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MEMOIRES
POUR SERVIR À
L'H I S T O I R E
D U
XVIII SIECLE,
CONTENANT
LES NEGOCIATIONS, TRAITEZ RESOLUTIONS,
ET AUTRES DOCUMENS AUTHENTIQUES
CONCERNANT
LES AFFAIRES D'ETAT;
Liés par une Narration Hiftorique des principaux Evénemens dont ils ont été
précédez ou fuivis , & particulièrement de ce qui s'eft pafle à la Haie ,
qui a toujours été comme le Centre de toutes ces Négociations.
Par Mr. DE LAMBERT T.
TOME ONZIEME,
CONTENANT
L'ANNE'E M. DCC. X VIII,
S U P P L E M E N T
AUX ANNE'ES M. DC.\XCVI--M. DCC. I.
A AMSTERDAM,
Chez PIERRE MORTIER Libraire,
M. DCC. XXXIV.
AVEC T R J V 1 L JE G E.
O
**
ADAMS/(TO.|
TABLE
GENERALE DES
P I E CE
CONTENUES DANS CR
ONZIEME VOLUME.
ANNÉE M. DCC. XVIII.
JNtroduEtion générait. i
Affaires des Proyinces-Unies.
7'NtroduEtion particulière. 2
5
Réfolution des Etats-Généraux fur une Lettre de Mr. Goes , du 5 Février,
Mémoire de Mylord Polwartb, du 22. Février; avec un de M. van Hagen } du ij.
Réponfe de M. C. Schajiadt au Mémoire précédent ; d« 22. Février. 8
Raport des Propofitions de l'AmbaJJadeur de France touchant la Suéde; du 13 jfcm-
wr. 9
Réponfe à un Pro Memoriâ dw Secrétaire de Suéde Preif; du 28. Janvier. 10
Repréjentation au Réfident de Danemark par raport à la Suéde ; du 1 . Few. 1 2
Leîïn? dtt Confeil d'Etat y pour un Armement Maritime; du 28. Janvier. 13
£faî d&r Fraix de 30. Vaijjeaux pour la Mer Baltique. 18
Réfolution des E. G. touchant des Vaijjeaux; du 25. Janvier. 18
Réfolution des E. G. touchant un Armement' Naval; du 29. Janvier. 19
Compte de 30. Vaijjeaux pour la Mer Baltique. 20
Deux Réfolutions des E. G. touchant V Armement Maritime projette. 21
Réfolution des Etats d'Utrechtfur V Armement Naval ; du 10. Mars. 24
Réfolution des Etats Généraux fur la précédente. ■ 16
Deux Réfolutions des E. G. fur V Armement Naval; du 14. Mars. 27
Réfolution des E. G. touchant l'Armement Maritime; du 28. Mars. 28
Réfolutim des E. G. touchant une Lotterie ; du 19. Mars. 29
* 2 Réjo-
TABLE GENERALE
tiéfoluiièn des E. G. touchant M. Ruzzini Ambajjadeur de Ven'fe ; du . 29. Mars.
29
Réfolution des E. G. touchant la Barrierre; du 6. Janvier. 31
Extrait d'une Lettre du Réfident Pejîers , touchant les Revenus de h Barrierre ; du
17 Janvier. 34
Réfolution des E. G. touchant la Barrierre ; du 7 Février. 36
Mémoire, ou Pro Memoriâ, du Minifire de PruJJe , touchant la Barrierre, du 3.
Janvier. 3-8
Réfolution des Etats-Généraux , touchant Herjlal; du 20 Janvier. 39
Mémoire du Minifire de PruJJe \ touchant les Revenus de Montjorî ; du 10. Fé-
vrier. 40
Réfolution des E. G. touchant la Barrierre; du 2. Mars. 41
Mémoire du Réfident de V Electeur de Cologne; du 7. Janvier. 44
Réponfe des E. G. à ce Mémoire; du 15. Janvier. 45
Mémoire du Réfident de V Electeur de Cologne; du 11. Février. 47
Réponfe des E. G. à ce Mémoire; du 18 Mars. 52
Lettre du Confeil d'Etat aux Etats-Generaux , fur une Repartition de Troupes; du
24 Janvier. 55
Mémoire du Minifire de V Electeur Palatin , touchant le Paiement des Troupes ; du
11. Janvier. 58
Mémoire de V Envoie du Bue de Meklenbourg, pour Paiement de Solde; du 3. Jan-
vier. ' 59
Réfolution des Etats-Généraux , pour envoler un Ambajjadeur en France; du 19.
Janvier. • 63
Réfolution des E. G. fur le Traitement des Ambajjadeur s; du 14. Mars. 65
Sentence du Confeil d'Etat contre André Kan Receveur de Menin ; du 4. Février 69
Lettre du Confeil d'Etat aux Etats-Generaux , touebant l'Appel de Kan; du 14 Fé-
vrier. 7 1
Mémoire de Rafons contre l'Appel des Sentences du Confeil d'Etat aux Etats-Géné-
raux. 77
"Réfolution des Etats-Généraux rejufant l'Appel de Kan; -du 4. Février. 82
Echantillons du Mémoire de Kan pour fes Defenfes. 83
Affaires de Moscoyie.
7 Ettre du Minifire des Etats-Généraux à Mofcou3 fur le Procès du Czarôwits; des
14 &? 16. Février. 92
Serment des Mofcovites. 94
Manijefie du Czar touchant le Czarowits; du 3. Février. 95
Grand Manijefie du Procès criminel fait au Czarotvits ; du 25 Juin. 102
Noms de tous ceux qui ont Jignê la Sentence du Czarovoits. 159
Refjortts fecrets de la Mort de ce malheureux Prince. 162
S U P-
DES PIECES.
SUPPLÉMENT AUX MEMOIRES
DE LAMBERT Y,
ANNEES M. DC. XCVI. XCVII. et XCVIIL
Affaires de Pologne et de Suéde.
T Ettre de VEvêque de Cujavie à V Ambaffadeur de France fur l'Election du
du Prince de Conti à la Couronne de Pologne. 165
Réponfe de l" Ambaffadeur de France à ce Prélat fur le même Sujet ; du 16. Oci.
1696. 166
Ode fur le Couronnement de Charles XII. Roi de Suéde; du 14. Dec. 1697. 172
Affaires de France et des Proyinces -Unies.
TBRojet de Tarif entre la France £? les Provinces-Unies ; du 22 Nov. 169s.
173
Table Comparative de différais Tarifs; de mîme Date. i;<5
ANNÉE M. DCC.
Affaires des Provinces-Unies.
J3Efolution des Etats- Généraux des Provinces-Unies fur des Grains , achetez par
des Marchands d* Amfterdam , &f arrêtez à Revel; du 20 Nov. 1700. 179
Réfolution pour l'Octroy de la Compagnie des Indes Occidentales ; du 30 Nov.
i7°o- 180
Lettre de h Régence d'Efpagne aux Etats-Généraux, pour leur notifier la Mort du
Roi CHARLES II; du 11 Dec. 1700. 182
Réfolution fur cette Notification ; du 8 Décembre 1700. 183
Autre Réfolution fur cette Notification; du même Jour. 183
Réfolution fur le Manque, de Fanaux dans la Mer Baltique ; du 14 Décembre
1700. 184
Réfolution fur la Ratification du Traité fait avec V Electeur de Brandebourg ; du
20 Décembre 1700. 186
Réfolution pour une Pétition de deux Millions pour des Map^azins, Munitions a
&c.t; du. .... iStf
*
3 M E-
TABLE GENERALE
Mémoires des Ministres Publics aux Etats-Generaux.
TX/TEmoire de Mr. de Gersdorf, Minijlre de Pologne £f de Saxe j du 19 Mars
*yi 1700. 185
Affaires d1 Angleterre.
J Ettre du Roi d'Angleterre au Comte d'Ooft-Frife, pour lut faire Compliment de
■ .Condoléance fur la Mort de fa Femme; du 13 Novembre 1700. 187
Lettre de l'Envoyé Stanbope au Roi d'Angleterre; du 25 Décembre 1700. 188
Affaires d' Italie.
T\Ifcours du Cardinal d'Etrées au Pape en Conjîjloire } touchant ï 'Election du Car-
. dinal de Nouilles; du 21 Juin 1700. i8§
Affaires d' Allemagne.
f^Onditkns d'un Emprunt pour le Duc de Brunfwick-Lunebourg en Hollande ; en
^ Septembre 1700. 189
Une des Déclarations . de Sa Majefié Impériale touchant le Traité de Partage ; en
1700. 190
Efpece de Manifefle de l'Empereur, touchant fes Droits à la Monarchie d'Efpagne;
en Latin; en 1700. 190
Le véritable Avant-Courreur du Manifefle de l'Empereur tombant fes Droits à la
Monarchie d'Efpagne , traduit du Latin de la Pièce précédente; en 1700. 201
Affaires de Pologne, de Dannemarc, de Suéde,
et de Moscoyie.
'T\Eclaration du Sénat de Pologne 9 touchant la Guerre avec la Suéde ; en
1700. 213
Courte Relation de la Defcente des Suédois en Zéelandt &f Dannemark ; du 25 Juil-
let 1700. 214
Manifefle des Suédois contre les Mofcovites ; en Latin; en 1700, 217
AN-
DES PIECES.
A N N É E M. D C C. I.
Affaires des Provinces-Unies.
JDEponfe de V Amirauté de Hoorn aux Etats-Généraux fur leur Information de
V Emploi des Deniers de cette Amirauté; du 13 Janvier 1701. 267
Réfolution des Etats-Gé?iéraux , fur une Pétition du Confeil d'Etat pour deux Mil-
lions ; du 17 Janvier 1701. 268
Réfolution des Etats-Généraux , fur une Requête de 9 Bataillons Prujfiens pour
leurs Gages; du 18 Janvier 1701. 268
Réfolution des Etats-Généraux , touchant les Réparations & Précautions nécejfaires
fur le Rhin; du 22. Janvier 1701. 269
Réfolution des Etats-Généraux , touchant le Confentement de la Hollande à la Péti-
tion de deux Millions , £f exigeant celui des autres Provinces ; du, 31 Janvier
1701. 270
Réfolution des Etats-Généraux , pour envoier à leur Minijîre en Efpagne leurs Re-
folutions touchant la Paix , déjà envolées à leur Minijîre en France ; du 1 Fé-
vrier 1701. 270
Réfolution des Etats-Généraux , touchant les faux Bruits répandus de leur Difpojî-
tion à la Guerre; du 1 Février 1701. 271
Pétition du Confeil d'Etat, touchant le Paiement de la Flotte; du 21 Février \~joi .
271
Réfolution des Etats-Généraux , en contenant deux des Etats de Zélande touchant
leur ■ Contingent des deux Millions demandez; du 16 Février 1701. 273
Lijle des Vaiffeaux de Guerre qu'on prépare à l'Amirauté d'AmJlerdam; en Février
1701. 276
Réfolution des Etats-Généraux , touchant les Lignes des François vers Llllo , &kur
Entrée à Oudenarde ; avec la Lettre du Lieutenant-Colonel Sikers à ce Sujet ; du,
27 Février 1701. 276
Réfolution des Etats-Généraux , pour écrire au Roi d'Angleterre; du 12 Mars 1701.
277
Réfolution des Etats-Gé?iéraux, touchant la Flotte; du 4 Avril 1701. 279
Réfolution des Etats-Généraux, fur le Mémoire de l'Envoyé Stanhope , avec ce Mé-
moire; du 22 Avril 1701. 280
Réfolution des Etats-Généraux, fur le même Mémoire; du 23 Avril 1701. 280
Réfolution des Etats-Généraux, pour conférer avec le Comte d'Avaux ; du 12 May
I701- 282
Confentement des Etats de Gronlngue à certains Articles ; du 23 May 1701. 283
Extrait du Recès de la Diète tenue à Arnhem , en Réponfe à une Lettre du Con-
feil d'Etat touchant le Rhin & fJJfel; du 24 May 1701. 284
Rapport du Confeiller-Penfionaire Heinfius } de fa Conférence avec le Comte d'A-
vaux; du 6 Juin 1701. 28(5
Ré-
TABLE GENERALE
Réfolution touchant des Troupes ; du 9 Juin. 287
Réfolution touchant la Paie des Cavaliers; du 15 Juin. 287
Réfolution touchant divers Confentemens de Provinces; du 16 Juin. 287
Réfolution des Etats de Frife ; du 11 Juin. 288
Réfolution des Etats-Généraux , fur des Vaiffeaux à équiper ; du 20 Juin. 288
Réfolutions pour négocier avtc le Comte d'Avaux, des 16 & 20 Juin. 289
Réfolution touchant des Retranchemens & Réparations ; du 20 Juin. 290
Réfolutions touchant les Lignes des Efpagnols en Flandres ; des 24 &? 25 Juin.
291
Réfolution. touchant des Confentemens de Provinces , &f partie, de Zwol ; du 25.
Juin. 292
Pétition du Confeil d'Etat ; du 28 Juin. 294
Réfolution des Etats-Généraux ; /«r les Mefures pour la Campagne ; du 15 Juillet.
297
Réfolution fur une Réponfe du Czar; du 14 ^z/f/to 1701. 300
Rapport fait aux Etats-Généraux , touchant un Canal dans laBetuvce; du 25 Juillet.
302
Lettre du Confeil d'Etat aux Etats-Généraux , avec le Raport de fes Députez tou-
chant le dit Canal; des 31 Juillet £f 2 Août. 303
Réfolution touchant des Arrérages dûs à l'Electeur Palatin; du 9 Août. 305
Réfolution des Etats de Groningue , portant Conjéntement au troijïéme Etat de Guer-
re; du 5 Août. 305
Réfolution des Etats - Généraux , louchant des Erres de Troupes; du 10 Août.
307
Raport fait aux Etats-Généraux 3 pour des Ouvrages de Fortification; du 16 Août.
307
Réfolution des Etats- Généraux , pour porter la Zélande à certains Païemens ; du 22
Août. 308
Lettre de l'Amirauté d'AmJlerdam aux E. G.; du 22 Août. 310
Deux Réfolutions des Etats-Généraux ', touchant les Provifions pour les Troupes; du
11 Août. 311
Lettre du Confeil d'Etat aux Etats-Généraux , touchant les Frontières; du 27 Août.
312
Réfolution des Etats-Généraux , en renfermant 2 des Etats de Groningue fur leur
Contingent ; du 27 Août. 312
Pétition du Confeil d'Etat, pour de nouveaux Subjides; du 2 Sept. 314
Réfolution des Etats-Généraux , avec une des Etats de Hollande, êf un Mémoire de
M. d'Elkmet; du 22 Sept. 315
Deux Réfolutions des Etats-Généraux touchant le Paffage des Troupes ; du 16 Sept.
3!7,3ï8
Deux Réfolutions des Etats-Généraux , touchant le Contingent de la Frife; du 16. Sept.
318
Réfolution des Etats - Généraux , touchant les Affaires Militaires; du 27 Sept.
319
Ré-
DES PIECES.
Réfolution des Etats Généraux touchant les Troupes Palatines; du .... 320
Réfolution des Etats Généraux touchant les Affaires Militaires ; du 28 Sept. . 321
Réfolution des Etats Généraux en pré/entant l'Etat de Guerre pour l'Année 1702.
au 4. Novembre. 322
Réfolution des E. G. touchant V Argent non monnoié; du 7. Nov. 324
Réfolution des E. G. touchant les Amirautez; du 14. Nov. 325
Réfolution des E. G. touchant des Affaires de Marine; du 15. Nov. 326
Réfolution des E. G. fur une Lettre du Confcil d'Etat ; du 21. Nov. ibid
Lettre de l'Electeur Palatin aux Etats Généraux ; du 23. Nov. 327
Réfolution des Etats Généraux fur la Conjlruàion duBaJiiondeSt.PierreàMaJlricht;
du 16. Novembre. ibid
Réfolution des Etats Généraux fur la Lettre précédente de VEleâeur Palatin; du 7.
Decemb'e. 329
Réfolution des Etats Généraux touchant les Monnoies de l'Empire; du 30 Décem-
bre. 330
Lettre du Confeil d'Etat aux Etats Généraux touchant les Magasins des Frontières ;
du 30. Décembre. ibid
Négociations des Proyinces-Unies touchant
les Troupes Danoises.
t Ettre de la Faille de Groningue; du. ... 33 1
■*-^ Ratification du Traité avec le Dannemark ; du 27 Juin. ibid
Réfolution des Etats Généraux ; du 15. Août. 332
Réfolution des Etats Généraux, avec le Confentement d" Overyffel ; des %. Sept. £f 4.
Octobre. 333
Réfolution des Etats Généraux pour régler les Gages du bas Etat major; du... 334
Réfolution des Etats Généraux fur le Paiement des Troupes Danoifes , du 8. Oéo-
bre. ibid
Autre de même; du 27. Octobre. 30 j
Réfolution des Etats de Groningue; du 29. Octobre. ibid
Réfolution des Etats Généraux fur le Paiement des Danois ; du 1. Nov. ibid
Réfolution des Etats Généraux fur les Apointemens des Danois; du 19. Décembre.
Acte de Réception des Troupes Danoifes; du 3. Novembre. 337
Lettres de divers Endroits aux Etats-Généraux.
T Ettres de Paris, des 18. Juillet £f 12. Août. 338
■^ Lettre de Maftricbt , du 13 Août. 339
Lettre de Lisbonne-, du \6 Août. 340
Lettre de Hambourg, du 30. Août. ibid
Tbme XL ** Lettre
TABLE GENERALE
Lettre de Hanovre , du i. Sep. 341
Lettre de Vienne, du 14. Septembre. ibid
Lettre de Cologne, du 23. Septembre. 342
Lettre de Bruxelles, du 16. Septembre. ibid
Lettre de Baden, du 11. Octobre, ibid
Lettre de Bruxelles , du 31. Octobre. 343
Lettre de Lisbonne, du 22. Novembre. ibid
Lettre de Cologne, du 16. Décembre. 344
Lettre de Majtricbt , du 17. Décembre. ibid
Lettre de Paris fur ce que du Sas de Gand on avoit tiré fur les Travailleurs Fran-
çois ; du 30. Décembre. 345
Listes de Troupes et Vaisseaux des Provinces-Unies.
7 Jjle des Troupes , tant Infanterie que Cavalerie. 346
-*-y Nom des Vaiffeaux arrivez des Indes Orientales ; avec la Valeur de leur Cargai-
fin. 347
Mémoires des Ministres Publics aux Etats-Generaux.
i\/!Emoire de Mr. de Lillietirooth ; du 2 Juillet 1701. 348
•**•*■ Mémoire de M. Bondely Envoie de Pruffe; du 6. Novembre 1701. 350
Affaires d'Angleterre.
t Ettre du Roi d'Angleterre aux Etats-Généraux; du 16. May 1701. 351
-*-' Adreffe des Communes au Roi. 352
L'Etat du Bill pour un Parlement annuel âf triennal ; avec des Obfervations. ibid
Proclamation du Roi $ Angleterre , pour diffoudre le Parlement, £f en convoquer un
nouveau; dit 16. Novembre 1701. 357
Adreffe de VEvéque £f du Clergé de Londres; en Novembre 1701. ibid
Adreffe delà Ville de Marlborougb; en Novembre 1701. 358
Adreffe du Comté de Leicejier; en Novembre 1701. 359
Adreffe dit Comté de Salisbury ; en Novembre 1701. ibid
Adref'e du Comté de Worcefler; en Novembre 1701. 360
Adreffe de la Ville £? Comté de Poolë; en Novembre 1701. 36b
Adreffe de la Ville de Sandwich; du 18. Novembre 1701. 361
Aarefe de la Ville de Wilton; du 18. Novembre 1701. ibid
Adreffe de la Ville d'Aylsbury ; en Novembre 1701. 362
Adreffe de la Ville de Tiverton ; en Novembre 1701. ibid
Adreffe de la Ville de Cantorbery; en Novembre 1701. 363
Adreffe de la Province de Cumberland; en Novembre 1701. 364
Inflruàions de la Ville de Londres à/es Députez au prochain Parlement ; en Novem-
bre 1701. 364
A F-
DES PIECES.
Affaires de France, d'Espagne, et d'Italie.
Harangue du Cardinal de Noailles au Roy , à la tête de VAJfemblée du Clergé ; du
19. Juin 1701. 365
Plainte du Duc d'Anjou à V Envoyé des Etats-Généraux , de ce qu'ils ne le félicitoient
pas-, en Efpagnol ; en 1701. 368
Campement des François fur VAdige ; du 4. Juin. 369
Nouvelles de Venife; du 4. Juin. 370
Situation des François £f des Impériaux; du 9. Juin. 371
Lettre des Généraux des deux Couronnes , du 22. Juillet 1701 ; avec Copie d'une de
ï1 Electeur de Cologne aux Electeurs de Mayence, de Trêves , & de Bavière: en I-
talien. 373
Relation de ce qui s'efl paffé entre les Armées Impériale £? Françoife en Italie ; dep.
le 31 Août jufqu'au 3 Septembre 1701. 375
Manifejle de François Spinelli, Duc de Cajlelluccia ; en Novembre 1701. 379
Affaires d1 Al le magne.
f~\Ffres de Troupes de divers Princes d'Allemagne , à l'Angleterre £f aux Etats
Généraux; en 1701. 382
Lettre fur les Mouvemens des François dans l'Eledtorat de Cologne ; du 25 Novem-
bre 1701. 332
Ordonnances de V Electeur de Cologne touchant Rbinberg, Keifersivert , & Alpen; du
15 Décembre 1701. 383
Lettre de Hambourg aux Etats-Généraux , touchant les Differens entre le Holjlein éf
le Dannemarc; du 4 Février 1701. 383
Traites Politiques concernant les Affaires
Générales de l'Europe.
qrEflament de CHARLES II. Roi d'Efpagne, &> Traité du Partage de fa
Monarchie; avec des Réflexions Politiques, traduites de V Anglais. 385
Réflexions fur une Lettre écrite d'Anvers le 29 Décembre 1700. fur les Affaires
prefentes de la Cour d'Efpagne; avec des Pièces authentiques ; favoir , 399
Lettre d'un Membre du Parlement d'Angleterre. 438
Renonciation de V Infante MA RIE-THERESE. 447
Contraà de Mariage de LOUIS XIV. avec l'Infante MARIE-THE-
RESE. 4,51
* * 2 Remar-
TABLE GENERALES DES PIECES.
Remarques fur la Succefflon du Duc d'Anjou , tant par raport à fa Validité qu'à
fes Conféquences , avec la Renonciation du Roi de France à cette Succeffton , &
'des Remarques; traduites de l'Anglois : I. Partie. 469
IL Partie de ces Remarques. 507
Réflexions fur divers Ecrits concemans la SucceJJion à la Monarchie d'Efpagne.
545
Jus Auftriacum in Monarchiam Hfpanicam ajjertum. 591
Remarques fur les Affaires du Tems préfent 1701; traduites de l'Anglois. 641
Récit des Débats de la Ville touchant la Paix £? la Guerre; & deux Lettres à un
Gentil-homme à la Campagne. 644
Lettre contenant diverfes Réflexions fur le Traité d'Alliance entre l'Empereur 3 le
Roi d'Angleterre, £f les Etats Généraux; en Septembre 1701. 661
Liftes diverfes des Troupes des Alliés, pendant l'Année 1*701. 671, 677, 678
MEMOI-
M®® 3P ®Gt QP £>(£ <3P G)®<St 9P ©(2 3P &>® 3P 5)SS^»
MEMOIRES,
NEGOTIATIONS,
f
TRAITEZ,
E T
RESOLUTIONS D'ETAT.
ANNEE M. DCC. XVIII.
<2*-&3*-fè &%>&& <3**£3**&3**£> 3**&<3**&3*-& «3**gs<3**£<âfr*É» «3ffè«3*-£3*-fè «3MfcSM&«3t4É»
INTRODUCTION.
|Uoi qu'on eut limité ces Mémoires à la fin de l'An 1717.
on a trouvé à propos d'y faire un Suplement. La
raifon en eft , que n'étant parti de la Hollande qu'au com-
mencement d'Avril de l'Année 171 8- il y a eu des Affai-
res fur le tapis pendant les 3. premiers Mois de cette An-
née-là. D'ailleurs , on a trouvé , dans des Papiers qu'on
avoit, des Pièces affez curieufes. Il y en a d'autres, qui
ont plus d'étendue , que l'Extrait qu'on en a fait dans les dix differens To-
mes déjà imprimez. D'ailleurs, il y en a en affez bonne quantité que l'on
n' avoit point alors , & d'autres qu'on a omis , en vûë d'abréger l'Ouvrage.
On envoie le tout au Libraire à la Haie , pour faire un Suplement aux dix
Tomes déjà imprimez. On lui fait tenir les Affaires des premiers trois Mois
tome XI. A de
Imtro*
DUCTIONo
2 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Intro- de l'Année 171 8- '■, & on laiflè à fon choix d'y ajouter , pour en faire
duction. quelques nouveaux Tomes, les Pièces, qu'il trouvera les plus intereffantes j
' les plus curieufes, & les plus fecretes.
AFFAIRES DES PROVINCES-UNIES.
-Affaires T Es Etats delà Province de Hollande, qui pefent toujours les Affaires
dis Pko- \_j avec la plus fage prudence , ne purent pas venir à une Refolution fi-
viNCF.s- naje je g0# ^e Décembre de l'Année précédente 1717. C'étoit au fujet d'un
L Armement d'une Efcadre de Vaiffeaux pour la Mer Baltique. Cela avoit été
mis fur le tapis relativement à la Suéde , & au Dannemark. Comme ce-
pendant il y eut divers incidens, la Refolution traina encore quelque tems.
La vue d'un tel Armement maritime par raport au Dannemark étoit pour
le porter à relâcher un grand nombre de Navires des Sujets des Etats. On
les y avoit arrêtez fous des prétextes, qu'on trouvoit frivoles. Entre ceux-
ci l'un étoit que la partie de la Province de Hollande , qu'on nomme Weft-
Frife ou Nord-Hollande, ne paioit pas au Dannemark quelque fomme, qui
étoit repartie fur Elle. Auffi une bonne partie de ces Navires arrêtez apar-
tenoit-elle à cette Semi-Province-là. Les Etats Généraux avoient, lors de
l'avis de l'arrêt de ces Navires, chargé leur Miniflre à Copenhague d'y fai-
re des Reprefentations. Elles dévoient rouler fur ce que ces Procédures
tendoient notoirement contre le Traité de Droits deDoùanne, & n'étoient
pas conformes à l'amitié qu'ils cultivoient avec Sa Majefté Danoife. Il y
avoit l'addition qu'Us s'étoient confiez qu'on auroit mis en liberté les Navi-
res.& effets confifqués, ou retenus. D'ailleurs, qu'on auroit laiffé la liberté
de la Navigation & du Commerce , fuivant les Traitez, fans parler du Droit
des Gens. C'étoit d'autant que des Reglemens émanez de la Cour ne fer-
voient que pour fes propres Sujets, & n'obligeoient pas ceux des Etats. Par-
là l'on efperoit une refolution favorable de Sa Majefté fuivant l'amitié,
l'équité, & la juftice. Que s'il arrivoit autrement, les Etats feroient obligez
de fonger à d'autres moiens pour le maintien & la protection du droit de
leurs Sujets. C'étoit là-deffus qu'il y avoit eu fur le tapis l'armement naval.
Comme tout cela n'eut aucune influence , on fongea à des refforts plus ef-
ficaces , réels , & pecunieux. On chargea de nouveau le Miniflre des Etats
à Copenhague de tacher par d'autres moiens de fléchir cette Cour-là. Le
Miniibe eut là-deffus des Conférences avec les Miniftres Danois. Il leur
lâcha le mot , qu'on paieroit à bon conte des pretenfions les plus liquides de
leur Cour une certaine fomme. Cela eut de l'efficace. Sa Majefté Danoife
ordonna de faire relâcher indiftinctement tous les Navires des Sujets des Etats
tant de la Nord-Hollande que ceux pris allant & revenant de Suéde. Il y
avoit cependant l'exception des effets trouvez dans les Cargaifons des Na-
vires, qui auroient apartenus incontellablement aux Sujets de la Suéde. Il
femb'oit par-là, que le Dannemirk ne troubleroit plus le commerce des Su-
jets des Etats dans la Mer Baltique, ni allant en Suéde. 11 arriva cepen-
dant.
vin ces-
Unies.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 3
dant qu'il parut une fufpenfion pour le relâchement de ces Navires. On Affaires
attribué' cela au Refident de Dannemark van Stôcken. Les Etats furent D" PR0-
avertis que ce Miniftre avoit écrit à fa Cour, qu'il étoit informé par quelques
membres des Etats, que leur Envoie n'avoit, ni autoriiation,niinllruétion,
pour traiter avec la Cour fur les arrérages , & des Navires pris ou retenus.
Il fe trouva cependant que ce Refident n'avoit pas marqué jufte. On crut
même que ce pouvoit être fur des informations apoftees pour empêcher une
bonne intelligence entre les Etats & la Cour de Dannemark. Ce qui don-
noit lieu à cette croiance venoit de ce que les Etats n'étoient pas fort con-
tens de ce Refident. Il avoit dit dans quelques-uns de fes forts Mémoires ,
que le Roi fon Maître demandoit des Preuves réelles de la fincerité des E-
tats. Comme il venoit d'être rapellé , il prefenta le troifieme jour de cette
Année un Mémoire pour prendre congé des Etats. II y avoit reïteré la
même expreffion des Preuves réelles de leurs bonnes intentions. Le mot
de Preuves paroiffoit choquant. Car, les gens trouvoient que cela vouloit
dire, qu'on n'ajoutoit pas foi à ce que des Souverains difent. D'autres attri-
buoient cette manière de s'énoncer au peu d'expérience d'un Miniftre , ou
à manque de bien pefer la force du mot. Celui-ci auroit pu être adouci, en
mettant qu'on s'attendoit à des effets réels , au lieu de preuves réelles. Les
Etats eurent cependant la bonté de lui accorder des Lettres Recredentiales
ufitées. Us ne defaprouvoient pas ce que leur Envoie à Copenhague avoit
ménagé. C'étoit d'autant qu'on y avoit relâché 26. Navires, & qu'il s'at-
tendoit que dix autres qui refloient auroient le même fort. Son elperance
étoit fondée fur ce qu'il s'étoit engagé à cette Cour-là de lui paier une fom-
me fixe de vingt mille Rixdallers , & autant à chaque quatre mois , juiques à
l'entier paiement de fes pretenfions liquides, & qu'on traiteroit pour les dou-
teufes. Les Etats auroient feulement fouhaité de pouvoir obtenir des termes
un peu plus étendus que ceux de quatre en quatre mois. On étoit diipofe
d'en faire la tentative par une demande. L'on fe flattoit même de pouvoir
y rè'uffir. La raifon étoit que la Cour de Dannemark envoioit vers les
Etats un Refident à la place de celui qu'elle avoit rapellé. 11 étoit déjà
connu , aiant été quelques années auparavant à la Haie comme Secrétaire
de Commiiïion. D'ailleurs, il étoit doiié d'une grande fagelfe, d'un efprit
accommodant, d'un fa voir diflingué, & d'une conduite fi réglée & clair-
voiante, qu'on l'avoit emploie dans des Negotiations ailleurs. Il s'apelloit
Greis. On fut par celui-ci, que la raifon du rapel de fon predecefleur ve-
noit d'une affaire particulière. Elle confilloit en ce qu'il s'étoit marié à la
Haie fans la permiuîon de fa Cour. Il y a une loi établie en Dannemark.
Elle porte qu'aucun de la Dépendance de la Chancellerie étrangère ne puifle
fe marier fans la permiffion du Roi. Ce Refident rapellé .avoit écrit au Se-
crétaire d'Etat Scheited, qu'il avoit fait delfein de fe marier. Le Secrétaire
d'Etat en écrivit au Roi de Dannemark qui étoit en Holllein. Ce Roi lui
ordonna d'écrire à ce Refident-là de fufpendre fon Mariage. Mais , il repon-
dit que c'étoit trop tard. C'étoit d'autant que les Annonces avoient été pu-
bliées , & que le jour des EpoufaiJles étoit fixé. U mandoit qu'il époufoit
A 2 une
4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires une perfonne de qualité , qui avoit un Frère dans le Collège des Nobles de
des Pro- Hollande, & qui étoit auffi de l'Amirauté. Par ce moien il pourrait favoir
UnS" Ie fecret des Etats, & par-là rendi-e fervice. Le Roi en fut fi indigné, qu'il
- nomma d'abord à la recommandation de fon Miniftre Webb un nommé
Joung, qui refufa cet emploi. Il fut delliné à Mr. Greïs, comme très-ca-
pable de s'aquitter de fa commiffion. On dira en paffant une pon&ille du
Cérémonial. Le Refident rapellé s'étoit par fois plaint , de ce que dans des
Conférences les Députez des Etats fe tenant de bout, il avoit été obligé de
fe tenir de même. Sur cela , le Roi de Dannemark ordonna precifement
dans les Inftruélions au nouveau Refident, de ne rien dire à foccafion dans
des Conférences , à moins que les Députez ne fuffent afîïs , & le fiffent affeoir
de même avec les honneurs dûs à un Miniftre public. Aufli, après qu'il eut
rendu les Lettres de créance le 31. de Janvier, on en a ufé envers lui comme
il faut. D'ailleurs , on tâchoit d'entretenir une bonne intelligence avec cette
Cour-là. Le Minillre des Etats auprès de celle-là leur avoit mandé, que les
Navires arrêtez avoient été relâchez fous certaines conditions. L'une étoit,
qu'on paieroit d'abord à cette Cour-là les cinquante mille Florins, ou vingt mille
Rixdalers , à bon conte des ordonnances fur la Nord-Hollande , dont on n'a-
voit pas encore fait le paiement. Sur cet article on requit les Etats de la
Province de Hollande de faire paier d'abord cette fomme-là. Pour le refle
on chargea le Miniftre de l'Etat d'afleurer qu'on paieroit par douze termes
de femeflre ce qui feroit liquidé fur le même pied, dont on étoit convenu
avec le Roi de Pruffe. Par raport à la navigation & au commerce , la Cour
Danoife propofoit qu'il faloit faire une altération aux Lettres de Mer , dont
on munit les Navires. Les Etats chargèrent leur Miniftre de reprefenter
qu'il y auroit en cela de la difficulté. La raifon étoit que le formulaire de
ces Lettres-là, qui étoit en ufage, avoit été concerté avec les autres Puif-
fances Maritimes. Cependant, il devoit demander la penfée de cette Cour-
là , relativement à ce changement. Il arriva juftement en ce tems-là un con-
tretems fâcheux. Ce fut par l'inadvertance ou ignorance de l'Agent de
Dannemark à Amfterdam contre l'avis du nouveau Refident. L'Agent fit
demander le paiement des 20 mille Ecus au Prefident du Confeil commis
de la Nord-Hollande. Celui-ci , qui n'étoit peut-être pas mieux averti , y
répondit de travers. Cela étoit capable de faire cabrer la Cour de Dan-
nemark. Le Refident mit tout en ufage pour remédier à ce malheu-
Teux incident. D'ailleurs, les Etats Généraux écrivirent à la Nord -Hol-
lande une Lettre fort ferieufe. Elle portoit qu'on expofoit par leur non-*
chalance , non feulement la réputation de la République , mais même
le commerce de l'Etat, à un péril manifefte. Il y avoit les exhortations
les plus touchantes , pour porter ce quartier de la Nord -Hollande à
faire ce paiement. On peut voir la Refolution même, qui eit plus éten-
-due que l'Extrait qu'on en fait.
Extrait
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIIL
Ayv.un.T8
Extrait du Regiflre des Refolutions de Leurs Hautes X^c'T
Puijfanees les Seigneurs Etats Généraux des Provik- u^s.
ce s- Uni es des E aïs-Bas ; du Samedi j. Février 1718.
de Mr.
Goes.
OU I le Raport des Sieurs de Wynbergen & autres Députez de Leurs Refo'u-
Hautes PuiiTances pour les Affaires étrangères ; aiant en confequence, tion d\s
& pour fatisfaire à leurs Refolutions commiflbriales de diverfes dates, exa- EtatsGc*
miné les Lettres du Sieur Goes, Envoyé Extraordinaire de Leurs Hautes furune
Puiiîances à la Cour de Sa Majeité le Roi de Dannemark reçues fucceiTive- Lettre
ment, lesquelles regardent ce qui s'y eft paffé par raport aux VaifTeaux Hol-
landois qu'on y détient , & le relâchement d'iceux ; le Sieur Goes priant
par ces Lettres Leurs Hautes Puiiîances de vouloir lui envoyer leur Refo-
lution fur les conditions , auxquelles s'elt fait le dit relâchement, & qui
font comprifes particulièrement dans fa Lettre du 25. Décembre dernier.
Surquoi aiant été délibéré, il a été trouvé bon & entendu, que les Seigneurs
Etats de Hollande & de Weit-Frife feront priés par Lettre , de vouloir
mettre de tels ordres pour qu'il foit , conformément à la promette faite par
le Sieur Goes, payé incontinent 50. mille flor. en diminution des arrérages
que la Province de Hollande & de Weft-Frife doit des affignations données
fur la Nord-Hollande au Roi de Dannemark en payement des fubfides du-
rant la dernière Guerre.
Qu'il fera repréfenté aux dits Seigneurs Etats , que Leurs Hautes PuiiTan-
ces font d'avis, que par rapport aux termes du payement des autres fubfi-
des & arrérages dûs tant par le quartier du Sud que par celui du Nord de la
Province de Hollande & de Weft-Frife , il faudroit accorder avec Sa Majefté
Danoife, & qu'enfuite les fufdits Seigneurs Etats veuillent fe déclarer là-def-
fus. Que pour ce qui regarde les Prétenfions du Roi de Dannemark par
raport aux arrérages dûs à fes Troupes , qui ont fervi dans la dernière
Guerre aux Païs-Bas, de liquider le plutôt le mieux ces prétenfions, & de
convenir de plus pareillement fur les termes du payement de ce qui fe trou-
vera par la liquidation , que l'Etat doit.
Et feront à celle fin les Sieurs de Welderen & autres Députez de Leurs
Hautes Puiffancespour les Affaires militaires priez &. chargez par la préfente
d'examiner au plutôt, conjointement avec quelques Sieurs Commiffaires du
Confeil d'Etat à nommer par lui-même , lesdites Prétenfions , & de délibérer
fur quel pied il fera traité là-deffus, & d'en faire raport ici à l'Aflemblée ; que
Jes Conférences fur ce fujet pourront fe faire à Copenhague, puifque Leurs
Hautes Puiffances l'ont ci-devant laiffé au choix de Sa Majefté Danoife, qui
a choifi Copenhague pour le lieu de Conférence, & y infifte prefentement.
Que les termes du payement des arrérages, tant des fubfides que des Trou-
pes, quand ils feront liquidez, doivent être réglez fur le pied comme on en eft
convenu avec Sa Majeité Prufîienne; favoir chaque mois une douzième part
de la Dette. Qu'à l'égard des Prétenfions pour les pertes que les Habitans
A3 de
6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aminés de l'Etat ont faites par la faifie & détention de leurs VaifTeaux & Effets , il
uEs Pro- fera écrit aux Collèges refpeftifs des Amirautez , à chacun dans Ton diftricl:,
Umes" ^e s'informer & de faire produire auiïitôt qu'il ell poflible les prétenfions des
— ' l ïabitans de l'Etat à la charge du Dannemark , de même que les Documens fer-
vant à leur vérification , & de les envoyer à Leurs Hautes PuilTances pour être
pareillement traité là-defïïis. Que quant aux Prétenfions du Dannemark pour
des VaifTeaux, qui feroient pris dans la dernière Guerre par des VaifTeaux de
Guerre ou Armateurs de l'Etat, il fera écrit en reponfe au Sieur Goes, que
Leurs "Hautes PuilTances n'ont abfolument aucune connoiiTance de pareilles
Prétenfions , & qu'il faudra qu'Elles attendent la Production qui en fera faite
pour favoir en quoi elles confiitent, avant que de prendre aucune refolu-
tion là-deiTus.
Que pour ce qui eft des nouveaux Formulaires des Lettres de Mer ou des
Certificats, qu'on donne aux Habitans de l'Etat, il fera écrit au dit Sieur
Goes , qu'il a fort bien répondu fur ce fujet , que les Lettres de Mer peu-
vent difficilement être changées , vu qu'elles font arrêtées avec d'autres
PuifTances Maritimes ; mais ,li durant la Guerre on demandoit d'autres preu-
ves des VaifTeaux Hollandois, que celles qu'on leur demande ordinairement,
on devroit s'expliquer là-defTus plus précifement, & que le Sieur Goes fe tien-
dra provifionellement à cette Réponfe. Qu'enfin , les Seigneurs de Hollande
& de Weil-Frife feront encore priez de faire payer au fufdit Sieur Goes fes
arrérages, & provifionellement une bonne fomme en diminution d'iceux.
La Ville d'Amfterdam prenoit fort h cœur cette Affaire-là. Laraifon,que
les cargaifons des Navires de la Nord-Hollande, quoique relâchez de leur
arrêt, étoient encore à Copenhague, & apartenoient à des Marchands de
cette Ville-la. Ceux-ci les avoient frettez. Us étoient par-là les plus fouf-
frans. Il y a d'autres affaires relativement à cette Cour-là; mais, comme
elles font par raport au commerce dans la Mer Baltique compliquées avec
celles de la Suéde, on aura occafion d'en parler lors qu'on fera fur ce cha-
pitre-là. On ne laifTera cependant pas d'ajouter ici quelque chofe par raport
à la nouveauté de cette Cour-là. Elle confifloit en ce que le 18. de Dé-
cembre de l'Année dernière 1717. Elle avoit fait déclarer aux Miniflres
Etrangers une nouvelle méthode de negotier. L'Angleterre Tavoit trou-
vée irreguliere. C'elt là-deffus que fon Minillre le Lord Polhvarth y pre-
fenta un Mémoire, qu'on infère ici pour fatisfaire aux Miniitres publics»
avec les Réponfes.
. Mémoire du Lord Tolwarth fu r le Ceremoniel des Miniflres
à la Cour de Dannemark \ du 22. Février 171 8.
^CM°irC T -^ f°uu^gné n'aiant pas encore receu de Reponfe à ce qu'il a eu l'honneur
tord Poi- de reprefenter à Vôtre Majeflé dans une Audience & par plufieurs Me-
warth. moires , auffi bien que dans une Conférence avec vos Miniitres au fujet de la
nou-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII/
Unies.
nouvelle méthode de négocier par écrit, il fe trouve oblige de prier Vôtre Ma- -AmiRi»
jefté encore une fois très-humblement de vouloir bien réfléchir fur le grand des Pro-
nombre d'-inconveniens , dont immancablement cette méthode fera accom- tï."5"
pagnée; & de lui faire favoir, par ordres exprès & réitérez de fa Cour, que
fi cette affaire n'eft pas remife fur le pied accoutumé , le foufiigné ne fauroit
point fe foûmettre à cette innovation , & que SaMajeilé fera obligée de rom-
pre toute correfpondance entre les deux Cours, & de donner ordre pareil-
lement au foufiigné de quitter celle-cy & de s?en retourner. C'efl pour-
quoi le foufiigné fuplie très-humblement qu'il plaife à Vôtre Majeflé" de lui
faire avoir là-deffus fa Reponfe. Fait à Copenhague.
Dans la Conférence avec Milord Polwartb, le i$. Février 171 8.
MI lord fit connoître comme quoi il n'étoitpas neceffaire qu'il répétât à
LL. EE. tout ce qui s'étoit paiTé de part & d'autre , fur la nouvelle mé-
thode propofée de négocier ici. Il remarquerait feulement à LL. EE. qu'il
avoit eu l'honneur d'avoir une Audience du Roi,& de prefenter un Mémoire
fur cette affaire le 12. Janvier , & qu'il avoit aufïï eu une Conférence avecLL.
EE. fur le même fujetle 14. fuivant, fans avoir encore obtenu la Reponfe,
affavoir que la Méthode de négocier accoutumée & établie depuis long-
temps foit remife. C'efl pourquoi il fe trouvoit obligé, par ordre exprés de
fon Maitre,de déclarer, que fi l'on infifloit fur la nouvelle déclaration, &
fur la Méthode de traiter les affaires qu'on prefentoit , le Roi fon Maître ne
pourroit en aucune manière fe foûmettre à une telle innovation , mais feroit
obligé de rompre toute correfpondance avec cette Cour-cy , & de donner
ordre pareillement à lui fon Miniflre de quitter la place & de s'en retour-
ner. Et c'efl pourquoi il étoit obligé de prier encore LL. EE. de prefenter
ce Mémoire au Roi, & de mettre cette affaire devant Sa Majeflé, comme
elle le mérite, & de lui faire avoir une Reponfe aufiitôt qu'il feroit pofiible.
Il faut aufii qu'il ajoute un feul mot quant aux raifons données pour cette
nouvelle méthode, favoir l'épargne du tems. LL. EE. favent fort bien,
s'il a jufques ici trop importuné, ou Sa Majeflé, ou LL. EE., & les ex-
prefiions fortes couchées dans fes Mémoires; la raifon en Angleterre, s'il
arrive des chofes qui l'obligent d'agir de la forte en fidèle Miniflre & fer-
viteur de fon Maître , la faifie des Vaiffeaux fur l'Elbe , & cette nouvelle
méthode de traiter , ont été les deux feules fois mis en ufage. C'eil
ce qui nefl pas fa faute , & fon très gracieux Maître aprouve tout ce qu'il
a fait. Il fe trouve encore obligé de prefenter à LL. EE. un Mémoire
fur la prife d'un Vaiffeau, & une affaire qui eft arrivée depuis peu de jours,.
& de prier LL. EE. d'en faire raport au Roi , & de lui en faire avoir une
Reponfe.
In jidem Protocolliy
VON H A G E N.
Rêponft
Affaires
des Pro-
vin ces-
Uni es.
Réponfe
au Mé-
moire de
M. Pol-
warth.
g MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Réponfe au Mémoire précèdent.
SA Majesté' le Roi deDannemark & deNorwegue s'eft laifTé raporter
que l'Envoie Extraordinaire & Miniitre Plénipotentiaire de Sa Majefté
le Roi de la Grande-Bretagne le Lord Polwarth a, en conformité d'une Lettre
receuë du Secrétaire d'Etat le Lord Sunderland , déclaré au fujet de la der-
nière explication faite à tous les Miniilres Etrangers le 18. Décembre 1717.,
par raport aux Audiences à prendre de Sa Majefté & aux Conférences , à tenir
avec fon Confeil. C'eil là-defïus que fadite Majefté a ordonné de repondre,
qu'Elle n'auroit jamais crû que la Cour de la Grande-Bretagne eut voulu
faire difficulté d'entrer dans une affaire fi jufle & fi équitable; & que cha-
que Prince eil inconteftablement en droit de régler à fa Cour , comme il
le trouve à propos , quoique c'eil abfolument & de même fans contradiction
le meilleur moien, & le plus court & propre pour faciliter les négociations
des Miniilres étrangers qui y refident. Encore beaucoup moins s'eft Elle
attendue que fa julle intention , après fa dernière déclaration , laquelle don-
ne aux Miniilres étrangers toute facilité imaginable de faire leurs propo-
rtions débouche ou par écrit, s'ils ont envie d'en profiter, doit avoir
porté Sa Majefté de la Gr -.n de-Bretagne à faire faire une Déclaration fî
defagreabîe & fi peu conforme à la bonne amitié & étroite intelligence ,
qui doit fubfifler entre les deux Cours , & laquelle de fon côté Elle tachera
de cultiver & d'affermir de plus en plus ; attribuant les exprefïïons odieu-
fes , afFavoir de vouloir rompre tout commerce entre les 2. cours , à quelque
mefentendu, ou bien une explication finiflre des fentimens de Sa Majefté.
En tout cas , fi , fur des incidens fi légers , contre toute attente , on perfifle
clans une Refolution fi peu amiable, Sa Majefté déclare, qu'Elle le verra tou-
jours avec un extrême chagrin & deplaifir^ ne pouvant faire au de là que
d'accorder aux Miniilres étrangers un libre accès auprès de fa perfonne ,
& de renvoier les affaires qu'ils ont à traiter aux Conférences avec fon
Confeil , lefquelles ils pourront obtenir chaque fois que l'affaire , dont il
s'agit, le mérite, & qu'ils auront fait demander l'heure à temps. Au refte,
Sa Majefté a inftruit fur cette affaire fon Miniftre à la Cour de la Grande
Bretagne, & Elle ne doute pas que fes Reprefentations n'aient tout l'effet
que l'on doit attendre dans un temps où la bonne harmonie efl tant neeek
faire entre deux Princes fi étroitement unis & alliez. C'eft de quoi le fus—
dit Envoie Extraordinaire & Miniftre Plénipotentiaire le Lord Polwarth efl
prié de faire un raport favorable à fa Cour, & Sa Majefté le fait d'ailleurs
affeurer de fa propenfion & bienveillance Roiale. A Copenhague, le 22.
Février 171 8.
(L. S.)
jfd Mandat um Sacra Regiœ Majej-
tatis proprium ,
C. S II & S T A D T.
Le
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIIT.
9
Lfe Projet, qui étoit fur le tapis pour un armement maritime, étoit pour
ifleurer le Commerce des Sujets de l'Etat dans la Mer Baltique. Celui-cy
étoit troublé tant par les Suédois que par les Danois. L'habile Secrétaire
de Suéde Freis, qui depuis a eu le Caractère de Miniftre public, avoit in-
fmué,môme par un Pro Memcriâ,que fi le Dannemark venoità ne plus trou-
bler le Commerce des Sujets de la Republique dans la Mer Baltique, ni al-
lant en Suéde, alors le Roi fon Maître ne troubleroit pas auflï de fon côté
celui des Sujets de l'Etat , qui iroient en Dannemark ou en la Norweguc
Danoife. Les Etats Généraux s'apliquerent là-defllis à tacher de rendre
libre le Commerce dans la Mer Baltique & au de-là du Dogger-Sand. Il y
avoit cependant quelque obftacle , & particulièrement fur une pon6lil!e.
Le Roi de Suéde pretendoit quelque fatisfaclion fur ce que le Baron de Gortz
avoit été arrêté dans les terres des fept Provinces. Le Comte de la Mark,
qui étoit allé en qualité d'Ambaffadeur de France en Suéde , fe méloit de
reconcilier ce Roi-là avec les Etats. Il entretenoit fur cette matière cor-
refpondance avec le Marquis de Chateau-Neuf Ambaffadeur auiïi de France
il la Haie. Celui-là étoit d'avis qu'une telle reconciliation pouvoit avoir
dufuccès, fi les Etats pouvoient fe refoudre à envoier un Miniftre Extra-
ordinaire en Suéde de leur part. Le Marquis communiqua aux Etats des
Lettres du Comte de la Mark du 10. Décembre paffé. Elles portaient que
le Roi de Suéde s'attendoità l'envoi d'un Miniftre Extraordinaire de la part
des Etats, pour y régler tout ce qui pouroit contribuer à une véritable ami-
tié. Le Roi fe contenteroit d'un fimple compliment d'un tel Miniftre fur
ce qui s'étoit paffé à l'égard du Baron de Gortz. Plufieurs Membres de
l'Etat étoient portez à nommer quelqu'un pour cet emploi extraordinaire :
d'autres s'y opoferent fur une ponclille. Ils vouloient qu'auparavant le
très-habile Refident des Etats Rumpf fut readmis. Le Marquis de Cha-
teau-Neuf dit là-deffus une chofe. Elle étoit, que dès que le Roi de Suéde
feroit affeuré de la ferme difpofition des Etats d'envoier un Miniftre ex-
traordinaire, & qu'il feroit chargé de ce fimple compliment, il n'y avoit
point à douter que ce Roi-là ne readmit d'abord ce Refident à pouvoir né-
gocier avec lui , & que la première harmonie feroit rétablie. Quelques jours
après, ce Marquis fit au Prefident de Semaine une infmuation de la part de
fa Cour. Pour en marquer au juite fon contenu ,on la met ici.
Affaire»
ces Pro-
VINCl-.S-
UNIES.
'Extrait du Regiftre des Refolutions de LL. HH. PP. ;
du Jeudi 1 3. Janvier 1718.
LE Sieur de Nortwyck Prefident à l'AfTemblée a fait favoir àLL. HH. Raport
PP. que le Sieur Marquis de Château-Neuf Ambaffadeur de France ^ceque
avoit ete auprès de lui , & lui avoit dit qu il avoit ordre de donner connoil- fadeur de
fance à LL. HH. PP. , que Sa Majefté le Roi de France trouvoit qu'il étoit France
neceffaire pour l'Etat , que fon Commerce dans la Mer Baltique fut rétabli; propo-
sa»* XL B mais
20 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Amiwi mais , qu'il paroiflbit à SaMajefté, que le choix des moiens pour y parvenir
dis pro- n'étoit pas indiffèrent. Que Sa Majefté croioit que le propofé fut & pour-
unies. roit être obtenu par la voie de la Negotiation : & que ledit Marquis de
; Chateau-Neuf avoit ordre d'afleurer LL. HH. PP. que le Sieur Comte de
foit tau- ]a ]yxarck emploieroit avec zèle le nom & les offices de Sa Majefté à l'avan-
Suede. taSe ^e l'Etat , jfuivant les ordres qu'il en avoit receus & qui lui en
avoient été renouveliez, lefquels il mettroit en ufage lors que LL. HH. PP.
Je mettront pour cela en état. Et en cas que l'on ne trouvât pas bon le
moien de fe fervir de la négociation , qu'il feroit difficile de prévoir juf-
ques où cela pourroit aller.
Surquoi aiant été délibéré , il a été trouvé bon & arrêté , que la copie
de ladite proportion fera mife entre les mains des Sieurs de Wynbergen
& autres Députez de LL.HH. PP. aux Affaires étrangères, pour la vifiter,,,
examiner , & en faire le raport de tout à l'AfTemblée-.
Il y eut des Miniftres qui firent des reflexions fur la démarche de cet
Ambaffadeur. Ils vouloient qu'elle tendoit à traverfer le deffein de l'arme-
ment maritime qui reftoit toujours fur le tapis , & dont on parlera plus
bas. Ils croioient même qu'il avoit attendu à faire cette infmuation , que
la Prefldence fut de la Province de Hollande. On alla jufques à s'imaginer
que c'étoit l'habille Secrétaire de Suéde Preis , qui y avoit influé. La rai-
fon étoit qu'il avoit toujours infiflé à ce qu'on commençât une Négocia-
tion. Cependant, il paroiffoit àfon dire, qu'il ne favoit pas tout le conte-
nu de l'infinuation de cet Ambaffadeur , qu'il ne lui en avoit dit la fub-
itance qu'en termes vagues. Auffi les Etats refolurent-ils d'avoir une Con-
férence avec ce Secrétaire. On devoit lui repondre à un Pro Mernoriâ,
déjà raporté l'année précédente. On en fera mieux éclairci de fon con-
tenu par la Pièce même , que par un Extrait, C'ell pourquoi on le.
met ici.
Réponfea un Pro Memorlà du Sécjr taire de Suéde Preis ^
du 28. Janvier 17*8.
Acponfe A \] fujet ^u pr0 Mém&nâ, que le Secrétaire Preis a prefenté, if y a
taire0"6" -^Muelque temps, on lui reprefentera dans une Conférence, que de la
Yreis. Part ^e LL. HH. PP. , on ne croit nullement neceffaire dentrer en dit
cuiïion des faits alléguez dans l'écrit, puis que cela ne pourroit pas fervir
à l'avancement du bût que LL. HH. PP. fe propofent; Qu'autrement il ne
feroit pas difficile de montrer, que quelques-uns de ces faits ne font pas
fondez, & qu'aucun de tous n'elt capable de juftifier en quelque manière
que ce foit les vexations & dommages, que les Suédois ont caufé aux
Sujets de l'Etat, dans leur commerce & navigation, & qu'on leur caufe
encore tous les jours. Car il efl notoire , que , quoi que ce foit le Roi de
Dannemark , qui ait commencé le premier à troubler le Commerce & la Na-
vigation
DES PRO-
V1NCKS-
UN1ES.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. n
vigation de cet Etat, & de l'infefler (ainfi que le Secrétaire Preis l'avan- Affaires
ce,) ou que ce foient les Sue'dois (comme on le fbùtient du côté de
Dannemark), le droit de l'Etat, contre SaMajeflé Suedoife, & aufli con-
tre Sa Majellé Danoife , demeure toujours le même , & qu'aucun defdits
deux Rois n'a été fondé, & ne l'efl pas encore, fbit qu'il fut le premier,
ou qu'il l'eut fait à l'exemple de l'autre , d'enfraindre le droit des gens , &
encore moins celui des Traitez : mais que chacun des fufdits Rois a été
notoirement obligé , & l'eil encore , de laiffer jouir les habitans de l'Etat
de la liberté abfoluë du Commerce & de la Navigation , pour toutes les
Villes & lieux, fans aucune diflinction , foit que ces. lieux, à l'égard de
l'un ou de l'autre, fuffent ennemis ; parce que les Traitez, même pour
les places ennemies, accordent expreffement le libre commerce Ôc navi-
gation aux Sujets de l'Etat, & qu'ils n'exceptent de cette liberté, que le
tranfport feulement des Marchandifes , qui "y font defignées être de con-
trebande, à l'égard defquelles il n'y a point de difpute. Mais que LL.
HH. PP. fans s'arrêter auxdits faits alléguez, venant à l'offre faite par le
Secrétaire Preis, fur la fin du fufdit Ecrit; fçavoir,que Sa Majeflé Sue-
doife fera difpofée de ne point troubler le Commerce fur le Dannemark
& la Norvegue , fi le Roi de Dannemark veut ceffer de troubler le Com-
merce fur les ports de Suéde, LL. HH. PP. font portées de faire propo-
fer ces offres au Miniflre de Sa Majeflé Danoife , qui eft ici , & par leur
Minillre, qui eft à la Cour de Coppenhague, à ladite Majeflé même; mais
que LL. HH. PP. ne peuvent pourtant pas s'empêcher de remarquer à l'é-
gard de ladite offre, qu'EUes prévoient , que fuivant toute aparance la
Cour de Dannemark ne -l'acceptera point, & la tiendra pour defec~lueufe ,
tant que fa Majeflé Suedoife n'y ajoutera pas la liberté de commerce &
de navigation, pour les Nations Neutres dans la Mer Baltique, & fur les
autres lieux poffedez par les Alliez de Sa Majeflé Danoife; Que LL. HH.
PP. pourroient d'autant moins preffer Sa Majeflé Danoife , puis qu'Eue
(quand même Elle pourroit accepter provifionellement ladite offre) ne
pourroit pas le faire , que fur la ferme promeffe qu'auffi Sa Majeflé Sue-
doife laiffera immédiatement après jouïr les Sujets de l'Etat de la liberté du
Commerce & de la Navigation, dans la Mer Baltique, & aux autres lieux
indiferement , conformément aux Traitez.
Que le dit Secrétaire Preis , pour toutes ces raifons , pourra bien confide-
Ter, que le plus court feroit de faire en forte, par fes bons offices, que le
Roi fon Maître pût tellement amplifier l'offre , dont il s'agit , que le Com-
merce & la Navigation, pour la Mer Baltique & autres lieux, à l'égard des
Nations qui ne font point comprifes dans la Guerre du Nord , puiffent être
rétablis fur un pied libre fans aucun empêchement; en quoi fadite Majeflé
ne feroit rien que de jufle , par raport aux habitans de cet Etat , (ce que
LL. HH. PP. reconnoitront auffi de leur côté par tous les meilleurs offi-
ces) & cela produiroit indubitablement , que la liberté du Commerce & de
la Navigation, fur la Suéde, pour les Nations neutres, feroit accordée de
toute part , fans parler d'autres notables avantages qu'une telle refolution
B 2 pour-
il MEM01RES/NEGOT1ATIONS, TRAITEZ, ET
Aiiaire» pourroit procurer à Sa Majefté Suedoife ; Qu'ainfi ledit Secrétaire Preis
des tro- fera requis d'emploier fes bons offices , à ce que les offres faites foient recli-
fiées & amplifiées en la manière fufdite.
VrNCF.S-
UNlf.S.
Prefenté dans une Conférence au Secrétaire Preis le
Vendredi 28. de F An 1718.
L'on ne fe contenta pas de cela ,il fut refolu de faire aufli des Repre-
Tentations au Refident de Dannemark dans une Conférence. Dans celle-cy
on lui dit ce qui elt porté dans la Pièce entière qu'on trouve à propos d'in-
férer ici.
Reprêfentation au Refident de Dannemark par raport à
la Suéde , du premier Février 1718.
Pvcpré- (T\N reprefentera dans une Conférence au Sieur Refident de Sa Majefté
fentation \^J ]e R0i c[e Dannemark, que paffé quelque temps le Secrétaire de Suéde
dent de Preis a déclaré ici , que fi le Roi de Dannemark ceife de troubler le Com-
Dannc- merce aux Ports de Suéde, SaMajellé le Roi de Suéde fera diïpofée d'en
mark. agir de même à l'égard des Ports de Dannemark & de Norwegue; & que
ledit Sieur Refident fera requis de vouloir emploier fes bons offices au-
près du Roi fon Maître , à ce que cette offre foit provifionellement accep-
tée comme un commencement par Sa Majefté, puis que par-là en tout cas
le Commerce & la Navigation pourroit être rendue' libre fur les deux
Roiaumes de fadite Majefté • en' affurant en même temps , que LL. I ïl L
PP. ne fe donneront point de repos avant qu'Elles aient obtenu pour leurs
Sujets la liberté du Commerce & de la Navigation fur la Mer Baltique &
autres lieux poffedez par les Alliez de Sa Majefté Danoife , d'autant plus
que l'intérêt qu'ont les Sujets de l'Etat au Commerce & à la Navigation
dans la Mer Baltique , & aux autres lieux , eft trop confiderable , & que le
droit qu'ils y ont eft trop inconteftable , pour que LL. HH. PP. puiffent
fe contenter de l'offre fufmentionnée. Mais , comme pour obtenir le tout ,
on accepte quelquefois par provifion une partie ; que pour cette raifon
LL. HH. PP. laiffent à confiderer à Sa Majefté le Roi de Dannemark , fi
(pour l'avantage de fes Roiaumes & auflî pour celui des Sujets de l'Etat)
on ne pourroit pas par provifion accepter ladite offre , fous l'affurance mi-
dite néanmoins j mais, que quelque refolution que Sa Majefté puiffe pren-
dre à cet égard LL. HH. PP. s'affeurent tellement de fon amitié , de fon
équité , & de fa juftice, qu'Elle fera ceffer tous les troubles, qui ont été
caufés. Et qu'Elle donnera ordre à Ces Amirautez , Vaiffeaux de Guerre ,
Armateurs, & par tout où befoin fera, que les Sujets de l'Etat puiffent jouir
à l'avenir de l'effet des Traitez , & par confequent de la liberté du Com-
merce & Navigation dans tous les lieux où cela eft permis par ledits
Traitez.
Ce*
ArFA!F,EJ
DES 1 RO-
V1NCKS-
TJnif.s.
d'Etat fur
un Arme-
ment Ma-
ritime.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 13
Cependant le deflein d'un Armement naval n'étoit pas négligé. Le
Confeil d'Etat en prefenta la neceflité aux Etats Généraux par la longue
Lettre qu'on infère ici , avec les Raifons pour y faire aquiefeer.
Lettre du Conjeiî cl Et aï pour un Armement Maritime %
du 28. Janvier 1718.
HAUTS ET PU1SSANS SEIGNEURS,
LE Confeil d'Etat a eu ci-devant quelquefois occafion de repréfenter lettre du
amplement à Vos Hautes PuifTances la grande importance & l'uti-
lité des Affaires maritimes du Pais relativement à la Situation & à la Coniti-
tution intérieure de l'Etat. Que comme par raport à ce dernier point il
eft d'une très petite étendue, fur tout en comparaifon d'autres Païs et Etats
voifins, & d'un entretien très coûteux contre la Mer & les Rivières qui
le traverfent, quoique quelque fois avec peu ou point de fuccès, comme il
n'a que trop pitoyablement paru encore ces jours paflez;& que de plus il
eft compofé pour la. plus grande partie de dunes, bruyères, terres mare-
cageufes , & tourbières , pour la culture & l'entretien defquelles il faut em-
ployer de grands fraix ; que pour cette raifon il ne fauroit trouver de fon
terroir & de fes revenus la fubfiitence que d'un très petit nombre de fes
Habitans , d'autant moins quand ces revenus font contrebalancez avec ce
qui doit être levé par an , outre les fraix du fol & des Bàtimens en différen-
tes fortes de Taxes publiques même en tems de Paix. Qu'ainfi la fubfiiten-
ce doit être pour la plupart cherchée & trouvée par d'autres moyens , &
que ces moyens confiitent principalement en la libre navigation & com-
merce de toute forte de Marchandifes & de Négoces; en la grande & pe-
tite Pèche , & dans le débit de Harengs & autres Poiffons Salez , qu'on
prend dans ce Païs , & porte ailleurs , & vend avec beaucoup d'in-
duftrie, travail, & danger; en la culture & l'exercice de toutes fortes de
manufactures & de métiers , pour lefqueîs , moyennant la navigation , les
étoffes crues & les ingrediens font aportez des Païs étrangers , & les mar-
chandifes fabriquées fe débitent en échange de la même manière ailleurs.
Qu'à proportion que ces moïens augmentent ou diminuent, il faut auiîï
que le nombre des Habitans , & en gênerai la Profperité & la Puiffance de
l'Etat augmente ou diminue, & que pour cette raifon ces moïens font déjà
du vieux tems maintenus & défendus de tout le pouvoir contre les deffeins
des Nations voifmes pour les inquiéter ou couper. Les Princes mêmes
de ces Provinces les plus puiffans dans ce tems là ont déclaré publï-
quement,& particulièrement l'Empereur Charles V. à la refignation folemnelle
des Païs-Bas à fon Fils & fuccefîeur à l'Afiemblée des Etats Généraux de
ces Païs, que leur force & confervation confiftoit en la Navigation & Com-
merce ; en l'avertiffant ferieufement, que fi l'une & l'autre étoient négligez ,
leur ruine en fuivroit immancablement.
B 3 Mais
Af*Atrèj
DES PRQ-
VlNCfcJ-
UNIÏS-
14. MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Mais, ce qui, pour l'explication de ces Points Préliminaires & Généraux,
n'efl pas allégué ci-devant , quoique fans & outre plufieurs autres chofes
& reflexions qui y fervent très effentiellement & qui font neceffaires dans
la conjoncture préfente , c'eft l'important intérêt de l'Etat dans la confer-
vation & le maintien du Trafic & de la Navigation fur la Baltique & dans
te Nord. On fait comment ce Trafic & cette Navigation , n'aïant été
exercé dans les vieux tems , que par les Villes Hanfeatiques , qui au nom-
bre de foixante & fix s'y étoient obligées mutuellement à Texclufion des
autres Nations , a été du depuis pour Ta plus grande partie tranfporté ici
par leurs démêlez avec les Couronnes du Nord ,& particulièrement par
l'établhTement de la Pêche & des Métiers dans ce Païs, & comment il elt
tellement accru, que, fuivant des Mémoires dignes de foi, il y avoit au
commencement du dix-feptième Siècle pas moins de neuf cens Vaiffeaux,
?tui alloient de ces Provinces vers l'Efl , & grand nombre d'eux plus d'une
bis par an, pour y transporter plufieurs manufactures, des Harengs, épi-
ceries , & autres Marchandifes portées ici de FOuëit, & pour aporter à leur
retour d'autres Marchandifes, comme du chanvre, du lin, de la poix, du
goudron , des grains , de la laine, du bois , du fer, du cuivre , de la chaux, &
beaucoup d'autres , toutes d'un grand débit, pour le tranfport defquelles il
faut des Vaiffeaux fort larges. Que dans ce tems-là,& encore environ
50. Ans après , il y avoit peu à craindre pour la diverfion de ce Commerce
& Navigation aulîî grande & auffi profitable, puifque les Puiffances du
Nord & d'autres voifines, étant relpeftivement maintefois en guerre en-
semble , ou troublées chez eux par des Guerres inteltines , n'ont que peu ou
point à cœur la continuation du Commerce & de la Navigation de leurs
Sujets; mais qu'enfuite ces Nations ont travaillé, fur tout depuis un demi
Siècle, avec beaucoup d'aplication, à s'en emparer, foi t en déchargeant
leurs Sujets & en chargeant ceux de ces Provinces, foi t même en donnant
des recompenfes de leurs propres CofFres,pour inciter leurs Sujets à occuper
ledit Commerce. Que de cette manière le Trafic & la Navigation de ce Païs
vers PEft & le Nord a de tems en tems diminué confiderablement, & qu'on
n'y a pu employer plus de quatre cens cinquante, ou tout au plus cinq cens
Vaiffeaux , lequel nombre même eût diminué encore d'avantage s'il ne fut
confervé avec tout le ménagement & économie imaginable. Mais, que de-
puis la guerre dernièrement allumée dans le Nord , & qui y continue en-
core , le Commerce des bons Habitans fur ces quartiers là efl devenu
quafi la proye des Puiffances qui y font en guerre, par la prife, vexation,
èi. détention des Vaiffeaux de ces Provinces , fous , on ne fait prefque pas,
miels prétextes , au préjudice très confiderable & même à la ruine des Fa-
cteurs & des Propriétaires de ces Vaiffeaux , à la totale diverfion du dit
Commerce, y aiant été l'année dernière dans ces Provinces près de trois
cens Vaiffeaux, qui n'ont pu faire aucun voyage, & par confequent au
renverfement entier de la Navigation & du Commerce du Pais , à moins
qu'on n'y remédiât ; puifqu' effectivement il ne fauroit confiiter qu'en une
efpece de circulation & permutation des Marchandifes entre l'Eil «TOuè'fl,
&
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 15
& que cette circulation ceflant, le Commerce ne peut que ceffer aufïï, té- Affaire
moin une certaine grande Ville voifine, qui, pour paffer fous filence plu- DKS PRa*
fieurs autres exemples de cette nature , fleuriflbit autres fois par fon Com- ukwsT
merce , & qui en a eu une trille expérience à fon grand préjudice & même
à fa ruine , deforte qu'en cas de décadence & de diveriion de la Naviga-
tion à l'Elt & au Nord, il n'y pourrait qu'enfuivre celle fur d'autres quar-
tiers du monde, comme on n'en aperçoit déjà que trop, & qu'ainfi cet
Etat pourrait être réduit à l'impuiflance & à l'entier déperiffement.
Cet empêchement & diveriion , Hauts & Puiilans Seigneurs , efl: plus
à craindre pour ces Provinces que pour d'autres voilines , puifqu'elles en
doivent, comme d'un Marché public & Magazin gênerai du Commerce entre
l'Elt & l'Ouefl, tirer leur profperité. Mais, comme ce n'ell pas la Nature
qui rend cet Etat un Marché & Magazin, ainfi que d'autres Etats' voifins
qui font plus accoutumez à donner de leurs productions qu'à en tirer d'au-
tre part, &qui par confequent peuvent conferver par devers eux un Com-
merce avantageux, & non fujet à aucune diverfion ; mais que c'eil l'Art
qui le rend tel , ne dépendant à plufîeurs égards que de l'induflrie , de la
diligence & frugalité des bons Habitans, & qui pourrait, au défaut d'une
due Protection contre toute violence, être tranfporté d'ici dans un autre
Pais} & que le négoce, étant une fois perdu, ne retourne gueres d'où il
s'efl retiré, témoin plufîeurs exemples & même confirmez par expérience
de ce Pais : il eil de la dernière neceiîité de veiller la-denus avec beau-
coup d'attention, de le traiter délicatement & foigneufement ,& de le
défendre comme il faut ; étant impoffible , que le Commerce & la Navi-
gation puifle durer fans une Protection jufle & proportionnée à la force de
ceux qui voudraient les troubler, l'état même d'incertitude leur étant rui-
neux, comme on pourrait, s'il étoit néceffaire, le démontrer par des rai-
ibns & argumens irréfragables.
De-là dépend auffi la valeur & le prix des Terres & des Biens immeu-
bles , & l'on ne peut trouver d'autres raifons , pourquoi dans d'autres Païs,
comme par exemple en Allemagne, en Suede,enDannemarc, en Pologne &c.
ils font à un moindre prix qu'ils ne font ici , fans des accidens extraor-
dinaires , ou bien à un très-bas , qu'uniquement la profperité du Com-
merce conjointement avec afrluence de Monde & autres fuites qui en ré-
fultent, non-obflant que prefque toutes les Terres ici, devant être entre-
tenues en état de fertilité par de fortes Digues , Moulins , Echues , & autres
dépenfes , feraient encore ,au défaut de cette profperité & afrluence de
Monde , d'une beaucoup moindre valeur que les autres fufdites Terres,
qui naturellement font au-deffus de l'eau & fécondes.
Il faut enfin remarquer à cette occafion , que par l'empêchement des
moïens fouvent mentionnez , par le manquement de négoce qui en efl occa-
fionné , parla defertion & retraite des Habitans, par la Diminution des revenus
du Païs, & par le déclin des Biens immeubles , l'Etat, quoiqu'il ne fût
point diminué dans {qs limites & fon étendue , ferait pourtant, faute de
forces néceûaires, expofé fans efpoir d' allez de réiiflance à des accident
impré-
id MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires imprévus tout ainfi qu'un corps amaigri & affoibli , & ne pourroit pas,
ras r.\o- ce que dIqu veuille détourner , être confervé. Et c'eft pourquoi ces
unies!" moyens méritent qu'on y ait autant d'attention & de garde qu'ils ne foient
, — . violez , qu'il faut avoir foin de la défenfe des frontières & pour prévenir
le danger qui leur pourroit furvenir.
Cependant , Hauts & PuilTans Seigneurs , beaucoup s'en faut , que
dans la conjoncture préfente la fureté requife du Commerce, & les-
moïens y fervans & pris dans un bon fens & dans une bonne ligni-
fication , puiflent donner lieu à de nouveaux troubles , qu'un Etat
comme celui-ci doit éviter foigneufement , parcequ'ils feroient feule-
ment propres à la fureté des VauTeaux & Effets des Habitans de l'E-
tat contre toute violence & tort des étrangers , ce qui jufqu'à pré-
ient , malgré tous les devoirs employez à cet effet auiïï long-tems &
avec tant de patience , n'a pu être aimablement prévenu ni évité ; fu-
reté fondée fur le Droit de la Nature & far la pratique générale
de toutes les Nations , fuivant laquelle on peut repouffer la force par la
force 5 & une fureté, qui devroit purement confifler en a&es de defenfe,
lefquels, fuivant le Droit des Gens, ne font pas une infraction de la
Paix, qui n'eft enfreinte que quand on fait quelque chofe de contraire à ce
qui a été expreffement promis en faifant la Paix, ou à ce qui provient
de la nature de la Paix, le vieux Proverbe étant du refte aflèz, ou peut-être
trop connu , pour le rapeller en mémoire : Pacem rumpunt , non qui vim vi
arcent , fed qui priores vim in fer tint.
Il a piû neantmoins à VV.HII. PP. de trouver bon par leur Refolution du
24. du courant de mettre encore divers devoirs amiables , y mentionnez
plus amplement, pour prévenir plus de violences, & pour reparer celles
qu'on a déjà fouffertesrmais, dans l'incertitude pourtant , fi , & jufqu'où
ils feront d'un fuccès defiré ; & pour être en tout cas en état de maitenir & d'af.
furer, s'il eft neceilaire , Je Commerce & la Navigation de ces Provinces
contre ceux qui voudront les troubler, il leur à plû aufli de prier le Confeil
de former au plutôt une Pétition pour l'Armement d'une Efcadre de tren-
te Vaiffeaux de Guerre avec tout ce qui y apartient, & de la faire remet-
tre à VV. HH. PP.
Le Confeil prefente donc en confequence par celle-ci à VV. HH. PP. cette
Pétition pour l'Armement de la dite Efcadre de trente Vaiffeaux de Guerre
avec ce qui y apartient, plus amplement fpecifié dans l'Etat qui a été pro-
jette fur ce fujet, & quiefl joint à la queue delà prefente , calculé pour fept
mois à commencer du premier d'Avril prochain , montant à la Somme de
3132740: pour être trouvez de l'agmentation des Droits de Gabelle,
3Laft^i& Feyl-geid: & que le Receveur de cet Impôt foit autorifé de faire
fournir de ce Revenu aux Collèges refpeélifs des Amirautez, qui fe char-
geront effectivement de leur quotepart du dit Armement, à chacun fon con-
tingent dans cette Pétition, & de négocier fur le dit fonds les deniers qu'il
pourroit leur manquer en caiffe pour ce fujet , à un intérêt de 4. pour
Cent par an, & exempt pour le teins de quatre années de toutes les char-
ges
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 17
ges extraordinaires , comme le ioo^e. & soome. denier, & d'autres plus ou awaires
moins; bien entendu, que la moitié du montant de cette Pétition, que le des Pro-
dit Receveur General ne fournira qu'en prêt, lui fera rellituée aiuTi-tôt qu'il vinces*
eft pofïïble , avec les intérêts, jufqu'à ce qu'il fera entièrement payé, favoir UyiE8»
de telle manière comme VV. HH. PP. le détermineront dans la fuite.
De plus VV. HH. PP. font priées de vouloir envoier cette Pétition fans
retardement aux Seigneurs Etats des Provinces refpectives , & l'apuyer
puiffament & efficacement , afin que les confentemens requis s'enfuivent
avec autant de diligence que la nature de l'affaire & le Printems tout pro-
chain l'exigent , pour pouvoir fentir l'effet defiré dudit armement , qui de-
mande bien du tems pour être achevé, & pour qu'il puiffe donner du poids
aux fufdits offices , & devoirs amiables , qu'on emploiera encore , à la ré-
paration des torts foufferts, & pour les prévenir dans la fuite, & ainîi au reta-
bliffement de la Navigation libre & du Commerce des bons Habitans de la
République fur l'Eit & le Nord, lequel pour les raifons fufmentionnées eic
de la dernière importance. Les fraix même de cet armement feront d'un
bon & utile emploi, quoique le but falutaire de VV. HH. PP. à cet égard
puiffe être obtenu par les dits offices amiables qu'on employera encore de
leur part , & qu'ainfi dans la fuite l'emploi aêtuel de cette Efcadre ne fût
plus neceffaire ; parce qu'en tout cas , & outre le fuccès incertain de ces
offices amiables , dont il a plu à VV. HH. PP. de faire mention , les dits
Vaiffeaux , qui avec d'autres font extrêmement délabrez à caufe de l'im-
puiffance des Collèges refpeêtifs des Amirautez caufée par le défaut du
paiement des fubfides qui leur font dûs par les Provinces, qui n'équipent
point , pour des arméniens ci-devant faits , pourront de cette manière être
duè'ment radoubez & pourvus de mâts , agrez & cordages , & de tout ce qui
manque dans les Magazins du Pais , & ainfi remis en état de pouvoir être
emploiez dans toutes les occurences au fervice de la Republique.
Et , afin que les dits Collèges des Amirautez foient tirez de cette impuif-
fance , le Confeil ne fauroit s'empêcher dans cette occafion de prier en
même tems VV. HH. PP. de difpofer pareillement par leur forte & ferieu-
fe intercefîion les fufdites Provinces d'acquiter à la fin une bonne fois leurs
dits arrérages ; du moins de fournir en diminution d'iceux une fomme fuf-
fifante aux Collèges mentionnez , afin des les mettre en état de rétablir
comme il faut la Marine du Pais, de paier à leurs Officiers, Matelots,
Livranciers, & autres, les Gages, Penfions, Livraifons, & ce qu'il y a de plus
en arrière , & après quoi ils ont foupire li long-tems, & de pouvoir par
confequent exécuter & effectuer ce que le fervice du Païs exige d'eux.
Ainli fait & pétitionné par le Confeil d'Etat, à la Haie, le 2 8. Jan. 1718-
{Paraphé) J. W 1 c h e r s, vt.
( Plus-Bas ) Par Ordonnance du Confeil d'Etat
des Provinces-Unies ,
Signé, S. van Slingelandt.
Tome XL C Etat
.Affaires
des Pkc-
ViNCES-
Unies.
Résolu-
tion tou-
chant les
VaiiTe-
aux.
18 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Etat des Fraix de trente Vaiffeaux de Guerre avec ce
qui y apar tient , pour le tems de fept mois, à envoier
dans la Mer Baltique.
Vaiffeaux
i à ••
6 à
Canons
90 à
72 à
Hommes.
550.
400 - 2440.
Sous eux encore 2 Pavillons
7 a
16 à
2 à
6 Brûlots
64 à - - -
54 à
24 à
325 - 2275.
270- 4320.
120- 240.
do - - 360.
10245. Hommes à — 36 — 0 — 0 —
Par mois , fait pour fept mois - - - - -
Achapt & apareillement de fix Brûlots
Le Louage de fix Flûtes à 2000 - o par mois ,
pour fept mois, pour Provifion & Vivres. - -
3 Hoecres & 3 Galiotes à 1000 — 0 — 0 pour
fept mois. -----__--._
2 Hôpitaux & VaiiTeaux de Provifion - - -
Pour des Occurrences extraordinaires , comme
auffi pour le Fifcal , Secrétaire , Miniflre ,
& autres Officiers. --------
SoJdesde 6000 Hommes pour75Joursà iofols-
Total
2581740 -
0
—
0
90000 —
0
--
0
84000 —
0
—
0
42000
60000
50000
225000
o
o
O
O
O
o
o
o
3132740 - o
Les Etats avoient, 3. ou 4. jours auparavant, pris une Refolution
pour empêcher les Navires de Guerre de fe gâter. Voici cette Refolution.
Extrait du Régi fi re des Re fol ut ions de LL. HH. PP.
touchant les Vaiffeaux; du Mardi 2?. Janvier 1718,
A Iant été propofé à FAfTemblée, & donné en conflderation , fi à l'é-
./"Il gard de la grande décadence où les VaiiTeaux de Guerre de l'Etat
font depuis un long éfpace de tems tombez , par manque d'un necefTaire
entretien, & d'une requife réparation • laquelle décadence s'augmente
journellement de plus en plus , de forte qu'il ell à craindre que les dits
VaiiTeaux ne foient en peu de tems entièrement perdus , à moins qu'on
n'y
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. i$
n'y mette les mains. Que cependant la confervation defdits Vaifleaux de AmiREj
Guerre , & des forces navales pour le bien & la feureté de l'Etat , eft de DES Pko-
la dernière importance & neceflité , ainfi que les teins paiTez en ont plus ^CKS"
d'une fois convaincu. C'efl pourquoi , fi l'on ne devoit pas écrire aux ref- ...
peêtifs Collèges de l'Amirauté de mettre en triage tous leurs foins , non
feulement pour empêcher lefdits Vaifleaux de fe gâter , mais auiïi de met-
tre du moins un bon nombre d'iceux en état de pouvoir d'abord être em-
ploiez & mis en Mer, lors que le fervice de l'Etat, la protection & la
feureté de la Navigation & du Commerce des Sujets de l'Etat , ou la ne-
ceflité pourra le requérir ; & fi , pour mettre lefdits Collèges de l'Amirauté
en état de le faire, l'on ne doit pas charger le Receveur General de l'aug-
mentation des impôts & de l'argent de bonnagedes Navires, Groeninx, de
fournir aux Collèges de l'Amirauté, qui fe chargeront de l'efFecluër réelle-
ment, l'argent neceflaire, hors les rentes de la recette, fur la quittance
du Receveur General defdits Collèges de l'Amirauté, chacun pour ce qui
le regarde, par provifion jufques à la fomme de .... Florins; & n'y
aïant point aflèz d'argent dans la CahTe , de négocier la fomme avec un
intérêt de 4. pour cent par an , fous l'exemption de tout centième & deux
centième denier , & d'autres pareilles charges , pour le tems de 4. ans ;
avec cependant cette referve, que les Négociations qui ont déjà été fai-
tes fur ledit fond, & dont Obligations ont pour cela été livrées, ne rece-
vront par ceci aucun préjudice , mais tant à leur égard, qu'à l'aquit plutôt
du Capital , que des deniers qui feront après négociez fur ledit fond , réfu-
teront de la même nature qu'ils font à prefent. Sur quoi aiant été délibéré ,
les Srs. Députez de la Province de Zelande ont pris Copie de cette Pro-
portion pour être communiquée à leurs Principaux. Et les Srs. Députez
des Provinces d'Utrecht & d'Over-Iffel fe font chargez de s'expliquer là-
deffus dans 2. ou 3. jours.
L e jour qu'on reçut la Lettre du Confeil d'Etat qu'on vient de rapor-
ter , les Etats Généraux prirent une Refolution pour trouver fur quoi on
prendroit l'argent neceflaire pour une telle depenfe. Cette Refolution eft
îa fuivante.
Extrait du Regijlre des Refolutions de LL. HH. PP.
touchant un Armement Naval', du Samedi 29. Jan-
vier 171 8.
RE c e u une Lettre du Confeil d'Etat, écrite ici à la Haie le 28 , portant Refolu*
une Pétition de la fomme de 3. Millions, 132. mille, 740. florins, pour tion fur
l'Armement extraordinaire de 30. Vaifleaux de Guerre & leur dependence. un Arme'
Cette fomme doit fe trouver fur l'augmentation de la charge & tonnage ™l Na"
des Navires. Et cette fomme ne fe trouvant pas en caifle, de la négocier
fur ledit fonda 4. pour cent d'intérêts annuel fous l'exemption pour 4. ans
C 2 de
VINCES-
Unies.
îo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires de tout extraordinaire impôt, comme centième & deux centième denier,
di,s Pko- g autres charges , la moitié de ladite fomme demandée à être fourme feu-
lement , par emprunt , pour être , d'abord qu'il fera poiîibîe, rembourfée avec
les intérêts qui en reiulteront, & de telle manière qu'il fera déterminé.
Sur quoi aiant été délibéré, & étant déclaré par les Sieurs Députez de la
Province de Hollande & de Weil-Frife, qu'ils confentoient de la part de
leurs Etats à ladite Pétition , il a été trouvé bon & arrêté , que la copie de
ladite Pétition feroit envoiée aux Seigneurs Etats des autres Provinces , & de
les prier de vouloir au plutôt y confentir, & d'envoier , tant plutôt tant
mieux , fans perte de temps , leur confentement , à caufe que la faifon s'avan-
ce. Qu'on y ajoutera que LL. HH. PP. , dans l'attente defdits confente-
mens , ne négligeront pas de mettre en ufage les amiables offices contenus
dans leur Refolution du 25, qu'on a déjà commencés. Cependant, cela don-
nera beaucoup de poids aux dits bons offices , & de-là il y a principale-
ment à efperer un bon fuccès , quand on aura pris une promte refolution
pour ledit Armement , & qui fera effectivement mis en exécution. Et en
cas que ces bons offices puiiTent obtenu- un bon fuccès , les depenfes à em-
ploier pour ledit Armement ne feront point pour cela perdues , puis que
par-là la force Navale de l'Etat , qui elt dans une pitoiable décadence , fera
en quelque manière mife en meilleur état, & cela fans de nouvelles charges
pour les Provinces , & feulement fur les revenus par eau.
Le Compte pour l'Armement de 30 Navires fuit ici.
Compte de ce que contera P Armement de 30. VaiJJeaux de
Guerre 5 avec leur dépendance , pour le tems de ?*,
Mois , pour envoler dans la Mer Baltique.
Navires Canons
H
ommes.
1 a - - - - 90 - -
-
- 500.
6 à - - - - 72 à 400
-
- 2440.
y compris deux Pavillons à
-
- ÏOO.
7 à - - - - 64 à 325
-
_ 907c"
16 k - - - - 54 à 270
-
- 4320.
2a---- 24 à 120
-
- 24O.
6 Brûlots à - - - - 60
-
- 360.
10245.
Sommes.
Depenfe pour 7. Mois des Hommes h. 36 fl. 2581740
Pour les 6. Brûlots. - ----------- 90000
Pour 6. Flûtes à 2000. fl. par Mois, & pour les vivres. - 84000
Trois Hoekkers & 3. Galiottes à 1000. fl. par Mois. - - 42000
Deux Navires d'Hôpital. ----------- 60000
Pour les Cafualitez , comme Fifcal , Secrétaire, Predicant,
& autres f ervans. 50000
Argent courant pour 6000.IIom.pour 75.jours,à io.fols par jour.225000.
En tout 3132 740
L'on
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIlT. g
21
L'on eut même des Conférences là-deffus avec des Députez de l'Amirau- Affaires
té. Leur contenu efl dans la Pièce qu'on met ici. DES p*o-
VINTCE8-
UiNIES.
Extraits du Régit re des Rcfolutions des LL. HH. PP. les
Seigneurs Etats Généraux des Provinces - Unies , tou-
chant r Armement Maritime.
S Un ce qui a été raporté aujourd'hui des Sieurs van Capelle & autres Ref0iu.
Députez de Leurs Hautes Puiflances pour les Affaires maritimes aiant tion fur
été en Conférence avec les Commiflaires icipréfens des Collèges des Amirau- l'Arme-
tez,il a été, après une Délibération préalable, trouvé bon & refolu de con- mentM*=
gedier par la préfente lefdits Commiflaires pour qu'ils puiffent partir, en leur ntune'
recommendant ferieufement d'avoir foin chacun auprès de leurs dits Col-
lèges de l'Amirauté , que l'Armement projette foit continué avec toute la di-
ligence imaginable ; & de faire en forte , qu'à la première occafion qu'ils re-
viendront ici fur la convocation de Leurs Hautes PuiiTances , ils foient en
état & inltruits pour conférer fur le ménage qui pourra fe pratiquer par
les Collèges des Amirautez.
Autre Extrait.
SUr ce qui a été propofé des Sieurs van Capelle & autres Députez de Autre,
Leurs Hautes Puiflances pour les Affaires maritimes aïant été en Confé-
rence avec les Commiflaires des Amirautez ici préfens , il a été , après une
préalable Délibération , trouvé bon & entendu d'autorher le Receveur Ge-
neral de l'augmentation des Droits de Gabelle (Loft- & Fey-Geld.) Mari-
nus Groeninx, comme il efl autorifé par la préfente, de mettre ordre pour
faciliter la Negotiation des fommes , qu'il eit chargé & autorifé de faire par
les Refolutions précédentes de Leurs Hautes Puiflances , pour avancer le
projette armement extraordinaire , & de prendre les mefures neceffaires ,
pour que les intérêts des deniers à négocier foient payez aux Teneurs des
Obligations , non feulement à Rotterdam où il tient fon Comptoir, mais
aufli à Amllerdam à ceux qui pourraient l'y requérir par le Receveur par-
ticulier de l'augmentation defdits Droits , qui employera pour cet effet un
Commis ou Clerc fur une penflon raifonnable , comme auffi ici à la Haie par
quelqu'un , que le fufdit Receveur General Groeninx établira à ce fujet fur
le même pied.
Il fut auflî refolu d'écrire aux Provinces refpeclives , pour avoir Ià-deflûs
leur aprobation. Lors que cette matière étoit fur le tapis , il y eut de pre-
mier abord des Difputes. Les Députez de la Gueldre s'y opoferent. La
raifon de leur opofition venoit de ce que leur Province n'étoit pas, pour
ainfi dire , concernée dans le Commerce maritime. Elle paroifîoit ne pas
fe foncier de ce qui pouvoit arriver à ce fujet , &c. Par -là ces Députez
C 3 ne
22 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AîFAiBE? ne voulurent pas que cette Dépenfe fut mife fur l'Etat de Guerre qui ob-
des Pao- lige toutes les Provinces , ainfi que les Députez de la Hollande le deman-
vincf.s- doient. Ces derniers allèrent jufques à dire que leur Province en feroit les
Unies* avances. 11 y eut des gens qui s'imaginoient que cet Armement pouvoit
encore avoir quelque altération. C'étoit en cas que le Roi de Suéde pût
être porté d'entrer en Négociation, tant pour afièurer la liberté du Commer-
ce dans la Mer Baltique , que pour l'indemnifation des prifes faites par les
Armateurs Suédois fur les Sujets des Etats. En cette vùë, il fut refolu
qu'on pouvoit envoier en Suéde le Minillre des Etats qui étoit à Copen-
hague , en qualité d'Envoïé Extraordinaire. Ce devoit être à condition
que préalablement le Refident Rumpf, auquel la Cour de Suéde étoit tou-
jours interdite , fut rehabilité. On écrivit même à celui qui étoit en Dan-
nemark de fe tenir prêt de palier enScanie en recevant des ordres ultérieurs.
On commit même le Prefident de Semaine de faire part de cette nomination
à l'Ambalîadeur de France : celui-ci repondit au Prefident , qu'il remercioit les
Etats de leur communication. Il fe chargea d'en faire part au Roi fon Maître,
& au Prince Régent, aum* bien qu'au Comte de la Mark en Suéde. Il ajou-
ta , que par raport à la readmiflion du Refident Rumpf, il avoit reçu des
Lettres dudit Comte de la Mark. Elles portoient , que le Roi de Suéde lui
avoit dit , que dès que le Miniflre , que les Etats envoieroient à Sa Maje-
ité, pour lui faire un Compliment de Civilité, fur ce qui étoit arrivé au
Baron Gortz , feroit arrivé en Suéde, d'abord le Refident Rumpf feroit
readmis. Le dit Marquis de Chateauneuf conclut, qu'il vouloit bien dé-
clarer dans une Conférence , que le Comte de la Mark lui avoit écrit de la
forte. Ce qui avoit beaucoup influé fur les Etats de fe refoudre à envoier
un Miniflre à Stockholme venoit des infmuations continuelles du Secrétai-
re Preis. 11 aiTeuroit, que fi l'on entretenoit la Négociation, on trouveroit
les difpofitions les plus favorables dans le Roi fon Maître. Avec tout ce-
la , l'on ne tarda pas à apercevoir de l'altération. L'AmbafTadeur Chateau-
neuf, & le Secrétaire de Suéde, fafoient entendre qu'il feroit difficile d'ob-
tenir du Roi de Suéde la readmiffion du Refident de l'Etat fur la fimple
nomination de l'Envoie des Etats qui étoit en Dannemark, pour aller en
Suéde. C'étoit parceque ce Roi-là voudra préalablement que cet Envoie
nommé pour aller auprès de lui, y foit arrivé , & quil lui ait fait quelque
Compliment de Civilité fur l'Arrêt du Baron Gortz. C'étoit pourtant une
chofe,' à laquelle il feroit difficile de porter les Etats. Ce mot de Compli-
ment de Civilité paroiflbit trop vague. On craignoit que l'on voudroit le
prendre fur le pied , que l'AmbafTadcur de France avoit quelque tems au-
paravant propolë par le mot d'Excufe. C'étoit aufli de la forte que le Se-
crétaire de Suéde s'enonçoit. Cela faifoit croire que l'Ambaffadeur &
le Secrétaire étoient de connivence. Ce qui augmentoit cette penfée étoit
qu'auparavant l'Envoi d'un Miniflre devoit être pour régler les differens
fur le Commerce , & fur les prifes faites , & depuis Ton fe reflraignoit à
devoir fimplement foire un Compliment de Civilité. Cet Ambafladeur fit
entendre quil s'étoit expliqué d'une manière plus forte que le raport n'en
avoit
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 23
avoit été fait aux Etats. Car , dans celui-ci il y avoit que dès que le Mi- Affaires
niilre que les Etats envcieroient vers le Roi de Suéde pour lui faire un des Pro-
Compliment de Civilité fur ce qui s'étoit palfé relativement au Baron vinces-
Gortz, feroit arrivé en Suéde, le Refident des Etats à Stokholme feroit .
readmis. Cependant, l'Ambaifadeur difoit qu'il avoit aux mots feroit ar-
rivé en Suéde , ajouté, £5? fait le Compliment de Civilité, &c. C'efl à quoi
il paroiffoit que les Etats ne pourroient jamais aquiefcer. La raifon étoit par-
ceque la Province de Hollande, qui feule aquiefça à l'Arrêt du Baron Gortz,
ne vouloit pas que par-là elle eut offenfé le Roi de Suéde. D'autant qu'a-
lors ce Baron-la ne pouvoit , fuivant tous les ufages entre les Cours poli-
cées, être conté Minillre autorifé par Sa Majeilé Suedoife. Quelques-uns
tachoient de faire furmonter cette ponétille , s'il y avoit eu quelque efpe-
rance fondée de terminer aimablement avec la Suéde les differens fur la li-
berté du Commerce, &de la Navigation, & de l'indemnifation des prifes
faites parles Armateurs. Mais ,les difficultez parurent prendre un train de
devenir plus grandes. Le Secrétaire de Suéde, qui paroiffoit foutenu par
l'Ambafladeur de France , fit une nouvelle infinuation. Elle confifloit en ce
que le Roi Son Maitre n'admettroit jamais un Minillre des Etats pour faire
le Compliment de Civilité , fur le pied & le caractère qu'ils lui deflinoient.
Le Roi fon Maître vouloit qu'il eut le Caractère d'Ambalfadeur , & non pas
d'Envoié Extraordinaire. Les gens trouvoient que c étoit exiger une cho-
fe que les Etats ne feroient jamais difpofez à faire. Il efl vrai que le Secré-
taire de Suéde, y voiant peu d'aparence , donnoit un autre tour à l'Affaire. Il
difoit, qu'on pouvoit donner des Lettres de Créance au Minillre de l'Etat ,
comme AmbaiTadeur , & cependant il iroit en Suéde comme particulier.
Ce feroit fur le même pied que le Comte de la Mark y étoit de la part de
la France. Car, il y étoit comme particulier, & en même tems comme
AmbaiTadeur, lors qu'il le trouvoit à propos, jouant de la forte differens
Rolles. L'on ne prêtoit point l'oreille à ces iniinuations. La raifon étoit
qu'on pouvoit prévoir, ou même craindre , qu'en ce cas le Roi de Suéde vou-
drait exiger de ce Minillre qu'il produiilt fes Lettres de Créance comme
AmbaiTadeur , afin d'obtenir le Compliment de Civilité qu'il exigeroit fins
doute avec le terme d'Excufe , d'une manière éclatante. Même, fi l'AmbafTa-
deur ne fe feroit fervi de ce mot d'Excufe , le Roi pouvoit dire qu'il re-
cevoit les Excufes des Etats, &c. Cette Affaire-là étoit fur ce pied, lorf-
que l'Ecrivain de ces Mémoires partit de Hollande, & ne s'efl depuis point
informé delà fuite. Elle pourra être raportée par des gens plus éclairez y
qui étoient refiez à la Haie.
Cette fituation d'affaire mettoitles trafiquants , qui avoient fouffert, dans
une méfiance invincible de pouvoir rien obtenir par la Négociation :au(fi ne
refpiroient-ils que le Projet de l'Armement Maritime. La Province de Hol-
lande innfloit ta-deffus. Il y avoit cependant trois Villes, favoir la Brille,
Gorkum, & Schidam, qui fe tenoient enfemble , qui n'y panchoient pas.
Leur reifort fecret pour cela étoit à caufe que la Ville d'Amflerdam infi-
floit fortement là-defîus. Elle propofoit même que cet Armement fût
corn-
24 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Apaises compofé de quelques plus gros Navires , qu'on ne l'avoit d'abord propo-
dt.s Pro- fé. Le fonds devoit être, amfi qu'il eft touché plus haut, fur une augmen-
vinces- tation de l'impôt fur les tonneaux. Cela s'entendoit fur tout ce qui étant
Umes, Jiquide entroit dans dans les Etats dans des tonneaux. L'Agleterre auroit
voulu qu'on défendit entièrement le Commerce avec la Suéde. La penfée
des Etats en gênerai étoit de pouvoir porter les Puiffances Maritimes qui
étoient en Guerre dans le Nord àaquiefcer à la liberté du Commerce. Le Prince
Kourakin foutenoit, que c'étoit l'intérêt de ces Puiflances-là, que ce Com-
merce fut rétabli dans fa première liberté. Dans l'aprehenfion de ne pas en
venir à bout, l'on continua le deffein de l'Armement maritime. La Province
d'Utrecht prit là-deffus une Refolution alTez curieufe pour être inférée ici.
