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Full text of "Memoires pour servir a l'histoire du XVIII siecle : contenant les negociations, traitez, resolutions, et autres documens authentiques concernant les affaires d'etat; liez par une narration historique des principaux evenemens dont ils ont été précédez ou suivis, & particuliérement de ce qui s'est passé à la Haïe, qui a toûjours été comme le centre de toutes ces négociations"

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MEMOIRES 

POUR    SERVIR    À 

L'H  I  S  T  O  I  R  E 

D    U 

XVIII     SIECLE, 

CONTENANT 

LES  NEGOCIATIONS,  TRAITEZ  RESOLUTIONS, 

ET  AUTRES  DOCUMENS   AUTHENTIQUES 

CONCERNANT 

LES     AFFAIRES     D'ETAT; 

Liés  par  une  Narration  Hiftorique  des  principaux  Evénemens  dont  ils  ont  été 

précédez  ou  fuivis ,  &  particulièrement  de  ce  qui  s'eft  pafle  à  la  Haie  , 

qui  a  toujours  été  comme  le  Centre  de  toutes  ces  Négociations. 

Par  Mr.     DE    LAMBERT  T. 

TOME      ONZIEME, 

CONTENANT 
L'ANNE'E    M.  DCC.  X VIII, 

S  U  P  P  L  E  M  E  N  T 

AUX  ANNE'ES  M.  DC.\XCVI--M.  DCC.  I. 

A    AMSTERDAM, 
Chez     PIERRE     MORTIER     Libraire, 

M.     DCC.     XXXIV. 

AVEC      T  R  J  V  1  L  JE  G  E. 


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ADAMS/(TO.| 


TABLE 

GENERALE    DES 

P      I      E      CE 

CONTENUES    DANS     CR 

ONZIEME     VOLUME. 


ANNÉE    M.    DCC.    XVIII. 

JNtroduEtion  générait.  i 

Affaires  des  Proyinces-Unies. 

7'NtroduEtion  particulière.  2 


5 


Réfolution  des  Etats-Généraux  fur  une  Lettre  de  Mr.  Goes ,  du  5  Février, 
Mémoire  de  Mylord  Polwartb,  du  22.  Février;  avec  un  de  M.  van  Hagen  }  du  ij. 

Réponfe  de  M.  C.  Schajiadt  au  Mémoire  précédent  ;  d«  22.  Février.  8 
Raport  des  Propofitions  de  l'AmbaJJadeur  de  France  touchant  la  Suéde;  du  13  jfcm- 

wr.  9 

Réponfe  à  un  Pro  Memoriâ  dw  Secrétaire  de  Suéde  Preif;  du  28.  Janvier.  10 
Repréjentation  au  Réfident  de  Danemark  par  raport  à  la  Suéde  ;  du  1 .  Few.         1 2 

Leîïn?  dtt  Confeil  d'Etat  y  pour  un  Armement  Maritime;  du  28.  Janvier.  13 

£faî  d&r  Fraix  de  30.  Vaijjeaux  pour  la  Mer  Baltique.  18 

Réfolution  des  E.  G.  touchant  des  Vaijjeaux;  du  25.  Janvier.  18 

Réfolution  des  E.  G.  touchant  un  Armement' Naval;  du  29.  Janvier.  19 

Compte  de  30.  Vaijjeaux  pour  la  Mer  Baltique.  20 

Deux  Réfolutions  des  E.  G.  touchant  V Armement  Maritime  projette.  21 

Réfolution  des  Etats  d'Utrechtfur  V Armement  Naval  ;  du  10.  Mars.  24 

Réfolution  des  Etats  Généraux  fur  la  précédente.                 ■  16 

Deux  Réfolutions  des  E.  G.  fur  V Armement  Naval;  du  14.  Mars.  27 

Réfolution  des  E.  G.   touchant  l'Armement  Maritime;  du  28.  Mars.  28 

Réfolutim  des  E.  G.  touchant  une  Lotterie  ;  du  19.  Mars.  29 

*  2  Réjo- 


TABLE      GENERALE 

tiéfoluiièn  des  E.  G.  touchant  M.  Ruzzini  Ambajjadeur   de  Ven'fe  ;  du .  29.  Mars. 

29 
Réfolution  des  E.  G.  touchant  la  Barrierre;  du  6.  Janvier.  31 

Extrait  d'une  Lettre  du  Réfident  Pejîers ,  touchant  les  Revenus  de  h  Barrierre  ;  du 
17  Janvier.  34 

Réfolution  des  E.  G.  touchant  la  Barrierre  ;  du  7  Février.  36 

Mémoire,  ou  Pro  Memoriâ,  du  Minifire  de  PruJJe ,   touchant  la  Barrierre,  du  3. 
Janvier.  3-8 

Réfolution  des  Etats-Généraux ,   touchant  Herjlal;  du  20  Janvier.  39 

Mémoire   du  Minifire  de  PruJJe  \  touchant  les  Revenus  de  Montjorî  ;   du  10.  Fé- 
vrier. 40 
Réfolution  des  E.  G.  touchant  la  Barrierre;  du  2.  Mars.  41 
Mémoire  du  Réfident  de  V Electeur  de  Cologne;  du  7.  Janvier.                               44 
Réponfe  des  E.  G.  à  ce  Mémoire;  du  15.  Janvier.  45 
Mémoire  du  Réfident  de  V Electeur  de  Cologne;  du  11.  Février.  47 
Réponfe  des  E.  G.  à  ce  Mémoire;  du  18  Mars.                                                    52 
Lettre  du  Confeil  d'Etat  aux  Etats-Generaux ,  fur  une  Repartition  de  Troupes;  du 
24  Janvier.                                                                                                       55 
Mémoire  du  Minifire  de  V Electeur  Palatin ,  touchant  le  Paiement  des  Troupes  ;  du 
11.  Janvier.                                                                                                         58 
Mémoire  de  V Envoie  du  Bue  de  Meklenbourg,  pour  Paiement  de  Solde;  du  3.  Jan- 
vier.                                                                         '                                        59 
Réfolution  des  Etats-Généraux ,    pour  envoler  un  Ambajjadeur  en  France;  du    19. 
Janvier.                                                                     •                                           63 
Réfolution  des  E.  G.  fur  le  Traitement  des  Ambajjadeur  s;  du  14.  Mars.                65 
Sentence  du  Confeil  d'Etat  contre  André  Kan  Receveur  de  Menin  ;   du  4.  Février  69 
Lettre  du  Confeil  d'Etat  aux  Etats-Generaux ,   touebant  l'Appel  de  Kan;  du  14  Fé- 
vrier.                                                                                                                   7 1 
Mémoire  de  Rafons  contre  l'Appel  des  Sentences  du  Confeil  d'Etat  aux  Etats-Géné- 
raux. 77 
"Réfolution  des  Etats-Généraux  rejufant  l'Appel  de  Kan;  -du  4.  Février.                 82 
Echantillons  du  Mémoire  de  Kan  pour  fes  Defenfes.                                              83 

Affaires   de    Moscoyie. 

7  Ettre  du  Minifire  des  Etats-Généraux  à  Mofcou3  fur  le  Procès  du  Czarôwits;  des 

14  &?  16.  Février.  92 

Serment  des  Mofcovites.  94 

Manijefie  du  Czar  touchant  le  Czarowits;  du  3.  Février.  95 

Grand  Manijefie  du  Procès  criminel  fait  au  Czarotvits  ;  du  25  Juin.                   102 

Noms  de  tous  ceux  qui  ont  Jignê  la  Sentence  du  Czarovoits.  159 

Refjortts  fecrets  de  la  Mort  de  ce  malheureux  Prince.  162 


S  U  P- 


DES      PIECES. 

SUPPLÉMENT   AUX   MEMOIRES 
DE    LAMBERT  Y, 

ANNEES    M.   DC.   XCVI.   XCVII.    et    XCVIIL 
Affaires  de  Pologne  et  de  Suéde. 

T  Ettre    de    VEvêque    de    Cujavie   à    V  Ambaffadeur  de  France  fur  l'Election  du 

du  Prince  de  Conti  à  la  Couronne  de  Pologne.  165 

Réponfe  de  l"  Ambaffadeur  de  France  à  ce  Prélat  fur  le  même  Sujet  ;  du   16.   Oci. 

1696.  166 

Ode  fur  le  Couronnement  de  Charles  XII.  Roi  de  Suéde;  du  14.  Dec.  1697.       172 

Affaires   de  France  et   des   Proyinces -Unies. 

TBRojet   de  Tarif  entre  la  France  £?  les  Provinces-Unies  ;   du  22  Nov.  169s. 

173 

Table  Comparative  de  différais  Tarifs;  de  mîme  Date.  i;<5 

ANNÉE    M.     DCC. 
Affaires   des  Provinces-Unies. 

J3Efolution  des  Etats- Généraux  des  Provinces-Unies  fur  des  Grains  ,    achetez  par 

des  Marchands  d* Amfterdam ,  &f  arrêtez  à  Revel;  du  20  Nov.  1700.        179 

Réfolution  pour  l'Octroy  de  la  Compagnie  des   Indes  Occidentales  ;    du   30  Nov. 

i7°o-  180 

Lettre  de  h  Régence  d'Efpagne  aux  Etats-Généraux,  pour  leur  notifier  la  Mort  du 

Roi  CHARLES  II;  du  11  Dec.  1700.  182 

Réfolution  fur  cette  Notification  ;  du  8  Décembre  1700.  183 

Autre  Réfolution  fur  cette  Notification;  du  même  Jour.  183 

Réfolution  fur  le  Manque,  de   Fanaux  dans  la  Mer    Baltique  ;    du   14  Décembre 

1700.  184 

Réfolution  fur  la  Ratification  du   Traité  fait  avec  V Electeur  de  Brandebourg  ;    du 

20  Décembre  1700.  186 

Réfolution  pour   une  Pétition  de  deux  Millions  pour   des  Map^azins,   Munitions  a 

&c.t;  du.  ....  iStf 


* 


3  M  E- 


TABLE      GENERALE 
Mémoires  des  Ministres  Publics  aux  Etats-Generaux. 

TX/TEmoire  de  Mr.  de  Gersdorf,  Minijlre  de  Pologne  £f  de  Saxe  j  du  19  Mars 
*yi     1700.  185 

Affaires    d1  Angleterre. 

J  Ettre  du  Roi  d'Angleterre  au  Comte  d'Ooft-Frife,  pour  lut  faire  Compliment  de 
■         .Condoléance  fur  la  Mort  de  fa  Femme;  du  13  Novembre  1700.  187 

Lettre  de  l'Envoyé  Stanbope  au  Roi  d'Angleterre;  du  25  Décembre  1700.  188 

Affaires    d'  Italie. 

T\Ifcours  du  Cardinal  d'Etrées  au  Pape  en  Conjîjloire }  touchant  ï 'Election  du  Car- 
.         dinal  de  Nouilles;  du  21  Juin  1700.  i8§ 

Affaires    d'  Allemagne. 

f^Onditkns  d'un  Emprunt  pour  le  Duc  de  Brunfwick-Lunebourg  en  Hollande  ;  en 
^     Septembre  1700.  189 

Une  des  Déclarations .  de  Sa  Majefié  Impériale  touchant  le  Traité  de  Partage  ;   en 

1700.  190 

Efpece  de  Manifefle  de  l'Empereur,  touchant  fes  Droits  à  la  Monarchie  d'Efpagne; 

en  Latin;  en  1700.  190 

Le  véritable  Avant-Courreur  du  Manifefle  de  l'Empereur  tombant  fes  Droits  à  la 

Monarchie  d'Efpagne ,  traduit  du  Latin  de  la  Pièce  précédente;  en  1700.        201 


Affaires  de  Pologne,  de  Dannemarc,  de  Suéde, 

et  de  Moscoyie. 


'T\Eclaration   du    Sénat  de  Pologne  9   touchant  la  Guerre  avec    la   Suéde  ;    en 
1700.  213 

Courte  Relation  de  la  Defcente  des  Suédois  en  Zéelandt  &f  Dannemark  ;  du  25  Juil- 
let 1700.  214 
Manifefle  des  Suédois  contre  les  Mofcovites ;  en  Latin;  en  1700,                        217 


AN- 


DES      PIECES. 

A  N  N  É  E    M.    D  C  C.    I. 
Affaires   des  Provinces-Unies. 

JDEponfe  de  V Amirauté  de  Hoorn  aux  Etats-Généraux  fur  leur  Information  de 
V Emploi  des  Deniers  de  cette  Amirauté;  du  13  Janvier  1701.  267 

Réfolution  des  Etats-Gé?iéraux ,  fur  une  Pétition  du  Confeil  d'Etat  pour  deux  Mil- 
lions ;  du  17  Janvier  1701.  268 

Réfolution  des  Etats-Généraux ,  fur  une  Requête  de  9  Bataillons  Prujfiens  pour 
leurs  Gages;  du  18  Janvier  1701.  268 

Réfolution  des  Etats-Généraux ,  touchant  les  Réparations  &  Précautions  nécejfaires 
fur  le  Rhin;  du  22.  Janvier  1701.  269 

Réfolution  des  Etats-Généraux ,  touchant  le  Confentement  de  la  Hollande  à  la  Péti- 
tion de  deux  Millions  ,  £f  exigeant  celui  des  autres  Provinces  ;  du,  31  Janvier 
1701.  270 

Réfolution  des  Etats-Généraux  ,  pour  envoier  à  leur  Minijîre  en  Efpagne  leurs  Re- 
folutions  touchant  la  Paix  ,  déjà  envolées  à  leur  Minijîre  en  France  ;  du  1  Fé- 
vrier 1701.  270 

Réfolution  des  Etats-Généraux ,  touchant  les  faux  Bruits  répandus  de  leur  Difpojî- 
tion  à  la  Guerre;  du  1  Février  1701.  271 

Pétition  du  Confeil  d'Etat,  touchant  le  Paiement  de  la  Flotte;  du  21  Février  \~joi . 

271 

Réfolution  des  Etats-Généraux  ,  en  contenant  deux  des  Etats  de  Zélande  touchant 
leur ■  Contingent  des  deux  Millions  demandez;  du  16  Février  1701.  273 

Lijle  des  Vaiffeaux  de  Guerre  qu'on  prépare  à  l'Amirauté  d'AmJlerdam;  en  Février 
1701.  276 

Réfolution  des  Etats-Généraux ,  touchant  les  Lignes  des  François  vers  Llllo ,  &kur 
Entrée  à  Oudenarde  ;  avec  la  Lettre  du  Lieutenant-Colonel  Sikers  à  ce  Sujet  ;  du, 
27  Février  1701.  276 

Réfolution  des  Etats-Généraux , pour  écrire  au  Roi  d'Angleterre;  du  12  Mars  1701. 

277 

Réfolution  des  Etats-Gé?iéraux,  touchant  la  Flotte;  du  4  Avril  1701.  279 

Réfolution  des  Etats-Généraux,  fur  le  Mémoire  de  l'Envoyé  Stanhope ,  avec  ce  Mé- 
moire; du  22  Avril  1701.  280 

Réfolution  des  Etats-Généraux,  fur  le  même  Mémoire;  du  23  Avril  1701.  280 

Réfolution  des  Etats-Généraux,  pour  conférer  avec  le  Comte  d'Avaux  ;  du  12  May 
I701-  282 

Confentement  des  Etats  de  Gronlngue  à  certains  Articles  ;  du  23  May  1701.      283 

Extrait  du  Recès  de  la  Diète  tenue  à  Arnhem ,  en  Réponfe  à  une  Lettre  du  Con- 
feil d'Etat  touchant  le  Rhin  &  fJJfel;  du  24  May  1701.  284 

Rapport  du  Confeiller-Penfionaire  Heinfius }  de  fa  Conférence  avec  le  Comte  d'A- 
vaux; du  6  Juin  1701.  28(5 

Ré- 


TABLE    GENERALE 

Réfolution  touchant  des  Troupes  ;  du  9  Juin.  287 

Réfolution  touchant  la  Paie  des  Cavaliers;  du  15  Juin.  287 

Réfolution  touchant  divers  Confentemens  de  Provinces;  du  16  Juin.  287 

Réfolution  des  Etats  de  Frife  ;  du  11  Juin.  288 

Réfolution  des  Etats-Généraux ,  fur  des  Vaiffeaux  à  équiper  ;  du  20  Juin.  288 

Réfolutions  pour  négocier  avtc  le  Comte  d'Avaux,  des  16  &  20  Juin.  289 

Réfolution  touchant  des  Retranchemens  &  Réparations  ;  du  20  Juin.  290 

Réfolutions  touchant    les  Lignes  des   Efpagnols   en  Flandres  ;   des  24   &?  25  Juin. 

291 

Réfolution.  touchant  des  Confentemens  de  Provinces ,   &f  partie,   de  Zwol  ;    du  25. 

Juin.  292 

Pétition  du  Confeil  d'Etat  ;  du  28  Juin.  294 

Réfolution  des  Etats-Généraux  ;  /«r  les  Mefures  pour  la  Campagne  ;  du  15  Juillet. 

297 

Réfolution  fur  une  Réponfe  du  Czar;  du  14  ^z/f/to  1701.  300 

Rapport  fait  aux  Etats-Généraux ,  touchant  un  Canal  dans  laBetuvce;  du  25  Juillet. 

302 
Lettre  du  Confeil  d'Etat  aux  Etats-Généraux ,  avec  le  Raport  de  fes  Députez  tou- 
chant le  dit  Canal;  des  31  Juillet  £f  2  Août.  303 
Réfolution  touchant  des  Arrérages  dûs  à  l'Electeur  Palatin;  du  9  Août.  305 
Réfolution  des  Etats  de  Groningue , portant  Conjéntement  au  troijïéme  Etat  de  Guer- 
re; du  5  Août.  305 
Réfolution    des   Etats  -  Généraux ,    louchant  des   Erres  de   Troupes;  du    10   Août. 

307 
Raport  fait  aux  Etats-Généraux 3  pour  des  Ouvrages  de  Fortification;  du  16  Août. 

307 

Réfolution  des  Etats- Généraux ,  pour  porter  la  Zélande  à  certains  Païemens  ;  du  22 

Août.  308 

Lettre  de  l'Amirauté  d'AmJlerdam  aux  E.  G.;  du  22  Août.  310 

Deux  Réfolutions  des  Etats-Généraux ',  touchant  les  Provifions  pour  les  Troupes;    du 

11  Août.  311 

Lettre  du  Confeil  d'Etat  aux  Etats-Généraux ,  touchant  les  Frontières;  du  27  Août. 

312 

Réfolution  des  Etats-Généraux  ,  en  renfermant  2  des  Etats  de  Groningue  fur   leur 

Contingent  ;  du  27  Août.  312 

Pétition  du  Confeil  d'Etat,  pour  de  nouveaux  Subjides;  du  2  Sept.  314 

Réfolution  des  Etats-Généraux ,  avec  une  des  Etats  de  Hollande,  êf  un  Mémoire  de 

M.  d'Elkmet;  du  22  Sept.  315 

Deux  Réfolutions  des  Etats-Généraux  touchant  le  Paffage  des  Troupes  ;  du  16  Sept. 

3!7,3ï8 

Deux  Réfolutions  des  Etats-Généraux  ,  touchant  le  Contingent  de  la  Frife;  du  16.  Sept. 

318 

Réfolution  des  Etats  -  Généraux ,    touchant  les  Affaires  Militaires;   du   27    Sept. 

319 
Ré- 


DES        PIECES. 

Réfolution  des  Etats  Généraux  touchant  les  Troupes  Palatines;  du  ....  320 

Réfolution  des  Etats  Généraux  touchant  les  Affaires  Militaires  ;  du  28  Sept.     .  321 
Réfolution  des  Etats  Généraux  en  pré/entant  l'Etat  de  Guerre  pour  l'Année  1702. 
au  4.  Novembre.  322 

Réfolution  des  E.  G.  touchant  V Argent  non  monnoié;  du  7.  Nov.  324 

Réfolution  des  E.  G.  touchant  les  Amirautez;  du  14.  Nov.  325 

Réfolution  des  E.  G.  touchant  des  Affaires  de  Marine;  du  15.  Nov.  326 

Réfolution  des  E.  G.  fur  une  Lettre  du  Confcil  d'Etat  ;  du  21.  Nov.  ibid 

Lettre  de  l'Electeur  Palatin  aux  Etats  Généraux  ;  du  23.  Nov.  327 

Réfolution  des  Etats  Généraux  fur  la  Conjlruàion  duBaJiiondeSt.PierreàMaJlricht; 
du  16.  Novembre.  ibid 

Réfolution  des  Etats  Généraux  fur  la  Lettre  précédente  de  VEleâeur  Palatin;  du  7. 
Decemb'e.  329 

Réfolution  des  Etats   Généraux  touchant  les  Monnoies  de  l'Empire;  du  30  Décem- 
bre. 330 
Lettre  du  Confeil  d'Etat  aux  Etats  Généraux  touchant  les  Magasins  des  Frontières  ; 
du  30.  Décembre.                                                                                            ibid 


Négociations  des  Proyinces-Unies  touchant 
les   Troupes  Danoises. 

t  Ettre  de  la  Faille  de  Groningue;  du.  ...  33 1 

■*-^  Ratification  du  Traité  avec  le  Dannemark  ;  du  27  Juin.  ibid 

Réfolution  des  Etats  Généraux  ;  du  15.  Août.  332 

Réfolution  des  Etats  Généraux,  avec  le  Confentement  d" Overyffel  ;  des  %.  Sept.  £f  4. 

Octobre.  333 

Réfolution  des  Etats  Généraux  pour  régler  les  Gages  du  bas  Etat  major;  du...  334 
Réfolution  des  Etats  Généraux  fur  le  Paiement  des  Troupes  Danoifes ,  du  8.  Oéo- 

bre.  ibid 

Autre  de  même;  du  27.  Octobre.  30 j 

Réfolution  des  Etats  de  Groningue;  du  29.  Octobre.  ibid 

Réfolution  des  Etats  Généraux  fur  le  Paiement  des  Danois  ;  du  1.  Nov.  ibid 

Réfolution  des  Etats  Généraux  fur  les  Apointemens   des  Danois;    du   19.  Décembre. 

Acte  de  Réception  des  Troupes  Danoifes;  du  3.  Novembre.  337 

Lettres  de  divers  Endroits  aux  Etats-Généraux. 

T  Ettres  de  Paris,  des  18.  Juillet  £f  12.  Août.                                               338 

■^  Lettre  de  Maftricbt ,  du  13  Août.  339 

Lettre  de  Lisbonne-,  du  \6  Août.  340 

Lettre  de  Hambourg,  du  30.  Août.  ibid 

Tbme  XL  **                                         Lettre 


TABLE      GENERALE 

Lettre  de  Hanovre ,  du  i.  Sep.  341 
Lettre  de  Vienne,  du  14.  Septembre.  ibid 
Lettre  de  Cologne,  du  23.  Septembre.  342 
Lettre  de  Bruxelles,  du  16.  Septembre.  ibid 
Lettre  de  Baden,  du  11.  Octobre,  ibid 
Lettre  de  Bruxelles  ,  du  31.  Octobre.  343 
Lettre  de  Lisbonne,  du  22.  Novembre.  ibid 
Lettre  de  Cologne,  du  16.  Décembre.  344 
Lettre  de  Majtricbt ,  du  17.  Décembre.  ibid 
Lettre  de  Paris  fur  ce  que  du  Sas  de  Gand  on  avoit  tiré  fur  les  Travailleurs  Fran- 
çois ;  du  30.  Décembre.  345 

Listes   de  Troupes  et  Vaisseaux  des  Provinces-Unies. 

7  Jjle  des  Troupes ,  tant  Infanterie  que  Cavalerie.  346 

-*-y  Nom  des  Vaiffeaux  arrivez  des  Indes  Orientales  ;  avec  la  Valeur  de  leur  Cargai- 

fin.  347 

Mémoires  des   Ministres   Publics   aux  Etats-Generaux. 

i\/!Emoire  de  Mr.  de  Lillietirooth  ;  du  2  Juillet  1701.  348 

•**•*■  Mémoire  de  M.  Bondely  Envoie  de  Pruffe;  du  6.  Novembre  1701.  350 

Affaires    d'Angleterre. 

t  Ettre  du  Roi  d'Angleterre  aux  Etats-Généraux;  du  16.  May  1701.  351 
-*-'  Adreffe  des  Communes  au  Roi.  352 
L'Etat  du  Bill  pour  un  Parlement  annuel  âf  triennal  ;  avec  des  Obfervations.  ibid 
Proclamation  du  Roi  $  Angleterre ,  pour  diffoudre  le  Parlement,  £f  en  convoquer  un 
nouveau;  dit  16.  Novembre  1701.  357 
Adreffe  de  VEvéque  £f  du  Clergé  de  Londres;  en  Novembre  1701.  ibid 
Adreffe  delà  Ville  de  Marlborougb;  en  Novembre  1701.  358 
Adreffe  du  Comté  de  Leicejier;  en  Novembre  1701.  359 
Adreffe  dit  Comté  de  Salisbury  ;  en  Novembre  1701.  ibid 
Adref'e  du  Comté  de  Worcefler;  en  Novembre  1701.  360 
Adreffe  de  la  Ville  £?  Comté  de  Poolë;  en  Novembre  1701.  36b 
Adreffe  de  la  Ville  de  Sandwich;  du  18.  Novembre  1701.  361 
Aarefe  de  la  Ville  de  Wilton;  du  18.  Novembre  1701.  ibid 
Adreffe  de  la  Ville  d'Aylsbury  ;  en  Novembre  1701.  362 
Adreffe  de  la  Ville  de  Tiverton  ;  en  Novembre  1701.  ibid 
Adreffe  de  la  Ville  de  Cantorbery;  en  Novembre  1701.  363 
Adreffe  de  la  Province  de  Cumberland;  en  Novembre  1701.  364 
Inflruàions  de  la  Ville  de  Londres  à/es  Députez  au  prochain  Parlement  ;  en  Novem- 
bre 1701.  364 

A  F- 


DES        PIECES. 


Affaires  de  France,   d'Espagne,  et  d'Italie. 

Harangue  du  Cardinal   de  Noailles  au  Roy ,  à  la  tête  de  VAJfemblée  du  Clergé  ;  du 

19.  Juin  1701.  365 

Plainte  du  Duc  d'Anjou  à  V Envoyé  des  Etats-Généraux ,  de  ce  qu'ils  ne  le  félicitoient 

pas-,  en  Efpagnol  ;  en  1701.  368 

Campement  des  François  fur  VAdige  ;  du  4.  Juin.  369 

Nouvelles  de  Venife;  du  4.  Juin.  370 

Situation  des  François  £f  des  Impériaux;  du  9.  Juin.  371 

Lettre  des  Généraux  des  deux  Couronnes ,  du  22.  Juillet  1701  ;  avec  Copie  d'une  de 

ï1  Electeur  de  Cologne  aux  Electeurs  de  Mayence,  de  Trêves ,  &  de  Bavière:  en  I- 

talien.  373 

Relation  de  ce  qui  s'efl  paffé  entre  les  Armées  Impériale  £?  Françoife  en  Italie  ;  dep. 

le  31  Août  jufqu'au  3  Septembre  1701.  375 

Manifejle  de  François  Spinelli,  Duc  de  Cajlelluccia  ;  en  Novembre  1701.  379 


Affaires    d1  Al  le  magne. 


f~\Ffres  de  Troupes  de  divers  Princes  d'Allemagne ,  à  l'Angleterre  £f  aux  Etats 
Généraux;  en  1701.  382 

Lettre  fur  les  Mouvemens  des  François  dans  l'Eledtorat  de  Cologne  ;  du  25  Novem- 
bre 1701.  332 

Ordonnances  de  V Electeur  de  Cologne  touchant  Rbinberg,  Keifersivert ,  &  Alpen;  du 
15  Décembre  1701.  383 

Lettre  de  Hambourg  aux  Etats-Généraux ,  touchant  les  Differens  entre  le  Holjlein  éf 
le  Dannemarc;  du  4  Février  1701.  383 


Traites  Politiques   concernant   les    Affaires 

Générales  de  l'Europe. 


qrEflament  de  CHARLES  II.   Roi  d'Efpagne,  &>  Traité  du  Partage  de  fa 
Monarchie;  avec  des  Réflexions  Politiques,  traduites  de  V Anglais.  385 

Réflexions  fur  une   Lettre  écrite   d'Anvers  le  29  Décembre  1700.  fur  les  Affaires 
prefentes  de  la  Cour  d'Efpagne;  avec  des  Pièces  authentiques  ;  favoir ,  399 

Lettre  d'un  Membre  du  Parlement  d'Angleterre.  438 

Renonciation  de  V  Infante  MA  RIE-THERESE.  447 

Contraà  de  Mariage  de  LOUIS  XIV.  avec  l'Infante  MARIE-THE- 
RESE. 4,51 

*  *  2  Remar- 


TABLE  GENERALES  DES  PIECES. 

Remarques  fur  la  Succefflon  du  Duc  d'Anjou ,    tant  par  raport  à  fa  Validité   qu'à 

fes  Conféquences  ,   avec  la  Renonciation  du  Roi  de  France  à  cette  Succeffton  ,    & 

'des  Remarques;  traduites  de  l'Anglois  :  I.  Partie.  469 

IL  Partie  de  ces  Remarques.  507 

Réflexions  fur  divers  Ecrits   concemans  la  SucceJJion   à   la  Monarchie  d'Efpagne. 

545 

Jus  Auftriacum  in  Monarchiam  Hfpanicam  ajjertum.  591 

Remarques  fur  les  Affaires  du  Tems  préfent  1701;  traduites  de  l'Anglois.  641 

Récit  des  Débats  de  la  Ville  touchant  la  Paix  £?  la  Guerre;  &  deux  Lettres  à  un 

Gentil-homme  à  la  Campagne.  644 

Lettre  contenant  diverfes  Réflexions  fur  le  Traité  d'Alliance  entre  l'Empereur  3  le 

Roi  d'Angleterre,  £f  les  Etats  Généraux;  en  Septembre  1701.  661 

Liftes  diverfes  des  Troupes  des  Alliés,  pendant  l'Année  1*701.  671,  677,  678 


MEMOI- 


M®®  3P  ®Gt  QP  £>(£  <3P  G)®<St  9P  ©(2  3P  &>®  3P  5)SS^» 

MEMOIRES, 

NEGOTIATIONS, 

f 

TRAITEZ, 


E    T 


RESOLUTIONS    D'ETAT. 


ANNEE    M.    DCC.     XVIII. 


<2*-&3*-fè  &%>&&  <3**£3**&3**£>  3**&<3**&3*-&  «3**gs<3**£<âfr*É»  «3ffè«3*-£3*-fè  «3MfcSM&«3t4É» 


INTRODUCTION. 

|Uoi  qu'on  eut  limité  ces  Mémoires  à  la  fin  de  l'An  1717. 
on  a  trouvé  à  propos  d'y  faire  un  Suplement.  La 
raifon  en  eft ,  que  n'étant  parti  de  la  Hollande  qu'au  com- 
mencement d'Avril  de  l'Année  171 8-  il  y  a  eu  des  Affai- 
res fur  le  tapis  pendant  les  3.  premiers  Mois  de  cette  An- 
née-là. D'ailleurs ,  on  a  trouvé ,  dans  des  Papiers  qu'on 
avoit,  des  Pièces  affez  curieufes.  Il  y  en  a  d'autres,  qui 
ont  plus  d'étendue ,  que  l'Extrait  qu'on  en  a  fait  dans  les  dix  differens  To- 
mes déjà  imprimez.  D'ailleurs,  il  y  en  a  en  affez  bonne  quantité  que  l'on 
n' avoit  point  alors ,  &  d'autres  qu'on  a  omis ,  en  vûë  d'abréger  l'Ouvrage. 
On  envoie  le  tout  au  Libraire  à  la  Haie ,  pour  faire  un  Suplement  aux  dix 
Tomes  déjà  imprimez.  On  lui  fait  tenir  les  Affaires  des  premiers  trois  Mois 
tome  XI.  A  de 


Imtro* 

DUCTIONo 


2       MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Intro-  de  l'Année  171 8-  '■,  &  on  laiflè  à  fon  choix  d'y  ajouter  ,  pour  en  faire 
duction.  quelques  nouveaux  Tomes,  les  Pièces,  qu'il  trouvera  les  plus  intereffantes  j 
'  les  plus  curieufes,  &  les  plus  fecretes. 

AFFAIRES  DES  PROVINCES-UNIES. 

-Affaires    T  Es  Etats  delà  Province  de  Hollande,  qui  pefent   toujours  les  Affaires 

dis  Pko-    \_j  avec  la  plus  fage  prudence ,   ne  purent  pas  venir  à  une  Refolution  fi- 

viNCF.s-     naje  je  g0#  ^e  Décembre  de  l'Année  précédente  1717.  C'étoit  au  fujet  d'un 

L    Armement  d'une  Efcadre  de  Vaiffeaux  pour  la  Mer  Baltique.   Cela  avoit  été 

mis  fur  le  tapis  relativement  à  la  Suéde ,  &  au  Dannemark.     Comme  ce- 
pendant il  y  eut  divers  incidens,  la  Refolution  traina  encore  quelque  tems. 
La  vue  d'un  tel  Armement  maritime  par  raport  au  Dannemark  étoit  pour 
le  porter  à  relâcher  un  grand  nombre  de  Navires  des  Sujets  des  Etats.     On 
les  y  avoit  arrêtez  fous  des  prétextes,  qu'on  trouvoit  frivoles.     Entre  ceux- 
ci  l'un  étoit  que  la  partie  de  la  Province  de  Hollande ,  qu'on  nomme  Weft- 
Frife  ou  Nord-Hollande,  ne  paioit  pas  au  Dannemark  quelque  fomme,  qui 
étoit  repartie  fur  Elle.    Auffi  une  bonne  partie  de  ces  Navires  arrêtez  apar- 
tenoit-elle  à  cette  Semi-Province-là.  Les  Etats  Généraux  avoient,  lors  de 
l'avis  de  l'arrêt  de  ces  Navires,  chargé  leur  Miniflre  à  Copenhague  d'y  fai- 
re des  Reprefentations.     Elles  dévoient  rouler  fur  ce  que  ces  Procédures 
tendoient  notoirement  contre  le  Traité  de  Droits  deDoùanne,  &  n'étoient 
pas  conformes  à  l'amitié  qu'ils  cultivoient  avec  Sa  Majefté  Danoife.     Il  y 
avoit  l'addition  qu'Us  s'étoient  confiez  qu'on  auroit  mis  en  liberté  les  Navi- 
res.&  effets  confifqués,  ou  retenus.   D'ailleurs,  qu'on  auroit  laiffé  la  liberté 
de  la  Navigation  &  du  Commerce ,  fuivant  les  Traitez,  fans  parler  du  Droit 
des  Gens.     C'étoit  d'autant  que  des  Reglemens  émanez  de  la  Cour  ne  fer- 
voient  que  pour  fes  propres  Sujets,  &  n'obligeoient  pas  ceux  des  Etats.  Par- 
là  l'on  efperoit  une  refolution    favorable  de  Sa  Majefté  fuivant  l'amitié, 
l'équité, &  la  juftice.  Que  s'il  arrivoit  autrement,  les  Etats  feroient  obligez 
de  fonger  à  d'autres  moiens  pour  le  maintien  &  la  protection  du  droit  de 
leurs  Sujets.     C'étoit  là-deffus  qu'il  y  avoit  eu  fur  le  tapis  l'armement  naval. 
Comme  tout  cela  n'eut  aucune  influence ,  on  fongea  à  des  refforts  plus  ef- 
ficaces ,  réels ,  &  pecunieux.     On  chargea  de  nouveau  le  Miniflre  des  Etats 
à  Copenhague  de  tacher  par  d'autres  moiens  de  fléchir  cette  Cour-là.     Le 
Miniibe  eut  là-deffus  des  Conférences  avec  les  Miniftres  Danois.     Il  leur 
lâcha  le  mot ,  qu'on  paieroit  à  bon  conte  des  pretenfions  les  plus  liquides  de 
leur  Cour  une  certaine  fomme.     Cela  eut  de  l'efficace.  Sa  Majefté  Danoife 
ordonna  de  faire  relâcher  indiftinctement  tous  les  Navires  des  Sujets  des  Etats 
tant  de  la  Nord-Hollande  que  ceux  pris  allant  &  revenant  de  Suéde.     Il  y 
avoit  cependant  l'exception  des  effets  trouvez  dans  les  Cargaifons  des  Na- 
vires, qui  auroient  apartenus  incontellablement  aux  Sujets  de  la  Suéde.     Il 
femb'oit  par-là, que  le  Dannemirk  ne  troubleroit  plus  le  commerce  des  Su- 
jets des  Etats  dans  la  Mer  Baltique,  ni  allant  en  Suéde.     11  arriva  cepen- 
dant. 


vin  ces- 
Unies. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  3 

dant  qu'il  parut  une  fufpenfion  pour  le  relâchement  de  ces  Navires.  On  Affaires 
attribué'  cela  au  Refident  de  Dannemark  van  Stôcken.  Les  Etats  furent  D"  PR0- 
avertis  que  ce  Miniftre  avoit  écrit  à  fa  Cour, qu'il  étoit informé  par  quelques 
membres  des  Etats,  que  leur  Envoie  n'avoit,  ni  autoriiation,niinllruétion, 
pour  traiter  avec  la  Cour  fur  les  arrérages ,  &  des  Navires  pris  ou  retenus. 
Il  fe  trouva  cependant  que  ce  Refident  n'avoit  pas  marqué  jufte.  On  crut 
même  que  ce  pouvoit  être  fur  des  informations  apoftees  pour  empêcher  une 
bonne  intelligence  entre  les  Etats  &  la  Cour  de  Dannemark.  Ce  qui  don- 
noit  lieu  à  cette  croiance  venoit  de  ce  que  les  Etats  n'étoient  pas  fort  con- 
tens  de  ce  Refident.  Il  avoit  dit  dans  quelques-uns  de  fes  forts  Mémoires , 
que  le  Roi  fon  Maître  demandoit  des  Preuves  réelles  de  la  fincerité  des  E- 
tats.  Comme  il  venoit  d'être  rapellé ,  il  prefenta  le  troifieme  jour  de  cette 
Année  un  Mémoire  pour  prendre  congé  des  Etats.  II  y  avoit  reïteré  la 
même  expreffion  des  Preuves  réelles  de  leurs  bonnes  intentions.  Le  mot 
de  Preuves  paroiffoit  choquant.  Car,  les  gens  trouvoient  que  cela  vouloit 
dire,  qu'on  n'ajoutoit  pas  foi  à  ce  que  des  Souverains  difent.  D'autres  attri- 
buoient  cette  manière  de  s'énoncer  au  peu  d'expérience  d'un  Miniftre ,  ou 
à  manque  de  bien  pefer  la  force  du  mot.  Celui-ci  auroit  pu  être  adouci,  en 
mettant  qu'on  s'attendoit  à  des  effets  réels ,  au  lieu  de  preuves  réelles.  Les 
Etats  eurent  cependant  la  bonté  de  lui  accorder  des  Lettres  Recredentiales 
ufitées.  Us  ne  defaprouvoient  pas  ce  que  leur  Envoie  à  Copenhague  avoit 
ménagé.  C'étoit  d'autant  qu'on  y  avoit  relâché  26.  Navires,  &  qu'il  s'at- 
tendoit que  dix  autres  qui  refloient  auroient  le  même  fort.  Son  elperance 
étoit  fondée  fur  ce  qu'il  s'étoit  engagé  à  cette  Cour-là  de  lui  paier  une  fom- 
me  fixe  de  vingt  mille  Rixdallers ,  &  autant  à  chaque  quatre  mois ,  juiques  à 
l'entier  paiement  de  fes  pretenfions  liquides,  &  qu'on  traiteroit  pour  les  dou- 
teufes.  Les  Etats  auroient  feulement  fouhaité  de  pouvoir  obtenir  des  termes 
un  peu  plus  étendus  que  ceux  de  quatre  en  quatre  mois.  On  étoit  diipofe 
d'en  faire  la  tentative  par  une  demande.  L'on  fe  flattoit  même  de  pouvoir 
y  rè'uffir.  La  raifon  étoit  que  la  Cour  de  Dannemark  envoioit  vers  les 
Etats  un  Refident  à  la  place  de  celui  qu'elle  avoit  rapellé.  11  étoit  déjà 
connu ,  aiant  été  quelques  années  auparavant  à  la  Haie  comme  Secrétaire 
de  Commiiïion.  D'ailleurs,  il  étoit  doiié  d'une  grande  fagelfe,  d'un  efprit 
accommodant,  d'un  fa  voir  diflingué,  &  d'une  conduite  fi  réglée  &  clair- 
voiante,  qu'on  l'avoit  emploie  dans  des  Negotiations  ailleurs.  Il  s'apelloit 
Greis.  On  fut  par  celui-ci,  que  la  raifon  du  rapel  de  fon  predecefleur  ve- 
noit d'une  affaire  particulière.  Elle  confilloit  en  ce  qu'il  s'étoit  marié  à  la 
Haie  fans  la  permiuîon  de  fa  Cour.  Il  y  a  une  loi  établie  en  Dannemark. 
Elle  porte  qu'aucun  de  la  Dépendance  de  la  Chancellerie  étrangère  ne  puifle 
fe  marier  fans  la  permiffion  du  Roi.  Ce  Refident  rapellé  .avoit  écrit  au  Se- 
crétaire d'Etat  Scheited,  qu'il  avoit  fait  delfein  de  fe  marier.  Le  Secrétaire 
d'Etat  en  écrivit  au  Roi  de  Dannemark  qui  étoit  en  Holllein.  Ce  Roi  lui 
ordonna  d'écrire  à  ce  Refident-là  de  fufpendre  fon  Mariage.  Mais ,  il  repon- 
dit que  c'étoit  trop  tard.  C'étoit  d'autant  que  les  Annonces  avoient  été  pu- 
bliées ,  &  que  le  jour  des  EpoufaiJles  étoit  fixé.    U  mandoit  qu'il  époufoit 

A  2  une 


4       MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    une  perfonne  de  qualité ,  qui  avoit  un  Frère  dans  le  Collège  des  Nobles  de 

des  Pro-   Hollande,  &  qui  étoit  auffi  de  l'Amirauté.    Par  ce  moien  il  pourrait  favoir 

UnS"    Ie  fecret  des  Etats,  &  par-là  rendi-e  fervice.  Le  Roi  en  fut  fi  indigné,  qu'il 

-   nomma  d'abord  à  la  recommandation  de  fon  Miniftre  Webb  un  nommé 

Joung,  qui  refufa  cet  emploi.  Il  fut  delliné  à  Mr.  Greïs,  comme  très-ca- 
pable de  s'aquitter  de  fa  commiffion.  On  dira  en  paffant  une  pon&ille  du 
Cérémonial.  Le  Refident  rapellé  s'étoit  par  fois  plaint ,  de  ce  que  dans  des 
Conférences  les  Députez  des  Etats  fe  tenant  de  bout,  il  avoit  été  obligé  de 
fe  tenir  de  même.  Sur  cela ,  le  Roi  de  Dannemark  ordonna  precifement 
dans  les  Inftruélions  au  nouveau  Refident,  de  ne  rien  dire  à  foccafion  dans 
des  Conférences ,  à  moins  que  les  Députez  ne  fuffent  afîïs ,  &  le  fiffent  affeoir 
de  même  avec  les  honneurs  dûs  à  un  Miniftre  public.  Aufli,  après  qu'il  eut 
rendu  les  Lettres  de  créance  le  31.  de  Janvier,  on  en  a  ufé  envers  lui  comme 
il  faut.  D'ailleurs ,  on  tâchoit  d'entretenir  une  bonne  intelligence  avec  cette 
Cour-là.  Le  Minillre  des  Etats  auprès  de  celle-là  leur  avoit  mandé,  que  les 
Navires  arrêtez  avoient  été  relâchez  fous  certaines  conditions.  L'une  étoit, 
qu'on  paieroit  d'abord  à  cette  Cour-là  les  cinquante  mille  Florins,  ou  vingt  mille 
Rixdalers ,  à  bon  conte  des  ordonnances  fur  la  Nord-Hollande ,  dont  on  n'a- 
voit  pas  encore  fait  le  paiement.  Sur  cet  article  on  requit  les  Etats  de  la 
Province  de  Hollande  de  faire  paier  d'abord  cette  fomme-là.  Pour  le  refle 
on  chargea  le  Miniftre  de  l'Etat  d'afleurer  qu'on  paieroit  par  douze  termes 
de  femeflre  ce  qui  feroit  liquidé  fur  le  même  pied,  dont  on  étoit  convenu 
avec  le  Roi  de  Pruffe.  Par  raport  à  la  navigation  &  au  commerce ,  la  Cour 
Danoife  propofoit  qu'il  faloit  faire  une  altération  aux  Lettres  de  Mer ,  dont 
on  munit  les  Navires.  Les  Etats  chargèrent  leur  Miniftre  de  reprefenter 
qu'il  y  auroit  en  cela  de  la  difficulté.  La  raifon  étoit  que  le  formulaire  de 
ces  Lettres-là,  qui  étoit  en  ufage,  avoit  été  concerté  avec  les  autres  Puif- 
fances  Maritimes.  Cependant,  il  devoit  demander  la  penfée  de  cette  Cour- 
là ,  relativement  à  ce  changement.  Il  arriva  juftement  en  ce  tems-là  un  con- 
tretems  fâcheux.  Ce  fut  par  l'inadvertance  ou  ignorance  de  l'Agent  de 
Dannemark  à  Amfterdam  contre  l'avis  du  nouveau  Refident.  L'Agent  fit 
demander  le  paiement  des  20  mille  Ecus  au  Prefident  du  Confeil  commis 
de  la  Nord-Hollande.  Celui-ci ,  qui  n'étoit  peut-être  pas  mieux  averti ,  y 
répondit  de  travers.  Cela  étoit  capable  de  faire  cabrer  la  Cour  de  Dan- 
nemark. Le  Refident  mit  tout  en  ufage  pour  remédier  à  ce  malheu- 
Teux  incident.  D'ailleurs,  les  Etats  Généraux  écrivirent  à  la  Nord -Hol- 
lande une  Lettre  fort  ferieufe.  Elle  portoit  qu'on  expofoit  par  leur  non-* 
chalance  ,  non  feulement  la  réputation  de  la  République  ,  mais  même 
le  commerce  de  l'Etat,  à  un  péril  manifefte.  Il  y  avoit  les  exhortations 
les  plus  touchantes  ,  pour  porter  ce  quartier  de  la  Nord -Hollande  à 
faire  ce  paiement.  On  peut  voir  la  Refolution  même,  qui  eit  plus  éten- 
-due  que  l'Extrait  qu'on  en  fait. 


Extrait 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  XVIIL 


Ayv.un.T8 

Extrait  du  Regiflre  des  Refolutions  de  Leurs  Hautes  X^c'T 
Puijfanees  les  Seigneurs  Etats  Généraux  des  Provik-    u^s. 
ce  s- Uni  es  des  E aïs-Bas  ;  du  Samedi  j.  Février  1718. 


de  Mr. 
Goes. 


OU  I  le  Raport  des  Sieurs  de  Wynbergen  &  autres  Députez  de  Leurs   Refo'u- 
Hautes  PuiiTances  pour  les  Affaires  étrangères  ;  aiant  en  confequence,    tion  d\s 
&  pour  fatisfaire  à  leurs  Refolutions  commiflbriales  de  diverfes  dates,  exa-   EtatsGc* 
miné  les  Lettres  du  Sieur  Goes,  Envoyé  Extraordinaire  de  Leurs  Hautes   furune 
Puiiîances  à  la  Cour  de  Sa  Majeité  le  Roi  de  Dannemark  reçues  fucceiTive-    Lettre 
ment,  lesquelles  regardent  ce  qui  s'y  eft  paffé  par  raport  aux  VaifTeaux  Hol- 
landois  qu'on  y  détient ,  &  le  relâchement  d'iceux  ;   le  Sieur  Goes  priant 
par  ces  Lettres  Leurs  Hautes  Puiiîances  de  vouloir  lui  envoyer  leur  Refo- 
lution  fur  les  conditions  ,   auxquelles  s'elt  fait  le  dit  relâchement,  &  qui 
font  comprifes  particulièrement  dans  fa  Lettre  du  25.  Décembre  dernier. 
Surquoi  aiant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  entendu,  que  les  Seigneurs 
Etats  de  Hollande  &  de  Weit-Frife  feront  priés  par  Lettre  ,   de  vouloir 
mettre  de  tels  ordres  pour  qu'il  foit ,  conformément  à  la  promette  faite  par 
le  Sieur  Goes,  payé  incontinent  50.  mille  flor.  en  diminution  des  arrérages 
que  la  Province  de  Hollande  &  de  Weft-Frife  doit  des  affignations  données 
fur  la  Nord-Hollande  au  Roi  de  Dannemark  en  payement  des  fubfides  du- 
rant la  dernière  Guerre. 

Qu'il  fera  repréfenté  aux  dits  Seigneurs  Etats ,  que  Leurs  Hautes  PuiiTan- 
ces font  d'avis,  que  par  rapport  aux  termes  du  payement  des  autres  fubfi- 
des &  arrérages  dûs  tant  par  le  quartier  du  Sud  que  par  celui  du  Nord  de  la 
Province  de  Hollande  &  de  Weft-Frife ,  il  faudroit  accorder  avec  Sa  Majefté 
Danoife,  &  qu'enfuite  les  fufdits  Seigneurs  Etats  veuillent  fe  déclarer  là-def- 
fus.  Que  pour  ce  qui  regarde  les  Prétenfions  du  Roi  de  Dannemark  par 
raport  aux  arrérages  dûs  à  fes  Troupes ,  qui  ont  fervi  dans  la  dernière 
Guerre  aux  Païs-Bas,  de  liquider  le  plutôt  le  mieux  ces  prétenfions,  &  de 
convenir  de  plus  pareillement  fur  les  termes  du  payement  de  ce  qui  fe  trou- 
vera par  la  liquidation  ,  que  l'Etat  doit. 

Et  feront  à  celle  fin  les  Sieurs  de  Welderen  &  autres  Députez  de  Leurs 
Hautes  Puiffancespour  les  Affaires  militaires  priez  &.  chargez  par  la  préfente 
d'examiner  au  plutôt, conjointement  avec  quelques  Sieurs  Commiffaires  du 
Confeil  d'Etat  à  nommer  par  lui-même ,  lesdites  Prétenfions ,  &  de  délibérer 
fur  quel  pied  il  fera  traité  là-deffus,  &  d'en  faire  raport  ici  à  l'Aflemblée  ;  que 
Jes  Conférences  fur  ce  fujet  pourront  fe  faire  à  Copenhague,  puifque  Leurs 
Hautes  Puiffances  l'ont  ci-devant  laiffé  au  choix  de  Sa  Majefté  Danoife,  qui 
a  choifi  Copenhague  pour  le  lieu  de  Conférence,  &  y  infifte  prefentement. 

Que  les  termes  du  payement  des  arrérages,  tant  des  fubfides  que  des  Trou- 
pes, quand  ils  feront  liquidez,  doivent  être  réglez  fur  le  pied  comme  on  en  eft 
convenu  avec  Sa  Majeité  Prufîienne;  favoir  chaque  mois  une  douzième  part 
de  la  Dette.    Qu'à  l'égard  des  Prétenfions  pour  les  pertes  que  les  Habitans 

A3  de 


6       MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aminés    de  l'Etat  ont  faites  par  la  faifie  &  détention  de  leurs  VaifTeaux  &  Effets ,  il 

uEs  Pro-    fera  écrit  aux  Collèges  refpeftifs  des  Amirautez ,  à  chacun  dans  Ton  diftricl:, 

Umes"     ^e  s'informer  &  de  faire  produire  auiïitôt  qu'il  ell  poflible  les  prétenfions  des 

— '  l ïabitans  de  l'Etat  à  la  charge  du  Dannemark ,  de  même  que  les  Documens  fer- 

vant  à  leur  vérification ,  &  de  les  envoyer  à  Leurs  Hautes  PuilTances  pour  être 

pareillement  traité  là-defïïis.  Que  quant  aux  Prétenfions  du  Dannemark  pour 

des  VaifTeaux,  qui  feroient  pris  dans  la  dernière  Guerre  par  des  VaifTeaux  de 

Guerre  ou  Armateurs  de  l'Etat,  il  fera  écrit  en  reponfe  au  Sieur  Goes,  que 

Leurs  "Hautes  PuilTances  n'ont  abfolument  aucune  connoiiTance  de  pareilles 

Prétenfions ,  &  qu'il  faudra  qu'Elles  attendent  la  Production  qui  en  fera  faite 

pour  favoir  en  quoi  elles  confiitent,  avant  que  de  prendre  aucune  refolu- 

tion  là-deiTus. 

Que  pour  ce  qui  eft  des  nouveaux  Formulaires  des  Lettres  de  Mer  ou  des 
Certificats,  qu'on  donne  aux  Habitans  de  l'Etat,  il  fera  écrit  au  dit  Sieur 
Goes ,  qu'il  a  fort  bien  répondu  fur  ce  fujet ,  que  les  Lettres  de  Mer  peu- 
vent difficilement  être  changées  ,  vu  qu'elles  font  arrêtées  avec  d'autres 
PuifTances  Maritimes  ;  mais  ,li  durant  la  Guerre  on  demandoit  d'autres  preu- 
ves des  VaifTeaux  Hollandois,  que  celles  qu'on  leur  demande  ordinairement, 
on  devroit  s'expliquer  là-defTus  plus  précifement,  &  que  le  Sieur  Goes  fe  tien- 
dra provifionellement  à  cette  Réponfe.  Qu'enfin ,  les  Seigneurs  de  Hollande 
&  de  Weil-Frife  feront  encore  priez  de  faire  payer  au  fufdit  Sieur  Goes  fes 
arrérages, &  provifionellement  une  bonne  fomme  en  diminution  d'iceux. 

La  Ville  d'Amfterdam  prenoit  fort  h  cœur  cette  Affaire-là.  Laraifon,que 
les  cargaifons  des  Navires  de  la  Nord-Hollande,  quoique  relâchez  de  leur 
arrêt,  étoient  encore  à  Copenhague,  &  apartenoient  à  des  Marchands  de 
cette  Ville-la.  Ceux-ci  les  avoient  frettez.  Us  étoient  par-là  les  plus  fouf- 
frans.  Il  y  a  d'autres  affaires  relativement  à  cette  Cour-là;  mais,  comme 
elles  font  par  raport  au  commerce  dans  la  Mer  Baltique  compliquées  avec 
celles  de  la  Suéde,  on  aura  occafion  d'en  parler  lors  qu'on  fera  fur  ce  cha- 
pitre-là. On  ne  laifTera  cependant  pas  d'ajouter  ici  quelque  chofe  par  raport 
à  la  nouveauté  de  cette  Cour-là.  Elle  confifloit  en  ce  que  le  18.  de  Dé- 
cembre de  l'Année  dernière  1717.  Elle  avoit  fait  déclarer  aux  Miniflres 
Etrangers  une  nouvelle  méthode  de  negotier.  L'Angleterre  Tavoit  trou- 
vée irreguliere.  C'elt  là-deffus  que  fon  Minillre  le  Lord  Polhvarth  y  pre- 
fenta  un  Mémoire,  qu'on  infère  ici  pour  fatisfaire  aux  Miniitres  publics» 
avec  les  Réponfes. 

.   Mémoire  du  Lord  Tolwarth  fu r  le  Ceremoniel  des  Miniflres 
à  la  Cour  de  Dannemark  \  du  22.  Février  171 8. 

^CM°irC   T  -^  f°uu^gné  n'aiant  pas  encore  receu  de  Reponfe  à  ce  qu'il  a  eu  l'honneur 
tord  Poi-  de  reprefenter  à  Vôtre  Majeflé  dans  une  Audience  &  par  plufieurs  Me- 

warth.      moires ,  auffi  bien  que  dans  une  Conférence  avec  vos  Miniitres  au  fujet  de  la 

nou- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  XVIII/ 


Unies. 


nouvelle  méthode  de  négocier  par  écrit,  il  fe  trouve  oblige  de  prier  Vôtre  Ma-  -AmiRi» 
jefté  encore  une  fois  très-humblement  de  vouloir  bien  réfléchir  fur  le  grand  des  Pro- 
nombre  d'-inconveniens ,  dont  immancablement  cette  méthode  fera  accom-  tï."5" 
pagnée;  &  de  lui  faire  favoir,  par  ordres  exprès  &  réitérez  de  fa  Cour,  que 
fi  cette  affaire  n'eft  pas  remife  fur  le  pied  accoutumé ,  le  foufiigné  ne  fauroit 
point  fe  foûmettre  à  cette  innovation ,  &  que  SaMajeilé  fera  obligée  de  rom- 
pre toute  correfpondance  entre  les  deux  Cours,  &  de  donner  ordre  pareil- 
lement au  foufiigné  de  quitter  celle-cy  &  de  s?en  retourner.  C'efl  pour- 
quoi le  foufiigné  fuplie  très-humblement  qu'il  plaife  à  Vôtre  Majeflé"  de  lui 
faire  avoir  là-deffus  fa  Reponfe.  Fait  à  Copenhague. 

Dans  la  Conférence  avec  Milord  Polwartb,  le  i$.  Février  171 8. 

MI  lord  fit  connoître  comme  quoi  il  n'étoitpas  neceffaire  qu'il  répétât  à 
LL.  EE.  tout  ce  qui  s'étoit  paiTé  de  part  &  d'autre ,  fur  la  nouvelle  mé- 
thode propofée  de  négocier  ici.  Il  remarquerait  feulement  à  LL.  EE.  qu'il 
avoit  eu  l'honneur  d'avoir  une  Audience  du  Roi,&  de  prefenter  un  Mémoire 
fur  cette  affaire  le  12.  Janvier ,  &  qu'il  avoit  aufïï  eu  une  Conférence  avecLL. 
EE.  fur  le  même  fujetle  14.  fuivant,  fans  avoir  encore  obtenu  la  Reponfe, 
affavoir  que  la  Méthode  de  négocier  accoutumée  &  établie  depuis  long- 
temps foit  remife.  C'efl  pourquoi  il  fe  trouvoit  obligé,  par  ordre  exprés  de 
fon  Maitre,de  déclarer, que  fi  l'on  infifloit  fur  la  nouvelle  déclaration,  & 
fur  la  Méthode  de  traiter  les  affaires  qu'on  prefentoit ,  le  Roi  fon  Maître  ne 
pourroit  en  aucune  manière  fe  foûmettre  à  une  telle  innovation ,  mais  feroit 
obligé  de  rompre  toute  correfpondance  avec  cette  Cour-cy ,  &  de  donner 
ordre  pareillement  à  lui  fon  Miniflre  de  quitter  la  place  &  de  s'en  retour- 
ner. Et  c'efl  pourquoi  il  étoit  obligé  de  prier  encore  LL.  EE.  de  prefenter 
ce  Mémoire  au  Roi,  &  de  mettre  cette  affaire  devant  Sa  Majeflé,  comme 
elle  le  mérite,  &  de  lui  faire  avoir  une  Reponfe  aufiitôt  qu'il  feroit  pofiible. 
Il  faut  aufii  qu'il  ajoute  un  feul  mot  quant  aux  raifons  données  pour  cette 
nouvelle  méthode,  favoir  l'épargne  du  tems.  LL.  EE.  favent  fort  bien, 
s'il  a  jufques  ici  trop  importuné,  ou  Sa  Majeflé,  ou  LL.  EE.,  &  les  ex- 
prefiions  fortes  couchées  dans  fes  Mémoires;  la  raifon  en  Angleterre,  s'il 
arrive  des  chofes  qui  l'obligent  d'agir  de  la  forte  en  fidèle  Miniflre  &  fer- 
viteur  de  fon  Maître ,  la  faifie  des  Vaiffeaux  fur  l'Elbe ,  &  cette  nouvelle 
méthode  de  traiter  ,  ont  été  les  deux  feules  fois  mis  en  ufage.  C'eil 
ce  qui  nefl  pas  fa  faute ,  &  fon  très  gracieux  Maître  aprouve  tout  ce  qu'il 
a  fait.  Il  fe  trouve  encore  obligé  de  prefenter  à  LL.  EE.  un  Mémoire 
fur  la  prife  d'un  Vaiffeau,  &  une  affaire  qui  eft  arrivée  depuis  peu  de  jours,. 
&  de  prier  LL.  EE.  d'en  faire  raport  au  Roi ,  &  de  lui  en  faire  avoir  une 
Reponfe. 

In  jidem  Protocolliy 

VON      H   A    G    E   N. 

Rêponft 


Affaires 
des  Pro- 
vin  ces- 
Uni  es. 

Réponfe 
au  Mé- 
moire de 
M.  Pol- 
warth. 


g       MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Réponfe  au  Mémoire  précèdent. 

SA  Majesté' le  Roi  deDannemark  &  deNorwegue  s'eft  laifTé  raporter 
que  l'Envoie  Extraordinaire  &  Miniitre  Plénipotentiaire  de  Sa  Majefté 
le  Roi  de  la  Grande-Bretagne  le  Lord  Polwarth  a,  en  conformité  d'une  Lettre 
receuë  du  Secrétaire  d'Etat  le  Lord  Sunderland ,  déclaré  au  fujet  de  la  der- 
nière explication  faite  à  tous  les  Miniilres  Etrangers  le  18. Décembre  1717., 
par  raport  aux  Audiences  à  prendre  de  Sa  Majefté  &  aux  Conférences ,  à  tenir 
avec  fon  Confeil.   C'eil  là-defïus  que  fadite  Majefté  a  ordonné  de  repondre, 
qu'Elle  n'auroit  jamais  crû  que  la  Cour  de  la  Grande-Bretagne  eut  voulu 
faire  difficulté  d'entrer  dans  une  affaire  fi  jufle  &  fi  équitable;  &  que  cha- 
que Prince  eil  inconteftablement  en  droit  de  régler  à  fa  Cour ,   comme  il 
le  trouve  à  propos ,  quoique  c'eil  abfolument  &  de  même  fans  contradiction 
le  meilleur  moien,  &  le  plus  court  &  propre  pour  faciliter  les  négociations 
des  Miniilres  étrangers  qui  y  refident.     Encore  beaucoup  moins  s'eft  Elle 
attendue  que  fa  julle  intention ,  après  fa  dernière  déclaration ,  laquelle  don- 
ne aux  Miniilres  étrangers  toute  facilité  imaginable  de  faire  leurs  propo- 
rtions débouche  ou  par  écrit,  s'ils  ont  envie  d'en  profiter,   doit  avoir 
porté  Sa  Majefté  de  la  Gr -.n de-Bretagne  à  faire  faire  une  Déclaration  fî 
defagreabîe  &  fi  peu  conforme  à  la  bonne  amitié  &  étroite  intelligence , 
qui  doit  fubfifler  entre  les  deux  Cours ,  &  laquelle  de  fon  côté  Elle  tachera 
de  cultiver  &  d'affermir  de  plus  en  plus  ;  attribuant  les  exprefïïons  odieu- 
fes ,  afFavoir  de  vouloir  rompre  tout  commerce  entre  les  2.  cours ,  à  quelque 
mefentendu,  ou  bien  une  explication  finiflre  des  fentimens  de  Sa  Majefté. 
En  tout  cas ,  fi ,  fur  des  incidens  fi  légers ,  contre  toute  attente ,  on  perfifle 
clans  une  Refolution  fi  peu  amiable,  Sa  Majefté  déclare,  qu'Elle  le  verra  tou- 
jours avec  un  extrême  chagrin  &  deplaifir^  ne  pouvant  faire  au  de  là  que 
d'accorder  aux  Miniilres  étrangers   un  libre  accès  auprès  de  fa  perfonne , 
&  de  renvoier  les  affaires  qu'ils  ont  à  traiter  aux  Conférences  avec  fon 
Confeil ,  lefquelles  ils  pourront  obtenir  chaque  fois  que  l'affaire  ,   dont  il 
s'agit, le  mérite,  &  qu'ils  auront  fait  demander  l'heure  à  temps.  Au  refte, 
Sa  Majefté  a  inftruit  fur  cette  affaire  fon  Miniftre  à  la  Cour  de  la  Grande 
Bretagne,  &  Elle  ne  doute  pas  que  fes  Reprefentations  n'aient  tout  l'effet 
que  l'on  doit  attendre  dans  un  temps  où  la  bonne  harmonie  efl  tant  neeek 
faire  entre  deux  Princes  fi  étroitement  unis  &  alliez.     C'eft  de  quoi  le  fus— 
dit  Envoie  Extraordinaire  &  Miniftre  Plénipotentiaire  le  Lord  Polwarth  efl 
prié  de  faire  un  raport  favorable  à  fa  Cour,  &  Sa  Majefté  le  fait  d'ailleurs 
affeurer  de  fa  propenfion  &  bienveillance  Roiale.   A  Copenhague,  le  22. 
Février  171 8. 

(L.  S.) 

jfd  Mandat um  Sacra  Regiœ  Majej- 
tatis  proprium , 

C.      S   II  &  S   T  A  D   T. 


Le 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  XVIIT. 


9 


Lfe  Projet,  qui  étoit  fur  le  tapis  pour  un  armement  maritime,  étoit  pour 
ifleurer  le  Commerce  des  Sujets  de  l'Etat  dans  la  Mer  Baltique.  Celui-cy 
étoit  troublé  tant  par  les  Suédois  que  par  les  Danois.  L'habile  Secrétaire 
de  Suéde  Freis,  qui  depuis  a  eu  le  Caractère  de  Miniftre  public,  avoit  in- 
fmué,môme  par  un  Pro  Memcriâ,que  fi  le  Dannemark  venoità  ne  plus  trou- 
bler le  Commerce  des  Sujets  de  la  Republique  dans  la  Mer  Baltique,  ni  al- 
lant en  Suéde,  alors  le  Roi  fon  Maître  ne  troubleroit  pas  auflï  de  fon  côté 
celui  des  Sujets  de  l'Etat ,  qui  iroient  en  Dannemark  ou  en  la  Norweguc 
Danoife.  Les  Etats  Généraux  s'apliquerent  là-defllis  à  tacher  de  rendre 
libre  le  Commerce  dans  la  Mer  Baltique  &  au  de-là  du  Dogger-Sand.  Il  y 
avoit  cependant  quelque  obftacle  ,  &  particulièrement  fur  une  pon6lil!e. 
Le  Roi  de  Suéde  pretendoit  quelque  fatisfaclion  fur  ce  que  le  Baron  de  Gortz 
avoit  été  arrêté  dans  les  terres  des  fept  Provinces.  Le  Comte  de  la  Mark, 
qui  étoit  allé  en  qualité  d'Ambaffadeur  de  France  en  Suéde ,  fe  méloit  de 
reconcilier  ce  Roi-là  avec  les  Etats.  Il  entretenoit  fur  cette  matière  cor- 
refpondance  avec  le  Marquis  de  Chateau-Neuf  Ambaffadeur  auiïi  de  France 
il  la  Haie.  Celui-là  étoit  d'avis  qu'une  telle  reconciliation  pouvoit  avoir 
dufuccès, fi  les  Etats  pouvoient  fe  refoudre  à  envoier  un  Miniftre  Extra- 
ordinaire en  Suéde  de  leur  part.  Le  Marquis  communiqua  aux  Etats  des 
Lettres  du  Comte  de  la  Mark  du  10.  Décembre  paffé.  Elles  portaient  que 
le  Roi  de  Suéde  s'attendoità  l'envoi  d'un  Miniftre  Extraordinaire  de  la  part 
des  Etats,  pour  y  régler  tout  ce  qui  pouroit  contribuer  à  une  véritable  ami- 
tié. Le  Roi  fe  contenteroit  d'un  fimple  compliment  d'un  tel  Miniftre  fur 
ce  qui  s'étoit  paffé  à  l'égard  du  Baron  de  Gortz.  Plufieurs  Membres  de 
l'Etat  étoient  portez  à  nommer  quelqu'un  pour  cet  emploi  extraordinaire  : 
d'autres  s'y  opoferent  fur  une  ponclille.  Ils  vouloient  qu'auparavant  le 
très-habile  Refident  des  Etats  Rumpf  fut  readmis.  Le  Marquis  de  Cha- 
teau-Neuf dit  là-deffus  une  chofe.  Elle  étoit, que  dès  que  le  Roi  de  Suéde 
feroit  affeuré  de  la  ferme  difpofition  des  Etats  d'envoier  un  Miniftre  ex- 
traordinaire,  &  qu'il  feroit  chargé  de  ce  fimple  compliment,  il  n'y  avoit 
point  à  douter  que  ce  Roi-là  ne  readmit  d'abord  ce  Refident  à  pouvoir  né- 
gocier avec  lui ,  &  que  la  première  harmonie  feroit  rétablie.  Quelques  jours 
après,  ce  Marquis  fit  au  Prefident  de  Semaine  une  infmuation  de  la  part  de 
fa  Cour.     Pour  en  marquer  au  juite  fon  contenu  ,on  la  met  ici. 


Affaire» 
ces  Pro- 

VINCl-.S- 
UNIES. 


'Extrait  du  Regiftre  des  Refolutions  de  LL.  HH.  PP.  ; 
du  Jeudi  1 3.  Janvier  1718. 


LE  Sieur  de  Nortwyck  Prefident  à  l'AfTemblée  a  fait  favoir  àLL.  HH.  Raport 

PP.  que  le  Sieur  Marquis  de  Château-Neuf  Ambaffadeur  de  France  ^ceque 

avoit  ete  auprès  de  lui ,  &  lui  avoit  dit  qu  il  avoit  ordre  de  donner  connoil-  fadeur  de 

fance  à  LL.  HH.  PP. ,  que  Sa  Majefté  le  Roi  de  France  trouvoit  qu'il  étoit  France 

neceffaire  pour  l'Etat ,  que  fon  Commerce  dans  la  Mer  Baltique  fut  rétabli;  propo- 
sa»* XL                                                 B                                      mais 


20     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Amiwi    mais ,  qu'il  paroiflbit  à  SaMajefté,  que  le  choix  des  moiens  pour  y  parvenir 

dis  pro-    n'étoit  pas  indiffèrent.     Que  Sa Majefté  croioit  que  le  propofé  fut  &  pour- 

unies.      roit  être  obtenu  par  la  voie  de  la  Negotiation  :  &  que  ledit  Marquis  de 

; Chateau-Neuf  avoit  ordre  d'afleurer  LL.  HH.  PP.  que  le  Sieur  Comte  de 

foit  tau-  ]a  ]yxarck  emploieroit  avec  zèle  le  nom  &  les  offices  de  Sa  Majefté  à  l'avan- 
Suede.  taSe  ^e  l'Etat  ,  jfuivant  les  ordres  qu'il  en  avoit  receus  &  qui  lui  en 
avoient  été  renouveliez,  lefquels  il  mettroit  en  ufage  lors  que  LL.  HH.  PP. 
Je  mettront  pour  cela  en  état.  Et  en  cas  que  l'on  ne  trouvât  pas  bon  le 
moien  de  fe  fervir  de  la  négociation ,  qu'il  feroit  difficile  de  prévoir  juf- 
ques  où  cela  pourroit  aller. 

Surquoi  aiant  été  délibéré  ,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté ,  que  la  copie 
de  ladite  proportion  fera  mife  entre  les  mains  des  Sieurs  de  Wynbergen 
&  autres  Députez  de  LL.HH.  PP.  aux  Affaires  étrangères,  pour  la  vifiter,,, 
examiner ,  &  en  faire  le  raport  de  tout  à  l'AfTemblée-. 

Il  y  eut  des  Miniftres  qui  firent  des  reflexions  fur  la  démarche  de  cet 
Ambaffadeur.  Ils  vouloient  qu'elle  tendoit  à  traverfer  le  deffein  de  l'arme- 
ment maritime  qui  reftoit  toujours  fur  le  tapis ,  &  dont  on  parlera  plus 
bas.  Ils  croioient  même  qu'il  avoit  attendu  à  faire  cette  infmuation ,  que 
la  Prefldence  fut  de  la  Province  de  Hollande.  On  alla  jufques  à  s'imaginer 
que  c'étoit  l'habille  Secrétaire  de  Suéde  Preis ,  qui  y  avoit  influé.  La  rai- 
fon  étoit  qu'il  avoit  toujours  infiflé  à  ce  qu'on  commençât  une  Négocia- 
tion. Cependant,  il  paroiffoit  àfon  dire, qu'il  ne  favoit  pas  tout  le  conte- 
nu de  l'infinuation  de  cet  Ambaffadeur ,  qu'il  ne  lui  en  avoit  dit  la  fub- 
itance  qu'en  termes  vagues.  Auffi  les  Etats  refolurent-ils  d'avoir  une  Con- 
férence avec  ce  Secrétaire.  On  devoit  lui  repondre  à  un  Pro  Mernoriâ, 
déjà  raporté  l'année  précédente.  On  en  fera  mieux  éclairci  de  fon  con- 
tenu par  la  Pièce  même  ,  que  par  un  Extrait,  C'ell  pourquoi  on  le. 
met  ici. 

Réponfea  un  Pro  Memorlà  du  Sécjr  taire  de  Suéde  Preis  ^ 
du  28.  Janvier  17*8. 

Acponfe       A   \]  fujet  ^u  pr0  Mém&nâ,  que  le  Secrétaire  Preis  a  prefenté,  if  y  a 
taire0"6"    -^Muelque  temps,  on  lui  reprefentera  dans  une  Conférence,  que  de  la 
Yreis.         Part  ^e  LL.  HH.  PP. ,  on  ne  croit  nullement  neceffaire  dentrer  en  dit 
cuiïion   des  faits  alléguez  dans  l'écrit,  puis  que  cela  ne  pourroit  pas  fervir 
à  l'avancement  du  bût  que  LL.  HH.  PP.  fe  propofent;  Qu'autrement  il  ne 
feroit  pas  difficile  de  montrer,  que  quelques-uns  de  ces  faits  ne  font  pas 
fondez,  &  qu'aucun  de  tous  n'elt  capable  de  juftifier  en  quelque  manière 
que  ce  foit  les  vexations  &  dommages,  que  les  Suédois  ont  caufé  aux 
Sujets  de  l'Etat,  dans  leur  commerce  &  navigation,  &  qu'on  leur  caufe 
encore  tous  les  jours.    Car  il  efl  notoire ,  que ,  quoi  que  ce  foit  le  Roi  de 
Dannemark ,  qui  ait  commencé  le  premier  à  troubler  le  Commerce  &  la  Na- 
vigation 


DES  PRO- 
V1NCKS- 

UN1ES. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        n 

vigation  de  cet  Etat,  &  de  l'infefler  (ainfi  que  le  Secrétaire  Preis  l'avan-  Affaires 
ce,)  ou  que  ce  foient  les  Sue'dois  (comme  on  le  fbùtient  du  côté  de 
Dannemark),  le  droit  de  l'Etat,  contre  SaMajeflé  Suedoife,  &  aufli  con- 
tre Sa  Majellé  Danoife ,  demeure  toujours  le  même ,  &  qu'aucun  defdits 
deux  Rois  n'a  été  fondé,  &  ne  l'efl  pas  encore,  fbit  qu'il  fut  le  premier, 
ou  qu'il  l'eut  fait  à  l'exemple  de  l'autre ,  d'enfraindre  le  droit  des  gens ,  & 
encore  moins  celui  des  Traitez  :  mais  que  chacun  des  fufdits  Rois  a  été 
notoirement  obligé ,  &  l'eil  encore ,  de  laiffer  jouir  les  habitans  de  l'Etat 
de  la  liberté  abfoluë  du  Commerce  &  de  la  Navigation ,  pour  toutes  les 
Villes  &  lieux,  fans  aucune  diflinction ,  foit  que  ces.  lieux,  à  l'égard  de 
l'un  ou  de  l'autre,  fuffent  ennemis  ;  parce  que  les  Traitez,  même  pour 
les  places  ennemies,  accordent  expreffement  le  libre  commerce  Ôc  navi- 
gation aux  Sujets  de  l'Etat,  &  qu'ils  n'exceptent  de  cette  liberté,  que  le 
tranfport  feulement  des  Marchandifes ,  qui  "y  font  defignées  être  de  con- 
trebande, à  l'égard  defquelles  il  n'y  a  point  de  difpute.  Mais  que  LL. 
HH.  PP.  fans  s'arrêter  auxdits  faits  alléguez,  venant  à  l'offre  faite  par  le 
Secrétaire  Preis,  fur  la  fin  du  fufdit  Ecrit;  fçavoir,que  Sa  Majeflé  Sue- 
doife fera  difpofée  de  ne  point  troubler  le  Commerce  fur  le  Dannemark 
&  la  Norvegue ,  fi  le  Roi  de  Dannemark  veut  ceffer  de  troubler  le  Com- 
merce fur  les  ports  de  Suéde,  LL.  HH.  PP.  font  portées  de  faire  propo- 
fer  ces  offres  au  Miniflre  de  Sa  Majeflé  Danoife ,  qui  eft  ici ,  &  par  leur 
Minillre,  qui  eft  à  la  Cour  de  Coppenhague,  à  ladite  Majeflé  même;  mais 
que  LL.  HH.  PP.  ne  peuvent  pourtant  pas  s'empêcher  de  remarquer  à  l'é- 
gard de  ladite  offre,  qu'EUes  prévoient  ,  que  fuivant  toute  aparance  la 
Cour  de  Dannemark  ne -l'acceptera  point,  &  la  tiendra  pour  defec~lueufe , 
tant  que  fa  Majeflé  Suedoife  n'y  ajoutera  pas  la  liberté  de  commerce  & 
de  navigation,  pour  les  Nations  Neutres  dans  la  Mer  Baltique,  &  fur  les 
autres  lieux  poffedez  par  les  Alliez  de  Sa  Majeflé  Danoife;  Que  LL.  HH. 
PP.  pourroient  d'autant  moins  preffer  Sa  Majeflé  Danoife  ,  puis  qu'Eue 
(quand  même  Elle  pourroit  accepter  provifionellement  ladite  offre)  ne 
pourroit  pas  le  faire ,  que  fur  la  ferme  promeffe  qu'auffi  Sa  Majeflé  Sue- 
doife laiffera  immédiatement  après  jouïr  les  Sujets  de  l'Etat  de  la  liberté  du 
Commerce  &  de  la  Navigation,  dans  la  Mer  Baltique,  &  aux  autres  lieux 
indiferement ,  conformément  aux  Traitez. 

Que  le  dit  Secrétaire  Preis ,  pour  toutes  ces  raifons ,  pourra  bien  confide- 
Ter,  que  le  plus  court  feroit  de  faire  en  forte,  par  fes  bons  offices,  que  le 
Roi  fon  Maître  pût  tellement  amplifier  l'offre ,  dont  il  s'agit ,  que  le  Com- 
merce &  la  Navigation,  pour  la  Mer  Baltique  &  autres  lieux,  à  l'égard  des 
Nations  qui  ne  font  point  comprifes  dans  la  Guerre  du  Nord ,  puiffent  être 
rétablis  fur  un  pied  libre  fans  aucun  empêchement;  en  quoi  fadite  Majeflé 
ne  feroit  rien  que  de  jufle ,  par  raport  aux  habitans  de  cet  Etat ,  (ce  que 
LL.  HH.  PP.  reconnoitront  auffi  de  leur  côté  par  tous  les  meilleurs  offi- 
ces) &  cela  produiroit  indubitablement ,  que  la  liberté  du  Commerce  &  de 
la  Navigation,  fur  la  Suéde,  pour  les  Nations  neutres,  feroit  accordée  de 
toute  part ,  fans  parler  d'autres  notables  avantages  qu'une  telle  refolution 

B  2  pour- 


il     MEM01RES/NEGOT1ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aiiaire»    pourroit  procurer  à  Sa  Majefté  Suedoife  ;    Qu'ainfi  ledit  Secrétaire  Preis 
des  tro-    fera  requis  d'emploier  fes  bons  offices ,  à  ce  que  les  offres  faites  foient  recli- 
fiées  &  amplifiées  en  la  manière  fufdite. 


VrNCF.S- 
UNlf.S. 


Prefenté  dans  une   Conférence  au  Secrétaire  Preis  le 
Vendredi  28.  de  F An  1718. 

L'on  ne  fe  contenta  pas  de  cela  ,il  fut  refolu  de  faire  aufli  des  Repre- 
Tentations  au  Refident  de  Dannemark  dans  une  Conférence.  Dans  celle-cy 
on  lui  dit  ce  qui  elt  porté  dans  la  Pièce  entière  qu'on  trouve  à  propos  d'in- 
férer ici. 

Reprêfentation  au  Refident  de  Dannemark  par  raport  à 
la  Suéde ,  du  premier  Février  1718. 


Pvcpré-       (T\N  reprefentera  dans  une  Conférence  au  Sieur  Refident  de  Sa  Majefté 


fentation  \^J  ]e  R0i  c[e  Dannemark,  que  paffé  quelque  temps  le  Secrétaire  de  Suéde 
dent  de  Preis  a  déclaré  ici ,  que  fi  le  Roi  de  Dannemark  ceife  de  troubler  le  Com- 
Dannc-  merce  aux  Ports  de  Suéde,  SaMajellé  le  Roi  de  Suéde  fera  diïpofée  d'en 
mark.  agir  de  même  à  l'égard  des  Ports  de  Dannemark  &  de  Norwegue;  &  que 
ledit  Sieur  Refident  fera  requis  de  vouloir  emploier  fes  bons  offices  au- 
près du  Roi  fon  Maître ,  à  ce  que  cette  offre  foit  provifionellement  accep- 
tée comme  un  commencement  par  Sa  Majefté, puis  que  par-là  en  tout  cas 
le  Commerce  &  la  Navigation  pourroit  être  rendue'  libre  fur  les  deux 
Roiaumes  de  fadite  Majefté  •  en'  affurant  en  même  temps ,  que  LL.  I  ïl  L 
PP.  ne  fe  donneront  point  de  repos  avant  qu'Elles  aient  obtenu  pour  leurs 
Sujets  la  liberté  du  Commerce  &  de  la  Navigation  fur  la  Mer  Baltique  & 
autres  lieux  poffedez  par  les  Alliez  de  Sa  Majefté  Danoife ,  d'autant  plus 
que  l'intérêt  qu'ont  les  Sujets  de  l'Etat  au  Commerce  &  à  la  Navigation 
dans  la  Mer  Baltique ,  &  aux  autres  lieux ,  eft  trop  confiderable ,  &  que  le 
droit  qu'ils  y  ont  eft  trop  inconteftable ,  pour  que  LL.  HH.  PP.  puiffent 
fe  contenter  de  l'offre  fufmentionnée.  Mais ,  comme  pour  obtenir  le  tout , 
on  accepte  quelquefois  par  provifion  une  partie  ;  que  pour  cette  raifon 
LL.  HH.  PP.  laiffent  à  confiderer  à  Sa  Majefté  le  Roi  de  Dannemark ,  fi 
(pour  l'avantage  de  fes  Roiaumes  &  auflî  pour  celui  des  Sujets  de  l'Etat) 
on  ne  pourroit  pas  par  provifion  accepter  ladite  offre ,  fous  l'affurance  mi- 
dite  néanmoins j  mais,  que  quelque  refolution  que  Sa  Majefté  puiffe  pren- 
dre à  cet  égard  LL.  HH.  PP.  s'affeurent  tellement  de  fon  amitié ,  de  fon 
équité  ,  &  de  fa  juftice,  qu'Elle  fera  ceffer  tous  les  troubles,  qui  ont  été 
caufés.  Et  qu'Elle  donnera  ordre  à  Ces  Amirautez ,  Vaiffeaux  de  Guerre , 
Armateurs,  &  par  tout  où  befoin  fera,  que  les  Sujets  de  l'Etat  puiffent  jouir 
à  l'avenir  de  l'effet  des  Traitez ,  &  par  confequent  de  la  liberté  du  Com- 
merce &  Navigation  dans  tous  les  lieux  où  cela  eft  permis  par  ledits 
Traitez. 

Ce* 


ArFA!F,EJ 
DES  1  RO- 

V1NCKS- 

TJnif.s. 


d'Etat  fur 
un  Arme- 
ment Ma- 
ritime. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  13 

Cependant  le  deflein  d'un  Armement  naval  n'étoit  pas  négligé.  Le 
Confeil  d'Etat  en  prefenta  la  neceflité  aux  Etats  Généraux  par  la  longue 
Lettre  qu'on  infère  ici ,  avec  les  Raifons  pour  y  faire  aquiefeer. 

Lettre  du  Conjeiî  cl  Et  aï  pour  un  Armement  Maritime  % 
du  28.  Janvier  1718. 

HAUTS  ET   PU1SSANS  SEIGNEURS, 

LE  Confeil  d'Etat  a  eu  ci-devant  quelquefois  occafion  de  repréfenter  lettre  du 
amplement  à  Vos  Hautes  PuifTances  la  grande  importance  &  l'uti- 
lité des  Affaires  maritimes  du  Pais  relativement  à  la  Situation  &  à  la  Coniti- 
tution  intérieure  de  l'Etat.  Que  comme  par  raport  à  ce  dernier  point  il 
eft  d'une  très  petite  étendue,  fur  tout  en  comparaifon  d'autres  Païs  et  Etats 
voifins,  &  d'un  entretien  très  coûteux  contre  la  Mer  &  les  Rivières  qui 
le  traverfent,  quoique  quelque  fois  avec  peu  ou  point  de  fuccès,  comme  il 
n'a  que  trop  pitoyablement  paru  encore  ces  jours  paflez;&  que  de  plus  il 
eft  compofé  pour  la. plus  grande  partie  de  dunes,  bruyères,  terres  mare- 
cageufes ,  &  tourbières ,  pour  la  culture  &  l'entretien  defquelles  il  faut  em- 
ployer de  grands  fraix  ;  que  pour  cette  raifon  il  ne  fauroit  trouver  de  fon 
terroir  &  de  fes  revenus  la  fubfiitence  que  d'un  très  petit  nombre  de  fes 
Habitans ,  d'autant  moins  quand  ces  revenus  font  contrebalancez  avec  ce 
qui  doit  être  levé  par  an ,  outre  les  fraix  du  fol  &  des  Bàtimens  en  différen- 
tes fortes  de  Taxes  publiques  même  en  tems  de  Paix.  Qu'ainfi  la  fubfiiten- 
ce doit  être  pour  la  plupart  cherchée  &  trouvée  par  d'autres  moyens ,  & 
que  ces  moyens  confiitent  principalement  en  la  libre  navigation  &  com- 
merce de  toute  forte  de  Marchandifes  &  de  Négoces;  en  la  grande  &  pe- 
tite Pèche  ,  &  dans  le  débit  de  Harengs  &  autres  Poiffons  Salez ,  qu'on 
prend  dans  ce  Païs  ,  &  porte  ailleurs  ,  &  vend  avec  beaucoup  d'in- 
duftrie,  travail,  &  danger;  en  la  culture  &  l'exercice  de  toutes  fortes  de 
manufactures  &  de  métiers ,  pour  lefqueîs ,  moyennant  la  navigation ,  les 
étoffes  crues  &  les  ingrediens  font  aportez  des  Païs  étrangers ,  &  les  mar- 
chandifes fabriquées  fe  débitent  en  échange  de  la  même  manière  ailleurs. 
Qu'à  proportion  que  ces  moïens  augmentent  ou  diminuent,  il  faut  auiîï 
que  le  nombre  des  Habitans ,  &  en  gênerai  la  Profperité  &  la  Puiffance  de 
l'Etat  augmente  ou  diminue,  &  que  pour  cette  raifon  ces  moïens  font  déjà 
du  vieux  tems  maintenus  &  défendus  de  tout  le  pouvoir  contre  les  deffeins 
des  Nations  voifmes  pour  les  inquiéter  ou  couper.  Les  Princes  mêmes 
de  ces  Provinces  les  plus  puiffans  dans  ce  tems  là  ont  déclaré  publï- 
quement,&  particulièrement  l'Empereur  Charles V.  à  la  refignation  folemnelle 
des  Païs-Bas  à  fon  Fils  &  fuccefîeur  à  l'Afiemblée  des  Etats  Généraux  de 
ces  Païs,  que  leur  force  &  confervation  confiftoit  en  la  Navigation  &  Com- 
merce ;  en  l'avertiffant  ferieufement,  que  fi  l'une  &  l'autre  étoient  négligez , 
leur  ruine  en  fuivroit  immancablement. 

B  3  Mais 


Af*Atrèj 

DES   PRQ- 

VlNCfcJ- 

UNIÏS- 


14.    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Mais,  ce  qui,  pour  l'explication  de  ces  Points  Préliminaires  &  Généraux, 
n'efl  pas  allégué  ci-devant ,  quoique  fans  &  outre  plufieurs  autres  chofes 
&  reflexions  qui  y  fervent  très  effentiellement  &  qui  font  neceffaires  dans 
la  conjoncture  préfente ,  c'eft  l'important  intérêt  de  l'Etat  dans  la  confer- 
vation  &  le  maintien  du  Trafic  &  de  la  Navigation  fur  la  Baltique  &  dans 
te  Nord.  On  fait  comment  ce  Trafic  &  cette  Navigation  ,  n'aïant  été 
exercé  dans  les  vieux  tems  ,  que  par  les  Villes  Hanfeatiques ,  qui  au  nom- 
bre de  foixante  &  fix  s'y  étoient  obligées  mutuellement  à  Texclufion  des 
autres  Nations ,  a  été  du  depuis  pour  Ta  plus  grande  partie  tranfporté  ici 
par  leurs  démêlez  avec  les  Couronnes  du  Nord  ,&  particulièrement  par 
l'établhTement  de  la  Pêche  &  des  Métiers  dans  ce  Païs,  &  comment  il  elt 
tellement  accru,  que,  fuivant  des  Mémoires  dignes  de  foi,  il  y  avoit  au 
commencement  du  dix-feptième  Siècle  pas  moins  de  neuf  cens  Vaiffeaux, 

?tui  alloient  de  ces  Provinces  vers  l'Efl ,  &  grand  nombre  d'eux  plus  d'une 
bis  par  an,  pour  y  transporter  plufieurs  manufactures,  des  Harengs,  épi- 
ceries ,  &  autres  Marchandifes  portées  ici  de  FOuëit,  &  pour  aporter  à  leur 
retour  d'autres  Marchandifes,  comme  du  chanvre,  du  lin, de  la  poix,  du 
goudron ,  des  grains ,  de  la  laine, du  bois ,  du  fer,  du  cuivre ,  de  la  chaux,  & 
beaucoup  d'autres ,  toutes  d'un  grand  débit,  pour  le  tranfport  defquelles  il 
faut  des  Vaiffeaux  fort  larges.  Que  dans  ce  tems-là,&  encore  environ 
50.  Ans  après ,  il  y  avoit  peu  à  craindre  pour  la  diverfion  de  ce  Commerce 
&  Navigation  aulîî  grande  &  auffi  profitable,  puifque  les  Puiffances  du 
Nord  &  d'autres  voifines,  étant  relpeftivement  maintefois  en  guerre  en- 
semble ,  ou  troublées  chez  eux  par  des  Guerres  inteltines ,  n'ont  que  peu  ou 
point  à  cœur  la  continuation  du  Commerce  &  de  la  Navigation  de  leurs 
Sujets;  mais  qu'enfuite  ces  Nations  ont  travaillé,  fur  tout  depuis  un  demi 
Siècle,  avec  beaucoup  d'aplication,  à  s'en  emparer,  foi t  en  déchargeant 
leurs  Sujets  &  en  chargeant  ceux  de  ces  Provinces,  foi  t  même  en  donnant 
des  recompenfes  de  leurs  propres  CofFres,pour  inciter  leurs  Sujets  à  occuper 
ledit  Commerce.  Que  de  cette  manière  le  Trafic  &  la  Navigation  de  ce  Païs 
vers  PEft  &  le  Nord  a  de  tems  en  tems  diminué  confiderablement,  &  qu'on 
n'y  a  pu  employer  plus  de  quatre  cens  cinquante,  ou  tout  au  plus  cinq  cens 
Vaiffeaux ,  lequel  nombre  même  eût  diminué  encore  d'avantage  s'il  ne  fut 
confervé  avec  tout  le  ménagement  &  économie  imaginable.  Mais,  que  de- 
puis la  guerre  dernièrement  allumée  dans  le  Nord  ,  &  qui  y  continue  en- 
core ,  le  Commerce  des  bons  Habitans  fur  ces  quartiers  là  efl  devenu 
quafi  la  proye  des  Puiffances  qui  y  font  en  guerre,  par  la  prife,  vexation, 
èi.  détention  des  Vaiffeaux  de  ces  Provinces ,  fous ,  on  ne  fait  prefque  pas, 
miels  prétextes ,  au  préjudice  très  confiderable  &  même  à  la  ruine  des  Fa- 
cteurs &  des  Propriétaires  de  ces  Vaiffeaux ,  à  la  totale  diverfion  du  dit 
Commerce,  y  aiant  été  l'année  dernière  dans  ces  Provinces  près  de  trois 
cens  Vaiffeaux,  qui  n'ont  pu  faire  aucun  voyage,  &  par  confequent  au 
renverfement  entier  de  la  Navigation  &  du  Commerce  du  Pais ,  à  moins 
qu'on  n'y  remédiât  ;  puifqu'  effectivement  il  ne  fauroit  confiiter  qu'en  une 
efpece  de  circulation  &  permutation  des  Marchandifes  entre  l'Eil  «TOuè'fl, 

& 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.         15 

&  que  cette  circulation  ceflant,  le  Commerce  ne  peut  que  ceffer  aufïï,  té-  Affaire 
moin  une  certaine  grande  Ville  voifine,  qui,  pour  paffer  fous  filence  plu-  DKS  PRa* 
fieurs  autres  exemples  de  cette  nature ,  fleuriflbit  autres  fois  par  fon  Com-     ukwsT 

merce ,  &  qui  en  a  eu  une  trille  expérience  à  fon  grand  préjudice  &  même 

à  fa  ruine ,  deforte  qu'en  cas  de  décadence  &  de  diveriion  de  la  Naviga- 
tion à  l'Elt  &  au  Nord,  il  n'y  pourrait  qu'enfuivre  celle  fur  d'autres  quar- 
tiers du  monde,  comme  on  n'en  aperçoit  déjà  que  trop,  &  qu'ainfi  cet 
Etat  pourrait  être  réduit  à  l'impuiflance  &  à  l'entier  déperiffement. 

Cet  empêchement  &  diveriion ,  Hauts  &  Puiilans  Seigneurs ,  efl:  plus 
à  craindre  pour  ces  Provinces  que  pour  d'autres  voilines  ,  puifqu'elles  en 
doivent,  comme  d'un  Marché  public  &  Magazin  gênerai  du  Commerce  entre 
l'Elt  &  l'Ouefl,  tirer  leur  profperité.  Mais, comme  ce  n'ell  pas  la  Nature 
qui  rend  cet  Etat  un  Marché  &  Magazin,  ainfi  que  d'autres  Etats' voifins 
qui  font  plus  accoutumez  à  donner  de  leurs  productions  qu'à  en  tirer  d'au- 
tre part,  &qui  par  confequent  peuvent  conferver  par  devers  eux  un  Com- 
merce avantageux,  &  non  fujet  à  aucune  diverfion  ;  mais  que  c'eil  l'Art 
qui  le  rend  tel ,  ne  dépendant  à  plufîeurs  égards  que  de  l'induflrie  ,  de  la 
diligence  &  frugalité  des  bons  Habitans,  &  qui  pourrait,  au  défaut  d'une 
due  Protection  contre  toute  violence,  être  tranfporté  d'ici  dans  un  autre 
Pais}  &  que  le  négoce, étant  une  fois  perdu,  ne  retourne  gueres  d'où  il 
s'efl  retiré,  témoin  plufîeurs  exemples  &  même  confirmez  par  expérience 
de  ce  Pais  :  il  eil  de  la  dernière  neceiîité  de  veiller  la-denus  avec  beau- 
coup d'attention,  de  le  traiter  délicatement  &  foigneufement  ,&  de  le 
défendre  comme  il  faut  ;  étant  impoffible ,  que  le  Commerce  &  la  Navi- 
gation puifle  durer  fans  une  Protection  jufle  &  proportionnée  à  la  force  de 
ceux  qui  voudraient  les  troubler,  l'état  même  d'incertitude  leur  étant  rui- 
neux, comme  on  pourrait,  s'il  étoit  néceffaire,  le  démontrer  par  des  rai- 
ibns  &  argumens  irréfragables. 

De-là  dépend  auffi  la  valeur  &  le  prix  des  Terres  &  des  Biens  immeu- 
bles ,  &  l'on  ne  peut  trouver  d'autres  raifons ,  pourquoi  dans  d'autres  Païs, 
comme  par  exemple  en  Allemagne,  en  Suede,enDannemarc,  en  Pologne  &c. 
ils  font  à  un  moindre  prix  qu'ils  ne  font  ici ,  fans  des  accidens  extraor- 
dinaires ,  ou  bien  à  un  très-bas  ,  qu'uniquement  la  profperité  du  Com- 
merce conjointement  avec  afrluence  de  Monde  &  autres  fuites  qui  en  ré- 
fultent,  non-obflant  que  prefque  toutes  les  Terres  ici,  devant  être  entre- 
tenues en  état  de  fertilité  par  de  fortes  Digues ,  Moulins ,  Echues ,  &  autres 
dépenfes  ,  feraient  encore  ,au  défaut  de  cette  profperité  &  afrluence  de 
Monde ,  d'une  beaucoup  moindre  valeur  que  les  autres  fufdites  Terres, 
qui  naturellement  font  au-deffus  de  l'eau  &  fécondes. 

Il  faut  enfin  remarquer  à  cette  occafion  ,  que  par  l'empêchement  des 
moïens  fouvent  mentionnez  ,  par  le  manquement  de  négoce  qui  en  efl  occa- 
fionné ,  parla  defertion  &  retraite  des  Habitans,  par  la  Diminution  des  revenus 
du  Païs,  &  par  le  déclin  des  Biens  immeubles  ,  l'Etat,  quoiqu'il  ne  fût 
point  diminué  dans  {qs  limites  &  fon  étendue  ,  ferait  pourtant,  faute  de 
forces  néceûaires,  expofé  fans  efpoir  d' allez  de  réiiflance  à  des  accident 

impré- 


id    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    imprévus  tout  ainfi  qu'un  corps  amaigri  &  affoibli ,  &  ne  pourroit  pas, 

ras  r.\o-    ce  que   dIqu  veuille  détourner  ,   être  confervé.     Et  c'eft   pourquoi  ces 

unies!"     moyens  méritent  qu'on  y  ait  autant  d'attention  &  de  garde  qu'ils  ne  foient 

, — . violez ,  qu'il  faut  avoir  foin  de  la  défenfe  des  frontières  &  pour  prévenir 

le  danger  qui  leur  pourroit  furvenir. 

Cependant  ,  Hauts  &  PuilTans  Seigneurs ,  beaucoup  s'en  faut ,  que 
dans  la  conjoncture  préfente  la  fureté  requife  du  Commerce,  &  les- 
moïens  y  fervans  &  pris  dans  un  bon  fens  &  dans  une  bonne  ligni- 
fication ,  puiflent  donner  lieu  à  de  nouveaux  troubles  ,  qu'un  Etat 
comme  celui-ci  doit  éviter  foigneufement ,  parcequ'ils  feroient  feule- 
ment propres  à  la  fureté  des  VauTeaux  &  Effets  des  Habitans  de  l'E- 
tat contre  toute  violence  &  tort  des  étrangers  ,  ce  qui  jufqu'à  pré- 
ient ,  malgré  tous  les  devoirs  employez  à  cet  effet  auiïï  long-tems  & 
avec  tant  de  patience ,  n'a  pu  être  aimablement  prévenu  ni  évité  ;  fu- 
reté fondée  fur  le  Droit  de  la  Nature  &  far  la  pratique  générale 
de  toutes  les  Nations  ,  fuivant  laquelle  on  peut  repouffer  la  force  par  la 
force 5  &  une  fureté,  qui  devroit  purement  confifler  en  a&es  de  defenfe, 
lefquels,  fuivant  le  Droit  des  Gens,  ne  font  pas  une  infraction  de  la 
Paix,  qui  n'eft  enfreinte  que  quand  on  fait  quelque  chofe  de  contraire  à  ce 
qui  a  été  expreffement  promis  en  faifant  la  Paix,  ou  à  ce  qui  provient 
de  la  nature  de  la  Paix, le  vieux  Proverbe  étant  du  refte  aflèz,  ou  peut-être 
trop  connu  ,  pour  le  rapeller  en  mémoire  :  Pacem  rumpunt ,  non  qui  vim  vi 
arcent ,  fed  qui  priores  vim  in  fer  tint. 

Il  a  piû  neantmoins  à  VV.HII.  PP.  de  trouver  bon  par  leur  Refolution  du 
24.  du  courant  de  mettre  encore  divers  devoirs  amiables ,  y  mentionnez 
plus  amplement,  pour  prévenir  plus  de  violences, &  pour  reparer  celles 
qu'on  a  déjà  fouffertesrmais,  dans  l'incertitude  pourtant  ,  fi ,  &  jufqu'où 
ils  feront  d'un  fuccès  defiré  ;  &  pour  être  en  tout  cas  en  état  de  maitenir  &  d'af. 
furer,  s'il  eft  neceilaire ,  Je  Commerce  &  la  Navigation  de  ces  Provinces 
contre  ceux  qui  voudront  les  troubler,  il  leur  à  plû  aufli  de  prier  le  Confeil 
de  former  au  plutôt  une  Pétition  pour  l'Armement  d'une  Efcadre  de  tren- 
te Vaiffeaux  de  Guerre  avec  tout  ce  qui  y  apartient,  &  de  la  faire  remet- 
tre à  VV.  HH.  PP. 

Le  Confeil  prefente  donc  en  confequence  par  celle-ci  à  VV.  HH.  PP.  cette 
Pétition  pour  l'Armement  de  la  dite  Efcadre  de  trente  Vaiffeaux  de  Guerre 
avec  ce  qui  y  apartient,  plus  amplement  fpecifié  dans  l'Etat  qui  a  été  pro- 
jette fur  ce  fujet,  &  quiefl  joint  à  la  queue  delà  prefente ,  calculé  pour  fept 
mois  à  commencer  du  premier  d'Avril  prochain ,  montant  à  la  Somme  de 
3132740:  pour  être  trouvez  de  l'agmentation  des  Droits  de  Gabelle, 
3Laft^i&  Feyl-geid:  &  que  le  Receveur  de  cet  Impôt  foit  autorifé  de  faire 
fournir  de  ce  Revenu  aux  Collèges  refpeélifs  des  Amirautez,  qui  fe  char- 
geront effectivement  de  leur  quotepart  du  dit  Armement, à  chacun fon  con- 
tingent dans  cette  Pétition,  &  de  négocier  fur  le  dit  fonds  les  deniers  qu'il 
pourroit  leur  manquer  en  caiffe  pour  ce  fujet ,  à  un  intérêt  de  4.  pour 
Cent  par  an,  &  exempt  pour  le  teins  de  quatre  années  de  toutes  les  char- 
ges 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        17 


ges  extraordinaires ,  comme  le  ioo^e.  &  soome.  denier,  &  d'autres  plus  ou   awaires 
moins;  bien  entendu,  que  la  moitié  du  montant  de  cette  Pétition,  que  le    des  Pro- 
dit  Receveur  General  ne  fournira  qu'en  prêt,  lui  fera  rellituée  aiuTi-tôt  qu'il     vinces* 
eft  pofïïble ,  avec  les  intérêts,  jufqu'à  ce  qu'il  fera  entièrement  payé,  favoir     UyiE8» 
de  telle  manière  comme  VV.  HH.  PP.  le  détermineront  dans  la  fuite. 

De  plus  VV.  HH.  PP.  font  priées  de  vouloir  envoier  cette  Pétition  fans 
retardement  aux  Seigneurs  Etats  des  Provinces  refpectives  ,  &  l'apuyer 
puiffament  &  efficacement ,  afin  que  les  confentemens  requis  s'enfuivent 
avec  autant  de  diligence  que  la  nature  de  l'affaire  &  le  Printems  tout  pro- 
chain l'exigent ,  pour  pouvoir  fentir  l'effet  defiré  dudit  armement ,  qui  de- 
mande bien  du  tems  pour  être  achevé,  &  pour  qu'il  puiffe  donner  du  poids 
aux  fufdits  offices ,  &  devoirs  amiables ,  qu'on  emploiera  encore ,  à  la  ré- 
paration des  torts  foufferts,  &  pour  les  prévenir  dans  la  fuite,  &  ainîi  au  reta- 
bliffement  de  la  Navigation  libre  &  du  Commerce  des  bons  Habitans  de  la 
République  fur  l'Eit  &  le  Nord,  lequel  pour  les  raifons  fufmentionnées  eic 
de  la  dernière  importance.  Les  fraix  même  de  cet  armement  feront  d'un 
bon  &  utile  emploi,  quoique  le  but  falutaire  de  VV.  HH.  PP.  à  cet  égard 
puiffe  être  obtenu  par  les  dits  offices  amiables  qu'on  employera  encore  de 
leur  part ,  &  qu'ainfi  dans  la  fuite  l'emploi  aêtuel  de  cette  Efcadre  ne  fût 
plus  neceffaire  ;  parce  qu'en  tout  cas ,  &  outre  le  fuccès  incertain  de  ces 
offices  amiables ,  dont  il  a  plu  à  VV.  HH.  PP.  de  faire  mention  ,  les  dits 
Vaiffeaux  ,  qui  avec  d'autres  font  extrêmement  délabrez  à  caufe  de  l'im- 
puiffance  des  Collèges  refpeêtifs  des  Amirautez  caufée  par  le  défaut  du 
paiement  des  fubfides  qui  leur  font  dûs  par  les  Provinces,  qui  n'équipent 
point ,  pour  des  arméniens  ci-devant  faits  ,  pourront  de  cette  manière  être 
duè'ment  radoubez  &  pourvus  de  mâts ,  agrez  &  cordages ,  &  de  tout  ce  qui 
manque  dans  les  Magazins  du  Pais ,  &  ainfi  remis  en  état  de  pouvoir  être 
emploiez  dans  toutes  les  occurences  au  fervice  de  la  Republique. 

Et ,  afin  que  les  dits  Collèges  des  Amirautez  foient  tirez  de  cette  impuif- 
fance ,  le  Confeil  ne  fauroit  s'empêcher  dans  cette  occafion  de  prier  en 
même  tems  VV.  HH.  PP.  de  difpofer  pareillement  par  leur  forte  &  ferieu- 
fe  intercefîion  les  fufdites  Provinces  d'acquiter  à  la  fin  une  bonne  fois  leurs 
dits  arrérages  ;  du  moins  de  fournir  en  diminution  d'iceux  une  fomme  fuf- 
fifante  aux  Collèges  mentionnez  ,  afin  des  les  mettre  en  état  de  rétablir 
comme  il  faut  la  Marine  du  Pais,  de  paier  à  leurs  Officiers,  Matelots, 
Livranciers,  &  autres,  les  Gages,  Penfions,  Livraifons,  &  ce  qu'il  y  a  de  plus 
en  arrière  ,  &  après  quoi  ils  ont  foupire  li  long-tems,  &  de  pouvoir  par 
confequent  exécuter  &  effectuer  ce  que  le  fervice  du  Païs  exige  d'eux. 

Ainli  fait  &  pétitionné  par  le  Confeil  d'Etat,  à  la  Haie,  le 2 8.  Jan.  1718- 

{Paraphé)  J.    W   1   c   h   e  r   s,     vt. 

(  Plus-Bas  )  Par  Ordonnance  du  Confeil  d'Etat 
des  Provinces-Unies , 

Signé,     S.    van    Slingelandt. 
Tome  XL  C  Etat 


.Affaires 
des  Pkc- 

ViNCES- 

Unies. 


Résolu- 
tion tou- 
chant les 
VaiiTe- 
aux. 


18       MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Etat  des  Fraix  de  trente  Vaiffeaux  de  Guerre  avec  ce 
qui  y  apar tient ,  pour  le  tems  de  fept  mois,  à  envoier 
dans  la  Mer  Baltique. 


Vaiffeaux 

i  à •• 

6  à 


Canons 

90  à 

72  à 


Hommes. 

550. 

400  -    2440. 


Sous   eux  encore  2   Pavillons 


7  a 

16  à 

2  à 

6  Brûlots 


64  à  -  -  - 

54  à 

24  à 


325   -    2275. 

270-    4320. 

120-      240. 

do  -  -  360. 


10245.  Hommes  à  —  36  —  0  —  0  — 


Par  mois ,  fait  pour  fept  mois      -    -    -     -    - 

Achapt  &  apareillement  de  fix  Brûlots 

Le  Louage  de  fix  Flûtes  à  2000  -  o  par  mois , 
pour  fept  mois,  pour  Provifion  &  Vivres.  -  - 
3  Hoecres  &  3  Galiotes  à  1000  —  0  —  0  pour 
fept  mois.     -----__--._ 

2  Hôpitaux  &  VaiiTeaux  de   Provifion  -   -   - 

Pour  des  Occurrences  extraordinaires ,  comme 

auffi  pour  le  Fifcal  ,   Secrétaire ,  Miniflre , 

&  autres  Officiers.   -------- 

SoJdesde  6000  Hommes  pour75Joursà  iofols- 

Total 


2581740  - 

0 

— 

0 

90000  — 

0 

-- 

0 

84000  — 

0 

— 

0 

42000 
60000 


50000 
225000 


o 
o 


O 
O 


O 

o 


o 
o 


3132740  -    o 


Les   Etats  avoient,  3.  ou  4.  jours  auparavant,   pris  une   Refolution 
pour  empêcher  les  Navires  de  Guerre  de  fe  gâter.    Voici  cette  Refolution. 

Extrait  du  Régi  fi  re  des  Re  fol  ut  ions  de  LL.  HH.  PP. 
touchant  les  Vaiffeaux;  du  Mardi  2?.  Janvier  1718, 

A  Iant  été  propofé  à  FAfTemblée,  &  donné  en  conflderation ,  fi  à  l'é- 
./"Il  gard  de  la  grande  décadence  où  les  VaiiTeaux  de  Guerre  de  l'Etat 
font  depuis  un  long  éfpace  de  tems  tombez ,  par  manque  d'un  necefTaire 
entretien,  &  d'une  requife  réparation  •  laquelle  décadence  s'augmente 
journellement  de  plus  en  plus  ,  de  forte  qu'il  ell  à  craindre  que  les  dits 
VaiiTeaux  ne  foient  en  peu  de  tems  entièrement  perdus ,  à  moins  qu'on 

n'y 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.         i$ 

n'y  mette  les  mains.  Que  cependant  la  confervation  defdits  Vaifleaux  de  AmiREj 
Guerre ,  &  des  forces  navales  pour  le  bien  &  la  feureté  de  l'Etat ,  eft  de  DES  Pko- 
la  dernière  importance  &  neceflité  ,  ainfi  que  les  teins  paiTez  en  ont  plus  ^CKS" 
d'une  fois  convaincu.  C'efl  pourquoi ,  fi  l'on  ne  devoit  pas  écrire  aux  ref-  ... 
peêtifs  Collèges  de  l'Amirauté  de  mettre  en  triage  tous  leurs  foins ,  non 
feulement  pour  empêcher  lefdits  Vaifleaux  de  fe  gâter ,  mais  auiïi  de  met- 
tre du  moins  un  bon  nombre  d'iceux  en  état  de  pouvoir  d'abord  être  em- 
ploiez  &  mis  en  Mer,  lors  que  le  fervice  de  l'Etat,  la  protection  &  la 
feureté  de  la  Navigation  &  du  Commerce  des  Sujets  de  l'Etat ,  ou  la  ne- 
ceflité pourra  le  requérir  ;  &  fi ,  pour  mettre  lefdits  Collèges  de  l'Amirauté 
en  état  de  le  faire,  l'on  ne  doit  pas  charger  le  Receveur  General  de  l'aug- 
mentation des  impôts  &  de  l'argent  de  bonnagedes  Navires,  Groeninx,  de 
fournir  aux  Collèges  de  l'Amirauté,  qui  fe  chargeront  de  l'efFecluër  réelle- 
ment, l'argent  neceflaire,  hors  les  rentes  de  la  recette,  fur  la  quittance 
du  Receveur  General  defdits  Collèges  de  l'Amirauté,  chacun  pour  ce  qui 
le  regarde,  par  provifion  jufques  à  la  fomme  de  ....  Florins;  &  n'y 
aïant  point  aflèz  d'argent  dans  la  CahTe ,  de  négocier  la  fomme  avec  un 
intérêt  de  4.  pour  cent  par  an ,  fous  l'exemption  de  tout  centième  &  deux 
centième  denier ,  &  d'autres  pareilles  charges ,  pour  le  tems  de  4.  ans  ; 
avec  cependant  cette  referve,  que  les  Négociations  qui  ont  déjà  été  fai- 
tes fur  ledit  fond,  &  dont  Obligations  ont  pour  cela  été  livrées,  ne  rece- 
vront par  ceci  aucun  préjudice  ,  mais  tant  à  leur  égard,  qu'à  l'aquit  plutôt 
du  Capital ,  que  des  deniers  qui  feront  après  négociez  fur  ledit  fond ,  réfu- 
teront de  la  même  nature  qu'ils  font  à  prefent.  Sur  quoi  aiant  été  délibéré , 
les  Srs.  Députez  de  la  Province  de  Zelande  ont  pris  Copie  de  cette  Pro- 
portion pour  être  communiquée  à  leurs  Principaux.  Et  les  Srs.  Députez 
des  Provinces  d'Utrecht  &  d'Over-Iffel  fe  font  chargez  de  s'expliquer  là- 
deffus  dans  2.  ou  3.  jours. 

L  e  jour  qu'on  reçut  la  Lettre  du  Confeil  d'Etat  qu'on  vient  de  rapor- 
ter ,  les  Etats  Généraux  prirent  une  Refolution  pour  trouver  fur  quoi  on 
prendroit  l'argent  neceflaire  pour  une  telle  depenfe.  Cette  Refolution  eft 
îa  fuivante. 

Extrait  du  Regijlre  des  Refolutions  de  LL.  HH.  PP. 

touchant  un  Armement  Naval',  du  Samedi  29.  Jan- 
vier 171 8. 

RE  c  e  u  une  Lettre  du  Confeil  d'Etat,  écrite  ici  à  la  Haie  le  28 ,  portant  Refolu* 
une  Pétition  de  la  fomme  de 3.  Millions,  132. mille,  740.  florins,  pour   tion  fur 
l'Armement  extraordinaire  de  30.  Vaifleaux  de  Guerre  &  leur  dependence.   un  Arme' 
Cette  fomme  doit  fe  trouver  fur  l'augmentation  de   la   charge  &  tonnage    ™l  Na" 
des  Navires.     Et  cette  fomme  ne  fe  trouvant  pas  en  caifle,  de  la  négocier 
fur  ledit  fonda  4.  pour  cent  d'intérêts  annuel  fous  l'exemption  pour  4.  ans 

C  2  de 


VINCES- 

Unies. 


îo     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    de  tout  extraordinaire  impôt,  comme  centième  &  deux  centième  denier, 
di,s  Pko-   g  autres  charges ,  la  moitié  de  ladite  fomme  demandée  à  être  fourme  feu- 
lement ,  par  emprunt ,  pour  être ,  d'abord  qu'il  fera  poiîibîe,  rembourfée  avec 
les  intérêts  qui  en  reiulteront,  &  de  telle  manière  qu'il  fera  déterminé. 

Sur  quoi  aiant  été  délibéré,  &  étant  déclaré  par  les  Sieurs  Députez  de  la 
Province  de  Hollande  &  de  Weil-Frife,  qu'ils  confentoient  de  la  part  de 
leurs  Etats  à  ladite  Pétition ,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté ,  que  la  copie  de 
ladite  Pétition  feroit  envoiée  aux  Seigneurs  Etats  des  autres  Provinces ,  &  de 
les  prier  de  vouloir  au  plutôt  y  confentir,  &  d'envoier  ,  tant  plutôt  tant 
mieux ,  fans  perte  de  temps ,  leur  confentement ,  à  caufe  que  la  faifon  s'avan- 
ce. Qu'on  y  ajoutera  que  LL.  HH.  PP. ,  dans  l'attente  defdits  confente- 
mens ,  ne  négligeront  pas  de  mettre  en  ufage  les  amiables  offices  contenus 
dans  leur  Refolution  du  25,  qu'on  a  déjà  commencés.  Cependant,  cela  don- 
nera beaucoup  de  poids  aux  dits  bons  offices ,  &  de-là  il  y  a  principale- 
ment à  efperer  un  bon  fuccès ,  quand  on  aura  pris  une  promte  refolution 
pour  ledit  Armement ,  &  qui  fera  effectivement  mis  en  exécution.  Et  en 
cas  que  ces  bons  offices  puiiTent  obtenu-  un  bon  fuccès ,  les  depenfes  à  em- 
ploier  pour  ledit  Armement  ne  feront  point  pour  cela  perdues ,  puis  que 
par-là  la  force  Navale  de  l'Etat ,  qui  elt  dans  une  pitoiable  décadence ,  fera 
en  quelque  manière  mife  en  meilleur  état,  &  cela  fans  de  nouvelles  charges 
pour  les  Provinces ,  &  feulement  fur  les  revenus  par  eau. 
Le  Compte  pour  l'Armement  de  30  Navires  fuit  ici. 

Compte  de  ce  que  contera  P Armement  de  30.  VaiJJeaux  de 
Guerre  5  avec  leur  dépendance ,  pour  le  tems  de  ?*, 
Mois ,  pour  envoler  dans  la  Mer  Baltique. 


Navires             Canons 

H 

ommes. 

1    a     -     -    -     -     90     -     - 

- 

-    500. 

6   à     -     -     -     -     72  à  400 

- 

-  2440. 

y  compris  deux  Pavillons  à 

- 

-      ÏOO. 

7  à    -    -    -    -     64  à  325 

- 

_    907c" 

16  k     -     -    -    -    54  à  270 

- 

-    4320. 

2a----     24  à  120 

- 

-       24O. 

6  Brûlots  à  -    -    -    -     60 

- 

-        360. 

10245. 

Sommes. 

Depenfe  pour  7.  Mois  des  Hommes  h.  36  fl.  2581740 

Pour  les  6.  Brûlots.     -     -----------     90000 

Pour  6.  Flûtes  à  2000.  fl.  par  Mois,  &  pour  les  vivres.     -     84000 
Trois  Hoekkers  &  3.  Galiottes  à  1000.  fl.  par  Mois.     -     -     42000 
Deux  Navires  d'Hôpital.     -----------     60000 

Pour  les  Cafualitez  ,  comme  Fifcal ,  Secrétaire,  Predicant, 

&  autres  f  ervans.  50000 

Argent  courant  pour  6000.IIom.pour  75.jours,à  io.fols  par  jour.225000. 

En  tout    3132 740 

L'on 


RESOLUTIONS   D'ETAT,   M.  DCC.  XVIlT.        g 


21 


L'on  eut  même  des  Conférences  là-deffus  avec  des  Députez  de  l'Amirau-    Affaires 
té.     Leur  contenu  efl  dans  la  Pièce  qu'on  met  ici.  DES  p*o- 

VINTCE8- 

UiNIES. 

Extraits  du  Régit re  des  Rcfolutions  des  LL.  HH.  PP.  les 
Seigneurs  Etats  Généraux  des  Provinces  -  Unies ,  tou- 
chant r Armement  Maritime. 

S  Un  ce  qui  a  été  raporté  aujourd'hui  des  Sieurs  van  Capelle  &  autres    Ref0iu. 
Députez  de  Leurs  Hautes  Puiflances  pour  les  Affaires  maritimes  aiant    tion  fur 
été  en  Conférence  avec  les  Commiflaires  icipréfens  des  Collèges  des  Amirau-   l'Arme- 
tez,il  a  été,  après  une  Délibération  préalable,  trouvé  bon  &  refolu  de  con-   mentM*= 
gedier  par  la  préfente  lefdits  Commiflaires  pour  qu'ils  puiffent  partir,  en  leur   ntune' 
recommendant  ferieufement  d'avoir  foin  chacun  auprès  de  leurs  dits  Col- 
lèges de  l'Amirauté ,  que  l'Armement  projette  foit  continué  avec  toute  la  di- 
ligence imaginable  ;  &  de  faire  en  forte ,  qu'à  la  première  occafion  qu'ils  re- 
viendront ici  fur  la  convocation  de  Leurs  Hautes  PuiiTances ,  ils  foient  en 
état  &  inltruits  pour  conférer  fur  le  ménage  qui  pourra  fe  pratiquer  par 
les  Collèges  des  Amirautez. 

Autre  Extrait. 

SUr  ce  qui  a  été  propofé  des  Sieurs  van  Capelle  &  autres  Députez  de  Autre, 
Leurs  Hautes  Puiflances  pour  les  Affaires  maritimes  aïant  été  en  Confé- 
rence avec  les  Commiflaires  des  Amirautez  ici  préfens ,  il  a  été ,  après  une 
préalable  Délibération ,  trouvé  bon  &  entendu  d'autorher  le  Receveur  Ge- 
neral de  l'augmentation  des  Droits  de  Gabelle  (Loft-  &  Fey-Geld.)  Mari- 
nus  Groeninx,  comme  il  efl  autorifé  par  la  préfente,  de  mettre  ordre  pour 
faciliter  la  Negotiation  des  fommes ,  qu'il  eit  chargé  &  autorifé  de  faire  par 
les  Refolutions  précédentes  de  Leurs  Hautes  Puiflances ,  pour  avancer  le 
projette  armement  extraordinaire ,  &  de  prendre  les  mefures  neceffaires , 
pour  que  les  intérêts  des  deniers  à  négocier  foient  payez  aux  Teneurs  des 
Obligations  ,  non  feulement  à  Rotterdam  où  il  tient  fon  Comptoir,  mais 
aufli  à  Amllerdam  à  ceux  qui  pourraient  l'y  requérir  par  le  Receveur  par- 
ticulier de  l'augmentation  defdits  Droits ,  qui  employera  pour  cet  effet  un 
Commis  ou  Clerc  fur  une  penflon  raifonnable ,  comme  auffi  ici  à  la  Haie  par 
quelqu'un ,  que  le  fufdit  Receveur  General  Groeninx  établira  à  ce  fujet  fur 
le  même  pied. 

Il  fut  auflî  refolu  d'écrire  aux  Provinces  refpeclives ,  pour  avoir  Ià-deflûs 
leur  aprobation.  Lors  que  cette  matière  étoit  fur  le  tapis  ,  il  y  eut  de  pre- 
mier abord  des  Difputes.  Les  Députez  de  la  Gueldre  s'y  opoferent.  La 
raifon  de  leur  opofition  venoit  de  ce  que  leur  Province  n'étoit  pas,  pour 
ainfi  dire ,  concernée  dans  le  Commerce  maritime.  Elle  paroifîoit  ne  pas 
fe  foncier  de  ce  qui  pouvoit  arriver  à  ce  fujet ,   &c.     Par -là  ces  Députez 

C  3  ne 


22    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AîFAiBE?  ne  voulurent  pas  que  cette  Dépenfe  fut  mife  fur  l'Etat  de  Guerre  qui  ob- 
des  Pao-  lige  toutes  les  Provinces ,  ainfi  que  les  Députez  de  la  Hollande  le  deman- 
vincf.s-  doient.  Ces  derniers  allèrent  jufques  à  dire  que  leur  Province  en  feroit  les 
Unies*  avances.  11  y  eut  des  gens  qui  s'imaginoient  que  cet  Armement  pouvoit 
encore  avoir  quelque  altération.  C'étoit  en  cas  que  le  Roi  de  Suéde  pût 
être  porté  d'entrer  en  Négociation,  tant  pour  afièurer  la  liberté  du  Commer- 
ce dans  la  Mer  Baltique ,  que  pour  l'indemnifation  des  prifes  faites  par  les 
Armateurs  Suédois  fur  les  Sujets  des  Etats.  En  cette  vùë,  il  fut  refolu 
qu'on  pouvoit  envoier  en  Suéde  le  Minillre  des  Etats  qui  étoit  à  Copen- 
hague ,  en  qualité  d'Envoïé  Extraordinaire.  Ce  devoit  être  à  condition 
que  préalablement  le  Refident  Rumpf,  auquel  la  Cour  de  Suéde  étoit  tou- 
jours interdite ,  fut  rehabilité.  On  écrivit  même  à  celui  qui  étoit  en  Dan- 
nemark  de  fe  tenir  prêt  de  palier  enScanie  en  recevant  des  ordres  ultérieurs. 
On  commit  même  le  Prefident  de  Semaine  de  faire  part  de  cette  nomination 
à  l'Ambalîadeur  de  France  :  celui-ci  repondit  au  Prefident ,  qu'il  remercioit  les 
Etats  de  leur  communication.  Il  fe  chargea  d'en  faire  part  au  Roi  fon  Maître, 
&  au  Prince  Régent,  aum*  bien  qu'au  Comte  de  la  Mark  en  Suéde.  Il  ajou- 
ta ,  que  par  raport  à  la  readmiflion  du  Refident  Rumpf,  il  avoit  reçu  des 
Lettres  dudit  Comte  de  la  Mark.  Elles  portoient ,  que  le  Roi  de  Suéde  lui 
avoit  dit ,  que  dès  que  le  Miniflre ,  que  les  Etats  envoieroient  à  Sa  Maje- 
ité,  pour  lui  faire  un  Compliment  de  Civilité,  fur  ce  qui  étoit  arrivé  au 
Baron  Gortz ,  feroit  arrivé  en  Suéde,  d'abord  le  Refident  Rumpf  feroit 
readmis.  Le  dit  Marquis  de  Chateauneuf  conclut,  qu'il  vouloit  bien  dé- 
clarer dans  une  Conférence ,  que  le  Comte  de  la  Mark  lui  avoit  écrit  de  la 
forte.  Ce  qui  avoit  beaucoup  influé  fur  les  Etats  de  fe  refoudre  à  envoier 
un  Miniflre  à  Stockholme  venoit  des  infmuations  continuelles  du  Secrétai- 
re Preis.  11  aiTeuroit,  que  fi  l'on  entretenoit  la  Négociation,  on  trouveroit 
les  difpofitions  les  plus  favorables  dans  le  Roi  fon  Maître.  Avec  tout  ce- 
la ,  l'on  ne  tarda  pas  à  apercevoir  de  l'altération.  L'AmbafTadeur  Chateau- 
neuf, &  le  Secrétaire  de  Suéde,  fafoient  entendre  qu'il  feroit  difficile  d'ob- 
tenir du  Roi  de  Suéde  la  readmiffion  du  Refident  de  l'Etat  fur  la  fimple 
nomination  de  l'Envoie  des  Etats  qui  étoit  en  Dannemark,  pour  aller  en 
Suéde.  C'étoit  parceque  ce  Roi-là  voudra  préalablement  que  cet  Envoie 
nommé  pour  aller  auprès  de  lui,  y  foit  arrivé  ,  &  quil  lui  ait  fait  quelque 
Compliment  de  Civilité  fur  l'Arrêt  du  Baron  Gortz.  C'étoit  pourtant  une 
chofe,'  à  laquelle  il  feroit  difficile  de  porter  les  Etats.  Ce  mot  de  Compli- 
ment de  Civilité  paroiflbit  trop  vague.  On  craignoit  que  l'on  voudroit  le 
prendre  fur  le  pied ,  que  l'AmbafTadcur  de  France  avoit  quelque  tems  au- 
paravant propolë  par  le  mot  d'Excufe.  C'étoit  aufli  de  la  forte  que  le  Se- 
crétaire de  Suéde  s'enonçoit.  Cela  faifoit  croire  que  l'Ambaffadeur  & 
le  Secrétaire  étoient  de  connivence.  Ce  qui  augmentoit  cette  penfée  étoit 
qu'auparavant  l'Envoi  d'un  Miniflre  devoit  être  pour  régler  les  differens 
fur  le  Commerce ,  &  fur  les  prifes  faites ,  &  depuis  Ton  fe  reflraignoit  à 
devoir  fimplement  foire  un  Compliment  de  Civilité.  Cet  Ambafladeur  fit 
entendre  quil  s'étoit  expliqué  d'une  manière  plus  forte  que  le  raport  n'en 

avoit 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        23 

avoit  été  fait  aux  Etats.     Car ,  dans  celui-ci  il  y  avoit  que  dès  que  le  Mi-    Affaires 
niilre  que  les  Etats  envcieroient  vers  le  Roi  de  Suéde  pour  lui  faire  un   des  Pro- 
Compliment  de  Civilité  fur  ce   qui  s'étoit  palfé  relativement  au   Baron     vinces- 
Gortz,  feroit  arrivé  en  Suéde,  le  Refident  des  Etats  à  Stokholme  feroit  . 

readmis.  Cependant,  l'Ambaifadeur  difoit  qu'il  avoit  aux  mots  feroit  ar- 
rivé en  Suéde ,  ajouté,  £5?  fait  le  Compliment  de  Civilité,  &c.  C'efl  à  quoi 
il  paroiffoit  que  les  Etats  ne  pourroient  jamais  aquiefcer.  La  raifon  étoit  par- 
ceque  la  Province  de  Hollande,  qui  feule  aquiefça  à  l'Arrêt  du  Baron  Gortz, 
ne  vouloit  pas  que  par-là  elle  eut  offenfé  le  Roi  de  Suéde.  D'autant  qu'a- 
lors ce  Baron-la  ne  pouvoit ,  fuivant  tous  les  ufages  entre  les  Cours  poli- 
cées, être  conté  Minillre  autorifé  par  Sa  Majeilé  Suedoife.  Quelques-uns 
tachoient  de  faire  furmonter  cette  ponétille  ,  s'il  y  avoit  eu  quelque  efpe- 
rance  fondée  de  terminer  aimablement  avec  la  Suéde  les  differens  fur  la  li- 
berté du  Commerce,  &de  la  Navigation,  &  de  l'indemnifation  des  prifes 
faites  parles  Armateurs.  Mais  ,les  difficultez  parurent  prendre  un  train  de 
devenir  plus  grandes.  Le  Secrétaire  de  Suéde,  qui  paroiffoit  foutenu  par 
l'Ambafladeur  de  France ,  fit  une  nouvelle  infinuation.  Elle  confifloit  en  ce 
que  le  Roi  Son  Maitre  n'admettroit  jamais  un  Minillre  des  Etats  pour  faire 
le  Compliment  de  Civilité ,  fur  le  pied  &  le  caractère  qu'ils  lui  deflinoient. 
Le  Roi  fon  Maître  vouloit  qu'il  eut  le  Caractère  d'Ambalfadeur ,  &  non  pas 
d'Envoié  Extraordinaire.  Les  gens  trouvoient  que  c  étoit  exiger  une  cho- 
fe  que  les  Etats  ne  feroient  jamais  difpofez  à  faire.  Il  efl  vrai  que  le  Secré- 
taire de  Suéde, y  voiant  peu  d'aparence ,  donnoit  un  autre  tour  à  l'Affaire.  Il 
difoit,  qu'on  pouvoit  donner  des  Lettres  de  Créance  au  Minillre  de  l'Etat , 
comme  AmbaiTadeur ,  &  cependant  il  iroit  en  Suéde  comme  particulier. 
Ce  feroit  fur  le  même  pied  que  le  Comte  de  la  Mark  y  étoit  de  la  part  de 
la  France.  Car,  il  y  étoit  comme  particulier,  &  en  même  tems  comme 
AmbaiTadeur,  lors  qu'il  le  trouvoit  à  propos,  jouant  de  la  forte  differens 
Rolles.  L'on  ne  prêtoit  point  l'oreille  à  ces  iniinuations.  La  raifon  étoit 
qu'on  pouvoit  prévoir,  ou  même  craindre ,  qu'en  ce  cas  le  Roi  de  Suéde  vou- 
drait exiger  de  ce  Minillre  qu'il  produiilt  fes  Lettres  de  Créance  comme 
AmbaiTadeur ,  afin  d'obtenir  le  Compliment  de  Civilité  qu'il  exigeroit  fins 
doute  avec  le  terme  d'Excufe , d'une  manière  éclatante.  Même, fi  l'AmbafTa- 
deur  ne  fe  feroit  fervi  de  ce  mot  d'Excufe ,  le  Roi  pouvoit  dire  qu'il  re- 
cevoit  les  Excufes  des  Etats,  &c.  Cette  Affaire-là  étoit  fur  ce  pied,  lorf- 
que  l'Ecrivain  de  ces  Mémoires  partit  de  Hollande,  &  ne  s'efl  depuis  point 
informé  delà  fuite.  Elle  pourra  être  raportée  par  des  gens  plus  éclairez y 
qui  étoient  refiez  à  la  Haie. 

Cette  fituation  d'affaire  mettoitles  trafiquants ,  qui  avoient  fouffert,  dans 
une  méfiance  invincible  de  pouvoir  rien  obtenir  par  la  Négociation  :au(fi  ne 
refpiroient-ils  que  le  Projet  de  l'Armement  Maritime.  La  Province  de  Hol- 
lande innfloit  ta-deffus.  Il  y  avoit  cependant  trois  Villes,  favoir  la  Brille, 
Gorkum,  &  Schidam,  qui  fe  tenoient  enfemble ,  qui  n'y  panchoient  pas. 
Leur  reifort  fecret  pour  cela  étoit  à  caufe  que  la  Ville  d'Amflerdam  infi- 
floit  fortement  là-defîus.     Elle  propofoit  même  que  cet  Armement  fût 

corn- 


24      MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Apaises    compofé  de  quelques  plus  gros  Navires ,  qu'on  ne  l'avoit  d'abord  propo- 
dt.s  Pro-  fé.     Le  fonds  devoit  être,  amfi  qu'il  eft  touché  plus  haut,  fur  une  augmen- 
vinces-    tation  de  l'impôt  fur  les  tonneaux.     Cela  s'entendoit  fur  tout  ce  qui  étant 
Umes,      Jiquide  entroit  dans  dans  les  Etats  dans  des  tonneaux.     L'Agleterre  auroit 
voulu  qu'on  défendit  entièrement  le  Commerce  avec  la  Suéde.    La  penfée 
des  Etats  en  gênerai  étoit  de  pouvoir  porter  les  Puiffances  Maritimes  qui 
étoient  en  Guerre  dans  le  Nord  àaquiefcer  à  la  liberté  du  Commerce.  Le  Prince 
Kourakin  foutenoit,  que  c'étoit  l'intérêt  de  ces  Puiflances-là,  que  ce  Com- 
merce fut  rétabli  dans  fa  première  liberté.    Dans  l'aprehenfion  de  ne  pas  en 
venir  à  bout, l'on  continua  le  deffein  de  l'Armement  maritime.  La  Province 
d'Utrecht  prit  là-deffus  une  Refolution  alTez  curieufe  pour  être  inférée  ici. 

Extrait  du  Regiftre  des  Refolutions  de  Leurs  Nobles  Puif- 
fances les  Etats  du  Pais  d"  Utrecht ,  touchant  P  sir  me- 
ntent Naval  ;  du  Jeudi  10.  Mars  171 8. 

Refolu-  T  Es  Etats  du  Païs  d'Utrecht,  après  une  meure  Délibération,  aiant  exa- 
dMJtrecht  -V-1  mm^  ^a  Pétition  du  Confeil  d'Etat  du  28-  Janvier  1718,  avec  la  Rcfo- 
fur  l'Ar-  lution  des  Seigneurs  Etats  de  Hollande  &  de  Wefl-Fiïfe  du  21.  Janvier 
mement  touchant  le  Confentement  à  un  Armement  extraordinaire  de  30.  VaifTeaux 
Naval.  de  guerre,  qui  feroient  emploiez  pour  la  liberté  de  la  Navigation  &  du 
Commerce  de  ce  Païs  dans  la  Mer  Baltique,  montant  à  la  fomme  de  3.  mil- 
lions, 132000,  74.0.  florins,  la  moitié  d'icelle  à  être  fournie  par  le  Rece- 
veur du  Hauffèment  des  Droits  des  cargaifons  &  tonnages  des  Navires, 
feulement  en  forme  de  prêt,  &  qu'elle  luiferoit  auffi-tôt  poffible  rellituée 
avec  les  intérêts ,  de  la  manière  qu'il  fera  ultérieurement  déterminé  par 
Leurs  Hautes  Puiffances ,  ont ,  après  une  délibération  &  foigneux  examen 
des  affaires ,  trouvé  bon ,  que  les  Sieurs  Députez  de  cette  Province  à  la 
Généralité  feront  chargez  8c  autorifés  de  déclarer,  que  les  Seigneurs  leurs 
Principaux  peuvent  bien  fouffrir  &  pouvoir  regarder ,  que  les  Amirautez 
vaquent  au  demandé  Armement  jufques  à  20.  VaiiTeaux  de  guerre  &  de 
leur  dépendance,  &  pas  plus;  &  que  Leurs  Nobles  Puiffances  confentent 
de  la  forte  aux  deux  tiers  de  la  dite  Pétition,  fans  charger  les  Provinces  : 
étant  aufli  du  fentiment  avec  les  autres  Alliez,  que  Leurs  Hautes  Puiffances 
doivent  emploier  &  mettre  en  ufage  leurs  meilleurs  offices  &  les  plus  forts 
devoirs  pour  obtenir  d'une  manière  la  plus  convenable  le  libre  Commerce 
ôc  Navigation  dans  la  Mer  Baltique,  des  Rois  de  Suéde  &  deDannemark, 
pour  les  fujets  de  l'Etat,  auxquels  il  compete  par  le  Droit  de  Nature,  & 
particulièrement  en  vertu  des  Traitez  formels.  Et  qu'on  prenne  foin,  qu'on 
reitituë  ou  indemnife  des  Navires  &  effets  pris  aux  Intereffez.  A  cette 
fin, le  plutôt  poffible, il  faudroit  déterminer  une  expreffe  Deputation  ,pour 
paiter  ces  amiables  offices  &  devoirs  envers  lefdites  2  Couronnes,  6c  de 
témoigner  par-là,  à  toute  la  Terre  ,  la  forte  inclination  de  l'Etat  pour  la  con- 
fervation  de  la  bonne  intelligence  ôc  pour  prévenir  d'ultérieurs  differens. 

Et 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        25 

Etcela  pourpouvoir  rendre  plaufible  &  légitimer  l'envoi  d'une  flotte  de  guer-  Affaires 
re  pour  la  liberté  du  commerce  des  Sujets  de  l'Etat,  &  confequement  d'obte-  DES  1>ll°* 
nir  par-Là  une  deuë  &  fuffifante  feureté  pour  la  Navigation  &  le  Commerce  Unies! 
dans  la  Mer  Baltique.  Que  l'Inflruction  pour  celui  qui  commandera  en  — ■ — -. 
chef  cette  Flotte  foit  dreflee  &  communiquée  auparavant  à  Leurs  Nobles 
Puiffances ,  <k  quelle  foit  tellement  faite,  que  par-là  les  Etats ,  fans  leur  con- 
noifTance,  &  contre  leur  penfée,  ne  foient engagés  en  aucune  affaire,  qui 
puùTe  jetter  la  Republique  dans  un  fâcheux  labirinte.  D'ailleurs ,  que  la 
depenfe  à  faire  pour  l'Armement  fe  prenne  du  hautement  du  droit  des  car- 
gaifons  &  tonnages ,  &  d'en  faire  la  Négociation  fur  ce  fond ,  fans  qu'ils 
veuillent  être  tenus  à  aucun  rembourfement  de  cette  Négociation  à  faire 
par  un  moien  Extraordinaire,  ainfi  aufli  que  les  Seigneurs  Etats  de  laHoI- 
lande  &  Weft-Frife  ont  bien  voulu  en  conformité  dire  leur  penfée  dans  la 
Lettre  inférée  dans  celle  de  Leurs  Hautes  PuifTances  du  2.  Mars  1718,  & 
portant  que  toute  la  fomme  requife  pour  cet  Armement  fera  trouvée  fans 
charger  les  finances  des  Provinces ,  &  feulement  à  la  charge  des  Sujets 
trafiquais  ,  &  fuffifament  le  tout,  ou  du  moins  à  peu  près, à  la  charge  de 
la  Province  de  Hollande  &  de  Welt-Frife.  Leurs  Nobles  PuifTances  trou- 
vent aufli  à  leur  regret ,  que  non-obftant  tant  de  reprefentations ,  fpecia- 
lement  par  la  Lettre  du  18.  Octobre  1715.  &  6.  Mai  17 16.  fur  le  ménage 
des  Amirautez,  aufli  bien  que  touchant  la  defenfe  de  groffes  fraudes  clan- 
deitines  desDroits  par  eau, il  ne  s'en:  enfuivi  peu  ou  point  de  remède.  C'efl 
pourquoi  on  doit  y  infiiter  de  nouveau  avec  tout  le  zèle  polTible ,  &  prier 
Leurs  Hautes  PuifTances  démettre  fur  le  tapis  tous  les  points  neceifaires  de 
ménage,  &  de  mettre  les  ordres  requis ,  à  fin  que  les  grolfes  &  honteufes 
fraudes  foient  prévenues  avec  effet,  &  qu'on  mette  promtement  en  exé- 
cution l'amodiation  des  Droits  par  eau  fuivant  qu'il  convient.  Et  Leurs 
Nobles  PuifTances  étant  entièrement  perfuadées ,  que  fi  les  Droits  d'entrée 
&  de  fortie  font  duement  paiez ,  fans  conniver  aux  fraudes ,  les  Amirautez 
feront  fuffifament  en  état  de  faire  de  pareils  Arméniens ,  fans  même  faire 
d'extraordinaires  Pétitions.  Car,  Leurs  Nobles  PuifTances  doivent  encore 
dire ,  que  cette  Province  efl  du  moins  aufli  peu  en  état  que  les  autres  Con- 
federez  de  fuporter  de  pareilles  extraordinaires  charges,  d'aider  à  fupléer 
aux  défauts  des  Amirautez ,  cette  impuifiance  étant  caufée  par  la  mortalité 
du  bétail ,  qui  a  duré  depuis  plufieurs  années  &  qui  dure  encore ,  par  les 
grandes  inondations,  &  autres  defaftres.  Il  ell  auffi  trouvé  bon, de  charger 
les  Sieurs  Députez  de  cette  Province  à  la  Généralité ,  &  de  les  autorifer 
de  confentir  à  la  diftribution  de  fuffifantes  commiffions  à  tous  les  Capitai- 
nes des  Navires  Marchands  de  la  Republique,  bien  armez  en  guerre,  de 
reprendre  les  Navires  des  Sujets  de  l'Etat,  pris  par  les  Suédois ,  &  même 
d'attaquer  &  de  prendre  les  Câpres  Suédois,  qui  voudroient  empêcher  cette 
reprife,  en  accordant  quelques  recompenfes  ,  ainfl  qu'il  eft  plus  ample- 
ment porté  dans  la  Refolution  de  LL.  HH.  PP.  du  4.  OcTobre  paffé. 

Accordé  avec  ladite  Refolution , 

Signé  ,     P.    Voet    VAN    WlNSSEN. 
Itome  XL  D  Re* 


26     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


Affau.es 

DES    PKO- 
VINCES- 

Unies. 


Refolution  de  LL.  HH.  PP.  Jur  la  précédente. 


Refolu- 
tion  des 
E.  G.  fur 
la  précé- 
dente. 


Urq.uoi  étant  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  entendu ,  que  les  Sei- 
gneurs Etats  de  la-dite  Province  d'Utrecht  feront  priez  par  une  Let- 
tre de  donner  un  Confentement  complet  audit  Armement.  Que  les  Sei- 
gneurs Etats  des  Provinces ,  qui  n'ont  pas  encore  donné  un  tel  confente- 
ment feront  auiïi  priez  de  le  donner  fans  plus  délai,  &  de  le  faire  produire. 
Que  néanmoins ,  dans  l'attente  de  ces  contentements ,  on  écrira  aux  r effe- 
ctifs Collèges  de  l'Amirauté  d'envoier  ici  des  Députez  de  leur  corps ,  bien 
inflruits ,  pour  Lundi  21.  du  Mois  courant  de  Mars,  pour  être  ici  le  foir 
auparavant,  pour  entrer  ledit  21.  au  matin  de  bonne  heure  en  travail  pour 
examiner  &  aider  Leurs  Hautes  PuifTances  par  leurs  confiderations  &  avis, 
comment  ledit  armement,  lors  qu'il  fera  ultérieurement  refolu  par  Leurs 
1  Iautes  PuifTances,  pourra  avec  la  plus  grande  promtitude  être  prêt  avec  fes 
dépendances.  Et  les  Sieurs  Hazebroeck  &  autres  Députez  de  Leurs  Hau- 
tes PuifTances ,  commis  pour  les  Affaires  Maritimes ,  font  par  celle-cy  priez 
&  commis  d'entrer  ce  jour-là  en  travail  avec  les  Députez  des  Collèges  des 
Amirautez  fur  ce  fujet,de  prendre  là-defTus  leurs  confiderations, &  de  faire 
raport  de  tout  ici  à  l'Affemblée. 

Les  Sieurs  Députez  de  la  Province  de  Gueldre  ont  déclaré  de  n'avoir 
là-deflus  aucune  Inflruêtion. 


I  l  y  a  à  remarquer  ,  que  cette  Province-là  fut  priée  de  donner  fon 
confentement  à  cet  Armement  fans  reitriclion  ,  ainfi  qu'on  voit  par  la  Re- 
folution mife  au  bas  de  celle  qu'on  avoit  reçu  d'Elle.  Cette  refîriction  prin- 
cipale étoit ,  qu'il  fuffifoit  que  l'Armement  fut  de  20.  Vaiffeaux.  Ils  dé- 
voient être  aifez  gros.  Même  on  pouroit  y  mettre  de  gros  Navires  Mar- 
chands armez  en  Guerre,  auxquels  on  donneroit  des  CommiiTions  qu'on 
appelle  de  retorfion.  Il  y  avoit  bien  des  gens,  fur-tout  des  Miniftres Etran- 
gers, qui  ne  pouvoient  prévoir  que  cet  Armement  eut  aucune  influence 
pour  porter  la  Suéde  à  aquiefeer  à  l'indemnifation,  ni  à  la  liberté  du  Com- 
merce, &  de  la  Navigation.  Ils  difoient ,  que  cette  Couronne-là  retien- 
droit  fes  VaifTeaux  de  Guerre  &  fes  Armateurs  dans  fes  Ports.  Lors  que 
l'Efcadre  des  Etats  feroit  revenue  de  la  Mer  Baltique ,  elle  feroit  donner  la 
chaffe  comme  auparavant  aux  Navires  Marchands  de  l'Etat.  Nonobflant 
cela  ,  le  delTein  de  l'Armement  étoit  pouffé  fins  délai.  On  avoit  trouvé , 
que  l'argent  qu'on  y  avoit  deftiné  n'étoit  pas  fuffiilmt  ,  &  qu'il  faloit  qu'il 
y  eut  une  augmentation.  On  prit  là-deffus  le  14.  de  Mars  une  Refolution , 
que  voici. 


Ex- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        27 

DES   PRO« 

"Extrait  du  Regi/ïre  de  Leurs  Hautes  Puiffances  fur  VAr-    yataû 
mement  Naval\  du  Lundi  14..  Mars  1718.  Unie3\ 

SUr  la  Propofition  des  Sieurs  Députez  de  la  Province  de  Hollande  &  de    Refolu» 
Weft-Friie  que  les  400000.  florins,  que  le  Receveur  General  du-  re-    t>°nfur 
hautement  des  cargaifons  &  tonnages  de  Mer,  étoit,  par  la  refo'ution  de    J^T^ 
Leurs  Hausea  Puiflances  du  28.  du  Mois  dernier,  chargé  &  autorifé,  de    vai, 
dillnbuer  aux  Collèges  de  l'Amirauté ,  n'étant  pas  en  caiffe ,  de  négocier, 

Four  préparer  par  proviiion  les  Navires  de  Guerre  ,  qui  doivent  fervir  à 
Armement  projette ,   lors  qu'il  fera  ulteriemment  refolu  ,  pour  parvenir 
audit   but,  n  étant  pas  fuffifans,  mais  une  plus  grotte  fomme  étant  necef-  * 

faire:  a, Tes  une  précédente  Délibération ,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté, que 
ledit  Receveur  Geneial  fera  chargé  &  autorifé,  ainfl  qu'il  fera  par  celle- 
cy  autorifé,  de  paier  au  de-li  des  400000.  florins  portez  dans  la  Refolu- 
tion  du  28.  du  Mois  dernier,  &  fi  1  Argent  n'efl  pas  enCaiffe  ,  de  négocier 
encore  600000.  florins ,  le  tout  fur  le  meme  pied  qu'il  efl  arrêté  par  ladite 
Refoiution.  Et  de  paier  ladite  Somme  au  Receveur  General  de  chaque 
Collège  de  l'Amirauté ,  qui  doivent  fournir  leur  contingent  dans  ledit  Ar- 
mement, fur  la  quittance  defdits  Receveurs  Généraux;  lequel  paiement: 
étant  fait ,  on  lui  en  tiendra  conte ,  &  qu'on  en  donnera  connoiffance  aux 
refpectifs  Collèges  de  lAmirauté,  &  qu'on  leur  écrira  de  mettre  avec  la 
plus  promte  expédition  en  état  iefdits  Navires  requis  pour  cet  Arme- 
ment: &  que  Leurs  Hautes  Puiffances  attendent  fans  faute  de  leur  zèle 
pour  le  fervice  de  l'Etat ,  qu'ils  y  aportent  tous  leurs  foins ,  &  de  mander  à 
Leurs  Hautes  Puiffances  ce  qu'ils  auront  fait  fur  cela. 

Les  Sieurs  Députez  de  la  Gueldre  ont  déclaré  de  n'avoir  encore  là- 
deffus  aucune  Inftruction. 

Les  Sieurs  Députez  de  la  Province  de  Zelande  ont  déclaré  de  fe  charger 
de  cette  propofition  ,  ont  contredit  la  Refoiution ,  &  fe  font  refervez  de 
faire  là-deilùs  telles  Remarques  que  les  Seigneurs  Etats  leurs  Principaux 
trouveront  bon  de  faire. 

Les  Sieurs  Députez  de  la  Province  d'Utrecht  &  de  Frife  ont  confenti 
à  la  fufdite  conclufion  en  conformité  de  la  Refoiution  des  Etats  leurs  Prin- 
cipaux. 

Autre  Extrait. 

BEceu  une  Lettre  du  Collège  de  l'Amirauté  de  Weft-Frife  &  du  Quar- 
tier du  Nord,  t  crite  à  Enkhuifen  le  8-  de  ce  Mois,  en  reponfe  àla  Kefo- 
îution  de  Lew>  Hautes  Puiffances.  &  à  leur  Lettre  du  28.  Février  précèdent 
touchant  la  Pétition  du  Conreii  d  Etat  pour  1  Armement  de  30.  Navires 
de  Guerre  &  leur  Dépendance:  que  par  ledit  Collège  de  lAmirauté  pour 

D  2  fon 


Affaires 
ces  Pro- 
vinces- 
Unies. 


Refolu- 
tion  tou- 
chant 
l'Arme- 
ment Ma- 
ritime. 


28     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

fon  contingent  dans  ledit  Armement  on  avoit  deftiné  5.  Vaifleaux  de  Guer- 
re ,  favoir  un  de  72,  un  de  64,  &  3.  chacun  de  50  Pièces  de  Canon;  que  par 
leur  ordre  il  étoit  arrêté  que  lefdits  Navires  fuflent  au  plutôt  prêts ,  afin 
que  ledit  Armement  devant  fe  faire ,  ils  y  puifîènt  être  emploiez. 

On  enpritenfuite  une  autre  pour  trouver  ces  fonds  d'augmentation  par 
un  emprunt.     Elle  contient  ce  qui  fuit. 

Extrait  du  Regijlre  des  Refolutions  de  Leurs  Hautes 
Puijfances  les  Seigneurs  Etats  Généraux  des  Provin- 
ces-Unies  des  P  aïs-Bas  ^  touchant  r Armement  Mari- 
time; du  Lundi  28.  Mars  171 8. 

Ur  ce  qui  a  été  propofé  des  Sieurs  Députez  de  la  Province  de  Hol- 
lande &  de  Weft-Frife ,  il  a  été  après  une  préalable  délibération  trouvé 
bon  &  refolu,  de  charger  &  d'autorifer  le  Receveur  General  de  l'augmen- 
tation des  Droits  de  Gabelle  (Laft  tk Feyl-Geld)  Marinus  Groeninx,  comme 
il  eft  chargé  &.  autorifé  par  la  préfente,  de  payer  outre  les  fommes  de  400000. 
&  de  600000.  flor.  pour  lefquelles  fommes  il  négociera  les  deniers  qu'il 
n'a  pas  en  Caille ,  en  confequence  de  la  Refolution  de  Leurs  Hautes  Puif- 
fances  du  28.  du  pafle  &  du  14.  du  courant,  encore  aux  mêmes  Collèges 
une  fomme  de  600000.  florins  &  de  négocier  pareillement  les  deniers  qui 
ne  fe  trouvent  pas  encanTe,  faifant  en  tout  la  fomme  de  1600000.  florins 
fur  le  pied  établi  dans  la  dite  Refolution  du  28.  du  pafle;  avec  ce  feul  chan- 
gement, que ,  pour  en  faciliter  la  Négociation ,  &  pour  avoir  d'autant  plus 
promptement  les  deniers,  les  Obligations  des  Sommes  déjà  négociées,  ou 
qui  le  feront  encore  ,  feront  exemptes  de  toutes  les  Charges  pour  fix  ans , 
au  lieu  de  4.  réglez  par  la  Refolution  précédente.  Que  lui  Receveur  Ge- 
neral payera  lefdites  Sommes  aux  Receveurs  Généraux  de  chacun  des  Col- 
lèges des  Amirautez,  qui  promettent  d'acquiter  leur  Contingent  dans  le  dit 
armement, fur  laquitance  des  fufdits  Receveurs  Généraux  des  Collèges  des 
Amirautez,  lequel  paiement  étant  fait  ainii,  lui  fera  validé  en  compte.  Ce 
dont  il  donne  connoiflance  aux  Collèges  des  Amirautez,  &  leur  écrit,  de 
mettre  en  état  avec  toute  la  diligence  pofïible,  les  Vaifleaux  requis  pour 
le  dit  armement,  de  faire  lever  du  Monde  y  neceflaire  fuivant  la  Refolution 
précédente  du  22.  du  courant >  &  d'emploier  par  raport  à  l'un  &  a  l'au- 
tre tout  le  zèle  imaginable,  &  de  continuer  à  faire  travailler  nuit  &  jour, 
afin  que  ces  Vaifleaux  foient  prêts  &  achevez  le  plutôt  le  mieux. 

Les  Seigneurs  Députez  de  Gueldre  ont  déclaré  de  n'avoir  point  d'In- 
ftruclion. 

Les  Seigneurs  Députez  des  Provinces  d'Utrecht,  &  de  Frife ,  ont  confen- 
ti  à  la  précédente  Refolution  fous  les  claufes  contenues  dans  \os  confente- 
mens  des  Seigneurs  Etats  leurs  Principaux  audit  Armement, 


Extrait 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  tg 

Affaires 

Extrait  du  Regitre  des  Refolutions  àe  LL.  HH.  PP.  les  des  iw 

Seigneurs    Etats    Généraux    des  Provinces-Unies  des    X2£ 

Pats- Bas ,  touchant   une  Lotterie\  du  Mardis  le  29.  — 

Mars   171 8. 


chant  une 
Loîterie. 


LE  s  Seigneurs  van  Capelle  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour  Refolu- 
les  Affaires  des  Finances  ont  en  confequence  ,  &  pour  fatisfaire  à  xi°n  tou 
leur  Refolution  Commiflbriale  du  17.  du  courant,  examiné  la  Requête  d'A- 
lexander  van  Champolion  ,  qui  prétend  pouvoir,  par  forme  de  Loterie, 
procurer  à  l'Etat  une  fomrae  de  cent  millions  dans  vingt  ans  de  tems,  à 
condition  qu'on  lui  fit  avoir  une  recompenfe  de  deux  pr.  ~  &  pour  iès  fraix 
12000.  mille  florins  par  an  ,  demandant  fur  ce  fùjet  l'Octroi  de  LL.  HH. 
PP.  :  &  aiant  là-deflus  entendu  le  dit  Suppliant  ils  ont  raporté  à  l'Aiïemblée , 
qu'eux  Seigneurs  Députez feroient  d'avis,  qu'il  falût  expédier  en  faveur  du 
Suppliant  un  Acte ,  pour  pouvoir  établir  lui  feul  &  à  l'exclulion  de  tous  les 
autres  dans  les  Provinces  refpeclives  ou  dans  le  Diflricl  de  la  Généralité, 
toutes  les  Loteries  &  de  les  mettre  en  œuvre  pour  le  tems  de  20.  ans, 
que  l'avantage  en  refultant  fera  au  profit  du  Païs  ,  duquel  avantage  le 
Suppliant  aura  2.  pr.  £  &  outre  cela  12000.  mille  florins  par  an  pour  fes 
fraix  ;  que  cependant  le  dit  Octroi  feroit  bien  montré  au  Suppliant ,  mais 
pas  remis ,  avant  qu'il  eût  donné  à  LL.  HH.  PP.  plus  d'ouverture  de  fon 
invention,  &  qu'elle  fût  approuvée,  &  n'étant  point  aprouvée,  que  l'Oc- 
troi feroit  alors  retenu.  Surquoi  aiant  été  délibéré ,  les  Seigneurs  Dépu- 
tez des  Provinces  refpectives  ont  pris  Copie  de  la  Proportion  fufmention- 
née  pour  être  communiquée  plus  amplement  aux  Seigneurs  leurs  Prin- 
cipaux. 

Extrait  des  Re/olutions  de  Leurs  Hautes  Pu/ffances ,  tou- 
chant r Ambaffadeur  de  Venize  Ruzzini  >  du  Mardis  te 
29.  Mars  171 8. 


R 


Eçu  une  Lettre  du  Doge  de  Venife  en  date  du  3.  du  courant,  le  quel   Refoiu- 
donne  connoiffance  à  LL.  HH.  PP.  que  la  Republique  avoit  nommé   "J^^Jl 
le  noble  Charles  Ruzzini,  Chevalier  &  Procurateur,  fon  Ambafladeur Pie-    Rua"zil^ 
nipotentiaire  aux  Conférences  de  Paix  avec  la  Porte  Ottomanne ,  priant 
LL.  HH.  PP.    de  vouloir  inflruire  leurs  Miniilres  ,    qui  conjointement 
avec  ceux  de  Sa  Majefté  Brit.  feront  les  fonctions  de  Médiateurs  auxdites 
Conférences ,  pour  apuyer  de  leur  mieux  les  intérêts  de  la  Republique. 
Surquoi  aiant  été  délibéré ,  il  a  été  trouvé  bon ,  &  entendu  ,  qu'on  fera 
Reponfe  en  des  termes  civils  à  ladite  Lettre,  &  qu'on  remerciera  la  Re- 
publique de  cette  communication,  en  l'aiTurant,  que  LL.  HH.  PP.  tâche- 
ront d'avancer  au  pofïible  les  intérêts  autant  qu'on  peut  attendre  en  quel- 

D  1  que 


Affaires 
bes  Pro- 
vinces- 
Uni  H.S. 


30    MEMOIRES,  NEGOTIATÏONS,  TRAITEZ,  ET 

que  manière  des  bons  Médiateurs  ;  que  cette  Reponfe  fera  envoyée  avec 
la  Copie  au  Sr.  Hamél  Bruyninx,  Envoyé  de  LL.  PIPI.  PP.  à  la  Cour 
Imneriale,  pour  lui  fervir  d'information,  &  pour  remettre  l'Original  au 
Sr.  Ambaffadeur  Primari,  de  la  part  de  qui  il  a  reçu  la  dite  Lettre. 


On  doit  remarquer , que  le  jour  fuivant  on  prit  2.  Refolutions  pour  d'au-» 
très  Affaires ,  qu'on  trouvera  audeflbus  de  celle  dudit  28.  Mars. 

Ne  pouvant pa^ , par  le  départ  de  lEcrivam  de  ces  Mémoires ,  inftruire de 
la  Suéde  ,  l'on  parlera  d'autre*  Affaires  qui  furent  fur  le  tapis  pendant  les 
trois  premiers  mois  de  cette  Année  17 1 8- 

La  plus  importante  étoit  celle  de  l'exécution  du  Traité  de  la  Barrière. 
L'Envoie  Impérial  le  Baron  de  Heems  fut  au  commencement  de  cette  an- 
née avec  les  Députez  des  Etats.  Les  Miniilres  étrangers  s'imag  nerent 
d'abord,  que  c'étoit  par  raport  à  cette  execution-là.  Cependant,  les  Etats 
n'avoient  pas  trouve  a  propos  de  lui  en  parler  d'abord.  La  Conférence 
ne  roula  que  relativement  à  une  Négociation  d'argent.  Elle  avoit  été  faite 
en  1703.  par  la  Cour  Impériale.  Elle  avoit  été  fous  la  garantie  des  Etats, 
&  fur  l'Hipoteque  du  Cuivre  de  Hongrie.  Il  étoit  du  aux  Prêteurs  les 
intérêts  de  8.  ans.  Pour  y  fatisfaire  ,  la  Cour  Impériale  venoit  d  envoier 
des  remifes ,  &  la  Conférence  ne  roula  que  fur  la  manière  de  fare  ce  paie- 
ment, &  fur  le  Règlement  de  le  faiie  à  l'avenir.  Il  y  avoit  prefque  une 
Année,  que  cela  étoit  fur  le  tapis.  Bien  des  Miniltres  crurent  que  la  Cour 
Impériale  ne  faifoit  cet  effort  pour  ce  paiement,  dans  un  tems  où  elle  etoit 
dans  des  circonftances  onereufes  de  la  Guerre  contre  les  Ottomans,  &  d'u- 
ne prochaine  en  Italie  ,  qu'en  vue  de  s'aquerir  du  crédit,  pour  pouvoir  fai- 
re avec  fuccès  un  nouvel  emprunt.  Cela  pouvoit  être  en  vue  de  faire 
quelques  avances,  en  cas  de  befoin,  d'une  Efcadre  particulière  de  Navires 
de  Guerre  pour  la  Méditerranée,  ou  pour  engager  les  Etats  a  la  garantie 
d'un  emprunt  fur  l'Hipoteque  du  même  Cuivre.  En  ce  cas,  c'étoit  pour 
inriuè'r  fur  les  Marchands  Prêteurs,  qui  voudroient  faire  les  avances  necefc 
faires,  pour  leur  feureté.  Ce  qui  pouvoit  donner  du  poids  à  ce  dernier 
point  étoit  que  ledit  Baron  de  Heems  venoit  de  recevoir  dAmlterdam  un 
Compte  de  quelques  particuliers,  qui  lui  offroient  d  armer  vingt  Vaiffeaux 
de  Guerre.  La  fomme  en  montoit  à  trois  million"-  &  trois  cent  &  quel- 
que mille  florins.  Ce  Baron  ne  leur  avoit  pas  d  abord  repondu ,  parce 
qu'il  n'avoit  pas  des  ordres  précis  de  fa  Cour  pour  une  telle  Affaire.  A  la 
fin  de  cette  Conférence,  on  lui  parla  fur  celle  de  l'exécution  du  Traité  de 
la  Barrière.  La  raifon  étoit  q-.;e  le  Reiident  des  Etat.^  Pefïers  leur  avoit 
mande  ce  que  le  Marquis  de  Prié  lui  avoit  intmué.  Ils  le  prièrent  de  vou- 
loir féconder  auprès  de  fa  Cour  une  Refolution  qu'ils  vendent  de  prendre 
fur  cela  dont  on  lui  donna  Copie  ,  &  qu'on  met  ici. 


Est" 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII. 


3i 


Affaires 


Extrait  du   Rcgiflre  des  Réfolutions  de  LL.  HH.  PP.  DES  Pro 
touchant  la  Barrière  \  du  Jeudi  6.  Janvier  1718. 


v  inc  es- 
Un  if.  s. 


OU  1  le  Raport  des  Seigneurs  de  Wynbergen  ,  &  autres  Députez  de   Refoiu- 
LL.  HH.  PP.  pour  les  Affaires  de  la  Barrière  ,  aiant  en  confequen-    tion  tou- 
ce  &  pour  fatisfaire  à  leurs  Réfolutions  Commiflbriales  de  diverfes  dates  ,    chant  la 
examiné,  conjointement  avec  les   Seigneurs  Députez  du  Confeil  d'Etat ,     arnere' 
tes  Lettres  du  Refident  Pefters  venues  depuis  quelque  tems,  contenues 
dans  les  Notules  du  10,  15,   18,  22,  27  &  31.  du  mois  dernier  &  du  5. 
courant  regardant  toutes  ce  qui  avoit  été  par  lui  dit   &  traité  avec  le  Sr. 
Marquis  de  Prié  fur  l'exécution  du  Traité  de  la  Barrière,  particulièrement 
à  l'égard   du  fubfide  de  500000.  Rixdalers  par  an,  promis  à  l'Etat  par  le- 
dit Traité. 

Surquoi  aiant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté  qu'on  recriroit 
au  Refident  Pefters ,  que  puis  que  le  Sieur  Marquis  de  Prié  a  en  toutes  les 
occafions  témoigné  audit  Refident,  que  les  revenus  des  Places  &  Chate- 
îenies  cédées  dans  la  Flandre  Occidentale ,  &  des  contoirs  &  bureaux  des 
Droits  d'entrée   &  de  fortie  dans  les  Païs-Bas  Autrichiens  feront  telle- 
ment améliorez  par  la  réduction  des  efpeces ,  &  par  l'Admodiation  des 
Droits    d'entrée  &  de  fortie,  que  l'Etat  ne  doit  faire  aucune  difficulté 
d'accepter  une  affignation  de  750000.  florins  par  an,  furies  revenus  def- 
dites  Places  &  Chatelenies  cédées ,   &  une  de  500000.   florins  fur  les 
Droits  d'entrée  &  de  fortie ,  qu'on  dit  avoir  rendu ,  félon  le  conte  annuel , 
dans  les  années  1714,  1715,  &  1716.  1740000.  florins,  &  qui  par  l'a- 
modiation rendront  1900000.  florins,  &  par  deffus  encore  une  afîignation 
de  50000.  florins.     Que  cependant  ledit  Refident  reprefentera  au  Sieur 
Marquis  de  Prié  que  LL.  HH.  PP.  ne  peuvent  que  trouver  étrange ,  qu'il 
y  a  à  prefent  environ  une  année  qu'on  a  parlé  de  la  réduction  des  efpe- 
ces &  de  l'Admodiation  des  Droits  d'entrée   &  de  fortie  ,    comme  d'un 
moien  prêt,  &  indubitable ,  pour  améliorer  confiderablement  les  revenus 
des  Païs-Bas  Autrichiens;  &  que  cependant, non  feulement  le  Sr.  Marquis 
de  Prié  a  fait  difficulté   de  promettre  &  de  fixer  dans  la  Convention  fur 
l'exécution  du  Traité  de  la  Barrière,  la  réduction  des  éfpeces,  &  l'Admo- 
diation des  Droits  d'entrée  &  de  fortie;  mais,  ce  qui  eil  encore  plus  éton- 
nant ,  eft  qu'aucune  defdites  Affaires ,  quoi  qu'on  en  ait  parlé  ,  n'a  été  mile 
entrain,  quoi  que  d'un  côté  la  Confhtution  des  Finances  dans  les  Païs- 
Bas  Autrichiens  foit  telle,  que,  fans  relation  au  Traité  de  la  Barrière  ,elle 
requift  indifpenfablement ,    qu'on  ne  trainât  pas  le  long  d'une  année  de 
mettre  en  ufàge  les  Affaires  qui  fervent  à  redreffer ,  &  à  augmenter  les  Fi- 
nances: &,  quoi  que  d'un  autre  côté  le  Sieur  Marquis  de  Prié   ne  piiifle 
pas  ignorer,  que  cela  contribueroit  fort  à  ce  que  lefdites  proportions  tou- 
chant rafîignation  du  Subfide   trouvent  de  l'ingrès  auprès  de  LL.  HH. 
PP. ,  fi  la  réduction  des  éfpeces  &  l'Admodiation  des  Droits  d'entrée  & 
de  fortie  étoient  mifes  en  Execution,  &  qu'il  vint  à  paroitre  qu'Elles  fer- 
vent 


32     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Awaises  vent  fort  à  l'augmentation  des  revenus  ,  ainfl  qu'en  toutes  les  Occaflons 
des  Pro-  on  l'avance,  &  que  ledit  Refident  demandera  fur  ce  fondement,  &  fur 
vinces-  ces  raifons  ;  i.  Que  fans  un  plus  long  délai,  ces  deux  moiens  foient  mis 
rsUS*  en  train  &  arrêtez,  2.  Attendu  félon  qu'on  l'avance  les  Droits  d'entrée  , 
&  de  fortie  rendront  par  l'Admodiation  1900000.  florins,  que  parconfe- 
quent  on  puiffe  là-deffus  afligner ,  1.  Une  fomme  de  500000.  florins  en 
diminution  du  Subfide  annuel  de  1200000.,  &  2.  encore  une  fomme  de 
50000.  florins  de  fuplement,  par  defïus  les  autres  charges  fpecifiées  dans 
les  deux  états  envoiez  par  ledit  Refident  par  fa  Lettre  du  16.  du  mois  der- 
nier, &  arrivée  le  1%.  mivant,  furquoi  il  elt  fondé  que  lefdits  Droits  doi- 
vent avoir  rendu  en  1714,  I7i5,&  1716,  par  le  conte,  1740000.  florins 
par  an}  &  le  Sr.  Marquis  de  Prié,  pour  preuve  de  cela,  a  offert  audit  Re- 
ndent de  lui  donner  une  infpection  de  refpectifs  contes ,  telle  que  ledit  Re- 
fident la  demandera,  auffi-bien  à  l'égard  des  charges  fixes,  qui  y  font  dek 
fus;  que  cependant  ledit  Refident  vifitera  fi  exactement,  &  fi  vîtement 
qu'il  fera  pofîible,  lefdit  contes,  &  confequement  avertira  combien  les 
refpectifs  bureaux  des  Droits  d'entrée  &  de  fortie  ont  rendu  net  dans  cha- 
cune defdites  3.  années  ;  ce  qui  efl  necefTaire,  fur  ce  qu'on  avance,  de 
leur  raport  de  1740000.  florins ,  qui  paroit  peu  uniforme  aux  états  envoiez 
cidevant  par  ledit  Refident. 

Et  3.  que  non  feulement  il  vifitera  les  contes  fur  les  charges  portées  dans 
lefdits  2.  états  j  mais  qu'il  doit  par  deffus  remarquer  fur  lefdits  états.  1. 
Que  les  intérêts ,  qui  doivent  être  annuellement  paiez  hors  des  revenus  du 
Fort  Ste.  Marie  fur  l'Efcaut,  ne  vont  pas  à  262008.;  mais  à  327000,256.  fi. 
&  2.  fols ,  favoir  tandis  que  Sa  Majefté  Impériale  n'aura  pas  fait ,  fuivant 
le  22.  Article  du  [Traité  de  laBarriere  que  les  Etats  des  refpectives  Provin- 
ces des  Païs-Bas  Autrichiens  pafTent  leurs  Obligations  pour  1400000.  flo- 
rins empruntez  en  1698.  &  pour  4.  ans  d'intérêts  ,  montant  à  224000. 
par  où  le  Capital  a  haufîe  fuivant  l'obligation ,  &  tandis  qu'il  n'aporte  pas 
annuellement   200000.  florins  pour  les  Intérêts,  &  pour  l'aquit. 

2.  Que  l'entier  revenu  du  Fort  de  Ste.  Marie ,  autant  qu'il  pourroit  excéder 
le  cours  annuel  des  intérêts ,  étant  fpecialement  affecté  pour  aquitter  les 
Capitaux  négociez  ,  doit  être  couché  dans  l'état  des  Charges  ,  &  non  pas 
feulement  le  cours  des  intérêts ,  qui  doivent  être  paiez. 

3.  Qu'on  n'a  pas  aquitté  660000,312.  florins  ,&  dix  fols  fur  le  Mil- 
lion ,  400000,625.  florins  négociez  en  17 10.  fur  les  Bureaux  des  Droits 
d'entrée  &  de  fortie  fur  Bruges  &  Oftende,&  non  pas  592000,187.  n\,  & 
dix  fols ,  dont  les  intérêts  à  5.  pour  cent  doivent  porter  fur  l'état  des  char- 
ges 33000,27.  &  10.  ,  &  non  pas  29000,609.  7,  6.;  &  que  d'ailleurs  il 
demande  information  fur  les  points  fuivants.  1.  Pourquoi  un  Article  de 
14000,783.  florins  efl  porté  pour  aquitter  les  Capitaux  fur  les  revenus  an- 
nuels du  Fort  Marie  fur  TEfcant,  quoi  que  le  furplus  après  les  intérêts  efl 
affecté  à  l'aquit?  2.  Combien  de  tems  ou  doit  paier  112000.  florins  par 
an ,  aux  entrepreneurs  du  pain  &  du  fourrage  pour  les  Troupes  Impéria- 
les? Et  finalement  fur  quel  fondement  une  fomme  de  235000.  florins  par 

an 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIIL        33 

an  eft  portée  fous  les  charges,  pour  les  depenfes  de  l'Admodiation , &  non   a»Ïik*! 
pas  plus  ou  moins  ?  des  Pko- 


VIXCF.S" 


One  tout  ce  que  deffus  contribuera  particulièrement  pour  mettre  LL. 

-.      ™r»      _„    12.-^    »     :„ r_:_   r_   j_ •  Unik's. 


HH.  PP.  en  état  à  pouvoir  une  fois  fe  déterminer  avec  repos  avec  con- 
noiffance  des  Affaires,  touchant  le  point  du fubfide;  mais  auffi  à  la  même 
fin  pour  en  venir  à  une  conclufion  des  Affaires.  Touchant  les  autres  points 
il  n'eft  pas  moins  neceffaire  que  le  Sieur  Marquis  de  Prié,  après  tant  de 
Difcours  de  bouche,  donne  une  diftinéte  Réponfe  par  écrit  fur  les  Mémoi- 
res prefentez  ,  par  ledit  Refident ,  fuivant  les  Refolutions  de  LL.  HH. 
PP.  du  17.  Novembre  &  6.  Décembre  paffez  ;  à  quoi  le  Sr.  Marquis  de  Prié 
témoigne  jufques  à  prefent  peu  d'inclination  ,  quoi  que  cela  ferviroit  beau- 
coup pour  venir  à  une  fin  des  Affaires ,  ainfi  qu'il  eft  demandé  reïterati- 
vement  par  ledit  Refident.  C'eft  pourquoi  ledit  Refident  demandera  par 
un  autre  Mémoire  une  Reponfe  par  écrit  fur  tous  les  Points  des  2.  prece- 
dens  Mémoires,  afin  que  LL.  HH.  PP.  puiffent  pofitivement  favoir  qu'el- 
le elt  la  penfée  de  Sa  Majefté  Impériale  touchant  tous  lefdits  Points  , 
&  fur  chacun  d'iceux  :  une  chofe  que  LL.  HH.  PP.  peuvent  demander 
ave:  d'autant  plus  deDroit ,  qu'Elles  ont  le  Traité  de  la  Barrière  pour  Elles  , 
&  que  l'Empereur ,  &  non  pas  Elles ,  y  demande  un  changement  ,  &  laiffe 
fous  ce  prétexte  le  Traité  fans  éxecution. 

Et  lefdits  Députez  fur  la  Barrière  font  requis ,  &  commis  par  la  prefente , 
d'en  donner  connoilfance  au  Sr.  Baron  de  Hems  Envoie  Extraordinaire  de 
Sa  Majeilé  Impériale  &  Roiale ,  avec  prière  de  vouloir  féconder  de  fon 
mieux  le  contenu  de  cette  Refolution.  Et  la  Copie  en  fera  envoiée  au  Sr. 
Hamel  Bruyninx ,  Envoie  Extraordinaire  de  LL.  HH.  PP.  à  la  Cour  Impé- 
riale pour  lui  fervir  à  l'Occafion  d'Inltruction. 


Comme  le  Marquis  de  Prié  promettoit  fur  le  point  principal  delà  feu- 
reté  du  paiement  du  fubfide  annuel  de  donner  fatisfaction  à  l'Etat ,  mais 
feulement  verbalement  ,  celui-ci  n'en  fut  pas  content.  C'étoit  d'au- 
tant que  l'Etat  avoit  toujours  fait  prefenter  fes  Refolutions ,  &  mêmes  des 
Mémoires  par  Ecrit, au  Marquis.  Auffi  pretendoit-il  que  le  Marquis  re- 
pondit de  même  par  écrit,  &  pour  pouvoir  faire  fonds  fur  ce  qu'il  avan- 
coit.  C'étoit  par  ce  qu'autrement  il  pourroit  defavouèï  ces  avances  ver- 
bales. Ce  qui  influoit  beaucoup  à  vouloir  avoir  des  Reponfes  par  écrit 
venoit  de  ce  que  le  LordCadogan,aiant  fait  un  tour  à  la  Haie,  avoit  offert 
à  l'Etat  la  moitié  des  arrérages  du  fubfide  annuel  depuis  la  fignature  du 
Traité  de  la  Barrière  du  15.  Novembre  1715.  Cependant,  il  fe  trouvoit 
en  ce  tems-ci,que  ce  Marquis  regimboit  à  ce  point-la.  Il  avoit  cependant 
infinué  au  Refident  Peftefs  un  Compte  pour  partie  de  ces  fublides  dont  voi- 
ci l'état. 


T'orne  XL  £  Ex 


34       MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


Affaires 
des  Pro- 
vinces- 
Unies. 


Revenus 
«le  la  Bar- 
siere. 


Extrait  de  la  Lettre  du  Réfident  Pefîers  ,  touchant 
les  Revenus  de  la  Barrière  ;  du  17.  de  Janvier 
1718. 

ÏL  dit  que  le  Marquis  de  Prié  lui  a  dit ,  que  par  raport  au  Subfide  des 
500000.  Ecus  ,  outre  les  300000.  Ecus  fur  le  Places  cédées;  I.  On 
donnerait  un  fond* fupletoire  de  20000.  Florins  pour  les  300000.  Ecus,  & 
que  la  réduction  des  éfpeces  portera  un  feptieme  de  plus. 

II.  Qu'on  ne  fauroit  donner  en  Admodiation  les  entrées  des  Places  cé- 
dées de  la  Flandre  Occidentale  que  publiquement ,  &  fi  l'on  demande 
quelque  remiflion,  on  en  donnera  part  audit  Réfident. 

III.  Qu'en  cas  de  manque  de  paiement  des  termes,  pour  les  300000. 
Ecus,  LL.  HH.  PP.  pourront  exécuter  le  Receveur  General  qui  en  fera 
reponfable  pour  les  Receveurs  Subalternes  de  fon  diftriét.  ,  comme  aufïî 
contre  les  revenus  mêmes  qui  relieront  hipotequés. 

Que  pour  la  feureté  des  autres  200000.  Ecus,  elle  fera  de  même  que 
celle  des  300000.  Ecus  :  favoir, 

I.  Tous  les  Comptoirs  libres  des  Droits  d'entrée  &  de  fortie. 

II.  Que  par  manque  de  paiement  on  pourra  exécuter  le  Receveur  gé- 
rerai des  Domaines  de  Sa  Majefté,  au  cas  qu'on  en  détourne  la  Caifle. 

I I I.  Qu'on  donnera  le  Droit  d'exécution  contre  les  Comptoirs  mêmes. 

I V.  Qu'en  cas  d'Admodiation ,  les  Admodiateurs  feront  refponfables ,  & 
exécutables  en  leur  privé  nom. 

V.  Par  delfus  on  y  hipoteque  les  libres   Comptoirs  de  Bruges  &  de 
ind. 

V I.  Que  l'Admodiation  fe  fera  d'abord  que  LL.  HFî.  PP.  conviendront 
de  ces  feuretez.  Que  pour  la  réduction  des  efpeces ,  il  attendoit  le  con- 
fentementde   l'Empereur. 

Et  Vil.  Que  la  Convention  à  faire  fur  l'exécution  du  Traité  de  laBarrie- 
re  fervira  d'une  irrévocable  Initruction  pour  le  Gouverneur  gênerai  du  terns. 

J'ai  demandé  en  vain  cette  Reponfe  par  écrit  ;  difant  que  fi  LL.  HPL 
PP.  fe  contentent  de  ces  furetez ,  on  n'avoit  qu'à  mettre  le  tout  par  écrit. 

Sur  le  Bureau  de  Bruxelles.  22199  -  -     n 

Bergerland.     -    -    -     -  22653  -  -      4    -     % 

Tirlemont.      -    -    -     -  18439  -  -     n     -     2 

Turnhout.            -     -     -  43065  -  -     14    -  10 

Chalcroi.     -----  6916--19-8 

Courtrai.     -----  17896  -  -      9-1 

Ipres.     ------  58814  -  -     12-9 

Neuport.    -----  222 8f  -  -       7-9 

Tournai.     -----  .31679  —       6    -  11 

Mons.     ------  64146  —     10     -  10 

Ath,   -------  4071  -  -     11     -  10 

Éeàtts* 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIIJ. 

Beaumont.      -      -     -    -  8787  -  -       6    -      1 

Limbourg.       -       -     -     -  75000  -     - 

Luxembourg.     -    -     -   .-  69200  -    - 

Ruremonde.    -----  26505  -  -      6-10 

Malines  7P54  -  -     13    -      5 

Total  deBrabant  5^115-    -  13    -      $. 


Affaires 

DES  Pro- 
VINCES- 

Unies. 


Les  Etats  prirent  quelque  peu  de  jours  après  encore  une  Rcfolution, 
dont  le  contenu  peut  mieux  paroitre  par  la  Refolution  même  ,  que  fi  l'on 
en  faifoit  un  fimple  Extrait.  C'eft  pourquoi  on  la  met  ici  en  tout  fon 
entier. 

Extrait  du  Regître  de  LL.  HH.  PP.  les  Seigneurs  ET 
tats  Généraux  des  Provinces-Unies  des  P  aïs-Bas^  ton- 
chant  la  Barrière  ;  du  Lundi  7.  Février  171 8. 

OUÏ  leRaportdes  Srs.  Leflevenon:  leSr.  de  Wynbergen,  qui  a  afli- 
fté  Samedi  dernier  à  la  Conférence,  étant  retourné  en  Gueldres  :  &  au- 
tres Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour  les  Affaires  de  la  Barrière ,  aiant  en 
eonfequence ,  &  pour  fatisfaire  à  leurs  Refolutions  Commiffioriales  de  diver- 
fes  dates ,  examiné  conjointement  avec  quelques  Committez  du  Confeil 
d'Etat,  plufieurs  Lettres  duRefidentPeflers,  particulièrement  celle  du  17. 
du  pafle  addreffée  au  Greffier  Fagel ,  &  qui  concerne  le  payement  du  fub- 
fide  de  5-00000. Ryxdalers  par  an,  dûs  par  le  Gouvernement  des  Païs-Bas 
en  vertu  du  Traité  de  Barrière ,  &  la  fureté  qu'il  en  doit  donner  pour  le 
payement,  comme  il  a  été  plus  amplement  mentionné  dans  la  dite  Lettre. 
Surquoi  aïant  été  délibéré , il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  qu'il  fera  écrit  en 
réponfe  au  dit  Refident,  que  LL.  HH.  PP.  font  furprues  &  fe  plaignent , 
que  le  Marquis  de  Prié  décline  de  donner  une  Réponfe  par  écrit  fur  le  Mé- 
moire prefenté  par  lui  Refident  au  dit  Marquis  en  eonfequence  de  la  Re- 
folution de  LL.  HH.  PP.  &  fur  les  points  contenus  dans  ce  Mémoire  ; 
qu'Elles  croyent  être  en  droit  d'iniiiter  encore  fur  une  Réponfe  par  écrit,  vu 
que  la  manière  d'une  négociation  dans  l'ordre  veut,  qu'on  faiTe  réponfe  par 
écrit  fur  une  repréfentation  faite  de  même,  &  que  divers  abus  peuvent 
naître  d'une  réponfe  faite  de  bouche,  qui  peut  quelquefois  être  mal-expiï- 
mée  ou  mal-entenduë ,  ce  qui  n'efl  pas  fans  exemple  ;  que  pour  cette  raifon 
lui  Refident  infiilera  encore  fur  une  RepGnfe  par  écrit  à  fes  Mémoires  déli- 
vrez &  à  chaque  article  contenu  :  que  non  obftant  cela  il  fera  écrit  au  dit 
Refident  Peilers,  qu'après  avoir  examiné  l'état  des  Comptoirs  non  char- 
gez, que  l'on  offre  à  LL.  HH.  PP.  pour  direcl  compte  du  payement  de 
ffoooo.  flor.  ou  220000.  Ryxdales,  lequel  monte  à  ^20215': '13:  f:  cet 
état  doit  être  jugé  ne  pas  fuffire  pour  le  payement  offert:  1.  parce  que  lef- 
dits  f  20215".  13:  S  •  fQnt  comptez  fur  de  l'argent  courant  de  Brabant,  que 

E  3  le 


Refolu* 
tion  tou- 
chant \i 
Barrière» 


»tf     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


ô 


TINCES- 

Unies 


Affaire*   ]c  fubfide  doit  être  calculé  félon  l'argent  de  Hollande,  à  quoi  la  dite  fomme 
des  Pro-    £tant  re<Juite  ne  fait  que  464477  :  14: 

2.  Que  comme  dans  la  calculation  du  provenu  des  Comptoirs ,  trois  des 
dernières  années  font  mêlées  enfemble,  on  ne  fauroit  faire  fonds  là-def- 
fus ,  &  que  le  revenu  efl  compté  trop  haut ,  vu  qu'il  paroît  incontinent 
par  les  états  délivrez, que  fur  la  plupart  des  Comptoirs  &  fur  les  principaux 
le  Revenu  des  3  premières  années  a  été  plus  grand  que  dans  les  fuivantes , 
&  que  le  Revenu  a  diminué  d'une  année  à  l'autre;  de  forte  qu'il  n'elt  pas 
aparent,  que  les  Comptoirs  rendent  autant  qu'ils  ont  rendu  l'un  portant 
1  autre  les  trois  dernières  années ,  &  que  pour  cette  raifon  ils  ne  peuvent 
guères  être  acceptez  pour  telles  fommes  qu'ils  font  fupputez. 

3.  Qu'il  a  été  mis  fur  la  Lille  defdits  Comptoirs  ceux  de  Limbourg  de 
la  femme  de  77-000,  &  de  Ruremonde  de  26505:  6:  10:  lefquels  deux 
Comptoirs  étant  propofez  comme  des  non-chargez  ne  peuvent  être  accep- 
tez pour  tels,  attendu  que  le  Revenu  de  celui  de  Limbourg  eft  déjà  enga- 
gé comme  une  arriere-hypotheque  pour  une  négociation  faite  par  Sa  Ma- 
jelté  Impériale  &  Catholique  fur  les  revenus  de  Silefie,  &  qu'il  eil  outre 
cela  compris  fous  le  Comptoir  deLimbourg  celui  de  Navaigne  raportant  en- 
viron 40000.  flor.  par  an  ;  &  que  les  Revenus  de  ce  Comptoir  de  Navai- 
gne, de  même  que  ceux  du  Comptoir  de  Ruremonde ,  font  obligez  pour  de 
certains  Droits  de  80000  &  20000  flor.  par  an  dûs  à  la  fucceiïîon  de  feu 
S.  M.  Britannique  Guillaume  III.  de  glor.  mem.  Que  comme  ainfi  les 
fufdits  états  doivent  être  tellement  diminuez,  on  ne  pourra  les  accepter 
pour  plus  qu'entre  3 5-0000  &  400000  florins,  à  condition,  que,  pour  ce 
qu'ils  rendront  moins  que  la  fomme  à  déterminer, les  Revenus  des  Comp- 
toirs de  Gant  ,  de  Bruges ,  &  d'Oftende  fo'ient  obligez  in  fubjidium,  & 
qu'il  foit  auiîi  afiigné  fur  ces  Comptoirs  ce  que  dans  la  iomme  à  déterminer 
il  y  aura  de  moins  que  lefdits  200003  ou  220000  Ryxdales,  &que  le  Re- 
venu de  ces  Comptoirs  foit  engagé  à  cet  effet,  de  même  que  pour  ce  que 
le  Revenu  du  Païs  rétrocédé  dans  la  Flandre  Occidentale  pourroit  rendre 
de  moins  que  300000  Ryxdales  ou  75-0000  florins  de  Hollande;  Et  qu'il 
eft  neceffajre  de  régler  en  même  tems ,  de  quelle  manière  les  Rentes  arré- 
ragées de  la  Négociation  fur  les  Comptoirs  deGand,de  Bruges  ,&  d'Often- 
de  feront  affectées.  Que  de  plus,  pour  ce  qui  eft  des  intérêts  du  Capital 
de  1624000  florins  negotié  en  i6o8,puifque  le  Sr.  Marquis  de  Prié  ne  voit 
que  peu  ou  point  d'aparence  pour  faire  pafTer  aux  Etats  de  la  Province  ref- 
peétive  leurs  Obligations  pour  le  Capital,  &  que  les  deux  mois  fixés  à  cet 
effet  par  le  22.  Article  du  Traité  de  Barrière  font  écoulez  il  y  a  long-tems , 
que  pour  cette  raifon  le  Marquis  de  Prié  ne  peut  ni  n'eft  en  droit  de  faire 
difficulté  pour  admettre  les  intérêts  du  Capital  fur  l'état  des  intérêts  du 
Comptoir  de  de  Marie  ;  qu'il  eft  aufîi  contre  toute  juftice  &  équité  de 
vouloir  retenir  l'intérêt  de  ce  Capital ,  parcequ'on  n'a  pas  encore  liquidé 
îà-deffus,  laquelle  injuitice  a  été  démontrée  par  la  Refolution  de  LL.  IIH. 
PP.  du  17.  Septembre  1717.  &  dans  le  Mémoire  y  mentionné,  que  lui 
Refident  Pefters ,  infiftant  fur  une  Réponfe  par  écrit,  fera  neantmoins  voir , 

pour 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  XVIII.         Q7 

pour  avancer  l'affaire  autant  qu'il  eit  poflîble,  au  Sr.  Marquis  de  Prié  ks    Amms 
ci-devant  mentionnez  défauts  dans  le  fonds  propofé,  &  quil  fera  des  in-    des  i\ko- 
itances  pour  qu'il  veuille  donner  h-delfus  une  déclaration  fatisfaifunte ,  pour     vincks- 
fuppléer  aux  dits  défauts ,  de  même  que  par  raport  à  l'intérêt  dudit.  Capital     Unies- 
de  1624000.  florins. 

Et  comme  le  Sr.  Marquis  de  Prié  diffère  à  contenter  LL.  HH.  PP.  fur 
divers  autres  Points  du  Traité  de  Barrière  contenus  dans  le  Mémoire  en 
conformité  de  la  Refolution  de  LL.  HH.  PP.  du  17.  Septembre  dernier, 
puifqu'il  faut  ajufler  premièrement  avec  le  Commiffaire  Gruber  quelques 
Points  de  liquidation  des  deniers  négociez  pour  l'entretien  des  Troupes 
de  Sa  Majefté  Impériale-  que  pour  cette  raifon  lui  Relident  infiltera,  que 
le  dit  Commiffaire  Gruber  foit  envoie  ici  au  plutôt  à  cet  effet.  Et  les 
Seigneurs  Ham,  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour  les  Affaires  de 
la  Barrière,  font  priez  &  chargez  par  la  prefente,  de  donner  pareillement 
connoilfance  de  ce  qui  efl  ci-deffus  au  Sr.  Baron  de  Heems,.  Envoyé  Ex- 
traordinaire de  Sa  Majefté  Impériale  &  Catholique ,  en  le  priant  d'apuier 
de  fon  mieux  la  bonne  intention  de  LL.  HH.  PP.,  &  particulièrement 
qu'il  foit  donné  par  le  Sr.  Marquis  de  Prié  une  Reponfe  par  écrit  fur  le 
Mémoire  qui  a  été  préfenté  &  fur  les  Points  y  contenus  concernant  tous 
l'exécution  du  Traité  de  Barrière;  ce  qui  pourra  fervir  à  faire  voir,  en 
quoi  on  eit  d'accord  l'un  avec  l'autre ,  &  en  quoi  on  eft  encore  difcordant, 
afin  de  trouver  enfuite  des  expediens  pour  lever  ce  différend. 

Et  fera  envoie  l'Extrait  de  cette  Refolution  de  LL.  HH.  PP.  au  Sr. 
Hamel  Bruyninx,  Envoie  de  LL.  HH.  PP.  à  la  Cour  de  l'Empereur,  pour 
lui  fervir  d'information  ,  &  pour  qu'il  emploie  à  cette  fin  les  devoirs  :  il 
fera  pareillement  envoie  au  dit  Sr.  Hamel  Bruyninx  Copie  de  la  Lettre 
du  Refident  Pelters  du  17.  du  paffé. 

I  l  étoit  furvenu  entre  tems  une  traverfe. Elle  confifloit  en  ce  qu'un  certain 
Borckenfeldt,fe  qualifiant  Refident  du  Roi  dePruffe  à  Bruxelles ,  avoit  écrit 
au  Refident  Peilers ,  &  l'avoit  enfuité  été  voir.  Il  lui  avoit  parle  touchant 
la  Proteltation  de  ce  Roi-là  contre  le  Traité  de  la  Barrière.    Le  Refident 
Peilers  lui  avoit  repondu  qu'il  étoit  chargé  de   conférer  avec  les  Corn- 
miffaires   du  Marquis   de   Prié    fur  les  points  de  la  Proteltation  ,  &  fur 
l'Article  des    Droits    d'Entrée   &   de  Sortie  fur    la  Meufe.      Que  LL. 
HH.  PP.  ne  jugeoient  pas  que  ledit  Refident  de  Pruffe  dût  intervenir 
dans  les  Conférences  à  tenir.  Cependant  ,  qu'en  aiant  parlé  au  Marquis  de 
Prié,  celui-ci  avoit  fait  paroitre  qu'il  y  avoit  quelques  Reflexions  à  faire 
fur  la  qualification  ce  Relident-là.  La  raifon  étoit,  qu'étant  né  en  Brabant, 
il  devoit  être  regardé  comme  Sujet  de  Sa  Majeilé  Impériale.  Ainfi,  fans 
la  permiffion  de  la  quelle,  il  ne  pouvoit  paffer  au  fervice  d'un  autre  Prin- 
ce.    C'étoit  quoique  pendant  l'Adminiitration  provifionelle  des  deux  Puif- 
fances  Maritimes,  il  eut  été  reconnu  par  la  Régence  comme  Refident  du 
Roi  de  Pruffe.     De  forte  qu'il  faloit  qu'il  attendit  là-deffus  les  intentions 
de  la  Cour  Impériale,  avant  que  de  pouvoir  répondre  au  Mémoire  que  ce 

E  3  Re- 


38 


MEMOÏRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


Aftaihes 

DES    Pb.0- 

VINCES- 

Unies. 


Refident -là  avoit  prefenté.     Les  Etats  prirent  là-deffus  le  6.  de  Janvier 
une  Refolution.     Elle  portoit  qu'on  chargerait  le  Refident  Peflers  de  re- 
pondre à  celui  de  PrulTe.  La  fubflance  de  laReponfe  étoit,  que  lors  que  le 
Marquis  de  Prié  auroit  porté    l'ouvrage  en   état  de  pouvoir  avec  fuccès 
avoir  des  Conférences  fur  les  differens  avec  le  Roi  de  PrufTe  qui  refultoient 
du  18.  Article  du  Traité  de  la  Barrière  ,  LL.  HH.  PP.  feroient  prêtes  de 
négocier  là-deffus  avec  lui,    ou  avec  tel  autre  que  ce  Roi-là  trouveroit  à 
propos  d'y  emploier.     On  ajouta  au  Refident  Peflers  ,  d'inliiler  de  plus 
auprès  du  Marquis  de  Prié ,  afin  qu'on  pût  ôter  d'une  manière  ou  d'autre 
l'empêchement  contre  les  Conférences  avec  le  Roi  de  PrufTe. ,  qui  pour- 
roit  refulter  de  la  difficulté  de  l'admiflion  de  la  Perfonne  dudit  Miniflre  de 
PrufTe.     Il  devoit  ajouter,  s'il  ne  feroit  pas  mieux,  lorfque  l'Affaire feroit 
préparée  à  Bruxelles  dans  les  Conférences  qui  par  ordre  du  Marquis  de  Prié 
dévoient  être  tenues  avec  le  Refident  Peflers ,  de  la  renvoier  à  la  Haie,  où 
Sa  Majeflé  Impériale,  aufîi-bien  que  le  Roi  de  PrufTe  ,y.  avoient  leurs  Mi- 
mitres  ,  parce  qu'autrement  fAiTaire  refleroit  fufpeuduè"  long-tems  au  de£ 
avantage  de  Sa  Majeflé  Impériale ,  &  de  l'Etat ,  dont  le  Commerce  fouf- 
froit  beaucoup  par-là  le  long  de  laMeufe  fur  un  incident  qui  n'avoit  rien  de 
commun  avec  T  Affaire.     L'on  chargea  même  les    Députez  d'en  donner 
connoiffance  à  l'Envoie  Extraordinaire  Prufîien  Meinertzhagen ,  &  de  lui 
ajouter  que  LL.   HH.  PP.  viendroient   fort  volontiers  à  une  fin  defdits 
differens.     Qu'Elles  chargeroient  leur  Refident  à  Bruxelles  d'y  préparer 
les  Affaires.     C'étoit  d'autant  que  Sa  Majeflé  Impériale  étoit  à  l'égard  de 
plus  d'une  vue  concernée  dans  lefdits  differens.  D'ail  leurs,  qu'Elles  feroient 
fâchées  que  les  Conférences  là-deffus  puffent  être  retardées  par  ledit  inci- 
dent ,  &  qu'elles  prioient  l'Envoie  Meinertzhagen  de  vouloir  emploier  Tes 
bons  offices ,  afin  que  d'une  manière  ou  d'autre  on  ôtât  l'empêchement ,  qui 
pourrait  en  refulter. 

L'Envoie  de  ce  Roi  s'en  étant  chargé,  il  prefenta  en  Reponfe  un  Pro 
Memoriâ ,  dont  le  contenu  peut  être  veu  tout  entier  dans  la  Copie  qu'on 
met  ici. 


Mémoire 
du  Mini- 
lire  de 
Pruïîe. 


Pro  Memoriâ  du  Minijlre  de  Truffe • ,  du  3.  Janvier 
1718. 

LE  Miniflre  de  Sa  Majeflé  le  Roi  de  PrufTe  aiant  fait  raport  au  Roi  foa 
Maître  de  la  Refolution  de  LL.  HH.  PP. ,  du  6.  janvier  dernier, 
que  Mrs.  les  Députez  lui  avoient  communiquée  dans  la  Conférence  du  10. 
de  ce  mois-là,  &  par  laquelle  LL.  HH.  PP.  témoignent,  que  parce  que 
Mr.  le  Marquis  de  Prié  faifoit  difficulté  d'admettre  le  Refident  de  Sa  Ma- 
jeflé à  Bruxelles  le  Sr.  Soufl  de  Borckenfeldt  aux  Conférences  qu'on  étoit 
près  de  tenir  fur  les  differens  provenus  du  Traité  de  la  Barrière ,  Elles  fou- 
haitoient  qu'on  renvoiât  cette  Affaire  ici  à  la  Haie ,  pour  conférer  là-deffus 
avec  le  Minillre  Impérial  ,  &  celui  de  Sa  Majeflé,  après  qu'on  auroit  pré- 
paré l'Affaire  à  Bruxelles. 

Ce 


VIMCF.S- 

Uniks. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.         39 

Ce  Minière  a  ordre  de  déclarer  à  Mrs.  lesDeputez,que  SaMajefléefl  dans  Affaires 
la  même  inclination  que  LL.  HH.  PP. ,  de  vuider  ces  diffcrehs  pro venus  du  DES  Pro 
18.  Article  du  fufdit  Traite  de  la  Barrière,  &  de  conférer  là-defius.  Mais ,  ne 
comprenant  pas  ce  que  LL.  HH.  PP.  entendent  par  ces  paroles  de  la  Refo- 
lution,  après  que  î Affaire  fera  préparée  à  Bruxelles  dans  les  Conférences  qui 
s  y  tiendront ,  Elle  les  prie  de  vouloir  s'expliquer  là-defïus ,  dans  Téfperance 
que  leur  intention  ne  fera  pas  de  régler  auparavant  les  points  de  différence 
avec  Mr.  le  Marquis  de  Prié,  fans  la  participation  de  fa  Majeilé  ou  de  fon 
Miniflre,  ainfi  qu'il  a  été  fait  dans  la  Négociation  fur  la  Barrière  ;  puis 
qu'en  ce  cas-là  Sa  Majeilé  déclare  d'avance,  qu'Elle  ne  veut  être  liée  en  au- 
cune manière  à  la  moindre  chofe  qui  fe  traitera  ou  concertera  là-deilus  fans 
Elle  \  mais ,  qu'Elle  fe  referve  fon  droit ,  en  proteflant  contre  tout  ce  qui 
pourroit  fe  faire  à  fon  préjudice  ,  ainfi  qu'Elle  a  ci-devant  fait  contre  le 
Traité  de  la  Barrière.     Le  31.  Janvier  171 8. 

Ce  même  Envoie,  avec  celui  de  Hefle-Caflel ,  avoient  dans  une  Confé- 
rence notifié  aux  Etats  une  Convention  provifionelle  fur  la  Baronie  de  Hér- 
itai ,  ainfi  qu'on  peut  voir  dans  l'Extrait  des  Regiilres  des  Etats  avec  leur 
Refolution  là-defïus  qu'on  infère  ici. 

Extrait  du  Rcgiflre  des  Refolutions  de  LL.  HH.  PP. 

touchant  Herjîal ;  du  Jeudi    20.   Janvier  1718. 


Herûal. 


LE  s  Sieurs  de  Wynbergue  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour  les  Refolir- 
Affaires  de  la  Succefîion  &c.  ont  raporté  que  les  Srs.  de  Meinertzha-  £°^*jl* 
gen  Envoie  Extraordinaire  de  Sa  Majeilé  le  Roi  de  Pruffe  ,  &  de  Dalwig 
Envoie  Extraordinaire  de  fon  AltefTe  Mr.  le  Landgrave  de  HefTe-Caffel , 
comme  Plénipotentiaires  refpeclifs  ,  tant  de  fadite  Majefté,  que  de  fon  Al- 
tefTe ,  &  de  Madame  la  PrincefTe  Douairière  de  NafTau,  ont  dans  une 
Conférence  donné  connoiflance  aux  Sieurs  leurs  Députez ,  de  la  provifio^- 
nelle  Convention  entre  Sa  Majeflé  &  lefdits  Hauts  Tuteurs  fur  la  Baronie 
de  Herilal ,  &  de  la  provifionelle  Adminiltration  &  Régence  de  ladite  Ba- 
ronie, &  leur  ont  donné  la  Copie  de  ladite  provifionelle  Convention,  qui 
ctoit  de  part  &  d'autre  ratifiée  ;  &  que  là-defïus  ils  ont  demandé ,  que  les 
Conseillers  autoriféz  pour  l'Adminillration  provifionelle  des  effets  de  la 
Succefîion  puiiTent  ^tre  chargez  par'LL.  HH.  PP.  de  fe  régler  en  con- 
formité de  ladite  Convention,  &  de  remettre  PAdminiflration  &  la  Régen- 
ce ,  qui  y  efl  conforme ,  à  fadite  Majeflé ,  &  auxdits  Hauts  Tuteurs ,  ou  à 
leurs  Autoriféz;  &  que  LL.  HH.  PP.  veuillent  retirer  leurs  Troupes  hors 
de  la  Se-gneurie  de  Herilal ,  lorfque  la  Régence  fe  fera  établie,  en  con- 
formité de  ladite  Convention  par  fadite  Majeflé,  &  par  lefdits  Hauts 
1  uteurs. 

Sur  quoi  aiant  été  délibéré  ,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté  que  la  Copie  de 
ladite  provifionelle  Convention  fera  envoiée  aux  Confeillers  autoriféz  pour 

kl 


^FFAJFES 

deTS  Pko- 

VINCKS- 

Unies. 


Mémoire 

duMini- 
ftrede 
Prufle 
touchant 
Mont- 
fort. 


40    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

la  provifionelle  adminiftration  &  la  fucceflion  ;  pour  leur  fervir  d'inftru&ion, 
&  que  lefdits  Confeillers  feront  chargez  &  autorifez,  ainfi  qu'ils  font  char- 
gez &  autorifez  par  la  prefente,  de  remettre  la  Régence  d  l'Adminiitra- 
tion  de  ladite  Baronie,  en  conformité, à  fadite  Majefté  le  Roi  de  Pruife  , 
&  auxdits  Hauts  Tuteurs  des  jeunes  Prince  &  Princelfe  de  Naflàu.  D'ail- 
leurs, que  lorfque  lefdits  Hauts  intereflez  y  auront  établi  la  Régence,  les 
Troupes  de  l'Etat  qui  font  à  Herflal  feront  retirées,  &  que  l'ordre  en  fera 
donné,  dès  qu'il  fera  donné  connoillance  à  LL.  HH.  PP.  dudit  étabhiTe- 
ment.  Et  que  l'Extrait  de  cette  Refolution  de  LL.  H  H.  PP.  fera  remis 
par  l'Agent  Rofeboom  auxdits  Sieurs  de  Meinertzhagen  &  Dalw:g. 

Les  Srs.  Députez  de  la  Province  d'Utrecht  fe  font  tenus  à  la  Refolution 
des  Seigneurs  leurs  Principaux  prife  fur  le  fujet  de  la  Succefîion,  &  à  leurs 
Remarques  û  fouvent  faites. 

Le  dit  Envoie  prefenta  quelques  jours  enfuite  encore  un  Mémoire  plain- 
tif contre  le  Procédé  du  Receveur  des  Domaines.  On  peut  voir  de  quoi  il 
p'agiflbit  par  la  Copie  du  Mémoire  même  ,  qui  fuit. 

Mémoire  du  Minijlre  de  Truffe ,  touchant  les  Revenus  de 
Montfort  \  du  10.  Février  1718. 

HAUTS  ET  PUISSANS  SEIGNEURS, 

VV.  HH.  PP.  fe  fouviendront  s'il  leur  plaît  des  Remontrances  réitérées 
que  le  foufligné  leur  a  faites  contre  le  Procédé  du  Receveur  des  Do- 
maines refervez  de  Montfort,  par  raport  aux  dîmes,  rentes,  &  douzième 
denier  des  terres  vendues  par  ceux  du  Village  de  Beefol  de  leur  Commu- 
nauté, lefquels  il  a  exigé  contre  les  droits  de  fa  Majelté,  comme  Seigneur 
Territorial  de  Montfort,  ainii  qu'il  a  été  amplement  expofé  dans  le  pre- 
mier Mémoire  du  foufiïgné  du  30.  Novembre  171 6. 

Et  quoiqu'après  les  fufdites  Remontrances  le  fou  (ligné  auroit  dû  efperer 
que  V  V.  rlH.  PP.  auroient  bien  voulu  donner  leurs  ordres  audit  Rece- 
veur des  Domaines  refervez  à  ne  plus  faire  aucune  infraction  aux  droits  de 
Sa  Majelté  à  cet  égard,  on  vient  derechef  d'adreflèr  des  plaintes  à  Sa  Ma- 
jelté, que  le  Receveur  fufmentionné  ,non  feulement  continue  à  obliger  ceux 
de  Beefol  de  paier  les  fufdits  droits  apartenans  à  fa  Majefté,  mais  qu'il 
prétend  même  les  forcer  à  lui  paier  ce  qu'iis  ont  déjà  paie  fur  ces  droits  au 
Receveur  de  Sa  Majelté. 

Le  foutrignéfe  pi  omet  de  l'équité  de  W.  HH.  PP.  qu'elles  n'aprou- 
veront  pas  ce  Procédé  de  leur  Receveur,  &  qu'Elles  lui  ordonneront  de 
s'abitenir  de  telies  infractions,  contre  lefquelles  Sa  Majelté  feroit  d'autant 
plus  obligée  de  fe  maintenir ,  puis  qu'il  elt  inconteltable  que  ces  Droits  lui 
apartiennent  uniquement  comme  Seigneur  Territorial ,  &  non  pas  au  Sou- 
verain, ce  qui  a  été  ûon  feulement  clairement  démontré  dans  le  Mémoire 

du 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  4l 

du  30.  Novembre  1716;  mais  VV.  HH.  PP.  trouveront  même  unequan-  Affaiues 
tité  de  decifions  femblables  fur  de  pareils  cas ,  qui  fc  font  faites  devant  le  LKS  I)r°- 
Confeil  d'Etat  de  cette  Republique  même.  ]\SCEi' 

Signét 

De  Meinertziiagen. 

Les  Etats  receurent  des  avis  de  Bruxelles,  qui  leur  donnoient  lieu  de 
fè  flatter  d'une  promte  conclufion  de  l'exécution  du  Traité  de  la  Barrière. 
On  devoit,  leur  mandoit-on,  charger  le  Minillre  Impérial  Heems ,  qui  étoit 
à  la  Haie,  d'achever  de  dégroifir  le  tout,  &  d'aplanir  ce  qu'il  y  avoit  de 
rabouteux  ;  à  caufe  de  fa  grande  capacité ,  comme  auffi  de  la  parfaite  con- 
noiffance  qu'il  avoit  des  Affaires  de  la  Republique.  Après  cela  ,  le  Mar- 
quis de  Prié  pourroit  faire  un  tour  à  la  Haie,  pour  y  donner  fon  aproba- 
tion  pour  une  conclufion  totale.  On  s'attendoit  qu'alors  on  pourroit  ter- 
miner en  même  tems  avec  la  Cour  de  Pruffe  les  points  fur  lefquels  Elle 
avoit  fait  protefler  contre  le  Traité  de  la  Barrière. 

Véritablement  le  Marquis  de  Prié  envoia  au  Baron  de  Heems  un  Pro- 
jet, dont  il  avoit  auffi  donné  Copie  au  Refident  Pelters.  Le  Baron  de 
Heems  fut  là-deffus  en  Conférence  avec  des  Députez  des  Etats.  Il  leur 
produifit  ce  Projet.  Il  tendoit  à  faire  une  nouvelle  Convention  touchant 
l'Article  du  Subfide  annuel  dont  il  devoit  y  avoir  quelque  reftri&ion  avec 
des  claufes.  Ce  Baron  ajouta,  que  le  Marquis  de  Prié  lui  avoit  même 
écrit  là-deffus.  Il  lui  mandoit  fes  penfées  fur  ce  Projet ,  &  les  raifons  con- 
tenues dans  dix  Articles ,  ainli  qu'il  les  remit  aux  Députez  des  Etats ,  dont 
la  Copie  fuit  ici. 

Extrait  du  Regître  des  Rcfohitions  de  LL.  HH.  PP.  les 
Seigneurs  Etats  Généraux  des  Provinces-Unies  des 
Pats-Bas 3  touchant  la  Barrière;  du  Mercredi  2. 
Mars  1718. 

LEs  Srs.  de  Wynbergen  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour  les  Af-  Refok- 
faires  de  la  Barrière  aiant  été  en  confequence  &  pour  fatisf  aire  à  leur  tfon  ton- 
Refolution  Commifforiale  du  28.  du  pafle  en  Conférence  avec  le  Sr.  Baron  jj^JJJJlj 
de  Heems,  Envoyé  Extraordinaire  de  S.  M.  Impériale,  ont  raporté  à  l'Af- 
femblée,  que  le  dit  Sr.  Baron  de  Heems  leur  avoit  dit,  que  Vendredi  der- 
nier il  avoit  reçu  par  un  Exprès  du  Sr.  Marquis  de  Prié  un  Projet  de  la  Con- 
vention préfentement  à  faire  fur  l'Article  du  Subfide  annuel  ,  lequel  ledit 
Marquis  avoit  auffi  remis  au  Refident  Peilers ,  qui,  comme  le  Baron  Heems 
croyoit,  l'auroit  fans  doute  déjà  envoyé  à  LL.  HH.  PP.  Que  le  dit  Sr.  Mar- 
quis lui  mandoit  auffi , 

Tome  XL  F  1.  Qu'il 


Barrière. 


mvi 

m:. es 

r.ES 

Pro. 

\1NCES- 

Us 

iies. 

43     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

i.  Qu'il  croyoit,  que  les  Plaintes  contenues  dans  la  Pvefolution  de  LL. 
HH.  PP.  du  7.  du  paffé  fur  le  délai  d'une  Réponfe  par  écrit,  n'étoient  pas 
fondées ,  vu  que  lui  Sr.  Marquis  de  Prié  avoit  confirmé  par  fes  Lettres ,  écri- 
.  tes  à  lui  Sr.  Baron  de  lieems,  tout  ce  que  le  dit  Refident  avoit  rapor'té  tou- 
chant les  expédions  qu'il  propofoit,&  ce  qu'il  accordoitpour  conduire  cette 
longue  Négociation  à  une  prompte  concluiion  &  a  une  heureufe  fin;  qu'ou- 
tre cela,  il  avoit  donné  une  Réponfe  par  écrit  fur  tous  les  points  du  Projet 
de  la  nouvelle  Convention ,  que  le  Sr.  Peiters  lui  avoit  remis ,  ce  qui  tou- 
tefois étoit  une  marque  &  aflurance  qu'il  ne  vouloit  pas  manquer  de  fatis- 
faire  à  ce  qui  étoit  itipulé  &  promis  de  fon  côté  :  qu'il  ne  refufoit  point  de 
répondre  par  écrit,  pourvu  que  l'affaire  en  pût  être  avancée; mais  que,  fé- 
lon fon  avis ,  la  raifon  pourquoi  cette  Négociation  alloit  fi  lentement,  étoit , 
que  de  la  part  de  l'Etat  on  faifoit  de  telles  demandes  fans  en  démordre,  que 
lui  Sr.  Marquis  ne  pouvoit  pas  accorder,  fur-tout  par  raport  à  la  nouvelle 
Hypothèque  &  Obligation  qu'on  demandoit  pour  le  défaut  aprehendé  des 
Revenus  des  Villes  &  Pais  conquis,  ainii  que  le  peu  de  Domaines ,  qui  reltoient 
à  Sa  Maj.  Imp.  &  Cathol.  devraient  être  chargez  de  la  Somme  totale  de 
yooooo.  Ryxdales. 

2.  Que  lui  Marquis  avoit  neantmoins ,  pour  prévenir  toutes  les  plaintes 
&  conteftations  ultérieures,  dreifé  àpréfent,  une  Réponfe  par  écrit,  furie 
point  du  Subfide  ,  ce  qu'il  avoit  aulîi  fait  ci-devant  en  termes  équivalens  ; 
qu'il  efperoit  &  s'afliiroit ,  qu'on  la  trouverait  entièrement  fatisfaifante  ;  & 
que  dans  le  changement  fait  du  Projet  du  Sr.  Peiters,  il  avoit  eu  plus  en  vue 
de  mettre  à  couvert  la  Dignité  &  Souveraineté  de  l'Empereur  fon  Maître, 
que  fes  intérêts. 

3.  Qu'il  croyoit  au ffi  avoir  donné  à  l'Etat  une  fureté  plus  que  fuffilante 
pour  le  payement  du  Subfide  annuel ,  ce  qu'il  avoit  démontré  même  au  Sr. 
Peiters  en  préfence  du  Premier  Commis  des  Finances ,  aïant  alTigné  pour 
le  défaut  aprehendé  les  Comptoirs  de  Gand  &  de  Bruges ,  où  il  y  aura  un 
furplus  d'au  de-là  de  100000.  Ryxds.  après  la  Réduction  des  Efpeces; 
que  dans  cette  affaire  il  avoit  palfé  par-deiYus  tout  ce  que  l'intérêt  des  Fi- 
nances de  l'Empereur  demandoit  pour  donner  une  fatisfaétion  à  l'Etat; 
qu'il  donnoit  plus,  qu'il  y  avoit  pour  ainfî  dire  dans  les  Coffres , afin  de  lever 
toutes  les  difficultez ,  &  qu'il  ne  refloit  plus  pour  l'Empereur  que  le  Comp- 
toir d'Oitende;  efperant,  que  LL.  I II 1.  PP.  defiiteroient  de  la  prétention 
au  dit  Comptoir  pour  plufieurs  raifons  importantes,  qu'il  avoit  propofées 
au  Sr.  Peiters. 

4.  Qu'il  étoit  pareillement  d'opinion ,  qu'on  aportoit  autant  de  préjudi- 
ce à  l'intérêt  de  l'Etat  même  qu'à  celui  de  Sa  Maj.  Imp.  &  Cathol.  par  les 
prétenfions  exceiîives  &  par  les  précautions  fuperlluës  ;  puifque ,  hors  des 
Comptoirs  de  Bruges  &  de  Gand ,  qui  devraient  fervir  d'une  Hypothèque 
fpeciale  pour  le  défaut  aprehendé  du  Subfide ,  il  ne  refloit  rien  dans  les 
Pais-Bas  Autrichiens ,  furquoi  on  pourrait,  en  cas  de  necellité y  faire  une 
Négociation;  que  LL.  III I.  PP.  n'ignoraient  point,  que  tous  les  fonds 
ctoicnt  chargez  &  engagez,  6c  quererfonne  ne  voudrait  donner  un  Sol, 

quand 


Unies. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.         43 

auand  les  dits  deux  fonds  feroient  chargez  d'une  Hypothèque  fpeciale  &  affaires' 
perpétuelle  de  500000.  Ryxdrs.,ccqui  meritoit  bien  que  cet  Etat  y  fît  quel-  dfs  Pro- 
que  réflexion,  vu  que  la  confervation  des  Païs-Bas  lui  importoit  autant  yINCF-s- 
qu'à  SaMaj.  Imp.  &  Cathol.  même. 

5.  Que  le  point  du  Subfide  étant  ajufté ,  il  ne  voyoit  point ,  qu'il  y 
reftoit  rien  qui  pourrait  empêcher  ou  différer  la  Conclufion  &  la  Signatu- 
re de  la  nouvelle  Convention,  attendu  qu'il  avoit  autant  que  réglé  &  ter- 
miné à  la  Haye  les  3.  autres  points  avec  les  Srs.  Gockinga  &  Geldermal- 

fen. 

6.  Qu'il  en  avoit  même  fouvent  parlé  avec  le  Sr.  Pefters,  en  le  priant, 
qu'on  voudroit  faire  un  Projet  là-deffus  pour  terminer  le  tout  à  la  fois  ; 
mais  que  celui-ci  avoit  toujours  répondu  ,  que  l'affaire  du  Subfide  devoit 
aller  devant,  &  que  c'étoit  le  point  le  plus  important  &  le  plus  effentiel, 
&  qu'on  pourroit  bien  après  accommoder  les  autres  affaires  pour  être 
portées  au  Confentement  des  Provinces. 

7.  Pour  ce  qui  regarde  le  point  des  arrérages  ,  qu'il  s'étoit  déjà  expli- 
qué là-deffus  ,  à  quoi  il  fe  referoit  encore,  ne  doutant  point,  que  LL. 
HH.  PP.  n'en  foient  contentes;  mais  qu'il  faudroit  trouver  un  expédient 
par  raport  au  payement  de  ce  qu'il  avoit  préfenté  &  furquoi  il  avoit  ci- 
devant  écrit  à  lui  Sr.  Baron  de  Heems,  puifqu'il  étoit  impofiibîe  de  faire 
à  préfent  ce  payement  à  caufe  du  mauvais  état  des  finances,  d'autant  que 
le  payement  du  Subfide  &  des  intérêts  des  Capitaux  négociez  &  de  ce 
qui  y  apartient,  fuivant  la  Convention  qu'on  en  doit  faire,  montera, à  ce 
qu'il  conjecture  ,  à  environ  800000.  Ryxds.  ou  2  Millions  de  florins  de 
Hollande  par  an. 

g.  Que  lui  Sr.  Marquis  de  Prié  étoit  prêt  à  figner  aux  dites  conditions 
la  nouvelle  Convention  ,  &  qu'il  feroit  bien  aile,  que  le  Sr.  Pefters  fût 
pareillement  inflruit  &  authorifé  à  ce  fujet  de  LL.  HH.  PP.  au  quel  eas  fa 
venue  à  la  Haie  ne  feroit  pas  encore  néceffaire. 

p.  Qu'en  attendant,  il  efperoit,  que  LL.  H  FI.  PP,  envoyeroient  une  au- 
tre Déclaration  &  une  meilleure  Refolution  que  la  précédente,  afin  que 
cette  Négociation  puiffe  être  conduite  à  une  prompte  fin. 

10.  Qu'il  envoyeroit  aufii  au  premier  jour  à  la  Haie  le  Commiffaire  de 
Guerre  Gruber,  pour  régler  avec  lui  la  liquidation  des  deniers  négociez 
pour  l'entretien  des  Troupes  Impériales. 

Qu'enfuite  le  dit  Sr.  Baron  de  Heems  avoit  prié  les  Députez  de  LL. 
HH.  PP.  de  leur  vouloir  faire  raport  de  ce  que  ci-deffus,  y  ajoutant, 
qu'il  avoit  des  ordres  très  preffans  de  Vienne  pour  employer  auprès  de 
LL.  HH.  PP.  tous  les  devoirs  poffibles  afin  de  terminer  au  plutôt  cette 
Négociation.  Surquoi  aïant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  entendu, 
que  Copie  du  précèdent  Raport  fera  remife  entre  les  mains  des  Srs.  de 
Wynbergen  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour  les  Affaires  de  la 
Barrière,  pour,  conjointement  avec  les  autres  Srs.  Commiffaires  du  Con- 
feil  d'Etat  qu'il  nommera  lui-même ,  examiner  &  faire  raport  de  tout  à 
i'AfTemblée. 

f  2  u 


44'  MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

ArFAiRïjs        11  n'y  a  pas  à  douter  que  cette  Négociation  n'eut  un  heureux  fuccès 
des  Pko-   pendant  les  autres  mois  de  l'année,  dont  on  n'araporté  ce  qui  s'étoit  pafTé 
vinces-     pendant  les  trois  premiers  touchant  cette  Affaire-là. 

Il  y  avoit  eu  pendant  le  même  tems  d'autres  Affaires ,  qui  roulèrent  fur 
le  tapis.     On  en  fera  le  raport  féparement. 

L'une  étoit  que  l'Electeur  de  Cologne  avoit  fait  préfénter  aux  Etats  par 
fon  Réfid.ent  un  Mémoire  en  date  du  iy.  Décembre  paffé  de  17 17.  On 
n'y  avoit  fait  aucune  Réponfe,  manque  de  tems  pour  y  réfléchir,  parce 
qu'on  étoit  vers  la  fin  de  l'année.  Ce  Refident  demanda  cette  Réponfe  le 
7,  de  Janvier  de  cette  année  par  le  Mémoire  cy-joint. 

Mémoire  du  Refident  de  PEklïeur  de  Cologne  pour  a- 
voir  une  Réponfe  à  fon  Mémoire  du  15.  Decembr. 
précèdent;  du  7.  Janvier  171 8. 

HAUTS  ET  PUISSANS  SEIGNEURS, 

Mémoire  T  E  foufiîgné  Confeiller  &  Refident  de  S.  A.  S.  El.  de  Cologne  auprès 
i\n  ReTid.  jL-j  de  LL.  HH.  PP.  a  eu  l'honneur  de  leur  prefenter  le  15.  de  De- 
.Magis.  cembr.  dernier  un  Mémoire,  fur  lequel  n'aiant  jufques  à  prefent  receu  de 
la  part  de  LL.  HH.  PP.  aucune  Réponfe  ni  Refolution  ,  il  ne  peut  plus 
long-temps  différer,  fuivant  les  ordres  qu'il  a  de  fon  Sr.  Maitre  ,  fans  de- 
mander inftamment  de  LL.  HH.  PP.  l'effet  des  points  contenus  dans  fon 
dit  Mémoire  ^efperant  que  LL.  HH.  PP.  s'y  trouveront  d'autant  plus  por- 
tées ,  qu'elles  auront  apris  qu'outre  le  relâchement  de  leurs  Artillerie  ,  S. 
A.  S.  El.  continue  à  exécuter  de  fon  côté  tous  les  articles  de  la  Con- 
vention. 

Le  7.  Janvier  171 8.  Signé ', 

M   A   G   I   S, 

Comme  l'Elecleur  de  Cologne  venoit  de  donner  un  exemple  de  ge~ 
nerofité  aux  Etats,  en  laiffant  partir  l'Artillerie  de  la  Republique,  ceux-ci 
voulurent  y  correfpondre.  lis  délibérèrent  fur  la  manière  de  le  faire. 
C'étoit  fur-tout  par  raport  à  la  pretenfion  des  Ordonnances  des  fourrages, 
&  au  donatif  de  la  Ville  de  Maftricht.  Elles  étoient  deux  chofes  fur  lef- 
quelles  ce  Refident-là  avoit  infifté  par  fon  Mémoire  du  if.  Decembr. 
précèdent.  On  prit  là-deffus  une  Refolution  dont  voici  la  Copie,  avec 
l'Addition  envers  les  Provinces  pour  pouvoir  paier  lefdites  Ordon- 
nances. 


Extrait 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        41 

'    Extrait  du  Regiftre  des  Refolutiom  de  IL.  HH.   PP.   ^J* 
en  Réponjè  au  Rcfident  Magis\  du  Vendredi  i).  Jan-    vinces- 
vier  1718.  Vnu$- 

SUr  l'Examen  des  Mémoires  du  Refident  de  l'El.  de  Cologne  le  Sr.    Rc'ponfe 
Magis  concernant  l'excluiion  de  la  Convention  ,  relative  à  la  démoli-   a  Mr. 
tiun  des  fortifications  extérieures  de  Bonn,  &  de  celles  de  la  Citadelle  de   Magis. 
Liège  &  de  Ilui,  &  fpecialement  au  vieux Baftion  du  Clergé,  le  donatif 
de  Mallricht,  &  les  arrérages  des  fourrages  &c.     Sur  quoi  aiant  été  de- 
libéré  x  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  qu'on  repondroit  au  Mémoire  dudit 
Sr.  Refident  xMagis ,    qu'il   eft  fort  agréable  à  LL.  HH.  PP.  de  voir  les 
nouvelles  aiTeurances  données  par  le  Mémoire  de  la  fincere  intention  de     . 
S.  A.  El.  pour  entretenir  &  cultiver  la  bonne  amitié  &  intelligence  avec 
l'Etat,  &  pour  l'exécution  du  convenu.     Que  LL.  HH.  PP.  ont  pareil- 
lement de  leur  côté  témoigné,  &  le  réitèrent  encore  une  fois  ,  qu'elles 
ont  toujours  été  portées  &   le  font  encore  de  vivre  avec  S.  A.  El.  en 
amitié  &  union  ,   &  d'exécuter  le  convenu  en  toutes  fes  parties;  &  de 
donner  toutes  fortes   de  preuves    à  S.    A.    El.  de   leurs  iinceres  fenti- 
mens. 

Qu'elles  confiderent  que  les  points  contenus  dans  le  Mémoire  font  dé 
deux  natures.  Le  premier  touchant  l'exécution  du  convenu  ,  nommé- 
ment celui  qui  concerne  le  Baftion  du  Clergé  ;  &  les  deux  autres  n'aianc 
rien  de  commun  avec  la  Convention ,  comme  le  donatif  de  la  Ville  de 
Maftricht  pour  l'admodiation  du  petit  impôt  de  Doiianne ,  &  les  arrérages 
des  fourrages  dûs  à  l'Archevêché  de  Cologne.  Que  fur  le  premier,  ne  regar- 
dant pas  en  aucune  manière  LL.  llll.  PP.  Elles  ne  peuvent  avouer 
que  de  leur  côté  elles  aient  manqué  de  fuivre  en  toutes  fes  parties  ce  dont 
on  eft  convenu.  Que  d'abord  que  la  Convention  fut  aprouvée  par  S.  A. 
EL,  LL.  HH.  PP.  ont  remis  au  Confeiî  d'Etat  l'exécution,  &  ordonné, 
ainli  que  S.  A.  El.  a  fait  de  fon  côté,  à  la  bonne  foi  fur  les  raifons  de  leur 
Refolution  du  10.  de  Novembre  paffé,  ayant  crû  ,  fuivant  le  convenu, 
que  le  Vieux  Baftion  du  Clergé  devoit  auîîi  être  démoli,  a  fait  donner  con- 
noiiTance  de  fon  Opinion  à  ceux  auxquels  de  la  part  de  S.  A.  El.  étoit 
commife  l'exécution  de  la  Convention  à  l'égard  des  Ouvrages  de  la  Cita- 
delle de  Liège.  Qu'en  cas  qu'ils  avoient  jugé  que  la  démolition  dudit 
Ballion  n'étoit  pas  comprife  dans  la  Convention,  ils  dévoient  la  defaprou- 
ver  &  en  donner  connoiffance  à  LL.  HH.  PP.  &  à  S.  A.  El.  &  en  de- 
mander l'explication; mais, au  contraire,  non-feulement  ont  acquiefeé  à  ce 
que  de  la  part  du  Confeil  d'Etat  étoit  de  bonne  foi  avancé,  mais  ont  mê- 
me donné  à  ferme  la  démolition  &  paie  les  travailleurs.  Que  cela  s'eft 
fait  fans  connoiffance  de  LL.  HH.  PP.,  &  il  a  même  été  travaillé  pen- 
dant quelques  femaines  à  ladite  démolition,  fans  que  de  la  part  de  S.  A. 
El.  on  ait  fait  quelque  plainte  là-deiTus  ;  que  fur  la  première  reprefenta- 
tion  à  eux  faite  de  la  part  de  S.  A.  El.  ,  que  la  démolition  dudit  baftion 

F  3  étoit 


Unies. 


46     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  étoit  contre  la  Convention,  elles  ont  d'abord  donné  ordre  de  la  fufpendre 
des  Pro-  jufques  à  ce  qu'on  en  eut  pris  information;  &  qu'après  les  informations 
vinces-  venues  ,  en  toute  bonne  foi  elles  ont  bien  voulu  déclarer  ,  que  ledit 
Baflion  n'étoit  pas  compris  dans  les  ouvrages  qui  dévoient  être  dé- 
molis. 

Qu'elles  croient  d'avoir  aufll  par-là  furabondament  fatisfait ,  &  l'on  ne 
peut  pas  en  la  moindre  manière  leur  imputer  d'être  contrevenuës  en  ce 
point  à  la  Convention  ,  puis  que  la  démolition,  qui  étoit  commencée  au- 
dit baftion  ,   avoit  été  faite  hors  de  leur  connoiilance  ;  que  ceux,  à  qui 
l'exécution  de  la  part  de  LL.  HH.  PP.  étoit  commife,  y  font  allez  de 
bonne  foi,  &  non-feulement  ceux-cy,  mais  auiîi  ceux  auxquels  S.  A.  El. 
avoit  commis  la  même  exécution,  ont  été  d'opinion  que  le  Baflion  devoit 
être  démoli ,  &  l'ont  même  donné  à  ferme  ,  &  ont  fait  commencer  la 
démolition.  Que  LL.  HH.  PP.  aiant  fait  de  leur  côté  ce  qu'on  peut  re- 
quérir d'elles ,  on  ne  peut  rien  prétendre  d'elles  au  de-là  ,  &  qu'elles  ne 
font  la  moindre  opofition  que  l'on  ne  repare  ce  qui  a  été  rompu  dudit 
Baflion;  car  ce  qui  a  été  fait  ne  peut-être  imputé  à  l'Etat,  mais  à  ceux 
auxquels  S.  A.  El.  avoit  commis  l'exécution,  &  qui  l'ont  donné  à  ferme, 
&  l'ont  laiflee  effectuer,  &  lors  qu'il  étoit  temps  n'ont  pas  fait  favoir  à 
LL.  HH.  PP.  ce  qu'on  jugeoit  devoir  alléguer  contre.     Que  cependant 
LL.  HH.  PP.  ne  peuvent  s'empêcher  de  fe  plaindre  de  l'inexécution  de 
la  Convention  de  la  part  de  S.  A. El.;  qu'elles  ne  parleront  pas  de  ce  qu'on 
a  retenu  l'artillerie  &  les  munitions  de  l'Etat,  pûifqu'on  les  a  relâchez, 
mais  que  la  démolition  des  ouvrages  extérieurs  de  Bonn,  &  des  ouvrages 
de  Huy  &  de  la  Citadelle  de  Liège, n'efl  pas  effectuée  dans  le  temps  fti- 
pulé  dans  la  Convention  ,  &  que  le  Gouverneur  &  autres  Officiers  &  fer- 
vans  qui  ont  été  dans  Bonn  n'ont  point  été  fatisfaits  de  leurs  arrérages, 
ainfi  qu'il  a  été  expreffement  promis  par  la  Convention  ;   que  LL.  HH. 
PP.  infiflent   encore  fur  l'exécution  du  convenu  touchant  lefdits  points 
autant  qu'on  n'y  a  pas  fatisfait.     Que  pour  ce  qui  regarde  les  points  qui 
font  hors  de  la  Convention  ,  &  premièrement  le  donatif  de  la  Ville  de 
Maeflricht,  LL.  HH.  PP.  y  aiant  confenti,  fous  la  condition  d'y  avoir 
leur  part,  elles  ont  fatisfait  à  ce  qu'on  a  requis  d'elles,  quoique  fans  aucu- 
ne obligation,  &  feulement  en  confideration  de  l'amitié  de  S.  A.  EL:  & 
2.  des   arrérages  dûs  à  l'Archevêché  de  Cologne,   qu'il  n'efl  pas  incon- 
nu à  S.  A.  El.  l'onereufe  charge  de  la  dernière  guerre  ,    &  les  defaflres 
furvenus  à  l'Etat ,  qui  font  la  caufe  ,  que  tant  cette  dette  que  d'autres 
n'ont  pu  jufques  ici  être  aquittées,  &  même  ne  peuvent  pas  l'être  fi-tôt. 
Comme  LL.  HH.  PP.  ont  beaucoup  de  confideration  pour  S.  A.  El.  & 
de   fa  recommandation  en  faveur  de  l'Archevêché  de  Cologne,  elles  fe- 
ront là-deflhs  toutes  les  Réflexions  poflibles;& ,  lors  que  ceux  de  l'Arche- 
vêché, auxquels  LL.  HH.  PP.  font  redevables  de  ces  arrérages  ,leur  en 
parleront  ,    on    entrera   avec  eux   en   négociation  ,   pour  convenir  au- 
tant   qu'il  efl    poffible    pour     une   raifonnable   fatisfaclion    de    la    det- 
te ,  fuivant    les    occurrences   du    temps.      Et  l'Extrait  de    cette   Re- 

folutiou 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  XVIII.         47 

lution    fera     remis    par     l'Agent  ^Rofeboom    entre   les.    mains   du    Sr.   ,\FKArf,E8 
Magis.  des  Pno- 

D'ailleurs ,  il  ferareprefenté  aux  Seigneurs  Etats  des  refpeclives  Provin-  vinces- 
ces ,  que  la  dette  de  l'Archeveelié  de  Cologne  confifte  en  Ordonnances  u"Its-  , 
d'argent  de  fourrages  pour  les  quartiers  des  Troupes  de  Pruffe  &  autres 
pendant  la  dernière  Guerre ,  fuivant  .qu'on  en  ctoit  convenu  ,  lefquel- 
Ies  Ordonnances  ont  été  livrées  pour  être  paiées  de  l'argent  des  Maga- 
fins  de  fourrage,  &  du  reliant  de  ladite  Pétition,  ou  de  profit  de  la  ré- 
duction (,&  cailation  des  Troupes  de  171 3.  C'efr.  pourquoi  lefdits  Sei- 
gneurs Etats  font  priez  fur  l'un  ou  l'autre  de  ces  Articles  d'envoier  une 
bonne  fomme  d'argent  au  Comptoir  du  Receveur  General ,  pour  pou- 
voir paier  cette  dette,  &  d'autres  d'une  pareille  nature. 

Cette  Refolution  ne  contenta  pas  ce  Refident-là.  Il  fupofoit  mal 
à  propos  qu'il  y  avoit  des  cliofes  qui  n'étoient  pas  véritables.  Il  difoit 
hautement ,  qu'il  travailîoit  à  un  Mémoire ,  qui  y  ferviroit  de  Réplique. 
Auiîi  quelques  jours  après  prefentat-t-il  un  Mémoire,  dont  l'Extrait  ne 
fatisferoit  peut  être  pas  le  Leèteur  comme  la  Pièce  même ,  que  voici. 

Mémoire  du  Refident  Magis  ,  pre fente  à  Leurs  Hautes 
Fulffuiices  Mejjieurs  les  Etats  Généraux ,  £«fV.  du  22. 
Tevrier  1718. 

HAUTS  ET  PUISSANTS  SEIGNEURS,  '    - 

LE  fouffigné  Confeiller  &  Refident  de  Son  Altelfe  SerenùTime  Eleclora-   Mémoire 
le  de  Cologne  auprès  de  Vos  Hautes  PuifTances,par  ordre  exprès  de  Son   du  Réfid. 
Sereniflîmc  Maître,  a  rhonneur  de  répliquer  à  la  Refolution  de  VV.  HH.    Magis* 
PP.  qui  lui  a  été  communiquée  le  17.  du  mois  pafle  par  leur  Agent  le  Sr. 
Rofenboom:  &  Son  Altefié  Sereniffime  Electorale  a  été  ravie  d'apprendre 
par  cette  Refolution  ,    que  les  nouvelles  affurances,   qu'Elle  m'avoit  or- 
donné de  marquer  de  fa  part  'à  W.  HH.  PP.  de  la  fincere  intention , 
qu'Elle  a  pour  entretenir,  &  affermir  avec  Elles 'une  bonne  &  parfaite'' 
amitié,  &  intelligence,  leur  ont  été  agréables;  &  que  celles,  qu'il  a  pîu 
à  VV.  HH.  PP.  de  lui  marquer,  dans  leur  dernière  Refolution ,  lui  ont' 
donné  toute  la  fuisfaction' imaginable  ,    &  que  'Son  Akeffe  Serenm*ime 
Electorale  .cherchera  toujours  des  occafions   pour  convaincre  VV.  HH.' 
PP.,  par  des   effets,  combien  Elle  cft  portée   à   cultiver   cette  bonne' 

0 


Elle  a  laiffé  partir  les  Batteaux  chargez  dé  munitions  <k  Artillerie  qui' 
étoient  dans  Bonn ,  quoiqu'Elle  pût  les  arrêter  jufqu'à  ce  qu'on  lui  eut; 
donné  une  entière  fatisf  action  a  fur  l'infraction  manilefte  ,  qui  s'eft  don- 


ner. 


A  F? AI ît, ES 

PE3 

Pro- 

u- 

ICES- 

Uni  s:  s. 

48     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

née  à  la  Convention  par  la  démolition  cla  vieux  Ballion  du  Clergé  à 
Liège  ;  mais  ,  cependant,  fur  les  feules  affurances ,qu'Eile  a  reçeues  du 
fouiîigné  de  la  bonne  difpofition  où  il  trouvoit  VV.  HH.  PP.  pour  l'en- 
tretien de  cette  bonne  Union ,  &  des  affurances  de  bouche ,  qu'Elles  lui 
avoient  bien  voulu  donner  ,  de  n'avoir  aucune  part  à  cette  infraction  , 
de  même  de  leur  bonne  intention  &  volonté  pour  donner  à  Son  Al- 
teffe  Sereniffime  Electorale  toute  la  jufte  fatis faction  qui  lui  efl  due  par 
cette  infraction  ,  Elle  a  bien  voulu  paffer  par  deffus  toutes  Reflexions, 
&  ne  point  s'arrêter  au  Droit  acquis  qu'Elle  avoit  d'arrêter  les  batteaux, 
<k  même  fans  en  attendre  la  Déclaration  que  VV.  HH.  PP.  en  ont  don- 
née au  fouffigné  par  leur  Refolution  du  9.  Novembre  dernier,  s'abandon- 
ner à  une  entière  confiance  ,  à  la  Juilice  &  à  l'Equité  renommée  de  W. 
IIH.  PP.;  ainfi  qu'avec  fujet  Elle  ne  peut  diOImuler  la  furpriie  qu'Elle  a 
eue  cle  voir  que  VV.  HH.  PP.  par  leur  dernière  Refolution  de  if.  du 
mois  fJaffé  paroiffent  chercher  prefentement  it  rejetter  la  faute  de  cette 
infraction  fur  ceux  qui  ont  été  Députez  de  la  part  de  Son  Alteffe  Sere- 
niffime  Electorale  à  Liège,  ou  fur  fon  Confeil  de  Régence,  ou  à  des  ac- 
quiefcements  de  fa  part.  Elle  avoit  lieu  de  s'attendre  que  VV.  HH.  PP. 
auroient  remarqué  avec  attention  les  preuves  convaincantes  du  contrai- 
re ,  qu'Elle  a  ci-devant  ordonné  au  fouffigné  de  marquer  par  fon  Mé- 
moire du  2.  Novembre  dernier.  C'eft  pourquoi  Son  Alteffe  Sereniffime 
Electorale  lui  ordonne  de  les  réitérer  à  VV.  HH.  PP.  de  leur  faire  con- 
noitre  de  nouveau,  que  cette  infraction  manifefte  ne  peut  nullement 
être  imputée  à  tels  motifs ,  &  qu'elle  tire  fon  Origine  de  la  demande 
que  le  Sr.  Rochebrune  a  fait  au  Confeil  d'Etat  d'une  interprétation  fur 
le  fait  de  ce  Baltion  ,  qu'il  a  effectivement  reçeuè"  du  dit  Confeil  telle 
qu'il  avoit  demandé.. 

Que  cette  Inftructlon  a  été  donnée  &  envoiée  par  ce  même  Confeil 
audit  Sr.  Rochebrune  avec  ordre  de  l'exécuter  ,  &  que  le  tout  s'eft  fait 
fans  la  communication  ni  participation  de  VV.  HH.  PP,  félon  qu'Elles 
font  déclaré  plufieurs  fois  Elles  mêmes.  'Qu'il  n'ell  point  naturel  qu'on 
puiffp  décider  fouverainemçnt  ,  &' faire,  exécuter  de  cette  forte  une  ex- 
plication, que  demande  un  Commandant  de  Place  fur  un  fait  qui  regar- 
de- un  accord  conclu  entre  deux  Souverains  ,  &  fur -tout  fins  le  com- 
muniquer nullement  au  Miniftre  du  Prince  avec  qui  on  a  traité,  &  qui 
fe  trouve  fur  le  lieu,  &'fans  la  participation  du  Miniftre  de  Sa  Majeité 
Impériale  &  Catholique.  Qu'outre,  que  bien  loin  qu'on  ait  procédé  de 
telie  manière  ,  comme  fa  bonne  intelligence,  le  requeroit ,  au  contraire , 
cette  interprétation  a  etéinifç'en  exécution'  à  Tinfçu  du  Miniftre  de 
Son  Alteffe  Sereniffime  Electorale  qui  le  trouvoit  à  Liège  :  Conduite  en- 
tièrement oppofée  à  celle  que  Te  Sr.  Rochebrune  étoit  convenu  de  te- 
nier  avec  Mr.  le  Comte  Sr.  Maurice  ;  car ,  il  ne  peut  nier  que  ledit 
Comte  ne  fût  à  Liège  de  ce  tems-là  ,  &  qui  lui  dit,  qu'il  avoit  ordre 
de  Son  Sereniffime  Maître  de  traiter  avec  lui,  fur  ce  qui  concernoit 
l'exécution  de  la    Convention  ,   &  Mr.  Rochebrune  lui  repondit  qu'il 

avoit 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  49 

avoit  les  mêmes  ordres  de  fes  Maîtres  :  ainfi  qu'il  convinrent  qu'à  l'avenir  Aftmrx» 
rien  fe  feroit  fans  fe  le  communiquer  réciproquement.  Cependant,  deux  des  Pa^ 
Jours  après ,  le  Sr.  Comte  St.  Maurice  aprit  avec  étonnement ,  que  Mr.     unTeÏ 

Rochebrune  s'étoit  adrefie  aux  Etats  de  la  Principauté  de  Liège,  pour 

demander  la  démolition  du  vieux  Billion  du  Clergé ,  ce  qui  obligea  ledit 
Comte  de  fe  rendre  le  même  jour  à  la  Citadelle,  pour  demander  au  Sr. 
Rochebrune  ,  pourquoi  il  en  agiflbit  de  cette  forte ,  qu'il  demandoit  la 
démolition  d'un  ouvrage ,  qui  n'étoit  point  compris  dans  la  Convention  ? 
Il  lui  donna  pour  reponfe  ,  qu'il  avoit  les  ordres  du  Confcil  d'Etat  fes 
Maîtres ,  &  qu'il  les  devoit  exécuter.  D'où  vient  donc  que  le  Comman- 
dant n'a  pas  donné  part  au Confeil  d'Etat,  ou  à  VV.  III I.  PP.  de  i'op- 
pofition  que  Mr.  le  Comte  de  St.  Maurice  lui  a  faite  au  fujet  de  cette 
démolition?  Il  ne  faut  point  douter,  que  fi  cela  étoit  arrivé  pour  lors, 
le  Confeil  d'Etat  auroit  agi  de  communication  avec  VV.  HH.  PP.  fur 
un  fait  de  cette  importance  ;  &  ainfi  on  auroit  pu  prévenir  auffi  à  tems , 
qu'Elles  croient  prefentement  que  cela  devoit  fe  faire ,  le  fujet  de  difcuf- 
fion  &  mefmtelligence  que  cette  infraction  manifeile  peut  caufer. 

Cette  feule  négligence ,  &  contrevention  aux  ordres  &  intentions  de 
VV.  HII.  PP.  mérite  quelque  chofe  de  plus  qu'il  n'efl  dit  dans  la  décla- 
ration que  VV.  HII.  PP.  donnent  par  leur  Refolution  du  15.  du  mois 
dernier;  car, puis  que  les  ordres  portent  expreffement  qu'il  eut  à  confé- 
rer avec  les  Perfonnes  dénommées  de  la  part  de  Son  Altefle  Sereniffime 
Eleèt  orale  ou  avec  la  Régence  de  Liège  ,  pourquoi  ne  l'a-t-il  point 
fait  ? 

On  doit  repeter  ici ,  qu'il  y  a  trop  Iong-tems  que  le  Sr.  de  Rochebrune 
efl  à  Liège ,  pour  ne  pas  favoir  que  Son  Altefle  Sereniffime  Electorale  & 
fes  Etats  ne  penfent  pas  de  même  fur  le  fait  des  démolitions  des  Places 
de  cette  Principauté  ,  &  qu'il  efl  aflez  connu  que  les  Etats  du  Païs  de 
Liège  ne  compofent  point  la  Régence  ;  &  que  ce  Corps ,  quand  il  efl  af 
femblé ,  n'efl  que  pour  travailler  aux  befoins  du  Païs ,  &  n'efl  en  aucune 
façon  dans  les  affaires  publiques  dépendantes  du 'Souverain.  Et  fi  les  Dé- 
putez defdits  Etats  du  Païs  de  Liège  peuvent  avoir  pris  le  Caractère  de 
Députez  de  Son  AltefTe  Sereniffime  Electorale  pour  traiter  avec  lui  de  la 
démolition  de  ce  Baflion ,  pourquoi  ne  leur  a-t-il  pas  demandé  leur  Pou- 
voir ou  Commiffion  ?  Ainfi  ,  rien  ne  peut  l'excufer ,  &  tout  au  contraire 
fa  Conduite  prouve  affés ,  qu'il  a  mieux  aimé  ménager  les  Etats  du  Païs 
de  Liège ,  que  fon  AltefTe  Sereniffime  Electorale. 

Il  confiera  donc  notoirement  à  VV.  HII.  PP. ,  qu'aucun  deffaut  de  cet- 
te in  fra6tion  ne  peut  être  imputé  à  Son  Altefle  Sereniffime  Electorale ,  ni 
à  fes  Députez,  ni  à  la  Régence,  ni  à  aucun  acquiefcement  de  fa  part.  Les 
Plaintes  &  Remontrances  en  ont  été  faites  aufli-tôt  qu'on  a  pu,  envers  le 
Sr.  Rochebrune  par  Mr.  le  Comte  Sr.  Maurice.  Elles  ont  été  fûtes  par 
Son  Altefle  Sereniffime  Electorale  même  au  Sr.  Lieut.  Colonel  Coëtier, 
qui  n'a  point  manqué  d'en  rendre  compte  à  VV.  HH.  PP.  Elles  ont  été 
portées  directement  à  VV.  IIH.  PP.  par  le  fouffigné  aufli-tôt  qu'il  a  pu. 

Tvme  XL  G  Et 


5o    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    Et  comme  Son  AltefTe  Sereniflime  Electorale  a  de  fon  côté  rempli  toutes 

des  Pko-    jes  Conditions  portées  dans  la  dite  Convention  ;  Huy  étant  déjà  entiere- 

Unies'    ment  démoli  &  évacué,  Liège  le  feroit  de  même,  Ci  on  eut  laifTé  travailler 

. '_   les  Entrepreneurs  :&  pour  peu  que  VV.  HH.  PP.  veuillent  chercher  Se 

favoir  la  caufe  de  ce  retardement  ,  elles  pourront  la  découvrir  bien-tôt  -9 
&  l'on  verra  ,  que  ce  n'efl  ,ni  la  faute  de  Son  AltefTe  Electorale  ,  ni  de 
Ces  Etats  de  Liège. 

Quant  h  la  démolition  de  Bonn,  comme  ce  ne  font  que  des  ouvrages  de 
terre,  on  n'a  qu'à  voir  le  tems  qu'il  a  fait  jufqu'à  prefent  ,  &  s'il  a  été 
poflible  de  diligenter  cet  ouvrage  plus  qu'on  n'a  fait:  &  d'ailleurs, s'il  y  a 
eu  quelque  lenteur  ou  retardement  ,  VV.  HH.  PP.  fe  trouvent  allez  in- 
formées par  le  Sr.  Coëtier ,  que  rien  n'en  peut  être  imputé  à  Son  AltefTe 
Sereniflime  Electorale.  Au  relie,  de  la  manière  que  cette  démolition  fe  di- 
ligente prefentement ,  malgré  les  rigueurs  du  tems  ,  elle  fera  bien-tôt 
achevée,  &  convaincra  tout  le  monde  de  la  droiture  des  fentiments  de 
Son  AltefTe  Sereniflime  Electorale,  laquelle  voulant  bien  demeurer  perfua- 
dée  que  VV.  HH.  PP.  n'ont  eu  aucune  part ,  ni  aucune  connoilTance  de 
cette  contravention ,  &  qu'ainfi  les  croyant  également  offenfées ,  elles  fe- 
ront d'autant  plus  d'attention  aux  preuves  convaincantes  ,  que  rien  ne 
peut  être  imputé  à  Son  AltefTe  Sereniflime  Electorale , à  Tes  Députés,  ni  à 
aucun  autre  acquiefeement  de  fa  part,  &  que  VV.  HH.  PP.  non  conten- 
tes de  defapprouver  la  conduite  irreguliere  qui  a  été  tenue  par  la  démoli- 
tion entière  du  dit  Baflion,  ne  difereront  plus  de  donner  les  ordres  nécef- 
faires  pour  que  le  dit  Baflion  foit  entièrement  &  inceflamment  remis 
dans  le  même  état  qu'il  étoit  auparavant. 

C'eft  ce  que  Son  AltefTe  Sereniflime  Electorale  ordonne  au  SoufTigné 
de  continuer  à  demander  inllamment  à  VV.  HH.  PP. ,  comme  aufli  une 
explication  fur  ce  fujet:  c'efl-à-dire ,  de  preffer  Mr.  de  Rochebrune  pour 
favoir  qui  l'a  infligué  à  demander  cette  interprétation  au  Confeil  d'Etat, 
laquelle  doit  être  uniquement  regardée  des  deux  Souverains  feuls  contrai- 
tants,  comme  l'origine  de  cette  infraction  manifeile  efl  l'ouvrage  de 
^ens,  qui  cherchent  à  altérer  la  bonne  intelligence  &  amitié  qui  règne 
entre  eux. 

Au  refle,  Son  AltefTe  Sereniflime  Electorale  fçait  que  les  points  repris 
dans  les  précédents  Mémoires ,  que  le  foufligné  a  eu  l'honneur  de  présen- 
ter, à  VV.  HH.  PP.  font  de  deux  fortes  de  nature  :&  au  Cas  que  Son 
AltefTe  Sereniflime  Electorale  ait  pris  la  réfolution  d'arrêter  les  Batteaux  ; 
l'infraction  commife  par  la  démolition  du  vieux  Baflion  du  Clergé  en  au- 
roit  été  le  feul  fujet;  ce  qui  s'ell  pafTé,  &  ce  qui  eil  marqué  ci-deflus  fur 
ce  fait,  en  efl  une  preuve  certaine. 

On  fçait  d'ailleurs ,  que  Son  AltefTe  Sereniflime  Electorale  a  laifTé  char- 
ger les  munitions  &  l'Artillerie  fur  les  batteaux  fans  aucune  oppofition  , 
n'ayant  jamais  eu  intention  de  les  arrêter  ;  &  elle  ne  fit  prier  le  Sr.  Coë- 
tier d'en  différer  le  départ, qu'à  caufe  de  cette  contrevention,  &  jufqu'à 
ce  qu'Elle.èUt  eu  des  Lettres  du  Soufîigné  pour  favoir  les  fentiments  &  in- 

ten- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  5r 

tentions  de  VV.  HH.  PP.  fur  ce  fait.  Elles  font  afTez  convaincues  de  Awairiii 
cette,  vérité,  puifque  dès  le  moment  que  VV.  HH.  PP.  lui  eurent  decla-  w»PRt>- 
ré,  qu'EIIes  n'avoient  eu  aucune  connoifîance  ni  part  à  cette  infraction,  Um^' 
<$c  leurs  bonnes  intentions  pour  donner  fur  ce  fùjet  à  Son  AltefTe  Serenif-  ' 
finie  Electorale  toute  fatisfaction  ;  fur  le  (impie  rapport  qu'il  en  fit  à  Son 
Sereniiiimc  Maitre,il  ordonna  fur  Je  champ  que  les  Ratteaux  pourraient 
partir,  quand  ils  voudraient,  &  Mr.  Coëtier  ne  peut  pas  contrevenir  à 
la  vérité  de  ce  fait, fans  fe  faire  tort  à  lui-même.  Ainfi, quoique  les  points 
repris  dans  les  précédents  Mémoires  foient  de  différente  nature ,  ils  font 
cependant  connus  &  averrez  par  VV.  HH.  PP.  également  juftes  &  équi- 
tables ;  &  Son  AltefTe  Sereniffime  Electorale  efpére  &  s'attend  que  VV. 
HH.  PP.  voudront  bien  lui  donner  fur  l'une  &  fur  l'autre  la  fatisfaclion  , 
qu'Elle  leur  demande,  aiant  ordonné  pour  ce  fujet  au  Souffigné  depour- 
fuivre  également  fes  follicitations  &  de  demander  auffi  avec  infianee  une 
fin  à  l'égard  de  ce  qui  concerne  les  arrérages  des  fourages  dus  par  VV. 
HH.  PP.  à  l'Archevêché  de  Cologne,  qui  ont  été  cédez  &  donnez  à  Son 
AltefTe  Sereniiîime  Electorale  comme  le  Souffigné  pourra  en  faire  confier 
s'il  efl  befoin  ;  de  forte  qu'il  ne  faut  pas  douter  qu'ils  ne  lui  foient  pas  lé- 
gitimement dus ,  &  Son  Altefle  Sereniiîime  Electorale  voulant  bien  entrer 
dans  les  juftes  cenfiderations  &  reflexions  que  lui  font  faire  VV.  HH. 
PP.  fur  les  grands  Fardeaux  de  la  dernière  guerre  ,  &  fur  les  defaftres 
furvenus  depuis  ;  Elle  s'attend  neantmoins  auffi  que  VV.  HH.  PP.  entre- 
ront avec  Elle  dans  des  engagements  juftes  &  convenables  pour  la  fatisfai- 
re ,  auquel  effet  le  Souffigné  a  ordre  de  déclarer  qu'il  fe  trouve  fuffifament 
autorifé. 

Quant .  à  ce  qui  regarde  le  donatif  de  la  Ville  de  Maeftricht ,  puifque 
VV.  HH.  PP.  ont  trouvé  à  propos  d'en  faire  mention  dans  leur  prédite 
Réfolution,  Son  AltefTe  Sereniffime  Electorale  ne  peut  fe  difpenfer  de  leur 
faire  connoitre  qu'Elle  auroit  bien  fouhaité  de  voir  que  le  confentement  de 
W.  HH.  PP.  eut  été  fimple  &  fans  les  claufes  qu'EIIes  y  ont  ajoutées  , 
&  fur-tout  celle  par  leur  dernière  Réfolution,  de  l'avoir  fait  fans  aucune 
obligation.  VV.  HH.  PP.  n'ignorent  point  que  par  le  confentement 
qu'EIIes  ont  donnée.  Elles  doivent  participer  auffi  à  ce  donatif,  &  il  pa- 
roit  qu'après  trois  années  de  follicitations  pour  le  confentement  d'une  af- 
faire auffi  jufte  en  elle  même  &  décidée  auffi  de  cette  manière  depuis  ce 
temps-là  par  l'avis  des  quatre  Commiffaires  decifeurs  des  deux  Princes  , 
qui  étoient  pour  lors  fur  les  lieux,  ce  confentement  auroit  dû  tout  au 
moins  être  laifle  tel  que  VV.  HH.  PP.  l'avoient  donné,  &  la  claufe  ci- 
defTus  peu  agréable   auroit  pu  être  fupprimée  ou  refervée. 

Quant  au  payement  du  Gouverneur,  &  celui  des  autres  Officiers  com- 
pris dans  la  Convention ,  Son  AltefTe  Sereniffime  Electorale  ordonne  au 
Souffigné  de  déclarer  iterativement  de  fa  part ,  qu'Elle  y  fatisfera  d'abord 
par  le  provenu  de  ce  qui  lui  efl  dû  des  fourages  par  VV.  HH.  PP. 
Ces  dettes  étant  d'une  même  nature  &  contractées  envers  les  Officiers  par 
l'Archevêché ,  &  non  par  Son  Altefle  Sereniffime  Electorale  qui  s'en  efl 

G  2  ce- 


52    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aîfurm    cependant  bien  voulu  charger  par  la  Convention,  pour  complaire  à  VV. 
dfs  Pko-    tjii    r>n  .    je,  'emi^  «s,  ^«^îr  «o^  «^,^,„;^  j^*,,,,.^  ,,„  ,  ,„~:n r^„..^: —      „: 


dfs  Pko- 

VJN'C.ES 

Unies, 


qn 

vrier  i-uS. 


Signé, 

M   A    G    I    S. 


D  es  que  les  MiniPtres  virent  ce  long  Mémoire  ,  que  ce  Rendent  pro- 
noit  devoir  fervir  de  Réplique  à  la  Reiblution,  ils  ne  heliterent  pas  à  s'atten- 
dre à  une  Duplique.  Elle  fut  dans  une  Réfolution  que  les  Etats  prirent  là- 
deffus  cinq  ou  fix  jours  après.  lis  remarquèrent,  que  comme  ce  Refident- 
là,  manque  d'expérience,  ou  par  ignorance,  ainii  qu'on  a  dit  plus  haut 
qu'il  étoit  arrivé  au  Refident  de  Dannemark  van  Stôcken  ,  fe  fervoit  du 
terme  de  Preuves  réelles  de  la  Sincérité  des  Etats ,  ceux-ci  y  touchoient 
quelque  chofe.  C'étoit  en  difant,  que  LL.  HH  PP.  avoient  de  leur 
côté  donné  des  Preuves  réelles  de  leurs  intentions  de  vivre  en  bonne 
amitié  &  voifmage  avec  Son  Alteffe  Electorale.  Cependant,  que  fadite 
Alteffe  Electorale  avoit  plus  d'une  ibis  fait  voir  le  contraire  de  fon  côté,  &c. 
Voici  cette  Réfolution  en  Duplique. 

Extrait  du  Regi/lre  des  Rcfolutions  de  LL.  HH.  PP. 
les  Seigneurs  Etats  Généraux  des  Prov'mees -  Unies 
des  P aïs-Bas,  pour  répondre  à  M.  Magis;  du  Ven- 
dredi   18.  Mars  171 8. 

Reponfe  (~\  ^  *  *e  ^aPort  des  Seigneurs  de  Wynbergen  &  autres  Députez  de 
aMr.Ma-  V->^  LL.  HH.  PP.  pour  les  Affaires  Etrangères,  aiant  en  conformité 
gis.  &  pour  fatisfaire  à  leur  Réfolution  Commiiîbriale   du  22.  du  paifé  exa- 

miné, conjointement  avec  quelques  Seigneurs  Committez  du  Confeil 
d'Etat  ,  le  Mémoire  du  Sr.  Magis ,  Refident  de  Son  AltelTe  Electorale 
de  Cologne,  Eveque  &  Prince  de  Liège,  concernant  l'exécution  de  ce 
dont  on  eft  convenu  par  raport  à  la  démolition  des  ouvrages  de  Bonn , 
Huy ,  &  de  la  Citadelle  de  Liège ,  plus  amplement  mentionné  dans  le 
dit  Mémoire.  Surquoi  aiant  été  délibéré ,  il  a  été  trouvé  bon  &  refolu  , 
qu'il  fera  remis  audit  Sr.  Magis ,  en  Réponfe  à  fon  Mémoire ,  que  com- 
me LL.  III I.  PP.  ont  donncTde  leur  côié  beaucoup  de  Preuves  de  leur 
inclination  de  vivre  avec  Son  Alteffe  Electorale  dans  une  bonne  amitié 
&  voifinage ,  &  que  Son  Alteffe  Electorale  leur  avoit  protefle  plus  d'une 
fois  d'être  de  la  même  intention  de  fon  côté,  LL.  HH.  PP.  ne  pou- 
voient  s'empêcher  d'être  en  quelque  manière  iurpnfes  du  grand  bruit 
fju'on  fait  de  ce  qui  s'elt  paifé  à  l'égard  du  vieux  Baition  nommé  du  Çter- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  53 

fé ,  comme  fi  c'étoit  une   Affaire   de  la  dernière  importance;  que  LL.    Affaire 
IH.  PP.  n'ont  pourtant  pu  voir  qu'il  importoit  tant,  fi  le  dit  Bufnon    n,s  Pko- 
efl  dans  Ton  entier  ou  non;  que  neantmoins  Elles  ont  bien  voulu  avouer,     yx"* 

qu'en  confequence  de   la  Convention  fur  la  démolition  des  ouvrages  de ' 

la  Citadelle  de  Liège,  ledit  Baflion  n'a  point  été  compris  dans  les  For- 
tifications qu'on  devoit  démolir,  mais  que  LL.  I1II.  PP.  ont  par  leur 
Relolution  du  10.  Novembre  dernier  démontré  clairement  &  avec  des 
raifons  convaincantes,  que  le  Confeil  d'Etat  ,  à  qui  LL.  IIH.  PP. 
avoient  recommandé  l'exécution  de  ce  dont  on  étoit  convenu ,  a  procé- 
dé de  bonne-foi  à  tous  égards,  &  qu'Elles  ont  iait  voir,  tant  par  cette 
Refolution-ïà ,  que  par  celle  du  14.  Janvier  dernier,  que  pour  ce  qu'on 
eil  allé  plus  Loin  avec  la  démolition  d'une  partie  du  fufdit  Bailion,  que 
portoit  la  Convention,  la  faute  en  doit  pour  le  moins  être  rejettée  au- 
tant fur  celui  que  Son  AlteiTe  Electorale  de  fon  côté  avoit  chargé  de 
l'exécution,  que  fur  ceux  qui  y  ont  été  aucoiïfez  de  la  part  de  LL.  ÏIÏ1. 
PP.  ;  qu'il  n'eit  pas  neceilaire  de  répéter  ce  qui  a  été  plus  amplement  men- 
tionné dans  ladite  Refolut.ion  ;  qu'Elles  ne  peuvent  feulement  fe  difpenfer 
de  remarquer ,  que  tout  ce  qu'on  a  allégué  dans  ledit  Mémoire  avec  beau- 
coup de  circonitances  par  raport  à  ce  qui  s'eil  pafle  entre  le  Comte  de 
St.  Maurice  &  le  Colonel  de  Rochebrune :  (comme  l'on  aurait  aufîi  dû 
s'addrefler  fur  ladite  démolition  au  Confeil  de  Son  AlteiTe  Electorale  com- 
me Prince  de  Liège,  &  non  pas  aux  Etats  du  Païs)  tombe  tout  à  fait 
quand  on  prend  en  confideration  ,  que  Son  AlteiTe  Electorale  a  recom- 
mandé l'exécution  de  la  Convention,  autant  qu'elle  regarde  la  Citadelle  de 
Liège,  aux  Etats  du  Païs  de  ce  nom,  &  par  confequent  le  Colonel  de 
Rochebrune  n'a  pu  s'addrefler  à  l'égard  de  ladite  démolition  qu'aux  nom- 
mez Etats  ou  à  leurs  Députez.  Il  paroit  inconteftablement ,  que  cette  exé- 
cution a  été  recommandée  auxdits  Etats,  puifque  leurs  Députez  ont  don- 
né à  prix  fait  la  démolition  des  ouvrages  de  la  Citadelle  de  Liège  de  mê- 
me que  du  vieux  Bailion  du  Clergé,  &  que  les  conditions  du  prix  fait  ont 
été  lignées  par  ces  Députez,  outre  que  tout  Sujet  de  plainte  à  cet  égard 
doit  ceilér  par  ce  que  le  Si*.  Magis  a  inféré  lui-même  dans  fon  Mémoire 
du  7.  Décembre  dernier,  à  quoi  la  Lettre  de  Son  AlteiTe  Electorale  du 
30.  Novembre  précèdent  fe  raporte  expreiîement ,  attendu  qu'on  y  a  dit 
diilinctement ,  que  ,  comme  LL.  HI1.  PP.  ont  renvoie  l'exécution  du 
Traité  au  Confeil  d'Etat,  Son  AlteiTe  Electorale  l'a  envoie  avec  la  même 
intention  aux  Etats  du  Païs  de  Liège ,  d'où  il  paroit  évidement  qu'on  n'a  pu 
s'addrefler  fur  ce  fujet  qu'aux  dits  Etats  ou  à  leurs  Subdeleguez,  &  que  ceux- 
ci  aiant  non  feulement  acquiefeé  à  la  démolition  du  vieux  Bailion  du  Clergé, 
mais  en  aiant  même  fait  le  prix,  on  ne  fauroit  dire  tout  au  plus  à  la  -charge 
de  LL.HH.PP.  fi  non,  que  ceux,  qu'Elles  avoient  chargez  de  l'exécution  de 
ce  dont  on  étoit  convenu,  aïant  entendu  de  bonne-foi  que  ledit  Bailion  étoit 
compris  parmi  les  ouvrages  qui  étoient  à  démolir,  l'ont  propofé  à  ceux 
qui  laifoieflt  cette  exécution  de  la  part  de  Son  AlteiTe  Electorale,  lefqueïs 
bien  loin  d'y  trouver  à  redire  ont  eux-mêmes  fait  le  prix  de  l'Ouvrage,  & 

G  3  l'ont 


5!     MEMOIRES,  NEGOT1 ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

A"AFho-  l'ont  ^  contînuef-  Ete  plus,  que  IX.  HH.  PP.  fur  la  première  plainte 
viKCf-s-  qu'on  leur  a  faite  fur  ce  iiijet,  aïant  fait  ceffer  la  démolition,  ce  qu'EUes 
Unies,      croyent  être  tout  ce  qu'on  peut  leur  demander ,  Elles  font-  obligées  feuîe- 

-  nient  d'ajouter,  qu'on  impute  à  tort  au  Colonel  &  Commandant  Roche- 
brune,  que  par  fes  Lettres  au  Confeil  d'Etat  il  eût  donné  occafion  à  la 
démolition  du  vieux  Baftion  du  Clergé,  vu  qu'on  peut  faire  voir  le  con- 
traire par  fes  Lettres.  Que  LL.  HI1.  PP.  efperent  &  s'affinent ,  que 
Son  AltefTe  Electorale  fe  contentera  à  la  fin  des  éclairciffemens  fur  ce 
point;  &  Elles  croient  avoir  de  leur  côté  fatisfait  à  tous  égards  à  la  Con- 
vention, étant  prêtes  à  exécuter  encore  ce  qui  pourroit  y  manquer,  fans 
qu'EUes  aient  donné  aucun  lieu  à  des  Plaintes  auiïi  vives,  comme  il  Elles 
avoient  enfreint  cette  Convention;  bien  loin  de-là,  Elles  croyent  pou- 
voir alléguer  plutôt,  que  Son  Aitefîe  Electorale  ne  l'a  pas  accompli  par 
raport  à  divers  points ,  dont  Elles  attendent  encore  l'exécution  ,  mais 
qu'EUes  ne  jugent  pas  neceflaire  de  s'expliquer  à  préfent  plus  amplement 
là-deffus,  ne  cherchant  rien  plus  qu'à  vivre  en  bonne  amitié  avec  Son 
Alteffe  Electorale  ,  quand  Elles  rencontrent  une  pareille  inclination,  fe 
contentant  d'avoir  démontré  qu'EUes  n'ont  rien  fait  iurquoi  Elles  dévoient 
aucune  fatisfaction. 

Que  pour  ce  qui  regarde  les  Ordonnances  pour  des  fourages  livrez  dont 
le  payement  ell  dû  à  î'Archévéché  de  Cologne,  LL.  HH.  PP.  adhérent 
à  cet  égard  à  ce  qui  a  été  allégué  par  leur  Refolution  du  14.  lanvier  der- 
nier, que , lorfqu'on  en  pourra  venir  à  une  autre  Conférence,  fur  la  fatis- 
faction  de  ces  Ordonnances,  il  faudra  auiïi  faire  réflexion  fur  telles  con- 
tre-prétentions que  l'Etat  a  à  faire  de  fon  côté.  Et  il  fera  fait  un  Extrait  de  cet- 
te Refolution  de  LL.  HH.  PP.  remis  par  l'Agent  Rofenboom  entre  les 
mains  du  Seur  Magis.  Que  de  plus  les  Seigneurs  Etats  des  Provin- 
ces refpectives  feront  encore  priez  de  fournir  au  Comptoir  du  Receveur 
General  une  bonne  &  fuffilànte  fomme  fur  leurs  arrérages  dans  la  Pétition 
pour  les  Magazins  de  fourage  durant  la  dernière  Guerre  ou  fur  le  profit 
de  la  réduction  &  cafïation  de  l'année  171 3,  afin  que  les  fufdites  Ordon- 
nances de  fourages  &  autres  de  la  même  nature  foient  acquitées. 

C  0  m  m  e  le  Refident  preflbit  fort  le  paiement  des  arrérages  que  les 
Etats  dévoient  à  l'Archevêché  de  Cologne  pour  les  fourrages  pendant  la 
dernière  Guerre,  ils  ne  defavouoient  pas  la  dette,  ni  regimboient-ils  à 
en  faire  le  paiement.  Ils  ne  vouloient  que  quelque  tems  pour  le  faire. 
Auiïi  écrivirent- ils  aux  Provinces  refpectives  de  la  Republique.  La  vûë 
étoit  de  les  porter  à  y  contribuer  leurs  contingens.  Ils  leur  indiquèrent 
fur  quels  fonds  on  devoit  en  prendre  l'argent.  Ce  fonds  devoit  être  fur 
l'épargne  qu'on  avoit  faite  fur  la  réduction  des  Troupes ,  d'abord  après  la 
Paix  d'Utrecht  en  171 3.  La  Province  de  Gueldres  y  confentit  d'abord, 
auffi-bien  que  quelques  autres  Provinces.  Cette  réduction  de  Troupes 
n'avoit  pas  encore  été  entièrement  aprouvée.  Aufii  le  Coni&l  d'Etat , 
toujours  fage  &  prevoiant,  fit-il  un  Avis  là-deffus,  qu'il  prefentaaux  Etats 

Gène- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIlf.  ss 

Généraux.     Cet  Avis  eft  fi  beau,  qu'on  trouve  à  propos  de  l'inférer  ici  en   A^mn 
Ton  entier.  DES  p*° 


VINCES- 

Unif.s. 

Lettre  du  Confcil  d'Etat  aux  Etats  Généraux ,  fur  une  

Répartition  de  Troupes  ;  du  24.  Janvier  1718. 

HAUTS  ET  PUISSANS  SEIGNEURS, 

POur  fatisfaire   à  la  Refolution  de  VV.  HH.  PP.  du  17. du  courant,   Lettre  du 
nous  avons   formé  l'Avis  fuivant ,    pour  concilier  les  fentimens  dif-  Confcil 
ferens  des  Provinces  fur  l'Article  des  Troupes,  comme  il  a  été  arrêté  par   d'Etat  pr. 
la  Refolution  de  l'Allemblée  extraordinaire  du  26.  de  Mai  dernier;  eiperant   tiondes" 
d'autant  plus  qu'il  trouvera  de  l'aprobation ,  que  par  raport  à  prefque  tous  Troupes. 
les  points  on  ell  porté  à  l'inclination  des  Provinces ,  fans  charger  l'Etat  en- 
tier de  plus  que  de  37124:  5:  o:par  an;  Somme  li  modique  ,    qu'elle  ne 
doit  plus  empêcher  la  Refolution  dudit  point  important,  &  la  formation  de 
l'Etat  de  Guerre. 

Pour  venir  au  propos,  les  fentimens  differens  des  Provinces  regardent 
ou  les  Compagnies ,  ou  les  Regimens ,  qui  fe  forment  des  Compagnies. 

Pour  s'accommoder  aux  Provinces  par  raport  aux  Compagnies,  pour 
autant  qu'elles  ne  conviennent  pas  fur  ce  fujet  ,  on  pourrait  accorder  , 
qu'il  reftera  à  la  repartition  de  la  Province  de  Gueldre  quarante  &  trois 
Compagnies  d'Infanterie,  au  lieu  de  quarante,  ce  qui  emporte  une  aug- 
mentation de  trois  Compagnies;  aucune  des  autres  Provinces  ne. devant 
être  portée  à  caffer ,  pour  plaire  à  la  Gueldres ,  de  leur  repartition  trois 
Compagnies  &  de  fe  charger  d'autres  articles  en  place. 

Qu'on  gardera  à  la  répartition  de  la  Province  de  Hollande  &  de  Weft- 
Frife  quatre  Compagnies  de  Dragons  de  plus  ,  &  quatre  Compagnies  d'In- 
fanterie de  moins. 

A  la  repartition  de  la  Province  d'Utrecht  une  Compagnie  de  Cavalerie 
de  plus,  &  deux  d'Infanterie  de  moins,  ou  quatre  Compagnies  de  Cavale- 
rie &  45.  d'Infanterie. 

A  la  repartition  de  la  Province  de  Frife  pareillement  une  Compagnie  de 
Cavalerie  de  plus  à  trouver  par  la  diminution  des  Gardes  du  Corps  du 
Prince  de  Nailan  ,  Stadhouder ,   à  la  fomme  concourante. 

Et  à  la  repartition  de  la  Province  de  Groeningue  de  môme  une  Com- 
pagnie de  Cavalerie  de  plus  ,  &  deux  d'Infanterie  de  moins, tout  ainfiqu'à 
la  repartition  d'Utrecht ,  ou  4.  Compagnies  de  Cavalerie  &  40.  d'Infan- 
terie. 

Mais, pour  ce  qui  regarde  les  trois  Compagnies  de  Cavalerie,  que  la 
Province  de  Zelande  voudroit  voir  mifes  fur  1  Etat  de  Guerre  à  la  place 
du  Régiment  du  Prince  de  Wurtemberg,  cela  eft  fi  directement  contrai- 
re à  la  Capitulation  &  à  la  promette  réitérée  que  VV.  HH.  PP.  ont 
faite  par  Lettre  il  n'y  a  que  peu  d'années  au  Duc  de  Wurtemberg,  que 

quel- 


VINCES 

Un  us. 


56    MEMOIRES,  NEGOTIATION5,  TRAITEZ,  ET 

Aftaires  quelques  portez  que  nous  foyons  à  nous  accommoder  à  l'inclination  des 
»Eë  Pbo-  Provinces  indiitin&ement ,  afin  de  venir  une  bonne  fois  à  un  pied  fixe 
par  raport  aux  Troupes  ,  nous  nous  trouvons  neantmoins  embarafle^ 
d'avifer  pour  une  affaire,  qui  eit  fi  peu  à  concilier  avec  la  parole  & 
l'honneur  de  l'Etat. 

Pour  pafTer  des  Compagnies  aux  Regimens  ou  aux  fentimens  differens 
là-delïus ,  &  pour  commencer  par  la  Cavalerie,  il  faut  en  premier  lieu 
confiderer  à  cet  égard ,  que  les  Efcadrons  devraient  être ,  fuivant  la  Re- 
folution  de  l'Affemblée  extraordinaire  du  26.  Mai  de  l'année  dernière  , 
de  4.  Compagnies ,  fans  que  la  Refolution  dife  de  combien  d'Efcadrons 
feront  les  Regimens. 

On  a  propofé  ci-devant,  &  fpecialement  le  2,  Novembre  1713,  de 
mettre  les  Regimens  de  Cavalerie  en  neuf  Compagnies  fous  un  Colo- 
nel, un  Lieutenant-Colonel ,  &  un  Major;  &  on  a  allégué,  pour  rendre 
cette  propoiition  agréable,  que  par-là  on  pourroit,  outre  le  profit  des 
apointemens ,  diminuer  confiderablement  l'inégalité  dans  les  degrés  d'a- 
vancement entre  les  Officiers  de  la  Cavalerie  &  de  l'Infanterie. 

Mais ,  cette  propofition ,  toute  utile  qu'elle  étoit,  n'étant  point  accep- 
tée, nous  joindrions  nôtre  Avis  à  celui  delà  Province  de  Hollande,  qui 
par  fa  Refolution  du  27.  d'Octobre  dernier  s'eft  déclarée  pour  des  Re- 
gimens de  fix  Compagnies,  ou  de  deux  Efcadrons  ,  chacun  de  trois 
Compagnies,  dont  on  pourra  faire  la  repartition  aufli-tôt  que  VV.  HH. 
PP.  auront  embraifé  ce  Projet  conciliatoire. 

2.  On  devroit ,  fuivant  la  fufdite  Refolution  du  2(5.  Mai ,  laiiTer  éteindre 
les  Regimens  de  Cavalerie  jufqu'à  quatorze ,  defquels  un  Etat  major  de- 
vroit être  mis  fur  la  Gueldre ,  fept  fur  la  Hollande,  deux  fur  la  Zelande  , 
&  un  fur  chacune  des  quatre  autres  Provinces. 

Cette  Répartition  des  Etats  majors  des  Regimens  s'accorde  fi  peu  avec 
la  Partition  des  Compagnies  ,  que  les  uns  &  les  autres  reliant  ainfi  il  en 
refultera,  non  feulement  une  très  grande  inégalité  entre  les  Provinces,  les 
unes  devant  établir  &  paier  deux  Capitaines  d'Infanterie  contre  un  Capi- 
taine de  Cavallerie,  les  autres  plus  que  deux  Capitaines  de  Cavallerie  con- 
tre un  Capitaine  d'Infanterie ,  mais  auffi  un  grand  préjudice  pour  les  Ca- 
pitaines de  Cavallerie  qui  font  fur  la  repartition  des  Provinces  de  la  derniè- 
re forte ,  c'efl-à-dire ,  pour  parler  clairement ,  fur  les  Repartitions  de  Hol- 
lande &  de  Frife. 

Ou  fi ,  pour  lever  ces  inconveniens ,  on  vouloit  repartir  les  Compagnies 
de  Cavallerie  fur  les  Provinces  fuivant  la  fufdite  Partition  des  Etats  Ma- 
jors des  Regimens ,  il  faudrait  renverfer  fans  deiîus  defibus  l'entier  Etat 
de  Guerre. 

Ce  qui  étant  très  defavantageux ,  il  n'y  a  pas  d'autre  expédient  forta- 
ble,  à  nôtre  avis,  que  de  repartir  les  principaux  apointemens  fur  les 
Provinces ,  à  proportion  de  leur  quotepart  aux  ibldes  de  la  Cavallerie  , 
tout  ainfi  que  cela  fe  pratique  à  l'égard  de  l'Infanterie;  &,  par  ce  qu'il 
ne  peut  pas  être  autrement  ,  fi-non  que  quelques  peu  de  Regimens  de 

Ca- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVÏII.        S7 

Cavallerie  foient  mis  fur  plus  d'une  repartition ,  de  renouveller  les  Refo-   AàtinÉ 
lutions  de  VV.   HH.   PP.   du   7.  Mars    1671. ,  4.  Février  &  28.  Mars   DES  Pk°- 
1672.,   lesquelles   portent,  que  le  rempliiTement  des  premières  Charges     Y*NCES* 
dans  les  Regimens  fe  fera  alternativement  entre  les  Provinces.  KI£S'  _ 

Quant  aux  Regimens  de  Dragons ,  en  cas  que  les  quatre  Compagnies  qui 
en  devroient  être  caflees  en  confequence  de  la  Refolution  du  26.  Mai , 
refbffent  au  fervice,  comme  on  a  avifé  ci-deiTus,la  fuite  en  feroit,  que  les 
Dragons  continueroient  à  faire  quatre  Regimens ,  &  que  par  confequent  il 
faudroit  y  avoir  un  Etat  Major  de  plus  que  fuivant  ladite  Refolution. 

Enfin ,  nous  ne  voyons  point ,  Hauts  &  PuiiTans  Seigneurs ,  comment  on 
pourra  faire  un  meilleur  arrangement  avec  les  Regimens  d'Infanterie,  fi- 
non,  que,  fuppofant  qu'il  n'y  en  aura  pas  moins  de  dix  Compagnies,  ils 
pourroient ,  félon  la  convenance  des  Provinces ,  être  départis  de  la  maniè- 
re fùivante. 

Sur  la  repartition  de  la  Province  de  Gueldres ,  trois  Regimens  de  onze  & 
un  de  dix  Compagnies ,  faifant  le  nombre  de  43  Compagnies. 

Sur  la  repartition  de  la  Hollande ,  un  Régiment  de  Gardes  &  encore 
deux  autres,  chacun  de  douze,  &  20.  Regimens  de  10.  Compagnies, 
faifmt  avec  une  Compagnie  détachée  237.  Compagnies,  fans  Iqs  Ecof- 
fois,  &  les  SuilTes. 

Sur  la  repartition  de  Zelande,un  Régiment  de  12 ,  &  5  de  10.  Compa- 
gnies ,  faifant  le  nombre  de  62.  Compagnies. 

Sur  celle  de  Utrecht ,  un  de  12 ,  &  3  de  11.  Compagnies ,  en  tout  45. 
Sur  la  repartition  de  Frife , un  Régiment  de  2  Bataillons,  chacun  de  12, 
&  encore  5  Regimens  de  1 2  Compagnies ,  faifant  84  »  auxquelles  il  fau- 
droit encore  ajouter  9  Compagnies ,  pour  remplir  le  nombre  que  la  Frife 
doit  payer  fuivant  la  partition  faite  :  mais  ,  comme  4.  de  ces  9  Compagnies 
font  çaïTées ,  non  pareeque  la  Province  de  Frife  foûtient  d'être  chargée 
-au  de-là  de  fa  quote-part,  mais  parce  qu'elle  foûtient  de  n'être  point  en 
état  de  pouvoir  fournir  entièrement  fa  quote-part  ;  &  que  les  devoirs , 
qu'on  a  faits  rjour  lui  faire  reprendre  lefdites  4  Compagnies ,  n'ont  été  juf- 
qu'à  préfent  d'aucun  accès  :  on  pourroit  joindre  le  plus  commodément  les 
f  Compagnies,  qui  exiflent  des  9,  aux  7  de  la  repartition  du  Païs  de 
Drente,  pour  faire  enfemble  par  provifion  un  Régiment  de  12.  Com- 
pagnies. 

Sur  la  repartition  d'Over-YHel ,  2  Regimens  de  11,  en  tout  22  Com- 
pagnies. 

Et  enfin,  fur  celle  de  la  Province  de  Groningue ,  un  Régiment  de  iS> 
&  2.  de  12.  Compagnies,  faifant,  y  compris  une  Compagnie  détachée, 
ou  bien  une  qui  doit  encore  être  levée ,  40.  Compagnies. 

Par  cet  arrangement ,  tous  les  Regimens  d'Infanterie ,  à  un  près ,  feront 
entièrement  chacun  fur  une  repartition,  ce  qui  feroit  à  fouhaiter  qu'il 
fût  même  praticable  par  raport  à  la  Cavallerie  ;  &  l'Etat  ne  feroit  char- 
gé que  de  trois  Etats  Majors  des  Regimens  d'Infanterie  au  delà  du  nom- 
bre arrêté  par  la  Refolution  du  26.  de  Mai. 

Tome  XL  H  Nous 


?S    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires       Nous  nous  perfuadons  ,  que  VV.  HH.  PP.  &  toutes  les  Provinces 
des  Pro-  conviendront,  que  par  ces  proportions  on  s'eft  accommodé  à  l'inclina- 

Unie"*    t^on  ^'un  cnacun  autant  °lu'^  a  pu  être  concilié  en  quelque  façon  avec 

L  l'égalité  &  la  juflice ,  avec  la  bonne-foi  &  le  fervice  du  Païs  ;  &  qu'El- 

les  viendront  une  bonne  fois  à  une  ferme  &  ferieufe  Conclufion  à  l'égard 
des  Troupes. 

Nous  éfperons  fur-tout,  du  moins  nous  fommes  obligez  en  vertu  de 
nos  charges  de  prier  ferieufement  &  de  recommander,  qu'on  prenne  en 
même  tems  de  telles  mefures ,  que  les  Troupes ,  une  fois  mifes  fur  un 
pied  ltable  ,  foient  tellement  entretenues  au  nombre  d'Hommes  &  de 
Chevaux  ,  comme  elles  feront  portées  fur  l'Etat  de  Guerre;  fans  quoi 
tout  efl  inutile,  &  comme  on  dit  autant  que  battre  l'eau,  ce  qui  ne  fauvera 
pas  la  Republique  de  fa  perte. 

Hauts  &  PuhTans  Seigneurs  ,  Nous  recommandons  VV.  HH.  PP.  à  la 
fèinte  Protection  de  Dieu.  A  la  Haie,  le  24.  Février  171 8. 

Paraphé 

J.  H.  v.  Wassenaer,  vt. 

Plus  bas, 

Par  Ordonnance  du  Confeil  d'Etat  des 
Provinces-Unies  des  Païs-Bas , 

Signé , 

S.  van  Slingelandt.  ' 


O  n  mettra  ici  des  Affaires  que  les  Etats  avoient  avec  d'autres  PuiiTan- 
ces.  On  avoit  en  Décembre  de  1717.  eu  une  Conférence  avec  le  Mini- 
itre  du  Roi  de  Pruffe.  Celui-ci  y  avoit  propofé  une  nouvelle  Alliance 
defenfive  entre  les  Etats  &  le  Roi  fon  Maître.  Les  Etats  y  temoigerent 
la  bonne  difpofition  de  la  Republique.  On  parcourut  depuis  les  vieux 
Traitez.  Cependant ,  on  n'alla  pas  plus  avant.  On  ne  put  auiîi  rien  re- 
foudre fur  un  Mémoire  de  Miniflre  Palatin  pour  régler  des  arrérages  dûs 
aux  Troupes  de  l'Eleâeur  Palatin ,  qui  avoient  fervi  en  Catalogne.  Ces 
prétendons  de  vieille  date  ne  paroifïbient  pas  requérir  une  fi  prompte  Re- 
ponfe  :  auffi  ne  met-on  ici  que  la  Copie  de  ce  Mémoire. 

Mémoire  du  Miniflre  Palatin  touchant  le  Paiement  des 
Troupes)   du  Samedi  22.  Janvier  171 8. 

HAUTS  ET  PUISSANS  SEIGNEURS, 


-  VV*  HTL  ??"  aiant  eu  la 


Mcmolri    \/v*  ntL  ^'J  aiant  eu  la   bonté   d'affeurer  l'Electeur  mon  Maître 
du  Mini-      V     parleurs  Lettres  du  15.  Mai  1717.  combien  elles  étoient  portées  à 
terminer  l' Affaire  de  la  liquidation  des  arrérages  dus  aux  Troupes  Palati- 
nes» 


latin. 


Ce  Mémoire  a  été  lu  le  Sa- 
rmdt  22.  Janv.  1718. 


Sig 


ne, 


Comte  de  Golstëin. 


E« 

des  Pro- 
vinces- 
Unies. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        59 

nés ,  qui  ont  fervi  pendant  la  dernière  Guerre  en  Catalogne  à  la  folde  de  Affaip. 
cet  Etat  :  le  foulïigné  Miniftre  de  Sadite  AltefTe  Electorale  fuplie  pour 
cet  effet  VV.  HI I.  PP.  de  vouloir  ordonner  que  les  CommifTaires  ci-de- 
vant nommez,  pour  examiner  ledit  compte  des  fufdits  arrérages,  lequel 
a  été  prefenté  à  VV.  HH.  PP.  le  f.  Novembre  1715.  par  le  CommilTaire 
Palatin  Hartman  ,  aient  à  faire  leur  raport,  &  de  lui  en  nommer  en  mô- 
me temps ,  pour  pouvoir  ajouter  les  points  au  fujet  defquels  il  pourroit  fe 
trouver  encore  quelque  difficulté ,  qui  pût  porter  du  retardement  à  finir  la 
fufdite  liquidation. 


Un  autre,  qui  fut  prefenté  par  l'Envoie  de  Mecklembourg ,  eut  le  mê- 
me fuccès.  C'eft  fur  une  fi  mince  pretenfion  qu'on  le  met  ici  pour  la 
cmïofité  des  gens. 

Mémoire  de  T  Envoie  de  Mecklembourg  3  pour  Paiement 
de  Solde;  du  3.  Janvier  171 8. 

HAUTS  ET  PUISSANS  SEIGNEURS, 

OU el que  Répugnance  que  le  Soulîigné  Confeiller  d'Etat  &  Envoie   Memoî™ 
Extraordinaire  de  Son  AltefTe  Sereniiîime  le  Duc  Régnant  de  Mec-   <*e  }'En- 
klembourg  a  toujours  eu  d'importuner  W.  HH.  PP.  il  en  a  affeurement  Meolden- 
beaucoup  à  retoucher  fi  fouvent  l'article  du  paiement  d'un  mois  de  folde  bourg, 
pour  la  marche  du  Régiment  de  Flohr ,  avancé  par  Son  AltefTe  Sereniflime 
&  négocié  en  ce  païs-ci  à  grand  intérêt  depuis  plus  de  4.  ans. 

Le  paiement  d'une  dette  fi  liquide  &  avérée  fe  trouve  accrochée  fur  la 
queftion  fi  l'Etat  ou  la  Province  d'Over-Yffel  doit  le  faire  ?  Cette  queftion 
n'aiant  pu  jufques  à  prefent  être  décidée ,  ni  voyant  quEile  faurok  l'être  , 
à  moins  qu'une  des  parties  ne  fe  relâche ,  puifque  les  autres  Provinces  dé- 
clarent de  ne  vouloir  pas  paier  pour  la  Province  d1Over-YfTel  ;  le  SouiTigné 
demande  donc  avec  tout  le  reipecl:  imaginable ,  fi  W.  HH.  PP.  trouvent  . 
qu'il  y  ait  la  moindre  aparence  de  juftice,  que  ce  feroit  à  Son  AltefTe  Sere- 
nilTime  Ton  gracieux  Maître  d'en  fuporter  la  perte  ? 

Certes,  quelque  favorable  compte  que  leSoufligné  ait  rendu  jufques  à  pre- 
fent là-deffus ,  rien  ne  fauroit  plus  empêcher  le  Sereniiîime  Duc  de  croire 
que  VV.  HH.  PP.  n'aient  conçu  quelque  mécontentement  contre  lui  , 
&  que  faifant  fi  peu  de  reflexion  fur  ce  qui  le  regarde ,  Elles  en  feront  bien 
moins  fur  ce  qui  efl  dû  à  toute  rigueur  d'équité  &  de  juftice  à  fes  trou- 
pes. 

H  2  H 


VINCES 

Unies. 


6o     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aïfa-ires        II  ne  refte  donc  au  Souffigné  que  de  prier  inftamment  VV.  HH.  PP. 

des  Pro-  ^e  vouloir  bien  trouver  un  expédient  pour  faire  paier  cette  petite  fomme 
d'un  fond  indiffèrent,  pour  ne  pas  en  charger  les  Provinces,  &  ne  pas 
fruflrer  plus  long-temps  Son  Alteffe  SerenilTime  de  fon  avance. 

Le  3.  Janvier  1718.  Signé  ^ 

VAN      SANDE. 

Il  arriva  au  commencement  de  cette   année  une  Affaire  affez  fin- 
guliere  &  fecrete.     Le   Comte   Gallash,   Ambaffadeur   de  l'Empereur  à 
Kome,  écrivit  au  Baron    de   Heems   à  la  Haie.     Le  contenu   de  cet- 
te Lettre  portoit  que  le  Nonce  Aldovrandi  à  la   Cour  de  Madrid   avoit 
écrit  au  Pape, pour    s'excufer  de   ce  qu'il    n'avoit  rien   fû   de   l'Entre- 
prife  fur  Sardaigne ,  que  cela  avoit  été  concerté  avec  Alberoni  par  l'Air - 
baffadeur  des  Etats  Riperda  ,  du  confentement  fecret  defdits  Etats.  Le  Baron 
de  Heems  en  avoit  parlé  à  quelques  Membres  des  Etats.  Ceux-ci  en  firent 
de  plaintes  à  l' Ambaffadeur  d'Efpagne  Beretti-Landi.     Celui-ci  fe  chargea 
d'en  écrire  à  fa  Cour.     Il  en  eut  bientôt  la  Reponfe,  qu'il  communiqua  aux 
Etats.  Elle  portoit,  que  le  Nonce  avoit  affiiré  le  Roi  d'Efpagne,  qu'il  n'a- 
voit écrit  rien  de  pareil.  Sur  cela,  les  Etats  affurerent  le  Baron  de  Heems 
qu'ils  n'avoient  jamais ,  ainfî  que  c'étoit  la  pure  vérité ,  fongé  à  rien  de  pa- 
reil. On  foupçonna  que  la  Cour  de  Rome  pouvoit  l'avoir  infinûé  au  Com- 
te Gallash ,  dans  la  veuë  d'en  rejetter  le  blâme  fur  la  Republique.     Quel- 
ques Miniftres  crurent  cependant  que  l' Ambaffadeur  Riperda  pouvoit  avoir 
de  fon  Chef  avancé  quelque  chofe  de  connivence  avec  Alberoni.     Ce  qui  y 
donnoit  lieu  venoit  de. ce  qu'on  le  regardoit  comme  un  brouillon  étourdi,  ca- 
pable de  cette  fauffe  démarche.     Auffi  cela  contribua-t-il ,  félon  la  penfée 
de  quelque  Minillre ,  à  fon  rapel,  qui  peut-être  fans  cela  lui  auroit  été  refu- 
fé.     Il  étoit   vrai  qu'il  y  avoit  eu  des  inltances  fecretes ,  réitérées  de  la 
part  de  la  Cour  de  la  Grande-Bretagne,  pour  le  rapeller,  puifqu'il  y  avoit  eu 
des  affaires ,  qui  faifoient  qu'elle  n'étoit  pas  contente  de  fa  conduite.     Cet 
Ambaffadeur   avoit  demandé  de  faire  un  tour  en  fa  patrie ,  ou  d'être  ra- 
pellé.     C'étoit  fur   ce   que  par  le  decez  de  fon  Epoufe  les  Affaires  de  fa 
famille  requeroient  quelque  foin.     Cependant ,  bien  des  gens  ont  crû  que 
fon  deffein  n'étoit  pas  de  retourner  en  Efpagne  \  mais  de  pouffer  fes  idées 
pour  négocier  le  Traité  de  Vienne ,  qui  fut  fait  quelque  année  après.   Ces 
idées  lui  paroiffoient  d'autant  plus  faciles ,  qu'elles  avoient  du  fondement 
fur  celui  de  la  Quadruple  Alliance  qu'on  negocioit ,   &  qui  fut  conclu  à 
Londres  la  prefente  année.   Cependant ,  quelque  Province  ne  paroiffoit  pas 
portée  à  le  rapeller  pour  éviter  la  depenfe,  qu'il  auroit  falu  faire  pour  en- 
voier  un  autre  Ambaffadeur  à  fa  place.     Auffi ,  en  vûë  d'un  tel  ménage , 
n'envoia-t-on  qu'un  Refldent  à  la  Cour  de  Portugal. 

Cette  Affaire  du  Nonce  Aldovrandi  donna  lieu  à  la  Province  de  Zelan- 
de  de  faire  faire  aux  Etats  Généraux  une  Reprefentation.    Elle  tendait  à 

ûter 


VINCKS- 

Unies. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  XVIII.        Ci 

ôter  tout  foupçon  à  l'avenir  que  les  Membres  des  Affaires  fecretes  ne  don-  Afutre» 
nent  des  Inflructions  fecretes  à  leurs  Miniltres  dans  les  Cours  Etrangères  DES  pR0 
fans  la  connoiffance  de  toute  l'Affemblée  des  Etats  Généraux.  Cette  Re- 
prefentation  portoit  en  fubftance ,  que  par  la  Réfolution  des  Etats  de  cette 
Province-là  du  2.  Juillet  1051.,  il  étoit  arrêté  que  les  Lettres  fecretes  des  Mi- 
niltres des  Etats  aux  Cours  Etrangères  feroient  en voiées  au  Greffier,  & 
qu'elles  feroient  remifes  aux  fept  Députez  de  l'AfTemblée  générale  pour  les  our 
vrir.  Cependant,  ceux-ci  ne  feroient  point  qualifiez,  mais  leur  feroitau  con- 
traire défendu  de  prendre  là-deffus  des  Résolutions.  Ils  feroient  feulement 
autorifez  d'envoier  de  tems  en  tems  aux  Minftres  de  l'Etat  les  Réfolutions 
prifes  par  les  Etats  Généraux,  &  autres  Pièces, pour  mieux  avancer  leurs 
CommilTions.  Cependant ,  depuis  ce  tems-là  ,  &  même  fouvent,  comme  en 
1656,  1668,  1671,  &c.  l'Autorifation  étoit  allée  fi  loin  que  quelques  Dé- 
putez avoient  négocié  fans  la  connoiffance  des  Seigneurs  les  Etats  Généraux. 
De  forte  que  lors  qu'on  a  pris  des  Réfolutions  fans  la  participation  des  Pro- 
vinces, il  en  eit  refulté  des  conteftations  &  des  proteftations ,  fur-tout  de 
la  part  de  la  Zelande,  ainfi  qu'il  paroiffoit  par  la  Réfolution  du  1.  Mars 
1672.  L'on  en  a  même  pris  depuis ,  ce  qui  alloit  contre  l'ordre  ôc  la  cou- 
tume de  l'Etat.  Cela  ne  pouvoit  caufer  que  de  la  diffidence  &  difcorde 
entre  les  confederez.  Par  confequent ,  cela  exigeoit  abfolument  du  remède. 
Comme  l'on  avoit  attribué  l'Affaire  que  le  Comte  de  Gallash  avoit  écrit  au  Ba- 
ron de  Heems  du  Pape  &  du  Nonce  Aldovrandi ,  à  une  méchante  Con- 
duite de  l'Ambaffadeur  Riperda ,  on  lui  avoit  accordé  fon  rapel.  Cepen- 
dant ,  on  le  chargea  avant  que  de  partir  de  faire  des  Reprefentations  à  cette 
Cour-la.  Le  fujet  en  étoit,  que  le  Conful  de  l'Etat  qui  étoit  à  Barcelonne 
leur  avoit  mandé  qu'on  vouloit  y  rehauffer  les  Droits  de  quelques  mar- 
chandifes  qui  y  alloient  de  la  Hollande.  Il  avoit  réitéré  que  ce  rehauffe- 
ment  fe  mettoit  en  pratique ,  au  grand  préjudice  du  Commerce  de  la  Repu- 
blique. Les  ordres  qu'on  donna  à  l'Ambaffadeur  Riperda  étoient  d'infi- 
nuè'r  à  cette  Cour-là,  que  les  Etats  ne  pouvoient  regarder  ce  rehauffement 
que  comme  un  extrême  defavantage  au  commerce  de  leurs  fujets  en  Efpa- 
gne.  D'ailleurs ,  que  cela  tendoit  directement  contre  les  Traitez  qu'ils 
avoient  avec  cette  Couronne-là.  Par  le  dernier  conclu  entre  la  Grande-Bre- 
tagne &  l'Efpagne,  il  étoit  flipulé  que  les  effets  des  Sujets  Britanniques  ne 
pGurroient  être  fournis  à  des  Droits  plus  hauts  que  ceux  auxquels  ils  étoient 
fournis  au  tems  de  feu  le  Roi  Charles  II.  Dans  le  dernier  Traité  en- 
tre l'Etat  &  l'Efpagne  ,  il  étoit  ftipulé  que  les  fujets  de  l'Etat  &  leurs  ef- 
fets jouiroient  des  mêmes  Droits ,  immunitez,  &  exemptions  que  les  propres 
Sujets  de  l'Efpagne  &  des  Nations  les  plus  favorifées.  C'efl  pourquoi  l'on 
s'attendoit  de  l'équité  &  de  l'Amitié  de  Sa  Majefté ,  que  ce  rehauffement 
à  Barcelonne  feroit  révoqué,  &  qu'Elle  donnerait  de  pareils  ordres  dans 
tous  les  autres  Etats  dépendants  de  fa  Couronne.  L'on  fit  même  de  plus. 
L'on  commit  des  Députez  pour  en  parler,  ainfi  qu'ils  rirent ,  au  Marquis 
Beretti-Landi  Ambaffadeur  de  ce  Roi-là.  On  lui  dit ,  que ,  fuivant  fon  Mé- 
moire du  2i.  Septembre  paffé,  il   avoit  lui-même  aiîeuré  que  le  Roi  fon 

II  3  Mai- 


VINCES- 

Unies. 


6i      MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AtttàflA  Maître  favoriferoit  le  Commerce  des  Sujets  de  la  Republique,  &  auroit  à 
dés  Pko-  cœur  leurs  intérêts ,  comme  les  Tiens  propres ,  &c.  Cet  Ambafîadeur  étant 
•pris  au  mot  ne  fut  que  promettre  par  de  belles  paroles  qu'il  feroit  leutr  A- 
vocat  auprès  de  fa  Cour.  Pour  éluder  ce  qu'on  pouvoit  lui  dire,  il  alla  fai- 
re des  plaintes  au  Prefident  de  Semaine  contre  le  Gazettier  de  Rotterdam. 
Celui-ci  avoit  inféré  dans  fa  Gazette  une  Lettre  fupofée  être  écrite  par  le 
Sultan  Ottoman  au  Roi  fon  Maître.  .  On  lui  dit  en  cette  occafion  ,  que  ce 
Gazettier  avoit  été  réprimandé,  &en  avoit  fait  une  Retraélation  dans  une 
des  fes  Gazettes  fui  vantes.  Pendant  prefque  le  même  tems  on  fut  furpris 
qu'on  eut  la  Nouvelle  que  l'Amiral  Efpagnol  avec  fix  Navires  de  Guerre 
fortant  de  Cadix  avoit  attaqué  trois  de  ceux  des  Etats.  Ils  s'étoient  can- 
nonez  pendant  fix  heures.  Cette  Nouvelle ,  qui  paroiiïbit  être  facheufe , 
n'étonna  pas  dans  la  fuite.  La  raifon  étoit  qu'on  aprit ,  que  les  Efpagnols 
avoient  pris  les  Navires  des  Etats  pour  des  Algériens.  On  avoit  enfuite 
reconnu  la  meprife ,  &  rentrèrent  enfemble  dans  la  Baye  de  Cadix.  Il  y 
eut  cependant  bien  de  gens  tuez  de  part  &  d'autre. 

Comme  il  falut  dans  la  fuite  remplacer  l' AmbafTadeur  Riperda ,  on  choi- 
fit  pour  aller  à  Madrid  en  fa  place  un  jeune  homme  apeilé  Monfieur  van 
der  Meer.  Il  étoit  de  la  Magiilrature  de  Leide.  On  avoit  enfuite  vu  que 
ce  choix  avoit  été  extrêmement  aprouvé.  La  raifon  a  été  qu'on  a  vu  par 
fa  Conduite  extraordinairement  fage ,  qu'il  pofledoit  toutes  les  bonnes  quali- 
tez  pour  s'aquitter  dignement  a  un  emploi  fi  difficile'.  Auffi  eut-on  égard 
à  fon  choix ,  qu'il  avoit  hérité  de  fon  Père  toutes  les  lumières  pour  une 
conduite  fort  fage  &  prudente. 

11  y  avoit  auffi  à  choilir  une  Perfonne,  pour  fucceder  à  T  AmbafTadeur 
Buys  en  France.  Le  Secrétaire ,  que  celui-ci  avoit  laifTé  à  la  Cour  de  Fran- 
ce, leur  manda  qu'elle  avoit  nommé  un  nouvel  Ambafîadeur  pour  relever  le 
Marquis  de  Chateauneuf.  Ce  nouveau  nommé  avoit  été  voir  le  Secrétai- 
re. 11  lui  avoit  témoigné  combien  il  étoit  ravi  de  cet  emploi.  La  raifon 
étoit  qu'il  étoit  auprès  de  la  Republique.  Sur  cette  Nouvelle  les  Députez 
de  la  Gueldre  mirent  fur  le  tapis ,  qu'il  étoit  plus  que  tems  de  renvoier  en- 
core de  la  part  des  Etats  un  AmbafTadeur  en  France.  Ceux  de  Zelande 
&  de  quelques  autres  Provinces  furent  du  même  avis.  C'étoit  dans  la 
croiance ,  difoient-ils ,  que  c'étoit  de  l'honneur  de  la  Republique  à  ne  plus 
fouffrir  qu'on  attendit  plus  long-tems  à  y  envoier  un  AmbafTadeur.  Il  fut 
là-deiïus  refolu  qu'on  écriroit  aux  Etats  de  celle  de  Hollande  une  Lettre  qui 
leur. fut  envoiée.  Elle  portoit  en  fubfïance,  qu'il  s'étoit  écoulé  l'efpace  de 
deux  ans  après  le  retour  de  TAmbafTadeur  Buys.  Que  l'Etat  aiant  le  bon- 
heur de  vivre  en  une  entière  amitié  avec  la  France ,  &  étant  d'ailleurs  en- 
tré en  une  nouvelle  Alliance  avec  Elle ,  il  étoit  de  l'intérêt  de  l'Etat  que 
cette  amitié  &  cette  alliance  fut  cultivée  de  fa  part.  A  cette  fin,  devoit- 
il  avoir  de  fa  part  un  Ambailadeur  à  cette  Cour-là.  Qu'il  auroit  été  bon 
avant  le  retour  de  Monfieur  Buys  ,  ou  du  moins  immédiatement  après  a 
d'avoir  nommé  une  autre  perfonne  pour  ce  pofte-là.  C'étoit  d'autant  qu'on 
avoit  fouvent  fait  entendre  que  cette  Cour-là  s'y  attendoit.  D'ailleurs,  que 

ce 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII. 


63 


VINCES- 

Unîes. 


ce  feroit  d'un  mauvais  effet  de  traîner  d'avantage  une  telle  nomination.  Affaibfr 
Par-là  on  donnerait  une  mauvaife  idée  de  la  Conftitution  du  Gouverne-  DES  Pro* 
ment.  Cela  même  à  l'Amitié  &à  l'Alliance  entre  la  France  &  l'Etat,  & 
derangeroit  les  propres  intérêts  de  la  Republique.  D'ailleurs,  que  la  Provin- 
ce de  Hollande  étant  chargée  fur  l'Etat  de  Guerre  des  apointemens  d'un 
Ambafladeur  en  France ,  il  n'étoit  pas  raifonnable  qu'elle  profitât  d'avan- 
tage du  cours  de  ces  apointemens  ,  pendant  que  d'autres  Provinces 
étoient  chargées  d'autres  articles  onéreux.  Que  comme  les  autres  Provin- 
ces vouloient  pour  cette  fois  avoir  la  complaiiance  de  déférer  à  la  nomina- 
tion qu'elle  feroit  d'une  perfonne  propre  pour  un  tel  emploi ,  éclatant  & 
important,  on  s'attendoit  à  une  telle  nomination.  Elle  feroit  pefée  félon 
la  haute  iageffe  des  Etats  de  la  dite  Province ,  qui  verroient  &  feroient 
convaincus  de  la  neceflité,  que  cette  nomination  ne  pouvoit  fouffrir  un 
plus  long  délai.  C'étoit  pourquoi  l'on  s'attendoit  qu'ils  propoferoient ,  tant 
plutôt  tant  mieux  ,  quelqu'un  pour  le  revêtir  de  ce  cara&ere-là ,  ou  du 
moins  d'autorifer  leurs  Députez  d'en  convenir  avec  ceux  des  autres  Pro- 
vinces. 


Extrait  des  Refolutions  de  LL.  HH.  PP.  pour  envoler 
un  Ambaffadeur  en  France  ;  du  Mercredi  19.  y  an- 
vier  1718, 


LE  s  Sieurs  Députez  de  la  Province  de  Gueldre  reflechiflant  fur  laLet-   Rcfolu- 
tre  du  Secrétaire  Skeltus,  par  laquelle  il  donne  connoiflànce  à  LL.    tiond'en- 
HH.  PP.  qu'on  a  accordé  au  Seigneur  Marquis  de  Châteauneuf  Ambafla-    4°'?r!j-n 
deur  de  France  de  pouvoir  retourner,  &  que  le  Seigneur  deMorviile  étoit    deur'en" 
nommé  pour  venir  ici  en  qualité  d' Ambafladeur  en  fa  place,  ont   donné   France, 
en  confideration  à  LL.  HH.  PP.  s'il  n'étoit  pas  plus  que  temps  de  ren- 
voier  encore  de  la  part  de  l'Etat  un  Ambafladeur  en  France ,  &  de  nom- 
mer pour  cela  quelqu'un  fans  plus  de  délai  ;  déclarant  que,  pour  cette  fois  , 
ils  vouloient  bien  déférer  cette  nomination  à  la  Province  de  Hollande  & 
de  Weil-Frife;  mais  avec  cette  amiable  &  preflante  demande,  qu'Elle  ne 
veuille  pas  différer  d'avantage  à  choifir  pour  cela  une  perfonne  propre  & 
capable  pour  la  propofer  à  LL.  HH.  PP.  à  Jaquelle  propofition  les  Sei- 
gneurs Députez  de  la  Province  de  Zelande  &  des  autres  Provinces  fuivan- 
tes  fe  font  conformez,  étant  tous  enfemble  dans  la  croiance  que  l'intérêt 
aufti  bien  que  l'honneur  de  l'Etat  ne  peuvent  plus  fouffrir  que  l'on  attende 
plus  long-temps  à  envoier  un  Ambafladeur  en  France.  . 

Sur  quoi  aiant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  qu'il  feroit  re- 
prefenté  par  Lettres  aux  Seigneurs  Etats  de  Hollande  &  de  Welt-Frife  , 
qu'il  s'eil  écoulé  l'efpace  de  2  .ans  que  le  Sieur  Buys  efl  revenu  de 
l'Ambaffade  de  France.  Que  l'Etat  aiant  le  bonheur  de  vivre  en  une  en- 
tière amitié  avec  Sa  Majeilé  de  France,  &  d'être  par  deflus  entré  dans 
une  nouvelle  Alliance  avec  Elle,  il  ell  de  l'intérêt  de  l'Etat,  que  cette 

.    amitié 


Affaîrf.s 
des  Pro- 
vinces- 
Unies. 


64       MEMOIRES,  NEGOCIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

amitié  &  alliance  foit  cultivée  de  la  part  de  l'Etat  en  toutes  leurs  parties  ; 
&  à  cette  fin  eit-il  tenu  d'avoir  un  Ambaffadeur  de  fa  part  à  la  Cour  de 
France.  Qu'il  auroit  été  bon  avant  le  retour  du  Sieur  Buys  ,  ou  du 
moins  immédiatement  après,  on  eut  nommé  &  commis  une  autre  perfonne 
propre  pour  ce  pofte-là.  Qu'on  a  plus  d'une  fois  fait  entendre  à  LL.  HH. 
PP.  qu'on  s'y  attendoit  de  la  part  de  la  France,  &  que  c'étoit  d'un  mau- 
vais effet,  que  la  délibération  fur  cela  ait  û  long-temps  trainé.  Que  de  la 
part  de  la  Province  de  Hollande.  &  de  Weil-Frife  aiant  été  témoigné  de 
l'inclination  d'en  nommer  quelqu'un  parmi  eux ,  les  autres  Provinces  ont 
bien  voulu  avoir  la  complaifance  pour  Elle  d'attendre  pour  cette  fois  une 
nomination  d'une  perfonne  propre  d'entre  ceux  de  fon  Corps.  Cepen- 
dant, qu'il  étoit  déformais  le  temps,  &  même  plus  que  temps,  qu'il  foit 
prife  là-delfus  une  finale  refolution,  attendu  que  cette  affaire  ne  peut  pas 
refier  plus  long-temps  fufpenduè";  fans,  au  defavantage  de  l'Etat,  donner 
une  méchante  idée  de  la  Conititution  de  fon  Gouvernement  ;  fans  nuire  à 
l'amitié  &  à  l'alliance ,  qu'il  y  a  entre  la  France  &  l'Etat  ;  &  fans  déranger 
les  propres  intérêts  de  l'Etat.  D'ailleurs,  que  la  Province  de  Hollande 
c'tant  chargée  des  apointemens  d'un  Ambaffadeur  en  France  fur  l'Etat  de 
guerre ,  ii  n'efl  pas  raifonnable  qu'Elle  profite  d'avantage  du  cours  de  ces 
apointemens  ,  pendant  que  par  contre  d'autres  Provinces  font  chargées 
d'autres  articles.  Que  LL.  HH.  PP.  efperent  &  s'attendent  que  lefdits 
Seigneurs  Etats  pefant  le  fait  avec  leur  haute  fageffe ,  feront  convaincus 
que  la  nomination  &  l'envoi  d'un  Ambaffideur  en  France  ne  peut  point 
fouffrir  un  plus  long  délai.  C'eft  pourquoi  LL.  HH.  PP.  prient  amiable- 
ment,  auffi  bien  qu'initamment,"que  lefdits  Seigneurs  Etats  veuillent,  tant 
plutôt  tant  mieux,  propofer  quelqu'un  pour  revêtir  du  Caractère  d' Am- 
baffadeur en  France;  ou  d'autorifer  les  Sieurs  leurs  Députez  pour  choifir 
pour  cela,  avec  ceux  des  autres  Provinces,  une  perfonne  propre,  &  qui 
ait  les  qualitez  requifes. 

Comme  ces  Etats  de  Hollande  fe  feparerent ,  leurs  Membres  fe  chargè- 
rent de  fe  faire  inflruire  là-deffus  par  leurs  Villes  refpeclives.  A  leur  re- 
tour dans  l'Affemblée  fuivante ,  ces  Etats-là  nommèrent  pour  cet  Emploi 
Monfieur  Hop ,  Fils  du  Treforier  General.  Us  firent  porter  ce  choix  à 
l'Affemblée  de  la  Généralité,  qui  fut  unanimement  aprouvé.  Ce  nouveau 
nommé  étoit  déjà  comme  Echevin  dans  la  Magiftrature  de  la  fameufe  Vil- 
le d'Amflerdam.  Il  avoit  toutes  les  qualitez ,  pour  bien  s'aquiter  de  cet 
emploi.  La  fageffe  &  la  prudence  avoient  prévenu  fon  âge.  On  étoit 
convaincu  qu'il  avoit  une  grande  étendue  de  lumières  ;  une  pénétration  fur- 
prenante  ,  &  im  zèle  éloigné  de  toute  diffimulation  pour  le  bien&  l'avanta- 
ge de  fa  Patrie.  On  lui  donna ,  comme  de  coutume,  une  Commiffion  pour 
prendre  feance  de  la  part  de  ces  Etats  de  Hollande  à  l'Affemblée  de  la  Gé- 
néralité. On  convint  de  lui  donner  trente  mille  florins  par  an  d'apointe- 
mens.  Il  devoit  d'ailleurs  dreffer  en  compte  les  fraix  extraordinaires.  C'étoit 
fuivant  un  Règlement  de  l'Etat  par  raport  à  les  Miniitres  dans  les  Cours 

Etran- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  XVIII. 


6^ 


Etrangères.  On  ajoutera  ici  par  anticipation ,  que  comme  les  Etats  de  Affaire 
Hollande  ne  font  jamais  rien  qu'avec  la  plus  grande  fageiTe,  au  retour  de  DES  ,>rt°- 
Monfieur  Hop  de  cette  Ambaffade-Ià ,  ils  nommèrent  pour  y  lucceder  Mon-     u^cEts* 

f]eur  van  Hoye  ,  qui  a  fait  voir  dans  les  occafions  les  plus  difficiles ,  qu'il    '__ 

poffedoit  aulîi  des  qualitez  pareilles  à  fon  Predeceffeur.  L'on  ne  doit  pas 
s'imaginer  que  ce  qu'on  dit  foit  une  flatterie ,  puis  que  n'aiant  aucune  re- 
lation à  ces  deux  Ambafladeurs,  on  ne  fait  que  dire  la  vérité.' 

Par  raport  au  rapel  du  Marquis  de  Chateauneuf ,  Ton  trouvoit  qu'il 
fbrtiroit  de  fon  Ambaflade  avec  aplaudiffement  &  avec  tous  les  agré- 
mens  les  plus  fatisfaifans.  En  premier  lieu ,  de  la  part  des  Etats  on  lui 
temoignoit  toute  la  fatisfaction  poiïible.  En  fécond  lieu ,  il  avoit  tout 
fujet  de  fe  louè'r  de  fa  Cour.  Le  Prince  Régent  lui  témoigna  par  une 
Lettre ,  que  c'étoit  à  regret  qu'on  deferoit  à  (es  infiances  pour  être  rapel- 
le  ,  puifque  la  Cour  étoit  très-contente  de  bons  fervices  qu'il  lui  avoit  ren- 
dus. Qu'on  augmenteroit  la  penfion  viagère  qu'il  avoit  de  fix  à  douze 
mille  livres ,  qu'il  auroit  la  première  place  vacante  dans  le  Confeil  d'Etat  ; 
qu'on  l'indemniferoit  des  grands  rabais  qu'il  avoit  foufferts  par  le  change 
des  fommes  qu'on  lui  avoit  fait  toucher ,  &  qu'on  lui  fourniroit  de  quoi 
s'aquitter  de  fes  dettes.  C'étoit  afin  de  ne  pas  donner  lieu  à  fes  créan- 
ciers de  crier  après  lui,  ainfi  qu'il  étoit  arrivé  à  l'Ambafladeur  de  Mofco- 
vie  Matueoff,  qui  avoit  fait  une  Efpece  de  Banqueroute  en  partant  de 
la  Haie. 

Puifque  l'on  efl  furie  Chapitre  des  Ambafladeurs,  il  fera  bon  dédire 
qu'on  a  déjà  dans  quelqu'un  des  derniers  Tomes  de  ces  Mémoires  raporté 
une  Affaire,  auquel  lieu  l'on  fe  raporte.  On  ajoutera  feulement ,  que  c'é- 
toit qu'on  avoit  pris  une  Refolution  de  retrancher  le  defraiement  pendant 
trois  jours  aux  Ambafladeurs  Etrangers  lors  de  leur  Entrée  publique ,  & 
de  leur  faire  prefent  de  mille  Ecus  au  lieu  de  la  depenfe.  Cela  n'avoit 
pas  eu  lieu  par  l'opofition  qu'il  y  avoit  eu  de  la  part  de  quelques  Ambaf- 
ladeurs ,  comme  de  la  part  du  Prince  Kourakin  &  du  Marquis  Beretti- 
Landi.  Ceux-ci  avoient  fait  grands  préparatifs  pour  leur  Entrée.  Ceux- 
ci  ne  fervirent  de  rien,  parce  qu'ils  ne  vouloient  pas  fe  foûmettre  à  don- 
ner un  exemple  contre  la  pratique  ordinaire.  Auiïi  comme  l'on  atten- 
doit  le  nouvel  Ambafifadeur  de  France  les  États  prirent  la  Refolution  de 
remettre  ce  point  du  Cérémonial  fur  l'ancien  pied,  ainli  qu'il  étoit  prati- 
qué auparavant.  C'ell  ainii  qu'on  peut  voir  par  la  Refolution  mê- 
me que  voici. 

Extrait  du  Rcgi/lre  des  Rcfolutions  de  LL.  HH.  PP. 
pour  remettre  Jur  P ancien  pied  k  Traitement  des  Am- 
bafladeurs; du  Lundi  14..  Mars  1718. 

PA  r  reafïumtion  étant  délibéré  fur  le  raport  des  Sieurs  Hazenbroeck  Traite- 

&  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP.  fur  les  Affaires  des  Finances ,  aiant  ™™£J™ 

en  confequence ,  &  pour  fatisfaire  à  leur  Refolution  Commiflbriale  du  19.  <jeurs. 
•   l'orne  XL                                              I                                                    de 


VINCES- 

Unies. 


66     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Attuv.es  de  Janvier  dernier,  examiné  avec  les  Srs.  Députez  du  Confeil  d'Etat  &de 
tes  Fro-  ia  Chambre  des  Comptes,  comment  feroit  pour  l'avenir  réglé  le  Traitement 
des  Ambalîadeurs  des  PuilTances  étrangères  à  leur  Entrée  :  il  a  été  trouvé 
bon  &  arrêté,  que  le  Traitement  des  Ambaffadeurs  des Puiffanees  Etrangè- 
res fera  fait  fur  le  pied,  qui  a  été  jufques  ici  en  ufage.  Et  lefdits  Sieurs  Ha- 
zenbroeck  &  autres  Députez  de  LL.  IIH.  PP.  fur  les  Affaires  des  Finan- 
ces font  par  celle-ci  requis  &  commis,  pour,  conjointement  avec  les  Sieurs 
Commis  du  Confeil  d'Etat  &  de  la  Chambre  des  Comptes  de  la  Générali- 
té à  être  nommez  par  eux-mêmes ,  examiner  de  quelle  manière  un  tel  Trai- 
tement pourra  être  fait ,  avec  le  meilleur  ordre  &  ménage ,  fans  amoindrir 
l'honneur  de  l'Etat ,  d'en  faire  le  raport  de  tout  à  l'Affemblée. 

Les  Sieurs  Députez  de  la  Province  de  Zelande  ont  déclaré,  que,  fui- 
vant  leur  avis,  par  laRefolution  prife  de  ne  point  traiter  les  Ambaffadeurs , 
on  de  voit  y  perfifler,  &  ont  contredit  à  la  Refolution  ci-deffus. 

Une  Affaire ,  qui  étoit  fur  le  tapis  en  ce  même  tems-là ,  fut  que  le  Mini- 
lire  de  la  Pruffe ,  avoit  depuis  quelque  tems  fait  des  plaintes  contre  la 
Compagnie  de  Hollande  des  Indes  Occidentales.     Elles  étoient,tant  par 
raport  à  un  Navire  qui  avoit  été  pris  par  une  Fregatte  de  cette  Compa- 
gnie-là fur  les  Côtes  d'Afrique,  quoi  que  fans  Pavillon  de  ce  Roi-là,  il  y 
avoit  environ  deux  ans  ;  que  par  raport  à  deux  Chaloupes  prifes  &  amenées 
à  Curaçao  fur  la  fin  du  fiecle  dernier.     Ce  Miniftre  fut  tout  d'un  coup 
tranquille  là-defîus,  &  fit  celTer  fes   plaintes.     La  raifon  étoit  que  ce  Roi 
fit  la  ceffion  de  fes  Forts  fur  les  Côtes  d'Afrique  à  la  dite  Compagnie. 
Cette  ceffion  étoit  moiennant  une  fomme  d'argent  fur  la  main,  &  une  au- 
tre lors  que  la  Compagnie  feroit  en  poffelTion  de  ces  Forts-là.     D'ailleurs, 
ladite  Compagnie  devoit  faire  prefent  à  ce  Roi  de  douze  Nègres  de  haute 
ftaturc,  dont  fix  auroient  chacun  un  Colier  d'Or.  Ce  Roi  vouloit  leur  faire 
aprendre  à  jouè'r  à  la  tête  de  fes  Grands  Grenadiers.    • 
•   Cette  Affaire  étant  finie ,  il  en  fut  remife  une  autre  fur  le  tapis.     Il  y 
avoit  quelque  année  qu'elle  duroit.  C'elt  ainfi  qu'on  en  a  parlé  en  divers 
lieux  des  Tomes  precedens.il  s'agiffoitde  la  reprilè  que  des  Zelandois  avoient 
faite  fur  les  François  d'un  Navire  Anglois  apelle  Nagtingal  Galley.     Les 
intereffez  dans   le  Navire  repris  avoient  demandé  que  le  Miniftre  Anglois 
Withworth  eut  une.  Conférence  pour  un  Accommodement  avec  les  Capi- 
taines Zelandois.     Cette  Conférence  avoit  été  accordée.    Cependant ,  les 
Députez  de  la  Zelande  n'y  avoient  confenti  qu'à  condition  qu'on  n'y  par- 
leroit  que  fur  le  pied  d'une  Propofitiou  de  leur  Province  du  21.  Septembre 
précèdent.  Celle-ci  ne  rouîoit  cependant  point  contre  cette  Affaire  particu- 
lière, mais  elle  étoit  générale  contre  tous  lesReclamans  de  Navires;  même 
ceux  de  France  pris  après  la  Paix  d'Utrecht.  Quoique  Je  Miniltre  Anglois 
eut  prefenté  là-deflus  un  court  Mémoire ,  il  n'y  eut  pour  lors  aucune  fuite. 

Les  Etats  avoient  reçu  en  Février  de  l'année  précédente  1717.  une  Let- 
tre du  Grand -Seigneur.  Elle  rouîoit  fur  le  deffein  de  la  Paix  entre  la 
Porte  &  l'Empereur.    Le  Prince  Eugène  avoit  reçu  la  Pyeponfe  à  une  qu'il 

avoiç 


VINCES» 

Unies, 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  67 

avoit  écrite  au  Premier  Vifir.  Cette  Reponfe  portoit  que  le  Sultan  Ot-  Amins'i 
toman  vouloit  la  Paix.  Il  laifToit  au  choix  de  l'Empereur  une  de  3.  Fia-  DES  Pr°- 
ces  qu'il  indiquoit.  Cette  Paix  devoit  être  négociée  par  les  Miniftres 
d'Angleterre  &  de  Hollande.  On  aura  vu  plus  haut ,  que  Venife  y  en- 
voioit  auffi  un  Minillre.  Après  quelques  Conférences  entre  les  Etats ,  il 
fut  refolu  de  faire  une  Reponfe  au  Sultan.  On  remit  celle-ci ,  ornée  de 
riches  agréemens ,  au  Secrétaire  du  Comte  Collier  Ambafladeur  de  l'Etat 
à  la  Porte ,  qui  avoit  aporté  cette  Lettre-là ,  &  qui  s'en  retournoit  à 
Conftantinople.  Ce  Secrétaire  étoit  chargé  de  quelques  InftrucHons 
pour  ledit  Comte  touchant  ladite  Comediation  de  l'Etat  avec  la  Gran- 
de-Bretagne. 

Ce  n'étoit  pas  avec  médiation ,  qu'on  devoit  négocier  avec  la  France 
pour  la  reftitution  des  Deferteurs  refpeclifs.  La  propofition  en  avoit  été 
taite  quelque  tems  auparavant  par  le  Prince  Tingri.  Les  Etats  n'y  re- 
ginberent  point  d'abord  ;  fi-non  en  difant ,  qu'on  devoit  en  faire  une  Con- 
vention de  concert  avec  le  Marquis  de  Prié ,  par  raport  auffi  aux  Trou- 
pes Impériales.  Le  Prince  Tingri  y  aiant  donné  les  mains,  la  pro- 
pofition fut  envoiée  au  Prince  Eugène,  comme  Gouverneur-General  du 
raïs-Bas  Autrichien.  Ce  grand  Prince  y  aquiefça  d'abord.  Il  remit  au 
Marquis  de  Prié  la  Nomination  d'un  General  pour  faire  la  convention  avec 
le  Prince  de  Tingri  de  la  part  de  la  France,  &  avec  le  General  Murray  de 
la  part  des  Etats  de  la  Republique.  Le  Marquis  nomma  de  fa  part  le  Ge- 
neral Vrangel.  Les  Etats ,  en  envoiant  leurs  Pleinpouvoirs  au  General 
Murrai  pour  traiter  là-defllis  avec  celui  nommé  par  le  Marquis  de  Prié ,  fi- 
rent quelques  EclairciiTemens.  On  trouva  à  propos  de  les  faire ,  pour  évi- 
ter des  Difputes.  Pour  cela ,  il  faloit  faire  quelque  changement  au  projet  de 
la  Convention.  Comme  les  Etats  n'avoient  point  d'Intendans ,  ni  de 
CommiiTaires  de  Guerre ,  ni  de  Receveurs  dans  les  Places  de  la  Barrière , 
&  même  les  Troupes  de  l'Etat  n'étant  pas  directement  paiées ,  mais  bien  par 
les  Provinces  de  la  Republique  fur  lefquelles  elles  étoient  reparties,  ils 
trouvèrent  à  propos  de  régler  la  recompenfe  à  ceux  qui  livreraient  des 
Deferteurs  :  ainfi ,  elle  feroit  d'abord  paiée  pour  ceux  des  Regimens  qui  s'y 
trouvoient  en  garnifon.  Cependant,  pour  ceux  des  Regimens  qui  feroient 
ailleurs,  on  écriroit  d'abord  au  Commandant  de  la  Pace,  où  les  Regi- 
gimens  feroient,  afin  de  faire  fans  délai  paier  cette  recompenfe,  &  qu'en 
attendant  les  Deferteurs  feroient  gardez  en  prifon.  D'ailleurs ,  que  les  paï- 
fans  des  Villages ,  qui  contreviendroient  à  ce  qui  avoit  été  conclu ,  favoir  qui 
favoriferoient  des  Deferteurs ,  ou  achèteraient  d'eux  leur  dépouille,  ou  la 
monture ,  feroient  jugez  fans  autre  forme  par  devant  le  Gouverneur  ou 
Commandant  par  deux  Commiffaires  de  la  Juftice  ordinaire,  conjoincle- 
ment  avec  deux  du  Confeil  de  Guerre. 

On  jugea  vers  ce  tems--là  une  Irrégularité  fcandaleufe.  Elle  étoit  arrivée 
dans  l'Églife  Reformée  de  St.  Jean-Steen  dans  la  Flandre  I  lollandoife.  Le 
Miniftre  Proteflant ,  n'aiant  pûfe  rendre  un  jour  à  l'Eglife,  pour  être  retenu 
au  lit  par  la  fièvre ,  le  prétendu  Seigneur  de  ce  lieu ,  après  avoir  fait  fonner 

I  2  P*r 


68     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  par  trois  fois  les  cloches,  fit  faire  lale&ure  de  quelques  Chapitres  de  l'E- 
de8  Pro-  criture  Sainte.  Enfuite,  il  fit  chanter  un  Pfeaume.  Après  cela, il  fit  lire  par 
vinces-  je  Maitre  d'Ecole  le  Formulaire  du  Bateme ,  &  avoit  fait  batifer  par  le  même 
un  enfant  d'un  Diacre.  Le  Confiftoire  de  cette  Eglife-là  repreienta  aux 
Etats  le  Scandale  que  cette  Procédure  énorme  &  inouïe  avoit  caufé  aux 
Spectateurs ,  dont  partie  etoit  Catholique.  Par-là  ,  il  y  avoit  de  la  néceffi- 
té  de  reparer  le  Scandale,  &  de  prévenir  à  l'avenir  de  pareils  Defordres 
contre  la  pratique  inaltérable  de  la  Religion  Reformée.  Les  Etats,  extrê- 
mement zelez  pour  leur  Religion ,  donnèrent  d'abord  un  ordre  au  Com- 
mandant de  Huilt.  Il  portoit  de  faire  arrêter  par  main  forte ,  tant  le  Sei- 
gneur, que  le  Maître  d'Ecole,  &  le  Père  de  l'enfant.  Enfuite,  de  les  faire 
amener  à  Ilullt,  de  les  y  tenir  fans  accès,  &  de  les  livrer  au  Confeil  de 
Flandres  à  Middelbourg.  On  chargea  le  Fifcal  du  Confeil  de  Flandres  de 
fe  tranfporter  à  Hulfl  &  à  St.  Jean-Steen,  pour  s'informer  de  tout,  &  de 
procéder  fans  connivence  contre  lefdites  perfonnes  fur  la  téméraire  profa- 
nation du  Service  Divin.  Enfuite ,  d'en  procéder  au  Châtiment  félon  les 
Placards  de  l'Etat  &  de  la  Juflice.  Ces  ordres  furent  exactement  exécu- 
tez. Cependant,  les  prifonniers  firent  prefenter  une  Requête  pour  être  élar- 
gis des  prifons  fous  quelques  auditions.  Les  Etats ,  toujours  bons  &  pi- 
toiables ,  panchoient  a  la  douceur.  Ils  aprouverent  une  Sentence  aufli  mo- 
dérée. Le  Seigneur  devoit  demander  pardon  à  la  Juflice  à  genoux ,  & 
paier  une  Amande  fort  modique. 

L'on  ne  pancha  pas  à  la  douceur  par  raport  au  regimbement  de  quelques 
perfonnes  commifes  dans  les  differens  Collèges  de  la  Republique.     C'étoit 
par  raport  à  prêter  les  Sermens.     Ils  ne  vouloient  le  faire  fur  les  Inflruc- 
f ions  arrêtées  par  le  Confentement  commun  des  Provinces ,  mais  feulement 
félon  la  Pratique  qui  en  étoit  différente.     Cette  affaire  fut  prife  en  confi- 
deration.     On  trouva  que  l'on  ne  devoit  pas   admettre  ce    changement. 
Laraifon  étoit  que l'Inflruélion ,  &  non  la  Pratique,  devoit  être  la  Règle, 
à  laquelle  l'on  devoit  fe  foûmettre.     Cela  étoit  même  fuivant  une  Refolu- 
tion  du  10.  de  Juillet    1671,  pour  ôter  tout  ferupuîe  ou  tergiverfation. 
C'étoit  puifque  que  le  Serment  qui  devoit  être  fait  fur  les  Inflruclions  du 
Confeil  d'Etat  de  la  Chambre  des  Comptes  de  la  Généralité ,  &  des  Collè- 
ges de  l'Amirauté, il  y  avoit  pour  cela  une  Claufe.     Elle  portoit  que  ceux 
qui  feroient  commis  dans  quelques-uns  de  ces  Colleges-là  devroient  fe  ré- 
gler fuivant  l'Inflruélion ,  comme  un  fidèle  Confeiller  devoit  faire.     Par 
ladite  Refolution  il  étoit  aufli  arrêté ,  que  le  Serment  feroit  pris  en  conformi- 
té &  fans  exception.     Auffi  les  Etats  Généraux  refolurent-ils ,    qu'à  l'a- 
venir le  Serment  devoit  être  prêté  en  conformité  de  ladite  Refolution  & 
fans  exception.     Ainfi  l'on  n'admettroit  nullement  qu'on  fe  raportât  à  la 
Pratique.  C'étoit  pourquoi  ceux,  qui  feroient  quelque  difficulté  pour  prê- 
ter le  Serment  flir  le  pied  arrêté ,  feroient  renvoiez. 

Ce  fut  fur  l'exactitude  de  femblables  ponctilles,  qu'il  y  eut  bien  des 
embarraz  &  des  difficultez.  Cela  vint  à  l'occafion  de  quelque  Procédure 
du  Confeil  d'Etat  contre  un  Jiommé  André  Kaan.     Il  étoit  Receveur  des 

Do- 


DKS    Pkc>- 
TINCKS- 

Un'ils. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  69 

Domaines  &  autres  Revenus  de  la  Ville  &  Verge  de  Menin  depuis  fa  der-  Affa 
niere  réduction.  Il  étoit  actuellement  Député  de  la  Province  de  Zelande  dks 
à  FAHemblée  de  la  Généralité.  Il  étoit  accufé  de  malversation,  &  de  s'être 
aproprié  &  partagé  partie  de  ces  revenus-là ,  &  d'avoir  connivé  avec  les 
Fermiers.  Une  veuve  d'un  Commis  d'un  Fermier  demanda  au  Confeil 
d'Etat  un  Aéte  d'Impunité ,  tant  pour  elle  que  pour  feu  fon  Mari.  Lui 
aiant  été  accordé ,  Elle  produiiit  diverfes  preuves^  de  cette  malverfation 
de  Kaan.  Le  Confeil  d'Etat,  les  aiant  examinées,  prononça  le  4  de 
Février  une  Sentence  contre  lui,  le  déclarant  incapable  d'aucun  em- 
ploi ,  &  le  condamna  à  une  amende ,  ainû  qu'on  peut  voir  la  Sentence  mê- 
me qu'on  infère  ici. 

Sentence  du  Confeil  d*  Etat  des  Provinces- Unies  des  P aïs- 
Bas  5  contre  Maître  André  Kaan  j  Receveur  des 
Domaines  £•?  Droits  dans  la  Fille  £«?  Banlieue  de  Me- 
nin; du  4.  Février  1718. 

DAns  la  Caufe  pendante  devant  le  Confeil  d'Etat  des  Provinces-Unies   Sentence 
des  Païs-Bas ,  entre  Maître  Jaques  Surendonck  comme  Spécialement  de  Kaaq. 
autorifé  &  commis  à  foùtenir  le  droit  de  la  Généralité  contre  Maître  An- 
dré Kaan  Receveur  des  Domaines  &  autres  Droits  dans  la  Ville  &  Ban- 
lieue de  Menin ,  &  en  cette  qualité  impétrant  de  mandement  &  deman- 
deur en  cas  criminel  d'une  part;  &  ledit  Maître  André  Kaan  afîigné  & 
défendeur  dans  le  même  cas ,  de  l'autre  part  ;  le  Confeil ,  aïant  vu  &  mû- 
rement examiné  toutes  les  pièces  &  productions  mifes  au  grefe ,  &  aïant 
de  plus  fait  attention  fur  toutes  les  circonftances  qui  en  meritoient  &  qui 
pouvoient  mouvoir ,  faifant  juflice  ,  dépofe  l' Afîigné  de  fa  dite  charge  de 
Receveur  des  Domaines   &  autres  Droits  dans  la  Ville  &  Banlieue  de 
Menin ,  le  déclare  infâme  &  inhabile  à  tout  Emploi ,  &  le  condamne  dans 
une  Amende  de  quinze  mille  florins  au  profit  de  la  Généralité ,  de  même 
qu'aux  fraix  de  juftice  &  aux  dépens  du  procès ,  à  taxer  &  modérer  par 
Leurs  Nobles  Puiflances.    Et  vu  que  l'Aiïigné  dans  fon  écrit  fecret  d'aver- 
tiffement  de  droit,  lequel  il  a  délivré  au  Confeil,  ligné  de  fa  propre  main, 
&  l'aïant  en  même  teins  fait  imprimer  l'a  divulgué  par-tout ,  a  ôfé ,  entre 
autres  menteries  grolîières  &  directement  contraires  à  la  bonne-foi ,  accu- 
fer  très-calomnieufement  l'Impétrant  par  les  l'Art.  201.  202.  que  le  4. 
Décembre  1709.  il  a  propofé  au  Confeil  par  un  Mémoire  d'offrir  impuné- 
ment de  l'argent  aux  témoins  pour  obtenir  diveifes  chofes  :  alléguant  dans  l'art. 
203.  pour  preuve  de  cette  calomnieufe  Accufation,  &  produifant  fur  fon 
inventaire  fous  la  lettre  m.  1 .  loco ,  une  Refolution  du  Confeil  du  dit  4.  Dé- 
cembre 1709.  par  laquelle  Leurs  Nobles  PuiiTances  ont  accordé  la  deman- 
de ou  la  propofition  de  l'Impétrant,  laquelle  tendoit  uniquement  à  pro- 
curer à  la  veuve  du  défunt  Germain  Ferier ,  de  fon  vivant  Commis  de 
I'Admodiateur  Joffe  Farafvn,  &  aïant  eu  en  cette  qualité  dans  la  Ville  de 

I  3  Me- 


70    memoip.es,  negotiations,  traitez,  et 

Affaires    Menin ,  après  lli  réclusion,  la  principale  direction  des  admodiations   & 

des  Pho   autTes  entreprifes  du  même  Farazyn ,  en  cas  an  elle  découvrît  fincerement  ce 

Unies.      îul  lul  ^t0li  connu  ton  chant  ceux ,  qui  contre  leur  devoir  avaient  eu  part  £s?  inte- 

. têt  dans  les  admodiations  &  entreprifes  de  Farazyn  ,  &  ce  qui  en  dépend ';  &  en 

cas  que  pour  la  même  fin  elle  dénonce àt  6?  remit  fans  réferve  à  Maître  Nicolas 
Saldenus  toutes  les  Lettres  du  Receveur  Kaan ,  de  Jean  &  Joffe  Farazyn  & 
d"  autres ,  de  même  que  tous  les  autres  papiers  quelle  a  eu  après  la  mort  de  fon 
Mari  entre  fes  mains,  &  qui  fervent  à  découvrir  les  perfonnes  &  les  intrigues 
-de  ceux  qui  dévoient  avoir  eu  part  &  intérêt  dans  lefditcs  admodiations  &  entre- 
frifes-,  non  feulement  un  Acle  d'impunité  y  pour  autant  quelle  ou  fon  Mari  défunt 
pourraient  en  être  complices  ;  mais  aufjî  outre  cela  fi  conformément  aux  placards 
du  Païs^  la  promefje  d'une  certaine  récompenfe,  pour  l'exhibition  de  telles  preu- 
ves ,  par  oit  les  perfonnes  &  les  pratiques  des  intereffez  dans  les  admodiations 
&  autres  entreprifes  pourraient  être  découvertes  ;  &?  que  fon  nom  fer  oit  tend  ca- 
ché. Et  y  apliquant  dans  une  longue  fuite  d'autres  articles  les  fentimens 
des  Jurisconfultes  fur  la  corruption  des  témoins  par  argent,  concluant  enfin 
parfaire  fentir  aflbz  clairement  dans  l'art.  242.  &  les  trois  fuivans,  con- 
tre la  confiante  vérité  ëc  contre  fa  confeience ,  que  les  perfonnes  nom- 
mées dans  lefdits  Articles ,  favoir  du  Pleffis ,  Domiceur ,  &  Deleporte , 
avoient  été  païées  pour  le  témoignage  qu'elles  avoient  rendu  contre  l'Af- 
figné.  Le  Confeil  déclare  donc,  que  ce  font  des  Calomnies  atroces,  fau£ 
fes ,  fcandaleufes ,  &  qui  réjailliflent  fur  l'honneur  du  Confeil  &  de  la  Jufti-. 
ce ,  &  condamne  l'Ailigné  pour  cette  caufe  à  une  Amende  de  mille  florins 
au  profit  des  pauvres.    Ainfi  prononcé  à  la  Haie  le  4.  Février  17 18. 

Et  oit  Paraphé  : 

E.  S.  B.  V.  Golstein,  vt. 

Plus-bas  :  par  ordre  du  Confeil  d'Etat. 

S.  VAN  Slingelandt. 

Ce, Condamné  prefenta  des  Ecrits  de  Droit  fignez  de  fa  main  au 
Confeil  d'Etat.  Il  s'oublia  à  imputer  diverfes  chofes  à  celui  qui  par  or- 
dre le  pourfuivoit.  Il  y  fit  même  réfléchir  quelque  chofe  d'offenfant  au 
Confeil  d'Etat.  C'eft  pourquoi  on  déclare  ces  imputations  pour  .calom- 
nies atroces,  famTes,  fcandaleufes,  &  fort  reflechiifantes  à  l'honneur  du 
Confeil  d'Etat.  Ce  Criminel  demanda  deux  jours  après  à  la  Généralité 
un  Apel,.  ou  Revifionde  cette  Sentence.  Il  y  eut  là-defius  de  forts  Dé* 
bats.  Il  fut  enfin  refolu  de  vifiter  les  Retroatla.  Il  y  avoit  cependant 
une  Refolution  prife,  fi  l'on  ne  fe  trompe,  en  1666.,  par  laquelle  une 
pareille  Revifion  avoit  été  refufée.  L'on  ne  fembloit  cependant  pas  difeon- 
venir  qu'on  ne  pût  lui  accorder  une  Revilion.  Le  point  étoit,  îi  l'on  pou- 
voir 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  VCC.  XVIII. 


i   * 


voit  lui  accorder  l'Apel  qu'il  demandoit.  La  différence  qu'il  y.  avoit  en- 
tre la  Revifion  &  l'Apel  étoit ,  que  (i  l'on  accordoit  feulement  la  Revifion 
de  la  Sentence ,  il  auroit  falu  que  le  coupable  fe  fut  fournis  à  l'exécution 
de  la  Sentence,  &  qu'il  paiàt  les  Amendes.  Au  lieu  que,  par  l'Apel 
l'exécution  reltoit  fufpenduë  jufques  à  une  ultérieure  Decilion.  Quelques- 
uns  vouloient  qu'il  y  eut  des  exemples  pour  &  contre.  Mais ,  la  Rdblu- 
tion  prife  par  les  Etats  de  Hollande  en  166$.  ou  66.  portoit  que  l'Apel 
en  de  pareilles  occalions  ne  feroit  jamais  accordé.  D'ailleurs,  que  fi  dans 
l'Affemblée  de  la  Généralité ,  on  venoit  à  l'accorder  ,  les  Députez  de  la 
Hollande  protefteroient  contre.  Il  ne  fut  pas  befoin  alors  d'une  telle  Pro- 
testation. La  raifon  étoit  par  ce  que  l'Apel  ne  fut  pas  accordé.  Même 
les  autres   Provinces  ne  s'étoient  jamais  expliquées  depuis  fur  ce  que  la 


&  Groningue ,  étoient  pour  l'accorder.  Celle  d'Utrecht ,  qui  devoit  don- 
ner le  poids  à  l'Affaire  ne  s'expliquoit  pas.  Même  les  Membres  de  cet- 
te Province-là  ne  convenoient  pas  entr'eux.  On  donna  cependant  à 
ce  Condamné  une  furfeance  de  l'exécution  de  Ja  Sentence  du  Confeil. 
C  étoit  jufques  à  ce  que  ledit  Confeil  d'Etat  eut  donné  fonAvis  la-deffus 
par  écrit.  Les  gens  foutenoient  qu'un  tel  Apel  étoit  incompatible  avec  la 
Conftitution  du  Gouvernement  de  la  Republique.  L'Avis  du  Confeil 
d'Etat  avec  d'autres  Pièces  font  les  fuivantes. 


Affaires 

des  Pko-» 

vincfs- 

Unif.s. 


d'Etat 
une  E.  G. 


Lettre  du  Confeil  d'Etat  aux  Etats  Généraux  ;  dû  14. 
Fevïer  171  S. 

HAUTS  ET  PUISSANS  SEIGNEURS. 

Ôus  avons  reçu  la  Réfolution  de  VV.  HH.  PP.  du  12.  Décembre,  Lettre  du 
par  laquelle  il  leur  a  plu  de  requérir  notre  Raport  fur  une  Requête  de  Confeil 
Maître  André  Kaan ,  ci  devant  Receveur  des  Droits  domaniaux  &  autres 
à  Menin,  demandant  Mandement  en  cas  d'apel  avec  la  claufe  d'inhibition 
de  la  Sentence  par  nous  prononcée  contre  lui  le  4.  Décembre ,  comme  aulli 
raport  furune  Déduction  qui  tend  à  prouver  que  le  droit  d'apel  avec  inhibi- 
tion, doit  competer  à  l'Affemblée  de  VV.  HH.  PP.  à  l'égard  des  fenten- 
ces  du  Confeil  d'Etat  ;  &  par  laquelle  Réfolution  Elles  acordent  en  atten- 
dant, &  jufqu'à  ce  que  notre  Raport  ait  été  délivré,  furfeance  de  toutes 
procédures  d'exécution  de  la  dite  Sentence. 

Nous  ne  faurions  cacher  à  VV.  HH.  PP.  la  furprife  que  cette  Réfolu- 
tion nous  a  caufée ,  pour  autant  que  l'exécution  de  notre  Sentence  y  a 
été  furilfe. 

Non  feulement , par  ce  que  cette  Réfolution,  quant  à  ce  point,  eu:  di- 
rectement contraire  à  celle  que  VV.  HH.  PP.  ont  prife  le  <?:  de  Septem- 
bre 


V1NCES 

Unirs. 


72    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aftairks  bre  1705.  par  laquelle  Elles  ont  déclaré,  qu'à  l'avenir  aucune  furfeance  ne 
ois  Pro-  fera  plus  accordés  contre  le  Confeil  d'Etal  avant  d'avoir  reçu  [on  Raport  fur 
'V Affaire  dont  il  s'agit-,  ce  qui  n'a  pas  été  obfervé  en  cette  occafion. 

Mais  principalement,  puifque  depuis  l'année  16 $7.  où  le  dernier  Apel 
a  été  accordé ,  ou ,  pour  mieux  dire  ,  rétracté  après  avoir  été  accordé ,  il 
n'y  a  plus  d'exemple  qu'aucun  Apel ,  ni  même  quand  il  a  été  demandé  & 
qu'on  a  pris  du  tems  pour  délibérer  là-defTus ,  aucunes  furféances  aient  été 
accordées ,  malgré  les  fortes  initances  qu'on  a  faites  pour  cet  effet. 

Nous  n'avons  pas  befoin  d'autre  preuve  pour  ce  dernier  point,  que 
l'exemple  de  la  veuve  du  Commis  Isbrand  de  Noortwyck  ,  qui  aiant  de- 
mandé dans  l'année  16^3.  Apel  d'une  Sentence  de  ce  Confeil,  &  depuis 
édit  de  pénalité  contre  l'exécution  qui  en  avoit  été  faite  pendant  les  Déli- 
bérations de  LL.  HH.  PP. ,  ne  pût  obtenir  ni  l'un  ni  l'autre ,  malgré  tou- 
tes les  initances  qu'on  faifoit  pour  cet  effet ,  comme  bien  des  gens  s'en  fou- 
viennent  encore:  &  VV.  HH.  PP.  ont  fans  doute  déjà  relu  leurs  Réfolu- 
tions  prifes  à  ce  fujet  le  22.,  24.  &  29.  de  Janvier  ,  le  9.  &  13.  de  Fé- 
vrier 165)3. 

Pour  ne  point  parler  de  l'exemple  de  Marcelis  Thiens  dans  l'année 
1658.  l'unique ,  qui,  outre  celui  de  la  veuve  du  Commis  Noordwyk ,  eft  ar- 
rivé depuis  l'année  1657.  mais  nous  le  paifons  fous  filence,  puis  qu'il  ne 
paroît  pas  que  Marcelis  Thiens  ait  tâché  d'arrêter  l'exécution. 

Nous  avons  été  d'autant  plus  furpris  de  cette  furfeance  extraordinaire, 
qu'elle  femble  avoir  été  accordée  fans  le  moindre  befoin  apparent. 

Nous  fupofons  que  l'intention  n'eit  point  de  faire  durer  la  furfeance  plus 
long-tems  que  jufqu'à  ce  qu'on  ait  reçu  notre  raport  ;  car  autrement  une 
furfeance  qui,  lî  l'on  en  a  envie ,  peut  être  étendue  à  perpétuité  ,  &  con- 
tre la  quelle  il  n'y  a  point  de  rémede  de  Droit ,  feroit  bien  plus  préjudicia- 
ble &  de  plus  mauvaife  confequence  pour  nous ,  qu'un  Mandement  d'Apel 
avec  inhibition. 

Mais  ,  fi  l'intention  de  ne  faire  durer  cette  furfeance  que  jufqu'à  ce 
que  notre  raport  ait  été  délivré ,  on  n'avoit  qu'à  requérir  le  Confeil  d'Etat, 
s'il  étoit  neceffaire ,  de  fufpcndre  jufqu'à  ce  tems-là  l'exécution  de  la  fen- 
tence  ,  au  lieu  de  la  furfeoir  de  pleinde  autorité ,  &  de  faire  infinuër  par 
♦ïm  Huiliier  de  VV.  HH.  PP.  l'Acte  de  furfeance  à  la  partie ,  avant  même 
qu'il  en  fût  donné  connoiflance  au  Confeil. 

Nous  difons ,  s'il  étoit  neceffaire ,  puis  qu'il  y  avoit  lieu  d'attendre  de  la  difere- 
tion  du  Confeil ,  que  lui  étant  demandé  raport  fur  l'apel ,  il  ne  précipite- 
roit  pas  l'exécution  avant  d'avoir  fait  ce  raport ,  d'autant  qu'il  efl  connu 
qu'on  n'y  fauroit  procéder  fi  vite  ,  puifque  le  Condamné,  étant  habitant 
de  la  Province  de  Zelande  ,  n'eit  pas  exécutable  fans  attache  à  la 
Sentence. 

Mais ,  ce  qui  nous  paroît  digne  de  réflexion  au  fujet  du  but  de  la  fur- 
feance, &  qui  par  conséquent  nous  oblige  d'autant  plus  à  indiquer  le  tort 
qui  nous  eft  fait  par-là,  eft,  que  nous  ne  faurions  comprendre  à  quoi 
doit  fervir  le  raport  à  l'égard  duquel  la  furfeance  a  uniquement  été  accor- 
dée. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  73 


dée,  après  que  VV.  HM.  PP.  fe  font  fait  lire  pendant  plufieurs  jours  de 
fuite  les  RetroaSla  fur  le  point  d'Apel  des  Sentences  du Confeil  d'Etat,  & 
entre  autres  indubitablement  auiîi  un  .Raport  du  Confeil ,  &  un  Avis  de  la 
Cour  de  Hollande,  l'un  &  l'autre  de  l'année  1658.  dans  les  quels  il  a  été 
prouvé  amplement  &folidement, que  ces  Sentences  ne  font  point  fujetes  à 
Apellation;  &  après  que  VV.  HH.  PP.  félon  leur  prudence  &  attention 
ordinaire  n'ont  pu.  manquer  de  faire  là-dciTus  les  quatre  juftes  Réflexions 
Vivantes. 

Premièrement,  que  du  tems  où  il  étoit  permis  d'interjetter  quelques- 
fois  Apel,  les  Srs.  Députez  à  l'Aflemblée  de  VV.  HH.  PP.  auiîi-bien  qu'au 
Confeil  d'Etat,  doivent  avoir  eu  point  ou  peu  de  connoLTance  de  la  ma- 
nière de  procéder  en  cas  d'Apel  &  de  Révifion. 

-Car  à  quoi  peut-on  attribuer  autrement  ,  l'Apel  étant  un  moïen  ordi- 
naire de  Jultice,  que  VV.  HH.  PP.  n'en  ont  point  accordé  fans  deman- 
der auparavant  Raport  du  Confeil  ?  Que  le  Confeil  entroit  fouvent  dans  fes 
Raports  dans  les  mérita  caujœ?  Que  LL.  HH.  PP. ,  après  avoir  vu  le  Ra- 
port du  Confeil, ont  refufé  plus  d'Apels qu'ils  n'en  ont  accordé?  &  que  ce 
refus  eiï  tellement  régardé  pour  une  Décilion  en  dernier  reffort ,  qu'il  n'y  a 
pas  d'exemple  qu'on  ait  après  cela  demandé  Révifion  ?  Toutes  ces  chofes 
paroîtroient  certainement  étranges  à  tout  autre  Tribunal  d'Apel. 

Et  à  quoi  peut-on  attribuer  autrement ,  qu'après  que  dans  l'année  16^6. 
ia  Province  de  Hollande,  à  l'occafion  dune  Surieance  accordée  par  VV. 
HH.  PP.  contre  l'exécution  d'une  Sentence  du  Confeil,  avoit  ferieufement 
délibéré  fur  la  manière  fmguliere  de  procéder  à  l'Aflemblée  de  VV.  HH. 
PP.  au  fujet  dts  Sentences  du  Confeil;  &.,  après  qu'elle  s'étoit  déclarée 
clairement  contre  les  Appellations  en  gênerai  auili-bien  que  contre  la  Sur- 
féance  dans  le  cas  particulier  dont  il  s'agiflbit,  des  Députez  de  l'AiTem- 
blée  de  VV.  HH.  PP.  &  du  Confeil ,  après  bien  desDifputes,  ont  enfin, 
au  commencement  de  l'année  1639., par  l'Entremife  du  Prince  Frederi  c- 
Henri,  plus  grand  Guerrier  fans  doute  que  Jurifconfulte  ou  Praticien , 
conclu  un  Accord  provifionel,  aprouvé  par  VV.  HH.  PP.  mais  non  pas 
reçu  par  le  Confeil ,  par  lequel  Apel  &.  Révifion  font  tellement  embrouil- 
lés ,  qu'on  ne  lauroit  dire  au  jufle ,  en  faifant  attention  aux  chofes ,  ce  non 
pas  aux  nomsfeuls,  fi  VV.  HH.  PP.  ont  defifté  par-ià  provifionellement 
de  laPermiiiion  d'Apel  &  de  Révifion,  ou  le  Confeil  de  fon  Jugement  fou- 
verain. 

En  fécond  lieu,  que  les  Srs.  Députez,  qui  en  confequence  de  la  Réfo- 
lution  de  VV.  HH.  PP.  du  27.  Octobre  165-7.  ont  conjointement  avec 
quelques  Srs.  Committez  de  ceConfeil  befoigné  fur  le  point  de  l'Apel,  &  en- 
particulier  fur  le  dit  Accord  provifionel  de  l'année  1659.  clans  leur  Raport 
par  écrit  ou  dans  leur  Avis  raifoné  du  28.  Fevier  1658.  fe  font  non  feule- 
ment déclaré,  pour  la  Révifion  &  contre  FApel,  mais  aufïi  que  la  forme 
de  Révifion  devroit  être  fuivie  par  Raport  aux  claufes  de  Surféarice  &  de 
Relief  d'Apel ,  comme  auffi  de  la  manière  d'initruirc  les  Procès. 

En  troifième  lieu ,  que.  .peu  de   tems  après  que  le  dît  Raport  du  28. 

terne  XL  K  Fe- 


Affaires 

DKS    PitO- 
VINCES- 

Unies. 


74    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

,\ffai:es    Février  1658.  fût  porte  à  la  Délibération  des  Provinces  ;  &  nommément 

des  Pko-   ]e  ^  d'Avril  de  la  même  année,  aiant  été  demandé  un  Mandement  d'A- 

Unk?"     Peî  P?-r  *c  fufnommé  Marcelis  Tiens;  VV.  HH.  ,  PP.  après  avoir  vît  le 

— , — L  Raport  du  Confeil  d'Etat ,  &  l'Avis  de  la  Cour  de  Hollande ,  qui  foute- 

noient  l'un  &  l'autre  par  plufieurs  folides  Raifons ,  que  les  Sentences  dit 

Confeil  d'Etat  n'étoient  pas  fujetes  à  Apel ,  mais   uniquement  à  Révïfion  f 

ont  par  leur  Réfolution  du  1.  de  Juin  fuivant  refufé  l'Apel,  &  ont  ainfi 

de  pleine   connoiflance ,  &  après  que  les  Provinces  avoient  eu  trois  mois 

de  tems  pour  délibérer  fur  ledit  Raport  du  28. Février,  décidé  la  Quelticn 

fur  l'Apel ,  en  faveur  du  Confeil  d'Etat. 

Il  cil  vrai  que  cette  Conclufion  a  été  donnée  par  les  Voix  de  cinq  Pro- 
vinces ,  &  que  les  Sieurs  Députez  de  Frife  &  de  Groningue  y  ont 
contredit;  mais  certainement  pour  aucune  autre  raifon,que  parce  que  ces 
deux  dernières  Provinces  étoient ,  clans  ce  tems-là ,  comme  tout  le  monde 
lait ,  en  train  de  contredire  à-  tout  ce  que  d'autres  Provinces  propofoient  ; 
ce  qu'on  peut  remarquer  dans  le  cas  dont  il  s'agit, non  feulement  par  ce  que 
ces  deux  Provinces  n'avoient  aucun  intérêt  particulier  différent  de  celui 
des  cinq  autres  Provinces  dans  l'Article  d'Apel  ,  mais  principalement 
auiïi ,'  par  ce  que  les  Députez  dans  leur  Opinion  enregîtrée  n'ont  parlé  que 
préeifement  û.  uniquement  du  cas  en  difpute ,  fans  rien  alléguer  pour- 
quoi ils  ne  donnoient  pas  lieu  aux  Raifons  décifives  déduites  dans  ledit  Ra- 
port du  Confeil  &  dans  l'Avis  de  la  Cour. 

Car  quelle  autre  Raifon  y  a-t-il  d'alléguer  le  cas  en  difpute,  û  ce  n'eft 
qu'on  veut  prouver  par  la  dignité  &  le  droit  des  Etats  Généraux,  qu'ils  peu- 
vent accorder  Apel  des  Sentences  du  Confeil  d'Etat  ?  Car  cette  expref- 
fion  enregîtrée  ne  fe  peut  entendre  fans  la  plus  grande  abfurdité  que  de 
t'Afiemblëe  de  VV.  HH.  PP.  qui  font  en  droit  d'accorder  Jpel  en  pareil  cas. 
En  quatrième  lieu,  que  depuis  l'année  1657.,  &  même  depuis  1648. 
jufqu'ici,  c'eil-à-dire  pendant  fbixante  &  dix  ans,  efpace  de  tems  bien 
plus  long  qu'il  n'en  faut  pour  alléguer  préfeription ,  aucun  Apel  n'a  été 
accordé ,  mais  bien   refufé ,  ou  mis  hors  d'effet. 

Car,  ni  l'Apel  accordé  dans  l'année  i6f3.  aux  Regens  d'Etten,  ni  la 
Surféance  accordée  aux  mêmes  durant  les  Délibérations  fur  l'Apel,  unique 
Exemple  qu'on  peut  alléguer  contre  nous  depuis  l'année  1648.,  ne  nous 
peut  préjudicier  en  aucune  manière,  puis  que  LL.  HH.  PP.  auront  fans 
doute  remarqué ,  que  la  Demande  de  ceux  d'Etten  n'a  pas  été  envoiée 
au  Confeil ,  pour  en  faire  Raport  félon  la  coutume  du  tems  où  les  Apels 
avoient  lieu,  mais  a  été  remife  entre  les  mains  des  parties  ,  &  depuis  en- 
tre les  mains  des  Commiffàires  de  l'AfTemblée  ,  mais  non  point  du 
Confeil,  témoin  les  Réfolutions  de  VV.  HH.  PP.  du  23.,  28.  &  31. 
Janvier  &  13.  Février  1653.  Auffi  ne  paraîtra- t-il  non  plus  que 
i'Apel  ait  été  dénoncé  au  Confeil,  ni  qu'il  en  ait  eu  la  moindre  con- 
noifïance. 

Ces  quartre  Réflexions  peremptoires ,  que  VV.  HH.  PP.  n'ont  pu  s'em- 
pêcher de  faire  fur  les  Retroathi  quEiies  fe  font  fait  lire,  ne  donnent  pas 

feu- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  75 

feulement  beaucoup  de  lumière  à  la  matière ,  mais  la  mettent  même  tellement  Ah-mrf. 
hors  de  difpute,que  nous  fommes  obligez  de  répéter  ne  pouvoir  pas  corn-  nrs  Pko 
prendre  pourquoi ,  après  avoir  vu  de  tels  Retroacla  ,  on  nous  demande  no-      ukks 

tre  Raport  ,    ii  ce  n'efl  pour  donner  lieu  par-là  à  furfeoir  provifionclle-    - 

ment  l'Execution  de  la  Sentence. 

Cependant,  pour  ne  laiffer  aucun  doute  fur  ce  Sujet,  nous  joignons  ici 
pour  le  furplus  un  Mémoire ,  qui  contient  en  abrégé  les  principales  Raifons 
par  lefquelles  on  a  ci-devant  prouvé  dans  le  Raport  &  Avis  ci-defTus 
mentionez ,  &  dans  d'autres  Occafions ,  que  nos  Sentences  ne  font  pas 
fujetes  à  Apel,  mais  uniquement  à  Révifion. 

Nous  paflbns  fous  filence  la  Déduction  imprimée  que  VV.  IiH.  PP. 
nous  ont  envoiée  avec  les  Requêtes  du  Receveur  depofé  Kaan ,  tant  par- 
ce que  lefdites  quatre  Réflexions  font  plus  que  furifantes  pour  détruire  cet- 
te Déduction  depuis  le  commencement  jufqu'à  la  fin,  que,parce  que  nous 
efperons  que  VV.  HH.  PP.  nous  permettront  bien  de  ne  point  entrer 
dans  la  Difcufiion  particulière  d'une  Déduction  qui  a  été  faite  avec  tant  de 
mauvaife-foi ,  qu'on  ne  craint  pas  d'y  dire  en  termes  exprès,  que  le  Man- 
dement d'Apel  demandé  par  Marcelis  Tiens  le  i.  de  Juin  1658.  a  été  re- 
fufé  fur  l'Avis  de  la  Cour  Provinciale  de  Hollande ,  non  parce  que  la  dite 
Cour  avoit  juge ',  qu'il  ri  y  avoit  point  d 'Apel  des  Sentences  du  C  on  [cil  d'Etat  IN 
CASIBÙS  NON  EXCEPTJS,  mais  parce  f  ri  il  ne  fêioit  agi  que  d'un 
Jim  pie  Récokment  de  Comptes,  fans  forme  de  Procès ,  ni' fans  la  moindre  Condi- 
tion ,  comme  aufjî  parceqriil  ri  y  avoit  été  prononcé  aucune  Sentence  condemnatoi- 
re ,  mais  uniquement  un  Règlement  des  Défauts  du  Compte. 

Cependant ,  il  ne  fe  trouve  rien  de  femblable  dans  l'Avis  de  la  Cour , 
comme  VV.  HH.  PP.  s'en  foûviendront;  mais  au  contraire  Meilleurs  de 
la  Cour  difent  au  commencement  de  l'Avis  ,  quils  ?i  entreront  point  dans 
ï  Examen  de  M  E  RI  TIS  C  AU  S  JE,  ni  de  la  Procédure  faite  devant  le  Gon- 
feil  d'Etat;  &  peu  après,  quils  ne  faur  oient  juger  que  Marcelis  Thiens  c(l  fon- 
dé dans  fa  démande  d'avoir  Mandement  d'Apel ,  vu  qu  aucun  Apel  ri  a  lieu  que 
de  Sentences  de  Juges  Subalternes  à  des  juges  Supérieurs.  Or ,  ils  prouvent 
dans!la  fuite,  par  un  nombre  de  Raifons,  que  le  Confeil  d'Etat  n'ëfi  pas  un 
Juge  Subalterne,  &  que  les  Sentences  du  Confeil  fans  diftinction  ne  font 
pas  fujetes  à  Apel. 

Pour  le  relie ,  Hauts  &  Puifians  Seigneurs ,  nous  avons  revu  à  cette 
occafion  notre  Inftruclion  fur  le  Point  de  ia  Surféance  accordée  ;  Point  de 
plus  grande  confequence  que  l'Apel  même ,  puiiqu'ii  il  y  a  plufieurs  occa- 
fions où  des  Surféances  peuvent  être  accordées ,  fuis  qu'il  y  puiffe  avoir 
Apel.  Nous  vouions  cependant  bien  croire  que  VV.  HH.  PP.  n'ont  pas 
regardé  l'Affaire  delà  même  manière,  lorfqu'eîies  ont  accordé  Samedi  pafie 
la  Surféance. 

Nous  avons  remarqué  dans  cette  ïnftruclion ,  que  les  Etats  Généraux 
nous  apprennent  dans  neuf  Articles  à  faire  diftinction  entre  eux  &  X  Jljfem- 
blée- des  Députe-  G;  dinaires-  à  la  Généralité.  Qu'ils  remettent  quelques 
Affaires  à  la  difpofition  de  ladite  Alfemblée,  moïennant  qu'elle  en  pren- 

K  2  ne 


76       MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    ne  Avis  du  Confcil.   D'autres ,  au  contraire,  à  la  difpofition.  du  Confeil  f<w- 
de3  Pko-  jointement  avec  ladite  Aflemblée. 

Unie"*         D'autres  encore  à  la  Difpofition  du  Confeil,  mais  avec  connoijfance  & 
L   contentement  de  l' Aflemblée. 

Et  enfin  d'autres  uniquement  à  la  difpofition  du  Confeil ,  fans  qu'il  y 
foit  fait  mention  de  l' Aflemblée. 

Cette  dernière  forte  comprend  toutes  les  Caufes  Juridiques. 

Qu'il  efi  bien.vrai  que  les  Etats  Généraux  fe  refervent  à  eux-mêmes  v& 
aux  Etats  des  Provinces ,  de  prononcer  en.  dernier  reflbrt  fur  les  Affaires 
remifes  par  l'Inltruction  à  la  difpofition  du  Confeil,  mais  en  ajoutant  cet- 
te reftriction  remarquable,  en  cas  de  bcjoin^  ou  quand  les  affaires  du  Pais 
viendront  à  V  exiger  j  &  fans  faire  la  moindre  mention  de  X  si  [[emblée  des  Dé- 
putez ordinaires  à  la  Généralité ',  bien  loin  de  lui  donner  le  pouvoir  de  fur- 
feoir  nos  Sentences,  ou  autres  Décrets,  fur  des  Affaires  remifes  par  l'Inflnic- 
tion  à  la  difpofition  du  Confeil. 

Et  enfin ,  quoique  les  Etats  Généraux  aient  indubitablement  le  Pouvoir  de 
changer  notre  Inftruction ,  ils  ont  pourtant  eux-mêmes  arrêté  par  l'ïn- 
ftruction ,  qu'ils  ne  le  feroient  point  fans  connoijfance  &  avis  dudit  Con- 
feil ;  ce  qui  nous  autorife  d'autant  plus  à  nous  en  tenir  à  notre  Infinie- 
tion,  tant  que  les  Provinces  n'y  font  aucun  changement.. 

VV.  HH.  PP.  peuvent  voir  par  tout  ceci  ce  qu'il  faut  iuger  de  Sur- 
féances,qui  ne  font,  ni  conformes  à  notre  Inftruction,  ni  fondées  fur  aucune 
autre  délégation  des  Confederez;  &  fi  les  Seigneurs  Etats  de  Hollande  ont 
raifon  ou  non  de  dire  dans  leur  Réfolution  connue  du  14.  Mai  1648  ,  Que 
le  Confeil  d'Etat ,  nonobfiant  l'Inhibition  ou  Surféance  d'Execution  ,  peut  &  doit 
procéder  à  l'Execution  defes  Sentences. 

Pour  ces  Raifons ,  nous  efperons  &  attendons  qu'il  plaira  à  V  V.  HH.  PP. 
de  renvoier  la  Demande  d'un  homme,  qui,  dans  Fefpoir  d'échaper par-là  à 
fa  jufte  punition,  réfufeite  une  Queftion  décidée  déjà  dans  l'année  1658. 
(toutefois,  ceux  qui  ne  voudraient  pas  avouer  cela  font  obligez  de  confef- 
fer ,  que  depuis  ce  tems-là  elle  a  été  pendue  au  croc  :  )  &  lequel  tache  de 
troubler  par-là  la  bonne  harmonie  entre  VV.  HH.  PP.  &  ce  Confeil. 

Hauts  &  Puiffans  Seigneurs,  nous  recommandons  VV.  HH.  PP.  à  la 
fainte  Protection  de  Dieu.     A  la  Haie  le  14.  Février  171 8. 

{  Paraphé) 

Apr.  van  Bors^len  à  Geldeemalsen.  vt. 

Par  Ordonnance  du  Confeil  d'Etat  des 
Provinces-Unies  des  Païs-Bas } 

Signé 

S,  van  Slingelandt. 

ifefe- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC  XVIII. 


/ 1 


Affaires 

Mémoire  contenant  les  Raifons  pourquoi  on  ne  peut  pas  ms  pKO 
appcller  des  Sentences  du  Confeil  d  Etat  des  Provinces-    \] 
Unies  à  rAJJemhlée  des  Etats  Généraux, 


YINCES- 

NLF.S. 


LE  s  Raifons,  pourquoi  il  ne  peut  pas  être  appelle  à  LL.  HH.  PP.  des   Centre 
Sentences  du  Confeil  d'Etat,  ont  été  pour  la  plupart  amplement  dé-   l'Appel 
duites  dans  un  Raport  du  Confeil  d'Etat   à  LL.  HH.  PP.  du  rg.  Mai   td;r^cnd" 
t65§.  &  dans  un  Avis  de  la  Cour  de  Hollande  aux  mêmes  du  31.  Mai    confeil'1 
fiiivant.     Elles  conliftent  dans  ce  qui  fuit.  d'Etat 

Que  l'Affemblée  de  LL.  HH.  PP.  n'étant  pas   une  Cour  de  Jultice  ,   auxE.  G. 
n'a  aucun  Droit  d'accorder,  fans  une  Autorifation  fpeciale  des  Confederez  , 
dcsMandemens  d'Appel  de  Sentences  prononcées  par  des  Collèges  qui  font 
Jpecialement  autorifez  à  faire  juitice. 

Que  l'Intention  des  Confederez  n'a  pas  été,  ni  n'a  pu  être,  de  déférer 
un  tel  Droit  à  l'AfTemblée  de  LL.  HH.  PP.  à  l'égard  des  Sentences  du 
Confeil  d'Etat ,  qui  a  reçu  fa  Jurifdiétion  avant  l'Ètabliffement  d'une  Af- 
femblée  permanente  de  Députez  des  Provinces. 

Qu'à  la  première  occafion  qui  fe  préfenta  après  que  l'AfTemblée  de  LL. 
HH.  PP.  fut  devenu  un  Collège  fedentaire,  les  Confederez  témoignè- 
rent ,  qu'ils  ne  vouloient  pas  qu'il  y  fût  apellé ,  comme  on  peut  voir  par 
l'Art,  fo.  des  InftruétioTis  des  Collèges  des  Amirautez  du  3.  Août  1597. 
en  vertu  duquel  les  Sentences  de  ces  Collèges  ne  font  pas  fujettes  à  Apel 
à  l'AiTemblée  de  LL.  HH.  PP.  mais  uniquement  à  Révifion. 

Que  l'AiTemblée  de  LL.  HH.  PP.  n'efl  pas  conftituée  pour'  admini- 
strer la  Jultice ,  puifque  les  Membres  qui  la  compofent  ne  font  pas  pris 
à  ferment  par  tous  les  Confederez,  ni  pourvus  de  commiflion  &  d'in- 
itruction  pour  faire  Juftice  en  leur  nom.  Auffi  n'opinent-ils  pas  chacun 
pour  foi ,  ni  ne  difent  leur  propre  Avis ,  mais  celui  de  leurs  Principaux 
refpeétifs ,  dont  ils  font  tenus  de  fuivre  les  Ordres  exprès  ou  préfomptifs. 

Ces  Défauts  dans  la  Conltitution  de  l'AiTemblée  font  fi  palpabjes,  que 
c'eft  une  Coutume,  érigée  pour  ainfi  dire  en  Loi,  de.renvoier  à  la  Decifion 
de  quelque  Cour  de  Jultice  les  Affaires,  pour  lefquelles  il  a  été  porté  Ap- 
pellation à  LL.  HH.  PP.  par  le  Confeil  de  Flandres,  au  quel  égard  LL. 
HH.  PP.  font  venues  à  la  place  du  grand  Confeil  de  Maîines. 

Mais,  ces  mêmes  circonitances  n'aïant  pas  lieu  par  raport  an  Confeil 
d'Etat,  on  ne  fauroit  alléguer  aucune  Raifon,  pourquoi  LL.  HH.  PP. 
preteroient  feulement  leur  nom  à  quelque  Cour  de  Juitice ,  qui  n'eft  pas 
iûperieure  au  Confeil  d'Etat ,  pour  être  Juge  en  cas  d'Appel  des  Senten- 
ces du  Confeil. 

Pour  ne  rien  dire  des  inconveniens,  tant  à  l'égard  desRevifions  qu'au>- 
trement,  lefquels  naiifent  de  la  manière  ci-deiTus  mentionée  de  connaître 
des  Appellations. 

Comme  aufli  que  dans  l'Inflruclion  du  Confeil  d'Etat  il  ne  fe  trouve  au- 

K  j  cun 


TES 

v in ces- 
Un  !  f.  s 


78    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Amraft  cun  Article  pareil  au  337.  de  fïmlruction  du  Confeil  de  Flandres,  en  ver- 
Pr°-   tu  duquel  on  apelle  à  LL.  HH.  PP.  des  Sentences  du  Confeil  d'Etat. 

Cette  dernière  Remarque  mérite  d'autant  plus  d'attention ,  que  la  queilion 
fur  les  mandemens  d'appel  s'agitoit  encore  dans  l'année  lôfi.  où  notre 
-nouvelle  Inftruclion  a  été  faite  ;  &  il  auroit  coûté  peu  de  peine  à  LL. 
HH.  PP.  d'y  faire  inférer  un  pareil  Article,  .fi  elles  avoient  trouvé  que  la 
grande  Affemblée  y  eut  été  portée. 

Le  Confeil  au  contraire  n'avoit  pas  la  môme  occafion  d'y  faire  inférer 
un  Article  femblable  au  fufdit  50.  de  l'InftrucTion  des  Collèges  des  Amirau- 
tés, n'aïant  pas  été  confulté  dans  les  Délibérations  fur  la  nouvelle  Infhuc- 
tion,  contre  l'Art.  34.  de  l'ancienne. 

Ce  qui  fut  caufe  auiîi  de  plufieurs  Omiflîons  &  Abus ,  qui  firent  regar- 
der cette  nouvelle  Inir.rucl.ion  pendant  plufieurs  années  comme  une  Inftruc- 
tion  flotante  &  incertaine. 

Outre  cela,  il  n'y  a  aucune Raifon  qui  puiiTc  perfuader ,  que  les  Confede- 
rez  aient  voulu  tacitement ,  que  les  Sentences  du  Confeil  d'Etat  fuffent 
fujettes  à  Apel ,  pendant  qu'ils  ont  ftatué  exprelTement  le  contraire  à  l'é- 
gard des  Sentences  des  Collèges  des  Amirautez. 

On  ne  fauroit  croire  non  plus,  que  tous  les  Confederez  puifïênt  avoir 
d'autres  idées  à  l'égard  du  Confeil  d'Etat,  qu'ils  ont  prefque  tous  dans 
leurs  Provinces  par  raport  aux  Collèges  des  Confeillers  Députez  ou  Etats 
Députez. 

Il  eit  bien  vrai ,  que  dans  le  tems  pafTé ,  &  principalement  avant  l'année 
1636.  plufieurs  Appels  ont  été  accordez;  mais  que,  fans  inniler  fur  ce 
qui  a  été  dit ,  non  feulement  dans  le  fufdit  Raport  du  Confeil  &  dans  l'Avis 
de  la  Cour  de  Hollande,  mais  auffi  dans  le  Verbal  de  ce  qui  s'eft  palTé  à 
la  Chambre  du  Prince  Frederic-Henri  le  11e.  Janvier  1639.  inféré  dans  les 
Regîtres  du  Confeil  d'Etat  du  12.  touchant  l'Opofition  contre  les  Mande- 
mens d'Apel ,  il  fert  de  folution  peremtoire,  que  des  Apels  accordez,  com- 
me la  Cour  raiionne  dans  ledit  Avis ,  il  ne  fauroit  être  inféré  aucune  pojfef- 
fion ,  quand  même  les  Commutez  du  Confeil  y  aur  oient  confcnîi  ;  vu  qu'il  efi  no- 
toire dans  les  Droits ,  qù un  tel  confentcment  emporte  bien  une  renonciation  quant 
au  cas  particulier  dent  il  s'agit ,  mais  ne  prive  pas  du  droit  dont  le  Collège  jouît  ; 
outre  que  les  Commettez  ne  font  pas  qualifiez  à  diminuer  le  Droit  de  leur  Collè- 
ge, puifquil  ne  s'y  peut  faire  aucun  changement  fans  le  confentcment  6?  P approba- 
tion de  tous  les  Confederez. 

Les  Refolutions  de  LL.  HH.  PP.  du.  11.  &  18  Janvier  1639.,  par  les- 
quelles on  prétend  que  l'Affaire  a  été  décidée  au  préjudice  du  Confeil ,  ne 
peuvent  pa's  être  alléguées  au  préjudice  du  Confeil ,  tant  parce  que  ces  Ré- 
folutions  n'ont  été  prifes  que  proviilonellement  pour  l'efpaee  d'un  an;  &, 
à  ce  que  la  première  dit  exprelTement,  lauf  le  droit  réciproque;  que 
puifque  l'Apel  &la  Rcvifion  fe  trouvent  tellement  embrouillées,  qu'en  fai- 
sant attention  aux  chofes ,  &  non  pas  aux  noms  fèuls,  on  a  de  la  peine  à 
dire  fi  LL.  HH.  PP.  ont  dcfilté  par-là  de  la  Permiilion  d'Apel  &  de  Révi- 

fion , 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.         79 

lion,  ou  ce  Confeil  de  fon  Jugement  fouverain  (f).  Outre  que  le  Confeil  .Affaires- 
foûtint  publiquement,  que  la  première  de  ces  Refoiutions,  dont  la  fecon-  Drs  Pren 
de  eit  une  fuite,  n'étoit  pas  conforme  à  ce  qui  avoit  été  ftipulé  par TEn-     îrTINCE*' 

•  r        1         T")    "  TT»  T  T  UNIES. 

tremife  du  rrmce  oederi c-He  n r i.  

A  quoi  il  faut  ajouter  en  dernier  lieu,  que  s'il  y  a  eu  un  teins  où  LL. 
IIH.  PP.  ontcuj'ufage  ou  la  poffeffion  pour  Elles;  l'ufage  &  la  pofTef- 
fion  des  derniers  foixante  à  foixante  &  dix  ans  font  pour  le  Confeil,  &  contre 
LL.  III I.  PP. 

Et  même  avec  cette  différence  confiderable,  que  l'ufage  ancien, &  aboli 
depuis  long-tems,  étoit  contraire  à  tant  de  Raifons  peremptoires  &  à  tant 
de  fondernens  du  Gouvernement  qu'on  a  allégué  ci-defflis,  outre  qu'il  étoit 
deilitué  de  tout  titre. 

Au  lieu  que  l'ufage  des  dernières  foixante  à  foixante  &  dix  années  eft 
établi  fur  toutes  les  Raifons  ci-deffus  alléguées  &  fur  les  fondernens  du 
Gouvernement,  &  qu'il  a  pour  titres  d'un  côté  le  Droit  inconteftable  de 
LL.  HH.  PP.  comme  reprefentantes  les  Etats  des  fept  Provinces-Unies, 
de  revoir  en  dernier  reffort  les  Sentences  des  Juges  de  la  Généralité;  & 
de  l'autre  ,  que  le  Confeil  d'Etat  eft  le  premier  &  le  principal  Collè- 
ge de  la  Généralité ,  qui  ne  reconnoit  point  de  Collège  Supérieur  de  Juin- 
ce,  &  prononce  par  confequent  fouverainement ,  comme  il  a  été  prouvé, 
dans  l'Avis  ci-deffus  mentionné  de  la  Cour. 

Avis  de  la  Cour  de  Hollande  à  LL.  HH.  FF.  du  3r.. 
Mai  16)8. 

HAUTS  ET  PUISSANS  SEIGNEURS. 

O u s  avons  reçu  la  Lettre  de  VV.  I ÏIL  PP.  du  2 1.  Décembre,  avec  les- 
Pièces  y  jointes,  au  fujet  de  la  Requête  de Marcelis Thins  *cumfuis^   (*)  o«- 
pour  avoir  provifion  d'Apel  d'une   Sentence  prononcée  à  fon  préjudice   Tiens, 
par  le  Confeil  d'Etat  ;  fur  quoi  VV.  HH.  PP.  demandent  notre   Avis.    c°Zm  ci~ 
Pour  lequel  effet ,  après  avoir  lu  &  mûrement  pefé  toutes  les  Pièces ,  &    'e^M' 
ce  que  ledit  Thins  a  de  plus  produit  pour  fondement  de  fa  Demande , 
nous  ne  voulons  pas  entrer  dans  l'examen  de  la  Juftice  de  la  Caufe ,  ni  de 
la  Procédure  faite  devant  le  Confeil;  &,  ne  faifant  attention  qu'unique- 
ment à  ce  qu'il  a  plû  à  VV.  HH.  PP.  de  nous  propofer,  nous  avons  trou- 
vé bon  de  donner,  fous  la  Correction  de  VV.  IIH.  PP.,  l'Avis  fuivant. 
Que  nous  ne  fuirions  juger  que  ledit  Thins  eft  fondé  dans  fa  Demande 
d'avoir  Provifion  d'Apel,  vu  qu'aucun  Apel  n'a  lieu  que  de  Sentences  de 
Juges  Subalternes  à  des  Juges  Supérieurs,  établis  par  les  Princes  du  Pais, 
ce  qui  s'obferve  dans  tous  les  Gouvernemens   de  l'Europe.    C'eft  fur  ce 
fondement ,  que,  Iorfque  F  Apel  de  la  Cour  de  Hollande  au  grand  Gpnfeil  de 
Malïnes  vint  à  ceiler,les  Seigneurs  Etats  de  Hollande  &  de  Zelande n'ont 

PÛ 
(I  )  Voiez  les  Refoiutions  du  Confeil  d'Etat  du  13.  &  14.  Janvier  &  eu  28.  Jul.  1630. 


3o     MEMOIRES,  NEGOCIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    pu  trouver  bon,    qu'on   appellât  des  Sentences  de  ladite  Cour  à  Leurs 
i>£s  Pao-  Nobles  &  Grandes  Puifïances ,  mais  ont  provifionellement  fait  décider  ces 
vinces-    ^ortes  d'Affaires  par  Révifion;  pour  le  quel  effet  le  Prince  d'Orange  de  glo- 
NïfcS'     rieufe  mémoire  fut  autorifé  dans  l'année  ifyy.  de  commettre  des  Membres 
de  ladite  Cour,  comme  aufïi  d'autres,  s'il  le  jugeoit  à  propos,  à  la  Révi- 
fion; &  dans  l'année  15-77.  lefdits  Seigneurs  Etats  de  Hollande  &  de  Ze- 
lande,  fur  l'Avis  de  la  même  Cour,  firent  une  Ordonnance  ou  Inftruclion 
ultérieure,  fous  le  nom  du  Roi  d'Efpagne,  laquelle  a  été  maintenue  jus- 
qu'à ce  que  le  Collège  du  grand  Confeil  fût  érigé.     Il  y  a  ici  à  remarquer 
très-particuliérement ,  que  le  Confeil  d'Etat  a  toujours  été,  tant  avant 
qu'après  les  Troubles ,  un  Collège  de  fort  grande  Autorité ,  au  deffus  du- 
quel il  n'a  jamais  été  établi  un  Juge  Supérieur,  à  qui  l'on  pourroit  appel- 
le; :  cV,  après  que  le  Roi  d'Efpagne  fut  déclaré  déchu  du  Droit   &  de  la 
Domination  de  ces  Provinces,  le  Gouvernement  fût  remis  entre  les  mains 
dudit  Confeil,  fur  de  telles   Inftructions  qu'on  jugeoit  à  propos  dans  ce 
tems-là,  où  les  Seigneurs  Etats  Généraux  ne  s'aifemblérent  pas  ordinaire- 
ment, mais  furent  convoquez  par  le  même  Confeil ,  lorfque  les  Affaires  du 
Pais  l'exigeoient  ;  de  forte  que  la  Forme  du  Gouvernement  de  ce  tems-la 
montre  de  ibi-méme,  qu'il  n'a  pu  être  appelle  des  Sentences  du  Confeil 
d'Etat.     C'eft  pourquoi .auffi  il  n'a  pas  été  fait  mention  dans  l'Inflrucrion 
dudit  Confeil ,  ou  plutôt  il  n'a  pas  .été  neceffaire  d'y  faire  mention ,  i\  l'on 
doit  accorder,  ou  non,  Proviiion  d'Apel  de  fes  Sentences.     Et  quoique 
depuis  l'Affemblée  de  VV.   HH.  PP.   foit  devenue  fedentaire,  comme 
elle  eft  actuellement,  le  Droit  que  le  Confeil  d'Etat  a  eu  originellement,  & 
avant  ce  tems-là,  n'a  pas  été  diminué  ni  aboli  par-là.     Ce  qui  fe  trouve 
confirmé  par  la  Refolution  que  VV.  Mil.  PP.  ont  prife  de  l'Aveu  de  S.  A. 
de  gîorieufe  mémoire,  &  en  prefence  de  Députez  du  Confeil ,  dans  l'année 
1639.  par  laquelle  il  a  été  réglé,  uniquement  pour  l'efpace  d'un  an,  ce 
que  doivent  faire  ceux  qui  fe  croient  lezez  par  quelque  Sentence  du  Con- 
feil d'Etat:  Refolution  inutile,  fi  le  moien  d'Apel  à  VV.  HH.  PP.  avoit 
été  permis  à  tout  le  monde;  outre  que  cette  même  Refolution,  étendue 
comme  elle  eft,  a  été  contredite  &  defavouee  par  une  Refolution  formel- 
le du  Confeil  d'Etat,  prife  dans  la  même  année  en  prefence  de  fadite  Ai- 
relle.    Et  quoique  Vos  Hautes  Puifïances  aient  quelquesfois  accordé  Pro- 
.  viiion  d'Apel  des  Sentences  du  Confeil,  on  n'en  fauroit  inférer  aucune 
poiTeffion ,  quand  même  Içs  Députez  du  Confeil  y  auroient  confenti ,  ce 
qui  n'a  pourtant  pas  été  fait,  vu  qu'il  efl  notoire  dans  le  Droit,  qu'un  tel 
contentement  .emporte  bien  une  Renonciation  quant  à  ce  cas  particulier, 
mais  ne  prive  pas  du  Droit  qui  competc   audit   Collège.     Outre  que   les 
Commutez 41e  font  pas  qualifiez  à  diminuer  le  Droit  de  leur  Collège,  vu 
qu'il  ne  s'y  peut  faire  aucun  changement  fans  l'aprobration  &  le  confente- 
ment  de  tous  les  Conférerez.   C'eit  pourquoi  le  Confeil  n'a  pas  manqué  d'y 
contredire  toutes  les  fois  qu'il  en  a  eu  connoiflance;  &  les  Députez  de 
quelques  Provinces  ont  été  chargez  expreffement  d'être  attentifs  qu'aucu- 
ne exécution  de  Sentences  prononcées  par  quelque  Collège  de  la  Généra- 
lité 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        gi 

lité  ne  foit  furfile.  Ce  qui  vient  d'être  dit  fert  aufïl  de  Réponfe  ce  qu'on  Affair*» 
prétend,  qu'il  eft  toujours  permis  à  VV.  HH.  PP.,  en  ver  ai  du  yo.  Ar-  DKS  Pé- 
tiole de  l'Inftruction  de  l'année  i65i.,de  changer  cette  Initruction ,  préfu-     *INCES- 

pofant  que  cela  avoit  été  fait  en  accordant  des  provifions  d'Apel  ^  mais ,  le   - _____ 

changement  de  l'Inftruétion  demande  d'autres  formalités ,  comme  il  paroit 
clairement  par  le  commencement  dudit  50.  Article.  Outre  cela,  il  eft  di- 
gne de  considération ,  que  la  Sentence ,  prononcée  au  préjudice  du  fufnom- 
mé  Thins ,  regarde  entre  autres  des  Revenus  &  Domaines  du  Paï's ,  &  con- 
fequemment  les  nerfs  du  Gouvernement ,  lefquels  doivent  être  promte- 
ment  recueillis  par  les  Adminiflrateurs  &  Receveurs ,  afin  que  l'Etat  pui£- 
fe  être  confervé.  C'efl  pour  cela  qu'il  a  été  itatué  expreffement  dans  l'Ar- 
ticle 9.  &  10.  de  l'Initruction  de  l'année  i?88-  &  dans  le  17.  Article  de 
la  nouvelle,  arrêtée  en  165*1.  que  les  deniers  publics  &  les  fourniffemens 
des  Provinces  doivent  être  promtement  levez  &  exécutez  par  ledit  Con- 
feil,  tout  comme  les  deniers  du  Prince  ont  été  levez,  ce  qui  ne  fauroïc 
être  retenu  par  aucune  provifion  judiciaire.  Et  comme  par  le  18.  Article 
tous  les  Comptables  des  deniers  àc  revenus  de  la  Généralité  fans  exception 
ont  été  fournis  à  l'autorité  &  à  la  direction  du  Confeil  d'Etat ,  à  qui  il  com- 
pete  outre  cela  privativement  de  connoître  de  ces  Comptables  ;  &  que  la 
Sentence  en  queition,  portant  entre  autres  condamnation  de  certaines 
ibmmes,  regarde  les  Domaines  &  Revenus  du  Paï's,  la  levée  ou  l'exécu- 
tion n'en  fauroit  être  empêchée  en  aucune  manière,  ni  même  par  un  Man- 
dement d'Apel ,  à  moins  qu'on  ne  voulût  en  toutes  autres  affaires  qui  con- 
cernent les  deniers ,  revenus ,  &  Domaines  publics  accorder  pareille  provi- 
fion, ce 'dont  VV.  HH.  PP.  peuvent  aifement  comprendre  les  fuites  pré- 
judiciables ,  ce  qui  leur  a  aulîi  fait  tant  de  fois  refufer  de  telles  provifions 
d'Apel.  Si  l'on  veut  paffer  outre  &  faire  attention  à  d'autres  Collèges  , 
qui  toutes  fois' ne  font  pas  fuperieurs  à  celui  du  Confeil  d'Etat,  on  trou- 
vera ,  que  toutes  les  Sentences  des  Confeillers  de  l'Amirauté  fortent  leur 
plein  &  entier  effet,  &  qu'elles  font  réellement  &  effectivement  mifes  en 
exécution,  fans  qu'on  puiffe  y  pourvoir  par  Apel  ou  Reformation,  mais 
uniquement  par  Revifion  ou  demonitration  d'erreur.  La  même  chofe  a 
lieu  à  l'égard  des  Sentences  prononcées  des  Confeillers  Committez,  ou 
Etats  Députez,  comme  compofans  pareillement  un  Collège,  au  deffus  du 
quel  il  n'en  a  pas  été  établi  de  fuperieur-,  de  forte  qu'aiant  été  prouvé  par 
ce  qu'on  vient  dédire,  que  le  Confeil  d'Etat  a  eu  orignellemeat,  &  dès  la 
première  inftitution,  la  difpofition  des  affaires  qui  regardent  les  deniers 
publics  &  les  Revenus  &  Domaines  du  Paï's ,  &  qu'il  a  toujours  connu  & 
connoit  encore  de  ces  matières,  cela  détruit  l'argument  que  ledit  Thins  a 
voulu  tirer  de  la  délégation,  vu  qu'en  juftice  cela  a  bien  été  une  véritable 
délégation  par  raport  au  Haut -Confeil  ,  mais  fous  correction  de  VV. 
HH.  PP.  La  chofe  y  avoit  été  portée  par  in  advertance;  cependant,  après 
que  ledit  Haut-Confeil  s'étoit  excufé  de  s'en  charger ,  VV.  HH.  PP.  ont 
trouvé  bon  &  arrêté  que  ladite  affaire  feroit  portée  au  Confeil  d'Etat  qui 
étoit  qualifié  de  foi-méme  à  la  terminer-,  ce  qui  n'efl  pas  félon  le  droit 
Tome  XL  L  une 


82      MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ, "ET 

A?ïairïs    une  délégation,   mais  uniquement  une  excitation  de  Jurifdic"tion ,  ou' de 
.des  Pro-  l'Office  dudit  Confeil ,   comme  les  jurifconfultes  l'appellent.     Auffi  VV. 

Unies8"     ^       ^'  ne  ^e  ^ervent  Pas  dans  ^eur  Refolution  du  mot  de  délégation. 

L   Pour  ce  qui  regarde  les  nullités  qu'on  prétend  avoir  été  commifes  dans  la 

Sentence,  cela  ne  mérite  pas  attention  ici,  puifqu'elles  peuvent  être  dé- 
duites par  Révifion  auffi  bien  que  par  Apel.  Nous  ne  nous  étendrons 
pas  d'avantage  ,  pour  ne  pas  ennuïer  VV.  HH.  PP. ,  voïant  que  dans  la 
Lettre  du  Confeil  d'Etat ,  à  nous  communiquée ,  il  a  été  très-pertinemment 
répondu  à  tout;  c'efl  pourquoi  nous  n'avons  touché  que  le  point  de  droit 
&  prouvé  par  des  raifons  folides,  que  VV.  HH.  PP.  ne  peuvent  pas  ac- 
corder Mandement  d'Apel.  Nous  nous  raportons  néanmoins  à  la  haute  &  fage 
difpofition  de  Vos  Hautes  PuifTances ,  à  qui  nous  renvoions  ci-joint  la  fufdi- 
te  Requête  &  Pièces  à  nous  communiquées ,  afin  de  refoudre  là-deffus  ce 
que  VV.  HH.  PP.  jugeront  convenable. 

Sur  ce,  Hauts  rj?  Puijj'ans  Seigneurs ,  nous  recommandons  VV.  HH.  PP. 
à  la  protection  du  Tout-PuilTant ,  qui  veuille  bénir  leur  Gouvernement  de 
tout  bien  &  profperité.     Le  31.  Mai  1658. 

DE  VOS  HAUTES  PUISSANCES, 

Les  Officieux 

Prefident  &  Confeillers  de  Hollande, 
Zelande,  &  Weft-Frife. 

Signé  y 

Ad.     Pots. 

Extrait  du  Regître  des  Refolutions  de  LL.  HH.  PP. 

les  Seigneurs  Etats  Généraux  des  Provinces -  Unies 
des  P aïs- Bas  \  du  Lundi  14..  Février  171 8. 

Refolu-      Y}  È  ç  u  une  Lettre  du  Confeil  d'Etat  écrite  ici  à  la  Haie  en  date  d'au- 
riondu      XV  jourd'hui,  portant  en  confequence  &  pour  fatisfaire  à  la  Refolution 
j+.Fevr.   de  LL.  HH.  PP.  du  12.  Février  Raport  fur  la  Requête  de  Maître  André 
Kaan ,  ci-devant  Receveur  des  Droits  Domaniaux  &  autres  à  Menin ,  de- 
mandant Mandement  en  cas  d'Apel  avec  la  claufe  d'inhibition  de  la  Sen- 
tence prononcée  par  ledit  Confeil  d'Etat  à  fa  charge  le  4.  du  courant  ; 
comme, auffi  fur  une  Déduction  pour  foûtenir  le  Droit  d'Apel  avec  inhibi- 
tioh.,  lequel  devoit  competer  à  l'Aûemblée  de  LL.  HH.  PP.  par  raport 
aux  Sentences  du  Confeil  d'Etat.     Surquoi  aiant  été  délibéré,  il  a  été 
trouvé  bon  &  arrêté,  qu'on  ne  fauroit  entrer  dans  la  Demande  faite  par  le 
SuplianéJ  &  que  par  confequent  on  la  refufe. 
Les. Seigneurs  Députez  des  Provinces  de   Gueldre  &   d'Utrecht  ont 

faic 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.         gj 

fait  enregîtrer  fur  ladite  concluflon ,  que  cet  exemple  ne  peut  ni  ne  doit  Affairm 
tirer  à  confequence ,  ou  prejudicier  à  l'Autorité  &  au  Droit  des  Etats  Gé- 
néraux ,  qui  peuvent  en  pareil  cas  accorder  des  Mandemens  d'Apel. 


DES    PrO- 
YÏNCES- 

Uku.s. 


Nota.  L'Opinion  enregîtrée  des  Seigneurs  Députez  des  Provinces  de 
Gucldre  &  d'Utrecht  iur  la  iùfdite  Reiblution  efl  copiée  de  mot  à 
mot  fur  celle  des  Seigneurs  Députez  des  Provinces  de  Frife  &  Gro- 
ningue  fur  la  Refolution  du  i.  de  Juin  1698  ,  dont  il  eft.  parlé  dans  la 
Lettre  du  Confeil  d'Etat  du  14.  Février  171 8-  page  3.  L'unique 
différence,  qu'il  y  a  entre  ces  deux  Opinions  enregîtrées,  ell,  que  les 
Seigneurs  Députez  de  Gueldre  &  d'Utrecht,  faifant  enregîtrer  un 
Avis  tout  opofé  à  celui  qu'ils  avoient  donné  dans  l'année  1658.,  ne 
contrcdifent  ■point  à  la  conclu/ion ,  comme  firent  les  Seigneurs  Députez 
des  Provinces  de  Frife  &  Groningue  dans  la  même  année  1658. 

I  l  parut  aufïi  fur  ces  matières  l'Imprimé  fuivant. 

Mémoire  ,  contenant  quelques  Echantillons  ,  tirez  de 
V  Advertiffement  de  Droits  du  dépofé  Receveur  André 
Kaan,  dans  fin  Procès  devant  le  Conjeil  d'Etat  des 
Provinces- Unies  des  Pais-Bas,  contre  Maître  Jaques 
Surendonck  comme  Committé  pour  obfcrver  le  Droit 
de  la  Généralité  contre  ledit  Kaan  ,  £5?  du  Mémoire 
juccint  qui  a  raport  audit  Advertiffement  :  par  les- 
quels Echantillons  on  peut  juger  >  j ans  prendre  la  pei- 
ne d'une  onereufe  Lellure  ?  avec  combien  peu  de  can- 
deur ledit  Advertiffèment  £5?  Mémoire  ont  été  drejfez , 
£5?  combien  de  foi  on  y  peut  ajouter. 


I.   p\ANs  les  Art.  201.  &  202.  de  l' Advertiffement  il  eft  dit,  que  l'Im-  j^3^1" 
X-S  petrant  avoit  pr  opofé  au  Confeil  d'Etat  par  un  Mémoire  du  4.  De-  Mémoire 
cembre  1709.  d'offrir  impunément  de  î 'argent  aux  témoins  pour  avoir  diverfes   de  Kaan. 
chofes.     Ces  paroles  en  Italique  font  imprimées  avec  d'autres  Lettres  que 
le  Texte,  aparament  pour  faire  croire  que  c'étoit  les  propres  paroles  du 
Mémoire  de  l'Impétrant. 

Mais ,  û  l'on  regarde  la  Refolution  du  Confeil  d'Etat  du  4.  Décembre 
1705).  alléguée  par  l'Affigné  dans  l'Art.  203.  pour  prouver  fa  thefe  ,  & 
produite  fur  fon  inventaire  fous  la  Lettre  M.  1.  hco  ,  on  trouve  toute 
autre  chofe ,  &  que  l'Impétrant  donne  à  confiderer ,  s  il  ne  feroit  bon ,  en 
cas  que  la  veuve  Ferrier  découvrit  fincerement  ce  qui  lui  étoit  connu  touchant 
ceux ,  qui  contre  leur  devoir  avoient  eu  part  £5?  intérêt  dans  les  Admodiations 
&  Entreprifes  de  Farazyn,  &  ce  qui  en  dépend,  &  en  cas  que  pour  la  même  fin 
elle  dénonçât  &  remit  fans  réferve  à  Maître  Nicolas  Saldenus  toutes  les  Lettrés 

L  2  du 


DES     PKO- 

VINCES- 

Unies. 


84    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

du  Receveur  Kaan ,  de  Jean  &  Joffe  Farazyn  £5?  d'autres ,  de  même  que  tous 

les  autres  papiers  quelle  a  eu  après  la  mort  de  [on  mari  entre  fe  s  mains  ,  £5?  qui 

fervent  à  découvrir  les  Perfonnes  &  les  Intrigues  de  ceux  qui  doivent  avoir  eu 

part  £5?  intérêt  dans  le/dites  Admodiations  &  Entreprifes  ;  de  lui  procurer ,  non 

feulement  un  Atle  d'Impunité,  pour  autant  quelle  ou  J on  mari  défunt  pour  oient 

en  être  complices ,  mais  aufî  outre  cela  (  conformément  aux  Placards  du  Pais  ) 

la  promeffe  d'une  certaine  recompenfe  ,  pour  l'exhibition  de  telles  preuves  par  oh 

les  Perfonnes   &  les  Pratiques   des  intereffez  dans  les  Admodiations  &  autres 

Entreprifes  pour  oient  être  découvertes  ;  &  que  [on  nom  fer  oit  tenu  caché. 

On  pouroit  remarquer  ici ,  que  puifque  le  Confeil  d'Etat  s'eft  conformé 
dans  ladite  Réfolution  à  la  Proposition  de  l'Impétrant ,  les  odieufes  Ré- 
flexions, que  l'Alîigné  fait  dans  les  Art.  204.  jufqu'au  247.  fur  ladite  Propo- 
rtion, blenent  plus  l'honneur  de  LL.  NN.  PP.  que  celui  de  l'Impétrant. 

Mais  comme  LL.  NN.  PP.  ont  pourvu  par  la  Sentence  à  leur  honneur, 
ou  plutôt  à  l'honneur  de  la  Juflice ,  on  fe  contentera  de  demander ,  où  il 
fe  trouve  un  feul  mot  d'offre  et  argent  aux  témoins  dans  le  fufdit  Extrait  de  la 
Réfolution  du  4.  Décembre  1 709  ? 

Autant  qu'il  efl  défendu  de  corrompre  des  témoins ,  autant  efl-il  per- 
mis &  reçu  de  promettre  impunité  &  recompenfes  par  des  Placards ,  Pu- 
blications, &  Gazetes,  à  des  complices  ,  pour  aprendre  le  fil  &  la  liaifon , 
&  pour  avoir  des  preuves  autentiques  des  crimes  qu'on  ne  fauroit  fans 
cela  entièrement  découvrir,  ou  fufifamment  prouver. 

Mais ,  pour  faire  paner  cela  pour  corruption  de  témoins ,  il  faloit  falfifier  la 
Propoiition  de  l'Impétrant. 

Que  doit-on  penfer  d'une  caufe  qui  a  befoin  de  pareils  moiens  de  de- 
fenfe  ? 

II.  Dans  les  Art.  705.  708.  709.  &  710.  dudit  Advertiflement  de  l'Af- 
'figné  il  elt  dit ,  que  par  la  produtlion  de  l'afjïgné  N.  1 .  loco ,  laquelle  efl  le 
compte  rendu  par  Ferrier  à  Farafyn  des  Admodiations  &  Entreprifes  à  Me- 
nin  du  if.  Septembre  1706.  jufqu'au  dernier  Avril  1707.  il  confie  claire- 
ment, qu'au  lieu  d'un  refait at  de  compte  avantageux  pour  Farafyn,  il  lui  a  été 
onéreux  ,  tellement  qu'il  a  été  obligé  de  paicr  le  refiant  en  Lettres  de  change  à 
Ferrier  \  ce  qui  diffère  beaucoup  du  prétendu  gain.  Et  dans  le  Mémoire  Fol. 
7.  Que  dans  le  compte  original,  délivré  par  F Affïgné ,  lequel  eit  le  fufdit 
compte  N.  1.  loco,  Farafyn  rend  une  fomme  de  7773-1 7-3. 

Sur  quoi  on  demande  dans  la  fuite  du  Mémoire ,  d'où  vient  donc  le  gain 
de  28000.  Florins  que  l 'Impétrant  s 'efl  chargé  de  prouver  être  provenus  de  la  pre- 
mière demi-armée  des  Admodiations  £5?  Entreprifes  ? 

Mais,  fi  l'on  regarde  ledit  compte  fous  N.  1.  loco  on  trouve  jultement  le 
contraire;  favoir,  premièrement,  que  Ferrier,  Rendeur  du  Compte,  met 
pour  recette  70 193- 18-10.  &  pour  depenfe  pas  plus  que  1 7549-4-1. 

En  fécond  lieu ,  que  pour  folde  du  compte  il  revient  à  Farafyn 
52644-14-9.  ce  qui  difere  beaucoup  d'un  folde  onéreux  de  7773-17-3. 

Et  en  troifieme  lieu,  que  Ferrier  a  paie  fur  cette  fomme  de  5-2644-14- 
y.  à  Farafyn  ou  à.  fon  ordre  47000-0-0,  &  encore  1 341 8-1 2-0.  en  tout 

60418-12-0, 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        8f 

60418-12-0.  qui  font  7773-17-5.   de  plus  qu'il  ne  devoit  à  Farafyn  pour    Ammt» 


fat»  1  aire  audit;  folde  avantageux. 

Lefquels  7773-1  ?-^-  reçus  de  trop  Farafyn  a  été  obligé  de  reflituer  à 
Ferrier. 

Oferoit-on  nommer  cela  un  folde  de  compte  onéreux  ? 

III.  Dans  les  Art.  721-726.  dudit  Advertiflèment  de  l'Afîigné  il  efl  dit, 
que  par  ce  compte  de  l'Impétrant ,  qui  efl:  le  compte  délivré  par  l'Impétrant 
fauf  erreur  X.  1.  loco,  comme  on  peut  voir  par  l'Art.  65?.  de  l'Advertilfe- 
ment,  le  prétendu  gain  de  28000.  Florins  diminue  fort ,  •va  que  la  depenje  de 
la  jomme  de  88857-14-3*  étant  foldée  contre  la  recette  de  la  fommede  29 120-6-0. 
il  ne  rejfe  que  262- 11 -9.  ce  qui  a  peu  de  proportion  avec  le  gain  imaginaire  dont 
1  Impétrant  fait  tant  de  bruit. 

Mais,  en  regardant  ledit  compte  on  trouve  d'abord,  que  la  depenfe  ci- 
deffus  mentionee  de  la  fournie  de  888^7-14-3.  eit le  produit ,  ouïe  total, 
des  nuits  Articles  fuivans. 


dfs  Pro- 
vince s- 
Unuc. 


Reprifes  générales  des  Débours. 

Pour  les  Domaines.     -    -    -    -      -  17288  -  -  1     -    p. 

Pour  les  Vivres  de  Mr.  Farafyn.  -    -  248  -  -  15     -    9. 

Pour  les  Vivres  de  Loef.     -     -    -    -  72  '-  .  -  0-0. 

Pour  les  Fortifications.      -    -    -     -  10148  -  *-  18     -     <?• 

Chauffage.    --------  5701  -  -  3-0. 

A  Mr.  le  General.      -----  4717  -  -  9-0. 

A  Mr.  Kaan.     -------  47-00  -  -  0-0. 

A  M.  Farafyn.    - 46181  -  -  6     -    9. 

888;o  -    -     14    -     3. 

Les  trois  derniers  de  ces  huit  Articles  étant  ajoutez  audits  262-1  T-y. 
comme  notoirement  ils  y  doivent  être  ajoutez,  il  en  refulte  pour  Farafyn 
un  folde  de  compte  avantageux  ,  non  de  262-1 1-5).   mais  de  5-7661-7-6. 

A  moins  qu'on  ne  voulût  dire,  que  46181-6-9.  paiez  à  Farafyn  ,  & 
4717-9-0.  &  4500.  paiez  pour  lui  à  d'autres,  ne  tournoient  pas  au  profit 
de  Farafyn ,  ce  qui  feroit  une  abfurdité  manifefle. 

Il  n'efl  pas  neceflaire  d'examiner  ici  quelles  Déductions  dôivenrêtre 
faites  de  ce  folde  avantageux  de  57661-7-6.  pour  pouvoir  dire  au  jufte 
combien  il  en  a  refté  ;  il  fuffit  qu'il  en  a  pu  être  déduit  jufqu'à  29661-7-6. 
pour  retenir  encore  tout  net  28000  Florins. 

Qu'on  juge  à  nrefent ,  avec  combien  de  candeur  on  peut  avancer  dans 
îefdits  Articles,  non  feulement,  qu'il  paroifïbit  par  lefdits  deux  Comptes, 
qu'il  n'y  a  pas  eu  28000.  Florins  de  gagnez  fur  les  Admodiations  &  En- 
treprifes  de  Farafyn  àMenin  pour  le  première  femeftre  ;  mais ,  qu'outre  ce- 
la il  étoit  clair  par  le  premier  de  ces  comptes ,  qu'il  y  avoit  une  perte 
de  7773-I7-3-  ou  que  s'il  y  avoit  quelque  chofe  de  relie,  il  paroifToit  par 

L  3  le 


Uniks. 


£6    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

-AffAinr.s  le  fécond,  que  ce  furplus  n'a  monté  qu'à  262-1 1  -9.  ou  tout  au  plus  feule- 
ras Pko-  ment  à  1166-11-9.  Juivant  le  plus  jufte  calcul ,  comme  dit  l'Afligné  dans 
vincks-     j'Art.  728.  de  fon  Advertiffement. 

IV.  Dans  les  Art.  914.  &  oif.  du  même  Advertiflement  il  eft  dit, 
que  Ferrier  a  déclaré  cordialement  au  lit  de  la  mort ,  en  prefence  de  l'Audi- 
teur Slegt ,  quil  tf  avoit  jamais  rien  promis  ni  donné  a  î Afjïgné  direclement  ou 
indirectement  pour  des  Raifons  injufes  j  ce  qu'on  paiferoit  fous  filence ,  quoi- 
que les  paroles,  pour  des  Raisons  injujl es  ne  fe  trouvent  pas  dans  la  Décla- 
ration de  Ferrier,  mais  y  ont  été  entreiaffées  par  l'Afligné  dans  fon  Ad- 
vertiffement, puisqu'il  n'eft  pas  Quefticn,  (i  Ferrier,  Commis  de  Fara- 
fyn,  mais  fi  Farafyn,  Maître  de  Ferrier  ,  a  promis  ou  donné  quelque 
chofe  à  l'Afligné ,  n'étoit  que  l'Afligné  eut  perfiilé  à  dire  dans  fon  Mé- 
moire Fol.  6.  §)ue  Ferrier  fur  le  ht  de  la  mort ,  &  deux  jours  avant  Jon  dé- 
cès ,  après  avoir  reçu  l'extrême  onclion,  a  déclaré  lui-même  aï  Auditeur  Slegt, 
en  prejence  de  témoins ,  quen  particulier  il  et  oit  vt  ai  que  V  Afjïgné  navoit  eu  aur 
cune  portion  ni  part  avec  haraj'yn  dans  les  Admodiations  ,  &  que  pour  cette 
Rai  [on  ou  pour  d'autres  Affaire,  injufles  il  ne  lui  av  oit  jamais  été  fait  aucun 
paiement  ni  direclement  ni  indirectement. 

Mais,  dans  la  Déclaration  fignée  par  Ferrier  avec  deux  témoins  &  l'Au- 
diteur Slegt,  &  produite  par  l'Afligné  fous  X.  1.  loco  ,  il  ne  fe  trouve  rien 
de  femblable. 

Ce  qui  paraîtra  fi  incroïabîe ,  _qu'on  a  jugé  neceflàire  d'inferer-ici  cette 
Déclaration,  qui  contient  ce  qui  fuit  (*). 

Ce  jourdïhui  Samedi  7.  Juillet ,  moi  Jokfïgné  Auditeur  Militaire  ai  examiné 
exaclcment  le  Sieur  Germain  Ferrier  malade  au  lit ,  £5?  difant  quil  avoit  déjà 
reçu  tous  fes  facremens  ;  ce  que  volant ,  je  lui  ai  repre fente ,  quil  nétoit  permis 
à  aucune  Perfonne  en  cet  état,  ou  Dieu  pouvoit  la  rapeller  aujji-tôt ,  d'aceufer 
ou  d'excujer  qui  que  ce  foit ,  &c.  :  Sur  quoi  ledit  Germain  Ferrier  depofoit ,  que 
le  Sieur  Jofjè  Farafyn ,  aiant  deffein  de  faire  fon  profit  en  braffant  de  la  Bière 
pour  la  Garnifon  ,  avoit  demandé  permifjion  de  faire  venir  de  l'orge  germé ,  ce 
quil  avoit  fait;  mais ,  volant  quil  ne  pouvoit  obtenir  permifjion  de  braffer ,  il 
avoit  chargé  lui  depojant ,  de  le  revendre  en  détail ,  ce  quil  navoit  pu  faire  :  que 
le  Sieur  Kaan  avoit  bien  dit  à  quelques  Perfonne  s ,  que  le  depofant  avoit  de  V  or- 
ge germé  à  vendre ,  mais  que  ni  Braffcur  ni  Marchand  nétoit  venu  chez  lui 
pour  en  acheter  ,  que  quelques  mois  après,  ou  il  s\n  état  défait  avec  perte  \ 
quil  ri  avoit  •  pas  parlé  avec  ledit  Sieur  Kaan ,  ni  navoit  demandé  permifjion  de 
faire  venir  de  Forge  germé  à  fexclufion  d'autres  ,  foit  Braj/curs  ou  Marchands  : 
qu'il  navoit  jamais  rien  promis  ni  donné  audit  Sieur  Kaan ,  direclement  ou  in- 
direclement.  Finit  par-là  ,  en  s' offrant  à  jerment  en  cas  de  befom.  Fait  à  Me- 
nin,  en  prejence  des'  Sieur  i  'Jean  Fichier,  Ingénieur  ici,  &  Jaques  de  Mey  Chi- 
rurgien pareillement  ici  à  Menin,  comme  témoins  dignes  de  foi  à  ceci  requis  , 
fous  la  date  de  ci-defjus.  Signé  Ferrier  ,J .  Fichier ,  J.  de  Mey ,  &?  Jean- Ja- 
ques de  Slegt. 

Où 

(  *  )  Verbal  d'Enquête  de  VAjpgné  X.  i.  loco. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.         87 

Où  trouve-t-on  un  mot  en  ceci  de  ce  qui  a  été  avancé  dans  ledit  Mé- 
moire? 

L'Affigné  dira  peut-être,  que  ce  qui  ne  fe  trouve  pas  dans  cette  Décla- 
ration, eft  contenu  dans  une  autre  Déclaration  de  Jaques  de  JVley  Maî- 
tre Chirurgien  à  Menin  ,  donnée  le  22.  Juin  17 14.  &  recolée  le  25. 
d'Août  1716. 

Mais,  û  jamais  on  a  vu  de  Déclaration  dont  la  fauffeté  eft  palpable  , 
c'eft  celle-ci. 

Savoir,  Jaques  de  Mey,  un  des  témoins  qui  ont  figné  la  Déclaration 
ci-deffus  raportée  de  Ferrier,  conjointement  avec  Ferrier  &  l'Auditeur 
Slegt ,  n'a  pas  rougi  de  déclarer  6.  ans  après ,  que  Ferrier  avoit  donné 
de  toutes  autres  Reponfes  à  l'Auditeur  Slegt,  que  ne  porte  la  Déclaration 
fignée  par  eux  deux  ,  &  par  lui  de  Mey  même  comme  témoin. 

Voici  Tes  propres  paroles  (*).  Qu'il  fe  fouvient  a  avoir  été  témoin  à  la 
paffation  d'un  AÏÏe  dans  le  mois  de  Juillet  fait  par  le  Sieur  Slegt,  Auditeur  Ali- 
lit  aire  de  Bruxelles  pour  lors  à  Menin,  lor/que  ledit  Slegt  a  demandé  à  défunt 
le  Sieur  Germain  Ferler ,  fur  fon  Ut  malade ,  fi  Monfr.  Kaan  Receveur  Gene- 
ral audit  Menin  avoit  été  interejjé  dan,  les  fermes  des  Domaines ,  prifes  par 
le  Sieur  Farafyn.  Sur  quoi  il  a  re pondu ,  que  non.  Que  ledit  Slegt  a  alors  de- 
mandé audit  Ferrier ,  fi  dans  le  compte  fous  A.  B.  C.  qu'il  lui  mont  r  oit,  ledit 
Sieur  Kaan  auroit  eu,  ou  tiré,  quelque  part,  ou  profit ,  /'/  avoit  fait  la  mê- 
me Reponfe  que  non.    Ledit  foûffigné  fe  réfère  au  furplus  à  î '  /Jbli  qui  a  été  donné. 

Ce  qui  confirme  encore  plus  la  fauiïeté  de  cette  Déclaration,  eft,  que 
l'Auditeur  Slegt,  aiant  été  cité  le  27.  Juillet  1716.  à  la  Requifition  de 
l'Adigné  ,  pour  repondre  à  interrogatoires  ,  a  répondu  par  ferment  fur 
l'onzième  Article  (f  )  ,  Qu'il  ri  a  pas  demandé  à  Ferrier ,  fi  le  Receveur  Kaan 
n  avoit ,  ou  ri  avoit  eu  ,  quelque  portion  ou  part  dans  les  Fermes ,  A  amodiations  ou 
Entreprifes  de  Jojfe  Farafyn  fon  Maître;  y  ajoutant  pour  Raifon ,  que  cela  lui 
était  impofjible ,  ne  connoiffant  pas  dans  ce  tems-là  le  Receveur  Kaan,  ni  ne  fa- 
chant  abfolument  rien  de  portion,  part,  ou  autre  chofe  mentionée  dans  cet. 
Article. 

Et  fur  le  12.  Art.  que  tout  ce  qui  lui  a  été  dit  par  Ferrier ,  a  été  mis  par 
écrit  en  préfence  de  témoins. 

Le  même  Auditeur  aiant  été  examiné  le  18.  Août  à  la  requidtion  de 
l'Impétrant  fur  des  contre-interrogatoires ,  a  répondu  au  premier  Article 
(§  ) ,  Quil  ignorait  d'avoir  demandé  à  Ferrier  fur  quoi  que  ce  f oit  qui  regardait  en 
particulier  le  Receveur  Kaan ,  fe  raportant  à  la  Déclaration  ci-deiTus  infé- 
rée de  Ferrier  du  7.  Juillet  1708. 

Sur  l'Art.  2.  De  ne  lui  avoir  pas  demandé  fi  ledit  Receveur  Kaan  étoit  iute- 
reffé  dans  les  Admodiations  des  Domaines  entreprifes  par  Jofe  Farazyn  à  Me- 


nai. 


El 


(*)  Verbal  d'Enquête  de  VAjJlgm  fous  X.  t.  loco. 
(f)  Verbal  d'Ensuite  de  VAJjïgné  fous  X.  î.  hio. 
(§)  Verbal  d'Enquête  de  V Ajjigné  foui  X.   \,  loco, 


AtVAÏKl» 

PM     Pi<0.« 

VINCfcS- 

Unies. 


VINCFS 

Unies. 


88     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires        Et  fur  l'Art.  4.     De  ri  avoir  pas  alors  fait  voir  audit  Germain  Ferrier  un 
ces  Pro-   Compte  fous  A.  B.  C.  £5?  D.  ni  de  lui  avoir  demandé  s'il  en  avoit  tiré  aucune 

portion  ou  profit;  y  ajoutant  pour  Raifon  peremtoire,  de  ne  /avoir  pas  encore 

dans  le  même  moment  ce  que  cefi  que  ce  compte  ,  fi-non  quil  en  avoit  entendu 

parler  dépuis  quelques  jours  confufement. 

Tout  cela  n'a  cependant  pas  retenu  l'Afligné  de  mettre  à  profit  ladite 

Déclaration  de  Jaques  de  Mey,  &  de  l'apeller  même  dans  fon  Mémoire 

pag.  6.  un  homme  de  probité. 

V.  Pour  prouver  que  la  liquidation  fecrete  ,  produite  par  l'Impétrant 
fous  X.  2.  loco,  ne  fauroit  être  faite  à  Gand  le  26.  Septembre  1707.  com- 
me elle  porte  cependant  en  termes  exprès,  on  dit  dans  les  Art.  8f6.  & 
877.  dudit  Advertiilement:  quon  la  croit  être  conçue  à  Menin  le  26.  Septem- 
bre 1707.  &  dans  le  Mémoire  Fol.  7.  Quil  y  avoit  même  fur  ledit  Inflru- 
ment ,  à  Menin. 

Mais, quand  on  regarde  i'Inflrument,on  trouve,  qu'il  y  a  au  coin  de 
la  première  page  à  main  gauche,  non  point  à  Menin,  ni  à  Menin  le  16. 
Septembre  1707.  mais  fimplement  Menin  1707.:  ce  qui  fait  voir  clairement 
que  cette  note  marginale  ne  fert  qu'à  marquer  que  la  liquidation  regarde 
Menin  &  £  Année  1707. 

Or  pour  faire  croire  que  la  liquidation  portoit  qu'elle  efl  faite  à  Menin, 
il  a  fallu  joindre  dans  l'Avertiflement,  contre  la  vérité,  Menin  &  le  26. 
Septembre  ,  &  mettre  dans  le  Mémoire,  non  pas  Menin  1707.  mais  à)Menin. 

Quel  nom  méritent  de  pareilles  allégations  ?  &  quelle  opinion  doit 
avoir  de  fa  caufe  celui  qui  s'en  fert  pout  rendre  fufpe6t  un  Infiniment 
dont  on  fe  fert  contre  lui. 

VI.  Dans  l'Art.  1227.  dudit  AvertifTement  de  l'Afligné  il  efl  dit,  que 
les  Art.  9.  &  10.  des  refponfives  de  P.  J.  d'Ooflerling  fur  le  contre-in- 
terrogatoire de  l'Affigné  portent  (#)  quil  ri  a  pas  vu  le  réfultat  du  compte , 
quoique  le  neuvième  Art.  contient  juftement  le  contraire.  En  voici  la 
teneur. 

Si  lui  Dépofant  a  vu  le  réfultat  du  compte  £5?  le  profit  ou  la  perte  ? 

Le  Dépofant  afirme  fur  ce  9.  Art  :  quil  a  vu  le  réfultat  du  compte ,  mais 
quil  a  vu  en  même  tems  quil  ri  et  oit  pas  figné;  y  ajoutant  dans  fa  réponfe  fur 
l'Art,  fuivant:  Que  le  Dépofant  ne  fe  fouvient  pas  à  combien  le  réfultat  a  mon- 
té,  mais  feulement  qu'il  revenait  au  Sieur  Kaan  à  peu  près  la  fomme  de  7000. 
florins. 

Peu  après,  favoir  dans  F  Art.  1231.  dudit  AvertifTement  de  l'Afligné,  il 
efl  dit,  que  P.  J.  d'Ooflerling  avoit  déclaré  fur  le  17.  Art.  du  contre- 
interrogatoire  (i"  ).,  quil  ne  fauroit  rien  dire  d'aucun  partage  du  gain,  &?  en- 
core moins  en  combien  de  portions;  quoiqu'aiant  été  demandé  dans  cet  Art. 
en  combien  de  portions  le  prétendu  gain  a  été  partagé  ?il  n'a  répondu  autre  chofe 
û-non,  qu'il  ne  f  avoit  pas  en  combien  de  portions  le  prétendu  gain  a  été  partage. 

Dans 

(*)  Verbal  d'Enquête  de  l'Impétrant  fous  T. 
[f)  Verbal  d'Enquête  de  l'Impétrant  fous  T. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.         gP 

Dans  les  Art.  1232.  &  1133.  il  eft  dit,  que  le  fufmentionné  Oofter- 
ling  avoit  déclaré  furie  18.  Art.  du  contre-intcrogatoire  (f),  de  ne  rien  fa- 
voir  des  participans,  ni  que  le  Gouverneur  de  Menin  y  avoit  été  compris  ,  ou  re- 
prefenté  par  V Afligné.  Cependant,  aiant  été  démandé  par  cet  Article:  Qui 
étoient  les  Participans  de  ce  Gain?  il  adonné  une  toute  autre  Réponfe,  la- 
voir: que  tout  ce  qu'il  [avoit  et  oit  quil  revenoit  audit  Sieur  Kaan  pour  folde  du 
compte  de  l'année  1 707.  fept  mille  florins  falvo  juflo. 

Et  dans  les  Articles  fuivans  il  ne  déclare  autre  chofe  au  fujet  du  Gou- 
verneur, fi-non,  quil  n  y  avoit  pas  été  préfent ,  &  que  le  Dépofant  ne  fait 
pas  qui  y  a  reprefenîé  fa  perfonne. 

VII.  Dans  les  Art.  }<5tf$.  &  1664.  dudit  Avertiflement  de  l'Aflïgné  il 
eft  dit,  quil  eft  bien  vrai  que  les  trois  points  ci-deffus  mentionez  ,  lefquel* 
points  font  exprimez  dans  les  Art.  3<54f.  3646.  &  3647.  de  l'AdverthTe- 
ment,  n  ont  pas  été  mis  en  ligne  de  compte  dans  le  premier  cahier  de  ï '  Afjîgné , 
mais  qu'ils  y  ont  été  alléguez  feulement  pour  la  mémoire. 

Cependant, quand  on  examine  ledit  premier  cahier,  on  trouve  qu'aucun 
defdits  trois  points  n'y  a  été  mis  en  ligne  de  compte,  {bit  pour  la  mémoi- 
re ,  ou  autrement;  &  qu'il  n'y  a  que  les  Rançons  du  fécond  femeftre 
d'Admodiation,  qui  y  ont  été  alléguez  pour  la  mémoire. 

Ces  Echantillons ,  dont  on  pouroit  grofîir  le  nombre  s'il  étoit  necefTai- 
re,  fuffifent  fans  doute  pour  faire  juger  de  la  candeur  avec  laquelle  l'Ad- 
vertiffement  de  Droits,  &  le  Mémoire  fuccint  de  l'Afligné,  ont  été  corn- 
pofez,  &  de  la  foi  qu'on  peut  y  ajouter. 

Il  y  avoit  des  Miniftres  Etrangers ,  &  même  des  perfonnes  du  Païs  le* 
plus  clairvoiantes  &  les  moins  timides,  qui  craignoient  que  la  Condamna- 
tion de  Kaan  n'eut  des  fuites.  Elles  pourroient  tendre  à  rendre  diffon- 
riante  l'Harmonie  Ci  neceffaire  entre  les  Provinces.  Leur  crainte  étoic 
fondée  fur  ce  que  le  Confeil  d'Etat  avoit  dépêché  aVliffingue  unHuiffier 
pour  exécuter  les  biens  de  ce,Condamné-là  pour  le  paiement  des  amandes 
&  des  fraix  du  procès.  L'on  eut  cependant  des  avis  de  cette  Ville-là,  que 
les  Magiftrats,  parmi  lefquels  le  Condamné  avoit  des  Amis  ,  &  dont  il 
étoit  du  corps ,  paroiffoient  vouloir  le  foûtenir.  De  plus ,  de  le  déclarer 
pour  honnête-homme,  &  par  confequent  de  vouloir  le  continuer  dans 
tous  les  Emplois  dont  il  étoit  en  poflelTion  dans  cette  Ville-là.  Ainfi ,  l'on 
aprehendoit  qu'à  Vlifîingue,  non  feulement  onempecheroit  l'Huiffier  d'exer- 
cer fa  charge,  mais  même  qu'il  vint  à  être  expofé  à  être  mal  traité.  On  l'e- 
ftimoit  à  la  vérité  une  Procédure  exhorbitante,  &  faifant  directement  brè- 
che à  la  Conflitution  du  Gouvernement  de  la  Republique  &  à  l'Union.  Ce 
qui  augmentoit  cette  aprehenfion  venoit  de  ce  qu'on's'attendoit  à  fort  peu  de 
docilité  parmi  la  populace  de  la  Zelande.  L'on  en  avoit  un  Exemple  fort 
récent  dans  la  Ville  de  Middelbourg.  La  Cour  de  Juftice  qui  fe  tient  à 
la  Haie,  qui  eft  compofée  mi-partie  de  Confeillers  de  la  Province  de  Hol- 
lande 

(f)  Fcrbal  ci-defus. 

Tome  XI.  M 


-Aminé» 
des  Pro- 
vinces- 
Unie*. 


90     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  £T 

Aïïaifes    lande  &  de  Zelande,  avoit  envoie  fe  Fifcal  avec  quelques  autres  Officiers 

Bis  Pko-    je. fa  dépendance  pouf  y  faifir  un  Criminel.     Le  Peuple  y  regimba,  em- 

Unies!"    P^cna  la  capture  du  Criminel  ;  '&  le  Fifcal  &  autres  Officiers  furent  bien 

. L   aifes  .&  même  heureux  de  pouvoir  s'echaper  des  mains  de  la  Populace,  (Se 

de  revenir  fans  avoir  pu  s'aquitter  de  leur  Commifïïon.  A  la  vérité,  lesMa- 
giftrats  y  font  doiiez  de  figeife,  mais  toute  leur  prudence  n'étoit  pas  une 
digue  aïîez  fuffifante  contre  une  populace  fou-vent  deibtuée  de  raiibn.  Ce 
defôrdré  fit  mettre  fur  le  tapis  de  faire  de  .  fages  Remontrances  aux  Etats 
de  Zelande  de  mettre  de  meilleurs  ordres  pour  la  foumiflîon  à  leur  com- 
mune Cour  de  Jultice. 

Enfin  l'Apel  fut  refufé.  Ce  fut  fur  des  Raifons,  qui  paroiffoient  incon- 
tefïables.  Par  exemple,  qu'on  n'admettoit  point  d'Apel1  des  Sentences  des 
Collèges  des  Amirautez .  quoique  ceux-ci  foient  fubordinez  à  I'Afiemblée 
fie  la  Généralité-,  mais  feulement  une  Revilîon.  D'ailleurs,  qu'un  Apel 
fupofe  un  Juge  fuperieur.'  On  connoit  que  l'Affemblée  des  Etats  Gène* 
raux  n'étoit  pas  de  la  forte  par  deifus  le  Confeil  d'Etat.  Ç'étoit  que  ce 
dernier  étoit  plus  ancien  que  cette  Affemblée-là.  Par-là  l'on  trouvoit  in- 
contestable Je  Droit  du  Confeil  d'Etat  de  juger  fans  Apel  fur  les  Affaires 
Militaires  &  des  Finances.  Il  y  avoit  d'autres  Raifons -mais,  celles  qu'on 
vient  de  raport'er  éioient  des  plus  pertinentes.  On  accordoit  bien  IaRevifion 
des  Sentences  dudit  Confeil  d'Etat,  au  cas  qu'il  y  eut  quelqu'erreur,  ou 
abus.  Cependant,  dans  ces  Revifions, des  Membres  du  Collège,  qui  a  pro- 
noncé la  Sentence,  y  interviennent  avec  d'autres  qu'on  nomme.  Dans  ce 
cas,  on  nommeroit  un  Député  de  chaque  Province,  pour  revoir  cette  Senten- 
ce conjoin&ement-avee 'ceux  du  Confeil  d'Etat.  Cependant,  il  en  coûte 
beaucoup  a  celui  qui  demande  la  Revifion ,  &  doit  préalablement  confi- 
gner  une  grotte. Tomme  pour  les  fraix,.  D'ailleurs,  il  auroit  fulu  que  Kaan 
paiât  'd'abord  les  amandes  auxquelles,  il  avoit  été  condamné,  ou  lés  biens 
exécutez  pour  en  avoir  le  paiement.  Le  Refus  de  l'Apel  n'avoit  pas  laiïTe 
que  de  trouver  de  l'Opofition.  Il  ne  fut  emporté  que  par  la  pluralité. 
On  attribua  cette  Opoiition  à  l'entêtement  de  quelques  Membres  de  cer- 
taines Provinces  ,.qui  avoient  en  veuë  de  dominer,  &  de  ravaller  l'Autorité 
fondamentale  du  Confeil  d'Etat.  Cet  entêtement",  fuivant  quelques  gens  , 
poùvoit  avoir  quelques  relions -.avides  ou  craintifs  d'un  intérêt  particulier 
ou  perfounel.'  L'on  raporte  tout  ce  quedeffus,  pareeque  cette  Affaire  fit 
beaucoup  de  bruit ,  &  qu'elle  faifoit  voir  aux  Miniltres  Etrangers  les  fâ- 
cheux Simptomes  de  la  fituation  d'alors  de  la  République.  Celle-ci  faifoit 
cependant  briller. en  toutes  les  autres  Affaires  plus  eifentielles  une  prevoiarj- 
■ce*  admirable,  .&jrne.  fagdJè;qui  furpallbit  toutes  celles  qu'on  vante  fi  hi- 
.^eirboh  que  ment  dans  '  les  anciennes  &  fi  renommées  Républiques  de  la 
<3riece.    I  On  doit  ce  témoignage  à  la  vérité  éloignée  de  toute  flatterie. 

L'Attente  d'en  voir  la  fuite  ne  fut  pas  longue.  On  exécuta  les  biens 
de' ce. Condamné  pour  les  Amandes  &  autres  fraix.  Il  s'étoit  attendu  que 
les  MigTirats  de  Vlifingue  lui  feraient  favorables, &  empecheroient  cette 
exécution^  mais,  leur  fageffe  les  porta  à  permettre  qu'on  envoiât  des  gardes, 

& 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII. 


<;l 


VINCES- 

Unies. 


&  qu'on  fçellât  fa  Maifoa  &  fes  Effets.  Le  Réfultat  de  cela ,  qui  y  mit  Avfakie*-, 
une  fin,  fut  que  fur  cela -ce  Condamné  fe  retira  lans  qu'on  put  alors  fa-  nES  »^°- 
voir  vers  où  il  s'étoit  acheminé. 

II  y  eut  une  Affaire  qui  avoit  caufé  quelque    plaifir.     On  a  parlé   dans 
des  Tomes  précédents  des  Differens  entre  la  Ville  de  Groningue  &  les 
Ommelandes.     Ils  avoient  duré  allez  de  tems,  fans  qu'on  eut  pu  reconci- 
lier ces  deux  part/es  de  la  Province.    Enfin,  elles  s'étoient   accordées  en- 
tr'elles,  &  rétabli  de  leur  part  leur   bonne   intelligence  intelhne.     Les 
Magiltrats  de  la  Ville  en  firent  part  à  la  Généralité  par  une  Lettre  datée  du 
jour  de  Noël  précèdent.  Cette  Lettre  de  Notification  portoit  que,le'Samedi 
avant  ce  jour-là,  fa  voir  le  18. ,  ces  differens,  qui  avoient  duré  fi  long- 
tems,  avoient  été  affoupis.     Le  réfultat  en   avoit    été  un   aquiefeement 
volontaire  h  toutes  les  charges,  qui  avoient'été  precedement  levées,   & 
pendant  la  dernière  Guerre.     Il  y  avoit  quelqu'exception.     Une  étoit  de 
réduire  toutes  les  Obligations  indiffin&ement  de  cinq  à.  quatre  pour  cent 
d'intérêt  pour  l'année  courante  17 18,  &  les  rentes  viagères  de  dix  à  neuf 
pour  cent.     La  Ville  avoit  toujours  foutenu  que  tous  les  Sujets  de  la  Pro- 
vince dévoient  être  égalemeut  chargez,  &  non  pas  les  uris  plus  que  les 
autres.  Par  confequent,ceux  qui  avoient  des  Obligations  pas  plus  que  ceux 
qui  avoient  de  grands  biens,  cides  effets»  opulens.  Cependant,pourle  bien 
de  la  Paix;  &-  pour  preferver  les  finances  délabrées  de  la.Prpvince  de  leur 
ruine  totale,  la  Ville  avoit  con/enti  à  ceue  égalité  des  charges.    Il  refuita 
de-là  que  les  Ouligations,^  même  des  lbmmes  négociées  fous  la  garantie  de 
la  Republique,  furent  réduites  de  cinq  à  quatre  pour  cent.     Àuffi  la  Ga- 
rantie de  l'Etat  n'étoit-elle  jamais  que  pour  quatre  pour  cent.     Des  gens 
bien  intentionnez  fouhaiterent.que.  les.  Quartiers  de  k  Gueldre  qui  s'étoient 
opiniatrez  dans  leurs  Difterens  fur -leur  contingent  refpeétif  depuis  13.  à 
14.  ans  ,  enflent  fuivi  l'Exemple  de  Groningue. 

:  Ce  rabais  d'intérêts  donna  lieu  à  continuer  des  Conférences  entre  des 
Députez  de  la 'Généralité,  ceux  du.Confeil  d'Etat, &  de  la  Chambre  des 
Comptes  de  la  Généralité,  pour  examiner  lesmoiens  pour  ménager  les  Re- 
venus de  la  Republique.  I!  y  avoit  prefque  deux  ans  que  cette  Propor- 
tion avoit  été  faite  dans  FAiremblée, des, Etats,  Généraux-,  &  de  tems  en 
tems  différentes  Provinces  l'avoient  renouvelée.  Les. Députez  de  celle 
dOver-YiTeï  le  firent  de  nouveau  Je  ,  18,  de  Février  de  cette  année.  Sur 
cela  on  fixa  un  jour  pour  y  vaquer.*'  Le  Co'nfeïf  d'État  e-a  demanda  un 
renvoi,  parce  qu'il  étoit  occupé  à  l'Affaire  de  Kaan.  Celle-là  étant  finie, 
les  Conférences  furent  entamées.  On  y  mit  fur  le  tapis  l'Avis  de  la  Cham- 
bre des  Comptes -de  la  Généralité,  qu'elle  avoit  donné  fur  cette  matière  il 
y  avoit  environ  une/année.  Cet  Avis  ne  portoit  au  fonds  que  quelques 
points  de  Lefine  ,.  de  fort  peu  ou  -point  de  confequence.  Le  Conlbil 
•d'Etat  mit  d'abord  fur  le  tapis  qu'il  fallpit/preahbleinent  régler  la  reparti- 
tion  proportionnée  des  Troupes  fur  les • 'Provinces ,  refpectives,,  ainii  qu'il 
avoit  mis  déjà  par  écrit.  Quelques  Membres  dirent  que  les  L-urs  s'étoient 
pour  cela  conformées  à  la  Refolution  des  Etats  du  26.  Mai  de  l'année  pre- 

M  2 


ce- 


SES    Pro 
VINCES- 

Uniks. 


Afïairm 

»e  Mos- 

COVjE. 


5>2    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

cedente.  Le  Confeil  d'Etat  foûtint ,  que  fi  quelques-unes  s'y  étoient  con- 
formées ,  i!  y  en  avoir  d'autres  qui  en  étoient  entièrement  éloignées.  Il 
propofa  pour  régler  cette  Affaire  de  faire  un  Plan  Conciliatoire ,  afin  que  la 
repartition  fut  juflement  proportionnée.  Il  fit  ce  Plan  le  24.  Février  , 
qu'il  prefenta  le  même  jour  aux  Etats  Généraux.  Il  fallut  en  envoier  la 
Copie  aux  Provinces  refpeéïives ,  pour  en  avoir  leur  Aprobation.  Ce  qui 
traina  en  longueur  ,  d'une  manière  qu'on  n'a  pas  vu  les  fuites  avant  le 
Départ  de  la    Hollande. 

11  auroit  peut-être  été  bon,  que  le  Séjour  de  l'Ecrivain  de  ces  Mémoires 
eut  pu  fans  préjudicier  à  fa  fanté  relier  plus  longtens  à  la  Haie ,  pour  voir 
la  fin  de  plufieurs  Affaires.  Par  exemple, de  voir  celle  des  Négociations 
qu'il  y  avoit  fur  le  tapis  tant  entre  l'Empereur,  la  France,  &  l'Angleterre 
relativement  à  l'Efpagne.  Comme  l'on  en  a  vu  la  Conclufion  imprimée 
ailleurs  dans  la  fuite  fous  le  nom  de  Quadruple  Alliance,  l'on  s'y  raporte. 
C'elt  auffi  bien  touchant  une  autre  entre  le  Czar,  la  Suéde  ,  le  Roi  Au- 
gufte,&le  Roi  de  Pruffe.  Elle  devoit  être  ménagée  à  Dantzick  par  la 
Médiation  de  la  France.  Suivant  des  Avis  que  le  Baron  de  Heems  avoit 
eu  de  la  Cour  Impériale,  les  ordres  avoient  été  envoiez  de  leur  part  à 
Vienne,  pour  inviter  l'Empereur  d'y  envoier  fes  Plénipotentiaires.  On  af- 
furoit  cependant,  que  ce  Congrès  à  Dantzick  n'étoit  qu'une  Formalité  pour 
figner  la  Paix*  car,  l'on  étoit  déjà  convenu  de  tous  les  Articles. 

AFFAIRES    DE   MOSCOVIE. 

Il  y  eut  dans  le  commencement  de  cette  Année  une  Affaire  capable 
d'étonner  le  Public.  Ce  fut  qu'au  commencement  de  la  même  Année  le 
Prince  Kourakin  notifia  aux  Etats ,  par  ordre  du  Czar,  que  le  Czarowitz 
fon  fils  aine  avoit  renoncé  à  fa  fuccefîion  en  faveur  du  fécond  fils  que  le 
Czar  avoit  eu  de  la  Czarinne  fa  féconde  femme.  Les  Etats  en  avoient 
déjà  été  informez  par  des  Lettres  de  leurMinillre  à  la  Cour  du  Czar  que 
voici. 

Lettres  de aux  Etats  Généraux  des  Provin- 
ces-Unies ,  touchant  le  Procès  du  Czarowits\  des  14.. 
6?  J  7.  Février  1718. 


Lettres 

touchant 
le  Procès 
du  Cza- 
rowits. 


MM. 

ON  forme  actuellement  les  grandes  Cloches,  &  j'aprens  quejSaMa- 
jefté,  accompagnée  de  tous  fes  Minières  &  Boyars,  fe  trouve  dans 
la  grande  Sale  d'Audience,  où  Son  Alteffe  le  Czarowitz  doit  parokre, 
pour  renoncer  fblemnellement  à  la  Succeffion  de  cette  Couronne.  J'eC- 
père  de  pouvoir  mander  par  la  première  Polie  toutes  les  Circonftances 
de  cette  importante  Affaire  ,  &  j'ai  l'honneur  d'être  ,  &c.  Mofcou,  le 
'14.  Février  1718. 

HAUTS 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  93 

Affaires 
HAUTS  ET  PUISSANS  SEIGNEURS,  ™  Moi- 


COVIE. 


EN  confequence  de  ma  dernière  très-humble  Dépêche  du  14.  de  ce 
mois  Je  prens  la  liberté  avec  tout,  le  dû  refpecl:  de  mander  à  VV.  HH. 
PP.  les  Circonftances  de  la  Renonciation ,  ou  plutôt  Dégradation  folemnelle , 
du  Fils  aine  de  Sa  Majefté  Czarienne,  le  Prince  Alexius  Petrowitz.  Le 
1 1.  au  foir  Son  AlteiTe  arriva  dans  cette  Ville  avec  Mr.  Tolftoy,  &  avoit 
un  long  Entretien  avec  Sa  Majefté,  furquoi  on  tint  Confeil  le  lendemain 
12,.  de  grand  matin.  Le  13.il  fut  donné  ordre  aux  Régimens  Gardes  de 
Przebralhiski  &  Simanawski,  comme  aufii  à  deux  Compagnies  de  Gre- 
nadiers, de  fe  tenir  prêts,  &  de  charger  à  baie  ,  fous  peine  de  mort.  Le 
14.  au  matin  ces  Troupes  fe  mirent  en  mouvement,  ck  furent  poilées  de 
telle  forte  au  tour  du  château,  qu'elles  occupoient  toutes  les  portes  & 
avenues.  En  même  tems ,  il  fut  envoie  ordre  à  tous  les  Miniilres ,  Boyars  , 
&  Confeillers  d'Etat,  de  paroitre  à  la  Cour  dans  la  grande  Sale  d'Audien- 
ce, &  au  Clergé  de  s'allembler  dans  l'Eglife  Cathédrale,  ce  qu'ils  firent 
tous.  Là-deiTus,  on  fonna  la  grande  Cloche;  &  le  Czarowitz ,  qu'on 
avoit  mené  hors  de  la  Ville  à  un  endroit  iîtué  à  fept  Werjïes  d'ici  ,  fut 
amené  fans  Epée.  En  entrant  dans  la  grande  Sale  ,  où  Sa  Majefté  Cza- 
rienne fe  tenoit  entourée  de  tous  les  Grands  du  Roiaume ,  le  Prince  pre- 
fenta  à  Sa  Majefté  un  Ecrit  qui  portoit,  qu'il  s'avoùoit  coupable, &  répan- 
dant de  chaudes  larmes  il  fe  jetta  aux  pieds  du  Czar ,  qui  remit  cet  Ecrit. 
à  Mr.  le  Vice-Chancelier  Baron  Shaffiroff:  &  relevant  enfin  ce  Fils  mal- 
heureux, il  lui  demanda,  ce  qu'il  fouhaittoit?  Sur  quoi  le  Prince  répliqua, 
qu'il  demandoit  grâce  &  la  vie.  Là-deiTus,  Sa  Majefté  repondit,  cela 
vous  eft  accordé;  mais,  vous  avez  perdu  toute  efperance  deSuccelTion  à 
notre  Couronne,  &  il  faut  que  vous  y  renonciez  folemnellement,  &  que 
vous  figniez  Jette  Renonciation:  à  quoi  il  déclara  être  prêt.  Sa  Majefté 
difoit  de  plus, Pourquoi  ne  m'avez-vous  pas  écouté,  &  qui  eft-cequi  vous 
a  confeillé  votre  fuite?  Sur  quoi  le  Prince  s'aprocha  de  Sa  Majefté  ,  &  lui 
parla  bas.  Là-deiTus,  ils  entrèrent  tous  deux  dans  une  autre  Chambre,  où 
l'on  fupofe  qu'il  a  nommé  les  Perfonnes;  ce  qui  paroit  d'autant  plus  vrai- 
femblable, que  d'abord  après  diné  il  fut  dépêché  trois  Couriers.  Sa  Ma- 
jefté &  le  Prince  étant  rentré  dans  la  Sale,  ce  dernier  figna  un  Ecrit,  qui 
contenoit,  qu'il  avoiioit  être  incapable  du  Gouvernement,  &  qu'il  renon- 
çoit  à  la  Succeflion.  Cela  étant  fait, on  lut  tout  haut  les  Points  ou  Raifons 
qui  avoient  porté  Sa  Majefté  Czarienne  à  exclure  fon  Fils  de  la  Succef- 
lion à  la  Couronne,  &  qui  'rempliiToient  plufieurs  feuilles  de  Papier,  dont 
j'éfpere  de  pouvoir  envoïer  dans  peu  à  VV.  HH.  PP.  une  Copie  trans- 
latée. Après  cette  Lecture ,  chacun  des  Alïiftans,  grands  &  petits,  Mi- 
niftres,  Boyars,  Officiers,  &  Marchands  Rutfiens ,  éioit  obligé  défaire 
&  de  figner  le  Serment  ci-joint;  furquoi  on  jetta  plufieurs  Exemplaires 
imprimez  de  ce  Serment  aux  Spectateurs.  De-là,  ces  grands  Perfonnages 
fe  rendirent  dans  l'Eglife  ci-dellus  nentionée,  où  Sa  Majefté  reprocha  au 

M  3  '  Pria- 


COVIE. 


94     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Amstxm    Prince   par  un  long  Difcours  fa  Defobeiflance  ,  &  fa  mauvaife  Conduite. 

de  vies-  surquoi  tous  les  Ecclefiaftiques  l'un  après  l'autre  firent  alignèrent  pareille- 
ment le  fulmentioné Serment.  Cela  étant  fait,  on  fe  fepara,  &  Sa  Majefté 
alla  dans  (es  apartemens  pour  diner,  où  le  Prince  aiïiita.  Le  foir,  il  y  eut 
Bal  à  la  Cour,  à  l'occaiion  du  jour  de  la  PrinceiTe  Anne,  Fille  ainée  de 
Sa  Majefté. 

Hier  16.  de  ce  mois  tous  les  Officiers  Allemands  qui  fe  trouvent  ici  ont 
pareillement  été  obligez  de  ligner  le  Serment,  &  les  Ordres  ont  été  en- 
voïez  dans  toutes  les  Provinces  de  ce  Roiaume,  de  même  qu'aux  Armées, 
pour  faire  prêter  ledit  Serment  à  un  chacun. 

Voici,  Hauts  ckPuiffans  Seigneurs,  les  Particularitez  de  cette  grande  & 
éclatante  Affaire,  pour  autant  qu'elles  font  parvenues  à  ma  connoiiïance. 
Bien  des  gens  craignent  qu'elle  n'ait  un  jour  de  dangereufes  fuites,  li  le 
Prince  dégradé  vient  à  furvivre  à  fun  Père.,  Il  n'y  a  que  de  certaines  Per- 
fonnes,  &  en  particulier  Mr.  Tollk>y,  à  qui  l'Accès  eft  permis  auprès  de 
Son  Altefle.  11  eft  à  favoir  prefentement,  fi  elle  fe  retirera  dans  un  Cou- 
vent ,  ou  li  Sa  Majeité  aimera  mieux  la  garder  fous  fes  yeux. 

J'ai  apris  de  bonne  main,  que  Sa  Majefté  a  bien  refolu  de  retourner  par 
Olkmitzfeh  à  Petersbourg,  mais  qu'elle  n'y  fera  pas  un  long  fejour,  vou- 
lant aller  vers  le  Primeras  dans  fes  Etats  d'Aftracan,  .&  de  Cafan.  Sa 
Majefté  la  Czarienne  reliera  en  attendant  ici,  &  y  fera  aparament auiii 
fes  couches. 

Par  Ordre  de  Sa  Majefté  Czarienne  on  a  commencé  à  refondre  laMon- 
noie  de  cuivre,  &  l'on  fait  d'un  ancien  Kopeek.  cinq  neufs;  de  forte  que, 
d'une  Livre  de  cuivre,  on  frape  p<5".  fols  de  Ruffie:  à  quoi,  fuivant  le 
Calcul  qu'on  en  a  fait,  Sa  Majefté  profite  deux  Millions: de  Roebeh'on  Rix- 
dales;  ce.  qui  fe  peut  bien,  mais  d'un  autre  côté  le  Commerce  en  foufrira 
une  criieile  atteinte.  Les  Monoies  d'argent  ne  feront  pas  encore  changées, 
qaoique  le  Plan  en  exifte  déjà,  mais  il  ne  fera  pas  exécute' avant  qu'on 
n'ait  fini  celles  de  cuivre.    Mofcou,  le  17.  de  Février  171S. 

SERMENT    DES    MOSCOVITES. 

Serment         IV! oi  NN.  NN.  m'engage  fur  le  îaint  Evançile.    Comme  notre  très-gra- 
des Mol-        i  ,»    a  S>     r-  I    p  ai       •         •  ri--  i  r  Pt     . 

tieux  Maître  (k  Czar  Pierre  Alexiowitz  a  publie  par  des  Lettres  patentes 
dans  toute  la  Ruffie  l'important  point  de  l'Exclulion  de  fon  Fils  le  Prince 
Czarien  Alexius  Petrowitz  du  Thrône  de  toute  la  Ruine  ;  aiant  notifié  en 
même  tems,  qu'il  a  établi  pour  fou  SucceiTeur  au  Irône  le  fécond  Fils  de 
Sa  Majefté  Czarienne  le  Prince  Roïal  Pierre  Petrowitz;  je  jure  donc  par 
le  Dieu  Tout-puiffant,  Ja  Très-fainte  Trinité,  que  je  reconnois  ce  Rè- 
glement de  Sa  Majeité  Czarienne  pour  jufte,  &  que  je  m'y  foùrnets erï 
toute  dévotion,  reconnoiffant  pour  toujours,  conformément  à  ce  Règle- 
ment de  Succeffion,  le  Prince  Czarien  Pierre  Petrowitz  pour  le  véritable 
SuceeiTeur  Héréditaire,  &  que  je  le  défendrai  en  toutes  rencontres ,  fut- 
ce  au  prix  de  ma  vie,  contre  tous  ceux  qui  ôferoient  le  contrecarer.    Et 

que 


des  Mos- 
covites 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  '9f 

que  je  ne  prêterai  jamais  afllflanee,  fous  quelque  prétexte  que  ce  foit,  au  AffairfS 

Prince  tzarien  Alexius  Petrowiiz,  pour  ladite  Succeiîio.n ,  ni  ne  tiendrai  de  Mos- 
le  Serment  à  lui  prêté.  C'eit  fur  quoi  je  fais  Sériaient  d'un  Efprit  Chrétien,      C0V1K- 

me. foumettant  au  Jugement  de  Dieu  ,  devant  le  fiint  Evangile,  &  en  bai-  " 

fant  la  fainte  Croix.    Je  fouffigne  de  ma  propre  main. 

Imprimé  devant  Mofcou ,  dans  V Année  de  notre  Seigneur  1 7 1 8. 
le  ,;  Février. 

Le  Czar  fit  enfuite  publier  un  Manifefle  du  3.  Février  affez  curieux 
pour  être  inieré  ici. 

Manifefle  de  Sa  Majejlé  Czarienne  ,  touchant  le  Czaro- 
wits:  traduit  Jur  P  Original  en  Langue  RuJJîenne. 

^Tous  PIERRE  1.,  par  la  Grâce  de  Dieu,  Czar  &  Autokrator  de   Mani- 
ai   toute  la  RuJJïey  (Sic.  &c.  &c.  Faifons  lavoir  à  toutts  les  Perfonnes,   &fte  du 
tant  Eccléfiailiques  que  Militaires  &  Civiles,  &  de  tous  Etats  de  la  Na-   ^^u" 
■tion  RuJJienne,  nos  fidelles  Sujets.  Il  ett  notoire  &  connu  à  la  plus  grande   piv  du 
partie  de  nos  ficelles   Sujets,  principalement  à  ceux  qui  demeurent  dans    3.  Fê- 
les Lieux  de  nos  Réfidences,  ou  qui  font  a  nôtre  Service,  avec  combien   vrier« 
d'aï  tendon  &  de  foin  Nous  avons  fait  élever  nôtre  Fils  aîné  Akxeï,  lui 
ayant  donné  pour  cet  effet  dès  fon  Enfance  des  Précepteurs  pour  la  Lan- 
gue RuJJîenne  &  pour  les  Langues  Etrangères,  le  faifaiu  bien  inltruire  dans 
toutes  fortes  de  Sciences ,  dans  la  vue  de  le  faire  élever,  non-feulement 
dans  nôtre  Chrétienne  &.  Orthodoxe  Foi  de  la  Confeîlion  Grecque  ,   mais 
.auffi  dans  les  connoiifances  des  Affaires  Militaires  &  Politiques,   comme 
suffi  des  Gouvernemens  des  Etats  étrangers  &  de  leurs  Coutumes  &  Lan- 
gues j  afin  que,  par  la  Lecture  des  Hiitoires  &  des  Livres  de  toutes  for- 
tes de  Sciences  convtnables  à  un   Prince  d'un  grand  Etat,  il  acquit  les 
qualitez  dignes  d'un  Succefîeur  à  nôtre  Trône  de  la  Grande  RuJJic. 

Cependant,  Nous  avons  vu  avec  douleur,  que  toute  nôtre  attention  & 
nos  foins  employez  h  l'éducation  &  a  l'iniiruclion  de  nôtre  Fj!î  étoient inu- 
tiles, puifqu'il  s'écartoit  toujours  de  rObéïflance  Filiale  ;  n'ayant  nulle  ap- 
plication à  ce  qui  convenoit  à  un  digne  Succelfeur ,  &  méprifant  les  Pré- 
ceptes des  Maîtres  que  nous  lui  avions  donnez ^  pratiquant  au  contraire 
des  perfennes  déréglées,  dont  1!  n'a  pu  aprendre  que  de  mauvaifes  choies, 
&  rien  qui  pût  lui  être  utile  &  profitable. 

Nous  n'avons  pas  oublié  de  tacher  fouvent  de  le  ramener  à  fon  devoir, 
tantôt  par  des  careffes,  tantôt  par  des  réprimandes,  queJquesfois  par  des 
Corrections   Paternelles. 

Nous  l'avons  pris  plus  d'une  fois  avec  Nous  dans  nos  Campagnes, pour 
îe  faire  mft  uire  dans  l'Art  Militaire  ,  comme  dans  une  des  principales 
Sciences  du  Monde  pour  la  défenle  delà  Patrie^'élo^nani  pourtant  toujours 

des 


C0V1E. 


5>6     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaip.f.s    des  occafions  périlleufes,pour  le  ménager  par  raport  à  la  Succeflîon,  quoi- 
Mos'   que  Nous  y  ayons  expofé  nôtre  propre  Perfonne. 

Nous  l'avons  laifle  en  d'autres  tems  kAfofiow,  en  lui  mettant  entre  les 
mains  une  efpece  de  Régence  dans  l'Empire,  afin  de  le  former  dans  l'Art 
de  Régner  pour  l'avenir. 

Nous  l'avons  envoyé  après  dans  les  Pais  Etrangers ,  Nous  perfuadant  que 
quand  il  verroit  dans  Tes  Voyages  des  Gouvernemens  fi  bien  réglez,  cela 
exciteroit  dans  lui  quelque  émulation  &  de  l'inclination  au  Bien,  pour  s'y 
appliquer. 

Mais,  tous  ces  foins  que  Nous  avons  pris  ont  été  fans  fruit:  c'a  été  la 
femence  de  la  doctrine  tombée  fur  les  pierres. 

Non-feulement  il  n'a  pas  fuivi  le  Bien,  il  l'a  même  haï,  fans  témoigner 
jamais  aucun  penchant  pour  les  Affaires,  foit  de  Guerre  ou  de  Politique: 
il  s'eft  attaché  uniquement  &  continuellement  à  la  converfation  de  Gens 
vils  &  déréglez,  &  de  mœurs  groffieres  &  abominables. 

Comme  Nous  le  voulions  détourner  de  ces  Déreglemens  par  toutes  les 
voyes  imaginables,  &  lui  infpirer  de  l'inclination  à  pratiquer  des  perfon- 
nes  de  vertu  &  d'honneur:  Nous  l'avons  exhorté  de  fe  choifir  une  Epou- 
fe  parmi  les  PrinceiTes  des  principales  Maifons  Souveraines  Etrangères , 
comme  c'elt  la  coutume  ailleurs ,  &  fuivant  l'exemple  de  nos  Ancêtres 
les  Czars  de  Rufiie,  qui  fe  font  alliez  à  d'autres  Maifons  Souveraines  ;& 
Nous  lui  avons  laiffé  la  liberté  du  choix. 

Il  s'efl  déclaré  pour  la  Princefle  Petite-Fille  du  Duc  de  Wolfenbuttel 
alors  régnant ,  Belle-Sœur,  de  S.  M.  l'Empereur  Romain  aujourd'hui  ré- 
gnant, &  Coufine  du  Roi  d'Angleterre;  &  Nous  ayant  prié  de  la  lui  pro- 
curer &  de  permettre  de  l'époufer,  Nous  y  avons  d'abord  confenti ,  n'é- 
pargnant pas  les  dépenfes  confiderables ,  que  ce  Mariage  a  exigées.  Mais, 
après  fa  confommation,  Nous  étant  flatez  que  le  changement  d'état  de  nô- 
tre Fils,  produiroit  un  fruit  particulier,  &  un  changement  dans  fes  mau- 
vaifes  habitudes ,  Nous  avons  éprouvé  tout  le  contraire  de  ce  que  Nous 
en  avions  efperé. 

Quoi-que  fon  Epoufe,  autant  que  Nous  l'avons  pu  remarquer,  fût  une 
Princefle  fage  ,  fpirituelle,  d'une  conduite  vertueufe,  quoi-que  lui-même 
l'eût  choifie,  il  a  vécu  néanmoins  avec  Elle  dans  la  dernière  defunion  , 
redoublant  fes  attachemens  pour  des  Gens  déréglez,  &  faifant  par-là 
honte  à  nôtre  Maifon  devant  les  Princes  Etrangers ,  à  qui  cette  Prin- 
cefle étoit  alliée  par  le  Sang  ;  ce  qui  Nous  a  aufli  attiré  beaucoup  de 
plaintes  &  de  reproches. 

Quelque  fréquens  qu'ayent  été  les  Avis  &  les  Exhortations  de  nôtre 
côté  pour  le  porter  à  fe  corriger,  rien  n'y  a  réufli. 

Violant  enfin  aufli  la  Foi  conjugale  ,  il  donna  fon  attachement  à  une 
Proflituée  de  la  plus  bafle  &  fervile  condition,  vivant  avec  Elle  dans  le 
crime  publiquement,  au  mépris  de  fa  légitime  Epoufe,  qui  peu  de  tems 
après  mourut  d'une  maladie  à  la  vérité,  mais  non  pas  fans  que  l'on  ait  crû 

que 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  XVIIT.        $? 

que  fon  chagrin,  caufé  par  les  defordres  &  les  dérégîemens  de  Ton  Epoux,    Affairf* 
n'ait  fait  avancer  fes  jours.  de  Mot. 

Quand  Nous  vimes  fon  opiniâtreté  a  perfévérer  dans  fa  Conduite  dépra-     C0VIE*_ 
vée,  Nous  lui  déclarâmes  aux  Funérailles  de  Ton  Epoufe,   que  Ci  défor- 
mais il  ne  fe  conformoit  point  à  nôtre  volonté,  &  qu'il  ne  s'appliquât  à  ce 
qui  convient  à  un  Prince  Héritier  préfomptif  d'un  tel  Empire,   Nous  le 
priverions  de  la  Succeffion,  fans  faire  attention  qu'il  étoit  nôtre  Fils  uni- 
que, nôtre  fécond  Fils  n'étant  pas  alors  encore  au  monde,  &  qu'il  ne  de- 
voit  pas  fe  fier  là-deffus ,  parce  que  Nous  aimerions  mieux  Nous  donner 
pour   Succeffeur  un  Etranger  qui  en  fût  digne,  que  nôtre  propre   Fils 
indigne  :  que  Nous  ne  pouvions  pas  laiffer  un  tel  Succeffeur  ,  qui  détrui- 
roit  ce  que, par  la  grâce  de  Dieu,  le  Père  a  établi,  &  qui  flétriroit  la  gloi- 
re &  l'honneur  de  la  Nation  Ruflienne ,  après  que,  pour  l'acquérir  ,    Nous 
avions  facrifié  nos  veilles  &  nôtre  fanté,expofant  fans  regret  en  plufieurs 
occafions  nôtre  propre  vie:  outre  que  la  crainte  des  Jugemens  de  Dieu  ne 
Nous  permettroit  pas   de  laiffer  le  Gouvernement  d'un  fi  grand  Etat   en- 
tre les  mains  de  quelqu'un  dont  l'infuffifance  &   l'indignité  Nous  feroit 
connue. 

Nous  l'avons  enfin  exhorté,  le  plus  fortement  que  Nous  avons  pu ,  à  fe 
conduire  avec  fageffe,  &  Nous  lui  avons  donné  du  tems  pour  fe  cor- 
riger. 

11  répondit  à  ces  Remontrances,  qu'il  fe  reconnoiffoit  coupable  en  tous 
ces  points;  mais, alléguant  la  foibleiïe  de  fon  tempérament  &  de  fon  efc 
prit,  qui  ne  lui  permettoit  pas  de  s'apliquer  aux  Sciences  &  Fonctions  né- 
ceffaires  ,  il  s'avoiia  lui-même  incapable  &  indigne  de  la  Succeffion, 
Nous  priant  de  l'en  décharger. 

Cependant,  Nous  l'avons  encore  exhorté  paternellement  ;  &  , joignant 
les  menaces  aux  prières,  Nous  n'avons  rien  oublié  pour  le  remettre  dans 
le  bon  chemin  :  &  les  Opérations  de  la  Guerre,  Nous  ayant  obligé  de 
Nous  rendre  en  Danemarc,  Nous  l'avons  laiffé  à  Petersbourg>  lui  donnant 
encore  le  tems  de  rentrer  dans  foi-meme  &  de  fe  corriger. 

Sur  les  Avis  que  Nous  recevions  dans  la  fuite  de  la  continuation  de  fes 
dérégîemens,  Nous  l'avons  mandé  auprès  de  Nous  à  Copenhague ,  pour  faire 
auffi  la  Campagne,  afin  de  fe  mieux  former. 

Mais,  oubliant  la  Crainte  &  les  Commandemens  de  Dieu,  qui  ordonne 
d'obéïr  aux  Parens  ordinaires,  &  à  plus  forte  raifon  à  ceux  qui  font  en 
même  tems  Souverains,  il  n'a  répondu  à  tous  nos  foins  Paternels,  qu'a- 
vec une  ingratitude  inouïe;  car,  au  lieu  de  fe  rendre  auprès  de  Nous, 
il  s'évada,  prenant  avec  lui  des  fommes  d'argent,  &  fon  infâme  Concu- 
bine ,  avec  qui  il  continuoit  de  vivre  dans  le  crime.  11  fe  mit  fous  la 
protection  de  l'Empereur,  débitant  contre  Nous,  fon  Père  &  fon  Sei- 
gneur, beaucoup  de  calomnies  &  de  fauffetez,  comme  fi  Nous  le  per- 
fécutions,  &  le  voulions  priver  fans  raifon  de  la  Succeffion;  difant  que. 
fa  vie  même  n'étoit  pas  en  fureté  auprès  de  Nous,  &  priant  l'Empereur 
de  lui  donner  retraite,  &  de  le  protéger  contre  Nous  à  main  armée. 

Tome  XL  N  Cha- 


?8    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

affaires        Chacun  peut  juger  combien  de  honte  &  de  deshonneur  une  telle  Cou- 
de Mos-    duite  de  nôtre  Fils  a  attiré  fur  nôtre  Etat  devant  toute  la  Terre.    On  trou- 
C0VïE'     Vera  difficilement  un  Exemple  femblable  dans  les  Hiftoires. 

L'Empereur,  quoi-qu'informé  de  Tes  excès,  &  de  la  manière  dont  il 
avoit  vécu  avec  fon  Epoufe,  Belle-Sœur  de  S.  M.  L,  accorda  pourtant  à 
fes  infiantes  fbllicitations  une  Place  où  il  pût  demeurer,  &  où  il  pria  l'Em- 
pereur qu'il  pût  être  fi  fecretemenc  que  Nous  n'en  puffions  point  avoir  la 
moindre  connoiffance. 

Son  long  retardement  en  chemin  Nous  ayant  cependant  fait  apréhender 
que  ce  ne  fût  pas  fans  fujet,  Nous  craignîmes  par  une  tendrefTe  &  foilici- 
tude  Paternelle,  qu'il  ne  lui  fût  arrivé  quelque  malheur,  ce  qui  Nous  o- 
bligea  de  l'envoyer  chercher  fur  plufieurs  routes,  jufqu'à-ce  qu'enfin  ,  après 
beaucoup  de  peines  &  de  perquifitions,  Nous  reçûmes  avis  de  nôtre  Ca- 
pitaine de  la  Garde  Alexandre  Ruemanzoff,  qu'on  le  garuoit  fecrette- 
ment  dans  une  ForterefTe  Impériale  du  Tirol  :  furquoi  Nous  écrivimes 
de  nôtre  propre  main  à  l'Empereur ,  pour  le  prier  de  Nuus  le  renvoyer. 

Mais,  quoi-que  X  Empereur  Y  ait  fait  informer  de  ce  que  Nous  délirions, 
&  l'exhorter  de  fe  rendre  auprès  de  Nous ,  &  de  fe  foûmettre  à  nôtre 
volonté,  étant  celle  de  fon  Père  &  de  fon  Seigneur,  il  remontra  de  fon 
côté  avec  beaucoup  de  calomnies  contre  Nous  ,  qu'il  ne  devoit  point 
Nous  le  livrer  entre  nos  mains,  comme  fi  nous  euiîions  été  fon  Ennemi 
&  fon  Tiran ,  de  qui  il  n'avoit  à  attendre  qu'à  fouffrir  la  mort. 

Il  perfuada  enfin  l'Empereur,  au  lieu  de  nous  l'envoyer  alors,  de  l'é- 
loigner dans  une  Place  reculée  de  fa  Domination,  favoir  à  Naples  en 
Italie ,  &  de  l'y  garder  fecretement  dans  le  Château  fous  un  nom 
étranger. 

Nous  fûmes  néanmoins  avertis  par  nôtre  fufdit  Capitaine  de  la  Garde 
de  fon  féjour  dans  cet  endroit- là,  &  Nous  dépéchâmes  à  l'Empereur 
nôtre  Confeiller  Privé  Pierre  Tolfloi  &  le  même  Capitaine  de  la  Garde 
Ruemanzoff,  avec  une  Lettre  en  fortes  exprefîlons  ;  remontrant  combien 
il  feroit  injuile  de  vouloir  retenir  nôtre  Fils  contre  tous  les  Droits  Divins 
&  Humains ,  félon  lefquels  auffi  les  Parens  particuliers  ,  encore  à  plus 
forte  raifon  ceux  qui  font  d'ailleurs  munis  de  l'Autorité  Souveraine  com- 
me Nous,  avoient  un  Pouvoir  illimité  fur  leurs  Enfans,  indépendamment 
de  toute  autre  Juge  ;  &  Nous  expofàmes  d'un  côté  les  manières  juftes  & 
bien -intentionnées,  dont  nous  avions  toujours  ufé  envers  nôtre  Fils,  & 
de  l'autre  fès  défobéiflances  5  faifant  voir  quelles  mauvaifes  fuites  &  ani- 
molitez  entre  Nous  ce  refus  de  Nous  le  remettre  pourroit  caufer  ,  parce 
que  Nous  ne  pourrions  pas  laifTer  la  chofe  en  cet  état.  Nous  inflruifimes 
en  même  tems  ceux  que  Nous  avions  envoyez  de  parler  de  bouche  enco- 
re avec  plus  de  force,  &  de  repréfenter  que  nous  ferions  obligé  de  ven- 
ger par  toutes  fortes  de  moyens  &  de  manières  cette  détention  de  nô- 
tre Fils. 

Nous  écrivimes  aufïi  à  lui,  nôtre  Fils,  de  nôtre  propre  main,  lui  re- 
montrant l'horreur  &  l'impiété  de  fa  conduite  ,  &  l'énormité  du  crime 

qu'il 


COVIE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  XVIII.         99 

qu'il  avoit  commis  contre  Nous  fon  Père  ,  &  comment  Dieu  dans  fes  Affatrf* 
Commandemens  menaçoit  de  punir  d'une  mort  éternelle  les  Enfans  def-  DE  Mo«* 
obéïflans. 

Nous  le  menacions  comme  Père,  de  nôtre  Malédiction ,  &  comme  fon 
Seigneur,  de  le  déclarer  Traitre  de  fa  Patrie,  s'il  n'y  retournoit  &  s'il  ré- 
futait de  Nous  obéir.  Nous  y  avons  joint  les  afllirances,  que  s'il  fe  foû- 
mettoit  à  nôtre  volonté  &  s'il  retournoit,  Nous  lui  pardonnerions  fon 
crime. 

Nos  Envoyez  ,  après  beaucoup  de  follicitations  ,  &  après  la  fufdite 
Repréfentation  faite  de  nôtre  part  par  écrit  ,  &  par  eux  de  bouche  ,  ob- 
tinrent enfin  de  X Empereur  la  permiflion  d'aller  trouver  nôtre  Fils ,  &  de 
le  difpofer  à  retourner. 

Les  Miniftres  Impériaux  leur  firent  en  même  tems  connoitre  ,  que  nô- 
tre Fils  avoit  informé  Y  Empereur  que  Nous  le  perfécutions  ,  que  fa  vie 
n'étoit  pas  en  fureté  avec  Nous ,  &  que  par- là  il  avoit  ému  la  compaf- 
fion  de  Y  Empereur  qui  l'avoit  porté  à  le  prendre  en  fa  protection  ;  que 
YEmpereur ,  confiderant  présentement  nos  véritables  &  folides  repréfenta- 
tions ,  il  ordonneront  de  fon  côté  qu'on  tachât  en  toute  manière  de  le  dif- 
pofer à  retourner  auprès  de  Nous,  en  lui  faifant  déclarer,  qu'il  ne  pouvoit 
pas  le  refufer  à  fon  Père  contre  toute  équité  &  juitice ,  ni  fe  brouiller  avec 
Nous  pour  ce  fujet. 

Nos  Envoyez,  à  leur  arrivée  à  Naples9  ayant  fouhaité  de  lui  rendre  nô- 
tre Lettre,  écrite  de  nôtre  propre  main  ,  nous  écrivirent  qu'il  n'avoit  pas 
feulement  voulu  les  admettre  ;  mars ,  que  le  Viceroi  Impérial  avoit  trouvé 
le  moyen,  en  l'invitant  chez  lui ,  de  les  lui  préfenter  enfuite  malgré  lui. 

Il  reçût  à  la  vérité  nôtre  Lettre ,  contenant  nôtre  Exhortation  Paternel- 
le, &  les  menaces  de  la  Malédiction  ;  mais,  fans  témoigner  la  moindre  in- 
clination au  retour,  &  en  alléguant  bien  des  fauiTetez  &  des  calomnies 
contre  Nous,  comme  fi,  à  caufe  de  beaucoup  de  dangers  qu'il  avoit  à 
apréhender  de  nous  il  ne  pouvoit,  ni  ne  vouloit,  retourner;  fe  vantant 
que  X Empereur  lui  avoit  promis,  non- feulement  de  le  défendre  &  de  le 
protéger  contre  Nous ,  mais  même  de  le  mettre  fur  le  Trône  de  RuJJie , 
auiîi  contre  nôtre  volonté,  à  main  armée. 

Nos  Envoyez ,  voyant  cette  mauvaife  difpofition,  employèrent  tous  les 
moyens  imaginables  pour  le  perfuader  à  retourner.  Ils  le  prièrent,  ils  fi- 
rent valoir  tour  à  tour  nos  ailurances  pleines  de  bonté  pour  lui,  &  nos 
menaces  en  cas  de  defobéïfiance,  &  que  Nous  le  retirerions  même  à  main 
armée.  Ils  lui  repréfenterent,  que  X Empereur  ne  voudroit  point  entrer  en 
Guerre  avec  Nous  pour  fon  fujet,  &  ils  lui  firent  beaucoup  d'autres  fem- 
blabîes  Remontrances. 

Mais, il  n'eut  aucun  égard  à  tout  cela,  &  ne  fe  difpofa  point  à  retourner 
auprès  de  Nous,  jufques  à  ce  que  le  Viceroi  Impérial,  voyant  enfin  fon 
obitination,  lui  repréfenta  au  nom  de  X Empereur ,  qu'il  devoit  retourner* 
lui  déclarant,  que  X Empereur  ne  pouvoit,  félon  aucun  Droit,  Nous  le  rete- 
nir ,  ni,  pendant  la  Guerre  préfente  avec  le  'Turc,  comme  auffi  en  Italie 

N  2  avec 


ïoo    MEMOIRES,  NEGOTIATION  S,  TRAITEZ,  ET 

affaîres  avec  le  Roi  à'Efpagm,  pour  l'amour  de  lui  s'attirer  des  affaires  avec  Nous. 
de  Mos-  Quand  il  vit  le  train  que  cette  Affaire  prenoit,  craignant  qu'il  ne  Nous 
fût  livré  malgré  lui,  il  fe  dilpofa  enfin  à  revenir  auprès  de  Nous,  &  il  le 
déclara  à  nos  Envoyez,  comme  aufîi  au  Viceroi  Impérial. 

Il  Nous  l'écrivit  auffi,  s'avoùant  criminel  &  coupable.     La  Copie  de  fa 
Lettre  eft  ci-defïbus  tranfcrke. 

Et  de  cette  manière  il  eft  arrivé  ici.  Et,  quoi- que  maintenant  nôtre 
Fils,  par  toutes  Tes  defobéïffances  criminelles  commifes  depuis  longues  an- 
nées contre  Nous  Ton  Père  &  Ton  Seigneur,  &  fur -tout  pour  le  deshon- 
neur qu'il  Nous  a  fait  devant  tout  le  monde,  par  fon  évafion,  &  par  les  ca- 
lomnies qu'il  a  répandues  de  Nous,  comme  d'un  Père  dénaturé,  &  pour 
s'être  oppofé  à  fon  Souverain,  il  ait  mérité  d'être  puni  de  mort  : 

Néanmoins, nôtre  Tendreffe  Paternelle  Nous  fait  avoir  pitié  de  lui,  & 
Nous  lui  pardonnons  fes  Crimes ,  en  lui  en  remettant  toute  Punition. 

Mais ,  confiderant  fon  indignité  &  tout  le  cours  de  fa  conduite  déréglée 
décrite  ci-deffus,  Nous  ne  pouvons  point  en  confcience  lui  lailler  après 
Nous  la  Succeffion  au  Trône  de  RuJJie,  prévoyant  que  par  fa  conduite  dé- 
pravée il  détruiroit  entièrement  la  gloire  de  nôtre  Nation,  &  le  falut  de 
nos  Etats,  que  Nous  avons  acquis  &  affermis, par  la  grâce  de  Dieu,  avec 
une  application  fans  relâche  ;  car,  il  eft  notoire  &  connu  à  chacun,  com- 
bien il  Nous  a  coûté,  &  avec  quels  efforts  Nous  avons  non -feulement  re- 
couvré les  Provinces  que  l'Ennemi  avoit  ufurpées  fur  nôtre  Empire  ,  mais 
auffi  conquis  de  nouveau  pluiieurs  Villes  &  Pais  confiderables ,  &  avec 
quels  foins  Nous  avons  fait  inftruire  nos  Peuples  dans  toutes  fortes  de 
Sciences  Militaires  &  Civiles ,  à  la  gloire  &  au  profit  de  la  Nation  &  de 
l 'Empire. 

Or,  comme  Nous  plaindrions  nos  Etats  &  nos  ridelles  Sujets,  fi  nous 
les  rejettions,  par  un  tel  Succeffeur,  dans  un  état  beaucoup  plus  mauvais 
qu'ils  n'ont  jamais  été  -, 

Ainfi,par  le  Pouvoir  Paternel,  en  vertu  duquel,  félon  les  Droits  de  nô- 
tre Empire,  chacun  même  de  nos  Sujets  peut  deshériter  un  Fils,  &  don- 
ner fa  Succeffion  à  tel  autre  de  fes  Fils  qu'il  veut  : 

Et  en  qualité  de*Prince  Souverain,  en  conlideration  du  faîut  de  nos 
Etats,  Nous  privons  nôtre  dit  Fils  Alexeï  pour  fes  Crimes  &  pour  fon  In- 
dignité, delà  Succeffion  après  Nous  à  nôtre  Trône  de  RuJJie ,  quand  bien 
même  il  ne  fubfifleroit  pas  une  feule  Perfonne  de  nôtre  Famille  après  Nous. 

Et  Nous  conflituons  &  déclarons  Succeffeur  audit  Trône  après  Nous 
nôtre  fécond  Fils  Pierre,  quoi -qu'encore  jeune,  n'ayant  pas  de  Succef- 
feur plus  âgé. 

Donnons  à  nôtre  fufdit  Fils  Alexei  nôtre  Malédiction  Paternelle ,  fi  ja- 
mais, en  quelque  tems  que  ce  foit,  il  prétend  ou  recherche  ladite  Suc- 
ceffion. 

Délirons  auffi  de  nos  Fidelîes  Sujets  de  l'Etat  Eccléfiaftique  &  Séculier, 
de  tout  autre  Etat,  &  de  toute  la  Nation Ruffienne, que,  félon  cette  Con- 
ilitution  &  félon  nôtre  Volonté ,  ils  reconnoiffent  &  confiderent  nôtre- dit 

Fils 


C0V1K. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,   M.  DCC.  XV11L        loi 

Fils  Pierre  défigné  par  nous  à  la  SuccefTion,  pour  légitime  Succefleur  ;  &  Affairée 
qu'en  conformité  de  cette  nôtre  Conltitution,  ils  confirment  le  tout  par 
Serment  devant  le  Saint  Autel ,  fur  les  Saints  Evangiles ,  &  baifant  la  Croix. 
Et  tous  ceux  qui  s'oppoferont  jamais,  en  quelque  tems  que  ce  foit,  à 
cette  nôtre  Volonté ,  &  qui  dès  aujourd'hui  ôferont  confiderer  nôtre  Fils 
Alexeï  pour  Succefleur  ou  l'affilier  pour  cet  effet,  Nous  les  déclarons  pour 
Traîtres  envers  Nous  &  la  Patrie.  Et  avons  ordonné  que  la  préfente  foie 
par  tout  publiée  &  promulguée,  afin  que  perfonne  n'en  prétende  caufe 
d'ignorance.     Fait  à  Mofcou,  le  3. Février  17 18.   V.St. 

Signé  ,    de  nôtre  main ,  &  {celle  de  nôtre  Sceau* 

Copie  de  la  Lettre  de  la  propre  main  du  Czareiuitz. 
TRES-GRACIEUX   SEIGNEUR  ET  PERE. 

J'Ai  reçu  la  tres-gracieufe  Lettre  de  Vôtre  Majeflé ,  par  les  Srs.  Tolfloi  & 
Roumjankoff ,  par  laquelle,  comme  aujji  par  eux  de  bouche  ,  Elle  majjïire 
très  -graaeuje ment  du  Pardon  de  ma  Sortie  fans  permijjïon ,  en  cas  que  je  revien- 
ne. Je  vous  en  rends  grâces  les  larmes  aux  yeux.  Je  rcconnois  être  indigne  de 
toute  grâce  :  me  jet  tant  à  vos  pieds ,  fimpioi  e  vôtre  Clémence  de  me  pardonner 
mes  Crimes ,  quoi  -  que  j aye  mérité  toutes  fortes  de  punitions.  Mais  ,je  me  repofe 
fur  vos  çracieufes  ajfuranccs  \  &  ,  m  abandonnant  à  Vôtre  Volonté ,  je  pars  au 
premier  jour  de  Naples,  pour  me  rendre  auprès  de  V.  M.  à  St.  Petersbourgs 
avec  ceux  que  V.  M.  a  envoyez, 

Très -humble  &  indigne  Serviteur  ,  qui  ne 
mérite  pas  de  fe  dire  Fils  , 

ALEXEL 
De  Naples  le  4.  Octobre  1717. 

Copie  du  Serment  fait  par  le  Czarowitz  Alexeu 

Promeffe  fous  Serment , 

,  TE,  ci- defTous  nommé, promets  devant  îe  Saint  Evangile,  que  comme 
,  I  pour  le  Crime,  que  j'ai  commis  envers  S.  M.  Czanenne  mon  Père 
,  &  Seigneur,  félon  que  cela  eft  déduit  dans  fon  Ecrit ,  &  par  ma  faute , 
,  je  fuis  exclus  de  la  Succeffion  au  Trône  de  Rufïîe.  Ainti,  je  reconnois 
y,  &  avoue  cette  Exclufion  pour  jufte  ,  comme  l'avant  mérité,  par  ma 
n  faute  &  indignité  ;  &  je  m'oblige,  &  jure  au  Tout-PuiUant  Dieu  en 

N  3  Tri* 


io2    MEMOIRES,  NEGOCIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    }>  Trinité  comme  au  Souverain  Juge,  de  me  foumettre    en  tout  à  cette 

de  Mos-    sj  Volonté  Paternelle;  de  ne  rechercher  jamais  cette  Succeffion  ;   de  ne 

C0V1E*     ?,  la  point  prétendre  ,  ni  de  l'accepter  fous  aucun  prétexte  ;   &  je  recon- 

„  nois  pour  légitime  Succeffeur  mon  Frère  le  Czarowitz  Pierre   Petro- 

„  witz.      Surquoi  je  baife  la  Sainte  Croix ,  &   figne  la  préfente  de  ma 

»»  propre  main. 

Signe , 

de  la  main  du 

CZAROWITZ  ALEXEI. 

Il  y  eut  vers  le  milieu  &  fur  la  fin  de  l'Année  un  autre  grand  Manifefte, 
affez  intereffant  pour  la  Curiofité  du  Public  pour  le  mettre  ici  tout  de  fon 
long. 

Manifefte  du  Procez  Criminel  du  Czarevitch  Alexei  Te- 
trovitch,  jugé  &  publié  à  Saint  Peter  sbourg^  le  25*. 
jour  de  Juin  1718.,  F.  St.  Traduit  fur  P  Original 
Rujfien  ,  £cp  Imprimé  par  Ordre  de  Sa  Majefté  Cza- 
rienne^à  la  Haye  3  chez  Jean  van  Duren,  en  Juin 
171 8. 

Manife-      ÇOit  notoire ,  que  dans  la  préfente  Année  1718.  le  14.  du  mois  de  Juin, 

fie  du        ^3  le  Très- Haut  Seigneur,   Czar,   &  Grand-Prince,   Pierre  Ale- 

l/procL   xievitch,  Autocrateur  de  toute  la  Grande  ,   Petite,    &  Blanche- RuJJîe, 

de  fon       a,  par  une  Ordonnance,  fait  convoquer  dans  la  Sale  de  la  Régence  du 

Fils.         Sénat  établi  pour  les  Affaires  de  l'Empire  Ruffien  ,    les  Archevêques  & 

Archimandrites,  tous  les  Minières  d'Etat,  le  Sénat,  les  Etats  Militaire  & 

Civil ,  &  la  principale  Nobleffe  qui  fe  trouve  à  préfent  a  St.  Petersbourg,  & 

leur  a  ordonné  d'y  attendre  l'arrivée  de  Sa  Majefté. 

Sa  Majcjlé  Czarier.ne  s'étant  rendue  en  Haute  Perfonne  au  Palais ,  elle 
commanda  ,  qu'on  fit  venir  en  fa  préfente  Impériale  &  devant  l'Affem- 
blée,  le  Czarevitch  Alexci  Petrovitch,  lequel  ayant  comparu,  Sa  Majeflê 
Czarienne  fit  de  bouche  une  courte  &  brieve  expofition  du  fujet  de  cette 
Convocation,  &  elle  ordonna  que  la  lecture  fut  faite  publiquement  des 
Ecrits  fuivans. 

Quoique  l'Evafion  du  Czarevitch  Alexei,  &  une  partie  de  fes  Trangref- 
fions  foient  déjà  connues  à  tous  par  le  Manifefte  qui  a  été  publié  à  Mof- 
coule  3.  jour  de  Février  de  la  préfente  Année  1718-;  cependant,  il  fe  dé- 
couvre encor  à  préfent,  contre  toute  attente,  des  chofes  qui  furpaffept  de 
beaucoup  tout  ce  qui  a  précédé ,  &  on  voit  avec  quelle  méchanceté  & 

quelle 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  103 

quelle  noirceur  ce  Prince  en  a  ufé  pour  en  impofer  à  fon  Souverain  &  fon  Amms» 
Pcre\  comme  aufîi  quels  parjures  il  a  commis  contre  Dieu,  &  comment   DE  Mo3' 
il  a  feint  une  mauvaife  famé,  pour  empêcher  qu'on  ne  fit  attention  a  fes     C°V1E' 
mauvaifes   pratiques  ,   &  qu'on  ne  découvrit  fes   pernicieufes  intrigues. 
Tout  cela  va  être  expolé  ici  clairement  &  avec  ordre,  en  reprenant  la 
chofe  dès  fon  commencement. 

A  peine  le  Czarewitz  Alexeï  eut  atteint  l'âge  de  Raifon,  &  pendant  les 
Années  qui  lefuivirent,  Sa  Majefté  Czarienne ,  Ion  Père,  emploia  toute  forte 
demoiens  pour  le  former  aux  Affaires  du  Gouvernement  &  lui  donner  des 
connoifiances  de  l'Art  Militaire,  comme  il  elt  raporté  dans  le  Manifeite  de 
Mofcou,  &  ce  fut  fans  aucun  progrés.  Sa  Maje fie Czarienne  a  attendu  de  jour 
en  jour  qu'il  fe  corrigeât  par  un  changement  de  conduite  &  de  mœurs;  mais, 
voiant  que  ce  Prince  s'oppofoit  à  tous  fes  bons  defTeins,  Sa  Majelté  lui  a  dé- 
claré fes  intentions  par  Lcrit,  &  lui  a  demandé  fa  dernière  Réfolution:  car, 
l'Année  171^.  le  11.  jour  d'Octobre,  au  retour  des  Funérailles  de  la  feue 
PrincefTe  de  la  Couronne  Epoufe  du  Czarew-tz  ,  Sa  Majefté  Czarienne  fe 
fendit  chez  ce  Prince  &  lui  donna  l'Ecrit  fuivant: 

Déclaration  a   mon   Fils. 

„  Vous  ne  pouvez  point  ignorer  ce  qui  elt  connu  de  tout  le  Monde, 
„  jufques  à  quel  point  nos  Peuples  gemiifoient  fous  l'oppreflion  des  Sué- 
,,  dois  avant  le  commencement  de  la  préfente  Guerre. 

„  Par  l'ufurpation  de  tant  de  Places  maritimes  fi  néceflaires  à  nôtre 
,,  Etat,  ils  nous  coupoient  tout  Commerce  avec  le  relie  du  Monde,  & 
5,  nous  avons  vu  avec  regret  qu'ils  avoient  encore  mis  un  épais  rideau 
,,  devant  les  yeux  des  clairvoians.  Vous  favez  combien  il  nous  en  a 
>5  coûté  au  commencement  de  cette  Guerre,  (où  Dieu  feul  nous  a  con- 
„  duit  comme  par  la  main,  &  nous  guide  encore,)  à  nous  rendre  expe- 
„  rimentez  dans  l'Art  Militaire  ,  &  à  nous  oppofer  aux  avantages  que 
1    nos  Ennemis  irréconciliables  remportèrent  fur  nous. 

„  Nous  nous  fommes  fournis  à  cette  épreuve  avec  refignation  à  la  vo- 
„  lonté  de  Dieu,  ne  doutant  pas  que  ce  ne  fût  lui  qui  nous  y  fît  palier , 
>7  jufques  à  ce  qu'il  nous  eut  mis  dans  le  bon  chemin,  &  que  nous  nous 
jj  fuffions  rendus  dignes  d'éprouver,  que  le  même  Ennemi,  devant  qui  on 
J5  a  tremblé  auparavant,  tremble  à  préfent  à  fon  tour  devant  nous,  peut- 
„  être  beaucoup  davantage.  Ce  font-là  des  fruits,  dont,  après  l'aiïiitan- 
,,  ce  de  Dieu,  nous  fommes  redevables  à  nos  travaux  &  à  ceux  de  nos 
„  fidèles  &  affectionnés  Enfans ,  nos  Sujets  Ruffiens. 

„  Mais ,  pendant  que  j'envifage  les  profperités  dont  Dieu  a  comblé  nô- 
„  tre  Patrie,  fi  je  tourne  les  yeux  fur  la  Pofterké  qui  me  doit  fuccéder , 
„  j'ai  le  cœur  encor  plus  pénétré  de  douleur'fur  l'avenir,  que  je  ne  l'ai  de 
„  joie  au  fujet  des  Bénédictions  paffées;  voiant  que  vous,,  mon  Fils, 
„  rejettez  tous  les  moïens  de  vous  rendre   capable  de  bien  gouverner 

„  après 


COVIE. 


îo4    MEMOIRES,  NEGOTiATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   „  après  moi.     Je  dis  que  vôtre  incapacité  eft.  volontaire ,  parce  que  vous 
oeMos-         ne  pouvez  point  vous  excufer  fur   le  défaut  d'efprit  &  des  forces  du 

„  corps,  comme  fi  Dieu- ne  vous  en  avoit  point  allez  bien  partagé:  &, 
quoique  vous  ne  foiez  point  d'une  complexion  des  plus  robuftes,  on 
ne  peut  point  dire  que  vôtre  tempérament  foit  abfolument  foible. 

Cependant,  vous  ne  voulez  point  même  entendre  parler  des  Exerci- 
ces de  la  Guerre;  c'eft  pourtant  par-là,  que  nous  fommes  fortis  de  cette 

,,  obfcurité  qui  nous  couvrait,  &  que  nous  nous  fommes  faits  connoître 
aux  Nations  dont  nous  avons  préfentement  l'eftime. 

Je  ne  vous  exhorte  point  à  faire  la  Guerre  fans  de  légitimes  raiibns  ; 
je  demande  feulement  de  vous,  que  vous  vous  appliquiez  à  en  appren- 
dre .l'Art;  car,  il  eft  impoiïible  de  bien  gouverner,  fans  en  favoir  les 
Règles  &  la  Difcipline,  quand  ce  ne  ferait  que  pour  la  defenfe  de  la 
Patrie. 

Je  pourrais  vous  mettre  devant  les  yeux  beaucoup  d'exemples  de  ce 
que  je  vous  propofe.     Je  ne  veux  vous  parler  que  des  Grecs  avec  qui 

,,  nous  fommes  unis  par  la  même  Profeffion  de  Foi.  D'où  eft  venue 
leur  Décadence  ,  fî-non  de  ce  qu'ils  ont  négligé  les  armes?  L'oifiveté  & 
le  repos  les  ont  affoiblis ,  &  les  ont  allujetiis  à  des  Tirans  &  à  l'Efcla- 

„  vage  où  ils  font  réduits  depuis  fi  long-tems.  Vous  vous  trompez,  fi 
vous  croiez  qu'il  fuffit  à  un  Prince  d'avoir  de  bons  Généraux  pour  agir 

,,  fous  fes  ordres.  Chacun  regarde  le  Chef:  on  étudie  fes  inclinations, 
&  on  s'y  conforme,  tout  le  monde  en  convient.  Mon  Frère  a  aimé 
pendant  fon  Régne  la  magnificence  des  Habits  &  les  gros  Equipages  de 
chevaux.  On  n'y  avoit  guère  de  penchant  dans  le  Païs>  mais,  les  plai- 
firs  du  Prince  firent  auffi  ceux  de  fes  fujets,  parce  qu'ils  font  portez  à 
l'imiter  dans  ce  qu'il  aime,  comme  dans  ce  qui  lui  déplait. 
„  Si  des  peuples  fe  détachent  fi  aifément  des  chofes  qui  ne  font  que 
pour  le  plaifir,  n'oublieront-ils  point  par  la  fuite  des  tems ,  on  n'aban- 
donneront-ils point  encor  plus  facilement  l'ufàge  des  armes,  dont  l'e- 
xercice eft  beaucoup  plus  pénible,  s'ils  n'y  font  pas  entretenus? 
„  Vous  n'avez  point  d'inclination  pour  aprendre  la  Guerre,  vous  ne 

,,  vous  y  appliquez  pas,  &par  conféquent  vous  ne  la  faurez  jamais.  Com- 
ment donc  pourrez-vous  commander  aux  autres,  &  juger  de  la  recom- 
penfe  que  méritent  ceux  qui  font  leur  devoir,  ou  punir  ceux  qui  y  au- 
ront manqué?  Vous  ne  ferez  rien,  &  vous  ne  jugerez  des  chofes  que 

„  par  les  yeux  &  le  fecours  d'autrui,  comme  un  jeune  oifeau  qui  tend 


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3,  le  bec. 


53 


Vous  dites,  que  la  foiblefTe  de  vôtre  fanté  ne  vous  permet  point  de 
„  fuporter  les  fatigues  de  la  Guerre:  c'eft  une  exeufe  qui  ne  vaut  pas 
„  mieux  que  les  autres.  Je  ne  vous  demande  point  des  fatigues ,  mais 
„  feulement  de  l'inclination  que  les  maladies  même  ne  peuvent  point  em- 
„  pêcher.  Demandez»  à  ceux  qui  fe  fouviennent  du  tems  de  mon  Frère. 
5,  Il  étoit  d'une  fanté  incomparablement  plus  foible  que  la  vôtre.  Il  ne 
pouvoitpas  manier  un  cheval  tant  foit  peu  fougueux,  ni  à  peine  le 

mon- 


3» 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  io* 

ter.  Mais,  il  les  aima,  ce  qui  fait  qu'il  n'y  a  jamais  eu  ,  &  que  peut-  Affaires 
être  n'y  a-t-il  point  encor,dans  le  Pais,  une  plus  belle  Ecurie  qu'étoitla  DE  Mos- 
fienne.  C0VIE- 

„  Vous  voiez  par-là  que  les  bons  fuccès  ne  dépendent  pas  toujours  des 
travaux,  mais  de  la  volonté. 

,,  Si  vous  penfez  qu'il  y  en  a,  dont  les  affaires  ne  laiffent  pas  de  réiïf- 
„  iir,  quoiqu'ils  n'aillent  point  eux-mêmes  à  la  Guère,  vous  avez  raifon; 
mais,  s'ils  n'y  vont  pas,  ils  y  ont  pourtant  de  l'inclination,  &  ils  la 
favent. 

„  Par  exemple,  le  feu  Roi  de  France  n'a  point  toujours  été  à  h  Guer- 
re en  perfonne;  mais, on  fait  jufques  à  quel  point  il  i'aimoit,  &  com- 
bien d'exploits  glorieux  il  y  a  faits;  ce  qui  fit  nommer  fes  Campagnes, 
le  Théâtre  &  l'Ecole  du  Monde.  Son  penchant  n'étoit  point  borné 
aux  feules  Affaires  Militaires:  il  avoit  auffi  de  l'inclination  pour  les  Arts 
Mechaniques ,  les  Manufactures ,  &  les  autres  EtablùTemens  qui  ont  ren- 
du fon  Roiaume  plus  floriflant  que  tous  les  autres. 
„  Après  toutes  ces  Remontrances  que  je  viens  de  vous  faire, je  reviens 
à  mon  premier  fujet  qui  vous  touche. 

„  Je  fuis  homme ,  &  par  conféquent  je  dois  mourir.  A  qui  laifferai-je 
après  moi  achever  ce  que  j'ai  commencé  par  la  grâce  de  Dieu,  &  con- 
ferver  ce  que  j'ai  recouvré  en  partie?  à  un  homme,  qui,  femblableà  ce 
pareffeux  de  l'Evangile,  enfouît  fon  talent  dans  la  terre,  c'eit-à-dire, 
qui  néglige  de  faire  valoir  ce  que  Dieu  lui  a  confié. 
,,  Souvenez-vous  de  vôtre  opiniâtreté  &  de  vôtre  méchante  humeur  , 
combien  de  fois  je  vous  les  ai  reprochées ,  &  je  vous  en  ai  même  châ- 
tié, &  depuis  combien  d'Années  je  ne  vous  parle  prefque  plus;  mais, 
rien  de  cela  n'a  profité,  rien  n'a  fructifié.  J'ai  perdu  mon  tems;  j'ai 
battu  l'air.  Vous  ne  faites  aucun  effort,  &  tout  vôtre  plaifir  femble 
confifter  à  relier  oifif  &  fainéant  dans  vôtre  maifon  :  ce  qui  devroit 
vous  faire  honte,  parce  que  c'efl  vôtre  mifere,  femble  faire  vos  délices 
les  plus  chères, fans  que  vous  en  prévoyiez  les  dangereufes  confequen- 
ces  pour  vous  &  pour  tout  l'Etat.  St.  Paul  nous  a  laiffé  une  grande 
vérité,  quand  il  a  écrit:  Si  quelqu'un  ne  fait  pas  gouverner  fa  propre  Fa- 
mille,  comment  pourr a-t-il  conduire  fEglife  de  Dieu? 
„  Après  avoir  confideré  tous  ces  grands  inconveniens  &  y  avoir  réflé- 
chi, &  voiant  que  je  ne  puis  vous  porter  au  bien,  par  aucun  motif, 
j'ai  trouvé  bon  de  vous  donner  par  écrit  cet  Acte  de  ma  dernière  vo- 
lonté, réfolu  pourtant  d'attendre  encor  un  "peu  de  tems,  avant  de  l'e- 
xécuter, pour  voir  fi  vous  voulez  vous  corriger.  Si-non,  fâchés  que 
je  vous  priverai  delà  Succefïion  comme  on  retranche  un  membre  inutile. 
,,  Ne  vous  imaginez  point,  que,  parce  que  je  n'ai  point  d'autre  #  En- 
fant 

*  On  fe  fert  ici  de  cette  exprefilon ,  parce  que  cette  Lettre  a  été  écrite  dix-huit  jours 
avant  la  Naiffance  du  Czarevitch  Piètre  Petrovitch;  par  conféquent  le  Czarevitch  Alexei 
étoit  pour  lors  fils  unique. 

Tome  XL  O 


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lotf    MEMOIRES,  NEGOTÏATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  „  fant  que  vous,  je  ne  vous  l'écris  que  pour  vous  faire  peur.  Je  l'execii- 
de  Mos-  j?  terai  aflurement,  s'il  plait  à  Dieu>  car,  puifque  je  n'épargne  point  ma 
propre  vie  pour  ma  Patrie  &  le  falut  des  mes  peuples,  comment  pour- 
rois-je  vous  épargner,  vous  qui  ne  vous  en  rendez  pas  digne?  Je  préfé- 
rerai de  les  tranfmettre  plutôt  à  un  Etranger  digne  ,  qu'à  mon  propre 
Fils  indigne. 


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L'Original  efl  figné  de  la  propre 
main  de  Sa  Majefté. 


PIERRE. 

Réponfe  du  Czarevitch  à  Sa  Majesté'  Czarien- 
n  e  ;  écrite  trois  jours  après  la  Nai fiance  du  Seigneur 
Czarevitch  Pierre  Petroyitch, 

Très  Clément  Seigneur  et  Père. 

„  T'Ai  lu   l'Ecrit  que  Vôtre  Majefté  m'a    donné  le  27.  Octobre  171 5. 

„  J    après  l'Enterrement  de  ma  feue  Epoufe. 

„  Je  n'ai  rien  à  y  répliquer,  11  ce  n'eit  que,  fi  Vôtre  Majefté  veut  me. 
priver  de  la  Succeffion  à  la  Couronne  de  Ruflie  à  caufe  de  mon  Inhabile- 
té, vôtre  Volonté  foit  faite  j  je  vous  en  fupplie  même  très  in(tamment5 
parce  que  je  ne  me  juge  pas  moi-même  propre  au  Gouvernement.  Ma, 
mémoire  eit  très  affoiblie ,  &  elle  efl  néceffaire  dans  les  Affaires.  Les. 
forces  de  mon  efprit  &  de  mon  corps  font  fort  diminuées  par  les  mala- 
dies aufquelles  j'ai  été  fujet  ;  ce  qui  m'a  rendu  incapable  de  gouverner 
tant  de  peuples  :  il  faut  pour  cela  un  homme  plus  vigoureux  que  je 
ne  fuis. 

5,  C'ell  pourquoi  je  n'afpire  point  après  vous  (  que  Dieu  conferve  lom- 
gues  Années)  à  la  Succeffion  de  la  Couronne  Ruffîenne,  quand  même 
je  n'aurois  pas  de  Frère  comme  j'en  ai  un  à  prefent,  lequel  je  prie  Dieu 
qu'il  conferve.  Je  ne  prétendrai  point  non  plus  à  l'avenir  à  cette  Suc- 
ceffion', de  quoi  je  prends  Dieu  à  témoin,  &  je  le  jure  fur  mon  ame, 
en  foi  de  quoi  j'écris  &  je  figne  la  préfente  de  ma  propre  main. 
„  Je  mets  mes  Enfans  entre  vos  mains-  &,  pour  moi,  je  ne  vous  de- 
mande que  mon  fimple  entretien  ma  vie  durant,  laiilant  le  tout  à  vôtre 
confideration  &  à  vôtre  volonté. 


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1> 


Vôtre  très  -  humble  Serviteur  fj?  Fils 
(Efl  Ggné)  ■  ALEXE  I. 

Second 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  XVIII.       107 

Second  Ecrit  de  Sa  Majeflé  Czarienne  au  Czarevitch,  du  AmtaM 
10.  Janvier  1716.  nE  Mos' 


COV1K. 


Dernière  Monition. 

COmme  ma  maladie  m'a  empêché  jufqu'à  prefent  de  m'expliquer  avec 
vous,  fur  ce  que  j'ai  réfolu  au  fujet  de  vôtre  Lettre  que  vous  m'a- 
vez écrite  fur  ma  première  \  je  réponds  maintenant ,  que  j'y  remarque , 
que  vous  n'y  parlez  que  de  la  Succeflion,  comme  fi  j'avois  befoin  de 
vôtre  confentement  pour  faire  en  cela  ce  qui  dépend  d'ailleurs  de  ma 
Volonté.    Mais,  d'où  vient  que  vous  ne  dites  rien  dans  vôtre  Lettre  de 
cette  Incapacité  où  vous  vous  mettez  volontairement,  &  de  l'Averfion 
que  vous  avez  pour  les  Affaires ,  que  je  touchois  plus  particulièrement 
„  dans  la  mienne  ,   que  je  n'ai  fait  l'indifpofition  de  vôtre  fanté ,  dont 
,,  vous  faites  feulement  mention  ?   Je  vous  ai  auffi  remontré  le  méconten- 
tement que  j'ai  de  vôtre  conduite  depuis  tant  d'Années ,  &  vous  paffez 
tout  cela  fous  filence  ,  quoique  j'aie  infilté  fortement  là-defïus.    J'en 
juge  ,  que  les  exhortations  paternelles  ne  vous  touchent  point.     C'eft 
pourquoi  je  me  fuis  déterminé  à  vous  écrire  encore  la  prefente ,  qui  fe- 
ra la  dernière.   Si  vous  meprifez  les  Avis  que  je  vous  donne  de  mon  vi- 
vant, quel  cas  en  ferez  vous  après  ma  mort  ? 

„  Peut -on  fe  fier  à  vos  fermens,  quand  on  vous  voit  un  cœur  endurci? 
David  a  dit  :  Tout  homme  efi  menteur.  Mais ,  quand  vous  auriez  à  préfent 
la  volonté  d'être  fidèle  à  vos  promeffes,  ces  grandes  Barbes  *  pourront 
vous  tourner  comme  ils  voudront ,  &  ils  vous  forceront  à  les  fauffer. 
,,  Au  lieu  qu'à  préfent  leurs  débauches  &  leur  faineamife  les  privent 
des  places  d'honneur-  ils  efperent  de  rendre  un  jour  leur  condition  meil- 
leure, par  vous  qui  montrez  déjà  beaucoup  de  penchant  pour  eux. 
,,  Je  ne  vois  point  que  vous  reconnoifîiez  les  obligations  que  vous  avez 
à  vôtre  Père  qui  vous  a  donné  la  vie.  L'affiliez- vous  dans  fes  foliçitu- 
des  &  fes  peines  depuis  que  vous  êtes  parvenu  à  un  âge  meur  ?  Certai- 
nement en  rien:  tout  le  monde  le  fait  :  bien  au  contraire,  vous  blâmez 
&  vous  deteftez  tout  ce  que  je  fais  de  bon  au  prix  &  aux  dépens  de  ma 
fanté,  pour  l'amour  &  le  bien  de  mes  peuples  ;  &  j'ai  tout  fujet  de  croi-. 
re  que  vous  en  ferez  le  deftructeur,  fi  vous  me  furvivez.  Ainfi,  je  ne 
puis  me  refoudre  à  vous  laifîer  vivre  à  vôtre  volonté  ,  comme  fi  vous 
étiez  un  Amphibie,  ni  chair,  ni  poiflbn.     Changez  donc  de  conduite  ; 


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prefent,  que  ma  fanté  s'affoiblit.  Aufîi-tot  donc  que  vous  aurez  reçu 
ma  Lettre,  répondez  moi  là-deflus,  foit  par  écrit,  foît  de  bouche.  Si 
vous  ne  le  faites  pas,  j'agirai  avec  vous  comme  avec  un  malfaiteur. 

Dans  l 'Original  et  oit  fignê ,  P1ER  R  E. 

*  Cela  s'entend  de  ces  gens-là  qui  font  de  mœurs  corrompues.     Quorum  Deus  venter  ejl. 

O  2.  Reponfe 


AvFAiRrs 

DE     MOS- 
COVXE. 


108    MEMOIRES,  NEGOCIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Réponfe  au  Czarevitch  écrite  le  20.  Janvier  171 6. 
TRES  -  CLEMENT  SEIGNEUR  ET  PERE. 


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55 
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J'Ai  reçu  hier  matin  votre  Lettre  du  19.  de  ce  mois.  Ma  maladie 
m'empêche  de  vous  écrire  plus  au  long.  Je  veux  embrafTer  l'Etat 
Monaftique,  &  je  vous  demande  votre  gratieux  confentement  pour 
cela. 

Vôtre  Serviteur  &  indigne  Fils 

ALEXEI. 

Sa  Majefté  Czarrienne  fe  rendit  enfuite ,  avant  Ton  départ  pour  les  Païs 
étrangers ,  chez  le  Czarevitch  pour  lui  dire  adieu.  Elle  le  trouva  au  lit,, 
comme  s'il  avoit  été  malade:  cependant,  à  peine  fut-elle  partie  ,  qu'il  fe 
rendit  à  un  Feftin  chez  le  Diack  Michel  Voinow. 

Sa  Majedé  lui  demanda  pour-iors ,  quelle  refolution  il  avoit  prife ,  &  le 
Czarevitch  lui  confirma  encor  avec  de  grands  Sermens ,  dont  il  prenoit 
Dieu  à  témoin,  qu'il  vouloit  fe  retirer  dans  un  Couvent,  &  qu'il  ne  fou- 
haitoit  rien  avec  plus  de  paflion  que  d'embraffer  l'Etat  Monaftique.  Sa 
Majelté  Czarienne  lui  reprefenta  les  difficultez  qu'il  y  avoit  à  prévoir  pour 
un  jeune  homme  dans  un  tel  engagement;  qu'il  devoit  bien  y  penfer  &ne 
rien  précipiter,  &  après  cela  lui  écrire  à  quoi  il  fe  feroit  déterminé;  mais 
qu'il  feroit  beaucoup  mieux  de  rentrer  dans  le  chemin  que  Sa  Majefté  lui 
avoit  tracé,  que  de  fe  faire  Moine,  &  que  pour  cet  effet,  Elle  lui  laif- 
foit  encore  fix  mois  de  tems;  &  Elle  lui  dit  adieu. 

Les  fix  mois  fe  paiTerent,  fans  que  Sa  Majeflé  reçut  aucune  nouvelle  du 
Czarevitch  fur  ce  fujet;  ce  qui  l'obligea  de  lui  envoyer  deCoppenhaguen, 
par  le  Courrier  Sophonor,  une  Lettre  de  fa  propre  main  ,  datée  du  16, 
Août  iyid. 

MON    FILS, 

„  Vôtre  première  Lettre  du  29.  Juin ,  &  l'autre  du  30.  Juillet  m'ont 
été  rendues.  Comme  vous  n'y  parlez  que  de  l'état  de  votre  fanté  feu- 
lement, je  vous  écris  la  prefente  pour  vous  dire,  que  je  vous  ai  de- 
mandé vôtre  refolution  fur  le  Chapitre  de  la  Succefllon,  quand  je  vous 
ai  dit  adieu.  Vous  me  répondîtes  pour  lors  à  vôtre  ordinaire,  que  vous 
ne  vous  en  jugiez  point  capable  à  caufe  de  vôtre  infirmité,  &  que  vous 
préféreriez  de  vous  retirer  dans  un  Couvent.  Je  vous  dis  d'y  penfer 
encor  ferieufement ,  &  de  m'écrire  après  la  refolution  que  vous  auriez 
prife.  Je  l'ai  attendue  pendant  fept  mois ,  &  vous  ne  m'en  mandez 
rien  jufqu'à  prefent.    Vous  avez  eu  alfez  de  tems  pour  y  penfer;  ainfi, 

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COVJE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.         io? 

à  la  réception  de  ma  Lettre,  prenez  votre  parti  d'un  côté  ou  d'autre.  A?fÀXM»e 
Si  vous  vous  déterminez  au  premier,  quiefr.de  s'appliquer,  pour  fe  rendre  DE  Mo*- 
capabJe  de  la  Succefîion ,  ne  différez  point  plus  d'une  femaine  h  vous 
rendre  ici,  où  vous  pourez  arriver  encor  allez  à  tems  pour  être  prê- 
tent aux  opérations  de  la  Campagne; mais,  fi  vous  prenez  l'autre  par- 
ti, mandez-moi  où,  en  quel  tems,  &  quel  jour  vous  voulez  exécuter 
votre  refolution,  afin  que  j'aie  le  cœur  en  repos,  &  que  je  fâche  ce 
que  je  dois  efperer  de  vous.  Renvoyez-moi  votre  Reponfe  finale  par 
le  même  Courier  qui  vous  rendra  ma  Lettre. 

„  Au  premier  Cas,  marquez-moi  le  jour  que  vous  partirez  de  Peters- 
bourg;  &  au  fécond,  quand  vous  l'exécuterez.  Je  vous  réitère  que  je 
veux  abfblument  que  vous  vous  déterminiez  à  quelque  chofe,  car  au- 
trement je  jugerai  que  vous  ne  cherchez  qu'à  gagner  du  tems ,  pour  le 
palier  dans  votre  oiiiveté  ordinaire. 

Dans  t  original  et  oit  fignê , 

i  PIERRE. 

Le  Czarewitz,  au  mépris  de  ces  Ordres  de  Sa  Majefté  Czarienne,  s'é- 
vada en  chemin,  feignant  au  fortir  de  Pecersbourg  daller  fe  rendre  auprès 
de  Sa  Majeiié  à  qui  il  écrivit  dans  fa  route  une  Lettre  frauduleufe  qu'il 
datta  faufîement  de  Conixbergue  au  lieu  de  Libau,  pour  empêcher  que 
fon  Père  n'envoiât  quelqu'un  à  fa  rencontre ,  comme  il  l'a  reconnu  ex- 
prefTement  dans  fon  Ecirt  de  Confeiïions. 

Sur  l'Avis  que  Sa  Majeflé  reçut  à  Amfterdam  de  fon  Evafiorî ,  elle  en- 
voia  à  fa  recherche, premièrement  le  Refident  Wefelowskî,  &  eimrite  le 
Capitaine  de  la  Garde  Rumanzow,  &  enfin  de  Spâ  le  Confeilter  privé 
&  Capitaine  de  la  Garde  Mr.  Tolfloi,  avec  le  même  Capitaine  Rumanzow, 
par  lefquels  Sa  Majelté  écrivit  de  fa  propre  main  la  Lettre  fui  vante  le  io, 
Juillet  1717. 

MON  FILS, 


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11 

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VOtre  defobeifTance ,  &  le  mépris  que  vous  avez  fait  de  mes  Ordres, 
font  connus  de  tout  le  Monde.  Ni  mes  paroles ,  ni  mes  correc- 
tions ,  n'ont  point  pu  vous  faire  fuivre  mes  Initruérions}  &  enfin, après 
m'avoir  trompé  quand  je  vous  dis  adieu  ,  &  au  mépris  des  Sermens  que 
vous  avez  faits,  vous  avez  pouffé  votre  defobeifTance  à  l'extrémité  par 
votre  fuite; &  en  vous  mettant,  comme  un  Traître,  fous  une  Protec- 
tion étrangère;  chofe  inouïe  jufqu'à  prefent,  non  feulement  dans  notre 
Famille,  mais  aufîi  parmi  nos  Sujets  de  quelque  confideration  !  Quel 
tort  &  quel  chagrin  n'avez- vous  point  caufé  par-là  à  votre  Père ,  & 
quelle  honte  n'avez- vous  point  attiré  fur  votre  Patrie  ? 
„  Je  vous  écris  pour  la  dernière  fois,  pour  vous  dire  que  vous  aiez  à 

Q  3  wtte 


COVIF,, 


no    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   „  faire  ce  que  Mrs.  Tolfloi,  &  Rumanzow,vous  diront  &  vous  propofe- 
©e  Mos-   ^  ront  ^tre  de  ma  volonté. 

„  Si  vous  m'appréhendez,  je  vous  aflure  par  la  prefente,  &  je  pro- 
mets à  Dieu  &  à  Ton  jugement,  que  je  ne  vous  punirai  pas;  &  que  fi 
vous  vous  foumettez  à  ma  volonté  en  m'obeùTant ,  &  fi  vous  revenez, 
ie  vous  aimerai  plus  que  jamais.  Mais,  fi  vous  ne  le  faites' pas,  je  vous 
donne  comme  Père,  en  vertu  du  Pouvoir  que  j'ai  reçu  de  Dieu,  ma 
malédiction  éternelle ,  pour  le  mépris  &  les  offenfes  que  vous  avez  faits 
à  vôtre  Pere>  &  ,  comme  vôtre  Souverain,  je  vous  déclare  Traître  ,  & 
,  je  vous,  aflure  que  je  trouverai  bien  les  moiens  de  vous  traiter  comme 
,  tel,  en  quoi  j'efpere  que  Dieu  m'alîiflera  &  qu'il  prendra  ma  jufte  cau- 
fe  en  main. 

„  Au  relie,  fouvenez-vous  que  je  ne  vous  ai  violenté  en  rien.  Avois-je 
befoin  de  vous  donner  le  choix  libre  du  parti  que  vous  voudriez  pren- 
dre? Si  j'avois  voulu  vous  forcer,  n'avois-je  point  en  main  la  puiflance 
de  le  faire?  Je  n'avois  qu'à  commander,   &  j'aurois  été  obéi. 


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Dans  l'Original  étoit 

Signé  ^ 

PIERRE. 

Le  Czarewitz  écrivit  de  Naples  la  Reponfe  Juivante  h 
Sa  Majefié  Czarienne  le  4.  Ottobre  1717. 

ÏRES'-CLEM'ENT  SEIGNEUR  ET  PERE. 

J'Ai  reçu  la' très-gracieufe  Lettre  de  Vôtre  Majeilé,  par  les  Sieurs 
Tolftoi  &  RoumanzofF,  par  laquelle,  comme  auffi  par  eux  de  bou- 
che, Elle  m'afTure  très-gracieufement  du  pardon  de  ma  fortie  fans 
permiffion ,  en  cas  que  je  revienne.  Je  vous  en  rends  grâces  les  lar- 
mes aux  yeux:  je  reconnois  être  indigne  de  toute  grâce:  me  jettant  à 
vos  pieds  ,  j'implore  vôtre  Clémence  de  me  pardonner  mes  crimes, 
quoique  j'aie  mérité  toutes  fortes  de  punitions.  Mais,  je  me  repofe  fur 
vos  gracieufes  afîurances}&,  m'abandonnant  à  Vôtre  Volonté,  je  pars 
au  premier  jour  de  Naples,  pour  me  rendre  auprès  de  Vôtre  Majefié  à 
St.  Petersbourg ,  avec  ceux  que  Vôtre  Majefié  a  envoiez. 

,,  Très -humble  &  indigne  Serviteur,  qui  ne 
„  mérite  pas  de  fe  dire  Fils , 

„  A  L  E  X  E  I. 

„-  De  Naples  Je  4.  Ottohre  17 17. 

Le  3.  jour  de  Février  de  la  prefente  Année  1718,     le  Czarewitz  fut 

amené 


COVIE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.   DCC.  XVIII.         m 

» 

amené  à  Mofcou  par  le  Confeiller  privé  le  Sieur  Tolftoi  &  par  le  Capitai-   Affaires 
ne  Rumanzoff,  &  conduit  devant  Sa  Majefté  Czarienne  dans  la  grande   D^°s< 
Sale  du  Château,  où  il  fit  de  bouche,  en  prefence  de  tout  le  Peuple, la 
Confeiïion  de  fa  Fuite  volontaire,  prefentant  en  même  tems  un  Ecrit  de 
fa  main  dans  les  Termes  fuivans. 

„  TRES-CLEMENT  SEIGNEUR  ET  PERE. 

„  Après  avoir  avoué  ma  Tranfgrcffion  devant  vous  Mon  Père  &  Mon 
Seigneur  ,  j'apporte  ici  l'Ecrit  de  Confeiïion  de  mes  Crimes,  que  je 
vous  ai  envoie  de  Naples.  Je  confefTe  encore  à  prefent  de  m'être  écar- 
té des  devoirs  d'Enfant  &  de  Sujet,  en  m'évadant  &  me  mettant  fous  la 
Protection  de  l'Empereur,  &  en  reclamant  fon  Appui.  J'implore  vôtre 
gratieux  Pardon  &  vôtre  Clémence. 

„  Le  très-humble  ce  inhabile  Serviteur ,  in- 
„  digne  de  fe  nommer  Fils , 


)} 


A  L  E  X  E  I. 


Sa  Majefté  lui  déclara  après  cela  de  bouche,  qu'Eîle  vouloit  qu'il  dé- 
couvrit au  vrai  toutes  les  particularitez  &  les  circonftances.de  Ton  Eva- 
ilon,  qui  la  lui  avoit  confeillée  ,  &  tout  ce  qui  y  avoit  du  Rapport.  Que 
s'il  difbit  la  vérité,  fans  aucun  deguifement,  fansreferve,  &  fans  reitric- 
tions ,  Elle  lui  donnerok  fon  Pardon  -y  mais  que ,  s'il  ne  decouvroit  pas 
tout,  &  même  les  Perfonnes  Complices,  &  s'il  cachoit  quelque  chofe  de 
ce  qui  y  avoit  quelque  liaifon,  le  Pardon  feroit  nul  6c  n'aurok  point 
d'effet. 

Surquoi  le  Czarewitz  promit  &  s'obligea  envers  Sa  Majefté  Czarienne 
de  déclarer  la  pure  vérité  ,  comme  devant  Dieu,  fans  aucun  deguifement, 
&  il  baifa  les  Sts.  Evangiles,  &  la  Sainte  Croix,  devant  l'Autel,  dans. 
l'Eglife  Cathédrale,  en  foi  de  la  promefTe  qu'il  faifoit  de  tout  découvrir. 

11  donna  à  entendre  à  Sa  Majefté  Czarienne  dans  la  même  Eglife  Ca- 
thédrale, qu'il  avoit  été  contraint  de  la  part  de  la  Cour  Impériale  d'écrire 
au  fujet  de  fa  fortie  du  Pais  trois  Lettres ,  favoir  deux  aux  Archevêques 
&  une  au  Sénat,  fur  le  contenu  des  quelles  il  s'expliqueroit  après. 

Le  4.  jour  de  Février  fut  écrit  fur  les  articles  don- 
nez au  Czarewitz  ,  par  Sa  Majefté  Czarienne  3  ce 
quifuit* 

COmme  vous    avez    reçu    hier  Le  Czarewitz  a  déclaré    par    é- 

vôtre  Pardon ,  à  Condition  de  crit  à  Sa  Majefté  Czarienne  fur  ces 

découvrir  toutes    les   circonftances  Articles-là ,  ce  qui  fuit ,  &  l'a  figné 

de  vôtre  Evafion  &  tout  ce  gui  y  a  de  fa  propre  main» 


ii2    MEMOIRES,  NEGOTÏATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Amures    du  Raport ,   &  de  foufrir  la  mort 
de  Mos-   ^  voas  cacniez  ou  deguifiez    quel- 

COVIE..  ,       r  °      a.    i  ^       ,- 

,  que  choie  ;  vous  vous  êtes  expli- 
qué de  bouche  fur  quelques  Points; 
mais,  pour  mieux  faire,  &  pour  vô- 
tre décharge,  faites- le  par  écrit, fé- 
lon l'ordre  des  Points  fuivans. 


Rêponfe  fur  le  premier  Point  £*? 
fur  les  lu  w  ans. 


Jùr  les  Juivans 


A  Mon  Tres-Clement  Sei- 
gneur et  Père. 


i, 


Y  a-t-il  eu  quelque  defîein  pre-  "'Ai  communiqué  &  lu  les  Lettres 
médité  dans  les  Réponfes  faites  à  la  I  que  j'ai  reçues  de  Vôtre  Maje- 
Lettre  que  vous  avez  reçue  de  moi  ité  après  l'Enterrement  de  mon 

après  l'Enterrement  de  vôtre  Epou-  Epoufe ,  &  les  fuivantes ,  à  Alexan- 
fe ,  &  à  celles  que  je  vous  ai  écrites  dre  Kikin,  &  à  Nikifore  Vafemski, 
depuis  fur  le  même  fujet?  Et  com.  &je  les  ai  confultez  chacun  en  par- 
me  vous  avez  toujours  demandé  ticulier.  Peut-être  l'un  en  a-t-il  fait 
d'aller  dans  un  Couvent,  foit  par  confidence  à  l'autre:  ils  ont  pour- 
toutes  vos  Lettres ,  foit  par  les  Dif-  tant  été  confultez  féparement. 
cours  que  vous  avez  tenus  lorfque  Ils  m'ont  confeillé  de  renoncer  à 
je  vous  dis  adieu  avant  mon  départ  la  Succeflion ,  &  même  de  deman- 
de Petersbourg  ,  puifqu'il  fe  mani-  der  d'en  être  déchargea  caufe  de  la 
fefte  prefentement  que  tout  cela  n'é-  foiblefTe  de  ma  fanté.  Je  l'ai  fouhai- 
toit  que  diflîmulation  de  vôtre  part,  te  auffi  moi-même,  &  c'a  été  de 
dites  avec  qui  vous  l'avez  concer-  bonne-foi,  fans  fineiTe , &  fans  mali- 
té,  &  qui  font  ceux  qui  ont  fû  que  ce,  que  je  l'ai  écrit  ;  car  pourquoi  fe 
vous  n'agiflîez  que  dans  la  vue'  de  charger  de  ce  qu'on  ne  fauroit  por- 
me  tromper.  ter?  * 

Les  deux  mêmes  perfonnes  me 
confeillerent  auiTi  de  demander  de 
me  retirer  dans  un  Couvent,  &  de 
dire  que  je  voulois  me  décharger  par 
ce  moien  du  fardeau  de  la  Succef- 
fion. 

Ils  me  parlèrent  ainfl  :  S'il  n'y  s 
point  d'autre  re£ourcei  le  plus  fur  ejt 
daller  dans  un  Couvent ,  parce  que  ce- 
la vous  éloignera  de  la  Succeffi»», 

On 

*  Il  a  écrit  tout  cela  frauduleufement,  comme  il  eft  vérifié  par  la  fiiite. 


COVIE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIIT.       113 

On  m'a  parlé  de  la  même  manière  à  l'occafion  de  l'adieu  que  vous  me  Affaires 
fîtes;  &  ils  m'ont  dit ,  que  pour  me  conformer  à  ce  qui  avoit  été  concer-  dkMos- 
té,  je  devois  dire  la  même  chofe  que  j'avois  écrite,  quand  bien  même  je 
n'aurois  pas  deffein  de  l'exécuter,  comme  je  l'ai  déjà  déclaré  de  bouche. 
Et  comme  vous,  Mon  Seigneur,  me  dites  dans  ce  tems-là,  que  je  devois 
penfer ,  fans  me  précipiter,  au  parti  que  je  d'/ibïs  vouloir  prendre  de  me 
retirer  dans  le  Couvent ,  j'ai  cru  pouvoir  trainer  l'Affaire  en  lon- 
gueur. 

Alexander  Kikin  fit  un  Voiage  dans  le  Carlsbad  bientôt  après  vôtre 
départ  de  St.  Petersbourg:  environ  deux  femaines  plus  ou  moins  aupara- 
vant (car  j'étois  à  mon  Village  Jorfqu'il  partit  effectivement)  il  me  dit:  Je 
vais  vous  chercher  un  endroit ,  en  quelque  lieu  que  ce  foit.  Et  j'attendis  de 
fes  nouvelles  dans  le  deffein  de  m'évader. 

Je  me  fuis  expliqué  clairement  fur  ce  qui  regarde  mon  Evaflon  même, 
dans  le  troifiéme  point  de  mon  Interrogatoire. 

Je  reviens  au  tems  de  ma  première  Réponfe  à  vos  Lettres» 

Je  fus  chez  le  Prince  Bafili  Nolodimerovitch  Dolgorouki  ,  &  chez  le 
Comte  Frédéric  Matveyevith  Apraxin  avant  d'envoier  ma  Réponfe  à  Vô- 
tre Majefté.  Je  les  priai ,  quand  Vôtre  Majefté  leur  parleroit  fur  mon 
fujat,  de  vous  perfuader  de  me  priver  de  la  Succeflion  ,  &  de  me  laiffer 
vivre  fur  une  Terre  pour  y  palier  le  relie  de  mes  jours.  Frédéric  Mat- 
veyevitch  me  repondit:  „  Si  vôtre  Père  m'en  parle,  je  fuis  prêt  à  lui  donner 
„  ce  confeil.  Le  Prince  Bafili  me  dit  la  mcme  chofe  ,  ajoutant  :  Donnez 
„  lui  mille  Ecrits  :  qui  fait  ce  qui  arrivera  quand  le  cas  dont  il  s'agit  exijlera\ 
„  On  dit  envieux  Proverbe  Ulita  Yedett,  Kolita  Boudett.  Cela  viendra , 
„  mais  Dieu  fait  quand?  Ce  nefpa.-là  un  de  ces  Contracls  de  nos  bonnes  gens 
„  du  tems  pajfé,  auxquels  fi  on  manquoit ,  on  en  paioit  la  multe. 

Quand  j'eus  donné  la  Lettre  dont  il  s'agit,  le  Prince  Bafili  vint  chez 
moi,  me  dire  en  vôtre  nom,  de  lui  faire  voir  celle  que  Vôtre  Majefté 
m'avoit  écrite.  Je  la  lui  lus,  &  il  me  dit  :  „  J'ai  parlé  de  vous  à  vôtre 
„  Père.  Je  crois  qu'il  vous  privera  de  la  SucceJ/ion,  fc?  il  par  oit  être  fat is fait 
„  de  vôtre  Lettre. 

Il  m'en  demanda  la  minute ,  je  lui  en  fis  lecture  ,  parce  qu'il  m'avoit 
confeillé  d'y  faire  mention  de  mon  Frère  dans  les  termes  que  je  l'ai  fait. 
Quand  je  lui  eus  lu  cette  minute,  il  me  dit  qu'elle  étoit  bien  j  &  il  me  ré- 
péta les  paroles  fufdites ,  ajoutant  :  Je  vous  ai  fauve  du  Billot  auprès  de  vô~ 
tre  Père. 

Je  lui  repondis  que  j'avois  fait  cette  Lettre-là  de  bonne-foi ,  fans  aucu- 
ne fineffe;  ne  voulant  point  me  charger  de  ce  que  je  ne  pouvois  point 
porter.  Il  me  répliqua:  Rejoùifjèz-vous  à  prefent.  Fous  n  avez  plus  rien  à 
faire. 

Pour  Frédéric  Matveyevitch ,  je  ne  me  fbuviens  pas  fi  je  lui  ai  mon- 
tré la  Lettre,  ou  non:  mais,  je  l'ai  écrite  de  concert  avec  Kikin  &  Niki- 
fore,  chacun  à  part,  en  aiant  fait  des  copies  que  je  leur  envoyois  cache- 
tées par  Bafili  Barikof  \  parce  que  Kikin  demeurant  loin  de  moi  ,  je  ne 

Tome  XL  P  pou- 


COVIE. 


114    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  pouvois  point  toujours  m' aboucher  avec  lui*  outre  qu'il  m'avoit  donné 
duMos-  avis  qu'il  y  avoit  des  Surveillans  de  vôtre  Cour  pour  obferver  qui  venoic 
chez  moi.  Quand  je  lui  demandai  d'où  il  favoit  cela  ?  Il  me  repondit  que 
quelques-uns  de  vôtre  Cour  même  le  lui  avoient  dit,  mais  il  ne  les  nom- 
ma point. 

Pour  Barikof ,  je  ne  faurois  dire~  s'il  a  fû  quelles  Lettres  il  portoit 
de  ma  part  à  Kikin;  du  moins,  je  ne  lui  en  ai  point  fait  de  confiden- 
ce: lui  ordonnant  feulement  de  les  porter  fécretement  à  Kikin,  qui  me 
les  renvoya  toujours  cachetées ,  après  les  avoir  corrigées. 

Ce  Kikin  m'a  confeillé  de  renoncer  à  la  Succeffion ,  difant  :  Fous  fe- 
rez en  repos  quand  vous  aurez  tout  quité.  Cela  vaut  mieux.  Je  fai  que 
la  faible  (Je  de  vôtre  Complexion  ne  vous  permettra  pas  de  porter  un  Jî  pefant 
fardeau  quefl  la  Succeffion.  Fous  avez  mal  fait  de  ne  point  vous  en  aller, 
mais  ce  fi  une  affaire  faite,  il  nef  plus  tems  de  la  redreffer. 

Nikifore  me  parla  en  ces  termes  :  Qu'importe  de  la  Couronne  ,  pourvu 
que  vous  foiez  en  repos.  Je  ne  me  fouviens  de  rien  autre  chofe  de  leurs 
difcours. 

J'ai  confulté  les  mêmes  Kikin  &  Nikifore  fur  ma  féconde  Lettre  à  Vô- 
tre Majefté,  mais  fans  la  leur  envoier,  ni  qu'ils  me  la  renvoiafîent  ,  au- 
tant qu'il  me  fouvient,  parce  que  le  tems  étoit  court:  ma  mémoire  me 
fournit  feulement  que  Kikin  vint  chez  moi  une  fois,  comme  je  crois  ,  & 
me  dit  avant  que  la  Lettre  fut  encor  écrite  ,  que  je  devois  me  retirer 
dans  le  Couvent  :  car  ,  dit-il  ,  le  Froc  ne  fe  cloue  point  à  la  tête  ;  on  peut 
toujours  le  quitter ,  &  le  pendre  au  Croc.  Il  ajouta  à  ce  confeil ,  Tout  ejl 
bien  comme  cela.     Pour  ï 'avenir ,  qui  fait  ce  qui  arrivera  encor. 

Les  difcours  que  me  tint  alors  Nikifore  ne  me  reviennent  point  à  pre- 
fent  à  la  mémoire.  Je  me  fouviens  feulement,  qu'il  m'a  dit:  S'il  ri  y  a 
point  d'autre  expédient ,  il  faut  aller  dans  le  Couvent  :  faites  venir  vôtre  L'on- 
fef/eur  ,  fj?  dite:- lui  que  l'on  vous  force  de  vous  retirer  dans  le  Couvent  ;  /*/ 
pourra  le  dire  à  l'Archevêque  de  Refan,  afin  qu'ils  ne  croient  pas  que  vous  foiez 
tondu  pour  quelque  crime.  J'ai  fuivi  ce  confeil  de  Nikifore,  &  l'ayant  dit 
à  mon  Confefleur,  George,  Archiprétre  de  l'Egiife  Cathédrale  de  St.  Pe- 
tersbourg  ,  il  me  repondit  :  Je  le  dirai  quand  il  fera  tems.  Je  lui  ai  de- 
mandé enfuite  s'il  l'avoit  dit,  &  il  me  répliqua  que  non;  furquoi  je  lui 
dis  ,  de  n'en  point  parler  non  plus  à  l'avenir.  Je  ne  fai  pas  de  quelle 
manière  Nikifore  m'a  initruit  de  faire  ainfi:  mais,  le  ConfefTeur  igno- 
roit  les  Conférences  que  j'avois  avec  Kikin  ;  &  je  n'ai  rien  mis  en  dé- 
libération avec  lui. 

Après  avoir  rendu  ma  féconde  Lettre  h  Vôtre  Majefté  ,  j'en  écrivis 
deux  autres,  à  mon  Confefleur  Jaques,  &  à  Ivan  Kikin,  auxquels  je 
mandois  que  j'allois  dans  le  Couvent  par  force  ,  &  qu'ils  donnaient  à 
la  perfonne  qui  portoit  la  Lettre  quelque  argent  de  celui  qu'ils  avoient 
à  moi  pour  lors.  Je  ne  me  fouviens  plus  de  la  fomme.  Je  dis  à  la  Fil- 
le, qui  étoit  la  perfonne  à  qui  je  donnai  ces  deux  Lettres  cachetées,  fans 
l'informer  du  contenu;  Si  je  viens  à  mourir ,  car  j'étois  alors  malade,  ren- 
dez 


C0V1F.» 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.         ny 

dez  ces  deux  Lettres  à  leurs  adrej/ès,  &f  on  vous  y  donnera  de  l'argent.     C'elt   hvtkdtà 
la  Fille  qui  a  vécu  auprès  de  moi.  de  Mos- 

Elle  a  gardé  ces  Lettres  dans  une  Caffette  j  mais,  pour  celles  que  j'ai 
reçues  de  Vôtre  Majeité,  &  mes  Réponfes  ,  elle  n'en  avoit  aucune  con- 
noiifance.  Je  l'emmenai  avec  moi  par  rufe,  lorfque  j'eus  pris  la  refolu- 
tion  de  m'enfuïr.  Je  lui  dis  ,  que  je  la  prenois  ieulement  jufques  à 
Riga,  &  de-là  je  l'ai  menée  plus  loin  ;  lui  faifant  accroire  ,  de  même 
qu'à  ceux  de  ma  fuite  ,  que  j'avois  ordre  d'aller  à  Vienne  pour  faire 
une  Alliance  contre  la  Porte  Ottomane,  &  que  j'étois  obligé  de  voia- 
ge«r  en  fecret ,  afin  que  les  Turcs  n'en  fuffent  point  avertis.  C'eft-là 
tout  ce  que  mes  gens  en  favoienc. 

Enfin,  ceux  qui  a  voient  encor  connoiflance  de  ma  fufdite  Lettre  à  Vô- 
tre Majefté  font  le  Prince  YouriyaYourievitchTrubezkoi,  &  le  Czarevitch 
de  Sibérie;  mais,  ils  n'ont  pas  vu  la  Lettre  même.  Le  Prince  Trubezkoi 
me  demanda  environ  trois  femaines  après  cette  Lettre:  Quelle  Lettre  vous 
a  donné  vôtre  Père  en  ma prefence  ?  Le  contenu  en  étoit-il  bon,  ou  mauvais?  Je 
lui  en  dis  le  fujet ,  &  de  ma  Réponfe.  Il  me  répliqua  :  Fous  faites  bien 
de  ne  prétendre  pas  la  Succejjïon.  Souvenez- vous  que  l'on  trouve  des  fujets 
d'afiiclion  au  milieu  même  des  grandeurs  13  clés  richejjes.  Fous  riy  êtes 
point  propre.  Je  lui  dis  qu'il  avoit  grande  raifon.  Le  Sibérien  me  dit: 
Quelles  Lettres  vous  a  apporté  Makarof?  Nous  en  /avons  tous  le  contenu  :  il 
le  communiqua  le  même  jour  au  Prince  Jaques  Dolgorouki.  Je  le  lui 
avouai ,  &  je  lui  donnai  une  fomme  de  ducats  pour  les  compter  à  ma  Maî- 
trefle  pour  fa  fubfiftance,  quand  je  me  retirerois  dans  le  Couvent.  J'ai 
repris  cet  argent  quelques  jours  après.  Ceux  qui  en  avoient  connoifTance 
font  Nikifore  Bafemski,  Ivan  Affonaffiez,  &  leConfelTeur  George.  Mais, 
pour  les  Lettres,  je  ne  me  fouviens  plus  û  je  l'ai  dit  au  ConfefTeur,on  non. 
Du  moins  il  n'a  point  fû  mon  Evafion. 

2.  Jîd  Secundum. 

N'a-t-on   pas  tenu  quelques  dif-         Je  n'ai  rien  entendu  dire  à  perfon- 

cours  pendant   ma   grande  maladie  ne  fur  ce  fujet  ,    dans  ce  tems  de 

à  St.  Petersbourg  ,    où  il  parut  de  vôtre  grande  maladie  ,  au  cas  que 

î'empreflement  de  fe  joindre  à  vous,  vous  mouruffiez. 
au  cas  que  je  mouruife? 

3.  jid  Tertium. 

Y  a-t-il  long-tems  que  vous  avez  Je  me  fuis  entretenu  fouvent,  & 
commencé  de  former  le  projet  de  endifferens  tems,  avec  le  mêmeKi- 
vôtre  Evafion  ;  &  avec  qui  l'avez  kin ,  &  encore  avant  que  j'euiTe  re- 
vous  concerté  ?  Car ,  comme  vous  $ù  vos  Lettres  &  que  j'y  eufTe  ré- 
avez pris  vôtre  parti  fi  fubitement,  pondu.  Nos  difcours  revenoient  à 
on  peut  croire  que  cela  étoit  prémé-  ce  qui  s'enfuit: 
dite  depuis  long-tems.  P  2                                      Dé- 


n6   MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aïfaihes        Déclarez  ouvertement  ce  qui  en         Que  s'il  arivoit  que  je  me  trou- 

dkMos-     çfl^  avec  qui,  en  quel  lieu;  fi  c'eft     vafle  dans  des  Pais  étrangers,  j'y 

C0VIE-      de  bouche,  ou  par  correfpondances     devois  relier  ,  en  quelque   endroit 

de  Lettres,  &  par  quel  canal?  que  ce  fut,  feulement  pour  y  vivre 

Déplus,  par  le  Confeil  de  qui,     en   re,pos    &   m'éloigner   de    toute 

avez-vous  écrit,  en  chemin,  la  fuf-     chofe. 

ditte  Lettre  frauduleufe  ?  Qui  vous  Je  ne  me  fuis  pourtant  point 
y  a  aidé  ?  Et  pour  quelles  raifons  beaucoup  preffé  de  l'exécuter;  mais, 
l'avez  vous  écrite  ?  Et  n'avez  vous  quand  je  partis  pour  Carlsbad ,  Ki- 
point  encor  écrit  à  quelqu'un  pen-     kin  me  dit: 

dant  vôtre  route  ?  Lorsque  vous  ferez  guéri ,  écrivez  à 

vôtre  Père  ,    que  vous  devez  prendre 
encore  des  Remèdes  au  Printcms  ,  & 
cependant ,  vous  pourez  aller  en  Hollande ,  &  en  fuite  en  Italie ,  après  les  Remè- 
des du  Printems\  £s?,  de  cette  manière  ,  vous  ferez  durer  vôtre  abfence  deux  ou 
trois  ans. 

Je  lui  écrivis  de  Carlsbad,  pour  favoir  fi  je  devois  faire,  ou  non  ,  ce 
qui  avoit  été  concerté  avec  lui?  Il  me  fit  cette  Réponfe:  Comment  pouvez- 
vous  faire  cela  fans  la  Permiffion  de  vôtre  Père  ?  Il  fer  oit  à  craindre  quil  ne  fs 
fâchât.  Ecrivez-lui ,  £5?  demandez  fa  Permiffion  :  mais  ,  n  oubliez  point  vos 
Affaires. 

Je  ne  pus  point  comprendre  ce  qu'il  vouloit  dire  par  ces  derniers  mots. 
Et,  quand  j'eus  changé  la  réfolution  que  j'avois  prife  d'aller  en  Hollande, 
&  que  je  fus  retourné  à  St.  Petersbourg,  j'y  trouvay  Kikin,  qui  avoit  été 
condamné  à  l'Exil  par  les  Procédures  qu'on  avoit  faites  alors.  Mais,  com- 
me il  n'étoit  plus  en  arrêt,  j'eus  occafion  de  m'aboucher  avec  lui. 

Il  me  demanda:  Quelqu'un  de  la  Cour  de  France  a-t-il  été  chez  vous?  Je 
lui  dis,  que  je  riy  avois  vûperfonne. 

Il  me  répliqua:  Vous  avez  tort  de  ne  vous  être  point  abouché  avec  quelqu'un 
de  la  Cour  de  France ,  &  de  ne  vous  y  être  point  retiré.  Le  Roi  eft  un  homme 
qui  a  Came  grande  :  il  donne  aux  Rois  mêmes  fa  Protection.  Ce  nauroit 
foïnt  été  une  grande  affaire  pour  lui,  de  vous  la  donner. 

Je  lui  demandai,  ce  qu'il  avoit  voulu  dire  dans  fa  Lettre  ,  par  ces 
mots,  que  Je  ne  devois  point  oublier  mes  Affaires \  &  ce  que  cela  fignifioit? 
Il  me  répondit.  Je  voulais  vous  dire  par-là ,  que  vous  deviez  vous  retirer  en 
France  :  car  je  no  fois  vous  écrire  clairement  \  vous  ï  auriez  dû  deviner  vous- 
même. 

Pour  la  dernière  Evafion  que  j'ai  exécutée  effectivement,  je  n'en  avois 
jamais  délibéré  auparavant  avec  perfonne:  mais,  aiant  reçu  vôtre  Lettre 
de  Coppenhagen,  &  voiant  qu'il  m'étoit  libre  de  fortir  de  Ruffie,  je  pris, 
en  conféquence  des  difeours  precedens  de  Kikin,  la  réfolution  de  me  re- 
tirer quelque  part  que  ce  fût,  ou  chez  l'Empereur,  ou  dans  quelque 
Republique,  àVenife,  ou  en  SuiiTe.  Je  n'en  ai  parié  à  perfonne.  J'ai 
feulement  fait  entendre  à  Iwan  Affonaflief  l'ainé  ,  que  j'étois  refolu  de 
m'enfuir  dans  un  des  endroits  fufdits  ,  quel  qu'il  fut ,  fans  m 'ex- 
pli- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        117 

pliquer  precifement  pour  où:   car,  je  n'y  étois  point  encor  bien  deter-   Af?ai**« 

miné.     *  .  ,  okMos- 

Je  lui  dis  encor,  que  j'avois  parlé  autrefois  fur  ce  fujet  avec  Kikin,  qui     CCMIE- 
peut-être  m'auroit  trouvé  un  endroit ,  puisqu'il  étoit  préfentement  dans 
ces  quartiers-là  ;  &  que  quand  je  le  rencontrerois  ,    il   me   confeilleroit 
où  aller:  que  fi  je  ne  le  trouvois  point  ,  j'irois  dans  l'un  ou  l'autre  de 
ces  endroits-là. 

Il  n'y  a  jamais  eu  avant  ce  tems-là  d'entretien  fur  ce  fujet  avec  ce 
Iwan  Affonaifief,  ni  avec  perfonne,  excepté  Kikin ,  ni  verbalement  ,  ni 
par  écrit ,  ni  de  quelque  autre  manière  ;  &  il  n'y  a  eu  aucune  confulta- 
tion,  fous  quelque  prétexte  que  ce  foit.  Aucun  de  mes  domeiliques,  ni 
étranger,  n'a  eu  connoiffance  du  deffein  de  mon  Evafion  ,  excepté  les 
ci-deiTus  nommez.  Et  Iwan  ArTonaffief  me  dit  ,  lorfque  que  je  m'en 
al  lois:  Je  fuis  refolu  de  vous  garder  le  fecret  ;  mais ,  malheur  à  nous ,  Ji  vous 
vous  enfuiez;  faites  réflexion  fur  ce  que  vous  faites. 

Quand  je  rencontrai  Kikin  à  Libou  ,  où  je  lui  demandai  ,  s'il  m'a- 
voit  trouvé  un  endroit  ,  il  me  dit  :  J'en  ai  trouvé  un.  Allez  à  Vienne 
chez  l 'Empereur  :  on  ne  vous  y  livrera  point.  Il  me  raconta  eniuite  com- 
ment il  avoit  vécu  à  Vienne. 

Je  lui  demandai  quelles  Affaires  l'avoient  engagé  d'aller  à  Vienne,  fi 
c'étoit  pour  les  miennes  ou  bien  pour  d'autres.  Car,  lui  difois-je, 
quoique  vous  aiez  parlé  avant  mon  départ  de  vouloir  me  chercher  un. 
endroit,  vous  ne  m'avez  cependant  rien  écrit.  Il  me  répondit  :  Je  ri  y 
ai  point  eu  d'autre  Affaire  que  pour  vous.  J'ai  prié  la  Princeffe  Cza- 
rienne,  Marie  Alexeiewna , de  me  permettre  d'aller  à  Vienne  pour  n;c s  Affai- 
res particulières  \  &  elle  ni  avoit  chargé  de  perfuader  à  Broforofski  de  re- 
tourner. 

Je  lui  demandai  enfuite  ce  que  je  devois  faire,  quand  quelqu'un  feroit 
envoie  à  ma  rencontre  à  Dantzic  ou  à  Konigsbergue.  Il  me  dit  :  Sauvez, 
vous  feul  pendant  la  nuit ,  ou  bien  ne  prenez  avec  vous  quun  valet  :  qu'il  arrive 
ce  qui  pourra  du  bagage  &  des  gens  ;  mais ,  fi  on  vous  envoie  deux  perfonne  s  ,  fei- 
gnez d'être  malade ,  13  faites  prendre  les  devans  à  l'un ,  pendant  que  voui  écha- 
perez  à  l'autre. 

Pour  la  Lettre  frauduleufe  ,  elle  fut  écrite  à  Libou  de  l'avis  du  même 
Kikin,  &  datée  de  Konigsbergue,  afin  qu'on  ne  remarquât  point  qu'il  y 
eut  eu  part:  car,  je  ne  le  voiois  point-là  en  fecret. 

La  Lettre  fut  donnée  au  Prince  Chakofski ,  Capitaine  du  Régiment  de 
Semegow,  en  le  chargeant  de  l'envoier  parla  polte.  Mais,  ce  Capitai- 
ne ne  favoit  rien  de  nos  affaires  ;  ck  le  deffein  étoit,  en  écrivant  cette 
Lettre,  d'empêcher  par- là  ,  que  perfonne  ne  fût  envoie  à  ma  ren- 
contre. 

Le  même  Kikin  me  fit  encore  écrire  une  Lettre  à  Juan  Affbnaflîef  l'ai- 
ne, que  je  lui  avois  dit  avoir  connoiffance  de  ce  que  nous  avions  concer- 
té, &  de  mon  Evafion,  pour  lui  faire  favoir  qu'il  devoit  mefuivre,  & 
que  je  lui  laiflbis  à  Dantzic ,  chez  le  Maître  des  Polies, l'Adrefle  où  il  de-      / 

P  3  voit 


COVIE. 


118     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    voit  aller.     Kikin  raifonna  ainfi  :  Si  Affonaffief  rieft  plu<  à  Petersbourg, 
»eMos-     cette  affaire  ne  fauroit  éclater  :  car  ,    hormis  nous  deux    &  lni\  perfonne  rien 
fait  rien.     Pour  moi,  je  ri  et  ois  point  à  Peter  sbourg  quand  vous  partîtes:  ainfi 
le  foubçon  ne  tombera  point  fur  moi.  Mais ,  fi  /iffonajjief  y  refie ,  il  eft  à  crain- 
dre qu'il  ne  lui  échape  quelque  chofe  avec  l'un  ou  l'autre. 

Je  lui  dis,  que  je  ne  croiois  point  qu'Affonaifief  voulût  partir,  fur- 
quoi  Kikin  pourfuivit:  En  ce  cas,  écrivez  lui  une  féconde  Lettre ,  par  ou  on 
ne  puifjé  point  comprendre  que  vous  eujjïez  jamais  tenu  avec  lui  aucun  di/cours 
fur  cette  Affaire ,  &  comme  fi  vous  ri  aviez  pris  qu'en  chemin  feulement  la  refo- 
lution  de  vous  en  aller j  &  marquez  lui,  qu'il  doit  prendre  avec  lui  vos  bijoux 
&  vous  fuivre. 

Je  ne  me  fouviens  pas  du  nom  de  la  Ville  où  il  me  dit  que  je  devois 
écrire  à  Affonaffief  de  me  joindre:  Et  moi  je  lui  dirai  de  montrer  la  Lettre 
que  vous  lui  écrirez,  au  Prince  Menchikof ,  comme  s'il  lui  decouvroit  votre  fe- 
cret  ,    13  ainfi  on  ne  fera  point  d'information  contre  lui. 

Il  me  dit  de  plus  d'écrire  au  Prince  Balili  une  Lettre  de  remerciment 
pour  Tes  amitiés,  que  je  tacherois  de  reconnoîcre  en  mon  tems  :  car,  dit 
Kikin,  fi  on  prend  quelque  foubçon  fur  moi  de  vôtre  Evafion,  je  déclarerai  d"a- 
bord  votre  Lettre  écrite  au  Prince  Bafili  ,  £5?  je  dirai  :  Il  par  oit  qu'il  l'a  con- 
certée avec  lui ,  parce  qu'il  lui  fait  des  Remercimens.  J'ai  intercepté  cette 
Lettre. 

Kikin  prit  cette  Lettre-là  avec  lui-  j'ignore  s'il  l'a  rendue.  Mais,  avec 
les  autres  Lettres  à  Affonaiiief,  il  me  dit  d'écrire  au  Prince  Menchikof , 
qu'il  devoit  donner  à  Affonaffief  un  ordre  pour  les  Polies,  &  le  dépêcher: 
que  je  devois  aufli  le  remercier  de  m'avoir  confeilîé  de  prendre  avec  moi 
ma  MairrefTe.  Peut-être,  dit  Kikin,  qu'il  montrera  cette  Lettre  à  vôtre  Pè- 
re ,    qui  prendra  aufji  de- là  quelque  Joubçon  fur  lui. 

Quant  au  Prince  Menchikof,  la  chofe  fe  paffa  de  cette  manière. 

Lorfque  je  fus  chez  lui  avant  mon  départ,  il  me  demanda  où  je  laifïe- 
rois  ma  MaitrefTe.  Je  lui  répondis  :  que  je  la  prenois  avec  moi  jufques  à 
Riga,  &  que  je  la  renvoierois  ici.  Il  me  dit:  Vous  ferez  mieux  de  la 
prendre  avec  vous; mais,  mon  intention  étoit,  fans  cela, de  la  mener  avec 
moi  ,  quoique  je  diife ,  que  je  ne  la  voulois  prendre  que  jufques  à  Riga 
feulement  ,  afin  qu'on  ne  s'aperçut  point  du  deffein  que  j'avois  de 
m'en  fuir. 

C'efr.  pourquoi  je  n'ai  point  dit  la  vérité ,  pas  même  à  elle  ,  de  peur  qu'il 
ne  lui  en  échapât  quelque  chofe:  &  quand  je  dis  tout  cela  à  Kikin,  ce  fut 
là-deflus  qu'il  me  dit  d'écrire  ,  comme  j'ai  déclaré  ci-deffus  ,  au  Prince 
Menchikof; mais, ce  Prince  n'a  rien  fçû  du  deffein  de  mon  Evafion,  &  il 
n'y  a  eu  non  plus  aucune  communication  fur  ce  fujet  avec  le  Prince  Ba- 
fili. 

Je  me  feparai  après  cela  d'avec  Kikin,  qui  me  pria  de  lui  faire  favoir, 
de  même  qu'à  Afronaiïief,  où  je  ferois,  quand  je  ferois  dans  ma  route:  & 
il  me  dit  encore,  que  je  devois  leur  écrire  dans  ces  termes,  que  j'avois  paf- 
(e  Danzich  heureujement  &  fans  danger  des  Confédérés ,  £5?  que  je  me  trouvais 

dans 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.       u? 

dam  ma  rouie.     N'écrivez  point  davantage ,  me  dit-il,  nous  comprendrons  bien   A?fais?.# 

cela.  '      ,    ,  dkMos- 

Je  l'ai  faic  auflî.  Je  leur  ai  écrit  de  Stargard;  mais,  pour  ôtertout  foub- 
çon  contre  eux ,  j'écrivis  autli  à  d'autres  qui  ne  favoient  rien  de  mes  def- 
ieins  concertez  avec  Kikin,  ni  de  mon  Evafion,  nommément  à  Nikifore 
Bafemskoi,  à  Fedor  Doubrofski ,  au  Czarevitch  Sibérien,  à  ïwan  Narich- 
kin ,  &  à  tous  dans  les  mêmes  termes  que  j'avois  écrit  à  Ivvan ,  afin  que  fi 
mes  Lettres  étoient  interceptées,' on  n'en  put  rien  fubçonner,  étant  éga- 
les à  tous,  &  contenant  la  même  chofe. 

Tous  les  fufnommez  n'ont  rien  fçu  de  ma  fuite,  excepté  Kikin  &  Ivvan. 

Ces  Lettres  furent  envoiées  à  Riga,  au  Prince  Pierre  Galliczin,  afin  de 
les  expédier  pour  St.  Petersbourg:  &  ,  après  cela,  je  n'ai  plus  écrit  de  Let- 
tres en  Rullie}  mais  bien  de  la  Courlande  &  de  la  Livoine  à  maMaifon, 
fur  mes  Affaires  Domefiiques ,  &  j'ai  encore  écrit  à  Doubrofski,  au  fujet 
de  certains  Livres  qui  m'appartenoient,  &  qu'il  avoit  entre  les  mains,  des 
auparavant,  de  même  que  d'autres  meubles   qu'il  avoit  en  fa  garde. 

C'eit  ainfi  que  tout  s'eli:  paffé  en  ce  tems-la. 

Le  Prince  Pierre  Galliczin  n'a  rien  fçû  de  mon  Evafion. 

Au  relie,  je  ne  fai  point,  fi  les  Lettres  en  queition  ont  été  reçues,  ou 
non,  parce  que  perfonne  ne  m'a  écrit  de  Rufiie. 

Voici  ce  que  Kikin  m'a  dit  de  plus:  Si  votre  Père  envoie  quelqu'un,  pour 
*ucu:  perfuader  de  retourner ,  ne  le  faites  point  :  il  veus  fera  couper  la  Tête  publi- 
quement. Et  alors  je  lui  dis  :  //  eji  bon  que  vous  maiez  cherché  un  endroit  : 
mais ,  fi  mon  Père  ne  m  avoit  pas  écrit  de  venir  auprès  de  lui ,  comment  aurois- 
je  fait  pour  m  enfuir?  Il  me  répondit:  Alors  j'aurais  fuit  en  forte  que  vous  cuf- 
fiez  dit,  que  vous  vouliez  de  votre  propre  mouvement  l'aller  trouver;  ÏS^de  cette, 
manière,  vou>  auriez  pu  vous  jauver. 

4.  Ad  Quartum. 

Avez-vous  reçu  pendant  vôtre  fui-  Je  n'ai  eu  aucunes  Nouvelles  é- 
te  des  Lettres  ,  ou  bien  vous  êtes  tant  en  chemin,  pendant  ma  fuite, 
vous  entretenu  avec  quelqu'un  de  ni  de  Rufiie,  ni  d'ailleurs ,  ni  par  écrit, 
Jlufiie  directement,  ou  indirecte-  ni  de  vive  voix ,  ni  directement,  ni 
ment,  ou  bien  par  d'autres  voies?  indirectement  ,  ni  d'autres  chofes; 
Quelles  font-e!ls  ?  Comme  au (îi  n'a-  fi  ce  n'eiï  ,  que  j'ai  reçu  des  Avis  du 
vez  vous  rien  apris,  foit  de  RuiTie,  Comte  de  Schonborn  àLhrenberg. 
foit  d'ailleurs,  des  Affaires  de  ce  Pais-  Premièrement  :  Qu'il  y  avoit  des  a- 
ci,  qui  nous  regardent  vous  &moi?     vis  à  mon  fujet,  que  jétois  chez  eux,  &? 

que  je  devois  vivre  C;  me  tenir  caché. 

La  féconde  fois,   lorfque  Wefelowski  a  parlé  de  moi  à  Vienne. 

Je  ne  me  fouviens  plus  à  laquelle  de  ces  deux  Lettres  étoit  jointe  une 
Copie  de  Bley-er,  portant  en  fubitance,  qu'On  avoit  fait  quelques  Informa- 
tions après  mon  dipatt  parmi  mes  Dôme  fi  que  s  :  Qu'il  y  avoit  delà  mutinerie  dans 
l  Armée  qui  eji  dans  le  Mellenbourg,  &  particulièrement  dans  les  Regimens  des 
Gardes,  qui  font  en  plus  grande  partie  compofez  de  la  Nobiejjè:  Qu'on  en  voulait 
à  la  vie  du  Czafj,  &  qu'on  parloit  d'envoler  la  Czarijje ,  -avec  jon  lils ,  là  ou 

étoit. 


Affaires 
de  Mos- 

COVIE. 


120    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

étoit  la  vieille  CzariJ/e ,  pour  conduire  celle-ci  à  Mofcou\  £5?,  quand  on  auroit 
trouvé  f on  Fils ,  dont  on  ne  favoit  pas  ce  quil  étoit  devenu ,  le  mettre  fur  le  Trô- 
ne, &c. 

Cette  Lettre  eft  refté  derrière^,  avec  mes  autres  Papiers. 

J'ai  eu  encore  une  autre  Lettre  du  Comte  de  Schonborn,  au  fujet  de 
mon  Voiage  de  Naples,  mais  je  n'en  ai  point  reçu  à  Naples. 

Je  n'ai  jamais  écrit  à  perfonne  en  chifre  pendant  ma  fuite.  Et ,  pour  des 
Nouvelles  ,  je  n'en  ai  pas  eu  d'autres,  que  celles  que  je  viens  de  dire,  & 
par  les  Gazettes  imprimées. 


Quand,  où,  &  pourquoi,  le  Prêtre 
Grec  a-t-il  été  chez  vous  ? 


Ad  Quintum. 

Il  n'y  a  eu  aucun  Prêtre  Grec  chez 
moi ,  ni  nulle-part ,  depuis  mon  départ 
de  St.  Petersbourg  ,  jufques  à  l'arri- 
vée de  Mrs.Tolftoi  &  Rumanzowà 
Naples. 

Ad  Sextum. 

Le  Secrétaire  du  Comte  de  Schon- 
born, nommé  Keil ,  m'a  forcé  d'écrire 
des  Lettres  au  Sénat  &  aux  Arche- 
vêques, quand  il  me  conduifit  à  Na- 
ples, dans  le  quartier  du  Secrétaire  du 
Vice-Roi,  Wingarten  \  difant,  que  je 
devois  écrire  en  Ruffie  aux  fuldites 


6. 

Dites,  au  moins,  la  fubflance  de 
la  Lettre  que  vous  avez  dit  q,ue 
les  Impériaux  vous  avoient  forcé 
d'écrire  fur  cette  Affaire  ,  quand 
même  vous  ne  vous  en  fouvien- 
driez  plus  mot  à  mot;  &  qui  des  Im- 
périaux vous  a  forcé  de  l'écrire  ? 
Quand,  &  où  ?  Qui  de  vos  gens  en  a  perfonnes,  parce  qu'on  y  avoit  des 
eu  connoiflance  ?  A  qui  vous  l'avez  Avis,dit-il,que///wj«;or/,&qued'au- 
renduè'.?  N'y  en  a-t-il  point  de  Mi-  très  leur  marquoient,  que  jetois  pris 
nute  chez  vous  ?  Et  e(t-il  vrai,  que  £5?  mené  en  Sibérie.  Ecrivez-donc,  di- 
les  Impériaux  vous  y  ont  forcé  ?  foit-il  ;  &?,  Jî  vous  n  écrivez  pas ,  nous 

ne  vous  garderons  point. 
Effectivement,  il  ne  fortit  point  delà  chambre,  que  je  n'euffe  écrit:  Et, 
fur  cette  contrainte  du  Secrétaire,  j'écrivis  au  Sénat  &  à  deux  Archevê- 
ques, favoir  à  celui  de  Roilou,   &  celui  de  Krudiiz,  dans  le  fens  qui  fuit; 
car,  ils  m'étoient  peu  connus. 

„  Je  crois  que  vous,  comme  tous  les  autres,  aurez  été  fort  furpris  de 
,  mon  départ  à  l'infçû  de  tout  le  Monde.  Ce  font  les  mauvais  traitemens 
,  qu'on  m'a  faits ,  jufques  à  vouloir  me  mettre  dans  le  Froc,  qui  m'y  ont 
,  obligé:  mais,  Dieu  m'a  procuré  l'occafîon  de  m'éloigner.  Je  me  trouve 
,  fous  la  Protection  d'une  Haute  Perfonne  (il  ne  m'étoit  point  permis  de 
,  la  nommer)  jufques  à  fon  tems,  quand  Dieu  me  rapellera  pour  retour- 
,  ner.  Cependant,  je  vous  prie  de  ne  me  point  oublier,  &  fi  quelqu'un 
,  de  ceux  qui  fouhaitent  de  m'effacer  de  la  Mémoire  des  hommes  fait 
,  courir  le  bruit  que  je  fuis  mort,  ou  de  quelque  autremauvaife  chofe,  n'y 
,  ajoutez  point  de  foi,&  raffurezles  autres:  car,  je  fuis  en  vie,  &en  bonne 
fanté,  grâces  à  Dieu  &  à  mes  Bienfaiteurs,  qui  m'ont  en  leur  garde,  qui 
m'ont  promis  de  ne  me  point  abandonner,  &  de  m'afîilter  dans  tous  mes 

befoins. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII. 


iii 


COVIK. 


„  befoins.     Je  fuis,  jufque  dans  mon  Tombeau,  h  vous&  à  toute  la  Patrie,    AtrÀnik 
„  plein  de  bons  fouhaits  !  de  Moj- 

C'eft-là  la  fubftance  de  l'Ecrit,  maïs  il  ne  m'en  fou  vient  plus  mot  pour 
mot:  on  ne  m'en  a  point  laifle  faire  de  minutes,  j'ai  feulement  la  Lettre 
comme  je  l'avois  commencée  à  écrire-  mais,  elle  n'eft  point  finie  dans  ce 
papier-là  ,  parce  que  j'avois  mal  écrit  :  ce  papier  m'elt  reité  au  lieu  du 
brouillon.  Il  n'eit  pas  dans  les  mêmes  termes,  mais  pourtant  fur  cette  ma- 
tière.    Il  eft  encore  derrière  avec  mes  autres  Papiers. 

Quand  j'eus  écrit  la  Lettre  dont  il  s'agit,  je  la  rendis  à  ce  Secrétaire  dont 
j'ai  parlé,  qui  partit  avec,  pour  je  ne  fai  où.  Mais  il  me  dit,  qu'il  alloit 
à  Vienne:  &  on  me  mit  dans  le  Château  Saint  Elmo. 

Perfonne  de  mes  gens  n'a  rien  fçu  de  ces  Lettres.  Il  n'y  en  avoit  pas 
même  alors  un  feul  avec  moi ,  qui  fcut  lire  &  écrire.  Ce  fut  moi  &  le  Se- 
crétaire qui  firent  la  Lettre,  nous  étant  enfermez  feuls.  Cela  fe  paiTa  le 
8.  Mai  1717. 

Je  m'adreflai  à  mon  arrivée  à  Vienne  au  Comte  de  Schonborn ,  pour  de- 
mander Protection.  Il  dit:  Je  m'en  'vais  chez  chez  l'Empereur,  pour  appren- 
dre ce  qu'il  dira  \  prenez-garde  à  •vous ,  que  Wefelofski  ne  vous  voie  peint. 

Au  retour  de  chez  l'Empereur,  il  dit  qu'il  n'avoit  pas  donné  de  refo- 
lution;  mais  qu'il  lui  avoit  ordonné  de  conférer  là-deifus  avec  le  Prince 
Eugène  &  le  Comte  de  Starremberg. 

11  fut  refolu,  après  cette  Conférence , de  me  prendre  en  Protection,  & 
de  m'envoier  dans  quelque  FortereiTe  ,  le  Comte  me  difant  :  ffjhie  feriez- 
vous  à  Vienne  ?  On  vous  y  reconmitra ,  ci?  fur  -  tout  IVefehfski.  L  Empereur 
ne  vous  abandonnera  point,  ci?  quand  il  fera  tems ,  après  la  mort  de  votre  Père , 
il  vous  aidera  à  monter  fur  le  Trône ,  même  à  main  armée.  Je  lui  dis,  (a)  Je 
ne  demande  point  cela  -,  mais  feulement ,  quon  me  tienne  en  Protcclion.  Je  n'en 
fouhaite  point  davantage. 

7.  Ad  Septimum. 

Déclarez  &  découvrez  tout  ce  qui  Je  dirai  tout  ce  qui  a  du  rapport  à 

peut  avoir  quelque  raport  à  cette  Af-  cette  Affaire. 

faire;  quoi  qu'il  ne  foit  point  expri-  Le  Prince  Menchikof  me  compta 

mé  ici,  &  purgez-vous,  comme  11  icoo.  Ducats  ,  à  mon  départ  de  S. 

vous  étiez  à  la  Sainte  Confefîîon.  Petersbourg:  &  quand  je  pris  con- 

Mais,  fi  vous  cachez  quelque  cho-  gé  des  Sénateurs,  ils  me  donnèrent 

fe  de  ce  qui  fe  découvrira  d'ailleurs,  auffi  1000.  Ducats 5  &  comme  on  ne 

ne  m'en  imputez   point  les  fuites  :  pouvoit  point  alors  trouver  des  Du- 

car  il  vous  a  été  déclaré  hier,  qu'en  cats,  ils  me  firent  paier  cette  fom- 

cas  que  vous  celiez  quelque  chofe,  me  en  deux  milles  Roubels. 
le  Pardon   qui  vous   a  été  accordé 
feroit  nul  &  demeureroit  révoqué. 

Jai 

{a)  Il  a  déclare  la  chofe  autrement  cidefïbus. 

Tome  XL  Q. 

1 


A  Tï  AIR  ES 

DE  MOS- 

COVIE. 


122     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

J'ai  emprunté  de  plus  à  Riga  de  Ilia  Ifaiew  cinq  mille  Ducats  en  efpe» 
ces,  &  deux  mille  en  argent  courant,  qu'un  Officier  de  la  Garnifon  me 
changea  en  Ducats. 

Le  Prince  Menchikof,  ni  les  Sénateurs,  non  plus  que  Ilia  Ifaiew,  ne  fa- 
voient  rien  du  deflein  de  mon  Evafion.  Je  leur  dis ,  que  je  partois  pour 
me  rendre  auprès  de  vous  à  Coppenhagen ,  &  ils  me  donnèrent  de  l'argent 
dans  cette  penfée. 

C'efl  Affonaflief  qui  m'a  confeillé  d'emprunter  d'Uia  Ifaiew. 

Ce  que  j'ai  entendu  de  plus  en  diferens  tems  &  dediferentes  perfbnnes, 
qui  peut  mériter  d'être  déclaré,  efl-ce  qui  fuit. 

J'ai  ouï  dire  au  Czarevitch  de  Sibérie  ces  paroles:  (£)  Michel  Samarin 
ma  dit ,  qu'il  y  aura  dans  peu  du  changement  chez  nous.  Me  ferez-vous  du 
bien ,  quand  vous  ferez  bien  ?  Car ,  tout  ce  que  Samarin  dit  s'accomplit. 

Il  ne  s'eft  point  expliqué  quel  feroit  ce  changement.  Le  même  me  dit 
dans  le  mois  de  Mars  1716.  qu'il  y  auroit  du  changement  le  1.  Avril;  & 
quand  je  lui  demandai,  quel  changement  ce  feroit ,  il  me  dit:  Ou  le  Czar 
mourra ,  ou  Petersbourg  périra.    J'ai  vu  cela  dans  un  Songe. 

Quand  ce  jour-là  fut  paffé,  je  lui  demandai ,  pourquoi  rien  n'étoit  ar- 
rivé ;  &  il  dit  :  Cela  peut  arriver  dans  d'autres  Années  à  ce  jour-là  :  je  n'ai  pas 
dit,  que  ce  feroit  cette  Année  -ci  ;  prenez-  feulement  garde  au  premier  d'Avril,. 
mais  pour  î  Année  je  ne  le  fat  pas. 

Nikifore  Wafemskoi,  étant  venu  de  Mofcou  à  Thoren ,  me  dit  :  J'ai  en- 
tendu d'Alexandre  Sergeiof,  que  le  Czar  ne  vivra  point  plus  de  cinq  ans,  mais. 
je  ne  fai  point  d'où  il  a  cela. 

Lorfque  j'étois  aux  environs  de  Stettin  ,  le  Prince  Bafili  Dolgorouki,. 
étant  à  cheval ,  me  parla  &  dit  :  Si  nous  n'avions  point  la  Czariffe  auprès  dw- 
Czar ,.  nous  ne  pourrions  point  vivre  avec  lui,  à  caufe  de  fon  humeur  feverev 
je  fer  ois  le  premier  à  Stettin  à  le  trahir. 


Dans  l'Original  êtoit  fignê- 


Dans  le  Château  de  Preobrachenski , 
le  8-  Février  171 8.. 


l'ouï  cela  a  déclaré  vôtre  très- fournis 
Serviteur  &  Fils 

ALEXEI. 


Au  refle,  il  efl  déclaré  dans  P  Ecrit  des  ConfeJJions  du  Czarevitch? 
ce  qui  Juit  : 

POur  Supplément  des  Points  d'Interrogatoire  ci-defius ,  je  déclare  en- 
cor  pour  ma  décharge,  ce  que  j'avois  oublié. 
Difcourant  avec  Frédéric  Doubrofski  à  mon  départ,  je  ne  me  fouviens 

pas 

(l)  Le  Cznrevitch  Sibérien  a  décharge'  enfuite  ledit  Samarin,  difant  dans  Ton   Interroga- 
toire, qu'il  ne  lui  avoit  point  entendu  tenir  ce  difcours.. 


COVIfc. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.      123 

pas  quel  jour  c'étoit,  il  me  demanda:  (c)  Allez-vous  trouver  votre  Père?   AffairèI 
Partez  pour  l'amour  de  Dieu  !  Je  lui  dis  :  Je  pars  :    Dieu  fait  fi  cefl  auprès  de    D£  Mos- 
lui  ou  d'un  autre  côté.     Il  die:  P lufieur s  autres ,  qui  étoient  de  votre  Rang,  ont 
trouvé  leur  falut  dans  la  fuite.     Je  crois  que  vos  Parens  ne  vous  abandonneront 
point. 

Encor.  Semon  Narichkin,  me  rencontrant  entre  Memel  &  Konixbergue, 
me  dit:  Vous  faites  mal  de  venir.  Vous,  auriez  pu  rejler  ou  vous  étiez.  Nous, 
qui  vous  femmes  fidèles,  nou\  y  avons  penfé,  £5?  Kikin  vous  Va  écrit. 

Je  lui  dis,  que  je  n'avois  pu  deviner  ce  qu'il  m'avoit  écrit.  Il  dit:  II 
faut  à  prefent  que  la  chofe  aille  comme  cela. 

Iwan  Affonaffief  avant  mon  départ,  &  quand  je  lui  communiquai  mon 
defTein  de  m'enfuïr  ,  m'apporta  des  ordres  que  je  devois  ligner  pour  mes 
affaires  domeftiques,  afin  de  régler  ce  qui  étoit  à  faire  pendant  mon  ab- 
fence,  comme  j'avois  toujours  fait  quand  j'ai  fait  quelque  voyage.  Je  lui 
dis  :  A  quoi  bon  de  figner  cela  ,  puifque  je  m  enfui  s  ?  Il  me  dit  :  Cela  me  fervi- 
rapour  mejuftifier.  Il  m'a  auffi  propofé  d'envoier  à  Coppenhagen,  pour 
l'apparence ,  mes  gens  &  quelque  Equipage.  Cefl  aufîï  lui  qui  m'a  con- 
feillé  d'emmener  par  rufe  ma  MaitrefTe  ,  comme  il  en  efl  fait  mention  dans 
le  précèdent  Ecrit ,  &  de  ne  dire,  ni  à  elle,  ni  à  mes  Domeftiques  qui 
iroient  avec  moi  ,  que  j'avois  defTein  de  m'enfuïr. 

Il  m'a  confeillé  encor  d'emprunter  d'Uia  Ifaief  cinq  mille  Ducats  &  plus, 
cela  a  paru  par  les  payements  faits,  &  efl  déjà  mentionné  ci-defTus. 

Tout  cela  s'efl  fait  par  fon  Avis. 

Le  Czarevitch  a  écrit  de  fa  propre  main ,  dans  fes  Confefîlons  fur  tous 
les  Articles  de  cet  Interrogatoire  drelTé  par  Sa  Majeflé  Czarienne,  les 
noms  de  quelques-uns  qui  lui  ont  confeillé  l'Evafion,  &  qui  en  ont  eu 
connoiffance  ;  mais,  il  ne  les  a  pas  nommé  tous,  ni  en  même  tems.  11  en 
a  celé  beaucoup  tout -à- fait,  comme  auffi  fon  véritable  DefTein  de  Rébel- 
lion &  fa  Machination  contre  Sa  Majeflé  Czarienne  fon  Père  &  fon  Sei- 
gneur ,  dont  il  n'a  rien  déclaré  ni  découvert. 

Particulièrement  fur  le  quatrième  Article  de  fon  Interrogatoire ,  le  Cza- 
revitch a  écrit  dans  fes  Confefiïons  ,   comme  il  efl  rapporté  ci-defîus  ; 

Qu'étant  en  chemin ,  dans  fa  fuite ,  il  n'avoit  reçu  des  Lettres  de  perfon- 

ne,  ni  de  Ruflie  ni  d'ailleurs ,  fur  aucune  chofe  ,  excepté  ce  que  lui  é- 
„  crivoitleComtecteSchonbornàE.hrenbergi  en  premier  lieu,  qu'on  avoit 
„  des  nouvelles  qu'il  étoit  chez  eux  ,  &  qu'il  devoit  vivre  en  fecret  5  fe- 
„  condement ,  lorfque  le  Refident  WefTelofski  avoit  parlé  fur  fon  fujet  à 
„  Vienne  fuivant  les  ordres  de  la  Cour,  Que  lui,  Czarevitch,  ne  fe  fou- 
„  venoit  plus  à  laquelle  de  ces  deux  Lettres  du  Comte  de  Schonborn  étoic 
„  jointe  la  copie  d'une  du  Refident  Bleyer,  portant,  qu'il  y  avoit  euquel- 
„  ques  defordres  après  fon  départ  dans  l'Armée,  qui  efl  dans  le  Pais  de 
j,  Meklenbourg  &c.     Que  de  plus ,  il  y  avoit  eu  une  Lettre  du  même 

„  Schon- 

(c)  Il  n'a  déclaré  ceci  que  quand  l'Examen  des  Criminels  étoit  déjà  commencé,  &  il 
craignoit  que  la  même  chofe  ne  fut  découverte  fans  lui. 


53 
55 


COVIE. 


33 

5) 
33 
33 


33 
33 
33 
53 


124    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Afiairfs    „  Schonborn,  fur  ce  que  lui,  Czarevitch ,  devoit  être  transféré  à  Naples , 
df.  Mos-    ^  &  qu'il  n'avoit  plus  reçu  de  Lettres  à  Naples. 

Cependant,  depuis  que  les  papiers  du  Czarevitch  ont  été  apportez  ici, 
on  trouve  prefentement  des  Preuves  ,  que  le  Czarevitch  a  eu  à  la  vérité 
trois  Lettres  du  fufdit  Miniftre  Impérial,  Comte  de  Schonborn  ;  mais,  que 
parmi  ces  Lettres-là  ,  il'  y  en  avoir  une  qui  fait  mention  d'une  Feuille  in- 
clufe  contenant  ce  qu'on  écrivoit  de  Mofcou.   Le  Czarevitch  n'avoit  pour- 
tant avoué  dans  fon  Ecrit  des  Confeffions  ^  qu'une  feule  lnclufe  ,  qui  étoit 
jointe  à  la  Lettre  de  Schonborn,  du  mois  de  Février,  &  particulièrement 
la  Copie  de  la  Lettre  de  Bleyer,  écrite  de  Petersbourgj  mais,  il  a1  caché 
qu'on  marquoit  dans  l'autre  Lettre  de  Schonborn:  On  écrit  de  Mofcou. 
Cette  trojfieme  Lettre  de  Schonborn  du  27. Février  1717.  porte,  „  Qu'il 
donne  un  nouvel  Avis  à  lui,  Czarevitch,  qu'on  ne  faifoit  que  commen- 
cer à  parler  dans  le  Monde  qu'il  étoit  perdu,  quelques-uns  difant:  qu'il 
s'étoit  fauve  à  caufe  de  la  cruauté  de  fon  Père  }  d'autres  ,  qu'on  l'avoit 
fait  mourir  par  fon  ordre;  &  quelques-uns,  que  les  voleurs  de  Grands- 
„  Chemins  l'avoient  tué  fur  fa  route;  mais, que perfonne  nefavoit  precife- 
,,  ment  où  il  étoit;  qu'il  joignoit  pour  la  curiolité  une  lnclufe  contenant 
ce  qu'on  écrivoit  fur  ce  fujet  de  Petersbourg ,  mais  qu'on  confeilloit  au 
malheureux  Czarevitch,  pour  fon  avantage,  qu'il  devoit  le  tenir  le  plus 
caché  qu'il  pourroit ,  parce  qu'il  y  auroit  une  grande  recherche  fur  cet- 
te Affaire ,  quand  le  Czar  fon  Père  feroit  de  retour  d'Amfterdam. 
Cependant,  le  Czarevitch  n'avoit  point  déclaré  dans  fes  Confeffions  cet- 
te troifiéme  Lettre  ,  dont  on  vient  de  parler,  &  qui  lui  étoit  envoyée  avec 
des  Inclufes  de  Mofcou. 

Le  Czarevitch  avoit  écrit  dans  fes  Confeffions,  comme  fi  le  Secrétaire 
du  Comte  de  Schonborn  nommé  Keil  l'eut  forcé  d'écrire  au  Sénat  &  aux 
Archevêques,  quand  il  le  conduifit  à  Naples,  dans  le  quartier  du  Secrétai- 
re du  Viceroi  Wingarten  ;  que  ce  Keil  lui  avoit  dit  :  Si  vous  ne  voulez  pas 
écrire  ,  nous  ne  vous  garderons  point  ,  &  qu'il  ne  l'avoit  pas  quitté  qu'il  n'eut 
écrit.  Que  lui  Czarevitch,  étant  contraint  par  ce  Secrétaire,  avoit  enfin 
écrit  au  Sénat  &  à  deux  Archevêques ,  favoir  à  celui  de  Rollou  &  à  celui 
de  Krudis,  en  fubflance  ce  qui  elt  mentionnée  ci-delTus  dans  l'Interroga- 
toire. Qu'on  ne  lui  avoit  point  permis  de  faire  des  minutes  de  ces  Let- 
tres, &  qu'il  ne  lui  étoit  reité  qu'un  morceau  d'une  &c.  comme  portent 
les  Confeffions  ci-deffus. 

Cependant,  on  vient  de  trouver  auprès  de  fa  Maîtrefle  Afrofini,  parmi 
les  papiers  du  Czarevitch,  les  véritables  minutes,  finies  de  fa  propre  main, 
conformes  aux  Lettres  qu'il  alaiiTées  aux  Impériaux:  Le  contenu  en  elt. 

Au  Sénat. 

Messieurs  Très  Excellens  Sénateurs. 

E  crois  que  vous  ne  ferez  pas  moins  furpris  que  tout  le  Monde  de  ma 
fouie  du  Païs ,  &  de  ma  Refidence  inconnue  d'à  prefènt.    Les  mau- 

„  vais 


COVIE. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,   M.  DCC.  XVIII.       uf 

vais  traitemens  continuels  &  les  defordres  m'ont  obligé  de  quitter  ma  ty*MRE* 
très-chere  Patrie.  L'on  avoit  defTeîn  de  me  jetter  dans  le  Froc  au  corn-  DE  Mos- 
mencement  de  l'Année  171 6.,  fans  que  j'eulfe  rien  commis  qui  le  méri- 
tât. Perfonne  de  vous  ne  le  peut  ignorer.  Mais  Dieu  plein  de  miféri- 
corde  m'a  fauve.,  me  préfentant  dans  l'Automne  pafTée  une  occafion  de 
m'éluigner  de  ma  chère  Patrie  &  de  vous,  que  je  n'aurois  pu  me  re- 
foudre à  quitter,  fi  je  n'avois  point  été  dans  le  cas  où  je  me  fuis  trouvé. 
„  Je  fuis  maintenant  bien  &  en  bonne  fan  té  ious  la  Protection  d'une 
certaine  Haute-Perfonne,  jufques  au  tems  que  Dieu,  qui  m'a  confervé, 
m'appelle,  pour  retourner  dans  la  chère  Patrie. 

„  Je  vous  prie  de  ne  me  point  abandonner  alors,  &  quant  à  prefent, 
n'ajoutez  point  de  foi  aux  nouvelles  qu'on  pourra  répandre  de  ma  mort  , 
ou  autrement,  parle  defir  qu'on  a  de  m'effacer  delà  Mémoire  des  hom- 
mes ;  car  Dieu  m'a  en  fa  garde,  &  mes  Bienfaiteurs  ne  m'abandonnent 
point.  Us  m'ont  promis  de  ne  me  point  abandonner  non  plus  à  l'ave- 
nir, en  cas  de  befoin. 

„  Je  fuis  en  vie,  &  je  ferai  toujours  plein  de  bons  fouhaits  pour  vos 
Excellences ,  &  pour  toute  la  Patrie. 

Aux  Archevêques. 

Très  -  Sache'  Vladiko.  * 

JE  m'imagine  que  vôtre  Sainteté,  de  môme  que  tout  le  Monde,  auront 
été  furpris ,  de  ce  que  je  fuis  forti  de  la  Patrie  à  leur  infçu.  Ce  font 
les  mauvais  traitemens  continuels,  qu'on  m'a  faits  fans  que  je  l'aie  méri- 
té, qui  m'y  ont  obligé.  Il  s'en  eilpeu  falu  qu'on  ne  m'ait  enfermé  dans 
un  Couvent.  Je  crois  que  vous  ne  l'ignorez  pas  :  cela  efl  provenu  des 
mêmes  Perfonnes  qui  ont  traité  ma  Mère  de  la  même  manière.  Mais,  le 
grand  Dieu,  fléchi  par  vos  Prières,  m'en  a  prefervé,&  m'a  conduit  fous 
la  Protection  d'un  certain  grand  Prince.  Je  m'y  trouve  bien  &  en  bonne 
fanté,  julques  au  tems  que  Dieu  voudra  que  je  me  fafle  revoir.  En  ce 
cas,  je  vous  prie  de  ne  me  point  abandonner  à  prefent. 

S'il  y  a,  ou  s'il  y  a  eu,  des  nouvelles  fur  mon  fujet,  comme  fi  j'étois 
mort,  ou  quelques  autres  de  cette  nature,  car  on  veut  m'effacer  de  la 
mémoire  des  Peuples,  n'y  ajoutez  pas  de  foi,  &  obligez -moi  de  raflu- 
reries  bien-intentionnez,  car  je  fuis  en  vie  &  plein  de  bons  fouhaits 


33 
55 
55 
3» 
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55 
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JJ 

35 

5? 


53 
53 

„  pour  vous. 


Le  Czarevitch  n'a  pas  fait  mention  dans  fon  Interrogatoire  de  l'expref- 

fion  fufdite  :   En  ce  cas ,  ne  m  abandonnez  pas  à  prefent  j  &  ce  mot  d'à  prefent 

étoit  écrit  &  rayé  deux  fois. 

La 

*  Vladiko,  C'eft  un  Titre  qu'on  donne  aux  Archevêques  pour  exprimer  leur  Priraatie, 

0.5 


n6    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AmiREs        La  Cour  Impériale  retient  ces  Lettres  à  Vienne  ,  &  elles  n'ont  point 
de  Mos-   été  envoiées  à  S.  Petersbourg.  Mais,  Sa  Majefté  Czarienne  a  chargé  le  Re- 
covie.     flcJent  Abraham  Wefelofski  de  demander  à  l'Empereur  pour  quelle  raifon 
"~   on  avoit  forcé  le  Czarevitch  de  les  écrire ,  &  qu'on  les  rendit.     Le  Ren- 
dent Abraham  Wefelofski  a  repondu  là-deffus  le  28.  jour  de  Mai  dans  fa 
Relation  : 

,,  Que  fur  fes  Reprefentations,  le  Prince  Eugène  lui  avoit  fait  connoître 
par  ordre  de  l'Empereur,  que  le  Vice-Chancelier  Comte  de  Schonborn  a- 
voit  été  examiné  en  prefence  de  tout  le  Miniftere  fur  ces  trois  Lettres 
du  Czarevitch  Alexei  Petrovitch,  &  qu'il  avoit  paru  en  effet  que  le 
Czarevitch  a  envoie  lui-même  ces  Lettres  au  Vice-Chancelier ,  pour  les 
expédier  en  Pologne ,  pour  un  avis  du  fejour  de  fa  perfonne  ;  mais ,  que 
ces  Lettres  n'avoient  point  été  envoiées ,  &  qu'elles  étoient  reliées  au- 
près d'eux:  que  même  on  les  lui  avoit  montrées  cachetées  fans  Infcrip- 
tionj  mais  qu'on  ne  les  lui  avoit  pas  remifes ,  le  Prince  Eugène  difant, 
que  l'Empereur  n'avoit  jamais  ordonné  de  demander  du  Czarevitch  cet- 
te forte  de  Lettres,  &  qu'il  étoit  impofîible  que  le  Comte  de  Schonborn 


il 


Enfuite,  quand  le  Czarevitch  fçut  qu'on  avoit  commencé  d'examiner  les 
autres  perfonues,  il  prefenta  à  Sa  Majefté  Czarienne  un  autre  Ecrit  de  Con- 
férions. 

Frédéric  Doubrofski  a  avoué  dans  fon  Interrogatoire,  qu'il  a  eu  connoif- 
fance  de  la  fuite  du  Czarevitch,  qu'il  s'en  eft  entretenu  avec  lui,  &  qu'il 
lui  avoit  confeillé  de  s'évader.  Cependant,  le  Czarevitch  avoit  celé  Doub- 
rofski dans  fon  premier  Interrogatoire,  &  l'a  juftifié  de  n'avoir  rien  fçu  de 
fon  Evafion,  ni  de  fes  Conférences  avec  Kikin. 

Semon  Narifchikin  a  avoué  dans  fon  Interrogatoire,  qu'aiant  rencon- 
tré le  Czarevitch  entre  Memel  &  Konigsbergue,  il  lui  avoit  dit  par  ordre 
de  Kikin  :  Vous  avez  tort  de  venir  ici,  vous  auriez  pu  refier  là  ou  vous  étiez , 
&  long  -  tems. 

Cependant,tout  cela  étoit  celé  dans  la  première  Confeffion  du  Czarevitch. 

Lorfqu'on  commença  le  20.  Février  les  procédures  du  Procès  criminel 
de  bufdalk,  on  y  amena  de  Roftou  le  ci-devant  Evêque  de  ce  lieu,  Dof- 
fifei,  qui  confelîa  dans  fon  Interrogatoire  plufieurs  chofes  indécentes  à  la 
charge  de  la  Czarewna  Marie  Alexiewna,  &  de  la  ci-devant  Czariffe,  la 
Religieufe  Elena. 

Après  le  commencement  de  tous  ces  Examens,  favôir  le  27.  Février, 
le  Czarevitch  donna  à  Sa  Majefté  Czarienne  un  Ecrit,  où  il  confeffa, 
qu'aiant  rencontré  en  chemin  la  même  Princeffe  Marie  Alexiewna,  il  s'en- 
tretint avec  elle  de  fa  Mère  à  lui,  la  ci-devant  CzarifTe,  mais  il  n'avoua 
point  alors,  que  cette  Princeffe  avoit  eu  connoiffance  du  deffein  de  fa  fui- 


te, comme  il  a  encore  tû  tout  cela  dans  fon  premier  Ecrit  de  Confefiïons. 
Jwan  Affonafiîef  &  Frédéric  Ebarlakof  ont  chargé  par  écrit,  dans  le 


eur 
In- 


COUR. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        127 

Interrogatoire,  le  Czarevitch  :  favoir  le  premier,  qu'il  avoit  oui  dire  à  Ton    Affaires 
Frère,  que  Je  Czarevitch  avoit  juré  contre  la  Dame  AnnilTe  Tolltoi,  Iè    nB  Mos* 
Prince  Menchikof ,  &  fa  belle  Sœur  Barbara  AiTenief,  de  les  vouloir  faire 
empaler,  de  même  qu'il  s'étoit  emporté  contre  AfTonaiîief. 

Qu'étant  encore  en  colère  un  jour  contre  le  Grand-Chancellier  le  Com- 
teGalofkin  &  le  Prince Truhezkoi,  ilavoit  coutume  de  dire,  qu'ils  étoient 
caufe  qu'il  avoit  époufé  la  PrinceiTe  de  la  Couronne,  qu'ils  lui  avoient  lié 
au  cou  une  femme  diabolique  ;  difant ,  11  riy  a  que  la  mort  qui  m  empêchera 
de  leur  faire  payer  cela^  &  je  ferai  planter  la  Tête  de  Jon  Fils  Alexandre  Ga« 
loîkïnfur  un  Poteau. 

Affonaflief  demandant  au  Czarevitch,  comment  il  ôfoit  parler  fi  hardi- 
ment, il  lui  repondit  :  Je  crache  fur  tous  les  autres.  Vive  le  petit  Peuple. 
Si  je  trouve  mon  tems ,  ou  mon  Père  ne  fit  pas  prefent  ,  je  dirai  quelque  cho- 
fe  dans  t oreille  aux  Archevêques ,  ce  que  les  Archevêques  diront  aux  Curez  ,  £5? 
ies  Curez  à  leurs  Paroifjiens.  Je  fuis  feur  quon  me  fera  régner ,  quand  ce  fe- 
rait malgré  moi. 

„  Que  le  Czarevitch  étoit  aufîî  accoutumé  de  dire:  Penfez  à  mes  pa~ 
9,  rcies  \  vous  verrez  que  Peter  sbourg  ne  nous  refera  point  long-tems. 

Et  quv-  quand  le  Czarevitch.  étoit  obligé  d'aller  chez  Sa  Majefté  Cza- 
rienne  ,  ou  de  fe  trouver  avec  Ion  Père  à  quelque  Feitin,  ou  de  voir  lancer 
des  VaifTeaux  à  l'eau,  il  avoit  coutume  de  dire:  J'aimerois  mieux  être  à  la- 
Galère ,  ou  avoir  la  fièvre ,  que  de  me  trouver  dans  ces  occafions-là. 

Frédéric  Ebarlakof  a  confelTé,  qu'en  l'Année  1715",  lors  que  la  Prin- 
ceiTe delà  Couronne  vivoit  encore,  le  Czarevitch  lui  avoit  dit  en  confi- 
dence ce  qui  fuit: 

Ce  fi  dommage  que  je  nai  point  fuivi  le  Confeil  de  Kikin  ,  de  m  évader  en 
France.  J'y  vivrois  plus  tranquillement  qu  ici ,  jufqu  a  fon  tems.  Je  ?r<e  trou- 
ver ois  même  mieux  dans  le  Couvent  de  St.  Michel  à  Kiovie,  ou  dans  la  Pri~ 
fon^  quici. 

Le  même  Ebarlakof  a  avoué  que  le  Czarevitch  avoit  pris  fouvent  mé- 
decine exprès,  feignant  de  l'indifpofition ,  quand  il   devoit  faire  quelque 
voiage  avec  Sa  Majeiié  Czarienne,  pour  s'en  exeufer  par  cette  feinte. 

De  forte  que  le  Czarevitch  a  caché  &  tu  tout  cela  ,  &  que  Ebarlakof" 
avoit  eu  connoiiTance  de  fon  deflein  d'Evafion  &  de  fes  Conférences  a-?- 
vec  Kikin. 

.  Enfuite,  la  MaitreiTe  du  Czarevitch,  qui  l'accompagnoit  dans  fa  fuite,, 
aiant  été  amenée  ici,  examinée, &  interrogée,  û  le  Czarevitch,  outre 
Jes  trois  Lettres  au  Sénat  &  aux  Archevêques,  n'en  a  pas  écrit  encore, 
d'autres  &  à  qui:  comme  auili  fi  elle  ne  fait  pas  d'autres  chofes  de  lui,  & 
quoi?  s'il  n'y  a  point  eu  des  difeours  entre  eux  fur  fes  mauvais  deiTeins,- 
dont  il  n'ait  pas  fait  mention  dans  fes  Confelïions?  Elle  a  déclaré  verba- 
lement, &  écrit  enfuite  de  fa  propre  main,  ce  qui  fuit,  favoir: 

Qu'après  les  trois  Lettres  fufdites ,  le  Czarevitch  écrivit  dans  la  Forte- 
reiTe,  en  Langue  Ruffienne ,  une  Lettre  à  un  Archevêque-  qu'il  n'y  a— 
voit  aucun  Etranger  prefent;  que  lui  Czarevitch, elle, &  fon  frère  à  elle,, 

y  étoient,-, 


COVIE. 


128     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aftaikt.s    y  étoient:  que  cela  s'étoit  fait,  non  pas  un  des  premiers  jours  de  Ton  ari- 
de  Mos-    v^e  ^  Nap]es  •  mais  bien  long-tems  après  qu'il  fut  dans  la  ForterefTe  ;  qu'il 
avoit  cacheté  cette  Lettre  en  fa  prefence ,  mais  qu'elle  ne  fa  voit  point  à 
quel  Archevêque  cette  Lettre  s'adreffoit. 

Qu'il  avoit  aufiî  écrit  à  l'Empereur  des  plaintes  contre  le  Czar  ;  &,  en 
dernier  lieu,  peu  avant  l'arivée  de  Mr.  Tollloi,  auquel  tems  la  Réponfe 
pouvoit  être  venue. 

Qu'au  fujet  des  Archevêques,  il  en  avoit  parlé  quelque  fois,  en  louant 
l'un ,  dont  elle  ne  fe  fouvient  pas  du  nom. 

Que  les  Lettres  écrites  aux  Archevêques  avoient  été  envoiées  dans 
le  deflfein  qu'ils  les  reçuffent  fecretement  par  voies  obliques  ,  afin  qu'ils 
n'en  fuffent  point  rendus  refponfables,  fi  on  les  leur  mettoit  en  mains. 

Que  le  Czarevitch  lui  avoit  auiïï  parlé  de.  la  mutinerie  de  l'Armée  dans 
le  Mecklenbourg,  comme  s'il  l'avoit  aprife  par  les  Gazettes:  qu'enfuite 
il  lui  avoit  dit:  Il  y  a  déjà  une  Rébellion  dans  les  Villes  voifines  de  Mofcou:  que 
ces  nouvelles  lui  venoient  en  droiture  par  des  Lettres,  fans  dire  de  qui: 
qu'il  s'en  étoit  réjoui, &  qu'il  difoit  fouvent:  Voiez-vous  bien,  Dieu  s'en 
mêle. 

Qu'à  l'égard  de  fon  Esrafion,  elle  lui  avoit  ouï  dire  que  quatre  perfon- 
nes  en  avoient  connoiiïance ,  parmi  lefquelles  étoit  la  Czarewna  Marie 
Alexiewna,  à  laquelle  il  avoit  dit,  Je  veux  me  cacher-,  qu'il  lui  avoit  auffi 
fait  entendre,  qu'il  vouloit  éloigner  tous  les  vieux  Courtifans,  &  s'en 
choifir  de  nouveaux  à  fon  gré:  que  quand  il  entendoit  parler  de  quelques 
vifions,  où  qu'il  lifoit  dans  les  Gazettes,  que  tout  étoit  tranquille  à Peters- 
bourg,  il  difoit:  Cela  fignifie  quelque  chofe,  [oit  la  mort  de  mon  Pere^  ou 
quelque  Rébellion. 

Qu'il  avoit  dit  étant  à  Ehrenberg,  qu'il  vouloit  fe  retirer  dans  quelque 
Ville  libre,  &  que  Doubrofski,  ou  quelque  autre,  le  lui  avoit  confeillé  : 
Que  quand  il  eut  pris  la  refolution  de  retourner  auprès  de  fon  Père,  le 
même  jour  qu'il  fortit  du  Château  de  S.  Elmo  ,  il  lui  avoit  donné  la  minu- 
te d'une  Lettre  qu'il  écrivait  à  l'Empereur,  pleine  de  plaintes  contre  fon 
Père,  &  qu'il  vouloit  faire  voir  au  Vice-Roi  de  Napks;  que  cependant  il 
lui  avoit  ordonné  de  la  brûler,  ce  qu'elle  avoit  fait  auffi;  que  toutes  ces 
Lettres  avoient  été  écrites  en  Langue  Ruflienne  ;  qu'il  y  en  a  eu  beau- 
coup ,  mais  qu'elle  ne  favoit  pas  fi  toutes  étoient  à  l'Empereur. 

Que  le  Secrétaire  du  Vice-Roi  de  Naples  étoit  venu  chez  lui  avant 
que  ces  Lettres  fuflent  brûlées ,  que  le  Czarevitch  lui  avoit  dit  en  Alle- 
mand quelques  paroles,  que  le  Secrétaire  avoit  écrites,  en  rempliflant 
une  feuille  entière ,  &  qu'en  tout  il  avoit  emporté  avec  lui  cinq  feuilles  de 
papier. 

Le  12.  May  le  Czarevitch  aiant  été  interrogé  fur  tout  ce  que  deffus,  a 
repondu ,  fur  la  Déclaration  de  la  Fille  Afrofini. 

„  Qu'il  a  écrit  à  l'Empereur  des  plaintes  contre  fon  Père ,  mais  qu'il 
„  n'a  pas  envoie  la  Lettre,  n'en  aiant  fait  qu'un  Extrait,   en  conformité 

~  du- 


COVIE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.       i%9 

„  duquel  il  a  expofé  au  Secrétaire  les  motifs  de  Ton  Evafion,   &  les  rai-    Amaxrm 
„  fons  de  Ton  refus  de  retourner;  qu'il  n'en  étoit  rien  refté  par  écrit,    &    DE 
„  que  les  minutes  avoient  été  brûlées.     Qu'il  n'avoit  point  écrit  aux  Ar- 
„  chevéques  dans  la  Forterefle. 

„  Qu'il  avoit  parlé  au  fujet  des  Lettres  aux  Archevêques, non  pas  dans 
„  le  fens  qu'elle,  la  Fille,  avoit  déclaré;  mais,  qu'il  avoit  dit  feulement, 
„  qu'on  devoit  laiflerles  Lettres  à  la  Polie  à  Petersbourg,  au  rifque  com- 
„  ment  elles  pouroient  leur  parvenir,  mais  toujours  qu'on  ne  devoit  point 
„  les  leur  remettre  en  propres  mains. 

„  Qu'à  l'égard  des  vifions,  &  de  fon  Père  ,  il  pouvoit  être  qu'il  avoit 
„  parlé  de  la  manière  fufdice. 

„  Que  Doubrofski  &  Affonaflief  lui  avoient  confeillé  de  fe  retirer  dans 
„  des  Villes  Libres. 

„  Qu'il  étoit  vrai,  qu'il  avoit  ordonné  de  brûler  les  Lettres  en  quel- 
„  tion. 

On  le  confronta  avec  la  Fille  Afrofini  au  fujet  des  Points  qu'il  avoit 
contellez  ,  &  le  Czarevitch  nia  encore  dans  cette  Confrontation  ce  dont 
la  Fille  l'avoit  chargé  par  fa  Depofition:  mais  la  Fille  le  lui  afoûtenuen  fa- 
ce, l'en  a  convaincu,  &  l'a  mis  par  écrit. 

Le  même  jour,  le  Czarevitch  fut  encore  interrogé  fur  les  Articles 
précédens;  &  enfin,  après  beaucoup  de  convictions,  il  a  reconnu: 

,,  Qu'il  avoit  écrit  à  l'Empereur  les  raifons  de  fon  Evafion  &  de  fon 

refus  de  retourner;  mais  qu'il  ne  le  fouvenoit  point  d'autre  chofe. 
Qu'il   n'avoit   abfolument  point  écrit  de  la  Forterefle  à  aucun  Ar» 
.},  cheveque. 

„  Qu'il  avoit  dit  à  la  Czarewna  Marie,  au  fujet  de  fa  fuite,  Je  veux  me 
„  cacher  ;  &  qu'il  fe  reconnoiflbit  coupable  de  ce  qu'il  ne  l'avoit  point 
„  déclaré  dans  Çqs  Confelfions. 

„  Qu'à  l'égard  des  Lettres  aux  Archevêques  ,  il  avoit  dit  qu'il  faloit 
„  les  jetter  à  la  Porte  à  Petersbourg,  d'où  elles  dévoient  leur  parvenir, 
,,  comme  elles  pouroient.  Que  ce  qu'il  a  dit  des  Vifions,  des  Gazettes, 
„  &  de  fon  Père,  il  l'avoit  tiré  de  la  bouche  du  Czarevitch  de  Sibérie. 

,,  Que  ç'étoient  Doubrofski  ex  Affonaflief  qui  lui  avoient  confeillé  de 

fe  retirer  dans  des  Villes  Libres. 

,,  Qu'il  avoit  dit  au  secrétaire  du  Vice-Roi  de  Naples  les  motifs  de  fon 

Evafion ,  &  les  raifons  qu'il  avoit  de  refufer  de  retourner. 

Le  Czarevitch  a  repondu  enfuite  de  plus,  fur  fon  Interrogatoire,  au  fu- 
jet des  Lettres  qu'il  n'avoit  point  avouées  :  ,,  Qu'il  avoit  reçu  trois  Let- 
„  très  du  Comte  de  Schonborn  ;  que-  celle  dans  laquelle  on  prétend  qu'il  y  a- 
,,  voit  une  Inclufe  de  Mo/cou,  &  l'Inclufe  même,  n'étoient  point  parve- 
,,  nuèsjufques  à  lui:  mais,  qu'il  avoit  reçu  dans  la  Lettre  de  Février  une 
,,  Inclufe  de  ce  que  Bleyer  écrivait  de  Petersbourg;  &  qu'il  n'y  avoit 
„  point  d'Inclufe  dans  la  Lettre  du  Mois  d'Avril. 

„  Qu'il  avoir,  écrit  affurement  par  force  au  Sénat  &  aux  Archevêques, 
„  &  non  pas  de  fon  propre  mouvement  -,  mais,  quilne  fe  fouvenoit  pas, 

Tome  XI*  R  »  fi 


Î5 


55 


C  JVIE. 


130    MEMOIRES,  NEGOTÏATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  „  fi  dans  la  Lettre  au  Sénat  fe  trouvoit  fexpreûion  de  defordres  ,  ni  celle 
deMos-     „  fans  que  j'aie  rien  commis  qui  le  meutat. 

,,  Que  dans  la  Lettre  Originale  aux  Archevêques ,  on  ne  trouvoit  point 
,,  les  mots:  les  même*  perfonnes  qui  ont  traaé  ma  Mère  de  la  même  ma~ 
,,  ni  ère. 

„  Qu'il  ne  fe  fouvenoit  point  pourquoi  le  mot ,  à  prefent ,  étoit  rayé 
„  deux  fois. 

„  Qu'il  avoit  celé  Doubrofski  à  deflein  ,  parce  qu'il  lui  en  avoit  parlé 
„  tête  1  tête;  &  que, par  confequent,il  n'en  avoit  rien  voulu  écrire  dans 

Tes  Confeflions. 

,,  Que  ç'étoic  par  oubli  qu'il  n'avoit  rien  déclaré  de  Semon  Narichkin  & 

de  Kikin. 

„  Qu'il  avoit  parlé  de  Ton  Evafion  à  la  Czarewna  dans  ces  termes:  Je 
„  veux  me  cacher.  Qu'il  s'avouoit  coupable  de  ne  l'avoir  point  déclaré  dans 
„  fes  Confeflions,  paj;ce  qu'il  avoit  eu  pitié  d'Elle. 


33 


35 


„  /^U'il  avoit  parlé  du  petit  Peuple  dans  la  colère,  &  étant  yvre. 
„  V^/  Qu'il  n'avoit  poil 


II  a  déclaré  Jur  les  Depo fit  ions  de  AffbnaJJief&  de  Ebarlakof. 

1  petit  Peuple  dans  la  colère,  &  étant  yvre. 
nt  tenu  les  difcours  dont  on  le  chargeoit,  au  fu- 
„  jet  des  Archevêques. 

„  Que  ça  été  dans  la  colère  qu'il  a  parlé  du  Comte  Golofkin,  de  fon 
„  Fils,&  du  Prince  Trubezkoi. 

„  Que  tour,  le  monde  favoit  qu'il  s'étoit  marié  de  fon  bon  gré,  &  non 
„  point  par  force;  que  Çqs  Lettres  à  fon  Père,  *  pour  lui  en  demander 
„  la  permiilion  ,  le  prouvoient  clairement ,  &  qu'il  en  avoit  écrit  au 
,,  moins  treize  fur  ce  fujet. 

„  Qu'il  avoit  entendu  de  la  bouche  du  Czarevitch  Sibérien,  ce  qu'il 
„  avoit  dit  de  St.  Petersbourg. 

»»  Que  ç'étoit  par  oubli  qu'il  n'avoit  point  déclaré  dans  fes  Confef- 
„  fions  Ebarlakof;  mais,  qu'il  étoit  vrai  qu'il  avoit  tenu  avec  lui  les  dif- 
„  cours  alléguez. 

„  Qu'il  avoit  pris  quelques  fois  des  remèdes  par  feinte,  afin  qu'on  le 
„  crût  incommodé;  qu'il  s'en  avouoit  coupable. 

Enfuite  ,  le  Czarevitch  pria  Sa  Majedé  Czarienne  de  lui  donner  le 
tems  de  penfer  &  d'écrire,  promettant  de  mettre  fur  le  papier  tout  ce 
qui  lui  reviendrait  en  mémoire. 

Sa  Majeité  lui  accorda  cette  permhTion ,  &  lui  déclara  en  même  tems  , 
que,  vu  que  dans  fes  Conférions  il  avoit  tu  beaucoup  de  chofes  qu'il  re- 
connoiflbit  à  prefent,  Elle  lui  réïteroit  encore  ce  qui  lui  avoit  été  dénon- 
cé auparavant,  qu'il  devoit  découvrir  tout  ce  qui  avoit  quelque  rapport  à 
cette  Affaire  ,  quand  même  on  ne  l'en  queflionneroit  point. 

Surquoi  le  Cz  irevitch  a  prefenté  dans  le  même  mois  de  Mai  des  Con^ 
feflions  fignées  de  fa  propre  main,  fur  cet  Interrogatoire, 

J)am 

*  Ces  Lettres  font  encore  gardées  en  Original. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,   M.  DCC  XVÏII.         iji 

Bans  les  premières  du  14.  Mai  >   il  a  écrit  ce  qui  fuit  : 

„  TE  n'ai  cacheté  aucune  Lettre  avant  l'arrivée  de  M.  Tolftoi;  mais,  le 
„J  Secrétaire  du  Vice-Roi ,  m'aiant  envoie  un  Plan  &  une  Relation  du 
„  Siège  de  Belgrade,  m'avoit  prié  de  les  lui  renvoier  cachetez,  afin  que 
„  le  Capitaine,  qui  étoit  avec  moi ,  ne  fçr.t  point  ce  qu'on  m'envoioit, 
„  par  ce  que  je  paifois  pour  être  Prifonnier:  àinfi,  je  renvoiai  ce  Plan-là 
cacheté. 

„  J'ai  écrit  aufti  un  billet  audit  Secrétaire,  je  ne  fai  fur  quel  fujet,mai3 
il  me  femble  que  ç/étoit  fur  quelques-uns  de  mes  befoins. 
„  Le  Capitaine,  qui  éroit  avec  moi,  me  montroit  de  tems  en  tems  des 
Plans  imprimez  de  beaucoup  d'Attaques. 

,,  Je  n'avois  rien  fçu  du  Sermon  de  l'Archevêque  de  Refan,  pareequê 
je  n'avois  point  été  à  Moscou  long-tems  auparavant.  Ce  fut  en  Po- 
meranie,  li  je  m'en  fouviens,  que  j'en  entendis  parler  la  première  fois 
au  Prince  Bafili  Dolgorouki,  ou  bien  à  Frédéric  Glebof:  l'un  des  deux 
m'a  dit  :  V Archevêque  de  Refan  ,  prêchant  à  Mofcou ,  a  fait  mention  de  vous 
en  mauvais  termes ,  comme  fi  vous  étiez  expuljé  \  &  ies  Sénateurs  l'ont  obligé 
de  leur  donner  une  copie  de  fon  Sermon.  t 

„  L'Archevêque  de  Refan  m'écrivoit  quelques  fois  auparavant,  &  moi 
à  lui  ,  quoique  rarement,  excepté  quand- il  y  avoit  des  Affaires  preflan- 
tes:  mais,  dès  que  je  fus  averti  de  ce  Sermon,  je  rompis  cette  corref- 
pondance,  &je  n'allois  plus  voir  cet  Archevêque,  je  ne  le  lailTois  pas 
non  plus  venir  chez  moi ,  pour  ne  point  donner  lieu  à  des  foubçons. 
„  J'ai  dit  à  la  Fille  Afrofini,  que  j'avois  écrit  des  Lettres  fuivant  les 
In  [trucidons  du  Secrétaire  fufdit,  mais  non  point  à  des  gens  avec  qui  je 
fulTe  en  grande  correfpondanee.  Je  crois,  dilbis-je,  que  les  Sénateurs  fe- 
ront voir  ma  Lettre,  mais  je  ne  croL  point  quon  fajfê  contre  eux  des  Infor- 
mations ,  parce  quils  font  en  grand  nombre  :  & ,  quand  même  cela  fe  feroit , 
ils  ne  peuvent  rien  dire  de  moi;  car  je  ne  leur  ai  fait  aucune  ouverture  de 
mon  Evafion.  Et  pour  les  Archevêques  ,  quand  on  les  brûlerait  tout  vifs , 
ils  ne  peuvent  pas  dire  que  je  leur  aie  rkn  communiqué . 
„  Quoi  qu'il  eut  falu  écrire  à  l'Archevêque  de  Refan  aufîi  bien  qu'aux 
deux  Archevêques  fufdits,  parce  que  le  Secrétaire  m'avoit  dit  d'écrire 
,  aux  principaux  Ecclefiaftiques  &  Séculiers,  je  ne  l'ai  point  fait,  afin 
,  qu'on  ne  pût  point  penfer  que  j'avois  concerté  mon  Evafion  avec  lui- 
,  car  j'avois  avec  lui  plus  de  connoifiance  qu'avec  les  autres,  &  les  foub- 
,  çons  auroient  été  plus  forts  contre  lui  &  moi,  à  caufe  du  Sermon  qu'il 
,  avoit  fait. 
,,  Ce  que  j'ai  écrit  au  fujet  de  mon  retour  dans  la  Patrie,  *  cela 
s'entendoit  après  la  mort  de  mon  Père  ,  &  non  pas  de  fon  vi- 
vant. 

R  2  Dam 

*  Le  contraire  paroitra  ci-après. 


DE    Mos- 
COVIE. 


ija    MEiMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


ARAIRES 

CE    Mos- 

COVIE. 


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3» 
9» 

33 
» 


Bans   les  fécondes  Confe (fions  du  16.  #lâi ,  /*/  a  écrit 
ce  qui  Juit. 

LE  General  Baver  étoit  en  Pologne  dans  le  tems  de  ma  fuite, 
avec  fon  corps  de  Troupes  :  il  étoit  de  mes  amis.  Je  croiois 
que  la  mort  de  mon  Père  étoit  prochaine,  fur  ce  quej'avois  entendu 
dire  qu'il  avoit  eu  une  efpece  d'Epilepfie:  comme  on  difoit  que  les  gens 
un  peu  âgez  qui  l'ont  eue, ne  peuvent  guère  vivre  long-tems,  je  croiois 
qu'il  mourroit  dans  deux  ans  tout  au  plus  tard.  J'ai  penfé  que  je  pour- 
rois  me  rendre  après  fa  mort,  des  Etats  de  l'Empereur  en  Pologne ,  & 
de  Pologne  avec  Baver  en  Ukraine  ,  où  je  ne  doutois  pas  que  tout  le 
Monde  ne  fe  déclarât  pour  moi;  &  j'ai  crû  qu'à  Mofcou,  la  Czarewna 
Marie,  &  quelques  Archevêques,  &  même  la  plus  grande  partie,  en 
feroient  de  même.  Et  pour  le  commun  Peuple,  j'ai  entendu  dire  à 
beaucoup  de  perfonnes,  qu'il  m'aimoit.  (*) 

„  Au  relie,  j'étois  refolu  de  ne  retourner  abfolument  point  du  vivant 
de  mon  Père ,  excepté  dans  le  cas  que  je  l'ai  fait ,  c'eft-à-dire  ,  fur 
fon  rappel. 

,,  Je  n'avois  fait  confidence  de  mon  delTein  d'Evafion  à  perfonne  ,  ni 
de  bouche  ni  par  Ecrit ,  &  qui  que  çe.foit  n'en  avoit  rien  fçu.  J'ai 
bien  dit  à  l' Afrofini ,  qu'un  tel ,  ou  un  tel ,  étoit  de  mes  amis  :  mais ,  quand 
elle  me  demandoit  qui  ç'étoient;  je  lui  difois  :  Fous  ne  connoi£ez-pas  ces 
Perfonnes-là. 

„  Pour  la  Lettre  au  fujet  de  laquelle  elle  a  depofé,  &  que  j'ai  déniée, 
difant  que  ç'avoit  été  le  Plan  du  Siège  de  Belgrade  -,  je  reeonnois  à  pré- 
ferrt  que  ce  n'étoit  pas  un  Plan ,  mais  une  Lettre  que  j'avois  écrite  à 
l'Archevêque  de  Kiovie,  peu  auparavant  1,'arivée  de  M.  Tolitoi  à  Na- 
ples.  Je  mettrai  ci-après  le  contenu  de  cette  Lettre. 
,,  Quand  je  donnai  mes  premiers  Confeiîions  par  écrit ,  j'avois  oublié 
véritablement,  tant  cela,  que  ce  qui  regarde  la  Czarewna  Marie,  fur 
ce  que  je  lui  avois  fait  entrevoir  du  deffein  de  mon  Evalion  ;  &  quoi- 
que cela  me  fut  revenu  en  mémoire  ,  j'avois  peur  de  le  dire  après, 
C'elt  par  compaffion  que  j'ai  tu  les  autres  difcours  de  cette  Prin- 
celfe. 

„  Je  ne  nie  point  ce  que  Ivan  AfFonafïief  a  depofé  de  ce  que  je  lut 
„  avois  dit  dans  l'yvreffe ,  quoique  je  ne  m'en  fouvienne  point  mot  pour 
„  mot;  mais  j'étois  yvre,  &  je  difois  ordinairement,  quand  j'étois  en  cet 
„  état,  tout  ce  qui  me  venoit  dans  la  bouche ,  &  j'ai  lâché  ces  difcours-là 
„  par  !a  confiance  que  j'avois  en  mes  gens. 

La 


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33 
3» 

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33 


(*)  Tout  cela  n'cft  pas  écrit  de  bonne-foi  ,  ainfi  qu'il  a  paru  enfuite>  &  qu'il  fera  prou- 
yé  ci  après. 


55 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  XVIII.        133 

Affmrf« 

La  fubflance  de  la  Lettre  à  l  Archevêque  de  Kiovie ,    *>*■  Mo*. 
ejî  comme  il  juit. 

T  Jôtre  Sainteté  a  ignoré  mon  départ  de  RuJJîc ,  parce  qu'il  y  a  long- terni 


que  je  ne  lui  ai  pas  écrit.  'Je  vous  fais  part  maintenant ,  que  j  ai  re- 
„  folu  cette  fort ïe ,  fur  ce  qu'on  mavoit  voulu  faire  embraJJ'cr  l'Etat  Monafii- 
„  que  par  force.  Ceji  là  ce  qui  m'a  obligé  de  me  retirer.  Quand  Dieu  me 
„  rapcllera  du  refuge  que  f  ai  trouvé  auprès  de  mes  Bienfaiteurs ,  pour  retourner 
„  en  RuJJïe  auprès  de  vous ,  je  vous  prie  de  me  recevoir  ;  £s?  quant  à  préfent, 
„  dites  à  ceux  qui  jouhaiteront  de  favoir  de  mes  nouvelles  ,  que  je  me  porte 
„  bien  ,    &   donnez   leur  connoifjance  des  raifons  que  j'ai  eues  de  for  tir  du 

„  Pais. 

,,  J'ai  envoie  cette  Lettre  à  Vienne  par  Je  Secrétaire  du  Vice-Roi  de  Na- 
„  pies,  pour  la  faire  tenir;  mais,  je  ne  fai  point  fi  elle  a  été  rendue.  Je  fuis 
„  auffi  incertain  fur  le  fort  des  Lettres  précédentes,  dont  j'avois  chargé 
„  le  Secrétaire  du  Comte  de  Schonborn.  Toujours  elt-il  viai,  que  je 
„  n'ai  point  eu  Réponfe  de  Vienne,  fi  elles  ont  été  reçues. 

„  J'ai  entendu  Doubrofski  tenir  les  difeours  de  i'Epilepfie  ,  &  faire  les 
„  réflexions  à  ce  fujet. 

Le  Czarevitch  fut  examiné  le  même  jour  ,  fur  les  Articles  fuivans 
dreffez  par  Sa  Majeité  Czarienne  :  les  Réponfes ,  que  le  Czarevitch  y  a 
faites,  font  lignées  de  fa  main. 

ARTICLES.  RE'PONSES. 

1  »  Ad  primum» 

Qui  des  Séculiers  a  fçû  vôtre  de£  Je  ne  fâche  point   que  perfonne 

fein  &  vos  difpofitions  a  la  défebeif-  ait  eu  connoiffance  de  mon  mauvais 

fance  ?  Quels  font  les  difeours   que  deifein,  quel  qu'il  fût,  ni    que   qui 

vous  leur  avez  tenus  ,    ou  eux    à  que  ce  foit  m'en  ait  parlé  ,  ^excepta 

vous  ?  ceux  que  j'ai  confefle  ci-deifus. 


2. 


Ad  Secundum, 


Ce  qu'Affonaffief  a  dépofé  de  Ta  Quand  fai  parlé  avec  Affbnaflîef 

Rébellion  ,   étok-ce  avant   la  Suc-  de  la  Rébellion  ,   c'a  été  dans   l'y- 

ceffîon?  vrefle ,  croïant  qu'il  y  en  auroit  une. 

3..  Ad  Tertïum, 

Dans  quel  fens  étoit  écrit  le   mot  Le   mot    a    préfent  ,    écrit  deux 

à  préfent ,    marqué  deux   fois  dans  fois ,  vient  de  ce  que  j'avois  man- 

R  3  <lué 


COVIE. 


DR    M0S« 
C0V1E. 


154    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

la  minutte  de  la  Lettre  aux  Arche-    que  en  écrivant,  ne  le  voulant  écri- 
vêques?  re  qu'une  fois.    Le  fens  étoit:  qu'on 

devoit  répandre  ces  Lettres  parmi 
le  peuple,  ce  que  je  croïois  pouvoir  l'engager  davantage  à  fe  déclarer 
pour  moi,  en  aiant  vu  l'exemple  dans  les  Gazettes  imprimées.  Je  pen- 
fai  enfuite  que  cela  étoit  mal,  c'efl  pourquoi  je  l'ai  affacé. 


4. 

Quand  vous  avez  vu  dans  la  Let- 
tre de  Bleyer  qu'il  y  avoit  une  Ré- 
volte dans  l'Armée  du  Mecklen- 
bourg,  vous  en  avez  eu  de  la  joie, 
difant  :  Dieu  ne  laijfe  point  aller  les 
Affaires  félon  les  fouhaits  de  mon  Pè- 
re. Mais,  quand  vous  vous  êtes  ré- 
joui de  cette  manière ,  je  crois  que 
vous  aviez  quelque  vue ,  fi  la  cho- 
fe  avoit  été  véritablement  telle ,  & 
que  vous  vous  feriez  déclaré  pour 
les  Rebelles  ,  même  de  mon  vi- 
vant. 


Ai  Quartum. 

Quand  j'eus  entendu  la  Révolte 
de  l'Armée  dans  le  Mecklenbourg, 
je  difois,dans  la  joie  que  j'en  avois, 
que  Dieu  ne  permettoit  pas  que  les 
Affaires  fe  fifîent  félon  les  fouhaits 
de  mon  Père. 

Si  cette  nouvelle  avoit  été  vraïe, 
&  Il  on  m'avoit  appelle  ,  j'aurois 
joint  les  mécontens  :  mais,  je  n'a- 
vois  point  de  deffein  formé  de  les 
aller  joindre,  ou  non,  fans  être  ap- 
pelle. Au  contraire ,  j'aurois  ap- 
préhendé de  m'y  rendre  fans  cela. 
Mais ,  s'ils  avoient  envoie  pour  me 
chercher,  j'y  ferois  allé. 


Comme  le  Czarevitch  a  confeffé  dans  cette  dernière  Réponfe,  d'avoir 
eu  des  deffeins  criminels  qu'il  vouloit  exécuter ,  même  du  vivant  de  Sa 
Majefté  Czarienne ,  Ci  l'occafion  s'en  prefentoit  :  Elle  a  ordonné  aux  Srs. 
Tolftoi  &  Buturlin  de  l'examiner  encore  fur  la  fufdite  Lettre  aux  Arche- 
vêques, pour  favoir  dans  quel  fens  &  dans  quelle  vue,  il  avoit  écrit  les 
mots,  à  préjent  ne  m  abandonnez  pas. 

Le  Czarewitch  a  confirmé,  que  c'étoit  dans  le  fens  qu'il  venoit  de  dire 
dans  fa  Réponfe  ,  &  il  a  écrit  de  fa  propre  main  ce  qui  fuit: 

Le  26.  Mal  1718. 


5» 
SI 

J» 


LEs  Sieurs  Tolftoi  &  Buturlin  m'ont  demandé  par  vôtre  ordre, 
dans  quelle  vue  je  m'étois  fervi  du  mot  d'à  préfent,  qui  fe  trouve 
dans  mes  Confeflions  ,  lorfque  j'ai  écrit  au  Sénat  &  aux  Archevêques 
de  ne  me  point  abandonner. 

„  Comme  j'ai  reconnu  dans  mes  dernières  ConfefTions,  que  il  les  Re- 
belles m'avoient  appelle,  en  quelque  tems  que  c'eût  été,  même  de 
vôtre  vivant,  je  me  ferois  rendu  auprès  d'eux  >  j'ai  écrit  ce  mot,  à 
préfent ,    dans  le  deffein  que  ,  quand  la  chofe  feroit  publiée  parmi  îe 

„  peu- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  i$f 

peuple  ,  il  fe  déclarât  en  ma  faveur ,  foit  par  la  voie  des  foliicitations ,   Affaires 
ou  ->ar  des  menaces,  de  quelque  manière  que  ce  fût.  DF  Mos- 

M  *  COVlE. 

SUIVENT  LES  ECL  A  IRCISS  EMENS  SUR  TOUTES 
LES  PIECES  PRECEDENTES. 

POur  faire  mieux  comprendre  les  foins  que  Sa  Majelté  Czarienne  a  pris 
pour  mettre  le  Czirevitch  dans  le  bon  chemin,  &  pour  l'y  faire  ren- 
trer quand  il  en  elt  forti,  afin  de  l'engager  s  fe  rendre  digne  de  la  suc- 
cédions &  pour  faire  voir  ao  public  comment  le  Czarevitch,  au  contrai- 
re, a  trompé  l'attente  de  fon  Père,  par  les  oppofitions  qu'il  y  a  mifes; 
on  va  mettre  la  chofe  encore  dans  un  plus  grand  jour  par  rÉclaircifiè- 
ment  fuivant ,  quoique  la  déduction  en  foit  faite  allez  amplement  dans 
les  Pièces  précédentes. 

Il  elt  notoire  par  le  premier  Manifelte  qui  a  été  rendu  public  à  l'arri- 
vée du  Czarevitch  à  Mofcou,  &  par  les  Lettres  que  Sa  Majelté  lui  à  écri<> 
tes,  qui  font  inférées  ci-devant,  avec  combien  de  folhcitations  réitérées 
Sa  Majelté  fon  Père  l'a  exhorté  à  fe  rendre  capable  &  digne  de  la  Suc- 
celfion.    Il  s'y  elt  toujours  montré  rcfraclaire. 

Le  Czarevitch  répondant  à  la  Lettre  que  Sa  Majelté  Czarienne  lui  a- 
voit  écrite,  après  l'Enterrement  de  fon  Epoufe  ,  n'avoit  point  dit  de 
raifons,  pourquoi  il  ne  vouloit  point  travailler,  comme  fon  Père  le  fouhai- 
toit,  à  fe  rendre  capable  de  cette  Succeflion.  Il  s'étoit  feulement  con- 
tenté de  le  tromper  par  de  faux  Sermens  ,  par  lefquels  il  s'engageoit  à  y 
renoncer,  lefquels  pourtant  il  a  non-feulement  vio]ez5mais  il  a  recherché 
cette  Succeflion  par  de  mauvaifes  Pratiques. 

Sa  Majelté  Czarienne  ,  qui  pénétroit  dans  les  mauvaifes  volontez  de  fon 
Fils,  l'a  encore  exhorté  par  d'autres  Lettres  à  fe  former  au  Gouverne- 
ment; &  elle  lui  a  répréfenté ,  pour  l'intimider  &  l'engager  à  fe  confor- 
mer à  fes  volontez,  que  fi  cela  lui  étoit  abfolument  impolTible  ,  il  dev.it 
embrafler  l'Etat  Monaitique.  Elle  voïoit  bien  que  la  Renonciation  du 
Czarevitch  à  la  Succeflion  n'étoit  qu'un  an.ufement  ,  qu'il  n'y  avoir, 
point  de  fincerité,  comme  les  fuites  l'ont  fait  voir.  Car,  bien  loin  de 
donner  une  Réponfe  claire  &  pofitive  fur  la  Lettre  de  Sa  Majelté  Cza- 
rienne qui  Pexhortoit  à  fe  déterminer,  il  eut  encore  recours  aux  fubter- 
fuges  ;  ne  répondant  que  d'une  manière  courte  &  vague,  par  des  Ser- 
mens &  par  des  Prières,  pour  qu'il  lui  fut  permis  de  fe  retirer  inceflam- 
ment  dans  un  Couvent,  lefquelles  pourtant  étoient  frauduleufcs. 

C'elt  pourquoi  Sa  Majelté  lui  dit,  à  fon  départ  de  Petersbourg  pour 
îes  Pa'ïs  Etrangers  ,  lors  qu'Elle  lui  dit  adieu  ,  qu'il  ne  devoit  point  en- 
trer fi-tôt  dans  le  Couvent  ,  pareeque  l'engagement  étoit  difficile  pour 
un  jeune  homme  ,  &  elle  lui  donna  fix  Mois  puur  y  penfer  encore,  après 
Jefquels  il  devoit  écrire  à  Sa  Majelté  le  parti  qu'il  voudroit  prendre. 

Elle  en  ufa  ainfi,  dans  l'efpérance  qu'il  pouroit  changer  de  .^emimen1 , 
&  que  par  une  meilleure  conduite  ,  il  fe  conformeront  a  là  volonté  ce 


fon 


COVIF.. 


i3<î    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

ArPMPEs  fon  Père,  pour  fe  rendre  digne  de  la  Succeffion  par  une  férieufe  applica- 
pe  Mos-    tiori  à  tous  fes  Devoirs. 

Le  Czarevitch,  ne  voulant  rien  répondre  pour  lors  là-defTus  à  fon  Père, 
fit  femblant  d'être  malade;  mais,  à  peine  Sa  Majelté  fut  elle  partie,  qu'il 
fe  rendit  à  un  Feitin  chez  Michel  Boinof. 

Les  fix  Mois  fe  paflerent ,  fans  que  le  Czarevitch  s'expliquât  fur  le 
choix  qu'il  avoit  fait. 

Sa  Majefté,  qui  voïoit  fa  tromperie  ,  lui  écrivit  encore  de  Coppenha- 
gen,  pour  lui  réitérer  fes  exhortations  au  fujet  de  la  Succeffion ,  &  elle 
lui  ordonna  fe  rendre  auprès  d'Elle  pour  y  apprendre  le  métier  de  la  Guer- 
re; mais,  que  s'il  vouloit  fe  retirer  dans  un  Couvent,  il  de  voit  en  choifir 
un ,  fixer  le  tems ,  &  en  récrire  à  Sa  Majelté ,  qui  ne  voulut  pas  même 
lui  en  prefcrire ,  ni  affigner  un. 

Il  paroft  évidemment  par  les  trois  Lettres  de  Sa  Majefté,  qui  font  infé- 
rées ci-deflus,  qu'elle  a  fouhaité  qu'il  fe  rendit  capable  de  la  Succeffion; 
qu'elle  ne  l'a  point  voulu  forcer  à  fe  faire  Moine  j  qu'au  contraire ,  elle  l'en 
a  voulu  détourner,  &  qu'elle  a  lahTé  fon  choix  à  fon  Libre  Arbkre. 

Le  Czarevitch  fit  femblant  de  s'être  choifi  de  fon  propre  mouvement 
un  Couvent:  cependant,  toutes  ces  promelTes  confirmées  par  des  .^erniens, 
fe  font  trouvées  frauduleufesj  car  ,  il  a  paru  en  effet, comme  il  elt  prou- 
vé ci-deflus,  que  le  Czarevitch  a  recherché  la  Succeffion,  dont  Sa  Ma- 
jefté, non  feulement  ne  l'avoit  point  privé  ,  mais  elle  l'avoit  même  forcé 
par  fes  puiffantes  exhortations  a  y  prétendre ,  en  travaillant  à  s'en  rendre 
digne. 

Mais,  au  mépris  de  tout  cela,  le  Czarevitch  s'eft  évadé  &  s'eft  réfugié 
auprès  de  l'Empereur,  reclamant  fon  affiftance  &  fa  Proteètion  pour  le 
fecourir  &  l'affilier,  même  à  main  armée,  &  il  a  dit  que  l'Empereur  l'a- 
voit fait  aflïïrer  par  le  Comte  de  Schonborn  Vice-Chancellier  ,  de  lui 
procurer  la  Couronne  Ruffienne  ,  non-feulement  par  des  bons  Offices , 
mais  auffi  par  la  force  des  armes.  De  forte  que  le  Czarevitch  a  non-feu- 
lement efperé  avec  des  témoignages  de  joie  la  mort  de  fon  Père  ,  mais 
il  l'a  auffi  cherchée;  &  quand  on  lui  rapportoit  qu'il  y  avoit  des  Rebel- 
lions, cela  lui  faifoit  plaifir,  il  étoit  réfoiu  d'aller  joindre  les  Rebelles, 
s'ils  l'avoient  appelle  ,  fut-ce  du  vivant  de  fon  Père ,  ou  après  fa 
mort. 

On  peut  le  convaincre  par  fes  propres  Confeffions,  que  quand  il  a  écrit 
dans  fes  Réponfes  qu'il  a  faites  à  fon  Père,  qu'il  ne  fouhaitoit  point  la 
Succeffion  à  caufe  de  fon  infirmité  ,  ç'étoient  de  purs  menfonges. 

Ce  n'etoit  que  pour  paroître  infirme,  qu'il  prenoit  des  remèdes,  lors- 
qu'on parloit  de  quelque  voiage  qu'il  ne  lui  plaifok  point  de  faire, 
comme  fon  Père  le  fouhaitoit  ;  mais ,  il  ne  l'étoit  point  véritable- 
ment. 

De  forte  qu'on  peut  juger  par  toutes  ces  circonflances  ,  qu'il  vouloit 
la  Succeffion  ,  non  point  de  la  manière  que  fon  Père  la  lui  vouloit 
laifier,  favoir  dans  l'ordre  requis,  mais  à  la  Tienne,  par  des  Affiilances 

Etran- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        13? 


Etrangères,  ou  bien  par  les  Forces  des  Rebelles,  même  du  vivant  de  Affaires 
l'on  Père.  ^  DtMoi' 

Si  le  Czarevitch  a  dit  dans  fes  dernières  Confeffions  ,  que  ç'avoit  été  COVXf- 
par  oubli  qu'il  avoit  manqué  d'avouer  qu'il  avoit  écrit  de  Naples  au 
Métropolitain  de  Kio vie, cela  s'eft  au(îi  trouvé  faux:  car,  puifqu'il  s'elt 
bien  fouvenu  des  particularitez  des  chofes  de  moindre  conféquence, 
dont  il  s'eft;  entretenu  avec  l'autre  depuis  plufieurs  Années,  comme  il  pa- 
roît  par  Ton  Interrogatoire,  comment  auroit-il  pu  avoir  oublié  celle-là, 
d'avoir  écrit  à  cet  Archevêque  ,  laquelle  eft  d'une  bien  plus  grande  im- 
portance? 

II  paroit  dans  cette  Excufe  fur  l'oubli ,  non-feulement  de  la  faufïeté , 
mais  auffi  une  grande  malice:  car,  quand  la  Fille  AfroOni  lui  a  foutenu 
qu'il  avoit  écrit  de  la  ForterefTe,  à  cet  Archevêque,  &  qu'il  avoit  cache- 
té la  Lettre  en  fa  préfence,  il  a  voulu  couvrir  la  chofe  du  prétexte  d'un 
Plan  de  l'attaque  de  Belgrade ,  qu'il  renvoioit  cacheté  au  Secrétaire  du 
Vice-Roi  de  Naples;  cependant,  il  a  reconnu  dans  la  fuite  ,  que  ce  n'a- 
voit  point  été  le  Plan,  mais  la  Lettre  à  l'Archevêque  de  Kiovie  ,  qu'il 
avoit  cacheté.  L'Excufe  qu'il  a  auffi  donnée  d'avoir  oublie  d'avouer,  dans 
fes  premières  Confeffions,  ce  qui  regarde  la  Czarewna  Marie  Alexiewna, 
Doubrofski,  &  Ebarlakof ,  qui  avoient  eu  connoiffance  de  fon  Evafion,  a 
encore  été  un  menfonge.  On  le  prouve  parce  qu'il  a  dit  enfaite ,  qu'il 
avoit  eu  pitié  de  la  Czarewna. 

Il  paroit  auffi  par  le  rapport  inféré  ci-defTus  du  Réfident  Wefelofski  à 
Vienne  ,  que  les  Impériaux  n'ont  point  forcé  le  Czarevitch  d'écrire  les 
Lettres  au  Sénat  &  aux  Archevêques. 

Sa  Majelté  Czarienne  n'avoit  promis  au  Czarevitch  par  les  Lettres 
qu'elle  lui  avoit  écrit  à  Naples  un  gracieux  Pardon ,  que  pour  fon  Evaiion 
uniquement ,  s'il  revenoit  auprès  d'Elle.  Elle  la  lui  a  non-feulement 
pardonnée  à  fon  retour ,  mais  elle  a  encore  étendu  cette  grâce  jufques 
à  lui  promettre  une  Amniflie  générale  pour  tout  ce  qu'il  auroit  commis, 
s'il  faifoit  une  Confeffion  fmcére  de  tout  ce  qu'il  pouvoit  avoir  fait ,  de 
quelque  nature  que  cela  fût,  &  s'il  découvroit  fes  complices  fans  aucune 
referve  -,  lui  déclarant  pourtant  en  même  tems  ,  que  s'il  cachoit  quelque 
chofe,  ou  celoit  quelque  perfonne  complice,  ou  bien  quelque  affaire,  le 
Pardon  feroit  nul  &  révoqué. 

Cependant,  on  a  déjà  fait  voir  clairement  par  toutes  les  Pièces  précé- 
dentes, de  quelie  manière  le  Czarevitch,  au  mépris  de  la  Clémence  Pa- 
ternelle &  du  Pardon  qu'il  en  avoit  obtenu ,  a  celé  un  grand  nombre  de 
perfonnes,  de  Lettres,  &  de  faits,  comme  auffi  fes  pernicieux  defleins 
de  fe  joindre  à  des  Rebelles,  &  fes  machinations. 

Il  efl  donc  vifible  par  tout  cela,  que  non-feulement  il  n'a  point  eu  de 
véritable  intention  de  découvrir  tous  fes  crimes,  &  d'en  avoir  une  lincé- 
re  répentance,  ni  de  fe  convertir;  mais  auffi  qu'il  a  déguifé  &  caché  tout 
ce  qui  s'eft  paffé,  pour  pouvoir  encore  reprendre  fes  deffeins  à  l'avenir, 
&.  recommencer  ce  qu'il  n'a  pu  achever  jufqu  a  prefent. 

time  XL  S  A  me- 


DE  MOS- 
COVIE. 


ï38     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

i?TAiREs  Â  mefure  qu'on  avancoit  dans  la  Le&ure  qu'on  faifoït  de  tout  ce  que 
X\.  deffus ,  Sa  Majeflé  Czarienne  éxaminoit  encore  verbalement  le  Cza- 
revitch,  fur  tous  Tes  crimes  manifeitez  dans  toutes  les  Pièces,  &  com- 
ment tout  s'étoit  pafie:  &  après  beaucoup  d'Interrogations  &  de  Deman- 
des, fur  les  chofcs  les  plus  importantes,  dont  Sa  Majeflé  lui  a  montré  les 
preuves  pour  fa  conviction ,  avec  les  Lettres  écrites  de  fa  propre  rrrain , 
le  Czarevkch  a  confeifé  devant  toute  l'AlTemblée  des  Etats  Eccléfialtiques 
&  Séculiers  à  fon  Père  &  fon  Seigneur,  qùil  'était  coupable  de  tout  ce  qui 
fe  trowvoit  clans  tous  les  Ecrits  &  Pièces  rapportées  ci-dejjus. 

L'Audience  étant  finie,  &  le  Czarevitch  aïant  été  remené,  Sa  Majeflé 
fît  produire  une  Ordonnance,  aux  Archevêques  &  au  Etats  Séculiers 9 
qu'elle  avoit  fîgnée  de  fa  propre  main ,  dont  le  contenu  s'enfuit. 


DECLARATION. 

Aux  très-Sacrez  Métropolitains  fep  Archevêques  ;  aux 
Evêques  &  autres  Ecclefiajliques. 

„  XTOus  venez ;  d'entendre  une' Déduction  fort  ample  des  Crimes  pref. 
„  V  que  inouïs  dans  le  Monde,  dont  mon  Fils  elt  coupable,  &  qu'il 
„  a  commis  contre  nous  fon  Père  &  fon  Seigneur. 

„  Quoique,  félon  toutes  les  Loix  Divines  &  Civiles  ,  &  fur-tout  fui- 
„  vant  celles  de  Rufîie,  qui  excluent  toute  JurisdicrJon  entre  un  Père  & 
..  un  Enfant,  même  parmi  les  particuliers,  Nous  aïons  un  Pouvoir  affez 
„  abondant  &  abfolu  de  juger  nôtre  Fils  fuivant  fes  crimes,  félon  notre 
,,  "Volante,  fans  en  demander  avis  à  perfonne:  Cependant,  comme  il  efl 
,,  affez  ordinaire  qu'on  ne  foît  point  aufïï  clair-voïant  dans  fes  propres  af- 
j,  faires,  qu'on  l'eft  dans  celles  des  autres,  &  comme  aufïï  les  Médecins, 
„  même  les  plus  experts,  ne  rifquent  point  de  fe  traiter  eux  mêmes  ,  & 
„  qu'ils  en  appellent  d'autres  dans  leurs  maladies;  ainfî  Nous,  craignant 
„  -Dieu  &  le  Péché,  Nous  vous  expdfons  pareillement  nôtre  maladie,  & 
Jj  Not-is  vous,  y  demandons  du  réméde.  Car,  Nous  appréhendons  la  Mort 
,,  Eternelle,  fi,,ne  connoiflant  peut-être  point  la  qualité  de  nôtre  mal-, 
-„  Nous  voulions  Nous  en  guérir  feuls,  d'autant  plus  que  j'ai  juré  fur  les 
,,  Jugemens  de  Dieu,  &  j'ai  promis  par  écrit ,  le  Pardon  à  mon  Fils,  ôc 
,,  je  l'ai  enfuite  confirmé  de  bouche  ,  au  cas  qu'il  me  dife  la  vé- 
■„  rite. 

,,  Quoique  Notre  Fils  ait  violé  fa  'promeffe ,  en  taifant  les  chofes  les 
„  plus  importantes  touchant  fes  deffeins  de  Rébellion  contre  Nous  fon 
,,  Seigneur  &  fori  Père,  toutefois,  pour  ne  Nous  écarter  en  rien  de  nos 
5,  obligations  ,  &  quoique  l'affaire  ne  foit  point  du  Reflbrc  de  la 
n  Jurifdiérion  Spirituelle,  mais  de  la  Civile,  &  que  Nous  l'aïons  même 

renvoyée  aujourd'hui  à  un  Jugement  impartial  des  Séculiers  ,  par  une 

„  Dé- 


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RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        139, 

Déclaration  expreffe ,  Nous  fouhaitons  pourtant  Nous  procurer  toutes   Affaire* 
fortes  de  lumières  fur  cette  Affaire.  deMos- 

„  Nous  fouvenant  de  l'endroit  de  la  Parole  de  Dieu,  où  il  exhorte  de  CQVIEl . 
demander  dans  de  pareilles  occafions  les  fentimens  des  Gens  d'Eglife, 
pour  favoir  ce  que  Dieu  en  ordonne,  ainfi  qu'il  eit  écrit  au  Chip.  17. 
de  l'Exode  ;  Nous  defirons  de  vous  ,  Archevêques ,  &  de  tout  l'Etat 
Ecclefialtique  ,  comme  des  Docteurs  de  la  Parole  de  Dieu,  non  pas 
que  vous  prononciez  un  Jugement  fur  cette  Affaire  -,  mais  que  vous  l'e- 
xaminiez, &  que  vous  Nous  donniez  là-deflus  ,  fuivant  les  Saintes  E- 
critures,  une  véritable  Inllru&ion  ,  pour  favoir  quelle  punition  un  Cri- 
me li  horrible  de  mon  Fils,  femblable  à  celui  d'Abfalom ,  a  mérité  fé- 
lon les  Loix  Divines,  fuivant  les  autres  Exemples  des  Saintes  Ecritu- 
res, &  félon  les  Préceptes-  ce  que  vous  Nous  donnerez  par  écrit  figné 
de  la  propre  main  d'un  chacun  ,  afin  qu'étant  fuffifamment  éclairez 
dans  cette  Affaire  ,  Nous  ne  chargions  en  rien  nôtre  Confcience. 
,,  Ainfi  Nous  mettons  nôtre  confiance  en  vous,  comme  Gardiens  des 
Loix  Divines,  fuivant  vôtre  Dignité;  comme  fidèles  Pafteurs  du  Trou- 
peau Chrétien  ,  &  comme  bien  intentionnez  pour  la  Patrie:  Et  Nous 
vous  conjurons  par  les  Jugemens  de  Dieu  &  par  vôtre  Sacre  ,  de  pro- 
céder en  cela,  fans  aucune  difîimulation,  &  fans  crainte. 

DECLARATION. 

yl  nos  Féaux  £5?  Amez   les  Sieurs  Mlniflres^  Séna- 
teurs ?  g«?  aux  Etats  Militaire  &  Civil. 

,  T  TOus  venez  d'entendre  une  Dedu6lion  fort  ample  des  Crimes  pref- 
,  V  que  inouïs  dans  le  Monde,  dont  mon  Fils  efl  coupable  &  qu'il  a 
,  commjs  contre  Nous  fon  Père  &  fon  Seigneur. 

„  Quoique,  félon  toutes  les  Loix  Divines  &  Civiles, &  fur-tout  fuivant 
,  celles  de  Rufîîe  ,  qui  excluent  toute  Jurisdiftion  entre  un  Père  &  un 
,  Enfant,  même  parmi  les  particuliers,  Nous  aïons  un  Pouvoir  allez  abon- 
,  dant  &  abfolu  de  juger  notre  Fils  fuivant  fes  Crimes,  félon  nôtre  Vo- 
,  lonté  ,  fans  en  demander  avis  à  Perfonne  :  cependant,  comme  il  efl 
,  allez  ordinaire  qu'on  ne  foit  point  aufïi  clair-voïant  dans  fes  propres 
,  affaires,  qu'on  l'efl  dans  celles  des  autres,  &  comme  aufîi  les  Mede- 
,  cins,  même  les  plus  experts  ,  ne  rifquent  point  de.  fe  traiter  eux-mê- 
,  mes  ,  &  qu'ils  en  appellent  d'autres  dans  leurs  maladies  -,  craignant 
,  Dieu,  &  de  charger  ma  Confcience  de  quelque  Péché,  c'efl  pour  cette 
,  raifon  que  Nous  vous  exppfohs  notre  état,  &  que  Nous  vous  y  deman- 
,  dons  du  remède  :  car  Nous  appréhendons  la  Mort  Eternelle  ,  fi  ,  ne 
,  connoiffant  peut-être  point  la  qualité  de  nôtre  mal  ,  Nous  voulions 
,  Nous  en  guérir  feuls,  vu  principalement  que  j'ai  juré  fur  les  Jugemens 
,  de  Dieu,  &  que  j'ai  promis  par  Ecrit,  le  Pardon  à  mon  Fils,  &  je  l'ai 
,  enfuitè  confirmé  de  bouche,-  au  cas  qu'il  me  dife  de  là  vérité. 

S  2  „  Quoi- 


55 
55 
J5 


140     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Awairf.«        „  Quoique  nôtre  Fils  ait  violé  fa  promette  ,  en  taifant  les  chofes  les 

de  Mos-    j?  p]us  importantes  touchant  Tes  DefTeins  de  Rébellion  contre  nous  fon  Sei- 

COVIE-      „  gneur  &  fon  Père,  toute-fois,  pour  ne  Nous  écarter  en  rien  de  nos 

„  obligations,  je  vous  prie  de  penfer  à  cette  Affaire,  &  de  l'examiner  fé- 

rieuTement  &  avec  attention,  pour  voir  ce  qu'il  a  mérité,  fans  me  flà- 

ter,  ni  appréhender  que  s'il  ne  mérite  qu'une  légère  punition,  &  que 

vous  le  jugiez  ainfi,  cela  me  fut  defagréable;  car,  je  vous  jure  par  le 

,,  grand  Dieu  &  par  fes  Jugemens,  que  vous  n'avez  abfolument  rien  à  en 

,,  craindre. 

„  Ne  faites  point  reflexion  non  plus,  fur  ce  que  vous  devez  juger  le 
„  Fils  de  vôtre  Souverain  ;  mais,  fans  avoir  égard  à  la  perfonne,  rendez 
„  Juftice,  &  ne  perdez  point  vôtre  Ame  &  la  mienne,  afin  que  nôtre  Conf- 
„  cience  ne  nous  reproche  rien  au  jour  du  terrible  Jugement,  &  que  nô- 
,,  tre  Patrie  ne  foit  point  lezée. 

Le  16.  Juin,  le  Confeiller  privé  Pierre  Tolfloi  a  déclaré  par  ordre  de 
Sa  Majefté  Czarienne  aux  Miniitres  ,  au  Sénat  ,  à  l'Etat  Militaire  &  au 
Civil ,  que  comme  elle  a  mis  entre  leurs  mains  le  Procès  de  fon  Fils  Alexei 
Petrovitch,  afin  qu'ils  en  prononcent  le  Jugement,  Elle  veut  &  entend 
qu'il  fe  fade  dans  la  Forme  requife,  &  avec  tout  l'Examen  neceflaire  :  c'eit 
pourquoi  Sa  Majefté  les  autorife  &  leur  donne  le  Pouvoir  d'examiner  le 
le  Czarevitch  Alexei  Petrovitch,  s'ils  le  trouvent  à  propos,  fur  quelque 
Affaire  que  ce  loit,  de  le  faire  comparoitre  ,  &  de  l'interroger  fur  ce  qui 
fera  néceffaire. 

Sur  cet  ordre  exprès  de  Sa  Majefté  Czarienne,  Mrs.  les  Miniftres,  le 
Sénat ,  &  les  Etats  qui  étoient  préfens  &  affemblez  aïant  ouï  Lecture  de 
routes  les  Pièces  précédentes ,  font  convenus  d'interroger  le  Czarevitch 
fur  les  Points  fuivans. 

Points  d'Interrogatoire  du  Czarevitch  Alexei  Petrovitch* 

I. 

IL  a  déclaré  au  fujet  de  la  Lettre  de  Bleyer,  que  la  copie  en  avoit 
été  couchée  dans  une  Lettre  de  Schonborn;  mais  qu'il  n'y  avoit  eu 
aucune  Inclufe  dans  celle  dudit  Shonborn  du  24.  Avril. 
„  Cela  ne  peut  pas  être:  parce  que  le  Comte  de  Schonborn  y  marque  de 
fa  propre  main,  qu'il  envoie  une  copie  de  ce  qu'on  écrivoit  de  Mofcou; 
de  forte  qu'il  n'elt  pas  poflible  que  le  Comte  ait  oublié  de  coucher  cette 
Incluie  dans  fa  Lettre,  il  paroit  même  qu'il  l'a  envoiée  exprès  pour  fai- 
re part  au  Czarevitch  de  ces  nouvelles-là. 

„  Cela  ell  conforme  auiîi  à  la  Déclaration  que  la  Fille  Afrofini  a  don- 
née, de  ce  que  le  Czarevitch  lui  avoit  dit,  d'une  Rébellion  aux  envi- 
rons de  Mofcou,  dont  il  prétendoit  être  informé  par  des  Lettres  ;   de 
forte  qu'il  paroît  qu'il  a  eu  de  ces  fortes  de  Lettres,  de  qui  que  ce  fût. 
„  11  elt  probable,  que  quand  même  Bleyer  auroit  mandé  ces  nouvelles, 

il 


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RESOLUTIONS  B»ETAT,  M.  DCC.  XVIII.  141 

„  il  auroit  fait  en  même  tems  mention  de  quelques  perfonnes ,  &  que  le  AmiM* 
„  Czarevitch  a  peut-être  brûlé  la  Lettre,  parce  qu'il  vouloit  les  cacher.    DE  Mos" 

,,  Ainfi,  il  doit  le  confeilcr  véritablement  à  prefent  ,  parce  qu'on  n'a  _L 

„  point  pu  ajouter  foi  à  ce  qu'il  aditjufquts  ici,  &  qu'il  a  augmenté  de  tems 
,,  en  tems  fcs  Confelfions.  11  doit  fe  fouvenir  des  promeiles  confirmées 
„  par  tant  de  Sermens,  qu'il  a  faites  à  Sa  Majeflé  Czarienne  fon  Père  à 
„  fon  arrivée  à  Molcou ,  &  lefquelles  il  a  reïterées  depuis  en  baifant  ls 
„  Croix,  &mêmeen  prenant  la  Sainte  Communion,  &  encore  lorfqu'il 
,,  obtint  de  Sa  Majelté  fon  Pardon  par  écrit.  Il  ne  doit  point  ,  pour 
,,  s'éxemter  de  tout  confefltr  fans  referve  &  de  nous  dire  la  pure  vérité, 
„  fe  confier  fur  ce  qu'il  eft  Fils  de  nôtre  Souverain:  car,  Sa  Majeflé  nous 
„  ayant  établis  Juges  fur  lui ,  Elle  nous  a  aufïi  donné  tout  Pouvoir  en  cet- 
„  te  qualité  j  &,  s'il  ne  veut  point  confciïer,  nous  ferons  obligez  de  le 
„  traiter  comme  on  traite  un  criminel  ordinaire  ,  &  comme  on  en  agit 
„  dans  de  femblables  cas  de  Rébellion,  de  Séditions,  de  Révoltes  tramées, 
,,  &  de  Deffeins  de  Parricides  contre  fon  Père  &  fon  Souverain. 

„  Qu'il  déclare  donc  les  Complices  de  fa  Confpiration  ,  qu'il  dife  fur 
„  qui  il  s'efl  repofé  pour  être  affilié,  &  avec  qui  il  a  conféré  &  conjuré: 
„  car,  il  ne  lui  étoit  point  pofïible,  fans  cela,  de  fe  flater  des  efperances 
,,  qu'il  avoit,  qu'il  a  communiquées  à  Sa  A  lai  trèfle,  &  qu'il  a  déjà  con- 
„  feflees  lui-même. 

I  I. 

„  A  quelle  occafion  a-t-il  parlé  à  Ivan  Affonafîïef  de  fa  confiance  fur  le 
„  petit  Peuple,  &  en  quel  tems  a-t-il  voulu  exécuter  ce  qu'il  a  dit:  fa- 

»   voir> 

,,  Si  je  vois  mon  tems  où  mon  Père  ne  [bit  pas  prefent ,  je  dirai  quelque  cho- 

„  fe  à  r oreille  aux  Archevêques!  Sur  quel  Archevêque  a-t-il  le  plus  compté 
„  dans  ce  cas-là?  La  Fille  Afrofini  aiant  déclaré,  qu'il  avoit  lotie  un  Ar- 
,,  chevéque  fans  le  nommer,  il  n'eit  point  pofïible  qu'il  l'ait  oublié;  mais, 
,,  il  paroît  que  cet  Archevêque  étant  de  fes  Amis,  il  a  celé  fon  nom  vou- 
„  lant  le  cacher.  De  plus.  Quel  tems  a-t-il  cru  trouver  dans  l'abfence 
„  de  Ton  Père  ? 

III. 
„  Pourquoi  &  fur  quel  fondement  a-t-il  dit ,  que  Petersbourg  ne  nous 
„  refleroit  pas  long-tems  ? 

Sur  quoi  le  Czarevitch  a  été  cité  de  comparoître  devant  le  Tribunal  des 
Juges  établis  par  Sa  Majeflé  Czarienne  dans  la  Sale  de  la  Régence  du  Sé- 
nat, &  Déclaration  lui  aiant  été  faite  des  ordres  qu'ils  avoient  reçus  de 
Sa  Majeflé  Czarienne:  il  lui  a  été  dit,  que  quoi  qu'iis  fulTent  fort  attiigez. 
de  la  conduite  qu'il  avoit  tenue, ils  étoient  pourtant  obligez,  pour  obéir  à 
leurs  ordres ,  &  fans  avoir  égard  à  fa  perfonne,  &  à  ce  qu'il  efl  le  Fils  de 
leur  très-Clement  Souverain  ,  de  l'interroger  fur  les  Articles  rapportez  ci- 
delTus,  qu'ils  lui  lurent,  lui  demandant  d'y  répondre  par  une  Confeiîlon 
véritable,  accompagnée  de  beaucoup  de  Preuves. 

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142    MEMOIRES,  NEGOTIATfcONS,  TRAITEZ,  ET 

î>'™Mos!  Le  1 7.  y um  5  &  Czarevitck  a  répondu  fur  ces  Articles* 

covie.  la  ce  qui  fuit. 

Leyer,Refident  de  l'Empereur,  a  écrit  au  Comte  de  Schonborn  Vice- 
Chancelier  de  l'Empire,  que  Abraham  Lopoukin  l'avoit  prié  à  Pe- 
tersbourg  de  le  venir  trouver:  qu'il  lui  avoit  demandé  où  fe  trouvoit  à 
prefent  le Czarevitch ,  &  G  on  avoit  de  Tes  nouvelles,  lui  faifanc  enten- 
dre en  même  tems  ce  qui  luit  :    0;iefi  ici  pour  le  Czarevitch ,  &  on  com~ 
„  mence  déjà  de  fe  remuer  à  ïentour  de  Mofcow,  car,  il  y  a  beaucoup  de  diferen- 
3,  tes  Nouvelles  furfqn  fujet  :  je  voudrais  /avoir  pofttivement  s7  il  Je  trouve  pre- 
„  Jentement  auprès  de  vous. 

„  Cette  Lettre  deBleyer  étoit  couchée  dans  celle  du  Comte  Schonborn 
„  écrite  au  Czarevitch  dans  le  Mois  d'Avril,  &  lui  Czarevitch  a  brûlé 
cette  Inclufe  après  l'avoir  lue. 

„  Quand  il  difoit  a  la  Fille  Afrofini,  qu'il  y  avoit  proche  de  Mofcou  une 
Rébellion,  il  l'a  tiré  de  la  ditee  Lettre,  fans  dire  à  cette  Fille  ce  que 
Bleyer  a  écrit  au  Comte  Schonborn  au  fujet  de  Loupokin. 

A  l'égard  de  ce  que  Ivan  Affonaffief  a  confeffé  à  la  charge  du  Czare- 
vitch, fur  ces  difeours  au  fujet  du  petit  peuple  :  Il  eft  vrai  que  lui  Cza- 
revitch avoit  comté  fur  ce  petit  peuple,  parce  qu'il  avoit  ouï  dire  à 
„  beaucoup  de  perfonnes  qu'il  en  étoit  aimé,  en  particulier  à  Nikifor  Ba- 
„  zemskoi  &  à  fon  ConfeiTeur  l'Archiprêtre  Jaques ,  qui  lui  avoit  parlé 
,,  fouvent  de  l'amitié  que  le  peuple  avoit  pour  lui,  &  qu'en  buvant  à  fa 
„  Santé  ,  on  l'appelloit  V Efperance  des  Rujfiens. 

Après  cela,  le  Czarevitch  prit  à  part  le  Séréniffime  Prince  Menchikof, 
le  Baron  Pierre  Schafirof,  Pierre  Tolftoi,  &  Ivan  Buturlin,  il  &  leur  dit: 
,,  Qu'au  refle  il  avoit  mis  fa  confiance  fur  ceux  qui  aimoient  les  ancien- 
„  nés  mœurs,  qu'il  les  avoit  reconnus  aux  Difeours  qu'ils  avoient  tenus 
avec    lui  ,    par  ce   qu'ils    avoient  toujours    loué    les    anciennes    ma- 
nières ,  parlant  avec  dépîaifir  des   nouveautés   que  fon  Père  introdui- 
„  foit.     Qu'il  avoit  été  fortifié  dans  cette  confiance  par  les   Difeours  du 
„  Prince  Bailli  Dolgorouki,  quand  il  lui  dit:   Donnez  à  vôtre  Père  tant  de 
„  Lettres  de  Renonciation  qu'il  voudra,  comme  il  eft  rapporté  dans  les  pre- 
mières Confeffions  du  Czarevitch.  Que  le  même  Prince  Dolgorouki  lui 
avoit  dit ,  qu.il  avoit p/u.>  d'efprit  que  fon  Père  \  &  que ,  quoique  {on  Père  en  ait 
beaucoup,  H  ne  connoifj'oit  pourtant  pas  les  gens  cfefprit,  difant  au  Czare- 
,,  vitch ,  vous  les  connuitrez  mieux. 

Etoit  figné  de  la  main  du  Czarevitch 

A  L  E  X  E  I. 

Le  Czarevitch  Alex  ci  Pctrovitch  a  écrit  de  plus  de  fa  propre 

main ,  pour  un  Suplenient  de  ce  qui  efl  ci- de ff us. 

claré  dans  mes  Confeffions   précédentes  le  relie  des  Difeours. 
éaare  à  prefent,  que  j'ai  fondé  mes  efpérances  fur  les  Difeours 

de 


?5 


51 
51 
•>■> 


„  T'Ai  dé 
„  J    Je  dé 


jj 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.         hj 

„  de  beaucoup  de  perfonncs,  &  en  particulier  fur  ceux  de  mon  Confef-    -*ÏFAr*T# 


leur  Jacques,  de   Nikifore  Bafemskoi,  du  Czarevitch  de  Sibérie,  de 
Doubrofski,  &  d'Ivan  Afrbnalîlef,  que  j'étois  aimé  du  peuple:  Jacques 


>» 
Jï 

J3 

» 

5' 


avoitde  l'inclination  pour  moi,  quoique  je  n'aie  jamais  parlé  de  rien  avec 
lui,  excepté  ce  que  j'ai  confeile  ci-cleflus. 

„  J'ai  parlé  de  Petersbourg  étant  yvre,  dans  le  fens  que,  voiant  qu'on 
s'éloignoit  jufques  à  Coppenhagen,  on  pouvoit  bien  le  perdre  comme 
Affbf.  je  ne  me  fouviens  plus  des  paroles  mômes  que  j'ai  dites. 
Le  Czarevitch  a  dit  auiïï  auxMiniflres  pendant  cet  Examen, 
„  Qj.i  il  avoit  toujours  recueilli  depuis  long-tems  tous  les  Difcours  que 
lui  avoient  tenus  les  perfonnes  à  qui  les  nouveautez  introduites  par  le 
Czar  fon  Fere  déplaifoient  &  qui  les  ont  blâmées,  parce  qu'elles  étoienc 
portées  pour  les  anciennes  mœurs  ,  vivant  à  la  manière  antique  ;  & 
que,  quoi  qu'il  n'ait  point  eu  de  correfpondance  avec  eux  au  fujet  de  Tes 
defTeins  ,  ni  n'ait  reconnu  en  eux  aucun  penchant  h  les  favorifer,  il 
s'étoit  pourtant  montré  incliné  pour  eux,  à  caufe  de  leurs  difcours  fur 
ce  fujet  ;&  que ,  pour  fe  les  attacher,  il  avoit  fait  femblant  d'aimer  aufii 
les  anciennes  pratiques ,  &  que  pour  ces  raifons  il  avoit  comté  fur  ces 
gens-là.  '" 


Après  la  Leéiure  faite  de  toutes  les  Pièces  en  prefence  des  Mini  (lires, 
du  Sénat,  &  des  Etats  aiTemblez,  ils  ordonnèrent  qu'on  cherchât  dans  les 
Saintes  Ecritures  de  l'Ancien  &  du  Nouveau  Teftament,  dans  les  Confti- 
tutions  de  l'Empire,  &  dans  les  Reglemens  Militaires  ,des  Autorités  con- 
venables, qu'on  pût  appliquer  au  cas  préfent,  pour  juger  quelles  peines 
ces  Tranfgreiîions  avoient  méritées. 

EXTRAITS    DE   L'ANCIEN   TESTAMENT. 

Au  Levi  tique,  Cbap.  20. 


51 


Ieu  parla  à  Moïfe,  en  difant:  Vous  direz  aux  Enfans  d'Ifraël;  Q:er 
celui  qui  outragera  de  paroles  fon  Père  ou  fa  Mère  ,  foit  puni  de 
„  mort,  fon  fang  eii  fur  lui. 

Au  Deuieroncme ,  Cbap.  21, 

„  /^Uand  un  Homme  aura  un  Enfant  pervers  &  rebelle,  n'obe /flanc 
55  V,/  point  à  la  voix  de  fon  Père,  ni  à  la  voix  de  fa  Mère,  &  qu'ils- 
„  l'auront  châtié,  &  que-nonobîknt  cela  il  ne  les  écoute  point;  Alors  le 
,,  Père  &  la  Mère  le  prendront  5  &.  le  mèneront  aux  Anciens  de  la  Ville  t 
,,  Cl  à  la  porte  de  fon  lieu:  Et  ils  diront  aux  Anciens  de  fa  ¥iHe  ;  j'C'<  ft 

„  ici 


Affaires 
ce   Mos- 

COVIE. 


»» 


I44    MEMOIRES,  NEGOTÎATIONS,  TRAITEZ,  ET 

ici  nôtre  Fils  qui  efl  pervers  &  rebelle,  il  n'obéît  point  à  nôtre  voix, 
il  eil  gourmand  &  yvrogne.  Et  tous  les  gens  de  la  Ville  le  lapideront, 
&  il  mourra  ;  &  ainli  Vous  ôterez  le  méchant  du  milieu  de  Vous,  afin 
que  tout  Ifraè'l  l'entende,  &  qu'il  craigne. 

EXTRAITS  DU   NOUVEAU  TESTAMENT. 

En  St.  Matthieu,  Chap.  if.  1. 

„  A  Lors  des  Docteurs  de  la  Loi  &  des  Pharifiens,  qui  étoient  venus 
,  Jl\.  dejerufalem,  s'adreflerent  à  Jefus,  &  lui  dirent:  Pourquoi  vos 
„  Difciples  violent-ils  la  Tradition  des  Anciens;  car,  ils  ne  lavent  point 
„  leurs  mains,  lors  qu'ils  prennent  leur  repas  ?  Il  leur  répondit:  Pour- 
,,  quoi  vous-mêmes  violez-vous  le  Commandement  de  Dieu ,  pour  fuivre 
„  vôtre  Tradition? 

En  St.  Marc,  Chap.  7.  9. 

f,  "rEfus  dit  aux  Pharifiens  &  aux  Docteurs  de  la  Loi  5  N'étes-vous 
J  donc  pas,  leur  difoit-il,  des  gens  bien  religieux,  de  détruire  leCom- 
,  mandement  de  Dieu,  pour  garder  vôtre  Tradition?  Car  Moïfe  a  dit: 
,  Honorez  vôtre  Père  &  votre  Mère  :  & ,  Que  celui  qui  outragera  de  parole 
„  fon  Père  ou  fa  Mère,  foit  puni  de  mort.  Mais,  vous  dites  vous  autres: 
„  Si  un  Homme  dit  à  fon  Père,  ou  à  fa  Mère:  Tout  don  que  je  fais  à 
„  Dieu  vous  foit  utile,  il  fatisfait  à  la  Loi?  Et  vous  ne  lui  permettez 
„  pas  de  faire  rien  davantage  pour  fon  Père  ou  pour  fa  Mère. 

Aux  Romains ,  Chap.  I.  28. 

„  TTJT  comme  ils  n'ont  pas  voulu  reconnoître  Dieu,  Dieu  aufli  les  a 
5)  JCy  livrez  à  un  fens  dépravé?  En  forte  qu'ils  ont  fait  des  actions  in- 
„  dignes  de  la  Raifon:  qu'ils  ont  été  remplis  de  toute  forte  d'injuftice, 
„  de  méchanceté,  de  fornication,  d'avarice,  de  malignité.  Ils  ont  été 
„  envieux,  meurtriers  ,  querelleurs,  trompeurs.  Us  ont  été  corrompus 
„  dans  leurs  mœurs,  femeurs  de  faux  rapports,  calomniateurs,  &  enne- 
„  mis  de  Dieu.  Us  ont  été  outrageux  ,  fuperbes  ,  altiers ,  inventeurs 
5,  de  nouveaux  moyens  de  faire  Je  mal  ,  defobéïifans  à  leurs  Pères  & 
„  à  leurs  Mères:  fans  prudence,  fans  modeitie,  fans  affection,  fans 
„  Foi,  fans  miféricorde.  Et,  après  avoir  connu  la  Juftice  de  Dieu,  ils 
„  n'ont  pas  compris  que  ceux  qui  font  ces  chofes,  font  dignes  de  mort, 
„  &  non  feulement  ceux  qui  les  font ,  mais  auifi  quiconque  aprouvc 
„  ceux  qui  les  font. 

du*  Ephefiens,  Chap.  6.  r. 

„  X  TOus  Enfans,  obéïffez  à  vos  Pérès  &  à  vos  Mères  en  ce  qui  efl:  fe- 
„    V    Ion  le  Seigneur  j  car,  cela  efl  julle.     Honorez  vôtre  Père  &  vô- 

„  tre 


FF.URE5 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.         Hf 

„  tre  Mère,  (c'eft  le  premier  des  Commandemens  auquel  Dieu  ait  promis    A 
„  une  récompenfe:)  Ilonorez-les,  dit-il,  afin  que  vous  foyez  heureux,   DE  Mos 
&  que  vous  viviez  long-tems  fur  la  Terre. 

DANS  LES    CONSTITUTIONS   DE  RUSSIE. 

Chap.  i.    Statut  i. 

„  CI  quelqu'un  commence,  par  quelque  mauvais  defTein,  à  penfer  con- 
„  l3  tre  la  fanté  du  Czar ,  ou  s'il  fait  quelque  chofe  à  Ton  préjudi- 
»  ce  &  qu'on  trouve  véritablement  qu'il  a  voulu  exécuter  Tes  pernicieux 
,)  deiTeins,  on  doit  le  punir  de  mort  après  l'en  avoir  convaincu. 


::S' 


T) 


Statut  2. 

Emblablement,  fi  quelqu'un, pendant  le  Règne  de  S.  M.  Cz. ,  par  le 
defir  de  régner  dans  l'Empire  Mofcovite ,  &  de  faire  mourir  le  Czar, 
commençoit  d'amafTer  des  Troupes  dans  ce  pernicieux  defTein  ;  ou 
bien  fi  quelqu'un  fait  amitié  avec  les  Ennemis  de  S.  M.  Cz.  ou  entre- 
tient correfpondance  avec  eux,  ou  s'il  les  affifte  pour  parvenir  au  Gou- 
vernement par  leur  afliftance,  ou  pour  faire  quelque  autre  defordre;  Q 
quelqu'un  le  dénonce,  &  que  fur  ces  délations  on  en  trouve  la  vérité, 
„  il  faut  punir  de  mort  un  tel  Traitre  pour  une  telle  Trahifon  vérifiée. 


Dans  les  LOIX  MILITAIRES  de  Sa  Majesté* 

Czarienne  imprimées  à  Petersbourg   en  l'Année 
1717. 

Au  Chapitre  5.  Art.  12. 


55 
55 
55 
5> 
55 


SI  un  Sujet  levé  du  monde,  ou  prend  les  armes  contre  S.  M.  Cz.  ,  ou 
bien  fi  quelqu'un  forme  le  defTein  de  prendre  prifonnier  S.  M. ,  ou 
bien  s'il  lui  fait  quelque  violence  -,  lui  &  tous  ceux  qui  l'auront  aidé, 
ou  qui  lui  auront  donné  confeil ,  feront  écartelez  comme  Criminels  de 
Léze-Majeité ,  &  leurs  Biens  feront  confifquez. 

Explication  de  V Article. 

„  CEront  pareillement  punis  du  même  Supplice,  ceux  qui  ,  quoi  qu'ils 

„  i3  n'ayent  point  pu  mettre  leur  crime  en  exécution,  feront  convain- 

„  eus  d'en  avoir  eu  la  volonté   &  l'envie,    aufli-bien  que  ceux  qui  ne 

„  l'ont  pas  découvert ,  en  ayant  eu  connoiiTance. 

Tome  XL  T  Chap. 


i4tf    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AïFAîRES 

»*  Mos-  Chap.  1 6.  Art.  17. 


COVIE. 


5» 


CElui  qui  forme  le  defTein  de  faire  quelque  trahifon,  ou  bien  quel- 
que chofe  de  femblable ,  quoi  qu'il  ne  le  mette  point  en  exécu- 
tion ,  doit  pourtant  être  puni  de  pareilles  peines  capitales ,  comme  s'il 
avoit  exécuté  fon  deflein. 


Ces  Extraits-là  des  Loix  Divines,  Civiles,  &  Militaires  ayant  été  lus  , 
&  lecture  ouïe ,  il  fut  réfolu  d'un  confentement  unanime ,  qu'avant  de 
prononcer  la  Sentence,  les  Miniitres  &  le  Sénat  dévoient  appeller,  l'un 
après  l'autre ,  les  Juges  établis  pour  former  ce  Tribunal ,  afin  de  dire  cha- 
cun de  bouche  fon  fentiment. 

Ce  qui  ayant  été  fait,  les  Miniftres  ont  pareillement  dit  chacun  fon- 
fentiment,  qui,  quoique  dit  féparémeut ,  revenoit  pourtant  unanimement 
&  fans  aucune  contradiction  à  un  même  Jugement,  ayant  déclaré  par 
Serment  &  en  Confcience , que ,  félonies  Loix  Divines  ,  Civiles,  &  Mili- 
taires extraites  ci-defTus  ,  le  Czarevitch  étoit  digne  de  Mort ,  pour  les 
Crimes  alléguez  &  prouvez  ci-deflus. 

Sur  la  Confeflion  ci-defTus  du  Czarevitch  ,  au  fujet  de  la  Lettre  de 
Bleyer,  Abraham  Lopoukin  a  été  examiné  le  19.  Juin  devant  les  Mi- 
mitres  &  les  Sénateurs.  Il  a  tout  nié  d'abord  avec  de  grands  Ser- 
mens. 

Mais, ayant  été  mené  dans  la  Chambre  de  la  Torture  le  même  jour 
de  Juin  après  midi,  il  a  avoué  &  déclaré  ce  qui  fuit  :  Qu'il  n'avoit  point 
prié  le  Réfident  Bleyer  de  venir  chez  lui,  &  que  lui  n'avoit  point  été 
non  plus  chez  le  Réfident,  mais  qu'ils  s'ecoient  rencontrez  après  l'Au- 
tomne, qu'il  ne  fe  fouvenoit  point  de  l'Année,  que  ç'avoit  été  avant 
l'arrivée  de  S.  M.  Cz.  allant  du  Port  de  la  Trinité  vers  celui  du  Baron 
Schaffirof  •  Que  lui  Lopoukin  avoit  demandé  au  Réfident  :  Ou  eft  à  pré- 
fent  le  Czarevitch  t  y  a-t-il  des  nouvelles  de  lui?  Que  Bleyer  lui  avoit  répon- 
du :  Il  y  a  des  nouvelles  que  le  Czarevitch  eft  auprès  de  nous  dans  les  Etats  de 
Sa  Alajefté  Impériale ,  fjf  Sa  Majefté  Impériale  ne  l'abandonnera  pas.  Que 
lui  Lopoukin  avoit  dit  à  Bleyer:  On  eft  en  peine  du  Czarevitch  chez  nous , 
'i$  fa  for  ne  pourra  eau  fer  un  foulevement  dans  C  Empire.  Que  le  Réfident  lui 
avoit  dit  là  delfus  :  Et  ï Empereur  ne  l'abandonnera  point  dans  un  tel  cas. 

Que  lui  Lopoukin  avoit  dit  au  Réfident  ces  paroles-là  félon  fon  propre 
railonnemenr,  ckfuivant  fon  inclination  pour  le  Czarevitch,  comme  auffi 
fur  ce  qu'ils  ont  raifonné  autrefois  avec  le  Land-Rad  du  Gouvernement 
de'Ca&Q,  nommé. Kanbar  Akinfief,  lors  qu'il  étoit  à  Petersbourg,  lequel 
■étant chez  lui  Lopoukin,  ils  avoient  difeouru  enfemble  &  dit  du  Czare- 
vitch ,  qu'il  étoit  dans  les  Etats  de  l'Empereur  .-qu'ils  avoient  dit  tout  deux, 
que  le  Czarevitch  avoit  bien  fait  de  prendre  ce  parti-là,  &  que  l'Empe- 
reur ne  l'abandonneroit  point.  Que  Kanbar  Akinfief  avoit  dit  à  lui  Lo- 
poukin: 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.       147 

poukin:  Et  chez  nous ,  clans  nôtre  Pais ,  là-bas,  il  peut  bien  arriver  quelque  de- 

I ordre  fur  ce  que  le  Czarevitch  seft  enfui,  parce  que  le  Peuple  y  efi  fort  fini-   «"m"" 

fie  Ùï  ignorant.  comk/ 

Le  21.  J^iin  Sa  Majefté  Czarienne  a  fait  ordonner  aux  Sénateurs,  par  le 
Confeiller  Privé  Pierre  Tolftoi ,  de  fe  trouver  dans  la  Sale;  où  étant  af- 
femblez,  le  même  Confeiller  Privé  leur  a  inlinué  les  Confidérations  (lavan- 
tes que  l'Etat  Ecclefiaflique  avoit  préfentées  à  S.  M.  Cz.  &  qu'Elle  a  vou- 
lu leur  envoier  par  lui,  pour  les  leur  communiquer. 

CONSIDERATIONS    DU    CLERGE'. 

FAifant  réflexion , d'un  côté,  fur  le  grand  Crime  commis  par  un  Fils,  qui, 
à  l'exemple  d'Abfalom  s'eft  foûlevé  contre  Ton  Père  ;  & ,  de  l'autre , 
fur  la  Perfonne  offenfée  ,  qui  efl  un  Père  &  un  Souverain,  qui  a  un  Pou* 
voirabfolu  fur  fon  Filsj  nous  n'ofons  toucher  une  Affaire  de  cette  nature, 
par  les  Confidérations  qu'il  nous  efl  commandé  d'y  faire,  cette  affaire  étant 
apurement  du  Reffort  de  la  Jurifdiclion  Civile,  &  point  du  tour,  de  l'Eccle- 
iiaftique:  outre  que  le  Pouvoir  abfolu  établi  dans  l'Empire  Czarien  qui  efl 
une  Monarchie ,  n'efl  point  fournis  au  Jugement  des  Sujets;  mais, le  Sou- 
verain y  a  l'Autorité  d'agir  fuivant  fon  bon  plaifir,  fans  qu'aucun  des  infé- 
rieurs y  intervienne. 

Cependant,  comme  il  nous  efl:  ordonné  de  rechercher,  non  point  par 
manière  de  Jugement,  mais  pour  l'Initrudlion  feulement,  des  Exemples  6c 
des  Statuts  applicables  à  l'Affaire  dont  il  s'agit} 

C'eft  pour  cela, qu'en  conformité  des  Ordres  du  Monarque,  Nous  foufl 
fignez  Perfonnes  Ecclefiaftiques  préfens  dans  la  Ville  Capitale  impériale 
de  Saint  Petersbourg,  avons  recueilli  des  Saintes  Ecritures  ce  qui  a  paru 
convenir  à  cette  terrible  &  inouïe  Affaire. 


1.  „  Le  Fils  de  Noé,  qui  s'étoit  moqué  de  fon  Père,  en  fut  maudit  & 
>  condamné  à  être  le  Serviteur  des  Serviteurs  de  fes  Frères.     Gen.9. 

tfo    AAt*v&        orîri   nn*>    ttoo    i/-»iit"e    i/~»i««f-  ni-nlr 


1.  Dieu  a  dit  dans  fes  Commandemens  :  „  Honorez  votre  Père  &  vo- 
tre Mère ,  afin  que  vos  jours  foient  prolongez  fur  la  Terre.  Exod.  20. 
„  Vous  ne  maudirez  point  le  Prince  de  votre  Peuple.     Exod.  22. 

3.  „  Celui,  qui  aura  maudit  fon  Père  ou  fa  Mère,  fera  puni  de  mort. 
Exod.  21.  Levit.  20. 

Et  Jefus  Chrift  a  dit  la  même  chofè.  „  Matth.  1  $.  &  Marc .  7. 

4.  ,,  Quand  un  homme  aura  un  Enfant  pervers  &  rebelle ,  n'obéilTanc 
„  point  à  la  voix  de  fon  Père ,  ni  à  la  voix  de  fa  Mère ,  &  qu'ils  l'auront 
„  châtié,  &  que  nonobflant  cela  il  ne  les  écoute  point  ;  alors  le  Père  & 
„  la  Mère  le  prendront,  &  le  mèneront  aux  Anciens  de  fa  Ville,  &  à  la 
„  porte  de  fon  Lieu,  &  ils  diront  aux  Anciens  de  fa  Ville  ;  C'eft  ici  nô- 
„  tre  Fils  qui  efl:  pervers  &  rebelle,  il  n'obéit  point  à  nôtre  voix,  il  efl 
„  gourmand  &  yvrogoe.    Et  tous  les  gens  de  la  Ville  le  lapideront ,  &  il 

T  2  „mour- 


COVIE. 


148    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    „  mourra;  &  ainfi  vous  ôterez  le  méchant  du  milieu  de  vous,  afin  que 
de  Mos-    w  tout  Ifrael  l'entende  &  le  craigne.  Deut. zi. 

f.  „  L'œil  de  celui  qui  fe  moque  de  Ton  Père  ,  &  qui  méprife  l'enfeigne- 
„  ment  de  fa  Mère,  les  Corbeaux  des  torrens  le  crèveront.  Prov.  30. 

6.  ,,  Honorez  vôtre  Père  &  vôtre  Mère  de  fait  &  de  paroles,  afin  que 
,,'la  bénédi&ion  vienne  fur  vous;  la  bénédiction  du  Père  affermit  les  mai- 
,,  fons  des  Enfans  :  &  la  malédiction  de  la  Mère  en  déracine  les  fonde- 
„  mens.     Eccl.  3. 

Et  plus  bas:  „  Mon  Enfant ,  fubvenez  à  vôtre  Père  dans  fa  vieilleffe,  & 
„  ne  le  fâchez  point  durant  fa  vie. 

7.  „  Le  Peuple  d'Ifraèl ,  étant  dans  la  prifbn  de  Babylone,  recueillit  de 
l'argent,  &  l'envoia  àjerufalem  àjoachimle  Grand  Sacrificateur  &  à  tout 
le  Peuple*  ci  ils  leur  mandèrent:  Voici  nous  vous  envoyons  de  l'argent, 
duquel  vous  achèterez  des  Oblations  &  de  l'Encens,  pour  faire  des  Ho- 

„  locauftes  &  des  Sacrifices  pour  le  péché,  &  faites  l'Offrande  que  vous 
offrirez  fur  l'Autel  du  Seigneur  nôtre  Dieu,  priant  pour  la  vie  de  Nabu- 
chodonolbr  Roi  de  Babylone,  &  de  Baltafar  fon  Fils,  afin  que  leur  vie 
dure  autant  que  le  Ciel  fur  la  Terre.     Baruch.  1. 

8.  „  Mardoehée,  ayant  entendu  les  complots  des  Eunuques  du  Roi  qui 
étoient  Gardes  du  Palais ,  &  qu'ils  fe  préparoient  de  mettre  les  mains  fur 
le  Roi  Artaxerxes  pour  le  tuer,  il  donna  avis  au  Roi  de  leur  Confpira- 
tion:  le  Roi  les  fit  mettre  à  la  queftion,  &  aprôs  qu'ils  eurent  confeffé, 
il  les  fit  pendre.     Ejiher  1. 

9.  „  L'Hiftoire  d'Abfalom  efl  connue  par  le  fécond  Livre  des  Rois,  if. 
16.  17.  18. 

Ce  font-là  les  Paffages  de  l'Ancien  Teftament  qu'on  a  recueillis. 

Du  Nouveau  Teftament. 

i.  ,,  Jefus-Chrift  même  étoit  fournis  à  fon  Père  Jofeph  &  à  fa  Mère. 
Luc.  2.     11  a  auffi  ordonné  de  payer  le  Tribut  à  Céfar.   Mat  th.  22. 

2.  „  Si  vous  voulez  entrer  en  la  vie,  gardez  les  Commandemens ,  qui 
font  :  Vous  ne  tuerez  point  ;  Vous  ne  commettrez  point  d'adultère  :  Vous 
ne  déroberez  point:  Vous  ne  direz  point  de  faux  Témoignages.  Hono- 
rez vôtre  Père  &  vôtre  Mère,  &  aimez  vôtre  prochain  comme  vous- 
même.  Maîth.  19. 

3.  ,,  Qui  dira  à  fon  Frère  Racka  méritera  d'être  condamné  par  le  Con- 
feil.     Matlh.'s. 

4.  „  Rendez  l'honneur  à  tous  ceux  à  qui  il  efl  dû  :  aimez  vos  Frères  : 
Craignez  Dieu:  Honorez  le  Roi.  Serviteurs,  foiez  fournis  à  vos  Maî- 
tres avec  toute  forte  de  Révérence ,  non  feulement  à  ceux  qui  font  bons 
&  doux,  mais  à  ceux  qui  font  rudes  &  fâcheux,  car  cela  eit  agréable  à 
Dieu.      î.Pet.  2. 

5.  „  Que  tout  le  monde  fe  foûmeue  auxPuiffances  fupérieures  ;  car  il  n'y 

„  a  point 


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35 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M,  DCC.  XVIII.        i4y 

a  point  de  Puiffance  qui  ne  vienne  de  Dieu,  &  c'efl  lui  qui  a  établi 
tes  celles  qui  font  fur  la  Terre.     Celui  donc  qui  s'oppofe  aux  Puiffan 


tou-     Affaires 

.  qui  lont  lur  la  lerre.     L.eiui  donc  qui  s  oppole  aux  lJmllances,    DE  Mos" 

réfilte  à  l'ordre  de  Dieu  :  &  ceux,  qui  y  réfiftent,  attirent  une  jutte  con 


damnation  fur  eux- mêmes  ;  car  les  Princes  ne  font  point  à  craindre  lors 
qu'on  ne  fait  que  de  bonnes  actions,  mais  lors  qu'on  en  fait  de  mauvai- 
{ès.  Voulez-vous  ne  point  craindre  les  PuifTances?  Faites  bien,  &  el- 
les vous  en  loueront.  Le  Prince  eft  le  Miniltre  de  Dieu  pour  vôtre 
bien.  Que  fi  vous  faites  du  mal,  vous  avez  raifon  de  craindre  ;  parce 
que  ce  n  elt  pas  en  vain  qu'il  porte  l'épée;  car,  il  eft  le  Miniftre  de  Dieu, 
pour  exécuter  fa  vengeance ,  en  puniffant  ceiui  qui  fait  de  mauvaifes  ac- 
tions.    Rom.  13. 

6.  ,,  Vous,  Enfans,  obéïiTez  à  vos  Pères  &  à  vos  Mères  en  ce  qui  eft 
félon  le  Seigneur,  car  cela  elt  julte.  Honorez  vôtre  Père  &  vôtre  Me- 
re,  c'efl:  le  premier  des  Commandemens ,  auquel  Dieu  ait  promis  une 
récompenfe  :  Honorez-les,  dit-il,  afin  que  vous  foyez  heureux ,  &  que 
vous  viviez  long-tems  fur  la  Terre.  Et  vous  Pères,  n'irritez  point  vos 
Enfans  :  mais ,  aiez  foin  de  les  bien  élever ,  en  les  inftruifant  félon  le  Sei- 
gneur. Vous  Serviteurs,  obéïflez  à  ceux  qui  font  vos  Maîtres  félon  la 
chair,  avec  crainte  &  avec  refpect ,  dans  la  fimplicité  de  vôtre  coeur, 
comme  à  Jefus-Chrift  même.  Ne  les  fervez  pas  feulement  lors  qu'ils 
ont  l'œil  fur  vous,  comme  fi  vous  ne  penliez  qu'à  plaire  aux  hommes; 
mais  faites  de  bon  cœur  la  volonté  de  Dieu,  comme  étant  ferviteurs  de 
Jefus-Chrift;  &  fervez-les  avec  affection,  regardant  en  eux  le  Seigneur, 
&  non  les  hommes.  Ephef.  6. 
Les  mêmes  Préceptes  fe  trouvent  dans  les  Epures  aux  CohJJîens  5. 

7.  ,,  AvertifTez-les  d'être  fournis  aux  Princes  &  aux  Magiftrats  ,  de  leur 
rendre  obéilTance ,  d'être  prêts  à  faire  toute  forte  de  bonnes  œuvres. 

Sfa  3- 

Dans  le  Concile  Provincial  tenu  a  Gangres  ,  le  Canon  4.  porte  : 

„  Si  quelques  Enfans  quittent  leurs  Pères  &  Mères  Orthodoxes  &  s'é- 
„  vadent,  ne  rendant  pas  le  refpecl;  dû  à  leurs  Pères  &  Mères,  &  s'ima- 
,,  ginant  qu'ils  feroient  mieux,  ils  feront  maudits. 

La  Bouche  d'Or ,  St.  Chryfojlome  dit  de  la  ProphetefTe  Anne ,  Mère 
de  Samuel ,  dans  [on  premier  Sermon  : 

„  Ce  n'eft  point  feulement  pour  avoir  engendré^  que  Ton  eft  Père;  mais 
„  pour  avoir  bien  inftruit:  &  ce  n'eft  point  feulement  pour  avoir  mis  au 
,,  monde  un  Enfant ,  que  l'on  eft  Mère  3  mais  pour  l'avoir  bien  élevé.  Les 
j,  Parens  mêmes  l'avoueront,  &.  que  ce  n'eft  point  la  Nature  ,  mais  la  Ver- 
„  tu ,  qui  fait  les  Pères.  Ils  rejettent  fouvent  leurs  Enfans ,  &  ils  ex- 
3,  cluent  de  leur  Famille  ceux  qu'ils  voyent  de  mœurs  corrompues,  & 

T  3  „qui 


roviE. 


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ip    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Àmims    ,,  qui  ont  dégénéré  en  méchanceté,  &  ils  en  adoptent  d'autres,  qui  ne 
dkMos»     ;j  jes  touchent  en  rien,  du  côté  de  la  Parenté. 

„  Peut-il  y  avoir  quelque  chofe  qui  mérite  plus  d'admiration ,  que  de  les 
voir  expulfer  ceux  qu'ils  ont  mis  au  monde,  &  de  s'approprier  par  l'A- 
doption ceux  à  la  génération  defquels  ils  n'ont  eu  aucune  part  ? 
,,  Ce  n'efl  point  fans  fujet  que  nous  venons  de  dire  cela  ;  mais  afin  que 
vous  fâchiez  que  la  force  du  Libre- Arbitre  e(t  plus  grande  que  celle  de 
la  Nature,  &  que  c'eft:  plutôt  celle  là ,  que  celle-ci,  qui  fait  les  Pères. 
„  Car  ç'a-été  là  un  Ouvrage  de  la  Divine  Providence  ;  &  qu'elle  ne  dé- 
truifit  point  d'un  côté  toute  affection  naturelle  pour  les  Enfans,  &  que 
de  l'autre,  elle  ne  laiffa  point  tout  à  faire  à  cette  affection  :  Parce 
que  û  les  Parens  dévoient  aimer  leurs  Enfans,  fans  y  être  pouïTez  par  la 
nécefïïté  de  la  Nature,  &  s'ils  n'y  tkoient  portez  que  par  la  confidéra- 
tion  de  la  bonté  de  leurs  moeurs  &  de  leurs  bonnes  actions  ,  vous  ver- 
riez l'ordre  de  tout  le  Genre-Humain  troublé  &  renvérfé,  par  l'expul- 
fion  de  beaucoup  d'Enfans,  que  l'on  chafferoit  de  laMaifon  Paternelle, 
à  caufe  de  leur  parelTe.  Au  contraire ,  fi  la  Providence  avoit  abandon- 
né la  chofe  à  la  force  de  la  Nature,  &  Il  elle  n'avoit  point  permis  de 
haïr  les  méchans  Enfans;  &  que  les  Pères  fuiTent  obligez,  par  la  nécef- 
fité  que  la  Loi  de  la  Nature  leur  impoferoit ,  de  ne  point  difeontinuer 
de  faire  du  bien  à  ceux  qui  les  auroient  outragez,  &  qui  fe  feroient  lai£ 
„  fez  emporter  aux  derniers  excès  contre  eux ,  le  Genre  Humain  feroit 
„  parvenu  au  comble  de  méchanceté. 

„  Si  donc  à  préfènt,  que  les  Enfans  ne  peuvent  point  tout  à  fait  fe  fier 

„  fur  la  Nature,  &  qu'ils  favent ,  que  plufieurs  ont  été  chaffez  de  la  Mai- 

fon  Paternelle  &  privez  des  biens  qui  y  étoient ,  pour  leur  perverfité  & 

leur  dépravation  ,  ne  lailTent  point  de  maltraiter  leurs  Parens,  fur  la 

confiance  qu'ils  ont  en  leur  Amour  \  de  quelles  fortes  de  méci  ancetez  ne 

j,  fe  fouilleroient-ils  point,  fi  Dieu  n'avoit  point  permis  aux  Païens,  qu'ils 

„  les  corrigeaient  &  qu'ils  en  tirallent  vengeance  ? 

„  C'eft  pour  ces  raifons ,  que  Dieu  a  voulu,  que  l'Amour  des  Parens 
„  fût  fondé,  aufli-bien  fur  les  mœurs  de  leurs  Enfans ,  que  fur  la  nécefîité 
de  la  Nature,  afin  qu'ils  leur  pardonnaient  par  inclination  naturelle, 
quand  ils  ne  pécheroient  que  légèrement,  &  qu'ils  puniffent  les  dépra- 
vez &  les  incorrigibles,  pour  que  l'indulgence  ne  les  portât  point  au 
„  mal  ,  fi  la  Nature  avoit  encore  le  defîus,  Ck  qu'elle  les  obligeât  à  les  ca- 
,,  reffer,  lorsqu'ils  font  devenus  mauvais. 

„  Admirez,  je  vous  prie,  la  grandeur  delà  Providence,  qui  comman- 
„  de  d'aimer,  &  qui  preferit  des  bornes  à  l'Amour. 

Nous  Eccefialtiques,  ayant  fait  ces  Extraits  des  Saintes  Ecritures  par 
Ordre  du  Monarque,  non  pas  en  forme  de  Sentence,  ni  pour  donner  un 
Décret,  ainfi  qu'il  eil  dit  ci  deflusj car,  cette  Affaire  n'efl  pas  de  la  com- 
pétence de  nôtre  Jurifdiétion.  Quieft-ce  qui  nous  établiroit  Juges  fur  ceux 
qui  nous  commandent?  Comment  peuvent  ies  membres  gouverner  la  tê- 
te? C'eft  la  tête  qui  gouverne  &  qui  fait  agir  les  membres.    D'ailleurs, 

nôtre 


53 


33 


COVlfco 


RESOLUTIONS  D'ETAT*  M.  DCC.  XVIII.         lSi 

nôtre  Jurifdidtion  étant  fpirituelle,  il  faut  qu'elle  foit  félon  l'efprit,  &  non  Av*aik.- 
point  félon  la  chair  &  le  fang.  Le  pouvoir  de  l'épée  de  fer  n'eft  point  DtMos 
donné  à  l'Egiife:  mais  le  pouvoir  de  l'épée  fpirituelle,  qui  elt  la  Parole  de 
Dieu;  Jefus  Chrift  même  a  défendu  au  Prince  des  Apôcres  de  faire  ufage 
de  l'épée,.  lui  difant  ,  Remettez  votre  épée  en  fon  lieu;  &  il  a  défendu  aux 
autres  Apôtres  de  faire  defcendre  le  feu  du  Ciel  pour  mettre  en  cendres 
Samarie. 

Jefus-Chrifl  a  voulu  enfeigner  par  ces  exemples,  qu'il  ne  convient  pas 
aux  Eccletiaftiques  de  fe  conduire  félon  l'efprit  de  colère,  mais  félon  l'ef- 
prit de  douceur,  ni  de  condamner  quelqu'un  à  la  mort,  ni  de  chercher  du- 
fang,  mais  uniquement  la  véritable  pénitence  &  la  mort  fpirituelle,  qui 
eit  d'être  mort  au  péché  &  vivant  en  Dieu,  félon  la  parole  de  l'Apôtre , 
dans  fon  Epitre  aux  Romains  6. 

Nous  foûmettons  tout  cela  à  la  très-relevée  Confidération  Impériale, 
avec  une  due  Obéiflance.  Que  le  Seigneur  fafle  ce  qui  eft  agréable  de- 
vant fes  yeux.  S'il  veut  punir  celui  qui  eit  tombé,  félon  fes  actions  ,  & 
fuivant  la  mefure  de  fes  crimes ,  il  a  devant  lui  des  exemples  que  nous 
avons  tirez  du  Vieux  TePcament.  S'il  veut  faire  miféricorde,  il  a  l'exem- 
ple de  Jefus-Chriir.  même,  qui  reçoit  le  Fils  égaré  revenant  à  la  repen- 
tance r  qui  laiile  iibre  la  Femme  furprife  en  adultère,  qui  a  mérité  la 
lapidation  félon  la  Loi;  qui  préfère  la  miféricorde  aux  Sacrifices,  difant; 
Je  veux  de  la  miféricorde  \£>  non  pas  le  Sacrifice;  &  par  la  bouche  de  fon  A- 
pôtre  :  La  miféricorde  s'élèvera  au-dejjus  de  la  rigueur  du  Jugement-,  Jacob.  2. 
13.  11  a  auiîi  l'exemple  de  David,  qui  veut  épargner  fon  Fils  perfécuteur 
Abfalom;  car  il  dit  à  fes  Capitaines  qui  vouloient  l'aller  combattre;  E- 
pargnez  mon  Fils  Abfalom.  Vid.  Chron.  11.  Rcg.  18.  5.  &  le  Père  l'a  voulu 
épargner  lui-même,  mais  la  Juftice  Divine  ne  l'épargna  point. 

Après  avoir  brièvement  déduit  tout  cela,  le  cœur  du  Czar  eft  entre 
les  mains  de  Dieu  :  qu'il  choififfe  le  parti  auquel  la  main  de  Dieu  le 
tournera. 

Ces  Confidérations  font  fignees.de  la  propre  main  comme  il  fuit,  l'An 
1718 ,  le  18.  Juin. 

Le  Humble  Etienne  ,  Métropolitain  de  Refan. 

Le  Humble  Feofan,  Eveque  de  Pfkovski. 

Le  Humble  Aîexei,  Eveque  de  Sarski. 

Le  Humble  Ignace,  Eveque  de  Soujedaî. 

Le  Humble  Varlaam,  Eveque  de  Tver. 

Le  Humble  Aaron  ,  Eveque  de  Korele. 

Le  Humble  Métropolitain  de  Sravropol ,  Yannikiy% 

Le  Humble  Métropolitain  de  Fibaidski,  Arfeny. 

Théodore,  Archimandrite  du  Couvent  de  la  Trinité  d'Alexandroner. 

Joachin ,   Archimandrite   du   Couvent   d'Antoine. 

Joaniky,  Archimandrite  du  Couvent  de  la  Réfurrtclion  deDerebanidskî. 

L'Archimandrite  Irinargg,  du  Couvent  de  Kyrille, 

Le 


i52     MEMOIRES/NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires       Le  Père  Gabriel,  Praefet  &  Millionnaire  de  la  Parole  de  Dieu. 
de  Mos-        Le  pere  Markel ,  ProfelTeur. 


COVIE. 


Le  24.  Juin ,  Les  Miniflres  &  les  Sénateurs  s'étant  affemblez  dans  la 
Chancellerie  du  Sénat,  le  Confeiller-Privé  Pierre  Toliloi  a  mis  devant  eux 
la  Déclaration  fuivante  du  Czarevitch,  qui  confirme  fes  Confeffions  du 
19  Juin,  comme  auffi  l'Interrogatoire  criminel  de  fon  Confeffeur  Jacques, 
qui  a  été  dégradé  de  l'Etat  Ecclefialtique. 

Le  19  Juin  1718  ,  le  Czarevitch  a  répondu  dans  fon  Interrogatoire, 
que  tout  ce  qu'il  avoit  confefTé,  &  ce  qu'il  avoit  déclaré  contre  ceux  qu'il 
a  chargez  dans  fes  précédentes  Confeffions  &  devant  les  Sénateurs,  étoit 
véritable,  &  qu'il  n'avoit  rien  omis,  ni  celé  perfonne. 

Il  a  encore  ajouté  de  plus ,  qu'il  y  a  déjà  du  tems  que  fon  Confeffeur 
TArchi-Prêtre  Jacques,  étant  venu  chez  lui  à  S.  Petersbourg,  lui  Czare- 
vitch s'étoit  confefTé  à  lui,  &  qu'il  avoit  dit  à  ce  Jacques  dans  la  Confef- 
fion: Je  fouhaite  la  mort  à  mon  Pere  :  &  que  le  Confeffeur  lui  avoit  ré- 
pondu: Dieu  vous  le  pardonnera  ,  nous  lui  en  fouhaitons  autant. 

Qu'aiant  été  en  dernier  lieu  à  Mofcou ,  &  s'étant  confefTé  à  fon  autre 
Conteffeur  l'Archimandrite  Barlam  du  CoUvent  du  Danilo ,  fitué  dans  le 
Salez  de  Perefclabe  ,  il  avoit  dit  dans  la  Confeffion  ,  qu'il  n'avoit  pas 
tout  avoué  à  fon  Pere  dans  fon  Interrogatoire  5  mais ,  qu'il  lui  avoit  caché 
beaucoup  de  chofes ,  &  qu'il  lui  fouhaitoit  la  mort  :  Sur  quoi  Barlam  lui 
avoit  répondu:  Dieu  vous  pardonnera,  mais  il  faut  que  vous  dijiez  la  vérité 
à  vôtre  Pere. 

Qu'après  l'une  &  l'autre  de  ces  Confeffions ,  il  avoit  reçu  la  Sainte 
Communion  ,  avec  la  permiffion  de  fes  Confeffeurs. 

Le  même  jour,  le  fufdit  Confeffeur  Jacques  ,  dégradé,  a  avoué  à  la 
queltion  &  dans  la  confrontation,  que  le  Czarevitch  Alexei  lui  avoit  dit 
dans  la  Confeffion  les  fufdites  paroles,  qu'il  fouhaitoit  la  mort  de  fon  Pere, 
fur  ce  que  lui  Confeffeur  lui  avoit  demandé  ,  Ne  fouhadtez-vous  pas  la 
mort  de  votre  Pere?  Et  que  le  Czarevitch  avoit  répondu:  Oiiï,  je  la  fou- 
haite. 

Que  lui  Confeffeur  avoit  dit  au  Czarevitch  ,  Nous  lui  fouhaitons  auffi 
tous  la  mort -y  mais  qu'il  ne  fe  fouvenoit  point  qui  la  lui  fouhaitoit  encore. 

Que,  parce  qu'on  aimoit  le  Czarevitch  parmi  le  Peuple,  &  qu'on  bû- 
voit  à  fa  fanté  ,  le  nommant  ÏEfpérance  des  Ruffiens  ,  lui  Jacques  l'a  voit 
dit  au  Czarevitch  ,  l'aiant  entendu  de  plufieurs  perfonnes ,  mais  ne  fe 
fouvenant  plus  de  qui. 

Le  même  jour  le  Sr.  Tolftoi  a  par  ordre  donné  part  au  Sénat  de  ce 
qui  fuit  ; 


Points 


COVIE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.      153 

Points  d'Interrogatoire  5  écrits  de  la  main  de  Sa  Ma-  Arma* s 
jejié  Czarienne,  &  délivrez  à  M.  le  Conseiller -Pri- 
vé ToJfioi-i  pour  examiner  le  Czareviîcb. 

A  Liez  trouver  mon  Fils  après  midi.    Interrogez-le,  &  mettez  par  écrie 
ce  qu'il  vous  dira  ,  après  lui  avoir  demandé  : 

1.  „  Quelle  eft  la  raii'on  pourquoi  il  ne  m'a  pas  obéi",  &  qu'il  n'a  rien. 
„  voulu  faire  de  ce  que  j'ai  demandé  de  lui,  ni  s'appliquer  à  rien  de  bon, 
„  quoi  qu'il  n'ignore  point  que  cela  ne  fe  pratique  point  dans  le  Monde, 
„  outre  que  c'elt  un  péché  &  une  honte  ? 

2.  ,,  D'où  vient  qu'il  a  eu  fi  peu  de  crainte  de  moi,  &  qu'il  n'a  point 
„  appréhendé  les  fuites  de  fa  defobéïlTance? 

2.  „  Pourquoi  il  a  defiré  d'avoir  la  Succeffion  par  d'autres  moiens  que 
par  l'Obé'nTance,  ainfi  que  je  lui  ai  dit  moi-même  ?  Et  interrogez- le  fur 
tout  le  relie  qui  a  rapport  à  cette  Affaire. 


Copie  de  l'Ecrit  de  la  propre  main  du  Czarevitch  3  en 
Réponje  à  ce  qui  eft  ci-deffus. 

T  E  22.  jour  de  Juin  17 18.   Je  répons  ceci  aux  Points  fur  lefqueîs 


>5 


?» 


9)  JL-/  M.  Tolftoi  m'a  interrogé. 

1.  „  Quoique  je  n'aie  pas  ignoré  qu'il  ne  fe  pratique  pas  dans  le  Mon- 
„  de  d'être  defobéïffant  comme  je  l'étois  à  mon  Père,  &  de  ne  vouloir 
„  point  faire  ce  qui  lui  plaifoit;  que  même  cela  étoit  un  péché,  &  une 
„  grande  honte  :  cependant,  cela  ell  provenu,  de  ce  que ,  dès  mon  en- 
j,  fance,  j'ai  vécu  avec  une  Gouvernante  &  des  Filles ,  dont  je  n'ai  ap- 
„  pris  que  des  amufemens  &  des  jeux  de  la  chambre  ,  &  à  faire  le  bi- 
got, à  quoi  j'étois  incliné  naturellement. 

,,  Les  perfonnes,  qu'on  me  donna  après  qu'on  m'eût  ôté  ma  Gouver- 
nante ,  ne  m'apprenoient  point  à  mieux  faire  ,  Nikifore  Bafemskoi  en- 
„  tre  autres,  Alexei  Bailli ,  &  les  Nariskins. 

„  Mon  Père ,  aiant  foin  de  mon  Education  ,  pour  me  porter  à  m'appli- 
>,  quer  à  ce  qui  pourroit  me  rendre  digne  d'un  Fils  du  Czar  ,  m'ordonna 
„  d'apprendre  la  Langue  Allemande  &'  d'autres  Sciences  pour  lefquelles 
„  j'avois  beaucoup  d'averfion.  Je  ne  m'y  fuis  appliqué  qu'avec  une  gran- 
„  de  négligence  ,  feulement  pour  pafler  le  tems  ,  fans  en  avoir  jamais 
„  d'envie. 

„  Et  comme  mon  Père ,  qui  étoit  alors  fou-vent  à  l'Armée,  étoit  loin  de 
„  moi,  il  ordonna  que  le  Sereniflime  Prince  Menchikof  eut  l'œil  fur  moi. 
Quand  j'étois  avec  lui,  j'étois  obligé  de  m'applixmer  -;mais,  quand  j'étois 
hors  de  la  vûë  de  ce  Prince ,  lefdits  Nariskins  &  Bafernskoi,'  voiant  que 
mon  penchant  alloit  uniquement  à  la  bigoterie,  à  l'oifiveté,  à  fréquen- 
„  ter  les  Prêtres  &  ;les  Moines  ,  &  à  boire  avec  eux,  ils  ne  m'en  ont 
Tome  XL  V  „  non- 


COVIE. 


5» 

5» 
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55 

J) 
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55 


if4    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Atfaîhes  „  non-feulement  pas  détourné  ,  mais  ils  ont  même  fait  avec  plaifir  corn- 
et- Mos-     ?)  me  moi.  Con^me  e'étoient  des  gens,  qui  étoient  auprès  de  moi  dès  mon 

„  enfance,  j'étois  accoutumé  à  faire  ce  qu'ils  me  difoient,  à  les  craindre, 
à  leur  complaire  en  tout;  &  ils  m'ont  déplus  en  plus  aliéné  de  mon  Pè- 
re, en  me  divertiffant  par  des  plaifirs  de  cette  nature-là  ;  &  peu  à  peu 

^,  j'ai  eu  en  horreur  ,  non-feulement  les  Affaires  militaires  &  les  autres 
actions  de  mon  Père ,  mais  fa  Perfonne  même.  C'eft  ce  qui  m'a  fait 
toujours  fouhaiter  d'être  éloigné  de  lui. 

Lors  que  je  fus  chargé  à  Mofcou  du  Gouvernement  de  l'Empire,  me 
voiant  en  pleine  liberté,  &  Maître  de  moi-même,  bien  loin  de  confidé- 
rer  que  mon  Père  me  l'avoit  mis  entre  les  mains  ,  pour  m'y  former  & 

„  me  conduire  à  la  SuccelTion  après  lui  ,  Il  je  m'en  rendois  capable  ;  je 
m'abandonnai  encore  davantage  aux  plaifirs  auxquels  j'étois  accoutumé 
avec  les  Prêtres  &  les  Moines,  &  avec  d'autres  gens  de  cette  trempe, 
Alexandre  Kikin  s'eft  toujours  appliqué  fortement  à  me  fortifier  dans 
ces  déréglemens ,  quand  il  a  été  avec  moi. 

Mon  Père  aiant  pitié  de  moi,  &  defirant  de  me  rendre  digne  de  l'E- 

,,,  tatou  j'étois  appelle,  m'envoia  dans  les  Pais  Etrangers;  mais,  comme 

„  j'étois  déjà  un  homme  fait,  &  d'un  âge  formé  ,  je  ne  changeai  rien  de- 

„  mes  habitudes. 

„  Il  eft  pourtant  vrai ,  que  le  féjour  que  j'y  ai  fait  m'a  été  utile  en 

„  quelque  chofe,  mais  non  pas  afiez  pour  qu'il  eut  pd  déraciner  les  mau- 

„  vaifes  habitudes  qui  avoient  jette  dans  moi  de  fi  profondes  racines. 
2.  „  Ceft  le  mauvais  caractère  de  mon  méchant  efprit,  qui  a  été  caufe 

„  que  je  n'apprehcndois  point  les  corrections  de  mon  Père  pour  mes 
defobéiffancesrje  l'avoué' franchement-,  car,  quoique  je  le  craigniiTe  vé- 
ritablement, ce  n'étoit  pourtant  pas  d'une  crainte  filiale,  elle  n'alloit 
qu'à  chercher  les  moiens  de  m'éloigner  de  lui,  pour  ne  point  faire  fa 
Volonté.  J'en  veux  alléguer  ici  un  exemple  évident. 
„  A  mon  retour  auprès  de  mon  Père  ,  revenant  des  Païs  Etrangers  à 
S.  Petersbourg  ,  il  me  fit  un  accueil  gracieux.  Il  me  demanda,  entre 
autres  chofes ,  fi  je  n'avois  point  oublié  ce  que  j'avois  appris  :  Je  lui 
répondis  que  non.  Il  m'ordonna  de  lui  apporter  mes  Ouvrages  de 
Deffeins.  Je  craignis  qu'il  ne  me  voulût  faire  defîïner  en  fa  prélence, 
parce  que  je  ne  fa  vois  rien,  &  je  fongeai  à  me  gâter  la  main  droite, 
pour  qu'il  me  fût  impoffible  de  travailler  avec.  Je  chargeai  un  piflolet 
d'une  baie,  &  le  prenant  de  la  main  gauche,  je  tirai  dans  la  paume 
de  la  droite  pour  la  percer  :  la  baie  manqua  la  main  ,  mais  la  pou- 
dre la  brûla  affez  pour  être  blefiee.  Comme  le  coup  porta  dans  la 
muraille  de  mon  Cabinet,  on  l'y  peut  voir  encore.  Mon  Père,  voiant 
que  j'écois  bleilé  à  la  main  ,  me  demanda  comment  cela  étoit  arri- 
vé ?  Je  lui  donnai  quelque  défaite  ;  mais,  je  ne  lui  dis  point  la  vé- 
rité. On  peut  voir  par-là,  que,  quoique  je  craignifle  mon  Père,  ce 
n  étoit  point  d'une  crainte  filiale. 

5,  3,  Pour  ce  que  j'ai  defiré  la  Succeffion  par  d'autres  voies  que  par 

„  celle 


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COVIE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  XYJIL        t$f 

celle  de  l'ObéifTance  ,  tout  le  Monde   en   peut  aifément  deviner  la  Affaire 
raifon;  car,  quand  je  fus  une  fois  écarté  du  bon  chemin  ,  ne  voulant  en    nE  Mos- 
rien  imiter  mon  Père,  je  cherchois  d'arriver  à  la  Succeflion  de  quelque 
autre  manière  que  ce  fût,  excepté  de  la  bonne  façon.     Je  la  voulois 
avoir  par  une  afïiftance  étrangère ;&  ,  fi  j'y  étois  parvenu,  &  que  l'Em- 
pereur eut  mis  en  exécution  ce  qu'il  m'avoit  promis,  de  me  procurer 
la  Couronne  de  Ruflie  ,  même  à  main  armée,  je  n'aurois  rien  épargné 
pour  ne  mettre  en  pofTefiion  de  la  Succeflion.     Par  exemple,  fi  l'Em- 
pereur avoit  demandé  en  échange  des  Troupes  Ruiîiennes  pour  fon  fer- 
vice  contre  qui  que  ce  fût  de  fes  ennemis ,  ou  de  grolTes  fommes  d'ar 
gent,  j'aurois  fait  tout  ce  qu'il  auroit  voulu,  &  j'aurois  donné  auffi  de 
grands  préfens  à  fes  Miniitres  &  à  fes  Généraux.     J'aurois  entretenu 
à  mes  dépens  les  Troupes  Auxiliaires  qu'il  m'auroit  données,  pour  me 
mettre  en  pofTeflion  de  la  Couronne  de  Ruflie;  &,  en  un  mot,  rien  ne 
m'auroit  coûté  pour  accomplir  en  cela  ma  volonté. 


Les  fouflîgnez,  établis  par  Sa  Majefté  Czarienne,  &  afTemblez  dans  h 
Sale  pour  rendre  un  Jugement,  après  avoir  ouï  tout  ce  qui  a  été  dit,  lu  „ 
&  rapporté,  &  y  avoir  fait  de  mûres. Réflexions,  ont  d'un  Confentement 
unanime  prononcé  &  ordonné  de  figner  la  Sentence  fuivante  ,  &  ils  y 
ont  mis  leurs  Signatures  de  leurs  propres  mains. 

Le  24.  Juin  1728. 

EN  vertu  de  l'Ordonnance  exprefTe  émanée  de  Sa  Majefté  Czarien- 
ne, &  fignée  de  fa  propre  main  le  13.  Juin  dernier,  pour  le  Juge- 
ment duCzarevitch  Alexei  Petrovitch ,  fur  fes  tranfgreflions,  &  fes  cri- 
mes contre  fon  Père  &  fon  Seigneur,  les  Souflignez  Miniitres,  Sena- 
„  teurs,  Etats  Militaire  &  Civil,  après  s'être  afTemblez  plufieurs  fois  dans 
„  la  Chambre  de  la  Régence  du  Sénat  à  St.  Petersbourg  ;  aiant  ouï  plus 
„  d'une  fois  la  lecture  qui  a  été  faite  des  Originaux  &  des  Extraits  des 
„  témoignages  qui  ont  été  rendus  contre  lui ,  comme  auiîi  des  Lettres 
,,  d'exhortations  de  Sa  Majefté  Czarienne  au  Czarevitch ,  &  des  Réponfes 
„  qu'il  y  a  faites,  écrites  de  fa  propre  main  ,  &  des  autres  Acles  appar- 
„  tenant  au  Procès  ;  de  même  que  des  Informations  criminelles,  &  des 
„  Confeflions  &  des  Déclarations  du  Czarevitch,  tant  écrites  de  fa  pro- 
„  pre  main,  que  faites  de  bouche  à  fon  Seigneur  &  fon  Père,  &  devant 
„  les  Souflignez  établis  par  l'Autorité  de  Sa  Majefté  Czarienne,  à  l'effet 
,,  du  préfent  Jugement:  Ils  ont  déclaré  &  reconnu,  que,  quoi  que  félon 
„  les  Droits  de  l'Empire  Ruflien,  il  n'ait  jamais  appartenu  à  eux,  étant 
Sujets  naturels  de  la  Domination  Souveraine  de  Sa  Majefté  Czarienne, 
„  de  prendre  connoiffance  des  Affaires  de  cette  nature  ,  qui ,  félon  fon 
„  importance,  dépend  uniquement  de  la  Volonté  abfoluë  du  Souverain, 
„  dont  le  Pouvoir  ne  dépend  que  de  Dieu  feul,  &  n'efl  point  limité  par 
„' aucune  Loi;  fe  foûmettant  pourtant  à  la  fufdite Ordonnance  de  SaMa- 

V  2.  „  jefté 


ii 


COVIE. 


i;6   MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    jS  jeflé  Czarienne  leur  Souverain,  qui  leur  donne  cette  Liberté,  &  après 
te  Mos-       ^e  m£lres  Réflexions.  &  en  Confcience  Chrétienne,  fans  crainte,  ni 
„  flaterie  ,  &  fans  avoir  égard  à  la  Perfbnne ,  n'aiant  devant  les  yeux  que 
„  les  Loix  Divines  applicables  au  cas  préfent ,  tant  de  l'Ancien  que  du 
„  Nouveau Teltament ,  les  Saintes  Ecritures  de  l'Evangile  &  des  Apôtres , 
„  comme  auiTI  les  Canons  &  les  Régies  des  Conciles ,  l'Autorité  des  Saints 
„  Pérès  &des  Docteurs  de  l'Eglife^  prenant  auffi  des  lumières  des  Confi- 
„  dérations  des  Archevêques  &  du  Clergé  afTemblez  dans  St.  Fetersbourg 
„  par  Ordre  de  Sa  Majelté  Czarienne,  lefquelles  font  tranfcrites  ci-deffus, 
,,  &  fe  conformant  aux  Loix  de  toute  la  Rufîie  ,  &  en  particulier  aux 
,,  Conflitutions  de  cet  Empire,  aux  Loix  Militaires,  &aux  Statuts,  qui  font 
})  conformes  aux  Loix  de  beaucoup  d'autres  Etats,  fur-tout  à  celles  des 
„  anciens  Empereurs  Romains  &  Grecs,  &  d'autres  Princes  Chrétiens: 
„  Les Souffignez ,  aiant  été  aux  Avis,  font  convenus  unanimement,  fans 
„  contradiction ,  &  ils  ont  prononcé,  que  le  Czarevitch  Alexei  Petrovitcb 
s,,  eft  digne  de  Mort  pour  Ces  Crimes  iufdits,&  pour  fes  Tranfgreffions  capi- 
„  taies  contre  fon  Souverain  &  fon  Père,  étant  Fils  &  Sujet  de  Sa  Ma- 
„  jelté  Czarienne  ;  en  forte  que ,  quoi  que  Sa  Majeflé  Czarienne  ait  pro- 
„  mis  au  Czarevitch,  par  la  Lettre  qu'il  lui  a  envoyée  par  M.  le  Confeil- 
.,  ler-Privé  Tolfloi,  &  par  le  Capitaine  de  la  Garde  Romanzow,  datée 
de  Spa  le  10.  Juillet  1717,  de  lui  pardonner  fonEvafion,  s'il  retour- 
noit  de  fon  bon  gré  &  volontairement,  ainfi  que  lui  Czarevitch  même 
l'a  avoué  avec  remerciment ,  dans  fa  Réponfe  à  cette  Lettre,  écrite  de 
Naples  le  4.  Octobre  1717,  où  il  a  marqué  qu'il  remercioit  Sa  Majelté 
Czarienne  pour  le  Pardon  qui  lui  étoit  donné  feulement  pour  fon  Eva- 
,,  fion  volontaire  ;  il  s'en  eil  rendu  indigne  depuis  par  fes  oppofitions  aux 
,,  volontez  de  fon  Père  &  par  fes  autres  tranfgreffions  qu'il  a  renouvel- 
5,  lées  &  continuées,  comme  il  eil  amplement  déduit  dans  le  Manifefle 
,,  publié  par  Sa  Majeflé  Czarienne  le  3  Février  de  l'Année  préfente,  & 
„  parce  qu'entr'autres  chofes  il  n'efl  pas  retourné  de  fon  bon  gré. 

„  Et  quoi  que  Majeflé  Czarienne,  à  l'arrivée  du  Czarevitch  à  Mofcou , 
avec  fon  Ecrit  de  la  Confeffion  de  fes  Crimes ,  &  où  il  en  demandoic 
Pardon,  eut  pitié  de  lui,  comme  il  efl  naturel  à  un  Père  d'en  avoir  de 
fon  Fils,  &  qu'à  l'Audience  qu'elle  lui  donna  dans  la  Sale  du  Château  le 
même  jour  3  Février,  elle  lui  promit  le  Pardon  de  toutes  fes  Tranfgref- 
"„  fions  :   Sa  Majeflé  Czarienne  ne  lui  fit  cette  promefTe,  qu'avec  cette 
„  condition  exprefle,  qu'elle  exprima  en  prefence  de  tout  le  Monde,  fa- 
,,  voir  que  lui  Czarevitch  déclareroit,  fans  aucune  reftriction  ni  referve, 
„  tout  ce  qu'il  avoit  commis  &  tramé  jufques  à  ce  jour-là  contre  Sa  Ma- 
?,  jeflé  Czarienne ,  &  qu'il  découvriroit  toutes  les  perfonnes  qui  lui  ont  donné 
des  confeils,fes  complices,  &  généralement  tous  ceux  qui  ont  fçû  quel- 
„  que  chofe  de  fes  defîeins  &  de  fes  menées  j  mais,  que  s'il  celoit  quel- 
qu'un, ou  quelque  chofe,  le  Pardon  promis  feroit  nul  &  demeureroit 
,,  révoqué,  ce  que  le  Czarevitch  reçut  alors  &  accepta,  au  moins  en  ap- 
pareil- 


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RESOLUTIONS   D'ETAT,   M.  D'CC.  XVIII.       i%? 

,',  parence,  avec  des  larmes  de  reconnoiffance,  &  il  promit  par  Serment  Affaire». 
„  de  déclarer  tout,  fans  réferve.  En  confirmation  de  quoi  il  baifa  la  Sain-  DK  M°s- 
„  te  Croix,  &  les  Saintes  Ecritures,  dans  l'Egiife  Cathédrale.  covie. 

„  Sa  Majelté  Czarienne  lui  confirma  auiîi  la  même  chofe  de  fa  propre 
„  main,  le  lendemain  ,  dans  les  Articles  d'Interrogatoire  inférez  ci-deflus, 
„  qu'elle  lui  fit  donner,  aiant  écrit  à  leur  tête  ce  qui  fuit: 

„  Comme  vous  avez  reçu  hier  vôtre  Pardon,  à  condition  que  vous  déclareriez. 
,,  toutes  les  cir  confiance  s  de  votre  Evajion  &  tout  ce  qui  y  a  du  rapport  :  mais 
„  que  fi  vous  celiez  quelques  chofe  s ,  vous  ferrez  privé  de  la  Fie;  &  comme  vous 
,,  avez  déjà  fait  de  bouche  quelques  Déclarations ,  vous  devez  pour  une  plus  am- 
„  pie  fat is faction,  &  pour  vôtre  décharge,  les  mettre  par  écrit  félon  les  Points 
,,  marquez  ci-dejfous. 

„  Et,  à  la  conclufion,  il  étoit  encore  écrit  de  la  main  de  Sa  Majeflé 
„  Czarienne  dans  le  7  Article. 

„  Déclarez  tout  ce  qui  a  du  rapport  à  cette  affaire ,  quand  même  cela  ne  fe- 
„  roit  point  fpécifié  ici ,  £5?  purgez-vous  comme  dans  la  Sainte  Confeff.on  :  mais, 
,,  fi  vous  cachez  ou  celez  quelque  chofe  qui  fe  découvre  dans  la  fuite  ,  ne  mim- 
,,  putez  rien;  car  ,  il  vous  a  été  déclaré  hier  devant  tout  le  monde ,  quen  ce  cas- 
„  là ,  le  Pardon  que  vous  avez  reçu  ferait  révoqué  £5?  nul. 

,,  Nonobftant  cela,  le  Czarevitch  a  parlé  dans  fes  Réponfes  &  dans  fes 
„  Conférions,  fans  aucune  fmcérité:  il  a  celé  &  caché  non  feulement 
beaucoup  deperfonnes,  mais  aufll  des  Affaires  capitales  &  Ces  Tranf- 
,,  greffions,  &  en  particulier  Ces  delfeins  de  Rébellion  contre  fon  Père 
„  &  fon  Seigneur,  &  fes  mauvaifes  Pratiques  qu'il  a  tramées  &  entrete- 
nues depuis  long-tems ,  pour  tâcher  d'ufurper  le  Trône  de  fon  Père , 
„  même  de  fon  vivant,  par  différentes  mauvaifes  voies,  &  fous  des  mé- 
dians prétextes  ;  fondant  fes  efpérances  &  les  fouhaits  qu'il  faifoit 
de  la  mort  de  fon  Père  &  fon  Seigneur,  far  la  déclaration  dont  il  fe 
flatoit  du  petit  Peuple  en  fa  faveur. 

Tout  cela  a  été  découvert  enfuite,  par  les  Informations  criminelles 
après  qu'il  a  refufé  de  le  déclarer  lui-même  ,  comme  il  a  paru  ci» 
deffus. 

„  Ainfi,  il  efl  évident  par-  toutes  ces  Démarches  du  Czarevitch ,  Se  par 
,,  les  Déclarations  qu'il  a  données  par  écrit  &  de  bouche  ,  &  en  der- 
„  nier  lieu  par  celle  du  22.  Juin  de  la  préfente  Année, qu'il  n'a  point  vou- 
„  lu  que  la  Succeffion  à  la  Couronne  lui  vint  après  la  mort  de  fon  Pere? 
„  de  la  manière  que  fon  Père  auroit  voulu  la  lui  laififer,  félon  l'ordre  de 
„  l'équité  &  par  les  voies  &  les  moiens  que  Dieu  a  preferits:  mais,  qu'il 
„  l'a  defirée,  &  qu'il  a  eu  deffein  d'y  parvenir,  même  du  vivant  de  fon 
„  Père  &  fon  Seigneur,  contre  la  volonté  de  S.  M.  Cz.  &  en  s'oppofanc 
„  atout  ce  que  fon  Père  vouloit,  &  non  feulement  par  des  foûlevemens 
„  de  Rebelles  qu'il  efperoit  ;  mais  encore  par  l'affiftance  de  l'Empereur, 
„  &  avec  une  Armée  étrangère  qu'il  s'étoit  flatté  d'avoir  à  fa  difpofuion, 
„  au  prix  même  du  renverfement  de  l'Etat ,  &  de  l'aliénation  de  tout  ce 
„  qu'on  auroit  pu  lui  demander  de  l'Etat ,  pour  cette  alîiihnce. 

V  3  »  L'EU 


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COVIE. 


if8    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Asiaires  „  L'Expofé  qu'on  vient  de  faire  fait  donc  voir  évidemment ,  que  le 
blMos-  ?j  Czarevitch,  en  cachant  tous  ces  pernicieux  deffeins  ,  en  celant  beau- 
„  coup  de  perfonnes  qui  ont  été  d'intelligence  avec  lui,  comme  il  a  fait 
„  jufques  au  dernier  Examen  &  jufques  à  ce  qu'il  a  été  pleinement  con- 
„  vaincu  de  toutes  fes  machinations,  a  eu  en  vue  de  fe  referver  des 
„  moiens  pour  l'avenir,  quand  l'occafion  fe  prefenteroit  favorable  de  re- 
„  prendre  Çqs  deiïeins  &  de  pouffer  à  bout  l'exécution  de  cette  horrible 
„  Entreprife  contre  fon  Père  &  ion  Seigneur,  &  contre  tout  cet  Enr 


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a  été  promis  par  fon  Seigneur  &  fon  Père  ;  il  l'a  auffi  avoué  lui-mê- 
me, tant  devant  Sa  Majelté  Czarienne,  qu'en  prefence  de  tous  les  E- 
tats  Ecclefialtique  &  Séculier,  &  publiquement  devant  toute  l'Affemblée, 
&  il  a  auffi  déclaré  verbalement  &  par  écrit  devant  les  Juges  fouiTignez 
établis  par  Sa  Majeflé  Czarienne,  que  tout  ce  que  deiïus  etoit  véritable 
&  manifeffe  par  les  effets  qui  en  avoient  parus. 

,,  Ainfi,  puiîque  les  fufdites  Loix,  Divines  &  Eccle  laftiques ,    les  Ci- 
viles &  les  Militaires,  &  particulièrement  les  deux  dernières,  condam- 
nent à  mort  fans  miiericorde,  non  feulement  ceux  dont  les  attentats 
contre  leur  Père  &  Seigneur  ont  été  manifeftez   par  des    évidences, 
'    ou  prouvez  par  des  Ecrits,  mais  même  ceux  dont  les  attentats  n'ont 
,  été  que  dans  l'intention  de  fe  rebeller ,   ou  d'avoir  formé  de  fimples 
„  deffeins  de  tuer  le  Souverain,  ou  d'ufurper  l'Empire.  Or ,  un  deffein  de 
,  rébellion,   tel  qu'on  n'a  guère  oui  parler  de  femblable  dans  le  Monde, 
joint  à  celui  d'un  horrible  double  Parricide  contre  fon   Souverain ,  pre- 
mièrement comme  Père  de  la  Patrie,  &  encore  comme  fon  Père  félon 
la  Nature,  (un  Père  très-Clement  qui  a  fait  élever  le  Czarevitch  depuis 
le  berceau  avec  des  foins  plus  que  paternels,  avec  une  tendreffe  &  une 
bonté  qui  ont  paru  en  toutes  rencontres,  qui  a  tâché  de  le  former  pour 
le  Gouvernement ,  &  l'inftruire  avec  des  peines  incroiables,   &  une 
application  infatigable  dans  l'Art  Militaire,  pour  le  rendre  capable  & 
digne  de  la  Succeffion  d'un  û  grand  Empire)   à  combien  plus  forte 
rarfon  un  tel  deffein  a  mérité  une  Punition  de  mort? 

C'ell  avec  un  cœur  affligé,  &  des  yeux  pleins  de  larmes,  que  nous  , 
comme  Serviteurs  &  Sujets,  prononçons  cette  Sentence;  confiderant 
„  qu'il  ne  nous  appartient  point  en  cette  qualité  d'entrer  en  un  Jugement 
de  fi  grande  importance,  &  particulièrement  de  prononcer  une  Senten- 
ce contre  le  Fils  du  très  Souverain  &  très  Clément  Czar  nôtre  Seigneur. 
Cependant  fa  Volonté  étant  que  nous  jugions,  Nous  déclarons,  parla 
„  prefente,  notre  véritable  opinion,  &  nous  prononçons  cette  Condam- 
nation avec  une  Confcience,  fipure,&  auffi  Chrétienne,   que  nous 
croions  pouvoir  la  foûtenir  devant  le  terrible,  le  jufte,  &  l'impartial  Ju- 
n  gement  du  grand  Dieu. 

„  Soumettant  au  refte  cette  Sentence  que  nous  rendons,  &  cette  Con- 
9f  damnation  que  nous  faifons ,  à  la  Souveraine  Puiffance ,  à  la  Volonté , 


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RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.DCC.  XVIII.        150 

„  &  à  la  clémente  Revifion  de  Sa  Majeiié  Czarienne  nOtre  très  clément   A^airé1* 

„  Monarque.  DE  Mo3- 

Au  bas  de  la  Sentence  ont  fi^ne  de  leur  propre  main , 

Alexandre  Menchikoff, 

Général  Amiral,    Comte  Apraxin  , 

Chancelier,  Comte  Gabriel  Golofkin, 

Confeiller  Privé,  Prince  Jacques  Dolgorouki, 

Confeiller  Privé,  Comte  Jean  Muflîn,  Pufchian , 

Confeiller  Privé,  Tichon  Strefchneff, 

Sénateur,  le  Comte  Pierre  Apraxin, 

Vice-Chancelier  &  Confeiller  Privé,  Baron  Pierre  SchifirofF, 

Confeiller  Privé,  &  Capitaine  des  Gardes ,  Pierre  Tolitoy, 

Sénateur,  Prince  Dimitry  Galizin, 

General,  Adam  Weide, 

Lieutenant  General,  Jean  Boutourlin, 

Confeiller  Privé,  Comte  André  Matweoff, 

Sénateur,  Prince  Pierre  Galizin, 

Sénateur,  Michel  Samarin, 

General  Major,  Grigory  Czernifchoff, 

General  Major,  Jean  Golowin, 

General  Major,  Prince  Pierre  Galizin, 

Chambellan ,  Prince  Jean  Ramodanoffsky , 

Boyarin,  Alexei  Soltikoff, 

Gouverneur  de  Sibérie,  Prince  Matihei  Gagarin. 

Bojarin ,  Pierre  Boutourlin. 

Le  Gouverneur  de  Mofcou ,  Kirilo  Nariskin. 

Brigadier  &  Major  de  la  Garde,  Michel  Wolkoff. 

Major  de  la  Garde  du  Régiment  de  Preobrachenski. 

Major  ,  Prince  Grigory  Youfoupoff. 

General  Major  &  Capitaine  de  la  Garde ,  Paul  Jagouzinsky. 

Major  de  la  Garde,  Simeon  Soltikoff. 

Major  de  la  Garde,  DimitrioFMamonoff. 

Major  de  la  Garde  de  Preobrachensky ,  Bafily  Karzmin. 

Brigadier  &  Revifeur  General,  Bafily  ZatofT. 

Colonel ,  Garafim  Kafcheleff. 

Gentilhomme  de  la  Chambre,  Theodor  Boutourlin. 

Colonel ,  Gabriel  Noroff. 

Okolnizy,  Prince  Gurgen  Schzerbaty. 

Vice-Gouverneur  de  St.  Petersbourg,  Stepan  KlokozofT. 

Major  delà  Garde  du  Corps ,  Oufchakoff. 

Capitaine- Lieutenant  des  Bombardiers,  Skornyakoff  PifarefT» 

Capitaine  de  la  Garde  du  Corps,  Prince  Boriffe  Czirkoff. 

Vice-Gouverneur  d'Archangel  Pierre  Lodichensky. 

Colonel ,  Jean  Strekaloff. 

Vice-Gouverneur  d'Afoff,  Stepan  KolitchotT. 

Capitaine 


DE     MOS 
COVIE. 


160    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITOZ,  ET 

Amx"ES        Capitaine  de  la  Garde ,  Petroff  Solowowa. 

Capitaine  de  la  Garde,  Alexandre  RoumyanzofF. 

Capitaine  de  la  Garde,  Simeon  Theodoroff. 

General  Maitre  de  la  Police ,  &  General-Adjoutant  de  Sa  Majefté  Cza- 

rienne,  Anthoine  Dewyer. 
Capitaine  de  la  Garde,  Leff  Ifmailoff. 
Capitaine  de  la  Garde ,  Prince  Jean  Chachoffsky. 
Capitaine  de  la  Garde,  Weljaminoff  Zernoff. 
Colonel,  Pierre  Sa weloff. 
Capitaine  de  la  Garde,  Jean  LigharefF. 
Capitaine  de  la  Garde,  Zacharoff. 
Capitaine  de  la  Garde,  Alexei  BaskakofF. 
....  Dimitry  Beftoucheff  Riumin. 
Colonel,  Prince  Bafily  Wjazemsky. 
Lieutenant  delà  Flotte,  Jean  ScheremetofF. 
Prince  Sergei  BorifofF  Golizin. 
....  Prince  Simeon  Sonzoff  Zafekin. 
Capitaine  de  la  Garde ,  Prince  Grigory  Ourouiîbff. 
....  Prince  Alexei  Czerkasky. 
»...  Matthei  Golowin. 
Colonel  Dolgoroukoi. 
....  Leonty  MichailofFGleboiF. 
Colonel,  Prince  Jean  Borjatinsky. 
....  Boris  Neronoff. 
Stepan  Neledinsky  Melezkoi. 
Lieutenant  de  la  Flotte,  Bafily  Scheremetoff. 
....  Bafily  Rzeffsky. 

Colonel  &  Capitaine  de  la  Garde  du  Corps,  Konchin. 
Capitaine  Lieutenant  de  Garde,  Alexandre  Loukin. 
Sous-Lieutenant  de  la  Garde,  Stepan  Saffonoff. 
Lieutenant  de  la  Garde ,  Frédéric  Polonskoi. 
Adjoutant  Michel  Czebifchof. 
Capitaine-Lieutenant  de  la  Garde,  Droumant. 
Goljanifchoff  Koutoufoff. 
Lieutenant-Colonel ,  Boukholz. 
Capitaine  de  h  Garde,  Frédéric  Metroffanoff. 
Capitaine  de  la  Garde  Jean  Karpoff. 
Lieutenant-Colonel  d'Infanterie ,  Stepan  Kafadawleff. 
Colonel  Jean  KoltofFskoi. 
Colonel  &  Commandant  de  St.  Petersbourg  &  Capitaine  de  la  Garde 

du  Corps,  Jacob  Bachmeotoff. 

Colonel,  Elias  Loutkowskoi. 

Colonel*  Prince  Michel  Schzerbatoi. 

Colonel,  Artemy  Zagyaskoi. 

Lieutenant  de  la  Garde,  Jean  KoflofF.; 

Lieu- 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  XVIII.        161 

Lieutenant  de  la  Garde,  Jean  Baehmetoff.  Affaire* 

Capitaine  de  Ja  Garde,  Alexei  Panin.  de  Mos- 

Capitaine  de  la  Garde,  Bafily  Porofoukoff.  C0VIE> 

Lieutenant  de  la  Garde,  Frédéric  Wolkoff. 

Lieutenant  de  la  Garde,  Abraham  Schamordin. 

General-Adjoutant ,  Jean  Polyanskoy. 

Enfeigne  de  la  Garde,  Jean  Wereffkin. 

Sous-Lieutenant  de  la  Garde,  Alexandre  Taneoff. 

Sous-Lieutenant  de  la  Garde  &  de  Bombardiers,  Bafily  Jafikoff. 

Capitaine- Lieutenant  de  la  Garde  du  Corps,  Pafchkoff  Yegor. 

Premier  CommifTaire,  Alexei  Libin. 

Juge  de  Pomefny,  Prikafe  Kirill  Cziczerin. 

General  Quartier-Maître  &  premier  CommifTaire  de  Guerre,  Michel 

ArgamakofF. 
Capitaine-Lieutenant  de  la  Garde,  Alexei  BibikofF. 
Lieutenant-Colonel,   Bafily  Titoff. 
Lieutenant-Colonel,  Gabriel  Kofloff. 
Lieutenant-Colonel  de  Place,  Kifeleff, 
Lieutenant-Colonel,  Michel  Anizkoff. 
Lieutenant-Colonel,  Naum  Czoglokoff. 
Lieutenant-Colonel,  Bafily  Batourin. 
Major ,  Nikita  Skoulskoy. 

Major  d'un  Bataillon  de  l'Amirauté,  Kirill  Poufchzin. 
Prince  Frédéric  Golizin. 
Prince  Jaques  Golizin. 

Sous-Lieutenant  de  Bombardiers ,  Nowokfchzenoff. 
Sous- Lieutenant  de  la  Garde,  Bafily  Iwanoff;  il  a  auffi  figné  pour  un 

Sous-Lieutenant  du  même  Régiment,  Bafily  Korofleleff,  qui  ne  fça- 

voit  pas  écrire. 
Premier  CommifTaire  de  Guerre,  Bafily  Nowofilzoff. 
Premier  CommifTaire  de  Guerre,  Prince  Michel  Iwanoff  Wadbalskoi. 
Gentilhomme  de  la  Chambre,  Prince  Affonafy  Borjatinskoi. 
Gentilhomme  de  la  Chambre,  André  Koliczoff. 
Enfeigne  de  la  Garde  du  Corps ,  Deroffei  Iwafchkin. 
Sous  Lieutenant  de  la  Garde,  Michel  Krouchtzchoff:  il  a  auffi  figné 

pour  un  Enfeigne  Affanafly  Wladizin. 
Sous-Lieutenant  de  la  Garde,  Prince  Alexei  Schechoffskoi  :  il  a  aufîi 

.figné  pour  le  Capitaine-Lieutenant  Dewefiloff. 
Premier  Secrétaire,  Anifim  Schezoukin. 
Djak,  Jean  Molczanoff. 
Djak  Simeon  Iwanoff. 

Capitaine  de  la  Garde,  Emeljan  Mawrin.  • 
Le  Juge  de  Rofprawnaja  Palata,  Afonafei  AndreofF. 
Koufmin  Karavayeff. 
Vice-Gouverneur  de  Mofcou,  Bafily  Jerschoff. 

Tome  XL  X  On 


COViE. 


I6î  MEMOIRES,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ETC. 

Amznu        On  ajoutera,  pour  conclufion,  quelques  Reflbrts  fecrets  qui  m'ont  été 
D^™°S"    communiquez  par  une  Perfonne  de  la  Nation  Ruffïenne  fort  distinguée , 
emploiée  dans  des  Cours  confiderables  pour  le  Czar,  &qui  a  été  fouvent 
nommée  dans  les  Nouvelles  publiques. 

Le  Czar  avoit  eu  de  la  Czarinne  fa  féconde  Femme  un  Fils  qu'il  fît  apel- 
ler  Pierre.     La  Czarinne,  qui  avoit  pris  un  grand  afcendant  fur  l'efprit  du 
Czar,  voioit  avec  peine  que  le  Czarowkz  fon  Fils  aine  dut  fucceder  par 
fon  Droit  d'Ainefle  à  l'Empire.  Elle  travailla  à  le  perdre.  Ce  Prince,  en  é- 
tant  averti,  trouva  à  propos,  pour  fauver  fa  vie,  de  fortir  de  l'Empire  de 
fon  Père.  11  alla  au  Tirol ,  où ,  pour  fa  feureté ,  il  fe  fit  loger  dans  la  Forte» 
refle  à  Infpruck.  Sur  les  Recherches  du  Czar,  il  alla  à  Naples,  croiant  de 
s'y  tenir  incognito.     Il  fut  même  logé  dans  un  des  Châteaux  forts  de  cet- 
te Ville-là.     Le  Czar  découvrit  le  lieu  de  fon  Refuge.     Il  y  envoia  des 
gens.     Ceux-ci  lui  perfuaderent  de  s'en  retourner  fous  des  Promenés  de 
Pardon  de  la  part  du  Czar.  A  fon  retour,  on  lui  fit  renoncer  à  la  Succefc 
fion.     Ce  qu'il  fit,  aiant  refolu  de  fe  confiner  lui-même  dans  un  Couvent. 
La  Czarinne ,  craignant  toujours  pour  fon  Fils,  n'eut  point  de  relâche ,  qu'el- 
le n'eut  porté  le  Czar  à  faire  au  Fils  aine  leProcez,  &à  le  faire  condamner  à 
Mort.  Ce  quiefr.  étrange  elt  que  le  Czar,  après  lui  avoir  donné  lui-même  le 
Knut  quieil  une  QuefHon,  lui  coupa  aufîi  lui-même  la  Tête.  Le  Corps  du 
Czarowits  fut  expofé  en  public,  &  la  Tête  tellement  adaptée  au  Corps, 
que  l'on  ne  pouvoit  pas  difcerner  qu'elle  en  avoit  été  feparée.   Il  arriva 
quelque  tems  après  ,que  le  Fils  d.t  la  Czarine  vint  à  décéder  à  fon  grand  re- 
gret &  à  celui  du  Czar.     Ce  dernier,  qui  avoit  décollé  de  fa  propre  main 
fon  Fils  aine,  reflechifiant  qu'il  n'avoit  point  de  SuccefTeur,  devint  de 
mauvaife  humeur.     Il  fut  en  ce  tems-là  informé  que  la  Czarinne  avoit  des 
Intrigues  fecretes  &  illégitimes  avec  le  Prince  Menzikof.  Cela,  joint  aux 
Reflexions  que  la  Czarine  étoit  la  caufe  qu'il  avoit  facrifié  lui-même  fon 
Fils  aine  ,  il  médita  de  faire  rafer  la  Czarine,  &  de   l'enfermer  dans  un 
Couvent ,  ainfi  qu'il  avoit  fait  fa  première  Femme  qui  y  étoit  encore.  Le 
Czar  avoit  accoutumé  de  mettre  fes  Penfées  journalières  fur  des  Tablettes. 
Il  y  avoit  mis  fondit  Deflein  touchant  la  Czarine.     Elle  avoit  gagné  des 
Pages,  qui  entroient  dans  la  Chambre  du  Czar.     Un  de  ceux-ci,  qui  étoic 
accoutumé  à  prendre  les  Tablettes  de  deflous  la  Toilette,  pour  les  faire 
voir  à  la  Czarinne,  prit  celles  où  il  y  avoit  le  DeiTein  du  Czar.  Dès  que  cette 
PrincefTe  l'eut  parcouru ,  elle  en  fit  part  h  Menzikof;  &,  un  jour  ou  deux 
après,  le  Czar  fut  pris  d'une  Maladie  inconnue  &  violente,  qui   le  firent 
ïnourir.     Cette  Maladie  fut  attribuée  à  du  Poifon,  puifqu'on  vit  manifefte- 
ment  qu'elle  étoit  fi  violente  &fubite,  qu'elle  ne  pouvoit  venir  que  d'une 
telle  Source 5  qu'on  dit  être  aflez  ufitée  en  Mofcovie. 

Fin  de  r Année  M.  DCC  XVII L 

S  U  P- 


SUPPLEMENT 

AUX  DIX  PRECEDENS  VOLUMES 

DES      s 

MEMOIRES 

D  E 


LAMBERT   Y> 

CONTENANT 

LES    NOUVELLES    PIECES 

RECUEILLIES     PAR     L'AUTEUR 

DEPUIS     M.    DC.   XCVI. 

JUSQU'EN 

M.    D  C  C.     XVIII     (  *  ). 


(  *  )  Votez 

ci  -  d.Jfus 
les  pciges 
i  &>  2  de 
ce  folume» 


^«^* 


A    LA    HATE, 
Chez.  P.    G  O  S  S  E     et     T.     NEAUL  M  X, 

M,    D  C  C.    XXXIII, 


MEMOIRES, 

NEGOTIATIONS, 


TRAITEZ 


j 


E    T 

RÉSOLUTIONS     D'ETAT: 

ANNÉES    M.    DC.     XCVI. 
M.  DC.  XCVII.  ET  M.  DC.  XCVIII. 

«^^^•^  €**&$*-*&  <âH§«3Hê>*3f:*Ë?  ^^^€><3M&  <3**ê><ât*ë><3M&  ^*&€**&<§t*&<5**&<3**§!3**& 

ANNEE    M.    DC.    XCVI. 

Copia  Epiftolœ  quant  fcripfit  Excellent ijfimus  Epifcopus  affmrfs 

Cujavienfis  Excellentiffimo  Legato  Galliarum. 


df.  Po- 
logne. 


ILLUSTRISSIME  ET  EXCELLENTISSIME  PATRONE. 


i^1tŒ*fD3£.jl> O  LE  NS   fubmijjïonem  meam  Excellent iœ   Suœ  unâ   &  al-  Lettre  de 

*1r\  r$  1er  a  teflari  vice  ab  ipfâ  illius  porta  redire  debuï ,  abfentem  pu-  l'Evêque 

rJ     <\T     ïV  blicifque  curis  à  Jîatione  fuâ  evocatum  reperiens  :   Qiiare  in  le-  de  9uJa" 

kd       *        (*)  vamen  frufirati  defiderii  mei  obfequiique ,  prafentibus  (urgent  if/ï-  Y,l<~  *   - 

^^  ^  mis  enim  repentinisque  cafibus  jam  Farfavtà  evocor)  ultimum  fa(jeur  de 

^JS-^ZD^X^   ffajg    Excellentia   Suœ  ,     mitto  ;    iïïud  unicum  flagrant ijjïmè  France; 

poflulans  ,    ut  quem  dignata   eji  Excellentia  Sua  ante  cmnia   mérita ,  huma-  er>  Octo- 

nifjîmâ  profequi  benevolentiâ  ,   eundem  confiant i  foveat  gratiâ  ,   auam  mereri  brel<sS>°- 
emni  obfequiorum  conatu  allaborabo. 

X  5  Et 


Afîatres 
de  Po- 
logne. 


166    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Et  quoniam  Excellent  ta  Sua  eo  me  fiduci*  obflrixit  patio  ,  ut  qu*  fenti-* 
rem  circa  futur*  Eleclionis  progreffum  ea  libéré  pro  ingenito  candore  meo 
Excellent!*  Su*  explicem  ,  audeo  Excrtlentiam  Suam  per  boni  publia 
commoda  fiudïofjfimé  obligare ,  quatenus  à  Promotione  Principis  de  Conti  refilire 
vêtit  i  £>uem  et  fi  eximia  talent  a  ,  belloramque  vocales  triumphi ,  fupparem  Ré- 
gi a  faciunt  Coron*:  metus  tamen  nominis  hujus  per  Regnatrices  Majefiates  ex 
Rationibus  Satûs  noftri  in  animis  Civium  pridem  excitât  us ,  &  modo  conferva- 
tus  y  remotiorem  videtur  à  Ihrono  Regni  facere. 

Neque  enim  vellem  SereniJJïmi  Galliarum  Régis  Promotionem  in  aliquod  ve- 
ntre diferimen  ,  ficut  (3  Excellent!*  Su*  expenfas  Laborïs  periclitari  :  qu* 
fi  optatum  fortientur  effeblum  ,  licebit  mihi  gratulari  \  fin  minus  ,  vix  pof- 
fum  tantorum  conatuum  motibus  condigne  compati.  Quoniam  non  temerarium 
Excellente  Su*  exprimant  fenfûs  met  judicium  ,  etiam  ex  multis  deprum- 
ptum.  Si  quid  verb  Sïngularitatis  communisandum  mihi  Excellentia  Sua 
babuerit  f  pari  ac  mecum  cum  Theologo  meo  Domefiico  fiduciâ  agere  potefi.  &c* 
Maneo 


Illufrijfma  Excellentia  Vejlrœ 

J 

DevotiJ/ïmus 
Epifcopus    ULADISLAUS. 


Lettre  de 
l'Ambaf- 
fadeur  de 
France 
fur  PE- 
îe&ion 
du  Prin- 
ce  de 
Conti  à  la 
Couron- 
ne de  Po- 
logne ; 
du  \6 
Octobre 
ï6o6. 


Refponfum  Excellent ijjîmi  Legati  Gai/ici. 
ILLUSTRISSIME  ET  EXCELLENTISSIME  PATRONE. 

SUMMO  cum  animi  met  dolore  intellexi  Suam  Excellentaim  ad  me  ve- 
nir e  dignatam  femel  13  bis ,  quo  tempore  valeditiones  hue  (3  Mue  deferen- 
d* ,  me  domi  fédère  non  permittebant.  Nec  minns  etiam  hoc  me  affiixit^  quod 
Excellentia  Su*  conatus  iterum  obfequia  mca  pr*ftare  ,  tamen  idoneum  ad- 
rnittendo  mihi  tempus  non  fit  inventum  :  etenim  humaniffimis  Excellentia 
y e fine  Litieris  ore  proprio  fatisfacere  volcbam  ,  ut  quidquid  nofiro  priori  colloquio 
defuerat  uberiori  fermone  aliquantulum  fupplerem.  Verum  ubi  publica  ,vel  Sere- 
niJJïmi Sut  Candidat  as  negoiia  tantapere  dijlrahunt  Excellentiam  yeftram ,  ut 
difficile  poffit  al  lis  attentas  aures  praberc  ,  ideb  feribend*  fatius  duxi,  ut  non 
modo  benignifjïmis  ejufdem  caracJeribus  ,  fed  etiam  conflits ,  ut  par  efi  refpon- 
deam  ;  &  quandoquidem  minime  dubito  ,  quin  eâdcm  me  meaque  omnia  humini- 
tate  profequi  (emper  velit ,  quam  mihi ,  &  verbo ,  13  feripto,  tam  eximiè  te  fat  a 
efi  •  ego  cum  maximâ  veneratione  &  vi  confident i*  illius ,  quam  in  me  reperiit 
(3  approbavit ,  intimos  mentis  mea  fenfus  aperiam  Excellentia  yefir*. 

Rem  arduam  fane  ,  ac  fupra  vires   meas  longé  poftam ,  Excellentia  yefira 
mihi  pracipit ,  dum  invitât  ut  à  Promotione  SereniJJïmi  Prmcipis  Conti  refiliam. 

Ego 


LOCNE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DC.  XCVL        iô'7 

Sço  enim  hic  non  propria  voluntatis  lnterpres  aut  Dominus  ,  fed  Chri/lianijfimi  A*fairm 
Régis  Minifier,  quid  aliud  facere  poffum  quam  quodjubeor?  Prêter  eu  cummi- 
hi  mhil  poffit  effe  antiquius  quàm  Serenififimœ  Reipublicœ  meam  infinit am  propen- 
fionem ,  &  fludiofiffimam  promptitudinem  ofiendere  ,  quo  patio  liceret  mihi  banc 
unicam  occafionem  prœtermittere ,  in  quâ  jervitium  illi  certe  majus  ,  quàm  qui- 
libet  e  propriis  Civibus  pr  ce  (lare  promovendo  in  Regem  futur  uni  talem  Princi- 
fem,  quem,  ipfâ  f aient  e  Excellent  iâ  Vefirâ,  omnibufque  cujufcunque  gentis ,  aut 
fatlionis  homimbus ,  eximia  talenta,  bellorumque  vocales  triumphi,  fuppa- 
rem  Regiac  faciunt  Coronse. 

Quid  enim  in  bac  proximâ  Eletlione  quœrunt  Poloni  ?  Non-ne  R-gem  opti- 
mum ,  Regem  maximum ,  Regem  Bellicofum ,  Sapkntem ,  Magnaniwum ,  Libe- 
ralem,  Modefium,  Affabilemï  Qui  tôt  eximiis  talentis  Remp.  ad  prifiinum 
opulentiœ ,  fplcndoris ,  &  famœ  ftatum  reducat,  bellorumque  vocalibus  trium- 
phis,  ut  propriis  Excellent ia  Veftrœ  verbis  utar ,  hoftes  Patria  debeUet ,  ému- 
las terreat ,  £5?  vicinos  in  <eternà  focietatis  atque  amicitia  necefiïtate  contineat? 
Qui  regat  Populum  fiuum  exemplo  potius  quam  authoritate;  qui  fit  in  Bello  pri- 
mus  Bellator,  in  Confilio  primus  Confiliarius ,  ubique  norma  cœterorum  ;  qiam 
nemo  Polonus ,  aut  oderit ,  aut  contemnat  ;  qui  feeptrum  fibi  nec  lege  me  confue- 
tudine  ,  fed  amore  £s?  œftimatione  delatum  digne  ferre  fiudèat ,  &  quibus  ac- 
quifierit  virtutibus ,  iifdem  confervare  necefje  habeat  :  qui  fi  a  relia  via  recé- 
der et  ,  &  liber  rima  Genti  vellet  aliquam  fagi  aut  fervitutis  fpeciem  imponere 
non  habeat  à  vicinis  Principibus  auxilium ,  nec  invenire  poffit  afylum  prefens  in 
aulis  fibi  fanguine  conjunclis  :  Qui  denique  in  primo  fui  regiminis  ingrefju  qualem 
reperit  Rempublicam  talem  adjuvet,  non  perfona  tanîum  fuà  ,fed  opibus.  Namqut 
duobus  eget  Refpublica,  Domine  mi  Excellentifjime,  Viro,  {$  Subfidio.  Viro,  qualem 
modo  defcripfi  ;  Subfidio  quod  reale  fit  ac  prefens.  Confideremus  itâque  Statum 
Puioniœ.  Exercitum  Confederatum ,  Stipendia  Miliii  ad  fummam  enormen  dé- 
bita ,  Bellum  quatuor decim  annorum  fine  frutlu  gefium  ,  nec  finit um ,  imo  tan- 
io  pericolofius  exardefeens,  quant 0  majores  addit  jmperio  fm  vires  navus  Imper a- 
tor  Turcarum  ;  Exhaufias  Provincias  ,  Comitia  perpétué  rupta  ,  Fatliones  £5? 
Divifiones  domefiicas  tantum  ex  illa  parte  grafj'antes ,  quœ  non  publicum  fed  pri- 
vât um  commodum  quœrit ,  &  ferias  atque  urgentes  Nobilitatis  unïverfœ  Quœri- 
montas  eludit.  Prgo  nihil  ad  ifia  refieclendum,  ergo  confuetudini  ferviendum ,  et'" 
go perfonarum  acceptioni ,  non  utiiitati  Rej 'public a fiudendumt  Abfit. 

Cur  enim  fibi  Polonia  Jus  eligendi  Régis  tara  firenuè  vindicavit ,  tam  forther 
6?  intacle  fervavit ,  ni  fi  ut  eum  creare  poffet ,  quem  rébus  fuis  oportunum ,  at- 
que accomodatum  judicaret  ?  Si  Corona  ifia  furet  hareditaria  gemerent  fortaffe 
populi  eam  tali  jure  deberi  minus  dignis  &  utiubus ,  quam  dignioribus  6?  utilio- 
ribus  dari  poffe  exoptarent.  Ecce  res  in  integro  efi\  pote  fi  dari  cuilibet,  non  ergo 
diçnior  efi  rejiciendus ,  ut  adolatoriè  prœferatur  alter  ,  quod  quitiem  bonâ  ve- 
nià  Candidatorum  omnium  dix erim  ,  quos  jugillare  nec  nuis  moribus  convtnit  7 
nec  Régis  mei  voluntaj  efi.  Iliud  enim  uvucè  probare  voiui  ExceUtncœ  VeflYte*, 
mérita  fpellanda  effe  tantum  &  commoda  Reipubhcœ  :  cœtera  J)lanè  jper- 
ni  oportere. 

Quod  vero  Exccllentia  Vefira  mihi  amantiffwie  fcrïbii ,  nolle  fe.  Promo 

t.ioDem 


Affaires 
de  Po- 
logne. 


i<?8    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

tionem  Régis  ChrillianiiTimi  in  aliquod  venire  difcrimen  ;  ac  metum  efle 
nominis  Gallici  per  Regnatrices  Majeftates  exRationibus  Status  hujufce  in 
animis  Civium  pridem  excitatum,  &  modo  confervatum  ,  unde  remorior 
Gallus  Princeps  Candidatus,  aliunde  meritiiîimus  ,  à  Throno  Regni  fie- 

ret ,  hoc  diligent er  &  mature  confiderandum  venit. 

Videtur  enim  metus  ifte  ,  veris  fundamenth  carens  ,  inter  bulgares  errores  enu* 
merandus.  Ille  aut  cm  de  totâ  Republicâ  non  bene  fentïret ,  qui  putaret  eam 
vacuis  hujufmodi  phaniafmatis  imprejfionibus  duci ,  non  folidis  evidentibufque  ar- 
gumentas in  tam  grandi  negotio,  ubi  de  fpe  &  falute  Civium  agitur  :  £s?  vereor 
ne  qui  metum  illum  excitatum  fupponunt ,  excitare  potius  velint ,  aut  fopitum ,  aut 
nullum.  Dicat  enim  mihi  Excellentia  Vefira^  quœ  tam  acri  tamque  prudenti 
pollet  judicio  ,  Muïierem  fortem  quis  inveniet  ?  De  Viro  forti  nunc  agimus  ;  &? 
quœ  Comparatio  potefi  inflitui  bona  Viri  cum  Muliere  ?  Si  per  Reginam  Ma- 
riam  aliquod  peccatum  eit  ,  undè  Cives  amplius  regnare  illam  nolint 
vel  per  fe ,  vel  per  filios  ,  nunquid  Sereniiîimus  Princeps  de  Conti  fi- 
lms ejus  e(t?  At  funt  ex  eadem  gente  Gallicâ.  Nunquid  omnes  in  G  allia  funt 
ejufdem  Indolis  &  Complexionis?  An  omnes  Poloni  fimiles?  Rex  Michael,  Rex 
Joannes ,  fub  eodem  Cœlo  nati,  toto  Cœlo  difpares  fuere.  Cur  ergo  confundemus 
eos  ,  bonne  JDeus  !  quos  natalis  educatio ,  fexus  ipfe ,  tant  opère  diferiminanfi 
Et  fi  quœ  fimilitudo  timenda,  nunc  ne  potius  in  proprio  fanguine  ,  quam  in  alie- 
no?  Vellet-ne  Excellentia  Veflra  datis  in publicum  motivis  uti  contra  nos,  quœ 
SereniJJimo  Suo  Candidat 0  nocerent  magis ,  £5?  partes  illas ,  quas  ipfa  tam  fiu- 
tam  apertè  tuetur,  unici  hujus  argument i  retorfione  fubverterel 

Videamus  itàque  quibus  impulfa  Confiliis  Serenijfima  Regina  tantam  in  fe , 
fuosque  concitaverit  invidiam  ,  an  Gallicis  ,  an  Aufiriacis  ?  Quemnam  audi- 
vit,  aut  cui  placer e  voluit ,  cum  ituros  in  Hungariam  milites  dijfipavit ,  cum 
Poloniam  folemni  Confederatione  voluit  alligari  Germaniœ  fine  refriciionibus 
tillis  ,  cum  ejecit  Galïicum  Legatum  de  Vitry  ,  cum  Serenifimum  Principcm 
facobum  Serenijfimœ  Palatinœ  Neoburgenfi  conjunxit  ?  Sunt-ne  ifti  Gallicœ 
an  Auflriacœ  Faclionis  part  us  ?  Attamen ,  Galla  fuit  Regina  :  fed  quid  am- 
plius in  Rem  Auflriacam  Germana  facere  potuiffefï 

Nolebamus  nos  tam  arblis  tamque  inextricabilibus  vinculis  Rempublicam 
vincire  femper ,  ut  aiunt  Illufiriffimi  Zamofcius  £s?  Fredro ,  metuendœ  potentia 
non  addiclam  modo ,  fed  quafi  mancipatam  fieri.  Vicit  nos  Galla  Regina  \  fed 
quid  ihde  boni  acciderit  Reipublicœ  tefies  miferi  Cives ,  quorum  imminuta  fubjlan- 
tia  ,  quorum  fines  devaftati ,  quorum  nomen  in  Aulâ  Cœfareâ  ,  etiam  pofl  ipfam 
Viennœ  Liber ationem,  ac  Ger mania  totius  ab  imminenti  fervitute  redemptionem  , 
tantum  vilipenditur,  quantum  apud  nos  in  honore  &  yeneratione  ejl. 

Sciebamus,  nec  oblivifeimur  ,quid  Majores  Veflri,  per  quos  ftetit  Libertas,  de 
vicinis  Mis  dixerint ,  i$  pofieris  fuis  tradiderint  \  eorum  vefiigiis  infiftebamust 
£i?  nunc  infiftimus,  neque  illum  regnare  cupimus  in  Poloniâ,  qui  vel  fit  Aufiria- 
cus ,  vel  Auflriacœ  Domui  tam  jpecialiter  addiclus  ,  ut  illi  fuam  dignitatem , 
Coronam,  Authoritatem  omnem  référât  acceptam  ,•  ne  tandem  aliquandh  fiât  de 
Poloniâ ,  quodfaffum  ejl  de  Bohemiâ  &?  de  Hungariâ,     Sunt  autem  i/la  tantœ 

tan- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DC.  XCXVï.       i69 

tant  a  que   compertœ  veritatis ,   ut   etiam  apucl  Pohnos  in  commune    aclagium  Affaires 
tranfierunt.  DE  Po" 

Dicet  Exccllentia  Veflra  :  Sed  neque  volet  Imperator  ut  hic  regnet  Gallus  -,  L0GNF> 
ergo  pat  utrobique  ratio.  Nequaquam  :  immo  valde  difp'ar ,  etenim  efi  hoc 
axioma  noium  omnibus  ,  Cœfarem  ejje  proximum  ,  ergo  metuendum  \  Chrif- 
tianiffmum  verè  remotum ,  ergo  prodefje  pcfië,  nocere  nunquam.  fjhù  timen- 
dusy&  fitjpeclœ  ambitionls  efi  ,  non  audiendus;  qui  non  timendus  femper  con- 
fulendus.  Non  videbit  Exceïkntia  Vefira  Bellurn  inter  longincos ,  fed 
inter  finitimos.  Poloni  cum  Gallis ,  Hifpanis ,  Italis,  &  Perfis  non  dcccrta- 
runt  \  fed  cum  Germants  ,  Suecis ,  IJungaris ,  Turcis  ,  Tartaris ,  £s?  Mojchis. 
Amplius  dico  :  non  débet  Serenifiïma  Rcfpublica  confderare  quid  ijii  vel  alteri 
di/pliceat,  fed  quid  fibi  bonu?n. 

Si  Germanus  talis  offeretur ,  qualem  Galîi  offcrunt ,  iifdem  prœfentibus  auxijiis, 
■œgefiati  publier,  beïloque  infruïïuofo  fubvenientem ,  non  confulite  Galliam  ,  #£? 
cipite  illum  vobis  >  dummodo  periculofus  Me  non  fit  ,  nec  Germanicis  viribus  uti 
pofiït  ad  oprimev.dam  Patriœ  Libertatem.  Si  Gallus  Princeps  omni  virtute 
prœditus ,  £s?  clives ,  cum  fumma  utilltale  vobls  proponetur ,  accipite  illum  incon- 
fulià  Germaniâ  \  non  enim  illa  vult  res  fuas  ad  veftram  voiuntatem  dirigere  , 
nec  vejlras  ab  il  là  pendere  ncceffe  efi. 

ghiid  ergo  dicet  Ce  far  ?  Dicet  Polonos  Hungaris  £>  Bohemis  effe  fapientiores. 
Dicet  eamdem  à  vobis  in  eligendo  Rege  vefiro  adhibitam  prudentiam ,  quàm  Me 
adhibet  in  fcligendis  Magifiratibus  fuis.  Dicet  illum  in  Polor.iâ  faclum  Regem, 
qui  forent  iffimœ  huic  Reip.  Provincias  avulfas  ,  &  antiqua  décora  refit  uere  u-. 
tins  valet ,  de  quo  vos  tanto  magis  lœtari  debebitis ,  quant o  minus  ipfe  lœtabitur. 

Sed  arma  in  Poloniam  inferet,  fi  Galli  Régis  fiet  Eleclio.  §ua  armât  Illa-ne, 
quibus  Hungariam ,  Rheni  Littora,  Stat loues  in  ftaliâ,  tuen  vix  pote  il  ^  necve- 
rb  tuetur  ?  Et  fi  per  hujufmoâi  minas  incutitur  timorReipublicœ,  jam  ubi  efi  libéra 
Eleclio?  Igitur  à  vicinis  erit  petendus  Rex ,  non  eligendus-,  &  quo  fine  ducli  Ger- 
mani  noient  hic  regnare  prœfiantiffïmum  Principem  ,  nonne  ut  Reipublicce  vires 
magis  corruant ,  £s?  ipfa  tandem  fiât  Aquilœ  bicipitis  Prada  ? 

Non  Me  metus  invaferat  Major um  vefirorum  animos ,  cum  Henricum  Gallum 
Ernefio  Aufiriaco  pratulerunt.  Erat  eadem  tune  temporis  vicinitas ,  quœ  nunc 
efi  ,  eadem  utriufque  domûs  emulatio ,  iifdem  mini  s ,  (3  futilibus  metivis  Ernefii 
defenfores  utebantur ,  quibus  hodie  videmus  non  dari,fied  ajfecïari  crédit  um.  ghiid 
frofuit ,  eo  magis  in  fuo  propofito  perftitit  confiais  Refpublica  à  quo  vehementius 
illam  dlmovere  tentabant  \  &  fi  per  inqpinatam  Chriflianiflmi  Fratris  fui  mor- 
tem  ,  Henricus ,  culpâ  quidem  fatis  magna ,  fed  excufabili  tamen ,  in  hœreditatem 
fuam  bellis  Civilibus  quafatam^  vix  non  deperditam ,  fie  nimis  pr opère  tacïûque 
recesit  ;  certè  quant  o  fuit  amore  dignus ,  vel  ipfe  profequentium  Polonorum  La- 
chrimœ  tefiatœ  funt ,  quo  s  illum  non  clegife >  fed  amififje  pœnituit. 

Nihil  taie  à  noflro  Principe  metuendum  ,  qui  cum  tlenrico^  nec  fplcndore  gène- 
ris  à  feculis  oEio  regnantis  quod  unum  13  idem  cil  ,    nec  virtuîum  fama  cedat , 
habet  hoc  fingulare  quod  in  fuccejfonis  ordine  fit  decimus  Princeps  à  Regio  San-  . 
guine  Galliarum. 

De  Reginâ  Lodovicâ ,  fuit  enim  Ma  quamvis  in  Gallia  nata,  non  tamen  ex 
Tome  XI.  Y  nofifâ 


GNE. 


*7ô    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  itoftrâ  gente  oriunda ,  fed  ut  omnes  fciunt  ex  Familia  Gonzaga  Manturum,  quat 
Jtala  eft ,  pios  ejus  Cineres  non  commoveamus  ;  mulîa  benè  geffit ,  multa  fortaffe 
minus,  ghiidni  placebit  bona  nobis  attribuer e ,  cœtera  fexui.  Ponajam  monui 
femel  effe  quaftionem  de  viro ,  non  de  muliere.  Melwr  eji  iniquitas  viri ,  quant 
mulier  benefaciens  ,  inqmt  Scriptura  \  &  quamvis  uxorem  habeat  Serenijfimus 
Princcps  de  Conti  ex  eodem  Regio  Sanguine ,  Paventibufque  Serenïffimo  Princi- 
pe Anguianeo ,  &  Sèrcniffimâ  Rheni  Palatinâ  Eleclorali  Principiffâ  natam ,  ni» 
hil  tamen  de  ipfà  metuendum ,  cum  illa  notce  fît  apud  omnes  manfuetudinis ,  £5? 
ita  marito  fubdita ,  ut  part em  nullam  in  Regno  fit  accepturam ,  prêter  eam  qiut 
Reginis  verè  competit ,  nempe  ut  cœtus  aulicos  prœfentiâ  fuâ  &  magnifient iâ  de- 
corare  curet  ;  non  emm  alio  ex  fonte  dérivât  iflud  muliebre  imperium ,  quo  non 
Polonia  modo ,  fed  multa  Reg,ia  plerunquejacJantur,  nif  ex  otio  Pnncipum.  Sit 
ergo  Rex  [irenuus ,  &  fedulus  ,  amans  gloriœ  fuœ ,  negotiifque  attentas ,  jam  Re- 
gime  non  imper ant.  Unde  accidit  ut  in  ipsâ  Gallià ,  ubi  olim  exterœ  Régine  ri~ 
xas  moverint  in  minorennitate  Regum ,  ipfe  pofiea  nec  auditœ  fuerint,  fi  ai  i  mat- 
que  Dcus  conceffit  nobis  Regem  verè  magnum. 

Ultimum  eft  quod  diluam.     Scriicet  Exceïlentia  Veftra  dicet  :   Efo ,  fint  Rex 

t§  Regma  omm  exceptione  majores ,  at  flatim  atque  Gallus  ad  Solium  Polonicum 

eveclus  erit ,  quatenus  in  eum  nihil  molietur  Cœfar  ,  attamen  ille  in  Cœfarem  mo- 

lietur  Bellum ,  &  Rempublicam  ad  pericula  if  a  deducet ,  ut  placeat  Rcgi  Chri- 

ftiamffimo.  Refpondeo  non  placiturum  nobis  Regem  novum  Pvioniœ ,  qui  Poloniam, 

feipfum ,  &  gloriam  fuam  tam  aperte  contra  Stativ  Rationcs  prœcipitaret ,  prœfer- 

tim  ubi  jam  pervenimus  ad  limen  Pacis  Umverfalis  in  Europâ  Chrifiianâ  conclu- 

dendte ,  quam  fortafsè  Deus  dabit  ante  Eleclionem.   Si  quid  contrarium  hac  fupev 

re  timeretur ,  facillimè  per  Pacla  Contenta  novi  Régis  prœcaveri  poffe  ,  ut  ipfe 

juramento  feobligaret,  nontantum  ad  obfervationem  in  génère  omniumTraclatuuni^ 

Fœderum ,  &  Paclorum  anteà  initorum  inter  Prœdecefifores  Rcges  £5?  Rempublicam 

ac  alios  quofvis  Principes;  fed  etiam  m  fpccie  illorum  quœ  nuper  contra  Tyrannum 

Orientis  fancitafunt.  Nonnè  hoc  remedio  fanabitur  fubitb  metus?  At  inquit  Fef- 

ira  Exceïlentia ,  Pacla  Consent  a  for  te  non  obfervabit.  Iterum  refpondeo ,  fi  hoc  ti- 

metur ,  de  quo  Candidat  0  juftim  ?  An  de  illo  qui  nullas  in  vicinia  copias ,  sut  af- 

finitates  habet ,  an  de  illo  qui  habei  ?  An  de  illo  qui  vider it  Coronam  è  Eami- 

lia   ?mnus   objervatrice  promifjorum   delapfam ,   talique  femper    exemplo   ter- 

rebitur?  An  de  illo  qui  hanc  nih'lominus  à  Pâtre  collcgerit  ?  Ifta  diretle  contra 

Serenifjïmum  fuum  Candidatum  militant ,  cur  objicerentur  nobis  ?  Deinde  pof- 

funt  executione  débita  Pacla  Conventa  defraudari ,  fi  Rex  erit  ita  fui  ipfius  imme- 

mor  in  iis ,  quœ  àfola  ejus  volunt aie  pendent ,  ut  funt  largitiones  Munerum ,  Of- 

fuiorum  &c.  fed  in  Us  quœ  numquam  facere  nec  t ent are  pote f  fine  con/enfû  Rei- 

publicœ  quomodo  poteft  fidem  frangcre  ?   Jam  hoc  certum  &  indubitatum ,  quod 

Bella  fine  unanimi  Nobilium  fuffragio  in  Comitus  congregatorum  non  pojfunt  de- 

darari.  Rex  itàque  novus ,  fi  vellet  aliqua  fufcipere ,  ante  proponere  deberet  Rei- 

publica.     Dicat  mihi  Exceïlentia  Vejlra  quâ  front e  proponeret  ille  paîam  id,  eu* 

j-us  contrarium  juraffet  ?  Et  quid  facilius  tune,  quàm  propofiîionem ,  fi  fieret , 

rejicere  ?  Quidquid  ergo  hine  timetur  Chimera  eft.     Quod  vet  0  dicitur ,  illum 

tnunera  &  bénéficia  Rei public  a  ,folis  Nobilibus  débita,  conccjjurum  exteris,  aliet 

Chimera 


GNE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DC.  XCVI.  171 

Chimera  efl.    Hoc  enim^&  lege  vêtit  uni,  &  in  praxi  abfolute  redigi  nequit  à   Amww 
quocumque  Régnante.  DE  Pou»- 

Opponct  n.  ï/ji  profeclb  Veflra  Excellent  ta ,  quod  à  multis  partium  fuarum  au- 
dit,  rationes  hajce  meas  apud  prudentiores  quidem  valituras ,  non  autem  apud 
multïtudincm  Nobilium,  qui  cœco,  ut  illi  dicunt  ,impetu,foliJque  anticipât is  opi* 
mombus  ducli,  non  attendent  ad  tôt  &  tant  as  Rationes  Status,  fed  Re* 
gem  fuum  fine  confideratione  illâ  repente  pronunciabunt.  Id  enim  procut  dubio 
intellexu  Excellcntia  Veflra,  quando  Principem  noflrum  Borbonium ,  confie fl'u  dignif* 
fimum ,  attamen  propier  hoc  de  nomine  Gallico  vulgare  phantafma  certè  certius 
ruiturum  declaravit. 

yJt  verb  non  Jum  ego  in  bac  fententiâ:  pluris  aflimo  Polonos  omnes  Nobiles, 
fivè  qui  divitiis  6?  muneribus  cumulât i  Urbem  fréquentant ,  fivè  qui  refident  Do* 
mi\  et  fi  enim  nonfitinîer  eos  fortunœ ,  at  certè  nobilitatis  &  magnanimitatis  efl 
<equalitas  -,  Omnes  ad  Libtrtatem  {§  Confilia  Reipublicœ  nati  probe  norunt  quid 
expédiât,  quid  non  ;  In  iisfpem  omnem  noflram  collocamus  :  lis  tant  uni  placer e 
volumui  :  alli  partent  Reipublicœ  ad  fe ,  mis  nefeio  quibus ,  &  magnis  obtationi* 
bus  allicere  prœ  fumant  :  nos  totam  Rempublicam  rite  congregatam  expeclamus  :  alit 
Regnum  affectant  ut  régnent ,  nos  ut  benè  fit  Regno  :  alii  confederant  exercitumy 
nos  confie derationi  illi  volumusfattsfacere:  alii  Provincias  à  Corpore  Reipublicœ 
conantur  avellcre ,  ut  ab  exteris  in  ambitu  fuo  proteganîur  :  nos  amiffas  récupéra* 
re ,  &f  fines  Reipublicœ  promovere. 

Cum  igitur  audient  centena  milita  Nobilium  in  equis,  jam  eos  privatis  faclio- 
nibus  excludi  velle ,  qui  foli  poffunt  utiles  effe  Reipublicœ  pro  tali  tantoque  Candi" 
dato ,  qualis  efl  no  fier ,  afferri  tôt  milliones  florenorum  ,  non  in  prêmiffis ,  fed  in 
prefenti  numeratàque  pecuniâ  ad  faiisfafiionem  Exercitui  confederato  debitam  :  ex* 
pugnationem  Camenecipropriis  fumptibus  ante  Coronationem  datis  obfedibus ,  &?  fub 
nullitate  Eleclionis  :  reftaurationem  monetœ  :  Rei  frumentariœ  Commer clique  Geda* 
nenfis:  quœ  omnia  noflris  in  manibus  funt,  nec  quivis  alius  efficerepotefl^  prœtereà  nul* 
lam  pro  futur  a  Regina  reformationem  ,  ne  panis  benemerentium  alio  dtftrahatur  , 
6?  alla  quamplurima  quœ  fuo  tempore  manifeftabimus.  Credat  mihi  Excellent ia, 
Veflra,  tune  melius fibicollaturos  Nobiles,  quàm  ut  amcularum  fabulis  adhereant9 
umbram  pro  corpore  arripiant ,  £s?  ambitum  privât  or  um  public  a  utilitati ,  tamquù 
certis  &  évident ibus  émolument is  antepvnant.  Perfuafio  ifla  non  Libellis,  non, 
Laboribus ,non  vigiliis ynon  induflriâ ,non  eloquentià ,non  terriculamentis  perfide* 
tur ,  fed  re  ipsâ  &  veritate. 

Ex  iis  omnibus  videt  Excellcntia  Veflra ,  non  adeb  me  Caufie  meœ  diffidere ,  quœ 
tôt  lus  Reipublicœ  eft ,  quàm  Excellentia  Veflra  ex  i /limât ,  vel  ad  dijfidendum 
invitât.  In  cœteris  omnibus  Obedientiam  meam  probare  poterit  ;  In  hoc ,  neque  Rex 
meus ,  neque  Sereniffima  Refpublica  ,finunt  obtemperare  me  Mandatis  Excellcntia 
Veflra,' ,  quœ  cum  fit  arbitra  fuœ  ipfius,  ac  proprii  fenjûs  Domina ,  pot  efl  à  pro* 
pofito  fuo  faciliùs ,  quàm  ego  à  meo  refilire.  Nec  tamen  hoc  exigo,  nifi  quantum 
Reipublicœ  commoda  vident ur  exigere.  De  cœtero  ,  maximâ  cum  venet  atione ,  & 
gratitudine  maneo 

Illuflriffimœ  Excellentiœ  Veflra 

Varfavia  \6.  Otlobris  1696.  Dcvotiffimus  Servitor. 

Y  2  AN- 


tjè     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

S  ANNÉE    M.  DC  XCVIL 

Ode  âicata    Sacro  Solenni  Règne   Untlionis  Sereniffimi  ac  Po~ 

tcntijjîmi  Principis  acDomini^  Domini  CAROLI  XII  Sue- 

corum ,  Gothorum ,  Vanâalorumque  Régis ,  £jV.  cumià 

celebraretur  Stockholmiœ  Fefto  Die  i^  Dec.  Ami  1697, 

Ode  fur  f^Ur  vefte  nigra,  funeris  indice  5 

le  Sacre  V^-/  Hic  inquinatur  lœtitiœ  dies> 

j%Ro\  6)ui  pufcit  augujtos  honores , 

£  1A     '  In  patriœ  bona  defiinatus? 

Dec.  En,  tetïa,  terram,  cunclaque  reclius 

169J.  JVi#  alba  vefiit ,  lumine  candido  : 

£#  //>/£  pulcro  Rex  renidet 
Ore,  fibique  bonum  referri 
Expeilat  omen.  Promite  ferio 
Graii  favoris  verba  volent  ta  ; 
Omnefquc  Regalem  Coronam 
Aufpiciis  honorate  faufiis  : 
Ut  cingat  apte  tempora  Principis , 
Eauri  ac  Qlivœ  florida  virgulis, 
Per  Martis  œque  ac  Pacis  Artes  9 
Ad  memores  celebris  nepotes. 
Virtute  clarus  fuîgeat  intégra , 
Legumque  fervans ,  juftitiam  colat , 
Sceptrique  vires  eminentes , 
Te  fie  Deo ,    moderetur  œquus. 
Efi  profperum  &  ïœtum  abfque  Deo  nihil, 
®hii  cuntla  nutu  tempérât.     Illius 
Reges  in  ipfos  efi  tremenda 
Imper  ii  indomitï  pot  efi  as. 
Ut  qui  [que  Rex  Summi  efi  metuens  Dci  > 
Sic  fubditorum  commoda  provehit 
In  majus ,  ipfcrumque  ad  ufus , 
More  pat  ris  ,  benefacla  fpargit  : 
Felicitatem  reddere  Se  allô 
Promtus ,  vetufiis  moribus  inclytam: 
Et  finguloriim  arblas  querelas 
Tollcrc  ,  pauperie  remet  à. 
Vox  abfit  atri  pe  il  Gris  improba , 
Rcgi  licere  id  quod  libeat ,  docens  : 
g)uodcunquc  fas  &  jus  vetaùunt, 
Id  liccat  libeatque  nulli. 

Innata 


RESOLUTIONS   D'ETAT,   M.  DC.  XCVII.       173 

Jnnata  cunclis  pugna  cupidinis ,  Affaires 

7  7»  •  •„  de  Suéde. 

Non  lemus  Kegem ,  ac  inopes  premit  ...__ 

Ruris  colonos  :  ïmo  majus 

Imminet  è  folio  periclum. 

Efl  turpe  cuivis ,  vivere  turpiter  : 

offert  dolorem  confcia  mens  malt: 

Scd,  vit  a  donec  fit  fuperftes , 

Si  pudor  £s?  met  us  impedire , 

Aut  triflis  emendare  dolor  ttequit , 

Quod  corde  conception  efi  avido  nef  as  5 

Pofi  fat  a ,  nil  ultra  juvabit , 

Quin  Erebi  patieris  ignés. 

O  il  le  feiix  &  fapiens  fimul , 

S  eu  fceptra  traclat ,  jeu  pedes  ambulat , 

Qui  comis  erga  omnes ,  fibi  aquus } 

Rite  Dtum  vemratur  infons. 

ANNEE    M.    D  C.     XCVII  I. 


Tarif  y  fait  entre  les  Commiffaires  de  Sa  Majeflé  T.  C.   £5?  les  Affaires 
Commiflaires   des  Hauts  &?  Fui  (faut  s  Seigneurs   les    Etats       „»*»" 
Gène? aux  des  Provinces-Unies  des  Fais-Bas,  en  vertu  de  prov.Un. 

V  Article  XII.  du  Traité  de  Commerce,  conclu  àRyswic 
le  2c.  Sept.  1 697.  entre  les  Plénipotentiaires  de  Sa  dite 
Majeflé  &  <#«#  des  Leurs  Hautes  Fuijfances. 


C 


O  mme  le  Traité  de  Commerce  fait  &  conclu  à  RySwjé  le  20.  Sept.  proïetd© 


1 697.  entre  les  Plénipotentiaires  de  Sa  Majeflé  le  Roy  Tres-Chré-  Tarif  en- 
tien  d'une  part,  &  les  Plénipotentiaires  des  Hauts  &Puiflans  Seigneurs  les  tre   la 
Etats  Généraux  des  Provinces -Unies  des  Pais- Bas  -de  l'autre,  porte  à  f™™*^ 
l'Article  i2me  qu'on  fera  nouveau  Tarif  commun,  fuivant  la  Convenance   v,-nccs. 
réciproque,  les  Sieurs  N.N.étans  nommés  Commiflaires  de SaditeMajefté  Unies;, 
T.  C.  &  les  Sieurs  N.  N.  par  lesdits  Seigneurs  Etats  Généraux  des  Pro-  du  22- 
yinces-Unies,  pour  en  conférer  enfemble ,  font  enfin  ,  après  la  commùni-  Is.°^- 
cation  réciproque  de  leurs  ordres  &  pouvoirs,  &  divèrfes  Conférences 
tenues  pour  entretenir  enfemble  le  Négoce  &  la  Navigation,  convenus 
unanimement,  que  les  Efpeces  comprifes  dans  les  Articles  mivans  payeront 
doresnavant  pour  tous  Droits,  tant  d'Entrée  en  France  &  autres,  de  quelle 
nature  qu'elles  puiffent  être,  à  commencer  du-    -     - 

Sçavoir , 
La  Baleine  coupée  &  apprêtée,  le  cent  pefant. ;       ^     =     -900 
Barracans,  la  pièce  contenante  21  aunes  de  France.     -     -       $     o     o 
Beures  de  Hollande ,  le  cent  pefant      -        -        -        -        o  12    o 

Y  $  Buffles, 


i74    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

A?m*Es       Buffles ,  Elans ,  &  Cerfs  pattes  en  Buffles.  Colets  &  Cole- 

be  f»an-  tins  de  Buffles ,  le  cent  pefant :  -.*  —    -  16    o    a 

ce  rt  des       Camelots  de  toutes  fortes  ,  &  Camelots,  à  onde  &  de 

demi-foye,  la  pièce  de  20.  aunes     ---------800 

Cire  blanche,  le  cent  pefant     -     -    -     -     -     -     -     -     --800 

Cuirs  de  Boeufs  tannés  de  toute  forte ,  la  douzaine     -    -    -     14    o     o 
Cuirs  de  Vache  tannés  de  toute  forte,  la  douzaine  ---700 
Draps  de  Hollande  de  toutes  fortes  &  couleurs,  la  pie- 
ce  de  1$.  aunes  de  France.  -----------     y  y     00 

Fanons  de  Baleine  ,  le  cent  en  nombre  tant  grands  que 
petits,  pefant  300.  Livres.   -     ----------     20    00 

Fer  blanc,  le  Baril  de  quatre  cent  cinquante  Feuilles  dou-  -     20     o     o 
blés  ,  &  le  Baril  de  fimples  Feuilles  payera  la  moitié. 
Fromages  de  Hollande,  &  en  boulettes,  le  cent  pefant.     -     1   10     o 
Huiles  de  Baleine ,    où  grains  d'autres  pohTons ,  les  Bar- 
rique telles  qu'elles  font.       ----------      -7100 

Morues  vertes  ou  Cabillaus   falez  ,  le  Baril ,  qui  pefera 
500.  livres,  ou  à  proportion  du  même  poids.       _     -    -     -    -     y     o    o 

Pipes  à  Tabacq ,  la  grofle,  contenant  douze  douzaines  o     j-     o 

Porcelaine  &  Fayence  fine,  moyenne,  grande,  &  petite, 
contrefaite  en  Hollande  ,   &  autres   lieux  ,  le  cent  pe- 
fant. 10    o    o 
Rubans  de  Fil,  de  toute  forte ,  le  cent  pefant.    -    -    -    -      800 

Savon  noir ,  verd ,  mol ,  &  liquide ,  &  de  toutes  fortes ,  le 
cent  pefant.     ---------------      400 

Serges  de  Seigneur  &  d'Afcot,  la  pièce  de  20.  aunes  de 
France.  800 

Serges  drapées,  contrefaites  ,  ratinées,  la  pièce  de  if. 
aunes  de  France.       -------------      1100 

Toiles  de  Hollande  de  toute  forte,  fines  &  ouvrées,  foit 
crues,  jaunes,  ou  blanches,  la  pièce  de  15.  aunes,  aûnage 
de  France.       ---------------      200 

Sucres  rafinés  en  pain  ou  poudre,  candis,  blanc,  &  brun.    -    22   10     o 
A  condition,  que  les  Syrops  ou  Melaffes  ,  qui  viennent  de  France  en 
Hollande  ou  dans  les  autres  Provinces,  payeront  un  Sol  par  Livre  pour 
Droit  d'Entrée. 

Que  les  Sujets  des  Etats  Généraux  jouiront  à  l'avenir  du  Tarif  de 
l'an  1664.  tant  à  l'Entrée  qu'a  la  Sortie  de  toutes  les  Efpeces  de  Mar- 
chandifes  dont  les  Droits  ne  font  pas  changés  par  cette  Convention  &  ex- 
ceptées: pareillement  les  Efpeces  compnfes  au  Tarif  de  l'an  1667.  qui 
font  point  changées  par  cette  Convention  fufdite,  lefquelles  fubfilteront  de 
même  à  l'avenir. 

Que  dans  toutes  les  Marchandifes ,  dont  la  quotité  des  Droits  n'elt  pas 
fixée  par  le  Tarif  de  l'an  1664,  celui  de  l'a©  1667,  ou  par  cette  nouvelle 
Convention,  ils  ne  payeront  que  tant  par  cent  de  leur  valeur,  fuivant  la 

Re- 


Affaire* 
de  Fran- 
ck f.t  DES 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DC.  XCVIII.        175 

Règle  établie  parle  Tarif  de  1664.  pour  les  Marchandifes  qui  y  font  omifes. 
Que  Sa  Majefté  le  Roy  T.  C.  donnera  les  Ordres  neceflaires  pour  l'exé- 
cution exaéte  du  Traité  de  Commerce  &  de  cette  nouvelle  Conven-  Jhov.UnI 

tion. 

Que  le  dit  Tarif  &  cette  Convention  fubfifteront  autant  que  le  fufdic 
Traité  de  Commerce  fuivant  l'Article  44.  doit  fubfilter;  &  que  pendant  ce 
tems-là  aucuns  Droits  d'Entrée  ni  de  Sortie  ne  pourront  être  haufTés  fur  les 
Sujets  des  Etats  Généraux,  que  de  concert  entre  SaMajeilé  &  Leurs  Hau- 
tes Puiflances. 

Que  fi  le  RoyT.C.  accorde  à  quelque  autre  Nation  des  Droits  d'Entrée 
ou  de  Sortie  plus  foibles  que  ceux  qui  font  portés  par  lesdits  Tarifs  &  par 
cette  Convention,  ou  quelque  autre  avantage  en  faveur  de  leur  Commer- 
ce ,  lefdits  Sujets  des  Etats  Généraux  jouiront  des  mêmes  avantages. 

Qu'à  l'égard  des  Marchandifes,  que  lesdits  Sujets  des  Etats  Généraux 
apporteront  dans  les  places  où  villes  conquifes,  ou  qu'ils  en  tireront,  les 
Droits  tant  pour  l'Entrée  que  pour  la  Sortie  feront  à  l'avenir  réglés  confor- 
mément au  Tarif  de  l'an  1671.  à  l'exception  des  Marchandifes  qui  font 
dans  l'un  ou  l'autre  égard  plus  chargées  par  ce  Tarif  que  par  celui  de  l'an 
1664. ,  à  l'égard  defquelles  \qs  Droits  feront  diminués  &  réduits  à  ceux  du 
dudit  Tarif  de  l'an  1664. 

Que  les  Marchandifes  qui  entrent  en  France  par  le  Païs  conquis,  ou 
qui  en  fortent  par  le  même  Païs,  ne  payeront  qu'une  fois  le  Droit  d'En- 
trée ou  de  Sortie  j  en  tout  cas,  qu'elles  ne  payeront  pas  plus,  tout  conté, 
tant  pour  l'un  que  pour  l'autre,  que  les  Droits  portés  par  le  Tarif  de  l'an 
1664.  n'en  portent. 

Que  la  Terre  de  Tornay  ne  fera  pas  à  l'avenir  plus  chargée  qu'elle  n'é- 
toit  devant  que  cette  ville  fut  réduite  à  l'ObeifTance  du  Roy. 

Que  nul  empêchement  ne  fera  apporté  au  tranfport  de  la  Terre  de  Rouen. 

Que  tant  à  cet  égard,  qu'à  d'autres  qui  peuvent  concerner  le  Commerce, 
reront  reconnus  pour  Sujets  des  Etats  Généraux,  non  feulement  ceux  qui 
font  nés  dans  les  Provinces-Unies ,  mais  aulîi  tous  les  Etrangers  en  gêne- 
rai qui  y  demeurent. 

Que  ces  Articles  auront  la  même  force  &  vigueur  que  s'ils  avoient  été 
inférés  au  Traité  de  Commerce  même ,  &  qu'ils  feront  ratifiés  en  bonne 

forme  dans  le  tems  de à  commencer  du  jour  de  la  Signature, 

ou  plutôt ,  û  faire  fe  peut. 

En  foy  dequoy ,  &  pour  plus  grande  affiirance  &  obfervation  infaillible 
de  tout  ce  que  deiïus,  les  CommhTaires  fufdits  de  part  &  d'autre,  en  ver- 
xu  de  leur  ordres  &  pouvoirs,  ont  figné  les  prefents  Articles,  &  y  ont 
appliquez  leur  Seaux.     Fait  paffé  à     .     .     ,     le     .     .    . 


TABLE 


t76  MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ETC. 


TaMô. 
compara- 
tive des 

difFerens 

Tarifs. 


TABLE  COMPARATIVE  DES   DIFFERENS 

TARIFS. 


Les  Efpece? 


Baleine  coupe'e,  le  cent  pezant 
Baïacans,  la  pièce  de  2  2. aunes 
Beures  ,    le  cent       - 
Buffles  ,   Elants  ,   &c.    le  cent 

pezant 
Camelots  ,  la  pièce  de  2o,aunes 
Cire  blanche  ,    le  cent 
Cuirs  de  Bœufs  tar.es,  la  douzai- 


Cuirs  de  Vache  tane's  ,  la  dou- 
zaine 

Draps  de  Hollande,  la  pièce  de 

2f. aunes 
Draps  ,   Eftoffes ,    de    Laine , 
Poil,    Fil,    Soye,    &c.      - 


Draps  ,   Eftoffes  ,   de  Soye  6cc. 
de  Velours  ,  la  livre 


Fanons  de  Balaine  ,  les  3  o  o .  li- 
vres 

Fer  blanc,  le  Baril  de  45*0.  feuil. 
&  le  Baril  de  fimples  feuil- 
les payera  la  moitié 

Fromage  le  cent 

Huiles  de  Balaine,  la  Bariqxie 

Morue  ,  le  Baril  de  30a.  livres 

"Pipes  à  Tabacq,  la  grofle  de  1  2. 
douzaines 

Porcelaine  ,  &  Faïance  contre- 
faite ,  le  cent 

Rubans  de  fil  ,    le  cent 

Savon  ,  Noir  ,  Verd  ,  &c.  le 
cent  pezant 

Serges  de  Seigneur  &  d'Af- 
cot ,  la  pièce  de  20.  aunes 

Item  Draps  contrefaits  ,  la  pié- 
ce  de  13.  à  1  f .  aunes 

Sucre  rafiné  ,   le  cent 


Toilles   de  Hollande  ,   laplice 

de  1  j*.  aunes 
Toilles  de  Coton  &c. 


Le  Con- 
tenu du 
Tarif 

de 
1664. 


2-10-0 
4-  0-0 
0-1 2-0 


If-  o- 
6-  o- 
6-  o. 


le  Con-'  le  Conte- 
tenu  du      nu  des 
Tarif        Arrêts 
de  poile- 


1667. 


15--  0-0 

8-  0-0 

o-  0-0 

4~-  0-0 

12-  0-0 

O-  O-O 


:4- 


6-  0-0    7-  o-ù 

40-    0-0  go-  o 

i 

o-    0-0      o-  = 


3-  0- 


2-     0-0  UO-     O-O 


neurs. 


Les  De- 
mandes de 
Monfr.  de 

Ponchar- 
train. 


-030- 


o-if. 
3-  o- 
I-    f- 


o-    0-0 
0,12-     0-0 


10-     0- 

8-  o- 

3-10- 

6-   o- 

10-    c- 
If-    c- 


o-    0-0 
o-    0-0 


2-      0. 

l'Entr, 
en  cil 
défen- 
due    - 


NulsArets 
Idem 
6-    o-    c 

Idem 
Idem 

20-    o-    o 

20-  pour 
cent  de  la 
valeur 

20-  ut  fu- 
pra     - 

Idem 

30-    pour 

cent  de  la 

valeur  - 


a  1  2- 
à  6- 
à     3" 


0-0 
0-0 
0-0 


Mes  Of- 
fres 
pour  un 
nouveau 
Tarif. 


7-10-0 
4-  0-0 
0-1 2-0 


a  3  0-  0-0  2f- 
à  10-  0-0  6- 
à  1 2-    0-0     6- 


à  1 8-pour 
cent    - 


1 8-pour 
cent   - 


.  6  0- 


14- 


Les  Efpeces 


20-  par 
vre 

Idem 

Idem 


6-    o-   o 
Idem 
36-0-    c 


20- 
20- 

7-1 


o- 
o- 


à  zf-    0-0 


a  25-- 


a  4-  0-0 
à  1 o-  0-0 
à     6-    0-0 


1  13-    0-0 
à  12-     0-0 


6- 


o-n    24-     O-    O  à  JO-    O-O      6-    0-0 


40-    0-0 

3  2-pour 

cent   de 
la  valeur 

1  2-  pour 
cent  ut 
fupra 
15--    o- 

If-    o-. 


O-If-' 

6-    0-0 
4-   0-0 

O-      f-0 


Baleine  coupée  - 

Baracans 

Beures 

Buffles  ckc. 
Camelots 
Cire  blanche 

Cuirs  de  Bœufs 


Cuirs  de  Vache 


Draps  de  Hollan- 
de 


Et  la  Con- 
vention 
faite  avec 
Alonfr.  de 
Ponchar- 
tiain  ,  le 
22.  Nov. 
1698- 

9  -     C  -  0 
f-       O-O 

O  -    12-0 

l6  -       O-O 
8  -        O-Jo 

8-    0-0 

14  -     0-0 


7- 


rr- 


c   -  '♦ 


Ces  deux  Efpeces  ne  fe  trou 
vant  pas  claires  dans  les  Ta- 
rifs ,  ck  Alr.de  Pontchartrain 
n'en  s'étant  pas  informé, lent 
remis  à  un  autre  Conférence  : 
elles  nous  font  d;  très  peu 
de  confequtnee. 
Fanons 


Fer   blanc 


Fromage 
Huiles 


20 


20 


C- 
6- 


0-0 
0-0 


I-IO-: 


I  f-     O-O 
1 3-10-0 


+- 


3  o-    0- 
Idem 


o  a  20- 
à  22- 


0-0 
ic-o 


Idem 


4- 


10- 


0-0 
0-0 


Me 


Pip 


es 


Porcelaine 
Rubans     - 

Savon 

Serges    &c. 


I  -  10 
7 

r 


10  -  o 

o  -V> 


o-     f 


10  - 

8- 


0-0 
0-0 


8  -    0-0 


Idem  Drapé  -  il-  0-0 
Nous  fommes  convenus  de 
laiffer  les  Sucres  à  22.10.0. 
à  condition  ,  que  nous  char-, 
gérons  les  Syrops  ou  Melafïes 
à  1.  fol  par  livre  ,  pour  l'En- 
trée chez  nous. 
Toilles  de  Hol 
lande     ---  2-0-0 


SUPPLE- 


SUPPLEMENT 


AUX 


M  E  MOIRES 


D   E 


LAMBERT   Y: 


ANNEE      M.   DCC. 


Tome  XL  Z 


MEMOIRES, 

NEGOTIATIONS- 
T     R     A     I     T     E     Z> 

E    T 

RÉSOLUTIONS    D'ETAT. 

AN  N  É  E    M.   DCC 
AFFAIRES  DES  PROVINCES-UNIES. 

Rêfoiution  fur   ce  que  le  Gouverneur   de  Revel  a   a?Têté  des  AmiRE» 
Grains    achetez  par  les  Marchands  fîAmJlerâam  \  "vinSsT 

du  Lundi  29.  Novembre   1700.  *  Uw»* 

ES   Sieurs  Députez  de   la  Province   de  Hollande  &  de   Refo1"- 
Weftfrife  ont  raporté  à  l'Aflemblée ,    que  quelques  Mar-   Jj1""   ur 
chands   de   la  Ville  d'Amflerdam   trafiquant    en  Grains   Grains 
avoient  porté  leurs  plaintes  aux  Magiflrats  de  cette  vil-  arrêtez  a 
le,  qu'ayant  fait    acheter  une  bonne  partie  de  Ségle  en    Revendu 
intention   de  la  faire  porter   dans  ces    quartiers-ci  ;   le   *?*    ov' 
Gouverneur  dudit  Revel  en  a  refufé   la  fortie ,  n'étoit 
qu'on    en  payât  des    Droits;    favoir  de   chaque  lafi  un 
àtmi-lafi    ou   fa    valeur  au   de-là  des   Péages   ordinaires;    lefqueîs    Im- 
pots   quelques-uns   des    Correfpondans    defdits    Marchands    trouvèrent 
bon  de  payer  \  &  d'autres  non,   mais  d'abandonner   plutôt   les    Grains; 
aimant     mieux    hazarder    cela ,     que    de    foufcrïre   des   prétentions  fi 
onereufes  ,    contraires  à   tout    ufage    dans    le   Gommerce    à   aux  Trai- 
tez:  &  à  l'Equité  même  :    les    Sieurs   Députez   priant    Leurs    Hautes 

Puif- 

*  Elle  eft  Jïtnpkmeni  citée  dam  le  Tome  I,  pag.    187. 