Extrait du Regiftre des Refolutions de Leurs Nobles Puif-
fances les Etats du Pais d" Utrecht , touchant P sir me-
ntent Naval ; du Jeudi 10. Mars 171 8.
Refolu- T Es Etats du Païs d'Utrecht, après une meure Délibération, aiant exa-
dMJtrecht -V-1 mm^ ^a Pétition du Confeil d'Etat du 28- Janvier 1718, avec la Rcfo-
fur l'Ar- lution des Seigneurs Etats de Hollande & de Wefl-Fiïfe du 21. Janvier
mement touchant le Confentement à un Armement extraordinaire de 30. VaifTeaux
Naval. de guerre, qui feroient emploiez pour la liberté de la Navigation & du
Commerce de ce Païs dans la Mer Baltique, montant à la fomme de 3. mil-
lions, 132000, 74.0. florins, la moitié d'icelle à être fournie par le Rece-
veur du Hauffèment des Droits des cargaifons & tonnages des Navires,
feulement en forme de prêt, & qu'elle luiferoit auffi-tôt poffible rellituée
avec les intérêts , de la manière qu'il fera ultérieurement déterminé par
Leurs Hautes Puiffances , ont , après une délibération & foigneux examen
des affaires , trouvé bon , que les Sieurs Députez de cette Province à la
Généralité feront chargez 8c autorifés de déclarer, que les Seigneurs leurs
Principaux peuvent bien fouffrir & pouvoir regarder , que les Amirautez
vaquent au demandé Armement jufques à 20. VaiiTeaux de guerre & de
leur dépendance, & pas plus; & que Leurs Nobles Puiffances confentent
de la forte aux deux tiers de la dite Pétition, fans charger les Provinces :
étant aufli du fentiment avec les autres Alliez, que Leurs Hautes Puiffances
doivent emploier & mettre en ufage leurs meilleurs offices & les plus forts
devoirs pour obtenir d'une manière la plus convenable le libre Commerce
ôc Navigation dans la Mer Baltique, des Rois de Suéde & deDannemark,
pour les fujets de l'Etat, auxquels il compete par le Droit de Nature, &
particulièrement en vertu des Traitez formels. Et qu'on prenne foin, qu'on
reitituë ou indemnife des Navires & effets pris aux Intereffez. A cette
fin, le plutôt poffible, il faudroit déterminer une expreffe Deputation ,pour
paiter ces amiables offices & devoirs envers lefdites 2 Couronnes, 6c de
témoigner par-là, à toute la Terre , la forte inclination de l'Etat pour la con-
fervation de la bonne intelligence ôc pour prévenir d'ultérieurs differens.
Et
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 25
Etcela pourpouvoir rendre plaufible & légitimer l'envoi d'une flotte de guer- Affaires
re pour la liberté du commerce des Sujets de l'Etat, & confequement d'obte- DES 1>ll°*
nir par-Là une deuë & fuffifante feureté pour la Navigation & le Commerce Unies!
dans la Mer Baltique. Que l'Inflruction pour celui qui commandera en — ■ — -.
chef cette Flotte foit dreflee & communiquée auparavant à Leurs Nobles
Puiffances , <k quelle foit tellement faite, que par-là les Etats , fans leur con-
noifTance, & contre leur penfée, ne foient engagés en aucune affaire, qui
puùTe jetter la Republique dans un fâcheux labirinte. D'ailleurs , que la
depenfe à faire pour l'Armement fe prenne du hautement du droit des car-
gaifons & tonnages , & d'en faire la Négociation fur ce fond , fans qu'ils
veuillent être tenus à aucun rembourfement de cette Négociation à faire
par un moien Extraordinaire, ainfi aufli que les Seigneurs Etats de laHoI-
lande & Weft-Frife ont bien voulu en conformité dire leur penfée dans la
Lettre inférée dans celle de Leurs Hautes PuifTances du 2. Mars 1718, &
portant que toute la fomme requife pour cet Armement fera trouvée fans
charger les finances des Provinces , & feulement à la charge des Sujets
trafiquais , & fuffifament le tout, ou du moins à peu près, à la charge de
la Province de Hollande & de Welt-Frife. Leurs Nobles PuifTances trou-
vent aufli à leur regret , que non-obftant tant de reprefentations , fpecia-
lement par la Lettre du 18. Octobre 1715. & 6. Mai 17 16. fur le ménage
des Amirautez, aufli bien que touchant la defenfe de groffes fraudes clan-
deitines desDroits par eau, il ne s'en: enfuivi peu ou point de remède. C'efl
pourquoi on doit y infiiter de nouveau avec tout le zèle polTible , & prier
Leurs Hautes PuifTances démettre fur le tapis tous les points neceifaires de
ménage, & de mettre les ordres requis , à fin que les grolfes & honteufes
fraudes foient prévenues avec effet, & qu'on mette promtement en exé-
cution l'amodiation des Droits par eau fuivant qu'il convient. Et Leurs
Nobles PuifTances étant entièrement perfuadées , que fi les Droits d'entrée
& de fortie font duement paiez , fans conniver aux fraudes , les Amirautez
feront fuffifament en état de faire de pareils Arméniens , fans même faire
d'extraordinaires Pétitions. Car, Leurs Nobles PuifTances doivent encore
dire , que cette Province efl du moins aufli peu en état que les autres Con-
federez de fuporter de pareilles extraordinaires charges, d'aider à fupléer
aux défauts des Amirautez , cette impuifiance étant caufée par la mortalité
du bétail , qui a duré depuis plufieurs années & qui dure encore , par les
grandes inondations, & autres defaftres. Il ell auffi trouvé bon, de charger
les Sieurs Députez de cette Province à la Généralité , & de les autorifer
de confentir à la diftribution de fuffifantes commiffions à tous les Capitai-
nes des Navires Marchands de la Republique, bien armez en guerre, de
reprendre les Navires des Sujets de l'Etat, pris par les Suédois , & même
d'attaquer & de prendre les Câpres Suédois, qui voudroient empêcher cette
reprife, en accordant quelques recompenfes , ainfl qu'il eft plus ample-
ment porté dans la Refolution de LL. HH. PP. du 4. OcTobre paffé.
Accordé avec ladite Refolution ,
Signé , P. Voet VAN WlNSSEN.
Itome XL D Re*
26 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affau.es
DES PKO-
VINCES-
Unies.
Refolution de LL. HH. PP. Jur la précédente.
Refolu-
tion des
E. G. fur
la précé-
dente.
Urq.uoi étant délibéré, il a été trouvé bon & entendu , que les Sei-
gneurs Etats de la-dite Province d'Utrecht feront priez par une Let-
tre de donner un Confentement complet audit Armement. Que les Sei-
gneurs Etats des Provinces , qui n'ont pas encore donné un tel confente-
ment feront auiïi priez de le donner fans plus délai, & de le faire produire.
Que néanmoins , dans l'attente de ces contentements , on écrira aux r effe-
ctifs Collèges de l'Amirauté d'envoier ici des Députez de leur corps , bien
inflruits , pour Lundi 21. du Mois courant de Mars, pour être ici le foir
auparavant, pour entrer ledit 21. au matin de bonne heure en travail pour
examiner & aider Leurs Hautes PuifTances par leurs confiderations & avis,
comment ledit armement, lors qu'il fera ultérieurement refolu par Leurs
1 Iautes PuifTances, pourra avec la plus grande promtitude être prêt avec fes
dépendances. Et les Sieurs Hazebroeck & autres Députez de Leurs Hau-
tes PuifTances , commis pour les Affaires Maritimes , font par celle-cy priez
& commis d'entrer ce jour-là en travail avec les Députez des Collèges des
Amirautez fur ce fujet,de prendre là-defTus leurs confiderations, & de faire
raport de tout ici à l'Affemblée.
Les Sieurs Députez de la Province de Gueldre ont déclaré de n'avoir
là-deflus aucune Inflruêtion.
I l y a à remarquer , que cette Province-là fut priée de donner fon
confentement à cet Armement fans reitriclion , ainfi qu'on voit par la Re-
folution mife au bas de celle qu'on avoit reçu d'Elle. Cette refîriction prin-
cipale étoit , qu'il fuffifoit que l'Armement fut de 20. Vaiffeaux. Ils dé-
voient être aifez gros. Même on pouroit y mettre de gros Navires Mar-
chands armez en Guerre, auxquels on donneroit des CommiiTions qu'on
appelle de retorfion. Il y avoit bien des gens, fur-tout des Miniftres Etran-
gers, qui ne pouvoient prévoir que cet Armement eut aucune influence
pour porter la Suéde à aquiefeer à l'indemnifation, ni à la liberté du Com-
merce, & de la Navigation. Ils difoient , que cette Couronne-là retien-
droit fes VaifTeaux de Guerre & fes Armateurs dans fes Ports. Lors que
l'Efcadre des Etats feroit revenue de la Mer Baltique , elle feroit donner la
chaffe comme auparavant aux Navires Marchands de l'Etat. Nonobflant
cela , le delTein de l'Armement étoit pouffé fins délai. On avoit trouvé ,
que l'argent qu'on y avoit deftiné n'étoit pas fuffiilmt , & qu'il faloit qu'il
y eut une augmentation. On prit là-deffus le 14. de Mars une Refolution ,
que voici.
Ex-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 27
DES PRO«
"Extrait du Regi/ïre de Leurs Hautes Puiffances fur VAr- yataû
mement Naval\ du Lundi 14.. Mars 1718. Unie3\
SUr la Propofition des Sieurs Députez de la Province de Hollande & de Refolu»
Weft-Friie que les 400000. florins, que le Receveur General du- re- t>°nfur
hautement des cargaifons & tonnages de Mer, étoit, par la refo'ution de J^T^
Leurs Hausea Puiflances du 28. du Mois dernier, chargé & autorifé, de vai,
dillnbuer aux Collèges de l'Amirauté , n'étant pas en caiffe , de négocier,
Four préparer par proviiion les Navires de Guerre , qui doivent fervir à
Armement projette , lors qu'il fera ulteriemment refolu , pour parvenir
audit but, n étant pas fuffifans, mais une plus grotte fomme étant necef- *
faire: a, Tes une précédente Délibération , il a été trouvé bon & arrêté, que
ledit Receveur Geneial fera chargé & autorifé, ainfl qu'il fera par celle-
cy autorifé, de paier au de-li des 400000. florins portez dans la Refolu-
tion du 28. du Mois dernier, & fi 1 Argent n'efl pas enCaiffe , de négocier
encore 600000. florins , le tout fur le meme pied qu'il efl arrêté par ladite
Refoiution. Et de paier ladite Somme au Receveur General de chaque
Collège de l'Amirauté , qui doivent fournir leur contingent dans ledit Ar-
mement, fur la quittance defdits Receveurs Généraux; lequel paiement:
étant fait , on lui en tiendra conte , & qu'on en donnera connoiffance aux
refpectifs Collèges de lAmirauté, & qu'on leur écrira de mettre avec la
plus promte expédition en état iefdits Navires requis pour cet Arme-
ment: & que Leurs Hautes Puiffances attendent fans faute de leur zèle
pour le fervice de l'Etat , qu'ils y aportent tous leurs foins , & de mander à
Leurs Hautes Puiffances ce qu'ils auront fait fur cela.
Les Sieurs Députez de la Gueldre ont déclaré de n'avoir encore là-
deffus aucune Inftruction.
Les Sieurs Députez de la Province de Zelande ont déclaré de fe charger
de cette propofition , ont contredit la Refoiution , & fe font refervez de
faire là-deilùs telles Remarques que les Seigneurs Etats leurs Principaux
trouveront bon de faire.
Les Sieurs Députez de la Province d'Utrecht & de Frife ont confenti
à la fufdite conclufion en conformité de la Refoiution des Etats leurs Prin-
cipaux.
Autre Extrait.
BEceu une Lettre du Collège de l'Amirauté de Weft-Frife & du Quar-
tier du Nord, t crite à Enkhuifen le 8- de ce Mois, en reponfe àla Kefo-
îution de Lew> Hautes Puiffances. & à leur Lettre du 28. Février précèdent
touchant la Pétition du Conreii d Etat pour 1 Armement de 30. Navires
de Guerre & leur Dépendance: que par ledit Collège de lAmirauté pour
D 2 fon
Affaires
ces Pro-
vinces-
Unies.
Refolu-
tion tou-
chant
l'Arme-
ment Ma-
ritime.
28 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
fon contingent dans ledit Armement on avoit deftiné 5. Vaifleaux de Guer-
re , favoir un de 72, un de 64, & 3. chacun de 50 Pièces de Canon; que par
leur ordre il étoit arrêté que lefdits Navires fuflent au plutôt prêts , afin
que ledit Armement devant fe faire , ils y puifîènt être emploiez.
On enpritenfuite une autre pour trouver ces fonds d'augmentation par
un emprunt. Elle contient ce qui fuit.
Extrait du Regijlre des Refolutions de Leurs Hautes
Puijfances les Seigneurs Etats Généraux des Provin-
ces-Unies des P aïs-Bas ^ touchant r Armement Mari-
time; du Lundi 28. Mars 171 8.
Ur ce qui a été propofé des Sieurs Députez de la Province de Hol-
lande & de Weft-Frife , il a été après une préalable délibération trouvé
bon & refolu, de charger & d'autorifer le Receveur General de l'augmen-
tation des Droits de Gabelle (Laft tk Feyl-Geld) Marinus Groeninx, comme
il eft chargé &. autorifé par la préfente, de payer outre les fommes de 400000.
& de 600000. flor. pour lefquelles fommes il négociera les deniers qu'il
n'a pas en Caille , en confequence de la Refolution de Leurs Hautes Puif-
fances du 28. du pafle & du 14. du courant, encore aux mêmes Collèges
une fomme de 600000. florins & de négocier pareillement les deniers qui
ne fe trouvent pas encanTe, faifant en tout la fomme de 1600000. florins
fur le pied établi dans la dite Refolution du 28. du pafle; avec ce feul chan-
gement, que , pour en faciliter la Négociation , & pour avoir d'autant plus
promptement les deniers, les Obligations des Sommes déjà négociées, ou
qui le feront encore , feront exemptes de toutes les Charges pour fix ans ,
au lieu de 4. réglez par la Refolution précédente. Que lui Receveur Ge-
neral payera lefdites Sommes aux Receveurs Généraux de chacun des Col-
lèges des Amirautez, qui promettent d'acquiter leur Contingent dans le dit
armement, fur laquitance des fufdits Receveurs Généraux des Collèges des
Amirautez, lequel paiement étant fait ainii, lui fera validé en compte. Ce
dont il donne connoiflance aux Collèges des Amirautez, & leur écrit, de
mettre en état avec toute la diligence pofïible, les Vaifleaux requis pour
le dit armement, de faire lever du Monde y neceflaire fuivant la Refolution
précédente du 22. du courant > & d'emploier par raport à l'un & a l'au-
tre tout le zèle imaginable, & de continuer à faire travailler nuit & jour,
afin que ces Vaifleaux foient prêts & achevez le plutôt le mieux.
Les Seigneurs Députez de Gueldre ont déclaré de n'avoir point d'In-
ftruclion.
Les Seigneurs Députez des Provinces d'Utrecht, & de Frife , ont confen-
ti à la précédente Refolution fous les claufes contenues dans \os confente-
mens des Seigneurs Etats leurs Principaux audit Armement,
Extrait
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. tg
Affaires
Extrait du Regitre des Refolutions àe LL. HH. PP. les des iw
Seigneurs Etats Généraux des Provinces-Unies des X2£
Pats- Bas , touchant une Lotterie\ du Mardis le 29. —
Mars 171 8.
chant une
Loîterie.
LE s Seigneurs van Capelle & autres Députez de LL. HH. PP. pour Refolu-
les Affaires des Finances ont en confequence , & pour fatisfaire à xi°n tou
leur Refolution Commiflbriale du 17. du courant, examiné la Requête d'A-
lexander van Champolion , qui prétend pouvoir, par forme de Loterie,
procurer à l'Etat une fomrae de cent millions dans vingt ans de tems, à
condition qu'on lui fit avoir une recompenfe de deux pr. ~ & pour iès fraix
12000. mille florins par an , demandant fur ce fùjet l'Octroi de LL. HH.
PP. : & aiant là-deflus entendu le dit Suppliant ils ont raporté à l'Aiïemblée ,
qu'eux Seigneurs Députez feroient d'avis, qu'il falût expédier en faveur du
Suppliant un Acte , pour pouvoir établir lui feul & à l'exclulion de tous les
autres dans les Provinces refpeclives ou dans le Diflricl de la Généralité,
toutes les Loteries & de les mettre en œuvre pour le tems de 20. ans,
que l'avantage en refultant fera au profit du Païs , duquel avantage le
Suppliant aura 2. pr. £ & outre cela 12000. mille florins par an pour fes
fraix ; que cependant le dit Octroi feroit bien montré au Suppliant , mais
pas remis , avant qu'il eût donné à LL. HH. PP. plus d'ouverture de fon
invention, & qu'elle fût approuvée, & n'étant point aprouvée, que l'Oc-
troi feroit alors retenu. Surquoi aiant été délibéré , les Seigneurs Dépu-
tez des Provinces refpectives ont pris Copie de la Proportion fufmention-
née pour être communiquée plus amplement aux Seigneurs leurs Prin-
cipaux.
Extrait des Re/olutions de Leurs Hautes Pu/ffances , tou-
chant r Ambaffadeur de Venize Ruzzini > du Mardis te
29. Mars 171 8.
R
Eçu une Lettre du Doge de Venife en date du 3. du courant, le quel Refoiu-
donne connoiffance à LL. HH. PP. que la Republique avoit nommé "J^^Jl
le noble Charles Ruzzini, Chevalier & Procurateur, fon Ambafladeur Pie- Rua"zil^
nipotentiaire aux Conférences de Paix avec la Porte Ottomanne , priant
LL. HH. PP. de vouloir inflruire leurs Miniilres , qui conjointement
avec ceux de Sa Majefté Brit. feront les fonctions de Médiateurs auxdites
Conférences , pour apuyer de leur mieux les intérêts de la Republique.
Surquoi aiant été délibéré , il a été trouvé bon , & entendu , qu'on fera
Reponfe en des termes civils à ladite Lettre, & qu'on remerciera la Re-
publique de cette communication, en l'aiTurant, que LL. HH. PP. tâche-
ront d'avancer au pofïible les intérêts autant qu'on peut attendre en quel-
D 1 que
Affaires
bes Pro-
vinces-
Uni H.S.
30 MEMOIRES, NEGOTIATÏONS, TRAITEZ, ET
que manière des bons Médiateurs ; que cette Reponfe fera envoyée avec
la Copie au Sr. Hamél Bruyninx, Envoyé de LL. PIPI. PP. à la Cour
Imneriale, pour lui fervir d'information, & pour remettre l'Original au
Sr. Ambaffadeur Primari, de la part de qui il a reçu la dite Lettre.
On doit remarquer , que le jour fuivant on prit 2. Refolutions pour d'au-»
très Affaires , qu'on trouvera audeflbus de celle dudit 28. Mars.
Ne pouvant pa^ , par le départ de lEcrivam de ces Mémoires , inftruire de
la Suéde , l'on parlera d'autre* Affaires qui furent fur le tapis pendant les
trois premiers mois de cette Année 17 1 8-
La plus importante étoit celle de l'exécution du Traité de la Barrière.
L'Envoie Impérial le Baron de Heems fut au commencement de cette an-
née avec les Députez des Etats. Les Miniilres étrangers s'imag nerent
d'abord, que c'étoit par raport à cette execution-là. Cependant, les Etats
n'avoient pas trouve a propos de lui en parler d'abord. La Conférence
ne roula que relativement à une Négociation d'argent. Elle avoit été faite
en 1703. par la Cour Impériale. Elle avoit été fous la garantie des Etats,
& fur l'Hipoteque du Cuivre de Hongrie. Il étoit du aux Prêteurs les
intérêts de 8. ans. Pour y fatisfaire , la Cour Impériale venoit d envoier
des remifes , & la Conférence ne roula que fur la manière de fare ce paie-
ment, & fur le Règlement de le faiie à l'avenir. Il y avoit prefque une
Année, que cela étoit fur le tapis. Bien des Miniltres crurent que la Cour
Impériale ne faifoit cet effort pour ce paiement, dans un tems où elle etoit
dans des circonftances onereufes de la Guerre contre les Ottomans, & d'u-
ne prochaine en Italie , qu'en vue de s'aquerir du crédit, pour pouvoir fai-
re avec fuccès un nouvel emprunt. Cela pouvoit être en vue de faire
quelques avances, en cas de befoin, d'une Efcadre particulière de Navires
de Guerre pour la Méditerranée, ou pour engager les Etats a la garantie
d'un emprunt fur l'Hipoteque du même Cuivre. En ce cas, c'étoit pour
inriuè'r fur les Marchands Prêteurs, qui voudroient faire les avances necefc
faires, pour leur feureté. Ce qui pouvoit donner du poids à ce dernier
point étoit que ledit Baron de Heems venoit de recevoir dAmlterdam un
Compte de quelques particuliers, qui lui offroient d armer vingt Vaiffeaux
de Guerre. La fomme en montoit à trois million"- & trois cent & quel-
que mille florins. Ce Baron ne leur avoit pas d abord repondu , parce
qu'il n'avoit pas des ordres précis de fa Cour pour une telle Affaire. A la
fin de cette Conférence, on lui parla fur celle de l'exécution du Traité de
la Barrière. La raifon étoit q-.;e le Reiident des Etat.^ Pefïers leur avoit
mande ce que le Marquis de Prié lui avoit intmué. Ils le prièrent de vou-
loir féconder auprès de fa Cour une Refolution qu'ils vendent de prendre
fur cela dont on lui donna Copie , & qu'on met ici.
Est"
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII.
3i
Affaires
Extrait du Rcgiflre des Réfolutions de LL. HH. PP. DES Pro
touchant la Barrière \ du Jeudi 6. Janvier 1718.
v inc es-
Un if. s.
OU 1 le Raport des Seigneurs de Wynbergen , & autres Députez de Refoiu-
LL. HH. PP. pour les Affaires de la Barrière , aiant en confequen- tion tou-
ce & pour fatisfaire à leurs Réfolutions Commiflbriales de diverfes dates , chant la
examiné, conjointement avec les Seigneurs Députez du Confeil d'Etat , arnere'
tes Lettres du Refident Pefters venues depuis quelque tems, contenues
dans les Notules du 10, 15, 18, 22, 27 & 31. du mois dernier & du 5.
courant regardant toutes ce qui avoit été par lui dit & traité avec le Sr.
Marquis de Prié fur l'exécution du Traité de la Barrière, particulièrement
à l'égard du fubfide de 500000. Rixdalers par an, promis à l'Etat par le-
dit Traité.
Surquoi aiant été délibéré, il a été trouvé bon & arrêté qu'on recriroit
au Refident Pefters , que puis que le Sieur Marquis de Prié a en toutes les
occafions témoigné audit Refident, que les revenus des Places & Chate-
îenies cédées dans la Flandre Occidentale , & des contoirs & bureaux des
Droits d'entrée & de fortie dans les Païs-Bas Autrichiens feront telle-
ment améliorez par la réduction des efpeces , & par l'Admodiation des
Droits d'entrée & de fortie, que l'Etat ne doit faire aucune difficulté
d'accepter une affignation de 750000. florins par an, furies revenus def-
dites Places & Chatelenies cédées , & une de 500000. florins fur les
Droits d'entrée & de fortie , qu'on dit avoir rendu , félon le conte annuel ,
dans les années 1714, 1715, & 1716. 1740000. florins, & qui par l'a-
modiation rendront 1900000. florins, & par deffus encore une afîignation
de 50000. florins. Que cependant ledit Refident reprefentera au Sieur
Marquis de Prié que LL. HH. PP. ne peuvent que trouver étrange , qu'il
y a à prefent environ une année qu'on a parlé de la réduction des efpe-
ces & de l'Admodiation des Droits d'entrée & de fortie , comme d'un
moien prêt, & indubitable , pour améliorer confiderablement les revenus
des Païs-Bas Autrichiens; & que cependant, non feulement le Sr. Marquis
de Prié a fait difficulté de promettre & de fixer dans la Convention fur
l'exécution du Traité de la Barrière, la réduction des éfpeces, & l'Admo-
diation des Droits d'entrée & de fortie; mais, ce qui eil encore plus éton-
nant , eft qu'aucune defdites Affaires , quoi qu'on en ait parlé , n'a été mile
entrain, quoi que d'un côté la Confhtution des Finances dans les Païs-
Bas Autrichiens foit telle, que, fans relation au Traité de la Barrière ,elle
requift indifpenfablement , qu'on ne trainât pas le long d'une année de
mettre en ufàge les Affaires qui fervent à redreffer , & à augmenter les Fi-
nances: &, quoi que d'un autre côté le Sieur Marquis de Prié ne piiifle
pas ignorer, que cela contribueroit fort à ce que lefdites proportions tou-
chant rafîignation du Subfide trouvent de l'ingrès auprès de LL. HH.
PP. , fi la réduction des éfpeces & l'Admodiation des Droits d'entrée &
de fortie étoient mifes en Execution, & qu'il vint à paroitre qu'Elles fer-
vent
32 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Awaises vent fort à l'augmentation des revenus , ainfl qu'en toutes les Occaflons
des Pro- on l'avance, & que ledit Refident demandera fur ce fondement, & fur
vinces- ces raifons ; i. Que fans un plus long délai, ces deux moiens foient mis
rsUS* en train & arrêtez, 2. Attendu félon qu'on l'avance les Droits d'entrée ,
& de fortie rendront par l'Admodiation 1900000. florins, que parconfe-
quent on puiffe là-deffus afligner , 1. Une fomme de 500000. florins en
diminution du Subfide annuel de 1200000., & 2. encore une fomme de
50000. florins de fuplement, par defïus les autres charges fpecifiées dans
les deux états envoiez par ledit Refident par fa Lettre du 16. du mois der-
nier, & arrivée le 1%. mivant, furquoi il elt fondé que lefdits Droits doi-
vent avoir rendu en 1714, I7i5,& 1716, par le conte, 1740000. florins
par an} & le Sr. Marquis de Prié, pour preuve de cela, a offert audit Re-
ndent de lui donner une infpection de refpectifs contes , telle que ledit Re-
fident la demandera, auffi-bien à l'égard des charges fixes, qui y font dek
fus; que cependant ledit Refident vifitera fi exactement, & fi vîtement
qu'il fera pofîible, lefdit contes, & confequement avertira combien les
refpectifs bureaux des Droits d'entrée & de fortie ont rendu net dans cha-
cune defdites 3. années ; ce qui efl necefTaire, fur ce qu'on avance, de
leur raport de 1740000. florins , qui paroit peu uniforme aux états envoiez
cidevant par ledit Refident.
Et 3. que non feulement il vifitera les contes fur les charges portées dans
lefdits 2. états j mais qu'il doit par deffus remarquer fur lefdits états. 1.
Que les intérêts , qui doivent être annuellement paiez hors des revenus du
Fort Ste. Marie fur l'Efcaut, ne vont pas à 262008.; mais à 327000,256. fi.
& 2. fols , favoir tandis que Sa Majefté Impériale n'aura pas fait , fuivant
le 22. Article du [Traité de laBarriere que les Etats des refpectives Provin-
ces des Païs-Bas Autrichiens pafTent leurs Obligations pour 1400000. flo-
rins empruntez en 1698. & pour 4. ans d'intérêts , montant à 224000.
par où le Capital a haufîe fuivant l'obligation , & tandis qu'il n'aporte pas
annuellement 200000. florins pour les Intérêts, & pour l'aquit.
2. Que l'entier revenu du Fort de Ste. Marie , autant qu'il pourroit excéder
le cours annuel des intérêts , étant fpecialement affecté pour aquitter les
Capitaux négociez , doit être couché dans l'état des Charges , & non pas
feulement le cours des intérêts , qui doivent être paiez.
3. Qu'on n'a pas aquitté 660000,312. florins ,& dix fols fur le Mil-
lion , 400000,625. florins négociez en 17 10. fur les Bureaux des Droits
d'entrée & de fortie fur Bruges & Oftende,& non pas 592000,187. n\, &
dix fols , dont les intérêts à 5. pour cent doivent porter fur l'état des char-
ges 33000,27. & 10. , & non pas 29000,609. 7, 6.; & que d'ailleurs il
demande information fur les points fuivants. 1. Pourquoi un Article de
14000,783. florins efl porté pour aquitter les Capitaux fur les revenus an-
nuels du Fort Marie fur TEfcant, quoi que le furplus après les intérêts efl
affecté à l'aquit? 2. Combien de tems ou doit paier 112000. florins par
an , aux entrepreneurs du pain & du fourrage pour les Troupes Impéria-
les? Et finalement fur quel fondement une fomme de 235000. florins par
an
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIIL 33
an eft portée fous les charges, pour les depenfes de l'Admodiation , & non a»Ïik*!
pas plus ou moins ? des Pko-
VIXCF.S"
One tout ce que deffus contribuera particulièrement pour mettre LL.
-. ™r» _„ 12.-^ » :„ r_:_ r_ j_ • Unik's.
HH. PP. en état à pouvoir une fois fe déterminer avec repos avec con-
noiffance des Affaires, touchant le point du fubfide; mais auffi à la même
fin pour en venir à une conclufion des Affaires. Touchant les autres points
il n'eft pas moins neceffaire que le Sieur Marquis de Prié, après tant de
Difcours de bouche, donne une diftinéte Réponfe par écrit fur les Mémoi-
res prefentez , par ledit Refident , fuivant les Refolutions de LL. HH.
PP. du 17. Novembre & 6. Décembre paffez ; à quoi le Sr. Marquis de Prié
témoigne jufques à prefent peu d'inclination , quoi que cela ferviroit beau-
coup pour venir à une fin des Affaires , ainfi qu'il eft demandé reïterati-
vement par ledit Refident. C'eft pourquoi ledit Refident demandera par
un autre Mémoire une Reponfe par écrit fur tous les Points des 2. prece-
dens Mémoires, afin que LL. HH. PP. puiffent pofitivement favoir qu'el-
le elt la penfée de Sa Majefté Impériale touchant tous lefdits Points ,
& fur chacun d'iceux : une chofe que LL. HH. PP. peuvent demander
ave: d'autant plus deDroit , qu'Elles ont le Traité de la Barrière pour Elles ,
& que l'Empereur , & non pas Elles , y demande un changement , & laiffe
fous ce prétexte le Traité fans éxecution.
Et lefdits Députez fur la Barrière font requis , & commis par la prefente ,
d'en donner connoilfance au Sr. Baron de Hems Envoie Extraordinaire de
Sa Majeilé Impériale & Roiale , avec prière de vouloir féconder de fon
mieux le contenu de cette Refolution. Et la Copie en fera envoiée au Sr.
Hamel Bruyninx , Envoie Extraordinaire de LL. HH. PP. à la Cour Impé-
riale pour lui fervir à l'Occafion d'Inltruction.
Comme le Marquis de Prié promettoit fur le point principal delà feu-
reté du paiement du fubfide annuel de donner fatisfaction à l'Etat , mais
feulement verbalement , celui-ci n'en fut pas content. C'étoit d'au-
tant que l'Etat avoit toujours fait prefenter fes Refolutions , & mêmes des
Mémoires par Ecrit, au Marquis. Auffi pretendoit-il que le Marquis re-
pondit de même par écrit, & pour pouvoir faire fonds fur ce qu'il avan-
coit. C'étoit par ce qu'autrement il pourroit defavouèï ces avances ver-
bales. Ce qui influoit beaucoup à vouloir avoir des Reponfes par écrit
venoit de ce que le LordCadogan,aiant fait un tour à la Haie, avoit offert
à l'Etat la moitié des arrérages du fubfide annuel depuis la fignature du
Traité de la Barrière du 15. Novembre 1715. Cependant, il fe trouvoit
en ce tems-ci,que ce Marquis regimboit à ce point-la. Il avoit cependant
infinué au Refident Peftefs un Compte pour partie de ces fublides dont voi-
ci l'état.
T'orne XL £ Ex
34 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires
des Pro-
vinces-
Unies.
Revenus
«le la Bar-
siere.
Extrait de la Lettre du Réfident Pefîers , touchant
les Revenus de la Barrière ; du 17. de Janvier
1718.
ÏL dit que le Marquis de Prié lui a dit , que par raport au Subfide des
500000. Ecus , outre les 300000. Ecus fur le Places cédées; I. On
donnerait un fond* fupletoire de 20000. Florins pour les 300000. Ecus, &
que la réduction des éfpeces portera un feptieme de plus.
II. Qu'on ne fauroit donner en Admodiation les entrées des Places cé-
dées de la Flandre Occidentale que publiquement , & fi l'on demande
quelque remiflion, on en donnera part audit Réfident.
III. Qu'en cas de manque de paiement des termes, pour les 300000.
Ecus, LL. HH. PP. pourront exécuter le Receveur General qui en fera
reponfable pour les Receveurs Subalternes de fon diftriét. , comme aufïî
contre les revenus mêmes qui relieront hipotequés.
Que pour la feureté des autres 200000. Ecus, elle fera de même que
celle des 300000. Ecus : favoir,
I. Tous les Comptoirs libres des Droits d'entrée & de fortie.
II. Que par manque de paiement on pourra exécuter le Receveur gé-
rerai des Domaines de Sa Majefté, au cas qu'on en détourne la Caifle.
I I I. Qu'on donnera le Droit d'exécution contre les Comptoirs mêmes.
I V. Qu'en cas d'Admodiation , les Admodiateurs feront refponfables , &
exécutables en leur privé nom.
V. Par delfus on y hipoteque les libres Comptoirs de Bruges & de
ind.
V I. Que l'Admodiation fe fera d'abord que LL. HFî. PP. conviendront
de ces feuretez. Que pour la réduction des efpeces , il attendoit le con-
fentementde l'Empereur.
Et Vil. Que la Convention à faire fur l'exécution du Traité de laBarrie-
re fervira d'une irrévocable Initruction pour le Gouverneur gênerai du terns.
J'ai demandé en vain cette Reponfe par écrit ; difant que fi LL. HPL
PP. fe contentent de ces furetez , on n'avoit qu'à mettre le tout par écrit.
Sur le Bureau de Bruxelles. 22199 - - n
Bergerland. - - - - 22653 - - 4 - %
Tirlemont. - - - - 18439 - - n - 2
Turnhout. - - - 43065 - - 14 - 10
Chalcroi. ----- 6916--19-8
Courtrai. ----- 17896 - - 9-1
Ipres. ------ 58814 - - 12-9
Neuport. ----- 222 8f - - 7-9
Tournai. ----- .31679 — 6 - 11
Mons. ------ 64146 — 10 - 10
Ath, ------- 4071 - - 11 - 10
Éeàtts*
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIIJ.
Beaumont. - - - - 8787 - - 6 - 1
Limbourg. - - - - 75000 - -
Luxembourg. - - - .- 69200 - -
Ruremonde. ----- 26505 - - 6-10
Malines 7P54 - - 13 - 5
Total deBrabant 5^115- - 13 - $.
Affaires
DES Pro-
VINCES-
Unies.
Les Etats prirent quelque peu de jours après encore une Rcfolution,
dont le contenu peut mieux paroitre par la Refolution même , que fi l'on
en faifoit un fimple Extrait. C'eft pourquoi on la met ici en tout fon
entier.
Extrait du Regître de LL. HH. PP. les Seigneurs ET
tats Généraux des Provinces-Unies des P aïs-Bas^ ton-
chant la Barrière ; du Lundi 7. Février 171 8.
OUÏ leRaportdes Srs. Leflevenon: leSr. de Wynbergen, qui a afli-
fté Samedi dernier à la Conférence, étant retourné en Gueldres : & au-
tres Députez de LL. HH. PP. pour les Affaires de la Barrière , aiant en
eonfequence , & pour fatisfaire à leurs Refolutions Commiffioriales de diver-
fes dates , examiné conjointement avec quelques Committez du Confeil
d'Etat, plufieurs Lettres duRefidentPeflers, particulièrement celle du 17.
du pafle addreffée au Greffier Fagel , & qui concerne le payement du fub-
fide de 5-00000. Ryxdalers par an, dûs par le Gouvernement des Païs-Bas
en vertu du Traité de Barrière , & la fureté qu'il en doit donner pour le
payement, comme il a été plus amplement mentionné dans la dite Lettre.
Surquoi aïant été délibéré , il a été trouvé bon & arrêté, qu'il fera écrit en
réponfe au dit Refident, que LL. HH. PP. font furprues & fe plaignent ,
que le Marquis de Prié décline de donner une Réponfe par écrit fur le Mé-
moire prefenté par lui Refident au dit Marquis en eonfequence de la Re-
folution de LL. HH. PP. & fur les points contenus dans ce Mémoire ;
qu'Elles croyent être en droit d'iniiiter encore fur une Réponfe par écrit, vu
que la manière d'une négociation dans l'ordre veut, qu'on faiTe réponfe par
écrit fur une repréfentation faite de même, & que divers abus peuvent
naître d'une réponfe faite de bouche, qui peut quelquefois être mal-expiï-
mée ou mal-entenduë , ce qui n'efl pas fans exemple ; que pour cette raifon
lui Refident infiilera encore fur une RepGnfe par écrit à fes Mémoires déli-
vrez & à chaque article contenu : que non obftant cela il fera écrit au dit
Refident Peilers, qu'après avoir examiné l'état des Comptoirs non char-
gez, que l'on offre à LL. HH. PP. pour direcl compte du payement de
ffoooo. flor. ou 220000. Ryxdales, lequel monte à ^20215': '13: f: cet
état doit être jugé ne pas fuffire pour le payement offert: 1. parce que lef-
dits f 20215". 13: S • fQnt comptez fur de l'argent courant de Brabant, que
E 3 le
Refolu*
tion tou-
chant \i
Barrière»
»tf MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
ô
TINCES-
Unies
Affaire* ]c fubfide doit être calculé félon l'argent de Hollande, à quoi la dite fomme
des Pro- £tant re<Juite ne fait que 464477 : 14:
2. Que comme dans la calculation du provenu des Comptoirs , trois des
dernières années font mêlées enfemble, on ne fauroit faire fonds là-def-
fus , & que le revenu efl compté trop haut , vu qu'il paroît incontinent
par les états délivrez, que fur la plupart des Comptoirs & fur les principaux
le Revenu des 3 premières années a été plus grand que dans les fuivantes ,
& que le Revenu a diminué d'une année à l'autre; de forte qu'il n'elt pas
aparent, que les Comptoirs rendent autant qu'ils ont rendu l'un portant
1 autre les trois dernières années , & que pour cette raifon ils ne peuvent
guères être acceptez pour telles fommes qu'ils font fupputez.
3. Qu'il a été mis fur la Lille defdits Comptoirs ceux de Limbourg de
la femme de 77-000, & de Ruremonde de 26505: 6: 10: lefquels deux
Comptoirs étant propofez comme des non-chargez ne peuvent être accep-
tez pour tels, attendu que le Revenu de celui de Limbourg eft déjà enga-
gé comme une arriere-hypotheque pour une négociation faite par Sa Ma-
jelté Impériale & Catholique fur les revenus de Silefie, & qu'il eil outre
cela compris fous le Comptoir deLimbourg celui de Navaigne raportant en-
viron 40000. flor. par an ; & que les Revenus de ce Comptoir de Navai-
gne, de même que ceux du Comptoir de Ruremonde , font obligez pour de
certains Droits de 80000 & 20000 flor. par an dûs à la fucceiïîon de feu
S. M. Britannique Guillaume III. de glor. mem. Que comme ainfi les
fufdits états doivent être tellement diminuez, on ne pourra les accepter
pour plus qu'entre 3 5-0000 & 400000 florins, à condition, que, pour ce
qu'ils rendront moins que la fomme à déterminer, les Revenus des Comp-
toirs de Gant , de Bruges , & d'Oftende fo'ient obligez in fubjidium, &
qu'il foit auiîi afiigné fur ces Comptoirs ce que dans la iomme à déterminer
il y aura de moins que lefdits 200003 ou 220000 Ryxdales, &que le Re-
venu de ces Comptoirs foit engagé à cet effet, de même que pour ce que
le Revenu du Païs rétrocédé dans la Flandre Occidentale pourroit rendre
de moins que 300000 Ryxdales ou 75-0000 florins de Hollande; Et qu'il
eft neceffajre de régler en même tems , de quelle manière les Rentes arré-
ragées de la Négociation fur les Comptoirs deGand,de Bruges ,& d'Often-
de feront affectées. Que de plus, pour ce qui eft des intérêts du Capital
de 1624000 florins negotié en i6o8,puifque le Sr. Marquis de Prié ne voit
que peu ou point d'aparence pour faire pafTer aux Etats de la Province ref-
peétive leurs Obligations pour le Capital, & que les deux mois fixés à cet
effet par le 22. Article du Traité de Barrière font écoulez il y a long-tems ,
que pour cette raifon le Marquis de Prié ne peut ni n'eft en droit de faire
difficulté pour admettre les intérêts du Capital fur l'état des intérêts du
Comptoir de de Marie ; qu'il eft aufîi contre toute juftice & équité de
vouloir retenir l'intérêt de ce Capital , parcequ'on n'a pas encore liquidé
îà-deffus, laquelle injuitice a été démontrée par la Refolution de LL. IIH.
PP. du 17. Septembre 1717. & dans le Mémoire y mentionné, que lui
Refident Pefters , infiftant fur une Réponfe par écrit, fera neantmoins voir ,
pour
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. Q7
pour avancer l'affaire autant qu'il eit poflîble, au Sr. Marquis de Prié ks Amms
ci-devant mentionnez défauts dans le fonds propofé, & quil fera des in- des i\ko-
itances pour qu'il veuille donner h-delfus une déclaration fatisfaifunte , pour vincks-
fuppléer aux dits défauts , de même que par raport à l'intérêt dudit. Capital Unies-
de 1624000. florins.
Et comme le Sr. Marquis de Prié diffère à contenter LL. HH. PP. fur
divers autres Points du Traité de Barrière contenus dans le Mémoire en
conformité de la Refolution de LL. HH. PP. du 17. Septembre dernier,
puifqu'il faut ajufler premièrement avec le Commiffaire Gruber quelques
Points de liquidation des deniers négociez pour l'entretien des Troupes
de Sa Majefté Impériale- que pour cette raifon lui Relident infiltera, que
le dit Commiffaire Gruber foit envoie ici au plutôt à cet effet. Et les
Seigneurs Ham, & autres Députez de LL. HH. PP. pour les Affaires de
la Barrière, font priez & chargez par la prefente, de donner pareillement
connoilfance de ce qui efl ci-deffus au Sr. Baron de Heems,. Envoyé Ex-
traordinaire de Sa Majefté Impériale & Catholique , en le priant d'apuier
de fon mieux la bonne intention de LL. HH. PP., & particulièrement
qu'il foit donné par le Sr. Marquis de Prié une Reponfe par écrit fur le
Mémoire qui a été préfenté & fur les Points y contenus concernant tous
l'exécution du Traité de Barrière; ce qui pourra fervir à faire voir, en
quoi on eit d'accord l'un avec l'autre , & en quoi on eft encore difcordant,
afin de trouver enfuite des expediens pour lever ce différend.
Et fera envoie l'Extrait de cette Refolution de LL. HH. PP. au Sr.
Hamel Bruyninx, Envoie de LL. HH. PP. à la Cour de l'Empereur, pour
lui fervir d'information , & pour qu'il emploie à cette fin les devoirs : il
fera pareillement envoie au dit Sr. Hamel Bruyninx Copie de la Lettre
du Refident Pelters du 17. du paffé.
I l étoit furvenu entre tems une traverfe. Elle confifloit en ce qu'un certain
Borckenfeldt,fe qualifiant Refident du Roi dePruffe à Bruxelles , avoit écrit
au Refident Peilers , & l'avoit enfuité été voir. Il lui avoit parle touchant
la Proteltation de ce Roi-là contre le Traité de la Barrière. Le Refident
Peilers lui avoit repondu qu'il étoit chargé de conférer avec les Corn-
miffaires du Marquis de Prié fur les points de la Proteltation , & fur
l'Article des Droits d'Entrée & de Sortie fur la Meufe. Que LL.
HH. PP. ne jugeoient pas que ledit Refident de Pruffe dût intervenir
dans les Conférences à tenir. Cependant , qu'en aiant parlé au Marquis de
Prié, celui-ci avoit fait paroitre qu'il y avoit quelques Reflexions à faire
fur la qualification ce Relident-là. La raifon étoit, qu'étant né en Brabant,
il devoit être regardé comme Sujet de Sa Majeilé Impériale. Ainfi, fans
la permiffion de la quelle, il ne pouvoit paffer au fervice d'un autre Prin-
ce. C'étoit quoique pendant l'Adminiitration provifionelle des deux Puif-
fances Maritimes, il eut été reconnu par la Régence comme Refident du
Roi de Pruffe. De forte qu'il faloit qu'il attendit là-deffus les intentions
de la Cour Impériale, avant que de pouvoir répondre au Mémoire que ce
E 3 Re-
38
MEMOÏRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aftaihes
DES Pb.0-
VINCES-
Unies.
Refident -là avoit prefenté. Les Etats prirent là-deffus le 6. de Janvier
une Refolution. Elle portoit qu'on chargerait le Refident Peflers de re-
pondre à celui de PrulTe. La fubflance de laReponfe étoit, que lors que le
Marquis de Prié auroit porté l'ouvrage en état de pouvoir avec fuccès
avoir des Conférences fur les differens avec le Roi de PrufTe qui refultoient
du 18. Article du Traité de la Barrière , LL. HH. PP. feroient prêtes de
négocier là-deffus avec lui, ou avec tel autre que ce Roi-là trouveroit à
propos d'y emploier. On ajouta au Refident Peflers , d'inliiler de plus
auprès du Marquis de Prié , afin qu'on pût ôter d'une manière ou d'autre
l'empêchement contre les Conférences avec le Roi de PrufTe. , qui pour-
roit refulter de la difficulté de l'admiflion de la Perfonne dudit Miniflre de
PrufTe. Il devoit ajouter, s'il ne feroit pas mieux, lorfque l'Affaire feroit
préparée à Bruxelles dans les Conférences qui par ordre du Marquis de Prié
dévoient être tenues avec le Refident Peflers , de la renvoier à la Haie, où
Sa Majeflé Impériale, aufîi-bien que le Roi de PrufTe ,y. avoient leurs Mi-
mitres , parce qu'autrement fAiTaire refleroit fufpeuduè" long-tems au de£
avantage de Sa Majeflé Impériale , & de l'Etat , dont le Commerce fouf-
froit beaucoup par-là le long de laMeufe fur un incident qui n'avoit rien de
commun avec T Affaire. L'on chargea même les Députez d'en donner
connoiffance à l'Envoie Extraordinaire Prufîien Meinertzhagen , & de lui
ajouter que LL. HH. PP. viendroient fort volontiers à une fin defdits
differens. Qu'Elles chargeroient leur Refident à Bruxelles d'y préparer
les Affaires. C'étoit d'autant que Sa Majeflé Impériale étoit à l'égard de
plus d'une vue concernée dans lefdits differens. D'ail leurs, qu'Elles feroient
fâchées que les Conférences là-deffus puffent être retardées par ledit inci-
dent , & qu'elles prioient l'Envoie Meinertzhagen de vouloir emploier Tes
bons offices , afin que d'une manière ou d'autre on ôtât l'empêchement , qui
pourrait en refulter.
L'Envoie de ce Roi s'en étant chargé, il prefenta en Reponfe un Pro
Memoriâ , dont le contenu peut être veu tout entier dans la Copie qu'on
met ici.
Mémoire
du Mini-
lire de
Pruïîe.
Pro Memoriâ du Minijlre de Truffe • , du 3. Janvier
1718.
LE Miniflre de Sa Majeflé le Roi de PrufTe aiant fait raport au Roi foa
Maître de la Refolution de LL. HH. PP. , du 6. janvier dernier,
que Mrs. les Députez lui avoient communiquée dans la Conférence du 10.
de ce mois-là, & par laquelle LL. HH. PP. témoignent, que parce que
Mr. le Marquis de Prié faifoit difficulté d'admettre le Refident de Sa Ma-
jeflé à Bruxelles le Sr. Soufl de Borckenfeldt aux Conférences qu'on étoit
près de tenir fur les differens provenus du Traité de la Barrière , Elles fou-
haitoient qu'on renvoiât cette Affaire ici à la Haie , pour conférer là-deffus
avec le Minillre Impérial , & celui de Sa Majeflé, après qu'on auroit pré-
paré l'Affaire à Bruxelles.
Ce
VIMCF.S-
Uniks.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 39
Ce Minière a ordre de déclarer à Mrs. lesDeputez,que SaMajefléefl dans Affaires
la même inclination que LL. HH. PP. , de vuider ces diffcrehs pro venus du DES Pro
18. Article du fufdit Traite de la Barrière, & de conférer là-defius. Mais , ne
comprenant pas ce que LL. HH. PP. entendent par ces paroles de la Refo-
lution, après que î Affaire fera préparée à Bruxelles dans les Conférences qui
s y tiendront , Elle les prie de vouloir s'expliquer là-defïus , dans Téfperance
que leur intention ne fera pas de régler auparavant les points de différence
avec Mr. le Marquis de Prié, fans la participation de fa Majeilé ou de fon
Miniflre, ainfi qu'il a été fait dans la Négociation fur la Barrière ; puis
qu'en ce cas-là Sa Majeilé déclare d'avance, qu'Elle ne veut être liée en au-
cune manière à la moindre chofe qui fe traitera ou concertera là-deilus fans
Elle \ mais , qu'Elle fe referve fon droit , en proteflant contre tout ce qui
pourroit fe faire à fon préjudice , ainfi qu'Elle a ci-devant fait contre le
Traité de la Barrière. Le 31. Janvier 171 8.
Ce même Envoie, avec celui de Hefle-Caflel , avoient dans une Confé-
rence notifié aux Etats une Convention provifionelle fur la Baronie de Hér-
itai , ainfi qu'on peut voir dans l'Extrait des Regiilres des Etats avec leur
Refolution là-defïus qu'on infère ici.
Extrait du Rcgiflre des Refolutions de LL. HH. PP.
touchant Herjîal ; du Jeudi 20. Janvier 1718.
Herûal.
LE s Sieurs de Wynbergue & autres Députez de LL. HH. PP. pour les Refolir-
Affaires de la Succefîion &c. ont raporté que les Srs. de Meinertzha- £°^*jl*
gen Envoie Extraordinaire de Sa Majeilé le Roi de Pruffe , & de Dalwig
Envoie Extraordinaire de fon AltefTe Mr. le Landgrave de HefTe-Caffel ,
comme Plénipotentiaires refpeclifs , tant de fadite Majefté, que de fon Al-
tefTe , & de Madame la PrincefTe Douairière de NafTau, ont dans une
Conférence donné connoiflance aux Sieurs leurs Députez , de la provifio^-
nelle Convention entre Sa Majeflé & lefdits Hauts Tuteurs fur la Baronie
de Herilal , & de la provifionelle Adminiltration & Régence de ladite Ba-
ronie, & leur ont donné la Copie de ladite provifionelle Convention, qui
ctoit de part & d'autre ratifiée ; & que là-defïus ils ont demandé , que les
Conseillers autoriféz pour l'Adminillration provifionelle des effets de la
Succefîion puiiTent ^tre chargez par'LL. HH. PP. de fe régler en con-
formité de ladite Convention, & de remettre PAdminiflration & la Régen-
ce , qui y efl conforme , à fadite Majeflé , & auxdits Hauts Tuteurs , ou à
leurs Autoriféz; & que LL. HH. PP. veuillent retirer leurs Troupes hors
de la Se-gneurie de Herilal , lorfque la Régence fe fera établie, en con-
formité de ladite Convention par fadite Majeflé, & par lefdits Hauts
1 uteurs.
Sur quoi aiant été délibéré , il a été trouvé bon & arrêté que la Copie de
ladite provifionelle Convention fera envoiée aux Confeillers autoriféz pour
kl
^FFAJFES
deTS Pko-
VINCKS-
Unies.
Mémoire
duMini-
ftrede
Prufle
touchant
Mont-
fort.
40 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
la provifionelle adminiftration & la fucceflion ; pour leur fervir d'inftru&ion,
& que lefdits Confeillers feront chargez & autorifez, ainfi qu'ils font char-
gez & autorifez par la prefente, de remettre la Régence d l'Adminiitra-
tion de ladite Baronie, en conformité, à fadite Majefté le Roi de Pruife ,
& auxdits Hauts Tuteurs des jeunes Prince & Princelfe de Naflàu. D'ail-
leurs, que lorfque lefdits Hauts intereflez y auront établi la Régence, les
Troupes de l'Etat qui font à Herflal feront retirées, & que l'ordre en fera
donné, dès qu'il fera donné connoillance à LL. HH. PP. dudit étabhiTe-
ment. Et que l'Extrait de cette Refolution de LL. H H. PP. fera remis
par l'Agent Rofeboom auxdits Sieurs de Meinertzhagen & Dalw:g.
Les Srs. Députez de la Province d'Utrecht fe font tenus à la Refolution
des Seigneurs leurs Principaux prife fur le fujet de la Succefîion, & à leurs
Remarques û fouvent faites.
Le dit Envoie prefenta quelques jours enfuite encore un Mémoire plain-
tif contre le Procédé du Receveur des Domaines. On peut voir de quoi il
p'agiflbit par la Copie du Mémoire même , qui fuit.
Mémoire du Minijlre de Truffe , touchant les Revenus de
Montfort \ du 10. Février 1718.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
VV. HH. PP. fe fouviendront s'il leur plaît des Remontrances réitérées
que le foufligné leur a faites contre le Procédé du Receveur des Do-
maines refervez de Montfort, par raport aux dîmes, rentes, & douzième
denier des terres vendues par ceux du Village de Beefol de leur Commu-
nauté, lefquels il a exigé contre les droits de fa Majelté, comme Seigneur
Territorial de Montfort, ainii qu'il a été amplement expofé dans le pre-
mier Mémoire du foufiïgné du 30. Novembre 171 6.
Et quoiqu'après les fufdites Remontrances le fou (ligné auroit dû efperer
que V V. rlH. PP. auroient bien voulu donner leurs ordres audit Rece-
veur des Domaines refervez à ne plus faire aucune infraction aux droits de
Sa Majelté à cet égard, on vient derechef d'adreflèr des plaintes à Sa Ma-
jelté, que le Receveur fufmentionné ,non feulement continue à obliger ceux
de Beefol de paier les fufdits droits apartenans à fa Majefté, mais qu'il
prétend même les forcer à lui paier ce qu'iis ont déjà paie fur ces droits au
Receveur de Sa Majelté.
Le foutrignéfe pi omet de l'équité de W. HH. PP. qu'elles n'aprou-
veront pas ce Procédé de leur Receveur, & qu'Elles lui ordonneront de
s'abitenir de telies infractions, contre lefquelles Sa Majelté feroit d'autant
plus obligée de fe maintenir , puis qu'il elt inconteltable que ces Droits lui
apartiennent uniquement comme Seigneur Territorial , & non pas au Sou-
verain, ce qui a été ûon feulement clairement démontré dans le Mémoire
du
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 4l
du 30. Novembre 1716; mais VV. HH. PP. trouveront même unequan- Affaiues
tité de decifions femblables fur de pareils cas , qui fc font faites devant le LKS I)r°-
Confeil d'Etat de cette Republique même. ]\SCEi'
Signét
De Meinertziiagen.
Les Etats receurent des avis de Bruxelles, qui leur donnoient lieu de
fè flatter d'une promte conclufion de l'exécution du Traité de la Barrière.
On devoit, leur mandoit-on, charger le Minillre Impérial Heems , qui étoit
à la Haie, d'achever de dégroifir le tout, & d'aplanir ce qu'il y avoit de
rabouteux ; à caufe de fa grande capacité , comme auffi de la parfaite con-
noiffance qu'il avoit des Affaires de la Republique. Après cela , le Mar-
quis de Prié pourroit faire un tour à la Haie, pour y donner fon aproba-
tion pour une conclufion totale. On s'attendoit qu'alors on pourroit ter-
miner en même tems avec la Cour de Pruffe les points fur lefquels Elle
avoit fait protefler contre le Traité de la Barrière.
Véritablement le Marquis de Prié envoia au Baron de Heems un Pro-
jet, dont il avoit auffi donné Copie au Refident Pelters. Le Baron de
Heems fut là-deffus en Conférence avec des Députez des Etats. Il leur
produifit ce Projet. Il tendoit à faire une nouvelle Convention touchant
l'Article du Subfide annuel dont il devoit y avoir quelque reftri&ion avec
des claufes. Ce Baron ajouta, que le Marquis de Prié lui avoit même
écrit là-deffus. Il lui mandoit fes penfées fur ce Projet , & les raifons con-
tenues dans dix Articles , ainli qu'il les remit aux Députez des Etats , dont
la Copie fuit ici.
Extrait du Regître des Rcfohitions de LL. HH. PP. les
Seigneurs Etats Généraux des Provinces-Unies des
Pats-Bas 3 touchant la Barrière; du Mercredi 2.
Mars 1718.
LEs Srs. de Wynbergen & autres Députez de LL. HH. PP. pour les Af- Refok-
faires de la Barrière aiant été en confequence & pour fatisf aire à leur tfon ton-
Refolution Commifforiale du 28. du pafle en Conférence avec le Sr. Baron jj^JJJJlj
de Heems, Envoyé Extraordinaire de S. M. Impériale, ont raporté à l'Af-
femblée, que le dit Sr. Baron de Heems leur avoit dit, que Vendredi der-
nier il avoit reçu par un Exprès du Sr. Marquis de Prié un Projet de la Con-
vention préfentement à faire fur l'Article du Subfide annuel , lequel ledit
Marquis avoit auffi remis au Refident Peilers , qui, comme le Baron Heems
croyoit, l'auroit fans doute déjà envoyé à LL. HH. PP. Que le dit Sr. Mar-
quis lui mandoit auffi ,
Tome XL F 1. Qu'il
Barrière.
mvi
m:. es
r.ES
Pro.
\1NCES-
Us
iies.
43 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
i. Qu'il croyoit, que les Plaintes contenues dans la Pvefolution de LL.
HH. PP. du 7. du paffé fur le délai d'une Réponfe par écrit, n'étoient pas
fondées , vu que lui Sr. Marquis de Prié avoit confirmé par fes Lettres , écri-
. tes à lui Sr. Baron de lieems, tout ce que le dit Refident avoit rapor'té tou-
chant les expédions qu'il propofoit,& ce qu'il accordoitpour conduire cette
longue Négociation à une prompte concluiion & a une heureufe fin; qu'ou-
tre cela, il avoit donné une Réponfe par écrit fur tous les points du Projet
de la nouvelle Convention , que le Sr. Peiters lui avoit remis , ce qui tou-
tefois étoit une marque & aflurance qu'il ne vouloit pas manquer de fatis-
faire à ce qui étoit itipulé & promis de fon côté : qu'il ne refufoit point de
répondre par écrit, pourvu que l'affaire en pût être avancée; mais que, fé-
lon fon avis , la raifon pourquoi cette Négociation alloit fi lentement, étoit ,
que de la part de l'Etat on faifoit de telles demandes fans en démordre, que
lui Sr. Marquis ne pouvoit pas accorder, fur-tout par raport à la nouvelle
Hypothèque & Obligation qu'on demandoit pour le défaut aprehendé des
Revenus des Villes & Pais conquis, ainii que le peu de Domaines , qui reltoient
à Sa Maj. Imp. & Cathol. devraient être chargez de la Somme totale de
yooooo. Ryxdales.
2. Que lui Marquis avoit neantmoins , pour prévenir toutes les plaintes
& conteftations ultérieures, dreifé àpréfent, une Réponfe par écrit, furie
point du Subfide , ce qu'il avoit aulîi fait ci-devant en termes équivalens ;
qu'il efperoit & s'afliiroit , qu'on la trouverait entièrement fatisfaifante ; &
que dans le changement fait du Projet du Sr. Peiters, il avoit eu plus en vue
de mettre à couvert la Dignité & Souveraineté de l'Empereur fon Maître,
que fes intérêts.
3. Qu'il croyoit au ffi avoir donné à l'Etat une fureté plus que fuffilante
pour le payement du Subfide annuel , ce qu'il avoit démontré même au Sr.
Peiters en préfence du Premier Commis des Finances , aïant alTigné pour
le défaut aprehendé les Comptoirs de Gand & de Bruges , où il y aura un
furplus d'au de-là de 100000. Ryxds. après la Réduction des Efpeces;
que dans cette affaire il avoit palfé par-deiYus tout ce que l'intérêt des Fi-
nances de l'Empereur demandoit pour donner une fatisfaétion à l'Etat;
qu'il donnoit plus, qu'il y avoit pour ainfî dire dans les Coffres , afin de lever
toutes les difficultez , & qu'il ne refloit plus pour l'Empereur que le Comp-
toir d'Oitende; efperant, que LL. I II 1. PP. defiiteroient de la prétention
au dit Comptoir pour plufieurs raifons importantes, qu'il avoit propofées
au Sr. Peiters.
4. Qu'il étoit pareillement d'opinion , qu'on aportoit autant de préjudi-
ce à l'intérêt de l'Etat même qu'à celui de Sa Maj. Imp. & Cathol. par les
prétenfions exceiîives & par les précautions fuperlluës ; puifque , hors des
Comptoirs de Bruges & de Gand , qui devraient fervir d'une Hypothèque
fpeciale pour le défaut aprehendé du Subfide , il ne refloit rien dans les
Pais-Bas Autrichiens , furquoi on pourrait, en cas de necellité y faire une
Négociation; que LL. III I. PP. n'ignoraient point, que tous les fonds
ctoicnt chargez & engagez, 6c quererfonne ne voudrait donner un Sol,
quand
Unies.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 43
auand les dits deux fonds feroient chargez d'une Hypothèque fpeciale & affaires'
perpétuelle de 500000. Ryxdrs.,ccqui meritoit bien que cet Etat y fît quel- dfs Pro-
que réflexion, vu que la confervation des Païs-Bas lui importoit autant yINCF-s-
qu'à SaMaj. Imp. & Cathol. même.
5. Que le point du Subfide étant ajufté , il ne voyoit point , qu'il y
reftoit rien qui pourrait empêcher ou différer la Conclufion & la Signatu-
re de la nouvelle Convention, attendu qu'il avoit autant que réglé & ter-
miné à la Haye les 3. autres points avec les Srs. Gockinga & Geldermal-
fen.
6. Qu'il en avoit même fouvent parlé avec le Sr. Pefters, en le priant,
qu'on voudroit faire un Projet là-deffus pour terminer le tout à la fois ;
mais que celui-ci avoit toujours répondu , que l'affaire du Subfide devoit
aller devant, & que c'étoit le point le plus important & le plus effentiel,
& qu'on pourroit bien après accommoder les autres affaires pour être
portées au Confentement des Provinces.
7. Pour ce qui regarde le point des arrérages , qu'il s'étoit déjà expli-
qué là-deffus , à quoi il fe referoit encore, ne doutant point, que LL.
HH. PP. n'en foient contentes; mais qu'il faudroit trouver un expédient
par raport au payement de ce qu'il avoit préfenté & furquoi il avoit ci-
devant écrit à lui Sr. Baron de Heems, puifqu'il étoit impofiibîe de faire
à préfent ce payement à caufe du mauvais état des finances, d'autant que
le payement du Subfide & des intérêts des Capitaux négociez & de ce
qui y apartient, fuivant la Convention qu'on en doit faire, montera, à ce
qu'il conjecture , à environ 800000. Ryxds. ou 2 Millions de florins de
Hollande par an.
g. Que lui Sr. Marquis de Prié étoit prêt à figner aux dites conditions
la nouvelle Convention , & qu'il feroit bien aile, que le Sr. Pefters fût
pareillement inflruit & authorifé à ce fujet de LL. HH. PP. au quel eas fa
venue à la Haie ne feroit pas encore néceffaire.
p. Qu'en attendant, il efperoit, que LL. H FI. PP, envoyeroient une au-
tre Déclaration & une meilleure Refolution que la précédente, afin que
cette Négociation puiffe être conduite à une prompte fin.
10. Qu'il envoyeroit aufii au premier jour à la Haie le Commiffaire de
Guerre Gruber, pour régler avec lui la liquidation des deniers négociez
pour l'entretien des Troupes Impériales.
Qu'enfuite le dit Sr. Baron de Heems avoit prié les Députez de LL.
HH. PP. de leur vouloir faire raport de ce que ci-deffus, y ajoutant,
qu'il avoit des ordres très preffans de Vienne pour employer auprès de
LL. HH. PP. tous les devoirs poffibles afin de terminer au plutôt cette
Négociation. Surquoi aïant été délibéré, il a été trouvé bon & entendu,
que Copie du précèdent Raport fera remife entre les mains des Srs. de
Wynbergen & autres Députez de LL. HH. PP. pour les Affaires de la
Barrière, pour, conjointement avec les autres Srs. Commiffaires du Con-
feil d'Etat qu'il nommera lui-même , examiner & faire raport de tout à
i'AfTemblée.
f 2 u
44' MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
ArFAiRïjs 11 n'y a pas à douter que cette Négociation n'eut un heureux fuccès
des Pko- pendant les autres mois de l'année, dont on n'araporté ce qui s'étoit pafTé
vinces- pendant les trois premiers touchant cette Affaire-là.
Il y avoit eu pendant le même tems d'autres Affaires , qui roulèrent fur
le tapis. On en fera le raport féparement.
L'une étoit que l'Electeur de Cologne avoit fait préfénter aux Etats par
fon Réfid.ent un Mémoire en date du iy. Décembre paffé de 17 17. On
n'y avoit fait aucune Réponfe, manque de tems pour y réfléchir, parce
qu'on étoit vers la fin de l'année. Ce Refident demanda cette Réponfe le
7, de Janvier de cette année par le Mémoire cy-joint.
Mémoire du Refident de PEklïeur de Cologne pour a-
voir une Réponfe à fon Mémoire du 15. Decembr.
précèdent; du 7. Janvier 171 8.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
Mémoire T E foufiîgné Confeiller & Refident de S. A. S. El. de Cologne auprès
i\n ReTid. jL-j de LL. HH. PP. a eu l'honneur de leur prefenter le 15. de De-
.Magis. cembr. dernier un Mémoire, fur lequel n'aiant jufques à prefent receu de
la part de LL. HH. PP. aucune Réponfe ni Refolution , il ne peut plus
long-temps différer, fuivant les ordres qu'il a de fon Sr. Maitre , fans de-
mander inftamment de LL. HH. PP. l'effet des points contenus dans fon
dit Mémoire ^efperant que LL. HH. PP. s'y trouveront d'autant plus por-
tées , qu'elles auront apris qu'outre le relâchement de leurs Artillerie , S.
A. S. El. continue à exécuter de fon côté tous les articles de la Con-
vention.
Le 7. Janvier 171 8. Signé ',
M A G I S,
Comme l'Elecleur de Cologne venoit de donner un exemple de ge~
nerofité aux Etats, en laiffant partir l'Artillerie de la Republique, ceux-ci
voulurent y correfpondre. lis délibérèrent fur la manière de le faire.
C'étoit fur-tout par raport à la pretenfion des Ordonnances des fourrages,
& au donatif de la Ville de Maftricht. Elles étoient deux chofes fur lef-
quelles ce Refident-là avoit infifté par fon Mémoire du if. Decembr.
précèdent. On prit là-deffus une Refolution dont voici la Copie, avec
l'Addition envers les Provinces pour pouvoir paier lefdites Ordon-
nances.
Extrait
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 41
' Extrait du Regiftre des Refolutiom de IL. HH. PP. ^J*
en Réponjè au Rcfident Magis\ du Vendredi i). Jan- vinces-
vier 1718. Vnu$-
SUr l'Examen des Mémoires du Refident de l'El. de Cologne le Sr. Rc'ponfe
Magis concernant l'excluiion de la Convention , relative à la démoli- a Mr.
tiun des fortifications extérieures de Bonn, & de celles de la Citadelle de Magis.
Liège & de Ilui, & fpecialement au vieux Baftion du Clergé, le donatif
de Mallricht, & les arrérages des fourrages &c. Sur quoi aiant été de-
libéré x il a été trouvé bon & arrêté, qu'on repondroit au Mémoire dudit
Sr. Refident xMagis , qu'il eft fort agréable à LL. HH. PP. de voir les
nouvelles aiTeurances données par le Mémoire de la fincere intention de .
S. A. El. pour entretenir & cultiver la bonne amitié & intelligence avec
l'Etat, & pour l'exécution du convenu. Que LL. HH. PP. ont pareil-
lement de leur côté témoigné, & le réitèrent encore une fois , qu'elles
ont toujours été portées & le font encore de vivre avec S. A. El. en
amitié & union , & d'exécuter le convenu en toutes fes parties; & de
donner toutes fortes de preuves à S. A. El. de leurs iinceres fenti-
mens.
Qu'elles confiderent que les points contenus dans le Mémoire font dé
deux natures. Le premier touchant l'exécution du convenu , nommé-
ment celui qui concerne le Baftion du Clergé ; & les deux autres n'aianc
rien de commun avec la Convention , comme le donatif de la Ville de
Maftricht pour l'admodiation du petit impôt de Doiianne , & les arrérages
des fourrages dûs à l'Archevêché de Cologne. Que fur le premier, ne regar-
dant pas en aucune manière LL. llll. PP. Elles ne peuvent avouer
que de leur côté elles aient manqué de fuivre en toutes fes parties ce dont
on eft convenu. Que d'abord que la Convention fut aprouvée par S. A.
EL, LL. HH. PP. ont remis au Confeiî d'Etat l'exécution, & ordonné,
ainli que S. A. El. a fait de fon côté, à la bonne foi fur les raifons de leur
Refolution du 10. de Novembre paffé, ayant crû , fuivant le convenu,
que le Vieux Baftion du Clergé devoit auîîi être démoli, a fait donner con-
noiiTance de fon Opinion à ceux auxquels de la part de S. A. El. étoit
commife l'exécution de la Convention à l'égard des Ouvrages de la Cita-
delle de Liège. Qu'en cas qu'ils avoient jugé que la démolition dudit
Ballion n'étoit pas comprife dans la Convention, ils dévoient la defaprou-
ver & en donner connoiffance à LL. HH. PP. & à S. A. El. & en de-
mander l'explication; mais, au contraire, non-feulement ont acquiefeé à ce
que de la part du Confeil d'Etat étoit de bonne foi avancé, mais ont mê-
me donné à ferme la démolition & paie les travailleurs. Que cela s'eft
fait fans connoiffance de LL. HH. PP., & il a même été travaillé pen-
dant quelques femaines à ladite démolition, fans que de la part de S. A.
El. on ait fait quelque plainte là-deiTus ; que fur la première reprefenta-
tion à eux faite de la part de S. A. El. , que la démolition dudit baftion
F 3 étoit
Unies.
46 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires étoit contre la Convention, elles ont d'abord donné ordre de la fufpendre
des Pro- jufques à ce qu'on en eut pris information; & qu'après les informations
vinces- venues , en toute bonne foi elles ont bien voulu déclarer , que ledit
Baflion n'étoit pas compris dans les ouvrages qui dévoient être dé-
molis.
Qu'elles croient d'avoir aufll par-là furabondament fatisfait , & l'on ne
peut pas en la moindre manière leur imputer d'être contrevenuës en ce
point à la Convention , puis que la démolition, qui étoit commencée au-
dit baftion , avoit été faite hors de leur connoiilance ; que ceux, à qui
l'exécution de la part de LL. HH. PP. étoit commife, y font allez de
bonne foi, & non-feulement ceux-cy, mais auiîi ceux auxquels S. A. El.
avoit commis la même exécution, ont été d'opinion que le Baflion devoit
être démoli , & l'ont même donné à ferme , & ont fait commencer la
démolition. Que LL. HH. PP. aiant fait de leur côté ce qu'on peut re-
quérir d'elles , on ne peut rien prétendre d'elles au de-là , & qu'elles ne
font la moindre opofition que l'on ne repare ce qui a été rompu dudit
Baflion; car ce qui a été fait ne peut-être imputé à l'Etat, mais à ceux
auxquels S. A. El. avoit commis l'exécution, & qui l'ont donné à ferme,
& l'ont laiflee effectuer, & lors qu'il étoit temps n'ont pas fait favoir à
LL. HH. PP. ce qu'on jugeoit devoir alléguer contre. Que cependant
LL. HH. PP. ne peuvent s'empêcher de fe plaindre de l'inexécution de
la Convention de la part de S. A. El.; qu'elles ne parleront pas de ce qu'on
a retenu l'artillerie & les munitions de l'Etat, pûifqu'on les a relâchez,
mais que la démolition des ouvrages extérieurs de Bonn, & des ouvrages
de Huy & de la Citadelle de Liège, n'efl pas effectuée dans le temps fti-
pulé dans la Convention , & que le Gouverneur & autres Officiers & fer-
vans qui ont été dans Bonn n'ont point été fatisfaits de leurs arrérages,
ainfi qu'il a été expreffement promis par la Convention ; que LL. HH.
PP. infiflent encore fur l'exécution du convenu touchant lefdits points
autant qu'on n'y a pas fatisfait. Que pour ce qui regarde les points qui
font hors de la Convention , & premièrement le donatif de la Ville de
Maeflricht, LL. HH. PP. y aiant confenti, fous la condition d'y avoir
leur part, elles ont fatisfait à ce qu'on a requis d'elles, quoique fans aucu-
ne obligation, & feulement en confideration de l'amitié de S. A. EL: &
2. des arrérages dûs à l'Archevêché de Cologne, qu'il n'efl pas incon-
nu à S. A. El. l'onereufe charge de la dernière guerre , & les defaflres
furvenus à l'Etat , qui font la caufe , que tant cette dette que d'autres
n'ont pu jufques ici être aquittées, & même ne peuvent pas l'être fi-tôt.
Comme LL. HH. PP. ont beaucoup de confideration pour S. A. El. &
de fa recommandation en faveur de l'Archevêché de Cologne, elles fe-
ront là-deflhs toutes les Réflexions poflibles;& , lors que ceux de l'Arche-
vêché, auxquels LL. HH. PP. font redevables de ces arrérages ,leur en
parleront , on entrera avec eux en négociation , pour convenir au-
tant qu'il efl poffible pour une raifonnable fatisfaclion de la det-
te , fuivant les occurrences du temps. Et l'Extrait de cette Re-
folutiou
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 47
lution fera remis par l'Agent ^Rofeboom entre les. mains du Sr. ,\FKArf,E8
Magis. des Pno-
D'ailleurs , il ferareprefenté aux Seigneurs Etats des refpeclives Provin- vinces-
ces , que la dette de l'Archeveelié de Cologne confifte en Ordonnances u"Its- ,
d'argent de fourrages pour les quartiers des Troupes de Pruffe & autres
pendant la dernière Guerre , fuivant .qu'on en ctoit convenu , lefquel-
Ies Ordonnances ont été livrées pour être paiées de l'argent des Maga-
fins de fourrage, & du reliant de ladite Pétition, ou de profit de la ré-
duction (,& cailation des Troupes de 171 3. C'efr. pourquoi lefdits Sei-
gneurs Etats font priez fur l'un ou l'autre de ces Articles d'envoier une
bonne fomme d'argent au Comptoir du Receveur General , pour pou-
voir paier cette dette, & d'autres d'une pareille nature.
Cette Refolution ne contenta pas ce Refident-là. Il fupofoit mal
à propos qu'il y avoit des cliofes qui n'étoient pas véritables. Il difoit
hautement , qu'il travailîoit à un Mémoire , qui y ferviroit de Réplique.
Auiîi quelques jours après prefentat-t-il un Mémoire, dont l'Extrait ne
fatisferoit peut être pas le Leèteur comme la Pièce même , que voici.
Mémoire du Refident Magis , pre fente à Leurs Hautes
Fulffuiices Mejjieurs les Etats Généraux , £«fV. du 22.
Tevrier 1718.
HAUTS ET PUISSANTS SEIGNEURS, ' -
LE fouffigné Confeiller & Refident de Son Altelfe SerenùTime Eleclora- Mémoire
le de Cologne auprès de Vos Hautes PuifTances,par ordre exprès de Son du Réfid.
Sereniflîmc Maître, a rhonneur de répliquer à la Refolution de VV. HH. Magis*
PP. qui lui a été communiquée le 17. du mois pafle par leur Agent le Sr.
Rofenboom: & Son Altefié Sereniffime Electorale a été ravie d'apprendre
par cette Refolution , que les nouvelles affurances, qu'Elle m'avoit or-
donné de marquer de fa part 'à W. HH. PP. de la fincere intention ,
qu'Elle a pour entretenir, & affermir avec Elles 'une bonne & parfaite''
amitié, & intelligence, leur ont été agréables; & que celles, qu'il a pîu
à VV. HH. PP. de lui marquer, dans leur dernière Refolution , lui ont'
donné toute la fuisfaction' imaginable , & que 'Son Akeffe Serenm*ime
Electorale .cherchera toujours des occafions pour convaincre VV. HH.'
PP., par des effets, combien Elle cft portée à cultiver cette bonne'
0
Elle a laiffé partir les Batteaux chargez dé munitions <k Artillerie qui'
étoient dans Bonn , quoiqu'Elle pût les arrêter jufqu'à ce qu'on lui eut;
donné une entière fatisf action a fur l'infraction manilefte , qui s'eft don-
ner.
A F? AI ît, ES
PE3
Pro-
u-
ICES-
Uni s: s.
48 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
née à la Convention par la démolition cla vieux Ballion du Clergé à
Liège ; mais , cependant, fur les feules affurances ,qu'Eile a reçeues du
fouiîigné de la bonne difpofition où il trouvoit VV. HH. PP. pour l'en-
tretien de cette bonne Union , & des affurances de bouche , qu'Elles lui
avoient bien voulu donner , de n'avoir aucune part à cette infraction ,
de même de leur bonne intention & volonté pour donner à Son Al-
teffe Sereniffime Electorale toute la jufte fatis faction qui lui efl due par
cette infraction , Elle a bien voulu paffer par deffus toutes Reflexions,
& ne point s'arrêter au Droit acquis qu'Elle avoit d'arrêter les batteaux,
<k même fans en attendre la Déclaration que VV. HH. PP. en ont don-
née au fouffigné par leur Refolution du 9. Novembre dernier, s'abandon-
ner à une entière confiance , à la Juilice & à l'Equité renommée de W.
IIH. PP.; ainfi qu'avec fujet Elle ne peut diOImuler la furpriie qu'Elle a
eue cle voir que VV. HH. PP. par leur dernière Refolution de if. du
mois fJaffé paroiffent chercher prefentement it rejetter la faute de cette
infraction fur ceux qui ont été Députez de la part de Son Alteffe Sere-
niffime Electorale à Liège, ou fur fon Confeil de Régence, ou à des ac-
quiefcements de fa part. Elle avoit lieu de s'attendre que VV. HH. PP.
auroient remarqué avec attention les preuves convaincantes du contrai-
re , qu'Elle a ci-devant ordonné au fouffigné de marquer par fon Mé-
moire du 2. Novembre dernier. C'eft pourquoi Son Alteffe Sereniffime
Electorale lui ordonne de les réitérer à VV. HH. PP. de leur faire con-
noitre de nouveau, que cette infraction manifefte ne peut nullement
être imputée à tels motifs , & qu'elle tire fon Origine de la demande
que le Sr. Rochebrune a fait au Confeil d'Etat d'une interprétation fur
le fait de ce Baltion , qu'il a effectivement reçeuè" du dit Confeil telle
qu'il avoit demandé..
Que cette Inftructlon a été donnée & envoiée par ce même Confeil
audit Sr. Rochebrune avec ordre de l'exécuter , & que le tout s'eft fait
fans la communication ni participation de VV. HH. PP, félon qu'Elles
font déclaré plufieurs fois Elles mêmes. 'Qu'il n'ell point naturel qu'on
puiffp décider fouverainemçnt , &' faire, exécuter de cette forte une ex-
plication, que demande un Commandant de Place fur un fait qui regar-
de- un accord conclu entre deux Souverains , & fur -tout fins le com-
muniquer nullement au Miniftre du Prince avec qui on a traité, & qui
fe trouve fur le lieu, &'fans la participation du Miniftre de Sa Majeité
Impériale & Catholique. Qu'outre, que bien loin qu'on ait procédé de
telie manière , comme fa bonne intelligence, le requeroit , au contraire ,
cette interprétation a etéinifç'en exécution' à Tinfçu du Miniftre de
Son Alteffe Sereniffime Electorale qui le trouvoit à Liège : Conduite en-
tièrement oppofée à celle que Te Sr. Rochebrune étoit convenu de te-
nier avec Mr. le Comte Sr. Maurice ; car , il ne peut nier que ledit
Comte ne fût à Liège de ce tems-là , & qui lui dit, qu'il avoit ordre
de Son Sereniffime Maître de traiter avec lui, fur ce qui concernoit
l'exécution de la Convention , & Mr. Rochebrune lui repondit qu'il
avoit
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 49
avoit les mêmes ordres de fes Maîtres : ainfi qu'il convinrent qu'à l'avenir Aftmrx»
rien fe feroit fans fe le communiquer réciproquement. Cependant, deux des Pa^
Jours après , le Sr. Comte St. Maurice aprit avec étonnement , que Mr. unTeÏ
Rochebrune s'étoit adrefie aux Etats de la Principauté de Liège, pour
demander la démolition du vieux Billion du Clergé , ce qui obligea ledit
Comte de fe rendre le même jour à la Citadelle, pour demander au Sr.
Rochebrune , pourquoi il en agiflbit de cette forte , qu'il demandoit la
démolition d'un ouvrage , qui n'étoit point compris dans la Convention ?
Il lui donna pour reponfe , qu'il avoit les ordres du Confcil d'Etat fes
Maîtres , & qu'il les devoit exécuter. D'où vient donc que le Comman-
dant n'a pas donné part au Confeil d'Etat, ou à VV. III I. PP. de i'op-
pofition que Mr. le Comte de St. Maurice lui a faite au fujet de cette
démolition? Il ne faut point douter, que fi cela étoit arrivé pour lors,
le Confeil d'Etat auroit agi de communication avec VV. HH. PP. fur
un fait de cette importance ; & ainfi on auroit pu prévenir auffi à tems ,
qu'Elles croient prefentement que cela devoit fe faire , le fujet de difcuf-
fion & mefmtelligence que cette infraction manifeile peut caufer.
Cette feule négligence , & contrevention aux ordres & intentions de
VV. HII. PP. mérite quelque chofe de plus qu'il n'efl dit dans la décla-
ration que VV. HII. PP. donnent par leur Refolution du 15. du mois
dernier; car, puis que les ordres portent expreffement qu'il eut à confé-
rer avec les Perfonnes dénommées de la part de Son Altefle Sereniffime
Eleèt orale ou avec la Régence de Liège , pourquoi ne l'a-t-il point
fait ?
On doit repeter ici , qu'il y a trop Iong-tems que le Sr. de Rochebrune
efl à Liège , pour ne pas favoir que Son Altefle Sereniffime Electorale &
fes Etats ne penfent pas de même fur le fait des démolitions des Places
de cette Principauté , & qu'il efl aflez connu que les Etats du Païs de
Liège ne compofent point la Régence ; & que ce Corps , quand il efl af
femblé , n'efl que pour travailler aux befoins du Païs , & n'efl en aucune
façon dans les affaires publiques dépendantes du 'Souverain. Et fi les Dé-
putez defdits Etats du Païs de Liège peuvent avoir pris le Caractère de
Députez de Son AltefTe Sereniffime Electorale pour traiter avec lui de la
démolition de ce Baflion , pourquoi ne leur a-t-il pas demandé leur Pou-
voir ou Commiffion ? Ainfi , rien ne peut l'excufer , & tout au contraire
fa Conduite prouve affés , qu'il a mieux aimé ménager les Etats du Païs
de Liège , que fon AltefTe Sereniffime Electorale.
Il confiera donc notoirement à VV. HII. PP. , qu'aucun deffaut de cet-
te in fra6tion ne peut être imputé à Son Altefle Sereniffime Electorale , ni
à fes Députez, ni à la Régence, ni à aucun acquiefcement de fa part. Les
Plaintes & Remontrances en ont été faites aufli-tôt qu'on a pu, envers le
Sr. Rochebrune par Mr. le Comte Sr. Maurice. Elles ont été fûtes par
Son Altefle Sereniffime Electorale même au Sr. Lieut. Colonel Coëtier,
qui n'a point manqué d'en rendre compte à VV. HH. PP. Elles ont été
portées directement à VV. IIH. PP. par le fouffigné aufli-tôt qu'il a pu.
Tvme XL G Et
5o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Et comme Son AltefTe Sereniflime Electorale a de fon côté rempli toutes
des Pko- jes Conditions portées dans la dite Convention ; Huy étant déjà entiere-
Unies' ment démoli & évacué, Liège le feroit de même, Ci on eut laifTé travailler
. '_ les Entrepreneurs :& pour peu que VV. HH. PP. veuillent chercher Se
favoir la caufe de ce retardement , elles pourront la découvrir bien-tôt -9
& l'on verra , que ce n'efl ,ni la faute de Son AltefTe Electorale , ni de
Ces Etats de Liège.
Quant h la démolition de Bonn, comme ce ne font que des ouvrages de
terre, on n'a qu'à voir le tems qu'il a fait jufqu'à prefent , & s'il a été
poflible de diligenter cet ouvrage plus qu'on n'a fait: & d'ailleurs, s'il y a
eu quelque lenteur ou retardement , VV. HH. PP. fe trouvent allez in-
formées par le Sr. Coëtier , que rien n'en peut être imputé à Son AltefTe
Sereniflime Electorale. Au relie, de la manière que cette démolition fe di-
ligente prefentement , malgré les rigueurs du tems , elle fera bien-tôt
achevée, & convaincra tout le monde de la droiture des fentiments de
Son AltefTe Sereniflime Electorale, laquelle voulant bien demeurer perfua-
dée que VV. HH. PP. n'ont eu aucune part , ni aucune connoilTance de
cette contravention , & qu'ainfi les croyant également offenfées , elles fe-
ront d'autant plus d'attention aux preuves convaincantes , que rien ne
peut être imputé à Son AltefTe Sereniflime Electorale , à Tes Députés, ni à
aucun autre acquiefeement de fa part, & que VV. HH. PP. non conten-
tes de defapprouver la conduite irreguliere qui a été tenue par la démoli-
tion entière du dit Baflion, ne difereront plus de donner les ordres nécef-
faires pour que le dit Baflion foit entièrement & inceflamment remis
dans le même état qu'il étoit auparavant.
C'eft ce que Son AltefTe Sereniflime Electorale ordonne au SoufTigné
de continuer à demander inllamment à VV. HH. PP. , comme aufli une
explication fur ce fujet: c'efl-à-dire , de preffer Mr. de Rochebrune pour
favoir qui l'a infligué à demander cette interprétation au Confeil d'Etat,
laquelle doit être uniquement regardée des deux Souverains feuls contrai-
tants, comme l'origine de cette infraction manifeile efl l'ouvrage de
^ens, qui cherchent à altérer la bonne intelligence & amitié qui règne
entre eux.
Au refle, Son AltefTe Sereniflime Electorale fçait que les points repris
dans les précédents Mémoires , que le foufligné a eu l'honneur de présen-
ter, à VV. HH. PP. font de deux fortes de nature :& au Cas que Son
AltefTe Sereniflime Electorale ait pris la réfolution d'arrêter les Batteaux ;
l'infraction commife par la démolition du vieux Baflion du Clergé en au-
roit été le feul fujet; ce qui s'ell pafTé, & ce qui eil marqué ci-deflus fur
ce fait, en efl une preuve certaine.
On fçait d'ailleurs , que Son AltefTe Sereniflime Electorale a laifTé char-
ger les munitions & l'Artillerie fur les batteaux fans aucune oppofition ,
n'ayant jamais eu intention de les arrêter ; & elle ne fit prier le Sr. Coë-
tier d'en différer le départ, qu'à caufe de cette contrevention, & jufqu'à
ce qu'Elle.èUt eu des Lettres du Soufîigné pour favoir les fentiments & in-
ten-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 5r
tentions de VV. HH. PP. fur ce fait. Elles font afTez convaincues de Awairiii
cette, vérité, puifque dès le moment que VV. HH. PP. lui eurent decla- w»PRt>-
ré, qu'EIIes n'avoient eu aucune connoifîance ni part à cette infraction, Um^'
<$c leurs bonnes intentions pour donner fur ce fùjet à Son AltefTe Serenif- '
finie Electorale toute fatisfaction ; fur le (impie rapport qu'il en fit à Son
Sereniiiimc Maitre,il ordonna fur Je champ que les Ratteaux pourraient
partir, quand ils voudraient, & Mr. Coëtier ne peut pas contrevenir à
la vérité de ce fait, fans fe faire tort à lui-même. Ainfi, quoique les points
repris dans les précédents Mémoires foient de différente nature , ils font
cependant connus & averrez par VV. HH. PP. également juftes & équi-
tables ; & Son AltefTe Sereniffime Electorale efpére & s'attend que VV.
HH. PP. voudront bien lui donner fur l'une & fur l'autre la fatisfaclion ,
qu'Elle leur demande, aiant ordonné pour ce fujet au Souffigné depour-
fuivre également fes follicitations & de demander auffi avec infianee une
fin à l'égard de ce qui concerne les arrérages des fourages dus par VV.
HH. PP. à l'Archevêché de Cologne, qui ont été cédez & donnez à Son
AltefTe Sereniiîime Electorale comme le Souffigné pourra en faire confier
s'il efl befoin ; de forte qu'il ne faut pas douter qu'ils ne lui foient pas lé-
gitimement dus , & Son Altefle Sereniiîime Electorale voulant bien entrer
dans les juftes cenfiderations & reflexions que lui font faire VV. HH.
PP. fur les grands Fardeaux de la dernière guerre , & fur les defaftres
furvenus depuis ; Elle s'attend neantmoins auffi que VV. HH. PP. entre-
ront avec Elle dans des engagements juftes & convenables pour la fatisfai-
re , auquel effet le Souffigné a ordre de déclarer qu'il fe trouve fuffifament
autorifé.
Quant . à ce qui regarde le donatif de la Ville de Maeftricht , puifque
VV. HH. PP. ont trouvé à propos d'en faire mention dans leur prédite
Réfolution, Son AltefTe Sereniffime Electorale ne peut fe difpenfer de leur
faire connoitre qu'Elle auroit bien fouhaité de voir que le confentement de
W. HH. PP. eut été fimple & fans les claufes qu'EIIes y ont ajoutées ,
& fur-tout celle par leur dernière Réfolution, de l'avoir fait fans aucune
obligation. VV. HH. PP. n'ignorent point que par le confentement
qu'EIIes ont donnée. Elles doivent participer auffi à ce donatif, & il pa-
roit qu'après trois années de follicitations pour le confentement d'une af-
faire auffi jufte en elle même & décidée auffi de cette manière depuis ce
temps-là par l'avis des quatre Commiffaires decifeurs des deux Princes ,
qui étoient pour lors fur les lieux, ce confentement auroit dû tout au
moins être laifle tel que VV. HH. PP. l'avoient donné, & la claufe ci-
defTus peu agréable auroit pu être fupprimée ou refervée.
Quant au payement du Gouverneur, & celui des autres Officiers com-
pris dans la Convention , Son AltefTe Sereniffime Electorale ordonne au
Souffigné de déclarer iterativement de fa part , qu'Elle y fatisfera d'abord
par le provenu de ce qui lui efl dû des fourages par VV. HH. PP.
Ces dettes étant d'une même nature & contractées envers les Officiers par
l'Archevêché , & non par Son Altefle Sereniffime Electorale qui s'en efl
G 2 ce-
52 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aîfurm cependant bien voulu charger par la Convention, pour complaire à VV.
dfs Pko- tjii r>n . je, 'emi^ «s, ^«^îr «o^ «^,^,„;^ j^*,,,,.^ ,,„ , ,„~:n r^„..^: — „:
dfs Pko-
VJN'C.ES
Unies,
qn
vrier i-uS.
Signé,
M A G I S.
D es que les MiniPtres virent ce long Mémoire , que ce Rendent pro-
noit devoir fervir de Réplique à la Reiblution, ils ne heliterent pas à s'atten-
dre à une Duplique. Elle fut dans une Réfolution que les Etats prirent là-
deffus cinq ou fix jours après. lis remarquèrent, que comme ce Refident-
là, manque d'expérience, ou par ignorance, ainii qu'on a dit plus haut
qu'il étoit arrivé au Refident de Dannemark van Stôcken , fe fervoit du
terme de Preuves réelles de la Sincérité des Etats , ceux-ci y touchoient
quelque chofe. C'étoit en difant, que LL. HH PP. avoient de leur
côté donné des Preuves réelles de leurs intentions de vivre en bonne
amitié & voifmage avec Son Alteffe Electorale. Cependant, que fadite
Alteffe Electorale avoit plus d'une ibis fait voir le contraire de fon côté, &c.
Voici cette Réfolution en Duplique.
Extrait du Regi/lre des Rcfolutions de LL. HH. PP.
les Seigneurs Etats Généraux des Prov'mees - Unies
des P aïs-Bas, pour répondre à M. Magis; du Ven-
dredi 18. Mars 171 8.
Reponfe (~\ ^ * *e ^aPort des Seigneurs de Wynbergen & autres Députez de
aMr.Ma- V->^ LL. HH. PP. pour les Affaires Etrangères, aiant en conformité
gis. & pour fatisfaire à leur Réfolution Commiiîbriale du 22. du paifé exa-
miné, conjointement avec quelques Seigneurs Committez du Confeil
d'Etat , le Mémoire du Sr. Magis , Refident de Son AltelTe Electorale
de Cologne, Eveque & Prince de Liège, concernant l'exécution de ce
dont on eft convenu par raport à la démolition des ouvrages de Bonn ,
Huy , & de la Citadelle de Liège , plus amplement mentionné dans le
dit Mémoire. Surquoi aiant été délibéré , il a été trouvé bon & refolu ,
qu'il fera remis audit Sr. Magis , en Réponfe à fon Mémoire , que com-
me LL. III I. PP. ont donncTde leur côié beaucoup de Preuves de leur
inclination de vivre avec Son Alteffe Electorale dans une bonne amitié
& voifinage , & que Son Alteffe Electorale leur avoit protefle plus d'une
fois d'être de la même intention de fon côté, LL. HH. PP. ne pou-
voient s'empêcher d'être en quelque manière iurpnfes du grand bruit
fju'on fait de ce qui s'elt paifé à l'égard du vieux Baition nommé du Çter-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 53
fé , comme fi c'étoit une Affaire de la dernière importance; que LL. Affaire
IH. PP. n'ont pourtant pu voir qu'il importoit tant, fi le dit Bufnon n,s Pko-
efl dans Ton entier ou non; que neantmoins Elles ont bien voulu avouer, yx"*
qu'en confequence de la Convention fur la démolition des ouvrages de '
la Citadelle de Liège, ledit Baflion n'a point été compris dans les For-
tifications qu'on devoit démolir, mais que LL. I1II. PP. ont par leur
Relolution du 10. Novembre dernier démontré clairement & avec des
raifons convaincantes, que le Confeil d'Etat , à qui LL. IIH. PP.
avoient recommandé l'exécution de ce dont on étoit convenu , a procé-
dé de bonne-foi à tous égards, & qu'Elles ont iait voir, tant par cette
Refolution-ïà , que par celle du 14. Janvier dernier, que pour ce qu'on
eil allé plus Loin avec la démolition d'une partie du fufdit Bailion, que
portoit la Convention, la faute en doit pour le moins être rejettée au-
tant fur celui que Son AlteiTe Electorale de fon côté avoit chargé de
l'exécution, que fur ceux qui y ont été aucoiïfez de la part de LL. ÏIÏ1.
PP. ; qu'il n'eit pas neceilaire de répéter ce qui a été plus amplement men-
tionné dans ladite Refolut.ion ; qu'Elles ne peuvent feulement fe difpenfer
de remarquer , que tout ce qu'on a allégué dans ledit Mémoire avec beau-
coup de circonitances par raport à ce qui s'eil pafle entre le Comte de
St. Maurice & le Colonel de Rochebrune : (comme l'on aurait aufîi dû
s'addrefler fur ladite démolition au Confeil de Son AlteiTe Electorale com-
me Prince de Liège, & non pas aux Etats du Païs) tombe tout à fait
quand on prend en confideration , que Son AlteiTe Electorale a recom-
mandé l'exécution de la Convention, autant qu'elle regarde la Citadelle de
Liège, aux Etats du Païs de ce nom, & par confequent le Colonel de
Rochebrune n'a pu s'addrefler à l'égard de ladite démolition qu'aux nom-
mez Etats ou à leurs Députez. Il paroit inconteftablement , que cette exé-
cution a été recommandée auxdits Etats, puifque leurs Députez ont don-
né à prix fait la démolition des ouvrages de la Citadelle de Liège de mê-
me que du vieux Bailion du Clergé, & que les conditions du prix fait ont
été lignées par ces Députez, outre que tout Sujet de plainte à cet égard
doit ceilér par ce que le Si*. Magis a inféré lui-même dans fon Mémoire
du 7. Décembre dernier, à quoi la Lettre de Son AlteiTe Electorale du
30. Novembre précèdent fe raporte expreiîement , attendu qu'on y a dit
diilinctement , que , comme LL. HI1. PP. ont renvoie l'exécution du
Traité au Confeil d'Etat, Son AlteiTe Electorale l'a envoie avec la même
intention aux Etats du Païs de Liège , d'où il paroit évidement qu'on n'a pu
s'addrefler fur ce fujet qu'aux dits Etats ou à leurs Subdeleguez, & que ceux-
ci aiant non feulement acquiefeé à la démolition du vieux Bailion du Clergé,
mais en aiant même fait le prix, on ne fauroit dire tout au plus à la -charge
de LL.HH.PP. fi non, que ceux, qu'Elles avoient chargez de l'exécution de
ce dont on étoit convenu, aïant entendu de bonne-foi que ledit Bailion étoit
compris parmi les ouvrages qui étoient à démolir, l'ont propofé à ceux
qui laifoieflt cette exécution de la part de Son AlteiTe Electorale, lefqueïs
bien loin d'y trouver à redire ont eux-mêmes fait le prix de l'Ouvrage, &
G 3 l'ont
5! MEMOIRES, NEGOT1 ATIONS, TRAITEZ, ET
A"AFho- l'ont ^ contînuef- Ete plus, que IX. HH. PP. fur la première plainte
viKCf-s- qu'on leur a faite fur ce iiijet, aïant fait ceffer la démolition, ce qu'EUes
Unies, croyent être tout ce qu'on peut leur demander , Elles font- obligées feuîe-
- nient d'ajouter, qu'on impute à tort au Colonel & Commandant Roche-
brune, que par fes Lettres au Confeil d'Etat il eût donné occafion à la
démolition du vieux Baftion du Clergé, vu qu'on peut faire voir le con-
traire par fes Lettres. Que LL. HI1. PP. efperent & s'affinent , que
Son AltefTe Electorale fe contentera à la fin des éclairciffemens fur ce
point; & Elles croient avoir de leur côté fatisfait à tous égards à la Con-
vention, étant prêtes à exécuter encore ce qui pourroit y manquer, fans
qu'EUes aient donné aucun lieu à des Plaintes auiïi vives, comme il Elles
avoient enfreint cette Convention; bien loin de-là, Elles croyent pou-
voir alléguer plutôt, que Son Aitefîe Electorale ne l'a pas accompli par
raport à divers points , dont Elles attendent encore l'exécution , mais
qu'EUes ne jugent pas neceflaire de s'expliquer à préfent plus amplement
là-deffus, ne cherchant rien plus qu'à vivre en bonne amitié avec Son
Alteffe Electorale , quand Elles rencontrent une pareille inclination, fe
contentant d'avoir démontré qu'EUes n'ont rien fait iurquoi Elles dévoient
aucune fatisfaction.