Z  z 


.Affaires 
tes  Pro- 
vinces- 
Unies. 


i8o    MEMOIRES,  NEGO  TIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Puiffances  qu'il  leur  plaife  employer  leurs  Offices  les  plus  efficaces  auprès 
du  Roi  de  Suéde,  &  là  où  il  fera  de  plus  d'utilité,  à  ce  que  la  fufdite  lm- 
pofition  foit  abrogée ,  &  que  ce  qui  a  été  payé  à  cet  égard  foie  reflitué. 
Sur  quoi  ayant  été  délibéré,  on  a  trouvé  bon  qu'il  en  fera  écrit  au  Roi  de 
Suéde,  &  qu'on  lui  repréfentera,  combien  ladite  Impofition  eft  contraire 
à  la  Liberté  du  Commerce ,  &  aux  Traitez  qui  exiftent  entre  Sadite  Ma- 
jefbé  &  cet  Etat,  &  comment  elle  eft  infupportable  aux  Negociansj  & 
qu'ainfi  Sadke  Majefté  fera  priée  d'y  pourvoir  de  manière  que  ladite  im-- 
pofition  foit  annullée ,  &  qu'il  foit  permis  aux  Négocians  de  tranfporter 
ici  les  Grains  dont  ils  ont  fait  Pacqùïfition  fans  aucune  charge  extraordi- 
naire ;  &  qu'à  ceux  dont  les  Grains  ont  été  envoyez  ici  après  le  payement 
de  ladite  Impofition.  extraordinaire  ,  reftitution  foit  faite  de  ces  deniers, ou 
du  moins  qu'il  leur  foit  permis  de  fe  dédommager  de  ce  qu'ils  ont  payé  en 
le  déduifant  fur  les  Péages  ordinaires  lorfqu'ils  feront  venir  de  nouveaux 
Grains  de  ces  quartiers-là.  Et  fera  ladite  Lettre  qu'on  écrira,  conjointe- 
ment avec  copie  d'icelle,  envoyée  au  Réfident  Rumpf;  &  lui  fera  mandé 
de  remettre  l'original  où  il  appartient  ,  &  d'employer  tous  les  de- 
voirs les  plus  efficaces  à  ce  qu'on  obtienne  la  demande  qui  y  eft  faite. 
Sera  de  plus  prié  le  Sieur  Baron  de  Lelienrodt,  Ambaffadeur  Extraordinai- 
re de  Sa  Majcité  lé  Roi  de  Suéde,  de  féconder  cette  Affaire  de  fes  bons 
Offices  ;  &  à  cette  fin  lui  fera  mis  en  main  par  l'Agent  Rofenboom  l'Ex- 
trait de  cette  Refolution  de  Leurs  Hautes  Puiffances. 


Rejoint  Ion  pour  TOffroy  de  la  Compagnie  des   Indes  Oc- 
cidentales ;  du  Mardi  30.  Novembre  1700. 


i>etïoy 
de  la 
(  ^ompa- 
çnie  des 
indes 
t'Hciden- 


jUï  le  Raport  des  Sieurs  Ham  &  autres  Députez  de  Leurs  Hautes 
Puiffances  pour  les  Affaires  de  la  Compagnie  des  Indes  Occidenta- 
les ,  ayant  en  conformité  &  en  exécution  de  leur  Refolution  Commiffo- 
riale  du  19.  May  1699.  &  d'autres  fuccefîivement  émanées  à  ce  fujet, 
examiné  la  Requête  de  la  Compagnie  Privilégiée  des  Indes  Occidentales 
de  ces  Pais,  requérant  qu'il  plût  à  Leurs  Hautes  Puiffances  de  prolonger 
pour  ï'efpace  de  30.  années  l'Oclroi  accordé  à  ladite  Compagnie  ,  avec 
tous  les  Droits,  Privilèges,  &  Exemptions,  ainfi  qu'Elles  l'ont  accordé  en 
l'année  1674.  ■  &  qu'il  plut  en  outre  à  Leurs  Hautes  Puiffances  de  ter- 
miner, arrêter,  &  confirmer  le  Droit  de  ladite  Compagnie  de  la  receptè 
de  la  reconnoiffance  des  Marchandifes  venant  des  Colonies,  étrangères r 
iituées  dans  les  endroits  portez  dans  l'Octroi ,  de  la  même  manière  qu'elle 
çn  a  jouï: avant  la  Refolution  de  Leurs  Hautes  Puiffances  du  26.  Mai 
1688.  &  que  par  conféquent  les  deniers  mis  à  part  depuis  ce  tems-là  dans 
une  Caiiïe,  fuient  remis  à  ladite  Compagnie  des  Indes  Occidentales;  que 
pareillement  l'Avis  porté  par  les  Sieurs  Députez -de.  Leurs  Hautes  Puif- 
fances le  17.  Septembre  1677.  concernant  la  diitinclion  des  Côtes  &  Pla- 
ces dans  les  Indes  Occidentales  &  en  Amérique,  dont  plus  ample  men- 
tion 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  1S1 

tion  eit  faite  dansl'Octroi  du. 20.  Septembre  1674.,  foit  confirmé  &  chaji-  Affaires 
gé  en  une  Réfolution  pofitive  de  Leurs  Hautes  Puiffances.  Sur  quoi  ayant  m:s  P*** 
été  délibéré,  on  a  trouvé  bon  &  conclu  qu'il  fera  accordé  à  la  Compagnie  YiNCES" 
Générale  Privilégiée  des  Indes  Occidentales  de  ces  Pais,  la  Continuation 
ou  Prolongation  de  l'Oclroi  accordé  à  ladite  Compagnie  le  20.  Septembre 
1674.,  pour  l'efpace  d'autres  30.  années,  &  ainfi  jufqu'à  la  fin  de  l'année 
1750.  ;  &  iqu'à  cette  fin  fera  dépêché  un  A6le  de  Prolongation  en  due' 
forme  en  faveur  de  ladite  Compagnie  des  Indes  Occidentales.  Qu'on  in- 
férera particulièrement  dans  l'A  été  de  Prolongation,  que  ladite  Compa- 
gnie des  Indes  Occidentales  peut,  &  elt  en  droit,  de  recevoir  larecon- 
noiffance  portée  au  commencement  dudit  Oclroi  de  l'an  1674.  &  dans  la 
Réfolution  de  Leurs  Hautes  PuiiTances  du  19.  Juin  i6jf. ,  non  feulement 
des  Habitans  de  ces  Païs, naviguant /allant  chercher,  ou  apportant  quel- 
ques Marchandifes  des  Places  appartenant  à  ladite  Compagnie,  mais  en- 
core de  chacun  de  ceux  qui  naviguent,  vont  chercher,  ou  aportent  quel- 
ques Marchandifes  des  Places  appartenant  &  fous  le  Domaine  d'autres  Rois 
&  Princes,  fi  tuées  dans  les  Limites  dudit  Oclroij  &  nommément  auffi 
de  tous  Vaiffeaux  étrangers  apportant  dans  ces  Païs  quelques  Effets ,  Mar- 
chandifes, ou  Fruits  des  Indes  Occidentales  ou  des  Limites  dudit  Octroi, 
pour  leur  propre  compte,  pour  le  Fret,  ou  en  Commiflîon  ,  foit  que  ces 
Marchandifes  viennent  par  de  pareils  Vaiffeaux  étrangers  à  droiture  des 
Indes  Occidentales  &  des  Limites  dudit  Octroi  dans  ces  Païs,  ou  qu'ils 
ayent  porté  leur  charge  dans  d'autres  Païs  ou  Roïaumes,  pour  quelle  cau- 
fe  que  ce  foit  ;  n'étoit  que  les  Effets  d'un  Propriétaire  euffent  été  changez 
en  trafiquant  dans  l'endroit  où  ils  auroient  abordé, &  qu'ils  y  euffent  payé 
les  Droits  impofez;  ce  que  quelqu'un  venant  à  alléguer,  il  fera  tenu  à  fon 
entrée  de  prouver  fuffifamment  les  Effets:  Qu'en  outre  pour  lever  les 
difficultez  ci-devant  furvenus  à  cet  égard  entre  les  Collèges  refpectifs  des 
Amirautez  &  de  la  Compagnie  des  Indes  Occidentales,  les  Collèges  des 
Amirautez  conferveront  &  employeront  à  leur  avantage  les  Droits,  les- 
quels ils  ont  reçu  au  lieu  de  ladite  reconnoiffance  depuis  la  Réfolution  de 
Leurs  Hautes  Puiffances  du  26.  Mai  i<588-  jufqu'à  préfent,  &  que  la  re- 
cepte  des  fufdits  Droits  ceffera  par-là  à  l'avenir:  Que  pareillement  en 
exécution  de  l'Avis  des  Sieurs  Députez  de  Leurs  Hautes  Puiffances  du  17. 
Septembre  1677.  *'  fera  déclaré  &  inféré  dans  l'Acle  de  Prolongation  de 
l'Octroi,  que  fous  le  nom  de  nouveau  Païs-Bas  à  l'égard  des  trois  pour  cent 
que  la  Compagnie  prétend  tirer  des  Effets  allant  de  ce  côté-là  ou  venant 
de  celui-ci,  eft  comprife  la  partie  de  l'Amérique  Septentrionale,  laquel- 
le s'étend  au  Oueft  &  au  Zud  depuis  l'extrémité  Méridionale  de  Terre- 
Neuve  jufques  au  Cap  de  la  Floride,  &.  que  pour  ce  qui  regarde  le  pa- 
yement de  deux  pour  cent,  on  entend  fous  le  nom  des  Indes  Occidenta- 
les les  Côtes  &  Pais  depuis  ledit  Cap  de  la  Floride  jufques  au  Fleuve  d'O- 
renoque,  y  compris  les  Ifles  de  Curaçao:  Qu'en  outre  l'on  defigne  par 
les  autres  Places  de  l'Amérique  mentionnées  dans  l'ancien  ou  précédent 
Octroi,  à  l'égard  des  cinq  -florins  par  Lait  fur  les  Vaiffeaux  naviguant 


7   " 


Affaires 

DIS    PKO- 
VINCES- 
U.VIES. 


182     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

vers  ces  endroits-là,  toutes  les  Mes  Caraïbes  y  compris  Cuba,  la  Jamaï- 
que ,  Spagnola  &  Porto  Rico;  comme  auffi  toutes  les  Côtes  &  Païs  de- 
puis ledit  Fleuve  d'Orenoque  par  les  Détroits  Magellaniques  de  Major, 
ou  par  d'autres  Détroits  ou  PafTages  y  appartenant,  jufqu'au  Détroit  d'A- 
nian ,  tant  dans  la  Mer  du  Nord,  &  les  lues  fituées  de  côté  &  d'autre  & 
entre  deux,  que  pareillement  aux  Terres  Auftrales  ou  Méridionales,  les- 
quelles s'étendent  &  font  fituées  entre  les  deux  Méridiens  touchant  à  l'Efr. 
au  Cap  de  bonne  Efperance  &  au  Oued  à  l'extrémité  Orientale  de  la 
nouvelle  Guinée  inclufivement.  Que  la  Chambre  d'Amfterdam  fera  aug- 
mentée de  deux  Directeurs;  favoir  d'un  demi  Directeur  de  la  Gueldre, 
d'un  Directeur  entier  de  la  Frife,  &  d'un  demi  Directeur  de  l'Overyflel; 
&  que  le  débours  qui  fera  fait  du  payement  auxdits  deux  demi-Directeurs 
&  Directeur  entier,  à  pareille  fomme  que  d'autres  Directeurs  ,  leur  tenant 
lieu  de  penfion,  fera  porté  fuivant  le  contenu  de  l'Octroi,  à  la  charge  de 
la  Compagnie  générale  des  Indes  Occidentales  ,  fans  que  par-là  les  Emo- 
iumens  des  autres  anciens  Directeurs  en  foient  chargez  ou  amoindris,  & 
qu'on  continuera  de  tems  à  autre  dans  cette  coutume. 


Lettre  de 
la  Ré- 
gence 
d'Efpa- 
gne  aux 
Etats  Gé- 
néraux; 
du  1 1 
Dec. 
1700. 


Lettre  de  la  Régence  d'E/pagne  aux  Etats-Généraux  des  Pro- 
vinces- Unies  des  P aïs-Bas,  pour  leur  notifier  la  Mort  du 
Roi  Charles  II ;  du  11.  Décembre  1700. 

TRES  CHERS  ET  GRANDS  AMIS, 

Aiant  plu  à  Dieu  d'appeller  à  foi  le  Roi  Charles,  nôtre  Sire  & 
Seigneur  ,  le  premier  jour  de  ce  mois ,  &  ayant  trouvé  entre  les 
Claufes  de  fon  Teltament  clos  deux  principales,  l'une  touchant  la  Nomi- 
nation de  l'Héritier  univerfel  de  toute  fa  Monarchie  ,  &  l'autre  au  regard 
de  la  Jonte  qu'il  établit  tandisque  le  Succeffeur  puiffe  gouverner  :  Nous 
avons  crû  devoir  vous  faire  part  de  cette  trifle  Nouvelle,  &  à  même 
temps  vous  envoier  Copie  des  deux  Articles  ci-defTiis  mentionnez  ;  efpé- 
rant  que  vous  prendrez,  non-feulement  beaucoup  de  part  à  la  jufle  Dou- 
leur d'une  fi  grande  Perte,  mais  auiTi  à  la  Confolation  générale  que  caufe 
la  Royale  Détermination  de  Sa  Majefté  ;  par  ce  qu'étant  celle  ,  qui  peut 
le  mieux  conferver  le  Repos  de  l'Europe,  elle  doit  être  tenue  pour  une 
Difpofition  de  la  Providence  Supérieure.  Surquoi  nous  prions  Dieu,  qu'il 
vous  ait,  très  chers  &  grands  Amis,  en  fa  fainte  Garde. 


A  Madrid,  le  11  Décembre  de  l'An  1700. 


Vôtre  bien  bonne  Amie 
MARIANE. 


El  Card.  de  Porto  Carero.  Don  E manuel  Arias.  El  In- 
duis id  or  General.  Don  Rodrigo  E  manuel.  Mamriq.ue 
de  Lara.  El  Conde  de  Benevente.  El  Joseph  de  la 
P  u  e  n  t  e.  Refo- 


RESOLUTIONS    D 'ET  AT,  M.  DCC.  igt 


Affaires 
DiS   Pkcw 


Rejoint  ion  Jur   la  Notification  de  la   Mort  du  Roi  d'Efpagne  \ 

du  Mercredi  8.  Décembre  1700  (*).  vince^ 

Unies. 

OUÏ  le  Raport  des  Sieurs  van  Effen  &  autres  Députez  de  Leurs  Hau-   Refolu. 
tes  Puiffances  pour  les  Affaires  Etrangères  ,  ayant,  en  vertu  &  en    tion  fur 
exécution  de  leur  Réfolution  Commifîbriale  du  2  de  ce  mois,  examiné  la   laMort 
Lettre  de  la  Reine  Douariere  d'Efpagne  &  des  autres  Regens  pro  intérim,   d'f  ^oi 
écrite  de  Madrit  le  11  du  mois  de  Novembre  dernier,  &  délivrée  par         .pf~ 
le  Sieur  AmbalTadeur  de  Quiros  au  Sieur  van  Haeren  alors  Prcfident  de   y  d'^ç. 
l'Affemblée,  contenant  la  notification  du  décès  de  Sa  Majelté  le  Roi  d'Ef-    1700. 
pagne,  &  des  Claufes  de  Ton  Teltamenr,  tant  par  raport  à  Ion  Héritier 
univerfel  qu'aux  Regens  nommez  pour  gouverner  pro  intérim  :  Sur  quoi 
ayant  été  délibéré,  on  a  trouvé  bon  &  ordonné  qu'il  fera  répondu  à  ladi- 
te Lettre  en   termes  civils,  &  qu'il  y  fera  fait  un  compliment  de  condo- 
léance à  fadite  Majelté  la  Reine  d'Efpagne  &  autres  Regens  fur  le  décès 
dudit  Roi  de  Glorieufe  Mémoire;  en  y  ajoutant,  que  la  Conii;itution  du 
Gouvernement  ne  permet  pas  à  Leurs  Hautes  Puiffances  de  fe  déclarer 
encore  fur  la  Claufe  du  Teitament  par  raport  à  l'Héritier  univerfel,  étant 
obligées  d'attendre  fur  ce  fujet  les  Avis  des  Provinces  refpeclàves ,  aux- 
quelles on  en  a  donné  connoiffance;  qu'en  attendanr,  le  défunt  le  Roi  d'Ef- 
pagne de  Glorieufe  Mémoire  ayant  très-fagement  inititué  ladite  Reine  & 
les  Régens  au  Gouvernement  Proviflonel  de  fes  Roïaumes  &  Etats ,  Leurs 
Hautes  PuiiTances  leur  en  fouhaitent   tout  bonheur  &  profpérité,  &  que 
de  leur  côté  Elles  prendont  toujours  à  cœur  la  confervation  &  le  maintien 
de  l'Amitié  &  bonne  Correfpondance  qui  a  fubfifté  depuis  beaucoup  d'an- 
nées entre  la  Couronne  d'Efpagne  &  cet  P2tat  ;   &  que  la  Lettre  qu'on  é- 
erira  fera  envoyée  au  Sieur  de  Scîionenberg,  antorifé  pour  le  maniment 
des  Affaires  de  l'Etat  h.  la  Cour  d'Efpagne,  avec  une  copie  d'icelle  ,  pour 
en  remettre  l'original  là  où  il  appartient.     Et  fera  l'Extrait  de  cette  Ré- 
folution  de  Leurs  Hautes  Puiffances  remis  es  mains  dudit  Sieur  de  Quiros 
par  l'Agent  Rofenboom  pour  lui  fervir  d'Information. 

Autre  du  même  Mercredi  8.  Décembre  iroo. 

OUÏ  le  Raport   des   Sieurs   van   Effen   &  autres  Députez  de  Leurs   Autre  fur 
Hautes  Puiffances  pour  les  Affaires  Etrangères,  ayant,  en  vertu  &    Jérôme 
en  exécution  de  leur  Réfokition  Commifforiale  du  4  de  ce  mois  ,  éxa-    SuJet* 
miné  la  Lettre  de  Sa  Majelté  le  Roi  de  France  ,    écrite  de  Verfailles 
le  29.  du  mois  paffé  ,  par  laquelle  Sadite  Majelté  donne  connoiffance  aux 
Etats   que  le  défunt  Roi  d'Efpagne  avoit  déclaré  par  fon  Teftament  le 
Seigneur  Duc  d'Anjou  ,  petit-Fils  de  Sadite  Majelté  le  Roi  de  France  , 
Succcffeur  dans  tous  Ces  Roïaumes  &  Etats  ;  conjointement  aufïï  le  Mé- 
moire 

f  *  }  H  n'y  en  a  qu'un  Extrait  dam  le  Tam.  I,  p.rg.   228. 


i84     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Araires    moire  du  Comte  de  Briord  Ambafladeur  Extraordinaire  de  Sadite  Ma- 

dks  Pro-  jq^q^  auquel  étoient  jointes  les  raifons  &  motifs  qui    ont  engagé  Sadi- 

Ukies.     te  Majeflé  d'accepter  ledit  Tellament ,  &  affurant  de  plus  Leurs  Hau- 

—  tes  Puiflances  de  l'Amitié  &  de  L'Vffection  de  Sadite  Majeflé  pour  cet  E- 

tat:  Sur  quoi  ayant  été  délibéré,  on  a  trouvé  bon  &  ordonné,  qu'il  fera 
repondu  à  ladite  Lettre  en  termes  civils,  &  qu'on  y  témoignera  à  Sadite 
Majeflé ,  que  Leurs  Hautes  Puiflances  ont  reçu  avec  ladite  Notification 
l'aflurance  agréable  ,  qu'il  a  plu  à  Sa  Majeflé  de  donner  dans  ladite  Lettre, 
&  par  ledit  Sieur  Comte  de  Briord,  de  la  continuation  de  fon  amitié  & 
de  fon  affeétion  pour  cet  Etat;  que  Leurs  Hautes  Puiflances  ont  toujours 
pris  beaucoup  de  part,  &  en  prendront  toujours,  dans  tout  ce  qui  con- 
cerne la  profpérité  &  la  grandeur  de  la  Maifon  Ro'ïale  de  Sadite  Majeflé  ; 
mais,  qu'EUes  efperent  dans  cette  occafion ,  que  Sadite  Majeflé,  félon  fa 
grande  SagefTe ,  confiderera  aifément  que  Leurs  Hautes  Puiflances  ne  font 
pas  en  état  de  s'expliquer  dans  l'inllant  fur  le  cas  préfent,  comme  é- 
tant  une  chofe  de  fi  grande  importance  ;  que  fuivant  la  Conflitution  de 
Leur  Gouvernement,  Elles  font  obligées  d'attendre  là-deflus  les  fentimens 
des  Seigneurs  Etats  des  Provinces  refpeétives ,  auxquels  il  en  a  été  donné 
connoiflance  ;  &  que  c'efl  outre  cela  une  Affaire  qui  leur  efl  commune 
avec  Sa  Majeflé  Britannique,  en  vertu  du  Traité  conclu  entre  Eux  fur 
la  Succeflion  d'Efpagne,  &  dont  Elles  doivent  par  conféquent  préalable- 
ment conférer  avec  Sadite  Majeflé.  Qu'en  attendant,  Leurs  Hautes  Puif- 
fances  n'ont  pas  voulu  manquer  à  remercier  fans  délai  Sadite  Majeflé 
de  la  nouvelle  Affiïrance  qu'il  lui  a  plu  de  donner  dans  cette  occafion  de 
fon  Amitié  &  de  fon  Affection  pour  cet  Etat}  que  Leurs  Hautes  Puiflan- 
ces l'ont  reçue  avec  beaucoup  de  refpecl ,  &  qu'en  connoiflant  le  prix 
Elles  tâcheront  toujours  de  s'en  conferver  de  plus  en  plus  &  avec  tous 
les  foins  poflibles  la  continuation,  au  delà  de  laquelle,  aufll  bien  que  de 
la  continuation  de  la  Paix  &  du  Repos  commun,  Elles  n'efliment  rien 
tant  que  la  bonne  Affeétion  de  Sadite  Majeflé.  Que  cette  Lettre  qu'on 
écrira  fera  envoyée  au  Sieur  de  Heemskerk,  Ambafladeur  Extraordinaire 
de  Leurs  Hautes  Puiflances  à  la  Cour  du  Roi  de  France ,  à  ce  qu'il  la 
remette  à  Sadite  Majeflé  :  &  que  l'Extrait  de  cette  Refolution  de  Leurs 
Hautes  Puiflances  fera  mile  es  mains  dudit  Sieur  Comte  de  Briord  par 
l'Agent  Rofenboom,  pour  fervir  de  Réponfe  à  fon  dit  Mémoire. 

Refolution  fur  le  Manque  de  Fanaux  dans  la  Mer  Balti- 
que;  du  14..  Décembre  1700. 


Manque     /H|N  a  lu  à  l'Aflemblée  la  Requête  des  Bateliers  &  Pilotes  navigant 


de  Fa-       \_J  dans  la  Mer  Baltique ,  comme  auiïi  des  Facteurs  des  Vaiffeaux,  por- 
nauxde     tant  que  depuis  bien  du  tems  le  Fanal  ordinaire  dans  l'Ifle  Anout  n'avoic 
Baltique.    Pas  W  allumé,  ce  qui  étoit  très  périlleux  pour  les  Vaifleaux  qui  naviguent 
ou  qui  vont  vers  le  Zont  dans  la  nuit  &  dans  un  tems  ombrageux,  pou- 
vant 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  18; 

vant  par -là  facilement  échouer  fur  ladite  Ifle;  ce  qui  étoit  arrivé  il  n'y  a 
que  peu  de  tems  à  un  Vaiffeau  venant  de  Coningsbergue,  dont  auftï  il  a 
plu  à  Leurs  Hautes  Puiflances  d'écrire  au  Réfident  Goes,  &  de  lui  ordon- 
ner de  faire  en  forte  auprès  du  Roi  de  Danemark  que  ledit  Fanal  fut  repa- 
ré au  plutôt,  &  qu'il  fût  allumé*  mais,  que  jufq'ici  on  n'en  avoit  rien  fait  ; 
priant  Leurs  Hautes  Puiflances,  qu'il  leur  plaife  en  écrire  une  autre  fois 
audit  Réfident,  lui  ordonnant  de  continuer  &  de  perfifter  à  prier  que  le- 
dit Fanal  foit  allumé  le  plutôt  poflible ,  pour  prévenir  de  plus  grands  dom- 
mages; &  que  ledit  Réfident  en  outre  ait  à  remontrer  à  Sadite  Majefté , 
&  là  où  cela  pourra  être  de  quelque  fruit ,  que  comme  ladite  Ifle  a  chan- 
gé d'aiîiette  depuis  quelques  années  ,  &  qu'une  pointe  de  terre  avance 
préfentement  en  mer,  laquelle  ell  à  fec  lorfque  la  marée  efl  baffe,  beau- 
coup de  Vaiffeaux  y  échouoient,  que  pour  cet  effet  ledit  Fanal  pourroit 
être  tranfporté  avec  plus  de  fruit  au  bout  de  ladite  pointe,  &  y  être  faci- 
lement bâti  de  briques  au  printems,  de  la  manière  dont  Leurs  Hautes 
Puiflances  en  avoient  ci-devant  fait  inltruire  plus  au  long  le  Sieur  Moe- 
ring,  comme  cela  paroitpar  les  Reiblutions  en  date  du  51.  Décembre  i6%2 
&  7.  Juillet  1683.  &  par  les  deffeins  qui  en  ont  été  remis  à  Sadite  Majefté; 
que  de  plus  on  mît  un  Gril  fur  ledit  Fanal ,  ainfi  qu'on  a  coutume  de  fai- 
re en  ce  Païs-ci,  &  qu'on  y  brûlât  du  charbon  Ecoffois,  que  deux  hom- 
mes allumeroient&  attiferoient  ;  que  par-là  grand  nombre  de  gens  feroient 
en  fureté  de  leur  vie,  &  beaucoup  de  Vaiffeaux  confervez  ;   que  le  Fanal, 
où  il  ell  à  prefent ,  n'eft  pas  bien  en  vue  des  Pilotes  ni  à  fa  véritable  place, 
fa  lumière  donnant  une  fauffe  clarté  ;  qu'il  étoit  à  efperer  que  Sa  Majefté  y 
confentiroit,  vu  que  les  Vaiffeaux  naviguant  de  ces  païs  vers  ces  quartiers- 
là  payoient  annuellement  des  fommes  confiderablesj  que  le  Sieur  Ambaff. 
Joël  étant  ici  avoit  même  fait  promeffe  que  cela  s'éxécuteroit  ;  que  non- 
obftant  cela ,  le  premier  Fanal  foit  rétabli  par  provifion  ,  jufqu'à-ce  que  l'au- 
tre édifice  foit  achevé  &  mis  en  train  dans  l'endroit  de  la  Carte  où  l'on  a 
marqué  de  la  plume  une  -f-  fur  la  fufdite  pointe.     Surquoi  ayant  été  délibé- 
ré, on  a  trouvé  bon  &  conclu  ,que  Copie  de  ladite  Requête,  avec  la  Carte 
&  autres  papiers,  fera  envoyée  au  Réfident  Goes,  &  qu'il  lui  fera  mandé 
de  faire  de  nouvelles  inftances  auprès  de  Sa  dite  Majefté  le  Roi  de  Dane- 
mark,  &  là  où  cela  pourra  être  de  quelque  fruit,  à  ce  que  le  Fanal  ordi- 
naire fur  l'Ifle  Anout  foit  allumé  le  plutôt  poflible,  pour  prévenir  de  nou- 
veaux malheurs }  &  qu'enfuite  on  conftruife  au  Printems  une  nouvelle 
Tour  fur  le  bord  de  ladite  pointe  pour  y  brûler  du  charbon  fur  un  Gril ,  fé- 
lon le  modèle  qui  en  a  été  fait;  que  le  Fanal  y  foit  allumé;  &  que  pen-, 
dant  cet  intervalle  le  vieux  Fanal  puiffe  fervir  :  Et  que  le  Sieur  van  Stoc- 
ken,  Envoyé  Extraordinaire  du  Roi  de  Danemark,  fera  requis  de  féconder 
cette  Affaire  de  fes  bons  Offices ,  &  qu'à  cet  effet  l'Extrait  de  cette  Réfo- 
lution  de  Leurs  Hautes  Puiflances  fera  remis  audit  Sieur  van  Stôcken  par 
l'Agent  Rofenboom.  W.    W  1  c  h  e  r  s. 


AfFAIRE3 

des  Pro- 
vinces 
Unies. 


Tome  XL 


Accordant  avec  le  Regitre. 


F.      F  A    G   E   L. 


Aa 


Ré  fa- 


i8<*     MEMOIRES,  NEGOTI ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Réfolution  fur  la  Ratification  du  Traité  fait  avec  PEJeBeur  de 
Brandebourg  ;  du  Lundi  20.  Décembre  1700. 

IL  a  été  trouvé  bon , après  une  Délibération  préalable,  que  les  Seigneurs 
Etats  de  la  Province  de  Groningue  feront  reqnis  par  Lettre,  de  con- 
fentir  fans  délai  à  la  Ratification  du  Traité  dernièrement   conclu  avec  le 

un  Traite  sérénifiimeEîecleur  de  Brandebourg  pour  le  Renouvellement  &  la  Prolon- 
gée le 

Brande- 
bourg. 


.Affaires 
ms  Pko 

YINCES 

UNItS. 

Réfolu- 
tion pour 
ratifier 


gation  des  précédens  Traitez. 

Réfolution  pour  une  Pétition  de  deux  Millions  pour  des  Magazins  &c. 

Kéfolu-     f^\^Y  îe  RaPPort  des  Sieurs  Ham  &  autres  Députez  de  Leurs  Hautes 
tionpour   \^J  PuifTances  pour  les  Affaires  de  la  Milice,  ayant  été  en  Conférence 
unePeti-    avec  quelques  Sieurs  Députez  duConfeil  d'Etat,  fur  le  contenu  de  la  Let- 
^"n,de2,   tre  dudit  Confeil  d'Etat  écrite  ici  à  la  Haye  le  neuvième  précédent  ,  au 
îuons.   ^et  j^^  Forces  que  la  Situation  préfente  des  Affaires  du  Paï's  paroiffoit 
exiger ,  qu'on  demandoit  qu'on  eut  foin  de  pourvoir  aux  Munitions  des 
Magazins  de  la  Généralité  ,  &  des  autres  fur  les  Frontières.     Sur  quoi 
avant  été  délibéré ,  on  a  trouvé  bon  que  pour  fuppléer  en  quelque  maniè- 
re aux  Befoins,tant  defdits  Magazins  de  la  Généralité,  que  de  ceux  fur  les 
Frontières,  &  y  procéder  le  plus  promptement  qu'on  pourra,  le  Confeil 
d'Etat  fera  requis ,  comme  il  en  eil  requis  par  la  préfente ,  de  former  une 
Pétition  pour  deux  Millions,  pour  l'achat  des  Munitions  &  autres  Befoins 
defdits  Magazins  ,  &  de  faire  remettre  ladite  Pétition  à  Leurs  Hautes 
Puiffances. 

MEMOIRES   DES   MINISTRES  PUBLICS 
AUX  ETATS -GENERAUX. 

Mémoire  de  Monfieur  de  Gersdorf;  du  îç.Mars  1700.  * 


HAUTS  ET  PUISSANS  SEIGNEURS, 

LE  fouiTigné,  Confeiller  &  Réfident  de  Sa  Majefté  le  Roi  de  Pologne  & 
Electeur  en  Saxe, notifie  avec  un  profond  refpecl  à  Vos  Hautes  Pui£ 
Pologne;  'fances,que  le  Roi  fon  Maitre,  ayant  reçu  une  Lettre,  dont  copie  eftici 
jointe,  de  Son  Lieutenant-  General  le  Sieur  de  Flemming,  qui  a  le  Com- 
mandement des  Troupes  de  Sa  Majefté  dans  le  Grand-Duché  de  Lithua- 
nie,  y  a  appris,  contre  toute  elperance  &  contre  toute  attente,  que  les 
gens  de  Sa  Majefté  Suédoife,  avec  leurs  Officiers  Commandans  féjournam 


Mémoire 
de  l'En- 


du  19. 

Mars. 


t 

dans 


*  Il  en  ejt  fait  mention  dam  h  Tome  I. ,  fag.  64. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC. 


187 


LOCNE. 


tîans  ces  Quartiers-là,  avoient  entrepris  beaucoup  de  chofes  contraires  à  Affaires 
l'Amitié  mutuelle;  que,  félon  les  Avis  portez  en  ce  moment  par  un  fécond 
Exprès,  ledit  Lieutenant  -  General ,  dans  l'appréhenfion  d'une  prochaine 
attaque  ou  furprife  ,  &  uniquement  pour  en  garantir  fes  Troupes  &  le 
Grand-Duché,  avoit  été  contraint ,  fans  pouvoir  attendre  quelques  ordres 
du  Roi ,  de  fe  rendre  maitre  d'un  Gabion  iltué  près  de  la  Rivière  de 
la  Duhne. 

Et  comme  le  Roi  mon  Maitre  reconnoit  l'Affection  particulière  que  Vos 
Hautes  PuifTances  ont  toujours  eue  pour  Sa  Perfonne  Royale,  pour  Sa 
Couronne,  &  fa  Maifon  Electorale,  il  a  plu  à  Sa  Majeflé  de  réordonner 
d'informer  exactement  Vos  Hautes  PuifTances  de  la  vérité  de  la  chofe,  ne 
doutant  point  qu'Elles  n'attribueront  pas  à  Sa  Majeflé,  fuivant  leur  Equité 
ordinaire ,  la  caufe  des  fuites  facheufes  qu'on  en  doit  craindre  ;  puifqu'El- 
le  efl  présentement  hors  de  fon  Royaume  ,  &  fe  tient  avec  la  plus  grande 
partie  de  fon  Armée  dans  fon  Eleftorat ,  n'ayant  fongé  qu'à  vivre  en  Paix 
&  en  Amitié  avec  la  Couronne  de  Suéde:  mais, qu'au  contraire,  Vos  Hau- 
tes PuifTances  n'approuveront  pas  feulement  ce  qui  a  été  entrepris  par  le 
Lieutenant  -  General  de  Flemming ,  mais  qu'Elles  affilieront  plutôt  Sa 
Majeflé  de  leur  Secours,  que  la  Couronne  de  Suéde  qui  a  donné  occafion 
à  cette  divifion  ;  ce  que  Sa  Majeflé  reconnoitra  autant  qu'il  lui  fera  poffi- 
dans  toutes  occalions.  Le  fouffigné  refle  avec  toute  la  vénération  pof- 
fîble  &c. 


Le  19.  Mars  1700. 


Gersdorf. 


AFFAIRES  D'ANGLETERRE. 


Lettre  du  Roi  fî "Angleterre ,  au  Comte  d'Oft-Frifi,  pour  lui 

faire  Compliment  de  Condoléance  fur  la  Mort  de  Ja 

Femme  ;  du  13.  Nov.  1700. 


Amures 

d'Angle- 
terre. 


GULIELMUS  TERT1US ,  DeiGratiâ,  Magna;  Britannia ,  Fran-  Lettre  du 
cite ,  £5?  Hibemiœ    Rex  ,  Fidei  Defenfor  &c.   JlluJlriJJimo  &  CelJîJJîmo  Roi 
Principi  Domino  Chriftiano  Everhardo  Principi  Frifiœ  Orient alis ,  Domino  in   Gulllau- 
Efens ,  Stedesdorf  &  Witmund  ,  Confanguineo  &  Amico  Nofiro  ChariJ/imo,   çomtc 
Salutem.     IUuftriJJî^e  Princeps  ,  Confanguinee  &  Amice  Charijfime ,  cum  ex   d'Oft- 
Literis  CeUitudinis  Vefirœ,  die  tertio  Menus  hujus ,  Aurici  feriptis,  dilcclijfjï-  Frife. 
mam  Ipfius  Conjugem ,  eandemque  leclijjïmam  Principem  Eberhardinam  Sophiam 
fubitâ  morte  prœreptam  intelligamus ,  non  pojfumus ,  pro  fummâ  no  (ira  in  Ipfam 
Amicitiâ  ,  ar claque  necejjïtudine ,  quin  tanti  Cafâs  acerbitatem  ,  ejufdem  Ipfi 
non  ignari  ,  &  Celfitudinis  Veflrœ  vices  graviter  doleamus ,  &  fi  quid  in  Nobis 
fitum  fit  quod  juflifiïmum  inopinati  vulneris  dolorem  Jijfere  aut  lenire  pojjït ,  id 

Aa  1  omne 


i88    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aftairfs    omne  pro  optimâ  Nofïrâ  in  Celfiîudinem  Veflram ,  ipjîufque  Familiam ,  Voluntate 
d'Ancle-    £j>  Benevokntiâ  collât  un  libenter  admodum  fumus.     Dabantur  in  Aulâ  Noftrâ 
T£RRF-     de  Hampt  on- Court  ^  die  i^.Novemùris ,  Anno  Domini  1700.   Regnique  Nojlri 
Duodecimo. 

Celfitudinis  Veftrœ 

Bonus  Confanguincus  &  Ami  eus. 

G  U LIE  LMU  S    R. 

C.     H   E   D    G   E   S. 

Lettre  de  V Envoyé  Stanhope  au  Roi  cC Angleterre  >  du  25", 

Décembre  1700. 

L'Ambassadeur  de  France  a  eu  ordre  de  témoigner  au  Sieur  de 
Lilienrodts,  que  le  Roy  fon  Maître  apprenok  avec  plaifir  les  foins 
qu'il  prenoit  pour  exhorter  Meilleurs  les  Etats  Généraux  à  la  Confervation 
delà  Faix.  On  remarque,  partons  les  mouvemens  qu'il  Te  donne,  qu'il 
ambitionne  une  nouvelle  Médiation.  Aurefte,  Sire,  comme  nous  allons 
entrer  dans  une  nouvelle  Année,  je  ne  fçaurois  m'empêcher  de  témoigner 
à  Vôtre  Majefté  les  Vœux  ardens  que  je  fais  journellement  pour  la  Prof, 
périté  de  fon  Règne,  &  pour  le  parfait  contentement  de  Sa  Perfonne  Sa- 
crée. Je  fupplie  la  Bonté  Divine  de  les  vouloir  exaucer ,  &  de  difpofer 
par  fa  Toute -Puiflance  toutes  chofes  d'une  manière  qu'elles  contribuent 
à  la  gloire  de  Vôtre  Majeité,  au  bonheur  &  à  la  félicité  de  tous  fes  Royaumes 
&  Etats  ,  &  à  la  joye  univerfelle  &  particulière  de  tous  fes  ridelles  Sujets. 
Je  fuis  avec  la  foûmillion  la  plus  refpeclueufe  du  monde, 


Lettre  de 
Stanhope 
au  Roi 
Guillau- 
me. 


SIRE, 


De  Vôtre  Majefté 

Le  très  -  humble  &c. 


A  la  Haye,  ce  2f.  Décembre  1700. 


Stanhope. 


Affaires 
d'Italie. 


Difcours 
duCard. 
d'Ktiées 
au  Pape. 


AFFAIRES    D'ITALIE. 

Difcours  du  Cardinal  d'Eîrécs  au  Pape  dans  le  Confifloire  du  2 1 
Juin  1 700 ,  touchant  1  Election  du  Cardinal  de  Noaïllcs. 

A  Promotion  à  la  Pourpre,  qu'il  a  plu  à  Vôtre  Sainteté  de  faire  de  trois 
Perfonnes  illuflres  par  leur  riaiflarice  &  par  leurs  vertus,  recomman- 
dées 


RESOLUTIONS   D'ETAT,   M.  DCC. 


lîo 


dées  pour  la  faveur  &  eftime  des  Princes,  doit  plutôt  être  receuë  avec  re-  Affairf» 
connoiiïance  &  avec  un  aplaudiffement  public  ,  que  d'être  mife  en  de!i-   d'Italik. 
beration  par  les  Suffrages  qu'EIle  a  daignée  nous  demander.  Car,  qu'a-t-on 
à  faire  de  plus  convenable  pourfe  captiver  l'Amitié  des  Princes,  ou  de  plus 
propre  pour  honorer  cette  facrée  AiTemblée  ? 

Mais,  trouvant  dans  leur  nombre  l'Archevêque  de  Paris  très-agreable  à 
mon  Roi,  c'eft  mon  devoir  indifpenfable  d'en  rendre  grâce  avec  recon- 
noiflanceau  nom  du  Roi  &de  toute  la  Nation;  ce  que  je  fais  à  vôtre Bea- 
titudeavec  l'humilité  convenable.  Je  pafferai  fous  filence  les  honneurs  in- 
fignes  de  fa  très-noble  Famille ,  augmentée  &  iliuflrée  déjà  par  tous  les 
principaux  titres ,  par  les  charges  auprès  du  Roi  ,  par  le  commandement 
des  Armées,  &  même  par  des  Victoires.  Je  laifle  le  foin  de  ces  chofes 
à  d'autres;  &  quant  à  moi,  il  ne  fuffit  de  dire  hardiment  ceci,  que  tout 
ce  qu'on  peut  jamais  fouhaiter,  pour  remplir  faintement  &  favament  tou- 
tes les  Charges  les  plus  eminentes  de  l'Eglife ,  a  été  vu  concourir  en- 
femble  &  croître  dans  l'Archevêque  de  Paris,  par  ceux  qui  voient 
avec  vénération  fon  excellent  naturel  depuis  fes  tendres  années ,  culti- 
vé avec  toute  forte  de  pieté,  &  continué  jufques  à  une  parfaite  virili- 
té à  Tàge  de  la  plénitude  de  Chrift  ,  avec  une  infigne  charité  ,  une 
continuelle  vigilance  ,  une  modération  d'efprit  ,  une  connoiffance  des 
choies,  une  fcience  extraordinaire  ,  une  doctrine  très-pure,  &  un  grand 
&  confiant  refpect  envers  le  S.  Siège  Apoftolique.  Ainfi,  il  réfléchira  en 
abondance  fur  la  Dignité  la  même  Splendeur  qu'il  recevra  d'Elle. 


AFFAIRES   D'ALLEMAGNE. 


Conditions,  que  Son  A.  Ser.  Monfeigneur  le  Duc.de  Brïmswïc- 

Luncbourg  offre  à  ceux  qui  voudront  lui  prêter  de 

r Argent  en  Hollande  ;  en  Septembre  1 700. 


Affaires 

D'ALLE- 
MAGNE. 


i.T    E  Confentement  des  Etats  de  Hollande,  en  vertu  de  leur  Edi£t  du    condi- 

-1— /   7.  Avril  170O.  tions 

2.  Une  bonne  Obligation  fignée  de  la  maindeS.x^.Sereniffime.  d'unEm- 

x .  Le  Confentement  de  Monfeigneur  l'Electeur  fon  Neveu  &  Succefleur,  prunt 

ligne  de  la  main  de  h.  A.  L.  BrunY- 

4.  Une  bonne  Hypoteque  dans  fes  Etats..  wik,-  en 

f.  La  Caution  de  Leffman  Berens  àïïannover,  pour  le  Capital,  moye-  Sept. 

'uant  un  Acle  en  bonne  forme.  J''oc* 

6.  La  Caution  de  Wolf  Goldfmit  à  Amflerdam,  aufîï  par  un  Aéte  pour 
y  payer  régulièrement  les  Intérêts. 

7.  Les  Intérêts  feront  cinq  peur  cent. 


Aa  j 


Une 


,Po   MEMOIRES,  NEGOTIATÏONS,  TRAITEZ,  ET 


AmtREs 
d'Alle- 
magne. 

Déclara- 
tion de 
l'Empe- 
reur fur 
le  Traité 
de  Parta- 


Une des  Déclarations  de  S.  Afaj.  Impériale  fur  le  Traité 

de  Partage  ;  en  1 700 

a  Majesté'  Impériale  nous  a  commandé  de  vous  dire,  qu'Elle 
a  déjà  fait  déclarer  l'autrefois,  comme  quoy  Elle  croyoit  indécent  & 
injuite  de  traiter  ou  convenir  de  la  Succeffion  ou  Partage  de  la  Mo- 
narchie d'Efpagne,  pendant  la  vie  du  Roy  Catholique  ,  &  après  les  Con- 
tradictions &  Proteftations  qu'il  a  faites  dans  tous  les  Endroits  de  l'Eu- 
rope. Nôtre  Auguite  Maître  efl  confirmé  dans  fon  Opinion  par  l'efpé- 
rance  qu'il  n'a  pas  encore  perdue,  que  le  bon  Dieu,  après  la  dangereufe  ma- 
ladie de  Sadite  Majefté  ,  la  remettra  en  pleine  fanté.  Du  refte,  Sa 
Majefté  Impériale  réitère  les  alTurances  données,  qu'Elle  efl  toujours  de  la 
même  intention  &  defir  d'entretenir  avec  le  Roy  Très-Chrétien  une 
Paix  confiante,  &  Amitié  fincere;  comme  auffi  d'obferver  religieufement 
du  vivant  du  Roy  Catholique  (pourvu  que  la  France  falfe  le  même) 
les  Déclarations  faites  en  dernier  lieu. 


ffpèce 
de  Mani- 
fette  de 
l'Empe- 
reur iur 
fesDroits 
à  la  Mo- 
narchie 
d'Efpa- 
gne j  en 
1700. 

Carolus 
II.  Hifpa- 
niarum 
Rex 


ad  Suc- 
ce  fuo- 
r.empra;- 
tensè  vo- 

cat  Ande- 
gaven- 
iem  Du- 
cem  }   & 


Synop/is  quorundam  Jurium  Auftriacorum  in  Succejfio- 

nem  Hifpanicam, 

Ad  Lectorem. 

NE  mirere  brevitatem  Scriptionis ,  quifquis  in  curtas  hafce  paginas  Japer  tam 
ampla  SucceJJione  incidis.  Veritas  iungâ  cerufsâ  non  indiget ,  nec  deerunt 
etiàm  in  bac  ipsd  maieriâ  dilatandâ  accuratiores  alii,  quibus  &  meîius  efl  otium 
&  accejj'us  ad  Archiva  paîet  \  me  obviorum  duntaxat  confeio ,  atque  alias  eiiam 
Laconifmum  amante.  Tu  intérim  ,  quidquid  hîc  efl  quant  ulumque  quod  legis^ 
abfque  affecluum  fludio  pet -pende ,  & ,  fi  Jufiitiam  colis,  ac  Summum  Deum 
pro  te  fie  vocatum  confickras,  Pyrcnaam  Pacem  &  Pacla  tôt  vicibus  jurata, 
quoeumque  potes  efficacijjimo  génère ,  contra  temeratorcs  vindica ,  cogniturus  eb 
m  agi  s  tandem  commune  Fatum  immanis  Potentiae  rarô  fempitemœ. 

SErenissimus  ac  PotentiiTimus  lïifpaniarum  Rex  Carolus  II. 
vix  fupremum  vitre  diem  obiit ,  cum  anxiâ  jam  pridem  cogitatione  in 
hune  triftem  cafum  defixus  Orbis,  praster  omnem  opinionem  percepit, 
Hifpanicum  polt  hac  Genium  in  Mores  Gallicos  inflectendum  eïTe ,  Tefla- 
mentumque  produci,  miris  artibus  conditum  ,  quo  non  agnatus  indubius, 
&  in  familiâ  limul  fenior,  fed  fedecennis  è  feminâ  exclusâ  confànguineus , 
ad  Succefiionem  Regnorum  ,  Ducatuum  ,  Priiicipatuumque  Hifpaniœ  fit 
defignatus-,  quicquid  jurata  pacis  &  paétorum  fides  •  paternaprior,  avita- 
que  difpofitio  ;  major  setas  in  pari  gradu,  expiranti  lineae  juxta  leges  Hif- 
panicas  fuccedanea  ;  Confànguinitas  quoque  proprior  è  materno  llemmate; 
&,  quod  omnium  penè  caput  videtur,  Europe  univerfae  quies,  ac  falus 
*'  recla- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC. 


ipi 


d'Aixe- 

MAGKE. 


Leopol- 
dum  lia» 
perato- 

rem, 
è  prirni 
acquircn- 
tisAvâ- 
triaci  li- 
neâmai- 
culinâ 
per  Fer- 
dinan- 
dum I, 
quiaFra- 
trepri- 
mogeni- 
to  apana- 
giatus  & 


reckmet  :  quippe  qua?  junctim  feorfimqueDiadema  Hifpanicum,  non  Du- 
el Andegavenii  Philippo  Borbonio,  fed  Romanorum  Imperatori  Leopoldo 
Auftriaco  afièrtum  eunt. 

Enimverà  ut  res  tota  è  quibufdam  breviter  primordiis  expendatur  ,  illa 
fie  fe  habent. 

Vixit  ante  duplex  fœculum  Philippus  Primus ,  Maximiliani  Csefaris  fi- 
lins, è  ftirpe  Àuitriacorum,  ut  nemini  non  confiât,  féliciter  procreatus. 
Binos  hic  filioshabuit,  Caroîum  cetate  majorera  Gandavj  in  Beigio  editum, 
&  minorem  natu  Ferdinandum,  Médina:  in  Hifpaniâ  generatum  :     Hune 
fub  Prîmi  numéro  Romanum  împerium  exprimit ,  illum  vero  Quintum  vo- 
cat,  qui  aliàs  primus  fub  Caroli  nornine  inter  Regum  Hiipanorum  Faftos 
iegitur.     Fraterna  dîtionum  inter  illos  divifio  fub  annum  15-2.!.  fie"  Worma- 
tiae  peracla  eft,  ut,  quas  fub  fuo  Cataiogo  Hifpania  numeraret,  ilias  fibi 
cum  Burgundiâ ,  Belgioque  integro  retineret  Carolus  henior ,  Gerraanica 
portione  Ferdinando  Fratri  juniori,  ce  vix  plenè  puberi  reliera.     Felicio- 
rem  hic  fati  fortem  in  fratre  Primogenito,  &  jam  Casfare,  agnovit,  eô- 
que  faciliùs  tune  quidem,  (uti  extraétus  fub  Numéro  î.infinuat  )  cum  pau- 
sillo  dimiiTus  eil,  fed  non  a!iâ  tamen  veS  mente  vel  poteitate ,  quàm  ut  jus 
reliquum,  quo  in  venerationem  primogeniturae  abftinebat,  fufpenrum  fem- 
per  ac  falvum  fervaret ,  juxta  primogenitorum  indolem  fuccefïurus,  cum 
mortalitatis  leges  poftgenito  locum  in  amplifîïmâ  hsereditate  fecerint.     Di- 
rectrice hâc  folidâ  feu  vita?  feu   mortis   Régula  Ferdinandus  progeniem 
fuam  per  Filium ,  Carolum  quoque  dictum,  &  ex  hoc  nepotem,  pronepo- 
temque  Ferdinandum  nempè  fecundum  ac  tertium  ,  rec*tà  lineà  ad  glorio- 
fiiîimum  nunc  Imperatorem  Leopoldum  perduxit  :  atque  ut  amorem  item- 
matis  ac  Pacli  Wormatienfis  fenfum  fequeretur,  hœredem  filiis  fuis  liifpa- 
nicam  domum  fubftituît  ;  etiam  fîliabus,  fi  quos  folas  relinqueret  fub  N.  2. 
poftpofitis.     Carolo  Quinto  ,    feu  fi  mavis  Hifpanicâ  in  Causa,  primo, 
poft  Philippum  Secundum, Tertium,  &  Quartum,  fuccefilt  Carolus  Secun- 
dus  Beatiffimae  Mémorise,  nuper  defunctus.     Hic  maire  Maria  Anna  gavi- 
fus  e(t ,  jam  dicli  Ferdinandi  Tertii  filiâ,  &  Leopoldi  forore,   duplicato 
confanguinitatis  vinculo,  fi  &  proximum  maternum  genus  &  avitam  quo- 
que propaginem  Auftriacam  in  adjundtis  fub  N.$.&  4.  Genealogiis  intuea- 
mur,  cum  Caefare  Leopoldo  colligatus. 

Moverunt  hocc  &  alia  complura,  quac  communem  Regnorum ,  particula- 
remque  Hifpania:,  naturam  concernunt Philippum  Quartum,  Caroli  defun- 
cli  patrem,  ut  Mariam  Therefiam,  primogenitam  riliam  fuam,  Ludovico 
XIV.  Galliarum  Régi  nuptam,  ad  Régna,  Provinciafque  Hifpanicas ,  née 
direclè  nec  indirecte  admitti,  fed  ab  eis  penitùs  cum  omnium  defeenden-  Tefta- 
tium  fexu  &  gradu,  in  perpétuum  quamvisPacisPyrensese  exelufam  volue-  mentum 
Tit^  Teftamento  infuper  fub  annum  i66y.  ereéto,  quo  ad  Succeifionem  il-  j^'PP,1 
iam,  in  defeétum  reliquae  Prolis  Hifpanicse ,  votis  verbifque  expreiliflimis  ron-sM° 
collateralem  Stirpem  Auftriacam -defignavit. 

Bellum  grave  &  vario  diferimini  obnoxium ,  poil  fignatas  anno  1648. 
Weftphalicse  Pacis  Tabulas,  Iiiipaniani  inter  &  Galliajn  ad  multas  adhuc 

sellâtes 


in  îîiTps,. 
nicam  lï- 
neam 
propriis 
fîliabus 
poftpofi- 
tis 

benevo- 
3  us  fuit p 
notorie 
defeen- 
dentem, 
duplici- 
que  con- 
fanguini- 
tatejunc- 
tum  , 
proeterit  s 
contra 


nasThe- 
refiaî  Ré- 
mi ne  ia- 
tionetn, 


i92    MEMOIRES,  NEGOTIATÏONS,  TRAITEZ,  ET 

AmiRis  aeflàtes  remanferat ,  in  longiorem  utriufque  gentis  perniciem  per  adverfa , 
d'Allé-  qUge  identidem  cudebantur,  arma  &  fcedera  iturum  ,  ni  odii  piufquam  Va- 
MAG-V£-  tiniani  violentior  impetus  per  machinam  concordiae  fifleretur,  quae  ipfa 
tamen  uti  non  alia  videbatur  quam  Connubii  forma,  rkè  fieri  poiTe ,  ita 
follicitac  ad  hanc  curse  appiicabantur.  Margarita  Sabauda  primùm  nuptu- 
rienti  arridebat,  fufpiciebatque  is  eam  vehementiori  jam  aftectu  ut  ad  ma- 
trimonium  cum  ipsa  fat  pronus  cerneretur.  At  facile  fuit  retinere  incep- 
tos  amantes  aeftus ,  meliorum  fpe  nuptiarum  cum  Infante  Hifpanicà.  Illuf- 
tria  ad  lias  Argumenta  impeilebant  Gallos,  atque  ipfa  Régis  Amita  Chrif- 
tina,  exaclà  Matrona  Judicii,  quae  cum  filià  fuâ,  praofatâ  Margarita  ,  Tu- 
rino  in  Urbem  Lugdunenfem  è  condiclo  venerat ,  praefentem ,  procum- 
que  Confobrinum  Regem  generosè  hortabatur,  ut  cum  hàc  omitteret  con- 
nubium,  cum  Hifpanâ  ambiret,  pro  publico  Chriftiani  Orbis,  &  tôt  prae- 
fertim  Regionum ,  tàm  longis  bellis  attritarum ,  commodo. 

Difficile  negotium  erat,  quod  prudens  fœmina  inter  caeteros  fuadebat, 
publica  privatis  fuis  rébus  magno  animo  praelata.  Oblu&abantur  jam  antè 
ac  diu  Ilifpani,  deterrebanturque  praevisâ  variorum  imagine,  quae  gentes 
natur.à  fuâ  diflbnas  in  funeftiorem  poifent  olim  Cataftrophen  inducere,  fi, 
qute  fperaretur  è  tali  matrimonio  foboles ,  ad  Régna  Hifpanica  quando- 
cumque  afpiraret ,  obtentu  materni  fanguinis  fpeciosè  formando.  Diffi- 
cultas  haec  meritô  tam  ingens  vifa  eft,  ut  fixum  maneret  in  fœdus  nuptiale 
tranfiri  non  poilè,  nifi  amorem  eminentis  mariti,  fponfa  reliquis,  forfan 
aliàs  valituris  ,  reflexionibns  anteponeret.  Nempè  renunciandum  erat 
Mariae  Therefise,  non  pro  fe  folùm,  fi  viduitatem  improlem  exciperet, 
fed  etiam  pro  liberis  ex  fe  nafcituris ,  utriufvis  îtxùs ,  ut  ne  fpes  fpei  qui- 
dem  circà  Succeflîonem  Hifpanicam  Gallicano  germini  fuperefTet. 

Quod  uti  moleitum  non  erat  filiae  in  rem  praefentem  humanitùs  intentas, 
pofl  habito  futurorum  incerto,  &,  fi  contingeret ,  trifli  cafu,  ita  facile 
Hacreditatem  Hifpanicam,  quocumque  poil  hac  tempore,  &  qualicunque 
tandem  modo,  feu  fibi  feu  pofteris  fuis  fperandam  refutabat,  praefenta- 
neum  florentis  Coronae  Gallicae  confortium  adeptum,  è  quo  fi  liberi  pro- 
dirent, jam  aliundè  fat  fauiti  effent  &  fi  ab  Hifpanico  non  minus  Patrimo- 
nio ,  quam  genio  remoti.  Nec  abibat  ab  hoc  libero  Regalis  filiae  Confenfu 
Philippus  Pater ,  Sponfufque  Lodovicus  }  Hifpanus  tamen  non  abfque  cir- 
cumfpefto  metu ,  ne,  fi  Renunciatio ,  penfatiffimis  verbis  non  fieret,  Mi- 
niilri  Gallici  in  afcititiam  interpretationem  proclives  forte  olim  anfam  ar- 
riperent  fuis  affe&ibus  velificandi ,  tune  potiffimum  ,  telle  experientià, 
prœvalidis,  cum  res  quidem  &  pa£ti  mens  clara  eft,  vox  tamen  obfcurior 
tam  diu  in  obliquum  fenfum  per  militares  turmas  detorquetur,  quam  diu 
militas  &  vis  Gallorum  finit. 

Cardinalis  ergo  Mazarinus  ,&  Lodovicus  Mendez  de  Haro,  Minifter  u- 
terque  Regum  primarius ,  &  quorum  hic  pro  Hifpano  Caducatorem ,  il- 
le  pro  Gallo  agebat,  cum  ad  Montes  Pyrenaeos  conciliandae  Paci  diver- 
fis  in  Congreltibus  infudarunt,  faepè  diclae  Renunciationis  formam  hinc 
iude   cogitabant  folerti  fludio  ,   donec  in  ampliffimam  compofitis  ani- 

mis 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  t93 

mis  claufulifque  efficaciflimis  pro  lege  duraturis  cum  gaudio  convenirent.   Aïfai 

Speciali  ad  illum  mandato  telle  N.  f.  muriierat  Legatum  fuurti  Rex  Chri-  "'Aui:- 
ïiianiiîimus  j  nec  potcitas  par  deerat  litrêris  à  Rege  Catholico  hune  in  fi-  MAGWi 
nera  fub  N.6.  datis  j  &  eenfebatur  utrinque  cum  Livio  ubi  Fide,  Fœdere , 
Patio,  Juramentu  tranjigitur ,  Jus  Gentïum  prœvalere ,  ac  mulîum  quidem  ïn- 
terejeinter  fidem  pubucam& pïvatam  tpubiicam  ex  dïgmtate ,  privatam  ex  for- 
muià  ciccLpï,  li  tamen  &  dignitas  &  formula  in  paôto  cdneurrant,  longé 
fanéliùs  hoc  obfervandum  elle. 

Fundamentum  fané  Regiis  refpeclibus  dignilTimum  ,  cui  tam  folemnis  partem 
conventio,  &  Pyrenseae  quidem  Pacis  pars  prima  Ck  nobiliffima  juxta  arti-  Pnma- 
culum  ejus  33.  hîc  fub  N.  7.  appolkum,  decendlïime  fuperitruebatur  : 

Neque  poterant,  vel  plura  pêne,  vel  efficaciora  verba  reperiri,  quibus    folem- 
&  fuam  Regalis  bponfa  renunciationem  &  fuum  Rex  Sponfus  aflenfum    nem,gc- 
exprimeret.     Prolixe  omnibus  ac  fingulis  renuntiabatur  Juribus,  Titulis,    neraleuj, 
Legibus,  Confuetudinibus,  Ordinationibus,  Difpolkionibus  ,  remediis  ac 
prœtexcibus ,  quibus  ipfa  renundans,  (excepta  lterili  viduitate  )  vel  ejuf. 
dem  liberi  quoeunque  gradu  ac  fexu  è  Gallicano  thalamo  generad  ad  rni- 
nimam  Hifpanicarum  Kegionum  SuccelTionem,  alto  unquam  poifent  œvo 
contendere:  Direcïa  a<i  hanc  via  &  indirecta  qùaevis  prascludebatur  poi'le- 
ritati  Gallican  :  Rogabaturque  Summus  Pondfex  ut  flipulationi  tam  delibe-    &xsum-- 
rata:  &  unanimi,  pro  quiète  Regnorum  &  Orbis  publicâ  confecla: ,  cum    moPon- 
ipfifmtt  Pyrenseae  Pacis  Tabulis  die  7.  Novembris   16 f p.  fubfcripta:  ,   in    tificead 
numerofo  cœtu  Miniltrorum  utnufque  Régis,   non  fine  rhutuis  applaufibus    Partlum 
fignatae ,  &  omnibus  undequaque  partibus  tam  pro  vida  induftria  Habilita:,    2^/" 
Apollolicam  benediciionem  impartiretur.  approba- 

Légat  vir  jultus  &  iniquae  paiTionis  expers  vel  folam  dotalis  pacli  Para-   tam5 
graphum  quartum,  quintum,&  fexium  cum  epilogo  fub  N.  8-  hîc  pariter 
luDJunftum,  &  abfque  longo  examine  aétutum  deprehendet,  nullam  poife 
difpolîdonem  fieri,  nullam  ordinationem  condi,  nullum  preetextum  fumi, 
quo  mas  Gallici  fanguims  ad   Sceptrum  Hifpanicum  anhelare  queat,  tôt 
Claris    Periodis,  tôt    emphaticis    verbis,  tôt    derogatoriis,  conltitutoriis, 
declaratoriifque  claufulis  ab  ejufdem  fpe  omni  exclu  fus.     Non  elt  hîc  opus 
fchulaftico    pulvere  ad   ofFulcandam   clariffimam   literam.      Explicationes 
verfatiles  non  admittit  ferutator  rerum  Deus,  in  teftem  vocatus.     Haud    PerJura" 
patitur  Chriltianse  Crucis  gloria ,  Evangelii  Sanélitas,  Miffie  Canon,  De-    rot,ora- 
cufque  Regium  (  per  quas  umnia  juranaum  erat ,  ex  Concordiae  Pyrenasae    tam, 
Formula  hîc  fub  N.  9.  adjacente)  ut  voces  loquantur  aliud,  &  aliud  intèn- 
tiones  dicant. 

Mens  véra  flipulantium,  &  profapiae  Gallicx  aeterna  exclufio,  fat  è  ra- 
tionibus  publicis,  fat  è  pa£to  per  ratificationem  Régis  Gallias  fub  N.  10. 
adji:n£tam  confirmato  patet. 

Rex  ipfe  Catholicus  Philippus  IV.  qui  Pacli  fenfum  praccipuè  norat ,  di-   m^ 
lucide  hune  repetit  in  uldmo  voluntatis  elogio  quod  14.  Decembris  166 f.    fhiiippi 
per  verba  fub  N.  11.  hûc  tranflata  expreiîît.     Multa  in  hoc  Teftamento    iv. 
&  diveifa  coordinat  de  hscreditate  Hifpanicâ  •    multa  etiam  de  metu  péri-   ciarèex- 

lomc  XL  Bb  culi  Phcatam> 


jlFFATRÏS 

d'Alle- 
magne. 


Ita  ut  Do- 
nnai Ger- 
mar.o- 
Auftriaca? 

validilïi- 
imun  Jus 
fit  quœfi- 
la  ni. 


Carolo 
Kegi,  va- 
riis  tirulis 
erita  h3nc 
«bligato , 


w    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

culi  innuit,  quod  Hifpaniae  ac  toti  Chriftianae  Reipublicae  ex  Matrimoniis 
Gallicis  immineret,  nifi  obex  foboli  ex  his  ortae  orkuraeve  effet  pofitus. 
Commémorât  fusé ,  quam  acrem  &  in  omnes  partes  vigilern  curam  cum 
Sorore  Anna,  cum  Filiâ  Maria  Therefiâ ,  cumque  propnà  Conjuge  Elifa- 
betha  Borbonia  obfervari  neceflum  fuerit  ne  mas  vel  foemina  Galiici  ltem- 
matis,quocunque  in  gradu  vel  cafu,  Hiipanicas  Ditiones  per  SuccelTionem 
attingit.  Verbotenus  capitula  recenfet ,  novhTimè  confecla  ,  ad  qualef- 
cunque  occafiones  avertendas,  in  quibus  etiam  è  longinquo  timeri  poffit 
ne  Terra?  Hifpanica;  cum  Gallicis  uniantur.  Accuratè  dinumerat  nonnul- 
las  Succellionum  Lineasj  &  quamvis  fciret  fœcunditatem  arnplam  è  Ge- 
nero  Rege  Ludovico  non  defuturam  Filias  fua:  (  quippe  quae  végéta  erat  & 
jam  tùm  Delphinum  pepererat ,  nec  non  filias  duas  )  Pyrenaeae  tamen  Pa- 
cis  &  Paftorum  memor,  propaginem  Gallicam  pro  eventu  quovis  &  ta- 
men indiitin&è  ab  hasreditate  Hifpanica  rejicit ,  ut  licet  Regnorum  unio 
ob  fumum  Legis  Salicae  haud  queat  infœminis  contingere,  nequaquam  ta- 
men eas,  ubi  lèmel  Juris  Galiici  fuerint,  fuccedentes  velit.  Ad  propriam 
Auitriacam  fe  potius  convertit  familiam,  &  liberos  è  Sorore  Maria  v'ocat, 
quse  mords  quidem  fata  fub  annum  16^6.  fubierat  filiorum  tamen  complu- 
rium  &  inter  hos  Leopoldi  Auguitiflima  ex  Imperatore  Ferdinando  Ter- 
tio ,  prius  mater  faéta.  Quid  ?  quod  adeô  Gallicanam  Stirpem  à  Regnis , 
Dominiifque  Hifpanicis  fubmovet ,  ut  û  Auftriaca  paulô  ante  memorata, 
deficiat ,  poflericatem  Arnitse  Catharinae  Sabaudœ,  jam  anno  ifoy.defunc- 
tx  ,  pro  iis  obtinendis  defignet. 

Egregia  utrobique  documenta  exclufionis  Gallicae  &  manifeili  Juris  Au- 
ftriaco  languini  competentis. 

Non  latebant  tàm  aperta  veritatis  teilimonia  Regem  Carolum,  nupèr 
è  vivis  fublatum.  Renunciatio  fororis  ,  &  defcendentium  hujus ,  perpé- 
tua, in  aprico  erat;  Teftamentaria  Lex  Patris  Philippi,  Succefforem  Au- 
itriacum  îpecificè  demonftrabat  ;  Leopoldum  Caefarem  coîebat  Rex  Caro- 
lus,  atque  illum  ut  à  Pâtre  agnatum,  à  Matre  Avunculum  ab  utroque  fli- 
pite  feniorem,  à  conjuge  affinem  ,  à  Teftamento  praecitato  fuccdTbrem 
fibi  proximum,  à  Coronà  Hungaricà  in  fe  haud  pridem  telle  N.  n,  con- 
derivatâ  beneflcium  ,  &  diverfis  aliis  venerandum  titulis ,  fufpiciebat  ^ 
imô  in  Hifpanicas  vires  ,  Ci  vel  unicum  huic  fub  N.  13.  annexum 
exempîar  iiterarum  fpeclamus  ,  potelïate  magnà  adhuc  vivus  impenie- 
batur. 

Cum  intérim,  ut  Mundi  Stropha  eft,  è  Miniflerio  Hifpanico  nonnulli 
eflent,  qui  viciniorem,  nec  auri  parcam,  adorantes  potentiam,qu3?rebanr. 
Regem  languidum  in  diverticula  pellicere  ,  &  à  Via  propriaé  fupremœ- 
q.ue  dormis  abftrachim  ,  ad  Galles  Gallicos ,  tantâ  alias  averfione  failidi- 
tos  ,  folerter  invitare.  Efficaciam  Renunciar.ionis  Therefianse  ;  Eviden- 
tiam  Teftamenti  Philippini,  &  quae  cetera  ad  Gallicam  exclufionern  ver- 
gunt,  fatebantur  ipfi,  fupponebantque  ;  (nec  enim  poterant  in  foie  lucem 
pegare)  fe.i  rationem  putabant,  in  roetu  Unionis  .Coronarum  confiitere, 
qui  li  ccflaret,    Unione  pruhibità,  polie  adiium  bine  Gailis  ad  Coronam 

Hifpa- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC. 


W 


Hifpanicam  pofie  fieri.  Proinde  Teftamentum  diligente:  fabricant;  Juris- 
prudentum  Confulta  fueatè  immiicent,  &  conquiiltis  pro  duce  Andegavi 
verbis,  moriturum  Regem  adoriuntur ,  ut  arido  &  exfucco  corde,  ac  re- 
foluto  in  pituitam  cerebro  ,  pulchrum  opus  approbet  quod  oranis  œtas  mi- 
rabitur,  feuScholis,  feu  Aulis  idonea  ;  il  prœfertim  cum  extraftu  fub  N. 
14.  hic  appofito  genuinam  feriem  totius  rei  de  caetera?  notai  atque  alias 
jam  ante  memoracas  circumftantias,  paulifper  conférât. 

Ex  Teftamento  anteriore  Philippi  Patris,  res  clara,  certa,  &  illimita- 
ta  agnofcitur  pro  Agnato  Auftriaco  ;  in  pofteriore  Caroli  Filii  ,  limitatio 
flguratur,  quam  nec  Verba  nec  Senfus  tolérant.  Teftamentarium  fibi  Ar- 
bitrium  Filius  arrogat  in  ultimo,  cujus  Suafores  hoc  Patri  conantur  auferre 
in  primo. 

Renunciatio  Sororis  atque  Amitae  ,  univerfalem  ,  indefinitam  ,  &  di- 
reciam  Abdicationem  continet  j  at  Carolinum  ,  quod  praccenditur  ,  elo- 
gium  vult  obliquam  reftrictionem  inducere,  contra  voces  &  intentiones 
jam  fupra  Habilitas  euntem.  Priores  ac  folemnes  Tabulae  amorem  indigi- 
tant  Auftriacae  Domus,  atque  ut  perennent  ejus  incolumitatem  adaugeant, 
in  fundamentales  leges  aptantur;  ar.  Regnis  privare,  jam  ultra  Liberorum 
tempora  per  nomen  Auftriacum  famofis,  &  ad  ea  Succeflbres  Gallos  vo- 
care,  an  hoc  amare  Domum  Auftnacam,  &  incolumitatem  ejus  majorera 
facere  ? 

Confpirat  ergo  cum  Textu  nbique  ratio  ad  exclufionem  Stirpis  Gallicae 
omnimodam,  neque  in  padlo  Gallo-Ii;fpanico  nec  in  Teftamento  Philip- 
pino  fola  Unio  Coronarum  expenditur. 

Quid  enim  alias  vel  pro  ipfis-met  fœminis  vel  pro  fobole  poftgenitâ  11- 
mul  renunciandum  fuJiîet  ?  Cum  &  haec  primogenitis  locum  cedat  in  Gal- 
liâ,  &  illae  à  Scepiro  Liligero  in  omne  aevum  arceantur;  ut  fruftra  ti- 
meas  Coronasrfto  in  uno  capite ,  ad  alterum  ex  iïs  ferendum  prorfus  invalido. 

Silëntiam  ante  hâc  tenuit,  &  vi  pacti  nupdaiis  Materni  hic  fub  N.  if. 
adjecli ,  femper  prseteritus  eft  Dux  Aurelianenfis ,  ex  Anna  Hifpanicâ  al- 
ter  filius:  quid  tamen  obfifteret  huic,  il  foiaformido  Coronarum  unienda- 
rum  refpiceretur  ? 

Et  nupèr  aufus  eil  poflremi  Teftatoris  fuggeitor  callidus  manifeftam  in- 
juriam  Serenifîimis  Filiabus  Leopoldi  Imperatoris  facere,  dum  eas  omnes 
&  fingulas  in  praefente  Teftamento  excludere  nititur,in  quibus  tamen  quis 
vereri  poterit  ne  Hifpanicus  Gallicufque  Thronus  in  confortium  hajredi- 
tatis,  &  unum  Corpus  coalefcat  ? 

Patet  itaque  longé  alium ,  quam  folius  Unionis  metum  pœnes  predecef- 
fores  in  Hifpania  refediffe,  conftanter  &  ubique  ex  motivo  quietis  publi- 
cs, fpecialifque  Auftriaci  boni  follicitos,  ne  Principein  e  Galiia,  Regem 
in  Hifpania  ferrent. 

Et  quid  amabo ,  il  periculum  diéiae  Unionis  examinamus  modernos  Hif- 
panos  fecuros  reddit  adverfus  incoronationem  Gallicam  ,  quam  tantoperè 
deteftari  non  definunt  ?  An  Francica  fides  ,  toties  data,  toties  delufa? 
An  Hifpanica  gravibus  tôt  fubitis  fsepè  turbinibus  ab  agilitate  adveriàe  gen- 

Bb  2  tis 


A  FF  A  II'  K*. 

d'Alle- 
magne. 


nec  vo- 
luntns  nec 
poteftas 
teftandi 

fuent. 


Nec  ratio 

Renuncia- 

tioiuun 


in  folo 
mctu  U- 
nionis  Co- 
lon arum 
conliftit , 


fed  alias 

quoque 

rationes 

confidexa- 

tas  efTe 

confiât. 

Neque  et- 
jam  dictas 
timoï 
Unioins 
ceflat. 


Affaires 

MAGNE. 


Hirpani 
infuper  fe 
ipfos  pio- 
ftituant. 


Et  inter 
eos  faino- 
fier 


Ambni- 
îieniis   Ar- 
chiepifeo- 


îiiTiil  ta- 
men  pro- 
bans j  fed 

potius 


per  con- 
gefta  mo- 
tiva  in 
i|)Gn> 
met  Gal- 
liam 


196    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

tis  in  gyrum  rapta?  An  tsedium  aut  contemptus  unius  diâdematis,  vacan- 
te vicino  akero  &  conterminis  ditionibus,  donec  in  Provinciam  redaéhe 
fine  nunquam  non  infidiofo?  An  aeterni  certitude»  fati  contra  mortalem  ca- 
fum,  quo  forte  Dux  Andegaventis  fuis  omnibus  ,  qui  nunc  vivunt  fratri- 
bus  fuperiles  manebit?  An  hinc  Hifpaniam  dimittet,  tôt  jam  iibi  vincu- 
lis  innexam ,  &  à  terris  tôt  auriferis ,  commodiique  Portibus  proflcuam? 
An  ei  quis  cafus  daretur  pro  Archiduce  Carolo.,  aut  Duce  Sabaudo  ,  aut 
etiam  pro  fratre  Bituricenfi,  omnino  paratus,  &  unopatrio  Diademate  jam 
fatur,  Dux  Andium  ab  hactenus  poiTefib  abfcedet? 

Celebratior  eft  Hifpanorum  prudentia  ,  quàm  ut  perfuafmncuiis  hujuf- 
modi  ac  officiis  inanibus  fmeere  applaudant ,  mox  in  parvis  vifuri  quam 
turpem  fervitutem,  ni  matunùs  ii  refipifcant  &  domum  Auftriacam  fe- 
quantur  ,•  debeant  in  magnis  fervire. 

Et  jam  tum  compaiïionem  meretur  humilitas  ifta  quâ  hic  fub  ,  N.  16, 
annexam  injurius  videri  vellet,  mpdis  omnibus  eam  eludere  conatus  eft, 
ac  Magiftràli  Epodo  liifpanos  erudire,  quid  îpfismet  proficuum,  noxium- 
ve  efle  debeat. 

Citata  San&io  cum  aliis  Hifpanix  Legibus  in  libro  proftat  quem  Nueva 
Recopilaçion  feu  novam  Colle&ionem  vocant,  jam  anno  164.0  Madriti  im- 
preiib.  Fortiffimis  haec  verbis  à  jure  Hifpanicae  Succeffionis  omnes  Gal- 
los  éliminât,  ut  nec  Ludovico  XIV,  fratrive  ejus ,  nec  u!ii  ex  horum  li- 
beris  capacitas  fuperfit  ad  Régna  Hifpanica,  aut  adjeéta  his  dominia,per- 
veniendi. 

Agnofcit  manifect-iiîïmam  legis  literam  memoratus  Archjepifcopus  ,  & 
mirum  in  modum  fe  torquet  ut  tamfirmum  obicem  queat  perrumpere.  Le- 
guleiorum  quorundam  fubterfugia  repetit,  jam  diù  à  Belgis  ac  Hilpanis  ad 
ruborem  &  obmutefcentiam  Gallorum  explofa;  &  ut  aliquid  addidiffe  vi- 
deatur,  per  intégra  &  poftrema  Capita  Libelli  fui  Jaboriofus  eft  ut  aftruat 
dictas  legi  rationem  utilitatis  publies,  Legiflatoris  authontatem  &  folemni- 
tatem  Promulgadonis  defuhTe.  Quafi  res  ea  fola  fit  publico  utilis  mue  non 
Commodum  Auftriacas  gentis  ,  &  quietem  diverforum  Europae  Populo- 
rum,  fed  unicum  incrementum  PoLentiae  Gallicas  refpicit  :  nec  validte  pof- 
fiht  ab  uîla  Monarchia  Conftitutiones  fieri  ,  quibus  non  aiTenfio  Gahica 
&  exoletus  antîquorum  faeculorum  ufus  fuffragetur.  Sufficit  in  allegatâ 
Sanctione  Hifpanicâ  juilum  amorem  &  decus  proprise  domus  Auftriacae 
•valuifTe  ,  per  jurata  Gallorum  pacla  ,  jam  anté  confirmatum.  Sufficit 
diclam  Pragmaticam  à  Rege  provido  ad  Confultationes  ac  Preces  Statuum 
Regni,  pro  Stylo  jam  Atavi  memoria  recepto,  non  fecus  ac  alias  recen- 
tioresleges,  confeétam  promulgatamque  elTe. 

Incautus  eft  Gallus ,  &  in  ipfam  Legem  Salicam  atque  authoritatem  fuo- 
rummet  Regum  iniquus,  û  valorem  quâ  Compilatores  Teftamenti  Caro- 
lini  patriotas  reliquos  proftjtuunt ,  dum  fuomet  fed  tumultuario  &  prœci- 
piti  judicio,  fe  Gallia  viliores  pronunciant ,  qui  Hifpanicam  hue  ufque 
preceminentiam  &  fcnptis  &  geftis  variis ,  non  alteri  quam  Carfari  proxi- 
raam  tutabantur,     OfTerunt  nunc  illi  (quod  ftupemur)  ultroneam  palmam 

trium- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  j9l 

triumphabundis  Gallis,  &  (quod  magis  miramur)  cum  abjecto  fupra  rao-   Affairf* 
dum  animo  &  calamo.     Vix  demifiiùs    potuiflent  Gallicanam   oitentare    n'Au.s- 
aut  prœferre  magnitudinem  ,  quatn  ,  quod  palàm  edicant,  Andegavenfis     MAUlNK- 
afFeclum  Ducis  pro  Sceptro  Gallico,   il  vacaret ,  potiorem  fore  ;  &  tune 
fi  Iiifpaniam  fperneret  ,  in  Galliàm  properans  ,  opportere  conr.entos  fe 
efle  ,  ut  rninor  annis  &  loco  Gallus  ,  Adventu  &  Imperiô  fuo,  Iiifpa- 
niam dignetur.     Exemplum  Heririci  Valefii  ad  Gallos   profugi   nondum 
concoxit  Polonia.     Quid  igitur  Hifpania  cogitec,  non  abfque  vilipendio 
fui  fpontaneo  ideam  fugae   in   abeunte  ,    &   novam   preecariamque   fub- 
jeélionem  fuam  refpeétu  novi  adventamis  Domini  praeconcipiens. 

Sed  hsec  ultima  quafi  privata  funtj  caetera  omnia  magis  publica  ,    &   &inpro- 
quaiem  in  partem  vertamùs  oculos ,  paritate  exempli  in  futurum  perni-   pliaf Le: 
ciofa.     Agitur  de  vi  pacificationum,  de  viribus  &  religione  pa&orum ,  de-  lunt"1*" 
que  ipfo  Hifpanicarum  Legum  robore. 

Inficiari  hoc  nequeunt  Scriptores  Gallici,  &  eminentioris  inter  eos  no-    Quicquid 
ue,  Ambrunenfis  Archiepifcopus  in  Libello  ,  antè  hàc  edito  5qui  Defenfio-   «»•««  bu 
nem  Jurium  Reginse  Chriftianiiîimse  prse  fe  fert.  ^.,hfci 

Operofus  in  illo  cum  adverfus  Hifpanicos  calamum  ilringeret,  prae  Gai-   rint  f" 
licano  Marte  ,  qui  tùnc  in  Belgium  irruebat*  nec  tamen  in  Pragmaticam 
Hifpaniaî  Sanciionem  Sanciiombus  denegat,  in  quarum  forma  aut  màteriâ 
mores  omnium  primi  ceffaverunt. 

Non    tàm  acris   femper  &  acerba    fuit    Galiorum    bilis   in  fœmineum   in  y«»î« 
fexum,  ut  hune  cum  Pollens  cognatifve  penitùs  à  Regni  Succeiîïone  de-   dillexens* 
pulerint  >  &  tamen  quid  Lege  Salicà  cum  tempore  induelà  defendatur, 
ineridiano  tiï  foie  notius. 

Neque  Gallici  Authores  folemne  Arreflum  diffimulant  quô  ,  ante  foeeuîa 
non  multa  demum  cautum  legitar,  ne  Filiab'us  Gallicis  in  Apanagio  fratris 
Regii,  poft  hâc  facceflîo  deferretur,  quae  iifdem  tamen  ufque  îîluc  com- 
petierat. 

In  prima  Gallicorum  Regum  familiâ,  etiam/ratres  pofigeniti  m  partem 
Coron  se  Regiae  venere,  ut  ne  nothi  quidem  fubmoverentur-  lie  enim  Clo- 
dova:o  mortuo  ,  qui  primus  Rex  Chriftianus  fuerat ,  quatuor  ejus  Filii 
Regnum  Francicum  in  totidem  partes  diviferunt  ;  Childeberto  Parifienfe, 
Ciodomiro  Aurelianum  ,  Clothario  Sue(îionenfe  ,  &  Theodorico  Ballardo 
Metenfe  naclo.  Cumque  per  tratrum  mortem  ,  in  unum  Clotharium 
coaîuilfent,  hsec  omnia  quatuor  filii  ejufdem  in  parem  rurfus  divifionem 
ivêre  ,  Charibertufque  Pariiiorum  ,  ChiJpericus  Sueilionum  ,  Gontrianus 
Aureliorum,  &  Sigebertus  Mediomatricum  Rex  faclus  eftj  &  horum  Re- 
gum quilibet,  cum  fe  Francise  Regem  inferiberet  ,  diferetionis  ergo  adde- 
bat,  fe  prECtorium  fummum  Parifiis,  aut  in  alio  fuse  partis  Oppido  habe- 
re:  ex  quo  tandem  communis  vox  inolevit;  ut  Reges  Pariiiorum,  Aure- 
Jia?,  Metarum  aut  alterius  loci  dicerentur.     Sigibertus,  Noihus  Régis  Da- 

goberti 

f  Sub  tituloi  la  Defenfe  du  Droit  de  Marie  Tliercfe  d'Autriche ,  Reine  de  France,  à  la  Succel'- 
£on  des   Couronnes  d'Efpagne, 

Bb  3 


MAGNE. 


IP8  MEMOIRES,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

ÀFunci  goberri  filins,  cum  Fratre  Legitimo  Clodovsco  Secundo  hœreditatem  cre- 
d'Allr-    viti  &  Franciam  Orientalem  Rex  tenuit. 

In  fecundâ  Regum  Francise  familiâ  ufque  ad  finem  illias  penè  eadem 
Regni  partitio ,  quae  in  prima  obtigit;  funcqae  omnes  filii  Reges  Francise 
nuncupati.  Et  tamen  hsec  invalidé  deinceps  mutata  efTe  ,  ac  mutari  non 
poiTe,  ecquis  Gallorum  afTerit  ? 

Hugo  Capetus,  qui  Regale  Scept'rum  in  tertiam  familiam  tranltulit,  pri- 
mus  legem  locumque  Apanagiis  fecit,  teftante  Arrefto  fub  annum  1282, 
non  nili  coram  triginta  proceribus  lato.  Quamvis  &  inde  fe  nondum  fœ- 
minea  progenies  exclufam  putavii,  donec  fub  Philippo  pulchro  lie  cœpic 
Apanagiorum  Aflignacio,  ut  Qmul  in  iis  fucceffio  fœminarum  exprefle  ve- 
taretur. 

Complures  hujufmodi  metamorphofes  circa  legum  rerumque  veterum 
figuram,  facillimè  notabit  quifquis  ipfa  Hiftoriœ  Francicse  Volumina  excu- 
tiet.  Mutationes  autem  iftaS  omnes  quis  è  Gallis  de  înjuftitiâ  arguée  aut 
nullitatis  condemnabit,  ac  proprios  Reges  fuos,  impietatis  in  naturam  fa* 
cietreos,  dum  filias  &  quidem  tune  invitas,  nec  ulla  renunciatione  tran- 
quillatas,  exciufere  ?  Quis  Leges  Gallicas  recentiùs  publicatas  pro  irritis 
declarabit  ;  quod  ab  aliis  adhuc  vetufiioribus  aut  eorum  modulo  recef- 
ferint  ?  Ut  caetera  taceam  quse  de  Modernis  Parlamentorum  fimulacris 
funt  obvia  ,  paJamque  oftendunt ,  ridiculum  in  Galliâ  fore  qui  pnfeos 
effœtae  fenectutis  ufus,  pro  elTenciali  vellet  norma  juniorurn  legum  fta- 
tuere, 

Verba  igitur,  ait  rerum  inania,  dat  Aubuflbnius  fupra  memoratus  E- 
bredunenfis  Archiepifcopus,  dum  fluido  fermone,  fed  inutili  opéra,  cum 
afleclis  fuis  contra  allegatam  San&ionem  Hifpanicam  difeurrit  ,  veracita- 
tem  Regiam  &  jurisjurandi  religionem  apud  cunctos  proftituens  ,  qui- 
bus  à  Partialitatis  glaucomate  non  eft  caccitas  ,  fed  textus  evidens  & 
vera  legis  ratio  fuperiùs  demonftrata  ob  oculos  verfatur. 

Unus  duntaxat  calamus,  &  una  lingua,  débet  Regibus  efle*  ac  nihil 
exiitki,  quod  clariore  lumine  prœfulgeat ,  quam  recla  fides  in  Principe.  *  Pro- 
miiTa ,  transacla ,  jurata,  fi  unquam  aliàs,  certè  ab  illis  quos  tanquam  ter- 
reltres  immutabilesque  Deos  veneramur,  fervari  oportet;  qua  procejjerunt 
à  labiis  eorum  ,  non  decet  irrita  fieri.  Contraclus  Regum  non  fubjacent 
Scholarum  jurgiis:  Afpernanturhi  forenfes Rabularum  cavillationes.  fed  eo 
fmeeriorem  fui  depofeunt  cuiïodiam,  quô  magis  Renunciationum  materiâ 
cum  jure  gentium  ,  decretis  communium  legum  ,  &  facrorum  Canonum 
Statutis  fœderantur. 

Telles  funt  ac  docent  paffim  Juris-Confulti  Belgœ,  Galîi,  Hifpani,  & 
alii,  \  per  Univerfalem  Gentium  Confuctudinem ,  Jiipulationes  approbari,  quœ 
de  hœreditate  vhentis ,  prœfertim ,  intuitu  matrimonii  tniti  concipiuntur.     E- 

xem» 

*  L.  3.   C.  rie  Summa  Trinitste. 

|  Vide  Covarmv.  Mean ,  Ant.  fab.  Cornez.  Vafçjuez  ,  Cancer,  Molin.  &c  paffim  in  formili- 
bvis  hic  allegatis. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC. 


199 


aempîum  Orhis  penè  Univevfi,  pvo  renunciationibus  Jlave,  idque  nullo  pr*fupo- 
fito  jur amcnt 0 ,  nullâ  pv*fupofita  confuetudine  locali ,  non  obfiante  mimrenmta- 
te ,  fed  mundi  confenfu  &  ut  il  a  ati  s  public*  refpeclu.  Pavent um  venunciantium 
jurejurando  in  h*vedes  concepto  cbtefiationem  tacitam  y  impvecatiunem  confine- 
ri)  cujus  h*c  vis  fit ,  ut,  fi  contravenerint ,  eidem  cum  pejevantibus  Divin* 
Findict*  Jubjaceant.  SucccJJioncm  hbevis  defevri,  mediante  qu'idem  natuvali  du- 
el u,  non  t amen  jure  natuv*.  Multa  in  natuvali  qu  à  dam  vatione  fundari,  non 
ita  tamen  immutabilia-,  ut  vevocationem  nullam,  aut  derogationem  patiantuv. 
Jus  unum  Civile  alio  Civili  tolli  pofje.  Leges  adfocietatem  civile  m  pcvtineve ,  Ci" 
viles  pvoptereà  atque  Mis  avbitravias ,  in  quavum  favovew  funt  introduèl*.  Et 
qua:  hujusmodi  funt  alias  quam  crebro  &folidè  ab  Hifpanis  quondam  con- 
tra Gallos  deducta,  tam  in  qua:  ad  cafum  de  quo  tune  agebatur,  ut  nunc 
agitur,  à  Gallis  impetita. 

Infpiciat  qui  volet  exeufos  ante  fex  luftra  libellos  varios,  &  hinc  in- 
dè  in  vulgus  fparfos,  è  quibus  demùm  nihil  aliud  deprehendet,  quàm  fi- 
gnum  Gallicani  Protei,  qui  nec  inltrumenta  fœderum,  nec  legum  dicla- 
mina,  nec  avita  praeconia  teftamentorum  ampliùs  aeitimat,  cum  primùm 
occafio  apparet,  noviiîimis  fuis  émoluments  inhiandi. 

Habent  proinde  cum  Domefticis  exteri,  cumque  incolis  vicini:  habent 
cum  Romano  Pontifice  Europsei  Reges,  Refpublicse  ac  Status  liberij  quid 
in  his  temporum  rerumque  circumflantiis  pro  benignitate  Domus  Au- 
ftriaœ,  contra  potentiam  ,  cupiditatemque  Gallicam  obfervent. 

Gravis  ac  prudens  Conititutio,  quàrn  circà  Renunciationes  juratus  Jus 
Canonicum  in  cap.  quamvis  dePaclis  in  6.  exhibet,  farcafticè  à  Gallis  per- 
ftringitur  ,  quafi  Conditor  illius  ,  vel  glovi*  cupiditate  incenfus  ,  vel  augen- 
da  Pontifia*  aubloritatis  fiudio  effv*nem  ,  uti  vocant  ,  &  exovbitantem 
illam  Decretalem  efiovmavït  ,  volueritque  nova  lege  Pontificatum  firmare, 
quam  ailu  ac  dolo  confecutus  fuerit  *. 

Pay  Pyrenaea  tôt  Hifpanicarum  Regionum  in  Gallos  prodiga,  &  repetiti 
facramenti  fanctitas,  quo  Hifpanam  fuccefîionem  fan&uis  Gallicus  non  fe- 
mel  ejuravit,  fub  Scholaflico  &  futili  preetextu  minutiarum  quarundam  vi= 
lipendi  fe  dolet. 

Succefibr  fummi  Pontincis ,  cujus  Apoftolïcam  benedictionem  ipfe  ténor 
dotalis  chartse  pro  corroborandâ  renunciatione  oraverat,  ludibriurn  haud 
levé  pradeceflbris  fui  &  Romanae  Sedis  experitur. 

Convelluntur  pacla  ,  focietatis  civilis  columina  :  Poteltas  Regum  in 
condendis  legibus,  &  legum  nervus  in  conveniionibus  mutiiatur  :  fean- 
daiofum  dogma  inducitur  negligendae  reverentiaî,  teftameniis  parentum, 
&  ultimis  Majorum  voluntatibus  débitai:  Qureruntur  quse  Régis  Chriiiia- 
niffimi  Vires  ampliant,  non  quœ  quietern  Chriftiahae  Reipublicae:  Via  ad 
Univerfalem  Monarchiam,fk  Régi  Gallorum  laxior , à  femitâ  tam  diligen- 
ter  inceptâ  nunquam  avocando  ,  nifi  Europa  reliqua  Phrygurn  raore  fa- 
piat,  &  tôt  jam  plagis  per  Gallos  exercka  confeflim  difeac,  quantupe- 


■AFrmr» 

D'ALLE- 
MAGNE. 


Ut   raeriro 
ex  omni- 
bus  tota 
Europa 
colligit. 


Quid    aù- 
verius 
Gallica- 
rani  Vo- 
tentiam  fit 
cuïanûum. 


re 


*  Vid.lib.  fubTit.  Régiras  Chiiftianiffirnae Jura  in   Brabanr.   p.  18   &  feq. 


:oo     MEMOIRES,  NEGOT1ATIONS,  TPvAITEZ,  ET 


A*FATRFS 
D'ALLE- 
MAGNE. 


pro  Sainte 
propm. 


pro  |nf  Itia 

Aufhiaca, 

led 


absque 
imora  Se 
cun&atio* 
tic. 


re  pro  Auftria  fit  laborandum  ,  ut  hsec  patrimonio  fuo  antiquo  non  de- 
fraudetur  ;  &  fie  Italia  ,  Magna  Bntannia  ,  Luiltania  ,  uniiumque  Bel- 
gium  ,  cum  Germanià  totà ,  praeclariflimis  fuis  libertatibus ,  fplendoribus , 
Ck.  commodis  non  exuatur. 

Hifpaniam  deploramus  omnes  tam  putidè  fedu6lam  ut  ad  obfequia  mi- 
nus décora  ii  pailim  demittat  &  quSe  adeô  conitanter  atque  acriter  contra 
libertatis  fuse  invidias  &  Gallorum  cruenta  molimina  ab  integro  fa:culo 
decertavit ,  nunc  uno  miferabili  cafu  in  praccipitium  volvatur  ,  in  quo 
famam  &  bona  perdit  ,  nili  fubito  vigore  le  in  Auftriacas  recipiat  par- 
tes ,  quibus  quoefita  &  itabilia  pridem  jura  imminuere  haud  potuit , 
quantàcumque  facilitate  in  ternporaneam  adorationem  Andegavenfis 
Ducis  condefcendùTe  videntur  ,  non  aliter  ac  grus  gruem  fecuta. 

Non  dubitamus  ingente  periculo  ,  quod  finibus  &  mercimoniis  csete- 
rarum  gentium  impendet ,  nunc  fingulas  conciuri  ut  pro  Auftriaca  ju- 
.  ûitiâ  generofo  fe  operi  accingant  ,  quod  iimul  ad  ialutem  ipfarum  ac 
domeiticœ  tranquillitatis   metam  neceifanô  collimat. 

Nequaquam  ambigimus ,  pro  fingulari  fuà  &  exactâ  prudentiâ,  Pon- 
tificem  expendere,  quàm  caducus  apud  Gallos  &  momentaneus ,  paci- 
ficationum ,  publicorum  contra£luum,  &  juramentorum  fit  honos;  quan- 
ta inde  Ûiyini  Numinis  atque  Evangeliorum  profahatio  ;  quàm  prom- 
ptae  apud  eos  ac  féroces  minee^  quam  velox  &  imperiofa  vis  in  armis; 
quam  immodefla  &  infolens  aliénas  in  domos,  aulas,  ac  terras  Domina- 
tio,  aufura  plus  in  dies,  uti  adhuc  magis  cervices  Hifpanorum  qui  tanidiù 
reititerant ,  propudiofe  conculcavit. 

Agnofcimus ,  lugemufque  hinc  feandala,  fentimus  damna,  non  decli- 
namusbella,  pericula  prsevidemus,  exilium  vicinis  imminens  proipicimus, 
&  tempeltatem  quoque  in  longé  difîîtos,  non  vanè  ominamur. 

Paciflcus  femper  &  innocens  Leopoldus  C'a: far  eit,  nonniil  Turcarum , 
fiiaceiïant,  h'oitis,  Chriitianae  dignitatis  vindex  j  &  legum,  paclionum,  ac 
jurisjurandipienLiiîimus  euftos.  Alt  nunc  quid  agat,  ubi  Patrimcnium  Atavi , 
tôt  titulis  Auftriaccf debitum,  rapitur?  Ubi  feuda  imperii  (de  quibus  aliàs 
ac  fpeciatim  nobis  fermo  erit)  tam  audaéter  &  licentiofè  invaduntur?  Uti 
caéteri  EuropaeSummatts  le  partim  à  Gallis  ludibrio  habitos ,  &  univeriim 
eo  deduclos  cognofeunt,  ut  in  nullâ  re  prius  ac  certius  fecuritatem  &  quie- 
tem  fuam,  quam  in  decremento  aut  remotâPotentia:  Gallicae  reperire  va- 
leant.  Ego  hic  fubfifto,&  quos  diferiminum  propinquitas  cura  periclitan- 
tis  propriae  falutis  tangit  fuadeo  memores  illius  elle,  qui,  ne  cunctentur, 
dixit 

Utendum  pr  a  fente  die  cfl.  Citb  labitur  hora  ; 
Nec  bona  tam  fequïtur ,  quam  bona  prima  fuit. 


Le 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M,  DCC. 


201 


Le  véritable  Avant-Coureur  au  Manifejle  de  Sa  Majeflé  Impériale  \  Awairw 
ou  Recueil  de  quelques  Droits  de  la  Mai/on  d'Autriche 
à  la  SucceJJion  d'Efpagne  :  traduit  du  La- 
tin  de  la  Pièce  précédente. 


d'Allr- 

MAGNE. 


A  Peine  le  Séréniflime  &  très  Puiflant  Prince  Charles  II.  Roi  d'Efpa- 
gne  eût- il  expiré,  que  toute  l'Europe,  qui  étoit  déjà  fort  attentive  à 
ce  triite  Evénement,  aprit,  contre  toute  attente,  que  l'Efpagne  devoit  à 
l'avenir  embraffer  les  manières  Françoifes;  &  qu'on  produifoit  un  Tefta- 
ment  forgé  par  des  artifices  extraordinaires ,  qui  apelloit  à  la  SuccefTïon 
des  Royaumes,  Duchez,  &  Principautezde  l'Efpagne,  non  pas  un  Parent 
inconteitable  du  même  nom,  &  en  même  tems  l'aîné  de  la  famille,  mai* 
un  Allié  âgé  de  feize  ans,  né  d'une  femme  exclufe  de  toutes  prétenfions: 
&  cela,  malgré  la  Foi  jurée  de  la  Paix  &  des  Traitez;  malgré  la  difpofi- 
tion  précédente  du  Père  &  des  Ayeuls ,  &  le  droit  d'aînelTe  dans  un  pareil 
degré ,  qui  félon  les  Loix  d'Efpagne  devoit  fuccéder  à  la  Ligne  mafculine 
qui  feroit  éteinte;  malgré  l'affinité  la  plus  proche  du  côté  des  femmes  ;&, 
ce  qui  femble  être  le  principal ,  malgré  la  tranquillité  &  le  falut  de  toute 
l'Europe:  ce  qui  prouve  ,tant  en  général  qu'en  particulier,  que  la  Couronne 
d'Efpagne  ne  devoit  pas  échoir  à  Philippe  de  Bourbon  Duc  d'Anjou, mais 
à  Leopold  d'Autriche  Empereur  des  Romains. 

Pour  éclaircir  les  chofes ,  voici  comment  elles  fe  font  pafTées. 

Philippe  premier  vivoit  il  y  a  plus  de  deux  Siècles  ,  il  étoit  fils  de 
l'Empereur  Maximilien  iffu  heure ufement  de  la  Tige  d'Autriche  ,  ce  que 
perfonne  n'ignore.  Il  eût  deux  fils,  favoir  Charles  qui  étoit  l'aîné,  né  à 
Gand  en  Flandres,  &  Ferdinand  qui  étoit  le  cadet,  né  à  Medinè  en 
Efpagne.  L'Empire  Romain  diltingue  le  dernier  par  le  nombre  de  Pre- 
mier, &  l'autre  par  celui  de  Cinquième  ou  Quinte  lequel  eft  nommé 
dans  les  Annales  des  Rois  d'Efpagne  Charles  Premier.  Le  partage  de 
ces  Etats  fait  entre  les  deux  frères  à  Wormes  l'an  ijii.  fut  tel,  que 
Charles  qui  étoit  l'aîné  auroit  l'Efpagne  avec  la  Bourgogne  &  toute  la 
Flandre;  &  que  Ferdinand,  qui  étoit  le  cadet,  &  qui  fortoit  à  peine  de 
fa  jeunefie,  auroit  les  Etats  qui  font  en  Allemagne.  Celui-ci  fe  fournit 
à  l'heureux  fort  de  fon  frère  aîné  déjà  devenu  Empereur ,  &  il  le  lit  alors 
d'autant  plus  facilement  (comme  il  fe  peut  voir  par  l'extrait  N.  i.)  que 
quoi  que  fa  part  fût  petite,  il  n'y  auroit  ni  Raifon  ni  PuiiTance  qui  put 
fent  lui  porter  préjudice  contre  les  autres  droits  qu'il  vouloit  bien  fufpen- 
dre  par  un  pur  refpect  pour  fon  aîné.  C'efl  à  dire,  qu'il  fe  refervoit  tou- 
jours le  pouvoir  de  rentrer,  lui  ou  fes  héritiers ,  dans  ce  grand  héri- 
tage, fi  l'extinction   de  la  Branche  aînée  lui  en  donnoit  l'occafion. 

Sous  les  aufpices  de  cette  règle  folide  de  vie  &  de  mort ,  Ferdinand  a 
tranfmis  fa  pofterité  par  fon  Fils ,  nommé  pareillement  Charles ,  &  fon 
petit-fils  &  arriére-petit-fils  aiTavoir  Ferdinand  Deuxième  &  Troiiléme 
en  Ligne  droite  à  Leopold  à  prefent  Empereur:  ôc  afin  d'entretenir  l'u- 

ftome  XL  Ce  nion 


Charlej 
II.   Roi 
d'Efpagne 
apclle,  par 
une   Pré- 
tention 
mal  foM- 
dée,  à  la 
Succefliou 
le  bue 
d'Anjou, 


&  néglige 
l'Empe- 
reur Leo« 
pold, 


descen- 
dant de  la 
LigneMaf- 
culine  du 
premier 
de  la  Mai- 
fon  d'Au- 
triche qui 
eùtl'Eipa.- 
g"e  , 
par  Ferdi- 
nand I. , 
qui  ayant 
un  apana- 
ge de   fon 
frère  aine'  ? 


ayant  pré- 
fère la 
branche 
d'Efpagne 
à  fes  pro- 
pres filles 


2oi    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    nion  de  la  famille  &  de  fuivre  le  fens  de  la  convention  de  Wormes  ,  il 
d'Allé-     fubftitua  à  Tes  fils  la  Branche  d'Efpagne  pour  héritière,  à  l'exclufion  des 
MAGNE-     filles,  s'il  en  reftoit  quelques-unes,  comme  l'on  voit  par  le  N.  2.  A  Char- 
les-Quint ,  ou  premier  félon  les  Espagnols,  &  après  Philippe  Deuxième, 
Troiliéme  &  Quatrième  ,   fuccéda  Charles  Second  d'heureufe  mémoire 
qui  eft  mort  en  dernier  lieu. 

Celui-ci  eût  pour  mère  Marie-Anne   d'Autriche,   fille  dudit  Ferdinand 

Troifiéme  &  fœur  de  Leopold:  ainfi,  il  étoit  doublement  Allié  avecl'Em- 

Senveii-     pereur  Leopold  tant  par  la  proximité  de  fa  mère,  que  par  la  lignée  des 

lance         Ayeuls  d'Autriche  comme  on  le  peut  voir  dans  les  Généalogies  ci  join- 

Î2?3C  tes  N.  2.  &  4. 

biement  Ces  raifons  &  plufieurs  autres  qui  regardent  les  Conltitutions  commu- 

z]ilé>  nés  des  Royaumes ,  &  la  particulière  d'Efpagne  ,  portèrent  Philippe  IV. 

Teftament  Père  de  Charles  dernier  mort,  à  vouloir  que  Marie  Therefe,fa  fille  ainée, 

derhiîip-  mariée  à  Louïs   XIV.  Roi  de  France  ne  fut  point  directement  ou  indirec- 

i'elv,n&  tement  admife  à  fuccéder  aux  Royaumes  &  Provinces  d'Efpagne,  mais 

«lùon  de  qu'elle  en  fût  abfolument  exclue  à  perpétuité,  avec  tous  fes  defcendans  de 

Marie-  quel  Sexe  ou  degré  qu'ils  fuilent;  il  fit  de  plus  un  Teftament  en  i66f. 

Thciefe  fa  lequel  il  appelle  exprelfement  la  Branche  collatérale  d'Autriche   à  la 

Sœur,  au-      r  T.  |)pr/  it  i      t  •        •       i-r  i 

todiee  par  Suceefiion  d  Elpagne  au  défaut  de  Lignée  Elpagnole. 
laPaixdes  La  pajx  fe  Weltphalie  qui  fut  fignée  en  1648.  n'empêcha  pas  qu'il  n'y 
puenees,  e^  une  cruelle  guerre  fujette  à  pluiieurs  revers  entre  l'Efpagne  &  la  Fran- 
ce qui  dura  pendant  plufieurs  années,  &  qui  fembloit  prendre  le  train  d'al- 
ler beaucoup  plus  loin  au  grand  dommage  des  deux  Nations,  tant  par  les 
Préparatifs  que  par  les  Alliances  qu'on  faifoit  des  deux  cotez  :  c'eft  pour- 
quoi l'on  tacha  d'arrêter  la  véhémence  d'une  haine  fi  implacable,  par  le 
moyen  d'une  bonne  intelligence,  ce  qui  ne  pouvant  être  plus  folidement 
fait  en  apparence  que  par  un  Mariage,  on  s'y  apliqua  avec  foin. 

Le  Roi  de  France  jetta  les  yeux  en  premier  lieu  fur  Marguerite  de 

Savoye,   &  il  la  regardoit  déjà  avec  allez  d'amour  pour  que  l'on  crût 

qu'il  avoit  affez  d'inclination  pour  fe  marier  avec  Elle^  mais ,  il  ne  fut  pas 

,     difficile    de  faire  ralentir  les  premiers  feux  de  ce  Prince ,  en  lui  propo- 

fant  une  Alliance  beaucoup  plus  avantageufe,  qui  étoit  l'Infante  d'Efpa- 

ëne- 

Des  raifons  importantes  portoient  les  François  à  fouhaitef  ce  Maria- 
ge, &  Chriftine  propre  tante  du  Roi,  Dame  d'un  grand  &{  folide  juge- 
ment, étant  partie  de  Turin  avec  Marguerite  fa  fille,  fe  rentht  à  Lion  où 
elle  rencontra  le  Roi  fon  neveu.  Eile  l'exhorta  généreufement  à  ne  pas 
fonger  de  fe  marier  avec  fa  Fille,  mais  de  fonger  plutôt  à  l'Infante  d'Ef. 
pagne,  tant  pour  l'utilité  de  toute  la  Chrétienté  ,  que  pour  le  rétablifie- 
ment  de  tant  d'Etats,  qui  étoient  ruinez  par  une  fi  longue  guerre. 

Ce  que  cette  prudente  Dame  vouloit  perfuader  au  Roi  fon  neveu ,  pré- 
férant généreufement  l'utilité  publique  à  (es  avantages  particuliers  ,  étoit 
une  Affaire  pleine  de  grandes  difficultez.  Il  y  avoit  déjà  long-tems  que 
les  Efpagnols  avaient  fait  paroitre  une  averfion  infurmontable  pour  cette 

Alliance , 


RESOLUTIONS   D'ET AT  ,  M.  DCC.  205 

Alliance,  fur-tout  lors  qu'ils  réfléchiffoient  fur  les  cataiirophes  funeflesque    ActaxkkI 
des  g-.^ns  d'un  naturel  fort  contraire  au  leur  auroient  pu  caufer  dans    leur    d'All^ 
Gouvernement,  fi  y  ayant  une  lignée  de  ce  mariage,  Elle  eût  afpiré  à  la     MAGNE> 
Succeffion  des  Royaumes   d'Efpagne  ,   fur  le  prétexte  fpécieux  du  fang 
maternel.     Cette  difficulté  parut  avec  raifon  de  fi  grande  conféquence, 
qu'on  relblut  fermement  de  ne  pas  donner  les  mains  à  ce  mariage  ,  ex- 
cepté que  l'Infante  ne  préférât  l'amitié  d'un  Epoux  fi  confidérable  aux 
confiderations  qui  d'ailleurs  auroient  peut-être  été  de  poids.     AiTavoir,  il 
falloit  que  Mane-Théréfe  renonçât,  non  feulement  pour  Elle  en  cas  de 
veuvage  avec  pofterité,  mais  auiîi  pour  fes  enfans  de  l'un  &  de  l'autre 
fexe  qui  feroient  fortis  d'Elle,  enforte  qu'il  ne  feroit  refté  la  moindre  ef^ 
perance  à  aucun  de  la  Poltérité  Françoife  d'avoir  part  à  la  Succeffion  d'Ef- 
pagne. 

Ce  qui  ne  faifant  aucune  peine  à  l'Infante,  qui,  félon  le  cours  du  mon- 
de, regardoit  au  prefent,  fans  avoir  égard  au  triffce  événement  d'un  futur 
incertain.  Elle  renonçoit  d'autant  plus  facilement  pour  jamais,  tant  pour  el- 
le que  pour  fa  pofterité,  à  l'efperance  de  l'héritage  d'Efpagne,  pour  s'a- 
querir  une  part  prefente  de  la  fleurilTante  Couronne  de  France,  &  que  fi 
Elle  venoit  à  avoir  des  Enfans,  ils  pouvoient  être  afTez  heureux,  quoi 
qu'ils  fuffent  aufïi  éloignez  de  fon  patrimoine  qu'ils  fétoient  du  génie  Ef- 
pagnol.  Le  Roi  Philippe  fon  Père,  &  Louis  fon  Epoux,  n'étoient  pas  e- 
Joignez  de  ce  confentement  libre  de  l'Infante. 

11  eit  vrai  que  le  Roi  Philippe  étoit  dans  une  prudente  crainte  que  fi  la 
Renonciation  n'etoit  pas  faite  en  termes  clairs  &  bien  expliquez,  les 
Miniftres François,  qui  étoient  toujours  enclins  à  des  interprétations  cap- 
tieufes,  ne  priffent  occa,lon  d'en  faire  autant  dans  cette  conjoncture  pour 
parvenir  à  leurs  delfeins,  qui  prévaloient  alors  par  la  force,  ainfi  que  l'ex- 
périence ne  faifoit  que  trop  voir}  puis  que,  quoi  que  la  chofe  &  l'efprit 
des  Traitez  foient  clairs,  la  lettre  étant  cependant  plus  obfcure,  ils  la  tor- 
dent en  un  fens  oblique  par  la  force  des  armes  ,  tout  autant  que  l'utilité 
&  la  force  Françoife  le  permettent. 

Ceft  pourquoi  le  Cardinal  Mazarin,  &  Don  Louis  Mendez  de  Haro,  l'un 
&  l'autre  Premiers  Miniftres  des  deux  Rois,  &  leurs  Plénipotentiaires, 
après  avoir  beaucoup  travaillé  aux  monts  Pyrénées  dans  pluileurs  Confé- 
rences pour  convenir  de  la  Paix,  &  après  avoir  fouvent  travaillé  avec  un 
foin  extraordinaire  fur  la  forme  de  la  Renonciation ,  en  convinrent  enfin 
avecjoye  d'une  manière  fort  ample,  avec  des  claufes  très-expreiTes,  qui 
devoit  fervir  de  loi  pour  l'avenir. 

Le  Roi  Très-Chretiert  avoit  muni  fon  AmbafTadeur  d'un  Ple-inpouvoir 
particulier  pour  convenir  de  cette  Renonciation,  ainfi  que  l'on  peut  voir 
par  le  N.  y.  la  même  chofe  ayant  été  pratiquée  par  le  Roi  Catholique  à 
l'égard  de  fon  Ambalfadeur,  comme  on  le  peut  voir  par  le  N.  6.  &  félon 
ce  que  dit  Tite-Live  que  le  Droit  des  Gens  prévaut  dans  les  chofes  dont  les 
l'y  un  fa  fiions  fe  font  par  Foi ,  par  alliance ,  par  Traité ',  &  par  Serment,  &  quti 

Ce  2  y  a 


MAGNE, 


comme  la 
partie 
principale 
folemnel- 
le  5c  géné- 
rale, 


204    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  y  a  beaucoup  de  différence  entre  la  Foi  publique  fcf  la  Foi  particulière ,  que  la  pu- 
blique prend  fa  force  de  la  dignité  ,  (3  la  particulière  de  la  forme  des  conven- 
tions. On  ne  doutoit  nullement  que  tout  ce  qu'on  avoit  fait  à  l'égard  de 
la  Renonciation  auroit  été  obfervé  plus  religieufement,  puis  que  la  digni- 
té &  la  forme  dans  le  Traitté  qu'on  en  avoit  fait  y  concourroient  éga- 
lement. 

C'étoit  fur  ce  fondement  véritablement  très-digne  de  la  Majefté  Roya- 
le, qu'on  bâtifibit  de  bonne-foi  une  Convention  fi  folemnelle,  &  la  par- 
tie première  &  très-noble  de  la  Paix  des  Pyrénées  ,  ainfi  que  l'on  peut 
voir  par  l'article  3?.  mis  fous  le  N.  7. 

On  ne  pouvoit  point  trouver  de  termes  plus  forts,  ni  qui  fulTent  plus 
efficaces  que  ceux  dont  fe  fervirent  l'Infante  &  le  Roi  fon  Epoux,  l'une 
pour  exprimer  fa  Renonciation ,  &  l'autre  pour  exprimer  fon  Confentement. 
On  y  renonçoit  de  la  manière  la  plus  ample  à  tous  &  un  chacun  des  Droits, 
Titres,  Loix,  Coutumes,  Constitutions,  Difpofiiions,  Remèdes, &  Pré- 
textes ,  par  lefquels  l'Infante  (excepté  qu'Elle  fut  reliée  veuve  fans  li- 
gnée) ou  fes  enfans  de  l'un  ou  de  l'autre  fexe,  nez  de  ce  mariage,  ne 
pourroient  en  quelque  tems  que  ce  foit  prétendre  à  la  moindre  Succeffion 
des  Etats  d'Efpagne.  Ainfi  toute  voye  directe  ou  indirecte  à  cette  Suc- 
ceffion étoit  fermée  à  la  pofterité  de  France.  On  fuplioit  même  le  Pon- 
tife Romain  de  vouloir  donner  fa  Bénédiction  Apoitolique  à  une  Conven- 
tion faite  avec  tant  de  précaution  &  fi  unanimement,  pour  la  tranquillité 
des  deux  Royaumes,  &  pour  le  repos  de  la  Chrétienté ,  foufeme  avec  le 
Traité  de  Paix  des  Pyrénées  le  7.  Novembre  i6f$. ,  &  fignée  dans  une 
Affemblée  nombreufe  de  Miniftres  des  deux  Rois  avec  des  applaudifle- 
mens  réciproques,  &  établie  des  deux  cotez  avec  une  prévoyance  très- 
prudente. 

Que  le  lecteur  definterefTé  ,  &  exempt  de  toute  paffion,  life  feulement 
les  paragraphes  quatrième,  cinquième,  &  fixieme  du  Contract  de  Maria- 
ge ,  qui  font  ici  annexez  fous  le  N.  8-  &  fans  un  long  examen,  il  verra 
évidemment  qu'on  ne  pouvoit  faire  aucune  difpofition  ni  ordre  &  qu'on 
ne  pouvoit  prendre  aucun  prétexte,  par  lequel  un  enfant  mâle  de  France 
auroit  pu  afpirer  à  la  Couronne  d'Efpagne,  puis  qu'il  étoit  exclus  de  tou- 
tes les  efperances  qu'il  y  auroit  pu  avoir,  par  des  périodes  fi  claires,    des 
termes  fi  exprefîifs,  &  par  de  claufes  fi  dérogatoires,  &  declaratoires. 
Il  n'eft  pas  befoin  ici  des  Subterfuges  de  l'Ecole  pour  obfcurcir  des  Termes 
très-clairs:  Dieu, qui eil  le  Scrutateur  des  cœurs,  &  qui  a  été  apellé   à  té- 
moin dans  ces  Conventions,  n'admet  point   des  explications   équivoques  ; 
la  Gloire  de  la  Croix  de  Chrifl,  la  Sainteté  de  l'Evangile,  le  Canon  de 
la  Méfie, &  1  Honneur  Royal, par  toutes  lefquelles  choies  on  devoit  jurer 
félon   la  Formule  de  la  Paix  des  Pyrénées  ci-jointe  fous  le   Nombre  9. 
ne   foufrrent  point  que   les    termes  difent   une   chofe  ,    &   fefprit  une 
autre. 
L'Efprit  &  l'Intention  de  ceux  qui  ont  contracté,  &  Texclufion  éter- 
nelle 


îc  qui  de- 
voit être 
approuvée 
par  le  Pa- 
pe à  la  re- 
quifition 
des  par- 
tics  , 


confirmée 
par  des 
Sermens, 
par  le  Tef- 
tament  de 
Philippe 
IV. 


RESOLUTIONS     D'ETAT,   M,  DCC.  20; 

relie  de  la  Lignée  de  France  ,  fe  voyent  clairement  par  les  rai  fon  s  puhli-  Affaire 
ques,&  par  le  Traitté  confirmé  par  la  Ratification,  du  Roi  de  France  qu'on  d'Alle- 
trouvera  inférée  fous  le  N.   10.  magne. 

Le  même  Roi  Catholique  Philippe  IV.,  qui  fçavôit  principalement  le   clairement 
fens  de  la  Convention,  le  répète  clairement  dans  fon  Teltament  fait  le  14.    énoncée: 
Décembre  i66y.  par  les  termes  mis  fous  le  N.  11. 

Ce  Roi  ordonne  dans  fon  Teftament  plufieurs  &  diverfes  chôfes  fur  l'Hé- 
ritage d'Efpagne:  il  raporte  aufiî  plufieurs  chofes  fur  la  crainte  du  danger 
qui  menacoit  l'Efpagne  &  toute  la  Chrétienté  par  les  mariages  avec  la 
Maifon  Royale  de  France,  û  on  ne  mettoit  un  obftacle  à  la  lignée  qui  en 
étok  née  ou  qui  en  naitroit.     Il  raporte  amplement  tous  les  foins  &  les 
précautions,  qu'il  avoit  été  obligé  d'aporter  en  toutes  manières  avec  An- 
ne fa fœur ,  avec  Marie  Therefe  fa  fille,  &  avec  fa  propre  femme   Elifa- 
beth  de  Bourbon,  afin  qu'aucun  enfant  de  France  mâle  ou  femelle,  en 
quelque  manière   ou  occafion  que  ce  fût  ne  parvint  à  la  Succeffion  des 
Etats  de  l'Efpagne.     Il  fait  mention  mot  à  mot  des  chapitres  qui  avoient 
été  faits  en  dernier  lieu  pour  éviter  toutes  \qs  occasions,  par  lcfquelles  on 
pouvoit  craindre,  même  de  loin, que  les  Etats  d'Efpagne  ne .  vinffent  à 
être  unis  à  ceux  de  France,     Il  détaille  quelques  lignes  des  Succédons , 
&  quoi  qu'il  fçut  très-bien  qu'il  n'auroit  pas  manqué  une  Lignée  nom- 
breufe  à  fa  fille  avec  le  Roi  Louis  fon  Gendre,  puisqu'elle  étoit  fertile,  & 
avoit  déjà  enfanté  le  Dauphin  &  deux  fil/es,  n'oubliant  pas  la  Faix   des 
Pyrénées  &  les  Conventions,  il  exclut  lapofterité  de  France  de  tout  l'hé- 
ritage d'Efpagne,  par  quelle  occafion  que  ce  puilfe  être, en  forte  que  quoi 
que  l'union  des  Royaumes  ne  puiffe  pas  arriver  dans  les  femelles  à  caufç 
de  la  chimère  de  la  Loi  Salique,  il  ne  veut  cependant  pas  qu'elles  puifient  iuc- 
ceder  dès  qu'elles  fortent  de  la  tige  de  France.     Mais ,  il  fe  tourne  plûiôc   de  forr« 
vers  fa  propre  famille  d'Autriche,  &  y  apelle  hs  enfans  de  fa  feeur  Ma-   Jj"aenc*e 
rie,  qui  étoit  morte  en  1646.  après  avoir  eu  plufieurs  enfans  de  l'Empe-    d'Autri- 
reur  Ferdinand  III.  &  entre  autres  le  très-Augulte  Leopold.     Il  va  me-   che  u^' A'- 
me  plus  loin>car,  pour  exclure  abfolumentja  Ligne  Françoife  des  Royau-  aqùivW; 
mes  &  Etats  d'Efpagne,  il  fubitituë  à  ladite  Maifon  d'Autriche,  en -cas,  Droîtfft- 
qu'elle  vint  à  s'éteindre,  la  pofterite.de  Catherine  de  Savoy e  fa  Tante, 
qui  étoit  déjà  morte  en  if 5)7., pour  fucceder  à>fe,s  Etats. 

Ce  qui  eft  une  preuve  certaine  de  J'exclufion  des  François,  &  du  droit 
inconteftable  qui  apartient  au  fang  d'Autriche. 

Le  Roi  Charles  dernier  mort  n'ignoroit  pas  des  témoignages  fl  authen-    tèijwlobâ 
tiques  de  la  vérité.     La  Renonciation  éternelle. de  fa  fœur  &  de  fes  àtf-   lierions 
cendans  étoit  notoire;  Le  Teftament  de' Philippe  fon  Père  fpecifioit  un   ^e  ci|ar* 
SuccefTeur  d'Autriche.     Le  Roi  Charles  honnoroit  l'Empereur  Leopold  &   pL1r  djV'er. 
ie  regardoit  comme  parent  du  côté  .de  fa  Mère,,  comme  le  plus  âgé  de  la    }«  raifons 
Maifon  d'Autriche  de  l'une  &  de  l'autre  Branche,  comme  proche  du  côté   bSSL 
de  fa  femme,  &  comme  Succeffeur  prochain  deiigné  par  le  Teftament  de 
ion  Père,  comme  bien  f ai  fan  t.  par  la  part  qu'il  lui  avoit  donné  peu  aupa- 
ravant a  la  Couronne  de  Hongrie,  ainfi  que  l'on  peut  voir  par  le  Nom- 
Ce  3  bre 


c  once  fia- 
ble, 


Affaires 

D'.'VjLI.E- 
MAGNE. 


Le    Roi 

Clia.'es 
n'a  eu  ni 

la  volon- 
té ni  le 
pouvoir 
àc  relier. 


La  raifon 
tics  Re- 
nonria- 
rions 


ne   cohiïf- 
t^  pas 

«uns   la 
i'eule 
craiiv.e  de 
ï  Uni  or. 
oes  Cou- 
ronr.',.s. 


200    MEMOIRES,  NEGOTÏATIONS,  TRAITEZ,  ET 

bre  12.  fans  compter  diverfes  autres  raiforts  qu'il  avoit  de  l'honorer;  mê- 
me étant  encore  en  vie ,  il  lui  avoit  donné  un  pouvoir  fort  ample  fur  les 
forces  d'Efpagne  ,  comme  on  le  peut  voir  par  la  copie  de  la  Lettre  ci-join- 
te fous  le  N-   15. 

Cependant,  félon  les  révolutions  du  monde  ,  quelques  perfonnes  du  Mi- 
niRére  d'Efpagne,  gagnez  parle  grand  éclat  de  l'or  d'un  voifin,  cher- 
choient  d'attirer  le  Roi  languiflant  d'un  autre  côré,&,  en  le  détachant  de 
fa  propre  famille,  le  tourner  avec  adreiTe  du  côté  des  François,  qui  au- 
paravant avoient  été  regardez:  avec  une  grande  averfion.  Ils  avotioienc 
eux-mêmes,  &  fupofbient  l'efficace  de  la  Renonciation  de  l'Infante  Marie 
Therefe,  aufli  bien  que  l'évidence  du  Teitament  de  Philippe,  &  tout  ce 
qui  tendoit  à  l'exclufion  de  la  France;  mais,  ils  en  faifoient  confilter  la  rai- 
ibn  ,  dans  la  crainte  de  l'union  des  deux  Couronnes,  laquelle  crainte  cef- 
fant,  &  l'union  étant  empêchée,  on  pouvoit  en  ce  cas  ouvrir  le  chemin, 
aux  François  pour  avoir  la  Couronne  d'Efpagne. 

Enfuite,ils  forgent  un  Teitament  qu'ils  embelIilTent  par  des  Confulta- 
tions  de  quelques  Jurifconfukes ,  &  avec  des  Difcours  étudiez  en  faveur 
du  Duc  d'Anjou,  ils  pouffent  le  Roi  moribond  à  aprouver  avec  un  cœur 
aride  &  deffeché  &  avec  le  cerveau  refout  en  pituite,  ce  bel  ouvrage  qui 
fera  l'étonnement  des  fiécles  à  venir,  tant  dans  les  Ecoles,  que  dans  les  Cours; 
particulièrement  fi  on  veut  tant  foit  peu  confiderer  la  fuite  de  toute  l'af- 
faire qui  eft  d'ailleurs  allez  notoire  auffi-bien  que  les  autres  circonitances 
déjà  raportées  avec  l'Extrait  ci-joint  fous  le  N.   14. 

Par  le  Teltament  précédent  de  Philippe  IV.  la  choie  eft  claire,  certai- 
ne^ illimitée  pour  un  Parent  de  la  Maifon  d'Autriche;  dans  le  dernier 
Teitament  de  Charles  fécond  on  feint  une  limitation  qui  elt  incompatible 
avec  les  paroles  aufli-bien  qu'avec  le  fens.  Le  fils  s'arroge  dans  le  der- 
nier un  pouvoir  de  faire  un  Teitament,  que  ceux  qui  ont  forgé  le  fécond 
tâchent  d'ôter  au  Père. 

La  Renonciation  de  la  Sœur  &de  la  Tante  contient  une  abdication  uni- 
verfelle  ,  indéfinie ,  &  directe  ,  mais  le  prétendu  Teitament  de  Charles 
veut  qu'il  y  ait  une  reftriction  oblique ,  directement  contraire  aux  termes 
&  aux  intentions  ci-deffus  alléguées.  Les  premiers  Actes  folemnels  té- 
moignent pour  la  Maifon  d'Autriche,  &  pour  augmenter  fa  fureté,  on 
les  établit  pour  Loix  fondamentales.  Mais,  eft-ce  aimer  la  Maifon  d'Autri- 
che, &  augmenter  fa  fureté,  que  de  la  priver  des  Royaumes  déjà  fi  re- 
nommez par  le  nom  d'Autriche  dés  le  tems  des  Ayeuls,  &.  y  appeller  des 
Succelfeurs  François  ?  La  raifon  concourt  donc  par  tout  avec  le  Texte  à 
une  totale  exclufion  de  la  poftéritéFrançoife;  &  il  n'eit  pas  vrai  que  dans 
les  Traittez  &  Contracta  entre  l'Efpagne  &  la  France,  non  pius  que  dans 
le  Teitament  de  Philippe ,  l'Union  des  Couronnes  foit  la  feule  &  uni- 
que raifon. 

Car ,  pourquoi  auroit-il  autrement  été  néceflaire  de  renoncer  pour 
les  femelles  ou  pour  ia  pofténté  puifnée  ?  Pu>s  que  celle-ci  cède  en 
France  aux  Ainez ,  &  que  celles-là  font  exclufes  à  jamais  de  la  Cou* 

ronne 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  207 

ronne  de  France  ;   ce  feroit  craindre   en  vain    l'Union  des  deux  Cou-    Ate&ir^s 
ronnes  en  une  perfonne  qui  auroit  été  absolument  incapable  d'an  por-    n'An.E- 
ter  une  des  deux.  -  magne. 

Le  Duc  d'Orléans,  un  des  fils  d'Anne  d'Autriche,  s'eft  tenu  ci-devant 
dans  le  filenee ,  &  en  vertu  du  contract  de  Mariage  de  fa  Mère ,  qu'on 
raporte  fous  le  N.  if.  a  toujours  été  laiffé  en  arriére  ;  ce  qui  cependant 
feroit  contraire  à  tout  ceci, fi  onregardoit  à  la  feule  crainte  de  l'Union  des 
Couronnes? 

Et  en  dernier  lieu  le  rufé  Inventeur  du  dernier  Teltament  a  été  fi  har- 
di ,  que  de  faire  un  tort  manifelte  aux  Sereniffimes  filles  de  l'Empereur 
Leopold,  puis  qu'il  tâche  de  les  exclure  toutes  &  chacunes  d'EUés  dans 
le  prétendu  Teftament,  quoi  que  pourtant  on  n'ait  pas  fujet  de  craindre 
que  par  Elles  ,  le  Trône  d'Efpagne  &  celui  de  France  s'unifient  par 
héritage. 

Il  elt  donc  évident,  que  les  Predeceffeurs  du  dernier  Roi  d'Efpagne    Maistjçft 
ont  eu  un  tout  autre  motif  que  celui  delà  feule  crainte  de  l'Union,  ayant    tota» 
mis  tous  leurs  foins  de  ne  pas  Iaiffer  monter  fur  le  Trône  d'Efpagne  un    folueu 
Prince  François,  par  le  motif  de  la  tranquillité  publique ,  &  pour  le  bien    *aÏÏis! 
particulier  de  la  Maifon  d'Autriche. 

Et  fi  nous  examinons  le  danger  de  ladite  Union  qui  eft-ce  qui  afTure-    Ceren<!nnt 
ra  les  Efpagnols  modernes  contre  cette  Union  ,  contre  laquelle  ils  ne  fe    Mainte  de 
lafTent  point  de  fe  recrier?  Eft-ce  la  Foi  de  la  France,  tant  de  fuis  don-    l'unionne- 
née  &  tant  de  fois  rompue  ?  Eft-ce  la  gravité  Efpagnole  réduite  par  l'a-    tellei'ûinr- 
dreffe  de  fes  Ennemis  à  voltiger ,  comme  une  giroiiette  agitée  par  de  fre- 
quens  &  fubits  tourbillons!  Eft-ce  l'ennui  ou  le  mépris  d'une  Couronne  à 
la  vacance  d'une  voifine  qui  eft  toujours  aux  aguets  contre  les  Etats  Voi- 
fins,  jufques  à  ce  qu'ils  fuient  réduits  en  Provinces  ?  Eft-ce  la  certitude 
d'une  éternelle  deftinée  contre  la  mort  par  laquelle  peut-être  le  Duc  d'An- 
jou furvivra  à  tous  fes  autres  frères  qui  font  prefentement  en  vie  ?  Quit- 
tera-t-il  alors  l'Efpagne,  qui  lui  fera  déjà  attachée  par  tant  de  liens,  &  fi 
profitable  par  fes  Etats  qui  font  abondans  en  or,  &  par  fes  Ports  qui  font 
fi  commodes?  Et  fi  le  cas  arrive  pour  le  Duc  de  lierri  fon  frère,  le  Duc 
d'Anjou  ,   content  du  feul  Diadème  Paternel ,  fera-t-il  prêt  d'abandonner 
celui  dont  il  feroit  déjà  en  pofléfiion? 

La  prudence  des  Efpagnols  eft  trop  connue',  pour  croire  qu'ils  applau-    De  PruS 
diflent  à  de  petites  perfuafions  de  cette  nature  &  à  des  raifons  fi  vuides,    les*%- 
étant  fur  le  point   de  voir  en   petit   l'affreux   efclavage   fuus  lequel   ils    ESû„,a 
gémiront  en  grand,  s'ils  ne  reflechiffent  meurement  à  leurs  intérêts  :  &    tuent, 
s'ils  ne  fe  joignent  à  la  Maifon  d'Autriche. 

Et  déjà  la  bafiéffe,  avec  laquelle  ceux  qui  ont  forgé  leTeftament  pro- 
ftituent  le  refte  des  Efpagnols,  eft  digne  de  pitié,  puisque,  par  leur  ju- 
gement précipité  &  tumultueux,  ils  avouent  qu'ils  font  beaucoup  au 
deffous  des  François,  eux,  qui  jufques  à  prefent  ont  deffendu  par  écrit, 
&  par  diverfes  actions,  la  Prééminence  Efpagnole,  comme  ne  pouvant 
aller  du  pair  qu'avec  l'Empereur.  A  prefent  ils  offrent  la  Palme  à  la  Fran- 
ce, 


asfaiue's 
d'Allé  • 

MAGNC 


&  agi  fient 
contre 
leurs  pro- 
pres Loix. 
Quoique 
les  Fran- 
çois écri- 
vent , 


&  parmi 
eux  le  fa- 
meux 
Archevê- 
que d'Am- 
brun  , 
qui  cepen- 
dant  ne 
prouve 
rien ,.  mais 
plutôt, 


208    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

ce ,  qu'ils  ont  fi  long-tems  difputée;  &,  ce  qui  furprend  davantage,  avec 
une  ame  &  une  plume  .extraordinairement  abjecte.  On  ne  fauroit  élever 
avec  plus  de  foûmi(îïon  la  Grandeur  de  la  France,  que  de  la  manière  que 
le  font  les  Efpagnols,  lors  qu'il  difent  que  fi  la  Couronne  de  France  ve- 
noit  à  être  vacante,  le  Duc  d'Anjou  auroit  plus  d'inclination  pour  Elle 
que  pour  celle  d'Efpagne;  &  alors, fi ,  méprifant  l'Efpagne,  il  s'en  retour- 
noit  en  France,  ils  feroient  contraints  de  fe  contenter,  qu'un  Cadet  &  na- 
tif François  vint  honorer  l'Efpagne  de  fa  prefence  &  de  fa  domination. 
La  Pologne  n'a  pa's  encore  digéré  l'exemple  de  Henri  de  Valois,  qui 
fe  fauva  en  France.  Quoi  que  l'Efpagne  puifTe  donc  penfer,  Elle  ne 
peut  concevoir  d'avance  l'idée  d'une  fuite,  &  fa  nouvelle  foûmiffion  à  un 
nouveau  Roi,  fans  un  abaiflement  volontaire  de  foi- même. 

Mais  ces  dernières  chofes  font  prefque  particulières ,  au  lieu  que  tou- 
tes les  autres  font  publiques,  &  par  une  égalité  d'exemple  pernicieufes 
pour  l'avenir,  de  quelque  côté  que  nous  les  envifagions.  Il  s'agit  de  la 
force  de  la  Paix  ,  de  la  Teneur  &  de  la  Religion  des  Traittez,  &  de  la  for- 
ce même  des  Loix  d'Efpagne. 

Les  Ecrivains  François  ne  peuvent  aller  à  l'encontre  de  ceci ,  pas  mê- 
me l'Archevêque  d'Ambrun,  qui  s'eft  fort  diftingué  parmi  eux  par  le  Libel- 
le ci-devant  qui  a  pour  titre  la  Deffence  des  Droits  de  la  Reine  Très-Chré- 
tienne, f 

Cet  Auteur ,  écrivant  dans  ledit  Ouvrage  avec  foin  contre  les  Efpa- 
gnols, en  faveur  de  l'Armée  Françoife  qui  envahiffoit  alors  la  Flandre, 
&  ne  voulant  pas  cependant  qu'il  parut  qu'il  offençât  la  Pragmatique 
Sanction  d'Efpagne  ,  s'elt  efforcé  de  l'éluder  par  tous  les  moyens  ima- 
ginables ,  &  d'inftruire  magiitralement  les  Efpagnols  de  ce  qui  leur  é- 
toit  utile  ou  leur  étoit  préjudiciable. 

Ladite  Sanction  avec  les  autres  Loix  d'Efpagne  font  dans  un  Livre 
intutilé  Nueva  Recopilaçion  ou  nouveau  Recueil ,  imprimé  à  Madrid  en 
1640.  Cette  Sanction  exclut  en  termes  trés-exprés  tous  les  François 
du  Droit  de  la  Succelîion  d'Efpagne,  de  forte  qu'elle  ne  laiffe  aucu- 
ne capacité  à  Louis  XIV.  &  à  fon  Frère  ni  à  aucun  de  leurs  enfans 
pour  fuccéder  aux  Royaumes  d'Efpagne,  ni  à  aucun  des  Etats  qui  en 
dépendent. 

Ledit  Archevêque  reconnoit  fort  bien  les  termes  exprés  de  cette 
Loi,  &  il  fe  donne  beaucoup  de  peine  pour  renverfer  une  digue  fi  fo- 
lide.  Il  répète  les  fubterfuges  de  quelques  Jurifconfultes  ,  auxquels  les 
Flamands,  &  les  Efpagnols,  avoient  déjà  répondu  d'une  manière  à  fai- 
re honte  &  à  impofer  filence  aux  François;  &,  afin  qu'il  parût  qu'il  y 
avoit  ajouté  quelque  chofe  du  fien,  il  s'efforce  dans  des  chapitres  en- 
tiers, &  à  la  fin  de  fon  Libelle,  de  détruire  les  raifons  de  l'utilité  pu- 
blique de  ladite  Loi;  difant  qu'il  y  manquoit  l'Autorité  du  Legiflateur, 

& 


|  Sous  le  Titre  de  Defîenrc  du  Droit  de  Maric-Therefè  d'Autriche  Reine  de  Prance  à  la  Succef- 
fîon  des  Ctou'ronnes  d'Efpagne. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  zo9 

&  la  folemnité  de  la  publication.    Comme  s'il  étoit  feulement  de  l'uti-  Affales 
lité  publique  de  ne  regarder  que  l'augmentation   de   la  puiflance   de  la    d'Allé- 
France  ,    &   de   ne   faire   aucune    attention   aux  intérêts  de  la  Maifon    MAGNE> 
d'Autriche,   &  à  la  tranquillité  de  divers  Peuples  de  l'Europe,   d'où  il 
fuivroit  qu'aucune  Monarchie  ne  pourroit   établir  aucunes  Conftitutions 
fans  l'aprobation  des  François ,  quoi  qu'elles  fufTent  conformes  aux  an- 
ciens Ufages  des  Siècles  les  plus  reculez.    Il  fuffit  que  dans  ladite  Sanc- 
tion d'Efpagne,  l'amitié  &  l'honneur  delà  Maifon  d'Autriche  ayent  pré- 
valu ,  après  avoir  été  auparavant  confirmées  par  les  Conventions  que  les 
François  avoient  jurées.     11  fuffit   que   ladite  Pragmatique  Sanction    ait 
été  faite  &  publiée  par  un  Roi  prévoiant,  à  la  prière  &  par  l'avis  des 
Etats  du  Roiaume,  félon  la  coutume  déjà  reçue  du  tems  des  Ayeuls  aufli- 
bien  que  félon  d'autres  Loix  plus  récentes. 

Cet  Auteur  François  s'oublie,  &  il  condamne  lui-même  la  Loi  Sali-  parles 
que  &  l'Autorité  de  fes  propres  Rois,  s'il   nie   la  force  des*  Sanctions,  ™°cr'ef*ÔV 
dans  la  forme  &  matière  defquelles  les  premières  Coutumes  ont  toutes  celle,  fenfe  la 

L'Averfion  des  François  contre  le  Sexe  féminin  n'a  pas  toujours  été  FrAance 
fi  forte,  pour  l'exclure  avec  la  Poftérité  &  les  Parens  de  la  Succeflion  memc* 
du  Royaume  ;    &  cependant   ce  que  défend  la  Loi  Salique,  introduite 
dans  la  fucceflion  du  tems,  efl  plus  clair  que  le  Soleil. 

Les  Auteurs  François  n'ignorent  point  l'Arrêt  folemnel  qu'on  a  fait  de- 
puis peu  de  Siècles,  qui  défend  d'admettre  les  Filles  de  France,  qui  fonjt 
dans  l'apanage  d'un  Frère  Royal,  après  lui  à  la  Succeflion,  à  laquelle  ce- 
pendant jufques  alors  Elles  avoient  eu  part. 

Dans  la  première  Famille  des  Rois  de  France  ,  les  Frères  puînez  a- 
voient  aufli  leur  part  à  la  Couronne ,  de  forte  que  les  illégitimes  n'en  é- 
toient  pas  mêmes  exclus.  Ainfi  Clovis  qui  fût  le  premier  Roi  Chrétien , 
étant  mort,  fes  quatre  fils  diviférent  le  Royaume  en  autant  de  parts  ,  & 
en  firent  quatre  Royaumes:  Childebert  eût  celui  de  Paris,  Clodomir  ce- 
lui d'Orléans,  Clotaire  celui  de  Soiflbns ,  &  Théodoric  leur  Frère  natu- 
rel eût  celui  de  Metz.  Enfuite  ces  quatre  Royaumes  s'étans  réunis  par 
la  mort  des  Frères  dans  Clotaire,  les  quatre  fils  de  celui-ci  firent  encore 
un  pareil  partage ,  &  Charibet  eût  celui  de  Paris  ,  Chilpéric  celui  de 
Soiflbns  ,  Gontran  celui  d'Orléans  ,  &  Sigebert  celui  d'Auftrafie  ;  & 
comme  chacun  de  ces  Rois  prenoit  le  titre  de  Roi  de  France,  il  ajoûtoit 
par  difcrétion ,  qu'il  avoit  fon  grand  Prétoire  à  Paris ,  ou  dans  un  autre  lieu 
de  fon  partage  ^  d'où  à  la  fin  on  prit  la  coutume  de  les  appeller  Rois  de 
Metz  ,  ou  de  quelque  autre  Lieu.  Sigebert  fils  naturel  du  Roi  Dago- 
bert  partagea  l'héritage  avec  Clovis  IL  &  le  Roi.  occupa  la  France 
Orientale. 

Dans  la  féconde  Famille  des  Rois  de  France,  jufques  à  fa  fin,  il  y 
eût  prefque  un  pareil  partage  à  celui  qui  avoit  été  pratiqué  dans  la  pre- 
mière ,  &  tous  les  Enfans  des  Rois  de  France  étoient  appeliez  Rois.  Ce- 
pendant, il  n'y  a  aucun  François  qui  ofàt  dire  que  ces  chofes  ont  été  dans  la 
fuite  injuiiement  changées,  &  qu'on  ne  pouvoit  pas  le  faire. 

Tome  XI.  Dd  Hugues 


ÀMAIRES 

d'Alle- 
magne. 


*io    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Hugues  Capet,  qui  tranfporta  le  Sceptre  dans  la  troifiéme  Famille,  fut 
le  premier  qui  fit  la  Loi  &  donna  lieu  aux  Appanages  ,  comme  on  peut 
le  voir  par  l'Arrêt  de  1282..  prononcé  feulement  en  prefence  de  trente 
Seigneurs:  néanmoins,  la  pollérité  féminine  ne  fe  crût  pas  encore  exclufe 
par  cet  Arrêt ,  jufques  à  ce  que  fous  Philippe  le  Bel  l'affignation  des  A- 
panages  fe  fit  de  la  forte ,  c'eft  qu'en  même  tems  on  fit  une  Loi  qui  dé- 
fendoit  expreffément  la  fucceffion  des  femelles. 

On  pourra  aifément  remarquer  plufieurs  métamorphofes  pareilles  tou- 
chant la  forme  des  Loix  &  dans  les  chofes  anciennes,  fi  on  veut  prendre 
la  peine  de  lire  les  volumes  de  l'Hiftoire  de  France.  Or,  qui  efl-ce  par- 
mi les  François  qui  taxera  d'injufïice  ces  changemens,ou  qui  les  condam- 
nera de  nullité ,  &  qui  fera  fes  propres  Rois  coupables  d'impiété  contre 
la  nature  ,  lors  qu'ils  ont  exclu  les  Filles  de  la  Succefîion  ,  &  même 
contre  leur  gré ,  &  fans  qu'Elles  y  eulTent  confenti  par  quelque  Renon- 
ciation ?  Qui  efl-ce  qui  déclarera  pour  nulles  les  Loix  de  Fance  récem- 
ment publiées,  parce  qu'elles  s'éloignent  d'autres  Loix  plus  anciennes  ou 
de  leur  manière  ?  Pour  paiïer  fous  filence  tout  ce  que  l'on  voit  de  ces 
Ombres  de  Parlemens  modernes,  qui  font  voir  évidemment  qu'il  feroit  ri- 
dicule en  France  de  vouloir  que  les  Ufages  anciens  des  tems  pafTez  fer- 
vhTent  de  régie  elTentielle  aux  Loix  récentes. 

D'Aubuflbn,  Archevêque  d'Ambrun,  ne  donne  donc  que  des  paroles  en 
l'air,  lors  qu'il  parle  avec  un  difcours  coulant,  mais  inutile  avec  fes  par- 
tifans  contre  ladite  Sanction  d'Efpagne  }  proflituant  par-là  la  fmcérité 
Royale,  &  la  Sainteté  des  fermens  auprès  de  tous  ceux  qui  ne  font  point 
aveuglez  par  la  partialité:  mais,  le  texte  évident  &  le  vrai  motif  de  la  Loi 
démontrée  ci-deilus  elt  clair  à  tout  le  monde. 

Les  Rois  ne  doivent  avoir  qu'une  langue  &  une  plume,  &  il  riy  a  rien 
qui  brille  plus  que  la  bonne-foi  dans  un  Prince.  ~\  Les  chofes  promifes  & 
dont  on  efl  convenu,  &  qu'on  a  juré.;  û  jamais  elles  doivent  être  obfer- 
vées  ,  certainement  elles  le  doivent  être  religieufement  par  ceux  ,  que 
nous  révérons  comme  autant  de  Dieux  fur  la  Terre.  Il  ri  efl  pas  permis  de 
rendre  fans  effet  ce  qui  procède  de  leurs  lèvres.  Les  Contrats  des  Rois  ne 
font  point  fujets  aux  Difputes  des  Ecoles ,  ils  méprifent  les  Sophifmes  de 
la  Populace,  mais  ils  exigent  une  Obfervation  d'autant  plus  fincére  qu'ils 
font  conformes  à  la  matière  des.  Renonciations  ,  au  droit  des  gens,  aux 
décrets  des  Loix  communes,  &  aux  flatuts  des  facrez  Canons. 

Les  Jurifconfultes  Flamands,  François,  Efpagnols,  &  autres,  rendent 
témoignage  &  enfeignent  tous,  $  que  les  flipulations  qui  fe  font  de  l'héritage 
d'une  perfonne  vivante  ,  particulièrement  à  l'égard  d'un  mariage  effeclué ,  font 
approuvées  par  la  coutume  univerfelle.  §>ue  l'exemple  de  prcfque  tout  le 
monde  efl  pour  les  Renonciations  \  £5?  cela  même  quand  il  riy  aurait  aucun 
ferment ,  ni  aucune  coutume  locale ,  nonobflant  la  minorité  ,   mais  par  le  con- 

fente- 

f   L.   S-  c  de    fumma  Trinirate.       $  Voyez  Covaruv. .;    Mean  ;    Ant.  fab  ;    Cornez  ;   Vafqasz ; 
Cancer,   MoJin,  &cc    &ïfa.  tJcs  lieux  rapemez  ici, 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  211 

fentement  de  tout  le  monde,  &  eu  égard  à  l'utilité  publique.  Dans  les  fer-  Affaires 
mens  faits  par  les  héritiers  eft  renfermé  un  con fentement  devant  Dieu  &  une  d'Allk* 


MAGNK. 


faits  par  les  héritiers  eft  renfermé  un  confentement  devant  Dieu  &? 
imprécation  des  Pérès  de  ceux  qui  renoncent ,  qui  eft  d'une   telle,  force  ,    que 
s  ils  y  contreviennent  ,  ils  font  aufji  fujets  à   la  même   vengeance  Divine  que 
les  parjures.     La  SucceJJion  eft  déférée  aux   enfans  ,  par   un   certain  inftincl 
de  nature  ;    mais  non  pas  par  un  droit  de  nature.     Beaucoup  de  chofes  font 
fondées  dans  uue  certaine  raifon  de  nature ,  mais  non  pas  en  forte  qu  elles  ne 
puijfent  être  changées ,  ou  fouffrir  aucune  révocation  ou  dérogation.     Un  droit 
civil  peut  être  aboli  par  un  autre.     Les   Loix  apartiennent  à   la  Société  ci- 
vile ;   6?  elles  font  civiles  ,    mais  elles   font   arbitraires  pour  ceux  en  faveur  Avec  fon- 
dcfquels  elles  ont  été  faites.     Et  par  d'autres  paiïages  de  cette  nature  que   dément 
les  Efpagnols  ont  raporté ,  par  le  pafle,  avec  tant  de  folidité,  contre  les  [,°ute 
François,  qui  les  employoient  avec  tant  d'ignorance  pour  le  cas  dont  il  doiTrt 
s'agilîbit  alors ,  &  dont  il  s'agit  à  prefent.  cueillir  de 

Qu'on  life  les  Livres  imprimez  depuis  trente  ans ,  &  répandus  par  tout  tout  cea 
le  Monde,  &  on  ne  pourra  en  recueillir  autre  chofe,fi-non  que  les  François 
par  leur  inconfiance  ne  font  plus  de  cas,  ni  des  Traittez ,  ni  des  Loix,  ni 
des  Teftamens  des  Anciens ,  dès  qu'ils  trouvent  la  moindre  occafion  de 
profiter  de  quelques  avantages. 

Ce  qui  doit  donner  lieu  à  ceux  duPaïs,  aux  étrangers,  aux  voifins, 
aux  Rois  de  l'Europe ,  aux  Republiques  &  Etats  libres ,  avec  le  Pontife 
Romain  ,  de  prendre  dans  ce  tems-ci,  &  dans  les  circonftances  des  affai- 
res prefentes,  des  mefures  en  faveur  de  la  Maifon  d'Autriche, contre  la 
puiffance  &  l'avidité  de  la  France. 

Les  François  donnent  un  fens  malin  à  la  prudente  &  fage  Conltitution   ce  qu'Eiie 
qui  fe  trouve  dans  le  Droit  Canon  touchant  les  Renonciations  qui  ont  été  doit  {âiic 
jurées  dans  le  Chap.  Quamvis  de  Paclis  in  6.  comme  fi  l'Auteur  de  ladite  p°"S,Ce 
Conltitution,  pouffé  par  convoitife  de  la  gloire, ou  dans  le  dejfein  d'augmen-  deiaFran- 
ter  l'Autorité  Pontificale,  avoit  fait  cette  Decretale  exhorbitante,  &  avoit  ce- 
voulu  par  une  nouvelle  Loi  affermir  le  Pontificat,  qu'il  avoit  occupé  par 
l'adrefle  &  la  tromperie,  f 

La  Paix  des  Pyrénées ,  qui  a  été  fi  prodigue  des  Etats  Efpagnols  en- 
vers les  François,  &  la  fainteté  d'un  ferment  réitéré,  par  lequel  le  fang 
François  a  renoncé  plus  d'une  fois  à  la  Succefîion  d'Efpagne,  fe  plaint 
d'être  maltraittée  &  foulée  aux  pieds  par  un  vain  prétexte  fcholaftique 
de  quelques  minuties. 

LeSucceffeur  du  Pontife  Romain,  qui  avoit  été  prié  dans  le  ContraéT: 
de  Mariage  d'y  donner  fon  Apoftolique  Bénédiction  pour  donner  plus  de 
vigueur  à  la  Renonciation,  doit  reffentir  le  grand  mépris  qu'on  fait  de 
fon  Predeceffeur,  &  du  Siège  Romain. 

On  enfreint  les  Traitez  qui  font  les  principaux  apuis  de  la  fociété  civi- 
le.   On  dénie  la  puifTance  aux  Rois  de  faire  des  Loix,  laquelle  eft  pour- 
tant 

t  Voyez  le  Livre  fous  le  Titre  des  Droits   de   la  Reine  Trcs-Cluc'tienne  fur  le  Brabant  pag.  i». 
Ev'  iuivaures. 

Dd  z 


MASNE. 


212    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  tant  le  nerf  des  Loixdans  les  Conventions.  On  introduit  un  dogme  fcan> 
daleux  de  négliger  la  révérence  due  aux  Teftaments  des  Pérès  &  Mères, 
&  aux  dernières  Volontez  des  Ainez.  Par  où  on  ne  cherche  pas  ce  qui 
regarde  la  tranquillité  publique  de  la  Chrétienté  ,  mais  feulement  ce  qui 
peut  augmenter  la  Puiffance  de  la  France.  Le  chemin  à  la  Monarchie 
Univerfelle  eft  à  préfent  plus  ouvert  au  Roi  de  France  ,  qui  jamais  ne 
s'arrêtera  dans  le  beau  chemin  qu'il  a  commencé,  avec  tant  de  bonheur, 
&  tant  d'adreffe;  fi  tout  le  relie  de  l'Europe,  entamée  par  tant  de  playes 
que  la  France  lui  a  faites,  ne  fe  reveille,  &  n'examine  fans  perte  de  tems 
quels  font  les  efforts  qu'Élle  doit  faire  en  faveur  de  la  Maifon  d'Autri- 
che, pour  empêcher  qu'Elle  ne  foit  fruflrée  defon  ancien  Patrimoine,  & 
qu'ainfi  l'Italie,  la  Grande-Bretagne  ,  le  Portugal,  les  Provinces-Unies, 
avec  le  refte  de  l'Allemagne  ne  foient  dépouillées  de  leurs  chères  libertez, 
de  leur  luftre  ,  &  de  leurs  avantages. 

Nous  déplorons  tous  le  fort  de  l'Efpagne,  qui  a  été  fi  vilainement  fe- 
duite  à  faire  des  làchetez  û  baffes,  de  ce  qu'Elle,  qui  depuis  un  Siècle  a 
combattu  fi  conftamment  &  li  fortement  contre  les  embûches  tendues  à 
fa  liberté  &  contre  les  cruels  deffeins  des  François,  fe  laiffe  entraîner  par 
une  fi  miferable  chute  dans  le  précipice  ,  dans  lequel  elle  perdra  fa  répu- 
tation &  fes  biens,  fi  elle  ne  fe  tourne  par  une  prompte  vigueur  du  côté 
de  la  Maifon  d'Autriche  ,  à  laquelle  Elle  n'a  pu  diminuer  les  droits  ci- 
devant  établis, quoi  qu'EUe  paroiffe  être  fl  facilement  tombée  dans  l'ado- 
ration  prefente  pour  le  Duc  d'Anjou. 

Nous  ne  doutons  nullement  que  le  grand  danger  ,  où  fe  trouvent  les 
Etats  &  le  Commerce  des  autres  Nations ,  ne  les  porte  à  agir  vigoureufe- 
ment  en  faveur  de  la  Juftice  de  la  Maifon  d'Autriche  ,  &  qu'ils  n'entre- 
prennent enfemblede  fe  procurer  le  falut  &  leur  tranquillité. 

On  ne  doute  point  que  le  Pontife  Romain,felon  fa  grande  prudence  n'aper- 
çoive le  peu  d'honneur  que  les  François  ont  pour  le  maintien  des  Traitez 
de  Paix,  des  Contracls  paffez,&  desSermens  }&  de  la  grande  profanation 
qu'ils  font  du  nom  de  Dieu  &  des  Evangiles  en  agiffant  de  la  forte  ;  comr 
bien  leurs  menaces  font  promptes  &  hautaines,  auffi-bien  que  la  force  de 
leurs  armes ,  que  leur  domination  eft  infuportable  &  infolente  dans  les 
Maifons, Cours,  &  Etats  d'autrui,  capables  d'entreprendre  encore  davan- 
tage, lors  qu'ils  auront  abaiffé  avec  ignominie  ces  Efpagnols  qui  leur  ont 
filong-tems  réfifté. 

Nous  connoiffons  &  déplorons  les  fcandales  qui  en  réfulteront ,  nous 
voyons  les  dommages  ,  nous  ne  refufons  pas  la  guerre  ,  nous  pré- 
voyons les  dangers ,  nous  voyons  d'avance  la  perte  prochaine  de  nos 
voifins ,  &  nous  augurons  avec  fondement  des  orages,  dans  des  Etats 
fort  éloignez. 

L'Empereur  Leopold,  qui  eft  toujours  pacifique,  &  qui  aime  l'équité, 
n'eft  ennemi  que  des  Turcs ,  fi  ceux-ci  l'irritent  :  il  eft  le  vengeur  de  la 
dignité  Chrétienne,  &  il  maintient  religieufement  les  Loix  ,  les  Traitez, 
&  les  Sermens.    Mais,  que  fera-t-il  à  préfent,  que  l'on  lui  ravit  le  Patri- 

moi- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC. 


2Ï3 


moine  de  Ton  Trif-Ayeul,  attaché  à  la  Maifon  d'Autriche  par  tant  de  Ti- 
tres ?  &  que  l'on  envahit  fi  hardiment  &  infolemment  les  Fiefs  de  l'Empi- 
re (dont  on  aura  occafion  de  parler  ci-après  en  particulier?)  Les  autres 
PuhTances  de  l'Europe  qui  ont  été  en  particulier  maltraitées  par  les  Fran- 
çois doivent  uni  verfellement  connoitre,  qu'Elles  ne  fçauroientplusfûrement 
&  plus  certainement  trouver  leur  fureté  &  leur  repos,  que  dans  rabailTe- 
ment  de  la  France ,  &  en  lui  opofant  une  forte  digue.  Pour  moi ,  je  m'ar- 
rête ici  5  &  ,  à  i'égard  des  dangers  prochains  qui  les  menacent  &  le  foin  de 
leur  propre  falut  qui  efl  fort  chancelant ,  je  leur  confeille  de  fe  fouvenir 
de  ce  qui  a  été  dit  autrefois,  de  fe  fervir  du  tems  prefent ,  l'heure  s'écou- 
le avec  rapidité,  &  il  nven  revient  jamais  une  qui  foie  auili  bonne  que  la 
première  que  l'on  a  laiffé  échaper. 


Amrwts 
d'Alle- 
magne. 


AFFAIRES    DE    POLOGNE,    DE    SUE- 
DE, DE  DANNEMARC,   ET   DE 
M  O  S  C  O  V  I  E. 


Beclaratio  Senatus  Confilii  Folonici  circa  BeJlum  cum 

Sueciâ;  1700. 

AD1.2.}.  y  6nm.  Quandoquidem  prœfens  Senatus-Confdïum  nequït  abfque 
tôt  a  RepubUcâ  declarare  afjîflentiam  ~Sereni(jimo  Rcgi  Daniœ  ex  vi  fœde- 
ris  cum  RepubUcâ  initi  contra  Sue  cum ,  promittit  Sacra  Regia  Majeflas  defi- 
gnare  Comitia  generalia  Deo  dante  in  menfe  Decembri ,  {$  modo  amicijflmis  Li- 
teris  refpondendum  Régi  Daniœ  Intérim  Literas  expedire  univerfales  ad  Pala- 
tinatus  &  Terras  cum  information  &  expreffione  caufarum  inchoati  belli  cum  Sue- 
€0  in  quibus  Literis  univerfalibus  exprimet  puriflïmam  intentionem  Suam;quod  fi 
Deo  adjuvante  recipiet  Ducatum  Livoniœ ,  Re (public  œ  aggregabit ,  juxta  jura- 
ment  uni  de  recuperandis  avulfis ,  quod  ipfum  fpeciali  Diplomate  cavere  parât  us 
efl.  Intérim  quia  Refpublica  abfque  Comitiis  in  hoc  bellum  non  defeendet ,  noilens 
ejfe  gravis  alio  modo  Refpublicœ  Sacra  Regia  Majeflas*propriis  Stipendiis  &  rfr- 
mis  militabit ,  non  deferet  Regem  Daniœ  :  quod  fi  nccejjitas  urgebit ,  parât  a  erit 
S.  R.  Majeftas  Comitia  Extraor  dinar  ta  duarum  feptimanarum  atque  folemnita- 
tibus  indicare:Interea  commendat  fupremis  Exercituum  Ducibu^  Regni  &  Ma- 
gni  Ducat ûs  Lithuanïœ  Gêner  alibus  omnem  vigilantiam  circa  mflodiendeï  limi- 
tes Patriœ ,  £5?  quatenus  cum  S.  R.  Majcflaîe  in  omnibus  occafionihus  correfl- 
pondeant  quorum  arbitrio  &  prudentiœ  etiam  Caflrorum  meiatio  relmquitur. 


.Affaires 
de  Po- 
logne 

ET    Db 

StJEDE.- 

Declara- 
tion  du 
Sénat  de 
Pologne 
touchant 
la  Guerre: 
avec  la 
.Suéde- 


Dd  3 


Cour- 


3i4    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


AFFAIRES 

de  Suéde 
et  n  i 


Courte  Relation  de  la  Defcente  faite  par  les  Suédois  en  Zeeîandt 
dans  le  Dannemark;  le  14.  (25?)  Juillet  1700. 


H  AR  G. 


Defcente  T  E  R0ï  de  Suéde,  ayant  réfolu  de  faire  deux  Defcentes  en  Zélande, l'u- 
j"sseunc"  J— *  ne  dans  la  Baye  de  Koge  ,  l'autre  du  côté  d'Elfeneur  ;  &  les  Ami- 
zdeiandt,  raux  Anglois  &  Hollandois  ayant  confenti  de  les  faciliter  avec  leurs  Fre- 
en  juillet  gates  &  Barques  ;  Sa  Majefté  conféra  le  ig.  de  Juillet  au  Lieutenant  Ge- 
neral Baron  de  Rheenshield,  Gouverneur  de  Schonen,  le  Commandement 
&  la  Direction  de  la  Defcente  dans  la  Baye  de  Koge,  &  à  Son  Excellence 
l'Amiral  General  Comte  Wachtmeilter  le  Commandement,  &  au  Major 
General  Stuart  la  Direction  de  celle  près  d'Elfeneur.  Mais,  le  vent  n'é- 
tant pas  favorable  pour  le  tranfport  d'Ufledt,  ce  delfein  fut  changé,  la 
Defcente  dans  la  Baye  de  Koge  abandonnnée,  &  l'on  fe  contenta  d'entre- 
prendre celle  près  d'Elfeneur.  Pour  cet  effet,  l'on  envoya  un  Détache- 
ment de  10.  gros  &  petits  Vaifieaux  de  la  Flote  vers  Landfcroon  ,  & 
l'on  y  affembla  100.  Barques  de  Pécheur  pour  le  tranfport  de  la  Milice  & 
autres  chofes  nécelfaires.  Le  22.  l'Embarquement  ne  put  fe  faire,  à  cau- 
fe  de  la  tempête,  &  fût  différé  jufques  au  lendemain.  Le  24.  Sa  Ma- 
jefté fit  voile  de  Landscroon  avec  fes  Troupes  ;  &  un  autre  Détache- 
ment de  la  Flote, commandé  par  le  Baron  Anharitiern,  qui  devoit  foûte- 
nir  la  Defcente,  fit  voile  de  devant  Coppenhague,  &  joignit  les  Vaif- 
féaux  de  tranfport  fous  l'Ifle  de  Ween  avec  un  vent  favorable  de  Sud- 
Ouelt,  lequel,  s'il  n'avoit  pas  changé,  auroit  fait  réuffir  la  Defcente  dès 
le  même  foir.  Pendant  toute  la  nuit,  le  tranfport  fe  tint  à  l'ancre  ,  &  le 
jour  fuivant  25.  fit  route  vers  le  rivage  de  Zélande,  où  l'on  vit  dans  tou- 
tes les  places  propres  à  mettre  pied  à  terre,  &  particulièrement  à  Brick- 
hidn  &  Runflegebroog  ,  des  Retrenchements,  des  Bateries,  &  beau- 
coup de  monde  >  ce  qui  fit  que  le  Major  General  Stuart  examina  d'a- 
bord toutes  les  places  le  long  de  la  Côte  auffi  fécretement  qu'il  fut  pof- 
fible;  &, ayant  fait  choix  de  l'endroit  où  fe  fit  par  après  la  Defcente,  fa- 
voir  près  du  moulin  à  vent,  environ  à  4  miles  AngJoifes  au  Sud  d'El- 
feneur, fitué  entre  Voogerup  &  Taberup,  il  fit  examiner  toutes  les  au- 
tres places  ouvertement ,  &  donna  ordre  aux  Pilotes  de  fonder  les  pro- 
fondeurs près  du  rivage.  Par  ce  moyen,  les  Danois  furent  féduits,  reti- 
rèrent leurs  Troupes  du  véritable  endroit  où  devoit  fe  faire  le  Débarque- 
ment, &  y  laifierent  le  champ  libre.  Les  Danois ,  attentifs  au  danger  où 
ils  fe  trou  voient,  avoient  envoyé  12  de  leurs  moindres  Frégates  aux  bords 
du  rivage  de  Zélande,  pour  y  ruiner  les  Navires  de  Tranfport  ,  ce  qui 
obligea  les  Frégates  qui  dévoient  foùtenir  la  Defcente  de  fe  ranger  en  or. 
dre;  mais  l'Efcadre  Angloife,qui  étoit  reliée  devant  Coppenhague,  char- 
gea ces  Frégates  de  manière  qu'elles  refolurent  bientôt  de  fe  retirer.  Cet- 
te alarme  étant  paflee,  &  toute  la  Flote  rangée  devant  Ounftigekroog,l'on 

crût 


ET     D* 

)  A  NN1 
MiUC. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  ny 

crût  que  la  Defcente  devoit  s'y  faire;  &  toutes  les  Troupes  Dano/fes,    Aïfairks 
qui  confiftoient  en  trois  Efquadrons  &  grand  nombre  d'Infanterie,   qu'on    I,tSurD-E 
ne  put  pas  compter,  parce  qu'elle  étoit  rangée  derrière  leurs  retranchemens,    datn£*. 
des  hauteurs  &  dans  les  bois,  s'y  rendirent.   Ce  qui  ayant  été   obfervé, 
tous  les  gros  bàtimens,  huit  en  nombre  ,  outre  quatre    Frégates   &  cinq 
VaiiTeaux  à  bombes, fe  rendirent  directement  aux  moulins  à  vent,  &  les 
Chaloupes  &  Barques  qui  avoient  les  Troupes  à  bord  vinrent  à  bas-bord 
plus  près  du  rivage.  Les  ennemis,  fe  croyant  trompez,  les  fuivirent  ;  mais, 
ils  eurent  un  grand  tour  à  faire  près  de  la  baye  vers  Hywalk,  ce   qui  les 
fit  venir  li  tard,  qu'il  n'y  eut  pas  un  feul  homme  au  véritable  endroit  de 
la  Defcente:  lorfque  les  vaiiTeaux  s'y  furent  rendus,  ils  s'afTemblerent  par 
degrez  derrière  un  retranchement  &  quelques  murailles. 

Les  gros  VaiiTeaux  étant  rangez  pour  foutenir  la  Defcente  ,  on  donna 
le  fignal  par  huit  coups  de  Canon  :  les  Barques  abordèrent ,  &  l'Aile 
droite  fut  mife  en  ordre  par  Sa  Majefté  même  avec  l'Amiral  Général  & 
les  Majors  Généraux  Polie  &  Stuart;  &  la  gauche  par  le  Lieutenant  Gé- 
néral Rheenshield.  Elles  furent  rangées  dans  l'ordre  de  Bataille  que  le 
Major  Général  Stuart  avoit  formé  par  ordre  de  Sa  Majellé,  &  on  leur 
montra  les  endroits  qu'elles  dévoient  attaquer  fuivant  les  découvertes  qui 
en  avoient  été  faites,  de  la  manière  fuivante.  Le  premier  Bataillon  des 
Gardes, commandé  par  le  Lieutenant  Colonel  Palmquiit,  devoit  être  à  la 
droite  de  tout  le  relie,  &  attaquer  la  hauteur  fur  laquelle  étoit  le  moulin 
à  vent;  le  fécond  Bataillon,  fous  le  Major  Numet, devoit  être  à  la  gauche 
des  autres,  &  attaquer  en  flanc  un  retranchement  fur  une  hauteur  pas 
loin  du  rivage; le  troilieme  Bataillon, fous  le  Capitaine  Erhenfteen, étoit  à 
la  droite  à  côté  du  premier,  &  devoit  attaquer  une  hauteur  fur  laquelle 
il  y  avoit  une  maifon;  le  quatrième  Bataillon  étoit  du  Régiment  du  Colo- 
nel Falsberg  de  Malmo  fous  le  Lieutenant  Colonel  Buckwald  :  il  étoit 
à  la  gauche  près  du  fécond  Bataillon,  &  devoit  attaquer  une  autre  hau- 
teur. 

Ain  fi ,  la  première  Defcente  fe  fit  par  quatre  Bataillons  ,  dont  chacun, 
étoit  placé  de  manière,  que  les  Grenadiers  entrèrent  les  premiers  dans  les 
plus  petites  Barques,  fuivis  des  Chevaux  de  Frife  menez  par  des  Mari- 
niers; après  cela,  fuivoient  plufieurs  Moufquetaires,  &  après  ceux-là  ceux 
qui  dévoient  les. foutenir;  enfuite  le  gros  des  Bataillons  dans  des  Chalou- 
pes où  on  avoit  mis  quelques  pièces  de  Canon,  &  d'autres  Chaloupes  a- 
vec  des  pièces  de  Campagne, qui  furent  placées  aux  ailes  des  Bataillons, 
Enfin,  plufieurs  Chaloupes  avec  des  Fafcines,  pèles,  bêches, &  autres  pa- 
reilles chofes.  Tout  ayant  été  difpofé  dans  cet  ordre  ,  on  donna  le  li- 
gnai pour  l'attaque  par  un  Pavillon  rouge  guindé  fur  le  VaiiTeau  de  l'A- 
miral. 

L'Ennemi  avoit  pendant  ce  tems-là  eu  le  loifir  d'approcher  &  de  former 
les  lignes:  &,  lorfque  nous  nous  rangeâmes,  ils  nous  faluerent  plufieurs 
fois,  tant  de  leur  canon ,  que  de  leur  Moufquetterie  ;  mais,  ils  furent  il  chau- 
dement regakzdes  VaiiTeaux,  que  leur  Cavalierie,  auffi  bien  que  l'Infan- 
terie 


NEMARC. 


116    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AmiREi  terie  furent  obligées  de  fe  mettre  h  couvert;  &,  lorsque  la  Cavallerie  étoît 
m  Sukdk  quelques  fois  dans  la  nécefiité  de  fe  découvrir  en  paiïànt  d'un  endroit  à  un 
*™^A"  autre ,  elle  fut  conduite  par  tant  de  coups  de  canon ,  qu'on  avoit  de  la  pei- 
11-  ne  à  la  voir  à  travers  la  pouffiere  &  la  terre  qui  l'environnoient.  Le  Ma- 
jor Numet  fortit  le  premier  des  Chaloupes  avec  fon Bataillon;  mais, avant 
qu'il  eut  mis  pied  à  terre ,  il  fut  obligé  de  charger  la  Cavallerie  Ennemie 
qui  vint  fur  lui  au  rivage:  elle  auroit  refiflé  longtems,  fi  les  Grenadiers 
ne  l'enflent  pas  chargée  fi  bravement,  qu'elle  fut  contrainte  de  fe  retirer 
fur  la  hauteur  derrière  fes  Retranchemens  ;  mais ,  encore  fut-elle  fuivie  par 
les  Grenadiers,  qui  forcèrent  ces  Retranchemens  dans  le  flanc,  &  firent 
reculer  la  Cavallerie  ,  laquelle  pourtant  fe  rallia  &  revint  à  la  charge  ; 
mais  ceux  qui  dévoient  féconder  les  Grenadiers  fe  joignirent  à  eux  dans 
ce  tems-là,  &  mirent  la  Cavallerie  une  féconde  fois  en  fuite.  Le  Bataillon 
entier,  ayant  gagné  terre,  marcha  d'une  vitefîe  furprenante,  fe  forma  & 
prit  les  polies  qui  lui  avoient  été  afTignez.  Les  autres  Bataillons  dépen- 
dirent à  terre  par  degrez  ;  & ,  quoique  l'Ennemi  fit  feu  des  fes  Retran- 
chemens, tant  du  Canon  que  de  la  Moufquetterie,  aucun  d'eux  ne  man- 
qua de  prendre  fon  polie,  mais  chacun  gagna  fa  hauteur  refpective ,  & 
après  avoir  repoufle  l'Ennemi  y  prit  fon  polte,  &  s'avança  enfuite  fi  loin 
qu'on  eut  pu  former  un  Camp  pour  huit  Bataillons  derrière  eux.  Si  tôt 
que  les  Chaloupes  furent  vuidées,  elles  furent  renvoyées  aux  Vaifleaux 
de  guerre,  &  elles  y  prirent  le  Régiment  de  Montagnards  commandé  par 
le  Colonel  Levé,  &  celui  de  Colmar  fous  le  Colonel  Diurklo  ,  lefquels 
prirent  terre  dans  le  même  endroit  où  avoient  defcendu  les  quatre  Batail- 
lons, &  de-là  marchèrent,  &  fe  polterent  furies  hauteurs.  Aufli-tôt  après 
on  commença  à  faire  les  Retranchemens,  &  le  Camp  elt  déjà  fi  bien  aflu- 
ré,  qu'on  a  donné  allez  de  tems  pour  attendre  l'arrivée  de  la  Cavallerie, 
laquelle  fe  débarque  actuellement.  De  notre  côté, nous  avons  très-peu  de 
morts  ou  de  blelTez.  Le  Major  General  Stuart  eft  le  feul  Officier  blefle  ; 
il  reçût  un  coup  à  la  cuifTe  gauche,  mais  la  baie  rencontrant  quelque  cho- 
fe  dans  fa  poche,  ne  fit  qu'une  grande  contufion  à  fa  jambe.  Il  reçût 
ce  coups  lors  qu'il  mena  fo  Hommes  du  Régiment  des  Montagnards  du 
Colonel  Levé,  pour  renverfer  un  des  Retranchemens  des  Ennemis,  dont 
cinquante  &  un  furent  tuez,  &  cinq  bleffez.  Dans  cette  Defcente  aucun 
n'a  eu  plus  d'occafion  de  donner  des  preuves  de  fon  courage ,  que  le  Bataillon 
du  Major  Numet,  fur-tour  fes  Grenadiers:  &  généralement  tous,  tant  les 
Officiers  que  les  Soldats,  fe  font  comportez  très  bravement.  On  ne  don- 
neras ici  le  détail  des  bravoures  des  Troupes,  parce  qu'on  ne  trouveroit 
point  d'exprelïion  allez  forte  pour  repréfenter  le  Courage  héroïque  de  Sa 
Majelté  feule ,  non  feulement  à  furmonter  tant  de  difficultez,  de  vents 
contraires,  de  courants,  &  autres  obttacles  ,  mais  en  rengeant&  animant 
fes  Troupes  avec  la  conduite  d'un  Général  confommé ,  &  enfin  la  valeur 
incomparable  qu'Elle  a  montrée  en  menant  Elle-même  le  premier  Batail- 
lon de  l'Aile  droite,  ce  que  le  Roi  auroit  fait  également  s'il  s'étoit  trou- 
vé à  l'Aile  gauche  où  le  choc  ctoit  le  plus  fort. 

DIS- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC. 


217 


K  T  DR 

Mosco- 

VI  E, 


Difaiffio  Criminationum ,  quitus  ufus  eft  Mojcorum  Czarus ,  cum  An*™™ 
bello  Suecis ,   contra  jusjurandum  ,  &  nuperrimê  datam  fi- 
dem,  iïtot°  prœtexlum  quœreret.  Juxta  Exemptai*  Holmiœ> 
Literis  B.  Nicolai  Wankifwy  J.  H.  Werner.  F.  M.  DCC  (*). 

Cicero  de  Legibus  : 
Pcena  âbvina  Perjurii  ,  Exitium;  humana  ,  Dedecus  eft. 
Belizarius  apud  Procopium  : 

Turpe  eft  cum  aîiis  omnibus  ^quibus  velminima  virtus  eft  cordi> 
îum  Principi  vho  ,  mentir i  ac  fidem  f aller  e  ;  jusjurandum 
autem,  &  pacla  etiam  Jcripto  Jancita  >  violare^ne  abjetlif- 
fimo  quidem  homini  décorum  ejje  arbitror. 

NON  Mis,  qui  rerum  fuperiori  memoriâ  geflarum  aliquam  habent  no-  ManifeG 
titiam,  novi  quidquam,  aut  inopinati  hodie  obveniet  ,  cum  audi-  te  des 
verint  Mofcos  nulla  injuria  laceiïitos ,  infidiofum  Suecis  bellum  intulifle,  c^tr°eIS 
inque  eo  faevitiam  tantam ,  quantam  nulla  in  barbariâ  quisquam  adhibuiile  iesMo£ 
legitur  ,  in  tefta  hominesque  effudifTe  :  magis  fortaffe  mirum  videbitur,  covites. 
fuifle  Suecos  iftâ  animi  fidentià,  ut  quorum  fraudibus  tories  decepti  fuif- 
fent,  eos  aut  innocentiâfuâ,aut  paélorum  fan£titate , a confueta  libidine  re- 
vocari  pofle  crediderint.  Tôt  enim  ab  eo  tempore  ,  quo  ,  fubjugatis  fi- 
nitimis  populis,  ad  Sueciae  viciniam  dominatum  fuum  protulerant,  incon- 
flantise  documenta  dederunt,  ut  caufam  non  haberent  Sueci  multum  fidu- 
cia:  in  eorum  amicitiâ  collocandi.  Nam  poftquam  interjetas  regiones, 
seftuantis  inftar  Oceani,  abforpferant ,  cum  ifti  hic  impetum  fuum  fenfiC- 
fent,  &  quafi  aggere  coerceri ,  ne  immenfa  ferarum  gentium  eluvione 
continguas  Septentrionis  partes  inundarent;  quo  in  majorem  virtutem  in- 
ciderant,  eô  vehementius  exariifTe  deprehenii  funt,  &  implacabile  adeo 
in  Suecos  odium  concephTe,  ut  nocendi  Mis  occaflonem  praetermiferint 
nullam,  &,  quos  armis  diffiderent,  eorum  fortunam  dolis  fubruere  fem- 
per  laboraverint.  Quamvis  autem  fortiffimè  repreiîi,  tôt  fuorum  ftrages, 
quot  cum  Suecis  confliclus ,  numerare  potuerint  ;  &  proinde  non  cupide 
minus  paeem  redintegraverint,  quam  eandem  paulo  ante  temerè  infrege- 
rant  :  ut  primùm  tamen  occafio  invitavit,  quafi  abolità  veterum  cladium 
memoriâ,  Suecos  aliis  bellis  occupatos  a  tergo  invadere,  aut,  fi  major 
horum  fortuna  videretur ,  quàm  ut  palam  adoriri  eos  fuflinerent,  oftenta- 
tis  ad  limitem  armatis  legionibus  ,  progreiTus  eorum  inhibere  nunqùam 
defierant.  Equidem  haec  levitas  monere  Suecos  debuerat ,  ne  folennibus 
paclis ,  quae  toties  conculcata  viderant ,  fuse  putarent  fecuritati  fatis  elle 
confultum  :  verum  hi  virtute  fuâ  confidentes ,  maluerunt ,  fœdera  inte- 
gerrimè  fervando ,  Mofcis  omnem  fimultatis  anfam  adimere  ,  quam  mi- 
nimam  difridentiae  fufcpicionem  prsebere  ,  atque  adeo  benevolentiâ  &  hu- 

mani- 

(*)  Cette  Pièce  n'ejl  qu'indiquée  dans  h  Tome  /,  pag.  183. 

Tome  XL  Ee 


2i8     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Afïairks    manitate  mitigare  eos ,  cum  quibus  colluclari  inglorium  exiftimaverunt.. 

de  Suéde    j^on  paLlcis  eiiam  perfuafum  erat,  Czarum  ,  qui  hodie  imperat,  inftitutà 

Mosco-    Per  celebriora  Europae  régna  peregrinatione ,  abolevifle  nonnihil  veteres 
VIE.      mores;  non  immérité  ad  civilis  vitse  rationem  tanto  propius   acceffiffe 

creditus  ,  quanto  cupidius  exterorum  commercia  vifus  erat  appetere.   At- 

que  idem  cum  Suecis  non  tantum  vetera  pacla  renovaverat ,  fed  etiam 
ingens  ubique  prsc  fe  tulerat  defiderium  cum  illis  conftanter  amiciciam  co- 
lendi.  Quod  ambitiofis  verbis ,  quà  publiée ,  quà  privatim  ,  teflatus  eft. 
Verùm  quàm  longé  omnium  opinionem  fefelliflet,  eventus  nuper  docuic, 
cum  immemor  fidei  &  jurisjurandi,  immanium  agminum  mole  in  Suecia& 
fines  infusa,  Narvam  prius  arélà  obfidione  cingeret,  quàm  quisquam  ad- 
fore  hoftem  fufpicaretur.  Quàm  verô  horrenda  &  varia  in  omnis  fexûs 
&  sctatis  mortales  fsevitiae  gênera  ediderac  ,  fi  commemoratur,  licet  illa 
nemini  non,  qui  communem  hominum  naiuram  reputabit,  magnum  & 
acerbum  dolorem  commoverent:  prœftiterit  tamen  illa  filentio  involvere, 
quàm  mites  Chriftianorum  aures  tam  focdis  exemplis  imbuere,  quce  ipfius 
humanitatis  excidium  docere  poffent. 

Quapropter ,  ut.  Orbi  Chrifliano  mànifefîetur ,  quàm  nefariis  artibus  ad 
circumveniendos  Suecos  jam  ufus  fit  Mofcus,  &  quàm  nihil  penfi  habue- 
rit,  fœdera,  promilTa,  jusjurandum,  &  quicquid  fanéfci  inter  gentes    efle 
débet,  profanare,  &  fuae  poftponere  Iibidini;  feriem  totius  rei  explicare, 
atque  ante  oculos  expofitam  intueri ,  necefle  eft.     Perpetuum  erat   inter 
ûtrumque  regnum  Fœdus,  quod  cum  Aiexius,  Mofcorum  Czarus,  parens 
hujus  qui  rerum  hodie  potitur,    anno    M  D  CL  VI,   rupiffet;    pax   ite- 
rurn,  anno  MDCLXI.  in  pago  Cardifiae  convenerat  iis  conditionibus  , 
ut  vetera  pacla  farta  teclaque  manerent ,    nec  propterea  refcindenda  ,  li- 
res aliquae  in  controverfiam  poftmodo   venirent  (  A  ).  Has    enim  prcefec- 
ti  provinciarum,  prope  Iimitem  regni,  more  veteri  cognofcerentr    atque 
dijudicarent  :  aut  fi  majoris  hx  moment!  viderentur,  quàm   ut  ab  iis  diri- 
mi  poffent,  mifli  ab  utroque  Principe  ad  Iimitem  Legati,  fine  cunclatione 
eontroverlias  omnes  tollerent  atque  fèdarent.     Hanc  pacem  Petrus  Ale- 
xides,  cum  imperium  naçtus  effet,   anno  MÛCLXXXIV,    verbis   m 
fancfci  Evangelia  conceptis,  &  ofculo  facrae  crucis,   quod  religiofiiTimum 
Mofcis  jus,urandum  eft ,  confirmavit;  &  fuperiori  anno,  cum  ex   legibus 
fœderis.  fuos  in  Mofcoviam  Legatos  Sacra  Regia  Majeftas  Sueeke  miliffet, 
folennibus  verbis  renovavit  (B):  non   alio  ,  ut  videtur  ,   fine,    nifi  ut, 
eum   pacem  bis   fancliiïimis  ceremoniis  firmatam  violaffet ,   geminato  & 
jam'  fiagitio  fe  obftringeret.     Sed  quafi  metueret,  non  fatis  fuiiTe  ad  fal- 
lendos  Suecos  reiigione  fœderum  abuti;  quo  magis  horum  animos  a  meta, 
iniidiarum  averteret ,  nuilas  non  blanditias  artefque  ,  quibus  fubdolis  men- 
tes valent  ,  adhibere  non  dubitavit.     Proinde  praeterita  reftate  Gilcovium 
è  primarià  nobiîitate  ifî  Sueciam  mifit,  qui  magnos  Legatos  brevi  adfuturos 
indicaret,  fi'dem  a  S.  R.  Majeilate  pro.  corrfirmando  fœdere  accepturos  :  fa 
verô,  dum  ifti  fe  itineri  accingerent  ,  prcemilïum  ,    ut  Regem   de  Czari. 
benevoJentiâ  conftantique  amickiâ  certiorem  f*:eret ,  &  auiam  Suecicam 

urdi- 


V  1  E. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC/  n9 

narius  pofthac  maneret  (C).  Cum  aftutus  Princeps  ne  fie  quidem  con-  Affairk» 
lîlia  fua  fatis  occultari  putaflet,  atque  ad  Suecorum  aures  emanafTe  ali-  de  Suéde 
quid  percepiifet  ,  quod  impedimento  fuis  effet  moiitionibus,  miniflrum  AT  DS 
Sueeicum,  qui  Mofcuae  degebat,  domi  fuae  iponte  convenit ,  omnique 
afieveratione  ei  affirmât,  fe  amicitiam  cum  S.  R.  Majeitate  Sueciœ  illiba- 
tam  confervaturum:  blandis  etiam  verbis  increpans ,  quod  majorem  fuis 
promillis  fidem  non  haberet,  quàm  ut  crederet  fe ,  violato  fœdere,  teme- 
rarium  fufeepturum  efle  bellum  (D).  Parera  illius  in  Suecos  benevolen- 
tiam  Artemonides,Legatas  Mofcicus,  Hagse-comitum  non  unâ  vice  de- 
claravit:  qui  cum  in  coiloquium  illultris  viri  Lillienrotii ,  qui  apud  Batavos 
Legitionem  obibat,  veniflet,  infidelitatis  fufpicionem  magno  cum  dolora 
fuitmere  vifus  efl.  Czarum  aiebat  rumufeulis  ,qui  de  hoftili  ejus  in  Sue- 
cos animo  percrebuiflent,  vehementer  efle  commotum  j  atque  agnofeere 
hic  artes  malevolorum ,  qui,  perveria  Suecis  opinione  injecta  ,  frigidam 
fuffundere  laborant:  illum  autem  in  veteri  amicitiâ  firmiter  perfiftere,  & 
pro  calumniâ  habere ,  quicquid  alii  fuae  adverfum  intentioni  finxerint.  Va- 
fer  idem  ac  verfipellis  homo  Legatum  Sueeicum  rogare  cœpit,  atque  ob- 
teitari ,  ne  dubitaret  in  poilerum  fibi  aperire,  fi  rumores  ejufmodi,  quibus 
Czari  nomen  &  exiitimatio  lasderetur ,  exciperet,  quo  condignis  ftatim 
modis  illos  coarguere  poÛet,  &  Principem  fuum  de  iisdem  certiorem  fa- 
cere.  Notabile  prorfus  malitiae  verfutiloquae  exemplum!  fed  quod  tamen 
ab  iis,  qux  fubjecerat,  illultrius  fîet  :  Czarum  enim  Principem  ejfe  Chrifiia- 
num ,  qui  in  folio  rejideret ,  fplendore  atque  opibus  nulli  totius  orbis  fecundo  :  il- 
lum in  tanto  faftigio  pojitum ,  nihïl  committere  velle  ,  quamobrem  non  tantum 
ijlâ  fort  unâ  minus  exifiimaretur  dignus,  fed  etiam  divina?n  fimul  vindiclam, 
quje  injujla  bella  comitari  folet ,  in  fe  provocaret.  Avcrfari  omne  indecorum 
facinus ,  qmd  prœfens  &  futur  a  œtas  ipfi  exprobrare  pojfet.  §)uod  certe  tune  fu- 
turum  nouent ,  fi  amico  Régi ,  £5?  nulli  us  injuria  comperto ,  bellum  non  neceffa* 
ritim  inferret.  Proindc  in  animant  induxij/è ,  cum  Rege  Sueciœ  jœdera  conftan- 
ter  fer v are ,  ut  tutus  orbis  intelligat ,  illum  fidei  &  promifforum  ejje  obfevvantif- 
fimum  (E).  Digna  profeéto  Chriitiano  Principe  Sententia  !  tantô  majo- 
rem Czaro  Mofcoviae  gloriam  conciliatura ,  fi  in  iilâ  permaniïfTet,  quan- 
ta graviorem  fua  levitas  inufîit  maculam,  cum  Suecis  etiam  fuo  judicio 
innocentibus  bellum  faceret.  Sed  ut  facinus ,  quod  in  Suecos  parari  no- 
verat,  perhorrefeere  forte  fe  fimulabat;  ita  triftem  hujus  facinons  exitum. 
animo  verè  prœfagiebat,  clademque  ,  quae  mox  infecuta  eft ,  juità  Dei 
ultione  immifiam  efle,  fua  ipllus  confeflio  ne  jam  tum   comprobabat. 

Cum  verô  de  tam  propenfà  in  pacem  voluntate  fe  ja&aret  Mo  feu  s ,  at- 
que eandem  animi  firmitudinem  ubique  teitificaretur  }  non  mirum  cuï- 
quam  videri  poterat,  fi  non  omnem  diétis  fidem  quis  cenfuiffet  efle  dero- 
gandam.  Nam  &  injuriofum  videbatur  ,  repetitis  toties  affeverationibus 
non  accedere  ,  atque  odiolis  adfpergere  illum  fufpicionibus,  qui  eas  tanto 
itudio  à  fe  propulfare  quaerebat.  Tum  Sua  Regia  Majeflas  Suecbe ,  ex 
fuâ  animi  magnitudine  Czarum  reputans  ,  acgrè  fibi  perfuadere  potuic, 
tantum  in  Principem  cadere  potuifle  fiagitium,  ut  tam  apertè  ludificari 

Ee  2  vellet. 


ET    DE 

kloSCI 

VIE. 


220     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

âifaires    vellet.     QuodfiDeum,  pollatae  fidei  vindicem,  minus  metueret  ;  famam 
df.Suede    tamen  &  hominum  judicia,  quae  apud  malos  pleramque  plus  valere  foient, 
Mo sco-    nonnmil  formidaret.     Acceffit  his  fumma  ex  parte  Sua?  Regise  Majeitatis 
innocentia,  qnaz  non  parum  hanc  augebat  fiduciam.    Nam  eu  m  nullius  in- 
jurias, quâ  lasfus  fuiffet  Mofcus ,  fibi  confeia.  effet,  &  offenfiunculam,  fi 
quam  fortafiis  Riga:  acceperat,  omni  diligentià  tôlière  fatageret,  non  exi- 
ftimabat  fœdus  eodem  anno ,  quo  renovatum  erat,  tam  facile  ruptum  iri. 
Quibas  omnibus  fa6lum  eit,  ut  fines  Sueciae  ,  quà  latiflîmè  Mofcoviam 
contingunt  ,  ineuftoditi  ferè  &  nudi  relinquerentur  ,   abduftis  legionibus 
verfus  Livoniam,  quam,  non  minori  vi  quam  perfidiâ ,  Rex  Polonorum 
tune  incurfabat;  altero  etiam  exercitu  extra  regnum  conltituto,  qui  Cim- 
brico  diffidio  tollendo  operam  impenderet.     Quae:  argumento  elle  poffunt, 
quantum  Czari  conftantiae  tribuiffet  Sua  Regia  Majeltas:  quœ  cum  ab  ami- 
cis  quoque  moneretur,  inQdias  ab  illo  comparari,  generofo  animo  malue- 
rat  îllius  experiri,  quam  temerè  damnare  fidem,  in  qua  adltruenda  tam 
anxium  fuiffe  eum  haétenns  compererat.     Verùm  ille  commodum   adve- 
niffe  tempus  ratus,  lethale  vulnus  Saecise  infligendi,  antequam  ex  difikis 
procul  regionibus  ,  mari  prrefertim  procellofo  ,  copise  trajicerentur ,  diu 
meditatum  cogitatumque  facinus  exfequi  ftatuerat.     Qaod  verô  incertas 
adhac  belli  Tarcici  exitas  folicitam  haberet ,  in  eo  credebat  cardinem  to- 
tius  rei  verti,  fi  Saecos  potaiflet,  fpecie  amicitiae  deceptos,  in  fecarita- 
tem  indacere^  Regem  aatem  Poloniae,  faclâ  fpe  céleris  aaxilii,  in  caepto 
infeliciter  bello  detinere.     Itaqae  eodem  tempore  deprehenfas  eft  mifee- 
re  cum  hoc  confilia,  qao  Saecoram  animis  adrepere,  blandiri  &  exqni- 
fitiilima  verboram  lenocinia  admovere  faltinuit.     Exceptae   enim  literse 
(F)   totam    feenam   detegunt ,    arguuntque  Czarum,  non  caufis  nuper 
confiétis  motum  ,  in  bellum  hoc  prorupiffe  ,    fed  illud  dudum  cum  ani- 
mo fuo  ftatntam  habaiffe.     Qaod  ficut  ab  eventu  alterias   belli  diftale- 
rat  ;   ita  poftquam   habendae   cam  Tarca  pacis  certa  fpes  affalfit  ,    qaâ 
volantate  in   Saecos  faiffet  ,    non  obfcarè  indicavit.     Tanc  enim  con- 
ftantem  benignamqae  perfonam ,   qaam  metas  Tarcici  belli  ha&enas  ei 
împofuit ,  occafio  &  fua  natura  decraxit.     Sed  ne  videretur  ex  ancipiti 
temporum  mutatione  pependiffe,  paalo  ante  quàm  pacificatio  haec  vul- 
gabatur ,  minutas  quasdam  &   infipidas   querelas,  contra  luculentas  pac- 
torum  leges  ,  contraque  veterem  confuetudinem ,  non  ad  Suecos  ,  qao- 
ram  intererat  eas  noviffe,  fed  ad  Ordines  fœderati  Belgii  déferre  volait, 
Quamquam  has  querelas  non  eo  animo  motas  dicebat,  at  inde  caafam 
belli  quaereret}  fed  at ,  Belgis  feqaeltribus,  citius  hae  tollerentur.     Ser- 
vaturum  fe   cum  Suecis    amicitiam  :    nec  in  bello    hoc  Livonienfi  cum 
Rege  Polonix  arma  fociaturum  (G).    Haec  apud  fœderatos  Belgas  Le- 
gatus  ejus  jaétabat  :  haec  apud  fereniffimum  Britanniae  Regem  etiam  tune 
profîteri  non  verebatar,  qaum  infefta  prope  fines  Sueciae  caftra  Czarus 
haberet.     Adeo  nullum  tempus  il  1  ï  unquam  vacabat  a  fimulando,  novas- 
qae  fraades  excogitando  :   qaibas  ita  deditas  erat,  at  ne  amicos  qaidem 
îudere  turpe  putaret,  quô  adverfarios  expeditius  falleret. 

Qao 


ET    DR 

Mosco- 

VI  f. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,   M.  DCC.  221 

Quo  pa£to  Mofcus  ad  belium  hoc  progreiTus  fit,  vidimus:  jam  caufas ,  Affaire 
quibus  ad  illud  fufcipiendum  impulfus  fueric,  expendere  operse  pretium  nE  Suéde 
elt.  Quaenam  verô  iftae  iint ,  non  promtum  adeo  eit  affirmare  :  fiqui- 
dem  publicum  aliquod  fcripcum,  quo  jus  ac  neceilitas  hujus  belli  deelara- 
tur ,  Suecis  nondum  innocuit.  Libello  ,  quem  Batavis  Legatus  Mofcicus 
traclidit,  fupra  dictum  efl  aliquas  contineri  querelas ,  fed,  ut  ille  tune  fe- 
rebat,  non  eo  fine  expofitas  ,  ut  praetextum  inde  novorum  motuum  fume- 
ret  Czarus:  quoniam  tamen  idem  Legatus,  cum  illatum  Suecis  belium  in 
Bataviam  paulo  pofl  nunciaret,  has  potiffimum  criminum  loco  objiciebatj 
apparet  juiîifle  Czarum,  ut  ex  iisdem  juflitia  belli  cognofeeretur.  Ex  eo 
igitur  fumma  aceufationis  capita  recenfere  lubet ,  &  ad  fingula  deinceps 
ordine  refpondere  :  quo  œquusLector  incorruptiuspofiît  judicare,  majori- 
ne  perfidià  ,  an  injuftitià  ,  hoc  belium  fit  conflatum.  Primum  autem, 
quod  non  feitivè  minus,  quam  operofè,  contexitur,  crimen  eft  :  Legatos 
Mofcicos  ,  cum  ,  A.  MDCXCV IL  per  Livoniam  iter  inflituerent ,  contra 
paiia  indigne  habit  os  ejfe.  Fines  enim  Suecia  ingreflis  non  jument  a  ad  vecluram 
prafto  fuijje ,  nec  commeatum  neccjjarium  Juppeditatum.  Riga  autem  non  debi- 
bitis  modo  honoribus  caruifje ,  fed  etiam  commodis  hofpitiis  :  arclius  quoque  obfer- 
vatos  fuijje  ,  nec  ulla  re  honoris  caufà  donatos.  Sed  nec  pretio  quidem  pabula 
equis  obtmuijje  :  & ,  quibufeunque  ad  viclum  ipfi  eguijfent ,  carè  nimis  veniijfe. 
Ôjiin  contumeliâ  comités  ejfe  ajfeclos ,  &? ,  cum  urbem  perluflrare  niellent ,  a 
Prafeclo  Rigenfi  afpere  compellatos ,  quafi  explorandi  caufà  munimenta  circumi- 
rent.  Trajecluris  Dunam  vilia  navigia  data,  &  nihilominus  pro  iis ,  quafub- 
miniflrata  erant ,  grande  naulum  exaclum.  ghiœ  injuria ,  cum  in  fe  intolerabi- 
les  effent ,  ex  per  fana  Czari,  qui  in  comitatu  erat ,  graviores  non  immérité  cen- 
feïi.  Cur/orem,  qui  ex  itinere  m  Mofcoviam  retroverti  jujfus  efl ,  Riga  diutius 
detentum  fui/Je,  atque  diiigentius  excujjum  :  equos  denique,  quibus  veclores  Mo- 
feici  uji  [mit ,  vili  pretio  a  mercatoribus  Rigenjibus  co'émptos.  Alterum  efl, 
Procopii  Vofnicinii  ,  qui  e  'Turcica  legatione  in  patriam  revertebatur ,  currum 
pretio  fa  fupelleclile  onuflum  a  rujlicis  Livonis  direptum.  Tertium  ex  Graenii, 
Praefecti  tabellariorum,  culpà  refultat,  quem  in  officio  fuo  non  intégré  ver  fa- 
tum aceufaverat  Finnius ,  Mofcua  codent  munere  fungens  ,  nec  tamen  obtinuerat , 
ut  ab  adminiflratione  iflâ  fummoveretur.  Ullimum  eit,  Mofcicis  mercatoribus 
a  Suecis  nonnullis  pecuniam  deberi  ,  qua  aureorupi  aliquot  millia  confiât  (  H  ). 
Has  offenfe  caufas  ab  initio  Czarus  afferebat  :  neque  alio  praetextu  apud 
prsepotentes  Belgii  fœderati  Ordines,  ut  fupra  monitum  ,  ufus  erat.  Nu- 
per  autem  comperturn  efl  binas  alias  acceiïifTe:  fed  quas  genius  fuus  facile 
prodit  vel  alibi,  vel  in  AulâRegis  Poloniae  Saxonicà,  fbcundâ  calumnia- 
rum  patrià,  conceptas  effe.  Acutiores  enim  videri  volunt:  cum  rudita- 
tem  Mofcicam  priores  iflse  redoleant.  Sed  de  his  poftea  videndum:  nunc 
eodem  ordine,  quo  recitatae  funt,  priores  confideremus,  aequi  &  pruden- 
tis  lecloris  judicio  permifTuri,  an  bellse  iftae  ratiunculse  Czarum  a  perfidie 
&  degeneris  flagitii  crimine  abfolvere  poflint  ,  aut  quidquam  fani  conti- 
neant,  quo  belium  hoc  fiât  excufaùus. 

Ee  5  Ac 


in    MEMOIRES,  NEGOTIATÎONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires        ^c  prjmum  quidem  ,  quôd  Legatos  fuos  parum  honorificè  Rigae  excep- 

DE    d^   tos  e^e  criminacur,  fi  putidam  quis  calummam  appdlaverit,  quae  Mofco- 

Mosco-    rum  infolentiam  &  confuetam  in  fingendo  libidinem  coarguat,  nihil  a  ve- 

vie.       ritite  alienum ,  aut  in  eoruin  mores  iniquum,  quidquam  dixerit.     Tralati- 

" tium  enim  eit,  omnium,  quibus  eu  m  illîs  ufus  aliquis  intercelferat,    fer- 

rnonibus  vulgatum,  fcrupulofiorem  abfurdioremque  in  arrogandis  fibi  im- 
modicis  honoribus  toto  orbe  nationem  non  exftare,  five  txteros  Legatos 
recipiat,  iive  fuos  ipfa  mittat.  Vitae  enim  humanioris  expers  &  ignara, 
omnes  alios  populos  defpicere  tantum  novit  :  &  cum  praeter  fbrdes  ,  quo 
fè  efferat  ,  domi  nihil  habeat;  foris  tamen  tantum  non  adorari  eupit  ,  & 
fallu  intolerabili  vel  exquifkifïîmos  apparatus  infra  dignitatem  fuam  repu- 
tat.  Polfet  id  ipfum  innumeris  exemplis  comfirmari ,  quae  rifum  panter 
&  ftomachum  cultiori  orbi  commoverent,  fi  non  aliorum  laboribus  nota- 
ta  reperirent-ur;  &  verendum  effet,  ne  non  tam  ad  diluendas  has  crimina- 
tïones ,  quam  ad  invidiam  adverfariis  conrlandam,  adducî  illa  exiftimaren- 
tur.  Unum  tamen  inter  Germanos  demonitrare  liceat,  quem  Mofcorum 
mores  nofeendi  cupidis  operae  pretium  fuerit  infpicere  (I).  Quare  cum 
inter  omnes  confiât,  qui  fando  de  iliis  quidquam  acceperunt,  morbo  hoc 
laborare  Mofcorum  ingénia,  non  jam  novum  cuiquam  videretur,  fi  officia 
humanitatis,  quae  Rigae  il  lis  exhibita  funt,  vaniiîimae  eorum  fuperbiee,  & 
inlatiabîli  cupidîtati  minus  fufFeciflent.  Verùm,  quodmireris,  nulia  tune 
querela  audita  eh\  /\deo  pnefikis  fibi  honoribus  mirificè  captos  fe  fere- 
bant,  ut  concinno  apparatu  in  fluporem  ferè  agerentur.  Verùm  Czarus 
partim  malevolorum  inlligaiionibus,  partim  rébus  fecundis  elatior,  cum 
magno  ardore  in  Suecos  iiimularetur,  nec  tamen  in  iliis,  quoad  argue- 
ret,  quidquam  reperiret,  hafee  cavillationes  arripere  voluit.  Quàm  ve- 
ro  famae  fua;  melius  longé  confuluiifet,  fi  affamas  hafee  perpetuo  filentio 
prseteriiffet  !  Neque  enim  decebit  aqui'am  feclari  mufeas  ,  aut  conveniet 
Frincipis  faltigio ,  titulis  tôt  gentium  regionumque  turgidi,  ad  minutulas 
has  calumnias  di'abi.  Quàm  enim  indecorum  eit,  quàm  regio  animo  in- 
dignum,  queri,  nulla  re  Legatos  ab  iis ,  qui  nihil  debebant ,  Rigae  elfe  do- 
natos!  cum  tabernariis  de  pauculorum  obulorum  pretio  rixari:  &  plebe- 
culœ  mercaterum  irafei,  quod  macilentos  aliquot  &  ltrigofos  Mofcorum 
equos,  qui  nulli  ufuierant,  pluribus  numulis  mercari  noluiffent  !  Pude- 
ret  certè,  fi  verae  laudis  guilum  haberet,  inter  caufas  belli  talia  recenfere, 
quae,  etiamfi  vera  elfent,  neque  imprelfam  nomini  fuo  perfidiae  notam  de- 
îebunt,  neque  moto  temere  bello  fpeciofum  faltem  colorem  inducent.  At 
pattis  répugnai,  Legatos  nulla  re  honoratos  elfe.  Equidem  his,  qui  non 
ad  S.  R.  Majelïatem  Sueciœ,  fed  ad  alios  Principes  &Refpublicas  deftina- 
ti  erant,  nihil  debebatur.  Tranfitum  petebant:  conceifus  eft.  Paftis  au- 
tem  nufpiam  exprelfum  invenitur,  quo  apparatu,  quâ  pompa  exciperen- 
tur:  contra  difenis  verbis  cautum  (L),  ne  ituri  ad  exteros,  Legati  quid- 
quam ullo  nomine  exigèrent,  fed  fuo  fumtu  per  provincias  Suecorum  Jter 
lacèrent:  officia  tantum  humanitatis,  quae  amicis  prseftari  folent,  iliis  non 

dene- 


VIE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  225 

denegarentur.     Prrelïita  il  la  abundè  funt.     Miffi  ad  fines  Livoniae  funt  ho-  Affawf» 
norati  nobilefque  viri,qui  Legatos  Rigam  deducerent  :  commeatus  largiter  deSukde 
convenus  erat  :  rhedarii  equi  plures,  quàm  opus  erat,  coacli:  quibus   uti    JJ  DE 
nolebant  Mofci ,    vel  ut  fumtibus  parcerent,  vel  quod  iliis  non  egerent. 
Rigam  accedentibus  obviam  effufi  prxfecli  milkares ,  &  flos  civitatis,  ma- 
gnifico  omnes  cultu,  quantum  opes  illius  urbis  ferebanc.     Prrelîdiarius  mi- 
les honoris  caufâ  in  armis  erat:tympanis,  buccinis,  &  reboantinm  tormen- 
torum  fragore  circumjecla  latè  reibnabant.     Hofpitia  ,  in  fuburbio    iitorali 
aiîignata  i! lis  funt  ampla  &  nkida  ,  quibus  a!ii  Mofcorum  Legati  antea  ufi 
funt.     Quamdiu  ad  urbem  morabantur,    nihil  omiflum  elt,  quod  ad  ani- 
mos  hofpÏLumdemulcendos,  benevolemiamque  teftandam,   facere  crede- 
batur.     Ilonoratiiîimus  quisque  domum  Legatorum  frequentabat:  certatim 
officia  deferebat  :  dona  mktebat.     Cultodia  militum  data  eit,  cjuac  turbam 
fummovreret ,  non   ut  hofpkes  conftringerec.     Q.uod    tantô  minus,    niil 
mens  finiftra  fuiflet,  reprehendi  ab  iis  par  erat,    quod  eundem  Mofcuae 
obfervari  morem  noverint-  atque  hic  fine  offenfa  quemque  comitum  ,    quo 
veiîet,  &  quando,  ambulare  libère  viderint.     Quod  verô  a  demetiendo 
oppido  ,  &  fitu  munimentorum,  vagos  prohibuiflct  illultrifiimus  vir ,    cui 
totius  provincise  &.  urbis  cura  demandata  efl,  officio  lùo  convenire  quàm 
maxime  exiflimabat  ,  neque  juribus  hofpitii,  aut  receptse  apud  omnes  po- 
pulos confuetudini  adverfari,  qui,  ab  advenis  munitiones    limitaneas  cu- 
riofius  perlultrari,  nunquam  aequo  animo  tulerint.     Si  verô  qute  ad  vitam 
necefTaria  erant,  carius   tune  venierint,  non  id  Rigenfium  culpâ.,    ficuE 
criminantur ,  contigit,  fed  graviori  folito   annonà,  qux  provinciam  ferti- 
lem,  &  omnium  rerum  abundantem,  per  aliquot  annos  miferrimè  affîixe- 
lat.     Itaque  Rigae  nihil  acciderat,  quod  ab  amicae  gentis  itudiis  alienum 
effet:  &  continuata  eadem  officia  funt,  quoad  limitera  Curoniag  attige- 
rant.     Nam  &  navigia,  quibus  Dunam  trajicerent,  fummà  cura  conquilita 
funt,  atque  talia,  qualium  iftis  in  locis  copia  habeiï  potuit.     Nova  aedifi- 
care,  aut  aîiunde  arcefTere  ifta  tempeftate  non  licuit.     Pro  illis  autem  non 
alia,  quàm  ex  arbkrio  conduftorum ,  merces  pendebatur.     Quod  ad  Cur- 
forera  attinet,  quem  Rigse  fuifle  detentum  fabulantur,  omnium,   ad  quos 
viaiores  Mofcici  divertere  confueverant,  teflimoniis  confiât,  talem  homi. 
nem,  qualem  in  libello  ifti  fingunt,  in  urbe  neque  vifum  fuiiTe, neque  no- 
men  ejus  auditum.     Nihil  igitur  Mofcis  caufa?  erat  ,  quare  tam  proterve 
falfa  venditarent,  &  fmgularem  Rigenfiufh  humanitatem ,   quam  fummis 
laudibus  tune  ornabant,  nomine  poitea  carperent  criminofo  :  cum  omnia* 
quae  in  eorum  poteftate  erant  ,  &  maximo  itudio  apparaverint  ,  &  luben- 
tifîimis  animis  obtulerint. 

Cum  tantam  benignkatem  funt  experti,  qui,  aliorum  negocîorum  cau- 
fà ,  per  Livoniam  taiitum  ire  perrexerant;  quanta  juitior  caufa  fuerit  ex- 
probrandi  Mofcis  fua-m  in  Legatos  Suecicos,  qui  ad  ipfum  Czarum  nuper 
miiTi  erant.  inhumankatem  <k  infolentiam!  Ex  plurimis ,  quse  indignifLmè 
tune  pafïi  funt,  qusedam  recenfere  placer,  ut  inteliigant  Moici,  illa  verè: 
fibitribui,  quorum,  alios  fulfo  uifimulanc.     Paéta  jubent,  ut  honorirlcè  ad 

limitera 


ET    DE 

Mosr.c 

VIE. 


224    MEMOIRES,  NEGOTIATÏONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  limkem  excipiantur ,  qui  ad  Czarum  ituri  funt ,  Legari.  Miiïus  illis  obviam 
deSuïde  eit  extremse  infulfitatis  homo,  qui  haud  ipfe  receptionis  formulam  recita- 
vit,  five  ingravefcentis  aetatis  infirmitate,  ûve  imperkiâ  Jiterarum,  quae 
in  ifto  viro  fumma  apparebat.  ltaque  per  vilioris  fortis  afleclam,  plané 
indecorè  ,  &  mutilatis  ignominiofè  tituiis  ,  falutatio  pera£la  eft.  Auxic 
contumeliam  Praefeclus  Novogardienfis ,  qui,  ut  argritudinem  Legatis  a- 
criorem  faceret,  urbem  intrantibus  adjungebat  quendam  Iatrociniis  ,  qui- 
bus  fines  Suecicos  paulô  ante  infeftaverat ,  invifum ,  qui  non  decentius , 
quàm  prior,  munus  fuum  obibat.  ldcirco  Legati  ulti  rufticitatem  hominis, 
neque  alloquio  illum  dignabantur,  fed  per  fcribam,  qui  forte  ad  manus 
erat,  refponfum  edebant.  Proficifcentibus  de  induitrià  mora  injecta  eft, 
utiter,  quod  non  multis  diebus  emetiri  potuifTent  ,  vix  duobus  menfibus 
abfolverentj  fubftracto  nunc  commeatu ,  nunc  jumentis,  quae  farcinis  per- 
vehendis  necellaria  erant.  Adverfari  ha?c  luculentis  paclorum  legibus  no- 
verant  Mofci  (M):  fed  jejunis  cavillationibus  tune  quidem  exeufare  fatis 
habuerant.  Cum  Mofcua  haud  proeul  effent,  Léo  Narifcinius ,  Bojarus, 
utappellant,  &  Czari  avunculus,  ad  praedium,  quà  tranfirent  Legati,  oc- 
currens  ,  importuné  poflulabat,  ut  regium  Diploma  fibi  traderent ,  fibi 
defideria  fua  exponerent,  refponfum  fimul  a  fe  accepturi:  caufatus  Cza- 
rum non  brevi  arTuturum;  Legatos,fi  feaudirent,  maturius  domum  re- 
mitti  pofie.  Quam  infolentiam  cum  graviter  redarguerent  Sueci,  indigna- 
ren turque  tam  Jeviter  Jiaberi  exiftimationem  Régis  fui,  qui  ,  pro  confir- 
manda  aeternà  pace ,  ad  Principem  gentis  iftius  hanc  Legationem  deftina- 
verat,  &  proinde  fas  effe,  ut  ipfi ,  non  purpuratorum  alicui,  mandata  fua 
exponerent.  Pudore  quidem  confufus ,  obticuit  :  caeterum ,  quod  apud  Cza- 
rum gratiâ  plurimûm  valebat,  occafionem  nocendi  Legatis  poftea  nullam 
intermifit.  Nam  quamdiu  ejus  reditum  praeftolabantur,  ne  prseberentur 
débita  ex  paclis  lautia,  intercefîit ,  coè'gitque  fuis  fumtibus  vivere ,  qui 
difficulter  tune  domo  adferri  poterant.  Cum  rediiffet  Czarus ,  efFecit  ut 
tardius  in  confpeélum  illius  admitterentur ,  varias  cunftationis  caufas  prae- 
texens,  quùm  conftaret  Czarum  integrum  ferè  menfem  in  urbe  fuifTe,  non 
aliis  occupationibus ,  quàm  privatorum  commiffationibus  diftentum.  In- 
telle clum  autem  eft,  hanc  moram  idée  effe  faclam,  ut  affecti  tsedio  & 
ignominiâ  Legati  a  propofito  defifterent;  &  Mofci  eventum  Turcicae  paci- 
fications fpecularentur:  quae  fi  votis  refpondiffet,  non  facra  dignitas,  non 
jus  gentium,Legatos  protexiffefJ,  quin  iàeviffima  quacque  paterentur.  Quid 
animo  volutabant  Mofci  fatis  elucebat,  cum  maiignè  omnia,  quae  pa£ta 
exigebant,  praeftarent;  &  hofpitium  legatis  attribuèrent  vile  fordidumque, 
quod  clathris  ferreis,  &  tenebricofis  conclavium  fomicibus,  horrorem  te- 
terrimi  carcçris  verius  referebat,quàm  domum  Legatis  tanti  Régis  dignam. 
Cum  demonftrarent  haec  non  convenire  fœderi,  &  mutuae  amicitiae  ,  quae 
cum  S.  R.  Majeftate  Czaro  intercedebat ,  vanis  &  illuforiis,  &  interdum 
minacibus  quoque  verbis  excepti  funt.  Literae,  quas  in  Sueciam  perfe- 
rendas  publicis  tabellariis  tradiderant ,  refignatae  funt,  &  iajpius  intercep- 
ta: comités  nonnulli,  quum  adiretur  Czarus ,  exclufi,  &  acerbius  habiti. 

Sed 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  us 

Sed  omnes  indignitates,  quas  Mofcuas  pertulerant,  fuperat  injuria  tune  AffAirèé 
illata,  cum  Rankius,  P'rsfeétus  aulae  Legatorum  ,  in  privato  fympofio  dkSuems 
miniftrum  Brandeburgicum  vuInerafTet.  Quamvis  enim  Legati  ,  ut  pri-  "  ni 
mùm  illis  hocinnotuit,  Czaro  fignificarent,  infelicem  hune  fugâ  evafiife,  Mosco- 
&  fimul  peterent,  ut  repertus  illis  traderetur,  cautione  oblatâ,  fe  in  eufc  VIK' 
todiâ  illum  habituros ,  donec  laefo  fatisfieret  :  nihilominus  centuriis  aliquot 
militum  obfeffa  eil  Legatorum  domus,  tamque  arclè  obfervata,  ut  neque 
Legati  exire,  neque  admittere  quenquam  fuorum  poffent,  ufque  dum  extra 
urbem  profugus  inveniretur.  ïîuicigitur  ltatim  injeclae  manus:  collum, 
pedes,  manufque  catenis  onerant,impofitumque  ruitico  vehiculo  ad  unum 
ab  urbe  lapidem  apportant,  quo  loco  Czarus  ih  reorum  fuppliciis  pafeere 
oculos  confuevit}  prohibitis  omnibus  iflo  in  fqualore  jacentem  invifere, 
aut  ulîâ  re  allevare  :  ubi  famé  ac  diuturnà  iJluvie,  cum  ne  Jinteas  quidem 
vefles  mutare  permiflum  erat ,  morbum  contraxit,  ex  quo  poflea  deceffit. 
Equidem,  qui  tune  aderant,  alii  exterorum  Principum  Legati,  cum  mi- 
feriis  hujus  adducli,  tum  fuam  vicem  reputantes,  fi  libido  forte  Mofcum 
fubiret,  Czarum  adeunt,  communemque  injuriamexpoftulant:  verùm  im- 
mitem  animum  fieclere  nequeunt.  Sed  nec  tacita  relinquenda  efl  injuria, 
quâ  Legatos  S.  R.  Majeftatis  laeferat ,  cum  intereffet  convivio  ,  quod 
apud  Miniflrum  Suecicum  inflitutum  erat.  Cum  rhedam ,  qua  Legato- 
rum unus  domum  veheretur ,  famulus  interpretis  Sueci  adduceret  ,  & 
propter  turbam ,  quae  anguflias  occupaverat,  aditum  aegrè  mcîiretur,  al- 
tercatio  inter  fervos  orta  efl  :  quse  ab  affentatore  quodam  delata ,  Czari. 
animum  adeo  efferavit ,  ut  non  reverentiâ  hofpitalis  menfae  ,  nec  con- 
fpeftu  Legatorum  moveretur ,  quin  gladium  e  vaginâ  edu6r,um  menfae 
impingeret,  pereuffurus  interpretem,  qui  a  tergo  Legatorum  adflabat,  ni 
domo  fe  proripuiiTet.  Arguent  hsec  &  fimilia  infignem  Mofcorum  sequi- 
tatem,  qui  fanclimoniam  Legationis  communi  omnium  gentium  confenfu 
ftabilitam,  violare  nefas  non  putarunt,  non  a  Legatorum  perfonis ,  non  a 
comitibus  eorum,  injuflam  vim  abflinentes.  Qui  verô  confcii  iibi  erant, 
tôt  atroces  injurias  Suecis  intuliiïe,  quà  fronte  eifdem  futilia  quœdam  cri- 
mina  objicere  poterant ,  aut  queri  fe  la,-fos  efle ,  qui  tôt  enormia  patra- 
verant? 

Sed  Riga:  majora  in  honorem  Czari ,  quem  in  comitatu  adfuifTe  nove- 
rant,  praeitari  oportebat.  Quanta  impudentia  efl,  illis  prcefentiam  iftius 
perfonx  objeclare,  quam  omni  cura  vefligantes  explorare  non  poterant? 
Unde  enim  cognofeerent?  An  Mofcuâ  quisquam  nunciavit  Czarum  adfu- 
turum?  Atqui  lilentium  ibi  capitis  periculo  fancitum  erat.  Adhaec  omnes 
aditus  interclufi  :  fublata  literarum  commercia ,  ut  nemo  certi  quid  de 
Czari  profectione  nunciare  poffet ,  vel  auderet.  Sed  a  Legatis  poflea  au- 
diverant  :  ab  iis  feilicet,  qui  praefentiam  ejus,  tariquam  myflerium,  miro 
fludio  ac  foîertiâ  celarunt ,  faclâ  mortis  comminatione ,  fi-  quis  e  comitatu 
arcanum  hoc  propalaflet.  Nihil  itaque  de  Czaro  extricari  potuit:  &  ma. 
jori  aliquanto  induflriâ,  aliisque  artibus  opus  erat  ad  eum  detegendum, 
quàm  quibus  Ulyfles  olim  ufus  elle  traditur,  cum  Açhillem  in  Scyro  laten- 

Tome  XL  F  f  tentera 


226   MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    tentem  deprehendere  vellet.     Cum  forte  retulilTet  aliquis,  apparuiflè  quen- 

eeSuf.de    dam,  inter  fervorum  quifquilias,  vulgari  habitu,  fercula   difcumbenubus 

v/  DE      miniltrantem ,  qui  Czarum  oris  fimilitudine  referret  j  hifeere  tamen  nemo 

vie.  *     fuftinuit.     Diiiîmulare  omnes  cogebantur,  ne,  fi  adfuiiTfct,  latere  tamen 

cupicntis  iram  in  fe  convertirent.     Quam  gratiam  ab  eo  initurus  fuiilet, 

qui  agnitum  protraxiilet ,  &  reluclantem  invilis  lîbi  cumulaiTet  honoribus  ? 
Profe£lô  ficut  irreverentiae  crimen  non  efïugilfet,  qui  fcire  fe  oitenderet, 
quod  ipfe  voluerat  ignorari  ;   ità   notitiam   qualemcumque  diiîimulantes, 
quod  ejus  fe  voluntati  accomrhodaflènt ,  venerationis  atque  obfequii  lau- 
dem  meruhTe  funt  cenfendi.     Obtinuit  iguur,  quod  maxime  tune  opta- 
bat.     Latere  voluit:  nemo  prohibebat.     Latere  voluit,  &•  tamen  publiée 
honorari:  hoc  quo  pacto  fieri  potuiflet,  non  mirum,  fi  nemo  afiècutiis  fit. 
Proinde  liad  Legatos  refpicias,  plus  honoris  exhibitum  illis  eft,  quàm  auc 
pa£ta  exigant,  aut  ante  îllos  Legatorum  contigerit  ulli  :  fi  ad  Prwcipem, 
potuerit  quidem  iite  honor  fafijgio  illius  fortunce  minor  fuiffe  ,  fed  quem 
ipfe,  fe  occultando,  majorem  fieri  vetuiiTec.     Cur  enim  mentitus  perfo- 
nam,  proviciam  S.  R.  Majeitatis  Suecire  perreptare  voluit?  Cur  adven- 
tum  non  fignificavit  ?    Privatis  vix   toleranda  audacia  eft  ,  jfi  quis ,  non 
pulfatis  fonbus,  in  xdes  irrumpat  :    Principi  certè ,  qui,  prêter  Deum, 
neminem  fe  agnofeit  fuperiorem,  minus  videtur  ferendum,  il  alter  in  pari 
faitigio  conltuutus ,  fines  fuos  clam  fe  imraverit.     Inlblens  enim  elt,  il- 
îos,  qui  fummam  in  terris  poteftatem  gerunt,  alieni  regni  fines  percurfa- 
re,  niti  fide  data  &  accepta  :  quod  propter  novitatem,  &viciniam,  fufpi- 
cione  atque  tumultu  iita  res  carere  minime  poteit.     Diverfa  illorum  &  pri- 
vatorum  fors  elt.     Quod  his  conceditur  apud  illas  gentes,  qurc  advenas 
admittere  atque  tolerare  folentj  non  Itatim  fummo  in  imperio  verfantibus 
intelligitur.  elle  permilTum:  pra:fertim  iis,  qui,  preeter  necerlkatem  aliénas 
terras  luitratum  veniunt,  nec  difeurfationis  vagœ  caufam  polfunt  adferre 
aliam,  quàm  ut  fuam  expleant  curiofitatem.     Quapropter  fummi  Principes 
non  indecorum  minus,  quam  intutum,  femper  duxerunt  peregrinas  adiré 
regiones,  nifi  venià  decenter  impetratà  :    quam  qui  neglexerant,  luctuofa 
illis  hacc  interdum  fuit  temeritas.     Carolum  V.  Caefarem  fumma  necef- 
fitas  adegit,  ut  per  Galliam  in  Belgium  feitinaret  :  iter  tamen  prius  non 
ingreflus  eit,  quàm  Rex  Galliarum  petenti  veniam  dedifiet.     Incautior  fuit 
Richardus  Anglise  Rex,  qui  cum,  mutato  habitu,   Aultriacum  folum  per- 
traniire  conaretur,  Viennae  captus,  atque  in  cuitodiarn  datus,  grandi  vix 
pectiniâ  libertatem  redemerat.  Quos  igitur  Czarus  laudare  debuerat,  quod 
comiter  infolentiam  ejus   tuliffent ,   eos  calumniis  onerare  non  veretur, 
quod  perfonato  dignitatem  fuam  non  fervalfent.     Quô  magis  infperatus 
ejus  fuit  adventusj  eo  minus  in  contumeliam  accipere  debuit,  fi  parem 
ambitioni  fuse   apparatum  non   inveniflet.     Fuit  aucem  ,   qui  nuper   de- 
functus  eft ,  gloriofifiimx  mémorise  Rex  ilta  animi  magnitudine  ,  ut  ,  fi 
nuncium  ,  vel  famam  tanti  hofpitis ,  prrcfertim,  ut  tune  putabatur,  amici, 
percepiiîct ,   nullis  impenfis  parceret  ,  quibus  avidiffimi  fumtuofilfimique 
Principis  cujusque  animum  exfatiaffeti     Quare  igitur  abditè  latuit,  i\  pa- 

lam 


I  F.. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  227 

lam  coli  voluerat  ?  In  turbâ  fe  abfcondidit ,  fi  ut  Princeps  fufpici  aique  Afmjrm 
acliimari  cupiverat  ?  Q.uid  ?  quod  cum  ica  fe  geflerit,  qui  putabitur  alio  deSui-»s 
id  confilio  feciffe  ,  uili  ut  rixarum  inde  haberet  materiam  ,  fi  quando  Jjosca: 
Suecos,  ut  nunc  fit,  laceflere  ipfi  allubefceret ?  Quapropter  fas  fit  fpe- 
rare,  omnes,  qui  rerum  funt  intelligentes  ,  liquido  liinc  perfpicere  pof- 
fe  ,  quàm  impudenter,  quam  ftolidô ,  dicam  fupremo  Livonia3  Praefecto 
impingant  Mofci,  quafi  in  dignitatem  Czari  deliquifiet.  Sive  enira  igno- 
raflet  prrefentiam  Czari,  quod  in  ifta  tam  anxià  fui  occultatione  necef 
fe  erat,  ignoratione  ipfà  meriiô  exeufandus  eit  :  five  noviffet,  quod  ta- 
men  ex  perobfcuris  vulgi  rumoribus  certè  non  potuit,  jufta:  venerationis 
laudem  allequetur,  quod  tam  indigné  fe  gerentem  non  prodidiflet.  Qua3 
cum  Mofcis  optimè  cognita  eflent,  fingularem  tamen  innocentiffimo  vi- 
ro  calumniam  intentare  non  erubuerunt.  Noverat ,  inquiunt  ,  Prœfes 
Rigenfis,  qux  res  ageretur,  fed  lu£tum ,  quem  ex  obitu  filial  perceperat, 
obtendit.  O  incredibilem  in  fingendo  audàciam!  Filia  féfquiaitero  anno, 
poftquam  heee  Rigce  gefta  funt,  vixit:  &  tamen  Pater  tune  mortuam  lu- 
gebat.  Anticipare  feilicet  luctum  voluit,  quod  illam  hariolatus  eft  poil 
illud  tempus  vivere  defituram  effe.  Piget  tam  infipidas  fabulas  diflliere. 
Et  quis  omnia,  quibus  ipfe  aceufationis  libellus  featet,  perfequi  poteft? 
Quocunque  te  vertas,  Mofcum  effe  JVlofcum  invenies  :  nec  quidquam  tam 
abfurdum  effe ,  quod  ille ,  &  audacter  fingere ,  &  impudenter  proferre ,  non 
valeat. 

Enimvero  fi  inhonoratam,  vel  Czari  prœfentiam,  vel  Legatorum,  pu- 
taflent  Mofci,  quare  hanc  injuriam  tune,  cum  recens  erat,  non  expoltu- 
laverant  ?  Illi ,  quorum  animi  honorum  infatiabiles  funt,  quique  in  mini- 
mis  etiam  tricari  non  grave  putartt  ?  Quare  quod  prxfentibus  placuit, 
poftea  difplicere  potuit  ,  ut  in  atroces  adeô  objurgationes  erumperent? 
Nam  concinnus  ordo,  difeiplina ,  cultus  ,  apparatus ,  humanitas,  csete- 
raque,  quse  Rigœ  fieri  &  obfervari  cernebant,  Mofcorum  oculos  mentes- 
que  adeô  tune  perftrinxerant,  ut  tanquamin  alterum  orbem  delati,  penè 
obftupefcerent.  Admiratus  hœc  ipfe  Legationis  princeps,  Fortius:  lite- 
ris  ad  amicos,  quos  Mofcuae  habebat,  perfcripfit  (N)  :  praedicavit  Ha- 
gae  Praefidis  Rigenfis  comitatem,  atque  prudentiam:  &  Legato  Suecico , 
qui ,  in  conciliandâ  inter  Principes  Orbis  Chriftiani  pace  ,  nomine  S.  R. 
Majeitatis,  fequeftris  munere  fungebatur,  &  fuo,  &  Czari  nomine  gratias 
egit  ob  fingularem ,  quam  in  itinere  Livonico  experti  funt,  humanitatem. 
Nec  diffimulavit  ipfeCzarus,  qui  cum  iter  fuum  commemoraffet,  addidit , 
per  Sueciam  domum  reverti  fe  conftituiiïe,  fi  Régi  acceptum  fore  credi- 
diflet.  Quod  ut  S.R.  Majeftas  refeivit,  eum  honoriflcis  verbis  in  regnurn 
fuum  invitavit,  ut  re  ipfa  oftendere  poflet,  quanti  faceret  vicini  Prince 
pis  amicir.iam.  Idem  cum  Eleclor  Saxoniac,  &  Princeps  Contius,  de  Diade-, 
mate  Polonico  contenderent,  diligentius  percontatus  eft  ,  utri  candidato- 
rum  S.  R.  Majeftas  faveret:  fe  quidem  Eleclorem  prœoptare:  fed  i\  Ré- 
gi aliter  vifum  fuerit,  à  fententià  difeeffurum;  quod  nihil  committere  vel- 
ler,quodRegi  Sueciœingratum  elfet,cujus  amicitiam ante omnia  fibi  pigne- 

Ff  2  rari 


VIE. 


218  MEMOIRES  ,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   rari  cuperet.     Talia ,  cum  ipfe  Czarus ,  tum  Legati  ,  quo  tempore  apud 
de  Suedh  Batavos  commorabantur,  ingeminabant,  non  minimo  ullks,  quam  Rigas 
J;T  DR     concepifient,  fimultatis  indicio  (O).     Cum  ad  claffem ,  quam  in  Mxoti- 
de  parabat,  petiiflet  Czarus,  ut  tormenta  in  Sueciâ  liceret  coëmerej  non 
tantum  affenfit  S.  R.  Majeftas ,  fed  trecenta  etiam  tormenta  bellica,  quse 
in  Mofcoviam  conrèftim  aveéla  ilint,  ultro  ei  donavit.     Quod  gratiffimum 
fibi  accidiiTe ,  datis  ad  S.  R.  Majeftatem  literis ,  paulô  poft  fignificavit  (  P  ). 
Nautas   in   maritimis  Suecise    oppidis  conducere  voluit  :    non  denega- 
tum  eft,  fi  qui  fponte  nomina  darent.     Iiaec  omnia,  cum  poft  aclafunt, 
quàm  Rigae  fuerat ,  ecquis  querelae  poft  tôt  mutuse  benevolentise  figna , 
locus  fupererat?  Aut  quâ  ratione  damnare  illa  potuit,  quse  antea  tanto- 
pere  vifus  erat  approbaffe  ?  Cum  officia  Rigce  fibi  prseftita,  cum  ipfe,  tum 
Legati  ejus,  Iaudarent,  eo  ipfo  confeffi  funt,  iftic  accidiiTe  nihil,  quod 
non  gratum  Mis  acceptumque  fuhTet:  aut  fi  qua  offenlio  fafta  erat,  eam 
pmnem  oftenderat Czarus,  cum  amicitiam  poitea  offerret  prolixius ,  atque 
praedicaret,  ex  animo  ipfius  fuiiTe  deletam  ,  aut  certc  non  tanti  aeftima- 
tam  ,  ut  ad  animum  revocari  deberet.     Sed  non  eft  ea  Mofcis  humanitas, 
ut  injurias,  fi  quas  putent  fe  accepifle ,  tam  diuturno  premant  filentio; 
qui  in  levifiimis  etiam  expoftulandis ,  non  promti  minus ,  quàm  ridiculi 
efie  folent.     Quo  verius  credibiliusque  eft,  fi  inofficiofos  in  fe  Rigenfes 
inveniflent,  non  tantum  tune  non  diiîimuiafTe ,  verùm  etiam  praedicandis 
iis  officiis,  quas  omiffa  nunc  querunr.ur,  omnino  abftinuifTe. 

Sed  fingamus  Riga;  quaedam  accidiiTe  ,  .qu*e  parum  officiofa  exiftima- 

rent:  quaiiacunque  tamen  fuifTent  illa,  infeiente  Rege  Suecise,  facla  efle 

fateantur,  oportet:  cum  tanto  locorum  intervallo  disjunélus,  neque  feire 

adventum  Czari,  neque  quse  Rigae  agerentur,  divinare  potuerat.    Dein- 

de  conveniat  illis  cum  Suecis  neceffe  eft  ,  fi  contra  Rigenfes  jus  obtinere 

voluiffent,  fuiiTe  injuriam,  quâ  iè  lsefosputabant,  deferendam,  ut  cogno- 

fcipoiTet,  quamam  fuiflet  illa,  quae  tantam  ipforum  anirnis   ïrgritudinem 

attulerat.     Si,  poftquam  expoitulatio  faéla  eft,  in  juftà  fatisfaclione  ter- 

giverfati  effent  Sueci,  tum  demum  in  illos  culpam  conjicere  sequum  fuifc 

ièt.     Jam  très  abieranc  anni,  poftquam  Rigam  perturbavit  inopinato  fuo. 

accefllt  Czarus:  interea  non  modo  de  injuria  nullum  verbum  faclum  eft, 

fed  etiam  priftinae  amicitia;  fpecies  maniit.     Unde  igitur  feirent  Sueci, 

refedifle  tantam  in  ejus  animo  fimukatem,  eum  propenfiori,  quàm  antea, 

voluntate  in  eos  effe  videretur,  &  accepta  ab  eis  bénéficia  efFufius  lauda- 

ret  ?   Superiori  demum  anno,  Legatis  Suedicis,  qui  Mofcuae  erant,  jam 

domum  abituris  criminatio  hsce  allata  eft:  verùm  illi,  qui  non  de  contro- 

verfiis  componendis,  quas  domo  profeéli  nullas  audiverant,  fed  de  fee- 

dere  renovando,  mandata  acceperant,  ad  crimen  improvifùm  infperatum- 

que  non  aliud  refpondere  potuerunt,  quàm  fe  de  il!o  ad  S.  R.  Majefta- 

tem  quàm  diligentifiimè  relaturos.     Quod  abfque  morà  fa£tum  eft:  datis. 

fimul  adfupremum  Livoniae  Praefeclum  literis,  quibus  exemplarLibelli  ac- 

eufatorii  erat  inclufum.  Sed  has,  cum  non  paucis  aliis,  cohfueta  Mofcorum 

îkentià  fuppreiTas  fuiiTe  poftea  innotuit.    Quamobrem  cum  diem  ex  die 

ex- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.   DCC.  zz9 

exfpe&antes ,  neque  nuncium  acciperent,  neque  ob  nimiam  longinquica-  Affai***. 
tem  locorum  refponlum  S.  R.  Majeitatis  brevi  adfuturum  perfpicerent,  deSukdk 
confecto  negocio,  cujus  causa  advenerant,  ad  fuos  reverti  flatuerunt.  In  ^0^j 
reditu  cum  Narvae  intelligerent,   nihil  literarum  venifle  Mofcua,   dolum       Y1IU 

fubolfacierues ,  ad  fupremum  Livoniae  Prsefeétum  denuô  fcribunt,  hortati, 

ut  quantocyus  refponfum  adornaret.  Eidem  quoque  S.  R.  Majeltas,  à 
Legatis  de  hoc  negocio  jam  certior  faéta ,  mandavit,  ut,  morâ  nullâ  in- 
terpofità,  de  criminibus  objeclis  fe  purgaret ,  &  enodatius  apertiusque 
explicaret ,  quo  cuku  Legati  Mofcici  Rigae  fuiflent  habki.  Nihil  cuncla- 
tus  ille  ,  quàm  primùm  obfidione  Saxonum  Riga  liberata  fuit ,  fufiori 
Epiftoîà  (  Q_) ,  quam  décima  quinta  Calendarum  Aprilis  proximè  prater- 
lapii  Holmiam  miferat,  falfa  fi&aque  efTe  omnia  oftendit,  quorum  a  Mof- 
cis  poltulabatur ,  &  in  illos  omne  genus  humanitatis  atque  benevolentiae 
abundè  collatum  idoneis  teftibus  probavit.  Cum  defenfione  oequitatis  ple- 
niflimâ  uti  videretur,  jiuTus  eft  Minifter  Suedicus ,  qui  Mofcua:  degebat, 
eam  cum  aceufatoribus  communicare,  &,  fi  pra:ter  fpem  minus  fatisface- 
ret,  hortari  Czarum ,  ut  Legatis  fuis,  qui  juxta  foedera  propediem  ÏToî- 
miam  mitterentur,  poteftatem  faceret  ulterius  hanc  controverfiam  difeu- 
tiendi.  Quod  pofiulare  eo  majori  jure  potuit  S.  R.  Majeltas  Suecia?, 
quôd  prifeo  more  receptum  erat,  ut,  Legatos  ad  alterum  mittens,  defi- 
deria  fua,  quaecunque  haberet,  ad  eum  fimul  deferret,  non  verô  alterius 
Legatis,  qui  ad  ipfum  miffi  fuerint,  eadem  exponeret.  Quo  paclo  dilfi- 
dia  ,  quae  inter  hos  populos  exorta  funt,  fréquenter  fublata  elTe  confiât. 
Cum  neque  hanc  rationem  ample&eretur  Czarus  ,  neque  viam  fœderibus 
deferiptam  infifteret,  dubitare  quisquam  poteft,  utérin  culpa  fit,  ii  inju- 
ria:, quâ  fe  affeétum  tradit,  remedium  non  fit  aîlatum?  Quid  enim  caufa? 
erat,  quare  cognitionem  fubterfugeret,  quare  a  paclis  recederet  ?  Gémi- 
namiila,  ut  antea  monitum  eft,  controverfias  omnes  tollendi  componen- 
dique  viam  demonflrant  :  harum  neutram  tentare  voluit.  Metuebat  enim5 
fi  putidiffimae  hae  calumniae  in  difeeptationem  venirent ,  fore,  ut  pr*e  pu- 
dore  ac  ignominiâ  fui  confiftere  non  pofTent,  &  immani  perfidie ,  quàm 
dudum  animo  habebat  defixam,  pulcerrimus  hic  praetextus  eriperetur, 
Cum  fedanda?  hujus  controverfias  ferium  in  Suecis  itudium  animadverte- 
ret,  nova  eludendis  paclis  diverticula  quaerens,  apud  fœderatos  Belgas 
îitem  hanc  deponere  voluit.  Quanquam  inufitata  hsec  via  erat,  &  majo- 
ribus  ambagibus  circumducla,  quàm  quse  paclis  oitenditur  j  a  S.  R.  Ma- 
jeftate  tamen ,  ne  videretur  aut  caufx  diffidere,  aut  arbitros  repudiare  ,. 
quorum  aequitati  ac  prudentise  plurimùm  tribuebat ,  haud  difnculter  in 
hanc  confenfum  eft.  bed  brevi  apparuit,  non  alio  confilio  iftud  faétum, 
quàm  ut  Suecos  ,  pariter  ac  focios,  a  fenfu  impendentis  mali  avocaret,& 
quos  aperto  Marte  aggredi  non  audebat,  illos  occultis  nefandifque  dolis 
fubrueret.  Vix  enim  caufam  hanc  Batavorum  fidei  commiferat,  cùrn  do- 
mi  clalUcum  cani  jubet,  tantô  detellabiliori  ad  omnem  pofterkatem  perfl- 
dià ,  quamô  pluribus  fanétioribufque  affeverationibus  pacifka;  mentis 
itudium  ubique  teitatum  reliquerac. 

Ff  |  Hoc 


ET     DE 

Mosco 

V  I  E. 


230    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,    ET 

.Aftures        Hoc  caput  totius  criminationis  erat,quod  poftquam  fra&um  atque  con- 
nF.SutnE    tufum  eft  ,  reliqua  perfequemur  ;  quae  putida  nimis  ac  futilia,   ut  nume- 
rum  implerent,  tantum  addufta  videri  pofïïint.     Certè  ,  praeter  Mofcum, 
talia  nemo  inter  caufas  belli  referre  vellet.     Quàm  enim  inanis  &  nugato- 
ria  accufatio  eit,  Currum  Vofnicïnii  Livonis  expilatum  ejfè,  poftquam,  refti- 
tutà  praedâ',  ultimum  de  ibntibus  fumtum  eft  fupplicium?  Si  laelb  ad  recu- 
perandas  res  jus  sequum  non  perfolvifTent  Sueci,  nemo  querelœ  locum  efle 
negaret:  cum  verô  in  crimine  indagando  puniendoque  acerrimos  fe  prae- 
buiflent,  quid  eft,  quod  in  hac  caufâ,  aut  accufare  Mofcus  habet  ,  aut 
Suecus  defendere?  Contigerat  illud  furtum  culpà  potiiiimum  Mofcorum, 
qui,  dum  in  tergum  ruftici  aurigae,  quod  feiïis}  jumentis  tardius  agebat, 
verberibus  pro  more  fuo  faevirent,  dolore  hic  ac  metu  coniternatus,  cur- 
ru  paulum  a  via  abdufto,  profugit.     Supervenientes  poltea  duo  ruftici  , 
res  in  fil  va  derelifras  domum  auferunt,  homines  in  tantum  fimplices ,  ut 
quafi  jure  occupatas  venum  exponerent.     Cujus  tamen  fafti  caufà  in  jus 
rapti ,  capitis  damnantur  :  atque  quod  partem  praedae  de  medio  removiiïe 
arguebantur,  prêter  morem  patriis  legibus  receptum ,  tormenta  etiam  in 
reos  ad  veritatem  exprimendam  funt  adhibita.     Hac  feveritate  cum  ute- 
rentur  Sueci,  fi  mens  fana  Mofcis  effet,  fummum  in  î  1  lis  juftitiae  ftudium 
laudare  potius  debuilTent,  quàm  vanifïïmam  hanc  proferre  criminationem. 
Quàm  fané  illis  fatisfaclum  eft,  cum  ex  totâ  fupelle£tile,pra:ter  res  nauci, 
nihil  defideratum,  &  facinoroforum  fupplicio  expiatum  crimen  erat.     Si 
privata  noxa  juftam  belli  caufam  praeberet ,   quis  non  intelligat,    miferri- 
mam  fore  fortem  mortalium,  cum  improbiffimus  quifque  pacis  bellique  ar- 
bitrium  haberet?   Quantafcunque  enim  comminationes  faciat  Princeps  , 
pcenafque  in  maleficia  ftatuat:  nunquam  tamen  efficiet ,   quin  pravi  ho- 
mines,  fi  volent,  periculo  fuo  leges  transgrediantur;  quorum  culpam  a 
Principe  pra:(tari  tum  juftum  cenfetur,  fi  impunitam  finat.  Delicla  autem 
fuos  au&ores  fequi ,  iisque  punitis,  reatum  è  civitate  tolli,  nemo  unquam 
dubitavit.     Nifi  fortaffe  Mofcis  aliter  videtur,  quibus  irinera  obfidere,   & 
viatores  crudeliter  jugulare,  tantum  non  in  conceflîs  ponitur.    Quod  ii  ad 
juftitiam  belli  hase  fufficerent,  quoties  ipfi  violatac  pacis  crimen  incurre- 
rant  ?  Quot  fuorum  numerare  Sueci  polTunt ,  dum  negociorum  causa  in 
Mofcoviam  abirent ,  vità  fortunisque  miferrimè  fpoliatos?  Quoties  praeda- 
torum  globi  in  agrum  Suecicum  irrumpentes,  ingemia  damna  dederant? 
Sed  hacc  jufto  ordine  expofita  videbunt  Mofci,  cum  Sueci  fuas  querelas 
protu'erint.     Quid  autem  dementius,  quàm  cum  ipfi  frequentia  latrocinia 
faepius  multa  patiuniur,  Suecis  punitum  crimen  objicere,  eoque   nomine 
infeélari  alios,  cujus  toties  rei  ipfi  facli  funt?  Verùm  Sueci,  quod  judica- 
verant  ejusmodi  faéta  fuilïe  a  publico  confilio  remota  ,  jufta  via  res  repe- 
tere  haclenus  maluerunt,  quàm  culpam  latius  extendere.  Atque  hoc  pacla 
jubent  (R):  quibus  ,   ne  pacem  ,   publicâ  fanftimonià  ftabilitam,  priva- 
torum  audacia  unquam  pollet  folicitare,  faluberrimè  provifumeft,  ut  ta- 
ies injurise,  quee,  infeio  Principe,  inferuntur,  fontium  fuppliciis  aboleren- 
tur.     Neque  hoc  Mofci  non  fciunt,  fed  usque  adeô,  quod  fœdiiîïmo  bel- 

lo 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  ^i 

Io   pnetexant ,   non  habent,    ut  etiam  impletas  paclorum   luges   vitupè- 
rent. 

Sed  jam  tertiam  criminationem  confideremus,  cui  anfara  dédit  quaedam 
inter  duos  TabdlariorumPracfeétos  controverfia,  tam  tenuitate  fuâ  contem- 
nenda,  quàm  infulfè  agitata.     Supremo  Livoniœ   Prœfidi  feribir,    aut  ve- 
nus  imperat ,    Vinnius  Mofcueniis ,  ut   Grœnium  ,   qui  Rigce  tabellariis 
regiis  praepqfitus  eft,  ab  adminiflradone  removeat.     Graves  enim  fibi  ra- 
tiones  elfe,  cur  id  fieri  vellet:  qius  quanquam  tune  indicare  non  poterat, 
pollea  tamen  lads  fe  illi  approbaturum.     Qua;  cum  Holmiam  nuneiata  ef- 
fent,  impotens  nimis  &  iniqua   vifa  eft  hace  viri  poftulado,  quâ  alterum 
nullius  rlagitii  conviclum,  indictâ  causa ,  damnari   voluit  :    fed  ut  nafeens 
forte  maîum  in  herbâ  fupprimeretur,  Miniitro  Suecico,  qui  Mofeuae  erat, 
placuit  mandata  mittere,  ut  Vinnium  caufas  tam  atroeis  aceufadonis  ro- 
garet.     Grœnius  fimul  afperè  monitus  eft,  omni  altercatione,    quà  irrita- 
bilis  animus  majori  tantum  ira  inflammaretur  ,    fe  abftineret.     Interjeclo 
tempore ,  cum  querimonias  fuas  edidiifet,  Riga;  protinus  dati  funt  cogni- 
tores,  viri  in  jua^cando  fpeclati  &  prudentes ,  qui  teftibus  auditis,  &  fin- 
gulis  curatius  examinatis,  fimultatein  hanc  ex  perle vibus  initiis  ortameffe 
deprehendunt,  au£lore  cive  Rigenfi,  qui  perverfè  nonnulla  ad  Vinnium 
detulerat:  aucîam  deinceps,  cum  pro  literis  Memelam  perferendis  merce- 
dem  repra-fentari  Grœnius  poftuiaret  ;  alter  binis  tantum  in  fingulis  annis 
pentionibus  folvere  eandem  vellet,  non  publicà,  non  privatà  convention 
ne  nixus.     Reliqua  crimina,  qua;  ingerebat,  aut  odio  in  adverfarium  con- 
fiera, aut  parvi   admodum  momenti:  veluti  fafciculum   epiflolarum   tar- 
dius  allatum:  capfulam ,  in  qua  muria  erat  ex  ovis  pifeium,  a  veredario, 
onus  averfante,  in  via  reliclam  :  fed  &  hsec  ,   imprudente  Grœnio,   acci- 
diffe.     Laque  cum  fatis  quœfitum  effet,  quid  de  fingulis  factis  (enrirèn.r^ 
expromunt.     Abfolvere  enim  reum. ,  aut  damnare  ,  juiïi  non  erant  ;   cum 
cognitionis  tantum,  non  ordinani  fori  res   agebaturj  &  metus  erat,  ne 
eâdem  temeritate,  quâ  litem  hanc  intenderat,   fententiam  judicum   Mof- 
cus  rejiceret.  Aéta  intégra  Holmiam  milTa  funt:  &  Legatis  Mofcicum  iter 
ingrefïuris  tradita ,    ut  Vinnio  infpiciendi  facultatem   facerent,    &,    qua; 
veilet ,  fimul  admonendi.     Factum  eft:  infpexit,  perlegit:  qua:   delidera- 
ret,  Legatis  Mofcicis,  qui  in  Sueciam  proficifeerentur ,    expufiturum  Je 
dixit.     Tantam  diligentiam  in  nugis  hifee  adhibuerunt  Sueci,    ut  tetrico 
homini ,  &  in  fimpulo  Au  élu  s  excitanti,  omnem   querelarum  anfam  pree- 
feinderent:  effugere  tamen  non  potuerunt,  quin  ab  ilîis  ,  qui  nodum  in 
fcii  po  quaerebant ,   in  argumentum  nefarii  belli  arriperentur.     Tolli  ha?c 
nuïlo  negocio  controverfia  potuiffet,  cum  inter  privatos  tantum  conten- 
tio  effet,  nec  quidquam  haberet,  quod  cum  publicis  fœderibus  efflt  com- 
mune, nifi   ad  fupplendum  jultcc  caufae  defectum  eam  hic  fuccenturiarî 
Mofcus  voluilîlt.     Quid  autem  eft  hoc,  nifi  ruditatem  fuam   imperidam- 
que  orbi   deridendam  propinare,  quod  minuendo  horrori  ,    quem  omnes 
probi  ex  frauduîentiâ  ejus  perceperant,  tam  viles  caviiladones  putarit  fuf- 
ficere,  perjuriique  dedteus  pellucidis  nifee  tegurnends  ceiari  potunTe. 

Nequc 


/UfÀiMI'S 

D>;  Su  fus 

f.t  ni 

Mosco- 

VIE. 

ET   DE 

Mosco- 

VIE. 


233    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

.Affaires  Neque  aliter  de  gère  alieno  mercatorum  quorundam  ,  quod  ultimum 
deSusde  jn  Libello  criminofo  locum  occupât,  pronunciandum.  Privata  nomina 
funt,  fi  qure  funt,  non  publicâ  fide,  non  Rege  au&ore,  facla  :  &  pro- 
inde  ab  iis ,  quorum  fidem  in  rébus  contrahendis  fecuti  funt  Mofci,  exi- 
genda.  Patuerunt  fora,  non  illa  quidem  anfra6libus  Iongis  tortuofa:  cum 
hoc  quoque  in  felicitate  fua  Suecia  ponit ,  quod  contra&iora  litigiis  tem- 
pora  conitituta  habeat.  Quoad  legibus  experiri  neglexerant,  tamdiu  ar- 
guere  nequeunt  Mofci  ,  injuriam  fibi  faétam  effe  ,  aut  quidquam  ,  quod 
Pactis  adverfum  effet ,  decretum.  Florentiflima  ,  dum  licuit  ,  inter  has 
gentes  mercatura  fuir,  atque,  ut  demonltrari  poteit,  Mofcis  quaeftuofiiîi- 
ma.  Si  quid  in  rationibus  conturbatum  fit,  quo  paclo  illud  debeat  expe- 
diri,  Fœdera  praefcribunt  (S).  Cum  juxta  illa  ordinarios  apud  Judices  in 
Regno,  apud  Praefe&os  verô  in  urbibus  limitaneis,  quando  folutio  impe- 
dita  fuerit,  debitores  appellari  debent  ;  quare  non  ad  eos  potiùs,  quàm 
ad  Batavos ,  quœrela  delata  eft  ?  Praepoiterum  enim  eit,  &  infanum  ,  abf- 
que  causa  uti  circumitione ,  cum  breviori  via  defungi  licet.  Hanc  Fœde- 
nbus  folennibus  defignatam,  longnTimo  etiam  ufu  tritam,  noverant  Mof. 
ci  :  à  quâ  ut  hoc  potiflimum  tempore  deflecterent,  quae  alia  iuberat  ratio, 
quàm  quod  fperarent ,  vaniflimis  hifce  offuciis  praeflingi  hominum  oculos 
potuiffe ,  ne  turpitudinem  violati  fœderis  vidèrent,  Quâ  tamen  in  re  ni- 
hil  aliud  aifequentur  ,  nifi  ut  ab  omnibus  mortalibus  ,  qui  fraudes  ode- 
rint ,  infullitas  Mofcica  cognofcatur  ,  &  audacia.  Indignabitur  prsefens 
œtas  tam  vilia  &  infipida  ad  turbandam  orbis  quietêm  praetextui  fumi  :  & 
polleritas  inter  illa  exempta  memorabit,  quae  irrifu  magis,  quàm  liberali 
judicio  ac  cognitione  digna  habeantur.  Ipfis  profecto  illis  ,  qui  fœdere 
conjurationis  tenentur,  tam  abjecta  hsec  &  indigna  judicata  funt,  ut  focii 
Principis  ineptias  miferati  ,  fuppeditata  nova  calumnia ,  gravius  quld  & 
robuflius  fonare  docuerint. 

Sanè,  quae  fequuntur  criminationes,  Mofcis  initio  inter  caufas  belli  re- 
latas non  funt,  neque  ufpiam  verbo  faltem  earum  mentio  fa&a  efl  :  quo- 
niam  tamen  Mofcorum  nomine  nuper  divulgatae ,  ad  multorum  cognitio- 
nem  pervenerant,  cujufcunque  fœtus  fint,  ne  incauto  lectori  imponant, 
difcutiantur  hîc  neceiîe  eft.  Non  autem  quifquam,  qui  artes  Aulae  Saxo- 
Polonicae  deguitaverat,  potuerit  dubitare,  quin  ex  eâdem  difciplinâ  hase 
commenta  prodiiffent ,  teterrimis  etiam  conviciis,  quafi  condimentis  qui- 
bufdam  necefTariis  ,  afperfa  ,  ut  invidiam  Suecis  ,  quemadmodum  auclor 
putabat,  apud  rerum  im^eritos  crearent  >  fed  ,  ut  faniores  interpretan- 
tur,  ne  quifquam  ignoraret,  tam  uberem  ifti  Aulœ  calumniarum  effe  ve- 
nam ,  ut  non  tantum  fibi  fufficiat,  kà  etiam  aliis  ex  abundanti  fuppedita- 
re  quafdam  pofiit.  Quœ,  fi  forte  armis  focium  fublevare  non  poiTet ,  ne 
tamen  nihil  feciffe  vTideretur  in  ejus  gratiam,  quem  ad  inaufpicatiffimum 
hoc  bellum  proritaverat,  dolis  &  calumniis  perditiffimam  caufam  juvare 
voluit.  Fabulantur  itaque  Suecos  in  fpecicm  omnia  officia  amicœ  tranquillœ- 
que  vteinitatis  fervajje  Czaro  ;  atquc ,  ut  fidem  fibi  ad  fallendum  praflruerent , 
Légat vs  ad  fœdus  renovandum  fuperiori  anno  mijijfe  :  occulte  autem  graves  ei  in- 

fidias 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  233 

Jtclias  moïiîos  cfj'e^  Polonis  contra  illum  in  focietatem  folicitaîis ,  &  Furcâ  ad   Affairfs 
belium  conîinmndum   bortationibus  fuis  impulfo  :   idque  eo  animo  fecij/e  ,   ut ,    de  Suéde 
conclus  tôt  hoftibus ,  Mofcicum  Imper  mm  funditus  exfcinderent.     Proinde  Cza-     ?7  n  h 
ro  ,  cum  machinationes  fraudulentas  fibi  notas  explorât  a  [que  haberct  ,  #/■/»#  «?-       V1E# 

ceffarib  capienda ,  ut  tant  uni  à  ccrvicibus  fuis  periculum  dcpeileret,  atque  Jimul 

exubérantes  Succorum  vires  ita  accideret ,  »?  //£/  aliifve  in  pofterum  nocere  pof- 
fent.  Confare  enim  orbi ,  Suecos  ex  rapto  vivcre  folitos ,  nunquam  conquiefce- 
ré  :  £s?  Carelïà  Ingriâque ,  <r#»z  Mofcovia  civili  bello  laboraret ,  occupât is,  tan- 
tas  opes  comparafè ,  z/f  r<?£tfj  deinde  geftis  ad  fummum  gloriœ  faftigium  adfcen- 
deiint.  Prêter  hcec  ,  Danum  veterem  Mofcorum  fœderatum ,  ^/  iniquas  pa- 
ris conditiones  adaclum  efje ,  exclufo  Rege  Pobniœ ,  #/  <è  /two  divul/um  facflius 
procuïcarent  :  quorum  injurias  ut  ulcijcatur ,  Czarum  ex  fanbliffimo  fœdere  ob- 
iigatum  efje  (T).  Ilifce  adminiculis  vacillans  illa  &  nimis  ianguida  Mof- 
corum accufatio  fuftinenda  erat ,  ne  fuà  debiiitate  corruens ,  mundo  ludi- 
brium  deberet  :  qux  tamen  omnia  quàm  nihil  habeant  folidi ,  quàmque 
imbecilla  atque  exefa  Tint,  oculos  propius  admoventibus  mox  patebit. 

Equidem  quanta  confcientiœ  vis,  quantaque  lux  fit  veritatis,  quifquis 
compilator  eft,  diilimu lare  non  poteft.  Fatetur  enim  Suecos  re  ipsà  nul- 
lam  Mofcis  injuriam  intuliffe,  fed  omnia  officia  amicitiae  fervafîe  :  per  Le- 
gatos  quoque  nuper  vetera  cum  illis  Pacta  renovafTe  :  atque  eatenus  nihil 
elfe,  quod  in  iliis  reprehendatur.  Totam  autem  criminationem  in  clan- 
deftina  &  perniciofa  eorum  conata  confert ,  quee  comprimere  armis  atque 
retundere  Czarus  debebat,  fi  fe,  fuumque  imperium  voluiflèt  falvum.  Si 
quseratur  ,  quibus  indiciis  occulta:  hx  Suecorum  infidise  detectae  fuerint, 
procul  dubio  refpondebitur  ,  ex  Aulà  Saxo-Polonicâ  tantum  profectum 
efTe  beneficium.  Neque  enim  facile  quifquam  eft,  qui  fuiffe  Suecos  fuf- 
picetur  taniac  tamque  inconfideratae  temeritatis  ,  ut  cuiquam  alii ,  prseter- 
quam  cujus  maxime  referret,  rem  fummi  confilii,  atque  ipsâ  taciturnitate 
conficiendam  ,  aperirent.  Ab  illâ  igitur  Aulâ  hoc  fecretum  emanavit  : 
cujus  fidei  quantum  fit  tribuendum,  nemo  non  intelligit ,  qui  noverit  ean- 
dem  &  Suecis  efie  infenfiiiimam,  &  fimilium  calumniarum,  quas  in  eau- 
fà  fimiJi  fabrieaverat ,  antea  manifeftam  &  conviclam.  Quare  fallitatem 
hujus  criminationis  pîuribus  non  opus  eft  arguere.  Fœdus  cum  Republi- 
cà  Polonâ  ficut  forte  utrique  genti  non  fuilîèt  inutile;  ità  non  aliud,  quàm 
quod  ad  mutuam  fecuritatem  ,  ornamentumque  fpeclaret*  admittere  Sua 
Regia  Majeitas  Sueciae  unquam  cogitavit.  Quod  fi  hoc  Czari  animum 
offenderat,  confiteatur  fimul  oportet,  propterea  invifam  fibi  fuiffe  hanc 
conjunélionem,  quod  immaniffimis  coniiliis ,  quae  ad  Sueciam  opprimen- 
dam  jam  diu  animo  agitaverat,  atque  adeo  exfecranda  perfidia,  conatu 
licet  irrito  ,  perflcere  nuper  voluerat,  maximo  impedimento  fore  eam  ju- 
dicaret.  Sed  non  tantum  cum  Czaro  amicitiam  redintegravit  Sua  Regia 
Majeitas  ;  fed  etiam  cum  vicinis  omnibus  pacem  illacefïitus  habere  con- 
ftituit.  Quo  minus  redargui  meretur  ,  fi  ad  perpetuitatem  tam  falubris 
propofiti  confilia  fua  omnia  dirigeret.  Aut  cur  non  liceret,  citra  alterius 
offenfam,  fœderibus  juftis  falutem  fuam  tueri,  &  innoxia  fibi  amicorum 

Terne  XL  G  g  prse- 


234     MEMOIRES,  NEGOT1ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    prsefidia  circumponere ,  quibus  malevolorum  infultus ,  il  forte  ingruerint, 

de  Suedk   retundi  poffent  atque  elidi  ?     Qui  enim  fe  confervare  ftudet,  non  alteri 

FT  DE     nocuiffe   idcirco  cenfebitur.     Nec  continua  ,   qui  uni  propiori  amickiae 

Mo5CO"    nexu  jungi  cupit ,   alteri   fa£tus   eil  inimicus  ,   aut  periculum  moliri  di- 

Z cendus  elt.     Procul  à  Sua  Regiâ  Majeltate  haec  fuere  confilia,  quœ  Cza- 

rum  non    fimulatis  officiis  devincire  fibi  voluerat:  ad  Legatos  verô  mit- 
tendos  Lege  Fœderis  adilri£ta  erat  (U) ,   quâ  difertè  jubetur  ,    ut  mor- 
tuo  alterutro  Regum ,  aufpicia  Regni  fui  fuccefîbr  folenni  Legatione  fuper- 
ftiti  denunciet ,  aeternumque  Fœdus   cum  illo  renovandum  curet.     Non 
itaque  fimulationis  erat,  fed  neceffitatis ,  ut  Legati  mitterentur  :  &  tamen 
hic  crimen  erit,  Pa&orum  Leges  fervaffe.  Etenim  nihil  unquam  contra  rem 
Mofcicam  cogitafle  Suecos,  certiflimum  veriflimumque  argumentum  efTe 
potefl,  quod,  florentiflîmis  fuis  rébus,  Mofcoviam  aut  internis  turbis  ve- 
xatam  ,   aut  difficili   aique  ancipiti  bello  foris  colluclantem  ,   non  modo 
non  laceffiverant  ,   fed   etiam  quibusvis  officiis  ,    quae   amico  &  vicino 
populo  exhiberi  poifent,  coluerant  ,  fuppeditato  etiam  non  modico  bel- 
li  apparatu.     Si  occafionem   nocendi   Mofcis   infidiofè    captafTent  ,   quae 
major   unquam   opportunitas    fuiffet  ,    quàm  tune  ,  cum  fuis  &  aliorum 
armis  oppugnare    illos   potuiiTent  ?   Non  parvis   quoque  follicitationibus 
in  partes  invitabantur  Sueci  ,   fi  commoditatem  belli  fufeipiendi  ,  quàm 
fandtitatem  foederum,  magis  refpexiffent.     Itaque  qui  neque  opportuni- 
tate  temporum ,  neque  promiffis  amplifierais ,  induci  poterant  ,   ut  fidem 
infringerent ,   quae  ratio  nunc  eos    ad   confilium   mutandum   impelleret? 
Quamvis  enim  iftum  holtem  non  magnopere  fibi  extimefeendum  puta- 
verinc:  res  tamen  adverfus  eum  gerere  adeo  non  optaverant,  ut  paélis  di- 
ligenter  fan&èque  obfervatis ,  officiisque  continuis,  illius  amicitiam  firma- 
re  fibi  maluerint ,  quo  vi&o  ,  non  gloriae  multum  propter  ignobilitatem , 
&  parum  commodi  propter  vaftitatem  incultumque  regionis  confecuturos 
fe  videbant.  Cum  itaque  nihil  effet ,  quare ,  aut  Mofcum  bello  Sueci  pétè- 
rent, aut  ille  metueret,  quidnam  fibi  ab  his  detrimenti  allatum  iri  ,  ap- 
paret  hoc  maligni  animi  elfe  commentum ,  non  tam  Mofco  temerè  credi- 
tum,  quàm  ad  criminandos  Suecos  aitutiffimè  arreptum.     Cum  Turca  au- 
tem  pacificationem  impediviffe  Suecos ,  quomodo  fibi  perfuadere  ,   vel 
aliis,  poteil,  cum  neque  cum  iftâ  gente  commercium  ullius  rei  habent, 
neque  per  quinquaginta  ferè  annos  fuorum  quenquam  miferant,  qui  mini- 
mum illic    negocium  gereret  ?    Quare  non  elt  credibile  ,    Mofcum,  qui 
Suecorum  fidam  contkantemque  amicitiam  tôt  clariiïimis  documentis  co- 
gnitam    perfpeétamque     habet  ,    feriô    illis    infidiarum     crimen    objec- 
taiTe  :   exprobrare   potins   voluit   antiquam  fimpliçitatem ,  &  nimiam  fœ- 
deris   religionem  ,    quod    opportuniffimis    temporum    momentis  ,    quas 
ipfe  utique    fibi    non    pra3termittenda  judicavit ,    ad   quaeftum   &  com- 
pendium    uti    nefciviiTent.     Sed    peregrinre    ifiœ   funt   artes  ,     &    Sue- 
corum  moiïbus    ignotœ  :    qui   virtute    agere    confueti  ,    failli    amicitiaî 
fpecie  ,   ighavis  turpibusque  dolis  &  perjuriis  ,   vicinos  fallere  nondum 
didicerunt. 

Verùm 


VIE. 


>  RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  23; 

Verùm  quid  attinet  diutius  ea  fcrutari,  quœ  fi&a  funt,  &  inania  ,  cum  AmiKn 
aliud  reftat  diluendum,  quod  a  fe  admiflum  effe,  Sueci  inficiari  non  pos-    DF-  SlJEDE 
funt?  Nam  cum  ea  haétenus  arguerat  Mofcus,  quas  adverfus  fe  patrata  ef-    jj*  DE 
fent  ;  jam  ad  fociorum  injurias  dilabitur  :  quorum  alterum  armis  ad  iniquas  pacis 
leges  adaclum  effe  criminaturj  alterum  ,  ut  facilius  opprimi  poflit ,  a  pace  ex- 
clufum.     Hic  primùra  aliquid  dicere  videtur  ,  quod  magnanimo  Principe 
non  indignum  effet,  fi  ex  juftâ  caufà,  fi  juflo  tempore  ,  nec  prœpofterè, 
ut  nunc  fit,  dictum  effet.     Quid  enim  œquius,  quid  majori  laude  ma6tan- 
dum,  quàm  fidem  fociis  fervare,  &  ab  iis  prohibere  periculum  ,  in  quod 
praefertim  non  fuâ ,  fed  adverfariorum  culpâ  inciderint?  Sed  cum  diverfx 
funt  eorum,  quos  fœderatos  appellat  ,  caufae  ;  disjungenda  etiam  eorum 
confideratio  eft.     Nam  quod  ad  Sereniflimum  Daniae  Regem  attinet,  non 
dubium  eft ,  quin  quisquis  &  fidem ,  &  ratiocinationem  ,  Mofcicam  per- 
penderit,  fateatur  ad  caufam  nihil  abfurdius,  ad  exprimendam  verô  Mof- 
corum  imaginem  accommodatius  nihil  adferri  potuiffe.     Fides  in  eo  elu- 
cet ,  quod  quamdiu  Holfatica  cum  Danis  controverfia  fervebat ,   neque 
auxiliumei,  cui  fe  ex  fœdere  opitulari  debuiffe  jam  clamitat,  ullum  tu- 
lit  ;  neque  intercefiit ,  ut  difcrimen  a  fœderato  Rege  averteretur  :  contra 
in  Belgio  per  legatum  fuum  juétavit  ,  fe  ifti  diffidio,  quod  ad  illum  non 
pertineret ,  nolle  fe  immifcere  (V).     Prseterea  cum  Ablegatus  ejus  S.  R. 
Majeftatem  Sueciae  prseterita  a:Itate  adiiffet,  cum  caftra  in  Selandia,  Da- 
norum  infulâ,  haberet,  non  modo  faftam  hanc  exfcenfionem  non  repre- 
hendit ,   fed  ne  verbo  quidem  ingratam  fuiffe  Czaro  indicavit.     Ratio- 
cinatio  autem  talis  eft,  ut  non  ab  ho  mine  fano  ,  fed  ab  eo  ,  qui  ratio- 
nis  atque  omnis  humanitatis  expers  fit  ,   profecla  effe  videatur.     Quàm 
enim  inconfultae  eft  cupiditatis ,    quàm  plénum  infolentiae  ,   jus  &  arbi- 
trium  fibi  in  illum  vindicare ,   qui  fummo  in  imperio  conftitutus  ,   libe- 
ram  habet  voluntatem ,  nec  cuiquam  mortalium  fubjeclus ,  Deo  foli  red- 
dendam  crédit  faétorum  fuorum  rationem?  Aéla  Danorum  Régis  refcin- 
dere  Mofcus  audet  ,   inque  dubium  vocat ,    an  fas   effet  illi  controver- 
fiam  ,   quae  cum  Duce  Holfatias  erat ,    per   amicam   potius   compofitio- 
nem,  quàm  incertum  armorum  difcrimen  tollere.     Sed  metu,  inquit,& 
vi  coaclus  eft  in  ea  confentire,  quse  alioquin  maxime  averfaretur.   Quod 
fi  effet,  quid  hoc  ad  alterum?  Siquidem  is,  qui  fui  juris  eft,  amplexus 
illa  fit,  quse  fuis  rébus  proficua  ,  nec  alteri  injuriofa  effe  judicaffet  :    & 
quae  amplexus  effet  ,    tueri  poftea  ,    &   rata   habere   pergat.     At  neque 
coaclus  eft  Rex  Daniae  rem  in  difcrimen  adducere.     Sponte  arma  fum- 
fit ,    ea  mente  ab  initio  ,    ut  ferro   caufam   difceptaret  :    depofuit  illa , 
poftquam    Martis   aleam    ancipitem  judicavit ,    tutius    autem   via  juris 
transigere.     An  fuo  arbitratu    agere   Rex  Daniaî   hic  non  potuit?   Aut 
regnum  fuum  in  clientelam  Mofcis  tradidit,  ut  ad  eorum  nutum  volun- 
tatemque  fefe  componere  deberet  ?  Sed  ,   uti  liquet ,  non  tantum  extra 
oleas  vagatur ,  cum  litem  alienam  perfequitur  ;  fed  etiam  intolerabilem 
impotentis  animi  faftum  prodit,  cum  controverfiam  maximo  fummorum 
Orbis  Chriftiani  Principum  itudio  ac  labore  fopitam  ,   exagitare  fuftinet 

Ggz  Mof- 


ET    [)E 

Mosco- 

V  I  K. 


236     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET         I 

.Affaires  Mofcus.  Quin  ccecam  Hbidinem  in  propatalo  ponit,  cum  ,  acquiefcen- 
deSukde  te  jjj0  ^  cujUs  res  potitfimum  agitur  ,  bellum  eo  Domine  fe  dicat  fufce- 
pille.  Jam  verô  ex  fœdere,  quod  ipfi  cum  Dano  intercedit  ,  qui  necef- 
iitatem  oftendet  iibi  elfe  impofitam  ,  aut  jus  natum  ad  arma  Suecis  infe- 
renda?  Ut  auxilio  contra  hoites  veniat  ,  tendere  illud  fœdus  non  negabir. 
At  cum  hoftium  loco,  neque  tum,  cum  controverfia  Holfatica  erat,  Sue- 
cos  haberet  Rex  Danise,  acque  jam,  ut  antea  ,  iis  utatur  amicis  :  neque  hi 
rurfus  Regem  Daniœ  hoftem  judicarent ,  aut  alias  partes  in  Cimbrico  né- 
gocie fïbi  fumèrent  unquam ,  quàm  Rex  Britannise  ,  quàm  Batavi ,  qui- 
buscum  unà  pacli  Altenoenfis  fponfronem  fufeeperant:  quàm  inepte  hoc 
nomen  immani  fuae  perndise  prœtendat  ,  nemo  eit  ,  qui  non'  percipiat. 
Scilicet  fœderum  reverentiâ  movebatur  is ,  qui  i lia.  religiofo  etiam  facra- 
mento  fîrmata  polluere  non  veritus  eil:  aut  focii  neceffitatibus  fubvenire 
voluit,  qui,  quoad  ille  in  angultiis  verfari  vifus  eft  ,  opem  omnem  fub- 
duxit:  depulfo  dudum  periculo,  cum  illius  non  indiget ,  prsefto  eft.  Qua- 
jQ  cuiquam  obfcurum  elle  polîlt,  Czarum  non  fuâ  potius  libidine,  quàm 
fociorum  caufa,  in  bellum  hoc  prorupifle  :  "a  quo  illum  metus  Turcarum 
haclenus  retinuerat. 

Quemadmodum  autem  fimnltas  illa,  quae  Régi  Suecis  cum  Danis  erat, 
facile  potuit  aboleri;  ità  injurias,  quas  Rex  Polonise  obtulerat ,  akius  in 
animum  penetraffe  ,    quo  majori  cum  indignitate  ac  perfidiâ  conjunclie 
funt,  nemo  paulo  humanior  demirabitur.     Illum  S.  R.  Majeflas  Suecis, 
ut  amicum  &  propinquum,  &  fuper  ha;c  propiori  fœderis  nexu  fibi  jun- 
gendum,  omni  officiorum  génère   cumulaverat  :   aggreffus  ille  eft  S.  R. 
Majeftatem,  innocuam,  &  paftis  fidentem  ,  non  jufto  bello  ,  non  legiti- 
mû  modo,  quo  Reges  ad  arma  procedere  folent,  fed  dolis,  &  turpi  aftu- 
tiâ.     Florentiflimam  provinciam  expilavit ,  priusquàm  Te  inimicum  profef- 
fus  eft:  caftella  intercepit  :   urbes  oppugnavit  :  prodkores  fovere  ,  cives 
ad  feditionern  illicere  ,  cœlum  terramque  mifeere  non  deftitit,  ut  hofles 
undique  in  Suecos  concitaret:  fparfis  quaquaverfum  teterrimis  calumniis , 
&  focietate  nefanâ  cum  malevolis  initâ  ,  cum  Suecis   arclioris  amickice 
fpem  quàm  maxime  faciebat.     Hune  igitur  juris  gentium  violatorem,  hof- 
tem,»^ infidiatorem  perniciofiflimum,  cum  neque  de  injuriis  remitteret, 
fed  in  propolito  &  nocendi  animo  pervicacius  perfifteret ,  cuiquam  ini- 
quius  videbitur,  poli  atrociffimas  tôt  injurias,  a  Rege  Sueciae  in  gratiam 
non  receptum  elle,  quàm  nunc  a  Czaro  defendi  atque  protegi?  Videlicet 
illum  Suecis  conciiiare  Mofcus  voluit  ,  quem  a  fpe  conatuque  potiundœ 
Livoniae  depulfum  erexit,  .&  debilitatum  fpe  auxilii  in  fententiâ  confirma- 
vit.     Qiiis  ex  pulcerrimâ  iiiâ  confpiratione  reftaret ,  cujus  confiliis  atque 
■opibus  m  bello  hoc  inaufpicatifiimo  uteretur  Czarus,  fi  hune  llatorem,  & 
columen  rerum  fuarum  unicum ,  ipfi  fubduxiifent  Sueci?  Liquet  emm  iis- 
dem  confiliis  innexum,   jam  diu  peftem  Suecis  moliri  :  contraclam  efle 
focietatem  eâ  lege,  ut,  quàmprimum  a  bello  Turcico  refpiraret  Mofcus, 
in  Suecos,  quorum  provincias  inter  fe  partiti  funt,  omnem  vim  effunde- 
ret  :  imerea,  quantum  poflot .,   ille  bellum  traheret.    Sed  riiic  ex  alto 

Deus 


RESOLUTIONS     D'ETAT,   M.  DCC.  237 

Deus  temeritatem  hominum;  &  inepta  fœdifragorum  confilia  diflurbavit.    Affairfs 
Qui  fiducià  virium  paulô  ante  ferox  ,  magnam  Sueciae  partem  fpe  dévora-    mSuf.de 


ET     DE 


VIE. 


verac ,  brevi  ad  moenia  Narvse  confliclu  expercus  eft,  quàm  parùm  impiis 
in  numéro  copiarum  auxilii  lit  :  quantum  vero  exigua  rnanus  virtute  ,  & 
caufà,  fubnixa  valeat.  Atquc  ita  qui  fubità  &  improviia  irruptione  Sue- 
cos  prohibuit,  ne  injurias  a  Rege  Poloniaî  fa&as  pofTent  ulcifci  ,  illum 
plagam,  alterius  perfidiae  debitam,  tergo  fuo  excepiffe  omnes  jure  meri- 
toque  exHtimabunt.  At  vero,  cum  tain  ar6tam  inter  fe  coiviflent  focie- 
tatem  ,  ratio  non  apparet ,  quare  indignetur  hune  fibi  foeium  elle  re- 
liétum,  quo  per  conciliationem  cum  Suecis  erepto  ,  doleret  hodie  fuper- 
efle  neminem  ,  qui  cum  clades  fuas  communicare  pollet.  C^uod  igitur 
benefkium  erat,  injuriam  nunc  interpretari  non  debebat.  Retineat  pœni- 
tentiac  foeium ,  quem  in  bello  incipiendo  hortatorem  confiliatoremque  fe- 
cutus  eft.  Non  invident  Sueci  hanc  tantam  ipfi  cum  Rege  Polonia;  ami- 
citiam  ,  quam  par  eaufa,  fimilis  perfidia,  gemma  temeritas  arcliffimè  con- 
glutinavit.  Quanquam ,  fi  hic  quoquejurata  fides  plus  apud  Mofcum  va- 
luiiTet,  quam  levitas  &  dominandi  libido  ,  a  focietate  hac  abltinuiflet:  cum 
seterno  fœdere  conventum  efc ,  ne  Suecorum  hofeibus  auxilium  fer- 
ret  (X). 

Quse  practerea  hoc  feripto  continentur ,  ad  examen  hic  revocare  non 
attinet.  Impuram  quandam  iniquilïimarum  calumniarum  elTe  farraginem , 
quibus  S.  R.  Majeftatem  ,  gentemque  Suecicam  in  odium  adducere  ,  res- 
que  ab  illa  fortiter  geftas  macula  adipergere,  laborai  compilator,  nemo 
non  intelligit.  Sed  ,  ut  opinari  licet ,  frultra  hic  malevolentiam  fuam 
confumfit.  Quibus  enim  artibus  famam ,  quam  ampliffimam  eile  ipfe  fa- 
tetur,  comparaiTent  Sueci,  novit  univerfus  Orbis  :  nec  magnopere  cu- 
pit  ,  ut  facundiâ  conviciatoris  alicujus  de  eâ  re  dôceatur.  Qui  ,  cum 
in  Suecis  alia  deflcerent ,  quse  dente  carperet  maiedico  ,  perpetuam  ar- 
morum  felicitatem,  reique  mjlitaris  ftudium  ,  criminatur.  Sed  ut  traélan- 
di  arma  neceiïitatem  illis  impofuerunt  aliorum  injuria,  qui  conjurati  to- 
ties  in  Suecicum  nomen  ,  extremam  moliti  funt  perniciem  ;  ita  fortu- 
nam  a  Deo  concefTam  haclenus ,  donec  juftitise  ac  virtuti  fludent ,  pro- 
pitiam  fore  fibi  pollicentur.  Longa  armorum  quies  ,  quâ  jam  uli  funt, 
docebit  non  minus  illacefîîtos  pacem  fequi  ,  quàm  ad  arma  prompri 
funt ,  cum  provocantur.  Itaque  gloriam  virtute  partam ,  virtute  in  po- 
ilerum  tuebuntur  :  née  ab  hac  perenni  conteftatâque  majorum  integrita- 
te  degenerabunt,  quàm  ad  pofteros  puram  immaculatamque  propagare, 
Deo  propitio  ,  cogitant.  Qui  vero  Suecorum  vires  acciiurum  fe  tara 
ïnfolenter  crepat  ,  non  reputat  ,  quàm  muki  fua  amiferint  ,  dum  aliéna 
feclantur. 

Non  obfcurè  autem  innuit  vitilitigator  ,  quo  hacc  valeant  con vicia, 
ôc  quafi  forex  fuo  fe  indicio  tandem  prodit.  Careliam  Ingriamque, 
quas  veteres  &  indubias  Mofcorum  provincias  appellat  ,  cum  inteitinis 
difiidiis ,  centum  circiter  ab  hinc  annis,  Mofcovia  laboraret,  Suecorum 
armis  occupatas    elle  ;   eas   hoc  bello   repetendas.     Hanc  igitur  genui- 

Gg  $  nam 


Affaires 

de  Suéde 

et  de 

Mosco- 

VIE. 


238    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

nam  hujùs  belli  caufam  effe  non  diffimulat  :  reîiqua ,  quse  ne  minimam 
quidem  jufli  imaginem  habent  ,  obtentui  fumta.  De  his  enim  provin- 
ciis  invadendis,  ut  portu  aliqao  maris  Bakhici  potiretur ,  minas  crebro 
jaftaffe  Czarum  conitat  :  &  certos  populos  ,  quod  teftibus  locupletibus 
compercum  eit,  ante  triennium,  cura  illos  adiiifet ,  immunitate  veétiga- 
lium ,  &  magnis  pollickationibus ,  in  partes  jam  tune  folickaiTe.  Quod 
cum  animo  fuo  fixum  deltinatumqne  haberet ,  Sueci  experiri  debe- 
bant,  quàm  levé  innocentiae  preefidium  fit,  ubi  libido,  viribus  inftructa, 
dominatur  ;  atque  hanc  fubire  tempeftatem,  quam  non  innocentiâ  fuâ, 
non  ullà  indultriâ  declinaiTent.  Neque  enim  folicitè  belli  caufam  qua> 
renti  defuturum  unquam  effet  ,  quod  fpeciofè  argui  pofTet.  Quanquam 
verô  harum  regionum  non  eit  controverfa  poffeflio  ,  in  quam  Sueci 
non  tam  gladio  inducti  tune  erant ,  quam  jure  poitliminii  &  pac- 
tis  folennibus  redierant  j  tamen  ut  il li  ,  quibus  veterum  actorum  co- 
gnitio  fortaffe  minus  obvia  eft ,  liquido  intelligant ,  quàm  juftè  ac 
légitimé  à  Suecis  illae  teneantur,  quàm  verô  improba  Mofci  cupide 
tas,  &  iniquitatis  plena  fit,  non  ab  re  fuerit  paulo  altius  quaedam  re- 
petere.  Ac  primùm  illud  a  vero  longiffime  abhorret ,  quod  antiqui- 
tus Mofcici  regni  fuiffe  lias  provincias  tradit.  Cum  enim  ex  Annali- 
bus  Mofcorum  domefticis,  tum  exterorum,  qui  veteris  aevi  monumen- 
ta  compofuerant  ,  clariflimè  patec  ,  &  nomen  &  regnum  Mofcicum ,  ob- 
feurum  antea  &  orbi  inauditum  ,  quadringentis  ab  hinc  annis  ,  demum 
emerfiffe  :  tune  quoque  perangultis  finibus  inclufum,  Scythis  feu  Tarta- 
ris  tributa  pependilTe,  donec,  circa  finem  feculi  decimi  quinti,  a  nato 
Salvatore  ,  Johannes  Bafilides  ,  avus  tyranni  ejufdem  nominis  ,  exeuflb 
jugo,  non  tantum  in  libertatem  fe  aileruit,  fed  etiam  vicinos  Rufliaî  po- 
pulos, longé  nobilio'res  Mofcis  potentiorefque,  tuncautem  inter  fe  difeor- 
dantes ,  majori  fraude  ,  quam  virtute  ,  paulatim  fuae  fubjecit  poteftati. 
Cum  Novogardiam ,  validam  tune  &  amplam  civitatem  proditione  quo- 
rundam  cepiiTet,  afportatis  veteribus  incolis ,  horridam  feramque  gentem 
fuam  in  eorum  fedibus  collocavit,  primusque  Mofcorum  in  Careliam  fi- 
nes imperii  protulit.  Itaque  ante  illud  tempus  nihiljuns  in  has  provin- 
cias fuiffe  Mofco  certum  eit  :  fed  quas  poitea  eadem,  quâ  finitima  quae- 
que  ,  ferocia  invadere  cœpit ,  caufam  interponens  ,  partem  earum  ad 
Novogardenfes  olimpertinuiiTe.  Suionumin  illas  jus  ac  imperium  omnem 
ferè  hominum  memoriam  excedit.  Nam  ut  vetuitiora  non  attingamus, 
feculo  poil  natum  Chriitum  nono,  cun6Hs  regionibus,  quas  Sinus  Finni- 
cus  interluit,  imperitaffe  Suiones  teftatur  Piiftoria  Scandica  :  atque,  ut 
domitas  in  officio  continerent  ,  &  barbaras  fimul  nationes  a  mari  Balthi- 
co,  quod  piraticis  îembis  infeftabant ,  arcerent,  conilitutoshabuiiTe  in  in- 
tïmo  hujus  maris  receffu  fiduciarios  quofdam  fui  fanguinis  Regulos,  qui  a 
prima  fede  ,  quam  in  infulis  litori  vicinioribus  habuerant  ,  Holmgardici 
prifeis  Annalibus  appellantur.  Unde  nomine  in  proximam  continentem, 
eorumque  ditioni  adjeftam ,  propagato  ,  Holmgardia  dicebatur  totus  ilJe 
trapus,  qui  Careliam, Ingriam,  &  JELMx  partem  hodie  compleétitur.  Flo- 

rentibus 


ET   D  E 

Mosco- 

VI  E. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  iyj 

rentibus  liorum  rébus  ,  quac  opibus  potiffimum  Suecorum  fulciebantur ,    Affaires 
omnis  barbarorum  vis  multis  astatibus  intra  remotos  ab  hoc  mari  fines  co-    DE SuEDE 
hibita  eit:  labefa&atis  iifdem,  &  regno  Holmgardico  cum  Rmhenorum, 
tum  Teutonum  in  Livoniam  irruptionibus  everfo,  cum  turbulentus  domi 
flatus  Suecos  a  ferendà  ope  prohiberet  ,  Ruthena  colluvies  e  paludibus 
fuis  prorumpens  ,  traftis  in  focietatem  Carelis,  maria  latc  percurfare  cœ- 
pit  ,  Sueciae  oris    maxime   infefta.     Compefcendis    horum  incurfionibus 
exercitus  miffus,  Careliam  brevi  pacavit,  receptaKexholmiâ,quam  rebel- 
les  infederant ,  anno  MCCXCII,  &  ,  paulo  poil ,  Lanscrona  arce  in 
faucibus  Lodogae  lacus  sediflcata.     Atque  ita  ad  primos  conditores ,  &  jam 
Finniae  ,  cujus  pars  olim  fuerat  ,  univerfae  dominos  Holmgardia  redibat. 
AtRutheni,  quorum  licentia  his  fhenis  coercita  erat,  gravem  Suecorum 
vicinitatem  rati,  quàm  primum  metus  aberat,  clauflra  revellere,&Sueci- 
cum  agrum  continuis  divexare  populationibus,  non  definebanc,  adjuti  vi- 
ribus  Lituanorum  Tatarorumque,  qui  eâ  tempeflate  Mofco  viam  tenebani. 
Ingentes  faepe  clades  pafli ,  pacem  inftaurant  :  rumpunt ,  ubi  occafio  in- 
vitabat;  tam  diu  de  alieno  certantes,  donec  ipfi  Mofcorum  tandem  inli- 
diis  praedae  ceiferint.     Ab  eo  tempore,  quod  a  nofirâ  setate  d-ucentis  pau- 
lo plus  annis  abefl,  has   regiones,  ut  antediclum,  Mofcus  fibi  vindicare 
cœpit,  diflriclà  tuncSuecià,  &  civilibus  difcordiis,  quas  exterorum  Re- 
gum  eleclio  excitaverat ,  propemodum  exhaufta. .    Ubi  ab  illis  refpiravit, 
lacefcente  Mofco,  cujus  libidini  nihil  falis  erat,  veteres  provincias ,  quas 
nullo  jure  ifle  invaferat  ,  Sueci  recuperarunt.     Provenit  ea  res  féliciter 
adeo,  utKexholmia,anno  MDLXXX,&Ivangardia,quam  MCCCCXCXVI 
occupaverat ,  hofli  ereptis,  praeter  Noteburgum ,  univerfae  in  Suecorum 
poteftatem  pervenerint.     Et  quanquam  iterum  Mofco  certis  legibus  per- 
mittebantur  :   pace  tamen  Stolboenfi,  anno  MDCXVII,  ob  navatam  ad- 
verfus  hofles  Mofcovise  operam,  in  perpetuum  Suecis  funt  reititutœ. 

Quse  fufius  in  publicis  monumentis  commemorantur ,  leviter  hic  per- 
ftringere  vifum  efî,  ut  conflare  poffit,  utri  Regno  accenferi  debeant  haa 
Provincial,  Sueciaene ,  cujus  à  remotiffimo  aevo  pars  fuerant,  an  Mofco- 
rum, qui  in  illas  noviffimè  involarunt,  ut  indidem  vicinos  populos  prae- 
darentur.  Quanquam  de  praerogativâ  aetatis  fupervacaneum  efl  difputare, 
cum  confiât  eequiiiimo  certiffimoque  jure  à  Suecis  nunc  poflîderi  :  quorum 
tanta  cum  in  totam  gentem  Mofcicam,  tum  familiam  regnatricem  mérita 
exilant,  ut  neutra  dignam  fatis  gratiam  illis  rependere  queat.  Haec  enim 
Suecorum  virtuti  débet,  quod  imperet  hodie  :  illa  quod  fuis  potius,  quàm 
alienis  dominis  pareat,  quod  avham  religionem,  quod  aliquod  imperii  no- 
men  habeat.  Ablque  Suecis  fi  fuiflet ,  aut  fceleratiiïimi  alicujus  Deme- 
trii  nepoti  ferviret ,  aut  alienum  jugum  hodie  ferret.  Cum  Mofcoviam 
exterorum  armis  obfelTam  recr-eaflènt  Sueci ,  ac  penè  ex  faucibus  fati 
ereptam  confervaffent ,  prorligatis  hoflibus  ,  &  ipsà  imperii  fede.  libera- 
tâ,  debilitatis  jam  Mofcis  &  abjeclis  quafi  fignum  ad  benè  fperandum 
primi  fuflulerunt.  Quid?  quod  cum  ipfam  Novogardiam  ,  oppida  quam 
plurima,   &  munimenta  ,  fuis   prajfidiis  tenerent  Sueci,    atque  adverfus 

hofles 


24o    MEMOIRES,  NEGOTÏATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    hoftes  longo  tempore  defenderent,  non  tantum  bond  fide  omnia  reddi- 
ueSof.de   derunc,  fed  etiam  jus  fuum  in  univerfum  Imperium,  quod  Mofci  Caro- 
îsîosco-     ^°  non°j  Suecorum  Régi,  ejufque  filiis  ,  oblatum.  jurejurando  confirma- 
vie,        verant ,    fefignarunt.     Quodnam   autem   par   tantis   laDonbus,  impenfis, 

■ ac  periculis  praemium  reportarunt  ?   Non   glebam   ullam   ex  toto  regno, 

quod  ab  intérim  revocaverant ,  fibi  retinuerunt  :  veteres  recepifle  Pro- 
vinces ,  quas  fumma  injuria  occupatas  reltituere  dudum  Mofcus  debue- 
rat,  unicum  lucrum  erat.  Tantulo  impendio  ,  (i  impendium  efl  ,  cum 
alienum  reddas,  tantum  Mofcus  Imperium  redemit.  Sed  illud  efl  in- 
gratiiiimœ  gentis  ingenium ,  ut ,  q.uos  ,  rébus  dubiis  ac  deploratis ,  tan- 
quam  cœlo  miffos  &  fofpitatores  fuos  olim  fummis  laudibus  extulerat , 
quorumque  fide  ac  tutela  ftetifle  fortunam  fuam  declaraverat  ,  eos  nunc 
turpiffimis  fraudibus  injuriifque  circumventos  opprimere  nefas  non  pu- 
tet.  Quae  tamen  bénéficia  à  Suecis  accepiffent  Mofci ,  ipsâ  eorum  con- 
feiïione ,  quœ  hic  apponitur,  cognofci  poteft  (Y). 

Itaque  fcrupulofius  forfan  ,  quàm  opus  effet,  fnvola  hcec  convelli  ali- 
quis  dicet  :  in  univerfum  autem  de  hujus  belli  injuititiâ  nemo  paulo 
sequior  dubitabit.  Quifquis  enim  hase  ,  qusc  dicTta  funt  ,  cum  adverfa- 
riorum  aceufatione  contenderit  ,  non  poterit  non  fateri  ,  neque  majori 
perfidiâ  ad  bellum  proceiîifle  quemquam  ,  neque  viliores  ineptiorefque 
ad  iilud  exeufandum  praetextus  attuliflè.  llluitrabit  autem  Sua:  Regiae 
Majeflatis  virtutem  iniquitas  perfidiofiiîimorum  hoflium  :  &.  caufee  inter 
fe  vehementius,  quàm  homines,  confligent.  Stabunt  ab  hac  parte  fum- 
ma  integritas ,  fides,  innocentia,  humanitas,  mens  bona  &  intrepida  : 
ab  altéra  confpicientur  calumnia? ,  fraudes ,  perjuria  ,  fidei  paclorumque 
violatio  ,  fera  immanifque  natura  ,  quam  odium  Dei  hominumque  co- 
mitatur.  Certè  his  omnibus  tanta  turpitudo  inefl  atque  fœditas  ,  ut 
non  unius  populi ,  fed  univerfi  generis  humani  hollis  atque  everfor  de- 
putari  debeat ,  qui  iilud  vinculum  ,  quo  focietas  omnium  gentium  con- 
neétitur ,  tam  temerè  rumpere  atque  violare  non  efl  veritus.  Quid  e- 
nim  ad  falutem  reliquum  erit  mortalibus  ,  û  non  perfidiam  innocen- 
tia ,  non  libidinem  fœderum  fanctitas  ,  non  perjuria  Dei  omnipotentis 
metus  inhibere  ac  refrenare  valeat  ?  Enimverô  ,  ut  haec  Mofci  auda- 
cia  quam  maturrimè  infringatur  ,  non  Suecias  tantum  ,  fed  omnium  e- 
tiam  vicinarum  gentium,  maxime  intereffe,  omnes  intelligent,  qui  pro- 
cellam  ,  quae  impendet ,  circumfpicere  mentibus  paulifper  voîuerint. 
Quam  nihili  putet  facra  omnia  inquinare  ,  quam  perfidus  fit  ,  quam  li- 
bidine  dominandi  ardens  ,  perfpicuum  in  Suecos  documentum  exilât  : 
quid  vero  cum  animo  agitet,  quidque  moliatur,  obfcurum  effe  non  potefï. 
Non  ili  beilum  hoc  ingreffus  efl,  ut  fu-as  fociorumve  injurias,  quicnul- 
lac  crant,  vindicaret,  fed  ut  barbariem  fuam  in  excultas  Europa:  regiones 
importaret.  Imperium,  quod  verfus  orientern  folem,  per  valïas  folitudi- 
nes,  ad  Sinenfes  prope  muros  extenditur,  in  occidentem  quoque  dilatare 
fibi  propofuit.  Tria  maria,  quoe  terras  in  immenfum  fpacium  porredtas 
alluunc,  non  fuffidunt  tanta?  aviditati:  fi  quartum  addi  poflet,   univerfas 

totius 


RESOLUTIONS  D'ETAT  ,  M;  DCC.  241 

totius  Orbis  opes  ad  fe  traheret,  easque  pro  lubitu  difpenfaret ,  turbatis  aut    .4f*aibF3 
everfis  omnium  aliarum  gentium  commerciis.     Obftare  Suecos  tam  infa-    dkSu*de 
nis  conatis  dolet:  quibus  proculcatis,  fperat  omnia  in  expedito  fore  :  tam-     ^T  DE 
diu  non  fufcipi  negocium  pofTe,  aut  certè  minori  cum  lucro.     Facillimum       Vi«." 
cnim  efle  aflentatores  perfuaferant,  ut  aromata  mercefque  Orientis  adver- 
fo  Indo  fubveclae,  atque  inde  modico  terreftri  itinere  in  Oxum  amnem , 
qui  in  mare  Cafpium  exoneratur,  traductœ,  apud  portum  Aftracanum  fa- 
cili  navigatione  fiiterentur:   unde  per  Mofcoviam  opportunis  plerumque 
fiuviis  in  oppidum  aliquod  maris  Balthici  comportatse,  quœitu  incredibili 
diftraherentur.     Quod  commodius  longé  iter   vifum  eil  ,  cùm  ad  fanum 
Archangeli  majori  circuitu  &  periculo  navigatur.     Non  nuper  hoc  confi- 
Hum  Mofcus  concepit:  vêtus  illud  efl,    ut  ex  Paulo  Jovio  difcimus  (Z); 
quod  haclenus  dilatum  defperatumque  vefano  impetu  jam  exfequi  ftatuit. 
Et  quis  fperet  hifce  finibus  tantam  contineri  pofTe  licentiam  ?  Quse,  ruptis 
femel  repagulis  ,   latius  evagaretur,  atque  novos  Attilas,    novofque  Ta- 
merlanes,  flagella  orbis  ,  produceret ,    fanguine   atque  csedibus  finitimas 
circumcirca  regiones  inundaturos.     Quàm  enim  proclive  effet  ex  vaftiffi- 
inis  terris ,  /atiuïmifque  ferarum  gentium  fedibus ,  nubem  cogère  horribi- 
lem,  tempeflates  a  fe  daturam,  nullis  viribus  ,  nulloque  humano  confilio 
poftea  evitabiles.     Et  quemadmodum  prima  vis  ac  ferocia  Suecis  incum- 
beret;  ità  illis,  quod  abfit,  debilitatis,  quin  eadem  omnes  maris  Balthici 
accolas  majori  poftea  violemiâ  corriperet  ,    dubitari  nequit.     Cernèrent 
tune  myoparonum  piraticis  roitris  fîerni  maria;  invehi  claiîibus  truculenta 
•barbarorum  agmina  ;  populari  urbes  -,   regiones  cultifîîmas  in  folitudinem 
redigij  difîipari  négocia;  miferandum  in  modum  csedi,  aut  in  fœdiffimam 
fervitutem  abftrahi  omnis  {exûs  mortales:  ne  illis  quidem  ipfis ,  qui  furio- 
fis  Mofcorum  deftinatis  jam  lenocinantur,  innoxium  lactumque  ipeclacu- 
lum. 

Sed  meliora  fperare  jubet  immenfa  Dei  bonitas ,  qui  hanc  peflem  a 
nobis  avertet:  &  ficut  fingulari  providentiâ  inviclum  Suecorum  robur, 
tanquam  propugnaculum,  furori  huic  oppofuit  ;  ità  porro  eorum  animos 
ad  avitam  veteremque  gloriam  inflammabit,  addetque  dignam  juftiiiimâ 
causa  fortitudinem.  Eundem ,  fupremum  rerum  omnium  arbitrum  & 
reclorem,  S.  Regia  Majeltas  Suecise  invocat  teftem  fuse  innocentiae,  ejufc 
que  Divinam  opem  implorât,  plena  fpei  ac  fiducie,  ut,  qui  flagitia  om- 
nia deteftatur,  nunc  quoque  temerati  fanclifîimi  nominis  fui  pœnam  a  fœ- 
difragis  ac  perjuris  expetat.  Confidit  denique  non  defuturum  fibi  favorem 
bonorum  omnium  ,  qui  contra  juris  gentium  violatores  ,  contra  perfido- 
rum  hoflium  nefariam  confpirationem  ,  contra  perniciofifïimas  machina- 
tiones,  pro  communi  denique  causa  confligentem ,  quantum  opibus  pof- 
fint,  votis  certè  &  fauftis  acclamationibus  juvare  atque  profequi  non 
ceffabunt. 


ïome  XL  H  h  Lit. 


Affaires 
peSuf.de 

ET    DE 

Mosco- 

VI  E. 


241    MEMOIRES,  NEGOTIATÏONS,  TRAITEZ,  ET 

Lit.  A. 

Artic.  24.  Pacis  Cardifienfis  5  1661. 


S 


/  qua  controverfia  inter  utrafque  partes  fuborta  fuerit ,  tune  praefeftus  âf  mi- 
nijler  iftius  partis ,  quae  injuriant  fibi  inlatam  putat ,  praefeclo  alterius  partis  £p 
magni  Domini  eam  indicabit ,  qui  absque  mord  convenire  debent  in  limite  utriusque 
regni ,  vel  aliquot  bonoratos  &?  bonae  fidei  viros  àb  utraque  parte  denominare  ,  qui 
ha/ce  lites  legitimo  modo  examinent  atque  amicè  componant. 

Artic.  25". 

Si  autem  négocia  majoris  momenti  inciderint  ,  quee  componere  non  pojfunt  provin- 
ciarum  limitanearum  praefecli  ac  gubernatores  ,  ijla  tune  ambobus  magnis  Dominis 
fignificahmtur.  Si  tune  magnis  Dominis  placuerit  mittere  fuos  legatos  vel  alios, 
quos-cunque  voluerint ,  ad  bas  lites  componendas  ,  earum  cognitio  tam  diu  differetur  , 
donec  ab  utriusque  partis  magnis  Dominis  aliquot  ad  eas  examinandas  mittantur , 
qui  in  ipfo  limite  vel  ubicunque  ex  conjenfu  utriusque  partis  commodiffimum  vifum 
fuerit  ,  libère  ac  amicè  concernent ,  atque  fie  pr opter  ejusmodi  négocia  convenientes , 
absque  mord  ex  jufto  â?  aequo  omnia  décident.  Praeterea  baec  perpétua  pax  nullis  de 
caufis  y  fcf  nullo  modo ,  abrumpenda  efi. 

Lit.  B. 

juramentum  Czari  pro  confervanda  aeterna  Face. 

GRatid  Dei  in  Trinitate  culti  Nos  Czarus  ,  Petrus  Alexii  filius ,   ejufdem  Deî 
nofiri  fervus  ,  fpondemus  coram  Deo  atque  hoc  fancto  Eva?igelio  ,    nos  omnia 
quae  cum  in  Nojirae  Czaricae  Majefiatis  ultimo  ratibabitionis  diplomate  ,   tum  in 
Suae  Regiae  Majefiatis  literis   cou  rmatoriis  per  omnia  conveniunt ,    exprejja  funt , 
fanclè  &?  fideliler  fervaturos  ,    atque   inviolatè  impleturos  ejfe.'    Mofcuae  1684.  àk 
20  Maii. 

Diploma  Ratihabitionîs. 

Nos  Dei  gratid  magni  Czari  £f  magni  Domini ,  Jobannes  Alexii  filius  ,  &?  Pe- 
trus Alexii  filius  ,  Nojtro  nomine ,  £f  Nofirorum  Dominorum  Haeredum  ,  qui  poji 
Nos  fut uri  funt  magni  Domini,  6f  magni  Principes  ,  promittimus  per  animas  Nof- 
trarum  Czaricarum  Majefiatum  ,  6f  in  Cbrifii  Dei  nofiri  fanctijfima  Evangelia  fpon- 
demus ,  Nos  magnos  Dominos ,  Nofiras  Czaricas  Maje fiâtes  ,  aeterna  foedera  Cardi- 
fienfia  ,  &  pacla  Plyfenfia  per  legatos  confecta,  ut  âf  conventionem  Mofcuenfem, 
fanctè , perpétua,  £f  inviolatè,  fine  ulla  mutatione ,  fervaturos ,  fecutur os ,  atque  imple- 
turos ejfe ,  in  omnibus  claufulis,  jaxta  eas  conventiones  ,  quas  magno  Domino,  Suae 

Cza- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  245 

Czaricai  Majejlati,  Parerai  Noflro  beatae  £?  aeternae  memoriae,  cum  Fejîra  Regia  Affaires 
Majejlate,  6?  regno  Sueciae ,  per  fupradiclkos  magnos  legatos,  in  congresfionibus  ad  deSuf.de 
Cardifiam  y  PlyJ'am,  &  Mofcuae  inftitutis  ,  inire  placuerat.  Mofcuae  1684.  die 
20  Maii. 


Alterum  Pétri  Alexii  Diploma  Ratihabitionis. 

Nos  Petrus  Alexii  filins ,  Dei  gratid  magnus  RuJJiae  Czarus ,  pro  Nobis  &  Nof 
tris  Dominis  fuccejjoribus ,  futuris  magnis  Dominis ,  6?  magnis  Principibus  Rusfiae, 
hoc  ratihabitionis  diplomate  affirmamus ,  Nos ,  magnum  Dominum  ,  Nojlram  Czari- 
cam  Majeflatem  ,  perpetuum  hoc  Cardifienfe  fœdus  ,  paàa  Plyfenfia  ,  per  legatos 
Nojîros  utrinque  confetla ,  Jimul  6f  conventionem  Mofcuenfem  ,  fideliter ,  conftanter, 
Ê?  invioîatè  fervaturos ,  fine  ulla  mutatione ,  eaque  in  omnibus  claufulis  juxta  paSlo- 
rum  tenorem  fecuturos  effe.     Mofcuae  Anno  1699  die  8  Nov. 

Ex  Literis  3  quae  ad  Suam  Regiam  Majeftatem  cum  Legatis  do- 

mum  redeuntibus  miflae  funt. 

Nos  Petrus  Alexii  filius  £?c.  declaramus ,  Nos  velle  juxta  tenorem  aeterni  foede- 
ris  Cardifienfis ,  patti  Plyfenfis,  &  Mofcuenfis  conventionis ,  cum  Regia  Veflra  Ma- 
jejlate  in  arnica  vicinia  &  perpetuo  amore  perfijlere  :  cujus  rei  gratid  £f  Nos  Veflrae 
Majejîatis  diploma  confirmationis  a  legatis  Regiae  Veflrae  Majejtatis  fufcepimus  ;  at- 
que  pariter  hoc  noftrae  ratihabitionis  diplomate  fupradicla  foedera  atque  pacta  confir- 
mamus  ,  quae  inviolata  in  pojlerum  tempus  manebunt.  Mofcuae  1699  die  20  Nç~ 
'vembris. 

Lit.  C. 

Literae  Czari  Mofcorum  ad  Sacram  Regiam  Majeftatem  Sueciae, 

1700  die  24.  Aprilis. 

NOS  Dei  gratid  magnus  Dominus  Czarus  ac  magnas  Princeps  ,  Petrus  Alexii 
filius  (tit.)  Vobis ,  potentisfime  ac  ferenisfime  Princeps,  Domine  CAROLE, 
Rex  Suecorum  &c.  (tit.)  Regiae  Vejlrae  Majejlati  falutem  amicè  deferimus.  Pla- 
cuit  Nobis  Nofiraeque  Czaricœ  Majejlati  ad  Regiam  Vejiram  Majeflatem  mitters 
nojlrum  intimions  admis fionis  cubicularium  &f  Knefium  Andream  Chilcovium  ,  ut 
indicaret  adventum  nojlrorum  magnorum  £f  plenâ  potentid  i?iJlruàorum  Legatorum , 
quos  Nos  magnus  Dominus ,  Nojlra  Tzarica  Majejlas  ,  vigore  perpetuae  pacis ,  ad- 
que  eandem  porrb  confirmandam ,  ad  Vejiram  Regiam  Majeflatem  defiinàvimus ,  quo- 
rum adventum  coram  Veflrae  Regiae  Majejîatis  magnis  £f  plenipotentiariis  Legatis, 
per  Noftrae  Tzaricae  Majejîatis  Senatores  in  colloquio  Mofcuae  habito  jam  tum  fi- 
gnificavimus ,  nulli  Nos  magnus  Dominus  ,  Noftraque  Czarica  Majejlas  ,  dubitan- 
tes ,  quin  Veflra  Regia  Majejlas  curet  ,  ut  iidem  nojlri  magni  Legati  ,  juxta  teno- 
rem aeternae  pacis, pro  dignitate,  excipiantur  in  vejlris  finibus }  £f  ad  regiam  vejiram 

H  h  2  fedem 


ET   DE 

Mosco- 

VIE. 


244    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


5>K  Suéde 

ET    DE 

Mosco- 

VIE. 


Affaires  fedem  debito  modo  deducantur.  Eidem  autem  nofiro  ablegato  ,  Nos  magnus  Domi- 
nus ,  Nofira  Czarica  Majefias ,  in  mandatis  dedimus  ,  ut  poftquam  nofirorum  ma- 
gnorum  &  plenipotentiariorum  Legatorum  adventum  fignificaverit ,  ad  aulam  Vefirae 
Régine  Majefiatis  pofimodo  ut  Refulens  permanent ,  fecundum  conventionem  Mofcmê, 
inter  Regiae  Vefirae  MajefiatU  magnos  £f  plenipotentiarios  Legatos  nojlrosque  inti- 
mos  Conjiliarios  ,  faclam.  Qjiare  Nos  magnus  Dominus  defideramus  ,  ut ,  ratione 
amicae  viciniae  mutuique  amoris  ,  velit  Vefira  Regia  Majefias  hum  modo  nomina- 
tum  Refidentem  ad  fuam  regiam  admittere  ,  atque  cum  debito  honore  ibidem  commo- 
rari  finere  ,  &  praeterea  jubere  fuos  Jubditos ,  ne  ipfi  faciant  impedimenta  in  corn- 
municandis  Nobiscum  omnibus  ,  quae  [cire  nofira  interefi.  Denique  Nos  magnus 
Dominus ,  Nofira  Czarica  Majefias  optamus  Vefirae  Regiae  Majeftati  multorum  an- 
norum  falutem  &f  incolwnitatem ,  atque  in  vefiro  regno  felicisfimum  imperium.  Scrip- 
îum  in  nofiro  regno  atque  regia ,  in  magna  Czarica  Urbe  ,  Mofcud  ,  anno  pofi  na- 
tivitatem  Salvatoris  nofiri  Jefu  Chrifti  ,  1700  die  24  Aprilis  ,  imperii  nofiri  anna 
decimo.  ofôavo,. 


Lit.  D. 

Literae  Knipercronae  ,  qui  Refidentis  munere  fungebatur  in  Ail- 
la Mofcicâ ,  datae  Mofcuae  1700  die  16  Maii. 

SUA  Czarica  Majefias,  die  14  hujus  menjïs  ,  falva  &  incoîumis  ab  oppiâo  Voro- 
roniciâ  hue  rediit  ,    atque  die  infequenti  me  domi  meae  convenit.     Inter  aiia  ef- 
fufae  benignitatis  pignora ,  Janctè  affirmavit  ,  nibil  Je  contra  Suam  Regiam  Majefta- 
teni  Sueciae  îiiali  vel  cogitare  vel  moliri.     Uxorem  meam  joco  increpuit  ,    quod  pliai 
fcripfijjet  ,   defiïnare  Czaricam  Majefiatem  cum  exercitu   ver  fus  Livoniam  proficifei, 
&  propterea  nos  omnes  Mofcuae  magno  in  timoré  vivere:  Filiam,  inquiens  ,  tuam  ef- 
fu/ius  lacrymantem  confolari  vix  potui\  âf  mepta,  dixi  ,  tu  non  meliora  de  meo  ani- 
rao  fperas?  putasne  me  injufium  btllum   Régi  Sueciae  illaturum  ,  rupturumque  aeter- 
fium  foedus ,  quod  fervat  arum  me  fanftè  promijèram?  limita  je  benignam  ckmentem- 
que  gerebat ,  ut  prae  gautio  à  lacrymis  abjiinere  vix  potuerimus.     Cumque  implora- 
rem  ,    ut    ignorantiam  uxoris  meae   exeufaret  ,   me  familiariter  amplexa  efi.     Intsr 
alla ,  JîngLiluri  plané  affecta  Sua  Czarica  Majefias  dicebat    Regem  Pohniae  vel  Ri- 
gam  occupaturum  ,    vel  fuas  vires   omninb  attriturum  ,  cum  alioquin  ignoraret  ,  ubi 
commode  vitam  degeret.     Atqui ,  fubjecit ,  Jî  Rigam  Suecis  adimat ,  eam  tamen  non 
retinebit  :  îllam  ego  profeào  manibus  ej'us  eripiam.     Conjlantinopoli  nibil  certi  de  par 
c'a  allât um  ejî.     Mofcuae  die  16  Maji  1700. 


Lit. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  14? 

Affairim 

Lit.  E.  DR  SuEDE 

ET    DE 
JVÎOSCO 

Ex  Literis  Legati  Suedici ,  illuftris  Viri  3  Lilierotii  ,  Hagae  24^      vie. 

juin  1700. 

PRaeterito  die  Martis  me  convenit  Legatus  Mofcicus ,  atque  inter  alia  iterum  plu- 
ribus  verbis  teftatus  ejl  Principis  fui  Jîncerum  firmumque  propojïtum  colendi 
cum  Vejlra  Regia  Majejïate  amicitiam.  Ego  rurfus  affirmavi,  Regiam  I  rejlram  Ma- 
jejlatem  nunquam  babuiffe  fidem  malevolorum  faljis  rumoribus ,  fed  fiduciam  certisfi- 
mam  ponere  in  Czari  candore  atque  conjlantid  ,  qui  etiam  à  Jua  parte  fibi  polliceri 
poffet  j  Regiam  Vejlram  Majejlatem  nib.il  praetermiffuram  ejje  ,  quod  ad  banc  amici- 
tiam porro  confirmandam  augendamque  faceret.  Et  cum  pacis  negocium  cum  Rege 
Poloniae  commendajjet  ,  addidit  ,  confultum  Régi  illi  fore ,  ut  quantocius  Regiae 
Vefirae  Majeftati  cenciliaretur ,  quum  nulla  omninb  fpes  effet  auxilii  à  Czaro  impe- 
trandi.     Interea   E.   Br.  Secretarius ,  heic  locorum  commorans ,  retulit ,  quod  quam- 

vis  Czarus  bac  ratione  mentem  fuam  déclarant  ,  non  tamen  certo  quis  promiffis  ejus 
fidere  pojjet.     In  proclivi  enim  effe  ,  fua  promiffa  in  alium  fenfum  detorquere  ,  quafi 

noliet  pacem  cum  Regid  Vefird  Majejïate  fafitam  vîolare ,  verum  ne  impediretur ,  vi- 
gore  foederis  cum  Rege  Pulo7iiae  initi ,  auxilia  ipji  mittere.  Çhiamobrem  ,  ficut  Le- 
gatus Mofcicus  mibi  propiorem  amicitiam  obtulerat ,  atque  rogaverat  ,  ut  ipjum  non 
celarem ,  fiquando  Jînifter  aliquis  rumor  de  Czaro  fpargerttur  ;  ita  banc  occajiuneni 
captans  mentem  ejus  explorandi ,  Secretarium  Hildebrandiwi  ad  eum  mifi ,  qui  prout 
inter  nos  conventum  fuerat ,  rumores  bofce  indicaret.  Laudavit  banc  fiduciam  Lega- 
tus :  fed  juxta  baec  fummoperè  admiratus  ejl  ejufmodi  rumores  absque  filndament» 
fpargi,  dixitque  abfurdam  effe  hominum  arrogantiam ,  qui  penitius  in  intimicm  Cza- 
ri confilia  penetraffe  fe  putaverint ,  quàm  ille  ipfe ,  cui  ifia  utique  nota  efe  cïebeant.. 
Czarum  fuum  anîmum  finceris  explicaffe  verbis ,  quibus  Regia  Vefira  Majeftas  tut» 
confidere  pojfet.  Qiiae  ipfe  mibi  dixerat ,  v.era  effe  atque  firma.  :  caeterorur.i  fabulas- 
contemni  debere. 

Ex  Libello  memoriali  Praepotentibus   Foederati   Belgii   Ordini- 
bus  exhibito  die  4  Septembris'   1700. 

MEmoratus  enim  Czaricae  Majejlatis  Legatus  plus  und  vice  banc  domîni  fui  cleraen- 
tisfimi  mentem  tejlatiorem  reddidit ,  idque  validisjimis  deelarationibus  conjlitutum 
ei  effe ,  non  tantum  hello ,  quo  Livonia  fiagraî ,  fe  non  immifcere  ,  fed  £?  amicitiam 
cum  Sud  Regid  Majejïate  omni  exquifito  ojficiorum  génère  excolere  ;  cahcmniam  ap- 
pellans  ,  quicquid  buic  adverfum  maligni  bomines  divulgare  'conaii  funt.  Ufus  ejl 
bac  occajione  verbis  memovatu  profeào  dignis  ,  utpote  immortale  decus  Czaricae  Suae 
Majejlati  conciliaturh :,  £?  quae  praeclarum  exemplam  praebeani  aliis ,  nifi  finijlui 
viliorque  mens  effet,  imitandum.  Haec  fcilicet  vcrba  fuerimt  :  Saemffimum  Czarum 
■itàin  animum  vnduxiffe  fuum,  ut  ante  omnia  fidei  datae  rdigiojisjimus  cidior  au  lire 
velit  i  memorem  nimirum  effe ,  infidere  Je  folio  nuUi  totius  orbis  potentki  jècïmdo-  ,  J'e- 

H  h  3,  .  que. 


ttf    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    que  adeb  tam  excelfo  loco  pofitum ,  nibil  imquam  committere  velle  ,  quo  tanto  faftigio 
Suéde    minus  dignus  cuipiam  videatar  :  averfari  igitur  fe  £f  adfpernari  quodcunque  indeco- 
rum  f admis  ,  quod  praefens  vel  futura  aetas  ipfi  exprobrare  posfet  :  id  quod  fient , 
Ji  amicum  Regem ,  nullâ  injuria  hcesjitus ,  bello  adoriretur. 


DE 
ET   DE 

Mosco- 

VIE. 


Lit.  F. 

Epiftola  Czari  ad  Regem  Poloniae. 

FRATER  DILECTISSIME  ET  DOMINE  VICINE: 

NON  dubium  ejje  débet ,  quin  propojîtum  noftrum  res  arduae  bacienus  moratae 
Jint:  quoniam  tamen  nunc ,  auxiliante  Deo,  pax  cum  Turca  triginta  annorum 
fancita  efi  ,  &  quidem  conditionibus  non  poenitendis  ;  jam  toti  in  eo  Jumus  ,  ut 
quàmprimum  .bellum  Régi  Sueciae  inferatur ,  âf  fadtâ  in  hojliles  fines  irruptione ,  io- 
ca  opportuna  occupentur.  Qiiem  in  finem  legiones  nojlras ,  quanta  pojjumus  fejli- 
natione,  praemiffas  ipfi  circa  finem  bujus  menfis  infequi  cogitamus  ,  pleni  fpe  ,  £? 
Dei  auxilio  confidentes.  Speramus  igitur  votis  Diledtionis  vejlrae  abundè  fatisfac- 
tum  wi. 

Veltrae  Majeflatis  bonus  Frater, 

Mo/cou  die  9  Augufti  P  E  T  R  U  S. 

1700. 

Lit.  G. 

Ex  memoriali  Libello  Legati  Mofcici  ad  Ordines  foederati  Bel- 

gii  die  2  Septembris  1700. 

CELSI  AC  PRAEPOTENTES  ORDINES, 

CUM  mibi  Literae  die  16  Junii ,  Mofcoviae  exaratae ,  pojleriori  demum  nuntio9 
Augufti  die  18  hic  traditae  funt ,  quae  quoddam  Mandatum  Suae  Czaricae  Ma- 
jejlatis  continuant ,  quod  P.  C.  ac  P.  Domination! bus  absque  alla  mord  infinuandavi 
fit ,  ideb  -  -  mearum  partiwn  ejje  duxi ,  illud  cum  Mis  communicare ,  demonftraiis  te- 
norem  illius  fequenti  modo  :  Quod  cum  de  Refponjîone  certior  facta  fit  Sua  Czarea 
Majejlas  à  Celfijfmiis  ac  Praepotentibus  Veftris  Statibus  ,  illos  perbenignè  accepijje  , 
(quod  Sua  Majejlas  bello  Lwonienji  cum  Coronâ  Suecicd  fefe  immifeere  no- 
luit)  hoc  admodum  contenta  efi  i  banc  eam  démon ftrationem  fuam  nunc  illaefè  objer- 
vare ,  ac  pacem  absque  offen/ione  cum  Corona  Sueciae ,  ob  peùùonem  Celforum  ac  Prae- 
poteîitium  Statuum  confer-vare  velit. 

Ex 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M,  DCC.  247 

Affaires 

Ex   Libello   ejusdem    die   6    O&obris     iroo.  deSuedb 

»  E  T   n  ». 


D  Elude  recepto  etiam  Suae  Czaricae  Majejlatis ,  clementisjîmi  Domini,  perbenigno 
Mandato,  in  colloquio  Veflrorum  Celforum  ac  Praepotentium  Dominorum,  Dominis 
tum  temporis  exijlentibus  deputatis,  Domino  Ham ,  caeterisque  demonjlravi ,  quod  Sua  Cza- 
rica  Majejlas  fuperiorem  fuam  Declarationem  Vejlris  Dominationibus  faàam ,  ad  pacem 
juxta  requifitionem  l^ejlrarum  Domi?iationum  cum  Coronâ  Sueciae  confervare  velit  ,fed  ut 
Celjae  Veflrae  Dominationes  finaliter  demonfirarent  Minijiro  Suecico ,  ac  Regiae  Majejlati 
Suecicae  tranferibant  de  fequenti  negotio ,  quoniam  in  praefentià  ac  commoratione  ma- 
gnorum  ac  plenipotentiariorum  Legatorum  Suecicorum  ,  Mojcoviae  ipjîs  diàum  fuit 
fufficienUr  cum  requifitione ,  de  communibus  injuriis  in  partent  Suae  Czaricae  Ma- 
jejlatis ,  clementijjhni  mei  Domini ,  maxime  autem  de  eâ  quae  ad  dedecus  Suae  Cza- 
ricae Majejlatis  pertinet ,  ac  Rigae  ipfi  illata  ejl  ;  cum  toti  ferè  mundo  conjiet ,  Suam 
Czaricam  Majefiatem  Rigae  fuiffe  praeteritis  amis  ,  ac  iterfuum  intendijje  verjus 
Bataviam. 


Lit.  H. 

Libcîlus  LegaÉi  Mofcici ,   qualis  Lalino  Sermone  Praepotentibus 
Belgii  foederati  Ordinibus  exhibitus  eft. 

CELSI  AC  PRAEPOTENTES   DOMINI, 

CUM  mihi  literae  die  i<5  Junii ,  Mofcoviae  exaratae,  pofteriori  demum  nuntio9 
Augujli  die  18,  hic  traditae  funt ,  quae  quoddam  Mandatum  fuae  Czaricae  Ma- 
jejlatis contineant ,  quod  V.  C.  ac  P.  Dominationibus  absque  ulld  mord  injinuandum 
fit ,  ideb  mearum  partium  ejje  duxi,  illud  cum  Mis  communicare ,   dcmonjlrans  teno- 
rem  illius  fequenti  modo  :  Quod  cum  de  refponfione  certior  faàa  fit  Sua  Czarica  Ma- 
jejlas  à  CelfiJJimis  ac  Praepotentibus  Dominis  Statibus  ,  illos  perbenignè  accepijje  (quod 
Sua  Czarica  Majejlas  bello  Livonienfi  cum  Corona  Suecica  fefe  immifeere   noluif) 
hoc  admodum  contenta  ejl ,   banc  eam  demonjlrationem  fuam  nunc  illaesè  obfervare , 
ac  pacem  absque  offenfione  cum  Corond  Sueciae,  ob  petitionem  Celfisfimorum  ac  Prae- 
■potentisfimorum  Statuum ,  confervare  velit.  Tantum  defideraî  apud  illos  Celfos  ac  Prae- 
patentes  Dominos  Status ,   ut  finaliter  Jignificent  Minijiro   Suecico  ac  Suae  Regiae 
Majejlati  feribant ,  quod  in  commoratione  magnorum  ac  plenipotentiariorum  Legaior dm 
Suecicorum  ,     Mujcoviae   locutus  fit  illis  intimus  Bojarinus  ac  Pro-Rex  Siberiae  3 
Tbeodorus  Alexides  Golovinus ,  cum  Collegis ,  de  communibus  injuriis  in  partem  Suae 
Czaricae  Majejlatis ,  maxime  autem  inter  alias ,  de  bac ,  quae  in  dedecus  ipfius  Cza- 
ricae Majejlatis  perfonae  illata  ejl    Rigae,   cum  toti  ferè  mundo  conjiet,  quod  Sua 
Czarica  Majejlas  praeteritis  annis  Rigae  fuerit ,    indeque  in  Bataviam  proficifei  vo- 
luerit ,  quod  fe  qiioque  facturos  ac  relaturos  effe  absque  ulld  mord  ad  Sacram  Regiam 
Majefiatem  in  reditu  fuo  promiferunt ,  qui  de  re  etiam  illis  feriptum  tmditum  ejl , 

cum 


£  T    D  E 

Mosco- 

V  IE. 


248     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    cum  fubfcriptione  manuum  fupradiftorum    Conciliariorum  Mufcoviae ,  fed  boc  usqus 

tie  Suedk  a(i  iempus  nuUum  refponfum  fecutum ,  nec  ulla  adhuc  fatisfadtio  praejlita  efi.  Qitamr- 

Moc^-    obrem,  Celjî  ac  Pracpotentes  Domini,  bis  benè  ac  prudenter  perpenfis ,  de  injunae  ip- 

\  ik.       fins  perfonae  Czar.  Majejtatis  fatisfactione  vindiâd  dignd  Jcribant.     Quae  autem  £? 

quales  illae  fint  injuriae ,  C.  ac  Praep.  D.  D.  fufius  exponetur  in  adjunfta  ebarta, 

quitus  interea  perpétua  profperorum  fuccejjuum  incrementa  apprecor  ,  manfurus  ad 
quaevis  amicitiae  officia  paratisfimus.  Hagae-Com.  die  2  Septembris  ,  Anno  1700. 
Signacum  erat  :  Suae  facratiffimae  Czar.  Majejiatis  ,  magni  potentijjimi  Imperatoris 
Mufcoviae,  intimus  Okolnicki,  locum  tenens  Jaroslavius ,  Legatus, 

Andréas  Artemonides   Marviecz. 


Adjunclus  erat  Libellas  hic,  Caufas  Belli  continens. 

CUM,  anno  1697,  Czar.  Majejiatis  magni  ac plenipot.  Legati,  ex  mandata  iter 
fuj'cepijjent  Mufcoviâ  cum  quibusdam praeclaris  voluntariis  (voluntaires  vulgofic  die- 
tis)  in  régna  Europaea  per  ditionem  Suae  Regiae  Majejiatis  per  urbem  Rigam,  tune 
in  praefata  urbe  non  tantum  in  receptione  juxta  obfervantiam  tradtatus  pacis  ,  fed 
etiam  in  commoratione ,  maxime  autem  in  dijcejju  ,  Mi  non  tam  fatisfacli ,  quin  po- 
tins injuria  ac  opprobrio  affiecli  &P  inimicè  tractati  funt ,    cujus  hic  ex  parte  mentio 
Jit.     Certior  enim  fdàus  Dominus  Generalis  ac  Gubernator  urbis  Rigenfis  ,  per  Uté- 
rus ipforum  de  adventu  magnorum  plenip.  Legatorum  in  confinid  ,  nejcivit  illos  jux- 
ta dignitatem  recipere ,  ac  idoneos  praefettos  receptionis  ÇPriftavos)  nec  equos  Mis  mit- 
tere ,  aut  pabida  dare ,  non  modo  ob  amicitiam  vicinam,  aut  alias  ob  caufas  ,  fed  illud 
quoque  nequaquam  pecunid  expeti  potuit ,  quâ  ratione  usque  ad  Rigam  iter  fuum  ma- 
ximd  egejlate  in  fais  equis  profequi  coaàijùnt.     Rigae  autem  non  modo  ab    bonejlis 
viris  &f  nobilitate  in  receptione   bonorati  ac  recepti  non  funt  ,  fed  à  parvo   numéro 
mercatorum  ipfis  occurfus  fadtus  efi.     Ajfignata  funt  ipfis  domicilia  baud  bona  & 
quidem  mercatoria ,  pro  quitus  autem  Mi  coafti  funt  folvere  pecuniam  pro  talitus  li- 
gnas hypocauftis ,  pro  qualitet  domo  tantum,  quantum  pro  magnis  lapideis  palatiis. 
Ad  baec ,  à  nemine ,  re  ulld ,  honoris  gratid  donati  funt ,  (quod  etiam  non  defidera- 
runt)  Jed  ignominiosè  tempore  diei  fanBae  refurreàionis  Cbrifii,   caeterisque  omnibus 
diebus  ,  nibil ,  nec  pabula  pro  equis ,  vendiderunt ,  quod  autem  Mi  vendiderunt ,  pro 
boc ,  quamvis  Legati  ijti  magni  pecuniae  non  pepercerint ,  plures  decies  fibi  Jbivi  cu- 
rarunt.     Apud  aurigas  (Muscoviticos)  etiam  equos  bonos  pro  pretio  minimo  ob  inven- 
àibile  pabulum  decem  Jliveris  (folidis)    fcp  paulo  pliais  quafi  fub  venditione  fumj'e- 
runt.     Perfonas,  aefervos  ad  legationem  pertinentes  ,  absque  vigilibus  nulliti  ire  aut 
tranfire  non  fiverunt ,  ac  quemeunque ,  quascunque  etiam  ot  caufas  ire  voluerint ,  fe- 
quuti  funt  milites  duo ,  dut  plures  tanquam  maleficum  ,  &?  plures  fex   hominum  nu- 
méro non  intromiferunt  in  urbem  ,  nec  etiam  in  areem  ad  Gubernatorem  ,  fed  prae- 
terei  graviter  in  eos  investi  funt ,  ac  contumelia  eos  affecerunt ,  £?  ijlos  loco  capita- 
l'um  bojlium  ac  cxplcratorum  babuerunt.     Ad  baec  illos  percutere  ac  detinere  gloriati 
funt  ,  quod  autem  man'fcftum  Dci  patrocinimn  non  per  mi  fit.     De  ceteris  autem  vertis 

meliiis 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  24? 

fncîius  tacere  quâmfcribere  convenit:  quod  autem  omne ,  ob  malam  adminijlrationm ,  Amx*M 
à  Domino  Générale  ac  Gubernatore  confulibusque  provenu.     Ouamvis  autem  Suae  Cza-  drSo«dh 
ricae  Majejlatis  magni  Legati,  de  hoc&  alio  multoties  praeciaros  fuos  nobiles  ad  eum    ^05C3. 
mijerint,  conquerentes  dejuo  infortunio ,  attamen  Me  non  tantum  ipfis  in  bac  re  auxi-      yfr. 
Hum  ferre  recufavit ,  fed  etiam  eos  magnos  Legatos  confolari  ac  deleclare  noluit.  Mon- 
Jîrans  fenfibile  ad  amicitiam  faftidium  fimulaîè  dixit ,  fe  jacere  aegrotum  ob  obilumfi- 
liaejuae,  quam  ob  caufam  Je  Dominos  ple?ùpot.   Legatos   invifere  non  pvffe,  cum  ta- 
men  hoc  nihil  fuerit. 

In  dijcejfu  magnorum  illorum  Dominorum,  ac  plenipotcntiariorum  Legatorum  ex  Ri- 
ga ,  trans  fluvium  Duinam ,  eos  non  modo  quihufdam  navibus  bonejiioribus  (  Jachti 
£?  Boot  )  non  honoravit ,  fed  etiam  pro  parvis  ac  ferè  deformibus  fcaphis,  cum  qui- 
bus  eos  milites  ac  alii  mer  cède  conducli  aurigae  tranjvexerunt ,  pretium  fumptum  ejl 
tantum,  quantum  pro  navibus ,  £?  ad  confiîiia  ufque  Ducis  Curlandiae  deduài  fuivt 
illi  abjque  ullo  honore  atque  comitatu.  Curfor  magnorum  ac  plenipotentiariorum  Lega- 
torum Jacobus  Suraivetz  mijjus  è  Curlandia  in  Rigam,  à  Domino  Generali  Guber- 
natore très  dies  detentus  ,  &  examini  fubjeâus  ejl ,  ut  diceret ,  ubi  Sua  Czarica  Ma- 
jefias  nunc  degat ,  £f  alla  buic  contraria  verba  ;  praeterea  lujlrationi  ac  vifitationi 
expo  fit  us  ,  atque  fummo  opprobrio  affectus  ejl ,  ac  ignominiosè  tanquam  inimicus  c? 
captivus  in  arrejlo  detentus,  &  non  modo  fcripta  aut  literae ,  fed  etiam  res  penè  om- 
îtes ei  ablatae  £f  accuratè  perluflratae  fuerunt ,  quem  demum  ,  cum  nihil  contrarii  in 
ipfo  inveniffent ,  cum  omni  exactione  ac  dedecore  mijerunt.  Adhuc  etiam  erubefcunt 
illi  grati  Domini,  Mis  magnis  ac  plenipotentiaris  Legatis  Suae  Regiae  Majejlatis  praeter 
alla  cujufdam  barbaricae  ac  invifae  Jufpicionis  Domini  Generalis  ac  Gubernatoris  Ri- 
■  genjis  reminifci ,  quod  multifariam  ad  magnos  ac  ple?iipote7itiarios  Legatos  mittens  t 
ajperè  vociferatus  fit ,  quafi  quidam  ex  minijlris  ac  perfonis  ad  legatione?n  pertinenti- 
bus ,  circumeundo  urbem  fortalitia  ac  munimenta  lujlrent  ac  dimetiantur ,  vocifera- 
tiones ,  turbines,  ac  quemcunque  tumultum  excitent;  quod  verb  fub  verâ  promiffione 
non  factum ,  &?  omnes  cum  vigilibus  ire  cogebantur.  Ad  quid  Suae  Czaricae  Maje- 
jlatis mag?ii  ac  plenipotentiarii  Legati  refponderunt ,  ut  illud  facientes ,  Jî  modo  qui- 
dam ex  minijlris  Legatorum  cujufcunque  conditionis  ijlae  perfonae  fint ,  tanquam  male- 
Jici ,  juribus  quibufcunque  illi  velint ,  capti  fuerint ,  dijudicarentur ,  propterea  quod 
nobis  certb  certius  conjlet ,  hoc  ab  ullo  ex  Mis  fieri.  Cum  autem ,  tempore  vernali  in- 
gruente ,  magni  ac  plenipotentiarii  Legati  naves  fibi  procurare  defiderarent ,  ad  con- 
ficiendam  Jibi  propojitam  viam,  mittendo  quofdam  minijlros  in  portum  ad  mare  Jt- 
tum ,  ut  naves  ijlas  praefcitu  Generalis  ac  Gubernatoris  lujlrarent ,  tune  non  tantum 
ijlos  non  per  urbem ,  vel  propè  urbem  tranfmiferunt  via  ordinariâ ,  fed  eos  circa  om- 
nia  fuburbia ,  in  agro  circumduxerunt  ,  militibus  circa  plateas  cum  fclopetis  Jlanti- 
bus.  Sed  de  aliis  feribere  non  necejje  ejl ,  quia  jam  toti  mundo  notum  &f  compertum 
ejl ,  quod  Sua  Czarica  Majejlas  ipfa  in  perfona  Mo  tempore  cum  magnis  &  plenipo- 
tentiariis  Legatis  praefens  fuerit ,  £f  baefupra  memoratae  omnes  contumeliae  ipfam  per- 
fonam  illius  tetigerunt.  Qiiapropter  Suae  Czaricae  Majejlatis  intimus  Bojarinus  cum 
Collegis  fuis  exijlens  in  colloquio  ,  Suae  Regiae  Majejlatis  magnos  ac  plenipotentiarios 
Legatos  rogat ,  ut  de  bis  omnibus  ad  Suam  Regiam  Majejlatem  verè  deferatur ,  &? 
Suae  Czaricae  Majejlatis  fummo  bonori ,  £f  pojl  ipfum  magnis  ac  plenipotentiariis 
Tome  XL  \\  Lega- 


iSo    MEMOIRES,  NEGOTI ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

affaires    Legatis  in  omnibus  fatisfattio  ac  defenfio  ab  Ma  injuria  fiât  ;  jiquidem  bac  injuria 

ce  Suéde    ac  dedecuS  mn  iantum  Traàatibus  Paris  &  vicinitati  admodum  contraria  ac  infenfa , 

et  de      je^  etiam  juri  communi  Gentium  valdè  incongruens  atque  inutilis  audit ,  de  quo  non 

VIE.       dubitat    ClementiJJimus  Nojler  Czar  ac  Dominas ,  quin   Sua  Regia  Majeflas  ,  tan- 

quam  Dominus  valdè  prudens ,  propenfo  hoc ,  quod  ad  majorent  amicitiam  pertinet  r 

dederit  defenfionem  adverfus  hanc  contumeliam  perpétrantes ,  &?  Suae  Czaricae  Majs- 
fiati  per  dileâas  literas  fignificaverit.  In  damnis  autem  fuis  Mi  magni  ac  plenipoten- 
tiarii  Legati  contenti  Junt  gratid  ac  clementiâ  Clementiffimi  Czaris  ac  Domini  Suae 
Czaricae  Majejiatis. 

Ad  haec  affert  quoque  querelam ,  Suae  Czaricae  Majeflatis  Legatus ,  intimas  confi- 
liarius ,  revertens  ex  Turcica  coiumijjione  ,  Procopius  Bogdanovitz  I^osnitzin  ,  dicens , 
quod  jures  ruftici  Livonmfes  aurigae  ipfum  innocenter  exfpoliaverint ,  avebendo  totum 
currum,  in  quo  pecuniae ,  argenti,  &  alius  variae  fupellectilis  plus  quam  millium  Ru- 
bloîiibus  pofitum  fuit ,  de  quo  Domino  Generali  Gubernatori  cum  literis  ejus  fpecifi- 
catio  mijja,  Jed  nunc  eis  accuratè  perlujlratù  rébus ,  praeter  ijîam  fpecificationem  fi- 
fert3  quod  iftic  etiam  in  cijld  fuerit  annulus  cum  adamantibus  obductus,  pretio  300. 
thalcrorum ,  £?  2  tapetes  Gallici  admodum  pulcbri. 

Sequentes  injuriae ,  quarum  infra  in  hoc  fcripto  fit  mentio ,  defiderat  Suae  Czaricae 
Majeflatis  intimus  Bojarinus  cum  collegis ,  ut  etiam  parte  Regiae  Suae  Majeflatis  jux- 
ta  veritatem  ipjam ,  fatisfaàione  refarciantur ,  in  quo  nec  dubitant ,  quin  Sua  Regia 
Majeftas ,  pofl  relationem  illorum  magnorum  ac  plenipotentiariorum  Legatorum ,  ipjam 
juftitiam ,  ad  implendam  amicabilem  Paris  confervationem ,  in  perpetuum  adminiftra- 
ri,  ac  illam  dignis  folutionibus  recompenjari  jubeat.  Sed  bae  infra  nominatae  injuriae 
traditae  funt  juxta  libellum  praefecti  fummi  curforum ,  Matthaei  Winnii,  de  multis  in- 
juriis  in  praefecl;um  ac  direëtorem  poflae  Rigenjîs ,  quia  multas  literas  detinuerit  ac  re- 
fignaverit ,  nec  non  multas  literas  non  acceperit ,  ut  diredtione  poflae  privetur ,  £f  ip- 
fi  alius  praeficiatur.  Libellus  fupplex  Gorafini  Bielfcowii  ex  vico  bortulano  de  pecunid 
pro  mercibus  in  Rigenfem  civem ,  Henricum  Cliverum:  fumma  mille  Rublonum  Thale- 
rorum  ,  fumma  expcnfarum  300.  Rublorum  ,  ut  haec  pecunia  adjudicetur.  Libellus 
Oflaskowienfis  Anthonii  Fokini  in  Narveufes  cives ,  in  Henricum  Funckenum  £?  Si- 
meonem  Numenjjenum  ,  de  pecunia  pro  mercibus  ,  fumma  600.  rublonum  ,  ut  manda- 
tum  exccutioni  mandetur.  Supplicatio  £?  extraàum  negotii  Tbomae  Kellermanni  in 
bonis  Martini  Bucklingii ,  fumma  2000.  rublonum.  Supplicatio  Boldwini  Andreae 
fiXii ,  in  aulicum  Suecicum  ,  Carflenium  Klingenflernum  ,  in  dcfedtu  traditionis  vêla- 
rium  iinteaminum  ac  tormentorum }  fumma  3000.  Rublonum. 

Lit.  I. 

Vid.  novifllma  Mofcoviœ  Defcriptio ,  quse  Norimbergse  typis  im- 
prefTa,  anno  1687,  in  oftavo  prodiit  ;  pag.  24.3.  &  383. 
&  feqq. 

Lit.  L, 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  zfi 

T  .        T  Affaires 

JLlt.     L/.  deSuede 


et  nv; 


Articulus  i?  Pacis  Cardifîenfis.  Mosco 


PARI  modo  conventum  ejl ,  ut  magni  Domini ,  Suae  Czaricae  Majejlatis  legati , 
nunc'ù  ac  tabellarii,  cum  omni  fuo  comitatu  âf  bonis,  libère  ,  fecure ,  tranquille. 
£f  abfque  ulla  detentione  proficifcantur  per  omnes  potentijfuni  Domini  ,  Suae  Regiae 
Majejlatis  Provincias  ac  Regiones  ,  ad  omnia  circumjacentia  Régna  âf  Nationes , 
quibufcuin  Regiae  Majejlati  bellum  nullum  intercedit  ,  atque  eodem  modo  in  Mofco- 
viam  redeant  :  nullos  tamen  mcrcatores  cum  mercibus  fuis  fecum  ducant.  Imprimis 
cautum  ejl ,  ne  utriufque  Principis  Legati,  Nuncii,&  Tabellarii,  quando  ad  magnum 
Dominum,  cujus  per  regionem  proficijcuntur  ,  à  magno  Domino  ,  qui  eos  miferat , 
nulla  mandata  aut  negotia  expediunda  habent  ,  quidquam  viatici  exigant  ,  fed  fuis 
impcnfis  iter  inflituant.  Propter  amicitiam  tamen ,  quae  inter  utrojque  magnos  Do- 
minos viget  ,  eorum  Legati  ,  Nuncii,  ac  Tabellarii  ad  iter  accclerandum  ac  promo- 
vendum  utrinque  omni  Jiudio  ac  opéra  juvabuntur. 

Lit.  M. 

§.  16.  Pacis  Card. 

PRaeterca  potentijfuni  Principis,  Suae  Regiae  Majejlatis  Sueciae  ,  magni  Legati, 
qui  ad  magnum  Dominum ,  Czaricam  Majejlatem ,  cum  literis  coJifirmatoriis  pis 
bac  aetema  pace ,  aut  aliorum  negociorum  caufd,  miffi  fuerint ,  à  Czaricae  Majejla- 
tis  Bojaris ,  praefeâis  â?  minifiris ,  honorifce  atque  eo  modo  ,  qui  legatorum  dignl- 
tati  convenerit ,  ad  limitem  regni  excipientur  :  inde  fufficienti  â?  neceffario  praefidio , 
commeatu ,  viatico  atque  jumentis  ad  vetïuram  fubminijlratis ,  Mofcuam  ufque ,  vei 
ad  Muni  locum,  in  quo  Czarica  Majejlas  commorantur ,  deducentur:  &  rurfus ,  cum 
domum  revertantur ,  tuto  &  debito  cum  honore  ad  fines  Suecicos  Jijîentur  ;  adeo  ut 
nufquam  à  Czaricae  Majejlatis  minifiris  vel  Jltbditis  if.Ua  injuria  aut  ignominid  ajji- 
ciantur.  Confeào  autem  negocio  ,  cujus  gratiâ  advenerant ,  fine  mora  dimittentur  : 
neque  in  hoc  itinere  aperte  vel  per  clandejlinas  machinationes  ullum  eis  incommodwn 
inferetur  :  neque  literae  vel  alla  feripta  eis  auferentur. 

§.4..  Pa&i  Mofcuenfis ,  anno  1684.3  die  22  Maii. 

INter  magnos  quoque  Principes  utrinque  conventum  ejl,  ut  eorum  legatis,  able- 
gatis ,  &  nunciisjoco  cibariorum  potuumque  variigeneris ,  quae  haStenus  datafunt, 
in  pojlerum  aequalis  utrinque  pecunia  detur ,  nempe  Legatis  magnis  £?  Plenipoten- 
tiariis  centum,  Ablegato  triginta,  Nuncio  decem  unciales  thaleri  quotidie  folvantur , 
quamdiu  iter  faciant ,  five  advenientes ,  five  abeuntes ,  £f  quamdiu  ad  aulam  Princi- 
pum  commorentur ,  quolibet  unciali ,  fi  minuta  vel  alia  moneta  exhibeatur ,  ad  aefti- 
mationem  unius  thaleri  imperialis,  quantum  ijlo  tempore  valeat ,  expendendo.  Prae- 
ter  baec  equi  ad  vecluram  Legatis  magnis  quadringenti ,  Ablegato  100,  Nuncio  30, 
fine  mercede  praejlabuntur  :  commoda  infuper  hojpitia ,  aqua  ,  candela  ,  ligna ,  quan- 
tum opusfit ,  fubminijlrabuntur. 

Ii  2  Lit.  N. 


VIE. 


152.    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 
aifaieu  LJt   jsj. 

de  Suéde 

et  de  Ex  Literis  Knipercronse ,  Mofcuse  fcriptis,  anno  i<5q7, 

Mosco-  j-  •    T  ...  1        '  ^<J 

ViE.  die  iô  Juin. 

POJiquam  aUquantum  fecefjîmus ,  fôerai  ?»$i  ojîendebat  à  principe  legationis  ad 
je  Riga  miffas ,  m  gm'èttJ  Generalis  Gubernatoris  prudentiffimam  difpofitionem  % 
praefeàorum  militarium  bumanitatem ,  £?  officiofam  converfationem. ,  militumque  perU 
tiam  âf  promtitudinem  fummis  laudibus  praedicabat. 

Lit.  O. 

Epiftola  Le  Fortii  ad  illuftrifîimum  Senatorem ,  Prrefi'dem  CanceJ- 

lariae ,  &  Academiae  Upfalenfis  Cancellarium  3  Dominum 

Comitem  Benedidhim  Oxenftiernam. 

Illustrissime  et  Generosissime  Domine  Comes. 

OUoniam  Jatis  certus  fum  de  amicitia  firma  &  amore  mutuo  ,  qui  inter  magnos 
Dominos  noftros ,   Czaricam  Majeflatem  ,    Dominum   meum  Clementiffimum  , 
&?  Potentiffimum  Dominum  veflrum  ,    Suam   Regiam  Majeflatem  intercedit  ,  ficut 
etiam  de  conflanti  affeàu ,  fidaque  vicinitate ,  quae  inter  ipforum  Régna  efl  ;  ideo  au- 
fus  fum  ad  Excelle ntiam  Veflram  ,  Dominum  ac  Fratrem  meum ,  pari  intentione  3 
ac  be?ievolentia  arnica ,  literas  hafce  fcribere  :    quibus  fimul  aperire  volui ,  juffu  Do- 
mini  mei  Ckmentijfimi ,  me  legationem  fufcepiffe  ,  eamque  ad  obeundam,  nunc  in  iti- 
nere  Holla?idiam  verfus  conflitutum  ejje.     Hic  vero  ex  infperato  relatum  mibi  efl ,  in 
Regno  Poloniae  Senatores  quofdam^  oblitos  publici  commodi,  Legum  atque  Libertatis 
iftius  Regni ,  planèque  immcmores  Fœderis  cum  Principibus  Cbriftianis  adverfus  hoftem 
Janàae  Cruels  initi  ,   Paàorumque  folenniter  fancitorum ,   eligere ,  atque  in  Regem 
Regni  Poloniae ,  ut  £f  Magni  Ducatïls  Lituaniae ,  fibi  adeptare  velle ,  ex  voto  atque 
clandefiinis  cum  Gallo  Conventionibus ,  Principem   Galliae  Contium.     Qjiem  in  finem 
communes.  Cbrifllani  Orbls  bofles ,  Sultanus  Turcicus  ,  &°  Crimaeus  Chanus,  coopéran- 
te-, quod  ut  perficerent -,  Legatis  fuis  in  Poloniam  miffis  }  baàenus   labor avérant y 
etiamnumque  omni  ardore  laborant.     Qjiod  fi  vero  ex  voto  conatus  illorum  féliciter 
procédèrent  ,  atque  praenominatus  Princeps  Contins  Regnum  Poloniae  adipifeeretur , 
omnino  inimicis  fancîae  Crucis  ingens  gaudium  obtingeret  ;  fœderatis  contra  Principe 
bus  Cbriftianis ,  ne  cogitata  fua  in  atrium  deducere ,  boflemque  iftum  debellare  poffent 
impedimentum  difficUlimum  oboriretur.     Quare  neceffe  efl  ,  ut  mature  conatibus   ejuf- 
viodi  obviam  eatur  ,  vafraeque  macbinationes  communis  Cbriflianorum  boflis  Sultani 
Turcici  ,  £?  Sociorum  ejus ,  cautc  praeveniantur.     Atque  in  eo  jam  Dominum  mag- 
num noftrum ,  Czaricam  Majeflatem  ,  aeque  ac  Suam  Regiam  Majeflatem  vi  Paào- 
rum  Caràifienfium  aeterna  fide  ftabilitorum  ,  opprime  confentire   &?  convenir e  credo, 
quandoquidem  in  Us  exprimitur ,  ut  alter  alterius  commoda  quaerat ,  omnique  ex  par- 
te bene  cupiat.     Si  vero  Princeps  ifle  Contins ,  gente  Borbonica  fatus ,  permittente  ita 
D EO  ,  Regnum  Poloniae  atque  Lituaniae  affequeretur ,  quilibet  vicinorum  amicorum 
quem  diligenter  caveret  >  adjunclum  fibi   cerneret.     Quapropter  ccnvenkns   duco ,  ut 

Dominus 


ET    DR 

Mosco- 

VIE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,   M.  DCC  *;* 

Dominus  magnus  nofter ,  Czarica  Majeftas  ,  &f  potentiffimus  Dominus  vejlcr ,  Sua  Affairf* 
jRég/a  Majejlas ,  confentiant  in  mutuum  Fœdus  adverfus  eum ,  ne  bofies  Mi  adver-  nE  Suedk 
tentes ,  quantum  qui/que  bello  adverfus  Janclae  Cruels  bofies  occupatus  fit ,  noceant 
alterutri  vicinorum  Dominordm.  Atque  bocce  jam  propofitum  num  placeat  potentijfi- 
mo  Domino  veftro ,  Suae  Régine  Majefiati ,  efi  ,  quod  rogo  ,  rejeribat  propedie-n 
Dileùtio  Vefira ,  Frater  meus.  Çhiod  fi  Regiae  Majefiati  id  gratum  vifum  fuerit , 
atque ,  permittente  ita  Deo  ,  Coronam  Poloniae  impeîraverit  Contins ,  tune  ege  ,  qui 
ex  Czarica  Majefiate  fpeciale  màndatum  babeo  ex  Hollandia  ifiud  négociant  traàan- 
di ,  cum  tota  legatione  Stockbolmiam  proficifear ,  ut  illud  praefens  perficiam  &  oh- 
fignem.  Dum  proinde  exfpeào  benevolam  optatamque  refponfionem ,  commendo  Dllec- 
tionem  Vefiram ,  Dominum  meum  &  Fratrem  3  omnîpotentis  Dd  tutelae  y  qui  fum 

Excellentiae  Vefirae 

Promptiffimus  Servus  , 
Liebfiadii  die  20.  Augufti  S.  V.  L  e     Fort 

Anna  1697.  Gen.  Am.  Amb.extr.  v.Koy  de  Novogrod.. 

Ad  eundem. 

EXcellentiae  Vefirae ,  Domïrii  mei  ac  Fratris ,  ad  literas  meas    refponfùm  die  \g. 
Septembris  ,  currentis  anni  ,    Suae  Regiae    Majeftatis   extraordinarius   Legatus 
tnibi  Hagae  tradidit  :  ex  quo  fatis  intellexi ,  amicitiae  atque  fiduciae   mutuae  ,    qua 
Serenifiimus  &f  Potentifiimus  magnus  Dominus  meus,  Czarica  Majejlas,  £f  Potentif- 
Jîmus   Dominus  ,  Sua  Regia  Majejlas ,  fejè  inviceni  ampkcluntur  ,  praefens  incre- 
mentum  ;  atque  proinde  etiam  addo  votum ,  velit  Dcus  Omnipotens  benedicere  idterius 
integritati  amoris  magnorum  Dominorum  ,  ut  incorrupta  maneat  aeternum ,  feliciJJi- 
moque  fiatu  tut  a  femper  ac  firma  vigeat.     Praeterea  Domino  meo  ac  Fratri  notum 
facio,  mibi  nunciatum  ejje  ,  quod  Sua  Regia  Majejlas  merd  amicitid,  pronoque  amo- 
u  ,  mota,  erga  magnum  Dominum,  Suam  Czaricam  Majejlatevi,  ad  tefiandum  af 
fectum  fuum  fincerum  ,  in  commodum  unkserfi  Cbrifliani  Orbis,  quo  compleatur  or- 
matures  clajjis  maritimae,  largita  fit  trecenta  tormenta   bellica,  quae  fflarvam   quo- 
que  tranfportata  dicuntur.     Certè  pofiquam  magnus   Dominus  ,    Sua  Czarica  Ma- 
jejlas ,  ifiud  comperiit ,  Suae  Regiae  Majefiati ,  fibi  tam  prone  fauenti  ,  fuppetiafquc 
amice  Jerenti ,  ad  gratias  referendas  fefe  fummopere  obligatam  cenjuit,  gratum  injuper 
animum  vel  per  Suae  Czaricae  Majeftatis  literas  ,  vel  per  Legatum  extraordinarium , 
Suae  Regiae  Majefiati  declaratura.     Interea  autem  non  dubito ,  quin  Dominus  &? 
Frater  meus  boc  à  me  jam  indicatum  Suae  Regiae  Majefiati  fideliter  fit  relaturus. 
De  caetero  fiait  Epiftold  prima  Jufiius  edifierui  de  rébus  Polonicis ,  Jaàione  Gallica- 
na  ,   &?  Principe  Co?itio  ,  ijlorumque  bominum  aujibus ,  ut  fignificarem ,  quâ  vvn- 
lantid  ifias  obfer-vare   deceat  ,  quamque  ferio  molitionibus  eorum  occurri  debeat  ;  ji- 
quidêm  confilia  baecce ,  quibus  Regnum  Poloniae  Jubigere  intendunt ,  minime  vcrgimt 
in  ufum   Orbis  Cbrifliani  :    ita  Domino   ac  Frairi  meo,  coîififus  fincerae  ipfius  in 
me  benevolentiae  ,  celare  nequeo  ,   dubium  mibi  quoddam  movere  ISuncios  bine  inde 
allatos ,  atque  inprimis  Mundum   univerfum  peragrantes  novellas ,  quibus  enarratur 
Legatum  Gallicum,  Comitem  d'Avaux,  omnem  navare  operam  ,  ut  aulam  Suecicam 
in  partes  Principis  Contii  trahat.    Equïdem  fat-ccr  me  parum  jjdei  Mis  tribucre ,  ne- 

I.i  2  qw 


VIE. 


2f4    MEMOIRES,  NEGOTI ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  qUe  ùlh  modo  dubitè  de  conftanti  &  immutabili  amicitid,  cbaritaîeque  mutua  inter 
de  Suéde  £)om{?m  magn0s  ?ioftros ,  Suam  Czaricam  fcp  Suam  Regiam  Majeftatem,  per  con- 
Mosco-  fer-vationem  Fœderis  â?  aeternae  Pacis  ,  &  qmdquid  porro  ad  majorent  certioremqm 
fccurlîatem  utriufque  Domini  magni  ,  ipjbrumque  R.egnorum  pertineat  :  non  pcjfum 
tamen  non  mentionem  barum  rerum  denuo  injicere ,  fi  à  parte  Polonorum  vel  Gallo- 
rum ,  in  causa  Principis  Contii ,  ipfiufque  cœptis  faventium ,  petitiones  quaedam  utri- 
que  magnorum  Dominorum  ac  Regnis  Ipforum  ,  Majeftatîque  Regide  Poloniae  no- 
xiae  deferantur ,  vie.  fiait  ante  dixeram  ,  utiliffimum  &  convenientijfimum  judkàre, 
ut  non  modo  neuîiqitam  attendatur ,  fsd  âf  prorfus  tanquam  Orbi  univerfo  Cbrifiiano 
inutiles  ê?  nocime  rejicianiut ,  amoveantur ,  fi?  in  nibilum  redigantur.  Qjiippe  omni 
ftudiu  cavendicm  arbitror ,  ne  perniciofi  Gallorum  motus  hifce  in  Terris  &  Finibus 
nofiris ,  quod  Deus  avertat  !  foveantur  }  mitlto  minus  fcopum  fuum  attingant ,  aut  ex 
voto  fua  peragant.  Qiiod  defiderium  meum  Domino  meo  &  Fratri  commendo ,  clarioi 
rem  de  ils  fententiam  cum  rcfponfione  fraterna  cxfpectans  :  quibus  Excellentiam  Jref~ 
tram  tutelae  Dei  Omnipotentis  committo.  Dabam  Amftelodami ,  Anno  Cbrifti  1697  , 
me  16.  Oâobriîf 

Exceilentise  Veftns 

Paratifîïmus  Servus, 

Le     Fort, 
Gen.  Am.  Amb.  extr.  v.  R, 

Lit.  P. 

Czari  Epiftola  ad  Suam  Regiam  Majeftatem  Sueciae." 

CÎ7JV/  Vejlra  Regia  Majejlate  Jinceram  amicitiam  ,  fidamque  vieillit atem  colère  , 
Nos  magnus  Dominus ,  Nojîra  Czarica  Majefias  ex  toto  animo  cupimus ,  op- 
tantes, ut  mutuis  officiis  amicitia  noftra  in  dies  crefeat ,  majoraque  copiât  incremen- 
ta  :  quod  omni  loco  ac  tempore  nos  quaeremus.  Sicut  autem  optamus,  ut  tormenta 
bellica ,  quae  nobis  mijfa  finit  9  in  pemiciem  fcf  excidium  Mabumedanorum ,  Cbriftia- 
ni  Nomhiis  bojlium  ,  féliciter  convertantur  ;  ita  Veflrae  Regiae  Majeftaii,  amicQ 
noftro  ac  vicino  optimo  &  dileciijjimo  ,  pro  tam  infigni  dono  gr  atlas  agimus  fummas , 
atque  promittimus  Nos  quolibet  occafione  operam  daturos  ut  hoc  beneficium  demereri 
•poffimus.  Ultimo ,  Nos  magnus  Dominus ,  Noftra  Czarica  Majefias  Regiae  Veftrae 
MajeftaXi  voluimus  indicare  ,  Nos  noftro  Praefeào  &?  Gubematori  magnae  Novo- 
gardiae  in  mandatis  dediffe ,  ut  in  Veftrae  Regiae  Majeftatis  Regnum  atque  ad  Urbes 
viciniores ,  Revaliam,  Narvam,  aliafque  nobiles  aliquot  viros  mitteret,  qui  in  ufum 
atque  commodum  noftrum,  inque  expeditionem  navalem ,  quam  animo  agitamus ,  Ca- 
pitaneos ,  Navarcbas ,  Gubernatores ,  atque  nautas  rei  nauticae  peritos  conducerent  ;  £? 
proinde  Regiam  Veftram  Majeftatem ,  cariffimum  noftrum  amicum  cf  vicinum ,  ma- 
ximopere  rogamus  3  ut  tam  illis ,  qui  à  Praefeftis  noftris  mercede  conducantur ,  quàm 
aîiis  ,  qui  fponte  nomina  fua  profiteantur ,  venia  concedatur  ,  ad  militiam  noftram 
tranfeundi.  Ouod  aux'Mum  tum  ad  commune  rei  Cbriftianae  commodum  pertinet , 
tum  ad  augendam ,  ftabiliendamque  mutuam  inter  nos  amicitiam  &  caritatem ,  appri- 

wt1  faciet  &c.    Mofcuae,  die  1.  Decembris,  anm  1698. 

Lit.  Q. 


RESOLUTIONS     D'ETAT,    M.  DCC.  iÎS 

j  .        -^  Affaires 

X-rfl  t.     V^.  deSuede. 


Epiftola  Apologetica 

IlluftrilTimi  Comitis,  Erici  Dahlbergii,  Senatoris  Regii,  Campi- 
dudoris ,  &  generalis  Gubernatoris  Livoniae ,  ad  Suam  Re- 
giam  Majeftatcm  Suecice ,  Rigx  anno  1700.  die  iS.Martii. 

OUantb  magis  e  re  putabam  effe ,  Rex  clementiffme ,  ad  amiciîiam  vicinita- 
tis  fir mandant ,  ut  Legatio  Mofcica  quàm  hpnqrifiçentijjimè  cxcipcretur  ; 
1antb  major  i  cura  t3  folicitudine  in  id  incumbtbam  ,ut  prae  caeteris  Lcgatis ,  qui 
per  Livoniam  antea  profecli  funt ,  fplendidiori  haec  apparat u  cultuque  ornaretur. 
Equidem  nihil  mihï  fufffet  optatius ,  quàm  fi  à  Sua  Régla  Majeflate  mandata 
accepiffem  ,  quce  in  dubiis  quibufdam  negociis  fequerer  :  verùm  cum  ad  interrvga- 
ta  refponfum  tant  celeriter  reddi  non  potuijfet ,  tcmporis  anguftiae  me  cogcbant , 
ut ,  datif  ad  Praefeclos  Revaliae  Narvaeque  literis ,  fententiam  eorum  exquire- 
rem ,  eofque  rogarem  ,  ut  me  certiorem  facerent  de  omnibus ,  quae  in  re  fimili  iftic 
locorum  obfervata  effe  noverint,  inprimis ,  an  moris  erat ,  Légat  os  Mofcicos  ad 
/viennes  epulas  invitare.  Refpondebant ,  ufu  id  nujquam  efje  receptum ,  neminem 
Legatorum ,  qui  per  hafce  Provincias  ,  five  in  Stieciam ,  five  ad  extera  Régna , 
iter  inflituiJJ'ent ,  publias  conviviis  adhibitum  :  omnes  confuetis  bonoribus  fuijje 
content  os.,  Eorum  autem  nomina ,  qui ,  ab  anno  1 660 ,  ad  hoc  ufque  tempus , 
per  Eftoniam ,  Livoniam ,  lngriamque  commeaverant ,  adjunclâ  rccenfentur  char- 
te. Interea ,  quae  ad  Legatorum  ufum  neceffaria  videbantur ,  diligenîer  ordina- 
bam ,  cogitationefque  omnes  eo  intendebam ,  ut  non  tantum  exacle  ca  fervarentur , 
quae  Paclis  prae  fer  ibuntur  ;  verum  etiam  ut  joliti  honores ,  quantum  convenir  e 
judicabam ,  in  gratiam  horum  Legatorum  adaugerentur.  Qui  eos  Rigam  dedu- 
ceret,  confitutus  efi  Glafenappius  ,  vigiliarum  praefeclus  ,  vir  &  claritate  gene- 
ris ,  &  furnma  humanitate  confpicuus  :  adjuncîi  ei  collegae  funt  Dornfeldius  cen- 
turio,  aliufque  nobilis  ,  Mojcicae  linguae  périt  us.  Mis  imperaium  efi  ,  quam 
primum  nunciaretur  Légat  os  Mofcuâ  abiijfe,  ut  Nyhhfam  pr  ope  fines  Livoniae  fe 
conferrent ,  adventum  ibi  Legatorum  praeftolaîuri.  Territoriorum  Praefecli  jufji 
funt  mature  annonam  convehere  ,  equos  rhedafque  cegere ,  diverforia  cum  ad  per- 
neclandum,  tum  ad  prandendum  commoda  defignare ,  atque  diligenter  providere, 
ne  quidquam ,  quod  ad  iter  rite  conficiendum  faceret ,  Légat  is  deejj'et.  Non  fegni- 
ter  illijujfa  exfecuti  funt  :  verum  in  propo/ito  fuo  non  parum  funt  perturbât  i , 
cum ,  quantacunque  cura  adhibita ,  expifeari  non  poffent ,  quo  tempore  îegati  do- 
mo  proficifci  conflituifjent ,  mira  folertiâ  abitum  fuum  celantes ,  ne  cuiquam  inno- 
te fecret  Czarum  una  fuifj'e  profetlum.  ghiare  aliquandlu  Mofcuae  fevere  inter- 
diclum  erat ,  ne  cur fores  publia  hue  mitterentur ,  detentis  etiam  omnibus ,  qui 
Livoniam  verjus  iter  facerent  :  quorum  e  numéro  tntepres  nofier  ,  Soldanus  ,  Ion- 
go  tempore  Mofcuae  fubfiftere  coaiïus  eft.  Pofiquam  vero  commeatus  iterum  con- 
fefius  erat,  omnes  literae  quae  Mofcuâ  mittebantur,  refignatae  atque  perlufiratae 
cunt.     Praeterea  ab  illis  tpfis  fama  quaqua  verfum  vulgabatur,  Légat  os  f  mu- 

tata 


ET    DE 
MoïCO- 

VIE. 


ET    DE 

Mosco 

VIF. 


zf6    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AnAÙto  tato  confdio  hue  eundi,  per  Livoniam  Pohnieam  iter  converti]?}.  Cum  omnes 
oeSùebs  jam  in  ea  opmione  effemus ,  fubito  Schmidius  quidam,  praefeclus  vigiliarum , 
cum  parte  impedimentorum  hue  accefferat  :  illum  mox  infecutus  veredarius ,  lite* 
ras  à  praefetio  Plefcovienfi  adferebat ,  die  14.  Martii  feriptas  }  quibus  adventus 
quidem  Legatorum  nunciaba.tur ,  caeterum  quando ,  aut  quo  numéro  ,  nihil  addi- 
îum.  Unde  faclum  cfl ,  ut  tempus  [ex  hebdomadum  ,  cum  inftgni  ruricoîarum 
damno  atque  molefliâ ,  teretur ,  antequam  fines  noflros  Legati  intrarent ,  veclo- 
ribus  toties  convocatis ,  toties  domum  remijjïs ,  quos  longâ  morâ  feffos  atque  ludi- 
brio  habit  os  ex  cire  tandem  difficilïmum  erat.  Cum  Legati  die  22.  Martii  Plefco- 
viâ  de  ad-ventu  fuo  mihi  fcripfijfent ,  nulla  tamen  mentione  facla ,  quando  ad  //- 
mitem  noftrum  ac céder e  dccrevifjent ,  die  16.  ejujdem  menfis  in  hanc  fente ntiam 
eis  refpondcbam  :  quod  etiamfi  literis  meis ■,  quas  die  23.  Martii  de deram ,  nihil 
refcripjifjet  Praefeclus  Plefcovienfi  s,  neque  de  tempore ,  quo  adfuturi  efjent  Le- 
ti ,  neque  de  comitum  numéro ,  ullo  verbo  me  certiorem  fecijjet ,  quod  tamen  ab 
eo  pojiulatum  ,  atque  fieri  acquum  erat  ;  nihilo  tamen  minus  omni  cura  provifum 
ejffe ,  ut  decenter  (s?  condignis  honoribus  exciperentur ,  rebufque  neceffariis  fuble- 
vati ,  per  hanc  Prcvincïam  ducerentur.  Sperare  me ,  ipfos  bénigne  candideque 
accepturos ,  quae  diffeilimo  hoc  tempore,  atque  infoiita  annonae  caritate ,  quae 
hanc  Provinciam  per  aliquot  annos  graviter  affiixerat ,  in  eorum  ufum  conferri 
pojjent  :  cum  perfuadere  Jibi  dîberent ,  nihil  me  praetermittere  voluijfe ,  quod  cum 
ad  amïcïtiam  erga  vicïnum  populum  teflandam ,  tum  ad  conventionem  aeternae 
Pacis  implendam  pertinere  judicajfem.  Longa  igitur  interpofita  morâ  ad  limitem 
tandem  improvisé  apparucrunt ,  atque  in  praedio  Nyhufenfi  hofpitaliter,  invitati 
pernoclarunt.  Inde  juftis  itineribus  Rigam  pervenerunt ,  deducli  ab  ils  ,  qui- 
bus  cura  importa  erat  videndi  ,  ut  ,  quae  ad  iter  ne  ce  [far  ia  ejfent,  abunde  fup- 
peditarentur. 

ghium  conftaret  Légat  os  haud  procul  abeffe ,  fub  tribunum  Palmflrauchium ,  ac 
vigiliarum  Praefeclum  Ranchium ,  fejuge  meo  veclos  ac  flipatos  duodecim  fatelli- 
tibus  regûi ,  nec  non  decem  meis  pediffequis ,  pro  habit u  praefentium  rerum  fat 
décore  ornât is ,  obviam  us  procéder  e  juffî  :  fequentibus  quinquaginta  &  amplius 
tant  militiae  duclorum ,  quam  aliorum  in  urbe  hofpitum  oppidanorumque  curri- 
bus  y  atque  uno  fenis  equis  junclo ,  per  magiftratum  urbicum  fubmiffo.  Hos  ex- 
cepit  or  do  militarium  virorum ,  non  numéro  tantum  ,  fed  etiam  cultu  atque 
magnificentiâ  praeftantium.  Proximi  ivêre,  quos  Nigricipes ,  feu  Schwartzen- 
hofder,  vocant ,  pile  os  albentibus  plumis  décorât  os,  ac  veflimenta,  auro  argen- 
toque  difiincla  ,  gefantes.  Hoc  agmen  claufit  turma  equitum  oppidanorum  , 
centum  omnino  fcf  quadraginta ,  decoris  armis  veflibufque ,  ac  ftriclis  enfibus , 
tubarum  etiam  ac  tympanorum ,  vexillor unique  fuorum  adparatu  fuperbientium. 
Quae  utique  omnia  acceffum  ingrejjumque  Legatorum  in  urbem  ita  celebrem  ac 
mémorandum  reddiderunt  ,  ut  vix  quemquam  reperiri  creda'm  ,  qui  neget  honores 
prioribus  Légat  ionibus  &  heic  £s?  alibi  locorum  habitos  ,modicos  omnino  fui  (Je ,  fi 
cum  hifee  conférant  ur.  Jtque  hoc  online  introït  um  eji  per  portam  arenariam^ 
ubi  cohors  milituyn  in  armis  Jlabat ,  exfpeclatura  adventum  Legatorum  :  perrec- 
tumque  inde  per  médium  forum  ,  pari  milïtum  numéro  infejfum ,  ufque  ad  por- 
tam Carolinam  ;   ubi  r'urfum  tertia  cohors  ces  operkbatur  ,   contmuo  tibiarum 

tympa- 


ET    PE 

Mosr.o- 

V1F. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  2;7 

tympanorumque  fuorum  fonitu ,  quemadmodum  &  prions  Mae  ,  perfirepens.  Sub-  Affaires 
euntem  valvas  Mofcum  triginta  &?  duo  forment  a  bellica  explofa  falutarunt ,  io-  oeSuf.de 
tidcmque ,  quum  per  ait cram  port am  priori  oppofitam  defcendcret ,  ad  fréquent  a- 
tum  omnibus  Mofcoviticis  legationibus  diverjorium  ,  in  loco  quodam  fuburbii , 
Lafladicn  diclo,  detonuêre.  Cum  Légat i  cbjamdeducli  ejfent ,  ad  eos ,  quo  par 
erat ,  vcrborum  honore  falutandos ,  tejtandumque  laetitiae  affeclum  ,  ^#m  ?*  eo- 
f«j»  adventu  perceperam  ,  Vrangclium  Praefetlum  vigiliarum  ,  £5?  L'ilieflier- 
nant  centurioncm  ,  w//?  ;  ./'tf^fo  yfa##/  indicare ,  ###/#  optionem  quinquaginta  milù 
tibus ,  in  fingnlos  dies  cammutandis ,  fuccinclum ,  /o/o  e<?  tempore ,  ^  z»  #,--££ 
commorari  placeret  ,  <2<^  ^^j  ipforum  excubias  aclurum. 

Gratum  inprimis  hoc  officium  ipfis  fuijfe ,  £#  £0  apparuït ,  ^«0^  extcmplo  unum 
è  fuis  fubtribunum ,  ###  «/;#  quodam  alio  propinqua  cognatione  Domino  Lcfortio 
junclo,  ad  gratias  eo  nomine  mihi  agendas  mitterent.  Sicuti  autem  praediclus 
Lillieflierna  m  aida  Legatorum  finguli s  diebus  comparerez  ac  vel  praecipue  Do- 
mina Lefortio  operam  fuam  atque  officia ,  y?  <jwi  ;'»  r£  defiderarcnîur ,  praeflare 
debuit  ;  //#  »c«  tantum  ea  ,  f  ##£  ara*  receptionem  eorum  in  urbem ,  y?^/  &?  ^,7tf£ 
reliquo  tempore  apud  eos  cuntigerunt  ,  adeuratâ  diligentïâ  ob/ervavit  ,  #/^#<?  /&#- 
y  « /fo  narrationis  feriem  inde  contexmt  ;  multis  verbis  indicans  ,  £#rt#2  £/vz /<?  <?#/'- 
#/<?  Dominus  Lefortius  femper  agnoverit  honores ,  Zw/V  Legationi  tributes.  Quod 
quidem  non  in  fpeciem  tum  ab  eo  faclum ,  /W  <?#  interiore  ejus  confeientiae  fenfu 
expromtum  fuijfe  ,  Kniperus  fuis  lit eris  Mofcuae  datis  die  i<5.  ^«//ï  confirmât', 
commemorando  fibi  comperîum  ,  principem  legationis  per [cripfiffè  ad  fuos  Mof 
cuam ,  ^/W  mirum  in  modum  fuerit  content  us  fplendidifjimo  illo  comitatu ,  quo 
in  urbe  fit  receptus  ,  nec  non  exquifitâ  illâ  magnificentià  ,  atque  honoribus  am- 
fliffimis ,  quels  toto  commorationis  fuae  tempore  à  Rigenfibus  fuerit  maclatus. 

Tribum  ac  reliqui  militum  praefebli  ,  -quotquot  in  urbe  aderant ,  fuis  quisque 
vicibus ,  ut  imperatum  erat ,  aulam  Legatorum  fréquent arunt ,  comis  officii  teflan- 
di  causa  ,  ac  ut  taedia  ipforum  ,  quibuscunque  poffent  ,  obleclamentis  f allèrent. 
Ipfe  quoque ,  miffis ,  qui  de  illorum  valet  udine  atque  reliquo  rerum  Jlatu  comiter 
cognofeerent ,  officia  mea  iis  quotidie  deferenda  curavi.  Sed  quo  minus  ipfe  eos 
inviferem ,  aut  in  arcem  ad  epulas  invitarem ,  ob/labat  vêtus  confuetudo  antece [fo- 
rum meorum ,  qui  nullas  Legationes ,  per  has  oras  tendentes ,  aliâ  ,  quam  à  me 
faclum  fit ,  ratiune  excepiffent.  Quae  quidem  res  mihi  tanto  magis  nunc  in  imi- 
tationem  trahenda  videbatur ,  quod  hanc  Legationem  non  ad  S.  K.  Majeflatem , 
fed  ad  extraneos  Principes  mifjam  fuiffe  conftaret.  Et  fi  vel  maxime  aliâ  mihi 
mens  fuiffet  circa  hoc  negocium,  nec  hae  rationes  fatis  apud  me  valuiffent  ;  ipfa 
tamen  rei  impoffibilitas  ex  adverfa  valetudine  ,  quae  totis  propemodum  quinque 
hebdomadibus  me  in  leblo  detinuit ,  a  propofito  me  retraxijfct.  Neque  enim  cb- 
duclum  ex  obitufiliae  meae  hoc  officii  a  me  intermiffum  eft ,  ut  falfo ,  ac  vix 
titra  calumniam , perhibent  \  quandoquidem  ijle  cafus,fexto  demum  diemenfisOclo* 
bris  i6y8-  adeoque  pofl  annum  ac  menfes  feptem  à  Legatorum  ad  nos  adventu 
accidit. 

Caeterum  qtium  ex  morâ  ,  quam  in  hac  urbe  egerunt ,  aliqui  licentiam  fibi 
fumèrent  in  urbe  obequitandi ,   atque  locis  eminentioribus  non  modo  Jitum  ejus 

Tome  XL  Kk  cura* 


VIE. 


i;8     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Attairfs    curât  ius   contemplandi  \   verum  etïam   totam  munit ionum   rationem  in  charta 
df.Suf.de    fclineanâi  ,   explorandique  fojfae  altitudinem  \   confcenfs  hinc  inde  maeniorum 
vt"  DE      fummitatibus ,    caeterisque    ad  urbis   tutelam  exflruclis   operibus  ,    ut   reclius 
cuntla  perluflrarent\  officii  mei  ejje  duxi  ,  à  Domino  Lefortio  décent er  requi- 
rere ,  ut  talia  fuis  interdiccret ,  quayidoquidem ,  ipfe  rerum  militarium  longe  pe- 
ritiffmus ,  ignorare  non  poffet ,  nuspiam  in  totâ  Europâ ,  ubi  aliqua  loca  J'unt 
munita  ,  ejusmodi  hofpitum  tentamenta  permitti  folere.     h  folitâ  fibi  humant- 
tate   excepit  hanc  expoftulationem ,  comiterque   excufavit  ,  quae   haclenus  ,  fe 
infcio  ,  acla  erant\  pollicitus  fe  prohibiturum ,  ne  qui d  f  mile  in  poflerum  com- 
mlttatur  a  frontis  perfrièlae   Ru  fis ,    uti   erant  propria  ejus   verba.     Atque 
hinc  nata  eft  improba  illorum  adverfus  nos  qucrela ,  quafi  eos  fepfiffemus  tam 
arclâ  cuflodiâ,  ut  omnis  plane  liber  tas  domibus  egrediendi  fuerit  ipfs  ademta. 
Quae  profiClo  hoc  injujlior  cenfcri  débet  ,  quod  omnes  ,    quotquot  in  hac  urbe 
a^unt ,  probe  norint  ,   fuoque  teflimonio  docere  pofint  ,  illos  non  fingulos  ,   fed 
ferè  univerfos  gregatim^  omnes  vicos  urbis  pervagatos  ,  mercatorum  tabernas, 
cpificium  officinas  atque  aenopolia  omnia  libère ,  ac  ut  eos  vel  libido  vel  indi- 
gentia  ferebat ,  frequentafe.  De  caetcro  infolenter  admodum  ac  praeter  omnem 
exfpcclationem  noftram  ,    à  Mofcoviticis  commifjdrus  jaclatum  efl  ,   ob  auguf 
tifimam  magni  Principis  pracfcntiam  ,   utique   exftantius   aliquod  honoris  ar- 
gumentum  expromi  debuiffe.     Nam  cum  intra  focietatem  Legationis  poena  ca- 
pitis  in  ipfum  dicla  effet  ,    qui  praefentiam  Czari  proderet  ,    an  non  cogitare 
debebamus ,  fnifirè  admodum  ab  codem  acceptum  tri ,  fi,  qualicunque  fgno  ex- 
teriore  palam  faceremus  ,    nos   in  aïiquam   if  ius  fecreti  notitiam  pervenife  ? 
Aut  quomodo^quaefo,  nos  deceret  id  ipfum  detegcre,  quod  ifii  ta?n  folicitè  oc- 
cultum  ibant  ? 

Grata  atque  accepta  Us  fuisfe,  quae  haclenus  egeramus  ,   vel  id  ipfum  ar- 

gumento  esfe  pote  fi ,  quod  nullas  omnino  difplicentiae  ,  aut  antmi  nobis  parum 

amici  ,  notas  toto  co  tempore  oftenderent  ,  uti  eas  nec  oflendere  poterant  ,  niji 

prius  omnem   aequitatis  hnmanitatisque  fenfum  plane  exuisfent.     Verum  cum 

ad  pofremum  rerum  hic  confumtarum  ratio  esfet  fubducenda ,  folutioque  prae- 

fiauda  ,  quaedam  ajfeclati  frigoris  indicia  fefe  produlerunt.     g)uâ   quidem  oc- 

cafione  quum  nonnutli ,    qui  hofpiîio  eos  exceperant ,  pretia  rerum  creditarum 

ultra ,  quàm  Mofcis  aequum  videbatur  ,   extenderent  ,   muneris  mei  aublorita- 

tem  ipfs  commodavi  :  redublo  ad  cam  mediocritatem  pretio ,  quae  utrique  pa- 

cifcentium   aequa   &    tolerabilis   judicabatur.     Atque  ut  S.  R.  Majeflas  co- 

gnofcat  ,    quant  omni  prorfus  fundamento  careat   ipforum  criminatio  ,  quâ  nos 

arguant  ultra  dimidium  auxisfe  rerum  vendendarum  pretia ,  atque ,  dum  hinc 

décédèrent ,  oftoginta  aureos  popofcisjc  in  compenfationem  operae ,    transport  an- 

dis  impedimentis  ipforum  navatae  \   mitto   rationarium  a  magiftratu    civitatis 

eâ  de  re,  me  requirente ,  confeclum\  unà  cum  nominibus  perjonarum  ,  comita- 

tum  hune  fat  numeréfùm  conflit uentium.     Adjungo  etiam  librum  menwrialem9 

in  quo  accurate  confgnata  funt-  omnia  ea  ,  quae  in  vicem  locatarum  aedium , 

pracbita-' unique  candeiarum  ,  atque  aliarum  rerum  ad  ufum  vitae  necesfariarum, 

non  tanquam  ex  debito^  fed  ex  mero  beneplaciîo  atque  arbitrio  Légat or um  cuique 

civi. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC. 


*f£> 


clvi  foluta  [tint.  Equidem  per  confcientiam  meam  vel  jurejurando  ajjirmaverim , 
me  nihil  eorum  omïfisfe ,  quae  ad  fludia  me  a  ojficiaque  ils  rite  ac  décent er  decla- 
randa  facere  novisjem  :  utut  fmijlre  admodum  cadem  nunc  interpretari  fcdeat. 
Caritas  rerum  ad  vitlum  necesfarïarum  ,  è  tenuijjïmo  terrae  his  in  locis  proven- 
tu  or  ta ,  mihi  utique  imputari  non  poterat  :  fiquidem  non  ipfe  minus  ,  quant  qui- 
vis  alius,  iflius  incommoda  fentire  coati  us  fuerim. 

Ghtoniam  autem  magnas  querelas  ex  eo  movent,  quod  difcedentes  parum  déco- 
ro  navigiorum apparat u  transmijji  fuerint  per  jlumen  Dunam\  com?ncmorare  ne- 
ces  fum  habeo,  quod  tametfi  nulla,  ejusmodi  in  fpeciem  aut  pompant  conjlrucla 
mvigia  hic  in  ufu  ftnt ,  ijlum  tamen  defeclum  quodammodo  fupplere  conatus  fue- 
rim, comparât  a  in  ufum  ip forum  Legatorum  ,  ac  honoratiorum  e  comitatu  mi- 
mjirorum ,  una  celoce ,  rubri  coloris  panno  inflrutla ,  atque  regio  apluftri  deco- 
rata.  Cui  adjuntlae  erant  binae  aliae  ,  una  cum  triginta  majufculis  navigiis 
heic  ufitatis.  jitque  ita  cum  omnia  trajeclui  parata  ejjent ,  triginta  £5?  duo  tor- 
menta  aenea  majora  in  honorem  abeuntium  explofa  funt  ;  ut  vel  inde  appareat 
falfitas  eorum  ,  qui  hune  tranfitum  plus  quàm  ignominiofum  fingere  aliisque  per- 
fuadere  fuftinuerunt.  Hue  accedit ,  quod  duo  currus ,  a  fenatu  urbis  ad  dedu- 
cendos  ,  ad  fines  territorii  Ducis  Curlandiae  ,  Légat  os,  praemijji ',  in  adverfa 
jluminis  ripa  conftjlerent.  Ac  fuijfcnt  profeclo  longe  plures  una  cum  agmine 
equitum  eodem  mifji  in  gratiam  Legatorum ,  fi  infefto  tune  maxime  ac  impedi- 
to  Dunae  alveo  ob  fluitantem  glaciem  ,  necesfarius  ijlis  transvehendis  nume- 
rus  navigiorum  haberi  potuïsfet  :  quandoquidem  ea  omnia  ,  quae  tune  ad  ma- 
nus  erant ,  farcinis  Legatorum  portandis  vix  jufficerent. 

Ad  haec  nullo  jure  mihi  impingi  potefi  culpa  contraclûs ,  Mofcos  inter ,  qui 
cum  e  qui  %  fuis  e  Curlandia  redierant ,  atque  cives  aliquot ,  ijlis  conditionibus 
initi ,  ut  pro  fingulis  equis  non  nifi  decem  folidi  (copecas  vocant)  folverentur  : 
fiquidem  res  ifta  nullo  modo  ad  me  fpeclet  ,  nec  ego  iflius  unquam  confeius 
juerim:  ficuti  nec  veredarii  ipforum  e  Curlandia  remijji ,  quem  Jacobum  Sca- 
roujofs  nominant.  Sanè  iflum  hominem  nunquam  vel  viju  vel  auditu  cogni- 
ium  habui.  f^hiemadmodum  etiam  Mermannus ,  Rusfomm  hojpes  Rigae  ,  ac 
duo  illic  mer  cat  ores,  ad  quos  literae  e  Mojcoviâ  venientes,  ut  plurimum,  de- 
feruntur  ,  Heinfius  &  Oefkingus  :  nec  non  Jarmerfledius  ,  infpecloris  munere 
apud  nos  fungens  ,  atque  Gertius  ,  Graenius  ,  Tabellariorum  magijlcr  ,  juis 
tcjlimoniis  probare  poterunt ,  ijlum  veredarium  Rigae  nunquam  fuis  je  ,  jed  esfè 
merum  commentum  Mvfcovitarum.  f^uae  porrb  memorantur  de  jaepius  iterata 
mijjione  cujusdam  Surowoi  ad  Légat  os ,  quae  jujpicionem  mihi  injecerit  :  .jateor 
eci  talia  esfe ,  quae  meam  feientiam  plané  jugiant ,  meque  permoveant  ad  creden- 
dum ,  imo  verô  ad  dicendum ,  ijla  fine  ullo  fundamento ,  aut  veri  fpecie  confiéta 
esje:  atque  adeo  indigna,  quibus  refellendis  quant illum  operae  impendam.  Ex 
hijce  omnibus ,  S.  R.  Alaje fias  facile ,  utijpero,  perjpiciet  non  tantum  innocen-* 
tiam  meam,  jed  etiam  iniquisfimas  adverjdriorum  criminationes  -,  ac  ea  propter 
nt  me  regio  juo  patrocinio  clément er  dignetur ,  etiam  atque  etiam  contendo ,  fanclè 
affirmans ,  ji  tanti  fafligii  Principem  hue  advenisfe  certo  fcivisjem  ,  me  nunquam 
pasfurum  fuis  je ,  ullum  devotijjimac  meae  erga  illum  pietatis  atque  obfequii  do- 

Kk  2  cumen- 


Attaires 

DE  SUKOS 
F.T    DE 

Mosco- 

V1E. 


zôo    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaikes  cumcnîum  defiderari.  jîjî  quod  urbis  circa  limitent  regni  poftae ,  munimento- 
DESohDE  rumque  fifci  ac  cuftodiae  meae  concredttorum,  Jolicitam  curant  gesferim ,  id  gra~ 
Mosco-  tiam  ac  commendationem  potius ,  quàm  iram  arque  indignationem  Czaricae  Ma- 
"  vie.  jeftatis  ,  tôt  operum  militarium  gloriâ  indytae  ,  provocaturum  exijlimaveram* 
Haec  funt ,    Rex  ClementiJJir/.e,  quae  per  fummam  feftinationem ,  ad  crimina- 

tiones  adverfariorum  dduendas ,  innocentiamque  meam  declarandam ,  adornare 

fotui. 

Dab.  Rigae  die  S  Martii.   1700. 


Lit.  R. 

Foedus  Teufinenfe  i?9?-  die  10  Maii. 

SI  qui  ab  alterutrâ  parte  irrumpentes ,  caedibus  ,  rapinis  ,  incendiisve  damna 
intulerint ,  aliaque  maleficia  commiferint ,  »o#  idcirco  pax  interrupta  cenje- 
bitur,  aut  bello  haec  vindicare  liccbit:  verhm  ejusmodi  grajfatores  à  prac/cclis 
utriui  que  Prihcipis,  qui  ad  limitent  eiloco,  in  quo  crimen  patratum  efi  ,  proxi- 
miïni  convenient,  inquir  entur ,  atque  debitis  fùpplicih  ajjicientur.  Idem  Arti- 
cuiis  22  &  23  Foederis  Cardifienlîs  itatukur. 

Lit.  S. 
Conventio  Plyfenfis  1666.   die  12  Odlob.  Artic.  4.  Ç.  4.. 

UT"  commenta  tantb  meîius  exerceantur ,  conventum  eft ,  #/  utriusque  magni 
Principis  cives ,  ^//i  caufam  babent  de  aliquo  negocio  conquercndi ,  vel  ab 
aliis  aliquid  exigcndi ,  potejiatem  habeant  adcundi  magiftratum  in  w  bibus  ,  qui 
juftitiam  adminifirat ,  6?  praeterea  praefetlos  ac  gubematores  à  parte  S.  R.  Ma- 
jeftatis ,  <à  />tff7<?  1W0  Cz.  Mâjeftatis  fenatores  &  gubematores  feu  Fcivodas  corn- 
pellare  us  licebit ,  qui  juxta  atîa  &  probata  judicabunt  ,  jus  aequum  reddent , 
atque  absque  ullâ  tergiverfatione  implorantibus  operam  fuam  conw:odabunt  ,  ne 
in  itiueribus  fuis  moram  fentiant  :  atque  haec  omnia  ad  tenorem  fœderis  Car- 
dijienfts  obfervabuntur. 


Lit. 


RESOLUTIONS     D'ETAT,  M.  D  C  C.  261 

r   •        ry\  ntSvEax. 

Mosciô- 

Libellus  Mofcoviae  vulgatus  die  18  Septemb.  1700.  «.*"*■.. 

INter  ovines  caufas  ,    quibus   Czarica  Majefias  ad  runpendam  cum  S'.iecis  pacem 
per.nota  fucrat ,  baSv  vel  praec:pua  ejl  ,   quod  Rex  Sueclae  externa   qu'de-n  fpec'c 
cmnia  officie  amicae  tranqiï.llaeque  vicihitatis  ei  exhibuerlt ,  atque  ut  de  f.de  fua  ma- 
gis  perfuaâeret ,  &  Czarum  q112.fi  in  foporem  daret  ,   legationem  quoque  folennem  vii- 
Jtrit,  quae  repetitam  paclorum  confirmationem  in  fpeciem  urgeret  ;    clanculum    aute.n 
varias  infidias  ei  machinatus  fit ,  atque  inter  alla  Regem  Pvlon'ae  in  focietatem  invi- 
taverit,  ut  conjunctis  v'ribus  Czarum  aggrederentur.     Cïandefiinae  quoque  Suecorum 
tnacbinationes  effecerant ,  ut  Confiantinopoli  pax  Turcam  inter  Ê?  Mofcu.n   multis  mo- 
dis  retardata  fuerit.     Ita  Su.ci  ultimam  Mofcis  moliti  funt  pernxiem.     Cum  igitur 
Rcx  Sueciae  nullci  jujta  de  caufa  Czarum  ï'aceffiiffèt ,  &  fimulata  amicitia  ipfum ,  to- 
tumque  ejus  imper  ium,  potentifjimis  bojlibus  adverjus  eu:n  conc'tat's  ,   evertere  atque 
pejjundare  frauduknter  cog'taffet  :  non  potuerat  non   Czarus  corà.n  univerjb  orbe  ef 
Chriftian;s  maxime  Princip'-bus  perfdian  banc  atque  fraude ,n  detegsre  ,  fperans  di- 
vinis    bumairsque   leg'bus  jufluni   ce   conveniens  jud'eatum  iri ,  ut  Czarica  Majefias 
imper ii  fui  curant  gerat ,  atque  à  Deo  conceffa  fibi  pot e fiât e  utatur  ,  illatoque  bello  , 
glfcentem  nimis  Suecorum  potent'.asn  ita  confringat ,  inque  eo  fiatu  collocet  ,  ne  perni- 
ciofas  perfidasque  machinât iones.  in  pefierum  exfequi  vaîeant.     Atque  confiait  fore ,  ut 
hoc  propofitum  jliu.n  ab  boneft's  omnibus  ,   £f  jîudio  partium  vacu:s  ,   eb  jufiius  ha~ 
beatur  ,  quo  mag's  nctun  eft ,  provincias  Careliam  &  Ingriam  antiquités  magno  Du- 
catui  Mofcoviae   extra   omnem    controverfiam  fubjectas  fu'ffe  ,    à  Suecis  verb ,  qui, 
juxta  eorum  fymbolum ,  ex  rapto  vivuni,  £f  omnes  vicinos  fpoliaverant ,  fub  initium 
bujusfeculi,  cum  Mofcovia  internis  dijjidiis  hboraret,  occupatas  atque  avuljas.  Qiio 
facto  cum  v'am  primum  invenifjènt  occupandi  Livoniam  ,    &  bellum  pofiea  in  Pruf- 
fiam,  inde  in  Germanium  transferendi  3  maximum  ex  rébus  gefiis  gloriam ,  fummam- 
que  famam  confecuti  funt. 

;  2.  Cum  regno  Daniae  Czarus  ejusque  antecefiores  ant'.quo  foederis  vinculo  junfti 

funt,  quo  ad  auxilia  ei  ferenda  ,    £?  injurias  quaslibet ,  tanquam  ipfis  fibi  f atlas , 

mndicandas  obligantur.     Raque  quoniam  Rex  Sueciae  Selandiam  valida  manu  invafe- 

rat,  Metropolique  abfentis  Régis  infeflata,  B  toto  regno  Daniae  in  ultimum  diferi- 

men  conjefto ,  Regem  non  modo  ad  iniquàm  pacem  cum  Duce  Holjatiae  ineundamy 

fed  etiam  ad  Regem  Poloniae,  amicum  &  focium,  ab  eadem   excludendum  adegerat , 

quo  difîraclwn  à  Jocio  opprimendi  major  occafio  effet  ;   Sua  Czarica  Majefias  °ararn 

Deo  &  howJnibusfe  adfiricfam  faîetur ,  ut.  Jnjurias  hafee  fidifjimis  amicis  fociisque 

illatas  ulcifeatur ,  è?  inita  cmt'ra  illos  confil'a  infringat  :   quo  fuam  èf  foederatorim 

fecuriiitem  armis  necejariis  aliquando  Jlabiliat ,   confidens  jufiifftmae  caufae   Dewn 

-ad/ort. 


Kk  3  Lit. 


262  MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  T    f-      T  T 

deSuf.de  A-/1C.     LJ. 

ET    DE 

Mocos-  Artic.  2%  Foederis  Cardifienfis. 


VIE. 


CUm  ex  providentiel  divina  contingat ,  ut  alteruter  magnorum  Principum  è  vita 
migret ,  Me  Pr inceps ,  qui  in  locum  defunài  fuccejjerit ,  continuandae  aeternae 
pacis  caufa  ad  fuperftitem  mittet ,  fuamque  amicitiam  ita  declarabit:  hic  quoque  ma- 
gnus  Princeps  rurfus  per  fuos  legatos  alterum  conveniet  ,  £?  fimili  modo  amicitiam 
j'uam  benevolentiamque  declarabit,  at que  ita  ab  utraque  parte  perpétua  haec  pax  >  mif- 
fis  utrinqm  diplomatibus ,  confirmabitur  ac  Jîabilietur. 

Lit.  V. 

Ex  Libello  Mofcici  Legati  fupra  citato  die  6.  Odtobris  1700. 

POfi  diuturnam  vero  exfpeftationem  illïus  refponfi ,  bis  diebus  à  Sua  Czarica  Ma- 
jefiate,  clementifiimo  meo  Domino,  accepi  mandatum,  in  quo  mibi  Vefiris  Civi- 
tatis  Dominibus  demonfirare  jujjit ,  quod  Sua  Czarica  Majefias  ,  ob  petitionem  Vef- 
trarum  Dominationum,  inter  Danicam  ê?  Suecicam  Coronas,in  incepta  negotiafe  immifee- 
re  nolit;  tantum  ut  fatisfaclio  fiât  ex  parte  Suecica  in  {(lis  manifefiis  injuriis  erga 
partem  Suae  Czaricae  Majefiatis  maxime  autem  de  ea  Rigae  illata  illius  Czaricae  per- 
fonae  ,  de  quibus  ex  mea  propojitione  vefiris  Dominationibus  omnimodo  confiât,  adquas 
injurias  Suecici  Legati ,  qui  fuerunt  Mofcoviae ,  refponderunt ,  quod  certo  certius  il- 
lam  notoriam  injuriam  ipfi  perfonae  Suae  Czaricae  Majefiatis  Rigae  illatam ,  ad  Re- 
gem  Dominum  illorum  referre  voluerint ,  ac  putent ,  ut  Mi  fatisfiat. 

Lit.  X. 

Artic.  9.  Foederis  Cardifienfis. 

PAriter  magnus  Dux  Sua  Czarica  Majefias ,  contra  potentifiimum  Dominum , 
Suam  Regiam  Majeflatem  âf  Coronam  Sueciae ,  atque  provincias ,  quae  nunc  ei 
fubjeclae  finit ,  aut  pofibaec  fubjici  pojjunt ,  nulli  Suae  Régine  Majefiatis  hofii  auxi- 
Humferet,  aut  pecuniam ,  militem,  ullamque  aliam  rem  fuppeditabit ,  neque  cum  Mis 
in  hune  finem  foedera  junget.  Nullos  praeterea  hofies  clam  aut  pahm  in  Suecos  im- 
mitlet  ,  concitabit ,  aut ,  ut  immittantur  concitenturque  adfentiet.  Neque  praeterea 
Sua  Czarica  Majefias  ,  ipfa  ,  aut  per  alios  ,  Suae  Regiae  Majefiati  âf  provinciis 
regno  Sueciae  Jubjeàis ,  inprimis  Finlandiae  ,  Efthoniae ,  Livoniae ,  Careliae ,  £f  In' 
griae,  urbibusque  £?  territoriis  ad  Mas  pertinentibus  ,  aut  aliis  Sueciae  provinciis , 
quoeunque  reniant  nomine  ,  perniciem  ullam  aut  detrimentum  macbinabitur  ;  7nultb 
minus  aliquam  earum  partem  aut  munimentum  occupabit ,  aut  quaeret  illas  fubjugare 
atque  retinere ,  aut  ullo  modo,  ullave  occafwne ,  Mis  damnum  inferet ,  inferri  patie-. 
lur ,  aut  ad  ici  confentiet.  Eltj 


RESOLUTIONS   D'ET AT  ,  M.  DCC.  263 


j 


'  Affatrf.s' 
J_^lt.     Y.  de  Suéde 


Literse  Ordinum  magnze  Novogardise  ad  Carolum  IX.  Regem 
Suecise  3  anno  1 6 1 1 .  die  17.  Augulti. 

NOS  Dominii  magnae  Novogardiae  Ordines  ,  utpote  Metropolita ,  &  Palatin!  re- 
liqui,  Knaefii,  Bajori ,  Praefedti,  AuHti,  Dapiferi,  Tribun! ,  Patrie!! ,  Mer- 
catores ,  Agricolae  omnes ,  gwi  /«Z?  magnae  Novogardiae  Ducatu  continemur  ;  iVw 
omww  cap/ta  ^zo/^ra  incllnamus  coram  Magnitudine  Tua. 

Regiae  Tuae  Majejlati  fat! s  cognitum  er.at3  colluviem  bominum  rebelV.um  partibus 
nequifihni  Demetrii,  qui  Je  poientiffîmi  Domini  Czarl  ac  Principis  Jobannis  Bafilidis, 
Demetrii  Ivanovitzii  de  Uglitz,  filium  venditaverat ,  acceflijje ,  auxiliaribufque  copiis 
à  S'gismundo  Rege  Poloniae  acceptis  ,  longo  tempore  Mofcboviam  obfidlone  prejfijje  , 
multa.ii  fànguinem  ejfudijje,  templa  De!  ac  cœnobia  profan.ijje,  Janctorum  loca  ac  Jla- 
tu.s  viohjfe,  pagos  â?  regiones  dsvajlajfe  ,  incultafque  reliquiffe.  Ea  tempejlate j'um- 
mum  Imper ium  Mo fcoviae ,  ac  Volidimiriae  BafiUus  Ivanovitz  Suifcbi  tenebut ,  cum-  . 
que  memoratus  nèquam  Mofcuam  pervenifi'et ,  ibique  J'pe  dominii  MuJ'cbovitici  confie- 
quendi ,  Cbrijllanaeque  eorum  fidei  e-vertendae  Je  continufiet ,  mi  fit  magnus  eorum 
Dux  pracdïàus  Suifchius  confanguineum  fuum  magnum  Bajorum  &  Palatinum  Knae- 
Jium  Micbaelem  Bajilium  Suifcbi  Novogardiam ,  ut  dominium  illud  tueretur ,  impel- 
leretque  ut  dominio  Mufcbovitico  opemferret.  Haec  Zari  mandata  Fajîllvitz  Suifcbi 
Jlrenue  efi  executus ,  £f  ego  Metropolita  cum  Bajoris ,  ad  Te ,  potentijfvne  Rex  ,  Ca~ 
rôle  y  literas  mifimus  ,  quibus  auxilium  tuum  imploravimus.  Tu  precibus  nojtris  com- 
nwtus ,  religionis  nojlrae  magnam  curam  gejjtjti  ;  &  ut  nos  ab  extrena  pernicie  lïbe- 
rares ,  Jacobum  Pontum  de  la  Gardie  Juprema  armorum  autoritate  in  MoJ'cboviani. 
cum  magno  exercitu  mifijii ,  qui  cum  Bajoro  ac  Palatino  Knaejio  Micbaele  Vafilivitz 
Suifcbi ,  plurima  Mofcboviae  munimenta ,  oppida,  âf  cœnobia  occupaverat ,  eaque  ah. 
bofitili  impetu  tuitus  eft,  multis  in  locis  bojlem  profl'gaverat ,  dominium  Mujcbovlti- 
cum  à  Pelonorum ,  Litbuanorum,  êf  nequiffimi  ifiius  bominis  Demetrii  objîdione  lïbe- 
raverat.  Inde  Jacobus  Pontius  Mofaijcum  ufque  Polonis  fcf  Litbuanis  obviam  pro- 
cejfit,  fed,  prob  dolor  ,  proptcr  delicla  nofira  factum  ,  ut  Rujfi  £f  Sueci  (Peregrini  à 
Suecis  mercède  condudtÇ)  in  medio  pugnae  ardore  animos  amitterent ,  deficerentque  ad 
bojles.  In  patriam  deinde  Majeftatis  tuae  fupremus  dux  rediit ,  bojlis  vero  in  mala 
fuo  propojito  perfeveram ,  undique  viâor  volitabat.  Quare,  cum  potentijjimus  Domi- 
nas Zar us ,  £5*  totius  Rujficae  nationis  Jummus  Princeps  fe  nullo  modo  Rujfos  libcra- 
re  pojje  cerneret ,  in  cœnobia  Je  contulit ,  formamque  angeli  ajjumpfit.  Quo  faclto  , 
Mofcbovitici  domini  Bojari  âfc.  à  Sigifmundo  Rege  Poloniae  petierunt ,  ut  filium  fuum 
Uladiftaum  dominum  ac  magnum  Ducem  fibi  permitteret  ;  quod  Staniflaus  Zolkev:us 
vi  ofculi  S.  Crucis  firmamt.  Rex  vèro  Poloniae  pafta  eludens,  filium  fuum  in  Ruf- 
jiam  non  mi  fit ,  fed  vi  armata  primariam  eorum  urbem  Mofcbuam  occupavit,  magnam- 
que  îyr.nmidem  in  ea  exercuit ,  donec  Mufcbovitae  caeterique  ordines  impulji  fuerint , 
Regem  Poloniae ,  filium ,  omnemquc  eorum  pofteritatem  regno  Mufcbovitico  abdicare  ; 
nos  quoque  cum  ill'.s  unanimi  confenfu  decrevimus ,  ipfis  ut  bojïibus  rejifiere,  ac  pro 

patriac 


ET    DE 

Mosco- 

VIE. 


ET     DE 
VlOiCI 
VIE. 


264    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ETC. 

Affaires  paîrlae  falute  nec  vitae  nec  fortunis  parcere.  Literas  praeterea  à  Mofcbovitico  domi- 
ne. Suéde  m-0  ^e  2.  Julii  datas  ac  propriis  man;b:is  fubfcrlptas ,  accepimuï,  quitus  jubemur , 
M  ^  hic  Novogardiae  cum  Regiae  Tuae  Mnjejiatis  fupremo  duce  tali  modo  tr  an  figer  e ,  ut 
nempe  unum  ex  Regiae  Tuae  Majejlatis  filiis  nobis  permittas ,  quem  Zarum  ac  totius 
RuJJiae ,  omniumque  ejus  Dominiorum  Principem  confi'.tuamus.  Qùamvis  vero  Zarni- 
cius  Palatinus ,  B.ifil'us  îvanovitz  Bùtterlin  cum  Majejl'atis  Tuae  fupremo  duce  fae- 
pius  de  hoc  egerint ,  negocium  tamen  hoc  ad  optatum  finem  perduci  non  pctuit.  Pop 
tremo ,  anno  hoc  7119-  d'e  6.  Julii  prov;dentia  Del  accidit  ut  Majejlatis  Tuie  fupre- 
mus  dux  Jicobus  Pontius  armis  exterius  munimentum  dv'tatis  Nougardiae  occupant  t 
cumque  in  molimine  arc' s  expugnindie  conjlltutus  effet ,  Nos  Nougardiae  Ordines  â? 
caetcrarum  urbium  cives  de  Cbrijliinorum  falute  cog'tare  cospimus.  Itaque  juramento 
fcp  S.  Cruels  ofculo  Tibi,  potentijjim  Rex ,  Cirole,  fide;n  nojlram  bac  ratione  firma- 
vimus,  ut  Tu  nempe,  Rsx  potentijftm ,  nos  c  on  fer  vires ,  imperio  protegeres ,  unumque 
ex  filiis  ,  quem  potijjimum  villes ,  aut  GufiWum  Adolpbum ,  aut  Carolum  Philippun, 
nob:s  in  Zarum  ac  magnum  Ducem  omnium  Rufforum,  Nougardiaeque  Dominii  offer- 
res ,  cui  etiam  nos  abj'que  dulo  malo  omnem  fidem  £f  obedientiam  cxbiberemus.  Vice 
verfii ,  Regiae  Tuae  Majejlatis  fupremus  dux ,  tribuni,  praefteli  equitum  £?  aulici, 
nomine  totius  Suecici  exerc'tus ,  ticlo  S.  Evmgelio  cum  nobis  £f  toto  Nougardiae  Do- 
minio  convenerunt ,  ut  Tu,  Rex  potentifvne ,  nojlri  defenfionem  fufe 'pères  &  alterum 
fil  'orum  ad  nos  mitteres.  Nos  viciffvn  ab  ipfo  impetravimus  ,  ne  aliam  praeter  banc 
Cbr.jlianam  ReUgionem  nobis  obtruderet ,  nec  pateretur  quemquam  ob  eam  caufamfpo- 
liari  aut  injujla  nece  affici ,  tum  juntHis  potius  cum  reliquis  Rujfis  viribus  3  omni  co- 
natu  rebelles  &  boftes ,  utpote  Litbuanos  &  Polonos  profligaret. 

Interei  Jacobo  diSto  audientes  fumus  ,  omniaque  apud  nos  rite  geruntur ,  fummam 
quoque  operam  nobifeum  dat ,  ut  refractarias  arces ,  oppida ,  &f  munimenta  ad  obfequium 
futuri  Ducis  redigantur.  MiJJi  denique  funt  Legati ,  viri  cujufcunque  ordinis  leclif- 
fimi  &?  bonoratijftmi ,  qui  de  bis  tranfigerent ,  &f  ab  Rege  ipfo  paàa  confirmari  cura- 
rent.     Aàum  Nougardiae  anno  mundi  71 19.  die  27.  Augujlp. 

Lit.  Z. 

Via.  Pauli  Jovii  Liber  de  Légations  Bafilii ,  Magni  Frincipis  Mofcoviae ,  adClemen- 
tem  VIL  Pontificem  Romanum ,  exeufus  Francofurti  3  anno  1606. 


SUPPLE- 


SUPPLEMENT 


AUX 


MEMOIRES 


D  E 


L   A  M  B  E  R   T  Y- 


ANNEE    M.    D  C  C.    I. 


loms  XI. 


L) 


w$£*?3>  *£  #  &&&&  3>\*3gK\+&  %.+&  î\+ï£  &*yS  VvS  *.♦-#  *.«■#  %:*&&&*? 


MEMOIRES, 

NEGOTIATIONS, 

TRAITEZ, 

E    T 

RÉSOLUTIONS     D'ÉTAT: 

ANNÉE        M.    DCC.    I. 

9H&*  *  $*4&$tt&  3*^3*-£3*-&  «3H&«3H&*4&  gM&4H&$Mg>  gM&€H&§tfê£H&$H&  «3*^ 

:     AFFAIRES  DES  PROVINCES-UNIES. 

Réponfe  de  V  Amirauté  de  Jîoorn  aux  Etats -Généraux  fur  leur  Amn«i 
Information  de  PEmpîoi  des  Deniers  de  cette  Amirauté  ;  DES  Pro- 

^  7  *V  •  VIMCES- 

du   13.  janvier  1701.  unies. 


^^:(55)^é>our  obeïr  aux  ordres  de  VV.  H  H.  PP.  compris  dans  IeurLet-  Réponfe 
^  }0  tre  &  Refolution  du  4.  Janvier  dernier,  touchant   Je  Ra-  dei'Amî- 

■©     \y      ©  port  demandé  comment  &  de  quelle  manière  les  deniers  TiUté  de 
S     A        ©  du  petit  Sceau  font  adminiftrez  dans  nôtre  Collège,  il  plaira  Ho°£Gt 
5^(  )fa  à  VV.HH.PP.de  felailTer  informer,  qu'on  fe  règle  à  l'égard 

WSW^i.^  de  ces  deniers  fur  ce  qui  a  été  ordonné  par  VV.HH.PP.en 
1669,  mais  que  les  Revenus  des  dits  deniers  n'ont  pas  été  allez  impor- 
tans  pour  faire  quelque  Négociation  là-deflus,  ni  pour  acheter  quelques 
Pièces  de  Canons,  puifqu'après  les  gages  du  CommiiTaire,  des  Contrôla 

Ll  2  leurs 


fi<58    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AmmEs  leurs, &  autres  Officiers,  il  n'efl  pas  beaucoup  refté  pour  le  Païs,par  où 
»»s  Pro-  i'on  croit  avoir  fatisfait  aux  intentions  de  VV.  HH.  PP. 

VINCKS- 

■"  FaitàHoorn,  le  13.  Janvier.  1701. 

1 

Réfohtion  des  Etats-Généraux  fur  une  Pétition  du  Confeiî  d'Etat 
pour  deux  Millions  ;   du  Lundi   17.  Janvier  1701. 

Rcfoîu-     T)  E9U  une  Lettre  du  Confeil  d'Etat,  écrite  ici  à  la  Haie,  le  ij.  du  cou- 
tion  fur     -IV  rant ,  laquelle  porte,  que  le  dit  Confeil,    après  avoir  délibéré  avec 
unePé-      Sa  Maj. Britannique  ne  fauroit  s'empêcher,  pour  les  raifons  alléguées  dans 
titiondu    ladite  Lettre,  de  remettre  à  la  confideration  de  VV.HH.PP.fi  l'onnepou- 
A?t£.û      roit  pas  négocier  encore  deux  millions  fur  le  même  fonds  que  les  4  millions 
dernièrement  rembourlez  avoient  ete  négociez  en  id88,  &  fur  lequel  VV„ 
HH.PP.  avoient  refolu  depuis  de  négocier  de  nouveau  2,9408 $6: 13.4.  bien 
entendu  fous  les  mêmes  claufes  &  engagemens  par  raport  aux  Provinces 
que  les  dernières  Négociations  avoient  été  faites.     Surquoi  ayant  été  dé- 
libéré, il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  qu'il  fera  envoyé  Copie  de  la  dite  Pé- 
tition aux  Seigneurs  Etats  des  Provinces,  en  demandant  leur  confentement 
au  plutôt  là-deffus,  &  d'en  vouloir  faire  part  inceflament  à  l'AlTemblée. 

,  Réfolution  des  Etat  s- Généraux  Jur  une  Requête  de  9  Bataillons 
PruJJiens  pour  leurs  Gages  ;    du    Mardi    1 8. 

Janvier  1701. 

Réfolu-  T  U  à  l'AlTemblée  la  Requête  des  Officiers  foufîîgnez  &  autorifez  des 
tion  tou.  1-/  neuf  Bataillons  de  S.  Maj.  le  Roi  de  PruïTe,  ci-devant  au  Service  de 
chants».  l'Etat,  fupliant  pour  des  raifons  exprimées  dans  la  dite  Requête,  qu'il 
Batail-  plaife  à  LL.  HH.  PP.  d'autorifer  encore  &  d'ordonner  au  Receveur  General 
(knsP  jeune  d'Ellemeet  d'accepter  les  arrérages  &  les  dettes  des  Suplians ,  por- 

tant la  fomme  de  616$  f  :  9;  o.  &  Je  promettre  par  écrit  de  les  payer 
avant  le  dernier  Février  prochain  &  de  les  acquiter  promptement  ;  com- 
me aufli  que  LL.  HH.PP.  veuillent  accorder  aux  Suplians  par  ordonnance 
audit  Receveur  General  une  fomme  qu'Elles  jugeront  équitable  &  propor- 
tionnée aux  gros  intérêts  qui  leur  ont  été  portez  en  compte  de  tant  de  Ca- 
pitaux confiderables ,  au  préjudice  des  Soldats,  foit  pour  habits  ,  argent ,. 
ou  monture,  de  même  qu'aux  autres  fraix  caufez  par  leurs  follicitations  & 
leur  long  fejour  ici,  afin  que  de  cette  manière  les  Suplians  ne  foient  ar- 
rêtez plus  long  tems  ici  à  leur  propre  ruine  &  au  préjudice  du  Pais,  & 
qu'enfin  il  leur  foit  ôté  tout  fujet  de  plainte.  Surquoi  ayant  été  délibéré,  il 
a  été  trouvé  bon  &  arrêté  d'écrire  de  nouveau  aux  Seigneurs  Etats  de 
la  Province  de  Gro.ning.ue ,  &  de  les  exhorter  ferieufement  à  confentir  fans 

délai 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.    I.  z69 

délai  à  la  Négociation  du  3mc  terme  fixé  pour  le  payement  des  Dettes  con-  AffairE3 

traêtées  par  les  depenfes  des  Camps  &  des  Magazins,  afin  que  la  dite  Né-  DES  Pi>°- 

gociation  puifTe  être  faite,  &  que  les  Suplians,de  même  que  d'autres,  foienc  ^1NCES- 

contentez  de  leurs  arrérages.  wtE$» 

Refolution  des  Etats-Généraux  touchant  les  Réparations  £*?  F  ré  eau- 
tions  neceffaires  fur  le  Rhin  ;  du  Samedi  2  2  Janvier  1 7 1  o. 

Ouï  le  Raport  des  Srs. d'Eflen &  autres  Députez  de  LL. HH.  PP.  pour  Réfolu- 
les  Affaires  du  Bas-Rhin  &  de  FYfler,  aïanc  examiné  conjointement  u?n  ^u" 
avec  quelques  Députez  du  Confeil  d'Etat,  la  Lettre  du  dit  Confeil  écrite  Répara-** 
ici  à  la  Haïe  le  12.  Janv.  précédent,  laquelle  porte,  qu'il  étoit  connu  àLL.  tions  & 
HH.PP.  qu'à  moins  qu'on  ne  voulût  entièrement  négliger  les  réparations  Précan- 
de  l'embouchure  du  Bas-Rhin,  il  falloit  fonger  à  laconfervation  de  lapoin-  J,0^fur 
te  de  Schenckenfchans  &  du  Botterdyck,  foit  par  manière  de  coupure, 
ou  en  travaillant  à  la  féconde  embouchure  :  Que  le  dit  Confeil  régardoiù 
les  moïens  propofés  par  le  Mémoire  joint  à  cette  Lettre  comme  indifpen- 
fablement  neceflaires  pour  la  confervation  de  Schenckenfchans  &  du  Bot- 
terdyck, mais  qu'il  fe  trouvoit  en  même  tems  obligé  de  dire,  qu'il  ne 
pouvoit  pas  donner  ordre  de  les  mettre  en  œuvre,  puifque  les  Provin- 
ces ,  qui  ont  été  taxées  fur  l'état  de  guerre  pour  l'entretien  du  Fafcmage 
deSchenkenfchans,  n'avoient  accepté  &  paie  que  très  lentement  les  aéles 
de  réquifition  qu'on  leur  avoit  dépêché  dans  ces  dernières  années  fur  cet 
Article  ,  &  que  jufqu'ici  elles  n'avoient  fourni  que  iyoo.  Florins  fur 
une  Somme  de  9803  -  4  -  7.  que  le  Confeil  avoit  avancé  fur  des  pro- 
mefTes  préalables  de  rembourfement,  &  qu'elles  paroifîbient  peu  portées 
à  fournir  d'avantage  fur  le  même  pied  ,  tant  que  les  délibérations  fur  les 
réparations  des  rivières  refterioent  dans  l'incertitude  préfente  ;  de  forte 
que  le  dit  Confeil  ne  fauroit  faire  autrement  que  de  porter  le  dit  Mémoi- 
re à  la  connohTance  &  délibération  de  LL.  HH.  PP.  Surquoi  aïant  été 
délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  qu'il  fera  envoie  Copie  de  la  dite 
Lettre  &  du  Mémoire  y  joint  aux  Srs.  Etats  des  Provinces  de  Gueldre,. 
d'Utrecht ,  &  d'Overylîel ,  lefquelles  font  mifes  fur  l'Etat  de  Guerre  pour 
une  Somme  deftinée  à  l'entretien  du  Fafcinage  de  Schenckenfchans,  & 
qu'elles  feront  priées  d'envoïer  au  comptoir  du  Receveur  gênerai  chacu- 
ne quatre  années  de  la  dite  Somme  en  diminution  de  ce  qu'elles  font  en 
arrière,  afin  que  les  Ouvrages  neceffaires  à  la  confervation  de  la  pointe 
de  Schenckenfchans  &  du  Botterdyck  puifTent  être  commencez,  &  de 
faire  le  dit  fournifTement  au  plutôt,  vit  que  le  branchage  neceflaire  doit 
éxxQ  acheté  dès  à  préfent,  &  ne  peut  fe  trouver  en  Eté, 


L.1  |  &tf*- 


a7o    MEMOIRES,  NEGOTIATîONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires     Réfolution  des  Etats-Généraux  ,   touchant  le  Confentement  de  la 
Dv/Snces°"         Hollande  à  la  Pétition  de  deux  Millions ,  £•?  exigeant  celui 
Unies-  des  autres  Provinces  ;  du  Lundi  3 1 .  Janvier  1 70 1 . 


Réfolu 
tion  tou 


Les  Srs.  Députez  de  la  Province  de  Hollande  &  Weilfrife  ont  porté  k 
l'Aflemblée,  &  y  fait  lire,  laRéfolution  des  Seign.  Etats  leurs  Prin- 
chant  2      cipaux  ,  par  laquelle  Elle  confent  à  la   Pétition  de   deux  Millions  pour 
Millions.    p0urvoir  ies  Magazins  aux  Frontières  de  l'Etat,  &  l'Etape  des  Magazins, 
fuivant  la  teneur  de  la  Réfolution  ci-jointe. 

Extrait  des  Réjolutions  des  Seign.  Etats  de  Hollande  £5?  de 

Weflfrife  ,  prifes  dans  VAffemblée  de  LL.  NN.  &  Gr. 

PP.  le  Jeudi  1 3.  Janvier  1701. 

Aï  a  nt  été  délibéré  par  réfomption  fur  la  Pétition  formée  par  le  Confeil 
d'Etat  pour  la  Somme  de  deux  Millions  de  florins  deftinée  à  pourvoir 
les  Magazins  fur  les  Frontières  de  cet  Etat ,  &  l'Etape  des  Magazins ,  infé- 
rée dans  les  Réfolutions  du  7.  du  courant,  les  Srs.  de  la  NobleiTe,  de  même  que 
les  Villes  Refpe&ives ,  au  nom  &  de  la  part  des  Bourguemaîtres  &  Regens 
defdites  Villes,  ont  confenti  &  acordé,  comme  LL.  NN  &GG.PP.  con- 
fentent  &  acordent,  par  la  préfente,  la  dite  Pétition  de  deux  Millions  pour 
être  emploïez  à  pourvoir  les  dits  Magazins ,  ôç  à  nul  autre  ufage,  ce 
qui  doit  être  déclaré  à  la  Généralité. 

Sur  quoi  aiant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  de  prier  les 
Srs.  Députez  des  autres  Provinces,  dont  le  confentement  n'a  pas  encore 
paru,  d'infilter  auprès  des  Seign.  Etats  leurs  Principaux,  afin  qu'ils  veuil- 
lent pareillement  l'envoïer  au  plutôt  ici  à  l'AfTemblée. 

Réfolution  des  Etats-Généraux ,  pour  envoler  à  leur  Mini  [Ire  en 

Ejpagne  leurs  Réjolutions  touchant  la  Paix,  déjà  envolée  à 

leur  Miniflre  en  France;  du  Mardi  1.  Février  1701. 

Rcfoiu-       ÂPRES  4e  mûres  Délibérations,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  que  les 

tion  tou-    Fi  Réfolutions  de  LL.  H  H.  PP.  du  if  &  29.  du  paiTé,  contenantes  les  ordres 

chant  la     donnez  auSr.  de  Heemskerck  AmbalTadeur  de  l'Etat  à  la  Cour  du  Roi  de 

tion  des     ^rance'  Pour  témoigner  combien  LL.  HI 1.  PP.  font  portées  à  la  Confervation 

E.  G.  à  la   ^e  'a  ^a^x  &  de  ^a  Tranquillité  publique  ,  &  pour  offrir  une  Conférence 

Paix.         afin  d'y  traiter  fur  les  moïens  qu'on  pouroit  trouver  pour  parvenir  à  ce 

but  falutaire,  feront  envoïées  au  Sr.  de  Schoneberg  chargé  des  Afaires  de 

l'Etat  à  la  Cour  d'Efpagne  ,  pour  lui  fervir  d'Inftru&ion  ,  &  pour  qu'il 

en  fade  un  ufage   convenable  ,  fur-tout  contre  le  bruit  courant ,  en  cas 

qu'il 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.   1.  i7t 

qu'il  foit  aufli  répandu  là  comme  ailleurs,  q^eLL.  HH.  PR  defiroient  la  guer- 
re, &  pouraffurer  au  contraire,  par-tout  où  il  poura  être  de  quelque  utili- 
té, de  leur  fincere  inclination  pour  là  Paix  &  la  Tranquillité  publique. 


affaires 
des  Pro- 
vinces- 
Unies. 


Réfolution  des  Etats-Généraux  touchant  les  faux  Bruits  répandus 
de  leur  Bifpoftiïon  à  la  Guerre  ;  du  Mardi  i .  Février  1 70 1 . 

Apre' s  de  mûres  Délibérations,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté  d'écrire  au   ^utrc  fur 
Réfident  Hulft,  que  LL.HH.PP.  ont  appris  avec  chagrin  le  bruit  ré-   lemêms 
pandu  par-tout,  &  particulièrement  aux  Pais-Bas  Efpagnols,  comme  fi  Elles   SuJct- 
étoient  portéesàla  Guerre,  &  la  defiroient.  Que  LL.HH.PP.  ne  fauroient 
régarder  ce  bruit  que  comme  femé  par  des  Perfonnes  mal-intentionées  pour 
l'Etat,  vu  que  LL.HH.PP.  abhorrent  entièrement  la  Guerre,  &  ne  foûhaitent 
rien  plus  que  la  confervation  de  la  Paix  &  de  la  Tranquillité  publique , 
étant  de  l'intérêt  de  l'Etat  d'en  pouvoir  jouir  long-tems  avec  une  feureté 
raifonable.  Que  pour  ces  raifons ,  lui  Réiident  doit  tacher  à  obvier  a  ce 
bruit, &  témoigner  par-tout  où  il  poura  être  de  quelque  utilité  la  lincè- 
re  intention  de  LL.  HH.  PP.  pour  la  confervation  de  la   Paix  &  de  la 
Tranquillité  publique  ;  &  qu'il  fera  envoie  audit  Réfident  Copie  des  Ré- 
folutions  de  LL.  HH.  PP.  du  ij.  &  29.  du  paffé,  pour  lui  fervir  d'Initru- 
érion ,  &  pour  qu'il  en  fafle  un  ufage  convenable. 


Pétition  du  Confeil  d'Etat 5  touchant  le  Paiement  de  la  Flotte, 

du  21  Février  1701. 

HAUTS   ET   PUISSANS    SEIGNEURS, 

Nous  avons  préfenté  dépuis  peu  à  VV.HH.  PP.furcequ'Elles  avoient 
crû  à  propos  pour  pluileurs  raifons,  &  pour  le  bien  Public,  d'équi- 
per vers  le  Printems  prochain  douze  VaiiTeaux  de  Guerre  avec  leurs  Fré- 
gates &  Brûlots,  une  Pétition  des  deniers  neceiTaires  pour  cet  Armement; 
mais ,  comme  du  depuis  les  Affaires  de  l'Europe  ont  pris  une  face  qui  a 
fait  juger  necelTaire  à  VV.HH.  PP.  pour  affermir  d'autant  plus  la  fureté  de 
l'Etat  par  Mer,  &  pour  affùrer  les  Fleuves  &  Rivières  du  Pais,  d'augmen- 
ter ledit  Armement  en  nombre ,  équipage ,  &  pièces  de  Canon  des  Vaif- 
feaux  de  Guerre,  comme  aufli  en  Frégates,  Brûlots,  &  Galiotes  à  Bom- 
bes, avec  une  quantité  convenable  de  VaiiTeaux  à  bas-bord,  &  qu'EUes 
nous  ont  prié  par  leur  Réfolution  du  17.  du  courant  de  former  une  Pétition 
des  deniers  indifpenfablement  necefTaires  pour  cet  effet,  nous  avons  crû 
conforme  aux  intentions  de  VV.HH. PP.  que  l'Efcadrequi  doit  fervir  fur 
Mer  confifte  en  VaiiTeaux  de  ligne,  favoir  troi^  de  po.  pièces  de  Canon 

& 


Pétition 
du  Conf. 
d'Et.  tou- 
chant la 
Flotte. 


iyi  MEMOIRES  ,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

Amisis   &  foo.  hommes  d'équipage,  fix  de  72.  pièces  de  Canon  &  2,7$-.  Hom« 


forte  que  l'Equipage  des  dics  24.  VaifTeauxde  Guerre, fix  Frégates ,& au- 
tant  de  Brûlots  fera  en  tout  842 y-  Hommes,  qui  comptez  par  tête  à  36. 
florins  par  mois ,  pour  folde ,  penfion ,  &  ce  qui  s'ufe ,  coûteront  chaque  mois 
3033oo.florins^à  quoi  il  faut  encore  ajouter  fix  Galiotes  à  Bombes  qui  coû- 
teront chacune  ss°-  A-  de  louage  par  mois,  ce  qui  montera  à  une  fom- 
me  de  3300.fl.  Les  Bâtimens  à  bas-bord ,  qui  doivent  fervir  à  la  defenfe 
des  fleuves  &  rivières  du  Païs,  ayant  été  mis  par  la  Réfolution  de  VV.HH. 
PP.  du  17.  d. c.  au  nombre  de  douze  ;  &  l'Etat  pouvant,  fuivant  l'avis 
des  Députez  des  Amirautés,  mieux  trouver  fon  compte  en  les  achetanc 
qu'en  les  louant,  l'achat  desdits  douze  Bâtimens  à  bas-bord  coûtera  72000. 
fl.  &  chacun  devant  être  équipé  de  fo.  Hommes  ,  fait  pour  les  douze  600. 
Hommes ,  comptez  par  tête  à  40.  fl.  par  mois  pour  folde  ,  penfion  des 
Officiers  &  des  Matelots ,  y  compris  ce  qui  s'ufe,  cela  montera  en  tout  à 
une  fomme  24000.  fl.  par  mois. 

Et  comme  VV.  HH.  PP.  ont  jugé  pour  plufieurs  bonnes  raifons,  que  lef. 
dits  équipages  devroient  être  engagés  du  moins  pour  huit  mois ,  celui  de 
vingt  &  quatre 

VaîfTeaux  de  Guerre,  Frégates,  &  Brûlots  fera  en  huit  mois,  fl.  2426400 
L'équipage  des  Bâtimens  à  bas-bord    -------  ip2ooo 

L'achat  des  dits  Bâtimens     ----------  72000 

Et  le  louage  des  Galiotes  pour  8.  mois     ------  26400 

fomme  totale      2.7 16800 

De  cette  fomme  devroit  être  rabatu  îe 
montant  de  la  Pétition  pour  12.  VahTeaux 
de  Guerre  en  date  du  12.  du  courant,  fi 
les  Provinces  y  avoient  confenti,  lequel 
faifant  ---------------         943200 

il  relie  encore    -    -    fl.      1773600 

Nous  envoyons  donc  à  VV.HII.PP.,  conformément  à  leur  volonté,  cette 
Pétition  pour  la  dite  fomme  de  1773600.  fl. ,  en  les  priant  de  vouloir  la  dé- 
pécher au  plutôt  aux  Provinces,  afin  qu'elles  envoient  fans  perte  de  tems 
leur  confentement  là-deffus ,  aufli-bien  que  fur  notre  précédente  Pétition 
du  12.  du  courant  de  la  fomme  de  fl  043200.  pour  autant  que  quelques-uns 
àes  Confederez  pouroient  n'y  avoir  pas  encore  confenti,  &  que  leur  con- 
fentement foit  apuïé  par  des  fourniiïemens  promts  &  effectifs.  Nous  ne 
doutons  pas  que  les  Seigneurs  Etats  des  Provinces  ne  foient  autant  con- 
vaincus que  VV.HII.PP., &  nous,  de  la  dernière  necefiité  qu'il  y  a  dans  la 

con- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC  I.         i7 


« 


conjoncture  préfente  de  fonger  fans  délai  à  la  fureté  de  l'Etat  &  de  fes  Affaires 
habitans,  tant  par  Mer  que  par  Terre,  de  même  qu'à  la  defenfe  des  Fleu-  DES  Pr°- 
ves  &  Rivières  du  Pais ,  vu  que  le  Printems  efl  fi  proche ,  &  que  les  A-     u^n?" 

mirautés  doivent  courageufement  mettre  les  fers  au  feu,  fi  l'Armement  ci- - 

deffus  mentioné  doit  être  de  quelqu'utilité,  &û  conformément  au  falutai- 
re  butdeVV.HH.  PP.  l'Etat  doit  être  gardé  &  défendu  par-là  par  eau  j  que 
par  confequent  lesdits  Collèges  des  Amirautés  doivent  être  mis  en  état  d'y 
travailler,  ce  qui  ne  fauroit  fe  faire  que  par  le  prompt  confentement,  & 
les  fournifTemens  réels  des  confederez;  lefquels  nous  nous  trouvons  obligez 
de  preffer ,  d'autant  plus  que  plufieurs  Provinces  ont  été  dépuis  quelques 
années  fort  tardives  à  ce  llijet,  ce  qui  a  caufé  de  grands  embarras  aux  A- 
mirautés  refpeélives. 

Fait  à  la  Haie  ce  21.  de  Fevr.  1701. 

Réfolution  des  Etats-Généraux ,  en  contenant  deux  des  Etats  de 

Zélande  touchant  leur  Contingent  des  deux  Millions 

demandez;  du  Samedi  26.  Février  1701, 


Les  Sieurs  Députez  de  la  Province  de  Zelande  ont  porté  à  l'Aflem-   Réfolu- 
blée,  &  y  ont  fait  lire,  les  Réfolutions  des  Sgneurs  Etats  leurs  Principaux,   tion  tou' 
par  lefquelles   ils  confentent  aux  Pétitions  de  deux  millions  pour  pour-    ^ant  le! 
voir  les  Magazins,  de  la  Négociation  de  deux  autres  millions  pour  les  For-    Misons 
tifications,  de  72,5717.  pour  apareiller  18.  VahTeaux   nouvellement  con- 
ftruks,  &  de  949500.  fl.  pour  la  conftruction  de  12.  VaifTeaux  de  Guerre. 
Lefquelles  Réfolutions  font  ci-jointes. 

Extrait  du  Regître  des  Réfolutions  de  LL.  NN.  PP.  les  Seigneurs 
Etats  de  Zélande  ;  du  2.  Février  1701. 

Aiant  été  délibéré  fur  la  Pétition  formée  par  le  Confeil  d'Etat  pour 
une  fomme  de  deux  millions  deflinée  à  pourvoir  les  Magazins  fur 
les  Frontières  de  cet  Etat,  &  l'Etape  des  Magazins,  tous  les  Membres  ont 
unanimement  confenti  à  la  dite  Pétition  de  z.  millions,  pour  être  em- 
ploïez  à  cet  ufage  &  à  nul  autre,  à  quoi  cette  Province  fournira  de  tems 
à  autre  fa  quote-part  en  fe  réglant  précifement  fur  l'exemple  des  autres 
Confederez,  fans  en  faire  ni  plus  ni  moins  :  le  tout  dans  la  ferme  atten- 
te que  les  Frontières  de  cette  Province  &  les  Quartiers  adjacens  en  feront 
fiififamment  pourvus.  Aiant  enfuite  été  délibéré  fur  la  Lettre  de  LL.HH.PP. 
du  12.  du  paffé,  pour  en  accompagner  une  du  Confeil  d'Etat  des  Pro- 
ZomeXL  Mm  vinces- 


*74    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   vinces-Unies ,  par  laquelle  on  propofe  une  nouvelle   Négociation  de  deux 

des  i'Ho-  millions  fur  le  même  fonds  que  \qs  4.  millions  dernièrement  rembourfez 

vinces-    avoient  ^  negotiez  dans  l'année  1688.  afin  d'achever  les  Fortifications, 

1    vu  que  la  plufpart  des  places  frontières  ne  fe  trouvent  pas  en  bon  état  de 

defenfe  j  &  les  Membres  aïant  réfléchi  que  depuis  les  dernières  Délibéra- 
tions fur  les  Fortifications  la  face  des  Affaires  a  beaucoup  changé,  &  que 
du  depuis  cette  Province  fe  trouve  allez  à  l'extrémité  des  Frontières  pour 
pouvoir  devenir  la  plus  expofée,  ils  ont  jugé,  que  pour  cette  raifbn  il 
eft  indifpenfablement  neceffaire  de  demander  auifi  de  ce  fonds  la  Fortifi- 
cation de  leurs  Frontières,  &  en  particulier  de  la  Ville  de  Sluys,  &  d'au- 
tres Places  en  Flandres,  qui  font  la  fureté  de  cette  Province  ;  &  fe  fiant 
à  cet  égard  entièrement  à  l'équité  de  leurs  Confederez,  ils  ont,  après  de 
mures  Délibérations,  unaniment  trouvé  oon  de  conîentir  que  lëÇonfei!  d'E- 
tat refte  autorifé,  s'il  fe  trouve  que  le  fonds  affecté  pour  les  Fortifications 
a  effectivement  été  emploie  &  depenfé  en  conformité,  &  pas  autrement, 
à  negotier  encore  pour  la  même  fin  une  fomme  de  deux  millions  fur  le 
même  fonds  que  les  premiers  4.  millions  ont  été  négociez,  le  tout  fous  les 
Reftrictions  comprifesdans  JaRéfolutiondeLL.  HH.  PP.  du  18.J ui'Iet  ic>88. 
&  fous  les  mêmes  engagemens  des  Provinces  jufqu'à  ce  qu'outre  les  300000.fl. 
emploiez  aux  Fortifications  cette  Négociation  foit  entièrement  rembour- 
fée  •  Que  la  dite  Négociation  de  2.  millions  de  florins  ne  fe  doit  pas  fai- 
re tout  à  la  fois  ,  mais  de  tems  à  autre ,  &à  mefure  que  les  ouvrages  feront 
entrepris  &  que  les  païemens  feront  neceffaires  ;  comme  auffi  que  le  rem- 
bourfement  fera  continué  fur  le  même  pied  à  raifon  de  2000.  h1,  par  an  les 
revenus  de  la  Généralité.  Qu'outre  cela ,  la  Province  de  Frifè  fera  priée 
de  fournir  au  Comptoir  General  ce  qu'elle  fera  trouvée  devoir  encore  fur 
fa  quote-part  pour  l'Article  des  Fortifications  jufqu'au  ijr,  Juillet  1688.  où 
il  fut  refolu  de  negotier  une  fomme  de  4.  millions  fans  le  concours  de  la 
Province  de  Frife. 

Ayant  auffi  été  délibéré  fur  une  autre  Lettre  du  27.  Janvier,  &  en  mê- 
me tems  fur  la  Pétition  faite  par  le  Confeil  d'Etat  pour  une  fomme  de 
72^17.  fl.  deftinée  à  appareiller  13.  Vaiffeaux  de  Guerre,  il  a  été  trou- 
vé bon  d'un  cdnfehtemerit  unanime,  que  lefdits  jzffiy.  û.  pourront  être 
negotiés  par  la  Généralité  fur  le  même  pied,  &  à  la  charge  des  Provinces 
qui  en  paieront  double  intérêt,  tout  comme  il  a  été  fait  ci-devant  pour  la 
conftruction  desdits  Vaiffeaux  &  qu'il  fera  fourni  de  même  de  ce  fonds  à 
chaque  Collège  des  Amirautés  fon  contingent. 

Extrait  du  Regître  des  Rêjolutions  de  LL.  NN.  PP.  les  Seigneurs 
Etats  des  Provinces  de  Zêlande  \  du  9.  Février  1701. 

LU  à  l' Affemblée  la  Lettre  fecrete  de  LL.  HH.  PP.  en  date  de  la  Haïe  du 
y.  du  courant,    contenant  entre  autres  des  infïances   réitérées  pour 
confentir  à  la  conitruclion  de  12.  Vaiffeaux,  &  aïant  été  délibéré  enfuite 

par 


Unies. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  i1$ 

par  réfomption  fur  la  Pétition  du  Confeil  d'Etat  pour  une  fomme  5j45tfoo.fi.  Affairm 
neceffaire  pour  cet  effet ,  les  Villes  refpeêtives  ont  d'un  confentement  nES  Pk°- 
unanime  accordé  la  dite  conftruétion  de  12.  Vaiffeaux  de  Guerre,  moïen- 
nant  que  les  deniers,  qui  doivent  être  negotiez  par  la  Généralité,  le  fe- 
ront pareillement  fur  le  même  pied,  &  à  la  charge  des  Provinces  contre 
un  double  intérêt,  tant  comme  il  a  été  fait  à  la  précédente  conftruclion , 
afinque  chaque  Collège  des  Amirautés  aïant  eu  de  ce  fond  fon  contin- 
gent, ils  puiilent  commencer  à  y  faire  travailler. 

Les  Seigneurs  Députez  de  Zelande  ont  auflî  confenti ,  au  nom  &  de  la 
part  des  Seigneurs  Etats  leurs  Principaux  à  la  Pétition  de$>43zoo.  fl.  pour 
l'Armement  extraordinaire  de  12.  Vaiffeaux  de  Guerre,  &  ont  déclaré  en 
même  tems,  que  lefdits Seigneurs  Etats  étoient  prêts  de  fournir  de  tems  à 
autre  leur  quote-part  à  cette  Pétition  &  à  toutes  les  autres  fommes  confen- 
ties  pour  le  Bien  Public, &  particulièrement  pour  les  Affaires  de  la  Mari- 
ne ;  mais ,  qu'en  cas  que  les  autres  Provinces  ne  fourniffent  pas  pareille- 
ment leur  contingent  à  ce  dernier  article,  lefdits  Seigneurs  Etats  ne  pou- 
vant pas  laiffer  la  Marine  abandonnée ,  feroient  obligez  d'en  prendre  tous 
les  foins  poflibles ,  mais  auflî  au  contraire  de  retenir  leur  quote-part  à  des 
Pétitions  pour  d'autres  objets.  Surquoi  aïant  été  délibéré  il  a  été  trouvé 
bon  &  arrêté  de  remettre  les  proportions  ci-deffus  entre  les  mains  des  Dé- 
putez de  LL.  HH.  PP.  pour  les  Affaires  de  Finances  afin  de  conliderer  & 
d'examiner  tout  &  d'en  faire  raport  à  l'Aflemblée. 

Apre' s  de  mures  Délibérations,  il  a  été  trouvé  bon  d'écrire  aux  Collèges 
des  Amirautés,  que  LL.  HH.  PP.  font  informées,  que  fur  des  Paffeports ,  qui 
ne  doivent  valoir  que  dans  le  Pais,  plufieurs  chevaux  font  tranfportez  fur 
les  rivières  en  des  places  frontières  ou  autres,  d'où  ils  peuvent  être  menez 
facilement  hors  du  Païs, de  forte  que  non  obflant  le  Placard  de  LL.  HH.  PP. 
quantité  de  chevaux  fortent  du  Païs.  Que  pareillement  plufieurs  mar~ 
chandifes,  dont  la  fortie  eit  défendue  dans  le  dernier  Placard  de  LL.  HH.  PP. 
font  tranfportées  de  la  même  manière  hors  du  Païs  fous  prétexte  &  à  la 
faveur  desdits  Paffeports,  valables  feulement  dans  le  Païs.  Que  pour  ces 
raifons  les  Collèges  des  Amirautés  doivent  mettre  de  tels  ordres,  &  pren- 
dre toutes  les  précautions  imaginables,  afin  que  les  Placards  de  LL.HH.PP. 
contre  la  fortie  de  Chevaux  &  de  Marchandifes  de  contrebande  y  fpeci- 
fiées  foient  exécutez  duëment  &  exactement,  tant  à  l'égard  des  chevaux 
qu'il  n'en  paffe  point,  à  la  faveur  des  Paffeports  qui  ne  doivent  valoir  que 
dans  l'étendue  du  Païs,  aux  Frontières  &  en  des  Places  d'où  ils  peuvent 
être  aifément  menez  hors  du  Païs,  fur-tout  point  de  chevaux  de  Maqui- 
gnons; que  par  raport  aux  Marchandifes  fur  la  fortie  des  quelles  on  doic 
veiller  avec  une  application  particulière. 


Mm  2  Lifte 


z76    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


AFFAIRES 


des  Pro-  £jfle  fles  Yaiffeaux  de  Guerre  qu'on  prépare  a  V Amirauté  d^AmJ- 
umes."  terdam;  en  Février  1701. 


VairTeaux 

d'Amf- 

terdam. 


Pièces  de 
Capitaines  Vaisseaux  Canon 

1.  Allemonde,  Amiral    -    -  L'Union     -    -    -     -  92  - 

z.  WafTenaer,  Contre-Amiral  Catwick  fur  Meer  -  -  72  - 

3.  Lynflager     -----  Le  Dôme  d'Utrecht  -  64  - 

4.  Sommelsdyck    -     -     -    -  Harlem    -----  ^4  - 
y.  Van  den  Berg     -      -     -  Leyde     -----  ^4  - 

6.  Teengs      -----  Wulverkorft     -     -     -  fz  - 

7.  Bodaan      -----  Damiaten     -    -    -    -  72  - 

8.  Graaf Le  Defenfeur      -     -  52  - 

p.  Van  der  Duiïen    -     -    -  Le  Flamand     -     -     -  $z  - 

10.  Sweerts Ripperda    -    -     -     -  y  2  - 

11.  Langenhoven      -      -      -  Edam     -----  40  - 

12.  Czaay Le  Grifon     -    -    -    -  40  - 

12.  Van  de  Bofch      -  Landfcroon      -    -     -  36  - 

14.  Braak     ------  Anne     -     -    ,      -     -  z6  - 

if.  Jean  de  Meyer     -    -    -  L'Epervier      -     -    -  24  - 

16.  Schaap      -     -     -      -     -  Le  Milan    -    -    -    -  24  - 

1 7.  Van  der  Wayen     -    -    -  L'Aigle     -     -     -     -  24  - 

18.  Toi Le  Faucon    -     -     -  24  - 

2.   BRULOTS 

Capitaines  Vaisseaux. 

19.  De  Jong     -----  Le  Salamandre 

20.  Jean    Tyfch     -     -    -    -  La  Concorde. 


Equi- 
page. 

Sf° 

400 

325 

3*f 

220 

220 

220 

220 

220 

180 

180 

150 

150 

9° 
po 

9T 

9Î 


Re'fblu- 
tion  fur 
les  Li- 


gnes 


des 


François 
à  Lillo  , 
&  leur 
Entrée   à 
Oude- 
*arde. 


Réfolution  des  Etats-Généraux  touchant  les  Lignes  des  François- 
vers  Lillo ,  £5?  leur  Entrée  dans  Oudenarde  ;  avec  la  Lettre 
du  Lieutenant-Colonel  Sikers  à  ce  Sujet ,   du 
Lundi  27.  Février  1701. 

Reçu  une  Lettre  du  Confeil  d'Etat  écrite  ici  à  la  Haye  le  24.  du 
courant,  laquelle  porte,  que  ledit  Confeil  n'avoit  pu  s'empêcher  de 
donner  connoiffance  à  LL  HH.PP.  des  Avis  qu'il  avoit  du  Sergeant  major 
Paul  Brunet  de  Rochebrune  commandant  préfentement  à  Lillo  &  dans 
les  Forts  Voifins ,  que  les  François  avoient  tiré  une  Ligne  fur  la  Digue  qui 
s'étend  depuis  le  fort  de  Parel  jufqu'à  Calloshoek:  que  la  Ligne  paiTant  près 
des  moulins  de  Calloo  étoit  à  portée  du  Canon  de  Liefkenshoek ,  &  qu'il 

avoit 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.   I.  277 

avoit  vu  lui-même  que  les  piquets  étoient  fichez  pour  le  retranchement  ,  Affairfs 

&  qu'on  coupoit  déjà  les  gazons  pour  le  Fort  qui  devoit  être  bâti  à  Cal-  des  Pro- 

ïooshoek.  Surquoi  aïant  été  délibéré  ,  il  a  été  trouvé  bon  de  remettre  copie  vincks- 

de  la  dite  Lettre  entre  les  mains  des  Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour  les  Unies- 
Affaires  Militaires ,  pour  voir  &  examiner  tout ,  &  en  faire  Raport  ici  à 
l'Affemblée. 

Lettre  du  Sieur  Colonel  Siekers. 

J'ai  crû  de  mon  devoir  de  rendre  compte  à  W.  MIL  PP.  que  ce  matin 
à  la  pointe  du  jour  il  vint  devant  mon  lit  un  Lieutenant- Colonel  de  la 
Cavallerie  Efpagnole,  me  donnant  part  que  dans  ce  moment  les  François 
entreroient  dans  la  ville:  que  cela  ne  devoit  pas  m'efraïer,  m'afTùrant  de 
même  que  tous  mes  Officiers  que  nous  pourrions  refier  ici  paifiblement 
jufqu'à  ce  que  l'Etat  nous  réclamât.  Je  fautai  auffi-tôt  du  lit ,  &  me  rendis 
avec  mon  Major  à  la  Maifon  Gouverneur, voïant  en  chemin  faifant  entrer 
les  Troupes  Françoifes  par  la  porte  de  Tournay,  où  les  Efpagnoles  fai- 
foient  la  garde.  Venant  chez  le  Gouverneur  je  lui  fis  mes  plaintes  de 
cette  manière  indue  d'agir  >  mais,  il  me  donna  pour  réponfe,  que  cela  s'étoit 
fait  par  ordre  de  l'Electeur,  &  m'affùra  en  fon  nom,  que  nous  pourions 
vivre  en  bons  amis  enfemble  jufqu'au  tems  que  nous  ferions  réclamez  par 
fEiat,  &  que  je  devois  ordonner  à  mes  Soldats,  comme  il  a  auffi  été 
publié  ici,  qu'on  ne  devoit  pas  fe  molefter  l'un  l'autre,  ni  fe  regarder  de 
travers.  Autant  qu'il  m'a  paru,  j'ai  vu  fur  la  grande  Place  deux  Regimens 
de  Cavalerie  &  deux  d'Infanterie.  J'ai  d'abord  dépêché  un  Officier  en 
Courier  à  Bruxelles,  pour  donner  part  de  tout  ceci  à  Mr.  le  Maréchal  de 
Camp  Heukelom.  Ce  qui  efl  arrivé  ici  s'eft  auffi  pratiqué  ce  même  jour, 
&  dans  la  même  heure,  par  tous  les  Païs-Bas  Efpagnols -,  à  ce  que  le  Gou- 
verneur m'a  dit. 

Oudenarde  le  6.  Février.  1701. 

Réfohtion  de  LL.  HH.  PP.  les  Seigneurs  Etats-Generaux  des  Provin- 
ces-Unies des  Pais  -Bas  >  pour  écrire  au  Roi  d"* Angleter- 
re ;  du  Samedi  12.  Mars  1701. 

eçu  deux  Relations  du  Sr.  Geldennalfen,  Envoie  Extraordinaire  de   Réfoîa- 
LL.  HH.  PP.  à  la  Cour  du  Roi  de  la  Grande-Bretagne,  écrites  à    tionpour 
Londres  le  4.  &  8-  du  courant, lefquelles, entre  plufieurs  autres  Avis,,  con-   ■^nrf>,au 
tiennent  auffî  que  la  Chambre  -  Baffe  avoit  réfolu  ncmïne  contradicente  de   g]eterre/ 
prier  S.  M.  par  Addreffe,  qu'il  lui  plaife  d'entrer  avec  LL.  HH.  PP.  &  au- 
tres Potentats  dans  les  Négociations  les  plus  efficaces  pour  conduire  à  la 
fureté  des  Royaumes  &  Etats  de  S.  M.  &  de  LL.HILPP.  comme  auffi 

Mm  3  à  la 


2.78     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    à  la  confervation  de  la  paix  de  l'Europe  ,  afïïirant  S.  M.  de  toute  affilia n- 

ues  Peo-  ce  conformément  au  l'raité  conclu  avec  LL.  HH.  PP.  le  3.  (13.)  Mars 

Y*NCES"     1678  i  à  quoi  eil  auffi  ajoutée  la  Réponfe  de  S.  M.  à  la  dite  Adreiîe.  Sur- 

IL  quoi  aiant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  de  témoigner  à  S. M. 

par  une  Lettre  en  termes  honnêtes,  que  LL.  HH.  PP.  ont  appris  avec 
beaucoup  de  plaifir,  par  les  dites  Relations,  l'attention  gratieufe qu'il  a  plû 
à  S.  M.  de  faire  au  Mémoire  préfenté  par  le  Sr.  de  Geldermalfen  de  la  part 
de  LL.  HH.  PP.  fur  la  conjoncture  préfente,  de  même  que  la  promte  &u- 
nanime  Réfolution  de  la  Chambre  des  Communes,  à  qui  S. M.  avoit  trou- 
vé à  propos  de  communiquer  le  dit  Mémoire ,  &  l'Adrefle  qu'elle  a  pré- 
fentée  en  conformité  à  S.  M.     Que  LL.HH.PP.  connoiflant  la  profonde 
fagelTe  de  S. M.,  &  ayant  tant  de  preuves  de  fon  amitié  &  affection  pour 
l'État ,  ne  fauroient  douter  que  les  fentimens  de  S.  M.  ne  foient  à  cet 
égard  entièrement  conformes  à  ceux  de  fon  Peuple.     Que  LL.  HH.  PP. 
l'ont  déjà  remarqué  par  la  Réponfe  fur  ladite  Adrefle  ,  &  qu'Elles  ont  trou- 
vé l'une  &  l'autre  fi  avantageufe  pour  les  intérêts  communs,  fi  obligean- 
tes à  leur  égard,  &  fi  ju fies  &  genereufes  par  raport  aux  Traités,  qu'El- 
les n'ont  pu  s'empêcher  de  témoigner  à  S.  M.  fans  aucun  délai  le  conten- 
tement que  cela  leur  a  caufé,  &  la  réconnoiffance  qu'Elles  en  conferve- 
ront  toujours.     Que  LL.  HH.PP.  ont  regardé  depuis  long-tems  la  bonne 
intelligence  &  une  union  étroite  entre  les  deux  Nations  comme  neceflai- 
res  pour  leur  fureté  réciproque  &  pour  la  confervation  de  leur  Liberté  & 
Religion  :  que,  dans  la  fituation  préfente  des  Affaires ,  Elles  jugent  cette 
bonne  harmonie  &  liaifon  encore  plus  necefïaire  que  jamais  ;    &  que 
pour  cette  raifon  Elles  ont  crû,  &  croient  encore,  que  leurs  intérêts  font 
inféparables  de  ceux  de  S.  M.  &  de  fes  Royaumes  &  Etats;  &  que  LL. 
HH.  PP. ,  animées  comme  Elles  font  préfentement  par  la  favorable  difpo- 
fition  de  S.  M.  &  de  fon  Parlement,  ne  défifleront  en  aucune  manière 
des  ces  fentimens.     Qu 'Elles  efpérent  que  dans  la  Négociation  à  entamer, 
avec  S.  M.  on  pourra  trouver  des  moyens  propres  à  affurer  leur  fureté 
réciproque  &  la  confervation  de  la  Paix  dans  l'Europe,  étant  perfuadées 
que  S.  M.  ne  fe  propofe  d'autre  but  dans  cette  Affaire.     Que  LL.  HH.  PP. 
remercient  S.  M.  de  ce  qu'il  lui  a  plû  d'envoier  des  Ordres  &  Inflruclions 
à  fon  Miniflre  fur  ce  fujet,  &  qu'Elles  afTurent  encore,  que  leur  intention 
efl  de  ne  faire  la  moindre  démarche  dans  cette  importante  Affaire  que  de 
concert  &  conjointement  avec  S.  M.     Qu'Elle  peut  compter  entièrement 
ià-deffus,  de  même  que  fur  la- bonne-foi  avec  laquelle  LL.  HH.  PP.  fatis- 
feront  promptement,  en  cas  de  befoin ,  aux  obligations  des  Traités  & 
Alliances,  par  lefquelles  Elles  ont  l'honneur  d'être  liées  avec  S.  M.     Que 
cette  Lettre,  avec  une  Copie  d'icelle,fera  envoiée  audit  Sr.  de  Geldermal- 
fen ,  pour  remettre  l'Original  à  S.  M.  &  donner  en  même  tems  à  S.  M. 
&  à  tous  ceux  où  il  fera  convenable,  des  affurances  de  la  fincerité  des 
fentimens  &  intentions  de  LL.HH.PP.  à  ce  fujet. 

Êêfolu- 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  ï.  279 

Affaîtfs 

Réfolution  des  Etats  -  Généraux  touchant  la  Flotte  ;    du  UES  l'-°- 

Lundi  4..  Avril  1701.  Uot«." 


Flotte. 


Apres  de  mûres  Délibérations  ,  il  a  été  trouvé  bon  d'écrire  au  Roi  de  Réfoiu- 
la  Grande-Bretagne,  que  S.  M.  comme  Amiral-General  de  l'Etat  tinn to^- 
avant  aiîigné  à  Dunes  le  rendez- vous  des  VaiiTeaux  que  Sa  République  5jantla 
tait  équiper,  LL.  1111.  Pi  .  avoient  ete  informées,  tant  par  le  Lieutenant- 
Amiral  d'Almonde  que  par  d'autres ,  que  le  fond  elt  fort  pierreux  à  Du- 
nes ,  &  que  les  ancres  de  l'Etat  plus  larges  que  celles  des  Anglois  n'y 
fauroient  prendre,  par  où  lefdits  VaiiTeaux  feroient  expofez  à  de  grands 
dangers  dans  cette  faifon ,  courant  rifque  à  tout  moment  de  perdre  leurs 
ancres,  il  fera  remisa  la  corifideration  de  S. M.  fi  telle  ne  trouveroit  pas  à 
propos  de  faire  afiigner  ledit  rendez -vous  à  la  Baye  de  Ste.  Hélène  au 
lieu  de  Dunes  :  Qu'en  attendant  LL.HH.  PP.  ordonneront  aux  Amirau- 
tés d'envoier  les  VaiiTeaux  qui  font  prêts  à  Dunes ,  pour  y  attendre  les 
Ordres  de  S.  M.  Qu'il  fera  fait  part  de  cette  Réfolution  aux  Collèges  ref- 
pectifs  des  Amirautez,  &  qu'il  leur  fera  écrit  de  donner  ordre  aux  Vaif- 
feaux  que  chacun  a  déjà  équipé ,  pour  Ion  contingent  à  l'Armement  ex- 
traordinaire, de  partir  au  premier  vent  pour  Dunes,  &  d'y  attendre  les 
ordres  de  S.  M.  Que  les  dites  Amirautés  doivent  outre  cela  faire  tous 
leurs  devoirs,  afin  que  les  VaiiTeaux,  qui  ne  font  pas  encore  prêts  pour 
ledit  Armement ,  foient  pareillemeut  équipez  au  plutôt  &  envoiez  fans 
délai  au  rendez-  vous  ailîgné  :  Qu'elles  doivent  rendre  compte  à  LL.  H  H. 
PP.  de  tout  ce  qu'elles  feront  à  cet  égard,  comme  auifi  de  l'état  où  fe 
trouvent  actuellement  les  VaiiTeaux  qu'elles  équipent,  &  quand  ils  pour- 
ront tous  être  prêts.  Qu'il  fera  auffi  ordonné  aux  dites  Amirautés  de  pré- 
parer, outre  cet  Armement  extraordinaire, encore  12.  VaiiTeaux  de  guerre, 
pour  pouvoir  être  équipez  &  mis  en  mer  au  premier  ordre  de  LL.HH. 
PP.  Et  enfin,  que  les  dites  Amirautés  doivent  faire  raport  à  LL.HH. 
PP.  fi,  &  quand,  les  Frégates  équipées  outre  l'Armement  ordinaire  des 
Revenus  courans  de  chaque  Amirauté  ont  été  envoiées  au  rendez-vous 
aux  Wklingues  \  & ,  au  cas  qu'elles  ne  foient  pas  encore  parties  ,  les  dites  A- 
mirautés  doivent  avoir  foin  de  les  faire  mettre  à  la  voile  fans  aucun  délai. 
Après  de  mures  Délibérations,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  que  le  Con- 
tre-Amiral den  Boer  ,  qui  fe  trouve  préfentement  aux  TViellngues  ,  fera 
chargé,  comme  il  l'eft  par  la  préfente  ,  de  veiller  avec  les  VaiiTeaux  ou 
Frégates  qui  y  font  fous  fon  commandement ,  ou  qui  lui  feront  encore 
envoiez,  for  tout  ce  qui  s'y  paflera;  &,  en  cas  que  contre  toute  attente 
on  entreprit  quelques  hoflilités  contre  l'Etat  ou  fi^s  habitans,  de. s'y  opo- 
fer&  de  les  détourner  autant  qu'il  elt  poflible,  fe  fervant  pour  cet  effet  des 
Soldats  &  Equipages,  &  de  fe  conformer  au  relie  exactement  aux  or- 
dres qui  lui  feront  envoyez  par  LL.HH. PP.  ou  par  S.  M.  Britannique 
comme  Amiral- General. 

Réfolu- 


23o    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,   ET 


Affaires 
dbs  Pro- 
vinces- 
Unies. 


Réfolu- 
tion  en 
Réponfe 
à  Stanho* 
pe. 


Réfolution  des  Etats  -  Généraux  fur  le  Mémoire  de  l'Envoyé  Stan° 
hope  3  avec  ce  Mémoire  ;  du  Vendredi  22.  Avril  1701. 

Les  Srs.  d'Eflen  &  autres  Députez  de  LL.  HH.PP.  pour  les  Affaires 
Etrangères,  ayant  été  en  Conférence  conformément  à  leur  Réfolution 
CommiiToriaîe  du  21.  Décembre  avec  le  Sr.  Stanhope  Envoyé  Extraordi- 
naire de  S.  M.  le  Roi  de  la  Grande-Bretagne,  ont  raporté  à  l'Aflemblée, 
que  ledit  Sr.  Stanhope  leur  avoit  non -feulement  déclaré  de  bouche,  mais 
aufli  délivré  par  écrit ,  ce  qui  eft  contenu  dans  le  Mémoire  inféré  ici. 


HAUTS  ET  PUISSANS   SEIGNEURS, 

LE  foufllgné  Envoyé  Extraordinaire  du  Roi  de  la  Grande  -  Bretagne 
aiant  informé  Sa  Majelté  de  ce  qui  s'eft  palTé  à  la  dernière  Conféren- 
ce qu'il  a  eue  avec  lesDéputez  de  VV. HH.PP.  &  Sa  Majefté  ayant  auiîi  re- 
çu les  Réfolutions  de  VV. HH.PP.  du  4.  Avril  par  raport  aux  fecours  qu'el- 
les ont  de  nouveau  requis  de  Sa  Majefté  en  exécution  du  Traité  de  167 {. 
Le  dit  Envoyé  a  ordre  de  faire  favoir  à  VV.  HH.  PP.  que  Sa  Majefté  eft 
non- feulement  réfolue  de  fatisfaire  aux  Conditions  dudit  Traité,  confor- 
mément aux  defirs  de  fes  bons  &  ridelles  Sujets  alTemblez  en  Parlement, 
qui  concourent  unanimement  avec  Elle  dans  ce  jufte  deffein ,  mais  aufîî 
d'entrer  dans  tels  autres  moyens  qui  feront  trouvez  convenables  pour 
procurer  leur  fureté  5  pour  laquelle  fin  ledit  Envoyé  a  ordre  de  continuer 
à  agir  de  concert  avec  VV.  HH.PP.  dans  les  Négociations  qui  peuvent 
y  conduire  de  la  manière  qui  fera  jugée  la  plus  efficace ,  &  d'affurer  W. 
HH.PP.  que  toutes  les  mefures  qui  feront  prifes  en  Angleterre  pour  la  fu- 
reté commune,  leur  feront  communiquées  de  tems  entems,  comme  elles 
ont  été  jufqu'à-préfent.     A  la  Haye  ce  11.  Avril  1701. 

A.    Stanhope. 


Réfolution  des  Etats-Généraux  fur  le  même  Mémoire  ;  du  Samedi 

23.  Avril  1701. 

Autre  de  f^Ul  ^e  Report  des  S  r  s.  d'Eflen  &  autres  Députez  de  LL.  HH.PP.  pour 
même.  V^/  les  Affaires  Etrangères,  qui  en  confequence  &  pour  fatisfaire  à  leur 
Réfolution  Commiflariale  du  22.  du  courant ,  ont  examiné  le  Mémoire  du  Sr, 
Stanhope  Envoïé  Extraordinaire  de  Sa  Majefté  Britannique,  en  Réponfe  à 
leurRefolutiondu8.de  ce  mois,  faifant  favoir  àLL.HH.PP.que  Sa  Majefté 
étoit  réfolue  de  fatisfaire,  non -feulement  aux  Conditions  du  Traité  de 
1677  &  1678.  mais  auffi  d'entrer  dans  tels  autres  moïens  qui  feront  trou- 
vez convenables  pour  procurer  leur  fureté,  le  tout  déduit  plus  ample- 
ment 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  281 

ment  dans  ledit  Mémoire,  inféré  dans  le  Régître  des  Réfoîutions  d'hier.  Affaire* 
Surquoi  aiant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  de  témoignera  DFS  I>H°- 
à  S.  M.  Britannique  par  Lettre  ,  que  fadite  Réfolution ,  iî  juite  &  li  con-     JJnijmu 

forme  à  ce  que  LL.  MIL  PP.  avoient  déliré,  leur  a  caufé  une  grande  joie  &   — "_ 

un  contentement  particulier  ,  principalement  dans  un  tems  où  elles  voient 
la  manière  plus  qu'indiferente  dont  on  traite  les  Propofitions  qu'elles  onc 
faites  conjointement  avec  Sa  Majefté,  peur  la  confervation  de  la  Paix  & 
de  leur  fureté  commune,  &  qu'on  augmente  de  jour  en  jour  les  troupes, 
&  les  préparatifs  de  Guerre  fur  leur  Frontières ,  ce  qui  ne  peut  que  leur 
cauferde  l'apréhenfion.  Que  LL.HH.  PP.  ont  toujours  trop  compté  fur  l'ami- 
tié &  affection  de  S.  M.  pour  l'Etat ,  autant  que  fur  fon  équité  &  fidélité 
naturelle  avec  lefquelles   Elle  eiï  acoûiumée  de  fatisfaire  à  fes  engage- 
mens  ,   pour  avoir  jamais  pu   douter  que  quand  le  cas-  écherrait  à.  M. 
n'exécutât  exactement  les  Conditions  de  l'Alliance  qu'elles  ont  eu  l'hon- 
neur de  conclure  avec  S.  M.;  mais  que  les  nouvelles  affûrances  qu'il  a  plu 
à  S.  M.  de  leur  donner  tout  récemment  leur  fert  de  nouveaux  gages  d'au- 
tant plus  fùrs  &  agréables  que  ces  aflurances  font  fondées  fur  les  fenti- 
mens  de  bons  &  fidèles  fujets  de  S.  M.  afTemblez  en  Parlement,  &  fur 
leur  concours  unanime  pour  le  même  but;  par  où  LL.HH.  PP.  fe  trouvent 
confirmées  dans  la  confiance  &  dans  l'efperance  ,  qu'elles  ont  que  le  fc- 
cours  demandé  ne  tardera  point ,  &  qu'elles  jouiront  toutes  les  fois  que  la 
neceiTité  l'exige  de  l'entier  effet  &  acompliffement  du  Traité.  Que  LL.  HIÏ. 
PP.  ont  été  touchées  fi  fenfiblement  parla,  qu'elles  fe  trouvent  obligées 
d'en  témoigner  leur  fincère  reconnoiffance  à  S.  M.  &  de  l'en  remercier 
du  fond  de  leur  cœur,  en  l'afftirant  de  nouveau  de  la  manière  la  plus  for- 
te, comme  elles  ont  déjà  fait  ci-devant,  que  de  leur  côté  elles  exécute— 
ront  pareillement  en  tout  tems  avec  fidélité  ledit  Traité,  &  s'y  conforme- 
meront  religieufement.     Qu'elles  font  entièrement  perfuadées   que  leurs 
intérêts  par  raport  à  la  confervation  de  la  Paix&  de  la  Sûreté  &  maintien 
de  leur  Liberté  &  Religion  ,  font  fi  étroitement  liez  avec  ceux  de  S.  M. 
&  de  fes  Roïaumes  &  Etats ,  qu'ils  en  font  tout  à  fait  infeparables.   Et 
comme  Elles  voient  que  S.  M.  prend  l'intérêt  de  l'Etat  tant  à  cœur,  elles 
ne  fe  bifferont  non  plus  jamais  détacher  de  ceux  de  S.  M.  aïant  refolû  fur 
ce  fondement  de  ne  prendre  aucunes  mefures  dans  la  Négociation  enta- 
mée fur  ce  fujèt,  que  de  concert  avec  S.  M.  de  même  qu'ells  ont  fait  jus- 
qu'à préfent;  fâchant  que  S.  M.  conjointement  avec  LL.  HH.  PP.  n'a  d'autre 
but  que  le  maintien  de  la  tranquillité  publique  &  de  leur  fureté  réciproque. 
Que  cette  Lettre  avec  Copie  d'icelle  fera  envoiée  au  Sr.  de  Geldermal- 
fen  Envoie  Extr.  de  LL.HH.  PP.  à  la  Cour  Brit. pour  rémettre  l'Original  à 
à  S.  M.  Et  les  Srs.d'Effen&  autres  Députez  de  LL.HH.  PP.  pour  les  Affai- 
res Etrangères  font  requis  par  la  préfente  ,  de  faire  part  du  contenu  de 
cette  Réfolution  au  Sr.  Stanhope,  pour  fervir  de  Réponfeà  fon  Mémoire 
ci-deffus  mentionné  ,    &  de  remercier  en  même  tems  le  dit  Miniftre  des 
bons  Offices  qu'il  a  emploies  à  cet  égard  ,  en  le  priant  de  vouloir  bien 
Tome  XL.  Nn  con- 


2S2    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    continuer  à  apuïer  leurs  inilances  afin  que  le  fecours  demandé  foit  envoie 

DES   PkO-     icj    au  plutôt. 


VINCF.S 

Unies. 


vaux. 


— — _^__  » 

Rejoint  ion  des  Etats-Généraux  pour  conférer  avec  le  Comte  ctA- 

vauXy  du  Jeudi  12.  Mai  1701. 

Réfolu-      <f~"\Ul  ^e  RaPort  ^es  Srs.  de  Gent  &  autres  Députez  de  LL.  MIL  PP.  pour 
tionpour    V-/  les  Affaires  Etrangères,  qui  en  confequence  de  ieur Réfolution  com- 
conféret    mifforiale  du   10.  d.  c.  ont  examiné  le  Mémoire  du  Sr.  Comte  d'Avaux 
Hï-      ~   AmbaiT.  Extr.  du  Roi  de  France ,  tendant  à  reprendre  les  Conférences  con- 
jointement avec  le  Miniftre  -Anglois ,  fin"  la  confervation  de  la  paix  &  l'é- 
tabliffement  de  la  fureté  de  l'Etat,  les  dits  Députez  aïant  été  en  Confé- 
rence avec  le  Sr.  Stanhope  Envoie  Extr.  de  S.  M.  Britannique  fur  le  con- 
tenu du  dit  Mémoire.     Surquoi  aïant  été  délibéré ,  il  a  été  trouvé  bon  & 
arrêté  de  repréfenter  au  Sr.  Comte  d'Avaux  dans  une  Conférence  ,  que 
LL.  Mil.  PP.  ont  vu  avec  plaifir  par  fon  Mémoire  les  nouveaux  témoignages 
des  fentimens  favorables  de  S.  M.  le  Roi  de  France  pour  le  maintien 
de  la  tranquillité  publique,  &  qu'Elle  a  jugé  à  propos  de  laiiTer   le  dit  Sr. 
Comte  encore  ici  pour  réprendre  les  Conférences.  Que  LL.  HII.  PP.  y  font 
portées   de  leur   côté;  fouhaitant   ardemment  qu'on  puiflè   trouver  des 
moïens  propres  &  fufifans  pour  la  confervation  de  la  tranquillité  en  Euro- 
pe, &  de  leur  fureté,  à  quoi  elles  contribueront  tout  ce  qui  dépend  d'el- 
les. Que  LL.  HïI.PP.  aprennent  de  plus  par  le  dit  Mémoire , qu'il  a  plu 
à  S.  M.  d'aprouver  la  Réponfe  que  lui  Sr.  Comte  d'Avaux  avuit  donné. 
auxSrs.  Députez  deLL.  IIH.  PP.  au  fujètde  la  participation  du  Sr.  Envoie 
Extr.  de  S.  M.  Brit.  aux  dites  Conférences  ;  laquelle  Réponfe  porioit  que 
lui  Sr.  Comte  d'Avaux  pouvoit  bien  foufrir  que  l'Envoie   d'Angleterre  af- 
filiât aux  Conférences  pour  apuïer  les  intérêts  de  l'Etat,  mais  non  pas 
pour  parler  des  Affaires  de  S.  M.  Brit.  îefquelles  dévoient  être  traitées  ail- 
leurs. Que  LL.  III I .  PP.  en  ont  fait  part  au  dit  Sr.  Envoie  Extr.  de  même 
que  du  Mémoire  ci-deffus  mentioné,  mais  qu'elles  y  ont  trouvé  quelques 
difficultez,vû  que  les  Affaires  de  LL.  I III.  PP.  qui  font  l'objet  de  la  préfente 
Négociation  ont  toujours  été,   &  ne  peuvent  encore  aêtiiellement  être 
confédérées  par  elles ,  que  comme  des  Affaires  qui  leur  font  à  tous  égards 
communes  avec  S.  M.  Brit.  ,  &  par  rapport  auxquelles  leurs  intérêts  ne 
diferent  en  rien  y  que  pour  ces  raifons ,  elles  fe  font  aufîi  engagées  à  Sa 
dite-Majefté  par  une  Lettre  du  23  Avril  dernier,  de  laquelle  il  fera  re- 
mis copie  au  Sr.  Comte  d'Avaux ,   h  ne  rien  faire  dans  cette  Négociation 
que  de  concert  &  du  confentement  de  S.  M.  Brit.;  de  forte  que  pour  ac- 
célérer la  dite  Négociation  LL.  Mil.  PP.  ont  jugé  neceffaire  de  prier  le  Sr. 
Comte  d'Avaux  de  vouloir  les  éclaircir  s'il  n'eff,  pas  d'intention  de  conti- 
nuer fur  ce  pied-là  &  fur  ces  fondemens   la  Négociation  avec  l'Angle- 
terre 


RESOLUTIONS.  D'ETAT,   M.  DCC.     I.         283 

terre  &  l'Etat.  Et  les  Sieurs  deGent  &  autres  Députez  de  LL.  III I.  PP.  pour  Awrun& 

les  Allai res  Etrangères  font  priez  par  la  préfente  d'entrer  fur  ce  que  defllis  Drs  p*°- 

en  Conférence  avec  le  Sr.  Comte  d'Avaux,  &  d'en  faire  Raport  ici  à  l'Af-  y^NCES" 

r         ,  ,  ,                                                                                                                                                             *  UNIES. 

1  emblée.  , 


Confcntcment  des  Etais  de  la  Province  de  Groninguç  aux  Ar- 
ticles fuïv  ans;  du  23  Mai  1701. 

1.  A     Six  Compagnies  du  Régiment  de  Reinhardt.  Confen- 

2.  jLjl  à  Six  Nouvelles  Compagnies  d'Infanterie.  tement 
x.  A  Cinq  Nouvelles  Compagnies  de  Cavallerie.  uro' 
4.  A  la  Pétition  de  yoo.  fis. 

7.  A  la  Pétition  de  ce  qui  efl  neceflaire  pour  mettre  l'Armée  en  Cam- 
pagne. 

6.  Aux  deux  Regimens  de  HeiTe-CafTel. 

Les  Seigneurs  de  la  Ville  de  Groningue  ont  confenti. 

1.  A  la  première  récriie  de  13320.  hommes,  &  par  confequent  à  7. 
Nouvelles  Compagnies  à  la  charge  de  la  Province  ,  fuivant  le  premier 
Etat  extraordinaire  de  guerre. 

2.  A  la  féconde  &  troifième  récriie  &  levée  de  15016.  hommes  &  72. 
Nouvelles  Compagnies  de  Cavalerie,  en  confequence  du  fécond  Etat  ex- 
traordinaire de  guerre,  &  outre  cela  à  la  levée  d'encore  deux  Compagnies 
d'Infanterie  &  fix  de  Cavalerie  à  la  charge  de  la  Province. 

Sans  préjudicierà  ceConfentement  gênerai ,  lesSgnrs.  delà  Ville  ont  pro- 
vifionellement  confenti  à  la  levée  de  (ix  Compagnies  d'Infanterie  &  fix 
de  Cavallerie  en  conformité  du  Confentement  des  Sgnrs.  Etats  de  la  dite 
Province. 

3.  A  fe  charger  de  fix  Compagnies  étant  encore  fur  pied  de  dix  Com- 
pagnies du  Régiment  de  Reinhard  ,  &  des  deux  Compagnies  détâchées 
mifes  dans  les  dernières  années  fur  la  répartition  de  cette  Province ,  fans 
avoir  été  acceptez,  à  condition  de  n'être  point  engagées  aux  arrérages  des 
dites  Compagnies  que  du  jour  de  la  date,  &  uniquement  pour  le  tems  de 
la  préfente  dangereufe  fituation  des  affaires. 

4.  Non-feulement  à  la  Pétition  provifionelle  de  y 00.  fls.  pour  le  paie- 
ment des  Troupes  étrangères,  mais  aufli  à  la  fuivante  de  f.  132,2747— :  3— :o. 
dans  laquelle  la  première  de  yoo.  fis.  efl  comprife,  fans  pourtant  s'engager 
par-là  à  la  Négociation  démandée  de  fix  millions  ,  pour  les  cas  de  be- 
foin. 

5.  A  f.  749475*-- :6— q:.  pour  ce  qui  efl  necefTaire  à  mettre  une  Armée 
en  Campagne,  à  condition  que  deux  Ingénieurs,  un  Bombardier,  &  quin- 
ze Canoniers  foïent  païez  par  la  Province  feule,  à  la  charge  de  laquelle 
ils  feront  pareillement  portez. 

6.  A  la  ratification  de  la  convention  faite  avec  le  Landgrave  de  HefTe- 
Caffel  fur  deux  Regimens  à  prendre  au  fervice  de  l'Etat. 

Nn  2  7-  A. 


Affaikes 
des  Pro- 
vinces- 
Unies. 


284    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

7.  À  l'Armement  de  24.  Vaiflfeaux  de  guerre  avec  tout  ce  qui  y  apar- 
tient,  &  à  ^pareillement  de  iS-  Vaiffeaux. 

g.  A  la  Négociation  du  troilième  terme  pour  les  arrérages  des  fraix  de 
l'Armée  &  des  Magazins  de  la  dernière  guerre ,  moïennant  le  rabais  de  ce 
qui  a  déjà  été  paie. 

9.  Ils  aprouvent  la  convention  faite  avec  l'Elecleur  de  Hanovre  & 
Cell  fur  un  confiderable  Corps  de  Troupes  à  prendre  à  la  folde  de 
l'Etat. 

10.  Ils  font  toujours  de  fentiment  que  les  arrérages  des  Troupes  de 
Cell  mifes  dans  l'Année  1693.  fur  la  répartition  de  cette  Province  ,  de- 
vroient  être  paies  par  termes,  &  que  d'abord  il  leur  foit  paie  9000.  fis. 


Réponfe 
«lu  Quar- 
tier 
d'Arn- 
hem  au 
Confeil 
d'Etat , 
touchant 
îe  Rhin , 
&  l'Iffel. 


Extrait  du  Recés  de  la  Diète  ternie  h  Arnhem ,  en  Reponfe  à  une 
Lettre  du  Conjeil  d'Etat  touchant  le  Rhin  £«p  rJffel;  du 

Mardi  24..  Mai  1701. 

Eçû  &  lu  une  Lettre  du  Confeil  d'Etat  des  Provinces-Unies  des  Païs- 
Bas ,  écrite  à  la  Haïe  le  jp.  Décembre ,  par  laquelle  le  dit  Confeil  fe 
croit  obligé  de  communiquer  à  LL.  NN.  PP.  un  Projet  de  mettre  les  ter- 
res baffes,  entre  Greb  &  la  Ville  d'Amersford  en  état  par  le  moïen  d'inon- 
dation ou  de  retranchemens,  ou  par  l'un  &  par  l'autre  ,  qu'aucun  enne- 
mi n'y  puifTe  paffer;  pour  lequel  effet  il  feroit  neceffaire  découvrir  le  pais 
entre  Grebben  &  Slaperdycken  des  eaux  de  mai  à  quoi  l'on  doit  s'atten- 
dre tous  les  jours  :  qu'il  a  d'autant  moins  pu  s'empêcher  de  faire  cette 
communication,  que  cette  Province  s'y  trouve  intereffée,  puifqu'en  répan- 
dant les  eaux  de  l'Eclufe  de  Grebben  il  y  auroit  des  Terres  de  fon  terri- 
toire d'inondées  ,  &  qu'il  ne  doutoit  pas  que  LL.  NN.  PP.  ne  vouluffent 
bien  dans  la  dangereufe  fituation  où  étoient  préfentement  les  Affaires  de 
la  Patrie  fpecifier  pour  le  bien  publie  les  fruits  des  dites  Terres. 

Qu'il  étoit  bien  vrai  que  cette  Inondation  ne  contribue  rien  à  la  fureté 
de  la  Province  de  Gueldre,  mais  que  d'un  autre  côté  les  depenfes  qu'on 
fait  pour  les  Fortifications  de  Nimegue,  de  Zutphen  ,  d'Arnhem,  &  de 
Grave,  pour  finfpection  du  haut  &  du  bas-Rhin  &  de  HiTel  ,  de  même 
que  pour  tous  les  autres  préparatifs,. de vroient  entièrement  affûrer  LL.  NN.. 
PP.  qu'on  a  deffein  ,  en  cas  de  rupture,  de  défendre  opiniâtrement  la  Pro- 
vince de  Gueldre;  outre  qu'il  plairoit  à  LL.  NN.  PP.  de  confiderer,  que 
le  foin  qu'on  prend  d'arrêter  l'ennemi,  quand  môme  il  fe  feroit  rendu  maî- 
tre de  la  Gueldre  y  ce  que  Dieu  veuille  détourner  ,  lui  feroit  bien  pafîer 
l'envie  d'attaquer  l'Etat  de  ce  coté-fa.  Surquoi  aïanx  été  délibéré,  il  a 
été  trouvé  bon  &  arrêté  ,  de  repréfenter  au  Confeil  d'Etat  en  Réponfe, 
qu'il  e(l  connu  au  dit  Confeil  ,  aufii-bien  qu'à  tous  les  Confederez  ,  que  les- 
Provinces  de  Gueldre,  d'Utrecht,&  d'Overyffd  ont  infilté  dépuis  plufieurs- 
années,  &  fait  des  inltances  réitérées,  pour  qu'on  veiiille  enfin  commen- 
cer à  rendre  le.  Bas-Rhin  &  1  Yffel  plus  profonds  ,  &  que  même  cette 

Pr.o 


VINCES- 
Un1£S, 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.    I.  tty 

Province  y  a  acrôché  plufieurs  fois  fonConfentemént  pour  d'autres  objets,  tommhï 
comme  encore  en  dernier  lieu  pour  la  Négociation  du  fécond  ternie  des  Affai-  DES  Pro~ 
res  de  la  Manne,  deftiné  au  paiement  des  detes  de  la  dernière  guerre;  lequel 
acrôchement  LL.  i\N.  PP.  ont  pourtant  levé  par  une  Lettre  à  LL.  HH. 
PP.  du  3.  Avril  16pp.  en  donnant  leur  Confentement  fans  aucune  reitn&ion, 
dans Telperance  &  entière  confiance,  que  les  Confederez  feroient  portez, 
par  les  raifons  &  motifs  alieguez  dans  la  dite  Lettre,  à  entreprendre  en- 
fin cet  ouvrage  avec  vigueur, étant  fans  contredit  de  la  dernière  importance 
pour  la  defenfe  des  frontières  de  l'Etat,  fur-tout  dans  la  conjoncture  pré- 
lente}  c'eif.  pourquoi  il  a  aufli  été  récommandé  ,  à  diverfes  reprifes ,  avec 
tant  d'empreilement ,  par  S.  M.  Britannique ,  &  en  particulier  à  ion  dernier 
départ,  &  fur  lequel  ouvrage  il  a  plû  pareillement  aux  Srs.  Etats  de  la- 
Province  de  Frife  d'infiiter  par  leur  Réfolution  du  n.  Mars  dernier,  le 
nommant  comme  de  raifon  un  Ouvrage  de  très  falutaire  &  de  fort  grande 
importance  pour  la  fureté  du  commerce  de  ce  païs.  Que  fi  Ton  avoit 
exécuté  ce  projet  ,  bien  plus  facile  qu'on  ne  s'imagine  ,  on  n'auroit  pas 
eu  befoin  de  fonger  à  inonder  des  eaux  de  mai  le  plat -païs  dépuis  G-reb- 
ben-Sluys  jufqu'à  Amersfoort,  comme  il  a  plû  au  dit  Confeil  de  repréfen- 
ter  par  fa  Lettre  ;  fur  laquelle  LL.  NW.  PP.  ne  fauroient  s'empêcher  de-  ré- 
pondre ,  qu'Elles  font  de  l'opinion  ,  qu'il  faut  fonger  principalement 
à  mettre  en  bon  état  de  defenfe  les  frontières  du  corps  de  la  République 
hors  des  limites  defquelles  il  n'y  a  préfentement  point  de  Barrière ,  a  fa- 
voir  de  l'Ëclufe  en  Flandres  jufqu'à  la  Ville  de  Campen  ,  &  de- là  jufqu'à 
Lieroort,  à  quoi  l'on  ne  fauroit  mieux  contribuer  qu'en  rendant  les  dites 
Rivières  plus  profondes,  avant  que  de  former  en  faveur  des  membres  de  ce 
Gorps  de  projets  de  rétranchemens  particuliers  en  dedans  du  païs  pour 
arrêter  l'ennemi.  Que  LL.  NN.  PP.  font  d'autant  plus  portées  à  croire  que 
l'Inondation  propofée,  dont  les  fraix  monteroient  bien  plus  haut  que  ceux. 
qu'on  emploïeroit  à  rendre  les  Rivières  plus  profondes ,  ne  de  vroit  pas  fe  faire 
à  l'heure  qu'il  eft,  pour  ne  pas  faire  par-là  impreffion  à  l'ennemi  ,  même- 
avant  le  tems  d'une  rupture  ,  comme  fi  l'on  ne  fauroit  l'arrêter  fur  le* 
frontières,  &  pour  ne  le  pas  attirer  quafi  de  ce  côté-là  en  faifant  paroître" 
une  foiblefTe  imaginaire. 

Que  de  pareilles  rétranchemens  ou  féparations  ne  devroient  non  plusr 
être  entreprifes  dans  cette  conjoncture,  puifque  le  cours  des  finances  fe- 
roit  aufiî-tôt  interrompu  dans  les  Provinces  fituées  hors  de  cette  fepara- 
tion  projettée,  &  qu'elles  ne  feroient  plus  en  état  de  contribuer  d'avanta- 
ge aux  affaires*  de  l'union,  par  aprehenfion  des  habicans  qu'on  ne  fongeac 
aies  abandonner  à  l'ap'rôche  de  l'ennemi.  LL.  NN.  PP.  foûtiennent  de  plus- 
que  la  dite  Inondation  projettée  ne  fauroit  préfentement  en  aucune  ma» 
mère  avoir  lieu ,  vu  que  les  eaux  de  Mai  font  déjà  paflees  ,  &  que  celles 
dû  Bas-Rhin  ne  font  actuellement  que  de  deux  pieds  &  demi  de  profon- 
deur au  lieu  de  dix  dont  elles  devroient  être  avant  que  les  terres  balles  eii 
puiffent  être  couvertes,  fuivant  le  raport  des  Ingénieurs  Patavant  &.  de 
Roi  fait  le  16,  Mars  dernier  par.  ordre  du  Sr.  Cochera  Directeur  General 

Nn  3  des 


2%S     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  des  Fortifications.     D'où  l'on  peut  conclure,  que  le  Bas-Rhin  étant  ren- 
ias Pro-   dû  plus  profond,  il  s'y  trouveroit  toujours  autant  d'eau  qu'il  en  faudroit 
vinces-    pQur  ^-ajre  |a  jjte  jnonc|ation  lorfque  la  neceffité  viendroit  à  l'exiger,  & 

que  l'ennemi ,  ce  que  Dieu  ne  veuille  ,  auroit  fait  une  Invafion  fur  les  fron- 
tières de  l'Etat. 

Que  LL.  NN.  PP.  feront  toujours  prêtes  à  contribuer  de  tout  ce  qui  dé- 
pend d'elles  à  la  fùretc  6c  defenfe  des  Provinces  moins  expofées  par  leur 
iituation  ,  dés  que  les  dites  Rivières  feront  miles  dans  l'état  ci-deiïus 
mentionné,  6c  que  les  Fortifications  commencées  des  frontières  feroienc 
achevées. 

Enfin,  queLL.NN.PP.  efperent,  que  le  Confeil  d'Etat,  en  réflechiflant 
fur-tout  ce  qu'on  vient  d'avancer,  ne  défiftera  pas  feulement  de  l'Inon- 
dation propofée  ,  mais  fera  auiîi  tous  fes  efforts  pour  diriger  les  affaires 
en  forte  que  le  dit  Accommodement  des  Rivières,  chofe  extrêmement  im- 
portante pour  la  confervation  de  l'Etat,  foit  exécuté  esc  achevé  avec  tou- 
te la  diligence  imaginable. 

Surquoi  aïant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  qu'il  fera  remis  copie  de 
cette  Réfolution  entre  les  mains  du  Sr.  Ham,  &  autres  Députez  de  LL, 
I i 1 1 .  PP.  pour  les  Affaires  Militaires. 

Rapport  du  Confeiller-Penfonnaire  Heinfius  de  fa  Conférence 
avec  le  Comte  cVAvaux  \  du  Lundi  6.  Juin  1 70 1 . 

Confé-  T  E  Confeiller-Penfionaire  Heinfius  a  raporté  à  TAfTemblée,  que  le 
rence  &_j  sn  Comte  d'Avaux  AmbafTadeur  Extraordinaire  du  Roi  de  France 
«rivaux  '  lui  avoit  notifié  de  bouche  les  ordres  qu'il  avoit  reçus  du  Roi  fon  Maitre 
de  demander  une  Réponfe  finale  au  fujet  des  Conférences  entamées  ici , 
favoir  fi  LL.  HH.  PP.  font  d'intention  de  les  continuer  en  y  admettant 
l'Envoyé  Extraordinaire  de  S.  M.  Britannique,  fans  qu'il  y  puilTe  faire  au- 
cune Demande  particulière  en  faveur  du  Roi  fon  Maitre  ,  &  fi  lefdites 
Conférences  feroient  tout  à  fait  rompues  ,  fi  ce  Miniitre  n'y  fut  admis 
qu'à  cette  condition  ?  Que  ledit  Sr:  Comte  d'Avaux  y  avoit  ajouté,  que 
S.  M.  n'avoit  pas  deffein  de  féparer  l'Angleterre  de  l'Etat,  preuve  dequoi 
S.  M.  pouvoit  bien  fouffrir  .que  comme  les  prétentions  du  Roi  de  la 
Grande-Bretagne  dévoient  être  propofées  à  la  Cour  de  France  par  fon 
AmbafTadeur,  LL.  HH.  PP.  y  envoyafient  un  Miniftre  pour  agir  de  con- 
cert avec  ledit  AmbafTadeur  ;  6c  que  le  Sr.  Comte  d'Avaux  avoit  fait  di- 
re enfuite  à  lui  Penfionaire,  en  explication  de  ce  que  defTus,  que  l' Am- 
bafTadeur Britannique  y  étant  pouvoit  expofer  les  Intérêts  particuliers  de 
l'Angleterre,  de  môme  que  le  Miniftre  de  LL.  HH.  PP.  les  leurs,  pour 
traiter  là -defTus  conjointement.  Surquoi  ayant  été  délibéré,  il  a  été  trou- 
vé bon  de  prier  &  charger  par  la  préfente  les  Srs.  van  EfTen  6c  autres 
Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour  les  Affaires  Etrangères,  de  faire  part  de 
ce  Raport  au  Sr.  Stanhope  Envoyé  Extraordinaire  de  S.  M.  Britannique, 

d'oiiir 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  zS7 

d'oiiir  Tes  Confiderations  là-  defltis  ,   &  de  rendre  compte  de  tout  ici  à  Am«ti 

„   v    r         ,,,  DES    PllO- 

lAifemblee.  TlNCKS. 

Unies» 


Réfolution  touchant  des  Troupes  ;  du  Jeudi  9.  de  Juin  1701. 

REçu   une  Lettre  du  Confeil  d'Etat  écrite  à  la  Haye  en  date  cfau-  Réfolu- 
iourd'hui,  à  laquelle  il  a  joint  en  confequence  &  pour  fatisfaire  à   t¥)ia'I0J£ 

•  \  r     t.i  t     nn         J         •/'i  1  t»  tr  1     ■  ,,    ■     chant  des 

l'intention  de  LL.  HII.  PP.  comprife  dans  leur  Réfolution    du   27.  Mai   Troupes» 
dernier,  un  Etat  delà  répartition  des  foîdes  des  Troupes  que  LL.  HIL   du  9. 
PP. ,  depuis  la  Recrue  &  Augmentation  faites  de  l'Armée  de  la  Républi-  Juilu 
que,  avoient  trouvé  bon,  en  conformité  des  Pétitions  du  31.  Janvier,  21. 
de  Février, &  7.  Mars, de  prendre,  pour  d'autant  plus  de  fureté  de  l'E- 
tat, de  plulieurs  Princes  de  l'Empire  &  d'ailleurs,  au  nombre  de   $360. 
Maitres,   1584.  Dragons,  &    125*00.  Fantafîins,  en  tout  de  17644.  hômi 
mes.     Surquoi  ayant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté  d'envoier 
Copie  de  cette  Lettre  aux  Seigneurs  Etats  des  Provinces ,  en  les  priant 
de  paier  conformément  audit  Etat  les  Troupes  qui  ont  été  mifes  fur  leur 
répartition. 

Réfolution  du  Meeredi  1 5".  Juin  1 70 1 . 

P\Ans  la  Conférence, que  les  Députez  pour  les  Affaires  des  Finances,  ReTolu» 
•*-^  ont  eue  avec  quelques  Committez  du  Confeil  d'Etat,  il  a  été  trouvé  tion  d" 
bon,  qu'à  chaque  Cavalier  des  Troupes  qui  doivent  effectivement  camper   if-Jum» 
ou  cantonner,  il  fera  paie  3.  fols  par  jour  pour  envoler  paître  fon  che- 
val dans  le  pré,  &  qu'il  fera  écrit  aux  Magilirats  &  Officiers  de  donner 
ordre  qu'on  n'exige  pas  plus  pour  le  pâturage  de  ces  chevaux  que  les  3-, 
fols  réglez. 

Pareillement  il  a  été  trouvé  bon ,  que  les  Seigneurs  Etats  des  Provinces 
feront  priez  par  Lettre  de  faire  les  difpoGtions  neceffaires,  afin  que  les 
Troupes  de  leur  répartition  qui  font  en  Garnifon  à  Maftricht  ou-  à  Grave 
y  trouvent  de  l'argent  ou  du  crédit  pour  quelques  mois,  afin  d'en  pouvoir 
profiter  en  cas  de  Siège» 

Réfolution  du  Jeudi  16.  Juin  1701. 

LES  Seigneurs  Etats  de  Weft-Frife  ont  confenti  à  la  Négociation  de  Réfol'al 
deux  cent  mille  Ecus  pour  le  Roi  de  Prulfe  fous  la  Garantie  de  l'E-   t!0n  du 
tat  ,   lefquels  doivent  être  emploiez  aux  Fortifications  de  Wefel  &  de   l6'Jum' 
liruek. 

Les  Seigneurs  Etats  de  Weft-Frife  ont  confenti  à  la  Pétition  de  75-0000, 
florins  deftinez  à  faire  les  Remparts  &  ouvrages  projetiez  ,  pour  affurer 
le  palfage  fur  le  Bas -Rhin  &  ï'YfTel,  &  entre  Grebbe  &  Amen,  fort.     En 

même 


288    MEMOIRES,  NEGOCIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Atîaires   même  tems,  lefdits  Srs.  Députez  ont  infifté   qu'on  veuille  pareillement 
des  Pro-  prencjre  f0]n  pour  ia  fureté  de  la  dite  Province  conformément  à  la  Réfo- 

VINCES-       f      .  .     r       ,     r     •  x 

Unjes.     lucion  inférée  ci -après. 

Extrait  du  Regiftre  des  Réfolutions  de  LL.  NN.  PP.  les  Sei- 
gneurs Etats  de  Frife,  du  n.  Juin  1701. 

Réfoiu-  T  U  &  examiné  une  Lettre  de  LL.  HH.  PP.  à  laquelle  étoit  jointe  une 
tion  des  £_j  p^Qtion  du  Confeil  d'Etat  de  la  fomme  de  770000.  florins ,  qui ,  con- 
Frife  *  jointement  avec  170000.  florins  à  fournir  par  la  Province  d'Utrecht  en 
diminution  de  fes  Arrérages  fur  l'Article  des  Fortifications  intérieures  & 
extérieures ,  doivent  être  employez  à  faire  plufieurs  Retranchemeus  & 
ouvrages  necellaires  pour  élever  des  Remparts  qui  puiïTent  fervir  de  Dé- 
fenfe  &  de  Sûreté  du  Paflage  entre  Grebbe-  Sluys,  &  Amer  s  fort.  Surquoi 
aiant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté  de  confentir  à  la  dite  Pé- 
tition de  7foooo.  florins  pour  être  emploiez  à  la  fureté  &  défenfe  des 
Frontières  de  l'Etat  ,  &  de  prendre  en  même  tems  tous  les  dûs  foins 
pour  la  fureté  &  fortification  de  cette  Province,  en  empêchant  le  PaiTage 
par  les  Marais ,  &  en  fortifiant  les  avenues  \  pour  laquelle  fin  les  Srs.  Dé- 
putez font  chargez  &  autorifez  par  la  préfente  d'entrer  au  plutôt  en  Con- 
férence avec  le  General  Coehoorn,  d'entendre  Ton  fentiment  &  avis  fur 
la  manière  la  plus  propre  à  garantir  cette  Province  d'une  invafion  de 
l'ennemi,  d'en  former  un  Projet,  &  de  l'envoier  au  Confeil  d'Etat,  en  le 
priant  de  vouloir  l'exécuter  incefïamment ,  &  en  cas  que  la  fomme  de- 
mandée ne  fuffît  point  aux  fraix  necellaires  pour  ces  Ouvrages ,  de  vou- 
loir encore  faire  une  autre  Pétition  fur  ce  fujet ,  &  la  préfenter  aux 
Provinces  refpe6lives. 

Surquoi  aiant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  de  remettre  Copie  de 
cette  Réfolution  entre  les  mains  des  Srs.  Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour 
les  Affaires  Militaires,  afin  de  voir  &  examiner  tout  &  d'en  faire  Ra- 
port  ici  à  l'AiTemblée. 

Réjoluîion  du  Lundi  20.  Juin  1701. 

Réfolu-  A  iant  été  délibéré  fur  la  Lettre  du  Collège  de  l'Amirauté  de  Weflfrife 
tion  du  jLjL  &  du  Quartier  du  Nord  ,  par  laquelle  on  avoit  apris  que  la  Frégate 
ao.  Jum.  Enckhuyfen,  &  le  Brûlot  Y  Africain ,  n'étoient  pas  hors  d'état  de  faire  le  fer- 
vice  requis,  il  a  été  trouvé  bon  qu'il  fera  donné  ordre  de  réparer  les  dits 
VaifTeaux  avec  toute  la  diligence  pofïible,  &  de  hs  renvoïer  à  l'Efcadre 
fous  le  Lieutenant- Amiral ,  &  d'équiper  en  attendant  &  d'envoïer  à  la- 
dite Efcadre  une  Galiote  propre  à  fervir  de  VaiiTeau  d'Avis. 

Aiant  été  délibéré  fur  la  Lettre  de  l'Amiral  Allemonde,  portant,  qu'il 
étoit  arrivé  chez  lui  du  Texel  deux  Galiotes,  chargez  de  Vivres  pour  les 

Vaif- 


RESOLUTIONS    D'ETAT/  M.  DCC.  I.  289 

Vaifleaux  du  Collège  de  l'Amirauté  d'Amfterdam  ,   lefquels  alloient  être  Affaire 

fuivis  d'encore  deux  Flûtes,  pour  en  pouvoir  avitailler  tous  les  Vaifleaux  DES  Pro- 

de  fon  Reflbrt  jufqu'à  la  mi-Novembre  prochaine,  &c.    il  a  été  trouvé  Y*NCES- 

bon  d'écrire  au  Collège  de  l'Amirauté  de  Zelande  de  faire  les  difpofitions 11 

neceffaires  ,  afin  que  Tes  Vaifleaux  foient  pareillement  avitaillez  jufqu'au 
15.  Novembre,  conformément  à  la  précédente  Réfolution  de  LL.  HH.  Puif- 
fances. 

Rejoint  ions  des  i<5.  £5?  20.  Juin^  pour  négocier  avec  le  Comte 
d'Avaux  (*)  ;  du  Jeudi  1 6.  Juin  1 70 1 . 

Le  Confeiller  Penfionaire  Heinfius  a  raporté  à  l'Aflemblée,  que  le  Sr.    Réfolu- 
Comte  d'Avaux,  AmbafT.Extr.  du  Roi  de  France  ,  lui  a  notifié  de  boû-    tion  du 
che,  d'avoir  eu  ordre  de  Sadite  Majefté  d'admettre  le  Sr.  Stanhope  En-    I<5- Juin* 
voïé  Extr.  de  S.  M.  Britanique  aux  Conférences  pour  l'avancement  de  la 
Négociation  commencée,  fur  le  pied  que  LL.HH.PP.  l'ont  demandé,  &  que 
le  Roi  fon  Maître  avoit  voulu  donner  par-là  marque  &  preuve  de  ion  in- 
clination fmcère  pour  la  confervation  de  la  Paix  &  Tranquillité  publique. 
Surquoi  aïant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté  de  prier  &  de 
charger  par  la  préfente  les  Srs.  d'Effen  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP. 
pour  les  Affaires  Etrangères,  de  faire  part  de  cette  Déclaration   au  Sr. 
Stanhope  ,  de  délibérer  conjointement  avec  lui  fur  ce  qui  doit  être  fait 
de  plus  fur  ce  Sujet,  &  de  faire  Raport  de  tout  ici  à  l'Aflemblée. 

Du  Lundi  20.  Juin   1701. 

Oui  le  Raport  des  Srs.  d'Effen  &  autres  Députez  de  LL.HH.PP.pour  les   ReTolu- 
Affaires  Etrangères ,  aïant  en  confequence  &  pour  fatisfaire  à   leur   tion  du 
Réfolution  Commiflbriale   du  17.  d.  c.  confulté,  fur  ce  qu'il  y  aura  à  fai-    20-  Juin* 
re  après  que  le  Sr.  Comte  d'Avaux  AmbaiT.  Extr.  du  Roi  de  France  a  dé- 
claré d'avoir  ordre  d'admettre  le  Sr.  Stanhope  Envoie  Extr.  de  S.  M.  Brit. 
aux  Conférences  pour  la  Négociation  entamée  ici ,  fur  le  pied  que  LL. 
HH.  PP.  l'avoient  demandé  j& en  aïant  fait  part  au  Sr.  Stanhope, il  a  dé- 
claré qu'il   ne  feroit   plus   de  dificulté    d'aflîfter  aux   dites  Conférences. 
Surquoi  aïant  été  délibéré, il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  que  les  Srs.  d'Ef- 
fen&  autres  Députez  de  LL.HH.PP.  pour  les  Affaires  étrangères  feront 
priez  &  chargez  par  la  préfente  de  rentrer  5  conjointement  avec  le  Sr. 
Stanhope,  en  Conférence  avec  le  Sr.  Comte  d'Avaux,  &  de  témoigner 
àce  dernier  qu'il  a  été  très-agréable  à  LL.  HH.  PP.  que  S.M.leRoide  Fran- 
ce a  trouvé  bon  de  laifler  continuer  ici  les  Conférences  furie  dit  pied, 
&  de  remercier  le  dit  Sr.  Comte  d'Avaux  de  la  part  de  LL.  HH.  PP.  des  bons 
Offices  qu'il  a  bien  voulu  emploïer  pour  cet  éfèt,  &  de  délibérer  con- 

jointe- 

(*)  Elles  font  plus  amples  que  celles ,  qui  font  rapportées  dans  le  Tome  I,  à  pareilles  Dates. 

Tome  XI,  Oo 


2c,o    MEMOIRES,  tfEGOTïATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aftaikxs  jointement  avec  le  dit  Sr.  Stanhope   &   le    Sr.  Comte   d'Avaux  fur  I&s 

desPro-  moïens  les  plus  propres  à  avancer  avec  toute  la  diligence  poftible  la  Ne- 

vixcks-  grociatîoii  commencée  &  à  la  terminer  heureufement;  dequoi  les  dits  Srs, 

.    .Ni!s'  Députez  doivent  faire  Raport  ici  à  l'AfTemblée. 

RéfoJuîion  touchant  des  Retmnchemens  £5?  Réparations  \  du 

Lundi  20.  Juin  1701. 

Rcfolu-      |r~'\ui  *e  raPort  des  Sieurs  Ham  &  autres  Députez  deLL.  HH.  PP.  pour 
tion  fur      \~J  les  Affaires  Militaires,  aiant,  conjointement  avec  quelques  Députez 
des  Re-     du  Confeil  d'Etat,  examiné  la  Réfoludon  des  Seigneurs  Etats  de  Gueldre 
P.ar:l*         prife  fur  la  Pétition  dudit  Confeil  pour  une  Somme  de  75*0000.   fl.   outre 
15*0000. que  laProvince  d'Utrecht  doit  fournir  en  diminution  de  ce  qu'elle  doit 
pour  l'article  des  Fortifications  intérieures  &  extérieures,   lefquelles  fom- 
mes  doivent  être  emploiées  à  faire  des  Retranchemens  dans  laBetuwe  pour 
pouvoir  élever  des  remparts  le  long  des  Rivières  du  Bas-Rhin  &  de  l'Yffel, 
h  faire  une  inondation  entre  Grebbe-Siuys  &  Amersfoort,  &  à  conilruire- 
les  ouvrages  neceffaires  pour  couvrir  ces   remparts  &  cette  inondation. 
Surquoi  il  a  été  trouvé  bon  que  le  Confeil  d'Etat  fera  prié  &  autorifé  ,  en 
attendant  le  confentement  des  Provinces  fur  la  Pétition  ci-defllis  mentio- 
née  ,  de  faire  commencer  au  plutôt  à  travailler  au  Retranchement  projette 
près  de  Doesbourg,  à  la  contrticarpe  paliffadée  de  Deventer,  &  aux  ou- 
vrages propofez  aux  environs  de  Wye,&  de  faire  pouffer  ce  travail  avec 
toute  la  diiigence  poffible ,  afin  de  Je  finir  le  plutôt  qu'il  fe  poura.     Que 
pour  ce  qui  regarde  les  Remparts  à  faire  dans  le  Bas-Rhin, &  I'Yffel, con- 
formément à  la  dite  Pétition  ,  LL.HH.PP.  infiffent  fur  leurRéfolution  du  8- 
d.  c.  par  laquelle  le  Confeil  d'Etat  a  déjà  été  prié  de  faire  affembler  à  l'en- 
droit requis  tous  les  matériaux  &  autres  chofes  neceffaires  pour  cette  fin. 
Et  quant  à  l'inondation  entre  Grebbe-Sluys  &  Amersfoort,  &  les  ouvrages 
requis  à  la  couvrir,  le  dit  Confeil  elt  prié  de  régler  avec  le  Directeur  Ge- 
neral des  Fortifications  Coehoorn  le  plan  &  les  projets  des  Ouvrages  ne- 
ceffaires,  de  les  arrêter  ,&  exécuter.     Que  de  plus  les  Sieurs  Etats  des 
Provinces,  qui  n'ont  pas  encore  confenti  à  la  dite  Pétition,  feront  exhor- 
tez par  Lettre,  à  vouloir  envoyer  fans  aucun  délai  leur  confentement  fur 
cette   Pétition  ici  à  l'Affemblée  ,  &  fournir  leurs  quotes-parts  en  argent 
comptant    au    Comptoir   du    Receveur  General.      Et    les   Sieurs  Etats 
des  Provinces  de  Gueldre,   d'Utrecht,  &   Overyffel,    comme  des  trois 
Provinces  les  plus  intereffées  à  ces  ouvrages,  feront  priez  particulièrement 
de  fournir, non  feulement  fur  le  champ  leur  quote-part,  mais  aufii  d'aller 
jufqu'à  avancer,  outre  cette  quote-part,  la  fomme  totale,  des  deniers  de- 
mandez pour  ces  ouvrages  dans  la  dite  Pétition ,  &  les  dits  Seigneurs  E- 
tats  pouront  rabattre  ce  qu'ils  auront  avancé  au  delà  de  leur  quote-part 
pour  le  montant  de  la  dite  Pétition,  fans  toutes  fois  l'excéder,  &  il  leur 


vaudra 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M,  DCC.  L  tpi 

vaudra  en  compte  fur  leur  quotepartà  la  Pétition  pour  l'Armement  extra-  âmauus 
ordinaire  de  l'année  courante.     Les  Sieurs  Députez   de  la   Province  de    ms  Pno' 
Gueldre  ont  fait  annoter  fur  la  dite  Conclusion,  qu'ils  n'y  fauroient  eonfentir     uJJ^8." 
que  pour  autant  qu'elle  efl  conforme  à  la  Réfolution  des  Seigneurs  Etats       -  '    *  ■ 
leurs  Principaux,  pas  au  delà;furquoi  lesdits  Sieurs  Députez  ont  été  priez 
de  rétracter  cette  Annotation  &  de  fe  conformer  à  la  précédente  Conclu- 
fion,  ou  qu'autrement  les  autres  Provinces  ne  veulent  pas  être  obligées 
aux  confentements  déjà  donnez  ou  à  donner  encore  à  la  dite  Pétition. 
Les  Sieurs  Députez  de  la  Province  de  Zelande  ont  déclaré  de  n'avoir  en- 
core aucunes  Inftruclions  fur  fujet ,  au  défaut  defquelles  ils  n'y  fauroient 
confemir.     Les  Sieurs  Députez  de  la  Province  d'Utrecht  ont  déclaré  de 
ne  point  eonfentir  h  la  Réfolution  ci-deffus  pour  autant  qu'elle  efl  contrai- 
re à  la  Lettre  des  Seigneurs  Etats  leurs  Principaux  remile  àLL.  HII.PP.  fur 
cette  affaire  après  la  réfomption,  refervée  à  leurs  Principaux  la  libre  déli- 
bération fur  la  demande  qu'ils  leur  feroient  conformément  à  la  dite  Con- 
clufion.     Les  Sieurs  Députez  de  la  Province  de  Frife  ont  infiflé  fur  la  Ré- 
folution des  Seigneurs  Etats  leurs  Principaux  prife  &  délivrée  fur  ce  fu- 
jet.    Le  Député  préfent  de  la  Province  de   Groningue  a  déclaré  de  n'a- 
voir point  d'ordre  &  de  ne  pouvoir  rien  dire  là-deifus  avant  d'avoir  reçu 
la  Réfolution  des  Seigneurs  Etats  Cqs  Principaux. 

Réfolutions  des  24.  &  2?.  Juin  touchant  les  Lignes  des  EJpagmls 
en  Flandres  ;  du  Fendredi  24..  Juin  1 70 1 . 

Reçu  une  Lettre  du  Confeil  d'Etat  écrite  ici  à  la  Haïe  le  20.  d.  c.  la-  Réfolu- 
quelle  porte  que  ledit  Confeilfe  croioit  obligé  de  notifier  àLL.HH.PP.  tion" tou- 
que  fur  le  territoire  d'Efpagne  on  droit  une  Ligne  environ  du  Sas  de  Gant,  j*"1  sles 
jufqu'au  Fort  la  Perle  fur  lEfcaut,  laquelle  on  garniiToit  de  Forts  &  de  Re-     lg 
doutes, &  qu'en  particulier  on  conftruifoit  un  Fort  confiderable  fur  le  Ca- 
nal de  Gant  environ  à  trois  quart  d'heures  de  Hulft;  ce  que  le  Confeil  d'E- 
tat regardoit  comme  une  chofe  digne  de   réflexions.    Surquoi  ayant  été 
délibéré, il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté  qu'il  fera  remis  copie  de  cette  Lettre 
entre  les  mains  des  Sieurs  Députez  deLL.  HH.  PP.  pour  les  Affaires  Militai- 
res, afin  d'examiner  tout  conjointement  avec  quelques  Committez  du  Con- 
feil d'Etat ,  &  en  faire  Raport  ici  à  l'Affemblée. 

Du  Samedi  25.  de  Juin  1701. 

Ouï  le  Raport  des  Sieurs  Députez  'de  LL.HH.  PP.  pour  les  Affaires  Mili-  Autre, 
taires  fur  la  Conférence  qu'ils  ont  eue  avec  quelques  Sieurs  Commit- 
tez du  Confeil  d'Etat  au  fujet  de  la  continuation  des  ouvrages  projettez 
dans  &  près  du  Bas-Rhin,  &  de  l'Yflel, comme  auffi  près  de  Greùôe-Sluys, 
&  d'Amersfort,  pour  la  fureté  de  l'Etat  de  ce  côté-là,  plus  amplement 
mentionez  dans  la  Pétition  du  Confeil  d'Etat  du  4.  &  dans  la  Réfolution 

O01  de 


292.    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 
Araires    de  LL.HH.  PP.  du  20.  d.  c.  Surquoi  ayant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon, 


DES 


Pro 


de  repréfenter  encore  aux  Seigneurs  Eiats  des  Provinces  refpeftives  par 
Unies."  Lettres,  que  LL.HH. PP.  ont  propofé  par  leur  précédente  aux  Confederez 
—  l'importance  &  la  necefîité  des  ouvrages  prbjettez  ,  pour  alTùrer  non-feu- 
lement le  pallage  du  Bas-Rhin  &  de  l'Yflel,  mais  aufli  la  féconde  Barrière 
par  le  moyen  d'une  Inondation  entre  Grebbe-Sluys,  &  Amersfort,  & 
&  par  des  Retranchements  neceflaires  à  la  couvrir.  Que  LL.HH. PP.  ont 
ont  aufii  donné  connoiflance  auxdits  Seigneurs  Etats  le  2.0.  d.  c.  qu'en 
attendant  le  Confentement  des  Provinces  refpectives,  &  pour  ménager 
le  tems  fi  prétieux  dans  cette  occafion  ,  elles  avoient  prié  le  Confeil 
d'Etat  de  faire  mettre  au  plutôt  la  main  à  l'œuvre,  &  que  pour  cet  effet 
LL.  HH.  PP.  ont  rémontré  le  20.  d.c.  aux  Provinces ,  à  laquelle  Lettre  elles 
iè  rapportent  encore  à  préfent ,  que  ce  travail  demandoit  de  l'argent 
contant,  fans  lequel  il  eft  impofîible  de  pouvoir  continuer  &  achever  lef- 
dits  ouvrages  avec  la  diligence  requife,  &  que  faute  d'argent  ces  ouvra- 
ges refteroient-là  ou  feroient  retardez  au  grand  préjudice  du  Pais  dans  une 
lltuation  aufli  dangereufe  des  affaires  que  la  préfente  :  Que  pour  ces  rai- 
fons  LL.  HH.  PP.  prient  encore  très-ferieufement  les  Seigneurs  Etats ,  qui 
n'ont  pas  encore  confenti  à  la  dite  Pétition,  de  vouloir  s'y  prêter  fans 
aucun  délai,  &  envoier  leur  Confentement  ici  à  l'Aflemblée:  &  les  Sei- 
gneurs Etats  des  Provinces  qui  ont  bien  pris  une  Réfolution  à  cefujet,mais 
peu  conforme  à  la  dite  Pétition,  font  priez  de  vouloir  annuller  les  claufes 
&  reltrictions  comprifes  dans  leurs  Réfolutions,  &  confentir  purement  & 
Amplement  à  la  dite  Pétitionnant  à  l'égard  de  la  première  que  de  la  fécon- 
de Barrière;  &  que  les  Seigneurs  Etats  de  toutes  les  Provinces  refpeéti- 
ves  veuillent  au  plutôt  fournir  leur  quote-part  au  comptoir  du  Receveur 
General ,  afin  que  faute  des  deniers  requis  ces  ouvrages  fi  neceflaires  ne 
foient  arrêtez,  &  que  l'Etat  n'en  foufre  du  préjudice.  Les  Sieurs  Dépu- 
tez de  la  Province  de  Gueldre  ont  infifté  fur  la  Réfolution  des  Seigneurs 
Etats  leurs  Principaux  ,  &  fur  ce  qu'ils  ont  fait  infcrire  dans  les  Regîtres 
le  20.  d.  c.  Les  Sieurs  Députez  de  la  Province  d'Utrecht  ont  pareille- 
ment infilté  fur  la  Lettre  écrite  fur  ce  fujet  par  les  Seigneurs  leurs  Princi- 
paux à  LL.HH. PP. &fur  cequ'ils  ont  fait  enregîtrer  le  20.  d.c.  Les  Sieurs 
Députez  de  la  Province  de  Frife  ont  de  même  perfiité  fur  la  Réfolution 
remife  de  la  part  des  Seigneurs  Etats  leurs  Principaux  fur  ce  fujet.  Les 
Sieurs  Députez  de  la  Province  d'Overyffel  ont  aufli  perfiité  fur  la  Réfo- 
lution des  Seigneurs  Etats  leurs  Principaux. 

Samedi  25".  de  Juin  1701. 

LES  Srs.  Députez  de  la  Province  d'OveryfTel  ont  porté  à  l'Aflemblée, 
&  y  fait  lire,  la  Réfolution  des  Seigneurs  P2tats  leurs  Principaux,  par 
laquelle  ils  confèntent  a  la  Pétition  de  7f00c0.fl.  outre  1  rcooo,  fl.à  fournir 
en  particulier  par  la  Province  d'Utrecht,  pour  faire  des  Retraiichemens  & 

con- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I. 


2P* 


conflruire  plufieurs  ouvrages  dans  laBetivwe,  dans  &  près  de  l'YfTel  &  du 
Bas-Rhin ,  comme  auiîi  près  de  Grebbe-Sluys  &  Amersfort ,  fuivant  la 
teneur  de  Ja  Réfolution  inférée  ci-après. 


Affaires 
des  Pro- 
vinces- 
Unies. 


SïvoII  le  21.  de  Juin  i^or. 


LA  NoblefTe  &  les  Villes  qui  compofent  les  Etats  d'Overyflel  ayant 
vu  &  examiné  la  Lettre  de  LL.  HH.  PP.  du  3.  d.  c.  conjointement  avec 
une  Pétition  du  Confeil  d'Etat  de  la  même  date  pour  une  fomme  de  750000.  fl. 
à  laquelle  la  Province  d'Utrecht  doit  encore  ajouter  iyoooo.  fl.  en  diminu- 
tion de  Tes  arrérages  pour  les  Fortifications  intérieures  &  extérieures  de 
la  dite  Province  mifes  fur  les  états  refpeélifs  de  Guerres  lefquelles  Tom- 
mes doivent  être  employées  à  faire  divers  Retranchemens  tant  dans  la  Be- 
tuwe  que  près  de  l'YfTel ,  comme  auffi  quelques  Remparts  dans  le  Bas- 
Rhin  &  l'YfTel  &  près  de  Grebbe-Sluys ,  de  plus  la  contreTcarpe  de  De- 
venter,  le  tout  plus  amplement  mentioné  dans  la  dite  Pétition.  Sur  quoi 
ayant  été  délibéré  &  confédéré  qu'il  eft  inconteftable  que  l'intérêt  de  la 
patrie  &  les  raiTons  d'Etat  &  de  Guerre  demandent  que  l'ennemi  Toit  ar- 
rêté autant  qu'il  eft  potfïble  fur  les  Frontières  les  plus  éloignées  de  la  Répu- 
blique, ce  qui  félon  toute  aparence  ne  fe  peut  mieux  faire  que  de  ce  cô- 
té-là, fuppofé  qu'il  ne  puilTe  entièrement  être  retenu  des  Frontières  de 
l'Etat  ,.LL.NN.  PP.  foùtiennent  qu'avant  tout  il  faut  travailler  au  Retranche- 
ment projette  du  Wael  jufqu'au  Bas-Rhyn  &  au  delà  de  Gent,  &  qu'a- 
près cela  elles  aprouvent  qu'on  falTe  un  Rempart  dans  l'embouchure  du  Bas- 
Rhyn  en  deçà  d'Yflel-Oort:  que  de  plus  on  doit  purger  la  dite  embouchu- 
re de  lTilel  de  fable:  Qu'en  cas  que  les  moyens  &  remèdes  propofez  ne 
foyent  jugez  fuffifans  pour  avoir  afTez  d'eau,  LL.NN.PP.confentent  qu'alors 
ou  aufii  en  même  tems  on  faffe  de  concert  &  avec  i'aprobation  de  quelques 
Committez  de  cette  Province  des  Remparts  dans  la  Rivière  même  de  l'YfTel 
fur  les- places  où  cela  pourra  être  jugé  le  plus  necefïaire,  moyennant  qu'ils 
foyent  ôtez  dans  l'hiver:  Qu'enfuite  on  faffe  aufîi  la  contrescarpe  de  la 
Ville  de  Deventer  &  tels  autres  Retranchement  le  long  de  l'YfTel  qu'on  ju- 
gera convenables  à  la  defenfe  d'icelle.  Que  de  plus  LL.  NN.  PP.,  en  cas  que 
LL.HH. PP. le  jugent  à  propos,  peuvent  fouffrir  qu'avant  que  les  dits  ou- 
vrages foient  achevez  ou  en  même  tems,  on  faffë  celui  près  de  la  Grebbe, 
&  le  Retranchement  pour  couvrir  la  Ville  d'Amersfort;  &  après  que  tout 
cela  fera  mis  en  fa  perfection,  on  délibérera  s'il  eft  neceffaire  de  faire  un 
autre  Retranchement  depuis  Doesbourg  jufqu'à  Heuflen;  en  attendantes 
confentent,  fous  les  conditions  exprimées  ci-defïus,  à  la  Pétition  de 770000.  fl. 
à  payer  par  les  Provinces  de  Gueldre,d'Utrecht,  &  Overyffel  ;  moyennant 
que  ce  que  cette  dernière  paye  à  cette  Pétition  outre  fa  quote-part  lui  paf- 
fera  en  compte  fur  ce  qu'elle  doit  fournir  pour  les  Affaires  de  la  Marine, 
pour  les  deniers  de  levée  &  de  recrue  des  troupes  étrangères  prifes  à  la 
foïde  de  l'Etat,  pour  les  fraix  de  l'Armée  &  des  Magazins,&  autres  cho- 

Oo  3  fes 


des  Pro- 

VIN'CtS- 
UnKS. 


Pétition 
duCon- 
feil  d'E- 
tat. 


1*4    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

tes  de  cette  nature,  fuirant  une  exacte  liquidation  qui  en  doit  être  tenue» 
aufti  dans  la  fupofuion  que  les  autres  Provinces  confentiront,  non  feulement 
à  la  dite  Pétition,  mais  acquiteront  aufli  leur  quote-part  réellement  ,  & 
payeront  par  compenfation  pour  la  dite  Province  aux  articles  ci-defTus 
mentionez  ce  quelle  a  fourni  à  celui  des  Fortifications  par  deffus  ion 
contingent  en  la  Pétition  de  7^0000.  fl. 

Pétition  du  Confcil  d'Etat  3  "du  2  S.  Juin  1701. 

Comme  le  grand  changement  qui  eft  arrivé  dans  la  fituation  des  Affai- 
res de  l'Europe,  à  la  fin  du  fiecle  dont  nous  venons  de  fortir,  & 
l'incertitude  delà  tranquillité  publique  non  feulement,  mais  aufli  en  particu- 
lier de  celle  de  cet  Etat,  caufée  par  ledit  changement,  a  fourni  à  VV. 
IiH.PP.plufieurs  Raifons  très-preiîantes  a  réfoudre  une  augmentation  confi- 
derable  des  Troupes  du  Pais,  tant  en  fortifiant  les  Régimens  &  les  Com- 
pagnies qui  ont  reftées  au  fervice  depuis  la  fin  de  la  dernière  Guerre, 
qu'en  prenant  à  la  Solde  de  l'Etat  plufieurs  autres  Troupes  Etrangères, 
afin  de  fe  mettre  par-là  en  bon  état  de  defenfe,il  n'a  pas  paru  moins  digne 
des  foins  de  VV.  HH.  PP.  de  pourvoir  h  tout  ce  qui  pouroit  fervir  à  tirer, 
en  cas  de  befoin,de  ces  Troupes  le  fervice  necellaire,  foit  par  la  defenfe 
des  Frontières,  foit  en  Campagne  pour  affûrer  ces  mêmes  Frontières  con- 
tre toute  Invafion  imprévue.  Pour  avancer  ce  but  falu taire,  il  a  non-feiî- 
lement  été  travaillé  depuis  quelque  tems,avec  un  zèle  redoublé, aux  For- 
tifications des  Places  Frontières  les  plus  expofées,  ouvrage  qu'on  continue 
encore  journellement,  mais  pour  les  pourvoir  auffi  de  tout  ce  qui  elt  ne- 
cefiaire  à  une  bonne  defenfe,  nous  avons  emploie  fans  celle  tout  ce  qui  a 
pu  être  amaiTé  des  fourniffemens  des  Provinces  fur  la  Pétition  pour  les 
Magazins,  dans  l'attente  que  nous  ferons  de  plus  en  plus  mis  en  état  d'y 
continuer  par  la  Contribution  du  reliant  que  les  Confederez  doivent  en- 
core fur  cet  Article. 

Pour  mettre  l'Armée  de  l'Etat  en  Campagne,  nous  avons  demandé  au 
mois  de  Mars  dernier  conformément  aux  intentions  de  VV.  Hfi.  PP. ,  ce  que 
nous  avons  jugé  indifpenfablement  neceffaire  pour  les  befoins  auxquels  il 
faut  pourvoir  avant  que  de  pouvoir  tirer  un  nombre  affez  confiderable  de 
Troupes  des  Garnifons;  &  pour  obferver  toute  la  prudence  œconomique 
à  cette  occafion  ,  nous  avons  provifionellement  fixé  un  terme  de  trois 
Mois  pendant  lefquels  les  dits  befoins,  dévoient  être  fournis,  afin  devoir 
en  attendant  quel  train  prendront  les  Affaires  du  Public,  &  ce  qu'il  y  au- 
roit  à  attendre  des  Conférences  &  Négociations  entamées  pour  l'Etablie 
fement  de  la  Paix  générale  &  la  fureté  de  cet  Etat.  Mais,  comme  du  de- 
puis le  danger,  bien  loin  d'être  diminué,  augmente  de  jour  en  jour  par 
les  grands  préparatifs  de  guerre  qui  fe  font  dans  le  voifinage,  par  le  nom- 
bre redoutable  de  Troupes  qu'on  a  fait  défiler  jufqu'aux  environs  des 
Frontières  de  l'Etat ,  par  la  groffe  Artillerie  qu'on  y  fait  mener  avec  tout 

fon 


\  INCKS- 

Umes. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  tp$ 

Ton  train,  &  par  tout  ce  qui  pouroit  être  exigé  à  l'ouverture  d'une  Cam-  Ambres 
pagne  &  à  toutes  fortes  d'Actes  d'hoftilité,  comme  aufli  par  le  Cantonne-  des  Pro- 
ment  de  ces  Troupes  dans  des  places  voifines,  &  par  la  difpofition  de  pou- 
voir les  faire  camper  &  marcher  au  premier  ordre;  VV.  HH.PP.  ont  donc, 
conjointement  avec  S.  M.  Britannique  ,  jugé  de  la  dernière'neceffité  de 
prendre  de  telles  mefures  à  l'égard  des  Troupes  de  cet  Etat, pour  qu'elles 
puiflent  avoir  l'œil  fur  les  mouvemens  des  voifins ,  &  avoir  loin  de  la  de- 
•îenfe  &  fureté  du  Païs.  . 

Pour  cet  effet,  il  aplûàS.  M. de  choifir  les  Généraux,  &  les  Regimens 
tant  d'Infanterie  que  de  Cavallerie,  pour  les  Campemens  refpe6l:fs  qui  leur 
font  affignez  ,&  à  VV.  I III.  PP.  de  nous  requérir  parleur  Réfolutiondu  17. 
d.  c.  de  former  une  Pétition  pour  plufieurs  fraix  extraordinaires  que  la 
neceffité  exige  lorfque  des  Troupes  doivent  être  mifes  en  Campagne  &  en 
état  de  pouvoir  agir  en  cas  de  befoin  pour  la  defenfe  du  Pais. 

Nous  avons ,  pour  fatisfaire  à  la  Réfolution  de  V  V.  HH.  PP. ,  réfléchi  avec 
toute  l'Aplication  neceiTaire  d'un  côté  fur  le  fer  vice  de  l'Etat,  &  de  l'autre  fur 
tout  le  ménage  qui  pouroit  s'obferver  en  cette  occafion,  &nous  avons  ju- 
gé préalablement,  que  la  Campagne,  &  le  tems  qu'il  faut  pour  renvoyer 
les  Troupes  mifes  en  Campagne  fans  rifque  à  leurs  Garnifons  ,  pouroit 
bien  durer  jufqu'à  la  fin  d'Oclobre,  &  que  par  confequen.t  les  befoins  que 
nous  n'avons  démandé  que  pour  trois  Mois  par  nôtre  Pétition  du  25).  de 
Mars  dernier,  doivent  être  continuez  &  fournis  jufqu'à  ce  tems-là,  de 
même  que  les  befoins  ultérieurs  dont  il  fera  parlé  dans  la  fuite  plus  am- 
plement, lefquels  depuis  les  ordres  donnez  aux  Troupes  de  fe  tenir  prê- 
tes à  marcher,  &  depuis  la  marche  éfeclive  qui  s'en  eitfuivie  ne  font  deve- 
nus guère  moins  preffans ,  que  ceux  que  nous  avons  démandé  par  nôtre 
Pétition  du  2.9.  de  Mars.  Nous  ne  faurions  cependant  nous  empê- 
cher de  faire  remarquer  en  même  tems,  qu'à  l'égard  des  befoins  qui  font 
l'objet  de  cette  Pétition  en  conformité  de  la  Réfolution  de  VV.  HH.PP.  du 
17.  du  courant,  nous  avons  fait  quelque  différence  .par  raportau  tems  qu'ils 
doivent  commencer,  ou  qu'ils  ont  déjà  été  commencez;  qu'ainfi  on  doit 
fatisfaire  pour  4.  mois  à  compter  du  1.  de  Juillet  prochain,  premièrement 
aux  Apointemens  Extraordinaires  des  Généraux  &.  des  autres  principaux 
Officiers  des  Regimens  qui  ont  été  nommez  pour  la  Campagne,  fur  le  mê- 
me pied  qu'ils  leur  ont  été  païez  dans  la  dernière  Guerre;  car,  quoique  le 
feu  de  la  Guerre  ne  fe  foit  pas  encore  aliumé  dans  ces  quartiersrci,  ce  que 
Dieu  veuïîle  encore  empêcher  par  fa  grâce,  il  efl  pourtant  fort  incertain 
que  ce  qu'on  craint  aujourd'hui  n'arrive  demain,  &  alors  il  feroit  trop  tard 
de  faire  les  préparatifs  neceffaires,  c'efl;  pour  quoi  les  dits  Généraux  & 
autres  principaux  Officiers  font  obligez  de  s'équiper  dès  à  préfent  &  de 
faire  les  mêmes  fraix  que  s'ils  alloient  actuellement  en  campagne.  En  fé- 
cond lieu  nous  croyons,  que  les  Collonels  &  Majors  de  Cavallerie,  qui 
depuis  la  dernière  Guerre  n'ont  point  tiré  des  gages,  &  n'ont  été  pour 
ainfi  dire  qu'honoraires,  ayant  eu  ordre  préfentement  d'aller  en  campa- 
gne 


Affaires 
des  Pro- 
vinces- 
Unies. 


25)6    MEMOIRES,  NEGOTÏAf  IONS,  TRAITEZ,  ET 

gne,  doivent  pareillement  être  fatisfaits  de  leur  gages  ordinaires  &  ex-* 
traordinaires  fur  le  même  pied  de  quatre  mois  ,  tout  comme  les   autres 
Collonels  &  Majors  dont  le  falaire  elt  réglé  fur  l'Etat  de  Guerre  ,  vu  que 
notoirement  les  uns  &  les  autres  font  obligez  aux  mêmes  fatigues  &  de- 
penfes;  mais  les  articles  fuivans  pas  moins  conformes  à  laRefolution  ci- 
deflus  mentionnée  de  VV.  HH.  PP.  doivent  être  payez  pour  quelque  tems 
de  plus  que  les  apointemens  des  Généraux  &  autres  Principaux  Officiers, 
favoir  pour  4.  Mois  &  demi  à  compter  du  16.  du  courant  ;  car  ayant  déjà- 
été  ordonné  avant  ce  terme  aux  troupes  deltànées  pour  la  campagne  de 
s'y  préparer,  elles  ont  été  neceffitées  dès  ce  tems-là  à  faire  plulieurs  dé- 
pendes fans  lefquelles  elles  ne  fauroient  faire  utilement  la  campagne  >  ou- 
tre cela  il  a  fallu  dès  ce  tems-là  préparer  &  difpofer  tout  ce  qui  eit  necef- 
faire  pour  mettre  des  troupes  en  campagne,  &  pour  les  faire  agir  s'il  en 
efl  befoin.     C'eft  donc  fur  ce  pied-là  qu'il  faut  payer  les  Adjutans  des  Gé- 
néraux &  le  petit  Etat  Major  des  Regimens  ,  tout  comme  au  tems  des 
précédentes  Guerres,  vu  que  fans  eux ,  non  feulement  les  ordres  des  Gé- 
néraux ne  fauroient  être  exécutez  avec  toute  la  promtitude  requife,  mais 
on  ne  fauroit  auffi  tirer  des  Regimens  le  fervice  exigé.     Pareillement,  il 
doit  être  payé    aux  Officiers  de  Cavallerie  &  des  Dragons  qui  vont  en 
campagne  l'augmentation  d'autant  de  chevaux  qu'ils  ont  eu  de  plus  dans 
la  dernière  Guerre  que  depuis  la  Paix  conclue,  favoir  de  fix  chevaux  par 
compagnie  de  Cavallerie  &  deux  par  Compagnie  de  Dragons,   afin  de 
pouvoir  d'autant  mieux  faire  le  fervice,  comme  auffi  parce  qu'on  n'acor- 
de  point  des  chariots  à  la  Cavallerie  pour  mener  le  bagage,  ce  qui  rend 
la  dite  augmentation  d'autant  plus  neceffaire  pour  les  Officiers.     Déplus 
il  doit  être  payé  aux  fix  Bataillons  Suifles  qui  ont  pareillemenr  été  com- 
mandez de  faire  la  Campagne  ,  &  auxquels  on   n'accorde  point  de  cha- 
riots, l'augmentation  de  leur  folde,  &  la  gratification  ftipulée  dans  la  Ca- 
pitulation.    Enfin,  il  doit  être  payé  aux  Généraux ,   aux  Regimens  d'In- 
fanterie &  de  Dragons  cojnmandez  ou  à  commander  encore  pour  la  Cam- 
pagne, aux  hauts  &  bas  Officiers  de  l'Artillerie,  &  à  pîufieurs  autres  per- 
sonnes qui  font  employées  au  camp,  le  chariage,  que  nous  avons  pour- 
tant calculé,  conformément  à  l'intention  de  VV.  HH.  PP.  comprife  dans 
leurRéfolution  du  17.  du  courant,  à  un  tiers  de  moins  qu'ils  n'a  été  ci-de- 
vant, moyennant  qu'il  foit  permis  aux  troupes  de  fe  fervir  de  charettes  à 
deux  chevaux  en  place  de  chariots  à  trois. 

De  plus,  il  doit  être  mis  fur  le  rang  de  ceux  qui  feront  payez  pour  qua- 
tre mois  &demi,  les  Gens  du  Confeil  de  Guerre,  le  Prévôt  General  a- 
vec  fes  fubalternes,  afin  de  pouvoir  tenir  les  Soldats  en  bonne  difcipline, 
&  d'empêcher  tout  defordre  &  dérèglement  :  les  Miniitres  ,  les  Ingé- 
nieurs, l'Intendant  General  des  Chariots,  avec  tous  ceux  qui  dépendent 
de  lui,  le  Comrniffaire  des  Bateaux,  qui  doit  être  payé  pour  neuf  mois, 
ayant  été  actuellement  employé  depuis  le  printems  :  l'hôpital  avec  ^ss 
Officiers,  &les  medicamcns  qu'on  diftribue  aux  Regimens,  le  Commiiîai- 

re 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  i?; 

rc  des  vivres ,  le  Capitaine  des  Pontons ,  avec  Tes  Officiers  fubalternes  ,  Amiuss 
&  Ouvriers,  enfin  toutes  les  perfonnes  necefTaires  à  un  Camp  compofé  DES  Pi'°" 
d'un  Corps  confiderable  de  Troupes.  vinces- 

Outre  cela, il  faut  aufîï  comprendre  dans  cette  Pétition  l'augmetation ,  N 
qui,  de  concert  &  après  de  mures  Délibérations  avec  les  Généraux,  a  été 
jugée  necefTaire,  des  chariots  de  vivres  au  nombre  de  quatre- vingt  ,  ou- 
tre les  cent  &  vingt  mentionnez  dans  nôtre  précédente  Pétition  du  25?.  de 
Mars  dernier,  comme  aufiï  celle  des  chevaux  d'Artillerie  jufqu'à  trois  cent 
quatre- vingt,  outre  les  quatre  cent  quatre- vingt  treize  demandez  dans  la 
même  Pétition,  &  enfin  l'augmentation  des  Officiers  Subalternes  de  l'Ar- 
tillerie, qui  fuivant  la  difpofuion  faite  pour  la  campagne  ont  été  jugez  ne- 
cefTaires d'être  encore  levez,  fans  compter  ceux  qui  ont  été  ci-devant  au 
fervice. 

Enfin, on  nefauroit  paiTer'fous  illence  dans  cette  Pétition  pluileurs  be- 
foins  &  incidens  qui  arrivent  tous  les  jours ,  &  qui  ne  fauroient  être  fpé- 
cifiez,  mais  qui  ne  laiiTent  pas  d'aller  fort  loin  au  bout  du  compte,  com- 
me il  a  paru  plufieurs  fois  dans  les  Campagnes  précédentes. 

Tout  cela,  Hauts  &  PuiiTans  Seigneurs,  ayant  été  mûrement  pefé  par 
nous,  &  tous  les  Articles  indifpenfablement  necefTaires  de  cette  Pétition, 
ayant  été  calculés  avec  toute  l'économie  poffible,  nous  avons  trouvé, que 
pour  y  fatisfaire ,  il  faudra,  outre  le  montant  de  notre  Pétition  fou  vent 
mentionnée  du  29.  de  Mars,  du  moins  encore  une  fomme  d'un  million  de 
florins ,  laquelle  nous  fommes  par  confequent  obligez  de  demander  par  la 
préfente,  priant  VV.  HH.  PP.  de  vouloir  difpofer  par  leur  recommenda- 
tion  ferieufe  &  efficace,  les  Sgrs.  Etats  des  Provinces  refpeétives,  en 
leur  envoyant  au  plutôt  cette  Pétition ,  à  y  confentir  promtement  &  à 
apuyer  leur  confentement  par  des  fourniiTemens  également  promis,  vu 
que  le  fervice  du  Pays  &  la  necefiité  urgente  le  demandent  abfolument. 
Ainfi  fait  &  demandé  par  ]e  Confeil  d'Etat, à  la  Haie, le  28.  Juin  1701. 

Etoit  Paraphé, 

J.  DE   ÏDSINGA. 

Plus  bas  il  y  avoit  : 
Par  ordre  du  Confeil  d'Etat  des  Provinces-Urnes  des  Pays-Bas. 

S.  DE    SUNGELANDL 

Réfoluîion  du  Vendredi  1  >.  Juillet  1701. 

SA  Majefté  le  Roi  de  la  Grande-Bretagne  ,  aiant  paru  à  J'AfTemblée,  a 
propofé  en  des  termes  très-gracieux  à  LL.  HH.  PP.  qu'Elle  étoit  tou- 
jours venue  avec  plaifir  dans  ce  païs-ci,  mais  principalement  dans   la 
préfente  dangereufe  fuuation  des  Affaires ,  où  Elle  croioit  plus  qu'en  tou- 
Tome  XL  Pp  te 


z9%     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   te  autre  occafion  pouvoir  fervir  l'Etat  par  fa  préfence.     Que  S.  M.  avoit 
des  Pko-   efperé  &  fouhaité  de  finir  le  relie  de  Tes  jours  en  tranquillité  &  paix,  & 
viNCEs-    ^e  laiffer  en  mourant  la  République  dans  un  état  paifible  &  floriffant,  à 
N1ES>     quoi  Elle  avoit  travaillé  toujours, &  particulièrement  depuis  la  conclufion 
de  la  dernière  Paix  ;  mais  que  depuis  peu  les  Affaires  de  l'Europe  avoient 
tellement  changé  de  face,  qu'on  ne  fauroit  prévoir  ce  qui  en  refulteroit 
fuivant  les  ordres  de  la  Providence.     S.   M.  pouvoit   cependant  aflurer 
fincèrement  LL.  HH.PP.  que  foit  que  les  chofes  en  reilaffent-là  fans  que 
le  feu  s'allumât,  foit  qu'on  fût  obligé  à  reprendre  les  Armes,  Elle  ne  re- 
lâcheroit  rien  de  l'affection  &  du  zèle  avec  lefquels  Elle  avoit  appuie  cï- 
devant  l'intérêt  &  le  bonheur  de  ces  Provinces  ,  mais  continueroit  à  a- 
vancer  leur  bien  &  avantage,  &  contribueroit  à  tout  ce  qui  pourroic  fer- 
vir à  maintenir  l'Etat  dans  fa  Liberté  &  Religion,  &  à  affermir  fa  fureté 
&  le  bien  public.     Que  S.  M.  fe  réjouiffoit  de  trouver  encore  ici  les  cho- 
fes dans  un  état  affez  paifible,  ce  qui,  après  la  Bénédiction  divine,  ne 
fauroit  être  attribué  qu'aux  promtes   &  vigoureufes  Réfolutions  de  LL. 
HH.  PP.  pour  fe  mettre  en  bon  état  de  defenfe  :    Qu'EUe  ne  doutoit  pas 
que  tous  les  Conféderez  n'y  vouluffent  contribuer,  vu  qu'Elle  regardoit 
une  bonne  pofture  comme  l'unique, moien  foit  pour  prévenir  une  Guerre, 
ou,  quand  il  en  faudroit  venir-là,  pour  garantir  l'Etat  du  danger  dont  les 
forces  combinées  de  tant  de  Puiffances  confiderables  le  menacent.    Qu'au 
relie  S.  M.  reffentoit  une  particulière  fatisfaction  de  pouvoir  affurer  LL. 
HH.PP.,  non  feulement  pour  Elle-même,  mais  auili  pour  toute  la  Na- 
tion Angloife  j  de  leur  affection  pour  cet   Etat  ,  lequel  ils  étoient  prêts 
d'affilier,  &  de  contribuer  conjointement  tout  ce  qui  étoit  neceffaire  pour 
leur  fureté  commune  ;  c'eil  furquoi  LL.  HH.PP.  pouvoient  compter  en- 
tièrement.    S.  M.  efperoit  que  le  Tout-puiffant  beniroit  les  moiens  em- 
ploiez,  &  que  par  la  voye  de  négociation,  ou  en  cas  de  necefïité  ,  par 
la  voye  des  Armes,  on  parviendroit  au  but  propofé  d'une  fureté  raiiona- 
ble  en  gênerai ,  &  particulièrement  de  la  confervation  de  l'Etat  dans  fa. 
Liberté  &  Religion;  que  S.  M.  ne  fouhaitoit  rien  tant,  &  v  contribue- 
roit tout  ce  qui  étoit  en  fon  pouvoir ,  jugeant  inutile  d'y  ajouter  autre 
chofe  préfentement   que  de  fe   recommander  toujours  à  la  continuation 
de  la  bienveuiliance  de  LL.  HH.PP.     Surquoi  aiant  été  délibéré,  LL. 
HH.  PP.   ont   fort   remercié  S.  M.    de  l'honneur  qu'il  lui  avoit  plû  de 
leur  faire  de  nouveau  en  venant  dans  leur  AlTemblée  ,   &   ont  en  mê- 
me tems  témoigné  leur  grande  joie  de  l'heureufe  arrivée  de  S.  M.;  que 
comme  fon  abfence  leur  avoit  toujours  fait  de  la  peine  ,  &  fon  retour 
en  tout  tems  beaucoup  de  plaifir,  fa  venue  &  préfence  leur  étoit  prin- 
cipalement agréable  &  confolante  dans   cette    Conjoncture   fàcheufe   & 
dangereufe.     Qu'Elles  favoient  fort  bien  que  S.  M.  fongeok  &  travail- 
joit  même  dans  fon  abfence  à  leur  bonheur,  mais  que  malgré  cela  El- 
les avoient  defiré  fortement  fon  arrivée  ,   fâchant  combien  fa  préfence 
cil  utile  &  neceffaire  en  ce  Païs-ci   dans  une  fituation  auffi  épineufe, 
afin  de  mettre  leurs  Affaires  fur  un  bon  pied  ,,   &  de   les   y  maintenir 

avec 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  299 


avec  l'afliflance  de  Dieu ,  vu  la  confiance  que  tous  &  un  chacun  de  cet  Avfatre* 
Etat,  du  plus  grand  jufqu'au  plus  petit,  a  en  la  prudence  &  l'expérience  nFS  ?*°" 
de  S.  M.  de  même  qu'en  Ton  affection  &  zèle  pour  la  confervation  &  le     unies" 
bien  de  ces  Provinces.  Que LL.HII.  PP. font. pénétrées  de  reconnoiffance    - —    ---- 
des  bons  &  gracieux  fentimens  dans  lefquels  S.  M.  continue  d'être  pour 
leur  tranquillité  &  bonheur  :  qu'Elles  ne  fauroient  exprimer  combien  El- 
les font  charmées  ,  outre  tant  de  preuves   réelles   qu'Elles  en  avoient  , 
d'en  recevoir  encore  de  nouveau  des  affurances  fi  cordiales  de  la  propre 
bouche   de  S.  M.     Qu'Elles  reconnoiffent  avec  une  entière  perfuafion, 
que  depuis  la  Paix  dernièrement  conclue,  tous  les  foins  &  toutes  les  pei- 
nes de  S.  M.  n'ont  eu  pour  but  que  de  procurer,  outre  la  tranquillité  gé- 
nérale, auiîi  une  fureté  raifonable  à  cet  Etat  &  en  même  tems  à  fes  pro- 
pres Royaumes.     Que  LL.  HH.  PP.  font  bien  aifes  de  l'approbation  de 
S.  M.  fur  la  conduite  qu'Elles  ont  tenue  depuis  le  changement  arrivé  tout, 
récemment }  que  cela  les  animeroit  à  y  continuer  d'autant  plus  conftam- 
ment,  étanf  convaincues  que  fans  les  derniers  efforts  la  Paix  &  leur  Li- 
berté ne  fauroient  être  confervées  ou  regagnées.     Que  l'Etat  fe  trouve 
préfentement  dans  un  extrême  danger ,  où  il  ne  s'agit  pas  de  moins  que 
de  la  perte  totale  de  fa  Liberté  &  Religion  :  c'eit  pourquoi  Elles  étoient 
réfolues  d'emploier  tous  les  moiens  imaginables  afin  de  conferver  des  ga- 
ges aufîi  prétieux,  &  Elles  tacheroient  de  faciliter  autant  qu'il  feroit  pof- 
fible  les  foins  &  le  travail  infatigable  de  S.  M.  pour  cet  effet,  en  contri- 
buant tout  ce  qui  pouroit  être  dans  leur  pouvoir  pour  féconder  les  falutai- 
res  intentions  de  S.  M.  dans  l'efperance  que  le  Tout-puiffant  y  donnera 
fa  bénédiction.     Que  LL.  HH.  PP.  ne  fauroient  s'empêcher  de  remercier 
encore  S.  M.  du  fond  de  leur  cœur  des  affurances,  non-feulement  de  fon 
inclination  perfonnelle,  mais  auffi  de  la  bonne  volonté  de  fes  peuples  à  af- 
filier l'Etat  :    Que  LL.  H  H.  PP.  font  fenfiblement  touchées  de  cette  fa- 
vorable difpofition  de  la  Nation  Angloife  en  leur  faveur  &  pour  le  bien 
public,  fâchant  de  quel  poids  leur  eft  l'affiltance  d'un  peuple  dont  la  ma- 
gnanimité &  valeur  font  renommées  par  toute  la  terre  :  que  c'eit  une  nou- 
velle obligation  qu'Elles  ont  à  S.  M.  des  foins  qu'Elle  a  pris  de  mettre  fes 
peuples  dans  cette  difpofition  favorable  ;  de  même  que  du  fecours  qu'Elle 
va  leur  envoier  comme  un  effet  de  la  dite  difpofition.     Que  LL.  HH.  PP. 
regarderont  pareillement  de  leur  côté  leurs  intérêts  comme  infeparables  de 
ceux.  d'Angleterre ,  efperant  pourtant  que  cette  Couronne  n'aura  jamais 
befoin  de  leur  aiîiftance  ,  'mais  qu'en  pareil  cas  LL.  HH.  PP.  ne  man- 
queroient  jamais  à  remplir  leurs  engagemens.  Qu'en  attendant  Elles  prient 
Dieu  très- ardemment  de  vouloir  bénir  les  confeils  de  S.  M.  &  lui  accor- 
der encore  plufieurs  années  la  fanté  &  les  forces  neceffaires  à  les  exécuter 
pour  le  bien  du  public,  des  Royaumes  de  S.  M.  &  de  cet  Etat,  &  pour 
l'affermiffement  de  la  Liberté  &  Religion.     Qu'enfin  LL.  HH.  PP.  prient 
S.  M.  de  vouloir  être  entièrement  perfuadée,  que  comme  fon  affection  & 
fon  zèle  pour  l'Etat  eft  inviolable,  l'amour  refpectueux  de  LL.  HH.  PP. 
&  leur  eiiime  pour  S.  M.  ne  cefferont  non  plus  jamais,  mais  que  tant  que 

Pp  2  l'Etat 


3co  MEMOIRES,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    l'Etat  fubfiftera  Elles  conferveront  toujours  une  très- vive  reconnoiffancc 

des  Pko-    pour  les  grands  &  incomparables  fcrvices  qu'Elles  ont  reçu  de  S.  M.  &  de 

viNCF.s-     j-a  prucjente  &  genereufe  Direction,  par  où  elles  ont  été,  avec  l'afilftance 

NIE$*      divine  ,  plufieurs  fois  fauvées  des  plus  grands  dangers  ,  &  par  où  elles 

efperent  d'être  pareillement  tirées  du  péril  qui  ies  menace  actuellement. 

Réfolution  fur  une  Réponfe  du  Czar\   du  Jeudi  14.  Juillet  1701. 

ReColu-  4f\  u  ï  le  Raport  des  Srs.  d'Effen  &  autres  Députez  de  LL.  MIL  PP.  pour  les 
tion  fur  \^Jr  Affaires  Etrangères ,  qui  en  confequenee  de  leurs  Réfolutions  Commit- 
une  Re-  forjales  du  26.  Janv.  &  9.  de  Fevr.  derniers,  &  pour  y  fatisfaire  ont  exa- 
Czar  mmé  une  Lettre  de  S.  M.  Czarienne  écrite  en  Réponfe  à  la  Réfolution  de 

LL.  HH.  PP.  du  29.  de  Septembre  de  l'année  pallée,  touchant  les  troubles 
qui  fe  font  élevez  entre  S.  M.  Czarienne  &  le  Roi  de  Suéde,  comme  aufli 
deux  Mémoires  du  Sr.  André  ArtemonidesMattuof,  AmbafT.  Ord.  de  S.  M. 
Czarienne  fur  le  même  fujèi,  le  tout  plus  amplement  allégué  dans  le  Regï- 
tre  des  Réfolutions  du  26.  Janv.  &  9  de  Fevr.  de  l'année  courante.     Sur 
quoi  aïant  été  délibéré ,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté  ,  de  marquer  en  ré- 
ponfe à  la  dite  Lettre  de  S.  M.  Czarienne  ,que  LL.  Mil.  PP.  ont  vii  avec 
beaucoup  de  regret  &  de  chagrin  les  troubles  qui  fe  font  élevez  entre  S. 
M.  Czarienne,  que  L.  H.  P.  ont  vu  avec  beaucoup  de  regret  &  de  cha- 
grin les  troubles  qui  fe  font  élevez  entre  S.  M.  Czarienne  &  S.  M.  le  Roi 
de  Suéde ,  &  par  raport  auxquels  Elles  ont  emploie  leurs  bons  offices 
afin  d'effectuer  s'il  étoit  pofîible  que  ces  differens  fulTent  terminez  plutôt 
par  un  accommodement  amiable  que  par  la  voie  des  armes.    Que  dès  que 
S.  M.  Czarienne  avoit  fait  part  àLL.  HH.PP.  du  tort  qu'elle  croïoit  lui  a- 
voir  été  fait  par  le  Roi  de  Suéde ,  LL.  HH.  PP.  ont  d'abord  communiqué  ces 
plaintes  à  S.  M.  Suedoife,  qui  ayant  témoigné  dans  fa  Réponfe  d'être  près 
à  continuer  la  paix  &  l'amitié  avec  S.  M.  Czarienne,  &  déclaré  d'avoir 
chargé  fon  AmbaiTadeur  ici  d'entrer  dans  la  difcution  de  ces  plaintes,  LL. 
HH.  PP.  en  ont  donné  connoiflance  à  S.  M.  Czarienne  par  leur  Lettre  du2p. 
de  Septembre  de  l'année  palTée,  en  la  priant  de  vouloir  pareillement  au- 
torifer  fon  Ambaffadeur  ici  ,  d'entrer  en  Negciation  fur  un  Accommode- 
ment amiable,  mais  qu'elles  doivent  régarder  comme  un  très-grand  mal- 
heur qu'avant  que  leur  dite  Lettre  ait  pu  parvenir  entre  les  mains  de  S. 
M.  Czarienne  les  chofes  en  font  venues  à  des  extrémités  &  à  une  guerre 
©uverte.  Que  du  depuis  Elles  ont  bien  reçu  la  Réponfe  de  S.  M.  Czarien- 
ne ,  mais  que  la  guerre  ayant  changé  la  face  des  affaires, LL. HH.PP.  n'y 
ont  d'abord  pu  rien  faire  de  plus,  vu  que  leurs  bons  offices  pour  le  main- 
tien &  la  confervation  de  la  paix  ayant  été  infructueux ,  elles  n'ofoient 
efperer  qu'on  voulût  les  écouter  fous  le  bruit  des  armes.  Que  pour  ces  rai- 
fbns  LL.  HH.  PP.  ont  bien  laiffé  paffer  quelque  tems  avant  de  répliquer  à 
la  Réponfe  de  S.  M.  Czarienne,  mais  qu'elles  n'ont  jamais  defifté  de  leurs 
fentimens  pacifiques ,  ni  de  leur  inclination  à  féconder  de  tout  leur  pou- 
voir 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.    L  301 

voir  les  moyens  qui  peuvent  fervir  au  rétabli  (Te  ment  de  la  paix  &  au  ré-  Affairi-s 
noiïemenc  d  une  amitié  lincère.  Qu'il  eit  bien  vrai  que  LL.  MM.  Czarienne  ™1  ?** 
ôi  Suedoife  ont  eu  la  bonté  d'admettre  leurs  bons  offices  pour  accommo-     u*"*" 

der  les  differens  dont  la  guerre  s'en  eil  fuivie,  afin  de  prévenir  que  le  feu    

ne  s'ailumât;  mais  que  ces  offices  ayant  été  employez  fans  fuccès ,  ils  ont 
necefiairement  dû  ceffer  pour  autant  qu'ils  dévoient  fervir  à  prévenir  la 
guerre.  Qu'il  a  bien  plu  à  S.  M.  Czarienne  de  témoigner  paria  Lettre  que  la 
médiation  de  LL.  I1H.  PP.  pour  lerétabliiTement  de  la  paix  lui  feroit  agréa- 
ble; mais,  comme  S.  M.  Suedoife  n'a  pas,  depuis  la  guerre  commencée, 
demandé  &  admis  de  la  même  manière  leur  médiation,  &  que  fans  le 
eonfentement  de  toutes  les  Hautes  Parties  interefTées.  Elles  ne  fauroient 
faire  les  fonctions  de  Médiateurs,  LL.  HH.  PP. ,  n'étant  pas  également  recon- 
nues pour  Médiateurs  par  l'une  &  l'autre  partie,  ne  fauroient  faire  autre 
chofe  que  de  contribuer  à  apuyer  par  leurs  bons  offices  toutes  les  propo- 
rtions qui  pouroient  être  faites  par  les  Médiateurs  déjà  établis  ou  à  établir 
encore  par  les  Hautes  parties  pour  le  rétablilTement  de  la  Paix,  &  de  con- 
feiller  en  toute  manière  une  chofe  auffi  defirable  que  la  Paix.  Que  dans 
cet  efprit  LL.  HH.  PP.  ont  envoyé  le  Sr.  de  Haerfolte  en  Pologne  &  en 
Livonie ,  pour  être  d'autant  plus  à  portée  ,  &  pouvoir  profiter  de  tou- 
tes les  occafions  propres  à  avancer  la  bonne  &  falutaire  intention  de  LL. 
HH.  PP.  pour  le  rétablilTement  de  la  Paix.  Qu'Elles  ont  auflï  chargé 
leur  Réfident  Hulft  d'en  donner  connoifTance  à  S.  M.  Czarienne  ,  dont 
la  haute  fageffe  &  équité  leur  fait  efperer  qu'Elle  jugera  que  c'eil  tout  ce 
que  LL.  HH.  PP.  ont  pu  faire  après  que  les  chofes  en  font  venues  à 
des  hoflilités.  LL.  HH.  PP.  déclarent  encore,  qu'elles  voyent  avec  bien 
du  chagrin  que  les  differens  font  allez  fi  loin  entre  LL.  MM.  Czarienne  & 
Suedoife  ,  ayant  l'honneur  de  vivre  avec  l'une  &  l'autre  en  amitié, 
outre  qu'elles  font  encore  dans  une  Alliance  Defenfive  avec  le  Roi  de 
Suéde.  Que  LL.  HH.  PP.  foûhaitent  auiTi  de  tout  leur  cœur,  que  la  dite 
Guerre  foit  au  plutôt  finie ,  &  la  Paix  <3c  l'Amitié,  necelTaire  LL.  MM.  Cza- 
rienne &  Suedoife,  entièrement  &  pour  toujours  rétablie.  Que  LL.HH. 
PP.,  quoiqu'Elles  ne  puiiTent  faire  les  fonctions  de  Médiateurs, refient  ce- 
pendant toujours  portées  à  y  contribuer  tout  ce  qui  dépend  d'elles,  dans 
î'efperance  que  les  efprits  des  deux  Hautes  parties  ayant  de  l'inclination 
pour  la  Paix  ,  il  fe  poura  trouver  des  moyens  propres  à  faire  celTer 
les  hoflilités  &  révivre  la  tranquillité  &  l'union  entre  elles.  Que  LL.  HH. 
PP.  étant,  par  une  eftime  pour  Sa  M.  Czarienne  &  pour  fon  amitié,  prê- 
tes à  faire  tout  ce  qui  peut  fervir  au  dit  but,  efperent  que  Sa  M.  Cza- 
rienne, félon  fon  afecTion  ordinaire  pour  cet  Etat,  &  félon  fon  équité 
rénommée  ,  fera  contente  de  ce  qu'elles  ont  fait  jufqu'ici  dans  cette 
afaire  :  &  comme  elles  font  portées  à  rendre  à  S.  M.  Czarienne  tous 
les  fervices  les  plus  agréables ,  elle?  font  aufll  perfuadées  que  fadite 
Maj.  n'exigera  rien  d'elles  qu'elles  ne  puiffent  faire,  ou  qui  puiffe  don- 
ner à  S.  M.  Suedoife ,  de  l'Amitié  &  Alliance  de  la  quelle  elles  ne  fau- 
roient fe   départir  fans  de   grandes  raifons ,   de  jufles  fujets  à  fe  croire 

Pp  3  ofen- 


302    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Amaires    ofenfée.  Mais  que  LL.  HH.  PP.,  comme  elles  font  obligées  d'entretenir 
des  Pko-    f  Amitié  &  Alliance  avec  S.  M.  Suedoife ,  tâcheront  aufîi ,  autant  qu'il  leur 
UkiesT     e^  P°fflble  »  de  donner  à  S.  M.  Czarienne  des  preuves  de  leur  véritable 
- — JL   eitime  pour  Ton  amitié,  &  compteront  pour  un  grand  bonheur  fi  elles 
ont  pu  contribuer,  ou  le  pouroient  encore,  à  l'avancement  d'un  but  aufli 
falutair.e  que  le  rétabliffement  de  la  Paix  &de  l'Union  de  LL.  MM.  Cza- 
rienne &   Suedoife.     Qu'il   fera   remis   Copie    de   cette   Réfolution  par 
l'Agent   Rofenboom    audit   Sr.  Ambaffadeur,  pour   fervir   de  Réponfe  à 
fes  Mémoires  ci-deffus  mentionez  ;  que  la  Letre  à  écrire  à  S.  M.  Cza- 
rienne lui  fera  pareillement  rendue  par  le  même,  en  le  priant  de  vou- 
loir la  faire  tenir  à  fon  Maître. 

Raport  du  Lundi  i$.  de  Juillet  1701. 

Raport  T  es  Srs.  Députez  de  la  Province  de  Hollande  &  de  Weflfrife  ont 
du  2f.  JL/  propofé  a  l'Aflemblée,  que  les  Députez  de  la  Ville  de  Dort, au  nom 
Juillet.       q  je  ja  parc  cje  jeurs  principaux  ?    avoient  reprefenté  à  l'AlTemblée  des 

<ies  Sgrs.  Etats  de  la  dite  Province,  d'avoir  apris  qu'on  ne  faifoit  aucuns 
Remparts  le  long  du  Bas-Rhin  &  de  1'Iflel,  ni  des  Retranchemens  pour 
les  couvrir,  conformément  à  la  Pétition  du  Confeil  du  4.  du  paiTé,  mais 
qu'au  contraire  on  creufoit  un  Canal  au  travers  de  la  Betuwe  pour  diver- 
tir le  cours  des  Rivières,    ce  qui  n'avoit  jamais  été  propofé  par   aucu- 
ne Pétition  ,  bien  loin   d'y  avoir  été  confenti  par  les  Sgrs.  Principaux. 
Que  des  perfonnes  entendues  avoient  trouvé  que  ce  Canal  avoit  non-feu- 
lement été  commencé,  mais  que  même  la  digue  qui  traverfe  la  Betuwe, 
&  particulièrement  le  IVaeldyck  en  deçà  de  Pandercn,  avec  la  SaufTaïe  de- 
vant ceite  digue  dans  la  Rivière,  étoit  tracé  pour  régler  là-defius  l'ouvra- 
ge commencé  &  l'achever  s'il  étoit  faifable  j  &  comme  les  Srs.  leur  Prin- 
cipaux étoient  entièrement  perfuadez,que  la  diverfion  des  Rivières,  fur  le 
pied  ci-deflus  marqué,  ferviroit  aufli  au  préjudice  du  négoce,  à  la  dimi- 
nution des  Douanes  du  Pais,  &  à  la  ruine  de  plusieurs  Villes,  particuliè- 
rement de  celle  de, Dort,  les  Srs.  Députez  avoient  demandé  de  mettre 
promtement  ordre  que  l'ouvrage  commencé,  n'étant  fondé  fur  aucune  Pé- 
tition ni  Confentement,  foit  arrêté  &  le  tout  remis  en  fon  entier,  afin  que 
les  Srs.  leurs  Principaux  reftent  en  état  de  pouvoir  contribuer  aux  befoins 
de  l'Etat.  Que  les  dits  Sgrs.  Etats  avoient  trouvé  bon  de  faire  examiner 
plus  exactement  la  dite  Propofition  dans  une  Conférence,  &  de  faire  part 
de  tout  à  l'AiTemblée:  Qu'en  attendant  eux  Srs.  Députez,  ayant  apris  que 
quelques  Srs.  Committez  du  Confeil  d'Etat  alîoient  partir  pour  faire  l'Iq- 
fpection  de  ces  Ouvrages  ,  n'avoient  pu  s'empocher  de   prier  ,  que  les 
dits  Srs.  Committez  foyent  chargez  de  s'informer  du  fait,  &  de  rendre 
compte  au  plutôt  à  LL.  IIH.  PP.  comment  &  en  quelle  fituation  ils  au- 
ront trouvé  cet  Ouvrage;  &  que  pendant  ces  entrefaites  on  veuille  don- 
ner les  ordres  neceffaires  poux  faire  cefler  tous  juites  fujets  de  plaintes. 

Sur- 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  305 

Surquoi  ayant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon, qu'il  fera  envoyé  Copie  Affaires 

de  cette  Prôpofition  au  Confeil  d'Etat,    en  le  priant  de  s'informer  par  DES  ri-°- 

fes  Committez  pour  l'Infpeélion  des  fufdits  Ouvrages  au  fuiet  du  contenu  *INCES- 

,                       -         tj           rs           j                                               i«    «      «J  r            rt  Unies. 

de  cette  même  Propolition  ,  de  communiquer  au  plutôt  a  Leurs  Hautes      — 


PuiiT.  leur  Raport  de  la  fituation  de  l'Ouvrage,  &  de  faire  en  attendant 
toutes  les  difpofitions  propres  à  lever  tout  fujèt  de  plaintes.  Les  Sgrs.  Dé- 
putez des  Provinces  de  Gueldre  &  d'Overyiîel  ont  pris  Copie  de  la  Pro- 
pofition  ci-devant  mentionée  pour  être  communiquée  a  leur  AfTemblée. 

Lettre  du  Confeil  d'Etat  aux  Et  at  s -Généraux ,  avec  le  Rapport  de 
Jes  Députez  à  r Examen  des  Travaux  de  la  Betuwe  ; 
■  des  31.  Juillet,  g*?  2.  Août. 

HAUTS   ET   PUISSANS   SEIGNEURS. 

Nous    envoions   ci -joint  à   VV.  H  H.  .PP.    la   Relation    des  Sirs,  nos  Lettre  & 

Committez  qui  ont  fait  l'Infpeclion  des  Ouvrages  à  quoi  l'on  tra-  RaPP°rt 

raille  dans   la    haute    Betuwe  ,    efperant   qu'elle   donnera   fatisfaction    à  f\  S?* 

VV.HH.  PP.    A  la  Haie,  ce  2. Août  i7oi.  ^L 

A  Bev enter  Je  31.  Juillet  170T. 

;  NOBLES   ET  PUISSANS   SEIGNEURS. 

Nous  avons  bien  reçu  à  Arnhem  par  un  Exprès  la  Réfolution  de 
VV.  NN.  PP.  du  26.  du  courant  ,  par  laquelle  Elles  nous  ordon- 
nent de  nous  informer  fur  ce  qui  a  été  propofé  par  les  Sgrs.  Députez 
de  la  Province  de  Hollande  &  de  Weit-Frife  le  tfi  précédent  au  fu- 
jet  des  Ouvrages  commencez  dans  la  haute  Betuwe  au  de-là  de  Gent, 
&  d'en  rendre  compte  au  plutôt  à  VV.  NN.  PP.  Pour  cet  effet,  & 
pour  nous  conformer  aux  Réfolutions  de  VV.  NN.  PP.  du  6.  & 
18.  du  courant,  tendantes  à  faire  entreprendre  le  Retranchement  dans 
4a  haute  Betuwe,  plus  amplement  mentionné  dans  la  Pétition  de  VV. 
NN.  PP.  du  4.  Juin  ,  &  dans  la  Réfolution  prife  là-deflus  par  LL. 
HH.PP.  le  20.  du  même  mois,  nous  nous  fommes  rendus  avanthier  fur 
les  lieux  ,  &  nous  avons  trouvé,  que  le  Retranchement,  y  tracé  par  le 
Sr.  General  Coehoorn  pour  la  fureté  du  pais  ,  commence  depuis  le 
M/acldyck  un  petit  quart  d'heure  en  deçà  de  Panderen,  &  traverfe  la  Be- 
tuwe jufqu'au  Leppehgraft  près  du.  Rhin  au-delà  ÏÏAngeren:  que  fuivant 
le  raport  des  Ingénieurs  qui  s'y  trouvent  fa  longueur  étoit  d'environ 
iofo.  toifes  de  Rhynland  ,  &  l'étendue  réglée  par  le  dit  General  Coe- 
hoorn telle. que  le  deffein  H.  qui  e(t  entre  les  mains  de  VV.  NN.  PP. 
le  marque  dittin&ement  ,  afin  de  ménager  en  quelques  endroits  le  ter- 
rain qui  pourroit  être  avantageux  à  la  défenfe  dudit  Retranchement  : 
que  pour  trouver  les  terres  neceffaires  à  la  hauteur  ,  épaiffeur  ,  &  le 
talus  du  Retranchement  y  &  le  mettre  par   confequent   en,  dû   état  de 

de- 


\t\rrs- 
ÙSIESJ 


304    MEMOIRES,  negotiations,  traitez,  et 

Attmksa    defenfe  <   on  a  jugé  d'une  né^efTué   indifpenfable   de  creufer  devant  ce 
des  !'«"-   Retranchement  un  foffé  ,    improprement    nommé  ailleurs  un  canal  ,   de 
telle  forte  pourtant  eue  ce    folTé  ne  commence  qu'à  4.  toiles  de  li  Di- 
gue de  IVacl  vers  le  dedans:  Que  le  Retranchement  touchera  à  la  Di- 
gue, où  l'on  a  projette  d'élever  une  bonne  Redoute  ou  autre  Fort  pour 
défendre  les'  avenues    de  la   Digue.    Quant  a  la  Digue  de  JVasl  même 
on  n'y  a  abfokiment  rien  fait  ,   &  les  dits   Ingénieurs    nous  ont  témoi- 
gné d'avoir  appris  avec  étonnement  les  bruits  répandus  &  l'allarme  pri- 
fé  comme  fi  l'on  vouloit  percer  ladite  Digue  ,  piii [qu'il  leur  a  toujours 
été  enjoint,  très-poiitivement  ,    de  ne  creufer  qu'à  une   diftance   de  4. 
toifes  de  la  Digue  vers  le  dedans.    Qu'à  la  vérité  les  Païfans  de  Guel- 
dres ,  commandez  &  du  depuis  renvoiez,  aiant  travaillé  du  commence- 
ment avec  beaucoup  de  defordre  &  de  confufion  ,  avoient  abatu  quel- 
ques arbres  du  côté  intérieur   de  la  Digue  ,   &   coupé    quelques  gazons 
environ  à  un  pied  de -là  ,   mais    que  cela  avoit  d'abord  été  arrêté  ,   de 
forte  qu'il  n'en  fauroit  ré  lui  ter  aucun  endommagement  à  la  Digue.     Le 
côté  extérieur  de  la  Digue,  &  la  Sauffaie  devant  elle,  font  comme  elles 
ont  toujours  été,  à  cela  près  que  du  tems  que  le  Sr.  Coehoorn  s'y  trouvoit 
il  a  été  fait  dans  la  dite  SaufTue,  pour  pouvoir  d'autant  plus  commodé- 
ment former  le  Retranchement,  un  tracement,  mais  fi  petit  qu'il  ne  mé- 
rite aucune  reflexion.     Hors  de  cette  SaulTaie  il  y  a  encore  deux  gros  ou- 
vrages de  fafeinage,  qui  fervent  à  foutenir  la  dite  Digue,  de  forte  qu'à  nô- 
tre avis  la  Digue  ell  parfaitement  bien  conditionnée  &  garantie  du  côté 
dudit  Retranchement.     La  Digue  qui  traverfe  la  Betuwe  a  été  ôtée,  vu 
qu'elle  entreroit  prefque  diamétralement  au  milieu  du  Retranchement ,  & 
le  rendrait  notoirement  moins  fort  ;   mais,  cette  Digue  n'a  aucun  raporc 
avec  la  Rivière  de  Wael ,  n'aiant  été  élevée  que  contre  le  Rhin;  outre  ce- 
la, le  terrain  y  eib  aujourd'hui  aufïï  étendu  &  haut,  &  là  où  il  ell  le  plus 
bas ,  il  efl  bien  pourvu  d'amas  de  terre  ;    &  cette  Digue  feroit  en  effet 
inutile,  quand  même  l'eau  du  Rhin  deviendrait  plus  haute  qu'elle  n'a  été 
depuis  plufieurs  années.    A  l'endroit  où  le  Retranchement  aboutit  au  Rhin 
on  a  fait  une  ouverture  dans  un  bout  de  Digue  qui  y  a  été  élevée  pour  cou- 
vrir le  terrain  bas  entre  le  haut  &  le  médiocre,  &  on  en  a  ôté  en  partie 
le  fommet.  Suivant  le  raport  des  Ingénieurs,  cette  ouverture  efl  neceffai- 
re  pour  le  découlement  des  eaux  de  pluie ,  qui  fans  cela  empécheroient 
l'ouvrage  du  foffé  dudit  Retranchement,  &  on  avoit  commencé  à  ôter  la 
Digue  môme  de  la  largeur  du  foffé  ,  afin  de  rendre  le  Retranchement  plus 
fort ,  fans  que  le  cours  du  Rhin  en  feroit  aucunement  détourné.     Outre 
cela,  on  nous  a  encore  reprefenté  que  ce  qui  a  été  ôté  de  ladite  Digue 
pourra  être  aifément  rétabli  lors  qu'il  feroit  jugé  neceffaire,  auquel  cas  on 
fuirait  par  des  conduits  &  autres  expediens  faire  découler  les  eaux,  qui 
.  pourraient  troubler  les  travailleurs  au  foffé  du  Retranchement. 

Voici  NN.  &  PP.  Seigneurs  l'Information  que  nous  pouvons  donner  à 
VV.  NN.  PP.  fur  la  Propofition  des  Sgrs.  Députez  de  la  Province  de  Hol- 
lande &  de  Wdl-Frife:  nous   nous  croions  de  plus  obligez  de  mander 

que 


RESOLUTIONS    D'ETAT,     M.  DCC.  I.  $o$ 

que  nous  avons  trouvé  ledit  Retranchement  affez  avancé  des  deux  bouts,  Affaires 
&  qu'en  conformité  des  Ordres  de  VV.  NN.  PP.  nous  avons  commandé  DES  1ko" 
tout  l'ouvrage  par  toiles  pour  être  achevé  en  dix  femaines.     Nous  aurons     UnieT" 

l'honneur  à  nôtre  retour  de  faire  à  VV.  NN.  PP.  un  ample  Raport  de  tout    JL 

cela,  de  même  que  de  l'ouvrage  du  Retranchement  près  de  Doesbourg, 
lequel  nous  avons  commandé  hier.  En  attendant,  nous  avons,  avant  de 
fortifier  le  Retranchement  au-delà  de  Gent,  donné  des  ordres  précis  aux 
Ingénieurs,  à  qui  la  direction  de  cet  ouvrage  ell  confiée ,  de  ne  rien  faire 
aux  Digues  refpectives  du  Wael  &  du  Rhin,  afin  prévenir  par- là  tous  juf- 
tes  fujecs  de  plaintes,  ce  qu'ils  fe  font  engagez  d'obferver  exactement. 

Guillaume  d'Egmont  van  der  Nieuwenburq. 
J.  L.  v.  Doys.  J.  Hop. 

Refolution  du  Mardi  p.  d\4oât   1701.  avec  une  de  Groningue 

du  5".  duâit  Mois. 

Lu  à  l' AfTemblée  une  Requête  de  David  Rutgers,  comme  ayant  pleinpou-  RefoHi- 
voir  des  Mennonites  Proteltans  ,  qui  ont  demeuré  dans  le  pays  de  tiondu 
Juliers  &  fous  la  Domination  de  l'Electeur  Palatin,  laquelle  porte,  que  9. Août. 
LL.  HH.  PP.  étoient  convenues  par  l'Accord  y  allégué  du  18  Octobre 
1700.  conclu  avec  le  Sr.  Heuerman  Envoyé  du  dit  Electeur,  fur  les  pré- 
tendus fubiîdes  de  l'année  1676.  de  payer  à  S.  A.  E.  une  fbmme  de 
60000.  Risdales,  moyennant  qu'il  foit  payé  préalablement  aux  dits  Men- 
nonites 20000.  Risdales  ;  répréfentant,  qu'une  grande  partie  de  ces  deniers 
de  la  caiiTe  pour  les  pauvres  des  dits  Mennonites  avoit  été  employée. 
en  faveur  de  leur  frères  réfugiez  ,  &  que  les  20000.  Risdales  ci-deiTus 
mentionnez  avoient  été  accordez  par  S.  A.  E.  fuivant  l'affignation  de 
l'Envoyé  Jean  Arnold  Bywegh  jointe  à  la  dite  Requête,  lequel  avoit 
été  autorifé  exprefTement  à  cet  effet.  Que  pour  ces  raifons,  ils  fuplioienc 
que  LL.  HH.  PP.  veuillent  bien  charger  le  Confeil  d'Etat  d'expé- 
dier des  Ordonnances  fur  les  Revenus  courans ,  pour  faire  payer  les  dits 
20000.  Risdales  au  fusdit  Rutgers  félon  fa  procuration  &  fes  documens. 
Surquoi  il  a  été  trouvé  bon  qu'il  fera  envoyé  copie  de  la  dite  Requê- 
te &  de  l'affignation  y  annexée  au  Confei!  d'Etat  ,  en  le  priant ,  de 
faire  expédier  une  Ordonnance  de  20000.  Risdales  en  conformité  de  la 
dite  affignation ,  pour  être  payez  au  fuppliant  des  60000.  Risdales  qui 
ont  été  mifes  au  profit  de  S.  À.  E.  Palatine  pour  des  fubfides  arréragez, 
fur  la  Pétition  de  282960.  fis.  en  Date  du  4  Juin  dernier. 

Ayant  été  de  nouveau  propofé  à  l'AiTemblée  le  projet  compris  dans  la 
Refolution  de  LL.  HH.  PP.  du  zp.  de  Novembre  1697.  pour  trouver  les 
derniers  neceffaires  au  payement  des  dettes  de  la  dernière  guerre  ,  favoir 
trois  millions  pour  les  fraix  de  l'armée,  quinze  cent  mille  florins  pour  les 
rnagazins  de  fourages  ,   &  douze  Millions  pour  les  armemens  extraordi- 

2  ont.  XL  Qq  nai- 


Affaires 
jdes  I'ro- 

VINCES- 

Unies. 


$o6    MEMOIRES,  NEGOCIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

naires  ,  payables  en  divers  termes ,  comme  il  a  été  plus  amplement  men- 
tionné dans  la  Réfolution  de  LL.  HH.  PP.  du.  27.  de  Novembre  1697. 
defquelles  fommes  il  n'a  été  negotié  jufqu'à  préfent  que  les  deux  premiers 
termes,  nommément  deux  millions  pour  les  dettes  des  dits  fraix,  &  un 
million  pour  celles  des  Magazins  de  fourages ,  &  les  trois  premiers  ter- 
mes ,  favoir  fix  millions  pour  les  dettes  des  armemens  extraordinaires  de 
la  dernière  guerre.  Il  a  été  trouvé  bon  après  de  mûres  Réflexions,  que, 
mettant  h  part  les  délibérations  ultérieures  des  confederez  fur  la  négocia- 
tion des  trois  derniers  termes  pour  les  dettes  des  armemens  extraordinai- 
res, de  laquelle  il  a  été  fait  mention  dans  ledit  projet,  il  doit  être  négocié 
pour  le  payement  les  dettes  des  fraix  de  l'armée  &  des  magazins  de  fou- 
rage,  encore  un  million  pour  les  premiers  &  cinq  cent  mille  florins  pour 
les  derniers.  Que  les  Provinces  refpeclives  donneront  un  triple  intérêt 
par  an  des  dites  fommes  à  negotier  pour  être  employé  au  payement  des 
intérêts,  &  au  rembourfement  des  capitaux,  jufqu'à  ce  que  les  intérêts  & 
les  capitaux  foyent  entièrement  aquités  &  rembourfés.  Que  chaque  Pro- 
vince fera  taxée  &  obligée  de  payer  ce  triple  intérêt  à  proportion  de  ce 
qu'elle  doit  de  fa  quote-part  à  la  Pétition  faite  pour  les  dits  fraix  de  l'Ar- 
mée &  les  Magazins  j  &  que  les  Provinces  feront  à  l'égard  de  cette  Né- 
gociation fujettes  aux  moyens  de  contrainte  compris  dans  la  Réfolution  de 
LL.  HH.  PP.  du  iy.  Juillet  168 8-  &  du  16.  Janv.  1696.  &  fera  un  Ex- 
trait de  cette  Réfolution  envoyé  auConfeil  d'Etat,  en  le  priant  &  autorifant 
de  faire  négocier  en  confequence  par  le  Receveur  gênerai  le  jeune  d'Elle- 
meèt  les  fommes  y  fpecifiées.  Les  Srs.  Députez  de  la  Province  de  Zelan- 
de  ont  infifté  fur  les  Annotations  faites  de  la  part  de  leurs  Principaux  fur 
les  négociations  des  précédens  termes.  Les  Srs.  Députez  de  la  Provin- 
ce ce  Frife  ont  confend  à  la  fufdite  conclufion  fous  les  reflriclions 
comprifes  dans  la  Réfolution  des  Sgrs.  Etats  leurs  Principaux,  délivrée 
a  l'Aflemblée  fur  ce  fujèt. 

Les  Srs.  Députez  de  la  Province  de  Groningue  ont  remis  à  l'Aflem- 
blée la  Réfolution  des  Sgrs.  Etats  leurs  Principaux,  par  laquelle  ils  con- 
fentént  au  troilième  Etat  extraordinaire  de  Guerre. 


Extrait  du  Regître  des  Réfoluîions  de  LL.  NN.  PP.  les  Sgrs.  Etats 
de  la  Province  de  Groningue  ;    du  Vendredi  >.  d'Août  1701. 

Suit  la  Proportion  faite  à  l'Aflemblée ,  &  fur  la  concurrence  des  Sgrs. 
des  Ommelandes ,  les  Sgrs.  Etats  de  la  Province  de  Groningue  ont 
plus  étendu  leur  consentement  au  troifiéme  Etat  Extraordinaire  de 
Guerre  ,  en  fe  chargeant  de  l'Etat  Major  Extraordinaire  du  Régiment 
du  Landgrave  de  Hefle-Cafleî  mis  à  la  Répartition  de  cette  Province. 
Les  Srs.  Députez  de  la  Province  de  Groningue  ont  remis  à  l'Af- 
(emblée  la  Réfolution  des  Sgrs.  Etats  leurs  Principaux,  par  laquelle  ils 
confentènt    au   troifiéme    terme    de    la    Négociation    pour    les   dettes 

des 


RESOLUTIONS  D'ETA  T,  M.  DCC.  I.         307 

des  fraix  de    l'Armée    &    des  Magazins  de  Fourages  de  la    dernière   Affadi* 
Guerre.  DFS  Pro 

De  plus,  les  Srs.  Députez  de  la  Province   de  Groningue   ont   porté     Unies!" 
à  l'AiTemblée  la  Réfolution  des  Sgrs.  Etats  leurs  Principaux  touchant  le 
fourniiïement  de  leur  quote-part  aux  Pétitions  de  deux  Millions  pour  la 
provifion  des  Magazins ,  &  de   74547/.  florins   pour  les  befoins   d'un. 
Camp. 

Réfolution  du  Mecreài  10.  Août  1701. 

Le  Sr.  Confeiller  Penfionaire  a  raporté  à  PAfTemblée,  que  S.  M.  le  Roi    Réfolu- 
de  la  Grande  Bretagne  avoit  recommandé  très-ferieufement  le  promt   tlon  du 
payement  des  erres  pour  lei  troupes  prifes  à  la  folde  de  la  Republique    fu°r'de°sut" 
de  l'Electeur  Palatin,  puifqu'on  faifoit  des  dificultés  de  faire  mettre  ces    Erres  de 
troupes  en  marche  tant  que  les  dites  erres  ne  fulTent  payées  conforme-    Troupes, 
ment  à  la  Capitulation.     Sur  quoi  ayant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon 
que  les  Sgrs.  Etats  des  Provinces  deZelande  &  de  Groningue  feront  priez 
par  Lettres  de  faire  les  difpofitions  neceflaires,  afin  que  les  Ailignations 
pour  le   payement  d'une   partie    des   erres   des  troupes    Palatines ,  les- 
quelles Affignations  ont   été   données  fur  leur  quote-part  aux  Pétitions 
pour  les  erres  &  les  fraix  de  Troupes  Etrangères ,  foient  payées  fans  plus 
de  délai  ,  afin  que  faute  de  payement  la  marche   des  dites  troupes  ne 
foit  retardée  plus  long-tems. 

Raport  du  Mardi ,  16.  1701. 

Les  Sieurs  van  EfTen  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour  les  Af-   Raport, 
faires  des  Finances  ont, en  confequence  de  leur  Réfolution  commiflb-   j|u  ?6' 
riale  du  12,.  de  ce  mois, examiné  conjointement  avec  quelques  Srs.  Com- 
mittez  du  Confeil  d'Etat  la  Lettre  du  dit  Confeil  d'Etat  du  10.  précèdent 
&  les  Refolutions  y  jointes  des  Srs.  Députez  des  Provinces  de  Gueldre, 
d'Utrecht,  &  d'Overyffel  prifes  des  Srs.Committez  du  Confeil  d'Etat,  qui 
ont  été  dans  les  fufdites  Provinces,  &  lesquelles  concernent  la  fomme  de 
ce  qui  doit  être  payé  par  les  Sgrs.  Etats  de  leurs  Provinces  par  deïïus 
leur  quote-part  à  la  fomme  de  770.  mille  florins  demandez  pour  les  ouvra- 
ges le  long  du  Bas-Rhin  &  de  l'Iflel,  &  du  côté  du  Grebbe-SIuys  &  d'A- 
mersfort;  ont  raporté  à  l'Affemblée,  qu'eux  Srs.  Députez  feroient  d'avis, 
que  les  fufdites  Provinces ,  ayant  payé  leur  quote-part  à  la  dite  Pétition 
de  7f o.  mille  florins ,  pouvoient  rabatre  ce  qu'elles  payeront  de  trop  pour 
ces  ouvrages,  favoir  fur  la  moitié  de  leurs  quote-parts  à  la  Pétition  pour 
l'Equipement  extraordinaire  de  l'année  courante  de  la  fomme  de  2716800. 
florins,  de  plus  fur  la  moitié  de  leurs  quote-parts  à  la  Pétition  de  945)500. 
florins  pour  la  Condruclion  de  12.  nouveaux  VaifTeaux  de  Guerre,  &  à 

Q_q  2  celle 


3o8    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affiftftis  celle  de  715517-  florins  pour  apareiller  18.  Vaiflèaux  de  Guerre,  faite 
joj-s  Pko-  j'une  g  l'autre  le  22.  Janvier  de  cette  année,  &  à  la  Pétition  faite  le  27. 
TiNCEs-  ^g  juj{}et  pafl*é  de  706860  florins  pour  l'équipement  extraordinaire  de  16. 
^*  Fregatr.es;  cV,  au  cas  qu'on  ne  pût  faire  bon  le  furplus  de  la  moitié  des 
quote-parts  des  dites  trois  Provinces  aux  Pétitions  fufmentionnées,  qu'a- 
lors Elles  peuvent  difcompter  ce  qu'elles  ont  payé  excédant  la  moitié  de 
leurs  quote-parts  aux  dites  Pétitions  ,  fur  leurs  quote-parts  à  deux  millions 
demandez  pour  ies  Magazins ,  &  aux  749475".  flor.  de  même  qu'à  un 
million  de  florins  pour  les  befoins  d'un  Camp.  Surquoi  ayant  été  délibéré, 
il  a  été  trouvé  bon  ,  que  Copie  du  précédent  Raport  fera  envoyée  aux  Sei- 
gneurs Etats  des  Provinces  refpeclives ,  en  leur  demandant  de  vouloir  fe 
déclarer  au  plutôt  fur  ce  fujet,  comme  aulil de confentir  aux  Pétitions  fufdi- 
tes  pour  autant  qu'ils  ne  l'ayent  encore  fait  à  quelques-unes  d'icelles,  de 
même  que  de  fournir  au  Comptoir  du  Receveur  General  le  reliant  de  leurs 
quote-parts  qui  ne  fera  pas  difcompté  de  la  manière  ci-deffus.  Et  que 
l'Extrait  de  cette  Réfolution  de  LL.  II H.  PP.  fera  envoyé  à  S.  Maj. 
Britannique,  la  priant  d'appuyer  par  fon  très  puiffant  crédit  auprès  des 
Seigneurs  Etats  des  Provinces  refpeélives  ce  qui  a  été  dit  ci-devant. 

Les  Srs.  Députez  de  la  Province  de  Zeîande  ont  déclaré  fur  le  fcf- 
dit  Raport  de  n'avoir  pas  encore  confenti  à  la  Pétition  qui  a  pour  prin- 
cipal objet  les  Retranchemens  ,  &  de  confentir  ainlï  encore  moins  à  ce 
qui  a  été  rapporté  ci-delfus,  mais  d'en  referver  expreffement  la  libre  De- 
libération  aux  Sgrs.  Etats  leurs  Principaux;  les  Srs.  Députez  des  Pro- 
vinces de  Gueldre,  &  d'Utrecbt,  comme  auffi  ceux  de  celle  d'OveryfTeL 
ont  à  la  refomption  ref-rvé  pareillement  la  libre  Délibération  aux  Sgrs» 
Etats  leurs  Principaux. 

Réfolution  du  Lundi ,  22.  Août  1701. 

Réfolu-    -f^\v ï  le  Raport  des  Srs.  van  ElTen  &  autres  Députez  de  LL.  IIM.  PP. 

Tf'si1.'.  V^  pour  les  Affaires  des  Finances,  ayant  examiné  une  Lettre  du  Con- 
feil  d'Etat  y  jointe  une  autre  Lettre  des  Sgrs.  Etats  de  Zelande,  dans 
laquelle  ils  déclinent  le  payement  des  deux  Àffignations  l'une  de  44806 .fl. 
$\  d.  &  donnée  aux  Regimens  de  Meklembourg  pris  à  la  folde  de  l'Etat, 
&  fautie  de  79186":  2.:  9.  &  donnée  aux  autorifez  de  S.  A.  E.  Pala- 
tine pour  les  Troupes  qu'on  attend  de  fa  part,  non  puifqu'il  y  ait  à  redi- 
re fur  ces  Affignations,  mais  puifque  les  Provinces  qui  ne  contribuent 
rien  à  l'équipement  n'ont  pas  payé  ce  qu'elles  dévoient  au  Collège  de 
FAmirauté  de  Middeîbourg  à  caufe  de  l'Equipement  extraordinaire  pour 
l'année  courante.  Surquoi  ayant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  en- 
tendu ,  qu'on  repréfentera  par  une  Lettre  aux  Seigneurs  Etats  de  la  dite 
Province  de  Zelande  ,  qu'il  e(t  de  la  nature  &  de  l'ordre  des  finances,  que 
les  deniers  de  chaque  confentement  foient  employez  à  tel  fujet  pour  lequel 
On  les  a  demandez,  fans  les  mêler  les  uns  avec  les  autres,  ou  divertir  les 


zz.  Aoû' 


deniers 


Unies. 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,   M.  DCC.  1.  30? 

deniers  d'un  confentement  deflinez  a  des  chofes  d'une  autre  nature;   qu'à    Affairm 
]:i  vérité  les  fufdits  Seigneurs  Etats  de  Zelande  ont    commencé    dans  la    des  pk0- 
derniere  Guerre  à  s'écarter  de  ces  fondemens  au  regret  de  LL.  liH.PP.     y*1*?** 
qui  regardent  cela  comme  une  affaire  de   pernicieufe  confequence ,   mais 
qu'alors  ils  ne  font  pas  allez  plus  outre  qu'en  employant  leurs  quote-parts 
aux  Pétitions  pour  les  fraix  de  l'Armée  et  pour  les  Magazins  de  Fourage , 
Pendons  en  quelque  façon  conformes  par  raport  à  la  manière  &  au  tems 
du  payement  à  celles  pour  les  Affaires  de  la  Marine:  que  cependant,  lef- 
dits  Seigneurs  Etats  allant  à  préfent  plus  loin,&  prétendant, en  revange 
des  défauts  des  Provinces  pour  les  Affaires  de  la  Marine,  leurs  quote-parts 
aux  confentemens,  qui   demandent  un  plus  prompt  payement,    tels  que 
font  les  erres  &  les  deniers  de  tranfport  des  Troupes  prifes  à  la  folae> 
cela  eft  non  feulement  contraire  à  Tordre  des  finances  ,  mais  même  doit 
être  d'un  très  mauvais  effet  pour  le  fervice  du  Pais,  comme  il  vient  de 
paroitre  par  le  retardement  desTroupes,  pour  lefqueiles  on  a  contracté  a- 
vec  l'Electeur  Palatin ,  qui  font  retenues  faute  du  payement  des  Afîigna- 
tions  données  à  leur  égard,  <3c  que  le  crédit  de  l'Etat  ne  peut  que  tomber 
entièrement,  quand  on  ne  fatisfait  point  aux  Conventions,  Capitulations, 
&  Contracts  faits, tant  avec  des  Princes  étrangers  qu'avec  des  particuliers, 
fur  des  prétextes  ou  difputes  dont  fe  fervent  les  Provinces,  ou  qui  fe  lè- 
vent entre  elles,  lefqueiles  ne  regardent  nullement  ceux  avec  qui  l'on  a 
contracté  au  nom  de  l'Etat  ;    que  le  non-payement  defdites   Afïignations 
paroît  d'autant  moins  fondé,  que  parmi  les  Pétitions,  fur  lefqueiles  les  fuf- 
dits Seigneurs  Etats  tachent  de  difeompter  ce  payement,   il  y  en   a  de 
trop  fraiches,  pour  y  avoir  encore  pu  confentir,  comme  par  exemple  celle 
pour  les  Fregattes,  qui  n'a  été  faite  tout  au  plus  que  depuis  trois  femai- 
nes,  &  généralement  fur  dételles,  pour  le  payement  &  acquit  entier  chC- 
quelles  fuivant  l'ordre  de  fEtat  le  tems  n'eit  pas  encore  éclui,   &  outre 
cela,  quand  même  quelque  difeompte  pouroit  avoir  lieu,  que  les   fufdits 
Seigneurs  Etats  ne  pourroient  ,   du  moins   par  raport   aux   défauts  des 
Provinces  qui  n'équipent  point,    retenir  plus  que  ce  que  l'Amirauté  de 
Zelande  doit  avoir  des  quotes-parts  des   mêmes  Provinces  j  car,  quand 
même  l'Equipement  feroit  pleinement  fait  conformément  à  la  Pétition, 
que  pourtant  les  fufdits  Seigneurs  Etats  femblent  vouloir  retenir  beaucoup 
plus,  comme  on  peut  voir,  quand  on  joint  enfemble  les  Pétitions  pour 
les    erres   &  les    deniers  de   tranfport  des   Trouppes   prifes  à  la  folde, 
celle  pour  les  Retranchemens  dans  les  Provinces  de  Gueldre ,  d'Utrecht, 
&  d'Overyffel,&  les  deux  qui  ont  été  faites  cette  année  pour  les  fraix 
de  l'Armée.  Que  LL.  HH.  PP.  ont  exhorté  ferieufement  à  diverfes  re- 
prifes,&  encore  depuis  peu,  les  Seigneurs  Etats  des  Provinces,  qui  n'é-« 
quipent  point,  à  acquiter  leurs  quote-parts  aux  Pétitions  pour  les  Affai- 
res de  la  Marine,  mais  qu'Elles  prient  aufii  les  fufdits  Etats  qu'en  con- 
fideration  des  raifons  ci-deffus  ,    ils  veuillent  plus  différer  de   contribuer 
par  leurs  quote-parts  dans  les  Pétitions  pour  les    dictes   erres  &   deniers 
de  tranfport  des  Troupes  engagées  aux  Afiignations  ci-devant  mention- 

Qq  3  nées, 


pu    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AîtAtRss  nées  ,    afin    que  le  fervice  du  Pays  n'en  foie  point  retardé,  &  que  les 
des  Pro-  p]a'mtes  ceffent,  qu'on  fait  journellement  fur  le  non-payement  des  dites 
tinces-    Aflignationsj    qu'on  fera  part  de  ceci  à  S.  Maj.   Brit.  en  la  priant,  de 
-    ■ ,  - —   vouloir ,  en  qualité  de  Stadhouder  de  la  dite  Province  deZelande,  apuyer  de 
fon  mieux  les  bonnes  intentions  de  LL.  HH.  PP.  à  cet  égard  5  que  de 
plus  les  Seigneurs  Etats  de  Groningue,  à  la  charge  defquels  une  pareille 
Aflignation  a  été  donnée  pour  payer  une  partie  des  erres  &  des  deniers 
de  transport  des  Troupes  Palatines,  laquelle  n'eft  pas  encore  fatisfaite, 
feront  pareillement  requis  ferieufement  d'acquiter  fans  plus  de  délai  ladi- 
te Afiignation. 

Les  Srs.  Députez  de  la  Province  de  Zelande  fe  font  rapportez  aux  Re- 
marques qu'ils  ont  faites  ci-devant  fur  ce  fujet. 

Lettre  de  V Amirauté  fîAmfterdam  aux  Etats-Généraux. 

Lettre  de  VTous  avons  reçu  la  Refolution  de  VV.  HH.  PP.  &  la  Lettre  tendan- 
l'Ami-       JJ%J   te  a  avoir  prêt  vers  le  Printems  prochain  nôtre  Contingent  à  fix 
<?ïtCft   -  Vaifleaux 'du  premier  rang,  12.  du  fécond,   18.  du  3me  &   12.  du  4^, 
dam.         tous  doublez  pour  pouvoir  fervir  par-tout -,  &  nous  trouvons  pouvoir  fatis- 
faire  de  nôtre  côté  a  l'intention  de  VV.  HH.  PP.  fi  nous  recevons  à  tems 
les  reftans  des  Subfides  extraordinairement  confentis  dans  les  années  pré- 
cédentes, de  même  que  d'autres  deniers  ,  fur  lefquels  il  a  plû  à  VV.HH.PP. 
de  faire  égard  dans  ladite  Refolution  du  23.  du  courant,  &  d'y  exhorter 
les  Provinces  qui  y  font  interelfées.    Nous  en  attendons  l'effet,  afin  qu'au 
défaut  de  cela  nous  ne  foyons  pas  obligez  de  différer  le  commencement  du 
dit   Equipement,  dequoi  nous   Jaiffons   les  fuites  à  la  grande  Jageffe  de 
VV.  HH.  PP.  les  priant  de  vouloir  encore  recommander  auprès  des  fuf- 
dites  Provinces  le  confentement  demandé  &  le  fourniffement  des  deniers 
mentionnez  dans  ladite  Refolution, afin  qu'elles  prennent  fur  ce  fujet  une 
Refolution  finale. 

Aufïi  fommes-nous  obligez  de  demander  un  confentement  pour  les  fub- 
fides  neceffaires  à  l'entretien  des  Fregattes  envoyées  au  Printems  aux  Wey- 
lingues  pour  la  fureté  de  la  Province  de  Zelande,  &  employez  de  V V.HH.  PP. 
pour  la  Flotte  de  l'Etat ,  defquels  fubfides  il  y  a  long-tems  que  les  Collè- 
ges interelTez  ont  remis  par  Mémoire  le  montant.  Nous  prions  enfin, 
qu'on  nous  fournifle  aulli  les  Subfides  pour  les  VaiiTeaux  de  la  Flotte  de 
l'Etat  fous  les  Lieuttnans  Amiraux  Allemonde  &  Callembergh  fervans 
cette  année;  nôtre  Contingent  en  e(t  une  fomme  de  $f6ooo.  florins, 
mais  nous  n'avons  reçu  jufqu'à  préfent  là-deiTus  que  de  la  Province  de 
Hollande  &  de  Wellfrife  une  fomme  de  325000.  fl.  &  de  la  Province 
d'Utrecht  ioj-fi  fl.,  fans  avoir  rien  touché  des  Provinces  de  Gueldre, 
d'OverylTel,  &  de  Groningue,  lequel  fourniffement  VV.  HH.  PP.  veuil- 
lent recommander  plus  particulièrement  fuivant  qu'EUes  le  jugeront  ne- 
ceflaire.     Fait  àAmiterdam,  le  22.  Août  1701, 

Réfo- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  3n 

Affaires 

Réfolution  du  Lundi  22.  Août  1-701.  Minces!" 

Uàies. 

Ouï  le  Raport  des  Srs.  van  Effen  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP. 
pour  les  Affaires  des  Finances,  ayant  examiné  la  Lettre  du  Refi-  Réfoiu- 
dent  Kuyften  ,  écrite  à  Itzehoe  du  11.  précèdent,  addreffée  au  Greffier  Fa-  tlon' ™ 
gel,&  portant  avis  &  entr'autres  un  Projet  fur  la  Proviiion  neceffaire 
pour  le  tranfport  de  l'Infanterie,  favoir,  qu'il  feroit  donné  à  bon  compte 
à  chaque  Compagnie  200.  écus  &  qu'alors  chacun  auroit  foin  pour  fun 
particulier  de  faProvifion,  comme  auili  que  LL.  HH.  PP.  voudroient 
accorder  aux  Officiers  autant  que  le  tranfport  de  leurs  chevaux  par  des 
Vaiffeaux  pourroit  coûter, &  qu'ils  employeront  cet  argent  à  les  envoyer 
par  terre,  &  que  de  plus  il  étoit  demandé  un  Paffeport  de  LL.  III I.  PP. 
pour  les  Draps,  Bayettes, Fil ,  Chapeaux,  Bas,  &c.  pour  l'habillement  & 
la  monture  des  Soldats,  lequel  à  caufe  de  la  brièveté  du  tems  ne  pour- 
roit être  fait  &  achevé  avant  le  transport.  Surquoi  ayant  été  délibéré,  il  a 
été  trouvé  bon,  qu'il  fera  répondu  audit  Refident  Kuyften,  que  LL. 
HH.  PP.,  pour  ce  qui  les  regarde  en  particulier,  font  d'intention  de  fai- 
re payer  aux  Regimens ,  lorfqu'ils  viendront  au  fervice  de  S.  M.  Britan- 
nique, &  de  l'Etat,  la  folde  du  premier  mois,  faifant  plus  de  200.  écus 
par  Compagnie,  &  qu'ainfi  LL.HH.  PP.  jugent,  qu'il  fera  le  moins  coû- 
teux pour  S.  M.  Britannique  &  pour  l'Etat,  &  le  plus  avantageux  aux 
Troupes,  que  ces  Troupes  fe  pourvoyent  elles-mêmes  de  leur  provifion  ; 
que  pour  à  l'égard  d'une  fomme  réglée  à  donner  pour  le  tranfport  de  leurs 
Chevaux,  LL.  HH.  PP.  n'y  ont  rien  à  redire  pour  leur  particulier  ;  mais 
que  lui  Refident,  conjointement  avec  le  CommiiTaire  de  Bye,  délibéreront 
fur  cette  Affaire  avec  le  CommiiTaire  ou  CommilTaires  Anglois,  &  con- 
certeront enfemble  &  feront  ce  qu'ils  trouveront  le  plus  convenable  au 
fervice  de  S.  M.  Britannique  &  de  LL.  HH.  PP.  Que  déplus  il  fera  ex- 
pédié un  Paffeport  en  due  forme, &  envoyé  audit  Refident  Kuyften,  pour 
que  les  Draps,  Bayettes,  Chapeaux,  Bas,  &  autres  Etoffes  fervant  à 
l'habillement  &  à  la  monture  desdites  Troupes  puilTent  entrer  librement 
&  fans  payer  les  Droits  du  Pays-,  mais, que  lui  Refident  aura  foin,  autant 
qu'il  eft  potTible  ,  qu'à  cette  occafîon  il  ne  fe  commette  point  de  fraudes 
avec  des  Marchandifes. 

Ouï  le  Raport  des  Srs.  van  EfFen  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP.  Autre» 
pour  les  Affaires  Etrangères ,  ayant,  en  confequence  de  leur  Réfolution  Com- 
mifforiale  du  16.  &  20. du  courant,  examiné  la  Lettre  du  Refident  Goes 
du  9.  &  celle  du  Commiffaire  de  Bye  du  16.  Août,  touchant  la  difficulté, 
qu'il  y  auroit  pour  ledit  CommiiTaire  d'aller  prendre  le  Régiment  à  Olden- 
bourg &  la  Cavallerie  près  du  Tolspiexer, comme  devant  fe  faire  prefque 
au  même  tems.  Surquoi  ayant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon,  qu'il  fera 
répondu  audit  Commiffaire  de  Bye,  que  vu  que  Sa  Maj.  Brit.  a  pareille- 
ment nommé  des  Commiffaires  pour  le  tranfport  defdlts  Regimens ,    il 

con 


3i2    MEMOIRES,  NEGOCIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    concertera  avec  eux  fur  ces  Affaires,  &  les  réglera  ainfi  qu'ils-  le  pourront 
des  Pro-   je  pius  commodément. 


VïNCES 

Unies. 


Lettre  du 
Confdl 
4' Etat. 


Lettre  du  Confeiî  (TE tût  touchant  les  Frontières  ;  du  27 

Août  1701. 

HAUTS  ET  PUISSANS  SEIGNEURS, 

Comme  il  importe  beaucoup  à  VV.  HH.  PP.  d'être  informées  de 
l'Etat  des  Frontières ,  afin  d'y  pouvoir  faire  égard  dans  leurs  Consta- 
tions fur  la  fureté  des  Provinces-Unies ,  le  grand  objet  de  leurs  Délibéra- 
tions \  nous  nous  fommes  crus  obligez,  non  de  reprefenter  à  VV.  HH. 
PP.  comme  une  nouveauté  ,  mais  de  les  faire  reflouvemr  du  mauvais  état 
de  l'Etape  des  Magazins  de  la  Généralité, &  de  ceux  qui  font  dans  la  plu- 
part des  Frontières,  n'y  ayant  été  fait  aucun  ou  peu  de  changement  depuis 
nôtre  dernière  Lettre,  attendu  que  depuis  ce  tems-îà  les  Provinces  ont 
fourni  de  fi  petites  fommes  fur  les  2  Millions  accordez  pour  le  fournifie- 
ment  des  Magazins,  qu'il  s'en  faut  encore  plus  de  100  mille  florins  pour 
le  payement  des  Dettes  déjà  contractées.  Nous  y  ajouterons  feulement, 
qu'il  elt  notoire  ,  qu'avant  la  demande  des  dits  deux  Millions,  les  Maga- 
zins étoient  également  mal  pourvus  ;,  qu'il  parok  quafi  palpablement  par 
la  Pétition  même,  que  deux  Millions  ne  font  nullement  proportionnez  aux 
grands  défauts  dans  les  Magazins ,  &  que  pour  prouver  que  les  Magazins 
doivent  être  encore  fort  mal-pourvus,  il  ne  faut  pas  d'autre  marque  que  la 
Lille  ci-jointe  des  fourniffemens  des  Provinces  fur  la  dite  Pétition  ,  à  l'é- 
gard de  laquelle  Lille  il  plaira  néanmoins  à  VV.  HH.  PP.  de  remarquer, 
que  quelques  Provinces  ont  bien  four-ni ,  ou  promis  de  fournir,  de  l'Artille- 
rie &  des  Munitions ,  lesquelles  n'y  font  pas  fpecifiées ,  mais  que  ces  Pro- 
vinces ne  iaillent  pas  pour  cela  de  devoir  encore  beaucoup  fur  leurs  quo- 
tes-parts.    Fait  à  la  Haye,  le  2.7.  Août  1701. 


Kêfolutïon  des  Etats -Généraux,   en  renfermant  2.  des  Etats  de 

Grorimgue,  du  27.  Août  1701. 

Réfolu-  T  E  préfent  Sr.  Député  de  la  Province  de  Groningue  a  remis  à  l'Affem- 
tiondes  1— /  blée  la  Refolution  des  Seigneurs  Etats  de  la  dite  Province  fes 
Etats  de     Principaux,  par  laquelle  ils  confement  au  Fourniffement  de  84045".  flor. 

fur  la  Pétition  de  \6o^-]q-j.  flor.  pour  les.  erres   &  deniers  de  tranfport 

des  Trouppes  prifes  à  la  folde  de  l'Etat. 


Gronin- 
gue fur 
leFour- 
nule- 
ment. 


Extrait 


U;ms. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  I.  |i| 

Affaires 
Dts  Pro^ 

Extrait  du  Livre  de  Réfolutions  de  LL.  NN.  PP.  les  Seigneurs   V,NCES- 
£ta/j  *fo  /#  Province  de  Groningue  \  du  Samedi  27. 

Août  1701. 

Aiant  été  délibéré  fur  le  premier  Article  de  la  Propofition  touchant 
le  FournilTement  demandé  du  Contingent  de  cette  Province  de  la 
fomme  de  84045.  flor.  à  la  Pétition  de  1322747  flor.  &  à  celle  de  2825*60. 
flor.  faifant  en  tout  1605707.  flor  pour  les  erres  &  deniers  de  tranfport 
des  Troupes  engagées  en  confequence  de  la  Lettre  de  LL.  HH.  PP.  du 
10.  Août  dernier,  pour  fervir  conformément  à  la  Capitulation  à  avancer 
la  Marche  des  3200  Hommes  d'Infanterie,  &  1200  de  Cavalerie  qu'on  a 
pris  de  l'Ele&eur  Palatin,  les  Seigneurs  Etats  de  Groningue  ont  inlifté  à 
la  Réfolution  du  16.  Juillet  dernier,  par  laquelle  il  étoit  arrêté,  qu'on  dref- 
feroit  l'Ordonnance  demandée  en  faveur  du  Sr.  Comte  de  NaiTau-Wei! bourg 
fur  l'Affignation  de  84045  flor.  donnée  du  Receveur  General ,  moyennant 
qu'elle  puilfe  paiïer  en  Compte  fur  les  Pétitions  pour  les  deniers  de  tranfport 
&  les  erres  des  Troupes  étrangères  ;  &  les  Sieurs  Députez  font  autori- 
fez  de  faire  les  payemens  là-deflus,  à  tems  &  par  termes,  des  premiers 
deniers  qui  entreront  en  caiffe. 

Le  préfent  Sieur  Député  de  la  Province  de  Groningue  a  remis  à  l'Af- 
femblée  la  Réfolution  des  Seigneurs  Etats  de  la  dite  Province  Ces  Princi- 
paux, par  laquelle  ils  confentent  à  la  Pétition  d'un  Million  pour  les  frais 
de  l'Armée  de  l'année  courante. 


Extrait  du  Livre  des  Réfolutions  de  LL.  NN.  PP.  les  Seigneurs 
Etats  de  Groningue;  du  Samedi 3   27.  Août  1701. 

Aiant  été  délibéré  fur  le  2  Article  de  la  Propofition  dans  laquelle 
LL.  HH.  PP.  par  leur  Lettre  du  16.  du  courant  avoient  demandé 
le  FournilTement  de  la  quote-part  de  cette  Province  à  la  Pétition  de 
749477  fl.  pour  les  neceflkez  d'un  Camp  à  former  cette  année,  de  même 
que  le  Confentement  à  la  Pétition  d'un  Million  de  flor.  faite  pour  la  même 
fin,  les  Seigneurs  Etats  de  Groningue  ,  en  confequence  de  leurs  Réfo- 
lutions Provinciales  ci-devant  prifes  fur  ce  fujet  &  confirmées  à  l'Aflem- 
blée  des  Etats  du  f.  Août  dernier ,  ont  non-feulement  confenti  à  la  dite 
Pétition  de  749477  flor.  pour  les  befoins  d'un  Camp  de  cette  année  ,  mais 
aufïï  outre  cela  a  celle  d'un  Million  faite  pour  la  même  fin,  fous  l'expreffe 
condition  réitérée,  que  les  deux  Ingénieurs  ,  un  Bombardier,  &  »f  Ca- 
nonmers,  étant  actuellement  au  fervice  du  Pays,&  étant  omis  jufqu'à  pré- 
fent dans  l'Etat  de  Guerre,  malgré  les  initances  renouvellées,  foient  por- 
Tome  XL  Rr  tez 


Affaires 

nés  Pro- 

VINCF.S- 

Umfs. 

lat. 


514    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

tez  à  la  charge  de  la  Généralité,  en  Diminution  de  la  quote-part  de  cette 
Province. 

Pétition  du  Confeil  d'Etat-,  du  2.  Septembre  1701. 

HAUTS  ET  PUISSANS   SEIGNEURS, 

•Pétition  XTous  avons  par  la  Pétition  du  17.  Janvier  dernier  propofé  à  VV.  HII. 
duCon-  J[\J  pp  une  Négociation  de  2  autres  [Millions  fur  le  fonds,  fur  lequel  é- 
J^1  dE"  toient 'levez  les  quatre  dans  l'année  1688  ,  &  après  leur  rembourfement, 
les  2940836: 13  .-4.  afin  de  pouvoir  continuer  à  fortifier  les  Places,  aux- 
quelles on  travailla  alors,  &  même  de  pouvoir  en  entreprendre  quelques  au- 
tres, en  attendant  que  les  Confederez  délibéreraient  fur  un  fonds  fuffi- 
fant  à  trouver  pour  pouvoir  mettre  enfin  en  fureté  les  Frontières  du  Païs, 
lequel  dernier  point  étoit  proprement  le  but  de  la  Pétition,  comptant  que 
ce  fonds  provifionel  fuffiroit  pour  le  moins  jufqu'à  la  fin  de  l'année, &  que 
vers  ce  tems-là  les  Confederez  termineroient  les  Délibérations  fur  le  prin- 
cipal point, 

Mais ,  comme  ces  Délibérations  font  encore  différées,  fans  doute  à  caufe 
d'autres  Délibérations  de  pas  moindre  importance,  dont  les  Confederez 
ont  été  occupez  du  depuis ,  &  que  la  Conclufion  en  eft  peut-être  encore 
fort  éloignée  ,  le  fonds  Provifionel  eft  déjà  debourfé  contre  l'état  que 
nous  fîmes  alors;  &  il  y  manque  des  centaines  de  milliers,  fi  l'on  doit  con- 
tinuer les  ouvrages  auxquels  on  travaille  &  qui  peuvent  &  doivent  être 
achevez  avant  l'hiver  ,  à  moins  qu'on  ne  veuille  négliger  la  fureté  du 
Païs. 

Et  il  n'efl  pas  étonnant,  Hauts  &  PuiiTants  Seigneurs,  qu'il  y  manque 
des  centaines  de  milliers,  carie  danger  qui  menaçoit  l'Etat  a  tant  aug- 
menté depuis  la  Pétition ,  qu'il  n'y  a  point  de  Frontière ,  du  moins  au- 
cune qui  eft  tant  foit  peu  expofée  ,  pour  laquelle  nous  n'ayons  été  obligez 
de  faire  de  groffes  depenfes  ,   les  défauts  des  Fortifications  n'étant  vus 
pour  la  plupart  que  quand  il  s'agit  de  les  défendre:  à  peine  même  a-t-on 
trouvé  un  Polte  ou  Avenue,  (car  nous  avons  fait  examiner  tout  exacte- 
ment), pourvu  dans  la  Guerre  d'Efpagne  d'un  Fort  ou  Redoute,  qu'on 
n'ait  jugé  neceiTaire  de  fortifier  félon  la  manière  d'aujourd'hui  ,  enforte 
qu'il  ne  faut  pas  s'étonner,  que  deux  Millions  foient  déjà  abforbez  cette 
année  pour  ces  Ouvrages ,  fans  y  fuffire.     Si  les  Provinces  n'étoient  (1  fort 
embarafiées  à  trouver  les  deniers  neceffaires  pour  le  courant  de  l'année, 
qu'il  n'y  a  pas  d'aparence  d'avoir  des  Comptoirs  des  Provinces  de  prompts 
Subfides  pour  les  Fortifications  ,  nous  n'aurions  garde  de  propofer  une 
troifième  Négociation  fur  le  même  Fonds,  fur  lequel  les  deux  précéden- 
tes ont  été  faites;  non-feulement,  puifque  le  Comptoir  de  la  Généralité 
fe  trouve  trop  chargé  pour  ce  Fonds  à  proportion  des  Provinces ,  comme 
nous  croyons  l'avoir  clairement  démontré  ci-devant,  &  qu'il  ell  fort  dan- 
gereux 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.        jif 

gereux  dans  cet  état  incertain  des  affaires  du  Pais  de  l'engager  encore  Amiasa 
quelques  années  pour  le  fourniflement  d'une  Somme  fi  confiderable;  mais  MS  Pro". 
principalement  auîîi  pareeque  l'entretien  de  tant  d'Ouvrages  nouveaux,    unm» 

qui  fe  font  aux  Frontières  dans  le  RefTort  de  la  Généralité,  eft  une  char-  — 

ge  nouvelle  &  onereufe,  qui  tombe  fur  (es  Revenus  du  moins  aufïi  long- 
tems  que  le  fonds  du  Comptoir  General  pour  les  Fortifications  hors  des 
Provinces  continué  à  fervir  au  payement  des  Capitaux  &  Intérêts,  &  que 
les  Confederez  ne  confentent  point  à  quelque  nouveau  fonds  à  la  place 
d^  celui-là. 

Mais,  comme  nous  ne  voyons  point  moyen  de  trouver  de  l'Argent  par 
une  autre  voye,  nous  avons  jugé  devoir  préférer  la  fureté  du  Pais  à  tou- 
tes autres  confiderations ,  &  que  fi  un  des  deux  doit  courir  danger,  ou  le 
Pais  d'être  continuellement  expofé  à  l'ennemi,  ou  le  Comptoir-General 
de  l'Union  de  n'être  pas  fecouru  par  les  Provinces,  comme  il  court  grand 
danger  en  cas  d'une  Guerre  inattendue,  la  différence  eft  trop  grande  en- 
tre les  deux,  pour  ne  pas  propofer  à  VV.  HH.PP.  une  Négociation  d'un 
autre  Million  jo.  mille  cent  &  foixante  <&  trois  flor.  6.  f.  8.  d.  fur  le  mô- 
me fonds  ,  &  fous  les  mêmes  engagemens  &  accords,  fur  lequel  &  fous 
lefqueis  les  deux  Négociations  précédentes  du  30.  Juin  1698.  &  du  31.  du 
Mois  pafTé  ont  été  refoluô's  :  alors  le  fonds  fera  chargé  de  fîx  Millions ,  Cx 
par  confequent  fi  fort  qu'il  ne  pourra  pas  raporter  double  intérêt,  &  que 
îes  Confederez  feront  obligez  de  ne  lever  plus  de  deniers  là-deiTus,  du 
moins  pas  plutôt  qu'après  quelques  années. 

Et  puifqu'il  manquera  encore  beaucoup  vers  l'année  qui  vient,  lorfque' 
]e  nouveau  fonds  fera  debourfé  pour  mettre  les  Frontières  dans  une  due 
defenfe,  àcaufe  de  leur  nombre  &  de  leur  grande  décadence,  nous  prions 
qu'on  délibère  au  plutôt  fur  le  moyen  de  trouver  encore  un  fonds  du  moins 
de  trois  Millions. 

Le  degré  de  tranquillité  ,  où  font  les  Provinces  &  leurs  bons  habi- 
tans  contre  une  Invafion  fubite ,  depuis  que  non  feulement  la  Milice  eft 
augmentée,  mais  que  les  Frontières  font  aufîimifes  en  meilleur  état  de  de- 
fenfe, fait  voir  l'utilité  de  la  depenfe  pour  les  Fortifications,  puifqu'autre- 
ment  la  fureté  du  Pais  dépend  de  la  décifion  d'une  Bataille.  C'eft  pourquoi 
nous  ne  pourons  que  nous  attendre  à  des  Réfolutions  promptes  &  defirées 
fur  cette  Pétition ,  tant  par  raport  à  la  Négociation  d'encore  une  Somme 
de  ioyoi6$  :  6:  8.  qui  eft  neceffaire  d'être  arrêtée  au  plutôt,  qu'à  l'égard 
d'un  autre  Fonds.  Nous  prions  auffî  VV.  HH.  PP. qu'EUes  veuillent,  en 
envoyant  cette  Pétition  aux  Provinces,  l'apuyer  le  plus  efficacement,  &  les 
exhorter  très  ferieufement  à  ne  pas  oublier  ni  négliger  ce  point  de  leur 
fureté ,  pendant  qu'EUes  délibèrent  avec  un  foin  infatigable  &  non  fans 
fuccès  fur  d'autres  points  qui  les  regardent.  Fait  à  la  Haye,  le  2.  Sept* 
1701. 


Rr  2      ;  Rcfc 


Affaires 
des  Pro- 
vinces- 
Unies. 


Réfolu- 
tion  du 
22. 


116    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Rêfolution  du  22.  Septembre  ;  avec  une  des  Etats  de  Hollan- 
de du  16  y  £sP  un  Mémoire  de  Mr.  dIEllemet 
du  20.  Septembre  1701. 

Les  Srs.  Députez  de  la  Province  de  Hollande  &  de  Wefl-Frife  ont 
remis  à  l'Aflemblée,  &  y  ont  fait  lire,  la  Rêfolution  des  Seigneurs 
Etats  leurs  Principaux,  par  laquelle  ils  confentent  à  la  Pétition  du  Con- 
feil  d'Etat ,  &  en  confequence  de  cela  au  fourniiTement  de  leur  quote- 
part  aux  fommes  qui,  fuivant  le  dernier  Traité,  doivent  être  payées  au  Roi 
de  Dannemarc  &  pour  l'entretien  de  fes  Troupes  ;  fuivant  la  Rêfolution 
ci  -  jointe. 


Extrait  des  Réfolutions  des  Seigneurs  Etats  de  Hollande  &  de 

Wefl-Frife  dans  VAffemblée  de  Leurs  Nobles  gjp  Grandes 

Fuiffances ,  le  Vendredi  16.  Septembre  1701. 

Ayant  été  délibéré  fur  la  Lettre  des  Seigneurs  Etats -Généraux  des 
Provinces -Unies  des  Pais -Bas,  écrite  ici  à  la  Haie,  le  5.  du  cou- 
rant, à  laquelle  étoit  jointe  une  Pétition  du  Confeil  d'Etat  du  2.  pafle 
portant  une  Supputation  exacte  des  articles  qui  doivent  être  payez  de  la 
part  de  Tritat  pendant  cette  année  pour  fatisfaire  au  Traité  dernièrement 
conclu  avec  le  Roi  de  Dannemark  &  qui  ont  été  envoyez  aux  Membres 
refpeclifs;  les  Seigneurs  de  la  NoblefTe  ,  de  même  que  les  Députez  des  Vil- 
les refpeétives ,  ont,  au  nom  &  delà  part  des  Bourguemaitres  &  Eche- 
vins  de  ces  Villes,  confenti  &  accordé,  ainfi  que  comme  LL.  NN.  & 
GG.  PP.  confentent  par  la  préfente  à  la  dite  Pétition  ou  Supputation  des 
articles  fufdits  :  &  de  plus  il  a  été  trouvé  bon  &  entendu,  que  les  Srs. 
Confeillers  Committez  de  LL.  NN.  &  GG.  PP.  feront  chargez  &  autori- 
fez,  comme  ils  font  chargez  &  autorifez  par  la  préfente,  de  fournir  en  con- 
formité les  deniers  requis  au  Comptoir  General  de  l'Union. 

Surquoi  ayant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  que  les  Sei- 
gneurs Etats  des  autres  Provinces  feront  encore  exhortez  &  requis  ferieu- 
fement  de  fournir  en  confequence  de  la  fufdite  Pétition  &  de  la  Suppu- 
tation y  comprife  leurs  quotes-parts  fans  le  moindre  retardement  au  Comp- 
toir du  Receveur  General. 


Mémoire  du  Receveur  General. 


LE  foufîigné  Receveur  General  des  Provinces- Unies  des  Païs-Bas, 
pour  obéir  à  la  Rêfolution  de  VV.  HH.  PP.  du  o.  du  courant,  donne 


Mémoire 
de  Mr. 

mct  c        avec  tout  le  dû  rçfpect  fes  conGderations  &  avis  fur  le  Mémoire  du  Sr. 

Com- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  I.  317 

Comte  de  Goes,  Envoyé  Extraordinaire  de  S.  M.  Imp.,  préfenté  à  l'Etat  Affaire» 
demandant  la  Garantie  de  VV.  Hli.  PP.  pour  une  Négociation  d'encore    ms  Pao* 
1 25-0.  mille  florins  fur  le  vif- argent.  Comme  donc,  conformément  à  la  no-     J?1^?" 
tice  jointe  audit  Mémoire,  la  Veuve  Deutz  &  fils  ont  remis  des  Obligations    - 
pour  la  fomme  de  999000.  florins  au  Souiîigné  ,  qui  a  notifié  à  VV.  HH. 
PP.  le  premier  du  mois  pafYé  de  les  avoir  entre  les  mains  en  diminution 
du  Capital  négocié  fur  ledit  vif- argent  en  i6pf.  de  1570000.  &.qu'ainfi  il 
eft  rentré  dans  l'efpace  de  6.  ans  deux  tiers  du  Capital,  non-obltant  que 
le  terme  du  rembourfement  itipulé  dans  l'obligation  de  Sa  Majefté  Impé- 
riale étoit  de  12.  ans,  enforte  que  les   1570000.  florins  foient  augmentez 
dans  l'année  1698-  d'une  fomme  de  800.  mille,  le  rembourfement  fe  fera, 
pourtant  plus  promptement  qu'on  l'avoit  projette  au  commencement,  fur- 
tout  en  y  ajoutant  la  grande  quantité  de  pots  remplis  de  vif-argent,   qui 
font  encore  dans  le  Magazin  ou  qu'on  allure  être  en  chemin;  le  ooufïigné 
feroit  ,  fauf  correction,  pour  ces  raifons  d'avis ,  que  VV.  HH.  PP.  pour* 
roient  bien  dans  les  Conjonctures  préfentes,  accorder  par  forme  de  rem- 
placement fous  la  Garantie  de  VV.  HH.  PP.  la  fufdite  Négociation  de- 
mandée fur  une  due  Obligation  de  Sa  Majefté  Impériale.    A  la  Haie,  le 
20.  Septembre  17  01. 

Réfoîution  du  Lundi  26.  Septembre  1701. 

Les  Srs.  de  Gent  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour  les  Affaires  Réfoiu- 
Etrangères  aiant  en  confequence  &  pour  fatisfaire  à  leur  Réfoîution  tl"nsdu 
Commilîonale  du  21.  du  courant  examiné  le  Mémoire  du  Sr.  van  Stocken,  2  •  eP  n 
Envoyé  Extraordinaire  de  Sa  Majefté  le  Roi  de  Dannemarc,  par  lequel 
il  avoit  prié  qu'en  conformité  du  Traité  dernièrement  conclu  ,  dont  les 
Obligations  que  le  feu  Roi  Frédéric  III.  de  gloneufe  mémoire  avoit  don- 
nées à  la  Province  de  Hollande  &  a  la  Ville  d'Amfterdam,  lui  feroient 
rendues,  &  aiant  été  en  Conférence  fur  ce  fujet  avec  ledit  Sr.  van  Stoc- 
ken, ils  ont  fait  raport  à  l'Affemblée  que  pour  ajuller  les  affaires  ci-def- 
fus  on  avoit  couché  fur  le  papier  une  Formule  de  Quitance,  qui  feroit  mi- 
fe  de  la  part  de  la  Province  de  Hollande  &  de  la  ville  d'Amfterdam  fur  les 
fufdites  Obligations,  &  d'un  acquit  qui  feroit  paiïe  en'échange  par  le  dit 
Sr.  van  Stocken,  comme  auilï  d'un  A6le  à  donner  par  la  Province  de 
Hollande  pour  alfurer  le  payement  des  fubfides  courans  ;  que  le  dit  Sr» 
van  Stocken  s'étoit  chargé  d'envoyer  les  fufdites  Formules  en  Dannemarc 
pour  fa  voir  l'intention  du  Roi  fon  Maitre  là-deffus  ;  qu'eux  Srs.  Députez 
avoient  de  plus  recommandé  audit  Sr.  van  Stocken  l'exécution  du  Traité 
de  la  part  de  Dannemarc  &  que  les  Troupes  puiffent  venir  ici  fans  plus  de 
délai  \  ce  qu'on  le  prioit  d'appuyer  de  fon  mieux  par  fes  bons  offices,  vu 
que  LL.  HH.  PP.  de  leur  côté  avoient  déjà  fait  plus  qu'on  ne  faufoit  de- 
mander d'Elles  en  vertu  du  Traité.  Surquoi  aiant  été  délibéré,  LL.  HH. 
PP.  ont  remercié  lefdits  Srs.  Députez  de  la  peine  qu'ils  ont  prife,  &  de 
•plus  il  a  été  trouvé  bon  &  entendu,  qu'il  fera  reprefenté' à  S.  AL  Danoife 

Rr  1  par 


Pi    MEMOIRES,  NEGOTIATÎONS,  TRAITEZ,   ET 

Amures   par  une  Lettre ,  de  quelle  manière  LL.  HH.  PP.  de  leur  côté  ont  déjà  fa- 

des  Piw>-  risfait  a  tout  ce  qui  jufqu'à  préfent  leur  a  pu  être  demandé  avec  juftice 

Unies5"   dudit  Traité ,  &  que  Sa  Majefté  doit  être  priée  de  le  faire  pareillement 

. 1    exécuter  de  Ton  côté  &  de  donner  ordre  pour  que  les  Troupes  viennent 

ici  fans  plus  de  délai  $  que  la  Lettre  à  écrire  fur  ce  fujet  fera  envoyée  a- 
vec  la  Copie  au  Refident  Goes ,  pour  délivrer  l'original  au  Roi  de  Dan- 
nemarc  &  en  appuyer  de  fort  mieux  le  contenu. 

Autre'  TJ  F'ÇU  une  lettre  ^e  l 'Electeur  de  Brunfwic  &  Lunebourg  écrite  à 
Ja  liannovre  le  13.  du  courant  en  Reponfe  à  celle  de  LL.  HH.  PP.  du 
§0.  du  pafle,  leur  faifant  favoir  qu'il  avoit  accordé  le  paffage  de  8.  Regi- 
inens  Danois  par  fes  Provinces:  furquoi  il  a  été  trouvé  bon,  qu'on  répon- 
dra audit  Electeur, &  qu'on  le  remerciera  en  des  termes  obligeans,&  que 
cette  Reponfe  fera  envoyée  au  CommiiTaire  van  der  Meer  pour  Ja  remet- 
tre là  où  il  convient. 

Du  Lundi  26.  Sept.  1701. 

Autre  T  es  Srs.  Députez  de  la  Province  de  Frife  ont  raporté  &  fait  favoir  à 
JL- /  l'AiTemblée,  que  les  Seigneurs  Etats  de  la  dite  Province  avoient  don- 
né ordre  pour  payer  leur  quote-part  aux  deniers,  qui  en  vertu  du  dernier 
Traité  doivent  être  payez  au  Roi  de  Dannemarc ,  fuivant  la  Pétition  du 
Confeil  d'Etat.  Surquoi  ayant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  enten- 
du, que  l'on  donnera  connoiiTance  de  ce  qui  eft  dit  ci-deiTus,  au  Confeil 
d'Etat  pour  lui  fervir  d'information,  &  que  les  Seigneurs  Etats  des  Pro- 
vinces Refpeclives ,  exceptez  de  celles  de  Hollande  &  de  Frife,  feront 
encore  exhortez  &  requis  de  payer  pareillement  leurs  quote-parts  fans  re- 
tardement, &  de  les  faire  fournir  au  Comptoir  du  Receveur  General. 

Du  Lundi  26.  Sept.  1701. 

Autre.  TD  EÇÛ  une  Lettre  du  Confeil  d'Etat  écrite  ici  à  la  Haye  le  14.  du  cou- 
Jlv  rant,  laquelle  porte,  que  la  Province  de  Frife  n'avoit  levé  que  13. 
Compagnies  de  Cavallerie  au  lieu  de  17 ,  &  qu'elle  avoit  refolu  en  place 
d'augmenter  la  Compagnie  des  Gardes  du  Seign.  Prince  de  Naflau  Stad- 
houder,avec  le  montant  de  deux  Compagnies, mais  en  rabatant  les  gages 
des  Officiers ,  laquelle  claufe  (comme  le  Confeil  d'Etat  avoit  été  informé) 
étoitcaufe,  que  cette  augmentation  n'avoit  point  eu  lieu,  tout  ainil  que  la 
Réfolution  avoit  caufé  la  non-levée  de  ces  deux  Compagnies;  qu'en  casque 
la  Province  eût  voulu  agréer  le  Projet  fait  par  Sa  Maj.  Brit.  &  par  le  dit 
Confeil  d'Etat  dans  la  Pétition  Générale  pour  l'année  1699.  Ja  dite  Corn- 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  ^uj 

Que  le  dit  Confeii  d'Etat,  puifque  la  Province  de  Frife  continuent  à  de-  Affaire 
cliner  ce  Projet,  &  que  la  dite  Compagnie  ne  coniîltoit  par  confequent   nES  Fh°- 
que  de  go.  Chevaux  au  lieu  que  dans  l'Etat  de  Guerre  elle  étoit  mife  fur     JPW 
126,  donnoit  à  coniiderer  à  LL.IIFI.PP.fi  Elles  ne  trouveroient  pas  bon 


d'aprouver  qu'on  employé  les  Soldes  de  deux  Compagnies  de  Cavallerie  à 
leur  augmentation,  moyennant  que  les  gages  des  Officiers,  auiîi-bien  que 
ceux  des  Cavaliers,  fer  viroient  à  cet  effet,  &  d'exhorter  enfuite  fur  ce  pied 
là  la  Province  de  Frife  a  livrer  ce  qui  manquoit  à  fon  confentement  dans 
la  nouvelle  levée.  Que  le  dit  Confeii  d'Etat  jugeoit  en  même  tems ,  qu'il 
feroit  à  propos  d'écrire  à  la  Province  de  Groningue  ,qui  étoit  encore  plus 
en  défaut,  comme  ne  fe  contentant  point  d'avoir  depuis  la  Paix  décliné 
11.  Compagnies  d'Infanterie  ,  &  de  continuer  à  en  décliner  encore  6, 
mais  ne  levant  point  outre  cela ,  non  pas  une  Compagnie  d'Infanterie  ,  mais 
de  Cavallerie,  de  celles  qu'elle  étoit  obligée  de  lever  en  confequence  de 
fes  engagemens.  Surquoi  ayant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon,  que, 
fuivant  le  Projet  du  Confeii  d'Etat  mentionné  ci-deifus ,  il  fera  écrit  aux 
Seigneurs  Etats  de  Frife,  en  les  priant  d'employer  le  montant  des  Soldes 
de  deux  Compagnies  de  Cavallerie,  que  les  dits  Seigneurs  Etats  nonf  pas 
encore  levées,  à  l'augmentation  de  la  Compagnie  des  Gardes  du  fufdit 
Seigneur  Prince  de  Naflau,  moyennant  que  les  gages  des  Officiers  auiïi- 
bien  que  les  Soldes  des  Cavaliers  foient  employées  à  ladite  augmentation. 
Que  déplus  les  Seigneurs  Etats  de  Groningue  feront  requis  par  une  Let- 
tre de  faire  lever  fans  plus  de  délai  ladite  Compagnie  de  Cavallerie  &  4. 
Compagnies  d'Infanterie,  qui  ont  été  mifes  fur  leur  Repartition  ,  &  dont 
ils  n'ont  pas  encore  voulu  fe  charger,  &  de  faire  pareillement  lever  les 
dites  Compagnies  de  l'Etat  de  Guerre  ordinaire,  auquel  ils  n'ont  par  fatis- 
fait  jufqu  a  prefent. 

Réfolutions  fur  les  Affaires  Militaires  \  du  Mardi  27.  Sept.  1701." 

Oui  le  Rapport  des  Sieurs  de  Gent  &  autres  Dépurez  de  LL.  HH.  £??!*" 
PP.  pour  les  Affaires  des  Finances ,  ayant  examiné  fur  quel  pied  il  fe-  res!#u?l" 
roit  convenable  de  régler  les  Appointemens  extraordinaires  des  Généraux 
&  autres  Officiers  qui  font  allez  en  Campagne,  lefqueîs  Apointemens  ne 
font  point  réglez  par  la  Refolution  de  LL.  HH.  PP.  du  17.  Juin  dernier, 
&  quels  autres  points  de  ménage  pourroient  être  trouvez  par  rapport 
aux  fraix  de  l'Armée.  Surquoi  ayant  été  délibéré  ,  il  a  été  trqu- 
vé  bon,  conformément  au  très  fage  avis  de  S. M.  Britannique,  que  par  ra- 
port  au  montant  des  Appointemens  extraordinaires  du  Maréciial ,  &  des 
Généraux  de  Cavallerie  &  d'Infanterie,  on  fe  réglera  fur  la  coutume  des 
deux  àernicres  Guerres;  bien  entendu  dans  les  Mois  de  Campagne,  mais 
que  ni  ces  Généraux  ni  ceux  de  moiodre  rang  ne  tireront  pas  des  Apoin- 
temens Extraordinaires  dans  les  Mois  d'hiver ,  quoiqu'il  leur  en  foit  afîï- 
gné,  &  qu'ils  ayent  ordre  d'avoir  l'œil  fur  les  Troupes  &  de  fe  tenir  prêts, 

eK~ 


3iô     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

A^airï.3    excepté  uniquement  pour  le  tems  qu'on  envoyeroit  en  hiver  des  Troupes 
ses  Pro-    en 'Campagne;  que  le  Sr.  d'Auwerkerek  fera  tenu  fur  l'ancien  pied  corn-- 
Umls'    me  ^  ^l01t  avam  Çui'  ^ut  revetu  du  Caractère  de  General  de  Cavallerie; 

. L    Qu'il  fera  donné  au  Comte  de  Tilly  une  recompenfe  de  3000.  florins  ,'  & 

au  Major  General  Dompré  une  autre  de  ifoo.  florins,  pour  les  fervices 
qu'ils  ont  rendu  en  Gueldre  en  formant  les  Camps;  Que  quant  aux  Gé- 
néraux, quoiqu'étant  fur  la  Lifte  pour  fervir  en  Campagne,  il  ne  leur  fe- 
ra point  donné  d'Apointemens  extraordinaires,  qu'au  cas  &  pour  le  tems 
qu'ils  y  feront  effectivement  employez  &  qu'ils  feront  leur  fonction  ;  Que 
les  fervices  de  Chariots  &  les  Apointemens  extraordinaires  des  Généraux 
&  desRegimens,  qui  ont  campé  cet  Eté,  feront  réglez  en  gênerai  fur  trois 
mois,  excepté  ceux  du  Seigneur  Prince  de  Naffau-Saarbruck,  Veltmarê- 
chal,  à  l'égard  duquel  ils  feront  réglez  dès  le  1.  Juin;  Que  les  Aides  de 
Camp  des  Généraux  feront  payez  durant  le  tems  que  l'augmentation  des 
Apointemens  des  Colonels,  Lieutenuns-Colonels  ,  &  Sergeans-Majors  des 
Regimens,qui  ont  campé,  &  de  plus  celle  des  Chevaux  des  Officiers  de 
Cavallerie  &  de  Dragons  y  compris  la  Garnifon  de  Maitncht  fera  payée 
pour  un  pareil  tems  de  3.  mois,  &  enfin  que  le  bas  état  Major  des  Regi- 
mens  pour  cette  année  ne  fera  pas  rembourfé. 

Autre.  df^\u  ï  ^e  RaPort  des  Sieurs  de  Gent  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP. 
V_^  pour  les  Affaires  des  Finances,  aïant  examiné  le  Mémoire  du  Comte 
de  Naffau-Weilbourg,  General  des  Troupes  de  S.  A.  Electorale  Palatine, 
lequel  porte  qu'il  étoit  chargé  de  S.  A.  Electorale  de  remontrer  à  LL.  HH. 
PP.  qu'en  confequence  du  Contract  fait  entre  S.  A.  Electorale  d'un  côté 
&  LL.  HH.  PP.  de  l'autre,  il  y  avoit  déjà  2.  mois  que  les  Trouppes  y 
mentionnées  ,  étoient  mifes  fur  pied  par  l'Electeur  fon  Maître,  &  un  mois 
que  fur  l'ordre  de  Sa  Maj.  Brit.  elles  étoient  allé  camper  pour  le  fervice 
de  cet  Etat  du  côté  de  Cologne  ;  qu'au  contraire  on  n'avoit  pas  encore 
envoie  de  la  part  de  LL.  HH.  PP.  les  erres  qui  font  en  arrière  &  qui 
montent  à  170  mille  fior.  lefquelles  devroient  être  payées  félon  le  dit  Con- 
trat! depuis  trois  mois,  de  même  que  le  mois  de  marche,  qui  devroit 
même  être  promptement  acquité  ;  que  S.  A.  Electorale  avoit  fourni 
depuis  ce  tems-là  jufqu'à  préfent  aux  dites  Trouppes  ,  conliftant  en  8 
Regimens ,  les  Provifions  de  bouche  &  le  fourage  neceffaire ,  mais  qu'il 
lui  étoit  impoffible  de  le  continuer  plus  long-tems  &  de  porter  le  far- 
deau de  ces  8-  Regimens,  vu  que  S.  A.  Electorale  avoit  déjà  rendu  com- 
plètes fes  propres  Trouppes,  d'où  ces  8  Regimens  étoient  tirez,  priant 
pour  ces  caufes  LL.  HH.  PP.  de  vouloir,  en  confédération  de  ce  qui  a 
été  dit  ci-deflus,  faire  payer  promptement  le  reliant  les  dites  erres  ,  de 
même  que  le  mois  de  marche;  &  de  nommer  des  Commiffaires  pour  paffer 
en  revue  &  venir  prendre  les  dites  Troupes  ;  &  comme  de*puis  le  tems 
ftipulé  dans  le  dit  Contracl  les  Troupes  avoient  été  prêtes  à  pouvoir  paf- 
fer la  revue  pour  le  fervice  de  LL  HH.  PP.  que  les  Ordonnances  de 
leurs  gages  feroient  dreffées  &  arrêtées ,  de  même  que  le  haut  &  bas  état 

Major 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M,  DCC.  I.  321 

Major  depuis  ce  tems-là.  Surquoi  il  a  été  trouvé  bon,  que  les  Seigneurs  Affaires 
Etats  des  Provinces  de  Zelande  &  de  Groningue  feront  exhortez  par  DES  Pro" 
Lettre  à  payer,  fans  plus  de  délai ,  de  leurs  quote-parts  aux  "Pétitions  pour    uniesT 

les  erres  &  deniers  de  tranfport  des  Trouppes  engagées  ,  les  Afîignations    — 

données  au  profit  S.  A.  E.  Palatine  fur  leurs  dites  quote-parts }  que  les 
Seigneurs  Etats  des  Provinces  refpeétives  ,  à  la  charge  defquelles  les 
Troupes  de  l'Electeur  Palatin  font  reparties  par  le  troifieme  Etat  de  Guer- 
re extraordinaire,  feront  pareillement  requis  par  Lettre,  de  faire  payer 
chacune  aux  Troupes  de  fa  repartition  le  mois  de  marche,  qui  fuivant  la 
Convention  doit  être  payé  aux  dites  Troupes,  fans  attendre  les  rôles  des 
revues  j  depius,  que  Sa  Maj.  Britt.  fera  priée  de  nommer  &  d'envoyer 
quelqu'un  des  Officiers  de  l'Etat  pour  pafler  en  revue  les  dites  Troupes, 
&  pour  les  prendre  au  ferment  &  fervice  de  l'Etat;  enfin  que  le  Confeil 
d'Etat  fera  requis  &  autorifé  de  conférer  avec  le  dit  Sieur  Comte  de  Naf- 
fau-Weilbourg  fur  le  tems  ,  que  les  gages  des  dites  Troupes  commence- 
ront, de  régler  ce  tems  &  d'en  donner  enfuite  Connoiffance  aux  Provin- 
ces, à  la  charge  defquelles  les  Troupes  refpe&ives  font  reparties  afin  d'a- 
voir foin  depuis  ce  tems-là  de  leur  payement. 

Sur  la  demande  du  Collège  de  l'Amirauté  d'Amflerdam,  qu'il  plaife  à 
LL.  HH.  PP.  de  difpenfer  de  la  defenfe  faite  par  Placard  contre  la  fortie  des 
marchandifes  de  contrebande  pour  autant  que  cela  regarde  le  chanvre  & 
les  cordages ,  puifqu'il  entre  ici  afTez  de  chanvre  par  les  VaifTeaux  venant 
de  Mofcovie ,  &  pour  d'autres  raifons  propofées  audit  Collège  ,  il  a  été 
trouvé  bon,  que  pour  l'avenir  la  fortie  du  chanvre,  des  cordages,  &  mè- 
ches eft  permife,  à  quel  égard  il  efl  dérogé  par-là  à  la  defenfe  contre  la 
fortie  des  marchandées  de  contrebande. 

Réjolution  fur  les  Affaires  Militaires;  du  Mercredi  28.  Sep- 
tembre 1701. 

^u  ï  le  Raport  des  Sieurs  van  Gent  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP.  Autrc' 
pour  les  Affaires  des  Finances ,  aïant  été  en  Conférence  avec  quel- 
ques Sieurs  Committez  du  Confeil  d'Etat  fur  le  contenu  de  la  Lettre  du 
dit  Confeil  ,  touchant  quelques  arrangemens  à  faire  dans  les  Regimens 
Hefjois  &  Suffis,  qui  font  au  fervice  de  l'Etat ,  il  a  été  ,  conformément 
au  très-fage  avis  de  Sa  Maj.  Brittan.  trouvé  bon  &  entendu,  que  des  deux 
Regimens  de  Hejfe-Cajj'el  confi fiant  chacun  de  12.  Compagnies ,  il  fera  formé  3 .  Ba- 
taillons chacun  de  1  o.  Compagnies  &  quà  cette  fin  Us  feront  augmentez  de  fix 
nouvelles  Compagnies  ;  que  pour  en  trouver  les  fraix  fans  un  nouvel  impôt 
fur  le  Pais ,  il  fera  levé  7.  Compagnies  SuifTes  au-lieu  de  8 ,  qui  devraient 
compofer  un  Régiment  fous  le  Colonel  Erlach  ,  lefquelles  feront  jointes 
aux  Regimens  du  Comte  d'Albemarle  &  de  Murait,  &  que  les  djtes  7. 
Compagnies  feront  réduites  chacune  à  178.  hommes  pour  être  égales  aux 
autres  Compagnies  Suiffes  ;  que  les  Compagnies  du  Régiment  de  Dragons 
Tome  XL  S  f  d'An- 


32î     MEMOIRES,  NEGOTÎATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   d'Anfpach  feront  augmentées  chacune  de  63.  à  66.  Hommes  &  de  72.  à 

des  Pro-   ^  chevaux,  pour  ies  mettre  fur  le  même  pied  avec  les  autres  Compagnies 

Unies!]    ^e  Dragons-,  que  dans  le  Régiment  de  Carabiniers  du  Comte  d'Albemarle 

1_  il  fera  établi  dans  la  Compagnie  de  Grenadiers  du  dit  4.  Lieutenans  au-lieu 

de  2,  &  que  cette  Compagnie  fera  augmentée  de  20.  Granadiers  à  che- 
val, &  chaque  Compagnie  de  Carabiniers  de  4.  Maîtres,  afin  de  les  met- 
tre fur  l'ancien  pied;  &  comme  le  dit  Régiment  confilte  de  10.  Compa- 
gnies, &  que  par  confequent  il  eft  d'autant  plus  fort  que  d'autres  Regimens 
de  Cavallerie,  il  y  fera  joint  un  Lieutenant-Colonel  &  fes  apointemens 
mis  fur  l'Etat  de  Guerre >  que  pour  mettre  les  Compagnies  du  Régiment 
Suiiïe,  dont  le  Comte  d'Albemarle  eft  Colonel  ,  au  même  nombre  avec 
d'autres,  chaque  Compagnie  fera  augmentée  de  deux  Hommes  ;  de  plus 
qu'à  caufe  des  préfentes  fortes  Garnifons  dans  les  Villes  &  Places  de  l'E- 
tat, l'Article  des  fervices  fera  augmenté  fur  l'Etat  de  Guerre,  3000.  flo- 
rins,  &  mis  ainfi  de  2000.  à  j*ooo.  florins,  comme  il  l'a  été  depuis  l'année 
1675.  jufqu'à  167-8;  que  le  nombre  des  Ingénieurs  fera  mis  fur  l'Etat  de 
Guerre  à  60 ,  comme  il  l'a  été  dans  la  dernière  Guerre;  que  la  Compagnie 
des  Mineurs  fera  agrandie  jufqu'à  100.  Hommes;  que  les  8.  Compagnies 
de  l'Artillerie  feront  recrutées  d'encore  .  .  .     Hommes  par  defTus  la  der- 
nière augmentation,  &  que  les  apointemens  &  gages  des  Officiers  dans 
les  Forts  de  Knodfenbourg,  de  Crevecœur,  &  autres  nouveaux  Forts  fe- 
ront mis  fur  l'Etat  de  Guerre  comme  parle  paffé;que  les  intérêts  des  Obli- 
gations de  la  fomme  d'un  million  de  florins  à  donner  à  la  Province  de 
Hollande ,  &  à  la  Ville  d'Amlterdam ,  pour  celles  qu'elles  ont  à  la  charge 
du  Roi  de  Dannemarc  ,    &  qu'elles  doivent  en  vertu  du  dernier  Traité 
lui  reftituer ,  commenceront  avec  le  jour  de  la  Ratification  du  dit  Trai- 
té ;    qu'on   ne   portera   fur   l'Etat    de    Guerre   pour   l'année  ■  prochaine 
qu'un  fimple  intérêt ,    mais  qu'il  y  fera  mis    au    double  ,  la  Paix   conti- 
nuant ,    l'année  fuivante  ;   qu'on  mettra  enfin  fur   l'Etat   de  Guerre  les 
apointemens  des  Lieutenans-Generaux  &  des  Maréchaux  de  Camp,  qui 
ont  été  faits  en  dernier  lieu,  pour  autant  qu'ils  ne  peuvent  rentrer  dans  les 
Places  vacantes.     Et  l'Extrait  de  cette  Refolution  fera  envoyé  à  Sa  Maj. 
Brit,  comme  Capitaine  General  de  l'Etat,  en  la  priant,   pour  ce  qui  re- 
garde le  changement  dans  les  Troupes,  de  donner  les  Ordres  necefîaires 
à  cet  effet  :  &  fera  remis  pareil  Extrait  au  Confei!  d'Etat ,  pour  lui  ler- 
vir  d'information,  &  pour  fe  régler  là-defïus  en  dreffant  l'Etat  de  Guer- 
re; le  tout  fauves  les  libres  Délibérations  fur  l'Etat  de  Guerre,  &  par- 
ticulièrement fur  les  points  fus-mentionnez. 

Refolution  en  préfentant  V Etat  de  Guerre  pour  T  Année  1702.; 

du  Vendredi  4.  Novembre  1 70 1 . 

Etat  de  ÇA  Majeflé  le  Roi  de  la  Grande-  Bretagne  aiant  paru  conjointement  a- 
Guerre  ^3  vec  le  Confeil  d'Etat  en  corps  àl'Aflemblée  ont,  en  vertu  de  leur  char- 
Ï70L       Se  &  fui vant  leur  foigneufe  attention,  remis  à  LL.  ÏIII.  PP.  la  Pétition 

gène- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  313 

générale  des  confentemens,  comme  aufli  l'Etat  ordinaire  &  extraordinai-  Affaires 
re  de  Guerre  pour  l'Année  prochaine  1702.,  laquelle  Pétition  aiant  été  DES  Fr°- 
lue  en  préfence  de  Sa  dite  Majefté  &  du  Confeil  d'Etat,  Sa  Majefté  a  pro-  ™«* 
pofé  à  LL.  HH.PP.  en  fubftance,  que  LL.  HH.  PP.  auroient  remarqué  — — *~ 
par  la  Lecture  de  ladite  Pétition  générale,  que  les  Etats  de  Guerre  é- 
toient  formez  fur  des  reflexions  d'une  Guerre  prochaine  •  que  Sa  Ma- 
jefté &  le  Confeil  d'Etat  y  avoient  allez  fuivi  les  Réfolutions  prifes  de 
terns  en  tems  par  LL.  HH.  PP.  pour  la  Sûreté  de  l'Etat  &  pour  le 
mettre  dans  une  pofture  raifonnable  de  defenfe  ;  que  la  cordialité  &  la 
promptitude,  avec  lefquelles  lefdites  Réfolutions  étoient  prifes,  doivent 
être  confiderées  comYne  la  feule  chofe  qui  puifle  fauver  la  République 
dans  les  tems  préfens;  que  Sa  Majelté  voyoit  avec  regret,  qu'on  étoiï 
obligé  de  demander  aux  Habitans  de  l'Etat  des  Charges  Ci  onereufes 
dans  un  tems  de  Paix,  mais  qu'à  peine  ce  tems  pouvoit-il  mériter  le  nom 
de  Paix  j  que  toute  efperance  à  un  Accommodement  amiable  étant  éva- 
nouie ,  on  étoit  forcé  de  prendre  des  mefures  comme  en  tems  de  Guerre  ; 
que  de  grandes  forces  s'étoient  approchées  des  Frontières  de  l'Etat;  qu'on 
tàchoit  de  le  priver  de  toutes  fes  Alliances,  de  troubler  fon  Commerce,  & 
de  le  rendre  infructueux  ;  que  l'Etat  étoit  comme  afïïegé,  &  que  félon 
l'avis  de  Sa  Majefté  une  Guerre  publique  valoit  mieux  qu'une  incertitude 
aufïï  dangereufe;  que  les  çliofes  étoient  venues  à  un  point,  qu'il  fembloit, 
qu'on  ne  pourroit  obtenir  d'Accommodement  que  par  la  voye  des  armes  ; 
qu'ainft  il  faudroit  s'y  prendre  avec  vigueur  pour  maintenir  l'Etat  dans  fa 
Liberté  &  Religion.  Sa  Majefté  ne  doutoit  point,  que  LL.  HH.PP.  & 
les  Seigneurs  Etats  des  Provinces  refpeftives  ne  conliderallent  cela  due- 
ment,&  que  fur  la  dite  Pétition  générale  des  Etats  de  Guerre,  de  même 
que  fur  d'autres  Pétitions  qu'il  faudra  faire  pour  le  bien  des  Affaires  du 
Païs  par  Mer  &  par  Terre,  ils  ne  s'engageaffent  à  des  Confentemens  una- 
nimes &  prompts,  &  principalement  à  les  mettre  en  effet  par  des  four- 
niflemens  réels,  fans  lelquels  les  Confentemens  ne  pourroient  être  d'au- 
cune utilité,  Sa  Majefté  recommandant  tout  cela  ferieufement  à  LL.  HH. 
PP.  Déplus,  Sa  Majefté  y  a  ajouté,  que  dans  cette  occafion  Elle  pren- 
droit  congé  de  LL.  H  IL  PP.  puifque  fes  Affaires  demandoient  fon  retour 
en  Angleterre;  qu'Elle  a  voit  déjà  mis  ordre,  &  qu'Elle  le  mettroit  d'avan- 
tage, à  ce  qui  s'étoit  requis  pour  le  fervice  de  l'Etat  &  qui  dependoit  de 
Sa  Majelté,  que  fon  départ  preftbit  d'autant  plus  qu'Elle  pouvoit  afîurer 
LL.  \\U.  PP.  que  la  Nation  étoit  difpofée  à  mettre  Sa  Majefté  en  état  à 
fon  arrivée  de  pouvoir  appuyer  puifiamment  les  intérêts ,  que  i"cs  Royau- 
mes ont  de  commun  avec  ces  Provinces,  &  ceux  de  toute  l'Europe,  & 
que  Sa  Majefté  efperoit  de  revenir  au  commencement  du  Printems  pro- 
chain pour  remplir  ici  fes  fonctions ,  fe  recommendant  en  outre  à  la  bien- 
veillance de  LL.  HH.  PP.  dans  la  confiance,  qu'il  n'étoit  pas  necellaire, 
qu'Elle  affuràt  LL.  HH.  PP.  de  fon  amitié  &  •affe&ion  pour  la  Patrie, 
puifqu'Elle  efperoit  que  LL.  HH.  PP.  en  feroient  fuflhTamment  perfua- 
dées.     Surquoi  aiant  été  délibéré,  LL.  HH.  PP.  ont  remercié  Sa  Majefté 

Sfa  &le- 


"»  ■» 


M    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    &  ledit Confeil  d'Etat,  du  foin,  de  la  peine,  &  du  zèle,  qu'ils  ont  pris  & 


i*i.s 


Pro*  employé  en  formant  la  fufdite  Pétition  générale  &  les  Etats  de  Guerre, 
Unie?"    &  qu'ont  témoigné  en  particulier  à  Sa  Majefté  fur  ce  qu'EIie  avoit  propo- 

—  fé,  que  LL.  HH.  PP.  étoient  obligées  à  Sa  Majefté  de  l'honneur  qu'Elle 

leur  faifoit  de  paroitre  encore  dans  leur  Affemblée;  qu'EI  es  regardoient 
la  recommandation  qu'il  avoit  plù  à  S.  M.   de  leur  faire  au  fujet  de  l'Etat 
de  Guerre,  comme  un  effet  de  la  conftante  &  inébranlable  affection  & 
zèle  de  Sa  Majefté  pour  la  Confervation  &  le  Bien  de  l'Etat ,  dont  Elles 
avoient  vu  &  iénti  au  tems  patte  des  fruits  &  effets  Ci  confiderables ,  dont 
Elles  conferveroient  une  vive  &  perpétuelle  reconnoiflance;  qu'Elles  s'en 
Cenoient  toujours  au  très-fage  confeil  de  Sa  Majefté,  &  s'en  étant  bien 
trouvées  Elles  étoient  d'Avis  de  continuer  de  même  &.  d'employer  toutes 
leurs  forces  pour  s'y  conformer,  fâchant  qu'il  tend  uniquement  au  Bien 
des  Intérêts  communs  de  toute  l'Europe ,  &  particulièrement  à  conierver 
la  Liberté  &  Religion  de  l'Etat  ;  que  LL.  HH.  PP.  avoient  fouhaké,  que 
les  Affaires  de  Sa  Majefté  euffent  pu  permettre  de  relier  plus  long-  tems 
dans  ce  Païs,  que  fa  préfence  leur  étoit  toujours  agréable  ck  leur  donnoit 
beaucoup  de  tranquilité  ;  mais  ,  qu'étant  entièrement  perfuadées  que  les 
raifons  qui  portent  Sa  Majefté  à  repalîér  en   Angleterre  étoient  tout-  à- 
fait  peremptoires,  Elles  louhaitoient  à  Sa  Majefté  un  heureux  &  prompt 
paffage,  &  qu'Elle  trouvât  à  fon  arrivée  en  Angleterre  le  cœur  de  tous  fes 
Sujets  comme  celui  d'une  feule  Perfonne,  rempli  d'affe&ion  &  de  fourni f- 
fion  à  Sa  Majefté  ,  &  prêt  à  féconder  de  tout  leur  pouvoir  ks  bonnes  &  fa- 
lutaires  intentions  pour  leur  propre  Bien  &  celui  du  Commun,  tout  ainft 
que  LL.  H  H.  PP.  feront  toujours  de  leur  côté  de  toute  leur  force  ;   que 
de  plus  Elles  conferveront  la  même  eftime  inviolable  qu'Elles  ont  toujours 
eue  pour  S.  M.,  priant  Dieu  de  vouloir  garder  en  fanté  la  précieufe  Perfon- 
ne de  Sa  Majefté  ,  de  la  ramener  ici  au  Printems,  &  de  bénir  fes  Confeila, 
au  bien  de  les  Roiaumes ,  de  cet  Etat,  &  de  toute  l'Europe.    Et  enfuite  il  a 
été  trouvé  bon  &  entendu,  que  la  dite  Pétition  générale  &  les  Etats  de 
Guerre  feront  envoyez  aux  Seigneurs  Etats  des  Provinces  refpectives, 
afin  de  prendre  tels  engagemens  ou  donner  telles  inftruclions  là-deïTus- 
qu'ils  trouveront  à  propos:  pour  laquelle  fin  ladite  Pétition  &  les  Etats  de 
Guerre  feront  copiez  au  plus  vite  nuit  &  jour  fans  perte  de  tems,  pour  les 
dites  Provinces. 


Résolu- 
tion du 

7.  Nov. 


Rêfoïution  du  Lundi  7.  Novembre  1701. 

Aiant  été  repréfenté  &  propofé  à  PAflembléë ,  qne  certaines  Gens 
qui  trafiquent  en  argent  non  monnoyé  ,  pour  éluder  Je  dernier 
Placard  de  LL.  HH.  PP.  contre  la  fortie  de  l'argent,  &  les  pénalitez  y 
ftatuées,  achetoient  encore  dans  ce  Pays  en  quantité  les  bares  &  lingots 
d'argent  &  les  Ducatons,  les  faifoient  fondre  &  en  fraper  des  écus  de 
banque  j  la  fortie  defquels  comme  d'une  moenoye  de  négoce  eft  permife, 

&  qu'ils 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  52; 

&  qu'ils  les  fortoient  ainfi  ,  &  reduifoient  hors  du  Pays  en  bares  d'argent,  Affaires 
&  que  fpecialement  de  tels  écus  de  banque  étoient  frappez  fur  la  mon-  DES  Pk°- 
noye  de  Hardenvyckj  il  a  été  trouvé  bon  de  charger  par  les  préfentes     Un°RS* 

les  Srs.  de  Haren  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour  les  Affaires -1 

de  la  Monnoye,  puiir  délibérer  quelles  mefures  feroient  les  plus  propres 
&  quelles  précautions  les  plus  convenables  pour  s'y  opofer  ;  qu'il  en  fera 
donné  connoiiTance  aux  Seigneurs  Etats  des  Provinces  respectives,  &  qu'ils 
feront  requis  de  mettre  (ans  perte  de  tems  de  tels  ordres,  que  par  provi- 
sion, &  jufqu'a  ce  que  LL.  HH.  PP.  ayent  pris  fur  ce  fujet  d'autres  Refo- 
lutions ,  il  ne  foit  plus  dans  les  Monnoyes  des  Provinces  refpe&ives  batu 
des  écus  de  banque,  ii-non  uniquement  pour  &  fur  l'ordre  des  Banques 
d'Amiterdam,  de  Rotterdam,  &  de  Middelbourg,  &  que  les  Seigneurs 
Etats  des  Provinces  de  Hollande  &  de  Weltfrife  &  de  Zelande  feront 
requis  de  donner  avis  de  cela  aux  CommifTaires  de  leurs  Banques  refpecli- 
ves  en  leur  recommendant  d'en  agir  avec  ménagement  &  circonfpeclion 
dans  la  Fabrication  &  dans  le  débit  defdits  écus  de  Banque. 

Extrait    du  Regijlre  des}  Réfolutiom    de    LL.   HH  PP.   tou- 
chant   le   Mémoire    des  Amirautez  ;    du  Lundi  14..  No- 
vembre 1701. 

Lu  à  l'Affemblée  le  Mémoire  des  Députez  âes  Collèges  de  l'Amirauté,  Amirau- 
portant,  qu'ils  jugeoient ,  que  les  Conjonctures  préfentes  exigeoient  tez- 
de  plus  en  plus  le  prompt  Equipement  extraordinaire  de  48.  VaifTeaux 
avec  ce  qui  y  apartient,  confiitant  en  6.  Vaiffeaux  du  premier  rang,  12. 
du  fécond,  18.  du  troifieme,  &  12.  du  quatrième  rang,  de  même  que  12. 
Fregattes,  avec  6  Brûlots  &  6  Galiotes  à  Bombes  ,  armez  enfemble  de 
18 108.  Hommes,  &  6.  Vaiifeaux  de  Provilîon ,  &  6.  Galiotes  à  engager 
par  mois  ,  dont  les  derniers  emporteroient  chaque  mois  enfemble  une 
ïbmme  de  664908.  flor.  comme  il  a  été  noté  par  les  dits  Députez  fur  ua 
Mémoire  remis  à  LL.  HH.  PP.  le  18.  Sept,  dernier  ,  donnant  ainfi  à 
connoitre  à  LL.  HH.  PP.  que  les  confentemens  neceffaires  pour  le 
dit  Equipement  extraordinaire  feroient  joints  pour  un  certain  tems  à  ceux 
que  les  dits  Députez  propoferoient  (fauf  le  très  fage  avis  de  Sa  Maj.  Bri- 
tannique) pour  8.  Mois,  parce  que  les  affaires  venant,  fuivant  toutes  les 
circonllances ,  aune  Guerre,  ce  tems  feroit  neceffaire  pour  employer  la 
Flotte,  &  pourrait  être  étendu  davantage  félon  l'occafion ,  Iefqueîs  8-  Mois 
feroient  pour  des  penfions,ibldes ,  &  pour  ce  qui  s'ufe,  de  même  que  pour 
le  loiiage  des  Vaiffeaux  de  Provifion  &  des  Galiotes,  une  fomme  de 
5319264.  florins  &  pour  la  réparation  des  Brûlots  18000.  flor.  ainfi  en  tout 
53372<H.  flor.  j  que  les  dits  Députez  prioient  à  ce  fujèt.  que  les  Provinces 
veuillent  s'y  refoudre  aufîi  promptement  qu'il  feroit  pofiible  ,  puif^u'un 
auiîi  grand  Equipement  demandoit  beaucoup  de  tems  pour  le  mettre  en 

S  f  ,3  Per- 


Affaires 
des  Pro- 
vinces- 
Unies. 


326  MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Perfection,  &  que  les  depenfes  feroient  autrement  inutiles,  il  les  Vaif- 
feaux  n'étoient  prêts  &  fournis  à  tems.  Surquoi  aïant  été  délibéré ,  il  a 
été  trouvé  bon  &  entendu,  que  Copie  du  dit  Mémoire  fera  envoyée  au 
Confeil  d'Etat,  &  qu'il  fera  requis  en  même  tems  de  faire  une  Pétition  de 
la  fomme  de  73 37264.  flor.  pour  l'Equipement  extraordinaire  de  48.  Vaif- 
feaux  de  Guerre  ,  12.  Fregattes  ,  6.  Brûlots,  6'.  VailTeaux  à  Bombes,  6. 
VaiïTeaux  de  Provifion ,  &  6.  Galiotes  mentionnez  ci-deflus  5  &  de  remettre 
la  dite  Pétition  à  LL.  HH.  PP. 


Affaires 
de  Mari- 
ne. 


Du  Mardi  15".  Novembre  1701. 

ut  le  Rapport  des  Srs.  van  Gent  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP. 
pour  les  Affaires  de  la  Marine,  aïant  vifité  &  examiné  le  Mé- 
moire des  Committez  ici  préfens  de  l'Amirauté,  lequel  porte  leur  avis 
pour  engager  9.  mille  matelots  au  fervice  de  l'Etat  durant  l'hyver  fur  des 
gages  Provifionels  de  10.  fols  par  jour  ,  afin  de  trouver  par  ce  moyen 
d'autant  mieux  les  Hommes  neceffaires  pour  l'Armement  de  la  Flotte  de 
l'Etat  au  Printems  prochain.  Surquoi  aïant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé 
bon  ,  que  Copie  dudit  Mémoire  fera  envoyée  au  Confeil  d'Etat,  &  qu'il 
fera  requis  en  môme  tems  de  former  une  Pétition  de  la  fomme  de  137000. 
flor.  par  mois  faifant  407000.  flor.  pour  3.  Mois,  afin  d'être  employez  à 
lever  fur  ces  gages  Provifionels  de  10.  fols  par  jour  pooo.  Hommes,  con- 
finant de  Gens  expérimentez,  de  bas  Officiers,  &  de  Matelots  les  plus  ha- 
biles ,  qui  feront  repartis  fuivant  la  proportion  ordinaire  fur  les  Collèges 
refpectifs  de  l'Amirauté  ,  à  commencer  comme  de  coutume  le  premier 
Janvier  1702.  &  à  finir  avec  le  dernier  Mars  fuivant,  &  de  faire  remettre 
la  dite  Pétition  à  LL.  HH.  PP. 


Réfolu- 
tion  du 
21.  Nov 


Réfoîution  du  Lundi  21.  Novembre  1701 3  fur  une  Lettre 

du  Conjeil  d'Etat. 

eçû  une  Lettre  du  Confeil- d'Etat  écrite  ici  à  la  Haye  le  19. du  cou- 
rant, laquelle  porte,  qu'en  confequence  de  la  Refolution  de  LL. 
HH.  PP.  du  2$.  Sept,  il  ne  fera  donné  des  deniers  de  Chariots  à  d'au- 
tres Regimens  qu'à  ceux  qui  ont  campé  effectivement  \  qu'il  fe  trouvoit  à 
préfent,  que  le  Printems  pafle  Sa  Maj.  Brit.  avoit  donné  ordre  à  divers 
Regimens  de  camper  &  de  fe  pourvoir  à  cet  effet  de  Chariots  &  d'Equi- 
pages necefiaires ,  lefquels  neantmoins  n'avoient  pas  enfuite  reçu  d'ordre 
de  fortir  des  Garnifons,  vu  que  les  affaires  n'étoient  point  venues  à  une 
rupture  l'Eté  dernier  ,  priant  ainfi  LL.  HH.  PP.  de  vouloir  déclarer 
comment  Elles  voudroient  qu'on  en  ùfat  à  l'égard  de  ces  Regimens  par 
raport  aux  deniers  de  Chariots,  Surquoi  ayant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé 

bon 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.   I.  327 

bon&arrcté,  que  Copie  de  la  fufdite  Lettre  fera  remife  entre  les  mains  Affairf.s 

des  Srs.  de  Lintelo  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP.  pour  les  Affai-  DES  Pro- 

res  des  Finances,  pour >  conjointement  avec  quelques  Srs.  Cornmittez  du  u^"s" 

Confeil  d'Etat  qu'il  nommera  lui-même,  vifuer,  examiner,  &  faire  raport  — — L 
de  tout  à  J'AfTemblée. 


Lettre  de  PElecleur  Palatin  aux  Etats  Généraux  ; 
du  23.  Novembre  1701. 

HAUTS   ET    PUISSANS  SEIGNEURS, 

Il  plaira  à  VV.  HH.  PP.  d'aprendre  par  les  Copies  ci-jointes  les  avis  Lettre  de 
qu'on  reçoit  dans  les  Païs-Bas  Efpagnols  &  dans  l'Archevêché  de  Co-  l'Elec- 
logne  au  fujet  de  la  Marche  des  François  par  nos  Etats  de  Juliers.  Corn-  teurPala" 
me  VV.  HH.  PP.  jugeront  elles-mêmes ,  qu'on  ne  peut  prendre  cela  au-  È#  q* 
trement  que  pour  un  commencement  de  rupture,  puifque  de  telle  forte 
les  Troupes  Françoifes  mettent  !e  pied  fur  le  Territoire  indifputabîe  de 
l'Empire  dans  le  Duché  de  juliers, fans  le  confemement  de  SaMaj.  Impé- 
riale, &  fans  nôtre  requilition  comme  Seigneur  Territorial  > de  même  quel- 
le calamité  &  devaflation  que  cela  cauferoit  à  nos  Pays,  &  que  Nous  fe- 
rions entièrement  enfermez  dans  notre  Refidence  en  deçà  &  en  delà  du 
Rhin ,  &  coupez  de  nos  voifins  bien-intentionnez  &  particulièrement  de 
VV.  HH.  PP.  quand  on  laifferoit  affez  de  tems  &  de  loîfir  aux  François 
d'entrer  non  feulement  en  Nuys  &  Keyfersweert,  où  vont  félon  des  avis 
leurs  deifeins  abfolument ,  mais  s'y  retrancher  aufTi  &  de. fe  mettre  en 
plus  grande  poflure:  Nous  prions  VV.  HH.  PP.  en  Ami  &  bon  Voifin 
de  délibérer  fur  les  moyens  de  prévenir  cela,  &  de  prendre  de  telles  Refo- 
lutions  que  le  demandent  l'importance  &  la  neceffité  de  l'affaire  à  la  con- 
fervation  &  au  bien,  tant  de  VV. HH.PP.  &  des  Provinces-Unies,  que 
de  leurs  Hauts  Alliez  &  Voifins,  &  de  nous  en  donner  enfuite  une  fi- 
dèle communication.  VV.  HH.  PP.  peuvent  être  affurées ,  que  de  nôtre 
côté  nous  ne  manquerons  point  de  concourir  félon  nôtre  pouvoir  à  tout 
ce  qui  pourroit  être  refolu  pour  cette  fin. 


A  Dufieldorff,  le  23.  Novembr.  1701. 


Jean  Guillaume, 

Electeur. 


Réfoïution  du  Samedi  26.  Novembre  170 


T. 


ui  le  Raport  des  Srs.  Députez  de  LL.  H  H.  PP.  pour  les  Affaires  Réfoïu- 

des  Pays  d'Outremeufe  ,    ayant  pour  fatisfaire  à  leurs  Refoiucions  ticn  fur 

Commifforiales  du  24.  Sept.  &  12.  Octobre  dernier  examiné  les  deux  Me-  [a  ^onf- 

*  tniction 


o 


moires 


Affaires 
dés  Pro- 
vinces- 
Unies. 

du  Baf- 
tion  de  S. 
Pierre 
à  Maf- 
tricht. 


328    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

moires  du  Sr.  Norf,  Confeiller  &  Refident  de  l'Electeur  de  Cologne,  E- 
vèque  &  Prince  de  Liège,  portant  plainte  fur  la  conftruétion  d'un  Fort 
fur  le  mont  de  St.  Pierre  près  de  Maftricht,  étant  territoire  de  Liège, 
fans  connoiiTance  préalable  &  fans  le  confentement  du  fufdit  Electeur , 
comme  Evêque  &  Prince  de  Liège,  mentionné  plus  amplement  dans  les 
Notules  du  2 s-  Sept.  &  22.  Oclobr.  dernier.  Surquoi  ayant  été  délibéré, 
il  a  été  trouvé  bon,  qu'il  fera  répondu  au  Sr.  Norf  fur  lefdits  Mémoires, 
que  l'ouvrage,  fur  lequel  on  fe  plaint,  &  qu'on  appelle  dans  les  Mémoires 
un  Fort,  n'eft  qu'un  Baftion  détaché,  ou  un  ouvrage  de  dehors  de  la  Vil- 
le de  Maftricht,  ci  ne  fervant  ou  pouvant  fervir  qu'a  éloigner  d'autant  plus 
l'ennemi  de  la  Ville;  que  LL.  HH.PP.,  ayant  examiné  lefdits  Mémoires, 
n'ont  pu  trouver,  que  la  conftruétion  dudit  ouvrage,  à  l'infçu  &  fans  le 
confentement  du  Prince  de  Liège,  ait  porté  aucune  atteinte  à fes  Droits, 
ou  qu'il  en  eût  été  donné  lieu  à  de  juftes  plaintes;  que  ledit  ouvrage  eft 
construit  à  la  vérité  fur  le  Territoire  de  Liège,  &  fous  la  junfdiction  Sei- 
gneuriale de  St.  Pierre  ;  mais  qu'il  eft  fi  proche  de  la  Ville  de  Maftricht, 
qu'il  ne  fauroit  être  confideré  autrement ,  fi-non  comme  une  exten- 
fion  des  Fortifications  précédentes  &  préfentes  de  cette  Ville;  que  la  Vil- 
le de  Maftricht  reconnoiffant  deux  Seigneurs,  LL.  HH.  PP.  y  ont 
neantmoins  le  Jus  Prœfidii  &  Fortalttiï  par  deflus  &  féparement  du  Sgr. 
Prince  de  Liège,  &  d'y  faire  tout  ce  qui  fe  pratique  fuivant  les  Droits 
communs  par  rapport  à  toutes  les  Fortereffes;  qu'en  confequence  de  cela 
LL.  HH.  PP.  ont  de  tems  en  tems  fait  à  la  Ville  de  Maftricht  avec  de 
fort  grandes  depenfes  tous  les  ouvrages ,  qui  ont  été  neceffaires  pour  la 
confervation  de  la  dite  Ville,  fans  regarder,  fi  le  terrain,  fur  lequel  on 
fait  quelques  ouvrages,  apartient  à  la  Ville  de  Maftricht  ou  pnvativement 
à  LL.  HH.  PP.  ou  au  Prince  de  Liège  ,  trois  cas  differens  qui  s'y  ren- 
contrent; que  pour  ce  qui  eft  des  Ouvrages  conftruits  fur  le  Territoire  de 
Liège,  fans  alléguer  apréfent  de  quelle  façon  l'extenfion  des  Fortifications 
de  la  Ville  de  Maftricht  a  été  déjà  accordée  dès  long-tems  par  les  Princes 
de  Liège,  S.  A.  Electorale,  de  même  que  le  Sr.  Norf,  ne  fauroient  igno- 
rer, que  LL.  HH.  PP.  font  en  bonne  &  tranquile  Poflefïion  d'excercer 
ledit  Droit,  fans  qu'il  foit  jamais  requis,  qu'il  falùt,  en  faifant  de  nou- 
veaux Ouvrages,  donner  connoiiTance  au  Sgr.  Prince  de  Liège,  ou  deman- 
der fon  confentement,  témoin  un  grand  nombre  d'Ouvrages  détachez 
conftruits  depuis  quelques  années  &  fubliftant  actuellement  furie  Territoi- 
re de  Liège;  que  le  Roi  de  France,  dans  le  tems  qu'il  a  été  maitre  de 
Maftricht  a  fait  en  confequence  de  ce  Droit  plufieurs  Baftions  &  toute 
l'inondation  du  côté  de  St.  Pierre  fur  Je  Territoire  de  Liège ,  fans  en  don- 
ner aucune  notification,  &  fans  qu'on  y  ait  fait  aucune  opofition  j  le 
"nouvel  ouvrage,  auquel  on  travaille  prefentement  fur  le  mont  de  St.  Pier- 
re étant  contigu  à  ces  ouvrages  &  occupant  à  peine  la  10  ou  2o"ie.  partie 
du  terrain  que  les  François  ont  occupé  dans  ce  tems-là  avec  lefdits  ouvra- 
ges &  l'inondation  ;  &  LL.  HH.  PP.  dans  la  conftruction  de  cet  nouvel 
ouvrage  ufant  de  leur  Droit  efperent  que  Sa  dite  Altefle  Electorale  ne 

s'en 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.    L  329 


ES 


s'en  plaindra  plus,  d'autant  que  cet  ouvrage  fert  uniquement  à  rendre  plus    Akfaip. 
forte  &  mieux  conferver  la  Ville  de  Maftricht,    dont  elle  elf.  Seigneur,    DES  Pko 
comme  Prince  de  Liège,  conjointement  avec  LL.  HH.  PP.;    que  S.  A.     ™NCB8" 

Electorale  pourra  aufii  juger,  fuivant  fa  grande  fageffe,  avec  combien  peu    — — 

de  fondement  les  François  fe  fervent  du  prétexte  de  cet  ouvrage  pour  fe  ren- 
forcer fur  le  Territoire  de  Liège.  Et  fera  l'Extrait  de  cette  Refolution  de 
LL.  HH.  PP.  envoyé  au  Refident  Spanheim  à  Ratisbonne,  pour  lui  fer- 
vir  d'information,  &pour  réfuter  par  fon  contenu  ce  qu'on  y  débite  com- 
me (ï  LL.  HH.  PP.  empietoient  fur  le  Territoire  de  l'Empire ,  &  entre- 
prenoient  des  chofes  auxquelles  elles  n'avoient  aucun  Droit. 

Refolution  du  Mercredi?.  Décembre  1701. 

Oui  le  Rapport  des  Srs.  de  Linteîo  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  Refolu- 
PP.  pour  les  Affaires  des  Finances ,  ayant  conjointement  avec  quel-  tI0"^" 
ques  Srs.  Committez  du  Confeil  d'Etat  examiné  la  Lettre  de  l'Electeur  cêmbrc 
Palatin  écrite  à  Duffeldorff,  le  22.  Novembre  dernier,  laquelle  porte  que 
LL.  HH.  PP.  avOient  aparement  déjà  apris,  qu'il  étoit  impoflible  à  leurs 
Troupes,  qui  font  dans  les  Provinces  de  S.  A.  Elecl.  de  fe  procurer  el- 
les-mêmes les  Fourages  à  caufe  du  haut  prix  où  ils  font  à  préfent ,  &  que 
S.A.  EleéL  de  fon  côté, ne  pouvant  abfolument  point  s'en  charger  ,  ne 
doutoit  pas,  que  LL.  HH.  PP.  ne  veuillent  prendre  inceffamenc  de  tel- 
les mefures  à  ce  fujet,  pour  que  la  Cavallerie,  faute  de  Fourage,  n'en 
fouffre  aucun  préjudice,  d'autant  plus  que  S.  A.  Elecl.  n'étoit  pas  d'hu- 
meur d'en  charger  fes  fujets  par  deffus  le  tems  propofé  par  le  Lieut.  Ge- 
neral Dopf,  ni  eux  en  état  de  le  pouvoir  fupporter.  Surquoi  ayant  été 
délibéré  ,  il  a  été  trouvé  bon  d'écrire  en  réponfe  audit  Elecleur,  que  LL. 
HH.  PP.  ne  s'étoient  pas  attendues  à  la  Repréfentation  faite  par  fa  Lettre; 
que  comme  Elles  ont  laiiTé  dans  ks  Provinces  de  S.  A.  Eleft.  leurs  Trou- 
pes envoyées  à  fon  fervice  en  les  payant  hors  de  leur  propre  Pays ,  El- 
les jugent  qu'il  falloit  qu'elles  en  fubfiftaflent  dans  les  Provinces  de  S.  A. 
Elect.  &  que  les  fourages  étant  trop  chers  pour  que  le  Cavalier  fe  puiffe 
nourrir  de  fa  folde  lui  &  fon  cheval,  S.  A.  ElecL  y  pourvût  du  moins 
par  le  règlement  du  prix  des  Fourages  ou  autrement,  vu  qu'il  neferoit  pas 
raifonnable,que  l'Etat  envoyant  fes  Troupes  hors  du  Pays  fût  chargé,  ou- 
tre les  foldes  ordinaires,  encore  du  foin  &  des  fraix  de  Fourages;  qu'ainfi 
le  dit  Elecleur  fera  prié  de  mettre  de  tels  ordres,  pour  que  la  Cavalle- 
rie de  l'Etat  puiffe  fubfifter  dans  les  Provinces  de  S.  A.  Electorale  fans 
que  LL.  HH.  PP.  foient  chargées  de  plus  que  des  foldes  ordinaires; 
qu'elle  fuit  pourvue  de  Fourages,  &  que  les  Trouppes  en  gênerai  puif- 
fent  être  confervées  comme  il  faut. 


T'orne  XI.  Te  Ré  fi- 


Affaires 
des  Pro- 
vinces- 
Unies. 

Refolu- 
du  30. 
Dec. 


Lettre  du 

Confeil 

d'Etat. 


330    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Réfohition  du  Vendredi  30.  Décembre  1701. 

Comme  on  a  délibéré  &  pris  en  confideration,  qu'avec  le  1.  Janvier 
prochain  il  vient  à  expirer  le  tems  de  deux  fois  4.  ans,  durant  lequel 
en  confequence  de  la  Refolution  de  LL.  HH.  PP.  du  16.  Avril  169$.  les 
Monnoyes  de  l'Empire  ont  été  arrêtées  ou  fufpenduês ,  moyennant  que  les 
Villes,  où  font  ces  Monnoyes,  en  tirent  par  an  chacune  400.  florins ,  la- 
quelle fomme  a  été  encore  portée  fur  le  prochain  Etat  de  Guerre  ,  dans 
l'attente  que  ces  Villes  continueront  la  fufpenfion  des  dites  Monnoyes  de 
l'Empire,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  que  les  Magiitrats  des  Villes  de 
Monnoye,  /avoir  de  Nimegue,  de  Zutphen,Deventer,  Campen  ,  Zwoll, 
&  Groningue  feront  requis  de  fufpendre  ces  Monnoyes  fous  les  mêmes 
conditions  pour  le  tems  d'encore  4.  ans  à  commencer  du  1.  Janvier  1701. 

Lettre  du  Confeil  d'Etat  ;  du  30.  Décembre  1701. 

Nous  avo'ns  communiqué  à  VV.  HH.  PP.  le  22.  du  courant  une  Re- 
quête de  l'Entrepreneur  du  Magazin  de  Fourage  à  Maftricht,  paria- 
quelle  il  nous  remet  fon  Contra6t,  &  nous  prie  d'en  être  déchargé.  A 
préfent  il  faut  que  nous  notifions  à  VV.  HH.  PP.  que  l'Entrepreneur  des 
Magazins  de  Fourage  dans  les  Frontières  de  Gueldre  &  de  Brabant  nous 
a  averti  par  une  Requête  de  difeontinuer  fa  livraifon  faute  de  paye- 
ment. 

Dépareilles  Dénonciations  nous  parviennent,  Hauts  &  Puiffans  Sei- 
gneurs, dans  un  tems  que  nous  fommes  preffez  d'autres  cotez,  non  fans  de 
grandes  raifons,  à  former  des  Magazins  de  vivres  &  de  fourage  dans  diver- 
ses Places.  Il  plaira  à  VV.  HH.  PP.  de  faire  fur  'ce  fujet  de  telles  re- 
flexions qu'Elles  trouveront  convenables ,  &  fe  laiffer  avertir  à  cette  occa- 
fion  de  grands  maux,  qui  fuivront  immancablement,  en  cas  d'une  Guerre, 
la  négligence  de  beaucoup  de  chofes,  fans  lefquelles,  ni  les  Troupes  ne 
peuvent  agir,  ni  les  Frontières  faire  une  due  defenfe.  Pour  nous,  il  faut 
que  nous  difions,  que  nous  ne  pouvons  plus  tenir  les  affaires  fur  le  bon  bout 
faute  d'argent  &de  crédit;  &  ,  quoique  nous  en  puifîions  attendre  peu  de 
fuccès,  nous  demandons  neantmoins  une  Conférence  pour  délibérer  avec 
des  Députez  deVV.  HH.  PP.  û,  &  comment,  on  pourra  difpofer,  après 
tant  de  Lettres  infruétueufes,  les  Provinces  h  l'acquit  des  confentemens  ac- 
cordez cette  année  pour  l'Adminiitration  des  Affaires  du  Pais,  &  particu- 
lièrement de  celles  qui  regardent  le  fourniffement  de  Magazins  &  les  fraix 
de  l'Armée  ;  confentemens,  qui  ne  fuffiroient  point ,  quand  même  ils  fe- 
roient  acquitez  jufqu'au  dernier  fol],  &  fur  lefquels  pourtant  diverfes  Pro- 
vinces font  de  beaucoup  en  arrière.     A  la  Haie,  le  30. Décembre  1701. 


NEGO- 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I. 


331 


NEGOTIATIONS    TOUCHANT  LES     £TK 


TROUPES    DANOISES    &c; 

JUIN DECEMBRE    M.   DCC.   I. 

Extrait  d'une  Letttv  des  Bourguemaîtrcs  £2?  Conjeiïïers  de  la 

Ville  de  Groningue. 


VINCES- 

Unies. 


L 


HAUTS    ET    PUISSANS    SEIGNEURS, 

es  Pétitions,  auxquelles  les  Seigneurs  des  Ommelandes  n'ont  pas  con-  Lettre  de 

M*         l%r,r     Inn     r^tronroc  11  Ville 


ti,  font  les  fuivantes: 


Le  3.  Etat  extraordinaire  de  Guerre;  l'Equipement  extraordinaire  \  la 
Négociation  du  troifième  terme  fur  l'Article  qui  regarde  les  fraix  de  l'Ar- 
mée &  des  Magazins  ;  &  la  Ratification  du  Traité  conclu  entre  l'Angleterre , 
le  Dannemarc,  &  cet  Etat.  De  plus,  la  Négociation  déjà  arrêtée  de  iyooDo. 
florins  pour  avoir  par  provifion  de  l'argent  comptant  ;  le  40^  denier  rap- 
portant le  plus  de  tous  les  Revenus  de  la  Province  levez  pendant  toute  la 
dernière  Guerre.  Outre  cela,  ils  chargent  &  bornent  les  nouvelles  levées, 
qu'on  a  refoluës  en  confequence  du  fécond  Etat  extraordinaire  de  Guer- 
re, de  tant  de  limitations,  reftriftions , additions,  exceptions, &  difficul- 
tez,  qu'elles  les  font,  ou  entièrement  tomber,  ouïes  rendent  impraticables» 
Nous  croyons  de  plus ,  que  les  dits  Seigneurs  en  fe  chargeant  de  6.  Com- 
pagnies du  Régiment  du  Colonel  Reinhard  ,  aparament  avec  aucune  au- 
tre vue  que  pour  en  donner  les  Emplois ,  comme  VV.  HH.  PP.  ont  bien 
voulu  le  remanquer  dans  leur  Lettre  du  7.  du  courant,  &  en  déclinant  au 
contraire  fix  Compagnies  de  Hefîe-CalTel  portées  fur  la  repartition  de  cet- 
te Province,  ont  fait  plus  de  préjudice  que  d'avantage  àlaCaufe  commu- 
ne &  à  cette  Province,  entr'autres  parce  que  les  dernières,  confiftant  en 
Hommes  agueris  &  expérimentez ,  même  en  confequence  de  la  Conven- 
tion faite  avec  le  Landgrave  de  HefTe  &  ratifiée  par  cette  Province, 
ne  fauroient  être  renvoyés  par  un  Membre  d'icelle,  &  que  d'un  autre 
côté  les  nouvelles  Compagnies  ne  doivent  qu'être  très  mauvaifes ,  peu 
exercées ,  &  guêres  en  état  de  rendre  fervice  au  Pais  pendant  le  cours  de 
l'année.  Nous  paffons  fous  filence,  comme  n'ayant  point  de  raport  à  ce 
que  ci-deffus  ,  qu'ils  font  encore  difficulté  de  faire  quelque  payement 
raifonable  aux  ainfi  nommez  Créanciers  de  Hollande. 


de  Gro- 
ningue. 


Du  Lundi  27.  Juin  1701. 

'tant  délibéré  fur  le  Traité  d'Alliance  defenfive  entre  S.  M.  le  Roi  de  Ratifie* 

J  Dannemarc,  Sa  Maj.  Britannique  ,  &  cet  Etat \  de  même  que  fur  le  ^°"it^ua> 

Traité  de  Commerce ,  les  Seigneurs  de  la  Ville  de  Groningue  ont  approu-  verca]eeD^ 

vé  &  ratifié  le  dit  Traité  ,  iuivant  la  Copie  qu'on  en  a  envoyé  à  cette  neTOart, 

Tt  2  Pro- 


E 


33i    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   Province,  à  condition  que  S.  M.  Brk.  aprouve  cette  Convention  &  que 
des  Pro-   jes  autres  Provinces  y  confentent  pareillement.     Surquoi  les  Seigneurs  des 
Unies"     Ommclandes  ont  déclaré  qu'ils  ne  declinoient  pas  l'aprobation  du  dit  Trai- 
'-    té,  mais,  l'Affaire  n'étant  pas  fi  prenante,  qu'ils  fouhaitoient  de  voir  pre- 
mièrement des  preuves  de  liquidation,  qui  manquent  encore  à  ce  Traité, 
&  qui  pourroient  être  données  par  S.  M.  Bric.  &  les  autres  Provinces,  & 
qu'ils  approuveroient  pareillement  le  dit  Traité,  quand  ils  le  jugeroient 
avantageux. 

Ayant  été  délibéré  par  Refomption  fur  le  troifième  Etat  de  Guerre,  les 
Seigneurs  de  la  Ville  ont  infiflé  à  leur  Confentement  précédent  pour  des 
raifons  ci-devant  amplement  déduites,  &  les  Seigneurs  des  Ommclandes 
fefont  engagez  de  délibérer  lh-deffus  à  la  Diète  prochaine.  Surquoi  les  Sei- 
gneurs de  la  Ville  ont  déclaré  de  ne  vouloir  pas  être  refponfables  de  tou- 
tes les  Confufions,  que  les  Seigneurs  des  Ommelandes  pouroient  caufer  aux 
Confederez,  &  à  cette  Province  en  particulier,  en  différant  &  tenant  incer- 
tain leur  Confentement.  Les  Seigneurs  des  Ommelandes  ont  encore  décla- 
ré, que  leurs  Remarques  fur  ledit  troifième  Etat  de  Guerre;  ne  provenoient 
pas  d'un  refus  d'y  concourir  conjointement  avec  les  Seigneurs  de  la  Ville, 
mais  du  mauvais  état  où  cette  Province  fe  trouvoit  de  fournir  de  prompts 
payemens  en  confequence  de  la  dite  Convention ,  fe  refervant  en  outre 
leurs  Remarques  ultérieures. 

Rêfolution  du  Lundi  15".  Août  1701. 

Réfolu-  /f~^uï  le  Raport  des  Srs.  d'Effen  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP. 
tion du  \^J  pour  les  Affaires  Etrangères,  ayant  examiné  la  Lettre  du  Refidenc 
! 5-.  Août.  Qoes  écrite  à  Copenhague  le  6.  de  ce  Mois,  laquelle  porte  entr'autres, 
qu'on  demandoit  de  la  part  de  Sa  Maj.  le  Roi  de  Dannemarc,  que  les 
Obligations  paffées  du  Roi  Frédéric  III.  de  glorieufe  mémoire  au  profit  de 
ia  Province  de  Hollande  &.  de  la  Ville  d'Amlterdam  feroient  renvoyées  & 
délivrées  en  conformité  de  l'Art.  <?.  du  Traité  dernièrement  conclu.  Sur- 
quoi ayant  été  délibéré,  &  pris  en  confideration  la  Rêfolution  de  LL. 
HH.  PP.  du  11.  Avril  dernier,  il  a  été  arrêté,  que  pour  dédommager  en 
quelque  manière  la  Province  de  Hollande  &  la  Ville  d'Amlterdam  à  cau- 
fe  de  ces  Obligations,  il  leur  feroit  donné  premièrement  les  f 00. mille  flor. 
promis  par  le  7.  Article  fecret  de  l'année  1696 ,  &  puis  encore  joo.  mille 
flor.  &  ainfi  en  tout  un  Million;  que  l'acquit  en  feroit  fait  en  Obligations 
à  la  charge  de  l'Union  ,  &  les  intérêts  portez  fur  l'Etat  de  Guerre  des  Pro- 
vinces Refpe&ives  chacune  fuivant  leurs  juftes  quote-parts  ,  favoir,  en 
cas  d'une  Guerre,  pendant  qu'elle  dure,  uniquement  les  dits  intérêts,  & 
autrement,  ou  la  Guerre  finie,  un  double  intérêt,  pour  en  employer  la 
moitié,  conjointement  avec  ce  qu'on  profitera  de  tems  en  tems  par  le  rem- 
bourfement,  à  la  reftitution  dudit  Million,  jufqu'à  ce  qu'il  fera  entièrement 
payé  avec  les  intérêts;  il  a  été  trouvé  bon&  entendu,  que  le  Confeil  d'E- 
tat 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  333 

tat  fera  prié,  comme  il  eft  prié  par  la  préfente,  d'expédier  des  Obliga-   Affaiiu» 
tions  pour  le  montant  d'un  Million  de  florins, pour  être  remifes  en  échange    DFS  PiK°- 
à  la  Province  de  Hollande  &  de  Weftfrife  &  à  la  Ville  d'Amfterdam  con-    ^f*" 
tre  les  dues  Obligations  du  Roi  Frédéric  III.  &  de  porter  les  intérêts  des        'NlLS* 
dites  Sommes  de  la  manière  ci-deflus  fur  l'Etat  de  Guerre.     EtlesSrs.  Dé- 
putez de  la  Province  de  Hollande  &  de  Weftfrife  font  priez  par  la  préfen- 
te de   faire  en  forte  dans  leur  AflTemblée  ,  que  les   dites  Obligations  du 
Roi  Frédéric  III.  foient  prêtes  pour  être  échangées  fur  la  prochaine  Réfo- 
lution  de  LL.  I1II.  PP.  contre  les  Obligations  à  expédier  par  le  Confeil 
d'Etat. 

Extrait  du  Regître  des  Réfolutions  de  LL.  HH.  PP.  les  Etats-Genc- 
raux  des  Provinces-Unies  ;  du  Samedi  3.  Septembre  1701. 

Reçu  une  Lettre  du  Confeil  d'Etat  écrite  ici  à  la  Haie  le  2.  du  cou-  Réfoïu- 
rant,  laquelle  porte  par  forme  de  Pétition  une  Supputation  des  Som-  tkindu  j. 
mes, qui,  en  confequence  du  dernier  Traité  conclu  avec  le  Roi  de  Danne-  pt' 
marc  ,  doivent  être  payées  cette  année:  les  divers  Articles  qui  font  à 
payer  incontinent  lorfque  les  Troupes  commencent  à  marcher  faifant  un 
million  neuf  mille  fept  cens  &  dix  florins,  14.  fols,  4.  deniers ,  à  laquelle 
fomme  il  faut  encore  ajouter  trois  mois  de  fubfides  à  payer  le  i$\  Décem- 
bre prochain,  portant  conjointement  avec  l'agio  &  le  change  cent  mille 
trois  cens  douze  flor.  10.  fols,  outre  la  portion  de  l'Etat  pour  trois  mois 
de  folde  &  d'apointemens  ordinaires ,  à  commencer  le  premier  Octobre, 
laquelle  doit  être  acquitée  précifement  au  commencement  de  chaque  mois 
^87984.  flor.  2.  fols  par  mois.  Surquoi  aiant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé 
bon  &  entendu,  qu'il  fera  envoyé  Copie  de  ladite  Pétition  aux  Provinces 
refpeclives,  en  les  priant, non  de  confentir,  vu  que  les  Confederez  y  ont 
déjà  confenti  par  la  conclufion  du  Traité  avec  le  Dannemarc,  mais  de 
fournir  chacune  leur  quote-part  avec  la  promptitude  requife  à  la  Pétition 
fufmentionnée. 

A  Zivoïï ,  le  ±.  Octobre  1701. 

LA  NobleiTe  &  les  Villes  qui  compofent  les  Etats  d'Over-YfTeî  ont  con-    Confen- 
fenti  par  des  Confiderations  particulières,  comme  LL.NN.PP.  con-    tement 
fentent  par  la  préfente,  à  une  Pétition  de  7275 17.  flor.  pour  ^pareillement    ^«Efats 
de  18.  VaifTeaux  de  Guerre,  qui  en  confequence  de  la  Pétition  de  1697.    .^./àW. 
doivent  être  conftruits,  tellement  pourtant,  que  cela  fera  non-feulement    nePéti- 
fans  confequence,  mais  que  même  LL.  NN.  PP.  déclarent  par  cette  Ré-    tion. 
folution  de  ne  vouloir  plus  être  moleltées  par  des  Pétitions  de  cette  na- 
ture ,  mais  que  les   depenfes  en  doivent  être  faites  par  les  Amirautez  ro 
fpe&ives. 

La  NobleiTe  &  les  Villes ,  &  les  Etats  d'Over-Yflel ,  confentent  par  h  pré- 
fente à  la  Pétition  de  249700.  florins  pour  la  conilruclion  de  12.  Vaifleaux 

Tt  3  de 


DES  PSO- 
VINCES- 

Unies. 


ReTolu- 
tion  fur 
des  Ga- 
ges du 
bas  Etat 
Major 
d'Infan- 
terie. 


Réfolu- 
tion  fur 
le  Paye- 
ment des 
Danois. 


334    MEMOIRES,  NEGOTIÀTIONS,  TRAITEZ,  ET 

de  Guerre,  mentionnée  plus  amplement  dans  la  Pétition  du  Confeil  d'Etat 
du  20.  Janvier  1701.,  en  forte  pourtant,  que  par  la  préfente  Refolution 
eft  annullé  &  fupprimé  le  Confentement  de  LL.NN.  PP.  accordé  ci- de- 
vant pour  la  conftru6tion  de  18.  VahTeaux  de  Guerre. 

Refolution  pour  régler  les  Gages  du  bas  Etat  Major  d?  Infanterie. 

Oui  le  Raport  des  Sieurs  de  Haren  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP. 
pour  les  Affaires  des  Finances ,  Iefquels  ont  été  encore  en  Conféren- 
ce avec  des  Srs.  Committez  du  Confeil  d'Etat  fur  quelques  points  de  l'Etat 
de  Guerre.  Surquoi  aiant  été  délibéré, il  a  été  trouvé  bon,  conformément 
au  très-fage  Avis  de  Sa  Majefté  Britannique,  que,  pour  égaler  fur  l'Etat 
de  Guerre  fuivant  une  proportion  raifonnable  le  bas  Etat  Major  d'un  Ré- 
giment d'Infanterie  à  celui  d'un  Régiment  de  Cavallerie,  il  fera  mis  fur 
l'Etat  de  Guerre,  pour  les  gages  dudit  Eçat  Major  d'un  Régiment  d'Infan- 
terie, 40.  florins  pour  un  Adjutant,  au  lieu  de  32.  n.o.;  20.  flor.  pour  un 
Chirurgien,  au  lieu  de  iy.  ;  pour  un  Quartiermaitre  fo.au  lieu  de  25*. flor. ; 
&  pour  un  Prévôt  if:  au  lieu  de  20.  flor.:  &  que  par  ce  moyen  celTera  le 
grand  nombre  de  gages  extraordinaires,  dont  lefdites  Perfonnes  du  bas 
Etat  Major  d'un  Régiment  d'Infanterie  ont  accoutumé  de  jouir  par-deffus 
leurs  gages  ordinaires;  &  que  le  Confeil  d'Etat  fera  prié  &  authorifé  de 
mettre  lefdits  gages  de  la  manière  comme  il  a  été  dit  ci-deffus  fur  l'Etat 
de  Guerre,  &  de  régler  d'autres  petits  points  femblables  qui  pourroient 
fe  trouver  en  dreffant  l'Etat  de  Guerre ,  comme  ils  ont  été  réglez  dans  la 
Guerre  précédente;  le  tout  fans  préjudicier  aux  libres  Délibérations  des 
Provinces  refpe&ives  fur  l'Etat  de  Guerre,  &  particulièrement  fur  les 
points  fus -mentionnez. 

Refolution  Jur  le  Payement  des  Troupes  Danoifes;  du  Samedi  8. 

Ofîobre  1701. 

tuï  le  Raport  des  Srs.  de  Gent  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP. 

pour  les  Affaires  des  Finances,  aiant  été  en  Conférence  avec  quel- 
ques Srs.  Committez  du  Confeil  d'Etat  fur  l'acquit  des  deniers,  qui  doi- 
vent être  payez  au  Dannemarc  &  pour  l'entretien  des  Troupes  Danoifes. 
Surquoi  aiant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon,  que  les  Seigneurs  Etats  des 
Provinces  refpeclives  feront  priez  de  fournir ,  outre  les  fommes  compri- 
fes  &  mifes  dans  la  Pétition  du  Confeil  d'Etat,  qui  leur  a  été  envoyée  le 
3.  du  courant,  encore  en  argent  comptant  au  Comptoir  du  Receveur  Ge- 
nenal ,  chacune  fa  quote-part  de  la  portion  de  l'Etat  à  la  moitié  des  fubfi- 
des  arréragez,  cette  moitié  montant  à  187700.  flor. ,  laquelle  fomme  n'efl 
point  portée  dans  ladite  Pétition,  puifqu'on  n'y  a  mis  que  tels  articles  qui 
doivent  être  acquitez  cette  année,  &  queè cette  féconde  moitié  des  fubli- 
des  n'auroit  dû  être  payée  que  fix  mois  après  la  première  :  mais ,  que  le 
Dannemarc  s'étant  opiniâtre  à  ne  pas  laiifer  marcher  les  Troupes  avant 
qu'on  lui  eut  aiuTi  remis  cette  fomme  en  Lettres  de  change  acceptées,  on 

n'a 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  535 


Affaires 

DES  PRO- 
VINCES- 


n'a  pû  le  lui  refhfer  en  lui  remettant  cette  fomme  comme  elle  l'a  déjà  été. 

Que  de  dIus  il  fera  de  nouveau  envoyé  aux  Seigneurs  Etats  des  Provinces 
un  bref  état  des  fommes  qui  doivent  être  payées  au  Dannemarc ,  oc  qui  ont     uN1ES# 

déjà  été  remifes,  en  les  priant  de  fournir  chacune  fa  quote-part  fans  retar-   

dément  au  Comptoir  du  Receveur  General  &  de  l'acquker,  pour  autant 
que  cela  n'eft  pas  encore  fait,  favoir  fur  les  termes  mentionnez  dans  ladi- 
te Pétition,  &  qu'on  y  exhortera  encore  très  - ferieufement  les  Seigneurs 
Etats  des  Provinces  de  Zelande  &  de  Groningue,  qui  n'ont  encore  rien 
fourni,  &  ceux  d'Over-YlTel  qui  n'ont  fourni  que  leur  quote-part  aux 
j-oo.  mille  florins. 

Réfolutionfur  le  Payement  des  Troupes  Danoijès  ;   du 
Jeudi  27.  Octobre  1701. 

Reçu  une  Lettre  du  Confeil  d'Etat  écrite  ici  à  la  Haie  ie  26.  du  cou-  Autre d© 
rant,  laquelle  fert  de  Réponfe  fur  les  Réfolutions  de  LL.  I1M.  PP.  du  même. 
7.  &  18-  de  ce  mois  touchant  les  deux  quarts  des  fubfides  courans  à  remet- 
tre au  Roi  de  Dannemarc,  qui  écherront  cette  année,  &  tendante  à  dif- 
pofer  les  Provinces  à  fournir,  non-feulement  les  deniers  y  neceifaires,  mais 
auiïï  ceux  qu'il  faut  pour  le  payement  des  foldes  des  Troupes  Danoifes 
qu'on  attend.  Surquoi  aiant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  arrêté,  que 
le  Receveur  General  fera  chargé,  comme  il  eit  chargé  par  la  préfente,  de 
délivrer  à  LL.HH.PP.  un  état  de  ce  qui  a  été  fourni  par  les  Provinces  & 
de  ce  qu'Elles  doivent  encore  fur  la  Pétition  pour  les  fraix  provenans  du 
dernier  Traité  avec  le  Dannemarc  à  la  charge  de  l'Etat  ,  y  comprife  la 
moitié  des  fubfides  arréragez  qui  a  été  déjà  remife,  mais  dont  il  n'a  point 
été  fait  mention  dans  ladite  Pétition. 

Extrait  du  Regître  des  Etats  de  Groningue  \  du  Samedi 

29.  Oclobr.  1701. 

&  les  Seigneurs  des  Ommelandes  ont  fbutenu  d'avoir  fatis-  R^fpla- 

fait  au  but  de  la  Diète  concernant  la  Convention  entre  Leurs  Majeftez  tionde 

Britannique,  &  Suedoife,  &  cet  Etat,  laquelle  étoit  ratifiée  ,&  qu'ils  con-  Gr°nin- 

fereront  à  la  Diète  prochaine  avec  les  Srs.  Députez  fur  d'autres  Affaires  §ue* 
non   réglées.     Surquoi  les  Seigneurs  de  la  Ville  fe  font  refervez  leur  An- 
notation ,  &  ceux  des  Ommelandes  leur  Contre  -  Annotation. 

Réfoîution  touchant  le  Paiement  des  Troupes  Danoifes  ;  du 
Mercredi  2.  Novembr.  1701. 

Ouï  le  Raport  des  Srs.  van  Eflen  &  autres  Députez  de  LL.  1 1 F I.  PP.  paVement 

pour  les  Affaires  des  Finances ,  aiant  en  confequence  &  pour  fatis-  desDa- 

faire  à  leur  Réfoîution  CommhToriale  d»  31.  du  paire  &  conjointement  nois-  • 

avec 


$$6    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    avec  quelques  Srs.  Committez  du  Confeil  d'Etat  examiné  la  Lettre  du  dit 
des  Puo-    Confeil,  concernant  le  payement  des  Troupes  Danoifes ,  dont  on  attend 

TJm£$~  tous  Ies  Jolirs  ^zniv^e  dans  ce  ^als >  ^e  meme  <lue  Je  Mémoire  du  Rece- 
WIE8'._  veur  General  d'Ellemeet,  avec  un  Etat  des  deniers  qui  ont  été  fournis  par 
les  Provinces  refpe&ives  fur  ceux  qui  refultent  du  Traité  avec  le  Danne- 
marc,  &  de  ce  qu'elles  doivent  encore  fur  cet  article.  Surquoi  aiant  été 
délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  ,  que  les  Seigneurs  Etats  des  Provinces  fe- 
ront priez  par  Lettre  d'acquiter  au  plutôt  leurs  quote- parts  à  la  Pétition 
pour  les  fraix  refuîtans  dudit  Traité,  du  moins  en  diminution  de  leurs  ar- 
rérages, &  de  fournir  inceiTamment  &  fans  aucun  délai  une  bonne  fomme 
d'argent;  &  que  les  Seigneurs  Etats  de  la  Province  de  Groningue,  qui 
font  en  défaut  plus  qu'aucune  autre  Province,  n'aiant  encore  rien  payé, 
feront  priez  particulièrement,  &  exhortez  le  plus  ierieufement,de  fournir 
pareillement  leur  quote-part  fans  plus  de  délai. 

Extrait  du  Regître  des  Réfolutions  de  LL.  HH.  PP.  les  Etats-Gene* 
raux  des  Provinces-  Unies  ;  du  Lundi  19.  Décembre  1701. 

Réfolu-  i^11'1  Ie  Raport  des  Srs.  van  EfTen  &  autres  Députez  de  LL.  HH.  PP. 
tionfur  \^J  p0ur  les  Affaires  des  Finances,  aiant  en  confequence  &  pour  fatisfai- 
pointe-  re  a  ^eLirs  Réfolutions  Commiiïbriales  du  10.  &  12.  du  courant  examiné 
mens  des  conjointement  avec  quelques  Srs.  Committez  du  Confeil  d'Etat  les  Re- 
Danois.  montrances  du  Duc  de  Wurtemberg,  General  des  Troupes  de  Sa  Majeité 
Danoife,  lefquelles  font  au  fervice  de  S.  M.  Brit.  &  de  LL.  HH.  PP.  les 
priant,  premièrement  de  vouloir  changer  leur  Réfolution  du  premier  du 
courant  par  raport  au  payement  defdites  Troupes,  en  tant  qu'elles  foient 
payées  promptement  &  fans  rabais ,  du  moins  fur  le  même  pied  que  celles 
de  Hanovre,  de  Zelie,&  d'autres  Princes  ;  fecondement  de  vouloir  payer 
pour  un  mois ,  tant  aux  Généraux  qu'aux  autres  Officiers  &  Perfonnes  de 
l'Etat  major,  non -feulement  les  ordonnances  des  Chariots,  mais  auiïi  les 
appointemens  extraordinaires  ,  comme  S.  M.  Brit.  avoit  refolu  de  faire 
pour  fa  portion.  Les  dits  Srs.  Députez  aiant  pareillement  examiné  le  Mé- 
moire du  Sr.  van  Stocken,  Envoyé  Extraordinaire  du  Roi  deDannemarc, 
fur  le  même  fujet.  Surquoi  aiant  été  délibéré,  il  a  été  trouvé  bon  &  en- 
tendu, qu'à  l'égard  du  premier  point,  les  Seigneurs  Etats  des  Provinces, 
à  la  charge  defquelles  les  Troupes  Danoifes  font  reparties  par  l'Etat  de 
Guerre,  feront  priés  par  Lettre  de  faire  de  telles  difpofitions  pour  que 
lefdites  Troupes  foient  payées  conformément  au  Traité;  &  quant  au  fé- 
cond point,  qu'il  fera  payé  pour  un  mois  aux  Généraux  de  Cavallerie  & 
aux  autres  Officiers  &  Perfonnes  de  l'Etat  major,  non- feulement  les  deniers 
de  Chariots ,  mais  auffi  les  appointemens  extraordinaires  :  &  fera  remis 
Extrait  de  cette  Réfolution  de  LL.  HH.  PP.  par  l'Agent  Rofenboom  en- 
tre les  mains  du  Sr.  van  Stocken  pour  lui  fervir  d'information. 

De     W  e  e  d  e. 

Accorde  avec  ledit  Regître.  F.    F  a  g  e  l. 

Nous 


N 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.         337 

ou  s  Soufîlgnez  CommilTaires  de  Sa  Majefté  Britannique  &  de  LL.   Araire» 
HH.  PP.  les  Seigneurs  Etats- Généraux  des  Provinces  -  Unies  5  nom-   DES  Pr°- 
mément  William  Cadogan,  Quartier  -  Maitre  General  &  Colonel,  &  Wil-     ™™~ 
liam  Aldershey  de  la  part  de  Sa  dite  Majefté  ;  comme  auffi  Gérard  Kuyf-    _J^_ 
ten,  Réfident  à  Hambourg,  &  Jaques  de  Bie,  de  la  part  de  LL. HH. PP.   Aftedc 
lefdits  Seigneurs  Etats -Généraux}  avouons  par  la  préfente,  que,  fuivant   S-ecep- 
le  contenu  de  nos  ordres  &  inftru£tions,  nous  avons  reçu,  en  conformité   ÎA°ndes 
des  Articles  du  Traité  conclu  entre  S.  M.  le  Roi  de  Dannemarc,  Norve-   Danois 
gue  &c.  d'un  côté,  &  S.  M.  Britann.  &  LL.  HH.  PP.  les  Seigneurs  Etats-   fes. 
Généraux  des  Provinces -Unies  de  l'autre,  complets  &  en  bon  état  huit 
Regimens  de  Cavallerie ,  qui  font  trois  mille  trois  cens  &  vingt  Hommes , 
&  fept  Bataillons  d'Infanterie  chacun  de  fix  Compagnies  :  fçavoir, 

Les  Gardes,  confiitans  en    -----     675).  Hommes. 
Le  Bataillon  de  S.A.R.  le  Prince  Charles       643. 
Le  Bataillon  de  S.  A.  R.  le  Prince  George     643. 
Le  Bataillon  de  Zeelande     -----       643. 
Le  Bat.  du  Duc  de  Wurtemberg     -    -    -      643. 
Le  Bat.  du  Lieut.  General  Scholtzen    -    -     643. 
Le  Bat.  du  Maj.  General  Harboe     -     -    -     (543.   . 
&  outre  cela  encore  le  Bataillon  de  Fuhnen  avec  la  Compagnie  de  Gre- 
nadiers, ne  faifant  que  7.  Compagnies,  puifqu'il  y  manque  i2f.  y  com- 
pris ceux  qui  font  caliez,  pour  lefquels  on  ne  paye  point  d'erres,  confi- 
nant en - 664. 

Une  Compagnie  de  Grenadiers  du  Bataillon  du 
Prince  Charles,  à  laquelle  il  manque  fept, 
faifant     -----------      104. 

La  Compagnie  de  Grenadiers  du  Bataillon  de 
S.A.R.  le  Prince  George,  à  laquelle  il  man- 
que 14.,  faifant     ------      -     -     97. 

k  La  Compagnie  de  Grenadiers  du  Bataillon  de 

Zeelande,  dont  il  manque  pareillement  18.     #3. 

en  tout ,  cinq  mille  quatre  cens  nonante  &  cinq  Hommes.  Surquoi  nous 
quitons  le  plus  efficacement  par  la  préfente,  en  vertu  du  Pleinpouvoir  dont 
nous  fommes  munis  pour  cet  effet  des  Seigneurs  nos  Principaux,  fous  nô- 
tre fein  &  cachet  ,  le  Sr.  Chrifloph-Joachim  Giefe ,  Confeiller  actuel  de 
Juftice,  &  CommifTaire  General  de  Guerre  de  S.  Maj.  Danoife,  comme 
étant  chargé  par  Sadite  Majefté  de  délivrer  les  Troupes  fus-mentionnées. 

Et  comme  ledit  Sr.  Confeiller  de  Juftice  Giefe  prétend,  qu'il  faut  en- 
core payer  go.  Rifdales  pour  un  Charretier  avec  z.  Chevaux  &  un  Chariot 
de  l'armée  dans  chaque  Compagnie  de  Cavallerie,  de  même  que  30.  Rif- 
dales pour  un  Prévôt  &  foa  Valet  dans  chaque  Bataillon  d'Infanterie  ;  & 
que  nous  ne  nous  trouvons  pas  autorifez  de  le  payer,  fans  un  ordre  parti- 
culier de  nos  Hauts  Principaux  refpeétifs  ;  nous  promettons  par  la  préfen- 
te de  leur  en  faire  un  très-humble  Raport.  Et,  quoique  cette  Quitance  foit 

Tome  XL  V  v  ex- 


3^8    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   expédiée  &  lignée  in  duplo  ,  elle  n'en  vaudra  pourtant  que  pour  une. 
»esFro-    Ydàt  à  Hambourg,  le  3.  Novembre  170 1. 


VINCES- 

Unies. 


(L.S.)  Cadogan.        (L.S.)  Gekard  Kuyste.n» 
(L.S.)   Al  D  ERS  HE  Y. 

J'attelle  par  la  préfente ,  que  cette  Copie  s'accorde  avec  fon  Original.  A 
Hambourg,  le  3.  Novembre  1701. 

C.    J.    G  I  E  3  !. 


Défaite 
des  Fran- 
çois à 
Carpi. 


LETTRES    DE  DIVERS  ENDROITS  AUX 

ETATS -GENERAUX. 

A  Taris ,  le  18.  'juillet  1701. 

IL  eft  arrivé  des  Couriers  d'Italie, des  8, ?,  10  &  11  de  ce  Moisj&àpré- 
fent  on  avoue  en  quelque  manière  publiquement ,  que  Mr.  de  St.  Fre- 
mont  a  été  entièrement  défait  par  les  Allemans  à  Carpi;  &  que  tout  fbn 
Détachement,  qui  confiftoit  en  4. Regimens  de  Dragons,  un  de  Cavaîle- 
rie,  &  2.  Bataillons  d'Infanterie,  a  été  prefque  tout  taillé  en  pièces.  Cette 
Cour  eft  fi  peu  accoutumée  à  aprendre  de  mauvaifes  Nouvelles,  que  cet- 
te Difgrace  ne  l'a  pas  peu  allarmée.  Le  Chevalier  d'Albret ,  &  le  Marquis 
de  Cambout,  ont  été  tuez,  &  on  à  difpofé  de  leurs  Regimens  en  faveur  de 
leurs  Frères.  H  y  a  environ  zy.  autres  Officiers  de  tuez,  &  plufieurs 
bleflez.  La  Ratification  du  Traité  entre  les  Turcs  &  les  Vénitiens  eil  ar- 
rivé à  Venife,  ligné  par  le  Grand  Seigneur. 


A  Taris  5  le  12.  Août  1701. 

Rapels  E  Marquis  deTorcy  a  réïtérement  dit  à  mon  Secrétaire,  qu'on  ne  de- 

des  Com-  JL-/  voit  attribuer  le  Rapel  du  Comte  d'Avaux ,  qu'au  Mélange  que  LL. 
HH.  PP.  faifoient  de  leurs  intérêts  avec  ceux  de  l'Empereur  contre  les 
Princes  qui  tachoient  de  vivre  avec  Elles  dans  une  fincere  Amitié. 

Son  Excellence  demanda  aufîi,  fi  LL.  HH.  PP.  ne  m'avoient  pas  en- 
voyé, conjointement  avec  leurRéponfe  furie  Mémoire  en  Queiiion,  une 
Lettre  au  Roi  fur  ce  fujet?  Surquoi  le  Secrétaire  ayant  repondu  que  non, 
S  E.  ajouta  ,  que  le  dit  Comte  le  lui  avoit  pourtant  marqué.  Cela  don- 
ne lieu  de  croire,  à  mon  avis,  que  cette  Cour  l'auroit  bien  fouhaité,au  lieu 
qu'à   préfent  elle  ne  paroit  pas    contente  que  le  dit  Comte  d'Avaux 

n& 


vaux  & 
Z/inzen- 
dorff. 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.         ^9 

ne  Toit  pas  parti  incontinent  après  la  dite  Réponfe  de  LL.  HH.  PP.;  puif-  AmntEt 
qu'il  avoit  dû  juger,  que  l'unique  pierre  d'achopement ,  favoir  la  préten-  DES  Pro- 
due  fatisfaclion  de  l'Empereur,  n'étant  point  levée ,  fon  Rapel  ne  pourroit  J^" 
qu'être  confirmé.  - — JL 

Il  eft  arrivé  ici  hier  à  midi  un  Courrier  d'Italie,  fans  qu'on  fâche  en- 
core avec  quels  avis; mais,  il  ell  certain  par  des  Lettres  du  3  du  cou- 
rant, que  les  Impériaux,  après  avoir  paiTé  le  Mincio  à  la  vue  des  Fran- 
çois ,  font  avancez  de  deux  marches  vers  VOgiio. 

Le  Comte  de  Sintzendorff  a  été  rapellé  de  l'Empereur  fon  Maître;  &, 
en  ayant  donné  connoiflance  au  Marquis  de  Torcy,  il  prendra  Mardi  pro- 
chain congé  de  cette  Cour,  &  partira  enfuite  à  la  fin  de  la  Semaine 
avec  tout  fon  train. 

A  Mafîrkht ,  k  13.  Août  1701. 

Les  Avantgardes  de  l'Armée, fous  les  Marquis  de  Villeroi  &  de  Crequi,  Entrée 
au  nombre  de  7.  Bataillons  &  10.  Efcadrons,  font  arrivées  à  Amalie^   des  Fran- 
ce marcheront  aujourd'hui  à  Theu ,  étant  la  route  la  plus  droite  de  Limbourg  :   f°  l,^"s 
les  autres,  fous  Tallard&  Villeroi,  fuivent  en  deux  Colonnes  à  mefure  que   bourg  & 
les  premières  avancent;  il  y  en  a  26.  à  28. Bataillons,  &  f4-  Efcadrons.  Le   lePaïsde 
defTem  paroît  être  de  s'afîurer  de  l'Archevêché  de  Cologne.     Les  Fran-   Uegc. 
çois  ont  demandé  de  Theu  (Territoire  de   Liège)    8-  mille  rations  de 
Fourage,  avec  quelques  Charettesj  &  ceux  de  Liège,  auxquels  le  Prince 
avoit  envoyé  ordre  depuis  quelques  jours  pour  empêcher,  autant  qu'il  eft 
pofîible  ,  que  la  Garnifon  d'ici  ne  dût  camper  hors  de  la  Ville,  près  de  St. 
Pierre,  lui  ont  répondu,  que,  pour  relier  dans  une  exa6te  Neutralité. 
ils  attendoient  de  S.  A.  Electorale,  qu'Elle  les  affranchiroit  de  dits  Fou- 
rages  demandez. 

Avanthier,une  grande  quantité  de  Farine  &  de  Bétail  a  pafTé  par  Liège 
à  Limbourg  &  Herre  ;  &  les  Liégeois  ne  font  pas  fans  crainte ,  qu'on  ne 
s'empare  de  leur  Citadelle  :plufieurs  en  font  d'autant  plus  en  peine,  qu'il  efi: 
arrivé  un  ordre  du  Prince  de  difeontinuer  la  Démolition  de  l'Ouvrage  de 
la  Charireufe^  vu,  comme  il  paroît,  que  les  François  pourroient  s'en 
fervir. 

Dans  ce  moment,  j'aprens  par  quelqu'un  qui  vient  du  Païs  de  Luxem- 
bourg, qu'il  n'y.  a  eu  zAiwalie  que  9000.  Hommes  tant  d'Infanterie  que  de 
Cavallerie,  &  que  deux  Regimens  des  derniers  étoient  marchez  hier  à 
Theu  ;  que  Mr.  Tallard  étoit  encore  a  ïhomme ,  avec  un  Corps  de  6.  à  7000. 
Hommes;  &  qu'il  y  en  avoit  environ  f.  à  6.  mille ,  du  côté  d'Pkteîbruck  & 
Hetterchett ,  où  le  Maréchal  de  Villeroi  avoit  fon  Quartier ,  mais  qu'ils 
dévoient  aller  hier  ou  ce  matin  camper  à  Stavelo,  où  l'on  portoit  quelque 
Fourage;  que  l'Artillerie  étoit  à  Linquer  ;  &  qu'avec  la  Maifon  du  Roi, 
qu'on  attendoit,  l'Armée  feroit  de  15.  à  30000.  Hommes. 

V.v  2  yf 


34-0    MEMOIRES,  NEGOTÏÂTIONS,  TRAITEZ,  ET 


Affaires 
DES  Pjao- 

VINCES- 

Unies. 

Echange 
du  Traité 
entre  la 
France , 
l'Efpa- 
gne,  &  le 
Portugal. 


A  Lisbonne,  le  \6.  Août  1701. 

IL  y  a  eu  jeudi  pafTé  8  jours  que  le  Traité  fait  depuis  peu  entre  la  France, 
l'Efpagne  ,  &  cette  Couronne  ,  fut  échangé  ici,  non-obitant  tous  les  de- 
voirs que  nous  avions  employez  l'Envoyé  d'Angleterre  &  moi,  afin  de  le 
différer  jufqu'à  ce  qu'on  eût  reçu  de  Hollande  de  plus  fùrs  Avis  de  la  Guer- 
re ou  de  la  Paix  ;  &,  le  lendemain,  il  fut  divulgué  un  Billet,  qu'on  fermeroic 
les  Ports  à  ceux  qui  viendroient  à  troubler  le  prefent  Roi  d'Efpagne  dans 
la  Succeflion. 


Marche 
de  la  Ca- 
valerie 
Danoife. 


A  Hambourg,  le  30.  Août.  1701. 

Aussitôt  que  j'eus  apris ,  que  le  Quartier- Maître -General  Cado- 
gan  étoit  arrivé  ici,  j'ai  été  trouver  S.  E.  pour  concerter  enfemble  les 
moyens  d'exécuter  les  Ordres  de  Sa  Maj.  Brit.  &  de  LL.  HH.  PP.  pour 
prendre  en  leur  fervice  les  Troupes  Danoifes  &  d'avancer  la  Marche  de  la 
Cavallerie  vers  les  Frontières  de  l'Etat.  Le  Réfultat  de  nos  Conférences  a 
été,  que,  d'abord  qu'on  recevra  avis  que  l'Infanterie  fera  venue  près  de 
Gluckftadt,  on  louera  des  Vaiifeaux  pour  l'embarquer  ,  &  réglera  avec 
les  Officiers  la  manière  dont  on  fera  la  Provifion  pour  leur  fubfiflance, 
ou  dont  on  conviendra  avec  les  dits  Officiers.  A  l'égard  de  la  Cavallerie, 
on  trouve  le  plus  expédient  de  la  diviferpour  lui  faire  pafTer  l'Elbe, la  moi- 
tié près  deTollenfpicker&de  les  faire  marcher  par  les  Etats  du  Duc  deZel- 
le,  de  l'Elecleur  de  Hannover,  del'Evèque  de  Munfler,  &  par  le  Comté 
de  Lingen,  vers  les  Villes  Frontières  de  l'Etat;  &pour  l'autre  moitié,  de 
la  faire  pafTer  la  dite  Rivière  près  de  Blanckenefe,  pour  faire  leur  marche 
par  l'Eveché  de  Bremen  &  le  Païs  de  Munfier,  pareillement  vers  les  Fron- 
tières de  la  Patrie;  &  comme  il  n'y  a  perfonne  ici  pour  régler  de  la  part 
de  la  Cour  de  Dannemarc  la  route,  j'ai  écrit  là-deffus  au  CommifTaire  van 
der  Meer,  qui  me  fait  efperer  qu'il  pourra  la  régler  avec  les  Miniltres 
du  Duc  de  Zelle,  &  qui  a  auffi  écrit  au  Gouverneur  General  de  Suéde 
Guldenfliern  pour  demander  le  libre  paffage  par  le  Duché  de  Bremen  de 
l'autre  moitié  de  la  dite  Cavallerie,  furquoi  on  attendoit  réponfe. 

Et  puifque  Mr.  Cadogan  nous  a  témoigné,  que  Sa  Maj.  Brit.  trouve  ex- 
trêmement neceffaire,  dans  la  fituation  préfente  des  Affaires,  défaire  venir 
le  plutôt  le  mieux  les  Troupes  Danoifes  dans  les  Provinces-Unies  ;  & 
voyant  que  les  Officiers  n'ont  point  eu  de  payement  depuis  quelques 
mois  du  Roi  de  Dannemarck;  il  feroit  à  craindre,  que  cela  ne  caufat  du 
retardement,  en  cas  que  les  erres  promifes  par  le  Traité  ne  fuffent  pas 
fournies  ponctuellement  par  le  Roi  &  LL.  HH.  PP.fuivant  la  Notice  ci- 
jointe.  C'eft  pourquoi  Mr.  Cadogan  en  envoie  aujourd'hui  une  Copie  au 
Sr.  Blâckwaith,  &  une  autre  pour  la  même  fin  à  Mr.  de  Schoulembourg, 
remettant  à  la  grande  Sageife  du  Roi  fon  Maître  &  de  LL.  HH.  PP.  s'il 

ne 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I. 


34i 


DFS    PKO- 
VINC.'.S- 
UtifES. 


neferoit  pas  bon,  pour  obtenir  leur  but  falutaire,  d'anticiper  le  payement,    Affaires 
afin  de  prévenir  tout  fujet  de  retardement. 

Il  me  falloit  pourvoir  de  deniers ,  pour  fournir  les  étapes  de  la  Cavalle- 
rie*  &  il  m'a  falu  payer  pour  cette  fin  aux  Officiers  un  mois  de  folde, 
avant  que  j'aie  tiré,  comme  je  l'ai  fait  aujourd'hui,  conformément  aux  Or- 
dres de  LL.  HH.  PP.,  fur  Mr.  d'Ellemeei  10.  mille  florins  à  payer  a  12. 
jours  de  vue'. 

De    B  y  e. 

Lettre  du  Commïffaire  van  der  Meer>  du  2  Septembre  1701. 

J'Ai  eu  l'honneur  de  parler  avec  M-">nfr.  de  Bernftorf  fur  la  Route  de  la   R0Ute  de 
Cavalerie  de  Dannemarc,  &  il  m'adonne  pour  réponfe  ,  qu'il -ne  pou-    laCavak- 
Voit  pas  me  dire  précifement  l'endroit  où  la  Cavalerie  devoit  paffer,  mais   rie  Da- 
qu'elle  prendroit  fa  Marche  depuis  Tollenfpicker  fur  Winjen,  delà  à  Reihem ,   "°1,rf.'?ans 
Hoya  &  Nienbourg\  qu'il  avoit  fait  écrire  aux  Villages  fituez  entre  ces  Pla-   iatdeHa- 
ces-là,  pour  favoir  ,  comment  on  logeroit  &  nouriroit  ces  Troupes  fur   nover. 
leur  paffage  le  plus  commodément;  qu'il  n'avoit  pas  encore  reçu  réponfe, 
mais  que   les  Commiflaires  ,  que  S.  A.  S.  enverroit  à  Winfen,  y  regle- 
roient  tout  cela  parfaitement  ,&  combien  de  Regimens  pourroient  paffer  à 
la  fois,  mais  qu'il  lui  faloit  favoir  une  femaine  auparavant  le  jour  précis 
que  ces  Troupes  arriveroient  près  de  l'fclbe  &  à  Tollenjptcker  ,  afin  que  les 
Commifiaires  de  S.  A.  S.  plaident  s'y  trouver  à  tems.     J'ai  donné  avis  de 
tout  cela  par  la  poite  d'aujourd'hui  au  Sr.  de  Byej  &  je  lui  ai  écrit,  pour 
gagner  du  tems ,  de  marquer  en  droiture  de  Hambourg  à  Mr.  de  Bern- 
fiorff  le   jour  que  les  dites  Troupes  arriveront  à  Tollenfpicker  ;  mais  ce 
Miniflre  ayant  oublié  la  Taxe  des  vivres  il  en  fit  écrire  en  ma  préfence  à 
Zelle. 


A  Hannovre ,  le  2.  Septembre  1701. 


Van    der     M  e  e  r. 


A  Vienne  3  le  14.  Septembre  1701. 

vanthïer  au  foir,  un  autre  Courier  du  Miniflre  Impérial  arriva  ici  Alliance 

delà  Haye, des  Dépêches  duquel  j'ignore  le  contenu, fi  non  que  l'on  rfe  11Fm- 

conje&ure  qu'elles  regardent  l'affaire  de  l'Alliance  qu'on  fouhaite   ici  fi  ^"[, 

fortement,  entre  l'Empereur,  S.  M.  Brit. ,  &VV.  HH.  PP. ,  &  qu'on  re-  terre,'  & 

garde  ici  comme  le  fondement  du  Bien  de  toute  l'Europe  dans  la  préfente  desE.  G. 
Conjon6lure  dangereufe.  On  entend  même  par-tout  à  cetteCour  des  Plain- 
tes de  ce  que  cette  Alliance  n'elt  pas  déjà  conclue  depuis  long-tems. 


Vv 


 


des  Pro- 
vinces- 
Unies. 


342    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

A  Cologne ,  Z?  23.  Septembre  1701. 


ues 


Divifions    /^YN  dh  que  la  Cour  de  Cologne  tient  les  Patentes  prêtes  pour  quelqu 
entre         v/  nouveaux  Regimens,  mais  qu'elles  ne  font  pas  encore  diilribuées. 
l'Arch.  &        La  ]^iete  de  Cologne  s'efl:  rompue  hier  à  Bonn ,  fans  avoir  rien  conclu  & 
le  Chapi-   rep0|u  fur  ja  première  Propofuion  de  S.A.  Eleél.  ;  &  les  Députez  duChapi- 
Golognc.    *re  revinrent  ici  hier  au  foir  après  qu'ils  eurent  fait  remettre  à  S.  A.  Eleél. 
une  Lettre  de  leurs  Principaux,  portant  la  raifon  de  leur  Rappel.  Il  efl  fur- 
prenant,  que  les  Membres  du  Chapitre  ayent  été  (1  d'accord  dans  toute 
cette  affaire,  que  même  ceux  qui  étoient  ci-devant  pour  le  Parti  de  la 
France  viennent  de  témoigner  le  plus  grand  Zélé  pour  la  Confervation 
des  Privilèges  &  des  Prérogatives  de  l'Eglife  de  Cologne. 

Dans  ce  moment,  j'aprens  que  tous  les  Etats  demeurent  feparez  à  Bonn, 
uniquement  pour  le  bien  commun ,  que  l'Eleéleur  les  a  congédiés  en  de- 
mandant 12.  Simples  pour  une  année  à  payer  au  Comptoir  du  CommifTaire 
de  Guerre;  menaçant,  au  défaut,  le  Païs  d  Exécution.  S.A.  Eleél.  a  écrit  au 
Chapitre  de  l'Eglife  Cathédrale,  pour  confentir  à  la  Diète  en  Weflphalie, 
&  elle  y  a  déjà  envoyé  ordre  pour  faire  affembler  les  Etats  le  6  Oélobre 
à  Arensberg.  Le  Chapitre,  prenant  cela  fort  mal,-a  refufé  à  l'Eleéleur 
cette  demande,  &  a  averti  les  dits  Etats  de  ne  pas  s'alTembler,  puifque  le 
Chapitre  n'y  confentoit  point.  Le  Comte  de  Sr.  Maurice  efl  devenu  Gou- 
verneur de  Keyferswerth  à  la  Place  du  Colonel  Bernfaw  ;  il  eft  appa- 
rent qu'il  y  aura  auiîi  quelques  changemens  dans  les  autres  Places. 


t,evée 
d'un  N. 
Régi- 
ment 
é'  Artil- 
lerie. 


A  Bruxelles  >  le  26.  Septembre  1701. 

On  dit  ici,  que  fous  la  Levée,  qui  fe  fera  encore  dans  ce  Païs-ci,  il 
fera  compris  un  Régiment  d'Artillerie,  compofé  de  Grenadiers,  Ca- 
nonniers,  Bombardiers,  Mineurs,  Charpentiers  ,  &  de  tout  ce  qu'il  y  a 
d'Ouvriers  necefTaires  à  l'Artillerie:  le  Duc  deBifcaria,  General  de  l'Artil- 
lerie, le  devant  commander  comme  Colonel. 


Propor- 
tion des 
Cantons 
aux  Al- 
liés. 


A  Baden,  le  il.  Ofîobre. 

Le  Comte  de  Trautmansdorff  m'a  fait  dire  par  fon  Secrétaire,  qu'il  y  a- 
voit  grande  aparence,  qu'on  pourroit  difpofer  les  ûx  Cantons  Alliez 
du  Milanez  d'éviter  toute  forte  de  Contravention ,  foit  à  l'égard  du  Servi- 
ce de  leurs  Troupes  qui  font  à  la  folde  delà  France  ,  foit  autrement, 
en  cas  que  la  Guerre  vint  à  s'allumer  tout  de  bon  ,  foit  dans  le  Pays- 
Bas,  foit  ailleurs;  pourvu  qu'on  leur  donne  une  afiurance  du  payemenc 

ponc- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  343 

pon&uel  de  la  Penfion  annuelle  de  300.  Philippes  flipulée  par  le  Capitu-   Affaires 
lac,  &  ceci  feulement  pour  l'avenir,  me  faifant  prier  d'en  vouloir  inceffa-   »*s  P*o- 
ment  donner  avis.    Il  eft  aiféàjuger,  où  cette  Propofition  des  Cantons     y;NCES* 
tend  ,  &  qu'ils  fouhaiteroient  que  S.  M.  Brit.  &  LL.  HH.  PP.,  comme    _ 
Alliez  de  Sa  Maj.  Impériale  ,  vouiuflent  fe  charger  de  la  Garantie  de  ce 
payement,   ou   du  payement  même*  &  qu a  moins  de  cela  ils  ne  vou- 
droient  rien  faire. 


A  Bruxelles  3  le  31.  Ottobre  1701. 

On  prétend  ici,  que  le  principal  motif  du  Voyage  du  Prince  Tzerclas   Exac- 
à  Bonn  feroit   pour  tacher  de  détourner  l'Electeur  de  Cologne  de    tions  de 
faire  quelque  exécution  fur  ceux  qui  refufent  de  payer  les  Subfides  de-   jE1£a,e,,r 
mandez,  comme  aufïï  de  porter  ce  Prince  à  fe  defifter  d'autres  Exactions,   gne. °°" 
afin  de  pouvoir  ajuiter  d'autant  plus  facilement  les  differens  avec  fon  Cha- 
pitre, &  de  prévenir  la  rupture  de  ce  côté-là.  On  dit  auffi,  que  la  Mar- 
che contremandée  des  Troupes  Françoifes  aux  quartiers  d'hiver  en  Fran- 
ce, &  dans  le  Païs  conquis, regarde  pareillement  cette  Affaire  ,    comme 
aufli  le  Voyage  différé  du  Maréchal  de  Bouflers  à  Lille ,  celui-ci  y  aiant 
envoyé  pour  cet  effet  des  ordres  de  changer  en  fon  nom  les  Magiitrats. 

A  Lisbonne  >  le  22.  Novembre  1701. 

Certain  Mr.  Cuiflbn,  Maréchal  du  Camp,  qui  a  été  envoyé  ici  de    intrigues 
la  part  de  la  Cour  de  France,  fans   connoiflance  préalable  ou  de-   de  la 
mande  du  Roi  de  Portugal,  pour  difcipliner  les  Troupes  Portugaifes,  &    France 
qui  a  été  préfenté  à  Sa  Maj.  par  l'Ambaffadeur  de  France,  a  été  remer-   n^es.Ur" 
cié  du  Roi  dans  des  termes  très-civils,  &  fon  emploi  décliné;   &  il  eft 
prêt  à   s'en  retourner  à  la  première    occafion   en  France,   quoique   les 
François  fe  vantent  de  cette  rencontre,  &  débitent,  qu'il  a  été  rappelle, 
parceque  l'on  avoit  befoin  de  fon  fervice  dans  le  Royaume.     Il  eil  cer- 
tain que  le  Miniftre  de  France,  aiant  fait  ici  des  infiances  pour  porter 
cette  Cour  à  reconnoitre  le  prétendu  Prince  de  Galles  pour  légitime  Roi 
de  la  Grande-Bretagne,  a  eu  un  refus  qui  confifle  en  ces  termes,   que  le 
Roi  de  Portugal  étoit  intentionné  de  vivre  avec  la  France  dans  une  étroi- 
te amitié  &  correfpondance ,  &  d'exécuter  fidèlement  les  Alliances  réci- 
proques; mais,  que  Sa  Maj.  Portug.  ne  fauroit  fe  prêter  à  une  Affaire  de 
cette  nature,  qui  pourroit  amener  des  Brouilleries  inévitables.  On  a  aufîî 
affuré  l'Envoyé  d'Angleterre  refidant  ici,  qu'il  n'y  avoit  pas  à„craindre 
le  moindre  changement  de  difpofition  à  cet   égard  ;    que ,   pour   éviter 
même  toute  autre  requifition  ou  communication,  &  par  conséquent  une 
notification  folemnelle  de  la  mort  du  feu  Roi  Jaques ,   foit  par  une  Am- 

baflade 


344    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS ,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  ballade  ou  par  une  Lettre,  cette  Cour  avoit  pris  la  femaine  pafiee  proprio 
dfs  Pro-  motu  le  petit  deuil.  Toutes  les  Trouppes ,  tant  de  Cavallerie  que  d'Infan- 
terie, qui  ont  durant  l'Eté  gardé  cette  Côte  &  fervi  de  Garnifon  à  cette 
Ville,  font  retournées  dans  leurs  Provinces  refpe&ives. 

A  Cologne ,  le  16.  Décembre  1701. 


VINCES- 

Unies. 


Mouve- 
mens 

dans  les 


LE  Régiment  de  Slangenbourg,  venant  de  Duren,efl  entré  ici  le  15,  de 
forte  qu'il  y  a  à  préfent  en  Garnifon  dans  cette  Ville  $.  Regimens 
eSo-*     d'Infanterie  de  l'Etat,  le  Régiment  de  Cavalerie  du  Comte  de  Frife  étant 
rats  de      encore  à  Mulheim  au  de-là  du  Rhin ,  pas  loin  d'ici.  Hier ,  il  entra  encore  ici 
Cologne    en  Garnifon  un  Bataillon  Fruffien.     Le  Prince  de  Saxe,  Evêque  de  Raab, 
f  Pala"     partit  d'ici  hier  au  matin  pour  Duffeliôrff  avec  une  grande   Efcorte ,  où 
fe  trouve  encore  le  General  duR.oi  de  PruiTe ,  le  Baron  de  Heyde;mais, 
le  Lieutenant  General  Dopf  doit  s'en  retourner  aujourd'hui  à  Maltricht. 
Les  Habitans  de  la  Ville  de  DuflTeldorfffauvent  leurs  meilleurs  effets  dans 
d'autres  Places  ;  même  on  empaqueté  à  la  Cour  Palatine  les  Meubles  pré- 
cieux, jufques  à   la  plupart  des  Papiers  des    Archives.     Avanthier,  24. 
Bateaux  de  ceux  qui  font  chargez  à  Metz ,  &  Thionville,  de  Grains,  Pal- 
liffades,  Pelés,  Planches,  Ancres,  &  Cordages,  defcendirent  près  de  cet- 
-te  Ville  la  Rivière  5  laquelle  Cargaifon  fera  déchargée  en   partie  à  Zons, 
en  partie  à  Nuys ,  Keyfèrsweert ,  &  Rhinberg.   L'Electeur  fait  tellement 
reparer  les  Ouvrages  du  Fortfitué  vis-à-vis  de  Bonn,  qu'il  fera  plus  grand 
qu'il   n'étoit  dans  la  dernière  Guerre;   200.    Hommes  y  travaillent  fans 
celle ,  &  l'Electeur  y  va  fouvent ,  pour  avancer  le  travail.    Il  y  a  peu  de 
jours  qu'on  a  détaché,  des  Troupes  Françoifes  qui  font  dans  le  Sleyder- 
dal,  4.  Bataillons,  dont  2.  ont  été  mis  à  Lintz,  &  2.  à  Andernach  au- 
defîus  de  Bonn. 

Le  Marquis  de  Montrevel,  qui  fe  tient  toujours  à  Bonn,  commande  à 
préfent  les  Troupes  de  l'Electeur  de  Cologne ,  qu'on  dit  avoir  reçu  il  n'y 
a  pas  long-tems  une  Lettre  du  Pape  en  des  termes  très  forts.  Dans  peu 
on  attend  encore  ici  d'autres  Troupes  de  Prufle,  de  Muniter,  &  de  Pa- 
terborn. 

A  Majlrkht)  le  17.  Décembre  1701. 

Mouve-     Y  es  Etats  du  Païs  de  Liège  font  convoquez  vers  le   2.  du  mois  pro- 

mens         fL,  chain  :  on  ne  fait  pas  au  vrai,  ii  le  Prince  viendra  vers  ce  tems-là  à 

M-  de  ^e'ëeî    rria^s  on  anTi-ire>  Ç11^  demandera  des  Subfides  pour  la  Levée  des 

Liep-e.       Troupes,  le  Lieutenant  General  de  Ximencs    ayant  déjà    donné   à  con- 

noitre,que  Iesdits  Etats  dévoient  fonger  à  de  propres  Troupes,  pareeque 

le  Roi  pouroit  avoir  befoin  de  Tiennes  ailleurs:    &  comme  le  Doyen  du 

Chapitre  eft  emmené,  les  autres  n'oferont  pas  s'expofer  à  la  difgrace  du 

Prince;  mais,  la  difficulcé.  fera  de  trouver  ûqs  efpeces,  auquel  effet  je 

crois 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I. 


34? 


crois  que  les  François  propoferont  une  Capitation,  tant  fur  les  Eccléfiafli-   Affai?e£ 
ques,  que  fur  les  Séculiers ,  fans  fe  foucier  des  Plaintes  du  Peuple. 


VINCES- 

Unies. 


Lettre  fur  ce  que  du  Sas  de  Gand  on  avoit  tiré  fur  les  Travail- 
leurs François  \  de  Paris  3  le  30.  Décembre  1701. 

Ce  fut  Lundi  dernier  au  foir,  que  j'eus  l'honneur  de  recevoir  les  gra- 
cieux Ordres  de  VV.  HH.  PP.  touchant  des  coups  de  Canon  que 
le  Commandant  du  Sas  van  Ghent  a  tiré  fur  les  Ouvrages  des  François 
fous  leur  ForterefTe,  &  le  jour  d'après  je  me  fuis  addreïfé  par  Mémoire 
fur  ce  fujet  au  Sr.  Marquis  de  Torcy.  Son  Excell.  me  donna  à  connoitre 
là-deffus ,  que,  quoique  l'Infolence  d'avoir  ôfé  faire  tirer  fur  l'ouvrage 
d'un  fi  puiitant  Roi  foit  infuportable  ,  Sa  Maj.  avoit  neantmoins  bien 
voulu,  par  un  excès  de  fa  bonté,  accorder  la  Conférence  demandée  fur 
ce  fujet,  &  faire  ceffer  en  attendant  les  travaux  ;  que  les  menaces  d'un 
Bombardement  étoient  faites  à  l'infçu  de  Sa  Maj.  ;  &  que  le  Maréchal 
de  Boufflers  les  defavouoit  auffi,  quoique  nous  l'euffions  bien  mérité. 
Et,  pour  ce  qui  regardoit  l'inclination  de  LL.  HH.  PP.  pour  la  Paix, 
qu  Elles  pronoient  tant,  que  S. Excell.  étoit  trop  perfuadée  que  LL.  HH. 
PP.  n'attendoient  que  le  Secours  d'Angleterre  pour  faire  la  Guerre.  Je 
pris  la  liberté  de  lui  répondre,  que  la  Manutention  de  leur  Droit  avec  au- 
tant de  Modération  ne  pourroit  jamais  être  nommé  Infolence  par  des  im- 
partiaux 5  que  LL.  HH.  PP.  aimeroient  d'autant  mieux  traiter  amiable- 
ment,  qu'Elles  fouhaiteroient  de  conferver  la  mutuelle  bonne  intelligen- 
ce; qu'on  ne  pouvoit  pas  croire,  que  fa  fufdite  Majeftéeût  voulu  recom- 
penferleur  Difcretion  d'un  Bombardement}  &  enfin  que  LL.  HH.  PP.'a- 
voient  donné  trop  de  preuves  de  leur  amour  pour  la  Paix ,  pour  le  révo- 
quer en  doute,  ou  pour  croire,  que,  fans  y  être  contraintes,  Elles  de- 
manderoient  le  Secours  de  leurs  Alliez  à  leur  Defenfe.  Je  parlai,  le  même 
jour,  &  enfuite,avec  divers  Seigneurs  de  Diflinclion  fur  la  même  matiè- 
re, lefquels  ne  pouvoient  pas  s'empêcher  de  dire  qu'ils  aprouvoient  la 
Conduite  de  LL.  HH.  PP.  \  &  qu'ils  étoient  d'avis,  que  la  Conférence  ac- 
cordée feroit  trainée ,  afin  que ,  convaincu  de  ce  côté-ci  d'un  tel  tort ,  on 
ne  fût  pas  obligé  de  le  defavouer  devant  tout  le  monde.  Outre  cela,  une 
Perfonne  d'une  Confideration  particulière  m'a  dit  en  confidence ,  qu'afiu- 
rément  il  ne  falloit  attribuer  cet  Ouvrage  fi  proche  de  la  Fortereife  de 
LL.  HH.  PP.  qu'au  Maréchal  de  Boufflers,  qui  l'avoit  entrepris  de  fa 
propre  Autorité,  à  l'infçu  du  Roi  &  des  Miniftres  d'Etat  pour  les  Affaires 
de  Guerre^  mais,  qu'on  faifoit  difficulté  a  préfent  de  defavouer  publique- 
ment ledit  Maréchal, 


Difputcs 
touchant 
un  Fort 
entrepris 
près  du 
Sas  de 
Gand ,  & 
touchant 
le  Ca- 
non tiré 
fur  les 
Trav  ail- 
leurs. 


Tome  XI 


Xx 


'  Vfle 


34<?    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


Affaires 

DES    ?RO 

VIN 

Unies. 


™?  LISTE   DE    QUELQUES   TROUPES    ET 

VAISSEAUX  DE  L'ETAT. 


Infanterie. 

ig  Recrues  par  Comp.  font  environ        - 
66  Nouvelles  Comp.  d'Infanterie  à  66  Hommes 
3  Regimens  François,  $6  Comp.  à  66  Hommes 

2  Regimens  de  Meklembourg,  20.  Comp.  à  84 
z  Regimens  d'Anfpach  comme  ci-devant 

3  Regimens  Ecoffois  36  Comp.  à  66  Hommes 

10  Regimens  de  Lunebourg  &  autres  Regimens  Allemans 

chacun  à  7^0  ---.__ 

Les  36  Compagnies  de  Mariniers  font  augmentez  au 

de-là  de  la  Recrue  ordinaire  chacune  d'encore 

34  Hommes 

Une  Compagnie  franche 

%  Regimens  de  Hefle-Caflel 


7^ 
2 


Cavalerie. 

Compagnies   de   Cavalerie  à    f  1    Maîtres 
Regimens  de  Lunebourg,  environ 
La  Recrue  de  la  Cavalerie  environ 
Comp.  de  Grenadiers 


Dragons. 

1  Régiment  de  Dragons  d'Anfpach ,  61  Hommes 
4  Comp.  fous  Matha,  comme  ci-devant 
\  Regimens  de  Lunebourg ,  environ 


Infanterie 
Cavalerie 
Dragons 
Ci-devant  environ 


I  Régiment  SuifTe  de 

4  Regimens  d'Infant.     \  de  TEleét. 

4  Regimems  de  CavaL  j  Palatin 


10000 

4*5^ 

2376 

1680 
1680 
1^6 

7foo 


«               «               « 

1224 
107 

2000 

342^9 

1 

ss 

3^ci 
600 

■  .                   m»  m                 m              *■  _  m 

1000 

- 

100 

53°i 

[ommes 

496 

248 
Szo 

34*PP 

f302 

if  44 

4^000 

1/44 

85HT 

1600 

4000 

Noms 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.    I  347 


ArvKtutM 
D«s  Pro- 
vinces» 


Noms  des  FaiJJeaux  du  Pais  arrivez  des  Indes  Orientales^  avec    „„w 
une  Spécification  de  la  Valeur  de  leur  Cargaijbn.  Un,es- 

Les  trois  fuivans  font  arrivez  il  y  a  quelques  femaines, 
Les  3.  Couronnes      -       52.839?     ~     16    - 
Ofterityn     -    -    -    -       545497     -     10-8 
Van  Iiuyfen    -    -    -       320669    -      4-8 


La  Charité 

Dombourg 

Schonderloo 

Jerufalem 

Schoondyck 

Ifelmonde 

La  Bavière 

Hoeflendaal 

Le  Poivrier 

Cologne 

't  Huys  by  Wegh    - 

3420117    -       1-8 
Rygersdaal. 
Vofmer. 
Theeboom. 
Haak. 
Dieven. 
De  ces  cinq,  dont  les  trois  derniers  font  des  Vaifleaux  de  retour,  on 
ignore  encore  la  Valeur  de  leur  Cargaifon,  qui  montera  environ  à  un 
million. 


14945-62  - 

II 

- 

à  toute  heure. 

439973  - 

10 
17 

-  8 

20O|lO   - 

2 

- 

3oy820   - 

6 

- 

3IO439   - 

3$3964   - 
324^69   - 
339206   - 
1/3126   - 

10 
1 1 
9. 

6 

-  8 

-  8 

-  8 

-  8 

444HO   - 
I * 87*1   " 

6 
1 

-  8 

-  8 

USÉE 


TÉTOËSàU 


l^g 


Ï412. 


Xx  a'  MEMOI. 


348    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

5*»   MEMOIRES  DES  MINISTRES  PUBLICS 

Minis- 

T»EsPu-  AUx   ETATS-GENERAUX. 


ÏLICS. 


Mémoire  de  Mr.  Lilienrooth  pour  du  Secours  ;  du  12. 

Juillet  1701. 

CELSI  ET  PRiEFOTENTES  DOMINI, 

iMemoïre  TyRaterire  non  poiefi  S  acné  Rcgia  Majefiatis  Suecia  Légat  us  Extraordinarivs 
de  l' A  m-  j[_  ^HQ  minus  memores  reddat  Celfas  &  Prapotentes  Domïnatioms  Vefiras ,  quem- 
ë.  £  à X  admodum  Rex  ac  Dominus  ejus  ClementiJJimus  banc  meritb  fpem  foveat ,  fe  con- 
tra hofiesfiuos  ,  vigore  fœdcrum  ,  quitus  cum  Celfis  ac  Prapotentijjïmis  Dvminationi- 
bus  Veflris  invicem  obfiringitur ,  jam  pridem  auxiliô  fuijje  potiturum.  Cum  au- 
\  tem  nihilominus  ipfe  in  bunc  ufque  diem  cô  carcre ,  ■■&  neque  ad  tôt  Sac.  Reg.  Ma- 

jeflatis  proprias  Literas  refponfum  fubfequi ,  neque  tôt  ipfius  juj/u  exhibitos  Libel- 
los  memoriales  effet! um  habuijfe  contigerit ,  Sacra  Regui  Majcftas  diclo  fuo  Le- 
gato  Extraordinario  injunxit ,  ut  CC.  ac  PP.  DD.  Vefiras  en-  nomine  quàm  iw 
fiantijfime  denub  compelhret.     Videlicet ,  haud  ignorant  ipfa ,  quid  jubcant  fœ~ 
derum  Legcs ,  quibus  diferiè  cautum  auxilia  intra  tertium  menfem  à  prima  requi- 
fitione  computandum ,  quinimo  citius ,  fi,  fieri  pojjit ,  prafiari  oportere ,  cum  tamen 
jam  integri  fedccim  menfes  &  amplius  effiuxerint ,  ex  quo  Sacra  Regia  Majejias 
primum  nunciatô  péri  eu  lô  opem  fibi  fer  ri  ex  pet  Ht.     Neque  dubium  quin  CC.  ac 
PP.  DD.  Vefira ,  pro  eo  ac  par  efi,  reput  atura  Jînt  animis ,  quid  amicitia 
quid  communis  hic  militas  fuadeat  atque  requirat  :  ità  ut  vel  hoc  intuitu  tametfi 
fœdera  dee  (fient ,  fubjidia  bine  expeclare  liceret ,  praferlim  cum  hifee  caufis  meri- 
■  tb  adjungenda  fit  ratio  Summis  certè  Potefiatibus  digna  ,  quarum  unumquemque 
Qhrifiiana  fidei ,.  vec  non  te  qui  honefiique  fenfu  imbutum  hoc  fibi  officium  ultro 
imponere  deceret ,  ut  ju-vandum  tuendumque  fufeiperet  cumy  qui  culpa  vel  minima 
«•xpers  vïm  tamen  &  injuriam  patitur ,  bonisque  omnibus  defiituitur.  De  catero  CC. 
ac  PP.  DD.  Fcfiris  ipfis  dijuduandum  relmquitur  quanta  amicitia  illarum  fir- 
mitas ,  fœderibus  authoritas  fit  accefi/ura  ,  fi  bac  occafione  validis  fiubfidiis  Sa- 
çram  Regiam  Majeflatem  fublevent ,  £s?  ex  advsrfio  fi  eandem  defiituant  quantum 
roboris  amicitia  quantum  dignationis  fœderibus  earum  decederet ,  &  quantum  de- 
nique  in  temporis  habitum  juxta  perpendant    CC.  ac  PP.  DD.  Vefira ,  £5? 
quid  de  Sua  Regia  Majefiatis  atnicitiœ  fibi  vicififim  polliceri  queant ,  procul  du- 
bio  agnoficent  quant  opère  fuis  rébus  expédiât ,  ita  admimeulo  ejjè  Sacra  Regia 
Majefiaii  ut  hoc  laudabih  cxemplum  fecutura ,  vicem  exfolvere  valeat.    Nec  fa- 
cile quifqnam  difjidebitur  quin  arcla  inter  Suam  Regiam  Mafiftatem  ac  CC.  ac 
PP.  DD.    Vefiras  amicitia  ,  quin  mutua  utilitas  Regnorum ,  Ditionum ,  &f 
Subjeclorum '  fiecuritas ,  propria  ajiimatio ,  fœderumque  diguitas ,  ejufmodi  jint  ra- 
tiones ,  quibus  CC.  ac  PP.  DD.  Vefira  non  pofiint  non  induci,  ad  prafianda 
ea  ma  Sacra  JRegia  Majefias  fummo  jure  parique fiducia  defiderat»    Nihilequi- 
.\(  :  dem 


TRES    Pu- 

EUC3. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  34? 

dem  quod  alicujus  fit  momenti  hic  vel  dubitandi  anfam  prabere  poffe  videtur.    Memoi- 
Nam  nec  bello  baclenus  dtfiritla  fuit  bac  Refpublica  ,  nec  virium  defetlum  ferio    RES  dis 
caujabuntur,  quos  confiât  caufiam  fuam,  ea  qua  pro  oculis  cjl  potentia ,  etiam  J^oN*j! 
contra  validifiïmum  qUemque  nullo  non  tempore  defenfuros.     ylccedit  quod  lucrum 
prafentifijimum  ad  fit ,  ubi  officii  prafi/ti  gratiam  non  pertturam  ,  fed  eum  infigni 
fœnore  redit  urum  appareat.    Ncque  profeclo  Sacra  Regia  Majefiatis  amicitia  eo 
loco  habenda  efi  ,quafi  opéra  pratiumvix  fit follicithts  eandem  tueri,  cum  non  tan- 
tum  fœdera  inita  aliud  évinçant ,  fed  &  Sacra  Regia  Regia  Majefias  ea  jam  du- 
dum  edid&rit  virtutis  fpecimina  qua  dubitare  non  finunt ,  quid  impofterum  Or« 
bi  de  eo  fit  exfipeïïandum.     Quo  praterea  ajfeclu  in  banc  Rempublicam  fera- 
iur,  aequo  animo   confervanda  augendaque  amicitia  fi  udeat ,   (f!  id  Celfa  ac 
Prapotentes  Dominations  Feftra  cognitum  habent.    Abfit  itaque  unius  vel  ahe- 
rius  ifive  privatas  rationes ,  five  erga  bofies  Sacra  Regia  Majefiatis  propenfione?n 
majoris   fieri  pojfe  ,    quant  publicam  utilitatem  ,   ac  publicam  fidem  ut i que  où 
talia  de  fer  i   6?   minus   dignum   &  vaîde   anceps  futur  um  CC.  ac  PP.  DD, 
Vcftra  pro  folita  fua  prudentia  fponte  judicabunt.     Subhtellexit   quidem  me- 
moratus  Légat  us  Extraordinarius  ejfe  qui  ajfcrere  fufiineant,  pan  fatisfaclum 
effe  cb  quod  anno  fuperiori  Claffis  navium  bdlicarum  ver  fus  Fretim  Qre-Sitn~ 
dium  miffa  fit.    Afi  vero  non  animadvertunt  hi  taies ,  fi  una  parte  vebemen- 
ter  immtnere  infigne  alias  CC.  ac  PP.  DD.   Vefirarum  in  Ducem  Holfittia 
meritum^  verumque  illud  de  lis   ex  garanti  a  fideliter  ci  frafiita  partum  ,  ex 
altéra   vero  frufira    CC.   ac   PP.  DD.    repris  tribuere  velle  ea  qua  ipfa , 
qua  funt  aquanimitate  ,  fibi  vindicare  dedignabuntur  ,     haud  agre  agnofeentes 
nundum  liber atam  esfe  fidem  Sacra  Règne  Majefiatis  Suecia  ex  fœderum  Pra- 
feripto  adfiriclam.     Hac  fiquidem  non  folummodo   mari  fed  &  terra  auxilia 
fer  ri  pracipiunt  ,   ejufque  pro  péri  eu  li  magnitudine  {quod  pofi  finit  am  expedi- 
tionem  Holfaticam  quàm  maxime  evidens  fui  s  fie ,  nemo  negavit^)  utrobivis  in 
duplum  vel  triplant  augenda   neque  pofi  perexigui   temporis  fpatium   Domum 
rêver fur  a ,  fed  ad  belli  usque  finem  permanfura ,  quorum  quidquam  faclum  esfe 
fane  non  apparet.     Quod  cateroquin  Caufam  Holfaticam  cujus   ralione  Claffis 
ifia  mis  fa  unit rè  fuit ,  attinet  CC.  ac  PP.  DD.  Fefira  fibi   haud   club  10   ;>; 
mentent   revocabunt   quoties  fubinde    Sacra  Regia  Majefias   in  aniecesfum  de- 
claravit  ,   fie  ea  non  alio   quàm   reliquos  pâclor.um   Rolfaticorum  vindices  & 
fpon  fores  nomine  fufeepturam  ,  feque  adeo   in  toto   hoc   negotio  m  h  il  quidquam 
aclurum  nifi  quod  commum  confilio  atque  fuffragio  gereretur.     Et  rêvera  que- 
que  rem  ita  peraclam  fuijfe  vel  bine  liquida  confiât  ,    quod  appellentibus  ifiis 
Cla (films  Anglica  Belgicaque  ratione  Imper ii  navalis  eo  demum  modo  ageretur  qui 
conveniens  imprimis  videbatur  fociis   ex   aquo  ,    13  ità   ut  nullius  pro  altero 
potiores  partes  effent ,  rem  gèrent 'iùus,  id  quod  abfonum  utique  fuiffet  ,  fi  tan- 
quam  fubjidiarïa  adventafjent  ;   cum  nimirum  fœdera  mure  etiam  alioquin  ufi-* 
tato  ,    eum  cafium  difertis  vérins  ita  defimant  ut  auxiliarci  five  naves  ,  five 
copia,  a  requirent is  fœderati  aufpiciis  ducluque  omnino  dependeant.  Id  interea 
p;o  eo  quo  Ducis  Hvifatia   Rationes  comphtlitur  ajfeclu ,  pralubens  aguojcit 
Sua  Regia  Majefias  banc  garantie  prœjkitioncm  oppida   acceptant  fibi  fuijfe , 
quam  où  rem  etiam  gratum  ayumum  dum  erga  Serenifjlmum  Magna  B%itannits 

Xx  x  Rc~ 


.TRES 


3^o     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Msmoi-  Regem,  tum  erga  CC.  ac  PP.  DD.  Veftras  profitera  non  dubitat.  Unde  ta- 
bes  des  men  nmxiqUam  colîigi  débet  praftita  ei  ejfe  auxilia  vi  fœderum  contra  hofies. 
rfsTpÛ-  Nam  Suecia  Regia  Majeftatis  bellum  cum  Serenifjîmo  Kege  Dania  nullum  in- 
uucs.  tercefft ,  quapropter  etiam  opus  non  fuit  pacem  inter  altifjimè  memoratas  Ma- 
-  jeftates  conciliari ,  reftituta  nihilo  fecius  publica  tranquilitate. 

Nihil  prorfus  igitur  obftat ,  quo  minus  confidat  Sacra  Regia  Majejlas  in 
prafentiarum  non  tantiim  auxilia  fibi  quàm  primîim  fubmijfum  tri  Jed  &  CC. 
ac  PP.  DD.  Vefiras  abfque  ulteriore  mora  apertè  graviter  que  denuntiaturas 
ejfe  prafatis  hojiibus  quemadmodum  tam  arclis  fanclifque  cum  Sacra  Regia 
Majeftate  junganiur  fœderibus  ,  ut  nullo  modo  a  ferendâ  ei  ope  defiftere  in- 
tegrum  ipfts  fit  antcquam  Sacra  Regia  Majeftati  tanquam  fœdè  adeo  ac 
enor  miter  la  fée  conveniens  fatisfaclio  obtigerit^  quod  &  ipfum  paclorum  tabu- 
lis  cxpreffè  ineft,  cum  &  praterea  apud  hofies  rem  ferib  demum  agi  fenfuros , 
maximum  abfque  dubio  pondus  habebit. 

Cum  déni  que  fa  pins  memorata  fœdcrà  ,  prafertim  novifflmum  die  13.  (i}.)Ja- 
tiuarii  anni  1700.  hic  percuffum  $.  12. ,  id  inter  alla  flatuant ,  ut  ejufmodi  occa- 
jionibus  quales  prafens  rerum  faciès  offert ,  pacifeentes  tum  de  tollendo  commer- 
ciorum  ufu  cum  hofle  fœderati  bcllo  impliciti  ,  tum  etiam  de  mediis  diclo  hojli 
quovis  modo  nocendi  virefque  ejus  imminuendi  confilia  conférant ,  itaque  Sua 
Regia  Majeftas  id  enixè  contenait  ut  ceffent  omninb  cummercia  inter  hanc 
Rempublicam  £5?  hofies  Regia  Sua  Majeftatis ,  idque  eb  magis  quod  ficut  his  ap- 
parat um  bellicum  fubvehi,  quantumque  ei  rei  impedienda  folertia  adhibeatur. 
Demum  etiam  fmgulari  cum  fiduciâ  hoc  requirit ,  ut  committantur  qui  CC.  ac 
PP.  DD.  Veflrarum  nomine  cum  Legato  fuo  Extraord.  délibèrent  rationefque 
ineant  quibus  potifjimum  modis  diclis  hojiibus  damnum  inferri  virefque  eorum 
infringi  pofftnt.  Super  quibus  omnibus  infraferiptus  Sua  Regia  Majeftatis 
Legatus  Extraord.  gratam  CC.  ac  PP.  DD.  Veftrarum  Declarationem  abf- 
que temporis  difpendio ,  ut  fperat ,  fibi  impertiendam  ,  quâ  par  efl  obfervantiâ 
pra/loy 

N.    LlLLIENROOTH. 

Datup  Haga-Comitis  die  1.   (12.)  Julii  1701. 

Mémoire  de  Monfr.  Bondely ,  Envoyé  Extr.  du  Roi  de  PruJJè^ 
préfenté  à  LL.  HH.  PP.  le  6.  Nov.  1 70 1 . 


HAUTS   ET   PUISSANS   SEIGNEURS, 


Mémoire 
de  l'En- 


Sa  Maj.  le  Roi  mon  Maître  ayant  trouvé  à  propos,  pour  fon  fervice, 
de  me  rappeiler   auprès  de  lui  ,    avec  ordre  de   prendre  coneé  de 

ffie        VV- IiIL  P,P"  J'efPere  qu'E1!es  auronc  !*  bonté  d'agréer,  puifque  l'Etat 
de  ma  fonte  ne  me  permet  pas  d'avoir  l'honneur  de  leur  rendre  ce  de- 
voir enPerfonne,  que  je  m'en  acquite  par  écrit.  Ce  que  je  prend  la  li- 
berté 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.    I.         35Ï 

berté  de  faire  aujourd'hui,  remerciant  très-humblement  VV.  HH.  PP.  Mfmoi- 
de  la  bonté  avec  laquelle  Elles  ont  bien  voulu  concourir  avec  moi  au  RES  DES 
maintien  &  affermïflement  de  l'étroite  union,  qu'il  y  a  toujours  eu  en-  T  ■  ^'^ 
tre  Sa  Majefté  le  Roi  mon  Maître  &  VV.  HH.  PP.     Je  puis  les  afTurer,      bucs*" 

que  Sa  Maj.  fera   toujours  tout   ce  qui  dépendra  d'Eile   pour  en  ferrer   ■ 

le  nœud  de  plus  en  plus,  dans  la  perfuafion,  que  VV.  IIH.  PP.  feront 
aufîï  de  leur  côté  leur  polïible  pour  le  rendre  indiflpluble-.  Je  dois  auf- 
fi  remercier  tres-humblementVV.HIi. PP.  de  la  bienveillance  qu'elles  m'ont 
témoigné  en  mon  particulier ,  de  même  que  de  la  manière  tres-obli- 
geante  avec  la  quelle  Elles  ont  reçu,  ce  que  j'ai  eu  l'honneur  de  leur 
propofer  de  la  part  de  Sa  M.  le  Roi  mon  Maître.  Je  n'en  perdrai 
jamais  le  fouvenir  ,  <&  ne  manquerai  pas  de  leur  témoigner  ma  recon- 
noiiïance,  foit  auprès  de  S.  M.  le  Roi  mon  Maître,  foit  par-tout  ou  il 
s'agira  du  fervice  de  VV.  HH.  PP.  •.  fouhaittant  à  leur  glorieufe  République 
un  état  toujours  floiïffant,  &à  VV.  llll.  PP.  une  fuite  continuelle  de 
Bonheur  &  de  Profperké.  A  la  Haie,  ce  6.  Nov.  1701. 

B    0    N    D    E    L   Y. 


AFFAIRES     D'ANGLETERRE. 

Affaires 
d'Angle- 

Lettre  au  Roi  (V Angleterre  aux  Etats  Généraux  \  du  16.  Mal       TERKE» 

1700. 

HAUTS  ET  PUISSANS  SEIGNEURS,  NOS  BONS 
AMIS,  ALLIEZ,  ET  CONFEDEREZ,  &c.&c. 

Les  AfTurances,  que  Vous  Nous  avez  données  par  vôtre  Lettre  du  13.   Lettre  du 
de  ce  Mois  N.  St.    que  Vous  croyés  Nos  intérêts  infeparablement  Roi  d' An- 
unis  aux  Vôtres ,  &  que  quoi  qu'il  arrive  Vous  ne  voulez  pas  vous  en  de-   guerre. 
partir,  ny  prendre  d'autres  mefures  dans  la  conjoncture  prefente,  que  de 
concert  avec  Nous,  font  fi  fortes  &  û  cordiales,  que  Nous  nous  trouvons 
obligés,  non-feulement  de  Vous  en  faire  Nos  remercimens,  mais  aulTi  de 
Vous  aiTurer  de  nouveau,  que  Nous  fommes  tout -à-fait  dans  les  mêmes 
difpofitions,  &  les  mêmes  fentimens  h  l'égard  de  Vos  intérêts,  que  Nous 
ne  confiderons  par  autrement  que  les  Nôtres.     Nous  vous  donnons  en 
même  tems  avis,  que  Nous  vous  envoyerons  inceflamment  le  Secours  que 
Vous  avés  demandé.     Les  inclinations  de  Nôtre  Parlement  ayant  promp- 
tement  repondu  aux  Nôtres;  ce  qui  Nous  a  donné  beaucoup  de   fatis- 
faclàon  ,  voyant  que  Nôtre  Peuple  eft  fi  fenfible  à  l'Etat  prefent  où  Vous 
êtes,  &  aux  dangers  qui  vous  menacent,  qu'il  fonge  avec  ardeur  à  pro- 
curer Vôtre  feureté.     Ainfi  Nous  prions  Bieu,  quai  Vous  ait,   Hauts  & 

Puiff. 


jji    MEMOIRES,  NEGOTIATÏONS,  TRAITEZ,  ET 

Awaîres    PuifT.  Seigneurs,Nos  bons  Amis,  Alliez,  &  Confederez,  en  fa  fainte  &  digne 
d'Angle-  garcje#     Ecrit  à  Notre  Cour  à  Hamptoncourt,  le  16.  May  1701.&  de  nô- 
TERRE-     tre  Règne  le  13. 


Vôtre  bien  bon  Allié, 


Signé  7 


WILHELMUS    RE& 


Addrefle 
des  Com- 
munes au 
Roi. 


Très-Humble  Addreffe  de  la  Chambre  des  Communes  au  Roi. 
TRES-GRACIEUX  SOUVERAIN, 

Comme  rien  ne  fauroit  plus  contribuer  à  la  fureté  &  à  l'honneur  de 
Vôtre  Majefté,  &  de  cette  Nation,  que  de  prendre  Avis  de  Vos  Con- 
feils  Anglois ,  Nous,  les  très-humbles  &  très-fideles  Sujets  de  V.  M.  les  Com- 
munes aifemblées  en  Parlement,  rendons  à  Vôtre  Majefté  toutes  les  grâces 
très-humbles  du  gracieux  Meflage,  par  lequel  il  lui  a  plû  de  nous  com- 
muniquer fes  Royales  intentions,  d'informer  cette  Chambre  de  l'état  &  du 
fuccès  des  Négociations  où  Vôtre  Majefté  eft  entrée  conformément  à  l'Ad- 
dreffe  de  cette  AfTemblée.  Si  Vôtre  Majefté  s'étoit  avifée  d'obferver  cette 
Méthode  avant  que  le  Traité  de  Partage  fut  conclu ,  lequel  avoit  paffé  le 
grand  Seau  d'Angleterre  durant  l'AfTemblée  du  Parlement,  &  pourtant  fans 
fon  Avis,  nous  ferions  difpenfez  de  repréfenter  à  Vôtre  Majefté  ce  que 
nous  fommes  obligez  de  faire,  quoi  qu'avec  regret,  favoir  les  facheufes 
Confequences  de  ce  Traité,  pour  ce  Royaume,  &  pour  le  Repos  de  l'Eu- 
rope; lequel  tend  fi  directement  à  augmenter  la  PuifTance  &  la  Grandeur 
de  la  France,  en  livrant  à  fon  Roi  de  fi  vaftes  Territoires  des  Dominations 
du  Roi  d'Efpagne,  &  à  détruire  le  Commerce  de  ce  Royaume;  &  auquel 
Traité  peuvent  être  attribuez  avec  juftice  les  Dangers  qui  menacent  pré- 
fentement  ce  Royaume,  aufli  bien  que  la  Paix  de  l'Europe. 


L'Etat  du  Bill  pour  un  Parlement  annuel  £3?  triennal  ;  avec  des 
Obje [lions  £5?  des  Reflexions  néceffaires  là-deffus* 


iîll  pour    /~*1 

n  Parie-   v^  e  Bill  confifte  en  III.  Parties  : 

I.  Premièrement,  qu'un  Parlement  doit  être  tenu  une  fois  par  an. 


Bi 

un 

iaent  an- 

triennal-  ^'  Secondement,  qu'il  y  aura  un  nouveau  Parlement  tous  les  trois  ans, 

avec  des  &  que  le  vieux  ne  doit  pas  durer  au  de-là  de  3.  ans  ,  mais  cefTer  & 

Objec-  être  diffous. 

tions  &  \i\    Troifiemement ,  que  le  préfent  Parlement  finira  le  zf .  de  Mars , 

flexions"  **  mQms  que  te  R°i  ne  Ie  c<uTe  plutôt. 

Tout 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  T.  $?$ 

Tout  cela  font  les  plus  grandes  Ufurpations  fur  les  Prérogatives  les  plus    Aftairfs 
efïentielles   de  la  Couronne,,  de  convoquer,  continuer,  &  difïbudre  les    d'Anglè- 
Parlemens  :  ce   font  auiïi  des  Diminutions  des  Droits  &  du  Pouvoir  du      r**Rt~ 
Roi,&  des  Violations  des  Conititutions  du  Gouvernement ,  &  préjudicia- 
bles au  Bien  du  Peuple,  comme  il  paroitra  par  les  Points  fuivans. 

i.  Quant  au  premier ,  qui  regarde  la  tenue  d'un  Parlement  annuel,  on    I. Point. 
dira  peut-  être  qu'il  y  a  3.  Loix  du  tems  d'Edouard  III.  &  de  Richard  II, 
que  les  Parlemens  retiendront  une  fois  par  an, ou  plus  Couvent, s'il  eft  ne- 
ceiTaire  >  de  forte  que  cela  n'eft  point  une  nouvelle  Loi. 

1.  La  Conilitution  du  Parlement  a  beaucoup  changé  du  depuis  ,  de  mê-  i.Rcpon- 
me  que  l'occalion  de  ces  fréquentes  Ailembléesj  le  Parlement  étant  alors  &• 
une  Cour  ordinaire  de  Jultice,  qui  décidoit  tous  les  Procès  d'Importance, 
qui  font  renvoyez  préfentement  à  la  Halle  de  Weftminfter ,  vid.  Placita, 
Parlamentar.  de  Reyly\  &  quand  il  s'agiflbit  d'établir  des  Loix,  on  préfen- 
toit  feulement  de  courts  Chefs  de  Demandes,  auxquels  le  Roi  donnoit  telle 
Réponfe  qu'il  trouvoit  à  propos,  &  en  accordoit  une  partie  ou  le  tout,  ou  le 
rejettoitj  les  Juges  dreflbient  des  Actes  là-deflus  après  le  Parlement,  &  il 
y  eut  toujours  un  jour  nommé  au  commencement  de  chaque  Parlement, 
pour  y  mettre  fur  le  tapis  toutes  les  caufes  &  matières ,  &  un  Committé 
pour  examiner  ce  qui  pouvoit  être  vuidé  dans  cette  Affemblée-là,  &  ce 
qui  duroit  rarement  plus  d'un  mois ,  mais  Je  cas  eft  changé  dans  ces  Affaires 
èc  dans  plufieurs  autres. 

2,. Ce  n'étoit  qu'une  Loi  directive,  &  qui  n'étoit  point  obfervée  la  même  2-  Re- 
année  après  que  le  premier  Acte  fut  fait ,  ni  jamais  du  depuis  fi-non  du  ^on  e' 
tems  de  Richard  II.  ce  qui  lui  fut  fatal,  y  ayant  eu  une  conteflation  per- 
pétuelle entre  lui  &  le  Parlement;  &  le  grand  nombre  de  ces  AiTemblées 
devint  fi  onéreux  au  Peuple,  que  fur  la  prière  des  Gentilshommes  on  fit 
divers  Acles  de  Parlement,  qu'ils  neferoient  point  contraints  àfervir  dans 
le  Parlement,  pour  aucune  Comté  ,  où  ils  ne  féjournoient  point,  ni  pour 
aucune  Communauté  ou  Bourg  où  ils  n'avoient  pas  de  Droit  de  franchife 
&  de  demeure,  ce  qui  donnoit  lieu  à  l'entrée  des  Gens  de  métier  &  aux 
Actes  pour  des  gages, &  plufieurs Communautez  étaient  difpenfées  à  cau- 
fe  de  leur  pauvreté  d'envoyer  des  Membres,  &  le  Roi  enfin  mis  tout  à  fait 
hors  d'oeuvre. 

3.  Mais  on  ne  prend  pas  cela  pour  une  Loi  aujourd'hui ,  car  l' Acte  trien-    v  Ré- 
nal  en  1640.,  &  l'Acte  du  tems  de  Charles  II.  qui  n'en  eft  qu'une  repéti-    Ponre* 
tion,  ordonne,  qu'à  l'avenir  il  n'y  aura  point  dintermifikm  de  Parlement 
pour  plus  de  5.  ans  ;  ce  qui  permet  que   les  Parlemens  puiffent  être  dis- 
continuez pour  $.  ans,  &  c'en  elt  par  confequent  une  abolition:  &  il  faut 
obferver,  que  le  long  Parlement,  qui  fe  tourna  en  Rébellion  &  en  une 
Guerre  civile,  étoit  encore  fi  modeite,  qu'on  n'affura  pas  le  Droit  d'un 
Parlement  annuel,  uniquement  parce  qu'on  étoit  en  Droit  d'affilier  aux 
Parlemens  en  vertu  de  ces  Actes. 
Il  faut  venir  aux  Objeclions. 

Si  cette  claufe  pailé,  non -feulement  on  fera  revivre  ce  Droit,  &  on    i- Objec- 
te XL  Y  y  obii-    t'ou' 


3J-4     MEMOIRES,  NEGOCIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AnMxmà  obligera  le  Roi  de  tenir  un  Parlement  annuel,  mais  de  lui  faire  pafler  aufîî 
©'Angle-  quelque  A.£le  &  d'en  flatuer  qu'on  faffe  une  Séance  :  car  par  l'autorité  de 
Tt,RRE'    Coke  dyer  &  de  Crooke,  les  grands  Juges  de  la  Loi ,  aucun  Parlement  ne 
peut  fe  tenir  fans  qu'il  y  ait  une  Séance;  &  il  elt  à  remarquer,  que  dans 
l'Acle  triennal  de  1640.  la  Convocation    la  Tenue  ,  &  Seiiion  des  Parle- 
mens  étoient  comptées  pour  des  chofes  différentes  :    il  ne  pouvoit  y  avoir 
non  plus  d'autre  établifiement  de  ces  vieux  Actes,  du  moins  dans  le  tems 
qu'on  les  fit,  tant  à  caufe  de  leur  pratique,  que  parce  que  les  prorogations 
&  ajournemens  n'étoient  pas  alors  en  ufage,  fi-non  avant  la  feance  d'un 
Parlement,  &  l'on  ne  fauroit  trouver  à  quel  deflfein  on  convoquoit  ces 
Parlemens  :   il  eft  pareillement  fort  remarquable,  que  lorfque  Mr.  Smith 
voulut  que  le  mot  iïajjembïer  fut  changé  en  celui  de  tenir,  &  que  le  Che- 
valier In.  Lowther  propofa  enfuite  une  claufe  pour  l'expliquer, &  conferver 
le  pouvoir  du  Roi  de  difïbudre  le  Parlement  avant  la  Séance ,  cela  fut  re- 
jette. 
1.  Objec-  "    Tjn  Parlement  annuel  dans  le  tems  de  Paix  met  aufïl  au  joug  le  Gou- 
tion.        vernement,  arrête  l'adminiftration  de  l'autorité  d'exécuter, décourage  tous 
d'agir  fous  lui,  &  caufe  une  contention  perpétuelle  entre  le  Roi  &  le  Par- 
lement, qui  ne  finit  que  par  le  renverfement  de  l'un  ou  de  tous  les  deux 
même,  comme  le  prouve  l'exemple  de  Richard  II.     Et  le  Roi,  dans  ces 
circonitances ,  n'a  pas  tant  de  pouvoir  qu'un  Stadhoudre  en  Hollande. 
Objec-       Par -là  la  JurifdicHon  des  Seigneurs  feroit  merveilleufement  augmentée, 
non.         &  le  Peuple  lezé,  en  examinant  tous  les  Procès  à  la  Halle  de  Welhnunf- 
ter,  &  en  les  rapportant  par  appel  comme  d'abus  à  la  Chambre  des  Sei- 
gneurs. 
l. Objec-  '    La  continuation  du  pouvoir  de  faire  des  Loix,  fi  fouvent  exercé,  de- 
ti'on.         viendra  par  la  multitude  des  Loix  ,  &  la  continuation  des  Privilèges ,  fore 
préjudiciable  au  règlement  de  la  Nation,  à  la  due  exécution  de  ces  Loix 
&  du  maintien  du  Droit  &  de  la  propriété  des  Sujets ,  comme  il  donna 
jadis  occafion  au  renverfement  de  la  Republique. 
Il  Point.       Quant  au  fécond  Point,  d'avoir  des  Parlemens  tous  les  3.  ans,  avec  un 

tems  limité  pour  leur  Caflation. 
i  Objec  Cecieft  pareillement  une  nouveauté  &  une  ufurpation  de  prérogative: 
ti'on.  car  tout  le  monde  fait,  qu'il  n'y  a  jamais  eu  de  Loi  propofée  jufqu'à  pre- 
fent,  qui  bornât  le  Roi  dans  la  convocation  d'un  nouveau  Parlement,  ou 
dans  fa  caflation,  puifque  les  Loix  pour  des  Parlemens  annuels  ou  trien- 
naux ne  regloient  point  la  convocation  d'un  nouveau  Parlement  ,  mais 
dicloient,  qu'un  Parlement  devoit  être  tenu  premièrement  tous  les  ans  & 
puis  tous  les  3.  ans:  cela  exigeoit,  qu'un  Parlement  devoit  être  tenu  une 
fois  par  an  \  encore  ces  Loix  nevouloient-elles  point  qu'il  y  en  eut  tous  les 
ans  un  nouveau:  auiîi  ne  pourroient- elles  fouffrir  cette  explication,  puif- 
que quelques  Actes  demandoient  qu'on  tint  un  Parlement  une  ou  deux 
fois  par  an,  &  tous  les  Aéles  enfemble  plus  fouvent,  s'il  étoit  neceffaire. 
En  vérité,  on  ne  pouvoit  pas  s'imaginer ,  qu'il  y  auroit  toujours  un  nouveau 
Parlement  élu  dans  la  même  année,  &  le  Bill  triennal  veut  feulement, 

qu'il 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  377 

qu'il  n'y  ait  point  d'intermiffion  de  Parlement  pour  plus  de  3.  ans  depuis  la  Awairsi 
caflation  du  dernier.  d'Anglk- 

II  ieroit  fort  embaralTant  de  fixer  un  certain  tems  pour  une  nouvelle  é-     TERRE- 
lection  &  caflation,  fi  cela  arrivoit  dans  un  tems  de  Rébellion  ou  d'Ufur-    ?,.objeo 
pation,  ou  dans  un  tems  de  Guerre,  ce  qui  dépend  beaucoup  de  la  bon-   tion. 
ne  difpofmon  du  Parlement,  &  particulièrement  quand  les  depenfes  font 
fi  grandes  qu'une  grande  partie  en  doit  être  levée  fur  le  crédit ,  ce  qui  dé- 
truit toute  confiance  en  la  Couronne  &  au  pouvoir  de  faire  la  Guerre  en 
cas  de  neceffité. 

Puifque  la  Nation  eft  divifée  en  Partis  à  l'égard  des  vues  pour  fixer  un    3.objco 
certain  tems  par  raport  à  la  caflation  d'un  Parlement  &  à  l'élection  d'un   tion. 
nouveau,  cela  pourroit  cauferdes  fermentations dangereufes  &  des  brigues  ; 
&  ce  fera  toujours  un  iconvenient  fâcheux ,  fi  l'on  a  un  tems   aufîi  long 
pour  faire  fon  parti  pour  une  Election. 

Néanmoins,  comme  le  Roi  peut  encore  prévenir  cela,  &  que  les  deux 
longs  Parlemens  du  tems  de  Charles  I.  &  de  Charles  II.  ont  donné  lieu  à 
beaucoup  de  Griefs  au  Peuple,  tant  par  la  continuation  du  Privilège,  que 
par  le  foupçon  de  corruption  de  la  Cour  dans  le  dernier  de  ces  deux  Par- 
lemens (quoiqu'il  n'y  en  eut,  y  compris  les  Officiers  &  les  Pensionnaires, 
qu'une  cinquième  partie  )  il  feroit  neceflaire  d'employer  quelque  remède 
pour  empêcher  que  les  Parlemens  foient  continuez  fi  long -tems,  fi-non 
dans  un  cas  de  grande  neceffité. 

A  l'égard  du  troifième  Point ,  qui  concerne  la  féparation  du  préfent  Par-   in. 
lement,  j'ofe  aflurer  hardiment,  qu'il  n'y  a  pas  d'exemple  antérieur, qu'un   Point. 
Parlement  aflemblé  dût  être  diflous  par  Acte  de  Parlement,  &  un  jour  fi-   ^Objec- 
xé  pour  cet  effet,  à  moins  que  le  Roi  ne  le  diflblve  plutôt.  tlon" 

Rien  ne  déroge  plus  à  l'Honneur  &  au  Droit  d'un  Roi,  que  d'admettre  z.Objcc- 
un  tel  exemple,  c'eft-  à-  dire,  de  fe  mettre  dans  le  befoin  d'avoir  un  Acte  tion« 
de  Parlement  pour  faire  agir  fon  pouvoir  exécutif,  dont  il  ne  peut  s'attri- 
buer l'honneur  s'il  y  confent,  puifque  les  deux  Chambres  lui  en  impofent 
la  Loi  contre  la  coutume  ordinaire;  &  cela  ne  va  pas  à  moins  qu'à  l'indi- 
gne méfiance  de  fon  Jugement  ou  de  quelque  mauvais  defîein  envers  fon 
peuple  lorfqu'il  continue  un  Parlement. 

Cette  Nouveauté  des  Seigneurs  eft  le  plus  grand  Abus  qui  fe  fit  jamais  ,  3.objec- 
en  fixant  un  jour  pour  la  continuation  d'un  Parlement  au  cas  que  le  Roi  tion. 
ne  le  diflblve  avant  ce  tems-îà,  &  elle  intereffe  grandement  ceux  de  la 
Chambre  Baffe  auffi-bien  que  le  Roi;  ce  Parlement  ne  pouvant  être  chan- 
gé que  par  une  pareille  caflation  ou  élection,  ce  qui  eff.  d'une  fort  mau- 
vaife  confequence  ii  l'on  en  fait  un  exemple  ;  puifqu'un  parti  oppofé  dans 
la  Chambre  des  Seigneurs  de  concert  avec  un  autre  dans  celle  des  Com- 
munes peut  en  tout  tems  furprendre  une  Chambre  lors  qu'il  n'y  a  que  peu 
de  Membres ,  &  impofer  la  neceffité  au  Roi  de  diflbudre  un  Parlement 
auffi  bien  2ffectionné  au  fervice  du  Public  qu'au  fien  propre. 

Ceci  mérite  la  plus  grande  Reflexion  de  la  Chambre  des  Communes ,  &   4.  Objec- 
ne  renferme  pas  moins  que  ceux-là  ont  été  fubornez  par  la  Cour  &  qu'ils  tion. 

Y  y  2  en 


TERRE. 


3j6     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    en  ont  donné  tant  de  preuves ,  par  ce  qu'ils  ont  accordé  à  la  Couronne  au 

D^««rE"  ^e^  ^e  ce  <lu^  ^t0*c  nece^dire»  que  le  peuple  ne  pouvoit  plus  long-tems 
fe  fier  à  eux  ;  &  quoiqu'il  foit  vrai  que  ce  point  l'emporta  fur  toute  la  mo- 
deitie  des  Gentilhommes  de  Province  qui  ne  dévoient  pas  demander  leur 
propre  continuation,  mais  laifTer  la  liberté  d'une  nouvelle  Election  à  la 
Province,  on  l'entendra  cependant  ainfi  au  dehors,  &  une  faclion  en  fera 
ion  profit  contre  eux  de  propos  délibéré  en  l'envifageant  comme  un  aveu 
de  la  venté  de  cette  imputation,  afin  de  prévenir  qu'ils  ne  foient  enco- 
re choifis. 

Enfin ,  ce  Point  de  la  caiïâtion  du  préfent  Parlement  fut  aflurément  celui 
que  fe  propofa  ce  Parti,  qui  porta  le  Bill  fur  le  tapis  &  le  favorifa  dans 
Jes  deux  Chambres,  en  efperance ,  par  une  nouvelle  rufe,  de  renforcer 
Ion  Parti ,  comme  cela  parut  fuffifamment  par  les  differens  artifices  dont 
il  fe  fervit  pour  noircir  ce  Parlement  par  un  Bill  qui  excluoit  à  l'avenir 
tous  ceux  qui  écoient  en  charge ,  en  portant  fes  plaintes  contre  nos  privi- 
lèges, y  propofant  des  changemens,  lâchant  des  reflexions  d'importance 
contre  les  Miniilres,  fous  prétexte  de  donner  des  avis  &  de  faire  des  re- 
cherches de  leur  mauvaife  conduite,  &  en  faifant  plufieurs  autres  chofes, 
qui  occupèrent  entièrement  le  plus  grand  nombre  de  la  préfente  Aifem- 
blée,  jufques  là  que  la  caflation  de  ce  Parlement  pour  un  tems  limité,  eft 
tout  ce  qu'on  s'eft  propofe. 

Après  tout,  je  ne  puis  m'empêcher  de  remarquer,  que  dans  le  cours  de 
nôtre  liifloire ,  aucun  Roi  qui  ait  fouffert  qu'une  Faction  le  confondit,  ou 
]e  dupât  dans  quelque  point  confiderable  de  les  prérogatives,  n'a  jamais 
été  en  état  de  fe  foutenir  lui-même  \  &  que  de  l'aveu  de  tout  le  monde, 
Je  dernier  exemple  que  le  Roi  Charles  I.  en  donna,  en  fouffrant  que  fa 
prérogative  par  raport  à  la  caiïâtion  fut  reftrainte,  fut  la  caufe  fatale  de  fa 
ruine  :  voilà  la  raifon  pourquoi  je  ne  faurois  trouver  à  propos  que  Sa  Ma- 
jeité  paife  ce  Bill;  mais,  s'il  plait  à  Sa  Majeflé ,  lors  qu'elle  rejettera  ledit 
Bill  de  remarquer  dans  fa  Harangue,  que  comme  Elle  étoit  venue  pour 
défendre  nos  juftes  Droits,  Elle  ne  pouvoit  croire  que  nous  vouluffions  en 
échange  ufurper  de  cette  manière  les  Droits  de  la  Couronne  ,  que  nous  a- 
vons  tous  juré  de  maintenir,  &  dont  Elle  ne  peut  jamais  rien  relâcher  en 
confideration  de  nous-mêmes;  &  que,  comme  Elle  ne  voudroit  jamais 
nous  donner  une  jufte  occafion  de  tenir  fufpecle  la  continuation  de  ce 
Parlement, ou  de  tous  autres,  au  delà  de  ce  qu'exige  le  bien  public  &  la  né- 
cefiité  des  Affaires,  Elle  feroit  pareillement  prête  de  paiTer  tout  Bill  qui  fe- 
ruit  propofé  d'une  manière  convenable  ,  pour  prévenir  la  longue  conti- 
nuation des  Parlemens  à  venir,  &  qu'Elle  termineroic  celui-ci  de  manière 
qu'il  ne  refteroit  aucune  jufte  raifon  de  s'en  plaindre. 


Fro- 


Fi 


5» 
5 

5 


RESOLUTIONS     D'ETAT,    M.  DCC.  I.         3)-7 

AîFAIRtfc 

•Qclamation  pour  âijjouare  le  Parlement  3  S3  ^  convoquer  un  au-  i/angle. 

/;t;  */«   il.  Novembre  1701.  . T£**E-. 

GUILLAUME    ROI. 

D'Autant  que  nos  amés  Sujets  ont  unanimement  témoigné,  par   pr0cla- 
leurs  fidèles  Adrelfes,  le  reflentiment  qu'ils  ont  de  l'injuibce  &  de   mation 
,  l'indignité  qui  nous  ont  été  faites,  ainlï  qu'à  nôtre  Peuple  ,  par  le  Pro-   pourdif- 
,  cédé  du  R.  T.  C.  en  prefumant  de  reconnoitre  &  de  déclarer  le  pre-    ion  rc_ 
„  tendu  Prince  de  Galles,  Roy  d'Angleterre,  d'Ecoffe,  &  d'Irlande;   Et   quer  je 
„  nous  ayant  en  même  tems,  donné  auiîi  de  la  manière  la  plus  refpeclueu-  Parie* 
„  fe ,  des  marques  de  leur  affection  pour  nôtre  Perfonne  &  nôtre  Gou-   ment* 
„  vernement ,  &  de  leur  ferme  Refolution  de  faire  en  cette  occafion, 
„  toutes  les  chofes  qu'on  peut  fouhaitter  de  véritables  Anglois  &  de  bons 
„  Proteitants  :  Nous  les  avons  reçeu  avec  beaucoup  de  fatisfaétion  ,    & 
„  Nous  avons  trouvé  qu'il  étoit  raifonnable  dans  cette  conjoncture  ex- 
„  traordinaire,  de  donner  occafion  à  nos  Sujets  de  choifir  des  Perfonnes 
,,  pour  les  reprefenter  en  Parlement,  telles  qu'ils  jugeront  être  les  plus 
„  propres  à  accomplir  leurs  j  uft.es  &  pieufes   intentions   &  pour  cet  ef- 
,,  fect.  de  cafTer  ce  prefent  Parlement  ,  qui  eft  prorogé  jufqu'au  Jeudi  1  ; 
„  de  ce  prefent  Mois  de  Novembre  (vieux  ilile.)    A  ces  caufes,  de  l'A- 
„  vis  de  nôtre  Confeil  privé,  nous  faifons  publier  cette  Proclamation  Ro- 
„  yale,  fuivant  laquelle  nous  diffolvons  le  dit  Parlement;    de  forte  que 
„  les  Seigneurs  Ecclefiaftiques  &  Séculiers,  &  les  Chevaliers ,  Citoyens, 
,,  &  Bourgeois  du  dit  Parlement,  font  par  la  prefente  Proclamation  dif- 
,,  penfés  de  s'afTembler  le  Jeudi  treizième  de  ce  prefent  Mois  de  Novem- 
„  bre.   Et  nous  faifons  favoir  par  les  prefentes ,  à  nos   dits  Sujets  ,    que 
„  nous  avons  deffein  de  donner  Ordre  au  Garde  de  nôtre  Grand  Seau, 
„  d'expédier  des  Ordres  ou  Lettres  circulaires  félon  la  diie  forme  de  laLoy, 
„  pour  convoquer  un  nouveau  Parlement,  qui  commencera  &  fe  tiendra 
,,  à  Weftmuniter  le  Mardi  trentième  du  Mois  de  Décembre  prochain. 

Donné  en  nôtre  Cour  à  Hamptoncourt  l'onzième  jour  du  Mois  de  No- 
vembre 1701  (V.  St.) ,  &  de  nôtre  Règne  le  treizième. 


AdreÇfe  de  TEvêque  £5?  du  Clergé  de  la  Fille  de  Londres. 

SIRE, 

5,  ^Tous  ,  les  très  fidèles  &  obeiffants  Sujets  de  Vôtre  Majeflé,  l'Eve-  Adrefle 
„  1  >l    que  &  le  Clergé  de  vôtre  Ville  de  Londres ,  remercions  Dieu  de  dl^"* 
„  tout  nôtre  cœur,  &  congratulons  V.  M.  fur  fon  heureux  retour  au  mi-  fondjes> 
„  lieu  de   nous.     Nous  fouhaitterions,   SIRE  ,  n'avoir  eu  d'autre  rai- 

Yy  3  »fcn, 


TERRE. 


J> 


3f3    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Amaibm  „  fon ,  pour  vous  prefenter  cette  AdrefTe ,  que  de  réitérer  à  V.  M.  les 
«'Angle-  ^  afTurances  de  nôtre  fidélité  &  de  nôtre  zèle  ,  pour  la  fureté  &  la 
„  profperité  de  vôtre  Perfonne  Sacrée  &  de  vôtre  Gouvernement. 

„  Mais ,  ce  que  nous  avons  apris  de  l'étrange  Procédé  du  Roy  T.  C. 
„  en  prefumant  fi  injuftement  d'ériger  le  prétendu  Prince  de  Galles 
,,  en  qualité  de  Roy  d'Angleterre  ,  d'Ecoffe,  &  d'Irlande  ,  nous  donnant 

une  julte  horreur  de  l'injure  &  de  l'indignité  faites  à  V.  M.,  nous  faic 
„  connoitre  aulTi  qu'il  eft  de  nôtre  devoir  de  donner  en  cette  occafion  à 
„  V.  M.  de  nouvelles  afTurances  de  nôtre  inviolable  fidélité ,  que  de  tels 
„  Prétextes ,  ou  de  femblables  Entreprifes ,  ne  pourront  jamais  ébranler. 

,,  Nous  fommes  trop  fenfibles,  Grand  Roy,  aux  dangers  que  nous 
,,  avons  fi  récemment  courus,  de  tomber  dans  le  Papifme  &  dans  le  Pou- 
„  voir  arbitraire;  &  nous  reconnoiffbns  trop  la  grande  Bonté  de  Dieu, de 
,,  nous  en  avoir  délivrés  ,  en  élevant  V.  M.  fur  le  Thrône  ,  pour  n'en 
,,  rendre  pas  nos  très  humbles  Actions  de  Grâces  à  la  Divine  Providence, 
„  &  être  fi  ingrats  envers  nôtre  Libérateur,  que  de  nous  expofer  à  de 
,,  nouveaux  dangers. 

,,  Nous  prions  donc  le  Dieu  Tout  PuifTant  d'infpirer  à  tous  vos  Sujets, 
„  nos  Compatriotes ,  de  concourir  avec  nous  en  nôtre  zèle  &  dans  nos 
„  prières,  ainfi  que  dans  nos  efforts  félon  nos  différentes  capacités  & 
„  nos  polies,  pour  renverfer  le  pouvoir,  &  faire  échouer  les  mauvais  défi- 
,,  feins,  de  tous  les  Ennemis  de  V.  M.  &  de  rendre  vôtre  Règne  heureux 
,,  &  glorieux ,  que  nous  prions  Dieu  de  continuer  long-tems  au  milieu  de 
„  nous. 


.Adrefle 
de  la  Vil- 
le  de 
Marlbo- 
roug. 


Adreffe  de  la  Ville  de  Marlboroug. 
SIRE, 

Le  Roy  T.  C. ,  ce  grand  Raviffeur  des  Libertés  de  l'Europe,  ayant 
violé  les  Articles  de  la  Paix  concilie  à  Ryfwich  ,  en  proclamant 
,  le  prétendu  Prince  de  Galles  Roy  de  tous  le  Etats  de  Vôtre  Ma- 
,  jelté  ,  excepté  la  France;  Nous,  les  très  obeiffants  &  fidèles  Sujets 
,  de  V.  M.,  le  Maire,  les  Magiflrats,  &  les  principaux  Bourgeois  de  la 
,  Ville  de  Marlborough  au  Comte  de  Wilts ,  fuplions  très  humble- 
,  ment  Vôtre  très  Sacrée  Majefté  d'envoyer  de  telles  Armées  de  Mer 
,  &  de  Terre  au  fecours  de  vos  Alliés ,  qu'on  puiffe  châtier  l'Infolence  de 
,  cet  orgeilleux  Monarque  ,  afin  de  lui  faire  connoitre  ,  que  non-feule- 
ment fon  petit  Fils  le  Duc  d'Anjou  n'a  aucun  Droit  à  la  Couronne  d'Ef- 
pagne,  mais  que  même  la  Couronne  qu'il  porte  eft  une  dépendance  de 
la  Couronne  d'Angleterre,  pour  le  maintien  de  laquelle  &  de  tous  les 
autres  Etats  de  V.  M.  nous  fommes  prêts  à  facrifier  nos  biens  &  nos 
vies.  Et,  ayant  congratulé  de  tout  nôtre  cœur  V.  M.  fur  fon  heureux 
retour,  nous  prierons  toujours  Dieu,ainfi  que  nôtre  devoir  nous  y  obli- 
ge, de  donnera  V.M.  une  longue  &  heureufevie,  &  un  Règne  glorieux. 

Aârejje 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  L  35<> 

AdreJJe  du  Comté  de  Lclccjîer. 
GRAND    ROY, 


.Affaires 
d'Angle- 
terre. 


Nous,  les  très-obéiflans  &  fidèles  Sujets  de  Vôtre  Majefté,  Tommes    Adreiïe 
très-perfuadez,  &  reconnoîtrons  toujours  avec  actions  de  grâces,    duCom- 
que  V.  M.,  par  fa  valeur  &  par  fa  conduite,  nous  a  rendu  nôtre  Reli-    tédeLei- 
gion  &  nos  Libertez  ,   lorfqu'elles  étoïent  dans    le  plus   grand  danger  :   ccfter' 
&  que  V.  M. ,  par  fa  fageffe,  nous  a  protégé  &  maintenu  dans  la  paifible 
jounTance  de  ces  avantages,  pendant  tout  le  cours  de  ion  Régne. 

Nous  croyons  donc  que  nôtre  devoir  nous  oblige  à  employer  tous  nos 
efforts ,  pour  procurer  &  entretenir  la  paix  &  la  bonne  union  dans  le 
Royaume,  &  contribuer  de  tout  nôtre  pouvoir  à  maintenir  le  jufte  &  très- 
légitime  titre  qu'à  V.  M.  à  la  Couronne  Impériale  de  ces  Royaumes  ,  fé- 
lon les  Actes  pour  fon  établissement,  contre  le  prétendu  Prince  de  Galles, 
fes  Adhérens,  &  tous  les  autres  Ennemis  de  V.  M.  quels  qu'ils  foient:  & 
nous  choifirons  toujours  ,  autant  que  nous  le  pourrons  ,  des  Perfonnes 
pour  nous  repréfenter  en  Parlement ,  qui  concouront  volontiers  &  de  bon 
cœur  avec  V.  M. ,  pour  obtenir  ces  bonnes  chofes. 

AdreJJe  du  Comte  de  Saïïsbury. 

SIRE, 

Nous  fommes  très-perfuadez  que  nôtre  devoir  &  nôtre  fidélité  nous   Adrefle 
obligent  à  reffentir  l'Infolence  du  Roy  T.  C. ,  &  la  grande  Indignité    d?  Gom- 
faite  par  lui  à  V.  M.,  en  donnant  le  titre  de  Roy  d'Angleterre,  d'Ecoffe,    |£.  **'  '*" 
&  d'Irlande  au  prétendu  Prince  de  Galles,  contre  le  très-julle  &  légitime 
droit  que  V.  M.  y  a,  &  les  Loix  faites  pour  établir  la  Succefiion  dans  la 
Ligne  Proteflante.     Il  eft  évident  par-là,  que  ce  Roi  a  deffein  de  tâcher, 
autant  qu'il  lui  fera  poflîble  ,  de  détrôner  V.  M. ,  d'extirper  la  Religion 
Proteflante  dans  ces  Royaumes,  &  de  renverfer  &  détruire  nos  Libertez, 
nos  Droits,  &  nos  Privilèges,  pour  le  maintien  &  la  confervation  defquel- 
les  chofes  V.  M.  à  fait  voir  un  (ï  grand  zeîe,  en  hazardant  fi  fouvent  vô- 
tre prétieufe  &  chère  vie. 

Nous,  les  très- fidèles  &  obéïffans  Sujets  de  V.  M.,  lui  demandons  donc 
Permillion  de  l'afiurer,  qu'en  quelque  tems  q\ie  ce  foit,  nous  fervirons 
fincerernent  &.  unanimement  V.  M.,  &  que  nous  employerons  tout  nôtre 
pouvoir  &  toutes  nos  forces,  pour  la  confervation  de  fa  Perfonne  Sacrée 
&  de  fon  Gouvernement ,  contre  tous  les  Ufurpateurs  >  &  tous  ceux  qui 
voudront  prétendre  au  Litre  de  V.  M. 