Que pour ce qui regarde les Ordonnances pour des fourages livrez dont
le payement ell dû à î'Archévéché de Cologne, LL. HH. PP. adhérent
à cet égard à ce qui a été allégué par leur Refolution du 14. lanvier der-
nier, que , lorfqu'on en pourra venir à une autre Conférence, fur la fatis-
faction de ces Ordonnances, il faudra auiïi faire réflexion fur telles con-
tre-prétentions que l'Etat a à faire de fon côté. Et il fera fait un Extrait de cet-
te Refolution de LL. HH. PP. remis par l'Agent Rofenboom entre les
mains du Seur Magis. Que de plus les Seigneurs Etats des Provin-
ces refpectives feront encore priez de fournir au Comptoir du Receveur
General une bonne & fuffilànte fomme fur leurs arrérages dans la Pétition
pour les Magazins de fourage durant la dernière Guerre ou fur le profit
de la réduction & cafïation de l'année 171 3, afin que les fufdites Ordon-
nances de fourages & autres de la même nature foient acquitées.
C 0 m m e le Refident preflbit fort le paiement des arrérages que les
Etats dévoient à l'Archevêché de Cologne pour les fourrages pendant la
dernière Guerre, ils ne defavouoient pas la dette, ni regimboient-ils à
en faire le paiement. Ils ne vouloient que quelque tems pour le faire.
Auiïi écrivirent- ils aux Provinces refpectives de la Republique. La vûë
étoit de les porter à y contribuer leurs contingens. Ils leur indiquèrent
fur quels fonds on devoit en prendre l'argent. Ce fonds devoit être fur
l'épargne qu'on avoit faite fur la réduction des Troupes , d'abord après la
Paix d'Utrecht en 171 3. La Province de Gueldres y confentit d'abord,
auffi-bien que quelques autres Provinces. Cette réduction de Troupes
n'avoit pas encore été entièrement aprouvée. Aufii le Coni&l d'Etat ,
toujours fage & prevoiant, fit-il un Avis là-deffus, qu'il prefentaaux Etats
Gène-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIlf. ss
Généraux. Cet Avis eft fi beau, qu'on trouve à propos de l'inférer ici en A^mn
Ton entier. DES p*°
VINCES-
Unif.s.
Lettre du Confcil d'Etat aux Etats Généraux , fur une
Répartition de Troupes ; du 24. Janvier 1718.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
POur fatisfaire à la Refolution de VV. HH. PP. du 17. du courant, Lettre du
nous avons formé l'Avis fuivant , pour concilier les fentimens dif- Confcil
ferens des Provinces fur l'Article des Troupes, comme il a été arrêté par d'Etat pr.
la Refolution de l'Allemblée extraordinaire du 26. de Mai dernier; eiperant tiondes"
d'autant plus qu'il trouvera de l'aprobation , que par raport à prefque tous Troupes.
les points on ell porté à l'inclination des Provinces , fans charger l'Etat en-
tier de plus que de 37124: 5: o:par an; Somme li modique , qu'elle ne
doit plus empêcher la Refolution dudit point important, & la formation de
l'Etat de Guerre.
Pour venir au propos, les fentimens differens des Provinces regardent
ou les Compagnies , ou les Regimens , qui fe forment des Compagnies.
Pour s'accommoder aux Provinces par raport aux Compagnies, pour
autant qu'elles ne conviennent pas fur ce fujet , on pourrait accorder ,
qu'il reftera à la repartition de la Province de Gueldre quarante & trois
Compagnies d'Infanterie, au lieu de quarante, ce qui emporte une aug-
mentation de trois Compagnies; aucune des autres Provinces ne. devant
être portée à caffer , pour plaire à la Gueldres , de leur repartition trois
Compagnies & de fe charger d'autres articles en place.
Qu'on gardera à la répartition de la Province de Hollande & de Weft-
Frife quatre Compagnies de Dragons de plus , & quatre Compagnies d'In-
fanterie de moins.
A la repartition de la Province d'Utrecht une Compagnie de Cavalerie
de plus, & deux d'Infanterie de moins, ou quatre Compagnies de Cavale-
rie & 45. d'Infanterie.
A la repartition de la Province de Frife pareillement une Compagnie de
Cavalerie de plus à trouver par la diminution des Gardes du Corps du
Prince de Nailan , Stadhouder , à la fomme concourante.
Et à la repartition de la Province de Groeningue de môme une Com-
pagnie de Cavalerie de plus , & deux d'Infanterie de moins, tout ainfiqu'à
la repartition d'Utrecht , ou 4. Compagnies de Cavalerie & 40. d'Infan-
terie.
Mais, pour ce qui regarde les trois Compagnies de Cavalerie, que la
Province de Zelande voudroit voir mifes fur 1 Etat de Guerre à la place
du Régiment du Prince de Wurtemberg, cela eft fi directement contrai-
re à la Capitulation & à la promette réitérée que VV. HH. PP. ont
faite par Lettre il n'y a que peu d'années au Duc de Wurtemberg, que
quel-
VINCES
Un us.
56 MEMOIRES, NEGOTIATION5, TRAITEZ, ET
Aftaires quelques portez que nous foyons à nous accommoder à l'inclination des
»Eë Pbo- Provinces indiitin&ement , afin de venir une bonne fois à un pied fixe
par raport aux Troupes , nous nous trouvons neantmoins embarafle^
d'avifer pour une affaire, qui eit fi peu à concilier avec la parole &
l'honneur de l'Etat.
Pour pafTer des Compagnies aux Regimens ou aux fentimens differens
là-delïus , & pour commencer par la Cavalerie, il faut en premier lieu
confiderer à cet égard , que les Efcadrons devraient être , fuivant la Re-
folution de l'Affemblée extraordinaire du 26. Mai de l'année dernière ,
de 4. Compagnies , fans que la Refolution dife de combien d'Efcadrons
feront les Regimens.
On a propofé ci-devant, & fpecialement le 2, Novembre 1713, de
mettre les Regimens de Cavalerie en neuf Compagnies fous un Colo-
nel, un Lieutenant-Colonel , & un Major; & on a allégué, pour rendre
cette propoiition agréable, que par-là on pourroit, outre le profit des
apointemens , diminuer confiderablement l'inégalité dans les degrés d'a-
vancement entre les Officiers de la Cavalerie & de l'Infanterie.
Mais , cette propofition , toute utile qu'elle étoit, n'étant point accep-
tée, nous joindrions nôtre Avis à celui delà Province de Hollande, qui
par fa Refolution du 27. d'Octobre dernier s'eft déclarée pour des Re-
gimens de fix Compagnies, ou de deux Efcadrons , chacun de trois
Compagnies, dont on pourra faire la repartition aufli-tôt que VV. HH.
PP. auront embraifé ce Projet conciliatoire.
2. On devroit , fuivant la fufdite Refolution du 2(5. Mai , laiiTer éteindre
les Regimens de Cavalerie jufqu'à quatorze , defquels un Etat major de-
vroit être mis fur la Gueldre , fept fur la Hollande, deux fur la Zelande ,
& un fur chacune des quatre autres Provinces.
Cette Répartition des Etats majors des Regimens s'accorde fi peu avec
la Partition des Compagnies , que les uns & les autres reliant ainfi il en
refultera, non feulement une très grande inégalité entre les Provinces, les
unes devant établir & paier deux Capitaines d'Infanterie contre un Capi-
taine de Cavallerie, les autres plus que deux Capitaines de Cavallerie con-
tre un Capitaine d'Infanterie , mais auffi un grand préjudice pour les Ca-
pitaines de Cavallerie qui font fur la repartition des Provinces de la derniè-
re forte , c'efl-à-dire , pour parler clairement , fur les Repartitions de Hol-
lande & de Frife.
Ou fi , pour lever ces inconveniens , on vouloit repartir les Compagnies
de Cavallerie fur les Provinces fuivant la fufdite Partition des Etats Ma-
jors des Regimens , il faudrait renverfer fans deiîus defibus l'entier Etat
de Guerre.
Ce qui étant très defavantageux , il n'y a pas d'autre expédient forta-
ble, à nôtre avis, que de repartir les principaux apointemens fur les
Provinces , à proportion de leur quotepart aux ibldes de la Cavallerie ,
tout ainfi que cela fe pratique à l'égard de l'Infanterie; &, par ce qu'il
ne peut pas être autrement , fi-non que quelques peu de Regimens de
Ca-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVÏII. S7
Cavallerie foient mis fur plus d'une repartition , de renouveller les Refo- AàtinÉ
lutions de VV. HH. PP. du 7. Mars 1671. , 4. Février & 28. Mars DES Pk°-
1672., lesquelles portent, que le rempliiTement des premières Charges Y*NCES*
dans les Regimens fe fera alternativement entre les Provinces. KI£S' _
Quant aux Regimens de Dragons , en cas que les quatre Compagnies qui
en devroient être caflees en confequence de la Refolution du 26. Mai ,
refbffent au fervice, comme on a avifé ci-deiTus,la fuite en feroit, que les
Dragons continueroient à faire quatre Regimens , & que par confequent il
faudroit y avoir un Etat Major de plus que fuivant ladite Refolution.
Enfin , nous ne voyons point , Hauts & PuiiTans Seigneurs , comment on
pourra faire un meilleur arrangement avec les Regimens d'Infanterie, fi-
non, que, fuppofant qu'il n'y en aura pas moins de dix Compagnies, ils
pourroient , félon la convenance des Provinces , être départis de la maniè-
re fùivante.
Sur la repartition de la Province de Gueldres , trois Regimens de onze &
un de dix Compagnies , faifant le nombre de 43 Compagnies.
Sur la repartition de la Hollande , un Régiment de Gardes & encore
deux autres, chacun de douze, & 20. Regimens de 10. Compagnies,
faifmt avec une Compagnie détachée 237. Compagnies, fans Iqs Ecof-
fois, & les SuilTes.
Sur la repartition de Zelande,un Régiment de 12 , & 5 de 10. Compa-
gnies , faifant le nombre de 62. Compagnies.
Sur celle de Utrecht , un de 12 , & 3 de 11. Compagnies , en tout 45.
Sur la repartition de Frife , un Régiment de 2 Bataillons, chacun de 12,
& encore 5 Regimens de 1 2 Compagnies , faifant 84 » auxquelles il fau-
droit encore ajouter 9 Compagnies , pour remplir le nombre que la Frife
doit payer fuivant la partition faite : mais , comme 4. de ces 9 Compagnies
font çaïTées , non pareeque la Province de Frife foûtient d'être chargée
-au de-là de fa quote-part, mais parce qu'elle foûtient de n'être point en
état de pouvoir fournir entièrement fa quote-part ; & que les devoirs ,
qu'on a faits rjour lui faire reprendre lefdites 4 Compagnies , n'ont été juf-
qu'à préfent d'aucun accès : on pourroit joindre le plus commodément les
f Compagnies, qui exiflent des 9, aux 7 de la repartition du Païs de
Drente, pour faire enfemble par provifion un Régiment de 12. Com-
pagnies.
Sur la repartition d'Over-YHel , 2 Regimens de 11, en tout 22 Com-
pagnies.
Et enfin, fur celle de la Province de Groningue , un Régiment de iS>
& 2. de 12. Compagnies, faifant, y compris une Compagnie détachée,
ou bien une qui doit encore être levée , 40. Compagnies.
Par cet arrangement , tous les Regimens d'Infanterie , à un près , feront
entièrement chacun fur une repartition, ce qui feroit à fouhaiter qu'il
fût même praticable par raport à la Cavallerie ; & l'Etat ne feroit char-
gé que de trois Etats Majors des Regimens d'Infanterie au delà du nom-
bre arrêté par la Refolution du 26. de Mai.
Tome XL H Nous
?S MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Nous nous perfuadons , que VV. HH. PP. & toutes les Provinces
des Pro- conviendront, que par ces proportions on s'eft accommodé à l'inclina-
Unie"* t^on ^'un cnacun autant °lu'^ a pu être concilié en quelque façon avec
L l'égalité & la juflice , avec la bonne-foi & le fervice du Païs ; & qu'El-
les viendront une bonne fois à une ferme & ferieufe Conclufion à l'égard
des Troupes.
Nous éfperons fur-tout, du moins nous fommes obligez en vertu de
nos charges de prier ferieufement & de recommander, qu'on prenne en
même tems de telles mefures , que les Troupes , une fois mifes fur un
pied ltable , foient tellement entretenues au nombre d'Hommes & de
Chevaux , comme elles feront portées fur l'Etat de Guerre; fans quoi
tout efl inutile, & comme on dit autant que battre l'eau, ce qui ne fauvera
pas la Republique de fa perte.
Hauts & PuhTans Seigneurs , Nous recommandons VV. HH. PP. à la
fèinte Protection de Dieu. A la Haie, le 24. Février 171 8.
Paraphé
J. H. v. Wassenaer, vt.
Plus bas,
Par Ordonnance du Confeil d'Etat des
Provinces-Unies des Païs-Bas ,
Signé ,
S. van Slingelandt. '
O n mettra ici des Affaires que les Etats avoient avec d'autres PuiiTan-
ces. On avoit en Décembre de 1717. eu une Conférence avec le Mini-
itre du Roi de Pruffe. Celui-ci y avoit propofé une nouvelle Alliance
defenfive entre les Etats & le Roi fon Maître. Les Etats y temoigerent
la bonne difpofition de la Republique. On parcourut depuis les vieux
Traitez. Cependant , on n'alla pas plus avant. On ne put auiîi rien re-
foudre fur un Mémoire de Miniflre Palatin pour régler des arrérages dûs
aux Troupes de l'Eleâeur Palatin , qui avoient fervi en Catalogne. Ces
prétendons de vieille date ne paroifïbient pas requérir une fi prompte Re-
ponfe : auffi ne met-on ici que la Copie de ce Mémoire.
Mémoire du Miniflre Palatin touchant le Paiement des
Troupes) du Samedi 22. Janvier 171 8.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
- VV* HTL ??" aiant eu la
Mcmolri \/v* ntL ^'J aiant eu la bonté d'affeurer l'Electeur mon Maître
du Mini- V parleurs Lettres du 15. Mai 1717. combien elles étoient portées à
terminer l' Affaire de la liquidation des arrérages dus aux Troupes Palati-
nes»
latin.
Ce Mémoire a été lu le Sa-
rmdt 22. Janv. 1718.
Sig
ne,
Comte de Golstëin.
E«
des Pro-
vinces-
Unies.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 59
nés , qui ont fervi pendant la dernière Guerre en Catalogne à la folde de Affaip.
cet Etat : le foulïigné Miniftre de Sadite AltefTe Electorale fuplie pour
cet effet VV. HI I. PP. de vouloir ordonner que les CommifTaires ci-de-
vant nommez, pour examiner ledit compte des fufdits arrérages, lequel
a été prefenté à VV. HH. PP. le f. Novembre 1715. par le CommilTaire
Palatin Hartman , aient à faire leur raport, & de lui en nommer en mô-
me temps , pour pouvoir ajouter les points au fujet defquels il pourroit fe
trouver encore quelque difficulté , qui pût porter du retardement à finir la
fufdite liquidation.
Un autre, qui fut prefenté par l'Envoie de Mecklembourg , eut le mê-
me fuccès. C'eft fur une fi mince pretenfion qu'on le met ici pour la
cmïofité des gens.
Mémoire de T Envoie de Mecklembourg 3 pour Paiement
de Solde; du 3. Janvier 171 8.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
OU el que Répugnance que le Soulîigné Confeiller d'Etat & Envoie Memoî™
Extraordinaire de Son AltefTe Sereniiîime le Duc Régnant de Mec- <*e }'En-
klembourg a toujours eu d'importuner W. HH. PP. il en a affeurement Meolden-
beaucoup à retoucher fi fouvent l'article du paiement d'un mois de folde bourg,
pour la marche du Régiment de Flohr , avancé par Son AltefTe Sereniflime
& négocié en ce païs-ci à grand intérêt depuis plus de 4. ans.
Le paiement d'une dette fi liquide & avérée fe trouve accrochée fur la
queftion fi l'Etat ou la Province d'Over-Yffel doit le faire ? Cette queftion
n'aiant pu jufques à prefent être décidée , ni voyant quEile faurok l'être ,
à moins qu'une des parties ne fe relâche , puifque les autres Provinces dé-
clarent de ne vouloir pas paier pour la Province d1Over-YfTel ; le SouiTigné
demande donc avec tout le reipecl: imaginable , fi W. HH. PP. trouvent .
qu'il y ait la moindre aparence de juftice, que ce feroit à Son AltefTe Sere-
nilTime Ton gracieux Maître d'en fuporter la perte ?
Certes, quelque favorable compte que leSoufligné ait rendu jufques à pre-
fent là-deffus , rien ne fauroit plus empêcher le Sereniiîime Duc de croire
que VV. HH. PP. n'aient conçu quelque mécontentement contre lui ,
& que faifant fi peu de reflexion fur ce qui le regarde , Elles en feront bien
moins fur ce qui efl dû à toute rigueur d'équité & de juftice à fes trou-
pes.
H 2 H
VINCES
Unies.
6o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aïfa-ires II ne refte donc au Souffigné que de prier inftamment VV. HH. PP.
des Pro- ^e vouloir bien trouver un expédient pour faire paier cette petite fomme
d'un fond indiffèrent, pour ne pas en charger les Provinces, & ne pas
fruflrer plus long-temps Son Alteffe SerenilTime de fon avance.
Le 3. Janvier 1718. Signé ^
VAN SANDE.
Il arriva au commencement de cette année une Affaire affez fin-
guliere & fecrete. Le Comte Gallash, Ambaffadeur de l'Empereur à
Kome, écrivit au Baron de Heems à la Haie. Le contenu de cet-
te Lettre portoit que le Nonce Aldovrandi à la Cour de Madrid avoit
écrit au Pape, pour s'excufer de ce qu'il n'avoit rien fû de l'Entre-
prife fur Sardaigne , que cela avoit été concerté avec Alberoni par l'Air -
baffadeur des Etats Riperda , du confentement fecret defdits Etats. Le Baron
de Heems en avoit parlé à quelques Membres des Etats. Ceux-ci en firent
de plaintes à l' Ambaffadeur d'Efpagne Beretti-Landi. Celui-ci fe chargea
d'en écrire à fa Cour. Il en eut bientôt la Reponfe, qu'il communiqua aux
Etats. Elle portoit, que le Nonce avoit affiiré le Roi d'Efpagne, qu'il n'a-
voit écrit rien de pareil. Sur cela, les Etats affurerent le Baron de Heems
qu'ils n'avoient jamais , ainfî que c'étoit la pure vérité , fongé à rien de pa-
reil. On foupçonna que la Cour de Rome pouvoit l'avoir infinûé au Com-
te Gallash , dans la veuë d'en rejetter le blâme fur la Republique. Quel-
ques Miniftres crurent cependant que l' Ambaffadeur Riperda pouvoit avoir
de fon Chef avancé quelque chofe de connivence avec Alberoni. Ce qui y
donnoit lieu venoit de. ce qu'on le regardoit comme un brouillon étourdi, ca-
pable de cette fauffe démarche. Auffi cela contribua-t-il , félon la penfée
de quelque Minillre , à fon rapel, qui peut-être fans cela lui auroit été refu-
fé. Il étoit vrai qu'il y avoit eu des inltances fecretes , réitérées de la
part de la Cour de la Grande-Bretagne, pour le rapeller, puifqu'il y avoit eu
des affaires , qui faifoient qu'elle n'étoit pas contente de fa conduite. Cet
Ambaffadeur avoit demandé de faire un tour en fa patrie , ou d'être ra-
pellé. C'étoit fur ce que par le decez de fon Epoufe les Affaires de fa
famille requeroient quelque foin. Cependant , bien des gens ont crû que
fon deffein n'étoit pas de retourner en Efpagne \ mais de pouffer fes idées
pour négocier le Traité de Vienne , qui fut fait quelque année après. Ces
idées lui paroiffoient d'autant plus faciles , qu'elles avoient du fondement
fur celui de la Quadruple Alliance qu'on negocioit , & qui fut conclu à
Londres la prefente année. Cependant , quelque Province ne paroiffoit pas
portée à le rapeller pour éviter la depenfe, qu'il auroit falu faire pour en-
voier un autre Ambaffadeur à fa place. Auffi , en vûë d'un tel ménage ,
n'envoia-t-on qu'un Refldent à la Cour de Portugal.
Cette Affaire du Nonce Aldovrandi donna lieu à la Province de Zelan-
de de faire faire aux Etats Généraux une Reprefentation. Elle tendait à
ûter
VINCKS-
Unies.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. Ci
ôter tout foupçon à l'avenir que les Membres des Affaires fecretes ne don- Afutre»
nent des Inflructions fecretes à leurs Miniltres dans les Cours Etrangères DES pR0
fans la connoiffance de toute l'Affemblée des Etats Généraux. Cette Re-
prefentation portoit en fubftance , que par la Réfolution des Etats de cette
Province-là du 2. Juillet 1051., il étoit arrêté que les Lettres fecretes des Mi-
niltres des Etats aux Cours Etrangères feroient en voiées au Greffier, &
qu'elles feroient remifes aux fept Députez de l'AfTemblée générale pour les our
vrir. Cependant, ceux-ci ne feroient point qualifiez, mais leur feroitau con-
traire défendu de prendre là-deffus des Résolutions. Ils feroient feulement
autorifez d'envoier de tems en tems aux Minftres de l'Etat les Réfolutions
prifes par les Etats Généraux, & autres Pièces, pour mieux avancer leurs
CommilTions. Cependant , depuis ce tems-là , & même fouvent, comme en
1656, 1668, 1671, &c. l'Autorifation étoit allée fi loin que quelques Dé-
putez avoient négocié fans la connoiffance des Seigneurs les Etats Généraux.
De forte que lors qu'on a pris des Réfolutions fans la participation des Pro-
vinces, il en eit refulté des conteftations & des proteftations , fur-tout de
la part de la Zelande, ainfi qu'il paroiffoit par la Réfolution du 1. Mars
1672. L'on en a même pris depuis , ce qui alloit contre l'ordre ôc la cou-
tume de l'Etat. Cela ne pouvoit caufer que de la diffidence & difcorde
entre les confederez. Par confequent , cela exigeoit abfolument du remède.
Comme l'on avoit attribué l'Affaire que le Comte de Gallash avoit écrit au Ba-
ron de Heems du Pape & du Nonce Aldovrandi , à une méchante Con-
duite de l'Ambaffadeur Riperda , on lui avoit accordé fon rapel. Cepen-
dant , on le chargea avant que de partir de faire des Reprefentations à cette
Cour-la. Le fujet en étoit, que le Conful de l'Etat qui étoit à Barcelonne
leur avoit mandé qu'on vouloit y rehauffer les Droits de quelques mar-
chandifes qui y alloient de la Hollande. Il avoit réitéré que ce rehauffe-
ment fe mettoit en pratique , au grand préjudice du Commerce de la Repu-
blique. Les ordres qu'on donna à l'Ambaffadeur Riperda étoient d'infi-
nuè'r à cette Cour-là, que les Etats ne pouvoient regarder ce rehauffement
que comme un extrême defavantage au commerce de leurs fujets en Efpa-
gne. D'ailleurs , que cela tendoit directement contre les Traitez qu'ils
avoient avec cette Couronne-là. Par le dernier conclu entre la Grande-Bre-
tagne & l'Efpagne, il étoit flipulé que les effets des Sujets Britanniques ne
pGurroient être fournis à des Droits plus hauts que ceux auxquels ils étoient
fournis au tems de feu le Roi Charles II. Dans le dernier Traité en-
tre l'Etat & l'Efpagne , il étoit ftipulé que les fujets de l'Etat & leurs ef-
fets jouiroient des mêmes Droits , immunitez, & exemptions que les propres
Sujets de l'Efpagne & des Nations les plus favorifées. C'efl pourquoi l'on
s'attendoit de l'équité & de l'Amitié de Sa Majefté , que ce rehauffement
à Barcelonne feroit révoqué, & qu'Elle donnerait de pareils ordres dans
tous les autres Etats dépendants de fa Couronne. L'on fit même de plus.
L'on commit des Députez pour en parler, ainfi qu'ils rirent , au Marquis
Beretti-Landi Ambaffadeur de ce Roi-là. On lui dit , que , fuivant fon Mé-
moire du 2i. Septembre paffé, il avoit lui-même aiîeuré que le Roi fon
II 3 Mai-
VINCES-
Unies.
6i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AtttàflA Maître favoriferoit le Commerce des Sujets de la Republique, & auroit à
dés Pko- cœur leurs intérêts , comme les Tiens propres , &c. Cet Ambafîadeur étant
•pris au mot ne fut que promettre par de belles paroles qu'il feroit leutr A-
vocat auprès de fa Cour. Pour éluder ce qu'on pouvoit lui dire, il alla fai-
re des plaintes au Prefident de Semaine contre le Gazettier de Rotterdam.
Celui-ci avoit inféré dans fa Gazette une Lettre fupofée être écrite par le
Sultan Ottoman au Roi fon Maître. . On lui dit en cette occafion , que ce
Gazettier avoit été réprimandé, &en avoit fait une Retraélation dans une
des fes Gazettes fui vantes. Pendant prefque le même tems on fut furpris
qu'on eut la Nouvelle que l'Amiral Efpagnol avec fix Navires de Guerre
fortant de Cadix avoit attaqué trois de ceux des Etats. Ils s'étoient can-
nonez pendant fix heures. Cette Nouvelle , qui paroiiïbit être facheufe ,
n'étonna pas dans la fuite. La raifon étoit qu'on aprit , que les Efpagnols
avoient pris les Navires des Etats pour des Algériens. On avoit enfuite
reconnu la meprife , & rentrèrent enfemble dans la Baye de Cadix. Il y
eut cependant bien de gens tuez de part & d'autre.
Comme il falut dans la fuite remplacer l' AmbafTadeur Riperda , on choi-
fit pour aller à Madrid en fa place un jeune homme apeilé Monfieur van
der Meer. Il étoit de la Magiilrature de Leide. On avoit enfuite vu que
ce choix avoit été extrêmement aprouvé. La raifon a été qu'on a vu par
fa Conduite extraordinairement fage , qu'il pofledoit toutes les bonnes quali-
tez pour s'aquitter dignement a un emploi fi difficile'. Auffi eut-on égard
à fon choix , qu'il avoit hérité de fon Père toutes les lumières pour une
conduite fort fage & prudente.
11 y avoit auffi à choilir une Perfonne, pour fucceder à T AmbafTadeur
Buys en France. Le Secrétaire , que celui-ci avoit laifTé à la Cour de Fran-
ce, leur manda qu'elle avoit nommé un nouvel Ambafîadeur pour relever le
Marquis de Chateauneuf. Ce nouveau nommé avoit été voir le Secrétai-
re. 11 lui avoit témoigné combien il étoit ravi de cet emploi. La raifon
étoit qu'il étoit auprès de la Republique. Sur cette Nouvelle les Députez
de la Gueldre mirent fur le tapis , qu'il étoit plus que tems de renvoier en-
core de la part des Etats un AmbafTadeur en France. Ceux de Zelande
& de quelques autres Provinces furent du même avis. C'étoit dans la
croiance , difoient-ils , que c'étoit de l'honneur de la Republique à ne plus
fouffrir qu'on attendit plus long-tems à y envoier un AmbafTadeur. Il fut
là-deiïus refolu qu'on écriroit aux Etats de celle de Hollande une Lettre qui
leur. fut envoiée. Elle portoit en fubfïance, qu'il s'étoit écoulé l'efpace de
deux ans après le retour de TAmbafTadeur Buys. Que l'Etat aiant le bon-
heur de vivre en une entière amitié avec la France , & étant d'ailleurs en-
tré en une nouvelle Alliance avec Elle , il étoit de l'intérêt de l'Etat que
cette amitié & cette alliance fut cultivée de fa part. A cette fin, devoit-
il avoir de fa part un Ambailadeur à cette Cour-là. Qu'il auroit été bon
avant le retour de Monfieur Buys , ou du moins immédiatement après a
d'avoir nommé une autre perfonne pour ce pofte-là. C'étoit d'autant qu'on
avoit fouvent fait entendre que cette Cour-là s'y attendoit. D'ailleurs, que
ce
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII.
63
VINCES-
Unîes.
ce feroit d'un mauvais effet de traîner d'avantage une telle nomination. Affaibfr
Par-là on donnerait une mauvaife idée de la Conftitution du Gouverne- DES Pro*
ment. Cela même à l'Amitié &à l'Alliance entre la France & l'Etat, &
derangeroit les propres intérêts de la Republique. D'ailleurs, que la Provin-
ce de Hollande étant chargée fur l'Etat de Guerre des apointemens d'un
Ambafladeur en France , il n'étoit pas raifonnable qu'elle profitât d'avan-
tage du cours de ces apointemens , pendant que d'autres Provinces
étoient chargées d'autres articles onéreux. Que comme les autres Provin-
ces vouloient pour cette fois avoir la complaiiance de déférer à la nomina-
tion qu'elle feroit d'une perfonne propre pour un tel emploi , éclatant &
important, on s'attendoit à une telle nomination. Elle feroit pefée félon
la haute iageffe des Etats de la dite Province , qui verroient & feroient
convaincus de la neceflité, que cette nomination ne pouvoit fouffrir un
plus long délai. C'étoit pourquoi l'on s'attendoit qu'ils propoferoient , tant
plutôt tant mieux , quelqu'un pour le revêtir de ce cara&ere-là , ou du
moins d'autorifer leurs Députez d'en convenir avec ceux des autres Pro-
vinces.
Extrait des Refolutions de LL. HH. PP. pour envoler
un Ambaffadeur en France ; du Mercredi 19. y an-
vier 1718,
LE s Sieurs Députez de la Province de Gueldre reflechiflant fur laLet- Rcfolu-
tre du Secrétaire Skeltus, par laquelle il donne connoiflànce à LL. tiond'en-
HH. PP. qu'on a accordé au Seigneur Marquis de Châteauneuf Ambafla- 4°'?r!j-n
deur de France de pouvoir retourner, & que le Seigneur deMorviile étoit deur'en"
nommé pour venir ici en qualité d' Ambafladeur en fa place, ont donné France,
en confideration à LL. HH. PP. s'il n'étoit pas plus que temps de ren-
voier encore de la part de l'Etat un Ambafladeur en France , & de nom-
mer pour cela quelqu'un fans plus de délai ; déclarant que, pour cette fois ,
ils vouloient bien déférer cette nomination à la Province de Hollande &
de Weil-Frife; mais avec cette amiable & preflante demande, qu'Elle ne
veuille pas différer d'avantage à choifir pour cela une perfonne propre &
capable pour la propofer à LL. HH. PP. à Jaquelle propofition les Sei-
gneurs Députez de la Province de Zelande & des autres Provinces fuivan-
tes fe font conformez, étant tous enfemble dans la croiance que l'intérêt
aufti bien que l'honneur de l'Etat ne peuvent plus fouffrir que l'on attende
plus long-temps à envoier un Ambafladeur en France. .
Sur quoi aiant été délibéré, il a été trouvé bon & arrêté, qu'il feroit re-
prefenté par Lettres aux Seigneurs Etats de Hollande & de Welt-Frife ,
qu'il s'eil écoulé l'efpace de 2 .ans que le Sieur Buys efl revenu de
l'Ambaffade de France. Que l'Etat aiant le bonheur de vivre en une en-
tière amitié avec Sa Majeilé de France, & d'être par deflus entré dans
une nouvelle Alliance avec Elle, il ell de l'intérêt de l'Etat, que cette
. amitié
Affaîrf.s
des Pro-
vinces-
Unies.
64 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ, ET
amitié & alliance foit cultivée de la part de l'Etat en toutes leurs parties ;
& à cette fin eit-il tenu d'avoir un Ambaffadeur de fa part à la Cour de
France. Qu'il auroit été bon avant le retour du Sieur Buys , ou du
moins immédiatement après, on eut nommé & commis une autre perfonne
propre pour ce pofte-là. Qu'on a plus d'une fois fait entendre à LL. HH.
PP. qu'on s'y attendoit de la part de la France, & que c'étoit d'un mau-
vais effet, que la délibération fur cela ait û long-temps trainé. Que de la
part de la Province de Hollande. & de Weil-Frife aiant été témoigné de
l'inclination d'en nommer quelqu'un parmi eux , les autres Provinces ont
bien voulu avoir la complaifance pour Elle d'attendre pour cette fois une
nomination d'une perfonne propre d'entre ceux de fon Corps. Cepen-
dant, qu'il étoit déformais le temps, & même plus que temps, qu'il foit
prife là-delfus une finale refolution, attendu que cette affaire ne peut pas
refier plus long-temps fufpenduè"; fans, au defavantage de l'Etat, donner
une méchante idée de la Conititution de fon Gouvernement ; fans nuire à
l'amitié & à l'alliance , qu'il y a entre la France & l'Etat ; & fans déranger
les propres intérêts de l'Etat. D'ailleurs, que la Province de Hollande
c'tant chargée des apointemens d'un Ambaffadeur en France fur l'Etat de
guerre , ii n'efl pas raifonnable qu'Elle profite d'avantage du cours de ces
apointemens , pendant que par contre d'autres Provinces font chargées
d'autres articles. Que LL. HH. PP. efperent & s'attendent que lefdits
Seigneurs Etats pefant le fait avec leur haute fageffe , feront convaincus
que la nomination & l'envoi d'un Ambaffideur en France ne peut point
fouffrir un plus long délai. C'eft pourquoi LL. HH. PP. prient amiable-
ment, auffi bien qu'initamment,"que lefdits Seigneurs Etats veuillent, tant
plutôt tant mieux, propofer quelqu'un pour revêtir du Caractère d' Am-
baffadeur en France; ou d'autorifer les Sieurs leurs Députez pour choifir
pour cela, avec ceux des autres Provinces, une perfonne propre, & qui
ait les qualitez requifes.
Comme ces Etats de Hollande fe feparerent , leurs Membres fe chargè-
rent de fe faire inflruire là-deffus par leurs Villes refpeclives. A leur re-
tour dans l'Affemblée fuivante , ces Etats-là nommèrent pour cet Emploi
Monfieur Hop , Fils du Treforier General. Us firent porter ce choix à
l'Affemblée de la Généralité, qui fut unanimement aprouvé. Ce nouveau
nommé étoit déjà comme Echevin dans la Magiftrature de la fameufe Vil-
le d'Amflerdam. Il avoit toutes les qualitez , pour bien s'aquiter de cet
emploi. La fageffe & la prudence avoient prévenu fon âge. On étoit
convaincu qu'il avoit une grande étendue de lumières ; une pénétration fur-
prenante , & im zèle éloigné de toute diffimulation pour le bien& l'avanta-
ge de fa Patrie. On lui donna , comme de coutume, une Commiffion pour
prendre feance de la part de ces Etats de Hollande à l'Affemblée de la Gé-
néralité. On convint de lui donner trente mille florins par an d'apointe-
mens. Il devoit d'ailleurs dreffer en compte les fraix extraordinaires. C'étoit
fuivant un Règlement de l'Etat par raport à les Miniitres dans les Cours
Etran-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII.
6^
Etrangères. On ajoutera ici par anticipation , que comme les Etats de Affaire
Hollande ne font jamais rien qu'avec la plus grande fageiTe, au retour de DES ,>rt°-
Monfieur Hop de cette Ambaffade-Ià , ils nommèrent pour y lucceder Mon- u^cEts*
f]eur van Hoye , qui a fait voir dans les occafions les plus difficiles , qu'il '__
poffedoit aulîi des qualitez pareilles à fon Predeceffeur. L'on ne doit pas
s'imaginer que ce qu'on dit foit une flatterie , puis que n'aiant aucune re-
lation à ces deux Ambafladeurs, on ne fait que dire la vérité.'
Par raport au rapel du Marquis de Chateauneuf , Ton trouvoit qu'il
fbrtiroit de fon Ambaflade avec aplaudiffement & avec tous les agré-
mens les plus fatisfaifans. En premier lieu , de la part des Etats on lui
temoignoit toute la fatisfaction poiïible. En fécond lieu , il avoit tout
fujet de fe louè'r de fa Cour. Le Prince Régent lui témoigna par une
Lettre , que c'étoit à regret qu'on deferoit à (es infiances pour être rapel-
le , puifque la Cour étoit très-contente de bons fervices qu'il lui avoit ren-
dus. Qu'on augmenteroit la penfion viagère qu'il avoit de fix à douze
mille livres , qu'il auroit la première place vacante dans le Confeil d'Etat ;
qu'on l'indemniferoit des grands rabais qu'il avoit foufferts par le change
des fommes qu'on lui avoit fait toucher , & qu'on lui fourniroit de quoi
s'aquitter de fes dettes. C'étoit afin de ne pas donner lieu à fes créan-
ciers de crier après lui, ainfi qu'il étoit arrivé à l'Ambafladeur de Mofco-
vie Matueoff, qui avoit fait une Efpece de Banqueroute en partant de
la Haie.
Puifque l'on efl furie Chapitre des Ambafladeurs, il fera bon dédire
qu'on a déjà dans quelqu'un des derniers Tomes de ces Mémoires raporté
une Affaire, auquel lieu l'on fe raporte. On ajoutera feulement , que c'é-
toit qu'on avoit pris une Refolution de retrancher le defraiement pendant
trois jours aux Ambafladeurs Etrangers lors de leur Entrée publique , &
de leur faire prefent de mille Ecus au lieu de la depenfe. Cela n'avoit
pas eu lieu par l'opofition qu'il y avoit eu de la part de quelques Ambaf-
ladeurs , comme de la part du Prince Kourakin & du Marquis Beretti-
Landi. Ceux-ci avoient fait grands préparatifs pour leur Entrée. Ceux-
ci ne fervirent de rien, parce qu'ils ne vouloient pas fe foûmettre à don-
ner un exemple contre la pratique ordinaire. Auiïi comme l'on atten-
doit le nouvel Ambafifadeur de France les États prirent la Refolution de
remettre ce point du Cérémonial fur l'ancien pied, ainli qu'il étoit prati-
qué auparavant. C'ell ainii qu'on peut voir par la Refolution mê-
me que voici.
Extrait du Rcgi/lre des Rcfolutions de LL. HH. PP.
pour remettre Jur P ancien pied k Traitement des Am-
bafladeurs; du Lundi 14.. Mars 1718.
PA r reafïumtion étant délibéré fur le raport des Sieurs Hazenbroeck Traite-
& autres Députez de LL. HH. PP. fur les Affaires des Finances , aiant ™™£J™
en confequence , & pour fatisfaire à leur Refolution Commiflbriale du 19. <jeurs.
• l'orne XL I de
VINCES-
Unies.
66 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Attuv.es de Janvier dernier, examiné avec les Srs. Députez du Confeil d'Etat &de
tes Fro- ia Chambre des Comptes, comment feroit pour l'avenir réglé le Traitement
des Ambalîadeurs des PuilTances étrangères à leur Entrée : il a été trouvé
bon & arrêté, que le Traitement des Ambaffadeurs des Puiffanees Etrangè-
res fera fait fur le pied, qui a été jufques ici en ufage. Et lefdits Sieurs Ha-
zenbroeck & autres Députez de LL. IIH. PP. fur les Affaires des Finan-
ces font par celle-ci requis & commis, pour, conjointement avec les Sieurs
Commis du Confeil d'Etat & de la Chambre des Comptes de la Générali-
té à être nommez par eux-mêmes , examiner de quelle manière un tel Trai-
tement pourra être fait , avec le meilleur ordre & ménage , fans amoindrir
l'honneur de l'Etat , d'en faire le raport de tout à l'Affemblée.
Les Sieurs Députez de la Province de Zelande ont déclaré, que, fui-
vant leur avis, par laRefolution prife de ne point traiter les Ambaffadeurs ,
on de voit y perfifler, & ont contredit à la Refolution ci-deffus.
Une Affaire , qui étoit fur le tapis en ce même tems-là , fut que le Mini-
lire de la Pruffe , avoit depuis quelque tems fait des plaintes contre la
Compagnie de Hollande des Indes Occidentales. Elles étoient,tant par
raport à un Navire qui avoit été pris par une Fregatte de cette Compa-
gnie-là fur les Côtes d'Afrique, quoi que fans Pavillon de ce Roi-là, il y
avoit environ deux ans ; que par raport à deux Chaloupes prifes & amenées
à Curaçao fur la fin du fiecle dernier. Ce Miniftre fut tout d'un coup
tranquille là-defîus, & fit celTer fes plaintes. La raifon étoit que ce Roi
fit la ceffion de fes Forts fur les Côtes d'Afrique à la dite Compagnie.
Cette ceffion étoit moiennant une fomme d'argent fur la main, & une au-
tre lors que la Compagnie feroit en poffelTion de ces Forts-là. D'ailleurs,
ladite Compagnie devoit faire prefent à ce Roi de douze Nègres de haute
ftaturc, dont fix auroient chacun un Colier d'Or. Ce Roi vouloit leur faire
aprendre à jouè'r à la tête de fes Grands Grenadiers. •
• Cette Affaire étant finie , il en fut remife une autre fur le tapis. Il y
avoit quelque année qu'elle duroit. C'elt ainfi qu'on en a parlé en divers
lieux des Tomes precedens.il s'agiffoitde la reprilè que des Zelandois avoient
faite fur les François d'un Navire Anglois apelle Nagtingal Galley. Les
intereffez dans le Navire repris avoient demandé que le Miniftre Anglois
Withworth eut une. Conférence pour un Accommodement avec les Capi-
taines Zelandois. Cette Conférence avoit été accordée. Cependant , les
Députez de la Zelande n'y avoient confenti qu'à condition qu'on n'y par-
leroit que fur le pied d'une Propofitiou de leur Province du 21. Septembre
précèdent. Celle-ci ne rouîoit cependant point contre cette Affaire particu-
lière, mais elle étoit générale contre tous lesReclamans de Navires; même
ceux de France pris après la Paix d'Utrecht. Quoique Je Miniltre Anglois
eut prefenté là-deflus un court Mémoire , il n'y eut pour lors aucune fuite.
Les Etats avoient reçu en Février de l'année précédente 1717. une Let-
tre du Grand -Seigneur. Elle rouîoit fur le deffein de la Paix entre la
Porte & l'Empereur. Le Prince Eugène avoit reçu la Pyeponfe à une qu'il
avoiç
VINCES»
Unies,
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 67
avoit écrite au Premier Vifir. Cette Reponfe portoit que le Sultan Ot- Amins'i
toman vouloit la Paix. Il laifToit au choix de l'Empereur une de 3. Fia- DES Pr°-
ces qu'il indiquoit. Cette Paix devoit être négociée par les Miniftres
d'Angleterre & de Hollande. On aura vu plus haut , que Venife y en-
voioit auffi un Minillre. Après quelques Conférences entre les Etats , il
fut refolu de faire une Reponfe au Sultan. On remit celle-ci , ornée de
riches agréemens , au Secrétaire du Comte Collier Ambafladeur de l'Etat
à la Porte , qui avoit aporté cette Lettre-là , & qui s'en retournoit à
Conftantinople. Ce Secrétaire étoit chargé de quelques InftrucHons
pour ledit Comte touchant ladite Comediation de l'Etat avec la Gran-
de-Bretagne.
Ce n'étoit pas avec médiation , qu'on devoit négocier avec la France
pour la reftitution des Deferteurs refpeclifs. La propofition en avoit été
taite quelque tems auparavant par le Prince Tingri. Les Etats n'y re-
ginberent point d'abord ; fi-non en difant , qu'on devoit en faire une Con-
vention de concert avec le Marquis de Prié , par raport auffi aux Trou-
pes Impériales. Le Prince Tingri y aiant donné les mains, la pro-
pofition fut envoiée au Prince Eugène, comme Gouverneur-General du
raïs-Bas Autrichien. Ce grand Prince y aquiefça d'abord. Il remit au
Marquis de Prié la Nomination d'un General pour faire la convention avec
le Prince de Tingri de la part de la France, & avec le General Murray de
la part des Etats de la Republique. Le Marquis nomma de fa part le Ge-
neral Vrangel. Les Etats , en envoiant leurs Pleinpouvoirs au General
Murrai pour traiter là-defllis avec celui nommé par le Marquis de Prié , fi-
rent quelques EclairciiTemens. On trouva à propos de les faire , pour évi-
ter des Difputes. Pour cela , il faloit faire quelque changement au projet de
la Convention. Comme les Etats n'avoient point d'Intendans , ni de
CommiiTaires de Guerre , ni de Receveurs dans les Places de la Barrière ,
& même les Troupes de l'Etat n'étant pas directement paiées , mais bien par
les Provinces de la Republique fur lefquelles elles étoient reparties, ils
trouvèrent à propos de régler la recompenfe à ceux qui livreraient des
Deferteurs : ainfi , elle feroit d'abord paiée pour ceux des Regimens qui s'y
trouvoient en garnifon. Cependant, pour ceux des Regimens qui feroient
ailleurs, on écriroit d'abord au Commandant de la Pace, où les Regi-
gimens feroient, afin de faire fans délai paier cette recompenfe, & qu'en
attendant les Deferteurs feroient gardez en prifon. D'ailleurs , que les paï-
fans des Villages , qui contreviendroient à ce qui avoit été conclu , favoir qui
favoriferoient des Deferteurs , ou achèteraient d'eux leur dépouille, ou la
monture , feroient jugez fans autre forme par devant le Gouverneur ou
Commandant par deux Commiffaires de la Juftice ordinaire, conjoincle-
ment avec deux du Confeil de Guerre.
On jugea vers ce tems--là une Irrégularité fcandaleufe. Elle étoit arrivée
dans l'Églife Reformée de St. Jean-Steen dans la Flandre I lollandoife. Le
Miniftre Proteflant , n'aiant pûfe rendre un jour à l'Eglife, pour être retenu
au lit par la fièvre , le prétendu Seigneur de ce lieu , après avoir fait fonner
I 2 P*r
68 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires par trois fois les cloches, fit faire lale&ure de quelques Chapitres de l'E-
de8 Pro- criture Sainte. Enfuite, il fit chanter un Pfeaume. Après cela, il fit lire par
vinces- je Maitre d'Ecole le Formulaire du Bateme , & avoit fait batifer par le même
un enfant d'un Diacre. Le Confiftoire de cette Eglife-là repreienta aux
Etats le Scandale que cette Procédure énorme & inouïe avoit caufé aux
Spectateurs , dont partie etoit Catholique. Par-là , il y avoit de la néceffi-
té de reparer le Scandale, & de prévenir à l'avenir de pareils Defordres
contre la pratique inaltérable de la Religion Reformée. Les Etats, extrê-
mement zelez pour leur Religion , donnèrent d'abord un ordre au Com-
mandant de Huilt. Il portoit de faire arrêter par main forte , tant le Sei-
gneur, que le Maître d'Ecole, & le Père de l'enfant. Enfuite, de les faire
amener à Ilullt, de les y tenir fans accès, & de les livrer au Confeil de
Flandres à Middelbourg. On chargea le Fifcal du Confeil de Flandres de
fe tranfporter à Hulfl & à St. Jean-Steen, pour s'informer de tout, & de
procéder fans connivence contre lefdites perfonnes fur la téméraire profa-
nation du Service Divin. Enfuite , d'en procéder au Châtiment félon les
Placards de l'Etat & de la Juflice. Ces ordres furent exactement exécu-
tez. Cependant, les prifonniers firent prefenter une Requête pour être élar-
gis des prifons fous quelques auditions. Les Etats , toujours bons & pi-
toiables , panchoient a la douceur. Ils aprouverent une Sentence aufli mo-
dérée. Le Seigneur devoit demander pardon à la Juflice à genoux , &
paier une Amande fort modique.
L'on ne pancha pas à la douceur par raport au regimbement de quelques
perfonnes commifes dans les differens Collèges de la Republique. C'étoit
par raport à prêter les Sermens. Ils ne vouloient le faire fur les Inflruc-
f ions arrêtées par le Confentement commun des Provinces , mais feulement
félon la Pratique qui en étoit différente. Cette affaire fut prife en confi-
deration. On trouva que l'on ne devoit pas admettre ce changement.
Laraifon étoit que l'Inflruélion , & non la Pratique, devoit être la Règle,
à laquelle l'on devoit fe foûmettre. Cela étoit même fuivant une Refolu-
tion du 10. de Juillet 1671, pour ôter tout ferupuîe ou tergiverfation.
C'étoit puifque que le Serment qui devoit être fait fur les Inflruclions du
Confeil d'Etat de la Chambre des Comptes de la Généralité , & des Collè-
ges de l'Amirauté, il y avoit pour cela une Claufe. Elle portoit que ceux
qui feroient commis dans quelques-uns de ces Colleges-là devroient fe ré-
gler fuivant l'Inflruélion , comme un fidèle Confeiller devoit faire. Par
ladite Refolution il étoit aufli arrêté , que le Serment feroit pris en conformi-
té & fans exception. Auffi les Etats Généraux refolurent-ils , qu'à l'a-
venir le Serment devoit être prêté en conformité de ladite Refolution &
fans exception. Ainfi l'on n'admettroit nullement qu'on fe raportât à la
Pratique. C'étoit pourquoi ceux, qui feroient quelque difficulté pour prê-
ter le Serment flir le pied arrêté , feroient renvoiez.
Ce fut fur l'exactitude de femblables ponctilles, qu'il y eut bien des
embarraz & des difficultez. Cela vint à l'occafion de quelque Procédure
du Confeil d'Etat contre un Jiommé André Kaan. Il étoit Receveur des
Do-
DKS Pkc>-
TINCKS-
Un'ils.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 69
Domaines & autres Revenus de la Ville & Verge de Menin depuis fa der- Affa
niere réduction. Il étoit actuellement Député de la Province de Zelande dks
à FAHemblée de la Généralité. Il étoit accufé de malversation, & de s'être
aproprié & partagé partie de ces revenus-là , & d'avoir connivé avec les
Fermiers. Une veuve d'un Commis d'un Fermier demanda au Confeil
d'Etat un Aéte d'Impunité , tant pour elle que pour feu fon Mari. Lui
aiant été accordé , Elle produiiit diverfes preuves^ de cette malverfation
de Kaan. Le Confeil d'Etat, les aiant examinées, prononça le 4 de
Février une Sentence contre lui, le déclarant incapable d'aucun em-
ploi , & le condamna à une amende , ainû qu'on peut voir la Sentence mê-
me qu'on infère ici.
Sentence du Confeil d* Etat des Provinces- Unies des P aïs-
Bas 5 contre Maître André Kaan j Receveur des
Domaines £•? Droits dans la Fille £«? Banlieue de Me-
nin; du 4. Février 1718.
DAns la Caufe pendante devant le Confeil d'Etat des Provinces-Unies Sentence
des Païs-Bas , entre Maître Jaques Surendonck comme Spécialement de Kaaq.
autorifé & commis à foùtenir le droit de la Généralité contre Maître An-
dré Kaan Receveur des Domaines & autres Droits dans la Ville & Ban-
lieue de Menin , & en cette qualité impétrant de mandement & deman-
deur en cas criminel d'une part; & ledit Maître André Kaan afîigné &
défendeur dans le même cas , de l'autre part ; le Confeil , aïant vu & mû-
rement examiné toutes les pièces & productions mifes au grefe , & aïant
de plus fait attention fur toutes les circonftances qui en meritoient & qui
pouvoient mouvoir , faifant juflice , dépofe l' Afîigné de fa dite charge de
Receveur des Domaines & autres Droits dans la Ville & Banlieue de
Menin , le déclare infâme & inhabile à tout Emploi , & le condamne dans
une Amende de quinze mille florins au profit de la Généralité , de même
qu'aux fraix de juftice & aux dépens du procès , à taxer & modérer par
Leurs Nobles Puiflances. Et vu que l'Aiïigné dans fon écrit fecret d'aver-
tiffement de droit, lequel il a délivré au Confeil, ligné de fa propre main,
& l'aïant en même teins fait imprimer l'a divulgué par-tout , a ôfé , entre
autres menteries grolîières & directement contraires à la bonne-foi , accu-
fer très-calomnieufement l'Impétrant par les l'Art. 201. 202. que le 4.
Décembre 1709. il a propofé au Confeil par un Mémoire d'offrir impuné-
ment de l'argent aux témoins pour obtenir diveifes chofes : alléguant dans l'art.
203. pour preuve de cette calomnieufe Accufation, & produifant fur fon
inventaire fous la lettre m. 1 . loco , une Refolution du Confeil du dit 4. Dé-
cembre 1709. par laquelle Leurs Nobles PuiiTances ont accordé la deman-
de ou la propofition de l'Impétrant, laquelle tendoit uniquement à pro-
curer à la veuve du défunt Germain Ferier , de fon vivant Commis de
I'Admodiateur Joffe Farafvn, & aïant eu en cette qualité dans la Ville de
I 3 Me-
70 memoip.es, negotiations, traitez, et
Affaires Menin , après lli réclusion, la principale direction des admodiations &
des Pho autTes entreprifes du même Farazyn , en cas an elle découvrît fincerement ce
Unies. îul lul ^t0li connu ton chant ceux , qui contre leur devoir avaient eu part £s? inte-
. têt dans les admodiations & entreprifes de Farazyn , & ce qui en dépend '; & en
cas que pour la même fin elle dénonce àt 6? remit fans réferve à Maître Nicolas
Saldenus toutes les Lettres du Receveur Kaan , de Jean & Joffe Farazyn &
d" autres , de même que tous les autres papiers quelle a eu après la mort de fon
Mari entre fes mains, & qui fervent à découvrir les perfonnes & les intrigues
-de ceux qui dévoient avoir eu part & intérêt dans lefditcs admodiations & entre-
frifes-, non feulement un Acle d'impunité y pour autant quelle ou fon Mari défunt
pourraient en être complices ; mais aufjî outre cela fi conformément aux placards
du Païs^ la promefje d'une certaine récompenfe, pour l'exhibition de telles preu-
ves , par oit les perfonnes & les pratiques des intereffez dans les admodiations
& autres entreprifes pourraient être découvertes ; &? que fon nom fer oit tend ca-
ché. Et y apliquant dans une longue fuite d'autres articles les fentimens
des Jurisconfultes fur la corruption des témoins par argent, concluant enfin
parfaire fentir aflbz clairement dans l'art. 242. & les trois fuivans, con-
tre la confiante vérité ëc contre fa confeience , que les perfonnes nom-
mées dans lefdits Articles , favoir du Pleffis , Domiceur , & Deleporte ,
avoient été païées pour le témoignage qu'elles avoient rendu contre l'Af-
figné. Le Confeil déclare donc, que ce font des Calomnies atroces, fau£
fes , fcandaleufes , & qui réjailliflent fur l'honneur du Confeil & de la Jufti-.
ce , & condamne l'Ailigné pour cette caufe à une Amende de mille florins
au profit des pauvres. Ainfi prononcé à la Haie le 4. Février 17 18.
Et oit Paraphé :
E. S. B. V. Golstein, vt.
Plus-bas : par ordre du Confeil d'Etat.
S. VAN Slingelandt.
Ce, Condamné prefenta des Ecrits de Droit fignez de fa main au
Confeil d'Etat. Il s'oublia à imputer diverfes chofes à celui qui par or-
dre le pourfuivoit. Il y fit même réfléchir quelque chofe d'offenfant au
Confeil d'Etat. C'eft pourquoi on déclare ces imputations pour .calom-
nies atroces, famTes, fcandaleufes, & fort reflechiifantes à l'honneur du
Confeil d'Etat. Ce Criminel demanda deux jours après à la Généralité
un Apel,. ou Revifionde cette Sentence. Il y eut là-defius de forts Dé*
bats. Il fut enfin refolu de vifiter les Retroatla. Il y avoit cependant
une Refolution prife, fi l'on ne fe trompe, en 1666., par laquelle une
pareille Revifion avoit été refufée. L'on ne fembloit cependant pas difeon-
venir qu'on ne pût lui accorder une Revilion. Le point étoit, îi l'on pou-
voir
RESOLUTIONS D'ETAT, M. VCC. XVIII.
i *
voit lui accorder l'Apel qu'il demandoit. La différence qu'il y. avoit en-
tre la Revifion & l'Apel étoit , que (i l'on accordoit feulement la Revifion
de la Sentence , il auroit falu que le coupable fe fut fournis à l'exécution
de la Sentence, & qu'il paiàt les Amendes. Au lieu que, par l'Apel
l'exécution reltoit fufpenduë jufques à une ultérieure Decilion. Quelques-
uns vouloient qu'il y eut des exemples pour & contre. Mais , la Rdblu-
tion prife par les Etats de Hollande en 166$. ou 66. portoit que l'Apel
en de pareilles occalions ne feroit jamais accordé. D'ailleurs, que fi dans
l'Affemblée de la Généralité , on venoit à l'accorder , les Députez de la
Hollande protefteroient contre. Il ne fut pas befoin alors d'une telle Pro-
testation. La raifon étoit par ce que l'Apel ne fut pas accordé. Même
les autres Provinces ne s'étoient jamais expliquées depuis fur ce que la
& Groningue , étoient pour l'accorder. Celle d'Utrecht , qui devoit don-
ner le poids à l'Affaire ne s'expliquoit pas. Même les Membres de cet-
te Province-là ne convenoient pas entr'eux. On donna cependant à
ce Condamné une furfeance de l'exécution de Ja Sentence du Confeil.
C étoit jufques à ce que ledit Confeil d'Etat eut donné fonAvis la-deffus
par écrit. Les gens foutenoient qu'un tel Apel étoit incompatible avec la
Conftitution du Gouvernement de la Republique. L'Avis du Confeil
d'Etat avec d'autres Pièces font les fuivantes.
Affaires
des Pko-»
vincfs-
Unif.s.
d'Etat
une E. G.
Lettre du Confeil d'Etat aux Etats Généraux ; dû 14.
Fevïer 171 S.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS.
Ôus avons reçu la Réfolution de VV. HH. PP. du 12. Décembre, Lettre du
par laquelle il leur a plu de requérir notre Raport fur une Requête de Confeil
Maître André Kaan , ci devant Receveur des Droits domaniaux & autres
à Menin, demandant Mandement en cas d'apel avec la claufe d'inhibition
de la Sentence par nous prononcée contre lui le 4. Décembre , comme aulli
raport furune Déduction qui tend à prouver que le droit d'apel avec inhibi-
tion, doit competer à l'Affemblée de VV. HH. PP. à l'égard des fenten-
ces du Confeil d'Etat ; & par laquelle Réfolution Elles acordent en atten-
dant, & jufqu'à ce que notre Raport ait été délivré, furfeance de toutes
procédures d'exécution de la dite Sentence.
Nous ne faurions cacher à VV. HH. PP. la furprife que cette Réfolu-
tion nous a caufée , pour autant que l'exécution de notre Sentence y a
été furilfe.
Non feulement , par ce que cette Réfolution, quant à ce point, eu: di-
rectement contraire à celle que VV. HH. PP. ont prife le <?: de Septem-
bre
V1NCES
Unirs.
72 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aftairks bre 1705. par laquelle Elles ont déclaré, qu'à l'avenir aucune furfeance ne
ois Pro- fera plus accordés contre le Confeil d'Etal avant d'avoir reçu [on Raport fur
'V Affaire dont il s'agit-, ce qui n'a pas été obfervé en cette occafion.
Mais principalement, puifque depuis l'année 16 $7. où le dernier Apel
a été accordé , ou , pour mieux dire , rétracté après avoir été accordé , il
n'y a plus d'exemple qu'aucun Apel , ni même quand il a été demandé &
qu'on a pris du tems pour délibérer là-defTus , aucunes furféances aient été
accordées , malgré les fortes initances qu'on a faites pour cet effet.
Nous n'avons pas befoin d'autre preuve pour ce dernier point, que
l'exemple de la veuve du Commis Isbrand de Noortwyck , qui aiant de-
mandé dans l'année 16^3. Apel d'une Sentence de ce Confeil, & depuis
édit de pénalité contre l'exécution qui en avoit été faite pendant les Déli-
bérations de LL. HH. PP. , ne pût obtenir ni l'un ni l'autre , malgré tou-
tes les initances qu'on faifoit pour cet effet , comme bien des gens s'en fou-
viennent encore: & VV. HH. PP. ont fans doute déjà relu leurs Réfolu-
tions prifes à ce fujet le 22., 24. & 29. de Janvier , le 9. & 13. de Fé-
vrier 165)3.
Pour ne point parler de l'exemple de Marcelis Thiens dans l'année
1658. l'unique , qui, outre celui de la veuve du Commis Noordwyk , eft ar-
rivé depuis l'année 1657. mais nous le paifons fous filence, puis qu'il ne
paroît pas que Marcelis Thiens ait tâché d'arrêter l'exécution.
Nous avons été d'autant plus furpris de cette furfeance extraordinaire,
qu'elle femble avoir été accordée fans le moindre befoin apparent.
Nous fupofons que l'intention n'eit point de faire durer la furfeance plus
long-tems que jufqu'à ce qu'on ait reçu notre raport ; car autrement une
furfeance qui, lî l'on en a envie , peut être étendue à perpétuité , & con-
tre la quelle il n'y a point de rémede de Droit , feroit bien plus préjudicia-
ble & de plus mauvaife confequence pour nous , qu'un Mandement d'Apel
avec inhibition.
Mais , fi l'intention de ne faire durer cette furfeance que jufqu'à ce
que notre raport ait été délivré , on n'avoit qu'à requérir le Confeil d'Etat,
s'il étoit neceffaire , de fufpcndre jufqu'à ce tems-là l'exécution de la fen-
tence , au lieu de la furfeoir de pleinde autorité , & de faire infinuër par
♦ïm Huiliier de VV. HH. PP. l'Acte de furfeance à la partie , avant même
qu'il en fût donné connoiflance au Confeil.
Nous difons , s'il étoit neceffaire , puis qu'il y avoit lieu d'attendre de la difere-
tion du Confeil , que lui étant demandé raport fur l'apel , il ne précipite-
roit pas l'exécution avant d'avoir fait ce raport , d'autant qu'il efl connu
qu'on n'y fauroit procéder fi vite , puifque le Condamné, étant habitant
de la Province de Zelande , n'eit pas exécutable fans attache à la
Sentence.
Mais , ce qui nous paroît digne de réflexion au fujet du but de la fur-
feance, & qui par conséquent nous oblige d'autant plus à indiquer le tort
qui nous eft fait par-là, eft, que nous ne faurions comprendre à quoi
doit fervir le raport à l'égard duquel la furfeance a uniquement été accor-
dée.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 73
dée, après que VV. HM. PP. fe font fait lire pendant plufieurs jours de
fuite les RetroaSla fur le point d'Apel des Sentences du Confeil d'Etat, &
entre autres indubitablement auiîi un .Raport du Confeil , & un Avis de la
Cour de Hollande, l'un & l'autre de l'année 1658. dans les quels il a été
prouvé amplement &folidement, que ces Sentences ne font point fujetes à
Apellation; & après que VV. HH. PP. félon leur prudence & attention
ordinaire n'ont pu. manquer de faire là-dciTus les quatre juftes Réflexions
Vivantes.
Premièrement, que du tems où il étoit permis d'interjetter quelques-
fois Apel, les Srs. Députez à l'Aflemblée de VV. HH. PP. auiîi-bien qu'au
Confeil d'Etat, doivent avoir eu point ou peu de connoLTance de la ma-
nière de procéder en cas d'Apel & de Révifion.
-Car à quoi peut-on attribuer autrement , l'Apel étant un moïen ordi-
naire de Jultice, que VV. HH. PP. n'en ont point accordé fans deman-
der auparavant Raport du Confeil ? Que le Confeil entroit fouvent dans fes
Raports dans les mérita caujœ? Que LL. HH. PP. , après avoir vu le Ra-
port du Confeil, ont refufé plus d'Apels qu'ils n'en ont accordé? & que ce
refus eiï tellement régardé pour une Décilion en dernier reffort , qu'il n'y a
pas d'exemple qu'on ait après cela demandé Révifion ? Toutes ces chofes
paroîtroient certainement étranges à tout autre Tribunal d'Apel.
Et à quoi peut-on attribuer autrement , qu'après que dans l'année 16^6.
ia Province de Hollande, à l'occafion dune Surieance accordée par VV.
HH. PP. contre l'exécution d'une Sentence du Confeil, avoit ferieufement
délibéré fur la manière fmguliere de procéder à l'Aflemblée de VV. HH.
PP. au fujet dts Sentences du Confeil; &., après qu'elle s'étoit déclarée
clairement contre les Appellations en gênerai auili-bien que contre la Sur-
féance dans le cas particulier dont il s'agiflbit, des Députez de l'AiTem-
blée de VV. HH. PP. & du Confeil , après bien desDifputes, ont enfin,
au commencement de l'année 1639., par l'Entremife du Prince Frederi c-
Henri, plus grand Guerrier fans doute que Jurifconfulte ou Praticien ,
conclu un Accord provifionel, aprouvé par VV. HH. PP. mais non pas
reçu par le Confeil , par lequel Apel &. Révifion font tellement embrouil-
lés , qu'on ne lauroit dire au jufle , en faifant attention aux chofes , ce non
pas aux nomsfeuls, fi VV. HH. PP. ont defifté par-ià provifionellement
de laPermiiiion d'Apel & de Révifion, ou le Confeil de fon Jugement fou-
verain.
En fécond lieu, que les Srs. Députez, qui en confequence de la Réfo-
lution de VV. HH. PP. du 27. Octobre 165-7. ont conjointement avec
quelques Srs. Committez de ceConfeil befoigné fur le point de l'Apel, & en-
particulier fur le dit Accord provifionel de l'année 1659. clans leur Raport
par écrit ou dans leur Avis raifoné du 28. Fevier 1658. fe font non feule-
ment déclaré, pour la Révifion & contre FApel, mais aufïi que la forme
de Révifion devroit être fuivie par Raport aux claufes de Surféarice & de
Relief d'Apel , comme auffi de la manière d'initruirc les Procès.
En troifième lieu , que. .peu de tems après que le dît Raport du 28.
terne XL K Fe-
Affaires
DKS PitO-
VINCES-
Unies.
74 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
,\ffai:es Février 1658. fût porte à la Délibération des Provinces ; & nommément
des Pko- ]e ^ d'Avril de la même année, aiant été demandé un Mandement d'A-
Unk?" Peî P?-r *c fufnommé Marcelis Tiens; VV. HH. , PP. après avoir vît le
— , — L Raport du Confeil d'Etat , & l'Avis de la Cour de Hollande , qui foute-
noient l'un & l'autre par plufieurs folides Raifons , que les Sentences dit
Confeil d'Etat n'étoient pas fujetes à Apel , mais uniquement à Révïfion f
ont par leur Réfolution du 1. de Juin fuivant refufé l'Apel, & ont ainfi
de pleine connoiflance , & après que les Provinces avoient eu trois mois
de tems pour délibérer fur ledit Raport du 28. Février, décidé la Quelticn
fur l'Apel , en faveur du Confeil d'Etat.
Il cil vrai que cette Conclufion a été donnée par les Voix de cinq Pro-
vinces , & que les Sieurs Députez de Frife & de Groningue y ont
contredit; mais certainement pour aucune autre raifon,que parce que ces
deux dernières Provinces étoient , clans ce tems-là , comme tout le monde
lait , en train de contredire à- tout ce que d'autres Provinces propofoient ;
ce qu'on peut remarquer dans le cas dont il s'agit, non feulement par ce que
ces deux Provinces n'avoient aucun intérêt particulier différent de celui
des cinq autres Provinces dans l'Article d'Apel , mais principalement
auiïi ,' par ce que les Députez dans leur Opinion enregîtrée n'ont parlé que
préeifement û. uniquement du cas en difpute , fans rien alléguer pour-
quoi ils ne donnoient pas lieu aux Raifons décifives déduites dans ledit Ra-
port du Confeil & dans l'Avis de la Cour.
Car quelle autre Raifon y a-t-il d'alléguer le cas en difpute, û ce n'eft
qu'on veut prouver par la dignité & le droit des Etats Généraux, qu'ils peu-
vent accorder Apel des Sentences du Confeil d'Etat ? Car cette expref-
fion enregîtrée ne fe peut entendre fans la plus grande abfurdité que de
t'Afiemblëe de VV. HH. PP. qui font en droit d'accorder Jpel en pareil cas.
En quatrième lieu, que depuis l'année 1657., & même depuis 1648.
jufqu'ici, c'eil-à-dire pendant fbixante & dix ans, efpace de tems bien
plus long qu'il n'en faut pour alléguer préfeription , aucun Apel n'a été
accordé , mais bien refufé , ou mis hors d'effet.
Car, ni l'Apel accordé dans l'année i6f3. aux Regens d'Etten, ni la
Surféance accordée aux mêmes durant les Délibérations fur l'Apel, unique
Exemple qu'on peut alléguer contre nous depuis l'année 1648., ne nous
peut préjudicier en aucune manière, puis que LL. HH. PP. auront fans
doute remarqué , que la Demande de ceux d'Etten n'a pas été envoiée
au Confeil , pour en faire Raport félon la coutume du tems où les Apels
avoient lieu, mais a été remife entre les mains des parties , & depuis en-
tre les mains des Commiffàires de l'AfTemblée , mais non point du
Confeil, témoin les Réfolutions de VV. HH. PP. du 23., 28. & 31.
Janvier & 13. Février 1653. Auffi ne paraîtra- t-il non plus que
i'Apel ait été dénoncé au Confeil, ni qu'il en ait eu la moindre con-
noifïance.
Ces quartre Réflexions peremptoires , que VV. HH. PP. n'ont pu s'em-
pêcher de faire fur les Retroathi quEiies fe font fait lire, ne donnent pas
feu-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 75
feulement beaucoup de lumière à la matière , mais la mettent même tellement Ah-mrf.
hors de difpute,que nous fommes obligez de répéter ne pouvoir pas corn- nrs Pko
prendre pourquoi , après avoir vu de tels Retroacla , on nous demande no- ukks
tre Raport , ii ce n'efl pour donner lieu par-là à furfeoir provifionclle- -
ment l'Execution de la Sentence.
Cependant, pour ne laiffer aucun doute fur ce Sujet, nous joignons ici
pour le furplus un Mémoire , qui contient en abrégé les principales Raifons
par lefquelles on a ci-devant prouvé dans le Raport & Avis ci-defTus
mentionez , & dans d'autres Occafions , que nos Sentences ne font pas
fujetes à Apel, mais uniquement à Révifion.
Nous paflbns fous filence la Déduction imprimée que VV. IiH. PP.
nous ont envoiée avec les Requêtes du Receveur depofé Kaan , tant par-
ce que lefdites quatre Réflexions font plus que furifantes pour détruire cet-
te Déduction depuis le commencement jufqu'à la fin, que,parce que nous
efperons que VV. HH. PP. nous permettront bien de ne point entrer
dans la Difcufiion particulière d'une Déduction qui a été faite avec tant de
mauvaife-foi , qu'on ne craint pas d'y dire en termes exprès, que le Man-
dement d'Apel demandé par Marcelis Tiens le i. de Juin 1658. a été re-
fufé fur l'Avis de la Cour Provinciale de Hollande , non parce que la dite
Cour avoit juge ', qu'il ri y avoit point d 'Apel des Sentences du C on [cil d'Etat IN
CASIBÙS NON EXCEPTJS, mais parce f ri il ne fêioit agi que d'un
Jim pie Récokment de Comptes, fans forme de Procès , ni' fans la moindre Condi-
tion , comme aufjî parceqriil ri y avoit été prononcé aucune Sentence condemnatoi-
re , mais uniquement un Règlement des Défauts du Compte.
Cependant , il ne fe trouve rien de femblable dans l'Avis de la Cour ,
comme VV. HH. PP. s'en foûviendront; mais au contraire Meilleurs de
la Cour difent au commencement de l'Avis , quils ?i entreront point dans
ï Examen de M E RI TIS C AU S JE, ni de la Procédure faite devant le Gon-
feil d'Etat; & peu après, quils ne faur oient juger que Marcelis Thiens c(l fon-
dé dans fa démande d'avoir Mandement d'Apel , vu qu aucun Apel ri a lieu que
de Sentences de Juges Subalternes à des juges Supérieurs. Or , ils prouvent
dans!la fuite, par un nombre de Raifons, que le Confeil d'Etat n'ëfi pas un
Juge Subalterne, & que les Sentences du Confeil fans diftinction ne font
pas fujetes à Apel.
Pour le relie , Hauts & Puifians Seigneurs , nous avons revu à cette
occafion notre Inftruclion fur le Point de ia Surféance accordée ; Point de
plus grande confequence que l'Apel même , puiiqu'ii il y a plufieurs occa-
fions où des Surféances peuvent être accordées , fuis qu'il y puiffe avoir
Apel. Nous vouions cependant bien croire que VV. HH. PP. n'ont pas
regardé l'Affaire delà même manière, lorfqu'eîies ont accordé Samedi pafie
la Surféance.
Nous avons remarqué dans cette ïnftruclion , que les Etats Généraux
nous apprennent dans neuf Articles à faire diftinction entre eux & X Jljfem-
blée- des Députe- G; dinaires- à la Généralité. Qu'ils remettent quelques
Affaires à la difpofition de ladite Alfemblée, moïennant qu'elle en pren-
K 2 ne
76 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires ne Avis du Confcil. D'autres , au contraire, à la difpofition. du Confeil f<w-
de3 Pko- jointement avec ladite Aflemblée.
Unie"* D'autres encore à la Difpofition du Confeil, mais avec connoijfance &
L contentement de l' Aflemblée.
Et enfin d'autres uniquement à la difpofition du Confeil , fans qu'il y
foit fait mention de l' Aflemblée.
Cette dernière forte comprend toutes les Caufes Juridiques.
Qu'il efi bien.vrai que les Etats Généraux fe refervent à eux-mêmes v&
aux Etats des Provinces , de prononcer en. dernier reflbrt fur les Affaires
remifes par l'Inltruction à la difpofition du Confeil, mais en ajoutant cet-
te reftriction remarquable, en cas de bcjoin^ ou quand les affaires du Pais
viendront à V exiger j & fans faire la moindre mention de X si [[emblée des Dé-
putez ordinaires à la Généralité ', bien loin de lui donner le pouvoir de fur-
feoir nos Sentences, ou autres Décrets, fur des Affaires remifes par l'Inflnic-
tion à la difpofition du Confeil.
Et enfin , quoique les Etats Généraux aient indubitablement le Pouvoir de
changer notre Inftruction , ils ont pourtant eux-mêmes arrêté par l'ïn-
ftruction , qu'ils ne le feroient point fans connoijfance & avis dudit Con-
feil ; ce qui nous autorife d'autant plus à nous en tenir à notre Infinie-
tion, tant que les Provinces n'y font aucun changement..
VV. HH. PP. peuvent voir par tout ceci ce qu'il faut iuger de Sur-
féances,qui ne font, ni conformes à notre Inftruction, ni fondées fur aucune
autre délégation des Confederez; & fi les Seigneurs Etats de Hollande ont
raifon ou non de dire dans leur Réfolution connue du 14. Mai 1648 , Que
le Confeil d'Etat , nonobfiant l'Inhibition ou Surféance d'Execution , peut & doit
procéder à l'Execution defes Sentences.
Pour ces Raifons , nous efperons & attendons qu'il plaira à V V. HH. PP.
de renvoier la Demande d'un homme, qui, dans Fefpoir d'échaper par-là à
fa jufte punition, réfufeite une Queftion décidée déjà dans l'année 1658.
(toutefois, ceux qui ne voudraient pas avouer cela font obligez de confef-
fer , que depuis ce tems-là elle a été pendue au croc : ) & lequel tache de
troubler par-là la bonne harmonie entre VV. HH. PP. & ce Confeil.
Hauts & Puiffans Seigneurs, nous recommandons VV. HH. PP. à la
fainte Protection de Dieu. A la Haie le 14. Février 171 8.
{ Paraphé)
Apr. van Bors^len à Geldeemalsen. vt.
Par Ordonnance du Confeil d'Etat des
Provinces-Unies des Païs-Bas }
Signé
S, van Slingelandt.
ifefe-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC XVIII.
/ 1
Affaires
Mémoire contenant les Raifons pourquoi on ne peut pas ms pKO
appcller des Sentences du Confeil d Etat des Provinces- \]
Unies à rAJJemhlée des Etats Généraux,
YINCES-
NLF.S.
LE s Raifons, pourquoi il ne peut pas être appelle à LL. HH. PP. des Centre
Sentences du Confeil d'Etat, ont été pour la plupart amplement dé- l'Appel
duites dans un Raport du Confeil d'Etat à LL. HH. PP. du rg. Mai td;r^cnd"
t65§. & dans un Avis de la Cour de Hollande aux mêmes du 31. Mai confeil'1
fiiivant. Elles conliftent dans ce qui fuit. d'Etat
Que l'Affemblée de LL. HH. PP. n'étant pas une Cour de Jultice , auxE. G.
n'a aucun Droit d'accorder, fans une Autorifation fpeciale des Confederez ,
dcsMandemens d'Appel de Sentences prononcées par des Collèges qui font
Jpecialement autorifez à faire juitice.
Que l'Intention des Confederez n'a pas été, ni n'a pu être, de déférer
un tel Droit à l'AfTemblée de LL. HH. PP. à l'égard des Sentences du
Confeil d'Etat , qui a reçu fa Jurifdiétion avant l'Ètabliffement d'une Af-
femblée permanente de Députez des Provinces.
Qu'à la première occafion qui fe préfenta après que l'AfTemblée de LL.
HH. PP. fut devenu un Collège fedentaire, les Confederez témoignè-
rent , qu'ils ne vouloient pas qu'il y fût apellé , comme on peut voir par
l'Art, fo. des InftruétioTis des Collèges des Amirautez du 3. Août 1597.
en vertu duquel les Sentences de ces Collèges ne font pas fujettes à Apel
à l'AiTemblée de LL. HH. PP. mais uniquement à Révifion.
Que l'AiTemblée de LL. HH. PP. n'efl pas conftituée pour' admini-
strer la Jultice , puifque les Membres qui la compofent ne font pas pris
à ferment par tous les Confederez, ni pourvus de commiflion & d'in-
itruction pour faire Juftice en leur nom. Auffi n'opinent-ils pas chacun
pour foi , ni ne difent leur propre Avis , mais celui de leurs Principaux
refpeétifs , dont ils font tenus de fuivre les Ordres exprès ou préfomptifs.
Ces Défauts dans la Conltitution de l'AiTemblée font fi palpabjes, que
c'eft une Coutume, érigée pour ainfi dire en Loi, de.renvoier à la Decifion
de quelque Cour de Jultice les Affaires, pour lefquelles il a été porté Ap-
pellation à LL. HH. PP. par le Confeil de Flandres, au quel égard LL.
HH. PP. font venues à la place du grand Confeil de Maîines.
Mais, ces mêmes circonitances n'aïant pas lieu par raport an Confeil
d'Etat, on ne fauroit alléguer aucune Raifon, pourquoi LL. HH. PP.
preteroient feulement leur nom à quelque Cour de Juitice , qui n'eft pas
iûperieure au Confeil d'Etat , pour être Juge en cas d'Appel des Senten-
ces du Confeil.
Pour ne rien dire des inconveniens, tant à l'égard desRevifions qu'au>-
trement, lefquels naiifent de la manière ci-deiTus mentionée de connaître
des Appellations.
Comme aufli que dans l'Inflruclion du Confeil d'Etat il ne fe trouve au-
K j cun
TES
v in ces-
Un ! f. s
78 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Amraft cun Article pareil au 337. de fïmlruction du Confeil de Flandres, en ver-
Pr°- tu duquel on apelle à LL. HH. PP. des Sentences du Confeil d'Etat.
Cette dernière Remarque mérite d'autant plus d'attention , que la queilion
fur les mandemens d'appel s'agitoit encore dans l'année lôfi. où notre
-nouvelle Inftruclion a été faite ; & il auroit coûté peu de peine à LL.
HH. PP. d'y faire inférer un pareil Article, .fi elles avoient trouvé que la
grande Affemblée y eut été portée.
Le Confeil au contraire n'avoit pas la môme occafion d'y faire inférer
un Article femblable au fufdit 50. de l'InftrucTion des Collèges des Amirau-
tés, n'aïant pas été confulté dans les Délibérations fur la nouvelle Infhuc-
tion, contre l'Art. 34. de l'ancienne.
Ce qui fut caufe auiîi de plufieurs Omiflîons & Abus , qui firent regar-
der cette nouvelle Inir.rucl.ion pendant plufieurs années comme une Inftruc-
tion flotante & incertaine.
Outre cela, il n'y a aucune Raifon qui puiiTc perfuader , que les Confede-
rez aient voulu tacitement , que les Sentences du Confeil d'Etat fuffent
fujettes à Apel , pendant qu'ils ont ftatué exprelTement le contraire à l'é-
gard des Sentences des Collèges des Amirautez.
On ne fauroit croire non plus, que tous les Confederez puifïênt avoir
d'autres idées à l'égard du Confeil d'Etat, qu'ils ont prefque tous dans
leurs Provinces par raport aux Collèges des Confeillers Députez ou Etats
Députez.
Il eit bien vrai , que dans le tems pafTé , & principalement avant l'année
1636. plufieurs Appels ont été accordez; mais que, fans inniler fur ce
qui a été dit , non feulement dans le fufdit Raport du Confeil & dans l'Avis
de la Cour de Hollande, mais auffi dans le Verbal de ce qui s'eft palTé à
la Chambre du Prince Frederic-Henri le 11e. Janvier 1639. inféré dans les
Regîtres du Confeil d'Etat du 12. touchant l'Opofition contre les Mande-
mens d'Apel , il fert de folution peremtoire, que des Apels accordez, com-
me la Cour raiionne dans ledit Avis , il ne fauroit être inféré aucune pojfef-
fion , quand même les Commutez du Confeil y aur oient confcnîi ; vu qu'il efi no-
toire dans les Droits , qù un tel confentcment emporte bien une renonciation quant
au cas particulier dent il s'agit , mais ne prive pas du droit dont le Collège jouît ;
outre que les Commettez ne font pas qualifiez à diminuer le Droit de leur Collè-
ge, puifquil ne s'y peut faire aucun changement fans le confentcment 6? P approba-
tion de tous les Confederez.
Les Refolutions de LL. HH. PP. du. 11. & 18 Janvier 1639., par les-
quelles on prétend que l'Affaire a été décidée au préjudice du Confeil , ne
peuvent pa's être alléguées au préjudice du Confeil , tant parce que ces Ré-
folutions n'ont été prifes que proviilonellement pour l'efpaee d'un an; &,
à ce que la première dit exprelTement, lauf le droit réciproque; que
puifque l'Apel &la Rcvifion fe trouvent tellement embrouillées, qu'en fai-
sant attention aux chofes , & non pas aux noms fèuls, on a de la peine à
dire fi LL. HH. PP. ont dcfilté par-là de la Permiilion d'Apel & de Révi-
fion ,
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 79
lion, ou ce Confeil de fon Jugement fouverain (f). Outre que le Confeil .Affaires-
foûtint publiquement, que la première de ces Refoiutions, dont la fecon- Drs Pren
de eit une fuite, n'étoit pas conforme à ce qui avoit été ftipulé par TEn- îrTINCE*'
• r 1 T") " TT» T T UNIES.
tremife du rrmce oederi c-He n r i.
A quoi il faut ajouter en dernier lieu, que s'il y a eu un teins où LL.
IIH. PP. ontcuj'ufage ou la poffeffion pour Elles; l'ufage & la pofTef-
fion des derniers foixante à foixante & dix ans font pour le Confeil, & contre
LL. III I. PP.
Et même avec cette différence confiderable, que l'ufage ancien, & aboli
depuis long-tems, étoit contraire à tant de Raifons peremptoires & à tant
de fondernens du Gouvernement qu'on a allégué ci-defflis, outre qu'il étoit
deilitué de tout titre.
Au lieu que l'ufage des dernières foixante à foixante & dix années eft
établi fur toutes les Raifons ci-deffus alléguées & fur les fondernens du
Gouvernement, & qu'il a pour titres d'un côté le Droit inconteftable de
LL. HH. PP. comme reprefentantes les Etats des fept Provinces-Unies,
de revoir en dernier reffort les Sentences des Juges de la Généralité; &
de l'autre , que le Confeil d'Etat eft le premier & le principal Collè-
ge de la Généralité , qui ne reconnoit point de Collège Supérieur de Juin-
ce, & prononce par confequent fouverainement , comme il a été prouvé,
dans l'Avis ci-deffus mentionné de la Cour.
Avis de la Cour de Hollande à LL. HH. FF. du 3r..
Mai 16)8.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS.
O u s avons reçu la Lettre de VV. I ÏIL PP. du 2 1. Décembre, avec les-
Pièces y jointes, au fujet de la Requête de Marcelis Thins *cumfuis^ (*) o«-
pour avoir provifion d'Apel d'une Sentence prononcée à fon préjudice Tiens,
par le Confeil d'Etat ; fur quoi VV. HH. PP. demandent notre Avis. c°Zm ci~
Pour lequel effet , après avoir lu & mûrement pefé toutes les Pièces , & 'e^M'
ce que ledit Thins a de plus produit pour fondement de fa Demande ,
nous ne voulons pas entrer dans l'examen de la Juftice de la Caufe , ni de
la Procédure faite devant le Confeil; &, ne faifant attention qu'unique-
ment à ce qu'il a plû à VV. HH. PP. de nous propofer, nous avons trou-
vé bon de donner, fous la Correction de VV. IIH. PP., l'Avis fuivant.
Que nous ne fuirions juger que ledit Thins eft fondé dans fa Demande
d'avoir Provifion d'Apel, vu qu'aucun Apel n'a lieu que de Sentences de
Juges Subalternes à des Juges Supérieurs, établis par les Princes du Pais,
ce qui s'obferve dans tous les Gouvernemens de l'Europe. C'eft fur ce
fondement , que, Iorfque F Apel de la Cour de Hollande au grand Gpnfeil de
Malïnes vint à ceiler,les Seigneurs Etats de Hollande & de Zelande n'ont
PÛ
(I ) Voiez les Refoiutions du Confeil d'Etat du 13. & 14. Janvier & eu 28. Jul. 1630.
3o MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires pu trouver bon, qu'on appellât des Sentences de ladite Cour à Leurs
i>£s Pao- Nobles & Grandes Puifïances , mais ont provifionellement fait décider ces
vinces- ^ortes d'Affaires par Révifion; pour le quel effet le Prince d'Orange de glo-
NïfcS' rieufe mémoire fut autorifé dans l'année ifyy. de commettre des Membres
de ladite Cour, comme aufïi d'autres, s'il le jugeoit à propos, à la Révi-
fion; & dans l'année 15-77. lefdits Seigneurs Etats de Hollande & de Ze-
lande, fur l'Avis de la même Cour, firent une Ordonnance ou Inftruclion
ultérieure, fous le nom du Roi d'Efpagne, laquelle a été maintenue jus-
qu'à ce que le Collège du grand Confeil fût érigé. Il y a ici à remarquer
très-particuliérement , que le Confeil d'Etat a toujours été, tant avant
qu'après les Troubles , un Collège de fort grande Autorité , au deffus du-
quel il n'a jamais été établi un Juge Supérieur, à qui l'on pourroit appel-
le; : cV, après que le Roi d'Efpagne fut déclaré déchu du Droit & de la
Domination de ces Provinces, le Gouvernement fût remis entre les mains
dudit Confeil, fur de telles Inftructions qu'on jugeoit à propos dans ce
tems-là, où les Seigneurs Etats Généraux ne s'aifemblérent pas ordinaire-
ment, mais furent convoquez par le même Confeil , lorfque les Affaires du
Pais l'exigeoient ; de forte que la Forme du Gouvernement de ce tems-la
montre de ibi-méme, qu'il n'a pu être appelle des Sentences du Confeil
d'Etat. C'eft pourquoi .auffi il n'a pas été fait mention dans l'Inflrucrion
dudit Confeil , ou plutôt il n'a pas .été neceffaire d'y faire mention , i\ l'on
doit accorder, ou non, Proviiion d'Apel de fes Sentences. Et quoique
depuis l'Affemblée de VV. HH. PP. foit devenue fedentaire, comme
elle eft actuellement, le Droit que le Confeil d'Etat a eu originellement, &
avant ce tems-là, n'a pas été diminué ni aboli par-là. Ce qui fe trouve
confirmé par la Refolution que VV. Mil. PP. ont prife de l'Aveu de S. A.
de gîorieufe mémoire, & en prefence de Députez du Confeil , dans l'année
1639. par laquelle il a été réglé, uniquement pour l'efpace d'un an, ce
que doivent faire ceux qui fe croient lezez par quelque Sentence du Con-
feil d'Etat: Refolution inutile, fi le moien d'Apel à VV. HH. PP. avoit
été permis à tout le monde; outre que cette même Refolution, étendue
comme elle eft, a été contredite & defavouee par une Refolution formel-
le du Confeil d'Etat, prife dans la même année en prefence de fadite Ai-
relle. Et quoique Vos Hautes Puifïances aient quelquesfois accordé Pro-
. viiion d'Apel des Sentences du Confeil, on n'en fauroit inférer aucune
poiTeffion , quand même Içs Députez du Confeil y auroient confenti , ce
qui n'a pourtant pas été fait, vu qu'il efl notoire dans le Droit, qu'un tel
contentement .emporte bien une Renonciation quant à ce cas particulier,
mais ne prive pas du Droit qui competc audit Collège. Outre que les
Commutez 41e font pas qualifiez à diminuer le Droit de leur Collège, vu
qu'il ne s'y peut faire aucun changement fans l'aprobration & le confente-
ment de tous les Conférerez. C'eit pourquoi le Confeil n'a pas manqué d'y
contredire toutes les fois qu'il en a eu connoiflance; & les Députez de
quelques Provinces ont été chargez expreffement d'être attentifs qu'aucu-
ne exécution de Sentences prononcées par quelque Collège de la Généra-
lité
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. gi
lité ne foit furfile. Ce qui vient d'être dit fert aufïl de Réponfe ce qu'on Affair*»
prétend, qu'il eft toujours permis à VV. HH. PP., en ver ai du yo. Ar- DKS Pé-
tiole de l'Inftruction de l'année i65i.,de changer cette Initruction , préfu- *INCES-
pofant que cela avoit été fait en accordant des provifions d'Apel ^ mais , le - _____
changement de l'Inftruétion demande d'autres formalités , comme il paroit
clairement par le commencement dudit 50. Article. Outre cela, il eft di-
gne de considération , que la Sentence , prononcée au préjudice du fufnom-
mé Thins , regarde entre autres des Revenus & Domaines du Paï's , & con-
fequemment les nerfs du Gouvernement , lefquels doivent être promte-
ment recueillis par les Adminiflrateurs & Receveurs , afin que l'Etat pui£-
fe être confervé. C'efl pour cela qu'il a été itatué expreffement dans l'Ar-
ticle 9. & 10. de l'Initruction de l'année i?88- & dans le 17. Article de
la nouvelle, arrêtée en 165*1. que les deniers publics & les fourniffemens
des Provinces doivent être promtement levez & exécutez par ledit Con-
feil, tout comme les deniers du Prince ont été levez, ce qui ne fauroïc
être retenu par aucune provifion judiciaire. Et comme par le 18. Article
tous les Comptables des deniers àc revenus de la Généralité fans exception
ont été fournis à l'autorité & à la direction du Confeil d'Etat , à qui il com-
pete outre cela privativement de connoître de ces Comptables ; & que la
Sentence en queition, portant entre autres condamnation de certaines
ibmmes, regarde les Domaines & Revenus du Paï's, la levée ou l'exécu-
tion n'en fauroit être empêchée en aucune manière, ni même par un Man-
dement d'Apel , à moins qu'on ne voulût en toutes autres affaires qui con-
cernent les deniers , revenus , & Domaines publics accorder pareille provi-
fion, ce 'dont VV. HH. PP. peuvent aifement comprendre les fuites pré-
judiciables , ce qui leur a aulîi fait tant de fois refufer de telles provifions
d'Apel. Si l'on veut paffer outre & faire attention à d'autres Collèges ,
qui toutes fois' ne font pas fuperieurs à celui du Confeil d'Etat, on trou-
vera , que toutes les Sentences des Confeillers de l'Amirauté fortent leur
plein & entier effet, & qu'elles font réellement & effectivement mifes en
exécution, fans qu'on puiffe y pourvoir par Apel ou Reformation, mais
uniquement par Revifion ou demonitration d'erreur. La même chofe a
lieu à l'égard des Sentences prononcées des Confeillers Committez, ou
Etats Députez, comme compofans pareillement un Collège, au deffus du
quel il n'en a pas été établi de fuperieur-, de forte qu'aiant été prouvé par
ce qu'on vient dédire, que le Confeil d'Etat a eu orignellemeat, & dès la
première inftitution, la difpofition des affaires qui regardent les deniers
publics & les Revenus & Domaines du Paï's , & qu'il a toujours connu &
connoit encore de ces matières, cela détruit l'argument que ledit Thins a
voulu tirer de la délégation, vu qu'en juftice cela a bien été une véritable
délégation par raport au Haut -Confeil , mais fous correction de VV.
HH. PP. La chofe y avoit été portée par in advertance; cependant, après
que ledit Haut-Confeil s'étoit excufé de s'en charger , VV. HH. PP. ont
trouvé bon & arrêté que ladite affaire feroit portée au Confeil d'Etat qui
étoit qualifié de foi-méme à la terminer-, ce qui n'efl pas félon le droit
Tome XL L une
82 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, "ET
A?ïairïs une délégation, mais uniquement une excitation de Jurifdic"tion , ou' de
.des Pro- l'Office dudit Confeil , comme les jurifconfultes l'appellent. Auffi VV.
Unies8" ^ ^' ne ^e ^ervent Pas dans ^eur Refolution du mot de délégation.
L Pour ce qui regarde les nullités qu'on prétend avoir été commifes dans la
Sentence, cela ne mérite pas attention ici, puifqu'elles peuvent être dé-
duites par Révifion auffi bien que par Apel. Nous ne nous étendrons
pas d'avantage , pour ne pas ennuïer VV. HH. PP. , voïant que dans la
Lettre du Confeil d'Etat , à nous communiquée , il a été très-pertinemment
répondu à tout; c'efl pourquoi nous n'avons touché que le point de droit
& prouvé par des raifons folides, que VV. HH. PP. ne peuvent pas ac-
corder Mandement d'Apel. Nous nous raportons néanmoins à la haute & fage
difpofition de Vos Hautes PuifTances , à qui nous renvoions ci-joint la fufdi-
te Requête & Pièces à nous communiquées , afin de refoudre là-deffus ce
que VV. HH. PP. jugeront convenable.
Sur ce, Hauts rj? Puijj'ans Seigneurs , nous recommandons VV. HH. PP.
à la protection du Tout-PuilTant , qui veuille bénir leur Gouvernement de
tout bien & profperité. Le 31. Mai 1658.
DE VOS HAUTES PUISSANCES,
Les Officieux
Prefident & Confeillers de Hollande,
Zelande, & Weft-Frife.
Signé y
Ad. Pots.
Extrait du Regître des Refolutions de LL. HH. PP.
les Seigneurs Etats Généraux des Provinces - Unies
des P aïs- Bas \ du Lundi 14.. Février 171 8.
Refolu- Y} È ç u une Lettre du Confeil d'Etat écrite ici à la Haie en date d'au-
riondu XV jourd'hui, portant en confequence & pour fatisfaire à la Refolution
j+.Fevr. de LL. HH. PP. du 12. Février Raport fur la Requête de Maître André
Kaan , ci-devant Receveur des Droits Domaniaux & autres à Menin , de-
mandant Mandement en cas d'Apel avec la claufe d'inhibition de la Sen-
tence prononcée par ledit Confeil d'Etat à fa charge le 4. du courant ;
comme, auffi fur une Déduction pour foûtenir le Droit d'Apel avec inhibi-
tioh., lequel devoit competer à l'Aûemblée de LL. HH. PP. par raport
aux Sentences du Confeil d'Etat. Surquoi aiant été délibéré, il a été
trouvé bon & arrêté, qu'on ne fauroit entrer dans la Demande faite par le
SuplianéJ & que par confequent on la refufe.
Les. Seigneurs Députez des Provinces de Gueldre & d'Utrecht ont
faic
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. gj
fait enregîtrer fur ladite concluflon , que cet exemple ne peut ni ne doit Affairm
tirer à confequence , ou prejudicier à l'Autorité & au Droit des Etats Gé-
néraux , qui peuvent en pareil cas accorder des Mandemens d'Apel.
DES PrO-
YÏNCES-
Uku.s.
Nota. L'Opinion enregîtrée des Seigneurs Députez des Provinces de
Gucldre & d'Utrecht iur la iùfdite Reiblution efl copiée de mot à
mot fur celle des Seigneurs Députez des Provinces de Frife & Gro-
ningue fur la Refolution du i. de Juin 1698 , dont il eft. parlé dans la
Lettre du Confeil d'Etat du 14. Février 171 8- page 3. L'unique
différence, qu'il y a entre ces deux Opinions enregîtrées, ell, que les
Seigneurs Députez de Gueldre & d'Utrecht, faifant enregîtrer un
Avis tout opofé à celui qu'ils avoient donné dans l'année 1658., ne
contrcdifent ■point à la conclu/ion , comme firent les Seigneurs Députez
des Provinces de Frife & Groningue dans la même année 1658.
I l parut aufïi fur ces matières l'Imprimé fuivant.
Mémoire , contenant quelques Echantillons , tirez de
V Advertiffement de Droits du dépofé Receveur André
Kaan, dans fin Procès devant le Conjeil d'Etat des
Provinces- Unies des Pais-Bas, contre Maître Jaques
Surendonck comme Committé pour obfcrver le Droit
de la Généralité contre ledit Kaan , £5? du Mémoire
juccint qui a raport audit Advertiffement : par les-
quels Echantillons on peut juger > j ans prendre la pei-
ne d'une onereufe Lellure ? avec combien peu de can-
deur ledit Advertiffèment £5? Mémoire ont été drejfez ,
£5? combien de foi on y peut ajouter.
I. p\ANs les Art. 201. & 202. de l' Advertiffement il eft dit, que l'Im- j^3^1"
X-S petrant avoit pr opofé au Confeil d'Etat par un Mémoire du 4. De- Mémoire
cembre 1709. d'offrir impunément de î 'argent aux témoins pour avoir diverfes de Kaan.
chofes. Ces paroles en Italique font imprimées avec d'autres Lettres que
le Texte, aparament pour faire croire que c'étoit les propres paroles du
Mémoire de l'Impétrant.
Mais , û l'on regarde la Refolution du Confeil d'Etat du 4. Décembre
1705). alléguée par l'Affigné dans l'Art. 203. pour prouver fa thefe , &
produite fur fon inventaire fous la Lettre M. 1. hco , on trouve toute
autre chofe , & que l'Impétrant donne à confiderer , s il ne feroit bon , en
cas que la veuve Ferrier découvrit fincerement ce qui lui étoit connu touchant
ceux , qui contre leur devoir avoient eu part £5? intérêt dans les Admodiations
& Entreprifes de Farazyn, & ce qui en dépend, & en cas que pour la même fin
elle dénonçât & remit fans réferve à Maître Nicolas Saldenus toutes les Lettrés
L 2 du
DES PKO-
VINCES-
Unies.
84 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
du Receveur Kaan , de Jean & Joffe Farazyn £5? d'autres , de même que tous
les autres papiers quelle a eu après la mort de [on mari entre fe s mains , £5? qui
fervent à découvrir les Perfonnes & les Intrigues de ceux qui doivent avoir eu
part £5? intérêt dans le/dites Admodiations & Entreprifes ; de lui procurer , non
feulement un Atle d'Impunité, pour autant quelle ou J on mari défunt pour oient
en être complices , mais aufî outre cela ( conformément aux Placards du Pais )
la promeffe d'une certaine recompenfe , pour l'exhibition de telles preuves par oh
les Perfonnes & les Pratiques des intereffez dans les Admodiations & autres
Entreprifes pour oient être découvertes ; & que [on nom fer oit tenu caché.