Adref- 


3<?o    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires 

"Vekr""  Aàreffe  du  Comté  de  Worvcfler, 

SIRE, 

Adrefle  XJous,  les  très-obéiffans  &  fidèles  Sujets  de  Vôtre  Majeflé,  fbuhaitons 
du  Com-  J^%|  ^  demandons  humblement  permiiiion  de  faire  voir  le  grand  reffen- 
Worcef-  timent  que  nous  avons  de  l'Affront  fait  h  V.  M.  &  à  vos  Royaumes  par  le 
ter.  Roy  T.  C.  en  déclarant  le  prétendu  Prince  de  Galles  Roy  d'Angleterre, 

d'Ecoffe,  &  d'Irlande.  Nous  fommes  obligez  d'avouer  &  de  reconnoître 
les  grandes  chofes  que  V.  M.  a  faites  pour  nous  ,  &  confeffer  que  c'efl 
une  Bénédiction  particulière  de  Dieu  fur  ces  Royaumes  ,  qu'en  de  fem- 
blables  entreprifes  &  attentats  pour  détruire  nôtre  Religion  &  nos  Liber- 
tez,  nous  avons  le  meilleur  des  Rois  pour  les  défendre.  Nous  prions 
donc  très-humblement  V  M.  de  nous  permettre  de  l'affurer ,  que  nous  fe- 
rons tout  nôtre  poffible,&  employerons  tous  nos  efforts,  pour  la  conferva- 
tion  &  la  défence  de  Vôtre  Perfonne  Sacrée  &  de  vôtre  Gouvernement, 
contre  le  prétendu  Prince  de  Galles  &  tous  vos  Ennemis,  foit  dedans  foie 
dehors  vos  Royaumes. 

AdreJJe  de  la  Ville  &?  Comté  de  Toolc.  \ 

SIRE,  1 

Nous,  les  très-obéïffans  &  fidèles  Sujets  de  Vôtre  Majeflé,  étant  trèsj 
fenfibles  &  fort  irritez  de  la  grande  Indignité  &  de  l'Affront  fait  à 
Vôtre  Perfonne  Sacrée  &  à  vôtre  Gouvernement  par  le  Roy  T.  C.  ,  en 
proclamant  le  prétendu  Prince  de  Galles  Roy  d'Angleterre  ,  d'Ecoffe,  & 
d'Irlande  ,  en  quoi  il  a  ouvertement  violé  le  Droit  &  le  Titre  inconteftable 
qu'a  V.  M.  à  ces  Royaumes,  &  contre  nos  Loix  faites  pour  établir  la  Suc- 
celTion  à  la  Couronne  dans  une  Ligne  Proteltante. 

Nous  demandons  humblement  permifiïon  de  déclarer,  que  nous  abho- 
rons  &  dételions  cette  perfide  Action  de  ce  Monarque:  comme  auflî  d'afc 
furer  V.  M. ,  qu'au  péril  de  nôtre  vie  &  de  tout  ce  qui  nous  eft  le  plus 
cher,  nous  nous  tiendrons  attachez  à  V.  M.  ,  pour  défendre  fa  Perfonne 
Sacrée  &  fon  Gouvernement,  &  la  Succeliion  à  la  Couronne,  ainfi  qu'el- 
le a  été  depuis  peu  établie,  contre  le  prétendu  Prince  de  Galles,  &  tous 
autres  qui  pretendroient  ou  voudroient  ufurper  vôtre  Couronne  ou  vôtre 
Dignité. 


Mrer 


Adrefle 
du  Com- 
té de 
Poole. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.  361 

Affaires 

Adreffe  de  la  Fille  de  Sandwich.  d'anolb- 

*"  TERUK. 

SIRE, 

„  "VTous,  les  très-obéifTants  Sujets  de  Vôtre  Majeflé,  la  congratulons   Adreflb 
„  1^1    de  tout  nôtre  cœur ,  de  ion  heureux  retour  dans  Ton  Royaume}    ?e  laVl1" 
„  Et  nous  nous  fervons  de  cette  occafion,  pour  aflurer  Vôtre  Majeflé    sand- 
„  autfi-tôt  après  fon  débarquement,  que  nous  ne  faurions  afTés  exprimer   wich. 
combien  nous  refTentons  l'Action  du  Roy  de  France, en  donnant  le  ti- 
tre de  Roy  d'Angleterre,  d'EcofTe,  &  d'Irlande  au  Prétendu  Prince  de 
Galles,  &  le  nommant  jaques  III.  pour   faire  revivre  &  ranimer  un 
Parti  qui  a  toujours  été  Ennemi  de  vôtre  Majeflé  dans  fon  Royaume , 
&  cela  contre  les  engagements  dans  lefquels  il  elt  entré  par  le  dernier 
Traité  de  Paix. 

„  Nous  croyons  donc  qu'il  efl  de  nôtre  devoir,  d'affurer  très-humble- 
„  ment  Vôtre  Majeflé,  que  nous  employerons  tout  nôtre  pouvoir,  pour 
„  vanger  l'honneur  de  V.  M.  &  maintenir  le  titre  incontellable  qu'a  V. 
„  M.  à  ces  Royaumes  durant  fa  vie,  que  nous  prions  Dieu  de  vous  don- 
,,  ner  longue  &  heureufe ,  &  après  cela  à  vos  SuccefTeurs  dans  la  Ligne 
„  Proteflante,  ainfi  qu'il  efl  établi  par  les  Loix. 

Adreffe  de  la  Fille  de  Wïlton. 


ledeWil- 
ton. 


„  "Permettez  nous,  Grand  Roy,  de  nous  joindre  à  un  fi  grand  nom-   Adrefle 

„  A     bre  de  vos  autres  très-obéifTants  &  fidèles  Sujets ,  pour  expofer  à   Jf  J^îf 

„  vos  pieds  le  profond  reiTentiment  que  nous  avons  de  cet  horrible  Af- 

„  front  fait  depuis  peu  à  Vôtre  Majeflé  par  le  Roy  de  France.     Nous  a- 

„  vons  lieu  de  croire,  qu'il  n'auroit  pas  été  afTés  hardi  pour  le  faire,  s'il 

„  n'y  avoit  été  encouragé  par  un  Parti  corrompu  qui  eft  dans  vos  propres 

„  Etats,  lequel   Milord  Melford  réprefenta  dans  la  Lettre  qu'il   écrivit 

„  l'hiver  pafTé,  comme  fes  Amis.     Mais  fon  Infolence,en  proclamant  le 

„  Prétendu  Prince  de  Galles  Roi  de  la  Grande-Bretagne  &  d'Irlande, 

„  pour  s'oppofer  au  juile  titre  que  Vôtre  Majeflé  y  a ,   efl  une  û  grande 

„  Indignité  faite  à  V.  M.  &  aux  trois  Royaumes,  que  tout  le  Monde  la 

„  doit  avoir  en  horreur,  excepté  des  Traitres  de  la  plus  noire  Trahifon  ;  fi 

„  on  confidere  principalement   toutes  les  grandes  chofes  que  V.  M.  a  fai- 

„  tes  pour  ces  Nations ,  &  tous  les  périls  qu'Elle  a  courus  pour  nous  de- 

„  livrer  du  plus  dur  de  tous  les  Efciavages. 

„  Nous  efperons,  Sire,  que  nos  Députez  à  la  Chambre  des  Com- 
„  munes  feront  toujours  prêts  à  concourir  avec  V.  M.  en  tout  ce  qui  la 
„  pourra  mettre  en  état,  non-feulement  d'arrêter,  mais  aufîi  d'abbatre  & 
„  d'humilier  ce  grand  Perturbateur.de  l'Europe,  dont  la  vie  a  été  une 
„  fuite  continuelle  de  ruine,  de  carnage,  &  de  rapine.    S'ils  ne  le  font 

l'orne  XL  Z  z  „  pas 


Aftaires 

d'Angle- 

TEKRE. 


$Si    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

„  pas ,  nous  aflfeurons  V.  M.  qu'ils  agiront  contre  nos  fentimens ,  &  ce 
„  que  nous  attendions  d'eux,  lorfque  nous  les  avons  choifis  pour  nous 
„  reprefenter  en  Parlement. 

„  Nous  efperons  encore  (en  nous  foumettant  pourtant  humblement  à 
„  Vôtre  Majefté)  que  dans  un  jufte  reflentiment  de  cette  Infolence,  V. 
„  M.,  avec  le  fecours  de  fon  Peuple  &  de  fon  Parlement,  fera  en  état  de 
„  luy  faire  rendre  compte  de  ces  autres  Titres  qu'il  a  érigés  en  Europe,  & 
„  dans  l'Amérique ,  au  préjudice  de  fa  Foy  &  de  fes  Traités  ;  &  qu'en 
„  rétabliffant  la  Maifon  d'Autriche  &  la  Couronne  d'Efpagne,  Elle  lui  fe- 
„  ra  abandonner  fes  Ufurpations  fur  ces  Païs-là,  &  lui  fera  perdre  l'efpe- 
,,  rance  de  devenir  Maître  du  Commerce  &  de  la  Liberté  deceRoyaume> 
„  &  de  tout  le  monde  voifin. 

Adreffe  de  la  Fille  dAylsbury. 


Adreffe 
de  la  Vil- 
le d'Ayls- 
jbury. 


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55 
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99 

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55 
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55 
55 
55 
Jï 


SIRE, 

Le  Reflentiment  &  l'Horreur,  que  nous  avons  de  la  Perfidie  du  Roy 
de  France,  qu'aucun  Serment  ne  peut  lier,  aucun  Traité  engager, 
ni  aucun  Sacrement  obliger;  qui,  au  préjudice  &  contre  la  Paix  de  Ryf- 
wich,  a  érigé  le  Prétendu  Prince  de  Galles,  nonobftant  le  juite  titre  & 
le  légitime  Droit  qu'a  Vôtre  Majeité  à  la  Couronne  Impériale  de  ces 
Royaumes  ;  nous  obligent  à  demander  tres-humblement  permiffion  à  V. 
M.  de  lui  renouveller  les  vœux  de  nôtre  obéiflance,  &  de  l'aflurer,  que 
nous  employerons  tout  nôtre  pouvoir  &  nôtre  induftrie,  pour  défendre 
fa  Perfonne  Sacrée,  fa  Couronne, &  fa  Dignité,  contre  tous  ceux  qui  y- 
voudront  prétendre,  ou  les  envahir,  de  quelque  rang  ou  qualité  qu'ils 
foient;  &  que  nous  foutiendrons  V.  M.  dans  toutes  les  Alliances  qu'EÎ- 
le  a  faites  ou  fera,  pour  l'honneur,  l'intereft,  &  la  feureté  de  tous  les 
Etats  de  vôtre  Domination,  &  la  Paix  publique  de  l'Europe. 


Adreffe 
de  la  Vil- 
le de  Ti- 
verton. 


>5 
55 
55 
55 
55 
5» 
55 
55 
55 


Adreffe  de  la  Ville  de  Tiverton. 

S  î  R  E, 

Etant  très  fenfibîes  avec  combien  de  gloire  Vôtre  Majefté  a  déli- 
vré nôtre  Religion,  nos  Loix,  &  nos  Libertés,  de  la  violation  ma- 
nifelte  des  précédents  Règnes  j  &  comment  ces  chofes  nous  ont  été 
depuis  inviolablement  confervées;  nous  ne  faurio.ns,  fans  nous  rendre 
coupables  de  la  plus  haute  ingratitude,  nous  empêcher  de  dire  &  faire 
connoitre  combien  nous  detefïons  &  avons  en  horreur  cette  dernière 
Action  du  Roy  de  France,  en  prefumant  &  ôfant  donner  le  titre  de 
Roy  d'Angleterre,  d'Ecofle,&  d'Irlande  au  Prétendu  Prince  de  Galles, 
violant  par-là  le  très  julte,  tres-legitime  ,  &  inconteltable  Titre  de  V. 

M. 


55 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M,  DCC.  I. 


3<53 


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TERRE. 


M.  &  méprifant  toutes  nos  Loix.  Nous  fommes  très-perfuadés,  que  le  Affaire* 
motif  qui  l'y  aporté  a  été  les  aflurances  qui  lui  ont  été  données  par  un  "L^!3"" 
Parti  dans  ce  Royaume  ,  qui ,  pendant  les  Règnes  précédents ,  a  fait  tout 
ce  qu'il  a  pu  pour  augmenter  fon  pouvoir,  afin  d'introduire  le  Papifme 
&  l'Efclavage  dans  ces  Royaumes,  &  qui  s'oppofa  à  mettre  la  Couron- 
ne fur  la  tête  de  Vôtre  Majeité.  Nous  prenons  donc,  avec  toute  l'hu- 
milité pofïïble,  la  permiiïion  d'aflurer  V.  M.  que  de  tout  nôtre  pouvoir, 
&  avec  touts  nos  efforts,  nous  maintiendrons  &  défendrons  la  Perfon- 
ne  Sacrée  &  le  Gouvernement  de  V.  M.  comme  auffi  la  Succeflîon  aux 
Couronnes  de  ces  Royaumes,  ainfi  qu'elle  eft  à  prefent  établie  par  les 
Loix  ,  contre  le  Prétendu  Prince  de  Galles ,  &  fes  Adhérents ,  &  tous  les 
ennemis  de  V.  M.  dedans  ou  dehors  le  Royaume.  Et  lorfque  V.  M. 
trouvera  à  propos  de  prendre  l'avis  de  fon  Peuple  aflemblé  en  Parle- 
ment, nous  ne  choiiirons  que  des  Perfonnes  qui  metront  efficacement 
Vôtre  Majefté  en  état  de  protéger  la  Religion  Proteflante,  de  mainte- 
nir la  balance  de  l'Europe,  &  de  réduire  le  pouvoir  exhorbitant  de  la 
France. 


Aàreffe  de  la  Fille  de  Cantorbery, 


SIRE, 


"  "^r°us»  ^es  très-humbles  &  tres-fidelles  Sujets  de  V.  M.,  qui  avons  eu  Adrefle 
„  JlN   fi  foi 


uvent  l'honneur  de  la  congratuler  fur  fon  heureufe  arrivée  en  dela.vfl- 
cette  Ville;  Nous  croirions  manquer  à  nôtre  devoir,  Ci  nous  tardions  en   lede 
ce  tems  à  vous  donner  de  nouvelles  marques  de  nôtre  fidélité  &  affec-  £ arn..tor" 
tion.  Principalement ,  depuis  que  le  Roy  des  François  a  proclamé  &  re- 
connu le  Prétendu  Prince  de  Galles  pour  Roy  d'Angleterre,  d'Ecofle, 
&  d'Irlande  ;   contre  les  Droits  légitimes  de  V.  M.  à  la  Couronne  Im- 
périale de  ces  Royaumes  ,    contraire  à  l'établifTement  de  la  Succeflîon  à 
la  Couronne ,  fait  par  plusieurs  Aftes  de  Parlement. 
„  C'eit  pourquoy  nous  affurons  tres-humblement  V.  M.  que  nous  em- 
ployerons  tout  nôtre  pouvoir  pour  défendre  &  affilier  vôtre  Perfonne 
facrée,  &  vôtre  Gouvernement,  contre  le  Prétendu  Prince  de  Galles,  fes 
adherens,  &  tous  les  autres  Ennemis  de  V.  M. 

„  Nous  prions  le  Dieu  tout  puiffant,  qui  a  donné  de  Ci  heureux  fuccès 
„  aux  Armes  de  V.  M.  pour  la  defenfe  &  la  confervation  de  nos  Libertés 
„  &  de  la  Religion  Proteftante ,  qu'il  lui  plaife  de  bénir  continuellement  ces 
„  Royaumes,  &  toute  la  Chrétienté, &  en  confervant  vôtre  precieufe  vie 
vous  donner  un  long  &  heureux  Règne. 


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55 


55 


55 


15 


55 


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Z    2 


MreJJe 


3*4  MEMOIRES,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 


AïîAIRÎS 
D'ANGLE- 
TERRE. 


AdreiTe 
de  la  Pr. 
deCum- 
berknd. 


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3' 


Aàrcffe  de  la  Province  de  Cumberland. 
SIRE, 

L'insolent  Procédé  du  Roy  T.  C. ,  en  s'ingerantde  donner  le  Ti- 
tre de  Roy  d'Ang'eterre,  d'Ecoffe,  &  d'Irlande,  au  Prétendu  Prince 
de  Galles  ,qui  eft  un  Affront  &  une  Indignité  de  la  plus  haute  nature 
faits  à  Vôtre  Majefté,  nous  fait  embraffer  cette  occafiond'afïurer  V.  M, 
que  nous  en  fentons  tout  le  reffentiment  &  toute  l'horreur  que  doivent 
en  avoir  de  véritables,  obeiflants,  &  fidèles  Sujets. 

Il  n'étoit  pas  nécelTaire  de  cette  nouvelle  preuve ,  pour  nous  convain- 
cre que  ce  Monarque,  violant  toutes  fortes  de  Serments,  &  tous  les 
Traités  qu'il  a  faits  avec  V.  M  ,  embrafTera  la  première  occafion  qui  fe 
prefentera  pour  affujettir  vos  Royaumes  à  fon  Pouvoir  deipotique. 
„  C'eft  pourquoy  nous  affurons  V.  M. ,  que ,  toutes  les  fois  que  vous  le 
trouvères  nécelTaire,  nous  l'arTilterons  de  toutes  nos  forces  &  de  tout  nôtre 
pouvoir,  à  réduire  &  rabaifTer  la  PuifTance  exhorbitante  &  dangereufe 
de  la  France.  Et  pour  mieux  faire  voir,  que  nous  nous  y  employerons, 
avec  tout  le  zèle  &  toute  l'affection  dont  nous  fouîmes  capables  ,  nous 
prenons  la  liberté  de  dire  à  V.  M.  que  nous  fommes  perfuadés  qu'il  fera 
très-difficile  de  conferver  nos  Loix,  nos  Libertés,  &  nôtre  Religion, fi 
on  ne  met  ce  Monarque  en  état  de  ne  les  pouvoir  jamais  molefter.  C'efl 
ce  que  nous  avons  tout  fujet  d'efperer,  de  la  conduite,  de  la  prudence, 
&  de  la  Sageffe  de  Votre  Majefté. 

Permetez-nous  encore  ,  Sire,  de  vous  affeurer  très-humblement, que 
non  feulement  nous  défendrons  au  péril  de  nos  vies  la  Perfonne  facrée 
de  V.  M.  &  maintiendrons  fon  Gouvernement,  que  nous  prions  Dieu 
de  nous  conferver  long-temsj  mais  que  nous  avons  aum  folemnellement 
refolu  &  déclarons,  que  nous  ferons  les  derniers  efforts,  pour  fuutenir& 
protéger  la  Succeffion  à  la  Couronne,  ainfi  qu'elle  eit  à  prefeni  établie 
parA6le  du  Parlement,  dans  la  Ligne  Proteftante,  contre  tous  ceux  qui 
voudroient  l'envahir  ou  y  prétendre. 

In/irufîions  de  la  Ville  de  Londres  a  fes  Députez  au  prochain 
Parlement;  en  Novembre  1701. 


5? 


Jnftru- 
étions  de 
Londres 
à  fes  Dé- 
putez. 


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3S 


33 


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MESSIEURS, 

'ou s  vous  prions,  &  vous  recommandons  expreffement,que,  dans 
le  prochain  Parlement,  vous  pourfuiviés  les  engagemens  faits  à  Sa 
Majefté,  dans  l'Adreffe  de  cette  Ville,  &  dans  toutes  les  autres  du 
Royaume,  Pour  cet  effet,  nous  nous  attendons,  que,  fans  perte  detems, 

„  vous 


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TERRE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  tfs 

vous  tacherés  de  tout  vôtre  pouvoir  de  mettre  S.  M.  en  état  de  main-  Affaires 
tenir  fon  Droit  inconteltable  &  Ton  Titre  à  la  Couronne  ;  De  vangerfon  d'Angle- 
honneur,  &  celui  delà  Nation;  De  mettre  S.  M.  en  état  dans  cette 
conjoncture  délicate  à  pourvoir  à  la  feureté  de  ces  Royaumes;  De  pa- 
roitre  à  la  tête  de  l'Intérêt  Proteflant;  De  faire  bon  Tes  Alliances  pour, 
conjointement  avec  fes  Alliés ,  réduire  tellement  le  Roy  des  François, 
qu'il  ne  puifle  plus  être  en  état  d'inquiéter  &  d'oprimer  l'Euro- 
pe. Et,  pour  y  reuffir,  nous  vous  chargeons  de  travailler  diligemment 
à  conferver  une  entière  &  bonne  correfpondance  entre  les  deux  Cham- 
bres du  Parlement,  &  empêcher  d'y  pourfuivre  les  Animofités  particu- 
lières ;  d'avoir  foin  du  Commerce;  de  foutenir  le  Crédit  public 3  de 
faire  bon  les  non-valeurs  des  fonds ,  &  d'avoir  foin  fur  toutes  choies  de 
la  Flotte  Royale.  En  ce  faifant ,  il  ne  faut  pas  douter  que  Dieu  ne  faf- 
fe  profperer  vos  Entreprifes. 


AFFAIRES  DE  FRANCE,  D'ESPAGNE,  A™" 

7  3      DE  FraM- 

ET  D'ITALIE.  £££ 

d'Italie. 


Harangue  du  Cardinal  de  Noailles  au  Roi,  à  la  tête  du  Clergé, 

du  iq.  Juin, 

SIRE, 

Le  Clergé,  aflemblé  par  vos  Ordres, vient  rencuveller  fes  hommages  à   Harangue 
Vôtre  Majellé  avec  la  foûmifllon  &  la  reconnoiffance  que  nous  inf-   du  em- 
pirent fon  Trône  augufle,  fon  Mérite  éclatant,  &  la  Protection  puiffante    deNoai1* 
dont  Elle  nous   honore.     Nous  venons  dans  cette  occafion,  avec  autant    j^0,-. 
d'ardeur  &  de  zeîe,  que  vous  avez  eu  de  peine  à  nous  faire  venir. 

Après  avoir  donné  à  l'Europe  une  Paix  fi  avantageufe,  qui  n'efl  pas 
moins  l'effet  de  vôtre  modération  que  de  vôtre  puiffance,  V.  M.  ne  pen- 
foit  plus  qu'à  nous  procurer  la  tranquilité  falutaire  ,  qu'on  attend  des  bons 
Rois,  félon  la  parole  de  St.  Paul;  &  l'on  vous  force  de  vous  préparer  à 
laGuerre. 

Nous  favons,  Sire,  que  le  Titre  de  Père  des  Peuples  efl  plus  cher  à 
V.  M.  ,  comme  à  tout  Prince  véritablement  grand  &  chrétien  ,  que  le 
Nom  flateur,mais  dangereux,  de  Conquérant.  Nous  fbmmes  encore  per- 
fuadez,  que  fi  vous  pouviez  feul  fournir  aux  fraix  de  la  Guerre,  en  re- 
tranchant à  vôtre  Perfonne  ce  qui  efl  dû  d'ailleurs  à  vôtre  Dignité,  nous 
jouirions  tous  en  repos  de  nos  biens;  que  vous  les  conferveriez  aux  dé- 
pens des  vôtres  par  la  tendrefle  que  vous  avez  pour  vos  Sujets ,  &  par  la 
juflice  &  la  force  de  vos  Armes.  Mais,  il  efl  jufte  que  nous  partagions 
avec  V.  M.  les  Dépenfes  qu'Elle  fait  pour  nous  défendre. 

L/amour  de  vos  Peuples,  l'expérience  du  paûe,  vous  répondent  de  la 

Zz  3  difpo- 


166    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,    ET 

Affaires  difpofition  de  tous  les  Corps  de  vôtre  Roiaume.  Le  Clergé  ,  qui  a 
deFran-  l'honneur  d'en  être  le  premier  par  le  rang  que  la  Religion  lui  don- 
ce,  n  Es-   ne^  en  fera  toujours,  comme  il   l'a  été  jufques  ici,  le  premier  par  fon 

d'Italis.    zèle.  _  , 

Quoi  qu'en  puiflent  dire  des  Politiques  trop  humains ,  le  Cierge  a  fait 

voir  plus  d'une  fois,  qu'il  n'elt  pas  moins  utile  pour  le  bien  temporel  de 
l'Etat,  qu'il  eft  néceffaire  pour  le  maintien  de  la  Religion.  Affligé  que 
fes  forces  épuifées  ne  puilîent  répondre  à  fon  zélé ,  il  conferve ,  s'il  eft 
permis  de  parler  ainfi  ,  un  dévouement  inépuifable  pour  vôtre  fervice. 
Telles  que  font  fes  forces, nous  les  offrons  à  V.M.  ,perfuadez  qu'Elle  nous 
ménagera  plus  que  nôtre  attachement  ne  nous  permettroit  de  nous  ména- 
ger nous  mêmes.  Que  pourrions-nous  refufer  à  un  Maître  qui  donne  tant 
àl'Eglife? 

C'eft  vôtre  Religion,  Sire,  il  faut  le  déclarer,  qui,  parmi  tant  de  qua- 
litez  héroïques ,  excite  le  plus  nôtre  gratitude.  Nous  connoiflbns  &  ad- 
mirons comme,  les  autres,  les  merveilles  de  vôtre  Régne:  mais ,  V.  M.  ne 
veut  recevoir  de  nous  que  des  louanges ,  qui  foient  dignes  de  nôtre  mini- 
ilére  &  d'un  Roi  T.  C.  Vos  actions  politiques  &  militaires  ont  épuifé  les 
éloges,  &  fatigué  vôtre  modeilie.  Vôtre  piété  vous  fait  anéantir  devant 
devant  Dieu,  comme  David,  tout  ce  qui  a  paru  en  vous  de  plus  éclatant 
devant  les  hommes  :  tant  vous  avez  compris  que  la  véritable  gloire  eft 
dûë  à  Dieu  feul. 

C'efl  lui  que  nous  glorifions,  quand  nous  célébrons  les  grâces  que  vous 
en  avez  reçues.     Cette  foi  non-feinte  ,  que  recommande  St.  Paul ,  qui 
vous  attache  fi  fortement  à  la  Religion  :  Ce  zélé  pour  la  gloire  de  Jefus- 
Chrift  ,  qui,  malgré  la  timide  politique  des  fages  du  Siècle,  vous  a  fait  tout 
entreprendre  &  tout  fouffrir  pour  la  deftruction  de  l'Héréiie:  Cet  amour 
pour  l'Eglife ,  qui  vous  fait  appuyer  par-tout  la  pureté  de  fes  dogmes,  de 
fa  morale,  de  fa  difcipline,  &  maintenir  fes  droits  Sacrez,  même  contre 
ceux  de  vos  Officiers,  qui  voudroient  diminuer  fon  autorité  pour  augmen- 
ter la  leur  fous  prétexte  de  défendre  la  vôtre:  Cette  foûmiflion  aux  ordres 
de  la  Providence,  qui  vous  rend  fi  égal  dans  tous  les  événemens,  qui  vous 
fait  recevoir  de  fa  main  les  maux,  comme  les  biens,  l'affliclion  comme  la 
joye  :     Ce  font-là  ,  Sire,  les   qualitez  qui  vous  rendent  véritablement 
grand  &  louable,  parce  qu'elles  viennent  de  Dieu,  &  fe  rapportent  à 
Dieu.  La  valeur,  les  richelTes  ,  les  conquêtes,  peuvent  rendre  pour  quel- 
ques momens  un  Roi  célèbre  fur  la  terre;  mais,  fi  la  Religion  n'en  régie 
l'ufage,  l'éclat  &  le  bruit  fe  diffipent  bien-tôt,  &  il  n'en  refte  plus  qu'un 
nom  itérile,  &  une  trille  défolation. 

Ce  Roi,fi  fameux  par  fes  richelTes  &  fes  profpéritez, n'efpéroit  que  par 
la  fageffe  acquérir  l'immortalité  &  rendre  fa  mémoire  éternelle.  Par  elle, 
difoit-il,  je  ferai  illuftre  parmi  les  Nations,  la  terreur  des  Rois  les  plus 
redoutables,  les  délices  de  mon  Peuple  pendant  la  Paix,  fon  efpérance  & 
fa  force  pendant  la  Guerre.  Ce  même  Roi,  qui  a  parlé  û  dignement  de 
l'utilité  de  la  fageffe,  lui  attribue  encore  le  pouvoir  de  difpofer  des  Peu- 
ples 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  tf7 

pies  &  des  Royaumes.  Vous  l'éprouvez,  Sire,  &  toute  l'Europe  en  Affaires 
voit  aujourd'hui  avec  admiration,  ou  avec  envie,  un  exemple  éclatant.  Tu-  DK  *»an- 
fle  récompenfe  de  vôtre  modération,  &  de  la  protection  que  vous  donnez  CE'  D'Es* 
aux  Princes  dépouillez  de  leurs  Etats.  S?*?  ** 

L'Efpagne,^  cette  Nation  fiére  &  généreufe,  incapable  de  fouffrir  une  — ■ ■ 

Domination  Étrangère,  oublie  tout  d'un  coup  Ton  ancienne  jaloufie  exci- 
tée par  le  voifinage  de  la  France,  par  l'émulation,  par  de  longues  Guer- 
res,  vient  remettre  Ton  fort  entre  le  mains  de  V.  M., lui  demande  un  Roi 
de  fon  Sang.  Qui  l'auroit  crû,  Sire  ,  Ci  les  prodiges  de  vôtre  Règne 
n'avoient  rendu  tout  croyable. 

Elle  voit  déjà  avec  tranfport,  cette  Nation  accoutumée  à  n'admirer 
qu'elle  même  ,  ce  qu'elle  s'étoit  promis  d'un  Prince  choifi  dans  une  Maifon 
toute  née  pour  gouverner,  inftruit  dans  l'Art  de  régner  par  un  fi  grand 
Maître,  d'un  Prince  forti  de  la  Race  de  St.  Louis,  pour  reporter  dans  la 
Caftille  toutes  les  vertus  Chrétiennes  &  Royales ,  que  la  Reine  Blanche 
apporta  en  France.  A  qui  ne  refiflera  point  un  Roi,  que  Dieu  vient  de 
donner  aux  Peuples  de  cette  illuftre  &  vafle  Monarchie  ,  félon  leur  cœur, 
&  félon  le  fien? 

Mais,  fi  l'ambition,  l'envie,  &  peut-être  l'Hérefie,  par  des  pratiques  fe-  • 
crettes,  l'emportent  fur  les  régies  de  la  Jultice  &  de  la  Religion,  Nous 
vous  offrons,  Sire,  tout  ce  qui  peut  dépendre  de  nous,  pour  foûtenir 
Ja  Caufe  de  DIEU,  des  Rois,    &  des  Peuples. 

Nous  ne  pouvons  changer  ladeflination  des  Biens  Eccléfiaftiques  :  nous 
n'en  fommes  pas  les  maîtres,  mais  les  difpenfateurs.  Vous  favez  comme 
nous,  Sire,  que  ces  biens  facrez  font  deflinez  à  l'entretien  du  culte  de 
Dieu,  de  fes  Miniflres,  &  des  Pauvres.  Malheur  à  nous,  fi  nous  en  fai- 
fons  un  autre  ufage.  Mais,  nous  croyons  employer  nos  revenus  conformé- 
ment aux  intentions  de  l'Eglife ,  en  les  faifant  fervir  à  défendre  la  Reli- 
gion Catholique,  à  empêcher  les  Peuples  de  fuccomber  foas  les  charges 
inévitables  de  l'Etat,  &  de  tomber  dans  une  plus  grande  pauvreté. 

Nous  fçavons  jufques  où  les  Saints  Evéques  ont  pouffé  leur  Compafïion 
pour  les  Pauvres.  lis  ont  dépouillé  leurs  Eglifes,  &  vendu  ce  qu'elles  a- 
voient  de  plus  précieux ,  quand  il  a  été  néceiTaire ,  rjour  les  foulager.  Mais 
ils  nous  apprennent  auffi,  que  ce  qu'ils  ont  fait  comme  un  Acte  de  chari- 
té parfaite  dans  les  grands  befoins,  eft  dans  les  autres  tems  un  larcin, 
un  facrilége. 

C'efl  à  vous  ,  Sire,  à  juger  des  tems  &  des  befoins,  &  à  nous  à 
nous  foumettrej  vôtre  Pieté  nous  le  fait  faire  fans  fcrupule.  Nous  voyons 
que, loin  de  dépouiller  les  Eglifes,  V. M.  les  orne  avec  magnificence  ;  l'E- 
glife de  Paris  en  fera  un  monument  perpétuel  à  la  Poflerité.  Nous  fom- 
mes convaincus  que  vous  ne  vous  préparez  à  la  Guerre,  que  dans  un  efprit 
de  Paix  :  comme  nous  fommes  les  Anges  &  les  Miniitres  de  la  Paix  , 
félon  les  paroles  de  l'Ecriture,  nous  la  fouhaitons,  nous  y  devons  con- 
tribuer de  toutes  nos  forces. 

Puiffiez-vous ,  Sire,  avec  la  Protection  du  Dieu  des  Armées,  pro- 
curer 


S68    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  curer  encore  bientôt  à  l'Europe  cette  Paix  qui  fait  fleurir  les  Etats  de  l'E- 
vr,  Fran-  glife.  Puifiiez-vous ,  tn  confervant  plufieurs  Couronnes  au  Roi  vôtre  pe- 
ce,  d'Es-  -t  y[\s,  en  meriter  une,  dont  toutes  celles  de  la  Terre  enfemble  ne  font 
ViSue!  qLie  l'ombre.  FaiTe  le  Ciel,  que  jufques  à  la  vieillefle  la  plus  reculée  &  la 
„_J  plus  heureufe,  au  milieu  d'une  Famille  augufte  plus  touchée  de  vos  ver- 
tus que  de  vôtre  puiflance,  vous  jouifiîez  de  la  juitice,  de  l'abondance,  & 
de  tous  les  autres  fruits  de  la  Paix  que  vous  nous  aurez  rendue. 

Plainte  faite  a  l'Envoie  de  TEtat ,   de  la  part  du  Luc  d'An- 
jou ,  fur  ce  que  l'Etat  ne  le  felicitoit  pas  ;  en  1 70 1 . 

S  E  N  O  R. 

Plainte       éT^O  M  P  L I E  N  D  O  el  Real  Orden  de  V.  M.  que  me  comunico  D.  Jofeph 

du  Duc       V^,  Pères  de  la  Puent  e  por  Papel  de  4  del  cor  rient  e ,  pasfe  a  llamar  a  mi  pof- 

?P?OU      fada  al  Embiado  Extaord.  de  Inglaterra  ,e  Hollanda  D.  Francifco  Schonneriberg, 

voie  des     y  haviendole   noticiado   quando  Je   me  manda   fobre  1er  muy  réparable  que  tos 

E.  G.        EJlados  Générales  de  lai  Provincias-Unidas  dilaten   la  Congratulation  y  Re- 

connocimient  que  fe  deve  ha  fer  a  V.  M.     corn   motivo   de   baver  recahido  en 

fu  Real  Performa  la  Subcefion  de  efla  Cerona ,  le  entregue  tambien  Papel  fir- 

mado  mio  ,    en  que  por  ejerito  ,   y  con  todas  las  Lazones  que  fe  previenen  le 

dava  a  entender  lo  mifmo ,  y  haviendolo  entendido  ,    reciviendo  el  Papel  ,  me 

manifefto    ejlrahava    que  [e  pajj'ace   eflo  oficio  con   Los  EJlados  Générales  fin 

hablar  del  Reg.  Britt.  y  de/pues  paffo  a  noiieiar  me  à  noche  que  fue  quando 

tubimos  efia  conferentia  ,    que  haviendole  llegado  un  Extr.  me  podia  dizir  de 

parte  del  Reg.  Britt. ,  el  guflo  grande  D.  S.  M.  ha  tenido  en  la  difpozitwn 

del  Teflamento  del  Reg.  nuejlro  Sehor.  (que  ejla  en  gloria)  que  S.  M.  B.  y 

Los  EJlados   Générales   defian  macho   manter  la   amijlad ,    buena   Correfpon- 

dentia  ,  y  Confederationes  que  ban  tenido  hajla  aqui  con  efta  Corona  ,  y  que 

que  de  indépendante  como  de  an  tes  y  pueda  cozar  de  una  liber  t  ad  entera  en  cuja 

manutencion  S.  M.   B.  y  Los   EJlados    Générales    contribuïran  fiempire   todo 

fu  poffible ,  y  como  S.  ifcf.  B.  y  Los  EJlados  Générales  defean  manter  la  efirecha 

Amijîad  y  buena  Correfpondencia  con  la  Corona  de  Efpagha  ,  défie  avan  tambien 

que  iquel   me.  de  parte  de  Efpagha   concurran  a  esfo  ,    no  Jolo  en  que  fub- 

fijlan  los  Trattados  de  Paz  entre  Efpagha,  Inglaterra,  y  Hollanda ,  en  Ju  fiuerca, 

&  vigor,fino  tambien  que  fe  renueben  dichos  Tratados  con  todas  aquellas  cïaujulas 

que  pue  dan  hazerles  mas  firmes  y  (egur  os  para  la  reciproca  combeniencia  y  benefi- 

cio  de  los  fiubditos  de  las  très  potencias ,  y  de  la  tranquilidad  de  Europa  ;  y  la 

major  prueba  de  que  Efpaha  ,  defea  de  fu  parte  vivir  con  buena  inielligencia 

con  S.  M.  B.  y  EJlados  Générales  ;  fera  el  que  fe  procuro  que  Los  Payzes  Bajos 

Efpanoles  queden  fiempre  uni  dos  a  la  Corona  de  Efpaha,  y  que  aquellas  Provin- 

cias  fean  governadas  como  hafla  aqui  por  fu  Rey;  de  forma  que  fe  eviften  tas 

occafiones  de  zelos  y  inquiétudes  a  fus  vezinos ,  y  de  minera  que  en  eflo  no  aja  novi- 

dad  de  lo  que  Je  ha  ejlilado  bajla  a  hora  ;  y  para  obviar  todo  genero  de  Dejcon- 

fian- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  3tf<? 

fiança  combendera  que  las  Garniciones  Olandezas  que  den  en  las  Plaças  de  los  Pay-  Affaire* 
[es  Bajos  del  Rey  Catt.  como  prefentemente  y  fe  tlaman  de  bajo  del  mando  de  los  deFran- 
Governadores  Efpagnoles  fiendo  el  unico  fin  el  que  Je  confier  ven  a  que  mas  Pro-  CE>nEs- 
vmcïas  en  el  Dvmmio  Efipanol  cornu  oy  to  eflan  quandu  S.  AL  B.  y  Ejludos  Gênera-   D'iTAL^. 

les,  por  inclinacton ,  como por  proprio  interes  ,defean  conjervar  la  amifiad y  buena 

correfpondencia  en  la  Corona  de  Efpana  ,  y  para  tefiimonio  de  ello,  les  fera  muy 
agradable  que  fe  les  participe  en  la  forma  acoftumbrada  la  Elevacion  del  nuebo 
Rey  a  la  Corona  de  Efpana ,  lue  go  que  aya  llgado  a  fu  Cor  te  de  Madrid  para 
reconocerlo  por  tal  Rey  de  Efpaûa  con  tedas  las  demofiraciones  de  amifiad  y  fo~ 
lemnidad  requerida  y  dévida  en  femejantès  ocafioms  amiados  tan  efirechos  y 
antigos  como  l^heram  el  Rey  Britanico  y  Efiados  Générales ,  luego  que  recivan  la 
notificacion  del  Rey  Catt.  D.  Philippe  Quinto. 

Haviendole  ohido  efia  Infinuacion  con  las  mismas  individualidades  que  la 
participa  a  f^.  M.  follette  perjuadirle  que  me  la  diefie  por  feripto  para  pajjdrla  a 
manos  de  V. M.  en  la  forma  que  fe  eflila,  y  fe  efcufo  de  no  poder  me  la  dur ,  mani- 
feflando  que  en  vos  me  la  communicara  en  conjequencia  de  las  Ordenes  que  havia 
havido  del  Rey  Britanico ,  y  pariciendo  me  efia  Conferencia ,  y  las  circonftancias 
de  efia  dignas  de  la  Real  mtiligencia  de  V.  M.  la  pajfio  a  ejfa  para  que  V.  M.  fu 
hajfe  noticiofo  de  todo.  &c. 

NOUVELLES     D'ITALIE. 

De du  4.  Juin  1701. 

Nous  fommes  de  ce  côté  dans  la  même  fituation,  ayant  fept  Bataillons   Campe- 
fur  le  haut  de  Farraro,  Pofte  très-avantageux, &  où  les  Vénériens  a-    ™em  dci 
voient  fait  autrefois  un  Fort  qui  obligea  Charles  V.  de  faire  un  chemin    furr*"'Ç°j*. 
exprès  derrière  le  Mont  Baldo,  lequel  chemin  eil  prefentement  ruiné.  Corn-   ge,àFar- 
me  le  nom  de  Farraro  n'eit  pas  marqué  fur  les  Cartes,  il  eil  a  deux   mil-  raro  & 
les  au-delTous  de  Nôtre-Dame  de  la  Couronne,  de  manière  que  nous  te-   Chiofa. 
nons  la  tête  par  ce  Pofle-la ,  &  nous  fommes  ici  fur  le  bord  de  l'Adige,  un 
peu  au  dcfTus  de  la  Chiofa,  petit  Fort  fur  l'Adige  appertenant  aux  Véni- 
tiens, &  où  ils  ont  fo.  hommes. 

Les  dernières  Nouvelles  qu'on  a  ici  des  Impériaux  font  que  depuis  y.  ou 
6.  jours  ils  font  des  chemins*  dans  les  Montagnes  de  tout  côté;  de  ma- 
nière que  nous  ne  fçavons  point,  fi  c'efl  pour  faire  une  marche  vers  le 
Frioul ,  ou  pour  tomber  par  au-deffus  du  Lac  de  Garde  à  gauche  à  notre 
égard, &  entrer  dans  le  BrefTan  par  le  Val  Canonique,  où  il  y  a  un  che- 
min allez  pratiquable  :  mais ,  leurs  Magazins  &  leurs  Provifions  ayant  été 
faites  du  coté  de  Trente,  on  juge  qu'ils  voudroient  nous  depofler  de  ce 
Pofte-ci  ,afin  de  fe  fervir  de  lAdige.  Cependant,  comme  l'entrée  dans  le 
Breffan  les  metroit  tout  d'un  coup  dans  le  Milanez,  il  paroit  qu'on  fon- 
ge  à  former  un  Camp  au  débouché  au  dcfTus  deBreile,  &  que  nous  commu- 
niquerons par  un  Pont  fous  Pefcaire  fur  le  Mincio. 

Nous  n'avons  point  de  Nouvelles  certaines  de  l'arrivée  de  Mr.  le  Pr.  Eu- 
gène. Comme  leur*  derrières  font  éloignez,  &  font  Pays  de  Montagnes  & 
-^Come  XI.  Aaa  de 


37o    MEMOIRES,  NEGOTI ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

At?ures    de  peu  de  Commerce,  l'on  n'efl  pas  bien  informé  de  ce  qui  fe  paile   au 
d'Italie.    vraY  c[iez  eux  }    &  par  confequent  de  la  jufte  quantité  des  troupes  qu'ils 
ont,  étant  les  Maiftres  de  nous  cacher  ce  qu'ils  voudront  jufqu'à  leur  De- 
bouché. 

Notre  Cavalerie  eft  toute  arrivée  dans  les  Milanez:  on  la  va  faire  cam- 
per en  plufieurs  endroits.  Les  Trouppes  de  Mr.de  Savoye  vont  aufli  fe 
mettre  en  Marche  pour  entrer  dans  le  Milanez.  Par  les  Lettres  venues  de 
Vienne  hier,  on  écrit  que  l'Armée  de  l'Empereur  en  Italie  fera  feulement 
de  8-  Régiments  d'Infanterie,  8-  de  Cavallerie,  trois  de  Dragons:  fix 
Régiments  d'Infanterie  &  de  Dragons  font  dans  le  Trentinj  on  n'a  point, 
de  nouvelles  que  la  Cavalerie  foit  encor  avancée  dans  le  Tirol.  Pour 
reprefenter  notre  fituation,  le  Pofte  de  Farraro  &  de  l'Adige  font  ce  qui 
nous  occupe  de  deçà:  nous  allons  faire  un  Camp  au  deffus  de  BrefTe,  & 
un  Pofle  à  la  Mofa  en  la  Roque  d'Anfon ,  qui  font  les  feuls  pafTages  par 
où  ils  peuvent  entrer  de  ce  côté  dans  le  Milanez. 

De  Fenife>  le  4.  Juin  1701. 

Entrée       y  t^  Corps  de  Cavalerie,  &  un  autre  d'Infanterie,  des  Impériaux  font 
des  im-        \J    entrés  dans  le  Vicentin,  où  le  Prince  Eugène  s'eft  aufli  rendu  :  ils 
dinïïe       croioient  que  ce  mouvement  obligeroit  nos  Généraux  d'abandonner  le  Pof- 
Vicentin.    te  de  la  Chiofa  \  mais,  ayant  laiflë  ce  qu'il  fuffifoit  pour  le  rendre  inataqua- 
ble,  ils  ont  pris  le  bon  &  le  véritable  parti,  qui  eft  de  garnir  le  bord 
de  l'Adige  par  des  corps  de  troupes,  qu'ils  ont  poftés  en  differens  lieux, 
&  qui  fe  peuvent  réunir  en  un  moment:  de  forte  que  les  Impériaux  ne 
peuvent  hazarder  ce  paffage,  fans  s'expofer  à  une  grande  perte  ,  &  il 
eft  prefque  aufli  vrayfemblable  que  ce.  fera  inutilement.     Les  Impériaux 
vivent  avec  allez  de  règle  dans  ce  Pays  Vénitien;  mais,  comme  l'argent 
eft  rare  parmi  eux,  pour  peu  qu'ils  continuent  d'y  fejourner,  il  eft  im- 
pofilble  qu'ils  ne  s'echapent,  car  neceiïité  n'a  point  de  loy.   Voilà  le  vé- 
ritable Etat  où  l'on  eft. 

Leur  penfée  feroit. à  ce  qu'on  dit,  de  prendre  le  chemin  du  Ferrarois, 
pour  s'avancer  'de  là  vers  Modene  ,  fe  croyant  toujours  un  Parti  favo- 
rable dans  le  Milanez.  Il  y  a  de  l'apparence  que  tout  cela  demeurera 
dans  leur  Idée  ,  &  que  dans  quelque  femaines  leur  partifans  n'auront  pas 
lieu  d'exalter  la  force  &  la  bravoure  de  leurs  Trouppes.  Un  grand 
nombre  de  Noblefle  eft  allé  voir  notre  Camp,  ils  en  font  revenus,  aufli 
contens  de  la  force  de  notre  armée,  que  de  toutes  les  civilitez  qu'ils  y 
ont  receues.  Toute  notre  Cavalerie  eft  arrivée;  mais,  pour  incommoder 
moins  le  Païs ,  &  nous  conferver  des  Fourages,  Mr.de  Catinat  la  tient 
dans  des  Poftes  où  elle  fubfjfte  plus  aifement,  &  d'où  elle  fe  peut  ren- 
dre à  lui  plus  facilement  quand  il  le  faudra. 


Ju 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  57i 

Affaires 

Au  Camp  de  Càâiïàéi ,    entre  Legano  &  Vérone >  D'lTALIE< 

z?  9.  y«//2  1701. 

Le  premier  Deflein  des  Allemands,  &  fur  lequel  ils  comptoient,a  été  d'à-  situation 
voirie  Cours  de  l'Adige  libre  jufqu'à  la  Chiofa,  s'en  rendre  Maîtres     deslmpc- 
&  du  Folle  de  Rivoli,  au  pied  du  quel  ils  pretendoient  s'arrêter,  faire  la'    riaux'  & 
defeente  de  leurs  vivres,  &  y  établir  leurs  difpofitions,  qui  fe  trouvoient   V*-  lrm~ 
redoublées  de  leurs  derrières  par  la  facilité  de  la  dite  Rivière.     En  même 
tems,  ils  pretendoient  s'étendre  par  leur  droite  jufques  au  Lac  de  Garde, 
pendant  qu'ils  euffent  fait  paffer  leur  première  difpolition  de  vivres  de  Ri- 
voli à  couvert  de  leur  Armée  jufques  audit  Lac,  &  que  fait  à  fait  ils  avoient 
fait  fuivre  leurs  vivres  fur  le  Lac,  toujours  derrière  eux,  &  en  avoient  fait 
venir  de  même  par  Tortoli.     Ils  fe  flattoient  de  pouvoir  jouir  de  Pefcaire, 
ou  du  moins  de  faire  des  Ponts  fur  le  Minfchio  à  leur  droite,  &  dans  cet- 
te lituation  obliger  les  Armées  des  deux  Couronnes  à  quitter  l'Adige,  & 
même  de  les  contraindre  à  couvrir  Mantouë.     Les  dits  Allemands  preten- 
doient auiTi  fe  couler  par  leur  droite  vers  Brefcia,fe  fervant  du  Lac,  pour 
i'aiTiirer  de  leurs  vivres  :  &  donnant  par  cette  iïtuation  à  craindre  jufqu'à 
l'Oglio,  &  à  l'Adda,  ils  obligeroient  l'Armée  des  deux  Couronnes  à  ve- 
nir couvrir  le  Milannez ,  en  mettant  l'Oglio  devant  eux ,  abandonnant  Man- 
touë ,  à  moins  que  l'Armée   des  Couronnes  ne  prenne  le  parti  de  pré- 
férer Mantouë  au  Milannez,  &  de  relier  pour  fa  feureté  entre  le  Minfchio 
&  l'Oglio  ,  leur  laiiTant  en  ce  cas  la  liberté  de  marcher  jufqu'à  l'Adda,  fai- 
fant  pour  lors  fortir  tous  leurs  vivres  des  Débouchés  du  Trentin  dans  le 
BreiTan,de  Ruca,de  Tortoli,  &  du  Lac.  C'étoit-là  pofitivement  le  deflein 
conçu  à  Vienne,  &  que  le  Prince  Eugène  s'étoit  promis  de  pouvoir  ex- 
écuter.    Le  Pofte  occupé  de  la  Farrara  &  de  Rivoli  l'a  rompu  abfolu- 
ment,  &  l'empêche  de  l'exécuter.     C'elt  pourquoi  ils  ont  été  contraints 
de  prendre  l'autre  parti,  qui  elt celui  des  Montagnes  &  du  Vicentin,  bien 
différent  dans  toutes  fes  circonflancesdu  premier, lequel  tournoit  &mena- 
çoit  Mantoue  &  le  Milannez,  &  le  dernier  s'en  éloigne,  &  ne  regarde  que 
l'Etat  de  la  Republique,  contre  laquelle  l'Empereur  affure  n'avoir  aucune 
mauvaife  volonté:  ce  qui  prouve,  que  ce  n'elt  que  par  contrainte  qu'ils  y 
vont,  &  parce  qu'ils  ne  pouvoient  plus  relier  dans  le  Trentin,   fans  en 
fortir  par  quelque  endroit:  &  l'avantage  conllderable,  que  les  Allemands 
laiiTent  aux  Armées  des  deux  Couronnes, le  prouve  afTée , puifqu'ils  les  lai fc 
fent  Maitreffes  de  la  defrenfe  de  l'Adige,  par  la  quelle  ils  mettent  en  feu- 
reté derrière  eux  Mantouë ,  le  Mantouan ,  &  le  Milannez ,  fans  manger ,  ni 
ruiner,  ni  l'un  ni  l'autre.    Il  femble  que  l'on  attend  dans  l'armée  Impériale 
quelque  ordre  de  Vienne ,  fur  le  compte  qu'on  y  a  rendu  des  difficultés 
qu'on  y  trouvoit  à  l'exécution  de  ce  premier  deflein.     Cependant,  il  y  au- 
ra de  la  difficulté  fur  la  Refolution  à  prendre  fur  le  fécond,   confîderant 

Aaa  2  que 


372     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET; 

Affaires  que  û  l'Armée  Imper,  penfe  à  s'aprocher  de  l'Adige ,  pour  y  jetter  un  Pont 
^'lTtL1E-  &  pour  le  paffer  vers  Lignage  ou  plus  bas,  il  faut  en  même  teros  qu'elle 
fe  refolve  à  abandonner  les  communications  des  derrières  du  Tirol  &  du 
Treniin ,  pour  fe  mettre  en  force  &  en  état  d'en  venir  à  une  Aclion  géné- 
rale, qui  eft  inévitable,  en  paflant  l'Adige;  mais,  fi  d'ailleurs  on  veutcon- 
ferver  la  liberté  des  derrières  du  Tirol,  &  qu'on  ne  veuille  pas  abandonner 
la  Vallée  du  Trentin,  on  ne  le  peut  faire  que  par  une  diminution  allez  con- 
fîderable  de  l'Armée  par  un  Corps  fuffifant  pour  s'aiTurer  la  communication 
du  Pais  ,  &  les  mettre  à  couvert  d'infulte  ,  les  Milices  ni  les  Paifans  du 
dit  Pais  ne  fuffifans  pas  à  cet  effet.  La  dite  Armée  d'ailleurs  n'a  encore 
aucun  Magazin  ni  difpofition  de  faite  pour  fa  fubiifbance  dans  le  Vi- 
centin  ,  ni  le  long  du  bas  de  l'Adige.  Ce  manque  de  difpofition  prouve  en- 
core la  nouveauté  &  la  contrainte  de  la  Marche  Impériale  vers  le  fufdit 
Vincentin. 

Ce  détail  ci-deflus  montre  quel  étoit  le  premier  deffein  des  Impériaux; 
mais,  quant  à  prefent,  ils  en  font  fort  éloignez  &  mangent,  de  l'autre  côté  de 
l'Adige,  le  Pays  Vénitien  ,  parce  qu'ainfi  la  voulu  la  République,  pour  s'être 
voulu  renfermer  dans  les  étroites  bornes  d'une  Neutralité  dont  elle  fe  re- 
pent,  d'autant  plus  qu'elle  n'a  tenu  cette  conduite  qu'en  confiance  que  le 
Pape  l'avoit  toujours  flattée  de  fe  joindre  à  Elle  pour  s'oppofer  par  force 
ou  par  prière  aux  defîeins  ruineux  de  l'Empereur  pour  le  Pays.  Ils  fe  plai- 
gnent donc  que  le  Pape  leur  a  manqué,  &  leur  a  fait  perdre  le  tems  de  fe 
mettre  en  état  de  garder  l'Entrée  de  leur  Pays,  ou  de  la  fermer  aux  Im- 
périaux, foit  par  prières  ou  par  voyes  de  fait,  de  forte  que  l'on  peut  comp- 
ter qu'ils  s'ennuyeront  bien-tôt  de  la  conduite  defordonnée  des  Allemands. 
Les  troupes  des  deux  Couronnes  Alliées  gardent  toujours  le  Débouché  du 
Tirol  à  Rivoli, la  Ferrara,&  le  Cours  de  l'Adige;&  depuis  là,  par  Briga- 
des feparées, elles  gardent  les  bords  de  cette  rivière  jufque  auprès  du  Canal 
blanc  au  défilais  de  Lignago  :  tous  les  Dragons  font  jettes  fur  la  droite  de 
l'Armée  Alliée  le  long  du  bord  de  l'eau  &  30.  Efcadronsde  Cavalerie  ,  com- 
mandée par  Mr.  le  Chevalier  de  TefTé,  font  à  leur  portée:  le  refie  de  la  Cava- 
lerie eft  à  peu  de  milles  derrière  le  centre  ,  en  Pays  de  Fourage,mais  tou- 
jours prête,  &  à  portée.  Le  Canon  eft  ici  dans  le  centre,  de  forte  qu'il 
Vagit  de  voir  s'il  feroit  pofîible  à  Mrs.  les  Allemands  d'avoir  envie  de 
jetter  un  Pont.  C'elt  pourtant  de  quoi  ils  menacent;  ce  qui  eft  certain, 
c'eil  qu'ils  font  fort  contraints  dans  tous  leurs  Poltes,  achetant  du  grain 
au  jour  la  journée,  cent  &  200  facs  à  la  fois,  avec  beaucoup  de  peine,  ce 
qui  marque  qu'i's  n'avoient  pas  de  Magazins  faits  ni  de  commodités  pour 
en  établir:  l'avance  où  la  necefîké  les  a  obligés  d'aller  ;  l'on  eft  bien  in- 
formé qu'ils  n'ont  aucuns  Magazins  dans  le  Ferrarois. 

Les  premières  troupes  de  Mr.  le  Duc  de  Savoye,  au  nombre  de  huit  Ba- 
taillons, font  entrées  dans  l'Etat  de  Milan,  &  fe  fui  vent  allez  régulièrement. 
Mrs.  les  Généraux  de  lEmpereur  font  autant  de  fanfaronades  qu'ils  peu- 
vent au  de-là  de  l'Adige.     L'on  avoit  mis  iix  Dragons  à  la  fauve-garde 

d'un 


RESOLUTIONS   D'ETAT,   M.   DCC.  I.  373 

d'un   Ponton,    à   la   requifkion  de    la  République    de  Venife.     Les  Al-    d»""ukv 

lemands  en    ont  affafiine   quelques-uns;    &  ,  quand    on  a  envoyé  repe- 

ter  les  vivans,  ils  ont  repondu,  qu'il  n'y  avoit  point  de  Cartel:  fierté  bru- 
tale, qui  deviendra  rampante,  au  moment  que  l'on  aura  fur  eux  un  feul 
p  ri  Ton  nier. 

Il  n'elt  point  vray, comme  on  tache  de  le  publier, que  les  Troupes Efpa- 
gnoies,&  Italienes  ,  vivent  mal  avec  les  François  :  au  coniraire,  tout  elten 
union,  &  l'on  peut  repondre  que  iî  les  Allemands  ôfent  fe  prêter  à  une 
Aéiion,  ils  feront  traittés  afTez  mal  pour  ne  pas  s'expofer  à  une  féconde, 
à  moins  qu'il  ne  veulent  rifquer  d'être  bien  battus.  Ces  Meilleurs  ayant 
trouvé  l'Adige  occupée,  aulfi-bien  que  les  moyens  d'entrer  dans  le  l>=r- 
gamafe  ou  Breffm ,  ont  fait  un  chemin  par  delilis  les  Montagnes,  &  dans 
les  lieux  uniquement  connus  des  chèvres,  pour  pénétrer  au  cie-ià  del'Adi- 
ge  entre  Vérone  &  Vincence:  ainfi  ce  qu'ils  font  n'ell  plus  que  l'Affaire 
des  Venitien«i  mais,  s'ils  jettent  des  Ponts  fur  l'Adige ,  ils  pourront  bien 
en  payer  la  façon. 


Lettre  des  Généraux  des  deux  Couronnes ,  du  22.  Juillet  1701  ;  avec 

Copie  d'une  de  PEkcleur  de  Cologne  aux  E/ecleurs  de 

Mayence ,  de  Trêves  3  £$P  de  Bavière. 


E 


roniKS» 


SSENDO  pervenuto  à  notitia  de"  Gsnerali  délie  Armate  délie  due  Corons ,  cbe  Ji   Efpece  ^ 
fojjero  dijjemenati  per  il  Mantovano ,  ed  altrove,   alcuni   placardi    è  Jcritti  in-    ç^lVi" 
jïnitamente  abufivi  à  difegno  di  portar  del  terrore  neW  ignoranza  del  Popoli,  Ji  è  gm-    Qéne- 
dicato    à  propojito  fenz'entrar  nel    detallio  di  tutte  le  ragioni  del  SercmiJimo  D.ica  di    rsux  de* 
Mantova  ,  cbe  probab'.lmete ,  quando  farà  citato  legitimtamejite ,  è  da  coi  haïra  il  ai-    2»  Cou 
ritto  di  farlo ,   non  manchera  già  di  produrle  ampiamente  è  di  far  conofeere  al  monda 
Vinfuffiflenza,  calunn'a,  e  falfità  del  detti  placardi ,   di  loro  far  intendere  ,  che  il 
contenuto  de  placardi  medeji.ni  non  bà  venin  fondamento  ;  poiebe  S.  M.  Impériale  non 
bà  ragione  alcuna  di  trovar  à  redire  alla  condotta  del  fudt.  SereniJJimo  Duca  di  Man- 
tova ,  corne  lo  prova  à  bajlanza  la  Lettera  feritta  dal  Seren.  Signor  FAettor  di  Colonia- 
di  cui  è  qui  appreffo  la  copia.    Per  altro ,   le  due  Corone  cbe  banno  fempre  havuto  per 
oggetto  il Mantenimento  délia  tranqu'lliîà  d'Italia,  conofeendo  quanto  ellajarebbe  non  jo- 
lamtente  altérât  a  ,    ma  per  lo  contrario  tutta  in  Guerra,   ?  elle  non  preven'vano   le 
minaccie  fatte  da  i  Mlniftri  delï  Lnperatore ,  fopra  il   tutto   dal  Sigr.  Co:  di  Cajiel- 
barco ,  che   S.  Mîà.  Impie  volea    impadromrfi,  di  Alantova  ,  per  fard  la  prima  Jua 
piazzd  d"armi ,  per  facil'.tar  probabihnente  anticipata   la  Guerra   in  Italia  ;    le  Loro 
Macjlà.  banno   trovato   buono  ,  di  far   raarchiare  Trappe  alla   detta  Mantova ,  e  di 
sferzar  queflo   Duca  à  ricevernele ,   neW  mica  épura  intenzione  di  opporjî  al  fiageilo 
délia  Guerra ,  di  cui  l  lnperatore  mhiacciava  il  ripofo  delï  Italia ,   corne  pare  clf  og- 
gidi  vi  operi  attaalmente.  Egli  t  perciô ,  cbe  i  popoli  devono  aver  menu  di  riguardo  aile 

A  a  a  3  fup- 


374    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aïtaires  fuppojizioni ,  che  loro  fi  prefentano  per  la  propria  ruina ,  cbe  alla  verità  ,  con  la  quale 
d'Italie  fi  vuol  loro  prevenire  e  difenderli;  ed  è  quejio  ancora  ,  che  U  Generali  deW  Armate  dél- 
ie due  Corone  banno  giudicato  à  propofito  di  far  publicare  per  intelligenza  de  Popoli, 
e  per  impedire  che  ejji  non  fi  lafcinoforprendere  dalle  fini fire  infîuenze  che  lero  potreb- 
bero  effere  totalmente  contrarie. 

Carolo-Enrico  di  Lorena. 
El   Maresciallo     di    Catinat. 
Dal  Campo  di  Goito,  nel  22.  diLuglio  1701. 


Lettre  de 
l'Elefteur 
de    Colo- 
gne tou- 
chant le 
Duc  de 
Mantoue» 


Copia  délia Lettera  circolare  Jwittadal  SereniJJimoElettor  di  Colonia 
alîi  Serenijfimi  Elettori  diMagonza,  Treveri,  e  Baviera. 

JO  bb  ricevuto  hieri  fera  per  la  pofta  Impériale  una  Lettra  delf  Imperalore  data 
à  Laxemburg  II  20.  del  mefe  di  Magglo  pajfato ,  concernente  il  Duca  di  Mantova , 
nella  quale  io  bb  intefo ,  cbe  alla  Corte  di  Vienna  fi  imputa  il  delitto  di  lefa  Maejlà  à 
quejio  Duca,  per  baver  ammeffe  Truppe  Slraniere  nella  fui  Città,  e  fuo  Ducato  di 
Mantova  ,  e  cbe  digià  fia  egli  flato  citato  per  comparire  alla  datta  Vienna  nel  termi- 
ne didue  mefi ,  ad  audiendum  &  videndum  fua,  &  Confiliorum  &c: 

Qiiantunque  io  ignori  in  quai  maniera,  &Jbtto  quali  condizioni ,  poffa  queflo  Principe 
efferfi  impegnato  con  potcnze  Straniere ,  e  niolto  più  ancora  le  Sicurezze  ,  cbe  pub  egli 
baver  date  à  S.  Mtà.  Impie,  fotto  lafede  di  giuramento ,  e  che  percib  io  nonfiagià  in 
i  flato  di  giudicare ,  fe  egli  veramente  è  colpevole  de'fattl,  di  cui  è  caricato,  e  Je  il  fuo 
trattato  con  le  dette  potenze  contenga  cofe ,  per  le  quali  dcbba  effere  decaduto  da"1  j'uoi 
fondi  dependenti  dalV  Imperio. 

Corne  tuttavolta  non  fi  puo  punto  dubitare ,  che  fe  queflo  Duca  poteffe  effer  conv'nto 
dhtna  ver  a  felonia  contro  l^mperio,  e  V  Imper  atore  corne  capo  deW  Imperio,  vi  fareb- 
be  grand'  occafione  di  procéder  gli  contro  per  parte  dell  Imper  atore  &  deW  Imperio ,  corne 
verfo  un  Ribelle.  Il  mlo  parère  altrefi  è,  che  bifogna  convenlre  che  la  Corte  Impé- 
riale non  dere  precipitarfi ,  ne  far  cofa  alcuna  di  fua  tefla,  privatwamente  à  i  diritti, 
e  coflituzioni  deW  Imperio  in  uno  affare ,  che  riguarda  un  tanto  confiderabile  Prenci- 
pe ,  e  Vaffallo  del  medefimo  Imperio ,  e  che  egli  è  d'un  grandiffimo  intereffe  per  tutti 
quelli ,  che  ne  compongono  il  corpo ,  di  tener  la  mano ,  perche  queflo  affare  fia  tratta- 
to con  tutte  leformalltà  requifite;  affine  che  la  Corte  Impériale  in  avvenire  non  fi  arrcgbi 
il  diritto  d'una  fimile  procédurale  di  décider  e  fola  in  fimili  cafi  nelle  cofe  impcrtanti,e 
fenza  laparticipazione  degll  Elettori,  Principi,  e  Stati  dell"  Imperio ,  corne  da  qualche  tem- 
po in  quà  ne  abbiamo  molti  efjhnpi ,  e  pare   che  fi  voglia  metterlo  in  ufo. 

Jo  fcr'vo  confidentemente  tutto  queflo  alla  VoflraDile  ione  ,  pregandola  di  vokrmi 
eommunicare  con  la  medefima  finecrità ,  quanto  più  preflo  potra,  li  J'uoi  fentimenti. 


Rela- 


en  1701. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  37r 

.Affaires 

Relation  véritable  de  ce  qui  s'efî  pajTé  entre  les  Armées  Impériale  d'Italib- 
£5?  Françoije  en  Italie.     Du  Camp  Impérial^  près  du  Pont 
d'Oglio,  depuis  Ze  3  1.  Aout^  jujques  au  3.  Sep- 
tembre  1 70 1 .  indufivement. 

Le  31.  l'Ennemi  ne  bougea  de  Ton  Camp,  mais  i!  fît  prendre  les  devans    Mouve- 
à  cous  les  Grenadiers  &  à  beaucoup  d'autres  ,-pouf  coflftruire  des  ponts    mens  des 
&  nettoyer  les  chemins:  &,  de  nôtre  côté,  on  prit  polie  à  Chiari,  la-    j.jmfes 
quelle  place  étoit  occupée  par  des  Paifans  &  quelque  Milice  Vénitienne?, 
qui,  fous  prétexte  que  cela  feroit  contre  la  Neutralité,  ne  voulut  pas  d'a- 
bord nous  recevoir:  mais,  Mr.  le  Commandant  General  leur  fit /ça  voir,  que 
Chiari  ayant  toujours  été  une   place  ouverte  ,  il  feroit  obligé  d'ufer  de 
force,  s'ils  s'opiniatroient  à  lui  en  refufer  l'entrée;  furquoi  ils  firent  ou- 
vrir les  portes,  &  demandèrent  une  Atteltation  par  écrit,  comment  ils  a- 
voient  été  obligez  de  céder  à  la  necefilté ,  ce  qu'on  leur  accorda  fans  au- 
cune difficulté:  néanmoins,  fon  Alteffe  Serenilîime  fit  dire  aux  Vénitiens, 
qu'il  étoit  furpris  qu'ils  euffenc  mis  Garnifon  dans  cette  place  ouverte,  & 
tout  de  même  comme  û  elle  avoit  été  fortifiée;  que  cette  Garnifon  pou- 
voit  bien  fervir  à  defièndre  les  PaïTans  &  les  Ilabitans,  &  à  empêcher 
qu'il  ne  leur  fut  fait  quelque  dommage ,  mais  non  pas  à  s'oppofer  qu'une 
Armée  y  entrât,  fur-tout  fi  la  fituation  des  affaires  ou  !a  necedîté  le  de- 
mandoit.     Cependant,  le  General  de  Bataille  Guttenitein  y  mit  deux  Ba- 
taillons de  fon  Régiment,  &  quelques  pièces  de  Canon;  &,  ayant  tiré  une 
Ligne  jufques  au  ruiffeau,  il  fit  faire  au  dehors  un  petit  parapet  le  long  du 
chemin, pour  couvrir  l'Infanterie:  l'on  mit  femblablement  quelques  Trou- 
pes dans  des  moulins  &  maifons  qui  étoient  fur  la  gauche  du  dit  Chiari  ; 
mais  on  rangea  tout  le  refle  de  l'Infanterie  de  l'Armée  en  deux  lignes, 
&  la  Cavallerie  fut  poflée  par  derrière  dans  le  même  ordre  fur  la  droite 
&  fur  la  gauche,  laiffant  néanmoins  quelques  Regimens  de  Cavallerie  le 
long  des  deux  petites  Rivières,  en  cas  que  l'Ennemi  voulut  nous  attaquer 
de  ce  côté-là.     Le  Canon  fut  placé  entre  l'Infanterie,  &  dans  cet  état  on 
attendit  l'Ennemi ,  qui  rangea  toute  fon  Armée  en  bataille  &  fit  courir  le 
bruit,  qu'il  alloit  droit  à  nous,  mais  que  nous  ne  l'attendrions  pas.     En- 
fuite  on  ordonna  au  Lieut.  Col.  de  Sereni  le  Baron  de  Selb  d'aller  avec 
1S0.  chevaux  reconnoitre  l'Ennemi  entre  l'Oglio  &  fon  Armée  qui  étoit 
ppftée  près  de  Caflro  Fato  ,  à  quatre  mille  d'Italie  de  la  nôtre.     L'Avant- 
garde  de  ce  Détachement  étant  tombée  fur  la  Garde  avancée  de  l'Ennemi, 
elle  tua  un  Lieut.  avec  fept  Soldats,  &  ramena  un  prifonnier  avec  (ix  ou 
fept  chevaux.  Après  quoi  ce  Lieutenant-Colonel,  s'étant  aproché  de  l'Ar- 
mée ennemie,  s'aperçut  qu'il  y  avoit  2.  Regimens  de  Cavalerie  qui  sqti 
étoient  un  peu  écartez  ,  &  montez  à  cheval  en  confufion,  de  forte  que 
s'il  l'eût  fçu  plutôt^  il  les  auroit  prefque  pu  deifaire,  d'autant  plus  que   la 
eonfufion  étoit  grande.   On  envoya  ordre  de  nouveau  aux  deux  Regimens 

•  de 


37*    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  de  Gefwind  &  de  Lorraine  de  fe  tenir  le  long  de  la  Montagne  jufques  à 
d'Italie.  Palazzolo.  Lors  qu'on  donna  la  parole ,  il  fut  ordonné  que  la  Cavallerie 
&:  l'infanterie  fe  tin0ent  prêtes  pour  l'après  midi  Le  i.  de  Septembre  à  là 
pointe  du  jour  Ton  entendit  battre  l'allarme  au  Camp  dans  l'Armée  enne« 
mie,  &  tous  nos  partis  rapportèrent  qu'elle  marchoit  à  nous,  ce  qui  fut 
aufii  confirmé  par  tous  les  deferteurs  &  les  prifonniers,  en  confequence 
de  quoi  nôtre  Armée  fut  auiîi-tôt  portée  de  la  manière  qu'il  eft  raporté  ci- 
deiîlis,  &  outre  cela  on  difpofa  les-chofes  comme  s'enfuit.  Après  qu'on 
fe  fut  faifi  de  Chiari,  on  mit  trente  hommes  commandez  par  un  Lieute- 
nant dans  un  Moulin  qui  étoit  devant  cette  place  à  main  droite ,  &  un 
pareil  nombre  dans  une  grande  Caiîine  à  main  gauche,  &  un  peu  en  der- 
rière, entre  le  fufdit  Moulin  &  la  Caffine,  fur  le  grand  chemin  devant  le 
foffé  de  cette  Place,  le  troifième  Bataillon  du  Régiment  fufmentionné  de 
Guttenilein,  pour  deffendre  ces  deux  polies  ;  &  un  autre  Moulin,  qui 
étoit  à  environ  600.  pas  plus  loin  en  devant,  fut  pareillement  occupé  par 
le  quatrième  Bataillon,  qui  s'étant  retranché,  on  commanda  mille  hom- 
mes de  Cavallerie,  &  le  Régiment  de  Dragons  de  Dietricldlein,  pour  le 
couvrir.  Le  Comte  de  Guttenilein,  dont  on  a  déjà  parlé,  fut  chargé  de 
prendre  exactement  garde  à  tous  ces  pofr.es.  Plus  bas ,  à  main  droite  ,  on 
partagea  aufii  deux  cents  hommes  de  Herberilein  &  de  Kirchbaum,  dans 
quatre  autres  CaiYines  ou  maifons  fituée  l'une  derrière  l'autre,  comme  aufïï 
dans  un  jardin  qui  touche  à  l'Aile  gauche  de  nôtre  Ligne.  Environ  furies 
dix  heures,  on  aperçut  les  Officiers  Généraux  des  Ennemis  qui  venoient 
reconnoitre  fous  une  forte  efcorte  ;  &  comme  ils  voulurent  s'aprocher  un 
peu  trop  près  de  nôtre  Ligne ,  on  tira  un  coup  de  Canon  fur  eux  ,  &  il  y 
en  eut  quelqu'un  qui  tomba  de  fon  cheval ,  après  quoi  ils  fe  retirèrent. 
On  ordonna  là-deiTus  au  Colonel  Comte  de  Daun  de  faire  abattre  un  pe- 
tit pont  de  pierre  3  &  comme  enfuite  il  alloit  reconnoitre  l'Ennemi,  il  at- 
trapa un  moufquetaire  Irlandois,  qui  s'étoit  égaré  le  jour  de  devant  de  fa 
Troupe,  &  qui  raporta  que  l'Ennemi  s'étoit  mis  entièrement  en  ordre  de 
Bataille,  marchoit  pour  donner  fur  nous,  &  avoit  deiïein  d'attaquer  pre- 
mièrement les  fufdites  Caiïines  &  Maifons,  &  en  effccl  il  s'étoit  déjà  tel- 
lement avancé  à  deux  heures  après  midi,  qu'enfin  nos  gardes  avancées 
furent  obligées  de  fe  retirer. 

Environ  fur  les  deux  heures  &  demi,  il  attaqua  lefdites  Maifons  &  Caf- 
fines  avec  trois  Brigades,  favoir  une  de  Normandie,  une  d'Auvergne, 
une  d'Anjou,  &  la  moitié  de  celle  de  Vaiffeaux  ;de  forte  que  ceux  des  nô- 
tres qui  y  étoient  poftez ,  étant  trop  inférieurs  en  nombre,  furent,  après 
une  réfiitance  aiïez  longue  &  fort  vigoureufe,  obligez  de  fe  retirer,  ce 
qu'ils  firent  en  bon  ordre  :  mais  l'Ennemi  reperdit  bien-tôt  ces  polies  ;  car, 
le  Bataillon  de  Guttenitein  qui  étoit  poité  en  arrière,  le  Colonel  Comte 
de  Daun,  &  le  Major  de  Kirchbaum  deWendt,  avec  les  Compagnies  des 
Grenadiers  Ni->re!!i,  Herberilein,  &  Daun  à  la  gauche,  &  à  la  droite  le 
Lieutenant-Colonel  de  Mansfeld  Gonzalles  avec  un  Bataillon,  &  la  Com- 
pagnie des  Grenadiers  de  fon  Régiment,  attaquèrent  û  vigoureufement  les 

En- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  377 

Ennemis ,  que  celui-là  après  une  perte  confiderable  des  Officiers  &  SoU  Ammf 
dats  fut  obligé  de  fe  retirer  en  confufion ,  tant  defdits  Poftes,que  des  Mou-  p!t,Al]fej 
lins,  que  les  Irlandois  avoient  attaquez.  L'Ennemi  perdit  quatre  Dra- 
peaux du  Régiment  de  Normandie  dans  cette  occafion.  Et  un  Moufque- 
taire  du  Régiment  de  Guttenftein  avoit  pris  un  Drapeau  du  Régiment  Ir- 
Jandois;  mais, dans  l'efperance  de  faire  un  plus  gros  butin,  il  le  jetta  dans 
l'eau,  &  ne  l'a  pu  retrouver  jufques  à  préfent.  Un  peu  avant  que  l'Enne- 
mi eut  fait  attaquer  les  fufdites  Caffmes  &  Maifons ,  il  avoit  déjà  avec  une 
partie  de  fon  Armée  attaqué  les  Bataillons  de  Nigrelli,  de  Herberftein,  & 
de  Kirchbaum  ;  mais  ceux-ci ,  ayant  laifle  aprocher  les  attaquants  fort  près 
d'eux  ils  firent  une  telle  décharge,  que  prefque  tous  ceux  qui  s'avanture- 
rent  trop  réitèrent  fur  la  place ,  de  forte  que  cela  joint  à  ce  qu'ils  ont  été 
obligez  de  fe  retirer  de  tous  les  lieux  qu'ils  attaquoient ,  à  caufe  du  feu 
continuel ,  &  de  nôtre  moufqueterie  &  du  Canon  qui  donnoient  fur  eux 
de  tous  cotez,  ils  ont  tant  fouffert  qu'on  ne  peut  le  décrire.  Quoi  que 
l'Ennemi  ait  fait  faire  fes  attaques  par  les  fufdites  Brigades,  qui,  à  ce 
qu'on  aprend,  conOiloient  en  17.  Bataillons  de  fes  meilleures  Troupes,  & 
qu'il  les  ait  fait  de  plus  foutenir  de  toute  l'Infanterie  de  fon  Armée ,  néan- 
moins il  a  trouvé  une  fi  vigoureufe  réfiftance,  qu'il  o'eft  vu  repoufie  avec 
toute  la  bravoure  poflible,  encore  que  ceux  qui  ont  foutenu  fes  efforts  ne 
confiltoient  qu'en  un  Bataillon  de  Mansfeld,  deux  de  Nigrelli,  un  de  Gut- 
tenflein,  deux  de  Kirchbaum,  &  en  quatre  Compagnies  de  Grenadiers 
de  Mansfeld,  Nigrelli,  Herberflein,  &  Daun.  Auffi  ne  fauroit-on  tror> 
donner  de  louanges  tant  aux  Officiers  qu'aux  Soldats ,  qui ,  foutenus  par  le 
zèle  &  la  prudence  des  Généraux  qui  fe  trouvoient  préfens  à  tout,  ont  té- 
moigné toute  la  bravoure  poiîible. 

La  perte  des  Ennemis  monte  au  moins  à  plus  de  deux  mille  hommes, 
tant  tuez  que  bleffez,  entre  lefquels  on  compte  plus  de  deux  cens  Offi- 
ciers dont  environ  feize  font  prifonniers  ,1a  plupart  bleffez,  &  100.  com- 
muns ,  toute  la  perte  que  nous  avons  faite  de  nôtre  côté  ne  monte  qu'à 
ce  qui  fuit  :  <    .         . 

Tuez.        Bleffez. 
De  Mansfeld  4  23 


j 


De  Nigrelli  2 

De  Herberflein  5 

De  Guttenftein  22 

De  Kirchbaum  13  17 


De  Herberflein  5  ip 

De  Guttenftein  22  ip 


. 


■ 


36  81 

■ 

Au  nombre  de  ceux  qui  ont  été  tuez  ,  il  fe  trouve  deux  Lieutenants  ; 
fçavoir  un  de  Taff,  &  un  de  Guttenftein  ;  &  de  ceux  des  bleffez  trois , 
favoir  un  des  Grenadiers  de  Mansfeld ,  un  de  Guttenftein  ,  &  un  de 
Kirchbaum,  outre  un  Capitaine  d'Artillerie.    Les  Deferteurs  901- nous  font 

Tome  XL  Bbb  vc- 


378    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  venus  cette  nuit  ont  unanimement  confirmé  la  grande  perte  des  Ennemis, 
d'Italie,  g  fpécialement  que  nôtre  Canon,  comme  il  a  été  dit,  leur  a  caufé  un 
très -grand  dommage;  qu'ils  en  avoient  d'abord  laide  deux  des  leurs,  mais 
qu'ils  avoient  été  depuis  fauvez  à  grand'  peine  avec  des  cordes ,  &  qu'en- 
fuite  ils  Te  font  retirez  la  même  nuit  à  une  lieuë  d'ici,  mais  qu'à  un  quart 
de  lieuë  du  Camp  de  bataille  il  étoit  reflé  beaucoup  de  leurs  bleiTez. 

Le  2.  de  ce  mois ,  toute  nôtre  Infanterie  &  une  partie  de  la  Cavalerie 
fe  font  tenus  prêtes  toute  la  nuit;  mais  les  ennemis,  comme  il  a  été  dit, 
fe  font  retirez  ,  &  ont  porté  leur  Aile  gauche  à  un  mille  &  demi  d'i- 
ci ,  &  leur  droite  un  peu  plus  loin.  On  a  de  notre  part  envoyé  divers 
partis  pour  reconnoitre  de  quel  côté  ils  marchent  ;  ils  ont  ramenez  plu- 
sieurs prifonniers,  &  en  ont  tué  plufieurs.  Ayant  environ  fur  les  dix 
heures  du  matin  commandé  deux  Lieutenans  Colonels  ,  fçavoir  le  Sr. 
le  Marre  Lieut.  Col.  de  Savoye  de  l'Aile  droite  ,  &  le  Baron  Spor 
Lieun.  Col.  de  Corobelli  de  l'Aile  gauche,  ils  ont  ramené  encore  au- 
jourd'hui quarante  prifonniers ,  tant  Cavaliers  que  Fantafiins ,  &  envi- 
ron 50.  autres  font  reliez  fur  la  place.  On  a  aufli  ramené  if.  che- 
vaux. 

Les  ennemis  ont  envoyé  ici  un  Tambour  du  Régiment  de  Bourgo- 
gne ,  fous  prétexte  de  reclamer  un  Officier  de  fon  Régiment  ;  mais  il 
a  fait  beaucoup  d'inflance  pour  qu'on  lui  laiflat  vifiter  les  morts  ,  &  a 
avoué  que  la  perte  que  l'ennemi  a  faite  monte  à  beaucoup  plus  de 
trois  mille  hommes  ,  &  que  parmi  ce  nombre  il  y  a  bien  300.  Offi- 
ciers, à  fçavoir  entre  autres  Moniteur  de  Precontal  Maréchal  de  Camp, 
un  Brigadier,  &  trois  ou  quatre  Collonels  d'Infanterie,  outre  d'autres 
qui  font  bleiTez.  Du  Régiment  de  Bourgogne  fusdit,  il  y  manque  33. 
Officiers  à  ce  que  rapporte  le  même  Tambour,  &  que  du  Régiment  de 
Normandie  il  y  en  a  près  des  deux  tiers  &  80.  Officiers  qui  ont  été 
tués.  On  apprend  à  chaque  moment  que  la  perte  des  ennemis  eft  bien 
plus  grande  qu'on  ne  l'a  pas  crue  hier.  Il  elt  venu  fur  le  foir  un  de- 
îerteur,  qui  rapporte  que  l'ennemi  avoit  diftribué  des  Munitions  à 
l'Infanterie,  &  que  les  Grenadiers  avoient  ordre  de  fe  tenir  prêts  pour 
minuit,  dans  le  defTein  de  nous  venir  attaquer  le  matin.  Tous  les  prifon- 
niers &  deferteurs  difent  qu'ils  ont  marché  la  nuit  après  l'action  en  gran- 
de confufion,  que  tous  leurs  Régiments  font  délabrés,  &  qu'il  y  a  beau- 
coup de  foldats  d'eftropiés.  Nous  avons  eu  avis  que  nos  deux  Régiments 
de  Gefwind  &  Lorraine  font  arrivés  à  Palazzuolo ,  &  le  General  Vaubon- 
ne  eit  aufli  venu  ce  matin  avec  le  corps  qu'il  commande. 

Le  3.  de  ce  mois,  lefdits  deux  Régiments  de  Gefwind  &  de  Lorraine 
ont  joint  l'Armée.  Au  refte,  elle  a  été  tout  ce  jour  prête  à  entrer  en 
action  ,  parce  que  fuivant  les  avis  d'hier  on  s'attendoit  que  les  Enne- 
mis pourroient  bien  tenter  quelque  chofe  :  cependant,  ils  n'ont  fait  au- 
cun autre  mouvement  ,  finon  qu'ils  ont  changé  la  difpofition  de  leur 
Armée  ;  &  comme  fon  Altefle  Sereniflime  a  apris ,  qu'un  Convoi  de- 
voir arriver  dans  l'Armée  Ennemie  par  Soncino,  il  avoit  commandé  dès 

hier 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.     I.         S7<> 

hier  le  General  Palfi  avec  mille  chevaux ,  mais  à  caufe  du  prétendu  6ef-  AmiR» 
fein  des  Ennemis,  il  n'avoit  pas  marché.  Néanmoins,  s  étant  mis  en  p'Itau»* 
chemin  ce  matin  ,  il  a  rencontré  à  quatre  bons  miles  d'ici  quelques  Enne-  ~ 

mis  prés  de  Vrago  ,  &  ayant  repoufle  les  Troupes  avancées  ,  comme 
l'Infanterie  fe  tenoit  trop  couverte  &  que  les  Ennemis  étoient  beaucoup 
fuperieurs,  il  s'ell  retiré  en  bon  ordre,  après  avoir  tué  fur  la  place  en- 
viron 60.  Soldats  &  quelques  Officiers;  il  a  de  plus  ramené  quelques  che- 
vaux, &  de  nôtre  côté  il  n'eft  relié  que  8.  à  10.  hommes  tant  tuez  que 
bleiTez. 

On  a  aufli  envoyé  deux  autres  partis  fur  l'aîle  droite  de  l'Armée  enne- 
mie, qui  fuivant  qu'on  l'avoit  appris  devoit  aller  au  fourage;  fcavoir  trois 
cens  chevaux  fous  la  conduite  du  Comte  de  Merci,  Lieut.  Col.  du  Reg. 
de  Lorraine  j  &  30.  hommes  fous  le  Capitaine  de  Dragons  Colomba  du 
Reg.  de  Sereni.  Le  premier  n'a  rencontré  perfonne ,  mais  le  fécond  ayant 
rencontré  les  fourageurs,  il  en  a  taillé  en  pièces  environ  30.,  &  comme  il 
ramenoit  quelques  prifonniers  &  36.  chevaux  qu'il  avoit  pris,  il  fçut  qu'il 
y  avoit  des  Ennemis  près  du  lieu  où  il  étoic  ;  il  alla  les  attaquer  &  en  défie 
encore  environ  trente.  Mais  en  revenant  il  tomba ,  près  d'un  pont,  dans 
un  Parti  ennemi,  &  n'y  ayant  pas  d'autre  paflage  pour  lui  que  celui-là, 
il  fut  encore  obligé  de  fe  battre,  &  d'abandonner  dans  l'action  tous  (es 
prifonniers,  hors  deux,  &  fes  chevaux,  à  7.  près:  au  refte  il  tua  encor» 
quelques  ennemis  fans  perdre  que  deux  hommes. 

Il  eft  arrivé  pendant  tout  ce  jour  plufieurs  deferteurs,  tant  Cavaliers 
que  Fantaffins,  qui  confirment  la  grande  perte  que  firent  les  Ennemis  dans 
l'action  d'avanthier. 


Manifefle  de  François  Spineîîi  3  Luc  de  Cqfleîluccia  3  en  Novem- 
bre 1701. 

,  f~\v iconque  veut  vivre  avec   honneur  doit  donner  connohTance  Manifef- 
,  V/  &  rendre  raifon  de  tout  cequ'il  fait;  ainfi  moi,  Duc  de  Caitelluccia,  teduDuc 
,  qui,  grâces  à  Dieu  ,  me  trouve  en  fureté,  nonobftant  la  cruauté  de  mes  deCaftel- 
,  parens,  qui  ont  refufé  de  me  fecourir  pour  défendre  ma  vie,  je  défen-    u  aa* 
,  drai  mon  honneur,  l'épée  à  la  main,  contre  tous  ceux  qui  ôferont  me 
,  donner  le  nom  de  Rebelle,  &  à  mes  amis,  pour  s'être  trouvez  à  Naples 
,  le  23.  Septembre  pour  une jufte  Entreprife.     C'efl  pourquoi  je  déclare 
,  qu'elle  eit  fondée  fur  la  juftice,  &  que  de  louables  raifons  nous  ont 
,  portez  à  chercher  le  bien  &  la  liberté  de  nôtre  Patrie.  Ceux,  qui  ôfent 
,  nous  regarder  comme  des  Perfides,  font  indignes  de  dire  la  vérité  ,  & 
,  je  rends  témoignage  au  monde  contre  l'ignorance  &  la  tyrannie  de  quel- 
,  ques  Miniflres,  qui  nous  ont  impofé  les  peines  dont  on  a  coutume  de 
,  charger  les  Rebelles.     Qu'ils  me  difent  qui  eft  Roi  de  Naples  ?  Qui 
,  elt-ce  ,  qui,  après  la  mort  de  Charles  Second,  dont  la  Ligne  efl  finie  en 
}  fa  Perfonne,  a  établi  un  Roi  légitime  de  Naples  ?  Qui  eit-ce  qui  a  tranf- 

Bbb  2  „  por- 


5) 


3So    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS ,  TRAITEZ,  ET 

ATFÀiRr.s  5)  porté  les  raifons  de  la  Maifon  d'Autriche  à  celle  de  Bourbon,  &  où  pa- 
©•Italie.  „  roit  l'Inveftiture  qui  doit  aller  avant  chaque  a&ion,  afin  qu'elle  ne  foie 
__  ,,  pas  illégitime?  Où  a-t-on  aiTemblé  les  Collèges  de  laNobleiTe?  Où  a-t-on 

„  tenu  les  Etats  Généraux  du  Royaume?  Le  Peuple  a-t-il  jamais  prêté  le 
„  Serment  de  Fidélité?  Eit-ce  donc  que  le  titre  légitime  de  la  Succelïion 
„  du  Royaume  peut  être  donné  &  affermi  par  une  Cavalcade  faite  par  le 
„  Duc  de  Médina-Celi  au  travers  de  la  Ville  ,  en  la  menaçant,  &  en  la 
,,  forçant  de  le  fuivre  ?  Le  Royaume  de  Naples  eft  encore  libre  jufqu'à 
.,  préfent.  Jl  faut  que  le  Pape  en  donne  l'Inveftiture;  &  cela,  en  vue  de 
„  la  Jullice,  &  du  bien  des  Sujets,  &  que  chacun  tache  de  fecouer  le 
joug  injulte  qu'il  a  fouffert  iï  long-temps.   Ce  n'efl  pas  un  crime  ,  mais 
le  devoir  de  chaque  Bourgeois  qui  efl  fidèle  à  fa  Patrie  }  &  l'on  fçait 
bien  que  ces  fentimens,  qui  doivent  être  enracinez  dans  un   honnête 
„  homme,  font  unanimement  imprimez  dans  le  cœur  des  Napolitains,  & 
„  dans  tout  le  Royaume,  qui  a  toujours  maintenu  fa  gloire  de  fon  propre 
„  fang.  Ainfi,  ceux-là  même  font  infâmes,  &  des  traîtres,  qui  oient  nous 
,,  faire  des  reproches,  parce  que  nous  n'avons  pas  voulu  nous  foûmettre 
„  à  la  violence  d'un  injufte  Gouvernement.     Nous  avons  proclamé  pour 
.,,  nôtre  Roi  l'illuflre  Archiduc  Charles ,  parce  qu'il  a  pour  lui  un  Droit 
„  inconteilable,  &  que  nous  y  fommes  portez  par  l'avantage  dont  nôtre 
„  Patrie  doit,  jouir  par  ce  moven.     C'eft  un  Prince  de  la  Maifon  d'Au- 
„  triche,  du  Sang  de  Charles  V.  nôtre  Roi  d'immortelle  mémoire  ,  & 
„  fils  de  l'illuflre,  pieux  ,  &  facré  Empereur  Leopold  I.  fur  qui  devroit 
„  légitimement  tomber  l'Inveititure  de  nôtre  Royaume  ,  par  le  titre  de 
Succeflion,  &  les  Accords  faits  dans  les  Traitez  de  Paix  publics  ,  af- 
fermis par  des  Sermens,  &  bénits  de  la  main  du  Pape.    L'on  voit  fleu- 
rir en  lui  la  piété  &  les  principales  vertus  qui  ornent  l'ame  d'un  Prince. 
C'efl  lui  que  l'Empereur  a  deftiné  pour  Roi,  en  ayant  été  prié  par  nous 
„  &  d'un  commun  confentement  des  Etats  du  Royaume;  c'efl  fans  doute 
le  plus  grand  bonheur  qui  pût  nous  arriver,  puis  que,  par  la  Perfonne 
de  l'Archiduc  ,  nos  anciennes  miféres  feroient  diffipées.     Il  auroit  af- 
fermi fon  àiége  à  Naples,  l'on  n'auroit  plus  méprifé  nos  fervices,  & 
nous  n'aurions  plus  été  forcez  de  nous  abaiffer  ,  &  de  remplir  l'anti- 
chambre  d'un   Miniflre   qui   auroit  dû   ambitionner   l'honneur   de    fe 
joindre  à  tant  d'iHuftres  Familles  de  nôtre  Pais.  Nos  biens  n'auroient 
plus  été  le  butin  de  l'avarice  &  de  la  cruauté,  &  nos   femmes,  re- 
„  nommées  par  leur  honneur  &  leurs  autres  vertus ,  n'auroient  plus  été 
foûmifes   aux   paffions   d'une   femme    miférable   &    méprifée.     Nôtre 
grand  Prince  nous  promettoit  un  riche  commerce,  la  diftribution  des 
Charges  parmi   les  naturels  du  Païs,  &  d'élever  un  Confeil  pour  une 
plus  prompte  Juflice.     Le  Peuple  qu'on  auroit  tâché  de  tenir  exempt, 
„  n'auroir  pas  été  opprimé  par  de  continuelles  &  d'infuportables  charges; 
„  il  ne  feroit  jamais  forti  tant  d'argent  du  Royaume  pour  rafTafier  tant  de 
,,  Miniftres;  mais,  par  une  continuelle  réfidence  de  la  Cour  à  Naples,  la 
„  Noblefle  auroit  vé.cu  dans  l'honneur  ,  la  Bourgeoifie  dans  le  repos,  & 

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RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.DCC.  I.         381 

le  Peuple  dans  l'abondance:  les  vertus  auroient  été  récompenfées  ,  &  Aftairi* 
nous  aurions  vu  nôtre  Fais,  d'un  abîme  demifëre,  fe  rétablir  dans  Ton  d'Italie* 
ancien  luilre.  Les  Privilèges  originaux  de  l'Empereur,  que  nous  avons 
demandez,  font  entre  nos  mains,  avec  la  confirmation  de  tous  les  au- 
tres avantages  accordez  par  Charles  V.  &  les  autres  Rois  fes  Prédécef- 
feurs;  mais  qui  font  tous  les  jours  anéantis  de  plus  en  plus  par  la  tiran- 
nie  du  dernier  Gouvernement ,  nonobftant  tan:  de  Sermeiis.  Voilà 
,,  les  raifbas  qui  nous  ont  portez  à  une  Entreprife  il  louable  :  &  il  n'y  a 
point  d'homme  allez  téméraire  ,  pour  ôfer  dire  que  cette  aétion,  ayant 
été  entreprife  pour  le  bien  public,  ait  été  formée  par  un  intérêt  particu- 
lier, puis  qu'il  eit  évident  que  nous  pouvions  vivre  commodément  de 
nos  propres  revenus ,  chacun  félon  fon  état,  &  que  nous  avons  bien 
voulu  tout  facrifier;  fans  permettre  que  l'on  pillât  les  maifons  des  En- 
nemis publics,  fuivant  en  cela  l'intention  de  l'illuftre  Archiduc  Charles, 
dont  les  Miniftres  de  l'Empereur  nous  ont  fi  fouvent  parlé  de  fa  part, 
&  voulant  prévenir  tous  les  defordres  &  le  dommage  des  Bourgeois, 
mettre  des  gardes  aux  banques  pour  empêcher  le  defavantage  des  inte- 
refiez,  préfenter  aux  Soldats  &  Officiers  Efpagnols  à  chacun  un  Emploi 
félon  fon  mérite,  pour  épargner  le  fang  de  ceux  qui  vouloient  demeu- 
rer fidèles  au  nom  d'Autriche;  mettre  le  Duc  de  Medina-CeJi  dans  un 
Château  en  fureté  contre  la  violence  du  Peuple  &  la  vangeance  de  tant 
„  de  gens,  à  qui  il  a  fait  tort,  &  même  lui  faire  paffer  la  mer  en  cas  que 
,,  cela  fût  nécelfaire  pour  le  faire  fortir  du  Royaume  ,  &  après  fon  départ 
„  faire  mettre  la  DuchelTe  fon  Epoufe  dans  un  Couvent  au  même  defîein. 
,,  Ce  Prince  pieux  &  illuftre  nous  a  de  plus  recommandé  d'éviter  de 
,,.  faire  injure  à  Dieu  &  au  Prochain,  d'honorer  les  Eglifes-,  d'épargner 
,,  l'honneur  des  femmes,  &  d'éloigner  en  cette  occafion ,  félon  fon  or- 
„  dre  Royal,  toute  paffion  ,  pour  le  Bien  commun.  Mais  nous  avons 
,,  efperance  ,  que  Dieu  nous  affiliera  ,  &  favorifera  les  armes  bé- 
„  nites  de  l'Empereur  pour  un  û  digne,  fi  jufte,  &  fi  pieux  Prince; 
,,  qu'il  nous  tirera  du  mépris,  &  qu'il  rétablira  le  Païs  dans  fa  liberté  &  fa 
„  réputation.  Enfin,  je  fais  fçavoir  à  tous  nos  amis,  que  quoi  que  la  Dé- 
„  couverte,  qui  a  été  faite  le  jeudi  d'auparavant  à  22,.  heures  au  Duc  de 
„  Medina-Céli  de  l'intelligence  que  nous  avions  au  Château  de  Caltel- 
„  nuovo,  ait  rendu  vain  l'avantage  que  nous  en  attendions,  &  que  cet  ac- 
„  cident  ait  tenu  en  arriére  le  fecours  qui  nous  étoit  promis,  l'Entreprife 
ayant  été  fans  fruit,  ils  ne  doivent  cependant  pas  croire  que  nôtre  ef- 
perance foit  anéantie  ,  mais  plutôt  que  chacun  , reprenant  le  deflêin  con- 
çu en  faveur  de  la  Maifon  d'Autriche  ,  cherche  à  fe  faire  de  nou- 
veaux adhérens  pour  cette  digne  Entreprife, qui  déformais  fera  foûienuë 
avec  de  telles  forces,  qu'on  aura  lieu  de  fe  réjouïr  de  l'efperance  que 
„  nous  avons  d'ctre  délivrez  de  l'efclavage  ,  &  de  voir  le  bien  commun 
„  affermi.  Il  efl  temps  de  ne  plus  fouffrir  des  iraitemens,  &  des  manié- 
„  res  barbares  ,  &  de  jouï'r  du  foulagement  que  nous  trouverons  dans  le 
„  pieux  Archiduc.  Je  ne  doute  point  que  chacun  ne  mette  la  main  à  l'œu- 

Bbb  5  »  vre, 


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MAGNE. 


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3«i    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aftàsu  ,,  vre,  puis  que  nôtre  véritable  &  légitime  Souverain  promet  de  grandes 
d'Allé-  "  récompenfes  à  ceux  qui  fuivront  fes  armes  ,  quand  il  entrera  dans  le 
Royaume;  &  qu'au  contraire,  il  menace  du  feu  &  du  fer  tous  ceux  qui, 
en  fuivant  l'injufte  Gouvernement  préfent ,  fe  font  reconnoître  pour 
traîtres  delà  Liberté  de  la  Patrie.  Joignons-nous  donc  enfemble,  pour 
l'affermir  fur  le  Trône ,  afin  qu'il  délivre  le  Royaume  des  miféres  pré- 
femes  &  pailées,  &  qu'il  rende  une  fois  fixe  le  bonheur  particulier  & 
commun. 

AFFAIRES     D'ALLEMAGNE. 

Offres  de  quelques  Princes  d'Allemagne  pour  des  Troupes. 

Offre.  Je  T  e  Sr.  Spina  ,  Réfident  des  Etats-Généraux  à  Francfort,  a  écrit  une 
Troupes  J_,  Lettre  à  LL.  HH.  PP.  pour  les  avertir,  que  plufieurs  Princes  d'Ai- 
de queiq.  iemagne  aVoient  prefenté,  de  vouloir  lever  quelques  Regimens  au  Service 
d'AUema-  de  l'Etat  >  &  particulièrement,  que  le  Commiifaire  des  Troupes  Mr.  Ulman 
gnc.  avoit  prefenté,  au  nom  de  l'Evéque  de  Wurtzbourg ,  d'envoyer  &  vendre 

à  LL.  HH.  PP.,moyenant  une  bonne  &raifonnable  Capitulation ,  z.  Regi- 
mens de  Cavalerie  &  un  d'Infanterie ,  qui  étoient  déjà  en  bon  ordre  & 
état ,  &  prêts  à  pouvoir  d'abord  marcher.  Leurs  HH.  PP.  ont  envoyé 
cette  Lettre  à  leur  Envoyé  en  Angleterre,  pour  en  donner  rapport  à  Sa 
Majefté  Britannique. 

Lettre  fur  les  Mouvemcns  des  François  dans  PElellorat  de  Cologne  ; 

de  Cologne  le  25*.  Novembre  1701. 

Entrée         A    la  fin ,  des  Troupes  de  France  venues  de  la  Meufe  font  entrées  Mardy 
desFran-    Jljl  palTé  dans  Nuis,  Zons,&  Keyfersweert ,  trois  Villes  duBas-Dioce- 
çoisdans    fe  de  Cologne ,  qui  regorgent  de  monde  à  prefent.  L'on  en  attend  auflià 
Cologne!    RhinDerg  «  Linn ,  &  Urdingen.    Trois  mille  hommes  de  cette  Nation  dé- 
voient entrer  aulîi  hier  dans  Bonn  ,  où  le  fameux  Partifan    la  Croix  fe 
trouve  déjà.    L'Electeur  Palatin  confeille  à  cette  Ville  de  Cologne  de 
de  prendre  des  Troupes  Hollandoifes  en  Garnifon;  mais, l'on  aime  mieux 
y  avoir  plus  de  monde  du  Cercle.  Des  Troupes  Palatines  deftinées  vers  le 
iiaut-Rnin,  trois  Régiments  s'y  font  déjà  acheminez  depuis  Mardi  dernier. 
L'Envoyé  de  France  Mr.  d'Iberville  efl  venu,  il  y  a  peu  de  jours,  de  Mayen- 
ce  à  la  Cour  de  l'Electeur  de  Trêves }  &  l'on  dit  que  les  François  veulent 
prendre  des  Quartiers  dans  le  Païs  de  Trêves  aufîï-bien  que  dans  la  Lor- 
raine.   Je  fuis  , 

Monsieur, 
Cologne  le.  25.  Novemb.  1701. 

Vôtre  tres-humble  &  tres-obehTant 
Serviteur  *** 
P.  S.    Les  François  ne  font  pas  encore 
entrez  dans  Bonn  ,   mais  l'on  y  fait  des 
Barques  pour  5000.  Hommes. 

Ordotî- 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.    f. 


38J 


Ordonnances  de  PEIecleur  de  Cologne 3  touchant  Rhinberg 
Kcifcrswerti  &?  Alpen\  du  15*.  Décembre  1701. 


AFFAIRES 

n'Ai  1 1- 

MAGNE. 


SA.  E.de  Cologne,  Duc  des  deux  Bavieres,  nôtre  tres-benin  Maître,    Ordon- 
•  voulant  faire  achever  les  Ouvrages  de  Rhinberg  &  de  Keyferswert,    nancJ 
&  jugeant,  fuivant  la  tres-humble  Requête  &  Remontrance,  qu'il  feroit    r^.3'^ 
de  l'avantage  de  fes  Sujets  de  pouvoir  dans  ces  conjun&ures  prefentes,  &    berg, 
pendant  l'hiver,  vaquer  à  leurs  Affaires,  S.  A. E. les  a  bien  voulu  exemp-    Keyfers- 
ter  de  ces  courvées,  auxquelles  tous  les  Sujets  desBaiiiages  &  Seigneuries    Y,ertï  & 
du  Bas-Diocefe  avoient  été  commandés.   Et  comme  par  une  fupputation      pcn* 
julle  &  équitable  la  quote-part  dejla  Seigneurie  d'Alpenffe  monte  à  8-  écus 
par  18. jours,  ordonne  S.A. E. aux  Magillrats  de  ce  Lieu  de  tenir  la  main 
afin  que  les  fufdits  8.  écus,  qui  commencent  dés  le  iy.de  ce  Mois,  foient 
payés  régulièrement  de  ly.  en  quinze  jours  au  Secrétaire  de  la  Ville  &  à 
l'Auditeur  Dikhaufen,  jufqu'a  nouvel  ordre,   &  cela  fur  peine  d'exécu- 
tion militaire.    Donné  a  Bonn  15.  Décembre  1717. 


(  L.S.  ) 


JOSEPH    CLEMENT,    Electeur. 

Et  plus  bas, 

C.  L.  Caukol. 


nance 

touchant 

Alpen, 


S.A. E.  de  Cologne, Duc  des  deux  Bavieres, nôtre  Clementifîime  Maître  Ordon 
&c.  ordonne  à  tous  les  Commandans, Magillrats, &  Bourgeois  d'Alpen, 
de  recevoir  dans  leur  Château  &  Ville,  fans  aucune  contradiction  ou  délai, 
le  porteur  de  cette ,  un  Officier  commandé ,  le  Comte  de  Coigny ,  avec  fes 
Soldats  >  &aufii-tôt  qu'ils  auront  prêté  le  Serment  ci-joint ,  de  leur  fournir 
logement,  lits,  &  lumière,  feu  d'holr.e,&  les  leur  bailler  de  bon  cœur,  pour 
un  prix  raifonnable  de  leurfolde,  fous  peine  d'indignation,  &  peines  ir- 
remiffibles.    A  Bonn,   utfuprà,  &c. 


(L.S.) 


JOSEPH     CLEMENT,    Electeur» 


Prefenté  à  Alpen  le  Lundi  de  Noël, 
170 1.  ante  portas  par  leLieut.  du  Roy, 
Commandant  à  Rhinbergue. 


Et  plus  bas, 


D.  Simon  Eizenberg. 


Lettre  de  Hambourg  aux  Etats-Generaux ,  touchant  les  Lifférem 
entre  le  Holfiein  g«?  le  Danemarc;  du  4.  Fevr.  1701. 


A 


près  que  les  Miniflres  de  l'Empereur,  de  Suéde,  de  Brandebourg ,    Di'ffe'rcns 
de  Lunebourg,  &de  VV.HH.PP.  ont  travaillé  depuis  quelques  jours, 

avec 


du  Huit 
tcin. 


MAGNE. 


384    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  avec  toute  Implication  pofîible,  à  diriger  par  leur  entremife ,  tant  auprès 
d'Allé-  du  Miniilre  de  Danemarc  que  de  celui  de  Holftein-Gottorp  ,  les  chofes  en 
forte  que  les  points  en  difpute  touchant  la  Seigneurie  de  Godsgave  ,  &  la 
pofleflion  acordée  de  la  Seigneurie  de  Lindewis,  ne  donnent  lieu  à  de  nou- 
velles querelles,  ces  deux  derniers  Miniftres  les  ont  bien  voulu  écouter, 
mais  fous  condition  expreile  que  par-là  ils  ne  prétendoient  pas  s'y 
être  fournis.  Nous  y  avons  répondu  tous,  que  nous  n'avions  pas  d'ordre 
des  Seigneurs  nos  Principaux  pour  nous  mêler  de  cette  Affaire ,  &  que 
tout  ce  que  nous  en  avions  fait  n'étoit  que  pour  l'Amour  de  la  Paix 
&  dans  la  bonne  intention  de  prévenir  par-là  toute  mésintelligence, 
que  le  défaut  du  payement  des  260.  mille  écus  pouroit  caufer.  On  a 
donc  propofé  ,  que  quoique  la  reftitution  de  la  Seigneurie  de  Gods- 
gave ait  été  promife  au  Duc  en  vertu  des  Traités  d'Altena  &  de 
Travendahl ,  la  valeur  en  devoit  pourtant  être  payée  au  Duc  de  Nor- 
bourg  ,  ou  par  le  Roi,  ou  par  le  Duc  de  Gottorp  ,  ce  qui  étant  une 
queftion  qui  ne  fauroit  être  décidée  fi  promtement,  on  donnoit  à  confi- 
derer,  fi  le  Roi,  par  généralité  &  par  inclination  pour  la  tranquillité, 
ne  voudrait  donner  au  Duc  de  Gottorp  20.  ou  if.  Arpens  de  terre,  qui 
font  la  moitié  de  trente  pour  lefquels  la  dite  Seigneurie  eft  enregîtrée  fur 
la  matricule,  &  qu'alors  le  Duc  de  Gottorp  rendrait  à  celui  de  Norbourg 
la  dite  Seigneurie, &  la  laifteroit  pofleder  tranquillement  à  lui  &àfes  Hé- 
ritiers; par  où  tomberoit  la  queftion  fur  la  féodalité.  Le  Sr.  Lentke  ré- 
pondit là- deflus,  qu'il  n'étoitpas  autorifé  fur  cefujèt,  mais  qu'il  en  rendroit 
un  compte  fidèle  au  Roi, recommanderait  la  chofe  de  fon  mieux, moyen- 
nant qu'on  s'engageât  du  côté  de  Holftein  à  ne  point  prendre  poïfeflion 
duBaillage  deBrefted,  dans  l'efpace  de 8. jours,  tems  qu'il  lui  falloit  pour 
avoir  réponfe.  Surquoi  leMiniftre  de  Holftein  difoit,  que  puifque  le  Duc 
fe  trouvoit  lui  même  fur  les  lieux,  nous  pourrions  lui  faire  cette  Propor- 
tion* ce  qui  ayant  été  fait  cet  après-midi  par  les  Miniftres  de  Suéde,  de 
Lunebourg,&  de  VV.T1H.  PP.  le  Duc  nous  écouta  très-gratieufement, 
&  nous  répondit,  que  quoique  les  points  en  difpute  n'avoient  point  de 
connexion  avec  le  payement  de  260.  mille  écus,  il  ne  vouloit  pourtant 
pas  fe  prévaloir  de  fon  Droit  aquis  dans  l'efpace  de  8-  jours  ;&  il  nous 
fit  affez  efperér  ,  qu'en  cas  que  le  Roi  acceptât  la  Propofition ,  il  s'y 
conformerait  auiïi  :  par  confequent,  le  fécond  point  touchant  la  pofTef- 
fion  accordée  trouvera  d'autant  moins  de  difkulté ,  n'étant  qu'une  pro- 
cédure faite  par  la  Régence  de  Holftein-Gottorp  fur  l'exhibition  d'une 
obligation  ,  à  quoi  l'on  pouroit  bien  aporter  quelque  tempérament  par 
le  défaut  de  communication  avec  la  Régence  de  Gluckftad  ,  le  quel 
pouroit  être  agréable  aux  deux  parties.  En  attendant ,  j'efpere  que  ce  que 
deilus,  ayant  été  fait  de  concert  par  les  Miniftres  ci-deflus  nommez ,  aura 
l'Approbation  de  Vos  "Hautes  Puiifances. 


TRAÏ. 


Affaires 

CEI*.    DE 

l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.    L  38? 

TRAITES  POLITIQUES  CONCERNANT 

LES    AFFAIRES    GENERALES 

DE  L'EUROPE. 

Le  Teftament  de  Charles  IL  dernier  Roi  d'EJpagne,  gf  le  Trai- 
té j ait  touchant  le  Partage  de  la  Monarchie  Efpagnole  :  rap- 
portez ,  6?  confidèrez  5  Article  par  Article  ,  avec  des  Réfle- 
xions fur  Tun  £5?  fur  Vautre ,  tendantes  a  prouver  ,  que 
toute  VEurope  eft  intéreffée  à  s^en  tenir  inviolablement  au  Par- 
tage de  la  Monarchie  d?Efpagne;  &  plus  particulièrement  par 
rapport  à  r  Utilité  &p  au  Bien  de  T  Angleterre.  Traduit  de  VAn- 
glois ,  fuivant  la  Copie  imprimée  à  Londres, pour  J.Nutt, proche 
de  la  Salle  des  Papetiers  >  en  1701. 

Comme  il  n'y  a  rien  qui  ait  tant  exercé  depuis  quelque  tems  la  Lan-   Tefta- 
gue  &  la  Plume  de  plufieurs  perfonnes,  que  les  Difcours  qui  le  font    ment  de 
tenus  touchant  le  Teftament  du  dernier  Roi  d'Efpagne  ,  &  la  Divifion  de    £hArl<:s 
cette  Monarchie  j  j'ai  crû  ne  pouvoir  faire  un  plus  grand  plaifir  aux  Cu-   d'Efpa- 
rieux,  que  de  leur  mettre  devant  les  yeux,&  le  Teftament  même,&  les  gne,avec 
Articles  qui  expofent  le  Partage,  avec  quelques  Remarques  modeftes  fur  desRé- 
l'un  &  fur  l'autre ,  tendantes  à  prouver  fans  aucune  contradiction ,    que  pe*.J°ns 
c'eft  l'Intérêt  de  toute  l'Europe ,  &  plus  particulièrement  de  l'Angleterre     0itI<l* 
nôtre  Patrie,  de  s'en  tenir  inviolablement  au  Partage  de  la  Monarchie 
d'Efpagne,  de  la  manière  qu'il  avoit  été  conçu,  &  dont  la  France,  l'An- 
gleterre, &  les  Etats  Généraux  des  Provinces-Unies,  étoient  convenus 
cnfemble ,  en  cas  que  le  Roi  d'Efpagne  vint  à  mourir  fans  Enfans.  Mais  , 
quand  je  devrois  renverfer  l'ordre  du  tems ,  dans  lequel  on  eft  convenu  de 
cette  Affaire ,  je  commencerai  par  le  Teftament  du  Roi  d'Efpagne  ,  du- 
quel fi  l'on  peut  tirer  quelque  conféquence ,  c'eft  qu'il  va  engager  la  Chré- 
tienté dans  une-Guerre  fanglante ,  dont  peut-être  les  plus  jeunes  de  cette 
Génération  ne  vivront  pas  afiez  long-tems  pour  en  voir  la  fin. 

TESTAMENT. 

Le  Teftament  13  Difpofition  de  dernière  Volonté  de  Charles  Second ,  dernier 
Roi  d'Efpagne  ,  qui  vive  en  gloire ,  lequel  il  a  fait  pour  établir  la  SucceJJïon  de 
la  Couronne  d'Efpagne. 

Le  Titre ,  aufli-bien  que  tout  le  Teftament, meriteroit  de  févéres  Reflè- 
te me  XL  Ccc  xions, 


386     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITER,  ET 

Affaires  xions \  mais,  le  Refpe6t  que  je  dois  aux  Têtes  Couronnées  m'empêche 
gen.  de  d'en  faire  aucunes  :ainfi,je  me  contenterai  de  palier  à  la  teneur  de  l'Acte, 
i/Euko-  jeqUej  j'aj  fait  diftinguer  par  des  Caractères  différens ,  afin  de  ne  le  pas 
■ — ~ —  confondre  avec  les  Remarques. 

TESTAMENT. 

Nous ,  ayant  remarqué ,  conformément  au  Réfaltat  de  toutes  les  Confultations 
tenues  par  nos  Miniftres  d'Etat ,  &  de  Juftice  ,que  les  Raifons  pour  le/quelles  les 
Infantes  Donna  Anna,  &  Donna  Maria  Thereiia ,  Reines  de  France ,  mes  cïan~ 
te ,  &  Sœur ,  ont  renoncé  à  la  Succeffion  de  ce  Royaume ,  net  oient  fondées  que 
fur  le  Danger  &  le  Préjudice  (qui  pourrok  revenir  à  la  Nation)  Jï  ce  Royau- 
me venoit  à  être  uni  à  celui  de  France. 

Il  paroît  par  ce  Paragraphe,  que  la  Prudence  des  Efpagnols  leur  a  tou- 
jours fait  envifager  comme  une  chofe,qui  étoit  la  plus  propre  à  les  mettre 
à  couvert  de  l'Opprellion,  de  prévenir,  &  d'empêcher  par  toutes  fortes 
de  moyens ,  que  la  Couronne  d'Efpagne  ne  tombât  fur  la  tête  d'un  Roi 
de  France.  C'eil  pourquoi  aufll,dans  tous  leurs  Traitez  de  Paix,  ou  de  Ma- 
riage, ils  ont  pris  tous  les  foins  imaginables  pour  y  remédier,  en  ne  fe 
familiarifant  pas  avec  eux  ,  en  éludant  toutes  lesPrétenfions  qu'ils  auroient 
pu  former,  &  en  tenant  la  Balance  du  Pouvoir  en  Europe  dans  un  équi- 
libre fi  jufte,  que  fi  la  France  afpiroit  à  faire  à  fes  Etats  une  Réunion 
aufii  confidérable  que  celle  de  l'Efpagne, elle  ne  fût  jamais  en  Pouvoir  d'en 
venir  à  bout,  ni  de  l'opprimer,  non  plus  que  pas  un  des  Princes  de  l'Eu- 
rope. 

C'étoient-là  les  Raifons  pour  lefquelles  le  Roi ,  &  le  Confeil  d'Efpagne ,  ne 
voulurent  jamais  accorder  ces  Princefles  en  Mariage  aux  Rois  de  France, 
avant  qu'elles  euffent  actuellement  renoncé  à  leurs  Droits  fur  la  Couron- 
ne d'Efpagne,  non-feulement  pour  Elles-mêmes,  en  qualité  de  Reines  de 
France,  mais  auflï  pour  leurs  Hoirs.  Ce  qui  fembloit  être  un  Lien  affez. 
fort  en  ce  tems-là,  quoi  que  depuis  peu,  encore  que  le  Nœud  ne  pût, 
être  délié  fans  violer  la  Foi  des  Traitez,  des  Alliances,  &  des  Contrats, 
on  ait  crû  qu'il  étoit  jufte  &  raifonnable  de  le  couper,  par  le  moyen  des 
Glofes  &  des  Expofitions  intereflees  que  l'on  en  a  faites.  Mais,n'eft-ce  pas 
une  chofe  furprenante  &  digne  d'admiration, de  voir  maintenant  de  quelle 
manière  ces  mêmes  Raifons  viennent  àceflerdans  cette  Conjoncture ,  com- 
me il  elt  infinué  dans  le  Teftament  ?  Attendu  que,  fi  le  Roi  de  France  avoit 
deflein  d'opprimer  l'Efpagne  &  toute  l'Europe,  il  eft  maintenant  plus  puif- 
fant  lui  feul,  que  jamais  Roi  de  France  ait  été  depuis  l'Erection  de  cette 
Monarchie:  ainfi,  que  ne  feroit-il  pas  alors,  fi  les  mines  d'or  &  d'argent 
des  Indes ,  &  l'Efpagne  toute  entière ,  venoient  à  être  unies  aux  Forces 
dont  il  eft  revêtu  préfentement?  Il  n'eft  pas  fur  de  fe  fiera  l'Amitié  ou  au 
bon  Naturel  d'un  Prince  ambitieux ,   quand  même  il  auroit  donné  à  fes 

voifins 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  387 

Voifins  des  Preuves  plus  fenfibles  de  fa  Modération  qu'il  n'a  plû   au  Roi   Affaire 
très-Chrêtien  de  nous  en  faire  voir.  CFÎC-  de 


TESTAMENT. 

Et  ayant  confideré  ,  que ,  puifque  la  Rai/on  fondamentale  ne  fubfifloit  plus ,  le 
Droit  de  la  SucceJJïon  étoit  dévolu  au  plus  proche  Parent ,  Jclon  les  Loix  de  ce 
Royaume ,  lequel  Cas  ejl  maintenant  vérifié  en  la  perfonne  du  fécond  Fils  de 
France. 

Ce  petit  Paragraphe  femble  avoir  une  double  face;  mais  toutes  deux 
terribles.  On  diroit,  à  le  prendre  d'un  fens ,  que  c'eit  une  chofe  avanta- 
geufe  pour  l'Efpagne,  de  déshériter  le  plus  prochain  Héritier;  mais,  il 
vous  le  prenés  de  l'autre,  il  femble  donner  à  entendre,  que  le  plus  jeu- 
ne Fils  ait  une  efpece  de  Droit,  tandis  que  l'Aine  de  toute  la  Famille, 
lequel  y  pouroit  plutôt  prétendre,  n'en  a  aucun.  Que  fi  ce  n'eft  pas- 
là  une  Injuflice,  c'eft  au  moins  une  Erreur  manifefle;car,  le  Duc  d'An- 
jou n'a  pas  plus  de  Droit  à  la  Couronne  d'Efpagne,  pendant  que  le 
Dauphin  fon  Père,  ou  le  Duc  de  Bourgogne  fon  Frère  aine  ,  font  en  vie, 
qu'un  Athée  a  de  Droit  au  Royaume  des  Cieux,ou  que  le  Roi  de  Bantam 
en  a  fur  Je  Royaume  de  France,  &  fur  celui  de  Navarre. 

TESTAMENT. 

Cefi  pourquoi ,  me  réglant  fur  le  [dites  Loix ,  je  déclare  pour  mon  SucceJJeur , 
fi  Dieu  me  retire  fans  avoir  laijjé  d'Enfant ,  le  Duc  d'Anjou ,  fécond  Fils  du 
Dauphin  :  & ,  en  confequence  de  ce ,  je  l'établis  &  le  nomme  pour  me  fucceder 
dans  tous  mes  Royaumes  13  Dominations ,  fans  en  excepter  aucuns  ;  £5?  je  corn- 
mande  (3  ordonne  que  tous  mes  Sujets  &  Vajfaux  le  reconnoijfent  comme  leur 
Roi  (3  Seigneur  Naturel ,  &  que  fans  aucun  délai  ils  le  mettent  aclueU 
lement  en  PoJjéJJion  d'iceux  ,  pourvu  quil  fafife  £5?  prête  les  Sermens  accoutu- 
més d'obferver  les  Loix ,  les  Ordonnances ,  £s?  les  Coutumes  de  mefdits  Royau- 
mes, &  Dominations. 

Voilà  le  Legs  du  dernier  Roi  d'Efpagne,  dont  jamais  perfonne  n'aura 
fujet  de  lui  fçavoir  gré,  pas  même  le  Roi  de  France;  car,  s'il  l'accepte 
en  fon  entier,  comme  un  Don  du  feu  Roi,  le  Monde  ne  manquera  pas 
infailliblement  d'être  fcandalizé  de  voir  que  le  Roi  Très-Chrétien  rom- 
pe un  Traité,  que  l'on  peut  appeller  fien,  lequel  il  a  déjà  figné,  auquel  il  a 
confenti,  par  lequel  il  s'ed  engagé  à  fe  contenter  d'une  Portion  de  l'Hé- 
ritage, &  qui  le  contraindra  malgré  lui  à  foutenir  une  une  nouvelle  Guer- 
re contre  fes  Voifins,  avant  que  d'avoir  remédié  aux  Pertes  qu'il  a  faites 
dans  la  dernière.  Ce  ne  fera  pas  le  Dauphin,  ni  le  Duc  de  Bourgogne 
fon  Fils  aine  j  car ,  le  Teitâment  établit  leur  Droit  indubitable.  Ce  ne  fera 
pas  aufiî  le  Duc  d'Anjou,  puis  que,  par  ce  moyen,   il  lui  a  fubftitué ,  à 

Ccc  :  lui, 


l'Euro- 
pe. 


388    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  lui,  ou  au  moins  à  fa  Pofterké  après  lui,  une  Guerre  perpétuelle,  en  cas 
«en.  de   qUe  je  £)uc  jg  Bourgogne  laifîe  des  Enfans  après  fa  mort.    Car,  par  la 
L  PjR0"    même  Raifon  que   la  Renonciation  faite  par  le  Père  &  par  la  Mère  du 
'       Dauphin,  à  la  Paix  des  Pyrénées, ne  peut  préjudicier  au  Droit  qu'il  a  à  la 
Succeffion  de  la  Couronne  d'Efpagne ,  qui  elt  l'unique  Argument  fur  le- 
quel la  France  forme  fes  Prétendons;  par  cette  même  Raifon,  ni  le  Con- 
fentement  du  Dauphin,  ni  celui  du  Duc  de  Bourgogne,  au  Teftamenc 
du  Roi  d'Efpagne,  ne  peut  préjudicier  au  Droit  de  fa  Pofterké,  aufiï- 
tôt  qu'elle  fe  fendra  aflez  forte  pour  le  répéter. 

D'ailleurs,  le  Commandement  exprès  du  feu  Roi  d'Efpagne,  par  lequel 
il  ordonne  que  le  Duc  d'Anjou  foit  înceffamment  mis  en  PofTeflion  de 
fes  Etats ,  ne  fignifie  rien  autre  chofe ,  fi-non  que  l'on  y  obeïfTe  par  la  Rè- 
gle des  Contraires,  &  ne  fert  que  pour  mettre  fes  Sujets  en  PofTeflion  de 
leur  Droit  Naturel,  en  les  autorifantà  fe  défendre  contre  l'Ufurpation  d'un 
Ennemi  déclaré,  qui  les  veut  rendre  Efclaves,&  contre  les  Avanies  d'u- 
ne Nation  Etrangère.  D'autre  part,  fuppofés  que  la  Haine  naturelle  des  Es- 
pagnols pour  les  François  foit  éteinte  extérieurement  ,  cela  n'empêchera 
pas  que  le  Duc  d'Anjou  ne  trouve  deux  grandes  Difficultés  dans  cette  Af- 
faire. Car,  fi,  comme  nous  l'avons  déjà  dit,  l'Ambaffadeur  de  l'Empereur 
à  la  Cour  d'Efpagne  a  déjà  proteflé  à  Madrid  contre  le  Teftament  du  feu 
Roi,  il  peut  bien  s'imaginer,  que  quoi  qu'il  ait  fon  Grand-Pere  pour  le 
fecourir,  il  ne  fera  que  très-mal  à  fon  aife  en  Efpagne,  û  il  prétend  s'y 
maintenir  fans  le  Confentement  de  fa  Majefté  Impériale,  qui  a^des  Pré- 
tendons fur  ce  Royaume  plus  anciennes  que  le  Duc  d'Anjou.  Il  ne  faut 
pas  auffi  croire  que  lesAnglois,  &  les  Hollandois,  ne  s'intéreffent  à  fai- 
re exécuter  le  Traité,  &  le  Partage, qu'ils  fe  font  fblemnellement  obligés 
de  maintenir  conjointement  avec  fon  Grand-Pere. 

TESTAMENT. 

Et  mon  Intention  étant ,  que  pvur  le  Bien  de  mes  Sujets ,  &?  pour  maintenir 
la  Paix  de  l'Europe,  cette  Monarchie  foit  fe  parée  de  la  Couronne  de  France , 
je  déclare  que  fi  ledit  Duc  d  Anjou,  venant  à  mourir,  ou  à  hériter  de  la  Cou- 
ronne de  France ,  preferoit  la  Jouïflance  de  cette  Monarchie  à  celle  d 'Efpagne -, 
la  Succefïon  fera  dévolue  au  Duc  de  Berry ,  /on  Fi  ère,  troifiéme  Fils  du  Dau- 
phin, de  la  même  manière ,  (ou)  aux  mêmes  conditions." 

Nous  avons  vu  dans  le  Paragraphe  précédent  la  Nature  de  la  Donation* 
&  ce  qui  peut  probablement  en  réfulter,  à  moins  que  le  Roi  de  France 
ne  trouve  à  propos  de  fe  conformer  au  Traité,  &  au  Partage,  dont  il  eft 
déjà  convenu,  &  auquel  il  s'eft  engagé  Je  fe  tenir;ou  que,  fuivant  fa  Pru- 
dence accoutumée,  il  ne  veuille  regarder  avant  que- d'entreprendre,  &  voir 
ce  qu'il  y  a  dans  le  fei/i  de  l'avenir.  Les  Raifons  que  le  feu  Roi  en  donne 
font  exprimées  en  termes  vagues  &  généraux:  c'eft ,  dit-il ,  pour  le  Bien  de 

fes 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.  585» 

Sujets  ,  y  pour  la  Paix  &f  la  Tranquillité  de  toute  V  Europe  \  fur  quoi  il  naît  Affaires; 
naturellement  du  doute.  Car,  en  premier  lieu,  eit-ce  l'Avantage  des  Ef-  GfN-  nK 
pagnols  d'être  rendus  Efclaves  de  la  France  ,  ou  d'être  forcés,  au  moins, 
de  combattre  pour  la  Confervation  de  leurs  Libertés ,  de  leurs  Biens ,  &  de 
leurs  Privilèges ,  lors  qu'ils  font  dans  une  Pauvreté  extrême,  defarmés,& 
qu'ils  n'ont  perfonne  pour  les  fecourir?  Car,  cette  Donation  de  l'Efpaene 
Il  vague,  &  comme  au  hazard,  fans  avoir  prévu  à  la  Sûreté  des  Peuples, 
ni  à  la  Confervation  de  leurSjPrivileges  &  de  leurs  Libertés ,  n'étant  gueres 
dilTemblab'e  d'une  Conquête,  la  Queftion  que  j'ai  faite  d'abord  fubfifte 
toujours,  &  c'elî  à  quoi  la  Nation  doit  s'attendre. 

Secondement.  Ett-ce  le  moyen  de  maintenir  la  Paix  &  la  Tranquillité 
de  l'Europe,  que  de  faire  en  forte  que  la  France,  en  s'emparant  de  l'Ef- 
pagne  &  des  RichefTes  des  Indes,  devienne  plus  grande,  &  plus  puiflan- 
te,  que  toute  l'Europe  enfemble,  &  en  état  d'opprimer  à  fon  plaifir  qui 
elle  voudra? 

En  troifiéme  lieu.  En  donnant  la  Couronne  d'Efpagne  h  la  France, eft- 
ee  le  moyen  que  les  deux  Royaumes  foientfeparés?  Au  contraire,  pouvoit- 
on  trouver  d'Expédient  plus  propre  pour  les  unir  fous  une  même  Domina- 
tion, que  celui  que  le  Teftament  a  inventé,  en  cas  que  toute  l'Europe 
foit  dans  un  Affoupiffement  allez  profond  pour  permettre  qu'un  Projet  il 
dangereux  ait  fon  effet  ? 

Mais,  dira  un  Fauteur  corrompu  &  infatué  du  Teftament  ,1e  Duc  d'An- 
jou ,  fe  voyant  poffelTeur  d'une.  Couronne ,  &  Maître  d'un  Royaume  bien 
afTûré,  ne  manquera  pas  de  difpofer  l'Efpritdes  Efpagnols  d'une  manière, 
qu'ils  lui  aideront  à  empêcher  que  la  France  n'ufurpe  rien  fur  fon  Terri- 
toire; &,  d'ailleurs  ,1a  Prudence  &  le  Sens-commun  veulent  qu'il  conferve 
cette  Monarchie  pour  fes  Defcendans.  Je  réponds,  que  toutes  ces  belles 
chofes  peuvent  être  véritables,  pourvu  que  ces  deux  Couronnes  viennent 
à  avoir  du  Différent  entre  el!esj&  que  ce  Différent  dure  toujours,  car  ce 
n'eit  pas  une  chofe  impofiible ,  que  le  Duc  d'Anjou  celle  d'être  Due  d'An- 
jou ,  pour  devenir  Roi  d'Efpagne.  Mais  auifi  ,  fi  la  fantaifie  prenoit  au 
Roi  Très-Chrétien,  de  faire  la  Guerre  à  toute  l'Europe  ,  il  ne  faut  pas 
douter  que  ce  même  Roi  d'Efpagne  neredevint  Duc  d'Anjou ,  à  la  moin- 
dre Sommation  qui  lui  en  feroit  faite  ;&  que,  comme  un  petit-fils  obéïfTant, 
il  ne  fe  liât  avec  la  France,  &  même  avec  le  Grand  Turc,  contre  toute 
la  Chrétienté.  Et,  en  ce  cas,  dans  quel  épouvantable  malheur  l'Europe 
ne  fe  verroit-elle  pas  plongée?  Je  lailTe  aux  perfonnes  bien  fenfées,  &  d'un 
Jugement  raftîs, à  confiderer,  &  à  faire  leurs  Réflexions  là-deffus;  &  aux 
fols  à  fe  plaindre ,  quand  ie  mal  fera  parvenu  à  un  point  qu'il  fera  impoffi- 
ble  d'y  apporter  de  remède. 

Car, que  la  Couronne  d'Efpagne  foit  mife  fur  la  tète  de  qui  que  ce  foit 
de  la  Maifon  de  Bourbon^û  eil  certain  que  le  Commandement  ci:  l'Autori- 
té demeurera  toute  entière  entre  les  mains  de  celui  qui  gouverne  h  Ver- 
failles,  &  que  le  Confeil  d'Efpagne  n'agira  que  fuivant  les  Mefures  qui  y 
feront  prifes.  Ainfi ,  le  Roi  d'Efpagne,  prétendant  éviter  un  Malheur  en  éii- 

Ccc  3  fant 


?9o    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AifFAiMS    Tant  un  fécond  Fils,  n'a  fait  autre  chofe  que  de  fortifier  un  Prince,  &  lui 
gbn.  df.    donner  des  Moyens  plus  fùrs  pour  opprimer  Cqs  propres  bujets,   &  toute 

l'Euro-     l'J£urope  avec  eux. 


PE. 


ne 


TESTAMENT. 

El  en  cas  que  ledit  Duc  de  Berry  vint  à  monrir  ,  ou  à  hériter  de  la  Couron- 
ne  de  France ,  je  déclare ,  C5?  je  nomme  à  la  SucceJJlon ,  l'archiduc  jecond  Fils 
de  l'Empereur ,  excluant  pour  les  mêmes  Raifons ,  &  pour  les  mêmes  Inconveniens, 
contraires  à  t  Intérêt  de  mes  Sujets ,  le  Fit  s  aîné  dudit  Empereur  \  &  en  cas  que 
t  Ardxduc  vint  aujji  à  mourir ,  je  déclare ,  &  nomme  à  la  dite  SucceJJlon  le  Duc 
de  Savoyc  &  [on  Fils. 

Tout  ce  Difcours  n'aboutit  à  autre  chofe ,  fi-non ,  que  fi  le  Duc  d'Anjou 
parvient  à  la  Couronne  de  France,  il  pourra  quitter  la  Couronne  d'Efpa- 
gne,  s'il  lui  plaît,  &  que  le  Duc  de  Berry  n'aura  qu'à  s'en  emparer  ,  s'il 
peut.  Mais,  fi,  laflee  de  pofTeder  un  Royaume  Ci  opulent,  toute  la  Maifon 
de  Bourbon  y  renonce ,  &  en  fait  une  Abdication ,  en  ce  cas  l'Archiduc, 
ou  le  Duc  de  Savoye  &  fon  Fils  ,  n'auront  qu'à  jouer  entre  eux  à  pair 
ou  non  à  qui  l'aura.  Sans  doute  que  le  feu  Roi  d'heureufe  mémoire 
a  crû  qu'un  Teftament  ,  ou  Difpofition  de  dernière  Volonté  ,  étoit  un 
Charme  merveilleux,  &  qu'il  renfermoit  en  foi  une  Vertu  fecrette  ,  à  la- 
quelle tous  les  Princes  du  Monde  dévoient  fe  conformer  bon  gré  malgré 
qu'ils  en  euiïent.  Car,  on  ne  voit  pas  dans  ce  Teitament ,  qu'il  ait  pris  aucunes 
Mefures,  ni  qu'il  ait  mis  aucun  ordre,  pour  le  faire  exécuter  félon  fon  In- 
tention, &  pour  frultrer  ceux  qui  ne  s'y  voudroient  pas  conformer  ;  & 
partant  c'eft  une  Porte  ouverte  à  tous  les  Princes  ;  &  c'elt  ici  que  peut  a- 
voir  lieu  le  Proverbe,  Attrape  qui  peut.  Il  ne  faut  pas  douter  que  ce  ne 
foit  ainfi,  qu'il  faille. entendre  cette  Divifion  de  la  Monarchie,  fi  la  Fran- 
ce ne  veut  pas  fe  foûmettre  à  ce  qu'elle  a  déjà  fait. 

TESTAMENT. 

Et  cefi  ma  Volonté ,  que  ceci  foit  exécuté  par  tous -mes  Sujets ,  de  la  manière 
que  je  f ordonne  \  car ,  il  efi  expédient  pour  leur  Bien  ,  quils  ne  (ou firent  pas  que 
la  Monarchie  foit  partagée ,  ou  diminuée ,  comme  on  ïa  déjà  projette ',  mais  quel- 
le demeure  dans  le  même  état  que  mes  Ancêtres  font  fondée.  Et  comme  je  defi- 
re  la  Paix  rj?  f  Union ,  que  je  fouhaitte  (quant  à  te  qui  regarde  l'Europe)  qui 
règne  enti e  f  Empereur  &  le  Roi  Très- Chrétien,  aujfi  je  Jouhaite ,  &  je  confeil- 
le ,  que  cette  Union  Joit  plus  fermement  cimentée  par  te  Lien  d'un  Mariage  entre  le 
Duc  d'Anjou  y  /  '  ArchiducheJJê ,  afin  que  f  Europe  jouijjê  du  Repos  qui  lui  efi  fi 
néceffaire. 

Quiconque  fera  aflez  fimple  pour  croire  que  cette  Concîufion  eft  un  vé- 
ritable Compliment  fait  à  l'Empereur,  lequel  ne  fignifie  pourtant  rien,  fait 

bien 


RESOLUTIONS   D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  191 

bien  voir  par-là  qu'il  n'a  jamais  été  en  France, où  tout  regorge  de  Compli-  Affaires 
mens,  par  le  moyen  defquels  on  en  impofe  à  toute  la  Terre:  &  celui  qui  G,F!J-  DE 
s'imaginera  cffce  la  Cour  de  Madrid  n'a  pas  confemi  ,  ou  même  ébauché    L  pUBO" 

ce  Teftament  par  les  Artifices  de  l'Ennemi  commun  de  l'Europe  ,  ne  fçait  ■ — 

pas  encore  le  pouvoir  que  les  Loïus  d'Or  ont  en  Efpagne. 

Voilà  jufqu'où  s'étendit  la  dernière  volonté  du  feu  Roi  ,  au  moins, 
comme  nous  l'apprimes  par  le  premier  ordinaire,  qui  arriva  après  fa  Mort, 
&  e'efl  aufli  tout  ce  qui  a  relation  à  la  Dijpofition  de  cette  Monarchie. 
Mais  la  dernière  Polie  nous  ayant  apporté  ce  qui  reftoit,  &  que  la  Mer 
qui  nous  fépare  nous  avoit  empêché  de  fçavoir  plutôt,  je  l'ai  ajouté  à  ce 
qui  a  été  fçû  d'abord ,  afin  qu'il  ne  nous  manquât  rien  de  ce  Teftament 
Royal.  Quoi  qu'il  y  ait  des  perfonnes  éclairées ,  qui  croyent ,  que  fi  le 
Roi  n'eût  rien  fait  du  tout,  il  auroit  laifle  un  plus  beau  caractère  de  fa 
prudence,  &  une  plus  haute  eftime  de  ion  intégrité,  qu'il  n'en  a  faitparoi- 
tre  dans  fon  Mémoire. 

TESTAMENT. 

Sa  Majejîé  a  ordonné ,  que,  pendant  ï  ht  er  régne,  la  Reine  d'E/pagne  fut  Ré- 
gente de  ce  Royaume ,  &  qu  Elle  eût  une  Voix  décifive  ,  que  les  Préfidens  de 
Caftille  ç$  d  Arragon ,  C  Archevêque  de  Tolède ,  Porto-Carero ,  V Inquïjïteur  Gé- 
néral ,  avec  les  Comtes  d'Aguillar  &  de  Frillana  fufjent  Confeillers  d'Etat, 
£5?  le  Comte  de  Bonavente  pour  les  Grands  ;  &  que  s'il  arrtvoit  que  quelqu'un 
des  Préfidens  vint  à  mourir ,  le  plus  ancien  Confeiller  remplît  fa  place  ju/qu'à 
ce  qu'on  en  eut  élu  un  autre.  §)ue  la  Scedule  touchant  l '  Inftitution  ou  ï Elec- 
tion des  Confeillers  &  dis  Grands  d'Efpagne,  fgnée  du  Roi  fé parement ,  fût 
'valable  ;  6)ue  le  Confeil  s'affemblât  dans  l  Appartement  du  Palais  ,  que  la 
Reine  ordonnera ,  auquel  le  Secrétaire  des  Ordres  Généraux  affifiera  ,  £5?  que 
toutes  les  Dépêches  fuffent  fignées  de  la  propre  main  de  la  Reine  ,  £s?  au 
même  Endroit  ou  le  Roi  avoit  coutume  de  les  figner  de  fon  vivant. 

Tout  ceci  eft  d'aufli  peu  de  conféquence  ,  que  ce  qui  a  été  dit  plus 
haut.  Car,  le  Teftament  ordonne  une  Exécution  fi  prompte  &  il  im- 
médiate ,  qu'il  annulle  toute  la  prétendue  Régence  de  la  Reine  ,  & 
n'eft,  feulement  qu'un  bel  Extérieur  de  Refpecl  fans  aucune  Réalité.  Car, 
puis  que  le  Pouvoir  eft  déjà  entre  les  mains  du  Roi  par  le  Teftament, 
il  ne  faut  pas  douter  que  s'il  l'accepte, il  n'interdife  toute  Autorité,  & 
qu'il  ne  prenne  lui-même  en  main  l'Adminiftration  du  Gouvernement. 
Que  fi  nous  devons  croire  ce  qu'on  nous  mande  de  Paris ,  il  s'en  eft; 
déjà  mis  en  PofTeffion,  en  créant  Grand  d'Efpagne  l'Ambafladeur  d'Ef- 
pagne  qui  eft  à  la  Cour  de  France  ,  &  en  le  faifant  Grand  Maître  de 
fa  Maifon  ,  &  en  déclarant  que  tous  les  Officiers  feront  maintenus 
dans  leurs  Charges.  Tellement  que  fa  Cour  d'Efpagne  eft  maintenant 
obligée  d'agir  félon  la  Volonté  du  Roi  vivant,  ou  de  fon*  Grand-Pere, 
&  non  félon  celle  du  défunt. 

TES. 


39i     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

V™""  TESTAMENT. 

l'Euro- 
pe- //  donne  à  la  Reine  un  Douaire  de  quatre  cens  mille  Ducats  £  Efpagne  ,  &? 
tous  fes  Joyaux ,  à  la  réferve  de  ceux  qui  appartiennent  à  la  Couronne ,  &  lui 
ajjïgne  un  de  fes  Royaumes,  foit  en  Italie,  ou  en  Efpagne ,  à  fon  choix,  pour  y 
faire  fa  Réfidence  ,  dans  lequel  Royaume  elle  gouvernera  de  concert  avec  les  Mi- 
nijlres ,  que  fon  Succeffeur  lui  preferira ,  &  il  joint  de  la  même  manière  les  Pats- 
Bas  à  l'Italie. 

Voilà  certes  un  beau  Legs  pour  une  Douairière  d'Efpagne,  &  bien  ca- 
pable de  lui  faire  trouver  un  autre  Mari;  mais , chetive  Récompenfe  pour 
une  Princefle ,  qui  a  pafle  tant  de  temps  à  faire  le  Métier  de  Nourrice  de 
fon  premier. 

TESTAMENT. 

Il  lègue  tous  les  Meubles  de  fes  Maifons  Royales  ,  &  de  fes  Palais ,  à  fon 
Succeffeur,  lequel  il  charge  du  Payement  de  toutes  fes  Dettes  perfonnelles.  Il  or- 
donne que  ïon  dife  cent  mille  MeJJes  pour  le  Repos  de  fon  Ame.  Il  déclare  Sain- 
te Thérèse  Patrone  d' 'Efpagne.  Il  ordonne  que  le  Monafiere  des  Pilles  d'A- 
villa  foit  fous  le  Patronage  de  la  Couronne.  Il  fait  un  Legs  à  tous  les  autres 
Couvens  Royaux ,  dont  la  Reine  doit  être  la  Difpenfatrice  \  £s?  il  ordonne  que  S& 
Majeflé,  conjointement  avec  les  Préfidens  de  Cafiille,  d'Arragon ,  &  des  Indes, 
le  Grand- Maître  de  fa  Mai  fon ,  Vlnquifiteur  Général,  fon  Confeffeur  ,  &  le 
Prieur  de  fEfcurial ,  foient  les  Exécuteurs  de  fon  fejlament. 

C'eft  un  Acte  d'Equité  de  payer  fes  Dettes,  c'en  eft  même  un  méritoi- 
re, félon  luij  mais,  pour  dire  la  vérité ,  il  faut  qu'il  n'en  ait  pas  beau- 
coup de  cette  nature  dans  fes  parties ,  puis  qu'il  n'a  pas  befoin  de  moins 
de  cent  mille  Mefles,  pour  faire  fon  compte  jufte  dans  l'autre  Monde: 
encore  fcavoir  fi  on  voudra  les  y  recevoir  en  payement  ?  Car,  c'eft  une 
chofe  aflez  incertaine ,  &  même  on  ne  fçait  pas  jufques  où  la  Dévotion  des 
Religieufes  pourra  contribuer  à  fon  repos  :  c'eft  pourquoi  il  faudra  s'en 
rapporter  à  la  Valeur  de  la  Donation ,  ou  au  Caractère  que  la  Reine  don- 
nera de  fes  Mérites  extraordinaires ,  pour  celles  de  fon  Sexe  ,  &  qui  font 
les  fruits  de  fa  propre  expérience.  Mais ,  que  peut  on  ajoutera  la  Pieté  de 
ce  bon  Prince,  &  au  Soin  tout  particulier,  qu'il  a  eu,  en  mourant,  du  Re- 
pos &  de  la  Profperité  de  l'Efpagne  ?  Perfuadé  que  le  Bourdon  de  S.  Ja- 
ques n'étoit  plus  capable  de  protéger  ce  Royaume,  il  lui  a  donné  &  légué 
par  Teftament  S.  Therefe  pour  Patrone,  attendu  qu'étant  née  en  Efpa- 
gne, elle  ne  manqueroit  pas  d'avoir  plus  de  Soin  de  fa  Patrie,  qu'un 
Etranger. 


T  E  S- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  I  39i 

TESTAMENT.  lîîf.""' 


Sa  Majefié  confirme  tous  les  Vicerois ,  Gouverneurs,  Minifires,  &?  Officiers 
de  fa  Mai  fon,  dans  leurs  Charges ,  fc?  </<?//>*  $-#<?  [on  SucceJJ'eur  les  y  continue , 
f»  reconnoiffance  des  bons  &?  agréables  Services  qu'ils  lui  ont  rendus. 

Le  Nouveau  Roi  ne  manquera  pas  fans  doute  de  s'acquiter  de  cette 
Commiflïon,  quant  au  Titre,  pourvu  qu'il  ne  fe  trouve  pas  de  François 
qui  en  veuille  ;  car,  autrement,  ils  fe  trouveront  bien  éloignés  de  leur 
compte rencore  feront-ils  bien  heureux,  s'ils  peuvent  s'en  tirer  fans  y  laif- 
fer  de  leurs  plumes,  pour  parer  un  Succefleur  qui  n'en  a  gueres  plus  qu'il 
ne  lui  en  faut. 

TESTAMENT. 

//  fait  mention  de  la  Dévotion  ,  quil  avoit  toujours  eue'  à  la  Conception 
Immaculée  de  la  Vierge  Marie.  Il  dit  qu'il  avoit  Couvent  defiré  de  parler  au 
Pape  fur  ce  Jujet ,  afin  quil  la  déclarât  un  Article  de  Foi ,  £5?  H  fouhaite  que  fon 
Succefjeur  pouffe  cette  Affaire  à  bout.  Il  defire  que  les  ouvrages  de  la  Mai  fon 
Royale foient  payés,  après  qu 'ils  feront  achevés  par  Jofeph  del  Olmo  ArchitecJe 
du  Roi ,  &  par  le  Secrétaire  Dom  Philippe  s  Eterres.  Il  ordonne ,  pour  ï  extrême 
Vénération  quil  a  toujours  eue  pour  le  S.  Sacrement ,  que  fon  continué  les  Prières 
de  quarante  heures  dans  la  Chapelle  fcoyale  ,  avec  les  Cérémonies  accoutumées ,  & 
que  les  Officiers  fcf  les  Prêtres  de  cette  Chapelle  jouïffent  de  leurs  Revenus.  Il 
r  en, et  aux  Grands  tous  les  Subfides  qu'ils  lui  doivent.  Il  enjoint  à  tous  les  Ducs , 
Ma>  quir ,  Comtes ,  Gouverneurs ,  Ecuyers ,  &  Gentilshommes ,  d'accomplir  la  'Te- 
neur de  fon  Te  filament ,  £5?  d'obéir  au  Roi  fon  Succefjeur.  Et  il  conclud  par  une 
ferieufe  Exhortation  à  tous  fies  Sujets ,  de  défendre  la  Religion  Catholique  -,  ajou- 
tant que  fi  quelqu'un  de  Jes  Succeffeurs  venoit  à  avoir  des  Opinions  erronées  ,  ou  à 
■être  infeclé  d'Herefie  ,  il  jeroit  des  le  moment  déchu  de  fa  Succeffion. 

Tout  ce  Paragraphe  ne  contient  pas  grand'  chofe  :  ce  ne  font  que  de 
fimples  &  de  vagues  prières,  &  de  peu  de  confequence,  qu'il  fait  à  fon 
Succeffeur.  Il  eft  vrai,  que  fi  le  premier  membre  venoit  à  être  reçu,  comme 
il  l'a  defiré,  les  Cordeliers  auraient  beau  jeu  ,   &  qu'il  faudrait  que  les 
Dominicains  rabaiflafTent  d'un  ton;  mais,  au  refte,  cela  ne  faifantrienau  fu- 
jet,  je  n'y  infifterai  pas:  me  contentant  feulement  de  faire  quelques  Ré- 
flexions fur  l'Exhortation  ,  qu'il  fait  à  fes  Sujets ,   de  défendre  la  Reli- 
gion Catholique,  de  laquelle  j'expliquerai  le  fens  en  peu  de  mots^  &  con- 
clurai par  une  brève  confequence  que  je  tirerai  de  fes  intentions  ,  afin  de 
nous  mettre  devant  les  yeux  le  befoin  que  nous  avons  d'être  inceffamment 
fur  nos  gardes  ,    de  peur  que  nous  ne  tombions  dans  le  piège  que  l'on 
nous  a  tendu.  Car  il  eft  certain  ,  que,  fous  la  vénérable  Epkhete  de  Reli- 
gion Catholique,  on  entend  la  Superitition  &  l'Idolâtrie  de  J'Eghfe  Romai- 

Tome  XL  Ddd  ne: 


l'Euro- 
pe. 


PS. 


$P4    MEMOIRES,  NËGO'TIÀ-TIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affmrfs    ne  ;  &  que,  par  le  mot  de  Défenfe ,  il  faut  entendre  l'Extirpation  totale  de 
«en.  ce    ja  Re]igion  prote  liante ,  fous  ie  Nom  de  F  Hère  fie  du  Nord.     Il  y  a  long- 
tems  que  ce  deffein  a  été  écrit  en   Lettres  de  Sang  ,    par-tout   où  ils   ont 
été  les  Maîtres  ,  & ,  s'il  ne  tenoit  qu'à  eux,  nous  nous  détruirions  nous-mê- 
mes de  nos  propres  armes,  ce  qu'à  Dieu  ne  plaife. 

Après  avoir  montré  de  la  forte  le  Danger  qui  menace  toute  la  Chrêtierr- 
té ,  ii  le  contenu  du  Tellament  elt  exécuté  ,  &  que  TEfpagne  tombe  en- 
tre les  mains  de  la  France;  il  me  refte  à  faire  voir,  que  c'elt  l'Intérêt  de 
toute  l'Europe  ,  de  s'en  tenir  inviolablement.au  Partage  de  la  Monarchie 
d'Efpagne,  qui  elt  l'unique  moyen  d'empêcher  que  La  France  ne  devienne 
trop  puiiTante  à  proportion  de  fes  voifins,  &  pour  mettre  &  rendre  la  Ba- 
lance des  Forces  de  l'Europe  dans  (on  julte  équilibre  :  fans  quoi  il  eit  im- 
pollible  que  cette  Paix  &  cette  Profperité,  qui  nous  a  coûté  tant  de  Sang 
&  tant  d'Argent  à  procurer,  puiffe  durer  long-tems.  Or,  parce  que  les  Ar- 
ticles touchant  le  Partage  de  la  Monarchie  d'Efpagne  font  mal  interprétés 
par  quelques-uns  de  ceux  qui  ne  les  ont  pas  veus,  &  deguifés  par  d'au- 
tres qui  n'en  entendent  pas,  ou  qui  n'en  veulent  pas  concevoir  le  but 
&   le  deffein  ,   il   ne  fera   pas    hors   de   propos  ,   d'en   dire   d'abord  un 
mot,  &  de  tirer  les  confequences  neceffaires  de  leur  importance  ,  afin 
d  impofer  filence  à  ceux  qui  fe  récrient   fi   fort   à   l'encontre  ,   de   con- 
vaincre ceux  que  le  doute   &    le  fcrupule   ronge  ,   &   de  confirmer   les 
bien-intentionnés  dans  l'alfeurance  que  fa  Majeité  Britannique,  &  Mef- 
fieurs  les  Etats  Généraux  des  Provinces- Unies,  n'ont  jamais  eu  en  ce- 
la d'autre  vue  que  la  Paix  &  la  Tranquillité  de  l'Europe.     Que  fi  le  Roi 
de  France  trouve  à  propos  de  changer  d'avis,  il  faut  qu'il  s'attende  à  ef- 
fuyer  tout  ce  qui  doit  s'en  enfuivre  neceffairement.     La  Préface  des  Arti- 
cles dit,  que  l'état  de  la  fanté  du  Roi  d'Efpagne  ayant  été  depuis  quelque 
tems  fi  languiifant,  qu'il  y  avait  fort  à  craindre  pour  fa  vie,  &  que  décé- 
dant fans  Enfans,  l'Affaire  de  la  Succeffion  ne  manqueroit  pas  de  caufer 
une  nouvelle  Guerre,  fi  le  Roi  très-Chretien  vouloit  maintenir  le  Droit  de 
fes  Prétentions ,  &  celui  de  Monfeigneur  le  Dauphin,  ou  de  fes  Defcen- 
dans ,  à  la  Succeffion  toute  entière  de  l'Efpagne  :  ou  ii  l'Empereur  vouloit 
faire  valoir  les  fiennes  ,  celles  du  Roi  des  Romains,  celles  de  l'Archiduc 
fon  Fils  puilhé ,  ou  de  fes  autres  Enfans  mâles  &  femelles,  à  ladite  SucceC» 
fion.  Que  pour  prévenir  ces  Difputes,  &  ces  Differens,  &  empêcher  une 
nouvelle  Guerre  en  Europe,  au  fujet  de  ladite  Succefiion,  ou  à  caufe  de 
l'ombrage  que  pouroient  caufer  trois  Etats  réunis  fous  un  même  Prince , 
ILS,  c'ett-à-dire  ,.  le  Roi  de  France,  le  Roi  d'Angleterre  „   &  les  Etats 
Généraux  des  Provincts-Unies,  avoient  trouvé  bon  de  prendre  des  Me- 
fures  neceffaires  ,   pour  prévenir  le-  Mal  ,    que  le   trilte  Evénement   de 
la    Mort    du    Roi    d'Efpagne  ,    venant  à  décéder   fans   Enfans  ,    pou- 
roit  produire. 


Les 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I. 


W 


Affaires 

LES    ARTICLES    DU    PARTAGE. 


A  ces  Caufes ,  //  a  été  arrêté ,  que  fi  un  tel  Cas  arrivait  ,  le  Roi  Tres- 
Chrêtien,  tant  en  [on  Nom  quen  celui  de  Monfeigneur  le  Dauphin,  fes  Hoirs 
G?  Succeffcurs  ,  fe  tiendra  Jatisfaït  ,  fj?  fe  tient  fatisfait  par  ces  pré  fentes . 
que  Monfeigneur  le  Dauphin  ait  pour  fa  Part  &  Portion  ,  en  entière  (? 
pleine  Propriété  &  Pojffejjion  ,  &  en  la  place  de  toutes  fes  Prétenfions  à  là. 
Succefjion  d'Efpagne  ,  le  Royaume  de  Naples  &  de  Sicile  ,  les  Places  dépen- 
dantes de  la  Monarchie  d'Efpagne  ,  fituées  fur  les  Côtes  de  Tofcane  ,  fètts  le 
Nom  de  Santo  Stephano ,  Porto  Hercole,  Orbitelfo,  Palamone  ,  Porto- 
longo  ,  Piombino  ,  la  Fille  &  Marquifat  de  Final ,  la  Province  de  Gui- 
pufcoa  ,  la  Fille  de  Fontarabie  ,  &  S.  Scbafien ,  le  Port  de  Pajfage  ,  la 
moitié  des  Places  qui  font  en  deçà  des  Pyrénées-,  quil  ait,  mitre  cela ,  le  Do- 
maine du  Duc  de  Lorraine,  ce/i -à-dire,  les  Duchez  de  Lorraine  &  de  Bar, 
de  la  même  manière  que  Charles  quatrième  du  nom  les  a  pofedcz:  cf,  en 
confidération  de  cette  Portion,  il  renoncera  à  tous  les  Titres  fj?  Prétenfions  <, 
quil  peut  avoir  fur  le  refie  du  Domaine  d 'Efpagne  \  & ,  en  échange  du  der- 
nier Article  ,  le  Duc  de  Lorraine  aura  le  Duché  de  Milan.  La  Couronne  a"  Ef- 
pagne ,  £?  les  autres  Royaumes,  Iles,  Etats,  Terres  ,  &  Places  ,  qui  font  au- 
jourd'hui en  la  Jouïfjance  du  Roi  Catholique ,  tant  en  Europe ,  qu  ailleurs  ,  fe- 
ront donnés  au  SérémJJîme  z/rchiduc  Charles  ,  Fils  puif?ré  de  F  Empereur ,  à  la 
referve  de  ce  qui  avoit  déjà  été  donné  au  Dauphin.  Et  f  Empereur ,  le  Roi  des 
Ro?nams ,  (s  F  Archiduc  Charles ,  renonceront  à  toutes  leurs  Prétenfions  fur  la 
Part  qui  eft  affignée  dans  le  Partage  du  Dauphin.  Ces  Articles  étoient  (ignés 
&  fcellés  par  tous  les  Plénipotentiaires. 

Maintenant,  quoi  qu'à  l'égard  du  Point  touchant  le  Droit  héréditaire, 
plufieurs  croyent  avoir  raifon  de  fe  récrier  contre  cette  Divifion  de  là 
Monarchie  Efpagnole,  cela  n'empêche  pas  que  le  Bien  public,  &  la  Paix 
univerfelle  de  l'Europe,  ne  doive  être  préférée  à  la  Délicateffe  d'un  Point 
de  Juftice,  dans  des  Matières  d'Etat  conteltées.  Et,  pour  n'en  rien  dira 
davantage,  fi  nous  examinons  cette  Affaire  dans  toutes  les  formes, il  n'y  a 
ni  Prince,  ni  Nation,  qui  ait  raifon  de  fe  plaindre  de  ce  Partage.  Car 
puifque  la  Sûreté  des  Conféderez  ne  leur  permet  pas  en  bonne  Politique 
d'approuver  que  la  France  foit  la  Maitrefle  de  toute  l'Efpagne  ,  &.  que 
d'ailleurs  le  Roi  de  France  a  réfolu  de  n'en  rien  céder  à  l'Empereur  ;  il 
n'y  arien  au  monde  qui  puiffe  empêcher  une  Guerre,  dans  laquelle  il  faut 
que  les  Conféderez  prennent  parti  d'un  côtéou  d'autre,  ou,  ce  qui  vaut 
autant,  qu'ils  foient  forcez  de  lever  des  Troupes  pour  obferver  les  M  oui- 
vemens  des  Contendans,  &  pour  garder  leurs  Territoires  :  je  dis  ,  qu'A 
n'y  a,  humainement  parlant,  que  ce  Partage  qui  puifTe  empêcher  une 
Guerre  fangiante. 

D'ailleurs,  quiconque  fera  réflexion  fur  le  grand  Surcroît  de  Gloire,  de 
Puiflance  ,  &  de  RichefTes  ,  qui  revient  à  l'Empire  &  à  la  France,  de 

Ddd  z  cette 


l'Euro- 
pe. 


PE. 


gptf   MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  cette  Addition  qui  fe  fait  par  ce  moyen  à  leurs  Etats,  doit  penfer,  que  la 
gen.  de  faifie  d'une  chofe  plus  grande  qu'ils  ne  peuvent  tenir  de  leurs  mains  ne 
i/Euro-  ferojt  qUe  jes  affoiblir  à  la  fin,  puis  qu'il  eft  impoilible  ,  qu'ils  jouiffcnt  de 
tout  paifiblement  &  fans  troubles,  ou  fans  dépenfes,  &  qu'après  avoir 
ainfi  confideré  &  balancé  les  Forces  de  l'Europe,  ils  ne  pourroient,  ou 
tout  au  moins,  ils  ne  devroient  rien  délirer  davantage  ,  fur- tout  ,  s'ils 
fbngeoient  que  le  fort  de  la  Guerre  ell  fort  incertain,  que  deux  Conten- 
dans  ne  peuvent  être  Conquérans ,  &  s'ils  faifoient  reflexion  fur  ce  qui  ar- 
rive la  plupart  du  tems  ,  que  tandis  que  deux  difpuient  d'une  proye,  & 
qu'ils  s'affoibliiïent  l'un  l'autre,  il  en  vient  un  troifiéme  qui'  s'en  faifit  & 
la  leur  enlève,  ne  leur  laiflant  qu'une  chère  &  tardive  repentance  de  leur 
folie,  pour  n'avoir  pas  connu  ce  qui  étoit  de  leur  bien.  C'eft  ainfi  que 
l'Empire  Roaiain  fut  fubjugué  par  ls  Gots  ,  que  l'on  appelloit  Barbares  5 
que  la  Palefline,  la  Syrie,  l'Egypte,  &  la  Grèce;  ont  été  conquires  par 
les  Turcs  ;  que  la  Bretagne  a  été  envahie  par  les  Saxons  ;  la  Gaule  par 
les  Gots,  les  Bourgignons,  &  les  Francs  ;  l'Italie  par  les  Huns;  &  l'Ef- 
pagne  par  les  Maures. 

Quant  à  la  Succeflion  en  droite  Ligne,  de  laquelle  nos  Fr.  .  .  .  fiés 
font  tant  de  bruit,  comme  étant  une  cholè  facrée  &  inviolable  ;  ils  me 
permettront  de  leur  dire,  qu'il  n'y  a  point  de  Siècle  qui  nous  fourniiïe 
d'Exemple  de  ce  qu'ils  foutiennent,  lors  qu'il  s'eft  agi  de  l'Intérêt  public 
des  Nations,  de  la  Confervation  de  la  Paix,  &  de  l'EtablifTement  d'un. 
Pouvoir  égal  entre  des  Princes,  qui  étoient  en  Difpute  pour  ce  fujet;  &  il 
n'y  a  point  de  raifon  pour  foutenir  le  contraire.  Car ,  comme  le  Tout  vaut 
mieux  que  la  Partie  ,  ainfi  l'Intérêt  tout  entier  de  la  Chrétienté  doit  être 
préféré  à  celui  d'une  feule  Famille,  qui  n'a  déjà  caufé  que  trop  de  Maux 
à  toute  l'Europe.  Ceux  qui  croyent,  que  je  n'ai  point  d'Exemple  pour 
confirmer  cette  ConnoilTance  inconteftable  de  Politique,  n'ont  jamais  iû 
l'Hiftoire.  C'efl  pourquoi  je  leur  confeille  de  confiderer  ferieufement  en 
quelle  déplorable  &  quelle  malheureufe  condition  auroit  été  l'Angleterre, 
&  toute  l'Europe,  Ci  un  Papifie  bigot,  entièrement  dévoué  aux  Intérêts 
de  la  France,  eut  pofTedé  le  Sceptre  d'Angleterre:  &,  en  ce  cas,  je  ne 
doute  pas,  quils  ne  bénilTent  la  Révolution  arrivée  dans  ce  Royaume,  & 
qu'ils  ne  rendent  grâces  à  Dieu  d'avoir  mis  le  Roi  GUILLAUME 
fur  un  Trône,  qui  eft  capable  de  faire  pancher  la  Balance  à  l'Avantage 
des  Proteftans  de  l'Europe  -,  ce  qui  fans  doute  a  été  un  des  grands  Motifs, 
qui  a  porté  Sa  Majelté  à  fe  mêler  du  Traité  fufdit. 

Ce  font-là  des  Raifons  qui  me  font  croire  que  les  Prétendans  à  la  Cou- 
ronne d'Efpagne  doivent  être  contens  de  leurs  Portions,  fans  fe  meure  en 
peine  du  Tout.  Maintenant,  un  mot  ou  deux,  touchant  le  Sujet  qu'ils 
ont,  à  mon  avis,  de  s'en  contenter:  mais,  quoique  je  le  puhTe  ranger 
fous  plufieurs  Chefs,  &  quejepuifle  m'y  étendre  allez  amplement,  néan- 
moins ,  pour  couper  coure  ,  je  ferai  entrer  tout  ce  que  j'ai  à  dire  dans 
une  Conclutîon  générale  ,  qui  eft  ,  parce  que  c'eft  leur  Intérêt  d'être  con- 
tins du  Partage,  L'Empereur,  malgré  tout  ce  que  l'on  peut  dire  en  fa  fa- 
veur, 


PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.   I.  $97 

veur,  en  fe  vantant  d'être  capable  de  rompre  toutes  ces  Mefures,  &  de  Affaire 
venir  à  bout  de  toutes  les  Oppofitions  que  Ton  peut  faire  aux  Prétenfions  GfN-  "^ 
qu'il  a  fur  toute  la  Monarchie,  doit  s'en  contenter:  car , je  ne  puis  jamais  L 
avoir  une  il  mauvaife  opinion  de  la  Prudence  de  ce  Prince ,  que  de  pen- 
fer,  qu'après  qu'un  Domaine  fi  confiderable  aura  été  établi  pour  l'Archi- 
duc ion  Fils,  &  duquel  il  peut  jouir  Daifibleinent ,  s'il  lui  plaît,  il  veuille 
le  rifquer  au  hazird  d'une  guerre;  puis  qu'après  tout  bien  conlideré,  il  lui 
fera  împoifibie  de  fe  faire  une  meilleure  Condition,  que  celle  qu'on  lui  a 
déjà  faite,  &  qu'en  voulant  tout  avoir,  il  pourroit  arriver ,  qu'il  n'auroit  rien 
du  tout.  Car,  quoiqu'il  foit  pofîible  qu'il  gronde,  &  qu'il  faiTe  même  du 
bruit  fur  le  Rhin  &  en  Italie  ,  il  ne  doit  pas  fe  flatter  de  pouvoir  confer- 
ver  l'Efpag ne  &  la  Flandre,  quand  même  il  en  feroit  déjà  en  poiTcffion. 
Jimais  l'Efpagne  ne  pourroit  reiiittr  à  la  France  par  Terre,  &  aux  An- 
glois  &  aux  llollandois  par  Mer  :  &  la  Flandre  fe  verroit  en  moins  de 
rien  envahie  d'un  côté  par  les  François,  &  de  l'autre  par  les  Hollandois  ; 
&  cela  ,  fans  beaucoup  de  peine  ,  &  avant  même  que  l'Empereur  ,  en  vou- 
lant avoir  le  tout,  eut  mis  les  fers  au  feu,  &  fût  en  état  de  leur  faire  au- 
cune réfiltance  confiderable.  Non,  il  eit  impoffible  que  Sa  Majellé  Im- 
périale ne  foit  pas  fenlible  à  ces  Dangers ,  &  à  d'autres  Difficultez  insur- 
montables, aufquelles  il  faut  de  néceiïité  qu'Elle  s'expofe,  fi  Elle  entre- 
prend une  Guerre.  Et,  par  confequent,  c'efl  fans  railbn  que  l'on  fuppofe, 
qu'Elle  refufera  ie  Royaume  d'Efpagne,  avec  toutes  les  lues  de  l'Océan 
dont  on  tire  tant  d'Avantages ,  la  Flandre  fi  fertile ,  &  toutes  les  Planta- 
tions de  l'Amérique,  fans  parler  des  Mines  inépuifables  d'or  &  d'argent  qui 
y  font  ;  fur  une  limple  &  nue  poffibihté  d'en  avoir  davantage.  Et  ainiî , 
il  ne  faut  pas  douter  qu'Elle  ne  donne  les  mains  au  Partage  fait  en  fa 
faveur. 

Il  eil  vrai, que  fi  la  France  avoit  la  liberté  de  fuivre  fes  Inclinations,  il 
n'y  a  point  de  doute  qu'Elle  ne  voulut  s'emparer  immédiatement  de  toute 
la  Domination  d'Efpagne,  comme  d'un  Bien  qui  lui  appartient,  ou  que 
tout  au  moins  elle  ne  voulut  maintenir  les  Droits  du  Dauphin,  &  l'anne- 
xer à  la  France  &  à  la  Navarre;  &  qui  pourroit  la  blâmer  en  cela?  Mais  , 
comme  il  y  a  deux  grands  Obitacles  en  chemin  ,  pilonne  ne  peut  devi- 
ner ce  qu'elle  fera,  &  peut-être  qu'Elle  l'ignore  elle-mcme,  jufques  à  ce 
qu'Elle  voye  ce  qui  fera  pour  ou  contre  Elle.  Car,  quoique  nous  appre- 
nions par  quelques  Lettres  des  Pais  étrangers,  que  le  Roi  de  France  ca- 
reiTe  le  Duc  d'Anjou,  &  lui  donne  le  Titre  de  Roi  d'Efpagne,  nous  appre- 
nons par  d'autres,  qu'il  a  receu  la  Nouvelle  du  Teltarhent  du  Roi  d'Ef- 
pagne avec  autant  de  froideur  6c  autant  d'indifférence,  que  û  le  Prefent 
ne  valoit  pas  la  peine  d'être  accepté.  Tellement  que,  félon  les  premières, 
fi  cela  étoit  vrai,  il  faudrait  dire  qu'il  agit  feulement  comme  un  Mcdecin 
Politique  ,  &  qu'il  ne  fait  cela  que  pour  tater.  le  poulx  à  fes  voifins, 
avant  de  fe  déterminer  fur  ce  qu'il  doit  faire  ,  ou  ordonner.  Le  premier 
Obltacle,qui  fe  rencontre  en  fon  chemin,  pour  aller  prendre  poff-iîion  de 
la  Couronne  d'Efpagne,  c'eit  le  Traité ,  par  lequel  il  a  reconnu  être  fatis- 

Ddd  3  fait 


598  MEMOIRES,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  fait  de  !a Portion  qui  lui  avoit  été  faite,  &  par  lequel  il  renonce, fous  fon 
gen.  de   Seing,  &  fous  fon  Sceau, à  toutes  fes  Prétentions  fur  lereftei  lefquels  font 
î-'huao-    ^es  Ljens  trop  forts  &  trop  folemnels  pour  cire  rompus  par  le  Roi  très- 
PE'       Chrétien ,  qui  fe  vante  û  fort  de  fon  Honneur  &  de  fon  Intégrité. 

Le  fécond  Obflacle,  font  deux  puiiTans  Voifins,  àfçavoir  le  Roi  d'An- 
gleterre, &•  les  Etats  de  Hollande,  lefquels  il  fçait,  qui  ne  confentiront 
jamais  à  le  voir  devenir  fi  formidable,  qu'il  le  deviendrait  par  ce  furcroit 
de  puifTance  :  &  partant,  comme  on  le  peut  fuppofer,  il  n'aime  pas  à 
avoir  la  Guerre  avec  eux,  fâchant  qu'ils  lui  en  ont  donné  tout  fon  faoul 
la  dernière  fois.  Si  ayant  par  le  Partage  de  la  Monarchie  d'Efpagne  de  11 
grandes  Acquittions  en  Italie  ,  qu'il  efl  le  Maître  de  la  Méditerranée ,  il 
exclud  la  Maifon  d'Autriche;  par  terre,  il  a  les  Clefs  de  l'Eglife  Romaine 
pendues  à  fa  ceinture, &  range  les  petits  Princes  d'Italie  à  fes  pieds;  il  eft 
à  croire  qu'il  s'en  tiendra  étroitement  à  fon  Alliance,  &  qu'il  aimera  mieux 
accepter  fans  bruit  le  Partage  de  la  Monarchie  d'Efpagne ,  comme  étant 
fon  Intérêt  inconteftablement,  que  de  perdre  fes  nouveaux  Amis,  &  de 
s'en  faire  des  véritables  Ennemis.  En  un  mot ,  c'efl  l'Intérêt  de  toute 
l'Europe  d'empêcher  que  l'un  ou  l'autre  de  ces  deux  Rivaux  ne  par- 
vienne à  la  Monarchie  toute  entière  d'Efpagne.  Car,fi  c'étoit  l'Empereur 
qui  en  devint  le  Maitre,  il  feroit  alors  trop  puiffant  pour  les  Princes  d'Al- 
lemagne, &  pourroit  les  opprimer  les  uns  après  les  autres,  comme  a  fait 
un  de  fes  Prédéceffeurs  à  l'égard  de  l'Electeur  Palatin  du  Rhin  j  ou  tous 
enfemble,  û  la  fantailie  lui  prenoit  de  rendre  la  Couronne  Impériale  héré- 
ditaire à  fa  Famille. 

D'ailleurs,  s'il  arrivoit  que  ce  fût  le  Roi  de  France,  il  efl  évident  que 
ce  ne  pourroit  être,  qu'au  Préjudice  de  l'Angleterre  &  de  la  Hollande, 
dont  les  Habitans  ne  fubiiltent  que  par  le  moyen  du  Commerce,  lefquels 
il  tacheroit  afîeurement  de  fupplanter ,  foit  en  augmentant  le  nombre  de 
fes  Vaiffeaux ,  à  quoi  il  pourroit  employer  une  partie  des  groffes  Sommes 
d'Argent  qui  viennent  tous  les  ans  du  Mexique  &  du  Pérou,  foit  en  leur 
prenant  les  leurs  dans  des  Guerres  &  par  des  Avanies  qu'il  ne  manqueroit 
pas  de  leur  faire  inceffamment ,  pour  ruiner  par  ce  moyen  le  Négoce  de 
nos  Marchands,  qui  font  habiliter  tant  de  milliers  d'Anifans,  en  les  obli- 
geant à  avoir  toujours  de  nombreufes  Flottes  pour  pouvoir  trafiquer  en 
feureté  ,  ou  à  demeurer  les  bras  croifés;  car  le  premier  les  obligeroit  à  vi- 
vre fur  le  commun,  &  le  fécond  enrichiroit  nos  ennemis  à  nos  propres 
dépens.  Quel  Tort  cela  ne  feroit-il  pas  à  nos  Manufactures ,  &  au  Trafic 
que  nous  faifons  avec  tant  d'avantage  en  Efpagne ,  en  deçà  ou  au  delà  du 
Détroit,  fi  tous  les  Ports  de  ce  Royaume  venoient  à  être  libres  &  ouverts 
à  la  France,  par  le  moyen  du  nouveau  Roi,  qui  mettrait  de  fi  gros  Im- 
pôts fur  toutes  les  Marchandifes  de  fes  Voifins,  que  la  France  feule  fe 
verrait  en  état  de  pouvoir  negotier  &  faire  le  Commerce  des  Marchandifes 
tirées  de  fon  crû,  &  de  fes  Manufactures ,  à  meilleur  marché  qu'eux  ? 

Ii  n'y  a  point  de  Mal ,  point  de  Tort ,  que  la  Malice  de  l'Homme  puiffe  in- 
venter ou  fuggerer  pour  ruiner  le  Commerce  de  l'Angleterre  ,  &  de  la 

IIol- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  I.  $$>> 

Iîol'ande,  &  pour  appauvrir  leurs  Marchands,  aufqueîs  on  ne  doive  s'at-  Affaire 
tendre,  lî  cette  fatale  Conjonction  de  ces  deux  Etats  arrive.  Que  de-  GV;N-  nE 
viendra  nôtre  Commerce  du  Levant,  à  Smyrne,  à  Scanderoon,  àAlep,    L   URO' 

dans  tous  les  Forts  de  la  Morée,  à  Zante,  à  Venife,  à  Gennes,  à  Li* 1' — 

gourne,&c. ;  lorfque  nous  trouverons  Toulon  ,  Alicant,  Gibraltar,  &  Ca- 
dix, aufii  remplis  de  Corfaires,  fur  les  Côtes  de  la  Chrétienté,  que  Tu- 
nis, Tripoli,  &  Alger,  le  font  fur  les  Côtes  de  Barbarie  ?  Et  que  l'on 
ne  s'imagine  pas  que  ces  Appréhenfions  ne  foient  que  des  malicieufes  Sug- 
gérions :  c'elt  une  véritable  Matière  de  Fait.  Car ,  fi  la  dernière  Paix  a- 
voit  déjà  engendré  une  fi  grande  quantité  de  Pyrates  &  de  Voleurs  de  cet- 
te Nation,  qu'à  une  feule  Séance ,  &  dans  une  feule  Place,  c'elt  au  Old- 
Bayiy ,  on  en  condamna  quarante  à  être  pendus  ;  il  elt  probable  que  kur 
jN  ombre  ne  manquera  pas  de  croitre  &  d'augmenter,  à  proportion  de  leurs 
Vaille  aux. 

Quel  terrible  Coup  ne  fera-ce  pas  pour  nous,  que  cette  Union  des  deux 
Royaumes  (  en  un  feul  chef)  par  rapport  a  nos  Colonies  des  Indes  Oc- 
cidentales ,  s'ils  ont  déjà  la  hardieffe  de  nous  y  infulter,  en  s'efforçint 
d'attirer  à  eux  le  Trafic  que  nous  y  avons,  &  en  rempliiTant  tellement  les 
Mer3  de  Boucaniers,  qu'à  moins  qu'un  Vaifieau  ne  foit  des  premiers  rangs, 
il  a  bien  de  la  peine  à  échapper  de  leurs  mains  ?  Que  deviendra  nôtre 
Commerce  du  Nord,  quand  OItende  &  Nieuport  feront,  comme  Dun- 
kerque  &  Saint  Malo ,  pleins  de  ces  Ecumeurs  de  Mer  ? 

Ce  n'eft-là  qu'un  petit  Echantillon  des  Malheurs  dont  je  prévois  que 
nous  fommes  menacés ,  fi  l'Efpagne  vient  à  être  jointe  à  la  France.  Mais , 
ce  qui  nous  doit  confoler,  c'eil  que  nous  avons  un  bon  Roi,  qui  connoit 
nos  Dangers,  &  qui  fçait  le  Moyen  de  les  prévenir,  pourvu  que  de  nôtre 
part  nous  ne  lui  refufions  pas  les  Moyens  de  le  faire. 

Reflexions  fur  une  Lettre  écrite  à"*  Anvers  le  29.  Décembre  1 700, 

par  Monfr.  N.  h  Monfr.  P.  en  Hollande ,  fur  les  Affaires  pre- 

Jentes  de  la  Couronne  d'Efpagne  :  avec  quelques  Pièces 

authentiques.     Imprimées  Pan  1701^'), 

MONSIEUR, 

J'ai  receu  la  Lettre  que  vous  m'avez  fait  l'honneur  de  m'écrire  le  pre-  Réa- 
rmer jour  du  fiécîe  où  nous  fommes  entrez,  avec  un  Exemplaire,  qui  siom  fut 
y  étoit  joint,   d'une  Lettre  que  vous  me  dites  avoir  paru  à  la  Haye  le  J1^,^" 
jour  auparavant,  &  dont  on  a  fait  tirer  cent  Exemplaires.   Vous  me  char-  versJ 
gez  en  même  tems  que  je  vous  faile  part  des  Reflexions  que  je  pourrai  fai- 

(*)  C«j  Réflexions  font  fimpkment  indiquées ,  Tome  I,  pag-Z^o. 


l'Euro 

PE. 


400    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aminés  re  fur  la  dite  Lettre.  En  vérité  Mr.  vous  m'obligez  à  faire  une  chofe,  que 
gen.  de  je  reconnois  être  abfolument  hors  de  la  fphere  de  ma  capacité;  mais,  vos 
ordres  font  fi  précis ,  &  mon  obéiffance  iï  exacte  à  tout  ce  qui  vient  de 
vôtre  part,  que  je  n'hefiteray  point  à  vous  en  marquer  quelques  unes ,  au 
hazard  que  vous  les  trouviez  infipides.  Il  eft  vrai  que  j'efpere  que  vous  ne 
vous  attendez  pas  que  j'aille  fouiller  pour  cela ,  ni  l'Hiftoire ,  ni  les  Endroits 
Jes  plus  fecrets  des  Cabinets  des  Princes ,  puis  que  le  feul  Sens-commun 
&  les  Affaires  que  nous  avons  vu  de  nôtre  tems  font  plus  que  fuffifantes 
pour  me  mettre  en  état  de  m'aquitter  de  ce  que  vous  exigez  de  moi:  &  fi 
vous  ne  trouvez  pas  mes  Reflexions  de  vôtre  goût,  imputez-le  au  peu  de 
tems  que  vous  me  donnez  pour  vous  répondre,  &  à  peu  de  génie  qui  ne 
me  permet  pas  de  traitter  ces  fortes  de  matières  auflî  ex  profefj'o  que  le  pré- 
tend l'Auteur  de  la  Lettre,  qu'on  fupofe  avoir  été  écrite  d'Anvers. 

Pour  procéder  avec  quelque  ordre,  vous  me  permettrez,  je  vous  fuplie, 
Mr.  que  je  raporte  tous  les  Articles  de  la  Lettre,  &  je  prendray  la  Liber- 
té de  dire  fur  chacun  ce  qui  me  femblera  le  plus  raifonnable.  Ainfi  je  com- 
mencerai par  le  Titre  qui  eft. 

Lettre  écrite  fi  Anvers  le  29.  Décembre  1700.  par  Monfieur  N.à  Monfieur  P. 
en  Hollande. 

Le  feul  Tître ,  auparavant  même  que  f  eufTe  jette  l'œil  fur  la  Lettre ,  mTa 
d'abord  donné  une  trés-méchante  idée  de  fon  contenu.  Car,  pourquoi  fu- 
pofer  que  laLtttre  a  été  écrite  d'Anvers, quand  l'on  fait  que  bien  des  jours 
avant  le  24.  de  Décembre ,  il  y  avoit  quelques  Miniflres  auxquels  Elle  a- 
voit  été  leiie,  ou  du  moins  auxquels  on  en  avoit  parlé.  Ce  Deguifement 
ne  m'a  paru  guéres  convenable  à  unePerfonne  qui  fe  pique  dans  toutes  fes 
Expreffions  d'une  candeur  &  d'une  fmcerité  fi  peu  commune,  contre  la- 
quelle voici  dès  le  commencement  un  Préjugé.  Je  pourray  vous  raporter, 
dans  la  fuite,  la  raifon  que  quelques  perfonnes  croyent  qu'on  a  eu  de  da- 
ter cette  Lettre  d'Anvers.  Ceci  n'eft  dit  qu'en  paffant,&  fans  aucune  veiie 
d'offenfer,  l'Affaire  ne  méritant  pas  de  s'y  arreiter.  Voyons  l'entrée  ou  le 
commencement  de  la  Lettre. 

MONSIEUR, 

ÏOrfque  feus  T  honneur  de  vous  informer  de  la  Mort  du  feu  Roi ,  6?  du  Tefla- 
s  ment  plein  de  f  âge  (Je  &  d'équité ,  par  lequel  il  avoit  appelle  le  Duc  d'Anjou 
à  la  Couronne ,  je  crus  vous  donner  tout  à  la  fois  deux  Nouvelles ,  dont  l'une  ferait 
capable  de  calmer  entièrement  les  Soucis  que  ï autre  autoit  pu  vous  caufer.  Ce- 
pendant ,  je  vois  par  les  Lettres ,  dont  il  vous  a  plu  mhonnorer ,  que  mes  Conjectu- 
res ne  fe  font  pas  rencontrées  jufles.  Fous  me  paroifjez,  furpris  £5?  conjlerné.  A 
vous  entendre,  le  leftament  du  Roi  eji  un  Coup  inopiné  ^terrible  ,&  va  devenir  la 
fource  d'une  infinité  de  maux  &  de  mifere. 

Vous 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I. 


401 


Vous  me  permettrez,  Monfieur,  que  je  ne  vous  dife  rien  fur'ce  commen- 
cement, parce  que  j'auray  occafion  dans  la  fuite  de  parler  du  Teftament 
du  feu  Roi  Catholique,  que  l'Auteur  dit  être  plein  fageffe  &  d'équité  en 
apellanrte  Duc  d'Anjou  à  la  Couronne,  aufti-bien  que  du  relie  du  contenu: 
ainfi,  je  continuerai  la  fuite  de  la  Lettre. 

Je  ne  fay ,  Monfieur,  qui  vous  a  pu  fuggerer  ces  Notions  étranges  \  mais,  je 
confejfe  ne  pouvoir  comprendre  comment  un  homme  aufji  éclairé  que  vous  a  été 
capable  de  les  recevoir ,  ni  comment  vous  pouvez  accorder  des  idées  aufji  contra- 
dicloires  que  celles  dont  il  femble  que  vous  foyez  prévenu.  Si  vous  craignez  la 
Grandeur  de  la  France ,  pourquoi  la  voulez-vous  augmenter ,  en  détachant  deux 
Royaumes  &  deux  Provinces  d'Efpagne,  pour  les  lui  donner  ?  Et  fi  au  contraire 
cette  Couronne  vous  par  oit  peu  redoutable ,  pourquoy  vous  alarmez  vous  delapcn- 
fée  quelle  pourra  un  jour  vous  faire  la  guerre ,  &  que  vous  n'auriez  pas  F  hj pa- 
gne pour  vous  fout enir  ?  La  contradiclion  eft  [enjibk.  Mais  ,  comme  ceux  qui  cm- 
brajjent  une  méchante  caufe  ont  accoutumé  de  la  foutenir  par  de  méchantes  rai- 
fons,  &  que  j'entrevois  à  peu  près  celles  que  l'on  vous  aura  alléguées  pour  vous 
infpirer  les  fentimem  ou  vous  êtes ,  je  veux  bien  entrer  avec  vous  en  quelque  dif- 
cuffion. 

Je  fuis  furpris  comment  l'Auteur  de  la  Lettre,  qui  traitte  de  Notions  é- 
tranges  le  jufte  fujet  qu'on  a  de  craindre  la  fuite  de  l'étrange  événement 
qui  eft  arrivé  en  la  fueceflion  d'Efpagne ,  &  qui  dit  de  ne  pouvoir  com- 
prendre comment  un  homme  éefairé  a  été  capable  de  les  recevoir,  veuil- 
le y  faire  voir  de  la  contradiction  par  un  dilemme  captieux,  &,  pour  me 
fervir  des  termes  de  l'Ecole,  par  une  fallace  &  un  fophifme  d'Ecolier.  Or, 
ou  cet  Auteur  a  compris  les  propofitions  de  ion  dikmme,  ou  il  ne  les  a  pas 
compris.  S'il  les  a  compris,  il  a  crû  parler  fans  doute  à  des  Enfans,  &  de 
les  éblouir  par  une  contradiction,  qui  n'eft;  peut-être  que  le  caractère  de  fon 
génie;  &  s'il  ne  les  a  pas  compris,  pourquoi  s'amufe-t-il  à  affirmer  la  fen- 
fibilité  d'une  contradiclion  qu'il  ne  comprend  pas  ?  Quelle  qu'ait  été  cepen- 
dant fa  penfée,  j'efpere  qu'on  ne  trouvera  pas  étrange  qu'à  l'exemple  de 
l'Auteur  je  me  ferve  d'une  diftinêtion  pour  répondre  à  fon  argument.  J'a- 
voue qu'on  craint  la  grandeur  de  la  France,  mais  je  nie  que  dans  le  cas, 
en  l'augmentant  en  détachant  deux  Royaumes  &  deux  Provinces  de  l'Ef- 
pagne  pour  les  lui  donner,  on  augmentoit  la  crainte.     Depuis  plus  d'un 
fiecle  le  but  de  toutes  les  Puiflances  de  l'Europe  a  été  d'entretenir  un  équi- 
libre entre  les  deux  Maifons  d'Autriche  &  de  Bourbon ,  afin  de  n'être  pas 
accablées  parcelle  des  deux  qui  auroit  furpafle  l'autre  enPuiflance,  &  que 
par-là  elle  fut  parvenue  à  la  Monarchie  Univerfelle  de  l'Europe.     Or, la 
Branche  d'Autriche  d'Efpagne  venant  à  manquer,  &  un  Prince  de  la  Bran- 
che de  celle  d'Allemagne  venant  à  fucceder  à  celle  d'Efpagne,  il  eft  fen- 
fible  qu'elle  venoit  au  même  point  de  PuhTance  qu'elle  avoit  été  fous  Char- 
les Quint,  &  qu'elle  auroit  emporté  le  poids,  ainfi  il  n'y  auroit  pas  eu 
d'équilibre.  C'eft  pourquoi,  par  le  Traitté  de  Partage,  on  ôtoic  d'un  cô- 
Tome  XL  E  e  e  té 


Affaires 

GI'.N.    Dï 

l'Euro- 

PK. 


PE. 


402    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  té  pour  donner  à  l'autre,  afin  que  l'équilibre  fubfiftât.  Ec  il  eft  confiant, 
gen.df.  que  ies  deux  Royaumes,  &  les  deux  Provinces,  qu'on  detachoit  pour  les 
donner  à  la  France,  n'étoient  que  pour  conferver  l'équilibre,  puis  que  Sa 
-  Majelté  Tres-Chretienne  en  étoit  convenue  elle  même  dans  le  dit  Traitté 
de  partage ,  auquel  je  vous  renvoyé.  Or ,  fi  on  craint  la  Grandeur  de  la 
France,  ce  n'elt  qu'en  la  fupofant  emporter  l'équilibre  ,  &  que  la  Maifon 
d'Autriche  ne  fût  pas  en  état  de  la  contrebalancer  ;  mais ,  par  les  deux 
Royaumes  &  les  deux  Provinces  que  la  France  aquerroit  par  le  Partage, 
cette  Puiflance  ne  f ecevoit  qu'une  augmentation  capable  de  fervir  d'équi- 
libre à  la  Maifon  d'Autriche  de  la  Branche  d'Allemagne,  &  par  confe- 
quent  la  crainte  de  fes  deifeins  &  de  fes  entreprifes  n'augmêntoit  pas, 
puifque  l'équilibre  fubfiltoit  par-là,  &  qu'on  auroit  toujours  été  en  état  de 
fe  joindre  à  la  partie  opofée  à  celle  qui  auroit  voulu  faire  pancher  la  ba- 
lance de  fon  côté ,  afin  de  tenir  les  chofes  dans  un  poids  égal.  L'autre 
partie  du  dilemme,  qui  dit  que  fi  au  contraire  cette  Couronne  paroit  peu 
redoutable,  pourquoi  s'alarme-t-on  de  la  penfée  qu'elle  pourroit  un  jour 
faire  la  Guerre  aux  Etats  &  qu'on  n'auroit  pas  l'Efpagne  pour  les  foute- 
nir,  tombe  d'elle-même  par  l'aveu  que  je  fais  qu'on  craint  fa  grandeur,  & 
que  cette  crainte  eft  fondée  fur  l'infubfiftence  de  l'équilibre.  J'auray  oc- 
cafion  d'en  parler  plus  amplement  dans  la  fuite;  &  je  me  contenteray  à 
prefent  de  fuivre  la  Lettre  pas  à  pas.     Voici  ce  qu'elle  continue  de  dire. 

V Affaire  confifte  en  deux  Points  généraux.,  qui  renferment  en  eux  tout  ce  qui 
peut  être  dit  fur  cette  matière,  l'un  de  droit,  f  autre  ^convenance:  dans  le  pre- 
mier ,  il  s  agit  de  f  avoir  fi  le  Teftament  du  feu  Roi  Charles  efl  jufie  &?  conforme 
à  ï équité  \  &  dans  le  fécond,  fi  le  Traitté  de  Partage  eft  plus  convenable  à  l'In- 
térêt commun  de  l'Europe  que  ce  même  Teftament. 

Je  veux  quant  à  prefent  convenir  de  ces  deux  Points;  mais,  cependant, 
par  un  tranfeat  ,d\nb.  que  l'on  s'en  fert  aux  difputes  ,  ou  un  dato  £5?  non 
concejfo  ;  parce  que  peut-être  dans  quelque  autre  occafion  il  pourroit  arri- 
ver que  je  ne  conviendray  pas  avec  l'Auteur  de  la  Lettre  d'Anvers  fur  ces 
deux  Points.     Voyons  toujours  la  fuite. 

J'ay  mis  le  Droit  en  premier  Chef ,  parce  que  toute  caufe  qui  en  eft  dénuée  eft 
infoutcnable ,  &  par  ce  aujfi  que  ceft  le  point  le  plus  clair  &  le  moins  embarrafjé. 

Je  vousprie,Monfieur,  de  remarquer  bien  ce  que  l'Auteur  de  la  Lettre 
vient  de  dire;  car,  peut-être ,  dans  la  fuite,  mefervira-t-il,  pour  rétorquer 
contre  lui. 

Effectivement,  pour  démontrer  la  juftice  du  Teftament  du  feu  Roi  dans  le  règle- 
ment de  la  fucceffon  ,  il  fufft  de  lafimple  expofttion  du  fait. 

Philippe  JF.  Roy  d'Efpagne  eut  quatre  Enfans  de  fes  deux  mariages  avec  Eli- 

zabet 


RESOLUTIONS    D'ETAT,     M.  DCC.  L  403 

zabet  de  France ,  6?  Marie  Anne  d'Autriche, /avoir  Marie-l'herefc ,  Marguerite-  Affaires 

ïhereje,  Balthazar,  &  Char/es.  «j^* 

Marie-Therefe  fut  mariée  en  1660.au  Roy  Très-Chrétien  Louis  XIV.  &  a  eu     '   ™ 

poflerité  ,  Alarguer  ite-ThereJe  époufa  en    1666.  f  Empereur  Leopold  Ignace  au- 

jourdloui  régnant  &  eut  une  fille  qui  depuis  a  été  femme  de  ÏElecleur  de  Baviè- 
re, mais  dont  il  ne  relie  point  d'Enfant.  Balt bazar  mourut  au  berceau.  Et 
Charles,  après  avoir  régné  3f.  ans,  vient  de  mourir  fans  pojîerité;  de  forte  que  la 
Couronne  a  du  tomber  en  Ligne  Collatérale.  Que  toute  pcrfonne,  qui  a  jamais  oui 
parler  de  Succeffion ,  juge  maintenant  ou  il  faut  chercher  cette  Ligne,  (s  fi  ce  ne  fi 
pas  en  celle  qui  tire  /on  droit  de  Marie-Thereje  prejerablement  à  toute  autre. 

Voilà  un  beau  détail  généalogique  des  defcendans  de  Philippe  IV.  Je  fou- 
haiterois  de  pouvoir  faire  une  Queftion  à  l'Auteur  de  la  Lettre  d'Anvers: 
&,  comme  il  efl  permis  à  fon  exemple  de  raifonner  fur  desSupofkions,je 
voudrois  bien  favoir  ce  qu'il  pourroit  répondre  à  ce  que  je  vay  dire. 

Louis  XIII.  Roi  de  France  eut  deux  Enfans  mâles,  favoir  Sa  Majefté 
Tres-Chretienne  LouïsXlV.  à  prefent  régnant,  &Monfieur  le  Duc  d'Or- 
léans. Sa  Majefté  Tres-Chretienne  a  eu  un  fils  qui  efl  Moniteur  le  Dau7 
phin,  qui  a  eu  trois  Princes ,  favoir  les  Ducs  de  Bourgogne,  d'Anjou  ,  <& 
de  Berry.  Monfieur  le  Duc  d'Orléans  a  eu  entre  autres  le  Duc  de  Char- 
tres, la  feue  Reine  d'Efpagne,  &  leurs  ÀltefTes  Royales  la  DuchefTe  de  Sa- 
voye  &  la  DuchefTe  de  Lorraine,  qui  ont  eu  poflerité.  Or,  comme  l'on  efl 
mortel ,  fuppofons  que  Sa  Majefté  Tres-Chretienne ,  Monfieur  le  Dauphin, 
&  les  Ducs  de  Bourgogne,  d'Anjou,  &  de  Berry,  auffi-bien  que  Monfieur 
le  Duc  d'Orléans  &  fon  fils  le  Duc  de  Chartres, qui  font  les  munimentaim- 
perii  félon  Tacite,  vinfientà  mourir,  (ce  qu'a  Dieu  ne  plaife,  car  je  fou- 
ha&e  à  tous  ces  illuitres  Princes  une  longue  vie,)  &  fans  laiffer  aucune 
autre  poiterité  que  celles  qui  viennent  des  deux  DuchelTes  de  Savoye  & 
de  Lorraine.  Suivant  l'Auteur  de  la  Lettre  d'Anvers,  toute  perfonne  qui 
a  jamais  ouï  parler  de  Succeffion  jugeroit  que  la  Couronne  devroit  tomber 
en  Ligne  collatérale,  &  l'on  ne  pourroit  trouver  cette  Ligne  qu'en  celle 
qui  tire  fon  droit  des  DuchefTes  de  Savoye  &  de  Lorraine.  Ce  qui  paroi- 
troit  d'autant  plusjufle,  fi  le  dernier  mâle  régnant  eut  fortifié  ce  droit 
par  unTeftament.  Cependant,  Monfieur  le  Prince  de  Condé,  ni  le  Prin- 
ce fon  fils,  ne  s'accommoderoient  point  de  tout  cela. 

N'allez  pas  trop  vifte,jevous  fuplie Monfieur.  Cette  Queftion, toute  ri- 
dicule qu'elle  vous  doit  paroitre  du  premier  abord,  a  un  but  qui  a  fon 
poids,  aitifi  que  vous  le  verrez. 

La  Réponfe,  que  l'Auteur  de  la  Lettre  d'Anvers  me  feroit  fans  doute 
d'un  air  magiftral  &  decifif,  feroit  que  cette  Queftion,  (les  fupofitions 
admifes)  n'a  rien  de  commun  avec  la  matière  dont  il  s'agit:  puis  qu'en 
France  la  Loy  Salique  décide,  Rex  Francis  mafculus  cfio ,  &  que  par-là  les 
femmes,  font  exclues  duThronej  au  lieu  que  cette  Loy  n'eft  point  en 
ufage  dans  la  Monarchie  d'Efpagne  où  les  Conftitutions  &  Coutumes  fon- 
damentales admettent  les  femmes.    Et  bien,  c'eft  une  affaire  dont  je  con- 

Eee  2  viens, 


Affaires 

G>-'N.  DE 

l'Euko- 

PE. 


404    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEE,  ET 

viens  5  mats  je  foutiens,que  par  la  Renonciation  de  l'Infante  Marie-Therefe 
&  par  leTeiiament  du  feu  Roy  Philippe  IV.  la  Monarchie  d'Efpagne  étoit 
dévolue  à  la  Branche  Mafculine  de  laMaifon  d'Autriche  d'Allemagne,  &à 
fon  défaut  au  Duc  deSavoye,  en  cas  que  la  ligne  Mafculine  de  la  branche 
d'Efpagne  vint  à  faillir;  &  celte  Renonciation  &  cette  Subilitution  tien- 
nent lieu  de  Loy  Salique  en  Efpagne.  Ainfl,  fi  la  queftion  que  je  viens  de 
faire  fur  des  fupofitions  elt  hors  de  faifon ,  le  raifonnement  de  l'Auteur 
de  la  Lettre  d'Anvers  l'eit  auiïï  :  s'il  répond  à  la  mienne,  qu'il  y  a  une  Loy 
Salique  en  France  qui  exclut  les  femmes,  je  diray  auiïi  qu'il  y  a  une  Re- 
nonciation &  une  Subftitution  en  Efpagne,  qui  décide  de  la fucceiïion  pre- 
ftnte,  tout  de  même  que  la  Loy  Salique  en  France  -,  &  il  ne  fauroit  rien 
alléguer  que  je  ne  lui  réponde,  comme  l'on  dit  à  l'école,  ad  homimm. 

11  s'enfuit  de  ce  j'ay  l'honneur  de  vous  dire,  que  le  feu  Roi  Charles  Se* 
cond  ne  pouvoit  ny  n'avoit  aucun  droit  de  faire  unTeftament,  &  de 
difpofer  de  la  Monarchie,  &  qu'ainfi  celui  qu'il  a  fait  efl  de  nulle  valeur. 
C'eft  juiïement  comme  fi  un  particulier ,  auquel  feroit  écheu  un  héritage 
par  fubltitution  ou  fideicommis  comme  on  l'appelle,  alloit  tefter  en  faveur 
d'un  tiers  qui  n'elt  pas  compris  dans  le  fideicommis  :  nôtre  Auteur  trou- 
veroit  cela  équitable,  &  même  d'une  équité  unique ,  contre  le  fentiment 
de  tous  les  Jurifconfukes  du  Monde,  &  contre  une  infinité  d'Exemples 
dans  tous  les  Etats  de  la  Chrétienté.  J'ai  encore  d'autres  raifons  tou- 
chant l'invalidité  de  ce  Teitament  du  Roi  Catholique,  mais  qui  me  fervi- 
ront  ci-aprés. 

Je  ne  doute  nullement  que  l'Auteur  de  la  Lettre  d'Anvers  ne  fe  récrie 
d'abord  contre  la  Subftitutionque  j'avance  y  avoir  dans  la  Monarchie  d'Ef- 
pagne,  pour  laMaifon  d'Autriche  de  la  branche  d'Allemagne,  &  qu'il  ne 
le  nie  avec  autant  d'aflurance  que  s'il  en  avoit  brûlé  les  Originaux.  Mais, 
c'eft  un  fait,  Monfieur,  qui  eft  inconteftable,  &  SaMajelté  Impériale,  qui 
eft  un  Prince  débonnaire  &  qui  aime  la  juftice  ,  en  mettra  l'évidence 
devant  les  yeux  de  toute  l'Europe;  &  je  ne  vous  avance  rien,  donc  je 
ne  fois  par-là  juftifié ,   comme  vous   le  verrez  en  peu  de  tems. 

Je  prévois  auiïi  que  cet  Auteur  iroit  chanter  triomphe,  s'il  fa  voit  ce 
que  je  viens  de  dire,  en  infultant  à  caufe  du  Traité  de  Partage,  difant 
puis  que  par  la  Renonciation  &  par  la  Subilùution,  la  Monarchie  d'Efpa- 
gne  venoit  à  tomber  entre  les  mains  des  Princes  de  la  Maifon  d'Au- 
triche de  la  branche  d'Allemagne,  pourquoi  a-ton  voulu  leur  faire  in- 
juflice ,  &  leur  enlever  deux  Royaumes  &  deux  Provinces  pour  les 
donner  à  la  France?  Je  repondrai  à  ceci  plus  bas,  lors  que  je  touche- 
rai la  corde  du  point  de  convenance,  que  l'Auteur  de  la  Lettre  d'Anvers 
a  mis  pour  1«  fécond  point  général.  En  attendant  que  nous  en  foyons- 
ià,  je  vai  continuer  la  Lettre. 

Vous  me  direz  fans  doute ,  que  cette  Prince (Je  en  fe  mariant  renonça  à  fon  droit 
de  fucccjjion ,  Es?  quainfi  on  nefi  plus  à  lieu  d'y  revenir  pour  le  faire  valoir  de  nou- 
veau. AJiiS)  à  cela  je  vms  répondrai  par  une  Dijlinëlion.  La  Renonciation  eft 

•vala- 


p:-;. 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  L  405 

valable  £5?  doit  fubfifler  eu  égard  au  motif  &  dans  le  cas  qui  Va  eau  fée  :  feu    Affatres 
conviens.     Mais,  qu'elle  doive  au jji  avoir  lieu  dans  le  cas  vu  ce  motif  n'exifk     G*N-  DE 
point ,  cefi  ce  que  je  nie,   &  ce  que  Vvn  ne  fauroit  foutenir  fans  renverfer  toutes     Lf.u"°" 
lesConjIitutions  <3  Conventions  du  Monde.  Or,  te  motif  qui  avait  caufé  la  Re- 
nonciation de  la  Reine  Marie-Therefe  net  oit  autre  que  la  crainte  de  voir  les  deux 
Monarchies  réunies  par  fuccefiion  dans  une  feule  &  même  perfonne.     Le  fait  efi 
notoire ,  £i?  le  contrat!  de  mariage  de  la  dite  Reine  Marie-Therefe  le  porte  formellc- 
ti/cnt  Article  IV.  ou  il  efi  dit  que  la  Renonciation  fe  fait ,  à  fin  que  les  deux  Cou- 
ronnes étant  fi  grandes  ijj fi  puijfantes ,  elles  ne  puiffent  être  unies  en  une  feule  j  Ci? 
que  des  à  prefent  on  prévienne  le>  occafions  d'une  pareille  jonction.     Le  Tefiament 
du  Roi  Philippe,  qui  fuivit  peu  apré  ,  s'explique  en  termes  peu  differens  Article 
XVI l,  &  remarque  expreffement  que  le  motif  de  la  Renonciation  efi  puur  préve- 
nir les  grands  dommages  qui  pour  oient  refait  er  de  lajonclion  des  deux  Couronnes , 
&?  des  Etats  en  dépendants. 

Nous  voici  arrivez  à  la  fameufe  ,  légale,  &  authenrque  Renonciation 
faire  par  l'Infante  Marie-Therefe,  mariée  à  Sa  Majeilé  Très- Chrétienne 
LouïsXIV.  Je  dirai  plus  bas  le  motif  qu'on  a  eulorfqu'on  exigea  cette  Re- 
nonciation de  l'Infante  dans  le  contract  de  mariage  qui  elt  tout  autre  que  ce- 
lui que  l'Auteur  de  la  Lettre  veut  infinuer,  &  en  attendant  je  veux  bien 
examiner  celui  de  l'Auteur.  II  dit  que  c'a  été  pour  empêcher  que  les  deux 
Monarchies  d'Efpagne&  de  France  ne  vinffentà  être  unies  en  une  feule  per- 
fonne, &enfuite  il  rend  valable  la  Renonciation  par  fexiftence  de  ce  mo- 
tif, lequel  n'étant  plus,  la  Renonciation  tombe.  Or, je  demande  à  l'Auteur, 
ou  il  y  avoit  de  la  jufiiee  &  de  l'équité  dans  le  prétendu  droit  de  l'Infan- 
te Marie-Therefe,  ou  il  n'y  en  avoit  pas.  S'il  n'y  en  avoit  pas,  donc 
toutes  les  prétentions  de  la  France  font  nulles  &  infoutenablesj  &  s'il  y 
en  avoit,  pourquoi  exiger  une  Renonciation?  Oh!  me  dira-t-il ,  il  faut 
une  Diflinclion^  c'eft  parce  qu'il  y  avoit  un  motif,  qui  étoit,  afin  que  les 
deux  Monarchies  ne  fuffent pas  unies;  mais,  cette  diltinélion  ne  convient 
pas  à  ce  que  l'Auteur  dit  dans  la  fuite,  que  lajufiice  &  V  équité  font  uniques  \  elles 
ne  peuvent  pas  changer  de  nature  en  changeant  de  pais  5  ni  protéger  en  même  tems 
deux  partis  contraires. 

Je  n'infiiterai  pas  fur  le  mot  uniques  qui  eft  trés-mal  adapté,  mais  j'en- 
tre dans  fa  penfée,  qui  eft,  ce  me  femble,que  la  jultice  eft  une,  l'équité 
elt  une,  favoir  indivillbles,  non  feulement  en  elles-mêmes,  mais  même 
relativement ,  puis  qu'elles  ne  peuvent  changer  de  nature  en  changeant 
de  païs:  donc,  une  diftinctiop  ne  leur  convient  pas,  &  elles  ne  peuvent 
pas  être  juftice  &  équité  relativement  à  un  motif,  &  ne  l'être  pas  en  mê- 
me tems.  Il  me  femble  qu'il  paroit  bien  mieux  ici  une  contradiction  i"cn- 
fible,  que  l'Auteur  ne  l'a  trouvée  ailleurs.  Je  n'ai  jamais  oui  dire  qu'une 
chofe  qui  elt  «wefTenciellement,  puiffe  être  différente  d'elle  même  par  un 
accident  qui  lui  elt  feparé  &  extrinfeque,  qui  ne  fauroit  abfolument  lui 
changer  fa  nature  &  fon  effence. 

Je  ne  dis  ceci  qu'en  pafïànt  ;  car ,  j'ai  bien  des  chofes  plusfolides  à  vous 

Eee  1  di- 


l'Euro- 
pe. 


4g£    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AmiRtf  dire,  pour  vous  montrer  évidemment,  que  l'Auteur  de  la  Lettre  ne  fait  la 
GEN-DB  diftincîion  raportée,  qu'avec  malice  &  avec  peu  de  bonne-foi  &  de  fince- 
rité,&.  que  fa  conclufion  va  abfolument  à  gauche.  Je  veux  convenir  avec 
lui , qu'un  des  motifs  énoncez  dans  lecontraél  de  mariage  de  l'Infante  Ma- 
rie-Therefe  efl  celui  qu'il  raporte;  mais,  outre  qu'il  n'efl  pas  le  feul,  il 
n'en  eft  même  que  le  plus  foible.  Ce  beau  Faifeur  de  Lettres  croit  peut- 
être  qu'on  vienne  du  Japon,  &  qu'on  ne  fâche  pas  les  chofes.  Je  veux 
m'attacher  comme  lui  au  Contracî:  de  Mariage,  pour  le  confondre  par  fes 
propres  armes.  Il  y  eft  dit,  que  moyennant  le  dot  qui  y  efl  flipulé,  la  Sere- 
nijjime  Infante  fe  tiendra  pour  contente  &  fe  contentera  du  dit  dot ,  fans  que  par 
après  elle  puiffe  alléguer  aucun  autre  fien  droit  &c.  &  quelle  en  fera  la  Renon- 
ciation en  bonne  &  deïte  forme  &c.  En  fuite  il  efl  dit  que  , 

D'autant  que  leurs  Majeficz  Très -Chrétienne  &  Catholique  font  venues ,  &? 
viennent  à  faire  le  Mariage ,  afin  de  tant  plus  perpétuer  &  affeurer  par  ce  nœud 
13  lien  te  Paix  publique  de  la  Chrétienté ,  (3  entre  leurs  Majefiez  t  amour  (3  la  fra- 
ternité que  chacun  efpere  entre  elles ,  13  en  contemplation  auffi  des  jujles  &  legi- 
mes  caufes  qui  montrent  &  perfuadent  î égalité  &  convenance  dudit  Mariage, 
par  le  moyen  duquel ,  (3  moyennant  la  faveur  (3  grâce  de  Dieu ,  chacun  en  peut 
efperer  de  tr es-heureux  fuccez  ,  au  grand  bien  {3  augmentation  de  la  Foi  &  Reli- 
gion Chrétienne ,au  bien  13  bénéfice  commun  des  Royaumes  Sujets  (3  Vajfaux  des 
deux  Couronnes  -,  comme  auj/i(  remarquez  bien,  Monfieur,  ce  comme  aufîï) 
pour  ce  qui  touche  (3  importe  au  bien  de  la  chof'e  publique  (3  coyfervation  défai- 
tes Couronnes,  le  (quelle  .s  étant  fi  grandes  (3  puiffantes  ne  puijjent  être  reunies  en 
une  feule ,  13  que  des  à  prefent  on  prévienne  les  occafions  d'une  pareille  jonction. 
Doriques  ,  attendu  la  qualité  des  fuj dites  13  autres  raifons ,  i3  notament  celle  de 
l'égalité  qui  fe  doit  conferver  (3c. 

Je  tire  de  ce  que  je  viens  de  vous  rapporter  trois  chofes,  qui  font  an- 
nexées l'une  à  l'autre.  L'une,  qu'il  y  a  plufieurs  raifons  qui  ont  fervi  de 
fondement  à  la  Renonciation  ,  ce  qui  fe  voit  parce  qui  efl  dit  qu  attendu  la 
qualité  des  fufdites  13  autres  jufles  raifons;  la  féconde, que  le  motif, fur  lequel 
l'Auteur  fonde  fa  diitin£lion ,  non  feulement  n'efl  pas  le  feul,  mais  qu'il 
n'eft  pas  le  principal  motif,  &  qu'il  n'efl  que  fecondaire,  &  comme  un  ac- 
ceflbire  qui  n'a  pas  autant  de  force  que  les  autres ,  ce  qui  fe  remarque  par  les 
mots  comme  au fji\  &  la  troiiiéme,que  le  principal' motif  efl  l'égalité,  &  no- 
tament ,  dit  le  Contracî,  celle  de  V égalité.  Ce  qui  combat  directement  ce  que 
l'Auteur  dit:  le  motif  de  l'égalité  efl  le  principal,  &  l'Auteur  ne  fauroit 
nier  la  fubfiftence  de  ce  motif.  Vous  me  demanderez  peut-être  ce  que 
j'entends  par  le  mot  d'égalité:  je  vai  vous  l'expliquer. 

L'un  des  principaux  obflacles,&  même  le  plus  grand,  du  Mariage  entre 
l'Infante  Marie-Therefe  &  le  Roy  Très -Chrétien,  fut  la  contrariété  des 
Loix  &  des  Coutumes  des  deux  Couronnes,  vu  qu'en  Efpagne  les  fem- 
mes fuccédent,  faute  de  mâles,  &  qu'en  France  les  femmes  font  exclues 
de  la  Succeffion  par  la  Loy  Salique  que  Philippe  le  Long  inventa  ou  éten- 
dit, pour  exclure  de  la  Succeffion  du  Royaume  fa  Nièce  fille  de  Louis 
I lutin.     Or ,  quelle  égalité  y  auroit-il  eu  entre  les  deux  Couronnes,  fi  les 

fem- 


lSEUHQ- 

r£. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  407 

femmes  de  France,  fe  mariant  en  Efpagne,  étoienc  fans  droit  à  la  Suc-  Asmma 
ceiïlon  de  France  ,  &  fi  celles  d'Efpagne,  en  fe  mariant  en  France,  euf-  ^ftx;  DK 
fent  eu  droit  de  fuccéder  en  Efpagne  ?  Cette  égalité  confilte  à  mettre 
également  à  couvert  les  Loix  fondamentales  des  deux  Royaumes.  La 
France  a  autrefois  exclues  de  tous  droits  &  partage  de  fes  Royaumes  les 
deux  Ifabelles  mariées  aux  deux  Philippes  Deuxième  &  Quatrième:  ainfi 
la  Couronne  d'Efpagne  par  une  égalité  a  exclues  Anne  &  Marie-Therefe, 
mariées  aux  deux  Louis  Trezieme  &  Quatorzième  ;  la  France  l'a  fait  par 
la  Loi  Salique,  &  l'Efpagne  l'a  fait  par  des  Renonciations  Légales  &  Au- 
thentiques :  voilà  le  véritable  &  le  principal  motif  de  la  Renonciation  de 
l'Infante  Marie-Théréfe,  &  non  pas  celui  que  l'Auteur  de  la  Lettre  allè- 
gue, ainfi  que  l'on  peut  recueillir  par  ce  que  j'ai  rapporté  ci-defius  du 
Contract,  ce  qui  me  femble  allez  clair.  Mais,  je  veux  aller  plus  loin  &  di- 
re, que  quand  même  la  Renonciation  eut  été  faite  en  veue  de  ce  feul  mo- 
tif, l'Auteur  conclud  malicieufement  que  le  motif  ne  fubfiftant  plus,  la 
Renonciation  eft  nulle.  Je  ne  veux  pour  Je  prouver  que  m'attacher  au 
Contra&  de  Mariage  &  au  même  Article  qu'il  allègue,  qui  conclud  direc- 
tement contre  ce  qu'il  avance.  Car,  après  avoir  dit  que  l'Infante  Marie- 
l'herefe  ,  &  les  Enfans  procréez  d'elle,  [oient  mâles  ou  femelles  ,&  leurs  des- 
cendant ,  premier  ou  Jecond,  trois  ou  quatre  ,  nez  cy-aprez  en  quelque  degré 
qu'ils  puijfent  fe  trouver  ,  voire  à  tout  jamais  ,  ne  peuvent  fuccéder  à  aucun 
des  Royaumes ,  Etats ,  &  Dominations ,  prefent  ou  à  venir  ,  par  quelque  titre , 
droits ,  ou  raifons  que  ce  puijfent  être  ;  encore  que  ce  fut  durant  la  vie  de  la- 
dite Sereniffime  Infante  Dame  Marie-Therefe' ou  après  fa  mort  &  celle  de 
qui  que  ce  foit  de  fes  défendants ,  premiers,  féconds,  troijiêmes  nez,  ou  ulté- 
rieurs, que  le  cas  ou  les  cas,  par  lej f quels ,  ou  de  droit,  ou  par  les  Loix  & 
Coutumes  des  dits  Royaumes ,  Etats,  &  'Dominations,  foit  par  difpofition  de 
titres  ,  par  lefquels  ils  puijfent  fuccéder  ou  prétendre  pouvoir  fuccéder  es  dits 
Royaumes  ,  Etats  ,  &  Dominations  leur  deut  appartenir  la  Succejfion,  en 
tous  lefquels  fuf dit  s  cas  des  à  pré  fent  la  dite  Dame  Marie -Thereje  Infante 
dit  &  déclare  être  &  demeurer  bien  £s?  deuement  exclufe  ,  enfemble  tous  fes 
enfans  mâles  ou  femelles  ,  encore  quils  fe  vuuluffent  ou  pujfent  dire  &  pré- 
tendre quen  leurs  perfonncs  ne  courent  ni  ne  fe  peuvent  &  doivent  confide- 
rer  les  dites  raifons  de  la  chofe  publique,  ni  autres  es  quelles  ladite  Ex- 
clufion  fe  pourroit  fonder  ,  ou  quils  voulujjent  alléguer  (  ce  quà  Dieu  ne 
plaife  )  que  la  Succcffwn  du  Roy  Cathodique  vu  de  fes  Succejfeurs  Princes  fj? 
Infantes,&  d'abondant  des  mâles  quil  a  cjf  pourra  avoir , fes  légitimes  Suc- 
cejfeurs ,  eut  manqué  &  défailli-  parce  que , comme  il  a  été  dit , en  aucun  cas 
ni  en  aucun  terns ,  ni  en  quelque  manière  qui  pût  advenir ,  ni  elle ,  ni  eux ,  fes 
hoirs  &  defcendans ,  nont  à  fucccder  ni  prétendre  pouvoir  fuccéder ,  nombfiant 
toutes  Loix ,  Coutumes ,  Ordonnances ,  fjf  Difpofitions  ,  en  vertu  defquelles  on 
a  fuccedé  en  tous  lefdits  Royaumes,  Etats,  rjf  Seigneuries  &c. 

Je  recueille,  de  tout  ce  que  je  viens  de  rapporter,  deux  chofes  confide- 
rables:  l'une,  qu'il  eft  itipulé  dans  le  Contracl  de  Mariage,  que  l'Infante  re- 
noncera à  tous  Droits  &c.    &  qu'elle  ,   ni  fes  defcendants  à  jamais   ne 

pour- 


4o8    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

pourront  s'en  prévaloir,  &  que  les  motifs  &  les  autres  raifons  fur  lefquel- 
les-1'exclufion  eil  fondée  ne  doivent  jamais  être  confiderées,  encore  qu'ils 
fe  vouluffent,  ou  puffent  dire  &  prétendre  qu'en  leurs  perfonnes  ne  cou- 
rent ni  ne  fe  peuvent  &  doivent  conllderer  lefdites  raifons  de  la  chofe  pu- 
blique, ni  autres  fur  lefquelles  ladite  Exclufion  fe  pourroit  fonder:  donc 
nôtre  Auteur  fait  à  préfent  une  Diftinclion  directement  contraire  à  une 
claufe  auffi  clairement  ftipulée.  L'autre  chofe  que  je  recueille  eft  que  les 
defcendans  de  ladite  Infante  font  exclus,  même  au  défaut  de  Lignée  dans 
la  Maifon  d'Autriche  d'Efpagne,  &  qu'ils  n'y  pourront  fuccéder,  non-ob- 
ftant  toutes  Loix  ,  Coutumes  ,  Ordonnances  ,  &  Difpofitions.  Remar- 
quez bien, s'il  vous  plait,  ce  mot  de  Difpofition,  car  on  doit  entendre  ce. 
mot  Difpofition  pour  un  Teftament,  &  qu'ainfi  c'eftmal  à  propos  que  l'Au- 
teur de  la  Lettre  d'Anvers  attribue  l'événement  préfent  en  vertu  du  Tef- 
tament qui  ne  fa-uroit  en  aucune  manière,  après  une  flipulation  fi  claire, 
donner  aucun  droit  aux  Defcendans  de  l'Infante  ,  en  quel  degré  qu'ils 
foient;  &  que  même  Charles  fécond  ne  pouvoit  pas  en  faire  un,  parce 
qu'il  déroge  à  ce  Contraét  auflî  bien  qu'aux  Difpofitions  du  Roi  Philippe 
fon Père,  qui  lui  a  laiffé  le  Royaume  en  Subftitution.  Ceci  eft  fi  clair,  que 
je  crois  qu'il  n'eft  pas  à  propos,  Monfieur,  que  j'y  infifte  d'avantage -y  & 
pour  vous  faire  voir,  que  je  n'avance  rien  que  pièces  en  main, je  joindrai  à 
la  fin  de  mes  Réflexions  le  Contraêf.  de  Mariage,  la  Ratification  du  Roi  de 
France  ,  &  les  Renonciations  de  l'Infante,  qui  vous  éclairciront  mieux  de 
tout  ce  que  j'ai  l'honneur  de  vous  repréfenter,  &  qui  ferviront  aufli  à  vous 
convaincre  que  les  fondemens  des  raifonnemens  de  l'Auteur  de  la  Lettre 
font  dénués  de  tout  droit,  &  par  confèquent , &  félon  lui-même , infoutena- 
bles ,  au  lieu  que  ce  dont  j'ai  l'honneur  de  vous  entretenir  eft  un  point  clair 
&  non  embaraifé.    Ainfi,  j'examinerai  la  Lettre  qui  continue  ainfi. 

Or  ,je  demande  ou  ejî  aujourd'hui  Texiftence  de  ce  cas  ?  Efl-ce  donc  le  Dau- 
phin ,  ou  le  Duc  de  Bourgogne ,  que  le  feu  Roy  vient  d'apeller  à  la  Succefjïon  ?  Ni 
l'un  ni  f  autre.  Cefl  le  Duc  a"  Anjou ,  fécond  Fils  de  France,  13 fort  éloigné  fe- 
Ion  ï ordre  de  nature  de  parvenir  à  la  Couronne  de  France ,  puifque  fon  Ayeul , 
fon  Pére^  &  fon  Aine,  font  grâces  à  Dieu  pleins  de  vie  &  de  font é. 

Je  veux  bien  pafler  à  l'Auteur,  (fans  confequence  pourtant)  qu'il  n'y  a 
pas  aujourd'hui  le  cas  ou  le  motif  qu'il  allègue.  Mais,  que  veut-il  inférer 
par-là?  iift-ce  que  ce  cas  ne  peut  pas  venir  à  exifter  un  jour?  Le  Dau- 
pnin  &  le  Duc  de  Bourgogne  ne  font  pas  appeliez,  dit-il,  à  la  Succeffion; 
mais,  c'eft  juftement  par-la  que  le  cas  peut  arriver  un  jour.  Car,  au  fond, 
fupofant  unejultice  &  une  équité  des  Droits  de  la  feue  Reine  de  France, 
on  ne  fauroit  fans  une  injuftice  criante  dépouiller  le  Dauphin  &  le  Duc  de 
Bourgogne  d'une  Succelfion  qu'une  juftice  &  une  équité,  qui  font  félon 
l'Auteur  uniques ,  leur  procure,  pour  y  appeller  un  puifné  à  leur  préjudice. 
MaiSjdira-t-on,le  Dauphin  &  le  Duc  de  Bourgogne  fe  déportent  de  leurs 
Droits  en  faveur  du  Duc  d'Anjou.  Cela  va  bien  ;  mais,  le  Dauphin,  &  le 

Duc 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  400 

Duc  de  Bourgogne ,  ont-ils  fait  quelque  A6le  authentique ,  pour  s'en  dépor-  Aftairs» 
ter?  Point  du  touc.  Mais,  fupofons  qu'ils  en  raflent,  veut-on  conclure  par-  gen.de 
là  qu'une  telle  Renonciation  feroit  valable?  Abus!  Quelle  Renonciation  L'EuR°- 
étoit  plus  authentique  que  celle  de  l'Infante  Marie-Théréfe ,  puifqu'elle  é-  __L_L__ 
toit  flipulée  dans  un  Contraét  de  Mariage,  après  plufieurs  Négotiations  ré- 
itérées. Cependant,  l'Auteur  de  la  Lettre  l'a  jugée  de  nulle  valeur.  Mais, 
me  dira-t-il,  elle  eit  jugée  de  nulle  valeur,  parce  que  le  motif  pour  lequel 
elle  avoit  été  faite  ne  fubfiite  plus.  Supofons-le.  Il  ne  me  fauroit  nier, 
que, depuis  le  Mariage  de  l'Infante  jufques  à  la  nahTance  du  Duc  d'Anjou, 
le  motif  fubfiftoit.  Ce  motif  a-t-il  empêché  le  Roy  Très-Chrétien  de  dé- 
clarer en  1668.  que  cette  Renonciation  étoit  nulle }  &  n'a-t-il  pas  fur  cela 
pouffe  fes  prétenfions  quoi  qu'elles  fuifent  mal  fondées ,  &  ne  s'eit-il  pas 
emparé  en  ce  tems-là  de  Lille  &  de  quelques  autres  Places  ?  Il  me  femble 
que  je  puis  donc  inférer  fans  abfurdité,  que  ces  Renonciations  ne  font  va- 
lables, ou  non  valables,  qu'en  tant  qu'elles  s'accommoderont  aux  intérêts  de 
la  France,  auprès  de  laquelle  id  œquius  quod  validius.  Et  fi  le  Dauphin, 
le  Duc  de  Bourgogne,  ou  ks  Enfans(  au  cas  qu'il  en  ait,)  trouvoient  un 
jour  que  ce  fût  leur  Intérêt  d'invalider  la  Renonciation  tout  de  même  que 
le  Roi  Très-Chrêtien  fit  à  la  Campagne  de  Lille ,  foit  en  fupofant  que  le 
Duc  d'Anjou  vint  à  manquer  ou  autrement,  quel  remède  pour  la  rendre 
valide?  Suivons  nôtre  Auteur. 

Déplus,  fupofons ,  ce  que  Dieu  ne  veuille  permettre ,  que  ces  trois  auguftes  tê~ 
tes  venant  a  manquer ,  le  Roi  Catholique  d'aujourd'hui  fe  trouvât  appelle  à  la, 
Couronne  de  France  ,  il  ne  s'en  fuivroit  pas  de-  là  que  les  deux  Etats  vinjfent  à 
fe  réunir:  le  l'eftament  du  feu  Roy  y  a  pourvu ^en  ordonnant  qu'alors  fon  Succef- 
feur  feroit  obligé  d'opter ,  &  qu'au  cas  qu'il  voulut  préférer  la  Couronne  de  Fran» 
te ,  le  Duc  de  Berri  fon  puifné  deviendroit  Roi  d'Efpagne  aux  mêmes  Conditions, 

J'efpere  que  vous  ne  trouverez  pas  mauvais ,  fi ,  à  l'exemple  de  l'Auteur, 
qui  fait  des  fupofitions  fur  des  chofes  pofîîbles  ,  j'en  fais  auiïï  quelques» 
unes ,  &  qu'on  ne  les  traittera  pas  en  fe  moquant  (  comme  l'Auteur 
fait)  de  fpeculations  anticipées  de  ce  qui  pourroit  arriver  un  jour,  ni 
d'idées  d'une  pofîibilité  future,  dont  Dieu  feul  par  fa  toute -fcience  peut 
pénétrer  l'événement.  Les  choies  du  Monde  font  incertaines,  &  les  Fa- 
milles les  plus  nombreufes  viennent  à  manquer.  Je  fupofe  donc  là-defTus 
qu'il  peut  arriver  que  le  Dauphin ,  le  Duc  de  Bourgogne ,  ou  fes  enfans  f 
foit  que  le  Duc  d'Anjou  vint  à  manquer  ou  autrement,  voudroient  un  jour 
faire  valoir  leurs  prétenfions  fur  la  Monarchie  d'Efpagne.  Je  fupofe  auflî 
avec  l'Auteur ,  que  ces  auguftes  Tefles  venant  à  manquer  il  prit  fantaifie 
au  Duc  d'Anjou  d'être  aufïi-bien  Roi  de  France  que  d'Efpagne,  &  que  les 
uns  ou  les  autres  fiffent  entrer  cent  mille  hommes  en  Efpagne  ,  envoyaf- 
fent  des  Flottes  en  Amérique,  &  eufTent  introduit  dans  les  places  d'Italie 
&  du  Païs-Bas  de  bonnes  Garnifons  ;  quel  remède  trouveroit-on  pour  em- 
pêcher cette  union  ?   L'Auteur  de  la  Lettre  en  fournit  un  qui  me  charme, 

fente  XL  Fff  JLeïefta* 


4io    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AffkiKEs  Le  Teftament  du  feu  Roi,  dit-il,  y  a  pourveu.     Les  Efpagnols  n'auront  alors 
cen.  de    qU»a  prendre  le  Teilament  en  main ,  &  ils  remporteront  avec  icelui  des 
l'Euro-    Yjfl.0jres }  encore  plus  complètes,  que  celle  que  le  Roi    de  Suéde  vient 
*       de  remporter  fur  les  Mofcovites  à  JNerva  ;  &  ils  obligeront  les  François 
de  s'en  tenir,  malgré  eux, aux  Difpofitions  du  Teilament.  Je  ne  m'étonne 
plus  après  cela  fi  dans  la  fuite  de  la  Lettre   nôtre   Auteur  fait   des  mena- 
ces.  La  Nation  Efpagnole  a  prefentement  un  Palladium,  avec  lequel  elle 
peut  feurement  braver  toute  la  Fui/lance  de  la  France, &  fe  faire  craindre 
de  l'Angleterre  &  de  la  Hollande.     Quel  malheur  pour  le  refte  de  l'Euro- 
pe ,  que  les  Efpagnols  n'ayent  pas  eu  plutôt  ce  Palladium  !  Oh  !  qu'on  auroit 
bien  évité  des  pertes  de  batailles  &  de  places ,  &  épargné  tous  les  efforts 
qu'on  a  faits  pour  fauver  cette  miferable  Nation  de  tomber  dans  le  néant. 
Quel  dommage  pour  l'Efpagne ,  qu'elle  n'ait  pas  eu  ce  Palladium  lors  qu'el- 
le perdit  le  Portugal ,  &  lors  qu'en  dernier  lieu  Mr.  de  Pointy  avec  une 
poignée  de  Monde  attaqua,  prit,  &  ravagea  Cartagene  !  On  doit  après  une 
raifon  (i  forte  bannir  toutes  les  jufles  craintes  pour  l'avenir,  &  dormir  en 
feureté.     Mais  pour  moi  qui  n'ai  point  de  foi  pour  ces  fortes  de  preferva- 
tifs  miraculeux,  &  qui  regarde  la  Nation  Efpagnole  déchue  de   fon  an- 
cien luftre,  &  fur  le  pied  que  l'Auteur  même  nous  la  defigne  dans  la  fui- 
te, ainfi  que  j'aurai  l'honneur  de  vous  faire  remarquer,  je  ne  puis  affez 
m'étonner  que  l'Auteur,  qui  veut  paifer  pour  un  homme  de  poids,  puiffe 
avoir  le  front  d'avancer  des  pauvretez  de  cette  nature,  &  de  vouloir  re- 
médier aux  inconveniens  qui  peuvent  arriver,  &  qu'on  peut  avec  fonde- 
ment conjecturer  par  le  pafle,  par  un  expédient  auiïi  ridicule.     L'Auteur 
de  la  Lettre  me  dira  peut-être ,  qu'il  efr.  feur  que  la  France  s'en  tiendra  à  la 
Difpofition  du  Teftament.  En  vérité,  j'avoue  pour  le  coup  qu'il  me  ferme 
la  bouche ,  puifqu'il  eft  0  notoire  que  la  France  eit  fi  religieufe  Obferva- 
trice  des  Edits,des  Traittez,  &  des  Contracls,  particulièrement  lors  qu'il 
font  ratifiez  par  des  Sermens  auifi  folemnels ,  que  ceux  par  lefquels  on  ra- 
tifia le  Contracl;  de  Mariage  de  la  feue  Reine  Marie-Therefe.     L'Archiduc 
Charles,  &  le  Duc  de  Savoye,ne  devroient  point  là-deiTus  fe  mettre  en 
peine  pour  leur  Subilitution,fi  leur  tour  arrive; car , quand  même  la  Fran- 
ce occuperoit  la  plupart  des  places  fortes  de  la  Monarchie  Efpagnole,  elle 
les  vuideroit  d'abord  de  même  qu'elle  a  vuidée  Lille  &  les  autres  places 
qu'elle  a  prifes  fur  un  prétexte  qu'elle  avoue  par  l'acceptation  du  Tefta» 
ment  ne  plus  être  valable  ,  pour  les  remettre  à  ceux  que  le  Teftament 
fubflitue,  puifque  le  dit  Teftament^  pourvoit  ,  &  que  la  France  ne  fe  de- 
part  jamais  de  la  louable  coutume  de  maintenir  religieufement  tous  les 
Traittez,  fans  en  excepter  même  celui  de  Partage.     Continuons  avoir  la 
fuite  de  la  Lettre. 

Je  ne  [ai  fi  je  me  trompe ,   mats  il  me  femble  que  des  difpofitions  de  cette 
nature  font  entièrement  irréprochables  :  fofervis  même  avancer  ,  que  fi  un  par» 
ticulier  ,fe  trouvant  dam  le  même  cas ,  avoit  tefié  d'un  autre  façon ,  £5?  avoit 
wulu  régler  autrement  F  ordre  de  la  fuccejfion  9  il  ri  y  auroit  point  de  Tribu- 
nal 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  411 

val    qui   ne    déclarât  fon   Teftament  nul ,    comme  en  effet ,    il  le  fer  oit  de  a"airf8 
&r0lt>  l'Euro. 


Je  vous  ai  déjà  donné  à  connoître,  Monfleur,  que  la  difpofition  du  Tefta- 
ment, dont  il  eit  queftion ,  eft  infoutenable,  puis  qu'il  y  a  une  Subltitution 
qui  empêchoit  le  Roi  Charles  de  pouvoir  tefter;  &  fi  un  particulier,  fe 
trouvant  dans  le  même  cas,  d'être  en  pofTeffion  d'un  bien  fubftkùé,  eut 
telle  de  la  façon  que  le  Roi  Charles  a  fait,  &  eut  voulu  régler  l'ordre  de 
la  Subftitution  d'une  autre  manière  qu'elle  n'étoit  réglée,  il  n'y  auroit  point 
de  Tribunal  qui  ne  déclarât  le  Teftament  nul ,  comme  en  effet  il  le  feroit 
de  Droit,  par  tout  ailleurs  qu'au  fupreme  Tribunal  de  France,  où  l'Utilité 
règle  la  Juflice.  Ainfi ,  le  Teftament  du  feu  Roi  Charles  Secoad  eft  abfo- 
lument  de  nulle  valeur.    L'Auteur  continue  ainfi. 

Or ,  fi  le  'Teftament  du  feu  Roi  eft  jufle  ,  ce  que  Von  ne  fauroit  contefter , 
comment  pourroit-on  s'y  oppofer  jufte  ment  ?  La  juflice  &  ï  équité  font  uniques. 
Elles  ne  peuvent  pas  changer  de  nature  en  changeant  de  pais  ,  ni  protéger  en 
même  temps  deux  partis  contraires.  Cefi  auffi  ce  que  le  Roi  Très-Chrêtien 
a  très-bien  reconnu.  S'il  navoit  voulu  confulter  que  /es  intérêts  ,  il  s'en  feroit 
tenu  au  Traitté  de  Partage  ;  &  ,  au  hazard  d'une  Guerre  ,  il  auroit  efi'ayé  de  fi 
rendre  Maître  des  Provinces  aui  lui  et  oient  defignées  :  mais ,  l'équité  qu'il  a  re- 
marquée dans  le  Teftament  du  feu  Rjai  Charles  lui  a  fait  quitter  toutes  ces  pen- 
fées.  Il  a  veu  que  fon  Honneur,  fa  Confcieîice  ,  &  la  bonne  Politique  ne  lui 
permettaient  pas  d'entreprendre  par  complaifance  pour  les  Etrangers  une  Guerre , 
dont  l'unique  but  feroit  de  ravir  à  fon  petit-fils  une  Couronne  qui  lui  eft  lé- 
gitimement échue  ,  mais  qu'au  contraire  il  trouverait  dans  le  parti  qu'il  a 
pris  toute  forte  de  feureté ,  d'honneur ,  £5?  d'avantage. 

J'ai  déjà  dit  que  le.Teftament  du  feu  Roi  d'Efpagne  n'eft  pas  juile:  ain- 
fi j'infère,  qu'il  y  a  donc  de  la  juflice  à  s'y  opofer.  C'eft ,  à  la  vérité ,  à  la 
partie  lefée  à  le  faire*  mais,  il  y  a  aufîi  de  la  charité  à  aider  la  partie  op- 
prefTée  à  recouvrer  ce  que  la  fupercherie  ou  la  violence  lui  enlevé.  Je 
parle  toujours  fuivant  le  premier  Point  de  Droit  de  l'Auteur;  car,  pour 
l'Article  de  la  convenance,  j'aurai  à  dire  bien  des  chofes  de  plus,  lors  que  je 
l'examinerai?  à  fond.  L'Auteur  dit  que  la  juflice  &  l'équité  font  uniques , 
&  queSaMajefléTrés-Chrêtienne  l'a  très-bien  reconnu  \ mais, ceci  eft  équi- 
voque, car  on  peut  bien  connoître  une  chofe  bonne  fans  la  fuivre,  video 
meliora  probcque ,  détériora  fequor,  &  on  ajoûteroit  à  propos  utiliora.  Mais 
comme  la  fuite  dit  qu'elle  a  remarqué  l'équité  du  Teftament,  il  eit  à  fupo- 
fer  qu'on  regarde  pour  équitable  tout  ce  qui  eft  utile ,  ici  œquius  quod  valu 
dius,  ainfi  que  j'ai  déjà  dit;  l'intérêt  particulier  faifant  envifager  les  chofes 
d'une  autre  manière  qu'elles  ne  font,  &  qu'on  n'a  quitté  les  avantages  de- 
fignez  parle  Traitté  de  Partage,  que  parce  qu'on  avoit  tout.  A  l'égard 
de  ce  que  l'Auteur  dit,  que  fon  honneur,  fa  confeience,  &  la  bonne  Poli- 
tique ne  lui  permettoient  pas  &c. ,  j'avoiie  que  la  bonne  Politique  de  Saint 

Fff  2  Machia- 


PE. 


4i2    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,    ET 

Amuss  Machiavel , qui  fait  préférer  l'utile  aujufle  &  à  l'honnête,  peut  avoir  lieu; 
cen.  de  mais, pour  l'honneur,  permettez  moi,  Monfieur ,  que  je  garde  le  filence.  Je 
v  p^RO"     ne  parlerai  jamais  qu'avec  refpect  des  perfonnes  qui  font  élevées  au-defîus 

'. du  commun  des  hommes:  ainfi  j'aime  mieux  me  taire;  ce  qui  fait  que  je 

paiTerai  fous  filence  ce  que  quelques  perfonnes ,  qui  n'ont  pas  le  même 
égard  que  j'ai  pour  ces  Têtes  facrées ,  difent  qu'il  y  a  toujours  de  l'hon- 
neur de  tenir  fa  parole ,  &  non  pas  de  la  rompre  de  but  en  blanc.  Pour 
la  confcience,  je  ne  fai  que  dire  là-defTus,  puifque  cela  dépend  de  favoir 
laquelle  des  Morales  on  fuit.  Je  fai  bien  qu'il  n'y  en  devroit  avoir  qu'une 
feule,  puis  qu'il  n'y  a  qu'une  Loi  ancienne,  ratifiée  par  la  nouvelle;  mais, 
je  fai  auffi  qu'il  y  a  des  gens  qui  flattent  les  confciences  ,  &  qui,  en  apla- 
niffant  le  chemin  du  Ciel ,  font  précipiter  dans  l'Abifme.  J'avoue  que  je  ne 
fuis  pas  allez  Théologien  pour  vous  parler  fur  ces  fortes  de  matières;  mais, 
je  vous  dirai  ce  qu'un  homme  de  bon  fens  a  trouvé  dans  ce  nouvel  évé- 
nement, qui  troubleroit  une  bonne  confcience.  C'eit,  dit-il,  que  le  Roi 
Trés-Chrêtien  ratifia  le  Con tract  de  Mariage  avec  toutes  les  Claufes  de  Re- 
nonciation fpecifiées  ci-devant,  par  deux  Sermens  confecutifs;car,  le  Roi 
de  France,  incontinent  après  que  la  lecture  du  Serment  fut  achevée  ,  pofa 
la  main  fur  le  MiJJ'el  qui  lui  fut  prefenté  par  Mazarin ,  &  jura  fi  vifte,  que  le 
Roi  Catholique  ne  s  en  aperceut  pas:  de  forte  que  celui-ci,  levant  lente- 
ment la  main  Droite,  &  ayant  fait  avec  gravité  un  ligne  de  Croix,  il 
la  pofa  fur  les  Evangiles  &  les  Canons  que  le  Patriarche  des  Indes 
lui  prefenta ,  jurant  tous  les  Articles  fuivant  la  teneur  des  Contracts. 
Puis ,  fe  tournant  vers  le  Roi  Très-Chrétien ,  &  voyant  qu'il  ne  juroic 
pas,  il  dit,  Eh  !  comment !  Le  Roi  de  France  m  jure-t-il  point ■?  Et  à  ce  mot 
le  Roi  Très- Chrétien  s'avançant  réitéra  le  Serment.  Voilà  donc  deux 
Serments  confecutifs  d'obferver  le  Contract  de  Mariage  &  la  Renoncia- 
tion, &  ce  avec  un  Roi  Catholique,  &  non  pas  foupçonné  d'Herefie  comme 
Charles-Quint,  &  auxquels  Serments  tout  le  Relâchement  delà  Morale, ni 
la  Probabilité,  ne  fauroyent  donner  un  tour  flatteur.  Ce  contract  de  ma- 
riage^ la  Renonciation ,  excluent  de  la  Monarchie  d'Efpagne  tous  les 
defeendans  de  l'Infante  Marie-Therefe  pour  jamais ,  &  fous  quelque  pré- 
texte que  ce  foit  :  cependant ,  on  y  a  contre-venu,  &  on  y  contrevient ,  non- 
obitant  un  double  Serment, &  fur  la  feule  Difpenfe  d'une  Pièce  aulïi  apo- 
cryphe &  clandefline,  qu'eit  le  Teftament  que  le  Roi  d'Eipagne  a  fi- 
gné  ,  dans  un  temps  que  fa  maladie  i'avoit  réduit  à  ne  favoiT  difeer- 
ner  le  blanc  du  noir.  Si  la  confcience  le  permet  après  cela,  on  a  tort 
dans  les  Cours  Criminelles  de  faire  le  Procez  à  ceux  qui  font  dans  de 
pareils  casj  &  tout  crime,  pour  criant  qu'il  foit,  ne  doit  jamais  blelTer 
la  confcience.  Je  vous  prie,  Monfieur,  de  remarquer  dans  le  Contract 
de  Mariage  ,  &  dans  les  Actes  de  Renonciation,  que  je  vous  envoyerai 
à  la  fin ,  qu'il  y  a  des  Articles  tres-forts ,  &  qui  ne  fauroient  fauver  l'in- 
tégrité d'une  confcience  qui  auroit  juré  de  les  obferver,  &  qui  cependant 
y  manque.  Et,  afin  que  vous  ne  foupçonniez  pas  %p  je  vous  avan- 
ce 


»3 

1J 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.   DCC.   I.  41; 

ce  rien  de  mon  chef,  voici  la  Forme  du  Serment  que  le  Roi  Très-Chrê-   Affaire 
tien  lit.  Gf-N-  nE 

„  Nous  Louis,  par  la  grâce  de  Dieu,  Roi  Tres-Chrêtien  de  France  &    LEUR°- 
de  Navarre ,  promettons  fur  nôtre  honneur,  en  foi  &  parole  de  Roi,  " 

jurons  fur  la  Croix,  les  Saints  Evangiles,  &  Canons  de  la  Méfie,  que  nous 
avons  touchez,  que  nous  obferverons  &  accomplirons  entièrement,  de 
„  bonne-foi,  tous  &  chacun  des  Points  &  Articles  contenus  au  Tràitté 
„  de  Paix,  Renonciation,  &  Amitié,  comme  auffi  les  Articles  fecrets  du 
„  même  Traitté,  fait  &  conclu  en  nôtre  nom,  par  nôtre  très-cher  & 
„  bien  aimé  Coufin  le  Cardinal  Mazarin  ,  &  nôtre  très-cher  &.  très-aimé 
„  Coufin  Don  Louis  Mendez  de  Haro  &  Gufman  Duc  d'Olivarés,  au  nom 
„  de  très-Haut,  très-Excellent ,&  tres-Puiffant  Prince , Philippe ,  aufii  par 
„  la  grâce  de  Dieu,  Roi  Catholique  d'Efpagne,  noflre  très-cher  &  bien- 
„  aimé,  bon  Frère, Oncle,  &  Beau-Pére,  le  7.  jour  de  Novembre  16 s 9. 
„  dans  l'Ifle  des  Faifans  ,  &  par  nous  ratifié  le  24.  du  même  mois  &c. 
„  Nous  ferons  tout obferver, tenir,  &  garder  inviolablement  de  nôtre  part, 
„  fans  venir  au  contraire  ,  ni  foufFrir  qu'il  y  foit  contrevenu  en  quelque 
„  forte  &  manière  que  ce  foit.  En  foi  de  quoi  nous  avons  fîgné  la  pre- 
,,  fente  de  nôtre  propre  main  ,  &  y  avons  fait  apofer  nôtre  Sceau,  en  la 
„  dite  Ifle  le  6.  jour  de  Juin  1660 ,  &  de  nôtre  Règne  le  18, 

Suite  de  la  Lettre. 

Le  fentiment  d'un  fi  grand  Roi ,  contre  fes  propres  convenances ,  efl  fans  doute 
d'un  poids  confiderable  \  mais  ce  qui  décide  entièrement  la  quefiion ,  cefi  le  confient  e- 
ment  univer/el  &  unanime  de  tous  les  Etats  &  Ordres  de  la  Monarchie.  Jus 
efl  in  Regnis.  On  ne  fiauroit  nous  conte  fier  le  Droit  de  reconnoitre  celui  à  qui 
nous  devons  obeïr ,  £5?  de  juger  s'il  a  les  qualité?,  pour  cet  effet.  Cela  eft  Ji  vrai , 
que  le  feu  Roi ,  avant  que  de  difpofer  de  la  Succefjïon  ,  trouva  neccfjaire  de 
confulter  fes  Confeils  d'Etat  &  de  jufiice ,  &  que  ce  fut  fur  leurs  Con fuites 
quil  régla  fon  Tefiament  de  la  manière  quil  fit.  Nous  adhérons  tous  à  ce 
Tefiament ,  &  reconnoiffons  le  Duc  d 'Anjou  pour  notre  Roi  &  Seigneur.     En 

faut-il  d'avantage?  Peut -il  vous  rejler  encore  quelque  difficulté  fur  la  quefiion  de 
Droit?  Je  me perfuade  que  non  \  Î3  >  dans  cette  J'upofition ,  je  pajfe  à  la  féconde , 

/avoir  celle  de  la  convenance  au  bien  public. 

C'efl  ici  la  conclufion  de  l'Auteur  de  la  Lettre  fur  fon  premier  Point 
de  Droit,  qu'il  veut  valider  par  le  poids  confiderable  des  fentimens  d'un  fi 
grand- Roy  contre  Ces  propres  convenances.  J'aurois  ici  lieu  de  lui  contef- 
ter que  l'événement  prefent  foit  contre  les  convenances,  fi  non  prefentes, 
du  moins  futures  ,de  la  France;  mais,  j'auray  lieu  de  vous  dire  quelque  cho- 
fe  là-deffus  dans  la  fuite.  Je  ne  veux  cependant  pas  nier  que  des  fenti- 
mens qui  viennent  de  fi  haut  n'ayent  un  poids  confiderable;  car,  fi  je  m'y 
opofois ,  ce  feroit  à  tort ,  &  toutes  les  Procédures  des  Chambres  de  Réunion 
établies  depuis  la  Paix  de  Nimegue,pour  dépouiller  divers  Princes  de  leurs 

Fff  3  Etats 


4H    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  Etats  héréditaires  me  dementiroient.  Ainfije  paiTerai  à  ce  qu'il  dit,  que  le 
gen.  de  Y)UQ  d'Anjou  eft  reconnu  par  un  Confentement  univerfel  des  Etats  &  Or- 
l'Euuo-  foe$  je  ja  jvionarchie.  Peut-on  avoir  l'affeurance  d'avancer  des  chofes  fi 
'1 — .  opofées  à  la  vérité?  Efl-ce  qu'un  Cardinal,  &  quatre  ou  cinq  perfonnes  ga- 
gnées ,  font  tous  les  Etats  &  Ordres  de  la  Monarchie  ?  Eh,  me  dira-t-on, 
tous  les  Vice-Rois  &  Gouverneurs  auiïi-bien  que  les  Peuples  ont  reconnu 
le  Duc  d'Anjou.  Il  eft  vray;  mais,  c'eft  par  les  ordres  delà  Régence,  du 
Cardinal ,  &  de  quatre  ou  cinq  perfonnes  gagnées  pour  renverfer  les  Confti- 
tutions  fondamentales  de  la  Monarchie.  Ce  Cardinal  a  toujours  eu  le  cœur 
François ,  depuis  les  connoiffances  familières  qu'il  a  eu  à  Rome  avec  Ma- 
dame de  Ch.  ...  qui  étoit  Françoife  ,  &  il  eft  à  prefumer  que  les  autres 
qui  fe  font  joints  à  luy,  pour  obliger  par  des  Menaces  fpiritueîles  ,  &  des 
Excommunications,  un  Roy  foible,  infirme,  &  délicat  de  confcience  ,  à 
faire  un  Teftament  qu'il  n'avoit  pas  Droit  de  faire,  &  abfolument  contrai- 
re aux  Difpofitions  du  feu  Roy  fon  Père  (à  quoi  il  a  pourtant  refifté,  tan- 
dis qu'il  a  eu  le  difcernement:  )  les  autres ,  dis  je ,  font  devenus  François ,  à 
fin  de  s'enrichir  fans  prendre  la  peine  d'aller  au  Pérou.  Compte-t-on  pour 
rien  tant  de  Grands,  qui  font  gens  d'honneur,  &  des  meilleures  Teftesde 
la  Monarchie,  qui  n'ont  eu  aucune  part  à  cette  Filouterie  d'Eftat, comme 
on  fapelle  à  Vienne,  ou,  comme  d'autres,  à  ce  Miftére  d'Iniquité?  Les 
uns  ayant  été  exilez  de  longue  main,  &  les  autres  s'étant  abfentez  d'eux 
même,  pour  ne  pas  tremper  dans  une  Vilenie  indigne  de  leur  cœur  géné- 
reux. Compte-t-on  pour  rien  un  nombre  infini  de  Peuples ,  tant  enEfpagne 
que  dans  les  Etats  qui  en  dépendent,  qui  ont  le  cœur  outré  de  voir  que  , 
fans  confulter  l'inclination  qu'ils  ont  pour  la  juftice,  ils  font  obligez,  pour 
éviter  pis,  de  fubir  les  ordres  d'une  Ufurpation?  Je  ne  vous  parle  point, 
Monfieur,  par  des  fupofitions,  &  je  ne  vous  avance  rien  que  ce  que  les 
Peuples  difent;  &  le  temps  pourra  vous  en  éclaircir,  Ci  jamais  ces  Peuples 
peuvent  avoir  la  liberté  de  dire  leurs  véritables  fentimens:  &  fi  jus  eft  in 
regms,  on  eft  feur  que  la  pluralité  regarde  ce  qui  fepaiTe  comme  une  Super- 
cherie ,  &  la  dételle  comme  telle. 

Je  ne  voudrois  pas  faire  l'injuftice  aux  Confeils  d'Etat  &  de  Juftice  d'EC 
pagne  de  dire  avec  l'Auteur  de  la  Lettre,  que  c'eft  fur  leur  Confultes  que 
le  feu  Roy  d'Efpagne  a  réglé  le  Teftament  clandeftin  qu'on  luy  a  fait  ligner 
fans  qu'il  fût  ce  qu'il  faifoit.  Ces  Confeils  ont  toujours  été  opofez  à  une 
D-ifpofition  fi  contraire  au  bien  de  la  Monarchie;  &  Sa  Majefté  Impériale 
en  a  des  preuves  réïterées  par  plufieurs  aflTeurances  que  le  feu  Roy  luy  a 
données  de  fa  main,  &  par  fon  AmbafTadeur,  même  peu  avant  fa  mort, 
auffi  bien  que  par  celle  de  ces  Confeils ,  tandis  qu'ils  ont  été  remplis  par 
de  véritables  Efpagnols  qui  ont  confervé  l'ancienne  Intégrité  de  cette  Na- 
tion genereufe.  Mais, chacun  fait  que  fous  divers  prétextes,  emplois,  ou 
mecontentemens,  on  a  tamifé  la  farine,  &  qu'on  n'a  retenu  que  le  fon. 
Quand  Sa  Majefté  Impériale  ne  feroit  pas  fondée  fur  des  Aftes  auffi  au- 
thentiques que  le  font  la  Renonciation  de  l'Infante  Marie -Therefe,  &  le 
Teftament  clu  Roy  Philippe  IV.  elle  le  feroit  de  s'infcrire  en  faux  contre 

le 


l'Eukc- 

Pê. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.    I.  4ir 

le  Teftament  du  feu  Roy  Charles  Second  ,  par  les  circonftances  qui  veri-  Araires 
fient ,  comment  peu  de  gens,  qui  ont  été  corrompus ,  &  qui  font  capables  de  Gf*-  hy 
tout  entreprendre  ,  ont  extorqué  le  Teftament  dont  il  s'agit  d'un  Prince 
aifé  à  fe  laifTer  aller  à  tout  ce  que  ces  gens  fubornezpouvoient  lui  repre- 
fenter,  &  qui  même  ne  l'a  (Igné  que  dans  un  temps  que  fa  maladie  luy  a- 
voit  affaibli  le  corps  &  l'efprit,  de  forte  qu'il  n'avoit  pas  cette  fanté  de  ju- 
gement qui  donne  la  valeur  aux  Teftaments,  lorfque  d'autres  chofes  ne  les 
rendent  pas  nuls ,  comme  dans  le  cas  prefent.  Je  vous  laiffe  à  penfer, 
Monfitur,  fi  la  Onclufion  de  l'Auteur  de  la  Lettre  a  !a  moindre  vray- 
femblance  d'avoir  éloigné  les  Difficultez',  &  fi  au  contraire  on  ne  voit  pas 
manifeftement  que  fes  principes  font  éloignez  de  la  vérité,  &  qu  on  ne 
fauroit  en  inférer  qu'une  confequence  de  même  nature.  Nous  voici  à 
fon  Point  de  Convenance  qui  commence  ainfi. 

Cette  Çhieflion  par  oit  fî abord  un  peu  plus  embarrajfée  que  f 'autre ,  £5?  elle  îcjl 
en  effet  ;  parce  que  la  plu/part  des  hommes ,  accoutumez  à  ne  reconnoitre  bien- 
feant  &  convenable  que  ce  qui  favori  fe  leurs  intérêts  particuliers,  ne  man* 
quent  jamais  de  raifonmmens  bons  ou  mauvais  -pour  maintenir  leur  Thefe ,  £5?  que 
dans  l'affaire  dont  il  s  agit ,  ces  mêmes  intérêts  particuliers  étant  fort  differens  les 
uns  des  autres,  il  ne  faut  pa^  douter  auffi  que  chacun  ne  fe  fafje  une  Convenance 
publique  à  fa  manière.  Mais ,  pour  peu  quon  veuille  aporter  ici  de  bonne-foi ,  & 
fe  défaire  de  tout  préjugé ,  il  ne  fera  pas  malaifé  de  reconnoitre  que  le  Teftament 
du  feu  Roy ,  bien  loin  d'être  de  nature  à  devoir  troubler  la  tranquilité  publique , 
comme  on  le  publie  en  vos  Provinces  ,  il  en  a  pofé  les  fondemens  folides,  & 
peut  fervir  très-utilement  à  rétablir  &  à  la  rendre  durable  t  pourvu  feulement 
que  de  votre  part  &  de  la  part  de  £  Angleterre  ,  on  ne  fe  laiffe  point  en- 
gager mal-à-propos  dans  une  Guerre  qui  paffsroit  pour  la  plus  injujle  du 
Monde. 

La  Queftion  ,que  l'Auteur  trouve  embarraffée,  ne  Peft  qu'à  fon  égard  , 
puifque,  pour  la  tourner  de  fon  côté  &  à  fon  avantageai  ne  fait  comment 
s'y  prendre,  &  n'appuyé  tout  fon  difeours  que  par  des  chofes  qui  font  pi- 
tié. Ce  que  je  vous  en  diray  vous  en  éclaircira.  Mais,  je  vay  faire  au- 
paravant, comme  en  paffant,  une  petite  Réflexion  fur  l'Intérêt  particulier, 
qu'il  pofe  être  une  pierre  d'achopement  pour  juger jufte  de  cette  Queftion. 
L'Auteur  même  n'eft-il  point  peut-être  dans  le  cas  qu'il  veut  opofer  aux 
autre-  ?  Le  defir  d'être  payé  peut-être  de  quelque  vieux  compte ,  qu'il  con- 
teroit  aurrement  pour  perdu,  ne  luy  feroit-il  point  prendre  le  parti  de  cet- 
te nouveauté  ?  C'eit  du  moins  le  fentiment  d'une  perfonne  qui  me  par- 
tait l'autre  jour  là-delTus,  me  difant  qu'il  y  avoit  bien  des  raifons  qui  peu- 
vent ctre  connues  à  bien  des  gens  ,  qui  donnent  lieu  d'en  faire  la  conjec- 
ture :  ce  queftant,il  y  auroit  julte  fujet  de  craindre  que  fon  intérêt  parti- 
culier ne'  luy  fit  faire  une  fort  méchante  Convenance  publique.  Mais,  ce 
n'eft  pas  à  quoi  je  veux  m'arréter,  &  je  pretens  me  défaire  de  tout  pré- 
jugé, &  d'agir  de  bonne-foi ,  ainfi  que  l'Auteur  demande  ;  mais,  avec  tout 

cela 


4i(5    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  cela,  je  ne  faurois  conduire  que  ce  qui  elt  directement opofé à  ce  qu'il  dit, 
gen.  de  &  qUe  ce  Teflament  fubreptice,  bien  loin  de  pofer  des  fondemens  folides 
i.'Euro-    ^une  Paix  ,    efl  une  fource  infaillible  d'une  Guerre  d'autant  plus  jufte, 

__J qu'elle  n'auroit  pour  but  que  la  confervation  de  l'Europe,  &  d'empêcher 

que  les  Eftats  qui  compofent  cette  Partie  du  Monde  ne  tombent  fous 
l'Efclavage  de  la  France.  Ce  que  l'on  ne  peut  prévenir  qu'en  agifTant  avec 
vigueur,  en  forte  que  la  Puiffance  de  la  France  foit  réduite  à  de  certaines 
bornes,  quelle  ne  puifie  engloutir  quand  elle  le  trouvera  à  propos  les 
differens  Eftats  félon  fa  convenance  particulière  ;  &  c'eft-là  le  folide  fon- 
dement de  la  tranquillité  publique,  &  non  pas  un  Teflament  qui  ouvre 
le  chemin  à  la  France  pour  réuiîir  dans  fes  Invafions  &  fes  Ufurpations ,  & 
pour  l'exécution  des  cruautez ,  dont  Spire,  Worms,  &  lePalatinat  feront 
des  monumens  éternels.  L'Auteur  fe  mêle  de  vouloir  infinuer  à  l'An- 
gleterre &  aux  Provinces-Unies  de  ne  pas  s'engager  mal  à  propos  dans  une 
Guerre,  qui  pafferoit ,  dit-il,  pour  la  plus  injufte  du  Monde.  Je  fuis  é- 
tonné  de  voir  jufques  à  quel  point  cet  Auteur  s'oublie.  L'Angleterre  a 
un  Roy  fage,  clairvoyant,  &  aclif,  &  un  Parlement  dont  les  Membres 
qui  le  compofent,  foit  dant  la  Chambre  Haute,  foit  dans  la  Baffe,  font  & 
feront  des  perfonnes  éclairées,  qui,  non  feulement  connoiffent  l'Intérêt  de 
la  Nation,  mais  quifavent  les  relations  qu'il  peut  avoir  avec  l'Intérêt  public. 
Les  Provinces-Unies  ont  dans  leur  illuftre  Affemblée  Générale  des  per- 
fonnes d'une  fageffe  &  d'une  prudence  confommée,  &  dont  l'intention  ne 
tend  qu'au  bien  gênerai  de  l'Europe.  C'eft  pourquoy  il  faut  s'attendre  de 
leurs  grandes  lumières,  qu'ils  ne  prendront  qu'un  parti  bon  &  jufte  &  fans 
prendre  Confeil  de  l'Auteur  de  la  Lettre,  lequel,  par  la  foibleffe  de  fes  rai- 
fonnemensje  compare  à  un  Ecolier,  qui,  aïant  trop  de  prefomption  &  d'or- 
gueil de  foy-même,  voudroit  s'ingérer  de  donner  des  Leçons  à  fes  Maî- 
tres. Il  n'y  a  perfonne  ,qui  s'étant  défait  de  tout  préjugé  ne  convienne  que 
c'eft  la  Convenance,  non  feulement  de  l'Angleterre  &  de  la  Hollande, 
mais  auffi  de  tout  l'Empire,  du  Portugal ,  du  Nord ,  de  la  Pologne,  de  l'I- 
talie, de  laSuiffe,  &  généralement  de  toute  l'Europe,  de  s'opofer  à  l'exécu- 
tion de  cet  injufte  Teftament.  Je  dis  bien  plus,  lavoir  que  c'eft  aufîî  la 
Convenance  de  la  Nation  Efpagnole.  Vous  ne  trouverez  pas ,  Monfieur , 
que  ce  foient  des  Paradoxes  que  je  vous  avance,  lorfque  j'auray  l'honneur 
de  vous  en  déduire  les  raifons ,  foit  que  l'Auteur  m'en  ouvre  le  chemin,  ou 
autrement.  En  attendant, je  vai  fuivre  fa  Lettre,  qui  continue  ainfl. 

Je  fay  que  vofire  'Traîné  de  Partage  porte  au  fvontifpice  le  motif  du  Bien  Pu- 
blic &?  de  £  Affermiffement  de  la  Paix  générale  ,  (3  je  veux  croire  qucn  lefaifanî 
vous  aviez  réellement  ce  but  en  vue.  Mais  ,  la  première  chofe  ,  que  je  vous  re- 
pondray  là-deffus,fcra  la  même  que  fay  déjà  eu  ï  honneur  de  vous  reprefenter  tou- 
chant la  Renonciation ,  cefi-à-dire  ,  que  là  où  le  motif  ceffe  ,1a  conftitution  & 
la  convention  ceffent  auffi.  Fous  vous  e fies  portez,  au  Traitté  de  Partage , 
pour  empêcher  la  Guerre  \&  il  fe  trouve ,  que ,  bien  loin  de  f  empêcher ,  il  rallume- 
rait dans  le  Monde.   Donc,  ii  doit  refter  nul  &  fans  valeur.    §ue  fi  vous  me 

deman- 


l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.     I.         4r7 

demandez  comment  ce  Traité  ayant  été  fait  dans  une  fi  louable  intention  pourvoit   Atfairfs 
produire  un  effet  fi  contraire  à  fa  fin,  je  vous   repondray  avec   Mr.  de  Qu'iras    GEN-  "e 
Ambajfadeur    Extraordinaire  du    Roy   dans  fon  Mémoire  aux  Eftats  du  12. 
Oclobre   itfpo: 

„  Si  les  PuiiTances,  qui  recherchent  ou  qui  font  recherchées  pour  de  fem- 
„  blables  Traitrez,  n'ont  en  veue  que  de  rendre  la  Faix  durable,  comme 
„  cela  eft  à  croire ,  Elles  doivent  s'affurer  que  ce  feroit  au  contraire  le  mo- 
„  yen  d'allumer  en  Europe  le  feu  d'une  fanglante  guerre,  &  qu'en  tel  cas, 
„  non- feulement  on  verroit  prendre  les  armes  d'un  commun  accord  à  tout 
„  ce  qu'il  y  a  d'Efpagnols  &  d'autres  Sujets  de  la  Couronne ,  depuis  les  Enfans 
„  de  quinze  ans  jufques  aux  vieillards  de  foixante;  mais  que,  plutôt  que  de 
„  fouffrirle  moindre  partage  des  Etats  quicompofent  la  Monarchie,  &  qu'on 
„  difpofât  ainfi  de  leur  fort,  ils  auroient  recours  à  tous  les  moyens  légitimes 
,,  qu'ils  jugeroient  leur  pouvoir fervir,  quels  qu'ils  puiiTent  être,  fuivant  en 
„  cela  la  maxime  qui  veut  que  dans  les  maux  extrêmes  on  employé  d'extrê- 
„  mes  remèdes,  &  fe  confiant  que  Dieu  Protecteur  du  bon  droit  favorife- 
„  roit  leurs  jufles  efforts  &  fe  déclarerait  pour  eux. 

L'Auteur  dit  qu'il  veut  croire  que  le  but,  qu'on  a  eu  en  faifant  le  Traitté 
de  Partage,  a  été  le  bien  public:  ce  mot  veut  marque  qu'il  ne  le  dit  que 
par  une  complaifance ,  qui  efl  éloignée  de  la  perfuafion  ;  cependant,  fi ,  fé- 
lon lui,  les  fentimens  de  Sa  Majefté  Très-Chrêtienne  font  d'un  poids  con- 
fiderable,  fes  mêmes  fentimens  énoncez  dans  le  Traitté  de  Partage  lui  en 
devroient  ôter  tout  doute.  Mais,  je  paffe  fur  ces  fortes  de  bagatelles,  &  je 
viens  à  fon  raifonnement ,  où  je  lui  nie  la  féconde  propofition  de  fon  fyl- 
logifme,  favoir  que  le  Traité  de  Partage  auroit  allumé  la  guerre  dans  le 
monde.  Je  donnerai  la  raifon  de  ma  négation ,  lors  que  je  viendrai  à  un  des 
articles  fuivants  de  fa  Lettre,  où  il  parle  de  nouveau  de  ce  Traité.     Je 
vois  cependant  que  fa  féconde  propofition  n'eit  fondée  que  fur  un  Article 
qu'il  raporte  d'un  prétendu  Mémoire  aux  Etats  le  12.  Oclobre  1699.     Il 
ne  conîte  pas  par  les  Regiftres  de  Meilleurs  les  Etats  qu'on  ait  reçu  &  lu 
dans  cette  Illuftre  AiTemblée  un  pareil  Mémoire  j  ainfi  il  me  femble  que 
n'étant  pas  auffi  authentique  que  l'Auteur  le  fupofe,  fon  fondement  n'eft 
pas  de  grands  poids.     L'Article  qu'il  raporte  contient  que  tous  les  Ef. 
pagnols  &  Sujets  depuis  quinze  ans  jufques  à  foixante  auroient  pris  les  ar- 
mes, &  voilà  la  Guerre  que  le  Traité  de  Partage  auroit  allumée.   En  vé- 
rité, les  exploits  glorieux,  les  conquêtes  nombreufes,que  lesEfpagnols  ont 
faites  depuis,cinquante  ans,  &  l'Etat  formidable  dans  lequel  la  Nation  Êf- 
pagnole  fe  trouve  préfentement  tant  par  Mer  que  par  Terre,  ôtent  tout 
fujet  de  dire  que  l'exprefllori  rapportée  ci-deflus  n'eft  qu'une  Rodomonta- 
de Efpagnole.    Mais,  laiiTant  cela  à  part  jufques  à  une  autre  occafion,  je 
me  trouve  fort  embaraffé  pour  juger  par  qu'elle  raifon  l'Auteur  va  mêler 
dans  fa  chetive  Lettre  un  auffi  grand  Miniftre  que  l'eft  Son  Excellence 
Monfieur  Don  Francifco  Bernardo  de  Quiros  qui  a  eu  la  gloire  de  ligner, 
fous  les  fages  directions  de  fon  AltefTe  Electorale  de  Bavière ,  auquel  il  a- 

Tome  XL  Ggg  voit 


PE. 


4ï8    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Actawes  voit  eu  ordre  d'Efpagne  de  fe  conformer  ;  de  figner  ,dis-je ,  le  Traitté  de  Paix 
cen.  de  de  Rvfwick,  qui  félon  les  conjonctures  étoit  très- avantageux  à  l'Efpagne. 
l'Euko-  çependant,  de  crainte  de  ne  pas  conjecturer  julle,  je  me  tairai,  &  je  ne 
m'attacherai  pas  aux  trop  fubtiles  fpéculations  de  quelques  perfonnes  qui 
croient  que  cet  extrême  remède  du  Teftament  eil  une  Affaire  fuggerée  &  né- 
gociée par  ce  Miniflre  pendant  fon  féjour  à  Anvers,  &  que  c'eft-là  ce  qui 
eft  dit  dans  l'article  de  queftion,  que  les  Efpagnols  aur  oient  recours  à  tous  les 
moyens  légitimes  qti 'ils  juger oient  leur  pouvoir  fervir ,  &  que  l'Auteur  dit  plus 
bas  que  l'événement  a  juliifié  la  fincérité  des  remonftrances.  Et  que  même 
c'eft  la  raifon  qu'on  a  eue  de  dater  d'Anvers  la  Lettre  que  j'examine,  afin 
que  le  coup  du  Teftament  ayant  eu  fa  fource  dans  cette  Ville-là,  on  duc 
craindre  quelque  effet  funefte  des  menaces  qu'on  fait  dans  la  fuite  de  la 
Letrre,  dont  je  vous  donne  la  continuation. 

Voilà,  Monfieur,  et  qui  rendroit  vôtre  Traitté  T  lnfirument  de  la  Guerre ,  &  ' 
non  pas  celui  de  la  Paix.  Mr.  Quiros  vous  parloit  en  homme  fincère ,  lors  qu'il 
vous  faijoit  ces  Remonftrances ,  &  l'événement  les  a  jufiifiées ,  puis  qu'à  peine  a- 
t-on  eu  connoiffance  du  Teftament  du  Roy  en  Ef pagne ,  que  tous  les  differens  Etats 
qui  cumpofent  la  Monarchie  ont  déclaré  qu'ils  facrifieroient  bien,  &  vies,  pour  le 
maintenir ,  rj?  pour  s'oppofer  à  toute  forte  de  démembrement.     J'efpére  que  vous 
ferez  ià-defus  une  férieufe  réflexion  ,  rj?  que  vous  ne  rejetterez  pas  les  offres  a- 
miables  de  Paix  &  d'Union  que  fon  vous  fait  tous  les  jours  de  la  part  du  Roy  & 
de  la  Nation.     Il  ne  faut  pas  que  vous  ceffiez  de  nous  confiderer  comme  vos 
Amis,  ni  que  la  bonne  correfpondance  qui  va  s'établir  entre  les  deux   Couronnes, 
vous  donne  la  moindre  inquiétude.     Quoique  nous  aions  receu  pour  Roy  un  Prin- 
ce de  France,  il  ne  s'enfuit  pas  que  nous  devenions  François  pour  cela ,  ni  même 
qu'api  es  avoir  été  animez  d'un  zélé  fi  ardent  &  fi  unanime  pour  le  maintien  de 
i  honneur  £5?  des  prérogatives  de  la  Couronne  i$  pour  la  confervation  de  la  totali- 
té de  la  Monarchie,  nous  nous  defiftions  de  ce  but  honnête  &  ju fie  ,  maintenant  que 
nous  l'avons  obtenu.  Fous  devez ,  Monfieur,  avoir  meilleure  opinion  de  la  Nation 
Efpùignole.     On  ne  lui  a  jamais  reproché  d'avoir  le  cœur  bas ,  ni  d'aimer  Vefcla- 
vage  ,  £57'  elle  ne  donnera  pas  fujet  de  le  faire  à  l'avenir.     L 'amitié  du  Roy  Très- 
Chrétien  nous  efi  chère  &  précieufe,  £5?  nous  ferons  toutes  chofes  pofjïbles  &  juftes 
pour  la  cultiver  &  la  conferver.  Mais ,  quelque  eftime  que  nous  en  faffions ,  elle 
ne  nous  obligera  pas  à  renoncer  fans  fujet  à  nos    anciennes  Alliances  &  Con- 
fédérations. La  conduite ,  que  nous  avons  tenue  par  le  paffé  avec  la  Branche 
d'Autriche  en  Allemagne,  pourra  vous  faire  juger  de  celle  que  nous  tiendrons 
à  l'avenir  avec  celle  de  Bourbon  en  France.     L'Union  étoit   étroite  ,   elle  a- 
voit  été  laifsée  pour  maxime  aux  deux  Branches  par  les  anciens  Fondateurs , 
£5?  de  part  &  d'autre   on    s'efforçoit   chaque  jour   de  l'entretenir  par   toutes 
fortes  d'égards  &  de  bienfeances.     Mais,  cela  n'empechoit  point    que  l'une  (S 
l'autre  Branche  ne  tendît  à  fes  propres  intérêts    &  avantages  dans  toutes  les 
chofes  ou  la  Raifon  d'Etat  fe  trouvoit  engagée.     Je  n'en  veux  point  d'autres 
exemples  que  ceux  des  Traitez  de  Munfler,  de  Nimegue  ,&  de  Ryfwick,  qui 
tous  trois  ont  été  conclus  feparement ,  malgré  les  vives  infiances  des  Minifires 

refpec 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  4xp 

refpeïïifs  de  ï '  Augufie  Mai  (on;  ou  bien  la  dernière  Guerre ,  dans  laquelle  le  Roy    Affaires 
Catholique  ne  s'engagea  à  la  Jolliciiation  des  trois  Putfsances,  que  long-tems  après      cen.de 
que  £  Empereur  s'y  fut  interefsé. 


Cet  Article  efl  long,&  contient  différentes  chofes;  ainfi,  je  crois  qu'il  fe- 
ra neceffaire  de  l'examiner  par  période,  ou  du  moins  d'en  tirer  le  fens  de 
plutieurs  ,  lors  qu'elles  ont  du  raport  l'une  avec  l'autre.     En  premier  lieu, 
il  remet  fur  le  tapis  Mr.  Quiros  &  parle  de  h  fincerité.     Que  veut-t-il  dire 
par-là?   Perfonne  ne  difputeque  Mr.  Quiros  ne  foit  fincere,  même  au  de- 
là de  la  Coutume  d'un  Minilire,  &  d'un  Miniftre  Ëfpagnol  qui  a  fait  fon 
aprentiflage  à  Rome.     Si  l'Auteur  pretendoit  par-là  d'infulter  à  ce  grand 
Miniflre,  dont  chacun  refpecle  le  mérite,  il  en  feroit  démenti  par  l'incli- 
nation fincere  que  ce  grand  homme  a  toujours  témoigné  pour  le  bien  &  l'a- 
vantage des  Etats  des  Provinces-Unies  ,  foit  par  le  foin  qu'il  a  eu  d'entre- 
tenir une  bonne  correfpondance  entre  le  Roy  fon  Maître  &  Eux,  lors  mê- 
me qu'on  foupçonnoit  la  Négociation  duTraitté  de  Partage ,  foit  en  empé-* 
chant  quon  ne  fit  le  Canal  projette  dans  les  Païs-Bas  Efpagnols  pour  réta- 
blir le  commerce  d'Anvers,  &  qu'on  n'y  établit  des  Manufactures ,  foit  en 
travaillant  auRetablilTement  du  Commerce  avec  leurs  Voifins,&  notament 
avec  laHollande.nes'étant  même  engagé  d'envoyer  à  Madrid  une  Requête  des 
Communes  de  Bruxelles  qui  lui  fut  prefentée  fur  ce  fujet,  que  pour  entre- 
tenir une  parfaite  intelligence  avec  les  Etats  Généraux,  &  la  bonne  union 
amitié,  foumiiîion,&  déférence  qu'il  a  toujours  eue  pour  Son  AltefTe  Electo- 
rale de  Bavière.     Ces  chofes  font  fi  notoires  ,    fur-tout  aux  Miniflres  pu- 
blics, qu'il  feroit  fuperflu  de  m'y  arrêter.  Les  Reflexions  que  l'Auteur  de- 
mande qu'on  faffe  fur  les  differens  Etats  de  la  Monarchie  Efpagnole,  à  l'é- 
gard du  Teftament ,  font  déjà  faites  plus  haut ,  où  on  le  nie  ,  &  fur  des  fon- 
demens  folides,  qu'il  n'efl  pas  neceffaire  de  révéler  à  l'Auteur.     Sur  les 
offres  amiables  de  Paix  &  d'Union  qu'il  dit  qu'on  fait  ,ce  ne  font  que  des 
pièges  pour  attraper  des  innocens,  &  non  pas  pour  leurrer  des  perfonnes 
clairvoyantes  ;  car  il  efl  incontellable  par  plufieurs  preuves  réitérées,  &  mê- 
me récentes,  qu'il  ny  a  aucun  fond  à  faire  fur  les  Traittez  qu'on  fait  avec 
certaines  Puiffances,  non  plus  que  fur  ceux  qu'on  feroit  à  prefent  avec  les 
Efpagnols  animez  de  l'efprit  de  ceux  qui  n'en  tiennent  aucun.  C'efl  parler 
en  Oltrogot,  que  de  dire,  que  pour  avoir  reçeu  pour  Roy  un  Prince  Fran- 
çois, les  Efpagnols  ne  deviendront  pas  François;  c'eft  raifonner  comme 
un  homme  qui  ne  connoit  pas  les  principes  des  chofes  fur  lefquelles  il 
veut  faire  le  difeoureur,  &  qui  ignore  les  Maximes  de  la  France:  j'auray 
heu  de  détruire  cy-après  fon  abfurde  confequence.    Quelle  opinion  veut- 
il  qu'on  ait  de  la  Nation  Efpagnole,  quand  on  voit  qu'elle  prend  le  chemin 
de  l'Efclavage,   qu'elle  n'a  jamais  aimé,  dit  Y  Auteur?  Ëfl-ce  n'avoir  pas 
le  cœur  bas,  mais  au  contraire  l'avoir  généreux  &  bien  placé ,  que  défaire 
les  fournirions  ferviles  qu'on  a  faites  envers  la  France  depuis  la  mort  de 
Charles  lecond?  &  Dieu  fait  quelles  elles  feront  à  l'avenir.  Il  efl  vray,  qu'il 
ne  faut  point  imputer  à  toute  la  Nation  Efpagnole  ce  que  quelques  mal- 

Ggg  2  heu- 


l'Euro« 

PE. 


42o    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    heureux  font  après  s'être  emparez  de  l'Autorité,  par  une  fraude  auffi  crian- 


te que  celle  du  Teitament.   Ainfi ,  ceux  d'entre  la  Nation  Efpagnole ,  qui 
confervent  l'ancienne  intégrité,  trouveront  toujours  que  les  honneftes  gens 


GEN. DE 

JEv 

PE. 


les  ïauront  diltinguer  entre  ceux  que  l'intérêt  particulier  &  fordide  a  abâ- 
tardi; &  l'on  fera  toujours  prêt  de  faire  réparation  à  toute  la  Nation,  fi 
elle  ne  fe  laiffe  pas  aller  au  torrent  qui  par  la  violence  la  peut  entrainer  aa 
précipice  qu'on  lui  prépare. 

La  conduite  pafTée  avec  la  Branche  d'Autriche  d'Allemagne  ne  fauroit 
faire  juger  jufle  de  celle  que  l'Auteur  prétend  que  les  Efpagnols  tien- 
droient  à  l'avenir  avec  celle  de  Bourbon  :  la  comparaifon  n'a  abfolument 
point  de  lieu;  &  les  trois  exemples  des  Paix  de  Weitphalie,  de  Nime- 
gue,  &  de  Ryfwick,  ne  font  rien  au  but  pour  lequel  on  les  avance  ;  en 
voici  la  raifon.  Chacun  fait  que  la  Guerre,  qui  fut  commencée  par  l'en- 
trée de  Guftave-Adolphe  Roi  de  Suéde  en  Allemagne,  n'a  eu  pour  but 
que  de  diminuer  la  grande  PuiiTance  de  la  Maifon  d'Autriche,  qui  donnoit 
♦le  même  ombrage  aux  differens  Princes  &  Etats  de  l'Europe,  que  la  Fran- 
ce leur  donne  à  prefent.  Les  échecs  que  la  Maifon  d'Autriche  receut  dans 
cette  guerre-là ,  l'ayant  réduite  à  la  foibleffe  qu'on  fouhaittoit ,  on  traitta  la 
Paix  à  Munlter,  &  la  même  foibleiTe  obligea  les  deux  Branches  à  figner 
k  Paix  l'une  avant  l'autre.  Celle  de  Nimegue  fut  lignée  de  même ,  mais 
avec  la  foibleffe  qui  en  étoit  une  des  caufes:  il  y  en  eut  une  autre,  qui  é- 
toit  la  grande  PuiiTance  de  laFrance,quipretendoit  de  donner  laLoy  ;  ain- 
fi  falut-il  lafubir  &  la  figner  feparementpour  éviter  l'effet  des  menaces  que 
la  France  faifoit,  &  qu'on  n'étoit  pas  en  état  de  parer.  Pour  la  Paix  de 
Ryswick,  l'Auteur  pourroit  favoir  les  raifons  qui  l'ont  fait  figner  feparé- 
ment,  fans  conter  ni  les  foiblefles  de  l'Efpagne ,  ni  les  allarmes  qu'on  y 
avoit  eu  après  la  perte  de  Barcellonne  ,  ni  la  hauteur  avec  la  quelle 
la  France  prefcrivoit  le  tems  de  la  figner.  Je  voudrois  bien  voir,  en  fupo- 
fant  entre  l'Efpagne  &  la  France  une  pareille  Union  qu'il  y  a  eu  en- 
tre les  Branches  d'Autriche,  d'Efpagne,  &  d'Allemague,  &  qu'on  fut 
dans  la  conjoncture  de  figner  quelques  Traittez  ,  ii  les  Efpagnols  , 
quelque  intérêt  qu'ils  y trouvaifent,  ôferoient aller  ligner,  feparement  de 
la  France  ,  aucun  Traitté  ,  &  fans  fè  conformer  à  ks  Inir.ruc~r.ions 
&  à  Confeils  ,  de  la  même  manière  fervile  que  la  Régence  prefente 
d'Efpagne  le  fait  à  prefent,  ce  qui  n'efl  encore  qu'un  prélude  de  ce  à 
quoi  on  doit  s'attendre  pour  l'avenir;  ce  qui  deftruit  abfolument  la  com- 
paraifon que  l'Auteur  allègue  ,&  qui  continue  fa  Lettre  ainfi. 

Le  peu  ^exemples,  que  je  vous  cite  entre  plufieurs  autres  comme  les  plus  re~ 
cens  ci?  les  plus  remarquables ,  doivent  fuffire  pour  vous  faire  connoitre ,  qu'il  n'y 
a  parentage  ny  union  qui  puijfe  engager  un  Prince  fage  à  fe  départir  de  fes 
vrais  intérêts ,  pour  faire  plaifir  à  [on  Parent  13  à  [on  Àmi.  D'où  vous  devez 
conclurre  deux  chofes\  l'une,  que  Sa  Majefté  ne  le  fer  oit  pas ,  quand  même  elle 
en  fer  oit  fortement  follicitée;  t"  autre ,  que  le  Roi  Tres-Chrêticn ne  lui  demande- 
ra jamais  rien  quelle  ne  puijfe  faire  avec  juflice. 

L'Au- 


tE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  421 

L'Auteur  fait  confifler  la  fagefîe  d'un  Prince  à  n'avoir  égard  qu'à  Tes  in-   Armixè 
terêts,  &  par-là  il  fait  tacitement  le  Portrait  de  fon  nouveau  Maitre.    [e     g  en.  ce 
lailfe  à  juger  à  toute  perfonne  qui  n'efl  point  prévenue  ce  à  quoi  on  doit    L'EuR°- 
s'attendre,  puifque  par-là  il  l'annonce  fur  le  modèle  de  la  France.    Il  con- 
clut deux  chofes  de  cet  Article.  La  première,  que  fon  nouveau  Maître  ne. 
le  feroit  pas,  quand  même  il  enferoit  fortement  follicité.  C'efi  décider  avec 
bien  de  l'aiTêurance.    C'efi:  tout  ce  que  pourroit  faire  le  Duc  de  Beauvij- 
liers ,  qui  a  été  Gouverneur  du  Duc  d'Anjou, &  qui  a  eu  le  loifir  d'étudier 
le  naturel  de  ce  Prince.     J'admire  la  pénétration  de  l'Auteur  dans  l'ave- 
nir: il  ne  s'explique  pourtant  pas  de  même  dans  la  fuite,  où  il  dit  que  Dieu 
feul  par  fa  toute-puifîance  peut  pénétrer  l'avenir.  Quoy  qu'il  en  foit,  la  fé- 
conde chofe  qu'il  veut  conclurre  femble  n'avoir  aucune  connexion  ni  re- 
lation à  ce  qui  précède.  D'ailleurs,  la  première  chofe  qu'il  conclut  paroic 
détruire  directement  la  féconde  j  car  il  veut  que  fon  nouveau  Maître  ne 
fera  jamais  rien  contre  fes  vrais  intérêts,  quand  même  il  en  feroit  follici- 
té :  or,  on  ne  fauroit  difconvenir  que  le  propre  intérêt  ne  fuit  pas  toujours 
les  règles  de  la  juflice;  ainfi ,  fi  ce  qu'on  demanderoit  à  fon  Maître  étoit: 
fuivant  fes  intérêts ,  il  n'heziteroit  pas^  y  confentir,.  juflice  ou  non.    Je 
ne  veux  cependant  pas  m'arrêter  fur  cette  féconde  chofe  qu'il  conclut,  qui 
n'efl:  pas  à  contredire,  puisque  tout  le  monde  fait  par  une  infinité  d'exem- 
ples, que  la  France  n'a  jamais  fait  ni  demandé  que  ce  que  la  Juflice  Gal- 
licane permettait  j  &  û  elle  a  dépouillé  des  Princes  de  leurs  Etats,  ce  n'a. 
été  que  parce  que  la  Juflice  y  avoit  été  trouvée  parles  Chambres  de  Réu- 
nion qu'elle  avoit  établies  à  l'imitation  de  celle  que  Tacite  raporte  que  Ti- 
bère, dont  la  Juflice  a  fervi  de  modèle,  avoit  établi  pour  fe  défaire  des. 
Sénateurs  &  Chevaliers  confiderables  de  la  Republique  Romaine,  dont  il 
fe  defioit  à  caufe  de  leurs  vertus.    L'Auteur  pourfuit  ainfi. 

D'ailleurs,  on  fait  avec  certitude,  que  Sa  Ma  je  fié  Très- Chrétienne  ne  veut  point 
la  guerre ,  £s?  que  toutes  fes  intentions  font  tournées  du  côté  de  la  Paix.    Vous  ne 
pouviez  V  ignorer ,  Monfleur ,  aprez  la  preuve  éclat ante.de  modération ,  de  juflice  ^ 
&  de  defintereffement ,  que  ce  Monarque  donna  auflîtôt  après  la  mort  du  Roy  Char- 
les fécond ,  en  acceptant  purement  &  Jimplement  les  difpofitions  de  [on  Teflament 
dans  le  point  de  la  fuccejflon.  Mais ,  bien  moins  encore  à  cette  heure  ,  puifque  par  un, 
effet  fingulier  de  fon  affeclion  envers  vous ,  &  de  fa  propenfon  à  la  tranquillité  de 
V Europe ,  il  vous  a  fait  faire  des  ouvertures  les  plus  avantageufes  du  monde  tou- 
chant la  Barrière  du  Pais- Bas ,  vous  offrant  de  concourir  en  ce  point  avec  Sa  Ma- 
jeflé  Catholique  pour  vous  procurer  une  raifonnable  fleuret  é.     Vous  êtes  bien  per- 
fuadé  auffl  que  dans  la  conjoncture  pre fente  V Eflpagne  ne  fonge  point  à  vous  atta- 
quer.    Ainfi  voilà  toutes  vos  craintes  &  vos  frayeurs  réduites  à  un  advenir  incer- 
tain, £5?  à  des  floupçons  {j?  des  fpeculations  anticipées  de  ce  qui  pourroit  arriver 
un  jour.  Avouez  moi,  Monfleur,  qu  il  faut  aimer  bien  peu  fon  repos  pour  fe  tour- 
menter réellement  &  de  fait  fur  des  idées  d'une  poflibilité  future,  dont  Dieu  feul 
par  fa  tout  e-feience  peut  pénétrer  ï  événement.     Mais ,  fi  en  cela  il  y  a  peu  de  rai- 
fo»,  il  y  en  auroit  encore  moins  à  fe  porter  fans  caufe  à  une  guerre  effet! ive  fur 

Ggg  3  des 


422     MEMOIRES,  NEGOTI ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  des  aprehenftons  vaines  ,  puifque  ce  fer  oit  choifir  dez  à  prejent  pour  remède  le  mal 

gf.n.  de  je  pius  grand  que  l'on  pourvoit  craindre  à  l'avenir. 
l'Euro- 
pe. Tout  le  monde  ne  convient  pas  de  la  certitude  que  l'Auteur  donne  que 

les  intentions  de  Sa  Majeflé  Très-Chretienne  foient  toutes  tournées  du  cô- 
té de  la  Paix,  fice  n'eft  en  tant  que  le  rette  de  l'Europe  voulût  bien  fe  fou- 
mettre  à  Tes  Lcix.  Il  eft  vray  que  ce  Grand  Prince  le  dit ,  &  le  fait  dire 
par  fes  Ambafladeurs;  on  ne  fauroit  le  nier:  mais, bien  des  gens  difent qu'en 
France  on  fuit  les  Maximes  de  Mazarin,  qui  difoit  &  alfeuroit  toujours  le 
contraire  de  ce  qu'il  penfoit.  Quoy  qu'il  en  foit,  l'Auteur  le  confirme  par 
l'acceptation  duTeftament:  mais,  la  preuve  me  femble  fans  force;  car  Sa 
Majefté  Très-Chrétienne  avoit  bien  fait  le  Traité  de  Partage  en  vue  de 
la  tranquillité  publique:  cependant,  dèfqu'elle  a  trouvé  mieux, Elle  ne  s'y 
eft  pas  tenue.  Or,  fi  l'acceptation  du  Teflament  eft  en  vue  de  la  Paix  Pu- 
blique, on  peut  inférer,  que  trouvant  de  l'utilité  à  révoquer  l'acceptation, 
on  le  fera  tout  de  même  qu'on  a  fait  à  l'égard  du  Traire  de  Partage:  c'eft 
une  confequence  jufte,  tirée  ab  exemple  récent i.  Les  Offres  pour  la  Barriè- 
re ne  fignirient  rien > car, quel  fond  peut-on  faire  fur  Offres,  Paroles,  Pro- 
mettes, Traittez,  &  Sermens,  puis  qu'ils  ne  fervent  qu'autant  de  tems 
qu'ils  peuvent  aider  à  faire  réùffir  des  vues  plus  étendues?  Ce  ne  font 
que  des  amufemens,  afin  de  gagner  du  tems.  Et  des  Avis  feurs,  dont  je 
vous  ay  entretenu  de  bouche  il  y  a  quelques  jours,  montrent  la  nature  des 
Offres ,  &  quel  fond  on  y  doit  faire. 

On  peut  avouera  l'Auteur,  qu'on  eft  perfuadé  que  dans  la  conjonc- 
ture prefente  l'Efpagne  ne  fonge  point  à  attaquer  les  Provinces-Unies; 
mais,  la  conjoncture  prefente  aura  bien-tôt  une  autre  face.  Et  puifqu'on 
ne  peut  pas  faire  fond  fur  les  Traitez  ftipulez,  lorfque  les  conjonctures 
ouvrent  les  occafions  à  de  plus  grands  avantages  que  ceux  en  vue  def- 
quels  les  Traitez  font  faits ,  que  fait-on  fi  on  n'entreprendra  pas  d'enfrain- 
dre  ceux  qui  ont  été  faits  pour  la  feureté  defdites  Provinces?  Les  raifons 
que  vous  favez  ne  donnent  pas  lieu  de  croire  que  les  frayeurs  &  les  crain- 
tes qu'on  a  ne  font  que  de  pures  fpeculatîons.  Et,  bien  loin  que  ce  foit 
aimer  peu  fon  repos,  que  de  fe  tourmenter  réellement  de  l'avenir,  je  trou- 
ve que  ce  font  des  précautions  que  la  vraye  Prudence  infpire.  Un  Maî- 
tre de  Navire, qui  par  quelques  nuages  qui  s'élèvent  aprehende  une  Tem- 
pelle  ,  devroit  félon  l'Auteur  être  traitté  de  ridicule,  s'il  travaille,  &  s'il 
fait  travailler  fes  Matelots  à  mettre  le  Navire  en  état  de  refifter  aux  Flots 
&  aux  Vents.     C'eft  cependant  une  bonne  conduite,  qui  luy  fuggere  le 

v  travail;  &  on  traiteroit  un  Pilote  d  e:re  dépourvu  de  la  raifon,  s'il  ne  pre- 

noit  à  temps   les  précautions  neceifaires   pour   fe  garantir  du  naufrage. 
Voici  la  fuite  de  la  Lettre. 

Quant  aux  bruits  qui  courent  parmi  vous ,  comme  fi  Von  avoït  âefjein  de  donner  les 
Pais- Bas  au  Roy  Très  Chrétien,  en  échange  de  quelque  autre  Province,  je  puis  vous 
affeurer  qu'ils  font  faux ,  artificieux ,  &f  controuvez  ;  ainfi ,  vous  n'y  devezpas  faire 
plus  d'attention  qu'à  tant  d'autres  fupofitions  aujfi  grofftéres  que  malignes,  dont  cer- 
tains 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  425 

tains  mechans  cfprits  rempVjfent  le  PubVc  par  le  moyen  des  Libelles  fatyriques  qui  pa-  Amin*» 
roijfent  journellement  fur  ces  matières,  63  qui  certainement  ne  devroient  être  foufferts  GfN-  DK 
ni  départ  ni  d'autre.     Non  feulement  le  Tejiament  du  feu  Roy  défend  expreffement    r'EuK0~ 

Articles  13.  &?  yo.  de  faire  dans  la  Monarchie  aucune  forte  cVAl'enation  ou  de  fepara-   — — 

tion  ,  même  en  faveur  des  Enfans  du  Succeffeur;  mais,  ce  qui  efl  encore  plus  fort ,  £f 
fait  voir  clairement  le  peu  de  fondement  de  ces  bruits ,  c'efi  que  V intérêt  de  la  Couronne 
ne  peut  pas  compatir  avec  un  femblable  démembrement ,  fur -tout  dans  une  partie  de  la, 
Monarchie  aujjî  confidcrable  que  le  Païs-Bas,  de  h  pojfejfion  duquel  dépendent  nos prin- 
t'pales  relations  avec  les  Puiffances  du  Nord,  fcp  diverfes  autres  convenances  &f  confx- 
derations  d'EJiat  non  moins  grandes  que  celle-là. 

Noflre  Auteur  afieure  tout  ce  qu'il  luy  plaît  d'une  manière  fort  hardie. 
Les  bons  Avis,  que  vous  lavez  qu'on  a,  devroient  faire  juger,  ou  que  l'Au- 
teur a  delTein  d'endormir  les  gens ,  ou  qu'il  ne  fait  pas  le  fëcret  j  mais 
je  vois  parla  fuite,  que  l'affeurance  qu'il  donne  efr.  fondée  fur  la  ridicule  de- 
fenfe  que  le  Teftament  fait  d'aliéner  aucune  partie  de  la  Monarchie ,  aufïï 
bien  que  fur  des  Intérêts  &  des  Convenances  d'Effet.  Mais,  ce  font  jufle- 
ment  ces  Convenances  qui  donnent  de  la  vrayfemblance  aux  bruits  que 
l'Auteur  dit  qui  courent;  car,  la  Convenance  "de  la  France  feroit  d'avoir 
le  Païs-Bas,  &  la  Convenance  de  l'Efpagne  feroit  d'avoir  le  Rouiîîllon  & 
le  Portugal,  dont  on  feroit  la  Conquête,  &  qui  efi:  dans  fes  entrailles,  à 
la  place  du  Païs-Bas  qui  en  efl  éloigné  ,  &  qui  eft  plus  à  charge  à  l'Efpa- 
gne qu'à  profit.     Mais,  voyons  la  fuite. 

D'ailleurs ,  quelle  aparence  y  a-t-il  que  nous  pui fions  abandonner  ces  Provinces,  pour 
la  confervation  defquglles  rions  avons  combattu  tant  d'années  £?  depenjé  tant  de  mil- 
lions ,  maintenant  que  par  le  moyen  de  la  bonne  intelligence ,  dans  laquelle  nous  allons 
vivre  avec  la  Couronne  de  France,  nous  avons  lieu  d'efperer  de  les  poffeder  en  repos  ,  £f 
de  les  voir  fe  rétablir  par  une  longue  Paix  de  leurs  dommages  pajfez.    Non,M:nfieurr 
vous  ne  le  devez  pas  croire.     Les  Flamands  ont  marqué  trop  de  fidélité ,  trop  de  conf- 
tance ,  £f  trop  de  zèle  dans  leur  union  à  la  Monarchie:  l'amour  que  les  Efpagnols  leur 
portent  en  conjîderation  de  ce  qu'ils  ont  fouffert  pour  le  maintien  de   cette  union  eft 
trop  grand  ;  &?  enfin  il  y  a  entre  les  deux  Nations  une  ejîime  trop  mutuelle  ;  pour  per- 
mettre jamais  ni  aux  uns  ni  aux  autres  de  confentir  à  une  feparation.    Auffi  peu  a-t- 
on fongé  à  faire  fortir  de  ce  Pais  les  Troupes  Hollandoifes ,  pour  y  faire  entrer  celles 
de  France,  fcp  tout  ce  qu'on  vous  débite  là- de ff us  ne  tend  qu'à  vous  jette r  mal  à  pro- 
pos en  des  foupçons  capables  de  produire  de  très-mechans  effets:   ne  vous  y  liijfez  donc 
point  furprendre  ;  &  fur-tout  prenez  garde  que  les  vailles  allarmes  que  vous  avez  déjà 
témoignées,  en  faifant  marcher  vos  Officiers  avec  tant  de  précipitation  dans  les  Garni- 
fons  de  Flandre  êf  de  Luxembourg ,  ne  vous  engagent  encore  en  quelque  autre  démar- 
che contraire  à  vos  intérêts.   Je  vous  l'ai  déjà  dit ,  £f  on  l'a  fait  entendre  à  Meffietirs 
les  Eftats  d'une  manière  qui  ne  fouffre  point  d'équivoque  ,  il  ne  tiendra  qu'à  vu  us  que 
le  Païs-Bas  Efpagnol  ne  vous  ferve  de  Barrière  à  l'avenir  comme  par  le  paffê.    Mais, 
vous  jugez  bien,  que  le  moyen  de  vous  conferver  cette  Barrière  71e  feroit  pas  de  faire  la 
Guerre  à  VEjpagne.     Ce  feroit  aucontraire  celuy  de  la  perdre,  d'ouvrir  la  porte  aux 


424    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aïfairfs    armées  Ennemies,  de  les  introduire  jufques  au  cœur  de  voftre  Païs ,  &?  en  un  mot 
-gen.  de     d'attirer  fur  vous  tous  les  maux  que  vous  craignez. 


PE. 


L'Auteur  parle  dans  cet  Article  des  Provinces  du  Pais-Bas  Efpagnol  a- 
vec  des  marques  très-grandes  de  l'Amitié  qu'il  a  pour  elles.  C'eit  tout  ce 
que  pourraient  dire  ceux  qui  ont  tant  travaillé  pour  y  établir  le  Commerce 
&  pour  y  faire  le  Canal  projette  il  y  a  bien-tôt  deux  ans;  mais,  comme 
ces  projets  n'étoient  qu'en  veuë  de  préjudicier  à  la  Hollande, il  y  a  à  crain- 
dre qu'on  ne  les  remette  fur  pied  pour  rétablir  félon  l'Auteur  ces  Provin- 
ces de  leurs  dommages  paffez.  Je  regarde  donc  ce  que  l'Auteur  dît  com- 
me une  menace  tacite  qui  mérite  fes  Réflexions,  &  qui  doit  jetter  fort  à 
propos  dans  de  juites  foupçons.  Ce  ferait  fe  laifTer  furprendre,  que  de 
prendre  garde  aux  expreffions  équivoques,  qu'il  ne  tiendra  qu'à  la  Hol- 
lande que  les  Pais  Bas  Efpagnols  ne  lui  fervent  de  Barrière.  Je  ne  diray 
rien  là-deflus,  parce  que  j'ay  déjà  touché  cette  corde  plus  haut,  où  j  ay 
dit  qu'on  ne  pouvoit  faire  fond  fur  rien,  lors  qu'on  à  faire  à  des  gens  qui 
ne  gardent  les  Traitez,  &  les  Sermens  mêmes,  qu'autant  de  temps  qu'un 
nouvel  avantage  leur  ouvre  le  chemin  de  s'en  moquer.  Ses  menaces 
ne  font  guerres  de  faifon ,  lors  qu'il  dit  que,  perdant  cette  Barrière ,  le 
cœur  du  Païs  ferait  ouvert  aux  Armées  ennemies.  Le  pais  eft-il  moins 
expofe  à  prefent,  que  la  France  y  peut  commander  fuivant  les  ordres 
que  la  Régence  de  Madrid  a  donné  pour  cela?  L'Auteur  fe  jette  d'un 
autre  côté    dans  la  fuite:  voici  ce  qu'il  dit. 

Quelques  Avis  d'Amfterdam  portent  que  Von  arme  plujïeurs  Vaiffeaux  dans  ce  Port, 
£?  qu'il  y  a  fur  le  tapis  un  dejjein  pour  les  envoyer  aux  Indes  d'Efpagne,  afin  d'y  fai- 
re reconnaître  V Archiduc  de  gré  ou  de  force.  Je  veux  croire  qu'il  n'en  ejb  rien ,  6? 
que  ces  Avis  font  mal  fondez.  Mais,  fupofé  qu'ils  fe  trouvaient  bons ,  je  ne  pourrois 
m  empècker  de  vous  dire,  que  jamais  Csnjeil  plus  pernicieux  que  celuy-là  riauroit  été 
donné  à  Meffieurs  les  EJlats.  La  cbofe  ejl  fenjible  :  car  enfin ,  ou  cet  Armement  fe- 
rait peu  confiderable  ,ou  il  le  ferait  beaucoup.  S'il  étoit  peu  confiderable ,  vous  jugez 
lien  qu'il  deviendrait  dès  lors  inutile  (ce  n'ejl  pas  avec  dix  ou  douze  Fregattes  qu'il 
faut  entreprendre  de  fi  grandes  expéditions;)  &f  s'il  étoit  grandB  fort ,  tout  l'avanta- 
ge que  vous  en  retireriez  c'ejl  que  vous  laijjeriez  ici  vos  Cotes  expofées ,  &?  vos  Mar- 
chands à  l'abandon,  tandis  qu'avec  beaucoup  d'ofientation  £?  de  depenfe  vous  iriez 
chercher  les  Avantures  à  l'autre  bout  du  Monde  ,  èf  tenter  une  Révolution  d'un  Succès 
à1  autant  plus  douteux  &  difficile  ,  que  les  François  ne  manquement  pas  fans  doute  de  s'y 
trouver  auffi-tot  que  vous  ,  pour  nous  prêter  la  main,  &  nous  aider  à  vous  bien  recevoir. 

Je  ne  veux  pas  entrer  dans  la  Difcufïion  fi  les  Avis  que  l'Auteur  dit 
venir  d'Amfterdam  font  vrays  ou  non,  puis  qu'ils  n'ont  pas  la  moindre 
ombre  de  vrai  femblance.  Mais, vous  me  permettrez,  Monfieur  que  je 
vousdife  deux  mots  fur  fon  argument  cornu;  car,  les  confequences  qu'il 
en  infère  font  pitié.  Il  dit  que  fi  l'Armement  étoit  peu  confiderable,  il  fe- 
roit inutile.     Si  l'Auteur  étoit  du  Confeil  de  la  Chambre  des  Indes,   & 

qu'il 


i-'Luro- 

PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.   I.         42; 

qu'il  eut  fait  les  Fondions  de  fa  Charge ,  je  m'imagine  qu'il  feroit  mieux    Affaires 
informé  de  la  Foibldîe  des  Indes  Efpagnoles,  &  qu'il  ne  feroit  pas  necef-    Gf*-  de 
Taire  ,  pour  y  faire  des  Conquêtes,  d'y  tnvoyer  des  Flottes  aufli  confidera- 
ble  que  l'Invincible  que  Philippe  II.  envoya  contre  l'Angleterre:  vingt  & 
deux  Flibuftiers  ont  attaqué  &  pris  une  Ville  dans  la  Mer  du  Sud,  où  il  y 
avoit  quatre  cents  Hommes  de  Garnifon  &  cinq  cent  habitans,   les  uns 
&  les  autres  Efpagnols  natifs, ou  defcendans  de  ces  Efpagnols  qui  en  fi- 
rent la  Conquête  par  les  belles  Actions  qui  fe  trouvent  dans  le  Livre  qu'en 
fit  l'Evêque  Barthélémy  de  las  Cafas.     Et  l'Entreprife  de  Mr.  de  Pointy 
fur  Cartagene  ,  qui  eft  la  plus  forte  Place  de  ce  Pais-là,  devroit  perfuader, 
qu'il  ne  faut  pas  de  grandes  forces  pour  des  Expéditions  fur  des  gens  enco- 
re moins  vaillans  que  les  Mofcovites  qui  étoient  tout  fraîchement  devant 
Nerva.  Mais,fupofant  ce  deiTein,&  qu'on  fit  un  Armement  fort  &  grand, 
il  dit  que  tout  l'avantage  feroit  qu'on  laiflëroit  les  Côtes  &  les  Marchands 
à  l'abandon,  &  que  les  François  y  feroient  au(îi-tôt  pour  leur  prêter  la 
main.    Ne  trouverez- vous  pas  Monfieur,  que  ce  vaillant  Efpagnol,  car  je 
crois  l'Auteur  de  cette  Nation-là,  horsmis  qu'il  ne  fe  deguife  en  Efpagnol, 
s'oublie  en  cet  endroit ,  &  ne  fondent  pas  bien  fa  gravité  &  la  bonne  opi- 
nion qu'il  veut  donner  ailleurs  de  la  Monarchie  Efpagnole,  comme  étant 
capable  d'être  l'équilibre  de  l'Europe  contre  la  France,  puifque  ces  vail- 
lantes menaces  ne  font  fondées  que  fur  les  François  mêmes:  les  François , 
dit-il,  ne  manqueraient  pas  de  s'y  trouver  en  même  temps.     Eh  bien.     Dans 
la  fupofition  qu'on  envoyeroit  un  grand  Armement  aux  Indes  Efpagnoles, 
les  François  que  feroient  ils?  S'ils  y  envoyoient  un  pareil  Armement,  ne 
laiil.roient-ils  pas  eux-mêmes  leurs  Côtes  &  celles  d'Efpagne  même  à  l'a- 
bandon ?  Lors  de   l'Expédition  de  Mr.  de  Pointy    à   Cartagene  ,  a-t-on 
laiifé  d'y  envoyer  une  bonne  Efcadre,  de  laquelle,  s'il  a  échapé,  la  Re- 
lation qu'il  en  a  fait  lui-même  fait  voir  que  ça  été  un  pur  coup  de  bon- 
heur; &  n'a-t-on  pas  cependant  entretenu  une  (1  bonne  Flotte  en  Mer, 
que  les  François  n'y  oferent  pas  paroitre?  J'auray  occafion  de  dire  encore 
quelque  chofe  là-delfus.  En  attendant,  voyons  noitre  Auteur,  qui  conti- 
nue ainfi. 

Voulez-vous  donc  m'en  croire ,  mettez  fin  à  vos  méfiances ,  ne  différez  plus  de  ren- 
dre à  Sa  Majefté  l'honneur  qui  lui  eft  dû  à  fon  avènement  à  la  Couronne.  Montrez- 
vous  amis  des  Efpagnols ,  &?  ne  vous  portez  à  aucune  nouveauté.  Par  ce  moyen ,  vous 
obtiendrez  ce  que  vous  avez  eu  en  veuë  ;  le  Pats- Bas  fera  toujours  vôtre  feur été  ;  la  li- 
berté de  vôtre  Commerce  ne  recevra  aucune  ateinte  ;  £f  vous  trouverez  dans  la  Nation 
Efpagnole  une  correfpondance  £f  une  amitié  réciproque,  Vous  voyez,  Monfieur ,  que 
je  ne  vous  donne  pas  des  Confeils  interejjez.  Di  moins,  le  devez-vous  voir.  Car  en- 
fin ,  envoyez  des  Ambaffadeurs  pour  féliciter  Sa  Majefté  ,  ou  n'en  envoyez  pas  ;  opofez 
vous  à  fon  exaltation,  ou  marqvez  en  de  lajoye;  il  n  en  fera  ni  plus  ni  moins  Rui  £f 
Mmarque  Univer'èl  de  toute  l  Ef  pagne  ,  au  grand  consentement  de  [es  Peuples.  Le 
plus  grand  malheur  qui  nous  pût  arriver ,  fi  vous  veniez  à  nous  faire  la  Guerre  à  ce 

Tome  XL  Hh  h  j»i" 


426    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

fujeî ,  feroit  de  nom  défendre  ;  &?  je  vous  donne  à  conjiderer  Ji  dans  une  telle  occajion 
les  fecours  du  dedans  £f  du  dehors  nous  manquement. 

Cet  Article  contient  des  exhortations  à  fe  foumettre  à  attendre  tranquil- 
lement fa  deitmée  ,par  une  infenfibilité,  qui  feroit  feulement  propre  à  des 
Gens  dépourvus  de  fens.  Je  veux  bien  croire  ,  que  fi  on  avoit  à  faire  aux 
Efpagnols ,  qui  n'ont  pas  donné  dans  le  paneau  de  la  France,  &  qui  n'ont 
pas  trempé  dans  le  Teltament ,  on  pourroit  efperer  tout  ce  que  l'Auteur 
promet,  afTavoir  une  Amitié  réciproque:  auffi,  quand  on  a  été  feur  de  la 
correfpondance  dont  l'Auteur  parle ,  on  a  vu  comment  on  y  a  correfpon- 
du;  mais,  ceux  qui  gouvernent  à  prefent  en  Efpagne  ont  trop  le  Morbus 
G ai Tt eu s  jufques  dans  la  moelle,  pour  ne  pas  craindre  que  leur  amitiéne  foit 
envenimée.  Dans  l'Article  précèdent  ,  félon  l'Auteur,  toutes  les  chofes 
futures  ont  un  fuccès  douteux,  lorfqu'elles  ne  s'accomodent  pas  à  fes  def- 
feins;  mais, lors  qu'elles  luy  plaifent,  il  décide  de  l'avenir  plus  que  jamais 
Noftradamus  n'a  fait.  S'il  avoit  été  du  temps  de  Charles  V. ,  il  n'auroit  pas 
manqué  de  le  proclamer  Monarque  Univerfel  de  l'Europe  ;  il  auroit  juré 
que  la  Flotte  invincible  de  Philippe  IL  auroit  tranfporté  l'Angleterre  dans 
une  autre  Mer  >  &  que  la  France,  qui  étoit  dans  une  grande  décadence, 
feroit  bien-tôt  devenue  une  Province  d'Efpagne  ,  tout  de  même  que  le 
Duché  de  Milan.  Mais,  helas  !  il  auroit  auffi  mal  prédit,  que  peut-être 
il  le  fait  à  prefent.  Car,  on  m'avouera  que  les  Monarchies  ont  leurs  pé- 
riodes. Voilà  la  Maifon  d'Autriche,  qui  a  été  la  terreur  de  lEurope,  tom- 
bée en  beaucoup  moins  d'un  fiécle  dans  un  état  11  abject,  qu'à  peine  pour- 
roit-on  croire  tout  ce  que  l'Hiftoire  dit  de  grand  de  cette  Maifon.  Et  la 
France, qui  a  été  dans  une  condition  digne  de  compafilon  ,  avant  que  la 
Maifon  de  Bourbon  en  occupât  le  Throne,  la  voilà  à  prefent  fur  le  même 
pied  que  la  Maifon  d'Autriche  étoit  du  temps  de  Charles  Quint  &  de  Phi- 
lippe il.  C'eit  pour  dire,  qu'il  y  a  de  l'incertitude  dans  les  chofes  futures. 
Mais,noflre  Auteur  voit  à  travers  de  l'avenir,  &  décide  d'une  manière  fort 
pofittve  de  la  poiTeffion  Univerfelle  de  la  Monarchie  d'Efpagne  par  fon 
Nouveau  Maître,  quoy  que  l'on  faffe.  C'eft  dommage  qu'il  ne  fe  mette 
à  faire  des  Almanachs}  mais, il  eft  vray  qu'on  ne  s'arréteroit  pas  à  fes  pré- 
dictions, &  il  y  auroit  à  craindre  pour  luy  qu'il  ne  feroit  pas  rembourfé  des 
fraix  qu'il  pourroit  avoir  faits,  fi  on  attendoit  à  le  dédommager  que  la 
predicîion  fut  vérifiée  par  le  fuccès.  Cecy  paroitroit  obfcur  à  tout  autre 
qu'à  vous, qui  pouvez  avoir  quelque  connoiflance  de  ma  penfée.  Je  vois 
cependant  que  l'Auteur  eft  fi  entêté  des  François,  que  dès  qu'il  s'agit  de  me- 
nacer en  brave,  il  s'apuye  d'abord  fur  les  François:  du  moins  doit-on  en- 
tendre ,ce  me  femble,  ainli  ce  fecours  de  dehors  qu'il  dit  que  l'Efpagne  au- 
roit dans  une  telle  occafion  ;  car, il  eft  à  fupofer  que  ce  neferoientpas  les 
Mores  qui  afîiegent  Ceuta.  Mais,  s'il  n'eft  brave  que  par-là,  en  vérité,  on 
pourroit  fort  bien  le  mettre  en  paralelle  avec  Don  Quixote.  Continuons  de 
voir  ce  qu'il  dit. 

& 


PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  4z7 

Si  toute  î 'Europe  a  paru  furprife ,  émerveillée,  indignée,  quand  vous  avez  entrepris  Atf.up.is 
de  partager  les  Etats  d'un  Roi  viva?it,  à  combien  plus  forte  rai/on  entrer a-t-elle  dans    gew,  dk 
tous  ces  fentiments ,  fi  elle  venoit  à  reconnoître ,  qxCauffi-tot  après  Jon  trépas ,  vous  vou-     L'EuR°- 
luffiez  prendre  les  armes  contre  jon  légitime  Succejfeur ,  e?  empêcher  l'exécution  d'un  Tef- 
tament  qui  n'a  pour  objet  que  la  confervation  des  anciens  Domaines  de  la  Monarchie  &f 
la  tranquillité  publique.  Encore  un  coup,  vous  y  devez  réfléchir  meurement ,  avant  que 
de  pajjer  outre  en  chofe  de  cette  importance.     Une  Guerre  auffi  injujîe  que  j'eroit  celle- 
là  ne  pouroit  pas  être  favorifée  de  Dieu.     A  la  vérité,  il  vous  fer  oit  aijé  d'y  entrer , 
mais  fort  difficile  d'enfortir  avec  avantage.     So?igez  aux  maux  Jans  nombre  quelle  en- 
traineroit  après  elle,  &  fur -tout  au  préjudice  qu'elle  caujeroit  à  votre  commerce    à  ce- 
lui de  r Angleterre ,  &f  enfin  à  tous  vos  Marchons  qui  négotient  fi  avantageujèment 
dans  les  Ports  d'Efpagne ,  de  France,  £?  d'Italie.   Il  n'y  auroit  plus  rien  à  faire  pour 
eux  en  tous  ces  Ports.     Une  fimple  Efcadre  aifée  à  entretenir  leur  fermerait  pour  tou- 
jours le  Détroit  de  Gibraltar,  &  par  confequent  la  Méditerranée,  d'où  dépend  le  ri- 
che Commerce  du  Levant.    Cadix,  qui  leur  fert  de  Clef  &  de  Canal  paur  faire  couler 
dans  leurs  Coffres  la  meilleure  partie  des  Tréfors  du  Nouveau  Monde  ,  leur  fer  oit  auffi 
fermé  ;    £f  qui  jçait  fi  la  For-tune  inconjiante  ,    venant  à  changer  de  parti    dans  le 
Nord,  ne  vous  oteroit  point  encore  la  Mer  Baltique ,  £f  72e  vous  réduirait  point  par  ce 
moyen  à  la  déplorable  extrémité  de  manquer  de  pain ,  &f  de  n'en  pouvoir  pas  obtenir 
pour  de  l'argent. 

Le  voici  encore  au  Traité  de  Parcage.     Je  panche  prefque  plus  à  croi- 
re qu'il  revient  à  la  charge  là-deflus  pour  infulter  ceux  qui  ont  fait  le  Trai- 
té, à  caufe  qu'il  été  fans  effet ,  que  pour  en  témoigner  de  l'averfion.  Mais, 
cela  étant,  il  me  femble  que  c'ell  faire  mal  fa  Cour  aux  François,  fur  les 
bras  defquels  il  s'apuie;  car,  au  fond,  la  rupture  de  ce  Traité  porte  avec 
foi  des  reproches.     Quoi  qu'il  en  foit,  pourquoi  toute  l'Europe  en  auroit- 
elle  été  furprife,  émerveillée,  &  indignée?  E(t-ce  la  première  fois  que  ce- 
la a  été  pratiqué?  Philippe  II.  n'avoit-il  pas  entrepris  une  pareille  Affaire, 
&  n'a-t-il  pas  fait  des  Traitez  pour  régler  la  Succeilion  d'Elizabet  Reine 
d'Angleterre  pendant  la  vie  de  cette  Reine  ?  Et  n'a-t-il  pas  fait  de  même 
en  France  fous  le  dernier  Roi  des  Valois  ?   Encore  la  différence ,  qu'il  y  a 
entre  les  Traittez  de  Philippe  II.  &  le  prefent  Traité  de  Partage,  eft  que 
Philippe  les  avoit  faits  pour  démembrer  l'Angleterre  &  la  France  à  Ion 
profit,  au  lieu  que  Sa  Majeité  Britannique,  &  leurs  Hautes  Puiffances, 
ne  l'ont  fait  qu'en  veue  de  la  tranquillité  publique,  fans  itipuler  le  moindre 
avantage  pour  eux.  Voyez,.  Monfieur,  dans  le  Mémoire  écrit  de  Vcrfiilies 
le  2p.  Novembre,  &  figné  LOUIS ,  &  préfemé  par  Monfieur  le  Comte 
de  Briord  aux  Etats,  oùMl  eit  dit  en  termes  exprès  ,,  que  la  feule  veue 
,,  que  les  Etats  (l'Angleterre  eft  fupofée  fur  le  même  pied)  ont  eue  tn 
„  traittant,  leur  unique  intérêt,  a  été  d'afleurer  la  tranquillité  générale:  on 
„  leur  doit  la  jufticede  déclarer,  qu'ils  n'ont  ltipulé  pour  eux-mêmes  ancus 
„  avantage  particulier,  nulle  Province  ,  nulle  Place,  nul  Port  de  Mer,  de- 
,,  pendant  de  la  Monarchie  d'Efpagne,  foit  dans  l'ancien  foit  dans  le  nuu- 
„  veau  Monde ,  nul  article  écrit  pour  faciliter  leur  Commerce.     Ils  ont 

H  h  h  2  „  pro- 


428    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  „  proprement  fait  l'office  de  Médiateurs  defmtereflez  entre  le  Roi  & 
gen.  de  ^  l'Empereur,  ils  ont  voulu  pacifier  les  troubles  que  les  differens  reci- 
**  pfeUO"  "  Procllies  ^e  'a  fuccefiîon  fembloient  devoir  bien  tôt  produire. ,,  Peut-on 
1__  après  cela  être  furpris,  émerveillé,  &  indigné  ?  On  n'avoit  que  fuivi  l'e- 
xemple de  Philippe  Second,  mais  d'une  manière  à  en  rejetter  tout  le  hon- 
teux ,  &  à  n'en  fuivre  que  l'honnête.  11  elt  vray  que  les  Princes  de  l'Eu- 
rope n'ont  pas  voulu  entrer  dans  la  Guarantie  de  ce  Traité  ;  mais  ,  outre 
les  foupçons  qu'on  peut  avoir  que  la  France,  Te  fondant  fur  les  Négocia- 
tions que  le  Marquis  d'f  Iarcourt  faifoit  en  Efpagne  pour  le  coup  fatal  du 
Teftament,  l'a  empêché  fous  main,  par  les  voyes  directes  à  fa  mode,  ces 
Princes, par  une  fageffe  digne  d'eux, ont  auparavant  voulu  attendre  la  Ré- 
folution  que  Sa  Majefté  Impériale  prendroit  là-deffus.  Il  eft  vrai  que  Sa 
Majeftélmpériale  a  refufé  le  Traité;  mais,c'eft  par  des  motifs  dignes  d'un 
grand  Prince, Chrétien,  &.  religieux  de  fa  parole  &  de  fes  fermens,  ce  qui 
devroit  à  préfent  porter  tout  le  relte  de  l'Europe  à  le  féconder  dans  fes 
jufles  &  indifputables  prétentions.  Sa  Majefté  Impériale  l'a  refufé  par 
trois  motifs  :  le  premier,  pour  ne  pas  déplaire  au  Roi  d'Efpagne  fon  ne- 
veu, fon  beaufrere,  &  fon  parent;  ce  qui  efl  une  bienfeance  que  la 
France  n'a  pas  eu,  en  faifant  le  Traité  de  Partage.  Sa  Majefté  Impériale 
étoit  d'autant  plus  portée  à  cette  genereufe  aêtion-là,  que  l'expérience  a 
fait  voir  être  contraire  à  fes  intérêts,  que  le  feu  Roy  d'Espagne  l'aiTeuroit, 
ainfi  qu'il  a  continué  de  faire  jufques  au  clandeitin  Ttftament,  qu'il  ne 
feroit  rien  au  préjudice  de  l'Augufte  Maifon  d'Autriche,  dont  il  étoit  une 
Branche,  &  qu'il  pouvoit  s'aflurer  que  toute  la  Succeffion  lui  feroit  tom- 
bée. Ces  affurances  font  des  témoignages  authentiques,  que  le  Teftamenc 
n'a  pas  été  fait  félon  les  intentions  du  Roy  d'Efpagne,  &  qu'il  n'étoit  pas 
dans  fon  fens,  lors  qu'on  lui  a  tenu  la  main  pour  le  lui  faire  foufcrire,  ou 
qu'il  a  pouiTé  jufques  à  fa  mort  une  diffimulatiun  que  les  cent  mille  Méfies 
qu'il  a  ordonné  dans  le  Teftament  ne  fauroient  laver;  ce  qu'on  ne  doit 
pas  croire  de  la  probité  du  feu  Roy  d'Efpagne.  La  féconde  raifon ,  pour 
laquelle  Sa  Majefté  Impériale  a  refufé  d'entrer  dans  le  Traité  de  Partage, 
elt  toute  opofée  à  la  conduite  de  la  France  à  l'égard  de  la  Renonciation 
de  l'Infante  Marie-Theréfe;  c'elt  par  un  principe  pieux  &  religieux,  car 
elle  favoit  que  lorsqu'on  lui  préfenta  la  Couronne  Impériale,  elle  avoic 
fait  ferment  de  ne  point  confentir  à  l'aliénation  d'aucune  partie  ou  fief  de 
l'Empire:  or,  s'agiffant  de  confentir  à  l'aliénation  des  Fiefs  Impériaux  qui 
font  en  Italie,  &  de  la  Lorraine,  Sa  Majefté  Impériale  auroit  par-là  con- 
trevenu à  fon  ferment ,  ce  qu'Elle  ne  pouvoit  pas  réellement  faire  en 
bonne  Confcience,  horfmis  que  les  Parties  Conftituantes  le  Sacré  Empire 
Romain  ne  l'eufTent  relevé  du  Serment  prêté,  &  n'y  euflènt  donné  leur 
confentement.  Si  la  France  avoit  eu  une  fi  louable  délicateflè  de  con- 
fcience, elle  n'auroit  pas  révoqué  en  doute  la  Renonciation  de  l'Infante 
Marie-Theréfe,  qu'elle  avoit  juré  d'obferver  par  un  double  Serment,  ainfi 
que  j'ai  déjà  eu  l'honneur  de  vous  dire  ci-devant  ;  &  on  ne  feroit  pas  à 
préfent  dans  l'embarras  où  l'Europe  fe  trouve.    La  troifième  raifon, que 

Sa 


l'Euro- 


RESOLUTIONS   D'ETAT,   M.  DCC.  I.  42^ 

Sa  Majefté  Impériale  a  eu  de  refufer  le  'Traité  de  Partage  ,  a  été  en  quali-  Apf/iikï* 
té  d'Archiduc  d'Autriche,  auquel  toute  la  Monarchie  Efpagnole  dévoie  GE*;  nK 
tomber ,  pour  être  une  Branche  de  la  même  Maifon ,  par  la  Renoncia- 
tion de  l'Infante  Marie  Theréfe  ,  &  par  la  Subilitui.ion  qui  a  été  faite 
entre  autres  par  Philippe  IV.  &  en  cette  qualité  d'Archiduc  Sa  Maje- 
flé Impériale  a  fait  entendre  que  la  mort  du  Roy  d'Efpagne  arrivant, 
elle  feroit  difpofée  d'entrer  en  Négociation  pour  quelque  Accommode- 
ment qui  put  conferver  la  tranquilué  publique.  Le  cas  elt  cependant 
arrivé;  mais,  fans  confulter  les  Intentions  pacifiques, juites ,  &  honnêtes 
de  Sa  Majeité  Impériale,  on  lui  a  été  le  moyen  d'en  donner  des  mar- 
ques, par  l'acceptation  que  la  France  a  faite  -d'un  Teflament  de  nulle 
valeur  ,  que  quelque  nombre  d'Efpagnoîs  ont  extorqué  de  la  manière 
dont  la  Cour  Impériale  elt  bien  informée,  je  vous  prie  de  remarquer, 
que  les  deux  Branches  d'Autriche,  d'Efpagne ,  &  d'Allemagne,  font  an- 
nexées en  forte  l'une  à  l'autre  pour  hériter  mutuellement,  qu'elles  pren- 
nent également  les  Titres  d'Archiduc  d'Autriche,  Comte  d'Hasbourg,  de 
Tirol ,  &c. 

On  nie  d'ailleurs  formellement  à  l'Auteur  la  Légitimation  de  la  Suc- 
cefiion  par  les  raifons  rapportées  ci- devant,  &  que  l'exécution  d'un 
Teflament  de  nulle  valeur  ait  pour  objet  la  tranquillité  publique  ;  & 
par  confequent,  que  la  Guerre,  qu'on  feroit,  feroit  injufle.  Dieu  lui  a- 
t-i)  révélé, qu'il  ne  favoriferoit  pas  une  Guerre  que  ceux,  qui  font  lefez  par 
]e  Teitament,  feroient  pour  leurs  juitts  Droits?  Quand  même  la  Guerre 
feroit  in,uir.e,  eft-ce  que  Dieu  ne  laiife  pas  quelque  fois  profperer  le  Mé- 
chant par  des  raifons  impénétrables  de  fa  Sagefle  éternelle?  JN'a-t-il  pas 
fait  profperer  les  Armes  Efpagnoles  en  la  Conquête  du  nouveau  Monde,  quoi 
qu'ils  s'en  emparaffent  par  des  Cruautez  aufli  criantes  que  celles  qui  font 
rapportées  par  l'Eveque  de  las  Cafas  ?  Et, de  nos  jours,,  n'avons-nous  pas 
vu  des  chofes  qui  nous  ont  fait  toucher  au  doigt  cette  vérité  de  la  profpé- 
rité  du  Méchant?  Mais,  aufli,  la  Patience  du  même  Dieu  fe  laiîe,.  par 
manière  de  parler,  &  fou  vent  fait  voir  des  effets  terribles  de  fa  Juftice  éter- 
nelle. Eh  !  qui  fçait  que  le  tems  n.c  foit  venu  que  Dieu  veuille  manifeiter 
au  Monde  qu'il  efl  auiïi  juite  que  bon  ?  Il  faut  donc  remettre  à  fa  Provi- 
dence à  pourvoir  aux  chofes  de  la  manière  que  fa  SageiTe  infinie  le  trou- 
vera à  propos. 

Je  trouve  cependant  allez  plaifant  que  l'Auteur,  qui  veut  que  la  tran- 
quillité publique  foit  l'Objet  du  Teitament,  fourniffe  lui-même  les  raifons- 
pour  prouver  le  contraire,  &  qu'il  mette  devant  les  yeux  en  forme  de 
menaces  tout  ce  qui  peut  arriver  pour  détruire  cette  même  tranquillité ,, 
alléguant  des  Maux  fans  nombre,  l'Interruption  du  Commerce,  les  Ports 
d'K.foagne  &  d'Italie,  &  le  Détroit  de  Gibraltar ,  fermez,  auffi-bien  que 
Cadiz  &  la  Mer  Baltique.  Ce  font  des  chofes  à  réflexion;  &,  dès  qu'on 
voudra  tant  foit  peu  prendre  des  mefures  pour  fa  propre  feureté,  ou  lorf* 
que  les  Ennemis  voudront  exiger  quelque  chofe ,  juite  ou  non,  on  croira. 
d'avoir  la  Verge  à  la  main  pour  obliger  à  fe  foumettre.    J'aurois  là-deffus* 

H  h  h-  1  beau- 


l'Euro 
pi 


450    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  beaucoup  à  dire;  mais,  quelques  raifons  m'obligeanc  à  être  plus  court  que 
gen.  de  je  ne  voudrois ,  je  les  paiTerai  fous  filence,  me  rapportant  à  vôtre  pru- 
dente prévoyance  5  car,  toutes  les  menaces  qu'il  fait,  en  fupofant  la  Guerre, 
ne  font  pas  prévenues  en  ne  la  faifant  pas  ;  au  contraire,  les  deux  Monar- 
chies de  France  &  d'Efpagne  étant  en  fi  bonne  correfpondance  qu'elles 
font ,  &  fâchant  d'ai'.ieurs  par  expérience  les  mauvaifes  Intentions  qu'elles 
ont  contre  l'Angleterre  .&  les  Etats  ,  on  peut  voir  clairement,  que  par 
l'acquiefcement  au  Teflament  elles  feront  beaucoup  mieux  en  état  d'exé- 
cuter ces  Menaces.  La  Menace  à  l'égard  de  la  Mer  Baltique  me  fait  ré- 
fléchir fur  ce  que  chacun  efl  amoureux  de  fon  propre  ouvrage;  car,  je 
crois  que  cette  menace  n'eil  fondée  que  fur  un  Projet  qui  a  été  une  fois 
far  le  Tapis,  &  entre  les  mains  de  l'Auteur  de  la  Lettre:  mais,  quoi  que 
cette  menace  foit  faite  à  la  légère,  elle  mérite  pourtant  qu'on  y  penfe; 
car, fi  on  va  fi  loin  dans  un  tcrns  que  les  Efpagnols  commencent  feulement 
à  montrer  le  nez,  que  fera*ce  lorfque  la  France  aura  rétabli  la  Monarchie 
Efpagnole  dans  fon  ancien  luflre,  ainfi  qu'elle  le  promet  ?  Venons  à 
la  Conclufion  de  fa  Lettre ,  qui  efl  la  fuivanie. 

Ne  m' alléguez  point  vos  Forces  Maritimes.     Je  fai  qu'elles  font  grandes ,  mais  je 
fai  en  même  te-ms  qu'elles  coûtent  beaucoup  ,  aujji-bien  que  les  Troupes  étrangères  que 
mus  pourriez  obtenir  des  Princes  d'Allemagne ,  £f  qu'ainfi  il  vous  fera  très  -  difficile 
de  les  entretenir.     D'ailleurs  ,  l'expérience  ne  vous  a-t-elle  pas  fait  voir  pendant  toute 
la  dernière  Guerre ,  que ,  malgré  les  nombreufes  Flottes  que  vous  équipiez  tous  les  ans 
avec  l'Angleterre,  les  François  vous  ont  enlevé  un  nombre  infini  de  Vaiffeaux  à  l'em- 
bouchure même  de  vos  Ports  ?  Çhie  fera-ce  donc  s'ils  viennent  à  unir  leurs  Forces  Na- 
vales à  celles  des  Efpagnols,,  après  avoir  mis  ces  dernières  en  bon  Etat ,  comme  il 
leur  fera  très-facile,  pour  peu  qu'ils  vewllent  ouvrir  leurs  Magazins ,  £f  donner  une 
partie  de  leur  fuperflu  ?  Nefi-il  pos  à  craindre  que  la  même  cbofe  arrive  encore  une 
fois  ?  Je  ne  dis  rien  de  la  difficulté  que  vos  Flottes  trouveraient  à  tenir  la  Mer  dans 
les  tems  orageux ,  fans  pouvoir  fe  réfugier  en  aucun  Port  d'Efpagne  ou  de  France. 
Peut-être  efperez  -vous  qu'à  leur  défaut ,  ceux  de  Portugal  vous  feront  ouverts  :  mais, 
outre  que  la  cbofe  efi  encore  dowteufe ,  puifque  vraifembhbkment  Sa  Majejlé  Portu- 
gaife  gardera  de  grandes  mefures  avec  les  deux  Couronnes,  cette  feule  reffource  nefuf- 
firoit  pas  pour  vous  mettre  à  couvert  de  tout  Danger.   Mais ,  c'ejl  à  vous  d'y  penfer  9 
V affaire  vous  regarde.     Pour  moi ,  qui  n'ai  pris  la  plume  que  pour  vous  donner  nji 
€onfeil  falutaire ,  &f  vous  détourner  de  prendre  des  engagements  qui  pourroient  vous 
devenir  préjudiciables ,  j'attendrai  avec   patience  l'iffue  de  tout  ceci;  £f  je  vai  finir 
ma  Lettre ,  après  vous  avoir  conjuré  de  pefer  meuremmt  les  chofes  que  j'ai  eu  l'hon- 
neur de  vous  dire.     Sur-iout ,  Monfieur ,  je  vous  prie  de  bien  confiderer ,  que  s'il  efl. 
vrai  qu'il  foit  nécejjaire  au  Bien  Commun  qu'il  y  ait  en  Europe  une  Puiffance  capable 
de  contrebalancer  celle  de  la  France ,  il  n'efh  pas  à  propos  de  chercher  à  affoiblir  celle 
d'Efpagne  ;  £p  qu'enfin  ,  s'il  n'y  a  que  la  jcureté  de  la  Barrière  qui  vous  faffe  de  h 
peine ,  vous  avez  lieu  de  vous  mettre  l'Efprit  en  repos ,  puifque  l'on  efi  difpofé  à  en- 
trer là-dejjus  en  tout  équitable  Accommodement ,  e?  qu'il  ne  dépend  abf&lument  que  de 

vous . 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M,  DCC.  I.  431 

vous  ,  d'obtenir  dès  à  préfent  ,par  les  voyesde  la  douceur  ,  le  plus  gra?id  avantage  que   Affaire 
vous  pourriez  efperer  par  celles  d'une  longue  Guerre  ,   quand  même  vous  la  feriez  avec    Gf-N 
fuccès,  ce  qui  néanmoins  eft  fort  douteux.     En  un  mot ,  Monfieur ,  fi?  pour  conclu-    L'Ey*° 
fion  ,  il  faut  que  vous  conveniez ,  qu'il  n'y  a  Intérêt  quelconque ,  ni  Rai/on  Divine  ou 
Humaine,  qui  puijfe  vous  confeiller  de  prendre  les  Armes  contre  les  Efpagnols  vos  an- 
ciens Amis  6P  Alliez ,  uniquement  par  ce  qu'ils  ne  veulent  pas  fouler  aux  pieds  les 
faintes  &?  dernières  Difpojitions  de  leur  Roi,  donner  les  mains  à  leur  propre  Déflruc- 
îion  &  Démembrement ,  &  fe  rendre  coupables  de  Rébellion  envers  celui  que  Dieu  leur 
a  donné  pour  légitime  Roy  &  Seigneur.     Mais  que  plutôt  vous  devez  rendre  à  Dieu 
des  Aàions  de  grâces  infinies ,  de  vous  voir  beureufement  tirez  du  terrible   embarras 
dans  lequel  vous  feriez  infailliblement  tombez ,  par  les  Suites  d'un  Traité  aujji  généra- 
lement defaprouvé ,  même  en  Angleterre  &  en  Hollande,  que  l'étoit  celui  de  Partage* 
Je  fuis ,  Monfieur,  &c. 

Il  faut  fuivre  pas  h  pas  ce  que  l'Auteur  dit.  Si  les  grandes  Forces  Ma- 
ritimes coûtent  beaucoup,  eft-ce  qu'il  n'en  coûtera  pas  autant  à  la  France 
&  à  l'Efpagne,  ft  elles  veulent  fe  montrer  ?  Ainfi ,  les  raifons  font  commu- 
nes à  fon  Parti  aufli  bien  qu'aux  autres.  Si  les  Troupes  étrangères  coû- 
tent, du  moins  elles  peuvent  être  employées  avec  plus  de  fuccès  que  par 
le  paffe ,  puis  qu'on  n'auroit  plus  à  garder  les  Pais,  apartenant  à  la  Mo- 
narchie d'Efpagne,  dont  la  Mifere  ne  lui  permettait  pas  de  faire  le  moin- 
dre effort  pour  foufager  ceux  qui  l'avoient  prife  en  Protection. 

On  a  perdu,  il  eflvrai,un  nombre  de  Navires  pendant  la  dernière  guer- 
re, mais  pourquoi  cela?  C'elt  parce  qu'on  empioyoic  les  Forces  mariti- 
mes à  garder  l'Efpagne,  foit  dans  l'Océan,  foit  dans  la  Méditerranée;  & 
le  plus  qu'on  en  a  perdu,  elt  dans  le  tems  que  l'Amiral  alla  dans  la  Méditerra- 
née pour  leur  fauver Barcelone,  qui  fut  enfuite  prife  lorfque  la  Flotte  eue 
pafFé  le  Détroit  pour  retourner  dans  fes  propres  ports,;  car,  pour  les  For- 
ces navales  d'Efpagne,  l'Auteur  avoue  lui-même  qu'elles  font  en  mauvais 
état,  &  que,  pour  les  reparer,  elles  ont  befoin  du  fuperflu  des  François. 
Il  faut  que  la  mifere  de  la  Nation  Efpagnole  foit  extrême,  puis  qu'il  faut 
qu'elle  mendie  de  ceux  qui  ont  été  fes  plus  grands  Ennemis  un  fuperflu 
qui  d'ordinaire  eit  le  fbulagement  des  plus  miiêrables  !  Mais-,  je  ne  conviens 
pas  avec  l'Auteur  que  la  même  perte  ferok  à  craindre  encore  une  fois,  car 
on  n'auroit  pa?  h  garder  toutes  le  Côtes  d'Efpagne^  &  les  Navires,  qui  furent 
employez  dans  la  dernière  guerre  pour  garder  cette  miferable  Nation,  fe- 
roient  fort  bien  employez  utilement  à  garder  le  propre.  L'Auteur  n'a  pas 
fans  doute  beaucoup  voyagé  fur  Mer,  ou  ne  fçait  pas  la  difpofkon  de  cette 
partie  de  l'Océan  où  les  Flottes  feroient  expofées  aux  orages.  J'avoue 
qu'il  peut  arriver  aux  Flottes  ce  qui  arriva  à  l'Invincible  de  Philippe  II , 
mais  n'en  peut-il  pas  arriver  de  même  à  celle  de  France  &  aux  Forces  Na- 
vales d'Efpagne?  Le  fuperflu  que  celle-ci  auroit  receu  des  Magazins  des 
François  feroit-il  fuffifant  pour  les  mettre  en  affez  bon  état  pour  éviter  le 
danger?  Si  fe  vent  chaïîbit  à  terre  du  côté  de  l'Efpagne  ou  de  la  France, 
il  pourroit  véritablement,  mettre  ea  danger  les*  Flottes  j  mais  ne  peut- il 

pas 


s 

PE 


PK. 


432    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Avtairvs  pas  arriver  qu'un  autre  vent  chafTeroit  les  leurs  vers  l'Irlande  &  l'Ang'e- 
f  in  .  d  [Crre.  &  les  Forts  de  ces  deux  Jfîes  ne  feroient-ils  pas  aufli  fermez  à  leurs 
Flottes?  Le  danger  paroit  egai:  ainiî ,  e'efl  mal  à  propos,  ce  me  femble, 
„  qu'il  veut  infpirer  des  aprehenfions  fur  des  chofes  qui  peuvent  arriver 
aufli-bien  à  leurs  Flottes  qu'à  celles  des  autres.  Pendant  la  dernière  guer- 
re, les  Flottes  combinées  ont-elles  eu  befoin  de  fe  réfugier  dans  les  Ports 
d'Efpagne  pour  éviter  les  orages?  Point,  du  tout.  C'etf.  pour  vous  dire, 
Monfieur,  que  quand  les  Ports  d'Efpagne  feroient  fermez,  i ' s  ne  por- 
teroient  pas  un  grand  préjudice.  Je  ne  veux  faire  aucune  réflexion  fur  ce 
qu'il  dit  du  Portugal,  par  raifon. 

Je  trouve  que  l'Auteur  fait,  tantôt  comme  Sirène  qui  endort  par  fon 
chaut  ceux  qui  lui  preltent  l'oreille,  parlant  d'amitié,  de  bonne  correfpon- 
dance,  de  Barrière  &c,  &  tantôt  comme  le  Crocodil,  déplorant  les  mal- 
heurs qui  peuvent  arriver;  mais  je  vous  prie,  Monfieur, de  faire  reflexion 
que  le  but  de  la  Sirène  &  du  Crocodil  n'eit  à  la  fin  que  pour  dévorer. 

Je  ne  faurois,  Monfieur  ,  m'empecher  de  rire,  lorfque  je  lis  ce  que  l'Au- 
teur dit  touchant  la  necefiité,  qu'il  y  ait  en  Europe. une  PuilTance  capable 
de  contrebalancer  celle  de  la  France,  &  qu'il  veut  infinuè'r  que  l'Efpagne 
ne  doit  point  être  affoiblie,  afin  qu'elle  puifie  fervir'pour  cet  effet.  L'Au- 
teur ne  fe  fou  vient  pas ,  fans  doute  i  des  menaces  qu'il  vient  de  faire  de  la 
jonélion  des  Forces  Navales  de  France  &  d'Efpagne  ,  du  fecours  que 
l'Efpagne  auroit  des  François,  foit  en  Efpagne,  foit  aux  Indes  Efpagnoles. 
Elt-ce  donc  que  l'Union  &  la  bonne  Correfpondance  entre  ces  deux  Mo- 
narchies ferviroit  pour  fe  contrebalancer  réciproquement  l'une  l'autre? 
La  fourmilion  fervile  de  la  Régence  de  Madrid  aux  Confeils  &  aux  Or- 
dres de  la  France  efl  la  plus  belie  preuve  du  monde  du  contrebalancement 
que  l'Efpagne  fera.  Je  vous  laiffe  à  juger  Monfieur  fi  une  pareille  raifon 
a  la  moindre  ombre  de  bon  Sens.  Ce  qu'il  dit  de  la  Barrière  &  de  la 
difpofition  où  on  efl  d'entrer  dans  un  Accommodement  équitable,  efl  un 
refrain  de  l'Auteur,  qui  ne  mérite  pas  qu'on  y  fafie  reflexion  ;  car,  ainfi 
que  j'ay  eu  l'honneur  de  vous  dire  ci-devant,  il  n'y  aucun  fond  à  faire 
fur  Accommodemens,  ni  Paroles,  ni  Traittez,  ni  Sermens ,  non  feulement 
avec  la  PuilTance  qui  efl  en  poffefîion  de  contrevenir  à  tout,  mais  pas  mê- 
me avec  les  Efpignols  qui  fuivent  à  prefent  les  directions  qui  ont  un  pa- 
reil but. 

Ce  feroit  une  queflion,  s'il  n'y  a  raifon  divine  ni  humaine,  qui  puifie 
confeiiltrr  de  prendre  les  armes  contre  les  Efpagnols  qui  font  les  anciens 
Amis  &  Alliez,  &c.  Mais  comme  je  fupofe  que  l'on  n'a  pas  defTein  de  fai- 
re la  Guerre  aux  Ëfpagnols  de  but  en  blanc,  je  ne  m'arréteray  pas  à  dire 
bien  des  chofes  qui  pourroient  s'y  raporter.  Je  diray  feulement  en  pat 
fant,  qu'il  feroit  beaucoup  moins  étrange  de  voir  deux  Amis  devenir  En- 
nemis,  que  de  voir  l'Union  des  Ëfpagnols  avec  les  François,  qui  aupara- 
vant étoient  mortels  Ennemis.  Nôtre  Auteur  finit  fa  Lettre  en  donnant 
i'Epitheie  de  Saintes  aux  Difpofitions  de  leur  Roy.  La  Cour  de  Vien- 
ne ,   qui  fçait  que    ces  Difpofitions  ne  font   que  l'effet  d'une  Politique 

de 


PE. 


RESOLUTIONS   D'ET  AT  ,  M.  DCC.  I.  453 

de  Machiavel ,  trouvera  que  c'efl  prophaner  en  impie  que  de  parler  de  Attairïs 
la  forte.  Tout  attentat  ,  ufurpation  ,  manquement  de  foy,  contreven-  GfN-  UE 
lions  aux  fermens,  doivent,  félon JTAuteur,  etre'des  chofes  faintes  ;  voilà 
une  nouvelle  Théologie  qui  va  s'établir  en  Efpagne:  c'efl  dommage  qu'un 
tel  perfonnage  ne  foit  Chanoine  de  Tolède  ,  pour  pouvoir  afpirer  à  en  être 
l'Archevêque. 

Enfin,  l'Auteur  achevé  en  foutenant  que  leTraitté  de  Partage  eft  géné- 
ralement defaprouvé  tant  en  Angleterre  qu'en  Hollande.  Il  y  a  aparen- 
ce  que  l'Auteur  fe  tenant  à  Anvers  n'eit  pas  informé  de  la  difpoution 
des  peuples  en  Angleterre  &  en  Hollande;  car,  bien  loin  qu'on  y  defa- 
prouvé leTraitté  de  Partage, on  le  trouve  tout-à-fait  bon,  &  ils  louent  la 
prudence  de  Sa  Majcfté  Britanique  &  de  Leurs  Hautes  Puiifances  d'avoir 
conclu  un  Traitté  qui  tendoit  abfolu>nent  au  maintien  du  repos  public. 
Et  pour  vous  faire  voir ,  que  je  n'avance  rien  de  moi-même ,  je  vous  en- 
voyé ci-jointe  une  Lettre  imprimée  en  Angleterre,  qu'un  Gentilhomme 
Anglois  de  mes  Amis  m'a  envoyée  de  la  Haye,  &  que  j'ai  fait  traduire  ici, 
par  laquelle  vous  verrez  les  Sentimens  des  véritables  Anglois.  A  l'égard 
de  la  Hollande,  j'ay  vu  que  tous  les  Ecrits  qui  s'impriment  tous  les  mois 
parlent  de  même,  fans  en  excepter  les  Lettres  Hiltoriques,  dont  l'Au- 
teur clairvoyant,  enfaifant,  comme  c'elt  fa  coutume,  les  Eloges  des  Efpa- 
gnols,  ne  lailTe  pas  de  donner  toujours  le  Titre  de  fage  Traitté  &  celui  de 
Partage. 

Voilà,  Monfieur, les  Reflexions  que'  ]ay  faites  currenteCalamo  fur  la  Let- 
tre en  queftion.  A  vous  parler  franchement ,  j'avois  deflein  en  prenant  la 
plume  de  m'étendre  beaucoup  plus  ;  mais ,  quelque  raifon  m'oblige  à  re- 
ferver  beaucoup  d'autres  chofes  à  une  autre  occatïon  ,  &  vous  vous  con- 
tenterez s'il  vous  plaît  de  ce  que  je  viens  de  vous  dire  là-deffus.  Mais 
comme  je  vous  ay  promis  ci-devant  de  vous  marquer  que  ce  n'ell  pas  la 
Convenance  non  feulement  de  l'Angleterre,  de  la  Hollande  &c. ,  que  le 
Teflament  ait  lieu,  permeuez-moy  ,je  vous  fuplie, Monfieur, que  je  vous 
en  raporte  quelques  raifons  le  plus  fuccinétement  qu'il  me  fera  poffible, 
&  comme  un  abrégé  de  ce  que  j'aurai  peut-être  l'honneur  de  vous  envoyer 
ci-après. 

A  l'égard  de  l'Angleterre,  la  Lettre  Angloife  expofe  alTez  ce  que  cette 
Nation-là  doit  aprehender.  On  y  peut  ajouter  que  la  Jamaïque  x  qui  eft 
l'Ifle  la  plus  à  portée  du  Mexique,  &  qui  a  ete enlevée,  comme  vous  favez, 
aux  Efpagnols,  feia  peut-être  la  première  txpofée  en  proye.  Encore  ce 
ne  feroit  rien,  û  la  Nation  n'a  voit  à  craindre  des  chofes  infiniment  plus 
importantes.  Un  faux  zèle  de  Religion  pourra  infpirer  d'annuller  l'Abdi- 
cation du  dernier  Roi,  &  on  a  d'autant  plus  de  raifon  de  le  craindre,  que 
vous  favez  par  quelles  voyes  iniques,  &  par  quels  attentats  horribles,  on 
a  déjà  taché  par  plufieurs  fois  d'y  reiïilirj  ce  qui  entraineroit  après  foi 
l'abolition  de  la  Religion  dominante,  de  tous  les  Privilèges,  &  de  toutes 
lesLibertez  qui  contribuent  le  plus  à  la  profperité  &  au  bonheur  de  la  Na- 
tion. C'efl  un  Projet ,  qui  fubfifte  depuis  plus  de  foixante.  ans  ;  &  la  Fran- 
lom.  XI.  I  i  i  ce 


&FN.    DE 

Eun 

PE. 


434    MEMOIRES,  NEGOTI ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  Ce  n'eft  pas  bien  aife  qu'il  y  ait  un  Pais,  qui, par  la  confervation  de  fesLî- 
&fn.  de  bertez,  puiffe  faire  fouvemr  aux  François  qu'avant  le  prefent  Règne  ils 
ont  été  fur  le  même  pied.  Il  eft  vray ,  qu'il  y  a  encore  un  Parlement  en 
France;  mais ,  chacun  fçait  qu'on  a  fait  à  fon  égard  ce  que  Tacite  dit  que 
fit  A/Ugtffte; x  qui  laifïa eadcm  magijîratuum  vocabula^  mais  fans  autorité:  Ôl 
le  Parlement  d'Angleterre, qui  ell  fi  jaloux  de  les  Prérogatives,  doit  ex- 
trêmement craindre  qu'il  ne  lui  en  arrive  de  même.  Vous  favez  les  In- 
formations qu'on  a  des  Projets  contre  l'Angleterre,  &  qu'il  n'efl  pas  ne- 
ceffaire  de  confier  au  Papier. 

La  Hollande  fe  trouve  par  le  Teftament  dans  de  plus  grands  dangers 
que  l'Angleterre ,  puis  qu'on  fait  de  longue  main  qu'on  en  veut  aux  Pro- 
vinces-Unies, qu'on  regarde  comme  celles  qui  ont  Je  plus  traverfé  l'agran- 
diflement  de  la  France.  Les  efforts',  qu'on  a  récemment  faits  pour  réta- 
blir le  Commerce  d'Anvers  par  le  deiTein  du  Canal,  auront  à  prefent  plus 
de  fuccès,  &  peut-être  voudra-t-on  en  ouvrir  le  paffage  par  la  Zelande,. 
qui  n'eit  fermé  que  par  lesTraittez,  qu'on  n'aura  pas  honte  d'enfraindre , 
puis  qu'ils  ne  font  inviolables  qu'autant  que  la  force  les  rend  tels.  Les 
perfonnes,  qui  en  ont  apuïé  ci-devant  l'Entreprife,  fe  trouvent  à  prefent 
avoir  tout  crédit  auprès  du  nouveau  Roy  &  auprès  de  la  France;  &  quand 
même  cela  n'auroit  pas  d'abord  tout  le  fuccès  qu'on  s'en  promet,  on  tâ- 
chera de  faper  peu  à  peu  le  Commerce.  On  tarira,  tant  à  l'Angleterre 
qu'à  la  Hollande,  les  fources  des  Indes  Occidentales,  &  tout  l'argent  ne  cou- 
lera que  dans  les  Coffres  de  la  France.  La  bonne  correfpondance  entre 
la  France  &  l'Efpagne  les  fera  entreprendre  de  traverfer  le  Commerce 
des  Indes  Orientales ,  qui  eft  un  des  principaux  foutiens  des  Provinces-U- 
nies; fans  compter  celui  du  Levant,  qui  n'eit  pas  un  des  moins  confidera- 
bies.  La  France  faifant  enlever  toutes  les  Laines  d'Efpagne  pour  faire 
valoir  fes  Manufactures,  celles  des  Provinces-Unies  tomberont  faute  de 
matière,  ce  qui  fer  oit  deferter  du  Pais  un  nombre  tres-confiderable  d'ou- 
vriers &  autres  gens,  qui ,  étant  réduits  à  la  mendicité , fe  tranfporteroienc 
ailleurs  pour  trouver  dequoi  vivre.  Les  menaces  mêmes  de  l'Auteur,  & 
les  Remarques  de  la  Lettre  d'Angleterre  que  vous  pourrez  voir  en  leur 
lieu,  peuvent  aider  à  vous  donner  une  idée  jufte,  que  ce  n'eit  pas  la  Con- 
venance des  Etats  Généraux  que  le  Teftament  s'exécute. 

Cette  exécution  n'eft  pas  non  plus  laConvenance  de  l'Empire;  car, l'a- 
grandhTemenc  de  la  France,  par  la  bonne  correfpondance  avec  l'Efpagne, 
par  l'accroiffement  de  fes  Manufactures  &de  fon  Commerce,  par  l'abaiflè- 
ment  de  l'Angleterre  &  de  la  Hollande,  &  par  l'Argent  du  Pérou,  redui- 
*ra  Sa  Majefté  Impériale  ,  &  tous  les  Sereniffimes  Electeurs  &  Princes 
d'Allemagne ,  dans  une  dépendance  à  n'ôfer  contredire  à  la  France  en 
rien.  Que  devindra  alors  l'Election  libre  d'un  Empereur,  que  devien- 
dront les  Souverainetez  des  Princes  qui  peuvent  à  prefent  tenir  des  trou- 
pes ,  en  lever  de  nouvelles ,  &  faire  des  Alliances  ?  Il  leur  arrivera  toute 
la  même  chofe ,  qu'on  voit  arriver  prefentement  au  Duc  de  Savoye,  au- 
quel la  France  fait  dire  de  livrer  aux  Efpagiiols  Verceil  qui  elt  la  meilleu- 
re 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.        435- 

re  place  qu'il  ait,  &  de  congédier  Tes  troupes.  Les  Chambres  de  Réunion  Artum 
feront  renouvellées,  &  les  Droits  de  Charlemagne,  ou  an  pis  aller  ceux  de  GfN-  nE 
la  Dépendance  des  Enfans  de  Noé  ou  d'Adam  ,  donneront  lieu  à  la  Fran-    L  ^KO' 

ce  de  dépouiller  tant  de  braves  Princes  de  leurs  Souveraintez,  &  d'être    ! — 

des    Vaiîaux  réduits  à  l'état  pitoyable   où   la   Noblefle   de   France   fe 
trouve. 

Le  Portugal  eft  le  premier  qui  fera  expofé.  La  mémoire  eft  encore 
récente  de  l'Etabliflement  de  ce  Royaume  détaché  de  la  Monarchie  d'Efpa- 
gne.  L'écarteleure  de  fes  Armes  dans  celles  d'Efpagne  qu'on  vient  de  fai- 
re eft  une  Comète  fatale  qui  ne  lui  prédit  que  malheur.  Si  l'Archiduc 
Charles  avoit  été  Roy  d'Efpagne  ,  fuivant  le  Traitté  de  Partage  ,  le 
Royaume  de  Portugal  auroit  été  hors  de  danger;  mais,  à  prefent,  la  mê- 
me raifon  que  la  France  a  eue  d'affilier  la  Maifon  de  Piragance  à  faire  le 
démembrement  du  Portugal  de  la  Couronne  Caftille,  elle  l'a  pour  le  réunir 
aux  Etats  de  fon  petit  Fils ,  quand  ce  ne  feroit  que  pour  la  bonne  con- 
fcience  que  la  France  a,  &  qu'ayant  aidé  à  ôter  le  Portugal  à  l'Efpagne, 
elle  veuille  à  prefent  aider  à  en  faire  faire  la  reftitution  par  un  prétexte 
d'équité.  L'exécution  du  Teflament  n'ell  donc  pas  non  plus  de  la  Con- 
venance du  Portugal. 

Les  Couronnes  de  Suéde  &  de  Dannemark  peuvent  attendre  de  fe 
voir,  non-feulement  négligées  ,mais  encore  obligez  d'envoyer  comme  par 
tribut  à  la  France  le  Goudron,  les  Mats ,  &  les  autres  matériaux  pour  les 
Navires  que  leurs  Royaumes  produifent,  quand  ce  ne  feroit  que  pour  rem- 
placer le  fuperflu,  dont  on  feroit  la  charité  aux  Efpagnols  pour  mettre  en 
état  leurs  Forces  navales.  Croyez-vous,  Monfieur  ,  que  la  France,  fe 
voyant  en  état  de  commander  à  baguette  au  relie  de  l'Europe,  voulût 
continuer  à  envoyer  des  Ambalfadeurs  à  ces  deux  Tètes  Couronnées,  non 
plus  qu'aux  autres  PuhTances?  Elle  voudroit  imiter  la  Porte  Ottomane,  qui 
reçoit  des  Ambalfadeurs,  &  n'en  envoyé  point,  parce  que  le  Grand  Sei- 
gneur fe  dit  Roi  des  Rois;&  il  eft  à  prefumer,  que  la  France  voudra  éle- 
ver fa  grandeur  par  des  Titres  qu'on  n'oferoit  après  lui  difputer.  Elle 
n'auroit  plus  befoin  de  femer  la  zizanie  parmi  les  PuhTances  :  ainlî,  elle 
les  priveroit  de  l'honneur  qu'elle  leur  fait  à  .prefent  pour  les  per- 
dre ,  &  leur  envoyeroit  le  Tel  eft  mon  Plaifir  pour  tout  ce  qu'elle  vou- 
droit. 

Que  deviendra  l'Election  libre  d'un  Roi  de  Pologne?  La  pauvre  Re- 
publique feroit  obligée, bon  gré,  mal  gré,  de  mettre  fur  le  Throne,  non 
pas  un  Prince  digne  de  la  Couronne,  comme  le  Prince  de  Conty,  mais 
peut-être  un  Légitimé  de  France.  Et  cette  Couronne-là  viendroit  à  être 
comme  un  Eveché  ou  une  Abaye  en  France,  à  laquelle  cette  Cour 
voudroit  avoir  Droit  de  Nomination. 

Les  Princes  d'Italie  doivent  s'attendre  au  même  traittement  que  la 
France  fait  à  prefent  au  Duc  de  Savoye.  L'Adouciffement  qu'ils  pour- 
roient  peut-être  avoir  ,  c'eft  qu'au  lieu  de  livrer  leurs  places  fortes , 
oa  les  obligeroit  feulement  à  les  démolir ,  afin  de  pouvoir  envoyer  des 

I  i  i  2  Trou- 


Affaires 

GEN.   DE 

l'Euro- 
pe. 


4V*    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Troupes  à  Difcretion  pour  les  châtier ,  lorfqu'ils  ne  voudroient  pas  fubir 
le  joug.  >  _     ■ 

Le  Pape  même,  &  le  Collège  des  Cardinaux,  feront  réduits  à  une  Soumif- 
fion  aveugle ;&  iîs  doivent  s'attendre,  que  dans  un  Conclave  il  n'y  auroit 
point  d'autre  Saint  Efprit  pour  diriger  les  Scrutins,  que  celui  de  l'Or- 
dre de  France. 

Et  les  pauvres  SuifTes  fe  verront  enlever  le  Païs  de  Vaux  &  Genè- 
ve ,  &  feront  obligez  de  rendre  avec  ufure  les  Penfions  publiques  & 
fecretes  que  la  France  leur  diflribuë  depuis  fi  long-tems. 

Je  tranche  court  fur  toutes  les  craintes  que  les  Puiffances  de  l'Europe 
doivent  avoir  par   l'exécution   de  l'injulte  Teftament ,   parce  que,  lorf- 
que  j'aurai  un  peu  plus  de  loifir ,    je  vous  ferai  un  Portrait   dans   tou- 
tes les   couleurs   de   ce  dont  je  ne  vous  donne  ici  qu'un  Crayon.  Mais 
je  ne  faurois  m'abftenir  de  vous  dire,  que  l'Execution  de  ce  Teftament  eft 
même  contre  la  Convenance  des   Efpagnols.     Un  changement  fi  grand 
dans  la  Monarchie  d'Efpagne,  &  de  la  nature  .dont  il  eft,  entraine  indif- 
penfablement  après  foi  un  Abaiffement  des  Grands  &  un  AppauvrifTemenE 
des  Peuples,  afin  de  ne  trouver  aucun  empêchement  dans  la  Domination. 
Que  ne  doivent-ils  pas  aprehender ,  tant  de  Grands  ,  dont  le  crime  ne 
fera  que  d'être  riches  ,  puifTants ,  ou  douez  d'intelligence  ?  Il  n'auront  pas 
des  exils  doux  comme  dans  les  Règnes  précédens  :   on  les  éloignera  dans 
les  climats  les  plus  dangereux  du  nouveau  Monde  &  dans  les  Ifles  ,  afin 
de  les  y  faire  périr  miferablement.     On  ira  remuer  les  cendres  des  Pérès 
&  des  Ayeuls;  &  fuivant  les  Vice-Royautez  &  les  Gouvernemens,  on  leur, 
imputera  des  Extoriions,  qu'on  condamnera  les  vivans  de  payer,  &  on 
les  traittera  avec  une  rigueur  pareille  à  celle  qu'on  vient  de  pratiquer  en 
en  France  contre  les  Traittans.   Il  eft  même  à  prefumer,  que  ceux-là  mê- 
me qui  ont  contribué  à  cet  Evénement  n'auront  pas  un  meilleur  fort.    On 
fe  fert  d'eux  à  prefent  jufques  à  ce  que  les  chofes  foient  affermies  ;  mais, 
après,  il  ne  faut  point  douter  qu'on  ne  les  éloigne  des  Confeils,  &  on  leur 
fera  voir  qu'on  aime  bien  les  Trahifons,  mais  non  pas  les  Traîtres.     Il  ne 
faut  pas  que  les  Efpagnols  s'attendent  que  leur  nouveau  Roi  fe  conduira 
par  les  Refolutions  du  ponfeil  d'Etat.     Les  Maximes  de  la  France  font 
defpotiques;  &  fi  le  Confeil  d'Efpagne  fubfifte,  ce  ne  fera  que  comme  le 
Parlement  de  Paris ,  pour  exécuter  les  ordres  qu'on  leur   donnera.     Les 
Peuples  Efpagnols  font  à  plaindre,  eux,  qui ,  par  une  pareffe  naturelle  & 
une  ambition  hors  de  faifon,  font  dans  une  extrême  miférej  parce  qu'on 
va  encore  les  réduire  à  une  condition  plus  pitoyable  ,  fans  compter  qu'on 
tâchera  d'en  tranfporter  la  plus  grande  partie  à  périr  dans  les   garnifons 
■éloignées,  afin  de  peupler  peu  à  peu  l'Efpagne  de  François."   Et  enfin  il 
n'eft  pas  impolïible,que  nous,  ou  nôtre  Pofterité,  ne  voyons  un  jour  cette 
Monarchie,  aufïï  bien  que  toutes  les  autres  Puiffances,  réduites  par  la  Loi 
Salique  en  Provinces ,  &  avoir  le  même  fort  qu'ont  eu  une  partie  de  celles 
qui  compofent  à  prefent  la  Monarchie  Françoife.  Je  vous  réitère,  Monfieur, 
que  je  pourrai  un  jour  vous  fatisfaire  plus  amplement. 

Mais 


PK. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.   ï.  457 

Mais,  après-tout,  que  faudroit-il  donc  faire?  Le  danger  eft  grand, il  eft  Affa^fs 
preffant,  je  vous  l'avoue,  il  eft  même  temps  d'y  réfléchir.  C'efl  pour-  °fN:  DE 
quoi  il  me  femble  que  le  plus  feur  ell  de  faire  ce  que  l'Auteur  de  la  Let- 
tre Angloife  infinuë,  qui  ell  de  fe  mettre  en  bonne  pofture  ,  &  de  faire 
que  l'Angleterre  &  la  Hollande  s'unifient  pour  fe  foutenir  mutuellement; 
&  de  fe  remettre  à  la  Prudence  de  Sa  Majefté  Britannique,  pour  ménager 
dedans  &  dehors  la  feureté  des  deux  Maifons.  11  eft  certain  que  les  Peu- 
ples de  ces  deux  Puiflances  y  contribueront;  car,  s'ils  ont  defaprouvé  en 
quelque  manière  le  Traitté  de  Partage,  c'eft  parce  qu'il  accordoit  quel- 
que chofe  à  la  France,  &  qu'ils  auroient  voulu  qu'elle  n'eut  rien  eu,  ainfi 
que  la  Juftice  le  requeroit.  Et  jugez  de  leur  Difpofftion,  à  prefent  qu'ils 
voyent  que  la  France  a  tout. 

Je  connois  des  perfonnes  fages ,  qui  vont  encore  plus  loin ,  &  foutien- 
nent  que  la  PuifTance  qui  peut  fervir  d'équilibre  dans  la  conjoncture  pre- 
fente  eft  Sa  Majefté  Impériale  &  l'Empire,  &  qu'il  feroit  neceflaire  que 
les  autres  Puiflances  de  l'Europe  fuiTent  de  la  partie  pour  lès  foutenir.  Sa 
Majefté  Impériale  eft  un  Prince  ,  à  la  bonne-foi  duquel  on  peut  fe  fier, 
&  on  trouvera  toujours  toute  feureté  à  entrer  en  Traitté  avec  lui.  Non- 
feulement  l'Angleterre  &  la  Hollande  pourront  trouver  leur  feureté  dans 
une  telle  Union  ,  mais  auïïi  les  autres  Puiflances  de  l'Europe  y  &  Sa  Ma- 
jefté Suedoife,  qui,  à  l'âge  où  elle  eft,  a  fait  de  û  beaux  coups  de  Maître, 
a  le  même  intérêt,  en  s'uniffant  à  l'Empereur,  de  faire  contre  la  Maifon 
de  Bourbon  ce  que  le  Grand  Guftave-Adolphe  en  Union  avec  la  France 
fit  contre  la  Maifon  d'Autriche.  Je  ne  fuis  pas  un  Trompette  de  Guer- 
re; j'aime  la  paix  &  la  tranquillité.  Mais,  il  me  femble,  qu'il  y  a  plus  de  Pru- 
dence de  foutenir  quelque  trouble  pour  hazarder  de  la  conferver  ,  que 
d'attendre  avec  infenfibilité  qu'elle  foit  pour  jamais  renverfée  :  &,  périr 
pour  périr,  il  vaut  mieux  périr  en  braves  gens,  &  hazarder  dans  le  fort' 
des  Armes  de  fe  fauver  du  Naufrage.  On  n'auroit  plus  à  prefent  à  em- 
ployer tant  de  Forces  ni-de  Flottes  à  garder  l'Efpagne  &  ies  Dépendan- 
ces ,  ce  qui  rendrait  les  Forces  opofées  à  la  France  plus  puiflantes ,  au-lieu 
qu'à  prefent  ce  foin  apartenant  à  la  France,  lui  fera  une  diverOon  à  forr 
defavantage  &  l'affaiblira.  Ce  ne  fera  pas  auiîi  une  chofe  facile  de  faire 
marcher  des  Troupes  du  Milanez  dans  l'Efpagne,  comme  il  a  été  aifé  à  la 
France  de  le  faire  du  Rhyn  à  la  Meufe  ,  &  de  celle-ci  au  Rhin.  Il  faut 
confiderer  que  l'Efpagne  n'a  ni  Soldats,  ni  argent,  ni  hommes  ,  pour  en  fai- 
re; fon  étendue  eft  grande,  &  requiert  par  confequent  de  plus  grandes 
forces  pour  fa  defenfe;  le  mauvais  état  de  fes  Magafins,  devant  être  repa- 
ré: vuidera  en  partie  ceux  de  la  France;  &  en  un  mot  je  ne  vois  pas  qu'il 
y  ait  jamais  eu  une  plus  belle  conjoncture  d'avoir  des  fuccès  heureux  con- 
tre la  France.  Si  les  Flottes  &  les  Forces  coûtent ,  éft-ce  que  la  France 
ne  fera  pas  obligée  à  faire  de  pareilles  depenfes,  &  même  plus  pour  four- 
nir pour  l'Efpagne  ce  que  les  Alliez  fourniflbient  pendant  la  dernière  guer- 
re? D'ailleurs ,  les  depenfes  de  la  dernière  guerre  ne  feront  pas  il  grandes  à 
l'avenir  j   car,  comme  c'eft  à  prefent   l'intérêt  commun  de   toutes  les 

I  i  i  3  Pui£- 


PE. 


438    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  PuifTances  de  l'Europe  de  tacher  de  fe  fauver  du  Naufrage  dont  on  eft 
■gen.  de  menacé  ,  il  ne  faut  point  douter  que  chacun  ne  fafTe  fans  intérêt  fes 
efforts  particuliers.  La  principale  chofe  eft  de  fe  mettre  en  bonne 
pofture,  &  de  faire  voir  que  fi  l'on  vient  à  une  guerre,  on  eft  refolu 
de  la  foutenir  avec  vigueur,  &  mieux  qu'on  n'a  jamais  fait.  Si  Dieu  par  fa 
mifericorde  veut  envoyer  fa  délivrance  à  l'Europe  par  quelque  coup  inopi- 
né de  fa  Providence  ,  on  ne  fe  repentira  pas  d'avoir  pris  les  mefures 
que  la  prudence  humaine  fuggere  pour  fa  propre  confervation  ,  &  on 
aura  d'autant  plus  lieu  de  rendre  des  actions  de  grâces  infinies  au  Tout- 
Puiflant  qui  aura  voulu  épargner  l'effufion  du  Sang  Chrétien. 

Voila,  Monfieur,  ce  que  mon  petit  Génie  m'a  fourni  à  la  hâte.  Je  fouhai- 
terois  d'avoir  une  plus  grande  étendue  de  connoiflance,  pour  vous  faiis- 
faire  ;  ce  que  je  viens  de  faire  n'étant  que  pour  vous  témoigner  que 
je  fuis ,  <5cc. 

Lettre  à  un  Membre  du  Parlement  à  la  Campagne ,  touchant  la 

Situation  prefente  des  Affaires  dans  la  Chrétienté ,  en  Réponfe 

à  une  de  fes  Lettres  fur  ce  Sujet. 

MONSIEUR, 


à     Te  voi  par  celle  que  vous  m'avez  fait  l'honneur  de  m'ecrire,  que  vous 
■m- J  fouhaitez  que  j'ajoute  aux  Nouvelles,  que  j'ai  foin  de  vous  envoyer, 


Lettre 
un  Mem- 

plrie-11      mes  Reflexions  fur"  le  Teftament  du  feu  Roi  d'Efpagne  ,  &  fur  la  Ré- 
ment        folution   que  la   Cour   de   France  a  faite   de  l'accepter  au  préjudice  du 
d'Angle-    Traitté  de  Partage.     Vous  m'avez  communiqué  par  avance  les  vôtres, 
terre.        Q  j'aj  examiné   avec   tout  le   foin  pofïïble  les  Raifons  ,   par  lefquelles 
vous  voulez  prouver  qu'il  étoit  plus  avantageux   pour   l'Europe  en  gê- 
nerai ,   &  pour  l'Angleterre   en  particulier,  que  la   France   acceptât   le 
Teftament  ,    comme   elle  a  fait ,    que   de   fe  tenir  au  Traitté  de  Par- 
tage. 

La  qualité  que  vous  avez  d'un  excellent  Compatriote, qui  vous  fait  en- 
tendre raifon  fans  vous  emporter  &  fans  pancher  dans  aucun  des  Partis ,  & 
fâchant  que  vous  me  croyez  abfolument  porté  pour  le  bien  public,  &  par 
confequent  que  je  vife  au  même  but  que  vous,  (quoique  nous  différions  à 
prefent  dans  nos  penfées  touchant  les  moyens)  m'a  encouragé  de  vous 
envoyer  avec  d'autant  plus  de  liberté  cette  Reponfeà  ce  que  vous  fouhait- 
tés ,  dans  l'affeurance  qu'elle  fera  acceptée  dans  la  même  intention  qu'elle 
a  été  conçue. 

En  premier  lieu.  Vous  tâchez  d'expliquer  dans  vôtre  Lettre ,  qiïau 
lieu  d'entrer  dans  un  Traitté ',  qui  auroit  été  trop  à  V Avantage  de  la  Fran- 
ce, cet  oit  plutôt  nôtre  Intérêt  de  fe  tenir  en  bonne  intelligence  avec  V  Empe- 
reur ,  £5?  de  prendre  conjointement  avec  lui  des  mefûres  capables  de  procurer 
la  Succefiïon  d'Efpagne  à  l'Archiduc. 

Je 


P£. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  L  w 

Je  conviens  avec  vous,  que  ç'auroit  été  mieux  pour  nous  d'avoir  ce  Affaires 
Prince  pour  Monarque  d'Efpagne,  plutôt  que  le  Duc  d'Anjou;  ex  que  ce-  GfN-  DB 
la  auroit  tenu  les  Affaires  de  l'Europe  dans  un  meilleur  équilibre  pour  le 
maintien  de  la  tranquillité  publique.  Mais,  vous  m'avouerez  en  même 
temps ,  que  ce  Prince  ne  pouvoit  être  mis  fur  ce  Throne-là,  que  par  une 
de  ces  deux  voyes,  favoir,  ou  par  un  engagement  d'une  guerre  confédé- 
rée contre  la  France  pour  avoir  tout ,  ou  en  entrant  dans  un  Trait- 
té  de  Partage  qui  pût  accommoder  amiablement  l'un  &  l'autre  Parti. 

Vous  infiftez  que  ce  Traitté  auroït  été  trop  avantageux  à  la  France  ,  s  il 
avoit  eu  [on  effet.  Mais ,  croyez-vous  de  bonne-foi  que  les  François  euf- 
fent  moins  gagné  par  une  guerre  ,  que  ce  que  le  Traitté  leur  accor- 
doit  ?  Ou  pouvez-vous  croire  que  la  France  eut  jamais  voulu  confentir 
à  un  Traitté  pour  abandonner  le  tout  ,  &  pour  renoncer  à  tous  les  a- 
vantages ,  qu'elle  avoit  raifon  d'efperer  de  la  poiture  où  elle  eil,  pou- 
vant agir  beaucoup  avant  aucuns  alliez  ,  &  dans  un  alTeurance  prefque 
certaine  d'une  foumiffion  générale  des  Ejpagnols ,  pour  éviter  qu'ils  ne 
fulTent  envahiz  &  ruinez  tout  d'un  coup  par  le  rapide  torrent  de  les  ar- 
mes? D'ailleurs,  ce  n'étoit  pas  un  petit  point  gagné  d'avoir  conduit  la  Fran- 
ce à  une  Renonciation  de  toutes  fes  Prétentions  fur  le  Royaume  de  Na- 
varre, qui  auroit  donné  occafion  une  fois  ou  l'autre  à  de  nouvelles  ruptu- 
res. Et  non-feulement  cela  ;  mais,  la  principale  Affaire  écoit  û'affeurer 
I'Efpagne  &  les  Indes  avec  le  Païs-Bas  à  l'Archiduc,  fçavoir  à  un  Prince, 
que  ce  fervice  auroit  unis  à  nos  intérêts  pour  épargner  à  la  Nation  la  de- 
penfe  d'une  dangereufe  &  onereufe  guerre,  &  pour  lui  affeurer  ce  qui  fait 
tout  à  la  fois  nôtre  Profperité  &  nôtre  Gloire,  favoir  l'ineitimable  Préro- 
gative de  tenir  l'équilibre  de  l'Europe  entre  nos  mains.  Ces  avantages  ne 
meritoient-ils  pas  d'être  recherchez  au  prix  de  quelque  petit  Sa- 
crifice? 

Vous  prétendez  de  plus,  que  le  dernier  Roi  d'Efpagne  rf  auroit  jamais  été 
porté  à  nommer  le  Duc  d"  Anjou  pour  [on  Héritier  Univerfcl  ,  fi  ce  ri  eût  été 
pour  le  Traitté ,  pour  tenir  par-là  la  Monarchie  entière  contre  les  defjcins  &  les 
intentions  d'icelui ,  ainfi  quil  nous  faut  regarder  le  Traité  comme  ayant  donné 
eccafion  au  Teltament.  Penfez  ,  plus  loin.  Que  l'aprehenfion  ,  que  nous 
avions  d'un  pareil  Teftament  en  faveur  de  la  France  ,  étoit  le  principal 
moùf  pour  entrer  dans  ce  Traitté  \  &  fur  cela  j'ôiè  dire  que  vos 
fentiments  aprochent  beaucoup  de  la  vérité.  Nôtre  Cour  avoit  de  bon» 
avis ,  lors  qu'on  mit  le  Traitté  fur  le  tapis  ,  que  le  Parti  de  l'Empereur 
ehancelloit,  &  que  le  Marquis  $ Rar court  avançait  toujours  de  plus  en 
plus  les  intérêts  de  fon  Maître  à  la  Cour  d'Efpagne.  Nous  avions  de  nou- 
velles feures,  que  les  perfonnes  qui  avoient  le  plus  grand  afeendant  fur  le 
Roi ,  &  qui  en  aparence  auraient  eu  la  plus  grande  influence  dans  la  con- 
duite de  fon  Teftament,  étoient  tous  portez  pour  un  desEnfans  du  Dau- 
phin. Les  Minières  de  France  tant  dedans  que  dehors  n'en  faifoient 
point  un  fecretj  mais  ils  affecloient  plutôt  de  le  publier,  &  ce  qu'ils  di- 

foir;-r 


l'Euko- 

PE 


440   MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Atiaires  foient  là-deffus  nous  étoit  confirmé  de  bonne  main.  Ainfi  le  deffein  de 
cen.  de  Y  Angleterre  &  de  la  Hollande  étoit  réellement  pour  prévenir  les  effets 
d'un  pareil  Teilament  par  le  moyen  d'un  'Traitté  de  Partage ,  dans  lequel  il 
y  avoit  par  confequent  une  neceffité  aparente  de  donner  quelque  partie 
pour  éviter  la  perte  du  tout.  C'étoit  pour  pourvoir  contre  toutes  les 
prétentions  d'un  tel  Teilament ,  que  la  France  a  été  induite  aux  Renoncia- 
tions politives  &  expreffes  qu'on  y  peut  voir;  &,  à  moins  qu'ils  ne  veuil- 
lent les  faire  paffer  pour  une  tromperie,  &  au  plus  que  cela  engage  feu- 
lement l'Angleterre  &  la  Hollande,  fans  inférer  aucune  obligation  du  cô- 
té de  la  France,  il  faut  avouer  que  le  Teilament,  tel  qu'il  elt  à  prefent, 
eil  le  véritable  cas  dans  lequel  cette  Couronne-là  s'efl  directement  obli- 
gée à  un-  exacte  maintien  du  Traitté ,  fi  elle  avoit  été  d'humeur  de  s'en 
tenir  aux  termes  &  aux  intentions  d'icelui. 

Mais,  fupofons  que  le  Traité  de  Partage  n'eut  point  été  fait,  croyez- 
vous  que  le  Roy  &  les  Grands  d'Efpagne  euffent  eu  alfez  de  foypour  croi- 
re que  l'Archiduc  auroit  pu  être  inflitué  Héritier  &  mis  en  poffeffion  de 
toute  la  Monarchie  fans  en  démembrer  quelque  partie?  Ils  ne  pouvoient 
qu'être  fort  fenfibles  d'avance  que  la  France  auroit  affeurément  fait  fes  der- 
niers efforts  pour  empêcher  l'avènement  de  ce  Prince  à  la  Couronne  ,  & 
qu'après  une  longue  <k  cruelle  Guerre  dans  leur  propre  Païs,  il  auroit  été 
impoftible  à  la  fin  d'empêcher  cette  Couronne  de  tenir  quelque  partie  en- 
tre fes  mains.  D'ailleurs,  pour  l'exécution  d'un  fi  grand  deffein,  il  leur  au- 
roit fallu  être  abfolument  affeurez  de  l'Angleterre.  Mais,  voyoient-ils  la 
Nation  d'humeur  à  s'engager  vigoureufement  dans  une  nouvelle  Guerre, 
fur  le  fimple  motif  que  i'Ârchiduc  eut  deux  ou  trois  Provinces  plus  ou 
moins?  Ou  pouvoient-ils  s'imaginer  que  l'Archiduc  eut  été  en  état  d'obli- 
ger à  une  totale  refignation,  fans  les  plus  grands  efforts  que  l'Angleterre 
ait  jamais  fait.  Ils  ne  pouvoient  que  prévoir  que  la  Nomination  de  l'Ar- 
chiduc auroit  infailliblement  allumé  une  Guerre  Univerfelle,  &  dans  la- 
quelle l'Efpagne  auroit  été  expofée  comme  en  proye  à  la  France, pendant 
qu'à  même  temps  il  auroit  été  hors  du  pouvoir  d'aucun  de  leurs  Alliez  de 
leur  fournir  à  temps  du  fecours.  De  pareils  dangers  aparens  &  inévitables 
auroient  d'eux-mêmes  fait  déterminer  le  Roy  &  les  Grands  d'Efpagne  en 
faveur  du  Duc  d'Anjou,  quand  même  on  n'auroit  jamais  fongé  au  Traitté 
de  Partage.  Feu  Sa  Majeflé  &  fes  Mimflres,  ainfi  que  l'on  a  évidem- 
ment vu,  étoient  refolus  d'inltituer  un  Héritier  qui  pût  être  tranquille* 
ment  fur  le  Throne.  Et  pouvoit-il  être  fur  un  moins  puiffant  mot  f  que 
celui-cy  ,  qu'un  Roy,  qui ,  pendant  toute  fa  vie  a  entretenu  une  étroite  cor- 
respondance avec  l'Empereur;  qui  a  été  fi  fouvent  engagé  en  Allianceavec 
lui  pour  faire  la  Guerre  à  la  France;  qui  a  paru  toujours  fort  zèle  pour  la 
M.iifon  d'Autriche,  dont-il  étoit  la  Branche  aînée;  eut  été  obligé  de  le 
rejouer  de  fa  Succefïïon  ,  &  de  tranfporter  fes  valles  Etats  i  un  Etranger, 
pour  ne  pas  dire  à  une  Famille  Ennemie?  Vous  me  repondrez  peut  être, 
que  le  Traitté  de  Partage  avoit  tellement  aigri  Sa  Majelté  Catholique,  que 
cela  l'avoit  mis  dans  le  chemin  qu'il  a  pris.     Mais ,  n'étoit-ce  pas   plutôt 

au 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.    I. 


44i 


au  contraire  un  motif  récent  &  fort  engageant  pour  favorifer  l'Archiduc 
dans  le  point  de  la  Succefiion,  puifque  l'Empereur  n'a  pas  voulu  donner 
les  mains  au  Traitté,  par  la  feule  raifon,  qu'il  deplailbit  extrêmement  au 
Roy  d'Efpagne?  N'ctoit-ce  pas  plutôt  une  nouvelle  raifon  pour  exclure  la 
France  ,  de  ce  qu'elle  a  été  la  principale  partie  qui  a  mis  fur  le  tapis  une 
pièce  fi  defagreable?ll  faut  donc conclurre, qu'il  faut  regarder  le  Teltament. 
du  Roy  d'Efpagne  comme  un  effet  d'une  prudence  timide,  qui  ne  lui  a  pas 
permis  de  fuivre  les  mouvemens  de  fon  propre  cœur. 

Vous  dites  de  plus ,  que  le  Traité  de  Partage  tendait  à  mettre  de  la  mefinteU 
licence  entre  nous  ùf  l'Empereur.  Mais,  pour  moi, je  crois  que  nous  avions 
raifon  d'en  attendre  un  effet  direétement  contraire:  Ci  la  Cour  de  l'Em- 
pereur avoit  connu  ou  avoit  voulu  fuivre  fon  véritable  interefl,  il  n'y  a 
rien  qui  auroit  pu  fervir  avec  plus  d'effet  pour  une  plus  étroite  &  plus  in- 
violable union  entre  nous  que  ce  Traité. 

On  n'efl:  convenu  de  rien,  pendant  la  Négociation,  qu'on  n'ait  com- 
muniqué à  cette  Cour-là,  &  on  a  mis  tout  en  ufage  pour  obtenir  fon  apro- 
bation  avant  fa  conclufion  :  &  les  démarches  étant  inutiles,  l'Empereur  a 
eu  trois  mois  de  temps,  qu'on  luy  a  donné  par  le  Traité  pour  délibérer 
meurement  deffus,  &  même  pour  pouvoir,  contre  Ton  refus,  y  entrer 
après  le  temps  prefcriti  &  afin  qu'il  ne  récent  par-là  aucun  préjudice, 
on  a  perfuadé  à  la  France  de  foufcrire  un  Article  fecret  (qui  e(t  à  pre- 
fent  univerfellement  connu)  par  lequel  il  étoit  flipulé ,  que  l'acceptation 
de  l'Empereur  auroit  été  reçue  encore  dans  le  terme  de  deux  mois  après 
la  mort  de  Sa  Majeflé  Catholique. 

Vous  continuez  à  dire  ,  que  la  France  ne  manquera  pas  d'aporter  en  fa  de- 
fence ,  que  dans  la  fituation  pre fente  des  affaires,  £5?  confiderani  que  l  Empe- 
reur a  continué  fi  long-temps  dans  Jin  refus  ,  il  ejl  plus  convenable  pour  le 
maintien  de  la  Paix  Publique  de  h  Chrétienté ,  que  la  France  accepte  le  Tefia- 
ment ,  que  de  fe  tenir  au  Traité  de  Partage;  parce  que  ,  fi  le  Tefiament  étoit 
refufé ,  &  que  les  Ducs  d'Anjou  £5?  de  Berry  euffent  rejette  le  Bénéfice  d'icelui , 
les  Efpagnols  aur oient  infailliblement  invité  l'Archiduc  à  prendre  pour  lui  tou- 
te la  Succefiion,  C5?  à  maintenir  par-là  les  intentions  du  Tefiament ,  qui  lui  don- 
ne la  Subfiitution  immédiatement  après  ces  deux  Princes.  Et  que  l'Empereur 
étant  par-là  engagé  de  mainte-air  le  Tefiament,  &  de  tacher  de  confierver  la  Mo- 
narchie en  fon  entier ,  il  y  auroit  eu  une  neceffité  évidente  d'entrer  en  Guerre 
avec  luy  £5?  fies  Alliez  &  toute  la  Monarchie  d'Efpagne,  comme  fe  foumettant 
■unanimement  à  V Archiduc:  ainfi,  nous  aurions  eu  divers  Royaumes  entiers  à 
conquérir  afin  de  fat is faire  aux  termes  du  Traité. 

Je  viens  à  confiderer  votre  principal  Argument  contre  le  Traité  de  Par- 
tage, que  vous  expofez  en  exagérant  l'état  dans  lequel  la  France  auroit  été  par 
le  Traité  de  commander  abfolument  le  Commerce  de  la  Méditerranée ,  ce  qui 
auroit  de  neceffité  entraîné  une  ruine  inévitable  fur  le  Commerce  d Angleterre  & 
de  Hollande  ■>  d'où  vous  inferez  que  le  Tefiament  du  jeu  Roy  d' Efpagne  efi  plus 
pour  noflre  avantage  que  le  Traité.  Je  ne  faurois  m'empecher  de  vous 
dire  que  je  trouve  dans  vollre  Argument  une  partialité ,  dont  je  ne  vous 

Tome  XL  Kkk  croiois. 


Affaikkï 

GEN.    DE 

l'Euro- 
pe. 


442   MEMOIRES,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  croiois  pas  capable.  Car  ,  fi  vous  êtes  vrayement  perfuadé  que  la  France 
gen.de  étant  une  fois  en  poffeiïïon  des  Royaumes  de  Sicile  &  de  Naples  feroic 
lEuho-  g      ^e  ruiner  noftre  Commerce  dans  la  Méditerranée,  fans  être  obli- 

*  gée  d'avoir  aucun  égard  à  l'Alliance  fondée  fur  le  même  Traité,  qui  au- 
roit  alors  eu  fon  effet,  pouvez- vous  vous  imaginer  qu'il  aura  pour  nous  plus  de 
de  complaifance  à  prefent  qu'il  l'a  rompu  dans  toutes  les  obligations  d'ice- 
luï ,  fans  faire  le  moindre  ufage  des  avantages  qu'il  femble  que  l'Avènement 
du  Duc  d'Anjou  à  la  Couronne  d'Efpagne  lui  offre?  Pourquoy  faut-il  que 
vous  vous  imaginiez  que  la  France  fe  feroit  retractée  defes  engagemens  au 
premier  cas,  lors  qu'il  ne  pouvoit  feulement  prétendre  qu'interrompre  no- 
tre Commerce  du  Levant,  &  qu'il  veuille  être  dans  le  fécond  cas  plus 
exact  &  £lus  fcrupuleux ,  nonobffant  l'état  où  il  fe  trouve  d'afpirer  au 
commandement,  non  feulement  du  commerce  de  la  Méditerranée,  mais 
même  de  celui  des  Indes?  lorfqu'il  a  une  li  belle  occafion  d'entrepren- 
dre un  Monopole  de  la  Laine  d'Efpagne,  pour  mettre  à  perfection  fes  Ma- 
nufactures, ck  pour  ruiner  par-là  les  noilres?  lorfqu'il  a  auffi-bien  le  pou- 
voir que  les  prétendons  pour  faire  telles  entreprifes  fur  le  Païs-Bas  Efpa- 
gnol  qu'elles  entraîneront  après  elles  par  confequence  la  ruine  de  la  Hol- 
lande qui  fera  bien-tôt  fuivie  neceffairement  par  celle  de  l'Angleterre? 
J'ôfe  dire  que  vous  avouerez  que  fi  l'Angleterre  &  la  Hollande  paroiiïenc 
l'une  &  l'autre  infenfibles  dans  une  conjoncture  û  délicate,  fans  témoi- 
gner la  moindre  inclination  à  fe  remuer,  il  fera  plus  aifé  à  la  France  de 
venir  à  bout  de  tous  fes  grands  deffeins,  que  d'avoir  ruiné  noflre  Com- 
merce dans  la  Méditerranée  fi  le  Traité  de  Partage  eut  eu  fon  effet: 
parce  qu'en  ce  dernier  cas,  il  feroit  toujours  refté  un  tel  contrepoids  & 
équilibre  des  Affaires  dans  l'Europe,  qui  auroit  tenu  la  France  dans  une 
paifible  conduite,  &  éloignée  des  infractions  &  nouveautez.  Le  Pape  & 
tous  les  Princes  d'Italie ,  qui  auroient  été  fort  jaloux  de  û  puiffans  Voi- 
fins ,  auroient  été  prêts  d'embraffer  la  première  occafion  favorable  de  fai- 
re une  Ligue  contre  eux,  dans  laquelle  l'Empereur  auroit  été  bien  aife 
d'entrer,  tant  pour  fes  intérêts, que  pour  ceux  du  Duc  de  Lorraine  fon 
neveu,  qui  alors  auroit  été  Duc  de  Milan.  L'Archiduc,  étant  alors  Roy 
d'Efpagne,  fe  feroit  tenu  attaché  à  nous,  &  auroit  concouru  à  toutes  les 
mefures  que  nous  mêmes  aurions  trouvé  neceffaires  pour  la  feureté  de 
ja  Flandre,  qui  e(t  la  barrière  commune,  tant  à  l'égard  de  l'Angleterre, 
que  de  la  Hollande,  contre  la  France. 

Je  me  trouvay  l'autre  jour  en  compagnie  d'un  Gentilhomme,  qui  n'a- 
voit  pas  des  penfées  auffi  charitables  que  vous  avez  de  la  difpofition  où 
on  eit  en  France  :  Ne  pcnfez  pas ,  dit-il  s'adreffant  à  moi ,  que  le  Roi  de  Fran- 
ce s'arrefle  dans  un  fi  beau  chemin  de  former  de  grands  deffeins ,  m  quil  ait  re- 
noncé à  'tant  de  belles  Provinces  qui  auroient  été  annexées  à  fa  Couronne  par  le 
traité  de  Partage  •  s'il  ne  s'attendoit  à  de  plus  grands  avantages  en  acceptant  le 
l'eftament.  On  fait  trop  bien  que  cette  Cour  nagit  abfolument  que  par  [es 
intérêts ,  pour  laiffer  lieu  au  rejle  du  Monde  de  croire  quelle  a  contrevenu  à 
toutes  les  obligations  d'un  Traité  fait  recemme?it  &  fi  folemnellement ,  pour  le 

ftmph 


r 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.  443 

Jimple  motif  de  l'aggrandiffement  du  Duc  d 'Anjou.     Vous  pouvez-vous  affairer   Affaires 

GF.N.    DE 

l'Euko- 


Monfieur , quelle  a  eu  des  vues  avantageufes  pour  elle ,  en  faifant  cela.  La  Fran- 


ce s'attend  indubitablement  de  gouverner  fous  le  nom  du  Nouveau  Roy  ,  &  le 
Grand-Pere  d'avoir  toute  l'influence  qu'il  peut  defirer  dans  les  Confeils  du  Pe- 
tit-Fils. La  recompenfe  donnée  en  dernier  lieu  au  Marquis  d'Harcourt  parla 
dignité  de  Duc ,  ne  montre  que  trop  évidemment  lot  nature  des  fer  vices  qu'il  a  ren- 
dus pendant  fon  Ambajfade  à  Madrid  \  (3  le  choix  qu'on  a  fait  de  lui ,  pour  y 
retourner  dans  la  même  qualité  découvre  totalement  les  fervices  qu'on  y  attend 
de  lui  pour  V avenir ,  ajfavoir  de  continuer  indubitablement  fes  intrigues  dans  une 
Cour  qu'il  connoit  à  fond.  Ceux  d'entre  les  Grands,  qu'il  a  trouvé  moyen  de 
gagner  pour  porter  le  feu  Roy  à  un  Teflament  fit  favorable  h  la  France  ,  &  qui 
font  les  feuls  employez  dan:  le  prefent  Mini  fi  ère ,  feront  fort  propres  à  le  fécon- 
der dans  tous  fes  projets.  Ils  Je  feront  une  Affaire  de  perfuader  leur  nouveau 
Maître ,  qui  ne  fera  déjà  que  trop  difpofé  à  recevoir  de  telles  impreffïons ,  que 
fe  tenant  bien  uni  à  la  France ,  il  n'y  aura  rien  d'impofjîble  pour  luy ,  &  qu'il  ne 
doive  point  douter  de  fe  mettre  un  jour  en  Eflat  de  reunir  à  fa  Monarchie  ces 
fiorijfans  Eflat  s,  qui  en  ont  été  démembrez  il  ri  y  a  pas  long-temps.  En  un  mot , 
non  feulement  l'Angleterre  13  la  Hollande  doivent  appréhender  la  perte  de  leux 
Commerce ,  mais  toute  ï Europe  doit  craindre  la  perte  de  fa  Liberté. 

Ce  Gentilhomme  étoit  bien  éloigné  de  regarder  l'Acceptation  du  Tefla- 
ment  du  Roy  d'Efpagne  comme  plus  à  noflre  avantage  que  le  Traité.  Vous 
me  repondrez  peut-être, que  fes  craintes  &  fes  apprehenfions  étoient  fans 
fondement;  mais, la  Cour  de  France  n'a-t-elle  pas  elle-même  réellement 
infinué  le  contraire?  Puifque  dans  le  premier  Article  Elle  déclare  comme 
Je  principal  motif  pour  faire  le  Traité  de  Partage  conjointement  avec  SaMa- 
jefïé  &  les  Eflat  s  Généraux,  que  c'était  à  deffein  cïoflcr  tous,  les  ombrages  que 
donner  oient  autrement  de  fi  vafle  s  Eflat  s  unis  fous  une  Perfonne.  A  la  vérité, 
ils  parlent  à  prefent  en  France  tout  d'un  autre  ton  ;&,  trouvant  qu'au  lieu 
de  l'Archiduc  le  Duc  d'Anjou  a  été  nommé,  ils  ne  trouvent  plus  aucu- 
ne jaloufie,  ni  crainte, par  l'union  de  tant  d'Eflats  en  une  feule  PuilTance. 
Mais,  j'ôfe  dire  que  vous  trouverez  ce  tour  trop  partial,  pour  ne  pas  le 
foupçonner. 

C'eft  pourquoy  je  puis  attendre  que  vous  conviendrez  avec  moy  en 
ce  point ,  que  dans  la  fituation  prefente  des  Affaires  ,  que  l' Angleterre  &  la 
Hollande  ne  fauroient  allez  fe  tenir  fur.  leurs  gardes.  Nous  favons  tous 
combien  de  fois  la  France  a  taché  d'avoir  en  fa  Poifeflion  le  Païs-Bas  Es- 
pagnol ,  &  d'en  faire  la  Conquête,  ce  qui  auroit  augmenté  fi  confiderablè- 
ment  fon  pouvoir.  Je  puis  dire  déplus,  que  nous  voyons  tout  ce  Pays-là 
(à  moins  que  nous  ne  voulions  fermer  les  yeux)  à  prefent  en  plus  grand 
danger  que  jamais  de  tomber  lous  la  Domination  de  la  France.  Elle  ne 
manquera,  ni  de  prétentions  pour  envoyer  des  forces  contre  eux  ,  ny  de 
moyens  de  porter  les  Efpagnols  à  y  confentir.  Et  on  ne  manquera  pas  de 
leur  donner  de  fréquentes  allarmes ,  leur  infmuant  que  des  ennemis  font 
prêts  de  s'emparer  de  ces  riches  Provinces ,  &  de  les  arracher  à  une  fo,is 
de  leur  Monarchie  &  de. la  Religion  Catholique..  La  promptitude  duj  Roy 

Kkk  2  Três- 


r£. 


i.'Euko- 

PE. 


444     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Araires    Très-Chrctien  de  prendre  les  Etats  de  Ton  Petit-Fils  fous  fa  Protection 
gfn.de     j'eri  mettra  enfuite  en  poffeflion,  &  on  y  donnera  les  plus  plaufibles  cou- 
leurs &  avantages.    Et  qui  fçait  fi  l'on  ne  mettra  pas  fur  le  tapis  le  vieux 
Projet  de  remettre  ce  Pais  à  la  France  pour  un  équivalent. 

je  ne  doute  point  que  vous  ne  comprenniez  fort  bien  de  quelle  fatale 
confequence  un  tel  événement  feroit  pour  nous.  Non-feulement  les  Païs 
voifins  de  Liège,  Juliers,  Trêves,  &  Cologne,  ne  pourront  alors  éviter  de 
tomber  fous  le  joug  de  la  France ,  mais  ce  qui  mérite  le  plus  nos  foins  & 
nôtre  attention,  la  Hollande  même,  dont  les  Flottes  &  les  Armées  ont 
eu  fi  bonne  part  parmi  les  Alliez  pour  la  Sûreté  commune,  étant  expofée 
de  tous  cotez  au  formidable  Pouvoir  de  la  France,  courra  un  rifque  évi- 
dent ,  ou  d'être  par  elle  foumife ,  ou  du  moins  d'être  réduite  à  un  état  de 
Vaflelage  envers  elle. 

Les  François,  étant  une  fois  Maîtres  de  la  Flandre ,  n'ont  pas  d'avantage 
à  faire  pour  donner  un  coup  mortel  à  cette  République,  que  de  rétablir 
le  Commerce  à  Anvers, en  forçant  une  libre  Navigation  dans  l'Efcaut;  ce 
qui  ne  laiflera  aux  Hollandois  aucun  autre  moyen  de  parer  un  tel  coup, 
que  de  fe  mettre  fous  la  Protection  de  la  France ,  comme  aufli  d'être  bri- 
dez d'entrer  en  aucune  Ligue  fans  avoir  l'approbation  de  cette  Cour ,  ôc 
pour  la  jouiiTance  de  leur  fiorilTant  Commerce,  mais  à  condition  que  la 
France  aura  part  dans  fes  profits,  &  qu'eux  conjointement  avec  cette 
Couronne  tâcheront  de  détruire  nos  Commerces.  Si  la  France,  n'ayant 
dans  lePaïs-Ras  autre  Port  queDunkerque,a  trouvé  le  moyen  d'en  tirer  de 
û  grands  Avantages,  &  de  le  faire  tourner  fi  fort  au  préjudice  de  nôtre 
Navigation,  que  faudra-t-il  que  nous  attendions,  lors  qu'étant  en  Poiief- 
fion  du  relie  des  Ports  de  Mer  de  Flandres ,  elle  aura  ceux  de  Zelande  & 
de  Hollande  fi  à  fon  Commandement,  que  d'en  difpofer  avec  la  même 
autorité  que  s'ils  apartenoient  actuellement  à  cette  Couronne?  Croyez- 
vous  en  vôtre  confcience,  que  nous  ferons  alors  capables  de  lui  faire  tête? 
Et  que  fes  richeffes  étant  Ci  confiderablement  augmentées  par  le  nombre 
de  fes  Sujets,  &  fon  Union  avec  l'Efpagne  le  mettant  en  beau  chemin 
d'avoir  le  principal  afcendant  ou  plutôt  le  Commandement  du  Négoce  de- 
puis la  Mer  Baltique  jufques  au  Levant  &  aux  Indes,  nous  puiffons  trou- 
ver un  fuffifant  Rempart  dans  nôtre  Flotte,  qui  feroit  alors  le  feul  qui 
nous  refteroit  pour  réfiiler  à  une  PuilTance  fi  formidable  tant  par  Terre 
que  par  Mer  ? 