On pouroit remarquer ici , que puifque le Confeil d'Etat s'eft conformé
dans ladite Réfolution à la Proposition de l'Impétrant , les odieufes Ré-
flexions, que l'Alîigné fait dans les Art. 204. jufqu'au 247. fur ladite Propo-
rtion, blenent plus l'honneur de LL. NN. PP. que celui de l'Impétrant.
Mais comme LL. NN. PP. ont pourvu par la Sentence à leur honneur,
ou plutôt à l'honneur de la Juflice , on fe contentera de demander , où il
fe trouve un feul mot d'offre et argent aux témoins dans le fufdit Extrait de la
Réfolution du 4. Décembre 1 709 ?
Autant qu'il efl défendu de corrompre des témoins , autant efl-il per-
mis & reçu de promettre impunité & recompenfes par des Placards , Pu-
blications, & Gazetes, à des complices , pour aprendre le fil & la liaifon ,
& pour avoir des preuves autentiques des crimes qu'on ne fauroit fans
cela entièrement découvrir, ou fufifamment prouver.
Mais , pour faire paner cela pour corruption de témoins , il faloit falfifier la
Propoiition de l'Impétrant.
Que doit-on penfer d'une caufe qui a befoin de pareils moiens de de-
fenfe ?
II. Dans les Art. 705. 708. 709. & 710. dudit Advertiflement de l'Af-
'figné il elt dit , que par la produtlion de l'afjïgné N. 1 . loco , laquelle efl le
compte rendu par Ferrier à Farafyn des Admodiations & Entreprifes à Me-
nin du if. Septembre 1706. jufqu'au dernier Avril 1707. il confie claire-
ment, qu'au lieu d'un refait at de compte avantageux pour Farafyn, il lui a été
onéreux , tellement qu'il a été obligé de paicr le refiant en Lettres de change à
Ferrier \ ce qui diffère beaucoup du prétendu gain. Et dans le Mémoire Fol.
7. Que dans le compte original, délivré par F Affïgné , lequel eit le fufdit
compte N. 1. loco, Farafyn rend une fomme de 7773-1 7-3.
Sur quoi on demande dans la fuite du Mémoire , d'où vient donc le gain
de 28000. Florins que l 'Impétrant s 'efl chargé de prouver être provenus de la pre-
mière demi-armée des Admodiations £5? Entreprifes ?
Mais, fi l'on regarde ledit compte fous N. 1. loco on trouve jultement le
contraire; favoir, premièrement, que Ferrier, Rendeur du Compte, met
pour recette 70 193- 18-10. & pour depenfe pas plus que 1 7549-4-1.
En fécond lieu , que pour folde du compte il revient à Farafyn
52644-14-9. ce qui difere beaucoup d'un folde onéreux de 7773-17-3.
Et en troifieme lieu, que Ferrier a paie fur cette fomme de 5-2644-14-
y. à Farafyn ou à. fon ordre 47000-0-0, & encore 1 341 8-1 2-0. en tout
60418-12-0,
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 8f
60418-12-0. qui font 7773-17-5. de plus qu'il ne devoit à Farafyn pour Ammt»
fat» 1 aire audit; folde avantageux.
Lefquels 7773-1 ?-^- reçus de trop Farafyn a été obligé de reflituer à
Ferrier.
Oferoit-on nommer cela un folde de compte onéreux ?
III. Dans les Art. 721-726. dudit Advertiflèment de l'Afîigné il efl dit,
que par ce compte de l'Impétrant , qui efl: le compte délivré par l'Impétrant
fauf erreur X. 1. loco, comme on peut voir par l'Art. 65?. de l'Advertilfe-
ment, le prétendu gain de 28000. Florins diminue fort , •va que la depenje de
la jomme de 88857-14-3* étant foldée contre la recette de la fommede 29 120-6-0.
il ne rejfe que 262- 11 -9. ce qui a peu de proportion avec le gain imaginaire dont
1 Impétrant fait tant de bruit.
Mais, en regardant ledit compte on trouve d'abord, que la depenfe ci-
deffus mentionee de la fournie de 888^7-14-3. eit le produit , ouïe total,
des nuits Articles fuivans.
dfs Pro-
vince s-
Unuc.
Reprifes générales des Débours.
Pour les Domaines. - - - - - 17288 - - 1 - p.
Pour les Vivres de Mr. Farafyn. - - 248 - - 15 - 9.
Pour les Vivres de Loef. - - - - 72 '- . - 0-0.
Pour les Fortifications. - - - - 10148 - *- 18 - <?•
Chauffage. -------- 5701 - - 3-0.
A Mr. le General. ----- 4717 - - 9-0.
A Mr. Kaan. ------- 47-00 - - 0-0.
A M. Farafyn. - 46181 - - 6 - 9.
888;o - - 14 - 3.
Les trois derniers de ces huit Articles étant ajoutez audits 262-1 T-y.
comme notoirement ils y doivent être ajoutez, il en refulte pour Farafyn
un folde de compte avantageux , non de 262-1 1-5). mais de 5-7661-7-6.
A moins qu'on ne voulût dire, que 46181-6-9. paiez à Farafyn , &
4717-9-0. & 4500. paiez pour lui à d'autres, ne tournoient pas au profit
de Farafyn , ce qui feroit une abfurdité manifefle.
Il n'efl pas neceflaire d'examiner ici quelles Déductions dôivenrêtre
faites de ce folde avantageux de 57661-7-6. pour pouvoir dire au jufte
combien il en a refté ; il fuffit qu'il en a pu être déduit jufqu'à 29661-7-6.
pour retenir encore tout net 28000 Florins.
Qu'on juge à nrefent , avec combien de candeur on peut avancer dans
îefdits Articles, non feulement, qu'il paroifïbit par lefdits deux Comptes,
qu'il n'y a pas eu 28000. Florins de gagnez fur les Admodiations & En-
treprifes de Farafyn àMenin pour le première femeftre ; mais , qu'outre ce-
la il étoit clair par le premier de ces comptes , qu'il y avoit une perte
de 7773-I7-3- ou que s'il y avoit quelque chofe de relie, il paroifToit par
L 3 le
Uniks.
£6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
-AffAinr.s le fécond, que ce furplus n'a monté qu'à 262-1 1 -9. ou tout au plus feule-
ras Pko- ment à 1166-11-9. Juivant le plus jufte calcul , comme dit l'Afligné dans
vincks- j'Art. 728. de fon Advertiffement.
IV. Dans les Art. 914. & oif. du même Advertiflement il eft dit,
que Ferrier a déclaré cordialement au lit de la mort , en prefence de l'Audi-
teur Slegt , quil tf avoit jamais rien promis ni donné a î Afjïgné direclement ou
indirectement pour des Raifons injufes j ce qu'on paiferoit fous filence , quoi-
que les paroles, pour des Raisons injujl es ne fe trouvent pas dans la Décla-
ration de Ferrier, mais y ont été entreiaffées par l'Afligné dans fon Ad-
vertiffement, puisqu'il n'eft pas Quefticn, (i Ferrier, Commis de Fara-
fyn, mais fi Farafyn, Maître de Ferrier , a promis ou donné quelque
chofe à l'Afligné , n'étoit que l'Afligné eut perfiilé à dire dans fon Mé-
moire Fol. 6. §)ue Ferrier fur le ht de la mort , & deux jours avant Jon dé-
cès , après avoir reçu l'extrême onclion, a déclaré lui-même aï Auditeur Slegt,
en prejence de témoins , quen particulier il et oit vt ai que V Afjïgné navoit eu aur
cune portion ni part avec haraj'yn dans les Admodiations , & que pour cette
Rai [on ou pour d'autres Affaire, injufles il ne lui av oit jamais été fait aucun
paiement ni direclement ni indirectement.
Mais, dans la Déclaration fignée par Ferrier avec deux témoins & l'Au-
diteur Slegt, & produite par l'Afligné fous X. 1. loco , il ne fe trouve rien
de femblable.
Ce qui paraîtra fi incroïabîe , _qu'on a jugé neceflàire d'inferer-ici cette
Déclaration, qui contient ce qui fuit (*).
Ce jourdïhui Samedi 7. Juillet , moi Jokfïgné Auditeur Militaire ai examiné
exaclcment le Sieur Germain Ferrier malade au lit , £5? difant quil avoit déjà
reçu tous fes facremens ; ce que volant , je lui ai repre fente , quil nétoit permis
à aucune Perfonne en cet état, ou Dieu pouvoit la rapeller aujji-tôt , d'aceufer
ou d'excujer qui que ce foit , &c. : Sur quoi ledit Germain Ferrier depofoit , que
le Sieur Jofjè Farafyn , aiant deffein de faire fon profit en braffant de la Bière
pour la Garnifon , avoit demandé permifjion de faire venir de l'orge germé , ce
quil avoit fait; mais , volant quil ne pouvoit obtenir permifjion de braffer , il
avoit chargé lui depojant , de le revendre en détail , ce quil navoit pu faire : que
le Sieur Kaan avoit bien dit à quelques Perfonne s , que le depofant avoit de V or-
ge germé à vendre , mais que ni Braffcur ni Marchand nétoit venu chez lui
pour en acheter , que quelques mois après, ou il s\n état défait avec perte \
quil ri avoit • pas parlé avec ledit Sieur Kaan , ni navoit demandé permifjion de
faire venir de Forge germé à fexclufion d'autres , foit Braj/curs ou Marchands :
qu'il navoit jamais rien promis ni donné audit Sieur Kaan , direclement ou in-
direclement. Finit par-là , en s' offrant à jerment en cas de befom. Fait à Me-
nin, en prejence des' Sieur i 'Jean Fichier, Ingénieur ici, & Jaques de Mey Chi-
rurgien pareillement ici à Menin, comme témoins dignes de foi à ceci requis ,
fous la date de ci-defjus. Signé Ferrier ,J . Fichier , J. de Mey , &? Jean- Ja-
ques de Slegt.
Où
( * ) Verbal d'Enquête de VAjpgné X. i. loco.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 87
Où trouve-t-on un mot en ceci de ce qui a été avancé dans ledit Mé-
moire?
L'Affigné dira peut-être, que ce qui ne fe trouve pas dans cette Décla-
ration, eft contenu dans une autre Déclaration de Jaques de JVley Maî-
tre Chirurgien à Menin , donnée le 22. Juin 17 14. & recolée le 25.
d'Août 1716.
Mais, û jamais on a vu de Déclaration dont la fauffeté eft palpable ,
c'eft celle-ci.
Savoir, Jaques de Mey, un des témoins qui ont figné la Déclaration
ci-deffus raportée de Ferrier, conjointement avec Ferrier & l'Auditeur
Slegt , n'a pas rougi de déclarer 6. ans après , que Ferrier avoit donné
de toutes autres Reponfes à l'Auditeur Slegt, que ne porte la Déclaration
fignée par eux deux , & par lui de Mey même comme témoin.
Voici Tes propres paroles (*). Qu'il fe fouvient a avoir été témoin à la
paffation d'un AÏÏe dans le mois de Juillet fait par le Sieur Slegt, Auditeur Ali-
lit aire de Bruxelles pour lors à Menin, lor/que ledit Slegt a demandé à défunt
le Sieur Germain Ferler , fur fon Ut malade , fi Monfr. Kaan Receveur Gene-
ral audit Menin avoit été interejjé dan, les fermes des Domaines , prifes par
le Sieur Farafyn. Sur quoi il a re pondu , que non. Que ledit Slegt a alors de-
mandé audit Ferrier , fi dans le compte fous A. B. C. qu'il lui mont r oit, ledit
Sieur Kaan auroit eu, ou tiré, quelque part, ou profit , /'/ avoit fait la mê-
me Reponfe que non. Ledit foûffigné fe réfère au furplus à î ' /Jbli qui a été donné.
Ce qui confirme encore plus la fauiïeté de cette Déclaration, eft, que
l'Auditeur Slegt, aiant été cité le 27. Juillet 1716. à la Requifition de
l'Adigné , pour repondre à interrogatoires , a répondu par ferment fur
l'onzième Article (f ) , Qu'il ri a pas demandé à Ferrier , fi le Receveur Kaan
n avoit , ou ri avoit eu , quelque portion ou part dans les Fermes , A amodiations ou
Entreprifes de Jojfe Farafyn fon Maître; y ajoutant pour Raifon , que cela lui
était impofjible , ne connoiffant pas dans ce tems-là le Receveur Kaan, ni ne fa-
chant abfolument rien de portion, part, ou autre chofe mentionée dans cet.
Article.
Et fur le 12. Art. que tout ce qui lui a été dit par Ferrier , a été mis par
écrit en préfence de témoins.
Le même Auditeur aiant été examiné le 18. Août à la requidtion de
l'Impétrant fur des contre-interrogatoires , a répondu au premier Article
(§ ) , Quil ignorait d'avoir demandé à Ferrier fur quoi que ce f oit qui regardait en
particulier le Receveur Kaan , fe raportant à la Déclaration ci-deiTus infé-
rée de Ferrier du 7. Juillet 1708.
Sur l'Art. 2. De ne lui avoir pas demandé fi ledit Receveur Kaan étoit iute-
reffé dans les Admodiations des Domaines entreprifes par Jofe Farazyn à Me-
nai.
El
(*) Verbal d'Enquête de VAjJlgm fous X. t. loco.
(f) Verbal d'Ensuite de VAJjïgné fous X. î. hio.
(§) Verbal d'Enquête de V Ajjigné foui X. \, loco,
AtVAÏKl»
PM Pi<0.«
VINCfcS-
Unies.
VINCFS
Unies.
88 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Et fur l'Art. 4. De ri avoir pas alors fait voir audit Germain Ferrier un
ces Pro- Compte fous A. B. C. £5? D. ni de lui avoir demandé s'il en avoit tiré aucune
portion ou profit; y ajoutant pour Raifon peremtoire, de ne /avoir pas encore
dans le même moment ce que cefi que ce compte , fi-non quil en avoit entendu
parler dépuis quelques jours confufement.
Tout cela n'a cependant pas retenu l'Afligné de mettre à profit ladite
Déclaration de Jaques de Mey, & de l'apeller même dans fon Mémoire
pag. 6. un homme de probité.
V. Pour prouver que la liquidation fecrete , produite par l'Impétrant
fous X. 2. loco, ne fauroit être faite à Gand le 26. Septembre 1707. com-
me elle porte cependant en termes exprès, on dit dans les Art. 8f6. &
877. dudit Advertiilement: quon la croit être conçue à Menin le 26. Septem-
bre 1707. & dans le Mémoire Fol. 7. Quil y avoit même fur ledit Inflru-
ment , à Menin.
Mais, quand on regarde i'Inflrument,on trouve, qu'il y a au coin de
la première page à main gauche, non point à Menin, ni à Menin le 16.
Septembre 1707. mais fimplement Menin 1707.: ce qui fait voir clairement
que cette note marginale ne fert qu'à marquer que la liquidation regarde
Menin & £ Année 1707.
Or pour faire croire que la liquidation portoit qu'elle efl faite à Menin,
il a fallu joindre dans l'Avertiflement, contre la vérité, Menin & le 26.
Septembre , & mettre dans le Mémoire, non pas Menin 1707. mais à)Menin.
Quel nom méritent de pareilles allégations ? & quelle opinion doit
avoir de fa caufe celui qui s'en fert pout rendre fufpe6t un Infiniment
dont on fe fert contre lui.
VI. Dans l'Art. 1227. dudit AvertifTement de l'Afligné il efl dit, que
les Art. 9. & 10. des refponfives de P. J. d'Ooflerling fur le contre-in-
terrogatoire de l'Affigné portent (#) quil ri a pas vu le réfultat du compte ,
quoique le neuvième Art. contient juftement le contraire. En voici la
teneur.
Si lui Dépofant a vu le réfultat du compte £5? le profit ou la perte ?
Le Dépofant afirme fur ce 9. Art : quil a vu le réfultat du compte , mais
quil a vu en même tems quil ri et oit pas figné; y ajoutant dans fa réponfe fur
l'Art, fuivant: Que le Dépofant ne fe fouvient pas à combien le réfultat a mon-
té, mais feulement qu'il revenait au Sieur Kaan à peu près la fomme de 7000.
florins.
Peu après, favoir dans F Art. 1231. dudit AvertifTement de l'Afligné, il
efl dit, que P. J. d'Ooflerling avoit déclaré fur le 17. Art. du contre-
interrogatoire (i" )., quil ne fauroit rien dire d'aucun partage du gain, &? en-
core moins en combien de portions; quoiqu'aiant été demandé dans cet Art.
en combien de portions le prétendu gain a été partagé ?il n'a répondu autre chofe
û-non, qu'il ne f avoit pas en combien de portions le prétendu gain a été partage.
Dans
(*) Verbal d'Enquête de l'Impétrant fous T.
[f) Verbal d'Enquête de l'Impétrant fous T.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. gP
Dans les Art. 1232. & 1133. il eft dit, que le fufmentionné Oofter-
ling avoit déclaré furie 18. Art. du contre-intcrogatoire (f), de ne rien fa-
voir des participans, ni que le Gouverneur de Menin y avoit été compris , ou re-
prefenté par V Afligné. Cependant, aiant été démandé par cet Article: Qui
étoient les Participans de ce Gain? il adonné une toute autre Réponfe, la-
voir: que tout ce qu'il [avoit et oit quil revenoit audit Sieur Kaan pour folde du
compte de l'année 1 707. fept mille florins falvo juflo.
Et dans les Articles fuivans il ne déclare autre chofe au fujet du Gou-
verneur, fi-non, quil n y avoit pas été préfent , & que le Dépofant ne fait
pas qui y a reprefenîé fa perfonne.
VII. Dans les Art. }<5tf$. & 1664. dudit Avertiflement de l'Aflïgné il
eft dit, quil eft bien vrai que les trois points ci-deffus mentionez , lefquel*
points font exprimez dans les Art. 3<54f. 3646. & 3647. de l'AdverthTe-
ment, n ont pas été mis en ligne de compte dans le premier cahier de ï ' Afjîgné ,
mais qu'ils y ont été alléguez feulement pour la mémoire.
Cependant, quand on examine ledit premier cahier, on trouve qu'aucun
defdits trois points n'y a été mis en ligne de compte, {bit pour la mémoi-
re , ou autrement; & qu'il n'y a que les Rançons du fécond femeftre
d'Admodiation, qui y ont été alléguez pour la mémoire.
Ces Echantillons , dont on pouroit grofîir le nombre s'il étoit necefTai-
re, fuffifent fans doute pour faire juger de la candeur avec laquelle l'Ad-
vertiffement de Droits, & le Mémoire fuccint de l'Afligné, ont été corn-
pofez, & de la foi qu'on peut y ajouter.
Il y avoit des Miniftres Etrangers , & même des perfonnes du Païs le*
plus clairvoiantes & les moins timides, qui craignoient que la Condamna-
tion de Kaan n'eut des fuites. Elles pourroient tendre à rendre diffon-
riante l'Harmonie Ci neceffaire entre les Provinces. Leur crainte étoic
fondée fur ce que le Confeil d'Etat avoit dépêché aVliffingue unHuiffier
pour exécuter les biens de ce,Condamné-là pour le paiement des amandes
& des fraix du procès. L'on eut cependant des avis de cette Ville-là, que
les Magiftrats, parmi lefquels le Condamné avoit des Amis , & dont il
étoit du corps , paroiffoient vouloir le foûtenir. De plus , de le déclarer
pour honnête-homme, & par confequent de vouloir le continuer dans
tous les Emplois dont il étoit en poflelTion dans cette Ville-là. Ainfi , l'on
aprehendoit qu'à Vlifîingue, non feulement onempecheroit l'Huiffier d'exer-
cer fa charge, mais même qu'il vint à être expofé à être mal traité. On l'e-
ftimoit à la vérité une Procédure exhorbitante, & faifant directement brè-
che à la Conflitution du Gouvernement de la Republique & à l'Union. Ce
qui augmentoit cette aprehenfion venoit de ce qu'on's'attendoit à fort peu de
docilité parmi la populace de la Zelande. L'on en avoit un Exemple fort
récent dans la Ville de Middelbourg. La Cour de Juftice qui fe tient à
la Haie, qui eft compofée mi-partie de Confeillers de la Province de Hol-
lande
(f) Fcrbal ci-defus.
Tome XI. M
-Aminé»
des Pro-
vinces-
Unie*.
90 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, £T
Aïïaifes lande & de Zelande, avoit envoie fe Fifcal avec quelques autres Officiers
Bis Pko- je. fa dépendance pouf y faifir un Criminel. Le Peuple y regimba, em-
Unies!" P^cna la capture du Criminel ; '& le Fifcal & autres Officiers furent bien
. L aifes .& même heureux de pouvoir s'echaper des mains de la Populace, (Se
de revenir fans avoir pu s'aquitter de leur Commifïïon. A la vérité, lesMa-
giftrats y font doiiez de figeife, mais toute leur prudence n'étoit pas une
digue aïîez fuffifante contre une populace fou-vent deibtuée de raiibn. Ce
defôrdré fit mettre fur le tapis de faire de . fages Remontrances aux Etats
de Zelande de mettre de meilleurs ordres pour la foumiflîon à leur com-
mune Cour de Jultice.
Enfin l'Apel fut refufé. Ce fut fur des Raifons, qui paroiffoient incon-
tefïables. Par exemple, qu'on n'admettoit point d'Apel1 des Sentences des
Collèges des Amirautez . quoique ceux-ci foient fubordinez à I'Afiemblée
fie la Généralité-, mais feulement une Revilîon. D'ailleurs, qu'un Apel
fupofe un Juge fuperieur.' On connoit que l'Affemblée des Etats Gène*
raux n'étoit pas de la forte par deifus le Confeil d'Etat. Ç'étoit que ce
dernier étoit plus ancien que cette Affemblée-là. Par-là l'on trouvoit in-
contestable Je Droit du Confeil d'Etat de juger fans Apel fur les Affaires
Militaires & des Finances. Il y avoit d'autres Raifons -mais, celles qu'on
vient de raport'er éioient des plus pertinentes. On accordoit bien IaRevifion
des Sentences dudit Confeil d'Etat, au cas qu'il y eut quelqu'erreur, ou
abus. Cependant, dans ces Revifions, des Membres du Collège, qui a pro-
noncé la Sentence, y interviennent avec d'autres qu'on nomme. Dans ce
cas, on nommeroit un Député de chaque Province, pour revoir cette Senten-
ce conjoin&ement-avee 'ceux du Confeil d'Etat. Cependant, il en coûte
beaucoup a celui qui demande la Revifion , & doit préalablement confi-
gner une grotte. Tomme pour les fraix,. D'ailleurs, il auroit fulu que Kaan
paiât 'd'abord les amandes auxquelles, il avoit été condamné, ou lés biens
exécutez pour en avoir le paiement. Le Refus de l'Apel n'avoit pas laiïTe
que de trouver de l'Opofition. Il ne fut emporté que par la pluralité.
On attribua cette Opoiition à l'entêtement de quelques Membres de cer-
taines Provinces ,.qui avoient en veuë de dominer, & de ravaller l'Autorité
fondamentale du Confeil d'Etat. Cet entêtement", fuivant quelques gens ,
poùvoit avoir quelques relions -.avides ou craintifs d'un intérêt particulier
ou perfounel.' L'on raporte tout ce quedeffus, pareeque cette Affaire fit
beaucoup de bruit , & qu'elle faifoit voir aux Miniltres Etrangers les fâ-
cheux Simptomes de la fituation d'alors de la République. Celle-ci faifoit
cependant briller. en toutes les autres Affaires plus eifentielles une prevoiarj-
■ce* admirable, .&jrne. fagdJè;qui furpallbit toutes celles qu'on vante fi hi-
.^eirboh que ment dans ' les anciennes & fi renommées Républiques de la
<3riece. I On doit ce témoignage à la vérité éloignée de toute flatterie.
L'Attente d'en voir la fuite ne fut pas longue. On exécuta les biens
de' ce. Condamné pour les Amandes & autres fraix. Il s'étoit attendu que
les MigTirats de Vlifingue lui feraient favorables, & empecheroient cette
exécution^ mais, leur fageffe les porta à permettre qu'on envoiât des gardes,
&
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII.
<;l
VINCES-
Unies.
& qu'on fçellât fa Maifoa & fes Effets. Le Réfultat de cela , qui y mit Avfakie*-,
une fin, fut que fur cela -ce Condamné fe retira lans qu'on put alors fa- nES »^°-
voir vers où il s'étoit acheminé.
II y eut une Affaire qui avoit caufé quelque plaifir. On a parlé dans
des Tomes précédents des Differens entre la Ville de Groningue & les
Ommelandes. Ils avoient duré allez de tems, fans qu'on eut pu reconci-
lier ces deux part/es de la Province. Enfin, elles s'étoient accordées en-
tr'elles, & rétabli de leur part leur bonne intelligence intelhne. Les
Magiltrats de la Ville en firent part à la Généralité par une Lettre datée du
jour de Noël précèdent. Cette Lettre de Notification portoit que,le'Samedi
avant ce jour-là, fa voir le 18. , ces differens, qui avoient duré fi long-
tems, avoient été affoupis. Le réfultat en avoit été un aquiefeement
volontaire h toutes les charges, qui avoient'été precedement levées, &
pendant la dernière Guerre. Il y avoit quelqu'exception. Une étoit de
réduire toutes les Obligations indiffin&ement de cinq à. quatre pour cent
d'intérêt pour l'année courante 17 18, & les rentes viagères de dix à neuf
pour cent. La Ville avoit toujours foutenu que tous les Sujets de la Pro-
vince dévoient être égalemeut chargez, & non pas les uris plus que les
autres. Par confequent,ceux qui avoient des Obligations pas plus que ceux
qui avoient de grands biens, cides effets» opulens. Cependant,pourle bien
de la Paix; &- pour preferver les finances délabrées de la.Prpvince de leur
ruine totale, la Ville avoit con/enti à ceue égalité des charges. Il refuita
de-là que les Ouligations,^ même des lbmmes négociées fous la garantie de
la Republique, furent réduites de cinq à quatre pour cent. Àuffi la Ga-
rantie de l'Etat n'étoit-elle jamais que pour quatre pour cent. Des gens
bien intentionnez fouhaiterent.que. les. Quartiers de k Gueldre qui s'étoient
opiniatrez dans leurs Difterens fur -leur contingent refpeétif depuis 13. à
14. ans , enflent fuivi l'Exemple de Groningue.
: Ce rabais d'intérêts donna lieu à continuer des Conférences entre des
Députez de la 'Généralité, ceux du.Confeil d'Etat, & de la Chambre des
Comptes de la Généralité, pour examiner lesmoiens pour ménager les Re-
venus de la Republique. I! y avoit prefque deux ans que cette Propor-
tion avoit été faite dans FAiremblée, des, Etats, Généraux-, & de tems en
tems différentes Provinces l'avoient renouvelée. Les. Députez de celle
dOver-YiTeï le firent de nouveau Je , 18, de Février de cette année. Sur
cela on fixa un jour pour y vaquer.*' Le Co'nfeïf d'État e-a demanda un
renvoi, parce qu'il étoit occupé à l'Affaire de Kaan. Celle-là étant finie,
les Conférences furent entamées. On y mit fur le tapis l'Avis de la Cham-
bre des Comptes -de la Généralité, qu'elle avoit donné fur cette matière il
y avoit environ une/année. Cet Avis ne portoit au fonds que quelques
points de Lefine ,. de fort peu ou -point de confequence. Le Conlbil
•d'Etat mit d'abord fur le tapis qu'il fallpit/preahbleinent régler la reparti-
tion proportionnée des Troupes fur les • 'Provinces , refpectives,, ainii qu'il
avoit mis déjà par écrit. Quelques Membres dirent que les L-urs s'étoient
pour cela conformées à la Refolution des Etats du 26. Mai de l'année pre-
M 2
ce-
SES Pro
VINCES-
Uniks.
Afïairm
»e Mos-
COVjE.
5>2 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
cedente. Le Confeil d'Etat foûtint , que fi quelques-unes s'y étoient con-
formées , i! y en avoir d'autres qui en étoient entièrement éloignées. Il
propofa pour régler cette Affaire de faire un Plan Conciliatoire , afin que la
repartition fut juflement proportionnée. Il fit ce Plan le 24. Février ,
qu'il prefenta le même jour aux Etats Généraux. Il fallut en envoier la
Copie aux Provinces refpeéïives , pour en avoir leur Aprobation. Ce qui
traina en longueur , d'une manière qu'on n'a pas vu les fuites avant le
Départ de la Hollande.
11 auroit peut-être été bon, que le Séjour de l'Ecrivain de ces Mémoires
eut pu fans préjudicier à fa fanté relier plus longtens à la Haie , pour voir
la fin de plufieurs Affaires. Par exemple, de voir celle des Négociations
qu'il y avoit fur le tapis tant entre l'Empereur, la France, & l'Angleterre
relativement à l'Efpagne. Comme l'on en a vu la Conclufion imprimée
ailleurs dans la fuite fous le nom de Quadruple Alliance, l'on s'y raporte.
C'elt auffi bien touchant une autre entre le Czar, la Suéde , le Roi Au-
gufte,&le Roi de Pruffe. Elle devoit être ménagée à Dantzick par la
Médiation de la France. Suivant des Avis que le Baron de Heems avoit
eu de la Cour Impériale, les ordres avoient été envoiez de leur part à
Vienne, pour inviter l'Empereur d'y envoier fes Plénipotentiaires. On af-
furoit cependant, que ce Congrès à Dantzick n'étoit qu'une Formalité pour
figner la Paix* car, l'on étoit déjà convenu de tous les Articles.
AFFAIRES DE MOSCOVIE.
Il y eut dans le commencement de cette Année une Affaire capable
d'étonner le Public. Ce fut qu'au commencement de la même Année le
Prince Kourakin notifia aux Etats , par ordre du Czar, que le Czarowitz
fon fils aine avoit renoncé à fa fuccefîion en faveur du fécond fils que le
Czar avoit eu de la Czarinne fa féconde femme. Les Etats en avoient
déjà été informez par des Lettres de leurMinillre à la Cour du Czar que
voici.
Lettres de aux Etats Généraux des Provin-
ces-Unies , touchant le Procès du Czarowits\ des 14..
6? J 7. Février 1718.
Lettres
touchant
le Procès
du Cza-
rowits.
MM.
ON forme actuellement les grandes Cloches, & j'aprens quejSaMa-
jefté, accompagnée de tous fes Minières & Boyars, fe trouve dans
la grande Sale d'Audience, où Son Alteffe le Czarowitz doit parokre,
pour renoncer fblemnellement à la Succeffion de cette Couronne. J'eC-
père de pouvoir mander par la première Polie toutes les Circonftances
de cette importante Affaire , & j'ai l'honneur d'être , &c. Mofcou, le
'14. Février 1718.
HAUTS
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 93
Affaires
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS, ™ Moi-
COVIE.
EN confequence de ma dernière très-humble Dépêche du 14. de ce
mois Je prens la liberté avec tout, le dû refpecl: de mander à VV. HH.
PP. les Circonftances de la Renonciation , ou plutôt Dégradation folemnelle ,
du Fils aine de Sa Majefté Czarienne, le Prince Alexius Petrowitz. Le
1 1. au foir Son AlteiTe arriva dans cette Ville avec Mr. Tolftoy, & avoit
un long Entretien avec Sa Majefté, furquoi on tint Confeil le lendemain
12,. de grand matin. Le 13.il fut donné ordre aux Régimens Gardes de
Przebralhiski & Simanawski, comme aufii à deux Compagnies de Gre-
nadiers, de fe tenir prêts, & de charger à baie , fous peine de mort. Le
14. au matin ces Troupes fe mirent en mouvement, ck furent poilées de
telle forte au tour du château, qu'elles occupoient toutes les portes &
avenues. En même tems , il fut envoie ordre à tous les Miniilres , Boyars ,
& Confeillers d'Etat, de paroitre à la Cour dans la grande Sale d'Audien-
ce, & au Clergé de s'allembler dans l'Eglife Cathédrale, ce qu'ils firent
tous. Là-deiTus, on fonna la grande Cloche; & le Czarowitz , qu'on
avoit mené hors de la Ville à un endroit iîtué à fept Werjïes d'ici , fut
amené fans Epée. En entrant dans la grande Sale , où Sa Majefté Cza-
rienne fe tenoit entourée de tous les Grands du Roiaume , le Prince pre-
fenta à Sa Majefté un Ecrit qui portoit, qu'il s'avoùoit coupable, & répan-
dant de chaudes larmes il fe jetta aux pieds du Czar , qui remit cet Ecrit.
à Mr. le Vice-Chancelier Baron Shaffiroff: & relevant enfin ce Fils mal-
heureux, il lui demanda, ce qu'il fouhaittoit? Sur quoi le Prince répliqua,
qu'il demandoit grâce & la vie. Là-deiTus, Sa Majefté repondit, cela
vous eft accordé; mais, vous avez perdu toute efperance deSuccelTion à
notre Couronne, & il faut que vous y renonciez folemnellement, & que
vous figniez Jette Renonciation: à quoi il déclara être prêt. Sa Majefté
difoit de plus, Pourquoi ne m'avez-vous pas écouté, & qui eft-cequi vous
a confeillé votre fuite? Sur quoi le Prince s'aprocha de Sa Majefté , & lui
parla bas. Là-deiTus, ils entrèrent tous deux dans une autre Chambre, où
l'on fupofe qu'il a nommé les Perfonnes; ce qui paroit d'autant plus vrai-
femblable, que d'abord après diné il fut dépêché trois Couriers. Sa Ma-
jefté & le Prince étant rentré dans la Sale, ce dernier figna un Ecrit, qui
contenoit, qu'il avoiioit être incapable du Gouvernement, & qu'il renon-
çoit à la Succeflion. Cela étant fait, on lut tout haut les Points ou Raifons
qui avoient porté Sa Majefté Czarienne à exclure fon Fils de la Succef-
lion à la Couronne, & qui 'rempliiToient plufieurs feuilles de Papier, dont
j'éfpere de pouvoir envoïer dans peu à VV. HH. PP. une Copie trans-
latée. Après cette Lecture , chacun des Alïiftans, grands & petits, Mi-
niftres, Boyars, Officiers, & Marchands Rutfiens , éioit obligé défaire
& de figner le Serment ci-joint; furquoi on jetta plufieurs Exemplaires
imprimez de ce Serment aux Spectateurs. De-là, ces grands Perfonnages
fe rendirent dans l'Eglife ci-dellus nentionée, où Sa Majefté reprocha au
M 3 ' Pria-
COVIE.
94 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Amstxm Prince par un long Difcours fa Defobeiflance , & fa mauvaife Conduite.
de vies- surquoi tous les Ecclefiaftiques l'un après l'autre firent alignèrent pareille-
ment le fulmentioné Serment. Cela étant fait, on fe fepara, & Sa Majefté
alla dans (es apartemens pour diner, où le Prince aiïiita. Le foir, il y eut
Bal à la Cour, à l'occaiion du jour de la PrinceiTe Anne, Fille ainée de
Sa Majefté.
Hier 16. de ce mois tous les Officiers Allemands qui fe trouvent ici ont
pareillement été obligez de ligner le Serment, & les Ordres ont été en-
voïez dans toutes les Provinces de ce Roiaume, de même qu'aux Armées,
pour faire prêter ledit Serment à un chacun.
Voici, Hauts ckPuiffans Seigneurs, les Particularitez de cette grande &
éclatante Affaire, pour autant qu'elles font parvenues à ma connoiiïance.
Bien des gens craignent qu'elle n'ait un jour de dangereufes fuites, li le
Prince dégradé vient à furvivre à fun Père., Il n'y a que de certaines Per-
fonnes, & en particulier Mr. Tollk>y, à qui l'Accès eft permis auprès de
Son Altefle. 11 eft à favoir prefentement, fi elle fe retirera dans un Cou-
vent , ou li Sa Majeité aimera mieux la garder fous fes yeux.
J'ai apris de bonne main, que Sa Majefté a bien refolu de retourner par
Olkmitzfeh à Petersbourg, mais qu'elle n'y fera pas un long fejour, vou-
lant aller vers le Primeras dans fes Etats d'Aftracan, .& de Cafan. Sa
Majefté la Czarienne reliera en attendant ici, & y fera aparament auiii
fes couches.
Par Ordre de Sa Majefté Czarienne on a commencé à refondre laMon-
noie de cuivre, & l'on fait d'un ancien Kopeek. cinq neufs; de forte que,
d'une Livre de cuivre, on frape p<5". fols de Ruffie: à quoi, fuivant le
Calcul qu'on en a fait, Sa Majefté profite deux Millions: de Roebeh'on Rix-
dales; ce. qui fe peut bien, mais d'un autre côté le Commerce en foufrira
une criieile atteinte. Les Monoies d'argent ne feront pas encore changées,
qaoique le Plan en exifte déjà, mais il ne fera pas exécute' avant qu'on
n'ait fini celles de cuivre. Mofcou, le 17. de Février 171S.
SERMENT DES MOSCOVITES.
Serment IV! oi NN. NN. m'engage fur le îaint Evançile. Comme notre très-gra-
des Mol- i ,» a S> r- I p ai • • ri-- i r Pt .
tieux Maître (k Czar Pierre Alexiowitz a publie par des Lettres patentes
dans toute la Ruffie l'important point de l'Exclulion de fon Fils le Prince
Czarien Alexius Petrowitz du Thrône de toute la Ruine ; aiant notifié en
même tems, qu'il a établi pour fou SucceiTeur au Irône le fécond Fils de
Sa Majefté Czarienne le Prince Roïal Pierre Petrowitz; je jure donc par
le Dieu Tout-puiffant, Ja Très-fainte Trinité, que je reconnois ce Rè-
glement de Sa Majeité Czarienne pour jufte, & que je m'y foùrnets erï
toute dévotion, reconnoiffant pour toujours, conformément à ce Règle-
ment de Succeffion, le Prince Czarien Pierre Petrowitz pour le véritable
SuceeiTeur Héréditaire, & que je le défendrai en toutes rencontres , fut-
ce au prix de ma vie, contre tous ceux qui ôferoient le contrecarer. Et
que
des Mos-
covites
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. '9f
que je ne prêterai jamais afllflanee, fous quelque prétexte que ce foit, au AffairfS
Prince tzarien Alexius Petrowiiz, pour ladite Succeiîio.n , ni ne tiendrai de Mos-
le Serment à lui prêté. C'eit fur quoi je fais Sériaient d'un Efprit Chrétien, C0V1K-
me. foumettant au Jugement de Dieu , devant le fiint Evangile, & en bai- "
fant la fainte Croix. Je fouffigne de ma propre main.
Imprimé devant Mofcou , dans V Année de notre Seigneur 1 7 1 8.
le ,; Février.
Le Czar fit enfuite publier un Manifefle du 3. Février affez curieux
pour être inieré ici.
Manifefle de Sa Majejlé Czarienne , touchant le Czaro-
wits: traduit Jur P Original en Langue RuJJîenne.
^Tous PIERRE 1., par la Grâce de Dieu, Czar & Autokrator de Mani-
ai toute la RuJJïey (Sic. &c. &c. Faifons lavoir à toutts les Perfonnes, &fte du
tant Eccléfiailiques que Militaires & Civiles, & de tous Etats de la Na- ^^u"
■tion RuJJienne, nos fidelles Sujets. Il ett notoire & connu à la plus grande piv du
partie de nos ficelles Sujets, principalement à ceux qui demeurent dans 3. Fê-
les Lieux de nos Réfidences, ou qui font a nôtre Service, avec combien vrier«
d'aï tendon & de foin Nous avons fait élever nôtre Fils aîné Akxeï, lui
ayant donné pour cet effet dès fon Enfance des Précepteurs pour la Lan-
gue RuJJîenne & pour les Langues Etrangères, le faifaiu bien inltruire dans
toutes fortes de Sciences , dans la vue de le faire élever, non-feulement
dans nôtre Chrétienne &. Orthodoxe Foi de la Confeîlion Grecque , mais
.auffi dans les connoiifances des Affaires Militaires & Politiques, comme
suffi des Gouvernemens des Etats étrangers & de leurs Coutumes & Lan-
gues j afin que, par la Lecture des Hiitoires & des Livres de toutes for-
tes de Sciences convtnables à un Prince d'un grand Etat, il acquit les
qualitez dignes d'un Succefîeur à nôtre Trône de la Grande RuJJic.
Cependant, Nous avons vu avec douleur, que toute nôtre attention &
nos foins employez h l'éducation & a l'iniiruclion de nôtre Fj!î étoient inu-
tiles, puifqu'il s'écartoit toujours de rObéïflance Filiale ; n'ayant nulle ap-
plication à ce qui convenoit à un digne Succelfeur , & méprifant les Pré-
ceptes des Maîtres que nous lui avions donnez ^ pratiquant au contraire
des perfennes déréglées, dont 1! n'a pu aprendre que de mauvaifes choies,
& rien qui pût lui être utile & profitable.
Nous n'avons pas oublié de tacher fouvent de le ramener à fon devoir,
tantôt par des careffes, tantôt par des réprimandes, queJquesfois par des
Corrections Paternelles.
Nous l'avons pris plus d'une fois avec Nous dans nos Campagnes, pour
îe faire mft uire dans l'Art Militaire , comme dans une des principales
Sciences du Monde pour la défenle delà Patrie^'élo^nani pourtant toujours
des
C0V1E.
5>6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaip.f.s des occafions périlleufes,pour le ménager par raport à la Succeflîon, quoi-
Mos' que Nous y ayons expofé nôtre propre Perfonne.
Nous l'avons laifle en d'autres tems kAfofiow, en lui mettant entre les
mains une efpece de Régence dans l'Empire, afin de le former dans l'Art
de Régner pour l'avenir.
Nous l'avons envoyé après dans les Pais Etrangers , Nous perfuadant que
quand il verroit dans Tes Voyages des Gouvernemens fi bien réglez, cela
exciteroit dans lui quelque émulation & de l'inclination au Bien, pour s'y
appliquer.
Mais, tous ces foins que Nous avons pris ont été fans fruit: c'a été la
femence de la doctrine tombée fur les pierres.
Non-feulement il n'a pas fuivi le Bien, il l'a même haï, fans témoigner
jamais aucun penchant pour les Affaires, foit de Guerre ou de Politique:
il s'eft attaché uniquement & continuellement à la converfation de Gens
vils & déréglez, & de mœurs groffieres & abominables.
Comme Nous le voulions détourner de ces Déreglemens par toutes les
voyes imaginables, & lui infpirer de l'inclination à pratiquer des perfon-
nes de vertu & d'honneur: Nous l'avons exhorté de fe choifir une Epou-
fe parmi les PrinceiTes des principales Maifons Souveraines Etrangères ,
comme c'elt la coutume ailleurs , & fuivant l'exemple de nos Ancêtres
les Czars de Rufiie, qui fe font alliez à d'autres Maifons Souveraines ;&
Nous lui avons laiffé la liberté du choix.
Il s'efl déclaré pour la Princefle Petite-Fille du Duc de Wolfenbuttel
alors régnant , Belle-Sœur, de S. M. l'Empereur Romain aujourd'hui ré-
gnant, & Coufine du Roi d'Angleterre; & Nous ayant prié de la lui pro-
curer & de permettre de l'époufer, Nous y avons d'abord confenti , n'é-
pargnant pas les dépenfes confiderables , que ce Mariage a exigées. Mais,
après fa confommation, Nous étant flatez que le changement d'état de nô-
tre Fils, produiroit un fruit particulier, & un changement dans fes mau-
vaifes habitudes , Nous avons éprouvé tout le contraire de ce que Nous
en avions efperé.
Quoi-que fon Epoufe, autant que Nous l'avons pu remarquer, fût une
Princefle fage , fpirituelle, d'une conduite vertueufe, quoi-que lui-même
l'eût choifie, il a vécu néanmoins avec Elle dans la dernière defunion ,
redoublant fes attachemens pour des Gens déréglez, & faifant par-là
honte à nôtre Maifon devant les Princes Etrangers , à qui cette Prin-
cefle étoit alliée par le Sang ; ce qui Nous a aufli attiré beaucoup de
plaintes & de reproches.
Quelque fréquens qu'ayent été les Avis & les Exhortations de nôtre
côté pour le porter à fe corriger, rien n'y a réufli.
Violant enfin aufli la Foi conjugale , il donna fon attachement à une
Proflituée de la plus bafle & fervile condition, vivant avec Elle dans le
crime publiquement, au mépris de fa légitime Epoufe, qui peu de tems
après mourut d'une maladie à la vérité, mais non pas fans que l'on ait crû
que
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIIT. $?
que fon chagrin, caufé par les defordres & les dérégîemens de Ton Epoux, Affairf*
n'ait fait avancer fes jours. de Mot.
Quand Nous vimes fon opiniâtreté a perfévérer dans fa Conduite dépra- C0VIE*_
vée, Nous lui déclarâmes aux Funérailles de Ton Epoufe, que Ci défor-
mais il ne fe conformoit point à nôtre volonté, & qu'il ne s'appliquât à ce
qui convient à un Prince Héritier préfomptif d'un tel Empire, Nous le
priverions de la Succeffion, fans faire attention qu'il étoit nôtre Fils uni-
que, nôtre fécond Fils n'étant pas alors encore au monde, & qu'il ne de-
voit pas fe fier là-deffus , parce que Nous aimerions mieux Nous donner
pour Succeffeur un Etranger qui en fût digne, que nôtre propre Fils
indigne : que Nous ne pouvions pas laiffer un tel Succeffeur , qui détrui-
roit ce que, par la grâce de Dieu, le Père a établi, & qui flétriroit la gloi-
re & l'honneur de la Nation Ruflienne , après que, pour l'acquérir , Nous
avions facrifié nos veilles & nôtre fanté,expofant fans regret en plufieurs
occafions nôtre propre vie: outre que la crainte des Jugemens de Dieu ne
Nous permettroit pas de laiffer le Gouvernement d'un fi grand Etat en-
tre les mains de quelqu'un dont l'infuffifance & l'indignité Nous feroit
connue.
Nous l'avons enfin exhorté, le plus fortement que Nous avons pu , à fe
conduire avec fageffe, & Nous lui avons donné du tems pour fe cor-
riger.
11 répondit à ces Remontrances, qu'il fe reconnoiffoit coupable en tous
ces points; mais, alléguant la foibleiïe de fon tempérament & de fon efc
prit, qui ne lui permettoit pas de s'apliquer aux Sciences & Fonctions né-
ceffaires , il s'avoiia lui-même incapable & indigne de la Succeffion,
Nous priant de l'en décharger.
Cependant, Nous l'avons encore exhorté paternellement ; & , joignant
les menaces aux prières, Nous n'avons rien oublié pour le remettre dans
le bon chemin : & les Opérations de la Guerre, Nous ayant obligé de
Nous rendre en Danemarc, Nous l'avons laiffé à Petersbourg> lui donnant
encore le tems de rentrer dans foi-meme & de fe corriger.
Sur les Avis que Nous recevions dans la fuite de la continuation de fes
dérégîemens, Nous l'avons mandé auprès de Nous à Copenhague , pour faire
auffi la Campagne, afin de fe mieux former.
Mais, oubliant la Crainte & les Commandemens de Dieu, qui ordonne
d'obéïr aux Parens ordinaires, & à plus forte raifon à ceux qui font en
même tems Souverains, il n'a répondu à tous nos foins Paternels, qu'a-
vec une ingratitude inouïe; car, au lieu de fe rendre auprès de Nous,
il s'évada, prenant avec lui des fommes d'argent, & fon infâme Concu-
bine , avec qui il continuoit de vivre dans le crime. 11 fe mit fous la
protection de l'Empereur, débitant contre Nous, fon Père & fon Sei-
gneur, beaucoup de calomnies & de fauffetez, comme fi Nous le per-
fécutions, & le voulions priver fans raifon de la Succeffion; difant que.
fa vie même n'étoit pas en fureté auprès de Nous, & priant l'Empereur
de lui donner retraite, & de le protéger contre Nous à main armée.
Tome XL N Cha-
?8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
affaires Chacun peut juger combien de honte & de deshonneur une telle Cou-
de Mos- duite de nôtre Fils a attiré fur nôtre Etat devant toute la Terre. On trou-
C0VïE' Vera difficilement un Exemple femblable dans les Hiftoires.
L'Empereur, quoi-qu'informé de Tes excès, & de la manière dont il
avoit vécu avec fon Epoufe, Belle-Sœur de S. M. L, accorda pourtant à
fes infiantes fbllicitations une Place où il pût demeurer, & où il pria l'Em-
pereur qu'il pût être fi fecretemenc que Nous n'en puffions point avoir la
moindre connoiffance.
Son long retardement en chemin Nous ayant cependant fait apréhender
que ce ne fût pas fans fujet, Nous craignîmes par une tendrefTe & foilici-
tude Paternelle, qu'il ne lui fût arrivé quelque malheur, ce qui Nous o-
bligea de l'envoyer chercher fur plufieurs routes, jufqu'à-ce qu'enfin , après
beaucoup de peines & de perquifitions, Nous reçûmes avis de nôtre Ca-
pitaine de la Garde Alexandre Ruemanzoff, qu'on le garuoit fecrette-
ment dans une ForterefTe Impériale du Tirol : furquoi Nous écrivimes
de nôtre propre main à l'Empereur , pour le prier de Nuus le renvoyer.
Mais, quoi-que X Empereur Y ait fait informer de ce que Nous délirions,
& l'exhorter de fe rendre auprès de Nous , & de fe foûmettre à nôtre
volonté, étant celle de fon Père & de fon Seigneur, il remontra de fon
côté avec beaucoup de calomnies contre Nous , qu'il ne devoit point
Nous le livrer entre nos mains, comme fi nous euiîions été fon Ennemi
& fon Tiran , de qui il n'avoit à attendre qu'à fouffrir la mort.
Il perfuada enfin l'Empereur, au lieu de nous l'envoyer alors, de l'é-
loigner dans une Place reculée de fa Domination, favoir à Naples en
Italie , & de l'y garder fecretement dans le Château fous un nom
étranger.
Nous fûmes néanmoins avertis par nôtre fufdit Capitaine de la Garde
de fon féjour dans cet endroit- là, & Nous dépéchâmes à l'Empereur
nôtre Confeiller Privé Pierre Tolfloi & le même Capitaine de la Garde
Ruemanzoff, avec une Lettre en fortes exprefîlons ; remontrant combien
il feroit injuile de vouloir retenir nôtre Fils contre tous les Droits Divins
& Humains , félon lefquels auffi les Parens particuliers , encore à plus
forte raifon ceux qui font d'ailleurs munis de l'Autorité Souveraine com-
me Nous, avoient un Pouvoir illimité fur leurs Enfans, indépendamment
de toute autre Juge ; & Nous expofàmes d'un côté les manières juftes &
bien -intentionnées, dont nous avions toujours ufé envers nôtre Fils, &
de l'autre fès défobéiflances 5 faifant voir quelles mauvaifes fuites & ani-
molitez entre Nous ce refus de Nous le remettre pourroit caufer , parce
que Nous ne pourrions pas laifTer la chofe en cet état. Nous inflruifimes
en même tems ceux que Nous avions envoyez de parler de bouche enco-
re avec plus de force, & de repréfenter que nous ferions obligé de ven-
ger par toutes fortes de moyens & de manières cette détention de nô-
tre Fils.
Nous écrivimes aufïi à lui, nôtre Fils, de nôtre propre main, lui re-
montrant l'horreur & l'impiété de fa conduite , & l'énormité du crime
qu'il
COVIE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 99
qu'il avoit commis contre Nous fon Père , & comment Dieu dans fes Affatrf*
Commandemens menaçoit de punir d'une mort éternelle les Enfans def- DE Mo«*
obéïflans.
Nous le menacions comme Père, de nôtre Malédiction , & comme fon
Seigneur, de le déclarer Traitre de fa Patrie, s'il n'y retournoit & s'il ré-
futait de Nous obéir. Nous y avons joint les afllirances, que s'il fe foû-
mettoit à nôtre volonté & s'il retournoit, Nous lui pardonnerions fon
crime.
Nos Envoyez , après beaucoup de follicitations , & après la fufdite
Repréfentation faite de nôtre part par écrit , & par eux de bouche , ob-
tinrent enfin de X Empereur la permiflion d'aller trouver nôtre Fils , & de
le difpofer à retourner.
Les Miniftres Impériaux leur firent en même tems connoitre , que nô-
tre Fils avoit informé Y Empereur que Nous le perfécutions , que fa vie
n'étoit pas en fureté avec Nous , & que par- là il avoit ému la compaf-
fion de Y Empereur qui l'avoit porté à le prendre en fa protection ; que
YEmpereur , confiderant présentement nos véritables & folides repréfenta-
tions , il ordonneront de fon côté qu'on tachât en toute manière de le dif-
pofer à retourner auprès de Nous, en lui faifant déclarer, qu'il ne pouvoit
pas le refufer à fon Père contre toute équité & juitice , ni fe brouiller avec
Nous pour ce fujet.
Nos Envoyez, à leur arrivée à Naples9 ayant fouhaité de lui rendre nô-
tre Lettre, écrite de nôtre propre main , nous écrivirent qu'il n'avoit pas
feulement voulu les admettre ; mars , que le Viceroi Impérial avoit trouvé
le moyen, en l'invitant chez lui , de les lui préfenter enfuite malgré lui.
Il reçût à la vérité nôtre Lettre , contenant nôtre Exhortation Paternel-
le, & les menaces de la Malédiction ; mais, fans témoigner la moindre in-
clination au retour, & en alléguant bien des fauiTetez & des calomnies
contre Nous, comme fi, à caufe de beaucoup de dangers qu'il avoit à
apréhender de nous il ne pouvoit, ni ne vouloit, retourner; fe vantant
que X Empereur lui avoit promis, non- feulement de le défendre & de le
protéger contre Nous , mais même de le mettre fur le Trône de RuJJie ,
auiîi contre nôtre volonté, à main armée.
Nos Envoyez , voyant cette mauvaife difpofition, employèrent tous les
moyens imaginables pour le perfuader à retourner. Ils le prièrent, ils fi-
rent valoir tour à tour nos ailurances pleines de bonté pour lui, & nos
menaces en cas de defobéïfiance, & que Nous le retirerions même à main
armée. Ils lui repréfenterent, que X Empereur ne voudroit point entrer en
Guerre avec Nous pour fon fujet, & ils lui firent beaucoup d'autres fem-
blabîes Remontrances.
Mais, il n'eut aucun égard à tout cela, & ne fe difpofa point à retourner
auprès de Nous, jufques à ce que le Viceroi Impérial, voyant enfin fon
obitination, lui repréfenta au nom de X Empereur , qu'il devoit retourner*
lui déclarant, que X Empereur ne pouvoit, félon aucun Droit, Nous le rete-
nir , ni, pendant la Guerre préfente avec le 'Turc, comme auffi en Italie
N 2 avec
ïoo MEMOIRES, NEGOTIATION S, TRAITEZ, ET
affaîres avec le Roi à'Efpagm, pour l'amour de lui s'attirer des affaires avec Nous.
de Mos- Quand il vit le train que cette Affaire prenoit, craignant qu'il ne Nous
fût livré malgré lui, il fe dilpofa enfin à revenir auprès de Nous, & il le
déclara à nos Envoyez, comme aufîi au Viceroi Impérial.
Il Nous l'écrivit auffi, s'avoùant criminel & coupable. La Copie de fa
Lettre eft ci-defïbus tranfcrke.
Et de cette manière il eft arrivé ici. Et, quoi- que maintenant nôtre
Fils, par toutes Tes defobéïffances criminelles commifes depuis longues an-
nées contre Nous Ton Père & Ton Seigneur, & fur -tout pour le deshon-
neur qu'il Nous a fait devant tout le monde, par fon évafion, & par les ca-
lomnies qu'il a répandues de Nous, comme d'un Père dénaturé, & pour
s'être oppofé à fon Souverain, il ait mérité d'être puni de mort :
Néanmoins, nôtre Tendreffe Paternelle Nous fait avoir pitié de lui, &
Nous lui pardonnons fes Crimes , en lui en remettant toute Punition.
Mais , confiderant fon indignité & tout le cours de fa conduite déréglée
décrite ci-deffus, Nous ne pouvons point en confcience lui lailler après
Nous la Succeffion au Trône de RuJJie, prévoyant que par fa conduite dé-
pravée il détruiroit entièrement la gloire de nôtre Nation, & le falut de
nos Etats, que Nous avons acquis & affermis, par la grâce de Dieu, avec
une application fans relâche ; car, il eft notoire & connu à chacun, com-
bien il Nous a coûté, & avec quels efforts Nous avons non -feulement re-
couvré les Provinces que l'Ennemi avoit ufurpées fur nôtre Empire , mais
auffi conquis de nouveau pluiieurs Villes & Pais confiderables , & avec
quels foins Nous avons fait inftruire nos Peuples dans toutes fortes de
Sciences Militaires & Civiles , à la gloire & au profit de la Nation & de
l 'Empire.
Or, comme Nous plaindrions nos Etats & nos ridelles Sujets, fi nous
les rejettions, par un tel Succeffeur, dans un état beaucoup plus mauvais
qu'ils n'ont jamais été -,
Ainfi,par le Pouvoir Paternel, en vertu duquel, félon les Droits de nô-
tre Empire, chacun même de nos Sujets peut deshériter un Fils, & don-
ner fa Succeffion à tel autre de fes Fils qu'il veut :
Et en qualité de*Prince Souverain, en conlideration du faîut de nos
Etats, Nous privons nôtre dit Fils Alexeï pour fes Crimes & pour fon In-
dignité, delà Succeffion après Nous à nôtre Trône de RuJJie , quand bien
même il ne fubfifleroit pas une feule Perfonne de nôtre Famille après Nous.
Et Nous conflituons & déclarons Succeffeur audit Trône après Nous
nôtre fécond Fils Pierre, quoi -qu'encore jeune, n'ayant pas de Succef-
feur plus âgé.
Donnons à nôtre fufdit Fils Alexei nôtre Malédiction Paternelle , fi ja-
mais, en quelque tems que ce foit, il prétend ou recherche ladite Suc-
ceffion.
Délirons auffi de nos Fidelîes Sujets de l'Etat Eccléfiaftique & Séculier,
de tout autre Etat, & de toute la Nation Ruffienne, que, félon cette Con-
ilitution & félon nôtre Volonté , ils reconnoiffent & confiderent nôtre- dit
Fils
C0V1K.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XV11L loi
Fils Pierre défigné par nous à la SuccefTion, pour légitime Succefleur ; & Affairée
qu'en conformité de cette nôtre Conltitution, ils confirment le tout par
Serment devant le Saint Autel , fur les Saints Evangiles , & baifant la Croix.
Et tous ceux qui s'oppoferont jamais, en quelque tems que ce foit, à
cette nôtre Volonté , & qui dès aujourd'hui ôferont confiderer nôtre Fils
Alexeï pour Succefleur ou l'affilier pour cet effet, Nous les déclarons pour
Traîtres envers Nous & la Patrie. Et avons ordonné que la préfente foie
par tout publiée & promulguée, afin que perfonne n'en prétende caufe
d'ignorance. Fait à Mofcou, le 3. Février 17 18. V.St.
Signé , de nôtre main , & {celle de nôtre Sceau*
Copie de la Lettre de la propre main du Czareiuitz.
TRES-GRACIEUX SEIGNEUR ET PERE.
J'Ai reçu la tres-gracieufe Lettre de Vôtre Majeflé , par les Srs. Tolfloi &
Roumjankoff , par laquelle, comme aujji par eux de bouche , Elle majjïire
très -graaeuje ment du Pardon de ma Sortie fans permijjïon , en cas que je revien-
ne. Je vous en rends grâces les larmes aux yeux. Je rcconnois être indigne de
toute grâce : me jet tant à vos pieds , fimpioi e vôtre Clémence de me pardonner
mes Crimes , quoi - que j aye mérité toutes fortes de punitions. Mais ,je me repofe
fur vos çracieufes ajfuranccs \ & , m abandonnant à Vôtre Volonté , je pars au
premier jour de Naples, pour me rendre auprès de V. M. à St. Petersbourgs
avec ceux que V. M. a envoyez,
Très -humble & indigne Serviteur , qui ne
mérite pas de fe dire Fils ,
ALEXEL
De Naples le 4. Octobre 1717.
Copie du Serment fait par le Czarowitz Alexeu
Promeffe fous Serment ,
, TE, ci- defTous nommé, promets devant îe Saint Evangile, que comme
, I pour le Crime, que j'ai commis envers S. M. Czanenne mon Père
, & Seigneur, félon que cela eft déduit dans fon Ecrit , & par ma faute ,
, je fuis exclus de la Succeffion au Trône de Rufïîe. Ainti, je reconnois
y, & avoue cette Exclufion pour jufte , comme l'avant mérité, par ma
n faute & indignité ; & je m'oblige, & jure au Tout-PuiUant Dieu en
N 3 Tri*
io2 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires }> Trinité comme au Souverain Juge, de me foumettre en tout à cette
de Mos- sj Volonté Paternelle; de ne rechercher jamais cette Succeffion ; de ne
C0V1E* ?, la point prétendre , ni de l'accepter fous aucun prétexte ; & je recon-
„ nois pour légitime Succeffeur mon Frère le Czarowitz Pierre Petro-
„ witz. Surquoi je baife la Sainte Croix , & figne la préfente de ma
»» propre main.
Signe ,
de la main du
CZAROWITZ ALEXEI.
Il y eut vers le milieu & fur la fin de l'Année un autre grand Manifefte,
affez intereffant pour la Curiofité du Public pour le mettre ici tout de fon
long.
Manifefte du Procez Criminel du Czarevitch Alexei Te-
trovitch, jugé & publié à Saint Peter sbourg^ le 25*.
jour de Juin 1718., F. St. Traduit fur P Original
Rujfien , £cp Imprimé par Ordre de Sa Majefté Cza-
rienne^à la Haye 3 chez Jean van Duren, en Juin
171 8.
Manife- ÇOit notoire , que dans la préfente Année 1718. le 14. du mois de Juin,
fie du ^3 le Très- Haut Seigneur, Czar, & Grand-Prince, Pierre Ale-
l/procL xievitch, Autocrateur de toute la Grande , Petite, & Blanche- RuJJîe,
de fon a, par une Ordonnance, fait convoquer dans la Sale de la Régence du
Fils. Sénat établi pour les Affaires de l'Empire Ruffien , les Archevêques &
Archimandrites, tous les Minières d'Etat, le Sénat, les Etats Militaire &
Civil , & la principale Nobleffe qui fe trouve à préfent a St. Petersbourg, &
leur a ordonné d'y attendre l'arrivée de Sa Majefté.
Sa Majcjlé Czarier.ne s'étant rendue en Haute Perfonne au Palais , elle
commanda , qu'on fit venir en fa préfente Impériale & devant l'Affem-
blée, le Czarevitch Alexci Petrovitch, lequel ayant comparu, Sa Majeflê
Czarienne fit de bouche une courte & brieve expofition du fujet de cette
Convocation, & elle ordonna que la lecture fut faite publiquement des
Ecrits fuivans.
Quoique l'Evafion du Czarevitch Alexei, & une partie de fes Trangref-
fions foient déjà connues à tous par le Manifefte qui a été publié à Mof-
coule 3. jour de Février de la préfente Année 1718-; cependant, il fe dé-
couvre encor à préfent, contre toute attente, des chofes qui furpaffept de
beaucoup tout ce qui a précédé , & on voit avec quelle méchanceté &
quelle
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 103
quelle noirceur ce Prince en a ufé pour en impofer à fon Souverain & fon Amms»
Pcre\ comme aufîi quels parjures il a commis contre Dieu, & comment DE Mo3'
il a feint une mauvaife famé, pour empêcher qu'on ne fit attention a fes C°V1E'
mauvaifes pratiques , & qu'on ne découvrit fes pernicieufes intrigues.
Tout cela va être expolé ici clairement & avec ordre, en reprenant la
chofe dès fon commencement.
A peine le Czarewitz Alexeï eut atteint l'âge de Raifon, & pendant les
Années qui lefuivirent, Sa Majefté Czarienne , Ion Père, emploia toute forte
demoiens pour le former aux Affaires du Gouvernement & lui donner des
connoifiances de l'Art Militaire, comme il elt raporté dans le Manifeite de
Mofcou, & ce fut fans aucun progrés. Sa Maje fie Czarienne a attendu de jour
en jour qu'il fe corrigeât par un changement de conduite & de mœurs; mais,
voiant que ce Prince s'oppofoit à tous fes bons defTeins, Sa Majelté lui a dé-
claré fes intentions par Lcrit, & lui a demandé fa dernière Réfolution: car,
l'Année 171^. le 11. jour d'Octobre, au retour des Funérailles de la feue
PrincefTe de la Couronne Epoufe du Czarew-tz , Sa Majefté Czarienne fe
fendit chez ce Prince & lui donna l'Ecrit fuivant:
Déclaration a mon Fils.
„ Vous ne pouvez point ignorer ce qui elt connu de tout le Monde,
„ jufques à quel point nos Peuples gemiifoient fous l'oppreflion des Sué-
,, dois avant le commencement de la préfente Guerre.
„ Par l'ufurpation de tant de Places maritimes fi néceflaires à nôtre
,, Etat, ils nous coupoient tout Commerce avec le relie du Monde, &
5, nous avons vu avec regret qu'ils avoient encore mis un épais rideau
,, devant les yeux des clairvoians. Vous favez combien il nous en a
>5 coûté au commencement de cette Guerre, (où Dieu feul nous a con-
„ duit comme par la main, & nous guide encore,) à nous rendre expe-
„ rimentez dans l'Art Militaire , & à nous oppofer aux avantages que
1 nos Ennemis irréconciliables remportèrent fur nous.
„ Nous nous fommes fournis à cette épreuve avec refignation à la vo-
„ lonté de Dieu, ne doutant pas que ce ne fût lui qui nous y fît palier ,
>7 jufques à ce qu'il nous eut mis dans le bon chemin, & que nous nous
jj fuffions rendus dignes d'éprouver, que le même Ennemi, devant qui on
J5 a tremblé auparavant, tremble à préfent à fon tour devant nous, peut-
„ être beaucoup davantage. Ce font-là des fruits, dont, après l'aiïiitan-
,, ce de Dieu, nous fommes redevables à nos travaux & à ceux de nos
„ fidèles & affectionnés Enfans , nos Sujets Ruffiens.
„ Mais , pendant que j'envifage les profperités dont Dieu a comblé nô-
„ tre Patrie, fi je tourne les yeux fur la Pofterké qui me doit fuccéder ,
„ j'ai le cœur encor plus pénétré de douleur'fur l'avenir, que je ne l'ai de
„ joie au fujet des Bénédictions paffées; voiant que vous,, mon Fils,
„ rejettez tous les moïens de vous rendre capable de bien gouverner
„ après
COVIE.
îo4 MEMOIRES, NEGOTiATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires „ après moi. Je dis que vôtre incapacité eft. volontaire , parce que vous
oeMos- ne pouvez point vous excufer fur le défaut d'efprit & des forces du
„ corps, comme fi Dieu- ne vous en avoit point allez bien partagé: &,
quoique vous ne foiez point d'une complexion des plus robuftes, on
ne peut point dire que vôtre tempérament foit abfolument foible.
Cependant, vous ne voulez point même entendre parler des Exerci-
ces de la Guerre; c'eft pourtant par-là, que nous fommes fortis de cette
,, obfcurité qui nous couvrait, & que nous nous fommes faits connoître
aux Nations dont nous avons préfentement l'eftime.
Je ne vous exhorte point à faire la Guerre fans de légitimes raiibns ;
je demande feulement de vous, que vous vous appliquiez à en appren-
dre .l'Art; car, il eft impoiïible de bien gouverner, fans en favoir les
Règles & la Difcipline, quand ce ne ferait que pour la defenfe de la
Patrie.
Je pourrais vous mettre devant les yeux beaucoup d'exemples de ce
que je vous propofe. Je ne veux vous parler que des Grecs avec qui
,, nous fommes unis par la même Profeffion de Foi. D'où eft venue
leur Décadence , fî-non de ce qu'ils ont négligé les armes? L'oifiveté &
le repos les ont affoiblis , & les ont allujetiis à des Tirans & à l'Efcla-
„ vage où ils font réduits depuis fi long-tems. Vous vous trompez, fi
vous croiez qu'il fuffit à un Prince d'avoir de bons Généraux pour agir
,, fous fes ordres. Chacun regarde le Chef: on étudie fes inclinations,
& on s'y conforme, tout le monde en convient. Mon Frère a aimé
pendant fon Régne la magnificence des Habits & les gros Equipages de
chevaux. On n'y avoit guère de penchant dans le Païs> mais, les plai-
firs du Prince firent auffi ceux de fes fujets, parce qu'ils font portez à
l'imiter dans ce qu'il aime, comme dans ce qui lui déplait.
„ Si des peuples fe détachent fi aifément des chofes qui ne font que
pour le plaifir, n'oublieront-ils point par la fuite des tems , on n'aban-
donneront-ils point encor plus facilement l'ufàge des armes, dont l'e-
xercice eft beaucoup plus pénible, s'ils n'y font pas entretenus?
„ Vous n'avez point d'inclination pour aprendre la Guerre, vous ne
,, vous y appliquez pas, &par conféquent vous ne la faurez jamais. Com-
ment donc pourrez-vous commander aux autres, & juger de la recom-
penfe que méritent ceux qui font leur devoir, ou punir ceux qui y au-
ront manqué? Vous ne ferez rien, & vous ne jugerez des chofes que
„ par les yeux & le fecours d'autrui, comme un jeune oifeau qui tend
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3, le bec.
53
Vous dites, que la foiblefTe de vôtre fanté ne vous permet point de
„ fuporter les fatigues de la Guerre: c'eft une exeufe qui ne vaut pas
„ mieux que les autres. Je ne vous demande point des fatigues , mais
„ feulement de l'inclination que les maladies même ne peuvent point em-
„ pêcher. Demandez» à ceux qui fe fouviennent du tems de mon Frère.
5, Il étoit d'une fanté incomparablement plus foible que la vôtre. Il ne
pouvoitpas manier un cheval tant foit peu fougueux, ni à peine le
mon-
3»
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. io*
ter. Mais, il les aima, ce qui fait qu'il n'y a jamais eu , & que peut- Affaires
être n'y a-t-il point encor,dans le Pais, une plus belle Ecurie qu'étoitla DE Mos-
fienne. C0VIE-
„ Vous voiez par-là que les bons fuccès ne dépendent pas toujours des
travaux, mais de la volonté.
,, Si vous penfez qu'il y en a, dont les affaires ne laiffent pas de réiïf-
„ iir, quoiqu'ils n'aillent point eux-mêmes à la Guère, vous avez raifon;
mais, s'ils n'y vont pas, ils y ont pourtant de l'inclination, & ils la
favent.
„ Par exemple, le feu Roi de France n'a point toujours été à h Guer-
re en perfonne; mais, on fait jufques à quel point il i'aimoit, & com-
bien d'exploits glorieux il y a faits; ce qui fit nommer fes Campagnes,
le Théâtre & l'Ecole du Monde. Son penchant n'étoit point borné
aux feules Affaires Militaires: il avoit auffi de l'inclination pour les Arts
Mechaniques , les Manufactures , & les autres EtablùTemens qui ont ren-
du fon Roiaume plus floriflant que tous les autres.
„ Après toutes ces Remontrances que je viens de vous faire, je reviens
à mon premier fujet qui vous touche.
„ Je fuis homme , & par conféquent je dois mourir. A qui laifferai-je
après moi achever ce que j'ai commencé par la grâce de Dieu, & con-
ferver ce que j'ai recouvré en partie? à un homme, qui, femblableà ce
pareffeux de l'Evangile, enfouît fon talent dans la terre, c'eit-à-dire,
qui néglige de faire valoir ce que Dieu lui a confié.
,, Souvenez-vous de vôtre opiniâtreté & de vôtre méchante humeur ,
combien de fois je vous les ai reprochées , & je vous en ai même châ-
tié, & depuis combien d'Années je ne vous parle prefque plus; mais,
rien de cela n'a profité, rien n'a fructifié. J'ai perdu mon tems; j'ai
battu l'air. Vous ne faites aucun effort, & tout vôtre plaifir femble
confifter à relier oifif & fainéant dans vôtre maifon : ce qui devroit
vous faire honte, parce que c'efl vôtre mifere, femble faire vos délices
les plus chères, fans que vous en prévoyiez les dangereufes confequen-
ces pour vous & pour tout l'Etat. St. Paul nous a laiffé une grande
vérité, quand il a écrit: Si quelqu'un ne fait pas gouverner fa propre Fa-
mille, comment pourr a-t-il conduire fEglife de Dieu?
„ Après avoir confideré tous ces grands inconveniens & y avoir réflé-
chi, & voiant que je ne puis vous porter au bien, par aucun motif,
j'ai trouvé bon de vous donner par écrit cet Acte de ma dernière vo-
lonté, réfolu pourtant d'attendre encor un "peu de tems, avant de l'e-
xécuter, pour voir fi vous voulez vous corriger. Si-non, fâchés que
je vous priverai delà Succefïion comme on retranche un membre inutile.
,, Ne vous imaginez point, que, parce que je n'ai point d'autre # En-
fant
* On fe fert ici de cette exprefilon , parce que cette Lettre a été écrite dix-huit jours
avant la Naiffance du Czarevitch Piètre Petrovitch; par conféquent le Czarevitch Alexei
étoit pour lors fils unique.
Tome XL O
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lotf MEMOIRES, NEGOTÏATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires „ fant que vous, je ne vous l'écris que pour vous faire peur. Je l'execii-
de Mos- j? terai aflurement, s'il plait à Dieu> car, puifque je n'épargne point ma
propre vie pour ma Patrie & le falut des mes peuples, comment pour-
rois-je vous épargner, vous qui ne vous en rendez pas digne? Je préfé-
rerai de les tranfmettre plutôt à un Etranger digne , qu'à mon propre
Fils indigne.
CO\IE.
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L'Original efl figné de la propre
main de Sa Majefté.
PIERRE.
Réponfe du Czarevitch à Sa Majesté' Czarien-
n e ; écrite trois jours après la Nai fiance du Seigneur
Czarevitch Pierre Petroyitch,
Très Clément Seigneur et Père.
„ T'Ai lu l'Ecrit que Vôtre Majefté m'a donné le 27. Octobre 171 5.
„ J après l'Enterrement de ma feue Epoufe.
„ Je n'ai rien à y répliquer, 11 ce n'eit que, fi Vôtre Majefté veut me.
priver de la Succeffion à la Couronne de Ruflie à caufe de mon Inhabile-
té, vôtre Volonté foit faite j je vous en fupplie même très in(tamment5
parce que je ne me juge pas moi-même propre au Gouvernement. Ma,
mémoire eit très affoiblie , & elle efl néceffaire dans les Affaires. Les.
forces de mon efprit & de mon corps font fort diminuées par les mala-
dies aufquelles j'ai été fujet ; ce qui m'a rendu incapable de gouverner
tant de peuples : il faut pour cela un homme plus vigoureux que je
ne fuis.
5, C'ell pourquoi je n'afpire point après vous ( que Dieu conferve lom-
gues Années) à la Succeffion de la Couronne Ruffîenne, quand même
je n'aurois pas de Frère comme j'en ai un à prefent, lequel je prie Dieu
qu'il conferve. Je ne prétendrai point non plus à l'avenir à cette Suc-
ceffion', de quoi je prends Dieu à témoin, & je le jure fur mon ame,
en foi de quoi j'écris & je figne la préfente de ma propre main.
„ Je mets mes Enfans entre vos mains- &, pour moi, je ne vous de-
mande que mon fimple entretien ma vie durant, laiilant le tout à vôtre
confideration & à vôtre volonté.
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Vôtre très - humble Serviteur fj? Fils
(Efl Ggné) ■ ALEXE I.
Second
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 107
Second Ecrit de Sa Majeflé Czarienne au Czarevitch, du AmtaM
10. Janvier 1716. nE Mos'
COV1K.
Dernière Monition.
COmme ma maladie m'a empêché jufqu'à prefent de m'expliquer avec
vous, fur ce que j'ai réfolu au fujet de vôtre Lettre que vous m'a-
vez écrite fur ma première \ je réponds maintenant , que j'y remarque ,
que vous n'y parlez que de la Succeflion, comme fi j'avois befoin de
vôtre confentement pour faire en cela ce qui dépend d'ailleurs de ma
Volonté. Mais, d'où vient que vous ne dites rien dans vôtre Lettre de
cette Incapacité où vous vous mettez volontairement, & de l'Averfion
que vous avez pour les Affaires , que je touchois plus particulièrement
„ dans la mienne , que je n'ai fait l'indifpofition de vôtre fanté , dont
,, vous faites feulement mention ? Je vous ai auffi remontré le méconten-
tement que j'ai de vôtre conduite depuis tant d'Années , & vous paffez
tout cela fous filence , quoique j'aie infilté fortement là-defïus. J'en
juge , que les exhortations paternelles ne vous touchent point. C'eft
pourquoi je me fuis déterminé à vous écrire encore la prefente , qui fe-
ra la dernière. Si vous meprifez les Avis que je vous donne de mon vi-
vant, quel cas en ferez vous après ma mort ?
„ Peut -on fe fier à vos fermens, quand on vous voit un cœur endurci?
David a dit : Tout homme efi menteur. Mais , quand vous auriez à préfent
la volonté d'être fidèle à vos promeffes, ces grandes Barbes * pourront
vous tourner comme ils voudront , & ils vous forceront à les fauffer.
,, Au lieu qu'à préfent leurs débauches & leur faineamife les privent
des places d'honneur- ils efperent de rendre un jour leur condition meil-
leure, par vous qui montrez déjà beaucoup de penchant pour eux.
,, Je ne vois point que vous reconnoifîiez les obligations que vous avez
à vôtre Père qui vous a donné la vie. L'affiliez- vous dans fes foliçitu-
des & fes peines depuis que vous êtes parvenu à un âge meur ? Certai-
nement en rien: tout le monde le fait : bien au contraire, vous blâmez
& vous deteftez tout ce que je fais de bon au prix & aux dépens de ma
fanté, pour l'amour & le bien de mes peuples ; & j'ai tout fujet de croi-.
re que vous en ferez le deftructeur, fi vous me furvivez. Ainfi, je ne
puis me refoudre à vous laifîer vivre à vôtre volonté , comme fi vous
étiez un Amphibie, ni chair, ni poiflbn. Changez donc de conduite ;
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prefent, que ma fanté s'affoiblit. Aufîi-tot donc que vous aurez reçu
ma Lettre, répondez moi là-deflus, foit par écrit, foît de bouche. Si
vous ne le faites pas, j'agirai avec vous comme avec un malfaiteur.
Dans l 'Original et oit fignê , P1ER R E.
* Cela s'entend de ces gens-là qui font de mœurs corrompues. Quorum Deus venter ejl.
O 2. Reponfe
AvFAiRrs
DE MOS-
COVXE.
108 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ, ET
Réponfe au Czarevitch écrite le 20. Janvier 171 6.
TRES - CLEMENT SEIGNEUR ET PERE.
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5)
J'Ai reçu hier matin votre Lettre du 19. de ce mois. Ma maladie
m'empêche de vous écrire plus au long. Je veux embrafTer l'Etat
Monaftique, & je vous demande votre gratieux confentement pour
cela.
Vôtre Serviteur & indigne Fils
ALEXEI.
Sa Majefté Czarrienne fe rendit enfuite , avant Ton départ pour les Païs
étrangers , chez le Czarevitch pour lui dire adieu. Elle le trouva au lit,,
comme s'il avoit été malade: cependant, à peine fut-elle partie , qu'il fe
rendit à un Feftin chez le Diack Michel Voinow.
Sa Majedé lui demanda pour-iors , quelle refolution il avoit prife , & le
Czarevitch lui confirma encor avec de grands Sermens , dont il prenoit
Dieu à témoin, qu'il vouloit fe retirer dans un Couvent, & qu'il ne fou-
haitoit rien avec plus de paflion que d'embraffer l'Etat Monaftique. Sa
Majelté Czarienne lui reprefenta les difficultez qu'il y avoit à prévoir pour
un jeune homme dans un tel engagement; qu'il devoit bien y penfer &ne
rien précipiter, & après cela lui écrire à quoi il fe feroit déterminé; mais
qu'il feroit beaucoup mieux de rentrer dans le chemin que Sa Majefté lui
avoit tracé, que de fe faire Moine, & que pour cet effet, Elle lui laif-
foit encore fix mois de tems; & Elle lui dit adieu.
Les fix mois fe paiTerent, fans que Sa Majeflé reçut aucune nouvelle du
Czarevitch fur ce fujet; ce qui l'obligea de lui envoyer deCoppenhaguen,
par le Courrier Sophonor, une Lettre de fa propre main , datée du 16,
Août iyid.
MON FILS,
„ Vôtre première Lettre du 29. Juin , & l'autre du 30. Juillet m'ont
été rendues. Comme vous n'y parlez que de l'état de votre fanté feu-
lement, je vous écris la prefente pour vous dire, que je vous ai de-
mandé vôtre refolution fur le Chapitre de la Succefllon, quand je vous
ai dit adieu. Vous me répondîtes pour lors à vôtre ordinaire, que vous
ne vous en jugiez point capable à caufe de vôtre infirmité, & que vous
préféreriez de vous retirer dans un Couvent. Je vous dis d'y penfer
encor ferieufement , & de m'écrire après la refolution que vous auriez
prife. Je l'ai attendue pendant fept mois , & vous ne m'en mandez
rien jufqu'à prefent. Vous avez eu alfez de tems pour y penfer; ainfi,
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COVJE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. io?
à la réception de ma Lettre, prenez votre parti d'un côté ou d'autre. A?fÀXM»e
Si vous vous déterminez au premier, quiefr.de s'appliquer, pour fe rendre DE Mo*-
capabJe de la Succefîion , ne différez point plus d'une femaine h vous
rendre ici, où vous pourez arriver encor allez à tems pour être prê-
tent aux opérations de la Campagne; mais, fi vous prenez l'autre par-
ti, mandez-moi où, en quel tems, & quel jour vous voulez exécuter
votre refolution, afin que j'aie le cœur en repos, & que je fâche ce
que je dois efperer de vous. Renvoyez-moi votre Reponfe finale par
le même Courier qui vous rendra ma Lettre.
„ Au premier Cas, marquez-moi le jour que vous partirez de Peters-
bourg; & au fécond, quand vous l'exécuterez. Je vous réitère que je
veux abfblument que vous vous déterminiez à quelque chofe, car au-
trement je jugerai que vous ne cherchez qu'à gagner du tems , pour le
palier dans votre oiiiveté ordinaire.
Dans t original et oit fignê ,
i PIERRE.
Le Czarewitz, au mépris de ces Ordres de Sa Majefté Czarienne, s'é-
vada en chemin, feignant au fortir de Pecersbourg daller fe rendre auprès
de Sa Majeiié à qui il écrivit dans fa route une Lettre frauduleufe qu'il
datta faufîement de Conixbergue au lieu de Libau, pour empêcher que
fon Père n'envoiât quelqu'un à fa rencontre , comme il l'a reconnu ex-
prefTement dans fon Ecirt de Confeiïions.
Sur l'Avis que Sa Majeflé reçut à Amfterdam de fon Evafiorî , elle en-
voia à fa recherche, premièrement le Refident Wefelowskî, & eimrite le
Capitaine de la Garde Rumanzow, & enfin de Spâ le Confeilter privé
& Capitaine de la Garde Mr. Tolfloi, avec le même Capitaine Rumanzow,
par lefquels Sa Majelté écrivit de fa propre main la Lettre fui vante le io,
Juillet 1717.
MON FILS,
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il
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»
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il
11
a
VOtre defobeifTance , & le mépris que vous avez fait de mes Ordres,
font connus de tout le Monde. Ni mes paroles , ni mes correc-
tions , n'ont point pu vous faire fuivre mes Initruérions} & enfin, après
m'avoir trompé quand je vous dis adieu , & au mépris des Sermens que
vous avez faits, vous avez pouffé votre defobeifTance à l'extrémité par
votre fuite; & en vous mettant, comme un Traître, fous une Protec-
tion étrangère; chofe inouïe jufqu'à prefent, non feulement dans notre
Famille, mais aufîi parmi nos Sujets de quelque confideration ! Quel
tort & quel chagrin n'avez- vous point caufé par-là à votre Père , &
quelle honte n'avez- vous point attiré fur votre Patrie ?
„ Je vous écris pour la dernière fois, pour vous dire que vous aiez à
Q 3 wtte
COVIF,,
no MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires „ faire ce que Mrs. Tolfloi, & Rumanzow,vous diront & vous propofe-
©e Mos- ^ ront ^tre de ma volonté.
„ Si vous m'appréhendez, je vous aflure par la prefente, & je pro-
mets à Dieu & à Ton jugement, que je ne vous punirai pas; & que fi
vous vous foumettez à ma volonté en m'obeùTant , & fi vous revenez,
ie vous aimerai plus que jamais. Mais, fi vous ne le faites' pas, je vous
donne comme Père, en vertu du Pouvoir que j'ai reçu de Dieu, ma
malédiction éternelle , pour le mépris & les offenfes que vous avez faits
à vôtre Pere> & , comme vôtre Souverain, je vous déclare Traître , &
, je vous, aflure que je trouverai bien les moiens de vous traiter comme
, tel, en quoi j'efpere que Dieu m'alîiflera & qu'il prendra ma jufte cau-
fe en main.
„ Au relie, fouvenez-vous que je ne vous ai violenté en rien. Avois-je
befoin de vous donner le choix libre du parti que vous voudriez pren-
dre? Si j'avois voulu vous forcer, n'avois-je point en main la puiflance
de le faire? Je n'avois qu'à commander, & j'aurois été obéi.
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Dans l'Original étoit
Signé ^
PIERRE.
Le Czarewitz écrivit de Naples la Reponfe Juivante h
Sa Majefié Czarienne le 4. Ottobre 1717.
ÏRES'-CLEM'ENT SEIGNEUR ET PERE.
J'Ai reçu la' très-gracieufe Lettre de Vôtre Majeilé, par les Sieurs
Tolftoi & RoumanzofF, par laquelle, comme auffi par eux de bou-
che, Elle m'afTure très-gracieufement du pardon de ma fortie fans
permiffion , en cas que je revienne. Je vous en rends grâces les lar-
mes aux yeux: je reconnois être indigne de toute grâce: me jettant à
vos pieds , j'implore vôtre Clémence de me pardonner mes crimes,
quoique j'aie mérité toutes fortes de punitions. Mais, je me repofe fur
vos gracieufes afîurances}&, m'abandonnant à Vôtre Volonté, je pars
au premier jour de Naples, pour me rendre auprès de Vôtre Majefié à
St. Petersbourg , avec ceux que Vôtre Majefié a envoiez.
,, Très -humble & indigne Serviteur, qui ne
„ mérite pas de fe dire Fils ,
„ A L E X E I.
„- De Naples Je 4. Ottohre 17 17.
Le 3. jour de Février de la prefente Année 1718, le Czarewitz fut
amené
COVIE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. m
»
amené à Mofcou par le Confeiller privé le Sieur Tolftoi & par le Capitai- Affaires
ne Rumanzoff, & conduit devant Sa Majefté Czarienne dans la grande D^°s<
Sale du Château, où il fit de bouche, en prefence de tout le Peuple, la
Confeiïion de fa Fuite volontaire, prefentant en même tems un Ecrit de
fa main dans les Termes fuivans.
„ TRES-CLEMENT SEIGNEUR ET PERE.
„ Après avoir avoué ma Tranfgrcffion devant vous Mon Père & Mon
Seigneur , j'apporte ici l'Ecrit de Confeiïion de mes Crimes, que je
vous ai envoie de Naples. Je confefTe encore à prefent de m'être écar-
té des devoirs d'Enfant & de Sujet, en m'évadant & me mettant fous la
Protection de l'Empereur, & en reclamant fon Appui. J'implore vôtre
gratieux Pardon & vôtre Clémence.
„ Le très-humble ce inhabile Serviteur , in-
„ digne de fe nommer Fils ,
)}
A L E X E I.
Sa Majefté lui déclara après cela de bouche, qu'Eîle vouloit qu'il dé-
couvrit au vrai toutes les particularitez & les circonftances.de Ton Eva-
ilon, qui la lui avoit confeillée , & tout ce qui y avoit du Rapport. Que
s'il difbit la vérité, fans aucun deguifement, fansreferve, & fans reitric-
tions , Elle lui donnerok fon Pardon -y mais que , s'il ne decouvroit pas
tout, & même les Perfonnes Complices, & s'il cachoit quelque chofe de
ce qui y avoit quelque liaifon, le Pardon feroit nul 6c n'aurok point
d'effet.
Surquoi le Czarewitz promit & s'obligea envers Sa Majefté Czarienne
de déclarer la pure vérité , comme devant Dieu, fans aucun deguifement,
& il baifa les Sts. Evangiles, & la Sainte Croix, devant l'Autel, dans.
l'Eglife Cathédrale, en foi de la promefTe qu'il faifoit de tout découvrir.
11 donna à entendre à Sa Majefté Czarienne dans la même Eglife Ca-
thédrale, qu'il avoit été contraint de la part de la Cour Impériale d'écrire
au fujet de fa fortie du Pais trois Lettres , favoir deux aux Archevêques
& une au Sénat, fur le contenu des quelles il s'expliqueroit après.
Le 4. jour de Février fut écrit fur les articles don-
nez au Czarewitz , par Sa Majefté Czarienne 3 ce
quifuit*
COmme vous avez reçu hier Le Czarewitz a déclaré par é-
vôtre Pardon , à Condition de crit à Sa Majefté Czarienne fur ces
découvrir toutes les circonftances Articles-là , ce qui fuit , & l'a figné
de vôtre Evafion & tout ce gui y a de fa propre main»
ii2 MEMOIRES, NEGOTÏATIONS, TRAITEZ, ET
Amures du Raport , & de foufrir la mort
de Mos- ^ voas cacniez ou deguifiez quel-
COVIE.. , r ° a. i ^ ,-
, que choie ; vous vous êtes expli-
qué de bouche fur quelques Points;
mais, pour mieux faire, & pour vô-
tre décharge, faites- le par écrit, fé-
lon l'ordre des Points fuivans.
Rêponfe fur le premier Point £*?
fur les lu w ans.
Jùr les Juivans
A Mon Tres-Clement Sei-
gneur et Père.
i,
Y a-t-il eu quelque defîein pre- "'Ai communiqué & lu les Lettres
médité dans les Réponfes faites à la I que j'ai reçues de Vôtre Maje-
Lettre que vous avez reçue de moi ité après l'Enterrement de mon
après l'Enterrement de vôtre Epou- Epoufe , & les fuivantes , à Alexan-
fe , & à celles que je vous ai écrites dre Kikin, & à Nikifore Vafemski,
depuis fur le même fujet? Et com. &je les ai confultez chacun en par-
me vous avez toujours demandé ticulier. Peut-être l'un en a-t-il fait
d'aller dans un Couvent, foit par confidence à l'autre: ils ont pour-
toutes vos Lettres , foit par les Dif- tant été confultez féparement.
cours que vous avez tenus lorfque Ils m'ont confeillé de renoncer à
je vous dis adieu avant mon départ la Succeflion , & même de deman-
de Petersbourg , puifqu'il fe mani- der d'en être déchargea caufe de la
fefte prefentement que tout cela n'é- foiblefTe de ma fanté. Je l'ai fouhai-
toit que diflîmulation de vôtre part, te auffi moi-même, & c'a été de
dites avec qui vous l'avez concer- bonne-foi, fans fineiTe , & fans mali-
té, & qui font ceux qui ont fû que ce, que je l'ai écrit ; car pourquoi fe
vous n'agiflîez que dans la vue' de charger de ce qu'on ne fauroit por-
me tromper. ter? *
Les deux mêmes perfonnes me
confeillerent auiTi de demander de
me retirer dans un Couvent, & de
dire que je voulois me décharger par
ce moien du fardeau de la Succef-
fion.
Ils me parlèrent ainfl : S'il n'y s
point d'autre re£ourcei le plus fur ejt
daller dans un Couvent , parce que ce-
la vous éloignera de la Succeffi»»,
On
* Il a écrit tout cela frauduleufement, comme il eft vérifié par la fiiite.
COVIE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIIT. 113
On m'a parlé de la même manière à l'occafion de l'adieu que vous me Affaires
fîtes; & ils m'ont dit , que pour me conformer à ce qui avoit été concer- dkMos-
té, je devois dire la même chofe que j'avois écrite, quand bien même je
n'aurois pas deffein de l'exécuter, comme je l'ai déjà déclaré de bouche.
Et comme vous, Mon Seigneur, me dites dans ce tems-là, que je devois
penfer , fans me précipiter, au parti que je d'/ibïs vouloir prendre de me
retirer dans le Couvent , j'ai cru pouvoir trainer l'Affaire en lon-
gueur.
Alexander Kikin fit un Voiage dans le Carlsbad bientôt après vôtre
départ de St. Petersbourg: environ deux femaines plus ou moins aupara-
vant (car j'étois à mon Village Jorfqu'il partit effectivement) il me dit: Je
vais vous chercher un endroit , en quelque lieu que ce foit. Et j'attendis de
fes nouvelles dans le deffein de m'évader.
Je me fuis expliqué clairement fur ce qui regarde mon Evaflon même,
dans le troifiéme point de mon Interrogatoire.
Je reviens au tems de ma première Réponfe à vos Lettres»
Je fus chez le Prince Bafili Nolodimerovitch Dolgorouki , & chez le
Comte Frédéric Matveyevith Apraxin avant d'envoier ma Réponfe à Vô-
tre Majefté. Je les priai , quand Vôtre Majefté leur parleroit fur mon
fujat, de vous perfuader de me priver de la Succeflion , & de me laiffer
vivre fur une Terre pour y palier le relie de mes jours. Frédéric Mat-
veyevitch me repondit: „ Si vôtre Père m'en parle, je fuis prêt à lui donner
„ ce confeil. Le Prince Bafili me dit la mcme chofe , ajoutant : Donnez
„ lui mille Ecrits : qui fait ce qui arrivera quand le cas dont il s'agit exijlera\
„ On dit envieux Proverbe Ulita Yedett, Kolita Boudett. Cela viendra ,
„ mais Dieu fait quand? Ce nefpa.-là un de ces Contracls de nos bonnes gens
„ du tems pajfé, auxquels fi on manquoit , on en paioit la multe.
Quand j'eus donné la Lettre dont il s'agit, le Prince Bafili vint chez
moi, me dire en vôtre nom, de lui faire voir celle que Vôtre Majefté
m'avoit écrite. Je la lui lus, & il me dit : „ J'ai parlé de vous à vôtre
„ Père. Je crois qu'il vous privera de la SucceJ/ion, fc? il par oit être fat is fait
„ de vôtre Lettre.
Il m'en demanda la minute , je lui en fis lecture , parce qu'il m'avoit
confeillé d'y faire mention de mon Frère dans les termes que je l'ai fait.
Quand je lui eus lu cette minute, il me dit qu'elle étoit bien j & il me ré-
péta les paroles fufdites , ajoutant : Je vous ai fauve du Billot auprès de vô~
tre Père.
Je lui repondis que j'avois fait cette Lettre-là de bonne-foi , fans aucu-
ne fineffe; ne voulant point me charger de ce que je ne pouvois point
porter. Il me répliqua: Rejoùifjèz-vous à prefent. Fous n avez plus rien à
faire.
Pour Frédéric Matveyevitch , je ne me fbuviens pas fi je lui ai mon-
tré la Lettre, ou non: mais, je l'ai écrite de concert avec Kikin & Niki-
fore, chacun à part, en aiant fait des copies que je leur envoyois cache-
tées par Bafili Barikof \ parce que Kikin demeurant loin de moi , je ne
Tome XL P pou-
COVIE.
114 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires pouvois point toujours m' aboucher avec lui* outre qu'il m'avoit donné
duMos- avis qu'il y avoit des Surveillans de vôtre Cour pour obferver qui venoic
chez moi. Quand je lui demandai d'où il favoit cela ? Il me repondit que
quelques-uns de vôtre Cour même le lui avoient dit, mais il ne les nom-
ma point.
Pour Barikof , je ne faurois dire~ s'il a fû quelles Lettres il portoit
de ma part à Kikin; du moins, je ne lui en ai point fait de confiden-
ce: lui ordonnant feulement de les porter fécretement à Kikin, qui me
les renvoya toujours cachetées , après les avoir corrigées.
Ce Kikin m'a confeillé de renoncer à la Succeffion , difant : Fous fe-
rez en repos quand vous aurez tout quité. Cela vaut mieux. Je fai que
la faible (Je de vôtre Complexion ne vous permettra pas de porter un Jî pefant
fardeau quefl la Succeffion. Fous avez mal fait de ne point vous en aller,
mais ce fi une affaire faite, il nef plus tems de la redreffer.
Nikifore me parla en ces termes : Qu'importe de la Couronne , pourvu
que vous foiez en repos. Je ne me fouviens de rien autre chofe de leurs
difcours.
J'ai confulté les mêmes Kikin & Nikifore fur ma féconde Lettre à Vô-
tre Majefté, mais fans la leur envoier, ni qu'ils me la renvoiafîent , au-
tant qu'il me fouvient, parce que le tems étoit court: ma mémoire me
fournit feulement que Kikin vint chez moi une fois, comme je crois , &
me dit avant que la Lettre fut encor écrite , que je devois me retirer
dans le Couvent : car , dit-il , le Froc ne fe cloue point à la tête ; on peut
toujours le quitter , & le pendre au Croc. Il ajouta à ce confeil , Tout ejl
bien comme cela. Pour ï 'avenir , qui fait ce qui arrivera encor.
Les difcours que me tint alors Nikifore ne me reviennent point à pre-
fent à la mémoire. Je me fouviens feulement, qu'il m'a dit: S'il ri y a
point d'autre expédient , il faut aller dans le Couvent : faites venir vôtre L'on-
fef/eur , fj? dite:- lui que l'on vous force de vous retirer dans le Couvent ; /*/
pourra le dire à l'Archevêque de Refan, afin qu'ils ne croient pas que vous foiez
tondu pour quelque crime. J'ai fuivi ce confeil de Nikifore, & l'ayant dit
à mon Confefleur, George, Archiprétre de l'Egiife Cathédrale de St. Pe-
tersbourg , il me repondit : Je le dirai quand il fera tems. Je lui ai de-
mandé enfuite s'il l'avoit dit, & il me répliqua que non; furquoi je lui
dis , de n'en point parler non plus à l'avenir. Je ne fai pas de quelle
manière Nikifore m'a initruit de faire ainfi: mais, le ConfefTeur igno-
roit les Conférences que j'avois avec Kikin ; & je n'ai rien mis en dé-
libération avec lui.
Après avoir rendu ma féconde Lettre h Vôtre Majefté , j'en écrivis
deux autres, à mon Confefleur Jaques, & à Ivan Kikin, auxquels je
mandois que j'allois dans le Couvent par force , & qu'ils donnaient à
la perfonne qui portoit la Lettre quelque argent de celui qu'ils avoient
à moi pour lors. Je ne me fouviens plus de la fomme. Je dis à la Fil-
le, qui étoit la perfonne à qui je donnai ces deux Lettres cachetées, fans
l'informer du contenu; Si je viens à mourir , car j'étois alors malade, ren-
dez
C0V1F.»
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. ny
dez ces deux Lettres à leurs adrej/ès, &f on vous y donnera de l'argent. C'elt hvtkdtà
la Fille qui a vécu auprès de moi. de Mos-
Elle a gardé ces Lettres dans une Caffette j mais, pour celles que j'ai
reçues de Vôtre Majeité, & mes Réponfes , elle n'en avoit aucune con-
noiifance. Je l'emmenai avec moi par rufe, lorfque j'eus pris la refolu-
tion de m'enfuïr. Je lui dis , que je la prenois ieulement jufques à
Riga, & de-là je l'ai menée plus loin ; lui faifant accroire , de même
qu'à ceux de ma fuite , que j'avois ordre d'aller à Vienne pour faire
une Alliance contre la Porte Ottomane, & que j'étois obligé de voia-
ge«r en fecret , afin que les Turcs n'en fuffent point avertis. C'eft-là
tout ce que mes gens en favoienc.
Enfin, ceux qui a voient encor connoiflance de ma fufdite Lettre à Vô-
tre Majefté font le Prince YouriyaYourievitchTrubezkoi, & le Czarevitch
de Sibérie; mais, ils n'ont pas vu la Lettre même. Le Prince Trubezkoi
me demanda environ trois femaines après cette Lettre: Quelle Lettre vous
a donné vôtre Père en ma prefence ? Le contenu en étoit-il bon, ou mauvais? Je
lui en dis le fujet , & de ma Réponfe. Il me répliqua : Fous faites bien
de ne prétendre pas la Succejjïon. Souvenez- vous que l'on trouve des fujets
d'afiiclion au milieu même des grandeurs 13 clés richejjes. Fous riy êtes
point propre. Je lui dis qu'il avoit grande raifon. Le Sibérien me dit:
Quelles Lettres vous a apporté Makarof? Nous en /avons tous le contenu : il
le communiqua le même jour au Prince Jaques Dolgorouki. Je le lui
avouai , & je lui donnai une fomme de ducats pour les compter à ma Maî-
trefle pour fa fubfiftance, quand je me retirerois dans le Couvent. J'ai
repris cet argent quelques jours après. Ceux qui en avoient connoifTance
font Nikifore Bafemski, Ivan Affonaffiez, & leConfelTeur George. Mais,
pour les Lettres, je ne me fouviens plus û je l'ai dit au ConfefTeur,on non.
Du moins il n'a point fû mon Evafion.
2. Jîd Secundum.
N'a-t-on pas tenu quelques dif- Je n'ai rien entendu dire à perfon-
cours pendant ma grande maladie ne fur ce fujet , dans ce tems de
à St. Petersbourg , où il parut de vôtre grande maladie , au cas que
î'empreflement de fe joindre à vous, vous mouruffiez.
au cas que je mouruife?
3. jid Tertium.
Y a-t-il long-tems que vous avez Je me fuis entretenu fouvent, &
commencé de former le projet de endifferens tems, avec le mêmeKi-
vôtre Evafion ; & avec qui l'avez kin , & encore avant que j'euiTe re-
vous concerté ? Car , comme vous $ù vos Lettres & que j'y eufTe ré-
avez pris vôtre parti fi fubitement, pondu. Nos difcours revenoient à
on peut croire que cela étoit prémé- ce qui s'enfuit:
dite depuis long-tems. P 2 Dé-
n6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aïfaihes Déclarez ouvertement ce qui en Que s'il arivoit que je me trou-
dkMos- çfl^ avec qui, en quel lieu; fi c'eft vafle dans des Pais étrangers, j'y
C0VIE- de bouche, ou par correfpondances devois relier , en quelque endroit
de Lettres, & par quel canal? que ce fut, feulement pour y vivre
Déplus, par le Confeil de qui, en re,pos & m'éloigner de toute
avez-vous écrit, en chemin, la fuf- chofe.
ditte Lettre frauduleufe ? Qui vous Je ne me fuis pourtant point
y a aidé ? Et pour quelles raifons beaucoup preffé de l'exécuter; mais,
l'avez vous écrite ? Et n'avez vous quand je partis pour Carlsbad , Ki-
point encor écrit à quelqu'un pen- kin me dit:
dant vôtre route ? Lorsque vous ferez guéri , écrivez à
vôtre Père , que vous devez prendre
encore des Remèdes au Printcms , &
cependant , vous pourez aller en Hollande , & en fuite en Italie , après les Remè-
des du Printems\ £s?, de cette manière , vous ferez durer vôtre abfence deux ou
trois ans.
Je lui écrivis de Carlsbad, pour favoir fi je devois faire, ou non , ce
qui avoit été concerté avec lui? Il me fit cette Réponfe: Comment pouvez-
vous faire cela fans la Permiffion de vôtre Père ? Il fer oit à craindre quil ne fs
fâchât. Ecrivez-lui , £5? demandez fa Permiffion : mais , n oubliez point vos
Affaires.
Je ne pus point comprendre ce qu'il vouloit dire par ces derniers mots.
Et, quand j'eus changé la réfolution que j'avois prife d'aller en Hollande,
& que je fus retourné à St. Petersbourg, j'y trouvay Kikin, qui avoit été
condamné à l'Exil par les Procédures qu'on avoit faites alors. Mais, com-
me il n'étoit plus en arrêt, j'eus occafion de m'aboucher avec lui.
Il me demanda: Quelqu'un de la Cour de France a-t-il été chez vous? Je
lui dis, que je riy avois vûperfonne.
Il me répliqua: Vous avez tort de ne vous être point abouché avec quelqu'un
de la Cour de France , & de ne vous y être point retiré. Le Roi eft un homme
qui a Came grande : il donne aux Rois mêmes fa Protection. Ce nauroit
foïnt été une grande affaire pour lui, de vous la donner.
Je lui demandai, ce qu'il avoit voulu dire dans fa Lettre , par ces
mots, que Je ne devois point oublier mes Affaires \ & ce que cela fignifioit?
Il me répondit. Je voulais vous dire par-là , que vous deviez vous retirer en
France : car je no fois vous écrire clairement \ vous ï auriez dû deviner vous-
même.
Pour la dernière Evafion que j'ai exécutée effectivement, je n'en avois
jamais délibéré auparavant avec perfonne: mais, aiant reçu vôtre Lettre
de Coppenhagen, & voiant qu'il m'étoit libre de fortir de Ruffie, je pris,
en conféquence des difeours precedens de Kikin, la réfolution de me re-
tirer quelque part que ce fût, ou chez l'Empereur, ou dans quelque
Republique, àVenife, ou en SuiiTe. Je n'en ai parié à perfonne. J'ai
feulement fait entendre à Iwan Affonaflief l'ainé , que j'étois refolu de
m'enfuir dans un des endroits fufdits , quel qu'il fut , fans m 'ex-
pli-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 117
pliquer precifement pour où: car, je n'y étois point encor bien deter- Af?ai**«
miné. * . , okMos-
Je lui dis encor, que j'avois parlé autrefois fur ce fujet avec Kikin, qui CCMIE-
peut-être m'auroit trouvé un endroit , puisqu'il étoit préfentement dans
ces quartiers-là ; & que quand je le rencontrerois , il me confeilleroit
où aller: que fi je ne le trouvois point , j'irois dans l'un ou l'autre de
ces endroits-là.
Il n'y a jamais eu avant ce tems-là d'entretien fur ce fujet avec ce
Iwan Affonaifief, ni avec perfonne, excepté Kikin , ni verbalement , ni
par écrit , ni de quelque autre manière ; & il n'y a eu aucune confulta-
tion, fous quelque prétexte que ce foit. Aucun de mes domeiliques, ni
étranger, n'a eu connoiffance du deffein de mon Evafion , excepté les
ci-deiTus nommez. Et Iwan ArTonaffief me dit , lorfque que je m'en
al lois: Je fuis refolu de vous garder le fecret ; mais , malheur à nous , Ji vous
vous enfuiez; faites réflexion fur ce que vous faites.
Quand je rencontrai Kikin à Libou , où je lui demandai , s'il m'a-
voit trouvé un endroit , il me dit : J'en ai trouvé un. Allez à Vienne
chez l 'Empereur : on ne vous y livrera point. Il me raconta eniuite com-
ment il avoit vécu à Vienne.
Je lui demandai quelles Affaires l'avoient engagé d'aller à Vienne, fi
c'étoit pour les miennes ou bien pour d'autres. Car, lui difois-je,
quoique vous aiez parlé avant mon départ de vouloir me chercher un.
endroit, vous ne m'avez cependant rien écrit. Il me répondit : Je ri y
ai point eu d'autre Affaire que pour vous. J'ai prié la Princeffe Cza-
rienne, Marie Alexeiewna , de me permettre d'aller à Vienne pour n;c s Affai-
res particulières \ & elle ni avoit chargé de perfuader à Broforofski de re-
tourner.
Je lui demandai enfuite ce que je devois faire, quand quelqu'un feroit
envoie à ma rencontre à Dantzic ou à Konigsbergue. Il me dit : Sauvez,
vous feul pendant la nuit , ou bien ne prenez avec vous quun valet : qu'il arrive
ce qui pourra du bagage & des gens ; mais , fi on vous envoie deux perfonne s , fei-
gnez d'être malade , 13 faites prendre les devans à l'un , pendant que voui écha-
perez à l'autre.
Pour la Lettre frauduleufe , elle fut écrite à Libou de l'avis du même
Kikin, & datée de Konigsbergue, afin qu'on ne remarquât point qu'il y
eut eu part: car, je ne le voiois point-là en fecret.
La Lettre fut donnée au Prince Chakofski , Capitaine du Régiment de
Semegow, en le chargeant de l'envoier parla polte. Mais, ce Capitai-
ne ne favoit rien de nos affaires ; ck le deffein étoit, en écrivant cette
Lettre, d'empêcher par- là , que perfonne ne fût envoie à ma ren-
contre.
Le même Kikin me fit encore écrire une Lettre à Juan Affbnaflîef l'ai-
ne, que je lui avois dit avoir connoiffance de ce que nous avions concer-
té, & de mon Evafion, pour lui faire favoir qu'il devoit mefuivre, &
que je lui laiflbis à Dantzic , chez le Maître des Polies, l'Adrefle où il de- /
P 3 voit
COVIE.
118 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires voit aller. Kikin raifonna ainfi : Si Affonaffief rieft plu< à Petersbourg,
»eMos- cette affaire ne fauroit éclater : car , hormis nous deux & lni\ perfonne rien
fait rien. Pour moi, je ri et ois point à Peter sbourg quand vous partîtes: ainfi
le foubçon ne tombera point fur moi. Mais , fi /iffonajjief y refie , il eft à crain-
dre qu'il ne lui échape quelque chofe avec l'un ou l'autre.
Je lui dis, que je ne croiois point qu'Affonaifief voulût partir, fur-
quoi Kikin pourfuivit: En ce cas, écrivez lui une féconde Lettre , par ou on
ne puifjé point comprendre que vous eujjïez jamais tenu avec lui aucun di/cours
fur cette Affaire , & comme fi vous ri aviez pris qu'en chemin feulement la refo-
lution de vous en aller j & marquez lui, qu'il doit prendre avec lui vos bijoux
& vous fuivre.
Je ne me fouviens pas du nom de la Ville où il me dit que je devois
écrire à Affonaffief de me joindre: Et moi je lui dirai de montrer la Lettre
que vous lui écrirez, au Prince Menchikof , comme s'il lui decouvroit votre fe-
cret , 13 ainfi on ne fera point d'information contre lui.
Il me dit de plus d'écrire au Prince Balili une Lettre de remerciment
pour Tes amitiés, que je tacherois de reconnoîcre en mon tems : car, dit
Kikin, fi on prend quelque foubçon fur moi de vôtre Evafion, je déclarerai d"a-
bord votre Lettre écrite au Prince Bafili , £5? je dirai : Il par oit qu'il l'a con-
certée avec lui , parce qu'il lui fait des Remercimens. J'ai intercepté cette
Lettre.
Kikin prit cette Lettre-là avec lui- j'ignore s'il l'a rendue. Mais, avec
les autres Lettres à Affonaiiief, il me dit d'écrire au Prince Menchikof ,
qu'il devoit donner à Affonaffief un ordre pour les Polies, & le dépêcher:
que je devois aufli le remercier de m'avoir confeilîé de prendre avec moi
ma MairrefTe. Peut-être, dit Kikin, qu'il montrera cette Lettre à vôtre Pè-
re , qui prendra aufji de- là quelque Joubçon fur lui.
Quant au Prince Menchikof, la chofe fe paffa de cette manière.
Lorfque je fus chez lui avant mon départ, il me demanda où je laifïe-
rois ma MaitrefTe. Je lui répondis : que je la prenois avec moi jufques à
Riga, & que je la renvoierois ici. Il me dit: Vous ferez mieux de la
prendre avec vous; mais, mon intention étoit, fans cela, de la mener avec
moi , quoique je diife , que je ne la voulois prendre que jufques à Riga
feulement , afin qu'on ne s'aperçut point du deffein que j'avois de
m'en fuir.
C'efr. pourquoi je n'ai point dit la vérité , pas même à elle , de peur qu'il
ne lui en échapât quelque chofe: & quand je dis tout cela à Kikin, ce fut
là-deflus qu'il me dit d'écrire , comme j'ai déclaré ci-deffus , au Prince
Menchikof; mais, ce Prince n'a rien fçû du deffein de mon Evafion, & il
n'y a eu non plus aucune communication fur ce fujet avec le Prince Ba-
fili.
Je me feparai après cela d'avec Kikin, qui me pria de lui faire favoir,
de même qu'à Afronaiïief, où je ferois, quand je ferois dans ma route: &
il me dit encore, que je devois leur écrire dans ces termes, que j'avois paf-
(e Danzich heureujement & fans danger des Confédérés , £5? que je me trouvais
dans
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. u?
dam ma rouie. N'écrivez point davantage , me dit-il, nous comprendrons bien A?fais?.#
cela. ' , , dkMos-
Je l'ai faic auflî. Je leur ai écrit de Stargard; mais, pour ôtertout foub-
çon contre eux , j'écrivis autli à d'autres qui ne favoient rien de mes def-
ieins concertez avec Kikin, ni de mon Evafion, nommément à Nikifore
Bafemskoi, à Fedor Doubrofski , au Czarevitch Sibérien, à ïwan Narich-
kin , & à tous dans les mêmes termes que j'avois écrit à Ivvan , afin que fi
mes Lettres étoient interceptées,' on n'en put rien fubçonner, étant éga-
les à tous, & contenant la même chofe.
Tous les fufnommez n'ont rien fçu de ma fuite, excepté Kikin & Ivvan.
Ces Lettres furent envoiées à Riga, au Prince Pierre Galliczin, afin de
les expédier pour St. Petersbourg: & , après cela, je n'ai plus écrit de Let-
tres en Rullie} mais bien de la Courlande & de la Livoine à maMaifon,
fur mes Affaires Domefiiques , & j'ai encore écrit à Doubrofski, au fujet
de certains Livres qui m'appartenoient, & qu'il avoit entre les mains, des
auparavant, de même que d'autres meubles qu'il avoit en fa garde.
C'eit ainfi que tout s'eli: paffé en ce tems-la.
Le Prince Pierre Galliczin n'a rien fçû de mon Evafion.
Au relie, je ne fai point, fi les Lettres en queition ont été reçues, ou
non, parce que perfonne ne m'a écrit de Rufiie.
Voici ce que Kikin m'a dit de plus: Si votre Père envoie quelqu'un, pour
*ucu: perfuader de retourner , ne le faites point : il veus fera couper la Tête publi-
quement. Et alors je lui dis : // eji bon que vous maiez cherché un endroit :
mais , fi mon Père ne m avoit pas écrit de venir auprès de lui , comment aurois-
je fait pour m enfuir? Il me répondit: Alors j'aurais fuit en forte que vous cuf-
fiez dit, que vous vouliez de votre propre mouvement l'aller trouver; ÏS^de cette,
manière, vou> auriez pu vous jauver.
4. Ad Quartum.
Avez-vous reçu pendant vôtre fui- Je n'ai eu aucunes Nouvelles é-
te des Lettres , ou bien vous êtes tant en chemin, pendant ma fuite,
vous entretenu avec quelqu'un de ni de Rufiie, ni d'ailleurs , ni par écrit,
Jlufiie directement, ou indirecte- ni de vive voix , ni directement, ni
ment, ou bien par d'autres voies? indirectement , ni d'autres chofes;
Quelles font-e!ls ? Comme au (îi n'a- fi ce n'eiï , que j'ai reçu des Avis du
vez vous rien apris, foit de RuiTie, Comte de Schonborn àLhrenberg.
foit d'ailleurs, des Affaires de ce Pais- Premièrement : Qu'il y avoit des a-
ci, qui nous regardent vous &moi? vis à mon fujet, que jétois chez eux, &?
que je devois vivre C; me tenir caché.
La féconde fois, lorfque Wefelowski a parlé de moi à Vienne.
Je ne me fouviens plus à laquelle de ces deux Lettres étoit jointe une
Copie de Bley-er, portant en fubitance, qu'On avoit fait quelques Informa-
tions après mon dipatt parmi mes Dôme fi que s : Qu'il y avoit delà mutinerie dans
l Armée qui eji dans le Mellenbourg, & particulièrement dans les Regimens des
Gardes, qui font en plus grande partie compofez de la Nobiejjè: Qu'on en voulait
à la vie du Czafj, & qu'on parloit d'envoler la Czarijje , -avec jon lils , là ou
étoit.
Affaires
de Mos-
COVIE.
120 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
étoit la vieille CzariJ/e , pour conduire celle-ci à Mofcou\ £5?, quand on auroit
trouvé f on Fils , dont on ne favoit pas ce quil étoit devenu , le mettre fur le Trô-
ne, &c.
Cette Lettre eft refté derrière^, avec mes autres Papiers.
J'ai eu encore une autre Lettre du Comte de Schonborn, au fujet de
mon Voiage de Naples, mais je n'en ai point reçu à Naples.
Je n'ai jamais écrit à perfonne en chifre pendant ma fuite. Et , pour des
Nouvelles , je n'en ai pas eu d'autres, que celles que je viens de dire, &
par les Gazettes imprimées.
Quand, où, & pourquoi, le Prêtre
Grec a-t-il été chez vous ?
Ad Quintum.
Il n'y a eu aucun Prêtre Grec chez
moi , ni nulle-part , depuis mon départ
de St. Petersbourg , jufques à l'arri-
vée de Mrs.Tolftoi & Rumanzowà
Naples.
Ad Sextum.
Le Secrétaire du Comte de Schon-
born, nommé Keil , m'a forcé d'écrire
des Lettres au Sénat & aux Arche-
vêques, quand il me conduifit à Na-
ples, dans le quartier du Secrétaire du
Vice-Roi, Wingarten \ difant, que je
devois écrire en Ruffie aux fuldites
6.
Dites, au moins, la fubflance de
la Lettre que vous avez dit q,ue
les Impériaux vous avoient forcé
d'écrire fur cette Affaire , quand
même vous ne vous en fouvien-
driez plus mot à mot; & qui des Im-
périaux vous a forcé de l'écrire ?
Quand, & où ? Qui de vos gens en a perfonnes, parce qu'on y avoit des
eu connoiflance ? A qui vous l'avez Avis,dit-il,que///wj«;or/,&qued'au-
renduè'.? N'y en a-t-il point de Mi- très leur marquoient, que jetois pris
nute chez vous ? Et e(t-il vrai, que £5? mené en Sibérie. Ecrivez-donc, di-
les Impériaux vous y ont forcé ? foit-il ; &?, Jî vous n écrivez pas , nous
ne vous garderons point.
Effectivement, il ne fortit point delà chambre, que je n'euffe écrit: Et,
fur cette contrainte du Secrétaire, j'écrivis au Sénat & à deux Archevê-
ques, favoir à celui de Roilou, & celui de Krudiiz, dans le fens qui fuit;
car, ils m'étoient peu connus.
„ Je crois que vous, comme tous les autres, aurez été fort furpris de
, mon départ à l'infçû de tout le Monde. Ce font les mauvais traitemens
, qu'on m'a faits , jufques à vouloir me mettre dans le Froc, qui m'y ont
, obligé: mais, Dieu m'a procuré l'occafîon de m'éloigner. Je me trouve
, fous la Protection d'une Haute Perfonne (il ne m'étoit point permis de
, la nommer) jufques à fon tems, quand Dieu me rapellera pour retour-
, ner. Cependant, je vous prie de ne me point oublier, & fi quelqu'un
, de ceux qui fouhaitent de m'effacer de la Mémoire des hommes fait
, courir le bruit que je fuis mort, ou de quelque autremauvaife chofe, n'y
, ajoutez point de foi,& raffurezles autres: car, je fuis en vie, &en bonne
fanté, grâces à Dieu & à mes Bienfaiteurs, qui m'ont en leur garde, qui
m'ont promis de ne me point abandonner, & de m'afîilter dans tous mes
befoins.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII.
iii
COVIK.
„ befoins. Je fuis, jufque dans mon Tombeau, h vous& à toute la Patrie, AtrÀnik
„ plein de bons fouhaits ! de Moj-
C'eft-là la fubftance de l'Ecrit, maïs il ne m'en fou vient plus mot pour
mot: on ne m'en a point laifle faire de minutes, j'ai feulement la Lettre
comme je l'avois commencée à écrire- mais, elle n'eft point finie dans ce
papier-là , parce que j'avois mal écrit : ce papier m'elt reité au lieu du
brouillon. Il n'eit pas dans les mêmes termes, mais pourtant fur cette ma-
tière. Il eft encore derrière avec mes autres Papiers.
Quand j'eus écrit la Lettre dont il s'agit, je la rendis à ce Secrétaire dont
j'ai parlé, qui partit avec, pour je ne fai où. Mais il me dit, qu'il alloit
à Vienne: & on me mit dans le Château Saint Elmo.
Perfonne de mes gens n'a rien fçu de ces Lettres. Il n'y en avoit pas
même alors un feul avec moi , qui fcut lire & écrire. Ce fut moi & le Se-
crétaire qui firent la Lettre, nous étant enfermez feuls. Cela fe paiTa le
8. Mai 1717.
Je m'adreflai à mon arrivée à Vienne au Comte de Schonborn , pour de-
mander Protection. Il dit: Je m'en 'vais chez chez l'Empereur, pour appren-
dre ce qu'il dira \ prenez-garde à •vous , que Wefelofski ne vous voie peint.
Au retour de chez l'Empereur, il dit qu'il n'avoit pas donné de refo-
lution; mais qu'il lui avoit ordonné de conférer là-deifus avec le Prince
Eugène & le Comte de Starremberg.
11 fut refolu, après cette Conférence , de me prendre en Protection, &
de m'envoier dans quelque FortereiTe , le Comte me difant : ffjhie feriez-
vous à Vienne ? On vous y reconmitra , ci? fur - tout IVefehfski. L Empereur
ne vous abandonnera point, ci? quand il fera tems , après la mort de votre Père ,
il vous aidera à monter fur le Trône , même à main armée. Je lui dis, (a) Je
ne demande point cela -, mais feulement , quon me tienne en Protcclion. Je n'en
fouhaite point davantage.
7. Ad Septimum.
Déclarez & découvrez tout ce qui Je dirai tout ce qui a du rapport à
peut avoir quelque raport à cette Af- cette Affaire.
faire; quoi qu'il ne foit point expri- Le Prince Menchikof me compta
mé ici, & purgez-vous, comme 11 icoo. Ducats , à mon départ de S.
vous étiez à la Sainte Confefîîon. Petersbourg: & quand je pris con-
Mais, fi vous cachez quelque cho- gé des Sénateurs, ils me donnèrent
fe de ce qui fe découvrira d'ailleurs, auffi 1000. Ducats 5 & comme on ne
ne m'en imputez point les fuites : pouvoit point alors trouver des Du-
car il vous a été déclaré hier, qu'en cats, ils me firent paier cette fom-
cas que vous celiez quelque chofe, me en deux milles Roubels.
le Pardon qui vous a été accordé
feroit nul & demeureroit révoqué.
Jai
{a) Il a déclare la chofe autrement cidefïbus.
Tome XL Q.
1
A Tï AIR ES
DE MOS-
COVIE.
122 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
J'ai emprunté de plus à Riga de Ilia Ifaiew cinq mille Ducats en efpe»
ces, & deux mille en argent courant, qu'un Officier de la Garnifon me
changea en Ducats.
Le Prince Menchikof, ni les Sénateurs, non plus que Ilia Ifaiew, ne fa-
voient rien du deflein de mon Evafion. Je leur dis , que je partois pour
me rendre auprès de vous à Coppenhagen , & ils me donnèrent de l'argent
dans cette penfée.
C'efl Affonaflief qui m'a confeillé d'emprunter d'Uia Ifaiew.
Ce que j'ai entendu de plus en diferens tems & dediferentes perfbnnes,
qui peut mériter d'être déclaré, efl-ce qui fuit.
J'ai ouï dire au Czarevitch de Sibérie ces paroles: (£) Michel Samarin
ma dit , qu'il y aura dans peu du changement chez nous. Me ferez-vous du
bien , quand vous ferez bien ? Car , tout ce que Samarin dit s'accomplit.
Il ne s'eft point expliqué quel feroit ce changement. Le même me dit
dans le mois de Mars 1716. qu'il y auroit du changement le 1. Avril; &
quand je lui demandai, quel changement ce feroit , il me dit: Ou le Czar
mourra , ou Petersbourg périra. J'ai vu cela dans un Songe.
Quand ce jour-là fut paffé, je lui demandai , pourquoi rien n'étoit ar-
rivé ; & il dit : Cela peut arriver dans d'autres Années à ce jour-là : je n'ai pas
dit, que ce feroit cette Année -ci ; prenez- feulement garde au premier d'Avril,.
mais pour î Année je ne le fat pas.
Nikifore Wafemskoi, étant venu de Mofcou à Thoren , me dit : J'ai en-
tendu d'Alexandre Sergeiof, que le Czar ne vivra point plus de cinq ans, mais.
je ne fai point d'où il a cela.
Lorfque j'étois aux environs de Stettin , le Prince Bafili Dolgorouki,.
étant à cheval , me parla & dit : Si nous n'avions point la Czariffe auprès dw-
Czar ,. nous ne pourrions point vivre avec lui, à caufe de fon humeur feverev
je fer ois le premier à Stettin à le trahir.
Dans l'Original êtoit fignê-
Dans le Château de Preobrachenski ,
le 8- Février 171 8..
l'ouï cela a déclaré vôtre très- fournis
Serviteur & Fils
ALEXEI.
Au refle, il efl déclaré dans P Ecrit des ConfeJJions du Czarevitch?
ce qui Juit :
POur Supplément des Points d'Interrogatoire ci-defius , je déclare en-
cor pour ma décharge, ce que j'avois oublié.
Difcourant avec Frédéric Doubrofski à mon départ, je ne me fouviens
pas
(l) Le Cznrevitch Sibérien a décharge' enfuite ledit Samarin, difant dans Ton Interroga-
toire, qu'il ne lui avoit point entendu tenir ce difcours..
COVIfc.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 123
pas quel jour c'étoit, il me demanda: (c) Allez-vous trouver votre Père? AffairèI
Partez pour l'amour de Dieu ! Je lui dis : Je pars : Dieu fait fi cefl auprès de D£ Mos-
lui ou d'un autre côté. Il die: P lufieur s autres , qui étoient de votre Rang, ont
trouvé leur falut dans la fuite. Je crois que vos Parens ne vous abandonneront
point.
Encor. Semon Narichkin, me rencontrant entre Memel & Konixbergue,
me dit: Vous faites mal de venir. Vous, auriez pu rejler ou vous étiez. Nous,
qui vous femmes fidèles, nou\ y avons penfé, £5? Kikin vous Va écrit.
Je lui dis, que je n'avois pu deviner ce qu'il m'avoit écrit. Il dit: II
faut à prefent que la chofe aille comme cela.
Iwan Affonaffief avant mon départ, & quand je lui communiquai mon
defTein de m'enfuïr , m'apporta des ordres que je devois ligner pour mes
affaires domeftiques, afin de régler ce qui étoit à faire pendant mon ab-
fence, comme j'avois toujours fait quand j'ai fait quelque voyage. Je lui
dis : A quoi bon de figner cela , puifque je m enfui s ? Il me dit : Cela me fervi-
rapour mejuftifier. Il m'a auffi propofé d'envoier à Coppenhagen, pour
l'apparence , mes gens & quelque Equipage. Cefl aufîï lui qui m'a con-
feillé d'emmener par rufe ma MaitrefTe , comme il en efl fait mention dans
le précèdent Ecrit , & de ne dire, ni à elle, ni à mes Domeftiques qui
iroient avec moi , que j'avois defTein de m'enfuïr.
Il m'a confeillé encor d'emprunter d'Uia Ifaief cinq mille Ducats & plus,
cela a paru par les payements faits, & efl déjà mentionné ci-defTus.
Tout cela s'efl fait par fon Avis.
Le Czarevitch a écrit de fa propre main , dans fes Confefîlons fur tous
les Articles de cet Interrogatoire drelTé par Sa Majeflé Czarienne, les
noms de quelques-uns qui lui ont confeillé l'Evafion, & qui en ont eu
connoiffance ; mais, il ne les a pas nommé tous, ni en même tems. 11 en
a celé beaucoup tout -à- fait, comme auffi fon véritable DefTein de Rébel-
lion & fa Machination contre Sa Majeflé Czarienne fon Père & fon Sei-
gneur , dont il n'a rien déclaré ni découvert.
Particulièrement fur le quatrième Article de fon Interrogatoire , le Cza-
revitch a écrit dans fes Confefiïons , comme il efl rapporté ci-defîus ;
Qu'étant en chemin , dans fa fuite , il n'avoit reçu des Lettres de perfon-
ne, ni de Ruflie ni d'ailleurs , fur aucune chofe , excepté ce que lui é-
„ crivoitleComtecteSchonbornàE.hrenbergi en premier lieu, qu'on avoit
„ des nouvelles qu'il étoit chez eux , & qu'il devoit vivre en fecret 5 fe-
„ condement , lorfque le Refident WefTelofski avoit parlé fur fon fujet à
„ Vienne fuivant les ordres de la Cour, Que lui, Czarevitch, ne fe fou-
„ venoit plus à laquelle de ces deux Lettres du Comte de Schonborn étoic
„ jointe la copie d'une du Refident Bleyer, portant, qu'il y avoit euquel-
„ ques defordres après fon départ dans l'Armée, qui efl dans le Pais de
j, Meklenbourg &c. Que de plus , il y avoit eu une Lettre du même
„ Schon-
(c) Il n'a déclaré ceci que quand l'Examen des Criminels étoit déjà commencé, & il
craignoit que la même chofe ne fut découverte fans lui.
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COVIE.
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5)
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124 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Afiairfs „ Schonborn, fur ce que lui, Czarevitch , devoit être transféré à Naples ,
df. Mos- ^ & qu'il n'avoit plus reçu de Lettres à Naples.
Cependant, depuis que les papiers du Czarevitch ont été apportez ici,
on trouve prefentement des Preuves , que le Czarevitch a eu à la vérité
trois Lettres du fufdit Miniftre Impérial, Comte de Schonborn ; mais, que
parmi ces Lettres-là , il' y en avoir une qui fait mention d'une Feuille in-
clufe contenant ce qu'on écrivoit de Mofcou. Le Czarevitch n'avoit pour-
tant avoué dans fon Ecrit des Confeffions ^ qu'une feule lnclufe , qui étoit
jointe à la Lettre de Schonborn, du mois de Février, & particulièrement
la Copie de la Lettre de Bleyer, écrite de Petersbourgj mais, il a1 caché
qu'on marquoit dans l'autre Lettre de Schonborn: On écrit de Mofcou.
Cette trojfieme Lettre de Schonborn du 27. Février 1717. porte, „ Qu'il
donne un nouvel Avis à lui, Czarevitch, qu'on ne faifoit que commen-
cer à parler dans le Monde qu'il étoit perdu, quelques-uns difant: qu'il
s'étoit fauve à caufe de la cruauté de fon Père } d'autres , qu'on l'avoit
fait mourir par fon ordre; & quelques-uns, que les voleurs de Grands-
„ Chemins l'avoient tué fur fa route; mais, que perfonne nefavoit precife-
,, ment où il étoit; qu'il joignoit pour la curiolité une lnclufe contenant
ce qu'on écrivoit fur ce fujet de Petersbourg , mais qu'on confeilloit au
malheureux Czarevitch, pour fon avantage, qu'il devoit le tenir le plus
caché qu'il pourroit , parce qu'il y auroit une grande recherche fur cet-
te Affaire , quand le Czar fon Père feroit de retour d'Amfterdam.
Cependant, le Czarevitch n'avoit point déclaré dans fes Confeffions cet-
te troifiéme Lettre , dont on vient de parler, & qui lui étoit envoyée avec
des Inclufes de Mofcou.
Le Czarevitch avoit écrit dans fes Confeffions, comme fi le Secrétaire
du Comte de Schonborn nommé Keil l'eut forcé d'écrire au Sénat & aux
Archevêques, quand il le conduifit à Naples, dans le quartier du Secrétai-
re du Viceroi Wingarten ; que ce Keil lui avoit dit : Si vous ne voulez pas
écrire , nous ne vous garderons point , & qu'il ne l'avoit pas quitté qu'il n'eut
écrit. Que lui Czarevitch, étant contraint par ce Secrétaire, avoit enfin
écrit au Sénat & à deux Archevêques , favoir à celui de Rollou & à celui
de Krudis, en fubflance ce qui elt mentionnée ci-delTus dans l'Interroga-
toire. Qu'on ne lui avoit point permis de faire des minutes de ces Let-
tres, & qu'il ne lui étoit reité qu'un morceau d'une &c. comme portent
les Confeffions ci-deffus.
Cependant, on vient de trouver auprès de fa Maîtrefle Afrofini, parmi
les papiers du Czarevitch, les véritables minutes, finies de fa propre main,
conformes aux Lettres qu'il alaiiTées aux Impériaux: Le contenu en elt.
Au Sénat.
Messieurs Très Excellens Sénateurs.
E crois que vous ne ferez pas moins furpris que tout le Monde de ma
fouie du Païs , & de ma Refidence inconnue d'à prefènt. Les mau-
„ vais
COVIE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. uf
vais traitemens continuels & les defordres m'ont obligé de quitter ma ty*MRE*
très-chere Patrie. L'on avoit defTeîn de me jetter dans le Froc au corn- DE Mos-
mencement de l'Année 171 6., fans que j'eulfe rien commis qui le méri-
tât. Perfonne de vous ne le peut ignorer. Mais Dieu plein de miféri-
corde m'a fauve., me préfentant dans l'Automne pafTée une occafion de
m'éluigner de ma chère Patrie & de vous, que je n'aurois pu me re-
foudre à quitter, fi je n'avois point été dans le cas où je me fuis trouvé.
„ Je fuis maintenant bien & en bonne fan té ious la Protection d'une
certaine Haute-Perfonne, jufques au tems que Dieu, qui m'a confervé,
m'appelle, pour retourner dans la chère Patrie.
„ Je vous prie de ne me point abandonner alors, & quant à prefent,
n'ajoutez point de foi aux nouvelles qu'on pourra répandre de ma mort ,
ou autrement, parle defir qu'on a de m'effacer delà Mémoire des hom-
mes ; car Dieu m'a en fa garde, & mes Bienfaiteurs ne m'abandonnent
point. Us m'ont promis de ne me point abandonner non plus à l'ave-
nir, en cas de befoin.
„ Je fuis en vie, & je ferai toujours plein de bons fouhaits pour vos
Excellences , & pour toute la Patrie.
Aux Archevêques.
Très - Sache' Vladiko. *
JE m'imagine que vôtre Sainteté, de môme que tout le Monde, auront
été furpris , de ce que je fuis forti de la Patrie à leur infçu. Ce font
les mauvais traitemens continuels, qu'on m'a faits fans que je l'aie méri-
té, qui m'y ont obligé. Il s'en eilpeu falu qu'on ne m'ait enfermé dans
un Couvent. Je crois que vous ne l'ignorez pas : cela efl provenu des
mêmes Perfonnes qui ont traité ma Mère de la même manière. Mais, le
grand Dieu, fléchi par vos Prières, m'en a prefervé,& m'a conduit fous
la Protection d'un certain grand Prince. Je m'y trouve bien & en bonne
fanté, julques au tems que Dieu voudra que je me fafle revoir. En ce
cas, je vous prie de ne me point abandonner à prefent.
S'il y a, ou s'il y a eu, des nouvelles fur mon fujet, comme fi j'étois
mort, ou quelques autres de cette nature, car on veut m'effacer de la
mémoire des Peuples, n'y ajoutez pas de foi, & obligez -moi de raflu-
reries bien-intentionnez, car je fuis en vie & plein de bons fouhaits
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„ pour vous.
Le Czarevitch n'a pas fait mention dans fon Interrogatoire de l'expref-
fion fufdite : En ce cas , ne m abandonnez pas à prefent j & ce mot d'à prefent
étoit écrit & rayé deux fois.
La
* Vladiko, C'eft un Titre qu'on donne aux Archevêques pour exprimer leur Priraatie,
0.5
n6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AmiREs La Cour Impériale retient ces Lettres à Vienne , & elles n'ont point
de Mos- été envoiées à S. Petersbourg. Mais, Sa Majefté Czarienne a chargé le Re-
covie. flcJent Abraham Wefelofski de demander à l'Empereur pour quelle raifon
"~ on avoit forcé le Czarevitch de les écrire , & qu'on les rendit. Le Ren-
dent Abraham Wefelofski a repondu là-deffus le 28. jour de Mai dans fa
Relation :
,, Que fur fes Reprefentations, le Prince Eugène lui avoit fait connoître
par ordre de l'Empereur, que le Vice-Chancelier Comte de Schonborn a-
voit été examiné en prefence de tout le Miniftere fur ces trois Lettres
du Czarevitch Alexei Petrovitch, & qu'il avoit paru en effet que le
Czarevitch a envoie lui-même ces Lettres au Vice-Chancelier , pour les
expédier en Pologne , pour un avis du fejour de fa perfonne ; mais , que
ces Lettres n'avoient point été envoiées , & qu'elles étoient reliées au-
près d'eux: que même on les lui avoit montrées cachetées fans Infcrip-
tionj mais qu'on ne les lui avoit pas remifes , le Prince Eugène difant,
que l'Empereur n'avoit jamais ordonné de demander du Czarevitch cet-
te forte de Lettres, & qu'il étoit impofîible que le Comte de Schonborn
il
Enfuite, quand le Czarevitch fçut qu'on avoit commencé d'examiner les
autres perfonues, il prefenta à Sa Majefté Czarienne un autre Ecrit de Con-
férions.
Frédéric Doubrofski a avoué dans fon Interrogatoire, qu'il a eu connoif-
fance de la fuite du Czarevitch, qu'il s'en eft entretenu avec lui, & qu'il
lui avoit confeillé de s'évader. Cependant, le Czarevitch avoit celé Doub-
rofski dans fon premier Interrogatoire, & l'a juftifié de n'avoir rien fçu de
fon Evafion, ni de fes Conférences avec Kikin.
Semon Narifchikin a avoué dans fon Interrogatoire, qu'aiant rencon-
tré le Czarevitch entre Memel & Konigsbergue, il lui avoit dit par ordre
de Kikin : Vous avez tort de venir ici, vous auriez pu refier là ou vous étiez ,
& long - tems.
Cependant,tout cela étoit celé dans la première Confeffion du Czarevitch.
Lorfqu'on commença le 20. Février les procédures du Procès criminel
de bufdalk, on y amena de Roftou le ci-devant Evêque de ce lieu, Dof-
fifei, qui confelîa dans fon Interrogatoire plufieurs chofes indécentes à la
charge de la Czarewna Marie Alexiewna, & de la ci-devant Czariffe, la
Religieufe Elena.
Après le commencement de tous ces Examens, favôir le 27. Février,
le Czarevitch donna à Sa Majefté Czarienne un Ecrit, où il confeffa,
qu'aiant rencontré en chemin la même Princeffe Marie Alexiewna, il s'en-
tretint avec elle de fa Mère à lui, la ci-devant CzarifTe, mais il n'avoua
point alors, que cette Princeffe avoit eu connoiffance du deffein de fa fui-
te, comme il a encore tû tout cela dans fon premier Ecrit de Confefiïons.
Jwan Affonafiîef & Frédéric Ebarlakof ont chargé par écrit, dans le
eur
In-
COUR.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 127
Interrogatoire, le Czarevitch : favoir le premier, qu'il avoit oui dire à Ton Affaires
Frère, que Je Czarevitch avoit juré contre la Dame AnnilTe Tolltoi, Iè nB Mos*
Prince Menchikof , & fa belle Sœur Barbara AiTenief, de les vouloir faire
empaler, de même qu'il s'étoit emporté contre AfTonaiîief.
Qu'étant encore en colère un jour contre le Grand-Chancellier le Com-
teGalofkin & le Prince Truhezkoi, ilavoit coutume de dire, qu'ils étoient
caufe qu'il avoit époufé la PrinceiTe de la Couronne, qu'ils lui avoient lié
au cou une femme diabolique ; difant , 11 riy a que la mort qui m empêchera
de leur faire payer cela^ & je ferai planter la Tête de Jon Fils Alexandre Ga«
loîkïnfur un Poteau.
Affonaflief demandant au Czarevitch, comment il ôfoit parler fi hardi-
ment, il lui repondit : Je crache fur tous les autres. Vive le petit Peuple.
Si je trouve mon tems , ou mon Père ne fit pas prefent , je dirai quelque cho-
fe dans t oreille aux Archevêques , ce que les Archevêques diront aux Curez , £5?
ies Curez à leurs Paroifjiens. Je fuis feur quon me fera régner , quand ce fe-
rait malgré moi.
„ Que le Czarevitch étoit aufîî accoutumé de dire: Penfez à mes pa~
9, rcies \ vous verrez que Peter sbourg ne nous refera point long-tems.
Et quv- quand le Czarevitch. étoit obligé d'aller chez Sa Majefté Cza-
rienne , ou de fe trouver avec Ion Père à quelque Feitin, ou de voir lancer
des VaifTeaux à l'eau, il avoit coutume de dire: J'aimerois mieux être à la-
Galère , ou avoir la fièvre , que de me trouver dans ces occafions-là.
Frédéric Ebarlakof a confelTé, qu'en l'Année 1715", lors que la Prin-
ceiTe delà Couronne vivoit encore, le Czarevitch lui avoit dit en confi-
dence ce qui fuit:
Ce fi dommage que je nai point fuivi le Confeil de Kikin , de m évader en
France. J'y vivrois plus tranquillement qu ici , jufqu a fon tems. Je ?r<e trou-
ver ois même mieux dans le Couvent de St. Michel à Kiovie, ou dans la Pri~
fon^ quici.
Le même Ebarlakof a avoué que le Czarevitch avoit pris fouvent mé-
decine exprès, feignant de l'indifpofition , quand il devoit faire quelque
voiage avec Sa Majeiié Czarienne, pour s'en exeufer par cette feinte.
De forte que le Czarevitch a caché & tu tout cela , & que Ebarlakof"
avoit eu connoiiTance de fon deflein d'Evafion & de fes Conférences a-?-
vec Kikin.
. Enfuite, la MaitreiTe du Czarevitch, qui l'accompagnoit dans fa fuite,,
aiant été amenée ici, examinée, & interrogée, û le Czarevitch, outre
Jes trois Lettres au Sénat & aux Archevêques, n'en a pas écrit encore,
d'autres & à qui: comme auili fi elle ne fait pas d'autres chofes de lui, &
quoi? s'il n'y a point eu des difeours entre eux fur fes mauvais deiTeins,-
dont il n'ait pas fait mention dans fes Confelïions? Elle a déclaré verba-
lement, & écrit enfuite de fa propre main, ce qui fuit, favoir:
Qu'après les trois Lettres fufdites , le Czarevitch écrivit dans la Forte-
reiTe, en Langue Ruffienne , une Lettre à un Archevêque- qu'il n'y a—
voit aucun Etranger prefent; que lui Czarevitch, elle, & fon frère à elle,,
y étoient,-,
COVIE.
128 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aftaikt.s y étoient: que cela s'étoit fait, non pas un des premiers jours de Ton ari-
de Mos- v^e ^ Nap]es • mais bien long-tems après qu'il fut dans la ForterefTe ; qu'il
avoit cacheté cette Lettre en fa prefence , mais qu'elle ne fa voit point à
quel Archevêque cette Lettre s'adreffoit.
Qu'il avoit aufiî écrit à l'Empereur des plaintes contre le Czar ; &, en
dernier lieu, peu avant l'arivée de Mr. Tollloi, auquel tems la Réponfe
pouvoit être venue.
Qu'au fujet des Archevêques, il en avoit parlé quelque fois, en louant
l'un , dont elle ne fe fouvient pas du nom.
Que les Lettres écrites aux Archevêques avoient été envoiées dans
le deflfein qu'ils les reçuffent fecretement par voies obliques , afin qu'ils
n'en fuffent point rendus refponfables, fi on les leur mettoit en mains.
Que le Czarevitch lui avoit auiïï parlé de. la mutinerie de l'Armée dans
le Mecklenbourg, comme s'il l'avoit aprife par les Gazettes: qu'enfuite
il lui avoit dit: Il y a déjà une Rébellion dans les Villes voifines de Mofcou: que
ces nouvelles lui venoient en droiture par des Lettres, fans dire de qui:
qu'il s'en étoit réjoui, & qu'il difoit fouvent: Voiez-vous bien, Dieu s'en
mêle.
Qu'à l'égard de fon Esrafion, elle lui avoit ouï dire que quatre perfon-
nes en avoient connoiiïance , parmi lefquelles étoit la Czarewna Marie
Alexiewna, à laquelle il avoit dit, Je veux me cacher-, qu'il lui avoit auffi
fait entendre, qu'il vouloit éloigner tous les vieux Courtifans, & s'en
choifir de nouveaux à fon gré: que quand il entendoit parler de quelques
vifions, où qu'il lifoit dans les Gazettes, que tout étoit tranquille à Peters-
bourg, il difoit: Cela fignifie quelque chofe, [oit la mort de mon Pere^ ou
quelque Rébellion.
Qu'il avoit dit étant à Ehrenberg, qu'il vouloit fe retirer dans quelque
Ville libre, & que Doubrofski, ou quelque autre, le lui avoit confeillé :
Que quand il eut pris la refolution de retourner auprès de fon Père, le
même jour qu'il fortit du Château de S. Elmo , il lui avoit donné la minu-
te d'une Lettre qu'il écrivait à l'Empereur, pleine de plaintes contre fon
Père, & qu'il vouloit faire voir au Vice-Roi de Napks; que cependant il
lui avoit ordonné de la brûler, ce qu'elle avoit fait auffi; que toutes ces
Lettres avoient été écrites en Langue Ruflienne ; qu'il y en a eu beau-
coup , mais qu'elle ne favoit pas fi toutes étoient à l'Empereur.
Que le Secrétaire du Vice-Roi de Naples étoit venu chez lui avant
que ces Lettres fuflent brûlées , que le Czarevitch lui avoit dit en Alle-
mand quelques paroles, que le Secrétaire avoit écrites, en rempliflant
une feuille entière , & qu'en tout il avoit emporté avec lui cinq feuilles de
papier.
Le 12. May le Czarevitch aiant été interrogé fur tout ce que deffus, a
repondu , fur la Déclaration de la Fille Afrofini.
„ Qu'il a écrit à l'Empereur des plaintes contre fon Père , mais qu'il
„ n'a pas envoie la Lettre, n'en aiant fait qu'un Extrait, en conformité
~ du-
COVIE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. i%9
„ duquel il a expofé au Secrétaire les motifs de Ton Evafion, & les rai- Amaxrm
„ fons de Ton refus de retourner; qu'il n'en étoit rien refté par écrit, & DE
„ que les minutes avoient été brûlées. Qu'il n'avoit point écrit aux Ar-
„ chevéques dans la Forterefle.
„ Qu'il avoit parlé au fujet des Lettres aux Archevêques, non pas dans
„ le fens qu'elle, la Fille, avoit déclaré; mais, qu'il avoit dit feulement,
„ qu'on devoit laiflerles Lettres à la Polie à Petersbourg, au rifque com-
„ ment elles pouroient leur parvenir, mais toujours qu'on ne devoit point
„ les leur remettre en propres mains.
„ Qu'à l'égard des vifions, & de fon Père , il pouvoit être qu'il avoit
„ parlé de la manière fufdice.
„ Que Doubrofski & Affonaflief lui avoient confeillé de fe retirer dans
„ des Villes Libres.
„ Qu'il étoit vrai, qu'il avoit ordonné de brûler les Lettres en quel-
„ tion.
On le confronta avec la Fille Afrofini au fujet des Points qu'il avoit
contellez , & le Czarevitch nia encore dans cette Confrontation ce dont
la Fille l'avoit chargé par fa Depofition: mais la Fille le lui afoûtenuen fa-
ce, l'en a convaincu, & l'a mis par écrit.
Le même jour, le Czarevitch fut encore interrogé fur les Articles
précédens; & enfin, après beaucoup de convictions, il a reconnu:
,, Qu'il avoit écrit à l'Empereur les raifons de fon Evafion & de fon
refus de retourner; mais qu'il ne le fouvenoit point d'autre chofe.
Qu'il n'avoit abfolument point écrit de la Forterefle à aucun Ar»
.}, cheveque.
„ Qu'il avoit dit à la Czarewna Marie, au fujet de fa fuite, Je veux me
„ cacher ; & qu'il fe reconnoiflbit coupable de ce qu'il ne l'avoit point
„ déclaré dans Çqs Confelfions.
„ Qu'à l'égard des Lettres aux Archevêques , il avoit dit qu'il faloit
„ les jetter à la Porte à Petersbourg, d'où elles dévoient leur parvenir,
,, comme elles pouroient. Que ce qu'il a dit des Vifions, des Gazettes,
„ & de fon Père, il l'avoit tiré de la bouche du Czarevitch de Sibérie.
,, Que ç'étoient Doubrofski ex Affonaflief qui lui avoient confeillé de
fe retirer dans des Villes Libres.
,, Qu'il avoit dit au secrétaire du Vice-Roi de Naples les motifs de fon
Evafion , & les raifons qu'il avoit de refufer de retourner.
Le Czarevitch a repondu enfuite de plus, fur fon Interrogatoire, au fu-
jet des Lettres qu'il n'avoit point avouées : ,, Qu'il avoit reçu trois Let-
„ très du Comte de Schonborn ; que- celle dans laquelle on prétend qu'il y a-
,, voit une Inclufe de Mo/cou, & l'Inclufe même, n'étoient point parve-
,, nuèsjufques à lui: mais, qu'il avoit reçu dans la Lettre de Février une
,, Inclufe de ce que Bleyer écrivait de Petersbourg; & qu'il n'y avoit
„ point d'Inclufe dans la Lettre du Mois d'Avril.
„ Qu'il avoir, écrit affurement par force au Sénat & aux Archevêques,
„ & non pas de fon propre mouvement -, mais, quilne fe fouvenoit pas,
Tome XI* R » fi
Î5
55
C JVIE.
130 MEMOIRES, NEGOTÏATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires „ fi dans la Lettre au Sénat fe trouvoit fexpreûion de defordres , ni celle
deMos- „ fans que j'aie rien commis qui le meutat.
,, Que dans la Lettre Originale aux Archevêques , on ne trouvoit point
,, les mots: les même* perfonnes qui ont traaé ma Mère de la même ma~
,, ni ère.
„ Qu'il ne fe fouvenoit point pourquoi le mot , à prefent , étoit rayé
„ deux fois.
„ Qu'il avoit celé Doubrofski à deflein , parce qu'il lui en avoit parlé
„ tête 1 tête; & que, par confequent,il n'en avoit rien voulu écrire dans
Tes Confeflions.
,, Que ç'étoic par oubli qu'il n'avoit rien déclaré de Semon Narichkin &
de Kikin.
„ Qu'il avoit parlé de Ton Evafion à la Czarewna dans ces termes: Je
„ veux me cacher. Qu'il s'avouoit coupable de ne l'avoir point déclaré dans
„ fes Confeflions, paj;ce qu'il avoit eu pitié d'Elle.
33
35
„ /^U'il avoit parlé du petit Peuple dans la colère, & étant yvre.
„ V^/ Qu'il n'avoit poil
II a déclaré Jur les Depo fit ions de AffbnaJJief& de Ebarlakof.
1 petit Peuple dans la colère, & étant yvre.
nt tenu les difcours dont on le chargeoit, au fu-
„ jet des Archevêques.
„ Que ça été dans la colère qu'il a parlé du Comte Golofkin, de fon
„ Fils,& du Prince Trubezkoi.
„ Que tour, le monde favoit qu'il s'étoit marié de fon bon gré, & non
„ point par force; que Çqs Lettres à fon Père, * pour lui en demander
„ la permiilion , le prouvoient clairement , & qu'il en avoit écrit au
,, moins treize fur ce fujet.
„ Qu'il avoit entendu de la bouche du Czarevitch Sibérien, ce qu'il
„ avoit dit de St. Petersbourg.
»» Que ç'étoit par oubli qu'il n'avoit point déclaré dans fes Confef-
„ fions Ebarlakof; mais, qu'il étoit vrai qu'il avoit tenu avec lui les dif-
„ cours alléguez.
„ Qu'il avoit pris quelques fois des remèdes par feinte, afin qu'on le
„ crût incommodé; qu'il s'en avouoit coupable.
Enfuite , le Czarevitch pria Sa Majedé Czarienne de lui donner le
tems de penfer & d'écrire, promettant de mettre fur le papier tout ce
qui lui reviendrait en mémoire.
Sa Majeité lui accorda cette permhTion , & lui déclara en même tems ,
que, vu que dans fes Conférions il avoit tu beaucoup de chofes qu'il re-
connoiflbit à prefent, Elle lui réïteroit encore ce qui lui avoit été dénon-
cé auparavant, qu'il devoit découvrir tout ce qui avoit quelque rapport à
cette Affaire , quand même on ne l'en queflionneroit point.
Surquoi le Cz irevitch a prefenté dans le même mois de Mai des Con^
feflions fignées de fa propre main, fur cet Interrogatoire,
J)am
* Ces Lettres font encore gardées en Original.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC XVÏII. iji
Bans les premières du 14. Mai > il a écrit ce qui fuit :
„ TE n'ai cacheté aucune Lettre avant l'arrivée de M. Tolftoi; mais, le
„J Secrétaire du Vice-Roi , m'aiant envoie un Plan & une Relation du
„ Siège de Belgrade, m'avoit prié de les lui renvoier cachetez, afin que
„ le Capitaine, qui étoit avec moi , ne fçr.t point ce qu'on m'envoioit,
„ par ce que je paifois pour être Prifonnier: àinfi, je renvoiai ce Plan-là
cacheté.
„ J'ai écrit aufti un billet audit Secrétaire, je ne fai fur quel fujet,mai3
il me femble que ç/étoit fur quelques-uns de mes befoins.
„ Le Capitaine, qui éroit avec moi, me montroit de tems en tems des
Plans imprimez de beaucoup d'Attaques.
,, Je n'avois rien fçu du Sermon de l'Archevêque de Refan, pareequê
je n'avois point été à Moscou long-tems auparavant. Ce fut en Po-
meranie, li je m'en fouviens, que j'en entendis parler la première fois
au Prince Bafili Dolgorouki, ou bien à Frédéric Glebof: l'un des deux
m'a dit : V Archevêque de Refan , prêchant à Mofcou , a fait mention de vous
en mauvais termes , comme fi vous étiez expuljé \ & ies Sénateurs l'ont obligé
de leur donner une copie de fon Sermon. t
„ L'Archevêque de Refan m'écrivoit quelques fois auparavant, & moi
à lui , quoique rarement, excepté quand- il y avoit des Affaires preflan-
tes: mais, dès que je fus averti de ce Sermon, je rompis cette corref-
pondance, &je n'allois plus voir cet Archevêque, je ne le lailTois pas
non plus venir chez moi , pour ne point donner lieu à des foubçons.
„ J'ai dit à la Fille Afrofini, que j'avois écrit des Lettres fuivant les
In [trucidons du Secrétaire fufdit, mais non point à des gens avec qui je
fulTe en grande correfpondanee. Je crois, dilbis-je, que les Sénateurs fe-
ront voir ma Lettre, mais je ne croL point quon fajfê contre eux des Infor-
mations , parce quils font en grand nombre : & , quand même cela fe feroit ,
ils ne peuvent rien dire de moi; car je ne leur ai fait aucune ouverture de
mon Evafion. Et pour les Archevêques , quand on les brûlerait tout vifs ,
ils ne peuvent pas dire que je leur aie rkn communiqué .
„ Quoi qu'il eut falu écrire à l'Archevêque de Refan aufîi bien qu'aux
deux Archevêques fufdits, parce que le Secrétaire m'avoit dit d'écrire
, aux principaux Ecclefiaftiques & Séculiers, je ne l'ai point fait, afin
, qu'on ne pût point penfer que j'avois concerté mon Evafion avec lui-
, car j'avois avec lui plus de connoifiance qu'avec les autres, & les foub-
, çons auroient été plus forts contre lui & moi, à caufe du Sermon qu'il
, avoit fait.
,, Ce que j'ai écrit au fujet de mon retour dans la Patrie, * cela
s'entendoit après la mort de mon Père , & non pas de fon vi-
vant.
R 2 Dam
* Le contraire paroitra ci-après.
DE Mos-
COVIE.
ija MEiMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
ARAIRES
CE Mos-
COVIE.
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33
»
Bans les fécondes Confe (fions du 16. #lâi , /*/ a écrit
ce qui Juit.
LE General Baver étoit en Pologne dans le tems de ma fuite,
avec fon corps de Troupes : il étoit de mes amis. Je croiois
que la mort de mon Père étoit prochaine, fur ce quej'avois entendu
dire qu'il avoit eu une efpece d'Epilepfie: comme on difoit que les gens
un peu âgez qui l'ont eue, ne peuvent guère vivre long-tems, je croiois
qu'il mourroit dans deux ans tout au plus tard. J'ai penfé que je pour-
rois me rendre après fa mort, des Etats de l'Empereur en Pologne , &
de Pologne avec Baver en Ukraine , où je ne doutois pas que tout le
Monde ne fe déclarât pour moi; & j'ai crû qu'à Mofcou, la Czarewna
Marie, & quelques Archevêques, & même la plus grande partie, en
feroient de même. Et pour le commun Peuple, j'ai entendu dire à
beaucoup de perfonnes, qu'il m'aimoit. (*)
„ Au relie, j'étois refolu de ne retourner abfolument point du vivant
de mon Père , excepté dans le cas que je l'ai fait , c'eft-à-dire , fur
fon rappel.
,, Je n'avois fait confidence de mon delTein d'Evafion à perfonne , ni
de bouche ni par Ecrit , & qui que çe.foit n'en avoit rien fçu. J'ai
bien dit à l' Afrofini , qu'un tel , ou un tel , étoit de mes amis : mais , quand
elle me demandoit qui ç'étoient; je lui difois : Fous ne connoi£ez-pas ces
Perfonnes-là.
„ Pour la Lettre au fujet de laquelle elle a depofé, & que j'ai déniée,
difant que ç'avoit été le Plan du Siège de Belgrade -, je reeonnois à pré-
ferrt que ce n'étoit pas un Plan , mais une Lettre que j'avois écrite à
l'Archevêque de Kiovie, peu auparavant 1,'arivée de M. Tolitoi à Na-
ples. Je mettrai ci-après le contenu de cette Lettre.
,, Quand je donnai mes premiers Confeiîions par écrit , j'avois oublié
véritablement, tant cela, que ce qui regarde la Czarewna Marie, fur
ce que je lui avois fait entrevoir du deffein de mon Evalion ; & quoi-
que cela me fut revenu en mémoire , j'avois peur de le dire après,
C'elt par compaffion que j'ai tu les autres difcours de cette Prin-
celfe.
„ Je ne nie point ce que Ivan AfFonafïief a depofé de ce que je lut
„ avois dit dans l'yvreffe , quoique je ne m'en fouvienne point mot pour
„ mot; mais j'étois yvre, & je difois ordinairement, quand j'étois en cet
„ état, tout ce qui me venoit dans la bouche , & j'ai lâché ces difcours-là
„ par !a confiance que j'avois en mes gens.
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33
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33
(*) Tout cela n'cft pas écrit de bonne-foi , ainfi qu'il a paru enfuite> & qu'il fera prou-
yé ci après.
55
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 133
Affmrf«
La fubflance de la Lettre à l Archevêque de Kiovie , *>*■ Mo*.
ejî comme il juit.
T Jôtre Sainteté a ignoré mon départ de RuJJîc , parce qu'il y a long- terni
que je ne lui ai pas écrit. 'Je vous fais part maintenant , que j ai re-
„ folu cette fort ïe , fur ce qu'on mavoit voulu faire embraJJ'cr l'Etat Monafii-
„ que par force. Ceji là ce qui m'a obligé de me retirer. Quand Dieu me
„ rapcllera du refuge que f ai trouvé auprès de mes Bienfaiteurs , pour retourner
„ en RuJJïe auprès de vous , je vous prie de me recevoir ; £s? quant à préfent,
„ dites à ceux qui jouhaiteront de favoir de mes nouvelles , que je me porte
„ bien , & donnez leur connoifjance des raifons que j'ai eues de for tir du
„ Pais.
,, J'ai envoie cette Lettre à Vienne par Je Secrétaire du Vice-Roi de Na-
„ pies, pour la faire tenir; mais, je ne fai point fi elle a été rendue. Je fuis
„ auffi incertain fur le fort des Lettres précédentes, dont j'avois chargé
„ le Secrétaire du Comte de Schonborn. Toujours elt-il viai, que je
„ n'ai point eu Réponfe de Vienne, fi elles ont été reçues.
„ J'ai entendu Doubrofski tenir les difeours de i'Epilepfie , & faire les
„ réflexions à ce fujet.
Le Czarevitch fut examiné le même jour , fur les Articles fuivans
dreffez par Sa Majeité Czarienne : les Réponfes , que le Czarevitch y a
faites, font lignées de fa main.
ARTICLES. RE'PONSES.
1 » Ad primum»
Qui des Séculiers a fçû vôtre de£ Je ne fâche point que perfonne
fein & vos difpofitions a la défebeif- ait eu connoiffance de mon mauvais
fance ? Quels font les difeours que deifein, quel qu'il fût, ni que qui
vous leur avez tenus , ou eux à que ce foit m'en ait parlé , ^excepta
vous ? ceux que j'ai confefle ci-deifus.
2.
Ad Secundum,
Ce qu'Affonaffief a dépofé de Ta Quand fai parlé avec Affbnaflîef
Rébellion , étok-ce avant la Suc- de la Rébellion , c'a été dans l'y-
ceffîon? vrefle , croïant qu'il y en auroit une.
3.. Ad Tertïum,
Dans quel fens étoit écrit le mot Le mot a préfent , écrit deux
à préfent , marqué deux fois dans fois , vient de ce que j'avois man-
R 3 <lué
COVIE.
DR M0S«
C0V1E.
154 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
la minutte de la Lettre aux Arche- que en écrivant, ne le voulant écri-
vêques? re qu'une fois. Le fens étoit: qu'on
devoit répandre ces Lettres parmi
le peuple, ce que je croïois pouvoir l'engager davantage à fe déclarer
pour moi, en aiant vu l'exemple dans les Gazettes imprimées. Je pen-
fai enfuite que cela étoit mal, c'efl pourquoi je l'ai affacé.
4.
Quand vous avez vu dans la Let-
tre de Bleyer qu'il y avoit une Ré-
volte dans l'Armée du Mecklen-
bourg, vous en avez eu de la joie,
difant : Dieu ne laijfe point aller les
Affaires félon les fouhaits de mon Pè-
re. Mais, quand vous vous êtes ré-
joui de cette manière , je crois que
vous aviez quelque vue , fi la cho-
fe avoit été véritablement telle , &
que vous vous feriez déclaré pour
les Rebelles , même de mon vi-
vant.
Ai Quartum.
Quand j'eus entendu la Révolte
de l'Armée dans le Mecklenbourg,
je difois,dans la joie que j'en avois,
que Dieu ne permettoit pas que les
Affaires fe fifîent félon les fouhaits
de mon Père.
Si cette nouvelle avoit été vraïe,
& Il on m'avoit appelle , j'aurois
joint les mécontens : mais, je n'a-
vois point de deffein formé de les
aller joindre, ou non, fans être ap-
pelle. Au contraire , j'aurois ap-
préhendé de m'y rendre fans cela.
Mais , s'ils avoient envoie pour me
chercher, j'y ferois allé.
Comme le Czarevitch a confeffé dans cette dernière Réponfe, d'avoir
eu des deffeins criminels qu'il vouloit exécuter , même du vivant de Sa
Majefté Czarienne , Ci l'occafion s'en prefentoit : Elle a ordonné aux Srs.
Tolftoi & Buturlin de l'examiner encore fur la fufdite Lettre aux Arche-
vêques, pour favoir dans quel fens & dans quelle vue, il avoit écrit les
mots, à préjent ne m abandonnez pas.
Le Czarewitch a confirmé, que c'étoit dans le fens qu'il venoit de dire
dans fa Réponfe , & il a écrit de fa propre main ce qui fuit:
Le 26. Mal 1718.
5»
SI
J»
LEs Sieurs Tolftoi & Buturlin m'ont demandé par vôtre ordre,
dans quelle vue je m'étois fervi du mot d'à préfent, qui fe trouve
dans mes Confeflions , lorfque j'ai écrit au Sénat & aux Archevêques
de ne me point abandonner.
„ Comme j'ai reconnu dans mes dernières ConfefTions, que il les Re-
belles m'avoient appelle, en quelque tems que c'eût été, même de
vôtre vivant, je me ferois rendu auprès d'eux > j'ai écrit ce mot, à
préfent , dans le deffein que , quand la chofe feroit publiée parmi îe
„ peu-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. i$f
peuple , il fe déclarât en ma faveur , foit par la voie des foliicitations , Affaires
ou ->ar des menaces, de quelque manière que ce fût. DF Mos-
M * COVlE.
SUIVENT LES ECL A IRCISS EMENS SUR TOUTES
LES PIECES PRECEDENTES.
POur faire mieux comprendre les foins que Sa Majelté Czarienne a pris
pour mettre le Czirevitch dans le bon chemin, & pour l'y faire ren-
trer quand il en elt forti, afin de l'engager s fe rendre digne de la suc-
cédions & pour faire voir ao public comment le Czarevitch, au contrai-
re, a trompé l'attente de fon Père, par les oppofitions qu'il y a mifes;
on va mettre la chofe encore dans un plus grand jour par rÉclaircifiè-
ment fuivant , quoique la déduction en foit faite allez amplement dans
les Pièces précédentes.
Il elt notoire par le premier Manifelte qui a été rendu public à l'arri-
vée du Czarevitch à Mofcou, & par les Lettres que Sa Majelté lui à écri<>
tes, qui font inférées ci-devant, avec combien de folhcitations réitérées
Sa Majelté fon Père l'a exhorté à fe rendre capable & digne de la Suc-
celfion. Il s'y elt toujours montré rcfraclaire.
Le Czarevitch répondant à la Lettre que Sa Majelté Czarienne lui a-
voit écrite, après l'Enterrement de fon Epoufe , n'avoit point dit de
raifons, pourquoi il ne vouloit point travailler, comme fon Père le fouhai-
toit, à fe rendre capable de cette Succeflion. Il s'étoit feulement con-
tenté de le tromper par de faux Sermens , par lefquels il s'engageoit à y
renoncer, lefquels pourtant il a non-feulement vio]ez5mais il a recherché
cette Succeflion par de mauvaifes Pratiques.
Sa Majelté Czarienne , qui pénétroit dans les mauvaifes volontez de fon
Fils, l'a encore exhorté par d'autres Lettres à fe former au Gouverne-
ment; & elle lui a répréfenté , pour l'intimider & l'engager à fe confor-
mer à fes volontez, que fi cela lui étoit abfolument impolTible , il dev.it
embrafler l'Etat Monaitique. Elle voïoit bien que la Renonciation du
Czarevitch à la Succeflion n'étoit qu'un an.ufement , qu'il n'y avoir,
point de fincerité, comme les fuites l'ont fait voir. Car, bien loin de
donner une Réponfe claire & pofitive fur la Lettre de Sa Majelté Cza-
rienne qui Pexhortoit à fe déterminer, il eut encore recours aux fubter-
fuges ; ne répondant que d'une manière courte & vague, par des Ser-
mens & par des Prières, pour qu'il lui fut permis de fe retirer inceflam-
ment dans un Couvent, lefquelles pourtant étoient frauduleufcs.
C'elt pourquoi Sa Majelté lui dit, à fon départ de Petersbourg pour
îes Pa'ïs Etrangers , lors qu'Elle lui dit adieu , qu'il ne devoit point en-
trer fi-tôt dans le Couvent , pareeque l'engagement étoit difficile pour
un jeune homme , & elle lui donna fix Mois puur y penfer encore, après
Jefquels il devoit écrire à Sa Majelté le parti qu'il voudroit prendre.
Elle en ufa ainfi, dans l'efpérance qu'il pouroit changer de .^emimen1 ,
& que par une meilleure conduite , il fe conformeront a là volonté ce
fon
COVIF..
i3<î MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
ArPMPEs fon Père, pour fe rendre digne de la Succeffion par une férieufe applica-
pe Mos- tiori à tous fes Devoirs.
Le Czarevitch, ne voulant rien répondre pour lors là-defTus à fon Père,
fit femblant d'être malade; mais, à peine Sa Majelté fut elle partie, qu'il
fe rendit à un Feitin chez Michel Boinof.
Les fix Mois fe paflerent , fans que le Czarevitch s'expliquât fur le
choix qu'il avoit fait.
Sa Majefté, qui voïoit fa tromperie , lui écrivit encore de Coppenha-
gen, pour lui réitérer fes exhortations au fujet de la Succeffion , & elle
lui ordonna fe rendre auprès d'Elle pour y apprendre le métier de la Guer-
re; mais, que s'il vouloit fe retirer dans un Couvent, il de voit en choifir
un , fixer le tems , & en récrire à Sa Majelté , qui ne voulut pas même
lui en prefcrire , ni affigner un.
Il paroft évidemment par les trois Lettres de Sa Majefté, qui font infé-
rées ci-deflus, qu'elle a fouhaité qu'il fe rendit capable de la Succeffion;
qu'elle ne l'a point voulu forcer à fe faire Moine j qu'au contraire , elle l'en
a voulu détourner, & qu'elle a lahTé fon choix à fon Libre Arbkre.
Le Czarevitch fit femblant de s'être choifi de fon propre mouvement
un Couvent: cependant, toutes ces promelTes confirmées par des .^erniens,
fe font trouvées frauduleufesj car , il a paru en effet, comme il elt prou-
vé ci-deflus, que le Czarevitch a recherché la Succeffion, dont Sa Ma-
jefté, non feulement ne l'avoit point privé , mais elle l'avoit même forcé
par fes puiffantes exhortations a y prétendre , en travaillant à s'en rendre
digne.
Mais, au mépris de tout cela, le Czarevitch s'eft évadé & s'eft réfugié
auprès de l'Empereur, reclamant fon affiftance & fa Proteètion pour le
fecourir & l'affilier, même à main armée, & il a dit que l'Empereur l'a-
voit fait aflïïrer par le Comte de Schonborn Vice-Chancellier , de lui
procurer la Couronne Ruffienne , non-feulement par des bons Offices ,
mais auffi par la force des armes. De forte que le Czarevitch a non-feu-
lement efperé avec des témoignages de joie la mort de fon Père , mais
il l'a auffi cherchée; & quand on lui rapportoit qu'il y avoit des Rebel-
lions, cela lui faifoit plaifir, il étoit réfoiu d'aller joindre les Rebelles,
s'ils l'avoient appelle , fut-ce du vivant de fon Père , ou après fa
mort.
On peut le convaincre par fes propres Confeffions, que quand il a écrit
dans fes Réponfes qu'il a faites à fon Père, qu'il ne fouhaitoit point la
Succeffion à caufe de fon infirmité , ç'étoient de purs menfonges.
Ce n'etoit que pour paroître infirme, qu'il prenoit des remèdes, lors-
qu'on parloit de quelque voiage qu'il ne lui plaifok point de faire,
comme fon Père le fouhaitoit ; mais , il ne l'étoit point véritable-
ment.
De forte qu'on peut juger par toutes ces circonflances , qu'il vouloit
la Succeffion , non point de la manière que fon Père la lui vouloit
laifier, favoir dans l'ordre requis, mais à la Tienne, par des Affiilances
Etran-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 13?
Etrangères, ou bien par les Forces des Rebelles, même du vivant de Affaires
l'on Père. ^ DtMoi'
Si le Czarevitch a dit dans fes dernières Confeffions , que ç'avoit été COVXf-
par oubli qu'il avoit manqué d'avouer qu'il avoit écrit de Naples au
Métropolitain de Kio vie, cela s'eft au(îi trouvé faux: car, puifqu'il s'elt
bien fouvenu des particularitez des chofes de moindre conféquence,
dont il s'eft; entretenu avec l'autre depuis plufieurs Années, comme il pa-
roît par Ton Interrogatoire, comment auroit-il pu avoir oublié celle-là,
d'avoir écrit à cet Archevêque , laquelle eft d'une bien plus grande im-
portance?
II paroit dans cette Excufe fur l'oubli , non-feulement de la faufïeté ,
mais auffi une grande malice: car, quand la Fille AfroOni lui a foutenu
qu'il avoit écrit de la ForterefTe, à cet Archevêque, & qu'il avoit cache-
té la Lettre en fa préfence, il a voulu couvrir la chofe du prétexte d'un
Plan de l'attaque de Belgrade , qu'il renvoioit cacheté au Secrétaire du
Vice-Roi de Naples; cependant, il a reconnu dans la fuite , que ce n'a-
voit point été le Plan, mais la Lettre à l'Archevêque de Kiovie , qu'il
avoit cacheté. L'Excufe qu'il a auffi donnée d'avoir oublie d'avouer, dans
fes premières Confeffions, ce qui regarde la Czarewna Marie Alexiewna,
Doubrofski, & Ebarlakof , qui avoient eu connoiffance de fon Evafion, a
encore été un menfonge. On le prouve parce qu'il a dit enfaite , qu'il
avoit eu pitié de la Czarewna.
Il paroit auffi par le rapport inféré ci-defTus du Réfident Wefelofski à
Vienne , que les Impériaux n'ont point forcé le Czarevitch d'écrire les
Lettres au Sénat & aux Archevêques.
Sa Majelté Czarienne n'avoit promis au Czarevitch par les Lettres
qu'elle lui avoit écrit à Naples un gracieux Pardon , que pour fon Evaiion
uniquement , s'il revenoit auprès d'Elle. Elle la lui a non-feulement
pardonnée à fon retour , mais elle a encore étendu cette grâce jufques
à lui promettre une Amniflie générale pour tout ce qu'il auroit commis,
s'il faifoit une Confeffion fmcére de tout ce qu'il pouvoit avoir fait , de
quelque nature que cela fût, & s'il découvroit fes complices fans aucune
referve -, lui déclarant pourtant en même tems , que s'il cachoit quelque
chofe, ou celoit quelque perfonne complice, ou bien quelque affaire, le
Pardon feroit nul & révoqué.
Cependant, on a déjà fait voir clairement par toutes les Pièces précé-
dentes, de quelie manière le Czarevitch, au mépris de la Clémence Pa-
ternelle & du Pardon qu'il en avoit obtenu , a celé un grand nombre de
perfonnes, de Lettres, & de faits, comme auffi fes pernicieux defleins
de fe joindre à des Rebelles, & fes machinations.
Il efl donc vifible par tout cela, que non-feulement il n'a point eu de
véritable intention de découvrir tous fes crimes, & d'en avoir une lincé-
re répentance, ni de fe convertir; mais auffi qu'il a déguifé & caché tout
ce qui s'eft paffé, pour pouvoir encore reprendre fes deffeins à l'avenir,
&. recommencer ce qu'il n'a pu achever jufqu a prefent.
time XL S A me-
DE MOS-
COVIE.
ï38 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
i?TAiREs  mefure qu'on avancoit dans la Le&ure qu'on faifoït de tout ce que
X\. deffus , Sa Majeflé Czarienne éxaminoit encore verbalement le Cza-
revitch, fur tous Tes crimes manifeitez dans toutes les Pièces, & com-
ment tout s'étoit pafie: & après beaucoup d'Interrogations & de Deman-
des, fur les chofcs les plus importantes, dont Sa Majeflé lui a montré les
preuves pour fa conviction , avec les Lettres écrites de fa propre rrrain ,
le Czarevkch a confeifé devant toute l'AlTemblée des Etats Eccléfialtiques
& Séculiers à fon Père & fon Seigneur, qùil 'était coupable de tout ce qui
fe trowvoit clans tous les Ecrits & Pièces rapportées ci-dejjus.
L'Audience étant finie, & le Czarevitch aïant été remené, Sa Majeflé
fît produire une Ordonnance, aux Archevêques & au Etats Séculiers 9
qu'elle avoit fîgnée de fa propre main , dont le contenu s'enfuit.
DECLARATION.
Aux très-Sacrez Métropolitains fep Archevêques ; aux
Evêques & autres Ecclefiajliques.
„ XTOus venez ; d'entendre une' Déduction fort ample des Crimes pref.
„ V que inouïs dans le Monde, dont mon Fils elt coupable, & qu'il
„ a commis contre nous fon Père & fon Seigneur.
„ Quoique, félon toutes les Loix Divines & Civiles , & fur-tout fui-
„ vant celles de Rufîie, qui excluent toute JurisdicrJon entre un Père &
.. un Enfant, même parmi les particuliers, Nous aïons un Pouvoir affez
„ abondant & abfolu de juger nôtre Fils fuivant fes crimes, félon notre
,, "Volante, fans en demander avis à perfonne: Cependant, comme il efl
,, affez ordinaire qu'on ne foît point aufïï clair-voïant dans fes propres af-
j, faires, qu'on l'eft dans celles des autres, & comme aufïï les Médecins,
„ même les plus experts, ne rifquent point de fe traiter eux mêmes , &
„ qu'ils en appellent d'autres dans leurs maladies; ainfî Nous, craignant
„ -Dieu & le Péché, Nous vous expdfons pareillement nôtre maladie, &
Jj Not-is vous, y demandons du réméde. Car, Nous appréhendons la Mort
,, Eternelle, fi,,ne connoiflant peut-être point la qualité de nôtre mal-,
-„ Nous voulions Nous en guérir feuls, d'autant plus que j'ai juré fur les
,, Jugemens de Dieu, & j'ai promis par écrit , le Pardon à mon Fils, ôc
,, je l'ai enfuite confirmé de bouche , au cas qu'il me dife la vé-
■„ rite.
,, Quoique Notre Fils ait violé fa 'promeffe , en taifant les chofes les
„ plus importantes touchant fes deffeins de Rébellion contre Nous fon
,, Seigneur & fori Père, toutefois, pour ne Nous écarter en rien de nos
5, obligations , & quoique l'affaire ne foit point du Reflbrc de la
n Jurifdiérion Spirituelle, mais de la Civile, & que Nous l'aïons même
renvoyée aujourd'hui à un Jugement impartial des Séculiers , par une
„ Dé-
3*
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JJ
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»
5)
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 139,
Déclaration expreffe , Nous fouhaitons pourtant Nous procurer toutes Affaire*
fortes de lumières fur cette Affaire. deMos-
„ Nous fouvenant de l'endroit de la Parole de Dieu, où il exhorte de CQVIEl .
demander dans de pareilles occafions les fentimens des Gens d'Eglife,
pour favoir ce que Dieu en ordonne, ainfi qu'il eit écrit au Chip. 17.
de l'Exode ; Nous defirons de vous , Archevêques , & de tout l'Etat
Ecclefialtique , comme des Docteurs de la Parole de Dieu, non pas
que vous prononciez un Jugement fur cette Affaire -, mais que vous l'e-
xaminiez, & que vous Nous donniez là-deflus , fuivant les Saintes E-
critures, une véritable Inllru&ion , pour favoir quelle punition un Cri-
me li horrible de mon Fils, femblable à celui d'Abfalom , a mérité fé-
lon les Loix Divines, fuivant les autres Exemples des Saintes Ecritu-
res, & félon les Préceptes- ce que vous Nous donnerez par écrit figné
de la propre main d'un chacun , afin qu'étant fuffifamment éclairez
dans cette Affaire , Nous ne chargions en rien nôtre Confcience.
,, Ainfi Nous mettons nôtre confiance en vous, comme Gardiens des
Loix Divines, fuivant vôtre Dignité; comme fidèles Pafteurs du Trou-
peau Chrétien , & comme bien intentionnez pour la Patrie: Et Nous
vous conjurons par les Jugemens de Dieu & par vôtre Sacre , de pro-
céder en cela, fans aucune difîimulation, & fans crainte.
DECLARATION.
yl nos Féaux £5? Amez les Sieurs Mlniflres^ Séna-
teurs ? g«? aux Etats Militaire & Civil.
, T TOus venez d'entendre une Dedu6lion fort ample des Crimes pref-
, V que inouïs dans le Monde, dont mon Fils efl coupable & qu'il a
, commjs contre Nous fon Père & fon Seigneur.
„ Quoique, félon toutes les Loix Divines & Civiles, & fur-tout fuivant
, celles de Rufîîe , qui excluent toute Jurisdiftion entre un Père & un
, Enfant, même parmi les particuliers, Nous aïons un Pouvoir allez abon-
, dant & abfolu de juger notre Fils fuivant fes Crimes, félon nôtre Vo-
, lonté , fans en demander avis à Perfonne : cependant, comme il efl
, allez ordinaire qu'on ne foit point aufïi clair-voïant dans fes propres
, affaires, qu'on l'efl dans celles des autres, & comme aufîi les Mede-
, cins, même les plus experts , ne rifquent point de. fe traiter eux-mê-
, mes , & qu'ils en appellent d'autres dans leurs maladies -, craignant
, Dieu, & de charger ma Confcience de quelque Péché, c'efl pour cette
, raifon que Nous vous exppfohs notre état, & que Nous vous y deman-
, dons du remède : car Nous appréhendons la Mort Eternelle , fi , ne
, connoiffant peut-être point la qualité de nôtre mal , Nous voulions
, Nous en guérir feuls, vu principalement que j'ai juré fur les Jugemens
, de Dieu, & que j'ai promis par Ecrit, le Pardon à mon Fils, & je l'ai
, enfuitè confirmé de bouche,- au cas qu'il me dife de là vérité.
S 2 „ Quoi-
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J5
140 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Awairf.« „ Quoique nôtre Fils ait violé fa promette , en taifant les chofes les
de Mos- j? p]us importantes touchant Tes DefTeins de Rébellion contre nous fon Sei-
COVIE- „ gneur & fon Père, toute-fois, pour ne Nous écarter en rien de nos
„ obligations, je vous prie de penfer à cette Affaire, & de l'examiner fé-
rieuTement & avec attention, pour voir ce qu'il a mérité, fans me flà-
ter, ni appréhender que s'il ne mérite qu'une légère punition, & que
vous le jugiez ainfi, cela me fut defagréable; car, je vous jure par le
,, grand Dieu & par fes Jugemens, que vous n'avez abfolument rien à en
,, craindre.
„ Ne faites point reflexion non plus, fur ce que vous devez juger le
„ Fils de vôtre Souverain ; mais, fans avoir égard à la perfonne, rendez
„ Juftice, & ne perdez point vôtre Ame & la mienne, afin que nôtre Conf-
„ cience ne nous reproche rien au jour du terrible Jugement, & que nô-
,, tre Patrie ne foit point lezée.
Le 16. Juin, le Confeiller privé Pierre Tolfloi a déclaré par ordre de
Sa Majefté Czarienne aux Miniitres , au Sénat , à l'Etat Militaire & au
Civil , que comme elle a mis entre leurs mains le Procès de fon Fils Alexei
Petrovitch, afin qu'ils en prononcent le Jugement, Elle veut & entend
qu'il fe fade dans la Forme requife, & avec tout l'Examen neceflaire : c'eit
pourquoi Sa Majefté les autorife & leur donne le Pouvoir d'examiner le
le Czarevitch Alexei Petrovitch, s'ils le trouvent à propos, fur quelque
Affaire que ce loit, de le faire comparoitre , & de l'interroger fur ce qui
fera néceffaire.
Sur cet ordre exprès de Sa Majefté Czarienne, Mrs. les Miniftres, le
Sénat , & les Etats qui étoient préfens & affemblez aïant ouï Lecture de
routes les Pièces précédentes , font convenus d'interroger le Czarevitch
fur les Points fuivans.
Points d'Interrogatoire du Czarevitch Alexei Petrovitch*
I.
IL a déclaré au fujet de la Lettre de Bleyer, que la copie en avoit
été couchée dans une Lettre de Schonborn; mais qu'il n'y avoit eu
aucune Inclufe dans celle dudit Shonborn du 24. Avril.
„ Cela ne peut pas être: parce que le Comte de Schonborn y marque de
fa propre main, qu'il envoie une copie de ce qu'on écrivoit de Mofcou;
de forte qu'il n'elt pas poflible que le Comte ait oublié de coucher cette
Incluie dans fa Lettre, il paroit même qu'il l'a envoiée exprès pour fai-
re part au Czarevitch de ces nouvelles-là.
„ Cela ell conforme auiîi à la Déclaration que la Fille Afrofini a don-
née, de ce que le Czarevitch lui avoit dit, d'une Rébellion aux envi-
rons de Mofcou, dont il prétendoit être informé par des Lettres ; de
forte qu'il paroît qu'il a eu de ces fortes de Lettres, de qui que ce fût.
„ 11 elt probable, que quand même Bleyer auroit mandé ces nouvelles,
il
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RESOLUTIONS B»ETAT, M. DCC. XVIII. 141
„ il auroit fait en même tems mention de quelques perfonnes , & que le AmiM*
„ Czarevitch a peut-être brûlé la Lettre, parce qu'il vouloit les cacher. DE Mos"
,, Ainfi, il doit le confeilcr véritablement à prefent , parce qu'on n'a _L
„ point pu ajouter foi à ce qu'il aditjufquts ici, & qu'il a augmenté de tems
,, en tems fcs Confelfions. 11 doit fe fouvenir des promeiles confirmées
„ par tant de Sermens, qu'il a faites à Sa Majeflé Czarienne fon Père à
„ fon arrivée à Molcou , & lefquelles il a reïterées depuis en baifant ls
„ Croix, &mêmeen prenant la Sainte Communion, & encore lorfqu'il
,, obtint de Sa Majelté fon Pardon par écrit. Il ne doit point , pour
,, s'éxemter de tout confefltr fans referve & de nous dire la pure vérité,
„ fe confier fur ce qu'il eft Fils de nôtre Souverain: car, Sa Majeflé nous
„ ayant établis Juges fur lui , Elle nous a aufïi donné tout Pouvoir en cet-
„ te qualité j &, s'il ne veut point confciïer, nous ferons obligez de le
„ traiter comme on traite un criminel ordinaire , & comme on en agit
„ dans de femblables cas de Rébellion, de Séditions, de Révoltes tramées,
,, & de Deffeins de Parricides contre fon Père & fon Souverain.
„ Qu'il déclare donc les Complices de fa Confpiration , qu'il dife fur
„ qui il s'efl repofé pour être affilié, & avec qui il a conféré & conjuré:
„ car, il ne lui étoit point pofïible, fans cela, de fe flater des efperances
,, qu'il avoit, qu'il a communiquées à Sa A lai trèfle, & qu'il a déjà con-
„ feflees lui-même.
I I.
„ A quelle occafion a-t-il parlé à Ivan Affonafîïef de fa confiance fur le
„ petit Peuple, & en quel tems a-t-il voulu exécuter ce qu'il a dit: fa-
» voir>
,, Si je vois mon tems où mon Père ne [bit pas prefent , je dirai quelque cho-
„ fe à r oreille aux Archevêques! Sur quel Archevêque a-t-il le plus compté
„ dans ce cas-là? La Fille Afrofini aiant déclaré, qu'il avoit lotie un Ar-
,, chevéque fans le nommer, il n'eit point pofïible qu'il l'ait oublié; mais,
,, il paroît que cet Archevêque étant de fes Amis, il a celé fon nom vou-
„ lant le cacher. De plus. Quel tems a-t-il cru trouver dans l'abfence
„ de Ton Père ?
III.
„ Pourquoi & fur quel fondement a-t-il dit , que Petersbourg ne nous
„ refleroit pas long-tems ?
Sur quoi le Czarevitch a été cité de comparoître devant le Tribunal des
Juges établis par Sa Majeflé Czarienne dans la Sale de la Régence du Sé-
nat, & Déclaration lui aiant été faite des ordres qu'ils avoient reçus de
Sa Majeflé Czarienne: il lui a été dit, que quoi qu'iis fulTent fort attiigez.
de la conduite qu'il avoit tenue, ils étoient pourtant obligez, pour obéir à
leurs ordres , & fans avoir égard à fa perfonne, & à ce qu'il efl le Fils de
leur très-Clement Souverain , de l'interroger fur les Articles rapportez ci-
delTus, qu'ils lui lurent, lui demandant d'y répondre par une Confeiîlon
véritable, accompagnée de beaucoup de Preuves.
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142 MEMOIRES, NEGOTIATfcONS, TRAITEZ, ET
î>'™Mos! Le 1 7. y um 5 & Czarevitck a répondu fur ces Articles*
covie. la ce qui fuit.
Leyer,Refident de l'Empereur, a écrit au Comte de Schonborn Vice-
Chancelier de l'Empire, que Abraham Lopoukin l'avoit prié à Pe-
tersbourg de le venir trouver: qu'il lui avoit demandé où fe trouvoit à
prefent le Czarevitch , & G on avoit de Tes nouvelles, lui faifanc enten-
dre en même tems ce qui luit : 0;iefi ici pour le Czarevitch , & on com~
„ mence déjà de fe remuer à ïentour de Mofcow, car, il y a beaucoup de diferen-
3, tes Nouvelles furfqn fujet : je voudrais /avoir pofttivement s7 il Je trouve pre-
„ Jentement auprès de vous.
„ Cette Lettre deBleyer étoit couchée dans celle du Comte Schonborn
„ écrite au Czarevitch dans le Mois d'Avril, & lui Czarevitch a brûlé
cette Inclufe après l'avoir lue.
„ Quand il difoit a la Fille Afrofini, qu'il y avoit proche de Mofcou une
Rébellion, il l'a tiré de la ditee Lettre, fans dire à cette Fille ce que
Bleyer a écrit au Comte Schonborn au fujet de Loupokin.
A l'égard de ce que Ivan Affonaffief a confeffé à la charge du Czare-
vitch, fur ces difeours au fujet du petit peuple : Il eft vrai que lui Cza-
revitch avoit comté fur ce petit peuple, parce qu'il avoit ouï dire à
„ beaucoup de perfonnes qu'il en étoit aimé, en particulier à Nikifor Ba-
„ zemskoi & à fon ConfeiTeur l'Archiprêtre Jaques , qui lui avoit parlé
,, fouvent de l'amitié que le peuple avoit pour lui, & qu'en buvant à fa
„ Santé , on l'appelloit V Efperance des Rujfiens.
Après cela, le Czarevitch prit à part le Séréniffime Prince Menchikof,
le Baron Pierre Schafirof, Pierre Tolftoi, & Ivan Buturlin, il & leur dit:
,, Qu'au refle il avoit mis fa confiance fur ceux qui aimoient les ancien-
„ nés mœurs, qu'il les avoit reconnus aux Difeours qu'ils avoient tenus
avec lui , par ce qu'ils avoient toujours loué les anciennes ma-
nières , parlant avec dépîaifir des nouveautés que fon Père introdui-
„ foit. Qu'il avoit été fortifié dans cette confiance par les Difeours du
„ Prince Bailli Dolgorouki, quand il lui dit: Donnez à vôtre Père tant de
„ Lettres de Renonciation qu'il voudra, comme il eft rapporté dans les pre-
mières Confeffions du Czarevitch. Que le même Prince Dolgorouki lui
avoit dit , qu.il avoit p/u.> d'efprit que fon Père \ & que , quoique {on Père en ait
beaucoup, H ne connoifj'oit pourtant pas les gens cfefprit, difant au Czare-
,, vitch , vous les connuitrez mieux.
Etoit figné de la main du Czarevitch
A L E X E I.
Le Czarevitch Alex ci Pctrovitch a écrit de plus de fa propre
main , pour un Suplenient de ce qui efl ci- de ff us.
claré dans mes Confeffions précédentes le relie des Difeours.
éaare à prefent, que j'ai fondé mes efpérances fur les Difeours
de
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„ T'Ai dé
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RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. hj
„ de beaucoup de perfonncs, & en particulier fur ceux de mon Confef- -*ÏFAr*T#
leur Jacques, de Nikifore Bafemskoi, du Czarevitch de Sibérie, de
Doubrofski, & d'Ivan Afrbnalîlef, que j'étois aimé du peuple: Jacques
>»
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5'
avoitde l'inclination pour moi, quoique je n'aie jamais parlé de rien avec
lui, excepté ce que j'ai confeile ci-cleflus.
„ J'ai parlé de Petersbourg étant yvre, dans le fens que, voiant qu'on
s'éloignoit jufques à Coppenhagen, on pouvoit bien le perdre comme
Affbf. je ne me fouviens plus des paroles mômes que j'ai dites.
Le Czarevitch a dit auiïï auxMiniflres pendant cet Examen,
„ Qj.i il avoit toujours recueilli depuis long-tems tous les Difcours que
lui avoient tenus les perfonnes à qui les nouveautez introduites par le
Czar fon Fere déplaifoient & qui les ont blâmées, parce qu'elles étoienc
portées pour les anciennes mœurs , vivant à la manière antique ; &
que, quoi qu'il n'ait point eu de correfpondance avec eux au fujet de Tes
defTeins , ni n'ait reconnu en eux aucun penchant h les favorifer, il
s'étoit pourtant montré incliné pour eux, à caufe de leurs difcours fur
ce fujet ;& que , pour fe les attacher, il avoit fait femblant d'aimer aufii
les anciennes pratiques , & que pour ces raifons il avoit comté fur ces
gens-là. '"
Après la Leéiure faite de toutes les Pièces en prefence des Mini (lires,
du Sénat, & des Etats aiTemblez, ils ordonnèrent qu'on cherchât dans les
Saintes Ecritures de l'Ancien & du Nouveau Teftament, dans les Confti-
tutions de l'Empire, & dans les Reglemens Militaires ,des Autorités con-
venables, qu'on pût appliquer au cas préfent, pour juger quelles peines
ces Tranfgreiîions avoient méritées.
EXTRAITS DE L'ANCIEN TESTAMENT.
Au Levi tique, Cbap. 20.
51
Ieu parla à Moïfe, en difant: Vous direz aux Enfans d'Ifraël; Q:er
celui qui outragera de paroles fon Père ou fa Mère , foit puni de
„ mort, fon fang eii fur lui.
Au Deuieroncme , Cbap. 21,
„ /^Uand un Homme aura un Enfant pervers & rebelle, n'obe /flanc
55 V,/ point à la voix de fon Père, ni à la voix de fa Mère, & qu'ils-
„ l'auront châtié, & que-nonobîknt cela il ne les écoute point; Alors le
,, Père & la Mère le prendront 5 &. le mèneront aux Anciens de la Ville t
,, Cl à la porte de fon lieu: Et ils diront aux Anciens de fa ¥iHe ; j'C'< ft
„ ici
Affaires
ce Mos-
COVIE.
»»
I44 MEMOIRES, NEGOTÎATIONS, TRAITEZ, ET
ici nôtre Fils qui efl pervers & rebelle, il n'obéît point à nôtre voix,
il eil gourmand & yvrogne. Et tous les gens de la Ville le lapideront,
& il mourra ; & ainli Vous ôterez le méchant du milieu de Vous, afin
que tout Ifraè'l l'entende, & qu'il craigne.
EXTRAITS DU NOUVEAU TESTAMENT.
En St. Matthieu, Chap. if. 1.
„ A Lors des Docteurs de la Loi & des Pharifiens, qui étoient venus
, Jl\. dejerufalem, s'adreflerent à Jefus, & lui dirent: Pourquoi vos
„ Difciples violent-ils la Tradition des Anciens; car, ils ne lavent point
„ leurs mains, lors qu'ils prennent leur repas ? Il leur répondit: Pour-
,, quoi vous-mêmes violez-vous le Commandement de Dieu , pour fuivre
„ vôtre Tradition?
En St. Marc, Chap. 7. 9.
f, "rEfus dit aux Pharifiens & aux Docteurs de la Loi 5 N'étes-vous
J donc pas, leur difoit-il, des gens bien religieux, de détruire leCom-
, mandement de Dieu, pour garder vôtre Tradition? Car Moïfe a dit:
, Honorez vôtre Père & votre Mère : & , Que celui qui outragera de parole
„ fon Père ou fa Mère, foit puni de mort. Mais, vous dites vous autres:
„ Si un Homme dit à fon Père, ou à fa Mère: Tout don que je fais à
„ Dieu vous foit utile, il fatisfait à la Loi? Et vous ne lui permettez
„ pas de faire rien davantage pour fon Père ou pour fa Mère.
Aux Romains , Chap. I. 28.
„ TTJT comme ils n'ont pas voulu reconnoître Dieu, Dieu aufli les a
5) JCy livrez à un fens dépravé? En forte qu'ils ont fait des actions in-
„ dignes de la Raifon: qu'ils ont été remplis de toute forte d'injuftice,
„ de méchanceté, de fornication, d'avarice, de malignité. Ils ont été
„ envieux, meurtriers , querelleurs, trompeurs. Us ont été corrompus
„ dans leurs mœurs, femeurs de faux rapports, calomniateurs, & enne-
„ mis de Dieu. Us ont été outrageux , fuperbes , altiers , inventeurs
5, de nouveaux moyens de faire Je mal , defobéïifans à leurs Pères &
„ à leurs Mères: fans prudence, fans modeitie, fans affection, fans
„ Foi, fans miféricorde. Et, après avoir connu la Juftice de Dieu, ils
„ n'ont pas compris que ceux qui font ces chofes, font dignes de mort,
„ & non feulement ceux qui les font , mais auifi quiconque aprouvc
„ ceux qui les font.
du* Ephefiens, Chap. 6. r.
„ X TOus Enfans, obéïffez à vos Pérès & à vos Mères en ce qui efl: fe-
„ V Ion le Seigneur j car, cela efl julle. Honorez vôtre Père & vô-
„ tre
FF.URE5
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. Hf
„ tre Mère, (c'eft le premier des Commandemens auquel Dieu ait promis A
„ une récompenfe:) Ilonorez-les, dit-il, afin que vous foyez heureux, DE Mos
& que vous viviez long-tems fur la Terre.
DANS LES CONSTITUTIONS DE RUSSIE.
Chap. i. Statut i.
„ CI quelqu'un commence, par quelque mauvais defTein, à penfer con-
„ l3 tre la fanté du Czar , ou s'il fait quelque chofe à Ton préjudi-
» ce & qu'on trouve véritablement qu'il a voulu exécuter Tes pernicieux
,) deiTeins, on doit le punir de mort après l'en avoir convaincu.
::S'
T)
Statut 2.
Emblablement, fi quelqu'un, pendant le Règne de S. M. Cz. , par le
defir de régner dans l'Empire Mofcovite , & de faire mourir le Czar,
commençoit d'amafTer des Troupes dans ce pernicieux defTein ; ou
bien fi quelqu'un fait amitié avec les Ennemis de S. M. Cz. ou entre-
tient correfpondance avec eux, ou s'il les affifte pour parvenir au Gou-
vernement par leur afliftance, ou pour faire quelque autre defordre; Q
quelqu'un le dénonce, & que fur ces délations on en trouve la vérité,
„ il faut punir de mort un tel Traitre pour une telle Trahifon vérifiée.
Dans les LOIX MILITAIRES de Sa Majesté*
Czarienne imprimées à Petersbourg en l'Année
1717.
Au Chapitre 5. Art. 12.
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SI un Sujet levé du monde, ou prend les armes contre S. M. Cz. , ou
bien fi quelqu'un forme le defTein de prendre prifonnier S. M. , ou
bien s'il lui fait quelque violence -, lui & tous ceux qui l'auront aidé,
ou qui lui auront donné confeil , feront écartelez comme Criminels de
Léze-Majeité , & leurs Biens feront confifquez.
Explication de V Article.
„ CEront pareillement punis du même Supplice, ceux qui , quoi qu'ils
„ i3 n'ayent point pu mettre leur crime en exécution, feront convain-
„ eus d'en avoir eu la volonté & l'envie, aufli-bien que ceux qui ne
„ l'ont pas découvert , en ayant eu connoiiTance.
Tome XL T Chap.
i4tf MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AïFAîRES
»* Mos- Chap. 1 6. Art. 17.