Nous  avons  certaines  Gens  en  Angleterre,  aiTez  extravagants  pour  s'i- 
maginer, qu'avec  une  bonne  Flotte  nous  n'avons  rien  à  craindre  quand  tout 
îe  Monde  feroit  contre  nous,  laquelle  opinion  les  jette  dans  cette  Maxime 
très  dangereufe ,  §)ue  nous  ne  devons  pas  nous  mêler  abfolument  de  ÎEtat  des 
thofe*  étrangères,  pas  même  parmi  nos  plus  proches  Foi  fins.  Mais,  après  l'Ex- 
périence de  la  dernière  Guerre,  il  fembleroit  fort  inutile  de  réfuter  une 
Erreur  fi  mal-fondée.  Nous  ne  le  trouvons  à  prefent  que  dans  les  bou- 
ches de  quelques  Proteflans  mal-intentionnez  par  certaines  veues  obliques 
qui  font  connues  à  chacun ,  ou  dans  celles  des  Papilles  ouverts ,  qui  fe- 

roient 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  I. 


44)- 


roient  bien-aifes  de  voir  la  Religion  Proteftante,  &  Ton  Intérêt,  tout  à  fait 
oppreiïes  parmi  nos  Voifins,  auiïi-bien  que  leurs  Loix  &  leurs  Libertez, 
en  efperance  de  voir  par-là  exécutée  bien-tôt  après  la  même  chofe  en  An- 
gleterre ,  l'une  étant  une  confequence  aparente  de  l'autre.  C'elt  ce  dont 
les  repréfentatifs  de  la  Nation  étoient  fort  fenfibles  dans  la  dernière  Guer- 
re,  &  qui  les  porta  à  faire  de  tels  efforts,  afin  de  montrer  qu'ils  n'avoient 
pas  moins  de  pénétration  à  juger  de  nos  Dangers  ,  que  de  zèle  &  de 
promptitude  à  les  prévenir.  Us  étoient  pleinement  convaincus  que  l'inté- 
rêt, auffi-bien  que  la  gloire  de  l'Angleterre,  confiile  à  garder  l'équilibre 
de  l'Europe  entre  nos  mains,  qui  tire  après  foi  une  néceffité  indifpenfa- 
ble  de  nous  intereffer  dans  ce  qui  y  arrive.  Us  étoient  perfuadez  que  la 
Nation  ne  pouvoit  pas  continuer  fon  Négoce  en  tant  de  Places ,  &  que 
pour  cet  effet  il  falloit  faire  beaucoup  d'Alliances,  que  par  conféquent  nô- 
tre véritable  Intérêt  nous  obligeoit  de  maintenir  &  d'obferver  fidelle- 
ment.  Si  d'un  côté  ils  croyoient  être  de  leur  devoir  d'aider  &  fécourir 
leurs  Alliez,  ils  étoieut  de  l'autre  fort  éloignez  de  méprifer  les  Secours 
qu'on  pouvoit  tirer  d'eux.  Us  confentirent  fans  aucune  difficulté  à  la 
jonétion  de  la  Flotte  Hollandoife  avec  la  nôtre  ,  étant  bien  perfuadez 
qu'elle  augmentoit  beaucoup  nos  Forces  &  nôtre  PuifTance.  En  un  mot, 
toute  leur  conduite  fit  voir  clairement,  qu'ils  étoient  entièrement  perfua- 
dez que  comme  £  Europe  ne  fauroit  être  garantie  de  ÏEfc lavage  fans  un  Se- 
cours effectif  de  î Angleterre ^  aufli  l'Angleterre  ne  fauroit  échaper,  fi  le  reite 
de  l'Europe  y  tombe. 

Et  cependant  c'eit  une  extrémité  où  nous  nons  verrions  bien-tôt  ré- 
duits, fi  la  France  étant  en  poiTeffion  de  la  Flandre  rendoit  un  jour  les 
Hollandois  incapables  d'être  en  état  de  nous  fécourir,  ou,  ce  qui  eit  enco- 
re pis,  les  réduifoit  à  la  nécefiité  de  fe  joindre  contre  nous  pour  leur  pro- 
pre défenfe,  &  de  jetter  fur  les  autres  la  ruine  préfente  qui  feroit  autre- 
ment tombée  fur  eux.  Toute  communication  étant  alors  coupée  entre 
nous  &  l'Allemagne,  l'Empire,  trouvant  de  l'impoiTibilité  de  recevoir  au- 
cun fecours  de  l'Angleterre,  n'auroit  non  plus  la  volonté  ni  le  pouvoir  de 
faire  la  moindre  diverfion  en  nôtre  faveur.  Et,  pour  comble  de  nos  mal- 
heurs, en  quel  état  ferions-nous,  fi  nôtre  Flotte,  qui  alors  feroit  nôtre 
feul,  quoique  foible,  refuge  venoit  à  être  détruite  par  une  Tempête,  ou 
défaite  dans  un  Combat?  J'apelle,  Monfieur,  à  vôtre  propre  jugement, 
fi,  après  la  ruine  de  nôtre  Commerce,  nous  ferions  en  état  de  foutenir 
une  Guerre  contre  une  Couronne  déjà  formidable  ,  après  une  fi  grande 
Augmentation  de  fes  Forces  tant  par  Mer  que  par  Terre  ?  Que  nos  Mar- 
chands jugent,  fi  nous  pourrions  continuer  nôtre  Négoce,  fi  les  Ports 
de  Mer  de  Hollande,  &  ceux  d'Efpagne,  tant  dans  le  vieux  que  dans 
le  Nouveau  Monde,  nous  étoient  fermés  ?  Quand  la  France  ,  étant  Mai- 
trefie  des  Tréfors  du  Pérou  &  du  Mexique  ,  en  feroit  un  tout  au- 
tre u  fa  ge,  que  celui  que  l'Efpagne  en  a  fait  ?  En  peu  de  mots,  quand 
nos  Navires  marchands ,  noslfles,  &  nos  Plantations,  feroient  expofées 
à  la  diferetion  de  ces  nombreufes  Flottes,  tant  de  VauTeaux  de  Guerre 

Kkk  3  que 


PE. 


446    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Amnus  que  d'Armateurs  ,  avec  lefquelles  cette  Puiffance  couvrirait  alors  les 
gfn.de  Mefs?  S'il  étoit  necelTaire  d'entrer  dans  un  plus  grand  détail  pour  prou- 
ver une  vérité  fi  palpable,  je  pourrois  aifément  demonftrer,  que  fur  le  pied 
que  les  chofes  feraient  alors,  on  pourroit  nous  empêcher  la  Liberté  de  la 
Mer  Baltique,  aufîi-bien  que  celle  de  la  Méditerranée,  &  de  négocier 
nous-mêmes  en  Efpagne,  Italie,  au  Levant,  &  aux  Indes.  Que  le  Por- 
tugal n'ôferoit  recevoir  nos  Navires  dans  fes  Havres,  ou,  ce  qui  eft  en- 
core plus  à  craindre,  ferait  en  danger  d'être  réuni,  ainfi  qu'il  a  été  ci-de- 
vant, à  la  Couronne  d'Efpagne.  Que  la  ruine  de  nos  iManu factures  fui- 
vroit  bien-tôt  celle  de  nôtre  Navigation.  Mais ,  ceci  elt  trop  clair  pour 
que  j'y  infifte  davantage. 

Peut-être  vous  êtes  prêt  de  me  repondre ,  que  ces  chofes  ne  peuvent  pas  ar- 
river fans  fuppofer  l'Union  de  V Efpagne  avec  la  France ,  ce  qui  ne  femble  pas 
devoir  arriver ,  £5?  quil  y  a  à  efperer  que  le  nouveau  Roi  deviendra  bien-tôt  un 
fort  bon  Efpagnol.  Mais , plutôt, n'eft-il  pas  plus  vrai-femblable,  que  ce  Prin- 
ce fuivra  au  fond  l'humeur  &  les  directions  de  la  France  dans  le  manie- 
ment de  fes  Affaires,  &  que  le  Duc  d'Harcourt  fera  du  fecret  &  du  pro- 
fond de  fes  Confeils?  Je  puis  ajouter,  qu'un  faux  zèle  de  Religion,  dont 
les  maximes  font  aveuglement  fuivies  par  la  France,  &  qui  ne  prévaut  pas 
moins  en  Efpagne  ,  fera  un  fort  puifîant  motif  pour  unir  enfemble.  ces 
deux  Couronnes  dans  des   mêmes   mefures   &    des  mêmes  intérêts  ,  & 
les  exciter  à  la  ruine  de  ceux  qui  paflent  parmi  eux  pour  Hérétiques; 
particulièrement, lors  que  cela  leur  fera  projetter  de  faire  entre  eux  tout  le 
Négoce  de  l'Europe.     D'ailleurs, il  eft  plus  que  probable,  que  les  Grands 
d'Efpagne  s'étant  déclarés  fi  ouvertement  contre  les  Prétenfions  de  FEm-* 
pereur ,  &  qui  par  cette  raifon  ne  peuvent  pas  être  bien  vus  à  la  Cour  de 
Vienne,  fe  jetteront  tous  enfemble  dans  les  Intérêts  de  la  France.  Je  de- 
mande donc,  fi,  pendant  que  nous  fommes  menacés  d'un  Danger  fi  grand 
&  (ï  aparent,  il  faut  que  nous  attendions  tranquillement  nôtre  Deftinée, 
fans  nous  fervir  des  Remèdes  qui  font  encore  en  nôtre  pouvoir  pour  nous 
munir  contr'eux? 

11  n'y  a  pas  d'autre  moyen, pour  nous  pour  détourner  ces  malheurs,  qu'en 
nous  mettant  (  avec  la  Hollande  )  dans  une  bonne  pofture  de  defenfe. 
Ceci  de  foi-même  donnera  encore  quelque  crainte  à  la  France,  &  l'ob- 
ligera de  garder  des  mefures  avec  nous;  autrement,  il  faut  nous  attendre 
à  de  telles  infractions  &  nouveautez  capables  de  nous  jetter  enfin  dans 
une  malheureufe  Guerre;  &  le  meilleur  moyen  ,pour  l'éviter,  eft  de  fai- 
re voir  que  nous  fommes  difpofez  à  Toccafion  de  la  faire  avec  la  plus 
grande  vigueur.  Si  quelque  chofe  eft  capable  d'ouvrir  les  yeux  aux  Ef- 
pagnols  ,  &  de  leur  faire  écouter  leur  véritable  Intérêt  ,  qui  eft  de  fe 
maintenir  avec  l'Angleterre  &  la  Hollande  fur  le  même  pied  que  dans  lés 
Règnes  précédens ,  ce  fera  de  leur  faire  connoitre  que  nous  avons  la  vo- 
lonté &  le  pouvoir  de  prendre  garde  à  nous,  &  de  foutenir  effectivement 
nos  Alliez.  Sans  cela,  il  faut  qu'ils  fe  tiennent  attachez  à  la  France,  & 
nous  laifleront  le  déplaifir  de  les  y  avoir  obligez.     Si  nos  préparatifs  pre- 

itn- 


DE 

l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  447 

viennent  une  Guerre,  pouvons -nous  fouhaiter  un  plus  heureux  fuccès  Affaire* 
d'eux?  Mais, s'ils  ne  peuvent  pas  empêcher  que  nous  foyons  attaquez,  ne    G™ 
deviennent -ils  pas  alors  abfolument  neceflaires  pour  nôtre  deffenlè  ? 

Selon  les  circonftances  préfentes  que  nôtre  Négoce  ne  court  pas  un 
petit  rifque,  j'efpére  que  vous  m'accorderezmie  nous  fommes  dans  une 
obligation  indifpenfable  d'avoir  une  bonne  frotte  en  Mer,  &  qu'il  n'elt 
pas  moins  neceffaire  de  maintenir  le  crédit  public  de  la  Nation,  en  feu- 
lant bons  les  fonds  qui  n'ont  pas  été  fuffifants.  Mais ,  ce  qui  doit  être  te 
foin  principal  de  cette  Nation,  nous  devons  donner  toutes  les  démon- 
ftrations  poilibles  d'une  entière  Confiance  au  Roi,  &  donner  à  connoitre 
au  Monde  dans  la  manière  la  plus  authentique  que  nous  pouvons,  que 
nous  ferons  toujours  prêts  de  concourir  avec  lui  &  de  le  féconder  de  tout 
nôtre  pouvoir  dans  les  engagemens  où  il  trouvera  necelTaire  d'entrer  dans 
les  Pais  Etrangers  pour  la  fureté  &  le  falut  de  fon  Peuple. 

Pour  grands  que  nos  Dangers  puiffent  paroitre,  nous  avons  cependant 
ceci  à  préfent  pour  nôtre  confolation,  que  nous  ne  manquerons  pas  de 
Pouvoir  pour  nous  aider  pendant  que  nous  avons  ce  fameux  Prince,  qui 
occupe  fi  glorieufement  le  Throne  à  la  tête  des  Affaires.  Il  efr.  impoiïi- 
ble  de  réfléchir  même  fur  ces  Malheurs  dans  lefquels  la  préfente  fituation 
des  Affaires  va  inévitablement  enveloper  l'Europe  en  gênerai,  &  l'An- 
gleterre en  particulier,  fans  trembler,  fi  nous  étions  à  préfent  deflituez 
de  l'ineflimable  avantage  de  fa  prudente  Adminiftration.  Nous  n'avons 
rien  moins  qu'un  Prince  qui  a  un  û  grand  crédit  &  pouvoir  dans  toutes 
les  Cours  d'Allemagne,  qui  a  une  fi  grande  autorité  en  Hollande,  &  ain- 
û  eft  très-propre  à  cimenter  une  Union  entre  nous  &  cette  République , 
qui  eft  plus  que  jamais  neceffaire  pour  pouvoir  réellement  pourvoir  pour 
la  fureté  commune.  Et  puis  que  l'expérience  paffée  de  fon  Règne  nous 
fait  voir  que  Dieu  nous  a  accordé  &  confervé  ce  Prince  pour  nôtre  déli- 
vrance en  tant  de  preffants  Dangers  &  Difficultez,  profitons  de  tout  nôtre 
mieux  du  tems  que  Dieu  referve  encore  pour  lui  dans  fes  Tréfors.  Fai- 
fons  voir  à  toute  la  Chrétienté  par  nôtre  zèle  &  nôtre  courage ,  en  foute- 
nant  un  auffi  digne  Chef,  que  nous  ne  fommes  pas  une  Nation  dont  on 
doive  négliger  l'Alliance,  ni  méprifer  l'Inimitié.     Je  fuis,  Monfleur,  &c. 

A  Londres  le  1.(12.)  Décembre  1700. 

Aile  de  Renonciation  fait  le  2.  de  Juin  de  VAn  1660.  a  Font  ara- 
ble-y  par  Madame  Marie-Thereje  Infante  d^Efpagne  promije 
au  Roy  Très-Chrétien  ^  tant  de  ce  qui  lui  pourvoit 
toucher  de  la  Légitime ,  comme  de  tout  T Héri- 
tage du  Roy  Catholique. 


M 


Ad  a  me  Marie -Therefe  Infante  des  Efpagnes,  &  par  la  grâce  de 
Dieu  Reine  future  de  France,  Fille  aînée  du  très-Haut,  très-Ex- 
cellent 


1/JlUKO- 

Pf.. 


44g     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aff.ukfs  cellent  &  très-Puiflant  Prince  Philippe  quatrième  par  la  même  grâce  Roy 
gf.v.  de  Catholique  des  Efpagnes  Monfeigneur,  &  de  la  très-Haute,  très-Excel- 
lente, &  très-  PuifTante  Princeife  Madame  Ifabelle  Reine  Catholique  qui 
foit  en  gloire-  par  cet  lnflrument  &  Acte  de  Renonciation,  &  du  fur- 
plus  qui  y  fera  contenu  ,  fok  notoire  <Sc  manifefte  a  ceux  qui  en  auront 
connoiflance,  en  quelque  façon  que  ce  foit,  que  parles  Articles  i.  &  4.  du 
Traitté  de  mon  Mariage  promis  avec  le  très-Haut,  très-Excellent,  &  très- 
PuifTant  Prince  Louis  XIV.  Roi  Très-Chrétien  de  France ,  conclu  dans 
rifle  nommée  des  Faifans  dans  la  Rivière  Vidaflba,  du  refïbrt  de  la  Pro- 
vince de  Guïpufcoa  &  confins  de  ces  Royaumes  avec  celui  de  France,  le 
feptième  Novembre  de  l'année  paiTée  1659.  il  a  été  réfolu  &  arrêté  que 
îe  Roy  Monfeigneur  (  à  caufe  &  au  regard  de  ce  Mariage,  &  afin  que  j'y 
porterois  mon  Dot  &  mes  Biens  propres  )  a  promis  qu'il  me  donneroit 
cinq  cent  mille  écus  d'or  au  Soleil ,  qui  fe  payeroient  &  delivreroient  au  lieu , 
&aux  termes  fpécitiez  dans  ledit  Article  au  Roy  Très-Chrctien,  ou  à  la  per- 
sonne qui  auroit  fon  pouvoir,  &  qu'avec  iceux  je  me  devrois  contenter, 
&  tenir  pour  contente  de  tous,  &  quelconques  Droits,  &  Actions  qui 
m'appartiennent,  ou  pourroient  appartenir  à  prefent  ou  à  l'avenir,  fur 
les  Biens  &  Hoirie  de  la  Sereniffime  Reine  Madame  Ifabelle  ma  Mère, 
&  fur  la  future  Succeiîion  du  Roi  Monfeigneur,  (  que  Dieu  ait  en  fa  gar- 
de) fur  tout  ce  qui  me  pourroit  competer  &  appartenir  comme  à  Fille, 
&  Héritière  de  leurs  Majeftez  Catholiques,  &  pour  leur  Droit,  &  Chef, 
&  pour  quelconque  autre  titre  penfé  ,  ou  non  penfé  ,  fçû,  ou  ignoré, 
tant  pour  la  Ligne  Paternelle,  que  Maternelle,  droite,  ou  tranfverfale, 
médiatement  &  immédiatement,  &  que  devant  de  célébrer  le  Mariage 
par  parole  de  prefent  j'aurois  à  céder  &  renoncer  tous  mes  Droits,  & 
Actions  au  Roy  Monfeigneur,  &  aux  Perfonnes  qui  auront  la  fienne,  & 
que  Sa  Majefté  voudra,  &  aura  agréable,  ainfi  qu'il  eft  ftipulé  &  déclaré 
plus  particulièrement  par  les  dits  Articles  1.  &  4.  que  j'ai  lu ,  &  ouï  lire 
plufieurs  fois  devant  que  de  confentir  à  ce  que  l'on  formeroit  cet  Acte, 
îefquels  je  veux  qu'ils  y  foient  inferez  &  mis  de  lettre  à  autre,  &  de  mot 
à  autre,  dont  la  teneur  eft  la  fuivante, 

I  I. 

Que  Sa  Majefté  Catholique  promet,  &  demeure  obligée  de  donner, 
&  qu'Elle  donnera  à  la  Séréniffime  Infante  Marie -Therefe,  en  Dot  & 
Mariage  avec  le  Roi  Très-Chrêtien  de  France ,  &  payera  à  Sa  Majefté 
Très-Chrétienne  ,  ou  à  qui  aura  fon  pouvoir  &  commiflion,  cinq  cent 
mille  écus  d'or  au  Soleil,  ou  leur  jufte  valeur  dans  la  Cité  de  Paris,  & 
cette  Somme  fe  payera  en  la  façon  fuivante  ;  le  tiers  au  tems  de  la  con- 
fommation  du  Mariage,  l'autre  tiers  à  la  fin  de  l'Année  après  ladite  con- 
fommation,  &  le  dernier  tiers  fix  mois  après;  de  forte  que  l'entier  paye- 
ment de  la  dite  Somme  de  y 00.  mille  écus  d'or  au  Soleil  fe  fera  dans  dix 
huit  mois ,  aux  termes  &  portions  qui  font  fpecifiées. 

IV.Que 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  445> 


Affaires 
I  V.  GEN-  DK 


Que  moyennant  le  payement  effectif  à  Sa  Majeflé  Très-Chrctienne,  ou 
à  la  Perfonne  qui  le  devra  recevoir  par  Ton  ordre,  defdits  fooooo.  écus 
d'or  au  Soleil ,  ou  leur  jufte  valeur  ,  dans  les  termes  fufmentionnez,  la  Se- 
reniffime  Infante  Madame  Marie  -  Therefe  aura  à  le  contenter,  &  fe  con- 
tente avec  le  dit  Dot ,  fans  qu'il  lui  refte  aucun  recours ,  action ,  ni  droit, 
pour  demander  ,  ou  précendre  qu'il  lui  appartiendroient ,  ou  pourroient 
appartenir  d'autre  Bien ,  ou  Droits  fur  les  Hoiries  de  Leurs  Majeftez  Ca- 
tholiques {es  Parents,  foit  au  regard  de  leurs  perfonnes ,  foit  en  quelcon- 
que autre  façon,  ou  quelque  autre  titre,  fçû  ou  ignoré,  parce  qu'elle  doit 
demeurer  exclue  de  tout  s  Droits  de  quelconque  condition ,  nature,  ou  qualité 
qu'ils  [oient,  &  devant 'd'effecluer  les  fiançailles,  elle  en  fera  Renoncia- 
tion en  forme  avec  toutes  les  afîurances,  fermetez ,  &  folemnitez  qui  font 
requifes  &  necelTairesi  ce  quelle  fera  avant  de  fe  marier  par  paroles  de 
prefent  ,   &  après  elle  l'approuvera,  &  ratifiera  conjointement  avec  le 
Roi  Très-Chretien ,  auffi-tôt  qu'elle  aura  célébré  fon  Mariage,  avec  les 
mêmes  aiîiirances  &  folemnitez,  avec  lefquelles  elle  a.ura  fait  la  première 
Renonciation  &  celles  qui  fembleront  plus  convenables  &  neceffaires  ;  à 
quoi  doivent  demeurer ,  &  demeurent  obligez  dès  à  préfent  &  pour  lors 
Sa  Majefté  Très- Chrétienne,  &  fon  AltefTe,  &  qu'en  cas  qu'ils  ne  faffent 
pas  la  dite  Renonciation  ,  elles  les  tiennent  pour  faites,  &  expédiées  dès  main- 
tenant pour  lors ,  feulement  en  vertu  de  ce  Traitté  :  lefquelles  devront  être  en 
la  forme  la  plus  efficace  &  convenable  que  faire  fe  pourra  pour  leur  vali- 
dité, &  fermeté,  avec  toutes  les  claufes,  dérogations ,  &  abrogations  de 
toutes  quelconques Loix,  Ufages  ,  ■& Coutumes,  Arrêts,  &  Conftitutions 
y  contraires,  ou  qui  l'empêchent  en  tout,  ou  en  partie,  auxquelles  à  cet 
effecl:  leurs  Majeflé  s  Catholique  £s?  Très-Chrêtienne  doivent  déroger,  &  que 
Von  entendra  demeurer  derogées  dès  à  prefent  pour  lors  par  l'approbation  quelles 
feront  de  ce  'Traitté. 

Et  comme,  par  la  grâce  de  Dieu,  je  me  trouve  en  âge  majeur  de  plus 
de  vingt  ans,  &  que  dans  peu  de  jours,  s'il  plait  à  Dieu,  nôtre  maria- 
ge fe  doit  effectuer  par  paroles  de  prefent,  &  que  je  fuis  certaine,  ad- 
vertie,  &  informée  à  mon  entière  fatisfaclion  de  la  fubltance  &  effet 
defdits  Articles,  &  reconnois ,  &  ai  reconnu,  que  de  la  future  Succefïion 
du  Roi  Monfeigneur,  &  de  l'Hoirie  de  la  Serenifîîme  Reine  ma  Mère,  il 
ne  me  pouroit  competer,  ni  appartenir  en  rigueur,  pour  héritage  &  lé- 
gitime ladite  Somme  de  joo.  mille  Ecus  d'or  au  Soleil  &  que  quand  mê- 
me elle  me  pourroit  appartenir,  c'eil  un  dot  fort  compétent,  &  le  plus 
grand  que  l'on  ait  donné  jufques  à  prefent  à  aucune  Infante  d'Efpagne, 
&  que  le  Roi  Monfeigneur  s'eil  incliné  &  porté  à  me  le  donner  fi  grand 
pour  me  gratifier  ,  &  en  confideration  &  contemplation  de  la  perfon- 
ne du  Roy  Tres-Chrétien ,  afin  que  par  le  moyen  de  ce  Mariage  l'on  ob- 
tiendroit  les  effets  mentionnés  dans  le  dit  Traitté  de  Mariage,  lefquels 
Tome  XL  LU  font 


l'Euro- 
pe. 


PE. 


450    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  font  fi  importants  au  bien  public  de  la  Chrétienté,  &  au  contentement 
gkn.  df.  <%  fatisfaftion  de  ces  Royaumes-ci.  Partant  de  ma  certaine  fcienee  ,  & 
fçavoir,  d'agréable  &  fpontanée  volonté  J'aprouve  &  veux  ,  que  l'on  ob- 
ferve  &  accomplifle  ce  qui  a  été  refoiu,  &  arrêté  par  lefdits  deux  Arti- 
cles, &  que  l'on  entende,  que  ce  Mariage  fe  devra  conclurre  &  effec- 
tuer fous  les  conditions  y  contenues,  &  déclarées,  &  que  fans  icelles  con- 
ditions il  n'auroit  pas  parvenu  à  l'état  où  il  efl  ce  jourd'huy  ,  &  dès 
maintenant  je  me  tiens  pour  contente,  &  pour  payée  entièrement,  & 
abfblument,  &.  fatisfaite  de  tout  ce  qui  m'appartient,  ou  pourroic  appar- 
tenir, à  prefent  ou  à  l'avenir,  par  quelconque  droit  fceu  ou  ignoré,  de 
la  future  Succeflion  &  Hoirie  de  Leurs  Majeflés  Catholiques  mes  Parents, 
&  à  caufe  de  la  légitime  Paternelle  &  Maternelle,  ou  pour  leur  Supplé- 
ment ou  à  caufe  des  Aliments,  ou  de  Dot,  tant  des  Biens  libres  comme 
de  ceux  de  la  Couronne  de  leurs  Royaumes,  Etats,  &  Seigneuries,  fans 
qu'il  me  refle  à  moy,  ou  aux  miens,  aucune  acfion  ou  recours  contre  Sa 
Majeité,  ou  fes  Succeffeurs,  pour  demander  ou  prétendre  que  je  devrois 
avoir  une  plus  grande  Somme,  ou  portion  de  plus  grande  valeur,  &  im- 
portance que  lefdits  500.  mille  Ecus;  &  je  veux  que  cette  Renonciation 
s'entende  auifi  de  quelconque  autre  drok,  où  aclions,  qui  me  pourroient 
competer  ou  appartenir  par  Hoirie,  ou  Succeffion  jde  quelque  droits, 
ou  Parent  de  lignée  droite  ou  tranfverfale  par  tête,  ou  par  perfonnes, 
comme  à  fille  de  Leurs  Majeflez,  &  que  je  les  abandonne  &  quitte  tous 
les  uns  fj?  les  autres  ,  de  quelconque  condition,  nature  ,  qualité ,  valeur ,  &  im- 
portance qu'ils  [oient ,  £5?  les  cède ,  renonce ,  &  tranfporte  au  Roy  Aîonfeigneur  & 
à  fes  Héritiers  ,  £5?  Succcjfeurs  univerfds  &  finguliers  ,  le/quels  auront  fon 
droit ,  &  afin  qu'il  en  puilfe  difpofer  comme  il  lui  plaira,  &  que  bon  lui 
fembiera,tant  par  donation  entre  vifs,  comme  parTeftament,  &  derniè- 
re volonté,  fans  que  Sa  Majefté  foit  obligée  de  minflituer ,  ou  laijfer  fon  hé- 
ritière ,  ou  légataire,  ou  de' faire  mention  de  moi ,  par  ce  que  pour  lefdits  ef- 
fets je'  me  déclare,  &  dois  être  teniie  &  réputée  pour  Etrangère ,  &  com- 
me à  telle  il  ne  m'y  doit  demeurer  aucun  recours,  afin  de  pouvoir  récla- 
mer, ou  propofer  quelque  complainte,  nonobflant  que  l'Hoirie  que  lair- 
ra  la  Majeité  de  mon  Père,  foit  tres-opulente,  &  de  Ci  grande  valeur, 
&  importance  que  d'icelle ,  &  comme  un  des  Enfans ,  que  nous  fommes 
à  prelent ,  ou  ferons  à  l'avenir  ,  il  m'en  pourroit  appartenir  une  Somme 
plus  grande,  &  plus  haute ,  que  celle  des  dits  joo.  mille  écus,  pour fi  grand, 
£5?  extraordinaire  que  foit  f  excès;  &  encore  que  le  cas  arriveroit  (ce  que 
Dieu  ne  permette  pas)  qu'au  tems  de  fa  mort  je  demeurrois,  &  viendrois 
à  être  fa  fille  unique ,  à  caufe  que  mes  Frères,  &  les  autres  fiens  dépen- 
dants légitimes  feroient  morts  auparavant,  afin  qu'en  nul  cas,  ni  pour  aucun 
événement  l'on  ne  puilfe  demander  ni  prétendre  pour  moy,  ou  en  mon 
nom,  ni  fur  le  droit  de  ma  perfonne,  aucune  autre  portion  plus  grande 
de  légitime  des  B  ens  &  Hoiries  du  Roy  mon  Seigneur,  je  promets  qu'en 
nul  tems,  ni  pour  aucune  raifon ,  fous  quelconque  prétexte  que  ce  foit, 
je  ne  confentirai  ni  permettrai,  que  l'on  agiiTe  contre  cette  mienne  Re- 

noncia- 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,     M.  DCC.  I.  4;i 

nonciation  &  defiftance  que  je  fais  de  mes  dits  droits ,  actions ,  ou  pre-  Avvkirm 
tendons;  &  je  defifte  conjointement,  &   renonce  à  tous,  £5?  quelconque    gen-de 
rei/.edc  ordinaires  &  extraordinaires ,  qui  m'appartiennent,  ou  pourroient    lEuro° 
appartenir  par  droit  commun,  &  loix  de  ces  Royaumes,  ou  par  fpecial 
Privilège,  &  particulièrement  à  celui  de  la  Refiitution  in  Integrum ,  fondée 
fur  le  manquement  de  mon  âge  ,  ou  fur  dire  que  le  dot  auroit  été  caufe  de  ce 
Contrat!  ,  ou  fur  l'incertitude  de  ce  que  je  renonce  ,  afin  que  nul  defdits  re- 
mèdes, &  recours  fufmentionnés  me  fervent,  ou  puiïTent  fervir  en  voye 
de  Juitice ,  ou  en  conteilation,  ni  que  par  iceux  moi  &  mes  Enfans  & 
Héritiers  puiiîions  y  être  oiiis,  &  admis,  &  que  l'on  nous   en   dénie  ôc 
ferme  l'accez,  pour  les  pouvoir  déduire  &  propofer  judiciellement ,  ou 
extrajudiciellement,  ni  par  voye  de  grief,  ou  de  recours,  ou  de  fimple 
complainte,  ainfi  que  toujours,  &en  tout  tems ,  l'on  obferve  &  accom- 
plhTe  ce  qui  eit  difpofé  par  les  dits  Articles  fufmentionés ,  &  ce  que  j'ai 
promis  par  cet  Acte  touchant  leur  Confirmation  ôc  Approbation ,  &  pro- 
mets en  foi  de  ma  Parole  Royale  ,  qu'il  fera  maintenu ,  accompli  ,  & 
obfervé  en  tout  tems  inviolablement ,  fous  l'obligation  que  je  fais  de  mes 
Biens  &  Rentes  que  j'ai,  &  aurai,  &je  donne  pouvoir  au  Confeil  de  Sa 
Majeflé,  &  aux  Seigneurs  Rois  fes  SuccelTeurs ,  &  aux  perfonnes  aux 
quelles  ils  enchargeront  l'exécution  de  cet  Acte,  à  ce  qu'ils  Je  faifent  ob- 
ferver  &  exécuter,  &  pour  plus  grande  validité,  je  jure  par  les  Saints 
Evangiles  contenus  dans  ce  Miflel ,  (fur  lequel  je  mets  ma  main  droite) 
qu'en  tout  tems,  &  autant  qu'il  pourra  dépendre  de  moi,  je  l'obferverai, 
&  accomplirai,  fans  dire,  ni  alléguer  que  pour  le  faire,  &  accorder,  j'ai 
été  induite,  attirée,  ou  perfuadée  par  le  refpect,  ou  vénération  que  je 
dois  &  porte   au  Roy  mon  Seigneur,  lequel  m'a  tenu,  &  me  tient  en- 
core fous  fa  puilTance  Paternelle;  d'autant  que  je  déclare  que  Sa  Maje- 
flé  s'eil   toujours  remife  à  mon  franc  arbitre  ,    &  volonté  ,  &   que   je 
l'ai  eu  libre,  &  nullement  refpective  en  tout  ce  qui  a  touché  à  ce  Con- 
tracta &  je  promets  de  ne  point  demander  Difpenfe  'de  Serment  à  nôtre 
trelTaint  Pere&  au  Saint  Siège  Apoftolique,  ni  à  fon  Nonce,  &  Légat  à 
Tatere  ,  ni  à  autre  Perfonne  qui  ait  pouvoir  ou  faculté  de  me  l'octroyer, 
&  que  fi  elle  venoit  à  être  demandée  à  mon  inftance,  ou  de  quelque  Per- 
fonne tierce,  ou  à  être  octroyée,  motii proprio ,  je  n'en  ulerai  point,  ni  ne 
m'en  prévaudrai ,  encore  que  ce  ne  feroit  feulement  que  pour  entrer  en  ju- 
ftice ,  fans  toucher  à  la  force  &  fubftance  des  dits  deux  Articles  de  Ma- 
riage, ni  à  celle  de  cet  Acte  que  je  fais  pour  les  confirmer,  nonobltanc 
que  ce  foit  avec  quelconque  claufe  dérogatoire  de  ce  Serment.     Et  en 
cas  que  l'on  me  l'accorde ,  une  ou  plufieurs  fois,  je  fais  de  nouveau  d'au- 
tres Serments ,  &  tant  qu'il  y  en  demeure  toujours  un  fur  toutes  les  di- 
tes Difpenfes,  &  fur  le  même  je  déclare  &  promets,  que  je  n'ai  fait,  ni 
ferai ,  aucune  proteftation ,  ni  réclamation ,  en  public,  ou  en  fecret ,  contrai- 
re à  cette  mienne  promefie  &  obligation,  pour  l'afFoi'blir,  ou  diminuer 
fa  force,  &  que  fi  je  venois  à  la  faire,  encore  que  ce  fut  avec  un  autre 
Serment  contraire  à  celui-ci,  qu'elle  ne  me  puiiîe  point  fervir,  ni  être 

LU  2  d'au- 


Aekaires 

GEN. DE 

x. 'Euro- 
pe. 


4f2    MEMOIRES  , -NEGOCIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

d'aucun  avantage  ,  &  je  promets  ,  &  m'oblige  ,  qu'auffiiôt  que  l'on 
m'aura  menée ,  &  que  je  ferai  en  Compagnie  du  Roy  Très-Chrêtien  ,  en 
fuitte  des  dits  Articles  ,  ferai  conjointement  avec  fa  Majeflé  un  autre 
Aéte  ,  avec  toutes  les  Claufes  ,  Serments  ,  &  Obligations  neceflaires ., 
avec  infertion  &  ratification  de  celui-ci,  qui  a  été  fait  en  cette  Cité  de 
Fontarabie,  où  fe  trouve  à  prefent  le  Roy  Mon  Seigneur  avec  fa  Cour, 
&  Palais,  le  z.  jour  du  mois  de  Juin  de  cette  année  \66o.  en  prefence 
du  Roy  nôtre  Maître,  lequel  en  continuation  de  l'O&roy  fufmentionné 
dit,  que  Sa  Majeflé  Catholique  fupleoit  avec  fa  Royale  authorité,  &  vou- 
Joit  que  l'on  tint  pour  fuppléez  quelconques  défauts  ,  ou  omiflions  de 
fait,  ou  de  droit,  de  fubitance  ,  ou  de  qualité,  de  ltile,  ou  de  Coutu- 
me, qu'il  y  pourroit  avoir  dans  la  formation  de  cet  Acle  de  Renoncia- 
tion ,  des  Légitimes ,.  &  futures  Succeffions  qu'a  fait  &  accordé  la  Sere- 
niflime  Infante  Reine  promile  de  France,  fa  très-chere  très-aimée  Fille, 
&  que  de  fa  pleine  &  abfoluë  puiflance  comme  Roi,  qui  ne  reconnoif- 
foit  aucun  fuperieur  dans  le  temporel,  elle  la  confirmoit,  &  approuvoit, 
<&  la  confirma  ,  &  approuva  avec  dérogation  pour  cette  fois  de  quelcon- 
ques Loix,  Ordonnances,  Ufages ,  &  Coutumes  qu'il  y  auroit  au  con- 
traire, lefquels  pourroient  empêcher  fon  effet  &  exécution,  &  pour  plus 
grande  affurance  commanda  que  l'on  le  fcelleroit  avec  le  Scel  Royal,  er- 
rant témoins  à  ce'  appelles  &  requis ,  Don  Louis  Mendez  de  Haro,  Mar- 
quis del  Carpio,  Conte  Duc  d'Olivares;  Don  Ramiro  Nunez  de  Guz- 
man,  Duc  de  Médina  de  la  Torres  ;  Don  Gafpar  de  Haro,  Marquis  de 
Eliche  ;  Don  Jean  Dominicq  de  Guzman,  Comte  de  Monterey  ;  Don 
Diego  de  Aragon,  Duc  de  Terranovaj  Don  Guillen  Ramon  de  Monca- 
da ,  Marquis  de  Aytona  ;  Don  Pedro  Puerto  Carrero ,  Comte  de  Medel- 
lin  :,  Don  Pedro  Colon  de  Portugal ,  Duc  de  Veraguas;  Don  Antonio 
de  Peralto  Hurtado  de  Mendoza ,  Marquis  de  Mondejar  ;  Don  Alonfo 
Perez  de  Guzman,  Patriarche  des  Indes;  Don  Alonfo  Perez  de  Vivero, 
Comte  de  Fuenfaldagne  du  Confeil  d'Etat  ;  Don  Jean  de  Caravajal,  6c 
Sardi  du  Confeil  &  Chambre;  Don  Diego  de  Tajada  Evêque  de  Pampe- 
îune  ,  &  plufieurs  autres  Seigneurs  &  Cavaliers  qui  fe  trouvèrent  pre- 
fens.    Etoit  ilgné,  JE  LE  ROY,  MARIE-THERESE. 

Je  Don  Fernando  de  Fonfeca  Ruiz  de  Contreras ,  Marquis  de  la  Lipaî- 
îa,  Chevalier  de  l'Ordre  de  Saint  Jaques,  des  Confeils  de  Guerre,  des  In^ 
des,  &  Chambre  d'icelles  de  Sa  Majeflé  Catholique,  Secrétaire  d'Etat,. 
&  de  la  Dépêche  Univerfdle ,  &  Notaire  dans  fes  Royaumes  &  Seigneu- 
ries, qui  ai  été  prefent  au  Serment,  Oclroy,  &  à  tout  le  furplus  ci-deïTus 
contenu,  en  fais  foi,  &  que  les  dits  Articles  2.  &  4.  du  Mariage  ainfi 
qu'ils  font  ci-deffus  mentionnés,  ont  été  tirez  fidellement,  &  collation- 
nés  avec  l'Original  qui  eft  en  mon  pouvoir.  En  témoignage  de  vérité 
je  l'ai  figné  &  foufcript  de  mon  nom.  Don  Fernando  de  Fonseca  Ruiz 
de  Contreras. 

Le  Roi  Catjiolique  Mon  Seigneur ,  ayant  été  fervi  de  réordonner  à 

moi 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  1.  4Si 

moi  Don  Blafco  de  Loyola  ,  Commandeur  de  Villarubia  de  Ocava  ,  de  Affaits-s 
l'Ordre  &  Chevalerie  de  Saint  Jaques,  de  ion  Confeil  ,.  &.  ion  Secrétaire  Gy-N-  DE 
d'Etat,  que  je  ferois  faire  la  copie  ci-deffus  écrite  de  la  Renonciation,  que  lEUiîo* 
la  Dame  Infante  Madame  Mane-Therefe  fa  Fille  ce  jourd'hui  Reine  de  " 

France  fit,  &  oclroya  devant  le  Sieur  Don  Fernando  de  Fonfeca  Ruiz  de 
Contreras,  Marquis  de.  la  Lapilla,  Chevalier  de  l'Ordre,  de  Saint  Jaques 
des  Confeiis  de  Guerre ,  des  Indes,  &  Chambre  d'icelles  de  Sa  Majeflé 
Catholique,  Secrétaire  d'Etat,  &  de  la  Dépêche  Univerfelie,  &  Notaire 
en  fes  Royaumes  &  Seigneuries,  des  Légitimes  Paternelle  &  Maternelle, 
pour  envoyer  au  Seigneur  Don  Eflevan  de  Gammera  fon  AmbafTadeur 
aux  Etats  Généraux  des  Pais-Bas,  &  l'ayant  ainfi  exécuté,  je  certifie  que 
cette  Copie  accorde  avec  flnflrument  Original , .qui  demeure  en  mon  pou- 
voir ,  avec  lequel  elle  a  été  collationée  ■■,  &  afin  qu'elle  confie ,  je  la 
figne  de  mon  nom,  &  elle  va  fcellée  avec  le.  Seel  Royal  fecret  ,  le- 
quel eft  auifi  en  mon  pouvoir.  A  Madrid  le  16.  de  Juillet  166$.  étoic 
figné  Don  Blasco  de  Loyola.  Et  au  côté  le  Seel  de.  Sa  Majeflé  fur 
une  Holtie  rouge. 

Madame  Marie-Therefe  Infante  des  Elpagnes  ,  &  par  la  grâce  de 
Dieu  Reine  future  de  France  ,  Fille  aînée  du  très-Hauit  ,  très-excel- 
lent, &  tres-Puiffant  Prince  ,  Don  Philippe  quatrième  ,  par  la  même 
grâce  Roi  Catholique  des  Efpagnes  mon  heigneur  ,  (que  Dieu  ait  en 
là  garde  ,  &  profpere  tres-heureufement)  &.  de  la  tres-liaulte  ,  très- 
Excellente  ,  &  tres-Puiffante  Princefle  Madame  Ifabelle  Reine  Catholi- 
que, de  glorieufe  mémoire  ,  ma  Mère  &  Dame  (qui  eil  au  Ciel)  par 
la  relation  &  notice  de  cet  Infiniment,  &  acle  d'approbation  ,  confir- 
mation &  ratification  ,  &  du  fur-plus  qu'il  s'y  contient  ,  &  afin  qu'il 
demeure  en  éternelle  mémoire ,  je  fais  notoire  &.  manifefle  au  Rois , 
Princes,  Potentats,  Republiques,  Communautés,  &  Perfonnes  particuliè- 
res, qui  font  ou  feront  aux  fiecles  à  venir,  que  d'autant  que  le  tres- 
Hault  ,  très-Excellent  ,  &  tres-PuiiTant  Prince  Louis  quatorfieme  Roi 
Tres-Chrêtien  de  France,  mon  Coufin  Germain,  &  en  fon  nom  &  avec 
Ambaflade  particulière  le  Marefchal  Duc  de  Grammont  demanda  & 
propofà  mes  Françaiiles  &  Mariage  pour  le  dit  Roi  Tres-Chretien  mon 
Coufin  au  Roi  Catholique,  mon  Seigneur,  &  que  Sa  Majeflé  Catholique 
faifant  une  juile  eflime  de  cet  office  &  proportion  ,  &  ayant  les  égards 
deus  aux  fujets  de  décence,  égalité,  &  convenances  publiques,  qui  con- 
courrent  en  ce  Mariage,  l'accorda  &  y  confentit,  ayant  à  précéder  la  dif- 
penfe  de  fa  Sainteté  pour  le  Parentage  &  Confanguinité  que  j'ai  avec  le 
Roi  Tres-Chrétien  mon  Coufin,  &  que  par  après  enfuite  de  cet  Oclroy  & 
Accord,  &  avec  pouvoir  des  deux  Majeflez  Catholique  &  Tres-Chrê- 
tienne  l'on  a  arreflé  ,  &  figné  nôtre  Traitté  de  Mariage  le  7.  Novembre 
de  l'année  paffée  1659.  dans  rifle  nommée  des  Faifans  ,  fituée  fur  la  Ri- 
vière de  Vidaffoa  du  reffort  de  la  Province  du  Guipufcoa  ,  &  confins  de 
ces  Royaumes  avec  celui  de  France ,  &  que  dans  les  Articles  5.  &  6.  du 
dit  Traitté  il  a  été  refolu,  &  arrêté  de  commun  accord,  &  de  même  vo~ 

LU  3  leru 


PE. 


4f4    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  lonté,  &  comme  une  chofe  tres-convenable,  après  l'avoir  confiderée  at> 
gf.n.  de  tentivement ,  &  avec  meure  délibération,  que  moi  &  les  Enfans  &  Def- 
l'Euro-  cencjarits,  qUe  Dieu  nous  donnera  de  ce  Mariage  ,  foyons  &  demeurons 
inhabiles  &  incapables,  &  abfolument  exclus  du  Droit  &  Efpoir  defucce- 
der  à  aucuns  des  Royaumes,  Etats,  &  Seigneuries,  dont  fe  compofe  cette 
"Couronne  &  Monarchie  d'Efpagne,  &  à  ceux  qui  s'y  pourroient  agréger 
par  Sa  Majefté  Catholique,  &  (après  fes  longs  &  heureux  jours)  par  les 
Rois  fes  Snccefleurs  \  &  quoi  que  pour  s'être  réduit  à  paélion  conventio- 
nelle  par  des  Princes  &  Rois  Souverains  (lefquels  dans  le  temporel  ne  re- 
cognoiiTent  aucun  /uperieur)  par  grâce,  &  en  faveur  de  la  caufe  publi- 
que des  deux  Royaumes ,  &  en  condefcendant  à  ceci  avec  le  defir , 
&  fouhait  commun  de  leurs  fujets  ,  vaiTaux  ,  &  naturels  ,  qui  veuil- 
lent ,  qu'il  ait  la  force  ,  &  vigueur  de  Loi  ,  &  Sanction  Pragma- 
tique ;  &  qu'elle  foit  receuë  &  obfervée  comme  telle  ,  &  pour  ce 
fujet  il  fembloit,  que  pour  fa  fermeté  il  ne  feroit  pas  befoin  d'aucune  au- 
tre folemnité,  mais  toutefois  leurs  Majeftez  voulurent,  que  fi  mon  appro- 
bation pouvoit  être  convenable  pour  quelque  confideration  ,  je  l'aurois  à 
faire  incontinent,  que  le  cas  arriveroit,  que  le  mariage  accordé  fe  devroit 
célébrer,  &  contracter  par  parolles  de  prefent  ,  &  que  mon  approbation 
fut  avec  toutes  les  claufes  &  folemnitez  necefTaires  ,  félon  ,  &  comme  il 
efl  ftipulé  &  déclaré,  particulièrement  par  l'Aéte  de  dix  Articles  dont  la 
teneur  du  $..  &  6.  tirée  de  fon  Original  efl  inférée  ici  de  mot  à  autre,  & 
efl  la  fuivante. 

V. 

Que  d'autant  que  Leurs  Majeftez  Catholique,  &  Très- Chrétienne,  ont 
confenti  &  confentent  à  ce  Mariage ,  afin  de  rendre  perpétuelle  par  ce 
lien,  &  aiïurer  davantage ,  la  Paix  publique  de  la  Chrétienté ,  &  l'amour 
&  fraternité  qui  fe  fouhaite  entre  Leurs  Majeflés ,  &  en  confideration  des 
jufles  caufes  ,   qui  font  cognoître  &  perfuadent  les  convenances   dudit 
Mariage,  moyennant  lequel  &.  avec  la  faveur  &  grâce  de  Dieu  ,  on  peut 
efperer  des  heureux  fuccés  au  grand  bien  &accrohTement  de  la  Foi  &  Reli- 
gion Chrétienne,  &  au  bénéfice  commun  des  Royaumes,  fujets,  &  vaf. 
faux  des  deux  Couronnes;  eu  égard  à  ce  qu'il  importe  à  l'Etat  public,  & 
à  leur  confervation ,  qu'étant  fi  grandes,  elles  ne  viennent  pas  à  fe  join- 
dre ,  &  que  l'on  prévienne  les  occafions  qu'il  y  pourroit  avoir  de  les  join- 
dre, &  en  confideration  de  l'égalité,  &  autres  jufles  raifons  ,  l'on  arrêta 
par  Accord  conventionel ,  que  Leurs  Majeflés  veulent,  qu'il  ait  force  &  vi- 
gueur de  Loi  érablie  en  faveur  de  leurs  Royaumes,  &  l'intérêt  public  d'i- 
ceux  ,  que  la  Seremffime  Infante  Madame  Marie-Therefe,  &  les  Enfans 
qu'elle  aura,  maies  ou  femelles,  &  leur  Defcendants  tant  fils  ainez,  com- 
me i.  3.  &  4.  &  de  là  en  avant  en  quelconque  degré  qu'ils  fe  trouvent; 
pour  toujours,  &  à  jamais,  ne  puiffent  fucceder,  ni  fuccedent  aux  Royau- 
mes, Etats,  &  Seigneuries  de  Sa  Majefté  Catholique,  fpecifiés  dans  ce 

Trait- 


RESOLUTIONS     D'ETAT,   M.  DCC.  T.  jjff 

Traitté,  ni  aucun  de  tous  les  autres  Royaumes,  Etats  &  Seigneuries, Pro-   Affaires 

vinees;  lfles  adjacentes,  Fiefs &Frontiers,  que  Sa  Ma-    GRN-  DIi 

jSîé  Catholique  a  ,  &  poflfede  à  prefent  ,  &  qui  lui  appartiennent,  ou    3L^^ui" 
puiffent  appartenir,  tant  en  Efpagne  que  hors  d'icelle,  &  qu'à  l'avenir  Sa         *" 
Majcilé  Catholique,  &  Tes  Succeiîeurs  auront,  poiTederont,  &  qui  leur  ap- 
partiendront, nia  tous  ceux  y  compris,  inclus,  &  aggregez  à  iceux  ,  ni 
à  tout  ce  qui  s'acquerra  en  quelconque  temps  que  ce  ibit  ,  &  s'accroitra 
aux  dits  Royaumes,    Etats  ,  &  Seigneuries,  &  qui  fe  recouvrera  ou  y 
fera  dévolu,  pour  quelconque  tiltre  ou  caufe  que  ce  foit  ou  puifTe  être, 
encore  que  pendant    la   vie   de   la   Serenifiime   Infante  Madame  Marie- 
Therefe  ,    ou   après   pendant  celles  de  quelconques    liens    Defcendants , 
Aines  ,    2..  ou  autres  arriveroit  ou  efchoiroit  le  cas ,    &   les    cas  ,    aux- 
quels par  Droit,  Loix,  ou  Coutumes  defdits  Royaumes,  Etats,  &  Sei- 
gneuries, &  par  les    difpofitions    &    tiltres   par   lefquels  on  fuccede  & 
pretendroit  y  fucceder  ,  la  iuceeilion  leur  devroit  appartenir,  parce  que 
Ton  déclare  dés  maintenant  que  la  dite  Serenihame  Infante  Marie-Therefe 
demeure  exclufe  d'icelle,  &  du  Droit,  &  de  l'Efpoir,de  pouvoir  fucceder 
à  ces  Royaumes,  Etats,  &  Seigneuries,  &  à  chacun  d'iceux  ,  &  tous  fes 
Enfants,  &  Defcendants,  Maies  &  Femelles  ,  nonobstant  qu'il  diroient, 
ou  pourroient  dire,  ou  prétendre,  qu'en  leurs  perfonnes  ne  concourroient, 
&  ne  fe  pourroient  confiderer  les  raifons  de  la  caufe  publique  ,  ni  autres 
fur  lefquelles  fe  pourroit  fonder  cette  exclufion,  &  qu'ils  voudroient  allé- 
guer que  la  fucceffion  de  Sa  Majefté  Catholique,  &  des  Sereniflimes  Prin- 
ces &  Infantes,  &  des  autres  Enfants  qu'il  a,  &  aura,  de  tous  les  légiti- 
mes SuccelTeurs  (ce  que  Dieu  ne  veuille  ,  ni  permette)  feroit  venue  à 
manquer,  d'autant  que  ce  nonobïtant  ils  ne  devront  pas  fucceder,  ni  pré- 
tendre de  fucceder  en  aucun  cas,  temps,  ni  accident,  ni  événement, 
Elle,  ni  fes  Enfants  ,  ni  Defcendants  ,   fans  avoir  égard  aux  dites  Loix, 
Coutumes,  Ordonnances,  &  Difpofitions,  en  vertu  defquelles  l'on  a  fucce- 
de, &  fe  fuccede  à  tous  lefdits  Royaumes,    Etats,  &  Seigneuries,  &  à 
quelconques  Loix  &  Coutumes  de  la  Couronne  de  France,  lefquelles  em- 
pêchent cette  exclufion  au  préjudice  des  fuccefleurs  d'icelle  ,  tant  à  pre- 
fent, comme  aux  temps  &  cas  que  la  fucceffion  fe  difrereroit,  à  toutes  Ici- 
quelles,  &  à  chacune  d'icelles  Leurs  Majeftez  devront  déroger  ,  &  abro- 
ger en  tout  ce  qu'elles  feront  contraires  ,  &  empêcheront  le  contenu  en 
ces  Articles ,  &  fon  accompliiïement,  &  exécution,  &  que  l'on  entende, 
que  par  l'approbation  de  ce  Traitté  elles  y  dérogent,  &  les  tiennent  pour 
derogées,  &  que  le  même  foit,  &  s'entende,  que  Madame  l'infante  &  fes 
Defcendants  demeurent  exclufe  &  exclus  de  pouvoir  fucceder  en  aucun 
temps,  ni  cas,  aux  Etats,  &  Païs-Bas  de  Flandres  ,  &  Comté  de  Bour- 
gogne &  de  Charoîois ,  avec  tout  ce  qui  y  eft  adjacent  &  leur  apartitn- 
nent.     Mais  auffi  on  déclare  expreffément,  que  s'il  arrivoit  (ce  que  Dieu 
n-e  veuille,  ni  permette)  que  la  SerenilTime  Infante  viendroit  à  être  veu- 
ve, fans  avoir  En  fans  de  ce  Mariage,  qu'en  ce  cas  elle  demeurera  libre 
de  l'Exclufion  fufmentionnée  ,  &  pourra  jouir  des  Droits   de  fucceder  à 

tout 


A?*AIRES 
GEN.    DE 

l'Euro- 
pe. 


4*6    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,   ET 

tout  ce  qui  lui  pourroit  appartenir  en  deux  cas.  L'un,  fi  elle  s'en  retour- 
nent en  Efpagne,  étant  veuve  de  ce  Mariage,  &  fansEnfans;  l'autre,  û 
pour  convenance  du  bien  public,  &  pour  juftes  confiderations ,  elle  fe  ma- 
rioit  du  confentement  du  Roi  Catholique  Ton  père,  &  du  Prince  d'Efpagne 
fon  frère i  aux  quels  cas  elle  demeurera  capable, &  habilitée, à  pouvoir  hé- 
riter, &  fucceder. 

VI. 

Que  la  Serenifîïme  Infante  Madame  Marïe-Therefe  aura  à  faire  dépé- 
cher un  A  été,  avant  de  célébrer  &  contracter  le  Mariage  par  parole  de 
prefentj  s'obligeant  pour  foy,  &  fes  Succefleurs  ,  à  l'accompliffement  & 
obfervance  de  ce  que  deffus,  &  de  fon  Exclufion,  &  de  fesDefcendants; 
approuvant  le  tout,  félon  &  comme  il  eft  contenu  en  ceTrakté,avec  les 
claufes  neceflaires,  &  ferment,  &  à  ce  qu'inférant  ce  Traitté,  &  l'Acte 
d'obligation  &  approbation,  que  Son  Al  telle  aura  fait  faire  ,  elle  en  fera 
un  autre  femblable  conjointement  avec  le  Roi  Très-Chrétien  auiîi-tôt  qu'el- 
le fera  mariée  avec  Sa  Majefté  ,  lequel  devra  être  enregistré  ,  &  paifé 
par  le  Parlement  de  Paris  en  la  forme,  &  avec  les  Claufes  accoutumées, 
&  Sa  Majefté  Catholique  devra  approuver  ladite  Renonciation  &  Ratifica- 
tion en  la  forme,  &  avec  les  Claufes  accoutumées  &  autres  neceffaires,  la 
faifant  aufîi  paffer  &  enregiftrer  par  le  Confeil  d'Etat,  &  les  dites-Renon- 
ciations &  Approbations  étant  faites,  ou  obmifes  de  faire  ,  dès  à  prefent 
en  vertu  de  ce  Traitté,  &  du  Mariage  qui  s'en-fuivra  en  vertu  d'icellui, 
on  les  tient  pour  faites  &  expédiées ,  &  pour  pafTées ,  &  enregift:  ées 
par  le  Parlement  de  Paris  par  la  Publication  de  la  Paix  en  ce  Royau- 
me-là, 

Et  d'autant  qu'après   le  Traitté  fufmentionné  ,   nôtre  très  Saint  Père 
Alexandre  VIL  a  difpenfé  pour  les  Degrez  de  Parentage  ,  qu'il  y  a  entre 
ledit  Roi  Très-Chrêtien  &  moi,  &  approuve  par  fon  autorité  &  bénédic- 
tion Apoftolique  nôtre  Traitté  de  Mariage  ,  &  les  Articles ,  &  que  le  cas 
&  temps  eft  venu,  que  le  Mariage  fe  doit  célébrer,  &   contracter  avec 
la  bénédiction  de  Dieu,  &  à  ce  que  l'on  doit  efperer  pour  fa  gloire  &  fer- 
vice,  exaltation  de  la  Saincte  Foi,  &  tranquillité  de  la  République  Chré- 
tienne; moyennant  quoi  le  cas  &  temps  eit  auffi  arrivé,  que  je  dois  ac- 
complir pour  ce  qui  me  touche  (avant  mes  Epoufailles  &  Mariage)  le 
contenu  aux  Articles  5.  &  6.  qui  font  inferez  en  cet  Acte,  &  qu'il  eft 
ainfi  que  je  me  trouve  en  âge  majeur  de  2.0.  Ans,  &  que  dans  icelle  il  a 
plu  à  nôtre  Seigneur  de  me  donner  capacité  &  difcreiion,  pour  entendre, 
&  comprendre  la  fubftance  &  l'effcct  desdits  Articles,  dont  je  fuis  certai- 
ne &  advertie  ,   d'autant  que  je  m'en  fuis  fouvent  informée,  &  de  leur 
convenance  pendant  le  temps  de  ûx  mois ,  qu'il  y  a  que  l'on  les  a  arrêtés 
&  publiés,  &  qu'ils  ont  étérefolus  &  arreftés,&  qu'il  fuffifoit,  afin  que  j'au- 
r-ois  la  faiis  faction  que  je  dois  de  leur  juflificaiion  de  fçavoir  que  c'a  été 
une  Affaire  examinée  &  accordée  par  le  Roy  Mon  Seigneur,  lequel  fou- 

hai« 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M,  DCC.  I.  4S7 

haite  &  procure  mon  contentement,  &  mon  bien,  avec  tant  d'amour, &  Affais^ 
de  foin,  prenant  conjointement  égard  au  Public  &  Commun  des  Royau-  <«*•  »■ 
mes  que  Dieu  luy  a  enchargé ,  kfquels  &  ceux  de  la  Couronne  de  Fran-    lE**°" 

ce  font  égaliement  intereffez  à  ce  que  la  Grandeur  &  Majeité  qu'ils  foû-       P""' 

tiennent ,  &  confervent  en  eux-mêmes  depuis  tant  d'années  ,  avec  tant 
de  bonheur  &  de  gloire  du  nom  de  leurs  Roys  Catholiques  &  Très-Chré- 
tiens, ne  (bit  point  diminuée,  &  ne  defcheoit  point,  comme  nécessaire- 
ment elle  fe  diminueroit  &  defcherroit,  fi  par  le  moyen,  &  à  caufe  de  ce 
Mariage,  ils  fe  vicndroient  à  unir,  &  conjoindre  dans  quelqu'une  des  En- 
fans  &  Descendants,  dont  le  fuccès  cauferoit  aux  Sujets  &  VaiTaux  le  mé- 
contentement &  affliction  ,  qui  fe  peut  confiderer  ,  &  dont  juftement 
on  pourroit  craindre  qu'il  refulteroit  les  dommages  &  inconvénients 
qui  fe  rencontrent  &  fe  reconnoiffent  plus  facilement  avant  qu'ils 
arrivent,  qu'ils  ne  fe  repareroient  &  remedieroient,  après  qu'ils  feroient 
arrivés ,  &  que  l'on  les  auroit  expérimentés  ;  &  partant  il  a  convenu 
prévenir  les  remèdes  à  ce  qu'ils  n'arriveroient  pas ,  &  que  ce  Mariage  ne 
foit  caufe  d'efTe&s  contraires  à  ceux  que  l'on  fè  promet,  &  que  l'on  doit 
efperer,  que  l'on  obtiendra  par  icelui 5  outre  qu'avec  cet  exemple,  &  à 
fon  imitation,  on  facilitera  dorénavant  les  Mariages  réciproques  entre 
mes  Enfans,  &  Defcendants,  &  ceux  du  Roy  Mon  Seigneur,  ce  qui 
m'eft  une  confideration  de  particulière  confolation  ,  &  contentement, 
d'autant  que  ce  fera  le  moyen  d'étroicir  &  renouveller  plufieurs  fois  le 
lien  du  Sang,  &  du  Parentage ,  &  d'afiurer,  &  affermir  plus  fortement 
&  efficacement  les  Alliances,  Amitiez,  &  bonne  correfpondance,  lefqueî- 
les  ont  été  liées  par  de  li  heureux  Principes  ,  &  contractées  entre  ces  deux 
Royaumes,  &  fe  continueront  à  la  gloire  de  Dieu,  &  demeureront  glo- 
rieufement  entre  iceux,  &  les  Roys  Catholiques  &  Très-Chrétiens,  ce 
qui  étant  le  bien  Public  &  Commun  fe  doit  par  bonne  raifon  préférer  au 
mien  particulier,  &  à  celui  de  mes  Enfans  &  Defcendants  ;  lequel  dans 
l'Etat  prefent  doit  être  tenu  un  peu  en  confideration- d'autant  qu'il eft  fore 
éloigné,  ainfi  qu'il  fe  reconnoit.  A  quoy  il  concourt  pour  ma  plus  grande 
fatisfaftion  ,  &Ac~te,  que  je  me  conforme,  &  fuis,  en  l'accordant,  l'e- 
xemple de  celui  qu'o£lroya  pour  fon  Mariage,  &  avant  iceluy  ,  la  Très- 
Haute,  Très-Excellente,  &  Très-Puiffante  PrincefTe  Madame  Anne  Infan- 
te dEfpagne,  &  aujourd'huy  Reine  Très-Chrétienne  de  France,  &  ma 
très  aimée  &  révérée  Tante  &  Dame,  &  qu'outre  les  confédérations ,  & 
caufes  publiques  fufmentionées ,  &  celle  de  conferver  &  aflurer  la  Paix  en- 
tre les  deux  Couronnes  (lefquelles  concoururent  auiïi,  &  s'alléguèrent  dans 
ledit  Traité,  &  Renonciation  ) il  a  concouru  dans  l'Etat  prefent,  &  a  été 
confideré  comme  caufe  publique,  la  plus  principale,  &  la  plus  grande, 
peur  la  Renonciation  accordée  dans  mon  Traité  de  Mariage,  que  l'accord 
de  mon  Mariage  auroit  été  notoirement  le  moyen,  &  caufe  plus  principal 
le  de  1  >.  pacification  d'une  Guerre  de  vingt  cinq  ans  entre  les  deux  Cou- 
ronne ,  Catholique  &  Très- Chrétienne  (  dans  laquelle  s'étoient  inte- 
refTez ,  par  Alliance  ou  Dependence,  les  plus  grands  Potentats  de  la  Chrê- 
Tvme  XL  Mm  m  tienté) 


4?8    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires'   tienté)  &  fon  bien  univerfel  &  la  caufe  publique,  &  fuprême  de  la  Reli- 
G,EN-  DE    gion  Catholique  ^    le  tout  ayant  pati  notablement  par  la  Guerre,  &  ne 


PE. 


s'y  pouvant  remédier  que  par  la  Paix  accordée  par  le  moyen  &  à  caufe 
de  ce  Mariage,  leouel   ne  s'accorderoit  point,  &  le  Roy  Monfeigneur 
n'y  confentiroit  point,  fans  la  Renonciation  accordée, ainli  qu'il  a  été  con- 
fideré  dans  l'Article  premier  de  mon  Mariage,  &  dans  le  35.  de  la   Paix 
des  deux  Couronnes ,  lequel  en  cette  considération  fe  réfère  au  Traité  par- 
ticulier fait  fur  les  conditions  de  mon  Mariage:  &  tous  deux  ont  été  fignés 
en  même  jour  &  date,  &  dans  ledit  Article  33.  de  la  Paix,  l'on  a  décla- 
ré que  ledit  Traité,  fait  fur  les  conditions  de  mon  Mariage,  nonobfhint 
qu'il  fût  feparé  ,  auroit  la  même  force,  &  vigueur  que  celui  de  la  Paix  j 
comme  en  étant  la  partie  plus  principale  ,  &   les  Airrhes  plus  precieufes 
pour  fa  plus  grande  fureté,  &  durée.  Partant,  de  mon  propre  mouve- 
ment, libre,  fpontanée,  &  agréable  volonté ,  &  ayant  certaine  fcience, 
&  connoiffance  de  l'acte  que  je  fais,  &  de  ce  qu'il  importe ,  &  peut  im- 
porter mon  confentement,  j'aprouve,  confirme,  &  ratifie  en  la  voye  & 
forme  que   mieux    je  puis,    &  dois,   ledit  accord  félon  &  de  la  façon 
qu'il  eft  contenu  plus  particulièrement  dans  ledit  Article  5.  &  en  cas  qu'il 
fembleroit  necefiaire,  &  convenable,  je  donne  mon  pouvoir  abfolu  &  fuf- 
fifant  au  Roy  Mon  Seigneur,  &au  Roy  Très-Chrétien,  à  ce  qu'ils  le  puif- 
fent  arrêter ,  &  accorder  de  nouveau.     Quoy  qu'en  vertu  &  accomplie 
fement  du  dit  Article  je  me  déclare  &  tiens  pour  exclufe ,  &  éloignée,  & 
les  Enfans  &  Defcendants  de  ce  Mariage  pour  exclus    &   inhabilités  ab- 
folument,  &  fans  limitation, différence  ,  ou  diftinction  des  perfonnes  , de- 
grez, Sexes,  &  temps  de  l'Action  &  Droit  de  fucceder  aux  Royaumes,  E- 
tats  ,  Provinces,  Terres,  &  Seigneuries  de  cette  Couronne  d'Efpagne  ex- 
primés, &  déclarez  par  iceluy,  &  que  je  veux,  &  confens  pour  moy,  & 
pour  leidits  miens  Defcendants,  que   dès   maintenant  comme   pour  lors 
l'on  les  tienne  comme  cédez ,  &  transferez  à  celuy  qui  fe  trouvera  le  plus 
proche  en  degré  (  à  caufe  que  moy,  &  eux  fommes  exclus,    inhabiles  & 
incapables)  &  immédiat  au  Roy  par  la  mort  duquel  il  vaquera,  &  fe  de- 
vra régler,  &  déférer  la  Succeiïion  defdits  Royaumes,    &  afin  qu'il  les 
tienne  &  poifede  comme  légitime,  &  vray  SucceiTeur  de  même  façon  que 
fi  moi,  &  mes  Defcendats,  ne  fuffions  pas  nez,  ni  étions  au  Monde,  par- 
ce que  nous  devons  être  tenus,  &  reputez  pour  tels,  à  fin  qu'en  m'a  per- 
sonne, &  en  la  leur,  l'on  ne  puiffe  confiderer,  ni  faire  fondement  de  re- 
prefentation  active,  ou  paiïîve,  principe,  ou  continuation  de  lignée  ef- 
fective, ou  contenu ve  de  fubftance,  de  fang,  ou  qualité,  ni  tirer  la  Defc 
cendance  &  computation  des  degrez  de  celle  du  Roy  Monfeigneur  ,  ni 
de  celle  des  glorieux  Roys  fes  PredeceiTeurs ,  ni  pour  aucun  autre  efFect , 
afin  d'entrer  en  la  Succeiîîon  ,  ou  préoccuper  le  degré  de  proximité,  & 
d'en  exclnrre  la  perfonne  qui  fe  trouvera  (comme  dit  eft  )  proche  en  de- 
gré ;  &  je  promets,  &  m'oblige  en  Foy  &  Parole  Royale,  qu'en  tout  ce 
qui  dépendra  de  moy,  &  de  mes  dits  Enfants, &  Defcendants,  l'on  pro- 
curera toujours  &  en  tout  temps,   que  lobfervation,  &  accompJiffement 

dudic 


PE. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC    I.         45-9 

dudit  Article,  &  de  ce  mien  A£te,  que  je  fais  pour  Ton  approbation ,  &   Affaires 
confirmation,  foit  inviolable,  fans  permettre,  ni  confentir  que  l'on  aille,    G',N-  nï 
ou  agifTe  au  contraire,  directement,   ou  indirectement,  en  tout,   ou  en 
partie,    &  je  dédite,  &  cède  tous,  &  quelconques   remèdes   feeus,  ou 
ignorez, ordinaires,  ou  extraordinaires,  &  qui  nous  pourroient  appartenir 
par  Droit  commun,  ou  Privilège  fpecia! ,  à  moi  ou  à  mes  dits  Enfants  & 
Defcendants  pour  reclamer ,  dire,   &  alléguer  cont-re  ce  que  diffus,   & 
je  renonce  à  tous,  &  fpecialement  à  celui  de  lareftitution  in  integram  ,  fon- 
dée fur  l'ignorance,  ou  inadvertence  du  ma  minorité,  ou  fur  la  Le'ion 
évidente,  énorme  &  très-enorme  que    l'on  pourroit    confiderer   être  in- 
tervenue dans   la  defiftance   &  renonciation  du    Droit  de  pouvoir  fuc- 
ceder  en  aucun  temps  à   tant   &   à  de  fi  grands  Royaumes,  Etats,  & 
Seigneuries,  &  je  veux  que  nul  defdits  remèdes,  n'y  aucuns  autres  de 
quelconque  nom,  caractère,  importance,  &  qualité  qu'ils  foyent,  nous 
fervent  ou  nous  puiffent  fervir  judiciellement,  ou  extrajudiciellement,  & 
que  fi  nous  les  intentions,  ou  tafehions  de  les  déduire  en  voye  de  ju- 
ftice  &  conteftations ,  l'on  nous  dénie  &  ferme  toute  forte  d'audiance, 
&  fi  de  fait  ou  fous   quelconque   couleur  mal  prétendue,  deffaut  de  la 
Juftice  (parce  que  nous  devons  toujours  reconnoître,  &.  confeffer,  que 
nous   n'en    avons    aucune  pour   fucceder   auxdits    Royaumes  )   nous  les 
vouluffions  occuper  par  force  d'armes,  faifant,  ou  mouvant  guerre  of- 
fenfive ,  que  dès  maintenant  comme  pour  lors,  l'on  la  tienne,  juge,  & 
déclare  pour  illicite,  injufte,  &  mal  attentée,  &  pour  violence  ,    inva- 
fion ,  &  ufurpation  tiranique  &   faite  contre  raifon ,   &  confeience  ,   & 
&  qu'au  contraire  on  juge  ,  &  qualifie  pour  jufle  ,   licite  ,    &   permife 
celle  qui  fe  viendroit  à  faire,  ou  mouvoir,  par  celui  qui  y  devroit  fuc- 
ceder, à  mon  excluiion,  &  de  mes  dits  Enfants  &  Defcendants,  lequel 
les  Sujets  &  Habitans  devront  recevoir,  &  obeïr^lui  faire,  &  prêter  Ser- 
ment, &  l'Hommage  de  fidélité,  &  le  fervir  comme  à  leur  Roy  &  Sei- 
gneur légitime*  &  j'affirme  &  certifie ,  que  pour  oclroyer  cet  Acte,  je 
n'ai  été  induite,  attirée,  ni  perfuadée  par  le  refpeèr.,  &  vénération  que 
je  dois,  &  ay  pour  le  Roi  Monfeigneur,  comme  à  Prince  fi  puiffant,   & 
comme  à  Père  qui  m'aime  tant,  &  que  j'aime ,  &  qui  me  tient,    &  m'a 
tenue  fous  fa  Puiffance  Paternelle,  parce  que  véritablement  en  tout  ce  qui 
fe  patte,  &  s'eft  paifé  au  regard  de  la  conclufion,  &  effecl:  de  ce   Maria- 
ge, touchant  le  dit  Accord,  &  Article  de  mon  Exclufion,  &  de  celle  de 
mes  Defcendants,  j'ay  eu  toute  la  liberté  que  j'ay  pu  fouhaiter,  pour  dire 
&  déclarer  ma  volonté,  fans  que  de  fa  part,  ou  d'aucune  autre  perfonne 
l'on  m'ait  fait  aucune  peur    ni  menace  ,  pour  m'y   induire  ,  ou   attirer 
à  faire  aucune  chofe  contre  elle,  &  que  pour  plus  grande  validité,  &  af. 
furance  de  ce  qui  eft  dit,  &  promis  de  ma  part,  je  jure  folemnellement 
par  les  Evangiles  contenus  en  ce  Miflel  (fur  lequel  je  mets  ma  main  droite) 
que  je  le  garderai  ,  mantiendrai,  &  accomplirai  en  tout,  &  par-tout,  & 
que  je  ne  demanderai  point  de  Difpenfe  de  ce  Serment  à  notre  très  Saint 
rere,  ni  au  Saint  Siège  Apoftolique ,  ni  à  fon  Légat,  ou  à  aucune  digni- 

jyimm  2  té 


Atfaires 

GEN. DE 

l'Euro- 
pe. 


460    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

té  qui  auroic  faculté  de  me  la  pouvoir  oftroyer,  &  que  fi  l'on  me  l'oc- 
troyeroit  à  mon  inilance,  ou  de  quelconque  UniverOté,  ou  perfonne  par- 
ticulière, ou  moîu  proprio,  encore  que  ce  feroit  feulement  afin  de  pouvoir 
entrer  en  jugement  fans  toucher  à  la  fubftance  defdits  remèdes,  &  de  la 
force  de  cet  Aéle,  &  du  Traité,  que  j'approuve  par  icelui,  je  ne  me  pré- 
vaudrai point  ni  m'en  fervirai  \  au  contraire,  en  cas  que  l'on  me  l'oclroye- 
roit,  je  fais  un  autre  fembîablé  Serment,  afin  qu'il  y  en  ait,  &  demeure 
toujours  fur  toutes  les  Difpences  qui  me  feront  oélroyées,  &  fous  le  même 
je  dis,  &  promets  que  je  ne  fais,  ni  feray  aucune  proteftation,  ou  récla- 
mation en  Public,  ou  en  fecret ,  qui  puilTe  empêcher,  ou  diminuer  la 
la  force  du  contenu  en  cet  Acle,  &  que  G.  je  la  fais  (encore  qu'elle  foie 
fous  Serment)  qu'elle  ne  fera  d'aucune  valeur,  &.  ne  puiffe  avoir  aucune 
force,  ni  èffeéi;  &  je  fupplie  fa  Sainteté,  que  puifque  ce  Mariage,  & 
Ion  Traité,  a  été  conclu,  &  accordé  avec  fa  Sainte  &Apo(tolique Appro- 
bation,  &  fe  doit  effectuer,  &  célébrer  avec  fa  benediclion , elle  foit  fer- 
vie  d'accroitre  la  force  du  Lien  &  Religion  de  ce  mien  ferment  par  l'auto- 
rité de  fa  confirmation  Apoilolique-  &  je  promets,  &  m'oblige ,  qu'en, 
conformité,  &  accompliffement  de  l'Article  6.  fufinentioné,  aufïi-tôc  que 
j'arriverai  au  lieu,  où  le  Roi  très-Chrétien  me  doit  recevoir,  je  ferai  & 
ferai  faire  avec  fon  intervention,  &  autorité,  &  conjointement  avec  fa 
Majefté  très-Clïrêtienne,  &  avec  toutes  les  claufes,  Serments,  &  condi- 
tions neceflaires,  &  convenables,  un  autre  femblable  Acte  de  confirma- 
tion, &  ratification  de  celui  qui  a  été  fait,  &  dépêché  dans  cette  Cité 
de  Fontarabie,  où  fe  trouve  à  prefent  le  Roy  Catholique  Monfeigneur , 
avec  fa  Cour,  &  Palais,  le  fécond  jour  de  Juin  de  cette  Année  ,  mille 
lix  cent  &  foixante,  en  prefence  du  Roy  notre  Maître.  Et  pour  plus 
grande  folemnité,  autorité,  &  validité  de  cet  Aéle,  Sa  Majefté  Catho- 
lique a  dit,  pour  l'accompliiTement  des  Articles  f.  &  6.  y  inférés,  que 
pour  ce  qui  regarde  la  caufe  publique  &  le  bien  commun  de  fes  Royau- 
mes, Sujets,  &  Vaflaux  d'iceux,  elle  confirmoit,  &  a  confirmé  cet  Acle 
félon  &  en  la  forme  que  l'a  fait,  &  fait  depefeher  la  Serenifîime  Infante 
Madame  Marie -Therefe,  Reine  promife,  &  future  de  France,  fa  très- 
chere  &  très-aimée  Fille,  &  que  de  fon  propre  mouvement  ,  certaine 
feience  ,  pleine  &  abfoiue  PuiiTance,  &  comme  Roi  &  Seigneur,  qui  ne 
reconnoit  point  de  fuperieur  dans  le  temporel,  elle  fupleoit,  &  vouloit 
que  l'on  tint  pour  fuplées  par  fa  Royalle  autorité  quelconques  defFauts,  ou 
omiffion  de  fait,  ou  de  droit,  de  fubltance,  ou  de  qualité,  de  ftile  ,  ou 
de  Coutume,  qu'il  y  pour.roit  avoir  en  cet  Acle,  &  qu'elle  confirmoit, & 
approuvoit  fpeeialement  &  particulièrement  le  dit  Article  5.  &  ce  qui  efi: 
refolu  &  arrêté  par  icelui  entre  Sa  Majefté  Catholique,  &  Très-Chrê- 
tienne  de  France,  <k  qu'elle  vouloit,  &  commandoit  qu'il  auroit  force  & 
vigueur  de  Loy,  &  de  Sanction  Pragmatique,  &  que  comme  tel  il  feroit 
receu,  &  fe  garderoit,  &  obferveroit  &  executeroit  dans  ihs  Royaumes, 
Etats,  &  Seigneuries ,  fans  prendre  garde  au  Loix  ,  Ordonnances  ,  Ufages 
&  Coutumes  qu'il  y  auroit,  ou  pourroic  avoir  au  contraire,  auxquelles  el- 
le 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  ï.  461 

le  derogeoit,  &  veut  que  pour  cette  fois  elles  foient  tenues  pour  abrogées, 
&  derogées,  encore  qu'elles  feroient  telles,  &  de  telle  qualité,  que  pour 
leur  dérogation  ferait  requife,  &  necefTiire,  une  autre  plus  expreiïe,  & 
fpeciale  mention,  &  commanda  que  l'on  le  fcelleroit  avec  Ton  féel  Royal 
&  qu'il  feroit  entregillré,  &  publié  en  Ton  Confeil  de  Chambre  &  dans 
les  autres,  auxquels  il  appartiendra;  de  tout  quoi  ont  été  temoings  à  ce 
appeliez,  &  requis,  Don  Louis  Mendez  de  Flaro,  Comte,  Duc  d'Oliva- 
rez:  Don  Ramiro  Nunnez  de  Guzman,  Duc  de  Médina  de  las  Torres: 
Don  Gafpar  de  Haro,  Marquis  de  Eliche  :  Don  Juan  Domingo  de  Guz- 
man, Comte  de  Monterey  :  Don  Diego  d'Arragon,  Duc  deTerranova: 
DonGillen  Ramofi  de  Moncada,  Marquis  de  Aytona,  Don  Pedro  Porto- 
Carrero  ,  Comte  de  Medeliin  :  Don  Pedro  Colon  de  Portugal,  Duc  de 
Veraguas:  Don  Antonio  de  Peralta  Hurtado  de  Mendoza,  Marquis  de 
JVlondejar:  Don  Alonço  Perés  de  Guzman,  Patriarche  des  Indes:  Don 
Alonco  Pères  de  Vivero  , Comte  de  Fuenfaldagne  du  Confeil  d'Etat:  Don 
Juan  de  Caravajal  &Sandi,  du  Confeil  &  Chambre:  Don  Diego  de  Je- 
fada  Ëvêq-ue  de  Pamplune  ,  &  plufieurs  autres  Seigneurs,  &  Cavaliers, & 
Domeftiques  de  fa  Majelté  qui  fe  trouvèrent  prefens. 


Signé, 


JE   LE    ROY. 

JE   MARIE-THERESE. 


APrAIKVS 
CFN.    1ÎK 

l'Euro- 

PK. 


riage  de 

uïs 
XIV, 


Contraiï  de  Mariage  du  Roy  Très-Chrétien  £5?  de  la  SereniJJime 
Injante,  Fille  aînée  du  Roy  Catholique ,  le  feptieim 

Novembre  i6)£l 

Louis,  par  la  grâce  de  Dieu,  Roy  de  France  &  de  Navarre:  A  tous    Contrat 
ceux  qui  ces  prefentes  Lettres  veront ,  Salut.     Comme  ainfi  foit  que    de  M* 
Je  Traite  de  Mariage  d'entre  nous,  &  la  Sereniffime  Infante  d'Efpagne,    V^ 
Donna  Maria- Thcreja,  Fille  aînée  de  notre  très  cher  &  très-aimé  Frère    xiv, 
&  Oncle,  le  Roi  des  Efpagnes,  Don  Philippe  IF.  de  ce  Nom,  ait  été 
conclu,  arrêté,  &  (igné  par  notre  très- cher  &  très-aimé  Coulin  le  Car- 
dinal Mazarini,   de  notre  part:  Et  le  Seigneur  Don  Loiiis  Mendez   de 
Haro ,  de  la  part  dudit  Roy  d'Efpagne ,    le  feptieme  jour  de  Novembre: 
dans  l'Ifle  dite  des  Faifans,  dans  la  Rivière  de  BidalToa,  aux  confins  des 
deux  Royaumes  de  France  &  d'Efpagne,  &  en  vertu  de  leur  Pouvoirs 
&  Commiflions.    Par  le  dernier  Article  duquel  Traité,    notre  dit  Cou- 
fin  le  Cardinal  Mazarini  ayant  promis  &  flipulé,  en  notre  nom,  de  faire 
fournir  nos  Lettres  de  Ratification,  en  la  forme  &  manière  accoutumées, 
&  de  la  faire  délivrer  en  trente  jours  avec  les  dérogations  à  quelconques 
Loys,  Coutumes,  &  D.ifpoiitions  qui  feroient  au  contraire  dudic  Traite, 
duquel  la-  teneur  enfuit. 

M  m  m  3  Au, 


ÂWAIRES 
CENT.    DE 

l'Euro- 
pe. 


4S1    MEMOIRES,  NEGOTÏATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Au  nom  de  la  tres-Ste.  'Trinité,    Père,  Fils,  &   St.  Efprit ,  trois  Per- 
fonnes  en  un  feul  Dieu  véritable,  à  Ton  Honneur  &  Gloire,  &  au  bien  de 
ces  Royaumes;  foit  notoire  à  tous  ceux  qui  ces  prefemes  Lettres  veronr, 
&  cet  Accord  de  Mariage  :  Que  comme  en  l'Ifle  appeHée  des  Faifans,  fi- 
tuée  dans  la  Rivière  de  Bidaflba,  à  demi  heiie  du  Bourg  d'Andaye,  Pro-? 
vince  de  Gyenne-,  &  autant  de  la  Viile  d'Irura,  en  la  Province  de  Gui- 
puzcoa  ,  &  dans  la  Maifon  qui  a  été  cette  année  bâtie  en  ladite  Ifle,  pour 
y  traitter  de  Paix,  entre  leurs  Majeltés  Très -Chrétienne  &  Catholique, 
ce  jourdhuy  fepiieme  du  mois  de  Novembre,  de  l'année  que  l'on  compte, 
depuis  la  Naiflance  de  Jefus-Chnjl ,  notre  Seigneur  &  Rédempteur,  mil 
iix  cent  cinquante-neuf.     Par  devant  moy  Pedro  Coloma,   Chevalier  de 
l'Ordre  de  Saint  Jaques,  Seigneur  des  Villes  de  Chozas ,  de  Cavales,  & 
de  Junchiliers,  du  Confeil  des  Indes,   Secrétaire  d'Etat,   Ecrivain,    & 
Notaire  de  la  Catholique  Royale  Majeflé}    ont  comparu,  trés-Eminent 
Seigneur  Meiîire  Jules  Mazarini  ,    Cardinal   de  la  Ste.  Eglife  Romaine , 
Duc  de  Mayene,  Chef  de  tous  les   Confeils  du  très-Excellent,  &  très- 
Puiflant  Prince  Louis  XIV.  par  la  Grâce  de  Dieu  Roy  très-Chrétien  de 
France  &  de   Navarre,  en  vertu  du  Pouvoir  qu'il  a  de  Sa  Majeflé  Très- 
Chrétienne,    écrit  en   Langue  Francoifej   figné  de  fa  Royale  main,  & 
feelé  de  fon  Seau  Royal ,  contre-figné  par  fon  Secrétaire  d'Etat ,  le  Sieur 
de  Lomenie,   donné  à  Paris  le   vingt  unième  jour  de  Juin  1659    lequel 
Pouvoir  eit  demeuré  en  mes  mains,   &  dont  la  copie  fera  inférée  à  la  fin 
des  prefentes,  d'une    part:  Et.de   l'autre,  très-Excellent  Seigneur  Don 
Louis  Mendez  de  Haro  &  Guzman,  Marquis  de  Carpio  ,  Comte  Duc  d'O- 
livarez,  Gouverneur  perpétuel  des  Palais  Royaux  &  Arfenal  de  Seville , 
Grand-Chancelier  perpétuel  des  Indes,  du  Confeil  d'Etat  de  Sa  Majefté 
Catholique,  Grand-Commandeur  de  l'Ordre  d'Aicantara,  Gentil-homme 
de  la  Chambre  de  fadite  Majeité,  &  fbn  Grand  E'cuyer  ;    &  au   nom  du 
très-Haut,  très-Excellent,  &  très  PuifTant  Prince  Philippe  IV.  auffi  par 
la  Grâce  de  Dieu  Roy  de  Caflille,  Léon,  Arragon,  des  deux  Siciles,  de 
Jerufalem,  de  Portugal,  de  Navarre,  &  des  Indes ,  &c.  Archiduc  d'Au- 
triche, Duc  de  Bourgogne,  de  Brabant ,  &  de  Milan,  Comte  de  Haps- 
bourg,  de  Flandre,  ck  de  Tirol,  &c.  &  en  vertu  du  Pouvoir  qu'il  a  de 
Sa  Majellé  Catholique,  par  Acle  figné  de  fa  main  Royale,    féelé  de  fon 
Sceau  Royal,  &  contre-fignée  par  Don  Fernand  deFonfecaRuyz  de  Con- 
treras, fon  Secrétaire  d'Etat  ;  fait  à  Madrit  le  cinquième  jour  de  Juillet 
de  la  prefente  année.. 

Comme  le  Roy,  Père  &  légitime  Adminiflrateur  de  la  Sereniffime  In- 
fante Dame  Marie-Therefe,  la  Fille  ainée  de  la  Majefté  de  la  feue  Rei- 
ne Elifabeth  fa  légitime  Epoufe:  &  ledit  Seigneur  Cardinal  Mazarini,  au 
nom  de  Sa  Mijelté  Très-Chretienne  :  &  ledit  Marquis  Comte  d'Oliva- 
rez,  au  nom  de  Sa  Majeflé  Catholique,  ufans  de  leurs  Pouvoirs  fufdits, 
ont  dit  &:  déclaré  que  leurs  Maîtres,,  comme  Rois  Très  Chrétien  &  Ca- 
tholique, qui  ont  fort  à  cœur  le  bien  de  leurs  Royaumes,  &  d'affermir 
la  Paix  ,   qui   s'établit  aujourd'hui  entre  les  deux  Couronnes  ;   défirans 

que 


PE, 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  4*5 

que  la  durée  de  cette  Paix  ne  s'étende  pas  feulement  à  celle  de  la  vie  de  Affaires 
Leurs  Majèftez,  mai-s  pafle  avec  la  me  me  fermeté  à  leurs  SucceiTeurs  &  gen.de 
Dépendants;  &  jugeant  que  le  plus  efficace  moyen,  pour  parvenir  à  cet- 
te faincte  fin,  eft  de  renouer  étroitement  leurs  Alliances  par  le  lien  d'un 
Mari.ige  :  Leurs  Majèftez  avec  la  Grâce  de  Dieu,  &  à  fon  fervice ,  ont 
trait  te  &  accordé  les  Efpoufailles  &  Mariage  de  Sa  Majefté  le  Roi  Très- 
Chrctien ,  avec  la  Sereniffime  Infante  Dame  Marie-Therefe,  Fille  ainée 
de  Sa  Majelté  le  Roy  Catholique;  afin  de  confirmer  davantage,  par  ce 
nouveau  Nœud,  l'amour,  l'amitié,  ck  l'union  qui  eft,  &  que  l'on  délire 
conferver,  entre  Leurs  Majèftez.  Et  pour  cet  effeél:  ,  lelctits  Seigneurs 
Plénipotentiaires  ,  aux  noms  fufdits  ,  ont  traitté  &  accordé  les  Articles 
qui  fuivent. 

Qu'avec  la  Grâce  &  Bénédiction  de  Dieu,  &  préalablement  obtenue 
Difpenfe  de  fa  Saincleté  ,  à  raifon  de  la  proximité  &  confanguinité,  qui 
eft  entre  le  Roi  Très-Chrétien,  &  la  Sereniffime  Infante  -,  ils  falTent  célé- 
brer leurs  Efpoufail'es  &  Mariage,  par  paroles  de  prefent ,  félon  la  for- 
me &  folemnité  préferite  par  les  facrez  Canons,  &  Conftitutions  de  l'E- 
glife  Catholique,  Apoftolique,  &  Romaine.  Et  fe  feront  lefdites  Efpou- 
failles  &  Mariage  en  la  Cour  de  Sa  Majefté  Catholique,  où  elle  fera,  a- 
vec  la  Sereniffime  Infante  Dame  Marie-Therefe  ;  &  ce  en  vertu  du  Pou- 
voir &  Commiffion  du  Roi  Très-Chrctien,  qui  le  ratifiera  &  accomplira 
en  Perfonne,  quand  la  Sereniffime  Infante  Dame  Marie-Therefe,  fera  a- 
menée  &  arrivée  en  France  j  Sa  Majeflé  fe  joignant  avec  fon  Aiteffe,  & 
recevant  les  bénédictions  de  l'Eglife  :  Et  la  Conclufion  &  Ratification  du- 
dit  Mariage,  foit  par  pouvoir  fpecial,  ou  en  prefence,  fe  fera  quand  & 
dans  le  tems  accordé  &  concerté  entre  Leurs  Majèftez. 

Que  Sa  Majefté  Catholique  promet  &  demeure  obligée  de  donner,  & 
donnera  a  la  Sereniffime  Infante  Dame  Marie-Therefe,  en  Dot  &  en  fa- 
veur de  Mariage  avec  le  Roy  Très- Chrétien  de  France,  &  payera  à  Sa 
Majefté  Très-Chrêtienne,  ou  à  celui  qui  aura  pouvoir  ou  commiffion  d'El- 
le,  la  fomme  de  cinq  cent  mille  écus  d'or  fol,  ou  leur  jufte  valeur,  en  ia 
Ville  de  Paris.  Et  ladite  fomme  fera  payée  en  la  manière  fuivante  :  le 
tiers,  au  tems  de  la  confommation  du  Mariage  ;  l'autre  tiers ,  a  la  fin  de 
l'année,  depuis  ladite  confommation  >  &  la  dernière  &troifieme  partie, fix 
mois  après:  en  forte  que  l'entier  payement  de  la  dite  fomme  de  cinq  cent 
mille  écus  d'or  fol,  ou  leur  jufte  valeur,  fera  faite  en  dix  huit  mois  de 
tems,  aux  termes  &  portions,  qui  viennent  d'être  fpécifiées. 

Que  Sa  Majefté  Très-Chrétienne  s'oblige  d'afTûrer,  &  alTùrera  le  Dot 
de  la  Sereniffime  Infante  Dame  Marie-Therefe,  fur  rentes  bonnes  &  bien 
alTurées,  &  fur  Fonds  &  Affignations  valables,  &  au  contentement  de 
Sa  Majefté  Catholique,  ou  des  perfonnes  qu'il  nommera  pour  cet  effecl > 
à  mefure  &  à  proportion  de  ce  que  Saditc  Majefté  aura  reçu  les  cinq  cent 
mille  écus  d'or  fol,  ou  leur  jufte  valeur,  dans  les  termes  ci-dellus  dits  ^ 
&  envoyera  auffi-tôt  à  Sa  Majefté  Catholique  les  A6tes  de  ladite  Afïigna- 
tion  &  Confignation  de  Rentes  ;  Et  en  cas  de  Diiîblution  du  Mariage,  & 

que 


AH    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

ÀFFA1-.E3  que  de  Droit,  la  Reflitution  du  Dot  ait  lieu;  il  fera  rendu  à  la  Sereniffime 
ben.  de  Infante,  ou  à  celui  qui  aura  charge  ou  droit  de  Ton  AltelTe-  &  pendant  le 
i'£oko-    tems  qui  courra,  qu'on  ne  lui  rendra  point  fon  dit  Dot,  Son  AltefTe ,  ou 

. _Î! fes  Héritiers  &  Succeffeurs  jouiront  des  Revenus,  à  quoi  fe  monteront 

lefdits  cinq  cent  mille  écus  d'or  fol,  à  raifon  du  denier  vingt,  qui  feront 
payez  en  vertu  defdites  Afîignations. 

Que  moyennant  le  payement  effectif  fait  à  Sa  Mnjefté  Très-Chrétien- 
ne defdits  cinq  cent  miile  écus  d'or  fol,  ou  leur  julte  valeur,  aux  termes 
qu'il  a  été  ci-devant  dit,  ladite  Sereniiiime  Infante  fe  tiendra  pour  conten- 
te, &  fe  contentera  dudit  Dot,  fans  que  par  ci-après  elle  puiife  alléguer 
aucun  fien  autre  Droit,  ni  intenter  aucune  autre  Action  ou  Demandes, 
prétendant  qu'il  lui  appartienne,  ou  puifïe  appartenir,  autres  plus  grands 
Biens,  Droits,  Raifons,  Actions,  pour  caufe  des  Héritages  &  plus  gran- 
de Succeffion  de  Leurs  Majeftez  Catholiques  &s  Pérès  &  Mères  ;  ni  pour 
conteitation  de  leurs  Perfonnes  en  quelque  autre  manière ,  ou  pour  quel- 
que caufe  &  titre  que  ce  foit,  foit  qu'elle  le  fcût,  ou  qu'elle  l'ignorât; 
attendu  que  de  quelque  qualité  &  condition  que  lefdites  Actions  &  chofes 
ci-deffus  foient ,  elle  en  doit  demeurer  exclufe ,  &  avant  l'effeèluation 
de  fes  Efpoufailles ,  elle  en  fera  la  Renonciation  en  bonne  &  due  forme, 
&  avec  toutes  les  affurances,  formes,  &  folemnitez  qui  y  font  requifes  & 
neceiTaires.  Laquelle  dite  Renonciation,  elle  fera  avant  que  d'être  ma- 
riée, par  parole  de  prefent  ;  qu'elle,  auiïi- tôt  après  ta  célébration  du  Ma- 
riage ,  approuvera  &  ratifiera  conjointement  avec  le  Roi  Très-Chrétien , 
avec  les  mêmes  formes  &  folemnitez  qu'elle  aura  fait  à  la  fufdite  première 
Renonciation,  voire  avec  les  claufes  qu'ils  verront  être  les  plus  convena- 
bles &  neceiTaires  :  A  l'effect  &  accompluTement  de  laquelle  Renoncia- 
tion, Sa  Majeité  Très-Chrétienne  &  Son  Alteffe  demeureront  &  demeu- 
rent dès  à  préfent,  comme  pour  lors, obligez;  &  au  cas  qu'elles  ne  faffenc 
ladite  Renonciation  &  Ratification  ,  en  vertu  du  préfent  Contract ,  par 
Capitulation,  iceux  fufdits  Traitiez,  Renonciation,  &  Ratification,  fe- 
ront tenus  &  cenfez  dès  à  préfent,  comme  pour  lors,  pour  bien  &  dûë- 
ment  faits,  pafîez  ,  &  octroyez.  Ce  qui  fe  fera  en  la  forme  la  plus  authen- 
tique &  efficace  que  faire  fe  pourra,  pour  être  bonnes  &  valides  ;  enfem- 
ble  avec  toutes  les  claufes  dérogatoires  de  quelconque  Loy,  Jurifdiction, 
Coutume,  Droits,  &  Conftitutions ,  à  ce  contraires,  ou  qui  einpêchaf- 
fent  du  tout,  ou  en  partie,  lefdites  Renonciations  &  Ratifications:  Aux- 
quelles, à  l'effet  &  validité  que  defTus,  Leurs  Majeflés  Très- Chrétienne, 
èk.  Catholique  dérogeront,  &  dès  à  préfent  elles  y  dérogent  entièrement: 
&  par  l'Approbation  &  Ratification  qu'elles  feront  de  ce  prefent  Con- 
tract &  Capitulation,  dès  à  préfent  comme  dès-lors,  elles  entendront  & 
entendent  avoir  déroge  à  toutes  exceptions  ci-deffus. 

Que  d'autant  que  Leurs  Majeftez  Très-Chrétienne  &  Catholique  font 
venues  &  viennent  à  faire  ce  Mariage,  afin  de  tant  plus  perpétuer  &  aflii- 
ref  par  ce  nœud  &  lien  la  Paix  publique  de  la  Chrétienté,  &  entre  Leurs 
Majeflés  ,  l'amour  &  la  fraternité ,  que  chacun  efpére  entre  elles;  &  en 

con- 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  46r 

contemplation  aufli  desjultes  &  légitimes  caufes,  qui  montrent  &  per-   Affaikfs 
fuadent  l'égalité  &  convenance  dudit  Mariage,  par  le  moyen   duquel  &     gen.de 
moyennant  la  faveur  &  grâce  de  Dieu ,  chacun  en  peut  eîpérer  de  très- 
heureux  fuccès  au  grand  bien  &  augmentation  de  laFoy  &  Religion  Chré- 
tienne, au  bien  &  bénéfice  commun  des  Royaumes,  Sujets,  é^Vaflaux 
des  deux  Couronnes  ;  comme  auiïi'pour  ce  qui  touche  &  importe  au  bien 
de  la   chofe   publique ,   &  confervation  defdites  Couronnes  ;    lefquelles 
étant  fi  grandes  &  puiifantes,  ne  puiflent  être  reunies  en  une  feule,  & 
que  dès  à  préfent  on  prévienne  les  occafions  d'une    pareille  conjonction. 
Donques,  attendu  la  qualité  des  fufdites,  &  autres  jufles  raifons,  &  no- 
tamment celle  de  l'égalité  qui  fe  doit  conferver,    Leurs  Majeftés  accor- 
dent ,  arrêtent,  parContracl:  &  Pacte  conventionel  entre  elles,  qui  fortî- 
ra,  &  aura  lieu,  force,  &  vigueur  de  Loy  ferme  &  itable  à  tout  jamais, 
en  faveur  de  leurs  Royaumes,  &  de  toute  la  chofe  publique  d'iceuxj  que 
la  Sereniftime  Infante  d'Efpagne,  Dame  Marie -Therefe,  &  les  Enfans 
procréez  d'elle,  foient  malles  ou  femelles  &  leurs  defcendants,  premiers, 
ou  féconds,  trois  ou  quatre,  nez  ci-après ,  en  quelque  degré  qu'ils  fe  puif- 
fent  trouver,  voire  à  tout  jamais,  ne  piaffent  fuccéder,  ni  fuccédent  es 
Royaumes  ,  Etats  ,  Seigneuries  ,  &  Dominations ,  qui  appartiennent  & 
appartiendront  à  fa  Majefté  Catholique,  &  qui  font  compris  au  defibus 
des  Titres  &  Qualités  mentionnées  en  cette  préfente  Capitulation,  ni  en 
aucun  de  Cas  autres  Royaumes,  Etats,  Seigneuries,  Provinces,  Ifles  ad- 
jacentes, Fiefs,  Capitaineries,  ni  es  Frontières  que  Sa  Majefté  Catholi- 
que pofféde  dès  à  préfent,  ou  qui  lui  appartiennent,  ou  pourront  appar- 
tenir, tant  dedans,  que  dehors   le  Royaume   d'Efpagne;    &  qu'à  l'ave- 
nir Sadite  Majefté  Catholique,  ou  fes  SuccefTeurs,  auront,  pofféderont, 
&  leur  appartiendront  j  ni  en  tous  ceux  qui  font  compris  en  iceux,  ou 
dépendent  d'iceux  ;  ni  même  en  tous  ceux  qui  par  ci- après,  en  quelque 
tems  que  ce  foit,  elle  pourroit  acquérir,  ou  accroitre,  &  adjouter  aux 
fufdits  fiens  Royaumes,  Etats,  &  Dominations ,  ou  qu'elle  pourroit  reti- 
rer, ou  qui  lui  pourroit  échoir  par   dévolution   ou  par  quelques  autres 
Titres,  Droits,  ou  Raifons  que  ce  puiffe  être,  encore  que  ce  fut  durant  la 
vie  de  ladite  Serenifiime  Infante  Dame  Marie-Therefe,  ou  après  fa  mort, 
ou  celle  de  qui  que  ce  foit  de  fes  defcendans,  premier,  féconds,  troilié- 
mes,  nez  ou  ultérieurs,  que  le  cas  ou  les  cas,  par  lefquels,  ou  de  Droit, 
ou  par  les  Loix,  &  Coutumes  defdits  Royames  ,  Etats,  &  Dominations, 
foit  par  Difpofitions  de  Titres,  par  lefquels  ils  puiflent  fuccéder  éfdits  Ro- 
yaumes, Etats,  ou  Dominations,  leur  dût  appartenir  la  Succeflion  en 
tous  lefquels  fufdits  cas,  dès  à  préfent  ladite  Dame  Marie-Therefe  Infan- 
te, dit  &  déclare  être  &  demeure  bien  &  dûement  exclufe,  enfemble 
tous  fes  Enfans  &  Defcendans,- Mâles  ou  Femelles,  encore  qu'ils /£  vou- 
lurent ou  pûffent  dire  ou  prétendre ,  quen  leurs  perfonnes  ne  courent ,    ne  ni  Je 
peuvent  £5?  doivent  confiderer  lefdites  raifons  de  la  chofe  publique ,  ni  autres  èf- 
quelles  ladite  Exdujion  fe  pourroit  fonder ,  ou  qu'ils  voulufient  alléguer  (  ce 
qu'à  Dieu  ne  plaife  )  que  la  SucceJJïon  du  Roy  Catholique ,  ou  de  fis  Sercnif- 
Tome  XL  Nnn  /mes 


PE. 


466    MEMOIRES,  NEGOT1ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

&ï*Ai*Es   fîmes  Princes  &  Infantes,  £5?  d'abondant  des  Mâles,  quil  a  (3  pourra  avoir 
gen.  de     les  légitimes  SucceJJeurs ,  eût  manqué  &  défaUly\  parce  que,  comme  i!  a  éié 
l'Euro-    dit,  en  aucun  cas,  ni  en  aucun  tems,  ni  en  quelque  manière  qui  peut  ad- 
venir, ni  elle,  ni  eux,  fes  hoirs  ck  les  defcendans,  n'ont  à  fucceder,  m 
prétenejje  pouvoir  fucceder,    non-obffant  toutes  Loix,  Coutumes,  Or- 
donnances, &  Difpolkions  en  vertu  desquelles  on  a  fuccedé  en  tous  lef- 
dits  Royaumes ,  Etats,  Seigneuries:  Et  non-obfiant  auflî  toutes  les  Loix 
&  Coutumes  de  la  Couronne  de  France,  qui,  au  préjudice  des  Succeffeurs 
en  icelle,  s'oppofent  à  cette  fufdite  Exclulion  ,  auffi-bien  à  préfent ,  com- 
me aux  tems  à  venir,  &  aux  cas  qui  auroient   long- tems  différé  leldites 
Succédions,  à  toutes  lefquelles  considérations,  enfemble,  &  à  chacune 
en  particulier  d'icelles,  Leurs  dites  Majeftez  dérogent,  en  ce  qu'elles  con- 
trarient ou  empêchent,  le  contenu  en  ce  Contrat,  ou  l'accomplifTement 
&  éxecution  d'icelui:  Et  que  pour  l'Approbation  &  Ratification  de  cette 
préfente  Capitulation,  elles  y  dérogent,  &  les  tiennent  pour  dérogées  : 
Veulent  &  entendent,  que  la Serenilïîme Infante, &  les  Defcendans  d'icel- 
le  demeurent  à  l'avenir  &  pour  jamais  exclus  de  pouvoir  fucceder  en  au- 
cun  tems  ,  ni  en  aucun  cas  ,  es  Etats  du  Païs  de  Flandres  ,  Comté  de 
Bourgogne  &  de  Charolois,  leurs  appartenances  &  dépendances.     Pa- 
reillement auffi  ils  déclarent  très-exprelfément,  qu'en  cas  que  la  Serenif- 
fime  Infante  demeure  veuve  (  ce  qu'à  Dieu  ne  plaife  )  fans  Enfans  de  ce 
Mariage,  qu'elle  demeurera  libre  &  franche  de  ladite  Exclufion  ;  &  par- 
tant déclarée  perfonne  capable  de  fes  Droits  ,  &  pouvoir  fucceder  en 
tout  ce  qui  lui  pourra  appartenir  ou  efcheoir  ,    en  deux  cas  feulement  : 
l'un,  fi  elle,  demeurant  veuve  de  ce  Mariage,  fans   Enfans,  venoit  en 
Efpagne  ;  l'autre,  û  par  raifon  d'Etat,  pour  le  Bien  public,  &  pour  juf- 
tes  Confiderations,  elle  fe  remarioit ,  par  la  volonté  du  Roy  Catholique 
ion  Père,  ou  du  Prince  fon  Frère:  efquels  deux  cas  elle  demeurera  capa- 
ble &  habile  à  pouvoir  fucceder  &  hériter. 

Que  la  Sereniffime  Infante  Dame  Marie  -  Therefe ,  avant  que  célébrer 
le  Mariage  ,  par  paroles  de  prêtent,  donnera  ,  promettra,  &  oéTroyera 
fon  Efcrit,  par  lequel  elle  s'obligera  ,  tant  pour  elle  ,  que  pour  fes  fuc- 
ceffeurs,  héritiers,  à  raccompliffement  &  obfervation  de  tout  ce  que  def- 
fus ,  &  de  fon  Exclufion  ,  &  de  celle  de  fes  Defcendans  ;  approuvera  le 
tout  félon  comme  il  efl  contenu  en  cette  prefente  Capitulation  avec  les 
claufes  &  jurements  neceffaires  &  requis.  Et  en  inférant  la  fufdite  obli- 
gation &  ratification,  que  fon  Attelle  aura  donnée  &  faite  à  la  prefente 
Capitulation  ,  elle  en  fera  une  autre  pareille  &  femblable  conjointement 
avec  le  Roi  tres-Chrétien ,  fi-tôt  qu'elle  fera  Epoufée  &  Mariée,  laquelle 
fera  enregiltrée  au  Parlement  de  Paris,  félon  la  forme  accoutumée  ,  avec 
les  autres  claufes  neceffaires.  Comme  aufli  de  la  part  de  fa  Maj-eflé  Ca- 
tholique, elle  fera  approuver  &  ratifier  la  renonciation  &  ratification  en  la 
forme  &  force  accoutumée  avec  les  autres  claufes  neceffaires  j  la  fera 
auflî  enregiftrcr  en  fon  Confeil  d'Etat.  Et  foit  que  les  dites  renoncia- 
tions ,  ratifications,  &  approbations  foieni  faites,  ou  non  faites  ;  dés  à  pré- 
fent % 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.     I.         4«?7 

fent,  en  vertu  de  cette  Capitulation  &  du  Mariage  qui  s'enfuivra,  &  en  Amni.v 
contemplation  de  toutes  les  fufdites  chofes,  elles  feront  teniies  6c  cenfées  QEW;  nt- 
pour  bien  &  deuè'ment  faites  &  octroyées,  &  pour  paflees  &  enregiflrées  L'^"R0" 
dans  le  Parlement  de  Paris ,  par  la  publication  de  la  Paix  dans  le  Royau- 
me de  France. 

Que  Sa  Majeflé  Trés-Chrêtienne  donnera  à  la  Sereniffime  Infante  Dame 
Marie-Therefe,  pour  fes  Bagues  ck  Joyaux,  la  valeur  de  cinquante  mille 
écus  d'or  fol  ,  iefquels  ,  &  toutes  autres  qu'elle  portera  avec  loi  ,  lui 
appartiendront  fans  difficulté  ,  comme  étant  bien  de  fon  patrimoine,  pro- 
pres à  Son  AlteiTe,  &  à  fes  Héritiers  &  Succeileurs,  ou  à  ceux  qui  auront 
fon  droit  ou  caufe. 

Que  Sa  Majeflé  Trés-Chrêtienne ,  fuivant  l'ancienne  &  Ioiiable  coutu- 
me de  la  Maifon  de  France,  alignera  &  conflituera  à  la  Sereniffime  Infan- 
te Dame  Marie -Therefe,  pour  fon  doiiaire  ,  vingt  mille  écus  d'or  fol, 
chacun  an,  qui  feront  afïignez  fur  revenus  &  terres,  où  il  y  aura  Juftice, 
dont  le  Principal  lieu  aura  titre  de  Duché,  &  confecutivement  jufques  à 
la  concurrence  de  ladite  fomme  de  vingt  mille  écus  d'or  fol  chacun  an: 
defquels  lieux  &  terres  ainfi  données  &  affignées  ,  ladite  Sereniffime  In- 
fante joiiira  par  fes  mains,  &  de  fon  autorité,  &  de  celle  de  fes  Commif- 
faires  &  Officiers,  &  aura  la  Juflice  ,  comme  il  a  été  toujours  pratique. 
D'avantage  à  elle  appartiendra  la  provifion  de  tous  les  Officiers  vaquants, 
comme  ont  accoutumé  d'avoir  les  Reynes  de  France  j  bien  entendu  néan- 
moins, que  les  dits  Offices ,  ne  pourront  être  donnez  qu'à  naturels  Fran- 
çois ,  comme  auffi  l'adminiflration  &  les  termes  défaites  terres ,  conformé- 
ment aux  Loix  &  Coutumes  du  Royaume  de  France.  De  laquelle  fufdite 
Affignation  ladite  Sereniffime  Infante  DameMarie-Therefe  entrera  en  pof- 
feffion  &  jouïlTance  fl-tôt  que  le  douaire  aura  lieu,  pour  en  jouir  toute  ù. 
vie,  foit  qu'elle  demeure  en  France,  ou  qu'elle  fe  retirât  ailleurs  hors  de 
France. 

Que  Sa  Majeflé  Très-Chrétienne  donnera  &  afîignera  à  la  Sereniffime 
Infante  Dame  Marie-Therefe ,  pour  la  dépenfe  de  fa  Chambre,  &  entre- 
tenement  de  fon  Etat  ,  .&  de  fa  Maifon  ,  une  fomme  convenable,  telle 
qu'appartient  à  Femme  &  Fille  de  fi  grands  &  puiffans  Rois;  la  lui  ali- 
gnant en  la  forme  &  manière  qu'on  a  accoutumé  en  France  de  donner 
affignations  pour  tels  entretenements. 

Que  le  Roi  Très-Chrétien,  &  la  Sereniffime  Infante  Dame  Marie-There- 
fe ,  s'epouferont  &  marieront  par  Procureur  ,  qu'envoyera  le  Roi  Très- 
Chretien  à  la  Sereniffime  Infante  par  parole  de  prefent.  Ce  qu'étant  fait, 
Sa  MijeiléCarhoiique  la  fera  mener  à  fes  frais  &  dépens  jufques  à  la  Fron- 
tière du  Royaume  de  France,  avec  la  dignité  &  appareil  qui  appartient  à 
Femme  &  Fille  de  fi  grands  Rois;  &  avec  le  même  appareil  elle  fera  re- 
ceue  par  le  Roi  Très-Chrétien. 

Qu'en  cas  que  le  Mariage  fe  diffolve  entre  Sa  Majellé  Très-Chrétienne 
&  la  Sereniffime  Infante  Dame  Marie-Therefe,  &  que  Son  Aiteffe  fur  vive 
Sa  Majeflé  Très-Chrétienne  ,    en  ce  cas  elle  s'en  pourra  retourner  libre- 

Nnn  2  ment 


Pï. 


4*8    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Attairï-s  ment  &  fans  autre  empêchement  quelconque,  au  Royaume  d'Efpagne,  & 
gen.de  aux  lieux  &  endroits  qu'elle  choifira  plus  convenables  hors  de  France,  tou- 
t'EuRo-  tes  f0js  &  quantes  que  bon  lui  femblera  ,  avec  tous  fes  Biens  ,  Dot,  & 
Douaire,  Bagues  ,  Joyaux,  &  Vêtements,  Vaiflaille  d'Argent,  &  tous 
autres  meubles  quelconques,  avec  fes  Officiers  &  Serviteurs  de  fa  Maifonj 
fans  que,  pour  aucune  chofe  que  ce  foit,  ou  feroit  furvenuë  ,  on  lui  puiffe 
donner  aucun  empêchement  quelconque  ,  ni  arrêter  fon  départ  directe- 
ment, ni  indirectement,  empêcher  la  jouïffance  &  recouvrement  de  fes 
dits  Dot,  &  Douaire,  ni  autres  Affignations  qu'on  lui  auroit  données,  ou 
dû  donner.  Et  pour  cet  effect  Sa  Majelté  Très-Chrêtienne  donnera  à  Sa 
Majelté  Catholique  pour  ladite  Sereniffime  Infante  Dame  Marie-Therefe, 
fa  Fille,  telles  Lettres  de  feureté,  qui  feront  neceffaires ,  fignées  de  fa 
propre  main,  &  fcelées  de  fon  féel;  &  dès  à  prefent ,  comme  dès  lors, 
Sa  Majefté  Très-Chrêtienne  le  leur  afïûrera  ,  &  promettra  ,  pour  lors  & 
pour  fes  SuccefTeurs  Rois,  en  foi  &  parole  de  Roi. 

Ce  Traitté  &  Contract  de  Mariage  a  été  fait ,  avec  defTein  de  fuplier  no- 
tre Saint  Père  le  Pape,  comme  dès  à  prefent  Leurs  Majeftez  l'enfupplient, 
qu'il  ait  agréable  de  l'approuver,  &  lui  donner  fa  Bénédiction  Apoftoli- 
que;  comme  auiîi  d'en  approuver  les  Capitulations  &  les  Ratifications 
qu'en  auront  faites  Leurs  Majeitez  &  Son  Airelle,  &  ces  Ecritures  &  Ju- 
remens  qui  fe  feront  &  octroyeront  pour  fon  accomplilTement ,  les  inférant 
en  fes  Lettres  d'Approbation  &  Bénédiction.     Que. Leurs  Majeitez  Très- 
Chrêtienne  &  Catholique  approuveront  &  ratifieront  cette  prefente  Ca- 
pitulation ,  &  tout  ce  qu'elle  contient;  promettront  &  s'obiigeront,  fur 
leur  foi  &  parole  Royale  ,    de  la  garder  &  accomplir  inviolablement, 
délivreront  à.  cet  effect  leurs  Brevets ,  ou  Lettres ,  en  la  forme  accou- 
tumée ,    avec  les  dérogatoires  de  quelconques  Loix,  Juftices,  &  Coutu- 
mes qui  feroient  à   ce   contraires  ,   &  auxquelles   il  convient   déroger. 
Lefquels  fufdits  Brevets  ou  Lettres  de  Ratification  de  la  prefente  Ecri- 
ture ,  ils  fe  délivreront  l'un  à  l'autre  refpectivement  dans  trente  jours , 
à  compter  du  jour  &.  date  de  la  prefente,  par  le  moyen  des  AmbaiTa- 
deurs    ou   Minïitres   qui  refideront  dans  les  Cours    de   leurs   Majeftez 
Très-Chrêtienne,  &  Catholique;  avec  l'obligation  &  lien  de  leur  foi  & 
parole  Royale,  qu'ils  effectueront  &  garderont,  commanderont  qu'il  foit 
obfervé  &  accompli  entièrement  ,  fans  qu'en  tout ,   ou  en  partie  ,   il  y 
manque  chofe  quelconque,  &  qu'ils  n'iront,  ni  confentiront  aller  ni  ve- 
nir au  contraire ,  directement  ni  indirectement ,  ni  en  autre  façon  ,  ni  ma- 
nière aucune;  car  àinfi  l'ont  promis  &  itipulé  les  dits  Seigneurs  Plénipo- 
tentiaires ,  en  vertu  des  Pouvoirs  qu'ils  ont  de  Leurs  Majeftez.  A  quoi  fu- 
ssent prefents,  de  la  part  de  la  France,  Meilleurs  le  Duc  de  Guife,  Com- 
te d'Harcourt,  Grand-Efcuyer  de  France,  &  Gouverneur  aAlface  &  de 
Philisbourg;  le  Maréchal  de  Clérembaud,  Gouverneur  de  Berri;  le  Duc 
de  Crequi ,  Premier  Gentilhomme  de  la  Chambre  du  dit  Seigneur  Roi 
Très-Chrêtien  y  le  Bailly  de  Souvré;  le  Comte  d'Olonne  >  le  Marquis  de 
Vardes*  Capitaine  des  cent  Suifles  de  la.  Garde  de  Sadite  Majelté  ;  le 

Mar- 


1701. 


A    V    E    R    T    I    S    S    E«  M    E    N     T. 

L'Original  de  cette  Pièce  a  été  fi  favorablement  reçu  en  Angleterre , 
qu'on  ne  fauroit  douter  du  Succès  de  la  Traduction.  Si  le  haut 
rang  que  tient  un  Auteur  dans  le  monde,  Pefprit,  le  bon-fens  ,  la  pe- 
nétration,Ie  favoir,  &  la  droiture,  donnent  du  relief  à  un  Ouvrage,  on 

Nnn  5.  peuc 


PK. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  409 

Marquis  deSoyecourt,  Maître  de  la  Garderobe  de  fa  dite  Majefté  ;  de    Affairm 
Lyonne  Miniltre  d'Etat  ;  Courtin  l'un  des  Maitres  des  Requêtes  de  l'Hô-     c.en.  dk 
tel  de  fa  Majefté  ;  d' Avaux  aufîi  Maître  des  Requêtes  de  l'Hôtel  ;  &  plulieurs     L'E«*°- 
autres  Seigneurs  &  Cavaliers.     Et  de  la  part  d'Efpagne  Meilleurs  le  Mar- 
quis deMondejar,  Gentilhomme  de  la  Chambre  du  ditSeigneurRoi  Catho- 
lique* le  Duc  de  Naxara  &  de  Maquedaj  le  Marquis  de  losBalbazez,  Ca- 
pitaine General  des  Gens  d'Armes  de  l'Etat  de  Milan:  le  Licentié  Don  Jo- 
feph  Goncalez,  du  Confeil  &  Chambre  de  fa  dite  Majefté  &  Prefident  de 
fes  Finances  -,   le  Licentié  Don  Francifco  Ramos  de  Mançano  ,  du  Con- 
feil de  fa  dite  Majefté,  dans  le  Souverain  de  Caftille  ;  le  Baron  de  Vate- 
ville,  du  Confeil  de  Guerre  de  fa  dite  Majefté,  &  fon  Capitaine  General 
dans  la  Province  de  Guipufcoa  ;  Don  Rodrigo  de  Moxica  ,  du  Confeil 
de  Guerre  de  la  dite  Majeité  &  Maitre  de  Camp  General  de  l'Armée 
d'Eftramadura,  &  plufieurs  autres  Seigneurs  &  Cavaliers.    Et  les  dits  Sei- 
gneurs contraclans  l'ont  figné  de  leurs  mains  &  noms  j  &  m'ont  requis 
que  de  toute  cette  Capitulation  je  leur  en  baillafle  copie  ,   &  de  toutes 
celles  qui  feront  traduittes,  &  tranflatées ,  qui  leur  feront  neceffaires.   Si- 
gné, le  Cardinal  Mazarini,  &  Don  Louis  Mendez.     Fait  &  paiTé  par  de- 
vant moi  Secretaite  ci-deflus  dit,  Ecrivain  &  Notaire  public,  les  ans  & 
jours  fusdits.    Signé,  Pedro  Colonna,  pour  témoignage  de  vérité,  Pe- 
dro Colonna,  avec  Paraphe. 

Remarques  fur  la  Succejfion  du  Duc  d'Anjou ,  tant  par  rapport 
à  Ja  Validité  qu'a  F  égard  de  Jes  Conjèquences.  Avec  des  Re- 
flexions Jur  le  Mémoire  du  Roi  de  France  aux  Hollandois  3  £«?' 
jur  ly Intérêt  de  divers  Princes  &  Etats  de  la  Chrétienté , 
dans  la  Conjoncture  préjente.  A  quoi  on  a  ajouté  la  Claufe' 
du  Contrat!  de  Mariage  de  Louis  XIV.  par  où  il  renonce  à 
la  Succejfion  d'Efpagne  ;  g«p  Ja  Ratification  3  Ja  Renonciation 
de  r  Infante  )  V  Article  du  Traité  des  Firénèes  3  gsp  la  Claufe 
du  Tejlament  de  Philippe  IV.  conforme  a  cette  Renonciation, 
Traduit  de  PAnglois.     Suivant  la  Copie  imprimée  à  Londres 


PE. 


470    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Amaires  peut  dire  que  celui-ci  n'en  manquera  pas.  C'ed  une  Perfonne  de  la 
on.  de  première  Qualité,  ornée  de  tous  ces  dons  &  de  toutes  ces  vertus  ,  qui 
L£if0"  l'a  m*s  au  )our•  D'ailleurs,  fi  le  .prompt  Débit  e(t  une  marque  de  la  bon- 
té d'une  Pièce  ,  celle-ci  doit  être  excellente  ;  puis  qu'il  s'en  eil  faic 
trois  Editions  à  Londres  en  trois  Semaines  de  tems.  L'Importance  des 
Affaires  qu  on  y  traite,  &  la  Conjoncture  où  nous  fommes,  ne  peuvent 
auiîi  qu'en  relever  le  prix.  Quoi  qu'il  en  foit  ,  on  laifTe  aux  Lecteurs 
équitables  à  juger  par  eux-mêmes  de  ce  qu'elle  vaut. 

PREFACE. 

CES  Confi 'aérations ,  qu'en  donne  au  Public,  ne  font  que  les  premières  P  en  fée  s 
qui  font  venues  dans  l'efprit  d'une  Perfonne  qui  jouhaite  le  Bien  de  l'Eu- 
rope en  général ,    &  de  la  Grande-Bretagne  en  particulier  -,    elle  ejpére  même 
quelles  Jeront  d'autant  mieux  reçues ,  que  fon  intention  efl  bonne    &  légitime. 
Nous  avons  fujet  de  bénir  Dieu   de  ce  que   la  Conflit  ut  ion  de   nôtre  Gouver- 
nement efl  fi  hcureuje  ,   que  nns  Princes  (s'il  y  en  avoit  jamais  quelcun  d'af- 
fez  méchant  pour  l'entreprendre  )  n'ont  pas  droit ,  fans  notre  conjentement ,  de 
difpojer  de  nos  biens  ,    &  encore  moins  de  nôtre  fidélité  &  de  nos  perfonnes , 
par  Tefiamcnts  &  Codicilles  >    comme  chaque  particulier  le  peut  faire    de  [es 
biens.     Puis  donc  que  nous   fommes   exemts    de  ce   danger   dans  nôtre  patrie , 
nous  devons  prendre  de  jufles  me  jures  ,   pour  empêcher  les  deffem*  des  Etran- 
gers qui  voudraient  noui  priver  de  ces  avantages.     Nous  ne  fçavons  pa>  juf- 
ques  ou  ce-  que  nous  volons  arriver  aujourd'hui  peut  fervir  d'exemple.     Nous 
devons  conjidértr ,  qu'outre  les  Etrangers  ,  il  y  en  a  encore  d'autres    qu'on  dit 
être  défendus  de  la  Famille  d 'Angleterre  ,qui  pi  étendent  avoir  Dr  vit  à  la  Suc- 
ceffion.     Qui  peut  dire  fi  un  malheur  de  cette  nature   ne  peut  pas  nous  arri- 
ver par  un  Mariage  quon  dit  être  propofê  entre   une  certaine  PrinceJJé  ,    & 
un  troij.éme  petit-fils  ,    £5?  que  ce  mariage  ne  donne  peut-être  lieu  à  un  deu- 
xième entre  un  Prince  'Titulaire  ,  £f?  quelque  proche  Parente  ?    Nous  devons 
donc  ,   puifque  la  Ligne  de  nôtre  Succefii  on  établie  peut  à  peine  faire  une  plu- 
ralité ,    prendre  foin   de  ne  pas    donner   occafion  aux  Etrangers  de  ta  régler 
pour  nous  ,  comme  ils  ont  fait  pour  d'autres.     Dans  cette  ve'ue  on  peut  faire 
trop  ou  trop  peu;  mais^  la  Nation   efl   ajfez  éclairée  pour  / avoir  les  mejures 
les  plus  propres  ,    pour  éviter  ces  deux  extrém  tez.     Cependant,  on  peut  dire 
fûrement ,  qu'une  des  meilleures  Méthodes  qu'on  puifife  prendre  ejt  de  j aire  des 
Alliances  Etrangères  ,  Jur  tout  avec  les  Pretefians  ,  qui  peuvent  nous  afjifter 
de  Forces  Navales,  £s?  d'entretenir  une  bonne •Correjponaance  avec  nos  Fvifins, 
afin  de  rompre  les  me  fur  es  de  ^1    Puijj'ance  que  mus  croions  avec  fujet  avoir 
le  plus  d  inclination  à  nous  chagriner  ià-aejjus. 


CON^ 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  4?r 

Affaires 

CONSIDERATIONS    SUR    LA    SUCCESSION    DU 

DUC     D'ANJOU. 


l'Euro- 
pe. 


La  Succelîîon  du  Duc  d'Anjou  à  la  Couronne  d'Efpagne  ,  &  les  fuites    Confidé- 
qui  en  peuvent  arriver, font  de  telle  importance,  &  interéfTéhtfi  gène-    rations" 
ralement  tout  le  monde,  quelles  font  le  fujet  des  difcours  <k  des  penfées    iuc  la 
de  toutes  les  perfonnes  de  bon  fens.  Succef- 

A  l'égard  de  la  Sacceflîon,  on  fçait  en  général:     i.  Que  le  Duc  d'An-    Suc 
jou  eft  élevé  fur  le  Thrône  d'Efpagne,  contre  les  Loix  du  Royaume,  qui    d'Anjou. 
ne  permettent  pas  d'aliéner  la  Couronne,  ni  qu'elle  tombe  entre  les  mains 
d'un  Etranger ,  la  Succeiïion  aiant  été  réglée  du  confentement  des  Etats 
du  Roiaume  en  faveur  de  la  Maifon  d'Arragon  ou  d'AuLriche. 

2.  Que  cette  Sacceflîon  eil  contraire  à  la  Renonciation  de  Louis  XIII. 
&  de  l'Infante  Marie -Anne  fon  Epoufe  ,  au  tems  de  leur  Mariage,  & 
que  la  validité  de  cette  Renonciation  ne  fut  pas  alors  conteltée. 

3.  Qu'elle  eil  contre  la  Renonciation  de  Louis  XIV.  à  préfent  Rai 
de  France,  &  de  l'Infante  Mane-Therefe  fon  Epoufe,  au  tems  de  leur 
Mariage. 

4.  Qu'elle  efl  contre  le  Traité  des  Pirenées ,  dont  cette  Renonciation 
étoit  le  principal  Fondement. 

5-.  Qu'elle  eil  contraire  au  Teftament  de  Philippe  IV.  fait  en  confé- 
quence  de  cette  Renonciation. 

6.  Qu'elle  efl:  contraire  au  Traité  de  Partage  fait  entre  la  France,  l'An- 
gleterre, &  la  Hollande. 

7.  Qu'elle  elt  expreifément  contraire  à  tous  les  Argumens  dont  Louis 
XIV.  s'ell  fervi  contre  la  Renonciation  de  fon  Père  6c  de  fa  Mère  ,  6c 
celle  qu'il  a  faite  lui-même  avec  fon  Epoufe,  &  qu'elle  fait  la  même  injuiti- 
ce  au  Dauphin  &  au  Duc  de  Bourgogne,  qu'on  difoit  que  ces  Renoncia- 
tions leur  faifoient;  &  ,par  conféquent, le  Mémoire,  par  lequel  on  prétend 
jultifier  la  Succefîion  du  Duc  d'Anjou,  la  condamne,  puifqu'il  établit  ex- 
preifément le  Droit  du  Dauphin  à  la  Ceuronne  ,  &  annulle  la  Renoncia- 
tion de  fa  Mère. 

Cela  étant  incomeilablement  vrai,  il  s'enfuit  que  le  Duc  d'Anjou  ne 
peut  avoir  d'autre  Droit  à  la  Couronne  d'Efpagne,  que  celui  qu'il  prétend 
établir  en  vertu  du  Teltament  de  fa  Majeilé  Catholique  Charles  II.  Car, 
quoiqu'on  allègue  encore  le  Defir  unanime  des  Sujets  d'Efpagne,  on  ne  s'en 
fert  pourtant  que  comme  d'une  raifon  acceiïbire ,  fur  laquelle  le  Mémoire 
ne  fait  pas  grand  fond:  auffi  ne  voïons-nous  pas  que  les  Cortes  ou  E- 
tats  d'Efpagne  ayent  en  aucune  manière  confenti  à  établir  le  Droit  du  Duc 
d'Anjou,  de  forte  que  cette  Raifon  eil  très-mal  fondée;  &  s'ils  y  con- 
fentent  dans  la  fuite,"  tout  le  Monde  regardera  leur  confentement  comme 
un  effet  de  la  force,  &  non  de  leur  choix,  ce  qui  expofcra  fon  Droit  à  de 
dangereufes  Objections. 

Mais,  pour  revenir  au  Teflamen-t  du  feu  Roi  d'Efpagne,  qui  eil  le  meiî- 

leur 


PE. 


472    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  leur  Titre  du  Duc  d'Anjou,  on  peut  dire:  1. Qu'il  elt  contraire  à  un  Tefc 
cen.  de  tament  précédent  que  le  Père  de  ce  dernier  Teftateur  lui  avoit  fait,  ce 
qui  n'eft  pas  une  marque  de  grande  piété  en  ceux  qui  l'ont  porté  à  faire 
un  Teftament  contraire  à  celui  de  fon  Père.  A  l'égard  de  la  part  que  le 
Teftateur  a  eue  en  ce  Teftament,  nous  n'en  parlerons  point,  puifque  la 
bienféance  nous  ordonne  de  marcher  doucement  fur  le  Tombeau  d'un 
Prince  qui  eft  décédé,  &  que  la  compaffion  ne  permet  pas  que  nous  trou- 
blions les  cendres  d'un  Monarque  qui  a  fi  peu  joui  des  douceurs  de  la 
vie. 

2.  On  ne  peut  pas  regarder  ce  Teftament  comme  aiant  la  même  for- 
ce que  celui  de  Philippe  IF.  parce  que  ce  dernier  fut  fait  en  confé- 
quence  du  Traité  des  Pirenées,  &  de  la  Renonciation  folemnelle  que  deux 
Rois  &  Reines  de  France  firent  fucceffivement,  &  qui  fut  ratifiée  par 
tout  le  Pouvoir  Legiflatif  de  France  &  d'Efpagne  j  au  lieu  que  le  Tefta- 
ment de  Charles  IL  eft  contraire  à  tout  cela. 

3.  Le  Teftament  de  Philipe  IV.  étoit  conforme  au  Droit  civil,  &  à  la 
Decretale  du  Pape  Boniface  VIII.,  qui  dit,  „Que  toute  Renonciation  fai- 
„  te  fur  Serment  par  une  Fille  au-deflus  de  l'âge  de  10.  ans,  en  faveur  de 
„  fon  Père,  afin  défaire  un Contra6t  de  Mariage,  par  lequel  un  Douaire 
„  fuffifanc  lui  eft  afligné ,  doit  être  bonne  en  Loi,  quoiqu'elle  foit  alors 
„  fous  la  Jurifdiction  de  fon  Père.  Toutes  ces  Conditions  fe  rencontrent 
dans  la  Renonciation  de  la  Reine  de  France;  au  lieu  que  le  Teftament 
du  feu  Roi  d'Efpagne  eft  contraire  à  cette  Decretale,  pour  laquelle  cer- 
tainement tous  les  Catholiques-Romains  doivent  avoir  un  Refpect  très- 
particulier. 

4.  L'Empereur  objecte  contre  le  Teftament  de  Charles  IL  d'Efpa- 
gne, qu'il  a  été  fait  lorfque  ce  Prince  n'étoit  pas  en  état  de  dicter,  &  en- 
core moins  d'écrire  un  Teftament  fi  bien  digéré,  &  fi  fubtilement  compo- 
fé  que  celui-ci,  avec  une  Préface  remplie  de  Raifons  politiques.  Cette 
Objection  a  d'autant  plus  de  force,  qu'elle  eft  fondée  fur  la  fuibleife  de  Corps 
&  d'Efprit,  dont  tout  le  Monde  feait  que  ce  pauvre  Prince  a  été  fi  long- 
tems  affligé  :  auffi  ne  paroit-il  en  aucune  manière ,  que  ce  Teftament  ait  été 
compofé  par  une  peribnne  qui  combat  contre  la  violence  d'une  telle  mala- 
die ,  comme  celle  dont  il  eft  mort. 

jr.  On  objecte  contre  ce  Teftament,  que  par  l'Artifice  de  la  Faction  Fran- 
çoife  le  Cardinal  Portocarero  l'a  extorqué  de  ce  Prince  ,  lorfqu'il  étoit 
prefque  à  l'article  de  la  mort,  fous  peine  de  lui  refufer  l'Abfolution ,  qui 
eft  la  chofe  du  monde  la  plus  épouvantable  à  un  Catholique -Romain  bi- 
got, tel  qu'étoit  ce  Prince.  Cette  Objection  eft  d'autant  plus  forte,  que 
îe  feu  Roi  d'Efpagne  étoit  obligé  par  tous  les  Liens  desLoix,  des  Traitez, 
de  la  Nature,  &  de  l'Inclination,  à  préférer  un  Prince  de  la  Mailbn  d'Au- 
triche à  tout  autre,  pour  fon  Succefleur;  aufii  n'ignore-t-on  pas  qu'un  peu 
avant  qu'il  lignât  ce  prétendu  Teftament,  il  en  avoit  fait  un  autre  en  fa- 
veur de  l'Archiduc. 

6.  On  objecte  contre  ce  Teftament ,  que  les  Efpagnols  ont  été  obligez 

d'y 


l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.-DCC.  I.         473 

d'y  acquiefcer,  gagnez  par  les  promefTes  &  intimidez  par  les  menaces  des    Affaires 
François,  qui  faifoient  marcher  leurs  Troupes,  avant  que  ce  Prince  fut    GF 
mort ,  pour  prendre  PofTefiion  des  Terres  d'Efpagne ,  que  le  Roi  de  Fran- 
ce prétendoit  lui  appartenir  en  vertu  du  Traité  de  Partage,  dans  lequel  il 
femble  par  le  Mémoire  préfenté  aux  Hollandois ,  que  les  François  n'étoient 
entrez  qu'à  ce  deffein. 

7.  On  objecle  contre  ce  Tefiament,  qu'il  ne  paroit  pas  qu'il  foit  pofîî- 
ble  d'empêcher  que  la  Couronne  d'Efpagne  ne  foit  réunie  à  celle  de  Fran- 
ce 9  quoique  ce  foit  un  des  principaux  Prétextes  du  Teftament.  Cela  eft 
vifible  par  le  Teftament  même ,  qui  laiffe  à  la  liberté  du  Duc  d'Anjou 
d'accepter  la  Couronne  de  France  ,  en  cas  que  le  Duc  de  Bourgogne 
meure  fans  enfans  maies,  à  condition  qu'il  nommera  le  Duc  de  Berry 
pour  lui  fucceder  comme  Roi  d'Efpagne.  Mais ,  cette  condition  paroîtra 
fort  dangereufe  &  même  impraticable,  fi  on  confidere  l'ambition  qui  règne 
dans  la  plupart  des  Têtes  couronnées, &  fur-tout  dans  la  Maifon  de  Bour- 
bon, &  le  Génie  de  la  France.  On  fçait  fort  bien  que  ce  n'eft  pas  d'au- 
jourd'hui que  cette  Couronne  afpire  à  la  Monarchie  univerfelle,  &  que 
pour  cet  effet  la  Cour  de  France  a  mis  tout  en  ufage  pour  réunir  la  Cou- 
ronne d'Efpagne  à  celle  de  France.  Cela  étant  ain fi,  à  peine  peut-on  fup- 
pofer  qu'un  Prince,  aufîi  hautain  que  le  Duc  d'Anjou  paroit  l'être  ,  aban- 
donne facilement  fes  prétendons  à  la  Couronne  d'Efpagne ,  dont  il  eft  en 
PofTeiTion,  quand  même  la  Couronne  de  France  lui  feroit  dévolue. 

C'efl  en  vain  qu'on  alléguera  l'exemple  de  Henry  III.  qui  quitta  la  Cou- 
ronne de  Pologne  pour  prendre  celle  de  France  après  la  Mort  de  Charles 
IX.  fon  Frère  ;  le  cas  n'efl  pas  le  même,  la  Couronne  de  Pologne  ne  vaut 
pas  à  beaucoup  près  celle  d'Efpagne.  D'ailleurs,  Henry  III.  n'y  avoit  pas 
Droit  par  fa  Naiffance,  &  il  ne  la  pouvoit  pas  garder,  à  caufe  de  la  con- 
ftitution  du  Gouvernement,  &  de  fon  éloignement  de  France:  au  lieu 
que  le  Duc  d'Anjou ,  en  cas  que  le  Duc  de  Bourgogne  meure  fans  Enfans 
maies,  prétendra  retenir  la  Couronne  d'Efpagne  comme  fon  Droit  d'ainef. 
fe:  il  mettra  fes  Créatures  &  fes  Miniflres  dans  l'Adminiftration  des  Af- 
faires ,  &  il  aura  par  ce  moyen  une  puiffante  Fa6lion  en  Efpagne  pour 
fupporter  le  Gouvernement,  outre  toutes  les  forces  de  France  qui  feront 
à  Ces  ordres  pour  le  maintenir.  Ceci  ne  paroitra  pas  une  vaine  fpeculation , 
fi  on  confidere  que  ces  deux  Royaumes  font  contigus,  &  que  le  Roi  d'Ef- 
pagne peut  avoir  les  Armées  de  France  prêtes  lors  qu'il  lui  plaira,  pour 
forcer  les  Efpagnols  à  lui  obéïr  en  cas  qu'ils  s'opofaffent  à  fon  Gouverne- 
ment. 

Mais,  parce  qu'on  peut  dire,  que  cette  Supofition  eft  trop  éloignée,  & 
qu'il  eft  probable  que  le  Duc  de  Bourgogne  aura  afîez  d'Héritiers  pour  la 
Couronne  de  France,  examinons  des  chofes  qui  femblent  être  plus  près 
de  nous. 

1.  Il  faut  avouer  que  le  Duc  d'Anjou  eft  un  Prince  de  France,  & 
que  par  conféquent  la  Nature  l'oblige  à  aimer  fon  Païs  natal. 

Tome  XI.  Ooo  2..  Il 


PE. 


474    MEMOIRES,  NEGOTÏATIO  NS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires        2.  Il  f&ut  demeurer  d'accord,  qu'il  doit  fon  Avènement  à  la  Couronne 
gen.  de    d'Efpagne  à  fon  Grand-Pere,  à  préfeni  Roi  de  France. 
l'Euro-  •    Qn  ne  peuc  pas  nier,  qu'il  ne  foit  nécefTairemenr  obligé  de  fe  gou- 

verner par  les  Avis  de  fon  Grand-Pere,  &  qu'il  ne  doive  Te  mettre  fous 
fa  Protection,  afin  de  fe  maintenir  dans  fa  nouvelle  Dignité. 

De  tout  cela  il  s'enfuit  naturellement,  que  l'Efpagne  fous  le  Duc  d'An- 
jou doit  être  gouvernée  d'une  manière  conforme  aux  Deffeins  de  Louïs 
XIV.:  autrement,  il  eft  en  fon  pouvoir  de  dépouiller  quand  il  lui  plaira  le 
Duc  d'Anjou  de  fa  Souveraineté,  &  de  mettre  ie  Dauphin  fon  Père  en 
Poffeffion  de  la  Couronne,  que  le  Mémoire  prétend  lui  apartenir  par  le 
Droit  de  fa  NaifTance. 

On  ne  peut  pas  raifonnablement  dire  que  les  Efpagnols  ne  permettront 
pas  à  leur  nouveau  Roi  de  prendre  de  telles  mefures  ;  car,  il  eft  évident 
qu'ils  ne  peuvent  pas  l'en  empêcher.  Son  Grand-Pere  peut  l'aiTifter,  quand 
il  lui  plaira,  d'un  tel  nombre  de  forces  par  Mer  &  par  Terre,  que  tout  le 
pouvoir  d'Efpagne  joint  enfemble  ne  feroit  pas  capable  de  leur  refifter;  & 
encore  moins  lorfque  leur  Roi  agira  de  concert  avec  la  France.     Cela  eft 
inconteftable,  fur-tout  fi  on  confédéré,   i.   Que  le  Duc  d'Anjou  aura  tou- 
jours une  Faélion  confiderable,  à  caufe  de  plufieurs  Grands  d'Efpagne, 
&c.  qui  dépendront  toujours  de  lui  &  de  la  Cour.     Le  pouvoir  de  difpo- 
fer  des  Dignitez  Ecclefiafiiques ,'&  des  Poftes  d'honneur  dans  l'Etat, l'Ar- 
mée, &  la  Flote,a  des  charmes  auxquels  on  ne  peut  refifler.   Les  Gouver- 
nemens  du  Pérou,  du  Mexique,  de  la  Sicile,  de  Milan  ,  &  des  Pais- Bas 
Efpagnols ,    avec  les  grands  Emplois  Ecclefiafiiques  &  Militaires  de  ces 
Royaumes  &  de  ces  Provinces,  outre  ce  que  fa  Majefté  a  en  fa  difpoii- 
tion  en  divers  Royaumes  qui  paffent  pour  dépendant  de  l'Efpagne ,  feront 
donnez  à  la  folicitation  fecrete  de  la  France,  aux  Grands  du  Pais,    ou  a 
d'autres,  pour  fatisfaire  leur  ambition  &  leurs  befoins,&  ils  les  recevront 
comme  des  faveurs  du  Duc  d'Anjou  ;  ce  qui  les  engagera  infailliblement 
dans  fes  intérêts,  quelque  contraires  qu'ils  foient  au  bien   de  l'Efpagne. 
Il  y  a  peu  d'exemples  dans  ce  fiécle ,  qui  faffent  voir   que  les  homn.es 
fjient  à  l'épreuve  de  pareilles  tentations.     Où  font  les  Royaumes  en  Eu- 
rope, dont  les  Princes,  lors  qu'ils  ont  voulu  étendre   leurs  prérogatives, 
n'aient  pas  trouvé  des  perfonnes  du  premier  Rang  capables  d'être  gagnées 
parles  honneurs,  les  emplois,  ou  les  pemions,  &  difpofées  à  facrifier  leur 
Religion  &  leur  Liberté  à  l'Ambition  de  leurs  Monarques?  Et  pourquoi 
croirions-nous  que  la  Vertu  règne  plus  en  Efpagne ,  qu'en  aucune  autre 
Nation?  2.  Si  nous  confiderons,   que   depuis  plufieurs   années  le  Roi  de 
France  s'eft  déclaré  le   Protecteur  du  Papifme,  contre  ce  qu'on  appelle 
l'Herefie  du  Nord:,  &  qu'une  des  principales  Raifons  qui  l'ont  obligé, 
contre  la  bonne  Politique,  à  perfecuter  fi  cruellement  fes  Sujets  Protef- 
tans,  eft  qu'il  avoit  en  veiie  la  Succeffion  d'Efpagne,  &  qu'il  vouloit  par- 
là  fe  rendre  lui-même  avec  toute  fi  Famille  recomman  lab>e  aux  Efpagnols 
bigots  :  Si  nous  regardons  encore  avec  quelle  hardiefTe  &  quelle  impu- 
dence 


PS. 


RESOLUTIONS  D'ETA  T,  M.  DCC.  I.        47; 

dence  l'Inquifition  s'étoit  déclarée  contre  le  feu  Roi,  pour  s'être  joint  Affaires 
contre  la  France  avec  ceux  des  Alliez ,  qu'ils  appellent  Hérétiques  ;  nous  Gf<.  de 
ferons  bien-tôt  convaincus  qu'il  a  une  telle  influence  fur  ces  Ecclefiafti- 
ques ,  que  par  leur  moien  il  peut  en  très-peu  de  tems  obliger  le  relie  de 
l'Efpagne  à  confentir  à  tout  ce  qu'il  lui  plaira.  11  n'a  qu'a  leur  perfuader 
qu'il  veut  faire  fervir  la  PuifTance  d'Efpagne  &  de  France  jointes  enfem- 
ble,  à  la  propagation  de  la  foi  Catholique,  &  h  l'extirpation  des  Héréti- 
ques ,  &  alors  il  peut  s'aiTurer  que  le  Clergé  l'affillera  de  toutes  fes  Rufes, 
&  de  fes  Artifices.  Sans  ces  confiderations ,  &  quelques  autres  fembla- 
bles  ,  les  Efpagnols ,  qui  d'ailleurs  font  alTez  bons  Politiques ,  auroient 
plutôt  appelle  l'Archiduc  à  la  Couronne ,  que  d'expofer  leur  Liberté  à  être 
engloutie  par  le  Pouvoir  de  la  France.  Mais ,  en  l'état  où  les  choies  font 
aujourd'hui ,  ils  doivent  embraffer  leurs  chaînes  ,  afin  de  rendre  l'efclava- 
ge,  qu'ils  ne  peuvent  éviter,  aufîi  doux  qu'il  leur  fera  poffiblej  car  il  ell 
dangereux  de  chagriner  ceux,  au  pouvoir  defquels  on  e(t  forcé  de  fe  fou- 
mettre. 

D'ailleurs ,  il  ell  évident  que  l'Efpagne  deviendra  de  plus  en  plus  fujet- 
te  à  la  France,  &  en  danger  d'être  entièrement  envahie  par  cette  Cou- 
ronne :  car,  il  faut  de  toute  neceflité  que  les  Efpagnols  s'endettent  pour 
de  grandes  fbmmes  au  Roy  de  France}  puis  qu'il  difoit  autrefois  qu'il  lui 
étoit  du  beaucoup  pour  le  refte  de  la  dot  de  l'Infante,  &  qu'il  offre  au- 
jourd'hui de  rembourfer  les  Hollandois  de  plufieurs  millions  que  les  Efpa- 
gnols leur  doivent, à  condition  qu'ils  évacueront  les  Places  Elpagnoles  des 
Pais-Bas,  dont  leurs  troupes  font  à  préfent  en  PolTeffion.  Il  leur  promec 
aufîi  de  les  ajîifter  de  fa  fiote,  pour  forcer  les  Maures  à  lever  le  Siège  de 
Ceuta  ;  &,  en  cas  de  Guerre  avec  l'Empereur,  ce  qui  femble  inévitable 
en  un  tems  ou  en  un  autre,  il  n'y  a  nul  doute  que  l'Efpagne  ne  foit  ref- 
ponfable  des  frais  qu'il  fera  obligé  de  faire  pour  la  foutenir  j  &  comme  fé- 
lon toutes  les  apparences  l'Empereur  tâchera  d'engager  des  Alliez  dans  fa 
querelle  ,  qui  auront  des  forces  navales  pour  obliger  la  France  à  faire  di- 
verfion,  &  qui  pourroient  peut-être  fe  faifir  des  Indes  Occidentales  pour 
la  Maifon  d'Autriche,  cela  ne  peut  qu'augmenter  les  dettes  de  l'Efpagne, 
qui  fera  chargée  des  frais  des  flotes  dont  la  France  l'affillera}  &,  alors,  le 
Roi  de  France  ne  manquera  pas,  pour  la  fureté  de  ces  dettes ,  à  fe  met- 
tre en  Poffefiion  de  Villes  Frontières,  de  Ports  de  Mer,  &  de  Provinces 
entières.  D'ailleurs ,  fuppofant  qu'il  n'y  eut  point  de  Guerre  à  cette  occa- 
fon  pendant  plufieurs  années,  il  efl  toujours  certain  que  les  frais  des  mar- 
ches &  contremarches,  &  des  préparations  Navales, pour  établir  &  main- 
tenir fon  petit-fils  fur  le  Thrône  d'Efpagne ,  rendront  cette  Couronne  tel- 
lement endettée  à  la  France,  que  ces  dettes  feront  toujours  un  bon  pré- 
texte au  Roi  de  France  à  préfent  régnant ,  ou  à  quelcun  de  fes  Succef- 
feurs ,  pour  s'en  faifir.  Et  qui  fçait  s'il  n'y  a  pas  quelques  Articles  fecrets 
de  cette  Nature  entre  lui,  fon  Petit-Fils,  &  les  Regens  Efpagnols  Fran- 
cifez  ?  Il  femble  du  moins  que  ce  foit  à  préfent  la  coutume  dans  tous  les 
Traitez  de  faire  de  tels  Articles.    Si  cela  eit,  le  Duc  d'Anjou  n'a  pas  tant 

Ooo  z  perdu 


C.EN.    DE 

l'Euro- 
pe. 


476    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

, 
Amuss  perdu  au  change,  quand  même  il  ne  feroit  réellement  que  Viceroy  d'Ef- 
pagné  &  des  Pays-Bas  qui  appartiennent  à  cette  Couronne,  fous  fon  Grand- 
Pere,  ou  Ton  Père  ;    cette  Viceroyauté  vaut  beaucoup  mieux  qu'aucun 
Apanage  qu'il  auroit  pu  prétendre ,  comme  Fils  de  France. 

Ceci  doit  fuffire  pour  desabufer  ceux,  qui  difent,  que  lors  que  le  Duc 
d'Anjou  fera  une  fois  établi  en  Efpagne,  il  deviendra  autant  Elpagnol  que 
s'il  étoit  né  dans  le  Pais.  On  ne  fçauroit  répondre  à  ce  que  dit  Ovide, 
Nefcio  qua  natale  folum\  &  il  y  a  des  Exemples  parlans  de  Princes  qui  ont 
préféré  l'intérêt  du  Païs  de  leur  naifiance,  ou  du  moins  de  leurs  compa- 
triotes, à  ceux  d'une  Couronne  nouvellement  acquife.  On  dit  même, que 
c  étoit  un  défaut  de  Jacques  I.  Roy  de  la  Grande-Bretagne  ;  &  ceux,  qui 
ont  écrit  fa  Vie ,  en  raportent  plufieurs  Exemples,  quoique  les  Ecoflbis 
difent,  que  les  Hifloriens  Anglois  ne  lui  ont  pas  rendu  juftice  là^deffus. 

Mais, quand  même  on  ne  tacheroit  pas  d'aiïujettir  la  Couronne  d'Efpa- 
gne  à  celle  de  France ,  il  eft  certain  que  la  Cour  de  France  tirera  avanta- 
ge de  la  Succefîion  du  Duc  d'Anjou,  qu'elle  aura  les  Efpagnols  pour  fes 
Amis  &  fes  Alliez  ;&  peut-être  qu'à  l'avenir  ils  fe  joindront  enfernble  dans 
ia  Guerre,  &  fans  doute  que  les  Efpagnols  s'eflimeront  heureux  fi  les  cho- 
fes  en  demeurent-là.  D'ailleurs ,  il  n'eft  pas  de  la  bienféance  qu'on  prive 
tout  d'un  coup  le  jeune  Roi  de  la  Converfation  des  François ,  qui  font 
fes  Amis;  &  il  efl  aflez  vraifemblable  que  les  vifites  de  la  NoblefTe  de 
France  à  la  Cour  de  Madrid  deviendront  à  la  Mode.  On  ne  doit  pas  dou- 
ter non  plus  que  les  Miniftres  de  France  ne  refident  à  Madrid ,  &  qu'on 
n'y  élevé  quelques  François  aux  Dignitez  &  aux  principaux  Emplois  de 
l'Etat,  comme  on  voit  que  cela  arrive  en  d'autres  Royaumes  en  pareil  cas: 
tout  cela  ne  fervira  qu'à  atacher  plus  fortement  ce  Prince  aux  Intérêts  de 
la  France.  Et  fi  cette  conduite  allumoit  quelque  jaloufie  dans  l'Efprit  des 
Efpagnols,  il  y  a  encore  une  autre  voye  infaillible,  qui  eft  ,  de  trouver 
des  Penfionnaires  parmi  eux.  Il  y  a  mille  manières  pour  perfuader  aux 
Efpagnols,  qu'ils  doivent  tirer  de  grands  avantages  d'une  telle  alliance. 
Quelques  Rodomontades  bien  inventées,  &  quelques  chimères  de  zèle, 
font  un  grand  effet  fur  un  Peuple  aufli  ambitieux  &  aufîi  bigot.  La  Cour 
de  France  fçait  fort  bien,  que  c'eft-là  leur  foible  ; c'efl  pourquoi  elle  a  com- 
mencé à  les  attaquer  de  ce  côté-là.  Car,  autrement, que  veulent  dire  ces 
pompeux  éloges  qui  retentiffent  à  Verfailles  de  la  bravoure  &  de  la  fagelfe 
de  la  vafte  étendue*  de  leur  Empire?.  &c.  On  carefie  les  Grands  d'Efpa- 
gne,  &  fi  on  peut  les  gagner  par  de  groffes  fommes  d'argent,  ou  de  bel- 
les promettes,  il  efl  fur  qu'ils  n'en  manqueront  pas.  A  préfent,  on  leur 
dit  que  la  France  &  l'Efpagne  ne  feront  plus  qu'une  Nation:  on  excufe 
les  outrages  qu'on  leur  a  faits  autrefois,  comme  des  fuites  de  la  conjonctu- 
re des  terris  ;  &  on  leur  dit  qu'ils  ne  doivent  rien  craindre  de  pareil  à  l'a- 
venir. Il  eft  aifé  de  concevoir,  qu'un  répit  de  Guerre  dans  le  fein  decet- 
te  Monarchie  languiffante  doit  lui  être  agréable;  &  ce  n'eft  pas  un  petit 
avantage ,  que  d'avoir  l'efperance  d'une  longue  Paix  avec  leur  plus  proche 
&  plus  formidable  Ennemi.  Si,  outre  cela,  on  leur  propofe  de  fe  joindre 

*4    1C4 


l'Euko- 

PK. 


RESOLUTIONS   D'ETAT  ,  M.  DCC.  I."  477 

à  la  France,  pour  faire  fleurir  le  Commerce,  &  fur-tout  pour  rétablir  leur    Affaires 
Manufacture  de  Laine,  &  s'emparer  entr'eux  du  Commerce  du  Détroit  &     gkn.de 
de  Turquie ,  ce  que  les  François  ont  entrepris  d'eux  mêmes  avec  beaucoup 
moins  de  probabilité  de  réuflir ,  on  peut  s'afliirer  qu'ils  y  donneront  les  mains. 
De  plus ,  fi  on  leur  propofe  d'entreprendre  la  Conquête  de  quelques  Païs 
qu'ils  ont  autrefois  pofledé  en  Europe,    comme   les  fept  Provinces  &  le 
Portugal,  ou  quelque  autre  partie  de  leurs  Etats  en  Amérique;   cela  fans 
doute  ne  manquera  pas  à  les  tenter.    Et  fi  on  y  ajoutoit ,  que  la  France 
les  affiliera  dans  ce  deffein,  &  qu'en  même  tems  ils  détruiront  l'Herefie, 
&  rétabliront  la  Foy  Catholique,  leurs  Prêtres  ne  manqueront  pas  de  di- 
re, que  c'eft  fe  rebeller  contre  le  Ciel ,  que  de  négliger  une  telle  occaiion. 
Et  y  a-t'-il  rien  que  toute  l'Europe  &  les  Proteftans  en  particulier  doivent 
plus  appréhender  que  cette  formidable  union  des  forces  de  France  avec 
les  RicheiTes  d'Efpagne?  On  peut  s'aflurer  que  les  Princes  d'Italie  donneront 
volontiers  les  mains  à  un  deffein  de  cette  Nature  :  c'eft  plus  leur  intérêt  à  pré- 
fent,  qu'il  ne  l'étoit  en  if  88.  lorfqu'ils  contribuèrent  avec  tant  de  zèle  pour 
empêcher  les  forces  d'Efpagne  de  tomber  fur  eux ,  &  les  envoyèrent  avec 
l'Armée  Invincible  pour  détruire  l'Herefie  du  Nord.  La  France  feule  eflà 
préfent  plus  formidable,  que  l'Efpagne  ne  l'étoit  alors,  &  elle  le  devien- 
dra beaucoup  d'avantage  aiant  un  Roi  Catholique  de  fa  Famille  &  fa  Créa- 
ture, qui  dépend  entièrement  d'Elle.     Le  jeune  Pape  eft  affez  bon  Poli- 
tique pour  voir  qu'un  jour  un  Prince  de  la  Maifon  de  Bourbon  pourroit 
bien  lui  envoyer  des  Gendarmes,  au  lieu  de  la  Haquenée  dont  on  lui  fait 
préfent  pour  le  Roïaume  de  INaples;  c'eft  pourquoi  il  croira  fans  doute 
qu'il  eft  de  fon  intérêt,  de  lui  confacrer  en  reconnoiffance  une  Armée  de 
Cavalerie ,  pourvu  qu'il  l'emploïe  à  quelque  expédition  dans  le  Nord.  Les 
Cardinaux  zelez,  qui  ont  choifi  Albani,    parce  qu'ils  connoifîbient  qu'il 
avoit  des  qualitez  propres  à  maintenir  la  Dignité  de  la  Chaire  Papale,  & 
qu'il  y  étoit  bien  difpofé,  feront   prêts    à  concourir  avec  lui  en  tout  ce 
qui  peut  aider  à  reprendre  les  Païs  que  l'Eglife  a  perdus;   &  fans  doute 
qu'ils  ont  quelque  occafion  en  vue,  qu'ils  croient  propre  à  faire  paroitre 
leur  zèle,  en  faveur  d'un  certain  Prince,  qu'ils  appellent  ConfefTeur,  par- 
ce qu'il  a  facnfié  trois  Couronnes  à  fon  Zélé  pour   la  Tiare   Pontificale. 
C'eit-ce  que  la  Gazette  imprimée  à  Anvers  ,  &  publiée  avec  la  permifîïon 
du  jeune  Roy   Catholique,  nous  apprend;  du  moins  on  y  trouve  que  le 
jeune  Roy  parlant  à  ce  Prince,  lui  dit,  qu'il  efperoit  en  peu  de  tems  féliciter 
le  Prétendu  Prince  de  Galles  fur  un  fucces  égal  au  fien ,  &  ajouta  ,   qu'il  pou- 
*voit  compter  fur  fon  amitié  &  fon  ajfiflance.     Ce  ne  fera  pas  la  faute  des  In- 
quifiteurs  d'Efpagne,  s'il  fe  trompe  dans  ks  efperances,  ou  s'il  ne  tient 
pas  fa  promeffe.     Si  la  caufe  de  Religion  ne  fuffit  pas  pour  faire  une  rup- 
ture, il  n'y  a  qu'à  établir  une  Chambre  à  Madrid,  comme  celle  de  Metz, 
&  on  trouvera  bientôt  des  raifons  d'une  autre  efJDece.    La  Prefcription  de 
tems  ne  paffe  plus  pour  une  raifon  fuffifante  parmi  les  François  ;  qui  déci- 
dent à  préfent  des  Affaires  d'Etat;  ainfi  quand  il  n'y  auroit  rien  de  plus 
nouveau,  que  les  Expéditions  de  Chevalier  François  Dràke,  &  du  Che-, 

Ooo  3  va- 


478    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  valier  Walter  Raleigh,  ou  le  fecours  que  la  Reine  Elizabeth  donna  aux 
cen.  de    Hollandais,  pour  s'ériger  en  République,  lorsqu'ils  fecouérent  le  joug  d'Ef- 
t'EuRo-    p.agnej  ou  ce  qUe  les  Anglois  rirent  pour  maintenir  le  Titre  du  Roy  Jac- 
s J ques  d'Ecoffe  en  oppofition  à  celui  de  l'Infante  d'Efpagne,   l'un  ou  l'au- 
tre de  ces  filets  fufira  •  &,  plutôt  que  de  manquer  de  prétexte,  ils  infifte- 
ront  fur  la  prife  de  la  Jamaïque,  lors  que  les  Anglois  en  dépofledérentles 
Efpagnois  du  tems  de  Cromwell,  &  fur  leurs  établiffemens  dans  l'Améri- 
que ,  à  laquelle  ils  prétendent  par  Droit  de  découverte.     C'eft  en  vain 
qu'on  alléguera  pour  fe  défendre  des  Traitez  particuliers,  ou  le  Traité  de 
Ryswick:  car  Je  Traité  de  Partage  a  été  fait  depuis  ceux-là;  &  la  même 
diîtinchon  de  DefTein  &  de  Termes ,  dont  on  fe  fert  pour  pallier  la  ruptu- 
re de  celui-ci,  fervira  à  excufer  l'infraction  de  tous  les  autres:   outre  que 
fi  cela  ne  fuffit  pas,  on  aura  recours  à  la  Décifion  du  Concile  de  Confian- 
ce, qui  pofe  en  termes  exprès ,  qu'on  ne  doit  pas  tenir  la  Foy  aux  Hérétiques» 
Il  nous  faut  à  préfent  confiderer  le  Mémoire  du  Roi  de  France. 
Suivant  ce  que  nous  avons  déjà  dit,  il  paroît  qu'il  eil  plus  avantageux 
à  la  France ,  que  tous  les  Etats  d'Efpagne  foient  gouvernés  par  fon  Con- 
feil,  &  unis,  ou  aflujetis  à  fa  Couronne,  en  forme  de  Vice-Royautés,  ou 
de  Fiefs  qui  foient  obligés  de  lui  faire  Hommage,  que  d'avoir  eu  la  Por- 
tion, que  le  Traité  de  Partage  lui  aiïignoit;  ce  qui  fait  révoquer  en  doute 
la  vérité  de  ce  qu'on  alégue ,  Que  le  Roi  de  France ,  en  acceptant  le  Te/ta- 
ment  du  feu  Roi  d'Efpagne ,  a  préféré  la  Paix  publique  à  fon  propre  intérêt. 

La  Reflexion  qu'on  fait  fur  le  Traité  de  Partage,  p.  z.  Qtiil  auroit  pro- 
duit une  infinité  de  troubles ,  £5?  de  malheurs  communs  à  toute  t' Europe ,  fonne 
très-mal  dans  la  bouche  de  ceux  qui  l'ont  premièrement  propofé,  &  four- 
ni des  Argumens  folides  pour  prouver  les  grands  Avantages  qui  en  fe- 
roient  revenus ,  &  perfuader  à  toute  l'Europe  qu'elle  doit  en  procurer 
l'éxecution.  Si  ceux  qui  raifonnent  de  cette  manière  avoient  préveu  ces 
troubles  infinis  &  ces  malheurs  communs  à  l'Europe,  avant  qu'ils  entraf- 
fent  dans  ce  Traité,  c'étoit  une  très-grande  injuftice  à  eux  que  de  s'y  en- 
gager. Le  Mémoire  reconnoit  ,  p.  3.  Que  ï Elévation  des  Rois  ne  peut  les 
difpenfer  de  faire  connoitre  l'Equité  des  Guerres  qu'ils  entreprennent. 

Quelque  grand  que  foit  un  Monarque  qui  entreprend  une  Guerre  qu'il 
fçait  être  injuite  ,  il  doit  fe  fouvenir  que  celui ,  qui  eli  plus  grand  que  les 
plus  grands  Rois,  a  déclaré  ceux-là  maudits,  qui  répandent  le  fang  inno- 
cent. Mais,  fi  on  n'a  jamais  concerté  la  julHce  du  Traité  de  Partage  que 
lors  qu'on  a  offert  la  Couronne  d'Efpagne  à  un  Petit-fils  de  France,  il 
femble  qu'on  peut  fort  bien  appliquer  à  ce  fujet  ce  qu'un  grand  Prince  & 
Legiflateur  a  dit ,  que  le  Préfent  aveugle  les  yeux  du  Sage. 

La  fubtile  DiftinCtion  entre  le  DefTein  &  les  Termes  du  Trait-é  fent 
plus  la  Férule  que  le  Sceptre,  &  paraîtra  très-mal  fondée,  fi  on  confide- 
re,  que  le  DefTein  du  Traité  ,par  lia  Majorité  de  ceux  qui  traitoient,  étoit 
de  préf-rver  la  Paix  de  l'Europe,  en  empêchant  la  Réunion  des  Couron- 
nes d'Efpagne  &  de  France  ;  ce  qu'un  Teftament  obtenu  par  furpriie 
rend  inutile  aujourd'hui:  &  la  Paix  de  l'Europe  e!t  autant  en  diriger  par 

cet- 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.        479 

cette  Réiinion,  quefi  les  deux  Couronnes  étoient  fur  la  tête  d'une  feule  &  Affaires 
même  Perfonne.  On  a  d'autant  plus  de  raifon  de  parler  ainfi,  que  le  Roi  GfN-  DE 
de  France  a  répète  diverfes  fois  depuis  la  mort  du  dernier  Roi  d'Efpagne, 
Qu'à  l'avenir  la  France  &  £ E [pagne  ne  fer  oient  plus  qu'un,  &  que  fes  Mi- 
mllres  ont  déclaré  a  la  Diète  de  l'Empire,  Qu'à  préfent  il  a,  dejjein  d'entre- 
tenir une  bonne  Correspondance  avec  le  Roi  dy Ejpagne ,  ce  qui  le  met  en  meilleur 
état  qu'auparavant ,  d'ajjfifter  les  Princes  de  £  Empire  &  de  maintenir  la  Paix  de 
l'Empire.  Il  auroit  pu  auiîi-bien  ajouter,  &  troubler  aujjji  la  P aix  de  l'Europe. 
On  avoue  p.  1.  Que  le  Teftament  Ï3  la  Mort  du  Roi  à! Ejpagne  mettent  la  diffé- 
rence entre  le  Traité  d'aujourd'hui  &  celui  d'alors.  Ce  qui  fait  évidemment  voir 
la  partialité  de  la  Cour  de  France,  qui  règle  la  juftice  &  finjutlice  par  fon 
intérêt.  Le  Traité  ne  donne  pas  lieu  de  diftinguer  le  Deffein  du  Traité,  des 
Termes  du  Traité,  fi  le  Roi  d'Efpagne  meurt,  ou  s'il  vit.  11  efi  évident  que 
le  Traité  ne  devoit  être  mis  en  éxecution  qu'après  la  mort  de  ce  Prince  ;  de 
forte  que  tout  le  différent  vient  du  Teftament,  &  fa  mort  efl  feulement 
allcguée  dans  le  Mémoire,  comme  un  mot  emploie  pour  remplir  le  Pa- 
pier &  amufer  le  Lecteur. 

Au  lieu  qu'il  eft  dit  dans  la  même  page  ,  que  le  deffein  du  Traité  étoit  de 
maintenir  la  Paix  générale  \  mais  à  préfent  que  le  Roy  d' Ejpagne  efi  mort ,  & 
a  fait  un  Teftament  en  faveur  du  Duc  cl' Anjou  y  les  termes  de  ce  Traité  caufent 
une  Guerre  univerfclle.  Cela  fait  voir  que  ceux  qui  étoient  intereffés  dans 
ce  Traité  agiffoient  de  bonne-foi,  mais  qu'il  n'en  étoit  pas  de  même  2  l'é- 
gard de  la  France.  Nous  avons  la  parole  du  Prophète  Royal  garand  de 
ce  que  nous  avançons ,  lorfqu'il  dit  que  l'homme  droit  tiendra  ce  qu'il  a  pro- 
mis y  quand  même  ce  feroit  à  fon  préjudice.  Si  cette  doctrine  efi:  celefte  ,  il  n'eil 
pas  difficile  de  deviner  d'où  vient  celle  qui  enfeigne  à  rompre  les  Traitez 
&  à  vioier  les  ferments  ,  fous  prétexte  d'une  diitinction  entre  le  Def- 
fein &  les  Termes;  autrement,  l'Ecrivain  facré  infpiré  de  Dieu  auroit 
renverfé  la  Propofition,  &  dit  que  l'homme  droit  ne  tiendra  pas  ce  qu'il  a 
promis  fous  ferment ,  fi  cela  lui  porte  préjudice ,  parce  que  quand  il  a  fait  Ser- 
ment, il  avoit  en  veuë  fon  propre  avantage;  mais  que  la  chofe  tournant 
à  préfent  a  fon  defavantage,  il  doit  s'en  tenir  au  defîein,  &  non  pas  aux 
termes  du  Serment  qu'il  a  fait. 

A  l'égard  de  ce  qu'on  allègue,  que  fi  on  s'en  étoit  tenu  aux  Termes 
du  Traité,  cela  auroit  caufé  une  Guerre  univerfelle  :  fi  les  François  avoient 
agi  de  bonne- foi ,  &  qu'ils  euffent  exécuté  de  leur  part  ce  qu'ils  dévoient 
faire  ,  cela  eft  évidemment  faux  ,  &  contraire  à  ce  qu'ils  ont  îi  fouvent  dit,, 
avant  qu'ils  euffent  un  Teftament  en  leur  faveur >  fçavoir,  Que  les  Parties- 
ir>tereffé(S  dans  le  Traité  étoient  capables  de  le  mettre  éxecution ,  malgré  tous  op- 
pofans.  C'elt  ce  que  le  Mémoire  reconnoit,  lorfqu'il  dit,  Que  le  Roy  de 
France  auroit  peut-être  obtenu  des  avantages  plus  confi durables  par  /es  armes,  que- 
ce  qui  étoit  jlipulé pour  lui  par  le  Partage \t  s'il  avoit  voulu  les  emploie)'  à  ïoeca- 
fion  de  la  mort  du  Roy  d'Efpagne.  Qui  doute  donc  qu'il  n'eut  pu  beaucoup 
plus  facilement  avec  l'aifiltance  des  Anglois  &  des  Hoilandoîs  fe  mettre 
.  tn  poileffion  de  ce  qui  avoit  ttéltipulé  pour  lui  par  le  Traité  de  Partage? 

Mais 


l'Euro 
pe. 


480    MEMOIRES,  NEGO TI A TIONS,  TRAITEZ,  ET 

AmtixES        Mais ,  la  principale  Objection  confifte  en  ce  que,  l'Empereur  refufoit  de 
gen.  oe    Joufcrire  au  irait  é  du  Partage ,  dans  l'efperance  que  V Archiduc  fer  oit  déclaré 
SucceJ/eur  de  toute  la  Monarchie  ;    &  que  fi  la  France  ri  avoit  pas  accepté  le 
'Tefiament,  ï  Archiduc  aurait  été  déclaré  SucceJ/eur  Univer/èl  de  tous  les  Etats  . 
dépandants  de  la  Monarchie  d 'Ejpagne.     Mais ,  que  fignifie  tout  cela  ?  Les 
François,  les  Anglois,  les  Hollandois,  n'étoient  ils  pas  capables  d'obliger 
l'Archiduc  à  fe  contenter  de  l'Efpagne ,  des  Indes  Occidentales ,  &  des 
Pais-Bas ,  de  quelque  manière  que  le  Roi  d'Efpagne  en  eut  difpofé  par 
fon  Teilament  ?  On  fçait  qu'il  étoit  flipulé  par  le  Traité,  que  l'Archiduc  ne 
pafTeroit  dans  aucun  des  Etats  qui  appartiennent  à  l'Efpagne ,  du  vivant 
de  Sa  Majeflé  Catholique  ;  &  qu'il  ne  le  pourroit  faire  en  aucune  maniè- 
re, que  conformément  au  Traité  après  la  mort  du  Roi  d'Efpagne.     Le 
Roi  de  France  avoit  fes  Troupes  prêtes  long-tems  avant  que  Sa  Majefté 
Catholique  fut  décédée,  pour  prendre  polleffion  de  ce  qui  avoit  été  ftipu- 
lé  pour  lui  par  le  Traité,  ce  qui  auroit  rendu  le  pafTage  de  l'Archiduc  en 
Efpagne  très-difficile,  s'il  avoit  voulu  l'entreprendre  contre  les  Termes 
du  Traité;  &  quand  même  il  auroit  trouvé  le  moien  d'y  paffer,  les  Forces 
de  ces   trois  Nations  l'en  auroient  bien-tôt  fait  déloger,  s'il  n'avoit  pas 
confenti  au  Traité.  Les  François  n'en  peuvent  pas  douter,  eux,  qui  n'igno- 
rent pas  les  Conquêtes  qu'ils  rirent  fur  les  Etats  d'Efpagne  durant  la  der- 
nière Guerre  avec  leur  Forces  feules,  malgré  les  efforts  de  l'Empereur, 
de  l'Efpagne ,  de  l'Angleterre  ,  &  de  la  Hollande  unis  tous  enfemble. 
Mais,  il  faut  qu'ils  difent  quelque  chofe,  &  ils  aiment  mieux  parler  mal- 
à-propos  ,  que  de  ne  rien  dire  du  tout.     Pourquoi  ,  conformément  au 
Traité,  ne  fe  font-ils  pas  joints  aux  autres  Alliez,  pour  donner  à  l'Empe- 
reur deux  mois  de  terme  après  la  mort  du  Roi  d'Efpagne,  afin  de  con- 
fiderer  s'il  accepteroit  Je  Traité  ou  non  ?   Comme  le  Teflament   du  Roi 
d'Efpagne  fruftroit  l'attente  de  l'Empereur  ?  qui  efperoit  que  l'Archiduc 
feroit  déclaré  SuccefTeur  univerfel,  il  donnoit  aulîi  une  occafion  à  la  Fran- 
ce de  faire  voir  fa  fincerité  &  fa  juftice  à  tout  le  monde,  en  obfervant 
le  Traité ,  &  en  propofant  de  laifter  prendre  pofTeiîion  à  l'Archiduc  de  ce 
qui  avoit  été  ftipuié  par  lui  par  le  Partage.     Qui  fait  fi  l'Empereur  ne 
l'auroit  pas  accepté?  Il  n'eft  pas  improblable  qu'il  l'eut  fait,  puifqu'il  fe 
voioït  fruftré  de  fon  attente,  à  l'égard  du  Teftament  du  Roi  d'Efpagne; 
&  qu'il  eft  évident,  que  l'honneur  &  l'avantage  qui  lui  dévoient  revenir 
de  la  Monarchie  d'Efpagne,    quoi  qu'ainfi  démembrée,   font  beaucoup 
plus  confiderables,  que  tout  ce  qu'il  peut  attendre  de  fon  fils,  continuant 
à  être  Archiduc.     Si  les  François  en  avoient  ufé  de  cette  manière,  ils 
auroient  pu  avoir  raifon  de  dire,  qu'ils  avoient  defTein  de  maintenir  la 
Paix  Univerfelle  de  l'Europe;  mais,  puifque  contre  le  Traité,  ils  ont  viis 
&  rnodis  obtenu  un  Teflament  en  leur  faveur,  &  qu'ils  font  refolus  de  s'y 
tenir,  ils  ont  jette  de  juiies  fondemens  pour  une  Guerre  Univerfelle,  & 
donné  lieu  à  leurs  Alliés  de  fe  joindre  avec  l'Empereur  pour  faire  valoir 
le  Droit  de  fa  Famille  fur  tous  les  Etats  dépendants  de  l'Efpagne;  &  s'ils 
trouvent  à  propos  de  le  faire,  cela  pourroit  à  la  fin  traverser  les  deffeins 

de 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  ï.  4S1 

de  la  Maifon  de  Bourbon,  de  même  que  le  Teflament  a  frultré  l'attente  Affaires 
de  la  Maifon  d'Autriche.  GfN-  n* 

Cefl  une  chofe  plaifante  d'entendre  ce  que  le  Mémoire  dit,  Que  fes 
alliés  ri  avaient  pas  de  Droit  aux  Etats  ftipulés  pour  lui  par  le  Traite';  lorfque 
tout  le  monde  fçait  ,  qu'il  ne  pouvoit  lui-même  y  prétendre  aucun  droit , 
qu'en  vertu  de  ce  Traité.  Avant  Ton  Mariage  avec  l'Infante,  il  a  voit  re- 
noncé à  tous  les  droits  qu'il  y  auroit  pu  prétendre,  comme  on  l'a  déjà  dit: 
fans  cette  Renonciation  on  n'auroit  jamais  confenti  au  Mariage  j  Sa  Re- 
nonciation &  celle  de  l'Infante  furent  enfuite  ratifiées  par  le  Traité  des 
Pirenées.  Cefl  en  vain  que  les  François  allèguent ,  qu'il  n'étoit  pas  en 
fon  pouvoir  de  céder  le  Droit  de  fon  fils:  car,  fi  cela  étoit  ainfi,  c'étoit 
une  injuflice  à  lui  de  contracter  ce  Mariage  &  d'entrer  dans  le  Traité; 
&  il  a  fait  encore  une  autre  injullice  en  donnant  le  Droit  du  Dauphin  & 
du  Duc  de  Bourgogne  au  Duc  d'Anjou;  mais,  puifqu'ils  infiftent  fi  fort  fur 
la  nullité  de  cette  Renonciation,  cela  confirme  dans  le  foupçon  que  le 
Duc  d'Anjou  doit  feulement  agir  comme  Vice-Roi  de  la  Couronne  de 
France;  autrement,  ils  fe  moquent  du  Monde  en  parlant  ainfi  du  Droit, 
lorfqu'en  même  tems  ils  juflifient  ce  qu'ils  ont  fait  contre  ce  prétendu 
Droit.  Quoi  qu'il  en  foit,  il  efl  certain  que  cette  raifon  fera  un  Fonde- 
ment éternel  de  querelle  entre  les  Couronnes  de  France  &  d'Efpagne,  fi 
le  Duc  d'Anjou,  &  les  Héritiers  qui  naitront  de  lui,  font  quelque  chofe 
de  plus  qtie  Vicerois  ;  tant  s'en  faut,  que  l'Acceptation  du  Teflament  du 
feu  Roi  d'Efpagne  foit  le  meilleur  expédient  pour  maintenir  la  Paix  de 
l'Europe. 

Ils  ne  font  pas  moins  plaifants,  lors  qu'ils  nous  difent,  Que  ce  ri  étoit  pas 
la  vue  de  Sa  Majefté  d'aquerir  par  un  Traité  les  Royaumes  de  Naples  &  de  Si- 
cile ,  la  Province  de  Guipufcoa ,  £5?  la  Duché  de  Lorraine  ;  mais ,  que  fon  prin- 
cipal but  étoit  de  maintenir  la  Paix  ,  &  quelle  a  traité  fur  cet  unique  fonde- 
ment. Si  l'unique  fondement  du  Traité  qu'il  a  fait  étoit  de  maintenir  la 
Paix  générale  ,  il  n'avoit  pas  befoin  de  faire  aucun  Traité  ,  il  n'avoit 
qu'à  obferver  le  Traité  des  Pirenées  ,  par  lequel  il  renonçoit  pour  lui, 
&  fes  SuccefTeurs  à  jamais ,  à  toutes  prétentions  à  la  Couronne  d'Efpa- 
gne; &  s'il  en  avoit  agi  de  cette  manière  ,  nous  pouvons  bien  nous  ha- 
zarder  à  dire  ,  que  fes  Alliez  ne  l'auroient  pas  forcé  à  prendre 
ces  Royaumes  &  ces  Provinces:  de  forte  que  s'il  n'a  pas  traité  en  vue  des 
Etats  itipulez  pour  lui  dans  le  Partage  ,  il  a  traité  ,  ou  pour  rien  ,  ou 
bien  pour  éfraïer  les  Efpagnols  &  les  obliger  à  lui  donner  le  tout,  comme 
il  efl  plus  vrai-femblable ,  &  comme  l'événement  l'a  vérifié. 

Mais,  pour  une  plus  grande  marque  dereconnoifîance  envers  fes  Alliez, 
le  Mémoire  nous  dit ,  Que  peut-être  il  auroit  pu  obtenir  des  avantages  plus 
confiderables  par  fes  armes ,  s  il  avoit  voulu  les  emploier  à  ïoccafion  de  la  mort 
du  Roy  d'Efpagne.  A  quoi  il  efl  aifé  de  répondre,  que  peut-être  il  auroit 
perdu  de  plus  grands  avantages  par  les  Armes  des  Alliez;  &  ceci  ne  pa- 
roitra  plus  un  Paradoxe,  lors  qu'on  confiderera;  que  fi  pour  maintenir  le 
Traité  des  Pirenées,  &  conferver  la  Paix  &  la  Balance  de  l'Europe,  ils 

Tome  XL  Ppp  s'étoienc 


P£. 


482    MEMOIRES,  NEGOTIATIÔNS,  TRAITEZ,  ET 

Apures  s'étoient  joints  avec  l'Empereur  &  l'Efpagne  pour  l'attaquer  ,  &  qu'ils 
gen.  de  euflent  envoyé  une  puiflante  Flote  pour  harafïer  Tes  Côtes  &  bombarder 
l'Euro-  jes  villes  de  Ton  Royaume }  il  ne  feroit  pas  aujourd'hui  en  état  de  refiller 
fi  aifément  à  leurs  forces  jointes  enfemble,  comme  il  a  fait  pendant  la  der- 
•  niere  Guerre  ,  puis  fur-tout  qu'il  eil  déjà  épuifé  d'hommes  &  d'argent. 
D'où  nous  pouvons  raifonnablement  conclure,  fans  un  peut-être,  qu'ils 
lui  auroient  donné  un  vomitif  plus  fort  qu'il  ne  rirent  à  la  conclufion  de  la 
dernière  Guerre,  lors  qu'ils  l'obligèrent  à  rendre  gorge  &  à  reitituer  tant 
de  fortes  Places  &  de  vafles  Provinces.  C'eil  encore  une  abfurdité  de 
nous  dire ,  dans  le  Mémoire ,  les  merveilles  qu'il  auroit  pu  faire  avec  Ces 
Armes,  s'il  avoit  eu  defTein  de  s'en  fervir  à  l'occafion  de  la  mort  du  Roi 
d'Efpagne:,  quand  tout  le  monde  fçait,  que  non  feulement  il  menaçoit  de 
fes  Armes  les  deux  Branches  de  laMaifon  d'Autriche,  fi  elles  faifoient  au- 
cune démarche  pour  empêcher  l'exécution  du  Traité  de  Fartage  ;  mais 
qu'il  faifoit  encore  marcher  fes  Troupes  fur  les  Frontières  d'Efpagne,  pour 
être  prêtes  à  fe  faifir  de  Fontarabie,  &c.  auiîi-tôt  que  fon  Beaufrére  feroit 
mort  ;  ce  qui  épouvanta  tellement  ce  pauvre  Prince,  qui  d'ailleurs  avoit 
l'efprit  foible,  qu'il  y  a  tout  fujet  de  croire,  que  la  peur  dont  il  fut  faifi  à 
cette  occafion  lui  abrégea  fes  jours.. 

Ce  qu'on  allègue  encore, que  s'il  avoit  accepté  le  Partage,  il  fe  feroit  at- 
tiré par-là  une  longue  &  fanglante  Guerre  ,  &  que  les  Efpagnols  fe  met- 
toient  en  pofïure  de  maintenir  leur  Monarchie  entière,  n'elb  qu'un  vain  & 
ridicule  prétexte.     Qu'auroit  pu  faire  cette  Monarchie  foible  &  difperfée 
en  plulieurs  Parties  du  Monde  pour  fe  maintenir  unie  &  entière,  contre 
le  Pouvoir  de  France,  d'Angleterre,  &  de  Hollande,  joint  enfemble  ?  Ils 
ne  font  pas  capables  d'eux-mêmes  de  refiiler  à  la  France  feule,  &  par 
conféquent  ils  le  feroient  encore  moins  lors  que  ces  trois  PuilTances  fe 
trouveroient  jointes  enfemble.     L'Empereur  ne  pouvoit  les  fécourir  par 
Mer,  ni  empêcher  qu'on  entrât  par  Terre  dans  leur  Pais.     On  ne  peut 
pas  raifonnablement  dire ,  qu'il  auroit  pu  faire  diverfion  fur  le  Rhin ,  car 
Louis  XIV.  lui  a  taillé  alTez  de  befogne  chez  lui,  en  encourageant  les 
Princes  qui  s'oppofent  au  neuvième  Ele&orat,  ôc  qui  fe  plaignent  de  plu- 
iieurs  autres  Griefs,  à  armer  contre  lui  :  ou  fi  cela  n'avoit  pas  réuili ,  il 
auroit  pu  avoir  recours  à  un  ancien  Artifice  des  Rois  Très-Chrétiens,  qui 
ne  leur  a  jamais  manqué  ,  qui  eil  d'engager  les  Turcs  à  envahir  la  Chré- 
tienté.     Les  François  &  les  Hollandois  font  dans  le  même  Continent 
que  l'Empereur,  &  font  plus  capables  d'envahir  fes  Etats,  qu'il  ne  l'eft 
de  fe  rendre  maître  des  leurs  :   Les  Etats  appartenant  à  l'Efpagne  &  fti- 
pulez  pour  la  France  dans  le  Traité  ,   auroient  pu  être  démembrez  du 
corps  de  la  Monarchie  d'Efpagne,  avant  que  l'Empereur  pût  venir  à  leur 
fecours,.  &  les  Flottes  Confédérées  auroient  aifément  démembré  l'Ame- 
nque,  qui  eft  l'ame  de  leur  Monarchie,   ce  qui  Tauroit  fait  périr  à  ja- 
mais :  c'eil  ce  que  les  Efpagnols  voyent  bien,  auffi  n'y  avoit-il  pas  d'au- 
tre voye  que  de  confentir  au  Traité  de  Partage,  ce  qui  leur  auroit  été 
désavantageux  &  deshonorable  j  ou  tacher  de  rompre  ce  Traité ,  en  fe 

jet- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.   I.  4g; 

jettant  entre  les  bras  d'une  Nation  qui  Te  moque  d'être  efclave  de  fa  pa-   AriA»** 
rôle  :  &  devenir  plutôt  entièrement  efclaves,  que  de  continuer  à  être  li-    ***».  »« 
bres  dans  un  Etat  démembré.     Cela  peut  fervir  de  réponfe  au  Duc  de  Sa-    L'EuRO~ 
voye  qui  vouloit  faire  valoir  fon  Droit ,  en  cas  que  l'Archiduc  s'en  tint       PF' 
au  Traité  de  Partage }  tout  le  monde  fçait  que  ce  petit  Prince  auroit  iné- 
vitablement cherché  fa  ruine,  s'il  avoit  entrepris  de  difputer  fes  droits 
contre  l'Empereur,  la  France,  l'Angleterre,  &  la  Hollande. 

Ce  qui  a  été  dit  fuffira  pour  prouver,  qu'aucun  Prince  de  la  Maifon  de 
France  n  avoit  Droit  à  la  Couronne  d'Efpagne:  nous  examinerons  à  pré- 
fent  ce  qui  eft  répandu  par-ci  par-là  dans  le  Mémoire  ,  comme,  §)ue  le 
feu  Roy  d' Efpagne  ,  par  fon  l'ejl ciment ,  a  enfin  fait  jujlke  aux  véritables  héri- 
tiers. Il  feroit  à  fouhaiter  que  l'Auteur  du  Mémoire  eut  marqué  &  fixé 
en  quoi  confifte  cette  juftice:  car,  quelquefois  il  dit  que  cette  Juftice  eft 
feulement  dûë  au  Dauphin ,  &  dans  cette  vue  il  déclare  que  la  Renon- 
ciation de  fon  Père  &  de  fa  Mère  elt  entièrement  nulle;  &  il  parle  ici 
de  la  Juftice  que  le  Teftament  du  Roy  d'Efpagne  a  faite  aux  véritables 
Héritiers,  qui  exclut  le  Dauphin,  le  Duc  de  Bourgogne,  &  tous  ceux 
qui  feront  Rois  de  France  après  eux,  &  l'applique  au  Duc  d'Anjou, 
&c.  deforte  que  cette  Notion  &  cette  Pratique  détruifent  entièrement  la 
juftice  d'une  Succeffion  en  droite  Ligne  ,  qui  a  coûté  la  vie  à  tant  de 
milliers  de  Sujets,  dans  la  plupart  des  Royaumes  de  l'Europe.  De  plus, 
comme  on  l'a  déjà  remarqué ,  le  Mémoire  fe  contredit  là-deffus  :  car  fî 
les  Renonciations  de  Louis  XIII.  &  de  Louis  XIV.  étoient  injultes,  celle 
du  Dauphin  le  doit  être  aufîi.  Et  quoique  le  Dauphin  foit  un  Prince  d'un 
(ï  bon  naturel ,  que  de  déclarer  qu  il  fera  bien  aife  de  dire  pendant  toute  fa  vie , 
le  Roy  mon  Père,  &  le  Roy  mon  Fils  ,  on  doute  que  le  Duc  de  Bourgogne 
foit  un  Prince  d'un  auffi  bon  naturel  :  peut-être  qu'il  viendra  un  tems  où 
on  lui  dira  à  l'oreille,  que  la  Cour  de  France  a  eu  tout  à  la  fois  deux  dif- 
férentes Notions  de  Juftice  ;  l'une,  qu'un  Père  ne  pouvoit  pas  juftement 
renoncer  au  Droit  de  fon  Fils  aine  :  &  l'autre  qu'un  Père  peut  juftement 
renoncer  au  Droit  de  fon  fils  aîné  en  faveur  du  fécond  :  &  puifque  ces 
deux  Idées  font  juftes,  celle-là  doit  être  la  plus  jufte,  qui  fait  plus  pour 
fa  gloire  &  pour  fon  avantage  ;  &  par  conféquent  puifqu'il  eft  plus  glo- 
rieux &  plus  avantageux  d'être  Roi  de  France,  de  Navarre,  &  d'Efpa- 
gne, &c.  que  d'être  feulement  Roi  de  France  &  de  Navarre  :  fon  Frère 
le  Duc  d'Anjou ,  feroit  fort  juftement  de  revenir  chez  foi,  de  fe  conten- 
ter de  fon  Apanage  en  France,  &  lui  reftituer  la  Couronne  d'Efpagne, 
qui  eft  fon  Droit  d'aîneffe.  Si  cela  arrive,  comme  il  n'eft  nullement  im- 
poffible,  la  plus  longue  épée  doit  déterminer  de  la  Juftice  ;  &  ainfi  le  Te- 
ftament du  feu  Roi  d'Efpagne  maintient  admirablement  bien  la  Paix  de 
l'Europe. 

Nous  ne  ferons  plus  qu'une  Remarque  pour  finir  cet  Article  ,  c'eft  que 
pour  rendre  le  Teftament  du  Roi  d'Efpagne  julte,  la  Ratification  devoit 
s'en  faire  avec  une  folemnité  &  une  autorité  égale  à  celle  avec  laquelle 
fe  fit  la  Ratification  du   Contract;  de  Mariage  de  Louïs  XIV.,  &   le 

Ppp  2  Trai^ 


jl'Euro- 

PE 


3> 


484   MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   Traitté  des  Pyrénées,  qui  eft  entièrement  renverfé  par  ce  Teftament. 
gen.  ue        Après  avoir  examiné  les  principaux  Chefs  du  Mémoire,  nous  parcour- 
rons feulement  quelques  autres  Particularitez  qui  s'y  rencontrent. 

L'Auteur  dit,    ,,  Que  tant  d'Etats  fi  confiderables  étant  ajoutez  à  la 
France,  fuivant  la  difpofition  du  Traité,  auraient  pu  donner  de  la  ja- 
,  loufie  contre  le  Pouvoir  de  France,  &  que   par  conféquent  les  Etats  • 
,  doivent  préférer  la  Succeffion  établie  par  le  Teftament,  au  Traité  de 
,,  Partage.,,     Mais,  qui  peut  s'empêcher  de  voir  que  les  Etats,  &  toute 
l'Europe,  ont  beaucoup  plus  de  raifon  d'être  jaloux  de  la  Réunion  de  tous 
les  Etats  d'Efpagne  h  la  Couronne  de  France,  ou  ce  qui  ell  la  même 
chofe,  que  toute  la  Monarchie  d'Efpagne  foit  fous  le  Gouvernement  du 
Confeil  de  France.   Puifque  l 'infraction  du  Traité  de  Partage  efl  un  exem- 
ple fi  récent  de  l'InconllanceFrançoife,  &  du  plus  grand  mépris  &  affront 
qu'on  pût  faire  à  Sa  Majeilé  Britannique  &  aux  Etats -Généraux  ;  qui  fe- 
ra garand,  que  cette  infraction  n'ira  pas  plus  loin,  &  qu'elle  ne  fera  pas 
encore  fuivie  de  Contraventions  à  tous  les  Traitez  pour  troubler  la  Paix 
dont  ils  jouiffent,  &  la  Tranquilité  univerfelle  de  l'Europe  ?    Lorfque  le 
Roy  de  la  Grande-Bretagne  &  les  Hollandois  entrèrent  dans  le  Traité-de 
Partage,  on  leur  fit  croire  que  les  François  n'avoient  point  d'autre  dcffein 
par  ce  Traité  ,  que  de  prévenir  de  nouvelles  Guerres ,  ou  comme  ils  s'en 
exprimoient  eux  -  mêmes  dans  leurs  Mémoires  aux   autres  Potentats  de 
l'Europe,  que  la  Conjoncture  des  Affaires  rendoit  ce  Traité  aufli  nécef- 
faire ,  qu'il  fefl  d'abattre  une  rue  ou  quelques  maifons  ,  pour  prévenir  f  incen- 
die d'une  Fille  entière.     Ils  n'avoient  pas  lieu  de  croire,  qu'après  avoir  fait 
une  11  bonne  part  aux  François,  ils  voulurent  encore  s'emparer  de  toute 
la  Monarchie  d'Efpagne,  ou  entreprendre  de  troubler  davantage  f Euro- 
pe fur  ce  fujet  ;  c'eft  pourquoi ,  quelles  que  puiffent  être  les  fuggeftions 
de  leurs  Sujets  à  l'égard  du  danger  de  leur  Commerce  de  la  Mer  Médi- 
terranée, ils  étoient  bien  fondez  de  croire  que  les  François  auroient  dilîî- 
pé  ces  craintes  en  obfervant  fidellement  le  Traité  de  leur  côté;  mais,puif- 
qu'il  en  ell  arrivé  autrement,  ils  ont  toutes  les  raifons  imaginables  de  di- 
re ,  que  les  craintes  de  leurs  Sujets,  &  de  ceux  d'Angleterre,  font  les 
effets  d'une  fage  prévoyance  ;  de  forte  qu'ils  doivent  à  l'avenir  faire  plus 
de  fond  fur  le  jugement  des  uns  &  des  autres,  foit  à  l'égard  des  Traitez, 
ou  des  évenemens,  qu'ils  n'en  ont  fait  jufques  ici,  à  ce  que  le  Mémoire 
femble  infinuer. 

Ce  que  nous  venons  de  dire  fuffit  pour  répondre  à  ce  qui  efl:  déclaré 
dans  le  Mémoire,  ghton  ne  voit  pas  que  les  Etats  reçoivent  aucun  préjudice 
de  ce  que  le  Roy  a  accepté  le  Teftament.  Mais,  de  plus,  il  ell  fur  que  les 
Peuples  de  Hollande  &  d'Angleterre  s'apperçoivent  fort  bien  du  préjudi- 
ce que  cette  pratique  de  la  Cour  de  France  leur  fait  \  fur-tout  les  Hollan- 
dois croient  avoir  de  bonnes  raifons  pour  cela ,  lors  qu'ils  voyent  que  le  Roi  de 
France  a  promis  dans  fa  Lettre  à  la  Reine  Douairière  &  à  la  Régence 
d'Efpagne,  Que  fon  principal  foin  fera  de  rétablir  la  Monarchie  d'Efpagne  au 
plus  haut  point  de  Gloire  vu  elle  (bit  jamais  parvenue.     Cela  rapelle  en  leur 

mé- 


l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.  48r 

mémoire  ,   qu'ils  faifoient  autrefois  partie  de  la    Monarchie  d'Efpngne;    Affaires 
qu'en  fecouant  le  joug  de  fa  Tyrannie,  ils  lui  ont  fait  perdre  une  partie    Gf£-  DE 
de  fa  gloire;  &  que  l'EtabliiTement  de  leur  République  n'a  pas  peu  con- 
tribué à  fa  décadence.     Ils  fçavent  auffi,  &  ils  en  fou  firent  encore,  que 
la  France  a  fait  plus  d'une  fois  fes  efforts  pour  fe  mettre  en  pofTefïion  de 
tous  les  Païs-Bas,  &  fur-tout  de  leurs  Provinces,  fous  prétexte  qu'ils  lui 
donnoient  du  Mécontentement  ;  car  c'eft  aujourd'hui  une  des  plus  terribles 
chofes  du  monde,  lorique  les  grands  Monarques  fe  plaignent  d'avoir  reçu 
du  Mécontentement ,  ou  d'avoir  été  mal  fervis.    Rien  ne  peut  fatisfaire  l'In- 
dignation Royale,  que  la  ruine  de  ces  pauvres  Républiques  ou  Royaumes, 
dont  on  fe  plaint.     On  leur  reproche. encore  qu'ils  manquent  de  fincéritê 
en  demandant  ce  qu'ils  n'ont  jamais  eu  deffein  d'obtenir  ,    6?   quils  font  des 
vœux  contraires  à  l'Intérêt  de  leur  République.     Cela  n'efï:  pas  feulement  ca- 
pable de  leur  attirer  le  refTentiment  de  Louïs  XIV.  mais  auffi  d'animer 
leurs  Peuples  contr'eux  :    on  les  menace  encore  ,  s  ils  ne  tachent  par  leur 
conduite  de  mériter  l'honneur  de  /on  'affeclion,  6r  la  continuation  de  (a   bien- 
veillance  ;  &  on  les  accufe  de  ne  s'être  pas  comportez  d'une  manière  qui 
réponde  à  la  Pruteclion  qu'ils  ont  reçue  de  Sa  Majefté  ,  &  de  fes  Ancêtres. 
Voilà  des  crimes  encore  plus  grands ,  que  ceux  de  lui  avoir  donné  du 
mécontentement  ;    ce  qui  néanmoins   donna  occafion   aux  Troupes    de 
France  de  faire  une  Irruption  dans  leur  Pais  en  1672.   &  par  conféquent 
les  pauvres  Etats  ont  raifon  de  s'attendre  à  être  aujourd'hui  plus  fevére- 
ment  traittez  qu'ils  ne  le  furent  alors,  s'ils  ne  font  au  plutôt  leur  Paix 
en  rompant  le  Traire  de  Partage ,  &  reconnoiffant  le  Duc  d'Anjou  pour 
Roi  d'Efpagne.  Voilà, félon  toutes  les  apparences,  leur  recompenfe  &  la 
nôtre,  pour  avoir  eu  l'honnêteté  d'entrer  dans  un  Traité,  par  lequel  la 
France  agrandiflbit  fi  considérablement  fes  Etats,  comme  le  Mémoire  le 
reconnoit ,  &  dans  lequel  nous  avons  agi  d'une  manière  fi  defintereffée, 
que  les  François  avouent  de  bonne-foi  ,  que  nous  navions  fiipulé  aucun  a-, 
vantage  particulier  pour  nous-mêmes.     Mais,  puifque  le  Mémoire  dit,  Que 
l' Equité  du  Roi ,  &  fa  tendre  Affetlion  pour  le  Roi  d'Efpagne,  ne  pouvoient  p.is- 
lui  permetre  de  tourner  fes  armes  contre  une  Nation,  /ans  autre  raifon  que 
parce  quelle  a  offert  à  [on  nouveau  Roi  ,  petit -fils  de  Sa  Majefié,  Y  une  des 
plus  puiffantes  Monarchies  de  ï  Europe  \   nous  efpérons  auffi  que  l'Equité  & 
la  Reconnoifiance  envers  fts  Alliez  ne  lui  permettra  pas  non  plus  de  tour- 
ner Ces  armes  contre  deux  Nations  par  le  motif  qu'elles  ont  voulu  ajouter 
plufieurs  Royaumes  &  Provinces  à  la  France,  qui  elt  déjà  beaucoup  plus 
puiflante  qu'aucune  autre  Monarchie  de  l'Europe,  &  qu'ils  ont  une  pîus 
grande  confideration  pour  Sa  Majelté  &  fon  Royaume,  que  pour  fon  Pe- 
lit-fils  &  fes  Etats. 

Cette  déférence  eft  d'autant  plus  confiderable,  que  les  François  n'a- 
xaient pas  fujet  de  l'attendre  d'aucune  de  ces  deux  Nations,  qui  avoienc 
ie  plus  beau  prétexte  du  monde  de  s  en  excufer,  Ci  elles  avoient  eu  queî- 
qu'autre  chofe  en  veiïe,  que  de  maintenir  la  Paix  de  l'Europe.  Elles  fça- 
voient  fort  bien,  que  le  Roi  de  France  s'étoit  exclus  lui  même  de  toutes 

Ppp  3  pré- 


486'  MEMOIRES  ,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

prétentions  à  la  Succeffion  d'Efpagne  par  le  Traité  des  Pirenées,  &  quoi 
qu'il  eut  fait  plufieurs  infractions  à  ce  Traité,  elles  n'étoient  pourtant  pas 
obligées  de  croire  qu'il  fut  annullé  à  cet  égard.  On  peut  dire  même  que 
fi  elles  n'avoient  pas  préféré  le  defir  qu'elles  avoient  pour  la  Paix,  aux 
jultes  fujets  de  leur  reffentiment,  elles  auroient  pu  le  faire  fervir  de  fon- 
dement à  une  nouvelle  Alliance  contre  lui,  en  cas  qu'il  attentat  de  fe  ren- 
dre maître  de  quelques  Païs  dépendants  la  Monarchie  d'E'pagne ,  après  la 
mort  de  fon  Beaufrere.  L'honnêteté  donc,  que  ces  deux  Nations  ont  eue 
pour  !e  Roi  de.France,  doit  être  d'autant  plus  efthnée,  qu'elle  étoit  libre 
ck  délinterefTée ,  comme  le  Mémoire  le  reconnoit  \  &  la  jufle  eftime  que 
les  François  en  doivent  faire  ne  doit  pas  être  diminuée  par  la  eonfide- 
ration  que  leurs  Alliez  ont  fait  voir  par  ce  Traité,  qu'ils  avoient  aufli  peu 
en  vue  la  Bigoterie,  que  leurs  Intérêts  temporels  ;  car,  ils  n'ont  rien  ftipulé 
en  faveur  des  Proteflans  de  France ,  qui  font  perfecucez  de  la  manière  la 
plus  barbare  qui  fut  jamais  -,  ni  en  faveur  de  ceux  d'Allemagne,  qui  font 
opprimez  &  accablez,  fous  prétexte  du  quatrième  Article  du  Traité  de 
Ryfwiek  ,  parce  qu'ils  étoient  opprimez  de  la  même  manière  par  les  Fran- 
çois avant  ce  Traité  :  &  fi  Louis  XIV.  vouloit  déclarer  que  ce  n'eil  pas 
en  ce  fens  qu'il  prend  cet  Article  ,  les  Princes  d'Allemagne  fes  Voifïns 
n'ôferoient  l'étendre,  comme  ils  ont  fait,  à  la  ruine  des  Proteflans.  Les 
Alliez  pouvoient  infiHer  là-deffus,  avant  que  d'entrer  dans  ce  Traité  avec 
la  France,  &  ils  l'auroient  fait  fans  doute,  s'ils  n'avoient  préféré  la  Paix 
générale  à  celle  de  quelques  particuliers.  Mais  il  femble  qu'on  a  beau  re- 
lâcher de  fes  Intérêts,  foit  dans  les  chofes  civiles,  ou  celles  qui  regar- 
dent la  Religion,  tout  cela  n'eft  pas. capable  de  contenter  l'affection  ex- 
tcaordinaire  que  le  Roi  porte  au  Duc  d'Anjou,  à  moins  que  toute  l'Euro- 
pe ne  facrifie  fon  honneur  &  fon  Intérêt  à  l'avancement  de  fon  Petit- 
Fils  ,  ce  qui  eft  contre  le  Droit  du  Dauphin  fon  propre  Fils ,  comme  le  Mé- 
moire en  tombe  d'accord. 

Ce  que  nous  avons  enfuite  à  confiderer  eft  l'Influence  que  cette  Suc- 
ceffion  peut  avoir  fur  les  Affaires  de  l'Europe,  &  quel  peut-être  l'Inté- 
rêt des  Princes  &  des  Etats  de  la  Chrétienté,  à  l'égard  de  cette  Succeflïon. 

En  premier  lieu,  nous  confidererons  la  Hollande,  parce  que  c'eli  le 
Païs  le. plus  expofé  au  danger,  &  qui  félon  toutes  les  apparences  fera 
un  des  premiers  qui  reffentira  les  effets  de  cette  Union.  En  voici  les 
raifons. 

i.  Les  Efpagnols  les  regardent  comme  des  Rebelles,  &  le  Roi  de 
France  en  promettant  de  faire  fes  efforts  pour  rétablir  l'Efpagne  au  plus 
haut  point  de  fon  ancienne  gloire,  femble  s'être  engagé  à  les  affilier  pour 
réduire  les  Hollandois. 

2.  Il  femble  encore  y  être  engagé,  en  qualité  de  Champion  déclaré  de 
ce  qu'on  appelle  la  Foy  Catholique,  que  le  feu  Roy  d'Efpagne  recomman- 
de à  fon  Succeffeur  d'avancer,  quand  même*  il  devroit  tout  facrifier  pour 
cette  Entreprife.  Et  Ton  n'ignore  pas,  qu'après  la  Grande-Bretagne,  la 
Hollande  eft  le  grand  Boulevard  de  la  Reformation. 

2.  Corn- 


l'Euho- 

PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  487 

3.  Comme,  après  l'Angleterre,  les  Hollandois  font  la  grande  Barrière  des  Aïfaiius 
Intérêts  des  Proteftans ,  ils  font  auifi  le  Boulevard  de  la  Liberté  de  toute  gen.dk 
l'Europe,  &,  après  les  Anglois  ,  il  forment  le  plus  grand  Obitacle  à  la  Mo- 
narchie Univerfelle  ,  à  laquelle  ils  fe  font  plus  oppofez  qu'aucune  autre  Na- 
tion de  l'Europe,  fi  on  en  excepte  la  Nation  Angloife.  Les  François  l'ont 
reconnu  par  une  trifte  expérience,  aufïi  ne  faut-il  pas  douter  qu'ils  ne  fe 
fervent  aujourd'hui  contr'eux  de  leur  avantage. 

4.  La  Conjoncture  préfente  des  Affaires  les  expofe  plus  que  jamais  à 
être  conquis  par  la  France.  La  Flandre  &  le  Brabant,  qui  étoient  leurs 
Barrières  naturelles,  ne  doivent  plus  à  préfent  être  regardées  comme  tel- 
les. Et  fi  les  Efpagnols  gardoient  ces  Provinces,  ce  n'efl  pas  qu'ils  en  re- 
tiraflent  aucun  avantage,  car  tout  le  monde  fçait  qu'elles  étoient  à  charge 
à  cette  Monarchie;  mais,  la  principale  raifon  qui  les  obligeoit  à  les  garder, 
c'ell  que  c'étoit  une  épine  dans  le  côté  de  la  France  ,  ou  un  os  à  ronger 
pour  les  François,  &  par  ce  moïen  ils  étoient  fûrs  qu'ils  les  obligeroient  à 
faire  diverfion  ,  lorsqu'ils  auroient  deffein  d'attaquer  le  corps  de  leur  Mo- 
narchie,  parce  que  la  confervation  de  ces  Provinces  Espagnoles  étoic 
d'une  telle  conféquence  à  l'Empereur,  l'Angleterre,  &  la  Hollande  ,  que 
faifant  en  quelque  forte  une  Barrière  qui  leur  étoit  commune  à  tous  ,  ils 
n'auroient  jamais  fouffert  que  \qs  François  s'en  fuifent  entièrement  ren- 
dus les  Maîtres. 

Mais  à  préfent  que  la  Scène  des  Affaires  efr.  changée,  &  que  la  France 
&  l'Efpagne  font  gouvernées  par  les  mêmes  Confeils  ;  ces  deux  Couron- 
nes feront  bien  aifes  de  trouver  l'occafion  de  réduire  les  Hollandois.  Li 
France  s'y  portera  aifément ,  à  caufe  des  raifons  que  nous  avons  dites ,  & 
l'Efpagne  y  donnera  volontiers  les  mains  ,  non-feulement  à  caufe  de  la 
haine  qui  lui  eft  commune  avec  la  France  contre  les  Provinces-Unies, 
mais  auiïi  parce  qu'elle  ne  peut  jamais  efperer  une  occafion  plus  favorable 
pour  les  ramener  à  leur  ancienne  obenTance  ,  ce  qui  fervira  de  prétexte, 
du  moins  pour  quelque  tems. 

Les  raifons  fuivantes  feront  encore  mieux  voir  le  Danger  auquel  les 
Hollandois  font  expofez. 

1.  Les  Habitans  du  Païs-Bas  Efpagnol  font  leurs  Ennemis  à  l'égard  de  la 
Religion;  les  Flamands  font  des  Papilles  û  bigots,  qu'ils  croient  que  tous 
les  Proteftans  font  damnez,  ou  peu  s'en  faut.  2.  Ils  les  haïfTent,à  caufe 
du  Commerce,  qu'Amflerdam  a  enlevé* à  Anvers  ,  qui  en  étoit  autrefois 
le  fiege,  &  qui  rendoit  cette  Ville  Ci  fîoriiTante.  3.  Ils  leur  veulent  enco- 
re du  mal  pour  quelques  brouilleries  qu'ils  ont  eues  entr'eux,  &  ils  les  ac- 
cufent  d'avoir  à  leur  préjudice  cherché  indirectement  leur  avantage  par  le 
dernier  Traité,  en  déclarant  le  Prince  Electoral  de  Bavière  Succeflèur  de 
l'Efpagne.  4.  Les  Ports  &  les  Havres  de  la  Hollande  font  fi  neceffaires 
aux  François,  que  fans  ce'a  ils  ne  peuvent  jamais  réuîTir  dans  leurs  Entre- 
prifes;  car,  quoique  Nieuport  &  Oltende,  que  nous  regardons  à  préfent 
comme  étant  au  commandement  de  la  Cour  de  France  ,  foient  fort  avan- 
tageux aux  flottes,  qu'ils  peuvent  avoir  dans  ie  Canal,  neanmeins  pen- 
dant 


488    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aitatres    dant  que  les  Hollandois  feront  capables   de  traverfer  leurs  deffeins  avec 

GEN.  DE 

1,'Euao- 


leurs  flottes,  ils  ne  feront  jamais  fùrs  de  leurs  Entreprifes  &  de  leurs  Expe- 


PK. 


ditions  de  mer  fur  cette  partie  de  l'Europe.  Outre  que  le  commerce  ne 
peut  jamais  fe  rétablir  dans  les  Païs-Bas  Efpagnols  ,  que  les  forces  des 
Hollandois  ne  foient  auparavant  ruinées  par  mer. 

Les  chofes  étant  ainfi  à  l'égard  des  Hollandois,  leur  Intérêt  doit  être,  en 
premier  lieu,  d'entretenir  une  bonne  correfpondance  avec  la  Grande-Bre- 
tagne, &  de  faire  une  Ligue  offenfive  &  défenfive  avec  les  Angloisjmais 
auffi,  pour  la  rendre  ferme  &  durable, ils  doivent  prendre  des  mefures  qui 
puifl'ent  les  juflifier  de  ce  qu'on  leur  impute,  d'être  trop  attachez  à  leurs 
propres  intérêts,  &  de  vouloir  entreprendre  fur  le  commerce  d'autrui,  & 
fe  comporter  en  un  mot  de  telle  manière  que  nous  n'aïons  plus  fujet  de 
nous  plaindre  de  leurs  entreprifes  pour  empêcher  le  commerce  de  nos  ne- 
gotians. 

Il  eft  encore  de  leur  Intérêt  d'entretenir  une  bonne  Correfpondance  avec 
les  Couronnes  du  Nord,  qui  peuvent  les  affilier  de  leurs  Forces  par  mer 
&  par  terre.  Ils  en  doivent  faire  de  même  avec  l'Electeur  de  Brandebourg, 
&  les  trois  Princes  de  la  Maifon  de  Brunswick,  qui  font  en  état  de  balan- 
cer les  forces  de  l'Evêque  de  Munfter,  de  l'Electeur  de  Cologne,  du  Duc 
de  Nieubourg,  &  du  Chapitre  de  Liège,  leurs  voifins  Papilles,  en  cas  d'u- 
ne guerre  de  Religion,  dont  la  conjoncture  préfente  des  Affaires  fembîe 
menacer. 

Il  eft  aufll  de  leur  Intérêt  d'entretenir  l'amitié  de  ces  voifins,  dont  nous 
venons  de  parler,  &  tâcher  de  les  attirer  dans  une  Ligue  défenfive,  par  la 
confideration  du  Danger  commun, dont  ils  font  tous  menacez  par  l'Union 
de  la  France  &  de  l'Efpagne;  &,  fur-tout,  ils  doivent  bien  prendre  gar- 
de à  ne  pas  fe  précipiter  dans  leurs  refblutions  ,  pour  faire  aucune  ligue 
avec  la  France,  quelque  preflante  que  foit  la  necefîîté  de  leurs  Affaires: 
leur  trop  grande  précipitation  fur  ce  fujet,  fans  confulter  l'Angleterre  ,  & 
les  autres  Proteftans  leurs  voifins,  pouroit  leur  être  fatale,  de  même  qu'à 
toute  l'Europe.  Les  faufïès  démarches  qu'ils  firent  autrefois  en  fe  preffant 
trop  de  conclure  la  Paix  de  Nimégue,  contre  le  fentiment  de  leur  Stadt- 
houder,  &  de  l'Electeur  de  Brandebourg  leur  Allié,  peut  leur  fervir  de 
précaution  là-deffus. 

Nous  devons  examiner  à-préfeqt  quel  peut  être  l'Intérêt  de  l'Angleterre 
dans  cette  Conjoncture  :  & ,  en  premier  lieu  ,  il  femble  qu'il  eft  abfolu- 
ment  néceffaire  d'entrer  en  une  Amitié  plus  étroite  que  jamais  avec  les 
Hollandois.  Pour  cet  effet,  il  feroit  à  propos  que  le  Roi  &  le  Parlement 
fiffent  énfemble  tous  leurs  efforts ,  afin  d'éloigner ,  s'il  eft  poiîible  ,  tous 
les  fujets  réels  &  imaginaires  ,  dont  on  s'eft  autrefois  fervi,  pour  nous 
brouiller  avec  des  Voifins ,  dont  nous  avons  tant  de  befoin  ;  il  faudroit  donc 
accommoder  à  l'amiable  tous  lesDifférens  qui  regardent  le  Commerce,  & 
les  terminer  &  régler  d'une  telle  manière  ,  qu'ils  ne  puiffent  plus  à  l'ave- 
nir ,  s'il  eft  pofîible,  fervir  de  prétexte  à  faire  naître  de  nouvelles  Di- 
vifions.  ! 

Sous 


PF. 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  449 

Sous  le  Règne  glorieux  de  la  Reine  Elizabeth,  on  trouva  que  l'Intérêt  Affaire» 
de  l'Angleterre  l'obligeoit  indifpenfablement  à  affilier  les  Hollandois.  Et  GFN-  °£ 
les  fàcheufes  conféquences  de  nos  differens  furent  repréfentées  par  deux  L'EuRO* 
pjtsde  terre,  qui  flotoient  enfemble  ,  avec  cette  devife  ,  Si  coliidimur , 
frangimur,  c'eft-à-dire ,  Si  nous  choquons  ï un  contre  l'autre ,  nous  Comme  s  caf- 
fz.  Il  eft  plus  de  nôtre  Intérêt  à  préfent,  qu'il  n'étoit  alors  ,  d'entrete- 
nir une  bonne  Intelligence  ,  &  d'éviter  toute  forte  de  Divifions  avec  eux. 
Les  Efpagnols,  qui  étoient  alors  les  Champions  du  Papifme  ,  &  les  Pré- 
tendants à  la  Monarchie  Univerfelle,  avoient  la  France,  qui  s'oppofoit  à 
leurs  delTeins ,  &  n'avoient  point  d'autres  Pais  ,  d'où  il  leur  fût  poffible 
d'entrer  en  Angleterre,  que  la  Flandre  j  au-lieu  qu'à  préfent  la  France  & 
l'Efpagne  font  jointes  enfemble,  &  ont  la  Flandre  à  leur  commandement. 
De  forte  qu'on  peut  entrer  en  Angleterre  de  France  &  de  Flandre ,  & 
de  la  Hollande  auffi  ,'  Ci  une  fois  les  François  en  deviennent  les  Maitres; 
ce  qui  pourroit  arriver  bientôt,  fi  nous  ne  faifons  pas  tous  nos  efforts,  & 
ne  nous  joignons  unanimement  avec  les  Hollandois  pour  l'empêcher. 

Nous  y  fommes  obligez  auffi-bien  par  Intérêt  que  par  Reconnoiffance. 
C'eft  au  fecours  qu'ils  nous  donnèrent  dans  la  dernière  Révolution ,  que 
nous  fommes  redevables  de  tout  ce  que  nous  poffedons,  puis  qu'ils  nous 
ont  maintenus  dans  la  poffeffion  de  nos  Biens  &  de  nôtre  Religion  qu'on 
vouloit  nous  ravir.  Ce  fecours  ne  doit  pas  feulement  être  regardé  com- 
me un  équivalent  de  ce  que  nous  fîmes  pour  eux  fous  le  Règne  de  la  Rei- 
ne Elizabeth ,  mais  il  doit  encore  nous  obliger  à  prendre  foin  de  leur  fure- 
té, qui  fait  auffi  la  nôtre. 

Il  paroitra  vifiblement  que  nôtre  propre  Intérêt  doit  nous  y  engager,  Ci 
nous  confiderons ,  qu'il  n'y  a  point  de  Nation  fi  capable  que  les  Hollan- 
dois d'obliger  la  France  à  faire  diverfion  par  mer  &  par  terre,  fi  elle  en- 
treprenoit  d'entrer  en  Angleterre.  Il  eft  certain  qu'il  eft  de  nôtre  Intérêt 
d'éloigner  la  guerre  le  plus  loin  de  nous  ,  qu'il  nous  fera  poiïible  ;  & 
qu'elle  fe  faffe  plutôt  hors  de  nôtre  pais,  que  dans  le  fein  de  nôtre  propre 
patrie.  C'eft  ce  qu'on  a  pratiqué  avec  fuccès  fous  les  Règnes  de  la  Reine 
Elizabeth  &  de  fà  Majefté  qui  règne  à  préfent.  Nous  pouvons  le  faire 
auffi  long-tems  que  les  Hollandois  conferveront  leur  Liberté.  Nous  pou- 
vons les  afïifter  des  forces  Angloifes,  ou  prendre  à  nôtre  folde  des  Trou- 
pes d'Allemagne  &  des  Couronnes  du  Nord,  &  les  joindre  aux  Hollan- 
dois pour  agir  avec  eux  contre  la  France  (ï  la  neceffité  le  requiert  ;  ce- 
la obligera  la  France,  à  faire  diverfion  par  terre }  &  on  fait  fort  bien  que 
les  Hollandois  &  les  Anglois  peuvent  agir  par  mer  d'une  manière  offenli- 
ve  ou  défenfive,  félon  qu'ils  le  trouvent  à  propos. 

Mais  fi  nous  nous  laiffions  tellement  aveugler  par  quelque  confideration, 
•ou  prétexte  que  ce  foit,  que  de  ne  pas  prendre  des  mefures  conjointe- 
ment avec  les  Hollandois  pour  nôtre  mutuelle  confervation  ,  nous  pou- 
vons facilement  prévoir  les  conféquences  qui  en  refultent^  favoir, 

r.  Qu'il  faut  que  les  Hollandois  fe  foumettent  entièrement  au  Pouvoir 

ïïom.  xi.  Qqq  ^c 


Affaires 

G  EN    DE 

l'Euro- 
pe. 


4fo    MEMOIRES  ,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

de  la  France,  &  que  leur  Gouvernement  foit  diflbus,  ou  qu'ils  fe  foumet- 
tent  aux  François  aux  termes  qu'ils  leur  impoferont. 

2.  Si  cela  arrive,  nous  ne  pouvons  plus  en  aucune  manière  débarquer 
tranquilement  nos  troupes  en  aucun  endroit  de  l'Europe  ,  ni  par  confé- 
quent  obliger  la  France  à  faire  diverfion. 

3.  Nous  ne  ferons  pas  feulement  privez  du  puiiïant  fecours  que  les  Hol- 
landois  nous  peuvent  donner  par  mer,  mais  il  nous  faudra  de  plus  refifler 
à  toutes  leurs  Forces  navales  jointes  à  celles  de  France  &  d'Efpagne  ;  & 
alors  fans  contredit  la  partie  feroit  trop  forte  pour  nous. 

4.  Nous  courons  rifque,  non-feulement  qu'on  nous  empêche  tout  nôtre 
Commerce  de  la  Mer  Méditerranée ,  mais  encore  qu'on  ne  ruine  entière- 
ment celui  de  la  Mer  Baltique,  &  des  Indes  Orientales  &  Occidentales. 
Nous  avons  veu  dans  la  dernière  Guerre  comment  Bart  &  fes  Dunquer- 
quois  ont  interrompu  nôtre  Commerce  dans  les  mers  du  Nord;  ce  qui  doit 
nous  convaincre ,  que  nous  ne  pourrons  plus  trafiquer  fûrement  de  ce  cô- 
té-la, lorfque  les  Ports  de  Hollande,  Zelande,  &  de  Flandres,  feront  en- 
tre les  mains  des  François.     A  l'égard  de  nôtre  Commerce  de  Turquie  & 
de  la  Mer  Méditerranée,  il  faut  nous  refoudre  à  palier  le  Détroit  à  force 
ouverte,  &  quand  même  nous  réunirions  contre  tant  de  forces  de  Mer 
unies  enfemble,  comme  celles  dont  nous  venons  de  parler,  ce  qui  paroit 
impoffible,  les  Portugais  &  les   Italiens  n'ôferoient    nous  recevoir  dans 
leurs  Ports }  mais,  fupofé  qu'ils  voulufTent  bien  nous  y  donner  azile,  ils  ne 
pouroient  pas  être  long-tems  fans  fuivre  la  deltinée  des  Hollandois  ,  puis 
qu'ils  ne  lont  pas  en  état  de  refifterau  Pouvoir  de  la  France,  de  i'Efpagne, 
&  de  la  Hollande  unies  enfemble:  d'ailleurs,  ces  Peuples  trouveront  des 
moiens  pour  fe  rendre  maîtres  des  marchandifes  propres  pour  ces  Païs-là, 
en  établiiïant  des  manufactures  de  laine,  &c.  &  ils  les  vendront  eux-mê- 
mes.    Nôtre  Commerce  des  Indes  Orientales  fera  expofé  aux  mêmes  in- 
commoditez  ;  nous  ne  ferons  pas  feulement  en  danger  d'être  attaquez  en 
allant  &  venant,  mais  nous  verrons  auffi  les  Comptoirs  François  &  Hol- 
landois des  Indes  joints  enfemble  contre  les  nôtres  pour  les  détruire;  ou  fi 
cela  n'arrivoit  pas,  les  François  étant  plus  forts  que  nous  fur  mer  ,   nous 
n'aurions  pas  la  liberté  de  tranfporter  les  marchandifes  que  nous  en  rapor- 
terions,.  comme  nous  l'avons  eue  jufques  ici;  &  nôtre  Commerce  venant 
à  diminuer,  nos  peuples  deviendroient  de  toute  neceffité  pauvres,  &  par 
conféquent  incapables  de  pouvoir  Confumer  beaucoup  de  ces  marchandifes 
dans  le  pais.     Les  mêmes  difficukez  fe   rencontreront  à  l'égard   de   nos 
Plantations  &  de  nôtre  Commerce  aux  Indes  Occidentales.     Les  Fran- 
çois ont  des  Ftablifîemens  fi  proches  des  nôtres ,  &  les  Efpagnols  font  II 
jaloux  du  Commerce  de  l'Amérique  ,  qu'ils  donneront  promptement  &  vo- 
lontiers les  mains  pour  aider  à  nous  y  ruiner.     11  eft  vrai  qu'à  prefent  nos 
forces  font  confiderables  de  ce  côté-là  ,  mais  fi  nous  ne  fommes  pas  en 
état  de  les  encourager  &  de  les  fecourir,  comme  on  ne  peut  pas  raifonna- 
blement  fuppofer  que  nous  le  foions,  les  chofes  étant  fur  le  pié  que  nous 

avons 


l'Euko- 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  451 

avons  dit,  ces  Plantations  feront  infailliblement  ruinées,  par  nos  Enne-  Affaires 
mis  Confederez.  G.Ej*-  DR 

f.  Nôtre  Commerce  étant  ainfi  détruit  par  mer,  nous  tomberons  inévi- 
tablement dans  la  pauvreté,  &  nôtre  puiflance  fur  mer  diminuera:  ce  qui 
ne  peut  que  caufer,  outre  la  perte  des  grands  thréfors  que  la  Nation  a 
dans  le  négoce,  la  ruine  d'un  nombre  innombrable  de  familles,  non  feu- 
lement de  ceux  qui  font  emploiez  fur  mer  ,  comme  les  Matelots  &  les 
Maitres  de  Navire,  mais  auffi  des  Marchands  &  des  Ouvriers  qui  gagnent 
leur  vie  à  fabriquer,  à  acheter,  tranfporter,  &  charier  les  marchartdifés 
d'un  côté  &  d'autre.  Toute  la  Nation  en  gênerai ,  depuis  le  Roi  jufques  au 
moindre  Ouvrier  qui  travaille  à  la  journée  ,  en  reffentiroit  bien-iot  les  fa- 
cheufes  conféquences  :  il  faut  que  toutes  les  branches  des  revenus  du 
Gouvernement  diminuent  par-là;  &  ceux,  qui  vivent  des  emplois  qu'ils 
tiennent  du  Gouvernement,  doivent  penfer  à  prendre  une  nouvelle  ma- 
nière de  vivre.  Les  revenus  des  terres  foufFriront  aufïi  une  diminution 
considérable  :  ceux  qui  s'appliquent  à  cultiver  la  terre,  ou  trafiquer  en 
beftiaux  ,  ne  trouveront  pas  que  leur  travail  &  leur  induftrie  leur  rapporte 
autant  de  profit  qu'auparavant;  de  forte  que,  par  une  conféquence  ne- 
celTaire  ,  il  faut  que  nous  devenions  pauvres  &  hors  d'état  de  nous 
pouvoir  défendre. 

6.  La  Hollande  étant  ainfi  réduite  ,  nous  fommes  expofez  à  une  In- 
vafion  de  la  part  de  la  France  &  de  l'Efpagne  ,  fans  qu'il  nous  relie 
aucune  efperance  de  pouvoir  obtenir  le  moindre  fecours  de  l'Europe. 
Voilà  les  conféquences  qui  doivent  neceffairement  arriver  ,  fi  nous  ne 
nous  intereflbns  pas  à  la  confervation  des  Hollandois,  qui ,  réduits  à  l'ex- 
trémité faute  de  fecours,  fuivront  l'exemple  des  Espagnols  ,  &  compo- 
feront  pour  eux-mêmes  du  mieux  qu'il  leur  fera  poffible  ,  afin  de  pro- 
longer le  tems  de  leur  Liberté,  &  d'avoir  la  tnite  confolaLion  d'être  les 
derniers  détruits.  Il  paroit  par  les  Lettres  de  Mr.  le  Chevalier  Tem- 
ple ,  qu'ils  étoient  aufîï  difpofez  à  prendre  une  pareille  refolution  lors 
que  le  danger  étoit  moindre,  ou  qu'il  égaloit  à  peine  celui  dont  ils 
font  menacez  :  Voici  ce  qu'il  nous  dit  là-deflus  :  „  Si  les  François  fe 
„  rendent  Maitres  de  la  Flandre  ,  comme  ils  le  peuvent  fort  bien  dans 
„  une  Campagne,  à  caufe  de  la  foibleile  &  des  defordres  du  Gouverne- 
„  ment  ,  les  Hollandois  voient  bien  qu'il  faut  qu'ils  deviennent  une  Pro- 
,,  vince  maritime  de  la  France  ,  aux  meilleures  Conditions  qu'il  leur  fera 
„  poffible  d'obtenir. 

Mais,  parce  que  ce  grand  Politique  nous  dit  immédiatement  après  ce 
qu'il  penfoit  du  danger  auquel  un  tel  malheur  auroit  expofé  toutes  les 
autres  Parties  de  l'Europe,  &  fur-tout  l'Angleterre,  on  a  trouvé  à  pro- 
pos de  rapporter  ici  fon  fentiment  fur  ce  fujet  :  ,,  L'Empire  ,  dit-il , 
„  doit  s'attendre  de  les  voir  bien-tôt  fur  le  Rhin,  &  par-là  Maitres  de 
,,  quatre  Electeurs  ;  &  il  eil  facile  de  juger  en  quelle  condition  fe 
„  trouveroit  l'Angleterre  par  cette  augmentation  de  Forces  de  Mer,& 

Q_qq  2.  „  de 


FE. 


4fi    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,    ET 

Aftaihe?   „  de  Provinces  à  une  Puiflance  comme  eft  déjà  celle  de  France  ;  c'efi 

çen.  de    }J  à  quoi  on  ne  fçauroit  penfer  fans  en  être  affligé. 

J*'^i"KO"  Si  cet  habile  Miniitre  étoit  alors  dans  ce  fentiment,  n'avons-nous  pas 
raifon  de  conclurre  ,  que  le  danger  eft  aujourd'hui  beaucoup  plus  grand 
pour  nous?  Les  François  font  actuellement  fur  le  Rhin  ,  en  polie  fiion  de 
Strasbourg,  une  des  plus  importantes  places  qui  foit  fur  ce  fleuve;  &  fans 
efluïer  les  fatigues  ou  les  hazards  d'une  campagne,  ils  ont  la  liberté  d'en- 
trer en  Flandre,  quand  il  leur  plaira.  11  paroit  aufîi  qu'ils  ont  deflein  de 
Je  faire,  &  qu'ils  font  prêts  à  l'exécuter,  lorfqu'on  confidere  les  offres 
qu'ils  ont  depuis  faites  au  Gouvernement  des  Pais-Bas  Efpagnols,  les  me- 
naces qu'ils  font  aux  Hollandois  dans  leur  Mémoire,  &  les  ordres  qu'ils 
ont  donnez  à  tous  les  Proteftans  étrangers  de  fe  retirer  de  Dun- 
querque. 

C'eft  en  vain  qu'on  diroit,  que  le  Gouvernement  Efpagnol  ne  le  permet- 
tra pas  ;  la  môme  voye,  dont  on  s'eft  fervi  pour  les  obliger  à  recevoir  le 
Duc  d'Anjou  pour  leur  Roi ,  aura  allez  d'influence  pour  les  obliger  à  le 
permettre,  &  à  faire  encore  beaucoup  davantage  s'il  eft  nécefTkire.  Ils 
ne  manquent  pas  de  prétextes  de  neceflité;  c'elt  pour  garantir  ces  Provin- 
ces d'une  Invafion  de  l'Angleterre  &  de  la  Hollande,  qui  n'ont  pas  recon- 
nu jufques  ici  le  Duc  d'Anjou  ;  c'eft  pour  faire  fortir  les  Troupes  Hollan- 
doifes  des  Garnifons  Efpagnoles  ,  êc  depofer  l'argent  qui  elt  necefîaire 
pour  cela.  Ces  raifons  font  li  fortes,  que  le  Gouvernement  d'Efpagne  n'efl 
pas  en  état  d'y  pouvoir  répondre.  D'ailleurs  ,  la  prudence  ne  leur  permet 
pas  de  faire  paroitre  préfentement  qu'ils  fe  défient  de  Louïs  XIV.  de  peur 
de  le  fâcher.  Que  fçait-on  s'ils  le  mettoient  en  colère,  s'il  ne  prétendroit 
pas  quelqu'autre  forte  de  Droit  fur  leur  Couronne  ,  que  celui,  qu'il  fonde 
fur  leur  Invitation ,  &  le  Teftament  de  leur  Roi  défunt  ?  Puis  donc  qu'ils 
font  obligez  à  demeurer  en  Paix  avec  la  France  ,  les  Païs-Bas  ne  leur 
font  plus  de  la  même  importance  ,  qu'ils  étoient  autrefois  ;  &  il  n'y  a 
nulle  apparence  qu'ils  veuillent  donner  aucun  chagrin  aux  François  à 
cet  égard,  &  encore  moins  rompre  avec  eux  pour  cela. 

11  y  a  encore  deux  autres  Confiderations  qui  rendent  cette  Union  de 
la  France  &  de  l'Efpagne  plus  dangereufe  à  l'Angleterre,  que  n'étoienc 
les  Entreprifes  des  Efpagnols  feuls,  lors  qu'ils  afpiroient  à  la  Monarchie 
Univerfelle. 

La  première  eft,  que  ces  deux  Royaumes  font  contigus,  &  peuvent  fa- 
cilement fe  communiquer  leurs  defTeins,&  leurs  délibérations,  &  s'envoier 
l'un  à  l'autre  leurs  Forces  ;  au- lieu  que  les  deux  Branches  de  la  Maifon 
d'Autriche  étoient  fort  éloignées  l'une  de  l'autre,  &  ne  pouvoient  join- 
dre leurs  Forces  fans  faire  de  grands  fraix  &  prendre  beaucoup  de  peine 
à  les  tranfporter  par  mer,  ou  les  expofer  à  de  longues  &  pénibles  marches 
par  terre.  Mais,  les  François  peuvent  facilement  de  leurs  Côtes  &  de  la 
Flandre  entrer  en  Angleterre,  fans  fatiguer  leurs  Troupes,  comme  les  Es- 
pagnols étoient  obligez  de  faire  en  pareil  cas. 

La 


PK. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  455 

La  féconde  Confideration  eft  ,  que  les  François  ont  chez  eux  le  Roi  Aptaire» 
Jaques  &  fes  prétendus  Delcendans;  ils  peuvent  nous  faire  une  querelle  ci-n.  de 
îà-deflus  ,  &  Te  joindre  aux  Papilles  &  à  plufieurs  Proteitans  déraifonna- 
bles  qui  ont  de  mauvais  principes  &  maintiennent  Ton  Droit.  Nous  aurions 
appris  par  une  trilte  expérience,  combien  cette  forte  de  gens  font  dange- 
reux, fi  Dieu  n'avoit  pas  empêché  l'exécution  de  l'horrible  deffein  qu'on 
avoît  d'aflaiîiner  le  Roi  &  de  la  Defcente  des  François.  Ou  bien  s'ils  trou- 
vent à  propos  d'abandonner  les  prétentions  du  Roi  Jaques  ,  &  de  retenir 
lui  &  fes  enfans  comme  prifonniers  en  France,  ou  d'en  difpofer  de  quel- 
qu'autre  manière,  ils  ont  un  Prince  de  la  Maifon  de  Savoye,  &  plufieurs 
Princes  du  Sang,  qui  ont  autant  de  Droit  par  leur  n  ai  (Tance  à  la  Couronne 
de  la  Grande-Bretagne,  que  le  Duc  d'Anjou  en  avoit  à  la  Couronne  d'Ef- 
pagne;  ils  n'ont  qu'à  s'éloigner  un  peu  plus  de  la  Ligne  directe,  ce  qui  en 
pareil  cas  n'elt  pas  une  Affaire,  &  ils  tâcheront  d'établir  un  de  leurs  Prin- 
ces fur  le  Ttirone  de  nos  Rois.  Que  fçait-on  (1  à  préfent  l'humeur  ambi- 
tieufe  des  François,  foutenus  par  un  fi  grand  Pouvoir,  &  encouragez  par 
une  occafion  fi  favorable,  ne  les  engagera  pas  dans  ce  projet?  Ce  feroit 
le  véritable  moyen  de  faire  voir,  qu'ils  ont  plus  d'efprit,  &  qu'ils  font  plus 
adroits,  que  la  Maifon  d'Autriche,  quia  donné  deux  têtes  à  fon  Aigle , 
car  par  ce  coup  d'Etat  les  François  pourroient  enter  leurs  Lys  fur  trois  ti- 
ges. Je  croi  que  toutes  ces  raifons  fuffifent  pour  faire  voir  évidemment 
qu'il  e(t  de  nôtre  Intérêt  de  faire  une  Alliance  fort  étroite  avec  les  Hollan- 
dois,  &  de  nous  affilier  mutuellement  les  uns  les  autres. 

Enfuite,  il  femble  qu'il  e(t  de  nôtre  Intérêt  de  faire  une  Ligue  avec 
l'Empereur  &  l'Empire  ,  pour  maintenir  la  Liberté  de  toute  l'Europe  9 
contre  le  Pouvoir  formidable  de  la  France  ,  &  de  faire  valoir  le  Droit  de 
l'Archiduc  d'Autriche  à  la  Couronne  d'Efpagne.  Les  avantages  qui  nous 
en  peuvent  revenir ,  font  : 

1.  Que  par  ce  moien  la  France  fera  obligée  à  faire  une  puifFante  Diver- 
llon  fur  le  Haut  Rhin  &  en  Italie;  car  cela  encouragera  l'Empereur  a  met- 
tre tout  en  œuvre ,  pour  établir  le  Droit  de  fa  Famille  ,  &  fe  vanger  lui- 
même  de  l'injuflice  qu'on  lui  a  faite  ^  fts  éforts  obligeront  le  Roi  de  Fran- 
ce à  lui  opofer  de  puiffantes  armées;  &  par  conféquent  ce  Monarque  ne 
pourra  pas  exécuter  les  deffeins  qu'il  a  formé  fur  la  Hollande  &  fur  l'An- 
gleterre. 

2.  Cela  peut  engager  le  Parti  de  la  Maifon  d'Autriche  en  Efpagne  à 
s'oppofer  autant  qu'il  pourra  aux  Intérêts  de  la  France:  fi  l'Empereur  mê- 
me entroit  en  Alliance  avec  ie  Roi  de  Portugal ,  il  pourroit  encore  faire 
Diverfion  de  ce  côté- là  ,  &  empêcher  que  les  Forces  de  France  ne 
fulTtnt  pas  fi  puiffantes  ailleurs.  Car  le  véritable  moien  de  diminuer 
la  force  d'un  courant ,  c'eft  d'en  détourner  les  eaux  par  plufieurs  en- 
droits. 

3.  En  vertu  de  cette  Ligue  avec  l'Empereur,  il  y  a  toute  apparen- 
ce que  nous  pourrions  obtenir  quelque  relâche  pour  nos  Frères  Pro- 
teitans perfecutez  ,   non-feulement  dans  l'Empire  ,   mais  auiîi  en  Ilon- 

Qqq  3  £ne> 


4*4     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

àftmrfs    grie ,  &  les  autres  Pais  qui  lui  apartiennent.    Il  n'y  a  nul  doute  qu'en- 
of.s.  de    reconnoiflancc  de  ce  que  nous  ferions  pour  lui,  &  en  veiie  de  Ton  pro- 
l'Euko-     pre  jntergt)  \\  ne  founriroit  pas  que  les  François   allumallent  davantage  la 
FF"       perfecution  en  Hongrie ,    à  deflein  de   conferver  un  pafTage  aux  Turcs 
pour  rentrer  dans  l'Empire.     Si  on  obtenoit  une  telle  chofe,  cela  fupplée- 
roit  au  défaut  de  l'article  du  Traité  de  Ryfwick,  qui  a  ruiné  tant  de  cen- 
taines d'Eghfes  Protestantes ,  &  expofé  les  Reformez  de  l'Empire  à  de 
fi  cruelles  Perfecutions  ,  fur-tout  ceux  du  Palatinat ,   qui  pourront  aifé- 
rnent  obtenir  leur   Liberté  ,    lorfque   l'Empereur  voudra  parler   en  leur 
faveur  ,    ou  plutôt   donner   fes  Ordres   à  fon  Beaufrere   l'Electeur  Pa- 
latin. 

4.  Cette  Alliance  entre  l'Angleterre,  la  Hollande,  &  l'Empire,  feroit 
un  des  moyens  du  monde  le  plus  fur  pour  prévenir  une  Guerre  de  Reli- 
gion, &  cbaffer  en  Italie  la  tempête  que  la  Cour  de  Rome  a  defiein  de 
faire  tomber  fur  nous. 

Mais ,  en  cas  que  le  Conclave  de  Rome,  guidé  par  la  Politique  de  fon 
Chef,  eut  l'adreiTe  de  trouver  des  voyes  pour  ajulter  les  différents  Intérêts 
de  l'Empereur  &  de  la  France,  &  de  les  unir  enfemble  contre  les  Prote- 
flans,  fou  par  des  Mariages,  ou  la  Ceffion  du  Milanez  à  la  Maifon  d'Au- 
triche, ou  par  des  promelïes  que  la  France  aiîitteroit  l'Empereur  pour  fe 
rendre  abfolu  en  Allemagne,  à  condition  qu'il  abandonneroit  de  fon  côté 
fes  prétentions  à  la  Couronne  d'Efpagne,  il  femble  qu'il  feroit  necdfaire 
de  nous  précautionner  là-detTus.  Il  elt  vrai  que  ce  Projet  fera  difficile  à 
exécuter ,  &  qu'on  peut  s'imaginer  qu'il  eit  contraire  a  la  Politique  de 
France,  parce  que  l'Empereur  deviendroit  par-là  trop  redoutable;  mais 
fi  on  coniidere  que  ces  deux  Familles  font  pofTedées  par  la  Bigoterie,  & 
par  cette  Maxime  de  l'Eglife  Romaine,  que  la  Propagation  de  fa  Foi  doit 
être  préférée  atout  autre  Intérêt,  &  que  fi  l'Empereur  étoit  abfoiu  en 
Allemagne,  les  Forces  de  la  France,  de  l'Efpagne,&  des  Païs-Bas  join- 
tes enfemble  &  fupôrtées  par  les  Threfors  de  l'Amérique ,  feroient  enco- 
re trop  puiflantes  pour  lui ,  on  verra  que  cette  proposition  peut  tenter 
un  efprit  foible  &  ambitieux  plus  qu'on  ne  pourroit  d'abord  fe  l'ima- 
giner. 

Quoiqu'il  en  foit,  il  eft  certain  que  l'intérêt  des  Proteftans  efl  en  très- 
grand  danger,  &  qu'il  y  feroit  encore  beaucoup  davantage  fi  une  telle 
Union  venoit  à  fe  faire.  "  C'elt  pourquoi  il  elt  à  propos  qu'ils  penfent  aux 
méthodes  qu'ils  doivent  prendre  pour  leur  fureté,  quelque  chofe  qu'il  ar- 
rive; &  il  faut  remarquer  que  l'Idolâtrie  Romaine  a  de  grands  avantages 
fur  la  Reformation,  à  plufieurs  égards. 

1.  Elle  s'accommode  mieux  aux  deffeins  ambitieux  des  Princes  qui  afpi- 
rent  au  Pouvoir  Arbitraire.  Pour  une  Libéralité  faite  à  l'Eglife,  ils  font 
bientôt  abfous  de  toutes  les  Obligations  qui  les  engagent  à  maintenir  leurs 
Sujets  dans  la  poiTeiîion  de  leurs  Libertez.  Les  Serments  faits  au  Couron- 
nement, les  Paffa  Conveuta,  les  Bulles  d'Or,  les  Conltitutions  des  Diètes, 
les  Parlemens  6c  les  Coriès,  ou  tout  ce  qu'il  vous  phira,  ne  font  qu'au- 
tant 


P£. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  I.  en- 

tant de  toiles  d'araignée  qui  ne  fcauroient  les  arrêter,  &  que  la  difpenfa-  Affaires 
tion  du  Pape  peut  abatre  facilement.  Les  Meurtres,  les  Aflaffinats,  les  G'N-  DE 
MafTacres,  &  les  plus  grands  Crimes  que  l'Enfer  puiffe  fuggerer,  ou  que 
la  malice  des  hommes  puiffe  exécuter ,  peuvent  être  fanétifiés  par  la  con- 
fecration  du  Pape.  C'ell  une  vertu,  que  de  ne  pas  tenir  la  Foy  aux  Héré- 
tiques ;  &  l'obferver  ceft  un  crime,  par  la  Décifion  de  leurs  Conciles; 
de  forte  que  nousnefaurions  prendre  trop  de  précautions  contre  cette  Re- 
ligion, &  les  Princes  qui  la  profeiTent.  Il  eft  vrai,  que  les  principes  d'hon- 
neur &  le  bon  naturel  prévalent  quelquefois  fur  le  poifon  de  leurs  Princi- 
pes; mais,  on  ne  doit  pas  trop  fe  repofer  là-defTus. 

Un  fécond  avantage  que  le  Papifme  a  fur  la  Reformation  c'eft  que  ,  fui- 
vant  fes  Principes  ,  les  homn.es  peuvent  être  aufîi  méchants  qu'il  leur 
plait,  &  malgré  tout  cela  fe  faire  un  paiTuge  pour  aller  au  Ciel  avec  des 
Pardons,  des  Indulgences ,  des  Jubilez  ,  des  Pénitences,  des  Méfies  pour 
les  Ames  ,  .&c.  mais  la  meilleure  de  toutes  les  voyes  pour  parvenir  au 
Ciel,  c  eft  de  perfecuter  &  de  détruire  ceux  qu'ils  appellent  Hérétiques: 
voili  quelle  eit  la  manière  la  plus  facile  pour  expier  les  plus  grandes  cruau- 
tez,  &  les  crimes  les  plus  abominables;  &  par  confequent  un  Principe 
contre  lequel  les  Reformez  doivent  fe  précautionner  comme  le  plus  per- 
nicieux &  le  plus  propre  à  déterminer  la  nature  corrompue  de  l'homme  au 
mal,  que  jamais  l'Auteur  des  faufles  Religions  ait  inventé. 

Un  troiliéme  avantage  que  les  Catholiques  Romains  ont  fur  les  Refor- 
mez, c'eft  qu'ils  ont  un  Chef  fke  &  certain,  qui  les  protège  &  les  affi- 
lie par  tout  le  monde,  &  à  qui  ils  ont  recours  dans  toutes  leurs  pref- 
fantes  neceflitez.  Le  Pape,  ou  plutôt  le  Siège  de  Rome,  ell  le  centre 
de  leur  Union,  &  quoique  leurs  différents  Sentimens  foient  plus  confi- 
derables  ,  en  plus  grand  nombre  ,  &  pouffez  avec  beaucoup  plus  d'ai- 
greur, que  ceux  qui  fe  rencontrent  entre  les  Proteilans,  néanmoins  le 
Pape  &  fon  Conclave  font  fi  Politiques,  qu'ils  les  retiennent  tous  dans 
la  Communion  de  l'Eglife;  & ,  à  la  honte  de  quelques  Proteltans,  ils  ne 
reftraignent  pas  fi  fort  les  termes  de  Communion,  qu'ils  en  excluent  au- 
cun de  leurs  Membres;  &  leurs  différentes  Opinions  n'empêchent  pas  les 
les  Laïques,  de  quelque  Secle  qu'ils  foient  parmi  eux,  de  pofieder  des  em- 
plois civils. 

Pour  contrepefer  tous  ces  avantages,  il  s'enfuit  naturellement  que  les 
Princes  &  Etats  Proteilans  devroient  faire  entr'eux  une  Alliance  offen- 
ûve  &  défenfive  à  caufe  de  leur  Religion  :  afin  que  le  Gouvernement 
de  chaque  Royaume  ou  Etat  prit  foin  ,  qu'aucun  de  fes  Sujets  Proteflans , 
qui  reconnoiffent  la  Doctrine  établie  dans  le  Pais,  ne  fut  rendu  incapable 
de  pofieder  les  Emplois  Ecclefiaftiques  &  Civils ,  par  cela  feul  qu'ils  diffé- 
rent en  d'autres  choies;  &  qu'il  y  eut  une  Tolérance  mutuelle  des  uns  & 
des  autres  fur  ces  petites  différences;  fans  qu'on  impofat  à  perfonne  d'au- 
tres termes  de  Communion  ,  que  les  termes  révélez  du  faiut.  11  n'y  a 
point  de  Nation  Reformée  dans  Je  Monde ,  qui  foit  plus  coupable  en  ceci 

que 


4r6     MEMOIRES,  NEGOTI ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

ftmxuEs   que  l'Angleterre  :  c'ell  pourquoi  nous  devons  y  prendre  garde  de  plus 


eu»,  oe    pic3  qu'aucune   autre. 
l'Euro- 

PE. 


Quoique  les  Principes  de  la  Reformation  ,  ou ,  ce  qui  eit  la  même  chofe , 
du  Véritable  Chriltianifme,  foient  fi  nobles  &  fi  fublimes,  qu'ils  ne  nous 
permettent  pas  d'avoir  un  Chef  Spirituel  fur  laTerre,  il  ne  s'enfuit  pas  dé- 
jà, que  les  Proteftans  ne  puiffent  s'accorder  entr'eux  à  reconnoitre  un 
Protecteur  commun  &  un  Chef  civil  fur  la  Terre.  Cela  regarde  le  Gou- 
vernement de  notre  Ifle,  &  la  Reine  Elizabeth  s'aquita  glorieufement  de 
cet  Emploi  malgré  tous  les  defavantages  de  fon  Sexe  :  mais ,  les  caufes  qui 
ont  empêché  fes  SucceÛeurs ,  jufques  à  la  dernière  Révolution,  de  s'en 
aquiter  avec  la  même  exactitude,  font  fi  connues  qu'il  feroit  inutile  d'en 
parler  ici. 

Mais ,  à  préfent ,  que  Dieu  nous  a  donné  en  fa  bénédiction  un  Prince,  qui 
efl  le  Héros  de  ion  Siècle,  defeendu  d'une  Famille,  qui,  pendant  le  Siècle 
dernier,  a  été  le  Fléau  du  Papifme  &  le  Bouclier  de  la  Réformation,  qui 
peut  empêcher  les  Proteftans  de  le  reconnoitre  pour  leur  commun  Pro- 
tecteur ?  Il  femble  que,  pour  en  venir  à  bout,  il  elt  de  l'Intérêt  de  cette 
XsTation  de  fournir  à  Sa  Majefié  les  moiens  d'agir  comme  tel,  &  de  lui  ai- 
der à  trouver  &  prévenir  les  caufes  qui  ont  fait  diminuer  depuis  peu  le 
Crédit  des  Reformez  par  tout  le  Monde.  On  n'avoit  pas  fujet  de  s'en  é- 
tonner  ,  lorfque  Louis  XIV.  triomphoit  par-tout  fans  trouver  aucune  opo- 
fition  ,  parce  qu'alors  le  Trône  de  la  Grande-Bretagne  étoit  dévoué  au 
Siège  de  Rome.  Mais ,  fi  cette  Eglife  continue  à  étendre  fes  Conquêtes , 
lorfque  l'Angleterre  &  la  Hollande,  qui  font  les  deux  grandes  PuhTances 
Proteftantes  de  l'Europe,  feront  jointes  enfemble  fous  un  Prince  Prof- 
itant, qui  s'eit  autant  distingué  par  fon  zèle  pour  fa  Religion,  que  par  fa 
valeur  dans  le  Champ  de  Mars,  on  doit  reconnoitre  de  toute  necefiité 
qu'il  y  a  quelque  défaut  fecret  efl  qui  impardonnable. 

Afin  donc  que  Sa  Majelté  fe  puhTe  charger  d'une  Ci  glorieufe  Commif- 
lion,  il  ne  faut  pas  feulement  qu'il  y  ait  une  Alliance,  faite  entre  les  Prin- 
ces &  les  Etats  Proteflans,  comme  celle  dont  nous  avons  parlé,  &  qu'ils 
aient  tous  conlènti  à  donner  à  Sa  Majelté  un  plein  Pouvoir  de  rechercher 
les  ufurpations  faites  au  préjudice  de  l'Intérêt  Protef  tant,  par  tout  le  mon- 
de ,  &  au  nom  de  tout  le  Parti  de  proteiter  contre ,  de  demander ,  &  faire 
en  forte  que  les  chofes  foient  rétablies;  mais  il  faut  encore  que  tous  les  dif- 
férents qui  font  entre  nous  foient  tellement  remisa  faDécifion,qu'ilnepuifle 
pas  être  a  l'avenir  au  pouvoir  d'aucun  Prince  ou  Parti  Domeltique ,  ou  étran- 
ger, d'armer  les  Proteflans  les  uns  contre  les  autres,  fous  quelque  prétexte 
que  ce  foit.  On  fuivoit  cette  Méthode  fous  les  derniers  Règnes  pour  intro- 
duire le  Papilme  &  TEfclavageà  la  faveur  de  nos  Divifions:  de  forte  que 
nous  devons  les  éviter  avec  d'autant  plus  de  foin  qu'elles  nous  ont  caufé  de 
terribles  maux.  Cette  précaution  ne  doit  pas  feulement  s'étendre  aux  Diffé- 
rends fur  les  matières  de  Religion,  mais  au(ii  aux  Démêlez  d'une  autre  nature, 
dont  on  s'eit  fervi  pour  fomenter  la  difeorde  parmi  nous,  comme  font  par 

éxem- 


PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.    I.  407 

exemple  les  différentes  opinions  fur  l'étendue  des  Prérogatives ,  Privile-   Affaires 
ges,&  Pouvoir  des  Parlemens;  ce  qui  nous  a  divifez,  &  nous  divife  en-     skn.de 
core,  par  des  Diitinclions  odieufes  de  Whigs  &  de  Torys,  c'eft- à-dire, 
de  Républicains  &  de  Royaliftes.     Il  n'y  a  point  d'homme  fage  de  l'un  &• 
de  lautre  Parti,  qui  ne  vous  dife,  lorfqu'il  parle  de  fens  ralîis ,  qu'il  eft 
pour  préferver  la  vraie  Conftitution  du  Gouvernement  d'Angleterre.   Puis 
donc  que  cela  eft  ainfi ,  &  que  les  Loix  de  l'Etat  fervent  de  limites,  en- 
tre la  Prérogative  &  le  Droit,  quelle  raifon  y  a-t-il,  qu'une  perfonne  qui 
veut  donner  cette  aiTurance  de  fa  fidélité,  que  la  Loi  requiert,  foit  regar- 
dée de  mauvais  œil,  ou  comme  incapable  de  fervir  la  Patrie?    De  telles 
Divifions  n'âffoiblifîent  pas  feulement  la  confiance  mutuelle  que  nous  de- 
vons avoir  les  uns  pour  les  autres,  mais  interrompent  auffi  la  tranquilité 
publique,  nous  font  moins  confiderer  au  dehors,  &  nous  expofent  aux 
Intrigues  des  Princes  &  des  Etats  étrangers.     Mr.  le  Chevalier  Temple  a 
fait  une  Remarque   fort  judicieufe  dans  le  fécond  Volume  de  fes  Lettres. 
Il  écrivoit  de  la  Haye  le  22.  Juillet  16 70.  à  Mr.  le  Chevalier  Trevor,  & 
il  lui  difoit  :    „  Je  fuis  fâché  que  l'Affaire  des  Conventicules  vous  donne 
„  tant  de  peine.    Je  fouhaiterois  que  toutes  ces  Controverfes  fuffent  fi- 
„  nies,  car  elles  font  voir  dans  les  Pais  étrangers,  que  le  Roi  a  un  très- 
„  grand  nombre  de  fujets,qui  ne  favent  pas  lui  obéir,  &  qui,  bien  loin  de 
,,  faire  une  partie  de  là  force,  femblent  plutôt  la  diminuer,  &  qu'il  amu- 
,,  fe  le  Peuple  au  dedans  &  au  dehors  du  Royaume  par  de  vaines  efpé- 
„  rances  de  remédier  à  tous  ces  defordres.  Cependant,  Mr.  van  Beunin- 
,,  ghen  a  reprefenté  ici  la  chofe  comme  une  Affaire  dont  Sa  Majefté  vien- 
,,  dra  plus  aifément  à  bout  que  vous  ne  penfez;  mais  l'Intérêt  des  Hoilan- 
„  dois  leur  perfuade  peut  être  ce  qu'ils  défirent,  dans  l'attente  que  cela  don- 
„  neroit  lieu  à  beaucoup  de  perfonnes   de  venir  parmi   eux  avec  leurs 
„  éfets,  &  qu'ils  augmenteroient  ainfi  leur  Commerce  parla  diminution 
„  du  nôtre.  „ 

Ces  divifions  à  l'égard  des  fentimens  ne  font  pas  le  feul  mal  qui  nous  af- 
flige, nous  fommes  encore  divifez  au  fujet  du  Commerce:  nous  avons 
Compagnie  contre  Compagnie,  &  il  femble  que  toutes  deux  veuillent  ex- 
clurre  de  leur  Trafic  le  relie  de  la  Nation.  Tout  le  Monde  fçait  quelle 
influence  ont  eu  ces  Démêlez  dans  quelques-unes  de  nos  dernières  E- 
ledtions  ;  &  il  n'efl  pas  facile  de  prévoir  jufqu'où  cela  peut  s'étendre 
dans  la  fuite,  ni  quel  effet  peuvent  avoir  ces  Elections,  qui  regardent  le 
Gouvernement,  &  par  une  conféquence  neceiîaire  la  Paix  de  l'Etat.  Il 
fera  même  difficile  d'arrêter  leurs  brigues  là-deilus,  fi  les  perfonnes  qui 
les  doivent  accommoder,  ne  prennent  au  plutôt  de  juites  mefures  pour 
terminer  leur  différent. 

On  peut  dire  la  même  chofe  des  Griefs,  dont  les  Ecoffois  &  les  Ir- 
landois  fe  plaignent.  On  doit  avoir  foin  de  remédier  aux  chofes  dont 
ils  fe  plaignent  avecjuitice.  Et  il  femble  que  les  Avis  des  Compagnies 
de  Commerce,  ou  de  ceux  qui  ont  des  vues  différentes  de  ce  que  les 
Parlemens  de  ces  deux  Nations  croient  être  indifpenjdblcment  de  leur 
îome  XL  Rrr  Inte- 


PE. 


498    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  Intérêt,  ne  devroient  pas  être  fuivis  à  cet  égard,  &  qu'une  Conférence 
gen.  de  à  l'amiable  entre  des  CommifTaires  choifis  par  les  Parlemens  des  trois 
î/Euro-  £jatjons  t  &  autorifez  pour  cet  effet  par  fa  Majefté ,  feroit  un  bon  ex- 
pédient pour  remédier  à  la  mauvaife  intelligence  qui  s'y  efl  déjà  glif- 
fée  ,  &  prévenir  une  pareille  brouillerie  à  l'avenir.  Nôtre  fureté  dé- 
pend de  nôtre  Union; ces  divifions,-  pouffées  plus  loin  dans  la  conjonctu- 
re où  nous  fommes,  peuvent  ouvrir  la  porte  à  l'Ennemi  commun,  & 
jufques-à  ce  qu'on  ait  pris  de  plus  exactes  mefures,  on  ne  devroit  rien 
faire  qui  parût  tendre  à  refufer  à  ces  deux  Nations  ce  qu'elles  peuvent 
jultement  demander,  félon  le  Droit  &  la  Conftitution  de  leur  Gouverne- 
ment. Il  a  plu  à  fa  Majefté  de  déclarer  plufieurs  fois,  qu'elle  ne  croira  ja- 
mais ,  que  le  véritable  Intérêt  de  fa  Couronne  &  celui  de  fes  Sujets  puif- 
fent  être  opofez  en  aucune  manière  :  ce  qui  doit  fervir  de  précaution  à 
tous  ceux,  qui  voudroient  attenter  de  divifer  les  Intérêts  du  Roi  &de  fon 
Peuple ,  qui  doivent  être  infeparables. 

Puis  donc  que  Sa  Majefté  a  donné  de  fon  côté  de  telles  aflurances  à 
fes  Sujets,  c'eft  à  nous  à  y  répondre  du  nôtre,  &  à  lui  donner  toutes  les 
marques  poffibles  de  nôtre  fidélité  &  de  nôtre  confiance.  On  n'ignore 
pas  d'ailleurs  que  les  Ennemis  mêmes  de  Sa  Majefté  ne  peuvent  s'empê- 
cher de  reconnoitre  fon  Courage  dans  la  Guerre,  &  fa  bonne  Conduite 
dans  la  Paix ,  &  qu'ainfi  nous  ne  faurions  trop  déférer  à  fes  Confeils  &  à 
fes  Avis,  en  ce  qui  eft  néceflaire  pour  nôtre  défenfe,  &  pour  affilier  nos 
Voifins  félon  que  l'occafion  le  requiert.  Pour  ce  qui  eft  de  la  manière, 
dont  cela  fe  peut  exécuter,  foit  par  la  levée  de  nouvelles  Forces  dans  le 
Royaume,  pour  les  envoyer  fervir  ailleurs,  ou  pour  les  employer  à  nô- 
tre propre  défenfe  ;  foit  en  prenant  des  Troupes  Etrangères  à  nôtre  folde 
pour  affilier  nos  Alliez  ;  ou  des  Réglemens  qu'on  doit  faire  pour  garantir 
nôtre  Liberté  du  Danger  qu'on  pourroit  craindre  des  Armées  à  nôtre  paye 
au  dedans  &  au  dehors  du  Royaume  ;  cela  doit  être  laiiTé  à  la  fagelTe  du 
Roi  &  du  Parlement,  qui  en  décideront  comme  ils  le  trouveront  le  plus 
à  propos  ;  feulement  je  prie  Dieu  d'établir  une  bonne  intelligence  entr'- 
eux  lorfqu'ils  feront  affemblez. 

Cependant,  û  Sa  Majefté  &  le  Parlement  trouvoient  qu'il  fût  de  l'In- 
térêt de  la  Nation  de  faire  une  Ligue  avec  les  Hollandois  &  l'Empire, 
&c.  pour  obliger  le  Roi  de  France  à  s'en  tenir  au  Traité  de  Partage  ,  ou 
faire  valoir  le  Droit  de  l'Archiduc  à  la  Succeffion  entière,  nous  pouvons 
dire  hardiment,  que  les  Forces  Navales  d'Angleterre  &  de  Hollande  com- 
mandées par  des  perfonnes  à  qui  le  Roi  &  les  deux  Nations  pourroient 
fe  confier,  mettroient  bien-tôt  fin  à  la  Guerre  félon  toutes  les  aparences. 
Et  nous  fommes  bien  fondez  à  le  fupofer,  fi  outre  ce  qui  eft  neceffaire 
pour  nôtre  propre  défenfe  ,  nous  envoïons  des  Efcadres  aflez  fortes  pour 
fe  faifir  du  Thréfor  de  l'Amérique;  ce  qui  ferviroit  beaucoup  à  maintenir 
la  Ligue.  Par-là  nous  nous  rendrions  Maîtres  du  Pais  le  plus  riche  de  la 
Monarchie  d'Efpagne ,  jufques  à  ce  que  la  Succeffion  fût  réglée  &  nous 
tiendrions  la  balance  de  l'Europe  dans  un  jufte  équilibre.  Par-là  nous  ôte- 

lions 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  499 

rions  le  Nerf  de  la  Guerre  à  l'Ennemi  commun,  &  bien  loin  que  l'Efpa-  Affaire. 

§ne,&  les  Etats  qui  lui  appartiennent  en  Europe,  foient  un  avantage  à  la    GfN-  D£ 
rance,  ils  lui  feront  à  charge.  l'Eubo- 

Dans  la  vue  de  tous  ces  grands  Projets ,  il  faut  avoir  un  foin  tout  extra- 
ordinaire de  la  Perfonne  Sacrée  de  fa  Majeité ,  puis  qu'il  femble  qu'après 
la  Protection  Divine,  nôtre  fureté,  &  celle  de  toute  l'Europe,  dépendent 
de  la  confervation  de  fa  Vie.  Et  nous  ne  pouvons  pas  douter  qu'elle  ne 
foit  en  très-grand  danger; car, outre  l'expérience  que  nous  avons  des  Com- 
plots faits  pour  l'affafliner,  la  Lettre  attribuée  à  Charnock  qui  vient  d'ê- 
tre publiée,  le  naturel  barbare  des  nos  Ennemis,  la  conjonêture  préfente 
des  Affaires ,  &  les  Avis  qu'on  reçoit  de  dehors ,  ne  nous  donnent  que 
trop  de  jufles  fujets  d'appréhender  pour  fa  perfonne. 

Je  me  fuis  déjà  plus  étendu  fur  ces  Confidérations  que  je  ne  m'étois 
d'abord  propofé.     Je  finirai  ce  que  j'ai  à  y  ajouter  en  aufîî  peu  de  mots 
qu'il  me  fera  poffible.  II  y  a  quelque  aparence ,  que  la  Conjoncture  préfen- 
te pourra  caufer  du  changement  dans  la  Conduite  de  la  Cour  de  Vienne. 
Il  femble  qu'il  efl  de  fon  Intérêt  de  donner  une  prompte  fatisfacîion  aux 
Princes  &  Etats  de  l'Empire  fur  tous  les  Griefs,  dont-ils  fe  plaignent  au 
fujet  de  la  Religion  &  des  Affaires  Civiles.     C'efl  une  très-fauffe  démar- 
che ,  que  les  Princes  font  en  matière  de   Gouvernement ,    d'ufurper  les 
Droits  de  leurs  Sujets,  mais  fur-tout  les  Droits  qui  regardent  la  Confcien- 
ce ,  fur  laquelle  il  n'y  a  que  le  Tribunal  du  Ciel  qui  puifTe  prétendre  au- 
cune Jurifdiétion.     C'efl;  le  point  de  tous  le  plus  délicat  pour  les  Gens  qui 
ont  quelque  principe  de  Religion ,  &  comme  les  Injuflices  de  cette  natu- 
re les  touchent  plus  au  vif,  auffi  le  refTentiment  qu'ils   ont  fait  des  im- 
preiTions  plus  profondes  fur  eux.  C'efl  pourquoi  il  efl  de  l'Intérêt  de  l'Em- 
pereur de  défendre  inceffanment  toute  forte  de  violences  fur  le   chapitre 
de  la  Religion.     C'efl  une  mortification  à  la  vérité  pour  des  Princes  fiers 
d'être  obligez  à  confentir  aux  demandes  de  leurs  Sujets,  mais  lorsqu'elles 
font  fondées  fur  la  juftice,  &  qu'en  même  tems  ces  Princes  ont  befoin  du 
bras  &  de  la  bourfe  de  leurs  Sujets,  il  efl  de  leur  Intérêt  de  leur  accorder 
ce  qu'ils  demandent.    L'expérience  auroit  du  rendre  la  Maifon  d'Autriche 
fage  fur  cet  Article.     Il  y  a  tant  de  Liberté  entrelaffée  dans  la  Confii:u- 
tion  du  Gouvernement  de  l'Empire ,  que  les  gens  de  bon  fens  en  Allema- 
gne, de  même  qu'en  quelques  autres  parties  du  Monde,  fe  croient  mal 
traitez  quand  on  les  oblige  d'acheter  de  bonnes  Loix  au  prix  de  leurs 
Tréfors  &  de  leur  Sang>  puifque,par  toutes  les  Idées  que  la  Nature  &  la 
Religion  nous  donnent  du  Gouvernement, il  femble  que  les  Princes  foient 
obligez,  par  ordre  du  grand  Legiflateur,  à  établir  eux-mêmes  de  pareil- 
les Loix    fans  attendre  qu'on  les  exige.     Comme  c'efl  donc  l'Intérêt  de 
l'Empereur  d'en  ufer  de  cette  manière,  c'efl  aufîî  l'Intérêt  des  Ele6teurs 
&  des  Princes   de  l'Empire  d'accommoder  les  différents  qu'ils  ont  avec 
lui, fous  des  Conditions  raifonnables ,  &  le  plutôt  qu'il  leur  fera  poffible; 
car  leur  Apel  à  la  Cour  de  France  ne  fera  qu'irriter  les  efprits  &  les  expo- 
fer  eux-mêmes  au  danger  de  perdre  leur  Liberté  :  Sur-tout  les  Princes  & 

Rrr  2.  les 


l'Euro- 
pe. 


500    MEMOIRES,  NEGOTÎATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AïfMBFs    les  Ecats  Proteftans  doivent  craindre  la  Médiation  de  la  France.     Il  fem- 
gen.de     ble  du  moins  qu'il  feroit  plus  à  propos  pour  eux  d'avoir  recours  en  pa- 
reils cas  à  l'Entremife  de  l'Angleterre,  ou  de  la  Hollande;  en  particulier 
dans  la  fituation  préfente  des  Affaires,  où  l'on  voit  que  le  Pouvoir  de  la 
France  eft  dévenu  fi  formidable. 

Pour  ce  qui  eit  des  Cantons  SuifTes  &  de  leurs  Alliez ,  il  y  a  quelque 
aparence  que  la  Conjoncture;  où  nous  fommes,  ne  leur  fera  point  aban- 
donner la  Neutralité,  parce  qu'ils  fe  trouvent  expofez  aux  Invafionsdes 
deux  cotez; 'néanmoins,  eu  égard  à  la  Paix,  qu'on  voit  aujourd'hui  entre 
l'Efpagne  &  la  France ,  les  6uiffes  doivent  fe  précautionner  contre  les 
deffeins  de  cette  dernière  Couronne  ,  &  faire  de  nouvelles  Alliances. 
Mais,  il  femble  que  les  Cantons  Proteftans,  qui  font  beaucoup  plus  forts 
que  les  autres,  foient  indifpenfablement  obligez  à  former  une  Ligue  Pro- 
teftante,  &  à  tenir  la  balance  égale  entre  la  France  &  la  Maifon  d'Au- 
triche, de  la  manière  que  leur  Prudence  le  jugera  le  plus  à  propos. 

A  l'égard  des  Princes  &  des  Etats  d'Italie,  il  ell  fans  doute  de  leur  In- 
térêt de  faire  la  même  chofe ,  pour  conferver  l'Equilibre  en  Europe:  car 
de  quelque  côté  que  la  balance  tombe ,  ils  font  en  danger; mais,  s'ils  con- 
fiderent  que  les  Etats  des  deux  Branches  de  la  Maifon  de  Bourbon  font 
contigus,  &  qu'elle  eft  très-puiffante  par  Mer  ;  ils  trouveront  qu'il  eft  de 
leur  Intérêt  que  l'Archiduc  luccede  à  la  Monarchie  d'Efpagne  plutôt  que 
le  Duc  d'Anjou;  &  ils  doivent  y  contribuer  fous  main,  jufques  à  ce  que 
l'occafion  fe  préfente  de  le  faire  ouvertement. 

"  11  en  eft  de  même  à  l'égard  des  Portugais;  mais,  fi  le  danger,  où  ils  fe 
voyent  d'être  engloutis  tout-d'un-coup,  les  oblige  à  fe  conduire  avec  pré- 
caution, cela  doit  auffi  engager  les  autres  Princes  de  l'Europe  à  prévenir 
que  ce  Royaume,  &  les  EtablilTements  qu'il  a  faits  dans  le  Nouveau  Mon- 
de, foient  réunis  à  la  Maifon  de  Bourbon;  &  lorfque  les  Puiflances  de 
la  Chrétienté  feront  quelque  effort  de  cette  nature,  il  eft  indubitablement- 
de  l'Intérêt  du  Portugal  de  fe  joindre  à  eux  avec  toutes  fes  Forces  ,  & 
d'agir  à  la  fourdinejjufqu'à  ce  que  le  tems  foit  venu  qu'il  fe  puiffe  déclarer 
en  toute  affurance. 

Pour  les  Couronnes  du  Nord,  elles  doivent  de  toute  neceflité  s'attendre 
à  perdre  leurs  Etats  qui  font  fur  leurs  Frontières,  fi  une  fois  les  François 
deviennent  Maitres  des  Pais- Bas.  Enfuite  leur  Navigation  ne  fera  libre, 
qu'autant  qu'il  plaira  à  la  France  de  le  permettre,  &  leur  Religion  &  leur 
Liberté  feront  à  la  merci  de  la  Maifon  de  Bourbon.  Mais  comme  c'eft 
une  Maxime  conftante  de  ces  deux  Couronnes  de  prendre  toujours  de 
différents  partis,  il  eft  au  pouvoir  des  Anglois  &  des  Hollandois  joints  a- 
vec  l'Empire,  d'engager  la  plus  puiffante  de  leur  côté,  &  d'obliger  l'autre 
à  fe  bien  comporter,  fur  peine  de  lui  faire  fentir  les  effets  de  leur  jufte 
reffentiment,  en  cas  qu'elle  prenne  des  mefures  opofées  à  l'Intérêt  Protes- 
tant &  à  la  Liberté  de  l'Europe. 

Pour  ce  qui  eft  des  Villes  Anféatiques  du  Nord,  la  forme  de  leur  Gou- 
vernement, &  l'Intérêt  de  leur  Commerce,  les  obligeront:  à  fe  joindre  aux 

dé- 


RESOLUTIONS    D'ET AT  ,   M.  DCC.     ï.         foi 

Défenfeurs  de  la  Liberté.  La  Republique  de  Pologne  a  le  même   Intérêt:  Affaires 
Elle  n'a  pas  moins  de  raifon,  qu'aucun  autre  Fais  que  ce  foit,  de  craindre    G^N-  RE 
l'agrandiffement  du  Pouvoir  de  la  France;  car,  outre  qu'il  feroit  fatal  à  fa    L'EuR°- 
Liberté  &  à  la  Forme  de  Ton  Gouvernement,  elle  doit  auffi  prendre  gar-       PE' 
de  à  ne  lui  fournir  pas  les  moyens  defe  vanger  de  l'Affront  qu'elle  prétend 
avoir  reçu  en  la  perfonne  du  Prince  de  Conti.    Et  fi  on  confidere  que  les 
Polonois  foupçonnent  leur  Roi  de  vouloir  fe  rendre  abfolu  ,  &  la  Couron- 
ne Héréditaire,  &  qu'ils  font  agitez  de  brouilleries  inteftines,  on  avouera 
que  la  Guerre  qu'ils  font  à  la  Suéde  ne  peut  pas  durer  long-tems.  L'Elec- 
teur de  Brandebourg  feul  peut  contribuer  beaucoup  à   mettre   fin  à  cette 
Guerre,  &  on  a  fujet  d'efperer  qu'il  prendra  de  bonnes  mefures  pour  la  ter- 
miner au  plutôt,  puis  que  fon  Intérêt  &  les  Obligations  où  il  s'eit  mis  en- 
vers l'Empereur  pour  la  Couronne  de  Pruffe ,   l'y   engagent  indifpenfa- 
blement. 

Le  Czar  de  Mofcovie  a  témoigné  dans  le  voiage  qu'il  a  fait  dans  cette 
partie  du  Monde,  qu'il  n'étoit  pas  pour  l'Intérêt  de  la  France,  mais  qu'au, 
contraire  il  la  haïiToit;  deforte  qu'il  ne  peut  pas  trouver  fon  avantage  a  fé- 
conder les  Dciîcins  des  François.  Et  s'il  continue  dans  fon  Entreprife  fur 
la  Suéde,  ce  qui  n'eft  pas  trop  vraifemblable,  après  l'échec  qu'il  a  reçu 
devant  Nerva,  les  Anglois,  les  Huilandois,&  les  Suédois  peuvent  ruiner 
Arch  .ngel  &  fes  Côtes.  Ainfi,  fupofé  qu'il  ait  envie  d'exercer  fon  humeur 
guerrure ,  le  meilleur  parti  qu'il  ait  à  prendre  eft  de  tourner  fcs  armes  du 
côté  des  Nations  de  l'Orient,  où  il  trouvera  plus  de  butin,  &  moins  de 
hazard. 

Pour  la  fatisfaclion  du  Leéleur,  &  afin  de  mettre  ce  Différent  au  fujet 
de  la  Succeffion  d'Efpagne  dans  tout  fon  jour,  nous  conclurrons  ces  Ré- 
flexions par  les  Articles  du  Contraét  de  Mariage  du  Roi  de  France,  où  il 
renonce  pour  lui  &  Ces  Héritiers  à  la  Succefilon  d'Efpagne  ;  par  l'Article 
du  Traité  des  Pirenées  fur  le  même  fujet  ;  &  par  l'Article  du  Teltament 
de  Philippe  IV.  en  conféquence  de  ce  Traité. 


La  Claufe  du  Contrat  de  Mariage  entre  fa  Majeflé  Très 'Chrétien- 
ne £s?  Dame  Marie-  Thrrefe  d^ Autriche ,  par  laquelle 
fa  Majeflé  renonce  à  la  Succeffion 
d'Efpagne^ 

„  TV'autant  que  Leurs  Majeftez  très- Chrétienne  &  Catholique  font 
7,  -1_>^  venues  &  viennent  à  faire  ce  Mariage, afin  de  tant  plus  perpétuer 
„  &  affûrer  par  ce  nœud  &  Lien  la  Paix  publique  de  la  Chrétienté  ,  & 
„  entre  Leurs  Majeftez,  l'amour  &  la  fraternité,  que  chacun  efpere  en- 
„  tr'elles;  &  en  contemplation  aufîî  des  juftes  &  légitimes  caufes,  qui 

Rrr  $  3,  mon» 


Affaires 

GEN.    DE 

l'Euro- 
pe. 


502    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

montrent  &  perfuadent  l'égalité  &  convenance  dudit  Mariage ,  par  le 
moien  duquel,  &  moyennant  la  faveur  &  grâce  de  Dieu  ,   chacun  en 
peut  efpérer  de  très-heureux  fuccès,  au  grand  bien  &  augmentation  de 
la  Foi  &  Religion  Chrétienne ,  au  bien  &  bénéfice  commun  des  Royau- 
mes, Sujets,  &  VafTaux  des  deux  Couronnes; comme  auffi  pour  ce  qui 
touche  &  importe  au  bien  de  la  chofe  publique,  &  confervation  des  di- 
tes Couronnes  ;  lefquelles  étant  fi  grandes  &  puifTantes  ne  puifTent  être 
réunies  en  une  feule ,  &  que  dès  à  préfent  on  prévienne  les  occafions 
d'une  pareille  jon&ion.     Doncques ,  attendu  la  qualité  des  fufdites  & 
autres  juftes  raifons ,  &  notamment  celle  de  l'égalité  qui  fe  doit  confer- 
ver,  Leurs  Majeftez  accordent  &  arrêtent,  par  ContracT:  &  Paéte  con- 
ventionel  entr'elles,  qui  fortira,  &  aura  lieu, force, &  vigueur  de  Loi 
ferme  &  fiable  à  tout  jamais ,  en  faveur  de  leurs  Royaumes,  &  de  tou- 
te la  chofe  publique  d'iceux;  que  la  Serenifiïme  Infante  d'Efpagne  Da- 
me Marie-Therefe ,  &  les  Enfans  procréez  d'elle,  foit  mâles  ou  femel- 
les, &  leurs  defeendants,  premiers,  ou  féconds,  trois  ou  quatre  nez, 
„  cy-après ,  en  quelque  degré  qu'ils  fe  puùTent  trouver,   voire  à  tout  ja- 
mais, ne  puifTent  fucceder, ni  fuccedent  aux  Royaumes, Etats, Seigneu- 
ries, &  Dominations  qui  appartiennent  &  appartiendront  à  fa  Majefté 
Catholique,  &  qui  font  compris  au  defTous  des  Titres  &  qualitez  men- 
tionnées en  cette  préfente  Capitulation ,  ni  en  aucun  de  Ces  autres  Ro- 
yaumes, Etats,  Seigneuries ,  Provinces ,  Ifles  adjacentes ,  Fiefs,  Capi- 
taineries ,  ni  es  Frontières  que  fa  Majefté  Catholique  pofTede  dès  à  pré- 
fent, ou  qui  lui  appartiennent,  ou  pourront  appartenir,   tant  dedans, 
que  dehors  le  Royaume  d'Efpagne;  &  qu'à  l'avenir  ladite  Majefté  Ca- 
tholique, ou  fes  SuccelTeurs,  auront,   pofTederont,   &  leur  appartien- 
dront; ni  en  tous  ceux  qui  font  compris  en  iceux,   ou  dépendent  d'i- 
ceux;  ni  même  en  tous  ceux  qui  par  cy  après  en  quelque  tems  que  ce 
foit,  elle  pourroit  aquerir,  ou  accroitre  ,    &  ajouter  aux  fufdits  fiens 
^,  Royaumes,  Etats,  &  Dominations,  ou  qu'elle  pouroit  retirer,  ou  qui 
lui  pouroient  échoir  par  dévolution  ,  ou  quelques  autres  Titres ,  Droits , 
ou  Raifons  que  ce  puifTe  être, encore  que  ce  fut  durant  la  vie  de  ladite 
Serenifîime  Infante  Dame  Marie-Therefe,  ou  après  fa  mort,  en  celle 
de  qui  que  ce  foit  de  fes  defeendants,  premiers,    féconds,   troifiémes, 
nez  ou  ultérieurs,  que  le  Cas  ou  les  Cas,  par  Iefquels,    ou  de  Droit, 
ou  parles  Loix  &  Coutumes  defdits  Royaumes, Etats, &  Dominations, 
foit  par  difpofitions  de  Titres,  par  Iefquels  ils  puifTent  fucceder  ou  pré- 
tendre pouvoir  fucceder  auxdits  Royaumes,  Etats,   ou  Dominations, 
leur  dut  appartenir  la  SuccefTion ,  en  tous  Iefquels  fufdits  cas ,  dès  à 
préfent  'ladite  Dame  Marie-Therefe  Infante  dit  &  déclare  être  &  de- 
meure bien  &  duëment  exclufe,  enièmble  tous  fes  Enfans  &  Defcendans 
Maies  ou  Femelles,  encore  quils  fe  voulurent,   ou  puffent  dire  Ci?  prête»- 
dre  qu'en  leurs  perfonnes  ne  courent ,  ni  ne  fe  peuvent  &  doivent  confiderer 
Uf dites  raifons  de  la  chofe  publique ,  ni  autres  auxquelles  ladite  exclu/ion  fe 

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RESOLUTIONS    D'ETAT,     M.  DCC.  I.  ^03 

„  pour -oit  fonder ,  ou  qu'ils  vouluflent  alléguer  (ce  qu'à  Dieu  ne  plaife)  que  Affaires 
„  la  Succejjion  du  Roi  Catholique ,  ou  de  fes  SereniJJïmes  Princes  &  Infantes,  Gf u-  DE 
„  fj?  d'abondant  des  Maies  quila  ou  pourra  avoir  pour  fes  légitimes  Succefjeurs,  L'EuR°- 
,,  eut  manqué  &  défailli;  parce  que  comme  il  a  été  die,  eu  aucun  cas,  ni 
„  en  aucun  tems,  ni  en  quelque  manière  qui  peut  avenir,  nielle  ni  eux, 
„  fes  hoirs  &  fes  defeendans  n'ont  à  fucceder,  ni  prétendre  pouvoir  fuc- 
ceder;  nonobitant  toutes  Loix,  Coutumes,  Ordonnances,  &  Difpofi- 
tions,  en  vertu  defquelles  on  a  fuccedé  en  tous  lefdits  Royaumes,  E- 
tats  &  Seigneuries:  Et  nonobftant  auffi  toutes  les  Loix  &  Coutumes  de 
la  Couronne  de  France,  qui  au  préjudice  des  Succefleurs  en  icelle, 
s'oppofent  à  cette  fufdife  exclufion,  auffi  bien  à  préfent,  qu'au  tems  à 
venir.  A  toutes  lefquelles  confiderations  Leurs  Majeftez  dérogent,  en 
ce  qu'elles  contrarient,  ou  empêchent  le  contenu  en  ce  Contract,  ou 
l'accomplhTement  &  éxecution  d'icelui;  &  que  pour  l'approbation  & 
„  ratification  de  cette  prefente  Capitulation,  elles  y  dérogent, &  les  tien- 
3>  nent  pour  dérogées,  &c. 

La  Ratification  de  Sa  Majejîé  Très-Chrétienne. 

N'ous,  de  l'Avis  de  la  Reine,  nôtre  très-honorée  Dame  &  Mère, 
de  nôtre  très-cher  &  très-aimé  Frère  unique  le  Duc  d'Anjou ,  plu- 
sieurs Princes  ,  Ducs  ,  &  Pairs,  &  Officiers  de  nôtre  Couronne,  & 
autres  Grands  &  Notables   Perfonnages  de  nôtre  Confeil  :  après  nous 
être  fait  lire  de  mot  à  autre  ledit  Traité,  avons  icelui  en  tous  &  cha- 
cuns  de  fes  points  &  articles  agréé,  approuvé,  &  ratifié,  approuvons 
&  ratifions  par  ces  préfentes  lignées  de  nôtre  main  :   promettant   en. 
bonne  foi  &  parole  de  Roi,  de  l'accomplir,  faire  garder,  &  entrete- 
nir inviolablement ,  fans  jamais  aller  ni  venir  au  contraire  ,  directe- 
ment ni  indirectement,  en  quelque  forte  &  manière  que  ce  foit,  dé- 
rogeant à  cette  fin  ,  comme  nous  dérogeons, à  toutes  Loix, Coutumes, 
&  Difpofitions  au  contraire.     Car  tel  eft  nôtre  plailir,  en  témoin  de 
quoi  nous  avons  fait  mettre  nôtre  Seau  à  ces  dites  préfentes.     Donné 
à  Thouloufe  le  24.  de  Novembre,  l'an  de  grâce  1659.  &  le  17.  de  nô- 
tre Règne. 

„  Signé, 


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„  L  O  U  I  S. 
»  Et  plus  bas: 

v  Par  le  Roi,  de  Lomenie, 

jîcle 


p4    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires 

jl'eÙro-  Aiïe  de  la  Renonciation  de  V Infante. 


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Adame  Marie-Therefe  Infante  des  Efpagnes,  par  la  Grâce  de 
XVa  Dieu,  Reine  future  de  France,  fille  aine  de  très  haut,  très-ex- 
cellent, &  très-puifllint  Prince ,  Don  Philippe  Quatrième,  par  la  mê- 
me Grâce,  Roi  Catholique  des  Efpagnes  Monfeigneur,  &  de  très-hau- 
te ,  très-excellente,  &  tres-puiflante  Princefle  Madame  Ifabelle  Reine 
Catholique  ,  qui  foit  en  gloire  :  Par  cet  Infiniment  &  Acte  de  Re- 
nonciation, &  du  furplus  qui  y  fera  contenu,  foit  notoire  &  manife- 
fle  à  ceux  qui  en  auront  connoiflance,  en  quelque  façon  que  ce  foit, 
que  par  les  Articles  fécond  &  quatrième  de  mon  Contraèl  de  Mariage, 
promis  avec  le  très-haut,  très-excelient ,  &  trés-puiffant  Prince  Louis 
XIV.  Roi  Très-Chrétien  de  France  conclu  dans  l'Ifle  nommée  des  Faz- 
fans  dans  la  rivière  Bidaflba ,  du  reiîort  de  la  Province  de  Guipufcoa, 
&  confins  de  ces  Roiaumes  avec  celui  de  France,  le  7.  de  •  ovembre 
de  l'année  pafTée  1659.  il  a  été  refolu  &  arrête,  que  le  Roi  Monfei- 
gneur  (  à  caufe  &  au  regard  de  ce  Mariage ,  &  afin  que  je  portafle  avec 
moi  mon  Dot  &  mes  biens  propres)  a  promis  qu'il  me  donneroit  cinq 
cens  mille  écus  d'or  au  Soleil  ,  qui  fe  payeroient  &  délivreraient  au 
lieu,  &  aux  termes  fpecifiés  dans  ledit  Article  au  Roi  Très-Chrétien, 
ou  à  la  perfonne  qui  aurait  fon  pouvoir,  &  qu'avec  iceux  je  me  devrois 
contenter ,  &  tenir  pour  contente  de  tous  &  quelconques  droits  ,  & 
actions  qui  m'appartiennent,  ou  pourraient  appartenir  à  prefent  ou  à 
l'avenir,  fur  les  biens  &  hoirie  de  la  Sereniiîime  Reine  M idame  Ifa- 
belle ma  Mère,  &  fur  la  future  fuccefîion  du  Roi  Monfeigneur  (que 
Dieu  ait  en  fa  garde)  &  fur  tout  ce  qui  me  pourrait  appartenir,  com- 
me fille  &  héritière  de  Leurs  Majeflés  Catholiques,  &  pour  leur  droit, 
&  chef,  &  pour  quelque  autre  titre  penfé  ou  nonpenfé,  fçeu  ou  igno- 
ré, tant  pour  la  Ligne  Paternelle  que  Maternelle,  droite  ou  tranfver- 
fale,  mediatement  &  immédiatement,  &que  devant  de  célébrer  le  Ma- 
riage ,  par  paroles  de  préfent  j'aurois  à  céder  &  renoncer  tous  mes 
droits ,  &  actions  au  Roi  Monfeigneur ,  &  aux  perfonnes  qui  auront  la 
Tienne,  &  que  Sa  Majefté  voudra,  &  aura  agréable  \  ainfi  qu'il  eft  fti- 
pulé  &  déclaré  plus  particulièrement  par  lefdits  Articles  fécond  &  qua- 
trième ,  que  jai  leus,  &  oui  lire  plufieurs  fois  devant  que  de  confentir 

„  à  ce  que  l'on  formât  cet  Acte,  lefquels  je  veux  qu'ils  y  foient  inferez  & 

„  mis  de  Lettre  à  autre,  &  de  mot  à  autre. 

Le  Dix-fcptiême  Article  du  Tejlament  de  Philippe  IF.  qui  confirme 

cette  Renonciation. 

33  D  0UR  l'AccompliiTement  de  ces  TraitezJ'Infante  Dame  Marie-Therefe, 


;:P 


ma  fille,  a  paffé  cette  Renonciation  fous  Serment  folemnel  dans  la  Vil- 
le 


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PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  fof 

m  le  de  Fontarabie  le  2.  de  Juin  itftfo.  contrefignée  par  Don  Ferdinand  Affaires 
„  de  Fonfeca  ,  Ruiz  de  Contrera  ,  nôtre  Secrétaire  d'Etat  ,  &  Notaire    se».  nE 
„  public  de  ces  Roiaumes,  &  quoy  que  nous  efperions  que  ladite  ïnfan-     L'£uRo- 
„  te  ,  &  le  Roi  Très -Chrétien  fon  Mari,  accompliront  &  obferveront 
„  tout  ce  qui  eft  ci-deffus  mentionné ,  &  tout  ce  qui  eft  de  plus  contenu 
dans  ledit  ContracT:  de  Mariage,  &dans  ladite  Reno-nciation ,  comme 
y  étant  obligez  en  Juflice  &  en  Confcience  ;   Néanmoins ,  afin  d'en  a£ 
furer  l'AccomplilTement  par  toutes  les  voyes  les  plus  dire6r.es  fur  un 
Sujet  &  dans  une  Affaire,  en  quoi  confifte  la  Paix  &  le  Repos  de  tou- 
te la  Chrétienté ,  nous  comportant  comme  nous  devons  en  qualité  de 
Père,  &  Seigneur  Naturel  de  tous  nos  Roiaumes,  Etats,  &  Domaines, 
„  en  vertu  de  la  Souveraine  Autorité,  que  nous  poffedons  en  tout  Droit, 
„  pour  difpofer,  &  pour  le  plus  grand  avantage  de  nos  Sujets  &laCaufe 
„  commune,  pour  pourvoira  ce  qu'ils  foient  mieux  gouvernez,  &  pour 
„  prévenir  les  grands  maux  qui  peuvent  s'enfuivre  de  l'union  des  deux 
„  Couronnes,   &  leurs   Dépendances;   de  nôtre  propre   mouvement, 
„  certaine  ConnoifTance ,  &  Pouvoir  Royal  &  abfolu,  dont  il  nous  plaît 
„  de  nous  fervir,  &  dont  nous  fervons  avec  pleine  &  entière  aiTurance 
„  de  l'exemple  de  nos  Royaumes  &  Etats,  à  exclurre  les  Enfans  ainez 
„  &  leur  Poflerité  à  raifon  &  à  caufe  des  Traitez  de  Paix  &  de  Maria- 
„  ge,  &  pour  d'autres  confidérations  qui  nous  y  meuvent,  nous  decla- 
„  rons  que  la  Sereniffime  Infante ,  Dame  Marie-Therefe  ,  nôtre  Fille, 
„  &  les  Enfans  qu'elle  aura  dudit  Mariage,  mâles  ou  femelles,  &  leur 
Poflerité,  feront  &  demeureront  exclus  :  Et  d'autant  que,  comme  par  ne» 
ceïïité,  nous  les  excluons  de  tout  droit  ou  efperance ,  qu'ils  pourroient 
ou  peuvent  avoir  en  quelque  cas  que  ce  foit,  qui  puiiTe  arriver,  à  au- 
cun de  nos  Royaumes,  Etats, &  Dominations,  à  jamais,  comme  s'ils 
„  n'avoient  jamais  été  nez.     Nous  déclarons  que  cette  Exchifion  &  tout 
ce  qui  a  été  établi  ,  en  fa  confideration  ,  en  la  Perfonne  de  l'Infan- 
te Dame  Marie-Therefe,  nôtre  Fille,  &  fa  Poflerité  par  ce  Mariage, 
doit  être  obfervé  :  Et  d'autant  qu'il  y  a  pour  cela  une  neceflité,  Nous 
„  voulons  &  commandons ,  qu'elle  foit  obfervée ,  accomplie ,  &  execu- 
„  tée  en  la  Perfonne  de  la  Serenifîïme  Reine  Dame  Anne  nôtre  Sœur, 
„  &  fa  Poflerité,  conformément  à  fon  Traité  devant  le  Mariage  &  la 
,,  Renonciation,  &  ce  que  Sa  Majellé  Don  Philippe  III.  nôtre  Seigneur 
„  &  Père  a  établi  par  fa  dite  Loy,  &  par  fon  Teflament  ci-deiïus  men- 
„  tionné,  concerté  &  accordé  entre  les  deux  Couronnes,  &  nous  l'ap- 
„  prouvons  fous  les  mêmes  conditions,  &  avec  la  même  force  que  les 
Loix  doivent  avoir,  qui  font  accordées  &  faites  entre  Princes  Souve- 
rains, ufant  de  leur  Pouvoir  abfolu.     Et  nous  révoquons,  annulions, 
dérogeons,  &  abrogeons  toutes  &  chaque  Loi  &  Loix,  Droits;  Eta- 
„  blifTemens  &  Coutumes ,  qui  puffent,en  aucune  manière  que  ce  pui£ 
fe  être,  empêcher  cette  Exclufion ,  comme  fi  chacune  étoit  expri- 
„  mée,  &  qu'on  en  fit  mention  en  particulier.     Nous  déclarons  auffi, 
„  que  s'il   arriyoit  ainfi  ,  ce   qu'à  Dieu  ne  plaife ,  que  la  Sereniffime 
Terne  XL  S  {Ç  ,,  In- 


So6    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aminés  J5  Infante  ,  devint  Veuve  ,  fans  avoir  des  Enfans  par  ce  Mariage  , 
<3en.  de  &  qU'e]]e  revint  en  Efpagne  ,  pour  le  bien  public  ,  ou  pour  de  ju- 
ites  confiderations ,  fe  remariât  de  nôtre  consentement,  ou  du  Prin- 
ce nôtre  Fils  après  nôtre  décès  ;  Nous  ordonnons  &  telle  eft  nôtre 
volonté  &  plaifïr  ,  que  ni  ladite  Exclufion  ni  Renonciation  la  pri 
vent  d'aucune  chofe 


l'Euro- 
pe. " 


3> 


--   >     -j  — —   —    •  — —   -  —  g — 

:hofe,  mais  qu'elle  &  fes  Enfans  du  fécond  Mariage, 
„  pourveu  que  ce  ne  foit  pas  en  France,  peuvent  être  capables  de  fucce- 
„  der  auxdits  Royaumes ,  Etats ,  &c. 

Le  troijîéme  Article  du  Traité  des  Pyrénées. 


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5» 
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3» 


ET  afin  que  cette  Paix  &  Union,  Confédération,  &  bonne  Corres- 
pondance, foit, comme  on  le  dédire , d'autant  plus  ferme,  durable, 
&  indiffoluble  ;  lefdits  deux  principaux  Miniltres  Cardinal -Duc  ,  & 
Marquis -Comte -Duc,  en  vertu  du  Pouvoir  fpécial  qu'ils  ont  eu  à  cet 
effet  des  deux  Seigneurs  Rois ,  ont  accordé  &  arrêté  en  leur  nom  le 
Mariage  du  Roi  Très -Chrétien  avec  la  Sereniffime  Infante  ,  Dame 
Marie  -  Therefe  ,  Fille  ainée  du  Roi  Catholique,  &  ce  même  jour 
datte  des  préfentes  ont  fait  &  figné  un  Traité  particulier,  auquel  on  fe 
remet  touchant  les  Conditions  réciproques  dudit  Mariage,  &  le  tems  de 
fa  célébration  :  lequel  Traité  à-part ,  &  Capitulation  de  Mariage ,  font 
de  la  même  force  &  vigueur,  que  le  préfent  Traité  de  la  Paix  ,  comme 
en  étant  la  partie  principale,  &  la  plus  digne,  auffi-bien  que  le  plus 
grand  &  le  plus  plus  précieux  gage  de  la  fureté  de  fa  durée. 

Par  tous  ces  Actes  autentiques  &  folemnels,  nous  pouvons  aifément 
voir  quelle  peut  être  la  Juitice  des  prétentions  de  la  France  à  la  Succef- 
fion  d'Efpagne.     Il  paroit  que  fuivant  l'opinion  de  tous  les  plus  fages  de 
la  Nation  Efpagnole  ,  cette  Succeflion  étoit  contraire  à  leurs  Intérêts. 
On  ne  peut  pas  dire  que  les  chofes  ont  changé  depuis;  car,  les  Raifons , 
fur  lefquelles  ces  Renonciations  étoient  fondées,  fubflitent  toujours,  en 
ce  qui  regarde  l'Europe  &  le  Royaume  d'Efpagne  en  particulier.     La 
précaution  que  le  Roy  Catholique  a  prife  par  fon  Teftament ,  favoir  qu'on 
n'admettra  point  d'Etrangers  dans  les  Poftes  d'honneur  ni  dans  le  Confeil, 
ne  lignifie  rien.  La  Cabale,  qui  a  l'Adminiftration  des  Affaires,  peut  être 
aifément  gagnée ,  puis  qu'elle  a  fur-tout  un  Prêtre  Cardinal  à  fa  tête.    Il 
n'y  a  point  de  personnes  qui  foient  plus  capables  de  trahir,  ou  qui  aient 
plus  fouvent  trahi,  les  Royaumes  &  les  Etats,  que  ceux  de  cet  Ordre, 
lors  qu'on  les  a  une  fois  admis  dans  le  Confeil,  ou  qu'on  leur  a  donné 
part  aux  Affaires.  Il  eit  donc  de  l'Intérêt  de  l'Efpagne,  de  tâcher,  autant 
qu'il  lui  fera  poffible,    de  rétablir  fon  Gouvernement  fur  un  pié  con- 
forme à  la  Difpofition  de  ces  Traitez ,    &  d'agir  en  fecret ,  &  avec  a- 
dreffe ,  en  faveur  des  Prétentions  de  la  Famille  Impériale  ;  & ,  lorfque  cel- 
îe-ci  fera  en  état  de  les  faire  valoir,  l'Efpagne  doit  emploier  toutes  fes 

fo- 


l'Furo- 

PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.    1.  ro; 

forces ,  pour  fécouer  le  joug  de  la  France  ;  autrement  elle  doit  s'atten-  Affaires 
dre  à  devenir  une  Province  de.  ce  Royaume,  &  à  ne  conferver  que  le  gen.de 
vain  titre  de  Souveraineté.  Il  ne  manque  pas  de  ces  Exemples  en  Eu- 
rope pour  convaincre  les  Efpagnols ,  qu'ils  font  expofez  à  un  pareil  trai- 
tement ;  & ,  fans  aller  plus  loin  que  les  François ,  leurs  nouveaux  Maî- 
tres ,  ne  fçait-on  pas  que  de  tems  en  tems  ils  ont  réuni  des  Souveraine- 
tez  à  leur  Couronne,  qu'ils  fe  font  aggrandis  par-là  eux-mêmes,  &  qu'ils 
ont  abimé  les  Païs  qu'ils  ont  réuni  à  leur  Couronne  ,  afin  de  les  mieux  te- 
nir en  fujétion  ?  Pour  éviter  une  pareille  deftinée,  les  Efpagnols  doivent 
prendre  garde  à  ne  pas  refufer  leurs  Ports  de  Mer  aux  Anglois  &  aux 
rlollandois,  à  ne  décourager  pas  les  Négotians  de  ces  deux  Nations  par 
de  nouveaux  Induites  fur  leur  billon ,  &  à  n'empêcher  pas  le  débit  de 
leurs  Manufactures,  &c.  fous  quelque  prétexte  que  ce  foit  ;  car,  fi  nous 
ne  pouvons  pas  bien  faire  nôtre  Commerce  de  la  Mer  Méditerranée  fans 
nous  fervir  de  leurs  Ports,  fur-tout  de  celui  de  Cadix,  &  qu'ils  nous  en 
défendent  l'entrée  ,  cela  tournera  bien-tôt  à  leur  propre  ruine ,  &  les 
privera  des  feuls  Amis  qu'ils  aient,  &  qui  foient  en  état  de  leur  confer- 
ver le  peu  de  Liberté  qui  leur  relie,  ou  de  leur  aider  à  recouvrer  ce 
qu'ils  en  ont  perdu. 

i 

Remarques  fur  la  Succejfwn  du  Bue  à1  Anjou ,  par  rapport  au 
"Danger  qui  menace  P Europe  en  gênerai  ^  V Angleterre  en  par- 
ticulier,  gep  principalement  toutes  les  Parties  de  fin  Commerce: 
féconde  Partie  ,  par  P  Auteur  de  la  première.  Suivant  la  Co- 
pie imprimée  à  Londres  par  A.  Ealdwin  y  in  Warwick-Lane  > 
prés  les  Armes  tfOxford?  1701. 

AVERTISSEMENT. 

LA  première  Partie  de  ces  Remarques  a  été  reçue  avec  tant  d'avidité, 
&  a  eu  une  Approbation  (ï  générale,  &  dans  fon  Païs  natal,  &  en 
ces  Provinces,  qu'on  ne  peut  douter  du  Succès  de  cette  féconde  Partie, 
fans  faire  tort  au  goût  du  Public.  La  Perfonne  iîluflre,  qui  en  efl  l'Au- 
teur, &  qui  donna  comme  en  courant  à  fa  Patrie  les  premières  Penfées 
qui  fe  préfenterent  à  fon  efprit  fur  l'important  Evénement  qui  attire  l'at- 
tention de  toute  l'Europe,  a  eu  le  tems  de  méditer  la  matière,  &  de 
l'envifager  de  tous  fes  cotez,  &  fur -tout  par  rapport  au  Commerce, 
qui  fait  la  RiehefTe  de  fon  Gouvernement  &  du  nôtre,  &  qui  ne  peut 
fouffrir  d'atteinte  fans  ébranler  le  plus  ferme  fondement  de  ces  deux 
puifïans  Etats.  Aulfi  entre-t-il  dans  un  Détail  tout  autrement  étendu  que 
celui  de  la  première  Partie ,  &  tel  qu'il  étoit  nécefTaire  pour  traitter  une 

Sffz  rna- 


l'Euro 
pe 


fo8    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  matière  de  fi  grande  importance.  On  a  fait  connoitre  au  commence- 
cEN.  de  ment  de  la  première  Partie  le  rang  &  le  mérite  de  l'Auteur.  Pour  ce  qui 
efl  de  Ton  Ouvrage,  je  dois  en  laiiTer  le  Jugement  au  Public,  qui  n'aime 
pas  qu'on  le  prévienne,  &  qui  veut  ne  devoir  qu'à  Ton  propre  Difcerne- 
ment  l'Aprobation  qu'il  donne  au  mérite.  Je  le  prie  feulement  de  me  par- 
donner les  négligences  qui  peuvent  m'étre  échapées,  &  de  ne  les  im- 
puter qu'à  moi  -  même.  La  Pièce  efl  bien  &  nettement  écrite ,  &  j'au- 
rois  fort  fbuhaité  de  lui  donner  toutes  les  beautez  de  l'original  ;  mais,  le 
malheur  eft  qu'on  efl  contraint  de  travailler  en  courant  fur  des  Pièces  de 
cette  nature,  &  je  n'ai  eu  qu'à  peine  le  tems  de  relire  mon  Manufcrit  de 
gros  en  gros. 

PREFACE. 

LA  SucceJJÎon  du  Duc  £  Anjou  efl  un  fujet  fi  vafle  6?  fi  riche ,  qu'il  y  au* 
voit  dequoi  faire  de  gros  Volumes.  Il  efl  aufiji  impojjible  d'en  dire  dans 
un  ou  deux  Ecrits  comme  celui-ci  tout  ce  qui  pourrait  s  en  dire ,  qu'il  le  Jeroit  à 
une  feule  -plume  d'exprimer  tout  ce  qui  fer  oit  nécejfaire  &  à-  propos. 

J'efpére  que  cela  contentera  ceux  qui  trouvent  peut  -  être  que  nous  ri  avons 
pas  dit  tout  ce  qu'on  auroit  lieu  d'en  dire.  Le  meilleur  moyen  de  reparer  ce  défaut , 
efl  que  les  autres  me  communiquent  leurs  Penfées ,  comme  je  leur  ai  communiqué 
les  miennes  -,  car  une  tête  ri  efl  non  plus  capable  d'épuifer  la  matière,  qu'une 
feule  épée  l'eft  de  décider  le  différent. 

J'ai  tâché  dans  cette  féconde  Partie  de  repréfenter  à  la  Nation  le  Danger 
qui  menace  notre  Commerce  ,  &  d'entrer  pour  cet  effet  dans  un  plus  grand 
détail  que  je  ri  ai  fait  dans  la  première.  Comme  c'eft  une  chofe  qui  nous  inte- 
reffe  tous ,  j'efpére  que  cela  fera  ouvrir  leurs  bourfes  à  plufieurs  qui  les  tien- 
dr  oient  fem.ées  s'il  s'agiffoit  de  toute  autre  chofe. 

Il  efl  queflion  de  notre  tout ,  £5?   nous  fommes  peut  -  être  dans  un  auffi  grand 
Danger  ou  nous  ayons  jamais  été  depuis  que  nous  compofons  une  Nation.     Il 
nous  efl  de  conféquence  que  nos  Réfolutions)  foient  promptes ,  £s?  nos  Efforts  vi- 
goureux.    Le  retardement  peut  être  fatal  dans  cette  Conjonclurc  \  nous  avons 
h  faire  à  un  Ennemi  naturellement  ardent ,  (es  Réfolutions  (ont  promptes ,  &f 
il  efl  prêt  d'en  venir  à  l'exécution  \    il  nous  a  aj/^z  fait  pour  nous  obliger  à 
prendre  feu ,  &  nous  avons  affez  fujet  de  nous  tenir  fur  nos  gardes.     Chacun 
de  nous  a  intérêt  d'engager  à  un  foin  extraordinaire  ceux  qui  les  reprefenteront 
au  Parlement   prochain.     Ils  n'y  font    envoyez    que  pour   prendre   foin    des 
Affaires  de  la  Nation,  qui  ri  ont  jamais  eu  plus  de  befoin  qu'à  préfent  de  Ré- 
foîutions  fag&s  6?  promptes.     Dieu  veuille  unir  Sa  Majefté  £s?  le  Parlement , 
&  leur  infpirer  les   moyens  propres  à  prévenir  les  Dangers  éminens  dont  nous, 
fommes  menacez. 


REMAR- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  So9 

.Affaire*! 

REMARQUES   SUR   LA  SUCCESSION  DU  DUC  G,EN-DE 

D'ANJOU 


IL     PARTIE. 

epuis  les  premières  Remarques  que  nous  avons  faites  fur  la  Su ccef- 
fion  du  Duc  d'Anjou ,  les  intérêts  &  la  puiilance  de  la  France  ont 
fait  des  progrez  formidables  ;  & ,  s'il  nous  eft  permis  de  nous  fervir  d'un 
Proverbe  qui  convient  fort  à  la  Conjoncture,  c'eft  une  boule  de  neige  qui 
grojfit  à  mefute  quelle  roule.  Il  ne  fera  pas  difficile  de  démontrer  cette  vé- 
rité par  les  Preuves  que  nous  allons  produire. 

I.  Toutes  les  Lettres,  qui  nous  font  venues  de  de-là  la  Mer,  convien- 
nent, que  ceux  qui  compofent  la  Régence  d'Efpagne  ont  donné  au  Roi 
de  France  la  plus  effentielle  partie  de  leur  Gouvernement,  &  mis  leur 
Monarchie  fous  fa  conduite  &  fous   fa  protection.    Il  eft  vrai  qu'il  fait 
mine  de  le  refufer  ;   il  remercie  la  Junte  de  la  confiance  extraordinaire 
qu'elle  a  en  lui,  &  lui  répond  qu'il  ne  peut  accepter  fes  offres,  de  peur 
d'augmenter  l'ombrage  de  ceux  qui  ne  veulent  pas  acquiefcer  au  Tefta- 
ment  du  feu  Roi  d'Efpagne.  Mais,  en  même  tems,  il  eft  maniiefte,  qu'il 
agit  dans  les  Affaires  d'Efpagne,  comme  fi  c'étoit  les  lîennes  propres, 
é(  ne  fait  aucune  difficulté  de  faire  dire  à  tous   fes  Ambaffadeurs  dans 
toutes  les  Cours  de  l'Europe,  que  les  Intérêts  de  l'Efpagne  &  ceux  de  la 
France  font  devenus  les  mêmes  Intérêts  par  la  mort  du  Roi  d'Efpagne. 
Cela  paroit  vifiblement  par  les  Difcours  des  Ambaffadeurs  de  France  aux 
Cantons  Suiffes  &  aux  Etats  de  Hollande.     Il  ne  trouve  pas  indigne  de 
fa  modefhe  de  faire  negotier  en  Suiffe  les  Affaires  d'Efpagne  par  fon  Am- 
baffadeur,  &  d'anticiper  les  démarches  du  Miniftre  d'Efpagne,  quoique 
ee  dernier  foit  fur  les  lieux.     L'Ambaffadeur  de  France  fait  encore  plus. 
Il  fe  donne  la  liberté  d'annoncer  à  l'avance. aux  Cantons  les  Inftruclions 
que  le  Miniftre  d'Efpagne  recevra  fur  ce  fujet,  &  d'offrir  la  bourfe  de  fon 
Maître  pour  fournir  à  la  dépenfe  qu'il  faut  faire  à  la  garde  des  paffages 
du  Milahez;  preuve  évidente  que  l'Efpagne  eft,  &  doit  être,  dirigée  par 
la  France.     Il  eft  inutile  de  rien  oppofer  à  cela,  &  ceux  qui  le  feroient 
donneroient  h  connoitre  par-là  qu'ils  n'ont  qu'une  connoiffance  très-fuper- 
ficielle  des  Affaires.     Mais,  qu'on  en  dife  ce  qu'on  voudra,  Sa  Majefté 
Très-Chrétienne  peut  aifément  donner  un  bon  tour  à  la  chofe,  en  di- 
fint  au  Public  qu'il  n'y  a  perfonne  plus  capable  que  lui  de  la  Tutelle  de 
fon  Petit-fils.  Il  n'eft,ni  nouveau,  ni  extraordinaire,  que  ceux,  à  qui  l'on 
confie  l'adminiftration  des  pupilles  ,   en  tirent  avantage  ,   leur  minorité 
rend  un  Gouverneur  neceffaire.     Et  qui  fait  fi  ce  n'ett  peut-être  pas  une 
des  principales  Raifons  qui  a  fait  choifir  le  Duc  d'Anjou  préférablement 
au  Dauphin  fon  Père,  pour  Succeffeur  à  la  Couronne  d'Efpagne?  Com- 
me il  auroit  été  moins  fujet  aux  exceptions  de  ceux   dont  l'Intérêt  n'elr 
pas  de  fouffrir  que  la  Puiilance  de  la  France  devienne  trop  grande,  fi  le 

gff3  Dau- 


PE, 


TE. 


Sio    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  Dauphin  avoit  été  appelle  a  la  Couronne  d'Efpagne  ;  aulll  auroit-on  trou- 
gen.  de  v£  p|us  mauvajs  de  voir  un  Prince  de  fon  âge  gouverné  par  un  autre 
que  par  foi-mème.  Cela  n'auroit  point  du  tout  quadré  avec  le  titre  de 
Louis  le  Hardi,  qu'on  lui  donna  au  Siège  de  Philipsboutg.  Car  il  faut  re- 
marquer en  paiïant ,  que  les  François  font  dès  l'heure  qu'il  efl  aufli  com- 
plaifans  pour  leurs  Princes,  que  s'ils  avoient  été  de  tout  tems  dans  la 
plus  abjefte  &  la  plus  lâche  Servitude  des  Payens,  ou  des  Levantins.  Us 
ne  font  point  difficulté  de  leur  rendre  les  honneurs  divins  durant  toute 
leur  vie  ,  &  font  de  fi  bonne  volonté  qu'ils  n'attendent  pas  leur  mort 
pour  faire  leur  apotheofe. 

Une  féconde  preuve  de  l'augmentation  du  Pouvoir  du  Roi  de  France, 
&  qu'il  gouverne  entièrement  l'Efpagne,  efl  que  la  Junte  ordonne  à  tous 
fes  Vice-Rois  &  Gouverneurs  de  fe  foumettre  à  fes  ordres  ;  &  de  fon 
côté  il  a  fait  favoir  a  la  Junte,  qu'il  avoit  donné  ordre  aux  Gouverneurs 
de  fes  Pais  &  Places  frontières  du  côté  des  terres  d'Efpagne,  de  leur 
fournir  en  toute  occafion  des  Troupes,  des  Munitions,  &  de  l'Argent. 

Une  troifième  Preuve  très-prefîante  de  cette  vérité  efl ,  que  les  Am- 
baiTadeurs  d'Efpagne  dans  toutes  les  Cours  ont  ordre  de  ne  rien  faire  que 
par  l'avis  du  Roi  de  France  ;  ce  qui,  joint  avec  l'autre  Preuve  dont  on 
vient  de  parler  ,  fait  voir  démonflrativement ,  que  la  Régence  d'Efpagne  re- 
garde r Intérêt  des  deux  Monarchies  comme  le  même  Intérêt ,  &  par  confe- 
q Ment  quelles  doivent  unir  leurs  Forces  £#  leurs  Confeils.  A  cela  s'accor- 
dent fort  bien  les  Inflruclions  que  le  Roi  de  France  a  donné  à  fon  Am- 
bafladeur  à  Madrid,  qui  a  eu  ordre  de  les  communiquer  au  Cardinal  de 
Porto  -  Carero. 

Une  quatrième  Preuve  que  le  crédit  du  Roi  de  France  augmente  efl 
que  le  Pape  fait  mine  de  reconnoitre  la  Succeflion  du  Duc  d'Anjou ,  & 
offre  de  s'oppofer  conjointement  avec  les  autres  Princes  d'Italie  aux  Pré- 
tentions de  l'Empereur  fur  le  Milanez.  Il  n'efl  pas  facile  de  s'imaginer 
l'impreffion  que  feront  cette  démarche  ,  &  la  médiation  du  Siège  de  Ro- 
me &  des  autres  Princes  Catholiques  Romains  \  mais ,  tous  ceux  qui  con- 
nohTent  le  monde  conviendront  volontiers ,  que  c'efl  un  des  plus  grands 
Points  que  le  Roi  de  France  pouvoit  peut-être  gagner,  &  que  rien  n'é- 
toit  capable  de  produire  un  plus  grand  effet  fur  les  Efpagnols  bigots,  ou 
de  contribuer  davantage  à  gagner  ceux  qui  ne  font  pas  contens  que  le 
Duc  d'Anjou  fuccede  à  la  Couronne  d'Efpagne. 

Une  cinquième  Preuve  de  l'accroifTement  de  la  PuilTance  de  la  France 
efl  que  le  Roi  de  Portugal  a  reconnu  le  Duc  d'Anjou.  Par  ce  moyen ,  la 
France  efl  affùrée  de  tout  ce  côté  de  l'Europe,  <â,  par  confequent,  plus 
en  état  de  faire  tête  par  tout  à  l'Empereur  ci  aux  autres  Puiflances. 

Ajoutons  pour  fixiéme  Preuve,  que  le  Duc  d'Anjou  efl  reconnu  pour 
Roi  d'Efpagne  par  le  Roi  de  Danemarc,  le  Duc  de  Brunlwic-Wolfcnbut- 
tel,  l'Eveque  de  Munller,  &  par  plufieurs  Princes  d'Italie. 

Cela  étant, nous  avons  fujet  de  craindre,  que  fi  l'on  y  remédie  à  tems, 
le  Pouvoir  de  la  France  ne  s'augmente  de  jour  en  jour  ;  que  ceux  qui 

n'ai- 


PK. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.   I.  fn 

n'aiment  pas  Louis  XIV.  ne  foient  réduits  par  la  crainte  à  la  néceffité  de  Affaires 
fe  foumettre  ,  comme  plufieurs  ont  déjà  fait,  &  que  ce  Prince  ne  veuille  G™-  DE 
obliger  avec  le  tems  tous  les  Potentats  de  l'Europe  à  fuivre  fon  Char  de 
Triomphe. 

Des  idées  de  cette  nature  cauferoient  moins  d'indignation,  fi,  comme 
plufieurs  des  Païs  qui  furent  fubjuguez  par  les  Romains  ,  nous  pouvions 
efperer  que  fes  Conquêtes  amelioreroient  nôtre  condition.  Mais,  au  lieu  de 
cela,  tout  ce  que  nous  avons  à  attendre  du  progrez  de  fes  armes,  c'ell  le 
Papifme ,  la  Servitude  ,  &  la  Pauvreté  ,  les  plus  grands  maux  qui  peu- 
vent arriver  aux  hommes ,  &  qui  tendent  directement  à  les  rendre  éter- 
nellement miferables. 

Ceux,  qui  ont  quelque  connohTance  de  l'Hiftoire ,  ne  trouveront  nulle- 
ment hors  d'apparence,  que  ce  ne  puifle  être-là  la  deitinée  de  la  Chré- 
tienté, fi  l'on  ne  prend  inceflamment  de  bonnes  mefures  pour  mettre  la 
France  à  la  raifon.  La  Maifon  d'Autriche  auroit  fait  fubir  le  même  fort 
à  l'Europe  du  tems  de  la  Reine  Ehfabeth,  fi  Dieu  n'avoit  pas  donné  à 
cette  grande  Princeffe  des  Confeiilers  habiles  &  honnétes-gens,  &  affez 
de  fageiTe  à  cette  Reine  ,  pour  fuivre  leurs  confeils.  La  Maifon  de 
Bourbon,  comme  on  l'a  déjà  dit,  efl  tout  autrement  formidable  aujour- 
d'hui que  ne  l'étoit  alors  la  Maifon  d'Autriche.  Louis  XIV.  a  été  auffi 
heureux  qu'aucun  Prince  qui  ait  fuivi  les  mêmes  Maximes  depuis  Nim- 
rod.  Que  n'a-t-on  donc  point  à  craindre  des  richeffes  immenfes  des  In* 
des,  &  d'une  PuiiTance  fi  redoutable  en  Europe,  fous  la  Conduite  d'un  tel 
Prince  ?  Nous  devons  compter  que  ces  richeiTes  feront  tout  autrement 
ménagées  qu'elles  ne  l'ont  jamais  été  depuis  le  Règne  de  Philippe  IV. 
Elles  tombent  de  l'Heure  qu'il  efl  entre  les  mains  d'un  Prince  qui  en  a 
befoin ,  &  qui  fait  fort  bien  s'en  fervir. 

Il  efl  trop  fage  &  trop  prudent  pour  n'avoir  pas  remarqué  les  Fautes 
que  le  Gouvernement  d'Efpagne  a  fait  autrefois,  &  l'on  peut  compter  fû- 
rement  qu'il  prendra  foin  de  les  éviter.  Il  a  allez  de  connoifîance  des 
Affaires  du  Commerce ,  &  il  fent  fi  bien  qu'il  efl  de  fon  intérêt  de  le  fa- 
vorifer,  qu'il  n'y  a  pas  à  douter  qu'il  ne  mette  à  profit  les  Trefors  de  l'Améri- 
que, qu'il  n'établifîe  des  Manufactures,  &  ne  protège  les  arts&  les  fcien- 
ces  miles ,  au  lieu  de  fouffrir  que  fes  peuples  confument  leurs  forces  & 
leurs  biens  dans  l'oifiveté,  comme  ont  fait  fes  Efpagnols  fous  une  mau- 
vaife  Adminiflrarion  de  près  de  quatre-vingts  ans. 

Cela  étant,  il  n'y  a  pas  d'apparence  que  le  Roi  de  France  manque  de 
troupes^  comme  il  efl  le  Maître  des  mines  d'argent,  il  ne  paroit  pas  vrai- 
femblable  qu'il  manque  de  ce  métal  pour  les  payer.  L'humeur  guerrière  de 
fes  Sujets  efl  fuffifamment  connue  de  l'heure  qu'il  eil  ;  &  il  n'y  a  aucun 
Sujet  de  douter  qu'elle  n'aille  en  augmentant  à  mefure  que  le  nerf  de  la 
guerre  augmentera  chez  eux. 

Cela  mérite  que  nous  y  faffions  une  attentiou  d'autant  plus  ferieufe, 
qu'il  faut  que  nos  richelTes  &  nôtre  puiffance  diminuent  à  proportion  que 
les  fiennes  augmenter*,  ne,    Cette  venté  paroitra  plus  clairement,  fi  nous 

fai- 


Sfr- 


PE. 


512    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  faifons  attention  à  l'influence  que  l'union  de  ces  deux  Monarchies  aura 
gen.  dr  vrai-femblablement  fur  plufieurs  Branches  de  nôtre  Commerce. 
l'Euro-  j  5ur  ce]uj  d'Efpagne  tant  pour  envoyer  que  pour  recevoir.  C'eft  com- 
me on  voit  une  des  plus  confiderables  parties  de  nôtre  Commerce  ;  & 
comme  le  danger  qui  nous  menace  à  cet  égard  eft  le  plus  proche,  auffi 
merite-t-il  que  nous  nous  mettions  inceffamment  en  devoir  de  le  préve- 
nir. Nous  avons  befoin  de  la  Laine  d'Efpagne  pour  la  Fabrique  de  nos 
Draps  fins.  On  compte  que  nous  en  pouvons  fabriquer  annuellement 
19054.  pièces,  &  que  nous  en  envoyons  tous  les  ans  hors  du  Royaume 
9034.  pièces.  Puis  donc  que  nôtre  Manufacture  de  Laines  eft  une  des 
principa'es  fources  de  nos  richeffes  domeftiques ,  n'efl-il  pas  tout  naturel 
de  conclure,  qu'elle  recevra  an  dangereux  échec,  fi  la  France  nous  dé- 
fend le  tranfport  des  Laines  d'Efpagne  en  Angleterre.  Il  y  a  alfez  d'ap- 
parence qu'elle  ne  manquera  pas  de  le  faire.    En  voici  les  Raifons. 

1.  Nonobilant  la  Paix  de  Ryfwick,  les  François,  &  nous,  ne  fommes 
point  encore  d'accord  au  fujec  du  Commerce  ;  il  n'y  a  point  de  Tarif  en- 
tr'eux  &  nous ,  comme  il  y  en  a  entr'eux  &  les  Hollandois  :  par  confe- 
quent ,  nous  avons  fujet  .de  craindre  que  les  François  ne  tâchent  d'inter- 
rompre nôtre  Commerce  avec  l'Efpagne  en  Reprefailles  des  Impôts  que 
nous  avons  mis  fur  leurs  Marchandifes. 

2.  On  fait  allez  que  les  François  ont  tenté  d'établir  une  Manufacture 
de  leurs  propres  Laines,  &  d'avoir  de  leur  propre  cru  tout  ce  qui  eitnecef- 
faire  pour  la  teinture,  &c.  en  vue  de  nous  difputer  le  Commerce  de  Tur- 
quie &  du  Détroit.  Peut-on  donc  douter  que  dans  la  même  vue  ils  ne 
s'emparent  de  la  Laine  d'Efpagne  pour  fabriquer  leurs  Draps  fins,  &  les 
faire  mieux  recevoir?  Ce  qui  joint  avec  les  Havres  qu'ils  ont  dans  la  Mé- 
diterranée ,  fans  parler  de  ceux  d'Efpagne  qui  font  de  l'heure  qu'il  eft  à 
leur  Commandement,  les  mettra  en  état  de  les  donner  à  meilleur  marché 
que  nous.  Je  ne  croi  pas  que  perfonne  s'avife  de  foûtenir  que  nous  na- 
viguerons plus  commodément  qu'eux,  &  que  nous  aurons  à  meilleur  mar- 
ché les  vivres  néceffaires  à  nos  vaifleaux. 

3.  Il  paroit  évidemment  par  la  même  raifon,  qu'ils  peuvent  avoir  en 
vûë  de  fournir  aux  Efpagnols  les  Etoffes  de  Laine  à  meilleur  marché  que 
nous  ne  pouvons  faire,  ou  leur  infpirer  l'envie  de  porter  leurs  méchantes 
Etoffes^  ce  qui  peut-être  d'une  très-fâeheufe  confequence  pour  les  Mar- 
chandifes que  nous  envoyons  en  Efpagne,  fi  nous  confiderons  la  chaleur 
du  climat ,  &  le  penchant  que  les  Efpagnols  ont ,  ou  auront  ,  de  fe 
mettre  à  la  Françoife.  Les  fuites  en  feront  fatales,  non  feulement  à  nôtre 
Commerce  d'Efpagne,  mais  encore  à  celui  des  Indes  Orientales.  Nos 
Marchands  le  fentent  affezj  car ,  en  envoyant  en  Efpagne  nos  Manufactu- 
res de  Laine  &c.  &  en  créditant  les  Efpagnols  jufques  aux  Indes  Occi- 
dentales, &c.  nous  en  avons  de  gros  retours  en  billon,  qui  font  le  pro- 
duit de  nos  Marchandifes.  Si  donc  l'onno.;s  ferme  une  fois  cette  fource, 
&  nous  devons  compter  à  coup  fur  que  les  François  tenteront  de  s'tn  em- 
parer, nous  ferons  obligez,  ou  de  tranfponer  nôtre  propre  argent,  ce  qui 

nous 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  513 

nous  ruineroit  bien  vite,  ou  de  laifler  périr  les  Indes  Orientales,  &  au-  Affames 
très  Commerces,  où  il  faut  de  l'argent  comptant,  &  par-là  nous  perdrions   °en-  de 
en  même  tems&  nôtre  gloire  &  nos  richefles.     La  plus  conflderable  Ob-     L'Euao. 
jeétion  qu'on  puilTe  faire  contre  cela  eft  de  dire,  Que  les  François  n'ont       Pt" 
pas  le  même  befoin  que  nous  des  vins  d'Efpagne  que  nous  achetons  en 
retour   de  nos  Marchandifes.       On  peut  répondre  à  cela.     1.  Que   les 
François ,  qui  font  les  Maîtres  de  l'Efpagne  de  l'heure  qu'il  eft,  n'auront 
pas  tant  d'égard  à  l'intérêt  des  Efpagnols  qu'aux  leurs  ;  &  il  eft  certain 
que  la  confiante  Politique  de  la  France  eft  abfolument  de  tenir  l'Efpagne 
dans  une  fîtuation  encore  plus  trifte  que  celle  où  elle  eft  maintenant,  afin 
de  la  mieux  retenir  fous  le  joug. 

Le  Duc  de  Rohan  dans- fon  Traité  de  la  Guerre  propofe  comme  une 
des  plus  excellentes  Maximes  pour  s'affeurer  d'une  Conquête,  d'ôter  à 
ceux  qu'on  a  conquis  toute  envie  &  tout  pouvoir  de  fe  révolter.  Il  ne  pa- 
roit  aucunement  difficile  de  pratiquer  cette  Maxime  à  l'égard  de  l'Efpa- 
gne. Il  y  a  fi  long-tems  que  fa  puifîance  a  commencé  de  tomber,  que  les 
François ,  qui  en  ont  fait  la  Conquête  par  le  moyen  de  leurs  Prêtres  & 
Penfionnaires,  n'auront  pas  de  peine  à  l'accabler,  &  auront  bientôt  fou- 
rnis l'efprit  des  Efpagnols  en  flattant  leur  vanité  &  leur  bigotterie,  com- 
me on  la  déjà  dit.  Ils  ont  un  moyen  fort  naturel  pour  en  venir  à  bout, 
c'eft  d'affeurer  le  Clergé  qu'ils  concourront  à  la  ruine  de  la  Reformation  , 
de  donner  aux  Grands  Efpagne  des  poftes  honorables  &  lucratifs,  &  de 
tranfpîanter  mutuellement  tour  à  tour  des  perfonnes  de  confequence.  Les 
François  ont  déjà  commencé  de  mettre  ce  dernier  expédient  en  ufage.  Le 
Duc  d'Harcourt  occupe  déjà  un  des  plus  importans  Poftes  d'Efpagne,  puis 
qu'il  eft  la  troifiéme  perfonne  delà  Régence.  Par  ce  moyen,  il  connoit  non 
feulement  tous  lesmouvemens&  les  refforts  du  Confeil,  mais  il  a  aufli  fur 
tout  cela  une  conflderable  influence, de  laquelle  il  ne  faut  pas  douter  qu'il 
ne  profite  en  faveur  de  la  France.  Comme  c'eft  une  prompte  contravention 
au  Teftament  du  feu  Roi  d'Efpagne,  qui  porte  Art.  33.  que  chacun  de  fes 
Royaumes  feroit gouverné  par  les  Originaires,  fans  aucune  innovation,  à 
caufe  des  grands  inconveniens  qu'on  a  éprouvé  lors  qu'on  a  voulu  faire  le 
contraire ,  on  a  fujet  de  craindre  que  cette  contravention  ne  foit  fuivie 
d'infractions  de  la  même  nature. 

Les  François  ne  fauroient  manquer  de  prétextes  pour  cela,  &  fur-tout 
en  cas  qu'il  y  ait  guerre  ,  &  que  leurs  Troupes  &  leurs  Efcadres  foient 
néceflaires  pour  maintenir  le  Duc  d'Anjou  en  pofTeflion.  Ils  regarderont 
cela  comme  une  occafion  légitime  de  mettre  des  Gouverneurs  François 
&  des  Garnifons  Françoifes  dans  les  Frontières  &  dans  les  Ports  d'Efpa- 
gne. Il  faudra  que  leurs  Généraux  affilient  à  tous  leurs  Confeils  de  Guer- 
re à  la  Cour  &  au  Camp;  &,  à  en  juger  par  l'Inclination  &  le  Génie  que 
les  François  ont  fait  connoître  jufqu'ici ,  l'on  n'a  aucun  fujet  de  croire 
qu'ils  feront  plus  modeftes  que  les  autres  Troupes  Auxiliaires  ont  accou- 
tumé de  l'être  en  pareil  cas  ;  ils  prétendront  indubitablement  être  en  Droit 
de  demeurer  en  pofTeflion  jufques  à  ce  qu'on  les  ait  rembourfé  de  leurs 

T'orne  XL  Ttt  fraix. 


GKN.  DE 

l'Euro- 
pe. 


fi4    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  fraix.  Contefter  que  les  Efpagnols  foient  incapables  ou  de  payer  ou  de 
déloger  les  François,  ce  feroit  connoître  bien  mai  les  chofcs  dont  il  s'agit. 
Les  Efpagnois  mêmes  le  Tentent  (i  bien,  que  nous  voyons  qu'ils  prennent 
déjà  des  devans  pour  fauver  leur  honneur  autant  qu'il  dépend  d'eux,  & 
croient  qu'il  vaut  mieux  mettre  les  François  en  polfeiîion  en  fe  foumet- 
tant  volontairement ,  que  de  s'y  laiffer  forcer  par  Execution  militaire. 
Une  fourmilion  faite  de  fi  bonne  grâce  eft  le  vrai  moyen  de  s'empêcher 
d'être  mis  en  pièces  par  un  Ennemi  puiffant:  il  femble  au  contraire  que 
c'eft  le  meilleur  moyen  d'émouvoir  fa  compafîîon  &  fa  generofité;  ainfi 
les  Efpagnols,  fe  voyant  abandonnez,  &  menacez  du  partage  de  leurs  E- 
tats,  fe  font  jettez  entre  les  bras  d'un  Prince,  qui  étoit  le  plus  capable 
&  le  plus  difpofe  qu'aucun  autre  de  leur  nuire,  dans  l'efperance  qu'une 
démarche  fi  foumiîe  l'adoucira  un  peu,  &  l'obligera  par  confequent  à  ren- 
dre leurs  chaînes  moins  pefàntes.  Il  n'elt  pas  a  la  vérité  tout-à-fait  excu- 
fable,  &  à  plus  forte  raifon  digne  de  l'ancienne  vertu  des  Romains,  que 
des  Perfonnes  diitinguées  fe  joignent  aux  Ennemis  de  leur  Patrie,  pour-! 
vu  qu'on  les  aflure  d'une  partie  de  fes  dépouilles  ;  cependant ,  quand  ils 
voyer;t  que  fa  ruine  e(t  inévitable,  &  qu'ils  font  reflexion  qu'ils  ont  au- 
tant de  Droit  que  des  Voifins  ambitieux  ou  des  Ennemis  étrangers,  l'ufa- 
ge  de  la  plupart  des  Cours  eft  à  prefent  de  leur  faire  grâce.  Cela  facili- 
tera la  tranfplantation  des  Grands  d'Efpagne,  pour  aiTûrer  la  poffeiïion  des 
François ,  comme  on  l'a  àé'fa.  dit.  On  peut  envoyer  les  plus  riches  en 
Ambaflade  ,  donner  aux  plus  pauvres  des  Gouvernemens  éloignez  Civils 
ou  Militaires  dans  leurs  propres  Etats;  &,  en  vertu  de  la  Régence  d'Efpa- 
gne qu'on  vient  d'offrir  volontairement,  ils  feront  tous  obligez  de  rendre 
compte  à  la  France  de  leur  Adminiftration.  Il  efl  difficile  de  concevoir 
l'ufage  que  les  François  peuvent  en  faire >  mais  il  eft  confiant,  qu'il  fau- 
droit  qu'ils  radotaffent  en  Politique,  s'ils  n'en  profuoient  pas  pour  réduire 
Les  Efpagnols  à  offrir  de  l'encens  fur  leurs  Autels,  à  dépendre  d'eux  pour 
les  honneurs  &  les  dignitez  ,  &  confequemment  pour  les  mettre  hors 
d'état  de  cabaler  contre  leurs  Intérêts. 

Mais,  revenons  à  l'Objection,  qu'il  n'y  a  pas  d'apparence  que  les  Fran- 
çois nous,  difputent  le  Commerce  d'Efpagne,  parce  qu'ils  n'ont  pas  befoin 
de  fes  vins.  On  peut  répondre  en  fécond  lieu  ,  que  cela  n'empêche  pas 
que  les  François  ne  puiflent  negotier  &  tranfporter  les  vins  d'Efpagne ,  & 
les  vendre  aux  Anglois  &  aux  autres  Nations  qui  en  ont  befoin.  Les  Ha.- 
rangs  &  autre  PoilTon  falé  d'Ecoffe  nous  fourmfTent  un  exemple  de  la  mê- 
me nature.  Les  François  refufent  d'en  prendre  des  Ecoffois,  à  caufe  des 
impôts  que  les  Anglois  ont  mis  fur  les  denrées  de  France ,  &  aiment  mieux 
les  acheter  des  Hollandois  à  plus  haut  prix  qu'à  cekn  que  les  Ecoffois  les 
leur  offrent.  Les  François  ne  pourront-ils  pas  propofer  aux  Efpagnols  de 
prendre  de  leurs  marchandifes  la  même  quantité  que  les  Anglois  en  pre- 
rioient,  pourvu  qu'ils  affoibliffent  nôtre  Commerce  ;  &  il  cela  les  accom- 
mode, les  Efpagnols  ne  doivent  pas  le  réfuter. 
La  féconde  Branche  de  nôtre  Commerce,  dont  les  François  unis  avec  les 

Efpa- 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  ^ 

Efpagnols  peuvent  nous  dépouiller  ,  elt  celui  de  la  Méditerranée  &  du  Affaires 
Levant  en  gênerai.  Cela  fe  peut  faire  aifémettt,  en  nous  refufant  la  Rade  G,EN-  DE 
&  le  Havre  de  Cadix,  &  entretenant  une  Efeadre  pour  nous  en  empêcher 
l'entrée.  Par-là  nous  voilà  privez  d'un  lieu  où  nous  piaffions  attendre  un 
vent  favorable  pour  palier  le  Détroit.  Mais ,  fupofé  que  nous  puiffions  fai- 
re en  forte  de  n'avoir  befoin ,  ni  de  ce  Huvre,  ni  de  cette  Rade,  n'eit-il 
pas  au  pouvoir  de  la  France  &  del'Efpagne  de  nous  empêcher,  &  à  tou- 
tes les  autres  Nations ,  de  palier  le  Détroit  fans  leur  permiflîon  ,  &  fans 
payer  un  Droit?  Cela  ell  allez  évident  à  ceux  qui  font  attention  à  la  fi- 
tuation  de  Gibraltar  &  de  Ceuta,  qui  confiderent  combien  le  Détroit  eft 
ferré  en  cet  endroit,  &  combien  il  elt  facile  de' bâtir  des  forts  fur  les 
deux  côtes,  &  d'interrompre  la  navigation  par  le  moyen  de  quelques  Fré- 
gates. Qui  fait  d'ailleurs  fi  le  Roi  de  France  ne  reirufcitera  pas  le  def- 
fein  qu'avoit  Cromwel  de  faire  une  Me  parfaite  de  la  Peninfule  de  Gilbra- 
tar.  Louis  XIV.,  par  pure  fantaifie  &  par  oftentation,  a  entrepris  & 
fait  des  chofes  de  moindre  éclat  ;&  s'il  fait  celle-ci,  comme  c'efl  un  moyen 
afluré  pour  nous  empêcher  de  palTer  le  Détroit  fans  fa  permilîîon  ,  ce  fera 
autli  une  fàeheufe  gourmete  pour  les  Efpagnols,  s'ils  redeviennent  jamais 
allez  fages  ou  alTez  habiles  pour  maintenir  encore  leurs  véritables  intérêts. 
Mais,  quand  il  ne  feroit  ni  l'un  ni  l'autre,  l'expérience  nous  a  appris,  que 
plufieurs  Rois  de  France  n'ont  pas  cru  qu'il  fut  incompatible,  avec  le  titre 
de  Très-Chrétien ,  d'unir  la  Croix  &  le  CroilFant  dans  le  louable  deflein  de 
mettre  aux  fers  la  Chrétienté;  il  y  en  a  eu  même  qui  n'ont  pas  cru  indi- 
gne de  l'homme  immortel  d'entrer  en  des  petits  Traitez  avec  les  Pirates 
de  Barbarie.  Ainfi  nous  n'avons  aucun  fujet  de  nous  flater  qu'on  face  au- 
jourd'hui difficulté  d'engager  les  Corfaires  à  contribuer  à  la  ruine  de  nôtre 
Commerce  du  Détroit.  La  terreur  des  garnifons  Efpagnoles  fur  la  côte 
d'Afrique,  compofées  de  Troupes  Françoifes,  &  foûtenuês  de  VaùTeaux 
François,  les  obligera  bien-tôt  à  des  chofes  aufquelles  ils  ont  moins  de 
penchant  qu'à  celle-ci.  Si  ces  expediens  ne  leur  reuffiffent  pas ,  ce  qui 
ell  prefque  impolfible,  il  y  en  a  encore  un  de  referve  ,  c'ell  d'engager 
les  Turcs  dans  un  Traité  pour  r  liner  nos  Manufactures.  Moyenant  cela, 
les  François  entreprendront  de  les  leur  fournir  à  meilleur  marché;  ce  qu'ils 
peuvent  faire  aifément,  comme  on  Ta  déjà  dit,  avec  le  fecours  de  la  Laine 
d'Efpagne  &c.  Pour  y  encourager  les  Turcs  d'autant  mieux  ,  le  Roi 
de  France  leur  promettra  de  faire  une  puiffante  diverflon  dans  l'Empire , 
pour  faciliter  aux  Ottomans  le  recouvrement  de  ce  qu'ils  ont  perdu  en 
Hongrie,  &c.  Nous  ne  devons  pas  croire  que  l'honneur  &  la  confcien- 
ce  caufent  au  Turc  aucun  fcrupule  là-deflus  ;  car,  le  Grand  Seigneur  ne 
manque  pas  deCafuiltes,  qui,  comme  ceux  du  Roi  de  France,  lavent  diftin- 
guer  non-feulement  entre  l'efprit  &  !a  lettre  d'un  Traité,  mais  ont  encore 
pour  eux  la  Loi  Mahometane,  qui  défend  pofitivement  de  rendre  ce  qu'ils 
ont  conquis.  Ainfi,  voici  un  cas  entr'autres ,  où  il  vaut  mieux  être  Turc 
que  Chrétien  Romain. 

De  tout  cela  il  paroit  manifeilement ,  qu'il  dépend  de  la  France  &  de 

Ttt  2  l'Ef- 


PE. 


$i6    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Awaires  l'Efpagne,  pendant  qu'elles  feront  unies  comme  elles  le  font,  de  ruiner  en- 
gen. de  tierement  nôtre  Commerce  de  Turquie  &  du  Détroit,  qui  a  été  fi  glo- 
i^RO"  rieux  &  fi  avantageux  à  l'Angleterre.  Pour  prévenir  cet  inconvénient, 
-  &  la  ruine  de  nôtre  Commerce  en  Efpagne ,  comme  il  femble  qu'il  y  a  de 
la  néceffité  de  faire  promptement  de  fortes  Alliances  avec  les  Puilfances 
étrangères,  &  de  vigoureux  efforts  par  Mer,  il  me  femble  auffi  qu'il  n'eib 
pas  moins  de  nôtre  intérêt  de  prendre  de  meilleures  mefures  que  celles 
qui  ont  été  prifes  jufqu'ici  pour  empêcher  le  tranfport  de  nos  Laines  en 
France.  Pour  cet  effet,  il  ne  fuffit  pas  de  créer  de  nouvelles  charges  ,  & 
de  les  donner  à  nos  amis  ou  à  gens  qui  foient  fous  nôtre  dépendance;  mais 
on  doit  prendre  garde  que  ces  poftes  foient  occupez  par  des  perfonnes 
tout- à-fait  bien  intentionnées  pour  le  Gouvernement  d'Angleterre,  &  qui 
fe  foient  plutôt  diftinguées  en  fouffrant  pour  leur  Patrie  lors  qu'elle  a  été 
opprimée,  que  par  flater  un  Gouvernement  auquel  on  ne  trouvoit  pas  de 
feureté  à  rellller.  Il  eit  certain  que  des  gens  de  ce  caractère  fuivronc 
toujours  le  torrent,  &  ne  feront  à  l'épreuve,  ni  de  la  corruption  d'un  Enne- 
mi étranger,  ni  de  la  brigue  d'un  Tiran  domeftique.  On  peut  juger  aifé- 
ment  combien  cela  eft,  à  craindre  dans  un  fiecle  auffi  corrompu  que  celui* 
ci.  Les  gens  de  cette  trempe,  entant  qu'ils  ont  concouru  avec  nos  Enne- 
mis pour  ruiner  nôtre  Commerce ,  ont  été  les  Canaux  ordinaires  de  leur 
perfide  correfpondance  :  &  par  confequent  ces  Polies  ,  quoi  qu'ils  ne 
foient  pas  fort  confiderables  en  eux-mêmes  ,  ne  doivent  pas  néanmoins 
être  proftitùez  à  leur  faveur  ou  à  l'intérêt  particulier}  mais,  on  en  doit  dif- 
pofer  uniquement  pour  le  bien  public,  &  avec  une  autorité  plus  publique 
qu'il  n'a  été  pratiqué  jufqu'ici. 

Une  troifiéme  Branche  de  nôtre  Commerce ,  &  qui  mérite  nôtre  plus 
profonde  attention,  eft  celui  de  nos  Plantations  de  l'Amérique.  L'Im- 
portance de  ce  Commerce,  le  grand  avantage  ,  aufïï-bien  que  l'honneur 
qui  en  reviennent  à  l'Angleterre,  font  fi  bien  connus,  qu'il  fuffit  de  dire 
qu'ils  périclitent  pour  reveiller  tous  les  mouvemens  de  nôtre  efprit  ,  & 
nous  faire  faire  les  efforts  les  plus  vigoureux  pour  prévenir  un  ii  grand 
mal.  On  fait  fort  bien  les  allarmes  que  l'Acle  du  Parlement  d'Ecoffe  don- 
na à  l'Angleterre  au  fujet  de  l'Etabliffement  des  Ecoffois  dans  les  Indes 
Occidentales.  Que  n'avons  nous  donc  point  à  craindre  pour  nôtre  Com- 
merce en  ce  païs-là  de  la  Puiffance  de  la  France  &  de  l'Efpagne  unies  en- 
femble?  Puifqu'étant  encore  divifées  elles  étoient  nos  Ennemies  &  nos  An- 
tagonifles  à  cet  égard,  il  efl  certain  que  leur  union  les  rendra  plus  entre- 
prenantes ,  parce  qu'elles  font  plus  en  état  d'exécuter  ce  qu'elles  entre- 
prendront. Le  Traité  de  Commerce  entre  nous  &  l'Efpagne  ne  fera 
qu'une  foible  defenfe  pour  nous  mettre  à  couvert  de  la  nouvelle  méthode 
d'argumenter  des  François.  Il  y  a  apparence  que  la  fubtile  diftinclion 
entre  la  lettre  &  I'efprit  du  Traité  va  être  d'un  auffi  grand  ufage  chez 
les  Princes  Catholiques-Romains ,  que  le  Dogme  des  Opinions  probables 
&  du  Péché  Philofophique  l'a  été  chez  leurs  Moines;  &  comme  à  peine 
y  a-t-il  de  crime  fi  noir,  que  la  dernière  ne  puiffe  pallier  ,  auffi  n'y  aura- 

.    t-il 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  fi7 

t-il  point  de  fi  indigne  violation  de  la  foi  publique  ,    que  Ja  première  ne   Affaires 
foit  capable  d'excufer.  ■  gen.  j>r 

Mais,  fi  cela  ne  reuiîit  pas, il  y  a  un  autre  expédient  dont  on  efl:  pareil-    Xi'^w>" 

lement  redevable  à  la  gratitude  &  à  i'adreffe  des  François ,  c'eft  de  deve-    - 

nir  nos  Accufateurs,  &  de  nous  rendre  odieux  aux  Efpagnols.  à  l'occafion 
du  Traité  de  Partage,  quoiqu'il  ne  fe  foit  fait  qu'à  leur  follicitation.  lis 
nous  ont  déjà  décriez  dans  leur  Manifefte  aux  Hollandois  ,  comme  des 
gens  qui  prétendoient  difpofer  des  Royaumes  &  des  Provinces  fans  aucun 
Droit.  C'eft  en  bon  François  accufer  les  Traitans  de  la  plus  grande  In- 
juftice  dont  on  ait  jamais  entendu  parler  j  on  les  décrie  comme  des  gens 
qui  veulent  donner  des  Souverains  aux  Peuples  fans  leur  confentement , 
&:  qui  prétendent  difpofer  des  Etats  ,  des  Provinces  ,  &  des  Hommes , 
comme  s'ils  étoient  des  Bêtes  brutes  &  des  Troupeaux  égarez  ,  qui  n'euf- 
fept,ni  Droit  de  difpofer  d'eux-mêmes ,  ni  un  Maître  pour  en  reclamer  la 
propriété.  On  nous  accufe  pareillement  d'avoir  voulu  ruiner  l'équilibre 
de  la  Chrétienté  en  donnant  tant  d'Etats  à  la  France  pour  augmenter  fa 
Puiffance,  qui  n'elt  déjà  que  trop  formidable.  Cela  s'appelle  intenter  un 
procez  aux  Traitans  par  devant  le  Tribunal  de  toute  l'Europe,  &  les  ac- 
cufer d'avoir  confpiré  contre  la  Liberté.  On  n'a  pas  oublié  de  faire  ]& 
même  accufation  aux  Traitans  par  devant  les  Peuples  d'Angleterre  &  de 
Hollande ,  comme  s'ils  avoient  expofé  par-là  reur  Commerce  de  la  Medi- 
terrannée.  On  les  accufe  auffi  par  rapport  à  leurs  Sujets  d'une  autre  omit 
fion  criminelle ,  c'elt  de  n'avoir  rien  itipulé  pour  eux.  Cela  fignifie  en 
bon  François ,  qu'encore  que  les  Traitans  ne  pûlTent  exécuter  le  Traité 
qu'aux  dépens  du  fang  &  des  biens  de  leurs  Sujets,  ils  ont  cependant  eu  il 
peu  d'égards  à  leurs  intérêts,  qu'ils  n'ont  rien  demandé  ni  pour  leur  Liber- 
té ,  ni  pour  leur  Commerce,  ni  pour  leur  Religion ,  ni  pour  leurs  Frères 
Proteftans  des  autres  Parties  de  l'Univers. 

Mais,  ce  n'eft  pas  encore  tout,  ils  accufent  de  plus  les  Traitans  d'Im- 
prudence &  de  Folie,  &  d'avoir  pris  des  mefures  qui  n'étoient  nullement 
propres  à  les  conduire  à  la  fin  qu'ils  fe  propofoient.  On  reconnoit  dans 
le  Mémoire,  quele  But  du  Traité  étoit  de  conferver  la  Paix  à  l'Europe  ; 
mais  les  François  difent  en  même  tems,  que  fi  l'on  s'en  tenoit  au  Traité 
de  l'heure  qu'il  efl,  cela  produiront  une  infinité  de  troubles  &  de  malheurs  com- 
muns à  tous.  On  ne  peut  pas  faire  le  Procez  à  la  Prudence  des  Traitans 
d'une  manière  plus  fanglante;  &  il  efl  certain  qu'ils  ont  toute  la  raifon  du 
monde  d'en  avoir  du  relTentiment  ;  raifon  d'amant  plus  grande,  que,  par  un 
foible  commun  à  tous  les  hommes,  on  aime  mieux  palier  pour  méchant 
que  pour  fimple. 

Les  François  ayant  donc  déjà  fait  paroître  tant  d'ingratitude  &  de  mali- 
gnité dans  leurs  accufations  ,nous  ne  devons  pas  douter  le  moins  du  mon- 
de, qu'ils  ne  foient  capables  d'aller  plus  loin,  &. qu'ils  ne  tâchent  auffi  de. 
nous  rendre  odieux  aux  Efpagnols ,  comme  fi  nous  avions  concouru  à  la 
violation  du  Traité  des  Pirenées,  par  lequel  la  Ligne  de  France  fut  exclue 
pour  toujours  de  la  Succeflion  d'Efpagne  ,  &  qu'ils  ne  difent  que  nôtre 

Ttt  |  vue 


l'£uro- 

PE 


5-18    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Atiairfs  vue  étoit  bien  moins  de  traverfer  l'élévation  de  la  France  ,  que  d'abaifîer 
gen.  de  l'ftfpagne.  11  ne  faut  pas  douter  non  plus  qu'ils  n'en  profitent  avec  la 
même  lâcheté  à  la  Cour  de  Vienne,  &  que  non-feulement  ils  ne  nous  ac- 
culent d'ingratitude  d'avoir  abandonné  nos  Alliez  dans  la  dernière  guerre, 
par  le  Traité  de  Partage  ;  mais  aufïi  d'infidélité  dans  nos  propres  prin- 
cipes ,  pour  avoir  concouru  par  un  Traité  à  la  violation  de  celui  des 
Pirenées  ,  qui  fut  fi  folemnel  ,  &  fur  lequel  le  nom  de  Dieu  fut  in- 
voqué. Ils  ne  manqueront  pas  d'en  tirer  avantage  au  préjudice  de  la 
Religion  que  nous  profeiïbns  ,  &  prendront  occafion  de-là  de  ren- 
dre la  Réformation  plus  odieuse  à  ceux  qui  font  déjà  fes  ennemis  dé- 
clarez. Jl  eft  vrai  que  nous  pouvons  récriminer  contr'eux  ,  &  les  ac- 
cufer,  non-feulement  d'avoir  eu  part  au  Traité  dont  on  parle  fi  mal  au- 
jourd'hui, mais  d'en  être  auffi  les  principaux  Auteurs.  Nous  pourrions 
aufîi  leur  reprocher  d'avoir  fuivi  en  cela  l'exemple  du  Dieu  de  ce  iMon- 
de,  qui  accufe  les  hommes  des  crimes  qu'il  leur  fait  commettre:  mais 
peut-être  ne  regarderont-ils  pas  cela  comme  une  Accufation  de  grande  im- 
portance, puifqu'il  eft  fi  ordinaire  à  ceux  qui  font,  ou  qui  voudroient  être, 
Monarques  abfolus,  de  fuivre  plutôt  les  préceptes  de  ce  méchant  Efprit, 
que  les  commandemens  du  grand  Dieu  du  ciel  &  de  la  terre.  D'ailleurs 
les  François  ont  pluiieurs  autres  chofes  pour  fe  défendre  de  cette  Accufa- 
tion, &  d'une  plus  atrocetneore.  Ils  plaident  pour  l'inexécution  du  Trai- 
té de  la  part  de  l'Efpagne,  &  pour  leur  Droit  naturel  à  laSucceffion;  ou  fi 
cela  ne  reiifîitpas,  ils  font  afiurez  de  l'Abfolution  du  Pape,  qui  dans  leurs 
principes  rend  le  plus  noir  de  tous  les  criminels,  auOi  innocent  que  l'En- 
fant qui  elt  encore  à  naitre.  Mais,  de  plus,  l'on  n'a  fait  cela  qu'en  vue  de 
rendre  fervice  à  la  Sainte  Eglife  Catholique  ,  comme  il  n'y  a  point  de 
doute  qu'on  ne  le  prétende,  cela  fuffit  pour  faire  du  crime  le  plus  noir 
l'action  du  monde  la  plus  méritoire.  Je  n'ai,  ni  lefpace,  ni  le  tems,  ni 
peut-être  la  volonté  ,  de  défendre  les  autres  interefllz  au  Traité  de 
Partage  :  ils  peuvent  employer ,  s'ils  le  jugent  néceifaire  ,  un  Avocat 
d'un  tout  autre  mérite  que  moi  >  mais, je  puis  bien  avancer  fans  rifque, 
que  les  François  ont  fait  la  guerre  à  leurs  voifins  pour  un  moindre  fu- 
jet  ;  &  fi  l'Angleterre  &  la  Hollande  jugeoient  à  propos  de  leur  de- 
mander réparation,  à  la  pointe  de  l'épée,  de  l'outrage  qu'on  leur  a  fait 
en  les  engageant  dans  un  Traité  qu'un  n'a  jamais  eu  deiTein  d'exécu- 
ter, perfonne  ne  pourroit  les  en  blâmer.  Mais,  il  n'eft  pas  befoin  de 
fonder  fur  cela  feul  la  caufe  de  la  guerre.  Si  Elles  trouvent  qu'il  foit 
de  leur  intérêt  d'y  entrer ,  Elles  n'ont  qu'à  rétorquer  l'Argument  des 
François  contre  eux-mêmes,  &  leur  dire,  que  puifque  Louis  XIV". 
n'a  pas  voulu  reconnoître  le  Traité  de  Partage  pour  un  bon  moyen 
pour  maintenir  la  Paix  de  l'Europe,  elles  ne  croient  pas  de  leur  part, 
que  l'Union  de  la  France  &  de  l'Efpagne  foit  un  bon  moyen  pour  ce- 
la même.  Surquoi  je  puis  dire  fans  rien  rifquer ,  que  la  plupart  des 
PuhTances  de  la  Chrétienté  feroient  de  leur   fentiment  à  cet  égard  \  & 

con- 


PF.. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC  I.  fi9 

eonfequemment  on  eft  en  Droit  de  demander  de  nouvelles  furetés  pour  Affaire* 
l'équilibre  de  l'Europe,  ou  de  dire  aux  François  qu'on  eft  dans  la  néceffi-  G*N-  DE 
té  de  prendre  des  mefures  pour  s'empêcher  aulfi-bien  que  les  autres  d'être 
engloutis  par  ces  deux  Couronnes.  Si  l'on  en  ufe  de  cette  manière,  & 
qu'on  prefTe  les  François  de  s'en  tenir  à  l'efprit  du  Traité  ,  puis  qu'ils 
en  ont  défaprouvé  la  lettre  ,  avec  quel  front  pourront-ils  le  refufer? 
Ils  ne  doivent  pas  prétendre  d'être  juges  &  parties;  &  ii  l'on  renvoyé 
Je  jugement  de  la  caufe  à  un  juge  deuntereffe  ,  il  n'elt  pas  difficile  de 
deviner  quelle  en  fera  la  decilion. 

Mais ,  revenons  au  Danger  qui  menace  nôtre  Commerce  des  Indes  Oc- 
cidentales.    Les  François  étant  unis  avec  les  Efpagnols  ,   ou  les  ayant 
pour  mieux  dire  fous  leur  Dépendance  ,  ne  manqueront  pas  de  trouver 
des  prétextes  pour  nous  incommoder  dans  les  Indes   Occidentales.     Ils 
font  en  droit  de  l'heure  qu'il  eft  de  prendre  \qs  Plantations   Efpagnoles 
fous  leur  protection  ,    &  fous  ce  prétexte   ils  peuvent  faire  revivre  les 
prétendons  des  Efpagnols  fondées  fur  le  Droit  de  la  Découverte  de  l'A- 
mérique, ou  s'établir  du  moins  fur  la  Rivière  de  Miiîilîipi ,  ou  ailleurs. 
De-là, ils  peuvent  beaucoup  incommoder  nos  Plantations  Septentrionales 
de  la  Nouvelle  York,  de  Jerfey  ,  de  la  Caroline,  de  Maryland,  de  la 
Nouvelle  Angleterre,  &c.     Leur  Commerce  avec  le  Canada  peut  ruiner 
le  nôtre  de  ce  côté  -  là  ;   &  en  interrompant  le  Commerce  de  ces  Planta- 
tions Septentrionales  avec  nos   Colonies  Méridionales,  ils  font  en   beau 
train  de  ruiner  les   unes  &  les  autres.     11   n'eft  pas  faciie  de  s'imaginer 
combien  les  fuites  en  feroient  funeftes  à  la  Nation  ;  on  peut  le  conjectu- 
rer en  partie  fi  nous  confiderons,  que  fuhrant  le  calcul  de  ceux  qui  fe 
font  occupez  à  examiner  l'état  de  nôtre  Commerce,  comme  le  Docteur 
Davenant  en  particulier,  les  envois  que  nous  faifons  tous  les  ans  dans 
l'Amérique  vont  à  environ  350000.  liv.  ft.  &  que  le  gain  que  nous  fai- 
fons par  ce  Commerce  revient  annuellement  à  600000.  liv.  lt.  ou  fi  nous 
fuppofons  fuivant  la  conclufion  de  certaines  gens,  que  les  Anglois  em- 
ploient 1 00000.  Nègres  dans  l'Amérique,  &  que  le  travail  de  cent  Nè- 
gres, fuivant  l'eftimation  qui  en  a  été  faite,  produit  1600.  liv.  ft.  par  an. 
L'Angleterre  gagne  1600000.  liv.  ft.  par  ce  feul  Commerce;  ce  qui,  plus 
ou  moins,  eft  fuffifant  pour  montrer,  que  la  ruine  de    nos  Plantations, 
ou  la  perte  de  leur  Commerce,  fi  les  François  &  les  Efpagnols  en  fai- 
foient  la  Conquête,  feroit  une  li  grande  perte  pour  l'Angleterre,  qu'il  fe- 
roit  impomble,ni  de  la  fuputer,  ni  de  la  reparer. 

Mais,  outre  la  perte  de  nôtre  Commerce,  quel  trifte  fujet  de  Reflexion 
ne  fera-ce  point  de  fonger  que  2.00300.  de  nos  frères  &  originaires  An- 
glois, ou  leurs  defcendans,qui  font  dans  l'Amérique,  feroient  ou  détruits 
par  les  François  &  les  Efpagnols,  ou  forcez  de  s'abandonner  à  l'Idolâtrie 
Romaine  ?  Que  cela  fera  avantageux  au  Papifme,  &  fatal  à  la  Reforma- 
tion ?  Mais  ,  comme  cette  penfée  ne  fauroit  feulement  trouver  place 
dans  le  cœur  de  ceux  qui  ont  pour  la  Religion  l'attachement  qu'ils  doi- 
vent, envifageons  lachofe  d'un  autre  côté,  &  confiderons  quelle  perte 

&  (ju'el- 


A  M'A  IRE  S 
GEN.    DE 


PE. 


fio    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

&  quelle  douleur  ce  fera  pour  nos  peuples ,  de  voir  tant  d'amis  &  de  pa- 
rens  qu'ils  ont  en  ces  Pais  -  là ,  ou  pafTez  au  fil  de  l'épée  par  l'ennemi 
L  EZ*°~  commun  ,  ou  condamnez  aux  mines  ,  &  autre  fervitude  infuportable. 
Nous  ne  devons  pas  efperer  que  les  François  &  les  Efpagnols,  également 
imbus  des  languinaires  &  barbares  principes  de  l'Eglife  de  Rome,  traitent 
les  Proteftants  plus  favorablement  que  les  Efpagnols  traitèrent  les  Indiens 
de  l'Amérique  dans  le  tems  qu'ils  s'y  établirent. 

Il  y  a  encore  une  conlideration  qui  frapera  peut-être  ceux  qui  ne 
comptent  pas  pour  grand  -  chofe  leurs  Compatriotes  ou  leur  Religion  dans 
l'Amérique.  Comment  eft-il  poflible  que  les  Anglois  puifient  fe  palier 
des  Marchandifes  &  Denrées  que  nous  recevons  tous  les  ans  de  ces  Païs- 
là,  comme  Tabac,  Sucre,  Cotton ,  Gingembre,  Poivre  de  la  Jamaïque, 
Bois  de  Fuftic,  Indigo,  Cacao,  Mats,  Fourures,  PoifTon  de  Terre-neu- 
ve, &c.  dans  un  tems  où  nous  perdons  non -feulement  les  chofes  nécef- 
faires  à  nôtre  propre  confommation ,  mais  encore  le  gain  que  nous  fai- 
sons par  le  tranfport  de  ce  que  nôtre  Pai's  nous  produit,  &  les  retours 
des  Marchandifes  de  l'Amérique  qui  nous  viennent  par  ce  moyen,  &  que 
nous  fommes  pareillement  privez  du  profit  qui  nous  revient  en  tranfpor- 
tant  dans  les  autres  Pais  de  l'Europe  ce  qui  ne  nous  efl  pas  néceffaire. 
Cela  ne  fera  pas  feulement  incommode  à  ceux  qui  vivent  dans  l'abon- 
dance, pour  ne  pas  dire  dans  le  luxe,  ce  fera  la  ruine  d'une  infinité  de 
familles  qui  gagnent  leur  vie  à  préparer  nos  Marchandifes  qu'on  efl  obli- 
gé de  tranfporter  pour  l'entretien  du  Commerce ,  ou  à  voyager  fur  les 
VaiiTeaux  employez  à  ce  Commerce. 

Si  quelqu'un  s'avifoit  de  dire,  que  nous  groffiffons  le  Danger,  &  que 
nous  regardons  les  chofes  au  travers  d'un  miroir  qui  les  multiplie ,  qu'il 
pefe  mûrement  la  matière,  &  il  trouvera  que  ces  appréhenfions  ne  font 
pas  les  effets  d'une  mélancolie  noire,  mais  le  réfultat  d'une  crainte  fon- 
dée fur  la  raifon.     On   fait  par  expérience  les  Avanies  que  les  François 
nous  ont  déjà  faites  dans  notre  Commerce  de  Terre-neuve  &  de  la  Baye 
de  Hudfon.     Le  Comte  de  Bellamont  a  remontré  dans  plufieurs  de  fes 
dernières  Harangues, à  ceux  repréfentent  nos  Colonies  Septentrionales, 
ce  qu'elles  ont  à  craindre  de  la  part  des  Colonies  Françoifes,  &  de  leurs 
Cabales  avec  les  Indiens  du  voifinage-    &  conféquemment  fi  l'on  confidére 
la  PuilTance  des  François  par  Mer,  &  la  facilité  qu'ils  ont  de  l'augmenter 
par  leur  union  avec  les  Efpagnols  ,  &  les  richeffes  de  l'Amérique ,  nos 
craintes  ne  feront  que  trop  bien  fondées.    Et  fi  l'on  ne  fonge  pas  tout  de 
bon,  pendant  qu'il  eft  encore  tems,   aux  moyens  de  prévenir  leurs  de£ 
feins ,  ce  que  nous  craignons  pourroit  bien  nous  arriver  bien -tôt. 

Une  autre  partie  de  notre  Commerce,  que  nous  avons  à  conflderer,  efl 
le  Commerce  d'Afrique.  La  Portion  de  ce  Commerce,  qui  fe  fait  du  coté 
du  Détroit,  eft  entièrement  à  la  merci  des  François  &  des  Efpagnols, 
comme  on  l'a  déjà  démontré,  &  pour  ce  qui  eft  de  celui  que  nous  faifons 
fur  la  Mer  Atlantique,  ou  au  de-là  du  Tropique  de  Cancer  &  de  la  Li- 
gne Equinoxiale,  ils  nous  ont  caufé  des  pertes  confiderables  durant  les 

der- 


PE. 


RESOLUTIONS   D'ET AT  ,  M.  DCC.  I.  5zr 

dernières  Guerres,  en  ruinant  nos  Forts  &  nos  Colonies.     Il  faut  donc   Affaires 
convenir  comme  d'une  chofe  évidente ,  qu'ils  font  à  préfent  plus  en  état    GfN-  DF- 
de  nous  nuire  dans  ce  Commerce  par  leur  union  avec  les  Efpagnols,  non- 
feulement  à  cauie  de  leurs  Forces  navales  unies,  mais  auili  parce  qu'ils 
peuvent  nous  incommoder  pour  le  Commerce  des  Efclaves  j  car  ne  leur 
eft-il  pas  aifé  d'obliger  les  Efpagnols  de  n'acheter  plus  d'efclaves  de  nous, 
moyennant  qu'ils  leur  en  fourniffent  à  meilleur  marché  ?    C'efi  le  prétexte 
qu'ils  peuvent  prendre  d'abord 5  &  il  ne  faut  pas  douter  qu'ils  ne  traitent 
enfuite  pour  leur  compte  avec  les  Efpagnols,  &  ne  nous  enlèvent  par  ce 
moyen  cette  autre  fource  du  Billon  que  nous  tirons  des  Indes  Occidenta- 
les, aulîi  bien  que  l'avantage  avec  lequel  nous  pouvons  le  faire  valoir 
dans  la  Jamaïque ,  &c.  &  ne  nous  ôtent   les  moyens  de  faire  pafTer  en 
Angleterre  les  Denrées  de  ce  Païs-là,  qui  non-feulement  nous  fourniffent 
les  chofes  néceffaires  à  notre  confommation,  mais  aufll  celles  dont  nous 
avons  befoin  pour  notre  Commerce  dans  les  Pais  étrangers.     Outre  ce 
dommage  ,  ils  ruineront  notre  Commerce   de  Dents  d'Eléphant  &  de 
Poudre  d'Or  ;  ce  qui  nous  privera  non-feulement  de  l'avantage  qui  nous 
revient  du  fret  &  de  la  vente  des  Marchandifes"  que  nous  envoyons  ëc 
que  nous  recevons  par  le  moyen  de  ce  Commerce  ;  mais  encore  inter- 
rompra la  Fabrique  de  nos  monnoyes,  &  la  circulation  de  nos  efpèces. 
S'étant  enfin  rendus  les  Maîtres  de  la  Mer,  ils  empêcheront  que  notre 
Compagnie  d'Afrique  ne  faife  pafTer  dans  la  Jamaïque,  &  dans  nos  au- 
tres Plantations  des  Efclaves,  dont  le  travail  fait  la  principale  partie  de 
nos  richeffes,  dans  les  Indes  Occidentales  ;  &  par  cela  feul  ils  peuvent 
ruiner  ces  riches  Plantations. 

Voyons  maintenant  les  fuites  que  peut  avoir  l'Union  des  François  &. 
des  Efpagnols  à  l'égard  de  notre  Commerce  des  Indes  Orientales.  On  a 
déjaintinué,  qu'une  pareille  augmentation  de  puiffance  mettra  les  Fran- 
çois plus  en  état  de  nous  incommoder,  foit  en  allant,  foit  en  revenant  ; 
qu'ils  font  ce  femble  en  beau  début  de  nous  priver  de  notre  argent  comp- 
tant, fans  lequel  il  nous  feroit  impoffible  de  faire  le  Commerce  du  Le- 
vant ;  que  s'ils  fubjuguent  les  Hollandois,  ou  les  réduifent  à  traiter  aux 
conditions  qu'ils  voudront  ;  ce  qui  elt  très-poiïïble  à  moins  que  nous  ne 
les  fécourions ,  les  Comptoirs  des  uns  &  des  autres  s'uniront  pour  ruiner 
les  nôtres.  On  peut  ajouter  à  cela,  qu'ils  n'ont  qu'à  fe  rendre  maîtres 
de  la  Côte  d'Afrique  fur  la  Mer  Atlantique,  &c.  pour  nous  enlever  tou- 
tes nos  Places  de  retraité  ou  de  rafraichiffement  au  Cap  de  Bonne- Efpé- 
rance  &  par-tout  ailleurs.  Ou  ils  peuvent  donner  des  commiflïons  aux 
Corfaires  de  Madagafcar  qui  traverleront  nos  voyages,  ou  ils  peuvent  y 
loger  leurs  Vaiffeaux  qui  feront  la  même  chofe.  Leur  crédit  auprès  du 
Grand -Mogol,  &  autres  Potentats  de  l'Orient,  qui  dans  ce  cas  l'empor- 
tera fans  contredit  fur  le  nôtre,  peut  ruiner  notre  Commerce  en  ces  Païs- 
là  >  &.,  devenus  plus  puiiTans  dans  la  Manche  ,  ils  peuvent  nous  empêcher 
de  tranfporter  ces  Marchandifes  dans  les  autres  Ports  de  l'Europe,  ilippo- 
Titme  XL  Vvv  fé 


PF.. 


52.2     MEMOIRES,  NEGOTTATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Attairf.s    fé  que  nous  foyons  allez  heureux  pour  conduire  fans  accident  nos  Vaif- 
gen.  de    féaux  dans  nos  Forts. 

l'Euao-  Nous  connoitrons  de  quelle  dangereufe  conféquence  cela  feroit  pour 
l'Angleterre,  fi  nous  considérons  :  1.  Que  nos  VaiiTeaux,  nos  fonds,  & 
les  gens  que  nous  occupons  a  cela,  nous  deviendront  néceiliirement  in- 
utiles, &  par  conféquent  nous  perdrons  tout  le  profit  qui  nous  revenait 
de  ce  Commerce.  Cette  raifon  paroitra  de  très -grand  poLis ,  fi- nous  jet- 
tons  les  yeux  fur  la  fupputation  (lavante  de  la  façon  du  Docteur  Deve- 
nant. Il  fait  monter  ce  que  nous  y  iraniportons  en  Billon  &  en  Mar- 
chandifes  à  500000.  liv.  IL  par  an. 

Les  retours  à  1800000. 

Ce  qui  fe  confomme  chez  nous  à  1300000. 

Ce  que  nous  rapportons  en  Europe  à  fooooo. 

Ce  que  nous  gagnons  par  ce  tranfport  à  180000. 

Si  nous  ajoutons  à  cela  ce  qu'il  dit  dans  fon  Traité  du  Commerce  âcs 
Indes  Orientales  ,  nous  épargnons  en  baillant  le  prix  des  foyes  &  des 
toiles  étrangères,  &  par  la  confommation  que  nous  faifons  de  nos  ma- 
tériaux ,  aufquels  ces  iMarchandifes  fuppléent  ;  ce  qui  rend  nos  envois 
plus  confiderables ,  nous  épargnons,  dis- je  ,  &  gagnons  annuellement 
par  ce  Commerce  680000.  liv.  IL 

De-là  il  paroit  encore  manifellement,  qu'en  perdant  nôtre  Commerce 
des  Indes  Orientales,  nous  perdons  pareillement  une  grande  partie  de  no- 
tre Commerce  de  l'Europe,  &  comme  acheteurs,  &  comme  vendeurs. 
Nous  perdons  encore  le  Salpêtre  pour  faire  la  Poudre  ,  néceffaire  à  no- 
tre défenfe  ^  perte  d'autant  plus  confiderable,  qu'il  n'y  a  pas  moyen  de 
îa  reparer  d'ailleurs.  Si  donc  les  François,  ou  en  fubjuguant  les  Ilollan- 
dois,  ou  en  les  mettant  dans  la  nécefîité  de  traiter  à  leur  mot,  s'empa- 
rent de  cette  Marchandife  par  cette  fupériorité  dans  le  Commerce  des  In- 
des Orientales,  voilà  tout  le  refte  de  l'Europe  defarmé,  voilà  les  Fran- 
çois à  la  Monarchie  Univerfelle  après  laquelle  ils  foupirent  avec  tant 
d'ambition,  &  à  laquelle  ils  ont  tâché  de  parvenir  depuis  11  long-tems 
avec  tant  d'induihïe.  La  perte  de  notre  Commerce  étranger  en  gênerai 
nous  dépouillera  d'une  partie  de  notre  Navigation  &  de  nos  gens  de  ma- 
rine, qui  font  une  fi  confiderable  partie  de  notre  force. 

Faifons  enfin  quelques  Confiderations  fur  nôtre  Commerce  de  l'Europe 
en  gênerai.  Il  paroit  manifellement  par  ce  qu'on  a  déjà  dit,  qu'il  dépend 
en  grande  partie  de  celui  que  nous  avons  aux  Indes  Orientales ,  lequel 
étant  une  fois  ruiné,  il  faut  nécelTairement  que  celui  de  l'Europe  tombe; 
ou  s'il  ne  tombe  pas,  les  François  étant  les  Maîtres  de  la  Mer,  &  uni/Tant 
leurs  forces  avec  l'Efpagne  ,  nous  voilà  dans  l'impolîibilité  de  lé  continuer. 
Par  cette  malheureufe  Union  nôtre  Commerce  d'Efpagne,  du  Détroit,  & 
du  Levant,  le  meilleur  que  nous  ayons  en  Europe,  eil  vifiblement  en 
danger.  Si  les  François  fe  rendent  une  fois  les  Maîtres  de  la  Hollande, 
nôtre  Commerce  d'Allemagne  &  du  Pais  Oriental  eil  entièrement  ruiné, 

&  com- 


PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.         Si« 

&  comme  il  fera  fort  expofé  à  caufe  des  Havres  de  Nieuport  &  ci'Oflende  Amt$Èà 
joints  avec  ceux  de  Dunkerque,  de  Graveline ,  &  de  Calais,  ce  fera  un  GFN'-  CF 
effet  particulier  fur  nôtre  Manufacture  de  Laine ,  qui  ell  fort  eltimée  de  L '^RO" 
ce  côté-là. 

On  compte  que  la  Laine  d'Angleterre  va  annuellement  à  deux  millions, 
&  l'on  fuppofe  qu'elle  monte  à  huit  lors  qu'on  l'a  mife  en  œuvre.  On  como- 
te  qu'on  peut  tous  les  ans  envoyer  dehors  pour  deux  millions  de  ces  Ma- 
nufactures. A  décompter  10.  pour  cent  pour  le  fret  &  pour  les  retours, 
le  gain  qui  en  revient  annuellement  à  la  Nation  monte  à  2.00000.  liv.  ft. 
Il  paroit  par-la, que  le  Royaume  fouffriroit  un  grand  préjudice, fi  l'on  nous 
empêchoït  le  tranfport  de  nos  Manufactures  de  Laine,  &  qu'une  infinité 
de  Familles  qui  ne  fubfiltent  que  par-Là  feroient  ruinées  fans  reflource. 

Pour  ce  qui  regarde  le  Commerce  de  la  Pêche,  dont  les  Hollandoîs 
&  les  François  fe  font  déjà  emparez  en  grande  partie,  nous  devons  nous 
attendre  à  le  perdre  entièrement,  fi  l'on  n'arrête  promptement  l'élévation 
de  la  France.  Les  Hoilandois  fe  font  déjà  fi  bien  rendus  les  Maîtres  de 
ce  Commerce,  qu'à  peine  veulent-ils  nous  permettre  de  pêcher  dans  nos 
Mers.  Or  fi  une  fois  ils  viennent  à  être  fujets  de  la  France,  ou  à  fe 
joindre  avec  Elle,  nous  n'aurions  pas  le  pouvoir  de  mettre  en  Mer  une 
Barque  de  Pêcheur,  qui  ne  foit  en  danger  de  tomber  entre  leurs  mains, 
comme  il  a  paru  par  les  infultes  que  les  Dunkerquois  ont  fait  à  nos  Pêcheurs 
de  Maquereaux  durant  la  dernière  Guerre. 

Pour  renfermer  en  peu  de  mots  ce  qui  regarde  le  Commerce  étranger, 
difons  que  le  profit  qui  nous  en  revient  monte  fuivant  la  fuputation  qu'on 
en  a  faite  à  deux  millions  par  an,  &  c'elt-ce  que  la  grandeur  exorbitan- 
te de  la  France  nous  met  fort  en  danger  de  perdre. 

Encore  feroit-ce  une  confolation,fi  nous  n'avions  que  cela  feul  à  crain- 
dre j  mais,  il  n'y  a  point  d'homme  fenfé  qui  puiffe  fe  flater  que  nous  en 
ferons  quittes  pour  cela  j  car  non  feulement  nous  avons  à  craindre   d'ê- 
tre dépouillez  de  tout  Commerce  étranger,  mais  encore  d'être  envahis 
dans  nôtre  Ifle.  Les  François  &  les  Efpagnols  fentent  fort  bien  ,  que  c'efb 
nous  qui  avons  fait  échouer  leurs  defïeins  pour  la  Monarchie  Univerfelle, 
lorsqu'ils  fe  font  mis  fucceiîivement  ce  projet  en  tètej   ils  lavent  pareille- 
ment que  tant  que  nous  demeurerons  en  nôtre  entier,  il  ne  leur  fera  pas 
facile  d'y  réunir,  quoi  qu'ils  unifient  leurs  Forces  &  leurs  Confeiîs.     Nous 
pouvons  ajouter  à  cela  la  haine  qu'ils  ont  pour  nous  au  fujet  de  la  Reli- 
gion, &  l'obligation  où  ils  font  de  rétablir  le  Prince  qui  nous  a  quitté,  ou 
{ts  Defcendans  ;  ou  peut-être  l'envie  qu'ils  ont,  pour  mieux  dire,  de  met- 
tre un  Prince  François  fur  le  Trône  de  la  Grand-Bretagne,  de  nous  rendre 
Feudataires  de  la  France,  de  nous  appauvrir  de  manière,  que  nous   ne 
fbyons  plus  en  état  déformais  de  traverfer  l'acheminement  de  leurs  projets- 
pour  la  Monarchie  Univerfelle,  &  d'extirper  ce  qu'ils  apellent  l 'liéréjie du    . 
Nord. 

Les  chofes  étant  ainfi ,   &  le  danger  fi  grand  &  fi  proche ,   il  refte  à 

Vvv  2.  exa- 


l'Euro- 
pe 


f24    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    examiner  ce  qu'on  peut  faire  de  mieux  pour  nous  mettre  à  couvert  de 
gkn.  dk    l'Orage  qui  nous  menace. 

A  bien  envifàger  la  nature  de  ce  danger,  il  eft  certain  que  nôtre  prin- 
cipale fureté,  après  la  Protection  divine,  dépend  d'une  bonne  Flotte, 
c'eft-à-dire  d'une  Flotte  qui  nous  mette  en  état  de  défendre  nos  Côtes, 
de  protéger  nôtre  Commerce  étranger,  &  d'incommoder  l'ennemi  public, 
ou  dans  lès  propres  Etats,  ou  dans  fes  Plantations  étrangères  fi  befoin 
eit.  Nous  fommes  déjà  en  fort  bon  état  pour  cela,  puifque  nous  avons 
au  moins  175».  VaiiTeaux  de  Guerre.  Si  nous  ajoutons  à  cela  les  forces 
Navales  des  liollandois, comme  il  dépend  de  nous  de  le  faire  par  le  moyen 
d'une  étroite  alliance  ,  nous  n'avons  humainement  parlant  rien  à  crain- 
dre pourvu  que  ces  Flottes  foient  bien  équipées,  bien  pourvues  de  vivres, 
&  commandées  par  des  gens  de  probité  &  d'honneur. 

Pour  cet  effet,  il  eit  très-raifonnable,  que  nôtre  Parlement, à  qui  l'on 
confie  la. difpofition  de  nôtre  bourlè,  afiîlte  Sa  Majefté  de  ks  meilleurs 
Confeils,  &  foit  en  même  tems  fon  grand  Confeil,  &  le  Corps  qui  repré- 
lènte  les  Peuples.  Il  y  a  un  grand  &  inconteitable  intérêt  d'aider  à 
ehoiilr  ceux  qui  méritent  d'être  chargez  de  la  défenfe  de  la  nation  ,  qui 
font  propres  à  avoir  la  difpofition  de  fa  bourfe,  &  à  prendre  garde  qu'on 
n'emploie  dans  des  affaires  de  fi  grand  poids ,  &  que  des  gens  afYe£tiori- 
nez  au  public,  &  plus  attentifs  à  ménager  nôtre  honneur  &  nôtre  Com- 
merce, que  de  s'enriehir  aux  dépens  du  Public.  C'efl  une  chofe  à  la- 
quelle il  faut  bien  prendre  garde  en  tout  tems,  mais  fur-tout  dans  une 
pareille  conjoncture ,  où  nous  ne  fommes  pas  plutôt  fortis  d'une  ennuyeu- 
le  &  pefante  Guerre,  qu'on  va  nous  forcer  vraifemblablemcnt  d'entrer 
dans  une  autre,  à  moins  que  nous  ne  foyons  d'humeur  de  demeurer  (im- 
pies Spectateurs,  &  de  voir  mettre  toute  l'Europe  aux  fers, en  attendant 
qu'on  vienne  enfin  nous  charger  des  plus  pefantes  chaînes  fans  pitié  ni 
compallion. 

JMôtre  Gouvernement  eft  fi  heureux,  que  nous  ne  pouvons  être  taxez 
que  de  nôtre  confentement ,  comme  on  taxe  les  fujets  de  la  plupart  des 
autres  Monarchies  de  l'Europe;  d'ailleurs  nous  fommes  heureux  d'avoir 
un  tel  Souverain,  qui  a  toujours  témoigné  contre  la  maxime  de  quelques- 
uns  de  fes  Prédeceifeurs,  qu'il  étoit  bien  aife  que  ceux  qui  accordent  les 
fonds  eufTent  aufîi  infpeétion  fur  les  comptes  publics;  de  forte  que  s'il  eft 
arrivé  que  quelque  chofe  ait  été  mal  adminiitré,  nous  ne  devons  nous  en 
prendre  qu'à  nous-mêmes.  Comme  cela  fournit  une  bonne  occafion  à 
ceux  qui  font  affectionnez  au  public,  de  fe  déclarer  pour  les  intérêts  de  la 
Patrie,  il  eit  tems  ou  jamais  qu'ils  le  faffent.  Il  y  auroit  bien  du  mérite 
pour  des  gens  d'honneur  &  de  diftinction,  à  fervjr  la  Nation  en  remphf- 
fant  de  pareils  poftes  publics  dans  une  occafion  fi  préfixante ,  ou  fans  aucun 
falaire ,  ou  du  moins  pour  ce  qui  leur  feroit  précifement  néceffaire  pour 
leur  dépenfe.  La  frugalité  des  Hollandois  nos  voifins,  au  fujet  des  pen- 
iions  qu'ils  donnent  aux  perfonnes  publiques,  eit  un  de  leurs  meilleurs 

prefer- 


PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  525 

prefervatifs  contre  la  corruption  &  les  préfens.  Leurs  falaires  ne  font  pas  Affaires 
allez  considérables  pour  tenter  des  avares'à  briguer  les  charges  de  l'Etat:  sen.de 
Aufll  les  donne-t-on  en  gênerai  à  des  gens  de. vertu,  &  de  mérite,  à  des 
gens  riches  qui  fervent  la  patrie  pour  la  gloire,  &  que  le  lucre  ne  détache 
pas  aifément  de  Tes  intérêts.  La  première  fois  qu'ils  îecouërent  le  joug 
Efpagnol ,  un  Miniftre  d'Efpagne  remarqua  fagement,  que  leur  frugalité 
ruineroit  ion  Maître.  Or,  puilque  l'événement  a  confirmé  la  prédiction, 
leur  exemple  en  cela  mérite  bien  d'être  imité. 

Quoique  nôtre  principale  fureté  dépende  d'une  bonne  Flotte,  cela  n'em- 
pêche pas  que  nous  ne  devions  avoir  une  Armée  fuffifante,  de  peur  de 
donner  trop  de  tentation  aux  ennemis  étrangers  &  aux  mécohtens  domef- 
tiques;  mais,  depuis  que  les  Libertés  de  la  France  &  du  Dannemark  ont 
été  englouties  par  des  Armées,  &  que  nôtre  Gouvernement  compofé  du 
Roi&  du  Parlement  a  été  entièrement  renverfé  par  Cromwel  &  par  l'Ar- 
mée qui  étoit  fous  fon  commandement ,  des  ombrages  de  la  Nation  contre 
les  Troupes  fur  pied  ne  doivent  pas  être  méprifez,  mais,  auili  ils  ne  doi- 
vent pas  être  fomentez.  Comme  il  faut  avoir  de  raifonnables  égards  au 
péril  qui  nous  menace  au  dehors,  on  doit  avoir  foin  à  proportion  de  pré- 
venir les  ombrages  contre  une  Armée  en  pied  au  dedans,  je  conçois,  s'il 
m'eit  permis  de  le  dire,  qu'on  peut  aifément  prévenir  les  fuites  de  cet 
inconvénient  par  le  concours  mutuel  du  Roi  &  du  Parlement,  qui  régle- 
ront le  commandement  &  le  nombre  des  Troupes  comme  ils  le  jugeront 
à  propos. 

Quoi  qu'il  n'y  ait  aucun  danger  en  cela  de  la  part  de  Sa  Majeftc, 
ce  n'ell  pas  une  fuffifante  fureté  pour  la  Nation.  Cromwel, qui  n'étoit  que 
Lieutenant  General  ,  ménagea  l'Armée  de  manière,  qu'elle  ne  vouloic 
obéir,  ni  au  Roi,  ni  au  Parlement,  ni  au  General;  mais,  s'étant  emparée 
de  la  puiffance  législative  qui  n'appartient  qu'à  la  Nation,  elle  faifoit  faire 
&  défaire  les  Acles  qu'elle  jugeoit  à  propos ,  mettoit  le  Pais  fous  contri- 
bution, &  donnoit  à  certains  Cavaliers  qu'on  appelloit  Agitateurs,  plus 
d'Autorité  qu'elle  n'en  vouloit  donner  à  la  Chambre  des  Communes.  Elle 
fit  tant  enfin,  qu'elle  renverfa  entièrement  nôtre  Gouvernement,  détrôna 
le  Roi,  chafla  le  Parlement,  &  tomba  enfin  heureufement  pour  la  Nation 
dans  une  parfaite  Anarchie,  qui  ne  finit  que  par  fa  ruine.  Au  lieu  de  ce- 
la, fi  elle  s'étoit  fixée  à  un  Chef  certain,  ou  qu'elle  fe  fût  attachée  invaria- 
blement quelque  forte  de  Gouvernement,  il  y  a  toutes  les  apparences 
du  Monde  qu'elle  nous  auroit  aiïujettis  à  une  Puiffance  militaire  fous  la-> 
quelle  nous  ferions  encore  de  l'heure  qu'il  elt.  Nous  n'avons  aucune  cer- 
titude de  la  Vie  de  Sa  Majeiîé  ou  de  la  PrinceiTe.  Nous  ne  favons  qui  leur 
fuccedera,  &  par  confequent  s'ils  venoient  à  mourir  nous  aurions  plus  à 
craindre  d'une  Armée  fur  pied.  Qui  nous  aifûrera,  que  des  Troupes  mer- 
cenaires, commandées  par  des  Généraux  ambitieux  &  politiques,  ne  iè 
laifferont  pas  en  pareil  cas  corrompre  par  argent,  pour  concourir  avec  les 
François  au  rétabliifement  du  dernier  Roi  ou  de  fon  prétendu  Fils  ;  ce  qui 

V  v  v  3  ne 


l'Euho 

PE 


fz6  MEMOIRES,  NEGGTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

Ayfaihts    ne  peut  jamais  arriver  fans  renverfer  totalement  nôtre   Religion   &  peut- 
ciF.N.DE     eLre  an;|i  nôtre  Souveraineté;  car,  il  n'y  a  point  de  vraisemblance  que 
les  François  Subjuguent  cette  Nation  pour  le  ci-devant  Roi,    s'ils   trou- 
vent quelque  pofiibilité  à  la  garder  pour  eux-mêmes  ;   ce  qu'on  ne  peut 
pas  dire  qui  fût  fort  difficile  en  pareil  cas. 

Je  n'iniifte  point  fur  ceci, pour  combattre  la  nécefîîté  d'avoir  une  Armée 
en  cas  de  Guerre,  mais  feulement  pour  prouver  que  comme  nous  fommes 
établis  à   préfent,  il  femble  qu'il  y  ait  de  la  nécelfitéque  les  parties  qui 
condiment  nôtre  Gouvernement  s'attachent  extraordinairement  à  écarter 
tout  ce  dont  les  mal-intentionnaz  peuvent  tirer  avantage  pour  donner  om- 
brage aux  uns  &  aux  autres,  ou  aux  Peuples.     Ce  n'elt  pas  faire  le  per- 
sonnage de  fage,  ou  d'homme  de  bien,  que  de  contefterla'Puiflance  execu- 
tive ou  de  Souverain  Magiilrat  que  nos  Loix  donnent  au  Roy  :   mais, 
comme  il  efl  impoiîible  à  Sa  Majeité  de  faire  tout  ce  qui  appartient  à  la 
Puiflance  executive  qui  refide  en  fa  perfonne,  &  que  nos  Loix  dans  la 
plupart  des  cas  de  confequence  déterminent  les  qualitez  de  ceux  aufquels 
on  doit  confier  S Adminittration,  aufii  doit-on  regarder  nos  Législateurs 
comme  les  Juges  les  plus  competens ,  &  qui  ont  les  qualitez  requifes  à 
l'Adminiitration.     Comme  il  efl:  nécefTaire  de  reconnoitre  en  tout  tems 
cette  vérité,  il  femble  qu'il  l'efl  encore  d'avantage  dans  la  conjoncture 
préfente,  où  nous  avons  le  malheur  d'être  divifez  en  Factions  ,  d'avoir  a 
faire  à  un  ennemi  puiïïant  &  artificieux,  &  de   nourrir  dans  nôtre  fein 
des  gens  qu'on  Soupçonne  avec  raifon  d'être  dans  fes  intérêts.     Une  mu- 
tuelle confiance  ,  &  une  bonne  Union  entie  le  Roi  &le  Parlement,  efi:  le 
meilleur  moyen  du  Monde  pour  nous  empêcher  de  craindre  les   injuftes 
progrés  de  la  prérogative  d'un  côté ,  ou  de  prévenir  les  attentats  qu'on 
pourroit  y  faire  d'un  autre.     II  paroît  mani  Tellement  par  nôtre  Hiftoire, 
que  le  premier  nous  a  donné  Sujet  de  craindre  plus  Souvent  que  l'autre; 
&  on  a  toujours  remarqué,  que  le  vrai  moyen  d'éviter  ces  deux  incon- 
veniens  étoit  que  nos  Rois  agiffent  de  concert  avec  le  Parlement  leur  grand 
ConSeil ,  &  que  ceux  qui  en  ont  uSé  autrement,    &  ont  voulu  gouverner 
plus  par  des  Favoris  que  par  l'Avis  de  nos  Parlemens,  n'ont  jamais  été 
heureux,  &  n'ont  jamais  reùifi. 

La  Reine  Elifabeth  nous  fournit  un  glorieux  Exemple  de  ce  que  nôtre 
Monarchie  efl  capable  de  faire,  quand  nos  Souverains  agiffent  par  de  Sa- 
ges conSeils,  &  de  concert  avec  les  Parlemens.  En  un  mot,  qflfc  nôtre 
Gouvernement  Soit  entre  les  mains  d'une  Femme  ou  d'un  Enfant,  comme 
il  étoit  du  teras  de  cette  excellente  Princeffe  &  de  Son  frère  Edouard  VI. 
pourvu  q'ïe  l'on  gouverne  par  l'avis  &  par  l'autorité  des  Parlemens  libre- 
ment &  légalement  élus,  nous  Sommes  capables  de  faire  des  progrez,  & 
de  maintenir  l'Europe  dans  unjulte  équilibre.  Mais,  au  contraire,  l'ex- 
ptrience  nous  a  apris,  que  quelque  grandes  qualitez  personnelles  dont  nos 
Princes  Soient  revêtus,  li  l'Harmonie  entre  eux  &  leurs  Parlemens  vient 
une  fois  à  être  interrompue  ,  ils  ne  Sont  pas  en  état  de  Soutenir  la  dignité 

de 


51 
5? 


l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.   I.  5i7 

de  leur  caractère,  ni  la  gloire  de  leur  Couronne,  ni  chez  eux,  ni  chez  les   Afïawe* 
étrangers.     La  raifon  en  e(t  naturelle,  &  Te  préfente  d  el.e  riiême.     Dans    G™-  0E 
un  Gouvernement  limité  comme  eft  le  nôtre,  qui  j'ejpere  le  fera  toujours, 
les  fujets  craignent  pour  leurs  libertcz  &  privilèges,  &  le  Prince  ne  peut 
jamais  bien  compter  fur  leurs  perfonnes  où  fur  leurs  boudes ,  ni  fur  la  dé- 
pendance de  leur  Serment.     11  elr.  tout  naturel  aux  hommes  de  fouhaiter 
d'être  affranchis  de  tout  fujets  de  crainte,  ou  d'un  fardeau  qu'ils  trouvent 
trop  pefant.     11  n'y  a  eu  aucun  de  nos  quatre  derniers  Princes,  qui  n'ait 
reconnu  cela  pour  la  Théorie,  quelque  éloignée  qu'en  fut  leur  Pratique. 
L'opinion  du  Roi  Charles  II. à  l'égard  du  Prince  d'Orange,  à  préfent  nôtre 
Souverain,  eit  remarquable  fur  ce  fujet.     Le  Chevalier  Temple  ayant  eu 
occafion  d'en  parler  dans  fa  Conférence  avec  Mr.  de  Witt,*  la  rapporte 
ainfi.  ,,  Je  lui  ai  dit  qu'il  étoit  vrai,  que  nous  avions  des  gens  allez  figes 
,,  pour  lavoir  qu'il  nous  étoit  impoflible  d'avoir  jamais  une  ferme  confian- 
„  ce  aux  Etats,  attendu  leur  Gouvernement  prélent ,  &  particulièrement 
en  luy  à  l'occalion  du  Prince  d'Orange.     Que  pour  moi  je  n'étois  pas 
tout  à  fait  de  ce  fentiment.     Qu'encure  que  le  Roi  ne  put  pas  fe  dé- 
pouiller de  l'affection  qu'il  avoit  pour  fon  Neveu, il  croyoit  neantmoins 
,,  qu'il  ne  pouvoit jamais  mieux  la  luy  témoigner,  qu'en  le  perfuadant,que 
„  rien  ne  pouvoit  le  rendre  û  heureux  que  la  b.-nne  volonté  des  Etats, en 
„  leur  abandonnant  entièrement  fa  fortune,  &  non  aux  factions  particu- 
„  lieres,  ou  aux  intrigues  des  puiffances  étrangères;  Que  Sa  Majefté  mê- 
„  me  étoit  perfuadée,  Que  les  Primes  ne  fauroient  fe  faire  plus  de  mal,  ni 
fe  rendre  -plus  petits  en  toutes  manières,  quen  affectant  trop  d'autorité,  ou  bien 
une  autorité  directement  contraire  à  l'inclination  £5 'au  génie  du  Pays  quitsavoiart 
en  partage.     Nous  ajouterons  à  cela  ce  que  Mr.  Temple  dit  enfuite  du  Gé- 
nie des  Anglois,   dont  perfonne  n'étoit  plus  capable  de   parler  que  lui. 
D'ailleurs,  dit-il,  ,,  je  (ai  que  Sa  Majeité  étoit  fi  julte  &  fi  raifonnable, 
„  qu'encore  qu'EUe  (eut  bon  gré  aux  Etats  de  témoigner  des  égards  à  fon 
„  Neveu,  je  ne  croyois  pas  néanmoins  qu'elle  voulût  propoier  à  aucun 
„  autre  Prince  ou  Etat,  une  chofe  qu'Elie  ne  trouveroit  pas  bon  qu'on 
„  lui  propofat-,  que  je  ne  croyois  pas  que  fon  Confeil  ou  le  penchant  de 
„  ks  peuples  lui  infpiraffent  jamais  un  pareil  deffein  ,  car  regardant  le 
„  Prince  comme  pouvant  un  jour  devenir  leur  Roi,  &  aimant  les  Princes 
„  qui  fondent  leur  puillance  fur  le  cœur  de  leurs  peuples,  &  qui  fe  font 
„  un  plaifir  de  les  gouverner  fuivant  les  Loix,  ils  aimeroient  peut-être 
„  mieux  voir  le  Prince  d'Orange  tenir  fa  fortune  de  la  bonne  volonté  des 
3,  Etats,  &  poffeder  l'autorité  modérée  qu'i's jugeroient  compatible  avec 
„  leur  gouvernement,  que  de  le  voir  d'humeur  à  former  des  deffeins  qui 
,,  pourroient  ten  ire  à  renverfer  leurs  conllitutions  civiles.  * 

Il  s'enfuit  naturellement  de  tout  cela  ,  que  les  Rois  de  la  Grande- 
Bretagne  n'ont  que  faire  de  fonger  à  aucune  forte  de  Gouvernement 
nouveau,  ils  n'ont  qu'à  fuivre  le  chemin  batu,  qui  eit  de  prendre? gar- 
de que  leurs  Parlemens  foient  élus  avec  liberté,   &  de  fe  conduire  par 

leurs 

*  Lettre  de  Tem'x>  vol.  2.  pag.  13.  14..  édit.  Fram.  pag.  18.  )$.  20, 


PF.. 


pS    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aktaires  leurs  confeils.  Par  ce  moyen,  ils  peuvent  compter  fur  le  cœur,  fur  les 
gen.  ue  bras,  &  fur  les  bourfes  de  leurs  fujets  ;  &  par  cette  route  ils  parvien- 
lE^r0'  dront  infailliblement  à  la  plus  haute  gloire  à  laquelle  aucun  Prince  *du 
__  monde  puiffe  jamais  afpirer^  c'elï-à-dire  qu'ils  feront  aimez  au  dedans, 
craints  au  dehors,  &  capables  de  faire  du  bien  à  l'Europe,  &  de  pré- 
venir l'efclavage  de  la  Chrétienté. 

Nos  Rois  ont  voulu  fe  faire  donner  depuis  quelque  tems  le  titre  de 
Lieutenans  de  Dieu,  Titre  excellent,  &  le  plus  propre  que  la  Sageffe 
humaine  pouvoit  choifir  pour  exprimer  le  devoir  des  Princes.  Le  Roi 
des  Rois,  quoi  qu'il  ait  donné  l'être  à  fes  fujets,  ne  veut  avoir  fur  eux  que 
la  prérogative  de  leur  donner  des  Loix  propres  à  les  rendre  heureux,  de 
leur  faire  trouver  un  avantage  certain  auffî-bien  que  leur  Devoir  dans  ce 
qu'ils  font  pour  fa  gloire ,  de  recompenfer  ceux  qui  obfervent  fes  Loix, 
Ck  de  punir  ceux  qui  les  violent.  Mais  ,  s'il  y  a  dans  le  monde  des  Monar- 
ques qui  n'aient  pour  principales  bornes  de  l'obeïiïance  de  leurs  fujets  que 
leur  volonté  &  leur  caprice  ,  qui  élèvent  leur  autorité  au  préjudice  de 
leurs  peuples,  qui  entêtez  de  leur  grandeur,  ne  fe  foucient  guère  delà 
mifere  de  leurs  fujets,  qui  avancent  &  employent  des  gens  vicieux,  pen- 
dant qu'ils  négligent  ou  oppriment  ceux  qui  ont  de  la  vertu  ,  qu'ils  pren- 
nent tant  qu'il  leur  plaira  la  qualité  de  très-Chrètien  ,  de  tres-Sacré  ,  de 
très-Excellent  i  tant  qu'ils  en  uferont  ainfi ,  bien  loin  d'être  les  Lieute- 
nans de  Dieu  ,  ils  ne  feront  que  les  Lieutenans  de  fon  plus  cruel  En- 
nemi. 

Si  l'on  traite  ceci  d'impertinente  Digreffion,  tout  ce  que  j'ai  à  répondre 
eft,  que  je  l'ai  cru  néceifaire  pour  aller  au  devant  de  certaines  Erreurs 
fur  le  Gouvernement,  que  certaines  gens  fe  mettent  en  devoir  d'avancer 
tout  de  nouveau  parmi  nous.     Us  voudroient  fort  perfuader,  que  les  Rois 
&  les  Sujets  ont  des  intérêts  difFerens ,  que  les  Princes  font  Maîtres  de 
tout  #,  comme  le  Czar  de  Mofcovie  fe  nomme,  &  que  les  fujets  fonc 
tellement  leur  propre,  qu'ils  ne  peuvent  leur  refiiler  en  rien.     Ces  maxi- 
mes une  fois  répandues  produifent  nécelTairement  la  tirannie.     Ces  prin- 
cipes furent  defavantageux  à  Jaques  I.,  portèrent  Charles  I.  fur  l'échafaut, 
firent  exiler  Charles  II. ,  &  abdiquer  Jaques  II.  Mais,  l'Epée  du  Roi  Guil- 
laume leur  a  donné  le  coup  de  mort  par  nôtre  heureufe  Révolution.   Auiîi 
n'y  aura-t-il,ni  particulier, ni Faction  qui  entreprenne  de  les  refïïifciter  fous 
quelqu'autre  nom  ou  prétexte  que  ce  foit ,  û  ce  n'efl  ceux  qui  voudront 
en  même  tems  travailler  de  tout  leur  pouvoir  ,   foit  qu'ils  le  croyent  ou 
non ,  à  guérir  la  playe  mortelle  qui  a  été  faite  a  la  Béte  de  l'Apocalipfe. 
La  Tirannie  &  l'Idolâtrie  font  deux  parties  effentiellement  néceifaires  à  la 
compofition  de  l'Empire  de  l'Antechrifl  ,  &  par-tout  où  la  première  fe 
fourre,  l'autre  prétend  être  en  Droit  de  la  fuivre.     C'eft  la  chofe  du  mon- 
de la  plus  furprenante,  de  voir  que  le  Clergé  en  gênerai ,  fans  diliinclion  de 
rang,  fente  fi  peu  cette  vérité ,  quoi  que  l'expérience  de  tous  les  fiecles 

prou- 

*  Le  mot  Angloii  eji  Self-Holders. 


TE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  I.  Ti9 

prouve  démonftrativement,  que  la  tirannie  ,  la  puiflance  fans  bornes,  la  A?kaiues 
prérogative  par  excellence,  ou  tout  ce  qu'on  voudra  la  nommer  ,  eft  la  GfN-  DE 
fource  des  plus  grands  &  des  plus  énormes  crimes  dont  la  nature  humaine 
foit  capable,  &  finit  toujours  par  l'opprefTion  des  plus  gens  de  bien  &  de 
probité.  Ainfi,  s'il  efl  vrai  qu'il  faille  juger  de  l'arbre  par  Ton  fruit,  com- 
me nous  enfeigne  le  Sauveur ,  nous  pouvons  raifonnablement  conclure , 
que  la  puiflance  fans  bornes  de  quelque  homme  qui  foit  fur  la  terre  efl 
une  plante  que  Dieu  n'a  jamais  plantée. 

Des  gens,  qui  ont  autrefois  travaillé  à  la  propagation  de  ces  principes,  & 
tâché  de  les  faire  revivre  parmi  nous,  en  faifant  paffer  leurs  Difciples  dans 
le  Corps  de  ceux  qui  font  lesLoix,&c.  peuvent  ufurper  le  Caraélere  d'Am- 
baifadeurs  du  Prince  de  Paix,  &  fe  distinguer  par  tous  les  Titres  qu'il  leur 
plaira;  ils  peuvent  en  impofer  à  la  Prophétie  de  Samuel  fur  la  tirannie  de 
Saiil  #,  au-lieu  de  s'en  tenir  à  ce  que  Moïfe  prefcrit  du  devoir  du  Roi 
■J":  mais ,  je  prendrai  la  liberté  de  leur  dire,  que  la  définition  que  St.  Paul 
fait  du  Prince  Souverain,  qu'il  apelle  un  homme  ordonné  pour  protéger  les 
bons  &  punir  les  méchans  -,  &  dont  il  dit  que  c'eft  pour  cela,  &  non  pour 
autre  chofe,  que  les  peuples  lui  doivent  obeïflance  &  tribut  **,  fera  de 
plus  grand  poids  pour  les  honnêtes-gens  qui  ont  de  la  fenfibilité  ,  que  les 
hétérodoxes  Maximes  de  l'ObeilTance  abfoluë.  Si  ces  gens-là  font  les  Am- 
balTadeurs  du  Ciel ,  qu'ils  étudient  tant  qu'il  leur  plaira  les  Livres  divine- 
ment infpiréz,  ils  ne  trouveront  pas  dans  leurs  Inftructions  une  iyllabe  qui 
les  autorife  d'enfeigner,  que  celui ,  qui  eft  venu  pour  garentir  les  âmes  de 
la  Tirannie  du  Dieu  de  ce  Monde  ,  a  ordonné  que  le  corps  feroient  efcla- 
ves  des  Princes  de  la  Terre.   Telles  gens  ,  leurs  Difciples,  &  leurs  Adhe- 
rens,  font  les  plus  pernicieux  qui  puhTent  approcher  du  Trône  ,   ils  font 
accroire  aux  Rois ,  qui  ne  font  qu'Hommes  ,  qu'ils  font  autant  de  Dieux. 
Ainfi,  nos  Legiflateurs  ont  un  intérêt  particulier  de  fe  donner  garde  de 
leurs  Confeils  &  de  leurs  Maximes  -,  &  tout  Peuple,  qui  veut  conferver  fa 
Liberté  doit  avoir  foin  d'éloigner  ces  fortes  des  gens  des  polies  d'autorité 
&  de  confiance.  Pareillement,  les  Princes,  qui  veulent  aller  au  devant  des 
ombrages  que  pourroient  prendre  leurs  fujets ,  doivent  bien  fe  donner  de 
garde  d'employer  ou  d'avancer  des  gens  de  ce  Caractère,  &  fur-tout  s'ils 
ont  déjà  travaillé  à  mettre  la  Nation  aux  fers.     A  moins  que  de  telles  gens 
ne  fe  foient  reformez,  ils  ne  peuvent  fervir  qu'à  groiTir  l'ombrage  des 
fujets,  &  à  trahir  tout  Gouvernement  fondé  fur  les  Principes  de  la  Liber- 
té.    Ils  peuvent  également  en  venir  à  bout,  ou  en  jettant  par  furprife 
les  Princes  dans  des  Maximes  arbitraires  autrefois  pratiquées ,   ou  en  en- 
tretenant correfpondance  avec  leurs  ennemis  déclarez.     11   n'y  a  pas  la 
moindre  fureté  pour  un  Gouvernement  établi  fur  un  légitime  fondement, 
&  fur  des  principes  comme  les  nôtres ,  de  confier  à  ces  fortes  de  gens 

des 

*  i.  Sam.  8.  depuis  le  neuvième  v.  jufcju'à  la  fin  du  chapitre* 
j"  Deut.  17.  depuis  le  14.  vtrf.  jufciu'a  la  fin  du  cbap;tre. 
**  Rom.  15"   depuis  le  commencement  ju/c^u"  an  8.  du  chapitre. 

Tome  XL  Xxx 


PK. 


j3o    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  des  emplois  de  confequence,  en  cas  qu'on  entre  en  guerre  contre  ceux 
gen.  d£  qUj  époufent  la  caufe  d'un  Prince  qui  a  abdiqué ,  &  qu'ils  doivent  néccf- 
fairement  croire  bonne  fuivant  leurs  principes. 

D'ailleurs,  il  n'elt  pas  à  propos,  en  toute  manière  ,  d'employer  &  d'a- 
vancer des  gens,  qui,  pour  s'être  laifîez  corrompre,  ont  gagné  de  grands 
biens  dans  les  emplois  publics  ,   fait  une  manoeuvre  qui  pouvoit  expofer 
nôtre  Conflitution,  &  dérogea  leurs  premiers  principes.     Le  Divin  Le- 
giflateur  nous  a  appris ,  que  ce  qui  rend  les   hommes  dignes  des  charges 
publiques,  c'ell  de  craindre  Dieu  &  de  haïr  l'Avarice.    Les  titres  pompeux, 
les  amis  accréditez ,  &  la  faveur  des  Princes ,  font  incapables  d'infpirer 
ces  qualitez  aux  hommes  j  &  confequemment  ce  ne  doit  pas  être  les  ca- 
ractères qui  defignent  ceux  qui  font  propres  au  Service  du  Public,  à  moins 
qu'il  n'y  ait  déjà  de  l'intégrité  &  de  la  vertu.     Si  elles  manquent ,   ils 
peuvent  ruiner  l'Etat  à  la  faveur  de  ces  poftes  publics,  au  lieu  de  le  fer- 
vir.  Non  tali  auxilio,nec  defenforibus  iftis,  tempus  eget ,  le  tems  ne  1  aille  pas 
manquer  d'un  tel  fecours.,  ni  de  tels  défenfeurs.   Puis  donc  qu'il  elt  impof- 
fible  que  les  Princes,  quelque  éclairez  qu'ils  foient,  puiffent  s'en  rapporter 
à  ce  qu'ils  appellent  leur  certaine  feience,  quand  il  s'agit  de  juger  du  véri- 
table caractère  de  ceux  qui  font  propres  à  les  fervir  dans  toutes  les  char- 
ges publiques,  il  femble  que  dans  une  conjoncture  pareille  à  celle-ci,  l'a- 
vis du  grand  confeil  de  la  nation  eft  non-feulement  convenable  ,   mais 
auffi  absolument  néceffaire.     On  ne  fauroit  rien  faire   de   plus  plaufible 
pour  maintenir  comme  il   faut  le   gouvernement ,    pour   écarter  entiè- 
rement les  défiances   que    les   mal-honnêtes-gens   ont   infpiré  avec  tant 
d'adreiTe  ,    &  pour  prévenir  tout  jufte  fujet   de  plainte  contre  l'admi- 
niflration. 

Un  des  plus  grands  defavantages  où  puhTe  être  un  gouvernement,  c'eft 
d'être  obligé  de  baloter,  s'il  faut  ainfi  dire,  l'adminifirarion,  &  de  la  faire 
paffer  d'une  faction  à  l'autre:  une  telle  conduite  ne  peut  jamais  être  uni- 
forme au  dedans,  &  les  Alliez  n'y  peuvent  jamais   bien  compter.    De-là 
vient  qu'étant  en  Traité  avec  les  Hollandois  fous  le  règne  de  Charles  II. 
ils  nous  oppoferent  l'inconflance  de  nos  refolutions ,  &  nous  dirent:  §ue 
depuis  la  Reine  Elifabeth  ,  l'Angleterre  avoit  été  dans  un  flux  ■&  reflux  perpé- 
tuel <>  &  qu'ainji  on  ne  pouvait  pas  compter  deux  ans  fur  [es  refolutions  ,  comme 
nous  apprend  Mr.  Temple  *.     Il  eil  bon  d'ajouter  à  cela  ce  qu'a  dit  cet 
habile  Miniflre  dans  une  autre  occafion  comme  celle  dont  nous  parlons. 
*f-  Sans  beaucoup  de  vertu  &  de  fermeté  dans  le  gouvernement ,  £s?  fans  ui.e 
bonne  refolution  d'exécuter  ce  qu'on  a  trouvé  jufle  &   convenable  ,  pour  faire 
voir  que  le  mérite  eft  le  feul  chemin  pour  s  élever ,  il  eft  auffi  inutile  de  mo- 
dérer les  faclions  ,   d'éloigner  les  feditieux  ,    &  d'adoucir  les  partis  ,   que  de 
raccommoder  une  maifon  ufée.     J'entens  par   vertu   ce   que   les  plus   illuftres 
nations  de  l'antiquité  ont  fi  fagement  favorifé  &  rendu  fi  célèbre.     Elle  con- 

fiftoii 

*  Lett.  de  Ter»p.  Vol.  i.  p,  ipj.  de  Vedit.  Franc, 
\  Ibid.  vol.  2.  pag.  41. 


i-'Euao- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  r.  ^i 

fifloit  cette  vertu  dans  les  grandes  qualitcz  qui  rendent  les  hommes  capables  Affaire? 
de  fèrvir  leur  Prince  &  leur  Patrie ,  &  qui  leur  donnent  des  di/po  fit  ions  for-  GEN#  Dfi 
tes  C5  vigoureujes ,  Joit  pour  le  corps ,  Joit  pour  l  ejprit. 

Depuis  ce  qu'on  a  écrit  ci-defTus ,  il  femble  que  les  François  font  deve- 
nus plus  forts  &  plus  arrogans.  Les  Hambourgeois  ont,  ce  femble,  jugé  à 
propos  de  reconnoitre  la  SuccefTîon  du  Duc  d'Anjou  au  Trône  d'Efpagne; 
&  Louis  XIV.  eft  tellement  animé  par  les  progrès  qu'il  fait  de  jour  en 
jour,  qu'il  menace  les  Hollandois  d'une  vigoureufe Guerre,  s'ils  ne  recon- 
noiflent  au  plutôt  le  Roi  d'Efpagne.     Cela  nous  donne  jufte  fujet  d'apré- 
hender,  qu'il  ne  s'avife  avant  qu'il  foit  long-tems  de  nous  faire  faire  le 
même  compliment:  les  préparatifs  de  Mer  qu'il  fait  fur  le  Canal  ,  la  mar- 
che de  fes  nombreufes  Troupes  en  Flandres,  &  le  Camp  qu'on  parle  de 
faire  aux  environs  de  Dunkerque ,  ne  femblent  promettre  que  cela.     Il 
fait  affez,  que  tant  que  la  Grande-Bretagne  tiendra  bon  ,  le  Duc  d'Anjou 
ne  doit  pas  regarder  fon  Trône  comme  fi  bien  affermi  qu'il  ne  puiffe  être 
ébranlé  ;  &  qu'encore  que  plufieurs  petits  Princes  &  Etats  croyent  devoir 
lui  faire  des  complimens  de  congratulation ,  ils  lui  feront  bien-tôt  fentir, 
qu'ii  ne  doit  rien  attendre  d'eux,  fi  l'Angleterre  &  la  Hollande  fe  décla- 
rent une  fois  pour  l'Empereur.     Il  faut  donc  convenir  qu'il  agit  en  fage 
Politique  de  preiTer  les  Hollandois  de  prendre  une  prompte  réfoiution  ;  & 
d'être  prêt  à  les  attaquer  brufquement  fur  leur  refus.     11  ne  fauroit  non 
plus  faire  rien  de  mieux  pour  nous  empêcher  d'envoyer  du  fecours  aux 
Hollandois,  que  d'avoir  à  Dunkerque  une  Armée  toute  prête  à  faire  inva- 
fion  chez  nous,  &  dans  le  Canal  une  Flotte  pour  efeorter  &  pour  fécon- 
der. Il  n'y  a  point  de  doute ,  qu'il  n'ait  fenti  la  faute  qu'il  a  faite  autrefois 
de  retirer  fes  Troupes  de  nos  frontières  ,   &  de  les  jetter  fur  le  Haut- 
Rhin  dans  le  tems  de  la  Révolution.   Ilcomptoit  alors  fur  la  force  du  Par- 
ti du  Roi  Jaques  en  Angleterre,  &  il  crut  que  la  Defcente  du  Prince  d'O- 
range devant  nécefTairement  produire  une  Guerre  civile,  le  meilleur  étoit 
de  nous  lailTer  détruire  les  uns  les  autres.  Mais,  il  a  connu  à  fes  dépens, 
que  les  habitans  de  nos  Ifles  font  plus  de  cas  de  leur  Religion  &  de  leur 
Liberté,  qu'ils  ne  s'imaginoit  qu'ils  n'en  feroient  alors.     Ou  s'il  ne  croit 
point  cela,  nous  ne  devons  pas  douter  que  nos  querelleux  Jacobites  ne 
î'ayent  bien  informé  combien  il  avoit  manqué  à  eux  &  à  foi-même,  de 
n'avoir  pas  mis  une  armée  à  terre  immédiatement  après  fa  victoire  navale 
à  la  pointe  de  Beachy.     Ils  n'ont  pas  manqué  non  plus  de  le  faire  fouve- 
nir  de  la  faute  impardonnable  qu'il  fit  de  fruftrer  pareillement  leurs  efpe- 
rances  dans  le  tems  qu'ils  meditoient  de  faire  un  affaiïinat.     Il  eft  certain 
après  tout,  qu'il  efl  de  fon  intérêt  de  faire  plier  l'Angleterre  &  la  Hollan- 
de le  plutôt,  qu'il  pourra  ;&,  foit  qu'il  en  puiffe  venir  à  bout  ou  non,  il  lui 
eft  de  confequence  de  faire  une  diverfion,  capable  d'occuper  leurs  forces 
au  dedans,  &  les  empêcher  de  fecourir  l'Empereur. 

Cela  étant,  ii  eft  certain  qu'il  eft  de  l'intérêt  de  l'Angleterre  de  fe  met- 
tre en  état  de  donner  la  loi  plutôt  que  de  la  recevoir  /&  de  s'allier  avec 

Xxx  z  ce 


$\i   MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  ce  qu'il  y  a  de  pur  dans  l'Europe ,  plutôt  que  de  biffer  chacun  fe  tirer 
gf.n.  de  d'Affaire  comme  il  pourra  ;  ce  qui  efl  le  moyen  infaillible  de  tout  per- 
u'Euko-     ^^     ^es  f^0}|anj0is  ne  doivent  point   appréhender  de  l'heure  qu'il  eft 

—    l'irrefolution  de  nôtre  Cour.     Il  dépend  donc  à  préfent  de  nôtre  Patrie  de 

faire  Ton  perfonnage.  Nous  ne  devons  pas  tant  nous  mettre  en  peine 
de  ce  que  les  Hollandois  doivent  faire  dans  cette  conjoncture,  que  de 
ce  que  nous  devons  faire  de  concert  les  uns  &  les  autres  ;  fi  nous  nous 
divifons,  nous  fommes  perdus:  à  moins  que  nous  ne  faffions  agir  con- 
jointement toute  nôtre  vigueur,  il  faut  néceffairement  que  toute  l'Eu- 
rope devienne  efclave;  &  nous  ne  pouvons  négliger  les  Hollandois, 
fans  nous  négliger  nous-mêmes.  Nôtre  appui  leur  fera  prendre  des  re- 
folutions  vigoureufes;  mais,  fi  nous  les  abandonnons,  nous  leur  donne- 
rons jufle  fujet  de  s'arracher  un  œuil  pour  nous  faire  perdre  les  deux. 
Si  cela  arrive  ,  ce  qu'à  Dieu  ne  plaife  ,  nous  devons-nous  attendre  de 
les  voir  revenir  tout  à  coup  à  leur  ancienne  refolution,  qui  étoit  *  de 
laiffer  faire  le  bon  Dieu  ,  {$  de  voir  la  France  à  leurs  -portes  fans  fe  remuer. 
Cela  fut  dit  à  l'occafion  de  la  défiance  qu'ils  avoient  du  Roi  Charles  IL 
Mais  Mr.  Temple  dit  en  même  tems  :  Qu'ils  êîoient  capables  de  prendre  de 
concert  avec  nous  telle  refolution  qu'il  plaira  à  Sa  Majefié\  ils  f avoient  qu'il  dé- 
pendoit  d'Elle  d'entretenir  f  équilibre  dans  la  Chrétienté  ,  &  que  F  Empire  13 
l'Efpagne ,  auff-bien  que  la  Suéde  £s?  leur  Etat  5  en  pa (fer oient  par  où  Sa  Ma- 
je  fié  voudroit. 

C'eft  la  même  chofe  aujourd'hui,  à  la  referve  des  Efpagnols  ;  &  il  n'y 
a  pas  fujet  de  douter,  que  ceux  même  d'entr'eux  qui  en  fecretou  autrement 
favorifent  le  Droit  de  la  Maifon  d'Autriche  ne  fuivent  aujourd'hui  les  me- 
fures  que  nous  voudrons,  comme  ils  vouloient  le  faire  alors. 

Il  paroit  de  tout  cela,  que  toutes  les  Nations  de  l'Europe  attendent 
que  nous  leur  prononcions  leur  Sentence,  &  que  nous  leur  diflons  fi  el- 
les feront  efclaves  ou  libres;  on  aquiefcera  fuivant  toutes  les  apparences 
à  la  decifion  que  nous  ferons  fur  cela:  û  nous  les  condamnons  à  la  chaî- 
ne, elles  feroient  bien  peu  politiques  d'irriter  leurs  nouveaux  Maîtres; 
ainfi  nous  avons  fujet  de  croire  qu'elles  recevront  le  joug  fans  refiitance, 
au  lieu  de  le  rendre  plus  pefant  en  faifant  de  vains  efforts  pour  s'en  fe- 
couër.     Si  cela  elt,-  comme  il  faut  de  néceffité  que  cela  foit,  &  que  nous 
ne  prononcions  pas  une  Sentence  favorable ,  il  efl  aifé  de  prévoir  que 
nôtre  tour  viendra  bientôt.     La  Politique  de  la  France  ne  lui  permet  pas 
d'en  ufer  autrement.     Elle  a  ruiné  {"es  Sujets  Proteftans,  qui  ont  foûtenu 
la  Couronne  fur  la  Tête  de  Louïs  XIV. ,  parce  qu'on  a  cru  que  des  gens 
qui  l'avoient  maintenu  fur  le  Trône  feroient  capables  de  l'en  chaffer  fur  le 
moindre  mécontentement  :  il  s'enfuit  néceffairement ,  par  la  même  métho- 
de de  raifonner,  qu'on  ne  doit  pas  laiffer  la  Grande-Btetagne,  qui  a  jufc 
qu'ici  fait  échouer  les  deffeins  de  la  France  pour  la  Monarchie  univerfel- 
le,  en  état  de  le  faire  encore  ;  fi  le  reite  de  l'Europe  fe  foumet ,  les  Fran- 
çois 

*  Lett.  de  Tetvp.  vol.  z.  pag.  3021  de  Védil.  Fravf. 


I 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  I.  f33 

çois  ne  feront  jamais  allez  Ennemis  de  leurs  intérêts,  pour  laifTer  l'Angle-  Affaire 
terre  dans  la  iouiffance  de  fa  Liberté  3  nous  pouvons  compter  fùrement  Gf*-  DK 
qu  ils  ne  nous  feront  pas  tant  de  grâce,  mais  qu  ils  profiteront  au  contrai-        PE 

re  avec  ardeur  de  Poccafion  de  nous  perdre:  ils  diront  de  l'Empire  d'An-    '. 

gleterre  ce  que  difoit  leur  Roi  Henri  IV.  de  la  Maifon  d'Autriche,  après 
qu'il  eut  formé  le  vaite  defTein  de  la  mettre  à  la  raifon,  §jtil  voulait  ùiejftr 
la  bête  au  cœur. 

Si  les  François  ou  autres  difent,  que  la  Paix  de  Ryfwick  nous  lie  les 
mains,  &  que  la  France  &  l'Efpagne  ne  nous  ayant  fait  aucun  Acte  d'Ho- 
ftilité,  nous  ne  pouvons  rien  faire  contre  Elles  fans  violer  ce  Traité,  il  eft 
aifé  de  répondre. 

I.  Qu'à  peine  y  a-t-il  aucun  des  Alliez  à  l'égard  defquels  la  France  n'aie 
violé  le  Traité  de  Ryfwick.  Combien  de  tems  a- 1- Elle  chicané  avec 
l'Empire,  avant  que  d'évacuer  Brifac?  Combien  de  délais  &  d'é valions 
n'a-t-elle  pas  mis  en  œuvre,  avant  que  de  régler  la  Frontière  d'Efpa- 
gne  dans,  les  Païs-Bas,  &  d'évacuer  Luxembourg?  Combien  d'In valions 
n'a-t-Elle  point  fait  &  fait  faire  fur  les  Proteltans  de  l'Empire,  fous  pré- 
texte du  quatrième  Article  du  Traité  de  Ryfwick?  Avec  quelle  inhuma- 
nité n'a-t-Elle  point  traité  le  Duc  de  Montbeliard  ?  Quelles  Infractions 
aux  Libertés  de  Neuchaftel ,  &  aux  Traités  qu'Elle  a  avec  les  SuifTes  ? 
Combien  d'Avanies  à  l'Electeur  Palatin,  au  fujet  des  Prétendons  de  hiDu- 
chefTe  d'Orléans?  Combien  de  chicanes  ne  nous  a-t-Elle  point  fait  à  l'oc- 
cafion  de  nôtre  Comptoir  de  la  Baye  de  Hudfon  ,  &  de  malhonnêtetés 
aux  Hollandois ,  avant  que  d'en  venir  au  règlement  du  Tarif  de  Com- 
merce ? 

II.  Mais,  quoi  qu'on  'n'eut  rien  de  tout  cela  à  oppofer,  nous  pourrions 
rétorquer  l'Argument  des  François  contre  eux-mêmes,  en  diftinguant  en- 
tre le  Traité  de  Ryfwick  &  fes  Termes.  Le  but  de  ce  Traité  fut  certai- 
nement de  maintenir  la  Paix  de  l'Europe,  en  tenant  là  balance  dans  une 
jufte  (ituation.  Mais,  les  François  ont  rompu  le  Traité,  en  annexant,  ou 
du  moins  alliant  étroitement,  la  Couronne  d'Efpagne  à  celle  de  France, 
ce  qui  fait  entièrement  pancher  la  balance  de  leur  côté;  de  forte  que,  fui- 
vant  leur  propre  argument,  nous  ne  fommes  plus  obligez  d'obferver  ce 
Traité.  Il  en  faut  demander  l'Efprit  fans  aucun  égard  à  la  Lettre,  &  par 
confequent  nous  voilà  obligez  d'arracher  la  Couronne  d'Efpagne  à  la 
Maifon  de  Bourbon  ,  qui  a  fuffifamment  fait  connoître  que  fon  defTein 
étoit  de  mettre  toute  l'Europe  aux  fers,  fi  Elle  avoit  autant  de  force 
que  de  bonne  volonté. 

On  efpere  qu'il  n'y  aura  point  d'Anglois  fi  entêté  de  la  Paix  de 
Ryfwyck  ,  que  d'en  faire  un  prétexte  de  refufer  fon  fecours  pour  met- 
tre la  France  à  la  raifon.  De  toutes  les  Nations  de  l'Europe  ,  la  nôtre  cil 
celle  qui  a  le  moins  de  fujet  d'être  contente  de  ce  Traité.  Que  ceux 
qui  en  ont  profité  le  défendent:  les  Anglois  n'y  ont  rien  gagné;  mais, 
ils  y  ont  au  contraire  manifeifcement  perdu  y  comme  il  paroitra  par  les 
preuves  fui  vantes. 

Xxx  3  I.  En- 


GF.N.  DE 

l'Euro 
pe. 


f34    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS ,  TRAITEZ,  ET 

Affaires        J.  Encore  que  la  Guerre  nous  ait  plus  coûté  qu'à  aucun  des  Alliez, 
il  n'y  en  a  point  qui  ait  moins  tiré  d'avantage  de  la  Paix.     L'Empire 
s'en:  fait  reftituer  plufieurs  Provinces  &  Forte  relies ,  &  l'Efpagne  aulïi  ; 
les  Hollandois  ont  allure  leurs  Frontières  ,   réglé  leur  Commerce  avec 
la  France  ,  &  fe  font  fait  reftituè'r  leurs  Plantations  étrangères  ;  mais , 
pour  nous,  nous  n'avons  rien  eu.     ParceTraké,  les  Hollandois  ont  re- 
tenu l'Artillerie,  les  Munitions,  les  Provifions,  les  Efclaves,  &  les  Ef- 
fets qu'ils  ont  enlevé  aux  François  à  Pontichery  dans  les  Indes  Occiden- 
tales, aufli-bien  que  les  terres  &  les  droits  qu'ils  ontaquis  du  Prince  &des 
Habitans  du  Pais ,  comme  il  paroit  par  le  huitième  Article  de  Traité  en- 
tre la  Hollande  &la  France;  mais,  pour  nous,  il  a  falu  abandonner  aux 
François  la  Baye  de  Hudfon  &  fes  dépendances ,  dont  ils  s'étoient  em- 
parez durant  la  Paix  qui  précéda  la  Guerre,  quoique  nôtre  Compagnie 
de  la  Baye  de  Hudfon  les  eut  repris  aux  François  à  fes  dépens  en  plei- 
ne Guerre,  comme  il  paroit  par  le  huitième  Article  de  nôtre  Traité;  & 
pour  furcroit,nous  avons  eu  la  mortification  de  traiter  avec  les  Plénipoten- 
tiaires François  de  chofes  fur  lefquelles  nous  avions   un  Droit  indifpu- 
table ,  &  dont  nous  étions  actuellement  en  poflefîion.     C'étoit  d'autant 
plus  honteux  pour  eux,  que  l'injuitice  qu'on  nous  a  faite  étoit  une  des 
caufes  fur  laquelle   étoit  fondé   la  Déclaration  de  Guerre  du  Roi  Guil- 
laume &  de  la  Reine  Marie  au  Roi  de  France  ,   dattée  du  7.  de  Mai 
1685?.  où  le  dernier  eft  accufé  d'avoir  envahi  nos  JJles  Caribbes^  de  s'ê- 
tre emparé  de  nos  terres  de  la  Nouvelle  Tork ,  &  de  la  Baye  de  Hudfon ,  par 
des  A  blés  d'Hofiilitè,  de  s'être  fat /î  de  nos  Forts ,  d'avoir  brûlé  nos  Maifons , 
13  enrichi  fes  peuples  de  nos  dépouilles ,    retenu  quelques-  uns  de  nos  fujets  dans 
une  dure  prifon  ,  fait  ôter  inhumainement  la  vie  à  d'autres  ,  &  mis  le  refle 
en  Mer  fur  un  petit   Vaiffeau ,  fans  vivres ,  &  fans  leur  donner  feulement  le 
néceffaire;  actions  inclignes  même  d'un  Ennemi  \  cependant  tant  s  en  faut  qu'il 
fe  foit  déclaré  tel  ,  ' qu'il  négociait   alors  en  Angleterre  par  fon  Miniftre  ,  un 
Traité  de  Neutralité  £5?  de  bonne  Corrcfpondance  dans  l'Amérique.     Voilà  les 
propres  termes  de  la  Déclaration.     Il  n'a  nullement  été  glorieux  à  l'An- 
gleterre ,  de  n'avoir  pas  demandé  au  Traité  de  Ryfwyk ,  non-feulement 
d  être  maintenue  en  polTeffion ,  mais  de  n'avoir  pas  parlé  de  compenfa- 
tion.     Que  pouvoit  faire  Sa  Majelté?  Nous  étions  las  de  Guerre,  &  des 
dépenfes  qu'il  falloit  faire  pour  la  ^continuer ,   actuellement  abandonnez 
par  quelques-uns  de  nos  Alliez  ,    &  en  danger  de  l'être  par  d'autres; 
ainfi  nous  ne  pouvons  nous  plaindre  que  de  nous  mêmes  &  de  la  perfi- 
die de  quelques-uns  de  nos  Alliez,  û  cet  Article  de  la  Paix  &  les  autres 
nous  font  peu  d'honneur.     Ce  qu'on  peut  faire  de  mieux  pour  le  repa- 
rer, c'elt  de  meure  à  prefent  Sa  Majefté  en  état  de  faire  juftice  à  h  Na- 
tion, &  de  demander  une  meilleure  fureté  pour  nos  Alliez,  ii  l'on  juge  à 
propos  d'entrer  en  de  nouveaux  Traités  avec  la  France. 

Une  féconde  Raifon,  qui  fait  que  nous  ne  devons  pas  être  paflîonnez 
pour  le  Traité  de  Ryfwyk  eft,   que  nous  ny  avons  eu  aucune  fatisfaclion 
pour  notre  Pêche  de  Terreneuve,  quoi  qu'il  fut  dit  dans  la  même  Déclara- 
tion 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,   M.  DCC.  T.  5^ 

cion  de  Guerre:    //  ri  y  a  pas  Ivng-tcms  que  les  François  prenaient  privilège  A*rmrs« 
du  Gouverneur  Anglois  de  Terre-neuve,  pour  pêcher  dans  les  Mers  de  cette  côte,    GEN'  D*- 
&  payaient  pour  ce  privilège ,  corn  h.  e  par  recotmoifj'ance  que  la  Couronne  d'An- 
gleterre a  feule  Droit  fur  cette  JJle;  cependant,  les  attentats  des  François  fur  la- 
dite Ifle ,  fur  le  Commerce  fc?  la  Pêche  de  nos  fujet s  ,  refjcmbloient  mieux  dans  ces 
derniers  tems  aux  invafions  d'un  Ennemi ,  qu  à  des  aôiions  convenables  à  des  A- 
mis,  qui  -ne  jouiJJ'oient  que  par  tolérance  de  V avantage  du  Commerce.     Au  lieu 
de  reclamer  nos  Droits  en  ce  Païs-là,  les  François  font  demeurez  en  po£ 
fefïion  de  Plaifance  en  Terre-neuve  ,  qui  peut  avec   le  tems  ruiner  de 
fonds  en  comble  la  Pèche  des  Anglois  en  ces  Païs-là,  parce  que  les  Fran- 
çois naviguent  &  ont  les  vivres  à  meilleur  marché  que  nous  ne  pouvons 
les  avoir,  qu'ils  occupent  de  miferables  Efclaves  quupeuvent  vivre  de 
pain  &  d'eau,  &  peuvent  confequemment  vendre  à  meilleur  marché  que 
nous  le  Poiffon  &  autres  Marchandifes  qui  en  viennent,  étant  demeurez 
les  maîtres  des  places  qu'ils  nous  ont  enlevées  dans  la  Baye  de  Hudfon. 
Ils  font  en  état  par  ce  moyen  de  ruiner  nôtre  Commerce  de  Fourures  & 
Chapeaux,  &  particulièrement  celui  de  nos  Caftors  d'Angleterre,  autre- 
fois tant  eftimez.     Cela  doit  nous   être  d'autant  plus  fenfible,  que  c'eft 
une  augmentation  aux  richeffes,  à  la  gloire,  &  à  la  puiflance  des  Fran- 
çois, &  à  tous  égards  une  diminution  de  la  nôtre,  dont  on  croiroit  que 
nous  fommes  à  préfent  plus   en  état  de  nous  reffentir,  que  nous  ne  l'é- 
tions du  tems  de   la  Reine  Elifabeth,  que  le  Chevalier  Humphrey  Gil- 
bert en  prit  pofTeffion  au  nom  de  cette  Princefle,  &  y  défendit  la  Pêche 
aux  autres  Nations.  D'ailleurs ,  nous  avons  droit  d'y  prétendre,  en  vertu 
de  la  première  Découverte  de  Sebaftien  Cabot ,  qui  préfenta  trois  Origi- 
naires du  Pais  à  notre  Roi  Henri  VII. 

Nous  pouvons  dire  en  troifiéme  lieu,  que  nous  n'avons  pas  fujet  d'ê- 
tre contens  du  Traité  de  Ryfwick,  en  ce  que  nous  n'avons  eu  aucune  fa- 
tisfaclion  des  plaintes  que  nous  avions  faites  dans  la  Déclaration  de  Guer- 
re au  fujet  de  nos  Vailfeaux  pris  par  les  Pirates  François.  Le  Roi  de  Fran- 
ce en  défendant  le  tranfport  d'une  grande  partie  des  Denrées  Cî?  Manufactures  de 
nôtre  Royaume ,  &  en  impofant  des  Droits  ex  or  bit  an  s  fur  les  autres ,  nonobjlant 
le  grand  avantage  que  lui  &  la  Nation  Françoife  tiroient  de  leur  Commerce  avec 
V  Angleterre  \  ce  qui,  comme  dit  la  Déclaration,  montre  évidemment  que  fon 
deffein  eft  de  ruiner  nôtre  Commerce,  &  par  canfequent  nôtre  Navigation ,  d'où 
dépendent  ft  fort  la  richeffe  £5?  la  fureté  de  cette  Nation. 

Il  eft  vrai  que  nous  leur  avons  rendu  le  change  à  l'égard  de  la  Défenfe 
&  des  Impots  concernant  nos  Marchandifes,  en  les  traitant  de  la  même 
manière;  mais,  nous  fommes  encore  en  arrière  fur  la  Prifede  nos  VahTeaux. 
Pour  ce  qui  regarde  le  danger  de  notre  Commerce  &  de  notre  Naviga- 
tion ,  fi  l'on  a  cru  pour  lors  que  c'étoit  un  légitime  fujet  de  déclarer  la 
Guerre,  la  même  raifon  eft  d'autant  plus  forte  &  plus  preifante  de  l'heu- 
re qu'il  eft,  que  notre  Commerce  eft  plus  expofé  par  rapport  à  la  France 
qu'il  ne  l'a  jamais  été,  comme  on  l'a  déjà  démontré. 
Nous  pouvons  dire  pour  quatrième  Raifon,  que  nous  ne  devons  pas 

avoir 


PE. 


Si6     MEMOIRES,  NEGOTI ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  avoir  d'attachement  pour  le  Traité  de  Ryfvvick,  puis  que  nous  n'avons  eu 
gf.n.  de  aucune  fatisfaètion  fur  le  Droit  de  Pavillon,  attaché,  comme  le  remarque 
x-'Euko-  ja  Deciaration,  à  la  Courone  d'Angleterre;  ,,  au  contraire  il  nous  a  été 
„  difputé  par  les  ordres  de  la  France  par  une  violation  de  Souveraineté 
„  dans  la  Manche  ;  Souveraineté  que  nos  PrédéceiTeurs  ont  défendue 
,,  dans  tous  les  Siècles,  &  que  nous  fomrnes  refolus  de  maintenir  pour 
,,  l'honneur  de  notre  Couronne  ,  &  de  la  Nation  Angloife.  „  Il  ne 
nous  paroit  pas  qu'on  ait  rien  fait  par  ce  Traité  pour  ménager  notre  hon- 
neur à  cet  égard;  &  nous  n'avons  aucun  fujet  de  douter,  que  comme  les 
François  fe  font  rendus  plus  puiiTans  dans  la  Manche  par  ce  Traité,  qu'ils 
ne  l'étoient  auparavant,  leur  obflination  &  leur  fierté  ne  deviennent fem- 
blablement  plus  grandes  fur  ce  fujet. 

Le  dernier  fujet  de  Guerre, dont  il  efl  fait  mention  dans  la  Déclaration, 
peut  fervir  de  cinquième  Raifon  au  mécontentement  que  nous  devons  a- 
voir  du  Traité  de  Ryfwick.     Le  voici.     ,,  Mais ,  ce  qui  doit  nous  tou- 
cher de  près,  c'eit  la  Perfécution  peu  Chrétienne  qu'il  a  fait  en  France 
pour  la  Religion  à  plufieurs  de  nos  Sujets  Proteftans  Anglois,  contre 
le  droit  des  gens,  &  les  claufes  expreilès  des  Traitez,  en  les  forçant 
d'abjurer  leur  Religion  par  des  cruautez  furprenantes  &  inoùies  ,   en 
emprifonnant  des  Capitaines  &  Matelots  de  nos  VaifTeaux  Marchands, 
&  condamnant  les  autres  aux  Galères,  fous  prétexte  d'avoir   reçu  fur 
leurs  VaifTeaux,  ou  fes  miferables  Sujets  Proteltants,  ou  des  effets  à  eux 
j,  appartenans.     Et  enfin,  comme  il  a  tâché  depuis  quelques  années,  par 
„  follicitations  &  promefTes  de  fecours,  de  renverfer  le  Gouvernement 
,,  d'Angleterre,  aufîi  emp!oye-t-il  aujourd'hui  tout  ouvertement  les  mê- 
„  mes  voyes  violentes  par  l'Invafion  actuelle  de  nôtre  Royaume  d'Irlan- 
„  de,  pour  foûtenir  nos  Sujets  rébelles  armez  contre  nous,  &  pour  irri- 
,,  ter  dans  nôtre  Royaume  nos  bons  &  ridelles  Sujets. 

Quiconque  fe  donnera  la  peine  d'examiner  le  Traité  de  Ryfwick, 
trouvera  qu'il  n'y  a  rien  qui  puûTe  empêcher  qu'on  ne  fafTe  à  l'avenir  de 
pareilles  Infultes  aux  Proteftans  Anglois  ,  ni  rien  qui  repare  celles  qui 
ont  déjà  été  faites.  Il  eft  confiant  aufîi  que  la  Cour  de  France  à  toujours 
la  même  envie  de  nous  faire  les  mêmes  outrages,  comme  il  a  paru  de- 
puis la  Paix  par  l'Affaire  arrivée  au  Chapelain  d'un  de  nos  AmbafTadeurs 
en  France.  On  en  peut  dire  autant  du  traitement  barbare  qui  a  été  fait 
contre  le  Droit  des  gens  aux  Maitres  &  Matelots  de  nos  VaifTeaux. 
Nous  n'avons  point  eu  fatisfaétion  de  l'Invafion  d'Irlande,  quoi  que  le 
Roi  de  France  ne  fût  pas  moins  obligé  de  nous  faire  juitice  à  cet  égard, 
que  de  tenir  compte  des  Revenus  de  la  Principauté  d'Orange,  &  des 
Intérêts  depuis  le  Traité  de  JNimegue  jufqu'à  la  conclufion  de  la  Paix. 
11  eft  manifefte  par  tout  cela,  que,  pour  ce  qui  nous  concerne,  nous  a- 
vons  auffi  peu  de  fujet  qUe  les  François  d'être  mal  fatisfaits  du  Traité  de 
Ryfwick  i  &  que  tous  les  fujets  de  guerre  mentionnez  dans  la  Déclara- 
tion fe  font  multipliez  au  lieu  de  diminuer. 
Une  fixiéme  Raifon  de  plainte  contre  le  Traité  de  Ryfwick,  qui  efl 

peut- 


?» 

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3J 
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33 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  I. 


f!7 


l'Euro- 


pe. 


peut-être  d'autfi  grand  poids  pour  la  Nation  qu'aucune  autre  dont  on  ait  Affaire.? 
parlé  jufqu'ici.     Il  efl  ftipulé  dans  le  quatrième  Article  :   Que  le  Roi  de    GKN-  D» 
France  fous   quelque  prétexte   que   ce  pnijje  être ,   ne  troublera   Sa   Majefîé 
régnante  dans  la  libre  PoJfeJJîon   de   ce  dont  Elle  jouit  préfentement  ;    mais  , 
il  n'y  a  rien  pour  aiïiirer  notre  Gouvernement  préfent  après  la  mort  de 
Sa  Majelté.     Ainfi  ,  le  Roi  de  France  pourroit  prétendre  qu'il  ne  s'efl 
point  obligé  par  ce  Traité  à  ne  pas  tâcher  de  dépoiTeder  la  PrincefTe  & 
tes  Defcendans,  ou,  en  cas  qu'elle  n'en  ait  pas,  les  Defcendans  de  Sa 
Majeflé,  s'il  plait  à  Dieu  de   lui  en  donner.     Il  n'eft  pas  mal-aifé  de 
comprendre  de  quelle  fàcheufe  conféquence  cela  peut  être  à  la  Nation. 
Si  le  Roi  Jaques  vient  à  furvivre  le  Souverain  qui  nous  gouverne  à  pré- 
fent; ou,  cela  n'arrivant  pas,  fi  le  Roi  de  France  ou  Ton  SuccefTeur  trou- 
ve à  propos  pour  fon  Intérêt  de  foûtenir  les  prétendons  du  prétendu  Prin- 
ce de  Galles;  ou, en  cas  que  l'occafion  ne  s'en  préfente  pas,  (1  dans  la 
fuite  quelque  Roi  de  France  juge  qu'il  lui  foit  avantageux  de  faire  valoir 
les  Droits  chimériques  des  Enfans  de  ce  prétendu  Prince ,  &  de  ceux  que 
peut  avoir  la  jeune  PrincefTe  qu'on  appelle  fa  Sœur  ;  il  n'y  a  rien  dans  ce 
Traité  qui  puiffe  l'en  empêcher,  &  nous  nous  verrons  difputer  des  Droits 
confirmez  par  une  pofTeflion  de  plufieurs  fiécles.     Il  eft.  confiant  que  cet- 
te feule  omiffion  pourroit  être  une  fource   éternelle  de  Querelles  entre 
l'Angleterre  &  la  France ,  &  rendre  inutile  le  Sang  &  les  Tréfors  qu'il 
nous  en  a  coûté  pour  recouvrer  notre  Conflitution  ,  &  la  Liberté   de 
l'Europe. 

Il  y  a  contre  le  Traité  de  Ryfwick  une  autre  Objection ,  prife  du  fé- 
cond paragraphe  de  la  Déclaration  de  Guerre,  qui  porte  :  Quand  nous  con- 
jiderons  les  moyens  injujles  dont  le  Roy  de  France  s  efl  fervi  depuis  quelques  an- 
nées pour  fatisfaire  à  fon  ambition ,  &  que  nous  faifons  réflexion  quil  a  non- 
feulement  envahi  les  Etats  de  f  Empereur  £5?  de  ï Empire ,  à  préfent  notre  Al- 
lié \  quil  a  ruiné  des  Pays  entiers  &  leurs  Habit  ans  par  [es  Armées  ,  mais 
auffl  déclaré  la  Guerre  à  nos  Alliez  fans  aucun  fujet ,  &  au  préjudice  des  Trai- 
tez confirmez  par  la  Garantie  de  la  Couronne  d'Angleterre ,  quil  a  manifefle- 
ment  violez  ;  nous  ne  pouvons  moins  faire  que  de  nous  joindre  avec  nos  Alliez 
contre  le  Roi  de  France ,  comme  Perturbateur  de  la  Paix ,  &  Ennemi  commun 
de  la  Chrétienté. 

On  fait  allez  que  les  Habitans  du  Palatinat,  &  des  autres  Pays  d'Alle- 
magne voifins  de  la  France,  ont  le  plus  fouffert  des  In  vallons  de  la  Fran- 
ce fur  nos  Alliez.  Cependant,  bien  loin  d'en  avoir  eu  aucune  réparation, 
ceux  qui  s'étoient  dérobez  à  la  fureur  de  la  perfécution  des  François,  au 
lieu  du  repos  auquel  ils  dévoient  s'attendre  avec  juitice,  fe  font  trouvez 
incontinent  expofez  à  une  nouvelle  tempête  de  la  part  de  l'Electeur  Pala- 
tin ,  animé  de  la  Rage  Papale  &c.  fous  laquelle  ils  gémiflènt  encore  de 
l'heure  qu'il  eft ,  &  font  retentir  aciuellement  leurs  inutiles  plaintes  dans 
toute  l'Europe.  L'Electeur  de  Brandebourg,  le  Landgrave  de  HefTe ,  le 
Médiateur,  &  les  Plénipotentiaires  de  quelques  autres  Princes  Proteftans, 
ont  fait  quelque  réfiflance  durant  un  tems ,  lors  qu'ils  ont  vu  leurs  Frères 

Tome  XI,  Yyy  Pro- 


Affaires 
gën.   HE 
l'Euro- 
pe. 


138    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Proteftans  fi  vilainement  trahis,  mais  cela  n'a  de  rien  fervi.  Ce  "fut  en  vain 
que  Sa  Majefté  Britannique  voulut  porter  la  réfiitance  plus  loin,  la  vio- 
lence du  torrent  lui  fit  lâcher  prifej  Tes  Sujets  incommodez,  &  les  Alliez 


caufe  de  foi-même ,  &  pour  s'exempter  de  la  Haine  &  du  Danger ,   que  pour 
décharger  [on  Royaume  du  poids  d'une  Guerre  de  grande  dépenje. 

De  tout  cela  il  paroit  clairement  à  notre  avis,  qu'il  n'y  a  point  de  vé- 
ritable Anglois ,  ou  de  bon  Protestant,  qui  voulut  oppofer  le  Traité  de 
Ryfwick  aux  nouvelles  tentatives  qu'on  pourroit  faire  pour  réduire  la 
France  dans  la  néceffité  d'accorder  des  conditions  plus  avantageufes ,  puis 
qu'Elle  a  été  la  première  à  le  violer. 

La  Maifon  d'Autriche  fe  plaignit  violemment  de  nous  du  tems  de  Ja- 
ques I. ,  de  ce  que  ce  Prince  ne  faifoit  rien  pour  l'Electeur  Palatin  Ton 
Gendre,  &  pour  fes  Sujets  Proteftans  que  les  Papiftes  d'Autriche  perfé- 
cutoient  alors  ;  &  qu'il  fe  contentoit  d'envoyer  des  AmbafTadeurs.  Ce 
fut  à  cette  occafion  ,  qu'on  plaifanta  à  Bruxelles  aux  dépens  du  Roi  Jaques 
dans  une  Pièce  de  Théâtre,  où  l'on  demanda  ce  que  le  Roi  de  Grande- 
Bretagne  fer  oit  pour  ï  Elecleur  Palatin?  &  où  l'on  fit  répondre  au  Faquin 
de  la  Farce,  Qu'il  le  fecmrroit  de  1 00000.  Ambaffadeurs.  Ce  feroit  quel- 
que chofe  de  bien  honteux  de  l'heure  qu'il  eft  au  zèle  &  à  la  fagefTe  de 
l'Angleterre,  fi  les  Princes  Catholiques  avoient  occafion  de  dire,  que  le 
trop  peu  du  Roi  Jaques  dont  on  fe  moquoit  alors ,  eft  à  préfent  trop  pour 
nous.  Il  faut  efpérer  que  la  Nation  Angloife  ne  regardera  pas  la  Perfé- 
cution  des  nos  Frères  &  Alliez  Proteftans,  comme  un  des  moindres  Su- 
jets d'entrer  en  de  nouvelles  Alliances  contre  la  France.  Ce  Royaume 
n'a  jamais  été  plus  floriffant  &  plus  renommé ,  que  lors  qu'il  a  paru  à  la 
tête  des  Proteftans ,  &  pris  la  défenfe  de  nos  Frères  perfécutez.  C'eft 
une  vérité  que  fentiront  évidemment  ceux  qui  feront  attention  à  la  figu- 
re que  nous  faifions  à  cet  égard  dans  le  Monde  Proteftant,  fous  le  Rè- 
gne de  la  Reine  Elifabeth ,  &  dans  le  tems  du  Parlement  furnommé  le 
long  s  &  même  à  la  Réputation  que  nous  nous  acquîmes  par  cela  même 
fous  l'Adminiftration  de  l'Ufurpateur. 

Qui  nous  empêche  donc  d'inviter  toutes  Jes  Puiflances  Proteftantes 
de  l'Europe  à  s'allier  avec  nous  pour  la  défenfe  de  notre  commune  Re- 
ligion ? Elles  peuvent  toutes  nous  fecourir  d'hommes  &  de 

VaifTeaux.  Nous  avons  la  plus  belle  Flotte  qu'il  y  ait  au  monde.  Nous 
n'avons  que  faire  de  chercher  un  Generaliffime ,  &  nous  avons  un  Roi 
pour  commander  nos  Armées.  Il  n'y  a  rien  humainement  parlant,  qui 
puifTe  réfifter  aux  Forces  Navales  unies  des  Princes  &  Etats  Proteftans  j 
ils  font  fi  voifins  que  la  France  &  l'Efpagne  ne  fauroient  empêcher  la 
Jonction  de  ces  mêmes  forces.  Ils  font  en  état  de  laiffer  dans  le  Canal 
une  Flotte  affez  formidable  pour  fe  mettre  à  couvert  des  infultes  de  cel- 
le de  la  France,  pendant  que  le  refte  bombardera  fes  Places,  bloquera 

fes 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  539 

fès  VaifTeaux  de  guerre ,  pafTera  le  Détroit ,  mettra  des  Troupes  à  Civi-    Awmrw 
ta-Vechia,    les  fera   marcher  à  Rome,  délogera  le  Pape  ,    &  détruira    gtn.de. 
l'Empire  de  l'Antechrill.  Cela  ne  paroitra,ni  extravagant,  ni  vilionnaire,    L       °" 
à  ceux,  qui  fe  fou  viendront,  que  l'Amiral  Ruffel ,  avec  uneEfcadre  de  nos   — .'    . . 
VailTeaux ,  fe  rendit  maître  de  la  Méditerranée  ,  tint  renfermez  les  autres 
dans  leurs  havres ,  &  donna  tant  de  réputation  à  nos  affaires,  que  les  fages 
Vénitiens  crurent  qu'il  étoit  tems  de  féliciter  le  Roi   Guillaume  fur  ion 
Avènement  à  la  Couronne  par  une  pompeufe  &  folemnelle  Ambaflade. 

Si  une  de  nos  Efcadres  a  fait  cela ,  que  ne  peuvent  point  faire  de  con- 
cert les  Forces  navales  dont  on  vient  de  parler?  Si  tous  les  Proteflans  n'ont 
pas  fait  conjointement  des  remontrances  contre  la  barbare  perfecution  du 
Palatinat,  &c.  &  fi  fur  le  refus  d'y  remédier  ils  ne  font  pas  entrez  dans 
la  ligue  dont  on  a  ci-devant  parlé,  qu'elle  raifon  peut-on  en  donner,  fin  on 
le  relâchement  fcandaleux  du  zélé  de  la  plupart  des  Royaumes  &  Etats 
Proteflans?  A  la  vérité,  nous  avons  vu  des  Ecrits  qui  faifoient  mention 
d'un  projet  de  cette  nature  ;  mais,  l'événement  a  montré  qu'il  n'y  avoit 
rien.  Cela  paroîtra  d'autant  plus  furprenant  &  plus  trille,  fi  l'on  confide-  . 
re  le  juile  fujet  d'allarme  qu'on  pouvoit  prendre  du  changement  de  l'Elec- 
teur de  Saxe,  de  la  Guerre  qui  s'allumoit  entre  les  Proteflans  du  Nord, 
&  des  bruits  qui  fe  répandoient  du  changement  de  Religion  de  quelques 
autres  grands  Princes.  11  efl  certain  ,  qu'une  pareille  ligue  auroit  été  plus 
foûtenable  que  certains  autres  projets  qu'on  a  vu  éclore  dans  ces  derniers 
tems ,  &  que  la  Providence  divine  a  fait  échouer:  une  ligue  ,  pour  la  mu- 
tuelle défenfe  de  nôtre  Religion,  auroit  été  beaucoup  plus  louable,  que  de 
voir  un  Prince  ou  des  Princes  Proteflans  courir  après  de  vains  titres  qui 
ne  fignifient  rien,  ou  faire  d'injufles  efforts  pour  étendre  leurs  Etats  ou 
leurs  prérogatives.  Tout  ce  que  ces  chofes  peuvent  produire,  c'efl  de 
donner  des  ombrages  à  leurs  voifins,  d'apauvrir  &  mécontenter  leurs  fu- 
jets,  de  les  empêcher  &  de  les  mettre  dans  l'impuiflance  d'entreprendre  la 
défenfe  de  la  caufe  commune.  Comme  on  en  efl  beaucoup  redevable  à 
la  folle  ambition  des  Princes ,  &  aux  artificieufes  Intrigues  du  Clergé  Ro- 
main dans  la  plupart  des  Païs  de  l'Europe  ;  auffi  n'a-t-on  que  trop  de  rai- 
fon de  l'imputer  à  la  lâcheté  &  au  manque  de  zèle  des  Ecclefiailiques  Pro- 
teltans ,  qui  fuivent  la  Cour  des  Princes  Protellans:  ils  font  pour  la  plu- 
part tellement  enforcelez  de  la  faveur  de  leur  Cour,  tellement  infatuez  de 
leur  manière  de  vivre  commode  &luxurieufe,  &  des  efperances  d'être 
avancez  ,  qu'ils  n'ôfent  dire  leurs  fautes  aux  Princes,  ni  leur  réprefenter 
en  aucune  manière  l'injuftice  de  leur  procédé.  S'ils  en  avoient  ufé  autre- 
ment ,  il  y  a  fujet  de  croire,  que  l'Electeur  de  Saxe  ne  feroit  pas  deve- 
nu fi  aifément  le  Profelite  de  l'Eglife  Romaine  ;  le  Roi  de  Dannemarc 
n'auroit  pas  non  plus  mis  en  danger  la  Paix  du  Nord, en  s'alliant  avec  ce 
Prince  nouvellement  Catholifé.  Où  trouver  de  l'heure  qu'il  ell  dans  l'Eu- 
rope un  Ecclefiaflique  Courtifan  de  la  fidélité  &  du  zèle  de  l'Evêque  Lati- 
mer,  qui  cenfura  le  Roi  Henri  VIII.  de  fa  vie  licencieufe,  en  lui  préfen- 

Yyy  2  tant 


FE. 


540    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aïtaires  tant  une  Bible  avec  ces  paroles  écrites  fur  la  couverture  :  Dieu  jugera  les 
gen.  de   Paillards  &  les  Adultères}  Le  honteux  relâchement  de  zèle  dans  nôtre 
l'Euro-     Clergé  Proteflant,  &  le  peu  de  foin  qu'il  prend  d'élever  les  Princes  Pro- 
teflans dans  la  pieté,  ce  qui  fe  découvre  par  les  mœurs  de  la  plupart  de 
ces  mêmes  Princes,  &  de  leurs  principaux   Courtifans,  efl  la  chofe  du 
monde  qui  fait  le  plus  craindre  pour  la  Reformation. 

C'efl  une  erreur  de  croire,  qu'il  ne  fert  pas  de  grand  chofe  que  le  Cler- 
gé faffe  une  vigoureufe  refiitance  aux  abus  du  gouvernement,  ou  à  la  mau- 
vaife  manœuvre  de  ceux  qui  gouvernent.  L'oppofition,  que  firent  nos  E- 
vêques  à  la  dernière  Déclaration  du  Roi  Jaques ,  efl  une  récente  &  par- 
lante démonftration  du  contraire.  Nous  pouvons  ajouter  à  cela  un  ancien 
exemple  du  Clergé  Presbytérien  de  Genève,  qui  obligea  cette  Republi- 
que à  faire  juflice  d'un  Meurtrier  de  qualité  ,  en  menaçant  d'abandonner 
la  ville  en  cas  de  refus.  La  raifon  efl  naturelle;  car  les  Tirans  mêmes, 
comme  Saiïl,  qui  ne  fe  foucioit,ni  de  Dieu,  ni  de  la  Religion,  croyent 
qu'il  eft  néceflaire  à  leur  réputation  ,  que  les  Sacrificateurs  &  les  Prophètes 
les  refpeclent  devant  le  Peuple. 

Cela  fuffit  pour  montrer  évidemment  combien  le  Clergé  Proteflant  <Sc 
la  Nobleffe  font  refponfables  par  toute  l'Europe  de  la  décadence  de  la  Re- 
jformation;  s'ils  avoient  affez  de  fidélité  pour  leurs  Princes  refpeélifs  pour 
leur  faire  connoître  les  fautes  qu'ils  font,  ou  pour  refufer  de  les  fervir  dans 
les  chofes  qui  préjudicient  à  la  Religion ,  ou  à  la  Liberté  du  Peuple  ,  on  ne 
verroit  pas  l'Irréligion  &  la  Tirannie  qu'on  voit  aujourd'hui  dans  la  plupart 
des  Pais  Proteflans.  De-là  vient  principalement, qu'ils  s'affoibliiTent  de  tous 
cotez;  &  h  Dieu  n'y  met  la  main ,  il  faut  qu'en  peu  de  tems  ils  foient  to- 
talement engloutis.  Nous  avons  peu  de  fujet  d'efperer,  que  les  Protef- 
tans  s'unifient ,  ou  faffent  une  vigoureufe  défenfe  contre  l'ennemi  com- 
mun ,  pendant  qu'ils  ont  tant  de  Princes  arbitraires  qui  par-tout  où  ils 
peuvent  oppriment  leurs  fujets  autant  que  les  Princes  Papilles  les  leurs. 
Tous  ceux  qui  ont  quelque  connoifTance  du  Gouvernement  des  Couron- 
nes du  Nord,  &  de  ia  plupart  des  Princes  d'Allemagne,  ne  s'aviferont 
pas  de  contefler  cette  vérité.  On  fait  affez  de  quelle  manière  les  Rois  de 
Dannemarc  &  de  Suéde  font  devenus  abfolusj  &  à  la  vérité  on  ne  fauroit 
pardonner  aux  Princes  d'Allemagne,  qui  de  tems  en  tems  ont  fait  de  fi 
généreux  efforts  contre  la  Tirannie  de  la  Maifon  d'Autriche  ,  de  pren- 
dre comme  ils  ont  fait  une  Autorité  abfoluë  fur  leurs  propres  fujets. 
Il  s'enfuit  donc,  que  le  feul  moyen  vifible  qui  refle  pour  rétablir  la  ver- 
tu &  la  liberté  parmi  les  Proteflans ,  efl  que  l'Angleterre  faffe  la  planche. 
Nous  avons  reiiffi  dans  ce  que  nous  avons  fait  pour  recouvrer  &  conferver 
nôtre  Liberté.  Nous  avons  fur  le  Trône  le  glorieux  Héros  dont  Dieu  s'efl 
fervi  pour  cela.  Il  agira  pour  brifer  les  chaines  de  l'Europe,  &  nous  met- 
tre à  couvert  de  l'efclavage  pour  l'avenir  ,  à  proportion  que  nôtre  bon- 
ne volonté  ,  nos  bourfes,  &  celles  de  nos  Alliez,  lui  en  faciliteront  les 
moyens ,  &  non  d'avantage. 

Nous 


.l'Euro* 

FE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.    L  541 

Nous  avons  dequoi  prouver  démonflrativement,  que  les  Papiftes  ont  Affaire 
fait  des  progrez  pour  la  propagation  de  l'Idolâtrie  Romaine,  depuis  le  0,ECN*°* 
Traité  de  Ryfvsfick.  Les  Plaintes  des  Proteftans  d'Allemagne,  dont  les 
Gazettes  étrangères  font  remplies ,  ne  nous  permettent  pas  de  douter  de 
cette  vérité.  Nous  n'avons  pas  fujet  de  croire  qu'ils  ayent  été  auffi  lents 
à  fe  liguer  pour  détruire  ce  qu'ils  apellent  l'Hérefie  du  Nord, que  l'ont  été 
les  Proteftans  à  faire  la  même  chofe  pour  fa  défenfe.  Tant  s'en  faut  que 
la  chofe  foit  incertaine,  fi  nous  en  croyons  les  Avis  qui  nous  viennent  de 
Hollande  de  très-bonne  main,  que  le  Miniftre  de  l'Empereur,  pour  faire 
connoître  la  fincerité  des  intentions  de  fon  Maître  à  fe  joindre  avec  les 
Hollandois  &  nous  pour  la  Défenfe  de  fes  Droits ,  &  de  la  commune  Liber- 
té de  l'Europe,  a  communiqué  le  Plan  d'une  Ligue  faite ,  ou  projettée  ,  par  les 
Princes  Catholiques  ,  pour  fub juger  la  Hollande,  &  rétablir  le  Papifme  en  An- 
gleterre ,  en  remettant  le  Roi  Jaques  fur  le  Trône. 

Cela  n'eft  nullement  improbable ,  mais  que  cela  foit  vrai  ou  faux  pour 
le  préfent  ,  nous  n'avons  aucun  fujet  de  douter,  que  le  Conclave  de  Ro- 
me ne  pouffe  ce  Projet  avec  toute  la  rapidité  poffible.  Les  Catholiques- 
Romains  fentent  fort  bien,  qu'ils  ont  perdu  une  très-belle  occafion  d'en 
venir  à  bout,  dans  le  tems  que  Louis  XIV.  étoit  au  faîte  de  fa  grandeur, 
&  Jaques  II.  fur  le  Trône  d'Angleterre,  foûtenu  d'une  bonne  Armée.  Il 
y  a  donc  très-peu  d'apparence  qu'ils  vueillent  encore  temporifer -,  & ,  puis- 
que la  Reunion  de  la  France  &  de  l'Efpagne  ,  la  poffibilité  de  raccommo- 
der les  Maifons  de  Bourbon  &  d'Autriche  par  des  mariages  réciproques,  & 
la  conceffion  de  quelques  Provinces,  à  moins  que  nous  &  les  Hollandois 
ne  prenions  au  plutôt  le  parti  de  l'Empereur,  leur  préfentent  une  fi  belle 
occafion,  il  ne  faut  pas  douter  qu'ils  n'en  profitent. 

Le  meilleur  moyen  du  Monde  pour  le  prévenir,  &  par  confequent  les 
fuites  d'une  Ligue  Catholique,  eft  d'entrer  en  Alliance  avec  l'Empereur 
à  des  conditions  honorables.  Cela  fe  fera  plus  aifément  qu'une  Ligue  Pro- 
teftante,&  afïïirera  mieux,  s'il  plait  à  Dieu,  l'intérêt  des  Proteftans.  L'Em- 
pereur nous  le  demande,  &  par-là  nous  empêcherons  un  des  principaux 
Chefs  de  la  Catholicité  de  fe  déclarer  contre  nous.  Si  nous  refufons  fes  of- 
fres ,  ce  fera  un  aiguillon  à  fa  vengeance  ajouté  au  nouveau  fujet  que  lui 
a  déjà  donné  le  Traité  de  Partage,  qui  l'obligera  à  faire  fon  parti  le  meil- 
leur qu'il  pourra,  &  confequemment  à  fe  joindre  aux  autres  Puiflances  Ca- 
tholiques de  l'Europe  contre  la  Réformation. 

Nous  fommes  ce  femble  d'autant  plus  obligez  à  faire  cette  Alliance,  & 
à  prendre  des  mefures  de  cette  nature  ,  que  Leurs  Majeftés  dans  leur  Dé- 
claration de  Guerre  ont  allégué  pour  première  Raifon  :  ghie  le  Roi  de  Franr 
ce  avôit  envahi  les  Etats  de  l'Empereur,  &  de  l'Empire ,  alors  nôtre  Allié.  Si 
c'étoit  dans  ce  tems-là  un  jufte  fujet  de  Guerre,  il  eft  certain  que  le  Roi 
de  France  ayant  dépouillé  la  Maifon  Impériale  de  toute  la  Succeffion  d'Ek 
pagne,  la  caufe  n'en  eft  maintenant  que  plus  légitime.  Cela  nous  regarde 
immédiatement ,  parce  qu'il  aura  une  influence  direcle  &  prompte  fur  nô- 

Yyy   3  tt* 


l'Euro 

TE. 


5-42    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AïfA-iras  tre  Commerce  &  fur  nôtre  fureté,  au  lieu  que  rinvafion  de  la  France  fur 
le  haut  Rhin  ne  nous  touchoit  que  par  un  intérêt  éloigné. 

Si  les  Traités  conclus  avec  nos  Alliez  étoient  alors  une  bonne  Raifon 
pour  juflifier  nôtre  prife  d'armes,  comme  la  Déclaration  l'allègue  avec  jus- 
tice, la  même  Raifon  eil  aujourd'hui  d'une  toute  autre  force.  Lafraudu- 
leufe  ufurpation  de  la  Couronne  d'Efpagne ,  elt  une  violation  de  tant  de 
Traités,  que  nous  perdrons  pour  jamais  la  gloire  d'Arbitres  de  l'Europe, 
ou  deGarans  des  Traités,  (j  nous  foufFrons  tranquillement  une  fi  infigne 
violation  de  la  Foi  Publique  qui  retombe  fur  toute  l'Europe.  Nous  de- 
vons mettre  tout  en  œuvre  pour  avoir  réparation  d'honneur  à  cet  égard, 
ou  nous  refoudre  à  perdre  pour  toujours  nôtre  réputation,  &  à  nous  ren- 
dre l'objet  des  reproches  &  du  mépris  de  toute  la  Terre. 
y  II  y  a  apparence  que  la  plupart  des  gens  fentent  fuffifamment  le  péril  qui 
nous  menace  j mais  la  grande  objection  fera,  que  la  pauvreté  de  la  nation, 
&  les  grandes  dettes  où  nous  nous  trouvons  déjà  engagez,  ne  nous  per- 
mettent pas  d'en  faire  de  nouvelles. 

On  peut  répondre  à  cela,  I.  Que  fi  nous  avions  à  faire  à  un  ennemi  qui 
n'eut  pas  les  mêmes  defavantages ,  ou  de  beaucoup  plus  grands ,  l'objec- 
tion feroit  redoutable  &  fans  reponfe  ;mais ,  comme  il  eit.  certain  qu'à  tous 
ces  égards  nous  fommes  en  beaucoup  meilleur  état  que  la  France  ou  l'Ef- 
pagne,  l'objection  perd  beaucoup  de  fa  force. 

II.  Il  n'y  a  point  de  véritable  Anglois,ou  de  bon  Proteflant,  qui  n'aime 
mieux  donner  dix  Chellings  d'une  livre  ft.  pour  faire  la  Guerre,  que  de 
laifler  prendre  le  tout  aux  François.  Il  n'y  a  point  d'homme  d'efprit  fi 
borné  , qu'il  ne  voïe  que  nous  courons  rifque  d'être  ainfi  traitez,  à  moins 
que  nous  ne  nous  mettions  en  état  de  l'empêcher. 

III.  On  a  déjà  dit  que  nôtre  Commerce  nous  vaut  deux  millions  par 
an;  mais,  rabatons-en.  N'eft-il  pas  vrai  que  la  moitié  de  cette  fomme 
bien  employée  peut  beaucoup  contribuer  à  finir  la  Guerre  promptement& 
heureufement?  Il- nous  en  faut  moins  à  beaucoup-près  pour  équiper  nôtre 
Flotte;  &  cela  étant  une  fois  fait,  une  bonne  Efcadre  envoyée  aux  In- 
des Occidentales,  &  commandée  par  de  véritables  Anglois  ,pourroit  fui- 
vant  toutes  les  apparences  nous  dédommager  en  peu  de  tems.  Le  moyen 
le  plus  prompt  &  le  plus  efficace  de  réduire  nos  ennemis  efl  de  fermer  la 
Source  de  leur  Argent,  &  de  traverfer  leur  Commerce.  Les  Hollandois, 
&  nous,  fommes  mieux  en  état  de  le  faire,  qu'ils  ne  le  font  de  s'y  oppofer; 
&  cela  étant  une  fois  fait,  la  France  feroit  bien-tôt  obligée  de  fe  renfer- 
mer dans  fes  anciennes  bornes,  &  bien  aife  d'en  être  quitte  à  fi  bon  mar- 
ché. Il  ne  me  femble  pas  difficile  à  démontrer,  qu'une  Guerre  par  Mer 
efl  le  moyen  le  plus  appparent  pour  dompter,  ce  Leviathanj  or,  fi  cela  eft, 
c'eit  une  forte  de  Guerre  que  nous  pouvons  parfaitement  bien-faire  avec 
moins  de  dépenfe  &  de  danger.  Nos  Forces  Navales  confirment  nos  Mar- 
chandifes,  &  l'argent  qu'on  levé  pour  les  entretenir  circule  parmi  nous, 
au  lieu  qu'il  fort  du*  Royaume  lorfque  nous  avons  une  Armée  dans  les 
Pais  Etrangers.  Une 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.  5-43 

Un  autre  avantage  que  nous  avons  dans  une  Guerre  de  Mer,  c'eft  que  AmxRss 
nous  combatons  fous  la  Conduite  de  Commandans  de  nôtre  Nation,  dont  G*N'-  DE 
le  génie  a  toujours  été  de  chercher  l'ennemi ,  de  le  combatre  ,  &  d'en- 
venir  à  une  prompte  décifion  :  il  n'en  eft  pas  de  même  des  Généraux  é- 
trangers,  &  de  ceux  qu'il  nous  faudroit  avoir  fi  nous  nous  engagions  au 
delà  de  la  Mer  dans  une  Guerre  de  Terre;  car,  ils  aiment  à  tirer  les  cho- 
fes  en  longueur,  pour  avancer  leur  fortune.  Il  eft  néceffaire  de  prendre 
garde  à  cela,  &  de  faire  en  forte  ,  que, ni  le  Soldat  étranger,  ni  le  Politi- 
que domeliique,  n'ayent  occafion  de  multiplier  les  affaires  fans  néceffité. 
On  dit  qu'un  certain  Seigneur  fit  cela  en  Irlande  dans  le  tems  de  la  Révo- 
lution. Sans  cela, il  y  a  toute  forte  d'apparence  que  ce  Royaume  nous  au- 
roit  coûté  le  quart  moins  de  fang  &  de  dépenfe  qu'il  ne  fit  depuis.  11  eft 
à  préfent  en  fon  lieu  ,  &  fa  gloire  eft  éteinte  avec  fa  pofterité.  Puiffenc 
les  pernicieux  Confeillers  de  ce  Caractère  avoir  tous  la  même  defti- 
née. 

Quand  il  s'agit  de  la  Liberté  &  de  l'Angleterre,  il  n'y  a  point  de  meil- 
leur Confeil  que  le  grand  Confeil  de  la  Nation ,  &  les  Anglois  ne  fau- 
roient  employer  à  leur  défenfe  de  meilleurs  bras  que  les  leurs.  Mais, puis 
que  la  fituation  préfente  des  Affaires  rend  néceffaires  les  Alliances  étran- 
gères^ que  nous  nous  fommes  ci-devant  mal-trouvez  de  pareils  Alliez,  la 
prudence  unie  de  la  Nation  eft  la  plus  capable  de  remédier  à  l'avenir  à 
cet  inconvénient  ;  la  plus  capable  de  juger  de  la  proportion  du  fardeau 
que  nous  devons  porter,  &  des  facultez  du  Peuple  qu'elle  réprefente  5 
&  par  conféquent  la  décifion  de  ces  chofes  eft  de  fa  compétence. 

On  ne  peut  pas  fuppofër  avec  raifon ,  que  quand  les  Anglois  fendront 
le  Danger  où  eft  leur  Patrie ,  ils  épargnent  leurs  vies  &  leurs  biens  pour 
la  défendre  &  par  Mer  &  par  Terre.  On  efpére  donc  que  les  Projets  de 
ceux  qui  traverfent  les  Alliances  Etrangères,  &  qui  reprefentent  l'impoffi- 
bilité  de  nous  engager  dans  une  nouvelle  Guerre,  feront  examinez  avec 
foin  avant  que  d'être  reçus.  Nous  avons  dans  nôtre  fein  une  Faction  de 
gens  qui  ont  toujours  été  les  Ennemis  des  Intérêts  de  leur  Patrie  ,  & 
pourvu  qu'ils  puffent  fe  procurer  des  poftes  lucratifs ,  ou  des  penfions,  &  la 
liberté  de  ruiner  tous  ceux  qui  ne  font  pas  marquez  au  même  coin  qu'eux, 
ils  étoient  bien  aifes  de  nous  rendre  efclaves  de  nos  Princes  qui  étoient 
les  Penfionnaires  de  la  France.  Il  faut  fuir  avec  foin  les  confeils  de  pa- 
reilles gens Soyons  affez  prudens  pour  nous  fervir  de  leurs 

fecours  &  de  leurs  fuffrages  pour  tout  ce  qui  peut  améliorer,  ou  affeurer 
de  plus  en  plus  notre  Gouvernement,  de  quelque  principe  que  cela  puiffe 
venir,  ou  à  quelque  fin  qu'on  le  deftine  ;  mais  prenons  garde,  qu'ils  ne 
nous  engagent  en  rien  qui  puiffe  nous  jetter  dans  des  animofitez  à  contre- 
tems,  ou  ne  retardent  les  préparatifs  néceffaires  à  notre  défenfe,  &  à  la 
défenfe  de  nos  Alliez.  Il  eft  certain  qu'ils  mettront  en  œuvre  pour  cela 
toute  l'adreffe  &  toutes  les  voies  indirectes  dont  ils  font  capables  ,  & 
qu'ils  couvriront  leurs  noirs  deffeins  des  plus  beaux  prétextes  dont  ils 
pourront  s'avifer  ;   mais  on  efpére  qu'ils  font  trop  bien  connus  pour  fe 

fier 


1,'EUKO 

p 


S44    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,   ET 

araires  fier  en  eux.  Il  fernble  que  la  préfente  fituation  des  Affaires  nous  apprend 
gen.  de  à  avoir  plus  de  foin  de  nous  tirer  des  facheufes  circonitances  où  nous 
nous  trouvons,  qu'à  rechercher  comment  nous  y  fommes  tombez;  quoi 
qu'en  même  tems  il  foit  à  propos ,  pourvu  que  l'un  ne  foit  pas  un  obflacle 
à  l'autre,  de  faire  une  enquête  de  cette  nature,  afin  de  favoir  mieux  évi- 
ter de  pareils  dangers  dans  la  fuite:  &  s'il  fe  trouve  quelqu'un,  qu'on  puif. 
Je  accufer  avec  juïHce  d'avoir  contribué  au  danger  où  nous  nous  voyons , 
par  leur  mauvaife  conduite,  ou  par  leurs  pernicieux  confeils,  la  raifon 
veut  qu'on  les  mette  dans  l'impuiifance  de  faire  la  même  chofe  une  au- 
tre fois. 

On  peut  faire  une  autre  Objection  contre  la  Guerre  pour  la  Succefîïon 
d'Efpagne,  qui  elt  de  dire  qu'elle  ruinera  plufieurs  de  nos  Marchands  qui 
ont  de  grands  Effets  en  Efpagne,  &  que  ce  fera  une  Perte  commune  à 
toute  la  Nation.  On  peut  répondre  à  cela,  qu'on  ne  peut  pas  déclarer  ou 
commencer  fi  fubitement  la  Guerre,  que  nos  Marchands  n'ayent  le  tems 
de  retirer  leurs  Effets.  D'ailleurs,  par  le  douzième  Article  du  Traité  de 
Ryfwick,  on  a  fix  mois  de  part  &  d'autre  en  cas  de  Guerre  pour  retirer 
les  Marchandifes  &  Vaiffeaux  fans  craindre  la  confifcation.  Si  les  Fran- 
çois &  les  Efpagnols  violent  cette  claufe ,  il  faut  ufer  de  reprefàilles ,  & 
traiter  leurs  Marchands  de  la  même  manière.  Les  Hollandois  y  ont  le 
même  intérêt  que  nous ,  &  s'ils  le  font  nous  pouvons  le  faire  à  coup  feur. 
On  ne  fauroit  entreprendre  de  Guerre,  qu'il  n'en  coûte  quelque  chofe  aux 
particuliers  &  à  la  Communauté  du  Royaume  en  gênerai.  Mais ,  il  faut 
à  tous  égards  préférer  le  Bien  public  au  particulier.  Il  faut  que  la  pruden- 
ce de  la  Nation  s'applique,  11  befoin  eft,  à  compenfer  les  pertes  des  Mar- 
chands s'il  leur  arrive  d'en  faire,  en  leur  faifant  part  de  ce  qu'on  pourra 
prendre  fur  les  Ennemis  dans  les  Indes  Occidentales,  ou  en  Mer,  ou  de 
quelqu'autre  manière  qu'on  jugera  à  propos.  Cependant,  nous  n'avons 
aucun  fujet  de  douter ,  que  nos  généreux  Négocians  ne  fouffrent  volon- 
tiers quelque  perte ,  pourvu  qu'une  vigoureufe  Guerre  puifle  à  l'avenir 
garantir  nôtre  Commerce  d'un  pareil  Danger,  &  le  mettre  fur  un  meil- 
leur pied. 

Si  l'on  objecte  contre  ce  qui  a  déjà  été  dit  des  Indes  Occidentales  Ef. 
pagnoles,  que  cette  manœuvre  ne  fera  pas  du  goût  de  l'Empereur,  que 
nous  devons  ménager  en  cas  de  Guerre.  On  peut  répondre  ,  qu'il  n'efl 
pas  poflible  que  la  Maifon  d'Autriche  connoiffe  fi  mal  fes  véritables  Inté- 
rêts, que  de  défapprouver  cela.  C'eft  le  moyen  le  plus  prompt  de  rédui- 
re nos  Ennemis,  &  d'épargner  l'argent  &  le  fang  qu'en  coûteroit  fans  ce- 
la une  longue  &  ennuyeufe  Guerre,  &  peut-être  inutilement. 

D'ailleurs ,  puifque  l'Empereur  efi  le  plus  obligé  par  honneur  &  par  in- 
térêt d'arracher  la  Couronne  d'Efpagne  à  la  Maiibn  de  Bourbon,  la  Rai- 
fon veut  que  nous  demandions  plus  de  liberté  de  negotier  dans  ces  par- 
ties du  Monde,  que  les  Efpagnols  ne  nous  en  ont  voulu  donner  jufqu'ici. 
Comme  nous  ne  demanderons  rien  en  cela  qu'on  ne  doive  nous  accorder 
avec  jultice,  peut-être  trouverons -nous  par-là  moyen  d'ajufier  les  diffé- 
rent 


l'Euro- 
pi-.. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  I.  f45 

rens  qu'on  a  porté  en  EcofTe  à  un  point  qui  femble  faire  craindre.  Corn-  Affaire* 
me  il  n'eft  pa:>  raifonnable  que  Ton  Commerce  faffe  des  progrez  aux  dé-  GfN-  DE 
pens  du  nôtre,  il  efl  de  l'équité  qu'on  l'entende  fur  ce  qu  elle  a  à  propo- 
îer  pour  lever  cette  Objection.  11  efl  certain  qu'il  elt  plus  de  nôtre  In- 
térêt, qu'une  Nation  qui  a  prêté  le  même  Serment  de  fidélité  que  nous, 
&  qui  efl  prefque  dans  une  néceffité  indifpenfable  de  faire  à  tous  égards 
fon  Intérêt  du  nôtre,  ait  quelque  part  au  Commerce,  que  de  tout  nfquer 
par  nos  divifions.  Il  faut  prendre  garde ,  qu'aucun  Politique  intriguant  ne 
FaiTe  clocher  ce  Royaume,  comme  on  dit  que  cela  arriva  autrefois  de 
de  l'Irlande,  il  vaut  mieux  que  nos  voifins  gardent  tous  leurs  membres 
fains,  que  fi  nous  avions  la  peine  de  les  guérir  après  qu'on  les  auroit  rom- 
pus. Ce  n'eft  pas  le  tems  de  fe  divifer  au  dedans,  quand  nous  fommes 
en  danger  d'être  attaquez  par  les  Etrangers.  Il  e(t  plus  de  nôtre  Intérêt 
d'encourager  nos  voifins  à  entretenir  avec  nous  une  bonne  correfpondan- 
ce  par  un  traitement  honnête ,  que  de  les  irriter  &  les  porter  à  des  refc 
fentimens  qui  pourroient  avec  le  tems  procurer  des  conflfcations  à  des 
gens  qui  en  ont  befoin. 

Depuis  ces  Remarques  écrites,  nous  avons  eu  avis  de  Hollande,  que 
les  Espagnols  font  déjà  fi  pleins  d'efperance  à  Madrid  de  rentrer  en  po£ 
feflion  des  Provinces  -  Unies ,  &  d'y  ruiner  la  Religion  Proteftante,  aufli 
bien  qu'en  Angleterre  &  en  Irlande ,  qu'ils  ne  peuvent  s'empêcher  de  le 
faire  connoitre  publiquement.  11  n'en  faut  pas  davantage  pour  confirmer 
ce  que  nous  avons  déjà  dit  du  Projet  d'une  Ligue  pour  extirper  l'Héréfie 
du  Nord.  Il  n'y  a  pas  de  doute  que  Rome  ne  favorife  ce  defiein  ;  & 
plutôt  qu'Elle  ne  le  fit  pas,  il  y  a  dans  le  Monde  un  Potentat,  qui  pro- 
mettra, moyennant  le  concours  de  Rome,  de  fubjuguer  toute  l'Europe, 
de  la  divifer  en  deux  Monarchies,  de  fe  mettre  à  la  tête  de  l'une,  &  le 
Pape  à  la  tête  de  l'autre ,  comme  il  étoit  convenu  de  faire  entre  l'Em- 
pereur Charles  V.  &  un  des  Papes  de  fon  tems  ,  à  ce  que  dit  Gregorio 
Leti  ;  mais ,  Dieu  fit  avorter  ce  Deifein  par  la  mort  du  Pontife. 


Reflexions  fur  divers  Écrits  concernans  la  Succesfîon  à  la  Mo* 

narchie  d'E/pagne.     A  Ville ■-  Franche ,  chez  Jean  le  Droit  y 

Rue  de  la  Liberté,  à  VEnJeigne  de  la  Vérité.  1701, 

PREFACE. 

LEs  Motifs  £5?  les  Raiforts ,  dont  les  Edits ,  Déclarations ,  Manifefles,  MémoU 
res,  £s?  autres  Ecrits  publics  des  Souverains  les  plus  abfolus  font  compofez^ 
font  ajfez  connoitre  que  les  Peuples  ont  la  Liberté  &  le  Droit  d'examiner  la  Con- 
duite qui  eft  tenue  dam  V  Admimftration  des  Etats ,  £5?  de  juger  fi  elle  ejî  jujîe , 
tu  fi  elle  ne  Vefi  pas. 

Tme  XL  Zzz  Les 


i/Euro 

PE. 


Stf    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  Les  Peuples  doivent  cependant  remarquer ,  que ,  s'ils  nont  point  une  connoif- 
gen.  de  fonce  de  tous  les  divers  intérêts  de  ï Etat  ,  il  ne  leur  efl  pas  pojjible  de  por- 
ter un  jugement  éclairé  fur  les  Réfolutions  £5?  les  Ordonnances  d  un  Souve- 
rain. Ainfi ,  les  Peuples  font  obligez  de  s'infiruire  fufifament  des  intérêts 
publics  &  des  motifs  de  la  conduite  des  Souverains ,  avant  que  de  prendre  la 
liberté  d'examiner  ce  qu'ils  propofent  ,  &  d'en  dire  ou  écrire  leur  fenti- 
mcnt. 

De  plus  ,  tout  particulier  ,  quelque  rang  qu'il  tienne  ,  ne  doit  jamais  dire 
ni  écrire  fon  fentiment ,  qu'avec  beaucoup  de  /implicite ,  £s?  une  extrême  circon- 
fpeclion.  Il  y  a  de  la  témérité  à  prétendre  qu'un  jugement  particulier  doive  paf- 
fer  pour  le  jugement  du  Public  ;  &  ce  fi  s 'oublier  foy-  même ,  &  manquer  à  ce  qui 
efl  du  au  Souverain ,  que  d'employer  des  manières ,  ou  injurieufes ,  ou  mal- 
féantes. 

Il  ne  fe  peut  rien  lire  de  plus  fage ,  ni  de  mieux  "ménagé ,  que  les  Ecrits  publiez, 
par  ordre  des  Souverains  qui  ont  l'équité  &  le  bonheur  des  Peuples  pour  principes 
de  leur  Gouvernement.  Que  fi  les  Souverains  ordonnent  ce  qu'ils  nont  pas  Droit 
d'ordonner ,  les  Peuples  [ont  indifpenfablement  obligez  de  maintenir  &  de  repre- 
fenter  leur  Droit ,  avec  tout  le  rejpecl  pojjible.  C'efi  pourquoi  tous  Difcours  & 
tous  Ecrits  compofez  au  fujet  des  Edits,  Déclarations,  Manifeftes,  &  Mémoi- 
res des  Souverains ,  doivent  toujours  être  également  jufies ,  judicieux ,  &?  refpec- 
tueux. 

La  Succeffion  à  la  Monarchie  d'Efpagne  a  déjà  produit  produit  plufieurs  Mé- 
moires ,  (sf  en  fera  naitre  plufieurs  autres,  en  intention  de  faire  valoir  les  Préten- 
tions de  divers  Souverains.  Par  conféquent,  les  Peuples  ont  la  Liberté  de  méditer 
&  de  s'expliquer  fur  la  folidité  des  Mémoires ,  &  fur  la  jufiiee  des  Préten- 
tions. ■ 

Le  Roi  de  France  prétend  que  cette  Succeffion  apartient  au  Duc  d'Anjou  fon 
Petit-Fils  ,  en  vertu  du  Tefiament  de  feu  Charles  II.  Roy  d'Efpagne  ,  £5? 
de  l'Acceptation  que  Sa  Majefté  Três-Chrêtienne  a  faite  de  ce  Tefia- 
ment. 

Sa  Majefié  Impériale  a  fait  protefier  contre  la  Validité  de  ce  ïeftament  ; 
£5?  le  Roy  d'Angleterre ,  &  les  Etats-Généraux  des  Provinces-Unies ,  ont  fait 
demander  au  Roy  de  France  ,  fi  Sa  Majefié  n'avoit  pas  intention  d'exécuter 
le  Traité  de  Partage  arrêté  entre  Sa  Majefié  Très  -  Chrétienne  ,  Sa  Majefié 
Britannique  ,  £5?  Leurs  Flautes  PuifJ'ances  ,  concernant  les  Pais  dont  la  Mo- 
narchie d'Efpagne  efl  compofée.  Par  ce  Traité ,  Louis  XI F.  Roy  de  France 
a  déclaré  qu'il  fe  tenoit  fatisfait  d'une  Partie  de  ces  Pays  ,  qu'il  renonçoit 
aux  autres,  &  les  lai //bit  à  un  Prince  de  la  Mai  fon  d'Autriche,  ou  à  quel- 
qu  autre  qui  ne  foit  point  de  la  Maifon  de  France. 

Il  par  oit  une  Lettre  du  Roy  Très-Chrétien  aux  Etats -Généraux  des  Pro- 
vinces-Unies, par  laquelle  Sa  Majefié  leur  donne  Avis  de  l'Avènement  dû- 
Duc  d'Anjou  fon  Petit-Iils  à  la  Couronne  d'Efpagne  ,  &  en  même  tems  on. 
voit  un  Mémoire  ,  ou  l'on  entreprend  de  prouver  que  le  Traité  de  Partage 
efi  devenu  nul  par  la  Difpofition  Teflament  aire  en  faveur  du  Duc  d'Anjou». 
Le  Tefiamtnt  efl  aufli  rendu  public  avec  la  Lettre  d'Acceptation  de  Sa  Ma- 

i4ê 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.    I.         f47 

jefié  Très  -  Chrétienne ,  ci?    un  Mémoire  préfcnté  par  V  Ambaffadeur  d'Efpa-   Affaires 
gne  aux  Etats-Généraux ,  pour  leur  notifier  la  Mort  de  Charles  I/.,fon  Te-    GEN-  nE 
fiament  en  faveur  du  Duc  d'Anjou,  £s?  l'Acceptation  qui  en  a  été  faite  par    L'f-URO" 
Sa  Majefié  Très-Chrêtienne.     Pour  le  Traité  de  Partage,  il  eji  depuis  long-   .. 
tems  entre  les  mains  du  Public. 

Ce  font  ces  Ecrits ,  ci?  quelques  autres ,  fur  lefquels  je  me  propofe  de  former 
des  Réflexions ,  nullement  à  deffein  de  décider  fur  aucun  Article  ,  mais  uni» 
quement  en  vue  d'engager  a  étudier  &  à  prévoir  les  Conféquences  de  cette 
matière.  Tous  les  Etats  Chrétiens  y  font  intereffez ,  &  particulièrement  ceux 
qui  font  voifins  des  Pays  dépendans  de  la  Monarchie  d'Efpagne. 

Il  arrive  des  tems  ci?  des  conjonctures  ,  ou  il  ne  fuffit  pas  que  le  Souve- 
rain veille  aux  Intérêts  de  l'Etat  ;  chaque  particulier  eft  obligé  de  laijfcr  le 
foin  de  [es  propres  Affaires  ,  ou ,  pour  le  plus ,  de  ne  les  conduire  que  de  la 
main  gauche  (3  d'une  ftmple  vue  ,  pour  appliquer  fa  principale  attention ,  &? 
tmploier  les  forces  de  (on  bras  droit  ,  félon  les  be foins  publics. 

La  Traité  de  Partage ,  arrêté  dès  le  mois  de  Mars  1700,  pouvant  faire  naî- 
tre des  difficultez,  entre  le  Roy  de  la  Grande-Bretagne  &  les  Etats  Généraux  des 
P.  U.  perfuadez  de  la  Validité  du  Traité,  6?  le  Roy  de  France  prétendant  fa 
Nullité,  il  e(l  à  propos  de  commencer  par  des  Réflexions  fur  les  Motifs ,  les  Rai- 
fons,  la  Teneur,  la  Force ,  ci?  les  Engagemens  de  ce  Traité. 

Réflexions  fur  le  Traité  entre  le  Roy   Très- Chrétien ,  Je  Roy  de 

la  Grande-Bretagne ,  £s?  les  Seigneurs  Etats  Généraux  des 

Provinces -Unies  des  P  aïs-Bas. 

Le  Difcours  qui  précède  les  Articles  du  Traité  contient  divers  Motifs.  Re'Ae- 
En  voici  les  termes.  uTrlhé 

Soit  notoire  à  tous  ceux  qui  ces  préfentes  verront ,  que  le  Sêréniffime  &  très-  <je  Parta» 
Puiffant  Prince  Louis  XIV.  par  la  Grâce  de  Dieu  Roi  T.  C.  de  France  &   ge  de 
de  Navarre,  &c.  ci?  le  Sereniffime  ci?  tres-Puiffam  Prince  Guillaume  lll.auffi   Mars 
par  la  Grâce  de  Dieu  Roy  delà  Grande-Bretagne ,  £s?  les  Seigneurs  Etats -Gé-   I'00' 
néraux  des  Provinces-Unies  des  P.  B.  n'ayant  rien  de  plus  à  cœur  que  de  for- 
tifier par  de  nouvelles  liaifons  la  bonne  intelligence  rétablie  entre  Sa  Majefié  T. 
C.  Sa  Majefié  de  la  G.  B.  ci?  lesdits  Seigneurs  Etats-Généraux  par  le  dernier 
Traité  conclu  à  Ryswick,  &  de  prévenir ,  par  mefures  prifes  à  temps, les  événe- 
mens  qui  pouroient  exciter  de  nouvelles  Guerres  dans  V Europe  ,    ont  donné  pour 
cet  effet  leurs  Plein-Pouvoirs  pour  couvenir  d'un  nouveau  Traité ,  favoir  &c* 
La  fuite  eft  une  Lifte  des  noms  &  qualitez  des  Plénipotentiaires  nom- 
mez par  chaque  Puiffance. 

Fortifier  par  de  nouvelles  liaifons  la  bonne  intelligence  rétablie  entre  Sa  Ma- 
jefié T.  C.  Sa  Majefié  de  la  G.  B.  ci?  les  Seigneurs  Etats-  Généraux  par  le  der- 
nier Traité  conclu  à  Ryfwick,  ci?  prévenir ,  par  mefures  prifes  à  temps ,  les  évé- 

Zzz  2  wmens 


548    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Attaibes    nemens  qui  four  oient  exciter  de  nouvelles  Guerres  dans  l'Europe,  font  deux  Mo- 
gen.  de     ufs  du  nouveau  Traité. 

i.'Euro-  j^a  Qrancjeur)  |es  RichefTes,  &  la  Puiflance  ne  font  point  le  bonheur 
'  d'un  Etat;  c'eit  l'Union  emre  les  Sujets  d'une  même  Nation  &  la  Paix 
avec  les  États  voifins.  La  différence  de  Génie  des  Peuples ,  des  Loix  du 
Gouvernement,  &  des  Intérêts  des  Souverains  font  les  caufes  ordinaires 
delà  Guerre;  Et  les  maux  &  les  malheurs,  qui  l'accompagnent,  obli- 
gent enfin  à  rechercher  la  Paix  &  à  la  rétablir.  La  véritable  Paix  confilte 
dans  une  mutuelle  correfpondance  entre  diverfes  Nations  pour  fe  procu- 
rer réciproquement  tous  les  avantages  poiîibles,  &  dans  une  parfaite  in- 
telligence, pour  prévenir  tous  fujèis  de  difeorde,  &  pour  accommoder  tous 
differens. 

On  lupofe  que, par  le  Traité  conclu  à  Ryswick,  la  bonne  intelligence  a 
été  rétablie  entre  Sa  Majefté  Tres-Chrétienne  ,  Sa  Majelté  de  la  Grande- 
Bretagne,  &  les  Seigneurs  Etats  Généraux.  Pour  connoitre  en  quoy  peut 
confiiter  ce  réfabliiK-ment  de  bonne  intelligence ,  il  convient  de  remarquer 
en  quoy  elle  avoit  été  détruite. 

La  Trêve  conclue  à  Nimegue  ayant  paru  à  Louis  XIV.  Roy  de  Fran- 
ce une  Conjoncture  propre  à  l'exécution  du  grand  DelTein  qu'il  avoit 
d'abolir  la  Religion  Réformée  dans  fon  Royaume,  l'Edit  de  Nantes  fut 
révoqué,  les  Temples  firent  démolis,  les  Miniftres  chafTez,  tout  Exerci- 
ce de  Religion  interdit,  &  la  Persécution  ouverte  par-tout  contre  les 
Réformez. 

Jacques  IL  Ducd'Yorck,  étant  en  ces  temps-là  monté  fur  îe  Trône 
d'Angleterre ,  entreprit  de  rétablir  la  Religion  Romaine ,  &  d'introduire  le 
Pouvoir  Arbitraire.  Le  Prince  d'Orange ,  à  la  follicitation  des  Peuples 
opprimez,  paffa  en  Angleterre  affilié  des  Troupes  que  les  Etats  Géné- 
raux lui  avoient  accordées.  Jacques  IL,  à  l'arrivée  du  Prince,  s'étant 
retiré  en  France,  le  Roy  T.  C.  déclara  à  l'Angleterre  &  à  la  Hollande 
la  Guerre  qu'il  avoit  déjà  commencée  contre  l'Empereur.  Il  y  avoit  une 
Ligue  entre  l'Empire,  l'Efpagne  ,  l'Angleterre,  les  Provinces-Unies, & 
plulieurs  autres  Princes,  pour  s'entraider  mutuellement  contre  les  Entre- 
prifes  de  la  France. 

Ainfi,la  bonne  intelligence  entre  Louis  XIV.  Roy  de  France,  Guil- 
laume III.  couronné  Roy  de  la  G.B. ,  &  les  Etats  Généraux,  avoit  été 
détruite  en  ce  que  Sa  Majefté  T.  C.  ayant  déclaré  la  Guerre  à  l'Angle- 
terre,  pour  rétablir  le  Roy  Jacques,  aux  Etats  Généraux,  pour  avoir 
affilié  le  Prince  d'Orange  dans  fon  paffage  en  Angleterre,  aux  Princes 
Confédérez  pour  ruiner  &  envahir  ce  qu'il  pouroit  de  leurs  Etats,  Sa 
Majelté  Britannique  étoit  obligée  de  maintenir  par  la  Guerre  la  Reli- 
gion &  les  Libertez  de  la  Nation  ;  les  Etats  Généraux  étoient  dans  la 
néceflité  de  fe  défendre  ;  &  l'Angleterre  &  la  Hollande  étoient  conjoinc- 
tement  engagées  à  s'oppofer  aux  Ravages  &  aux  Invafions  de  la  France 
fur  les  Pais  des  Princes  confédérez. 

Sa 


FE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  U9 

Sa  Majefté  T.  C,  après  avoir  éprouvé  que  route  la  fureur  de  Tes  Ar-  Affaire 
mes  n'étoit  pas  capable  de  venir  à  bouc  de  fes  deffeins  contre  les  Alliez,  èEN*  Dr 
eut  recours  aux  artifices  pour  les  divifer.  Les  artifices  ayant  eu  peu  de  Lt^RO~ 
fuccès,  on  fit  femer  des  Proportions  de  Paix  Générale.  Guillaume  III. 
&  les  Etats  Généraux,  qui  a  voient  foutenu  &  repouiTé  avec  vigeur  la 
furie  des  François,  &  ne  s'étoient  point  taillez  ébranler  par  le  fuccés  des 
artifices,  refuférent  conitament  d'entendre  à  des  Propofitions  de  Paix  pré- 
judiciables aux  juftes  Intérêts  des  Alliez.  Mais,  enfin,  les  Parties  lafîïes 
de  la  Guerre,  &  la  néceffité  des  Affaires  le  requérant,  il  fut  convenu  de 
traiter  de  la  Paix.  Le  Château  de  Ryswick ,  apartenant  à  Guillamne  HT, 
&  fitué  proche  la  Haye,  féjour  des  Etats  Généraux,  fut  choifi  pour  le  lieu 
du  Traité.  Ce  choix  étoit  un  aveu  de  la  part  de  la  France,  que  Guillau- 
me III.  &  les  Etats  Généraux  n'avoient  rien  plus  à  cœur  que  de  rétablir 
l'équité  &  l'union  entre  tous  les  Princes. 

En  Conféquence  du  Traité  conclu  à  Ryswick,  la  France  a  reconnu 
Guillaume  III.  pour  légitime  Roy  de  la  Grande  Bretagne  ,  la  Guerre  a 
cefle,  &  la  Paix  a  dû  ctre  rétablie  entre  les  François,  les  Anglois ,  &  les 
Hollandois. 

Cependant,  on  fait  les  Difficultez  que  la  France  a  fait  naître  au  fujet 
du rétabliffement  de  Commerce:  &  la  manière,  dont  elle  en  a  ufé  à  cet  é- 
gard  envers  l'Angleterre  &  la  Hollande,  eit- elle  la  manière  d'une  bonne 
intelligence  ? 

De  plus  ,  il  a  été  remarqué  que  Louis  XIV.  avoit  déclaré  la  Guerre  à 
l'Angleterre  &  à  la  Hollande,  pour  foutenir  les  Prétentions  du  Roy  Jac- 
ques. Il  n'y  a  point  eu  de  Règlement  aifez  précis  à  l'égard  de  ces  Préten- 
tions pour  empêcher  qu'elles  ne  fervent  de  prétexte  à  de  nouvelles  Guer- 
res ,  dès  qu'il  fe  prefentera  quelque  occalion  propre  à  les  faire  va- 
loir. 

Enfin,  la  Perfécution  redoublée  en  France,  pour  achever,  s'il  eftpoffible, 
la  Ruine  de  la  Religion  Réformée  ,1e  grand  nombre  de  Familles  forties  du 
Royaume  non-obftant  les  défenfes ,  reçues  en  Angleterre  &  en  Hollande 
contre  l'intention  de  fa  Majelté  T.  C,  &  toutes  les  follicitations  de  la  part 
du  Roy  de  la  G.  B.  &  des  Etats  Généraux  inutilement  emploiées 
auprès  du  Roy  de  France  en  faveur  des  Réformez  ,  font  voir  que  la  bonne 
intelligence  en  fait  de  Religion  n'eit  point  encore  rétablie  entre  ces  trois 
PuifTances. 

Il  efl  facile  de  juger  par  les  maximes ,  par  la  conduite,  &  par  les  dif- 
pofitions  de  Sa  Majefté  Britannique  &  des  Etats  Généraux,  qu'ils  auroienc 
fort  à  cœur  d'entretenir  une  parfaite  correfpondance  pour  tout  ce  qui  con- 
cerne le  Commerce,  la  Politique,  &  la  Religion  avec  Sa  Majeilé  T.  C. 
Mais,  les  maximes,  la  conduite,  &  les  difpoûtions  de  ce  Monarque  en 
paroiffent  beaucoup  éloignées. 

Ainfif,  toute  cette  idée  de  ri  avoir  rien  plus  à  cœur  que  de  fortifier  par  de  nou- 
velles liaifom  la  bonne  intelligence  rétablie  entre  (Se.  &  de  prévenir ,  par  mefures 
prifes  à  temps ,  les  événemens  qui  pour  oient  exciter  dé  nouvelles  Guerres  en  Eu- 

Zzz  3  ropey 


PE. 


450    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  ropgt  doit  s'entendre  feulement  d'une  Union  pour  prévenir  des  Guerres  pa- 
cf.n.  de  reiuesà  celles  qui  font  arrivées  à  la  fin  du  dix-feptiéme  iiecle,dans  lesquel- 
les prefque  toute  l'Europe  s'eit  trouvée  engagée  par  divers  motifs. 

On  a  coutume  de  louer  les  hommes  qui  le  contentent  d'un  état  mé- 
diocre, &  on  admire  ceux  qui  fe  comportent  avec  modération  dans  une 
grande  fortune;  parce  qu'en  effet  rien  n'eft  plus  commun  que  de  voir  les 
perfonnes  afpirer  à  des  conditions  plus  relevées  que  celles  où  elles  fe  trou- 
vent: &  il  eft  vrai  de  dire,  que  la  Puiiïànce,  la  Grandeur,  &  les  Richef- 
fes ,  font  pour  l'ordinaire  un  poifon  qui  excite  des  defirs  exceflifs  &  in- 
iatiables  dans  le  cœur  de  l'homme. 

Les  Prétentions  réciproques  de  la  Maifon  de  France  &  de  la  Maifon 
d'Autriche,  ou  plutôt  l'Ambition  qui  leur  eft  naturelle  pour  s'élever  par 
la  ruine  l'une  de  l'autre,  a  été  une  fource  continuelle  de  Guerres;  &  apa- 
rament  cette  fource  ne  tarira  point,  que  l'une  des  deux  Maifons  ne  foie 
entièrement  détruite.  Chaque  Maifon  étant  perfuadée  par  expérience, 
qu'il  ne  lui  eft  pas  poflible  de  parvenir  à  fes  fins,  tant  que  les  autres  Etats 
feront  liguez  avec  fa  Rivale  ,  ne  manque  point  de  profiter  des  occafions, 
ou  pour  s'en  emparer,  ou  pour  les  ruiner,  ou  pour  les  attacher  à  fes  inté- 
rêts. Les  autres  Puiffances ,  de  leur  côté,  ne  pouvant  ignorer  que  la  ruine 
de  l'une  des  deux  Maifons  doit  attirer  la  leur ,  font  toujours  prêtes  à  fe 
joindre  à  celle  qui  femble  la  plus  foible  ,  afin  de  s'oppofer  aux  progrès  de 
celle  qui  eft  la  plus  forte.  Ce  font-la  les  Motifs  de  la  plupart  des  Ligues 
qui  ont  été  formées  dans  ces  derniers  fiecles. 

L'Examen  des  Articles  du  Traité  fera  juger ,  fi  l'intérêt  particulier  de  la 
Maifon  de  France  n'eft  pas  le  Motif  qui  a  porté  Louis  XIV. ,  &  fi  l'intérêt 
commun  de  toutes  les  autres  Puiffances  n'eft  pas  le  Motif  qui  a  engagé 
Guillaume  III.  &  les  Etats  Généraux,  de  fortifier  par  cette  nouvelle  liaifon 
la  bonne  intelligence  rétablie  entre  ces  trois  Souverains,  &  prévenir  par 
mefures  prifes  à  temps  les  événemens  qui  pourroient  exciter  de  nou- 
velles Guerres  en  Europe. 

On  n'a  point  fçu  dans  le  Public  laquelle  des  trois  Puiffances  avoit  fait 
les  premiers  Projets  de  ce  Traité.  Que  ce  foient  les  Seigneurs  Etats 
Généraux  des  P.  U.,  on  n'en  fera  pas  furpris.  La  Paix  eft  néceffaire 
pour  la  confervation  &  l'entretien  de  leur  République.  L'Efprit  de 
paix  en  eft  une  Loi  ,  ou  un  Principe  fondamental  ;  &  toutes  les  Guer- 
res, que  les  Etats  Généraux  ont  foutenuës,  ont  été  néceffaires,  ou  pour 
fe  défendre,  ou  pour  empêcher  la  ruine  de  leurs  Alliez. 

Que  le  Plan  du  Traité  ait  été  formé  &  propofé  par  Guillaume  III.  Roy 
de  la  Grande-Bretagne,  tout  le  monde  jugera  bien  que  le  Projet  de  pré- 
venir de  nouvelles  Guerres  dans  l'Europe  devoit  naturellement  naitre 
dans  la  tête  d'un  Prince,  qui  dès  fa  plus  tendre  jeuneffe  s'eft  apliqué  tout 
entier  aux  foins  &  aux  travaux  néceffaires  pour  arrêter  la  Défolation  de  fa 
Patrie  &  pour  la  rétablir;  qui  n'a  point  ceffé  d'infpirer  à  toutes  les  Puiffan- 
ces l'efprit  de  bonne  intelligence  entre  elles  pour  la  confervation  de  leurs 
Etats  particuliers  ;  qui  a  toujours  également  travaillé  pour  maintenir  la  Li- 
ber- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  5-51 

berté  des  Sujets  &  les  Droits  légitimes  des  Souverains;  qui  n'a  jamais  été  Affaires 
prévenu  de  cette  Grandeur  élevée  par  les  miféres  réelles  d'une  Nation  &  G*N-  DK 
fur  la  ruine  des  autres  Peuples;  &  qui  jamais  n'a  été  fufceptible  de  la  vai-     tEuRO- 

ne  gloire  de  prétendre  tracer  à  une   Pofterité  le  chemin  à  la  Monarchie ! . 

Univerfelle.  Peut>il  y  avoir  de  Grandeur  &  de  Gloire  plus  excellentes 
pour  les  fiecles  préfents  &  à  venir,  que  de  mettre  fon  bonheur  à  rendre 
heureux  les  Peuples  de  fon  tems  ? 

Que  fi  Louis  XIV.  Roy  de  France  a  été  le  premier  Auteur  du  Traité, 
ne  doit-on  pas  fe  trouver  dans  un  étonnement  de  joye,de  ce  que  ce  puif- 
fant  Monarque,  aimé  &  craint  de  Tes  Sujets,  redouté  des  autres  Peuples, 
accoutumé  à  faire  fentir  le  poids  de  Tes  armes  &  la  force  de  fes  tréfors, 
propofe  &  promet  de  prévenir  de  nouvelles  Guerres  en  Europe? 

Enfin,  quelle  que  ce  loit  des  trois  PuifTances ,  qui  ait  fait  les  ouvertures 
du  Traité j  puifque  toutes  l'ont  arrêté  de  concert,  &  qu'elles  ont  le  pou- 
voir de  l'exécuter,  ne  devoit-ce  pas  être  une  grande  efpérance  pour  l'Eu- 
rope? Auroit-elle  pu  defirer  rien  de  plus  avantageux?  Mais,  auroit-elle 
pu  s'imaginer  de  le  voir  conclu  ,  &  a-t-elle  dû  jamais  fe  promettre 
qu'il  pourroit  être  accompli? 


ARTICLE.      I. 


La  Paix  rétablie  par  le  Traité  de  Ryswick  entre  Sa  Majefté  Très-  Chrétien- 
ne, Sa  Majefté  Britannique ,  £5?  les  Seigneurs  Etats-Généraux  des  Provinces- 
Unies  des  Pais- Bas,  leurs  Héritiers  &  Succeffeurs ,  leurs  Royaumes,  Etats,  & 
Sujets ,  fera  ferme  &  confiante  ;  &?  Leurs  Majefiez ,  &  les  dits  Seigneurs  Mr 
tats-Généraux  des  Province  s -Unie  s  des  Pais-Bas,  feront  réciproquement  tout  ce 
qui  pourra  contribuer  à  C  avantage  13  à  futilité  de  l'un  &  de  f autre. 

En  premier  lieu  ,  tous  les  Réformez  ,  réfugiez  dans  les  Etats  de  la 
Grande-Bretagne  &  dans  les  Provinces-Unies,  de  qui  feront-ils  réputez 
Sujets?  Si  le  Roy  de  France  prétend  les  redemander  ,  lui  feront-ils  ren- 
voyez? Si  on  les  retient,  refteront-ils  privez  de  la  liberté  d'aller  &  venir 
en  France  pour  leur  commerce?  Un  point  de  cette  conféquence  n'étant 
pas  encore  réglé,  comment  la  Paix  conclue  à  Ryswick'  demeurera-t-elle 
ferme  &?  confiante?  Ce  nouvel  engagement  entre  Sa. Majefté  T.  C,  Sa  Ma- 
jefté Britannique,  &  les  Etats-Généraux,  pour  faire  réciproquement  tout  ce  qui 
poura  contribuer  à  l'avantage  &?  à  futilité. de  ïun  &  de  l'autre  ,  peut-il  faire 
efpérer  que  ce  point  fera  bien-tôt  réglé  ? 

En  fécond  lieu ,  fi  l'occafion  fe  prefente  en  un  temps  ou  en  un  autre  de 
rétablir  le  Roy  Jacques  ou  fes  Héritiers,  que  deviendra  cette  idée  de  Paix 
ferme  &  confiante  ? 

Sa  Majefté  Très- Chrétienne,  fes, Héritiers  &  SuccefTeurs,  leurs  Royau- 
mes, Etats,  &  Sujets  n'ont  rien  a  apréhender  des  maximes  de  la  Politique, 

m 


L'Eukô 

Ffi. 


fSi    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ',  ET 

Araires  ni  des  principes  de  la  Religion  de  Sa  Majedé  B.  &  des  Seigneurs  Etats-* 
c.EN.  ot  Généraux.  Mais,  n'ont-ils  rien  à  craindre  des  maximes  Politiques  &  des 
principes  de  Religion  des  François  Catholiques-Romains?  Y-a-t-il  eu  des 
Sujets  de  Sa  Majeflé  Britannique,  ou  des  Etats-Généraux,  accufez  en 
France  de  Crime  contre  l'Etat?  Et  s'eft-il  trouvé  des  Réformez  à  qui  l'on 
ait  imputé  avec  juftice  d'avoir  formé  des  Entreprifes  contre  le  Gouverne- 
ment? Combien  au  contraire  de  François  Catholiques-Rom.  paflez  en  An- 
gleterre pour  y  femer  la  divifion  ;  &  combien  de  naturels  de  la  Nation  ex- 
citez continuellement  par  des  François  à  machiner  des  deiTeins  pernicieux 
à  la  Religion,  &  aux  Loix  du  Royaume?  Comment  fe  flatter  de  Paix  fer- 
me &  cinflante  au  milieu  d'un  fi  grand  nombre  de  fujèts  de  Guerre  tou- 
jours prête  à  recommencer? 


ARTICLE.      IL 

Comme  le  principal  objet  que  Sadite  Majeflé  Très- Chrétienne ,  Sadite  Ma* 
jeflé  de  la  Grande-Bretagne ,  £5?  lesdits  Seigneurs  Etats-Généraux,  fe  propo- 
fent ,  efl  celui  de  maintenir  la  tranquilité  générale  de  l'Europe  ,  ils  n'ont  pu 
voir  fans  douleur  que  Y  état  de  la  fanté  du  Roy  a" Efpagne  foit ,  depuis  quel- 
que temps,  devenu  fi  languijfant ,  qu'il  y  a  tout  à  craindre  pour  la  vie  de  ce 
Prince  :  quoi  qu'ils  ne  puiffent  tourner  leurs  penfées  du  côté  de  cet  événement 
fans  affliction  par  l'amitié  fincére  &?  véritable  qu'ils  ont  pour  lui,  ils  ont  ce- 
pendant efiimé  quil  étoit  d'autant  plus  néceffaire  de  prévoir  que  Sa  Majeflé 
Catholique  n'ayant  point  d' Enfans  ,  l'ouverture  de  la  SucceJJîon  exciteroit  in- 
failliblement une  nouvelle  Guerre  ,  fi  le  Roi  Très-Chrêtien  foûtenoit  fes  Pré- 
tentions ,  celles  de  Monfeigneur  le  Dauphin ,  ou  de  fes  Defcendans  fur  toute  la 
Succefjion  d'Efpagne  \  6?  que  l'Empereur  voulût  auffi  faire  valoir  fes  Préten- 
tions, celles  du  Roi  des  Romains  ,  de  V  Archiduc  [on  fécond  Fils ,  ou  de  fes 
autres  Enfans  mafies  ou  femelles ,  fur  laditte  SucceJJîon, 

N'eft-ce  point  ici  le  véritable  Motif  du  Traité,  &  ceux  qui  ont  pré- 
cédé ne  feroient-ils  pas  fimplement  une  manière  de  Préambule  fans 
confequence? 

Charles  II.  Roi  d'Efpagne  en  état  de  mort  prochaine  fans  enfans,  l'ou- 
verture de  la  Succeflion  eft  regardée  comme  devant  infailliblement  exci- 
ter une  nouvelle  Guerre  entre  le  Roy  de  France  ayant  prétention,  ou  pour 
foi  ,  ou  pour  fes  Defcendans ,  fur  toute  la  Succeflion  d'Efpagne  ,  & 
l'Empereur  ayant  une  femblable  prétention,  ou  pour  foy  ,  ou  pour  fes 
Defcendans. 

On  n'entre  dans  aucun  Examen  du  Droit  des  Prétentions  ,  &  l'on  con- 
fidére  feulement,  que  l'un  &  l'autre  peut  les  foutenir  ,  &  eft  en  état 
de  les  faire  valoir  par  les  armes  ,  d'où  il  s'enfuivroit  une  nouvelle 
Guerre. 

Cette  Conjoncture  donne  lieu  de  remarquer  la  Vanité  des  Projets  que 

les 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.    I.         f5$ 

les  Souverains  fe  forment.  Charles  d'Autriche,  à  l'âge  de  if.  ans  de- 
venu en  \fi6.  Roi  d'Efpagne  par  le  Teftament  de  Ferdinand  V.  fon 
ayeul  maternel  ,  &  élu  Empereur  le  24  Février  de  1515?.  après  le  dé- 
cès de  Maximilien  I.  fon  autre  ayeul  ,  avoit  conceu  les  efpérances  de 
parvenir  à  la  Monarchie  Univerfelle.  Cependant,  quoiqu'il  eût  eu  le  bon- 
heur de  conquérir  deux  Empires  de  très  grande  étendue  dans  le  nouveau 
Monde,  de  fe  rendre  prefque  Maître  abfolu  dans  IAlIemagne,  de  retenir 
à  Madrid  François  I.  fait  prifonnier  à  la  Bataille  de  Pavie,  de  fe  faire  re- 
douter par  les  Papes,  &  de  fe  rendre  formidable  aux  Turcs  ,  il  fe  trouva 
engagé  à  l'âge  de  f  f .  ans  de  renoncer  au  Monde ,  &  de  fe  retirer  dans  un 
Monaflére,  fans  avoir  pu  obtenir  pour  foy-même  la  Dignité  de  Pape 
qu'il  avoit  procurée  à  Adrien  VI.  &  à  Clément  VIL ,  &  fans  pouvoir 
lailTer  l'Empire  &  l'Efpagne  réunis  en  la  Perfonne  de  Philippe  II. 
fon  Fils  unique. 

Philippe  II,  s'étant  flaté,  de  même  que  Charles-Quint  fon  Père  ,  d'éle- 
ver la  Maifon  d'Autriche  à  la  Monarchie  Univerfelle,  Ferdinand  fon  On- 
cle étant  Empereur,  vit  fa  Flotte  Y  Invincible  batuë  ,  ruinée  ,  diffipée  aux 
aproches  de  l'Angleterre ,  fes  efpérances  fur  le  Royaume  de  France  en- 
tièrement détruites,  &  une  partie  des  Païs-Bas  foultraite  à  fon  obéiffance. 
Et  fa  Poflérité,  Philippe  III.,  Philippe  IV.  ,&  Charles  II. ,  après  avoir  été 
travaillez  de  Guerres,  fe  trouvent  fur  le  point  de  lailTer  à  leurs  Héritiers 
de  la  Maifon  d'Autriche  une  Succeffion  à  difputer  par  les  armes,  ou  à  par- 
tager avec  leurs  plus  grands  Ennemis. 

Deux  Infantes  d'Efpagne  avoient  été  données  en  mariage  à  deux  Rois 
de  France ,  afin  de  procurer  la  Paix  entré  les  deux  Maifons  ,  en  prenant 
préalablement  des  Précautions  pour  empêcher  la  Couronne  d'Efpagne  de 
tomber  dans  la  Maifon  de  France  au  préjudice  de  celle  d'Autriche.  Mais 
enfin  ces  Infantes  ont  été  la  fource  de  plufieurs  Guerres  entre  les  deux 
Maifons ,  ont  caufé  la  perte  de  plufieurs  Pais  dépendans  de  l'Efpagne  u- 
nis  à  la  Couronne  de  France,  &  donnent  aujourd'hui  à  Louis  XIV.  &  au 
Dauphin  fon  Fils  lieu  de  prétendre  à  la  Monarchie  entière  d'Efpagne ,  ou 
de  la  partager  après  la  mort  prochaine  de  Charles  II. 

Les  trois  Fuiflances  témoignent,  qu'elles  ne  peuvent  tourner  leurs  pen- 
fées  du  côté  de  cette  Mort  fans  affl-érion ,  par  l'amitié  fincére  &  véritable 
quelles  ont  pour  fa  Majeflé  Catholique.  Je  ne  fçai ,  fi  les  maladies  du 
corps,  &  les  dangers  de  la  mort,  font  desévénemens  plus  à  plaindre  pour  un 
Prince,  que  le  ravage  de  fes  Etats,  leur  perte,  &  le  rifque  de  s'en  voir  en- 
tièrement dépouillé.  Charles  II.  s'eft  vu  plufieurs  fois  à  ces  épreuves  ;  & 
il  y  a  bien  de  l'aparence  qu'il  auroit  été  impitoyablement  réduit  à  d'étran- 
ges extrémitez  par  les  attaques  de  la  France,  s'il  n'avoit  été  affilié  de  for- 
ces &  d'argent  par  la  Grande-Bretagne  &  par  les  Etats-Généraux  des 
Provinces-Unies. 

C'eft  dans  les  temps  fâcheux,  que  l'on  connoit  les  amis  fincéres  &  vé- 
ritables.    Quels  ont  été  les  temps  les  plus  fâcheux  du  Règne  de  Charles 
II.  &  quels  ont  été  dans  ces  temps  les  mouvemens  &  les  affeèlions  de  Sa 
Tom.  XL  Aaaa  Ma- 


5*4    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaihks   Majefté  Très-Chrétienne,  de  SaMajeflé  Britannique,  &  des  Seigneurs  E- 

gkn.  dr     lats-Generaux? 

l'Euro-        Les  Ralfons  du  Traité  font  déduites  dans  l'Article  III. 


PE. 


ARTICLE      III. 

Et  comme  les  deux  Seigneurs  Rois  £s?  les  Seigneurs  Etats-Généraux  'veulent 
fur  toutes  chofes  la  con/ervation  du  repos  public ,  \J  éviter  une  nouvelle  Guerre 
dans  l 'Europe ,  pour  ï  accommodement  des  dif putes  £5?  des  différens  qui  pour  oient 
réfulter  au  fujèt  de  la  dite  Succcjfïon,  ou  par  F  ombrage  de  trois  Etats  réunis 
fous  un  même  Prince ,  ils  ont  trouvé  bon  de  prendre  par  avance  des  me  fur  es  nécef- 
J aires  pour  prévenir  les  malheurs  que  le  trifie  événement  de  la  mort  du  Roy  Ca- 
tholique fans  enfans  pourroit  produire. 

Vouloir  fur  toutes  chofes  la  confervation  du  repos  public,  c'eft  non-feu- 
lement ne  rien  projetter  &  ne  rien  entreprendre  qui  puifle  le  troubler  j 
mais  encore  relâcher  plutôt  de  fes  intérêts  légitimes  ,  fi  on  ne  peut  les  fai- 
re valoir  fans  que  le  repos  public  en  foit  troubjé.  Et  vouloir  fur  toutes 
chofes  éviter  une  nouvelle  Guerre  ,  c'efl  examiner  avec  une  fcrupuleufe 
exactitude  les  caufes  ou  les  raifons  qui  la  peuvent  faire  naître ,  afin  de 
prendre  les  mefures  convenables  pour  les  arrêter.  Voici  deux  Caufes  ou 
deux  Raifons  jugées  capables  de  faire  naître  une  nouvelle  Guerre  dans  l'Eu- 
rope après  la  mort  du  Roy  d'Efpagne  fans  enfans. 

La  première  ,  les  dif  put  es  &  les  différens  qui  pouroient  réfulter  au  fujèt  de 
la  Succefïon. 

La  féconde,  V  ombrage  de  trois  Etats  réunis  fous  un  même  Prince. 
La  première  Caufe  regarde  feulement  les  Héritiers  prétendus  ;  à  fça- 
voir  ,  la  Branche  Impériale  d'Autriche  ,  Héritière  préfomptive  de  la  Bran- 
che Royale,  de  la  quelle  Charles  IL  eli  immédiatement  iiïïi ,  &  la  Mai- 
fon de  France ,  qui  a  des  Alliances  allez  étroites  avec  la  Branche  Royale 
d'Autriche,  pour  prétendre  droit  d'hériter  de  Charles  II,  décédant 
fans  enfans  ,  préferablement  au  plus  pur  fang  de  la  Branche  Impériale 
d'Autriche. 

L'Empereur,  en  qualité  de  Chef  de  la  Maifon  d'Autriche,  prétend  que  la 
Succeiîion  entière  de  Charles  d'Autriche  ,  fécond  du  nom  Roy  d'Efpa- 
gne, lui  doit  apartenir  ou  à  fes  Enfans.  Le  Roy  de  France,  Chef  de  fa 
Maifon  ,  prétend  également  que  cette  Succeffion  entière  doit  apartenir  à  lui 
ou  à  fes  Enfans,  comme  étans  plus  proches  Païens  de  Charles  II.  que  ne  le 
font  l'Empereur  &  fes  Defcendans. 

Louis  XIV.  a  eu  pour  Mère  Anne  d'Autriche,  Infante.  d'Efpagne, Fille 
de  Philippe  III,  Tante  de  Charles  II.  Le  Dauphin  de  France  eîr.  Fils  de 
Marie-Théréfe  d'Autriche,  Infante  d'Efpagne,  Fille  de  Philippe  IV.  Sœur  de 
Charles  IL  Or,  les  Infantes  d'Efpagne  héritent  la  Couronne  au  défaut  des 
Mules  &e£  en  droite  ligne.  L'Empereur  a  au  contraire,  defcendu  de  Ferdi- 
nand 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  SSS 

nand  Frère  de  Charles-Quint,  ne  peut  être  Parent  de  Charles  lî.  Roy  d'Ef-  4»a»w 


GKN.    DK 


pagne  qu'en  un  degré  fort  éloigné.  Mais,  Sa  Majefté  Impériale  fonde  fon 
Droit  de  préférence  fur  les  Renonciations  folemnelles  faites  par  les  deux  In-      PE. 

fantes  aux  momens  de  leurs  Mariages  avec  les  Roys  de  France,  aux-quels 

elles  n'eulTent  jamais  été  données  en  des  Mariages  capables  de  porter  pré- 
judice aux  Héritiers  de  la  M  ai  fon  d'Autriche.  Et, en  conféquence  des  Re- 
nonciations, Philippe  IV. ,  par  unTeftament  ,a  fubftitué  l'Archiduc  Fils  de 
l'Empereur  à  fon  propre  Fils  Charles  II.  au  cas  qu'il  vienne  à  mourir  fans 
Enfans.  La  France,  de  fon  côté,foutient  que  les  Actes  de  Renonciation 
font  nuls  ,  lorfque  les  maies  &  les  femelles  en  droite  ligne  viennent  à 
manquer. 

La  difeuffion  feroit  d'une  longue  étendue  ,  s'il  faîloit  raporter  tout  ce 
qui  peut  autorifer  ou  exclure  l'une  ou  l'autre  Prétention.  Mais,  cette  dif- 
euffion poura  être  plus  à  propos  dans  une  autre  occafion,  puis  que,  poul- 
ie prefent  il  fufit  de  remarquer  que  le  Roi  de  la  Grande-Bretagne,  &  les 
Etats  Généraux, n'ont  point  jugé  que  le  Droit  de  l'une  ou  de  l'autre  Mai- 
Ion  fut  inconteftable  :  autrement,  bien  loin  d'avoir  pu  avec  juftice  pro- 
pofer  d'accommoder  les  deux  Maifons ,  ils  auroient  au  contraire  été  obli- 
gez en  toute  équité  de  maintenir  en  ion  entier  le  Droit  inconteftable  dé 
l'une  ou  de  l'autre;  de  même  qu'ils  ont  conftament  maintenu  &  apuyé  dé 
toutes  leurs  forces  les  Droits  de  Charles  II.  contre  les  Prétentions  de  la 
France ,  tant  que  ce  Prince  a  vécu. 

D'autre  part,  Louis  XIV.  ne  croit  pas  lui-même  que  fes  Prétentions 
ni  celles  du  Dauphin  fon  Fils  fur  l'entière  Succeffion  d'Efpagne  foient  ab- 
folument  inconteftables  ;  vu  que  Sa  Majeité  Très-Chrétienne ,  qui  a  fi 
bien  feu  fe  faire  juftice  par  elle-même,  non-obftant  les  Oppoiitions  des 
autres  PuiiTances  de  l'Europe  ,  fur  diverfes  Prétentions  de  moindre  con- 
féquence ,  touchant  des  Pais  dépendants  l'Efpagne ,  propofe  aujourd'hui 
&  fait  unTraitépour  accommoder  les  difputes  &  les  différens  auxquels  el- 
le eft  intéreflee  touchant  la  Succeffion  entière  de  cette  Monarchie. 

D'ailleurs,  il  fera  remarqué  dans  les  Articles  fuivans,  que  la  France  a  ac- 
cordé, eft  convenue,  &  s'eft  tenue  fatisfaite ,  d'avoir  pour  fon  Partage 
feulement  divers  Etats  qui  ne  font  point  originairement  parties  de  ce 
qu'on  apelle  proprement  le  Royaume  d'Efpagne  ,  &  qui  ne  lui  ont  été 
annexez  que  par  Succeffion  de  tems.  D'où  il  eft  à  conclure,  que  la  Fran- 
ce, de  fon  plein  gré  &  franc  vouloir,  a  reconnu  le  Droit  de  Prétention  de  la 
Maifon  d'Autriche  fupérieur  au  fien  ;  puis  qu'elle  a  accordé  &  eft  conve- 
nue conjointement  avec  les  deux  autres  Puiflances  ,  que  la  Couronne,  les 
Pais  proprement  nommez  l'Efpagne,  &  les  deux  Empires  du  nouveau 
Monde,  conquis  fous  Charles-Quint  tris-ayeul  de  Charles  IL,  refteroient 
ajugez  à  un  Prince  de  la  Maifon  Impériale. 

La  féconde  Caufe  de  Guerre,  que  l'a  Succeffion  de  Charles  II. doit  pro- 
duire, c'eft  l'ombrage  de  tant  d'Etats  réunis  fous  un  même  Prince.  Cet- 
te Caufe  regarde  généralement  tous  les  Souverains  de  l'Europe.  La  Fran- 
ce ,  à  qui  il  eft  naturel  de  prétendre   une  Prééminence  d'honneur  &  de 

Aaaa  2  puiflan- 


7/6    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

puifiancc  fur  les  autres  Royaumes,  a  de  juftes  motifs  de  craindre,  que 
tous  les  Etats  d'Efpagne  poiîédez  par  un  Fils  de  l'Empereur  ne  fifTent  naî- 
tre à  Sa  Majeiié  Impériale  ledefir  &  les  moyens  de  redemander  &  de  re- 
prendre les  raïs  que  Louis  XIV.  a  conquis  fur  l'Empire  &  fur  l'Efpagne. 

L'Empereur,  de  fon  côté,  n'a  pas  moins  de  fujèt  d'apréhender  que  les 
forces  de  la  France  augmentées  par  celles  de  l'Efpagne  ,  foumife  à  un 
Prince  François,  ne  réduife  la  Maifon  d'Autriche  à  de  grandes  extrémî- 
tez.  La  France  s'elt  trouvée  ravagée  par  les  Guerres  civiles  les  plus  hor- 
ribles, ôl  expofée  en  proye  aux  Etrangers,  fous  les  Règnes  de  François  IL 
Charles  IX.  Henri  III.  &  le  commencement  de  celui  d'Henri  IV.  Ces  deux 
derniers  Roys  étoient  excommuniez  par  les  Papes,  &  déclarez  tels  par 
laSorbonne,  &  par  la  Ville  de  Paris.  La  Branche  des  Valois,  finie  en 
la  Perfonne  d'Henri  III. ,  étoit  une  occafion  aux  Princes  du  Royaume 
de  mettre  tout  en  ufage  pour  fe  faire  couronner  à  l'excîufion  d'Henri 
IV.  Héritier  préfomptir  de  la  Branche  de  Bourbon.  Pendant  ces  tems 
fi  fu  nèfles  à  la  Maifon  de  France,  &  fi  favorables  à  celle  d'Autriche, 
quel  a  été  le  fuccés  de  toutes  les  Entreprifes  de  ce  grand. Politique  & 
puiffant  Monarque  Philippe  II. ,  Roy  d'Efpagne,  Neveu  de  Ferdinand  Em- 
pereur? Malgré  tous  fes  efforts,  Henri  IV. ,  couronné  Roy  de  France, 
a  commencé  à  rétablir  fa  Maifon  ,  au  préjudice  de  celle  d'Autriche. 
Louis  XIII.  a  fait  de  nouveaux  progrès,  &  Louis  XIV.  s'elt  acquis  le 
Nom  de  Grand  par  des  Conquêtes  fur  l'Empire  &  fur  l'Efpagne.  S'il 
arrive  donc  que  les  Etats  d'Efpagne  viennent  à  être  occupez  par  un 
Prince  François ,  quel  ombrage  l'Empereur  n'en  doit-il  point  prendre 
pour  foi  &  pour  fes  Defcendans? 

L'Allarme  ne  doit-elle  pas  fe  répandre  généralement  parmi  toutes  les 
autres  PuhTances  de  l'Europe?  L'Allemagne,  l'Italie,  l'Angleterre,  les 
Provinces-Unies  des  Pais-Bas,  les  Etats  du  Nord,  peuvent-ils  jimais  ou- 
blier les  Projets  de  Charles-Quint  &  de  la  Maifon  d'Autriche?  Y  a  t-ii 
Souverain  en  Europe,  qui  puiffe  ignorer  les  Forces  de  la  France  &de 
l'Efpagne  réunies  en  une  même  Maifon?  Et  les  Prétentions  de  la  Fran- 
ce ne  font-elles  pas  ordinairement  réglées  félon  fes  Forces? 

Outre  le  fujèt  général  que  toutes  les  PuiiTances  de  l'Europe  ont  de  prendre 
ombrage  d'une  Réunion  de  la  Succeflîon  entière  d'Efpagne  à  la  Maifon 
d'Autriche  ou  à  celle  de  France,  tous  les  Princes  Proteitins  en  ont  un 
très-particulier  &  très-preilant.  Aucun  d'entre  eux  ne  peut  manquer, 
d'être  fufifament  inftruit,  que  leurs  Etats,  ayant  eu  le  malheur  d'avoir 
été  fournis  au  Pape,  il  y  a  Sentence  d'Interdit  contre  eux,  &  liberté  & 
injonction  à  tout  Prince  qui  voudra  s'en  emparer  ,  pour  les  réduire  à 
yÔbeilTance  de  Rome. 

La  Perfécmion  exercée  dans  les  Royaumes  de  Bohême  &  de  Hongrie 
dépendans  de  la  Maifon  d'Autriche;  la  Perfécution  pomTée  à  un  dernier 
excès  de  rigueur  contre  les  Réformez  de  France,  &  même  contre  des 
Proteflans  en  Allemagne,  par  les  ordres  de  Louis  XIV;  &  enfin  l'Inqui- 
fition  établie  en  Efpagnej  font  des  Leçons  afîez  fortes  pour  éclairer  tous 

les 


l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.        sri 

les  Etats  Proteftans.     Ils  ont  affez  d'exemples  pour  ne  devoir  point  pré-    Affaires 
tendre  caiife    d'ignorance   qu'il   n'y    a  ni  équité   naturelle  ,    ni  foy  pu-    G™-  DE 
blique,  ni  loy  Chrétienne  pour  eux;  &  qu'ils   ne  peuvent  s'aflurer  d'au- 
cune Liberté  de  Confeience,  ni  d'aucune  tranquilité,  qu'autant  qu'ils  font 
capables  de  fe  foutenir  par  leurs  propres  forces,  ou  que  l'intérêt  particu- 
lier des  Princes  Catholiques  Rom.  permet  qu'ils  fubtiftent. 

La  France  une  fois  jointe  avec  l'Efpagne,  que  ne  doivent  pas  apréhen- 
der  les  Provinces-Unies ,  pour  s'être  affranchies  du  Joug  du  Pape  pour  la 
Religion  &  de  celui  d'Efpagne  pour  le  Gouvernement  ?  Combien  de  pré- 
textes, &  de  Religion,  &  de  Gouvernement ,  contre  l'Angleterre,  &  contre 
tous  les  Etats  Proteftans ,  fi  la  France  &  l'Efpagne  peuvent  fe  promettre 
de  les  fubjuguer,  &  de  leur  faire  rendre  Obéilfance  au  Pape? 

En  16 if.  la  Propofhion  du  double  Mariage  d'Elizabet  de  France  avec 
Philippe  IV.  Roy  d'Efpagne  ,  &  de  l'Infante  Anne  d'Autriche  avec  Louis 
XIII.)  fut  un  grand  fujèt  d'ombrage  pour  la  plupart  des  Etats  de  l'Euro- 
pe. Les  Proteftans  fur-tout  n'en  attendoientque  des  fuites  très  facheufes. 
C'eft  pourquoi  Edmon,  AmbalTadeur  de  Jacques  I.  Roy  de  la  Grande- 
Bretagne  à  la  Cour  de  France,  foi.licitoit  fon  Maître  de  s'oppofer  à  ce 
double  Mariage.  On  prétendoit  alors,  que  l'ombrage  étoit'mal  fondé  ,  en 
ce  que  cette  Alliance  ne  feroit  jamais  capable  d'éteindre  la  jalouiie  des 
deux  Maifons  entre  elles,  &  qu'ainfi  il  n'étoit  nullement  à  craindre  de  les 
voir  dans  une  intelligence  affez  étroite  pour  projeter  &  pour  exécuter  des 
Entreprifes  contre  le  Corps  des  Proteftans.  Cependant,  on  voit  préfente- 
ment,  que  ce  premier  Mariage  a  donné  lieu  à  un  fécond,  qui  a  été  celui 
de  Marie -Thérefe  Infante  d'Efpagne  Fille  de  Philippe  IV.  avec  Louis 
XIV.  Roy  de  France;  &  Monfeigneur  le  Dauphin, *ifTu  de  ce  Mariage, 
donne  aujourd'hui  à  la  France  lieu  de  former  des  prétentions  fur  la  Suc- 
celiïon  entière  la  Monarchie  d'Efpagne.  Ainfi,  l'ombrage  du  double  Ma- 
riage ,qui  en  161  f.  ne  fembioit  être  qu'une  idée  de  malheurs  à  venir,  fort 
éloignez,  &  même  peu  aparens,  fe  trouve  en  1700.  de  véritables  maux 
tres-réels,  &  non-feulement  prochains,  mais  commencez  dès  1667.  par  la 
Guerre  déclarée  à  l'Efpagne  fous  le  prétexte  des  Droits  de  Mane-Théréfe 
fur  une  partie  de  la  Flandre.  Si  la  Guerre  de  1667.  ne  regardoit  point  pré- 
cifément  les  Etats  Proteilms,  la  Révocation  de  fEdit  de  Nantes,  &  la  Perfé- 
cution  ouverte  par  tout  le  Royaume  eni68y.,a  été  un  commencement  de 
la  ruine  du  Corps  Proteftant.  On  a  répandu  dans  le  Public,  que  Marie-Thé- 
réfe  n'avoit  rien  eu  plus  à  cœur  que  cette  Révocation,  Cv  qu'elle  l'avoit  foî- 
licitée  en  mourant.  Peu  de  terns"  avant  la  conclufion  de  la  Paix  de  Ry£ 
wick.on  vu  dans  les  Nouvelles  publiques  un  Décret  de  l'Inquifkion  d'Efpa- 
gne ,  portant  que  toutes  les  pertes  arrivées  dans  cette  dernière  Guerre 
étaient  des  Punitions  de  Dieu  contre  le  Royaume,  pour  s'être  allié  avec 
des  Puiffanc-:  s  Hérétiques  j  &  qu'au  contraire  Jes  victoires  de  la  France  é- 
toieht  des  Bénédictions,  que  le  Ciel  répandoit  fur  un  Roi  qui  perfécutoit 
les  Hérétiques  d\ns  fèï  Etats,  &  qui  faifoit  la  Guerre  aux  Pmlunces  fé- 
parées  de  la  Communion  du  Pape.     Ces  Faits,  &  mille  autres 3  arrivez 

Aaaa   3  -de- 


PE. 


758    MEMOIRES,  NEGOTÏATIONS,  TRAITEZ,  ET 

affaires  depuis  longues  années ,  font  des  voix  tres-intelligibles  qui  avertiffent  les  E- 
wn.  »e  tats  Proteftans  de  ce  qu'ils  ont  à  attendre  des  Princes  Catholiques  Rom. 
i/Euro-  ^en  particulier  de  la  France,  û  elle  peut  fe  trouver  en  parfaite  intelli- 
gence avec  l'Efpagne. 

Mais ,  les  Etats  Proteftans  fubjugez  par  les  Forces  de  la  France  &  de 
l'Efpagne  ,  &  fournis  à  l'Obeiffance  du  Pape ,  Rome  &  l'Italie  n'ont-elles 
rien  a  apréhender  pour  leurs  Souverainetez  ?  Quelle  étoit  autrefois  la  Dé- 
pendance de  l'Italie  entière  fous  les  premiers  Empereurs  Chrétiens?  & 
qu'elle  étoit  la  Dépendance  des  Papes  fous  les  Empereurs  Roys  de 
France  ? 

Ces  juftes  Sujets  de  différens,  de  difputes,  &  d'ombrage,  ont  fait  trou- 
ver bon  aux  deux  Seigneurs  Roys ,  &  aux  Seigneurs  Etats  Généraux ,  de 
prendre  par  avance  des  mefures  néceJJ aires  pour  prévenir  les  malheurs  que  le  tri' 
fie  événement  de  la  mort  du  Roy  Catholique  fans  Enfans  pour  oit  produire. 

Mais ,  le  Roy  Catholique  ne  pouvoit-il  pas  lailTer  un  Teftament  ?  N'y 
en  avoit-il  pas  déjà  eu  un  avant  la  mort  du  Prince  Electoral  de  Bavière  ? 
N'étoit-il  point  à  préfumer  qu'il  pouroit  bien  encore  en  être  drelfé  un 
nouveau,  foit  du  propre  mouvement  de  Sa  Majefté  Catholique,  foit  aux 
inftances  des  Princes  intérefiez ,  foit  à  la  follicitation  des  Grands  &  des 
Peuples  du  Royaume?  Ainfi,n'eût-ilpasété  à  propos  de  prendre  des  me- 
fures touchant  un  Teftament  tel  qu'il  eût  pu  être  drelfé  ?  Cette  idée  de 
Teftament  ne  feroit-elle  point  venue  dans  l'efprit  d'aucune  des  trois  Puif- 
fances?  ou  bien  auroit-elle  été  négligée,  comme  de  nulle  confequence? 
Le  Roy  Catholique  étoit-il  jugé  incapable  à  l'avenir  de  faire  Teftament? 
Nul  autre  Prince  ne  pouvoit-il  être  déclaré  légitime  Héritier  au  préjudice 
des  deux  Maifons  prétendantes?  L'une  ne  pouvoit-elle  être  légitimement: 
préférée  à  l'autre? 

Quoy  qu'il  en  foit  ,  il  y  a  bien  de  l'apparence  que ,  nul  Teftament 
ne  pouvant  empêcher  les  difputes  ,  les  différens ,  &  \ts  ombrages  que  la 
Succeflion  devoit  faire  naître,  les  trois  Puiflances ,  fans  aucun  égard  de 
Teftament  ,  ou  précédant,  ou  à  venir,  ont  travaillé  à  un  jufte  Accommo- 
dement des  différens  &  des  difputes,  &  à  prévenir  l'ombrage  que  tant 
d'Etats  réunis  fous  un  même  Prince  pouvoient  produire.  C'eit  dans  cet- 
te vue  qu'on  a  dreffé  le  Partage  contenu  dans  les  Articles  IV.  &  V.  en  fa- 
veur de  la  France,  &  VI.  en  faveur  de  la  Maifon  d'Autriche. 


ARTICLE        IV. 

JÎinfi  a  été  accordé  £5?  convenu,  que  fi  ledit  cas  arrivoit ,  le  Roi  Très- 
Chrétien  ,  tant  en  fon  propre  nom  ,  quen  celui  de  Monfeigneur  le  Dauphin, 
fes  Enfans  Mâles ,  ou  Héritiers  &  Succefjeurs  ,  nez  £5?  à  naître  \  comme 
auffi  Monfeigneur  le  Dauphin  pour  Soi  -  même ,  fes  Enfans,-  Mâles ,  ou  ,  &c. 
fe  tiendront  fat  is fait  s  ,  comme  ils  fe  tiennent  fat  is fait  s  par  la  pré  fente  ,  que 
Monfeigneur  U  Dauphin  ait  pour  fon  Partage ,  en  toute  propriété ,  pojfejfion 

pie*, 


RESOLUTIONS  D'ET  A  T,  M.  DCC.  I.         S59 

pléniere,  &  extinction  de  toutes  fes  Prétenfions  fur  la  Succcffon  d' Efpagne-,  Affairfs 
four  en  jouir ,  Lui ,  fes  Héritiers ,  SucceJJeurs ,  Dcfcendans  M» fes ,  ou ,  (je. 
à  perpétuité  ,  fans  pouvoir  être  jamais  troublé  fous  quelque  prétexte  que  ce 
foit  de  droits  ou  de  prétenfions ,  directement  ou  indircblement  ,  même  par  cef- 
Jions ,  appela  révolte  ,  vu  autre  voye  de  la  part  de  l'Empereur  ,  du  Roy  des 
Romains ,  du  Serenifime  Monfeigneur  Y  Archiduc  Charles  fon  fécond  Fils  ,  des 
Archiducheffes ,  de  fes  autres  Enfans  Majles ,  ou ,  &c.  les  Royaumes  de  Na- 
ples ,  £5?  de  Sicile ,  en  la  manière  que  les  Efpagnols  les  poffédent  préfentement , 
les  Places  dépendantes  de  la  Monarchie  d  Efpagne  ,  Jituées  fur  la  Côte  de 
Tofcane ,  ou  Ifles  adjacentes,  comprifes  fous  le  nom.  de  Sanclo  Stephano,  Por- 
to- Hercole ,  Orbiteiw,  Palamone,  Portolongo  ,  Piombin,  en  la  manière  aujji 
que  les  Efpagnols  les  tiennent  préfentement ,  la  Fille  &  le  Marquifat  de  Fi- 
nal en  la  manière  pareillement  que  les  tiennent  les  Efpagnols,  la  Province  de 
Guipufcoa ,  nommément  les  Filles  de  Font  arable  ,  Éj?*  de  Saint  *  Sebafiien ,  Ji- 
tuées dans  cette  Province ,  &  fpécialement  le  Port  du  Paffage  qui  y  efl  com- 
pris ;  avec  cette  refriclion  feulement ,  que  s'il  y  a  quelques  lieux  dépendans  de  la- 
dite Province  qui  fe  trouvent  f  tuez  au-delà  de>  Pyrénées ,-  ou  d'autres  Mon- 
tagnes de  Navarre,  d' /Jlava ,  ou  de Bifcaye ,  du  côté  de  ÏE (pagne,  ils  refe- 
ront à  l' Efpagne  ,•  (y  s'il  y  a  quelques  lieux  pareillement  dépendans  des  Pro- 
vinces fourni  (es  à  l'  Efpagne  qui  J  oient  en  deçà  des  Pyrénées  ou  d'autres  Mon- 
tagnes qui  fe  trouveront  entre  ladite  Province  de  Guipufcoa ,  Navarre  ,  Ala- 
*va ,  £5?  de  Bifcaye ,  à  qui  quelles  appartiennent  ,  feront  partagées  entre  la 
France  &  ï  Efpagne ,  en  forte  qu'il  refera  autant  de  (dit  es  Montagnes  &?  tra- 
jets, à  la  France  de  fon  côté,  qu'il  en  refera  à  î Efpagne  du  fien ,  le  tout 
avec  les  Fortifications  ,  Munitions  de  Guerre  ,  Poudres  ,  Boulets  ,  Canons , 
Galères,  Chiourmes,  qui  fe  trouveront  appartenir  au  Roy  d' Efpagne  lors  de 
fon  decez  fans  Enfans,  &  être  attachez  aux  Royaumes,  Places,  /fes,  £5? 
Provinces  ,  qui  doivent  compofer  le  Partage  de  Monfcigneur  le  Dauphin  ; 
bien  entendu  que  les  Galères ,  Chiourmes ,  ïfj  autres  Effecls  appartenant  au 
Roy  d' Efpagne  par  le  Royaume  d' Efpagne  &  autres  Etats  qui  to?nbent  dans 
le  Partage  du  Sereniffime  Archiduc  luy  referont  ;  celles  qui  appartiennent  aux 
Royaumes  de  Naples  c?  de  Sicile  devant  revenir  à  Monfcigneur  le  Dauphin ,  ain~ 
fi  qu'il  a  été  dit  ci-deffus. 

De  plus ,  les  Etats  de  Monfeigneur  le  Duc  de  Lorraine ,  à  favoir  les  Duchez 
de  Lorraine  &  de  Bar ,  ainfi  que  le  Duc  Charles  IV.  du  nom  les  poffedoit ,  £s? 
tels  qu'ils  ont  été  rendus  par  le  Traité  de  Ryfvick ,  feront  cédez  &  tr  an  [portez  à 
Monfeigneur  le  Dauphin,  fes  Enfans,  Héritiers,  £5?  SuCcefèurs  AF'fes ,  ou, 
&C.  en  toute  propriété  i$  poffeff  on  pléniere  à  la  place  du  Duché  de  Milan,  qui 
fera  cédé  &  tranfporté  en  échange  au  dit  Duc  de  Lorraine ,  fis  Enfans  Majles , 
ou ,  &c.  en  toute  propriété  &  poffejfon  pléniere  ,  lequel  ne  refit  fera  point  un 
Parti  f  avantageux;  bien  entendu  que  le  Comté  de  Bitcb  appartienne  à  Mon- 
feigneur le  Prince  de  Vaudemont ,  lequel  rentrera  dans  la  poffejfon  des  Terres 
dont  il  a  joui  ci-devant ,  qui  lui  ont  été  ou  doivent  être  rendues  en  exécution  du  ' 
Traité  de  Ryfwick :  moyennant  lefquds  Royaumes,  Jjles,  Provinces,  6?  Pla- 
ces, le  f  dit  s  Roy  Très-Chrétien,  tant  en  J  on  propre  mm,  qu'en  celui'  de  Monfei- 
gneur 


gev.  de 
l'Euro- 
pe. 


56o    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Araires  gneur  le  Dauphin,  [es  Enfans  Majles ,  ou,  13  c.  lequel  a  aufiî  donné  [on  Plein* 
pouvoir  au  Sieur  Comte  de  Tallard,  &  au  Sieur  Comte  de  Briord,  promettent 
&  s  engagent  de  renoncer  lors  de  l'ouverture  de  ladite  SucceJJion  d 'Ej 'pagne ,  com- 
me en  ce  cas-là  ils  renoncent  dès  à  prefènt  par  celle-ci  à  tous  leurs  Droits  £s? 
prétenfions  fur  ladite  Couronne  d'Efpagne  &  fur  tous  les  autres  Royaumes ,  lfles^ 
Etats ,  Pais ,  Ci?  Places ,  qui  en  dépendent  préfentement ,  à  l'exception  de  ce  qui 
eft  énoncé  ci-dcfjus  pour  [on  Partage  ;  &  de  tout  cela  ils  feront  expédier  des 
Aïïes  folemnels  dans  la  plia  forte  (3  la  meilleure  forme  quil  f'e  pourra,  qui 
feront  délivrez  au  tems  de  l échange  des  Ratifications  de  ce  préfent  Traité  au 
Roy  de  la  Grande-  Bretagne ,  &  aux  Seigneurs  les  Etats -Généraux. 


ARTICLE        V. 

•  * 

Toutes  les  Filles ,  Places ,  £5?  Ports  ,  fituez  dans  les  Royaumes  fc?  Provin- 
ces qui  doivent  compofer  le  Partage  dudit  Seigneur  Dauphin  ,/er  ont  confervez  fans 
être  démolis. 

Par  la  teneur  de  ces  deux  Articles,  il  eft  notoire:  I.  Que  Louis  XIV. 
Roi  de  France,  &  Monfeigneur  le  Dauphin,  chacun  en  leur  nom  &  en 
celui  de  leurs  Enfans  Mâles  ou  Héritiers  &  SuccefTeurs  nez  &  à  naitre, 
ayant  donné  leurs  Plein-Pouvoirs  au  Sr.  Comte  de  Tallard  &  au  Sr.  Com- 
te de  Briord,  fe  tiennent  fatisfaits  que  Monfeigneur  le  Dauphin  ait  pour 
fon  Partage  en  toute  propriété  &  pofTeffion  pléniére  les  Païs  fpécifiez  dans 
ces  Articles.  % 

2.  Qu'ils  confentent  &  accordent  que  toutes  leurs  Prétentions  fur  la 
Succefîion  d'Efpagne  feront  éteintes  moyennant  la  pofieiîion  des  Païs  qui 
leurs  font  attribuez. 

3.  Qu'ils  promettent  &  s'engagent  de  renoncer  lors  de  l'ouverture  de  la 
Succefîion  de  Charles  II.  à  tous  leurs  Droits  &  Prétenfions  fur  la  Couron- 
ne d'Efpagne  &  Etats  qui  en  dépendent,  à  l'exception  de  ce  qui  eft  é- 
noncé  pour  le  Partage  du  Sgr.  Dauphin. 

4.  Que  dès  le  tems  du  Traité  ils  ont  effectivement  renoncé  à  tous  leurs 
Droits  &  Prétenfions ,  &  ont  accepté  les  Païs  fpécifiez  pour  le  Partage 
du  Sgr.  Dauphin. 

f.  Que  Sa  Majefté  T.  C.  &  Mgr.  le  Dauphin  ont  dû  faire  expédier 
des  Actes  folemnels  fur  le  fujet  du  Traité  dans  la  plus  forte  &  la  meilleu- 
re forme  pofïible. 

6.  Qu'ils  font  convenus  eux-mêmes  &  qu'ils  ont  arrêté  ce  qu'ils  ont 
eftimé  leur  pouvoir  convenir  de  la  Succefîion  d'Efpagne,  &  qu'ils  ont  re- 
noncé au  relie  fans  aucune  reftriction. 

8.  Que  par  les  Actes  folemnels,  qui  ont  dû  être  délivrez  dans  le  tems 
de  l'échange  des  Ratifications  au  Roi  de  la  Grande-Bretagne  &  aux  Sei- 
gneurs Etats -Généraux,  ces  deux  PuifTances  font  reconnues  dépofltai- 
res  &  garantes  du  Traité. 

Pour 


PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.   L  S6i 

Pour  ce  qui  regarde  le  Partage  en  foi-même,  il  eft  à  obferver,  que  la  Affaire:, 
Monarchie  û'Efpagne,  la  plus  étendue  &  la  plus  puiffante  de  celles  qui  GE^-  de 
font  en  Europe,  ayant  caufé  de  terribles  Guerres  dans  ces  derniers  fié-  L'EvR°- 
clés,  tant  par  l'ombrage  que  les  autres  Etats  en  ont  pris,  que  par  l'ambi- 
tion de  Tes  Rois,  il  étoit  néceffaire,  pour  la-tranquilité  publique,  qu'elle 
pût  être  refferrée  dans  des  bornes  plus  étroites.  L'Hiltoire  nous  apprend 
qu'Henri  IV.  avoit  formé  le  deifein  de  réduire  la  Maifon  d'Autriche  à  fe 
contenter  de  l'Efpagne  &  des  Pais  Héréditaires  :  on  peut  voir  le  Projet 
qui  en  avoit  été  drelfé.  On  préfume  qu'il  auroit  été  exécuté,  &  que  les 
Partifans  de  la  Maifon  d'Autriche  n'avoient  point  eu  de  meilleure  reflbur- 
ce ,  que  de  faire  affafîiner  ce  grand  Roi  dans  le  tems  qu'il  étoit  prêt  de 
partir   pour  en  commencer  l'exécution. 

La  Mort  de  Charles  II.  Roy  d'Efpagne  fans  Enfans,  &  les  Prétenfions 
réciproques  de  la  Maifon  d'Autriche  &  de  la  Maifon  de  France ,  font  des 
conjonctures  très -propres  pour  diminuer  la  trop  grande  PuiiTance  de  la 
Monarchie  Efpagnole,  &  pour  affermir  la  tranquilité  de  l'Europe. 

Il  eût  été  à  fouhaiter  que  Louis  XIV.  Roy  de  France  &  Mgr.  le  Dau- 
phin fe  fuiTent  trouvez  difpofez  à  former  ce  Projet  avec  autant  de  definté- 
reffement ,  qu'il  avoit  été  propofé  fous  Henri  IV.  Ayeul  de  ces  Princes  ; 
mais ,  les  tems  &  les  Intérêts  font  fort  differens.     Henri  IV.  avoit  peu  à 
prétendre  fur  l'Efpagne  :   elle  étoit  gouvernée  par  Philippe  III.  Roi  puif- 
lant,  qui  avoit  des  Enfans  ;  &  le  Projet  ne  pouvoit  être  exécuté  que  par 
le  moyen  d'une  Ligue  entre  les  autres  Princes  de  l'Europe  intereifez  à 
l'abaiiTement  de  la  Maifon  d'Autriche.     Au  lieu  que  Louis  XIV.  &  le 
Dauphin  ont  des  Prétenfions  fur  la  Succeiïion  entière  de  l'Efpagne  au  mo- 
ment de  la  Mort  prochaine  de  Charles  II.  fans  Enfans  ;  &  ces  Princes 
font  en  état  de  faire  valoir  leurs  Prétenfions  par  leurs  propres  forces,  fans 
le  fecours  d'autres  Puiflances,  &  contre  tous  oppofans.     C'efl  donc  un 
Bien  pour  l'Europe,  de  ce  que  la  France  fonge  à  ménager  fes  Prétenfions 
par  les  voyes  tranquilles  d'un  Partage  arrêté  par  une  manière  de  Média- 
tion de  la  part  du  Roy  de  la  Grande-Bretagne  &  des  Sgrs.  Etats- Géné- 
raux des  Provinces  -  Unies  ,   deux   Puiffances   abfolument    defintereffées 
pour  elles-mêmes,  &  qui,  principalement  vers  la  fin  du  lyéme.  fiécle, 
ont  emploie   tous  leurs  efforts  pour  maintenir  l'équilibre  entre  les  deux 
Maifons,  &  les  Droits  particuliers  de  chaque  Souverain  de  l'Europe. 

11  efl  fort  vrai-femblable,  que  fi  la  France  avoit  été  maitreffe,  elle  au- 
roit choifi  les  Etats  d'Efpagne  qui  étoient  le  plus  à  fa  bien-féance  ;  mais, 
ayant  été  pofé, pour  fondement  du  Partage,  d'accommoder  les  difputes  & 
les  differens,  &  de  prévenir  l'ombrage  à  naître  des  Etats  d'Efpagne  réunis 
fous  un  Prince  trop  puiffant,  la  France  ne  pouvoit  pas  faire  des  deman- 
des qui  ne  pouvoient  aucunement  lui  être  accordées. 

La  Monarchie  Efpagnole  confifle  à  préfent  dans  cette  étendue  de  terre 
appellée  proprement  ÏEfpagr.e,  &  en  plufieurs  autres  Pais  fituez  en  diffe- 
rens Endroits  de  l'Europe  &  des  Amériques. 

Tome  XL  Bbbb  Les 


PE. 


$61  MEMOIRES,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

AmiREs  Les  Montagnes  des  Pyrénées  &  celles  de  Navarre,  d'Alava,  &  de  Bif- 
gen.de  Caye,  font  des  bornes  naturelles  pour  réparer  les  Etats  de  la  France  d'a- 
vec ceux  de  l'Efpagne.  Les  Acquifitions  faites  en  deçà  &  en  delà  de  ces 
Montagnes  ont  été  des  Motifs  continuels  de  Guerre  entre  les  deux  Na- 
tions. Pour  y  remédier,  le  Partage  établit,  que  le  jufte  milieu  de  ces 
Montagnes  fera  à  l'avenir  les  bornes  précifes  entre  chaque  Royaume. 
Tout  Pais  en  deçà  du  milieu  de  ces  Montagnes  du  côté  de  la  France  fera 
proprement  Pais  de  France;  &  tout  Pa'is  au-delà  du  milieu  des  Monta- 
gnes fera  proprement  Pais  d'Efpagne.  La  féparation  des  Montagnes 
une  fois  faite ,  il  n'y  aura  plus  de  fujet  de  differens  ni  de  difpute  entre 
les  deux  Nations  touchant  la  dépendance  des  Païs.  Et  comme  toute 
l'étendue  de  ces  Montagnes  &  les  Terres  de  deçà  &  de  delà  appartien- 
nent à  la  France  &  à  l'Efpagne,  un  tel  Partage  doit  être  aprouvé  de 
toutes  les  autres  Puiflances  de  l'Europe  ;  puifqu'il  doit  arrêter  tous  les 
prétextes  de  Guerres  que  l'incertitude  des  limites,  &  le  mélange  des  Jurif- 
dictions ,  ont  coutume  de  produire. 

De  plus ,  le  Traité  adjuge  à  la  France  les  Royaumes  de  Naples  &  de 
Sicile;  les  Places,  dépendantes  de  la  Monarchie  d'Efpagne,  fituées  fur  la 
Côte  de  Tofcane,  ou  Mes  adjacentes;  la  Ville  &  le  Marquifat  de  Final. 
Quoique  tous  ces  Païs  femblent  extrêmement  augmenter  la  Puiffance  des 
Rois  de  France,  dont  les  Forces  font  déjà  fi  fort  redoutables  à  fes  Voi- 
fms,  on  peut  néantmoins  faire  les  Remarques  fuivantes. 

En  premier  lieu,  en  cas  de  Partage  de  la  Succeffion  d'Efpagne,  la 
Part  adjugée  à  Mgr.  le  Dauphin  eft  bien  moins  confiderable  que  les  au- 
tres Etats  réfervez  à  un  Prince  qui  ne  foit  point  de  la  Maifon  de  France. 
Ainfi,  Louis  XIV.  &  le  Dauphin  ne  pouvoient  pas  moins  demander,  & 
il  ne  pouvoit  pas  leur  être  accordé  moins. 

En  fécond  lieu  ,  la  France  ayant  eu  depuis  longues  années  diverfes  Pré- 
tendons fur  la  plupart  de  ces  Etats  ,  &  ces  Prétenfions  ayant  été  des 
fources  de  Guerres,  les  Prétenfions  fe  trouvent  réglées  &  les  fources  de 
Guerres  taries. 

En  troifième  lieu,  les  Païs  devant  être  pofledez  par  la  France  en  h 
manière  qu'ils  font  préfentement  poffedez  par  l'Efpagne,  les  Droits  d'In- 
veftiture  &  toute  autre  Dépendance  relient  dans  leur  état  naturel;  &  tou- 
tes les  Puiflances  intéreffées  peuvent  entretenir  une  Ligue  pour  prévenir 
&  empêcher  qu'il  ne  s'y  introduife  aucune  nouveauté  capable  de  porter 
préjudice  à  la  tranquillité  publique. 

En  quatrième  lieu,  ces  Etats  étant  féparez  &  éloignez  des  Terres  d'Ef- 
pagne, &  proches  de  Voifîns  capables  de  s'oppofer  à  des  Entreprifes  illé- 
gitimes ,  ils  ont  plus  augmenté  l'étendue  de  la  Monarchie  Elpagnole , 
qu'ils  ne  l'ont  rendue  formidable.  Il  y  a  tout  fujet  de  croire,  que  leur  ac- 
quifition  augmentera  plus  le  luflre  que  les  forces  de  la  Monarchie  Fran- 
•  çoife  ;  d'autant  que  ces  Etats  font  aufli  féparez  de  la  France. 

En  cinquième  lieu ,  le  Prince ,  qui  fe  trouvera  Roy  d'Efpagne ,  aura 

un 


P£. 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  ^3 

un  intérêt  fingulier  d'empêcher  que  la  France  n'entreprenne  aucune  chofe  Affaires 
à  la  faveur  de  Tes  nouveaux  Etats  au  préjudice  de  la  liberté  &  de  la  tran-  GEN-  DK 
quilité  de  fes  Voifins. 

En  fixième  lieu,  la  France  occupée  de  l'Adminiflration  de  cesPaïs,  & 
obligée  d'établir  &  d'affermir  fon  Autorité  parmi  des  Peuples  ,  qui  peu- 
vent bien  être  confiderez  comme  peu  avantageufement  prévenus  en  fa- 
veur de  fa  manière  de  gouverner,  fera  fort  éloignée  de  fonger  à  troubler 
la  tranquilité  de  l'Europe,  &  encore  moins  celle  des  Puiïiknces  voifines 
de  fes  nouvelles  Acquitkions. 

En  feptième  lieu ,  tous  les  Etats  démembrez  de  la  Monarchie  d'Efpagne 
doivent  apartenir  en  propre  à  Mgr.  le  Dauphin  ;  &  la  parfaite  Obéifîance, 
que  ce  Prince  a  toujours  eue  pour  le  Roy  fon  Père,  efl  un  préjugé,  que 
s'il  devient  fouverain ,  il  aimera  véritablement  fes  Sujets ,  &  entretiendra 
une  bonne  intelligence  avec  les  autres  PuifTances. 

En  huitième  lieu,  il  eli  important  de  faire  attention  que  les  Etats  étans 
fujets  à  des  viciffitudes  perpétuelles,  le  plus  haut  point  de  leur  élévation 
elt   le  préfage  d'un  abaiifement  prochain.     La  Splendeur  de  la  France 
fous  Charlemagne  Empereur  perdit  beaucoup  de  fon  éclat  fous  fon  Fils 
Louis  le  Débonnaire  auiîi  Empereur  ;  &  la  grande  fécondité  de  ce  Prince  - 
fut  une  fource  de  troubles  domeftiques,  &  de  Guerres  qui  ont  produit  la 
Defunion  du  Diadème  Impérial  d'avec  la  Couronne  de  France.     Tous  les 
Etats  de  la  Maifon  d'Autriche  fe  font  trouvez  réunis  en  la  Perfonne  de 
Charles-Quint  -,  mais ,  ce  lui  a  été  une  néceflité  de  les  partager  entre 
Ferdinand  fon  Frère,  à  qui  il  a  réfigné  l'Empire,  &  Philippe  fécond  fon 
Fils ,  auquel  il  remit  la  Monarchie  Efpagnole.     Cette  Monarchie  n'a  obéi 
qu'à  un  feul  Souverain  depuis  Charles-Quint  ;  parce  que  fes  Defcendans 
n'ont  point  eu  plufieurs  Enfans.     Lors  qu'un  Monarque  Chrétien,  poffé- 
dant  de  grands  Etats  féparez  les  uns  des  autres ,  fe  trouve  avoir  nombre 
d'Enfans  Majeurs,  il  efl  rare, ou  que  le  Père  ne  leur  partage  point  l'Auto- 
rité Souveraine  ,   ou  que  les  Fils  fe  plaifent  de  reiter   toujours  Sujets. 
L'éloignement  des  Royaumes  deNaples,  de  Sicile,  &  autres  Etats  dé- 
membrez de  la  Couronne  d'Efpagne ,  feroit  une  forte  raifon  pour  les  fai- 
re devenir  l'Apanage  de  quelque  fécond  Fils  de  France,  &  pour  former 
une  nouvelle  Monarchie  indépendante.  En  ce  cas,  toute  l'Europe  ne  de- 
vroit-elle  pas  aplaudir  au  Partage  de  la  Succeffion  d'Efpagne,  lequel,  en 
établiifant  un  plus  Julie  équilibre  entre  les  deux  Maifons  d'Autriche  &  de 
France,  arrêteroit  l'émulation  qui  les  porte  réciproquement  à  entrepren- 
dre l'une  fur  l'autre  ,  &  mettroit  les  autres  PuifTances  plus  en  état  de  pou- 
voir, en  cas  de  befoin,  maintenir  le  plus  foible  contre  le  plus  fort  ?   N'y 
a-t-il  pas  même  de  l'aparence  que  ces  Royaumes  feroient  érigez  en  nou- 
velle Monarchie,  avant  que  la  France  pût  s'en  prévaloir  au  préjudice  des 
Voifins  ?  En  1675".  Louis  XIV.  étant  devenu  Maitre  de  la  Ville  de  Mef- 
fine,  Sa  Majefté  fit  publier  en  Italie  un  Manifefte,  daté  de  Verfailles  le 
11.  Octobre.    Après  une  Déduction  des  Raifons  qui  onc  engagé  le  Roy 

Bbbb  z  Très- 


S64-    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  Très-Chretien  à  recevoir  les  Meffinois  au  nombre  de  fes  Sujets  &  d'ac- 
gen.de  cepter,  à  leurs  prières,  le  Serment  de  Fidélité  qu'ils  lui  avoient  prêté,  on 
l'Euro-    yiz  une  Déclaration  des  intentions  de  la  France  en  ces  termes. 


PE. 


Sa  Majefié  pouvoit ,  par  ce  nouveau  titre ,  £f  par  les  Droits  fi  juftes  &  fi  an- 
ciens qu'elle  a  fur  le  Royaume  des  deux  Siciles ,  unir  à  fa  Couronne ,  non -feulement  la 
Ville  de  Mefjine ,  mais  encore  les  autres  Phces  qu'elle  pojjéde  dans  l'Ile,  £f  toutes 
celles  à  qui  l'amour  de  la  Liberté  infpireroit  de  fecoiier  le  joug  des-  Efpagnols.  Mais, 
parceque  fa  vile  a  bien  moins  été  dans  cette  occafion  d'étendre  fes  limites ,  que  de  fé- 
courir  des  peuples  qui  avoient  imploré  fon  affijlance  ;  elle  veut  bien  déclarer  par  le 
préfent  Mémoire,  qu'elle  n'a  reçu  les  Meffinois ,  quand  ils  fe  font  donnez  à  elle, 
que  pour  les  rendre  en  quelque  forte  à  eux  -  mêmes ,  auffi  -  bien  que  les  autres  Villes 
de  Sicile  qui  voudront  fuivre  leur  exemple:  Qjiefon  dejfein  n'a  pas  été  de  les  faire 
vivre  fous  fes  Loix ,.  qui  leur  fembler  oient  toujours  étrangères,  en  les  uniffant  à  fa 
Couronne  ;  mais ,  qu'à  l'exemple  de  fes  Prédeceffeurs ,  qui  ont  donné  deux  fois  des 
Roys  à  Naples  â?  à  Sicile,  dans  deux  Branches  de  la  Maifon  Royale  de  France,  fon 
intention  ejt  encore  de  donner  à  cette  Ife  un  Souverain ,  qui  tire  fon  origine  du  mê- 
me fang  ;  qu'elle  lui  remettra  tous  les  Droits  qui  font  acquis  à  la  France  fur  ce  Ro- 
yaume ,  ô?  tous  ceux  que  le  confentement  des  Peuples  a  déjà  déferez  â?  pourroit  dé- 
férer à  l'avenir  à  Sa  Majefié  :  Qiie  ce  Prince  prendra  les  Mœurs,  les  Coutumes ,  âf 
les  Loix  de  fon  Etat ,  âf  qu'il  rétablira  chez  les  Siciliens  un  Trône  que  leurs  Ancê- 
tres ont  vu  avec  douleur  tranfporté  en  Arragon  âf  en  Cafiille ,  £?c. 

On  doit  inférer  de  cet  Extrait,  que  Sa  Majeilé  Très -Chrétienne  ne  pré- 
tend point  avoir  renoncé  à  fes  anciens  Droits  fur  les  Royaumes  de  Na- 
ples &  de  Sicile  ;  mais  que ,  connoiffant  alTez  les  difficultez  de  les  pou- 
voir réunir  à  fa  Couronne,  elle  ne  formeroit  des  delTeins  pour  les  recou- 
vrer, qu'annd'en  remettre  la  Souveraineté  à  un  Prince  du  Sang  Royal 
de  France. 

En  neufvième  lieu,  le  Pape,  par  fon  Autorité  Spirituelle  &  Tempo- 
relle, peut  facilement  arrêter  tous  mouvemens  injuites  de  la  part  de  la 
France  en  Italie;  &  cette  Augmentation  d'Etats  rendroit  les  autres  Prin- 
ces de  l'Europe  plus  éclairez  pour  veiller  à  leur  confervation ,  &  particu- 
lière, &  générale. 

En  dixième  lieu,  le  Milanois,  qui  a  été  une  autre  fource  de  Guerres 
en  Italie  entre  les  Maifons  d'Autriche  &  de  France,  étant  cédé  &  tranf- 
porté au  Duc  de  Lorraine  &  à  fes  Héritiers  en  toute  propriété  &  poilef- 
fion  pléniere,  il  ne  refteroit  plus  de  prétexte  de  Guerre  de  ce  côté-là,  & 
le  Milanois  deviendroit  un  nouvel  Etat  interelfé  à  fe  joindre  avec  les  au- 
tres Princes  de  l'Italie,  dont  les  Forces  fe  trouveroient  par  ce  moyen 
plus  capables  de  faire  tête  à  quiconque  voudroit  .entreprendre  contre  leurs 
Droits.  D'autre  part,  la  Lorraine  cédée  à  la  France feroit  encore  un  fu- 
jet  de  dïffcrens  &  de  difputes  retranché.  Il  relie  û  peu  de  Païs  au  Duc 
de  Lorraine,  &  la  liberté  des  Paflages  accordée  à  la  France  par  le  Traité 

de 


RESOLUTIONS   D'ETAT,   M.  DCC.  I.  j6f 

de  Ryfwick,  eft  d'une  telle  importance,  qu'il  n'étoit  point  à  douter  que   Affaires 
ce  Prince  ne  dut  pas  refufer  un  échange  autii  coniiderable  que  celui  du   GEN-  DE 

Milanois.  PE 

Ne  doit-il  pas  réfulter  de  toutes  ces  Remarques ,  qu'en  cas  de  néceflîté    1__ 

de  Fartage,  les  Propolitions  de  la  France,  n'étant  point  exceflives  ni  dé- 
raifonnables ,  le  Roy  de  la  Grande-Bretagne  &  les  Seigneurs  Etats -Gé- 
néraux n'avoient  pu  fe  difpenfer  d'y  foufcrire  &  d'en  arrêter  l'exécution 
par  un  Traité  qui  par  avance  accommodoit  les  differens  &  les  difputes,  & 
prévenoit  les  ombrages  à  naître  au  tems  de  l'ouverture  de  la  Succeflion 
d'Efpagne. 

Les  Efpagnols  pourroient  prétendre  qu'il  n'y  avoit,ni  raifon,  ni  droit, de 
démembrer  leur  Monarchie.  Sa  Majelté  Impériale  pourroit  aufli  trouver 
mauvais  le  Partage  d'une  Succeflion  appartenante  à  l'Archiduc  fon  fécond 
Fils  en  vertu  des  Renonciations  de  Marie -Therefe  &  du  Teftament  de 
Philippe  IV.  Les  Italiens  fe  plaindroient  peut-être  de  ce  qu'on  n'a  pas 
afiigné  à  la  France  d'autres  Païs  que  ceux  qui  fe  trouvent  dans  leur  voi- 
finage.  Et  enfin  il  pourroit  fe  rencontrer  des  PuiiTances ,  qui  n'aprouve- 
roient  pas  que  le  Roy  de  la  Grande-Bretagne  &  les  Seigneurs  Etats -Gé- 
néraux des  Provinces -Unies  foient  entrez  dans  un  Traité  de  cette  natu- 
re avec  la  France ,  &  l'ayent  conclu  fans  leur  participation. 

S'il  fe  trouve  des  Efpagnols, qui  prétendent  qu'il  ne  peut  y  avoir  eu  ni 
raifon  ni  droit  de  démembrer  leur  Monarchie,  ne  leur  demandera-t-on 
pas  avec  juftice,  pourquoi  ils  n'ont  pas  eu  foin  de  faire  régler  les  Préten- 
dons de  la  France  fur  la  Succeflion  à  la  Couronne  d'Efpagne,  en  cas  de 
Mort  de  Charles  II.  fans  Enfans?  Louis  XIV.  ayant  aflez  fait  entendre  fes 
intentions  par  la  Guerre  de  166 7.  il  étoit  de  l'Intérêt  particulier  de  l'Ef- 
pacrne  de  prévenir  par  des  mefures  prifes  à  tems  les  differens  &  les  dif- 
putes à  naître  à  l'ouverture  de  la  Succeflion  d'un  Roy  duquel  on  devoit 
allez  bien  connoitre  les  difpofitions  infirmes?  De  plus,  les  Efpagnols  ayant 
été  puiflamment  fecourus  dans  le  befoin  par  diverfes  Puiffances ,  &  princi- 
palement par  le  Roy  de  la  Grande-Bretagne  &  par  les  Seigneurs  Etats- 
Generaux,  n'étoient-ils  pas  obligez  de  mettre  un  fi  bon  ordre  à  la  Suc- 
ceflion qu'elle  ne  pût  fournir  aucun  prétexte  de  renouveller  la  Guerre  en 
Europe  ?  Si  l'Efpagne  néglige  fes  véritables  Intérêts,  &  û  elle  n'a  aucun 
égard  pour  les  PuiiTances  auxquelles  elle  a  de  fi  étroites  obligations ,  les 
autres  Etats  n'ont-ils  pas  raifon  de  veiller  à  leur  feureté  ?  &  la  France 
propofant  d'accommoder  les  differens,  &  de  prévenir  les  fujets  d'ombrage, 
n'étoit-ce  pas  une  neceflité  de  conclure  un  Traité  pour  entretenir  la  tran- 
quilité  publique  &  éviter  de  voir  toute  l'Europe  en  combultion  ?  Celui 
qui  prévoit  f  embrafement  de  la  maifon  de  fon  voifin ,  n'a-t-il  pas  droit 
de  le  prévenir  j  &  s'il  ne  le  peut  faire,  fans  que  la  maifon  fouffre  quelque 
dommage,  y  aura-t-il  lieu  de  le  blâmer  ?  Que  la  Maifon  d'Autriche  &  la 
Maifon  de  France  foutiennent  également  leurs  Prétentions  fur  la  Monar- 
chie d'Efpagne,  tous  les  Pays  de  cette  Monarchie  ne  feront-ils  pas  expo- 
fez  à  la  fureur  des  armes  ?  La  France  n'ei't-elle  pas  en  état  d'en  conquérir 

Bbbb  3  la 


FE. 


f66    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  la  meilleure  partie  ?  D'ailleurs  les  autres  PuifTances  de  l'Europe  ne  pour- 
gen.  de  roient-elles  pas  avec  juftice  profiter  de  l'occafion,  ou  pour  reprendre  ce 
qui  leur  a  été  autrefois  enlevé ,  ou  pour  s'emparer  des  Pais  à  leur  bien- 
féance  ?  Ainfi,  le  démembrement  de  la  Monarchie  d'Efpagne  étant  inévi- 
table, Sa  Majelté  T.  C,  Sa  Majefté  Britannique,  &  les  Seigneurs  Etats- 
Generaux  ont  avec  droit  &  raifon  pourvu  à  ce  que  le  démembrement 
pût  être  fait  d'une  manière  convenable  aux  diverfes  Pretenfions ,  &  fans 
intereffer  la  tranquillité  particulière  des  Peuples  fournis  à  l'Efpagne  ni  celle 
de  toute  l'Europe. 

Pour  ce  qui  regarde  les  mécontentemens  de  Sa  Majefté  Impériale, 
il  eft  plus  à  propos  d'en  remetre  l'examen  après  les  Réflexions  fur  l'Ar- 
ticle VI. 

Quant  aux  plaintes  des  Italiens,  il  eft  à  obferver,  i.  que  la  plupart 
des  Etats  Souverains  de  l'Italie  font  des  Donations  ou  des  Concertions 
faites  par  les  Empereurs ,  les  unes  à  titre  d'Indépendance  de  l'Empire , 
&  les  autres  à  titre  de  Dépendance. 

2.  Que  l'Empire  acquis  à  la  Maifon  de  France  par  Charlemagne  étant 
palTé  à  la  Maifon  d'Autriche,  pendant  que  celle-ci  travaille  pour  fe  con- 
ferver  cette  première  Dignité ,  l'autre  prétend  de  pouvoir  un  jour  ren- 
trer dans  un  Bien  poffédé  originairement  par  fes  Ancêtres.  Ainfi,  les  Prin- 
ces d'Italie  fe  trouvent  dans  l'Obligation  de  veiller  aux  Entreprifes  des 
deux  Maifons  concurrentes ,  afin  de  prévenir  ce  qui  pouroit  être  préjudi- 
ciable à  leurs  juftes  Intérêts. 

3.  Que  le  Pape  de  Rome,  étant  non  feulement  reconnu  Souverain  de 
l'Etat  Eccléfiaftique,  mais  encore  ayant  les  Droits  de  Père  commun 
généralement  fur  tous  les  Etats  Catholiques-Romains ,  ce  lui  eft  un  De- 
voir indifpenfable  de  s'oppofer  conftament  à  toutes  Entreprifes  &  Préten- 
tions illégitimes  de  la  part  de  la  Maifon  d'Autriche  ou  de  celle  de 
France. 

4.  Que  non-obftant  ces  Obligations  des  Princes  Italiens,  &  ce  Devoir 
du  Pape  en  particulier,  les  Souverains  d'Italie  ont  eu  très-peu  d'égard  aux 
Intérêts  publics  &à  la  Juftice  dans  les  démêlez  furvenus  entre  les  Princes 
d'Autriche  &  ceux  de  France.     On  fçait  par  exemple  que,  dans  toutes 
les  Entreprifes  de  Charles-Quint  contre  François  I. ,  dans  toutes  les  Intri- 
gues de  Philippe  II.  pour  ruiner  la  France  ,  les  Papes  ,  bien  loin  de  fe 
déclarer  en  faveur  de  la  Juftice,  au  contraire  fomentoient  les  divifions, 
les  complots,  &  les  projets  à  proportion  de  l'utilité  particulière  qu'ils  pou- 
voient  en  efpérer  pour   l'accroi/Ternent  de  leur  Autorité  &  l'augmenta- 
tion de  l'Etat  Eccléfiaftique.     De  même,  lorfque  la  France  s'eft  trouvée 
en  état  d'ufer,  pour  ainfi  dire,  de  reprefailles  envers  la  Maifon  d'Autri- 
che, la  Conduite  de  la  Cour  de  Rome  n'a  point  été  celle  d'une  Cour  de 
Juftice,  qui  s'emploie  à  régler  les  Intérêts  des  Parties  félon  l'équité,  &  à 
maintenir  entre  les  Souverains  une  Correfpondance  Chrétienne.     Dans  les 
Alliances  étroites  des  deux  Maifons,  dans  les  Prétentions,  dans  les  Guer- 
res, dans  les  Traitez  de  Paix  entre  les  Couronnes  de  France  &  d'Ef- 
pagne, 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  ^7 

pagne,  les  Papes  n'ont  eu  d'autres  vues  que  celles  de  leur  propre  Inté-  Affaires 
rct.  lis  fe  font  donné  beaucoup  de  mouvement  pour  éloigner  la  Guerre  GfN-  DE 
de  l'Italie}  mais,  il  s'en  faut  beaucoup  qu'ils  n'ayent  fait  ce  qu'ils  auroient    L^RO" 

dû  &  ce  qu'ils  auroient  pu ,  pour  arrêter  &  prévenir  les  fuites  facheufes    '— 

des  Prétentions  réciproques  de  la  Maifon  d'Autriche  &  de  celle  de  Fran- 
ce fur  la  Monarchie  d'Efpagne. 

Les  autres  Princes  d'Italie  en  ont  ufé  à  peu  prés  de  la  même  manière. 
Tous  fe  font  fort  remuez  pour  obtenir  une  Neutralité;  fans  confidérer,que 
tôt  ou  tard  ils  auront  à  répondre  à  la  Partie  qui  demeurera  viclorieufe. 
11  eft  vrai  que  le  Duc  de  Savoye  n'efl  pas  relié  dans  l'indiférence,  & 
qu'il  s'elt  mêlé  bien  avant  dans  les  tems  de  Guerre;  mais,  quel  a  été 
fon  Motif?  Lors  qu'il  a  efpéré  de  l'avantage  du  Parti  de  la  Maifon  d'Au- 
triche, il  s'elt  déclaré  contre  la  France;  &  lorfque  la  France  lui  a  fait 
des  conditions  félon  Tes  defirs  ,  il  eit  devenu  GeneralilTime  des  Trou- 
pes de  France  contre  la  Maifon  d'Autriche.  Telle  a  été  ordinairement 
la  Conduite  des  Ducs  de  Savoye  à  l'égard  des  DifFérens  entre  les  deux 
Maifons. 

Ces  difpofitions  de  l'Italie,  uniquement  intereflee  pour  fe  ménager 
quelqu'avantage  particulier ,  ou  pour  jouir  d'un  repos  préfent,  &  indif- 
rente  pour  la  tranquilité  publique  de  toute  l'Europe  ,  a  été  caufe  que 
Louis  XIV.  Roy  de  France,  étant  réfolu  de  faire  valoir  fes  Prétentions 
fur  la  Succeiïîon  à  la  Monarchie  d'Efpagne,  n'a  point  confulté  les  Prin- 
ces Italiens,  ni  même  le  Pape,  qui  fans  doute  devroit  être  l'Arbitre  de 
toutes  les  Prétentions  des  Souverains,  s'il  avoit  en  effet  les  principes 
de  l'équité  &  du  defintérefTement  d'un  Père  commun  &  d'un  Palteur, 
qui  fe  tient  établi  Chef  de  TEglife  univerfelle  de  Jefus-Chrifl.  La  Ré- 
publique des  Provinces-Unies  des  Pais-Bas ,  &  Guillaume  III.  Roy  de  la 
Grande-Bretagne,  n'ayant  eu  rien  plus  à  cœur  que  d'entretenir  un  équilibre 
entre  la  Maifon  d'Autriche  &  celle  de  France  ,  &  n'ayant  rien  négli- 
gé de  ce  qui  pouvoit  accommoder  leurs  différens ,  &  rétablir  la  tran- 
quilité <}e  l'Europe,  font  en  dernier  lieu  entrez  en  Ligue,  avec  la  Fran- 
ce, afin  de  prévenir,  s'il  eft  poffible,  les  difputes  entre  les  deux  Mai- 
fons ,  les  ombrages  des  autres  PuifTances ,  &  une  Guerre  à  naître  à  l'ou- 
verture de  la  Succeflion  de  Charles  II.  en  état  de  mort  prochaine  fans 
Enfans;  furquoy  les  Princes  d'Italie  doivent  obferver: 

5".  Que  le  Roy  de  la  Grande-Bretagne,  &  les  Seigneurs  Etats  Géné- 
raux, dans  le  Traité  ont  eu  généralement  égard  au  bien  de  toute  l'Euro- 
pe, n'ayant  recherché  aucun  avantage  particulier  pour  leurs  Etats.  Si 
l'on  demande  pourquoi  l'on  n'a  pas  ajugé  à  la  France  les  Païs-Bas  auffi- 
bien  que  lesPaïs  d'Italie?  On  répondra,  que  la  France  a  des  Prétentions 
plus  fortes  fur  Naples,  Sicile,  &  le  Milanois,  qu'elle  n'en  peut  avoir  fur 
les  Païs-Bas.  Que  ces  Pais  n'étant  pas  fufifans  pour  éteindre  les  Préten- 
tentions  de  la  France ,  il  éioit  plus  à  propos  de  lui  afîigner  ce  qui  fe 
trouvoit  en  Italie  décaché  de  l'Efpagne ,  &  féparé  des  Etats  de  la  Fran- 
ce ;  Que  les  Païs-Bas  étant  contigûs  à  la  France  ,  les  fept  Provinces- 
Unies, 


S6$    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


Hollande  aïant  toujours  été  d'aréter  les  Entreprifes  illégitimes  de  la  Fran- 
ce, il  importe  à  toute  l'Europe,  &  à  la  Maifon  d'Autriche  en  particulier, 
que  ces  deux  Puifîances  fe  trouvent  le  plus  qu'il  e(l  pofîible  hors  de  la 
portée  des  armes  de  Sa  Majefté  Très  C.  Que  les  Païs-Bas  confervez 
à  la  Maifon  d'Autriche  feroient  toujours  foutenus  par  les  Provinces- 
Unies  ,  &  que  l'Italie  en  cas  de  befoin  feroit  plutôt  fecouruë  par  les 
Païs-Bas  ,  par  les  Provinces- Unies  ,  &  par  l'Angleterre,  que  ces  Puif. 
fances  ne  pouroient  efpérer  du  fecours  de  l'Italie  ;  enfin  ,  que  le  mo- 
tif de  Religion  qui  porte  les  Italiens  à  préférer  la  ruine  de  l'Angleterre  & 
de  la  Hollande  à  leur  confervation,  a  été  une  raifon  très-légitime  &  très- 
preflante  pour  ces  deux  PuifTances  de  veiller  à  leur  propre  feureté,  en 
ménageant  ce  qui  peut  convenir  de  mieux  à  la  tranquilité  publique  de 
toute  l'Europe. 

Si  les  raifons,  raportées  touchant  l'équité  &  la  néceiîké  du  Partage  des 
Etats  de  la  Monarchie  d'Efpagne,  peuvent  être  bien  fondés,  il  n'y  aura 
aucune  PuiiTance  qui  puiife  defaprouver,  que  le  Traité  ait  été  conclu 
fans  fa  participation;  parce  qu'il  ne  s'agit  point  ici  de  droit  de  fupériorité 
ni  de  prérogative  d'honneur,  ni  d'aucun  profit  réel.  Ce  font  les  Préten- 
tions des  deux  Maifons  d'Autriche  &  de  France,  qu'il  efl  queftion  de  ré- 
gler pour  le  mieux,  à  la  fatisfaction  de  l'une  &  de  l'autre,  &  félon  que 
toute  l'Europe  peut  defirer  pour  la  tranquilité  générale  &  particulière 
de  tous  les  Etats.  Supofé  donc  que  le  Traité  ait  pourvu  à  tout,  autant 
que  cela  étoit  poflîble,  ne  doit-ce  pas  être  un  très-grand  contentement 
pour  tous  les  Souverains  qui  n'ont  qu'à  accepter  &  garentir  un  Traité  qui 
fe  trouve  abfolument  tel  que  la  Conjoncture  des  Affaires  de  la  Succefîion 
d'Efpagne  le  peut  exiger ,  pour  accommoder  les  difputes  &?  les  différens ,  &? 
prévenir  une  nouvelle  Guerre  dans  l'Europe? 


ARTICLE        VI. 

Ladite  Couronne  d'Efpagne  &  les  autres  Royaumes ,  //les ,  Etats ,  Pais ,  &? 
Places  que  le  Roy  Catholique  poffede  préfentement  tant  dehors  que  dedans  f  Eu- 
rope feront  donnez  &  affgnez  au  Sereniffîme  archiduc  Charles  fécond  Fils  de 
ï 'Empereur ,  à  l'exception  de  ce  qui  a  été  donné  dans  f  Article  quatrième  qui 
doit  compofer  le  Partage  de  Monfeigneur  le  Dauphin ,  £5?  du  Duché  de  Milan 
en  conformité  dudit  Article  quatrième ,  en  toute  propriété  &  poffeffwn  pleniere  en 
partage ,  (jj  exjlinclion  de  toutes  fes  preténfions  fur  ladite  Succcffion  d'Efpagne 
pour  en  jouir,  lui,  fes  Héritiers  &  -Succcfjeurs  nez  &  à  naître  à  perpétuité, 
fans  pouvoir  être  jamais  troublé  fous  quelque  prétexte  que  ce  joit  de  droits  ou 
de  pretenfons  direclemcnt  ni  indirectement,  même  par  ceffion,  appel,  révolte, 
ou  autre  voye  de  la  part  du  Roy  Très-Chrêtien ,  de  Monfeigneur  le  Dauphin  , 

ou 


PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  56> 

eu  de  fes  Etoffas  Mâles ,  ou ,  &c.  moyennant  laquelle  Couronne  £ Ef pagne  &f  les    Affairzs 
autres  Royaumes ,  /fies,  Etats,  Pais,  &  Places  qui  en  dépendent ,  l'Empereur     GEN- DE 
/#«/  ?«  [on  propre  non  quen  celui  du  Roy  des  Romains  ,  du.  Sérénifjime  Archi-    L  ^"i'°" 
duc  Charles  [on  fécond  Fils ,  des  Archiduchcffes  fes  Filles ,  fes  Enfans ,  /<?«;-; 
Enfans  Mâles,  ou,  &c.  comme  auffi  le  Roy  des  Romains  pour  lui ,  &  le  Se- 
remffime  Archiduc   Charles  des  qu'il  fera  Majeur  pour  lui-même ,  leurs  En- 
fans ,  &c.  fe  tiendront  fatisfaits  ;  que  ledit  Sérénifjime  Archiduc  Charles  ait , 
en  exfiinclion  de  toute  *  leurs  Prétentions  fur  la  Succefjlon  d  Ejpagney  ladite  Cef~ 
Jion  faite  ci-deffus ,  &  ledit   Empereur  tant  en  fon  propre  nom  quen  celui  du 
Roy  des  Romains  renonceront ,  lorfquils  entreront  en  ce  prélent  Traité  &  quils 
le  ratifieront ,  fc?  le  Seréni finie  Archiduc  Charles  dés  qu 'il fera  Majeur,  à  tous 
autres  Droits  &  Pretenfons  fur  les  Royaumes ,  //les,  Etats,  Pais,  &  Places 
qui  compofent  les  Partages  fj?  les  Portions  afjïgnez  ci-deffus  à  Monfeigncur  le 
Dauphin ,  de  celui  qui  aura  le  Duché  de  Milan  par  échange  de  ce  qui  fera  donné 
à  Monfeigneur  le  Dauphin ,  .&?  que  de  tout  cela  ils  feront  expédier  des  Actes  fo- 
lemnels  dans  la  plus  forte  £5?  la  meilleure  forme  quil  fe  pourra,  fç  avoir  ï  Em- 
pereur &?  le  Roy  des  Romains ,  quand  ils  ratifieront  ce  préfent  Traité ,  £s?  le  Se- 
reniffime  Archiduc  des  quil  fera  Majeur ,  lef quels  feront  délivrez  à  Sa  Majeflé 
Britannique  rj?  aux  Seigneurs  Etats  Généraux. 

i.  Cette  Difpofirion  de  la  Couronne  d'Efpagne  &  de  tous  les  Païs  pofle- 
dez  par  le  Roy  Catholique  tant  dedans  que  dehors  de  l'Europe,  aflignez 
à  un  Héritier  de  la  Maifon  d'Autriche,  ell  une  Preuve  que  le  Roy  de  la 
Grande-Bretagne  &  les  Seigneurs  Etats  Généraux  ont  eitimé  que  le  droit 
de  prétention  de  cette  Maifon  à  la  Succeflion  d'Efpagne  ell  fupérieur  à 
celui  que  la  Maifon  de  France  peut  y  avoir;  &  Sa  Majefté  Très-Chré- 
tienne &  Monfeigneur  le  Dauphin  en  font  eux-mêmes  tombez  d'accord , 
lors  qu'ils  ont  demandé  &  fe  font  tenus  fatisfaits  d'avoir  une  médio- 
cre partie  de  cette  Succefllon  en  extinction  de  tous  leurs  droits  &  pré- 
tentions. 

2.  La  France  doit  être  cenfée  convenir  elle-même  du  droit  des  trois  Puif- 
fances  pour  le  Partage  de  la  Monarchie  d'Efpagne;  &  en  particulier  elle 
doit  être  cenfée  reconnoître  l'Angleterre  &  la  Hollande  pour  Juges  & 
Médiatrices;  puifque,  de  concert  avec  elles,  elle  régie  &  accepte  ce  qui 
doit  lui  appartenir,  &  ce  qui  doit  appartenir  à  la  Maifon  d'Autriche. 

3.  Dans  les  Médiations  &  dans  les  Traitez  ordinaires  il  faut  le  confen- 
tement  de  toutes  les  Parties  intéreffées;  de  manière  que  fi  une  Partie  ne 
veut  pas  convenir  du  choix  des  Médiateurs ,  ou  fi  elle  ne  veut  pas  s'en 
tenir  aux  articles  arrêtez  par  le  Traité,  les  autres  ne  peuvent  être  liées 
par  aucun  engagement.  Mais,  il  en  elt  tout  autrement  à  l'égard  de  ce 
Traité.  L'Emptreur  Chef  de  la  Maifon  d'Autriche,  &  Louis  XIV.  Chef 
de  la  Maifon  de  France,  ont  des  Prétentions  fur  la  Succefllon  d'Efpagne. 
Pour  prévenir  une  Guerre  le  Roy  de  France,  &  le  Dauphin  fon  Fils  fe  re- 
mettent de  leurs  prétenfions  au  jugement  du  Roy  de  la  Grande  Bretagne 
&  des  Sgrs.  Etats  Généraux  ,  enluite  de  qtioy  les  trois  PmlTances,  indé- 
pendament  de  Sa  Majelté  Impériale,  concluent  un  Traité  de  Partage  de 

Tome  XL  Ce  ce  la 


l'Euro- 
pe. 


570    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  la  Succeflion  d'Efpagne  entre  la  Maifon  d'Autriche  &  celle  de  France.  Par 
gen.  de  conféquent ,  l'Empereur  efl:  abfolument  libre  d'accepter  ou  de  rejetter  le 
Traité.  Mais,  au  contraire,  que  le  Traité  fuit  accepté  ou  rejette  par 
l'Empereur ,  le  Roy  de  France  &  le  Dauphin  demeurent  toujours  indifpen- 
fablement  engagez  à  l'obferver  fuivant  les  conditions  arrêtées  par  eux- 
mêmes  avec  Sa  Majefté  Britannique  &  les  Sgrs.  Etats  Généraux  des  Pro- 
vinces-Unies des  Païs-Bas. 

Quant  au  Partage  aiïigné  à  la  Maifon  d'Autriche,  en  premier  lieu,  il 
efl:  fait  en  faveur  du  Sereniflîme  Archiduc  Charles  fécond  Fils  de  Sa  Ma- 
jelté  Impériale,  à  l'exclufion  de  l'Empereur  &  du  Roy  des  Romains  fon 
Fils  aine.  Cette  Difpofition  efl;  la  même  que  celle  du  Teftament  de  Phi- 
lippe IV.  Roy  d'Efpagne,  lequel  exclut  de  fa  Succeflion  l'Empereur  &  le 
Roy  des  Romains,  comme  Héritier  préfomptif  de  la  Couronne  Impé- 
riale. 

Si  les  Peuples  étoient  capables  de  s'accorder  bien  les  uns  avec  les  au- 
tres, &  de  régler  leurs  intérêts  de  manière  que  chacun  put  être  content, 
il  n'y  auroit  point  de  Souverains.  Et  fi  un  Souverain  étoit  capable  de 
gouverner  fagement  &  de  faire  obferver  les  régies  d'une  parfaite  équité  en- 
tre divers  Peuples,  le  Monde  entier  pouroit  être  gouverné  par  un  feul 
Souverain.  Les  grands  Empires  n'ont  fubfifté  qu'autant  que  la  bonne  in- 
telligence s'eft  confervée  entre  le  Souverain  &  les  Peuples.  Le  mécon- 
tentement des  Princes  d'Allemagne  leur  a  fait  embrafler  les  Intérêts  de 
Ferdinand  contre  les  Pourfuites  de  Charles-Quint  fon  Frère,  pour  bif- 
fer l'Empire  &  l'Efpagne  réunis  en  la  Perfonne  de  Philippe  III.  fon  Fils 
unique. 

Pour  prévenir  l'ombrage  des  autres  Etats  de  l'Europe  Philippe  IV. 
fubftitua  à  Charles  II.  fon  Fils,  en  cas  de  mort  fans  Enfans,  un  Prince 
de  la  Maifon  d'Autriche ,  le  quel  ne  dût  point  être  Empereur.  C'eft  par 
la  même  raifon  que  les  trois  PuhTances  ont  aiïigné  à  l'Archiduc  Charles 
ce  que  la  Maifon  d'Autriche  doit  prétendre  de  la  Succeflion  d'Efpagne. 

En  fécond  lieu,  le  Partage  en  faveur  de  la  Maifon  d'Autriche  efl:  telle- 
ment confidérable,  que  l'Archiduc  fe  trouve  encore  en  état  de  pouvoir 
être  le  plus  puuTant  Monarque  de  l'Europe  en  étendue  de  Païs,  en  fer- 
tilité &  en  richefTes  de  Terrain,  en  commoditez  pour  le  Commerce  ,&  en 
forces  pour  fe  faire  redouter  par  les  autres  PuhTances  de  l'un  &  de  l'au- 
tre Monde. 

En  troifiéme  lieu ,  il  a  déjà  été  remarqué  que  les  Païs  démembrez  de  la 
Monarchie  d'Efpagne,  &  aiïignez  au  Dauphin  de  France,  font  plutôt  des 
fujèts  de  Guerre  inévitable  retranchez,  qu'une  diminution  de  grandeur 
&  de  puiffance.  Que  le  Sereniflîme  Archiduc,  devenu  Roy  d'Efpagne, 
fâche  rendre  fes  Peuples  laborieux,  qu'il  préne  foin  de  repeupler  les  vaf- 
tes  Etats ,  qu'il  établifle  un  bonne  difcipline  parmi  tous  les  Ordres  de  fa 
Monarchie  ;  on  reconnoîtra  bien-tôt  que  les  Païs  aiïignez  à  la  France  ne 
font  pas  fufifans  pour  la  mettre  en  état  d'entreprendre  quelque  chofe  au 

prejV 


PE. 


RESOLUTIONS   D'ETAT  ,  M.  DCC  I.  57i 

préjudice  de  l'Efpagne,  &  qu'au  contraire  la  France  avoit  befoin  de  ce    Affaires 
renfort  pour  fe  garentir  d'infulte  de  la  part  d'un  Ray  Catholique.  GfN-  DE 

Quelqu'avantageufe  que  puiffe  être  cette  difpofition  du  Partage  afligné 
au  Serenifiime  Archiduc  Charles,  il  étoit  neantmoins  fort  à  croire  que 
l'Empereur  fon  Père  n'en  feroit  pas  fatisfait.  Sa  Majeflé  Impériale  préten- 
doit  que  la  Succefllon  entière  devoit  apartenir  de  droit  inconteltable  à  fes 
Defcendans,  après  la  mort  de  Charles  IL  Roy  d'Efpagne.  Cependant 
en  voilà  une  partie  qui  leur  efl  enlevée,  en  pleine  paix,  du  vivant-mê- 
me du  Roy  Catholique,  par  Louis  XIV.  Roy  de  France  &  le  Dauphin 
fon  Fils,  apuyez  du  confentement  &  de  la  garantie  de  Guillaume  III. 
Roy  de  la  Grande  Bretagne  &  des  Seigneurs  Etats  Généraux  des  Pro- 
vinces-Unies des  Pais-Bas,  deux  PuifTances  qui  n'ont  aucun  droit  fur  la 
Succeffion  d'Efpagne,  &  qui  d'ailleurs  ont  été  fortement  attachées  aux 
intérêts  de  la  Maifon  d'Autriche,  pendant  les  dernières  Guerres  contre 
la  France. 

Ces  Confidérations  femblent  avoir  dû  naturellement  caufer  de  la  fur- 
prife  &  du  mécontentement  à  Sa  Majeflé  Impériale.  Mais  ceux,  qui  fe 
plaifent  à  former  des  raifonnemens  fur  ce  qu'ils  voient  arriver,  doivent 
le  donner  de  garde  de  ne  point  parler  avec  trop  de  précifion  touchant 
les  matières  traitées  dans  le  cabinet  des  Princes;  parce  qu'en  effet  il  y  a 
mille  particularitez  qui  ne  viennent  point  à  la  connoiflance  du  Public.  Il 
paroit,  par  exemple,  que  ce  Traité  de  Partage  a  été  fait  fécrétement 
entre  la  France  , l'Angleterre, &  la  Hollande,  fans  la  participation  de  l'Em- 
pereur &  du  Roy  d'Efpagne  ;  il  peut  toutefois  y  avoir  eu  des  démar- 
ches &  des  négociations,  lefqueîles,  fl  elles  étoient  connues  ,  on  trou- 
veroit  que  Sa  Majeflé  Impériale  &  Sa  Majeflé  Catholique  n'ont  dû  ni 
être  furprifes  ni  mal-fatis  faites.  Ainfi,  fans  vouloir  trop  aprofondir  les 
fecrêts  de  la  politique  particulière  des  Princes ,  il  faut  s'en  tenir  à  des  ré- 
flexions générales  fur  ce  qui  peut  être  connu  de  tout  le  monde. 

i.  Chacun  connoit  la  jaloufie  qui  efl  entre  la  Maifon  d'Autriche  &  la 
Maifon  de  France.  Cette  jaloufie  commença  de  parvenir  à  fon  fupreme 
degré  fous  les  Régnes  de  François  I.  Roy  de  France  &  de  Charles- 
Quint  Roy  d'Efpagne.  Ils  étoient  montez  fur  le  Trône  prefqu'au  même 
temps  en  ipf.  François  à  22.  ans,  &  Charles  à  iy.  Us  eurent  l'un  & 
l'autre  des  difpoiitions  extraordinaires  pour  le  Gouvernement  ;  mais , 
François  I.  aima  toujours  la  Paix ,  &  ne  fit  la  Guerre  que  pour  défen- 
dre fes  Etats ,  ou  pour  recouvrer  ce  qui  luy  apartenoit  légitimement: 
L'Empire  étant  venu  à  -vacquer ,  il  follicita  les  fufrages  des  Electeurs 
par  des  voyes  naturelles  à  un  Roy  dont  les  Ancêtres  avoient  acquis 
l'Empire  d'Occident.  Charles  au  contraire  employa  tous-  les  moyens 
imaginables  pour  agrandir  fes  Royaumes  5  a  19.  ans  il  fe  fit  élire  Em- 
pereur à  l'exclufion  de  François  I.  il  luy  fufcita  des  Guerres  continuelles: 
il  luy  enleva  le  Milanois:  après  qu'il  eût  été  fait  prifonnier  à  la  batail- 
le de  Pavie,  il  le  fit  amener  à  Madrid  ,    &  luy  fit  plufieurs  traitemens 

Ce  ce  2.  indi- 


$72    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  indignes  pendant  une  longue  pnTon  ;  &  ne  le  relâcha  qu'après  avoir  exi- 
gen.  ue  g^  une  Renonciation «aux  Souverainetez  de  la  Flandre  ,  &  de  l'Artois,  & 
l'Euro-    aux  pretentjons  de  la  France  fur  Naples  &  fur  Milan.  Enfin , il  mit  en  ufa- 

ge  tout  ce  que  la  rufe  ait  pu  imaginer  &  la  force  exécuter  pour  ruiner  la 

France.  Philippe  II. ,  Fils  unique  de  Charles-Quint ,  &  fon  Succeffeur  à 
la  Monarchie  Efpagnole ,  pourfuivant  les  deffeins  de  fon  Père  contre  la 
France,  employa  des  fommes  immenfes  &  toutes  les  intrigues  poiïibles, 
pour  profiter  de  la  foibleffe  &  du  mauvais  ordre  du  Royaume  fous  les  Rè- 
gnes de  François  1 1.  Charles  I X.  &  Henri  1 1 1. 

Mais,  la  face  des  afTaires  ayant  changé  fous  Henri  IV.  Roy  de  Fran- 
ce ,  Philippe  III.  Philippe  IV.  &  Charles  II.  Roys  Catholiques  ont  été 
obligez  de  le  précautionner  contre  les  deffeins ,  &  de  fe  défendre  contre 
les  attaques  de  Loïs  XIII.  &  de  Louïs  XIV.  Roys  Très-Chrétiens.  La 
Politique  de  Charles-Quint  a  été  introduite  dans  le  Confeil  de  France  par 
le  Cardinal  de  Richelieu,  premier  Miniftre  fous  Louis  XIII:  elle  a  été 
continuée  fous  le  Miniltére  du  Cardinal  Mazarin  au  commencement  du  Ré- 
gne de  Louis  XIV;  &  s'étant  toujours  rafinée  de  plus  en  plus,  elle  a  pro- 
duit tous  les  grands  effets ,  qui  ont  étonné  le  monde  depuis  longues  an- 
nées. 

Les  Maximes  de  cette  Politique  de  Charles- Quint  font,  une  délicate^ 
fe  extraordinaire  pour  le  point  de  Souveraineté,  un  defir  extrême  de  s'a- 
grandir, un  grand  foin  de  ménager  dans  le  Public  une  réputation  de  Reli- 
gion, dejuftice,&  de  bonne-foy,  une  prévoyance  aflîdue  pour  difpofer 
&  amener  les  évenemens,  autant  que  la  prudence  humaine  le  peut  per- 
mettre ,  &  une  prompte  diligence  pour  fçavoir  profiter  des  occafions. 

2.  Les  Entreprifes  &  les  Intrigues  de  la  Maifon  d'Autriche  ayant  re- 
veillé l'émulation  de  la  Maifon  de  France,  il  étoit  naturel  que  les  démar- 
ches du  Roy  de  France  au  préjudice  de  la  Maifon  d'Autriche  rendirent 
les  Princes  de  cette  Maifon  plus  éclairez  &  plus  vigilans  pour  la  con- 
fervation  de  leurs  propres  intérêts.  Si  les  indifpofitions  de  Philippe 
IV.  &  les  infirmitez  de  Charles  II.  Roys  d'Efpagne  ont  été  favorables 
à  la  France  gouvernée  par  un  Monarque  plein  de  vigueur  &  de  fanté,Sa 
Majeité  Impériale  avoit  affez  de  difpofitions  avantageufes  pour  veiller 
aux  intérêts  communs  à  toute  la  Maifon  d'Autriche  j  &  plus  l'état  de 
Charles  II.  devenoit  languiffant,  &  plus  l'Empereur  étoit  obligé  d'être 
attentif  &  de  prêter  la  main  aux  Affaires  d'Efpagne. 

3.  Leopold  I.  Empereur  prefentement  régnant  a  eu  des  motifs  très- 
particuliers  pour  obferver  les  deffeins  &  les  démarches  de  la  France. 
Ferdinand  III.  Empereur  étant  decedé  le  2.  Avril  1657.  Louis  XIV.  Roy 
de  France  avoit  traverfé  de  tout  fon  pouvoir  l'Eleclion  de  Leopold  Frère 
du  défunt;  &,fous  le  prétexte  d'apuyer  les  mecontentemens  des  Elec- 
teurs &  des  Princes  d'Allemagne,  il  avoit  fortement  follické  pour  em- 
pêcher que  le  Diadème  Impérial  ne  demeurât  plus  long-temps  fur  la 
tête  des  Princes  de  la  Maifon  d'Autriche.  Si  les  fol  incitations  n'eurent  pas 
tout  leur  effet,  au  moins  l'Ele&ion  fut  diferée  jufqu'au  mois  de  Juillet  de 

1652, 


PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  575 

16  f%.  &  le  4.  Juin  précèdent  a  voie  été  faite  la  célèbre  Capitulation  de  Amiiui 
Francfort ,  fi  avantageufe  à  la  France.  Le  nouvel  Empereur  la  figna  le  GEN-  DE 
18.  Juillet:  Il  s'y  oblige  au  XIII.  Article  de  riaffiflcr  en  aucune  manière  que 
ce  [oit ,  d 'Armes ,  d'Argent,  de  Troupes,  ou  de  Munitions  ,  &  de  ne  favorijer 
aucunement  les  Ennemis  de  la  Couronne  de  France ,  qui  font  hors  de  f  Empire,  pre- 
fens  ou  futurs,  fous  aucun  prétexte  ou  rai  (on  que  ce  [oit ,  de  Différent  ou  de  Guer- 
re contre  ladite  Couronne.  L'Article  XIV.  eft  encore  plus  précis  j  c'eit  l'Em- 
pereur qui  parle.  Et  de  peur  même  que  nôtre  chère  Patrie  ta  Nation  Alleman- 
de,  ou  nous-mêmes ,  ne  J  oyons  enveloppez  dans  de  nouvelles  querelles,  nous  ne  nous 
mêlerons  nullement  dans  les  Guerres  que  ïon  fait  prefentement  en  Italie  £s?  dans 
le  Cercle  de  Bourgogne,  &  ne  ferons  la  Guerre ,  ni  pour  nous  comme  Empereur , 
ni  pour  nôtre  Maifon,  contre  la  Couronne  de  France ,  ni  fe s  Alliez  dans  ladite  Ita- 
lie, 13  dans  le  Cercle  de  Bourgogne-,  moins  encore  envoyerons-wus ,  fous  aucun 
prétexte  de  Guerre  que  ce  puiJJ'e  être ,  du  fecours  à  fes  ennemis ,  fait  en  'troupes , 
argent ,  ou  armes  ,  foit  en  autre  chofe  ,  ni  ne  les  favori  ferons  ou  ajfjlerons  en 
aucune  manière  que  ce  Joit ,  pourvu  que  d  ailleurs  la  Couronne  de  France  13  fes 
Alliez  n'envoyent ,  ni  ne  fajfent  envoyer,  aucun  fecours  en  Troupes  ,  en  argent ,  en 
armes,  ou  en  autre  manière  que  ce  Joit  à  nos  ennemis  ou  à  ceux  de  l'Empire , 
aux  ennemis  de  nôtre  Maifon  Allemande,  ou  &c. 

La  principale  vue  de  la  France  étoit  d'empêcher  que  l'Empereur  ne 
pût  fecourir  Philippe  IV.  Roy  d'Efpagne,  lequel  déjà  vieux  &  infirme, 
n'ayant  des  enfans  que  très-jeunes ,  fut  engagé  de  faire  le  Traité  de  Paix 
des  Pyrénées  avec  la  France  en  1659.  &  de  donner  l'Infante  Marie-The- 
refe  fa  Fille  en  Mariage  à  Louis  XIV.  Roy  Très-Chrétien. 

4.  La  France  ayant  commencé  en  1667.  de  faire  infirmer  les  A6f.es 
les  plus  folemnels  &  les  plus  Authentiques ,  qui  ayent  pu  être  faits  de  la 
Renonciation  de  Marie-Therefe  à  tous  Droits  de  Succetfion  à  la  Couron- 
ne d'Efpagne  en  qualité  de  Reine  de  France,  l'Empereur,  Chef  de  la 
Maifon  d'Autriche, &  Héritier  prefomptif  de  la  Monarchie  Efpagnole  pour 
foi  ou  pour  fes  Defcendans ,  devoit  fe  mettre  en  pofture  de  faire  enten- 
dre à  Sa  Majefté  Très-Chretienne  que  la  Maifon  d'Autriche  auroit ,  en 
cas  de  befoin,  des  épées  auffi  bonnes  que  les  plumes  des  Jurifconfultes 
d'Efpagne  ,  pour  maintenir  fes  Droits  contre  les  Pretenfions  de  la  France. 
Il  faloit  dès  ce  moment  étudier  toutes  les  mefures  du  Confeil  de  Louis 
XIV.  pour  attirer  les  autres  PuiiTances  dans  fes  intérêts,  &  les  déconcer- 
ter; &  comme  la  France  devenoit  plus  entreprenante  &  plus  emprefiee 
à  proportion  du  fuccès  de  fes  Négociations  &  de  fes  Armes,  Sa  Majefté 
Impériale  &  fon  Confeil  dévoient  aufii  de  plus  en  plus  fe  reveiller,  crain- 
dre, &  fe  précautionner  contre  un  fâcheux  avenir. 

5.  En  1671.  l'Empereur  s'étant  trouvé  veuf  fans  Enfans  mâles,  n'a- 
yant qu'une  Fille  de  l'Impératrice  fa  première  Femme,  fut  obligé  de  s'op- 
pofer  au  deffein  que  Louis  XIV.,  rempli  de  grandes  efperances  par  le 
fuccès  de  fes  Armes  en  Hollande  ,  avoit  formé,  pour  faire  en  forte  que 
le  Daufln  fon  Fils  fut  élu  Roy  des  Romains.  Le  Mémoire,  contenant 
les  offres  faites  par  Sa  Majefté  Très-Chrétienne  à  i'Ele£teur  de  Brande- 

Cccc  3  bourg 


p, 


PE. 


j74    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  bourg,  pour  obtenir  Ton  fuffrage,  fut  remis  entre  les  mains  de  Sa  Majeflé 
gkn.de  Impériale  parle  Prince  d'Anhalt.  Cette  aplication  &  cette  activité  du 
l'Euro-  Confeil  de  France  pour  ne  rien  épargner  dans  les  occalions,  où  il  femble 
y  avoir  quelque  forte  d'avantage  à  eiperer ,  devoit  engager  l'Empereur  à 
terminer  inceflament  cous  mécontentemens  entre  les  Princes  de  l'Empire, 
à  leur  ôter  tout  prétexte  de  favorifer  les  intentions  de  la  France ,  à  les  en- 
tretenir dans  une  union  très-étroite  pour  maintenir  leurs  intérêts  communs, 
&  à  s'affurer  de  leur  fidélité  &  leur  zèle  pour  foutenir  les  Droits  attachez  à 
Sa  Perfonne  en  qualité  d'Empereur,  &  en  qualité  d'Héritier  Prefomptif 
de  la  Maifon  d'Autriche  pour  foy ,  ou  pour  fes  Defcendans. 

6.  L'Allemagne,  l'Efpagne,  &  la  Hollande  s'étant  trouvées  en  Armes 
contre  la  France  en  1674.  &  fur-tout  en  1688.  Guillaume  III.  Prince 
d'Orange  étant  monté  fur  le  Trône  d'Angleterre,  &  la  plupart  des  Prin- 
ces de  l'Europe  étants  liguez  contre  les  François ,  Sa  Majeflé  Impériale 
avoit,  pour  ainfi  dire,  l'occafion  en  main;  &  ii  fon  Confeil  avoit  été  au- 
tant éclairé  &  autant  zélé  pour  les  intérêts  de  la  Maifon  d'Autriche ,  com- 
me celui  de  France  pour  la  gloire  de  fes  Roys,  il  eft  certain  que  toutes  les 
mefures  prifes  par  Louis  XIV.  &  tous  les  grands  avantages  que  Sa  Ma- 
jeflé Très- Chrétienne  avoit  remportez  fur  la  Maifon  d'Autriche  depuis  la 
Paix  de  Munfler  &  le  Traité  des  Pyrénées,  auroient  pu  être  entièrement 
renverfez. 

11  n'étoit  pas  difficile  de  remarquer  que  les  bons  fuccès  de  la  France  dé- 
voient être  atribuez  à  des  foins  continuels  pour  amafTer  des  Trefors,à  des 
Troupes  extraordinairement  nombreufes,  également  bien  difeiplinées  &  en- 
tretenues, toujours  prêtes  à  entrer  en  action;  &  à  des  Négociations  aflï- 
dues  pour  ménager,  ou  par  belles  paroles,  ou  par  menaces,  ou  par  argent, 
les  autres  PuifTances  de  l'Europe.  Auroit-il  été  impoiiible  à  Sa  Majeflé 
Impériale  d'ufer  d'une  femblable  Politique, mais  plus  équitable  &  plus  fin- 
cere,  pour  déconcerter  les  mefures  du  Confeil  de  France?  Les  Princes 
Alliez  &  les  Generaux-mêmes  de  l'Empereur  n'ont  point  ceffé  de  fe  plain- 
dre, de  ce  que  les  Troupes  Allemandes  ne  pouvoient  être  prêtes  à 
temps  ;  &  de  ce  que  l'Argent  &  les  Munitions  manquoient  toujours  au 
befoin. 

Une  féconde  caufe  des  grands  fuccès  du  Roi  de  France  a  été  la  fubor- 
dination  parfaite  entre  Sa  Majeflé  &  fon  Confeil,  entre  les  ordres  précis 
de  ce  Monarque, &  leur  exécution  poncluelle  par  les  Minières  &  Officiers 
Généraux  &  Subalternes  &  généralement  par  tous  les  Soldats  &  les  Peu- 
ples de  fon  obeiffance.  Il  étoit  fans  doute  très-difficile  qu'il  fe  rencontrât 
une  auffi  parfaite  conformité  de  commandement  &  d'exécution  parmi  les 
Alliez.  Cependant,  fi  Sa  Majeflé  Impériale  ,  comme  Chef  de  la  Ligue, 
avoit  eu  toute  l'exaclitude  &  la  févérité  néceffaires  pour  les  mefures  ,  les 
délibérations,  les  ordres, &  les  exécutions,  que  les  diverfes  conjonctures 
pouvoient  requérir  de  fon  Confeil  &  de  toutes  perfonnes  qui  lui  étoient 
immédiatement  fujettes,  cet  exemple  au'rnic  été  une  régie  pour  tous  les 
autres  Souverains  Conféderez.   Et  n'efl-il  pas  apparent  qu'une  jufle  cor- 

refpon- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I. 


S7f 


GF.N.  DE 

l'Euro- 
pe. 


refpondance  entre  tous  les  Membres  de  la  Ligue  auroit  pu  obtenir  l'ifiué  Amiar.s 
qu'ils  s'étoient  propofée ,  en  s'uniflant  les  uns  avec  les  autres?  L'Empe- 
reur travailloit  à  des  Conquêtes  fur  le  Turc ,  pendant  qu'il  étoit  beaucoup 
plus  important  de  reprendre  fur  la  France  ce  qu'elle  avoit  enlevé  à  l'Em- 
pire. Les  Généraux  Allemands  en  Italie  ne  fongeoient  qu'à  ménager  cer- 
tains intérêts  particuliers  à  la  Maifon  d'Aûtricbe  ou  à  l'Empire,  &  négli- 
geoient  ce  qui  étoit  de  principal  pour  la  Caufc  commune.  D'où  il  efl  ar- 
rivé que  les  plus  grands  efforts  des  autres  PuifTances  Confédérées,  n'ayant 
pu  empêcher  la  France  de  faire  des  progrès  confidérables  ,  il  a  fallu 
enfin  en  venir  à  des  Traitez  toujours  préjudiciables  à  la  Maifon  d'Au- 
triche. 

7.  Les  Traitez  de  Paix  font  des  événemens  plus  en  la  difpofition  du 
Souverain  que  les  actions  de  la  Guerre.  Ya-t-il  Souverain  qui  puhTe  ab- 
folument  compter  fur  l'expérience  infaillible  d'un  Général  &  fur  la  valeur 
intrépide  de  fes  Soldats?  Y  en  a-t-il  qui  puifTe  aucunement  prévoir  mille 
circonflances  qui  font  allez  fouvent  le  gain  des  batailles?  Mais,  pour  ce  qui 
regarde  les  Négociations  d'une  Paix  ;  qu'il  arrive  à  des  Plénipotentiaires 
de  manquer  d'habileté ,  ce  défaut  peut  être  réparé  par  le  Souverain  ;  puis 
qu'il  peut  prendre  une  connohTance  exacte  des  intentions, des  intrigues, & 
de  la  conduite  de  fon  Ennemi ,  envoyer  les  Inllructions  fuffifantes  à  fes 
Miniftres ,  &  qu'il  efl  toujours  le  maître  de  rejetter  ou  de  conclure  les  Ar- 
ticles d'un  Traité. 

Ce  fut  la  France  ,  qui,  dans  la  dernière  Guerre,  parla  la  première  de 
Paix:  elle  en  fit  femer  des  Propositions  de  tous  cotez:  elle  mit  tout  en 
ufage  pour  parvenir  à  la  conclufion  d'un  Traité.  Ceux,  qui  ont  cru  qu'el- 
le étoit  épuifée  d'argent  &  de  forces  ,  fe  font  beaucoup  abufez.  Elle  é- 
toit  encore  en  état  de  fournir  plufieurs  campagnes  &  de  remporter  des 
victoires.  Mais ,  entre  plufieurs  raifons  qui  l'obligeoient  à  rechercher  la 
Paix,  la  plus  forte  étoit,  qu'il  y  avoit  plus  à  gagner  par  les  Négociations 
que  par  les  Armes.  Les  infirmitez  du  Roy  d'Efpagne  étoient  fi  confidéra- 
bles, qu'on  ne  pouvoit  plus  douter  que  la  fin  de  la  vie  de  ce  Monarque 
n'étoit  pas  fort-éloignée.  Si  Sa  Majeilé  Catholique  fut  venue  à  mourir  en 
un  temps,  où  la  Maifon  d'Autriche  fe  trouvoit  liguée  avec  les  principales 
PuifTances  de  l'Europe  contre  la  France ,  il  eil  certain  qu'il  eût  été  pref- 
que  impofiible  au  Roy  Très-Chrêtien  &  à  Mgr.  le  Dauphin  de  faire  va- 
loir aucune  de  leurs  Prétentions  fur  la  Succeffion  à  la  Monarchie  d'Ek 
pagne.  Ainfi,  le  principal  Intérêt  de  la  France  étoit  de  rompre  la  Ligue, 
&  de  changer  les  difpofitions  des  PuifTances  Alliées  de  la  Maifon  d'Au- 
triche. 

Le  Duc  de  Savoye  étoit  entré  des  derniers  dans  la  Confédération ,  & 
il  n'avoit  eu  d'autre  vue  que  de  recouvrer  ce  qui  lui  avoit  été  enlevé  par 
les  François.  C'eft  pourquoi  Sa  Majefté  Très-Chrêtienne  jugea  fort  julte, 
que  pour  féparer  ce  Prince  d'avec  les  Alliez,  il  fufifoit  de  lui  faire  des 
conditions  plus  avantageufes  qu'il  n'avoit  pu  fe  les  promettre  en  prenant 
parti  contre  la  France.    La  fufpenfion  d'armes ,  &  la  neutralité  accordées 

enfui- 


5-5    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   enfuite  pour  le  Milanois  &  les  Païs  d'Italie,  étoient  des  démarches  pour 

gen.  de    aCquerir  les  bonnes  gr tces  du  Pape  &  des  Princes  Italiens,  &  pour  cqiïï- 

i.'Euko-    mtnccr  $  fe  ménager  des  partifans  dans  le  Confeil  d'Efpagne  ,  en  même 

rEV  ..    temps  qu'elles  procuroient  la  réunion  des  Troupes  de  France  pour  agir  a- 

vec  plus  d'effet  contre  la  Ligue. 

L'ahandonnement  du  rétabliffement  du  Roi  Jacques ,  &  les  offres  faites 
à  l'Angleterre  &  à  la  Hollande  pour  une  Paix  particulière  n'eurent  point 
de  fuccès  ;  parce  que  ces  deux  Puiflanccs,  n'ayant  foutenu  la  Guerre  que 
pour  maintenir  les  intérêts  communs,  n'étoient  point  capables  de  la  termi- 
ner par  quelque  profit  particulier. 

Enfin  la  France  ayant  befoin  de  la  Paix  à  quelque  prix  que  ce  fût, 
elle  confentit  à  des  amples  Reflitutions  en  faveur  de  l'Efpagne,  préten- 
dant bien  qu'elles  lui  tiendroient  lieu  de  mérite  auprès  du  Gouverne- 
ment; &  s'attacha  uniquement  à  retenir  Strasbourg  &  le  plus  qu'il  lui 
fut  pofîible  de  fes  Conquêtes  fur  L'Empire.  Par  ce  moyen,  elle  efpéroit 
ménager  l'efprit  des  Efpagnols  &  fortifier  Çts  Frontières  du  côté  de 
l'Allemagne. 

Non-feulement  la  France  s'étoit  propofée  de  féparer  les  Alliez  ,  mais 
encore  de  les  mettre  en  mauvaife  intelligence  les  uns  avec  les  autres.  Le 
Duc  de  Savoye  étoit  devenu  ennemi  déclaré  de  la  Ligue  par  la  Qualité 
de  Généraliflime  des  Troupes  de  France  en  Italie.     L'Angleterre    &  la 
Hollande  fe  feroient  rendues  odieufes,  fi  elles  avoient  accepté  des  offres 
particulières  au  préjudice  des  autres  Alliez.    Les  amples  Reflitutions  faites 
à  l'Efpagne  difpofoient  les  Peuples  à  ne  vouloir  plus  rifquer  de  nouvelles 
pertes  en  fe  déclarant  contre  la  France.   Enfin  les  principales  vues ,  &  qui 
réuffirent  le  mieux ,  furent  à  l'égard  du  Traité  avec  l'Empereur  &  l'Empire.  La 
France  fit  des  Propofitions  plus  avantageufes  à  la  Maifon  d'Autriche  en  parti- 
culier qu'aux  Etats  de  l'Empire  en  gênerai ,  à  deffein  de  faire  naître  du  mécon- 
tentement entre  les  Membres  &  le  Chef;  &  en  dernier  lieu ,  elle  fit  in- 
férer à  la  fin  de  l'Article  IV.  une  claufe  conçue  en  ces  termes  ;  la  Religion 
Catholique-Romaine  néanmoins  demeurant  dans  lesdits  lieux  âinfi  rétablis  clans 
Vétat  auquel  elle  efi  à  préjent.    Cette  claufe  laiffoit  à  la  France  un  prétex- 
te pour  continuer  diverfes  hoftilitez  fur  les  Frontières  de  l'Allemagne; 
comme  il  a  été  exécuté  dans  le  Montbéliart  &  dans  le  Palatinat,  &  pro- 
duisit des  femences  de  plaintes,   de  defunion,  &  d'animofitez  entre  les 
Princes  Proteilans  &  les  Princes  Catholiques-Romains  ;   de  manière  que 
la  Paix  même  de  la  France  avec  l'Allemagne  auroit  allumé  une  guerre  ci- 
vile dans  l'Empire,  fi  les  Etats  Proteftans  n'avoient  pas  eu  plus  de  mo- 
dération que  ceux  de  la  Communion  du  Pape.     Il  eil  bien  aparent  que  le 
Roi  Très-Chrêtien  avoit  fort  à  cœur  de  faire  naître  cette  guerre  civile; 
puis  que,  fans  la  participation  de  Sa  Majeflé  Impériale  ni  des  Princes  Ca- 
tholiques Romains,  il  a  fait  commettre  de  grands  defordres  par  fes  Sol- 
dats &  par  fes  Dragons,  en  exécution  de  la  Claufe  pour  le  maintien  delà 
Religion  Romaine  dans  les  lieux  reflituez,  pendant  qu'il  ne  fongeoit  nul- 
lement 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,   M.  DCC.  I.  ST7 

lement  à  la  reftitution  de  plufieurs  Places  importantes  rendues  à  l'Empire   Aaaaraw 

par  le  Traité  de  Paix.  gen.  de 

Quelle  qu'ait  pu  être  la  Conduite  de  la  Cour,  de  France  dans  le  Traité    L'EuR0" 

conclu  à  Ryswick ,  je  ne  voy  pas  qu'il  y  ait  lieu  de  s'en  plaindre.     Sa  Po-    !* 

litique  n'étoit  point  allez  rafinée  pour  tromper  ceux  qui  ne  le  vouloienc 
pas  être  ,  &  qui  n'étoient  point  aifez  aveugles  potur  préférer  de  faux  inté- 
rêts particuliers  aux  véritables  intérêts  communs.  Depuis  le  Miniftére  du 
Cardinal  de  Richelieu,  la  France  s'étant  confirmée  dans  les  vaftes  projets 
de  s'agrandir  de  toutes  parts,  on  peut  dire  avec. vérité  qu'elle  n'a  confer- 
vé  aucun  égard  d'Amitié  fïncére  pour  aucune  autre  Puiflance.  Elle  les  a 
regardées  toutes  comme  devant  en  quelque  manière  lui  être  vaflalles  ou 
ennemies.  C'eft  fur  ce  pied  que  la  France  a  toujours  traité  avec  les  au- 
tres Etats ,  &  d'une  façon  fi  fenfible ,  que  dans  les  circonftances  -,  où  elle 
a  femblé  être  la  mieux  intentionnée ,  &  même  avoir  le  plus  befoin  des  au- 
tres, elle  a  toujours  fait  paroitre  des  marques  de  hauteur  &  de  difïimula- 
tion,  contre  les  quelles  il  étoit  nécefTaire  de  demeurer  en  méfiance  &  de 
prendre  de  grandes  précautions. 

L'Empereur  &  la  Maifon  d'Autriche  ne  doivent  poine  méconnoître  que 
la  Politique  de  la  France  eft  celle  que  Charles-Quint  a  pratiquée  pendant 
fon  régne,  &  dont  il  a  donné  les  inilrudtions  de  ion  vivant  à  Philippe  II. 
fon  fils }  ainfi,  il  leur  feroit  peu  utile  d'en  former  des  plaintes}  mais,  s'ils 
n'en  font  pas  fatisfaits ,  il  faut  la  combattre  &  travailler  à  la  renverfer  de 
fond  en  comble  par  des  voyes  de  droiture  &  d'équité. 

Il  y  avoit  plufieurs  moyens  pour  retenir  le  Duc  de  Savoye  dans  le  parti 
de  la  Ligue.  Si  les  Généraux  Allemands  avoient  eu  le  foin  qu'ils  dé- 
voient avoir  pour  s'oppofer  aux  ravages  des  Païs  de  Son  Alteiïe  Royale  : 
pour  empêcher  que  les  François  ne  pufTent  porter  le  fer  &  le  feu  jufques 
aux  portes  de  Turin  ;  s'il  y  avoit  eu  une  parfaite  fubordination  entre  les 
Chefs  des  Troupes  des  Alliez  en  Italie  ,  pour  concerter  ce  qui  étoit  de 
plus-expédient,  &  faire  exécuter  les  refolutions  arrêtées  d'un  commun  ac- 
cord ;  fi  l'on  avoit  eu  pour  le  Duc  divers  menagemens  &  de  certaines 
déférences  qu'il  pouvoit  prétendre  avec  juftice  ;  fi  on. lui  eut  propofé 
quelque  prérogative  d'honneur  extraordinaire,  n'eft-il  pas  aparent  que  les 
menaces  &  les  offres  de  la  France  n'auroient  point  été  capables  de  le  déter- 
miner à  une  Paix  particulière? 

Si  déplus  Sa  Majefté  Impériale  avoit  été  fort  févére  pour  faire  obfer- 
\-er  une  telle  difeipline  parmi  fes  Troupes,  que  les  Princes  Italiens  n'euf- 
fent  pas  fujet  d'en  être  mal  fatisfaits,  toute  la  haine  de  la  Guerre  feroit 
retombée  fur  les  François,  &  l'Italie  auroit  conçu  &  entretenu  des -dit 
portions  favorables  pour  la  Maifon  d'Autriche  préférablement  à  celle  de 
France. 

L'Empereur  ne  manqua  pas  à  la  vérité  de  bien  connoitre  que  plus  la 

France  étoit  empreffée  à  folliciter  une  Paix  générale  ,  &  plus  il  devoit 

s'intérefTer  pour  la  continuation  de  la  Guerre  ;  mai? ,  ce  n'en  étoit  plus  le 

temps.     Les  principales  forces  de  l'Allemagne  avoient  toujours  été  em- 

Tomc  XI,  Dddd  ploiées 


Srt     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Awaires  ploiées  à  des  Conquêtes  fur  le  Turc  ,  au  profit  de  la  Maifon  d'Aûtri- 
gen.  de  che,  pendant  qu'il  n'y  avoit  eu  qu'une  médiocre  défenfe  oppofée  aux 
l'Euro-  jnvaflons  des  François  fur  les  Pais  des  Alliez.  Les  Peuples  d'Angle- 
FE'  terre  &  de  Hollande  étoient  rebutez  par  les  dépenfes  exceiïives  qu'ilç 
avoient  fournies  ,  pour  foutenir  les  intérêts  de  la  Maifon  d'Autriche; 
la  quelle,  bien  éloignée  de  prendre  des  mefures  pour  une  jufte  recon- 
noiffance  envers  les  Anglois  &  les  Hollandois ,  fembloit  au  contraire 
confpirer  par  fa  lenteur  pour  les  épuifer  &  les  ruiner.  Quelque  bon- 
nes difpofitions  que  puffent  avoir  le  Roi  de  la  Grande-Bretagn^&  les  E- 
tats-Generaux  des  Provinces-Unies  en  faveur  de  la  Ligue  ,  C  étoit  une 
néceffité  abfoluë  de  prendre  foin  de  l'intérieur  de  leurs  Gouvernemens; 
d'autant  plus  qu'il  y  avoit  très-peu  à  efpérer  des  démarches  du  Confèil  de 
Sa  Majefté  Impériale.  La  Cour  de  Vienne  pouvoit-elle  avec  juflice  fe 
récrier  contre  les  projets  de  Paix  ,  &  prétendre  qu'on  devoit  fe  repofer 
fur  les  promettes  qu'elle  donnoit  de  faire  à  l'avenir  des  efforts  de  guerre 
tout  extraordinaires  contre  la  France  ? 

Le  Règne  du  Roi  Jacques  II.  &  la  Révolution  arrivée  en  1688.  avoient 
donné  lieu  à  de  grands  defordres  dans  les  Finances  &  dans  les  principales 
Affaires  de  la  Grande-Bretagne.  Cependant ,  la  Nation  par  une  fageffe  & 
par  une  générofité  bien  différentes  de  la  politique  de  la  plupart  des  autres 
Peuples,  avoit  préféré  le  foin  de  remplir  fes  engagemens  envers  la  Li- 
gue à  celui  de  remédier  entièrement  à  fes  propres  befoins.  Quelles 
nombreufes  Troupes  d' Anglois  paffées  au  fecours  des  Etrangers?  Quel- 
les fommes  extraordinaires  levées  pour  les  entretenir  ?  Et  quelles  obli- 
gations les  Alliez  ne  devoient-ils  pas  avoir  à  la  valeur  de  ces  Trou- 
pes? La  France  étoit  fi  bien  perfuadée  qu'elle  n'avoit  point  d'Ennemis 
plus  redoutables ,  que  fa  plus  grande  aplication  étoit  d'exciter  conti- 
nuellement la  Nation  à  faire  attention  au  préjudice  qu'elle  pouvoit  rece- 
voir des  dépences  excefiives  &  de  la  quantité  de  Troupes  fournies  à  des 
Alliez,  qui  fe  déchargeoient  fur  elle  du  plus  grand  fardeau  de  la  Guerre, 
fans  efpérance  d'aucune  récompenfè.  Combien  fe  trouvoit-il  de  fortes  de 
gens  intéreffez  à  foire  valoir  des  Réflexions  fi  plaufibles  en  elles-mê- 
mes? 

La  Nation  avoit  encore  un  motif  plus-preffrnt  que  ne  pouvoit  être 
celui  des  Dépenfes  &  des  Troupes  ;  c  etoit  la  confèrvation  de  la  vie 
&  de  la  fanté  du  Grand  Roi  que  Dieu  avoit  élevé  fur  le  Trône  de  la 
Grande-Bretagne  pour  le  Rétabliffement  de  la  Religion  &  des  Libertez 
du  Gouvernement.  La  grandeur  d'ame  ,  la  foy  des  Traitez  ,  le  zèle 
pour  le  maintien  de  l'équité  naturelle  entre  tous  les  Peuples  portoient 
ce  Prince  à  prendre  tous  les  foins  imaginables  pour  réveiller  ,  éclairer 
&  mettre  en  mouvement  les  Puiffances  Alliées,  félon  que  leurs  vérita- 
bles intérêts  le  requeroient  :  chaque  année,  il  paffoit  &  repaffoit  la 
Mer  :  fes  fatigues  &  fes  travaux  n'avoient  point  de  relâche  :  fa  Per- 
fonne  étoit  continuellement  eypofée  hors  de  fes  Royaumes  aux  injures 
des  fajjbns ,   aux  hazards  de  lu  Guerre,  aux  périls  des  combats  ,  aux 

dan- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  1.  fS9 

dangers  des  fiéges  &  à  toutes  les  occafions  auxquelles  il  falloit,  ou  pré-  Affaire» 
venir,  ou  repouffer,  la  plus  grande  furie  des  armes  de  la  France:  l'ab-    G™'  DE 
fence  du  Monarque  &  les  rifques  d'une  vie  fi  prétieufe  étoient  favora-    L   ™°' 
blés  aux  Ennemis  &  aux  mal-intentionnez  ,   pour  former  des  complots    * — - — 
&  machiner  des  confpirations  contre  le  Souverain  au  retour  de  fes  glo- 
rieufes  Campagnes.     Quels  pouvoient    &   quels  dévoient  être  les  fenti- 
mens  &  les  affections  des  Peuples   de   la   Grande-Bretagne  ,    lorfqu'ils 
venoient  à  confidérer  que  les  autres   Têtes    Couronnées   vivoient   tran- 
quiles  en  toute  feureté  dans  le  milieu  de  leurs  Etats?  Si  une  Providen- 
ce finguliére  paroiffoit  viflblement  veiller  à  la  confervation  du  Monarque 
que  le  Ciel  avoit  donné  pour  Chef  à  la  Nation  Angloife  &  à  toute  la  Li- 
gue, la  prudence  humaine  exigeoit  que  les  PuifTances  Confédérées  contri- 
buaient tous  les  efforts  poffibles,  pour  féconder  les  faveurs  du  Ciel  ,   & 
mettre  à  exécution  les  fages  confeils  que  la  Providence  infpiroit  au  cœur 
d'un  tel  Chef  pour  le  bien  commun  de  toute  l'Europe. 

L'émulation  &  le  reffentiment  devoient-ils  avoir  de  moindres  effets  fur 
les  Princes  d'Autriche ,  que  la  gloire  des  Conquêtes  en  produifoit  dans  les 
Princes  de  France  ?  Il  eft  confiant  que  les  Anglois ,  après  être  demeurez 
victorieux  des  attaques  particulières  des  François  contre  leurs  Royaumes, 
fans  le  fecours  de  la  Maifon  d'Autriche,  ont  plus  dépenfé  &  fe  font  expo- 
fez  à  des  pertes  plus  confidérables  en  faveur  de  cette  Maifon ,  qu'ils  n'ont 
fait  pour  eux-mêmes.  Que  cette  valeur  &  cette  générofité  leur  ayent  ac- 
quis une  gloire  immortelle,  il  n'eft  pas  moins  certain  que  toute  cette  gloi- 
re fe  feroit  tournée  en  blâme,  fi  ils  n'avoient  eu  de  jultes  égards  pour  ne 
point  s'épuifer  entièrement ,  &  pour  réformer  les  defordres  introduits 
dans  leurs  propres  Affaires.  La  Maifon  d'Autriche  ayant  laiffé  échaper 
les  occafions  de  la  Guerre  ,  les  Anglois  dévoient  profiter  de  celles  de 
la  Paix. 

La  Cour  de  France  offroit  des  Reflitutions  fi  amples ,  qu'elles  fem- 
bloient  tourner  à  fa  honte  :  elle  n'étoit  pas  fâchée  qu'il  fe  trouvât  grand 
nombre  de  gens  capables  de  fe  laiffer  flater  de  cette  honte  apparente;  ç'é- 
toit  le  moyen  de  cacher  les  grandes  vues  qu'elle  méditoit  de  faire  valoir 
à  l'ombre  de  la  paix.  D'autre  côté ,  il  étoit  facile  d'apercevoir  que  la  paix 
étoit  néceffaire  à  toute  l'Europe,  &  qu'elle  pouvoit  être  encore  plus-utile 
aux  PuiiTances  Confédérées  ,  qu'à  la  France.  La  Paix  de  l'Europe  ne 
pouvoit  manquer  d'être  fuivie  de  celle  de  l'Orient  à  l'avantage  de  l'Empe- 
reur &  de  toute  l'Allemagne.  Le  rétabliffement  de  Commerce  pouvoit  ré- 
parer les  pertes  &  reproduire  l'abondance  dans  l'Angleterre  &  dans  la 
Hollande  en  moins  d'années,  que  la  fécondité  ne  pouvoit  renaître  dans 
les  Provinces  de  France.  D'ailleurs  le  temps  de  Paix  étoit  plus  propre 
que  celui  de  la  guerre  pour  contreminer  &  faire  diffiper  en  fumée  tous  les 
projets  que  la  France  pourroit  former. 

La  plupart  des  raifons  qui  engageoient  les  Anglois  à  terminer  la  Guer- 
re, y  engageoient  également  les  Hollandois.     Les  deux  Nations  n'a- 

Dddd  2  voient 


PE. 


S 60   MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  voient  qu'un  même  Chef-  &  la  même  Providence  qui  avoit  mis  les. Cou- 
gen.  n£  ronnes  de  la  Grande-Bretagne  fur  la  Tète  de  Guillaume  III.  lui  avoit  dès 
L'^K°  fa  jeuneffe  confié. le  Gouvernement  General  des  Provinces-Unies  ,  pour 
arrêter  les  lnvafions  des  François  &  rétablir  la  République  dans  fa  premiè- 
re fplendeur.  Les  Etats-Generaux  connoiffoient  fore-bien  que  la  confer- 
vation  de  leur  Liberté  dépendoit  de  celle  de  Sa  Majeflé  j  parce  qu'ils  a- 
voient  abfolument  befoin  d'un  Chef  dans  les  conjonctures  préfentes  ,  & 
outre  qu'il  n'étoit  pas  facile  d'en  choifir  un  au  défaut  du  Roy  Guillaume, 
il  étoit  certainement  impoiîible  qu'il  s'en  pût  rencontrer  aucun  d'une  fem- 
blable  fagefTe  &  d'un  femblable  mérite.  De  plus,  le  Commerce  étant  pref- 
que  l'unique  fotirce  d'où  les  Provinces  puiflent  tirer  des  richeffes  &  les 
commoditez  nécefîaires  à  la  vie,  fon  altération  &  les  pertes  caufées  par  la 
longueur  de  la  Guerre  inquiétoient  les  Peuples  ,  &  faifoient  naître  des 
plaintes  contre  la  lenteur  des  Alliez.  Il  eil  d'une  extrême  conféquence  à 
des  Républiques  compofées  de  plufieurs  Provinces ,  qui  n'ont  point  de  dé- 
pendence  abfoluë  les  unes  des  autres  ,  &  qui  fe  trouvent  remplies  de  peu- 
ples de  divers  Nations  &  de  Religions  oppofées,  de  prévenir  tout  ce  qui 
peut  donner  lieu  à  quelque  mésintelligence  dans  le  Gouvernement  &  à 
des  foulevements  populaires.  Enfin ,  les  fommes  immenfes  avancées  à  l'Ef- 
pagne  par  la  Hollande  étoient  une  matière  digne  d'une  grande  attention 
pour  les  Etats-Generaux.  11  faloit  toujours  fournir  de  nouvelles  avances, 
quoique  les  fonds ,  bien  loing  d'être  inépuifables  ,  eufTent  befoin  d'etre 
•  remplis  j  afin  de  fe  précautionner  contre  la  France,  que  l'on  fçait  avoir  ré- 
folu  en  un  temps  ou  en  un  autre  la  ruine  ou  le  pillage  des  Provinces-U- 
nies ,  en  vengeance  de  ce  qu'elles  ont  été  un  des  plus  puifTans  obflacles  à 
fes  vafles  projets.  D'autre  part,  les  chutes  &  rechutes  de  Charles  II.  fai- 
foient apréhender  une  Révolution  ou  de  grands  changemens  dans  la  Mo- 
narchie d'Efpagne  :  un  nouveau  Roi  pouvoit  former  divers  prétextes  & 
même  devenir  Ennemi,  afin  de  ne  point  acquiter  la  quantité  de  Millions 
dont  la  Couronne  fe  trouveroit  redevable  à  la  Hollande  :  les  difpofitions 
mêmes  des  Miniflres  Efpagnols  encore  plus  languifîantes  &  plus-incertai- 
nes que  la  fanté  de  Sa  Majeflé  Catholique,  avec  la  prévention  de  cette 
fuperilitieufe  Nation  en  faveur  du  fuccès  des  armes  de  France  en  Cata- 
logne, faifoient  afTez  juger  que  de  nouvelles  fommes  prêtées  à  l'Eipagne 
•ne  pouvoient  être  d'aucune  utilité  pour  la  Caufe  commune,  &  que  la  Paix 
feroit  plus  avantageufe,  il  la  France  vouloit  convenir  de  Proportions  rai- 
fonnables,  comme  elle  s'emprefîbit  de  le  perfuader. 

C'eil  pour  cela  que  Sa  Majeflé  Britannique,  qui  avoit  été  le  Confeil  & 
le  Bras  de  la  Ligue  pendant  la  Guerre  ,  prit  foin  d'abréger  les  Négocia- 
lions,  en  faifant  expliquer  le  Roi  de  France  avec  précifion  ,  &  en  arrêtant 
-les  principales  conditions  à  la  fatisfa&ion  de  toutes  les  Puiffa  ne  es  Confédé- 
rées. On  pouvoit  bien  s'en  raporter  à  un  Roi  qui  avoit  une. parfaite  con- 
noifTance  des  véritables  intérêts  de  chaque  Etat  5  qui ,  non-obitant  les  be-' 
Jbin  de  Ces  propres  Royaumes,  non-obitant  -la  perte  irréparable  de  fa  glo- 
rieufe  Epoufe,  la  Reine  Marie  de  triomphante  mémoire,  non-obflant  les 

divers 


DE 

l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  ï.  r6i 

divers  mécontemens  qu'il  auroit  pu  refTentir  de  la  conduite  des  Alliez,   Affaires 
n'a  jamais  ceiTé  d'expofer  fa  propre  vie  à  la  tète  des  Armées  pendant  tou-    G™ 
tes  les  Campagnes  ;  qui  n'a  fait  aucune  entreprife  de  guerre  ni  aucune 
condition  de  paix  à  ion  avantage  particulier  ou  à  celui  de  l'Angleterre,  ou 
de  la  Hollande. 

J'ay  fait  un  détail  de  plufieurs  motifs  qui  ont  pu  engager  Sa  Majeflé 
Britannique  &  les  Seigneurs  Etats-Generaux  des  P.  U.  de  iè  déterminer  à 
la  conclufion  d'une  Paix  Générale,  quoyque  l'Empereur  eût  plus  d'incli- 
nation pour  continuer  la  Guerre  -,  afin  de  donner  plus  fenfiblement  à  con- 
noître  que  les  Plénipotentiaires  de  Sa  Majeflé  Impériale  n'ont  pu  fans 
une  très-grande  injuitice  foufcrire  à  la  cîaufe  concernant  la  Religion  an- 
nexée au  quatrième  Article  de  la  Paix  de  Ryiwkk  entre  l'Allemagne  &  la 
France,  foit  à  deflein  de  chagriner  tout  le  Corps  des  Proteflans  &  en  par- 
ticulier l'Angleterre  &  la  Hollande  ,  qui  en  furent  très- mécontentes  ,  & 
qui  s'y  oppoférent,  autant  que  les  circonftances  du  temps  le  permettaient; 
foit  par  un  zélé  de  Catholicité  Romaine  entièrement  oppofé  aux  intérêts 
&  aux  intentions  de  l'Empereur  leur  Maître. 

La  Relation  de  l'AmbafTade  Impériale  de  la  Haye,  envoyée  à  la  Cour 
de  Vienne ,  &  communiquée  à  la  Diète  de  Ratisbonne  ,  fuffit  pour  four- 
nir une  pleine  Inltruélion  fur  cette  matière.  On  trouve  en  premier  lieu, 
que  les  Miniiïres  de  l'Empereur  fe  jufliflent  touchant  les  plaintes  formées 
par  les  Princes  de  l'Empire  contre  leur  procédé  dans  les  Délibérations  & 
I\éiblutio>ns  concernant  les  Affaires  générales  5  &ils  concluent  en  ces  termes.- 
Mais  il  efi  confiant  aujji ,  £?  l'effet  le  démontre ,  que  les  Minifires  de  V Empire  voyant 
qu'il  n'y  avoit  plus  rien  à  obtenir  des  François  ,  nous  ont  obligé  d'y  acquiefeer  ;  de 
forte  que  tout  ce  que  nous  avons  traité  en  général,  £f  en  particulier ,  a  été  fait  de  leur 
fçu,  âf  de  leur  consentement ,  &  mime  fur  leurs  grandes  infiances  &  empreffementsy 
principalement  quand  ils  virent  V Empire  abandonné  des  autres  Alliez  ;  £p  quand, 
félon  V opinion  de  quelques-uns ,  nous  perfifidmes  trop  à  demander  une  Déclaration  des 
Préliminaires  plus  claire  fur  le  rétabliffement  de  la  Paix  de  Wefiphalie ,  &f  quand 
enfuite  nous  finies  un  peu  plus  de  difficulté  qu'ils  ne  fouhaitoient  de  nous  accommo- 
der des  points  dictez  le  11.  de  Février ,  &  dans  la  refiitution  de  la  Ville  de  Stras- 
bourg ,  de  nous  contenter  de  l'état  d'occupation  d'icelle  ,  plufieurs  Minifires  de  l'Em- 
pire £f  Etrangers  prirent  tout  cela  pour  un  prétexte  recherché  de  nous  tout  exprès  pour 
en  retarder  la  conclufion  de  la  Paix ,  &  pour  faire  continuer  la  Guerre ,  £f  ils  nous 
le  reprochèrent,  &f  d'autres  prétendues  fuper  cher  les ,  avec  des  paroles  affez  dures,  en 
nous  menaçant  même ,  qu'en  cas  d'un  plus  grand  retardement ,  ils  s'affifieront  eux- 
mimes;  &?  finalement ,  que,fuivant  l'exemple  de  ceux ,  qui  n'étoient  pas  encore  tant 
preffez  qu'eux,  ils  fe  feront  comprendre  dans  les  Traitez  d'Efpagne ,  d'Angleterre,  & 
de  Hollande,  comme  on  le  leur  avoit  déjà  offert. 

En  fécond  lieu,  on  vient  aux  plaintes  des  Etats  Proteflans  qui  fe  trouvofent 
principalement  offenfez,  de  ce  que  bien  loin  de  traiter  de  l'Intérêt  de  leur  Religion], 
on  n'a  pas  voulu  feulement  les  y  écouter,  ni  admettre  leurs Remontrances ,  ni  en  don- 
ner quelque  Déclaration  par  écrit  pour  la  Médiation  ;   £?  qu'on  s'efi  formalifé  même 

D  d  d  d  3  dé 


l-'KUHO- 
PK. 


Sôz    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aftaires    de  leurs  fi  jufies  demandes ,  d'où  il  ejl  arrivé,  que  la  claufe  en  queftion  ,  de  l'Arti- 
gj=.n.  de     cie  quatrième,  &?  fi  préjudiciable  à  la  Paix  de  Religion  dans  V Empire  ,  a  été  propo- 
fée  par  l'Ambaffade  de  France  dans  un  tems  où  les  Protefians  avoient  à  grand  peine 
encore  quelques  heures  de  refie  ,  pour  Je  réfoudre.     Ceft  ce  qui  n'auroit  pu  arriver, 
fi  l'on  avoit  traité  ,   dés  le  commencement  ,    de  l'Intérêt   de  leur  Religion  avec  les 
François.    Nous  ne  défavoûons  pas ,  pourfuit  l'Auteur  de  la  Relation ,    que  quand 
au  mois  de  Mai  on  commençoit  à  former  les  Prétentions  de  Votre  Majefié  ,    &f  le 
mois  fuivant  à   conférer  Article  par  Article  ,    ce  qui  discontinua  pourtant  avant 
qu'un  fortit  du  premier ,  nous  ne  jugeâmes  pas  à  propos  d'inférer  dans  nôtre  projet  de 
V Article  3.  que  nous  communiquâmes  aux  Minifires  de  V Empire ,   les  mots   in  Sa- 
cris  &  Profanis  ,  pour  la  reftitution  que  nous  demandâmes  de  la  Paix  de  Wefiphalie, 
parce  que  le  rétabliffement  abfolu  &?  entier  de  ladite  Paix  s'étend  également  en  toutes 
chofes ,  pour  tout  tems  ,  £f  fur-tout  ce  qui  doit  être  rendit  à  V Empire  en  conformité 
â'icclle ,  &?  qu'il  feroit  d'autant  plus  fuperflu  d'en  demander  le  confentement  des  Fran- 
çois ,  qu'on  leur  donneroit  plutôt  occafion  d'y  faire  quelques  exceptions.     Il  nous  fem- 
Ha  même  pour-lors  ,  que  plus  d'un  Minifire  des  Protefians  avoit  approuvé  nôtre  pro- 
pofition ,  âf  que  quelques  autres  infifioient ,  plutôt  à  la  perfuafion  des  Etrangers  ,  qui 
font  d'une  même  Religion  avec  eux ,  que  de  leur  propre  mouvement.    La  Médiation  de 
Suéde ,  mémefon  Plénipotentiaire  pour  la  Duché  de  Brème ,  ne  trouvèrent  par  après  à 
propos  d'alléguer  d'autre  raifon  que  de  dire  que  l'un  valoit  l'autre  ,  quand  au-lieu  des 
mots:  Reitituatur  Ducatus  Bipontinus  ad  normam  Inftrumenti  Pacis  Weftpha- 
îicce  tam  in  Politicis  quàm  in  Ecclefiafticis  cum  annexis  ;  c'efi-à-dire  ,  (Que  le 
Duché  de  Deux-Ponts  foit  reftitué  félon  la  teneur  du  Traité  de  Paix  de  Wefl- 
phalie  }  tant  pour  ce  qui  concerne  les  chofes  Politiques  que  les  Ecclefiaftiques 
avec  leurs  dépendances)  qu'ils  avoient  mis  auparavant  dans  l'Article  de  Deux-Ponts, 
qu'ils  7ious  donnèrent  pour  porter  aux  François  ,   ils  foufrirent  par  après  du  change- 
ment, fans  nôtre  communication,  &  fe  contentèrent ,  de  gré  ou  de  force,  de  ces  feuls 
mots  ad  normam  Pacis  Weftphalicœ  c'efi-à-dire,  (félon  la  teneur  de  la  Paix  de 
Weftphalie)  qui  fe   trouvent  préfentement  exprimez  dans   l'Article  9.  du  Traité  de 
Rysvoick.   Cependant,  après  avoir  lu  l'Inflruàion  de  l'Empire  ,  cïf  que  quelques  Mi- 
nifires Protejians  fe  furent  chargez  de  répondre  du  tout ,  nous  ne  manquâmes  pas 
d'inférer  par  deux  fois  les  fusdits  mots  dans  notre  réponfe  aux  Articles  3.  4.  &  5.  du 
Projet  des  François ,  que  nous  leur  renvoyâmes  encore  le  1 .  d'Août  pour  y  délibérer , 
£f  que  nous  ne  portâmes  aux  François  que  le  5.  dudit   mois    d'Août  :  In   facris   & 
profanis  plenè  executioni  mandetur,  &c.  quse  nullâ  ex  caufâ  feu  rationi  in  Ec- 
clefiafticis vel  politicis  à  Rege  Chriflianifiimo  mutata  feu  innovata  funt  ,   abo- 
leantur  ac  redintegrentur ,  &c.  c'efi-à-dire,   (foit  entièrement  mis  à  exécution 
tant  pour  le  Sacré  que  pour  le  Profane,   &c.  que  tous  changemens  ou  inno- 
vations faites  fans  caufe  ou  fans  raifon  en  matière  Ecclefiaftique  ou  Politique 
par  le  Roi  Très-Chrétien  foient  abolies  &  rétablies  en  leur  premier  état,ox. 
nous  ajoutâmes  conjointement  avec  les  Minifires  de  l'Empire ,    &f  fur  leur  demande  , 
le  mot  Catholica  aux  Articles  15.  &f  16.  âf  nous  répétâmes  enfuite  l'un  &  l'autre 
dans  nôtre  premier  Projet  de  Paix,  que  nous  fumes  contrains  d'abréger  dans  le  com- 
mencement d'Octobre. 

L'Au, 


FF.. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  I.  f6} 

L'Auteur  continue  après  cela  ,   qu'il  eft  vrai   que  les  Minières    des  Protes-    Affaires 
tans  propoférent  le  7.  d'Octobre  dans  l'Aflemblée  commune  de  ceux  de  l'Em-      GFN-  DB 
pire,  &  que  deux  Plénipotentiaires  de  Princes  demandèrent  enfuite  à  Ryswick 
aux  Miniitres  de  l'Empereur  d'ajouter  à  l'Article  troifiéme  une  claufe  dont  voi- 
ci la  fubftance  :  Que  la  Paix  de  Wejlphalie ,  £?  tout  ce  qui  avoit  été  exécuté  en  con- 
féquence ,  demeurera  félon  toute  fa  force  ,  £f  que  l'on  n'admettra  aucune  Exception  ni 
aucune  rejlritlion ,  au  préjudice  de  ce  Traité  qui  doit  fervir  de  Loy  fondamentale  &? 
perpétuelle  au  Gouvernement  de  l'Empire  ,  fpécialement  à  l'égard  des  Affaires  Eccle- 
fiajïques ,  félon  qu'il  ejl  porté  par  les  Articles  4.  &  5.  où  l'on  a  expreffement   mar- 
qué Vannée   1624.  6f  l'état  auquel  les  chofes  fe  trouvaient  immédiatement  avant  les 
Troubles  de  Bohême ,  qu'au  contraire  on  retranchera  incontinent  tout  ce  qui  fe  fera, 
trouvé  de  nouveautez  introduites  pendant  le  tems  de  la  guerre  pré  fente  dans  les  Ter- 
res apartenantes  en  quelque  manière  que  ce  puiffe  être  à  l'Empire  Rom.  £f  qui  doivent 
lui  être  rendues  par  le  Traité  de  Paix  ;  £p  pour  ce  qui  ejl  des  Affaires  Politiques  on 
n'y  admettra  point  d'autres  changemens  que  ceux  des  quels  on  ejl  expreffement  conve- 
nu dans  le  Traité.    Il  fut  auffi  démandé  qu'on  ajoutât  à  l'Article  6.  touchant  la 
Reftitution  de  Strasbourg  :  Accorde  auffi  Sa  Majejlé  Très-Chrétienne ,  non-feulement 
à  la  fusdite  ville  de  Strasbourg ,    mais  encore  à  tous   les  habitans  des  lieux  qui  lui 
feront  cédez  par  l'Empire ,  le  libre  exercice  de  leur  Religion  avec  fes  prérogatives ,  de 
la  même  manière  dont  ils  en  ont  jouï  auparavant  fous  la   domination  de  l'Empire, 
&f  une  pleine  jouiffance  de  toute  forte  de  revenus ,  de  quelque  nature  qu'ils  puiffent 
être  ;  fur  quoi  l'Auteur  s'exprime  ainli:  Mais  outre  que  nous  avions  grande  rai/on 
de  nous  tenir ,  autant  qu'il  étoit  poffible ,  à  la  lettre  de  l'injlruiïion  de  l'Empire,  & 
de  ne  retarder  pas  davantage  une  Négociation ,  dont  le  terme  étoit  fi  court ,  ni  de  la 
rendre  plus  difficile  par  des  chofes  nouvelles  £f  particulières ,   qui  n'y  appartiennent 
pas ,  ou  qui  fe  trouvent  déjà  fuffifamment  comprifes  dans  le  Projet  général  ;  &f  que 
nous  ne  J avions  pas  fi  V on  s'y  pouvoit  engager  davantage,  la  Lijle  des  Rejlitutions  à 
faire  en  matière  de  Relgion  n'étant  pas  encore  prête  ,  mais  feulement  promife  par  les 
Protejlans  ;  &c. 

Les  Curieux  prendront  la  peine  de  lire  toute  la  Relation    qui  eft  imprimée 
en  divers  Ouvrages.    Elle  ne  contient  aucune  Période  qui  ne  mérite  des  Ré- 
flexions très-févéres.    Je  paife  à  ce  qui  concerne   plus  précifément  la  Claufe 
annexée  au  quatrième  Article.     L'Ambaffade  de  France  prétendit  enfuite   le  22. 
d'Octobre,  lorsque  nous  examinâmes  derechef  avec  elle  notre  Projet  de  Paix,  effacer 
pareillement  les  mots:  in  Sacris  &  Profanis,  qui  fe  trouvoient  encore  dans  l'Article 
troifiéme-,  mais  Elle  les  y  laiffa  enfin  fur  nos  infiances  ,    à?  fe  contenta  de  dire  ,   en 
préfence  des  Médiateurs ,  pour  raifon  de  cette  condefcendance  ,   que  ces  mots-là  étant 
fuivis  de   ceux-ci  ,   nifi  quatenus   nunc   aliter  expreffe   conventnm  fuerit ,    ne 
pourroient  aucunement  préjudicier  à  la  claufe ,    quelle  méditoit  de  faire  en  matière 
de  Religion ,  8?  qu'elle  s' étoit   refervée  expreffement  plus  d'une  fois.     Tout  ceci  fe  fit 
de  la  manière ,  que  nous  venons  de  dire  ,  en  préfence  des  Médiateurs  qui  font  de  la 
Confefjion    d'Ausbourg  ,     ou  par    eux-mêmes  ,    &f   nous    ne    manquâmes   jamais , 
foit  après ,  foit  pendant  nos  conférences,  où  quelqu'un  de  nous  fe  levait  tout  exprès 
pour  aller  trouver  les  Minijlres  de  l'Empire  dans  leur  appartement,  de  communiquer 


ex- 


PE. 


564    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  exactement  tout  ce  qui  s'y  pajj'a ,  &  le/dits  Minifires  de  l'Empire  le  remarquèrent  d'a- 
gf.n.  de  bord  &  l'écrivirent  fi  ponctuellement  que  nous  ne  finies  pas  difficulté ,  de  le  tirer  par 
l'Euro-  apr^s  ^  ieurs  Protocoles  £f  de  leurs  Relations  pour  nôtre  ufage  ,  &  de  prendre  des  Co- 
pies de  ce  que  le  Directoire  Electoral  de  Maye?ice  leur  avoit  diCté ,  £f  qui  pour  la  plu- 
part étoit  beaucoup  plus  circonflancié ,  que  nos  très-humbles  raports  que  nous  finies  à 
Vôtre  Majejlé  dans  Vembaras  de  nos  autres  occupations ,  &  où  toutes  cbofes  riéteient 
pas  toujours  bien  comprifes  de  nous  tous.  L'affaire  de  la  Déclaration  que  nous  refufâ- 
mes  de  faire  au  Protocole  des  Médiateurs  £f  de  nôtre  emportement ,  comme  on  dit,  dans 
le  fuffrage  commun  des  Proteflans ,  Je  réduit  proprement  à  ceci  :  quand  l' après-midi  du 
29.  d'OCtobre  fur  nos  injiances  &  fur  celles  des  Minflres  de  V Empire,  les  Ambaffa- 
àeurs  d'Efpagne ,  d'Angleterre,  £5?  de  Hollande  comparurent  avec  nous  à  Ryswick ,  pour 
tâcher  d'obtenir  d'avantage  en  ces  cbofes  qui  avaient  été  déjà  plufieurs  fois  proposées , 
mais  pas  encore  ajuflées ,  £f  que  ceux  des  deux  dernières  Ambaffades  avec  quelques  Mi- 
nflres Proteflans  de  V Empire  pafférent  tout  le  teins  jufqu'à  7.  ou  8.  heures  du  foir 
à  aller  &f  venir  de  la  Chambre  des  Médiateurs  ,  nous  prefsdmes  également  tant  ceux-là 
que  les  Médiateurs  de  paffer  dans  ce  peu  de  tems  qui  refloit  encore,  leurs  Offices  pro- 
mis ,  ou  de  nous  donner  ce  tems  pour  continuer  nôtre  conférence ,  £?  pour  y  achever 
l'Article  difficile  du  Palatinat  :  £f  qu'auparavant  les  Alliez  demandeient  d'en  conférer 
avec  nous ,  les  Ambaffadeurs  d'Angleterre  âf  de  Hollande  entrèrent  dans  la  Chambre 
des  Médiateurs.  .  .  .  Le  Comte  de  Bonde  premier  Médiateur  &  Ambaffadeur  de  Sué- 
de nous  dit  d'abord  au  nom  de  tous  les  autres ,  que  les  Proteflans ,  ayant  trouvé  la 
claufe  comprife  dans  tel  Nouveau  Traité,  demandaient  pour  leur  fureté  £f  tranquilité 
une  Déclaration  de  nous ,  portant  que ,  touchant  leur  Religion ,  Vôtre  Majeflé  ferait 
toujours  objerver  âf  exécuter  rigoureufement  les  Traitez  de  la  Paix  de  Weflphalie ,  la, 
Capitulation  de  fon  EleClion,  les  Recès  d'exécution  de  Nuremberg,  &f  toutes  les  autres 
loix  de  l'Empire-,  £f  comme  nous  marquâmes  nôtre  étonnement  fur  des  demandes  extra- 
ordinaires £f  faites  par  des  paroles  fi  dures  ,  vil  principalement  que  V obfervation  de  la, 
Capitulation  6°  des  Loix,  continuée  exactement  par  Votre  Majejlé,  étoit  notoire  dans 
l'Empire ,  £f  que  d'ailleurs  ce  71' étoit  pas  ici  le  lieu  ni  le  tems  de  nous  en  demander  de 
nouvelles  Affuranccs  &f  Déclarations ,  le  fécond  Médiateur  Suédois  ,  &f  après  luy  le 
Sieur  de  Schmetau  prit  la  parole  ,  £p  en  préfentant  le  nombre,  n'en  défifla  point  juf- 
qu'à ce  que  Manfieur  le  Comte  de  Caunitz  l'eût  lu ,  un  Ambaffadeur  étranger  fe  leva 
de  fon  chef,  âf  apporta  au  milieu  de  nôtre  cercle  un  guéridon  avec  la  chandelle;  mais , 
comme  je  remarquai  leur  manière  d'agir  fi  peu  conforme  à  ce  qu'ils  doivent  au  carac- 
tère d'une  Ambaffade  Impériale  ,  &  que  je  confidérai  d'ailleurs  le  peu  de  tems  £f  d'heu- 
res qui  nous  refloit  pour  nôtre  négociation,  &?  principalement  les  foupirs  que  tant  d'â- 
mes pouffoient  inflament  au  Ciel  pour  une  prompte  conclufion ,  je  mis  ledit  num.  fur  le 
guéridon ,  êf  après  leur  avoir  dit  &  répété  que  dans  le  tems  où  les  autres  avoient  déjà 
leur  Paix  faite ,  ou  leur  inclufion  dans  celle  des  autres,  perfonne  ne  pouroit  trouver 
mauvais,  que  nous  Jonglons  auffi.à  la  conclufion  de  celle  de  Vôtre  Majeflé  Impériale  & 
de  tout  l'Empire,  fans  nous  laiffer  amufer  ou  empêcher  par  des  cbofes  qui  ne  font  ni 
lie  fa  fon,  ni  de  ce  lieu,  je  m'en  allai  dans  la  Chambre  des  Conférences ,  où  un  mo- 
ment après,  les  Médiateurs  ô?  les  Ambaffadeurs  de  France  fe  rendirent  auffi:  on  y 
recommença  l'Affaire  du  Palatinat  3  &  les  François  demandèrent  quelques  ebangemens 

dans 


l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.  765 

dans  V  Article  feparé  ;  convenant  avec  nous ,  que  moy  le  Baron  de  Seillern  pour  y  tra-  Atfaxrei 
vailler  plus  à  mon  aijè  £f  plus  promptement  que  dans  cet  embaras  d'autres  difcours ,  je  cr;N-  De 
vie  retirajje  dans  un  des  appartemens  des  Médiateurs  qui  étoit  le  plus  proche.  Cepen- 
dant les  Ambaffadeurs  de  France  expoférent  l'ordre  de  leur  Roy  pour  ajouter  à  l'Arti- 
cle quatrième  la  clauje  qui  concerne  la  Religion  ;  £?,  plus  les  Médiateurs  s'y  oppoférent , 
plus  les  François  y  infijlerent ,  voulant  ainfi  à  l'exemple  des  autres  montrer  leur  zélé 
pour  leur  ancienne  &f  véritable  Religion.  Tout  ce  que  nous  oppofdmes  aux  François, 
dans  le  dejjein  de  conferver  VUniun  dans  l'Empire ,  nefervit  de  rien.  L'AmbaJJade  de 
France  répondit  fimplement ,  qu'elle  avoit  des  ordres  contraires  du  Roy ,  dont  elle  n'o- 
feroit  pas  s'éloigner  ,6f  que  par  la  rejlriâion  de  ladite  clauje  il  fembleroit  qu'on  voulue 
féparer  un  cheveu  en  quatre  parties ,  voula?it  dire  que  la  chofe  étoit  fi  petite  de  foi- 
même.    Les  Médiateurs  n'y  rèuffrent  pas  mieux  quand  ils  répétèrent  leurs  premières 

injla?ices  &?  offices  ,  tant  de  leur  chef  qu'au  nom  des  Anglois  &?  des  Hollandsis 

Et  votre  Majejlé  trouvera  d'un  coté  mal  fondé  ce  qu'on  nous  a  voulu  imputer ,  comme 
fi  on  avoit  refufé  d'écouter  les  Proteftans ,  pendant  toute  la  Négociation  ô?  de  traiter 
de  l'intérêt  de  leur  Religion  avec  les  Ambaffadeurs  de  France  >  £f  de  l'autre  coté  qu'on 
auroit  plutôt  fujet  de  faire  une  déduàion ,  &  de  fe  rejfentir  de  toutes  les  irrévérences 
commifes  ici  contre  Votre  Majejlé  Impériale  en  la  perjonne  de  fes  Ambaffadeurs  ;  &  com- 
me on  ne  nous  peut  nullement  aceufer  de  ce  qui  fe  paffa  le  30.  d'Octobre  en  exécution 
des  menaces  que  par  plufieurs  importunitez  on  s' étoit  attirées  des  François,  ainfi  au- 
rolt-on  pu  aifêment  prévoir  par  les  bruits  &  par  les  éclairs  continuels  de  leurs  parolei 
la  foudre  qu'ils  lancèrent  en  effet ,  âfc. 

On  a  cru  qu'il  étoit  utile  de  donner  un  afTez  long  Extrait  de  la  Relation 
Originale  de  Mr.  le  Baron  de  Seillern,  troifiéme  &  néantmoins  principal 
Plénipotentiaire  de  SaMajefté  Impériale,  pour  ce  qui  regardoit  en  particu- 
lier la  Religion  Proteftante.  Comme  il  ne  s'agiflbit  que  des  intérêts  poli- 
tiques dans  ce  Traiié  de  Paix  à  Ryswick,  l'ignorance  du  Baron  de  Seil- 
lern en  matière  de  vérité  &  d'ancienneté  de  Religion  n'auroit  été  d'aucu- 
ne conféquence,  fi  d'ailleurs  ce  Miniltre  eût  eu  les  qualitez  d'un  Pléni- 
potentiaire parfaitement  inftruit  &  entièrement  zélé  pour  fori  Maître.  Tout 
Miniftre  public  doit  fçavoir  que,  dans  les  Fonctions  de  fon  Emploi, il  ne 
lui  eft  pas  permis  d'agir  félon  fes  fentimens  &  fes  vues  particulières; mais, 
qu'il  doit  s'informer  avec  la  dernière  precifion  des  intentions  du  Maître 
dont  il  repréfence  la  Perfonne ,  &  les  fuivre  avec  une  exactitude  telle- 
ment fcrupuleufe,  que,  fi  fa  confeience  fent  de  la  répugnance  en  quelque 
point,  ou  il  faut  quitter  l'Emploi ,  ou  il  faut  exécuter  toutes  chofes  de  la 
même  manière  que  le  Souverain  les  executeroit  lui-même. 

Le  Décret  de  la  Commifïion  Impériale,  dicté  à  Ratisbonne  le  11.  Fé- 
vrier 1^8.  en  réponfe  de  l'Adrefle  prefentée  le  6.  Novembre  &  répétée 
le  30.  Décembre  1697.  à  l'Empereur  au  fujet  des  Plaintes  des  Proteftans 
donne  afTez  à  entendre  les  intentions  de  Sa  Majeflé  Impériale,  quoy- 
qu'elle  ait  de  grands  ménagemens  pour  la  Conduite  de  fes  Plénipoten- 
tiaires. 

tftme  XL  E  e  e  e  II 


GEN.    DE 

l'Euro 
fe. 


Sm    MEMOIRES,  NEGOCIATIONS,  TRAITEZ:,  ET 

Affaires        \\  eft  porté  dans  ce  Décret  que  les  imputations  &  les  plai7ites  contre  l'Ambaffade 
Impériale  ne  fervoient  ,ni  pour  rendre  meilleures  les  conditions  de  la  Paix ,  ni  pour  af~ 
fermir  la  bonne  intelligence ,   qui  doit  être  entre  le  Chef  cîf  les  Membres  de  l'Evipi- 
re.     Pour  ce  qui  efi  de  h  Déclaration  ,  qu'on  demande,  Sa  Majefilé  Impériale  foufri- 
ra  toujours  volontiers  ,  qu'un  chacun  Jouijfe  librement  des  avantages,  que  la  Paix  de 
Wejïphalie  luy  donne  9  tant  à  V égard  de  ï '  Ecclejiafitique  que  du  Politique ,   £?  auroit 
même  foubaité ,  pour  empêcher  toute  méfiance  £f  tout  Jbupçon ,  que  cette  Paix  fut  réta- 
blie fans  aucun  changement;  que  l'Ambaffade  Impériale  avoit  plujieurs  fois , par  ordre 
exprès  de  Sa  Majejlé ,  déclaré  aimer  mieux  continuer  la   Guerre ,   n'ayant  enfin  co?i- 
jmti  à  la  Paix ,  qu'après  que  les  Députez  £p  les  autres  Miniflres  de  l'Empire  l'avoient 
jugée  fi  nèceffaire  que  la  continuation  de  la  Guerre  leur  paroififoit  danger eufe  &.  im- 
pojjible  félon  les  conjonctures  du  tems.     Du  refile,  Sa  Majeflê  Impériale  Je  tiendra  tou- 
jours aux  'Traitez  de  Wejïphalie.  dans  les  cbofes  de  VEglife  âf  de  Police  ,  y  .  maintien* 
dra  puiffament  un  chacun  ,  &  fera  adminifilrer  lajujlice  conformément  à  iceux ,  c?  fans 
aucune  difilinàion  de  Religion.     Cefil  ce  que  Sa  Majejlé  Impériale  promet  cependant 
aux  Eleàeurs ,  aux  Princes,  £p  aux  Etats ,  en  les  exhortant  encore -très-benignement  à 
bâter  leurs  confié  ils  &f  à  les  diriger  à  cette  fin,  que  la  bonne  intelligence  foit  confervée 
&?  continuée  dans  l'Empire ,  en  y  étant  toute  méfiance  qui  n'efl  ni  de  faijon  ,  ni  fon* 
dée ,  £f  que  la  jouïfijance  de  la  dernière  Paix  puiffe  être  au  plutôt  ajfurée  £?  affermie 
par  une  garantie  effective,  £f  conflitution  commune  de  tout  l'Empire. 

N'eft-il  donc  pas  notoire,  que  lés  intentions  de  Sa  Majefié  Impériale 
ctoient  que  Ton  Ambiflade  à  Ryswick  eue  en  vue  d'affermir  la  bonne  in- 
telligence entre  les  Membres  &  le  Chef  de  l'Empire,  &  d'obtenir  des  con<- 
ditions  de  Paix  les  meilleures  qu'il  feroit  poffible ,  félon  l'efprit  du  Traité 
de  Weitphalie ,  tant  à  l'égard  de  l'Eccléfiaftique  que  du  Politique  ;  &  que 
fa  Majefté  Impériale  eût  préféré  volontiers  de  continuer  la  Guerre  ,  plu- 
tôt que  de  confentir  à  aucune  altération  contraire  à  ce  Traité? 

Quant  à  la  continuation  de  la  Guerre,  elle  étoit  devenue  impoflîble  à 
l'Angleterre  &  à  la  Hollande  par  les  Confédérations  raportées  ci-delTus;  la 
principale  des  quelles  regarde  la  lenteur  du  Confeil  de  l'Empereur,  dont 
on  voit  un  exemple  par  la  date  du  Décret  donné  le  u.  Février  165)8.  fur 
une  affaire  communiquée  le  6.  Novembre,  &  répétée  le  30.  Décembre 
1697.  &  d'une  telle  importance,  qu'en  pareil  cas,  le  Confeil  de  France 
n'auroit  laiffé  écouler  du  tems  qu'autant  qu'il  en  eut  été  neceiTaire  pour 
l'arrivée  &  le  retour  d'un  Exprés  en  pofte. 

Dès  le  commencement  du  Traité,  l'Ambaffade  Impériale,  pouvant  voir 
aiTez  diftin Élément  la  necefîité  de  conclure  la  Paix,  ne  devoit-elle  pas  ê- 
tre  pleinement  convaincue  que  le  principal  intérêt  de  l'Empire  confiiîoit 
en  une  parfaite  intelligence  entre  les  Membres  &  le  Chef?  N'etoit-ce 
pas  confpirer  avec  la  France  pour  faire  naître  de  la  mefintelligence  ,  en 
connivant  aux  Proportions  que  les  François  méditoient  de  faire  au  préju- 
dice particulier  de  la  Religion  Proteltante  ?  Les  Proteftans  avoient-ils 
moins  contribué  que  les  Catholiques-Romains  pour  la  confervation  de 
£xEmpire  ?  La  Relation  de  l'Ambaflade  Impériale  raporte  ,  comme  quel- 
que 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I. 


5*7 


que  chofe  de  bien  fpirituel ,  que  quelques  uns  des  Minijîres  Catholiques  de- 
mandèrent tant  en  raillant  que  ferieufement  aux  Protejîans ,  s'ils  avoient  bien 
ajjifté  ci-devant  à  Munfler  &  à  Ofnabrugh  les  Catholiques ,  pour  leur  conferver 
VExerccie  de  la  Religion  Catholique  obfrrvé  depuis  plujieurs  fiécles ,  &  les  biens 
deftinez  à  cet  ufage  ;  s'ils  avoient  pour  lors  mieux  aimé  continuer  la  guerre  con- 
tre la  France  &  la  Suéde ,  que  de  permettre  que  les  Catholiques  en  fujjent  fru- 
ftrez  &c.    Y  a  t-il  la  moindre  aparance  de  fens  à  la  raillerie  ou  au  férieux 
de  cette  demande  ?   Qui  ne  voit,  au  contraire,  que  la  France  Catholique, 
liguée  avec  la  Suéde  Proteftante,  ne  s'étant  pas  extrêmement  empreiTée 
pour  les  intérêts  de  la  Religion  Romaine,  parce-qu'il  lui  étoit  utile  de  mé- 
nager les  Proteftans,  les  Catholiques  auroient  bien  plus  à  propos  fait  leur 
demande  railleufe  ou  ferieufe  aux  Plénipotentiaires  de  France  à  Ryfwick, 
les  quels  paroiflbient  alors  fi  zélez  pour  la  Religion  Romaine  ;  parce  qu'il 
y  avoit  efperance  de  pouvoir  mettre  de  la  divifion  dans  l'Empire,  &  cail- 
ler une  mefintelligence  préjudiciable  à  la  Maifon  d'Autriche.     L'intention 
de  Sa  Majeflé  Impériale  ayant  été  d'ôter  toute  méfiance  &  tout  foupçon 
entre  les  Membres  &  le  Chef  de  l'Empire  ,  pourquoi  Mr.  le  Baron  Plé- 
nipotentiaire, qui  avoit  aifément  prévu  par  les  bruits  &  par  les  éclairs 
continuels   des  paroles  des  François  la  foudre  qu'ils   lancèrent  en  ef- 
fet, ne  s'étoit-il  pas  mis  en  état,  félon  fon  obligation  envers  fon  Maître, 
de  la  prévenir  &  de  la  diffiper  ?   N'y  avoit-il  point  de  cloche  bénite  con- 
tre cette  forte  de  foudre  ?  Mais ,  les  ordres  de  l'Empereur  ne  devoient-ils 
pas  prévaloir  à  ceux  du  Roy  de  France,  &  la  foudre  lancée  par  des  Plé- 
nipotentiaires François  ne  devoit-elle  pas  être  autant  méprifée  par  des 
Plénipotentiaires  Impériaux,  que  le  Parlement  de  Paris  a  coutume  de  mé- 
prifer  la  foudre  du  Pape  même ,  en  matière  d'Intérêts  de  la  Couronne  & 
de  Libertez  du  Royaume  ?   S'agifToit-il  à  Ryfwick  aucunement  d'intérêts 
Eccléfiaftiques ,  &  la  France  avoit-elle  d'autre  vue  que  de  fe  rendre  puifl 
fante  au  préjudice  de  la  Maifon  d'Autriche?   Quelle  fatisfaction  &  quelle 
aflurance  de  fuccès  pour  l'AmbalTade  Françoife  d'avoir  à  négocier  avec  un 
Plénipotentiaire  de  la  trempe  de  Mr.  le  Baron  de  Seillern  ?  Quels  auront 
été  les  fentimens  des  Minillres  de  la  Cour  de  France,  lorfqu'ils  auront 
trouvé  dans  cette  Relation  de  l'Ambaflade  Impériale ,  que  la  claufe  de 
Religion  a  pafle  chez  les  Plénipotentiaires  Impériaux  comme  une  chofe 
d'aum*  petite  confequence  ,  que  fi  l'on  eût  voulu  feparer  un  cheveu  en 
quatre  parties;  &  qu'ils  s'étoient  fort  docilement  fournis,  lorfqu'à  toutes 
leurs  opofitions  les  AmbaiTadeurs  François  avoient  répondu  fimplement 
qu  ils  avoient  des  ordres  contraires  du  Roy,  dont  ils  nofer oient  pas  s  éloigner  ? 
Il  n'eft  pas  à  douter  que  le  Sieur  Baron  ne  foit  à  la  Cour  de  France  en 
«[lime  d'un  des  meilleurs  Catholiques- Romains;  mais  de  s'imaginer  qu'on 
remit  à  fa  diferetion  les  intérêts  de  la  Couronne  dans  un  Traité  de  Paix, 
c'eft  ce  qui  n'eft  pas  à  croire.     Le  Roy  Très-Chrêtien  ne  foufre  pas  que 
le  Zélé  Catholique  foit  emploie  avec  indiferetion  au  préjudice  de  fa  Gloire 
&  de  fa  Grandeur.  Sa  Majeflé ,  en  même  tems  qu'elle  aime  &  veut  que 
fes  Miniftres  l'oient  jaloux  de  tous  les  égards  dus  à  leur  Caraclère,  exige 

Eeee  z  cle 


Affairer 
gen.  DE 

L'EURO- 


l'Euro 
pe. 


56S    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  de  l'habileté  &  une  obeifTance  entière  à  fes  ordres  dans  les  Perfonnes 
gf.n.  de  qy'elie  honore  de  la  Dignité  d'Ambaffadeurs;  &  il  n'y  auroit  point  d'in- 
dulgence pour  un  Baron  Plénipotentiaire,  qui,  après  avoir  laiffe  écouler 
près  de  fix  mois  de  Négociation  ,  à  éluder,  à  tourner  en  ridicule,  &  à  rejet- 
ter  toutes  inllances  fur  la  décifion  d'un  des  points  principaux,  fe  feroit 
abandonné  à  un  excès  d'emportement  au  tems  de  la  Conclufion;  &  qui, 
pour  juftifiér  une  Conduite  fi  irreguliére,  raporteroit  qu'il  a  confideré 
principalement  les  foupirs  que  tant  d'âmes  poujjoient  infirment  au  Ciel  pour  une 
prompte  Conclufion.  1!  y  eut  eu  plus  de  véritable  piété  à  confidérer  les  cris 
lamentables  que  tant  de  peuples  expofez  aux  Exécutions  des  Dragons 
François  dévoient  pouffer  vers  le  Ciel.  En  un  mot,  comment  ne  pas  ad- 
mirer qu'un  Plénipotentiaire  Impérial  entreprenne  au  milieu  d'une  AfTem- 
blée  célèbre  ,  comme  celle  de  Ryfwick  ,  de  faire  valoir  la  Religion  de 
l'Empereur  fon  Maître,  pour  le  maintien  des  Privilèges  de  Proteflans, 
&  le  Zélé  du  Roy  de  France  pour  les  violer.  N'eft-ce  pas  Louïs  XIV. 
lui-même,  qui  en  1648-  dans  le  Traité  de  Munlter,  où  il  avoit  encore 
plus  d'avantage  qu'en  celui  de  Ryfwick,  a  fait  arêter  l'Article  concernant 
les  Proteflans;   à  fçavoir. 

Que  ceux  de  la  Confejfîon  c? '  Ausbsurg  qui  avoient  été  en  poffejjîon  des  Eglifes , 
£5?  entre  autres  les  Bourgeois  &  Habitans  d'Oppenbeim,  /oient  confervez  dans 
l'Etat  Ecclejiafiique  de  l'année  1624.  &?  qu'il  [oit  libre  aux  autres  qui  defire- 
roient  embrajjer  te  même  Exercice  de  la  ConfeJJïon  d' Ausbourg ,  de  la  pratiquer 
tant  en  public  qu 'en  particulier ,  &c.  Le  même  Article  efl  encore  de  mot  à 
mot  dans  le  Traité  d'Ofnabrug  aufîi  en  1648. 

Ce  qui  efl  de  tout  à  fait  fingulier,  c'efl  que  le  Baron  Plénipotentiaire 
eonfent  &  prête  la  main  à  l'AmbafTadeFrançoife  pour  faire  la  Loy  à  l'Em- 
pereur fon  Maître ,  en  ce  qui  regarde  la  Religion  Protellante  dans  les 
Pais  reflituez,  &  il  laiffe  volontiers  à  la  diferetion  de  Sa  M ajeflé  Très- 
Chrétienne  les  Proteflans  de  Strasbourg.  Ce  procédé  ne  doit-il  pas  être 
cenfé  féconder  les  François,  pour  infpirer  aux  Allemands  Catholiques-Rom. 
une  préférence  d'eflime  en  faveur  du  Zélé  religieux  de  Sa  Majeflé  Très- 
Chrécienne,  &  pour  faire  naître  quelque  forte  d'averfion  contre  l'Empe- 
reur dans  le  cœur  des  Proteflans  Allemands  paffez  fous  la  Domination 
Françoife,  ou  réunis  à  l'Empire? 

Un  Fait  de  cette  conféquence  efl  afTez  authentique,  pour  fervirde  Le- 
çon aux  Etats  Proteflans.  Ils  voient  d'une  part  les  difpofitions  d'un  Roy 
Très-Chrétien  pour  les  maintenir,  autant  qu'ils  peuvent  lui  être  utiles  & 
pour  les  détruire ,  fi  leur  ruine  lui  efl  d'un  plus  grand  grand  profit  ;  & 
d'autre  part  ils  éprouvent  le  peu  d'égard  que  le  Confeil  Impérial  a  eu  à 
leurs  follicitations ,  quoiqu'elles  aient  été  fortement  appuiées  par  l'An- 
gleterre, la  Suéde,  &  la  Hollande,  aux  quelles  l'Empereur  a  de  fi  gran- 
des Obligations,  &  dont  il  a  fi  grand  befoin  pour  foutenir  les  Prétentions 
de  la  Maifon  d'Autriche  contre  celles  de  la  France.  Au  moins ,  que  tous 
les  Etats  Proteflans  p'i.fTent  une  fois  comprendre  parfaitement,  combien 
il  leur  efl  important  de  demeurer  étroitement  unis  entre  eux  ,  &  de  pren- 
dre 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  f69 

dre  les  mefures  les  plus  fages  &  les  plus  jultes,  pour  ôter  aux  Catholi-    Abvahm 
ques-Rom.  toutes  penfées  de  travailler  à  leur  ruine.  «en.  dk 

8.  La  conduite  du  Confeil  de  France  après  la  Paix  conclue  fut  encore  L'^R0* 
une  fufifante  matière  d'Inltruétions  pour  celui  de  l'Empereur.  Comme 
le  Roy  Très-Chrétien  avoit  eu  principalement  en  vue  de  rompre  la  Ligue 
d'Ausbourg,  fi  préjudiciable  à  Tes  delfeins  fur  la  Succefîion  d'Efpagne, 
aulïi-tôt  que  les  Engagemens  réciproques  furent  finis  avec  la  Guerre,  il 
travailla  à  prévenir  de  femblables  liailbns  ,  en  propofant  de  nouveaux 
Traitez  particuliers  entre  la  France  &  diverfes  autres  Couronnes.  Les 
honneurs  extraordinaires,  rendus  aux  Ambafladeurs  d'Angleterre,  avoient 
pour  une  des  lins  principales  d'attirer  le  Roy  Guillaume  dans  les  intérêts 
de  la  France,  ou  au  moins  de  le  rendre  plus  indiférent  pour  la  Maifon 
d'Autriche.  On  fçait  quelles  étoient  les  complaifances  de  Sa  Majefté 
Très-Chrétienne  envers  le  Pape ,  quels  étoient  les  ménagemens  des  Mi- 
nières François  dans  les  Cours  d'Italie,  &  dans  celles  du  Nord,  dans 
celles  d'Allemagne,  à  l'égard  même  du  Roy  de  Pologne;  pendant  que 
l'AmbaiTadeur  de  France  à  la  Cour  de  Madrid  déclaroit  ouvertement  les 
Prétentions  du  Roy  fon  Maître  fur  le  Droit  de  Succeflion  à  la  Monarchie 
d'Efpagne.  Sa  Majefté  Catholique  ayant  fait  un  Teftament  à  la  fin  de 
1698,  le  Marquis  d'Harcourt  Ambafladeur  du  Roy  Très-Chretien ,  luipre- 
fenta  le  Mémoire  fuivant,  le  15.  Janvier  1699. 

Le  Roy  mon  Maître  ma  commandé  de  me  donner  ï  honneur  de  dire  à  Votre 
Majefté ,  que  depuis  quelle  l 'avoit  pofitivement  ajfîtré,  &  m  avoit  aujjl  chargé 
de  l 'affurer ,  quelle  ne  fer  oit  jamais  aucune  nouveauté  conttaire  à  la  Paix  & 
à  Ça  ponctuelle  obfervation ,  il  fer  oit ,  Sire ,  bien  difficile  à  Sa  Majefté  d'ajouter 
foy  à  la  nouvelle  d'un  ïeftament  fait  par  Votre  Majefté  en  faveur  du  Prince 
Electoral  de  Bavière ,  fi  cela  ne  lui  étoit  pas  confirmé  d'une  manière  à  rien  pou- 
voir plus  douter. 

En  <e  cas ,  Sire,  13  que  le  Roy  mon  Maître  ne  puijfe  plus  s'attendre  à  F  en- 
tière fatisfaclion  qu'il  prenoit  à  la  Parole  Royale  de  Votre  Majefté  ,  ce  fer  oit 
manquer  à  la  même  amitié,  dont  Votre  Majefté  a  reçu  tant  de  marques  depuis 
la  conclufion  de  la  Paix ,  comme  aufft  à  ce  qu'on  doit  à  la  confervation  du  re- 
pos de  toute  ï  Europe ,  £5?  finalement  à  maintenir  le  droit  que  les  lois  £5?  les 
Coutumes  inviolables  de  la  Monarchie  établiffent  en  faveur  du  Dauphin  [on 
Fils  unique,  fi  Sa  Majefté  ne  déclaroit  d'abord,  comme  elle  ma  donné  char- 
ge  de  le  dire  à  Votre  Majefté ,  quelle  prendra  les  mefures  nécejf aires  pour  empê- 
cher en  même  tems  le  renouvellement  de  la  Guerre  ($  le  préjudice  qu'on,  prétend 
lui  faire. 

Ce  que  je  dois  ajouter  à  cela  ,  Sire  ,  Ceft  que  le  Roy  mon  Maître  n  avoit 
point  de  plus  grand  objet  que  de  voir  Votre  Majefté  jouir  long  tems  des  Etats 
quelle  a  reçus  de  Dieuî3  de  la  Nature,  &  Vôtre  Majefté  fçait  bien  que  je  n'ay 
jamais  fait ,  de  la  part  du  Roy  mon  Maître ,  aucune  inftance  pour  ce  qui  regarde 
la  Succeffion.  Et  enfin,  Sire,  Vôtre  Majefté  doit  voir ,  fi  cette  attention  tiéjin- 
terejfée  du  Roy  mon  Maître ,  &?  le  defir  fincère  qu'il  a  témoigné  d'entretenir  une 

Eeee  3  par- 


Vf. 


j7o    MEMOIRES,  NEGOTIATÏONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    parfaite  intelligence  avec  Votre  Majejlé  méritoit  quon  prit  une  pareille  réfolu- 
©kn.  de     fiQnn)  &  combien  toute  ï Europe  trouvera  un  jour  à  redire ,  ji  par  malheur  les 

foins  du  Roy  mon  Maître  ne  peuvent  empêcher  ,  que  la  tranquilité  publique  ne 

foii  troublée  par  cet  incident. 

Cette  Protection  contre  un  Teftament  de  Charles  II. ,  fupofé  en  fa- 
veur du  Prince  Electoral  de  Bavière  ,    ne  dévoie  laiffer   à   Sa  Majefté 
Impériale  aucune  aparence  de  doute  que  Louis  XIV.  ne  fût  entièrement 
réfolu  d'affurer  au  Dauphin  fon  Fils  la  Couronne  d'Efpagne,  comme  lui 
apartenante  de  plein  Droit  par  les  Loix  &  les  Coutumes  de  la  Monarchie* 
lesquelles,  félon  Sa  Majeflé  Très-Chrétienne,  devant  être  inviolables, 
c'étoit  un  devoir  de  piété   &  de  juilice  d'en  maintenir  l'éxecution.    Le 
Roy  de  France  n'en  demeuroit  pas  aux  (impies  paroles.     Si  l'on  déchar- 
geoit  les  Peuples  de  quelques  Subfides ,  &  il  l'on  diminuoit  les  Tailles 
de  quelques  Millions ,  on  emploioit  plufieurs  autres  moyens  pour  rem- 
plir promptement  leTreforRoyal,  &  pour  tenir  prêts  les  fonds  nécefTaires 
pour  les  plus  grandes  entreprifes:  les  Magazins  étoient  auffi  bien  fournis 
qu'à  la  veille  d'une  Guerre:  pour  l'Armée,  au  lieu  de  la  diminuer,  on 
l'avoit  plutôt  renforcée  en  donnant  le  congé  aux  Hommes  de  peu  de 
fervice  ,  &  par  le  choix  de  ce  qu'il  pouvoit  y  avoir  de  meilleurs  Soldats: 
on  ne  ceifoit  point  d'ailleurs  de  faire  des  achats  extraordinaires  de  che- 
vaux dans  les  Païs  Etrangers ,  tant  pour  entretenir  une  nombreufe  Cava- 
lerie en  parfaitement  bon  état ,  que  pour  ôter  aux  autres  la  commodité 
d'en  lever  une  femblabîe  au  befoin.   La  plupart  des  troupes  étoient  tou- 
tes affemblées  fur  les  Frontières  vers  l'Efpagne,  pour  intimider  cette  Na- 
tion, &  vers  l'Allemagne  pour  entrer  en  Action,  fi  il  étoit  neceffaire, 
au  moment  de  l'ouverture  de  laSuccelTion  de  Charles  II;  &,  afin  de  pou- 
voir tourner  les  plus  grands  efforts  du  côté  des  Païs  Efpagnols,  li  les  Af- 
faires le  demandoient ,  on  fortifioit  toutes  les  Places  qui  pouvoient  être 
attaquées  par  l'Empereur;  c'eft  pour  cette  raifon  qu'on  differoit  de  refti- 
tuer  Brifac,  jufqu'à  ce  qu'on  eût  achevé  de  perfectionner  Jes  Ouvrages 
du  Nouveau- Brifac  bâti  exprès  pour  tenir  le  vieux  en  bride.     Après  des 
Proteftations  fi  exprelfes,  &  des  préparatifs  fi  vifibles,  il  ne  devoit  plus 
refter  aucun  prétexte  de  pouvoir  reprocher  à  la  France,  comme  on  avoit 
fait  dans  les  dernières  Guerres  ,  qu'elle  avoit  attaqué  fes  Ennemis  par 
furprife,  &  qu'elle  les  avoit  pris  au  dépourvu.     Les  marches  des  Trou- 
pes Françoifes  fur  Terre,  &  les  Voyages  des  Efcadres  vers  les  Côtes  d'Ek 
pagne,  n'étoient  ignorez  de  perfonne  :  bien  plus,  la  diilimulation  de  la 
France  à  l'égard  des  chagrinantes  Affaires  de  Pologne  &  de  Neuchâ- 
tel,  &  fa  Conduite  touchant  les  démêlez  entre  les  Couronnes  du  Nord, 
fans  prendre  parti ,  comme  elle  auroit  pu  le  faire  en  tout  autre  tems ,  fai- 
foient  clairement  connoître ,  qu'elle  réfervoit  toutes  fes  Forces  pour  la 
Succeilion  d'Efpagne.     Le  Prince  Electoral   de  Bavière  étant  décédé  à 
Bruxelles  le  6.  P^evrier  169p.  le  Roy  Très  Chrétien  ne  manqua  pas  de 
renouveler  fes  infiances  auprès  de  Sa  Majeilé  Catholique.  Chacun  a  fçu 

tous 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  571 

tous  les ménagemens  dont  le  Marquis  d'Harcourtaufé  dans  Madrid,  pour  ÂWAraaft 
prévenir  les  Peuples  en  faveur  du  Duc  d'Anjou }  jufque-là  que  les  François    GfN-  DE 
débitoient  par-tout,  comme  allure,  que  ce  Prince  pafferoit  cnEfpagne,    tEuRO* 
du  vivant  même  de  Charles  II ,  &  y  feroit  élevé  en  qualité  de  Succeifeur       FE* 
de  Sa  Majeflé  Catholique. 

Il  n'elt  pas  à  révoquer  en  doute  que  l'Empereur  n'ait  très-bien  reconnu 
les  intentions  du  Roy  Très-Chretien ,  &  qu'il  n'ait  été  donné  des  Inftruc- 
tions  très-prelTantes  aux  Ambaffadeurs  de  Sa  Majefté  Impériale  auprès  de 
Sa  Majefté  Catholique ,  pour  détruire  les  Entreprifes  du  Marquis  d'Har- 
court.  Mais,  cela  furlfoit-il?  Ne  falloit-il  pas  fuivre  pied  à  pied  toutes  les 
autres  Démarches  de  la  Cour  de  France  ,  les  éclairer  de  bien  près ,  & 
marquer  à  chaque  mouvement ,  qu'on  étoit  au  moins  en  état  d'une  Défen- 
fe  vigoureufe  ? 

L'Angleterre  &  la  Hollande ,  fans  conferver  aucun  reffentiment  tou- 
chant les  Injuftices  de  l'Ambaffade  Impériale  h  l'égard  des  intérêts  des 
Proteftans  dans  le  Traité  de  Ryfwick ,  offrirent  leur  Médiation  pour  la 
Paix  de  l'Orient,  la  quelle  ayant  été  conclue  à  Carlowitz  avec  le  conten- 
tement gênerai  de  toutes  les  PuilTances  intereffées,  la  Cour  de  Vienne 
n'avoit  plus  d'autre  Affaire  qui  la  pût  détourner  de  l'attention  qu'elle  de- 
voit  donner  aux  Prétentions  &  aux  Mouvemens  de  la  Cour  de  France. 
Cependant, le  Confeil  Impérial  négligea  beaucoup  de  faire  évacuer  les  Pla- 
ces qui  dévoient  être  reftituées  à  l'Empire  ou  à  l'Empereur  en  éxecution 
du  Traité  de  Ryfwick  :  on  laiffa  augmenter  les  mécontentemens  des  Pro- 
teftans,  au  lieu  de  les  faire  ceiTer:  on  ne  fe  mit  aucunement  en  peine  de 
remédier  à  diverfes  plaintes  excitées  entre  les  Membres  de  l'Empire  :  on 
ne  travailla  point,  comme  on  auroit  pu  le  faire,  à  arèter  les  troubles  du 
Nord ,  ni  à  dilpofer  la  Suéde  ,  la  Pologne ,  &  le  Dannemarc  à  des  Al- 
liances étroites  pour  le  maintien  des  Intérêts  de  l'Empire  :  l'Affaire  des 
Fiefs,  renouvellée  en  Italie,  fervoit  à  aliéner  l'efprit  du  Pape  &  de  plu- 
fleurs  autres  Princes  au  defavantage  de  la  Maifon  d'Autriche  :  les  Suiiîés, 
pour  qui  la  Cour  de  France  avoit  de  très-grands-ménagemens,  étoient  in- 
quiétez par  la  Cour  de  Vienne  au  fujèt  de  dépendances  trés-legeres  :  en- 
fin on  laiffoit  caffer  avec  beaucoup  d'indiference  une  partie  des  Troupes 
de  l'Empire,  &  emploier  l'autre  au  préjudice  de  la  tranquillité  publique, 
pendant  que  le  Confeil  Impérial  faifoit  tout  au  plus  quelques  fimples  Pro- 
pofitions  de  conferver  la  plupart  de  l'Armée   des  Païs  Héréditaires  de 
l'Empereur ,  qui  avoit  fervi  contre  le  Turc  ,  de  chercher  des  fonds  pour 
leur  entretien ,  &  de  remplir  quelques  magazins  d'Allemagne.     Au-refte 
il  fembloit  que  les  Miniftres  de  la  Maifon  d'Autriche  préfupofoient,  que 
la  préfence  d'un  Ambaffadeur  auprès  du  Roy  Catholique  devoit  être  plus 
que  fuffifante,  pour  aïTurer  la  Succeflîon  de  la  Branche  Royale  aux  Hé- 
ritiers de  la  Branche  Impériale,  non-obftant  toutes  follicitations  &  tous 
efforts  de  la  part  des  Princes  de  France.     L'Expérience  des  tems  paffez 
pouvoit  pourtant  donner  affez  à  connoître,  que  les  Prétentions  les  mieux 
fondées  étoient  fouvent  obligées  de  céder  à  la  force ,  que  les  Peuples  & 

les 


l'Euro- 
pe. 


572.    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

.toxines  les  Souverains-mêmes  avoient  pour  l'ordinaire  plus  d'égard  à  ce  qui  pa- 
gen.de  r.oifîbit  de  plus  convenable  félon  les  Conjonctures,  qu'à  ce  qui  pouvoit 
être  de  plus  jufte  en  foy-même,  ou  de  plus  conforme  à  leur  inclination 
particulière,  &  qu'enfin  les  derniers  momens  de  la  vie  pouvoient  chan- 
ger ce  qui  avoit  demeuré  fermement  arête  pendant  le  cours  de  longues 
années. 

L'Hiftoire  d'Efpagne  contient  diverfes  Révolutions  qui  pouvoient  fer- 
vir  d'inilruclion  au  Confeil  de  l'Empereur }   &  fans  remonter  plus  haut 
que  les  tems  de  Charles-Quint,  on  aprend  que  Ferdinand  V.  Roy  d'Ef- 
pagne avoit  deltiné  fa  Succeflïon  &  l'avoit  confirmée  par  plufieurs  Tefta- 
mens,  lignez  de  fa  main,  à  Ferdinand  fon  fécond  Petit-fils  Frère  de  Char- 
les fon  aîné  ;  mais  que ,  peu  d'heures  avant  fa  mort ,  trois  de  fes  Minif- 
tres,profkans  de  fa  foiblefle,  lui  avoient  fait  révoquer  fes  Difpofitions  pré- 
cédentes, &  inllituer  l'ainé  de  fes  Petit-Fils  fon  Héritier  univerfel,  à  l'ex- 
clufion  du  cadet.  Deux  ans  après,  l'Empereur  Maximilien  I.  Ayeul  Pater- 
nel de  Charles ,  s'éiant  ouvert  au  Cardinal  de  Sion  du  delfein  qu'il  avoit 
de  faire  élire  Roy  de9  Romains  Ferdinand  fon  fécond  Petit-Fils  préfera- 
blement  à  l'ainé,  ce  Cardinal,  qui  avoit  une  haine  implacable  contre  les 
François ,  &  qui  avoit  refolu  de  mettre  en  œuvre  la  force  &  l'adreffe , 
pour  leur  enlever  une  féconde  fois  le  Milanois,  en  vengeance  de  l'Affront 
qu'ils  lui  avoient  fait  à  Marignan ,  entreprit  de  détourner  l'Empereur  de 
fa  refolution,  laquelle,  fi  elle  eût  été  effectuée  ,  le  jeune  Ferdinand,  ve- 
nant à  fucceder  à  l'Empire,  n'auroit  pas  eu  allez  de  Forces,  pour  ôfer 
entreprendre  fur  le  Milanois  ;   au  lieu  que,  fi  Charles  pouvoit  devenir 
Empereur,  les  François  n'en  refteroient  pas  long-tems  les  Maures.     Les 
principales  raifons  que  le  Cardinal  de  Sion  emploia  furent ,  ,,  que  Sa  Ma- 
„  jeflé  Impériale  s'etant  toujours  propofé  de  rétablir  l'Empire  dans  fon 
«,  ancien  luftre ,  il  y  avoit  lieu  d'être  furpris ,  de  ce  qu'elle  parloit  de  per- 
„  vertir  l'ordre  de  la  Nature,  &  d'ôter  i'efperance  de  fa  Succefiion  au 
„  feul  Prince  qui  pouvoit  exécuter  un  fi  magnifique  defTein  -,  Que  le  Roy 
„  Catholique  étoit  defliné  pour  donner  à  l'Empire  d'Occident  la  même 
„  étendue  qu'il  avoit  eue  fous  Charlemagne;  &  que  de  l'en  priver  après 
„  tant  de  difpofitions  que  le  Ciel  avoit  affemblées  en  fa  Perfonne ,  ce  fe- 
„  roit  renverfer  l'ordre  de  la  Providence  divine;  Que  les  Empereurs  Ro- 
„  mains  avoient  eu  tant  de  peur  d'affaiblir  leur  Monarchie,  en  la  divifant, 
„  qu'ils  avoient  mieux  aimé,  n'ayant  point  de  fils,  adopter  des  perfon- 
„  nés  étrangères  ,   que   d'élever  fur  le  Trône  leurs   propres  Filles  ,    de 
„  crainte  qu'elles  ne  donnaflent  lieu  à  le  partager  ;   Que  l'Empereur  a- 
w  voit  un  exemple  de  fon  tems  en  la  Perfonne  du  Roy  Catholique  Fer- 
„  dinand,  qui  avoit  furpaffé  tous  les  autres  Princes  tant  anciens  que  nou- 
„  veaux  en  l'art  de  régner;   Que  ce  fage  Monarque,  quand  il  avoit  été 
„  queftion  de  faire  fon  dernier  Tellament,  avoit  oublié  fon  bien- aimé 
Ferdinand ,  fon  fécond   Petit-Fils ,  lequel  il  avoit  vu  naître  ,   dont  il 
étoit  Parain ,  à  qui  il  avoit  donné  fon  Nom ,  qu'il  avoit  lui-même  élevé 
dans  fa  Cour,  qu'il  avoit  mené  dans  tous  fes  voyages,  &  qu'il  n'avoic 

„  jamais 


9) 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.    I.  57j 

„  jamais  cefle  d'aimer  avec  une  tendreflb  la  plus  grande  qui  fe  puiffe  Affaires 
5,  imaginer,  pour  aller  chercher  dans  un  coin  de  la  Flandre  fon  autre  gen.de 
,,  Petit- Fils  Charles, qu'il  n'avoit  jamais  vu,  qu'il  avoit  toujours  tenu  com- 


„  me  étranger,  &  qui  venoit  de  l'offenfer  en  la  partie  la  plus  fenfible , 
„  en  traitant  avec  la  France  fans  fa  participation;  &  tout  cela ,  par  la  feu- 
„  le  raifon  d'oppofer  à  la  Monarchie  Francoife  un  Adverfaire  allez  puif- 
„  fant  pour  lui  refiiter.  Que  le  même  Roy  Catholique  ne  s'étoit  pas  con- 
„  tenté  de  témoigner  dans  fi  une  fameufe  occafion,  combien  il  haïflbit  le 
„  démembrement  de  la  Monarchie  Efpagnole  ;  puifque ,  pour  l'éviter 
„  dans  une  autre  rencontre,  il  avoit  confenti  à  la  dégradation  de  fa  pro- 
„  pre  Famille ,  en  la  fruftrant  de  la  Couronne  d'Arragon ,  qu'elle  portoit 
„  depuis  tant  d'années ,  &  en  la  reduifant  à  la  condition  privée  ,  quoi- 
„  qu'elle  ne  manquât  pas  de  mâles  capables  détenir  le  Sceptre,  afin  de 
„  mettre  en  fa  place  la  Maifon  d'Autriche  j  par  cette  feule  confideration, 
„  que ,  ne  pouvant  empêcher  ceux  de  cette  Maifon  de  fucceder  à  la  Ca- 
„  fiille ,  il  avoit  jugé  neceflaire  qu'ils  fuccedalfent  à  tout  le  relie.  Qu'en- 
„  fin  les  Turcs  étoient  devenus  fi  puiffans ,  que  l'unique  moyen  de  les 
,,  empêcher  d'ufurper  le  refle  de  la  Chrétienté  confifloit  à  former  dans 
„  l'Europe  une  Domination  capable  de  leur  faire  tête  }  au  lieu  de  jetter 
„  les  femences  d'une  haine  irréconciliable  dans  la  Maifon  d'Autriche, 
„  qui  l'engageroit  infailliblement  dans  une  Guerre  éternelle  ,  bien  loin 
„  de  la  mettre  en  état  de  fervir  un  jour  de  rempart  à  la  Religion  Chrê- 


„  tienne.  „ 


Ceux,  qui  feront  une  attention  ferieufe  aux  Remontrances  du  Cardinal 
de  Sion,  animé  à  la  vengeance  contre  les  François,  concevront  facile- 
ment ce  qu'un  autre  Cardinal  ,  bien  difpofé  en  leur  faveur,  aura  pu  faire 
valoir  auprès  de  Charles  II.  Roy  d'Efpagne  dans  les  derniers  tems  d'une 
vie  languiffante.  L'Empereur  prefentement  régnant  pouvoit-il  être  alïliré 
que  le  Cardinal ,  qui  étoit  à  la  Cour  de  Madrid ,  feroit  entièrement  porté 
pour  la  Maifon  d'Autriche  ?  Y  a-t-il  nombre  d'Exemples  de  Cardinaux, 
qui  ayent  préféré  les  Intérêts  publics,  &  le  Droit  des  Familles,  à  l'éléva- 
tion de  leur  propre  fortune  ?  Ces  premiers  Princes  de  l'Eglife ,  à  l'imita- 
tion du  Pape  leur  Seigneur  &  Maitre,  n'ont-ils  pas  coutume  de  recher- 
cher ce  qui  leur  eft  de  plus  utile  &  de  plus  honnorable, indépendamment 
des  devoirs  de  la,  juflice  ?  Si  un  Prince  de  la  Maifon  d'Autriche  fût 
monté  fur  le  Trône  d'Efpagne,  qu'elle  recompenfe  le  Cardinal  Efpagnol 
en  auroit-il  pu  prétendre  ?  Les  Difpofitions  Teftamentaires  de  Philippe 
IV.,  arrêtées  avec  le  confentement  de  toute  la  Nation  touchant  la  Succef- 
fion  à  la  Monarchie,  avoient  fubftiiué  a  Charles  II.  un  des  Fils  de  l'Em- 
pereur :  le  Roi  de  France  lui-même  avoit  juré  hautement  fur  les  Evangi- 
les, en  prefence  de -Sa  Majefté  Catholique  &  des  Seigneurs  de  fa  Cour, 
avec  les  folemnitez  les  plus  authentiques,  &  d'une  volonté  exempte  de 
toute  aparence  de  contrainte,  qu'il  renonçoit,  comme  avoit  fait  l'Infan- 
te d'Efpagne  fon  Epoufe,  pour  foi  &  pour  fes  Defcendans  à  toutes  pré- 
tendons de  pouvoir  fucceder  aux  Etats  d'Efpagne  :   le  Serment  de  Sa  Ma- 

Tome  XL  FT'ff  jefté 


l'Euro- 
pe. 


TE. 


*74    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,    ET 

ArTMRE3  jefté  Très-Chrètienne  avoit  été  confirmé  par  les  Actes  du  Royaume  de 
gev. pe  France  en  la  meilleure  forme,  qu'on  les  eut  pu  faire  en  pareil  cas.  Ainfi 
l'Euro-  un  Cardinal ,  qui  eut  apuyé  les  Droits  d'un  Prince  d'Autriche ,  à  l'exclu- 
fion  d'un  Prince  François,  n'auroit  eu  d'autre  mérite  que  celui  d'un  Su- 
jet demeuré  fidèle  à  fon  Souverain,  au  Gouvernement  de  fa  Nation ,  &  à 
la  Religion  des  Sermens  ;  &  de  cette  manière  il  n'eut  pu  prétendre  au- 
cune nouvelle  Diitinclïon  d'Honneur  ni  aucun  profit  extraordinaire,  qu'au- 
tant que  le  nouveau  Roi  de  la  Maifon  d'Autriche  s'y  feroit  trouvé  difpo- 
fé  par  fon  eftime  ou  par  fa  bonne  volonté,  fans  aucune  obligation  parti- 
culière. Au  contraire ,  fl  Je  Cardinal  entreprend  de  faire  valoir  les  préten- 
dons du  Roy  Très-Chrêtien,  &  s'il  procure  l'élévation  d'un  Fils  de  Fran- 
ce à  l'exclulion  d'un  Prince  d'Autriche,  y  aura-t-il  Prérogative  d'Honneur, 
Dignkez ,  Emplois  ,  Trefors  ,  qui  puiffent  allez  recompenfer  un  fervice 
d'un  prix  ineftimable  ?  L'Adminiitration  générale  de  la  Monarchie  Efpa- 
gno'le  ne  pouvoit  manquer  au  Cardinal  Archevêque  de  Tolède  fous  un 
Fi!s  de  l'Empereur;  mais,  elle  auroit  été  partagée  entre  plusieurs  Ré- 
gens pendant  les  années  de  Minorité  du  Prince,  la  Reine  Douairière  y 
auroit  eu  la  principale  Voix  ,  &  d'ailleurs  il  eut  été  libre  à  l'Empereur 
d'entretenir  un  allez  grand  nombre  de  Confeillers  &  d'Officiers  Alle- 
mands auprès  du  Roy  Ion  Fils  ;  au  lieu  que  le  Petit-Fils  du  Roi  Très-*. 
Chrétien  fe  trouvant  Majeur,  &  y  ayant  toute  forte  de  Raifons  plaufi- 
bles,  pour  ne  fbtifrrir  auprès  du  jeune  Roi  Catholique  aucuns  François 
de  quelque  rang  qu'ils  pûfTent  être,  qu'autant  que  le  Cardinal  le  trou- 
veroit  bon,  l'Eminence  pouvoit  fe  rlater  de  difpoièr  feule,  non-feulement 
du  Gouvernement  de  toute  la  Monarchie ,  mais  encore  de  la  Perfonne 
du  Prince. 

Si  la  Cour  de  Vienne  croyoit  affez  bien  connoitre  Je  Cardinal- Arche- 
vê.jue,  pour  être  perfuadce  que  l'Ambition  &  l'Intérêt  ne  lui  feraient  pas 
préférer  la  Maifon  de  France  h  celle  d'Autriche,  il  y  avoit  un  autre  fu- 
jet  de  défiance  très  bien  fondée.  La  Politique  confiante  dt.s  Papes,  en 
matière  de  Contcitation  entre  les  Souverains  de  la  Communion,  a  tou- 
jours été  de  fe  déclarer  pour  le  Parti  auquel  il  paroilfoit  impofïibie  de 
s'opofer.  Suivant  cette  Pratique  du  Chef,,  le  Cardinal  Efpagnol ,  Mem- 
bre du  Sacré  Collège,  voyant  la  France  en  état  de  s'emparer  immanqua- 
blement d'une  partie  des  Pais  fournis  à  l'Efpagne  ,  d'exciter  de  grands 
Troubles,  &  de  caufer  diverfes  Révolutions  dans  la  Monarchie  au  moment 
du  décès  de  Charles  II;  &  ne  voyant  point  que  l'Empereur  pût  jamais 
être  capable  de  difputer  le  terrain  à  Sa  Maieflé  Très-Chrétienne;  n'étoit- 
il  pas  à  a  pp.  hendcr  ,  que  la  confideration  de  conferver  la  Monarchie 
d'iïfpagne  en  fon  entier,  c\:  de  détourner  les  funeftes  effets  des  Armées 
Françoifes,  ne  fût  plus  forte  fur  l'efprit  de  fon  Emmenée,  que  l'idée  des 
Droits  de  Suceeifion  attachez  à  la  Maifon  d'Autriche?  Si  le  Cardinal ,  par 
quelque  motif  que  ce  put  être,  fe  trouvoit  une  fois  déterminé  en  faveur 
de  la  France,  combien  luiécoit-il  aifé  de  ménager  les  momens  du  Roy 
Charles  II  ?   Ce  Prince ,  dont  l'efprit  étoit  accablé  par  les  infirmitez  de. 

ion 


PK. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  f7j 

de  Ton  corps,  ne  pouvoit  plus  avoir  de  vigueur  pour  les  Intérêts  de  la  Affaiwf* 
Maifon  d'Autriche  ;  &  il  étoit  très-facile  à  le  Iaifler  faire  illufion  par  cer-    °>N-  Dt 
tains  fentimens  de  pieté  &  de  jultice  aparentes,  que  les  Prélats  Romains    L\ 
fçavent  parfaitement   bien   accommoder  félon   leurs    vues  particulières. 
Qu'on  s'imagine  donc  un  peu  l'effet  que  pouvoit  produire  le  Zèle  d'un 
Cardinal,  le  Sacrement  à  la  main ,  s'il  en  étoit  befoin,  repréfentant  au 
Roy  Charles  II.  en  fon  lit  de  mort  ;  Que  l'unique  deûeïn  de  Sa  Majeiié 
Catholique  pendant  tout  fon  Règne  ayant  été  de  prendre  foin  de  la  Con- 
fervation  de  fes  Royaumes,  il  y  alloit  de  fon  Salut  éternel  de  régler  avant 
fa  mort  l'ordre  de  la  Succelîion  à  la  Monarchie  ;   Que  de  vouloir  exclure 
du  Droit  de  fucceder  les  Defcendans  du  Roy  Très-Chrêtien ,  c'étoit  per- 
vertir l'Ordre  de  la  Nature,  &  éloigner  les  feuls  Princes  qui  pouvoient  ré- 
tablir la  Monarchie  d'Efpagne  dans  fon  ancien  luflre  ;   Que,  conformé- 
ment aux  Réfultats  de  plufieuts  Confultations  des  Minières  d'Etat  &  de  la 
Juftice,  le  fondement  des  Renonciations  des  Infantes  d'Efpagne,  Reines 
de  France,  la  Tante  &  la  Sœur  de  Sa.Majeflé,  ayant  été  d'éviter  le  dan- 
ger d'unir  la  Couronne  d'Efpagne  avec  celle  de  France  ,  &  ce  danger 
pouvant  être  évité  par  le  Couronnement  du  fécond  Fils  du  Dauphin  de 
France,  le  fondement  de  la  Renonciation  n'avoit  plus  de  lieu,  &  qu'ain- 
fi  les  Loix  de  la  Monarchie  vouloient  que  Sa  Majeiié  déclarât  Monfei- 
gneur  le  Duc  d'Anjou , fécond  Fils  du  Dauphin,  en  qualité  de  plus  proche 
Parent ,  fon  SuccefTeur  à  la  Monarchie  entière  de  tous  fes  Etats  (  au  cas 
que  Dieu  l'apelàt  à  lui  fans  Enfans.  )     Que  le  Ciel  ayant  rafTemblé  de  fi 
grandes  Difpofitions  dans  la  Perfonne  du  Roy  Très-Chrêtien  &  dans  cel- 
les de  fes  Fils  &  Petit-Fils,  ce  feroit  renverfer  l'Ordre  de  la  Providence, 
que  de  vouloir  les  priver  des  Royaumes  auxquels  ils  font  apelez  ;  Que  fes 
Ayeuls  de  Triomphante  Mémoire  n'avoient  eu  rien  plus  à  cœur  que  d'a- 
grandir la  Monarchie   d'Efpagne,  &  d'en  prévenir  le   démembrement  ; 
Que  Ferdinand  V.,  cinquième  Ayeul  de  Sa  Majeiié,  avoit  confenti  à  la 
dégradation  de  fa  propre  Famille,  &  de  la  réduire  à  la  condition  privée, 
afin  de  rendre  la  Monarchie  d'Efpagne  plus  puhTante  ,  en  unifiant  pour 
toujours  la  Couronne  d'Arragon  à  la  Couronne  de  Cailille,  qui  étoit  la 
plus  confiderable ;  Que  l'Empereur  Charles-Quint,  tris- Ayeul  de  S.  M.,  a- 
voit  fait  fon  polîible  pour  lailTer  l'Empire  uni  à  l'Efpagne  en  la  Perfonne 
de  Philippe  II.  fon  Fils,  à  l'excîufion  de  Ferdinand  fon  Frère  &  de  fes 
Enfans  ;  mais,  que  les  Conjonctures  des  tems  ne  l'ayant  pas  permis,  au 
moins  il  avoit  attaché  pour  toujours  à  la  Monarchie  d'Efpagne  toutes  les 
glorieufes  Conquêtes  qu'il  avoit  faites  dans  le  Vieux  &  le  Nouveau  Mon- 
de, tant  par  des  Troupes  Allemandes  que  par  des  Efpagnoles,  &  même 
le  Milanois  &  plufieurs  autres  Fiefs  relevans  de  l'Empire  ;   Que  Philippe 
IL ,  quelque  tendreiTe  extraordinaire  qu'il  eut  pour   l'Infante  Ifabelie  fa 
chère  Fille,  ne  lui  avoit  affigné  les  Païs-Bas  en  Dot,  qu'après  avoir  pris 
toutes  les  Précautions  imaginables  pour  conferverune  étroite  Union  de  ces 
Païs  avec  l'Efpagne,  &  empêcher  qu'ils  ne  puiTent  jamais  être  démem- 
brez de  la  Monarchie  ;   Que  Philippe  III.  &  Philippe  IV.  l'Ayeul  &  le 

Ffff  2.  Père 


PE. 


f76    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   Père  de  Sa  Majeilé ,  n'avoient  pas  été  moins  zelez  que  leurs  Predecef- 
gen.  de    feurs  pour  l'augmentation  &  la  gloire  des  Royaumes  d'Efpagne  j  mais, 
jl'Euko-    qa'en  l'état  prefent  des  Affaires ,  la  Monarchie  ne  pouvoit  éviter  une  ruine 
prefque  totale,  fi.  Sa  Majefté  venoit  à  mourir  fans  avoir  réglé  la  Succef- 
iion,  ou  fi«on  vouloit  exclure  les  plus  proches  Héritiers,  qui  étoient  les 
Princes  de  France  ;  Que  le  Roy  Très-Chrétien, pendant  un  des  plus  longs 
Règnes  dont  il  foie  fait  mention ,  ayant  toujours  été  comblé  de  victoires 
&  de  profperitez,  étoit  en  état  de  fe  faire  juitice  par  fes  propres  Armées, 
de  s'emparer  d'une  grande  partie  des  Etats  d'Efpagne,  de  devenir  aiTez 
puiffant  pour  fe  rendre  maitre  de  ce  qui  pourroit  relier  ,  &  d'éteindre 
ainli  la  Monarchie  Efpagnole ,  en  l'unifiant  à  celle  de  France  comme  un 
Pays  de  Conquête  ;  Que  V Empereur ,  bien  éloigné  de  pouvoir  s'oppofer 
à  cette  Révolution,  ieroit  en  danger  avec  toute  fa  Famille  de  fuccomber 
dans  une  Guerre,  que  la  Succefiion  d'Efpagne  auroit  allumée  entre  les 
deux  Maifons  d'Autriche  &  de  France  ;  Qu'au  contraire,  fi  le  Duc  d'An- 
jou, fécond  Fils  du  Dauphin,  étoit  déclare  Succeffeur  de  Sa  Majeilé  Ca- 
tholique, cette  Juilice  rendue  à  Sa  Majeilé  Très-Chrétienne  l'engageroit 
de  maintenir  la  Monarchie  d'Efpagne  en  faveur  de  fon  Petit-Fils,  &  mê- 
me à  lui  rcitituer  tous  les  Pais,  defquels  il  s'étoit  déjà  emparé,  comme 
ayant  dus  appartenir  à  la  feue  Reine  de  France,  de  tous  les  Droits  de  la 
quelle  le  Petit-Fils  feroit  reconnu  légitime  Héritier  ;   Que  d'ailleurs  il  fe 
pourroit  ménager  ,   entre  Je  Duc  d'Anjou  Roy  d'Efpagne,  &  l'Archidu- 
ehefle  Fille  de  l'Empereur,  un  Mariage  qui  ferviroit  de  lien  pour  entre- 
tenir entre  les  Maifons  d'Autriche  &  de  France  une  Paix  &  une  Union 
très-avantageufe  à  toute  l'Europe  &  à  la  Chrétienté  ;    Qu'enfin  Sa  Ma- 
jcité ,  à  l'exemple  de  fes  PredecelTeurs  Roys  Catholiques,  ayant  toujours 
'gouverné  les  chofes  plutôt  par  la  confideration  de  la  Religion  que  par 
des  Intérêts  Politiques,  ne  pouvoit  rien  faire  de  plus  méritoire  pour  la 
Vie  éternelle,  que  de  contribuer  à  l'Exaltation  de  la  Foy  Catholique,  A- 
poftoîique,  &  Romaine,  en  nommant,  avant  fa  mort,  le  Duc  d'Anjou 
pour  fon  Succeffeur  ;  d'autant  que  l'Union  étroite,  qui  fe  trouveroit  en- 
tre la  France  &  l'Efpagne ,  augmentant  les  forces  de  Sa  Majedé  Très- 
Chrètienne  ,    elle  pourroit  travailler  plus  puiifamment   à  l'extinction   de 
l'Hérefie ,  qu'elle  avoit  déjà  fi  heureufement  exterminée  de  fes  propres 
Etats,  &  l'Alliance  du  Duc  d'Anjou  Roy  d'Efpagne  avec  la  Maifon  d'Au- 
triche pourroit  procurer  à  Sa  Majelté  Impériale  les  moyens  de  travailler 
plus  efficacement  à  la  Ruine  de  l'Empire  des  Turcs. 

Je  ne  dis  pas  que  le  Cardinal  Archevêque  de  Tolède  ait  dû  parler  en 
ces  termes  ;  je  demande  feulement,  s'il  n'étoit  pas  à  craindre  pour  Sa 
Majeilé  Impériale,  que  cette  Eminence  n'emploiat  en  faveur  de  la  Fran- 
ce des  Motifs  plus  rafinez ,  plus  dévots,  &  plus  capables  de  faire  impref- 
fion  fur  l'efprit  du  Roy  Catholique ,  que  je  ne  les  puis  imaginer  ni  expri- 
mer ?  Le  Teftament  de  Charles  IL  fait  connoitre  quelles  ont  été  les  Dif- 
portions-  du  Cardinal  &  des  principaux  Miniitres  de  Sa  Majeilé  pendant 
les  derniers  tems  de  fa  vie;  &  ces  Diipoiitions  ne  pouvoient  pas  être  allez 

degui- 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.  S77 

deguifées  pour  ne  point  être  aperçues  des  Ambaffadeurs  de  l'Empereur,   Affaires 
s'ils  les  avoient  examinées  de  bien  près.     Lors  que  je  propoferai  des  Re-    GEN-  DE 
flexions  fur  le  Teitament  du  feu  Roy  d'Efpagne  ,   je  rechercherai  plus    L'E 
particulièrement  la  folidité  des  Motifs  qui  ont  pu  déterminer  Sa  Majeité    _ 
Catholique  &  fon  Confeil  aux  Difpolitions  qui  le  lifent  dans  les  Articles 
imprimez,  &  rendus  publics. 

La  concurrence  de  la  Maifon  d'Autriche  &  de  la  Maifon  de  France 
pour  la  Succeilion  d'Efpagne  peut  bien  être  comparée  à  celle  qui  étoit 
arrivée  en  ifi<>.  entre  ces  deux  Maifons  pour  l'Empire,  devenu  vacant 
par  le  Décès  prématuré  de  Maximilien  1.     Cet  Empereur,  ébranlé  par 
l'Eloquence  du  Cardinal  de  Sion,  avoit  fufpendu  l'exécution  de  fon  def- 
fein  de  faire  couronner  Roy  des  Romains  Ferdinand  fon  fécond  Petit- Fils; 
&,  après  avoir laiiîé  inutilement  écouler  le  tems  de  la  Diète  des  Electeurs, 
laquelle  fe  termina  avec  l'année  iyi8.  le  douzième  jour  de  la  fuivante, 
ayant  pris  une  médecine  par  précaution ,  il  en  fut  étouffé  dans  la  ville  de 
Lintz  en  Autriche ,  lors  qu'il  ne  commençait  que  d'entrer  en  fon  année 
climaclerique.     Son  trépas  donna  lieu  à  François  I.  Roi  de  France  de  pré- 
tendre ouvertement  à  l'Empire.     Il  s 'étoit  contenté  de  traverfer  indirec- 
tement la  Propolltion  qui  avoit  été  faite  d'élever  à  la  Dignité  de  Roi  des 
Romains  Charles  d'Autriche  Roy  d'Efpagne,  lequel,  fans   s'amufer  aux 
Remontrances  que  le  Roy  Très-Chretien  faifoit  faire  à  fon  defavantage, 
s'étoit  fecretement  affuré  de  la  voix  de  quatre  des  fept  Electeurs,  mo- 
yennant  deux  cens  mille   écus.     La  vacance  de  l'Empire  ayant  changé 
les  Affaires,  les  Electeurs  dégagèrent  leur  parole,  François  I.  leur  ayant 
fait  offrir  quatre  cens  mille  écus.     Dans  la  fuite  de  la  Négociation,  le 
Roy  Très- Chrétien,  perfuadé  du  fuccès  de  fon  Entreprife  par  les  Lettres 
de  Bonnivet  fon  Ambaffadeur  à  Francfort,  où  fe  faifoit  l'Election,  né- 
gligea d'arrêter  dans  fhs  Intérêts  Erard  de  la  Mark  Eveque  de  Liège,  & 
Sequinguen  ,  fameux  par  fon  crédit  parmi  les  Gens  de  Guerre,  &  par  la 
facilité  qu'il  avoit  de  les  alfembler.     L'un  &  l'autre  étant  paffez  au  fervi- 
ce  du  Roy  d'Efpagne,  l'Eveque  de  Liège,  devenu  Cardinal  par  la  recom- 
mandation de  Sa  Majeflé  Catholique ,  ménagea  tellement  les   Voix  des 
Electeurs  par  des  Intrigues  étudiées  félon  chaque  diverfe Conjoncture,  & 
Sequinguen  fçut  fi  à  propos  raffembler  une  Armée  de  vingt -quatre  mille 
hommes  autour  de  la  ville  de  Francfort ,  fous  le  prétexte  d'affurer  la  Li- 
berté de  l'Election,  mais  en  effet  pour  déterminer  les  Suffrages  en  faveur 
de  fon  Maître,  que  Charles  fut  élu  à  l'Exclufion  de  François  I. 

Le  Confeil  de  l'Empereur  prefentement  régnant,  qui  devoit  avoir  par- 
faitement remarqué ,  combien  celui  de  France  fçait  fe  prévaloir  habile- 
ment desCirconitances  arrivées  dans  les  temps  paifez,  auroit  du  fe  precau- 
tionner  un  peu  mieux  contre  les  Intrigues,  les  Trefors,  &  les  Armes  de 
Sa  Majeité  Très-Chretienne  dans  la  Conjoncture  de  la  Succeffion  d'Efpa- 
gne; de  crainte  qu'il  n'arrivât  a  la  Maifon  d'Autriche  d'être  fupplantée  par 
celle  de  France,  fous  la  fin  du  Règne  de  Louis  XIV.  comme  il  étoit  ar- 

Ffff  3  rivé 


FE. 


;78    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  rivé  à  celle  de  France  d'avoir  été  fupplantée  par  la  Maifon  d'Autriche  aïs 
gxn.  de    commencement  du  Règne  de  Charles  Roy  d'Efpagne. 

Le  Roi  de  la  Grande-Bretagne,  &  les  Seigneurs  Etats  Généraux  des 
P.  U.,  conftament  attentifs  à  procurer  la  Tranquillité  de  leurs  Pais,  excel- 
le de  toute  l'Europe ,  prevoians  avec  alTez  de  certitude  les  intentions  de 
la  France  &  les  effets  de  Tes  Négociations  &  de  fes  Forces,  auroient  bien 
fouhaité  pouvoir,  après  la  conclufion  de  la  Paix  de  Ryswick,  entretenir 
un  nombre  de  Troupes  prêtes  pour  diverfes  Conjonctures  qui  dévoient 
accompagner  la  mort  du  Roi  d'Efpagne,  la  quelle  ne  pouvoit  plus  être  fort- 
éloignée^  mais  les  deux  Nations,  plus  attachées  à  faire  valoir  leur  Com- 
merce &  à  réparer  leurs  Pertes  paflées,qu'à  pénétrer  les  RefTortsde  la  Po- 
litique ,  avoient  deux  fortes  Raifons  pour  s'oppofer  à  la  Continuation  de 
l'Entretien  des  Troupes.  La  première  étoit  le  préjudice  que  le  trop  grand 
nombre  de  Gens  de  Guerre  ne  manque  jamais  de  caufer  dans  un  Etat, 
foit  par  leurs  depenfes  à  charge  à  tout  le  peuple,  foit  par  les  defordres 
qu'ils  introduifent  dans  la  Société  publique  par  leur  oifiveté ,  &  par  une 
trop  grande  licence.  La  féconde  raifon  étoit  qu'il  n'y  avoit  aucun  befoin 
de  groffes  armées  pour  la  confervation  de  leurs  propres  Païs ,  &  qu'on  ne 
devoit  pas  fi  fort  s'intereffer  pour  les  autres  Puiffances ,  des  quelles  on  a- 
voit  reçu  fi  peu  de  fatisfaétion  pendant  la  Guerre,  de  fi  grands  meconten- 
temens  à  la  conclufion  de  la  Paix,  &  qui  prenoient  11  peu  de  foin  de  leur 
propre  Défenfe. 

On  ne  peut  pas  avoir  perdu  le  fouvenir  de  ce  qui  fe  paffa  en  1699.  en- 
tre le  Parlement  d'Angleterre,  refolu  de  caffer  toutes  les  Troupes  ,  à  la 
referve  de  celles  que  la  Nation  avoit  coutume  d'entretenir  en  temps  de 
Paix,  &  Sa  Majeiîé  Britannique  faifant  les  plus  fortes  inilances  pour  con- 
ferver  une  Armée  proportionnée  aux  befoins  particulières  de  la  Nation 
&  généraux,  pour  afîurer  le  repos  de  l'Europe.  La  Conduite  de  Sa  Ma- 
jefté  fera  dans  tous  les  fiecles  à  venir  un  Exemple  admirable  d'un  Monar- 
que le  plus  emprelTé  pour  les  véritables  Intérêts  de  fes  Sujets,  &  en  mé% 
me  temps  d'un  Père  le  plus  indulgent  pour  condefeendre  aux  Délibérations 
de  fes  Peuples  affemblez  en  Parlement. 

Les  Hollandois  imitèrent  les  Anglois  dans  la  Reforme  des  Gens  de  Guer- 
re \  mais ,  pour  certain ,  les  uns  &  les  autres  auroient  confenti  à  l'entretien 
de  la  plus  grande  partie  de  leurs  Troupes,  fi  les  autres  Souverains,  in- 
tereiïez  à  une  confervation  mutuelle ,  avoient  eu  des  fentimens  ,  &  pris 
des  mefures  ,  tels  que  l'état  des  Affaires  Publiques  les  demandoient. 
Cependant,  Sa  Majelté  Britannique  ne  s'eiï  jamais  relâchée,  &  a  tou- 
jours avec  uneextreme  vigeur  prévenu  les  Semences  de  nouvelles  Guer- 
res, autant  qu'il  a  été  en  fon  pouvoir:  les  Prétentions  fur  Neuchâtel,  are- 
tées  dès  leurs  premiers  mouvemens ,  en  font  une  preuve  ;  &  les  Diffe- 
rens  fur  le  Holftein,  réglez  par  un  Traité  de  Paix  à  la  prefence  des  Flotes 
Angloifes  &  Hollandoifes ,  font  les  effets  du  Zèle  de  ces  deux  Nations 
pour  le  maintien  de  la  Tranquilité  de  l'Europe. 

La  fituation  des  Affaires  de  la  Succeflion   d'Efpagne  ayant   difpofé  la 

Fran- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  f79 

France  à  vouloir  convenir  de  quelque  Partage  pour  Tes  Prétentions,  la  ArrA1RïS 
propofition  étoic  trop  favorable  pour  n'être  pis  embraffée  volontiers  par  l>£Ùro- 
Sa  Majeité  Britannique  &  par  les  Seigneurs  Etats  Généraux  des  Provin-       PE. 

ces-Unies.  Quoique  le  Procédé  du  Roi  Très- Chrétien  ,    à  l'égard  de  cet-  ~~ 

te  idée  de  Partage,  pût  être  regardé  comme  un  Rafinement  de  Politique, 
félon  qu'il  fera  remarqué  ci-apres,&  que  les  fuites  l'ont  confirmé ,  il  n'en 
étoit  pas  moins  d'une  Politique  bien  entendue  d'entrer  en  Traité,  d'aréter 
des  Articles  les  plus  propres  pour  accommoder  les  differens  &  prévenir 
les  ombrages  à  naître  à  l'ouverture  de  la  Succefiion  d'Efpagne,  &  de  les 
figner  avec  toutes  les  formalitez  qui  peuvenc  rendre  un  Traité  inviolable. 
Si  l'Empereur,  qui  a  eu  connoilïance  d'une  partie  des  démarches  faites 
pour  le  Traité  de  Partage ,  eût  voulu  fe  mettre  en  polhire  de  pouvoir 
vigoureufement  difputer  à  la  Maifon  de  France  la  SuccefTion  du  Roy  Ca- 
tholique, il  y  a  quelque  fujet  de  croire, que  le  Roi  d'Angleterre  8l  les  E- 
tats  Généraux  auroient  pris  d'autres  mefures,  en  cas  qu'il  eût  été  h  propos 
de  convenir  d'un  Partage;  mais.  Sa  Majeité  Impériale  refufant  tout   Ac- 
commodement, &  (aillant  neantmoins  le  Roi  Tres-Chretien  en  état  de  fe 
rendre  Maître  de  ce  qui  feroit  le  plus  à  fon  gré  ,  de  mettre  toute  l'Europe 
en  ailarme  ,  &  Je  former  aes  projets  qui  ne  pouvoient  être  exécutez  fans 
une  horrible  Guerre;  ne  faut-il  pas  avouer  que   c'étoit  une  SagefTe  à  Sa 
Majeité  Britannique  ck  aux  Etats  Généraux  de   conclure  un  Traité,  qui 
devoit  aflurerà  la  Maifon  d'Autriche  le  principal  &  le  meilleur  d'une  Suc- 
ceffiun  qu'elle  couroit  rifque  de  perdre  entièrement,  &  obliger  la  France 
à  fe  tenir  fatisfaite  de  conditions  moins-confiderables  ,  qu?elle  ne  les  pou- 
voit  ootenir  par  les  Armes?  De  plus,  en  même  temps  que  ces  deux  Puif- 
fances  convenaient  avec  le  Roi  Très-Chrétien  de  maintenir  le  Règlement 
qu'il  propofoit  lui-même  touchant  la  Succeffion  d'Efpagne,   elles  preve- 
noient  fort  à  propos  le  foupçon  de  quelque  milterequi  fe  pouvoit  rencon- 
trer dans  ce  Trait  de  Politique  de  la  Cour  de  France.  En  effet,  fi  Sa  Ma- 
jeité Très-Chrétienne  venoit  à  violer  un  Traité  de  cette  nature, &  à  vou- 
loir entreprendre  fur  toute  la  Monarchie  Efpagnoîe ,  ce  feroit  ouverte» 
ment  fe  condamner  elle-même  de  n'avoir  employé  la  Foi  du  Traité,  que- 
pour  parvenir  plus  feurementà  fes  fins;  ce  feroit  confirmer  les  Nations 
Etrangères  dans  la  prévention  où  elles  font  que  les  François  ne  cherchent 
qu'à  les  abufer  par  des  apparences  de  ilncenté;  ce  feroit  enfin  faire  une 
Injure  des  plus  outrageantes  aux  Ang'ois  &  aux  Hollandois ,  &  les   met- 
tre en  droit  d'appuyer  de  toutes  leurs  forces  la    Maifon  d'Autriche,  tant 
pour  foutenir  fes  prétentions,  que  pour  prévenir  de  notables  préjudices, 
dt-nt  'es  deux  Nations  feroient  menacées  par  une  telle  conduite.     Ces 
Conùdcrations  regardoient  proprement  les  Anglois  &  les  Hollandois  5  mais, 
le  Traité  en  foi-meme  devoit  fervir  d'un  dernier  &  du  plus  puhTant  mo- 
tif pour  réveiller  l'émulation  &  la  j  iloufie  de  la  Maifon  d'Autriche;    & 
c'en:  le  fujet  d'une  neuvième  &  dernière  Reflexion. 
#.  La  Ligue  entre  la  France  &  l'Angleterre  fut  un  des  principaux  Arti- 
fices 


PE. 


580    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  fices  que  le  Cardinal  Mazarin  mit  en  ufage  pour  faire  reuflir  le  Projet  qu'il 
gen.  dk  avoit  formé ,  pour  engager  Philippe  IV.  Roi  d'Efpagne  à  faire  la  Paix 
jl'Euro-  avec  ]a  France  ,  &  à  donner  fa  Fille  l'Infante  Marie-  Therèfe  en  Maria- 
ge à  Louis  XIV.  Roi  Très-Chrétien.  Le  Confeil  d'Efpagne  ,  voulant 
confirmer  Sa  Majefté  Catholique  dans  le  fentiment  où  elle  étoit  de  con- 
clure l'un  &  l'autre  ,  lui  reprefenta ,  que  la  Ligue  étroite  qui  étoit  entre  la 
France  &  F  Angleterre  empêcher  oit  laréuffite  de  tous  les  Dejfeins  cï  Efpagne\quil 
étoit  confiant  que  Charles- Quint,  tout  victorieux  qu  il  étoit  de  François  I. ,  fut 
contraint  de  faire  la  Paix  avec  lui  à  caufe  de  V  Alliance  ou  ce  Prince  entra  avec 
les  Anglois  \  13  qu  après  cet  Exemple  Sa  Majefié  ne  pouvoit  manquer  de  faire  la 
Paix  par  un  femblable  motif.  Il  ajout  oit  à  cela  que  V  Empereur  avoit  les  mains 
tellement  liées ,  qu'il  ne  pouvait  plus  donner  aucun  fecours ,  ni  à  la  Flandres ,  ni  à 
.  V  Etat  de  Milan  -,  &  enfin  que  le  Portugal  par oijff oit  fur  le  point  d'entrer  en  Al- 
liance avec  les  Anglois  &  les  François  d'une  part ,  &  peut-être  avec  les  HoU 
landois  de  l'autre ,  ce  qui  fer  oit  trés-facheux. 

Philippe  IV.,  Prince  naturellement  pacifique,  confiderant  qu'il  étoit 
vieux  &  infirme ,  aprehendoit  de  lahTer  à  fes  Enfans  extrêmement  jeunes 
une  Guerre  à  pourfuivre  contre  un  Roi  victorieux  &  à  la  fleur  de  fon  âge  ;  & 
cette  aprehenfion  fervit  à  le  perfuader  que  le  Mariage  de  l'Infante  avec 
le  Roy  de  France  ne  porteroit  aucun  préjudice, ni  à  fes  Enfans,  ni  à  fes 
Etats  j  d'autant  plus  que  le  Marquis  de  Lionne,  dans  un  voyage  fait  ex- 
près à  Madrid  quelques  années  auparavant,  avoit  fait  entendre,  que  le 
Roi  Très-Chretien  ne  pretendoit  point  époufer  l'Infante  à  des  Conditions 
autres  que  celles  qui  avoient  été  ilipulées  dans  le  Contrat  de  Mariage  de 
Louis  XIII.  avec  l'Infante  Anne,  Fille  de  Philippe  III. 

Il  y  avoit  une  grande  différence  entre  les  Conjonctures  de  l'année  itffp. 
qui  fut  celle  du  Mariage  de  Louis  XIV.  Roi  de  France  avec  Marie-Thé- 
refe  Infante  d'Efpagne, &  les  Conjonctures  de  l'année  1700.  qui  a  été  cel- 
le du  Traité  de  Partage  de  la  Succeffion  de  Charles  II.  Roi  Catholique. 
Les  intentions ,  les  réfolutions,  &  les  préparatifs  de  la  France  nétoient 
plus  couverts  d'aucun  déguifement.  Sa  Majefié  Tres-Chretienne  avoit 
déclaré  fes  Prétentions  fur  la  Monarchie  d'Efpagne  ,  &  par  provifion  elle 
s'en  étoit  affurée  une  partie  par  une  Ligue  avec  l'Angleterre  &  la  Hol- 
lande,  afin  de  pouvoir  plus  facilement  obtenir  l'autre  ,  de  même  que, 
pour  parvenir  à  la  conclufion  du  Mariage ,  elle  s'étoit  unie  d'Intérêts  avec 
les  Anglois.  Au  tems  du  Mariage,  le  Cardinal  Mazarin  n'avoit  point 
fait  de.difficulté  d'emploier  les  cérémonies  les  plus  folemnelles  &  les 
plus  facrées  qui  puilTent  accompagner  une  Renonciation  ,  comme  une 
fimple  Rufe  de  Politique  qui  pouvoit  fervir  à  faire  croire  au  Roi  &  aux 
Peuples  d'Efpagne  que  le  Roi  Très-Chretien  &  fes  Defcendans  ne  fe  pre- 
vaudroient  jamais  de  ce  Mariage ,  pour  former  des  Prétentions  fur  leurs 
Etats-,  &  en  1700.  la  France  s'eft  fervie  de  la  Foy  d'un  Traité,  comme 
d'une  féconde  Rufe  de  Politique,  qui,  pouvant  faire  croire  qu'elle  fe  te- 
noit  fatisfoite  d'une  médiocre  Partie  de  la  Succeffion  d'Efpagne,   feroit 

très- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.         jSi 

très-propre  pour  attirer  dans  Tes  intérêts  le  Cardinal  Portocarrero,  un  des  Affaires 
principaux  Minières  du  Roi  Catholique,  &  par  fon  moyen  déterminer  Sa  GFN-  °£ 
Majefté  à  inftituer  par  Ton  Teftament  le  Petit- Fils  du  Roi  Très-Chrétien  L'EuK0- 
Héritier  de  la  Monarchie  entière.  PE* 

Cette  féconde  Rufe  de  la  France  auroit  été  rendue  inutile,  &  auroit  peut- 
être  même  fervi  à  détruire  l'effet  de  la  première ,  û  l'Empereur  étoit  en- 
tré dans  le  Traité  de  Partage.  De  quelque  manière  que  les  chofes  tour- 
naient, il  étoit  difficile  qu'il  ne  fe  rencontrât  point  d'occafion  de  Guerre} 
&  je  douterois  fort  que  le  Roi  de  la  Grande-Bretagne  &  les  Etats  Géné- 
raux des  P.  U.  fe  foient  perfuadez  de  voir  les  premiers  temps  de  l'ouver- 
ture de  la  Succeilion  d'Efpagne  fe  paffer,  comme  ces  belles  journées,  où 
les  rayons  du  foleil  font  tempérez  de  nuages  qui  n'ont  que  de  bénignes  in» 
fluences.  Mais,  la  France  étant  la  feule  en  état  de  faire  de  grandes  Ln- 
treprifes  ,  elle  auroit  été  moins  difpofée  à  fe  prévaloir  de  fes  forces,  fi  la 
Succeflion  fe  fût  trouvée  réglée  de  concert  entre  Sa  Majefté  Très- Chré- 
tienne &  Sa  Majefté  Impériale.  De  vouloir  fupofer  que  la  France  étoit 
bien  prévenue  que  l'Empereur  ne  voudroit  jamais  entendre  à  aucun  Parta- 
ge, ou,  qu'en  ce  cas,  elle  auroit  eu  des  expediens  prêts  pour  rompre  le 
Traité  &  rendre  nuls  tous  Engagemens  ,  c'eft  furquoi  je  ne  raifonne  point: 
il  eit  inutile  de  fupofer  ce  qui  n'efl  point  arrivé,  &  il  faut  s'en  tenir  aux 
faits  qui  font  hors  de  toute  conteltation. 

La  France  pretendoit  à  quelque  prix  que  ce  fût  avoir  fa  part  de  la  Suc- 
ceflion à  la  Monarchie  d'Efpagne:  il  n'y  avoit  aucune  apparence,  que 
la  Maifon  d'Autriche  pût  lui  oppofer  des  forces  capables  de  l'obliger  à 
fe  defifter  de  fes  prétentions,  ou  d'empêcher  qu'elles  ne  fulfcnt  effectuées. 
Sa  Majefté  Britannique  &  les  Etats  Généraux  des  P.  U.,  très-perluadez 
de  la  vérité  de  ces  deux  propolitions,  avoient  jugé  neceffaire  de  préve- 
nir les  effets  des  prétentions  de  la  France,  en  convenant  avec  Sa  Majefté 
Très-Chrétienne  d'un  Accommodement  tel  que  les  conjonctures  des  tems 
le  pouvoient  exiger,  pour  fatisfaire  les  deux  Concurrents  à  la  Monarchie 
d'Efpagne,  &  pour  afîurer  la  tranquilité  de  l'Europe}  non  pas  en  retran- 
chant abfolument  tout  prétexte  de  Guerre,  mais  feulement  en  difpofant 
les  chofes  d'une  manière  plus  propre  à  pacifier  promptement ,  &  avec 
■moins  de  préjudice  pour  toute  l'Europe,  les  émotions  &  les  troubles  iné" 
vitables  au  moment  du  décès  de  Sa  Majefté  Catho'ique. 

Voilà  précifement  le  fait.  Il  elt  bien  vrai  que  la  conduite  de  la  France 
envers  l'Empereur,  &  l'Amitié  fincére  que  Sa  Majefté  Impériale  a  tou- 
jours eue*  pour  Majefté  Catholique,  ne  lui  permettoient  pas  d'entrer  dans 
un  Partage  des  Etats  d'Efpagne,  du  vivant  de  Charles  IL  aurïi  délibéré- 
ment,  que  le  Roi  Très- Chrétien,  lequel  n'avoit  époufé  la  Sœur  de  S.  M. 
C.  que  pour  acquérir  l'Héritage  d'Efpagne  à  fes  Defcendans.  Mais,  enfin, 
il  n'y  avoit  plus  de  temps  à  perdre.  En  vain  on  fe  laiflbit  fhter  de  quel- 
que recouvrement  de  fanté,  ou  prolongation  de  vie  d'un  Prince  qui  n'éioit 
foutenu  que  par  l'artifice  des  remédies.  11  étoit  d'une  dernière  néceffité 
que  l'Empereur  pût  inceffamment  engager  Sa  Majefté  Catholique  &  fon 

T<tme  XI,  Gggg  Con- 


t'EuRO 
PE 


7S2    MEMOIRES,  NEGOTI ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  Confeil  à  donner  une  déclaration  de  leurs  intentions  touchant  le  Traité  de 
gfn.  de  Partage.  Si  le  Roy  Charles  IL,  de  fon  propre  mouvement,  ou  par  les  In- 
fpiraiions  de  fon  Confeil  ,  ne  vouloit  point  confentir  à  aucun  démembre- 
ment de  la  Monarchie,  il  étoit  d'une  égale  néceffité  de  faire  refoudre  Sa 
Majeflé  Catholique  à  donner  des  aflurances ,  hors  de  toute  apparence  de 
doute,  pour  maintenir  le  Droit  de  la  Maifon  d'Autriche  à  la  Succeffion  de 
la  Monarchie  entière  de  tous  les  Etats  d'Efpagne  :  ces  aflurances  ne 
pouvoient  être  fuffifamment  fondées  que  fur  un  nouveau  Teitament  du 
Roi  Charles  II.  en  faveur  d'un  Prince  de  cette  Maifon  ;  &  ce  Tefta- 
ment  devoit  être  confirmé  par  toutes  les  formalitez  les  plus  capables 
d'obliger  les  Grands  &  les  Peuples  d'Efpagne  à  foutenir  de  leurs  Biens  & 
de  leurs  Vies  les  Difpofitions  Teflamentaires,  qu'ils  feraient  cenfez  avoir 
faites  eux-mêmes  conjointement  avec  leur  Souverain. 

Trois  mois  de  temps,  marquez  dans  l'Article  VU.  du  Traité,  pour  don- 
ner lieu  à  Sa  Majeilé  Impériale  de  l'accepter,  fuffifoient  pour  obtenir  une 
détermination  du  Roi  d'Efpagne  ,  &  s'il  fe  rencontroit  des  obilacles  in- 
vincibles à  un  Teltament  tel  que  je  viens  de  le  propofer ,  il  n'étoit 
nullement  de  la  prudence  de  fe  repofer  fur  de  fimples  promelles  ou  de 
bouche  ou  écrites.  Si  Sa  Majeilé  Catholique  n'étoit  plus  en  état  de 
difpofer  de  fon  Confeil  ,  félon  que  les  véritables  intérêts  de  la  Maifon 
d'Autriche  l'exigeoient;  fi  l'apréhenfion  de  mécontenter  la  France  pré- 
valoit  fur  les  inltances  de  l'Empereur,  il  étoit  indubitable  que  l'Accep- 
tation du  Traité  de  Partage  étoit  la  meilleure  reflburce  pour  la  Maifon 
d'Autriche. 

Le  feptième  Article  du  Traité  contient  encore  deux  Points  confidé- 
rables.  L'un  efl  que  ,  fi  Sa  Majcjîé  Impériale  &  le  Roy  des  Remains  re- 
fufoient  d'entrer  dans  le  'Traité  &  de  convenir  du  Partage  affigné  au  Sere- 
'mjf.  archiduc  ,  les  deux  Seigneurs  Roys  ou  leurs  Succeffeurs  ,  £5?  les  Sei- 
gneurs Etats-Généraux ,  conviendront  d'un  Prince  auquel  le  dit  Partage  fera 
donné.  Le  fécond  Point  efl,  quV»  cas  que  ,  non-obftant  la  préfente  Conven- 
tion ,  le  dit  Serenijf.  archiduc  voulut  prendre  pojfejjïon  de  la  Portion  qui  lui 
fera  échue ,  avant  qu'il  eût  accepté  le  préfent  Traité ,  ou  de  celle  qui  fer  oit 
affgnées  à  Mgr.  le  Dauphin  ou  à  celui  qui  aura  le  Duché  de  Milan  par 
échange  ,  comme  il  eft  dit  ci-deffus  ,  lesdits  deux  Seigneurs  Rois  &  les  E- 
tats-Generaux,  en  vertu  de  cette  Convention ,  f  empêcheront  de  toutes  leurs 
forces. 

Ces  deux  Points,  non  plus  que  tout  ce  qui  fe  trouve  dans  le  Traité  de 
defavantageux  à  la  Maifon  d'Autriche,  ne  doivent  aucunement  être  imputé 
au  Rci  de  la  Grande-Bretagne  ni  aux  Etats-Generaux.  La  France  ayant 
propofé  de  faire  valoir  fes  prétentions  &  de  les  apuyer  d'un  confentement 
des  deux  autres  Puiffances,  elles  ont  fimplement,  comme  Médiatrices,  eu 
égard  à  ne  rien  accorder  que  ce  qui  ne  pouvoit  pas  être  refufé  ,  fans  ex- 
pofer  toute  l'Europe  à  de  terribles  bouleverfemens;  mais  en  même  temps 
que  les  deux  Puiffances  ont  condefeendu  à  certaines  proportions  de  la 
France,  elles  ont  pourvu  à  mettre  des  bornes  aux  prétentions  de  cette 

Cou- 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC  I.        jgj 

Couronne.  Car  fi  d'un  côté  Sa  Majeflé  Britannique  &  les  Etats-Generaux  Affaires 
ont  confenti  de  fixer  un  terme  de  trois  mois  à  l'Empereur  pour  l'accepta-  GEN-  de 
tion  du  Traité;  s'ils  font  convenus  de  faire  choix  d'un  autre  Prince  ,  en  L'E^li0- 
cas  de  refus  de  Sa  Majelté  Impériale;  il  efï  manifefle  que  ce  n'a  été  qu'à 
defTein  de  folliciter  plus  vivement  la  Maifon  d'Autriche  à  fe  déterminer 
inceffamment  fur  des  circonftances  qui  ne  pouvoient  fouffrir  de  délay,  & 
afin  d'engager  la  France  à  ne  pouvoir  plus  prétendre  à  l'entière  Succefîion 
d'Efpagne  pour  un  Prince  François ,  &  à  ne  pouvoir  point  faire  de  bri- 
gues fans  leur  participation.  Que  fi  d'autre  côté  ,  les  deux  Puiffances 
ont  contracté  une  obligation  indifpenfable  d'empêcher  les  entreprifes  de 
l'Archiduc  au  préjudice  du  Traité:  elles  ont  en  premier  lieu  pourvu  à  ce 
qu'il  ne  fe  fit  point  de  mouvement,  pendant  la  vie  de  Sa  Majeflé  Catho- 
lique, capable  de  troubler  la  Paix  de  l'Europe;  &  en  fécond  lieu  elles 
ont  acquis  le  Droit,  &  contracté  l'obligation,  d'empêcher  la  France  de  for- 
mer &  d'exécuter  aucun  projet  au  préjudice  des  conditions  des  quelles 
elle  eft  convenue. 

L'Article  VIII.  portant  que  le  Séréni/f.  Archiduc  ne  pourra  pajfer  en  Efpa- 
gne  ni  dans  le  Duché  de  Milan  du  vivant  de  Sa  Majefté  Catholique,  que  d'un 
commun  confentement  13  point  autrement,  n'efl  qu'une  extention  de  l'Article 
précédent ,  &  fait  connoitre  combien  la  France  eft  exacte  à  prendre 
toutes  les  précautions  neceffaires  pour  le  fuccès  de  fes  deffeins.  Cette 
extrême  exactitude  ne  devok  pas  être  regardée  avec  indifférence  par 
la  Maifon  d'Autriche;  mais  auffi  elle  pouvoit  un  jour  fervir  de  bonne  rai- 
fon  aux  deux  autres  Puiffances ,  pour  faire  entendre  à  Sa  Majeflé  Très- 
Chrétienne,  que  fi  elle  les  avoit  engagées  à  des  mefures  fi  précifes  contre 
la  Maifon  d'Autriche ,  dont  les  entreprifes  ne  pouvoient  être  d'un  grand 
préjudice,  il  étoit  de  lajuftice  de  ne  pas  permettre  que  leur  confentement 
n'eût  été  recherché  ,  que  pour  faire  mieux  valoir  les  prétentions  de  la 
France, au  defavantage  de  l'Empereur. 

L'Article  IX.  affure  à  la  Maifon  d'Autriche  le  Partage  afligné  au  Séré- 
niffime  Archiduc  ,  en  telle  forte  néanmoins ,  qu'il  ne  pourra  jamais  être 
réuni,  ni  demeurer  en  la  perfonne  de  celui  qui  fera  Empereur  ou  Roi  des 
Romains  de  quelque  manière  que  ce  puiffe  être. 

Cela  veut  dire  que  les  Trois  Puiffances  ont  jugé ,  qu'il  étoit  néceffaire 
pour  le  bien  de  toute  l'Europe  que  les  chofes  demeuraffent  ainfi  arrêtées  j 
mais  de  fçavoir,  fi  elles  peuvent  en  effet  demeurer  dans  cette  difpofition, 
il  faudroit  auparavant  avoir  trouvé  le  moyen  d'empêcher  la  force  majeure 
de  fe  rendre  maitreffe  des  réglemens  ,  des  loix,  &  de  tous  les  droits  les 
mieux  établis,  les  plus  jultes  ,  &  les  plus  facrez.  Que,  dans  le  temps- 
même  de  ce  Traité,  on  eût  demandé  à  la  France,  û,  l'occafion  fe  pré- 
fentant  de  pouvoir  réunir  en  la  Perfonne  d'un  de  fes  Princes ,  ou  Empe- 
reur ou  Roi  des  Romains  ,1e  Partage  afiigné  au  Séréniffime  Archiduc,  elle 
fe  feroit  quelque  fcrupule  de  contrevenir  à  cet  Article?  Il  efl  à  croire  qu'el- 
le auroit  détourné  la  queflion  ,en  répondant,  que  ,jufqu'à  ce  que  roccafion 

Gggg  2  fût 


>84    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Araires    fût  arrivée,  il  y  avoit  du  temps  pour  avifer  à  ce  qu'elle  auroit  à  faire 
cen. de    alors. 

x'Euro-  i]  me  femble  qu'il  faut  bien  plus  fonger  à  pourvoir  généralement  à  tout 
PE-  ce  que  les  conjonctures  préfentes  peuvent  exiger,  qu'à  prévoir  des  événe- 
mens  éloignez.  El  certes  ,  ce  font  proprement  les  négligences,  de  ce  qui 
concerne  les  temps  prefens ,  qui  donnent  heu  aux  révolutions  qui  p;,roif- 
fent  furvenir  inopinément.  Si  par  exemple  la  Maifon  d'Autriche  eût  imi- 
té le  procédé  de  la  France,  pour  des  négociations  ,  des  préparatifs,  &  gé- 
néralement pour  tout  ce  qui  pouvoit  allurer  fes  prétentions  à  la  Succeflion 
d'Lfpagne,  le  Roi  Très-Chrétien  n'auroit  pas  trouvé  une  lî  grande  facilité 
pour  amener  les  chofes  à-peu  près  au  point  où  il  les  vouloit,  ni  d'en  dif. 
pofer  félon  fon  choix,  non  obftant  toutes  Conventions  précédentes.  D'au- 
tre part,  fi  le  Roi  de  la  Grande-Bretagne  &  les  Seigneurs  Etats-Generaux 
avoient  fait  une  fcrupuleufe  attention  aux  intentions,  aux  ratlnemens,  aux 
fubtilitez  du  Confeil  de  France  dans  les  Négociations ,  ils  auroient  eu 
principalement  foin  de  former  dans  le  préfent  Traité  un  Article  exprès 
touchant  un  Teftament  qui  viendroit  à  être  fait  en  faveur  des  Petits-Fils 
de  Sa  Majeflé  T.  C.  Ce  Teftament  ne  pouvoit  pas  abfolument  être  jugé 
impofllble  ;  &  la  France,  qui  avoit  déjà  publié  hautement  fon  inclination 
défaire  paffer  le  Duc  d'Anjou  en  Efpagne  ,  pour  y  être  élevé  ,  comme 
SuccefTeur  de  Sa  Majefté  Catholique  ,  n'avoit  pas  aparament  abandonné 
toutes  les  grandes  efpérances  fur  la  hucceiîion  entière  ,  lorfqu'elle  vouloit 
paroître  fatisfaite  d'un  médiocre  Partage.  Pour  marque  qu'elle  fe  propofoit 
encore  quelque  choie  de  plus,  elle  a  eu  foin  de  faire  ajouter  à  la  fin  de 
cet  Article  IX.  la  Claufe  fuivante. 

Et  de  même  le  dit  Partage  du  Sérénijf.  Archiduc  ne  pourra  jamais  rêve* 
n'tr ,  ni  demeurer  en  la  per/onne  d'un  Prince  qui  fera  Roi  de  France  ou  Dau- 
phin^ ou  qui  fera  devenu  ïun  ou  l'autre,  (oit  par  SucceJJton,  cïejiament ,  Con- 
trat! de  Mariage,  &c. 

A  ne  confidérer  cette  Claufe,  que  félon  l'idée  générale  que  les  termes 
femblent  exprimer,  &  félon  les  vues  de  bonne-foi  qui  devroient  régner 
dans  tous  les  Traitez,  on  fe  lahTeroit  perfuader,  que  les  Trois  PuifTances 
n'ont  eu  égard  qu'à  des  événemens  capables  d'arriver  dans  la  fuite  des 
temps,  fi  l'Archiduc  &  la  Maifon  d'Autriche  venoient  à  manquer  d'Héri- 
ritiers.  Car,  étant  dit  que  le  Partage  du  SérénilT.  Archiduc  ne  pourra  jamais 
revenir  ni  demeurer  en  la  perfbnne  d'un  Prince  qui  fera  Roi  de  France  ou 
Dauphin  &c,  ne  doit-on  pas  naturellement  fupofer  ,  que  !e  Partage  ali- 
gné à  l'Archiduc  lui  fera  confervé  &  à  fes  Héritiers  ,  fuivant  le  règle- 
ment arrêté  au  commencement  de  Cet  Article  IX.  &  qu'il  ne  pourra  reve- 
nir à  la  Maifon  de  France  que  par  des  Conjonctures  à  naître  dans  les  tems 
à  venir.  Cependant,  fi  l'on  fait  une  Réflexion  plus  particulière  fur  la  Poli- 
tique que  les  Cardinaux  de  Richelieu  &  Mazarin  ont  introduite  duns  le  Con- 
feil de  France  ,  on  pourroit  avec  fondement  fe  méfier  que  le  véritable 
Cens  de  cette  Claufe  auroit  été,  que  les  Pais  de  la  Monarchie  d'Elpagne , 

aflîguez 


PE. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC    I.  f$5 

aftignez  pour  Partage  au  SérénifT.  Archiduc  ,   pourroient  bien  revenir  &    Affaires 
demeurer  en  la  perfonne  d'un  Prince  de  France,  qui  ne  feroit  point  Roi     gen.de 
ni  Dauphin  ,  ni  devenu  l'un  ou  l'autre  ;&  de  cette  manière  fi  le  Duc  d'An-     *-'Eu»°- 
jou  devenoit  Roi  de  France  ou  Dauphin,  en  ce  cas  il  ne  pourroit  jouir  du 
Partage  que  le  Traité  aiîigne  au  Seréniilime  Archiduc;  mais  le  Duc  de 
Berri  ou  un  autre  Prince  de  la  Maifon  de  France  auroient  pu   obtenir  par 
droit  de  Succeflion  au  Duc  d'Anjou,  ce  que  lui-même  auroit  pu  obtenir  par 
Droit  de  Teitament. 

Il  eft  certain,  que  le  Roi  de  la  Grande-Bretagne  &  les  Etats- Généraux 
ont  etiimé  que,  pour  accommoder  les  difputes  &  les  différens  ,  &  pour 
prévenir  les  ombrages  à  naître  à  l'ouverture  de  la  Succellion  d'Efpagne, 
il  étoit  necefTaire  que  toute  la  Maifon  de  France  fut  exclue  du  Partage  af- 
figné  à  l'Archiduc,  indépendament  de  tout  Teitament  de  Charles  II.  Roi 
d'Efpagne,  fait  en  faveur  des  Defcendans  de  Sa  Majelté  Très-Chrétien- 
ne; de  même  que  l'Intention  des  deux  PuhTances  étoit ,  que  tout  Tefla- 
ment  précédent  ou  à  venir  en  faveur  de  la  Maifon  d'Autriche  ne  pourroit 
autorifer  un  Prince  de  cette  Maifon  de  fe  vouloir  mettre  en  poffc(Fion  du 
Partage  afîigné  à  Mgr.  le  Dauphin  ;  autrement  il  y  auroit  eu  de  l'injultice 
à  convenir  que  le  Partage  de  l'Archiduc  pourroit  revenir  à  un  Prince  de 
France,  pendant  que  celui  de  Mgr.  le  Dauphin  ne  pouvoit  revenir  à  un 
Prince  d'Autriche.  Mais  ,  comme  il  a  déjà  été  remarqué  ,  la  France 
ayant  recherche  de  s'allier  aux  Rois  d'Efpagne  à  deilein  d'acquérir  le 
Droit  de  fuccéder  à  leur  Monarchie  ,  &  les  Renonciations  n'ayant  été 
faites  dans  les  Traitez  précédens  qu'en  manière  de  Rufe  politique  em- 
ployée par  la  France  pour  couvrir  des  prétentions  ,  qu'elle  fe  refervoit 
de  faire  valoir  en  tems  &  lieu,  il  étoit  important  à  Sa  Majefté  Britan- 
nique &  aux  Etats-Generaux  des  P.  U.  de  pénétrer  le  véritable  efprit, 
&  d'aprofondir  toutes  les  vues  fecrétes,  des  Propofitions  avancées  par 
les  François  dans  un  dernier  Traité  exprès  pour  régler  la  Succeffiori 
de  Charles  II.  Roi  d'Efpagne,  en  état  de  mort  prochaine  ,  fans  Héritiers 
de  la  Branche  Royale  d'Autriche. 

Les  Articles  X.  XI.  &  XIV.  contiennent  des  Engagemens  réciproques 
entre  les  Trois  PuiiTances  pour  maintenir  la  tranquillité  de  l'Europe  au 
moment  du  décès  de  Sa  Majefté  Catholique,  i.  de  laitier  toute  la  Suc- 
cefiion  dans  l'état  ,  comme  elle  fe  trouvera  alors  ;  2.  de  louffrir  qu'il 
feu  libre  à  chaque  Prince  de  fe  mettre  en  poiTeiïion  de  ce  qui  lui  elt  afîi- 
gné pour  Partage,  pourvu  qu'il  ait  préalablement  fatisfait  aux  conditions 
portez  par  les  Articles  IV.  &  Vil.  du  Traité  -,  $.  de  faire  tous  leurs  de- 
voirs poflibles,  afin  que  chacun  foit  mis  en  poflelîion  de  h  Portion,  félon 
cette  Convention ,  &  qu'elle  puiiTe  avoir  fon  entier  c  ffet  ;  4.  de  s'aifi- 
fter  mutuellement  l'une  l'autre  avec  toutes  fes  forces,  &  de  fe  rendre  Ga- 
rant de  la  poncluelie  exécution  de  la  dite  Convention.  &  des  Renoncia- 
tions faites  en  confequence  \  5.  de  s'entraider  l'une  l'autre  contre  tous 
©ppoians  à  la  prife  de  pofTefïion  des  partages  convenus,  &  pour  cet  effet 

Gggg  3  dc 


l'Euko- 
pr. 


586    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    de  régler  entr'ellès  ce  qu'elles  doivent  contribuer  de  forces  par  Mer  &  par 
ge*.  m    Terre. 

Entre  diverfes  Réflexions  à  faire  fur  ces  Engagemens  les  principales  font  : 
la  première,  que  la  France  avoit  moyen  de  faire  les  plus  grands  prépara- 
tifs de  Guerre,  fous  le  jufte  prétexte  de  fe  tenir  en  état  d'entrer  en  pok 
feffion  de  ce  qui  lui  étoit  afîigné  par  le  Traité  &  d'en  faire  valoir  toutes 
les  Conventions. 

La  féconde,  que  la  Maifon  d'Autriche  étoit  fuffifamment  avertie  &  ex- 
citée à  en  faire  de  même  pour  foutenir  fes  Droits  &  prendre  toute  forte 
de  précautions,  ou  pour  combattre  les  Conventions  du  Traité  ,  ou  pour 
prévenir  toutes  difficultez  &  conteflations  à  naitre  au  tems  de  leur  exé- 
cution. 

La  troifiéme,  que  le  Roi  de  la  Grande-Bretagne  &  les  Etats-Generaux 
des  Provinces- Unies  avoient  pareillement  tous  les  prétextes  plaulibles 
pour  difpofer  leurs  Peuples  à  de  puiiïants  Armements,  tant  pour  mainte- 
nir les  Conventions  du  Traité  ,  que  pour  mettre  leurs  Etats  en  feureté  en 
cas  de  Révolutions  imprévues. 

La  quatrième ,  que  la  manière  dont  la  France  en  uferoit  à  l'égard  des 
mefures  qui  dévoient  précéder  le  décès  de  Sa  Majeflé  Catholique,  fer- 
viroit  aux  deux  PuifTances  pour  reconnoître  plus  particulièrement  les  In- 
tentions qu'elle  auroit  pu  avoir  dans  la  Conclufion  du  Traité.    Par  exem- 
ple ,  fi  la  France  faifoit  des  infiances  pour  obliger  les  autres  PuifTances 
à  préparer  des  Armements  5    fi  elle  requeroit  que  chacune  de  fon  côté 
difpofàt  par  avance  tout  ce  qui  fe  trouveroit  neceffaire  pour  la  Garantie 
du  Traité  au  moment  de  l'ouverture  de  la  Succefîion  du  Roy  Catholi- 
que ;  fi  elle  témoignoit  de  l'empreffement  pour  que  toutes  Trois  enfem- 
ble  fîiTent  faire  à  la  Cour  d'Efpagne ,  &  par-tout  où  befoin  feroit,  des 
Déclarations  nettes  &  precifes  de  la  Refolution  irrévocable ,  où  elles  é- 
toient,  de  faire  valoir  les  Conventions  du  Traité,  non-obftant  toutes  op- 
pofitions  contraires:  l'Angleterre  &  la  Hollande  n'avoient  qu'à  fonger  à 
contribuer  de  leur  part  à  une  pareille  obfervation  dans  toute  fon  exacti- 
tude.    Que  fi  la  France  paroifîoit  uniquement  empreffée  pour  des  Arme- 
ments au  dedans  de  fes  Provinces;  fi  elle  étoit  indifférente  pour  deman- 
der que  les  deux  autres  PuifTances  fifTent  des  préparatifs  de  Guerre  j  fi 
elle  ménageoit  quelques  intrigues  fecretes,  fans  en  donner  Communica- 
tion au  Roy  de  la  Grande-Bretagne  &  aux  Etats  Généraux;  fi  elle  con- 
fervoit  quelques  vues  au  de-là  du  Partage  qui  lui  étoit  affigné  ;  fi  dans 
les  Négociations  de  tous  fes  Envoyez  dans  les  Cours  de  l'Europe  elle  ne 
marquoit  pas  une   détermination  precife  de    demeurer  irrévocablement 
arétée  aux  Conventions  du  Partage  ;  enfin,  s'il  pouvoit  naitre  quelque  for- 
te de  foupçon  que  la  France  ne  fe  feroit  pas  une  Loy  inviolable  d'obfer- 
ver  le  Traité,  c'étoit  alors  une  Obligation  bien  plus  étroite  à  l'Angle- 
terre &  à  la   Hollande   de  fe  tenir  fur  leur  garde   &  d'être  fufifament 
préparées  à  tout  événement. 


J'exa. 


pour  une  Julie  decifion  fies  differens  que  la  Succeilion  d'Efpagne  doit 
faire  naître   entre   Sa  Majefté    Impériale    &   Sa   Majefté   Trés-Chrè- 

'il  eût  été  néceflaire  d'affembler  des  Plénipotentiaires  de  tous  les  E- 
&  de  former  une  Negotiation  fernblable  à  celles  des  Traitez  de  Paix 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  s%7 

J'examinerai  ailleurs  les  motifs  que  l'on  pouvoit  avoir,  pour  ne  point  Affaires 
fe  repofer  fur  la  Foy  de  ce  Traité  \  la  necefîké  qu'il  y  avoit ,  que  les  An-  GfN-  DK 
glois  &  les  Hollandois  fe  trouvaient  parfaitement  bien  difpofez,  félon  les 
diverfes  Conjonctures  que  l'ouverture  de  la  SuccefTion  d'Efpagne  pourroit 
occalionner  ;  &  les  mefures  qui  auroient  pu  être  prifes  à  cet  égard. 

L'Article  XII.  porte  que  feront  admis  dans  le  Traité  tous  Rois,  Princes,  &? 
Etats ,  qui  'voudront  y  entrer ,  &  qu'il  fera  permis  aux  deux  Seigneurs  Rois  £s? 
aux  Seigneurs  Etats  Généraux ,  cj?  à  chacun  d'eux  en  particulier  de  requérir 
&?  inviter  tous  ceux  qu'ils  trouveront  bon  de  requérir  &  inviter  d'entrer  dans  le 
Traité ,  &  d'être  (en.blablement  Garands  de  jon  exécution  &  de  la  validité  des 
Renonciations  qui  y  font  contenues. 

La  Révolution  d'Efpagne  étant  un  Evénement  auquel  toute  l'Europe 
doit  être  très-particuliérement  intéreffée,  n'auroit-il  pas  été  plus  convena- 
ble de  propofer  à  tous  Rois ,  Princes ,  &  Etats,  le  Projet  du  Traité  avant 
qu'il  fut  conclu  ?  Souvent  le  mécontentement  de  n'avoir  pas  été  admis 
aux  délibérations  d'une  affaire  ,  fait  qu'on  ne  veut  point  prendre  part,  & 
même  que  l'on  s'oppofe  à  fon  exécution ,  quoiqu'elle  foit  la  plus  jufle  & 
la  plus  conforme  aux  véritables  intérêts  du  public  &  du  particulier.  Les 
Conventions  du  Traité  ayant  été  dreffées  pour  alïurer  la  tranquillité  de 
tous  les  Etats  de  l'Europe,  n'étoit-il  point  naturel  de  communiquer  à  tous, 
ce  qui  étoit  eltimé  de  plus  utile  pour  le  bien  général  ?  Cette  Jullice  & 
cet  Honneur  rendus  aux  Souverains,  dans  une  occafion  qui  les  concernoit 
de  bien  près,  ne  pouvoient  manquer  de  produire  de  bons  effets.  Ils  au- 
roient eu  plus  de  difpofition  pour  fe  laiffer  perfuader  de  l'importance,  de 
l'avantage ,  &  de  la  necefîité  des  Conventions.  Que  fi  des  Préventions 
d'Intérêt  particulier,  ou  d'autres  Confédérations, en  avoient  empêché  quel- 
ques-uns de  prendre  part  dans  le  Traité,  ou  les  avoient  portez  à  s'y  op- 
pofer ,  au  moins  ils  n'auroient  pu  fe  plaindre  de  ce  qu'on  n'auroit  point 
eu  pour  eux  une  certaine  defcrence  d'honneur  &  de  confeil ,  qu'ils  au- 
roient eu  quelque  Droit  de  prétendre. 

En  effet,  qu'il  s'élève  une  Guerre  à  l'ouverture  de  laSucceflion  d'Efpa- 
gne j  dificilement  fe  trouverat-il  des  Etats  qui  puiffent  demeurer  neutres: 
tous  ceux,  qui  auroient  eu  part  aux  mouvemens  de  la  Guerre,  feroient 
indubitablement  admis  dans  les  délibérations  pour  la  Paix  avant  fa  con- 
clufion.  11  paroit  donc  que  chaque  Etat  de  l'Europe  auroit  eu  raifon  de 
s'attendre  d'être  confulté  &  admis  dans  les  délibérations  du  Traitéde  Par- 
tage ,  avant  qu'il  fut  conclu  -,  puifqu'à  proprement  parler,  ce  Traité  doit 
tenir  lieu  d'un  Accord  gênerai  entre  toutes  les  Puiffances  de  l'Europe 


tienne. 

S 
tats 


TE. 


188  MEMOIRES  ,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  ordinaires,  la  chofe  n'étoît  pas  praticable;  mais  ne  s'agifTant  que  de  de- 
gkn.de  pêcher  des  Extraordinaires  pour  folliciter  une  prompte  Refolution  delà 
part  des  Souverains,  de  même  qu'il  a  dû  être  pratiqué  pour  donner  avis 
du  Traité  conclu  -t  je  ne  conçois  point  la  dificul'e  qui  auroit  pu  s'y  rencon- 
trer. Si  l'état  languiiTant  de  Charles  fembloit  ne  point  foufrir  de  retarde- 
ment, ne  pouvoit-il  pas  être  déterminé  entre  Sa  Majeilé  Très-Chrétien- 
ne, Sa  Majeilé  de  la  Grande-Bretagne,  &  les  Seigneurs  Etats  Généraux, 
qu'au  cas  que  Sa  Majeilé  Catholique  vint  à  mourir  avant  le  retour  des 
Exprès  dépêchez  dans  tous  les  Etats  de  l'Europe,  les  Conventions  aré- 
tées  entre  les  Trois  Puiffances  auroient  la  force  &  la  vigueur  des  Trai- 
tez les  plus  folemnels  ? 

On  poura  trouver  mauvais  que  j'infiile  fur  de  fimples  formalitez  ;  d'au- 
tant que  les  Trois  Puiffances,  ayant  une  fois  refolu  de  s'en  tenir  aux 
Conventions  arétées  entre  elles,  il  étoit  indiferent  d'en  donner  communi- 
cation avant  ou  après  la  dernière  Cô*riclufion  du  Traité.  Ne  doit-on  pas  re- 
pondre, que  s'il  étoit  indiferent,  que  les  autres  Etats  acceptafTent ,  ou 
îî'acceptaiîent  point  le  Traité ,  il  pourroit  auffi  être  indiferent  d'obferver 
toutes  les  formalitez  poiïibles  pour  les  inviter  d'y  entrer?  Mais  n'eft-il 
pas  manifefle,  que  la  parfaite  exécution  des  Conventions  dépendoit  abfolu- 
ment  du  confentement  des  autres  Souverains  ,  pour  contribuer  de  leur 
part  au  maintien  de  la  tranquilité  publique  dans  les  tems  de  la  Révolution 
de  l'Efpagne  ?  N'auroit  il  donc  pas  été  à  propos  de  ménager  jufqu'aux 
moindres  formalitez  utiles ,  pour  engager  plus  feurement  le  confentement 
des  autres  Souverains? 

Il  auroit  bien  pu  arriver,  que  la  France,  accoutumée,  comme  elle  efl, 
de  parler  avec  beaucoup  de  hauteur,  &  de  commander  les  chofes  plutôt 
que  de  les  propofer,  auroit  fait  difficulté  de  prendre  de  tels  ménagemens 
dans  une  Affaire,  où  elle  prétend  avoir  un  plein  Droit,  &  dont  elle  croit 
pouvoir  être  MaitreiTe.  Mais,  les  deux  autres  Puiffances,  qui  ne  préten- 
doient  aucun  avantage,  &  dont  l'unique  but  étoit  d'accommoder  les  dif- 
ferens,de  prévenir  les  ombrages,  &  d'ail  urer  la  Paix  Générale,  ne  pouvoient 
prendre  des  précautions  trop  circonfpecles  pour  faire  valoir  leurs  Inten- 
tions parmi  les  Peuples  de  leurs  Obeïffances,  &  pour  attirer  les  autres  E- 
tats  dans  le  même  DelTein.  Bien  plus,  comme  la  France  n'avoit  recher- 
ché cette  manière  de  Confédération %vec  l'Angleterre  &  la  Hollande, 
que  pour  empêcher,  qu'elles  ne  fe  rencont raflent  point  oppofées  aux  Pro- 
jets qu'elle  meditoit,  afin  de  tirer  tout  le  fruit  poffible  du  grand  Evéne- 
ment de  l'ouverture  de  la  Succeiïïon  d'Efpagne,  il  éroit  d'une  dernière 
importance  que  S.  M.  Britannique  &  les  Etats  Généraux  ne  fe  iaiiTafTent 
point  induire  à  favorifer  les  vues  fecrctes  de  cette  Couronne,  par  les  mê- 
mes voyes,  qu'elles  emploioient  pour  leur  propre  feureté  &  celle  de  tou- 
te l'Europe. 

Je  doute  qu'entre  tous  les  Traitez,  que  la  France  a  faits  depuis  le 
Miniftére  du  Cardinal  Mnzarin  ,  il  s'en  trouve  un  feul  qui  foit  fondé  fur 
des  principes  de  bonne-foy  &  de  véritable  efprit  de  concorde.    Il  feroit 

aile 


Pli. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  f%$ 

aifé  de  démontrer  que  tons  les  Traitez  n'ont  été,  ni  des  réconciliations,  Affaire* 
des  accords ,  de  la  part  de  la  France ,  mais  autant  de  Rufes  étudiées  par  c™-  DS 
un  Ennemi  qui  n'étoit  plus  difpofé  à  fe  fervir  de  la  force  ouverte. 

On  a  remarqué  dans  l'Hiftoire  du  Traité  des  Pyrénées ,  que  quelques 
Courtifans  François,  impatiens  de  ce  que  la  Ratification  d'Efpagne,  tou- 
chant les  Préliminaires,  n'arrivoit  pas  afTeztôt,  avoient  voulu  infinuer  au 
jeune  Monarque  Louis  XlV.de  la  méfiance  contre  le  Confeil  de  Sa  Majeflé 
Catholique;  mais  que  S. M.  Très-Chrétienne  avoit  répondu,  qu'elle  ne  pouvoit 
croire  que  Dom  Louis  (  c'étoit  le  premier  Miniftre  du  Roy  d'Efpagne  )  voulût 
la  tromper ,  &  qu'on  lui  en  avoit  parlé  de  toutes  parts  comme  d'un  Cavalier  plein 
de Franchife&  d'Honneur  :  Cette  Réponfe  témoigne  alTezqueles  Sentimens 
intérieurs  du  jeune  Roy  étoient,  qu'un  Cavalier  plein  d'Honneur  &deFran- 
chife  ne  devoit  jamais  être  capable  de  vouloir  tromper ,  ni  de  manquer  à 
la  parole  qu'il  avoit  donnée.  La  Maxime  efl  d'une  Obligation  encore 
plus  indifpenfable  pour  un  Roy,  à  proportion  de  l'élévation  du  Monarque 
au  defïus  du  Cavalier.  Cependant,  il  s'agiflbit  d'un  Traité  dont  le  principal 
Article  étoit  le  Mariage  de  l'Infante  Marie-Therefe  avec  Louis  XIV.  Roy 
de  France;  &  les  Renonciations  faites  au  Sujet  de  ce  Mariage,  &  jurées 
fur  les  Evangiles  parle  même  Louis  XIV.  Roy  Très-Chrétien,  n'étoient 
autres  que  des  Artifices  employées  par  le  Cardinal  Mazarin  pour  trom- 
per Sa  Majellé  Catholique  &  toute  la  Nation  Efpagnolle.  Je  n'atribuë 
ces  Artifices  qu'au  Cardinal  Mazarin  ;  parce  qu'il  y  a  de  très-fortes  Preu- 
ves que  Sa  Majeflé  T.  C.  eft  naturellement  éloignée  de  cette  forte  de 
procédé  tout-à-fait  indigne  d'un  Cavalier  plein  d 'Honneur  &  de  Francbife. 
Que  û  l'on  découvre  toujours  le  même  principe  de  Politique  rufée  dans 
les  Traitez  que  la  France  a  faits  du  depuis ,  il  en  eil  à  cet  égard  comme 
des  trahifons;  on  fe  fert  des  avantages  qui  en  peuvent  revenir;  mais  on 
conferve  toujours  de  l'averfion  pour  les  Traîtres.  Il  y  a  eu  dans  les 
Siècles  paiTez  plufieurs  Princes  dont  le  génie  étoit  fécond  à  inventer  des 
rufes  &  habile  pour  les  faire  reufîir  ;  mais  je  ne  voy  pas  qu'on  puhTe 
imputer  ni  génie  ni  inclination  femblables  à  Sa  Majelté  Très-Chrétien- 
ne. Ce  Prince ,  en  fa  jeuneffe ,  ayant  appris  d'un  Cardinal  fon  premier 
Miniitre,  que  les  Traitez,  jurez  avec  les  formalitez  les  plus  authentiques 
&  les  plus  facrées ,  ne  doivent  pas  fervir  de  bornes  à  fes  Prétentions , 
lors  qu'il  y  a  quelque  efperance  de  les  faire  valoir,  ne  s'efl  jamais  fait 
de  fcrupule  de  fuivre  une  Maxime  û  utile  dans  tous  les  Traitez  qu'il 
lui  a  falu  conclure  pendant  les  longues  années  de  fon  Règne  ;  de  ma- 
nière qu'on  peut  dire  fort  jufle  ,  que  l'Epée  de  la  Guerre,  &  la  Plu- 
me de  la  Paix,  ont  été  des  Armes,  dont  Sa  Majeflé  Très-Chrétienne  s'eil 
également  fervie  contre  fes  Ennemis. 

Quoique  les  principes  de  droiture  &  de  bonne-foi,  qui  font  les  fonde- 
mens  de  la  Republique  des  iëpt  Provinces-Unies ,  &  qui  font  la  Règle 
confiante  de  la  Politique  du  Roy  de  la  Grande-Bretagne  &  des  Seigneurs 
Etats  -  Généraux  ,  ne  leur  permettent  pas  de  croire  qu'un  Monarque 
Très-Chrétien  les  voulût  tromper,  ils  ont  neantmoins  fuffifamment  apris 
Tome  XL.  Hhhh  par 


PE. 


f9o    MEMOIRES,  NEGOTIATÏONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  par  une  funefte  expérience,  que  quelques  termes  de  Paix,  de  bonne  Intel- 
gen.  de  Hgefice ,  de  Parole  Royale,  de  Très- chers,  de  Grands  Jmis ,  d' Alliez,  de 
Conféderez,  qui  foient  exprimez  dans  des  Traitez  ou  dans  des  Ecrits  de  la 
part  de  la  France,  l'Intérêt  particulier  du  Monarque  en  efl  toujours  le 
véritable  Efprit. 

Dès  que  le  Traité  de  Partage  fut  rendu  public,  il  y  eut  des  perfonnes, 
qui  ne  purent  s'empêcher  de  craindre  qu'une  des  vues  de  la  France  ne 
fût  d'attirer  la  Jaloulie  des  Etats  Catholiques-Romains  fur  les  deux  Puif- 
fances  Proteft  intes  ,  &  d'exciter  le  Reifentiment  du  Confeil  d'Efpagne 
pour  fe  venger  du  Démembrement  de  la  Monarchie.  Toute  la  haine  de 
ce  Partage  auroit  dû  naturellement  retomber  fur  la  France  :  les  deux  au- 
tres Puilfances  n'étoient  entrées  en  Traité  avec  elle ,  qu'afin  de  prévenir 
de  p'us  funeltes  effets  de  fes  Pretenfions  fur  la  Succefîion  de  Sa  Majeité 
Catholique.  Mais,  quelle  équité  &  quelle  raifon  y  avoit-il  à  attendre 
d'une  Nation  vaine  &  fuperltitieufe  ?  N'étoit-il  pas  bien  plus  apparent, 
qu'il  fe  formerait  quelque  Parti  pour  s'oppofer  à  un  Démembrement  de  la 
Monarchie,  &  pour  lignaler  le  zèle  Catholique- Romain  contre  les  Puif- 
fances  Proteilantes ,  qui  avoient  confenti  à  un  Partage  des  Etats  d'Efpa- 
gne ?  En  ce  cas,  le  choix  d'un^Succeffeur  ne  devoit-il  pas  immanquable- 
ment tomber  fur  un  Petit^Fils  de  Sa  Majefté  Tres-Chrêtienne,  qui  en  cet- 
te confideration  employeroit  toutes  fes  forces,  non -feulement  pour  le 
maintien  de  la  Monarchie  en  fon  entier  j  mais  encore,  pour  effectuer  le 
Partage  des  Provinces  Unies,  que  la  France  a  plufieurs  fois  propofé  à  Sa 
Majelié  Catholique,  &  enfuite  pour  ruiner  &  renverfer  la  Conflitution 
du  Gouvernement  d'Angleterre? 

Ne  pouvoit-on  pas  foupçonner  à  bon  droit,  que  le  Confeil  de  France 
n'avoit  projette  le  Traité  de  Partage  ,  que  comme  un  moyen  capable 
d'acquérir  la  Couronne  d'Efpagne  aux  Defcendans  de  Sa  Majefté  T.  C.  & 
de  les  mettre  en  état  dans  un  tems  ou  dans  un  autre  de  fe  rendre  Mai-» 
très  de  toute  l'Europe  ? 

Il  efl  à  croire  que  c'ell  dans  cette  même  apréhenfion ,  que  Sa  Majeflé 
Britannique  &  les  Etats  Généraux  ont  fait  drefler  l'Article  XIII.  du  Trai- 
té, portant,  que  pour  afjurer  encore  davantage  le  Repos  de  ï  Europe,  le  [dit  s 
Roys'9  Princes,  &  Etat. s  ,  feront  non- feulement  invitez  d'être  Garants  de  la- 
dite exécution  du  préfent  Traité ',  &  de  la  validité  defdites  Renonciations,  com- 
me ci-deffus  ;  mais  ,  fi  quelqu'un  des  Princes ,  en  faveur  defquels  les  Partages 
font  faits,  voulait  dans  la  fuite  troubler  f  ordre  établi  par  ce  Traité,  faire  de 
nouvelles  Entreprifes  qui  y  foient  contraires ,  &  amfi  saggrandir  aux  dépens  les 
uns  des  autres ,  fous  quelque  prétexte  que  ce  fait ,  la  même  Garantie  du  Traité 
fera  c  en  fée  devoir  s'étendre  auffi  en  ce  cas  ,  en  forte  que  les  Roy  s ,  Princes,  & 
Etats ,  qui  promettent ,  feront  tenus  d'employer  leurs  forces  pour  s'oppofer  aux 
dites  Entreprifes ,  &  pour  maintenir  toutes  chofes  dans  ïétat  convenu  par  le  f  dit  s 
Articles. 

Le  véritable  Efprit  de  cet  Article  n'efl-il  pas    ï.  que  le  Traité  a  été 
conclu,  comme  le  moyen  le  plus  propre  pour  alTurer  le  Repos  de  l'Euro- 
pe j 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I. 


ypi 


l'Euro- 
pe. 


pe  ;  2.  que  les  trois  Puiffances,  &  généralement  tous  ceux  qui  y  entre-  Aff.virk* 
ront,  font  indifpenfablement  obligez  à  en  maintenir  une  ponctuelle  exécu- 
tion ;  3.  que  nul  prétexte,  tel  qu'il  puiiïe  être,  ne  peut  donner  lieu  à 
aucune  infraction  des  Conventions  du  Traité.  Ces  Ôbfervations  feront 
miles  en  ufage  dans  les  Reflexions  fur  les  Mémoires  que  la  France  a  fait 
publier  pour  jultifier  l'Acceptation  qu'elle  a  faite  du  Teitament  de  feu 
Charles  II.  Roy  d'Efpagne  au  préjudice  du  Traité. 

On  remarquera  fimplement  pour  le  prélènt,  que  Sa  Majefté  Britannique 
&  les  Etats-Generaux,  ayant  eu  foin  que  le  Roy  Très-Chrétien  fe  loic  obli- 
gé de  la  manière  la  plus  étroite  à  s'en  tenir  précifement  au  Partage,  fans 
pouvoir  en  troubler  l'ordre  ,  ni  faire  aucune  nouvelle  Entreprife  ,  fous 
quelque  prétexte  que  ce  pût  être,  &  ayant  engagé  les  Souverains  qui  en- 
tretient dans  le  Traité  à  en  garantir  très-exprefTement  toutes  les  con- 
ditions ,  il  eut  été  très-utile ,  en  premier  lieu ,  de  faire  des  follicitations 
auprès  de  Sa  Majefté  Catholique  &  de  fon  Confeil,  afin  de  les  porter  à 
aprouver  ces  Réglemens  pour  l'affermilTement  du  Repos  de  l'Europe  j  en 
fécond  lieu,  de  faire  des  inltances  auprès  des  Princes  &  Etats ,  qui  fe- 
roient  entrez  dans  le  Traité ,  à  ce  qu'ils  fe  tinlTent  difpofez  à  en  foutenir 
l'exécution,  lors  que  le  tems  en  feroit  arrivé;  en  troifiéme  lieu,  de  ne 
négliger  aucuns  des  préparatifs ,  dont  ils  pourroient  eux-mêmes  avoir  be- 
foin,  ou  pour  apuyer  la  France,  ou  pour  empêcher  qu'elle  ne  pût  former 
aucune  Entreprife  contraire  aux  engagemens ,  dont  elle  étoit  convenue. 
On  ne  pouvoit  point  de  trop  bonne  heure  faire  entendre  à  la  France, 
que,  fi  le  Roy  de  la  Grande-Bretagne  &  les  Seigneurs  Etats-Generaux 
des  Provinces-  Unies  conjointement  avec  Sa  M;tjefté  Très-Chretienne, 
avoient  par  avance  pris  les  mefures  necejjaires  pour  prévenir  les  malheurs  que  le 
tri  fie  événement  de  la  mort  du  Roy  Catholique  J  ans  En/ans  pourrait  produire , 
les  Peuples  Anglois  &  Hoîlandois  ne  manqueroient  point  de  fe  trouver 
tous ,  au  moment  de  l'ouverture  de  la  SucceiTion  de  ce  Prince  ,  préparez 
à  maintenir  une  ponctuelle  éxecution  des  fages  Précautions  de  leurs  Sou- 
verains ,  &  qu'ils  ne  lailTeroient  point  à  la  difcrétion  des  François  d'entre- 
prendre de  difpofer,  en  Maitres ,  de  la  Monarchie  d'Efpagne,  des  Con- 
ventions du  Traité  de  Partage,  &  du  Repos  de  l'Europe. 


Jus  Auflriacum  in  Monarchiam  Hifpanicam  afjertum.     Juxta 

Exemplair  impreffum  Viennœ  Auftria  3  Typis  Joannis  Jacobi 

Kiirner ,  An.  1701.     Excudit  Ratisbona  Jo. 

Georg.  Hofmann. 


Summa» 
n'a  com- 


AB  excejju  Phiïppi  QuarDi  Catbolici  Hifpaniarum  Régis  ,   quoties  mentio   incl- 
diflet  de  SucceJJione  in  illius  Régna  &  Provintias  ,   prcrtcr  aliquos  Gallos  ex 
more  gentis  Regibus  fuis  fupparafitari  ajjuetos ,  vix  al'um  quendam  invenin  erat    me    a* 
gnarum   publicarum  rerum  ,    cui  non  perfuafijjimun  effet ,    Regem  CbriftiàniJJfrnu  h 

Hhhh  2  cjuj- 


quarufl» 


Atfaik.es 

GF.N.  DK 

l'Euro- 
pe. 

rerum , 
qurecirca 
fucceflîo- 
nem  H  if- 
pan  icam 
à  morte 
Philippi 
Quarti 
contige- 
runt. 


Paul b  an- 
tedecef- 
fum  Ca- 
roli  Se- 
eundi. 


Et  poft  il- 
lius fata: 
Hifpani- 
eam  Mo- 
narchism 
improbe 
nuper 
occupan- 
te Duce 
Andega- 
venfi. 