COVIE.
5»
CElui qui forme le defTein de faire quelque trahifon, ou bien quel-
que chofe de femblable , quoi qu'il ne le mette point en exécu-
tion , doit pourtant être puni de pareilles peines capitales , comme s'il
avoit exécuté fon deflein.
Ces Extraits-là des Loix Divines, Civiles, & Militaires ayant été lus ,
& lecture ouïe , il fut réfolu d'un confentement unanime , qu'avant de
prononcer la Sentence, les Miniitres & le Sénat dévoient appeller, l'un
après l'autre , les Juges établis pour former ce Tribunal , afin de dire cha-
cun de bouche fon fentiment.
Ce qui ayant été fait, les Miniftres ont pareillement dit chacun fon-
fentiment, qui, quoique dit féparémeut , revenoit pourtant unanimement
& fans aucune contradiction à un même Jugement, ayant déclaré par
Serment & en Confcience , que , félonies Loix Divines , Civiles, & Mili-
taires extraites ci-defTus , le Czarevitch étoit digne de Mort , pour les
Crimes alléguez & prouvez ci-deflus.
Sur la Confeflion ci-defTus du Czarevitch , au fujet de la Lettre de
Bleyer, Abraham Lopoukin a été examiné le 19. Juin devant les Mi-
mitres & les Sénateurs. Il a tout nié d'abord avec de grands Ser-
mens.
Mais, ayant été mené dans la Chambre de la Torture le même jour
de Juin après midi, il a avoué & déclaré ce qui fuit : Qu'il n'avoit point
prié le Réfident Bleyer de venir chez lui, & que lui n'avoit point été
non plus chez le Réfident, mais qu'ils s'ecoient rencontrez après l'Au-
tomne, qu'il ne fe fouvenoit point de l'Année, que ç'avoit été avant
l'arrivée de S. M. Cz. allant du Port de la Trinité vers celui du Baron
Schaffirof • Que lui Lopoukin avoit demandé au Réfident : Ou eft à pré-
fent le Czarevitch t y a-t-il des nouvelles de lui? Que Bleyer lui avoit répon-
du : Il y a des nouvelles que le Czarevitch eft auprès de nous dans les Etats de
Sa Alajefté Impériale , fjf Sa Majefté Impériale ne l'abandonnera pas. Que
lui Lopoukin avoit dit à Bleyer: On eft en peine du Czarevitch chez nous ,
'i$ fa for ne pourra eau fer un foulevement dans C Empire. Que le Réfident lui
avoit dit là delfus : Et ï Empereur ne l'abandonnera point dans un tel cas.
Que lui Lopoukin avoit dit au Réfident ces paroles-là félon fon propre
railonnemenr, ckfuivant fon inclination pour le Czarevitch, comme auffi
fur ce qu'ils ont raifonné autrefois avec le Land-Rad du Gouvernement
de'Ca&Q, nommé. Kanbar Akinfief, lors qu'il étoit à Petersbourg, lequel
■étant chez lui Lopoukin, ils avoient difeouru enfemble & dit du Czare-
vitch , qu'il étoit dans les Etats de l'Empereur .-qu'ils avoient dit tout deux,
que le Czarevitch avoit bien fait de prendre ce parti-là, & que l'Empe-
reur ne l'abandonneroit point. Que Kanbar Akinfief avoit dit à lui Lo-
poukin:
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 147
poukin: Et chez nous , clans nôtre Pais , là-bas, il peut bien arriver quelque de-
I ordre fur ce que le Czarevitch seft enfui, parce que le Peuple y efi fort fini- «"m""
fie Ùï ignorant. comk/
Le 21. J^iin Sa Majefté Czarienne a fait ordonner aux Sénateurs, par le
Confeiller Privé Pierre Tolftoi , de fe trouver dans la Sale; où étant af-
femblez, le même Confeiller Privé leur a inlinué les Confidérations (lavan-
tes que l'Etat Ecclefiaflique avoit préfentées à S. M. Cz. & qu'Elle a vou-
lu leur envoier par lui, pour les leur communiquer.
CONSIDERATIONS DU CLERGE'.
FAifant réflexion , d'un côté, fur le grand Crime commis par un Fils, qui,
à l'exemple d'Abfalom s'eft foûlevé contre Ton Père ; & , de l'autre ,
fur la Perfonne offenfée , qui efl un Père & un Souverain, qui a un Pou*
voirabfolu fur fon Filsj nous n'ofons toucher une Affaire de cette nature,
par les Confidérations qu'il nous efl commandé d'y faire, cette affaire étant
apurement du Reffort de la Jurifdiclion Civile, & point du tour, de l'Eccle-
iiaftique: outre que le Pouvoir abfolu établi dans l'Empire Czarien qui efl
une Monarchie , n'efl point fournis au Jugement des Sujets; mais, le Sou-
verain y a l'Autorité d'agir fuivant fon bon plaifir, fans qu'aucun des infé-
rieurs y intervienne.
Cependant, comme il nous efl: ordonné de rechercher, non point par
manière de Jugement, mais pour l'Initrudlion feulement, des Exemples 6c
des Statuts applicables à l'Affaire dont il s'agit}
C'eft pour cela, qu'en conformité des Ordres du Monarque, Nous foufl
fignez Perfonnes Ecclefiaftiques préfens dans la Ville Capitale impériale
de Saint Petersbourg, avons recueilli des Saintes Ecritures ce qui a paru
convenir à cette terrible & inouïe Affaire.
1. „ Le Fils de Noé, qui s'étoit moqué de fon Père, en fut maudit &
> condamné à être le Serviteur des Serviteurs de fes Frères. Gen.9.
tfo AAt*v& orîri nn*> ttoo i/-»iit"e i/~»i««f- ni-nlr
1. Dieu a dit dans fes Commandemens : „ Honorez votre Père & vo-
tre Mère , afin que vos jours foient prolongez fur la Terre. Exod. 20.
„ Vous ne maudirez point le Prince de votre Peuple. Exod. 22.
3. „ Celui, qui aura maudit fon Père ou fa Mère, fera puni de mort.
Exod. 21. Levit. 20.
Et Jefus Chrift a dit la même chofè. „ Matth. 1 $. & Marc . 7.
4. ,, Quand un homme aura un Enfant pervers & rebelle , n'obéilTanc
„ point à la voix de fon Père , ni à la voix de fa Mère , & qu'ils l'auront
„ châtié, & que nonobflant cela il ne les écoute point ; alors le Père &
„ la Mère le prendront, & le mèneront aux Anciens de fa Ville, & à la
„ porte de fon Lieu, & ils diront aux Anciens de fa Ville ; C'eft ici nô-
„ tre Fils qui efl: pervers & rebelle, il n'obéit point à nôtre voix, il efl
„ gourmand & yvrogoe. Et tous les gens de la Ville le lapideront , & il
T 2 „mour-
COVIE.
148 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires „ mourra; & ainfi vous ôterez le méchant du milieu de vous, afin que
de Mos- w tout Ifrael l'entende & le craigne. Deut. zi.
f. „ L'œil de celui qui fe moque de Ton Père , & qui méprife l'enfeigne-
„ ment de fa Mère, les Corbeaux des torrens le crèveront. Prov. 30.
6. ,, Honorez vôtre Père & vôtre Mère de fait & de paroles, afin que
,,'la bénédi&ion vienne fur vous; la bénédiction du Père affermit les mai-
,, fons des Enfans : & la malédiction de la Mère en déracine les fonde-
„ mens. Eccl. 3.
Et plus bas: „ Mon Enfant , fubvenez à vôtre Père dans fa vieilleffe, &
„ ne le fâchez point durant fa vie.
7. „ Le Peuple d'Ifraèl , étant dans la prifbn de Babylone, recueillit de
l'argent, & l'envoia àjerufalem àjoachimle Grand Sacrificateur & à tout
le Peuple* ci ils leur mandèrent: Voici nous vous envoyons de l'argent,
duquel vous achèterez des Oblations & de l'Encens, pour faire des Ho-
„ locauftes & des Sacrifices pour le péché, & faites l'Offrande que vous
offrirez fur l'Autel du Seigneur nôtre Dieu, priant pour la vie de Nabu-
chodonolbr Roi de Babylone, & de Baltafar fon Fils, afin que leur vie
dure autant que le Ciel fur la Terre. Baruch. 1.
8. „ Mardoehée, ayant entendu les complots des Eunuques du Roi qui
étoient Gardes du Palais , & qu'ils fe préparoient de mettre les mains fur
le Roi Artaxerxes pour le tuer, il donna avis au Roi de leur Confpira-
tion: le Roi les fit mettre à la queftion, & aprôs qu'ils eurent confeffé,
il les fit pendre. Ejiher 1.
9. „ L'Hiftoire d'Abfalom efl connue par le fécond Livre des Rois, if.
16. 17. 18.
Ce font-là les Paffages de l'Ancien Teftament qu'on a recueillis.
Du Nouveau Teftament.
i. ,, Jefus-Chrift même étoit fournis à fon Père Jofeph & à fa Mère.
Luc. 2. 11 a auffi ordonné de payer le Tribut à Céfar. Mat th. 22.
2. „ Si vous voulez entrer en la vie, gardez les Commandemens , qui
font : Vous ne tuerez point ; Vous ne commettrez point d'adultère : Vous
ne déroberez point: Vous ne direz point de faux Témoignages. Hono-
rez vôtre Père & vôtre Mère, & aimez vôtre prochain comme vous-
même. Maîth. 19.
3. ,, Qui dira à fon Frère Racka méritera d'être condamné par le Con-
feil. Matlh.'s.
4. „ Rendez l'honneur à tous ceux à qui il efl dû : aimez vos Frères :
Craignez Dieu: Honorez le Roi. Serviteurs, foiez fournis à vos Maî-
tres avec toute forte de Révérence , non feulement à ceux qui font bons
& doux, mais à ceux qui font rudes & fâcheux, car cela eit agréable à
Dieu. î.Pet. 2.
5. „ Que tout le monde fe foûmeue auxPuiffances fupérieures ; car il n'y
„ a point
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RESOLUTIONS D'ETAT, M, DCC. XVIII. i4y
a point de Puiffance qui ne vienne de Dieu, & c'efl lui qui a établi
tes celles qui font fur la Terre. Celui donc qui s'oppofe aux Puiffan
tou- Affaires
. qui lont lur la lerre. L.eiui donc qui s oppole aux lJmllances, DE Mos"
réfilte à l'ordre de Dieu : & ceux, qui y réfiftent, attirent une jutte con
damnation fur eux- mêmes ; car les Princes ne font point à craindre lors
qu'on ne fait que de bonnes actions, mais lors qu'on en fait de mauvai-
{ès. Voulez-vous ne point craindre les PuifTances? Faites bien, & el-
les vous en loueront. Le Prince eft le Miniltre de Dieu pour vôtre
bien. Que fi vous faites du mal, vous avez raifon de craindre ; parce
que ce n elt pas en vain qu'il porte l'épée; car, il eft le Miniftre de Dieu,
pour exécuter fa vengeance , en puniffant ceiui qui fait de mauvaifes ac-
tions. Rom. 13.
6. ,, Vous, Enfans, obéïiTez à vos Pères & à vos Mères en ce qui eft
félon le Seigneur, car cela elt julte. Honorez vôtre Père & vôtre Me-
re, c'efl: le premier des Commandemens , auquel Dieu ait promis une
récompenfe : Honorez-les, dit-il, afin que vous foyez heureux , & que
vous viviez long-tems fur la Terre. Et vous Pères, n'irritez point vos
Enfans : mais , aiez foin de les bien élever , en les inftruifant félon le Sei-
gneur. Vous Serviteurs, obéïflez à ceux qui font vos Maîtres félon la
chair, avec crainte & avec refpect , dans la fimplicité de vôtre coeur,
comme à Jefus-Chrift même. Ne les fervez pas feulement lors qu'ils
ont l'œil fur vous, comme fi vous ne penliez qu'à plaire aux hommes;
mais faites de bon cœur la volonté de Dieu, comme étant ferviteurs de
Jefus-Chrift; & fervez-les avec affection, regardant en eux le Seigneur,
& non les hommes. Ephef. 6.
Les mêmes Préceptes fe trouvent dans les Epures aux CohJJîens 5.
7. ,, AvertifTez-les d'être fournis aux Princes & aux Magiftrats , de leur
rendre obéilTance , d'être prêts à faire toute forte de bonnes œuvres.
Sfa 3-
Dans le Concile Provincial tenu a Gangres , le Canon 4. porte :
„ Si quelques Enfans quittent leurs Pères & Mères Orthodoxes & s'é-
„ vadent, ne rendant pas le refpecl; dû à leurs Pères & Mères, & s'ima-
,, ginant qu'ils feroient mieux, ils feront maudits.
La Bouche d'Or , St. Chryfojlome dit de la ProphetefTe Anne , Mère
de Samuel , dans [on premier Sermon :
„ Ce n'eft point feulement pour avoir engendré^ que Ton eft Père; mais
„ pour avoir bien inftruit: & ce n'eft point feulement pour avoir mis au
,, monde un Enfant , que l'on eft Mère 3 mais pour l'avoir bien élevé. Les
j, Parens mêmes l'avoueront, &. que ce n'eft point la Nature , mais la Ver-
„ tu , qui fait les Pères. Ils rejettent fouvent leurs Enfans , & ils ex-
3, cluent de leur Famille ceux qu'ils voyent de mœurs corrompues, &
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ip MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Àmims ,, qui ont dégénéré en méchanceté, & ils en adoptent d'autres, qui ne
dkMos» ;j jes touchent en rien, du côté de la Parenté.
„ Peut-il y avoir quelque chofe qui mérite plus d'admiration , que de les
voir expulfer ceux qu'ils ont mis au monde, & de s'approprier par l'A-
doption ceux à la génération defquels ils n'ont eu aucune part ?
,, Ce n'efl point fans fujet que nous venons de dire cela ; mais afin que
vous fâchiez que la force du Libre- Arbitre e(t plus grande que celle de
la Nature, & que c'eft: plutôt celle là , que celle-ci, qui fait les Pères.
„ Car ç'a-été là un Ouvrage de la Divine Providence ; & qu'elle ne dé-
truifit point d'un côté toute affection naturelle pour les Enfans, & que
de l'autre, elle ne laiffa point tout à faire à cette affection : Parce
que û les Parens dévoient aimer leurs Enfans, fans y être pouïTez par la
nécefïïté de la Nature, & s'ils n'y tkoient portez que par la confidéra-
tion de la bonté de leurs moeurs & de leurs bonnes actions , vous ver-
riez l'ordre de tout le Genre-Humain troublé & renvérfé, par l'expul-
fion de beaucoup d'Enfans, que l'on chafferoit de laMaifon Paternelle,
à caufe de leur parelTe. Au contraire , fi la Providence avoit abandon-
né la chofe à la force de la Nature, & Il elle n'avoit point permis de
haïr les méchans Enfans; & que les Pères fuiTent obligez, par la nécef-
fité que la Loi de la Nature leur impoferoit , de ne point difeontinuer
de faire du bien à ceux qui les auroient outragez, & qui fe feroient lai£
„ fez emporter aux derniers excès contre eux , le Genre Humain feroit
„ parvenu au comble de méchanceté.
„ Si donc à préfènt, que les Enfans ne peuvent point tout à fait fe fier
„ fur la Nature, & qu'ils favent , que plufieurs ont été chaffez de la Mai-
fon Paternelle & privez des biens qui y étoient , pour leur perverfité &
leur dépravation , ne lailTent point de maltraiter leurs Parens, fur la
confiance qu'ils ont en leur Amour \ de quelles fortes de méci ancetez ne
j, fe fouilleroient-ils point, fi Dieu n'avoit point permis aux Païens, qu'ils
„ les corrigeaient & qu'ils en tirallent vengeance ?
„ C'eft pour ces raifons , que Dieu a voulu, que l'Amour des Parens
„ fût fondé, aufli-bien fur les mœurs de leurs Enfans , que fur la nécefîité
de la Nature, afin qu'ils leur pardonnaient par inclination naturelle,
quand ils ne pécheroient que légèrement, & qu'ils puniffent les dépra-
vez & les incorrigibles, pour que l'indulgence ne les portât point au
„ mal , fi la Nature avoit encore le defîus, Ck qu'elle les obligeât à les ca-
,, reffer, lorsqu'ils font devenus mauvais.
„ Admirez, je vous prie, la grandeur delà Providence, qui comman-
„ de d'aimer, & qui preferit des bornes à l'Amour.
Nous Eccefialtiques, ayant fait ces Extraits des Saintes Ecritures par
Ordre du Monarque, non pas en forme de Sentence, ni pour donner un
Décret, ainfi qu'il eil dit ci deflusj car, cette Affaire n'efl pas de la com-
pétence de nôtre Jurifdiétion. Quieft-ce qui nous établiroit Juges fur ceux
qui nous commandent? Comment peuvent ies membres gouverner la tê-
te? C'eft la tête qui gouverne & qui fait agir les membres. D'ailleurs,
nôtre
53
33
COVlfco
RESOLUTIONS D'ETAT* M. DCC. XVIII. lSi
nôtre Jurifdidtion étant fpirituelle, il faut qu'elle foit félon l'efprit, & non Av*aik.-
point félon la chair & le fang. Le pouvoir de l'épée de fer n'eft point DtMos
donné à l'Egiife: mais le pouvoir de l'épée fpirituelle, qui elt la Parole de
Dieu; Jefus Chrift même a défendu au Prince des Apôcres de faire ufage
de l'épée,. lui difant , Remettez votre épée en fon lieu; & il a défendu aux
autres Apôtres de faire defcendre le feu du Ciel pour mettre en cendres
Samarie.
Jefus-Chrifl a voulu enfeigner par ces exemples, qu'il ne convient pas
aux Eccletiaftiques de fe conduire félon l'efprit de colère, mais félon l'ef-
prit de douceur, ni de condamner quelqu'un à la mort, ni de chercher du-
fang, mais uniquement la véritable pénitence & la mort fpirituelle, qui
eit d'être mort au péché & vivant en Dieu, félon la parole de l'Apôtre ,
dans fon Epitre aux Romains 6.
Nous foûmettons tout cela à la très-relevée Confidération Impériale,
avec une due Obéiflance. Que le Seigneur fafle ce qui eft agréable de-
vant fes yeux. S'il veut punir celui qui eit tombé, félon fes actions , &
fuivant la mefure de fes crimes , il a devant lui des exemples que nous
avons tirez du Vieux TePcament. S'il veut faire miféricorde, il a l'exem-
ple de Jefus-Chriir. même, qui reçoit le Fils égaré revenant à la repen-
tance r qui laiile iibre la Femme furprife en adultère, qui a mérité la
lapidation félon la Loi; qui préfère la miféricorde aux Sacrifices, difant;
Je veux de la miféricorde \£> non pas le Sacrifice; & par la bouche de fon A-
pôtre : La miféricorde s'élèvera au-dejjus de la rigueur du Jugement-, Jacob. 2.
13. 11 a auiîi l'exemple de David, qui veut épargner fon Fils perfécuteur
Abfalom; car il dit à fes Capitaines qui vouloient l'aller combattre; E-
pargnez mon Fils Abfalom. Vid. Chron. 11. Rcg. 18. 5. & le Père l'a voulu
épargner lui-même, mais la Juftice Divine ne l'épargna point.
Après avoir brièvement déduit tout cela, le cœur du Czar eft entre
les mains de Dieu : qu'il choififfe le parti auquel la main de Dieu le
tournera.
Ces Confidérations font fignees.de la propre main comme il fuit, l'An
1718 , le 18. Juin.
Le Humble Etienne , Métropolitain de Refan.
Le Humble Feofan, Eveque de Pfkovski.
Le Humble Aîexei, Eveque de Sarski.
Le Humble Ignace, Eveque de Soujedaî.
Le Humble Varlaam, Eveque de Tver.
Le Humble Aaron , Eveque de Korele.
Le Humble Métropolitain de Sravropol , Yannikiy%
Le Humble Métropolitain de Fibaidski, Arfeny.
Théodore, Archimandrite du Couvent de la Trinité d'Alexandroner.
Joachin , Archimandrite du Couvent d'Antoine.
Joaniky, Archimandrite du Couvent de la Réfurrtclion deDerebanidskî.
L'Archimandrite Irinargg, du Couvent de Kyrille,
Le
i52 MEMOIRES/NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Le Père Gabriel, Praefet & Millionnaire de la Parole de Dieu.
de Mos- Le pere Markel , ProfelTeur.
COVIE.
Le 24. Juin , Les Miniflres & les Sénateurs s'étant affemblez dans la
Chancellerie du Sénat, le Confeiller-Privé Pierre Toliloi a mis devant eux
la Déclaration fuivante du Czarevitch, qui confirme fes Confeffions du
19 Juin, comme auffi l'Interrogatoire criminel de fon Confeffeur Jacques,
qui a été dégradé de l'Etat Ecclefialtique.
Le 19 Juin 1718 , le Czarevitch a répondu dans fon Interrogatoire,
que tout ce qu'il avoit confefTé, & ce qu'il avoit déclaré contre ceux qu'il
a chargez dans fes précédentes Confeffions & devant les Sénateurs, étoit
véritable, & qu'il n'avoit rien omis, ni celé perfonne.
Il a encore ajouté de plus , qu'il y a déjà du tems que fon Confeffeur
TArchi-Prêtre Jacques, étant venu chez lui à S. Petersbourg, lui Czare-
vitch s'étoit confefTé à lui, & qu'il avoit dit à ce Jacques dans la Confef-
fion: Je fouhaite la mort à mon Pere : & que le Confeffeur lui avoit ré-
pondu: Dieu vous le pardonnera , nous lui en fouhaitons autant.
Qu'aiant été en dernier lieu à Mofcou , & s'étant confefTé à fon autre
Conteffeur l'Archimandrite Barlam du CoUvent du Danilo , fitué dans le
Salez de Perefclabe , il avoit dit dans la Confeffion , qu'il n'avoit pas
tout avoué à fon Pere dans fon Interrogatoire 5 mais , qu'il lui avoit caché
beaucoup de chofes , & qu'il lui fouhaitoit la mort : Sur quoi Barlam lui
avoit répondu: Dieu vous pardonnera, mais il faut que vous dijiez la vérité
à vôtre Pere.
Qu'après l'une & l'autre de ces Confeffions , il avoit reçu la Sainte
Communion , avec la permiffion de fes Confeffeurs.
Le même jour, le fufdit Confeffeur Jacques , dégradé, a avoué à la
queltion & dans la confrontation, que le Czarevitch Alexei lui avoit dit
dans la Confeffion les fufdites paroles, qu'il fouhaitoit la mort de fon Pere,
fur ce que lui Confeffeur lui avoit demandé , Ne fouhadtez-vous pas la
mort de votre Pere? Et que le Czarevitch avoit répondu: Oiiï, je la fou-
haite.
Que lui Confeffeur avoit dit au Czarevitch , Nous lui fouhaitons auffi
tous la mort -y mais qu'il ne fe fouvenoit point qui la lui fouhaitoit encore.
Que, parce qu'on aimoit le Czarevitch parmi le Peuple, & qu'on bû-
voit à fa fanté , le nommant ÏEfpérance des Ruffiens , lui Jacques l'a voit
dit au Czarevitch , l'aiant entendu de plufieurs perfonnes , mais ne fe
fouvenant plus de qui.
Le même jour le Sr. Tolftoi a par ordre donné part au Sénat de ce
qui fuit ;
Points
COVIE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 153
Points d'Interrogatoire 5 écrits de la main de Sa Ma- Arma* s
jejié Czarienne, & délivrez à M. le Conseiller -Pri-
vé ToJfioi-i pour examiner le Czareviîcb.
A Liez trouver mon Fils après midi. Interrogez-le, & mettez par écrie
ce qu'il vous dira , après lui avoir demandé :
1. „ Quelle eft la raii'on pourquoi il ne m'a pas obéi", & qu'il n'a rien.
„ voulu faire de ce que j'ai demandé de lui, ni s'appliquer à rien de bon,
„ quoi qu'il n'ignore point que cela ne fe pratique point dans le Monde,
„ outre que c'elt un péché & une honte ?
2. ,, D'où vient qu'il a eu fi peu de crainte de moi, & qu'il n'a point
„ appréhendé les fuites de fa defobéïlTance?
2. „ Pourquoi il a defiré d'avoir la Succeffion par d'autres moiens que
par l'Obé'nTance, ainfi que je lui ai dit moi-même ? Et interrogez- le fur
tout le relie qui a rapport à cette Affaire.
Copie de l'Ecrit de la propre main du Czarevitch 3 en
Réponje à ce qui eft ci-deffus.
T E 22. jour de Juin 17 18. Je répons ceci aux Points fur lefqueîs
>5
?»
9) JL-/ M. Tolftoi m'a interrogé.
1. „ Quoique je n'aie pas ignoré qu'il ne fe pratique pas dans le Mon-
„ de d'être defobéïffant comme je l'étois à mon Père, & de ne vouloir
„ point faire ce qui lui plaifoit; que même cela étoit un péché, & une
„ grande honte : cependant, cela ell provenu, de ce que , dès mon en-
j, fance, j'ai vécu avec une Gouvernante & des Filles , dont je n'ai ap-
„ pris que des amufemens & des jeux de la chambre , & à faire le bi-
got, à quoi j'étois incliné naturellement.
,, Les perfonnes, qu'on me donna après qu'on m'eût ôté ma Gouver-
nante , ne m'apprenoient point à mieux faire , Nikifore Bafemskoi en-
„ tre autres, Alexei Bailli , & les Nariskins.
„ Mon Père , aiant foin de mon Education , pour me porter à m'appli-
>, quer à ce qui pourroit me rendre digne d'un Fils du Czar , m'ordonna
„ d'apprendre la Langue Allemande &' d'autres Sciences pour lefquelles
„ j'avois beaucoup d'averfion. Je ne m'y fuis appliqué qu'avec une gran-
„ de négligence , feulement pour pafler le tems , fans en avoir jamais
„ d'envie.
„ Et comme mon Père , qui étoit alors fou-vent à l'Armée, étoit loin de
„ moi, il ordonna que le Sereniflime Prince Menchikof eut l'œil fur moi.
Quand j'étois avec lui, j'étois obligé de m'applixmer -;mais, quand j'étois
hors de la vûë de ce Prince , lefdits Nariskins & Bafernskoi,' voiant que
mon penchant alloit uniquement à la bigoterie, à l'oifiveté, à fréquen-
„ ter les Prêtres & ;les Moines , & à boire avec eux, ils ne m'en ont
Tome XL V „ non-
COVIE.
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if4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Atfaîhes „ non-feulement pas détourné , mais ils ont même fait avec plaifir corn-
et- Mos- ?) me moi. Con^me e'étoient des gens, qui étoient auprès de moi dès mon
„ enfance, j'étois accoutumé à faire ce qu'ils me difoient, à les craindre,
à leur complaire en tout; & ils m'ont déplus en plus aliéné de mon Pè-
re, en me divertiffant par des plaifirs de cette nature-là ; & peu à peu
^, j'ai eu en horreur , non-feulement les Affaires militaires & les autres
actions de mon Père , mais fa Perfonne même. C'eft ce qui m'a fait
toujours fouhaiter d'être éloigné de lui.
Lors que je fus chargé à Mofcou du Gouvernement de l'Empire, me
voiant en pleine liberté, & Maître de moi-même, bien loin de confidé-
rer que mon Père me l'avoit mis entre les mains , pour m'y former &
„ me conduire à la SuccelTion après lui , Il je m'en rendois capable ; je
m'abandonnai encore davantage aux plaifirs auxquels j'étois accoutumé
avec les Prêtres & les Moines, & avec d'autres gens de cette trempe,
Alexandre Kikin s'eft toujours appliqué fortement à me fortifier dans
ces déréglemens , quand il a été avec moi.
Mon Père aiant pitié de moi, & defirant de me rendre digne de l'E-
,,, tatou j'étois appelle, m'envoia dans les Pais Etrangers; mais, comme
„ j'étois déjà un homme fait, & d'un âge formé , je ne changeai rien de-
„ mes habitudes.
„ Il eft pourtant vrai , que le féjour que j'y ai fait m'a été utile en
„ quelque chofe, mais non pas afiez pour qu'il eut pd déraciner les mau-
„ vaifes habitudes qui avoient jette dans moi de fi profondes racines.
2. „ Ceft le mauvais caractère de mon méchant efprit, qui a été caufe
„ que je n'apprehcndois point les corrections de mon Père pour mes
defobéiffancesrje l'avoué' franchement-, car, quoique je le craigniiTe vé-
ritablement, ce n'étoit pourtant pas d'une crainte filiale, elle n'alloit
qu'à chercher les moiens de m'éloigner de lui, pour ne point faire fa
Volonté. J'en veux alléguer ici un exemple évident.
„ A mon retour auprès de mon Père , revenant des Païs Etrangers à
S. Petersbourg , il me fit un accueil gracieux. Il me demanda, entre
autres chofes , fi je n'avois point oublié ce que j'avois appris : Je lui
répondis que non. Il m'ordonna de lui apporter mes Ouvrages de
Deffeins. Je craignis qu'il ne me voulût faire defîïner en fa prélence,
parce que je ne fa vois rien, & je fongeai à me gâter la main droite,
pour qu'il me fût impoffible de travailler avec. Je chargeai un piflolet
d'une baie, & le prenant de la main gauche, je tirai dans la paume
de la droite pour la percer : la baie manqua la main , mais la pou-
dre la brûla affez pour être blefiee. Comme le coup porta dans la
muraille de mon Cabinet, on l'y peut voir encore. Mon Père, voiant
que j'écois bleilé à la main , me demanda comment cela étoit arri-
vé ? Je lui donnai quelque défaite ; mais, je ne lui dis point la vé-
rité. On peut voir par-là, que, quoique je craignifle mon Père, ce
n étoit point d'une crainte filiale.
5, 3, Pour ce que j'ai defiré la Succeffion par d'autres voies que par
„ celle
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COVIE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XYJIL t$f
celle de l'ObéifTance , tout le Monde en peut aifément deviner la Affaire
raifon; car, quand je fus une fois écarté du bon chemin , ne voulant en nE Mos-
rien imiter mon Père, je cherchois d'arriver à la Succeflion de quelque
autre manière que ce fût, excepté de la bonne façon. Je la voulois
avoir par une afïiftance étrangère ;& , fi j'y étois parvenu, & que l'Em-
pereur eut mis en exécution ce qu'il m'avoit promis, de me procurer
la Couronne de Ruflie , même à main armée, je n'aurois rien épargné
pour ne mettre en pofTefiion de la Succeflion. Par exemple, fi l'Em-
pereur avoit demandé en échange des Troupes Ruiîiennes pour fon fer-
vice contre qui que ce fût de fes ennemis , ou de grolTes fommes d'ar
gent, j'aurois fait tout ce qu'il auroit voulu, & j'aurois donné auffi de
grands préfens à fes Miniitres & à fes Généraux. J'aurois entretenu
à mes dépens les Troupes Auxiliaires qu'il m'auroit données, pour me
mettre en pofTeflion de la Couronne de Ruflie; &, en un mot, rien ne
m'auroit coûté pour accomplir en cela ma volonté.
Les fouflîgnez, établis par Sa Majefté Czarienne, & afTemblez dans h
Sale pour rendre un Jugement, après avoir ouï tout ce qui a été dit, lu „
& rapporté, & y avoir fait de mûres. Réflexions, ont d'un Confentement
unanime prononcé & ordonné de figner la Sentence fuivante , & ils y
ont mis leurs Signatures de leurs propres mains.
Le 24. Juin 1728.
EN vertu de l'Ordonnance exprefTe émanée de Sa Majefté Czarien-
ne, & fignée de fa propre main le 13. Juin dernier, pour le Juge-
ment duCzarevitch Alexei Petrovitch , fur fes tranfgreflions, & fes cri-
mes contre fon Père & fon Seigneur, les Souflignez Miniitres, Sena-
„ teurs, Etats Militaire & Civil, après s'être afTemblez plufieurs fois dans
„ la Chambre de la Régence du Sénat à St. Petersbourg ; aiant ouï plus
„ d'une fois la lecture qui a été faite des Originaux & des Extraits des
„ témoignages qui ont été rendus contre lui , comme auiîi des Lettres
,, d'exhortations de Sa Majefté Czarienne au Czarevitch , & des Réponfes
„ qu'il y a faites, écrites de fa propre main , & des autres Acles appar-
„ tenant au Procès ; de même que des Informations criminelles, & des
„ Confeflions & des Déclarations du Czarevitch, tant écrites de fa pro-
„ pre main, que faites de bouche à fon Seigneur & fon Père, & devant
„ les Souflignez établis par l'Autorité de Sa Majefté Czarienne, à l'effet
,, du préfent Jugement: Ils ont déclaré & reconnu, que, quoi que félon
„ les Droits de l'Empire Ruflien, il n'ait jamais appartenu à eux, étant
Sujets naturels de la Domination Souveraine de Sa Majefté Czarienne,
„ de prendre connoiffance des Affaires de cette nature , qui , félon fon
„ importance, dépend uniquement de la Volonté abfoluë du Souverain,
„ dont le Pouvoir ne dépend que de Dieu feul, & n'efl point limité par
„' aucune Loi; fe foûmettant pourtant à la fufdite Ordonnance de SaMa-
V 2. „ jefté
ii
COVIE.
i;6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires jS jeflé Czarienne leur Souverain, qui leur donne cette Liberté, & après
te Mos- ^e m£lres Réflexions. & en Confcience Chrétienne, fans crainte, ni
„ flaterie , & fans avoir égard à la Perfbnne , n'aiant devant les yeux que
„ les Loix Divines applicables au cas préfent , tant de l'Ancien que du
„ Nouveau Teltament , les Saintes Ecritures de l'Evangile & des Apôtres ,
„ comme auiTI les Canons & les Régies des Conciles , l'Autorité des Saints
„ Pérès &des Docteurs de l'Eglife^ prenant auffi des lumières des Confi-
„ dérations des Archevêques & du Clergé afTemblez dans St. Fetersbourg
„ par Ordre de Sa Majelté Czarienne, lefquelles font tranfcrites ci-deffus,
,, & fe conformant aux Loix de toute la Rufîie , & en particulier aux
,, Conflitutions de cet Empire, aux Loix Militaires, &aux Statuts, qui font
}) conformes aux Loix de beaucoup d'autres Etats, fur-tout à celles des
„ anciens Empereurs Romains & Grecs, & d'autres Princes Chrétiens:
„ Les Souffignez , aiant été aux Avis, font convenus unanimement, fans
„ contradiction , & ils ont prononcé, que le Czarevitch Alexei Petrovitcb
s,, eft digne de Mort pour Ces Crimes iufdits,& pour fes Tranfgreffions capi-
„ taies contre fon Souverain & fon Père, étant Fils & Sujet de Sa Ma-
„ jelté Czarienne ; en forte que , quoi que Sa Majeflé Czarienne ait pro-
„ mis au Czarevitch, par la Lettre qu'il lui a envoyée par M. le Confeil-
., ler-Privé Tolfloi, & par le Capitaine de la Garde Romanzow, datée
de Spa le 10. Juillet 1717, de lui pardonner fonEvafion, s'il retour-
noit de fon bon gré & volontairement, ainfi que lui Czarevitch même
l'a avoué avec remerciment , dans fa Réponfe à cette Lettre, écrite de
Naples le 4. Octobre 1717, où il a marqué qu'il remercioit Sa Majelté
Czarienne pour le Pardon qui lui étoit donné feulement pour fon Eva-
,, fion volontaire ; il s'en eil rendu indigne depuis par fes oppofitions aux
,, volontez de fon Père & par fes autres tranfgreffions qu'il a renouvel-
5, lées & continuées, comme il eil amplement déduit dans le Manifefle
,, publié par Sa Majeflé Czarienne le 3 Février de l'Année préfente, &
„ parce qu'entr'autres chofes il n'efl pas retourné de fon bon gré.
„ Et quoi que Majeflé Czarienne, à l'arrivée du Czarevitch à Mofcou ,
avec fon Ecrit de la Confeffion de fes Crimes , & où il en demandoic
Pardon, eut pitié de lui, comme il efl naturel à un Père d'en avoir de
fon Fils, & qu'à l'Audience qu'elle lui donna dans la Sale du Château le
même jour 3 Février, elle lui promit le Pardon de toutes fes Tranfgref-
"„ fions : Sa Majeflé Czarienne ne lui fit cette promefTe, qu'avec cette
„ condition exprefle, qu'elle exprima en prefence de tout le Monde, fa-
,, voir que lui Czarevitch déclareroit, fans aucune reftriction ni referve,
„ tout ce qu'il avoit commis & tramé jufques à ce jour-là contre Sa Ma-
?, jeflé Czarienne , & qu'il découvriroit toutes les perfonnes qui lui ont donné
des confeils,fes complices, & généralement tous ceux qui ont fçû quel-
„ que chofe de fes defîeins & de fes menées j mais, que s'il celoit quel-
qu'un, ou quelque chofe, le Pardon promis feroit nul & demeureroit
,, révoqué, ce que le Czarevitch reçut alors & accepta, au moins en ap-
pareil-
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3?
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RESOLUTIONS D'ETAT, M. D'CC. XVIII. i%?
,', parence, avec des larmes de reconnoiffance, & il promit par Serment Affaire».
„ de déclarer tout, fans réferve. En confirmation de quoi il baifa la Sain- DK M°s-
„ te Croix, & les Saintes Ecritures, dans l'Egiife Cathédrale. covie.
„ Sa Majelté Czarienne lui confirma auiîi la même chofe de fa propre
„ main, le lendemain , dans les Articles d'Interrogatoire inférez ci-deflus,
„ qu'elle lui fit donner, aiant écrit à leur tête ce qui fuit:
„ Comme vous avez reçu hier vôtre Pardon, à condition que vous déclareriez.
,, toutes les cir confiance s de votre Evajion & tout ce qui y a du rapport : mais
„ que fi vous celiez quelques chofe s , vous ferrez privé de la Fie; & comme vous
,, avez déjà fait de bouche quelques Déclarations , vous devez pour une plus am-
„ pie fat is faction, & pour vôtre décharge, les mettre par écrit félon les Points
,, marquez ci-dejfous.
„ Et, à la conclufion, il étoit encore écrit de la main de Sa Majeflé
„ Czarienne dans le 7 Article.
„ Déclarez tout ce qui a du rapport à cette affaire , quand même cela ne fe-
„ roit point fpécifié ici , £5? purgez-vous comme dans la Sainte Confeff.on : mais,
,, fi vous cachez ou celez quelque chofe qui fe découvre dans la fuite , ne mim-
,, putez rien; car , il vous a été déclaré hier devant tout le monde , quen ce cas-
„ là , le Pardon que vous avez reçu ferait révoqué £5? nul.
,, Nonobftant cela, le Czarevitch a parlé dans fes Réponfes & dans fes
„ Conférions, fans aucune fmcérité: il a celé & caché non feulement
beaucoup deperfonnes, mais aufll des Affaires capitales & Ces Tranf-
,, greffions, & en particulier Ces delfeins de Rébellion contre fon Père
„ & fon Seigneur, & fes mauvaifes Pratiques qu'il a tramées & entrete-
nues depuis long-tems , pour tâcher d'ufurper le Trône de fon Père ,
„ même de fon vivant, par différentes mauvaifes voies, & fous des mé-
dians prétextes ; fondant fes efpérances & les fouhaits qu'il faifoit
de la mort de fon Père & fon Seigneur, far la déclaration dont il fe
flatoit du petit Peuple en fa faveur.
Tout cela a été découvert enfuite, par les Informations criminelles
après qu'il a refufé de le déclarer lui-même , comme il a paru ci»
deffus.
„ Ainfi, il efl évident par- toutes ces Démarches du Czarevitch , Se par
,, les Déclarations qu'il a données par écrit & de bouche , & en der-
„ nier lieu par celle du 22. Juin de la préfente Année, qu'il n'a point vou-
„ lu que la Succeffion à la Couronne lui vint après la mort de fon Pere?
„ de la manière que fon Père auroit voulu la lui laififer, félon l'ordre de
„ l'équité & par les voies & les moiens que Dieu a preferits: mais, qu'il
„ l'a defirée, & qu'il a eu deffein d'y parvenir, même du vivant de fon
„ Père & fon Seigneur, contre la volonté de S. M. Cz. & en s'oppofanc
„ atout ce que fon Père vouloit, & non feulement par des foûlevemens
„ de Rebelles qu'il efperoit ; mais encore par l'affiftance de l'Empereur,
„ & avec une Armée étrangère qu'il s'étoit flatté d'avoir à fa difpofuion,
„ au prix même du renverfement de l'Etat , & de l'aliénation de tout ce
„ qu'on auroit pu lui demander de l'Etat , pour cette alîiihnce.
V 3 » L'EU
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COVIE.
if8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Asiaires „ L'Expofé qu'on vient de faire fait donc voir évidemment , que le
blMos- ?j Czarevitch, en cachant tous ces pernicieux deffeins , en celant beau-
„ coup de perfonnes qui ont été d'intelligence avec lui, comme il a fait
„ jufques au dernier Examen & jufques à ce qu'il a été pleinement con-
„ vaincu de toutes fes machinations, a eu en vue de fe referver des
„ moiens pour l'avenir, quand l'occafion fe prefenteroit favorable de re-
„ prendre Çqs deiïeins & de pouffer à bout l'exécution de cette horrible
„ Entreprife contre fon Père & ion Seigneur, & contre tout cet Enr
s»
•1
a été promis par fon Seigneur & fon Père ; il l'a auffi avoué lui-mê-
me, tant devant Sa Majelté Czarienne, qu'en prefence de tous les E-
tats Ecclefialtique & Séculier, & publiquement devant toute l'Affemblée,
& il a auffi déclaré verbalement & par écrit devant les Juges fouiTignez
établis par Sa Majeflé Czarienne, que tout ce que deiïus etoit véritable
& manifeffe par les effets qui en avoient parus.
,, Ainfi, puiîque les fufdites Loix, Divines & Eccle laftiques , les Ci-
viles & les Militaires, & particulièrement les deux dernières, condam-
nent à mort fans miiericorde, non feulement ceux dont les attentats
contre leur Père & Seigneur ont été manifeftez par des évidences,
' ou prouvez par des Ecrits, mais même ceux dont les attentats n'ont
, été que dans l'intention de fe rebeller , ou d'avoir formé de fimples
„ deffeins de tuer le Souverain, ou d'ufurper l'Empire. Or , un deffein de
, rébellion, tel qu'on n'a guère oui parler de femblable dans le Monde,
joint à celui d'un horrible double Parricide contre fon Souverain , pre-
mièrement comme Père de la Patrie, & encore comme fon Père félon
la Nature, (un Père très-Clement qui a fait élever le Czarevitch depuis
le berceau avec des foins plus que paternels, avec une tendreffe & une
bonté qui ont paru en toutes rencontres, qui a tâché de le former pour
le Gouvernement , & l'inftruire avec des peines incroiables, & une
application infatigable dans l'Art Militaire, pour le rendre capable &
digne de la Succeffion d'un û grand Empire) à combien plus forte
rarfon un tel deffein a mérité une Punition de mort?
C'ell avec un cœur affligé, & des yeux pleins de larmes, que nous ,
comme Serviteurs & Sujets, prononçons cette Sentence; confiderant
„ qu'il ne nous appartient point en cette qualité d'entrer en un Jugement
de fi grande importance, & particulièrement de prononcer une Senten-
ce contre le Fils du très Souverain & très Clément Czar nôtre Seigneur.
Cependant fa Volonté étant que nous jugions, Nous déclarons, parla
„ prefente, notre véritable opinion, & nous prononçons cette Condam-
nation avec une Confcience, fipure,& auffi Chrétienne, que nous
croions pouvoir la foûtenir devant le terrible, le jufte, & l'impartial Ju-
n gement du grand Dieu.
„ Soumettant au refte cette Sentence que nous rendons, & cette Con-
9f damnation que nous faifons , à la Souveraine Puiffance , à la Volonté ,
»
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RESOLUTIONS D'ETAT, M.DCC. XVIII. 150
„ & à la clémente Revifion de Sa Majeiié Czarienne nOtre très clément A^airé1*
„ Monarque. DE Mo3-
Au bas de la Sentence ont fi^ne de leur propre main ,
Alexandre Menchikoff,
Général Amiral, Comte Apraxin ,
Chancelier, Comte Gabriel Golofkin,
Confeiller Privé, Prince Jacques Dolgorouki,
Confeiller Privé, Comte Jean Muflîn, Pufchian ,
Confeiller Privé, Tichon Strefchneff,
Sénateur, le Comte Pierre Apraxin,
Vice-Chancelier & Confeiller Privé, Baron Pierre SchifirofF,
Confeiller Privé, & Capitaine des Gardes , Pierre Tolitoy,
Sénateur, Prince Dimitry Galizin,
General, Adam Weide,
Lieutenant General, Jean Boutourlin,
Confeiller Privé, Comte André Matweoff,
Sénateur, Prince Pierre Galizin,
Sénateur, Michel Samarin,
General Major, Grigory Czernifchoff,
General Major, Jean Golowin,
General Major, Prince Pierre Galizin,
Chambellan , Prince Jean Ramodanoffsky ,
Boyarin, Alexei Soltikoff,
Gouverneur de Sibérie, Prince Matihei Gagarin.
Bojarin , Pierre Boutourlin.
Le Gouverneur de Mofcou , Kirilo Nariskin.
Brigadier & Major de la Garde, Michel Wolkoff.
Major de la Garde du Régiment de Preobrachenski.
Major , Prince Grigory Youfoupoff.
General Major & Capitaine de la Garde , Paul Jagouzinsky.
Major de la Garde, Simeon Soltikoff.
Major de la Garde, DimitrioFMamonoff.
Major de la Garde de Preobrachensky , Bafily Karzmin.
Brigadier & Revifeur General, Bafily ZatofT.
Colonel , Garafim Kafcheleff.
Gentilhomme de la Chambre, Theodor Boutourlin.
Colonel , Gabriel Noroff.
Okolnizy, Prince Gurgen Schzerbaty.
Vice-Gouverneur de St. Petersbourg, Stepan KlokozofT.
Major delà Garde du Corps , Oufchakoff.
Capitaine- Lieutenant des Bombardiers, Skornyakoff PifarefT»
Capitaine de la Garde du Corps, Prince Boriffe Czirkoff.
Vice-Gouverneur d'Archangel Pierre Lodichensky.
Colonel , Jean Strekaloff.
Vice-Gouverneur d'Afoff, Stepan KolitchotT.
Capitaine
DE MOS
COVIE.
160 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITOZ, ET
Amx"ES Capitaine de la Garde , Petroff Solowowa.
Capitaine de la Garde, Alexandre RoumyanzofF.
Capitaine de la Garde, Simeon Theodoroff.
General Maitre de la Police , & General-Adjoutant de Sa Majefté Cza-
rienne, Anthoine Dewyer.
Capitaine de la Garde, Leff Ifmailoff.
Capitaine de la Garde , Prince Jean Chachoffsky.
Capitaine de la Garde, Weljaminoff Zernoff.
Colonel, Pierre Sa weloff.
Capitaine de la Garde, Jean LigharefF.
Capitaine de la Garde, Zacharoff.
Capitaine de la Garde, Alexei BaskakofF.
.... Dimitry Beftoucheff Riumin.
Colonel, Prince Bafily Wjazemsky.
Lieutenant delà Flotte, Jean ScheremetofF.
Prince Sergei BorifofF Golizin.
.... Prince Simeon Sonzoff Zafekin.
Capitaine de la Garde , Prince Grigory Ourouiîbff.
.... Prince Alexei Czerkasky.
»... Matthei Golowin.
Colonel Dolgoroukoi.
.... Leonty MichailofFGleboiF.
Colonel, Prince Jean Borjatinsky.
.... Boris Neronoff.
Stepan Neledinsky Melezkoi.
Lieutenant de la Flotte, Bafily Scheremetoff.
.... Bafily Rzeffsky.
Colonel & Capitaine de la Garde du Corps, Konchin.
Capitaine Lieutenant de Garde, Alexandre Loukin.
Sous-Lieutenant de la Garde, Stepan Saffonoff.
Lieutenant de la Garde , Frédéric Polonskoi.
Adjoutant Michel Czebifchof.
Capitaine-Lieutenant de la Garde, Droumant.
Goljanifchoff Koutoufoff.
Lieutenant-Colonel , Boukholz.
Capitaine de h Garde, Frédéric Metroffanoff.
Capitaine de la Garde Jean Karpoff.
Lieutenant-Colonel d'Infanterie , Stepan Kafadawleff.
Colonel Jean KoltofFskoi.
Colonel & Commandant de St. Petersbourg & Capitaine de la Garde
du Corps, Jacob Bachmeotoff.
Colonel, Elias Loutkowskoi.
Colonel* Prince Michel Schzerbatoi.
Colonel, Artemy Zagyaskoi.
Lieutenant de la Garde, Jean KoflofF.;
Lieu-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. XVIII. 161
Lieutenant de la Garde, Jean Baehmetoff. Affaire*
Capitaine de Ja Garde, Alexei Panin. de Mos-
Capitaine de la Garde, Bafily Porofoukoff. C0VIE>
Lieutenant de la Garde, Frédéric Wolkoff.
Lieutenant de la Garde, Abraham Schamordin.
General-Adjoutant , Jean Polyanskoy.
Enfeigne de la Garde, Jean Wereffkin.
Sous-Lieutenant de la Garde, Alexandre Taneoff.
Sous-Lieutenant de la Garde & de Bombardiers, Bafily Jafikoff.
Capitaine- Lieutenant de la Garde du Corps, Pafchkoff Yegor.
Premier CommifTaire, Alexei Libin.
Juge de Pomefny, Prikafe Kirill Cziczerin.
General Quartier-Maître & premier CommifTaire de Guerre, Michel
ArgamakofF.
Capitaine-Lieutenant de la Garde, Alexei BibikofF.
Lieutenant-Colonel, Bafily Titoff.
Lieutenant-Colonel, Gabriel Kofloff.
Lieutenant-Colonel de Place, Kifeleff,
Lieutenant-Colonel, Michel Anizkoff.
Lieutenant-Colonel, Naum Czoglokoff.
Lieutenant-Colonel, Bafily Batourin.
Major , Nikita Skoulskoy.
Major d'un Bataillon de l'Amirauté, Kirill Poufchzin.
Prince Frédéric Golizin.
Prince Jaques Golizin.
Sous-Lieutenant de Bombardiers , Nowokfchzenoff.
Sous- Lieutenant de la Garde, Bafily Iwanoff; il a auffi figné pour un
Sous-Lieutenant du même Régiment, Bafily Korofleleff, qui ne fça-
voit pas écrire.
Premier CommifTaire de Guerre, Bafily Nowofilzoff.
Premier CommifTaire de Guerre, Prince Michel Iwanoff Wadbalskoi.
Gentilhomme de la Chambre, Prince Affonafy Borjatinskoi.
Gentilhomme de la Chambre, André Koliczoff.
Enfeigne de la Garde du Corps , Deroffei Iwafchkin.
Sous Lieutenant de la Garde, Michel Krouchtzchoff: il a auffi figné
pour un Enfeigne Affanafly Wladizin.
Sous-Lieutenant de la Garde, Prince Alexei Schechoffskoi : il a aufîi
.figné pour le Capitaine-Lieutenant Dewefiloff.
Premier Secrétaire, Anifim Schezoukin.
Djak, Jean Molczanoff.
Djak Simeon Iwanoff.
Capitaine de la Garde, Emeljan Mawrin. •
Le Juge de Rofprawnaja Palata, Afonafei AndreofF.
Koufmin Karavayeff.
Vice-Gouverneur de Mofcou, Bafily Jerschoff.
Tome XL X On
COViE.
I6î MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ETC.
Amznu On ajoutera, pour conclufion, quelques Reflbrts fecrets qui m'ont été
D^™°S" communiquez par une Perfonne de la Nation Ruffïenne fort distinguée ,
emploiée dans des Cours confiderables pour le Czar, &qui a été fouvent
nommée dans les Nouvelles publiques.
Le Czar avoit eu de la Czarinne fa féconde Femme un Fils qu'il fît apel-
ler Pierre. La Czarinne, qui avoit pris un grand afcendant fur l'efprit du
Czar, voioit avec peine que le Czarowkz fon Fils aine dut fucceder par
fon Droit d'Ainefle à l'Empire. Elle travailla à le perdre. Ce Prince, en é-
tant averti, trouva à propos, pour fauver fa vie, de fortir de l'Empire de
fon Père. 11 alla au Tirol , où , pour fa feureté , il fe fit loger dans la Forte»
refle à Infpruck. Sur les Recherches du Czar, il alla à Naples, croiant de
s'y tenir incognito. Il fut même logé dans un des Châteaux forts de cet-
te Ville-là. Le Czar découvrit le lieu de fon Refuge. Il y envoia des
gens. Ceux-ci lui perfuaderent de s'en retourner fous des Promenés de
Pardon de la part du Czar. A fon retour, on lui fit renoncer à la Succefc
fion. Ce qu'il fit, aiant refolu de fe confiner lui-même dans un Couvent.
La Czarinne , craignant toujours pour fon Fils, n'eut point de relâche , qu'el-
le n'eut porté le Czar à faire au Fils aine leProcez, &à le faire condamner à
Mort. Ce quiefr. étrange elt que le Czar, après lui avoir donné lui-même le
Knut quieil une QuefHon, lui coupa aufîi lui-même la Tête. Le Corps du
Czarowits fut expofé en public, & la Tête tellement adaptée au Corps,
que l'on ne pouvoit pas difcerner qu'elle en avoit été feparée. Il arriva
quelque tems après ,que le Fils d.t la Czarine vint à décéder à fon grand re-
gret & à celui du Czar. Ce dernier, qui avoit décollé de fa propre main
fon Fils aine, reflechifiant qu'il n'avoit point de SuccefTeur, devint de
mauvaife humeur. Il fut en ce tems-là informé que la Czarinne avoit des
Intrigues fecretes & illégitimes avec le Prince Menzikof. Cela, joint aux
Reflexions que la Czarine étoit la caufe qu'il avoit facrifié lui-même fon
Fils aine , il médita de faire rafer la Czarine, & de l'enfermer dans un
Couvent , ainfi qu'il avoit fait fa première Femme qui y étoit encore. Le
Czar avoit accoutumé de mettre fes Penfées journalières fur des Tablettes.
Il y avoit mis fondit Deflein touchant la Czarine. Elle avoit gagné des
Pages, qui entroient dans la Chambre du Czar. Un de ceux-ci, qui étoic
accoutumé à prendre les Tablettes de deflous la Toilette, pour les faire
voir à la Czarinne, prit celles où il y avoit le DeiTein du Czar. Dès que cette
PrincefTe l'eut parcouru , elle en fit part h Menzikof; &, un jour ou deux
après, le Czar fut pris d'une Maladie inconnue & violente, qui le firent
ïnourir. Cette Maladie fut attribuée à du Poifon, puifqu'on vit manifefte-
ment qu'elle étoit fi violente &fubite, qu'elle ne pouvoit venir que d'une
telle Source 5 qu'on dit être aflez ufitée en Mofcovie.
Fin de r Année M. DCC XVII L
S U P-
SUPPLEMENT
AUX DIX PRECEDENS VOLUMES
DES s
MEMOIRES
D E
LAMBERT Y>
CONTENANT
LES NOUVELLES PIECES
RECUEILLIES PAR L'AUTEUR
DEPUIS M. DC. XCVI.
JUSQU'EN
M. D C C. XVIII ( * ).
( * ) Votez
ci - d.Jfus
les pciges
i &> 2 de
ce folume»
^«^*
A LA HATE,
Chez. P. G O S S E et T. NEAUL M X,
M, D C C. XXXIII,
MEMOIRES,
NEGOTIATIONS,
TRAITEZ
j
E T
RÉSOLUTIONS D'ETAT:
ANNÉES M. DC. XCVI.
M. DC. XCVII. ET M. DC. XCVIII.
«^^^•^ €**&$*-*& <âH§«3Hê>*3f:*Ë? ^^^€><3M& <3**ê><ât*ë><3M& ^*&€**&<§t*&<5**&<3**§!3**&
ANNEE M. DC. XCVI.
Copia Epiftolœ quant fcripfit Excellent ijfimus Epifcopus affmrfs
Cujavienfis Excellentiffimo Legato Galliarum.
df. Po-
logne.
ILLUSTRISSIME ET EXCELLENTISSIME PATRONE.
i^1tŒ*fD3£.jl> O LE NS fubmijjïonem meam Excellent iœ Suœ unâ & al- Lettre de
*1r\ r$ 1er a teflari vice ab ipfâ illius porta redire debuï , abfentem pu- l'Evêque
rJ <\T ïV blicifque curis à Jîatione fuâ evocatum reperiens : Qiiare in le- de 9uJa"
kd * (*) vamen frufirati defiderii mei obfequiique , prafentibus (urgent if/ï- Y,l<~ * -
^^ ^ mis enim repentinisque cafibus jam Farfavtà evocor) ultimum fa(jeur de
^JS-^ZD^X^ ffajg Excellentia Suœ , mitto ; iïïud unicum flagrant ijjïmè France;
poflulans , ut quem dignata eji Excellentia Sua ante cmnia mérita , huma- er> Octo-
nifjîmâ profequi benevolentiâ , eundem confiant i foveat gratiâ , auam mereri brel<sS>°-
emni obfequiorum conatu allaborabo.
X 5 Et
Afîatres
de Po-
logne.
166 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Et quoniam Excellent ta Sua eo me fiduci* obflrixit patio , ut qu* fenti-*
rem circa futur* Eleclionis progreffum ea libéré pro ingenito candore meo
Excellent!* Su* explicem , audeo Excrtlentiam Suam per boni publia
commoda fiudïofjfimé obligare , quatenus à Promotione Principis de Conti refilire
vêtit i £>uem et fi eximia talent a , belloramque vocales triumphi , fupparem Ré-
gi a faciunt Coron*: metus tamen nominis hujus per Regnatrices Majefiates ex
Rationibus Satûs noftri in animis Civium pridem excitât us , & modo conferva-
tus y remotiorem videtur à Ihrono Regni facere.
Neque enim vellem SereniJJïmi Galliarum Régis Promotionem in aliquod ve-
ntre diferimen , ficut (3 Excellent!* Su* expenfas Laborïs periclitari : qu*
fi optatum fortientur effeblum , licebit mihi gratulari \ fin minus , vix pof-
fum tantorum conatuum motibus condigne compati. Quoniam non temerarium
Excellente Su* exprimant fenfûs met judicium , etiam ex multis deprum-
ptum. Si quid verb Sïngularitatis communisandum mihi Excellentia Sua
babuerit f pari ac mecum cum Theologo meo Domefiico fiduciâ agere potefi. &c*
Maneo
Illufrijfma Excellentia Vejlrœ
J
DevotiJ/ïmus
Epifcopus ULADISLAUS.
Lettre de
l'Ambaf-
fadeur de
France
fur PE-
îe&ion
du Prin-
ce de
Conti à la
Couron-
ne de Po-
logne ;
du \6
Octobre
ï6o6.
Refponfum Excellent ijjîmi Legati Gai/ici.
ILLUSTRISSIME ET EXCELLENTISSIME PATRONE.
SUMMO cum animi met dolore intellexi Suam Excellentaim ad me ve-
nir e dignatam femel 13 bis , quo tempore valeditiones hue (3 Mue deferen-
d* , me domi fédère non permittebant. Nec minns etiam hoc me affiixit^ quod
Excellentia Su* conatus iterum obfequia mca pr*ftare , tamen idoneum ad-
rnittendo mihi tempus non fit inventum : etenim humaniffimis Excellentia
y e fine Litieris ore proprio fatisfacere volcbam , ut quidquid nofiro priori colloquio
defuerat uberiori fermone aliquantulum fupplerem. Verum ubi publica ,vel Sere-
niJJïmi Sut Candidat as negoiia tantapere dijlrahunt Excellentiam yeftram , ut
difficile poffit al lis attentas aures praberc , ideb feribend* fatius duxi, ut non
modo benignifjïmis ejufdem caracJeribus , fed etiam conflits , ut par efi refpon-
deam ; & quandoquidem minime dubito , quin eâdcm me meaque omnia humini-
tate profequi (emper velit , quam mihi , & verbo , 13 feripto, tam eximiè te fat a
efi • ego cum maximâ veneratione & vi confident i* illius , quam in me reperiit
(3 approbavit , intimos mentis mea fenfus aperiam Excellentia yefir*.
Rem arduam fane , ac fupra vires meas longé poftam , Excellentia yefira
mihi pracipit , dum invitât ut à Promotione SereniJJïmi Prmcipis Conti refiliam.
Ego
LOCNE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DC. XCVL iô'7
Sço enim hic non propria voluntatis lnterpres aut Dominus , fed Chri/lianijfimi A*fairm
Régis Minifier, quid aliud facere poffum quam quodjubeor? Prêter eu cummi-
hi mhil poffit effe antiquius quàm Serenififimœ Reipublicœ meam infinit am propen-
fionem , & fludiofiffimam promptitudinem ofiendere , quo patio liceret mihi banc
unicam occafionem prœtermittere , in quâ jervitium illi certe majus , quàm qui-
libet e propriis Civibus pr ce (lare promovendo in Regem futur uni talem Princi-
fem, quem, ipfâ f aient e Excellent iâ Vefirâ, omnibufque cujufcunque gentis , aut
fatlionis homimbus , eximia talenta, bellorumque vocales triumphi, fuppa-
rem Regiac faciunt Coronse.
Quid enim in bac proximâ Eletlione quœrunt Poloni ? Non-ne R-gem opti-
mum , Regem maximum , Regem Bellicofum , Sapkntem , Magnaniwum , Libe-
ralem, Modefium, Affabilemï Qui tôt eximiis talentis Remp. ad prifiinum
opulentiœ , fplcndoris , & famœ ftatum reducat, bellorumque vocalibus trium-
phis, ut propriis Excellent ia Veftrœ verbis utar , hoftes Patria debeUet , ému-
las terreat , £5? vicinos in <eternà focietatis atque amicitia necefiïtate contineat?
Qui regat Populum fiuum exemplo potius quam authoritate; qui fit in Bello pri-
mus Bellator, in Confilio primus Confiliarius , ubique norma cœterorum ; qiam
nemo Polonus , aut oderit , aut contemnat ; qui feeptrum fibi nec lege me confue-
tudine , fed amore £s? œftimatione delatum digne ferre fiudèat , & quibus ac-
quifierit virtutibus , iifdem confervare necefje habeat : qui fi a relia via recé-
der et , & liber rima Genti vellet aliquam fagi aut fervitutis fpeciem imponere
non habeat à vicinis Principibus auxilium , nec invenire poffit afylum prefens in
aulis fibi fanguine conjunclis : Qui denique in primo fui regiminis ingrefju qualem
reperit Rempublicam talem adjuvet, non perfona tanîum fuà ,fed opibus. Namqut
duobus eget Refpublica, Domine mi Excellentifjime, Viro, {$ Subfidio. Viro, qualem
modo defcripfi ; Subfidio quod reale fit ac prefens. Confideremus itâque Statum
Puioniœ. Exercitum Confederatum , Stipendia Miliii ad fummam enormen dé-
bita , Bellum quatuor decim annorum fine frutlu gefium , nec finit um , imo tan-
io pericolofius exardefeens, quant 0 majores addit jmperio fm vires navus Imper a-
tor Turcarum ; Exhaufias Provincias , Comitia perpétué rupta , Fatliones £5?
Divifiones domefiicas tantum ex illa parte grafj'antes , quœ non publicum fed pri-
vât um commodum quœrit , & ferias atque urgentes Nobilitatis unïverfœ Quœri-
montas eludit. Prgo nihil ad ifia refieclendum, ergo confuetudini ferviendum , et'"
go perfonarum acceptioni , non utiiitati Rej 'public a fiudendumt Abfit.
Cur enim fibi Polonia Jus eligendi Régis tara firenuè vindicavit , tam forther
6? intacle fervavit , ni fi ut eum creare poffet , quem rébus fuis oportunum , at-
que accomodatum judicaret ? Si Corona ifia furet hareditaria gemerent fortaffe
populi eam tali jure deberi minus dignis & utiubus , quam dignioribus 6? utilio-
ribus dari poffe exoptarent. Ecce res in integro efi\ pote fi dari cuilibet, non ergo
diçnior efi rejiciendus , ut adolatoriè prœferatur alter , quod quitiem bonâ ve-
nià Candidatorum omnium dix erim , quos jugillare nec nuis moribus convtnit 7
nec Régis mei voluntaj efi. Iliud enim uvucè probare voiui ExceUtncœ VeflYte*,
mérita fpellanda effe tantum & commoda Reipubhcœ : cœtera J)lanè jper-
ni oportere.
Quod vero Exccllentia Vefira mihi amantiffwie fcrïbii , nolle fe. Promo
t.ioDem
Affaires
de Po-
logne.
i<?8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
tionem Régis ChrillianiiTimi in aliquod venire difcrimen ; ac metum efle
nominis Gallici per Regnatrices Majeftates exRationibus Status hujufce in
animis Civium pridem excitatum, & modo confervatum , unde remorior
Gallus Princeps Candidatus, aliunde meritiiîimus , à Throno Regni fie-
ret , hoc diligent er & mature confiderandum venit.
Videtur enim metus ifte , veris fundamenth carens , inter bulgares errores enu*
merandus. Ille aut cm de totâ Republicâ non bene fentïret , qui putaret eam
vacuis hujufmodi phaniafmatis imprejfionibus duci , non folidis evidentibufque ar-
gumentas in tam grandi negotio, ubi de fpe & falute Civium agitur : £s? vereor
ne qui metum illum excitatum fupponunt , excitare potius velint , aut fopitum , aut
nullum. Dicat enim mihi Excellentia Vefira^ quœ tam acri tamque prudenti
pollet judicio , Muïierem fortem quis inveniet ? De Viro forti nunc agimus ; &?
quœ Comparatio potefi inflitui bona Viri cum Muliere ? Si per Reginam Ma-
riam aliquod peccatum eit , undè Cives amplius regnare illam nolint
vel per fe , vel per filios , nunquid Sereniiîimus Princeps de Conti fi-
lms ejus e(t? At funt ex eadem gente Gallicâ. Nunquid omnes in G allia funt
ejufdem Indolis & Complexionis? An omnes Poloni fimiles? Rex Michael, Rex
Joannes , fub eodem Cœlo nati, toto Cœlo difpares fuere. Cur ergo confundemus
eos , bonne JDeus ! quos natalis educatio , fexus ipfe , tant opère diferiminanfi
Et fi quœ fimilitudo timenda, nunc ne potius in proprio fanguine , quam in alie-
no? Vellet-ne Excellentia Veflra datis in publicum motivis uti contra nos, quœ
SereniJJimo Suo Candidat 0 nocerent magis , £5? partes illas , quas ipfa tam fiu-
tam apertè tuetur, unici hujus argument i retorfione fubverterel
Videamus itàque quibus impulfa Confiliis Serenijfima Regina tantam in fe ,
fuosque concitaverit invidiam , an Gallicis , an Aufiriacis ? Quemnam audi-
vit, aut cui placer e voluit , cum ituros in Hungariam milites dijfipavit , cum
Poloniam folemni Confederatione voluit alligari Germaniœ fine refriciionibus
tillis , cum ejecit Galïicum Legatum de Vitry , cum Serenifimum Principcm
facobum Serenijfimœ Palatinœ Neoburgenfi conjunxit ? Sunt-ne ifti Gallicœ
an Auflriacœ Faclionis part us ? Attamen , Galla fuit Regina : fed quid am-
plius in Rem Auflriacam Germana facere potuiffefï
Nolebamus nos tam arblis tamque inextricabilibus vinculis Rempublicam
vincire femper , ut aiunt Illufiriffimi Zamofcius £s? Fredro , metuendœ potentia
non addiclam modo , fed quafi mancipatam fieri. Vicit nos Galla Regina \ fed
quid ihde boni acciderit Reipublicœ tefies miferi Cives , quorum imminuta fubjlan-
tia , quorum fines devaftati , quorum nomen in Aulâ Cœfareâ , etiam pofl ipfam
Viennœ Liber ationem, ac Ger mania totius ab imminenti fervitute redemptionem ,
tantum vilipenditur, quantum apud nos in honore & yeneratione ejl.
Sciebamus, nec oblivifeimur ,quid Majores Veflri, per quos ftetit Libertas, de
vicinis Mis dixerint , i$ pofieris fuis tradiderint \ eorum vefiigiis infiftebamust
£i? nunc infiftimus, neque illum regnare cupimus in Poloniâ, qui vel fit Aufiria-
cus , vel Auflriacœ Domui tam jpecialiter addiclus , ut illi fuam dignitatem ,
Coronam, Authoritatem omnem référât acceptam ,• ne tandem aliquandh fiât de
Poloniâ , quodfaffum ejl de Bohemiâ &? de Hungariâ, Sunt autem i/la tantœ
tan-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DC. XCXVï. i69
tant a que compertœ veritatis , ut etiam apucl Pohnos in commune aclagium Affaires
tranfierunt. DE Po"
Dicet Exccllentia Veflra : Sed neque volet Imperator ut hic regnet Gallus -, L0GNF>
ergo pat utrobique ratio. Nequaquam : immo valde difp'ar , etenim efi hoc
axioma noium omnibus , Cœfarem ejje proximum , ergo metuendum \ Chrif-
tianiffmum verè remotum , ergo prodefje pcfië, nocere nunquam. fjhù timen-
dusy& fitjpeclœ ambitionls efi , non audiendus; qui non timendus femper con-
fulendus. Non videbit Exceïkntia Vefira Bellurn inter longincos , fed
inter finitimos. Poloni cum Gallis , Hifpanis , Italis, & Perfis non dcccrta-
runt \ fed cum Germants , Suecis , IJungaris , Turcis , Tartaris , £s? Mojchis.
Amplius dico : non débet Serenifiïma Rcfpublica confderare quid ijii vel alteri
di/pliceat, fed quid fibi bonu?n.
Si Germanus talis offeretur , qualem Galîi offcrunt , iifdem prœfentibus auxijiis,
■œgefiati publier, beïloque infruïïuofo fubvenientem , non confulite Galliam , #£?
cipite illum vobis > dummodo periculofus Me non fit , nec Germanicis viribus uti
pofiït ad oprimev.dam Patriœ Libertatem. Si Gallus Princeps omni virtute
prœditus , £s? clives , cum fumma utilltale vobls proponetur , accipite illum incon-
fulià Germaniâ \ non enim illa vult res fuas ad veftram voiuntatem dirigere ,
nec vejlras ab il là pendere ncceffe efi.
ghiid ergo dicet Ce far ? Dicet Polonos Hungaris £> Bohemis effe fapientiores.
Dicet eamdem à vobis in eligendo Rege vefiro adhibitam prudentiam , quàm Me
adhibet in fcligendis Magifiratibus fuis. Dicet illum in Polor.iâ faclum Regem,
qui forent iffimœ huic Reip. Provincias avulfas , & antiqua décora refit uere u-.
tins valet , de quo vos tanto magis lœtari debebitis , quant o minus ipfe lœtabitur.
Sed arma in Poloniam inferet, fi Galli Régis fiet Eleclio. §ua armât Illa-ne,
quibus Hungariam , Rheni Littora, Stat loues in ftaliâ, tuen vix pote il ^ necve-
rb tuetur ? Et fi per hujufmoâi minas incutitur timorReipublicœ, jam ubi efi libéra
Eleclio? Igitur à vicinis erit petendus Rex , non eligendus-, & quo fine ducli Ger-
mani noient hic regnare prœfiantiffïmum Principem , nonne ut Reipublicce vires
magis corruant , £s? ipfa tandem fiât Aquilœ bicipitis Prada ?
Non Me metus invaferat Major um vefirorum animos , cum Henricum Gallum
Ernefio Aufiriaco pratulerunt. Erat eadem tune temporis vicinitas , quœ nunc
efi , eadem utriufque domûs emulatio , iifdem mini s , (3 futilibus metivis Ernefii
defenfores utebantur , quibus hodie videmus non dari,fied ajfecïari crédit um. ghiid
frofuit , eo magis in fuo propofito perftitit confiais Refpublica à quo vehementius
illam dlmovere tentabant \ & fi per inqpinatam Chriflianiflmi Fratris fui mor-
tem , Henricus , culpâ quidem fatis magna , fed excufabili tamen , in hœreditatem
fuam bellis Civilibus quafatam^ vix non deperditam , fie nimis pr opère tacïûque
recesit ; certè quant o fuit amore dignus , vel ipfe profequentium Polonorum La-
chrimœ tefiatœ funt , quo s illum non clegife > fed amififje pœnituit.
Nihil taie à noflro Principe metuendum , qui cum tlenrico^ nec fplcndore gène-
ris à feculis oEio regnantis quod unum 13 idem cil , nec virtuîum fama cedat ,
habet hoc fingulare quod in fuccejfonis ordine fit decimus Princeps à Regio San- .
guine Galliarum.
De Reginâ Lodovicâ , fuit enim Ma quamvis in Gallia nata, non tamen ex
Tome XI. Y nofifâ
GNE.
*7ô MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires itoftrâ gente oriunda , fed ut omnes fciunt ex Familia Gonzaga Manturum, quat
Jtala eft , pios ejus Cineres non commoveamus ; mulîa benè geffit , multa fortaffe
minus, ghiidni placebit bona nobis attribuer e , cœtera fexui. Ponajam monui
femel effe quaftionem de viro , non de muliere. Melwr eji iniquitas viri , quant
mulier benefaciens , inqmt Scriptura \ & quamvis uxorem habeat Serenijfimus
Princcps de Conti ex eodem Regio Sanguine , Paventibufque Serenïffimo Princi-
pe Anguianeo , & Sèrcniffimâ Rheni Palatinâ Eleclorali Principiffâ natam , ni»
hil tamen de ipfà metuendum , cum illa notce fît apud omnes manfuetudinis , £5?
ita marito fubdita , ut part em nullam in Regno fit accepturam , prêter eam qiut
Reginis verè competit , nempe ut cœtus aulicos prœfentiâ fuâ & magnifient iâ de-
corare curet ; non emm alio ex fonte dérivât iflud muliebre imperium , quo non
Polonia modo , fed multa Reg,ia plerunquejacJantur, nif ex otio Pnncipum. Sit
ergo Rex [irenuus , & fedulus , amans gloriœ fuœ , negotiifque attentas , jam Re-
gime non imper ant. Unde accidit ut in ipsâ Gallià , ubi olim exterœ Régine ri~
xas moverint in minorennitate Regum , ipfe pofiea nec auditœ fuerint, fi ai i mat-
que Dcus conceffit nobis Regem verè magnum.
Ultimum eft quod diluam. Scriicet Exceïlentia Veftra dicet : Efo , fint Rex
t§ Regma omm exceptione majores , at flatim atque Gallus ad Solium Polonicum
eveclus erit , quatenus in eum nihil molietur Cœfar , attamen ille in Cœfarem mo-
lietur Bellum , & Rempublicam ad pericula if a deducet , ut placeat Rcgi Chri-
ftiamffimo. Refpondeo non placiturum nobis Regem novum Pvioniœ , qui Poloniam,
feipfum , & gloriam fuam tam aperte contra Stativ Rationcs prœcipitaret , prœfer-
tim ubi jam pervenimus ad limen Pacis Umverfalis in Europâ Chrifiianâ conclu-
dendte , quam fortafsè Deus dabit ante Eleclionem. Si quid contrarium hac fupev
re timeretur , facillimè per Pacla Contenta novi Régis prœcaveri poffe , ut ipfe
juramento feobligaret, nontantum ad obfervationem in génère omniumTraclatuuni^
Fœderum , & Paclorum anteà initorum inter Prœdecefifores Rcges £5? Rempublicam
ac alios quofvis Principes; fed etiam m fpccie illorum quœ nuper contra Tyrannum
Orientis fancitafunt. Nonnè hoc remedio fanabitur fubitb metus? At inquit Fef-
ira Exceïlentia , Pacla Consent a for te non obfervabit. Iterum refpondeo , fi hoc ti-
metur , de quo Candidat 0 juftim ? An de illo qui nullas in vicinia copias , sut af-
finitates habet , an de illo qui habei ? An de illo qui vider it Coronam è Eami-
lia ?mnus objervatrice promifjorum delapfam , talique femper exemplo ter-
rebitur? An de illo qui hanc nih'lominus à Pâtre collcgerit ? Ifta diretle contra
Serenifjïmum fuum Candidatum militant , cur objicerentur nobis ? Deinde pof-
funt executione débita Pacla Conventa defraudari , fi Rex erit ita fui ipfius imme-
mor in iis , quœ àfola ejus volunt aie pendent , ut funt largitiones Munerum , Of-
fuiorum &c. fed in Us quœ numquam facere nec t ent are pote f fine con/enfû Rei-
publicœ quomodo poteft fidem frangcre ? Jam hoc certum & indubitatum , quod
Bella fine unanimi Nobilium fuffragio in Comitus congregatorum non pojfunt de-
darari. Rex itàque novus , fi vellet aliqua fufcipere , ante proponere deberet Rei-
publica. Dicat mihi Exceïlentia Vejlra quâ front e proponeret ille paîam id, eu*
j-us contrarium juraffet ? Et quid facilius tune, quàm propofiîionem , fi fieret ,
rejicere ? Quidquid ergo hine timetur Chimera eft. Quod vet 0 dicitur , illum
tnunera & bénéficia Rei public a ,folis Nobilibus débita, conccjjurum exteris, aliet
Chimera
GNE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DC. XCVI. 171
Chimera efl. Hoc enim^& lege vêtit uni, & in praxi abfolute redigi nequit à Amww
quocumque Régnante. DE Pou»-
Opponct n. ï/ji profeclb Veflra Excellent ta , quod à multis partium fuarum au-
dit, rationes hajce meas apud prudentiores quidem valituras , non autem apud
multïtudincm Nobilium, qui cœco, ut illi dicunt ,impetu,foliJque anticipât is opi*
mombus ducli, non attendent ad tôt & tant as Rationes Status, fed Re*
gem fuum fine confideratione illâ repente pronunciabunt. Id enim procut dubio
intellexu Excellcntia Veflra, quando Principem noflrum Borbonium , confie fl'u dignif*
fimum , attamen propier hoc de nomine Gallico vulgare phantafma certè certius
ruiturum declaravit.
yJt verb non Jum ego in bac fententiâ: pluris aflimo Polonos omnes Nobiles,
fivè qui divitiis 6? muneribus cumulât i Urbem fréquentant , fivè qui refident Do*
mi\ et fi enim nonfitinîer eos fortunœ , at certè nobilitatis & magnanimitatis efl
<equalitas -, Omnes ad Libtrtatem {§ Confilia Reipublicœ nati probe norunt quid
expédiât, quid non ; In iisfpem omnem noflram collocamus : lis tant uni placer e
volumui : alli partent Reipublicœ ad fe , mis nefeio quibus , & magnis obtationi*
bus allicere prœ fumant : nos totam Rempublicam rite congregatam expeclamus : alit
Regnum affectant ut régnent , nos ut benè fit Regno : alii confederant exercitumy
nos confie derationi illi volumusfattsfacere: alii Provincias à Corpore Reipublicœ
conantur avellcre , ut ab exteris in ambitu fuo proteganîur : nos amiffas récupéra*
re , &f fines Reipublicœ promovere.
Cum igitur audient centena milita Nobilium in equis, jam eos privatis faclio-
nibus excludi velle , qui foli poffunt utiles effe Reipublicœ pro tali tantoque Candi"
dato , qualis efl no fier , afferri tôt milliones florenorum , non in prêmiffis , fed in
prefenti numeratàque pecuniâ ad faiisfafiionem Exercitui confederato debitam : ex*
pugnationem Camenecipropriis fumptibus ante Coronationem datis obfedibus , &? fub
nullitate Eleclionis : reftaurationem monetœ : Rei frumentariœ Commer clique Geda*
nenfis: quœ omnia noflris in manibus funt, nec quivis alius efficerepotefl^ prœtereà nul*
lam pro futur a Regina reformationem , ne panis benemerentium alio dtftrahatur ,
6? alla quamplurima quœ fuo tempore manifeftabimus. Credat mihi Excellent ia,
Veflra, tune melius fibicollaturos Nobiles, quàm ut amcularum fabulis adhereant9
umbram pro corpore arripiant , £s? ambitum privât or um public a utilitati , tamquù
certis & évident ibus émolument is antepvnant. Perfuafio ifla non Libellis, non,
Laboribus ,non vigiliis ynon induflriâ ,non eloquentià ,non terriculamentis perfide*
tur , fed re ipsâ & veritate.
Ex iis omnibus videt Excellcntia Veflra , non adeb me Caufie meœ diffidere , quœ
tôt lus Reipublicœ eft , quàm Excellentia Veflra ex i /limât , vel ad dijfidendum
invitât. In cœteris omnibus Obedientiam meam probare poterit ; In hoc , neque Rex
meus , neque Sereniffima Refpublica ,finunt obtemperare me Mandatis Excellcntia
Veflra,' , quœ cum fit arbitra fuœ ipfius, ac proprii fenjûs Domina , pot efl à pro*
pofito fuo faciliùs , quàm ego à meo refilire. Nec tamen hoc exigo, nifi quantum
Reipublicœ commoda vident ur exigere. De cœtero , maximâ cum venet atione , &
gratitudine maneo
Illuflriffimœ Excellentiœ Veflra
Varfavia \6. Otlobris 1696. Dcvotiffimus Servitor.
Y 2 AN-
tjè MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
S ANNÉE M. DC XCVIL
Ode âicata Sacro Solenni Règne Untlionis Sereniffimi ac Po~
tcntijjîmi Principis acDomini^ Domini CAROLI XII Sue-
corum , Gothorum , Vanâalorumque Régis , £jV. cumià
celebraretur Stockholmiœ Fefto Die i^ Dec. Ami 1697,
Ode fur f^Ur vefte nigra, funeris indice 5
le Sacre V^-/ Hic inquinatur lœtitiœ dies>
j%Ro\ 6)ui pufcit augujtos honores ,
£ 1A ' In patriœ bona defiinatus?
Dec. En, tetïa, terram, cunclaque reclius
169J. JVi# alba vefiit , lumine candido :
£# //>/£ pulcro Rex renidet
Ore, fibique bonum referri
Expeilat omen. Promite ferio
Graii favoris verba volent ta ;
Omnefquc Regalem Coronam
Aufpiciis honorate faufiis :
Ut cingat apte tempora Principis ,
Eauri ac Qlivœ florida virgulis,
Per Martis œque ac Pacis Artes 9
Ad memores celebris nepotes.
Virtute clarus fuîgeat intégra ,
Legumque fervans , juftitiam colat ,
Sceptrique vires eminentes ,
Te fie Deo , moderetur œquus.
Efi profperum & ïœtum abfque Deo nihil,
®hii cuntla nutu tempérât. Illius
Reges in ipfos efi tremenda
Imper ii indomitï pot efi as.
Ut qui [que Rex Summi efi metuens Dci >
Sic fubditorum commoda provehit
In majus , ipfcrumque ad ufus ,
More pat ris , benefacla fpargit :
Felicitatem reddere Se allô
Promtus , vetufiis moribus inclytam:
Et finguloriim arblas querelas
Tollcrc , pauperie remet à.
Vox abfit atri pe il Gris improba ,
Rcgi licere id quod libeat , docens :
g)uodcunquc fas & jus vetaùunt,
Id liccat libeatque nulli.
Innata
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DC. XCVII. 173
Jnnata cunclis pugna cupidinis , Affaires
7 7» • •„ de Suéde.
Non lemus Kegem , ac inopes premit ...__
Ruris colonos : ïmo majus
Imminet è folio periclum.
Efl turpe cuivis , vivere turpiter :
offert dolorem confcia mens malt:
Scd, vit a donec fit fuperftes ,
Si pudor £s? met us impedire ,
Aut triflis emendare dolor ttequit ,
Quod corde conception efi avido nef as 5
Pofi fat a , nil ultra juvabit ,
Quin Erebi patieris ignés.
O il le feiix & fapiens fimul ,
S eu fceptra traclat , jeu pedes ambulat ,
Qui comis erga omnes , fibi aquus }
Rite Dtum vemratur infons.
ANNEE M. D C. XCVII I.
Tarif y fait entre les Commiffaires de Sa Majeflé T. C. £5? les Affaires
Commiflaires des Hauts &? Fui (faut s Seigneurs les Etats „»*»"
Gène? aux des Provinces-Unies des Fais-Bas, en vertu de prov.Un.
V Article XII. du Traité de Commerce, conclu àRyswic
le 2c. Sept. 1 697. entre les Plénipotentiaires de Sa dite
Majeflé & <#«# des Leurs Hautes Fuijfances.
C
O mme le Traité de Commerce fait & conclu à RySwjé le 20. Sept. proïetd©
1 697. entre les Plénipotentiaires de Sa Majeflé le Roy Tres-Chré- Tarif en-
tien d'une part, & les Plénipotentiaires des Hauts &Puiflans Seigneurs les tre la
Etats Généraux des Provinces -Unies des Pais- Bas -de l'autre, porte à f™™*^
l'Article i2me qu'on fera nouveau Tarif commun, fuivant la Convenance v,-nccs.
réciproque, les Sieurs N.N.étans nommés Commiflaires de SaditeMajefté Unies;,
T. C. & les Sieurs N. N. par lesdits Seigneurs Etats Généraux des Pro- du 22-
yinces-Unies, pour en conférer enfemble , font enfin , après la commùni- Is.°^-
cation réciproque de leurs ordres & pouvoirs, & divèrfes Conférences
tenues pour entretenir enfemble le Négoce & la Navigation, convenus
unanimement, que les Efpeces comprifes dans les Articles mivans payeront
doresnavant pour tous Droits, tant d'Entrée en France & autres, de quelle
nature qu'elles puiffent être, à commencer du- - -
Sçavoir ,
La Baleine coupée & apprêtée, le cent pefant. ; ^ = -900
Barracans, la pièce contenante 21 aunes de France. - - $ o o
Beures de Hollande , le cent pefant - - - - o 12 o
Y $ Buffles,
i74 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
A?m*Es Buffles , Elans , & Cerfs pattes en Buffles. Colets & Cole-
be f»an- tins de Buffles , le cent pefant : -.* — - 16 o a
ce rt des Camelots de toutes fortes , & Camelots, à onde & de
demi-foye, la pièce de 20. aunes ---------800
Cire blanche, le cent pefant - - - - - - - - --800
Cuirs de Boeufs tannés de toute forte , la douzaine - - - 14 o o
Cuirs de Vache tannés de toute forte, la douzaine ---700
Draps de Hollande de toutes fortes & couleurs, la pie-
ce de 1$. aunes de France. ----------- y y 00
Fanons de Baleine , le cent en nombre tant grands que
petits, pefant 300. Livres. - ---------- 20 00
Fer blanc, le Baril de quatre cent cinquante Feuilles dou- - 20 o o
blés , & le Baril de fimples Feuilles payera la moitié.
Fromages de Hollande, & en boulettes, le cent pefant. - 1 10 o
Huiles de Baleine , où grains d'autres pohTons , les Bar-
rique telles qu'elles font. ---------- -7100
Morues vertes ou Cabillaus falez , le Baril , qui pefera
500. livres, ou à proportion du même poids. _ - - - - y o o
Pipes à Tabacq , la grofle, contenant douze douzaines o j- o
Porcelaine & Fayence fine, moyenne, grande, & petite,
contrefaite en Hollande , & autres lieux , le cent pe-
fant. 10 o o
Rubans de Fil, de toute forte , le cent pefant. - - - - 800
Savon noir , verd , mol , & liquide , & de toutes fortes , le
cent pefant. --------------- 400
Serges de Seigneur & d'Afcot, la pièce de 20. aunes de
France. 800
Serges drapées, contrefaites , ratinées, la pièce de if.
aunes de France. ------------- 1100
Toiles de Hollande de toute forte, fines & ouvrées, foit
crues, jaunes, ou blanches, la pièce de 15. aunes, aûnage
de France. --------------- 200
Sucres rafinés en pain ou poudre, candis, blanc, & brun. - 22 10 o
A condition, que les Syrops ou Melaffes , qui viennent de France en
Hollande ou dans les autres Provinces, payeront un Sol par Livre pour
Droit d'Entrée.
Que les Sujets des Etats Généraux jouiront à l'avenir du Tarif de
l'an 1664. tant à l'Entrée qu'a la Sortie de toutes les Efpeces de Mar-
chandifes dont les Droits ne font pas changés par cette Convention & ex-
ceptées: pareillement les Efpeces compnfes au Tarif de l'an 1667. qui
font point changées par cette Convention fufdite, lefquelles fubfilteront de
même à l'avenir.
Que dans toutes les Marchandifes , dont la quotité des Droits n'elt pas
fixée par le Tarif de l'an 1664, celui de l'a© 1667, ou par cette nouvelle
Convention, ils ne payeront que tant par cent de leur valeur, fuivant la
Re-
Affaire*
de Fran-
ck f.t DES
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DC. XCVIII. 175
Règle établie parle Tarif de 1664. pour les Marchandifes qui y font omifes.
Que Sa Majefté le Roy T. C. donnera les Ordres neceflaires pour l'exé-
cution exaéte du Traité de Commerce & de cette nouvelle Conven- Jhov.UnI
tion.
Que le dit Tarif & cette Convention fubfifteront autant que le fufdic
Traité de Commerce fuivant l'Article 44. doit fubfilter; & que pendant ce
tems-là aucuns Droits d'Entrée ni de Sortie ne pourront être haufTés fur les
Sujets des Etats Généraux, que de concert entre SaMajeilé & Leurs Hau-
tes Puiflances.
Que fi le RoyT.C. accorde à quelque autre Nation des Droits d'Entrée
ou de Sortie plus foibles que ceux qui font portés par lesdits Tarifs & par
cette Convention, ou quelque autre avantage en faveur de leur Commer-
ce , lefdits Sujets des Etats Généraux jouiront des mêmes avantages.
Qu'à l'égard des Marchandifes, que lesdits Sujets des Etats Généraux
apporteront dans les places où villes conquifes, ou qu'ils en tireront, les
Droits tant pour l'Entrée que pour la Sortie feront à l'avenir réglés confor-
mément au Tarif de l'an 1671. à l'exception des Marchandifes qui font
dans l'un ou l'autre égard plus chargées par ce Tarif que par celui de l'an
1664. , à l'égard defquelles \qs Droits feront diminués & réduits à ceux du
dudit Tarif de l'an 1664.
Que les Marchandifes qui entrent en France par le Païs conquis, ou
qui en fortent par le même Païs, ne payeront qu'une fois le Droit d'En-
trée ou de Sortie j en tout cas, qu'elles ne payeront pas plus, tout conté,
tant pour l'un que pour l'autre, que les Droits portés par le Tarif de l'an
1664. n'en portent.
Que la Terre de Tornay ne fera pas à l'avenir plus chargée qu'elle n'é-
toit devant que cette ville fut réduite à l'ObeifTance du Roy.
Que nul empêchement ne fera apporté au tranfport de la Terre de Rouen.
Que tant à cet égard, qu'à d'autres qui peuvent concerner le Commerce,
reront reconnus pour Sujets des Etats Généraux, non feulement ceux qui
font nés dans les Provinces-Unies , mais aulîi tous les Etrangers en gêne-
rai qui y demeurent.
Que ces Articles auront la même force & vigueur que s'ils avoient été
inférés au Traité de Commerce même , & qu'ils feront ratifiés en bonne
forme dans le tems de à commencer du jour de la Signature,
ou plutôt , û faire fe peut.
En foy dequoy , & pour plus grande affiirance & obfervation infaillible
de tout ce que deiïus, les CommhTaires fufdits de part & d'autre, en ver-
xu de leur ordres & pouvoirs, ont figné les prefents Articles, & y ont
appliquez leur Seaux. Fait paffé à . . , le . . .
TABLE
t76 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ETC.
TaMô.
compara-
tive des
difFerens
Tarifs.
TABLE COMPARATIVE DES DIFFERENS
TARIFS.
Les Efpece?
Baleine coupe'e, le cent pezant
Baïacans, la pièce de 2 2. aunes
Beures , le cent -
Buffles , Elants , &c. le cent
pezant
Camelots , la pièce de 2o,aunes
Cire blanche , le cent
Cuirs de Bœufs tar.es, la douzai-
Cuirs de Vache tane's , la dou-
zaine
Draps de Hollande, la pièce de
2f. aunes
Draps , Eftoffes , de Laine ,
Poil, Fil, Soye, &c. -
Draps , Eftoffes , de Soye 6cc.
de Velours , la livre
Fanons de Balaine , les 3 o o . li-
vres
Fer blanc, le Baril de 45*0. feuil.
& le Baril de fimples feuil-
les payera la moitié
Fromage le cent
Huiles de Balaine, la Bariqxie
Morue , le Baril de 30a. livres
"Pipes à Tabacq, la grofle de 1 2.
douzaines
Porcelaine , & Faïance contre-
faite , le cent
Rubans de fil , le cent
Savon , Noir , Verd , &c. le
cent pezant
Serges de Seigneur & d'Af-
cot , la pièce de 20. aunes
Item Draps contrefaits , la pié-
ce de 13. à 1 f . aunes
Sucre rafiné , le cent
Toilles de Hollande , laplice
de 1 j*. aunes
Toilles de Coton &c.
Le Con-
tenu du
Tarif
de
1664.
2-10-0
4- 0-0
0-1 2-0
If- o-
6- o-
6- o.
le Con-' le Conte-
tenu du nu des
Tarif Arrêts
de poile-
1667.
15-- 0-0
8- 0-0
o- 0-0
4~- 0-0
12- 0-0
O- O-O
:4-
6- 0-0 7- o-ù
40- 0-0 go- o
i
o- 0-0 o- =
3- 0-
2- 0-0 UO- O-O
neurs.
Les De-
mandes de
Monfr. de
Ponchar-
train.
-030-
o-if.
3- o-
I- f-
o- 0-0
0,12- 0-0
10- 0-
8- o-
3-10-
6- o-
10- c-
If- c-
o- 0-0
o- 0-0
2- 0.
l'Entr,
en cil
défen-
due -
NulsArets
Idem
6- o- c
Idem
Idem
20- o- o
20- pour
cent de la
valeur
20- ut fu-
pra -
Idem
30- pour
cent de la
valeur -
a 1 2-
à 6-
à 3"
0-0
0-0
0-0
Mes Of-
fres
pour un
nouveau
Tarif.
7-10-0
4- 0-0
0-1 2-0
a 3 0- 0-0 2f-
à 10- 0-0 6-
à 1 2- 0-0 6-
à 1 8-pour
cent -
1 8-pour
cent -
. 6 0-
14-
Les Efpeces
20- par
vre
Idem
Idem
6- o- o
Idem
36-0- c
20-
20-
7-1
o-
o-
à zf- 0-0
a 25--
a 4- 0-0
à 1 o- 0-0
à 6- 0-0
1 13- 0-0
à 12- 0-0
6-
o-n 24- O- O à JO- O-O 6- 0-0
40- 0-0
3 2-pour
cent de
la valeur
1 2- pour
cent ut
fupra
15-- o-
If- o-.
O-If-'
6- 0-0
4- 0-0
O- f-0
Baleine coupée -
Baracans
Beures
Buffles ckc.
Camelots
Cire blanche
Cuirs de Bœufs
Cuirs de Vache
Draps de Hollan-
de
Et la Con-
vention
faite avec
Alonfr. de
Ponchar-
tiain , le
22. Nov.
1698-
9 - C - 0
f- O-O
O - 12-0
l6 - O-O
8 - O-Jo
8- 0-0
14 - 0-0
7-
rr-
c - '♦
Ces deux Efpeces ne fe trou
vant pas claires dans les Ta-
rifs , ck Alr.de Pontchartrain
n'en s'étant pas informé, lent
remis à un autre Conférence :
elles nous font d; très peu
de confequtnee.
Fanons
Fer blanc
Fromage
Huiles
20
20
C-
6-
0-0
0-0
I-IO-:
I f- O-O
1 3-10-0
+-
3 o- 0-
Idem
o a 20-
à 22-
0-0
ic-o
Idem
4-
10-
0-0
0-0
Me
Pip
es
Porcelaine
Rubans -
Savon
Serges &c.
I - 10
7
r
10 - o
o -V>
o- f
10 -
8-
0-0
0-0
8 - 0-0
Idem Drapé - il- 0-0
Nous fommes convenus de
laiffer les Sucres à 22.10.0.
à condition , que nous char-,
gérons les Syrops ou Melafïes
à 1. fol par livre , pour l'En-
trée chez nous.
Toilles de Hol
lande --- 2-0-0
SUPPLE-
SUPPLEMENT
AUX
M E MOIRES
D E
LAMBERT Y:
ANNEE M. DCC.
Tome XL Z
MEMOIRES,
NEGOTIATIONS-
T R A I T E Z>
E T
RÉSOLUTIONS D'ETAT.
AN N É E M. DCC
AFFAIRES DES PROVINCES-UNIES.
Rêfoiution fur ce que le Gouverneur de Revel a a?Têté des AmiRE»
Grains achetez par les Marchands fîAmJlerâam \ "vinSsT
du Lundi 29. Novembre 1700. * Uw»*
ES Sieurs Députez de la Province de Hollande & de Refo1"-
Weftfrife ont raporté à l'Aflemblée , que quelques Mar- Jj1"" ur
chands de la Ville d'Amflerdam trafiquant en Grains Grains
avoient porté leurs plaintes aux Magiflrats de cette vil- arrêtez a
le, qu'ayant fait acheter une bonne partie de Ségle en Revendu
intention de la faire porter dans ces quartiers-ci ; le *?* ov'
Gouverneur dudit Revel en a refufé la fortie , n'étoit
qu'on en payât des Droits; favoir de chaque lafi un
àtmi-lafi ou fa valeur au de-là des Péages ordinaires; lefqueîs Im-
pots quelques-uns des Correfpondans defdits Marchands trouvèrent
bon de payer \ & d'autres non, mais d'abandonner plutôt les Grains;
aimant mieux hazarder cela , que de foufcrïre des prétentions fi
onereufes , contraires à tout ufage dans le Gommerce à aux Trai-
tez: & à l'Equité même : les Sieurs Députez priant Leurs Hautes
Puif-
* Elle eft Jïtnpkmeni citée dam le Tome I, pag. 187.
Z z
.Affaires
tes Pro-
vinces-
Unies.
i8o MEMOIRES, NEGO TIATIONS, TRAITEZ, ET
Puiffances qu'il leur plaife employer leurs Offices les plus efficaces auprès
du Roi de Suéde, & là où il fera de plus d'utilité, à ce que la fufdite lm-
pofition foit abrogée , & que ce qui a été payé à cet égard foie reflitué.
Sur quoi ayant été délibéré, on a trouvé bon qu'il en fera écrit au Roi de
Suéde, & qu'on lui repréfentera, combien ladite Impofition eft contraire
à la Liberté du Commerce , & aux Traitez qui exiftent entre Sadite Ma-
jefbé & cet Etat, & comment elle eft infupportable aux Negociansj &
qu'ainfi Sadke Majefté fera priée d'y pourvoir de manière que ladite im--
pofition foit annullée , & qu'il foit permis aux Négocians de tranfporter
ici les Grains dont ils ont fait Pacqùïfition fans aucune charge extraordi-
naire ; & qu'à ceux dont les Grains ont été envoyez ici après le payement
de ladite Impofition. extraordinaire , reftitution foit faite de ces deniers, ou
du moins qu'il leur foit permis de fe dédommager de ce qu'ils ont payé en
le déduifant fur les Péages ordinaires lorfqu'ils feront venir de nouveaux
Grains de ces quartiers-là. Et fera ladite Lettre qu'on écrira, conjointe-
ment avec copie d'icelle, envoyée au Réfident Rumpf; & lui fera mandé
de remettre l'original où il appartient , & d'employer tous les de-
voirs les plus efficaces à ce qu'on obtienne la demande qui y eft faite.