Qnx  ad 

Domum 

Auftria- 

camper- 

tinet. 


f92    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

ejufque  pofleros  omnes  ,   ab  omnibus  Hifpanicœ  D'tionis  Regnis  êf  Provinciis  perpé- 
tua exclu/os  ejje.     Acîeb  mmque  manifefics ,  amples,  &  valides  ah  omnibus  femper  ha- 
bites Jïtnt    dùdum  vulgates  Renuntiationes  duarum   Hifpanies  Infantum  3  Anna ,  âf 
Maries -Tberefiee  ,  quarum  illa  Filia  Philippi  Tertii ,   Ludovico  Decimo   tertio,    hesc 
Philippi  Qjtarti  Filia  Ludovico  Decimoquarto ,  Francics  Regibus  nuptes  f itérant ,  ut 
ad  firmanclam  banc  Jententlam  ultra  Jblam  earum  leàionem  à  juftitiœ  cultoribus  am- 
plius  nïbil  requijîtum  fiterit.     Ubi  verb  aliquos  cupido  incefferat  accuratiùs  indagan- 
eli ,  quee   majorls  cautelee  ergb  eib  Hifpanies  £f  Galilée  Regibus  ,  quos  inter  res  tranf- 
acta  erat ,  adelita  fuijjent  ulteriora  fulcra  ,   tum  plané  nemo  cor  datas  capere  poterat , 
qua  fronte  non  religione  ver  a  imbutus  £?  DEI  timorem  près  Je  ferens ,  fed  quillbet 
bomo  mentis  compos  &  qui  non  omnia  humanitatis  jura  funditus  everfa  cuperet  ,  tôt 
fimul  paàlones  fanàionefque  vel  leviter  vellicandi  defiderium  qualecunque  palam  f acé- 
ré J'ufiinuerit.     Ipje  quln   etiam    Chriftianijfimus  Rcx  poft  fopitum ,  quod  à  morte 
Régis  Philippi  Qjtarti  ele  aliquibus  Belgii  Catholici  Provinciis  moverat  bellum ,   ielen- 
tidem  vifits  eft  agnovijje  barum  Renuntiationum  validltatem  ,  fpemque  omnem  pro  fe , 
&f  liber is  fuis  in  reliquam  quameumque  Hifpanicœ  Ditionis  partent  penitus  abdicaffe, 
beereditatis  iftiits  adeund.es  folicitudine  Mis   reliââ ,  ad  quos ,  fe  fui/que  remotis  ,  pro 
cafuum  diverfttate  ea  juxta  ordinem  fuccedendi  in  Familid  Hlfpanicd  receptum  de- 
volvi  quandoque  pojjet.    Eb  inexfpeàatiits   cunàis  accidit ,  contendijfe  haud  pridem 
Rege  Catbolico-Catbclico  Carolo  adhuc  in  vivis  agents  Regem   Chrijïianiffimum  apud 
Magnes  Britannies  Regem  âf  Ordines  Générales  Uniti  Belgii ,  ut  juncid  opéra  Sacra 
Ceefarea  Majejtûs  ad  partiendam  fecum  ,  Rege  Catholico    improie  diem  obeunte ,  Hif 
paiv.cam  Succejfionem  compelleretur  :  tantum  etiam  obtinuiffe  ,  ut  juxta  fœdus  inter 
eos  initum  ea  de  caufa  communi  nomine  &f  Sacra   Cesjarea  Majeftas  compcllata ,  êf 
mines  omnlnb  Cbriftiani  Orbis  Reges  &?  Status,  ad  fociandas   in   id  vires  invitati 
fuerint.     Nitperrimè  verb  ,  velut  attonitas,  ftupore  perculfus  nemo  non  fuit ,  cùm 
fama  primant  tuliftet  ,'  paulbque  poft  éventas  comprobaffet  ,    inductum  jam  mente  de- 
bllem  Regem  fulfte  ,    ac  fi    hoc  unicum  confervandes  indivifim  Hifpankes  Monarchies 
médium  fuperejfet ,  ut   teftamento   ab  aliis   ipfi   obtrufo   quomodociinque  fubfcriberet , 
quo  Remintiatlonibus ,  quas  diximus ,  ad  Delpbinum  Francies  ejufque  primogenitum 
reftriàis  ad  Succejfionem  Hifpa?iicam  primo  loco   Dux  Andegavenfis  illius  fecundo 
genitus  vocaretur  :  Acquieviffe  etiam  buic  qitalicunque  difpofitioni  Regem  Chriftianif- 
Jimum ,  àf  ipfo  auciore  Nepotem  pro  Rege  Hifpanies  Je  gerere  cœpijfe  atque  Tbroni 
iftius  invadendi  caufa  in  Hifpaniam  abiiffe  ,  plerojque  quoque  preefeàos  connexorum 
feu  fubjeclorum  Regnorttm  &f  Provinciarum  in  verba  illius  adaiïos  effe ,  non  fins 
occulto  plurimorum  cùm  Hifpanorum  tum  aliorum  fubditorum  dolore  ,  qui  al'a  omnia 
fperarant.     Ab  eo  tempore  minimi  maximique ,  plerique  ubique  omnes  non  aliud  esquè 
fermone  frequentarunt ,  quùm  Jummam ,  fi   quee   unquam   allas ,  injuriam   non    tam 
Auguftiffimo  Imperatori  ejufque  célébrât ijfimee  Familles  ,  âr1  aliis   oreline  fuccedentibus 
Domibus ,  quant  toti  Europes ,  vel  univerfo  pot' as  Generi  bumano  fieri  :  eam  proinele 
confociatis  omnium  ftatuuin  imb  bominum  confiais  £f  armis ,  DEO  aufpice ,  non  vo- 
\ente  folàm  ,  fed  vel  rehtetante  Cœfare,  vindicandam ,  unaque  fimul   communem  falu- 
tem  in  maximum  adduàam  periculum  in  tuto  locandam  effe.     Hœc  apud  omnes ,  qui 
quidem  publicarum  rerum  wn  penitus  incuriofi  finit,  quofque  prava  mens  nondum 

tranf- 


PE. 


oftenda- 

tur ,  pr£- 
mittun- 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  I.  55>3 

tranfverfos  egit ,  adeb  in  confcffo  funt ,  ut  fi  inventes  tantùm  fpect.irl  deberent ,  ni-    Affaires 
bil  necejfe  effet,  de  manifcjtandci  ulterius  Gallofum  injufiitia,  vel  probando  SereniJU-     GEN-  DE 
mce  Familiœ  AuJlriavœ ,  ex  omnibus,  qui  juris  integri  âefuncburn  Regem  C.irolun     *~    "vKO 
fanguine  attigerunt  ,  Jive  Agnatio  five  Cognatio  confideretur ,  proximcé',  prœcipuo  in 
Hifpanicàm  Suçcefjionem  jure  multàm  hborare ,  aut  quœ  eu  faciunt ,  operosè  congere- 
re.     Sed  prœterquam  facile  fieri  poteji,  ut  aliquœ  circumfjtantice ,  licet  fcitu  dignijji- 
mœ ,  nonaum  in  omnium  notitiam  pervenerint ,  Jimpliciorum  quoque  feu  ineruditorum 
£f  ferœ  pojlerltatis  ratio  hahenda  eft  in  re  bac  omnium ,  quotquot  unquam  contige- 
runt  j  maxvmè  fingulari,  eff  uni  qmfi  obtutui  exponenda  ceternœque  memoriœ  mandan- 
àa  funt ,  quœ ,  cùm  ad  caujle  jufiitlam  Jlatim  dignofeendam ,  tum  au  ruborem  vel  Gallis 
ipfis  eor  unique  affeclis  incutiendum  pertinere  ,aâ  eorumfaltem  continuas  infidias  vitandas 
cunctos  excitare  poffent ,  non  abfque  fpe  certa,fore  ut  us  lectis  vel  auditis  fimul  fejè 
mox  expedire  fatagant ,  qui  imprudentes  aliorum  fraude   in  caffes  inciderunt  ,  forte 
etiam  eorum  aliqui  in  viam  redeant,  qui  inlquitatem  conemnaffe  vel  Mi  [ponte  manus 
âeuiffe  nofeuntur.     Id  qub  citius  ajfequamur ,  primi  fundamenli  loco   ex  ipfa  naturali    Hoc  ut  e- 
ratione  ab  omnibus  gentibus  approbata  velut  obviwn  omnibus  br -éviter  repeter  e  juvat  :    videntiûa 
fuijfe  agnita  neceffitate  vit  ce    civilis  introducem.ee  in  cujujvis  populi  liberrima  volunta- 
te  ,  uti  forme?  ,  juxta  quant  ab  uno  vel  pluribus  régi  debeat ,  cligëndœ ,  ita  ,  ubi  Prln- 
cipatus  Jeu  Regnum  placuiffet ,  id  vel  uni  folum  homini ,  vel  univerfœ  fimul  Familiœ    tur  I. 
ab  Mo  oriturce  deferendi ,  flatuta  hoc  cafu  perpétua  Régies  Familiœ  fuccejfione  fecun-    principîa 
dum  œtàtem,  gradus  aut  lineas  ,  five  exclufis  omnino ,  Jive  pofl  cxtinàos   mares  om-    ?uœdam. 
nés ,  vel  eos  faltcm ,  qui  in  eadem  linea  eodemque  gradu  fuifl'ent ,  admiffis  fœminis ,    verialia. 
aliis  etiam  additis  conditionibus  regnantium  perfonas  earumque  nativitatem ,  ftatum 
vel  matrimonia    regnandive  formulant  refpicientibus ,  prout  collibuiffet.     Non  minas 
perfpeClum  omnibus   eft:  recepta  femel  fucceffwnis  forma  non  ita   adflringi  populum 
regnatricemque  familiam ,  quin  conjentibus  utrinque  omnibus ,  qui  eo  tempore  Juperfli- 
tes  funt ,  ilki  vel  in  totum  abrogari  vel  pro  parte  mutari,  adeoque  vel  nova  plané  for- 
ma reipubl'cœ,  vel  alla  fuccedendi  ratio  Juhjlitui  pojjît  ,  qua  omnes   âeinceps  nafeitu- 
ri  pofteri  teneantur ,  donec  communi  rurfum  confenju  aliud  conjlitutum  fuijfet  :  cuicun- 
que  autem  fuperfiiti  ex  familia  regnatrice  membro  actu  delatum  Jive  ex  prima  five  fe- 
quenti  cum  populo  ,  inita  conventione  jus,  vel  quœjïtam  jam  ex  nativltate  fpem  Miin- 
vïto  à  nemine  five  rege  ,  vel  alio  Familiœ  Regiœ  membro ,  five  populo  ,  quacunque  ra- 
tione auferri  debere  aut  pojfe.     Omnis  porro  rationis  expers  mérita   ab  aiîinibus  judî- 
cabitur  ille  ,  qui  in  controverfiam  vocare  aufitipacis  inter  bellum  gèrent es  Principes  & 
évitâtes  componendœ  gratia ,  Provincias  &  Régna ,  bonaque  ac  jura  prœj'entia  quœ- 
cunque  alla,  ab  ipfis   belligerantibus  eorumve  Jubditis  poffejfa:   multoque   adeb  magis 
fperata  tantùm  aut  jure  vel  injuria  petita  abdicari,  cedi,  transferri,  ubivis  gentium 
ab  omni  œvo  confueffe ,  taie  [que  paCtiones  &  tranfactiones  communi  gentium  jure  niti, 
nec  abfque  pernicie  &  detejiatlone  gencris  humani  unquam  temeratas  efj'e.     Hinc  pari- 
ter  claret ,  ufufque  omnium  fœcidor um  docet:   acquiri  à  Rege  unius  Regni  alla  etiam 
Rjegna  £f  Pr:ncipatus  po_ffe  ,  ita  ut  vel  priori  R.egno  uniantur  Jeu  Jubjiciantur ,   £f 
ad  unum  eundemque  perpeîuum  fuccjffvrem  utraque  clevolvantur  ,vel  fervato  in  fingu- 
lis  antiquo  fucceffion's  ordine  aliifque  juribus  per  fe  poffideantur ,  ac pro'mde  fœpe  ad 
àiverfos  fucceffores  perveniant  :  fpeclare  quin  etiam  non  rarb  ad  Regem  feu  Principem 

H  h.  h  h  3  ditiones 


ÏM    MEMOIRES,  NSGOTIATÏONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  dithnes  feu  hona  quanlivis  prstii  prvoafi  àominii  feu  patrimonii  jure ,   de  quibus  ex 

cen.  oe  propria  voluntate   vel  ipfe  neglexijfei  aut  fuperfediffet ,  fuccefforum   aVquis  dijponere 

l'Euro-     aàeoque  etiam  in  familiœ  utilitatëm  fidekommifji  œterni  vinculù  ea  illigàre  pojjit ,  quod 

,  à  nullo  deinceps  fuccefforum  in  alïorum  vocatorum  necem  ,    illorum  non  accedente  con- 

fenfu,  tolli  aut  infringi feu  immutari  ullatenus  queat.     Nullus  denique  hœfitarc  pote- 

rit ,  qui  jura  in  terris  ad  facram  Ecclsjïam  Romanam  aut  facrum  Romanum  Impe- 

rium  firce  jeudi  Jive  alla  ratione  Jpectantibus  ufiîatu   nérit ,  quin  falvo  undique ,  £f 

non  mutât o  fupremi  vel  directi  domini  jure  familiœ    nobiles  quœcunque  ,  prœjertim  il- 

iujires;  ad  earunâem  fplendorem  confervandwn   vel  augendum,  futurafque  controver- 

Jias  prœcidendas ,  certa  inUr  fe  de  fucceffione  pacia  ,  fiv2  perpétua  ,  Jive  temporaria  vel 

pcrfonalia,  nullo  hnpediente  inire  foleant ,  eaque  uti  pi er unique  à  fummis  Pontifcibus 

&f  Imperatoribus  confirmantur ,  ita,&  abfque fpeciali  eorum  confirmatione  fubfijlant 

àummodo  nihil  in  fraudcm  Ecclejîœ  vel  Imperii  admitti  compertum  fit ,  eôque  etiam  re- 

futaticnes  y  quas  vocant ,  feudorum  pertinere  :  inprimis  verô  illic  filiarum  nobilium  feu 

illuflrium-,  dum  nuptui  elocantur ,  Renuntiationes ,  Jive  Jimplices  five  certis  limitibus 

circumfcriptas  ,  alibi  quoque  non  incognitos  ,   vigere  £f  fummd  obfervantid  cujlodiri 

quamvis  primitùs  ante  ejujmodi  pacia  alla  fucccjjionis  ratio  in  famïliâ  recepta  Juifjet. 

His  ita ,  quantum  ad  deciâendam ,  quam  prœ  manibus  babemus,  quœjiionem  fatis  efl, 

ex  jure  récenfitis  pr.imis  principiis  ,  dij'piciendum  nunc  fecundo  loco  paucis  erit ,  quœ 

fucceffonis  ratio  in  Hifpanice  Monarclia  ,  poflquàm  ea  ex  pluribus  parti  bus  feu  mem- 

hris  in  unum  velut  corpus  coaluit ,  introduSta  fuerit ,  etfi  nec  id  penitus  negligendum 

videtur ,  quod  fpcciatim  de  illis  provinciis ,  quœ  Jeudi  jure  ab  Hijpaniœ  Rcgibus  tc- 

lï.  Dîver-   mntur  ,    flatutum  fuit.     IJlud  ver o  faillir i  non  pojjumus  non  Jîmul  ante  oculos  po- 

fa  fuccef-  nere  partim  diverfa  longé  feu  potiàs  contraria ,  uti  in  plerifque  aliis  rébus  ,    ita  &  in 

fionjs  ra-  fucceffione  conflit uenda ,  partim  quœ  aliquamdiu yifa  f aérant  eadem  Hifpanorum ,  £f 

Hifoaniâ    ^a^orum  ftudia ,  dum  hi  ad  excludendum  omnes  plané  Jœminas  non  tantùm  à  Francm 

&  Galliâ  -.   Regno ,  Jed  etiam  ab  Us  ditionibus  ,   quœ  per  fœminas  ad  Galliœ  Reges  pervenerunt , 

Hâc  fuc-    variis  titulis  connifi  mafculam  Regiœ  familiœ  Juccefjionem  fecundum  lineas  jam  dudum 

ceffio-        acerrimè  propugnàrunt  :  Hifpani  autem  poft  mares  ejufdem  lineœ  £?  gradés,  etiam  fœ- 

ncalem       TO""'i"  ex  ^-eê^  Familiâ  ortis  locum  fecerunt  ,  aliis  tamen ,  quàm  in  Familiam  Galli- 

Agnati-      cam  enubentibus  &  ideo  tum  ad  œqualitatem  inter  utraque  Régna  fervandam  ,  tum  oh 

camam-     alia  caufas  cum  omni  progenie  Gallicd,  ipfamet  antehac  adjlipulatd  Franciâ,  perpetim 

PleCllFi"    femotis  •>  œtc^'ls  Prœrogativa  ^  reliquis  perinde  ut  in  maribus  Regiœ  Familiœ  femper 

linealem     obfervanda.     De  cujus  affertionis  generaliori  parte  ,    cjufque  pofteriori  ufu ,  (quamvis 

Cognati-    Arragonii  olim  communiter  agnationis  jus  tuitijint,  neque  id  nunc  prœteriri  debeat) 

cam  prx-  cùm  inter  omnes  etiamnum  conveniat  ,    ei  probandœ  ulteriùs  immorari  fuperfluum  fue- 

•EyT^     r*t  '  I6^  ac-(^tœ  tantu:'1  exceptionis  veritas,  quam,  jure  latiùs  regnandi  cauja  violato , 

tamen        Gallis  primum  oppugnare  collibitum  fuit ,  quamque  nuper  etiam  Hifpani  quidam ,  non 

fsmp-r      meliore  undecunquc  crto  impulja,  contra  Majorum  propriaque  infiituîa  non  fcriptis  fo- 

Gallicis     iùm  Jéd  armis  nunquam  non  defenfa  obfcurare ,  vel  fi  fieri  potuifjet ,  obruere  adorji 

înn.C '£"  funt  '  in  lucem  denuà  producenda  ,    ê?  vindicanda  erit  :  prœflabiturque  id  adeb  à  no- 

apudAr-    bis  deinceps  manu  pleniffima  ,  flatim  ac  tertio  loco  agnationis  &  cognationis  nexum9 

ragonios    qui  inter  utramque   Domum   Auflriacœ  gentis  intercedit  ,    Germanicam  nimirum  & 

non  ex-     tlifpanicavii ,  quàm  poterimus  brevijimè  indicaverimus.    Loneam  enim  5  &  accuratam 
tmdom  ejm 


l'Eoko- 

PE. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.   I.  $S>r 

ejus  fcriem  hic  texere  nibil  opus  ejl ,  fed  fuffècerit  compendio  dixijjf ,  uti  Rex  Car  vins    Affaii-m 
origincm  ex  Imperatore  Carolo  V.  primogenito  in  Êelgio  edito  traxît,  iia  Sacrum  Ca-    gen.  de 

faream  Majeftatem  ex  P.iperatore  Ferdinando  Primo  illius  fratre  verè  Gefmano  ,  HiJ- 
pani arum  Infante  fcf  Germine  ,    Avique  Ferdinandi  Catbolici  delkiis  ortam  ejje  ,    ac . 
proinde  utrumque  ex  Philippo ,  cui  corporis  décor  pulcbri  jeu  formoji  cognomen  cenci-    R^gfa  fa. 
liavit,  Maximiliani  I.  Imperatoris  atque  Maria  Burgundiœ  becredis  filio ,  &?  Joanna    miliâ  po- 
Ferdimndi  ac  Ijabella    Çatbolicorum  Regum  fi  lia  ,   continuato  utrinque  per  duclas    tlorc  A§- 
plerumque  communis  ftemmàtis  agnatas  ordine  defeendere.     In  recentiori  aclhuc  omnium    . 
memoria  ver  futur  :  Sacra  Cœfarea  Majeflatis  Matrem  Mariam  Régis  Pbilippi   Ttrtii 
filiam ,  fororem  verb  Pbilippi  Quartz  fuiffe ,  nuptam  Imperatori  Ferdinando  Tertio  Sa-       '  •      ' 
cra  Cajàrea  Majeflatis  Patri:  Ipfi  autem  Sacra  Cœfareœ  Majejlati  ah  eodem  Philip-    ftrj2ci 
po  Quarto,  6?  Maria  Anna  Aujiriaça  illius  conjuge  ,  Sacrœ  Cœfareœ   Majeji  itis  So-    hue  fa- 
rore  ,  in  matrimonium  collocatam  fuiffe  Margaritam.,  iilorum  filiam  fecundo  genitam,    £lcns 
ex  qua  nota  Maria  Antonia  viatrhnonio  junùta  B avaria  Eleàori  fiUum    Mi  peperit,    \(^li0^ 
qui  Matri  fuperftes  eam  vix  fexennis  ad  Cœleflia  régna  fecutus  ejl  ,  Sacra  Cafarea 
Majefiate  poft  decejfum  Margariîœ  Hijpanica  ex  Augufia  Magdalena  Palatina  pluri- 
bus  liberis  utriufque  fexûs  auctd,  qûos  omnes  Divina  benignkas  porrb.fofpitet.     Bre- 
vis  bac  enarratio  uti  ad  oftendendum  Sacra  Cœfareœ  Majeflatis  Augufia  que  prolis 
raafcula  ,  £f  faminea  omnis  in  Hifpanicam  fucceffionem  ejus  omitti  non  potuit  ;  ita  ab 
ea  Rex  Cbriftianijjimus  ejufque  filii  vel  frater  non  idée  repelluntur,  quod  ex  filiabus 
Hijpa?io-Auftriacis  geniti  mgentur,  càm  id  à  i\obis  ultrb    commemoratum  fit  :  fed 
qubd,  Uti  jam  evincere  aggredimur,  propter  bac  ipfa  matrimonia  G  allie  a ,  £?  Mater    pr0^ntur 
Anna,  &  Conjux  CbriftianiJJimi  Régis  Maria  Tberejia  9  quorum  mentio  facta  ejl,    fabinde 
cum  omni  propagine  Gallica  cujufcmque  ordinis,  gradés,  &  fexûs,  donec  bacjuper-    fanguinis 
effet ,  etiam  vidua ,  ab  omni  qualicunque  Hijpanica  ditionis  parte  per  leges  &  confie-    G&]^" 
tudines  HiJ'panicas  Regum  anleriorum  dijpofitiones ,  juratafque  proprias  £?  maritorum 
conventions  œternùm  exclu/a  fuerint.     Neque  injblens  hoc  videri  potefi  Mi,  qui  ex    i.Exjure 
antiquiore  hiftoria  Hifpaniça  meminerit ,  ne  Hjpania  Régna  Gallia  aliquando  commit-    &  môre 
terentur,  iifve  quicunque  Gallus  vel  Galla  moderaretur  ,    à  patribus  jam  olim  atque    J^f5" 
univerfis  ordinibus ,  adbibitis  etiam  folcnnififimis  judicum  fanait ate  vita  ,  eruditione  &       M5-"0* 
rerum  uju  celeberrimorum  fententiis ,  voluntate  denique  totius  gentis ,  6f  majori  Regum 
Hifpanorum  filia  in  Galliam  elocata  ejufque  foboli  minorent  natu  pralatam ,    &  ex- 
clu fis  lege ,  tejlamento ,  renuntiatione  Rcgiis  filiabus  Gallico  fanguini  mixtis  ear unique 
proli  fratris  fororumque  filios  Hifpaniça  familia  cretos  antebabitos  ejj'e.     Tantoperè  jam 
tum  Hifpanorum  patria  libertati  6?  honori  confulentium  animis  infederat  ,  Gallicum 
Principem  non  magis  Hifpanis  imperare  debere  aut  jure  pofife ,  quant    Galli  apud  je 
Hifpanico  imperio  locum  dent ,  quoeunque  tandem  id  nomme  aut  titulo  affectari  volue- 
rit ,  nullumque  contrariarum ,  fi  qua  extitiflent ,  molitionum  avertenâarum  caufa,  la- 
borem ,  aut  periculum  reeufandum  effe.     His  igiîur  vefiig;is  infiflens  pluribujque  no- 
vis  rationibus,  non  una  tantùm  9  permota  ,   qub  minor  difeeptationi  locus  relinquere- 
tur,  provida  Pbilippi  Tertii  Avi  mater  ni  Sacra  Cœfareœ  Majeflatis  cura  effecit,  ut 
pacta  matrimoniale  Annam  Auflriacam  inter  &  Ludovicum  Decimum  Tertium  Fran-    co"nn^  ' 
cia  Regem  ab  Hfpanicis  Minifiris  6?  Legato  Gallico,  prafente  Legato  Pontificio ,  £p    bialibus 
Arcbi-Epifcopo  Capuano  ex  nobilijjima  Cajetana  familia  oriundo ,  Magni  quoque  Vu-    Annam 

us   Auftr*- 


AFFAIRES 

GEN.  DE 

l'Euro- 
pe. 

cam  in- 
ter  &  Lu- 
dovicum 
XIII. 


S 96    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

cis  HetrUriœ  ceu  pararii  &?  proxenetœ  Legato  ,  plurimorwnque  Hifpamcorum  Procc- 
rum  ,  Confeliarioruiii  Regiorum  &  Nobilium  Caterm,  Madriti  Anno  Chrifti  1612. 
inita  fiierint ,  utcunque  Latine  reMito  tenore  fequenti. 


n  nomine  SancYiffimae  Trinitatis ,  Patris  ,  Filii ,  &  benedi&i  Spiritûs 
fanéli  ,  trium  perfonarum  in  uno  folo  &  vero  DEO  ,  ad  ipfius  glo- 
riam  &  obiequium  ,  Regnorumque  iftorum  incrementum.  Notum  lie 
omnibus  pnefentem  feripturam  &  inftrumentum  vifuris ,  quod  tractatum 
continet,  &  conventionern  matrimonialem  fequentis  tenoris. 

Quandoquidem  in  urbe  Madriti,  auîa  fuse  Majeflatis  Catholicae  in  illius 
palatio  die  Mercurii  20.  Augufti,  Anno  1612.  praefentibus  IlluflrnTimo  Do- 
mino Antonio  Cajetano  Archi-Epifcopo  Capuano ,  Legato  à  latere  Sanéti 
Patris  noftri  Papse  Pauii  V.  ipfmfque  Nuntio  Apoftolico  in  hifee  Regnis, 
Sanclitatis  fuse  nomine:  &  Domino  Comité  Urfo  d'Eîzi  ,  Legato  Magni 
Ducis  Hetruriac,  quatenus  ab  illo  poffidetur  :  nec  non  Dominis  Ducibus 
de  l'Infantado  &  Albuquerque,  Marchionibus  de  Cartel  Rodrigo,  &  de 
Villa  Franca,  omnibus  quatuor  Confiliariis  Status  Suae  Majeflatis  Catholi- 
cae, Duce  de  Uzeda,  Architalaflb  Caflellac ,  Principe  Tingrii  ,  Duce  de 
Magueda,  Duce  de  Pefiaranda ,  Duce  de  Arco,  Duce  He  Sefta,  Duce  de 
Feria,  Duce  de  Montalto,  Duce  de  Villa  Hermofa  ,  Duce  de  Veraguas, 
Domino  Joanne  de  Idiaques  Magno  Commendatore  Legionis ,  Conliliario 
Status  Suae  Majeflatis,  &c.  Domino  Augudino  Méfia  ,  etiam  Confiliario 
Status,  &c.  &  Licentiato  Domno  Didaco  Lopez  de  Ayala  fimiliter  Con- 
filiario Status  Majeflatis  Suae,  &c.  &c.  Aliifque  pluribus  Magnatibus  & 
Equitibus,  coram  me  Antonio  Arefignii  ,  Equité  Ordinis  S.  Jacobi,  Se- 
cretario  Status,  Scriba  &  Notario  Suoe  Majeflatis  Catholicae,  comparue- 
runt  ExcellentifTimus  Dominus  Domnus  Francifcus  de  Sandoval  ,  &  de 
Roxas,  Dux  de  Lerma,  &c.  &c.  Sua:  Majeflatis  Confiliarius  Status ,  CvC 
&c.  Gubernator  ,  &  primus  Aulse  Magiiter  SerenifTimi  &  triumphantis 
Philippi  Principis  Mifpaniarum ,  &c.  &c.  Nomine  &  ut  Procurator  Se- 
renifîîmi ,  ExcellenthTimi,  &  Potentiflimi  Principis  Domni  Philippi  Ter- 
tii,  Domini  noflri,  DEI  gratià  Régis  Caflellae  ,  &c.  &c.  Vigore  man- 
dati,  quod  per  inftrumentum  fubfcriptum  Regiâ  fuà  manu,  Regioque  fl- 
gillo  munitum  atque  fubfignatum  à  me  nominato  Secretario  Regio  in  Mo- 
nafterio  S.  Laurentii  Efcurialis  30.  Julii  diélo  anno,  dictus  Dominus  Dux 
de  Lerma  accepit  à  fuâMajeftate  Catholicà,  velutRege,  pâtre,  &  legiti- 
mo  adminiftratore  SerenifTimae  Infantis  filiae  ipfius  &  Majeflatis  fuie  Regi- 
na3  Margaretae  conjugis  fuae  légitimas  ex  unâ  parte  :  &  ex  altéra  parte  Ex- 
çellentifîimus  Dominus  Henricus  de  Lotharingiâ  ,  Dux  Meduanae  ,  cum 
afliflentibus  flbi  Domino  Vice  Comité  de  Puifieux,  &c.  &c.  Confiliario 
Status  fuee  Majeflatis  Chriilianiffimae ,  &c.  &c.  Illiufque  ad  Majeflatem 
Catholicam  fpeciatim  ob  hoc  negotium  miiTo  Legato  extraordinario  ,  uti 
&  Domino  Barone  de  Vaucelas,  &c.  &c.  ATomine,  &  vice  Serenifïimi, 
Excellentiflimi,&  Potentiflimi  Principis  Ludovici  Decimi  TertiiDEI  gra- 
tià Régis  Francise  &  Navarrae  Chriftianiflimi ,  &  Sereniffimœ,  Excellentif- 

fimae 


l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  S97 

firrïae  ac  potentiflimae  Domina:  Maria?  Régime  Francise  &  Navarrœ  Chrif-  Affaires 
tianifïïmae,  illius  Màtris,  tutricis,  &  Regnorum  fuorum  regentis,  virtute-  gen.de 
que  mandatorum ,  quse  exhibuerunt  fcripta  linguà  Gallicâ,  fignaca  Regiis 
manibus  &  figillis  Regiis  munita  in  Regiâ  urbe  Parifiorum,  à  Rege  qui- 
dem  17.  Julii,  àReginàverô  19.  ejufdem  Menfis  hujus  Anni,  quorumque 
authentica  exemplaria  huic  actui  anneéïenda  ego  Secretarius  Status  pênes 
me  cuftodio,  di&us  Dux  de  Lerma  nomine  fuae  Majeftatis  Catholicae,  & 
diéli  Domini  Dux  Meduanae,  Vice-Cornes  de  Puifieux  ,&  Baro  de  Vauce- 
las  nomine  Majeftatum  fuarum  Chriftianifîîmarum ,  quibus  cordi  curaeque 
eft  utiiitas  Regnorum  fuorum ,  &  ut  fecura  reddatur  per  duarum  Corona- 
rum  totiufque  Chriftiani  orbis ,  jam  inde  ab  eo  tempore  jugiter  obfervata, 
quo  conclufa  fuit  inter  Majeftatem  Catholicam  defun&i  Régis  Domni  Phi- 
lippi  Secundi,  Dominum  noftrum,  &  Majeftatem  Chriftianifîimam  Régis 
quondam  Henrici  Quarti,  Patres  Majeflatum  fuarum  Catholicas  &  Chrif- 
tianiflimae  nunc  rerum  potientium  ,  quaeque  in  votis  habent  ,  ut  eadem 
continuetur  &  perpetuetur  non  folùm  ipfis  fed  etiam  pofteris  eorum  fu- 
perftitibus,  cui  fini  affequendo  non  aliud  médium  sequè  idoneum  arbitrât»? 
funt,  quàm  nexum  matrimoniorum  ,  nec  majoris  efficacia?  ,  quàm  fi  illa 
duplici  vinculo  colJigari  poflint ,  profperante  Divinâ  benignitate  ,  in  aug- 
mentum  Divini  honoris:  jamque  adeô  benedicente  Sanclifîimo  Pâtre  Pa- 
pa Paulo  Quinto,  &  conciliente  Magno  Hetruriae  Duce  traclata  &  con- 
clufa funt  fponfalia  &  matrimonia  Sereniflimi  Principis  Hifpaniarum  Dom- 
ni Philippi  cum  Sereniflîmâ  Ifabella  forore  &  fïliâ  primogenità  fuarum  Ma- 
jeflatum ChriftianifTimarum ,  uti  &  Régis  Chriftianiflimi  cum  Sereniflimâ 
Infante  Domnâ  Anna  filiâ  primogenità  fuae  Majeftatis  Catholica: ,  quo  ma- 
gis  flringatur  &confirmetur  amor,  amicitia ,  &  fraternitas ,  quae  eft,  quae- 
que perpes  optatur  inter  Majeltates  fuas.  Ideô  ut  plénum  &  integrum  ef- 
fectuai îbrtiantur ,  fupradicli  Domini  Commiflarii  ;  quantum  ad  matrimo- 
nium  Régis  Chriftianiiïimi  cum  Serenifiimâ  Infante  Domna  Anna  ipeftat , 
tranfegerunt  &  convenerunt,  prout  fequitur. 

Quod  divinâ  benedicente  gratiâ,  praeviâ  San&itatis  fuae  difpenfatione 
ob  proximitatem  &  confanguinitatem ,  quae  intercedit  inter  Regem  Chri- 
ftianiflimum  &  Sereniffimam  Infantem  ,  ftatim  atque  haec  duodecimum 
annum  compleverit,  ipfi  celebrare  debeant  fponfalia  fua  &  matrimonium 
per  verbade  prœfenti,  forma  &  folennitatibus  praefcriptis  à  Sacris  Cano- 
nibus  &  Conilitutionibus  Ecclefiœ  Catholica?,  Apoftoliae,  &  Romana:. 
Fietque  iftud  in  Aulâ  Regia?  Majeftatis  Catholica:,  ubi  Sereniffima  Infans 
Domna  Anna  confiftit,  &  quidem  virtute  mandati  &  commiffionis  Régis 
Chriftianiffimi ,  qui  illud  dein  ratum  habebit  &  ipfe  confummabit  ftatim 
atque  Sereniffima  Infans  Domna  Anna  in  Galliam  perducla  fuerit  illucque 
pervenerit,  jungente  fe  fua  Majeftate  Serenitati  fua?  per  Ecclefiae  bene- 
di&ionem  ,  perficieturque  diéla  folennitas  fponfaliorum  five  per  fpeciale 
procuratorium  five  ab  ipfis  contrahentibus  tempore  inter  fuas  Majeftates 
convento  &  definito. 

Quod  fua  Majeftas  Catholica  promittat',  &  teneatur  dare  daturaque  fit 
T'orne  XL  Iiii  Sere- 


PE. 


y98    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  SereniffimiE  Infanti  Domnae  in  dotem  Matrimonii  caufâ  cum  Rege  Francise 
gen.  de  Chriitianiflimee  aut  ipfius  Procuratori  &  Commiffario  quingenta  millia  au- 
v'Ev&o-  reorum  fulis,  quorum  finguli  valeant  fedecim  reaies,  in  Civitate  Parifien- 
fi  pridie  celebrandarum  nuptiarum. 

Quod  ad  fecuritatem  doiis  hujus  fua  M-ajeftas  Chriftianiflima  promittat 
fe  adîgnaturam  ,  afiignaturaque  fit  reditus  liquides  &  certos ,  &c.  &c. 

Quod  Serenifîima  Infans  Domna  Anna  contenta  elfe  debeat  &  contenta 
futura  fit  dicta  dote,  ita  ut  illi  non  fuperfit  aliquis  regrefTus  ,a£tio,aut  jus 
petendi  aut  pnetendendi ,  quèd  ad  illam  pertineant  alia  majora  bona ,  ju- 
ra, tituli,  &  acliones  ex  h&reditatibus  amplioribufque  fuceeiïlonibus  fua- 
rum  Majeftatum  Catholicarum  Parentum  fuorum,  Cive  ex  illorum  perfonis, 
five  alia  ratione  quacunque  aut  alio  aliquo  titulo,  cognito  aut  incognito, 
quoniam  ab  omnibus,  cujufcunque  conditionis  ,  naturae  aut  qualitatis  fine , 
nihilominus  fe  abdicabit  forma  optimà  &  débita  cum  omnibus  fecuritati- 
bus ,  firmamentis,  &  folennitatibus  requiiitis  &  neceiTariis  ante  matrimo- 
nium  contrahendum  per  verba  praefentia,  illud  etiam  denuô  poitea  appro- 
babit  &  ratum  habebit  unà  cum  Rege  Chriftiaiiiffimp  ftatim  ac  matrimo- 
nium  celebraverit,  additis  iifdem  cautionibus  &  folemnitatibus,  quae  ob- 
fervatx  fuerint  in  prima  renunciatione,  aliifque  quae  maxime  convenien- 
tes  &  neceflarise  videbuntur  :  ad  quod  tum  faciendum  tenebuntur,  &  nunc 
"  tenentur  atque  obligantur  fua  Majeiias  Chriitianiifima  &  Tua  Serenitas , 
quin  imô  fi  renuntiationem  illhanc  &  ratihabitionem  facere  négligèrent, 
illec  jam  nunc  per  hune  folum  traétatum  faclae  &  expeditae  reputabuntur. 
Fient  vero  modo,  qui  ad  conciliandam  aut  teltandam  validitatem  &  es» 
mitatem  excogitari  poterit,  efficaciliimo  &  maxime  convenienti,  expref- 
lis  omnibus  claufulis  derogatoriis  derogatoriarum  omnium  legum,  jurifdic- 
tionum,  confuetudinum,  decretorum  &  lUtutortim  contrariorum,  quaeve 
impedierint  in  toto  aut  in  parte  dictas  renuntiationes  &   ratihabitiones, 
quibus  acleô  ad  hune  effeclum  &  validitatem  fupradiétam  fuse  Majeftates 
Cathoîica  &  Chriilianiiîima  derogare  debebunt  &  ab  hoc  momento  omni- 
nô  derogant  ,   perque  approbationem  &  ratihabitionem  praefentis   hujus 
Contra&ùs  &  Capitulationis  jam  nunc  uti  tune  cenfebuntur  &  cenfentur 
derogafle  omnibus  exceptionibus  fupra  memoratis. 

Cùm  ambse  Majeftates  Cathoîica  &  Chriltianiflîma  in  hoc  matrimo- 
nium  confenferint  &  confentiant,  ut  firmo  hoc  nodo  &  vinculo  perpetue- 
tur  &  magis-fecura  reddatur  pax  publica  Chriftianitatis  fperataque  ab  om- 
nibus mutua  inter  fuas  Majeftates  dileclio  &  fraternitas  ,  &  contemplatio- 
ne  juitarum  caufarum ,  qua;  commonftrant  &  perfuadent  a:qualitatem  & 
convenientiam  diclorum  matrimoniorum,  per  quae  Divinâ  favente  gratiâ 
fperari  poffunt  reliées  fucceffus  in  eximiam  utilitatem  &  augmentum  fidei 
&  religiqnis  Chriftianac  communeque  beneficium  Regnorum,  fubditorum 
&  Vafallorum  ambarum  Coronarum  :  Cumque  interfit  Itatûs  publici  & 
confervationis  iilarum,  ut  quae  tam  magnse  fmt,  non  conjungantnr,  occa- 
fionefque  praecaveantur,  quae  evenire  poffent  illas  jungendi,  &  ob  aequali- 
tatem  &  alias  juitas  rationes ,  flatuitur  paclo  convento,  quod  Majeltates 

fuae 


PE. 


RESOLUTIONS  ÏVETAT,  M.  DCC.  I.  S99 

fuse  obtinere  volunt  robur  &  vigorem  legis  Habilita?  in  favorem  regnorum  Affmrks 
fuorum  &  publicae  caufae  illorum,  ut  Sereniffima  Infans  Domna  Anna  li-  gem.  de 
berique,  quos  habuerit,  mares  &  fœminae,  illorumque  &  illarum  defcen-  L'Euurrt°" 
dentés  primo,  fecundo,  tertio,  aut  quarto  geniti ,  ulteriorefque  in  quo- 
cunque  gradu  confiftant ,  non  poffint  ullo  unquam  tempore  venire  aut 
fuccedere  in  Régna,  Status,  &  Dominia,  quae  pertinent  aut  pertinebunt 
ad  fuam  Majeltatem  Catholicam,  quacquè  comprehenfa  funt  in  titulis  rela- 
tis  in  iftâ  capitulatione  ,  nec  quodlibet  aliud  omnium  reliquorum  Regno- 
rum, Statuum  ,  &  Dominiorum,  Provinciarum  ,  Infularum  adjaceniium, 
Feudorum,  Capitaneatuum,  Caitellorum  feu  locorum  limitaneorum,  quae 
fua  Majeftas  Catholica  nunc  tenet  ac  pofîidet  quaeque  ad  lllam  pertinent 
vel  pertinere  poflint  cùm  intra  nifpaniam  tum  extra  illam,  quseve  ante- 
hac  Majeftates  fuae  Catholicae  &  Illarum  Majores  deceflbrefVe  habuerunt, 
polTederunt,  &  ad  illos  fpeélarunt,  aut  illis  comprehenduntur,  vel  ab  iis 
dépendent,  nec  in  ea,  quae  fua  Majeflas  ullo  tempore  acquirere  vel  diclis 
fuis  Regnis  ,  Statibus ,  &  Dominationibus  adjicere ,  quaeve  ut  devoluta 
feu  aperta ,  vel  alio  quovis  titulo  ,  jure  aut  ratione  retrahere  poffent, 
cuamvis  vivâ  Domina  infante  Domnà  Anna  aut  poft  illius  deceffum  fuper- 
ftite  quocunque  illius  Defcendentium  ,  primgenitorum  ,  fecundogenito- 
rum,  tertiogenitorum,  &  ulteriorum  eveniat  &  contingat  cafus  unus  vel 
plures  ,  quibus  ex  jure  Legum  &  Confuetudinum  di&orum  Regnorum , 
Statuum,  &  Dominiorum,  difpofitionumque  ac  titulorum  ,  quorum  vi  il- 
lic  fucceditur  ,  praetendique  fucceflio  poiïit ,  ad  illos  pertinere  fucceflio 
deberet,  namque  in  omnibus  iltis  cafibus  dicla  Domna  Anna  Infans  ait  & 
déclarât  effe  fe  &  manere  benè  &  débité  exclufam  unaque  fimul  omnes 
illius  liberos  defcendentes  mares  &  fœminas ,  licèt  dicant ,  aut  dicere  vel 
practendere  queant ,  quôd  in  illorum  perfonis  locum  non  inveniant  nec 
confiderari  debeant  aut  poilint  rationes  caufae  publicae  aliacve,  fuper  qui- 
bus fundari  poffit  haec  exclufio ,  quamvis  etiam  allegare  velit ,  quod  defe- 
cerit,  quodDEUS  non  permittat  fed  avertat,  fucceflio  fuae  Majeflatis 
Catholicae  &  Serenifiimorum  Principum  &  Infantum  ,  reliquorumque  li- 
berorum,  quos  habet  &  habuerit,  omnium  denique  legitimorum  fucceffo- 
rum,  namque  nihilominus,  prout  diclum  elt,  in  nullo  cafu  aut  fucceden- 
te  eventu ,  nulloqne  tempore  aut  modo  fuccedere  habent  aut  fucceuio- 
nem  prnetendere  ipia  ipfiufve  fllii  aut  defcendentes ,  non  obftantibus  nec 
illis  legibus,  confuetudinibus,  ordinationibus  ,  &  difpofitionibus,  quarum 
virtute  fuccefllim  efl:  &  fucceditur  in  omnibus  dicTlis  Regnis,  Statibus ,  & 
Dominiis  ,  nec  quibufvis  Legibus  &  Confuetudinibus  Coronae  Franciae, 
quar.  exiflente  praejudicio  illius  fuccefforum  exclufionem  hanc  impedire 
queant,  tam  nunc  quàm  in  temporibus  &  cafibus  deferendae  fuccefifionis , 
quibus  omnibus  &  earum  cuilibet  Majeftates  fuae  derogare  debent,  eafque 
abrogare,  quatenus  quocunque  modo  contrarix  fuennt  renori  hujus  capi- 
tuli,  illudque  vel  ejus  adimpletionem  &  executionem  impedierint,  atque 
approbando  capitulationem  iftam  derogafle  eafque  pro  derogatis  habere 
cenfentur.    Voluntque  &  definiunt,  ut  exclufa  &  exclufi  maneant  Sere- 

Iiii  i  nifli- 


6oo    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  niffima  Infans  &  Illius  defcendentes,  ne  pofîînt  ullo  tempore  ullove  eve- 

gen.  ue   niente  cafu  fuccedere  in  Statibus  &  Provinciis  Belgii,  Comicatu  Rurgun- 

l'Euro-    jj^  ^  Caroledsc,  cum  omnibus  adjacentibus  &  pertinentibus ,  quse  Pro- 

vx"       vinciae  &  Dominia  data  fuerunt  à  fua  Majeftate  Catholica  SereniiTimae  In- 

fanti  Domnœ  ïfabelloe ,  quaeque  redire  debent  ad  fuam  Majeflatem  Catho- 

"licam  illiufve  Succeflbres.     Simul  tamen  declaratur ,   quod   11  accident, 

quod  DEUS  prohibeat,  ut  viduetur  Sereniflima  Infans  abfque  liberis  ex 

hoc  matrimonio ,  hoc  cafu  libéra  maneat  à  dic1:à  exclufione ,  capaxque  ju- 

rium  fuccedendi  in  omnia,  quae  ad  illam  pertinere  îllive  deferri  poiïint, 

duobus  folùm  cafibus,  uno  nimirum,  fi  vidua  permanens  &  abfque  liberis 

ex  hoc  matrimonio  in  Hifpaniam  rediret,  altero,  fi  in  commodum  boni 

publici  &  ob  juftas  confiderationes  denuô  matrimonium  iniret  ex  volun- 

tate  Régis  Catholici  Patris  &  Principis  Hifpaniarum  illius  fratris ,  in  qui- 

bus  cafibus  capax  &  habilis  elfe  feu  manere  débet  hsereditatem  capeiTendi 

&  fuccedendi. 

Quôd  SerenilTima  Infans  Domna  Anna  mox  à  completo  anno  duodeci- 
mo  ante  celebrationem  &  contraétum  matrimonii  per  verba  prœfentia 
fcripto  folenni  inftrumento  obligare  fe  teneatur  pro  fe  fuisque  fuccelToribus 
ad  implementum  &  obfervantiam  fupradiclorum  exclufionifque  fuse  &  fuo- 
rum  defcendentinm  approbando  ea  omnia,  prout  prsefenti  contraétu  &  ca- 
pitulatione  continenter,  cum  claufulis  neceiTariis  &juramento,  quôdque 
infertà  capitulatione  fcripturâque  obligatoriâ  &  approbatoriâ  à  Serenitate 
fuà  confe&â  aliud  fimile  confeclura  fit  unâ  cum  Rege  Chriilianiflimo ,  fta- 
tim  atque  cum  fuâ  Majeftate  matrimonium  contraxerit,quod  regeri  &  ac- 
ceptai debeat  à  Pariamento  Parifienfi  forma  &  cum  vigore  folitis,  ficut 
<Sc  fua  Majeflas  Catholica  diétam  renuntiationem  &  ratificationem  appro- 
bare  teneatur  atque  curare,  ut  per  Confilium  Status  pariter  acceptetur  & 
regeratur  forma  &  cum  virtute  folitis  reliquisque  claufulis  neceffariis. 
Faélis  verô  dïcTtis  renuntiationibus ,  ratificatîonibus ,  &  approbationibus  vel 
omifïis,  illse  nunc  jam  virtute  illius  Capitulationis  prasfentis  contra£tûs  at- 
que matrimonii  ,  quod  illius  intuitu  fecutum  fuerit,  contemplationeque 
omnium  fupradiclorum  habentur  &  declarantnr  pro  benè  &  rite  faélis  & 
peraclis. 

Quod  Majeftates  fuse  Chriflianiiîimae  daturse  fint  Sereniflimre  Infanti 
Domnse  Anna:  pro  annulis  &  monilibus,  feu  gemmis  &  magaritis  valorem 
quinquaginta  millium  aureorum,  &c.  &c. 

Quod  fua  Majeflas  Chriftianifîima  fecundum  antiquam  &  laudabilem 
Domûs  Francise  confuetudinem  affignatura  fit  &  conltitutura  Sereniflîmaî 
Infanti  Domnae  Anna?  pro  dotalitio  viginti  millia  aureorum,  &c.  &c. 

Quôd  fua  Majeflas  Chriflianiflima  dare  velit  &  afîïgnare  Sereniflîmaî 
Infanti  Domnae  Annae  pro  impenfis  Camerae  &  ad  fuftentationern  Dignita- 
tis  ac  Domus  fuse  fummam  convenientem,  quae  deceat  conjugem  &  filiam 
tantorum  &  tam  potentium  regum,  &c.  &c. 

Quôd  completo  à  Sereniflima  Infante  anno  setatis  duodecimo  fponfalia 
&  matrimonium  verbis  prœfentibus  contrahentur  perprocuratorem  mitten- 

dura. 


PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  I.  601 

dum  à  Rege  Chriflianifîïmo  ad  Serenifiimam  Infantem.     Q110  facto  fua    Arnica 
Majellas  Catholica  fuis  fumptibus  &  impenfis  illam  deduci  fackt  ad  Gai-    gen.de 
lise  Regni  fines,  &c.  &c.  l'Euko- 

Quôd  diffoluto  per  mortem  matrimonio  inter  fuam  Majeftatem  Chriftia- 
niffimam  &  Sereniffimam  Infantem ,  fuperftes  Serenitas  faa  redire  poffit  li- 
bère &  abfque  ullo  impedimento  in  Regnum  Hifpania;  &c.  &c. 

Quôd  cùm  paclio  &  conventio  hsec  matrimonialis  expetita  atque  pro- 
mota  fit  à  noftro  Sancliflimo  Pâtre,  illiufque  operà  in.  itatum  praefentem 
dedu&a,  œquum  fuerit  fupplicare  San&itati  fuae,  prout  illi  Majeflates  fua: 
jam  nunc  fupplicant,  ut  dignetur  matrimonium  hoc  approbare  &  fuà  be- 
nedi&ione  beare,  uti  etiam  comprobare  authoritate  fuâ  Apololicâ,  Bullae- 
que  fuae  inferere  praefentem  contractum  &  capitulationem  ratihabitionefquc 
fuarum  Majeftatum  &  fua  Serenitatis,  nec  non  fcripturas  &juramenta, 
quse  in  illorum  implementum  fient  &  perficientur. 

Quod  fuae  Majeftates  Catholica  &  Chriftianifïïma  approbaturae  &  ratam 
habiturae  fint  prsefentem  Capitulationem ,  promitrentes  &  recipientes  fide 
&  verbo  regio,  illam  à  fe  cuitoditum  &  inviolabiiiter  impletum  iri,  editis 
eum  in  finem  ratificationum  literis  confuetis  cum  abolitione  omnium  le- 
gum,  jurium,  &  confuetudinum  contrariarum  quibufque  proinde  derogari 
conveniat.  Haeque  literae  mutuae  ratificationis  praefentis  fcripturae  exhi- 
bebuntur  intra  duos  menfes  à  die  fubfcripto  computandos  per  legatos  & 
miniftros  in  utrâque  aulâ  commorantes. 

In  omnia  enarrata  dicli  Domini  CommifTarii  confenferunt  ac  convene- 
runt  prout  hac  capitulatione  continentur,  adftrictis  ad  ea  Majeltatibus  fuis 
&  fuâ  Serenitate,  cum  obligatione  &  vinculo  fidei  verbique  regii,  ifthaec 
ab  illis  effeclui  mandatum  &  fervatum  ,  ut  plané  cuftodiantur  &  implean- 
tur  juflum  iri ,  abfque  ullo  defeclu  totius  aut  partis ,  &  fine  ullâ  contraven- 
tionis  permifiione  directâ  aut  alià  quacunque.  Ita  enim  promiferunt  dï6ci 
Domini  Plenipotentiarii  vi  mandatorum,  quae  à  Majeftatibus  fuis  accepe- 
runt.  Prœfentes  fuére  illi,  qui  initio  hujus  capitulationis  recenfiti  fuerunt, 
&  di£ti  Domini  promittentes  &  contrahentes  huic  inllrumento  nomina 
fua  propriis  manibus  fubfcripferunt,  me  requirentes,'ut  illius  exemplum, 
unum  vel  plura  qaae  neceflaria  fuerint,  ipfis  tradam. 

Dux  de   Lerma,   6tV. 

IIenricus  de  Lotharingia,  &c. 


OUoruni  verborum  complexu  ad  interminatam  non  proximi  tantltm  in  Re~ 
gno  Galli*  fuccejforis ,  fed  cujufcunque  Gallici  fanguinis  ex  hoc  matri- 
monio etiam  ultimo  loco   orti  6?  à  fuccejjione  Gallicâ  remotijjimi  vel  pr opter 
fœmineum   fexum  penitus  femoti  exclujionem  à  quâlibet  Hifpanica  fuccejjione ,  TIT.  Fa&i 
fublatâ  omni  fexâs ,  ordinis ,  £5?  gradus  dijiinclione ,  ut  nihil  clarius  excogita-  ab  "?  fo- 
ri ,  nec  inhœrens  obllgatio  arclius  Jiringi  potuit  \  ita  etiam  ab  Infante  jinnâ    e-nni  °.m" 
antc  13  poft  confummatum  matrimonium ,  ipfoque  Rege  GhriftianiJJïmQ  faniïijfî-  ttàauL 

Xiii  3  mis 


6oz    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    mis  juramentis  confirmata   £5?  inter  leges  Hifpaniœ    £s?    G  allia  fempiternas  in 
gen.  de    utr'wfque   Regni   Dicafieriis   annotari  folitas .  relata  ,    ne  que  antehac   ab  ullo 
L  pe*0"    mortalium  in  dub'ium  vocata  fuit.     Perpenfâ  potins  illius   utilitate  £s?  ne  ce  fi- 
— — - —  fitate  ciim  fiât  us  feu  ordines  générales  Regni  Madriti  Anno  161 8-  congregati 
IV   Lege   &&  Philippo  fuggejferunt   ac  fuppl'icârunt ,   ut  lege  perpétua  &  renuntiatio- 
Hifpanicâ  ne  m  iflhanc  denuh  confirmant  ,  &  virtute  illius    omnes  in  univerfum  utrius- 
exprefTà.     que  fexus  liber  i  ex  matrimpnio  hoc  prognati   &  qui  ex   illis  nafcituri  effent , 
ab  omni  fuccejjione   Hifpanicâ   aterniim   excluderentur  ,    tum  Rex  Philippus 
examinât â  itcrum  &  mature  difcujfâ  re ,  eam ,  quœ  petita  fuerat ,  legem  tu- 
lit  &  promulgavit ,  rcpetitis  &  in  novum  Hifpanicarum  Legum  Codicem  Ma- 
driti Anno    1640.  impreffum   relatis   de  refervato  pariter  pofi   matrimonium 
Gallicum  folutum  ipfi  Infant  i  fine  proie  fuperfliti ,  ac  ejurato  alias ,  uti  dixi- 
mus ,  cmni  fuccefjîonis  jure  ipfifjîmis  patlorum  connubialium   fupra   defcripto- 
•tum  &  confona  renuntiationis  ver  bis  ,  bac  prœfixâ  infcriptione  £5?  fummâ: 

Lex  duodecima.  Quôd  Regina  Francise  Chrillianiiîima  Domna  Anna 
Illiufque  liberi  &  defcendentes  ex  matrimonio  cum  Rege  Chriliianifîimo 
Ludovico  Decimo  tertio  fuccedere  non  poiTînt  in  Regnis  Iiifpaniae  & 
connexis,  pranerquam  in  cafibus,  quos  lex  iita  compleélitur. 


V.  Con- 
tractai ma- 
trimonia- 
li  Infant is 
Maris 
Therefîa; 
nupta»  Lu- 
dovico 
XIV. 


Concors  plané  in  excludendis  ob  plures  rurfum  rationes  allegatas  in  in  finit  um 
quibufvis  maribus  &  fœmints  Gallicis  ab  omni  Hifpanicâ  fuccefjîonis  parte , 
ejufdemque  efficaciœ  efi ,  quod  tabulis  connubii  inter  Philippi  Quarti  filiam  In- 
fantem  Mariant  Therefiam  £5?  Ludovicum  Decimum  Quartum  modernum  Fran- 
ciœ  Regem  Anno  1 6f  <?.  contratli  exprimitur ,  ut  pêne  defcripta  tantîtm  fupe- 
rior  formula  videri  potuifiet,  ni  fi  enixioris  contrahentium  voluntatis  declaran- 
dœ  &  ,  fi  fieri  potuifjet ,  arclandœ  magis  obligationis  ergb  nova  quœdam  clau- 
j'ula  additœ  fu'îfjent  J'equentibus  ex  Galiico  exemplari  ratificationi  Régis  Chri- 
fiianiffimi  inferto  hue  tranflatis  ver  bis. 

In  nominefan&ifïimaeTrinitatis,  Patris,  Filii,  &  Spiritus  Sanfli,  trium 
Perfonarum  unius  folius  &  veri  Dei,  ad  illius  honorem  &  gloriam  &  in 
bonum  horum  regnorum.  Notum  fit  omnibus  iis ,  qui  prasfentes  literas 
&  contra&um  hune  connubialem  videbunt.  Quandoquidem  in  Infula  à 
Phafianis  appellatâ,  fitâ  in  flumine  Bidaflba,  quod  dimidiâ  leucâ  diltat  à 
vico  Andaya  provincioc  Aquitania? ,  &  eodem  fpatio  ab  urbe  Irunenfi  pro- 
vincia:  Guipofcoœ  ,  inque  domo  ibidem  exftru&â  ad  traciandam  pacem 
inter  Majeihtes  fuas  Chriflianiflimam  &  Catholicam  hodiernâ  die  feptimâ 
Menfis  Novembris  Anno  à  Nativitate  Jesu  Chrifti  Domini  &  Redemp- 
toris  nolhi,  fupra  Millefimum  fexcenteîimum  quinquagefimo  nono,  co- 
ram  me  Petro  Colom,  Equité  Ordinis  fancli  Jacodi,  Domino  Oppido- 
rum  &c.  &c.  Confiliario  Indico  ,  Secretario  Status,  Scribâ  &  Notario 
Regise  Catholica*  Majeftatis  ,  comparuerunt  Eminentilîîmus  Dominus  , 
Dominus  Juiius  Mazarinius  ,  Sacrçc  Romane  Ecelefia?  Cardinalis  ,  Dux 
Meduanse  ,  Praefes  omnium  Confiliorum  Sereniiiimi ,   Excellentiffimi ,  & 

Poten- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.-DCC.  I. 


6&1 


Potentiflîmi  Principis  Ludovici  Decimi  Quarti,  Dei  grarià  Régis  Francia: 
&  Navarrae  Chriitianiffimi,  vi  mandati ,  îpii  à  fua  Majeilate  Chnftianif- 
fima  conceffi,  quod  Gallica  lingua  confcriptun  ,  manu  regià  fubfcriptum 
&  regio  figillo  munitum,  atque  ab  ipfius  Secretario  itatûs,  Domino  de 
Lomenie  fubùgnatum  ,  daium  fuerat  Lutetiae  Panliorum  vigefima  prima 
Junii  1659.  cujufque  authenticum  exemplar  pênes  me  aflervatur,  ejus 
verô  exemplum  fini  praefentium  adnectetur  ab  una  parte:  &  ab  altéra 
parte  ExcellentifTimus  Dominus,  Dominus  Ludovicus  Mendez  de  Haro 
&  Guzman ,  Marchio  del  Carpio,  Cornes  Dux  de  Olivarez,  Confilarius 
Status  fuse  Majeftatis  Catholicae  &c.  &c.  Nomine  Sereniffimi,  Excel- 
leniiilimi,  &  Potentiifimi  Principis  Philippi  Quarti,  Divinâ  etiam  gratiâ 
Régis  Caftelloe  ,  Legionis,  Arragonia?  ,  utriufque  Siciiia?  ,  Hierolblymo- 
rum,  Ludtaniae,  Navarre,  &  Indiarum  &c.  &c.  Dueis' Auiinae',  Bur- 
gundiœ,  Brabantix  &  Mediolani,  Comitis  Habfpurgi,  Flandrias,  &  Ty- 
rolis  Sic.  &c.  Virtuteque  mandati,  quô  à  fua  Majeilate  Catholica  in- 
ftruclus  fuit  per  inftrumentum  Regià  fuâ  manu  fubfcriptum,  regioque  fi- 
gillo  confirmatum  &  à  Domno  Ferdinando  de  Fonfeca  Ruiz  de  Contreras 
illius  Secretario  ftatûs  fubfignatum  Madrid  $.  Julii  praefentis  Anni,  tan- 
quàm  Rege,  Pâtre,  &legitimo  Adminiftratore  SerennTimae  Infantis  Dom- 
nae  Mariae  Therefiae ,  filiae  lux*  primogenkae  procreatœ  ex  Majeilate  quon- 
dam  Régine  Elifabethae  Conjugis  fuae  légitimai:  atque  fubinde  diclus  Do- 
minus Cardinalis  Mazarini  nomine  fuae  Majeftatis  Chriftianiffimae,  &  Mar- 
chio de  Olivarez ,  nomine  fuse  Majeftatis  Catholicae ,  ufi  mandatis  fupra- 
dicbs,  dixerunt  &  enuntiarunt,  quod  ipforum  Domini ,  uti  Reges  Chri- 
itianifïïmus  &  Catholicus  animum  intendentes  in  utilitatem  regnorum  ilbi 
concreditorum ,  &  ut  Habilitas  pacis  hodie  inter  ambas  Coronas  conclu- 
fae,  non  folùm  ipfis  viventibus  duret,  fed  eâdem  firmitate  ad  omnes  fuc- 
cefibres  &  defcendentes  perveniat  ,  perpendentefque  ,  quèd  efficacihï- 
mum  ejus  fcopi  affequendi  remedium  fit,  pacis  fœdera  per  matrimonii 
vinculum  ar&ius  flringere^  ea  propter  confirmandseque  adeo  amplius  per 
hoc  matrimonium  amicitise,  &  urrioni,  quae  eft  &  perpétua  optatur  inter 
fuas  Majeftates,  Divinà  adftipulante  benignitate  &  in  Omnipotentis  h-o- 
norem  traclaverint  &  iniverint  fponfalia  &  matrimonium  Régis  Chriftia- 
niffimi  cum  Serenifiîma  Infante  Domna  Maria  Therefia  fuse  Majeftatis ^Ca- 
thoîicae filia  primogemtà,  quodque  eum.iiifinem  dicti  Domini  Plenïpoten- 
tarii  nominibus  fupradiclis  tranfegerint:  &  convenerint  de  articulis'fequen- 
tibus. 

1.  Quôd  Divinâ  benedicente  gratiâ,  prsevià  San&itatis  fuse  difpenfatio- 
ne  ob  proximitatem  &  confanguinitatem  ,-quœ  intercedit  inter  Rege-rri 
Chriftianiffimum  &  Sereniiïïmam.  Infant'èm^  ipii  célebrare  debeant  fponfâ- 
lia  fua  &  matrimonium  per  verba  de  prxibnti  ,  forma  &  iblennkati'bus 
prœfcriptis  a  facris  Canonibus  &  Conftitutionibus  Ecclefioe  Catholica' Àpo- 
Itolicae  &  Romance.  Fietque  iftud  in  .Aula  Regise  Majeftatis  Catholica:, 
ubi  cum  Sereniflima  Infante  Domna  Maria  Theretia  conftet,  &  q'uidem 


Affaires 

GKN.    DE 

l'£uro- 

PE. 


virtute  mandati  &  commiiïionis  Régis  Chriftianiiîim 


6l 


qui  îllud  dein  ratum 
habe- 


QEN.    DE 

l'Euro- 
pe. 


604    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Maires  habebit  &  ipfe  confummabit ,  ftatim  atque  Sereniflîma  Infans  Domna 
Maria  Therefia  in  Galliam  perdu&a  fuerit,  illucque  pervenerit,  jungente 
fe  fua  Majeftate  Serenitati  fuae  per  Ecclefiae  benedictionern  perficieturquc 
concluflo  ratihabitio  di£U  matrimonii  five  per  fpeciale  procuratorium,  fi- 
ve  ab  iplis  contrahentibus  tempore  inter  fuas  Majeftates  convento  & 
definito. 

2.  Quôd  fua  Majeftas  Çatholica  promittat  &  teneatur  dare ,  daturaque 
fit  SereniiTimse  Infanti  Domnae  Mariae  Therefire  in  dotem  matrimonii 
caufâ  cum  Rege  Francise  Chriftianifîimo ,  foluturaque  fit  fuae  Majeflati 
Chriftianifiimae  aut  ipfius  procuratori  &  commiflario  quingenta  millia  au- 
reorum  folis,  aut  illorum  valorem  legitimum  in  civitate  Parifienfi.  Qiiae 
fumma  dependetur  modo  fequenti  :  triens  tempore  confummationis  ma- 
trimonii :  alter  triens  fub  flnem  anni  inde  fequentis ,  &  ultimus  triens  in- 
tra  fex  Menfes  ab  eo  tempore  numerandos ,  ità  ut  intégra  folutio  diébe 
fummae  quingentorum  millium  aureorum  folis  perficiatur  fpatio  octodecim 
menfium  terminis  &  portionibus  determinatis. 

3.  Quôd  ad  fecuritatem  dotis  hujus  fua  Majeftas  Chriftianiflîma  pro- 
mittat fe  affignaturam  ,  affignaturaque  fit  reditus  liquidos  &  certos  &c. 

4.  Quôd  per  hanc  realem  folutionem  diétorum  quingentorum  millium 
aureorum  folis  vel  jufti  valoris  fac~lam  fuae  Majeitati  Chriftianiffimae  aut 
illius  mandatario  penfionibus  fupradi&is ,  Sereniffimse  Infanti  Domnse  Ma- 
rias Therefiae  plenè  fatisfa&um  cenfeatur  illaque  adeô  contenta  fit  diclâ 
dote,  ità  ut  il li  non  fuperfit  aliquis  regreffus,  a6tio,aut  jus  petendi,  quôd 
ad  illam  pertineant  alia  bona  aut  jura  in  haereditates  fuarum  Majeftatum 
Catholicarum,  Parentum  fuorum,  five  ex  illorum  perfonis,  five  aliâ  ra- 
tione  quacunque ,  aut  alio  aliquo  titulo,  cognito  aut  incognito,  quoniam 
ab  omnibus,  cujufcunque  conditionis,  naturae  aut  qualitatis  fint,  exclufa 
efTe  &  manere  débet ,  iifque  fe  exerte  abdicabit  cum  omnibus  fecuritati- 
bus,  firmamentis,  &  folennitatibus  requifitis  &  neceffariis  ante  matrimo- 
nium  contrahendum  per  verba  praefentia,  illud  etiam  denuô  pofteà  appro- 
babit  &  ratum  habebit  unâ  cum  Rege  ChriftianifTimo  ftatim  ac  matrimo- 
nium  celebraverit ,  additis  iifdem  cautionibus  &  folennitatibus,  quas  ob- 
fervatœ  fuerint  in  prima  renuntiatione ,  aliifque  quse  maxime  convenien- 
tes  &   neceffarisc  videbuntur:   ad  quod  tum  faciendum  tenebuntur,  & 
nunc  tenentur  atque  obligantur  fua  Majeftas  Chriftianiflîma  &  fua  Sereni- 
tas ,  quinimô  fi  renuntiationem  ifthanc  &  ratihabitionem  facere  négligè- 
rent, illae  jam  nunc  per  hune  folum  tractatum  fac~foe  &  expeditae  repu- 
tabuntur.    Fient  verô  modo ,  qui  ad  conciliandàm  aut  teftandam  validi- 
tatem  &  firmitatem  excogitari  poterit,  efficaciflimo  &  maxime  conve- 
nienti  ,  expreflîs  omnibus  claufulis  ,  derogationibus  ,  &  abrogationibus 
omnium  legum,morum,  confuetudinum ,  decretorum,&  ftatutorum  con- 
trariorum ,  quaeve  impedimento  fuerint  in  toto  vel  in  parte ,  quibus  adeô 
ad  hune  efFe&um  fuae  Majeftates  Çatholica  &  Chriftianhîima  derogare  de- 
bebunt  ,   quxque  ab  hoc  momento  in  illud  tempus  per  approbationem 
hujus  tra£htus  abolita  intelligentur. 

S*  Cùm 


PE. 


RESOLUTIONS   D'ETAT  ,  M.  DCC.  ï.  éoT 

$.  Cùm  ambae  Majeftates  Catholica   &  Chriftianiffiraa  in  hoc  matri-  Affaires 
monium  confenferinc  &  confentiant,  ut  illius  vinculo  perpetuetur  &  ma-    grn.dk 
gis  fecura  reddatur  pax  publica  Chriitianitatis  expetitaque  inter  Majelta-    L'^URP- 
tes  fuas  mutua  dileétio  ac  fraternitas,  &  contemplatione  juftarum  caufà- 
rum,  quœcommonftrant&  perfuadent  coimxioda  di&iconnubii ,  per  quod 
Divina  favente  gratià  fperari  poflunt  felices  fucceffus  in  eximiam  utiiita- 
tem  &  augmentum  fidei  &  reiigionis  Chriflianse  communique  beneficium 
Regnorum,  fubditorum  &  vafallorum  ambarum  Coronarum:  Cumque  in- 
teriit  itatûs  publici  &  confervationis  illarum,  ut  quac  tam  magnae  imt,  non 
conjungantur,  occafionefque  prcecaveantur,  quac  evenire  pofTent  iilas  jun- 
gendi  &  ob  aequalitatem  &  alias  juitas  rationes,  ftatuitur  paclo  convento, 
quod  Majeilates  fuse  obtinere  voiunt  robur  &  vigorem  legis  Habilitée  in 
iavorem  regnorum  fuorum  &  publics  caufse  illorum,  ut  Serenifîima  Infans 
Domna  Maria  Therefiâ  liberique,  quos  habuerit,  mares  &focminac,  illo- 
rumque  &  illarum  defcendentes  tam  primogeniti,  quàm  fecundo,  tertio, 
aut  quarto  geniti,  ukeriorefque  in  quocunque  gradu  confiltant,  nonpof- 
iint  ullo  unquam  tempore  fuccedere  nec  fuccedant  in  regnis,  itatibus,  & 
Dominiis  fuse  Majeftatis  Catholicac  comprehenfis  in  titulis  relatis  in  iflaca- 
pkulatione,  nec  in  quolibet  alio  omnium  reliquorum  regnorum,  ftatuum, 
&  Dominiorum  ,  Provinciarum ,  infularum  adjacentium ,  feudorum ,  eu- 
ltodiarum  feu  tuitionum  &  Caitellorum  feu  locorum  limitaneorum,  quac 
fua  Majeftas  Catholica  nunc  tenet  ac  poffidet ,  quaeque  ad  illam  pertinent 
vel  pertinere  poffint  cùm  intra  Hifpaniam  tum  extra  illam  &  quae  fua 
Majettas  Catholica  &  illius  fuccefTores  impofterum  tenuerint,  pofîèderint, 
&  ad  îllos  pertinuerint,  nec  in  ullo  quod  comprehenfum ,  inclufum,  &  ag- 
.gregatum  fuerit ,  nec  quod  ullo  tempore  adquiri  &  aderefeere  dictis  re- 
gnis,  itatibus,  &  Dominiis  recuperarique  &  reddipoffit,  fub  quocunque 
titulo  &  caufa  id  fit  aut  elle  poffit,  quamvis  vivà  Domina  Infante  Dom- 
na Maria  Therefiâ,  aut  deinceps  fuperftite  quocunque  illius  defeenden- 
tium  primogenitorum,fecundogenitorum ,  &  ulteriorum  ,  eveniat  &  con- 
tingat  cafus  unus  vel  plures,  quibus  ex  jure  legum  &  coniuetudinum  diclo- 
rum  regnorum,  flatuum,  &  Dominiorum,  difpofiticnumque  actitulorum, 
quorum  vi  illic  fucceditur  prsetendique  fuccefiio  poffit,  ad  illos  pertinere 
fucceflio  deberet,  namque  ab  iita  jureque  &  fpe  fuccedendi  in  hifee  re- 
gnis, ftatibus,&  Dominiis,  &  illorum unoquoque  jamnunc  declaratur  peni- 
tus  exclufa  dicta  Sereniiîima  Infans  Domna  Maria  Therefiâ  &  omnes  illius 
liberi  &  defcendentes  mares  &  fœminae,  licet  dicant  aut  dicere  vel  pra> 
tendere  queant,  quod  in  illorum  perfonis  locum  non  inveniant  nec  confi- 
derari  poiïint  rationes  caufa;  publics  aliaeve,  fuper  quibus  fundati  pofïit 
haec  exclufio  ,  quamvis  etiam  ailegare  velint,  quèd  defecerit,  quod  Deus 
non  permittat  fed  avertat,  fucceffio  fuae  Majeflatis  Catholicae  &  Sereniffi- 
morum  Principum  &  Infantum  reîiquorumque  liberorum,  quos  habet  & 
habuerit ,   omnium  denique  legitimorum  fucceflbrnm ,  namque  nihilomi- 
nus  ,  prout  di&um  eft ,  in  nullo  cafu  aut  fuccedente  eventu  ,  nulloque 
tempore  fuccedere  habent  aut  iucceffionem  praetendere  ipfa  ipfiusve  iilii 
Tome  XL  Kkkk  aut 


FE. 


606    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aminss  aut  defcendentes,  non  obftantibus  nec  illis  legibus,  confuetudinibus,  or- 
cen.  de  dinationibus ,  &  difpofitionibus ,  quarura  virtute  fucceiTum  efl  &  fuccedi- 
i.'£uro-  tQr  in  omnibus  diclis  regnis,  ftatibus  ,  &  Dominiis,  nec  quibusvis  legibus 
&  confuetudinibus  Coronre  Francise ,  quse  exiftente  praejudicio  illius  fuc- 
cefTorum  exclufionem  hanc  impedire  queant,  tam  nunc,  quàm  in  tempo- 
ribus  &  cafibus  deferendae  fucceffionis,  quibus  omnibus  &  earum  cuilibet 
Majeftates  fuae  derogare  debent ,  eafque  abrogare  ,  quatenus  quocunque 
modo  contrariée  fuerint  tenori  hujus  capituli,  illudque  vel  ejus  adimpletio- 
nem  &  executionem  impedierint,  atque  approbando  capitulationem  iftam 
derogaffe  easque  pro  derogatis  habere  cenfentur.  Eademque  ratione  pa- 
riter  erunt  &  intelligentur  manere  exclufa  &  exclufi  Sereniffima  Infans 
&  Illius  Defcendentes  ,  ne  poffint  ullo  tempore  uîlove  eveniente  cafu 
fuccedere  in  itatibus  &  provinciis  Belgii,  Comitatu  Burgundiae  &  Carole- 
fiîc  cum  omnibus  adjacentibus  &  pertinentibus.  Simul  tamen  declara- 
tur,  quod  fî  acciderit,  quod  Deus  prohibeat,  ut  videtur  Sereniffima  In- 
fans abfque  liberis  ex  hoc  matrimonio  ,  hoc  cafu  libéra  maneat  à  dicta 
exclufione  capaxque  jurium  fuccedendi  in  omnia  quae  competunt,  duo- 
bus  cafibus  ,  uno  nimirum  fi  vidua  permanens  &  abfque  liberis  ex  hoc 
matrimonio  in  Hifpaniam  rediret ,  altero ,  fi  in  commodum  boni  publici 
&  ob  judas  confiderationes  denuo  matrimonium  iniret  ex  voluntate  Régis 
Catholici  Patris ,  &  Principis  Hifpaniarum  illius  fratris,  in  quibus  cafibus 
capax  &  habilis  efTe  feu  manere  débet  haereditatem  capelfèndi  &  fuc- 
cedendi. 

6.  Quod  Sereniffima  Infans  Domna  Maria  Therefia  ante  célébration em 
&  comraclum  matrimonii  per  verba  praefentia  fcripto  folenni  Inflrumento 
obligare  le  teneatur  pro  fe  fuifque  fuccefforibus  ad  implementum  &  ob- 
fervantiam  fupradiftorum  Exclufionifque  fuae  &   fuorum  defcendentium , 
approbando  ea  omnia,  prout  iitâ  capitulatione  continentur,  cum  claufu- 
lis  neceiïariis  &  juramento,  quodque  infertâ  iflà  capitulatione  fcripturâ- 
que  obligatoriâ  &  approbatorià  Serenitate  fuà  confe&â  aliud  fimile  con- 
feclura  fit  unà  cum  Rege  Chriilianiffimo  flatim  atque  cum  fuà  Majeflate 
matrimonium  contraxerit,  quod  regeri  &  acceptari  debeat  à  Parlamento 
Parifienfi  forma  &  cum  vigore  folitis  ,    ficut  &  fua  Majeflas  Catholica 
diclam  renunciationem  &  ratification  em  approbare  teneatur  atque  cura- 
re, ut  per  confllium  ftatus  pariter  acceptetur  &  regeratur  forma  &  cum 
virtute    folitis  reliquifque    claufulis  necefTariis.      Faclis  verô  diclis   re- 
nunciationibus ,  ratificationibus,  &  approbationibus  vel  omiffis ,  illac  nunc 
jam  virtute  illius  Capitulationis  &  Matrimonii,  quod  illius  intuitu  fecu- 
tum  fuerit,  habentur  &  declarantur  pro  factis  &  confcriptis  ac  à  Parla- 
mento Parifienfi  acceptais  atque  regeitis  per  publicationem  pacis  in  illo 
regno  fsciendam. 

7.  Quod  fua  Majeflas  Chriftianiffima  datura  fît  Sercnilîimce  Infanti 
Domnx  Marias  Therefia:  pro  annulis  &  monilibus  feu  gemmis  &  margari- 
tis  valorem  quinquaginta  milliurn  aureorum  &c. 

g*  Quod  fua  Majeilas  Chriftianiiîima  fecundum  antiquam  &  laudabi- 

lera 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  607 

îem  Domûs  Francise  confuetudinem  affignatura  fit  &  conflitutaSereniiîimoe  Affaires 

Infanti  Domnoe  Mariae  Therefiae  pro  dotalkio  viginti  millia  aureorum  &c;  gen.de 

9.  Quod  fua  Majeftas  Chriflianiffima  dare  velit  &  aflîgnare   Serenif-  L^RO" 

fimae  Infand  Domnac  Marke  Therefias  pro  impenfis    Camerae   &  ad  fu-  \ — 

ftentadonem  dignitads,  ac  Domûs  fuoc  furamam  convenientem ,  quae  de- 

ceat  conjugem  &  filiam  tantorum  &  tam  potentium  Regum  &c. 

10.  Quôd  Rex  Chriftianifllmus  &  Sereniffima  Infans  Maria  Therefia 
fponfalia  &  matrimonium  contrahere  velinc  verbis  prafentibus  per  procu- 
ratorem  mittendum  à  Rege  Chriftianiflîmo  ad  Serenifîimam  Infantem. 
Quo  facto  fua  Majeftas  Catholica  fuis  fumpdbus  &  impenfis  illam  deduci 
faciet  ad  Galliae  Regni  fines  &c. 

ix.  Quôd  diflbluto  per  mortem  matrimonio  inter  fuam  Majeftatem 
Chrianifïïmam  &  Serenifiimam  Infantem  fuperftes  Serenitas  fua  redire 
poffit  libéré  &  abfque  ullo  impedimento  in  Regnum  Hifpaniae  &c. 

12.  Pactio  &  Conventio  haec  matrimonialis  inita  fuit  eâ  mente,  ut  fup- 
plicetur  fancto  Patri  nollro  Papae,  proutilli  Majeftates  fuae  jam  nunc  fup- 
plicant,  ut  dignetur  matrimonium  hoc  approbare  &  fuâ  bendictione  Apo- 
îlolicâ  beare,  uti  etiam  comprobare  illius  capitula  feu  articulos,  ratihabi- 
uonefque  fuarum  Majeftatum  &  fuce  Serenitatis,  nec  non  fcripturas  & 
juramenta,  quae  in  illorum  implementum  fient  &  perficientur,  inferendo 
ifthaec  litteris  fuis  approbadonis  &  benedictionis. 

Quôd  fuae  Majeftates  Chriftianiffima  &  Catholica  approbaturac  &  ratam 
habiturac  fint  praefentem  Capitulationem  ,  omnemque  ejus  continentiam, 
promittentes  &  recipientes  fide  &  verbo  regîo ,  illam  à  fe  cuftoditum  & 
inviolabiliter  impletum  iri,  edids  eum  in  finem  ratificadonum  literis  con- 
fuetis  cum  abolitione  omnium  legum  ,  jurium,  &  confuetudinum  contraria- 
rum  quibufque  proinde  derogari  conveniat.  Haeque  litersemutuae  ratifica- 
donis  prefentis  fcripturae  exhibebuntur  intra  triginta  dies  à  die  iubfcripto 
computandos  per  legatos  &  miniftros  in  utraque  aulâ  commorantes  ,  cum 
obligatione  &  vinculo  regiae  fidei  verbique  ,  effeclui  fe  illam  daturas  & 
cultodituras  obfervarique  &  plenè  impleri  jufîuras  efiè  abfque  ullo  defedtu 
totius  aut  partis,  feque  non  contraventuras  aut  ut  contra  eatur  permiffii- 
ras ,  directe  aut  indirecte,  ullâ  ratione  aut  modo.  Ita  enim  promiferunt 
&  ftipulati  funt  dicti  Domini  Plenipotentiarii,  vi  regiorum,  quae  habent, 
mandatorum  ,  praefentibus  à  parte  Franciae,  Dominis  Duce  Guifiae  &c„ 
&c.  Duce  de  Crequi  &c.  &c.  Marchione  de  Soyecourt  &c.  Lionseo  &c. 
Courtin  &c.  &c.  Comité  ab  Avaux  &c.  &c.  Pluribufque  aliis  Dominis 
&  Nobilibus:  Et  à  parte  Hifpaniae  Dominis  Marchione  de  Mondejar  &c. 
&c.  Duce  de  Mazara  &c.  &c.  Marchione  de  los  Balbazes  &c.  &c. 
Licentiato  Domno  Francifco  Ramos  de  Manzano  &c.  &c.  Barone  de 
Battevile  &c.  &c.  Domno  Rodrigo  de  Mexia  &c.  &c.  &  pluribus  aliis 
proceribus  &  nobilibus.  Iplique  Domini  contrahentes  manibus  fuis  no- 
rnina  fubfcripferunt,  meque  requifiverunt,  ut  ejus  exemplum,  vel  plura, 
ubi  neceflaria  fuerint,  exempla  illis  traderem. 

Cakd,  Mazarinus.  D.  Ludovicus  Mendez. 

Kkkk  2  Fac- 


tfô8     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ , 


Aminés       Faclum  &  peraélxim  coram  me  Secretario ,  Scriba  &  Notario  publico 
e£f:°£    fupradi&o,  anno  &  die  expreiïis. 

Pet  rus  Coloma. 


PE. 


Vl.Secutâ 

am^iifli- 

mâRe- 

nuncia- 

tione 

juratâ 

omnium 

hxredita- 

îum. 


CQnventioni  bilic ,  antequam  in  Gaîlicam  potejîatem  concederet  illiufque  ar- 
bitrio  obtemperare  coqeretur  ,  exacliffime ,  qucmadmodum  Hifpanici  fangui- 
n'is  principe  m  decuit ,  fat'.sfecit  Infans  Maria  Therefia  ,  jamyue  vïgejtmum  e gref- 
fa annum ,  &  rerum  humanarum  intelligent ijfima  ,  duobus ,  quod probe  notandum , 
à  fe  fub/'cripti,  &  deinde  unâ  cum  ip/à  convention?  matrimoniali  in  abla  publica 
Confliorum  Hijpanicorum  regeftis  Inflrumenîis  ,  fatlœ  Renuntiationis  alterorati- 
bab.tœ  Exclufionis  à  provinciis  &  regnis  eorumque  Cefîonis,  utr unique  corporali 
juramento  corroboravit ,  omnemque  Jîmul  petcnda  vel  u/ur panda  cujufcunque  ex- 
ceptions ,  refit  utionis  ,  abjbluîioms ,  a  ut  difpenfationis  Pontificia  vel  alterius^ 
etiam  f ponte  aut  alio  pof  niante  confefa  facultatem  penitus  abjuravit.  Id  quod 
Renunciationem  comprebendit  continent! a  efi  fequentis  : 

Domna  Maria  Therefia  Infans  Hifpaniarum  &  DEI  gratiâ  futura  Re- 
gina  Francice,  Filia  primogenka  Sercnifîimi,Excellentiffimi,  &  Potentif- 
fimi  Principis  Domni  Philippi  Quarti  eâdem  gratiâ  Régis  Catholici  Hifpa- 
niarum ,  Domini  mei,  &  Sereniffimoe,  Excellentiffimae,  &  Potentiflimae 
Principis  Domnae  IfabelUe  Reginae  Catholicae,  quam  osterna  gloria  beet, 
per  Initrumentum  hoc  &  Aétum  Renunciationis  ampliorifque  quem  com- 
pledtitur  tenoris,  notum  facio  &  manifeiluin  omnibus,  quorum  fcire  quo- 
modocunque  refert,  quod  per  Articulos  fecundum  &  quartum  Tra&atûs 
mei  connubialis  iniii  cum  Serenifîimo  ,  Excellentitfimo,  &  Potentiffimo 
Principe  Ludovico  Decimoquarto  Rege  Franciae  in  Infula  dicla  Phafiano- 
rum,  fita  in  amne  Bidaffoa  Provincial  Guipufcoae  in  confinio  horum  Re- 
gnorum  cum  Regno  Franciae  feptimâ  Novembris  anni  prseteriti  1 6yo.  fta- 
tutum  &  decretum  fuerit,  Rexque  Dominus  meus  propter  hoc  matrimo- 
îîium  &  ut  congrue  dotata  bonifque  propriis  initrucla  eiTem  promiferit, 
daturum  fe  mihi  elle  quingenta  millia  aureorum  foiis ,  folvenda  &  reprae- 
fentanda  loco  &  temporibus  diélo  Tra&atu  defignatis  Régi  Chriilianiiïimo 
illiufve  mandatario,  quibus  fatisfaclum  mihi  effe  &  haberi  debeat  pro  om- 
nibus &  quibuflibet  juribus  &  aclionibus ,  quae  ad  me  pertinent  aut  per- 
tinere  pofîînt,  nunc  aut  impoflerum ,  ob  bona  &  hoereditatem  Sereniffi- 
mse  Reginae  Domnae  Ifabellse  Matris  mese  &  ob  futuram  Succefïionem  Ré- 
gis Domini  mei,  quem  DE  US  tueatur,  &  propter  omne  illud,  quod  mi- 
hi competere  poiTet  tanquam  filise  &  haeredi  Majeflatum  fuarum  Catholi- 
carum,  tam  ex  ipforum  jure  &  capite ,  quàm  ex  quocunque  alio  titulo, 
cogitato  aut  non  eogitato,  noto  aut  incognito,  ex  lineâ  cùm  paternà  tum 
materna  ,  rcclâ  aut  tranfverfali ,  médiate  aut  immédiate ,  quodque  ante 
celebrationem  matrimonii  per  verba  praefentia  abdicare  me  debeam  &  ce- 
ctere  omnibus  meis  juribus  &  omnibus  a&ionibus  Régi  Domino  meo  illif- 
que  qui  perfonam  illius  reprsefentant,  prout  conventum  &  declaratum  ell 
fpecialius  dictis  Articulis  i,  &  4.  quos  ipfa  legi,  legique  audivi  pkiribus 

vici» 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.  6o9 

vicibus  antequam  aflenfum  huic  ac"hii  forrnando  praslîarem,  quos  verbote-  Aff.uues 
nus  hîc  infen  volo  ,  tenore  fequend.  „  Quod  fua  Majeftas  Catholica  °*f  Dfi 
„  promitcat  &  teneatur  dare,  daturaque  fit  Sereniiïimre  Infanti  Domnx    L'EuRo- 

„  Mariac-Therefiae  in  dotem  matrimonii  caufà  cum  Rege  Francis  Chri-  ^_„ 

„  ltiani^imo,  foluturaque  lit  fuse  Majeftati  Chnitianilliraie  aut  ipfius  pro- 
,,  curatori  &  commiiLrio  quingenta  millia  aureorum  folis  ,  aut  illorum 
„  valorem  legiumum  in  civitate  Parilienii.  Quse  fumma  dependetur  mo- 
„*do  fequenti  :  triens  tempore  confummationis  matrimonii  :  alter  triens 
,,  fub  finem  anni  inde  fequentis,  &  ultimus  triens  intra  fex  menfes  ab  eo 
„  tempore  numerandos ,  ita  ut  intégra  folutio  didtae  fummae  quingentorum 
„  millium  aureorum  folis  perficiatur  fpatio  octodecim  mentium  terminis  & 
„  portionibus  determinatis. 

„  Quod  per  hanc  realem  folutionem  dictorum  quingentorum  millium 
„  aureorum  folis  vel  juiti  valons  fa&am  fuae  Majeftati  Chriftianiiîïmae  auc 
„  illius  mandatario  penliombus  fupradiéds  ,  Serenilfimse  Infanti  Domnce 
„  Mariae-Therefiœ  plenè  fitisfadtum  cenfeatur  illaque  adeô  contenta  fit 
di6ta  dote,  ità  ut  îlii  non  fuperfit  aliquis  regreflùs,  aftio  aut  jus  peten- 
di  aut  praetendendi  quod  ad  illam  perdneant  alia  bona  aut  jura  in  hae- 
reditates  fuarum  Majeitatum  Catholicarum ,  Parentum  fuorum,  five  ex 
„  illorum  perfonis,  iive  alia  ratione  quacunque,  aut  aiio  aliquo  titulo  co- 
„  gnito  aut  incognito  ,  quoniam  at>  omnibus  ,  cujufcunque  conditionis, 
„  naturse  aut  qualitatis  fint,  exclufa  effe  &  manere  débet,  iifque  fe  exer- 
„  té  abdicabit  cum  omnibus  iecuritatibus,  firmamentis ,  &  folennitatibus 
„  requifitis  &  neceflariis  ante  matrimonium  contrahendum  per  verba 
„  prsfentia,  illud  etiam  denuô  pofleà  approbabit  &  ratum  habebit  una 
„  cum  Rege  Chriftianiffimo ,  ftatim  ac  matrimonium  celebraverit,  addi- 
„  ds  iifdem  cautionibus  &  folennitatibus,  quae  obfervatae  fuerint  in  pri- 
„  ma  renuntiatione,  aliifque  quœ  maxime  convenientes  &  neceffarice  vi- 
„  debuntur  :  ad  quod  tum  faciendum  tenebuntur,  &  nunc  tenentur  at- 
„  que  obligantur  fua  Majeftas  Çhriftianilnma  &  fua  Serenitas,  quinimô  fi 
„  renuntiationem  ifthanc  &  ratihabitionem  facere  négligèrent,  illse  jam 
„  nunc  per  hune  folum  Traclatum  faclae  &  expeditas  r^putabuntur  ->  fiene 
„  verô  modo  qui  ad  conciliandam  aut  teftandam  validitatem  &  firmita,- 
„  tem  excogitari  poterit  effieaciifimo  &  maxime  convenienti  expreiîis 
„  omnibus  claurulis  ,  derogationibus ,  &  abrogationibus  omnium  legum, 
„  morum  ,  confuetudinum  ,  decretorum  ,  &  ftatutorum  contrariorum , 
„  quaeve  impedimento  fuerint  in  toto  vel  in  parte,  quibus  adeo  ad  hune 
„  effeclum  fus  Majeftates  Catholica  &  Chriftianiffima  derogare  debe- 
„  bunt,  quaeque  ab  hoc  momento  in  illud  tempus  per  approbationem  hu- 
„  jus  Traclatûs  aboîita  intelligentur.  „ 

Cùmque  per  DEI  clementiam  aetatem  ingrefla  fim  majorem  viginti 
annis,  &  DEO  volentè  intra  paucos  dies  matrimonium  noftrum  in  effec- 
tum  deduci  per  verba  praefentia  debeat,  certifîimè  etiam  edocla  fim  ac 
quà;n  defiderare  potui  plenilïimè  perfpeclam  habeam  fubftandam  &  effec- 
tum  horum  ardeuiorum  ,  limul  cognofeam  &  agnoverim  ,  quod  ex  fut  i  ira 

Kkkk  3  fuc- 


6io   MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AfrAi»»   fucceffione  Régis  Domini  mei ,  &  hsereditate  Sereniffimx  Reginse  matris 
gen.  de    mege  fummo  jure  ut  haereditas  vel  légitima  mihi  competere  aut  ad  me 
l'Euko-    fne$;are  non  poiTit  diéla  fumma  quingentorum  millium  aureorum   folis, 
Ft"       quod  etiam,  ubi  competiifTet ,  dos  fît  valde  congrua  &  omnium  maxima, 
qux  ad  hoc  ufque  tempus  data  fuerit  alicui  Infanti  Hifpaniae  ,  quodque 
Rex  Dominus  meus  in  animum  induxerit,  ut  tantam  mihi  daret  iïudio  mi- 
hi gratificandi ,  &  conlideratione  ac  contemplatione  Régis  Chriftianiffimi, 
quo  per  hoc  matrimonium  obtineantur  effeclus  expofiti  di£to  tra&atu  con- 
nubiali,  tantoperè  neceiTarii  &  utiles  bono  publico  Chriftiani  orbis  ,  ho- 
rumque  regnorum  quieti  &  fatisfactioni  :   ideô  ex  certà  fcientiâ,  libéra  & 
fpontaneà  voJuntate  approbo  &  vo!o  obfervari  atque  compleri  flatuta  & 
décréta  diclorum  articulorum  fimulque  credi  feu  intelligi,  quôd  matrimo- 
nium hoc  fub  conditionibus  contenus  &  illic  enuntiatis  concludi  &  effeclui 
mandari  debeat,  &  quôd   abfque  illis  nec  ad  ftatum,  in  quo  hodie  eft, 
pervenilTet,  mihique  adeô  jam  nunc  meo  arbitrio  fatisfaclum  &  plenè  ab- 
folutèque  folutum  cenfeo,  quicquid  ad  me  pertinet  aut  pertinere  queat, 
nunc  aut  impoiterum,  quocunque  jure  ,  comperto  aut  latente,  ex  futurà 
fucceffione   &  hsereditate   fuarum   Majeflatum  Catholicarum   Parentum 
meorum ,  &  prgpter  legitimam  paternam  ac  maternam  ,  vel  illius  fupple- 
mentum  ,  vel  ex  causa  alimentorum  aut  dotis  ex  bonis  tam  liberis,  quàm 
quae  ad  Coronam,  régna,  ftatus,  &  Dominia  fpeétant ,  ut  mihi  meisque 
non  fuperfit  aliqua  actio  vel  regreffus  contra  Majeftatem  fuam  illiusve  fuc- 
ceffores,  expetendae  aut  prœtendendse  majoris  fummse  aut  pretiofioris  & 
dignioris  portionis  quàm  dicta  quingenta  millia  aureorum  efficiant.    Volo 
pariter ,  haec  renuntiatio  etiam  faéta  intelligatur  ratione  quorumlibet  alio- 
rum  jurium  aut  a&ionum ,  quae  mihi  ceu  filiae  Majeftatum  fuarum  compe- 
tere aut  ad  me  pertinere  poffent  ex  haereditate  aut  fucceffione  cujufvis 
juris  aut  cognationis  linea:  reclae  aut  transverfse ,   in   capita  vel  ftirpes, 
quodque  illis  fimul  omnibus  &  cunclis  me   abdico  &  exuo  cujuscunque 
conditionis,  naturae ,  qualitatis,  pretii  <5ç»ponderis  fint ,   cedens,  devol- 
vens,  &  tranferens  ea  in  Regem  Dominum  meum  illiusque  haeredes  &  fuc- 
ceflbres  univerfales  &  fingulares  in  jus  illius  fubeuntes ,  ita  ut  de  iis  pro 
arbitrio  &  beneplacito  dilponere  poifit,  tam  per  donationem  inter  vivos, 
quàm  per  teltamentum  &  ultimam  voluntatem  ,  nullâ  fuperftite  obligatio- 
ne,  ut  me  haeredem  inflituat,  legato  me  honoret,  aut  mei  mentionem  fa- 
ciat,  in  hos  namque  effeclus  me  extraneam  conflituo  &  pro  tali  haberi  & 
reputari  debeo,  atque  ut  tali  nullusmihi  fupereiTe  débet  regrefTus  obloquen- 
di  aut  movendi  quamlibet  querelam,  licet  hsereditas  à  fua  Majeftate  relin- 
quenda  opulentiffimafit,  tantique  pretii  &  momenti,  ut  ex  ipfa  mihi  tan- 
quam  uni  ex  illius  liberis  praefentibus  aut  futuris  major  diclis  quingentis 
millibus  aureorum  fumma  competere  poITet  ,  quocunque  tandem  exceflus 
pertingat.     Etiamfi  verô  cafus  contingeret   (quod  DKUS  prohibeat)  ut 
tempore  mords  illius  ego  filia  ejus  unica  fuperelTem  ,  fratribus  nimirum 
meis  aliifque  ipfius  legitimis  defcendentibus  praedefunélis ,  quô  nullo  ca- 
fu,  nulloque  émergente  fucceflu  peti  aut  prsetendi  pro  me  meove  nomine 

aut 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  611 

aut  ex  jure  mihi  compétente  pofîît  a!ia  major  portio  légitima;  ex  bonis  Affaire 
&  haereditate  Régis  Domini  mei,  polliceor  nullo  tempore  nullaque  ratio-  t;))N-  D& 
ne  fub  quocunque  prstextu  me  confenfuram  aut  permiffuram  effe  ,  ut  aga- 
tur.  contra  hanc  meam  renuntiationem  &  abdicationem  meorum  jurium, 
actionutn  aut  prar.enfionum,  unaque  renuntio  omnibus  &  quibuslibet  re- 
mediis  ordinariis  &  exiraordinariis ,  quse  fuppetunt  aut  fuppetere  mihi 
poiTent  ex  jure  communi  &  legibus  horum  regnorum  ,  aut  ex  ipeciali  pri- 
vilegio,  pracfertim  reftitutioni  in  integrum  ob  defeétum  setatis ,  aut  liseiid- 
nem  enormem  vel  enormifiïmam  ,  aut  quôd  dos  dicatur  caufa  efTe  hujus 
contra&us,  aut  propter  incertkudinem  ejus  ,  cui  renuntio  ,  adeô  ut  nul- 
lum  diétorum  remediorum  nullusque  recenfitorum  regreikmm  mihi  fuffra- 
getur  aut  fuffragari  queat  in  judicio  &  contentione  juridica  ,  neque  pro- 
pter illa  ego  meique  liberi  &  haeredes  audiri  adraittive  poffimus  ,  nobisque 
aditus  negetur  &  prœcludatur  ea  proponendi  &  deducendi  judicialiter  aut 
extrajudicialiter,  per  viam  gravaminis  vel  recurfus,  feu  implorationis  aut 
fimplicis  querelee,  fed  femper  &  omni  tempore  obfervetur  &  compleatur  , 
quod  relatis  articulis  difpofitum  elt,  quodque  omni  tempore  cuftoditum , 
impletum,&  inviolabiliter  obfervatum  iri per  hune  a6lum  confirmations  <Sc 
approbationis  promifi  &  promitto  fide  meâ  &  verbo  regio,  fub  hypotheca 
omnium  meorum  bonorum  &  redituum  prsefentium  &  futurorum,  omnem 
quoque  poteltatem  concedo  Conlilio  fuse  Majeitatis  Catholicse  Dominisque 
Regibus  ipfius  fuccelTuribus  &  perfonis,  quibus  executionem  hujus  A£tus 
injunxerint,  ut  iitum  obfervari  faciant  &  executioni  mandari.  Ad  majo- 
rent validitatem  juro  infuper  per  fancla  Evangelia  contenta  MifTaii  hoc  , 
quod  dexterà  mea  contingo,  quod  omni  tempore  &  quantum  à  me  depen- 
dere  poterit,  hsec  obfervabo  &  implebo ,  neque  dicam  aut  allegabo,  me 
ad  ifta  facienda  &  promittenda  induclam,  iliectam,  aut  perfuafam  fuifle 
per  refpeclum  aut  venerationem  Régis  Domini  mei,  qui  me  habuit  &  ad» 
hue  habet  fub  fua  patriâ  poteilate,  declaro  potiùs,  quôd  fua  Majeflas  ea 
femper  libero  meo  arbitrio  &  voluntati  proprise  reliquerit  &  quôd  eâ  libé- 
ra Si.  nullatenus  fubjeétâ  ufa  fim  in  omni  eo  quod  concernit  hune  contrac- 
tum.  Promitto  porrô  me  nunquam  petituram  difpenfationem  feu  liberatio- 
nem  hujus  juramenti  à  noftro  Sancliffimo  Pâtre  &  Sanctà  Sede  Apoftolicâ, 
neque  ab  illius  Nuntio  autLegato  à  latere,  aut  aliâ  perfonâ,  quœ  potelta- 
tem aut  facultatem  habeat  illam  largiendi ,  &  û  eam  peti  contingeret,  me 
aut  alio  quovis  jubente  ,  vel  proprio  motu  concedi,  illâ  non  utar,  aut  ex 
illâ  utilitatem  capiam,  quamvis  ad  id  folum  tenderet,  ut  jure  contendere 
pofTem  non  ta£tâ  aut  imperitâ  virtute  &  fubftantià  diélorum  articuîorum 
matrimonialium  hujusve  mei  a6lus ,  quo  illi  confirmantur  ,  etfi  quibuslibet 
amplifîimis  claufuiis  derogatoriis  hujus  juramenti  muniretur.  In  contra- 
rium  quoties  mihi  concederetur  talis  difpenfatio,  femel  aut  fsepius,  toties 
tôt  alia  nova  juramenta  pradto,  ut  femper  unum  fuperfit  &  integrum  ma- 
neat  fuper  &  poil  diclas  difpeniationes  :  fub  eodem  Sacramento  etiam  de- 
claro &  recipio  me  non  edidiffe  aut  edituram  efTe  aîiquam  proteiïationem 
aut  contradictionem  publiée  aut  privatim  contra  hanc  meam  promilTionem 

&  cb- 


Pt. 


612.    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  &  obligationem ,  ad  eam  labefa&andam  ejusve  robur  imminuendum  ,  &.fî 
gen.  de  '1(\  facerem  etiam  jurata,  quôd  raïhi  nuliatenus  fuffragari  aut  quàcunque  ra- 
L'Ejili°  tione  prodefle  poilit.  Promkto  denique  &  recipio ,  me  flatim  atque  ad 
Regem  Chriftianilîimum  accefiero  ,  edituram  juxta  di6los  articulos  unâ 
cum  Majeilate  fuâ  alium  aflum  fimilem  munitum  omnibus  claufulis  ,  jura- 
mentis  &  obligationibus  neceffariis  ,  inferendo  &  ratum  habendo  hune, 
qui  fa&us  eit  in  hâc  civitate  Fonds  rapieii,  ubi  nunc  confiftit  Rex  Domi- 
nas meus  cum  fuâ  Aulà  &  Falacio,  fecunda  die  Menfis  junii  Anni  hujus 
1660.  prœfente  Rege  Domino  noftro.  Qui  continuando  A£tum  recitatum 
dicit,  quôd  Majeftas  fua  Catholica  iuppleat  authoritate  fuâ  Regiâ  &  velit 
pro  fuppletis  haberi  omnes  defe&us  &  omiiîiones  facta  aut  juris,  fubilan- 
tirc  aut  qualitatis ,  ftyli  aut  confuetudinis,  quse  admiflae  elfe  aut  dici  poflent 
in  edendo  aut  formando  hoc  a£lu  renuntiationis  feu  abdicationis  legitima- 
rum  &  futurarum  fuccefiîonum  faér.22  &  pracltitae  à  Sereniflima  Infante  def- 
ponfa  Regina  Francise,  filia  illius  Charilïima  &  Dileétiiîima,  quôdque  ple- 
nâ  &  abfolutâ  poteftate  ut  Rex  in  temporalibus  fuperiorem  non  agnofeens, 
renuntiationem  iftam  feu  abdicationem  confirmet  &  comprobet  ,  confir- 
maverit  &  approbaverit,  cum  abrogatione  valiturà  hâc  vice  omnium  le- 
gum ,  ordinationum,  ufuum,  &  confuetudinum,  fi  quas  contrariée  fuerint, 
quasve  impedire  poffent  illius  effeélum  &  executionem  ,  mihi  in  eviden- 
tiorem  fecuritatem  mandans,  ut  ifthœc  Sigillo  Regio  communirem  ,  tefti- 
bus  ad  id  vocatis  &  requifitis  Domno  Ludovico  Mendefio  de  Haro,  Mar- 
chione  del  Carpio ,  Comité  Duce  de  Olivares ,  Domno  Ramiro  Nuîles  de 
Guzman  Duce  Medinae  Turrium ,  Domno  Gafpare  de  Haro  Marchione  de 
Eliche  ,  Domno  Joanne  Dominico  de  Guzman  Comité  de  Monterey, 
Domno  Didaco  de  Arragon ,  Duce  Terra;  nova? ,  Domno  GillefiO  Ramo- 
ne de  Moncada  Marchione  Aytonae,  Domno  Petro  de  Portocarrero  Co- 
mité Medeliinae,  Domno  Petro  Colon  de  Portugallia  Duce  de  Veraguas, 
Domno  Antonio  de  Peralta  Hurtado  de  Mendoza ,  Marchione  de  xMon- 
dejar,  Domno  Alphonfo  Perez  de  Vivero  Comité  de  Fuenfaldagna  Con- 
filiario  Status,  Domno  Joanne  de  Caravajal  &  Sandi  Confiliario  Camerae, 
Domno  Didaco  de  Tejada  Epifcopo  Pampelunse  ,  pluribusque  aliis  Do- 
minis,  Nobilibus,  &Equitibus,  qui  praefentes  fuerunt. 


EGO  REX.    MARIA  THERESIA. 

Ego  Domnus  Ferdinandus  de  Fonfeca  Ruiz  de  Contreras  Marchio  La- 
pilli, Eques  Ordinis  S.  Jacobi,  fax  Majeftatis  Catholicx  Confiliarius  Bel- 
li ,  Indiarum  &  Camerœ  Indicae,  Secretarius  Status  &  Expéditions  univer- 
falis ,  &  Notarius  in  illius  Regnis  &  Dominiis,  qui  praefens  interfui  Juramen- 
to,  Aétui,  &  reliquis  fupra  contenus ,  ea  atteftor  fidemque  facio  ,  quôd 
dicli  Articuli  2..  &  4.  Paétorum  connubialium,  prout  fupra  deferipti  repe- 
riuntur,  fideliter  deprompti  fini  ex  Exemplan-auihentico,  quôd  pênes  me 

eft, 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I. 


tfi$ 


e(l,  lllique  collati.    In  teftimonium  veritatis  ego  hifce  Sigillo  meo  Arma-  Amincs 
tis  nomen  meura  fubfcripfi. 

D.  Ferdinandus  de  Fonseca  Ruiz  de  Contreras. 


GEN.    HE 

l'Iiuko- 

IE. 


EXcîufionîs  poflerioris  verb  à  Rcgriis  £5?  Dominiis  eorumque  ceffionh  inflrumcn- 
îum  ,  quo  ftmul  ip/à  Maria  l'berefia  velut  ex  tabella  pro  tribunali  Je- 
dens  juraîa  judex  foknnijjïmam  fenîenîiam  profert  ,  quaincunque  contrariam 
ufurpationem  feu  molitionem  pro  illicitâ,  violentiâ,  invafione  injufla,  at- 
que  contra  rationem  naturalem  &  confcientiam  adeoque  pellîmè  cœptâ 
tyrannide  habendam ,  quoe  autem  ifthanc  depellere  aggrediatur,  vim  juf- 
tiam,licitam ,  &  permiiTam  effe,  eique  promovendse  cunclos  Ilifpaniae  feu 
Hifpanici  juris  fubditos  omnemoperamcommodaredebere ,  hifce puris  ,/impli- 
cibuSy  &  à  nullà  conditione  doits  aut  aliâ  quâcunqae  fufpenfis  verbis  concept um  fuit  : 

Domna  Maria  Therefia  Infans  Hifpaniarum,  &  DEI  gratiâ  futura  Regi- 
na  Francise ,  filia  primogenita  Sereniffimi,  Excellentiffimi ,  ac  Potentiiïïmi 
Principis,  Domni  Philippi  Quarti,  eâdem  Divinâ  favente  clementià  Régis 
Catholici  Hifpaniarum ,  Domini  mei,  quem  DEUS  confervet  &  feliciflimè 
profperet,  &  Sereniflimse ,  Excellentiflimae,  atque  PotentilTimae  Principis 
Domnas  Ifabellae  Reginœ  Catholicœ ,  Matris  &  Dominas  meae  gloriofre  me- 
jnoriae,  qux  in  cœlis  agit,  per  expofitionem  &  publicationem  Infîrumenti 
hujus,  Actusque  approbationis ,  confirmationis ,  ac  ratihabitionis,  &  quae 
ulterius  illo  continentur ,  que  eorum  perpétua  memoria  vigeat  ,  notum  & 
manifeftum  facio  omnibus  Regibus  ,  Principibus  ,  Potentatibus ,  Rébus- 
publicis ,  Communitatibus ,  &  Hominibus  privatis  ,  qui  funt  aut  fecuturis 
remporibus  erunt  ,  cum  Serenifîimus,  Excellentiflimus,  ac  Potentiiïîmus 
Princeps  Ludovicus  Decimus  quartus,  Rex  Francise  Chriilianifilmus,  Con- 
fobrinus  meus ,  Ipfiusque  nomine  &  mandato  fpeciali  Marefchallus  Dux 
Grammontius ,  expetiiifet  à  Rege  Catholico  Domino  meo  fponfalia  mea  & 
matrimonium  cum  diclo  Rege  Chriftianiflïmo ,  fuaque  Majeitas  Catholica 
juftè  seftimans  defiderium  iftud  &  propofitionem  ,  débité  etiam  attendens 
decorem,  sequalitatem,  &  utilitatem  publicam  huic  matrimonto  connexam 
illud  concefliffet  eique  aflènfa  effet,  falvâ,  quae  prsecedere  debeat,  difpen- 
fatione  Sanétitatis  fuse  ob  cognationem  &  confanguinitatem  ,  quae  mihi 
.cum  Rege  Chriftianiflîmo  meo  cognato  intercedit,  deinceps  poft  concef- 
fionem  &  affenfionem  hanc,  auctoritate  &  juffu  fpeciali  duarum  Majefta- 
tum  Catholicae  &  Chriftianiffim.T  conclufum  &  fignatum  effe  noftrum  Tra- 
clatum  matrimonialem  feptimo  Novembris  Anni  praeteriti  16 f 9.  in  Infula 
difla  Phafianorum  fit  a  in  flumineBidaffoa  Provincial  Guipufcose  in  confinio 
iilorum  Regnorum  cum  RegnoFranciae,  illiusque  Traclatûs  Articulis  f.&6. 
praeviâ  perpenfione  ac  maturâ  deliberatione,  communi  confenfu  eâdem- 
que  yoluntate  ceu  maxime  conveniens  decretum  elfe  &  flatutum  ,  uc 
ego  liberique  &  defcendentes  ,  quos  DEUS  mihi  ex  hoc  matrimonio 
largiturus  eïTet,  fimus  &  maneamus  inhabiles,  incapaces,  &  omnimodo 
abfoïutèque  excluQ  à  jure  &  fpe  fuccedendi  in,  aliquo  Regnorum  ,  Sta- 

îome  XL  LUI  Uium 


nfumqut 
ftatuum 
feu  pro* 
vincia- 
rum  abf- 
queullâ 
mentio- 
ne  dotis 
ah'ave 
conditio- 
ne, exclu- 
faque 
omni 
Pontifî- 
ciâvel  a- 
liâ  abfo- 
lutione 
feu  refti- 
tutionc. 


GEN.    DE 

l'Euro- 
pe 


tfi4    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  tuum  &  Dominiorum  ,  quibus  nunc  conitat  Corona  hxc  &  Monarchia 
Hifpania? ,  quseque  illis  five  à  fua  Majeftate  Car.holicâ  ,  five  pofl  illius 
longam  &  felicem  vitam  à  fuccedeniibus  illi  Regibus  "aggegrabuntur. 
-  Quamvis  verô  Paétio  illhaec  convemionalis  inita  fuerit  inter  Principes 
&  Reges  fupremos,  qui  in  temporalibus  fuperiorem  non  agnofcunt ,  ad 
promovendam  caufam  publicam  utriusque  Regni  juxta  defiderium  &  vo- 
ta communia  fubjectorum  ,  vafallorum,  &  indigenarum ,  qui  volunt ,  ut 
eadem  vim  habeat  &  vigorem  legis  &  fanélionis  pragmaticas  ,  &  tan- 
quam  talis  recipiatur  &  obfervetur  ,  indeque  confequens  fit  ,  ad  illius 
firmitatem  ullà  alià  folennitate  opus  non  elle  ;  placuit  nihilominus  Ma- 
jeilatibus  fuis,  ut  fi  approbatio  mea  aliquâ  ratione  utilis  elTe  poffet  ,  il- 
!am  etiam  edere  haberem  flatim  ac  contigeret ,  promiffum  matrimonium 
celebrari  &  contrahi  per  verba  praefentia ,  atque  approbatio  iilhasc 
muniretur  omnibus  claufulis  &  folennitatibus  necefTariis ,  prout  flipula- 
tum  &  declaratum  efl  per  inilrumentum  decem  Articulos  complexum, 
ex  cujus  exemplari  authentico  deprompti  Articuli  $.  &  6.  tenons  funt 
fequentis, 

Videantur  fupra  pag.  6o|.  &  fiquentibus, 

Cùmque  pofl  Traftatum  fupra  relatum  Pater  nofter  fanâiflimus  Aie- 

xander  VII.  difpenfaverit  ratione  graduum  cognationis,  quae  inter  did- 

tum  Regem  ChriftianifFimum  &  me  intercedit,  approbaverit  etiam  auto- 

,,/itate  fua  &  Apoilolicà  benedictione  noflrum  Tra<5tatum  matrimonialem 

iliiufque  Articulos ,  atque  cafus  tempusque  extiterit  celebrandi  &  com- 

plendi  DEO  fortunante  Matrimonium  ad  illius,  ut  fperare  fas  efl,  glo- 

riarn  ac  honorem,  exaltationemque  fanclae  fidei  &  tranquillitatem  Reipu- 

blicac  Chriflianae;  adeoque  etiam  Cafus  &  tempus  advenerit  implendi  an- 

te  meum  Matrimonium,  quatenus  me  concernunt,  contenta  xirticulis  f. 

&  6.  infertis  huic  Inftrumento,  maxime  cum  œtatem  jam  agam  majorem 

viginti  annis ,  D  EUSque  pro  fuâ  benignitate  me  dotaverit  judicio  &  ca- 

pacitate  intelligendi  &  comprehendendi  fubflantiarn  &  •effeéfcum  diclo- 

rum  Articulorum,  quorum  probe  gnawfum,  iis  nempe  fœpe  confideratis 

perfpe&âque  illorum  decentià  fpatio  fex  Menfium ,  qui  erfluxerunt  ab  il- 

lorum  conventione  &  publicatione \  fufficiat  quin  etiam  ad  illorum  jùflifl- 

cationem  &  ut  illis  à  me  débité  fatisfiat,  fcire  quod  à  Rege  Domino  meo 

examinati  &  conventi  fuerkit,  qui  optât  &  promovet  vota  mea,  meam- 

que  utilitatem  tanto  cum  affe&u.  &  follicitudine,  fimul  animum  intendens 

egregio  publico  &  communi  Regnorum  à  DEO  ipti  commifibrum ,  quo- 

■  rum  œquè  ac  Coronce  Francise  intereft,  ne  Amplkudo  ac  Majeftas,  quam 

cum  tantâ  felicitate  &  Regum  fuorum  Catholicorum  &  Chfiltiàniffimorum 

gloria  in  fe  confervant  poil  tôt  annorum  curricuîum,  diminuatur  aut  con- 

cidat,  uti  neceffario  imminuenda  foret  &  coltapfura,  fi  per  Matrimonium 

hocce  illiufve  caufa  unirentur  &  conjungerentiir  in  aliquo  liberorùm  & 

defçend'enùum  ,  <jui  eventus  allaturias  eflet -fubditis  &  vafallis  mœrorem 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I. 


6i 


&  affli&ionem ,  quam  quivis  conflderare  queat  &  ex  quâ  metui  debent 
refultatura  damna  &  incommoda ,  quae  futura  faciliûs  praevideri  quam  ena- 
ta  corrigi  poflint,  quaeque  adeo  remediis  ne  eveniant,  praeveniri  aequum 
fueric,  ne  matrimonium  hoc  caufa  lit  efTectuum  adverfantium  fpei  ex  eo- 
dem  conceprae,  prseterquam  quod  per  iitud  exemplum  illiafque  imitatione 
expeditiora  reddentur   conjugia  reciproca  incer   meos  Regifque  Domini 
mei  liberos,  quod  ipfum  me  praccipuè  voluptate  afficit  &  confolatur,  ceu 
médium  &  ratio  vinculum  fanguinis  &  confanguinitatis  faepiùs  ftringendi 
&  renovandi  fortiufque  folidandi  ac  firmandi  fœdera  &  amicitiam    mu- 
tuam  ,  quse  tam  felicibus  aufpiciis  nexa  &  contracta  funt  intef  ambo  hrec 
Régna  atque  impolterum  ad   Divinam  gloriam  inter  illa  illorumque  Reges 
Catholicos  &  Chriftianiflimos  continuabuniur  &  gloriosè  permanebunt  : 
quod  cùm  publico  bono  cedat,  etiam  ut  taie  merito  praeponderare  débet 
utilitati  meae  liberorumque  &  defcendentium  meorum  particulari ,  in  prae- 
fenti  ltatu  haud  magni  aeftimandae  utpotè  remotifltmae  ,  prout  cuivis  co~ 
gnofcere  eft.     Accedit  majori  meae  fatisfa&ioni  renuntiationifque  hujus  & 
a&us  ampliori  juftificationi,  quôd  exemplum  fequar  renuntiationis   propter 
&  ante  matrimonium  peracïae  à  Sereniffima,  Excellentiffima,  &  Potentif- 
fima  Principe  Domna  Anna  Hifpaniarum  Infante ,  hodierna  Regina  Fran- 
ciae  Chriftianiffima ,  Amita  &  Domina  mea  amatiflîma  &  plurimùm  colen- 
da  :   Quodque  praeter  confiderationes  &  caufas  publicas  fupra  recenfitas 
illamque  confervandoc  &  firmandae  pacis  inter  ambas  Coronas  (  quae  etiam 
concurrunt  &  allegantur  in  diéto  Traclatu  &  Renuntiatione  )  pro  prae- 
fenti  rerum  conditione  locum  fimiliter  habuerit  &  confiderata  fuerit  ve- 
lue Princeps  maximaque  caufa  publica  renuntiationis  conventrc  in  Trafta- 
tu  meo  matrimoniali,  quôd  paclio  matrimonii  mei  notoriè  effet  médium 
&  caufa  pr*ecipua  pacis,  quà   bellum  finiretur,  quod  per  viginti  quinque 
annos  non  folùm  ambas  inter  Coronas  Catholicam  &  Chriftianifilmam  ge- 
flum  fuerat,  fed  etiam  fœderibus,  aliifque  modis  maximas  Chriftiani  or- 
bis  Potentias  involverat ,  procurandique  boni  univerfalis  &  quod  pro  Re- 
ligione  Catholica  faciat  &  ad  illam  pertineat,  fummi  ;   quorum  immenfo 
detrimento  bellum  ceflerat  ,    nec  aliter  remedium  afferri  poterat,  quam 
per  pacem  per  &  ob  matrimonium  iitud  initam,  in  hoc  vero  nunquam 
condefeenfum  aut  à  Rege  Domino  confenfum  fuiffet  abfque  renuntiatione 
con venta,  prout  confideratum  fuit  Articulo  i.  Pa&ionis  connubialis,  & 
Articulo  33.  Pacis  inter  ambas  Coronas  initae  ,    quae  propter  hanc  confide- 
rationem  repetit  Tractatum  particularem  fa&um  fuper  conditionibus  met 
matrimonii,  qui  Traftatus  uterque  eodem  die  fubfcriptus  &  fignatus  fuit, 
expreffa  in  di6bo  Articulo  33.  declaratione ,  quod  conventio  matrimonia- 
lis  licet  feparata  eandem  cum  Traclatu  Pacis  virtutem  &  vim.habere  de- 
beat,  cum  fit  praecipua  ejus  pars  fecuritatifque  &  durationis  nobiliffima 
arrha.    Ideoque  proprio  motu  liberâque  &  fpontaneâ  ac  plenâ  voluntate, 
atque  certô  feiens  &  intelligens  Actûs  quem  facio,  &  quid  operetur  & 
operari  queat  confenfus  meus,  approbo,  confirmo,  &  ratum  habeo  ra* 
rione  &  forma  ,  quâ  optimè  poiîim  &  debeo  diclam  conventionem  fe- 

LUI  z.  cun- 


Affaires 

Of.N.    DK 

i/Euuo- 

PE. 


PE. 


616    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aftaires  cundum  modum  &  tenorem  amplius  expreflum  di&o  Artiçulo  quinto,  & 
c en.  de    q  neceffarium  vifum  fuerit  &  conveniens,  facultatem  concedo  fufficien- 
tem  &  iilimitatam  Régi  Domino  meo  &  Régi  Chriltianiffimo  ut  denuô  id 
decernere  &  mutuà  conventione  firmare  rurfum  queant.     Virtute  etiam 
&  in  implementum  dicli  Articuli  me  declaro  &  teneo  exclu fam  &  femo- 
tam  ,  meofque  liberos  Ck.  defcendentes  ex  hoc  matrimonio  inhabiles  & 
exclufos  abiblutè  &  illimitatè  abfque  differentiâ  aut  diitinctione  perfona- 
rum,  graduum,  fexûs,  &temporis,  ab  omni  fucceflîone  jureque  &  fpe 
fuccedendi  in  Régna,  Status,  Provinçias,  Dominia,  &  ioca  hujus  Coro- 
nx  Hifpanicœ  dicto  Artiçulo  enunciata  &  declarata  ,   volens  &  confen- 
tiens  pro  me  &  diclis  meis  defcendentibus,  ut  jam  nunc  ficuc  tune  cefîa 
&  tranflata  reputentur  in  iilum,  qui  gradu  proximus  reperietur  (  quando- 
quidem  ego  &  il li  exclu!] ,  inhabiles ,  &  incapaces  fumus  )  &  immediatus 
Régi,  per  &  propter  cujus  mortem  vacabit   conilituique  &  deferri  de- 
beat  fuccefiïo  diftorum  Regnorum,  ut  ea»  obtineat  &  polîideat,  ceu  le- 
gitimus  &  verus  poiTeflbr,  perinde  ac  fi  ego  &  defcendentes  mei  nati 
non  fuiflêmus  aut  luce  non  frueremur,  nam  pro  talibus  haberi  &  cenferi 
debemus ,  adeô  ut  nec  in  meâ  nec  in  illorum  perfonà  confiderari  aut  at- 
tendi  polïit  reprcefentatio  activa  aut  pafliva,  principium  aut  continuatio 
lineae  effe&ivae  aut  contentivae,  fubflantiae,  fanguinis   aut  qualitatis,  nec 
fupputari  gradus  juxta  defeendendi  rationem  five  à  Rege  Domino  meo, 
five  à  gloriofis  Regibus  illius  decefforibus ,  nec  ullâ  aliâ  ratione  fubintrari 
in  fucceflionis  ordinem  aut  occupari  gradus  proximitatis  &  excludi  per- 
ibna,  quae  reperietur,  uti  dictum  eft,  gradu  propinqua.     Promitto  quo- 
que  fideque  &  verbo  Regio  recipio  in  omnibus ,  qure  à  me  meifque  libe- 
ris  &  defcendentibus  dépendent ,  femper  &  omni  tempore  curatum  iri, 
ut  obfervatio  &  impletio  ditti  Articuli  &  hujus  mei  Aélùs,  quo  illum  ap- 
probo  &    confirmo  ,   inviolata  permaneat ,  nec  permittatur  aut  afîenfus 
prsebeatur,  ut  illi  contraveniatur,  directe  aut  indireétè,  in  toto  aut  par- 
te, me  abdicans  &  cedens  omnibus  &  fingulis  remediis,  notis  aut  inco- 
gnitis,  ordinariis  &  extraordinariis,  quœ  competere  pofTent  jure  commu- 
ni  aut  privilegio  fpeciali,  mihi  aut  dictas  meis  liberis  &  defcendentibus, 
eo  fine  ut  aliquid  proferre,  dicere  aut  allegare  poiTimus,  contra  id,  quod 
fuperiùs  conflitutum  eit ,  omnibus  iiquidem  renuntio ,  fpeciatim  reititu- 
tioni  in  integrum  ob  ignorantiam  feu  inconfiderantiam  minoris  mcas  seta- 
tis,  aut  lrcfionem  evidentem,  enormem  vel  enormilTimam ,  qu?e  praeten- 
di  poflet  intervenhTe  in  abdicatione  &  renuntiatione  juris  fuccedendi  ullo 
tempore  tôt  &  tam  vaftis  Regnis  ,  Statibus ,  &  Dominiis,  voloque  ut 
nullum  dictorum  remediorum,  nec  aliud  ullum  cujufcunque  nominis,  ca- 
racteris,  ponderis,  &  qualitatis  nobis  proficiat  aut  prodeffe  poffit  in  judi- 
cio  aut  extra  illud,  fique  ea  in  judicium  deducamus ,  aut  deducere  fata- 
gamus,  ut  nobis  omnis  audientia  negetur  &  prsecludatur  :  un  facto  &  fub 
colore  aliquo  malè  praetenfo,  juflitiee  diffifi  (  quandoquidem  femper  agnof- 
cere  &  fateri  debemus,  quôd  nulla  nobis  in  fuccelîione  dictorum  Regno- 
rujn  fuifragetur  )  vi  armorum  ea  occupare  velimus  bellum  gerendo  auc 

mo- 


l'Euro- 
pk. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.--DCÇ.    I.  617 

movendo  offenfivum,  ut  illud  jam  nunc  uti  tune  habeatur,  judicetur  &   Affaire 
deelaretur  illicitum,  injuflum ,  &  malè  cceptum,  fimulque  adeô  violentia,    G™-  DJ- 
invafio,  &  ufurpatio  tyrannica ,  fufeitata  contra  rationem  &  confeientiam  , 
&  in  contrarium  ut  judicetur  &  nominetur  vis  juita,  licita ,  &  permilla  il- 
la,  quam  inferri  aut  moveri  contigerit  pe'r  illum,  qui  fuccedere  habet, 
me  meifque  liberis  &  defeendentibus  exclufis ,  quem  omnes  fubditi  &  in- 
cola; recipere  debebunt  eique  uti  Régi  illorum  ck   Domino  legitimo  obe- 
dire  atque  Sacranientum  ci  fidelkatem  jurare  reque  ipsà  fervire.    Ad  Ac^ 
tum  hune  edendum  affirmo  &  profïteor  me  non  indu£Um  aut  perfuafam 
refpeétu  reverentiali  ,   quem  debeo  &  exhibeo-Regi  Domino  meo-,    uti 
Principi  tam  potenti  &  tanquam  patri,  qui  me  tantoperè  diligit,  quem- 
cme  viciffim  diligo  ,  quique  me  habet  &  habuit  fub  patrid  poteitate,  quo- 
niam  rêvera  in  omnibus,  qu»  peraguntur  &  peracla  funt.in  concludendo 
&  ad  efFeclum  deducendo  matrimonio  hoc ,  inque  ftabiliendo  Articulo  ex- 
clufionis  meae  meorumque  defeendentium  ,    omni  libertate  gavifa  fum, 
quam  defiderare  aut  optare  poiuerim,  dicendi  &  declarandi  meam  vo- 
luntatem,  abfque  ullo  ab  ipfo  aut  quâcunque  aliâ  perfonà  mihi  injecto  me- 
tu,  aut  ingeftis  minis,  ut  ad  aiiquid  faciendum  invita  permoverer  aut  co- 
gérer.    Ad  majorem  validitatem  &fecuritatem  dictorum  &  à  me  promif- 
ibrum,  juro  folenniter  per  &  fuper  fanc~ta  Evangelia  contenta  in  Miilali 
hoc,  quod  impofita  manu  dextra  tango,  quod  illa  obfervabo,  cuitodiam, 
&  implebo  in  omnibus  &  per  omnia,  quodque  nullam  difpenfationem  hu- 
jus juramenti  petam  à  noltro  fancliffimo  Pâtre,  nec   àlanclaSede  Apo- 
ilolica,  aut  ab  ipfius  Legato,  ullàve  dignitate,  quae  illam  concedendi  po- 
teflatem  haberet  ,    &  û  mihi  concederetur ,  me    ullave  univerfitate  aut 
perfonà  particulari  petente,  aut  motu  proprio  ,  licèf  ad  eum  finem  fo- 
lùm,  ut  judicium  adiré  polTem  illœsâ  lubftantiâ  diclorum  remediorum ,  & 
intégra  validitate  hujus  AéKis  &  Tra6latûs,  quem  per  hune  approbo,  il- 
lam non  recipiam,  nec  illâ  utar,  quin  contra,  quoties    talis  difpenfatio 
juramenti  mihi  concederetur,  aliud  nunc  facio  jnramentum  .poil  diipenfa- 
tionem  rurfus  valiturum,  ita  ut  femper  fit  &  maneat  juramentum(pp£t  & 
fuper  omnes  difpenfationes,  quœ  mihi  coricedi  valeant  aut  poterunt.  Sub 
eodem  juramento  dico  &  promuto,  me  non  feciffe  aut  fa6turam  eiïe  ul- 
lam  proteflationem  aut  contradiclionem  palam  aut  clam  ,  quee  impedire 
aut  imminuere  valeat  vim  contentorum  in  hoc  A6lu,  &  0  feçero ,  etiam 
jurata,  illam  non  valituram  nec  ulium  robur  habituram  aut  effeclum  for- 
tituram  efTe.     Supplico  pariter  San6litati  fuaç,  cùm  matrimonium  hoc  ini- 
tum  iiliusque  traclatus  conventus  &  conclufus  fuerit  fan&â  &  Apoilolica 
ipfius  approbatione  accedente,  efFeclui  etiam  mandari  &  celebrari  Sancti- 
tate  fua  benedicente  debeat,  ut  authoritate  Apoltolicœ  fua?  confirmationis 
vim  quoque  feu  robur  augere  dignetur  vinculi  &  religionis  hujus  mei  Sa- 
cramenti.     Promitto   porro   &   memet   obligo    fecundum  tenorem   &  in 
implementum  'fupradicli   Articula    6.   itatim   atque  pervenero   in  lucum, 
ubi  Rex  Chriihaniiïimus  me  recepturus  elt,  fa&uram  me  &  fieri  cura- 
turam  au&ore   ac  niterventore   Rege   Chriftianiirimo   &   unâ   cum  illo 

Lill  3  aliud 


PE. 


£ià    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Ajtajrks  aliud  Fimile  inftrumentum  omnibus  claufulis  ,  juramentis ,  &  condition!- 
grn.  pe  bus  neceflariis  feu  utilibus  munitum ,  quo  confirmetur  &  ratum  habea- 
x/Euao-  tur  jftud  ipfum  quod  faétum  &  expeditum  efl  in  urbe  hac  Fonds  Ra- 
pidi  ,  ubi,  nunc  agit  Rex  Catholicus  Dominus  meus  cum  illius  aula  & 
palatio  fecunda  die  Menfis"  junii  Anno  fupra  Milleflmum  Sexcentefi- 
mum  Sexagefimo,  prsefente  Rege  Domino  noltro. 

Ad  majorem'  folennitatem ,  auéloritatem ,  &  validitatem  Aclûs  hujus  Ma- 
jeftas  fua  Càtholiea  in  implementum  Ardculorum  f.  &  6.  fupra  infertorum 
dixit,  quôd  quatenus  concernant  caufam  publicam  &  commune  bonum 
faorum  Regnorum,  fubditorum  ,  &  vafallorum  confirmet  &  confirmaverit 
actuna  hune  ,  juxta  continentiam  &  formam  ,  qua  fecit  &  expediri  juflit 
Sereniffima  Infans  Domna  Maria  Therefia  Regina  defponfa  &  futura  Fran- 
cise j  chariffima  illius  &  amatiffima  filia  :  quôdque  proprio  motu  ,  certa 
feientia,  pleria  &  abfoluta  poteftate  ceu  Rex  &  Dominus,  qui  in  tempo- 
ralibus  fuperiorem  non  habet ,  fuppleat  authoritate  fua  Regia  &  velit  pro 
fuppletis  haberi  omnes  defe&us  feu  omifllones  facti  aut  juris,  fubflantia;  aut 
qualitatis;  flyli  aut  confuetudinis ,  quse  in  hoc  adtu  contingere  potuerint: 
quôd  inprimis  &  fpeciatim  confirmet  &  approbet  dictum  Articulum  f .  Re- 
giarumque  fuarum  Majeftatum  Catholicae  &  Chriftianiihmac  contentam  illo 
conventionem ,  quôdque  velit  &  jubeat,  ut  robur  &  vigorem  hàbeat  le- 
gis  &  fanclionis  pragmaticae,  &  ut  talis  recipiatur  ,  euftodiatur,  obferve- 
tur,  &  execudoni  mandetur  in  omnibus  fuis  Regnis,  Statibus,  &  Dominiis, 
non  attentis  legibus,  ordinationibus,  ufibus,  &  confuetudinibus  quae  fue- 
rint  aut  elfe  poilint  contraria?  ,  quibus  deroget  &  hâc  vice  pro  abrogads 
haberi  velit,  quamvis  ejufmodi  iint  &  talis  qualkatis,  ut  ad  illarum  dero- 
gatitlnem  exprefla  magis  '&  fpecialior  mentio  requireretur  aut  neceffaria 
effet  :  jufîît  denique  Sigillo  fuo  Regio  ha;c  muniri  inque  Confilio  fuo  Ca- 
merae  aliifque' juxta  morem  confuetum  regeri  atque  publicarf.  Horum 
omnium  telles  fuerunt  ad  id  vocati  &  requifiti  Domnus  Ludovicus  Men- 
dez  de  Haro  Cornes  Dux  de  Olivarez,  Domnus  Ramirus  Nunnes  de  Guz- 
man  j  ,Dux  Medinœ  Turrium,  Domnus  Cafparus  de  Haro,  Marchio  de 
Eliehe,  Domnus  Joannes  Dominicus  de  Guzman  ,  Cornes  Montis  Regii, 
Domnus  Didacus  ab  Arragoniâ,  Dux  Terne  novae,  Domnus  Gilles Ramon 
de  Moncada,  Marchio  Aytonae ,  Domnus  Petrus  Porto-Carero ,  Cornes 
Medellinse ,  Domnus  Petrus  Colon  de  Portugallia ,  Dux  de  Veraguas, 
Domnus  Antonius  de  Peralta,  Hurtado  de  Mendoza ,  Marchio  de  Mon- 
dejar,  Domnus  Aiphonfus  Perezius  de  Vivero ,  Cornes  de  Fuenfaldagna, 
Confiliarius  ftatus  ;  Domnus  Joannes  de  Caravajal  &  Sandi,  Confiliarius 
Camene,  Domnus  DidâCus  de  Tejada  Epifcopus  Pampelunae  ,  plurefque 
alii  proceres,  Equités,  Nobiles  &  Domeftici  fuae  Majeftatis  ,  qui  praefen- 


tes  fuerunt. 


■ 


EGO  REX.  MARIA  THERESIA. 

Ego 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.PCC.  I.  6x? 

Ego  Domnus  Ferdinandus  Fonfeca  Ruiz  de  Contreras  ,  Marchio  La- 
pi!]^,  Eques  Ordinis  fan&i  Jacobi,  Confiliarius  Bellicus  Indiarum  &  Ca- 
méras Indicœ,  Secretarius  Status  atqueExpeditionis  univerfalis,  &Notarius 
in  illius  Regnis  &  Dominiis  ,  qui  prœfens  interfui  juramento  ,  aclui  ,  & 
reliquis  fupra  recitatis,  de  illis  fidem  facio  ,  teftorque  quôd  dicti  Articuli 
fupra  inferti  defcripti  fint  fideliter  &  collati  cum  lnflrumento  authentico , 
quod  pênes  me  eft.  In  teflimonium  veritatis  hifce  manu  meâ  fubfcriptis 
ilgillum  meum  appofui. 

D.  Ferdinandus  de  Fonseca  Ruis  de  Contreras. 

ADditum  fuit  uîterius  vinculum  per  Pacem  Pyrenaani)  citjus  Articulo  33. 
tejïc ,  non  folum  pnecipua  &  nobilijffima  pars.faiïa  ,  fed-.et'.am.  fvalidif- 
fimum  duratïonis  fundamenîum  habita  fuit-  tôt. a  ,  quanta  eft  ,  Conventio  ma- 
trimonialis  ejufque  objervatio ,  non  aliter  ac  fi  nulla  omijfa  vocuia  in  ipfi's  pa- 
cis  tabulis  exprejfa  fuiffet.  Ut  adeb  cuntla  ,  quœ  ad  firmandam  pacem  ab 
•utroque  Rege  &  in  utriusque  regnis  adhihi.ta  fucrunt.  adminicula  feu  fulcra 
conventioni  quoque  matrimoniale  novum  impertiijfe  robur  çamqye  vel  maxime 
fuftentaffe  &  fuffulfijfe  cenferi  debeant:  ipfa  etiam  abdicatio  ,cejj:.o  y&  tranftatio 
juris  cujufcunque  paUis  connubialibus  &  formulis  renuntiationu/d  contesta  per 
pacem  hanc  facla  feu-  repetit  a  intelligatur ,  ifë?  per  confequéns  hic  pariter  locum 
■habeant,  qua  fuperius  de  vi  pacis  ex  nâturali  &  genlium  pire  attulimt<$.  To- 
■tum  proinde  jîrticulum  unâ  cum  Claufulâ  finali  hue  trcimfh  ibère  haud  gr-%- 
■vje  erit: 

Àrtic.  33, 

Ouo  Pax  ift.a,  fraterhitas ,  &  bona  amicida  juxta  voturri  firmior,  dum- 
bilior,  &  indiffolubilior  maneat ,  conventum  &  ftabilitum  fuit  nomi^ 
ne  di6torum  Dominorum  Regum,  ut  fua  Majeftas  Chriftianiffima  uxorem 
ducat  Infantem  Domnam  Mariam  Therefam  filiam  majorem  fune  Majeftatis 
CatholicîE  ,  in  quem  finem  diéti  iMiniftri  Cornes  Dux  de  Olivarez  &  Car- 
dinalis  DuxMazarinus,  vï  mandati  fpecialis ,  quo  muniti  funt,  inierunt  ëc- 
'dem  die,  qui  &  huictraclatui  fubnotatus  eft,  aliumtra&atum  partieula- 
Tem  fuper  conditionibus  dicli  matrimonii  &  tempore  eelebrationis ,  prour 
illic  expreffum  eft,  qui  quidem  tra&atus  etfi.  feparatus  à  prœfenù  traclau 
pacis  fit",  ëjufdem  nihiîominùs-cum  hocroboris  &  vigoris  eft  tanquam 
ejufdem  .pars  principalior  illiufque  feeuritatis  &  duratïonis  pretiofuTims 
■ârrha; 

Ctafula  finalis  ex  Inftrumento -Gallîco  petila. 

.    ■ 
t  in  certiorem  fecuritatem  Traclatûs  hujus  Pacis  ,  omniuraque  m  ec 
contentorum-Capkum  &  Articiklorum  ,  publicabitur,  acceptabitur ,  & 

rege 


GEN.    DE 

l'Eu  ko- 

PE. 


VIT.  Pacc 
Pyrcnsa, 


E 

■ 


AfEAtRFS 
CEN.    DE 

l'Euro- 
pe. 


viii. 

Non  unâ 

Ordinum 

Hifpani- 

corum 

appro- 

batione. 


IX.  Re- 

jrisque 
Chriftia- 
jatiTimi 
^confenfu. 


6io    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

regeretur  idem,  in  Curiâ  Senatûs  Parifienfis  aliifque  Regni  Franciae  ,  ficut 
fimiiiter  publicabitur  ,  acceptabitur,  &.  regeretur  ta  m  in  Confilio  majori 
aliifque  Coniiliis ,  &  Camerà  Rationum  diéti  Domini  Régis  Cathoiici  Bel- 
gicis,  quàm  in  aliis  Confiliis  Coronarum  Calleliae  &  Aragoniae  eâ  prorfus 
forma  quse  in  Traétatu  Vervinenfl  Anni  15*98.  continetur,  ejufque  rei  do- 
cumenta mutuô  tradentur  intra  très  Menfes  à  publicatione  hujus  Tra&atûs 
numerandos. 

Quac  Capita  &  Articuli  fupra  expofiti  unâ  cum  omnibus  iis  quœ  fingulis 
continentur,  traclati  ,  convenu,  admilîi,  &  itipulati  fuerunt  inter  fupra- 
diftos  Plenipotentiarios  diclorum  Dominorum  Regum  Chriftianiflimorum 
&  Catholicorum  nomine  Majeftatum  fuarum  :  qui  PJenipotentiarii  virtute 
mandatorum,  quorum  apographa  huicTraétatui  fubneclentur,  promiferunt 
&  promktunt ,  fub  obligatione  omnium  &  finguiorum  bonorum  &  fta- 
tuum  ,  prsefentium  &  futurorum  ,  Regum  Dominorum  fuorum  ,  eos  à 
Majeftatibus  fuis  inviolabilker  obfervatum  &  impletum,  pureque  &  fim- 
pliciter  abf^ue  ullà  adjeétione  auc  immutatione  ratihabitum  literafque  rati- 
liabkionis  authenticas  &  flgnatas,quibus  hic  Traclatus  verbotenus  infertus 
fit,  intra  30.  dies  à  fubfcriptione  hujus Traétatûs  computandas  mutuô  exhi- 
bitum  iri.  Pra^cerea'  promiferunt  &  promktunt  difti  Plenipotentiârii  nomi- 
nibus  expreflls  Regem  Chriftianiiîimum  poft  commutatas  ratihabitionum 
formulas,  quàm  citiffimè  id  fieri  potuerit,  prsefente  aut  prœfentibus  per- 
fonâ  vel  perfonis  à  DominoRege  Catholico  deputandis  juraturum  ta6lis  Cruce, 
fanftisque  Evangeliis,  Canone  MilTae,  &  fub  honore  fuo,  quôd  obfervatu- 
rus  &  impleturus  fit  plenè,  reapfe,  &  bonâ  fide,  omnia  contenta  articu- 
îis  hujus  tra&atûs.  Idem  quoque  fiet  quamprimùm  id  fieri  poterit  à  Do- 
mino Rege  Catholico,  prœfente  vel  prœfentibus  perfonâ  vel  perfonis,  quas 
diftus  Dominus  Rex  Chriftianiffimus  deputare  voluerit.  In  quarum  rerum 
-teftimonium  di£bi  Plenipotentiârii  huic  Tra&atui  nominafua  fubfcripferunt, 
figillaque  fua  apponi  fecerunt  in  Infula  à  Phafianis  appellata  7.  Novem- 
bris  165p. 

Cardinalis  Mazarini.  D.  Ludoviçus  Mendez  de  Haro. 
1 

SUfficere*  quidem  poterat  ad  firmandam  etiam  Ordinum  Hifpanicorum  ajfenfu 
Mari<sTberef;œ  Renuntiationem  *  qubd  Pax  Pvrenœa^ac  Conventio  matrimo- 
niales tôt  magnat  ihts  alihque -  prafentibus  confeclte  publiceque  denuntiatœ  ^f  in 
Atla  Confihorum  relatœ  fucrini  :  adhibitanihilominus  in  Comitiis  Regni  Anno 
•I 662,,  (s deinceps  habitis  -ad  id  ampliùs\&  évident  tus  prœflandum  ea  quoque  fpc- 
cialior  £5?  expr.cjjïor  folennitas  tft ,  quam  fupra  recit-ayimus,  cum  de  Rcnunciatio- 
ne  Anna  agcremus ,  quamque  adeb  evitandœ  nimiœ  prolixitatii  ergb  'hue  rurfum 
ingerere  fuperfedemus ,  digitum  illuc  intendijf/e  contenu. 

Tempus  cjl ,  ut  de  ipfiusmet  Régis  ChriJlianiJJimi  Confenjione  £5?  de  Ratihabi- 
tione  agamus,  qu'as  non  dtfuijfe  jam.  imuimus ,  tametfi  ad  [oïid'amdos  immunis 
adhuc  ab  ejus  nexu  Infantis  Therefiœ  Aclus  plane  necejjariœ  non  fuerint.  Po- 
tuit  namque  ante  connubium  init'um  ca  fola  commum  naturœ  i£!  gentium  jure 
ad  id  fe  adjiringeye  idque  libère  agere  ,    quod  fuc  cèdent  e   connubio   in  Domus 

paier» 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.         621 

patenta  commodum  patriœque  fecuritatem  &?  decus  cejfurum  ejfe  ,  atque  alias  Awaikm 
ante  fe  filias  Hifpanicas  familïœ  Gallica  inneclendas ,  probantibus  &  laudan-  °,^" 
tibus  utriusque  regni  Dicafieriis  &  populo  univerfo  ,  exteris  etiam  principibus       PK> 

congratuïantibus  feciffe  ,   olim  quoque  â   major ibus  fuis  defideratum  fuijje  & 

alibi  pajjim  frequentari  cognôrat.  Régis  Chriflianiffimi  ajfenfum  itaque  quod 
attinety  mirari  fatis  non  pojfumus  incogitantiam  vel  venus  impudentiam  Scri- 
ptorum  G  allie  or  um  ,  qui  prodere  fuflinuerunt  ,  absque  mandata  adjlipulatum 
Cardinalem  Mazarinum  Renuntiationi  atque  Exclufioni  ejfe  :  Neque  enim  ad 
res  tanti  momenti ,  qu£  mandatnm  fpeciale  requirant ,  générale  ,  quod  habue- 
rat  mandatant ,  utut  facultate  illïmitatâ  £s?  fuppletoriâ  claufulâ ,  fi  quid  mi- 
nus exprejfum  effet ,  aliisque  inftruèlijfimum  fuffeciffe.  Ipfa  enimverb  Conven- 
tio  matrimonial]  s  0 fendit  ,  qui  c  quid  eâ  continent  ur  vi  mandat  or  um  utriusque 
legati  aclum  efe  ,  £5?  Rex  Chrilîianijfjimus  eandem  Conventionem  ,  adeoque 
etiam  ipfjfîrna,  quœ  id  ajunt  ,  verba  Ratihabitioni  [uœ  folenni  inferuit.  De  Specîaîî 
particulari  nunc  loquimur  Ratihabitione  Paclorum  connubialium,  cujus  initium  œque» 
£5?  finis  efi  hujusmodi: 

Ludovicus  DEI  Gratiâ  Rex  Francise  &  Navarrse  omnibus  pne- 

fentes  h  as  literas  vifuris  falutem. 

Cum  concîufa,  perfecla,  &  fignata  fuerit  Conventio  matrimonialis  inter 
Nos  &  SereniiTimam  Hifpaniae  Infantem ,  Domnam  Mariam  There- 
fam,  filiam  primogenitam  Charifïimi  &  amatiffimi  Fratris  &  Avunculi  nofc 
tri  Régis  Hifpaniarum ,  Domni  Philippi  Quarti  ,  per  Charifîimum  &  di- 
]e£r.iflimum  Cognatum  noferum  Cardinalem  Mazarini  noftrâ  vice  :  &  Do- 
minum  Domnum  Ludovicum  Mendezium  de  Haro  verbis  di£H  Régis  Hifc 
paniae,  7.  die  Novembris  in  Infulâ  à  Phafianis  vocabulum  fortita  fitaque 
in  flumine  Bidaflba  in  confiniis  utriusque  Regni  Francise  &  Hifpaniae,  vir- 
tute  mandatofum  &  commhTionum  ipfis  injun&arum  :  inque  ejus  traclatûs 
ultimo  articulo  Cognatus  nofter  Cardinalis  Mazarini  noftro  nomine  promi- 
ferit  &  receperit  exhibitum  iri  noftras  Ratihabitionum  literas ,  forma  &  ra- 
tione  folità  inr.ra  30.  dies  cum  derogatione  quarumeunque  legum  ,  confue- 
tudinum,  &  difpofitionum  contrariarum.  dïfto  tra6latui  ,  qui  tenons  efc 
fequentis  : 

In  nomine  San&iffimse  Trinitatis  &c.  &c. 

Vide  fuprà  §.  Concors  plané  &c.  pag.  602.  Poft  infertum  totum  TracJa- 
tum  matrimonialem ,  deferiptaque  Mandata  Regum  Chriftianijfimi  &  Catholici , 
pergit  Ludovicus  XIV", 

Nos  confilio  Reginae  honoratiffimas  Domina?  &  Matris  noftrse  ,  noftri 
Chariffimi  &  amatiflimi  Fratris  unici  Ducis  Andegavenfis ,  plurimorumque 
Principum,  Ducum,  Parium^  Officialium  Coronse  noftrae,  aliorum  etiam 
Magnatum,&  notabilium perfonarum  fenatûs  noftri, poft  auditam  recitatio- 
nem  omnium  verborum  hujus  tra&atûs ,  illum  in  omnibus  &  fingulis  punc- 

ïme  XL  Mm  mm  ti* 


6ii    MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,  ET 

Affaires    tis  &  articulis  gratum  &  ratum  habuimus  atque  approbavimus ,  gratum  & 

?£iiro*    ra^ura  habemus  ac  approbamus  ,  per  praefentes  manu  nollrâ  fubfcnptas ,  pro- 

PE#K       mittentes  bonâ  fide  &  verbo  R-gio,  nos  illum  impleturos,  cuitodïrique, 

&  inviolabilker  fervari  curaturos  elfe,  absque  ul!â  eujuscmique  ^eneris  in- 

fra&ione  aut  contraventione,  dire&â  aut  indire&à  ,  afcrogatis  eum  in  H- 
nem,  uti  abrogamus ,  omnibus. legibus,  confuetudinibus  &  difpofitionibus 
contrariis.  Nam  ita  placer.  In  quorum  teitimonium  iigillum  noitrum  prae- 
fencibus  apponi  fecimus ,  qua?  daté  funt  Tholofae  vigeiimâ  quar.â  die  No- 
vembris  Anno  gratiae  Millefimo  fexcenteflmo  quinquagetimo  nono,Regni- 
que  noitri  Decimo  feptimo. 

LUDOVICUS. 

Et  inferius  per  Regem. 

De  Lomenie. 

ITa  quoque  ratihabita  fuit  Conventio  hœc  matrimonialis  in  omnibus  Punclis  Ç<? 
Capitulis  à  Rege  Catholico  pro  fe  fuisque  juccejjoribus ,  regnis ,  ac  fiutibui^ 
Jablatis  Jeu  abolit is  omnibus  legibus  confuetudinibusque  feu  rébus  contrariis, 
Madriti  10.  Decembris  1659. 

AcRatî-       À  L*à  adhuc  vice  aliâque  ratione  non  fuperficiariâ  Paèla  ijia  ratihabita  à  Re- 

kabitione    Jl\.  ge  Chriftianifjimo  fuiffe  quivis  haud  difficulter  colliget  ,  cum  paulb   ante- 

Pacis  Py-   dixerimus  ,  illa  in  Pacis  Pjrenaœ  tabulas  relata  infgniorem  ejusdem  partent 

conflit uiffè ,  atque  proin  non  posfe  non  ratihabita  eodem  plane  modo  ejje  quo  ip/'a 

pax  ratihabita  fuit.     Faclum  autem  id  eji  ténor e  fequenti. 

Ludovicus  DEI  gratiâ  Rex  Francis  &  Navarras  omnibus  praefentes  lite- 
ras  vifuris  falutem.  Cùm  virtute  Mandatorum  à  nobis  &  Sereniflimo ,  Ex- 
cellentiflimo,  atque  Potentiflimo  Rege  Catholico  Hifpaniarum  nollro  cha- 
riffimo  &  amatiffimo  ,  bono  Fratre  &  Avunculo  ,  noftro  -chariflimo^  & 
amatiffimo  cognato  Cardinali  Mazarini  &  Domino  Domno  Ludovic© 
Mendez  de  Haro  &  Gufman  datorum ,  iidem  in  Infulâ  àPhafianisdicl:a&  in 
amne  Bidaflba  in  confiniis  utriusque  Regni  juxta  montes  Pyrenaeos  fita 
feptimâ  die  praefentis  Menfis  Novembris  concluferint ,  definierint ,  &  fignâ- 
rint  tra&atum  pacis  &  réconciliations  tenore  fequenti:  (fequitur  Pax  Py- 
rensea)  Nos  gratum  habentes  Tractatum  fupradictum  in  omnibus  &  finguli» 
capitibus  &  articulis  eo  contentis,  eosdem  tam  pro  nobis  quàm  pro  noftris 
haeredibus  ,  fucceflbribus,  Regnis,  provinciis,  terris,  dominiis,  &fubdi- 
tis  acceptavimus ,  approbavimus  ,  ratos  habuimus ,  &  confirmamus  ,  ac- 
ceptants ,  ratos  habemus ,  &  confirmamus ,  promittentes  fide  verboque 
Regio  &  iiib  obligatione  atque  hypotheca  omnium  &  fingulorum  noftro- 
rum  bonorum,  praefentium,  &  futurorum,  nos  omnia  cuftodituros ,  obfer- 
vaturos  &  completuros  efle,  absque  ullâ  infra&ione  aut  contraventione  di- 
recta  aut  indirectâ,  cujufcunque  generis  aut  conditionis  ea  efle  poflit.  In 
cujus  rei  teflimonium  praefentibus  nomen  noflrum  apponi  fecimus.  Da- 
tum  Tholof»  24.  Novembris  Anno  gratis:  i6$p,  Regnique  noftri  decimo 
feptimo»  His 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I, 


62$ 


HIs  ante  matrimonii  confummationem  perfeclis  accejjït  reiigio  jurisjuranâi  pa- 
ci  s  tabulis  utrique  Régi  injuncli  &  à  Rege  Chriftianifjimo  non  minus  ac 
Rege  Cathuiico  prtfiiti ,  eâ  folennitate  ,  quâ  inter  Reges  feu  Chriflianos  ho- 
fnines  denique  aut  excogitari  major  non  pote  fi ,  quam  tamen ,  cum  &  in  fimilibus 
olim  cajibus  objervari  confusverit  &  jamdudum  innotuerit,  hic  particulatim  re- 
ferre fupervacaneum  fuerit, 

COnventum  équidem  per  articules  Paclorum  connubialium  fuperius  récitât  os  in- 
fuper  fuerat ,  ut  ijia  etiam  tempore  celebrandarum  nuptiarum  ciim  à  Rege 
Chrifiianifjimo  tum  ab  Infante  Maria  l'herejia  fpeciatim  denuà  rata  haberentur 
juramentoque  confirmarentur  £5?  atlis  Sénat  as  Parifienfis  infererentur.  Nec  dif- 
fitemur ,  uitrb  potius  cum  Rege  Philippo  Quarto  jam  pœne  moribundo  aï  que  in 
4eterna  defixo  incufamus ,  &  ad  Jequentium  élucidai ionem  legentium  vel  audien- 
tium  mémorise  commendamus  ,  nihil  horum  ,  quœ  bis  terve  promiferant ,  vel  à 
Rege  Chrifiianijfimo  vel  illius  conjuge  prafiitum  ej/e.  Id  vero  fimul  affirmamus, 
non  idcirco  quicquam  vigori  paclionis,  renuntiationis,  exclufonis  décéder e  ,  non 
tantum  quia  propriâ  negligentiâ  aut  perfidie  nemo  ab  obligatione  exfolvitur ,  fed 
etiam  quia  in  prima  à  Rege  Chrifiianiffimo  ratihabitâ  cmventione  exprejfè  pro- 
vifumfuit,  ne  talis  omifiio  ,  fi  contigijfet,  detrimenti  quid  paclis  ajferret,  fed 
illâ  nm  obftante  omnia  perinde  valerenî ,  ac  fubfifierent ,  &  ad  ifium  finem  per 
ipfam  publicationem  pacis  prœfiita  reputari  debeant.  Jfia  vero  qub  altius  in 
animos  omnium  défendant ,  non  abs  re  erït  ipfamet  Régis  Philippi  verba 
re ferre ,  qua  non  feminecis  lingua ,  fed  inter  C  alite  s  jam  agens  omnisque  fimu- 
îationis  &  ficlioms  expers  mens  profudit  hoc  ténor  e  : 

Per  aliam  claufulam  dictas  Capitulations  obtuli  pro  dote  di&ae  Infanti 
meae  filiae  quingenta  millia  coronatorum  folis,  inclufis  feu  comprehenfis  !e- 
gitimis,  paternâ  &  materna,  &  aliis  quibuscunque  juribus  ,  idque  factura 
eft  fub  paéto  &  conditione  approbandi  &  ratam  habendi  unâ  cum  Rege 
Chriftianiffimo  ftatim  atque  illius  nuptiae  celebrarentur  ,  di&am  renuncia- 
tionem  cum  jurejurando  ac  claufulis  neceffariis,  &  ut  acceptaretur  à  Par- 
lamento  Pavifienfi  forma  &  vigore  folitis ,  documentaque  mihi  aut  meo 
fucceffori  transmitterentur  ;  id  vero  hactenus  à  Rege  ChriftiannTimo  & 
dicta  Infante  meâ  filiâ  impletum  non  eft ,  quare  liber  fui  &  fum  ab  obli- 
gatione folvendas  dotis ,  quam  obtuli.  Quia  tamen  fpero  Regem  Chrif- 
tianiflimum  &  fîliam  id  prœftituros  efle,  prout  juititiâ  &  confcientiâ  dic- 
tante tenentur,  cùm  certum  fit,  me  nunquam  ,  nifî  fub  conditionibus  re- 
latis  in  dictum  matrimonium  confenfurum  fuiffe;  Mando  &Volo,quan- 
tumvis  Rex  Chriftianisfimus  &  mea  fiiia  non  fatisfecerint  fuis  partibus ,  ut 
dosfolvatur,  quampromifi,  firmis  &  validis  manentibus ,  prout  manere 
debent,  omnibus  &  fingulis  conditionibus  in  Capitulatione  expresfis,  quo- 
niam  ica  expedit  propter  majorem  exaltatjonem  religionis  noflrse  Catholi- 
cse,  pacemque  ac  tranquillitatem  inter  utramque  coronam. 


Affaire» 

GENT.    OK 

l'Euro- 
pe. 

Ejusque 
juratâ 
confîr- 
matione. 

Quae  ad 

validfta- 

templus 

fatis  fuffi- 

ciunt, 

omifla  li- 

cèt  à  Gal- 

liâ  fuerit 

débita 

poftma* 

trimo- 

niumce- 

lebratun» 

iteratio. 


Mmmm  z 


Con- 


6i4    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


Afjaikes    f^Ontuiti adduclorum  hatlenus  ad  probandam  omnis  Gallici  fanguinis  Exclufto 

GEN.  DE         ^^y 

l'Euro 


mm  ab  univerfa  Hifpanicâ  fucccffiom  documentorum  molem  ,  quœ  fub  ma- 


nu nobis  non  animadvcrtentibus  jam  pêne  in  immenfum  cxcrevit ,  à  pluribus  t 


■  ponendis  deinceps  libenter  abfienturi  effemus  ,  nifi  ea  (uperefjhit ,  qua   &  quod- 

Ablatum  dam  velut  fummarium  complecluntur  pracedentium  fiaiutorum  ,  illaque  irrefra- 

feis  Infan-  gabiliter  inter  prêt  antur ,  &  difcrtis  verbis  immutabile  duftriaca  Domûs  jus  in 

tibusea-  clarifjimâ \  luce  conflit uunt.     Primum  depromptum  eft  ex  Convention  Dotait  1m- 

fbboli  peratorem  Ferdinandum  Secundum  inter  13  Regem  Philippum  ctertiu?n  pro  Fer- 

Gallicaî  dinando  l'ertio  Hungari<?  tum  adhuc   ^f  Bohemiœ  Rege  &  Infante  Maria , 

fucceden-  felicif]ïmis  Leopoldi  Imper  atoris  parentibus  slnno  161%.  inita  0  fie  habet  : 

di jus  ac- 

roribus  "       Et  quia  Serenisfima  Regina  Francise  Domna  Anna  Hifpaniarum  Infans 
totique      virtute  paclorum  dotalium  renuntiationifque  factae  cum  confenfu  &  per- 
adeo  Au-   miffione  Sereniffimi  &   Chriflianiiïimi  Principis  Ludovici  XIII.  Francise 
ftriacîe       Régis  ipfms  marki  ita  exclufa  ell  &  manet  ab  omni  jure  fucceiîionis ,  ut 
indTo1-     omnes  illius  liberi  ex  illà  nafeituri  tam  mares  quàm  fœminse  omnefque  def- 
riunda;.     cendentes  ,  tam  primo  quàm  fecundo  ,  tertio,  &  quarto  geniti  ,   atque 
juxta  ta-   adeô  in  infinitum  cujufcunque  gradûs  fuerint  perpetuis  temporibus  futuris, 
buiasma-   fub  quolibet  titulo  aut  caufà  non  pofîint  nec  debeant  fuccedere  in  ullo 
Ferdin.      regno  ,  ftatu  ,  provincia  ,   dominio ,  vel  loco  Sereniiïimi  Régis  Catholici 
in.  &  in-   ipfiufque  hscredum  &  fuccefîbrum  legitimorum  tam  intra  régna  Hifpanias 
fantis        quàm  extra  illam  in  reliquis  provinciis  &  omnibus  regnis,  five  prasfentibus, 
Manx,     five  iis,  quee  venturis  temporibus  îpfe  Sereniffimus  Rex  Catholicus  ipfiuf- 
natqeftUS   9ue  fucceffores  tenuerint,  pofTederint,  quaeque  ad  eos  pertinuerint  ;   ideô 
Leôpol-  .  dicta  Sereniffima  Infans  Domna  Maria  fibi  refervat  jus  fuum  competens 
duslm-     una  &  junclim  cum  jure,  quod  ipfi  accrevit  per  commemoratam  renun- 
perator.     ciationem  factam  ab  ipfius  forore  Regina  Franciae  ,  approbante  iftud  ,  il- 
îudque  confirmante  per  pactum  expreflum  (quod  robur  (&  vigorem  le- 
gis  întemeratae  &  inviolabilis  &   ftabilis   obtinere   débet)  ipfo  Sereniffi- 
rao  Rege  Catholico  pro  fe    &   omnibus   fuis  hsereditariâ  fucceffione  & 
hœreditate ,   duobus  exiftentibus  cafibus  exceptis  per  allegata  pacla  do- 
tilia  matrimonii  celebrati  inter   di£tos   Sereniffimos  Regem   &  Reginam 
Francise  j  uno  nimirum  ,  fi  diem  Sereniffima  Regina  Francise  Régi  Chriltianif- 
firao  marito  fuo  fupervixerit  eamque  viduam  nu!lâ  fuperflite  proie  inliifpa- 
niam  reverti  contigerit  5  altero  vero  fi  ad  augmentum  &  confervationem  boni 
publici  &  ob  a'ias  judas  caufas  &  confiderationes  voluntate  &  confenfu  Sere- 
niffimi Régis  Catholici  ipfius  fratris  illiufque  fucceflbrumfecundà  vice  nupferit. 
Qu2ê  omnes  &  fmguîce   res  tractatse    &    conduise  fuerunt  inter  fupe- 
rius  di6los  Sereniffimos  &  Potentiffimos  Principes  &  Dominos  ,   Domi- 
num  Ferdinandum  IL  Romanorum  Imperatorem  &  Dominum  Domnum 
Philippum  IV.  Catholicum  Hifpaniarum  Regem  tam  fuo  nomine  ,  quàm 
kico  &  verbis  diftorum  Sereniffimi  Ferdinandi  IIL  Hungarisc  &  Bohemiae 
Régis  &  Sereniffimae  Domnse  M-ariae  Infantis  Hifpaniac,  illorum  refpeclivè 
fîlii  &  fororis,  vi  ampliffimarum  facultatum  fupra  relatarum  ,  additâ  reci- 
proeâ  promiffione  interveniente  folenni  flipulatione  per  verbum  Carfareum 

&  Re- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.        61$ 

&Regium,  fe  firmum  habere  quicquid  fupradiftis  articulis  continetur,  eof-  Affaires 
que  pariter  à  Sereniflimis  Rege  Ferdinando  &c.  &  Infante  Domna  Maria  G^N-  DB 
ratos  &  firmos  habitum  faclumque  iri  ut  plénum  &  integrum  effe6lum  ob-  x-EuR0" 
tineant  &  confequantur.     In  quorum  omnium  teftimonium  firmarunt  prse-  ' 

fentes  hafce  tabulas  propriarum  manuum  fubfcriptione  easque  figillis  fuis 
obfignari  fecerunt,  dum  ipfi  praefentes  adeiTent  Domini  Ramirus  Philippus 
de  Guzm'an,  Domûs  Guzmaniœ  Dominus  ,  Dux  Medinse  Turrium  ,  Mar- 
chio  Toralii,  Marchio  Monàfterii  &c.  &c.  Supremus  Pincerna  Régis  Hif- 
paniarum  Catholici  ,  Magnus  Cancellarius  Indiarum,  Capitaneus  centum 
nobilium  proteétorum  domefticorum,  Régis  &.  Coronae  Arragoniœ  The- 
faurarius  generalis  :  Domnus  Auguftinus  Meffias  Confiliarius  Status  fuoc 
Majeftatis  Catholicx  &c.  &c.  Sereniiïimi  Régis  Catholici  nobilis  Cubicu- 
larius ,  Confiliarius  Status  &  fupremi  Arragoniœ  Confilii  Prsefes  &c.  &c. 
Domnus  Philippus  de  Guzman  Marchio  de  Leganez  ,  nobilis  Camerarius 
fiia;  Majeftatis ,  Confiliarius  Status, levions  Equitatûs  Belgici  &  rei  tormen- 
taria3  Hiîpanicae  Capitaneus  generalis,  &  Melchior  de  Molina,  Confilia- 
rius Camerae  &  Status  Regni  Caftellae  &c.  &c.  Madriti  urbe  Regia  in  Re- 
gio  palatio  hàc  die  Dominicâ  3.  Septerrtbris  Anno  nati  Salvatoris  noftri 
Jefu-Chriiti  Millefimo  fexcentelimo  &  vigefimo  o6lavo. 

ALterum  ex  bis  document  um  ad  rem  noflram  pertinent  efi  omninh  confen-  Tcfta- 
tanea  pars  Tefiamenti  30.  Martii  162.1.  à  Philippo  Tertio  conditi ,  eo-   m«n*aciuc 
que  magis  notanda  ,    quia  difertiffïmè  exprimit  ,    qubd  poji  renuntiationem  feu   xcrtii^1 
abdicationem  Anna  ChriflianiJJlmo   Régi   nuptœ  ,   quœ  per  nativitatem  major 
fuerat  ,  foror  ilîius  Maria  junéla   Ferdinando  Tertio  vel  fola  fuperfuijje  vel 
major  natu  facla  cenferi   debeat ,    bis  ipfis   ex  Hïfpanico   idiomate   redditis 
verbis. 

Et  quoniam  DEO  placuit  duabus  filiabus  me  augere  ,  quarum  natu 
majorem  Infantem  Domnam  Annam  ob  juftas  confiderationes  boni  pu- 
blici  horum  Regnorum  &  Chriftianitatis  in  matrimonium  tradidi  Régi 
Franciae  Chriftianisfimo  fub  pa<5lis  &  conditionibus.  Uti  in  prainfertis  Ar- 
ticulis fuprà  pag.  55>S.  6?  feqq.  vidcre  licet.  Prseterea  ad  inftantiam  ho- 
rum meorum  Regnorum  lex  condita  fuit  juxta  fupradiéla  infertis  iifdem 
capitulis  depromptis  ex  fcripturâ  confecrâ  fuper  conditionibus  matrimonii, 
eaque  quam  perfecit  dicla  Serenisfima  Infans  Burgis  16.  O&obris  Anni 
161  f.  Ideô  conflrmans,  confentiens,  &  approbans  iupra  recenfita  relatam- 
que  legem  ,  jubeo  &  declaro  fervari  debere  in  omnibus  &.  per  omnia  dic- 
tas conditiones  Paélorum  connubialium  fcripturamque  approbationis  Burgis 
confectam,  uti  &  pra:fatam  legem  :  ita  enim  convenit  bono  horum  Re- 
gnorum &  Chriftiani  Orbis,  &  propter  alias  multas  rationes  ultra  expref- 
fas  in  Inftrumentis  matrimonialibus,  quas  tanquam  notorias  aliis  etiam  juf- 
tis  caufis  motus  non  refero.  flinc  confequens  eft ,  ut  iiatu  praefente  RE- 
MANSERîT  CEU  FILIA  MAJOR  ET  UNICA  in  cafibus  enunciatis 
in  diclis  Capitulationibus  matrimonialibus  INFANS  DOMNA  MARIA , 

M  m  m  m  5  quam 


616    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

IfîAïKFs  quam  cum  omni  progenie  légitima  &  non  legitimata  pofl  extinétas  per- 
«en.  de    fonas  &  defcendentes  dictorum  Principis  Domni  Caroli  &  Domni  Ferdi- 

nandi  eorumque   defcendentium  fuccedere   debere   in  iftis  Regnis   & 

Dominiis  declaro  &  jubeo. 


PE. 


Et  Phi-  Tertium,  quod  injîar  omnium  haberi  poteft,  &  vel  folum  ad  idt  quod  in- 
lippî  m  tendimus  ,  fufficere  débet ,  éft  'Tefiamemum  Régis  Philippi  Quarti  ,  non  tan- 
Quarti.     fum  0y  conciitoris  kgibus  £5?  pacJis  nixam   authoritatem  £5?   potejîatem ,  fed 

etiam  quia  majore  forte  ac  diuturniore  ,   adeoque  &?  perpenjiore  dehberatione , 

quàm  aliud  ullum  unquàm  confeclum  fuit ,  Regisque  Legijlatoris ,  Patris ,  £5? 

Teflatoris  penitijjîmam  mentem  ac  enixijjïmam  voluntatem  quàm  diluctdisfimè 

txplicat  in  hune  Jenfum  : 

Si  tamen  ,  quod  DEUS  avertat,  fato  fungatur  princeps  filius  meui 
ante  aut  poftquàm  in  Regnis  iflis  fucceflerit ,  non  relictis  liberis  aut  aliis 
defeendentibus  legitimis  maribus  aut  fœminis  \  infeituo  haeredem  meurn  uni- 
verfalem  in  omnibus  meis  regnis,  ftatibus,  &  Dominiis  filium  fecundum 
marem,  quem  DEUS  mihi  concefTerit  ex  hoc  vel  alio  matrimonio  ,  ip- 
fiusque  defcendentes  legitimos  &  ex  legitimo  matrimonio  natos  &  pro- 
creatos  mares  &  fœminas  eodem  ordine  primogeniturse  :  ipfoque  &  ipfis 
deficientibus  voco  tertium  filium  marem  ex  hoc  vel  quoeunque  alio  ma- 
trimonio ,  illiusque  filios  &  defcendentes  ,  mares  &  fœminas  legitimos 
&  ex  legitimo  matrimonio  genitos ,  ut  fuccedant  eodem  ordine  &  ferie 
primogeniturae.  Et  illud  ipfum  intelligatur  in  reliquis  filiis  maribus  le- 
gitimis &  legitimo  matrimonio  prognatis  ,  quos  DEUS  mihi  largitus 
fuerit,  &  in  pofthumo  fi  Reginam  gravidam  reliquero  &  natus  fuerit 
mafculus,  ut  fuccedat  fuo  loco  &  gradu,  ut  dictum  eft. 

Si ,  ut  dictum  eft ,  princeps  decefîerit ,  quod  Deus  prohibeat ,  non  re- 
liais liberis  aut  defeendentibus  maribus  aut  fœminis  legitimis  &  ex  legi- 
timo matrimonio  genitis ,  aut  fi  Deus  pluribus  me  filiis  maribus  ex  hoc 
vel  alio  matrimonio  auxerit,  illique  mortui  fuerint  liberis  aut  defeendentibus 
nonrelictis,  prout  diclum  eft,  in  defeélu  ipforum  haeredem  univerfalem 
omnium  diclorum  meorum  Regnorum ,  ftatuum ,  &  Dominiorum  inftituo 
Infantem  Domnam  Margaritam  filiam  meam  &  Reginae  Domnse  Mari-An- 
nas  conjugis  mese  charifîim^e  &  amatiflimœ  ,  illiusque  filios  &  filias  ac 
defcendentes  mares  &  fœminas,  legitimos  &  ex  legitimo  matrimonio  pro- 
gnatos,  quos  Deus  illi  dederit:  illaque  &  illis  deficientibus  voco  tertiam 
filiam  ex  eâque  ortos  f  eodem  etiam  ordine  voco  reliquas  filias  légitimas 
&  ex  legitimo  matrimonio  progenitas  ,  quas  mihi  Deus  donaverit  ,  & 
pofthumas  ex  hoc  vel  alio  matrimonio,  quod  contraxero,  &  earum  fingu- 
larum  defcendentes  legitimos,  qui  fuccedere  habent  eodem  ordine  primo- 
geniturae prseferendo  majorem  minori  &  marem  fœminas  ejufdem  linesc 
&  gradûs. 


Défi- 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  I.  «27 

Befieientibus   verô  dictis  meis  liberis  5  maribus  <Sc  fbeminis,  a»aihis 

quos  voco  5  ex  hoc  vel  alio  matrimonio,  quod  contraxero,  de-  G™*  DK 
claro,  quod  (ticceflib  omnium  dictorum  meorum  Regnorum,  Do-      pe?° 

miniorum,  Si   >tatuum  pertinere  debeat  &  pertineat  adliberos  «Si  " "- 

defcendentès  iegitimos,  mares  &  fœminas ,  Infantis  Imperatricis 
Mariée  mese  cliariûimae  &  amatae  Sororis  jam  defun&ce,  eâ  ratio- 
ne  iicut  in  inftitutione  meorum  filiorum  &  filiarum  declaro. 

Et  in  defe&u  illorum  &  illarum  fuaeque  lineae  aequè  declaro,  fucceflîo- 
nem  diétorum  meorum  Reçnorum ,  ftatuum  ,  &  Dominiorum  pertinere  ad 
lineam  Infantis  Domnae  Catharinae  Amitae  meae  Sabaudiae  DucifTae  illius- 
que  liberos  &  defcendentcs  Iegitimos  &  ex  legitimo  matrimonio  natos 
mares  &  fœminas  ,  praelatâ  lineà  primogeniti  reliquis  ,  eâ  forma  quae 
di£ta  eft. 

Omnibus  temporibus  &  retatibus  prœteritis  valde  fingularis  adfoibita  fuit 
circumfpeÊtio  in  Matrimoniis  Infantum  Hifpaniae  cum  Regibus  Francise, 
ob  incommoda,  quae  ex  conjunétione  &  unione  iftarum  duarum  Corona- 
rum  orirentur,  n.iin  cùm  ambae  &  earum  (ingulae  per  fe  tam  magnae  fint, 
ut  confervarint  magnitudinem  fuam  tantâ  cum  gloriâ  Regum  fuorum  Ca- 
tholicorum  &  Chriitianiflimorum  ,  iliis  junclâs  minueretur  &  labafceree 
ipfarum  exaltatio  aliaeque  graviiïimae  inconvenientiae  redundarent  ad  ea- 
rum fubditos  &  vafa'los  &  ad  bonum  publicum  ftatumque  amborum  Re- 
gnorum  &  totius  Chriilianitatis.    Et  ad  hsec  praecavenda  &  faciliora  red- 
denda  matrimonia  inter  ambas  Coronas  in  utilitatem  Vafallorum  urrius- 
que  &  Itatus  univerfalis  prohibita  fuit  illarum  conjunclio  inito  pacl:o  con- 
vento,  quod  vim  habeat  legis  ftabilis  in  favorem  regnorum  &  caufx  pu- 
blics illorum  ,  &  praefertim  in  capitulatione  matrimoniali  confecta  in  hac 
Regia  22.  die  Auguili  Anno  Millefimo  &  duodecimo  inter  Regcm  Do- 
minum  meum  &  Patrem  meum  atque  Regem  Chriftianiiîrmum  Francix 
Ludovicum  XIII.  propter  matrimonium,  quod  ego  contraxi  cum  Kegina 
Domna  Ifabella  Borbonia  chariflîma  &  dileétifîima  mea  conjuge,  quodque 
ilîe  ipfe  Rex  contraxit  cum  Chriftianiffima  Regina  Domna  Anna  mea  cha- 
riflîma &  a'nata  forore,  pa-clum  fuit  &  convenit,  ne  conjungerentur  & 
conjungi  poiTent  ambae  Corona:  &  quod  difta  Infans  foror  mea  pro  fe  fuis- 
que  defcendentibus  ex   illo  matrimonio  renuntiare  deberet,  renuntiaret 
omni  &  cuilibet,  quod  ad  illam  pertineret  aut  aliquo  tempore  pertine- 
re pnifet,  juri  fuccedendi  in  meis  Regnis,  adeô  ut  in  nullo  cafu,  cogitato 
aut  non  cogitato,  in  illis  fuccederet,  fucceffioque  ad  fequentem  gradum 
tranliret,  quouiam  h  fucceflîone  ilta  &  à  {"pe  fuccemonis  protinus  exclufa 
declarata  fuit  d=6la  Infans  mea  foror  Domna  Anna,  illiufque  defcenaentes 
mares  &  fa-minse,  abolitis  per  utramque  Majeilatem  Catholicam  &  Chri- 
flianiffiinam  legibus  ,  juribus  ,  confuetudinibus  ,  difpolitionibus ,  &.  titulis 
di6l:tr  m  duarurr,  Coronarum ,  ex  quibus  fucceditur  aut  fucceilîo  prarten- 
di  poifet  in  diclis  regnis,  ftatibus,  &  Dominiis  tam  nuncquàm  olim  fu- 

turis 


<fi8    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Aïfairïs  tm"is  temporibus  &  cafibus  fucceffionis  deferendrc,  in  quantum  ulla  ratio» 
gen.dk  ne  obflarent  aut  impedimento  eifent  dictœ  renundationi  &  exclufioni 
diclae  Infands  Domnae  Annœ  ,  addita  declaratione,  quôd  Mis  fuse  Majelta- 
tes  per  approbatîonem  dicli  Tractatûs  matrimonialis  derogare  eaque  pro 
derogads  habuiffe  intelligi  debeant.  Et  in  executionem  hujus  Traclatûs 
dièla  Regina  Chriftianiffima  mea  foror  ante  fponfalia  per  verba  de  pr?e- 
fenti  renuntiationem  fecit  omni  folenniori  forma  &  cum  juramento  in  ci- 
vkate  Burgenfi  17.  Oclobris  Anno  Millefimo  fexcentefimo  decimo  quin- 
to  pnefente  Rege  meo  Domino  meoque  Pâtre,  qui  illam  approbavit,  co- 
ram  Antonio  de  Arefigny  ipfius  Secretario  &  Notario  publico  horum  Re- 
gnorum, &  mediante dicta  ifta  Renunciatione  effectum  fortitum  efl  dictum 
matrimonium,  Rexque  meus  Dominus  &  meus  Pater  illam  juffit  fervari, 
impleri  &  execudoni  mandari  per  legem  generalem ,  quam  ad  petitio- 
nem  &  fupplicationem  iftorum  regnorum  flatuit  &  publicavit  tertia  Junii 
Anno  Millefimo  fexcentefimo  decimo  nono  &  per  claufulam  $8-  Teflamen- 
ti  fui,  qua  declaravit  elfe  di6tam  Reginam  meam  fororem  ipfiufque  libe- 
ros  &  defcendentes  ex  illo  matrimonio  mares  &  fœminas  exclufos  à  fuc- 
ceffione  omnium  diclorum  Regnorum ,  flatuum  ,  &  Dominiorum.  Atque 
juxta  hoc  exemplum  aliaque,  traélatibus  conventis  à  me  &  Rege  Chri- 
flianitfimo  Ludovico  XIV.  meo  chariffimo  &  amato  ex  forore  nepote  de 
pace  &  matrimonio,  quod  Divina  conciliante  gratia  inque  illius  majorem 
honorem  ,  bonum  univerfale  fingularum  coronarum  ,  illarum  quietem  & 
tranquillitatem  contraclum  e(t  inter  Infantem  Domnam  Mariam  Therefam 
meam  chariffimam  &  amatam  filiam  eundemque  Regem  praeter  a!ia  po- 
fita  fuerunt  duo  capitula  y.  &  6.  Jam  tam  pag.  605.  (£  feq.  recenfita.  Uti 
confiât  ex  diclo  Tractatu  matrimoniali  convento  per  me  &  meo  nomine 
per  Domnum  Ludovicum  Mendez  de  Haro,  Comitem  Ducem  de  Oliva- 
rez,  meique  flabuli  fupremum  praefeétum  ab  unâ:  &  ab  altéra  parte  per 
Regem  Chriftianiffimum  &  Julium  Mazarinum  vi  mandati  exarati  7.  No- 
vembris  Anno  fupra  millefimum  &  fexcetefimum  quinquagefimo  nono , 
fubfcripto  à  Petro  Coloma  meo  Confiliario  Bellico  &  Secretario  Status 
Notarioque  publico  horum  regnorum.  Et  in  Traétatu  Pacis  convento  per 
eofdemPlenipotentiarioseodemdiecoram  dicto  Petro  Coloma  pofitum  fuit 
capkuium  numéro  33. quod  itahabet.  Videatur fupra  pag.  619.  $.  Additum  fuit 
u'terius  vinculum  &c.  eut  hic  Articulus  33.  annexus  efl.  Et  in  completionem 
iftorum  Traélatuum  dicla  Infans  Domna  Maria  Therefa  mea  filia  re  ipfâ 
praeititit  dictam  Renuntiationem  juratam  in  Civitate  Fonds  Rapidi  2. 
die  Junii  Anno  Millefimo  fexcentefimo  &  fexagefimo  munitam  teflimo- 
nio  Domni  Ferdinandi  de  Fonfeca  Ruiz  de  Concreras  mei  Confiliarii  bel- 
lici,  Secretarii  Status  Expeditionis  univerfalis ,  Notariique  publici  horum 
Regnorum.  Et  quamvis  fperem  fore  ,  ut  Infans  mea  filia  &  Rex  Chri- 
itianiflimus  illius  Maritus  impleant  &  obfervent  omnia  relata  &  reliqua 
contenta  diclo  Traétatu  matrimoniali  &  Renuntiatione ,  cùm  obligatio  haec 
juftitiarri  &  confeientiam  refpiciat;  nihilominus  quia  ab  hâc  re  &  nego- 
uo  pax  &  tranquillitasChriftianiOrbis  dependet,  ut  omnibus  modis,  quos 

jura 


PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.         6i9 

juranôrunt,  ejufdem  impletio  fecura  reddatur,  tanquam  Pater,  &Domi-  Affaires 
nus  mtturalis  omnium  meorum  Regnorum,  ilatuum,  &  Dominiorum,  ex     gen.de 
fupremà  poteftate,  quâ  utor  quamque  habeo  difponendi  &  ordinandi  in     L'^"RO" 
Utilitatem  meorum  Vafallorum  &  caufae  publicae,  confulendi  etiam  opti- 
mal illius  adminiftrationi,  atque  praecavendi  damna,  quac  ex  conjunétione 
dictarum  duarum  Coronarum,  Regnorum,  &  Ilatuum  ad  earum  unam- 
quamque  pertinentium  oriri  poffent ,  proprio  motu  ,  certâ  fcientia,  &  ple- 
nitudine  poteilatis  Regiae  ablbluiae,  quae  uti  volo  &  utor  ,  certiiîimè  & 
optimè  gnarus  exemplorum  deceflbrum  meorum,  qui  difpofuerunt,  mutâ- 
runt,  &  inverterunt  ordinem  fuccefïionis  Regnorum  &  flatuum  meorum 
exclufis  primogenitis  ipforumque  defcendentibus,   CONTEMPLATIO- 
NS ,  ET  EX   CAUSA  TRACTATUUM  PACIS   ET   MATRIMO- 
NIORUM,&  ob  jufias  confiderationes,  declaro,  quod  dicta  Infans  Dom- 
na  Maria  Therefia  mea  fi!ia ,  omnefque  illius  defcendentes  ex  hoc  matri- 
monio, mares &fœminoe,  erunt,manebunt,&  funt  exclufi,&  quatenus  ne- 
ceffarium  fuerit,  eos  excludo  ab  omni  jure  five  fpe,  quam  in  quovis  ca- 
ïu  habere  poïlint  aut  habent,  fuccedendi  in  quolibet  meorum  Regnorum, 
ilatuum, &  Dominiorum  perpétua, non  fecus  ac  SI  NATI  NON  FUIS- 
SENT: iitamque  exclufionem  &  omnia  quae  circa  illam  dilpofui  &  difpo- 
no   ratione    perfonae    diélae   Infantis  Domnae   Mariai   Therefiae  meae   fi- 
liae  illiufque  defcendentium  ex  hoc  matrimonio   marium   &  fœminarum 
declaro,  debere  obfervari,  &  ubi  neceffe  effet,  volo,  jubeo,  &  mando 
obfervari,  impleri,  &  executioni  dari  adverfus  Chriilianiffimam  Reginam 
Domnam  Annam  fororem  meam  illiufque  defcendentes  fecundum  illius 
pafla  matrimonialia  &  renuntiationem  praeflitam,  juxtaque  difpolitionem 
Régis  Domni  Philippi  III.  noilri  Domini  &  Patris  in  diéla  lege  &  ipfius 
teflamento  relatis,  quod  omnevim  habuit  legis  conventae  inter  ambas  co- 
ronas,  quamque  approbo  cum  &  fub  eâdem  qualitate,  quae  ineft  legibus 
conventionalibus  inter  fupremos  Principes,  utens  plenitudine  meae  po- 
teflatis  ,  abolitis  &  caffatis  omnibus  legibus  ,  ftatutis  ,  juribus,  difpofi- 
tionibus,  &  confuetudinibus,  quatenus  neceffarium  fuerit,  illaeque  aliqua 
ratione  impedire  poffint  diélam  exclufionem,  non  fecus  ac  fi  earum  una- 
quaeque  hic  expreffa  ejufque  mentio  fpecialis  faéla  fuillet.     Declaro  ta- 
men,  volo  &  jubeo,  fi,  quod  DEUS  avertat,  matrimonio  diélae  Infan- 
tis Domnae  Maris  Therefiae  meae  filial  fbluto  fine  liberis  illa  in  Hifpaniam 
reverfa  vidua  manferit,  aut  fi  vidua  ad  promovendum  bonum   publicum 
&  ob  judas  confiderationes  ad  fecundas  nuptias  tranfierit  me  confentien- 
te,  aut  poil  meum  deceffum  Principe  meo  filio,  ut  illi  tune  non  obflet 
exclufio  &  renuntiatio,  maneantque  capaces  illa  illiufque  filii  &  defcen- 
dentes ex  fecundo  matrimonio,  dummodo  non  fit  in  Franciâ,  qui  fucce- 
dere  poffint  in  diélis  Regnis  &  Statibus. 

Per  aliam  claufulam  diélae  capitulationis  obtuli  pro  dote  diéla?  Infanti 

meae  filial  quingentaMiiliaCoronatorum  folis,  £s?  cœlera,  qua  relata  funt  fnpr a 

ad§.  Conventum  equidem  perarticulos  &c.  &c.  pag.  623.  &  deinde  :  Omnia 

quae  dicla  funt  jubeo  impieri,  fervari,  &  executioni  mandari  in  fuccefïio- 

Tome  XL  Nnnn  ne 


<S56  MEMOIRES,  NEGOTIATIÔNS,  TRAITEZ,  ET 

Attaires  ne  meorum  Regnorum  &  Dominiorum  ab  omnibus  meîs  fubditis  &  vafal- 

gen.de    lis  cujufcunque  qualitatis,  &ab  omnibus  meis  Regnis,  ftatibus,  &Domi- 

i/Euro-    njiSj  utque  eam  obfervent  &  in  vîgore  confervent  veluti  legem  &  flatu- 

rE*        tum  facturn  &  ftabilitum  in  Comitiis  publicandum  forma  &  folennitatibus 

in  quovis  Regno,  Statu,  &Dominio  confuetis. 

Hïfce  Re-   f~*%Mnia  hucufque  allât  a  atque  ob  document  or  um  idem  contimntium  multitudi- 
nimtiatio-  \^Jr   ne  m  fepius  repetita  uti  plerumque  univerfam  Hifpanïcam    Monarchiam 
m  bus  &     refpiciunt,  nec  ad  minimam  ejus  particulam  vel  quamlibet  exiguum  jus  G  allia 
nibusFeu-  fanguinis  quemcunque  admittunt  -,   ita  ifte  in  univerfum  omnis   non  femel  nec 
da  quo-      uno  loco  [peciatim  à  jeudis  quibufcunque  excluditur  ,  Jive  Reges  Hifpaniœ  ijf- 
que  com-    ha c  aliis  contulerint  ,  Jive  illa  ab  aliis  teneant  :  inter  quœ  abfque  omni  dubi- 
prehen-      fatatione  cum  prœcipua  fint  ,  quœ  à  Sanclâ  Romand   Rcclefiâ  Sacroque  Ro- 
'     mano  Imperio  acceperunt,  ea  etiam  fub  hoc  nomine  difpofitione  exclufvâ  Gai- 
Nomma-    iorum  f  (3  quœ  eam  confequitur ,  totius  Hifpanicue  fuccejjîonis  in  Sacram  Cœfa- 
cT  tam"  ream  Majeftatem   ejufque  fobolem  tranjlaîione  comprehendi  nemo  inficias  ive- 
Pontif.      vit.     Hinc  quis  non  videat ,   nequïcquam  in  contrarium   allegari  aut  prœtexi 
quàm         verba  invcftiturarum  Jive  quœ  Regnum  Neapolitanum  concernant ,  Pontifcia- 
Caefarea.     rum  f  flVe  CœJ'arearum  de  Ducat  a  Mediolanenfi ,  Marchionatu  &  Porta  Fi- 
literisYn"   narïenfi ,  Principatu  Plombini,  Vicariat u    Senenfi ,  feudi/que  novelli  Monfor- 
veftitura-    tis  ,  Monfchieri ,  &  Sinei  &c.   concejfarum  ,  veterum  aut  recentiorum ,  qucê 
rumpri-    juxta  ordinem  primogeniturœ  tam  fœminis   quàm  maribus  fuccejjionem  defe- 
mogeni-     rant  9  cum  ea  potilis  ita  interpretanda  reniant ,  ut  fpecialibus  Pontificum  au- 
runtur6      toritate  initis  paclis  &  promulgatis   legibus  de   exclujione  Gallici  fanguinis, 
afcititii  aut  nativi ,  falvis  ,  jus  inde  ad  alios  tranjlatum  femper  integrum 
Tranflato   confervari  debeat  :  Eâdem  denique  ratione  juxta  Tejlamentum  Philippi  Tertii 
mmirum    fuperiïis  relatum  rurfus  dicendum  fit ,  per  leges  13  pacla  enuptas  in  Galliam 
Gaîlisnu-   ^nfanîes  Hifpanicas  primogenitas  eo  ipfo  taies  efje  defiiff'e,  (3  in  illarum  lo- 
ptarum  ad  cum  proximos  feu  proximas  Hifpanici  fanguinis  Principes ,  adepto  fimul  no- 
Auftria-     mine  primogenitorum  vel  primogenitarum  ,  fubiiffe ,   quâ  minor  Geminorum 
cospn^      Patriarcha  Jacob,  futur  us  dein  cum  aliorum  Patriarcharum,  tum  almi  Jo- 
Traf'no-   fe$'1  beatijjïmus parens ,  pofl  venditum  fibi  à  fratre  Majore  Efau  lentis  edu- 
mine  &     ti°  primogeniturœ  jus ,  Patri  Ifaac  roganti  quis  effet  ?  Filium  fe  ejus  effe 
jute.         primogenitum  Efau  jure  optimo  refpondit,  prout  apud  Judœos  non  minus 
ac  Chrijlianos   indubiiatœ  veritatis  babetur   &  Divina  per  patrem  cbtenta 
etiam  ad  nos  pertinens  benedicHo  comprobavit.     ghiis  potius  Imperaterem  non 
monendum  putet  ,   etiam  fi  Domus  fuœ   negligens  efje  vellet ,   ne  rem   Imperii 
prodigeret ,  conferendo  in  eam  familiam  fve  ci  relinquendo  Imperialia  feuda , 
quœ  duâum  13  Imperii  œmula  fuit  (3  infigmm  illius  partem  quâ  vi  injuflâ, 
quâ   congenita   fraude   ad  fe  traxit  ,   quœque   nihil   magis   in  votis   habeat , 
quam  ut  pro  obfequiv  ob  nexum  feudalem  debito   omnibus  porro  Italiœ  feudis 
Imper ium  fpoliet ,  totam  demum  Italiam  fub  jugum  mittat ,  (3  ipfam  Impe- 
Idem  de     ratoriam  dignitatem  Germanis  ablatam  in  Capiti  pofteros  transférât.     Idem 
Belgioaf-  fa  cunclis  Belgicis  £s?  connexis  Provinciis  diclum  ejlo ,  quarum  pariter  in  re- 
fentur-      latis  documentas  frequens  mentio  ft  ,  tum  quia  13  ipf*  non  folum  ad  vicinos 

popu- 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  I.  651 

populos   à  Gallià  fubjugandos  ,   fed   ad  lerrorem  eiiam  longinquis  incutiendum    Affaire, 
eorumque  ad  fe  irahenda  commoda  opportunifjïmœ  [tint ,  tum  quia  prœtcr  a li-     GEN- DE 
quarum  feudale ,  quo  lmpcrio  innexœ  funt ,  vinculum ,  £5?  rcceptam  in  lis  an-    L'£uK<> 
tiquitus  vel  fulum  vel  potiorem  marium  eiiam  remotiorem  fuccejjîonem ,  omnes       ?£* 
ad  Imperium  fc?  Domum  Auftriacam  adeo  pertinent  ,   ut  pecuiiarem  Imperii 
Circulum  ,   Burgundicum    vocatum   conjïituant  ,   regibufque   Hifpania    earum 
pojjejforibus  &  non  nifi   fub  Archiducis  Auitrise  titulo  &  qua  talibus  fef-    Cùm  id 
ftonem  &  votum  unâ  cum  aliis  Auguftœ  Domâs  prœrogativis  in  Imperii  Co-    ™x}mc  , 
mitiis  tribuant  :  Evidenti/fimo  argumento   non  alio  eas  nomme  feu  alla  caufâ   w'^d0" 
ad  Reges  Hifpaniœ  pertinuijfe  ,  nec  ad  alios  quàm  Archi-Duces  Auflria  de-   Domum 
volvi  pojfe.     Cantant  id  apertiffime  ,   ut  de  aliis   mine  taceamus  ,   ipfijjima   Auflria- 
verba   notijfimœ  tranfaclionis  ,  quœ  in   Comitiis  Auguflanis    16.  Junii  Anno    cam  *Pec" 
Jupra  Millcfimum  quingentefimum  quadragefimo  otlavo  de  Belgicis  &  conjunc-     et' 
tis  provinciis  inter  Imperium   &  Imperatorem    Carolum  ghtintum  imta ,  13       Prout 
ab  eodem  tanquam  Imperatore  &?  earum  provinciarum  Domino ,  nomine  Im-    patet  ex 
perii  verb  ab  Elecloribus  Moguntino   £5?  Palatino ,  Archi-Epifcopo    Salisbur-    c.onven- 
genfi    &  Duce   Bavaria  ,  Abbate   Wingartenfi  ,  Comité  Furjlembergenfi    £5?    euftauâ!1" 
Magifiratu  Civitatis  Auguflanœ  pro  fe  £s?    reliquis  Elecloribus  ,  Principibus 
Ecclefajlicis  &?  Secularibus ,  Prœlatis  ,  Comitibus  ,  &  immediatis  Imperii  Ci- 
vitatibus  ad  Comitiakm  omnium  flatuum  requifitionem  fubfignata  ,  inque  Im- 
perii ,  quem  vocant ,  Receffum    relata  (3  demum  ut  aterna  judicandi  formu- 
la à  Camerâ  Imper  iali ,  qitce  Spirœ  h  [que  ad  ejus  urbis  excidium  fuerat ,  nunc 
Wetzdariœ  efi ,  regejla  atque  acceptât  a  ^  fi militer  etiam  à  flatibus  ill  arum  provin- 
ciarum ratihabita  fuit ,  ténor e  fequenti  : 

Nos  Carolus  Quintus  DEI  Gratià  Romanorumlmperator  femper  Au» 
guftus ,  Rex  Germaniae  ,  Caftellae  ,  Aragoniae  &c.  &c.  Archi-Dux  Au- 
ltrise,  Dux  Burgundiae  &c.  &c.  Notum  facimus  &c.  &c.  Convenimus 
etiam  vi  harum  literarum  omni  meliori  modo  &c.  &c.  Quôd  Nos  ceu 
verus  hasreditariarum  noftrarum  provinciarum  Belgicarum ,  pro  nobis  no- 
flrifque  hoeredibus  &  fuccefToribus  unà  cum  deinceps  nominandis  noitris 
provincis  Belgicis  nimirum  &c.  &c.  impoflerum  aeternis  temporibus  fub 
proteclione ,  tuitione,  defenfione,  &  ope  Imperatorum  &Regum  Roma- 
norum  Sacrique  Imperii  elle  ejufque  privilegiis  &  juribus  gaudere  & 
frui,  atque  à  dicTtis  Imperatoribus ,  Regibus,  &  Sacri  Imperii  itatibus  in- 
itar  aliorum  ejus  principum,ftatuum,&  membrorum  femper  protegi ,  de- 
fendi  &  fideliter  juvari,  porrô  etiam  ad  omnia  Imperii  Comitia  &  con- 
ventus  invitari  &  vocari,  nofque  &  illi  unà  cum  aliis  itatibus  pro  arbitrio 
illic  comparendi  aut  illuc  mittendi  facultatem  habere  ,  atque  Nos ,  noftri- 
que  hsredes  &  fuccefTores,  Noftri  &  illorum  legati  ad  feiîîonem  &  vo- 
tum  ratione  recenfitarum  provinciarum ,  tanquam  Archi-Ducis  Aufiriœ  £5? 
fub  Archi-Ducis  Auflriœ  nomine  admitti  debeamus  &c.  &c.  Prscterea  quo- 
que  Nos  ,  noftri  haeredes  &  fuccelTores  praediclas  noftrse  provincial  unà 
cum  omnibus  ad  eas  pertinentibus  principibus  &c.  &c.  pecuiiarem  Im- 
perii Circulum,  fub  Burgundici  Circuli  nomine  conftituere  debeamus, 

Nnnn  2  quo 


AFFAIRES 
GEN.    DE 

l'Euro- 
pe. 


Tefta- 
mentis- 
que  Phi- 
lippi  Ter- 
îii    & 
Quarti. 


Ad  diaa- 
rum  con- 
ventio- 
num  tui- 
tionem 
obligantur 
tum  alii 
fîdeju  fio- 
les, tum 
imprimis 
fummi 
Pontifi- 
ces,qui  eas 
promove- 
runt  & 
confmna- 
runt. 


£32    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

quo  illse  omnes  comprehendentur,  licèt  earum  aliquac  aliis  antehac  Impe- 
rii  Circulis  comprenfae  fuiffent  &c.  &c.  Quotquot  tamen  ex  fupra  me- 
moratis  principatibus  &  provinciis  feudorum  ab  Imperio  collatorum  nomi- 
ne  &  qualicate  haclenus  poiTeiîi  vel  poffefTae  fuerunt,  illi  vel  illae  etiam 
ficut  hactenus  ica  &  impofterum  ab  Imperio  accipi  &  poffiden  debe- 
bunt  &c.  &c.  Ideô  promittimus  &  pollicemur  verbo  vero  Caefareo  pro 
Nobis,  noftris  haeredibus  &  fucceiToribus ,  omnibufque  noftris  prœdiclis 
provinciis  hsereditariis  Burgundicis  à  nobis  &  1 1 lis  tranfa&ionem ,  compo- 
iitionem  &conventionem,  in  omnibus  &fingulis  partibus,  puncîis,  clau- 
fulis,  &  decretis,  nos  noftrofque  concernentibus,  iirmiter,  perpetuô,  & 
ïnviolabiliter  obfervari  &  execucioni  mandari,  iis  nullà  ratione  contrave- 
nire,  nec  ut  id  flat,  noftris  vel  aliis  permitti,  omnia  etiam,  quae  adver- 
fus  hune  traclatum  tentata,  ordinata,  ftatuta,  impetrata,  &  obtenta  fue- 
rint ,  auttentari,  ordinari  &c.  &c.  impofterum  queant,  cafta,  nulla,  & 
invalida  effe  &  manere  debere  &c.  &c. 

GEminum  germanum  eji ,  quod  de  Beîgii  Provinciis  ad  Hifpaniœ  Reges  quâ 
Auflriacos  pertinentibus  Teflamentis  fuis  caverunt  Philippus  îertius  & 
Quartus  adeb  confoms  formulis  ,  ut  pro  ambabus  ejje  pojfît  una  ex  Philippi 
Quarti  Teflamento  defumpta  his  verbis  conjians  : 

Et  fpeciatim  declaro  ,  quô  ftatus  Flandrias,  Belgii ,  &  quicunque  alii, 
quos  prseterito  tempore  poiTedit  Sereniffima  Infans,  Domna  Ifabella  Ami- 
ta  mea,  quofque  ad  Coronam  meam  revolutos  ego  pofTedi  &  pôffideo, 
ex  voluntate  mea  femper  uniti  manere  debeant  cum  reliquis  Regnis  & 
Dominiis  meis ,  neque  aliquo  cafu  dividi  aut  feparari.  Injungo  quoque  & 
mando  meis  fucceiToribus  quoeunque  tempore  futuris,  ut  feriô  omnique 
ope  protegant  &  défendant  diclos  Status  illorumque  Vafallos ,  quoniam  id 
tantopere  pertinet  ad  exaltationem  fidei  Catholicae  ,  confervationem  & 
pacem  reliquorum  meorum  Regnorum  ,  Statuum  ,  &  Dominiorum  Jurium- 
que  Domus  Auflriacœ ,  cujus  Primogenituram  6?  major atum  obtineo ,  ut  palam 
omnibus  eft. 

COlophonem  tandem  huic  DeduElionis  noflrœ  parti  impojlturi ,  uno  adhuc  verbo  in- 
digitandum  duximus ,  cùm  omnia  &f  fingula  pace ,  conventionibus  ,  &  fanàioni- 
bus  recitatis  inferta  cùm  à  fummi  s  Pontificibus  tum  ab  Imperatoribus  rata  habita, 
confirmata ,  £?  pro  potejlate  iis  compétente  munita  Jint ,  ad  conventorum  £f  fancito- 
rum  vindicias  &  tutelam  utrofque  nonfecus  ac  alios  coiumemoratorum  fœderum  pacis 
vel  particularium  conventionem  fide  jujfores  obligari ,  eoque  pertinere  ,  quod  non  felùm 
juxta  relata  injlrumenta  dotalia  aliaque  pars  utraque  contrahentium  id  à  fummis 
Pontificibus  filiali  reverentid  expetierit ,  fed  etiam  hi ,  vel  renunciationum  formulis  te- 
Jlibus  ,  preces  ijlas  lubentijfnnis  animis  admiferint ,  conventaque  Âpojîolicd  authorita- 
te  reapfe  confirmârint  ;  ut  de  Imperatoribus  pro  Je  aut  fobole  idipfum  Jlipulantibus  jam 
dicla  mokjtè  non  repetamus. 

Poft 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.  I.  ^3 

POfl  omnes  bas  conventiones  ,  fanttiones  ,  renunciationes  ,  abdicationes ,  feu  ceffiones  Affaires 
éf  Sacramentel  nemini  in  mentem  ventre  potuifet ,  aut  fi  forte  cuiquam  talis  in-    gen.  oe 
cidiffet  cogitatio  ,  incredibilis  fimul  Mi  proculdubio  vifa  fuijjet ,  ïm  infuper  babitis  feu    L'EuR°- 
neglectis  &  fpretis  religioni  fibi  non  dufturum  Regem  Cbrijlianiffimunt  ejusve  liber  os   _J^1 
effe ,  eveniente  cafu ,  Sacrce  Cœfareœ  Majejiati  illiufque  proli  de  fucceffione  Hifpanicd 
litem  movere ,  aut  quameunque  illius  partent  fibi  vindicare ,  nifi  ipfa  experientia  aliud 
docui[fet.     Qiùs  verb  injuflitiœ  tegendœ  color  adfumptus  fit ,  non  alïunde  aptiùs  ,  quant 
ex  feriptis  Gallicis  antebac  in  lucem  emiffis  percipi  potefl ,  ficut  viciffim  oppofitœ  ab 
ipfa  Hifpanid   refponfiones  optimè  exhibent ,  quàm  dilutus  is  omninb  fuerit  :  quee  adeb 
utrinque  édita  hic  in  compendium  redaàa  proponere  expeditifftnium  fit ,  fubjunclka  ul- 
tïmo  loco  ex  Tejlamento,  quod  à  Carolo  Rege  conditum  novum  argunientum  Galllœ   Objedtio 
fubminijlrajfe  perbibetur ,  claufula  concernent e  ,  quam  vel  recitaffe  refutaffe  erit.  Non  Pes 
vidgare  nempe  invafo  pofi  mortem  Pbïlippi  Ouarti  Belgio  Catbolico ,  afi  vanum  in  eo 
ftudium  pofuerunt  Galli ,  ut  aliis  perfuaderent ,  quod  ipfi  non  crediderunt:  debere  ju- 
re naturœ ,  Divino  &  Humano,  Civili  potiffiutum  Romano ,  parentum  bœreditates  li- 
ber is  ,  née  citra  graviffintam  injuriam  filias  Us  privari  pojfe.     Contra  bonos  mores  effe 
paàa  de  bœreditate  viventis ,  &f  quia  cum  Mis  non  minus  ac  juftitia  pugnent  renuntia- 
tiones  filiarum ,  ut  dote  contenta  aliud  quid  ex  bonis  paternis  fperare  feu  petere  ne- 
queant ,  ideb  Mas  jure  Romano  admiffas  non  fuiffe.     Confirmajfe  demum  eas  Papam 
Bonifacium  Octavwn,  fi  juratœ  ,  non  fraudulentœ  aut  violentœ  fuijfent ,  prœtextu  ju- 
ramenti  fervandi ,  rêvera  proprii  commodi  £f  extendendœ  in  rem  alieni  fori  pontificiez 
autboritatis  eau  fa,  non  fine  novo  fantœ  undiquaque  non  optimœ  difpendio.     Efrencnt 
tamen  décrétaient  iftam  effe ,  exorbitantem  âf  abfurdam ,  nec  vint  fuam  ad  Reges  & 
Principes  feu  Principatus  £f    Imper ia,  quœ  nullo  pretio  œftimari  poffint ,  porrigere. 
Hanc  nominatim,  de  qua  nunc  agitur ,  renuntiationent ,  non  una  licèt  fed  multis  ab 
Hifpaniœ  confilio  effictis  rationibus  fucatam  &f  infuetis   claujulis  munitam  ,  omni  jure 
acœquitate  dejiitui ,  £f  ob  minorennitatem  renuntiantis ,  ejufdemque  enormem  Ixfio- 
nem ,  prœcipuè  vero  ob  non  numeratam  è  vejligio  die  condiào  dotent  ,  <vel  à  primordio 
non  fubfkitijfe ,  feu  invalidant  fuiffe ,  vel  deinceps  illico  corruijje,  £f  prifiinum  Maria 
Therefiœ  jus  revixiffe.     Verùm  &  folidiffnnè  jam  à  Miniftris  atque  Scriptoribus  Hifpa-   Refellim- 
nis  demonftratum  efl ,  &  rerum  evidentia  comprobatur  :    Qiiœftionum  publicarum  de-   tur.ex. 
cifionem  ex  jure  civili  five  Romano  ,  in  plurimis  ubivis  antiquato ,  five  alio  de  pri-   «T^ni- 
vatis  fubditorum  rébus  lato  non  magis  reclè  peti,  quàm  publicœ  controverfiœ  inter  funt-    cis  circa 
mos  principes   vertentes  à  privatis  eorum  tribunalibus  dirimi  feu  dijudkari  poffint  :  tempus 
Pejus  Us  Caufidicorunt  privatorum  argutias  applicari.     Èxpreffas  quidem  in  connubia-   mva^,  a 
libus  inflrumentis  diverfas  claufulas  abrogatorias  feu  cajjdtorias  efj'e  privatarum  legum   BeViînu- 
&  confuetudinum  municipalium ,  quœ  forfitan  juxta  verborum  corticem  contraries,  cre-  blicatis, 
di  potuifent ,  infpecie  devolutionis  in  aliquibus  Belgh  provinciis  inter  privatos  ufita-   paucis 
ta:  Sedid  faàum  majoris  tantùm,  licèt  plané  abundantis  cautelœ  ergo ,  &?  ut  cou-   'junc  a^* 
îrabentes  enixiffimunt  fuum  in  auferendis  feu  preecavendis  prœtextibus  qulbufcunque 
ftudium  tanto  clariùs  tejlarentur ,  non  quod  aUas  leges  ilhe  ad  Principunt  fucceffionem 
convenientiàs  trahi  quivijfent,  quàm  Gallici  feriptores  Pontificum  décréta  h\c  attendi 
velint:  abfurdiffimè  vero  ea  quœ  ad  firmandant  contrabentium  difpofitionem  pofita  feu 
potiùs  remota  fuerunt ,  ad  eandem  evertendam  allegari.     Infplciendum  contra,  f aten- 

Nnnn  3  -  tibus 


634    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    tibus  ipfiufmet  prudentiçribus  Gallarum  fcriptoribus  ,  quid  in  quovis  regno  circa  ill'us 

g  en.  de    jùccejjhnem  ab  us  ,  quibus  ea  potejias  competit,  ftatutum,  quidque  inmutuam  populo- 

-  p"         rum  concreditorum  utilitatem  £f  communem  quietem  inter  Reges  Jeu  Principes  DEQ 

<— joli  fubjectos  populi ,  de  cujus  fuccejfione  agitur ,  accedente  confenfu  ,  tremjaâum  fit. 

Sufficere  ad  id  quamvis  œtatem  aàionum  humanarum  capacem ,  eam  utique ,  quœ  cùm 
in  Hijpanid  tum  in  ipfâmet  Gallid  Regio  muneri  par  babeatur ,   72e  dum  eam ,  quœ 
veteribus  firmata  dicta,  robujiifimœ ,  quam  appellârunt ,  juventuti  proxima  non  uno 
loco  Hifpanicce  ditionis  etiam  privâtes  rei  adminijîrandœ  idonea  reputetur ,  cujujque  œ* 
tatis  Infantem  Mariam  Tberejîam  fponfalium   tempore  fuijje ,  vel  ex  renuntiationum 
formulis  eluceat.     Licuiffe  Galliœ  aliifque  Regnis ,  imo  etiam  minoribus  Jlatibus  feu 
familiis ,  quoties  è  re  fud  exiflimajjent ,  &  modum  tam  eleàionis  quam  fuccejjionis 
antiquitus   receptum  immutare  ,  &  lege  ,  pacïis  ,  etiam  ubi  ea  locum  babeant ,  nec  ■ 
aliis  invitis  jus  competens  auferatur,  teftamentis ,  omnes  à  fe  poffeffas ,  diverji  quam- 
vis anteà  juris  ac  variis  fuccejfionibus  aliifque  titulis  acquijitas  provincias  aut  bona 
in  unam  velut  maffam  feu  compagem  unire   &p  quafi  concorporare ,  atque  ab  Us  in- 
dijlinëtè  omnibus  cùm  mares  fecundo  genitos ,.  alimentis  tantum ,  aut  quœ  eorum  vicem 
fubeunt ,  appanagiis   ajjignatis  ,  fecludere ,  tum  maxime  fœminas    earumque  propagi- 
neniy  modica  concejja  dote,  arcere ,  aut  aliis  fuccefftonem  conditionibus  circumfcr ibère  : 
eoque  jure  Gallium  adverfus  Hifpaniam  aliaque  Régna  £f  ftatus   illorumve  principes 
per  exprejjas  etiam  filiarum  fuarum  renuntiationes  identidem ,  &  fpeciatim  adbuc  in 
pactis  'jiuptialibiLS  Elifabetbœ  Burbonicœ  Pbilippi  quarti  Hifpaniarum  Régis    primes 
cojijugis,  quam  una  cum  omnibus  ex  eo  matrimonio  defcendcntïbus  liberis  à  fuccejfione 
omnium  Regnorum  &  Dominiorum  Patemorum ,  eorum  etiam  in  quibus  pojl  extinàos 
mares  fuccedendi  jus  competeret  fœminis ,  imo  &f  ab  omni  bœreditate  Reginœ  Galliœ 
Matris  fuœ  in  perpetum  fubmovit ,  ufam  effe.     Çhiidni  adverfus  Galliam  idem  fas  fit 
aut  fuerit  Hijpaniœ ,  quam  fingulares  rationes ,  non   una ,  fed  plures ,  publicœ  cf  pri- 
vâtes ,  uti  ad  non  feparanda  feu  dividenela ,  fed  una  £f  indivifa  fuccejfione  ad  feros 
pofteros  tranfmittenda  complura  ,  quibus  potitur  ,  Régna  âf  Ditiones  ,  ita  ad  remo- 
vendas  ab  Us  omnibus  &?  fingulis  Regum  Jùorum  filias  in  familiam  Gallicam  innu- 
bentes  earumque  prolem  omnem  mafculam  £f  fœmineam  incitent  fed  compellant.     Tan- 
tum abeffe  ut  jus  natures  de  bœreditatibus  parentum  ,fratrum  9aut  aliorum  cognatorum 
aliquid  perpétua  obfervandum  prescipiat ,  aut  quœ  lis  modum  Jlatuum  ,  leges  feu  con- 
ventions ,  juri  natures  adverjentur:  ut  apud  omnes  in  confejfo  fit ,  illo  jure  nec  ipfos 
parentes  prœter  educationem  âf  alimenta   liberis  quicquam  debere  ,    ^  jus  divinum 
Ifraèïitis  promulgatum  non  folùm  à  Regno  £?  Patrimonio  publico  filias  femovijfe  ,  fed 
in  privata  quoque  fuccejfione  marium  potiorem  caufam  conjlituijfe.     Longé  adbuc  ri- 
gidiores  fuijje  antiquiores  Romanos  ,   qui  prœter  retenta  vetujlijfima  acquifitionum 
aliaque    patriee   potefiatis  fimul    &    liberrima    emancipationum     e    familid  jura , 
ne  fesminarum    perpetuam  remotionem   ab   omnibus  muneribus  publicis  ,    per    legem 
Cutone ,   lumine   Romani  Senatûs  Juadente  feitam  ,    eas   ab  bœreditatibus  adeo  pro- 
bibuerint ,  ut  îiullus   cenfus  ullam  virginem  aut   mulierem ,   ne  peiter  quielem  imicam 
filiam  hœredem  facere  potuerit ,  etiam  tune  temporis ,  cùm  in    cœteris  illibata  patris- 
familias  de  re  fud  legandi  feu  tejïandi  facilitas  co7ifiitiJJet.     Mitigatam    quidem  per 
intervalla  aliquantijper  illani  feveritatem  fuijfe  3  deterioris  nibilominùs  femper  condi- 

tionù 


Affaire* 


pe. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  e^ 

tionis  in  bœreditatibus  cernendis  âf  fœminas  &?  earum  defcendentes  maribus  illorum- 
que  filiis  manfiffe ,  donec  fero  tandem  ,  non  ad  imper ium  Capeffendum  aut  mimera  gen.  de 
reipublicœ  ambienda  ,  fœminis  via  aperta  ,  fed  in  privatis  bœréditatibus  dijferentia  l'Euk°- 
fexih  nec  non  emancipatorum  atque  in  potejlate  retentorum  Uberorum  tolleretur.  De 
ihofficiofo  tamen  îejlamento  cujufcunque  militis  five  jure  militari  Jive  Civili ,  prout 
libuijjet ,  faëlo  ;  etiam  tum  nec  filios  queri  potuijje ,  utut  nihil  penitùs  Mis  à  pâtre 
relitlùm  effet,  multo  magis  filias  impunè  prœteriri  aut  exbœredari  quiviffe.  Notius 
effe,  quàm  ut  operofa  deduàwie  egeat ,  quanta,  pofi  introduBa  feuda ,  JucceJJionum 
in  Us  diverfitas  apud  varios  populos  femper  fuerit  fcp  quàm  angujlis  finibus  fœmi- 
narum  ad  ea  jus ,  maxime  ubi  feuda  ab  Imperio  Romano  dérivent,  coarâatum  fit, 
certijjimo  argumcnto  ,  nihil  de  ifia  re  jure  natures  definitum  effe.  Abfque  bujus 
dogmatis  veritate  fi  foret ,  illas ,  quee  cùm  in  plurhrtis  regionibus  aliis,  tum  in  Sici- 
iia  œquè  ac  Italia  ,  nominatim  in  Ducatu  Mediohnenfi ,  circa  peregrinos  feu  peregrè 
natos  aut  alienigenas  à  fuccejfionibus  privatis  probibendos  obtinent  leges  &  confuetu- 
aines  crimine  non  vacaturas  :  diffamatam  faltem  ubivis  gentium  in  ejufmodi  bœrédi- 
tatibus jure  Albinagii  fifeo  vindicantis ,  nifi  ubi  major  éf  frequentior  ex  quotidiano 
commerciorum  ufu  aut  alla  commoditate  utilitas  moderationem  extorfiffet  ,  Gallorum 
aviditatem  tanto  minus  exeufandam  effe.  Contra  bonos  mores  quibufdam  legibus  Ro- 
manis aliquamdiu  habita  fuiffe  pafîka  de  bœreditate  viventis  ,  quia  feilicet  votum 
captandœ  mortis  inducerent  :  at  illa  tantimt ,  quœ  ignorante  6f  invito  fièrent  eo ,  de 
eujus  bœreditate  traftaretur ,  quœque  teftandi  libertatem  adimerent ,  non  quœ  ipfo  vo- 
lente  èf  in  eadem  voluntate  ufque  ad  extremum  vivendi  fpatium  perfeverante  ,  non 
item  quœ  prompto  Romanorum  Principum  favore  inter  milites  fatta  fuiffent ,  aut 
quitus  non  bœreditas  quœreretur  fed  abdicaretur.  Ampliora  adbuc  fequentibus  tem- 
poribus  indulta  effe ,  &  non  tantùm  feuda  communiter  refutari  feu  inter  vivos  aliis 
prima  inveftitura  comprebenfis  cedi  &  ad  bis  recipi  femper  potuiffe  ,  fed  £?  alia  bo- 
na  eorumque  fpem  pattis  bodie  atque  contraclibus  tum  matrimonialibuf ,  tum  aliis , 
inter  perfonas  illuftres  prœfertim ,  repudiari ,  transferri ,  Ê?  acquiri  confueviffe.  Dif- 
fufa  extare  volumina  primi  nominis  Juris-Confultorum  Gallorum  ,  ex  quibus  appa- 
reat ,  in  Galliâ  œque  atque  alibi ,  inter  privatos  nobiles  quoque ,  uti  primogenituras 
mafeulinas ,  renuntiationes  filiarum  vigere  ,  Ufque  magis  quàm  ulli  cautelœ  integri- 
îatem  nobilium  familiarum  fuperjirui.  Pronuntiaffe  non  femel  ex  eorundem  Jurïfpe- 
ritorum  fententia  fuprema  Dicafleria  Gallica  :  hujufmodi  renuntiationes  etiam  inter 
privatos  nec  ob  minorent  nec  ob  enormitatem  lœfionis  revocari  poffe ,  maxime  fi  ad 
confervationem  illuftrium  feu  nobilium  familiarum  quamlibet  privatarum  colliment. 
Abundè  ex  Canonibus  &  Romanis  legibus  conftare  :  implenda  effe  omnia  juramenta 
minorennium  fœminarum  non  minus  quant  aliorum,  quœ  fine  periculo  œtemœ  damna- 
tionis  fervari  poffmt ,  £?  perfidiam  ac  perjuriam  nominari ,  fi  quicunque  minor  œta' 
tem  prœtexens  juramentum  à  Je  de  rébus  fuis  prœflitum  retracîare  nitatur ,  aut  tan- 
tîïm Mo  fe  liberari  poftulet ,  nec  ideo  audiri.  Conceffd  vero  etiam  dicis  gratid  in 
quibuflibet  cafibus ,  five  ad  Principes  pertineant ,  Jive  ad  privatos ,  ob  dotis  exgui- 
tatem  renuncîationis  refeiffione  ;  in  hoc  tamen  cafu ,  quem  prœ  manibus  babemus ,  non 
fummam  attendendam  diëfœ  dotis  quamvis  omnium  Hifpanicarum  maximes,  e?  quœprœ- 
tereà  Infanti  Maiœ  Tberefiœ  vel  tum  data  vel  ante  prœfîita  fuerint;  fed  propter  ne- 

ceffmam 


GEN. DE 

l'Euro- 
pe. 


6tf     MEMOIRES,  NEGOTI AXIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    cefiariaM  &  indiffohibilem ,  quœ  à  contrahentibus  reputabatur ,  pacis  Pyrenœœ  £f  Ma* 
trimonii  unionem ,  fimul  confuleranda  immcnfa  &f  inœftiraabilia  commoda  5  quœ  non 
minus  favore  âf  defiderlo  matrimonium  ineundi  per  pacem  ifiam  ab  Hifpania  ad  Gal- 
liam  tranflata  funt ,  ac  matrimonium  ipfum  ceu  convenïentiffimum  médium  paci  pro- 
movendœ  &f  fiabiliendœ   adbibitum  fuit.     Caufam  ut  non  petites,  à  Gallia  ,   ita  ab 
Hifpania  non  folutœ  die  conventa  vel  alia  dotis  pênes  Galliam  refidere  câm  nec  rati- 
babitionis  à  Rege  &?  Regina  ChrljiianiJJimis  continuo  pojl  nuptias  celebrata*  ,  adeo- 
que  ante  die  m  reprœfentationi  dotis  prœfiitutum  ex  patio  faciendœ,  Jeu  iter.tndœ  re- 
nuntiationis ,  ejufque  in  monumenta  publica  fummi  Senatils  Parijienjîs  regerendee  In- 
fini mentum  ,  Régi  Philippo  ad  illius  mortem  ufque  exbibitum ,  nec ,  Gallis  fatenti- 
bus  ,  ipfa  promiffa  ratibabitio  feu  iteratio  &  publicatio  expleta,  doti  etiam  tefiamento 
Philippi  Ouarti  fpontè  oblatœ  impreffio  Belglca  preelata  fuerit,  baneque  Gallia  feu 
culpam ,  feu,  quœ  ex  Scriptis  Gallicis  clareat ,  diu  meditatam  fraudent  &  peffimè  con- 
fultam  proprii  juramenti  violationem  o.lknœque  rei  violentam  iiwafionem  ullatenus  aut 
Mi  pro défie  aut  Hifpania  nocere  non  debere.     Et  fi  effet  quod  jure  firictifiimo ,  id  efl, 
iniquifjimo ,  imputari  Hifpaniœ  pojfet ,  quod  tamen  perpenfis  omnibus  circumfiantiis 
nec  ii,  qui  fyllabarum  apices  aucupari  &f  cunciorum  afàibus  injîdiari,  non  menîem 
aut  cequitatem  feclari  amant  ,  facere  abfque  pudoris  labe  queant  ,  purgari  fecundum 
praxin  quotidianam  cum  in  aliis  promiffionibus  ad  diem  certain  factis ,  tum  prœpri- 
mis  in  dotis  folutione  moram  poffe  &  folere.     Hanc  faltem  non  aliud  operari ,  quàm 
ut  una  cum  folutione  débita  fortis  pœnam  adjectam  prœjiare  ,  aut  damnum  quod  ex 
mora  emerjiffet  ,  promijfur  farcire  teneatur  ,  non  ut  conventio  ipfa  omnifque  mutua 
obligatio  penitùs  aboleatur.     Commifforiam  legem  in  nulla  conuentione  fubintelligi  feu 
fuppleri  poffe ,  fed  ut-locum  inveniat ,  difertis  verbis  exprimendam  atque  tum  etiam 
odiofam  effe ,  feu ,  quœ  propria  juris  vox  efl ,  difplicere  &  reflringi  debere.     Nullam 
in  toto  contextu ,  quem  Jupra  retulimus ,  talem  claufulam  aut  quœ  eo  tendat  ,  reperi- 
ri ,  fed  potiùs  facultatem  folàm  petendi  dotem  promiffam ,  donec  fohatur ,  refer-vatam 
fidjfe  ,  nec  antequam  eam  confequatur ,  acquiefeere  feu  contentam  effe  renuntiantem  co- 
gi.     Ex  articulis  quinto  &?  fexto  Paftorum  Connubialium  elucere  :  càm  dotis  promiffio 
£f  folutio  feu  petitio  Articulo  fecundo  enuntiata  effet,  non  ob  illam  ,  fed  propter  alias 
longé  jufiifjimas  £f  prœgnantiffimas  rationes ,  quorum  parte  univerfi  orbis  tranquilli- 
tas  continetur,  exclufionem  Gallici  fanguinis  à  quibufvis  Hifpanici  juris  regnis  âf  di- 
tionibus ,  œterna  &?  immutabili ,  non  ex  promifiione  aut  folutione  dotis  fufpenfa ,  fed 
prœfenti  £f  abfoluta,  nonfolum  non  renuntiatione  arbitraria  filiœ,  fed  necejfaria  lege 
feorfim  Janclri ,  aut  quœ  antè  in  ufum  venerat ,  rurfum  firmari.     Subfcripfijfe ,  ut 
fupra  audivimus ,  Infantem  Mariam  Tberefiam  ante  initum  matrimonium  duplici  tum 
renuntiationis  tum  exclufionis  feu  cejjionis  inftrumento ,  &?  altero  quidem  fucccffiones 
omnes  repudiaffe ,  altero  regno  êf  principatus  feu  illorum  fpem ,  nulla  vel  minima  men- 
tione  dotis  faëla  ,  abdicajfe ,  feu    legi  id  fiatuenti  Jîmpliciter  fe  fubmififfe ,  edque  de 
caufa  inprimis  &  articulum  33.  Pacis  Pyrenœœ  eo ,  quem  indicavimus ,  modo,  con- 
ception, Renuntiationemque  adeo  cefjionem  &  tranflationem  in  illd  iteraîam ,  âf  omnia 
fie  tranfaàa,  conjunSlim  &  feparatim  ,  in  mimer um  legum  perpeîuarum  repetitis  rcici- 
bus  recepta  fuiffe.     Ad   bœc  facienda  ,  quamvis  in  transferendis  mutub  per  pacem. , 
bdli  finiendi  ergo  fubditirum  juribus  illorum  confenfus  aut  diffenfus  rarb  attendi  folsat 

aut 


GEN.    DE 

l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  637 

aut  poffit ,  nulîd  vi  Infantem  Mariam  Tberefiam  ab  indulgentiffimo  non  folàm  fif  a-  Affaire* 
mantijjimo  pâtre,  fed  mitiffimo  erga  omnes Principe ,  adaclam  fuijfc,  necullum  ejus  rei 
ullibi  unquam  indicium  apparuijje  ,  fed  tejîante  geftorum  ferie  £? ,  quœ  extat ,  ultro- 
nea  déclarations  ,  liberrima  omnia  illius  voluntats  psraÏÏa  ejje ,  perinde  atque  ipfe  Rcx 
CbrijlianiJJlmus  omnem  à  fe  ,  cùm  ad  ea  author  fieret  iliaque  rata  habcret ,  metum  £? 
coaàionem  procul  abfuijje ,  baud  dubiè  libens  confiteatur.  Niji  fortajje  expeditiffimo 
ad  infringendas  feu  eludendas  quafcunque  mutuas  conventions ,  tranfacliones ,  &f  paci- 
ficationes  commento  ,  metus  ,  violentia ,  &?  coacVio  ,  quam  jura  probibeant  ,  nominari 
velit  ,  çuod  ,  uti  innuimus  ,  abfque  ijlbac  renunciatione  ,  abdications  ,  csffions ,  nec 
matrimonium  boc  fortin,  nec  per  pacem  tôt  &  tanta  commoda  confequi  Gallia  potuif 
fet,  eo  fcilicet  fine,  ut  perceptis  &f  retentis  à  Gallia  commodis ,  nibilominus  id  quoi 
in  mutuâ  prestations  molejlum  ejl ,  declinars,  feu  abs  fe  amoliri  queat.  Nulld  tan- 
dem rations  faciliùs  atque  ipfa  Isiïions  Scriptorum  Gallicorum  intelligi  aut  mente  con' 
cipi  pojje ,  quàm  levia ,  quàm  mania ,  quàm  frivola  Jint  omnia  effugia ,  objeftiones , 
iîitsrprstationss ,  detorjiones,  uno  aptiffimo  vsrbo  offuciœ  ,  quibus  ex  genio  &  ufu  gen- 
tis ,  omnia  patta  ,  conventions* ,  fœdera ,  promiffionss ,  csjjionss,  difpofitionss ,  tefia- 
menta,  claufulas ,  leges ,  canonss,  facramsnta,  execrationes s  non  tam  ferio  adoriri, 
refellere ,  enervare,  convellere ,  Ucèt  fruftra  conentur  ,  quàm  vel  captatà  literuld  in 
perverfum  &  non  raro  contrarium  fenfum  trabere  aut  aliàs  eludere,  vel  apertè  cavil- 
lari  S5  calumniari ,  imb  proprio  dolo  &  fids  à  fs  rupta  gloriari ,  indsqus  caufefuce 
patrocinium  arceffere  non  vereantur.  Paucis  nunc  dilucidioris  sxplicationis  gratia 
nojlro  jure  addimus  :  cùm  res  ijta  non  tantùm  Regem  Pbilippuin ,  fed  omnes  Cogna- 
tos  integri  juris  omniaque  illi  fubjsàa  régna  &  provincias  fpeàarit ,  nequs  ex  more 
in  Serenijfima  Domo  Aufiriaca  utriufqus  linece  nunquam  non  obfervato ,  in  matrimo- 
nia  Gallica  cum  duobus  Regibus  Ludovicis  ineunda,  vel  Sacra  Cefarea  Majeflas  vel 
illius  Parentes  aliter  confenferint  ,  quàm  ut  Isx  base  fsmpsr  incolumis  effet  ,  nec  ei 
unquam  contr  avenir  etur ,  jus  familles  Germano-Aufiriacœ  ipfique  adeo  Sacrœ  Cœfarccs 
Majefiati  £f  illius  Liberis ,  aliifqus  Cognatis  familiis  femel  qucejîtum  &  fœpiùs  réno- 
vation ,  per  nullum  Jive  Pbilippi  Jive  illius  Miniflrorum  fivs  aliorum  quorumeunque 
pofterius  faquin ,  multb  minus  per  ipforum  omiffionem  aut  culpam  feu  quameunque 
cujufvis  temporis  moram  ulli  eorum  cognatorum  eripi  ,  aut  in  Regnorum  Hifpanico- 
rum  fcf  fubjeftarum  regionum  prœjuàicium  quicquam  mutari  potuiffe  aut  poffe  ,  fed 
non  objlantibus  quibujlibet  omiffionibus  aut  faftis  alienis ,  quibufque  omnss  £?  Jinguli 
Cognati  ad  fuccejfionem  vocati ,  Hifpanicaqus  Régna  sorumvs  Jlatus ,  affenfum  non 
prœbuerint ,  omnia  Mis  competentia  jura  &f  bénéficia  intemerata  femper  psrmanfiffs  & 
in  csvum  permanfura  effe. 

Supereft  poftremo  loco ,  ut  ex  Tejlamento ,  qubd  Régis  Caroli  nomine  divulgatum    Ultïmo 
eft,  verba  hue  pertinentia  recitemus  &?  excutiamus ,  adbibita  maxima ,  quoad  fuis  ali-    locotefk- 
quando  vocabulis  appellanda  res  patitur  ,  moderatione,  ea  licet  indigni  merito  exijli-    ™entum 
mentur  ,  quos  iftbœc  macbinatos  effe  publica  fama  loquitur.     Sunt  autem  bujufmodi:    Caroh  H 

nomine 

Agnofcens  etiam  juxta  diverfas  confultationes  Miniiirorum  flatus  &  ju-    vuigatum 
flitiœ  ,  rationem  ,  in  quâ  feu  fuper  quam  fundatur  renuntiatio  Domina-   recitatur, 
rum,  Domnae  Annsc,  &  Domnse  iMariae  Therefiae  Francise  Reginarum, 
tome  XL  Oooo  mea- 


638    MEMOIRES,  NEGOTI ATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   mearum  Amkx  &  Sororis ,  feu  abdicatio  fucceffionis  in  haec  régna  ,  illam 

GEN.   DE 

l'Euko- 


extitifle  ,  ut  evitetur  praejudicium  unionis  cum  Coronâ  Francis:   perfpi- 


PE. 


ciens  fimul ,  cefTante  iltâ  ratione  movente  fundamentali,  fucceffionis  jus 
fubfïïtere  in  proximo  Cognato  fecunduin  Regnorum  horum  leges,  hunc- 
que  ipfum  cafum  exiltere  in  filio  fecundo  genito  Delphini  Francise)  ideô 
régulas  fequens  dielarum  legum  declaro,  fi  volente  DKO  abfque  liberis 
deceflero,  fuccellbrem  meum  futurum  Ducem  Andegavenfem  filium  fe- 
cundum  Delphini,  euraque  ut  talem  ad  fucceflionem  voco  omnium  meo- 
rum  Regnorum  &  Dominiorum  nullâ  omnino  parte  excepta.  Mando  quo- 
que  ëi  praecipio  omnibus  meis  Subditis  &  Vafallis  omnium  meorum  Re- 
gnorum &  Dominiorum,  ut  eveniente  memorato  caiu  mortis  mea:  nullâ 
légitima  fobole  reliétà,  illum  habeant  &  agnofcant  Regem  Dominum  fuum 
naturalem ,  ipiique  ftatim  &  abfque  minimà  dilatione  realem  poireiîionem. 
tradant,  prxvio  Juramento  quôd  obfervari  faciet  leges  ,  Itatuta  &  con- 
fuetudines  Regnorum  &  Dominiorum  meorum.  Quia  porro  mens  mea 
eft  ,  expeditque  paci  Chriitiani  orbis  ac  Europse  totius  ,  imprimis  verô 
tranquillitati  meorum  Regnorum ,  ut  Monarchia  ifthaec  femper  feparata  à 
Coronà  Franciœ  maneat,  ilatuo  confequenter  antedictis,  ut  Duce  Ande- 
gavenfl  diem  obeunte  aut  ad  fucceflionem  Gallicam  vocato  ejufque  adep- 
tionem  poffeflioni  hujus  Coronas  prseferente,  tune  ipfa  hujus  Monarchies 
fucceffio  eâdem  ratione  transferri  debeat  ad  Ducem  Bituricenfem  filium 
tertium  Delphini.  Sin  &  Dux  Bituricenfis  fato  fungatur  aut  in  Regno 
Francise  fuccedat,  iftis  Cafibus  defigno  &  voco  ad  fucceflionem  Archi- 
Ducem  fiiium  fecundogenitum  Imperatoris  Avunculi  mei  ,  exclufo  per 
eandem  rationem  damni  feu  praejudicii  in  falutem  publicam  xefukantis  fllio 
primogenito  Imperatoris  Avunculi  mei.  Ubi  verô  Archi-Dux  defecerît, 
illo  cafu  nomino  &  voco  ad  fucceiïionem  Ducem  Sabaudise  illiufque  filios. 
Atque  hoc  modo  voluntatem  hanc  meam  ab  omnibus  meis  Vafallis  exe- 
cutioni  mandari  jubeo,  prout  propria  illorum  fa  lus  exigit,  nec  minimam 
permittentibus  divifionem  aut  imminutionem  Monarchie  tanta  cum  glo- 
ria  à  meis  progenitoribus  confràtutae.  Quia  verô  maxime  mihi  cordi  efl 
unîcèque  defidero  ,  ut  pax  &  unio  Chnitianitati  tam  proficua  inter  Im- 
peratorem  Avunculum  meum  &  Regem  Chriilianiflimum  confervetur,  il- 
los  rogo  &  exhortor,  ut  ea  per  vinculum  matrimonii  inter  Ducem  Ande- 
gavenfem &  Archi-DuciiTam  initi  arclàùs  adiïri&a  iflo  medio  neceiTariam 
Europa  quietem  confequatur  &c.  &c. 

2.  Oclobris  Anno  1700. 

Examina*    s-\U?s  hœc  legens  *vel  audiens  non  âoleat  vicem   picntijjîmi  cœtera  Principis 

V^f    13  Domûs  fuœ  ,    dum  fanus  erat  ,  amant ïf]i mi  ,  potuijfe  paucos  aliquos 

rei  augendœ  tantltm  intentos  ,  vel  odio  &  invidiœ  li  tant  es  ,   aut  a  lias  perver- 

fos  illius  œgritudine  13  mentis  imhecilïitate  ita  abuti  ,    ut  ipfius    nomir.e  pro- 

prium  feelus  peragerent  eumque  adeo  reum   orbi   oftentarent   non   ingratitudinis 

folîim  fed  injujiitiœ  in  propriam  Familiam  de  ipfo  ejufque  Regnis  (3  Ditioni- 

bus 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  630 

bus  optimè  meritam  omnium  enormifjimœ  ,  quant  labem  nulla  temporis  vetuf-  Affaires 
tas  eluere  unquàm  valeat.  Cui  enim  verifimile  videri  qucat  ,  Principem  °fN'  DK 
hune  ,  fi  mentis  compos  tune  fuijfet  ,  &  qués  deferiptâ  claufulâ  continent ur , 
perpcndifj'et ,  vel  etiam  obiter  rejcijjet  ,  eo  adduci  potuifje  ,  ut  contra  innume- 
ras ,  cum  alias  fœpe  tum  paulb  ante  teftamentum  ,  quod  illi  trihuitur  condi- 
tum  ,  ore  &  feriptis  litteris  à  fe  fanclifjime  faclas  promijjiones  &  offert  io- 
nes ,  tant  indigna  perpétrant ,  totque  fimul  pacliones  &  fancliones  multis  com- 
munium  majorum  vigiliis  excogitatas  ,  plurimoque  univerfa  Domûs  fanguine 
£î?  non  unius  ad  eam  antiquo  jure  Jpeclantis  provinciœ  jaclurà  redemptas , 
faucifjimis  juxta,  &  falfifjimis  verbis  ,  quantum  in  fe  effet  ,  evertere  vellet. 
Ait  cognovifle  fe  juxta  diverfas  confultationes  Miniftrorum  Status  &  Juflitîse 
(nempè  talium  ,  qui  vel  manifefti  pnevaricatores  feu  transfuge  fint  nobilijve 
jlirpis  degener  progenies  ,  vel  alii  ,  quàm  quorum  majores  quive  '  ipfi  tabidis 
matrimonialibus  &f  tejlamentis  prœcedentwm  Regum  Hifpanicorum  exprefjï 
funt ,  Comitiijve  Regni  interfuerunt ,  vel  anterioribus  Gallorwm  prœtenfiombus 
refetieyidis  £s?  depellendis  operam  navarunt)  rationem  quâ  Renuntiatio  utriuf. 
que  Infantis  Ànnae  &  Mariae  Therefiae  {valida  utique  etiam  fe  judicc  & 
nullatenus  convellenda  feu  impugnandd)  nititur  ,  la  razon  en  que  fe  funda 
la  renuncia  ,  illam  extitiffe ,  ut  evitetur  periculum  Unionis  Monarchiae 
Hifpanicae  cum  Galliâ.  Avus  verb  illius  &  Pater  ,  toto  Regno  vel  potius 
Orbe  univerfo  audiente  &  applaudente  ,  nec  Gallicis  Scriptoribus  negantibus , 
in  Paclis  connubialibus  alibique  non  unâ  Unionis  amoliendœ  occafonumque  eo 
tendentium  prœcavendarum^  fed  etiam  œqualïtatis  feu  œqualis  fucceflonis  inter 
utrumque  Regnum  retinend£  caujâ  cœterijque  rationibus  relatis  ,  alias  adhuc 
fuiffe ,  quibus  moti  ad  hanc  exclujionem  Jiabiliendam  defeenderint ,  apertè  tra- 
dunt  :  hœc  certè  Unionis  avertendœ  ratio ,  fi  fola  fuifj'st ,  fœminarum  Gallica- 
rum  &7  ab  iis  defeendentium  exclujionem  ab  Hifpanica  fuccejjïone  unquàm  per- 
fuafiffet ,  quas  tarnen  non  minus  ac  mares  Gallicos  ab  Hifpaniœ  Regnis  exclu- 
di  confiât  ,  cum  in  Galliâ  faltem  hodie  fuccedere  nequeant.  Pcrgit  Carolus  : 
Perfpexifle  Te  ceffante  iftâ  ratione  fundamentali  fucceffionis  jus  fecun- 
dùm  Hifpaniae  leges  in  proximo  cognato  adeôque  in  filiis  fecundo  & 
tertio  Delphini  fubfiftere  ,  quia  fcilicet  ante  cos  alii  ad  fucccffionem  Galli- 
cam  vocentur  ,  &  ce(fante  feu  déficiente  ratione  legis  ipfa  quoque  lex  cefjare 
debeat.  Quis  verb  vulgari  huic  juris  rcgulœ  locum  unquàm  fecit ,  ubi  plures 
in  lege  ferendà  rationes  concurrerunt ,  quœ  in  cafu  ex  kge  illâ  àijudicando  non 
omnes  cefjare  nofeuntur  ?  a  ut  qui  s  etiam  à  fecundo  &  tertio  filio  Delphini 
Unionis  metum  abefje  abfuturumve  ejfe  fuo  periculo  affirmaverit  ?  quid  déni- 
que  Pat  ri  £5?  Avo  ,  optimis  abfque  controverfià  vo.untaîis  &  conventionis 
propriœ  legumque  à  fe  latarum  interpretibus ,  vel  potius  utrique  contrahentium 
parti  abfque  calumnia  aut  impietate  refpondebitur ,  qui  paclis  connubialibus  & 
alibi  exertijfime  caverunt  ,  omnes  lnfanturn  Gallue  nuptarum  liberos  & 
defeendentes ,  mares  &  fœminas  ,  excludi  &  pro  exclufis  haberi  debe- 
re ,  quamvis  ifti  vel  ex  iis  aliqui  prsetendere  vellent  aut  poffent ,  in  il- 
lorum  pe.rfonis  locum  non  invenire  nec  confiderari  poire  aut  debere 
rationes  expreffas,  aiiafve,  quibus  ceu  fundamento  excluiio  ifthacc  inni- 

Oooo  2  ti 


640    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  ti  poflet.  Caterum  Hifpaniœ  leges  in  Regni  fuccejjlone  fequendas  efie  adeo 
gfn.  df  non  negamus  ,  ut  eam  ex  illarum  prœfcripto  adornari  pojiulemus  ,  illud  ftmul 
L  pertendentes  ,   anterioribus  per  novijjimas  derogari  ,  hafque  cum  partis  connu» 

—  bialibus  juxta  exprejfa  m  ils  Legis  firmae ,  ftabilis,  &  çeternae  verba  contineri, 

tum  in  recentiorïbus  Regni  Commis  promulguas  in  novo  legum  Hifpanicarum  Co- 
dice  reperiri.     Peffime  verb  &?  contra  legum  harum  tenorem  porrb  infcrt  Caro- 
lus  :  Idée  à  fe ,  fi  abfque  liberis  deceffiifet  ,  fucceflbrem  Regnorum  fuorum 
declarari  &  vocari  fecundo  genitum  Delphini  Ducem  Andegavenfem ,  il- 
loque pariter  defun&o  Delphini  filium  tertio  genitum  ,  cum  per  ilîas  ipfas 
leges  non  femel)  fed  fiepiùs,  £5?  ipfie  Infantes,  non  folum  confiante,  fed  etiam 
foluto  matrimonio  Gallico ,  non  improli  ,  &  earum  liberî  Gallici  omnes 
mares  &  fœminee,  illorumque  defcendentes,  primo,  fecundo  ,  tertio,  aut 
quarto  loco  geniti ,  in  infinitum  omnes ,  nullâ  diltinftione  gradûs  atten- 
ta ,  etiamfi  Regum  Catholicorum,  qui  tum  fuerant,  aut  unquam  fuccef- 
furi  efTent ,  Itirps  non  mafcula  tantùm  fed  univerfa  extingueretur ,   abfc 
que  ullà  cogitati  vel  non  cogitati  cafùs,  temporis,  modive  exceptione, 
ab  omni  Ditionis  Hifpanicae  praefentis,   praeteritac  &  futurse  parte  etiam 
feudali  excludantur  ,   &  exclufi   declarentur  ,    non   aliter  ac   SI  NATI 
VEL  IN  LUCEM  EDITI  NUNQUAM  FUISSENT.    Cur  autem  ex 
futili  bâc  argument andi  ratione  non  eâdem  opéra  Dux  quoque  Aurclianenfis  ad 
fuccejfioncm  vocatus  fed  plane  prœtcritus  fuijfet ,  ni  fi  tpfa  ver  i  tas  fateri  corn* 
pulifjet ,  non  attento  remotiore  illius  in  Galliâ  fuccedendi  ordine  ,  eum  nihilo- 
minus  ob  illimitatam  renuntiationum  validitatem  unà  cum  Rege  Chriflianijfi- 
mo  £s?  fil  10  Delphino  ejufque  primogenito  ab  Hifpanicâ  fuccejjïone  penitus  ex- 
clufum  ejfe  &  manere  ?     6)uis  non  magis  fecundum  Regulam  juris  à  Carolo 
citaiam  hinc  colligendum  putet ,  quamvis  in  illius  poteftate  fuijjet  ,  uti  refra- 
gantibus  téfiamentis ,  Avito  &  Paterno  ,  totque  reclamantibus  legibus  &  ju- 
ratis  atque  à  Sede  Apoflolicâ  confirmatis  consent ionibus  non  fuit ,  ifihœc  dif- 
pofitio  feu  déclarât io,  ipfummet  tamen  noluifie  ,  eam  valere  ,  fi  pervidere  po- 
tuiffet ,  rationem  à  fe  exprejfam,  cui  uni  &  Joli  apertijfime  fuperfirucla  fuit, 
manifefiè  deficere  ,  adebque  nec  Andegavenfem  nec  Bituricenfem  Duces  ab  ipfo 
vocatos  cenjèri  debere.     Omnium  autem  iniquijjîmum  atque  abfurdiffimum  ejl , 
tertio  loco  Archi-Ducem  Imperatoris  fecundo  genitum  vocari  ,   exclufo 
ob  rationem  antè  commemoratam   &   ad  sequalitatem  fervandam ,    cum 
fobole  primogenito  Rege  Romanorum  ,  omiffifque  penitus  filiabus  Aufiria- 
cis ,   fubftituto   demum   in   dericientis  Archi-Ducis   locum  cum  flliis  Sa- 
baudiae  Duce.     Et  nos  equïdem  inter  Hifpania  fucceffores  ,  fed  pofi  Domum 
Aufriacam  hune  Ducem  numeramus^  adebque  &  illi  injuriam  faclam  affeve- 
ramus ,  duobus  Gallicis  Principibus  pralatis  ,  quos ,  uti  funt ,  omnino  exclu fos 
eportuit.     Domum  Aufiriacam  vero  utriufque  fexûs  &  cujufcunque  dignitatis 
non  aliter  ad  Hifpanicam  fucceffionem  admittere  velle ,  ut  per  egregios  hojce  novi 
juris  autlores  Gallic£  familiœ  ad  illam  aditus  pateat  ,  etiam  nobis  tacentibus 
perinde  effe  quivis  intelliget ,  atque  apertè  profit  en ,  nolle  eos  ,  fi  pênes  ipfos  fia- 
ret ,  ut  Domui  Auftriacœ  nullœ  Hifpanicâ  leges ,  antiquœ  vel  récent iores  ,  ulla 
priorum  Regum  dijpofitiones ,  ullœve  pacliones  connubiales  aliœve  amplius  auàm 

iilis 


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RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  641 

illis  fedeat,  fuffr agent ur  :  negare  clenique  contra  vêlera  £5?  nova  exempla,  Hifpa-  Affaires 
nia  Reges  aut  unquam  Imper io  Romano  prafuisfe  aut  ilhul  ambuisfe  feu  ad  id  GfN-  Dï 
afpirare  potuisfe.     Qjiod  fub  fi  non  annectitur  de  pace  &  concordiâ  inter  Im-    L  £uR0* 

peratorem  &  Regem  ChriltianitTimum  non  folîirn  confervandâ  ,  fed  etiam  ! 

per  matrimonii  nodum  arftiùs  conilringendâ  ,   id  ad  fucum  Carolo  facien- 
dum  necesfarium  fuit  ,    quaji   conftlio   if  hoc    &    obîefatione   confeientia  la  fa 
abundè  fatisfaclum  ,    omnifque  Domni  Anfiriaca  illata  injuria  plcnè  reparata 
esfet,  cum  ne  mine  m  lateat ,  qua  cujufvis  injufiitiâ  colendà  &?  cuique  tribuendâ 
obligatio  fit,  quid  Pater  liberis  ,  quid  legitimus  Princcps  fubditis  debeat  ,  quid- 
que  adeo  Imperatorem ,  ut  ut  pacis,  fi  ea  honefie  frui  liceat ,  fludiofijjimum  age- 
re  oporteat.     Quicquid  veto  fraudis  aut  violent ia  adhibitum  haclenus  fuerit ,  vel       „.  .. 
in  poflerum  admitti  poffït ,  aderit  profeclb  jufia  caufa  ope  fuâ  Author ,  tefiis  &   ^"j  s 
eufios  fœderum  Deus  :  confurgent  ad  coercendam  immancm  non  unius  Orbis  Bur-   DEU.VT 
boniam  cupiditatem  cum  reliqui  Europa  Principes  &  Status  ,  tum  praprimis    &  Homf- 
Pacis  Pyrenaa  aliarumque  explicitarum  conventionum  vindices  :  ipfi  etiam  popu-   "es  haud 
/;'  peregrinam  nunc ,   quà  funî  oppreffi ',  manum  non  magis  ofculantes  quàm  exe-   Jju!f 
crantes  ,   experta  per  tôt  facula  Auflriaca  lenitatis  officiique  fui  memores  ad   phaturâ. 
prifiinum  mox  obfequium  palam  redibunt ,  perfidis  jufiitia  temeratoribus ,  per- 
vaforibus  £5?  tyrannis  ,  eorumque  ajfeclis  ,  fatellitibus  ac  mini/Iris  pœnas  Di- 
vinas  atque  humanas  haud  dubie  non  evafuris, 


Remarques  fur  les  Affaires  du  Tems  prefent ,  traduites  de  VAn-  Remar- 
glois  :   depuis  le  26.  Février  (8  Mars)  juf qu'au  5  (1?)         îwAffd- 

MarS)  1701. 

1 .  Réflexions  fur  les  Préparatifs  de  Guerre  faits  en  Hollande .  z.  Sur  Je 
dernier  Mémoire  préfenté  aux  Etats-Généraux  par  Mr.  le  Comte  d Avaux. 
3.  Le  Caraclére  ,  que  le  Cardinal  de  Richelieu  a  attribué  aux  Efpa- 
gnols ,  apliqué  préjenttment  aux  François.  • 

SI  le  dernier  Mémoire  ,  préfenté  à  Sa  Majefté  par  l'Ambafladeur  de 
Hollande,  n'étoit  pas  fuffifant , pour  convaincre  la  plupart  des  perfon- 
nes,  que  les  Etats-Generaux  n'a  voient  point  péché  contre  la  Politique,  en 
reconnoiffant  le  Duc  d'Anjou  pour  Roy  d'Efpagne ,  que  la  chofe  ne  tire 
à  aucune  conféquence ,  &  qu'ils  ne  feroient  point  de  Traité  avec  la  Fran- 
ce ,  ni  avec  l'Efpagne,  fans  le  confentement  de  l'Angleterre  &  des  autres 
PuifTinces  intéreffées  à  la  Faix  de  l'Europe  ;  il  eft  à  croire  que  ks  grands 
Préparatifs  ,  qui  fe  font  préfentement  en  Hollande  ,  pour  s'oppofer  aux 
Ennemis ,  feront  ouvrir  les  yeux  >  &  qu'on  reconnoîtra  la  fidélité  des  Hol- 
landois  pour  l'intérêt  public.  Il  leur  feroit  difficile  d'oublier  la  Cruauté 
avec  laquelle  ils  ont  été  traitez  en  1672.  lors  que  Louis  XIV.,  fans  aucun 
fujèt,  fut  afTez  injuite  pour  venir  fubitement  fondre  fur  eux  avec  une  piaf- 
fante Armée ,  qui  les  auroit  engloutis ,  fans  la  conduite  &  le  courage  de 

Oooo  3  nôtr 


res  du 
Tems. 


«^ 


PE. 


642     MEMOIRES,  NEGOTIATIO  NS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires    nôtre  Grand  Roy ,  alors  jeune  Prince  d'Orange  ,   lequel  ranima  les  Peu- 

gev    de    pi^g  par  fon  exemple. 

l'Euro-  ||  ne  £luc  pOUlt  s'imaginer  que  la  République  de  Hollande  puifTe  fe  bif- 
fer gagner  par  aucun  moïen.  Elle  a  pour  Chef  un  Confeil  qui  eit  toujours 
attentif  à  la  confervation  de  les  Membres,  &  qui  ne  manque  point  de  ré- 
veiller fes  voitins  aux  aproches  d'une  tempête.  Comme  il  eit  certain, 
que  le  Roy  de  France  prend  toujours  pour  injultice  de  la  part  des  autres, 
ce  qui  n'eit  qu'une  précaution  néceffaire  pour  une  jufle  défenfe,  il  paroic 
qu'il  elt  fort  irrité  ,  non-feulement  contre  les  Hollandois  qui  témoignent 
un  fi  grand  zélé  pour  prévenir  le  danger*  mais  auiïi  contre  les  Anglois,qui 
embralTent  leur  parti  :  il  les  menace  tacitement ,  parce  qu'ils  ne  veulent 
point  prêter  l'oreille  à  aucun  Traité  particulier;  c'eft  aufïi  leur  intérêt  de 
rejetter  ces  fortes  de  propofuions, devant  être  perfuadez,  qu'ils  feront  fe- 
courus  par  leurs  Voilîns ,  lesquels  font  pleinement  convaincus  qu'il  n'y  a 
rien  de  bon  à  attendre  du  Roy  Très-Chrétien  ;  &  encore  moins,  lors  qu'on 
luy  voit  f  lire  de  fi  grands  préparatifs,  avec  des  circonitances  qui  doivent 
être  regardées,  comme  le  prélude  certain  d'une  rupture. 

On  nous  dit  que  ,  fi  "Philippe  de  Macédoine  n'obfervoit  aucuns  Trai- 
tez que  ceux  qui  fe  trouvoient  conformes  à  fes  intérêts,  &  que,  fi  l'on 
a  vu  en  un  même  jour,  par  fon  confeil ,  la  paix  fuivie  de  la  guerre,  pour 
laquelle  il  ne  manquoit  jamais  de  prétexte  ,  nous  n'avons  pas  raifon  de 
nous  plaindre  de  ce  que  Louis  XIV.  tient  une  pareille  conduite,  quand 
l'occalion  s'en  préfente.  Certainement ,  fes  Sujets  font  fi  fubtils ,  pour  dé- 
couvrir quelque  forte  de  juitice  dans  tout  ce  qu'il  luy  plaît  d'entreprendre, 
que  l'homme  le  plus  éclairé  &  le  plus  pénétrant  auroit  peine  à  détruire 
ces  beaux  prétextes  ,  quelque  injuftes  qu  ils  foient  en  eux-mêmes.  Ne 
nous  difent-ils  pas,  par  exemple,  que  fi  par  le  paifé  la  France  a  eu  inté- 
rêt de  chercher ,  à  faire  naître  de  la  mefintelligence  entre  les  Provinces- 
Unies  &  la  Monarchie  d'Efpagne,  il  eit  prefentement  de  leur  intérêt  de 
leur  infpirer  une  intelligence  parfaite  avec  cette  même  Monarchie.  Mais 
les  Etats  n'ignorent  point  ce  qui  a  été  dit  par  Manlius  ,  fçavoir  ,  que  le 
meilleur  moien  pour  conferver  la  Paix,  c'eft  de  fe  préparer  à  la  guerre,  de 
telle  manière  qu'on  fe  trouve  toujours  en  état  de  s'oppofer  à  toute  entre- 
prife  illégitime,  &  qu'une  telle  précaution  arrêtera  indubitablement  toute 
prétention  de  l'Ennemi.  De  plus,  ils  connoiflent  très-bien  que  leur  con- 
fervation elt  de  la  dernière  confequence  pour  celle  de  l'Angleterre.  Auflî 
doivent- ils  fe  tenir  affurez  d'être  fecourus  de  toutes  les  forces  de  leurs  Voi- 
fms, entièrement  intéreffez  à  prévenir  leur  ruine;  laquelle  ne  manque- 
roit  point  de  donner  au  Roy  de  France  les  moiens  de  pourfuivre  fes  def- 
feins  contre  la  Liberté  de  l'Europe. 

Mais ,  pourquoy  fe  méfier  des  bonnes  intentions  de  Louis  le  Grand  ?  il 
a  toujours  été  fi  généreux ,  qu'il  eltimeroit  une  lâcheté  de  fonger  à  fur- 
prendre  aucun  de  fes  Voifins.  Peut-on  remarquer  aucune  de  fes  entre- 
prifes  qui  n'ait  eu  la  juitice  pour  fondement  ?  Non  afTurément;  jamais  il 
n'a  formé  de  projet  qui  ne  fut  directement  pour  le  maintien  de  la  Paix 

de 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,   M.  DCC.   I.  ty 

de  l'Europe  ,  &  pour  procurer  quelqu'avantage  à  Tes  Voifins.  S'il  fait  affaires 
aujourd'huy  p  aller  des  Troupes  dans  la  Flandre  ,  &  s'il  remplie  de  Sol-  <#*•  de 
dâts  les  Villes  les  plus  proches  de  la  Hollande  ;  c'eit  feulement  comme  L'E^H0" 
Ami,  afin  d'être  à  portée  pour  fecourir  cette  République  contre  quelque 
Ennemi.  Qui  fçait  il  ce  n'eft  point  cqritre  le  Czar  de  Mofcovie,  ou  con- 
tre le  Grand  Seigneur,  auprès  duquel,  &  par-tout  ailleurs,  ce  Monar- 
que aiant  beaucoup  d'EmiiYaires  par  le  moien  de  Tes  Louis  d'Or,  il  a  pu 
découvrir  quelque  deifein  contre  Tes  chers  Alliez  les  Hollandois. 

2.  Le  Comte  d'Avaux  par  ion  dernier  Mémoire  affura  les  Etats-Géné- 
raux de  la  fincérité  des  intentions  de  Ton  Maître  pour  la  confervation  de 
leur  Commerce  &  de  la  Paix  de  l'Europe  ;  leur  donnant  parole  ,  que  les 
Troupes,  qui  font  en  Flandres ,  feroient  rappellées  dès  le  moment  qu'il 
ne  reiteroit  plus  aucun  foupçon  de  jaloufie.  Mais  un  Prince ,  dont  les 
Forces  font  il  nombreufes ,  doit  toujours  être  un  fujèt  d'ombrage;  outre 
que  les  François  font  à  prefent  fi  bien  connus ,  qu'on  ne  fait  aucune  efti- 
me  de  leurs  plus  belles  paroles. 

Nous  trouvons  dans  l'Hiitoire ,  que  pendant  les  troubles  caufez  en  Eu- 
rope &  en  Aile  par  les  mouvemens  des  Francs ,  leur  Ambafladeur  en  Ma- 
cédoine propofoit  une  bonne  Paix>  mais  Ptoîomée  leur  répondit,  qu'il 
ne  croioit  point  que  ce  fût  tout  de  bon  ,  &  qu'il  ne  fe  fîeroit  jamais  à  leur 
parole,  à  moins  qu'ils  n'euffent  entièrement  defarmé.  Les  Mémorialiites 
François  pourront  bien  recevoir  une  Réponfe  femblable  à  celle  des  Macé- 
doniens. 

3.  Nous  pouvons  dire  aujourd'huy  des  François  ce  qu'autrefois  le  Car- 
dinal de  Richelieu  difoit  des  Efpagnols.  Il  leur  reprochoit,  que  toute  leur 
affectation  à  la  dévotion  n'étoit  qu'un  pur  effet  de  leur  intérêt.  Cqs  re- 
proches étoient  feulement  par  raport  aux  injuftices  &  à  l'infatiable  ambi- 
tion de  cette  Nation,  qu'il  regardoit  comme  ennemie  de  la  Chrétienté. 
Un  faïnt  zélé,  difoit-il,  les  a  faits  auteur  i  d' un  fi  bon  Etabli [fement  \  il  enten- 
doit  les  François  Proteftans  :  cette  obfervation  eil  fans  neceiîité  &  par 
conféquent  fans  raifon,  excepté  en  ce  qui  regarde  la  continuation  de  leur 
ufurpation ,  laquelle  ils  prétendent  rectifier  &  rendre  digne  de  louange 
en  vertu  de  leur  bonne  intention  ;  quoiqu'il  foit  défendu  de  faire  du  mai 
en  vue  de  produire  un  bien. 

Pendant  que  le  Cardinal  parloit  ainfl  contre  cette  Monarchie,  qu'il  avoit 
deffein  de  rabaifler  ,  il  prétendoit  relever  la  gloire  de  fon  Maître  &  l'hon- 
neur de  fon  Miniftére.  Louis  XIII.  aimoit  mieux  courir  les  risques  d'une 
Guerre,  que  d'expofer  la  Chrétienté  aux  armes  de  l'Ottoman  qui  lui  avoienc 
été  plusieurs  fois  propofées.  Il  avoit  pour  Maxime  fondamentale,  quun 
grand  Prince  doit  non- feulement  expofer  (a  Perfonne ,  mais  encore  tous  les  in- 
térêts de  fa  Domination  ,  plutôt  que  de  manquer  à  fa  parole  ^laquelle  il  ne 
peut  'violer  ,  fans  perdre  de  fa  Réputation  &  Je  rendre  méprijable  à  tout  le 
monde.  Ce  qui  doit  obliger  les  Roys  d'examiner  de  bien  près  de  quel- 
le manière  ils  s'engagent  dans  des  Traitez;  mais,  lorsqu'ils  les  ont  faits, 
ils  en  doivent  être  religieux  obfervateurs. 

Les 


l'Euro 
te 


£44    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,    ET 

Affaires  Les  François  ont  autrefois  obfervé  ces  bonnes  Maximes;  mais,  par  une 
gen.  oe  fatalité  attachée  au  pouvoir  abfolu,  elles  ne  fe  pratiquent  plus  en  Fran- 
ce. J'ôfe  aflurer ,  qu'il  n'y  a  pas  une  perfonne  de  bon  fens  qui  ne  con- 
vienne que  les  Reproches  du  Cardinal  de  Richelieu  ne  puifTent  être  tres- 
juflement  appliquez  à  la  France.  Car,  ce  font  autant  de  Cenfures  des  Ma- 
ximes qui  font  aujourd'hui  en  ufagê  dans  fon  Gouvernement.  Nous  avons 
Jes  Plaintes  que  les  Efpagnols  ont  dreifées  contre  les  Contravations  faites 
par  les  François  au  Traité  des  Pyrennées.  Combien  de  Provinces  &  de 
Villes  le  Roy  de  France  leur  a-t-i!  enlevées ,  en  violant  la  folemnité 
des  Traitez  ?  Nous  voions  un  Duc  de  Lorraine  privé  de  fa  Duché , 
parties  de  l'Allemagne  &  de  la  Flandre  démembrées  &  acquifes  à  la 
Couronne  de  France  ,  fous  des  prétextes  de  dépendances;  c'eft-à-dire, 
une  Guerre  continuelle  ,  fous  couleur  d'une  interprétation  de  Traitez 
de  Paix ,  par  lesquels  tout  le  monde  croioit  que  la  tranquillité  devoit  être 
parfaitement  rétablie. 

Il  nous  efl  venu  de  toutes  les  parties  de  la  France  des  Plaintes  les  plus 
améres,  mais  les  plus  refpeclueufes  &  les  plus  foumifes  ;  ces  Plaintes  fe 
font  répandues  par  tout  le  monde  par  l'oppreflîon  de  tant  de  bons  Sujets 
qui  vivoient  en  pleine  confiance  fous  la  foy  des  Edits  irrévocables  ,  & 
fur  la  parole  inviolable  de  leur  Roy.  Tous  ces  fidèles  Sujets  n'ont-ils 
pas  été  réputez  comme  autant  de  viclimes  qui  ont  été  immolées  par  ce 
Zélé  religieux  que  la  France  fçavoit  fi  bien  autrefois  reprocher  à  l'Ef- 
pagne? 

Sans  alléguer  d'autres  Faits  fur  ce  Sujet  ,  je  laifle  à  toutes  perfonnes 
judicieufes  à  fe  repréfenter  ce  que  nous  devons  attendre  de  l'union 
de  deux  Nations ,  dont  les  fentimens  font  fi  conformes  en  tirannie  & 
en  bigoterie. 


Relation   Relation  des  Débats  dans  la  Ville  (de  Londres)  au  fujet  de  la  Faix 
batsfUria       &  ^e  &*  Guer?v  ^  comprife  en  deux  Lettres  à  un  Gentilhomme 
Paix  & ia  à  la  Campagne:  traduite  de  VAnglois. 

Guerre. 

I.     L  E   T  T  R  E, 

Contenant  des  Raifons  pour  la  Paix. 

Mon  sieur, 

C'est  une  chofe  étrange,  que  vous,  qui  êtes  fi  capable  de  fèrvir  vo- 
tre Païs,  vous  vous  abfentez  de  la  Ville,  dans  un  tems  où  peut-être 
cette  Nation  depuis  fa  Conquête  n'a  jamais  eu  plus  befoin'des  Confeils 
&  de  l'afliftance  des  honnêtes  &  habiles  gens.  Je  me  flate  pourtant  que 
vous  viendrez.  Néanmoins,  s'il  faut  que  je  vous  écrive,  je  vous  prie  de 

me 


l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.  64; 

me  permettre  de  le  faire  librement,  &  de  n'être  pas  môme  de  votre  fen-  Afmirm 
timent  lorfqu'il  le  faudra.     Je  ne  fuis  pas  furpris  de  vous  trouver  un  peu     GfN-  nK 
entier  dans  votre  opinion  à  l'égard  des  débats  préfents  :  permettez-moi  de 
vous  dire,  qu'il  eft  fâcheux  pour  un  homme  folitaire  à  la  Campagne  dans 
cette  faifon  de  l'année,  &  deltitué  de  toute  converfation  ,  de  n'ctre  pas 
(Ci  j'ofe  parler   ainfi)  d'accord  avec  lui-même,   c'eft-à-dire  de  n'embruf- 
ier  pas  l'opinion  qui  lui  convient  le  mieux, en  s'abandonnant  à  fes  propres 
penfées  &  devenant  la  proye  de  fes  inclinations.    Un  côté  de  la  queltion 
devient  le  côté  favori:  &  ainfi,  comme  il  arrive  dans  tout  ce  qui  plait, 
il  eft  trop  tard  pour  s'inftruire  fi  ce  côté  mérite  ou  ne  mérite  pas  de  s'y 
ranger  j  mais,  je  fuis  pourtant  ravi  que  vous  ne  foyez  pas  encore  allé  fi 
loin.  Car,  quoique  vos  raifons  foyent  fans  réplique,  dites-vous,  vous  fou- 
haitez  de  favoir  fans  partialité  ce  que  je  penfe  en  faveur  ou  contre  vôtre 
opinion;  en  quoi  vous  paroiffez  avouer,  que  des  raifons,    en  apparence 
fans  réplique,  pour  foutenir  une  opinion,  ne  doivent  pas  toujours  y  dé- 
terminer entièrement  un  homme;  ce  que  je  crains  que  beaucoup  de  gens 
n'apperçoivent  point  à  rems  dans  la  préfente  Difpute,pu;fque  fans  cela  ils 
ne  feroient  pas  fi  pofitifs  au  commencement  de  la  femaine,  mais  fe  refer- 
veroient  la  liberté  de  changer  de  fentiment  vers  la  fin,  comme  cela  arri- 
ve tous  les  jours  à  des  Meilleurs  qui  viennent  de  la  Campagne.     Il  elt 
vrai,  que  c'efl  une  matière  de  fi  grande  importance,  &  qu'il  y  a  tant  à 
dire  de  côté  &  d'autre,  qu'un  homme  a  befoin  de  tems,  &  d'une  conver- 
fation mélangée,  pour  s'en  inflruire  duëment ,  afin  d'être  en  état  d'en  juger  ; 
&  il  trouvera  même  encore  après  cela,  qu'il  ne  fauroit  venir  à  aucune ré- 
folution,  s'il  prétend  de  répondre  aux  raifons  d'un  des  cotez,    finon  en 
pefant  celles  des  deux.   Je  fuivrai  donc  cette  Méthode,  puis  qu'elle  vous 
plait,  &  j'effayerai  de  cette  manière  fi  vous  &  moi  pourrions  devenir  du 
même  fentiment:  car  Ci  nous  ne  devenons  d'accord,   en  pefant  la  chofe 
à  la  balance,  &  n'ayant  d'autre  vue  que  la  bonté  de  la  caufe,  que  peut-on 
attendre  d'une  troupe  de  gens  divifez  en  partis,  &  qui  ont  des  vues  &des 
intérêts  différens  ? 

Afin  d'exécuter  ce  que  j'ai  promis  avec  toute  l'impartialité  pofîible  , 
&  pour  m'épargner  la  peine  d'une  Collection,  j'ai  eu  une  longue  conver- 
fation avec  Monfr.  P.  qui  eft  extrêmement  porté  pour  une  Paix.  Après 
vous  avoir  entretenu  de  ce  qui  s'eft  pafTé  avec  lui ,  j'ai  deffein  d'aller  trou- 
ver Monfr.  R.  qui  eft  au  contraire  pafiionné  pour  une  Guerre ,  &  de  vous 
écrire  dans  ma  prochaine  Lettre  ce  qu'il  me  dira.  J'ai  fait  choix  de  gens 
chauds,  parce  que  ,  généralement  parlant,  ils  font  plus  finceres  &  plus 
ouverts  que  les  autres,  Monfr.  P.  quoiqu'il  s'échaufe  &  qu'il  foit  tenace 
dans  le  difeours,  ne  laifTe  pas  d'avoir  des  penfées  modérées,  &  eft  très- 
éloigné  de  réfoudre  la  moindre  chofe  avec  précipitation  ;  &  quoi  qu'il 
foit  rempli  de  paflîon  &  de  regret  dans  plufieurs  chofes ,  à  l'occafion 
defquelles  quelques  pirrfonnes  fe  trompent  à  fon  égard  ,  le  croyant  contrai- 
re à  la  Conftitution  préfente,  je  vous  aflïïre  qu'on  lui  fait  tort,  &  qu'on 
feroit  bien  d'être  fur  les  gardes  en  fe  fervant  d'un  argument  ,   qui ,  s'il 

Terne  XL  PpPP  paffe , 


6tf  MEMOIRES,  NEGOTIATIONS  ,  TRAITEZ,  ET" 

AïfAïuEs  paffe,  prouveroit  que  la  Conltitution ,  ou  du  moins  le  Gouvernement, 
gen.de    a  peu  de  Partifans. 

l'Euro-  je  juj  $ls  franchement,  que  je  venois  pour  favoir  ce  qu'il  penfoit  dans 
le  préfent  débat  ;  à  quoi  il  me  répondit ,  qu'il  feroit  ravi  de  favoir  mon 
opinion  &  de  me  dire  la  Tienne. 

Pour  ce  qui  efl  de  mon  opinion,  lui  dis-je ,  je  ferois  pour  la  Paix  ;  mais 
que  je   craignois  quon  trouveront  la  Guerre  néceffaire,  &  que  je  fouhaitois 
favoir  de  lui  fi  cela  n'étoit  pas  ainfi.     Ho,  me  dit-il  ,  je   vous  entens. 
Vous  êtes  pour  la  Guerre,  une  Guerre  elt  néceffaire,  &  ce  qui  ell  né- 
ceflfaire  doit-être  fait,  c'eft  en  un  mot  tout  ce  qu'on  peut  dire;  ce  qu'il  y 
a  à  ajouter  ce  font  de  certaines  raifons  de  prouver  cette  nécelîité,que 
j'ai  fans  doute  toutes  prêtes  en  poche  ,    car  elles  ont  été  foigneufement 
difperfées  par  toute  la  Ville;  ce  qui  faifoit  qu'il  crut  que  j'étois  venu  pour 
avoir  fa  réponfe  fur  ces  mêmes  raifons:    mais,  me  dit-il,   je  veux  vous 
faire  changer  de  fentiment,  &  en  même  tems  vous  furprendre;  car,  au 
lieu  de  prendre  à  tâche  votre  prétendue  nécefîité,  je  la  fuppoferai  pré- 
fentement;  c'eft-à-dire,  lui  dis-je,  que  vous  donnez  gain  de  caufe?  Non 
vraiment,  me  repondit-il;fi  un  Médecin  dit  à  ion  malade  que  telle  cho- 
fe  eit  abfolument  néceffaire  pour  le  recouvrement  de  fa  famé,  laquelle 
le  malade  lui  dit  qu'il  elt  impoflible  de  trouver  ,    elt-il  plus  près  de  fa 
fanté  pour  un  tel  avis?  Si  je  fais  voir  qu'une  Guerre  elt  impraticable  dans 
les  circonflances    où  efl  la  Nation ,   vous   ferez   obligé  vous  même    de 
vous  départir  de  votre  nécefîité,  &  de  trouver  des  réponfes  à  vos  preu- 
ves; ou  bien  de  conclure   que  la  Nation   efl   dans    un   état  defefpéré , 
c'eft-à-dire  dans  la  nécefîité  de  faire  la  Guerre,  dont  elle  n'eft  pas  en  é- 
tat.    A  Dieu  ne  plaife,  lui  dis-je,   qu'une   Guerre  foit  remplie  de  diffi- 
cultez,  &  que  pourtant  elle  ne  foit  point  impraticable  ;  &  quoi  qu'il  y 
ait  beaucoup  de  fortes  raifons  pour  la  Guerre,  me  dit-il,  cette  Guerre 
peut  néanmoins  n'être  pas  néceffaire.    Hé  bien ,  lui  dis-je ,  je  vous  prie 
que  je  fâche  vos  raifons  pour  le  contraire.  Mes  raifons,  me  dit -il,  font 
toutes  prifes  des  circonflances  où  nous  nous  trouvons. 

En  premier  lieu,  nous  fommes  fort  divifez  entre  nous ,  &  quoi  que 
nous  layons  été  pendant  la  dernière  Guerre,   nous  n'allons  que  de  pis 
en  pis-,  &  il  fe  trouve  quelque  chofe  de   mauvais  &  de  fmgulier  dans 
le  cas  préfent ,  qui  fait  une  différence  effentielle  par  raport  à  la  Guér- 
ie. Dans  ce  tems-là,  une  forte  de  Gens  avoit  toutes  les  Affaires  en  mani- 
ment,  &  les  autres  étoient  faits  pour  obéir.     A  préfent  en  toute  apparence 
un  Parti  doit  régner  à  la  Cour,  &  l'autre  au  Parlement  ;  &  de  cette  maniè- 
re nous  avons  une  efpece  de  Guerre  en  dedans,  à  laquelle  fi  nous  ajou- 
tons une  Guerre  au  dehors,  quelle  belle  befogne  n'en  ferons-nous  pas?  Non, 
lui  dis  je,  le  danger  commun  réunira  les  efprits,  ou  bien  on  aura  de  nou- 
veau recours  aux  expédiens  dont  on  s'efl  déjafervi.  Le  Siège  de  Jerufa- 
lem  ,  dit-il,  n'a  pas  réuni  les  Juifs,  quoi  qu'aucun  d'eux  n'eut  jamais  de- 
mandé, ni  ne  fe  fut  attendu,  d'avoir  un  Roi  de  la  part  des  Romains;   & 
quand  tout  l'Art  du  Gouvernement  n'a  confifté  fi  long-tems  que  par  l'ufa- 


FE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,   M.  DCC.  I.         (547 

ge  des  Factions ,  comment  eft-il  poflible  de  parvenir  tout  d'un  coup  à  les  Amutss 
déraciner  entièrement?  Et  pour  ce  qui  e(l  des  expédiens,  ils  font  tous  GfN-  D* 
ufez,  le  charme  en  elt  perdu ;  il  fe  peut  que  quelques-uns  s'en  ferviront  à  L'^UR0" 
leurs  propres  vues ,  mais  tout  le  monde  les  a  pénétrez.  Rien  n'efl  plus 
utile  que  les  expédiens ,  mais  lorfque  l'artifice  en  eft  connu,  ils  ne  font 
plus  que  des  Stratagèmes  dont  un  Général  ne  peut  pas  fe  fervir  fou- 
vent. 

Nonobftant  cela,  me  dit-il,  pour  vous  montrer  combien  je  fuis  bon, 
je  veux  bien  fuppofer  que  le  danger  commun  (ou  tout  ce  qui  vous  plaira) 
nous  réunira  tous  dans  une  vigoureufe  Guerre ,  ou  qu'il  nous  y  fera  don- 
ner les  mains  ;  mais  ,que  je  vous  faffe  une  fimple  queftion:  Avons-nous,  ou 
de  l'argent, ou  du  crédit, ou  des  Troupes ,  ou  des  Conducteurs,  pour  une 
Guerre  telle  que  doit  être  celle-ci,  une  Guerre  très-férieufe?  Il  n'y  a  per- 
fonne  qui  aime  moins  à  faire  les  chofes  à  demi  que  moi  ;  &  quoique  mon 
opinion  foit  contre  la  Guerre,  fi  l'on  vient  à  la  réfoudre,   j'y  Ibufcrirai 
d'auffi  bon  cœur  que  qui  que  ce  foit  de  ma  Nation  ;  car,  je  fuis  convaincu 
que  tout  ce  qu'on  peut  entreprendre  par  cette  voye  doit  être  pouffé  par 
une  courte  &  vigoureufe  Guerre; mais,  voici  l'abrégé  de  toutes  mes  rai- 
fons  oppofées  à  une  Guerre,  c'efl  que  nous  ne  fommes  pas  en  état,  autant 
que  nous  devrions  l'être,  pour  la  faire.     Là-defTus,  il  tira  de  fa  poche  un 
papier  qui  contenoit  une  fupputation  des  charges  de  la  Nation  dans  la  pré- 
fente année,  de  la  Flote,  des  Troupes,  &  des  Dettes}  à  quoi  il  avoit  a- 
jouté  les  fommes  dont  on  auroit  befoin  pour  groiïir  la  Flote  jufqu'à  cent 
VaifTeaux  de  Guerre  &  pour  équiper  ou  emprunter  deux  cents  autres  Vaifc 
féaux;  pour  augmenter  nos  Troupes  en  Angleterre  jufqu'à  2.0000  hommes, 
&  pour   envoyer  de-là  la  Mer  pour  des  Troupes   &  des  Négociations 
jcooooo  Livres  par  an;  jugeant  tout  cela  nécefiaire  en  cas  de  Guerre.  Et 
comme  l'argent  doit  être  donné  par  avance  chaque  année,    &  que  pour 
cela  le  crédit  doit  être  rétabli,  il  a  mis  dans  le  papier  un  Article  de  ce 
dont  il  prétend  qu'on  auroit  befoin  pour  payer  les  intérêts  courants  ,  ce 
qu'il  proportionne  autant  qu'il  peut  à  la  difette  préfente, &  ce  que  le  Gou- 
vernement ne  fauroit  trop  bien  éviter  dans  la  fuite,   en  donnant  de  gros 
intérêts  des  Fonds  abaiflez  déjà  levez,  ou  qui  doivent  encore  l'être.     Je 
ne  faurois  me  fouvenir  de  toutes  les  particularitez.  Il  y  a  apparence  que 
cette  fupputation  fera  publiée.  Mais,fuppofant  en  général,  que  les  fraix 
de  la  Guerre  ne  monteront  pas  tout  à  fait  fi  haut,  &  qu'on  pourra  retran- 
cher &  rabattre  quelque  chofe  de  plufieurs  Articles ,  la  fomme  ne  laiffe  pas 
d'effrayer ,  &  j'en  fus  extrêmement  frapé.   Ce  qu'ayant  remarqué ,  il  me 
prit  par  la  main:  Mon  Ami,  me  dit-il,  vous  qui  êtes  un  grand  Guerrier, 
vous  ne  devez  pas  perdre  courage  fi-tôt;  fi  les  furprifes  ne  font  pas  de 
mife  dans  la  Guerre  entre  nous  deux,  je  vous  donnerai  du  tems  pour  vous 
recueillir:  je  vous  prie  relifez  encore  le  papier;  ce  que  je  fis:  mais, com- 
mençant à  diminuer  quelques  Articles; j'ai  trop  d'avantage  dans  notre  cau- 
fe ,  me  dit-il ,  &  n'ai  pas  befoin  de  m'en  fervir.  Otez  un  demi  Million ,  & 
combien  refte-t-il ?  une  prodigieufe  fomme,  lui  répondis-je :  mais  n'êtes- 

Pppp  2  vous 


/ 


6\%     MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


l'Eu  ko 

PE. 


Aïfairfs   vous  pas  fatisfait,  me  dit-il,  ou  bien  avez* vous  quelque  chofeà  répliquer? 

G*.*,  de  je  ]ui  avouois  qu'il  m'avoit  confondu ,  &  que  tout  ce  que  je  pouvois  ef- 
perer  c'étoit  qu'il  y  avoit  de  l'erreur  quelque  part.  Non,  me  dit-il,  fî 
pour  vous  complaire  je  foufcrisàla  nécefïité  d'une  Guerre, il  feroit  fâcheux 
que  vous  ne  foufcriviffiez  pas,  pour  avoir  votre  Guerre,  à  la  nécelïité 
d'une  fomme  à  laquelle  vous  ne  fauriez  trouver  à  redire.  Mais ,  pour  paf- 
fer  outre,  où  trouvera-t-on  cette  fomme?  Ne  peut-on  pas  l'avoir  ?  Si  j'a- 
vois  confédéré,  que  le  Crédit  immenfe  de  Papier,  &  les  fommes  prodi- 
gieufes  que  ce  gros  intérêt  a  apporté  du  dehors,  nous  avoient  donné  une 
opinion  trompeufe  de  nos  Richeffes,  comme  fi  nos  pertes  fur  notre  mo- 
noye  &  dans  notre  commerce ,  &  par  ladépenfe  pour  nos  Troupes  au  de- 
hors pendant  la  Guerre,  pouvoient  avoir  rempli  nos  poches.  Mais,  fup- 
pofant  qu'on  peut  trouver  de  l'argent,  car  je  veux  vous  complaire  autant 
qu'il  rneft  poffible,  comment,  je  vous  prie, le  levera-t-on? Dites  ce  que 
vous  voudrez,  je  veux  bien  vous  entendre.  J'avoue,  lui  dis-je,  qu'il  y  a 
beaucoup  d'objections  à  faire  contre  une  Guerre,  &  que  celle-ci  efl  la 
p!us  grande  de  toutes  \  mais ,  quoique  je  ne  nous  croye  pas  aufîi  riches  que 
nous  nous  le  faifons,  j'efpere  que  la  fomme  mentionnée,  ou  bien  une  au- 
tre qui  en  approche,  pourra  fe  trouver,  &  que  le  Parlement  aura  des 
moyens  de  la  lever  pour  un  an  ou  deux,  ou  du  moins  qu'on  la  lui  avan- 
cera en  donnant  un  gros  intérêt  \  car  ,  quoique  nous  nous  arriérons  de  beau- 
coup ce  n'elt  pas  une  grande  affaire,  fi  dans  un  fi  court  efface  c'etems,  com- 
me on  doit  le  présumer ,  on  fait  un  effort  avec  une  fomme  allez  grande 
pour  nous  procurer  une  Paix  fure  :  mais,  j'avoue  franchement,  que  û  la 
Guerre  dure  plus  long-tems,  je  ne  vois  pas  comment  trouver  cette  fom- 
me, fi-non  que  le  Peuple,  fuivant  fon  rang  &  fa  condition,  ne  retranchât 
du  fuperflu  de  fa  manière  de  vivre, &  fuppofantmême  cela  je  ne  vois  pas 
comment-elle  peut-être  levée  fi-non  par  une  Impofition  générale ,  ou  en 
taxant  le  Païs  également.  On  doit  efperer  que  ces  grands  dangers  ani- 
meront le  courage  des  gens,  &  les  porteront  à  de  grandes  réfolutions. 
Tout  ceci  véritablement  ne  donne  qu'un  fâcheux  préfage ,  mais  il  nous 
convient  bien  mieux  de  fuivre  quelque  vue  de  fureté,  que  de  donner  lâ- 
chement les  mains  à  notre  ruine.  La-deffus  il  me  dit,  qu'il  croyoit  que  j'a- 
vois  raporté  tout  ce  qui  pouvoit  fervir  à  ma  caufe,  &  qu'en  même  tems 
j'avois  avoué  tout  ce  qu'il  prétendoit,  c'efl- à-dire ,  que  la  Guerre  étoit  un 
remède  defefperé;  car,  me  dit-il,  vous  êtes  obligé,  au  cas  que  la  Guer- 
re dure  plus  d'un  an  ou  deux  (&qui  pourra  l'empêcher?  )  d'avoir  recours  à 
des  fuppofitions  qui  ne  font  fondées  que  fur  de  fimples  pohibilitez.  Il  pour- 
fuivit  en  difant,  que  quoique  tout  ce  qui  avoit  été  dit  des  difficultez  par 
raport  à  l'argent  fut  feul  fuffifànt  pour  prouver  que  la  Guerre  étoit  imprati- 
cable ,  pour  rendre  encore  ces  difficultez  plus  infurmontables  ,  il  me  pri- 
oit  de  fuppofer  une  interruption  totale  du  Commerce  ;  car ,  comme  nous 
n'avons  à  prefent  aucun  port  François  ou  Efpagnol,  c'eft-à-dire,  aucun 
qui  foit  de  la  moindre  défenfe  depuis  Flushing  jufqu'à  la  Morée,  excepté 
en  Afrique,  &  que  probablement  les  François  fe  ferviront  de  toutes  leurs 

For- 


PE. 


RESOLUTIONS   D'ET  A  T,  M.  DCC.   I.         649 

Forces  Maritimes  pour  pirater,  ce  que  les  Efpagnols  font  pareillement  en  Affaires 
état  de  faire  ;  rien  ne  feroit  plus  convenable  en  cas  de  Guerre,  que  d'em-  GEN'-  DE 
pécher  tout  négoce  pir  Mer,  puis  que  dans  de  pareilles  circonilances  nous  L'ED"KO" 
ne  pouvons  fans  cela  nous  attendre  qu'à  perdre  plus  par-là  que  nous  ne  ga- 
gnerons. De  cette  manière  donc  les  Revenus  des  Douanes  &  les  autres 
Fonds  tomberoient,  &  fans  parler  des  pertes  des  Marchands,  qui  en  met- 
tant leur  argent  dans  les  Fonds  pourront  ferevanger  fur  le  Public, que  fe- 
ra le  pauvre  Artifan,  quand  toutes  les  Manufactures  n'auront  plus  de  cours? 
Vous  croyez  à  préfent ,  dit-il,  que  j'ai  tout  dit;  mais,  pour  vous  en  dé- 
tromper, ajoutez  ,je  vous  prie,  au  manque  d'argent  &  à  la  perte  du  Com- 
merce dans  votre  Guerre,  (pour  parler  modeilement)  le  manque  probable 
du  fuccès.  Halte-là,  lui  dis-je,  le  fuccès  dépend  de  Dieu;  à  la  faveur 
duquel  nous  avons  (pour  parler  aufïi  modeflement)  autant  de  droit  que 
nos  Ennemis.  Pour  ne  pas  vous  difputer  votre  droit,  dit-il,  dont  vous 
faites  fort  bien  de  parler  par  comparaifon,  le  fuccès  dépend  aïlurément  de 
Dieu;  mais  Dieu  fe  fert  de  moyens,  &  les  prépare  prefque  tous  vifible- 
ment  à  fes  fins.  Je  fouhaiterois  bien  préfentement  de  favoir  de  vous  qui 
font  les  Gens  fur  la  probité  &  la  capacité  defquels  cette  Nation  peut  fe 
repofer,  tant  dans  le  maniment  des  Negotiations  étrangères,  que  dans  le 
commandement  de  fes  Troupes  ?  Nous  fumes  dernièrement  impliquez  dans 
une  aulîi  grande  Guerre,  &  dans  autant  d'affaires  étrangères,  qu'ait  jamais 
été  cette  Nation,  &  nous  fommes  cependant  aulîi  embarraifez  à  chercher 
des  Anglois  capables  pour  l'une  ou  pour  les  autres,  que  nous  l'avons  ja- 
mais été.  Cela  paroit  incroyable;  mais  quiconque  le  croit,  ce  que  la  plu- 
part fera  d'abord,  je  le  prie  de  réfléchir  encore  une  fois  là-deilus,  quoi 
que  je  fois  convaincu  que  cela  eiï  vrai.  J'accorderois  même  que  cette  vé- 
rité efl  incroyable,  fi  elle  n'étoit  pas  de  nature  à  ne  pouvoir  être,  ni  ca- 
chée, ni  éludée.  La  raifon  n'en  efl  cachée  à  aucun  homme  d'efprit.  Je 
fouhaiterois  que  cela  eut  été  auflî  manifefte  lorfqu'il  en  étoit  tems ,  que  cela 
l'efl  réellement  à  préfent.  Il  y  avoit,  fans  doute,  &  il  y  a  encore  de  bra- 
ves Gens  dans  l'Armée,  qui  dans  la  conjoncture  préfente  pourroient  être 
capables  de  tout  Commandement.  Mais  leur  a-t-on  jamais  donné  les  oc- 
cafions  d'en  donner  des  preuves  ?  A-t-on  fouffert  qu'ils  fe  fignalafTent  ? 
Les  a-t-on  foutenus  &  encouragez?  Fit-on  jamais  la  moindre  diltinélion 
quand  les  Gens  fervoient  bien  ou  mal?  Un  dévouement  aveugle,  qu'on 
peut  appeller  une  tromperie,  &  qui  (avec  la  permiflion  de  l'Ecrivain  dé- 
naturé) efl  diamétralement  oppofé  au  Caractère  d'un  véritable  Anglois; 
un  pareil  dévouement,  dis-je,  &  non  le  mérite,  n'étoit-ii  pas  le  feul 
moyen  pour  parvenir  à  de  grands  polies  ?  Hïnc  Me  laebrima.  Quelques 
autres  furent  opprimez ,  foulez  aux  pieds ,  &  eurent  des  mortifications  pour 
leur  pain  quotidien.  Les  Dupes  alloient  leur  train  >  &  que  pouvoient  fai- 
re les  gens  d'efprit,  fi  ce  n'eft  d'aller  où  on  les  conduifoit,  c'elt-à-dire  de 
fè  laifTer  prendre  pour  dupes,  ou  en  feignant  de  l'être,  tromper  fes  fupe- 
rieurs  en  fe  gliffant  ainfi  dans  les  Emplois?  Pour  ce  qui  efl  des  affaires  é- 

Pppp  3  tran- 


GEN.  DE 

l'Euro 

PE. 


6$o    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS ,  TRAITEZ,  ET 

Actai*m  trangeres,  je  verrois  volontiers  une  Lifte  de  quelques  Anglois  qui  y  eurent 
part  depuis  la  Révolution;  on  fait  que  les  Secrétaires  n'ont  pas  été  en  état 
d'aller  plus  loin  que  ce  qui  leur  étoit  néceffairement  prefcrit.  Et  ceux  au 
dehors  avouent  pour  la  plupart,  fous  le  même  prétexte,  qu'ils  îbnt  reve- 
nus auffi  ignorans  qu'ils  s'en  étoient  allez,  d'autres  ayant  le  maniment  des 
affaires.  C'efr.  ainfi  que  les  Emplois ,  qui  étoient  jadis  l'Ecole  pour  élever 
des  gens  à  de  grands  Polies ,  ne  font  point  recherchez  à  préfent  par  les 
gens  d'efprit ,  &  en  vain  même  les  demanderoient-ils.  Ce  font  ceux-là 
qui  les  obtiennent,  qui  veulent  bien  être  exclus  du  fecret,  ou  qui  ne  font 
pas  capables  de  le  garder.  Des  gens  fans  nom ,  qui  vraifemblablement  ne 
font  point  connus  "aux  Cours  où  ils  réfident,  puisqu'ils  ne  le  font  pas  mê- 
me en  Angleterre.  Cette  année  a  été  une  année  extraordinaire:  une  Ré- 
volution furprenante  en  Efpagne;  de  grandes  Négociations  à  Vienne;  une 
nouvelle  Dignité  en  Brandebourg;  les  Rois  de  Dannemarc,  de  Suéde,  de 
Pologne, &  le  Czar  de  Mofcovie  en  Guerre.  Qui,  je  vous  prie,  eft  affez 
favant  pour  dire  les  Noms  de  nos  Miniftres  à  ces  Cours  :  &  qu'y  gagnera- 
t-on  en  les  nommant;  leurs  noms  ne  ferviroient-ils  point  de  matière  à  re- 
proches? Et  tout  ceci  dans  un  fiecle  de  Héros,  qui  nous  difent  qu'ils  ont 
mis  dans  les  mains  de  cette  Nation  (dans  ces  mêmes  mains)  la  Balance 
de  l'Europe.  Des  Héros  afTûrément,  puifque  l'un  d'entre  eux,  le  Grand 
Commandeur,  &  en  même  tems  le  Grand  Politique  (car  un  Héros  doit 
être  tout  enfemble)  comme  le  fait  fon  dernier  Panegirifte  Renégat,  pou- 
voit  renverfer  par  fon  feul  foufle  des  Royaumes  entiers  &  des  Provinces, 
dont,  ni  lui,  ni  fon  Maitre  ,  n'ont  aucun  droit  de  difpofer.  Nous  avons 
fouvent  ri  du  Partage  des  Indes  fait  par  le  Pape,  mais  voici  un  Par- 
tage de  fa  Grandeur  qui  fera  pleurer  un  enfant  encore  à  naitre. 

je  l'interrompis  ici,  &  le  priois  de  ne  point  continuer  fes  Réflexions, 
qu'elles  n'étoient  point  de  fiifon  à  préfent,  que  l'Affaire  étoit  trop  férieufe 
pour  en  railler ,  &  qu'il  falloit  oublier  le  paffé ,  s'unir  &  voir  en  avant. 
Il  ne  fuffiroit  donc  pas,  me  dit-il,  de  pardonner  ce  qui  eft  paffé  ,  fau- 
droit-il  encore  l'oublier  ?  Ce  feroit  fans  doute  l'approuver.  Pouvons-nous 
prévenir  la  même  chofe  à  l'avenir ,  fans  fe  rappeller  la  mémoire  de  ce 
qu'on  voudroit  prévenir  ?  Et  croyez-vous  en  confcience  que  de  s'unir  a- 
vec  de  telles  gens  (comme  par  exemple  avec  le  Grand  Négotiateur)  qui 
ont  mené  la  Nation  dans  des  précipices  ,-  ce  foit  le  moien  d'en  tirer  cette 
Nation?  Lui  &  fon  unique  Ami  Anglois  le  Panegyrifte  font-ils  des  gens 
de  Ci  grande  importance?  Vous  êtes  encore  échauffé,  lui  dis-je;  je  vous 
avoue  que  fans  réfléchir  ou  déterminer  où  git  la  faute,  les  Hollandois  ne 
font  pas  de  bons  Maîtres  d'Ecole  pour  les  Anglois;  la  conduite  qu'il  tien- 
nent avec  nous ,  &  la  conduite  qu'il  faut  tenir  avec  nous ,  font  oppofées 
comme  le  feu  &  l'eau,  &  il  paroit  qu'il  y  a  quelque  chofe  d'incompatible 
de  leur  génie  au  nôtre.  Vraiment  ,  dit-il  ,  vous  ne  vous  appercevez  pas 
que  vous  faites-là  une  grande  Reflexion  ,&  qui  paffe  toutes  celles  que  je 
puis  faire.  Je  ne  fuis  point  contre  les  Hollandois ,  mais  bien  contre  quel- 
ques 


GFN.  DE 

j-'Euko- 

PE. 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  <&* 

ques  Hollandois  ,  qui  dans  la  Révolution  font  entrez  dans  des  Pofles  Affaires 
(Dieu  fait  comment  &  pourquoi)  fort  au-delfus d'eux ;&  qui,  s'étant  depuis 
toujours  approprié  le  fecret  de  toutes  les  Affaires  d'importance,  en  ont 
éloigné  autant  qu'il  étoit  poflibîe  tous  autres,  à  l'exception  de  quelque 
peu  de  Dupes  babillardes  qui  fe  mefurent  à  leur  aune.  C'eit  de-là  que  je 
croi  que  tous  nos  malheurs  ont  pris  leur  fource.  Mais,  pour  ce  qui  eii  des 
Hollandois  en  général ,  ce  n'eit  pas  mon  delfein  de  les  accufer  tous  ;  je 
fai  qu'ils  foufTrent  autant  que  nous  par  le  penchant  pour  les  Dupes  &  qu'ils 
s'en  apperçoivent  tout  comme  nous.  Ce  font  des  gens  fobres  &  induf. 
trieux,  de  la  même  Religion  que  nous,  dont  le  pais  eit  l'azyle  de  la  vé- 
rité &  de  la  liberté,  qu'i;s  ont  achetées  fort  cher,  &  qu'ils  ne  rendront , 
je  croi,  qu'à  bon  prix.  Nous  leur  devons  beaucoup  par  raport  à  la  Révo- 
lution. A  préfent  qu'ils  font  auiîi  prêts  du  danger  que  nous  étions  alors , 
comprenez-moi  bien  je  vous  prie  ,  quoique  je  fois  pour  la  Paix  ,  je  fuis 
bien  éloigné  de  penfcr  qu'il  faille  les  abandonner.  Hé  bien  ,  lui  dis-je,  fî 
cela  eit  ainfi ,  je  puis  efperer  encore  quelque  chofe  de  bon  de  vous  -y  & 
puifque  vous  voilà  de  bonne  humeur ,  parlons  des  remèdes  qu'on  peut  ap- 
porter à  tout  ceci.  Des  Remèdes,  me  répliqua- t-il  ;  c'eit  l'ouvrage  du 
Parlement.  C'eit  fe  moquer  que  d'attendre  du  remède  de  ceux  dont  vien- 
nent les  maux  }  de  pareilles  gens  font  hors  d'état  d'être  convaincus  de 
leurs  erreurs,  &  quand  même  ils  en  auroient  du  regret  ,  ils  vivent  dans 
un  fiècle  qui  ne  leur  permet  pas  de  s'en  corriger.  Parlez  leur ,  ils  vous 
diront  qu'il  eit  impoflible  de  faire  quelque  chofe  des  Anglois  >  à  les  enten- 
dre, ils  ont  trouvé  quelque  chofe  d'incorrigiblement  mauvais  dans  la  maniè- 
re dont  nous  fommes  faits ,  ou  du  moins  defefperent-ils  que  nous  ne  nous 
en  cor  igerons  jamais.  Ils  n'ont  certes  pas  tout-à-fait  tort  ,  puifqu'avec 
50  Miilons  d'Angleterre,  &je  ne  fai  combien  de  Millons  de  Hollande,  ils 
n'ont  pas  formé  un  corps  de  plus  d'hommes  tant  Anglois  que  Hollandois , 
dans  les  conjonctures  dont  nous  parlons,  qu'ils  ont  de  doigts  à  leurs  mains. 
Non,  fi  nous  nous  engageons  dans  une  Guerre  ,  ils  n'ont  pas  un  feul 
homme  Anglois  ou  Hollandois  à  oppofer  aux  Catinats.  Ils  n'en  eurent 
pas  d'avantage  dans  la  dernière  Guerre  ,  mais  furent  obligez  d'avoir  re- 
cours à  des  Waldeks ,  Schombergs ,  &  Vaudemonts,  quoique  \qs  Païs-Bas  fu- 
rent jadis  l'Ecole  où  tant  nous  que  d'autres  Nations  apprimes  à  nous  for- 
mer pour  la  Guerre.  Telles  font  les  confequences  fatales  des  Dupes  en 
faveur.  Mais,  allons  plus  loin;  non-feulement  nous  n'avons  pas  des  Offi- 
ciers capables  pour  les  grands  Commandemens,  mais  nous  n'en  avons  pas 
même  qu'on  en  puilTe  rendre  capables,  fi  ce  n'eft  que  nous  établirions  une 
nouvelle  Bande  de  Penfionaires  pour  Généraux,  Lieutenant-Generaux, 
&c.  Vous  vous  imaginez  peut-être,  que  je  veux  parler  de  tels  qui  ne  font 
plus  propres  à  la  Guerre,  mais  bien  plus  je  parle  de  ceux,  tant  Anglois 
que  Hollandois ,  qui  n'y  furent  jamais  propres.  J'avoue,  lui  dis-je,  que 
nous  fumes  malheureux  dans  la  dernière  Guerre,  mais  cela  peut  avoir  été 
par  nôtre  Infortune  ,  car  le  hazard  ne  préfide  jamais  pius  que  dans  la 
Guerre.    Infortune!  me  dit-il:  je  vous  prie,  nommez  les  choies  par  leur 

nom 


6fi    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  nom.  Les  infortunes  font-elles  régulières ,  font-elles  périodiques,  comme 
gen.de  jes  Eclipfes?  Si  le  hazard  avoit  régné,  nous  aurions  eu  plus  de  coups  de 
l'Euro-  bonheur.  Le  peu  que  nous  en  avons  eu  n'étoient  aiïurément  que  des  ef- 
— 1^1 fets  vifibles  de  hazard  ;  car  nous  ne  les  avons  attnppez  que  par  la  bra- 
voure de  la  Soldatefque  &  des  Officiers  Subalternes  ,  &  en  quelque  ma- 
nière fans  autorité.  Après  tout ,  vous  devez  avouer  ,  que  nous  ne  fau- 
rions  raifonnablement  nous  attendre  à  une  meilleure  conduite  que  cel- 
le que  nous  avons  expérimentée  ,  &  par  confequent  à  un  meilleur 
fuccès  que  nous  avons  eu.  Nôtre  mauvais  ménagement  eft  l'effet  nécef- 
faire  des  Caufes  inévitables;  nous  pouvons  les  déplorer,  mais  nous  ne 
fommes  pas  en  état  de  les  détourner.  J'ai  infifté  d'autant  plus  là-deffus, 
que  je  croi  que  le  defefpoir ,  où  nous  fommes  du  Succès ,  eft  une  Objeclion 
contre  la  Guerre  à  laquelle  on  peut  le  moins  répliquer.  L'autorité  d'un 
Parlement  peut  aller  ioin  pour  difpofer  la  Nation  à  fe  foumettre  à  leurs 
charges  &  à  leurs  pertes  ;  mais,  quel  remède  peuvent-ils  trouver  pour  une 
mauvaife  Conduite ,  fi  ce  riejl  qu'ils  prennent  eux-mêmes  le  ménagement  de  la 
guerre  en  leurs  mains? 

Après  cela,  il  reprit  haleine  ,  &  s'étant  un  peu  recueilli,  je  croi ,  dit-il , 
en-  avoir  dit  allez,  &  que  11  cela  étoit  raflemblé  il  vous  donnerait  une  vue 
fort  defagreable  dans  Ion  étendue.  Confiderez  donc,  je  vous  prie,  une 
charge  de  Taxes  dont  cette  Nation  ne  reffentit  jamais  la  pareille  ;  aucun 
Commerce,  ou  il  vous  voulez  moins  qu'on  n'en  a  eu  de  mémoire  d'hom- 
me; moins  de  Sujets  capables,  tant  pour  les  Negotiations  épineufes ,  que 
pour  les  grands  Cornmandemens,  moins,  dis-je,  que  nous  n'en  avons  eu 
dans  le  tems  d'une  Paix  profonde;  des  Factions  élevées  pour  caufer  une 
Guerre  intefline,  joint  à  un  Efprit  de  Parti  qui  facrifie  tout  à  fes  intérêts 
propres  ;  un  manque  général  d'eflime  &  de  refoecl:  pour  fes  Supérieurs , 
fans  qu'il  foit  poffible  de  rétablir  leur  crédit  perdu  ;  des  -jalouiies  &  des 
craintes  dans  le  cœur  des  meilleures  Perfonnes  &  des  mieux  affectionnées, 
&  une  opinion  naiffante  parmi  le  bon  peuple  (pour  des  raifons  que  j'ai 
évité  de  rapporter)  que  nous  n'avons  pas  Dieu  pour  nous  ;  & ,  pour  un 
dernier  trait ,  joignez  à  tout  ceci  un  mauvais  Succès  ,  c'eft-à-dire  ,  un 
Succès  tel  que  nous  avons  raifonnablement  lieu  d'attendre. 

Enfuite  il  s'arrêta  un  peu,  &  ajouta  après;  je  vous  prie  de  confiderer 
avec  moi  combien  le  Traité  de  Partage  a  changé  l'efprit  de  la  Nation  Es- 
pagnole contre  fon  Inclination  naturelle,  quoi  qu'il  ne  s'y  agiffoit  unique- 
ment que  de  l'intérêt  des  Grands ,  &  que  le  gros  du  Peuple  n'en  reflen- 
tit  que  de  l'indignation,  à  laquelle  la  Maifon  d'Autriche  n'avoit  aucune 
part,  &  que  tous  dévoient  perdre  tout  d'un  coup  leuts  intérêts  dans  cet- 
te Monarchie,  quoiqu'il  s'y  fuffent  habituez  depuis  150.  ans,  &  fortifiez 
par  les  François ,  par  toutes  les  inimitiez  ,  préjudices  ,  averlions,  maxi- 
mes incompatibles  ,  coutumes  ,  temperamens ,  &  intérêts  ,  qui  font  en 
quelque  manière  capables  de  rendre  un  peuple  odieux  à  un  autre.  Si 
donc  on  ne  f.iuroit  compter  fur  rien  de  ce  qui  a  été  allégué ,  lors  que  le 

Peuple 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  t         ô*;$ 


Aftairec 

GEN.   DE 


Peuple  feul  efl  provoqué  &  irrité:  furquoi  peut-on  compter,  ou  que  doit 

on  attendre  dun  Peuple  tel  que  je  vous  lai  reprefente  ,  ii-non  qu  a  1  ex-    L>EuRO 

emple  d'un  homme  qui  fe  noyé  il  empoignera  jufqu'à  une  plume  ,  &  tout       PH. 

ce  qui  a  l'ombre  de  pouvoir  le  fauver.     Vous  favez  auffi  qu'il  y  a  une  o-    

pinion  au  fond,  conçue  par  plus  de  gens  qu'on  ne  le  croit  généralement, 
laquelle  fe  répandra  enfin  lors  que  la  Guerre  preflfera;  une  Opinion,  dis- 
je  y  qu'on  trouvera  alors  un  expédient.  Je  vous  entens,  lui  dis-je,  &  je 
puis  vous  alTurer  que  le  Parlement  ne  manquera  pas  de  pourvoir  à  ce 
que  vous  penfez;mais,  après  tout,  vous  avez  faifi  mon  foible.  J'avoue  que 
la  Révolution  me  tient  véritablement  aflervi,  &  que,  quoi  que  j'aye  des 
yeux  pour  voir  ce  que  je  fuis  fâché  de  voir,  &  ce  qui  n'eft  que  trop  viii- 
ble  ,  rien  n'efl  capable  de  me  détourner  de  l'opinion  que  j'ai  de  la  Caufe , 
ou  de  l'inclination  que  j'ai  pour  elle.  C'eil  une  Caufe  noble ,  que  la  Caufe 
de  la  Vérité  &  de  la  Liberté  ;  &,  quoi  qu'elle  périfTe  entre  les  mains  de 
la  Génération  préfente,  elle  pourra  revivre  &  profperer  même  entre  d'au- 
tres mains.  Si  ceux  ,  qui  ont  eu  l'honneur  d'en  être  les  premiers  Promo- 
teurs ,  s'en  font  montrez  indignes,  &  qu'au  lieu  de  laiifer  le  foin  à  la  Caufe 
même  de  les  jultifier,  (laquelle  feule  le  pouvoit  faire  )  ils  en  ont  fait  une  Cau- 
fe pleine  de  reproches  par  leur  mauvaife  conduite.  Si  cela ,  dis-je ,  y  a 
donné  occafion  ,  puijfent  les  Oeuvres  de  ténèbres  venir  au  jour  ,  rj?  ce  qui 
s'efl  dit  tout  bas  dans  des  recoins  être  manifejlé  publiquement  ,  afin  que  la 
Caufe  foit  vengée  de  pareilles  gens ,  &  quelle  rfen  fouffre  point.  Ma  crain- 
te eit  que  cette  Nation,  &  même  toute  l'Europe,  ne  viennent  à  boire 
d'une  Coupe  qu'ils  n'ont  aucunement  remplie.  Et  je  vous  prie  de  me 
pardonner  fi  je  vous  dis  encore  ,  que  je  n'y  vois  point  d'autre  Remède 
qu'une  vigoureufe  Guerre;  &  qu'aucune  difficulté  n'y  peut  fervir  d'Objec- 
tion fuiïifante.  Mais,  vous  m'avez,  je  vous  l'avoue  ,  mené  jufques-là,  que 
j'efpere  de  toute  mon  ame,  qu'on  put  trouver  quelqu'autre  remède.  Ho  ! 
dit-il,  c'efl  la  tâche  d'un  Parlement;  je  vous  promets  que  s'il  n'en  trouve 
aucun  autre  que  la  Guerre,  je  me  mettrai  de  vôtre  fentiment.  Et  je  vous 
promets,  lui  dis-je,  que  s'il  en  trouve  quelque  autre,  je  me  rengerai  du 
vôtre.  Après  cela,  nous  allions-nous  féparer,  Iorfque  quelqu'un  entra  qui 
nous  engagea  de  nouveau  dans  un  difcours  fur  le  même  fujèt,  qui  vous 
furprendraj  mais  je  ne  faurois  écrire  d'avantage  à  préfent. 

Je  fuis,  &c 

Londres  U  20.  Janvier  1701. 


Tome  XL  Qqqq  II. 


<?54    MEMOIRES,  NEGOTIATIQNS,  TRAITEZ,  ET 

.Affairfs  .       , 

gbn.pb  IL      L    E    T    T    R    E. 

l'Euro- 

- fE' —      Ou   Raifons  de  croire  que  la  Cour  ifeft  pas  portée  pour 

la  Guerre. 

Monsieur. 

il.  Let-     T'Es  te  re  que  vous  avez  reçu  ma  Lettre,  &  je  ne  doute  pas  que  vous 
tre ,  ou     J    Re  f0yez  fort  fatisfait  du  Diicours  de  Monfr.  P.  en  faveur  d'une  Paix; 
ducroire    i'  a  véritablement  allégué  de  bonnes  raifons- mais, je  vous  prie  de  fufpen- 
kCour      dre  vôtre  jugement  jufqu'à  ce  qu'on  vous  ait  fait  voir  la  grandeur  du  dan- 
portée  à     ger  :  alors  j'ai  lieu  de  croire  que  la  mauvaife  condition  où  nous  nous  trou- 
laPaix.     vons,  &  que  nous  avons  à  combattre,  au-lieu  de  vous  rendre  vous  & 
d'autres  honnêtes-gens  fournis  à  elle,  excitera  en  vous  &  dans  toute  la 
Nation  un  efprit  d'Union  &  de  Réfolution  convenable  à  une  fi  grande  oc- 
cafion.   Mais  Je  n'ai  pas  encore  eu  le  tems  de  difcourir  avec  Monfr.  R., 
&  il  paroit  que  les  François  eux-mêmes  mettront  hors  de  doute  dans  huit 
ou  quinze  jours  la    néceiîlté   d'une  Guerre.     Contentez-vous  ,  s'il  vous 
plait,  à  préfent  du  Récit  de  ce  qui  s'elt  pafle  de  plus  avant  que  nous  nous 
ieparamesi  ce  que  je  vous  ai  dit  qui  furprendra.     Car,  comme  j'en  ai 
été  informé,  plufieurs  de  vous  ,Gentilhommes  de  la  Campagne  ,   qui  ne 
voyez  les  chofes  que  de  loin,  vous  vous  flatez  que  la  Cour  a  épuifé  juf- 
qu'au  fond  tout  ce  bruit  de  la  nécefîité  d'une  guerre,  qu'elle  veut  encore 
une  Armée  &  n'en  démord  point  dans  la  conjoncture  préfente,  afin  de 
remplir  le  Peuple  de  craintes  &  de  jaloufies  pour  des  dangers  imaginai- 
res ,  auquels  vous  efperez  pa(Tionnément  qu'il  n'y  a  aucun  fondement.  Le 
Ciel  veuille  vous  ouvrir  les  yeux  ,  avant  qu'il  foit  trop  tard.  Nous  autres 
ici  en  Ville ,  bien  loin  d'être  attaquez  de  la  contagion  ,  comme  vous  le 
penfez,  nous  ne  favons  que  faire  de  la  Cour,  nous  ne  favons  de  quel  cô- 
té elle  penche,  ou  à  quoi  elle  eil  contraire  ,    ni  même  il  elle  dort  ou  û 
elle  veille,  comme  vous  l'entendrez.     Le  Gentilhomme  que  je  vous  aï 
dit  qui  entroit  lorfque  Monfr.  P.  &  moi  allions  nous  feparer  ,  eii  certain 
Monfr.  S.     Monfr.  P.  avoit  afTez  de  tems  pour  me  dire  à  l'oreille    que 
c  étoit  un  honnête-homme,  avec  qui  nous  pouvions  parler  librement.  A- 
près  les  Civilitez  ordinaires ,  &  quelque  difcours  fur  l'Election  ,  nous  re- 
vînmes infenfiblement  à  nôtre   premier  fujèti    ce  qui  donna  occadon  à 
Monfr.  S.  de  nous  dire,  qu'à  préfent  il  étoit  fatisfait  que  le  Gouvernement 
étoit  contre  la  Guerre;  ce  que  vous  (regardant  Monfr.  P.)  ferez  bîen-aife 
je  m'afïïire  d'entendre.     Pour  ce   qui  eli  de  moi  ,  dit  Monfr.  P.  il  y  a 
long-tems  que  je  fuis  de  ce  fentiment,  je  ferois  pourtant  bien-aife  d'y  être 
confirmé,  je  commençois  moi-même,  répliqua  Monfr.  S.  de  ne  m'y  pas 
fier,  lors  qu'après  que  le  Roi  de  France  eut  accepté  le  Teitament,  je  vis 
qu'on  ne  fit  rien  au  de-là  des  mefures  prifes  l'Eté  dernier  de  diiîbuare  le 
Parlement ,  &  d'en  convoquer  un  autre  après  les  Fêtes  alors  prochaines. 

Je 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.    I.  df5 

Je  fai  que  l'on  prétendoit  que  la  conjon&ure  l'avoit  exigé  ainfi  ;  mais  cet-  Affaires 
te  raifon  venoit  trop  tard  pour  une  Réfolution  prife  avant  qu'elle  exiltât.  ^m.  de 
Si  on  avoit  réfolu  la  Guerre,  la  Cour  auroit  changé  de  mefures ,  exami- 
né le  dernier  Parlement ,  &  le  trouvant  difpofé  à  de  vigoureufes  Réfolu- 
tions,  fufpendu  pour  cette  fois  l'Acle  Triennal  dans  une  circonltance 
de  cette  nature  dans  laquelle  les  préparatifs  qu'on  auroit  pu  faire  n'au- 
roient  donné  lieu  à  aucun  danger  ,  puifqu'il  n'eft  pas  probable  que  la 
même  chofe  arrive  jamais;  &  li  on  s'étoit  apperçu  qu'on  s'étoit  trompé 
dans  ce  qu'on  attendoit  du  Vieux  Parlement  ,  il  n'y  auroit  eu  aucun 
tems  perdu  pour  en  convoquer  un  autre;  fi  ,  comme  on  le  prétendoit, 
on  ne  pouvoit  en  convoquer  un  plutôt  que  nous  le  pouvons  à  préfent. 
Quoiqu'il  en  foit  ,  on  perdit  tout  l'hiver  à  prendre  des  mefures  ;  & 
toutes  les  Cours  de  l'Europe  furent  obligées  de  négocier  avec  la  Fran- 
ce ,  &  fe  préparèrent  pour  la  Guerre  pendant  que  nous  nous  entre- 
difputions  fur  les  Elections.  Pourquoi  ,  dit  Monfr.  P. ,  tout  ceci  ne 
vous  a-t-il  donné  que  du  foubçon  ?  N'y  en  avoit-il  pas  allez  pour  vous 
convaincre? Peut-on  accorder  la  CaiTation  d'un  Parlement,  &  le  deffein 
d'une  Guerre  ?  Ou  du  moins  ceux  qui  confeilloient  l'un  pouvoient-ils 
avoir  l'autre  en  vue?  Et  quoiqu'il  y  eut  d'abord  un  bruit  des  mouve- 
ments que  la  Cour  faifoit  en  hâte  en  Hollande,  &  qu'elle  dépêchoit 
de  toute-part  fes  petits  Miniftres  d'Etat  fur  de  grandes  Affaires  ;  tout 
cela  ne  s'évanouït-il  pas  dans  un  moment?  Et  pouvez-vûus  me  dire 
qu'il  en  fut  dit  un  mot  depuis  ,  ou  que  quelque  choie  ait  été  fait  qui 
tendit  à  la  Guerre?  Car  le  grand  Jglibnby  n'a  pas  été  envoyé  ,  je  penfe, 
pour  faire  la  Guerre  ,  mais  pour  convaincre  la  Régence  par  une  voye 
amiable,  qu'elle  a  mal  interprété  le  Partage  (c'efl  dequoi  je  vous  allure) 
&  fi  l'on  avoit  eu  la  Guerre  en  vue,  n'auroit-on  pas  eu  foin  de  pacifier 
les  EcolTois,  dont  les  Réfolutions  unanimes  montrent  dans  quelle  difpofi- 
tion  ils  font  à  préfent,  laquelle,  quoi  qu'elle  ne  vaille  pas  la  peine  qu'on 
s'y  arrête  lors  que  nous  n'avons  à  faire  qu'à  eux  feuls ,  mérite  affurément  nôtre 
attention,  fi  nous  avons  maille  à  partir  avec  un  Ennemi  aulîi  vigilant  que 
la  France,  qui  ell  leur  ancienne  Alliée.  Et  puis,fi  nous  voyons  plus  loin, 
qu'à-t-on  fait,  je  vous  prie,  pour  dégager  les  Troupes  Hollandoifes  qui 
font  en  Flandres ,  lefquelles  j'ai  fottement  cru  être  maitres  des  Villes  où 
elles  font  en  garnifon,  comme  pour  gages  de  ce  que  les  Efpagnols  doivent 
aux  Etats:  mais  quelques  Officiers  m'ont  dit  qu'elles  y  font  réellement 
prifonnieres,  &  qu'elles  feront  conliderées  comme  telles  fi  quelque  con- 
cert fecrèt  n'engage  point  les  François  à  en  agir  plus  honnêtement.  Mais, 
ce  qui  eft  de  bien  plus  grande  importance  encore,  quelles  mefures  avons- 
nous  prifes  nous  &  les  Hollandois,  pour  mettre  en  futeté  nos  effets  à  bord 
des  Gallions,  en  cas  de  Guerre?  Nous  pûmes  bien  jadis  envoyer  atta- 
quer la  Flote  Hollandoife  de  Smirne  fans  y  avoir  des  effets ,  &  contre  le 
Droit  des  Nations; car,  nous  avions  feulement  réfolu  la  Guerre,  mais  nous 
ne  l'avions  pas  déclarée.  Mais  ,  avec  la  France, il  n'y  a  point  de  Droit  des 
Nations,  puis  qu'il  n'y  a  point  de  Foi  publique  ,  &  que  fouvent  elle  fait 

Q_qqq  2  la 


Affaires 

GEN.    DE 

l'Euro- 
pe. 


6f6    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

la  Guerre  fans  la  déclarer  ;&  fi  nous  fommes  encore  un  peu  délicats ,  noire 
n'avons  qu'à  embraffer  nos  intérêts  propres ,  &  abandonner  charitablement 
le  refle.     J'interrompis  ici ,  &  dis  à  Monfr.  P.  qu'il  devoit  m'excufer  fi  je 
l'avois  mal  compris ,  à  quoi  pouvoit  avoir  donné  lieu  l'envie  que  j'avois 
qu'il  fut  de  mon  fentiment;  car,  à  dire  la  vérité,  je  ne  pus  conclure  de  tout 
ceci,  fi-non  qu'il  étoit  fâché  contre  la  Cour  parce  qu'elle  ne  prenoit  point 
de  mefures  pour  la  Guerre.     Si  j'avois  pu  croire,  répondit-il,  qu'elle  fon- 
geoit  réellement  à  la  Guerre,  je  ne  lui  pardonnerois  jamais  d'avoir  perdu 
tout  l'hiver  fans  entrer  dans  des  mefures  à  cet  égard:  mais, en  vous  mon- 
trant qu'une  pareille  conduite  de  la  Cour  elt  ridicule  &  incroyable  ,    je 
croi  vous  avoir  fuffifamment  prouvé  qu'elle  n'efl  pas  pour  la  Guerre  ,   fa- 
chant  qu'elle  efl  impraticable  ,  &  que  pour  cela  elle  n'a  pris  aucun  foin  de 
prévenir  des  pertes,  qui  après  tout  en  cas  de  Guerre  auroient  été  pour 
la  plupart  inévitables  &  irréparables.     Mais,  lui  dis-je,  quand  même  j-e 
ferois  de  vôtre  fentiment,  je  ne  laifferois  pas  de  croire  que  le  Gouverne- 
ment auroit  mieux  fait  d'avoir  du  moins  témoigné  quelque  refTentiment., 
&  donné  quelque  menace  de  Guerre  pour  avoir  de  meilleures  conditions 
pour  la  Paix.     Mon  ami,  me  dit  Monfr.  P.,  le  Traité  de  Partage  a  mis 
la  Couronne  d'Efpagne  fur  la  Tête  d'un  François  ,  quoiqu'il  foit  fait  (du 
mois  fuivant  la  lettre  du  Traité)  pour  le  prévenir.    Ferons-nous  une  au- 
tre folle  expérience,  &  forcerons-nous  les  Efpagnols,  fous  les  apparences 
d'une  Guerre,  (laquelle  nous  n'avons  pas  deffein  de  faire,  &  pour  la- 
quelle nous  ne  fommes  pas  en  état)  à  mettre  la  Flandre  &  toutes  fes  for- 
ces entre  les  mains  des  François  ;  &  lors  que  cela  fera  une  fois  fait,    au- 
lieu  de  fe  battre  à  Breda,  Frontière  de  la  nouvelle  Confédération  ,  nous 
pourrions  en  venir  à  un  autre  Traité  de  Reftitution.    A  Dieu  ne  plaife, 
fui  dis-je.  Non,  me  répondit  Monfr.  P.  je  fuis  autant  contre  cela  que  vous, 
&  plus  même  j  car,  quoi  que  vous  penfiez  autrement,  je  crains  que  vous 
n'en  preniez  le  chemin.  Mais ,  dites  moi  je  vous  prie,  lui  dis-je,  fur  cette 
manière  d'argumenter  ^  n'aurions-nous  pas  mieux  fait  de  reconnoitre  le 
Duc  d'Anjou  dès  le  commencement?  Car,  nôtre  refus  tout  plat  de  le  re- 
.connoitre.pourroit  épouvanter  les  Efpagnols  jufqu'à  mettre  la  Flandre  en- 
tre les  mains  des  François,  comme  il  paroit  qu'ils  feront,  s'il  y  a  plus  que 
des  complimens  dans  leurs  offres.     En  vérité,  me  dit-il ,  je  fuis.fi  mal- 
heureux, que  quoique  je  fois  de  l'avis  de  la  Cour  dans  cette  Affaire,  je  ne 
faurois  pourtant  approuver  fa  manière  d'agir,  qui  pour  l'ordinaire  eir,  iri- 
compréhenfible,  du  moins  pour  moi,  qui  fuis  un  homme  franc,  &  non 
un  Politique.     Car  il  y  en  a  qui  pourroient  croire  que  fur  l'acceptation 
du  Teftament  la  Cour  devoit  être  porrée  pour  la  Guerre  ou  qu'elle  ne  le 
devoit  pas  être}  un  Génie  Supérieur  ne  héfite  jamais  dans  les  grandes  oc- 
calions}  la  véritable  magnanimité  fe  déclare  dans  un  moment,  &  ne  pefe 
point  les  conféquences,  &  en  vérité  ne  faire  rien  dans  des  circoniîances 
auxquelles  il  n'y  a  point  de  tems  à  perdre,  c'efl  perdre  toute  occafion  de 
-faire  jamais  la  moindre  chofe.     Si  la  Cour  ne  vouloit  abfolument  point  la 
Guerre,  qu'avoic-elle.  à  faire,  fi-uon  d'envoyer  inceflàmment  (non  fon 

Par- 


Ï>E. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  6?7 

Partifan)  mais  une  bonne  fois  un  habile  homme  en  Efpagne,  pour  recon-  Affaire* 
noitre  ce  Roi,  pour  renouvelJer  les  Alliances,  pour  encourager  la  Regen-  Gf-  DE 
ce  &  la  fortifier  dans  les  véritables  intérêts  de  fon  Païs  ?  Ou  s'il,  n'y  avoit  **E™°~ 
pas  moyen  de  réuffir  en  cela,  de  n'épargner  ni  infiances  ni  indultrie  pour 
former  une  Faction  fur  ce  pied-là.  Mais,  11  la  Cour  étoit  dans  le  deffein  de 
faire  la  Guerre,  pourquoi  ne  fongeoit-on  pas  au  plutôt  à  toutes  les  mefu- 
res  imaginables  pour  la  pouffer  j  &  à  envoyer  un  autre  habile  homme  (fl 
nous  en  avons  deux)  en  Allemagne,  pour  agir  de  concert  avec  l'Empe- 
reur, &  s'affurer  de  l'Electeur  de  Bavière,  en  lui  donnant  la  Flandre,  ou 
ce  qu'il  auroit  voulu,  à  ce  qu'avec  fes  6000.  hommes  &  les  12000.  Hol- 
landois  on  eut  couvert  les  meilleures  Villes,  &  qu'on  s'y  fut  tenu  jufqu'àce 
que  les  Troupes  de  Hollande  &  d'Allemagne  les  euifent  joints.  Il  auroit 
paru  par-là,  qu'on  avoit  deffein  de  faire  quelque  chofe,  &  qu'on  vouloit 
mfpirer  de  l'efperance  &  du  courage;  mais,  en  ne  faifant  rien  de  côté  ni 
d'autre  on  a  abatu  les  efprits.  Et  joint  à  ce  que  je  vous  ai  dit  de  ce  qui 
m'a  convaincu, &  beaucoup  d'autres,  qu'on  ne  pouvoit  rien  faire  par  la 
voye  des  Armes,  il  paroit  comme  fi  on  avoit  commis  quelque  grand  faux- 
pas,  ou  qu'il  y  eut  eu  quelque  fecret  fur  le  tapis.  Vous  me  direz  fans 
doute,  que  tout  dépend  d'un  Parlement.  Mais,  qui  peut  prévoir  ce  qu'un 
Parlement  fera?  Puis  que  je  n'ai  jamais  vu  un  Parlement  qui  ne  veut  pas 
entendre  raifon,  ni  même  les  plus  fortes  raifons  ,  lors  qu'on  veut  pren- 
dre les  plus  juftes  mefures  pour  fes  intérêts.  Je  fuppofe  une  Séance  ou- 
verte par  une  Harangue  qui  fit  connoitre  que  la  Flandre  eit  entre  nos 
mains ,  &  qu'on  avoit  befoin  de  vigueur  &  de  diligence  pour  s'en  rendre, 
maitre,  &  pouffer  ainfi  la  Guerre;  que  fans  cela  on  feroit  obligé  de  laif- 
fer  les  villes  au  pouvoir  des  François.  Y  eut-il  jamais  un  Monllre  de 
Parlement  au  monde,  qui  eut  voulu  abandonner  ces  villes  dans  les  circon- 
flances  où  nous  fbmmes  ?  J'avoue,  lui  dis-je,  qu'il  n'y  a  que  trop  de  véri- 
té dans  ce  que  vous  me  dites  -,  mais  je  ne  laiffe  pas  d'efperer  encore  qu'on 
ne  faffe  quelque  chofe  fous  main ,  &  que  nous  faifons  des  Portraits  peu 
reffemblans  de  tout  ce  que  nous  comparons.  Car,  pour  revenir  à  nôtre 
fujet,  quoiqu'il  ne  paroifTe  jufqu'ici,  ni  Réfolution,  ni  Jugement,  dans  la 
conduite  de  la  Cour,  je  ne  la u rois  me  réfoudre  à  croire  ii-non  qu'ils  font 
portez  pour  la  Guerre.  Les  Cours  aiment  à  avoir  des  Armées  ;  le  Roi  a 
vieilli  dans  les  Campemens:  Quelles  autres  vues  peuvent-ils  avoir?  Com- 
ment peuvent-ils  fe  croire  en  fureté?  Je  fai  que  le  Peuple  parle  à  tort  & 
à  travers;  mais,  en  fuppofant  ce  que  vous  fouhakez,  quelle  fureté  ont- 
ils  de  la  France  pour  fe  fier  à  elle?  Si  le  Roi  Jaques  étoit  lui-même  de 
.retour  ici,  pourroit-il  avoir  eu  quelque  confiance  en  la  France  ?  Je  ne 
conçois  pas  ce  qu'on  peut  alléguer  à  ceci,  fi  ce  n'eflque  nous  fuppofions 
que  Dieu  a  abandonné  nôtre  Cour  à  l'efprit  d'endurciffement.  Ajouterai- 
je  ici  ce  qui  a  plus  de  pouvoir  fur  les  gens  d'efprit  que  toute  autre  confi- 
deration,  c'eft-à-dire ,  que  s'ils  fe  montrent  capables  d'elTuyer  l'affront  qui 
leur  été  fait  ,  ils  perdront  tout  crédit  dans  l'efprit  de  tout  le  monde.  11 
eft  plus  que  tems ,  dit  Monfr,  S.,  que  je  parle  à  mon  tour  ;  ces  Argumeas 

Qqqq  3  font 


PE. 


(5f8    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  font  les  mêmes  qui  m'ont  fort  choquez,  &  qui  m'ont  tracafTé  pendant  un 
gïn.  de  mois  dans  la  Ville.  Mais,  écoutez  premièrement ,  je  vous  prie  ,  ce  que 
i/Euuo-  j'ay  à  ajouter  à  ce  qu'a  dit  Monfr.  P.,  &  ce  que  j'avois  deffein  de  vous 
dire  il  y  a  Iong-tems,  s'il  ne  m'avoit  interrompu.  Je  vous  demande  bien 
Pardon  ,  dit  Monfr.  P. ,  les  foubçons  que  vous  formiez  fur  des  Preuves 
palpables  m'ont  échauffé. 

Monfr.   S.  continua,  &  dit,  que  les  raiions  que  j'avois  alléguées,  & 
d'autres  de  cette  nature ,  l'avoient  long-tems  aveuglé  ,  &  qu'il  s'étoit  flat- 
té lui-même,  que  la   Cour  avoit  quelque  grand   deffein,  qu'elle  cachoit 
foigneufement.  Mais  à préfent ,  dit-il,  telles  &  telles  gens,  qu'il  nommoit, 
fe  déclarent  contre  la  Guerre  :  &  peut-on  bien  s'imaginer  qu'ils  ignorent 
le  fecret  ?  Et  s'ils  favent  que  ce  fecret  efl  favorable  à  la  Guerre  ,  comment 
le  peut-il  faire  qu'ils  fe  déclarent  contre  la  Guerre  ?  Leur  intérêt  propre, 
ou  celui  de  leur  parti, peut  les  y  rendre  contraires:  mais  fi  l'on  eft  dans 
l'intention  de  faire  la  Guerre,  cela  ne  les  porteroit  pas  à  s'y  oppofer  ou- 
vertement, mais  plutôt  à  la  prévenir  fous  main  ,  en  la  rendant  encore  plus 
impraticable  qu'elle  n'eft,  ou  qu'ils  l'ont  faite.  Ceci,  je  l'avoue,  me  paroit 
de  grande  conféquence;  &,  à  préfent  que  j'y  fais  réflexion,  comment  la 
Cour,  fi  elle  a  réfolu  la  Guerre,  n'a-t-elle  pas  empêché  que  fes  partis  fe 
déclaraffent,  jufqu'à  ce  qu'elle  ait  vu  de  quel  côté  fe  tourneroient  les  E- 
leétions?  A  l'égard  de  cela,  dit  Monfr.  P.,  elle  efperoit  par-là  de  tourner 
les  Elections  à  Ton  gré;  mais  l'effet  n'a  pas  répondu  à  fon  attente,   à  quoi 
j'aurois  voulu  lui  recommander  de  réfléchir  le  plus  ferieufement.    Elle  eft 
aiïurément  dans  PendurciiTement  dont  vous  avez  fait  mention ,   fi  elle  ne 
voit  point  dans  quelle -fituation  elle  eft,  &  où  elle  s'eft  mife  elle  même 
en  tems  de  Paix;  elle  eft  trop  fage  affurément  (quoique  je  n'aye  pas  gran- 
de opinion  de  fa  fageffe)  pour  hazarder  la  Guerre.     Mais,  je  vous  prie, 
dit-il ,  en  s'addrelTant  à  Monfr.  S.,  apprenez-nous  ce  que  vous  avez  à  dire  aux 
Argumens  de  mon  Ami ,  qui  vous  ont  û  long-tems  aveuglé.     Au  dernier, 
dit  Monf.  S.,  que  je  confidere  comme  le  plus  fort,  j'ai  ceci  a  répondre; 
que  fi  à  la  Cour  on  juge  que  la  Paix  intereffe  l'Angleterre,  rien  n'eft  plus 
héroïque  à  un  Prince  que  de  facrifier  fon  relTentiment  au  bien  de  fon  peu- 
ple; &  quoi  qu'il  foit  fâcheux  à  des  perfonnes  privées  même,  qui  font 
gens  d'efprit,  de  préférer  leur  propre  intérêt  à  leur  rellentiment,  &  bien 
moins  encore  l'intérêt  des  autres,  &  qu'on  voit  peu  de  Princes  qui  en 
foyent  capables  ;  il  eft  néanmoins  confiant  que  fa  Majefté  deguifa  fon  fen- 
timent  fur  l'infolente  rejouïflance  faite  à  Paris  par  authorité,  fur  la  fauffe 
nouvelle  de  fa  mort  à  la  Boyne,  &  de  tout  les  villains  artifices  de  cette 
Cour  pour  l'affalliner ,  &  fagotter  une  Paix  le  ptutôt  po(ïïble;car  les  Fran- 
çois croient  fort  portez  pour  la  Paix  au  grand  mécontentement  des  Alliez, 
jugeant  fans  doute  qu'elle  étoit  de  faifon  &  abfolument  nécelfaire.     Les 
autres  raifons  font  fortes  contre  de  tels  concerts  fecrets  avec  la  France, 
dont  on  a  parlé,  &.  que  je  ne  faurois  croire;  car  comment  cela  fe  peut-il? 
Quoique  je  fois  affez  perfuadé  qu'il  y  a  plus  dans  le  fond  qu'on  ne  voudra 
que  nous  fâchions.  Mais , qu'il  me  foit  permis  d'ajouter  une  chofe,que  l'in- 
clina- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,    M.  DCC.  I.  655? 

clination  de  la  Cour  pour  la  Paix  eft  le   chemin  de  perfuader  à  bien  des    Affaires 
gens  delà  vérité  de  pareils  Concerts,  qui  (ans  cela  n'y  auroient  jamais,    GfN-  DE 
fongé.  On  fe  dit  déjà  communément,  que  Ja  Cour  ne  veut  ni  ne  peut  rom-     *-EvR0' 
pre  avec  la  France.     Je  me  fouviens,  dit  Monfr.  P. ,  que  lorfque  le  Ne-       ■ 
gociateur  revint  après  avoir  répandu  ces  femences  de  Jaloufie  par  Ton  Am- 
bafTade  engageante,  on  fit   beaucoup  d'attention  à  fon  Extravagance  en 
recommandant  le  Prince  de  Galles,  comme  s'il  en  étoit  aimé.  Ceci  joint 
à  quelques  autres  de  Tes  imprudences  &  de  celles  de  fa  bande  babillarde, 
aufli-bien  que  des  raifons  de  plus  grand  poids,  dont  on  ne  doit  pas  faire 
mention,  ont   donné  une  jaloufie  à   des  perfonnes  d'efprit  même,  qu'il 
ménageoit  les  intérêts  de  plus  d'un  Prince;  fi  c'eft  la  vérité,  Dieu  le 
fait,  mais  je  n'en  fai  rien.  Quand  le  Peuple,  lui  dis-je ,  eft  fâché  &  cha- 
grin ,  c'eft  l'a  coutume  de  s'abandonner  aux  jaloiifiès  &  aux  craintes ,  pour  les 
quelles  il  n'y  a  fouvent  non  plus  de  fonds  ,  que  pour  fe  repoferfur  des  Pro- 
phéties &  fur  des  Songes ,  autres  refuges  des  efprits  foibles.  Comment  !  dit 
Monfr.  P.,  vous  nous  traitez  bien  feverement.    Je  vous  demande  pardon, 
lui  dis-je,  je  ne  vous  traite  pas  plus  feverement  que  moi-même;  car  vous 
pouvez  être  aifuré,  quefi  j'étois  une  fois  plainement  convaincu  que  la  Cour 
elt  pour  la  Paix,  je  deviendrons  jaloux  à  mon  tour  ;&  vous  ne  croyez  pour- 
tant pas,  Monfr.  P.,  que  ce  foit  un  bon  fonds  de  jaloufie. 

Mais  ,  pour  revenir  encore  à  notre  fajet„  11  la  Cour  penche  pour  la  Paix, 
il  eft  vraifemblable  qu'elle  appréhende,  qu'en  cas  de  Guerre  le  Parlement 
en  prendra  le  ménagement  dans  fes  propres  mains:  mais,  j'ai  cependant 
lieu  de  croire  que  la  Cour  eft  pour  la  Guerre,  mais  qu'elle  le  tient  fur  fes 
gardes ,  pour  remettre  toute  l'affaire  au  Parlement.  Et,Monfr.P,,  fi  vousrai- 
fonnez  conféquemment ,  en  difant  que  fi  la  Cour  n'avoit  découvert  Cqs  inclina- 
tions avant  les  Elections,  ces  Elections  feferoient  faites  plus  conformément 
h  fes  fouhaits.  N'a-t-elle  pas  raifon,  dans  ces  circonftances  dangereufes ,  de  te- 
nir fa  penfée  cachée?  Je  fuppofe  encore  qu'elle  fouhaitoit  que  le  Parlement 
ne  s'affemblàt  que  jufqu'à  ce  que  la  Régence  d'Efpagne&  la  Cour  de  Fran- 
ce euiTent  fait  les  pas  nécelfaires  pour  faire  porter  des  Refolutions  unanimes 
au  Parlement:  car,  rien  ne  répond  moins  aux  circonftances  prefentes  que 
l'union  &  la  vigueur  convenable  dont  on  eft  entièrement  convaincu.  Peut- 
être  aufn  la  Cour  a  prévu,  que  (1  le  Parlement  s'étoit  afTemblé  plutôt,  il 
auroit  voulu  prendre  fa  part  dans  la  Guerre  fur  Mer  feulement  :  comme 
auîTi  le  Parlement  pourroit  devenir  du  même  fentiment ,  qu'une  augmen- 
tation des  Forces  par  Terre  fera  néceiTaire.  Si  la  Cour  eft  pour  la  Guerre, 
vous  avez  rencontré  jufte,  s'écria  Monfr.  P.,  &  je  commence  à  compren- 
dre la  raifon  des  bruits  que  fement quelques  grands  hommes  (j'entens  quel- 
ques gens  qui  font  dans  de  grands  poftes  )  depuis  peu  de  jours,  c'eft-a- di- 
re, que  dans  la  vue  d'une  Guerre,  l'avis  de  la  CalTation  du  Parlement 
feroit  le  meilleur  qu'on  put  donner.  Tout  ce  que  j'ajouteiai  eft,  quefi 
c'étoit-là  l'intention  de  pareils  avis  (ce  que  je  ne  faurois  croire)  \\s  doi- 
vent avoir  de  bonnes  épaules  ;tnais  que  fi  la  raifon  de  leur  avis  étoit,  com- 
je  l'efpere,  qu'ils  étoient  du  fecret ,  que  la  France  veut  nous  donner  fans 

une 


660  MEMOIRES,  NEGOTÏATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires   une  Guerre  toutes  les  furetez  raifonnables  que  nous  pouvons  efperer  d'à* 

gen.  de    Voir  par  la  Guerre ,  leur  avis  leur  fera  honeur. 

ï/Euko-  Mais,  dit-il  en  fe  tournant  vers  moi ,  approuvez -vous  cette  Politique 
FE*  de  la  Cour  dont  vous  avez  parlé  ,  pour  venir  à  bout  de  la  Guerre  ,  &  que 
vous  croyez  qu'elle  pourroit  avoir? Non,  lui  dis-je,  j'en  fuis  bien  éloigné, 
ces  fortes  de  manières  d'agir  ne  conviennent ,  ni  ne  conviendront  jamais, 
à  cette  Nation.  Nous  fommes  un  Peuple  franc  &  fincere,  &  nous  vou- 
lons être  traitez  comme  tels.  Je  fouhaiterois  de  tout  mon  coeur  que  la 
Cour  eut  convoqué  d'abord  le  Parlement ,  &  qu'elle  eut  pris  les  mefures 
dans  lefquelles  elle  l'auroit  trouvé  prêt  d'entrer.  Le  Parlement  feroit  ve- 
nu par  degrez  (  à  l'ouverture  de  la  Scène  )  dans  toutes  les  mefures  nécef- 
faires ,  &  aujourd'hui  même  nos  préparations  auroient  été  fort  avancées. 
Je  fuis  &  j'ai  toujours  été  d'opinion,  dit  Monf.  P.,  que  lorfqu'il  n'y  a  que 
des  deffeins  fur  pied  qui  peuvent  fouffrir  le  jour,  on  peut  les  mettre  ou- 
vertement en  exécution  ,  &  que  c'elt-là  la  véritable  manière  dont  il  en 
faut  agir  avec  cette  Nation,  laquelle  les  Procédez  Mifterieux  remp'.iiTent 
de  jaloufies,  donc  elle  ne  fe  défait  pas  aifément  dès  qu'elle  les  a  conçues 
une  fois,  mais  qu'elle  pouffe  alors  fort  loin,  comme  nous  voyons  qu'il  ar- 
rive. Car,  depuis  ce  tems-là,  les  Conférences  obfcures  en  Flandre  &  l'ef- 
pece  de  Paix  qui  les  accompagna,  laquelle  fut  fui  vie  de  la  diflblution  de 
toute  Union  &  bonne  intelligence  avec  les  Conféderez  &  avec  toutes  les 
apparences  de  la  plus  grande  confiance  ,  la  plus  étroite  amitié  avec  la 
France  ;  lorfqu'en  même  tems  la  perfécution  de  ceux  de  notre  Religion  en 
France  &  autre  part  s'accroiflbit ,  fans  qu'il  parut  qu'on  s'en  mettoit  aucu- 
nement en  peine  chez  nous,  &  qu'il  fembloit  que  Dieu  &  les  hommes  a- 
voient  abandonné  par-tout  l'intérêt  Proteftant  ;  toutes  ces  chofes-là,  dis-je, 
ont  rempli  d'étonnement  tous  ceux  qui  font  en  quelque  manière  capables 
de  reflexion ,  &  les  ont  fait  trembler  &  appréhender  quelque  mauyaife 
Cataftrophe.  Après  cela  parut  premièrement  le  Partage  &  depuis  leTef- 
tament  ;  &  Dieu  veuille  nous  fortifier  contre  ce  qui  doit  les  accompagner 
encore.  Nous  fommes  évidenment  fous  l'afpecl:  de  quelque  mauvaife  Pla- 
nète, qui  paroit  nous  avoir  accablé  en  tems  de  Paix.  En  ce  cas-là,  fi  le  Par- 
lement trouve  pourtant  qu'une  Guerre  foitle  véritable  remède,  je  m'y  fou- 
mets.     Et  après  cela  nous  nous  féparames. 

J'efpere,  Monfieur,  que  j'ai  rendu  juftice  h  Monfr.  P.  Je  ne  me  fou- 
viens  pas  d'avoir  oublié  aucune  chofe  eiTentieHe ,  fi  ce  n'eit  qu'il  infifla 
beaucoup  fur  l'avantage  que  nous  prétendions  tirer  de  la  Guerre,  laquelle 
Queftion  je  mettrai  dans  tout  fon  jour  dans  ma  converfation  avec  Monfr. 
R. ,  qui  fans  doute  y  fouferira  abfolument. 

Une  autre  chofe ,  qu'il  dit  tenir  d'un  Gentilhomme  Ecoffois ,  eft  que  la 
femaine  pafTée  dans  le  débat  au  Parlement  d'Ecoffe  aufujetd'un  Aclepour 
confirmer  leur  Droit  à  Caledonie,  auquel  il  paroit  que  le  Roi,  dans  fa  Let- 
tre à  leur  Parlement,  leur  avoit  dit  qu'il  ne  pouvoit  confentir  fans  en  ve- 
nir à  une  Guerre;  il  y  fut  foutenu  que  les  chofes  ayant  changé  de  face  à 
préfent,  &  que  la  Guerre  étant  devenue  probable  pour  desraifons  déplus 

grand 


RESOLUTIONS    D'ETAT  ,  M.  DCC.  I.  661 

grand  poids,  il  étoit  hors  de  doute  que  Sa  Majeflé  en  étoit  devenue  p'us  Affatkf.s 
libre.  Sur  cela  le  Commiiïkire  leur  dit  qu'il  avoit  de  nouvelles  afilirances  G™-DR 
de  Sa  Majeité  qu'elle  avoit  les  mains  liées  plus  que  jamais  dans  cette  affai-    LÊUR0" 

re.     Cela  n'a  pas  befoin  de  Commentaire:  &,  pour  vous  parler  franche-   — 

ment,  quoique  je  parle  en  compagnie,  je  fuis  plainement  fitisf.iit  qu'on 
ne  (bit  point  porté  à  la  Guerre  ;  mais  non  pas  qu'on  iouffre  que  les  Alar- 
mes du  dehors,  &  les  méfiances  au  dedans,  aillent  leur  train,  jufqu'à  ce 
que  tout  le  crédit  &  tout  l'argent  foit  perdu;  de  manière  que  lorfque  le 
Parlement  s'aiTemblera  (ce  qui  paroit  être  le  plan)  quelque  nécefTaire  que 
foit  la  Guerre,  elle  fera  en  vérité  impraticable;  &  alors  cette  malheureu- 
se Nation  dupée  &  abandonnée  fera  contrainte  de  foufcrireàde  nouveaux 
Papiers  de  Partage  ,  &  à  toute  autre  chofe  qui  peut  auffi  aifément  fe  calTer, 
fi-tôt  que  d'autres  auront  capitulé ,  &  qu'on  aura  mis  ordre  aux  Affaires 
d'Efpagne. 

Je  fuis  &c. 
Londres  Je  24.  Janvier  1 70 1 . 

p 

Lettre  de  Af*****  écrite  à  M**%  Envoyé  Extraordinaire  de  *** 
à  la  Haye,  contenant  diverfes  Réflexions  Jur  le  Trait  té  conclu 
entre  P  Empereur,  le  Roy  d' 'Angleterre ,   &  les  Etats 
Généraux    des    Provinces  -  Unies  ,   le    7.   Sep- 
tembre    1701.     A    Francfort,     chez 
Pierre  Olhenjlagher ,  1701. 

Vous  m'avez  mandé,  Monfleur,  les  engagements  réciproques  qui  ont  Lettre 
été  pris  dans  le  Traité  d'Alliance  conclu  entre  l'Empereur,  le  Roy  furie 
d'Angleterre ,  &  les  Etats  Généraux  des  Provinces- Unies  le  7.  Septembre  Traite 

.        .°  -  ,  -  /  1      m     •    '        a  o     entre 

dernier,  mais  vous  ne  m  avez  point  envoyé  copie  du  Iraite  même,    &  i'Empe. 
c'eft  principalement  ce  que  je  vous  avois  demandé.    J'ay  trouvé  moyen  reur,  le 
d'en  avoir  une  par  un  autre  endroit  ;  & ,  depuis  ce  tems-là ,  le  Pojîe  que  vous  R°i 
occupez  ma  empêché  de  m'étonner  du  refus  que  vous  m'avez  fait  de  me  com-  d'An§Ie- 
muniquer  la  vôtre.  ]es  Et'ats 

En  effet,  de  pareils  engagements  débitez  fans  circonftances  des  motifs  Gêné- 
fur  Iefquels  ils  font  fondez  en  donnent  d'abord  une  grande  idée;  mais,  raux. 
Monfieur,  que  cette  idée  s'efl  diminuée,  depuis  que  j'ay  veu  le  Traité  mê- 
me !  Le  foin  que  la  Cour  de  Vienne  a  pris  de  ne  le  communiquer  quen  de 
certaines  Cours,  fans  le  rendre  entièrement  public ,  m'avoit  déjà  donné  quelque 
foupçon;  &  je  jugeois,  que  fi  elle  en  avoit  été  aufîi  contente,  qu'elle  a 
voulu  le  faire  croire, elle  n'auroit  pas  d'abord  manqué  de  le  produire  par- 
tout, &  entr'autres  lieux  à  Ratisbonne,pour  préparer  la  Diette  à  en  con- 
noitre  les  avantages.     Mais,  elle  a  craint  avec  ràifon ,  qu  une  communication 

îome  XL  Rrrr  fins 


FE. 


662.    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires  plus  générale  ne  donnât  à  des  gens ,  comme  nous  fans  partialité  &  fans  intérêt , 
gen.  de  une  trop  facile  occafion  de  l'examiner  &  d'en  faire  remarquer  le  foible.  Elle  a 
crû  qu'il  fer  oit  plus  à  propos  de  ne  rendre  cette  communication  fi  publique ,  que 
■dans  le  tems  que  Al.  le  Cardinal  de  Lamberg  inviteroit  la  Dictte  de  l 'Empire 
d'y  entrer  ,  &  elle  a  efperé  de  confondre  par-là  ces  deux  objets ,  £5?  d'éloigner^ 
ou  d'affuiblir  au  moins ,  par  les  propofitions  de  ce  Prince  les  jufles  Réflexions  que 
le  Public  auroit  eu  le  tcms  de  faire  à  loijîr  fur  le  Traité  même. 

Mais,  Tes  précautions  onc  écé  inutiles.  Ce  Traitté  efl  tombé  entre  les 
mains  de  tout  le  monde\ôc  voici  les  Remarques  judicieufes  qui  y  ont  été  fai- 
tes par  ceux  qu'une  longue  expérience  fur  de  pareils  engagements  rend  capables  d'en 
juger  avec  folniité  É5  (ans  pajjion. 

Nous  commencerons ,    s'il  vous  plaid ,    Monfieur ,  par  le  Préambule. 
Dans  tous  les  Traittez  qui  ont  jamais  été  faits,  c'eft  ordinairement  dans  ce 
Préambule  où  l'on  établit  les  principes  fur  lefquels  l'Alliance  &  les  mefu- 
res  qu'on  prend  en  confequence  font  fondées.    Ces  principes  doivent  être 
certains  dans  l'opinion  des  parties  qui  contractent, quand  ils  ne  le  feroient 
pas  dans  l'efprit  des  autres,  &  elles  doivent  au  moins  en  convenir,  &  faire 
paroitre  qu'elles  les  croyent  tels.     C'eil  pourtant  ce  qu'on  ne  voit  en  au- 
cune façon  dans  le  Préambule  du  Traité  dont  il  s'agit.     11  y  e(t  feulement 
fpecifié  que  l'Empereur,  a  foutenu  que  la  Succefîion  du  Roi  d'Efpagne  lui 
apartient,  que  le  Roy  de  France  s'en  efl  emparé  pour  le  Duc  d'Anjou  fon 
petit  Fils  en  vertu  d'un  certain  Teitament  &c.  Que  par  ce  moyen   les 
Royaumes  de  France  &  d'Efpagne  paroiffent  ne  pouvoir  être  confiderez 
que  comme  un  feul  &  même  Royaume,  enforte  que  fi  on  n'y  pourvoit 
il  y  a  affez  d'apparence  que  l'Empereur  doit  renoncer  à  toute  efperance 
d'avoir  jamais   fatisfaêtion  fur  fes  prétentions.    Que  l'Empire  perdra  fes 
droits  fur  les  Fiefs  d'Italie  &  des  Pays-Bas  Efpagnols;  que  le  libre  ufage 
de  la  Navigation  &  du  Commerce  périra  entièrement  dans  la  -Mer  Médi- 
terranée, dans  les  Indes,  &  ailleurs,  pour  les  Anglois  &  les  Provinces-U- 
nies.  Que  ces  mêmes  Provinces  feront  privées  de  la  feureté  qu'elles  ti- 
roient  de  la  fituation  des  Pays-Bas  Efpagnols  entr'elles  &  les  François, 
nommée  vulgairement  Barrière.    Qu'enfin  les  François  &  les  Efpagnols 
ainfi  unis  deviendroient  bien-tôt  fi  formidables,  qu'ils  fe  pourroient  faci- 
lement arroger  l'Empire  de  toute  la  Terre,  &  que  par  cette  conduite  du 
Roy  de  France  l'Empereur  avoit  été  obligé  d'envoyer  une  armée  en  Italie 
pour  la  confervation,tant  de  fes  Droits  particuliers,  que  des  Fiefs  de  l'Em- 
pire.   Que  le  Roi  d'Angleterre  avoit  creu  de  même   neceflaire  d'envoyer 
fes  Troupes  auxiliaires  aux  Hollandois,  dont  les  Affaires  étoient  dans  le 
même  état  que  s'ils  étoient  en  effet  attaquez.  Et  que  les  Provinces-Unies, 
dont  les  Frontières  font  prefque  ouvertes  de  tous  cotez  par  la  rupture  de 
la  Barrière  qui  les  deffcndoit  contre  le  voifinage  des  François ,    ont  été 
obligées  de  faire  pour  la  feureté  &  le  falutde  leur  Republique  tout  ce  qu'el- 
les ont  dû  &pû,  de  même  que  fi  elles  avoient  été  attaquées;  Qu'ainliune 
fituation  fi  douteufe  des  Affaires  étant  plus  perilleufe  que  la  Guerre  même, 
&  la  France  &  l'Efpagne  abufant  de  cet  état  des  chofes,   pour  s'unir  de 

plus 


PE. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.    I.  66\ 

plus  dans  le  deflein  d'opprimer  la  Liberté  de  l'Europe  &  de  détruire  leur  Affaires 
Commerce,  par  ces  raifons , l'Empereur,  le  Roi  d'Angleterre,  &  les  Pro-  GfN-  DE 
vinces-Unies ,  dans  la  veue  d'aller  au  devant  de  tant  de  maux  qui  en  re- 
fulteroient,  &  dans  le  defir  d'y  remédier  félon  leurs  forces,  ont  creu  ne- 
ceffure  de  faire  entr'eux  une  étroite  union  &  confédération  ,  pour  repouf- 
fer la  grandeur  de  ce  péril  commnn ,  &  ont  à  cette  fin  muny  de  leurs  or- 
dres tels  &  tels ,  &c.  qui  font  convenus  des  conditions  fuivantes. 

Voilà,  Monfieur,  le  Préambule  de  ce  Traitté  mot  pour  mot.  On  n'y 
convient  d'aucun  principe  fixe  &  réel,  que  de  celui  de  s'unir  pour  faire  la 
Guerre.  L'Empereur  y  reprefente,  à  la  vérité,  fa  prétention  indéfinie 
fur  laSuccefiion  d'Efpagne;  mais,  le  Roi  d'Angleterre, ni  les  Etats  Géné- 
raux, ne  marquent  en  aucune  façon  qu'ils  conviennent  de  fes  Droits  pré- 
tendus. Cela  feroit  pourtant  neceflaire  dans  ce  Préambule  pour  fonde- 
ment des  mefures  qu'on  veut  prendre;  &  c'eil,  comme  il  a  été  dit  ci- 
delfus,  l'ufage  dans  tous  les  Traittez. 

Mais,  cette  irrégularité  n'efl  pas  la  feule.  Après  avoir  manqué  d'éta- 
blir ce  fondement,  on  en  infinué  d'autres  dont  on  ne  parle  que  comme 
de  fimples  apparences,  ainfi  qu'on  le  voit  par  les  mots  Videantur,  13 
autres ,  qui  ne  déterminent  rien ,  &  qui  ne  font  que  des  traits  d'éloquen- 
ce inutile  en  matière  de  Traittez,  qui  demandent  d'être  établis  fur  des 
principes  certains,  dent  il  faut  au  moins  que  les  parties  contractantes  de- 
meurent d'accord  entr'elles. 

On  peut  même  dire  que  ces  apparences  font  imaginaires.  La  pre- 
mière ell  fondée  fur  une  prétendue  Union  des  deux  Monarchies  de  Fran- 
ce &  d'Efpagne  en  une  feule.  C'eil  une  idée  inventée  par  ceux  qui 
veulent  injuflement  entrainer  l'Europe  dans  une  Guerre  qui  convient,  à 
l'égard  de  la  Cour  de  Vienne,  aux  prétentions  de  l'Empereur,  &  au  be- 
foin  d'avoir  des  quartiers  ,  des  aflignations  ,  &  des  mois  Romains  dans 
l'Empire,  pour  fubvenir  aux  frais  de  la  Guerre;  &  à  l'égard  des  autres, 
au  deflein  de  fortir  d'un  repos  ennuieux  &  renfermé  en  des  certains  lieux, 
&  en  de  certaines  bornes  qui  ne  conviennent  pas  à  leur  génie  &  au  de- 
fir de  finir  leur  carrière  comme  ils  l'ont  commencée  ,  &  de  fe  rendre 
neceifaires  dans  l'Europe,  où  ils  craignent  d'être  oubliez  ou  négligez,  11 
la  Paix  n'en  étoit  pas  troublée ,  fans  fe  mettre  en  peine  des  fuites,  parce 
qu'ils  n'en  ont  point  de  fujet  qui  les  touche  dallez  près  pour  y  prendre 
intérêt. 

Dans  ce  deflein  des  uns  &  des  autres,  il  a  fallu  établir  dans  les  efprits  du 
public  cette  prétendue  Union  des  deux  Monarchies  en  une,  &  l'on  a  eu 
grand  foin  d'en  faire  le  fondement  de  tous  les  Libelles  &  autres  Ecrits, 
qui  ont  été  débitez  pour  en  abreuver  le  monde  &  profiter  de  fa  cré- 
dulité. 

Cependant,  rien  n'efl:  plus  vain  que  cette  idée.  Pour  en  être  defabufé, 
il  n'y  qu'à  lire  le  Teflament  du  Roi  d'Efpagne  deffunt.  Il  n'y  a  qu'à  fe 
fouvenir  de  l'Acceptation  de  ce  Teflament, des  démarches  des  Efpagnols 
en  venant  jufqu'à  Verfailles  demander  leur  Roy,  &  des  Explications  tant 

Rrrr  2  de 


PE. 


<tf4     MEMOIRES,   NEGOTIATIONS,  TRAITEZ, 

AtTAiâES  de  fois  données  dans  toutes  les  Cours ,  que  dans  la  Renonciation  que 
gen.  de  ]es  Espagnols  ont  pu  annuller ,  puifqu'ils  l'avoient  faite,  on  n'a  pas  lailfé 
l'Euro-  ^»en  COpferver  l'efprit  &  Ie  t>ut  >  9ui  étaient  d'empêcher  que  ces  deux 
Monarchies  ne  fuffent  reiinies  en  la  perfonne  d'un  même  Prince.  Tout 
cela  eft  auffi  réel,  que  la  crainte  dont  on  veut  éblouir  le  public  eft  chi- 
mérique, &  ne  tend  vifiblement  qu'à  troubler  l'Europe,  pour  des  inté- 
rêts Etrangers,  pour  les  veuës  particulières,  qu'on  a  fait  affez  entendre 
ei-defTus. 

L'autre  apparence  qu'on  raporte  eft ,  que  fi  on  n'y  pourvoit ,  l'Empe- 
reur n'aura  point  de  fatisfa&ionfur  fes  prétentions  ;  &  c'eft  encore  un  mo- 
tif fans  fondement.  L'Empereur  prétend  toute  la  Succefîion.  On  ne 
voit  pas  même  dans  ce  Traité  qu'il  le  contente  des  Etats  qu'on  ftipule  de 
l'aider  à  recouvrer.  En  effet ,  dans  les  règles  toute  la  Succefîion  apartient 
de  droit  au  véritable  héritier.  C'eft  fur  ce  fondement,  que  le  Teftament 
&  la  Nation  Efpagnole  ont  apellé  un  Prince  du  Sang  de  France.  Il  ne 
s'agit  donc  point  de  fatisfaclion  en  une  chofe  qui  apartient  de  droit  à  un 
feul  Prince  reconnu  par  tant  de  droits,  &  reçeu  avec  tant  d'aplaudiffements 
de  toute  la  Nation  Efpagnole,  entre  les  bras  de  laquelle  il  s'ell  jette, 
fans  qu'on  y  ait  employé  la  moindre  force  :  <&  de  fimples  convenances 
ne  peuvent  priver  un  héritier  d'une  partie  d'une  fucceffion  qui  lui  apar- 
tient toute  entière.  C'eft  pourtant  fur  ces  convenances  de  pure  politi- 
que, qu'on  établit  cette  prétendue  fatisfaclion ,  &  l'on  ne  peut  jamais  di- 
re qu'elles  foient  conformes  à  l'équité.  On  dit  enfuite  que  l'Empire  per- 
dra fes  Droits  fur  les  Fiefs  d'Italie  &  des  Pais-Bas  Efpagnols.  C'eft  un 
fondement  notoirement  faux.  L'Empire  n'a  point  d'autre  intérêt  dans 
cette  Affaire,  que  le  Vaffelage  &  laReconnohTance  de  ces  Fiefs.  Il  fuffit 
que  le  Prince  qui  en  a  hérité,  &  qui  en  eft  en  poffeiîion,  y  fatisfaffe:  La 
perfonne  ne  fait  rien  à  la  chofe  pour  affurer  la  mouveance.  C'eft  ce 
que  le  Roy  d'Efpagne  a  fait.  Il  a  demandé  à  Vienne  par  fon  Ambaffa- 
deur  l'Inveftiture  du  Duché  de  Milan  à  l'Empereur.  Il  s'eft  reconnu 
Membre  de  l'Empire  pour  le  Cercle  de  Bourgogne  qui  comprend  les  Païs- 
Bas  Efpagnols,  par  le  pouvoir  qu'il  avoit  envoyé  à  fon  Miniftre  à  Ratis- 
bonne.  Si  cette  Inveftiture  n'a  pas  été  donnée,  &  li,  fans  confulter  la 
Diette  de  l'Empire,  comme  cela  étoit  indifpenfable,  la  Cour  de  Vienne 
a  obligé  ce  Miniftre  de  fe  retirer  de  la  Diette,  ce  n'eft  pas  la  faute  du 
Vaffal.  Le  Roy  d'Efpagne  a  rempli  de  fa  part  toutes  fes  obligations.  Il 
eft  encore  prêt  d'y  fatisfairej  &  ce  fondement  du  Traitté  eft  donc  entiè- 
rement contraire,  non  feulement  à  la  vérité  du  fait,  mais  même  à  l'é- 
quité. 

On  vient  enfuite  à  la  Navigation  &  au  Commerce  ,  &  l'on  témoigne 
en  craindre  la  perte.  Mais  ,  c'eft  encore  une  autre  fauffe  idée  fondée  fur 
l'Union  des  deux  Monarchies  en  une,  dont  on  a  fait  voir  le  peu  de  fon- 
dement. En  effet,  ces  Monarchies,  feparées  comme  auparavant ,  laifferonc 
le  Commerce  en  l'état  qu'il  étoit  ci-devant.  C'eft  même  de  quoy  on 
peut  convenir  plus  particulièrement,  comme  la  France  &  l'Efpagne  l'ont 

offert 


PE. 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  I.  66f 

offert  plufieurs  fois.  La  guerre  qu'on  médite  contre  ces  deux  Couronnes  Affaires 
efl  bien  plutôt  un  obftacle  à  ce  même  Commerce,  que  le  maintien  de  la  GEN- 1>R 
Paix,  pendant  laquelle  l'habileté  &  la  parcimonie  des  Hollandois  les  ren-  L'Ewo- 
dront  toujours  fuperieurs  à  toutes  les  autres  Nations  dans  le  négoce.  Et 
le  Commerce  eit  d'ailleurs  naturellement  libre  par  lui  même,  &  ne  peut 
jamais  être  feul  un  jufle  fujet  de  faire  la  Guerre,  quand  on  fatisfait  de 
part  &  d'autre  aux  conditions  établies  réciproquement,  dont  il  eit  facile 
de  convenir  encore  plus  amplement. 

Après  cela, on  paiTe  à  la  Barrière  dont  on  craint  d'être  privé.  C'efl  de 
même  une  vaine  apprehenfion.  Les  Places  Efpagnoles  qui  la  forment 
entre  la  France,  &  les  Etats  Généraux  des  Provinces-Unies,  la  forme- 
ront toujours  comme  auparavant,  en  demeurant  entre  les  mains  de  l'E- 
fpagne.  La  France  n'y  prétend  rien ,  &  c'eit  fur  quoi  Elle  a  témoigné 
qu'elle  étoic  même  prête  de  prendre  avec  eux  toutes  les  mefures  qui  fe- 
ront raifonnables. 

Enfin,  à  Pégard  de  ce  qui  efl  dit  de  l'état  où  les  Provinces-Unies  ont 
été  obligées  de  fe  mettre  avec  tant  de  depenfe  pour  la  feureté  &  le  i'alut 
de  leur  République  comme  fi  elles  étoient  actuellement  en  Guerre ,  c'efl 
un  mal  commun  qu'on  auroit  pu  éviter  réciproquement.  La  France  ni 
l'Efpagne  ne  penfent  point  à  attaquer  ni  cette  Republique  ny  perfonne. 
Ces  deux  Couronnes  n'ont  aucune  autre  intention  que  de  fe  deffen- 
dre.  La  confervation  de  la' Paix  fait  leur  unique  intention.  C'eft  un  but 
falutaire  autant  qu'irreprocable ,  &  c'efl  celui  de  plufieurs  Etats  de  l'Eu- 
rope qui  ne  fe  font  pas  laifTé  éblouir  par  la  vaine  crainte  d'une  union  ima- 
ginaire des  deux  Monarchies,  ny  par  des  intérêts  étrangers,  ou  par  des 
veuês  particuliers  qui  en  ont  entrainé  d'autres ,  par  un  effet  de  leur  dé- 
vouement pour  la  Cour  de  Vienne,  ou  de  leur  ambition  perfonelle,  qui 
leur  fait  trouver  trop  peu  de  mouvement  &  de  confideration  dans  le  re- 
pos de  l'Europe. 

Voilà, Monîieur,  les  prétendus  fondements  de  ce  Traitté,  qui  ne  font, 
comme  vous  voyez,  que  des  prétentions  indéterminées  d'un  côté  dont  on 
ne  convient  pas  même  de  l'autre,  de  fimples  aparences  fans  realité,  des 
faits  contraires  à  la  vérité,  des  craintes  imaginaires  dont  on  veut  éblouir 
le  public,  &  en  effet  un  deffein  formé  de  troubler  toute  l'Europe,  &  de 
rejetter  fur  l'Empire  la  plus  grande  partie  du  poids  de  la  Guerre  pour  fe 
tirer  enfuite  d'intrigue ,  &  faire  fa  Paix  feparement  malgré  toutes  les  pro- 
meffes  qu'on  donnera  du  contraire,  comme  cela  efl  déjà  deux  fois  arrivé 
de  nos  jours.  Enfin,  je  vous  avoue  que  je  n'ay  jamais  veu  un  Traitté  fi 
mal  fondé;  &,  encore  une  fois, non  feulement  je  ne  m'étonne  plus  que  la 
Cour  de  Vienne  ait  tant  différé  de  le  rendre  entièrement  public ,  mais  je  croîs 
même  qu'il  efl  plus  capable  de  porter  les  autres  Puiffances  à  en  empêcher 
l'exécution,  qu'à  y  contribuer. 

Je  viens  après  cela  aux  Articles  mêmes  qui  font  réduits  à  14. 

Le  premier,  concernant  une  amitié  &  une  correfpondance  réciproque, 
efl  à  peu  près  le  même  qu'on  met  dans  tous  les  Traitiez. 

Rrrr  ?  Le 


666    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Affaires       Le  fécond  mérite  Réflexion.   On  y  dit  qu'on  a  la  Tranquilité  gênera- 
gen. m.    le  de  toute  l'Europe  à  cœur;  cependant,  on  y  témoigne  qu'on  trouve 
l'Euro-    ^  propos  de  la  troubler,  en  procurant  à  l'Empereur  une  fatisfaction  é- 
F£'        quitable  &.   conforme   à   la   raifon    fur  fes   prétentions    à  la    SucceiTion 
d'Efpagne,  &  une  feureté  particulière  &  fuffifante  au  Roy  d'Angleter- 
re &  aux  Etats  Généraux,  pour  leurs  Royaumes,  Provinces,  &  Pais, 
&  pour  la  Navigation  &  le  Commerce  de  leurs  Sujets.     J'avois  toujours 
ouï  dire  ,  qu'on  faifoit  la  Guerre  pour  avoir  la  Paix:  mais  je  n'avois  ja- 
mais oui  parler   que  que  quand   on  a  la  Paix  on   doit  faire   la   Guerre 
pour  l'obtenir;  &  l'on  auroit  bien  deu  donner  un  autre  tour  à  cet  Arti- 
cle pour  le  rendre   recevable. 

A  l'égard  de  la  fatisfaction  ,  j'y  ay  répondu  en  examinant  le  Préam- 
bule. J'y  adjoûterai  feulement,  que  ces  termes  indéfinis  de  fatisfaction 
raifonnable  laiifent  un  beau  champ  aux  Hollandais  de  dire,  quand  ils  le 
trouveront  de  leur  intérêt,  que  telle  ou  telle  fatisfaction  l'eft,  &  de  faire 
ainfi  leur  Paix  particulière,  comme  dans  les  deux  dernières  Guerres.  J'ay 
de  même  répondu  à  la  feureté  mentionnée  dans  cet  Article.  Je  ne  vous 
le  repeteray  point. 

Dans  le  3.  on  convient  de  deux  mois  qu'on  employera  à  obtenir  par 
des  voyes  amiables  cette  fatisfaction  raifonnable  &  cette  feureté,  à  com- 
pter du  jour  de  la  Ratification  du  Traitté.  Le  public  eil  bien  obligé  aux 
Parties  contractantes  de  cette  modération ,  pendant  qu'on  voit  que  de 
tous  cotez  elles  travaillent  à  engager  la  Guerre  par  toutes  fortes  de  voyes 
contraires  à  cette  veuë;  &  je  ne  fçais  point  que  depuis  ce  tems-là  elles 
ayent  fait  aucune  démarche  pour  parvenir  à  un  Accommodement. 

Dans  le  4.  il  eft  dit  qu'après  ce  terme  expiré,  on  unira  fes  forces  fui- 
vant  la  fpecification  qui  en  fera  faite  dans  une  tranfaction  particulière  pour 
obtenir  cette  fatisfaction  &  cette  feureté.  Je  juge  de-là  ,  que  cette 
tranfaction  n'étoit  pas  encore  faite  alors.  Je  ne  fçais  fi  elle  l'aura  été 
depuis. 

Enfliitte,  on  dit  dans  le  5.  Article,  que  pour  procurer  cette  fatisfaction 
&  cette  feureté,  on  travaillera  à  recouvrer  les  Païs-Bas  Efpagnols  pour 
fervir  de  Barrière  entre  la  France  &  les  Provinces-Unies,  le  Duché  de 
Milan  comme  Fief  de  l'Empire,  &  fervant  de  feureté  aux  Pais  héréditai- 
res de  l'Empereur,  enfin  les  Royaumes  de  Naples  &  de  Sicile,  &  les 
Ifles  de  la  Mer  Méditerranée  de  la  Domination  d'Efpagne  qui  peuvent  fer- 
vir à  la  Navigation  &  au  Commerce  des  Sujets  du  Roy  d'Angleterre  & 
des  Etats  Généraux  des  Provinces-Unies.  Voilà,  Monfieur,  de  grands 
projets.  On  devoit  ajouter  dans  combien  de  tems  on  les  exécutera; 
autrement,  je  prévois  qu'on  ne  parviendra  jamais  à  la  Paix  qu'ils  difent 
avoir  en  veuë,  puifque  nous  ne  fommes  plus  dans  le  tems  où  la  Conquê- 
te d'un  Royaume  dépendoit  du  gain  d'une  Bataille  &  de  la  Prife  d'une 
Place.  Aujourd'hui,  les  Fortereffes  fe  touchent  prefque  dans  tous  ces 
païs-là.  On  fçait  ce  qu'une  feule  coûte  à  prendre  ,  &  l'expérience  a  fait 
voir  dans  les  Païs-Bas  principalement,  &  même  depuis  peu  en  Italie,  qu'on 

ne 


l'Euro- 
pe. 


RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I.  667 

ne  donne  pas  Bataille  quand  on  veut ,  &  que  tout  le  fruit  d'une  victoire  Affaires 
incertaine  eft  d'abord  arrêté  parla  moindre  Place,  qu'on  ne  peut  hazar-  JSJ^J 
der  de  laifler  derrière  foy  par  les  raifons  que  les  gens  du  métier  vous 
pourront  expliquer  mieux  que  moi.  De  plus ,  le  péril  fera  réciproque;  ce- 
pendant, le  Commerce,  qui  eft  l'ame  des  Provinces-Unies,  périra,  &  il 
leur  faudra  pourtant  trouver  de  l'argent,  parce  qu'on  ne  doit  pas  prefumer 
que  tant  de  Troupes  Auxiliaires  falTent  la  Guerre  aux  dépends  des  Frinces 
qui  les  fourniront.  On  doit  dire  la  même  chofe  à  l'égard  du  Duché  de 
Milan,  &  des  Royaumes  de  Naples  &  de  Sicile  ;  & ,  pour  ce  qui  eft  de  ce 
Duché  qu'on  fait  toujours  regarder  comme  un  Fief  de  l'Empire  qu'il  faut 
recouvrer,  j"ay  amplement  fait  voir  que  ce  faux  prétexte  eft  entière- 
ment détruit  par  l'Inveftiture  demandée  au  nom  du  Roy  d'Efpagne.  Je 
vous  feray  feulement  remarquer  la  circonftance  de  futilité  dont  on  dit 
que  ce  Duché  eft  pour  la  feureté  des  Pais  héréditaires  de  l'Empereur; 
&  je  vous  demanderai  contre  qui  cette  feureté,  puifque  le  Roy  d'Efpa- 
gne ne  veut  attaquer  perfonne,  &  quel  intérêt  affez  grand  l'Europe  peut 
avoir  de  s'expofer  par  cette  raifon  à  une  Guerre  ruineufe,  vraisemblable- 
ment plus  longue  qu'aucune  autre  qui  ait  été  faite  depuis  long-tems, 
quand  elle  peut  l'éviter,  en  confervant  dès  à  prefent  la  Paix  dont  elle 
jouit?  Il  faut  auflî  remarquer  fur  cet  Article,  comment  toutes  chofes  y 
îbnt  raportées  avec  ambiguïté.  On  y  parle  bien  de  travailler  à  recouvrer 
les  Pais-Bas  Efpagnols,  mais  on  ne  dit  point  pour  qui,  ny  comment.  Tout 
cela  n'elt  exprimé  qu'en  termes  généraux,  &  doit  donner  à  toutes  les 
Puiifances  non  partiales  de  juftes  doutes  fur  la  véritable  intention  des  Par- 
ties contractantes. 

Le  6.  Article  eft  un  Confentement  &  un  Don  que  l'Empereur  fait  au 
Roy  d'Angleterre  &  aux  Etats  Généraux  des  Villes  &  Pais  qu'ils  pour- 
ront occuper  aux  Indes  de  la  Domination  d'Efpagne.  Que  dites  vous, 
Monfieur,  de  cette  Libéralité?  Trouvez-vous  qu'elle  coûte  beaucoup  à 
l'Empereur?  Un  pareil  Confentement  n'efl-il  pas  un  Titre  bien  valable 
pour  autorifer  des  Conquêtes  en  ces  Quartiers-là,  &  pour  y  foumettre  de 
juftes  &  anciens  Poffeffeurs  à  la  Domination  des  Anglois  &  des  Hollan- 
dois,  &  à  une  nouvelle  Doctrine  au  préjudice  de  la  Catholique  Romaine 
qui  y  été  plantée  avec  tant  de  peine?  Comment  croyez-vous  que  la  Cour 
de  Rome,  &  les  autres  Etats  Catholiques  de  l'Europe ,  apprendront  ce 
Confentement?  Et  peut-on  jamais  fe  perfaader  qu'il  fuffira  de  dire  ,  com- 
me on  fait  dans  l'Article  10.  qu'à  cet  égard  on  conviendra  dans  la  fuite 
de  cet  exercice  par  une  tranfaclion  qui  fera  faite  lors  de  la  Paix.  C'eft 
une  excufe  qui  ne  peut  jamais  être  reçeuê  dans  ces  Cours-là;  &  ce  peu 
de  foin  pour  la  confervation  de  la  Religion  Catholique  y  doit  être  généra- 
lement blâmé,  &  faire  connoitre  que  la  pafîion  a  plus  de  part  que  l'équi- 
té à  tout  ce  Traitté. 

Le  7.  Article  contient  feulement  une  communication  réciproque   de 
Cpnfeils  fur  les  Opérations  de  la  Guerre  &  fur  toutes  Ils  autres  chofes 

tous 


66%    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

.Affaires  qui  regarderont  la  caufe  commune;  &  cet  Article,  qui  eft  ordinaire  dans 


GEN.    DE 

l'Euro- 
pe. 


tous  lesTraittez  de  cette  nature,  ne  demande  point  de  Reflexions  particu- 
lières. 

Dans  le  8.  il  eft  dit  qu'on  ne  fera  point  de  Paix  que  de  concert ,  & 
qu'on  ne  la  conclura  point  fans  la  fatisfacYion  raifonnable  de  l'Empereur , 
&  fans  la  feureté  particulière  du  Roy  d'Angleterre  &  des  Etats  Généraux, 
comme  aufli  fans  avoir  pris  des  juftes  précautions  pour  empêcher  que  ja- 
mais les  Royaumes  de  France  &  d'Efpagne  ne  foient  unis  &  fournis  à  un 
même  Roy,  &  que  les  François  ne  poffedent  jamais  les  Indes  de  la  Do- 
mination d'Efpagne,  ni  même  que  la  Navigation,  fous  ombre  de  Négo- 
ce ,  leur  y  foit  permife  directement  ni  indirectement  fous  quelque  prétex- 
te que  ce  foit ,  enfin  fans  être  auparavant  convenu  en  faveur  des  fujets 
du  Roy  d'Angleterre  &  des  Etats  Généraux  de  la  Liberté  du  Commerce 
&  de  tous  les  droits,  immunitez,  &  privilèges  par  Mer  &  par  Terre  en 
Efpagne ,  dans  la  Méditerranée  ,  &  dans  tous  les  autres  lieux  que  le  Roy 
d'Efpagne  deffunt  poffedoit,  tant  en  Europe  qu'ailleurs,  &c.  J'ay  déjà 
répondu  à  ce  qui  regarde  la  fatisfaclion  &  la  feureté  marquées  dans  cet 
Article.  La  reponfe,  que  j'ay  aufli  faite  fur  la  vaine  crainte  de  l'Union  des 
deux  Monarchies  en  une  feule ,  montre  de  même ,  que  cette  circonftan- 
ce  ne  peut  jamais  fervir  de  jufte  caufe  à  une  rupture.  A  l'égard  des  In- 
des, la  France  ne  penfe  point  à  avoir  aucune  part  aux  Villes  &  Pais  qui 
y  apartiennent  au  Roy  d'Efpagne  ;  mais,  pour  ce  qui  eft  de  la  précaution 
d'interdire  à  la  France  tout  Commerce  direcl:  ou  indirect  en  ces  Quar- 
tiers-là ,  en  vérité  on  ne  peut  trop  s'étonner  d'une  penfée  û  téméraire  & 
fi  opofée  au  pouvoir  des  Rois  de  faire  en  ces  occalions  ce  qu'ils  croienc 
de  leur  intérêt,  autant  qu'au  Droit  des  Gens ,  &  à  la  Liberté  du  Commer- 
ce :  &  enfin  toutes  les  Puiffances  Maritimes  &  autres  de  l'Europe  ne  peu- 
vent trop  voir  par-là  combien  ces  deux  Nations  cherchent  de  s'attribuer 
feules  le  Commerce  par-tout,  à  Pexclufion  des  autres. 

Le  9.  ne  regarde  aufli  que  le  Commerce  &  la  Navigation  des  Anglois 
&  des  Hollandois  ,  c'eft- à-dire  ,  une  Promeffe  réciproque  de  convenir, 
lors  de  la  Paix ,  des  moyens  qui  feront  neceffaires  pour  établir  l'un  &  l'au- 
tre en  faveur  de  leurs  Sujets  dans  les  terres  &  pais  qui  feront  acquis,  & 
qui  ont  été  poffedez  par  le  Roy  d'Efpagne  deffunt.  Il  eft  feulement  die 
un  mot  de  la  feureté  de  la  Barrière  à  la  fin  de  l'Article;  &  l'on  voit  tou- 
jours le  même  efprit  de  pourvoir  à  leurs  intérêts ,  &  à  leurs  avantages  par- 
ticuliers, fans  fe  mettre  en  peine  de  ceux  des  autres  Nations,  qu'ils  veu- 
lent pourtant  engager  à  la  Guerre. 

Le  10.  Article  regarde  les  Différends  qui  pourroient  naître  fur  la  Reli- 
gion, dans  les  lieux  que  les  Alliez  pourront  occuper  par  les  armes;  & 
l'on  remet  à  en  convenir  dans  le  tems  que  la  Paix  fera  faite.  J'ay  déjà 
repondu  à  cet  Article  dans  le  6.  &  je  vous  feray  feulement  remarquer  la 
Parenihefe,  Uti  fperant ,  qui  eft  fins  doute  finguliere. 

Par  le  11.  il  eft  dit  que  les  Alliez  s'aflifteront  de  toutes  leurs  forces 

contre 


RESOLUTIONS  D'ETAT,  M.  DCC.  I.  669 

contre  l'aggreffeur,  en  cas  que  le  Roy  de  France,  ou  quelque  autre,  en-  Aftaiks* 
treprenne  d'attaquer  l'un  des  confederez  à  caufe  du  prefent  Traitté.  Cet  G*N-  Dfc 
Article   elt   une   fuite   des    autres   engagements.      Il   ell   allez   ordinal-    L  p^  ( 

re  dans  tous  les  Traittez  ,  &  il  ne  mérite  ainiî  aucune  Reflexion  parti- 

culiere, 

Le  12.  n'en  demande  pas  d'avantage.  Il  dit  feulement,  qu'en  cas 
qu'on  puiffe  tranfiger  prefentement  fur  la  fatisfaction  &  fur  la  feureté  dont 
il  s'agit,  ou  qu'après  avoir  été  obligé  de  faire  la  Guerre,  on  puiffe  con- 
venir de  la  Paix ,  après  la  Tranfaétion ,  ou  la  Paix ,  les  Parties  contractan- 
tes demeureront  encore  unies  par  une  Alliance  deffenlive ,  pour  la  ga- 
rantie de  ladite  tranfaétion,  ou  paix.  Cet  Article  efl  de  même  une  fuite 
des  précédentes  mefures;  &  je  vous  y  feray  feulement  regarder  l'efprit 
toujours  le  même  de  faire  la  Guerre ,  &  combien  il  feroit  jufte  &  facile 
d'éviter  la  neceiTité  qu'ils  y  veulent  faire  envifager,  puis  qu'elle  n'efl  fon- 
dée ,  comme  je  vous  l'ay  montré  ,  que  fur  des  motifs  imaginaires  ,  ou 
contraires  à  la  vérité  des  chofes. 

Le  13.  Article  efl  plus  confiderable.  On  y  dit  qu'on  admettra  dans 
l'Alliance  tous  les  Rois,  Princes,  &  Etats,  qui  voudront  y  entrer,  &qui 
aimeront  la  Paix  générale.  C'eft  plutôt  les  inviter  à  Guerre,  qu'on  a  de£ 
fein  de  faire ,  qu'à  la  Paix  ,  qu'il  n'efl:  pas  neceffaire  de  chercher  dans  le 
trouble,  puifqu'on  efl  en  état  de  conferver  celle  dont  on  jouit,  en  ne  pre- 
nant point  de  part  à  des  mefures  qui  ne  tendent  qu'à  troubler  tou- 
te l'Europe,  fur  les  faux  préjugez  dont  j'ay  fait  voir  le  peu  de  fonde- 
ment. 

Enfuite  on  dit,  dans  le  même  Article,  que  l'Empire  étant  particuliè- 
rement intereffé  à  la  confervation  de  la  Paix  publique,  &  s'aghTant ,  en- 
tre autres  chofes,  de  recouvrer  les  Fiefs  de  l'Empire,  il  fera  fpeciale- 
ment  invité  d'entrer  dans  la  prefente  Alliance.  Je  vous  a  y  déjà  fait  voir, 
combien  ce  prétexte  eit  faux ,  par  la  demande  de  l'inveititure  du  Duché 
de  Milan  faite  à  l'Empereur  même  au  nom  du  Roy  d'Efpagne,  &  par  le 
pouvoir  qu'il  avoit  envoyé  à  Ratisbonne  au  Sr.  de  la  Neuveforge,  pour 
occuper  de  fa  part  le  Suffrage  du  Cercle  de  Bourgogne  comme  Membre 
de  l'Empire.  Je  ne  vous  en  parleray  pas  davantage.  Je  vous  prieray 
feulement  de  remarquer  le  Deffein  formé  des  Anglois  &  des  Hollandois 
de  rejetter,  s'il  efl  pofiible,  le  Poids  de  la  Guerre  fur  l'Empire,  &  de 
lui  faire  prendre  part  au  péril,  &  aux  malheurs  qui  l'accompagnent,  fans 
avoir  feulement  penfé  à  les  avantages  particuliers ,  ni  en  avoir  dit  un 
feul  mot  dans  le  Traitté.  Ils  n'ont  fongé  qu'à  leurs  intérêts  &  à  leur 
Commerce,  comme  on  le  voit  dans  prefque  tous  les  Articles.  Ceux  de 
l'Empereur  ont  enfuite  occupé  leur  attention  d'une  manière  même  ambi- 
guë; &,  quoi-qu'il  en  foit,  les  Etats  de  l'Empire  n'ont  aucune  raifon  de 
faire  céder  la  Paix,  dont  ils  jouiffent ,  à  une  Guerre  ,  qui  leur  efl  en- 
tièrement Etrangère.  Elle  ne  peut  même  que  leur  être  ruineufe  de  tou- 
tes manières ,  foit  qu'elle  fût  malheureufe,  ou  heureufe.  Dans  le  premier 

Tme  XL  Sfff  cas, 


Aftaief-S 

GfN.    DE 

l'Euro- 
pe. 


670    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

cas,  ils  s'expoferont  à  une  Ruine  infaillible,  &  dans  l'autre  l'Empereur 
feul  en  profiteroit  à  leur  exclufion.  Il  efl  certain,  que  nulle  puiflance  ne 
leur  efl  plus  à  craindre  que  la  Tienne,  fi  elle  fe  trouvoit  augmentée  par 
l'Union  des  Etats  d'Italie,  &  des  Païs-Bas  aux  Tiens  ;  &  fi,  dans  des  tems 
faibles',  ils  ont  efluié  tant  d'entreprifes  contre  leurs  Droits  ,  &  leurs 
Prérogatives  ,  à  quoy  ne  Teroient-ils  pas  expofez  dans  des  tems  de 
profperité  ? 

Le  14.  &  dernier  Article  ne  demande  point  de  Reflexion.  Il  ne  con- 
tient que  la  condition  de  ratifier  leTraitté  dans  Tix  Temaines;  &  fi  je  vous 
fais  remarquer  la  date  de  la  fignature  du  Traitté  qui  efl  du  7.  Septembre 
1701.  ce  n'efl  qu'à  cauTe  des  deux  Mois  Tpecifiez  dans  le  3.  Article, 
pour  travailler  à  une  compofition  amiable,  fur  laquelle  je  ne  fçais  point 
qu'on  ait  encore  rien  fait  propoTer,  quoy  qu'on  m'ait  écrit  que  le  Traitté 
a  été  ratifié  en  Hollande  dès  le  15.  Octobre  dernier. 

Voilà,  Monfieur,  les  jufles  Reflexions  qu'on  fait  en  plufieurs  Cours  fur 
ce  Traitté.  J'y  ay  adjoûté  peu  de  chofe  du  mien.  Je  n'ai  fait  que  vous 
raporter  les  fèntiments  de  ceux  qui  en  parlent  fans  pafïion;  &,  perfuadé 
de  vôtre  difcernement,  &  de  vôtre  habileté,  je  vous  avoue  que  j'attens 
avec  impatience  d'apprendre  le  jugement  que  vous  en  faites.  Cependant 
je  fuis  toujours  ,  &c. 

^#####   ce  j0t  Décembre  1701. 


Lifo 


ET    RESOLUTIONS    D'ETAT.  671 

1.  Lille  des  Troupes  mie  T  Angleterre  ^  £5?  les  Etals  des  Provin-  m*a*m 
ces-Unies 3  payent  de  ce  cote-ci  de  la  Mer.  •  l'Euro- 

'Troupes qui  font  toutes  payées  par  l'Angleterre. 

Bataillons  Efcadrons       Lifte  des 

Troupes 
_  /»ii  des  Al- 

Stuart     ...  1  Schomberg 2  liés. 

Anglois.  Royal  EcofTois  2  Windham 2 

Rou.     ...  1  Drag.  de  Raby.     .      .       3 

Ferguflbn.     .  1  Drag.  de  Ros.     ...     2 

Hamilton.     .  1  Drag.  de  Tiriot.     .     .        2 

Ingolsby.     .    .  1  Lumley 3 

Blood.     ...  1  Wood 2 

Marlborough.  1  Cadogan 1 

Leegh.     .     .  1  .  .  >  ~ 

Derby.     .     .  1  *7 

Bartimore.      .  1 

Gardes  Ang.  1 

Iiow.     ...  1 

North  &  Gray.  1 

Webb.     .    .  i 

Lunebourg.    .     8 


Troupes  que  Y  Angleterre  &  la  Hollande  payent  par  moitié. 


Bataillons. 


Efcadrons. 


Anglois. 


Stanhope. 
Meredith. 
Churchill. 
Portmore. 


1 

1 

1 
1 


Danois. 


Le  Prince  de  Son- 
derbourg.  .  .  1 

Gardes.     .     .      1 
Fucnen.     .     .      1 


Uytterwyck. 
Nummerfon. 
Randfau. 
Cuiraiîiers. 

Sfffa, 


z 
2 
2 

z 

T 


Ze- 


67i    MEMOIRES,  NEGOTIATÏONS,  TRAITEZ,  ET 


Affaires 
gen.  DE 
l'Euro- 
pe. 


Pru  (Tiens. 


Bataillons. 
Zelande.  .  .  i 
Le  Prince  Char- 
les. .  .  .  i 
Wirtemberg.  i 
Schelte.  .  .  i 
Le  Prince  Geor- 
ge.    ...  i 


Harbor.     .    . 
Bonar.     .     . 

Prince  de  HefTe. 
Varennes.     . 


i 

i 

7 
i 

i 


Efcadrons. 
Smettau z 


Reg.  des  Gardes. 
Broendorf. 
Deurts.     .     .     . 

Drag.  de  Bonar. 


2 

2 
Z 


Heiden. 
Schôning. 


2 

2 


Heffiens. 


L'Eleft.  Palatin. 


Munfter. 


Wolfe.  .  .  i 
Anhalt-Zerbs.  i 
Gromkow.     .      î 


Gardes. 

Prince  Heredit. 
Schench.  .  .  i 
Wartensleben.  i 
Schôpping.  i 

Grenadiers.  .  i 
Prin.  Guillaume,  i 
Louvenftein.  i 
Le  Bat.  le  dernier 
venu.    .    .     i 

4.   Bat.    qui    font 

venu  à  l'Etat  Je 

20.A.1701.  pour 

renforcer      les 

Regimens.       4 

Swartz.     .     .      1 

Elverfeld.     .       1 

Cornarens.  .      1 


Gardes 

Spiegel , 

Drag.  du  Prin.  Heredit. 
Drag.  de  Hombourg.     . 


z 
2 

4 

±. 

12. 


Ba- 


RESOLUTIONS    D'ETAT,     M.  DCC.  I. 


<f7i 


Gotha. 


Gottorp. 


Ofnabrug. 
Ouilfrife. 

Liège. 


Bataillons 
Bartels.     .     . 
Kefevit.    .     . 

E 

i     SteuburcLl.     . 

i     Drag.  de  Ilarienberg. 

2 

i     Bauditz    Drag. 

i     Drag.  de  vander  Natt. 

fcadrons. 

*> 

•  J_ 

6 

•  4 

•  4 

Affaiues 

G  EN.    DE 

L'Eimo- 

TE. 

Aderhae.     . 
Berner.     .     . 

Spiegel.     . 
Eggeluy.     . 
Trogne.     .-• 
Lamart.     . 
Caris. 

2 

I  — I 
I--I 
I 

i     Drag.  deWalef.     . 
_3_ 

8 

4 
SS 

•• 

Total   44 


Troupes  qui  font  payées  par  l'Etat  tout  fiuL 

Bataillons.  Efcadrons. 

Weldere.     .      i     Athlone 2 

Beinfein.     .      1     Gardes 2 

Mettenburgh.    1     Elk 2 

Els.     .     .         3     Tilly 2 

Gardes.      .      2     Al  be  marie 2. 

Holitein  plein.  1     Obdam. 2 

Hamaud.     .      1     Rochcfort 2 

Lindebo.     .     1  Rhos.           .           .           .2 

Birchenwelt.    1  Tegnagel.           .           .  2 

Coefor.     .        1  Domyte.           .             .  2 

Torfay.     .        1  Ooflfrife.           .         .      .  z 

Swarsbel.          1  Pr.  Guill.  de  Hefle,  Drag.  y 

Annelisward.   1  Drag.  de  Dopit.     ...  4 

Goor.     .     .     1  Drag.  de  Shlippenbach.      .  4 

Saldit      .          1  Drag.  de  Matha.     .      ,      .  4 

Fagel.     .         1  Gardes  du  Corps.     .     .     .  1 

Zouteland.       1  Erpach.           .             .  2 

Slangenburg.    1  Dridsbergh.             .         .  z 

Beggel.     .       1  Gardes  du  Corps  du  Pr.  de 

de  Frife 1 

Noorburg.       1  Naflau  de  Fnfe.     ...  2 

Houckelen.     1  VutmghefF.           .           .  1 

Prin  AUreft.    1  Hefle-Hombourg.     ...  5 

Sfffj  Ba- 


Affaires 

GEN.   DE 

l'Euro- 
pe. 


6;4    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Efcadrons. 


Bataillons. 

Tranfporcé 26 

Kromprins. 


Ecoflbis. 


Ranch.     . 
Dohna.     . 
Frieflem. 
Naflau  Walon. 
Vanderbech. 
Falais.     . 
Sparre.     . 
Steenhuyfe. 
Holfteinbech. 
Woudenberg. 
Palland.     . 
Waas.    . 
Openften. 
Naflàu      Stad 
houder.     . 
Schratenberg. 
ldflnga.     . 
Vegelin.     . 
Eiierach.     . 
Rummema. 
Heide.     . 
Willere.     . 
Ham.     .     . 
Ripperda. 
Iruis.     .     . 
Rhynhard. 
Linftau.     . 
Lauder.     . 
Coljiar. 
Murrai. 
Dalrimpl-e. 
Lorn.     .     , 
Hamilton,  . 


Lalech. 

Cralingen. 

Sopen-Hcilbourg. 

Hornberg. 

Chaudler.     . 

Ech. 

Nifla. 

Wirtemberg. 

Groveiteins. 

Emminga. 

Baldwyn. 

Paurel. 


59 


1 

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2 
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73 


73 


Ba- 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.  I.  <r7; 

Efcadrons.       ^ifaihi-.s 


Bataillons. 

Tranfporté $9 

François.  Belcaftel.     .     i 

Lifle-Marais.    i 
Viçoufe.  i 


<yî        GEN.     DE 

i-'£uko- 


PE. 


Suifles. 


Albemarle.  ' 

Logmar. 

Icharmde. 

Capel. 

Strelde. 

Sacconnay. 

Chambruié. 


Sekkendorf. 
Janes. 


2 
2 
2 
2 
2 
2 
I 


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i     Smettau  Drag. 


4 


Lunebourg. 


El.  Palatin. 


Amfterralb.  i 

Berensdorf.  i 

Wye.     .     .  i 

St.  Paul.     .  i 

Randfan.     .  i 

Charle.    .  i 


Bois-David. 

Fritcheapel.     . 
Penfe. 
Garden.     . 
Schuyîenburgh. 


Rebinder.  i 
Barbo.  .  .  i 
Benthen.  .  i 
Naflauw- Weil- 
bourg.    ,     i     Teminge. 


Naflau-Weilbourg. 

Weifer. 

Schellart. 


2 
2 
2 

3 


2 
2 

2 


I  I 


Heffe. 


Prince  Charle.  2 
Anhalt-Beren.  i 


Munfler. 


Mecklenbourg. 


Nagel. 
Landsberg. 


Swerin. 
Bouckwaldt. 


i     Hinderbern. 
i 

2 


2 

94 


2 

P8 

Som- 


Atï  AIRES 
GEN.    DB 

l'Euro- 
pe. 


676    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

Sommaire. 

Des  Troupes  qui  font  payées 
par  l'Angleterre  toute  feule. 

Des  Troupes  que  l'Angleterre 
paye  par  moitié  avec  la  Hollande. 

Des  Troupes  que  la  Hollande 
paye  toute  feule. 


Tellement  que  l'Angleterrepaye. 
Les  Etats. 


Bataillons. 

Efcadrons. 

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Autre 


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RESOLUTIONS    D'ETAT,  M.  DCC.  I. 


*77 


//.  Autre  Lifte  des  Tivupes  au  Service  des  Alliés. 


4.Efquadrons  Villers  Dra- 
gons. 

(^  du  Régiment  jaune. 
\t  de  Voigt. 


*§'    Ji  Noyelles. 
\2  Holden. 


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Affaires 

GEN.    DE 

jl'Euro- 

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Autre 
Lifte  de 
Troupes» 


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(Herbeville. 
<Govin. 
\Du  BrueL 


/Tecklenburg, 
<(Hirtzel. 
iWartenfleben, 


fSt.  Paul. 

<  Héréditaire  Prince. 
^Grenadiers. 


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fLuck. 

<>  Hie  !fen, 
^Tozin. 


Stuckrod. 

BerensdorC 

Rantzau, 


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J2  Régiment  du  Corps. 
\i  Erbagh. 


4  Hombourgh   Dragons. 
4  Prince  Héréditaire  Dra- 
gons, 


Tome  XL 


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SpiegeL 


^  g$i  3  Schulembourg. 


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Lifte 


6j$    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 


Affaires 

GKN.    DE 

l'Euro- 
pe. 

Lifte  des 
Troupes 
de  l'Etat 
en  1701. 


Lift e  des  Troupes  des  Etats  Généraux  en  1701. 

Dragons, 
f  Efcadrons,     -    -    -    -     125*0  Hommes. 


Régiment  du  Roy, 

-     -     de  DopfF,  41 

-  -     -     de  Mattha ,  2  >  8  Efcad.    -    - 

-  -     -     de  Slipenbag ,  2.) 

Cavalerie. 

Une  Compagnie  des  Gardes  du  Corps  du  Roy, 
Une  Compagnie  des  Gardes  de  Frife,  -  -  - 
Reg.  Portland,         Reg.  Agrim, 


-     1584  Hommes. 


250  Hommes, 
180  Hommes. 


Albemarle, 
Rhock , 
Dubuy , 
Mlle, 
Boncourt, 
Rochefort , 
Tengnagel , 
Laleck . 
Schaek, 
Erbag , 
Opdam , 


Tilly, 

Wirtemberg, 

Paul , 

Eck, 

Nafïau-Vriefland , 

Athlone, 

Madurant, 

Saxen-Heylt: 

Ooft-Vrifland, 

Vittinghoff, 

Hoornberg, 

Homburg , 


Dompré  , 
NaiTau-Sarbruk, 
27  Régiments  de  Cavalerie ,  enfemble    - 
Chaque  Régiment  de  312  Hommes 
Dragons  &  Cavalerie  enfemble 


Reg.  Holftein-Pîoen , 
Oxenflern , 
Le  Prince  Royal 

de  PruiTe, 
Soutlande, 
Ileukelon , 
Slangenburg, 
Beynheym , 
Goor, 
Schratenbag, 
Welderen , 
Ileyden , 


Infanterie. 

Reg.  Poot. 

DenhofF  Brand. 
Dona. 

Amelifwaar.t. 
Friefen. 

Holilein-Norburg. 

Waas. 

Plettenburg. 

NaiTau. 

Keppel. 

Holflein-Beek. 

Fagell. 


8424  Hommes. 
11 72  g  Hommes. 


Reg.  Haerfoîte. 
Birkenfelt. 
Swaensbel. 
Bayma. 
Coehoorn  Col- 

lonel. 
Rynharts. 
Scheltinga. 
Sparr. 
Lofeeoot. 
Eyfenag. 
Murray. 

Infan* 


RESOLUTIONS   D'ETAT,  M.  DCC.   I. 


679 


Reg.  Naffau-Waale , 
JNoyelies, 
Salileh , 
Palan  d , 
Arents, 
Torcé, 
Ouwerkerk, 
Ten  Harji. 


Infanterie. 

Reg.  Wilkes. 
Els. 

Dedem. 
Coehoorn,  Gé- 
néral. 
S.  Amand. 
Lintdauw. 


Reg.  Lauden. 
Coljiar. 
Portmore. 
Strathnaver, 
Hamilton. 
Belcaftel. 
Lillemarais. 
Vicoufe. 


Lindeboom. 
57  Régiments  d'Infanterie  de  12.  Compagnies , 

chacune  de  63  Hommes,     -     -     -     -    -    43092  Hommes. 


'   Troupes  qui  font  payées  par  de  (fus. 

Gardes  du  Roy  26  Comp.  de  100  Hommes  -  -- 
Gardes  de  Frife  24  Comp.  de  60  Hommes  -  - 
Une  Compagnie  Franche , 


2600  Hommes. 

1440  Hommes. 

i|o  Hommes. 


Affaires 
gf.n.  DE 

l'Euro- 
pe. 


Suijfes. 


MontmoulinO 

S  cher  er , 

Jaconnet, 

Murait, 

Loghman, 

Cappoll. 

Aibemarle. 


>7  Régiments  de  1600  H.  chacun  -  -  -    11200  Hommes. 

■■■'■■■'  1      — ■  ■  1  1  „ 

Infanterie, 58481  Hommes. 

Cavalerie  &  Drag.  11728  Hommes. 

70210  Hommes. 


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Danois , 


£8o    MEMOIRES,  NEGOTIATIONS,  TRAITEZ,  ET 

AmmM    Danois,      -     -    -    -  Cavalerie,     -    -    -    -    -  4000  Hommes, 

gf-n.  de  Dragons  ,-*---  2000  Hommes. 

L'Euil°"  Infanterie,     -----  gooo  Hommes» 

h*        PrulTiens,     1     -    -     -    -      Cavalerie,     -----  3000  Hommes. 

Dragons,     -----  2000  Hommes. 

Infanterie,     -----  5000  Hommes. 

Lunebourg-Hanover,    -    -  Cavalerie,     -----  4000  Hommes. 

Infanterie,     -----  4030  Hommes. 

Saxe-Gotha,    -    -    -    -      Cavalerie,     -----  2000  Hommes. 

Infanterie,     -----  4000  Hommes. 

HelTe-CalTel ,     -    -    -    .     Cavalerie,    -----  2000  Hommes. 

Dragons,       -----  1000  Hommes. 

Infanterie,     -*•---  3000  Hommes. 

Palatin  de  Neubourg,    -  -  Cavalerie,    -----  zooo  Hommes. 

Infanterie,     -----  4000  Hommes. 

Anfpaçb,    K  *    -    -    *     Dragons,    -----  igoo  Hommes. 

Infanterie,  -----  2400  Hommes. 

Mekelbourg,    -    -    -    -    Infanterie,    -----  2000  Hommes. 

5^200  Hommes. 
De  l'autre  Part  70210  Hommes. 

Font  enfemble  1 26410  Hommes. 
Sans  les  Troupes   Auxiliaires. 
Anglois  Auxiliaires,    -  -        -        -  100 00  Hommes» 

Outre  les  Troupes  de  Suéde, de  Holftein-Gottorp,  &  autres,  qui  doivent 
encore  venir. 

FIN. 


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