Sera de plus prié le Sieur Baron de Lelienrodt, Ambaffadeur Extraordinai-
re de Sa Majcité lé Roi de Suéde, de féconder cette Affaire de fes bons
Offices ; & à cette fin lui fera mis en main par l'Agent Rofenboom l'Ex-
trait de cette Refolution de Leurs Hautes Puiffances.
Rejoint Ion pour TOffroy de la Compagnie des Indes Oc-
cidentales ; du Mardi 30. Novembre 1700.
i>etïoy
de la
( ^ompa-
çnie des
indes
t'Hciden-
jUï le Raport des Sieurs Ham & autres Députez de Leurs Hautes
Puiffances pour les Affaires de la Compagnie des Indes Occidenta-
les , ayant en conformité & en exécution de leur Refolution Commiffo-
riale du 19. May 1699. & d'autres fuccefîivement émanées à ce fujet,
examiné la Requête de la Compagnie Privilégiée des Indes Occidentales
de ces Pais, requérant qu'il plût à Leurs Hautes Puiffances de prolonger
pour ï'efpace de 30. années l'Oclroi accordé à ladite Compagnie , avec
tous les Droits, Privilèges, & Exemptions, ainfi qu'Elles l'ont accordé en
l'année 1674. ■ & qu'il plut en outre à Leurs Hautes Puiffances de ter-
miner, arrêter, & confirmer le Droit de ladite Compagnie de la receptè
de la reconnoiffance des Marchandifes venant des Colonies, étrangères r
iituées dans les endroits portez dans l'Octroi , de la même manière qu'elle
çn a jouï: avant la Refolution de Leurs Hautes Puiffances du 26. Mai
1688. & que par conféquent les deniers mis à part depuis ce tems-là dans
une Caiiïe, fuient remis à ladite Compagnie des Indes Occidentales; que
pareillement l'Avis porté par les Sieurs Députez -de. Leurs Hautes Puif-
fances le 17. Septembre 1677. concernant la diitinclion des Côtes & Pla-
ces dans les Indes Occidentales & en Amérique, dont plus ample men-
tion
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 1S1
tion eit faite dansl'Octroi du. 20. Septembre 1674., foit confirmé & chaji- Affaires
gé en une Réfolution pofitive de Leurs Hautes Puiffances. Sur quoi ayant m:s P***
été délibéré, on a trouvé bon & conclu qu'il fera accordé à la Compagnie YiNCES"
Générale Privilégiée des Indes Occidentales de ces Pais, la Continuation
ou Prolongation de l'Oclroi accordé à ladite Compagnie le 20. Septembre
1674., pour l'efpace d'autres 30. années, & ainfi jufqu'à la fin de l'année
1750. ; & iqu'à cette fin fera dépêché un A6le de Prolongation en due'
forme en faveur de ladite Compagnie des Indes Occidentales. Qu'on in-
férera particulièrement dans l'A été de Prolongation, que ladite Compa-
gnie des Indes Occidentales peut, & elt en droit, de recevoir larecon-
noiffance portée au commencement dudit Oclroi de l'an 1674. & dans la
Réfolution de Leurs Hautes PuiiTances du 19. Juin i6jf. , non feulement
des Habitans de ces Païs, naviguant /allant chercher, ou apportant quel-
ques Marchandifes des Places appartenant à ladite Compagnie, mais en-
core de chacun de ceux qui naviguent, vont chercher, ou aportent quel-
ques Marchandifes des Places appartenant & fous le Domaine d'autres Rois
& Princes, fi tuées dans les Limites dudit Oclroij & nommément auffi
de tous Vaiffeaux étrangers apportant dans ces Païs quelques Effets , Mar-
chandifes, ou Fruits des Indes Occidentales ou des Limites dudit Octroi,
pour leur propre compte, pour le Fret, ou en Commiflîon , foit que ces
Marchandifes viennent par de pareils Vaiffeaux étrangers à droiture des
Indes Occidentales & des Limites dudit Octroi dans ces Païs, ou qu'ils
ayent porté leur charge dans d'autres Païs ou Roïaumes, pour quelle cau-
fe que ce foit ; n'étoit que les Effets d'un Propriétaire euffent été changez
en trafiquant dans l'endroit où ils auroient abordé, & qu'ils y euffent payé
les Droits impofez; ce que quelqu'un venant à alléguer, il fera tenu à fon
entrée de prouver fuffifamment les Effets: Qu'en outre pour lever les
difficultez ci-devant furvenus à cet égard entre les Collèges refpectifs des
Amirautez & de la Compagnie des Indes Occidentales, les Collèges des
Amirautez conferveront & employeront à leur avantage les Droits, les-
quels ils ont reçu au lieu de ladite reconnoiffance depuis la Réfolution de
Leurs Hautes Puiffances du 26. Mai i<588- jufqu'à préfent, & que la re-
cepte des fufdits Droits ceffera par-là à l'avenir: Que pareillement en
exécution de l'Avis des Sieurs Députez de Leurs Hautes Puiffances du 17.
Septembre 1677. *' fera déclaré & inféré dans l'Acle de Prolongation de
l'Octroi, que fous le nom de nouveau Païs-Bas à l'égard des trois pour cent
que la Compagnie prétend tirer des Effets allant de ce côté-là ou venant
de celui-ci, eft comprife la partie de l'Amérique Septentrionale, laquel-
le s'étend au Oueft & au Zud depuis l'extrémité Méridionale de Terre-
Neuve jufques au Cap de la Floride, &. que pour ce qui regarde le pa-
yement de deux pour cent, on entend fous le nom des Indes Occidenta-
les les Côtes & Pais depuis ledit Cap de la Floride jufques au Fleuve d'O-
renoque, y compris les Ifles de Curaçao: Qu'en outre l'on defigne par
les autres Places de l'Amérique mentionnées dans l'ancien ou précédent
Octroi, à l'égard des cinq -florins par Lait fur les Vaiffeaux naviguant
7 "
Affaires
DIS PKO-
VINCES-
U.VIES.
182 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
vers ces endroits-là, toutes les Mes Caraïbes y compris Cuba, la Jamaï-
que , Spagnola & Porto Rico; comme auffi toutes les Côtes & Païs de-
puis ledit Fleuve d'Orenoque par les Détroits Magellaniques de Major,
ou par d'autres Détroits ou PafTages y appartenant, jufqu'au Détroit d'A-
nian , tant dans la Mer du Nord, & les lues fituées de côté & d'autre &
entre deux, que pareillement aux Terres Auftrales ou Méridionales, les-
quelles s'étendent & font fituées entre les deux Méridiens touchant à l'Efr.
au Cap de bonne Efperance & au Oued à l'extrémité Orientale de la
nouvelle Guinée inclufivement. Que la Chambre d'Amfterdam fera aug-
mentée de deux Directeurs; favoir d'un demi Directeur de la Gueldre,
d'un Directeur entier de la Frife, & d'un demi Directeur de l'Overyflel;
& que le débours qui fera fait du payement auxdits deux demi-Directeurs
& Directeur entier, à pareille fomme que d'autres Directeurs , leur tenant
lieu de penfion, fera porté fuivant le contenu de l'Octroi, à la charge de
la Compagnie générale des Indes Occidentales , fans que par-là les Emo-
iumens des autres anciens Directeurs en foient chargez ou amoindris, &
qu'on continuera de tems à autre dans cette coutume.
Lettre de
la Ré-
gence
d'Efpa-
gne aux
Etats Gé-
néraux;
du 1 1
Dec.
1700.
Lettre de la Régence d'E/pagne aux Etats-Généraux des Pro-
vinces- Unies des P aïs-Bas, pour leur notifier la Mort du
Roi Charles II ; du 11. Décembre 1700.
TRES CHERS ET GRANDS AMIS,
Aiant plu à Dieu d'appeller à foi le Roi Charles, nôtre Sire &
Seigneur , le premier jour de ce mois , & ayant trouvé entre les
Claufes de fon Teltament clos deux principales, l'une touchant la Nomi-
nation de l'Héritier univerfel de toute fa Monarchie , & l'autre au regard
de la Jonte qu'il établit tandisque le Succeffeur puiffe gouverner : Nous
avons crû devoir vous faire part de cette trifle Nouvelle, & à même
temps vous envoier Copie des deux Articles ci-defTiis mentionnez ; efpé-
rant que vous prendrez, non-feulement beaucoup de part à la jufle Dou-
leur d'une fi grande Perte, mais auiTi à la Confolation générale que caufe
la Royale Détermination de Sa Majefté ; par ce qu'étant celle , qui peut
le mieux conferver le Repos de l'Europe, elle doit être tenue pour une
Difpofition de la Providence Supérieure. Surquoi nous prions Dieu, qu'il
vous ait, très chers & grands Amis, en fa fainte Garde.
A Madrid, le 11 Décembre de l'An 1700.
Vôtre bien bonne Amie
MARIANE.
El Card. de Porto Carero. Don E manuel Arias. El In-
duis id or General. Don Rodrigo E manuel. Mamriq.ue
de Lara. El Conde de Benevente. El Joseph de la
P u e n t e. Refo-
RESOLUTIONS D 'ET AT, M. DCC. igt
Affaires
DiS Pkcw
Rejoint ion Jur la Notification de la Mort du Roi d'Efpagne \
du Mercredi 8. Décembre 1700 (*). vince^
Unies.
OUÏ le Raport des Sieurs van Effen & autres Députez de Leurs Hau- Refolu.
tes Puiffances pour les Affaires Etrangères , ayant, en vertu & en tion fur
exécution de leur Réfolution Commifîbriale du 2 de ce mois, examiné la laMort
Lettre de la Reine Douariere d'Efpagne & des autres Regens pro intérim, d'f ^oi
écrite de Madrit le 11 du mois de Novembre dernier, & délivrée par .pf~
le Sieur AmbalTadeur de Quiros au Sieur van Haeren alors Prcfident de y d'^ç.
l'Affemblée, contenant la notification du décès de Sa Majelté le Roi d'Ef- 1700.
pagne, & des Claufes de Ton Teltamenr, tant par raport à Ion Héritier
univerfel qu'aux Regens nommez pour gouverner pro intérim : Sur quoi
ayant été délibéré, on a trouvé bon & ordonné qu'il fera répondu à ladi-
te Lettre en termes civils, & qu'il y fera fait un compliment de condo-
léance à fadite Majelté la Reine d'Efpagne & autres Regens fur le décès
dudit Roi de Glorieufe Mémoire; en y ajoutant, que la Conii;itution du
Gouvernement ne permet pas à Leurs Hautes Puiffances de fe déclarer
encore fur la Claufe du Teitament par raport à l'Héritier univerfel, étant
obligées d'attendre fur ce fujet les Avis des Provinces refpeclàves , aux-
quelles on en a donné connoiffance; qu'en attendanr, le défunt le Roi d'Ef-
pagne de Glorieufe Mémoire ayant très-fagement inititué ladite Reine &
les Régens au Gouvernement Proviflonel de fes Roïaumes & Etats , Leurs
Hautes PuiiTances leur en fouhaitent tout bonheur & profpérité, & que
de leur côté Elles prendont toujours à cœur la confervation & le maintien
de l'Amitié & bonne Correfpondance qui a fubfifté depuis beaucoup d'an-
nées entre la Couronne d'Efpagne & cet P2tat ; & que la Lettre qu'on é-
erira fera envoyée au Sieur de Scîionenberg, antorifé pour le maniment
des Affaires de l'Etat h. la Cour d'Efpagne, avec une copie d'icelle , pour
en remettre l'original là où il appartient. Et fera l'Extrait de cette Ré-
folution de Leurs Hautes Puiffances remis es mains dudit Sieur de Quiros
par l'Agent Rofenboom pour lui fervir d'Information.
Autre du même Mercredi 8. Décembre iroo.
OUÏ le Raport des Sieurs van Effen & autres Députez de Leurs Autre fur
Hautes Puiffances pour les Affaires Etrangères, ayant, en vertu & Jérôme
en exécution de leur Réfokition Commifforiale du 4 de ce mois , éxa- SuJet*
miné la Lettre de Sa Majelté le Roi de France , écrite de Verfailles
le 29. du mois paffé , par laquelle Sadite Majelté donne connoiffance aux
Etats que le défunt Roi d'Efpagne avoit déclaré par fon Teftament le
Seigneur Duc d'Anjou , petit-Fils de Sadite Majelté le Roi de France ,
Succcffeur dans tous Ces Roïaumes & Etats ; conjointement aufïï le Mé-
moire
f * } H n'y en a qu'un Extrait dam le Tam. I, p.rg. 228.
i84 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Araires moire du Comte de Briord Ambafladeur Extraordinaire de Sadite Ma-
dks Pro- jq^q^ auquel étoient jointes les raifons & motifs qui ont engagé Sadi-
Ukies. te Majeflé d'accepter ledit Tellament , & affurant de plus Leurs Hau-
— tes Puiflances de l'Amitié & de L'Vffection de Sadite Majeflé pour cet E-
tat: Sur quoi ayant été délibéré, on a trouvé bon & ordonné, qu'il fera
repondu à ladite Lettre en termes civils, & qu'on y témoignera à Sadite
Majeflé , que Leurs Hautes Puiflances ont reçu avec ladite Notification
l'aflurance agréable , qu'il a plu à Sa Majeflé de donner dans ladite Lettre,
& par ledit Sieur Comte de Briord, de la continuation de fon amitié &
de fon affeétion pour cet Etat; que Leurs Hautes Puiflances ont toujours
pris beaucoup de part, & en prendront toujours, dans tout ce qui con-
cerne la profpérité & la grandeur de la Maifon Ro'ïale de Sadite Majeflé ;
mais, qu'EUes efperent dans cette occafion , que Sadite Majeflé, félon fa
grande SagefTe , confiderera aifément que Leurs Hautes Puiflances ne font
pas en état de s'expliquer dans l'inllant fur le cas préfent, comme é-
tant une chofe de fi grande importance ; que fuivant la Conflitution de
Leur Gouvernement, Elles font obligées d'attendre là-deflus les fentimens
des Seigneurs Etats des Provinces refpeétives , auxquels il en a été donné
connoiflance ; & que c'efl outre cela une Affaire qui leur efl commune
avec Sa Majeflé Britannique, en vertu du Traité conclu entre Eux fur
la Succeflion d'Efpagne, & dont Elles doivent par conféquent préalable-
ment conférer avec Sadite Majeflé. Qu'en attendant, Leurs Hautes Puif-
fances n'ont pas voulu manquer à remercier fans délai Sadite Majeflé
de la nouvelle Affiïrance qu'il lui a plu de donner dans cette occafion de
fon Amitié & de fon Affection pour cet Etat} que Leurs Hautes Puiflan-
ces l'ont reçue avec beaucoup de refpecl , & qu'en connoiflant le prix
Elles tâcheront toujours de s'en conferver de plus en plus & avec tous
les foins poflibles la continuation, au delà de laquelle, aufll bien que de
la continuation de la Paix & du Repos commun, Elles n'efliment rien
tant que la bonne Affeétion de Sadite Majeflé. Que cette Lettre qu'on
écrira fera envoyée au Sieur de Heemskerk, Ambafladeur Extraordinaire
de Leurs Hautes Puiflances à la Cour du Roi de France , à ce qu'il la
remette à Sadite Majeflé : & que l'Extrait de cette Refolution de Leurs
Hautes Puiflances fera mile es mains dudit Sieur Comte de Briord par
l'Agent Rofenboom, pour fervir de Réponfe à fon dit Mémoire.
Refolution fur le Manque de Fanaux dans la Mer Balti-
que; du 14.. Décembre 1700.
Manque /H|N a lu à l'Aflemblée la Requête des Bateliers & Pilotes navigant
de Fa- \_J dans la Mer Baltique , comme auiïi des Facteurs des Vaiffeaux, por-
nauxde tant que depuis bien du tems le Fanal ordinaire dans l'Ifle Anout n'avoic
Baltique. Pas W allumé, ce qui étoit très périlleux pour les Vaifleaux qui naviguent
ou qui vont vers le Zont dans la nuit & dans un tems ombrageux, pou-
vant
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 18;
vant par -là facilement échouer fur ladite Ifle; ce qui étoit arrivé il n'y a
que peu de tems à un Vaiffeau venant de Coningsbergue, dont auftï il a
plu à Leurs Hautes Puiflances d'écrire au Réfident Goes, & de lui ordon-
ner de faire en forte auprès du Roi de Danemark que ledit Fanal fut repa-
ré au plutôt, & qu'il fût allumé* mais, que jufq'ici on n'en avoit rien fait ;
priant Leurs Hautes Puiflances, qu'il leur plaife en écrire une autre fois
audit Réfident, lui ordonnant de continuer & de perfifter à prier que le-
dit Fanal foit allumé le plutôt poflible , pour prévenir de plus grands dom-
mages; & que ledit Réfident en outre ait à remontrer à Sadite Majefté ,
& là où cela pourra être de quelque fruit , que comme ladite Ifle a chan-
gé d'aiîiette depuis quelques années , & qu'une pointe de terre avance
préfentement en mer, laquelle ell à fec lorfque la marée efl baffe, beau-
coup de Vaiffeaux y échouoient, que pour cet effet ledit Fanal pourroit
être tranfporté avec plus de fruit au bout de ladite pointe, & y être faci-
lement bâti de briques au printems, de la manière dont Leurs Hautes
Puiflances en avoient ci-devant fait inltruire plus au long le Sieur Moe-
ring, comme cela paroitpar les Reiblutions en date du 51. Décembre i6%2
& 7. Juillet 1683. & par les deffeins qui en ont été remis à Sadite Majefté;
que de plus on mît un Gril fur ledit Fanal , ainfi qu'on a coutume de fai-
re en ce Païs-ci, & qu'on y brûlât du charbon Ecoffois, que deux hom-
mes allumeroient& attiferoient ; que par-là grand nombre de gens feroient
en fureté de leur vie, & beaucoup de Vaiffeaux confervez ; que le Fanal,
où il ell à prefent , n'eft pas bien en vue des Pilotes ni à fa véritable place,
fa lumière donnant une fauffe clarté ; qu'il étoit à efperer que Sa Majefté y
confentiroit, vu que les Vaiffeaux naviguant de ces païs vers ces quartiers-
là payoient annuellement des fommes confiderablesj que le Sieur Ambaff.
Joël étant ici avoit même fait promeffe que cela s'éxécuteroit ; que non-
obftant cela , le premier Fanal foit rétabli par provifion , jufqu'à-ce que l'au-
tre édifice foit achevé & mis en train dans l'endroit de la Carte où l'on a
marqué de la plume une -f- fur la fufdite pointe. Surquoi ayant été délibé-
ré, on a trouvé bon & conclu ,que Copie de ladite Requête, avec la Carte
& autres papiers, fera envoyée au Réfident Goes, & qu'il lui fera mandé
de faire de nouvelles inftances auprès de Sa dite Majefté le Roi de Dane-
mark, & là où cela pourra être de quelque fruit, à ce que le Fanal ordi-
naire fur l'Ifle Anout foit allumé le plutôt poflible, pour prévenir de nou-
veaux malheurs } & qu'enfuite on conftruife au Printems une nouvelle
Tour fur le bord de ladite pointe pour y brûler du charbon fur un Gril , fé-
lon le modèle qui en a été fait; que le Fanal y foit allumé; & que pen-,
dant cet intervalle le vieux Fanal puiffe fervir : Et que le Sieur van Stoc-
ken, Envoyé Extraordinaire du Roi de Danemark, fera requis de féconder
cette Affaire de fes bons Offices , & qu'à cet effet l'Extrait de cette Réfo-
lution de Leurs Hautes Puiflances fera remis audit Sieur van Stôcken par
l'Agent Rofenboom. W. W 1 c h e r s.
AfFAIRE3
des Pro-
vinces
Unies.
Tome XL
Accordant avec le Regitre.
F. F A G E L.
Aa
Ré fa-
i8<* MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ, ET
Réfolution fur la Ratification du Traité fait avec PEJeBeur de
Brandebourg ; du Lundi 20. Décembre 1700.
IL a été trouvé bon , après une Délibération préalable, que les Seigneurs
Etats de la Province de Groningue feront reqnis par Lettre, de con-
fentir fans délai à la Ratification du Traité dernièrement conclu avec le
un Traite sérénifiimeEîecleur de Brandebourg pour le Renouvellement & la Prolon-
gée le
Brande-
bourg.
.Affaires
ms Pko
YINCES
UNItS.
Réfolu-
tion pour
ratifier
gation des précédens Traitez.
Réfolution pour une Pétition de deux Millions pour des Magazins &c.
Kéfolu- f^\^Y îe RaPPort des Sieurs Ham & autres Députez de Leurs Hautes
tionpour \^J PuifTances pour les Affaires de la Milice, ayant été en Conférence
unePeti- avec quelques Sieurs Députez duConfeil d'Etat, fur le contenu de la Let-
^"n,de2, tre dudit Confeil d'Etat écrite ici à la Haye le neuvième précédent , au
îuons. ^et j^^ Forces que la Situation préfente des Affaires du Paï's paroiffoit
exiger , qu'on demandoit qu'on eut foin de pourvoir aux Munitions des
Magazins de la Généralité , & des autres fur les Frontières. Sur quoi
avant été délibéré , on a trouvé bon que pour fuppléer en quelque maniè-
re aux Befoins,tant defdits Magazins de la Généralité, que de ceux fur les
Frontières, & y procéder le plus promptement qu'on pourra, le Confeil
d'Etat fera requis , comme il en eil requis par la préfente , de former une
Pétition pour deux Millions, pour l'achat des Munitions & autres Befoins
defdits Magazins , & de faire remettre ladite Pétition à Leurs Hautes
Puiffances.
MEMOIRES DES MINISTRES PUBLICS
AUX ETATS -GENERAUX.
Mémoire de Monfieur de Gersdorf; du îç.Mars 1700. *
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
LE fouiTigné, Confeiller & Réfident de Sa Majefté le Roi de Pologne &
Electeur en Saxe, notifie avec un profond refpecl à Vos Hautes Pui£
Pologne; 'fances,que le Roi fon Maitre, ayant reçu une Lettre, dont copie eftici
jointe, de Son Lieutenant- General le Sieur de Flemming, qui a le Com-
mandement des Troupes de Sa Majefté dans le Grand-Duché de Lithua-
nie, y a appris, contre toute elperance & contre toute attente, que les
gens de Sa Majefté Suédoife, avec leurs Officiers Commandans féjournam
Mémoire
de l'En-
du 19.
Mars.
t
dans
* Il en ejt fait mention dam h Tome I. , fag. 64.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC.
187
LOCNE.
tîans ces Quartiers-là, avoient entrepris beaucoup de chofes contraires à Affaires
l'Amitié mutuelle; que, félon les Avis portez en ce moment par un fécond
Exprès, ledit Lieutenant - General , dans l'appréhenfion d'une prochaine
attaque ou furprife , & uniquement pour en garantir fes Troupes & le
Grand-Duché, avoit été contraint , fans pouvoir attendre quelques ordres
du Roi , de fe rendre maitre d'un Gabion iltué près de la Rivière de
la Duhne.
Et comme le Roi mon Maitre reconnoit l'Affection particulière que Vos
Hautes PuifTances ont toujours eue pour Sa Perfonne Royale, pour Sa
Couronne, & fa Maifon Electorale, il a plu à Sa Majeflé de réordonner
d'informer exactement Vos Hautes PuifTances de la vérité de la chofe, ne
doutant point qu'Elles n'attribueront pas à Sa Majeflé, fuivant leur Equité
ordinaire , la caufe des fuites facheufes qu'on en doit craindre ; puifqu'El-
le efl présentement hors de fon Royaume , & fe tient avec la plus grande
partie de fon Armée dans fon Eleftorat , n'ayant fongé qu'à vivre en Paix
& en Amitié avec la Couronne de Suéde: mais, qu'au contraire, Vos Hau-
tes PuifTances n'approuveront pas feulement ce qui a été entrepris par le
Lieutenant - General de Flemming , mais qu'Elles affilieront plutôt Sa
Majeflé de leur Secours, que la Couronne de Suéde qui a donné occafion
à cette divifion ; ce que Sa Majeflé reconnoitra autant qu'il lui fera poffi-
dans toutes occalions. Le fouffigné refle avec toute la vénération pof-
fîble &c.
Le 19. Mars 1700.
Gersdorf.
AFFAIRES D'ANGLETERRE.
Lettre du Roi fî "Angleterre , au Comte d'Oft-Frifi, pour lui
faire Compliment de Condoléance fur la Mort de Ja
Femme ; du 13. Nov. 1700.
Amures
d'Angle-
terre.
GULIELMUS TERT1US , DeiGratiâ, Magna; Britannia , Fran- Lettre du
cite , £5? Hibemiœ Rex , Fidei Defenfor &c. JlluJlriJJimo & CelJîJJîmo Roi
Principi Domino Chriftiano Everhardo Principi Frifiœ Orient alis , Domino in Gulllau-
Efens , Stedesdorf & Witmund , Confanguineo & Amico Nofiro ChariJ/imo, çomtc
Salutem. IUuftriJJî^e Princeps , Confanguinee & Amice Charijfime , cum ex d'Oft-
Literis CeUitudinis Vefirœ, die tertio Menus hujus , Aurici feriptis, dilcclijfjï- Frife.
mam Ipfius Conjugem , eandemque leclijjïmam Principem Eberhardinam Sophiam
fubitâ morte prœreptam intelligamus , non pojfumus , pro fummâ no (ira in Ipfam
Amicitiâ , ar claque necejjïtudine , quin tanti Cafâs acerbitatem , ejufdem Ipfi
non ignari , & Celfitudinis Veflrœ vices graviter doleamus , & fi quid in Nobis
fitum fit quod juflifiïmum inopinati vulneris dolorem Jijfere aut lenire pojjït , id
Aa 1 omne
i88 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aftairfs omne pro optimâ Nofïrâ in Celfiîudinem Veflram , ipjîufque Familiam , Voluntate
d'Ancle- £j> Benevokntiâ collât un libenter admodum fumus. Dabantur in Aulâ Noftrâ
T£RRF- de Hampt on- Court ^ die i^.Novemùris , Anno Domini 1700. Regnique Nojlri
Duodecimo.
Celfitudinis Veftrœ
Bonus Confanguincus & Ami eus.
G U LIE LMU S R.
C. H E D G E S.
Lettre de V Envoyé Stanhope au Roi cC Angleterre > du 25",
Décembre 1700.
L'Ambassadeur de France a eu ordre de témoigner au Sieur de
Lilienrodts, que le Roy fon Maître apprenok avec plaifir les foins
qu'il prenoit pour exhorter Meilleurs les Etats Généraux à la Confervation
delà Faix. On remarque, partons les mouvemens qu'il Te donne, qu'il
ambitionne une nouvelle Médiation. Aurefte, Sire, comme nous allons
entrer dans une nouvelle Année, je ne fçaurois m'empêcher de témoigner
à Vôtre Majefté les Vœux ardens que je fais journellement pour la Prof,
périté de fon Règne, & pour le parfait contentement de Sa Perfonne Sa-
crée. Je fupplie la Bonté Divine de les vouloir exaucer , & de difpofer
par fa Toute -Puiflance toutes chofes d'une manière qu'elles contribuent
à la gloire de Vôtre Majeité, au bonheur & à la félicité de tous fes Royaumes
& Etats , & à la joye univerfelle & particulière de tous fes ridelles Sujets.
Je fuis avec la foûmillion la plus refpeclueufe du monde,
Lettre de
Stanhope
au Roi
Guillau-
me.
SIRE,
De Vôtre Majefté
Le très - humble &c.
A la Haye, ce 2f. Décembre 1700.
Stanhope.
Affaires
d'Italie.
Difcours
duCard.
d'Ktiées
au Pape.
AFFAIRES D'ITALIE.
Difcours du Cardinal d'Eîrécs au Pape dans le Confifloire du 2 1
Juin 1 700 , touchant 1 Election du Cardinal de Noaïllcs.
A Promotion à la Pourpre, qu'il a plu à Vôtre Sainteté de faire de trois
Perfonnes illuflres par leur riaiflarice & par leurs vertus, recomman-
dées
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC.
lîo
dées pour la faveur & eftime des Princes, doit plutôt être receuë avec re- Affairf»
connoiiïance & avec un aplaudiffement public , que d'être mife en de!i- d'Italik.
beration par les Suffrages qu'EIle a daignée nous demander. Car, qu'a-t-on
à faire de plus convenable pourfe captiver l'Amitié des Princes, ou de plus
propre pour honorer cette facrée AiTemblée ?
Mais, trouvant dans leur nombre l'Archevêque de Paris très-agreable à
mon Roi, c'eft mon devoir indifpenfable d'en rendre grâce avec recon-
noiflanceau nom du Roi &de toute la Nation; ce que je fais à vôtre Bea-
titudeavec l'humilité convenable. Je pafferai fous filence les honneurs in-
fignes de fa très-noble Famille , augmentée & iliuflrée déjà par tous les
principaux titres , par les charges auprès du Roi , par le commandement
des Armées, & même par des Victoires. Je laifle le foin de ces chofes
à d'autres; & quant à moi, il ne fuffit de dire hardiment ceci, que tout
ce qu'on peut jamais fouhaiter, pour remplir faintement & favament tou-
tes les Charges les plus eminentes de l'Eglife , a été vu concourir en-
femble & croître dans l'Archevêque de Paris, par ceux qui voient
avec vénération fon excellent naturel depuis fes tendres années , culti-
vé avec toute forte de pieté, & continué jufques à une parfaite virili-
té à Tàge de la plénitude de Chrift , avec une infigne charité , une
continuelle vigilance , une modération d'efprit , une connoiffance des
choies, une fcience extraordinaire , une doctrine très-pure, & un grand
& confiant refpect envers le S. Siège Apoftolique. Ainfi, il réfléchira en
abondance fur la Dignité la même Splendeur qu'il recevra d'Elle.
AFFAIRES D'ALLEMAGNE.
Conditions, que Son A. Ser. Monfeigneur le Duc.de Brïmswïc-
Luncbourg offre à ceux qui voudront lui prêter de
r Argent en Hollande ; en Septembre 1 700.
Affaires
D'ALLE-
MAGNE.
i.T E Confentement des Etats de Hollande, en vertu de leur Edi£t du condi-
-1— / 7. Avril 170O. tions
2. Une bonne Obligation fignée de la maindeS.x^.Sereniffime. d'unEm-
x . Le Confentement de Monfeigneur l'Electeur fon Neveu & Succefleur, prunt
ligne de la main de h. A. L. BrunY-
4. Une bonne Hypoteque dans fes Etats.. wik,- en
f. La Caution de Leffman Berens àïïannover, pour le Capital, moye- Sept.
'uant un Acle en bonne forme. J''oc*
6. La Caution de Wolf Goldfmit à Amflerdam, aufîï par un Aéte pour
y payer régulièrement les Intérêts.
7. Les Intérêts feront cinq peur cent.
Aa j
Une
,Po MEMOIRES, NEGOTIATÏONS, TRAITEZ, ET
AmtREs
d'Alle-
magne.
Déclara-
tion de
l'Empe-
reur fur
le Traité
de Parta-
Une des Déclarations de S. Afaj. Impériale fur le Traité
de Partage ; en 1 700
a Majesté' Impériale nous a commandé de vous dire, qu'Elle
a déjà fait déclarer l'autrefois, comme quoy Elle croyoit indécent &
injuite de traiter ou convenir de la Succeffion ou Partage de la Mo-
narchie d'Efpagne, pendant la vie du Roy Catholique , & après les Con-
tradictions & Proteftations qu'il a faites dans tous les Endroits de l'Eu-
rope. Nôtre Auguite Maître efl confirmé dans fon Opinion par l'efpé-
rance qu'il n'a pas encore perdue, que le bon Dieu, après la dangereufe ma-
ladie de Sadite Majefté , la remettra en pleine fanté. Du refte, Sa
Majefté Impériale réitère les alTurances données, qu'Elle efl toujours de la
même intention & defir d'entretenir avec le Roy Très-Chrétien une
Paix confiante, & Amitié fincere; comme auffi d'obferver religieufement
du vivant du Roy Catholique (pourvu que la France falfe le même)
les Déclarations faites en dernier lieu.
ffpèce
de Mani-
fette de
l'Empe-
reur iur
fesDroits
à la Mo-
narchie
d'Efpa-
gne j en
1700.
Carolus
II. Hifpa-
niarum
Rex
ad Suc-
ce fuo-
r.empra;-
tensè vo-
cat Ande-
gaven-
iem Du-
cem } &
Synop/is quorundam Jurium Auftriacorum in Succejfio-
nem Hifpanicam,
Ad Lectorem.
NE mirere brevitatem Scriptionis , quifquis in curtas hafce paginas Japer tam
ampla SucceJJione incidis. Veritas iungâ cerufsâ non indiget , nec deerunt
etiàm in bac ipsd maieriâ dilatandâ accuratiores alii, quibus & meîius efl otium
& accejj'us ad Archiva paîet \ me obviorum duntaxat confeio , atque alias eiiam
Laconifmum amante. Tu intérim , quidquid hîc efl quant ulumque quod legis^
abfque affecluum fludio pet -pende , & , fi Jufiitiam colis, ac Summum Deum
pro te fie vocatum confickras, Pyrcnaam Pacem & Pacla tôt vicibus jurata,
quoeumque potes efficacijjimo génère , contra temeratorcs vindica , cogniturus eb
m agi s tandem commune Fatum immanis Potentiae rarô fempitemœ.
SErenissimus ac PotentiiTimus lïifpaniarum Rex Carolus II.
vix fupremum vitre diem obiit , cum anxiâ jam pridem cogitatione in
hune triftem cafum defixus Orbis, praster omnem opinionem percepit,
Hifpanicum polt hac Genium in Mores Gallicos inflectendum eïTe , Tefla-
mentumque produci, miris artibus conditum , quo non agnatus indubius,
& in familiâ limul fenior, fed fedecennis è feminâ exclusâ confànguineus ,
ad Succefiionem Regnorum , Ducatuum , Priiicipatuumque Hifpaniœ fit
defignatus-, quicquid jurata pacis & paétorum fides • paternaprior, avita-
que difpofitio ; major setas in pari gradu, expiranti lineae juxta leges Hif-
panicas fuccedanea ; Confànguinitas quoque proprior è materno llemmate;
&, quod omnium penè caput videtur, Europe univerfae quies, ac falus
*' recla-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC.
ipi
d'Aixe-
MAGKE.
Leopol-
dum lia»
perato-
rem,
è prirni
acquircn-
tisAvâ-
triaci li-
neâmai-
culinâ
per Fer-
dinan-
dum I,
quiaFra-
trepri-
mogeni-
to apana-
giatus &
reckmet : quippe qua? junctim feorfimqueDiadema Hifpanicum, non Du-
el Andegavenii Philippo Borbonio, fed Romanorum Imperatori Leopoldo
Auftriaco afièrtum eunt.
Enimverà ut res tota è quibufdam breviter primordiis expendatur , illa
fie fe habent.
Vixit ante duplex fœculum Philippus Primus , Maximiliani Csefaris fi-
lins, è ftirpe Àuitriacorum, ut nemini non confiât, féliciter procreatus.
Binos hic filioshabuit, Caroîum cetate majorera Gandavj in Beigio editum,
& minorem natu Ferdinandum, Médina: in Hifpaniâ generatum : Hune
fub Prîmi numéro Romanum împerium exprimit , illum vero Quintum vo-
cat, qui aliàs primus fub Caroli nornine inter Regum Hiipanorum Faftos
iegitur. Fraterna dîtionum inter illos divifio fub annum 15-2.!. fie" Worma-
tiae peracla eft, ut, quas fub fuo Cataiogo Hifpania numeraret, ilias fibi
cum Burgundiâ , Belgioque integro retineret Carolus henior , Gerraanica
portione Ferdinando Fratri juniori, ce vix plenè puberi reliera. Felicio-
rem hic fati fortem in fratre Primogenito, & jam Casfare, agnovit, eô-
que faciliùs tune quidem, (uti extraétus fub Numéro î.infinuat ) cum pau-
sillo dimiiTus eil, fed non a!iâ tamen veS mente vel poteitate , quàm ut jus
reliquum, quo in venerationem primogeniturae abftinebat, fufpenrum fem-
per ac falvum fervaret , juxta primogenitorum indolem fuccefïurus, cum
mortalitatis leges poftgenito locum in amplifîïmâ hsereditate fecerint. Di-
rectrice hâc folidâ feu vita? feu mortis Régula Ferdinandus progeniem
fuam per Filium , Carolum quoque dictum, & ex hoc nepotem, pronepo-
temque Ferdinandum nempè fecundum ac tertium , rec*tà lineà ad glorio-
fiiîimum nunc Imperatorem Leopoldum perduxit : atque ut amorem item-
matis ac Pacli Wormatienfis fenfum fequeretur, hœredem filiis fuis liifpa-
nicam domum fubftituît ; etiam fîliabus, fi quos folas relinqueret fub N. 2.
poftpofitis. Carolo Quinto , feu fi mavis Hifpanicâ in Causa, primo,
poft Philippum Secundum, Tertium, & Quartum, fuccefilt Carolus Secun-
dus Beatiffimae Mémorise, nuper defunctus. Hic maire Maria Anna gavi-
fus e(t , jam dicli Ferdinandi Tertii filiâ, & Leopoldi forore, duplicato
confanguinitatis vinculo, fi & proximum maternum genus & avitam quo-
que propaginem Auftriacam in adjundtis fub N.$.& 4. Genealogiis intuea-
mur, cum Caefare Leopoldo colligatus.
Moverunt hocc & alia complura, quac communem Regnorum , particula-
remque Hifpania:, naturam concernunt Philippum Quartum, Caroli defun-
cli patrem, ut Mariam Therefiam, primogenitam riliam fuam, Ludovico
XIV. Galliarum Régi nuptam, ad Régna, Provinciafque Hifpanicas , née
direclè nec indirecte admitti, fed ab eis penitùs cum omnium defeenden- Tefta-
tium fexu & gradu, in perpétuum quamvisPacisPyrensese exelufam volue- mentum
Tit^ Teftamento infuper fub annum i66y. ereéto, quo ad Succeifionem il- j^'PP,1
iam, in defeétum reliquae Prolis Hifpanicse , votis verbifque expreiliflimis ron-sM°
collateralem Stirpem Auftriacam -defignavit.
Bellum grave & vario diferimini obnoxium , poil fignatas anno 1648.
Weftphalicse Pacis Tabulas, Iiiipaniani inter & Galliajn ad multas adhuc
sellâtes
in îîiTps,.
nicam lï-
neam
propriis
fîliabus
poftpofi-
tis
benevo-
3 us fuit p
notorie
defeen-
dentem,
duplici-
que con-
fanguini-
tatejunc-
tum ,
proeterit s
contra
nasThe-
refiaî Ré-
mi ne ia-
tionetn,
i92 MEMOIRES, NEGOTIATÏONS, TRAITEZ, ET
AmiRis aeflàtes remanferat , in longiorem utriufque gentis perniciem per adverfa ,
d'Allé- qUge identidem cudebantur, arma & fcedera iturum , ni odii piufquam Va-
MAG-V£- tiniani violentior impetus per machinam concordiae fifleretur, quae ipfa
tamen uti non alia videbatur quam Connubii forma, rkè fieri poiTe , ita
follicitac ad hanc curse appiicabantur. Margarita Sabauda primùm nuptu-
rienti arridebat, fufpiciebatque is eam vehementiori jam aftectu ut ad ma-
trimonium cum ipsa fat pronus cerneretur. At facile fuit retinere incep-
tos amantes aeftus , meliorum fpe nuptiarum cum Infante Hifpanicà. Illuf-
tria ad lias Argumenta impeilebant Gallos, atque ipfa Régis Amita Chrif-
tina, exaclà Matrona Judicii, quae cum filià fuâ, praofatâ Margarita , Tu-
rino in Urbem Lugdunenfem è condiclo venerat , praefentem , procum-
que Confobrinum Regem generosè hortabatur, ut cum hàc omitteret con-
nubium, cum Hifpanâ ambiret, pro publico Chriftiani Orbis, & tôt prae-
fertim Regionum , tàm longis bellis attritarum , commodo.
Difficile negotium erat, quod prudens fœmina inter caeteros fuadebat,
publica privatis fuis rébus magno animo praelata. Oblu&abantur jam antè
ac diu Ilifpani, deterrebanturque praevisâ variorum imagine, quae gentes
natur.à fuâ diflbnas in funeftiorem poifent olim Cataftrophen inducere, fi,
qute fperaretur è tali matrimonio foboles , ad Régna Hifpanica quando-
cumque afpiraret , obtentu materni fanguinis fpeciosè formando. Diffi-
cultas haec meritô tam ingens vifa eft, ut fixum maneret in fœdus nuptiale
tranfiri non poilè, nifi amorem eminentis mariti, fponfa reliquis, forfan
aliàs valituris , reflexionibns anteponeret. Nempè renunciandum erat
Mariae Therefise, non pro fe folùm, fi viduitatem improlem exciperet,
fed etiam pro liberis ex fe nafcituris , utriufvis îtxùs , ut ne fpes fpei qui-
dem circà Succeflîonem Hifpanicam Gallicano germini fuperefTet.
Quod uti moleitum non erat filiae in rem praefentem humanitùs intentas,
pofl habito futurorum incerto, &, fi contingeret , trifli cafu, ita facile
Hacreditatem Hifpanicam, quocumque poil hac tempore, & qualicunque
tandem modo, feu fibi feu pofteris fuis fperandam refutabat, praefenta-
neum florentis Coronae Gallicae confortium adeptum, è quo fi liberi pro-
dirent, jam aliundè fat fauiti effent & fi ab Hifpanico non minus Patrimo-
nio , quam genio remoti. Nec abibat ab hoc libero Regalis filiae Confenfu
Philippus Pater , Sponfufque Lodovicus } Hifpanus tamen non abfque cir-
cumfpefto metu , ne, fi Renunciatio , penfatiffimis verbis non fieret, Mi-
niilri Gallici in afcititiam interpretationem proclives forte olim anfam ar-
riperent fuis affe&ibus velificandi , tune potiffimum , telle experientià,
prœvalidis, cum res quidem & pa£ti mens clara eft, vox tamen obfcurior
tam diu in obliquum fenfum per militares turmas detorquetur, quam diu
militas & vis Gallorum finit.
Cardinalis ergo Mazarinus ,& Lodovicus Mendez de Haro, Minifter u-
terque Regum primarius , & quorum hic pro Hifpano Caducatorem , il-
le pro Gallo agebat, cum ad Montes Pyrenaeos conciliandae Paci diver-
fis in Congreltibus infudarunt, faepè diclae Renunciationis formam hinc
iude cogitabant folerti fludio , donec in ampliffimam compofitis ani-
mis
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. t93
mis claufulifque efficaciflimis pro lege duraturis cum gaudio convenirent. Aïfai
Speciali ad illum mandato telle N. f. muriierat Legatum fuurti Rex Chri- "'Aui:-
ïiianiiîimus j nec potcitas par deerat litrêris à Rege Catholico hune in fi- MAGWi
nera fub N.6. datis j & eenfebatur utrinque cum Livio ubi Fide, Fœdere ,
Patio, Juramentu tranjigitur , Jus Gentïum prœvalere , ac mulîum quidem ïn-
terejeinter fidem pubucam& pïvatam tpubiicam ex dïgmtate , privatam ex for-
muià ciccLpï, li tamen & dignitas & formula in paôto cdneurrant, longé
fanéliùs hoc obfervandum elle.
Fundamentum fané Regiis refpeclibus dignilTimum , cui tam folemnis partem
conventio, & Pyrenseae quidem Pacis pars prima Ck nobiliffima juxta arti- Pnma-
culum ejus 33. hîc fub N. 7. appolkum, decendlïime fuperitruebatur :
Neque poterant, vel plura pêne, vel efficaciora verba reperiri, quibus folem-
& fuam Regalis bponfa renunciationem & fuum Rex Sponfus aflenfum nem,gc-
exprimeret. Prolixe omnibus ac fingulis renuntiabatur Juribus, Titulis, neraleuj,
Legibus, Confuetudinibus, Ordinationibus, Difpolkionibus , remediis ac
prœtexcibus , quibus ipfa renundans, (excepta lterili viduitate ) vel ejuf.
dem liberi quoeunque gradu ac fexu è Gallicano thalamo generad ad rni-
nimam Hifpanicarum Kegionum SuccelTionem, alto unquam poifent œvo
contendere: Direcïa a<i hanc via & indirecta qùaevis prascludebatur poi'le-
ritati Gallican : Rogabaturque Summus Pondfex ut flipulationi tam delibe- &xsum--
rata: & unanimi, pro quiète Regnorum & Orbis publicâ confecla: , cum moPon-
ipfifmtt Pyrenseae Pacis Tabulis die 7. Novembris 16 f p. fubfcripta: , in tificead
numerofo cœtu Miniltrorum utnufque Régis, non fine rhutuis applaufibus Partlum
fignatae , & omnibus undequaque partibus tam pro vida induftria Habilita:, 2^/"
Apollolicam benediciionem impartiretur. approba-
Légat vir jultus & iniquae paiTionis expers vel folam dotalis pacli Para- tam5
graphum quartum, quintum,& fexium cum epilogo fub N. 8- hîc pariter
luDJunftum, & abfque longo examine aétutum deprehendet, nullam poife
difpolîdonem fieri, nullam ordinationem condi, nullum preetextum fumi,
quo mas Gallici fanguims ad Sceptrum Hifpanicum anhelare queat, tôt
Claris Periodis, tôt emphaticis verbis, tôt derogatoriis, conltitutoriis,
declaratoriifque claufulis ab ejufdem fpe omni exclu fus. Non elt hîc opus
fchulaftico pulvere ad ofFulcandam clariffimam literam. Explicationes
verfatiles non admittit ferutator rerum Deus, in teftem vocatus. Haud PerJura"
patitur Chriltianse Crucis gloria , Evangelii Sanélitas, Miffie Canon, De- rot,ora-
cufque Regium ( per quas umnia juranaum erat , ex Concordiae Pyrenasae tam,
Formula hîc fub N. 9. adjacente) ut voces loquantur aliud, & aliud intèn-
tiones dicant.
Mens véra flipulantium, & profapiae Gallicx aeterna exclufio, fat è ra-
tionibus publicis, fat è pa£to per ratificationem Régis Gallias fub N. 10.
adji:n£tam confirmato patet.
Rex ipfe Catholicus Philippus IV. qui Pacli fenfum praccipuè norat , di- m^
lucide hune repetit in uldmo voluntatis elogio quod 14. Decembris 166 f. fhiiippi
per verba fub N. 11. hûc tranflata expreiîît. Multa in hoc Teftamento iv.
& diveifa coordinat de hscreditate Hifpanicâ • multa etiam de metu péri- ciarèex-
lomc XL Bb culi Phcatam>
jlFFATRÏS
d'Alle-
magne.
Ita ut Do-
nnai Ger-
mar.o-
Auftriaca?
validilïi-
imun Jus
fit quœfi-
la ni.
Carolo
Kegi, va-
riis tirulis
erita h3nc
«bligato ,
w MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
culi innuit, quod Hifpaniae ac toti Chriftianae Reipublicae ex Matrimoniis
Gallicis immineret, nifi obex foboli ex his ortae orkuraeve effet pofitus.
Commémorât fusé , quam acrem & in omnes partes vigilern curam cum
Sorore Anna, cum Filiâ Maria Therefiâ , cumque propnà Conjuge Elifa-
betha Borbonia obfervari neceflum fuerit ne mas vel foemina Galiici ltem-
matis,quocunque in gradu vel cafu, Hiipanicas Ditiones per SuccelTionem
attingit. Verbotenus capitula recenfet , novhTimè confecla , ad qualef-
cunque occafiones avertendas, in quibus etiam è longinquo timeri poffit
ne Terra? Hifpanica; cum Gallicis uniantur. Accuratè dinumerat nonnul-
las Succellionum Lineasj & quamvis fciret fœcunditatem arnplam è Ge-
nero Rege Ludovico non defuturam Filias fua: ( quippe quae végéta erat &
jam tùm Delphinum pepererat , nec non filias duas ) Pyrenaeae tamen Pa-
cis & Paftorum memor, propaginem Gallicam pro eventu quovis & ta-
men indiitin&è ab hasreditate Hifpanica rejicit , ut licet Regnorum unio
ob fumum Legis Salicae haud queat infœminis contingere, nequaquam ta-
men eas, ubi lèmel Juris Galiici fuerint, fuccedentes velit. Ad propriam
Auitriacam fe potius convertit familiam, & liberos è Sorore Maria v'ocat,
quse mords quidem fata fub annum 16^6. fubierat filiorum tamen complu-
rium & inter hos Leopoldi Auguitiflima ex Imperatore Ferdinando Ter-
tio , prius mater faéta. Quid ? quod adeô Gallicanam Stirpem à Regnis ,
Dominiifque Hifpanicis fubmovet , ut û Auftriaca paulô ante memorata,
deficiat , poflericatem Arnitse Catharinae Sabaudœ, jam anno ifoy.defunc-
tx , pro iis obtinendis defignet.
Egregia utrobique documenta exclufionis Gallicae & manifeili Juris Au-
ftriaco languini competentis.
Non latebant tàm aperta veritatis teilimonia Regem Carolum, nupèr
è vivis fublatum. Renunciatio fororis , & defcendentium hujus , perpé-
tua, in aprico erat; Teftamentaria Lex Patris Philippi, Succefforem Au-
itriacum îpecificè demonftrabat ; Leopoldum Caefarem coîebat Rex Caro-
lus, atque illum ut à Pâtre agnatum, à Matre Avunculum ab utroque fli-
pite feniorem, à conjuge affinem , à Teftamento praecitato fuccdTbrem
fibi proximum, à Coronà Hungaricà in fe haud pridem telle N. n, con-
derivatâ beneflcium , & diverfis aliis venerandum titulis , fufpiciebat ^
imô in Hifpanicas vires , Ci vel unicum huic fub N. 13. annexum
exempîar iiterarum fpeclamus , potelïate magnà adhuc vivus impenie-
batur.
Cum intérim, ut Mundi Stropha eft, è Miniflerio Hifpanico nonnulli
eflent, qui viciniorem, nec auri parcam, adorantes potentiam,qu3?rebanr.
Regem languidum in diverticula pellicere , & à Via propriaé fupremœ-
q.ue dormis abftrachim , ad Galles Gallicos , tantâ alias averfione failidi-
tos , folerter invitare. Efficaciam Renunciar.ionis Therefianse ; Eviden-
tiam Teftamenti Philippini, & quae cetera ad Gallicam exclufionern ver-
gunt, fatebantur ipfi, fupponebantque ; (nec enim poterant in foie lucem
pegare) fe.i rationem putabant, in roetu Unionis .Coronarum confiitere,
qui li ccflaret, Unione pruhibità, polie adiium bine Gailis ad Coronam
Hifpa-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC.
W
Hifpanicam pofie fieri. Proinde Teftamentum diligente: fabricant; Juris-
prudentum Confulta fueatè immiicent, & conquiiltis pro duce Andegavi
verbis, moriturum Regem adoriuntur , ut arido & exfucco corde, ac re-
foluto in pituitam cerebro , pulchrum opus approbet quod oranis œtas mi-
rabitur, feuScholis, feu Aulis idonea ; il prœfertim cum extraftu fub N.
14. hic appofito genuinam feriem totius rei de caetera? notai atque alias
jam ante memoracas circumftantias, paulifper conférât.
Ex Teftamento anteriore Philippi Patris, res clara, certa, & illimita-
ta agnofcitur pro Agnato Auftriaco ; in pofteriore Caroli Filii , limitatio
flguratur, quam nec Verba nec Senfus tolérant. Teftamentarium fibi Ar-
bitrium Filius arrogat in ultimo, cujus Suafores hoc Patri conantur auferre
in primo.
Renunciatio Sororis atque Amitae , univerfalem , indefinitam , & di-
reciam Abdicationem continet j at Carolinum , quod praccenditur , elo-
gium vult obliquam reftrictionem inducere, contra voces & intentiones
jam fupra Habilitas euntem. Priores ac folemnes Tabulae amorem indigi-
tant Auftriacae Domus, atque ut perennent ejus incolumitatem adaugeant,
in fundamentales leges aptantur; ar. Regnis privare, jam ultra Liberorum
tempora per nomen Auftriacum famofis, & ad ea Succeflbres Gallos vo-
care, an hoc amare Domum Auftnacam, & incolumitatem ejus majorera
facere ?
Confpirat ergo cum Textu nbique ratio ad exclufionem Stirpis Gallicae
omnimodam, neque in padlo Gallo-Ii;fpanico nec in Teftamento Philip-
pino fola Unio Coronarum expenditur.
Quid enim alias vel pro ipfis-met fœminis vel pro fobole poftgenitâ 11-
mul renunciandum fuJiîet ? Cum & haec primogenitis locum cedat in Gal-
liâ, & illae à Scepiro Liligero in omne aevum arceantur; ut fruftra ti-
meas Coronasrfto in uno capite , ad alterum ex iïs ferendum prorfus invalido.
Silëntiam ante hâc tenuit, & vi pacti nupdaiis Materni hic fub N. if.
adjecli , femper prseteritus eft Dux Aurelianenfis , ex Anna Hifpanicâ al-
ter filius: quid tamen obfifteret huic, il foiaformido Coronarum unienda-
rum refpiceretur ?
Et nupèr aufus eil poflremi Teftatoris fuggeitor callidus manifeftam in-
juriam Serenifîimis Filiabus Leopoldi Imperatoris facere, dum eas omnes
& fingulas in praefente Teftamento excludere nititur,in quibus tamen quis
vereri poterit ne Hifpanicus Gallicufque Thronus in confortium hajredi-
tatis, & unum Corpus coalefcat ?
Patet itaque longé alium , quam folius Unionis metum pœnes predecef-
fores in Hifpania refediffe, conftanter & ubique ex motivo quietis publi-
cs, fpecialifque Auftriaci boni follicitos, ne Principein e Galiia, Regem
in Hifpania ferrent.
Et quid amabo , il periculum diéiae Unionis examinamus modernos Hif-
panos fecuros reddit adverfus incoronationem Gallicam , quam tantoperè
deteftari non definunt ? An Francica fides , toties data, toties delufa?
An Hifpanica gravibus tôt fubitis fsepè turbinibus ab agilitate adveriàe gen-
Bb 2 tis
A FF A II' K*.
d'Alle-
magne.
nec vo-
luntns nec
poteftas
teftandi
fuent.
Nec ratio
Renuncia-
tioiuun
in folo
mctu U-
nionis Co-
lon arum
conliftit ,
fed alias
quoque
rationes
confidexa-
tas efTe
confiât.
Neque et-
jam dictas
timoï
Unioins
ceflat.
Affaires
MAGNE.
Hirpani
infuper fe
ipfos pio-
ftituant.
Et inter
eos faino-
fier
Ambni-
îieniis Ar-
chiepifeo-
îiiTiil ta-
men pro-
bans j fed
potius
per con-
gefta mo-
tiva in
i|)Gn>
met Gal-
liam
196 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
tis in gyrum rapta? An tsedium aut contemptus unius diâdematis, vacan-
te vicino akero & conterminis ditionibus, donec in Provinciam redaéhe
fine nunquam non infidiofo? An aeterni certitude» fati contra mortalem ca-
fum, quo forte Dux Andegaventis fuis omnibus , qui nunc vivunt fratri-
bus fuperiles manebit? An hinc Hifpaniam dimittet, tôt jam iibi vincu-
lis innexam , & à terris tôt auriferis , commodiique Portibus proflcuam?
An ei quis cafus daretur pro Archiduce Carolo., aut Duce Sabaudo , aut
etiam pro fratre Bituricenfi, omnino paratus, & unopatrio Diademate jam
fatur, Dux Andium ab hactenus poiTefib abfcedet?
Celebratior eft Hifpanorum prudentia , quàm ut perfuafmncuiis hujuf-
modi ac officiis inanibus fmeere applaudant , mox in parvis vifuri quam
turpem fervitutem, ni matunùs ii refipifcant & domum Auftriacam fe-
quantur ,• debeant in magnis fervire.
Et jam tum compaiïionem meretur humilitas ifta quâ hic fub , N. 16,
annexam injurius videri vellet, mpdis omnibus eam eludere conatus eft,
ac Magiftràli Epodo liifpanos erudire, quid îpfismet proficuum, noxium-
ve efle debeat.
Citata San&io cum aliis Hifpanix Legibus in libro proftat quem Nueva
Recopilaçion feu novam Colle&ionem vocant, jam anno 164.0 Madriti im-
preiib. Fortiffimis haec verbis à jure Hifpanicae Succeffionis omnes Gal-
los éliminât, ut nec Ludovico XIV, fratrive ejus , nec u!ii ex horum li-
beris capacitas fuperfit ad Régna Hifpanica, aut adjeéta his dominia,per-
veniendi.
Agnofcit manifect-iiîïmam legis literam memoratus Archjepifcopus , &
mirum in modum fe torquet ut tamfirmum obicem queat perrumpere. Le-
guleiorum quorundam fubterfugia repetit, jam diù à Belgis ac Hilpanis ad
ruborem & obmutefcentiam Gallorum explofa; & ut aliquid addidiffe vi-
deatur, per intégra & poftrema Capita Libelli fui Jaboriofus eft ut aftruat
dictas legi rationem utilitatis publies, Legiflatoris authontatem & folemni-
tatem Promulgadonis defuhTe. Quafi res ea fola fit publico utilis mue non
Commodum Auftriacas gentis , & quietem diverforum Europae Populo-
rum, fed unicum incrementum PoLentiae Gallicas refpicit : nec validte pof-
fiht ab uîla Monarchia Conftitutiones fieri , quibus non aiTenfio Gahica
& exoletus antîquorum faeculorum ufus fuffragetur. Sufficit in allegatâ
Sanctione Hifpanicâ juilum amorem & decus proprise domus Auftriacae
•valuifTe , per jurata Gallorum pacla , jam anté confirmatum. Sufficit
diclam Pragmaticam à Rege provido ad Confultationes ac Preces Statuum
Regni, pro Stylo jam Atavi memoria recepto, non fecus ac alias recen-
tioresleges, confeétam promulgatamque elTe.
Incautus eft Gallus , & in ipfam Legem Salicam atque authoritatem fuo-
rummet Regum iniquus, û valorem quâ Compilatores Teftamenti Caro-
lini patriotas reliquos proftjtuunt , dum fuomet fed tumultuario & prœci-
piti judicio, fe Gallia viliores pronunciant , qui Hifpanicam hue ufque
preceminentiam & fcnptis & geftis variis , non alteri quam Carfari proxi-
raam tutabantur, OfTerunt nunc illi (quod ftupemur) ultroneam palmam
trium-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. j9l
triumphabundis Gallis, & (quod magis miramur) cum abjecto fupra rao- Affairf*
dum animo & calamo. Vix demifiiùs potuiflent Gallicanam oitentare n'Au.s-
aut prœferre magnitudinem , quatn , quod palàm edicant, Andegavenfis MAUlNK-
afFeclum Ducis pro Sceptro Gallico, il vacaret , potiorem fore ; & tune
fi Iiifpaniam fperneret , in Galliàm properans , opportere conr.entos fe
efle , ut rninor annis & loco Gallus , Adventu & Imperiô fuo, Iiifpa-
niam dignetur. Exemplum Heririci Valefii ad Gallos profugi nondum
concoxit Polonia. Quid igitur Hifpania cogitec, non abfque vilipendio
fui fpontaneo ideam fugae in abeunte , & novam preecariamque fub-
jeélionem fuam refpeétu novi adventamis Domini praeconcipiens.
Sed hsec ultima quafi privata funtj caetera omnia magis publica , & &inpro-
quaiem in partem vertamùs oculos , paritate exempli in futurum perni- pliaf Le:
ciofa. Agitur de vi pacificationum, de viribus & religione pa&orum , de- lunt"1*"
que ipfo Hifpanicarum Legum robore.
Inficiari hoc nequeunt Scriptores Gallici, & eminentioris inter eos no- Quicquid
ue, Ambrunenfis Archiepifcopus in Libello , antè hàc edito 5qui Defenfio- «»•«« bu
nem Jurium Reginse Chriftianiiîimse prse fe fert. ^.,hfci
Operofus in illo cum adverfus Hifpanicos calamum ilringeret, prae Gai- rint f"
licano Marte , qui tùnc in Belgium irruebat* nec tamen in Pragmaticam
Hifpaniaî Sanciionem Sanciiombus denegat, in quarum forma aut màteriâ
mores omnium primi ceffaverunt.
Non tàm acris femper & acerba fuit Galiorum bilis in fœmineum in y«»î«
fexum, ut hune cum Pollens cognatifve penitùs à Regni Succeiîïone de- dillexens*
pulerint > & tamen quid Lege Salicà cum tempore induelà defendatur,
ineridiano tiï foie notius.
Neque Gallici Authores folemne Arreflum diffimulant quô , ante foeeuîa
non multa demum cautum legitar, ne Filiab'us Gallicis in Apanagio fratris
Regii, poft hâc facceflîo deferretur, quae iifdem tamen ufque îîluc com-
petierat.
In prima Gallicorum Regum familiâ, etiam/ratres pofigeniti m partem
Coron se Regiae venere, ut ne nothi quidem fubmoverentur- lie enim Clo-
dova:o mortuo , qui primus Rex Chriftianus fuerat , quatuor ejus Filii
Regnum Francicum in totidem partes diviferunt ; Childeberto Parifienfe,
Ciodomiro Aurelianum , Clothario Sue(îionenfe , & Theodorico Ballardo
Metenfe naclo. Cumque per tratrum mortem , in unum Clotharium
coaîuilfent, hsec omnia quatuor filii ejufdem in parem rurfus divifionem
ivêre , Charibertufque Pariiiorum , ChiJpericus Sueilionum , Gontrianus
Aureliorum, & Sigebertus Mediomatricum Rex faclus eftj & horum Re-
gum quilibet, cum fe Francise Regem inferiberet , diferetionis ergo adde-
bat, fe prECtorium fummum Parifiis, aut in alio fuse partis Oppido habe-
re: ex quo tandem communis vox inolevit; ut Reges Pariiiorum, Aure-
Jia?, Metarum aut alterius loci dicerentur. Sigibertus, Noihus Régis Da-
goberti
f Sub tituloi la Defenfe du Droit de Marie Tliercfe d'Autriche , Reine de France, à la Succel'-
£on des Couronnes d'Efpagne,
Bb 3
MAGNE.
IP8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
ÀFunci goberri filins, cum Fratre Legitimo Clodovsco Secundo hœreditatem cre-
d'Allr- viti & Franciam Orientalem Rex tenuit.
In fecundâ Regum Francise familiâ ufque ad finem illias penè eadem
Regni partitio , quae in prima obtigit; funcqae omnes filii Reges Francise
nuncupati. Et tamen hsec invalidé deinceps mutata efTe , ac mutari non
poiTe, ecquis Gallorum afTerit ?
Hugo Capetus, qui Regale Scept'rum in tertiam familiam tranltulit, pri-
mus legem locumque Apanagiis fecit, teftante Arrefto fub annum 1282,
non nili coram triginta proceribus lato. Quamvis & inde fe nondum fœ-
minea progenies exclufam putavii, donec fub Philippo pulchro lie cœpic
Apanagiorum Aflignacio, ut Qmul in iis fucceffio fœminarum exprefle ve-
taretur.
Complures hujufmodi metamorphofes circa legum rerumque veterum
figuram, facillimè notabit quifquis ipfa Hiftoriœ Francicse Volumina excu-
tiet. Mutationes autem iftaS omnes quis è Gallis de înjuftitiâ arguée aut
nullitatis condemnabit, ac proprios Reges fuos, impietatis in naturam fa*
cietreos, dum filias & quidem tune invitas, nec ulla renunciatione tran-
quillatas, exciufere ? Quis Leges Gallicas recentiùs publicatas pro irritis
declarabit ; quod ab aliis adhuc vetufiioribus aut eorum modulo recef-
ferint ? Ut caetera taceam quse de Modernis Parlamentorum fimulacris
funt obvia , paJamque oftendunt , ridiculum in Galliâ fore qui pnfeos
effœtae fenectutis ufus, pro elTenciali vellet norma juniorurn legum fta-
tuere,
Verba igitur, ait rerum inania, dat Aubuflbnius fupra memoratus E-
bredunenfis Archiepifcopus, dum fluido fermone, fed inutili opéra, cum
afleclis fuis contra allegatam San&ionem Hifpanicam difeurrit , veracita-
tem Regiam & jurisjurandi religionem apud cunctos proftituens , qui-
bus à Partialitatis glaucomate non eft caccitas , fed textus evidens &
vera legis ratio fuperiùs demonftrata ob oculos verfatur.
Unus duntaxat calamus, & una lingua, débet Regibus efle* ac nihil
exiitki, quod clariore lumine prœfulgeat , quam recla fides in Principe. * Pro-
miiTa , transacla , jurata, fi unquam aliàs, certè ab illis quos tanquam ter-
reltres immutabilesque Deos veneramur, fervari oportet; qua procejjerunt
à labiis eorum , non decet irrita fieri. Contraclus Regum non fubjacent
Scholarum jurgiis: Afpernanturhi forenfes Rabularum cavillationes. fed eo
fmeeriorem fui depofeunt cuiïodiam, quô magis Renunciationum materiâ
cum jure gentium , decretis communium legum , & facrorum Canonum
Statutis fœderantur.
Telles funt ac docent paffim Juris-Confulti Belgœ, Galîi, Hifpani, &
alii, \ per Univerfalem Gentium Confuctudinem , Jiipulationes approbari, quœ
de hœreditate vhentis , prœfertim , intuitu matrimonii tniti concipiuntur. E-
xem»
* L. 3. C. rie Summa Trinitste.
| Vide Covarmv. Mean , Ant. fab. Cornez. Vafçjuez , Cancer, Molin. &c paffim in formili-
bvis hic allegatis.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC.
199
aempîum Orhis penè Univevfi, pvo renunciationibus Jlave, idque nullo pr*fupo-
fito jur amcnt 0 , nullâ pv*fupofita confuetudine locali , non obfiante mimrenmta-
te , fed mundi confenfu & ut il a ati s public* refpeclu. Pavent um venunciantium
jurejurando in h*vedes concepto cbtefiationem tacitam y impvecatiunem confine-
ri) cujus h*c vis fit , ut, fi contravenerint , eidem cum pejevantibus Divin*
Findict* Jubjaceant. SucccJJioncm hbevis defevri, mediante qu'idem natuvali du-
el u, non t amen jure natuv*. Multa in natuvali qu à dam vatione fundari, non
ita tamen immutabilia-, ut vevocationem nullam, aut derogationem patiantuv.
Jus unum Civile alio Civili tolli pofje. Leges adfocietatem civile m pcvtineve , Ci"
viles pvoptereà atque Mis avbitravias , in quavum favovew funt introduèl*. Et
qua: hujusmodi funt alias quam crebro &folidè ab Hifpanis quondam con-
tra Gallos deducta, tam in qua: ad cafum de quo tune agebatur, ut nunc
agitur, à Gallis impetita.
Infpiciat qui volet exeufos ante fex luftra libellos varios, & hinc in-
dè in vulgus fparfos, è quibus demùm nihil aliud deprehendet, quàm fi-
gnum Gallicani Protei, qui nec inltrumenta fœderum, nec legum dicla-
mina, nec avita praeconia teftamentorum ampliùs aeitimat, cum primùm
occafio apparet, noviiîimis fuis émoluments inhiandi.
Habent proinde cum Domefticis exteri, cumque incolis vicini: habent
cum Romano Pontifice Europsei Reges, Refpublicse ac Status liberij quid
in his temporum rerumque circumflantiis pro benignitate Domus Au-
ftriaœ, contra potentiam , cupiditatemque Gallicam obfervent.
Gravis ac prudens Conititutio, quàrn circà Renunciationes juratus Jus
Canonicum in cap. quamvis dePaclis in 6. exhibet, farcafticè à Gallis per-
ftringitur , quafi Conditor illius , vel glovi* cupiditate incenfus , vel augen-
da Pontifia* aubloritatis fiudio effv*nem , uti vocant , & exovbitantem
illam Decretalem efiovmavït , volueritque nova lege Pontificatum firmare,
quam ailu ac dolo confecutus fuerit *.
Pay Pyrenaea tôt Hifpanicarum Regionum in Gallos prodiga, & repetiti
facramenti fanctitas, quo Hifpanam fuccefîionem fan&uis Gallicus non fe-
mel ejuravit, fub Scholaflico & futili preetextu minutiarum quarundam vi=
lipendi fe dolet.
Succefibr fummi Pontincis , cujus Apoftolïcam benedictionem ipfe ténor
dotalis chartse pro corroborandâ renunciatione oraverat, ludibriurn haud
levé pradeceflbris fui & Romanae Sedis experitur.
Convelluntur pacla , focietatis civilis columina : Poteltas Regum in
condendis legibus, & legum nervus in conveniionibus mutiiatur : fean-
daiofum dogma inducitur negligendae reverentiaî, teftameniis parentum,
& ultimis Majorum voluntatibus débitai: Qureruntur quse Régis Chriiiia-
niffimi Vires ampliant, non quœ quietern Chriftiahae Reipublicae: Via ad
Univerfalem Monarchiam,fk Régi Gallorum laxior , à femitâ tam diligen-
ter inceptâ nunquam avocando , nifi Europa reliqua Phrygurn raore fa-
piat, & tôt jam plagis per Gallos exercka confeflim difeac, quantupe-
■AFrmr»
D'ALLE-
MAGNE.
Ut raeriro
ex omni-
bus tota
Europa
colligit.
Quid aù-
verius
Gallica-
rani Vo-
tentiam fit
cuïanûum.
re
* Vid.lib. fubTit. Régiras Chiiftianiffirnae Jura in Brabanr. p. 18 & feq.
:oo MEMOIRES, NEGOT1ATIONS, TPvAITEZ, ET
A*FATRFS
D'ALLE-
MAGNE.
pro Sainte
propm.
pro |nf Itia
Aufhiaca,
led
absque
imora Se
cun&atio*
tic.
re pro Auftria fit laborandum , ut hsec patrimonio fuo antiquo non de-
fraudetur ; & fie Italia , Magna Bntannia , Luiltania , uniiumque Bel-
gium , cum Germanià totà , praeclariflimis fuis libertatibus , fplendoribus ,
Ck. commodis non exuatur.
Hifpaniam deploramus omnes tam putidè fedu6lam ut ad obfequia mi-
nus décora ii pailim demittat & quSe adeô conitanter atque acriter contra
libertatis fuse invidias & Gallorum cruenta molimina ab integro fa:culo
decertavit , nunc uno miferabili cafu in praccipitium volvatur , in quo
famam & bona perdit , nili fubito vigore le in Auftriacas recipiat par-
tes , quibus quoefita & itabilia pridem jura imminuere haud potuit ,
quantàcumque facilitate in ternporaneam adorationem Andegavenfis
Ducis condefcendùTe videntur , non aliter ac grus gruem fecuta.
Non dubitamus ingente periculo , quod finibus & mercimoniis csete-
rarum gentium impendet , nunc fingulas conciuri ut pro Auftriaca ju-
. ûitiâ generofo fe operi accingant , quod iimul ad ialutem ipfarum ac
domeiticœ tranquillitatis metam neceifanô collimat.
Nequaquam ambigimus , pro fingulari fuà & exactâ prudentiâ, Pon-
tificem expendere, quàm caducus apud Gallos & momentaneus , paci-
ficationum , publicorum contra£luum, & juramentorum fit honos; quan-
ta inde Ûiyini Numinis atque Evangeliorum profahatio ; quàm prom-
ptae apud eos ac féroces minee^ quam velox & imperiofa vis in armis;
quam immodefla & infolens aliénas in domos, aulas, ac terras Domina-
tio, aufura plus in dies, uti adhuc magis cervices Hifpanorum qui tanidiù
reititerant , propudiofe conculcavit.
Agnofcimus , lugemufque hinc feandala, fentimus damna, non decli-
namusbella, pericula prsevidemus, exilium vicinis imminens proipicimus,
& tempeltatem quoque in longé difîîtos, non vanè ominamur.
Paciflcus femper & innocens Leopoldus C'a: far eit, nonniil Turcarum ,
fiiaceiïant, h'oitis, Chriitianae dignitatis vindex j & legum, paclionum, ac
jurisjurandipienLiiîimus euftos. Alt nunc quid agat, ubi Patrimcnium Atavi ,
tôt titulis Auftriaccf debitum, rapitur? Ubi feuda imperii (de quibus aliàs
ac fpeciatim nobis fermo erit) tam audaéter & licentiofè invaduntur? Uti
caéteri EuropaeSummatts le partim à Gallis ludibrio habitos , & univeriim
eo deduclos cognofeunt, ut in nullâ re prius ac certius fecuritatem & quie-
tem fuam, quam in decremento aut remotâPotentia: Gallicae reperire va-
leant. Ego hic fubfifto,& quos diferiminum propinquitas cura periclitan-
tis propriae falutis tangit fuadeo memores illius elle, qui, ne cunctentur,
dixit
Utendum pr a fente die cfl. Citb labitur hora ;
Nec bona tam fequïtur , quam bona prima fuit.
Le
RESOLUTIONS D'ETAT, M, DCC.
201
Le véritable Avant-Coureur au Manifejle de Sa Majeflé Impériale \ Awairw
ou Recueil de quelques Droits de la Mai/on d'Autriche
à la SucceJJion d'Efpagne : traduit du La-
tin de la Pièce précédente.
d'Allr-
MAGNE.
A Peine le Séréniflime & très Puiflant Prince Charles II. Roi d'Efpa-
gne eût- il expiré, que toute l'Europe, qui étoit déjà fort attentive à
ce triite Evénement, aprit, contre toute attente, que l'Efpagne devoit à
l'avenir embraffer les manières Françoifes; & qu'on produifoit un Tefta-
ment forgé par des artifices extraordinaires , qui apelloit à la SuccefTïon
des Royaumes, Duchez, & Principautezde l'Efpagne, non pas un Parent
inconteitable du même nom, & en même tems l'aîné de la famille, mai*
un Allié âgé de feize ans, né d'une femme exclufe de toutes prétenfions:
& cela, malgré la Foi jurée de la Paix & des Traitez; malgré la difpofi-
tion précédente du Père & des Ayeuls , & le droit d'aînelTe dans un pareil
degré , qui félon les Loix d'Efpagne devoit fuccéder à la Ligne mafculine
qui feroit éteinte; malgré l'affinité la plus proche du côté des femmes ;&,
ce qui femble être le principal , malgré la tranquillité & le falut de toute
l'Europe: ce qui prouve ,tant en général qu'en particulier, que la Couronne
d'Efpagne ne devoit pas échoir à Philippe de Bourbon Duc d'Anjou, mais
à Leopold d'Autriche Empereur des Romains.
Pour éclaircir les chofes , voici comment elles fe font pafTées.
Philippe premier vivoit il y a plus de deux Siècles , il étoit fils de
l'Empereur Maximilien iffu heure ufement de la Tige d'Autriche , ce que
perfonne n'ignore. Il eût deux fils, favoir Charles qui étoit l'aîné, né à
Gand en Flandres, & Ferdinand qui étoit le cadet, né à Medinè en
Efpagne. L'Empire Romain diltingue le dernier par le nombre de Pre-
mier, & l'autre par celui de Cinquième ou Quinte lequel eft nommé
dans les Annales des Rois d'Efpagne Charles Premier. Le partage de
ces Etats fait entre les deux frères à Wormes l'an ijii. fut tel, que
Charles qui étoit l'aîné auroit l'Efpagne avec la Bourgogne & toute la
Flandre; & que Ferdinand, qui étoit le cadet, & qui fortoit à peine de
fa jeunefie, auroit les Etats qui font en Allemagne. Celui-ci fe fournit
à l'heureux fort de fon frère aîné déjà devenu Empereur , & il le lit alors
d'autant plus facilement (comme il fe peut voir par l'extrait N. i.) que
quoi que fa part fût petite, il n'y auroit ni Raifon ni PuiiTance qui put
fent lui porter préjudice contre les autres droits qu'il vouloit bien fufpen-
dre par un pur refpect pour fon aîné. C'efl à dire, qu'il fe refervoit tou-
jours le pouvoir de rentrer, lui ou fes héritiers , dans ce grand héri-
tage, fi l'extinction de la Branche aînée lui en donnoit l'occafion.
Sous les aufpices de cette règle folide de vie & de mort , Ferdinand a
tranfmis fa pofterité par fon Fils , nommé pareillement Charles , & fon
petit-fils & arriére-petit-fils aiTavoir Ferdinand Deuxième & Troiiléme
en Ligne droite à Leopold à prefent Empereur: ôc afin d'entretenir l'u-
ftome XL Ce nion
Charlej
II. Roi
d'Efpagne
apclle, par
une Pré-
tention
mal foM-
dée, à la
Succefliou
le bue
d'Anjou,
& néglige
l'Empe-
reur Leo«
pold,
descen-
dant de la
LigneMaf-
culine du
premier
de la Mai-
fon d'Au-
triche qui
eùtl'Eipa.-
g"e ,
par Ferdi-
nand I. ,
qui ayant
un apana-
ge de fon
frère aine' ?
ayant pré-
fère la
branche
d'Efpagne
à fes pro-
pres filles
2oi MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires nion de la famille & de fuivre le fens de la convention de Wormes , il
d'Allé- fubftitua à Tes fils la Branche d'Efpagne pour héritière, à l'exclufion des
MAGNE- filles, s'il en reftoit quelques-unes, comme l'on voit par le N. 2. A Char-
les-Quint , ou premier félon les Espagnols, & après Philippe Deuxième,
Troiliéme & Quatrième , fuccéda Charles Second d'heureufe mémoire
qui eft mort en dernier lieu.
Celui-ci eût pour mère Marie-Anne d'Autriche, fille dudit Ferdinand
Troifiéme & fœur de Leopold: ainfi, il étoit doublement Allié avecl'Em-
Senveii- pereur Leopold tant par la proximité de fa mère, que par la lignée des
lance Ayeuls d'Autriche comme on le peut voir dans les Généalogies ci join-
Î2?3C tes N. 2. & 4.
biement Ces raifons & plufieurs autres qui regardent les Conltitutions commu-
z]ilé> nés des Royaumes , & la particulière d'Efpagne , portèrent Philippe IV.
Teftament Père de Charles dernier mort, à vouloir que Marie Therefe,fa fille ainée,
derhiîip- mariée à Louïs XIV. Roi de France ne fut point directement ou indirec-
i'elv,n& tement admife à fuccéder aux Royaumes & Provinces d'Efpagne, mais
«lùon de qu'elle en fût abfolument exclue à perpétuité, avec tous fes defcendans de
Marie- quel Sexe ou degré qu'ils fuilent; il fit de plus un Teftament en i66f.
Thciefe fa lequel il appelle exprelfement la Branche collatérale d'Autriche à la
Sœur, au- r T. |)pr/ it i t • • i-r i
todiee par Suceefiion d Elpagne au défaut de Lignée Elpagnole.
laPaixdes La pajx fe Weltphalie qui fut fignée en 1648. n'empêcha pas qu'il n'y
puenees, e^ une cruelle guerre fujette à pluiieurs revers entre l'Efpagne & la Fran-
ce qui dura pendant plufieurs années, & qui fembloit prendre le train d'al-
ler beaucoup plus loin au grand dommage des deux Nations, tant par les
Préparatifs que par les Alliances qu'on faifoit des deux cotez : c'eft pour-
quoi l'on tacha d'arrêter la véhémence d'une haine fi implacable, par le
moyen d'une bonne intelligence, ce qui ne pouvant être plus folidement
fait en apparence que par un Mariage, on s'y apliqua avec foin.
Le Roi de France jetta les yeux en premier lieu fur Marguerite de
Savoye, & il la regardoit déjà avec allez d'amour pour que l'on crût
qu'il avoit affez d'inclination pour fe marier avec Elle^ mais , il ne fut pas
, difficile de faire ralentir les premiers feux de ce Prince , en lui propo-
fant une Alliance beaucoup plus avantageufe, qui étoit l'Infante d'Efpa-
ëne-
Des raifons importantes portoient les François à fouhaitef ce Maria-
ge, & Chriftine propre tante du Roi, Dame d'un grand &{ folide juge-
ment, étant partie de Turin avec Marguerite fa fille, fe rentht à Lion où
elle rencontra le Roi fon neveu. Eile l'exhorta généreufement à ne pas
fonger de fe marier avec fa Fille, mais de fonger plutôt à l'Infante d'Ef.
pagne, tant pour l'utilité de toute la Chrétienté , que pour le rétablifie-
ment de tant d'Etats, qui étoient ruinez par une fi longue guerre.
Ce que cette prudente Dame vouloit perfuader au Roi fon neveu , pré-
férant généreufement l'utilité publique à (es avantages particuliers , étoit
une Affaire pleine de grandes difficultez. Il y avoit déjà long-tems que
les Efpagnols avaient fait paroitre une averfion infurmontable pour cette
Alliance ,
RESOLUTIONS D'ET AT , M. DCC. 205
Alliance, fur-tout lors qu'ils réfléchiffoient fur les cataiirophes funeflesque ActaxkkI
des g-.^ns d'un naturel fort contraire au leur auroient pu caufer dans leur d'All^
Gouvernement, fi y ayant une lignée de ce mariage, Elle eût afpiré à la MAGNE>
Succeffion des Royaumes d'Efpagne , fur le prétexte fpécieux du fang
maternel. Cette difficulté parut avec raifon de fi grande conféquence,
qu'on relblut fermement de ne pas donner les mains à ce mariage , ex-
cepté que l'Infante ne préférât l'amitié d'un Epoux fi confidérable aux
confiderations qui d'ailleurs auroient peut-être été de poids. AiTavoir, il
falloit que Mane-Théréfe renonçât, non feulement pour Elle en cas de
veuvage avec pofterité, mais auiîi pour fes enfans de l'un & de l'autre
fexe qui feroient fortis d'Elle, enforte qu'il ne feroit refté la moindre ef^
perance à aucun de la Poltérité Françoife d'avoir part à la Succeffion d'Ef-
pagne.
Ce qui ne faifant aucune peine à l'Infante, qui, félon le cours du mon-
de, regardoit au prefent, fans avoir égard au triffce événement d'un futur
incertain. Elle renonçoit d'autant plus facilement pour jamais, tant pour el-
le que pour fa pofterité, à l'efperance de l'héritage d'Efpagne, pour s'a-
querir une part prefente de la fleurilTante Couronne de France, & que fi
Elle venoit à avoir des Enfans, ils pouvoient être afTez heureux, quoi
qu'ils fuffent aufïi éloignez de fon patrimoine qu'ils fétoient du génie Ef-
pagnol. Le Roi Philippe fon Père, & Louis fon Epoux, n'étoient pas e-
Joignez de ce confentement libre de l'Infante.
11 eit vrai que le Roi Philippe étoit dans une prudente crainte que fi la
Renonciation n'etoit pas faite en termes clairs & bien expliquez, les
Miniftres François, qui étoient toujours enclins à des interprétations cap-
tieufes, ne priffent occa,lon d'en faire autant dans cette conjoncture pour
parvenir à leurs delfeins, qui prévaloient alors par la force, ainfi que l'ex-
périence ne faifoit que trop voir} puis que, quoi que la chofe & l'efprit
des Traitez foient clairs, la lettre étant cependant plus obfcure, ils la tor-
dent en un fens oblique par la force des armes , tout autant que l'utilité
& la force Françoife le permettent.
Ceft pourquoi le Cardinal Mazarin, & Don Louis Mendez de Haro, l'un
& l'autre Premiers Miniftres des deux Rois, & leurs Plénipotentiaires,
après avoir beaucoup travaillé aux monts Pyrénées dans pluileurs Confé-
rences pour convenir de la Paix, & après avoir fouvent travaillé avec un
foin extraordinaire fur la forme de la Renonciation , en convinrent enfin
avecjoye d'une manière fort ample, avec des claufes très-expreiTes, qui
devoit fervir de loi pour l'avenir.
Le Roi Très-Chretiert avoit muni fon AmbafTadeur d'un Ple-inpouvoir
particulier pour convenir de cette Renonciation, ainfi que l'on peut voir
par le N. y. la même chofe ayant été pratiquée par le Roi Catholique à
l'égard de fon Ambalfadeur, comme on le peut voir par le N. 6. & félon
ce que dit Tite-Live que le Droit des Gens prévaut dans les chofes dont les
l'y un fa fiions fe font par Foi , par alliance , par Traité ', & par Serment, & quti
Ce 2 y a
MAGNE,
comme la
partie
principale
folemnel-
le 5c géné-
rale,
204 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires y a beaucoup de différence entre la Foi publique fcf la Foi particulière , que la pu-
blique prend fa force de la dignité , (3 la particulière de la forme des conven-
tions. On ne doutoit nullement que tout ce qu'on avoit fait à l'égard de
la Renonciation auroit été obfervé plus religieufement, puis que la digni-
té & la forme dans le Traitté qu'on en avoit fait y concourroient éga-
lement.
C'étoit fur ce fondement véritablement très-digne de la Majefté Roya-
le, qu'on bâtifibit de bonne-foi une Convention fi folemnelle, & la par-
tie première & très-noble de la Paix des Pyrénées , ainfi que l'on peut
voir par l'article 3?. mis fous le N. 7.
On ne pouvoit point trouver de termes plus forts, ni qui fulTent plus
efficaces que ceux dont fe fervirent l'Infante & le Roi fon Epoux, l'une
pour exprimer fa Renonciation , & l'autre pour exprimer fon Confentement.
On y renonçoit de la manière la plus ample à tous & un chacun des Droits,
Titres, Loix, Coutumes, Constitutions, Difpofiiions, Remèdes, & Pré-
textes , par lefquels l'Infante (excepté qu'Elle fut reliée veuve fans li-
gnée) ou fes enfans de l'un ou de l'autre fexe, nez de ce mariage, ne
pourroient en quelque tems que ce foit prétendre à la moindre Succeffion
des Etats d'Efpagne. Ainfi toute voye directe ou indirecte à cette Suc-
ceffion étoit fermée à la pofterité de France. On fuplioit même le Pon-
tife Romain de vouloir donner fa Bénédiction Apoitolique à une Conven-
tion faite avec tant de précaution & fi unanimement, pour la tranquillité
des deux Royaumes, & pour le repos de la Chrétienté , foufeme avec le
Traité de Paix des Pyrénées le 7. Novembre i6f$. , & fignée dans une
Affemblée nombreufe de Miniftres des deux Rois avec des applaudifle-
mens réciproques, & établie des deux cotez avec une prévoyance très-
prudente.
Que le lecteur definterefTé , & exempt de toute paffion, life feulement
les paragraphes quatrième, cinquième, & fixieme du Contract de Maria-
ge , qui font ici annexez fous le N. 8- & fans un long examen, il verra
évidemment qu'on ne pouvoit faire aucune difpofition ni ordre & qu'on
ne pouvoit prendre aucun prétexte, par lequel un enfant mâle de France
auroit pu afpirer à la Couronne d'Efpagne, puis qu'il étoit exclus de tou-
tes les efperances qu'il y auroit pu avoir, par des périodes fi claires, des
termes fi exprefîifs, & par de claufes fi dérogatoires, & declaratoires.
Il n'eft pas befoin ici des Subterfuges de l'Ecole pour obfcurcir des Termes
très-clairs: Dieu, qui eil le Scrutateur des cœurs, & qui a été apellé à té-
moin dans ces Conventions, n'admet point des explications équivoques ;
la Gloire de la Croix de Chrifl, la Sainteté de l'Evangile, le Canon de
la Méfie, & 1 Honneur Royal, par toutes lefquelles choies on devoit jurer
félon la Formule de la Paix des Pyrénées ci-jointe fous le Nombre 9.
ne foufrrent point que les termes difent une chofe , & fefprit une
autre.
L'Efprit & l'Intention de ceux qui ont contracté, & Texclufion éter-
nelle
îc qui de-
voit être
approuvée
par le Pa-
pe à la re-
quifition
des par-
tics ,
confirmée
par des
Sermens,
par le Tef-
tament de
Philippe
IV.
RESOLUTIONS D'ETAT, M, DCC. 20;
relie de la Lignée de France , fe voyent clairement par les rai fon s puhli- Affaire
ques,& par le Traitté confirmé par la Ratification, du Roi de France qu'on d'Alle-
trouvera inférée fous le N. 10. magne.
Le même Roi Catholique Philippe IV., qui fçavôit principalement le clairement
fens de la Convention, le répète clairement dans fon Teltament fait le 14. énoncée:
Décembre i66y. par les termes mis fous le N. 11.
Ce Roi ordonne dans fon Teftament plufieurs & diverfes chôfes fur l'Hé-
ritage d'Efpagne: il raporte aufiî plufieurs chofes fur la crainte du danger
qui menacoit l'Efpagne & toute la Chrétienté par les mariages avec la
Maifon Royale de France, û on ne mettoit un obftacle à la lignée qui en
étok née ou qui en naitroit. Il raporte amplement tous les foins & les
précautions, qu'il avoit été obligé d'aporter en toutes manières avec An-
ne fa fœur , avec Marie Therefe fa fille, & avec fa propre femme Elifa-
beth de Bourbon, afin qu'aucun enfant de France mâle ou femelle, en
quelque manière ou occafion que ce fût ne parvint à la Succeffion des
Etats de l'Efpagne. Il fait mention mot à mot des chapitres qui avoient
été faits en dernier lieu pour éviter toutes \qs occasions, par lcfquelles on
pouvoit craindre, même de loin, que les Etats d'Efpagne ne . vinffent à
être unis à ceux de France, Il détaille quelques lignes des Succédons ,
& quoi qu'il fçut très-bien qu'il n'auroit pas manqué une Lignée nom-
breufe à fa fille avec le Roi Louis fon Gendre, puisqu'elle étoit fertile, &
avoit déjà enfanté le Dauphin & deux fil/es, n'oubliant pas la Faix des
Pyrénées & les Conventions, il exclut lapofterité de France de tout l'hé-
ritage d'Efpagne, par quelle occafion que ce puilfe être, en forte que quoi
que l'union des Royaumes ne puiffe pas arriver dans les femelles à caufç
de la chimère de la Loi Salique, il ne veut cependant pas qu'elles puifient iuc-
ceder dès qu'elles fortent de la tige de France. Mais , il fe tourne plûiôc de forr«
vers fa propre famille d'Autriche, & y apelle hs enfans de fa feeur Ma- Jj"aenc*e
rie, qui étoit morte en 1646. après avoir eu plufieurs enfans de l'Empe- d'Autri-
reur Ferdinand III. & entre autres le très-Augulte Leopold. Il va me- che u^' A'-
me plus loin>car, pour exclure abfolumentja Ligne Françoife des Royau- aqùivW;
mes & Etats d'Efpagne, il fubitituë à ladite Maifon d'Autriche, en -cas, Droîtfft-
qu'elle vint à s'éteindre, la pofterite.de Catherine de Savoy e fa Tante,
qui étoit déjà morte en if 5)7., pour fucceder à>fe,s Etats.
Ce qui eft une preuve certaine de J'exclufion des François, & du droit
inconteftable qui apartient au fang d'Autriche.
Le Roi Charles dernier mort n'ignoroit pas des témoignages fl authen- tèijwlobâ
tiques de la vérité. La Renonciation éternelle. de fa fœur & de fes àtf- lierions
cendans étoit notoire; Le Teftament de' Philippe fon Père fpecifioit un ^e ci|ar*
SuccefTeur d'Autriche. Le Roi Charles honnoroit l'Empereur Leopold & pL1r djV'er.
ie regardoit comme parent du côté .de fa Mère,, comme le plus âgé de la }« raifons
Maifon d'Autriche de l'une & de l'autre Branche, comme proche du côté bSSL
de fa femme, & comme Succeffeur prochain deiigné par le Teftament de
ion Père, comme bien f ai fan t. par la part qu'il lui avoit donné peu aupa-
ravant a la Couronne de Hongrie, ainfi que l'on peut voir par le Nom-
Ce 3 bre
c once fia-
ble,
Affaires
D'.'VjLI.E-
MAGNE.
Le Roi
Clia.'es
n'a eu ni
la volon-
té ni le
pouvoir
àc relier.
La raifon
tics Re-
nonria-
rions
ne cohiïf-
t^ pas
«uns la
i'eule
craiiv.e de
ï Uni or.
oes Cou-
ronr.',.s.
200 MEMOIRES, NEGOTÏATIONS, TRAITEZ, ET
bre 12. fans compter diverfes autres raiforts qu'il avoit de l'honorer; mê-
me étant encore en vie , il lui avoit donné un pouvoir fort ample fur les
forces d'Efpagne , comme on le peut voir par la copie de la Lettre ci-join-
te fous le N- 15.
Cependant, félon les révolutions du monde , quelques perfonnes du Mi-
niRére d'Efpagne, gagnez parle grand éclat de l'or d'un voifin, cher-
choient d'attirer le Roi languiflant d'un autre côré,&, en le détachant de
fa propre famille, le tourner avec adreiTe du côté des François, qui au-
paravant avoient été regardez: avec une grande averfion. Ils avotioienc
eux-mêmes, & fupofbient l'efficace de la Renonciation de l'Infante Marie
Therefe, aufli bien que l'évidence du Teitament de Philippe, & tout ce
qui tendoit à l'exclufion de la France; mais, ils en faifoient confilter la rai-
ibn , dans la crainte de l'union des deux Couronnes, laquelle crainte cef-
fant, & l'union étant empêchée, on pouvoit en ce cas ouvrir le chemin,
aux François pour avoir la Couronne d'Efpagne.
Enfuite,ils forgent un Teitament qu'ils embelIilTent par des Confulta-
tions de quelques Jurifconfukes , & avec des Difcours étudiez en faveur
du Duc d'Anjou, ils pouffent le Roi moribond à aprouver avec un cœur
aride & deffeché & avec le cerveau refout en pituite, ce bel ouvrage qui
fera l'étonnement des fiécles à venir, tant dans les Ecoles, que dans les Cours;
particulièrement fi on veut tant foit peu confiderer la fuite de toute l'af-
faire qui eft d'ailleurs allez notoire auffi-bien que les autres circonitances
déjà raportées avec l'Extrait ci-joint fous le N. 14.
Par le Teltament précédent de Philippe IV. la choie eft claire, certai-
ne^ illimitée pour un Parent de la Maifon d'Autriche; dans le dernier
Teitament de Charles fécond on feint une limitation qui elt incompatible
avec les paroles aufli-bien qu'avec le fens. Le fils s'arroge dans le der-
nier un pouvoir de faire un Teitament, que ceux qui ont forgé le fécond
tâchent d'ôter au Père.
La Renonciation de la Sœur &de la Tante contient une abdication uni-
verfelle , indéfinie , & directe , mais le prétendu Teitament de Charles
veut qu'il y ait une reftriction oblique , directement contraire aux termes
& aux intentions ci-deffus alléguées. Les premiers Actes folemnels té-
moignent pour la Maifon d'Autriche, & pour augmenter fa fureté, on
les établit pour Loix fondamentales. Mais, eft-ce aimer la Maifon d'Autri-
che, & augmenter fa fureté, que de la priver des Royaumes déjà fi re-
nommez par le nom d'Autriche dés le tems des Ayeuls, &. y appeller des
Succelfeurs François ? La raifon concourt donc par tout avec le Texte à
une totale exclufion de la poftéritéFrançoife; & il n'eit pas vrai que dans
les Traittez & Contracta entre l'Efpagne & la France, non pius que dans
le Teitament de Philippe , l'Union des Couronnes foit la feule & uni-
que raifon.
Car , pourquoi auroit-il autrement été néceflaire de renoncer pour
les femelles ou pour ia pofténté puifnée ? Pu>s que celle-ci cède en
France aux Ainez , & que celles-là font exclufes à jamais de la Cou*
ronne
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 207
ronne de France ; ce feroit craindre en vain l'Union des deux Cou- Ate&ir^s
ronnes en une perfonne qui auroit été absolument incapable d'an por- n'An.E-
ter une des deux. - magne.
Le Duc d'Orléans, un des fils d'Anne d'Autriche, s'eft tenu ci-devant
dans le filenee , & en vertu du contract de Mariage de fa Mère , qu'on
raporte fous le N. if. a toujours été laiffé en arriére ; ce qui cependant
feroit contraire à tout ceci, fi onregardoit à la feule crainte de l'Union des
Couronnes?
Et en dernier lieu le rufé Inventeur du dernier Teltament a été fi har-
di , que de faire un tort manifelte aux Sereniffimes filles de l'Empereur
Leopold, puis qu'il tâche de les exclure toutes & chacunes d'EUés dans
le prétendu Teftament, quoi que pourtant on n'ait pas fujet de craindre
que par Elles , le Trône d'Efpagne & celui de France s'unifient par
héritage.
Il elt donc évident, que les Predeceffeurs du dernier Roi d'Efpagne Maistjçft
ont eu un tout autre motif que celui delà feule crainte de l'Union, ayant tota»
mis tous leurs foins de ne pas Iaiffer monter fur le Trône d'Efpagne un folueu
Prince François, par le motif de la tranquillité publique , & pour le bien *aÏÏis!
particulier de la Maifon d'Autriche.
Et fi nous examinons le danger de ladite Union qui eft-ce qui afTure- Ceren<!nnt
ra les Efpagnols modernes contre cette Union , contre laquelle ils ne fe Mainte de
lafTent point de fe recrier? Eft-ce la Foi de la France, tant de fuis don- l'unionne-
née & tant de fois rompue ? Eft-ce la gravité Efpagnole réduite par l'a- tellei'ûinr-
dreffe de fes Ennemis à voltiger , comme une giroiiette agitée par de fre-
quens & fubits tourbillons! Eft-ce l'ennui ou le mépris d'une Couronne à
la vacance d'une voifine qui eft toujours aux aguets contre les Etats Voi-
fins, jufques à ce qu'ils fuient réduits en Provinces ? Eft-ce la certitude
d'une éternelle deftinée contre la mort par laquelle peut-être le Duc d'An-
jou furvivra à tous fes autres frères qui font prefentement en vie ? Quit-
tera-t-il alors l'Efpagne, qui lui fera déjà attachée par tant de liens, & fi
profitable par fes Etats qui font abondans en or, & par fes Ports qui font
fi commodes? Et fi le cas arrive pour le Duc de lierri fon frère, le Duc
d'Anjou , content du feul Diadème Paternel , fera-t-il prêt d'abandonner
celui dont il feroit déjà en pofléfiion?
La prudence des Efpagnols eft trop connue', pour croire qu'ils applau- De PruS
diflent à de petites perfuafions de cette nature & à des raifons fi vuides, les*%-
étant fur le point de voir en petit l'affreux efclavage fuus lequel ils ESû„,a
gémiront en grand, s'ils ne reflechiffent meurement à leurs intérêts : & tuent,
s'ils ne fe joignent à la Maifon d'Autriche.
Et déjà la bafiéffe, avec laquelle ceux qui ont forgé leTeftament pro-
ftituent le refte des Efpagnols, eft digne de pitié, puisque, par leur ju-
gement précipité & tumultueux, ils avouent qu'ils font beaucoup au
deffous des François, eux, qui jufques à prefent ont deffendu par écrit,
& par diverfes actions, la Prééminence Efpagnole, comme ne pouvant
aller du pair qu'avec l'Empereur. A prefent ils offrent la Palme à la Fran-
ce,
asfaiue's
d'Allé •
MAGNC
& agi fient
contre
leurs pro-
pres Loix.
Quoique
les Fran-
çois écri-
vent ,
& parmi
eux le fa-
meux
Archevê-
que d'Am-
brun ,
qui cepen-
dant ne
prouve
rien ,. mais
plutôt,
208 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
ce , qu'ils ont fi long-tems difputée; &, ce qui furprend davantage, avec
une ame & une plume .extraordinairement abjecte. On ne fauroit élever
avec plus de foûmi(îïon la Grandeur de la France, que de la manière que
le font les Efpagnols, lors qu'il difent que fi la Couronne de France ve-
noit à être vacante, le Duc d'Anjou auroit plus d'inclination pour Elle
que pour celle d'Efpagne; & alors, fi , méprifant l'Efpagne, il s'en retour-
noit en France, ils feroient contraints de fe contenter, qu'un Cadet & na-
tif François vint honorer l'Efpagne de fa prefence & de fa domination.
La Pologne n'a pa's encore digéré l'exemple de Henri de Valois, qui
fe fauva en France. Quoi que l'Efpagne puifTe donc penfer, Elle ne
peut concevoir d'avance l'idée d'une fuite, & fa nouvelle foûmiffion à un
nouveau Roi, fans un abaiflement volontaire de foi- même.
Mais ces dernières chofes font prefque particulières , au lieu que tou-
tes les autres font publiques, & par une égalité d'exemple pernicieufes
pour l'avenir, de quelque côté que nous les envifagions. Il s'agit de la
force de la Paix , de la Teneur & de la Religion des Traittez, & de la for-
ce même des Loix d'Efpagne.
Les Ecrivains François ne peuvent aller à l'encontre de ceci , pas mê-
me l'Archevêque d'Ambrun, qui s'eft fort diftingué parmi eux par le Libel-
le ci-devant qui a pour titre la Deffence des Droits de la Reine Très-Chré-
tienne, f
Cet Auteur , écrivant dans ledit Ouvrage avec foin contre les Efpa-
gnols, en faveur de l'Armée Françoife qui envahiffoit alors la Flandre,
& ne voulant pas cependant qu'il parut qu'il offençât la Pragmatique
Sanction d'Efpagne , s'elt efforcé de l'éluder par tous les moyens ima-
ginables , & d'inftruire magiitralement les Efpagnols de ce qui leur é-
toit utile ou leur étoit préjudiciable.
Ladite Sanction avec les autres Loix d'Efpagne font dans un Livre
intutilé Nueva Recopilaçion ou nouveau Recueil , imprimé à Madrid en
1640. Cette Sanction exclut en termes trés-exprés tous les François
du Droit de la Succelîion d'Efpagne, de forte qu'elle ne laiffe aucu-
ne capacité à Louis XIV. & à fon Frère ni à aucun de leurs enfans
pour fuccéder aux Royaumes d'Efpagne, ni à aucun des Etats qui en
dépendent.
Ledit Archevêque reconnoit fort bien les termes exprés de cette
Loi, & il fe donne beaucoup de peine pour renverfer une digue fi fo-
lide. Il répète les fubterfuges de quelques Jurifconfultes , auxquels les
Flamands, & les Efpagnols, avoient déjà répondu d'une manière à fai-
re honte & à impofer filence aux François; &, afin qu'il parût qu'il y
avoit ajouté quelque chofe du fien, il s'efforce dans des chapitres en-
tiers, & à la fin de fon Libelle, de détruire les raifons de l'utilité pu-
blique de ladite Loi; difant qu'il y manquoit l'Autorité du Legiflateur,
&
| Sous le Titre de Defîenrc du Droit de Maric-Therefè d'Autriche Reine de Prance à la Succef-
fîon des Ctou'ronnes d'Efpagne.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. zo9
& la folemnité de la publication. Comme s'il étoit feulement de l'uti- Affales
lité publique de ne regarder que l'augmentation de la puiflance de la d'Allé-
France , & de ne faire aucune attention aux intérêts de la Maifon MAGNE>
d'Autriche, & à la tranquillité de divers Peuples de l'Europe, d'où il
fuivroit qu'aucune Monarchie ne pourroit établir aucunes Conftitutions
fans l'aprobation des François , quoi qu'elles fufTent conformes aux an-
ciens Ufages des Siècles les plus reculez. Il fuffit que dans ladite Sanc-
tion d'Efpagne, l'amitié & l'honneur delà Maifon d'Autriche ayent pré-
valu , après avoir été auparavant confirmées par les Conventions que les
François avoient jurées. 11 fuffit que ladite Pragmatique Sanction ait
été faite & publiée par un Roi prévoiant, à la prière & par l'avis des
Etats du Roiaume, félon la coutume déjà reçue du tems des Ayeuls aufli-
bien que félon d'autres Loix plus récentes.
Cet Auteur François s'oublie, & il condamne lui-même la Loi Sali- parles
que & l'Autorité de fes propres Rois, s'il nie la force des* Sanctions, ™°cr'ef*ÔV
dans la forme & matière defquelles les premières Coutumes ont toutes celle, fenfe la
L'Averfion des François contre le Sexe féminin n'a pas toujours été FrAance
fi forte, pour l'exclure avec la Poftérité & les Parens de la Succeflion memc*
du Royaume ; & cependant ce que défend la Loi Salique, introduite
dans la fucceflion du tems, efl plus clair que le Soleil.
Les Auteurs François n'ignorent point l'Arrêt folemnel qu'on a fait de-
puis peu de Siècles, qui défend d'admettre les Filles de France, qui fonjt
dans l'apanage d'un Frère Royal, après lui à la Succeflion, à laquelle ce-
pendant jufques alors Elles avoient eu part.
Dans la première Famille des Rois de France , les Frères puînez a-
voient aufli leur part à la Couronne , de forte que les illégitimes n'en é-
toient pas mêmes exclus. Ainfi Clovis qui fût le premier Roi Chrétien ,
étant mort, fes quatre fils diviférent le Royaume en autant de parts , &
en firent quatre Royaumes: Childebert eût celui de Paris, Clodomir ce-
lui d'Orléans, Clotaire celui de Soiflbns , & Théodoric leur Frère natu-
rel eût celui de Metz. Enfuite ces quatre Royaumes s'étans réunis par
la mort des Frères dans Clotaire, les quatre fils de celui-ci firent encore
un pareil partage , & Charibet eût celui de Paris , Chilpéric celui de
Soiflbns , Gontran celui d'Orléans , & Sigebert celui d'Auftrafie ; &
comme chacun de ces Rois prenoit le titre de Roi de France, il ajoûtoit
par difcrétion , qu'il avoit fon grand Prétoire à Paris , ou dans un autre lieu
de fon partage ^ d'où à la fin on prit la coutume de les appeller Rois de
Metz , ou de quelque autre Lieu. Sigebert fils naturel du Roi Dago-
bert partagea l'héritage avec Clovis IL & le Roi. occupa la France
Orientale.
Dans la féconde Famille des Rois de France, jufques à fa fin, il y
eût prefque un pareil partage à celui qui avoit été pratiqué dans la pre-
mière , & tous les Enfans des Rois de France étoient appeliez Rois. Ce-
pendant, il n'y a aucun François qui ofàt dire que ces chofes ont été dans la
fuite injuiiement changées, & qu'on ne pouvoit pas le faire.
Tome XI. Dd Hugues
ÀMAIRES
d'Alle-
magne.
*io MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Hugues Capet, qui tranfporta le Sceptre dans la troifiéme Famille, fut
le premier qui fit la Loi & donna lieu aux Appanages , comme on peut
le voir par l'Arrêt de 1282.. prononcé feulement en prefence de trente
Seigneurs: néanmoins, la pollérité féminine ne fe crût pas encore exclufe
par cet Arrêt , jufques à ce que fous Philippe le Bel l'affignation des A-
panages fe fit de la forte , c'eft qu'en même tems on fit une Loi qui dé-
fendoit expreffément la fucceffion des femelles.
On pourra aifément remarquer plufieurs métamorphofes pareilles tou-
chant la forme des Loix & dans les chofes anciennes, fi on veut prendre
la peine de lire les volumes de l'Hiftoire de France. Or, qui efl-ce par-
mi les François qui taxera d'injufïice ces changemens,ou qui les condam-
nera de nullité , & qui fera fes propres Rois coupables d'impiété contre
la nature , lors qu'ils ont exclu les Filles de la Succefîion , & même
contre leur gré , & fans qu'Elles y eulTent confenti par quelque Renon-
ciation ? Qui efl-ce qui déclarera pour nulles les Loix de Fance récem-
ment publiées, parce qu'elles s'éloignent d'autres Loix plus anciennes ou
de leur manière ? Pour paiïer fous filence tout ce que l'on voit de ces
Ombres de Parlemens modernes, qui font voir évidemment qu'il feroit ri-
dicule en France de vouloir que les Ufages anciens des tems pafTez fer-
vhTent de régie elTentielle aux Loix récentes.
D'Aubuflbn, Archevêque d'Ambrun, ne donne donc que des paroles en
l'air, lors qu'il parle avec un difcours coulant, mais inutile avec fes par-
tifans contre ladite Sanction d'Efpagne } proflituant par-là la fmcérité
Royale, & la Sainteté des fermens auprès de tous ceux qui ne font point
aveuglez par la partialité: mais, le texte évident & le vrai motif de la Loi
démontrée ci-deilus elt clair à tout le monde.
Les Rois ne doivent avoir qu'une langue & une plume, & il riy a rien
qui brille plus que la bonne-foi dans un Prince. ~\ Les chofes promifes &
dont on efl convenu, & qu'on a juré.; û jamais elles doivent être obfer-
vées , certainement elles le doivent être religieufement par ceux , que
nous révérons comme autant de Dieux fur la Terre. Il ri efl pas permis de
rendre fans effet ce qui procède de leurs lèvres. Les Contrats des Rois ne
font point fujets aux Difputes des Ecoles , ils méprifent les Sophifmes de
la Populace, mais ils exigent une Obfervation d'autant plus fincére qu'ils
font conformes à la matière des. Renonciations , au droit des gens, aux
décrets des Loix communes, & aux flatuts des facrez Canons.
Les Jurifconfultes Flamands, François, Efpagnols, & autres, rendent
témoignage & enfeignent tous, $ que les flipulations qui fe font de l'héritage
d'une perfonne vivante , particulièrement à l'égard d'un mariage effeclué , font
approuvées par la coutume univerfelle. §>ue l'exemple de prcfque tout le
monde efl pour les Renonciations \ £5? cela même quand il riy aurait aucun
ferment , ni aucune coutume locale , nonobflant la minorité , mais par le con-
fente-
f L. S- c de fumma Trinirate. $ Voyez Covaruv. .; Mean ; Ant. fab ; Cornez ; Vafqasz ;
Cancer, MoJin, &cc &ïfa. tJcs lieux rapemez ici,
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 211
fentement de tout le monde, & eu égard à l'utilité publique. Dans les fer- Affaires
mens faits par les héritiers eft renfermé un con fentement devant Dieu & une d'Allk*
MAGNK.
faits par les héritiers eft renfermé un confentement devant Dieu &?
imprécation des Pérès de ceux qui renoncent , qui eft d'une telle, force , que
s ils y contreviennent , ils font aufji fujets à la même vengeance Divine que
les parjures. La SucceJJion eft déférée aux enfans , par un certain inftincl
de nature ; mais non pas par un droit de nature. Beaucoup de chofes font
fondées dans uue certaine raifon de nature , mais non pas en forte qu elles ne
puijfent être changées , ou fouffrir aucune révocation ou dérogation. Un droit
civil peut être aboli par un autre. Les Loix apartiennent à la Société ci-
vile ; 6? elles font civiles , mais elles font arbitraires pour ceux en faveur Avec fon-
dcfquels elles ont été faites. Et par d'autres paiïages de cette nature que dément
les Efpagnols ont raporté , par le pafle, avec tant de folidité, contre les [,°ute
François, qui les employoient avec tant d'ignorance pour le cas dont il doiTrt
s'agilîbit alors , & dont il s'agit à prefent. cueillir de
Qu'on life les Livres imprimez depuis trente ans , & répandus par tout tout cea
le Monde, & on ne pourra en recueillir autre chofe,fi-non que les François
par leur inconfiance ne font plus de cas, ni des Traittez , ni des Loix, ni
des Teftamens des Anciens , dès qu'ils trouvent la moindre occafion de
profiter de quelques avantages.
Ce qui doit donner lieu à ceux duPaïs, aux étrangers, aux voifins,
aux Rois de l'Europe , aux Republiques & Etats libres , avec le Pontife
Romain , de prendre dans ce tems-ci, & dans les circonftances des affai-
res prefentes, des mefures en faveur de la Maifon d'Autriche, contre la
puiffance & l'avidité de la France.
Les François donnent un fens malin à la prudente & fage Conltitution ce qu'Eiie
qui fe trouve dans le Droit Canon touchant les Renonciations qui ont été doit {âiic
jurées dans le Chap. Quamvis de Paclis in 6. comme fi l'Auteur de ladite p°"S,Ce
Conltitution, pouffé par convoitife de la gloire, ou dans le dejfein d'augmen- deiaFran-
ter l'Autorité Pontificale, avoit fait cette Decretale exhorbitante, & avoit ce-
voulu par une nouvelle Loi affermir le Pontificat, qu'il avoit occupé par
l'adrefle & la tromperie, f
La Paix des Pyrénées , qui a été fi prodigue des Etats Efpagnols en-
vers les François, & la fainteté d'un ferment réitéré, par lequel le fang
François a renoncé plus d'une fois à la Succefîion d'Efpagne, fe plaint
d'être maltraittée & foulée aux pieds par un vain prétexte fcholaftique
de quelques minuties.
LeSucceffeur du Pontife Romain, qui avoit été prié dans le ContraéT:
de Mariage d'y donner fon Apoftolique Bénédiction pour donner plus de
vigueur à la Renonciation, doit reffentir le grand mépris qu'on fait de
fon Predeceffeur, & du Siège Romain.
On enfreint les Traitez qui font les principaux apuis de la fociété civi-
le. On dénie la puifTance aux Rois de faire des Loix, laquelle eft pour-
tant
t Voyez le Livre fous le Titre des Droits de la Reine Trcs-Cluc'tienne fur le Brabant pag. i».
Ev' iuivaures.
Dd z
MASNE.
212 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires tant le nerf des Loixdans les Conventions. On introduit un dogme fcan>
daleux de négliger la révérence due aux Teftaments des Pérès & Mères,
& aux dernières Volontez des Ainez. Par où on ne cherche pas ce qui
regarde la tranquillité publique de la Chrétienté , mais feulement ce qui
peut augmenter la Puiffance de la France. Le chemin à la Monarchie
Univerfelle eft à préfent plus ouvert au Roi de France , qui jamais ne
s'arrêtera dans le beau chemin qu'il a commencé, avec tant de bonheur,
& tant d'adreffe; fi tout le relie de l'Europe, entamée par tant de playes
que la France lui a faites, ne fe reveille, & n'examine fans perte de tems
quels font les efforts qu'Élle doit faire en faveur de la Maifon d'Autri-
che, pour empêcher qu'Elle ne foit fruflrée defon ancien Patrimoine, &
qu'ainfi l'Italie, la Grande-Bretagne , le Portugal, les Provinces-Unies,
avec le refte de l'Allemagne ne foient dépouillées de leurs chères libertez,
de leur luftre , & de leurs avantages.
Nous déplorons tous le fort de l'Efpagne, qui a été fi vilainement fe-
duite à faire des làchetez û baffes, de ce qu'Elle, qui depuis un Siècle a
combattu fi conftamment & li fortement contre les embûches tendues à
fa liberté & contre les cruels deffeins des François, fe laiffe entraîner par
une fi miferable chute dans le précipice , dans lequel elle perdra fa répu-
tation & fes biens, fi elle ne fe tourne par une prompte vigueur du côté
de la Maifon d'Autriche , à laquelle Elle n'a pu diminuer les droits ci-
devant établis, quoi qu'EUe paroiffe être fl facilement tombée dans l'ado-
ration prefente pour le Duc d'Anjou.
Nous ne doutons nullement que le grand danger , où fe trouvent les
Etats & le Commerce des autres Nations , ne les porte à agir vigoureufe-
ment en faveur de la Juftice de la Maifon d'Autriche , & qu'ils n'entre-
prennent enfemblede fe procurer le falut & leur tranquillité.
On ne doute point que le Pontife Romain,felon fa grande prudence n'aper-
çoive le peu d'honneur que les François ont pour le maintien des Traitez
de Paix, des Contracls paffez,& desSermens }& de la grande profanation
qu'ils font du nom de Dieu & des Evangiles en agiffant de la forte ; comr
bien leurs menaces font promptes & hautaines, auffi-bien que la force de
leurs armes , que leur domination eft infuportable & infolente dans les
Maifons, Cours, & Etats d'autrui, capables d'entreprendre encore davan-
tage, lors qu'ils auront abaiffé avec ignominie ces Efpagnols qui leur ont
filong-tems réfifté.
Nous connoiffons & déplorons les fcandales qui en réfulteront , nous
voyons les dommages , nous ne refufons pas la guerre , nous pré-
voyons les dangers , nous voyons d'avance la perte prochaine de nos
voifins , & nous augurons avec fondement des orages, dans des Etats
fort éloignez.
L'Empereur Leopold, qui eft toujours pacifique, & qui aime l'équité,
n'eft ennemi que des Turcs , fi ceux-ci l'irritent : il eft le vengeur de la
dignité Chrétienne, & il maintient religieufement les Loix , les Traitez,
& les Sermens. Mais, que fera-t-il à préfent, que l'on lui ravit le Patri-
moi-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC.
2Ï3
moine de Ton Trif-Ayeul, attaché à la Maifon d'Autriche par tant de Ti-
tres ? & que l'on envahit fi hardiment & infolemment les Fiefs de l'Empi-
re (dont on aura occafion de parler ci-après en particulier?) Les autres
PuhTances de l'Europe qui ont été en particulier maltraitées par les Fran-
çois doivent uni verfellement connoitre, qu'Elles ne fçauroientplusfûrement
& plus certainement trouver leur fureté & leur repos, que dans rabailTe-
ment de la France , & en lui opofant une forte digue. Pour moi , je m'ar-
rête ici 5 & , à i'égard des dangers prochains qui les menacent & le foin de
leur propre falut qui efl fort chancelant , je leur confeille de fe fouvenir
de ce qui a été dit autrefois, de fe fervir du tems prefent , l'heure s'écou-
le avec rapidité, & il nven revient jamais une qui foie auili bonne que la
première que l'on a laiffé échaper.
Amrwts
d'Alle-
magne.
AFFAIRES DE POLOGNE, DE SUE-
DE, DE DANNEMARC, ET DE
M O S C O V I E.
Beclaratio Senatus Confilii Folonici circa BeJlum cum
Sueciâ; 1700.
AD1.2.}. y 6nm. Quandoquidem prœfens Senatus-Confdïum nequït abfque
tôt a RepubUcâ declarare afjîflentiam ~Sereni(jimo Rcgi Daniœ ex vi fœde-
ris cum RepubUcâ initi contra Sue cum , promittit Sacra Regia Majeflas defi-
gnare Comitia generalia Deo dante in menfe Decembri , {$ modo amicijflmis Li-
teris refpondendum Régi Daniœ Intérim Literas expedire univerfales ad Pala-
tinatus & Terras cum information & expreffione caufarum inchoati belli cum Sue-
€0 in quibus Literis univerfalibus exprimet puriflïmam intentionem Suam;quod fi
Deo adjuvante recipiet Ducatum Livoniœ , Re (public œ aggregabit , juxta jura-
ment uni de recuperandis avulfis , quod ipfum fpeciali Diplomate cavere parât us
efl. Intérim quia Refpublica abfque Comitiis in hoc bellum non defeendet , noilens
ejfe gravis alio modo Refpublicœ Sacra Regia Majeflas*propriis Stipendiis & rfr-
mis militabit , non deferet Regem Daniœ : quod fi nccejjitas urgebit , parât a erit
S. R. Majeftas Comitia Extraor dinar ta duarum feptimanarum atque folemnita-
tibus indicare:Interea commendat fupremis Exercituum Ducibu^ Regni & Ma-
gni Ducat ûs Lithuanïœ Gêner alibus omnem vigilantiam circa mflodiendeï limi-
tes Patriœ , £5? quatenus cum S. R. Majcflaîe in omnibus occafionihus correfl-
pondeant quorum arbitrio & prudentiœ etiam Caflrorum meiatio relmquitur.
.Affaires
de Po-
logne
ET Db
StJEDE.-
Declara-
tion du
Sénat de
Pologne
touchant
la Guerre:
avec la
.Suéde-
Dd 3
Cour-
3i4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AFFAIRES
de Suéde
et n i
Courte Relation de la Defcente faite par les Suédois en Zeeîandt
dans le Dannemark; le 14. (25?) Juillet 1700.
H AR G.
Defcente T E R0ï de Suéde, ayant réfolu de faire deux Defcentes en Zélande, l'u-
j"sseunc" J— * ne dans la Baye de Koge , l'autre du côté d'Elfeneur ; & les Ami-
zdeiandt, raux Anglois & Hollandois ayant confenti de les faciliter avec leurs Fre-
en juillet gates & Barques ; Sa Majefté conféra le ig. de Juillet au Lieutenant Ge-
neral Baron de Rheenshield, Gouverneur de Schonen, le Commandement
& la Direction de la Defcente dans la Baye de Koge, & à Son Excellence
l'Amiral General Comte Wachtmeilter le Commandement, & au Major
General Stuart la Direction de celle près d'Elfeneur. Mais, le vent n'é-
tant pas favorable pour le tranfport d'Ufledt, ce delfein fut changé, la
Defcente dans la Baye de Koge abandonnnée, & l'on fe contenta d'entre-
prendre celle près d'Elfeneur. Pour cet effet, l'on envoya un Détache-
ment de 10. gros & petits Vaifieaux de la Flote vers Landfcroon , &
l'on y affembla 100. Barques de Pécheur pour le tranfport de la Milice &
autres chofes nécelfaires. Le 22. l'Embarquement ne put fe faire, à cau-
fe de la tempête, & fût différé jufques au lendemain. Le 24. Sa Ma-
jefté fit voile de Landscroon avec fes Troupes ; & un autre Détache-
ment de la Flote, commandé par le Baron Anharitiern, qui devoit foûte-
nir la Defcente, fit voile de devant Coppenhague, & joignit les Vaif-
féaux de tranfport fous l'Ifle de Ween avec un vent favorable de Sud-
Ouelt, lequel, s'il n'avoit pas changé, auroit fait réuffir la Defcente dès
le même foir. Pendant toute la nuit, le tranfport fe tint à l'ancre , & le
jour fuivant 25. fit route vers le rivage de Zélande, où l'on vit dans tou-
tes les places propres à mettre pied à terre, & particulièrement à Brick-
hidn & Runflegebroog , des Retrenchements, des Bateries, & beau-
coup de monde > ce qui fit que le Major General Stuart examina d'a-
bord toutes les places le long de la Côte auffi fécretement qu'il fut pof-
fible; &, ayant fait choix de l'endroit où fe fit par après la Defcente, fa-
voir près du moulin à vent, environ à 4 miles AngJoifes au Sud d'El-
feneur, fitué entre Voogerup & Taberup, il fit examiner toutes les au-
tres places ouvertement , & donna ordre aux Pilotes de fonder les pro-
fondeurs près du rivage. Par ce moyen, les Danois furent féduits, reti-
rèrent leurs Troupes du véritable endroit où devoit fe faire le Débarque-
ment, & y laifierent le champ libre. Les Danois , attentifs au danger où
ils fe trou voient, avoient envoyé 12 de leurs moindres Frégates aux bords
du rivage de Zélande, pour y ruiner les Navires de Tranfport , ce qui
obligea les Frégates qui dévoient foùtenir la Defcente de fe ranger en or.
dre; mais l'Efcadre Angloife,qui étoit reliée devant Coppenhague, char-
gea ces Frégates de manière qu'elles refolurent bientôt de fe retirer. Cet-
te alarme étant paflee, & toute la Flote rangée devant Ounftigekroog,l'on
crût
ET D*
) A NN1
MiUC.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. ny
crût que la Defcente devoit s'y faire; & toutes les Troupes Dano/fes, Aïfairks
qui confiftoient en trois Efquadrons & grand nombre d'Infanterie, qu'on I,tSurD-E
ne put pas compter, parce qu'elle étoit rangée derrière leurs retranchemens, datn£*.
des hauteurs & dans les bois, s'y rendirent. Ce qui ayant été obfervé,
tous les gros bàtimens, huit en nombre , outre quatre Frégates & cinq
VaiiTeaux à bombes, fe rendirent directement aux moulins à vent, & les
Chaloupes & Barques qui avoient les Troupes à bord vinrent à bas-bord
plus près du rivage. Les ennemis, fe croyant trompez, les fuivirent ; mais,
ils eurent un grand tour à faire près de la baye vers Hywalk, ce qui les
fit venir li tard, qu'il n'y eut pas un feul homme au véritable endroit de
la Defcente: lorfque les vaiiTeaux s'y furent rendus, ils s'afTemblerent par
degrez derrière un retranchement & quelques murailles.
Les gros VaiiTeaux étant rangez pour foutenir la Defcente , on donna
le fignal par huit coups de Canon : les Barques abordèrent , & l'Aile
droite fut mife en ordre par Sa Majefté même avec l'Amiral Général &
les Majors Généraux Polie & Stuart; & la gauche par le Lieutenant Gé-
néral Rheenshield. Elles furent rangées dans l'ordre de Bataille que le
Major Général Stuart avoit formé par ordre de Sa Majellé, & on leur
montra les endroits qu'elles dévoient attaquer fuivant les découvertes qui
en avoient été faites, de la manière fuivante. Le premier Bataillon des
Gardes, commandé par le Lieutenant Colonel Palmquiit, devoit être à la
droite de tout le relie, & attaquer la hauteur fur laquelle étoit le moulin
à vent; le fécond Bataillon, fous le Major Numet, devoit être à la gauche
des autres, & attaquer en flanc un retranchement fur une hauteur pas
loin du rivage; le troilieme Bataillon, fous le Capitaine Erhenfteen, étoit à
la droite à côté du premier, & devoit attaquer une hauteur fur laquelle
il y avoit une maifon; le quatrième Bataillon étoit du Régiment du Colo-
nel Falsberg de Malmo fous le Lieutenant Colonel Buckwald : il étoit
à la gauche près du fécond Bataillon, & devoit attaquer une autre hau-
teur.
Ain fi , la première Defcente fe fit par quatre Bataillons , dont chacun,
étoit placé de manière, que les Grenadiers entrèrent les premiers dans les
plus petites Barques, fuivis des Chevaux de Frife menez par des Mari-
niers; après cela, fuivoient plufieurs Moufquetaires, & après ceux-là ceux
qui dévoient les. foutenir; enfuite le gros des Bataillons dans des Chalou-
pes où on avoit mis quelques pièces de Canon, & d'autres Chaloupes a-
vec des pièces de Campagne, qui furent placées aux ailes des Bataillons,
Enfin, plufieurs Chaloupes avec des Fafcines, pèles, bêches, & autres pa-
reilles chofes. Tout ayant été difpofé dans cet ordre , on donna le li-
gnai pour l'attaque par un Pavillon rouge guindé fur le VaiiTeau de l'A-
miral.
L'Ennemi avoit pendant ce tems-là eu le loifir d'approcher & de former
les lignes: &, lorfque nous nous rangeâmes, ils nous faluerent plufieurs
fois, tant de leur canon , que de leur Moufquetterie ; mais, ils furent il chau-
dement regakzdes VaiiTeaux, que leur Cavalierie, auffi bien que l'Infan-
terie
NEMARC.
116 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AmiREi terie furent obligées de fe mettre h couvert; &, lorsque la Cavallerie étoît
m Sukdk quelques fois dans la nécefiité de fe découvrir en paiïànt d'un endroit à un
*™^A" autre , elle fut conduite par tant de coups de canon , qu'on avoit de la pei-
11- ne à la voir à travers la pouffiere & la terre qui l'environnoient. Le Ma-
jor Numet fortit le premier des Chaloupes avec fon Bataillon; mais, avant
qu'il eut mis pied à terre , il fut obligé de charger la Cavallerie Ennemie
qui vint fur lui au rivage: elle auroit refiflé longtems, fi les Grenadiers
ne l'enflent pas chargée fi bravement, qu'elle fut contrainte de fe retirer
fur la hauteur derrière fes Retranchemens ; mais , encore fut-elle fuivie par
les Grenadiers, qui forcèrent ces Retranchemens dans le flanc, & firent
reculer la Cavallerie , laquelle pourtant fe rallia & revint à la charge ;
mais ceux qui dévoient féconder les Grenadiers fe joignirent à eux dans
ce tems-là, & mirent la Cavallerie une féconde fois en fuite. Le Bataillon
entier, ayant gagné terre, marcha d'une vitefîe furprenante, fe forma &
prit les polies qui lui avoient été afTignez. Les autres Bataillons dépen-
dirent à terre par degrez ; & , quoique l'Ennemi fit feu des fes Retran-
chemens, tant du Canon que de la Moufquetterie, aucun d'eux ne man-
qua de prendre fon polie, mais chacun gagna fa hauteur refpective , &
après avoir repoufle l'Ennemi y prit fon polte, & s'avança enfuite fi loin
qu'on eut pu former un Camp pour huit Bataillons derrière eux. Si tôt
que les Chaloupes furent vuidées, elles furent renvoyées aux Vaifleaux
de guerre, & elles y prirent le Régiment de Montagnards commandé par
le Colonel Levé, & celui de Colmar fous le Colonel Diurklo , lefquels
prirent terre dans le même endroit où avoient defcendu les quatre Batail-
lons, & de-là marchèrent, & fe polterent furies hauteurs. Aufli-tôt après
on commença à faire les Retranchemens, & le Camp elt déjà fi bien aflu-
ré, qu'on a donné allez de tems pour attendre l'arrivée de la Cavallerie,
laquelle fe débarque actuellement. De notre côté, nous avons très-peu de
morts ou de blelTez. Le Major General Stuart eft le feul Officier blefle ;
il reçût un coup à la cuifTe gauche, mais la baie rencontrant quelque cho-
fe dans fa poche, ne fit qu'une grande contufion à fa jambe. Il reçût
ce coups lors qu'il mena fo Hommes du Régiment des Montagnards du
Colonel Levé, pour renverfer un des Retranchemens des Ennemis, dont
cinquante & un furent tuez, & cinq bleffez. Dans cette Defcente aucun
n'a eu plus d'occafion de donner des preuves de fon courage , que le Bataillon
du Major Numet, fur-tour fes Grenadiers: & généralement tous, tant les
Officiers que les Soldats, fe font comportez très bravement. On ne don-
neras ici le détail des bravoures des Troupes, parce qu'on ne trouveroit
point d'exprelïion allez forte pour repréfenter le Courage héroïque de Sa
Majelté feule , non feulement à furmonter tant de difficultez, de vents
contraires, de courants, & autres obttacles , mais en rengeant& animant
fes Troupes avec la conduite d'un Général confommé , & enfin la valeur
incomparable qu'Elle a montrée en menant Elle-même le premier Batail-
lon de l'Aile droite, ce que le Roi auroit fait également s'il s'étoit trou-
vé à l'Aile gauche où le choc ctoit le plus fort.
DIS-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC.
217
K T DR
Mosco-
VI E,
Difaiffio Criminationum , quitus ufus eft Mojcorum Czarus , cum An*™™
bello Suecis , contra jusjurandum , & nuperrimê datam fi-
dem, iïtot° prœtexlum quœreret. Juxta Exemptai* Holmiœ>
Literis B. Nicolai Wankifwy J. H. Werner. F. M. DCC (*).
Cicero de Legibus :
Pcena âbvina Perjurii , Exitium; humana , Dedecus eft.
Belizarius apud Procopium :
Turpe eft cum aîiis omnibus ^quibus velminima virtus eft cordi>
îum Principi vho , mentir i ac fidem f aller e ; jusjurandum
autem, & pacla etiam Jcripto Jancita > violare^ne abjetlif-
fimo quidem homini décorum ejje arbitror.
NON Mis, qui rerum fuperiori memoriâ geflarum aliquam habent no- ManifeG
titiam, novi quidquam, aut inopinati hodie obveniet , cum audi- te des
verint Mofcos nulla injuria laceiïitos , infidiofum Suecis bellum intulifle, c^tr°eIS
inque eo faevitiam tantam , quantam nulla in barbariâ quisquam adhibuiile iesMo£
legitur , in tefta hominesque effudifTe : magis fortaffe mirum videbitur, covites.
fuifle Suecos iftâ animi fidentià, ut quorum fraudibus tories decepti fuif-
fent, eos aut innocentiâfuâ,aut paélorum fan£titate , a confueta libidine re-
vocari pofle crediderint. Tôt enim ab eo tempore , quo , fubjugatis fi-
nitimis populis, ad Sueciae viciniam dominatum fuum protulerant, incon-
flantise documenta dederunt, ut caufam non haberent Sueci multum fidu-
cia: in eorum amicitiâ collocandi. Nam poftquam interjetas regiones,
seftuantis inftar Oceani, abforpferant , cum ifti hic impetum fuum fenfiC-
fent, & quafi aggere coerceri , ne immenfa ferarum gentium eluvione
continguas Septentrionis partes inundarent; quo in majorem virtutem in-
ciderant, eô vehementius exariifTe deprehenii funt, & implacabile adeo
in Suecos odium concephTe, ut nocendi Mis occaflonem praetermiferint
nullam, &, quos armis diffiderent, eorum fortunam dolis fubruere fem-
per laboraverint. Quamvis autem fortiffimè repreiîi, tôt fuorum ftrages,
quot cum Suecis confliclus , numerare potuerint ; & proinde non cupide
minus paeem redintegraverint, quam eandem paulo ante temerè infrege-
rant : ut primùm tamen occafio invitavit, quafi abolità veterum cladium
memoriâ, Suecos aliis bellis occupatos a tergo invadere, aut, fi major
horum fortuna videretur , quàm ut palam adoriri eos fuflinerent, oftenta-
tis ad limitem armatis legionibus , progreiTus eorum inhibere nunqùam
defierant. Equidem haec levitas monere Suecos debuerat , ne folennibus
paclis , quae toties conculcata viderant , fuse putarent fecuritati fatis elle
confultum : verum hi virtute fuâ confidentes , maluerunt , fœdera inte-
gerrimè fervando , Mofcis omnem fimultatis anfam adimere , quam mi-
nimam difridentiae fufcpicionem prsebere , atque adeo benevolentiâ & hu-
mani-
(*) Cette Pièce n'ejl qu'indiquée dans h Tome /, pag. 183.
Tome XL Ee
2i8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Afïairks manitate mitigare eos , cum quibus colluclari inglorium exiftimaverunt..
de Suéde j^on paLlcis eiiam perfuafum erat, Czarum , qui hodie imperat, inftitutà
Mosco- Per celebriora Europae régna peregrinatione , abolevifle nonnihil veteres
VIE. mores; non immérité ad civilis vitse rationem tanto propius acceffiffe
creditus , quanto cupidius exterorum commercia vifus erat appetere. At-
que idem cum Suecis non tantum vetera pacla renovaverat , fed etiam
ingens ubique prsc fe tulerat defiderium cum illis conftanter amiciciam co-
lendi. Quod ambitiofis verbis , quà publiée , quà privatim , teflatus eft.
Verùm quàm longé omnium opinionem fefelliflet, eventus nuper docuic,
cum immemor fidei & jurisjurandi, immanium agminum mole in Suecia&
fines infusa, Narvam prius arélà obfidione cingeret, quàm quisquam ad-
fore hoftem fufpicaretur. Quàm verô horrenda & varia in omnis fexûs
& sctatis mortales fsevitiae gênera ediderac , fi commemoratur, licet illa
nemini non, qui communem hominum naiuram reputabit, magnum &
acerbum dolorem commoverent: prœftiterit tamen illa filentio involvere,
quàm mites Chriftianorum aures tam focdis exemplis imbuere, quce ipfius
humanitatis excidium docere poffent.
Quapropter , ut. Orbi Chrifliano mànifefîetur , quàm nefariis artibus ad
circumveniendos Suecos jam ufus fit Mofcus, & quàm nihil penfi habue-
rit, fœdera, promilTa, jusjurandum, & quicquid fanéfci inter gentes efle
débet, profanare, & fuae poftponere Iibidini; feriem totius rei explicare,
atque ante oculos expofitam intueri , necefle eft. Perpetuum erat inter
ûtrumque regnum Fœdus, quod cum Aiexius, Mofcorum Czarus, parens
hujus qui rerum hodie potitur, anno M D CL VI, rupiffet; pax ite-
rurn, anno MDCLXI. in pago Cardifiae convenerat iis conditionibus ,
ut vetera pacla farta teclaque manerent , nec propterea refcindenda , li-
res aliquae in controverfiam poftmodo venirent ( A ). Has enim prcefec-
ti provinciarum, prope Iimitem regni, more veteri cognofcerentr atque
dijudicarent : aut fi majoris hx moment! viderentur, quàm ut ab iis diri-
mi poffent, mifli ab utroque Principe ad Iimitem Legati, fine cunclatione
eontroverlias omnes tollerent atque fèdarent. Hanc pacem Petrus Ale-
xides, cum imperium naçtus effet, anno MÛCLXXXIV, verbis m
fancfci Evangelia conceptis, & ofculo facrae crucis, quod religiofiiTimum
Mofcis jus,urandum eft , confirmavit; & fuperiori anno, cum ex legibus
fœderis. fuos in Mofcoviam Legatos Sacra Regia Majeftas Sueeke miliffet,
folennibus verbis renovavit (B): non alio , ut videtur , fine, nifi ut,
eum pacem bis fancliiïimis ceremoniis firmatam violaffet , geminato &
jam' fiagitio fe obftringeret. Sed quafi metueret, non fatis fuiiTe ad fal-
lendos Suecos reiigione fœderum abuti; quo magis horum animos a meta,
iniidiarum averteret , nuilas non blanditias artefque , quibus fubdolis men-
tes valent , adhibere non dubitavit. Proinde praeterita reftate Gilcovium
è primarià nobiîitate ifî Sueciam mifit, qui magnos Legatos brevi adfuturos
indicaret, fi'dem a S. R. Majeilate pro. corrfirmando fœdere accepturos : fa
verô, dum ifti fe itineri accingerent , prcemilïum , ut Regem de Czari.
benevoJentiâ conftantique amickiâ certiorem f*:eret , & auiam Suecicam
urdi-
V 1 E.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC/ n9
narius pofthac maneret (C). Cum aftutus Princeps ne fie quidem con- Affairk»
lîlia fua fatis occultari putaflet, atque ad Suecorum aures emanafTe ali- de Suéde
quid percepiifet , quod impedimento fuis effet moiitionibus, miniflrum AT DS
Sueeicum, qui Mofcuae degebat, domi fuae iponte convenit , omnique
afieveratione ei affirmât, fe amicitiam cum S. R. Majeitate Sueciœ illiba-
tam confervaturum: blandis etiam verbis increpans , quod majorem fuis
promillis fidem non haberet, quàm ut crederet fe , violato fœdere, teme-
rarium fufeepturum efle bellum (D). Parera illius in Suecos benevolen-
tiam Artemonides,Legatas Mofcicus, Hagse-comitum non unâ vice de-
claravit: qui cum in coiloquium illultris viri Lillienrotii , qui apud Batavos
Legitionem obibat, veniflet, infidelitatis fufpicionem magno cum dolora
fuitmere vifus efl. Czarum aiebat rumufeulis ,qui de hoftili ejus in Sue-
cos animo percrebuiflent, vehementer efle commotum j atque agnofeere
hic artes malevolorum , qui, perveria Suecis opinione injecta , frigidam
fuffundere laborant: illum autem in veteri amicitiâ firmiter perfiftere, &
pro calumniâ habere , quicquid alii fuae adverfum intentioni finxerint. Va-
fer idem ac verfipellis homo Legatum Sueeicum rogare cœpit, atque ob-
teitari , ne dubitaret in poilerum fibi aperire, fi rumores ejufmodi, quibus
Czari nomen & exiitimatio lasderetur , exciperet, quo condignis ftatim
modis illos coarguere poÛet, & Principem fuum de iisdem certiorem fa-
cere. Notabile prorfus malitiae verfutiloquae exemplum! fed quod tamen
ab iis, qux fubjecerat, illultrius fîet : Czarum enim Principem ejfe Chrifiia-
num , qui in folio rejideret , fplendore atque opibus nulli totius orbis fecundo : il-
lum in tanto faftigio pojitum , nihïl committere velle , quamobrem non tantum
ijlâ fort unâ minus exifiimaretur dignus, fed etiam divina?n fimul vindiclam,
quje injujla bella comitari folet , in fe provocaret. Avcrfari omne indecorum
facinus , qmd prœfens & futur a œtas ipfi exprobrare pojfet. §)uod certe tune fu-
turum nouent , fi amico Régi , £5? nulli us injuria comperto , bellum non neceffa*
ritim inferret. Proindc in animant induxij/è , cum Rege Sueciœ jœdera conftan-
ter fer v are , ut tutus orbis intelligat , illum fidei & promifforum ejje obfevvantif-
fimum (E). Digna profeéto Chriitiano Principe Sententia ! tantô majo-
rem Czaro Mofcoviae gloriam conciliatura , fi in iilâ permaniïfTet, quan-
ta graviorem fua levitas inufîit maculam, cum Suecis etiam fuo judicio
innocentibus bellum faceret. Sed ut facinus , quod in Suecos parari no-
verat, perhorrefeere forte fe fimulabat; ita triftem hujus facinons exitum.
animo verè prœfagiebat, clademque , quae mox infecuta eft , juità Dei
ultione immifiam efle, fua ipllus confeflio ne jam tum comprobabat.
Cum verô de tam propenfà in pacem voluntate fe ja&aret Mo feu s , at-
que eandem animi firmitudinem ubique teitificaretur } non mirum cuï-
quam videri poterat, fi non omnem diétis fidem quis cenfuiffet efle dero-
gandam. Nam & injuriofum videbatur , repetitis toties affeverationibus
non accedere , atque odiolis adfpergere illum fufpicionibus, qui eas tanto
itudio à fe propulfare quaerebat. Tum Sua Regia Majeflas Suecbe , ex
fuâ animi magnitudine Czarum reputans , acgrè fibi perfuadere potuic,
tantum in Principem cadere potuifle fiagitium, ut tam apertè ludificari
Ee 2 vellet.
ET DE
kloSCI
VIE.
220 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
âifaires vellet. QuodfiDeum, pollatae fidei vindicem, minus metueret ; famam
df.Suede tamen & hominum judicia, quae apud malos pleramque plus valere foient,
Mo sco- nonnmil formidaret. Acceffit his fumma ex parte Sua? Regise Majeitatis
innocentia, qnaz non parum hanc augebat fiduciam. Nam eu m nullius in-
jurias, quâ lasfus fuiffet Mofcus , fibi confeia. effet, & offenfiunculam, fi
quam fortafiis Riga: acceperat, omni diligentià tôlière fatageret, non exi-
ftimabat fœdus eodem anno , quo renovatum erat, tam facile ruptum iri.
Quibas omnibus fa6lum eit, ut fines Sueciae , quà latiflîmè Mofcoviam
contingunt , ineuftoditi ferè & nudi relinquerentur , abduftis legionibus
verfus Livoniam, quam, non minori vi quam perfidiâ , Rex Polonorum
tune incurfabat; altero etiam exercitu extra regnum conltituto, qui Cim-
brico diffidio tollendo operam impenderet. Quae: argumento elle poffunt,
quantum Czari conftantiae tribuiffet Sua Regia Majeltas: quœ cum ab ami-
cis quoque moneretur, inQdias ab illo comparari, generofo animo malue-
rat îllius experiri, quam temerè damnare fidem, in qua adltruenda tam
anxium fuiffe eum haétenns compererat. Verùm ille commodum adve-
niffe tempus ratus, lethale vulnus Saecise infligendi, antequam ex difikis
procul regionibus , mari prrefertim procellofo , copise trajicerentur , diu
meditatum cogitatumque facinus exfequi ftatuerat. Qaod verô incertas
adhac belli Tarcici exitas folicitam haberet , in eo credebat cardinem to-
tius rei verti, fi Saecos potaiflet, fpecie amicitiae deceptos, in fecarita-
tem indacere^ Regem aatem Poloniae, faclâ fpe céleris aaxilii, in caepto
infeliciter bello detinere. Itaqae eodem tempore deprehenfas eft mifee-
re cum hoc confilia, qao Saecoram animis adrepere, blandiri & exqni-
fitiilima verboram lenocinia admovere faltinuit. Exceptae enim literse
(F) totam feenam detegunt , arguuntque Czarum, non caufis nuper
confiétis motum , in bellum hoc prorupiffe , fed illud dudum cum ani-
mo fuo ftatntam habaiffe. Qaod ficut ab eventu alterias belli diftale-
rat ; ita poftquam habendae cam Tarca pacis certa fpes affalfit , qaâ
volantate in Saecos faiffet , non obfcarè indicavit. Tanc enim con-
ftantem benignamqae perfonam , qaam metas Tarcici belli ha&enas ei
împofuit , occafio & fua natura decraxit. Sed ne videretur ex ancipiti
temporum mutatione pependiffe, paalo ante quàm pacificatio haec vul-
gabatur , minutas quasdam & infipidas querelas, contra luculentas pac-
torum leges , contraque veterem confuetudinem , non ad Suecos , qao-
ram intererat eas noviffe, fed ad Ordines fœderati Belgii déferre volait,
Quamquam has querelas non eo animo motas dicebat, at inde caafam
belli quaereret} fed at , Belgis feqaeltribus, citius hae tollerentur. Ser-
vaturum fe cum Suecis amicitiam : nec in bello hoc Livonienfi cum
Rege Polonix arma fociaturum (G). Haec apud fœderatos Belgas Le-
gatus ejus jaétabat : haec apud fereniffimum Britanniae Regem etiam tune
profîteri non verebatar, qaum infefta prope fines Sueciae caftra Czarus
haberet. Adeo nullum tempus il 1 ï unquam vacabat a fimulando, novas-
qae fraades excogitando : qaibas ita deditas erat, at ne amicos qaidem
îudere turpe putaret, quô adverfarios expeditius falleret.
Qao
ET DR
Mosco-
VI f.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 221
Quo pa£to Mofcus ad belium hoc progreiTus fit, vidimus: jam caufas , Affaire
quibus ad illud fufcipiendum impulfus fueric, expendere operse pretium nE Suéde
elt. Quaenam verô iftae iint , non promtum adeo eit affirmare : fiqui-
dem publicum aliquod fcripcum, quo jus ac neceilitas hujus belli deelara-
tur , Suecis nondum innocuit. Libello , quem Batavis Legatus Mofcicus
traclidit, fupra dictum efl aliquas contineri querelas , fed, ut ille tune fe-
rebat, non eo fine expofitas , ut praetextum inde novorum motuum fume-
ret Czarus: quoniam tamen idem Legatus, cum illatum Suecis belium in
Bataviam paulo pofl nunciaret, has potiffimum criminum loco objiciebatj
apparet juiîifle Czarum, ut ex iisdem juflitia belli cognofeeretur. Ex eo
igitur fumma aceufationis capita recenfere lubet , & ad fingula deinceps
ordine refpondere : quo œquusLector incorruptiuspofiît judicare, majori-
ne perfidià , an injuftitià , hoc belium fit conflatum. Primum autem,
quod non feitivè minus, quam operofè, contexitur, crimen eft : Legatos
Mofcicos , cum , A. MDCXCV IL per Livoniam iter inflituerent , contra
paiia indigne habit os ejfe. Fines enim Suecia ingreflis non jument a ad vecluram
prafto fuijje , nec commeatum neccjjarium Juppeditatum. Riga autem non debi-
bitis modo honoribus caruifje , fed etiam commodis hofpitiis : arclius quoque obfer-
vatos fuijje , nec ulla re honoris caufà donatos. Sed nec pretio quidem pabula
equis obtmuijje : & , quibufeunque ad viclum ipfi eguijfent , carè nimis veniijfe.
Ôjiin contumeliâ comités ejfe ajfeclos , &? , cum urbem perluflrare niellent , a
Prafeclo Rigenfi afpere compellatos , quafi explorandi caufà munimenta circumi-
rent. Trajecluris Dunam vilia navigia data, & nihilominus pro iis , quafub-
miniflrata erant , grande naulum exaclum. ghiœ injuria , cum in fe intolerabi-
les effent , ex per fana Czari, qui in comitatu erat , graviores non immérité cen-
feïi. Cur/orem, qui ex itinere m Mofcoviam retroverti jujfus efl , Riga diutius
detentum fui/Je, atque diiigentius excujjum : equos denique, quibus veclores Mo-
feici uji [mit , vili pretio a mercatoribus Rigenjibus co'émptos. Alterum efl,
Procopii Vofnicinii , qui e 'Turcica legatione in patriam revertebatur , currum
pretio fa fupelleclile onuflum a rujlicis Livonis direptum. Tertium ex Graenii,
Praefecti tabellariorum, culpà refultat, quem in officio fuo non intégré ver fa-
tum aceufaverat Finnius , Mofcua codent munere fungens , nec tamen obtinuerat ,
ut ab adminiflratione iflâ fummoveretur. Ullimum eit, Mofcicis mercatoribus
a Suecis nonnullis pecuniam deberi , qua aureorupi aliquot millia confiât ( H ).
Has offenfe caufas ab initio Czarus afferebat : neque alio praetextu apud
prsepotentes Belgii fœderati Ordines, ut fupra monitum , ufus erat. Nu-
per autem comperturn efl binas alias acceiïifTe: fed quas genius fuus facile
prodit vel alibi, vel in AulâRegis Poloniae Saxonicà, fbcundâ calumnia-
rum patrià, conceptas effe. Acutiores enim videri volunt: cum rudita-
tem Mofcicam priores iflse redoleant. Sed de his poftea videndum: nunc
eodem ordine, quo recitatae funt, priores confideremus, aequi & pruden-
tis lecloris judicio permifTuri, an bellse iftae ratiunculse Czarum a perfidie
& degeneris flagitii crimine abfolvere poflint , aut quidquam fani conti-
neant, quo belium hoc fiât excufaùus.
Ee 5 Ac
in MEMOIRES, NEGOTIATÎONS, TRAITEZ, ET
Affaires ^c prjmum quidem , quôd Legatos fuos parum honorificè Rigae excep-
DE d^ tos e^e criminacur, fi putidam quis calummam appdlaverit, quae Mofco-
Mosco- rum infolentiam & confuetam in fingendo libidinem coarguat, nihil a ve-
vie. ritite alienum , aut in eoruin mores iniquum, quidquam dixerit. Tralati-
" tium enim eit, omnium, quibus eu m illîs ufus aliquis intercelferat, fer-
rnonibus vulgatum, fcrupulofiorem abfurdioremque in arrogandis fibi im-
modicis honoribus toto orbe nationem non exftare, five txteros Legatos
recipiat, iive fuos ipfa mittat. Vitae enim humanioris expers & ignara,
omnes alios populos defpicere tantum novit : & cum praeter fbrdes , quo
fè efferat , domi nihil habeat; foris tamen tantum non adorari eupit , &
fallu intolerabili vel exquifkifïîmos apparatus infra dignitatem fuam repu-
tat. Polfet id ipfum innumeris exemplis comfirmari , quae rifum panter
& ftomachum cultiori orbi commoverent, fi non aliorum laboribus nota-
ta reperirent-ur; & verendum effet, ne non tam ad diluendas has crimina-
tïones , quam ad invidiam adverfariis conrlandam, adducî illa exiftimaren-
tur. Unum tamen inter Germanos demonitrare liceat, quem Mofcorum
mores nofeendi cupidis operae pretium fuerit infpicere (I). Quare cum
inter omnes confiât, qui fando de iliis quidquam acceperunt, morbo hoc
laborare Mofcorum ingénia, non jam novum cuiquam videretur, fi officia
humanitatis, quae Rigae il lis exhibita funt, vaniiîimae eorum fuperbiee, &
inlatiabîli cupidîtati minus fufFeciflent. Verùm, quodmireris, nulia tune
querela audita eh\ /\deo pnefikis fibi honoribus mirificè captos fe fere-
bant, ut concinno apparatu in fluporem ferè agerentur. Verùm Czarus
partim malevolorum inlligaiionibus, partim rébus fecundis elatior, cum
magno ardore in Suecos iiimularetur, nec tamen in iliis, quoad argue-
ret, quidquam reperiret, hafee cavillationes arripere voluit. Quàm ve-
ro famae fua; melius longé confuluiifet, fi affamas hafee perpetuo filentio
prseteriiffet ! Neque enim decebit aqui'am feclari mufeas , aut conveniet
Frincipis faltigio , titulis tôt gentium regionumque turgidi, ad minutulas
has calumnias di'abi. Quàm enim indecorum eit, quàm regio animo in-
dignum, queri, nulla re Legatos ab iis , qui nihil debebant , Rigae elfe do-
natos! cum tabernariis de pauculorum obulorum pretio rixari: & plebe-
culœ mercaterum irafei, quod macilentos aliquot & ltrigofos Mofcorum
equos, qui nulli ufuierant, pluribus numulis mercari noluiffent ! Pude-
ret certè, fi verae laudis guilum haberet, inter caufas belli talia recenfere,
quae, etiamfi vera elfent, neque imprelfam nomini fuo perfidiae notam de-
îebunt, neque moto temere bello fpeciofum faltem colorem inducent. At
pattis répugnai, Legatos nulla re honoratos elfe. Equidem his, qui non
ad S. R. Majelïatem Sueciœ, fed ad alios Principes &Refpublicas deftina-
ti erant, nihil debebatur. Tranfitum petebant: conceifus eft. Paftis au-
tem nufpiam exprelfum invenitur, quo apparatu, quâ pompa exciperen-
tur: contra difenis verbis cautum (L), ne ituri ad exteros, Legati quid-
quam ullo nomine exigèrent, fed fuo fumtu per provincias Suecorum Jter
lacèrent: officia tantum humanitatis, quae amicis prseftari folent, iliis non
dene-
VIE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 225
denegarentur. Prrelïita il la abundè funt. Miffi ad fines Livoniae funt ho- Affawf»
norati nobilefque viri,qui Legatos Rigam deducerent : commeatus largiter deSukde
convenus erat : rhedarii equi plures, quàm opus erat, coacli: quibus uti JJ DE
nolebant Mofci , vel ut fumtibus parcerent, vel quod iliis non egerent.
Rigam accedentibus obviam effufi prxfecli milkares , & flos civitatis, ma-
gnifico omnes cultu, quantum opes illius urbis ferebanc. Prrelîdiarius mi-
les honoris caufâ in armis erat:tympanis, buccinis, & reboantinm tormen-
torum fragore circumjecla latè reibnabant. Hofpitia , in fuburbio iitorali
aiîignata i! lis funt ampla & nkida , quibus a!ii Mofcorum Legati antea ufi
funt. Quamdiu ad urbem morabantur, nihil omiflum elt, quod ad ani-
mos hofpÏLumdemulcendos, benevolemiamque teftandam, facere crede-
batur. Ilonoratiiîimus quisque domum Legatorum frequentabat: certatim
officia deferebat : dona mktebat. Cultodia militum data eit, cjuac turbam
fummovreret , non ut hofpkes conftringerec. Q.uod tantô minus, niil
mens finiftra fuiflet, reprehendi ab iis par erat, quod eundem Mofcuae
obfervari morem noverint- atque hic fine offenfa quemque comitum , quo
veiîet, & quando, ambulare libère viderint. Quod verô a demetiendo
oppido , & fitu munimentorum, vagos prohibuiflct illultrifiimus vir , cui
totius provincise &. urbis cura demandata efl, officio lùo convenire quàm
maxime exiflimabat , neque juribus hofpitii, aut receptse apud omnes po-
pulos confuetudini adverfari, qui, ab advenis munitiones limitaneas cu-
riofius perlultrari, nunquam aequo animo tulerint. Si verô qute ad vitam
necefTaria erant, carius tune venierint, non id Rigenfium culpâ., ficuE
criminantur , contigit, fed graviori folito annonà, qux provinciam ferti-
lem, & omnium rerum abundantem, per aliquot annos miferrimè affîixe-
lat. Itaque Rigae nihil acciderat, quod ab amicae gentis itudiis alienum
effet: & continuata eadem officia funt, quoad limitera Curoniag attige-
rant. Nam & navigia, quibus Dunam trajicerent, fummà cura conquilita
funt, atque talia, qualium iftis in locis copia habeiï potuit. Nova aedifi-
care, aut aîiunde arcefTere ifta tempeftate non licuit. Pro illis autem non
alia, quàm ex arbkrio conduftorum , merces pendebatur. Quod ad Cur-
forera attinet, quem Rigse fuifle detentum fabulantur, omnium, ad quos
viaiores Mofcici divertere confueverant, teflimoniis confiât, talem homi.
nem, qualem in libello ifti fingunt, in urbe neque vifum fuiiTe, neque no-
men ejus auditum. Nihil igitur Mofcis caufa? erat , quare tam proterve
falfa venditarent, & fmgularem Rigenfiufh humanitatem , quam fummis
laudibus tune ornabant, nomine poitea carperent criminofo : cum omnia*
quae in eorum poteftate erant , & maximo itudio apparaverint , & luben-
tifîimis animis obtulerint.
Cum tantam benignkatem funt experti, qui, aliorum negocîorum cau-
fà , per Livoniam taiitum ire perrexerant; quanta juitior caufa fuerit ex-
probrandi Mofcis fua-m in Legatos Suecicos, qui ad ipfum Czarum nuper
miiTi erant. inhumankatem <k infolentiam! Ex plurimis , quse indignifLmè
tune pafïi funt, qusedam recenfere placer, ut inteliigant Moici, illa verè:
fibitribui, quorum, alios fulfo uifimulanc. Paéta jubent, ut honorirlcè ad
limitera
ET DE
Mosr.c
VIE.
224 MEMOIRES, NEGOTIATÏONS, TRAITEZ, ET
Affaires limkem excipiantur , qui ad Czarum ituri funt , Legari. Miiïus illis obviam
deSuïde eit extremse infulfitatis homo, qui haud ipfe receptionis formulam recita-
vit, five ingravefcentis aetatis infirmitate, ûve imperkiâ Jiterarum, quae
in ifto viro fumma apparebat. ltaque per vilioris fortis afleclam, plané
indecorè , & mutilatis ignominiofè tituiis , falutatio pera£la eft. Auxic
contumeliam Praefeclus Novogardienfis , qui, ut argritudinem Legatis a-
criorem faceret, urbem intrantibus adjungebat quendam Iatrociniis , qui-
bus fines Suecicos paulô ante infeftaverat , invifum , qui non decentius ,
quàm prior, munus fuum obibat. ldcirco Legati ulti rufticitatem hominis,
neque alloquio illum dignabantur, fed per fcribam, qui forte ad manus
erat, refponfum edebant. Proficifcentibus de induitrià mora injecta eft,
utiter, quod non multis diebus emetiri potuifTent , vix duobus menfibus
abfolverentj fubftracto nunc commeatu , nunc jumentis, quae farcinis per-
vehendis necellaria erant. Adverfari ha?c luculentis paclorum legibus no-
verant Mofci (M): fed jejunis cavillationibus tune quidem exeufare fatis
habuerant. Cum Mofcua haud proeul effent, Léo Narifcinius , Bojarus,
utappellant, & Czari avunculus, ad praedium, quà tranfirent Legati, oc-
currens , importuné poflulabat, ut regium Diploma fibi traderent , fibi
defideria fua exponerent, refponfum fimul a fe accepturi: caufatus Cza-
rum non brevi arTuturum; Legatos,fi feaudirent, maturius domum re-
mitti pofie. Quam infolentiam cum graviter redarguerent Sueci, indigna-
ren turque tam Jeviter Jiaberi exiftimationem Régis fui, qui , pro confir-
manda aeternà pace , ad Principem gentis iftius hanc Legationem deftina-
verat, & proinde fas effe, ut ipfi , non purpuratorum alicui, mandata fua
exponerent. Pudore quidem confufus , obticuit : caeterum , quod apud Cza-
rum gratiâ plurimûm valebat, occafionem nocendi Legatis poftea nullam
intermifit. Nam quamdiu ejus reditum praeftolabantur, ne prseberentur
débita ex paclis lautia, intercefîit , coè'gitque fuis fumtibus vivere , qui
difficulter tune domo adferri poterant. Cum rediiffet Czarus , efFecit ut
tardius in confpeélum illius admitterentur , varias cunftationis caufas prae-
texens, quùm conftaret Czarum integrum ferè menfem in urbe fuifTe, non
aliis occupationibus , quàm privatorum commiffationibus diftentum. In-
telle clum autem eft, hanc moram idée effe faclam, ut affecti tsedio &
ignominiâ Legati a propofito defifterent; & Mofci eventum Turcicae paci-
fications fpecularentur: quae fi votis refpondiffet, non facra dignitas, non
jus gentium,Legatos protexiffefJ, quin iàeviffima quacque paterentur. Quid
animo volutabant Mofci fatis elucebat, cum maiignè omnia, quae pa£ta
exigebant, praeftarent; & hofpitium legatis attribuèrent vile fordidumque,
quod clathris ferreis, & tenebricofis conclavium fomicibus, horrorem te-
terrimi carcçris verius referebat,quàm domum Legatis tanti Régis dignam.
Cum demonftrarent haec non convenire fœderi, & mutuae amicitiae , quae
cum S. R. Majeftate Czaro intercedebat , vanis & illuforiis, & interdum
minacibus quoque verbis excepti funt. Literae, quas in Sueciam perfe-
rendas publicis tabellariis tradiderant , refignatae funt, & iajpius intercep-
ta: comités nonnulli, quum adiretur Czarus , exclufi, & acerbius habiti.
Sed
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. us
Sed omnes indignitates, quas Mofcuas pertulerant, fuperat injuria tune AffAirèé
illata, cum Rankius, P'rsfeétus aulae Legatorum , in privato fympofio dkSuems
miniftrum Brandeburgicum vuInerafTet. Quamvis enim Legati , ut pri- " ni
mùm illis hocinnotuit, Czaro fignificarent, infelicem hune fugâ evafiife, Mosco-
& fimul peterent, ut repertus illis traderetur, cautione oblatâ, fe in eufc VIK'
todiâ illum habituros , donec laefo fatisfieret : nihilominus centuriis aliquot
militum obfeffa eil Legatorum domus, tamque arclè obfervata, ut neque
Legati exire, neque admittere quenquam fuorum poffent, ufque dum extra
urbem profugus inveniretur. ïîuicigitur ltatim injeclae manus: collum,
pedes, manufque catenis onerant,impofitumque ruitico vehiculo ad unum
ab urbe lapidem apportant, quo loco Czarus ih reorum fuppliciis pafeere
oculos confuevit} prohibitis omnibus iflo in fqualore jacentem invifere,
aut ulîâ re allevare : ubi famé ac diuturnà iJluvie, cum ne Jinteas quidem
vefles mutare permiflum erat , morbum contraxit, ex quo poflea deceffit.
Equidem, qui tune aderant, alii exterorum Principum Legati, cum mi-
feriis hujus adducli, tum fuam vicem reputantes, fi libido forte Mofcum
fubiret, Czarum adeunt, communemque injuriamexpoftulant: verùm im-
mitem animum fieclere nequeunt. Sed nec tacita relinquenda efl injuria,
quâ Legatos S. R. Majeftatis laeferat , cum intereffet convivio , quod
apud Miniflrum Suecicum inflitutum erat. Cum rhedam , qua Legato-
rum unus domum veheretur , famulus interpretis Sueci adduceret , &
propter turbam , quae anguflias occupaverat, aditum aegrè mcîiretur, al-
tercatio inter fervos orta efl : quse ab affentatore quodam delata , Czari.
animum adeo efferavit , ut non reverentiâ hofpitalis menfae , nec con-
fpeftu Legatorum moveretur , quin gladium e vaginâ edu6r,um menfae
impingeret, pereuffurus interpretem, qui a tergo Legatorum adflabat, ni
domo fe proripuiiTet. Arguent hsec & fimilia infignem Mofcorum sequi-
tatem, qui fanclimoniam Legationis communi omnium gentium confenfu
ftabilitam, violare nefas non putarunt, non a Legatorum perfonis , non a
comitibus eorum, injuflam vim abflinentes. Qui verô confcii iibi erant,
tôt atroces injurias Suecis intuliiïe, quà fronte eifdem futilia quœdam cri-
mina objicere poterant , aut queri fe la,-fos efle , qui tôt enormia patra-
verant?
Sed Riga: majora in honorem Czari , quem in comitatu adfuifTe nove-
rant, praeitari oportebat. Quanta impudentia efl, illis prcefentiam iftius
perfonx objeclare, quam omni cura vefligantes explorare non poterant?
Unde enim cognofeerent? An Mofcuâ quisquam nunciavit Czarum adfu-
turum? Atqui lilentium ibi capitis periculo fancitum erat. Adhaec omnes
aditus interclufi : fublata literarum commercia , ut nemo certi quid de
Czari profectione nunciare poffet , vel auderet. Sed a Legatis poflea au-
diverant : ab iis feilicet, qui praefentiam ejus, tariquam myflerium, miro
fludio ac foîertiâ celarunt , faclâ mortis comminatione , fi- quis e comitatu
arcanum hoc propalaflet. Nihil itaque de Czaro extricari potuit: & ma.
jori aliquanto induflriâ, aliisque artibus opus erat ad eum detegendum,
quàm quibus Ulyfles olim ufus elle traditur, cum Açhillem in Scyro laten-
Tome XL F f tentera
226 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires tentem deprehendere vellet. Cum forte retulilTet aliquis, apparuiflè quen-
eeSuf.de dam, inter fervorum quifquilias, vulgari habitu, fercula difcumbenubus
v/ DE miniltrantem , qui Czarum oris fimilitudine referret j hifeere tamen nemo
vie. * fuftinuit. Diiiîmulare omnes cogebantur, ne, fi adfuiiTfct, latere tamen
cupicntis iram in fe convertirent. Quam gratiam ab eo initurus fuiilet,
qui agnitum protraxiilet , & reluclantem invilis lîbi cumulaiTet honoribus ?
Profe£lô ficut irreverentiae crimen non efïugilfet, qui fcire fe oitenderet,
quod ipfe voluerat ignorari ; ità notitiam qualemcumque diiîimulantes,
quod ejus fe voluntati accomrhodaflènt , venerationis atque obfequii lau-
dem meruhTe funt cenfendi. Obtinuit iguur, quod maxime tune opta-
bat. Latere voluit: nemo prohibebat. Latere voluit, &• tamen publiée
honorari: hoc quo pacto fieri potuiflet, non mirum, fi nemo afiècutiis fit.
Proinde liad Legatos refpicias, plus honoris exhibitum illis eft, quàm auc
pa£ta exigant, aut ante îllos Legatorum contigerit ulli : fi ad Prwcipem,
potuerit quidem iite honor fafijgio illius fortunce minor fuiffe , fed quem
ipfe, fe occultando, majorem fieri vetuiiTec. Cur enim mentitus perfo-
nam, proviciam S. R. Majeitatis Suecire perreptare voluit? Cur adven-
tum non fignificavit ? Privatis vix toleranda audacia eft , jfi quis , non
pulfatis fonbus, in xdes irrumpat : Principi certè , qui, prêter Deum,
neminem fe agnofeit fuperiorem, minus videtur ferendum, il alter in pari
faitigio conltuutus , fines fuos clam fe imraverit. Inlblens enim elt, il-
îos, qui fummam in terris poteftatem gerunt, alieni regni fines percurfa-
re, niti fide data & accepta : quod propter novitatem, &viciniam, fufpi-
cione atque tumultu iita res carere minime poteit. Diverfa illorum & pri-
vatorum fors elt. Quod his conceditur apud illas gentes, qurc advenas
admittere atque tolerare folentj non Itatim fummo in imperio verfantibus
intelligitur. elle permilTum: pra:fertim iis, qui, preeter necerlkatem aliénas
terras luitratum veniunt, nec difeurfationis vagœ caufam polfunt adferre
aliam, quàm ut fuam expleant curiofitatem. Quapropter fummi Principes
non indecorum minus, quam intutum, femper duxerunt peregrinas adiré
regiones, nifi venià decenter impetratà : quam qui neglexerant, luctuofa
illis hacc interdum fuit temeritas. Carolum V. Caefarem fumma necef-
fitas adegit, ut per Galliam in Belgium feitinaret : iter tamen prius non
ingreflus eit, quàm Rex Galliarum petenti veniam dedifiet. Incautior fuit
Richardus Anglise Rex, qui cum, mutato habitu, Aultriacum folum per-
traniire conaretur, Viennae captus, atque in cuitodiarn datus, grandi vix
pectiniâ libertatem redemerat. Quos igitur Czarus laudare debuerat, quod
comiter infolentiam ejus tuliffent , eos calumniis onerare non veretur,
quod perfonato dignitatem fuam non fervalfent. Quô magis infperatus
ejus fuit adventusj eo minus in contumeliam accipere debuit, fi parem
ambitioni fuse apparatum non inveniflet. Fuit aucem , qui nuper de-
functus eft , gloriofifiimx mémorise Rex ilta animi magnitudine , ut , fi
nuncium , vel famam tanti hofpitis , prrcfertim, ut tune putabatur, amici,
percepiiîct , nullis impenfis parceret , quibus avidiffimi fumtuofilfimique
Principis cujusque animum exfatiaffeti Quare igitur abditè latuit, i\ pa-
lam
I F..
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 227
lam coli voluerat ? In turbâ fe abfcondidit , fi ut Princeps fufpici aique Afmjrm
acliimari cupiverat ? Q.uid ? quod cum ica fe geflerit, qui putabitur alio deSui-»s
id confilio feciffe , uili ut rixarum inde haberet materiam , fi quando Jjosca:
Suecos, ut nunc fit, laceflere ipfi allubefceret ? Quapropter fas fit fpe-
rare, omnes, qui rerum funt intelligentes , liquido liinc perfpicere pof-
fe , quàm impudenter, quam ftolidô , dicam fupremo Livonia3 Praefecto
impingant Mofci, quafi in dignitatem Czari deliquifiet. Sive enira igno-
raflet prrefentiam Czari, quod in ifta tam anxià fui occultatione necef
fe erat, ignoratione ipfà meriiô exeufandus eit : five noviffet, quod ta-
men ex perobfcuris vulgi rumoribus certè non potuit, jufta: venerationis
laudem allequetur, quod tam indigné fe gerentem non prodidiflet. Qua3
cum Mofcis optimè cognita eflent, fingularem tamen innocentiffimo vi-
ro calumniam intentare non erubuerunt. Noverat , inquiunt , Prœfes
Rigenfis, qux res ageretur, fed lu£tum , quem ex obitu filial perceperat,
obtendit. O incredibilem in fingendo audàciam! Filia féfquiaitero anno,
poftquam heee Rigce gefta funt, vixit: & tamen Pater tune mortuam lu-
gebat. Anticipare feilicet luctum voluit, quod illam hariolatus eft poil
illud tempus vivere defituram effe. Piget tam infipidas fabulas diflliere.
Et quis omnia, quibus ipfe aceufationis libellus featet, perfequi poteft?
Quocunque te vertas, Mofcum effe JVlofcum invenies : nec quidquam tam
abfurdum effe , quod ille , & audacter fingere , & impudenter proferre , non
valeat.
Enimvero fi inhonoratam, vel Czari prœfentiam, vel Legatorum, pu-
taflent Mofci, quare hanc injuriam tune, cum recens erat, non expoltu-
laverant ? Illi , quorum animi honorum infatiabiles funt, quique in mini-
mis etiam tricari non grave putartt ? Quare quod prxfentibus placuit,
poftea difplicere potuit , ut in atroces adeô objurgationes erumperent?
Nam concinnus ordo, difeiplina , cultus , apparatus , humanitas, csete-
raque, quse Rigœ fieri & obfervari cernebant, Mofcorum oculos mentes-
que adeô tune perftrinxerant, ut tanquamin alterum orbem delati, penè
obftupefcerent. Admiratus hœc ipfe Legationis princeps, Fortius: lite-
ris ad amicos, quos Mofcuae habebat, perfcripfit (N) : praedicavit Ha-
gae Praefidis Rigenfis comitatem, atque prudentiam: & Legato Suecico ,
qui , in conciliandâ inter Principes Orbis Chriftiani pace , nomine S. R.
Majeitatis, fequeftris munere fungebatur, & fuo, & Czari nomine gratias
egit ob fingularem , quam in itinere Livonico experti funt, humanitatem.
Nec diffimulavit ipfeCzarus, qui cum iter fuum commemoraffet, addidit ,
per Sueciam domum reverti fe conftituiiïe, fi Régi acceptum fore credi-
diflet. Quod ut S.R. Majeftas refeivit, eum honoriflcis verbis in regnurn
fuum invitavit, ut re ipfa oftendere poflet, quanti faceret vicini Prince
pis amicir.iam. Idem cum Eleclor Saxoniac, & Princeps Contius, de Diade-,
mate Polonico contenderent, diligentius percontatus eft , utri candidato-
rum S. R. Majeftas faveret: fe quidem Eleclorem prœoptare: fed i\ Ré-
gi aliter vifum fuerit, à fententià difeeffurum; quod nihil committere vel-
ler,quodRegi Sueciœingratum elfet,cujus amicitiam ante omnia fibi pigne-
Ff 2 rari
VIE.
218 MEMOIRES , NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
Affaires rari cuperet. Talia , cum ipfe Czarus , tum Legati , quo tempore apud
de Suedh Batavos commorabantur, ingeminabant, non minimo ullks, quam Rigas
J;T DR concepifient, fimultatis indicio (O). Cum ad claffem , quam in Mxoti-
de parabat, petiiflet Czarus, ut tormenta in Sueciâ liceret coëmerej non
tantum affenfit S. R. Majeftas , fed trecenta etiam tormenta bellica, quse
in Mofcoviam conrèftim aveéla ilint, ultro ei donavit. Quod gratiffimum
fibi accidiiTe , datis ad S. R. Majeftatem literis , paulô poft fignificavit ( P ).
Nautas in maritimis Suecise oppidis conducere voluit : non denega-
tum eft, fi qui fponte nomina darent. Iiaec omnia, cum poft aclafunt,
quàm Rigae fuerat , ecquis querelae poft tôt mutuse benevolentise figna ,
locus fupererat? Aut quâ ratione damnare illa potuit, quse antea tanto-
pere vifus erat approbaffe ? Cum officia Rigce fibi prseftita, cum ipfe, tum
Legati ejus, Iaudarent, eo ipfo confeffi funt, iftic accidiiTe nihil, quod
non gratum Mis acceptumque fuhTet: aut fi qua offenlio fafta erat, eam
pmnem oftenderat Czarus, cum amicitiam poitea offerret prolixius , atque
praedicaret, ex animo ipfius fuiiTe deletam , aut certc non tanti aeftima-
tam , ut ad animum revocari deberet. Sed non eft ea Mofcis humanitas,
ut injurias, fi quas putent fe accepifle , tam diuturno premant filentio;
qui in levifiimis etiam expoftulandis , non promti minus , quàm ridiculi
efie folent. Quo verius credibiliusque eft, fi inofficiofos in fe Rigenfes
inveniflent, non tantum tune non diiîimuiafTe , verùm etiam praedicandis
iis officiis, quas omiffa nunc querunr.ur, omnino abftinuifTe.
Sed fingamus Riga; quaedam accidiiTe , .qu*e parum officiofa exiftima-
rent: quaiiacunque tamen fuifTent illa, infeiente Rege Suecise, facla efle
fateantur, oportet: cum tanto locorum intervallo disjunélus, neque feire
adventum Czari, neque quse Rigae agerentur, divinare potuerat. Dein-
de conveniat illis cum Suecis neceffe eft , fi contra Rigenfes jus obtinere
voluiffent, fuiiTe injuriam, quâ iè lsefosputabant, deferendam, ut cogno-
fcipoiTet, quamam fuiflet illa, quae tantam ipforum anirnis ïrgritudinem
attulerat. Si, poftquam expoitulatio faéla eft, in juftà fatisfaclione ter-
giverfati effent Sueci, tum demum in illos culpam conjicere sequum fuifc
ièt. Jam très abieranc anni, poftquam Rigam perturbavit inopinato fuo.
accefllt Czarus: interea non modo de injuria nullum verbum faclum eft,
fed etiam priftinae amicitia; fpecies maniit. Unde igitur feirent Sueci,
refedifle tantam in ejus animo fimukatem, eum propenfiori, quàm antea,
voluntate in eos effe videretur, & accepta ab eis bénéficia efFufius lauda-
ret ? Superiori demum anno, Legatis Suedicis, qui Mofcuae erant, jam
domum abituris criminatio hsce allata eft: verùm illi, qui non de contro-
verfiis componendis, quas domo profeéli nullas audiverant, fed de fee-
dere renovando, mandata acceperant, ad crimen improvifùm infperatum-
que non aliud refpondere potuerunt, quàm fe de il!o ad S. R. Majefta-
tem quàm diligentifiimè relaturos. Quod abfque morà fa£tum eft: datis.
fimul adfupremum Livoniae Praefeclum literis, quibus exemplarLibelli ac-
eufatorii erat inclufum. Sed has, cum non paucis aliis, cohfueta Mofcorum
îkentià fuppreiTas fuiiTe poftea innotuit. Quamobrem cum diem ex die
ex-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. zz9
exfpe&antes , neque nuncium acciperent, neque ob nimiam longinquica- Affai***.
tem locorum refponlum S. R. Majeitatis brevi adfuturum perfpicerent, deSukdk
confecto negocio, cujus causa advenerant, ad fuos reverti flatuerunt. In ^0^j
reditu cum Narvae intelligerent, nihil literarum venifle Mofcua, dolum Y1IU
fubolfacierues , ad fupremum Livoniae Prsefeétum denuô fcribunt, hortati,
ut quantocyus refponfum adornaret. Eidem quoque S. R. Majeltas, à
Legatis de hoc negocio jam certior faéta , mandavit, ut, morâ nullâ in-
terpofità, de criminibus objeclis fe purgaret , & enodatius apertiusque
explicaret , quo cuku Legati Mofcici Rigae fuiflent habki. Nihil cuncla-
tus ille , quàm primùm obfidione Saxonum Riga liberata fuit , fufiori
Epiftoîà ( Q_) , quam décima quinta Calendarum Aprilis proximè prater-
lapii Holmiam miferat, falfa fi&aque efTe omnia oftendit, quorum a Mof-
cis poltulabatur , & in illos omne genus humanitatis atque benevolentiae
abundè collatum idoneis teftibus probavit. Cum defenfione oequitatis ple-
niflimâ uti videretur, jiuTus eft Minifter Suedicus , qui Mofcua: degebat,
eam cum aceufatoribus communicare, &, fi pra:ter fpem minus fatisface-
ret, hortari Czarum , ut Legatis fuis, qui juxta foedera propediem ÏToî-
miam mitterentur, poteftatem faceret ulterius hanc controverfiam difeu-
tiendi. Quod pofiulare eo majori jure potuit S. R. Majeltas Suecia?,
quôd prifeo more receptum erat, ut, Legatos ad alterum mittens, defi-
deria fua, quaecunque haberet, ad eum fimul deferret, non verô alterius
Legatis, qui ad ipfum miffi fuerint, eadem exponeret. Quo paclo dilfi-
dia , quae inter hos populos exorta funt, fréquenter fublata elTe confiât.
Cum neque hanc rationem ample&eretur Czarus , neque viam fœderibus
deferiptam infifteret, dubitare quisquam poteft, utérin culpa fit, ii inju-
ria:, quâ fe affeétum tradit, remedium non fit aîlatum? Quid enim caufa?
erat, quare cognitionem fubterfugeret, quare a paclis recederet ? Gémi-
namiila, ut antea monitum eft, controverfias omnes tollendi componen-
dique viam demonflrant : harum neutram tentare voluit. Metuebat enim5
fi putidiffimae hae calumniae in difeeptationem venirent , fore, ut pr*e pu-
dore ac ignominiâ fui confiftere non pofTent, & immani perfidie , quàm
dudum animo habebat defixam, pulcerrimus hic praetextus eriperetur,
Cum fedanda? hujus controverfias ferium in Suecis itudium animadverte-
ret, nova eludendis paclis diverticula quaerens, apud fœderatos Belgas
îitem hanc deponere voluit. Quanquam inufitata hsec via erat, & majo-
ribus ambagibus circumducla, quàm quse paclis oitenditur j a S. R. Ma-
jeftate tamen , ne videretur aut caufx diffidere, aut arbitros repudiare ,.
quorum aequitati ac prudentise plurimùm tribuebat , haud difnculter in
hanc confenfum eft. bed brevi apparuit, non alio confilio iftud faétum,
quàm ut Suecos , pariter ac focios, a fenfu impendentis mali avocaret,&
quos aperto Marte aggredi non audebat, illos occultis nefandifque dolis
fubrueret. Vix enim caufam hanc Batavorum fidei commiferat, cùrn do-
mi clalUcum cani jubet, tantô detellabiliori ad omnem pofterkatem perfl-
dià , quamô pluribus fanétioribufque affeverationibus pacifka; mentis
itudium ubique teitatum reliquerac.
Ff | Hoc
ET DE
Mosco
V I E.
230 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
.Aftures Hoc caput totius criminationis erat,quod poftquam fra&um atque con-
nF.SutnE tufum eft , reliqua perfequemur ; quae putida nimis ac futilia, ut nume-
rum implerent, tantum addufta videri pofïïint. Certè , praeter Mofcum,
talia nemo inter caufas belli referre vellet. Quàm enim inanis & nugato-
ria accufatio eit, Currum Vofnicïnii Livonis expilatum ejfè, poftquam, refti-
tutà praedâ', ultimum de ibntibus fumtum eft fupplicium? Si laelb ad recu-
perandas res jus sequum non perfolvifTent Sueci, nemo querelœ locum efle
negaret: cum verô in crimine indagando puniendoque acerrimos fe prae-
buiflent, quid eft, quod in hac caufâ, aut accufare Mofcus habet , aut
Suecus defendere? Contigerat illud furtum culpà potiiiimum Mofcorum,
qui, dum in tergum ruftici aurigae, quod feiïis} jumentis tardius agebat,
verberibus pro more fuo faevirent, dolore hic ac metu coniternatus, cur-
ru paulum a via abdufto, profugit. Supervenientes poltea duo ruftici ,
res in fil va derelifras domum auferunt, homines in tantum fimplices , ut
quafi jure occupatas venum exponerent. Cujus tamen fafti caufà in jus
rapti , capitis damnantur : atque quod partem praedae de medio removiiïe
arguebantur, prêter morem patriis legibus receptum , tormenta etiam in
reos ad veritatem exprimendam funt adhibita. Hac feveritate cum ute-
rentur Sueci, fi mens fana Mofcis effet, fummum in î 1 lis juftitiae ftudium
laudare potius debuilTent, quàm vanifïïmam hanc proferre criminationem.
Quàm fané illis fatisfaclum eft, cum ex totâ fupelle£tile,pra:ter res nauci,
nihil defideratum, & facinoroforum fupplicio expiatum crimen erat. Si
privata noxa juftam belli caufam praeberet , quis non intelligat, miferri-
mam fore fortem mortalium, cum improbiffimus quifque pacis bellique ar-
bitrium haberet? Quantafcunque enim comminationes faciat Princeps ,
pcenafque in maleficia ftatuat: nunquam tamen efficiet , quin pravi ho-
mines, fi volent, periculo fuo leges transgrediantur; quorum culpam a
Principe pra:(tari tum juftum cenfetur, fi impunitam finat. Delicla autem
fuos au&ores fequi , iisque punitis, reatum è civitate tolli, nemo unquam
dubitavit. Nifi fortaffe Mofcis aliter videtur, quibus irinera obfidere, &
viatores crudeliter jugulare, tantum non in conceflîs ponitur. Quod ii ad
juftitiam belli hase fufficerent, quoties ipfi violatac pacis crimen incurre-
rant ? Quot fuorum numerare Sueci polTunt , dum negociorum causa in
Mofcoviam abirent , vità fortunisque miferrimè fpoliatos? Quoties praeda-
torum globi in agrum Suecicum irrumpentes, ingemia damna dederant?
Sed hacc jufto ordine expofita videbunt Mofci, cum Sueci fuas querelas
protu'erint. Quid autem dementius, quàm cum ipfi frequentia latrocinia
faepius multa patiuniur, Suecis punitum crimen objicere, eoque nomine
infeélari alios, cujus toties rei ipfi facli funt? Verùm Sueci, quod judica-
verant ejusmodi faéta fuilïe a publico confilio remota , jufta via res repe-
tere haclenus maluerunt, quàm culpam latius extendere. Atque hoc pacla
jubent (R): quibus , ne pacem , publicâ fanftimonià ftabilitam, priva-
torum audacia unquam pollet folicitare, faluberrimè provifumeft, ut ta-
ies injurise, quee, infeio Principe, inferuntur, fontium fuppliciis aboleren-
tur. Neque hoc Mofci non fciunt, fed usque adeô, quod fœdiiîïmo bel-
lo
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. ^i
Io pnetexant , non habent, ut etiam impletas paclorum luges vitupè-
rent.
Sed jam tertiam criminationem confideremus, cui anfara dédit quaedam
inter duos TabdlariorumPracfeétos controverfia, tam tenuitate fuâ contem-
nenda, quàm infulfè agitata. Supremo Livoniœ Prœfidi feribir, aut ve-
nus imperat , Vinnius Mofcueniis , ut Grœnium , qui Rigce tabellariis
regiis praepqfitus eft, ab adminiflradone removeat. Graves enim fibi ra-
tiones elfe, cur id fieri vellet: qius quanquam tune indicare non poterat,
pollea tamen lads fe illi approbaturum. Qua; cum Holmiam nuneiata ef-
fent, impotens nimis & iniqua vifa eft hace viri poftulado, quâ alterum
nullius rlagitii conviclum, indictâ causa , damnari voluit : fed ut nafeens
forte maîum in herbâ fupprimeretur, Miniitro Suecico, qui Mofeuae erat,
placuit mandata mittere, ut Vinnium caufas tam atroeis aceufadonis ro-
garet. Grœnius fimul afperè monitus eft, omni altercatione, quà irrita-
bilis animus majori tantum ira inflammaretur , fe abftineret. Interjeclo
tempore , cum querimonias fuas edidiifet, Riga; protinus dati funt cogni-
tores, viri in jua^cando fpeclati & prudentes , qui teftibus auditis, & fin-
gulis curatius examinatis, fimultatein hanc ex perle vibus initiis ortameffe
deprehendunt, au£lore cive Rigenfi, qui perverfè nonnulla ad Vinnium
detulerat: aucîam deinceps, cum pro literis Memelam perferendis merce-
dem repra-fentari Grœnius poftuiaret ; alter binis tantum in fingulis annis
pentionibus folvere eandem vellet, non publicà, non privatà convention
ne nixus. Reliqua crimina, qua; ingerebat, aut odio in adverfarium con-
fiera, aut parvi admodum momenti: veluti fafciculum epiflolarum tar-
dius allatum: capfulam , in qua muria erat ex ovis pifeium, a veredario,
onus averfante, in via reliclam : fed & hsec , imprudente Grœnio, acci-
diffe. Laque cum fatis quœfitum effet, quid de fingulis factis (enrirèn.r^
expromunt. Abfolvere enim reum. , aut damnare , juiïi non erant ; cum
cognitionis tantum, non ordinani fori res agebaturj & metus erat, ne
eâdem temeritate, quâ litem hanc intenderat, fententiam judicum Mof-
cus rejiceret. Aéta intégra Holmiam milTa funt: & Legatis Mofcicum iter
ingrefïuris tradita , ut Vinnio infpiciendi facultatem facerent, &, qua;
veilet , fimul admonendi. Factum eft: infpexit, perlegit: qua: delidera-
ret, Legatis Mofcicis, qui in Sueciam proficifeerentur , expufiturum Je
dixit. Tantam diligentiam in nugis hifee adhibuerunt Sueci, ut tetrico
homini , & in fimpulo Au élu s excitanti, omnem querelarum anfam pree-
feinderent: effugere tamen non potuerunt, quin ab ilîis , qui nodum in
fcii po quaerebant , in argumentum nefarii belli arriperentur. Tolli ha?c
nuïlo negocio controverfia potuiffet, cum inter privatos tantum conten-
tio effet, nec quidquam haberet, quod cum publicis fœderibus efflt com-
mune, nifi ad fupplendum jultcc caufae defectum eam hic fuccenturiarî
Mofcus voluilîlt. Quid autem eft hoc, nifi ruditatem fuam imperidam-
que orbi deridendam propinare, quod minuendo horrori , quem omnes
probi ex frauduîentiâ ejus perceperant, tam viles caviiladones putarit fuf-
ficere, perjuriique dedteus pellucidis nifee tegurnends ceiari potunTe.
Nequc
/UfÀiMI'S
D>; Su fus
f.t ni
Mosco-
VIE.
ET DE
Mosco-
VIE.
233 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
.Affaires Neque aliter de gère alieno mercatorum quorundam , quod ultimum
deSusde jn Libello criminofo locum occupât, pronunciandum. Privata nomina
funt, fi qure funt, non publicâ fide, non Rege au&ore, facla : & pro-
inde ab iis , quorum fidem in rébus contrahendis fecuti funt Mofci, exi-
genda. Patuerunt fora, non illa quidem anfra6libus Iongis tortuofa: cum
hoc quoque in felicitate fua Suecia ponit , quod contra&iora litigiis tem-
pora conitituta habeat. Quoad legibus experiri neglexerant, tamdiu ar-
guere nequeunt Mofci , injuriam fibi faétam effe , aut quidquam , quod
Pactis adverfum effet , decretum. Florentiflima , dum licuit , inter has
gentes mercatura fuir, atque, ut demonltrari poteit, Mofcis quaeftuofiiîi-
ma. Si quid in rationibus conturbatum fit, quo paclo illud debeat expe-
diri, Fœdera praefcribunt (S). Cum juxta illa ordinarios apud Judices in
Regno, apud Praefe&os verô in urbibus limitaneis, quando folutio impe-
dita fuerit, debitores appellari debent ; quare non ad eos potiùs, quàm
ad Batavos , quœrela delata eft ? Praepoiterum enim eit, & infanum , abf-
que causa uti circumitione , cum breviori via defungi licet. Hanc Fœde-
nbus folennibus defignatam, longnTimo etiam ufu tritam, noverant Mof.
ci : à quâ ut hoc potiflimum tempore deflecterent, quae alia iuberat ratio,
quàm quod fperarent , vaniflimis hifce offuciis praeflingi hominum oculos
potuiffe , ne turpitudinem violati fœderis vidèrent, Quâ tamen in re ni-
hil aliud aifequentur , nifi ut ab omnibus mortalibus , qui fraudes ode-
rint , infullitas Mofcica cognofcatur , & audacia. Indignabitur prsefens
œtas tam vilia & infipida ad turbandam orbis quietêm praetextui fumi : &
polleritas inter illa exempta memorabit, quae irrifu magis, quàm liberali
judicio ac cognitione digna habeantur. Ipfis profecto illis , qui fœdere
conjurationis tenentur, tam abjecta hsec & indigna judicata funt, ut focii
Principis ineptias miferati , fuppeditata nova calumnia , gravius quld &
robuflius fonare docuerint.
Sanè, quae fequuntur criminationes, Mofcis initio inter caufas belli re-
latas non funt, neque ufpiam verbo faltem earum mentio fa&a efl : quo-
niam tamen Mofcorum nomine nuper divulgatae , ad multorum cognitio-
nem pervenerant, cujufcunque fœtus fint, ne incauto lectori imponant,
difcutiantur hîc neceiîe eft. Non autem quifquam, qui artes Aulae Saxo-
Polonicae deguitaverat, potuerit dubitare, quin ex eâdem difciplinâ hase
commenta prodiiffent , teterrimis etiam conviciis, quafi condimentis qui-
bufdam necefTariis , afperfa , ut invidiam Suecis , quemadmodum auclor
putabat, apud rerum im^eritos crearent > fed , ut faniores interpretan-
tur, ne quifquam ignoraret, tam uberem ifti Aulœ calumniarum effe ve-
nam , ut non tantum fibi fufficiat, kà etiam aliis ex abundanti fuppedita-
re quafdam pofiit. Quœ, fi forte armis focium fublevare non poiTet , ne
tamen nihil feciffe vTideretur in ejus gratiam, quem ad inaufpicatiffimum
hoc bellum proritaverat, dolis & calumniis perditiffimam caufam juvare
voluit. Fabulantur itaque Suecos in fpecicm omnia officia amicœ tranquillœ-
que vteinitatis fervajje Czaro ; atquc , ut fidem fibi ad fallendum praflruerent ,
Légat vs ad fœdus renovandum fuperiori anno mijijfe : occulte autem graves ei in-
fidias
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 233
Jtclias moïiîos cfj'e^ Polonis contra illum in focietatem folicitaîis , & Furcâ ad Affairfs
belium conîinmndum bortationibus fuis impulfo : idque eo animo fecij/e , ut , de Suéde
conclus tôt hoftibus , Mofcicum Imper mm funditus exfcinderent. Proinde Cza- ?7 n h
ro , cum machinationes fraudulentas fibi notas explorât a [que haberct , #/■/»# «?- V1E#
ceffarib capienda , ut tant uni à ccrvicibus fuis periculum dcpeileret, atque Jimul
exubérantes Succorum vires ita accideret , »? //£/ aliifve in pofterum nocere pof-
fent. Confare enim orbi , Suecos ex rapto vivcre folitos , nunquam conquiefce-
ré : £s? Carelïà Ingriâque , <r#»z Mofcovia civili bello laboraret , occupât is, tan-
tas opes comparafè , z/f r<?£tfj deinde geftis ad fummum gloriœ faftigium adfcen-
deiint. Prêter hcec , Danum veterem Mofcorum fœderatum , ^/ iniquas pa-
ris conditiones adaclum efje , exclufo Rege Pobniœ , #/ <è /two divul/um facflius
procuïcarent : quorum injurias ut ulcijcatur , Czarum ex fanbliffimo fœdere ob-
iigatum efje (T). Ilifce adminiculis vacillans illa & nimis ianguida Mof-
corum accufatio fuftinenda erat , ne fuà debiiitate corruens , mundo ludi-
brium deberet : qux tamen omnia quàm nihil habeant folidi , quàmque
imbecilla atque exefa Tint, oculos propius admoventibus mox patebit.
Equidem quanta confcientiœ vis, quantaque lux fit veritatis, quifquis
compilator eft, diilimu lare non poteft. Fatetur enim Suecos re ipsà nul-
lam Mofcis injuriam intuliffe, fed omnia officia amicitiae fervafîe : per Le-
gatos quoque nuper vetera cum illis Pacta renovafTe : atque eatenus nihil
elfe, quod in iliis reprehendatur. Totam autem criminationem in clan-
deftina & perniciofa eorum conata confert , quee comprimere armis atque
retundere Czarus debebat, fi fe, fuumque imperium voluiflèt falvum. Si
quseratur , quibus indiciis occulta: hx Suecorum infidise detectae fuerint,
procul dubio refpondebitur , ex Aulà Saxo-Polonicâ tantum profectum
efTe beneficium. Neque enim facile quifquam eft, qui fuiffe Suecos fuf-
picetur taniac tamque inconfideratae temeritatis , ut cuiquam alii , prseter-
quam cujus maxime referret, rem fummi confilii, atque ipsâ taciturnitate
conficiendam , aperirent. Ab illâ igitur Aulâ hoc fecretum emanavit :
cujus fidei quantum fit tribuendum, nemo non intelligit , qui noverit ean-
dem & Suecis efie infenfiiiimam, & fimilium calumniarum, quas in eau-
fà fimiJi fabrieaverat , antea manifeftam & conviclam. Quare fallitatem
hujus criminationis pîuribus non opus eft arguere. Fœdus cum Republi-
cà Polonâ ficut forte utrique genti non fuilîèt inutile; ità non aliud, quàm
quod ad mutuam fecuritatem , ornamentumque fpeclaret* admittere Sua
Regia Majeitas Sueciae unquam cogitavit. Quod fi hoc Czari animum
offenderat, confiteatur fimul oportet, propterea invifam fibi fuiffe hanc
conjunélionem, quod immaniffimis coniiliis , quae ad Sueciam opprimen-
dam jam diu animo agitaverat, atque adeo exfecranda perfidia, conatu
licet irrito , perflcere nuper voluerat, maximo impedimento fore eam ju-
dicaret. Sed non tantum cum Czaro amicitiam redintegravit Sua Regia
Majeitas ; fed etiam cum vicinis omnibus pacem illacefïitus habere con-
ftituit. Quo minus redargui meretur , fi ad perpetuitatem tam falubris
propofiti confilia fua omnia dirigeret. Aut cur non liceret, citra alterius
offenfam, fœderibus juftis falutem fuam tueri, & innoxia fibi amicorum
Terne XL G g prse-
234 MEMOIRES, NEGOT1ATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires prsefidia circumponere , quibus malevolorum infultus , il forte ingruerint,
de Suedk retundi poffent atque elidi ? Qui enim fe confervare ftudet, non alteri
FT DE nocuiffe idcirco cenfebitur. Nec continua , qui uni propiori amickiae
Mo5CO" nexu jungi cupit , alteri fa£tus eil inimicus , aut periculum moliri di-
Z cendus elt. Procul à Sua Regiâ Majeltate haec fuere confilia, quœ Cza-
rum non fimulatis officiis devincire fibi voluerat: ad Legatos verô mit-
tendos Lege Fœderis adilri£ta erat (U) , quâ difertè jubetur , ut mor-
tuo alterutro Regum , aufpicia Regni fui fuccefîbr folenni Legatione fuper-
ftiti denunciet , aeternumque Fœdus cum illo renovandum curet. Non
itaque fimulationis erat, fed neceffitatis , ut Legati mitterentur : & tamen
hic crimen erit, Pa&orum Leges fervaffe. Etenim nihil unquam contra rem
Mofcicam cogitafle Suecos, certiflimum veriflimumque argumentum efTe
potefl, quod, florentiflîmis fuis rébus, Mofcoviam aut internis turbis ve-
xatam , aut difficili aique ancipiti bello foris colluclantem , non modo
non laceffiverant , fed etiam quibusvis officiis , quae amico & vicino
populo exhiberi poifent, coluerant , fuppeditato etiam non modico bel-
li apparatu. Si occafionem nocendi Mofcis infidiofè captafTent , quae
major unquam opportunitas fuiffet , quàm tune , cum fuis & aliorum
armis oppugnare illos potuiiTent ? Non parvis quoque follicitationibus
in partes invitabantur Sueci , fi commoditatem belli fufeipiendi , quàm
fandtitatem foederum, magis refpexiffent. Itaque qui neque opportuni-
tate temporum , neque promiffis amplifierais , induci poterant , ut fidem
infringerent , quae ratio nunc eos ad confilium mutandum impelleret?
Quamvis enim iftum holtem non magnopere fibi extimefeendum puta-
verinc: res tamen adverfus eum gerere adeo non optaverant, ut paélis di-
ligenter fan&èque obfervatis , officiisque continuis, illius amicitiam firma-
re fibi maluerint , quo vi&o , non gloriae multum propter ignobilitatem ,
& parum commodi propter vaftitatem incultumque regionis confecuturos
fe videbant. Cum itaque nihil effet , quare , aut Mofcum bello Sueci pétè-
rent, aut ille metueret, quidnam fibi ab his detrimenti allatum iri , ap-
paret hoc maligni animi elfe commentum , non tam Mofco temerè credi-
tum, quàm ad criminandos Suecos aitutiffimè arreptum. Cum Turca au-
tem pacificationem impediviffe Suecos , quomodo fibi perfuadere , vel
aliis, poteil, cum neque cum iftâ gente commercium ullius rei habent,
neque per quinquaginta ferè annos fuorum quenquam miferant, qui mini-
mum illic negocium gereret ? Quare non elt credibile , Mofcum, qui
Suecorum fidam contkantemque amicitiam tôt clariiïimis documentis co-
gnitam perfpeétamque habet , feriô illis infidiarum crimen objec-
taiTe : exprobrare potins voluit antiquam fimpliçitatem , & nimiam fœ-
deris religionem , quod opportuniffimis temporum momentis , quas
ipfe utique fibi non pra3termittenda judicavit , ad quaeftum & com-
pendium uti nefciviiTent. Sed peregrinre ifiœ funt artes , & Sue-
corum moiïbus ignotœ : qui virtute agere confueti , failli amicitiaî
fpecie , ighavis turpibusque dolis & perjuriis , vicinos fallere nondum
didicerunt.
Verùm
VIE.
> RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 23;
Verùm quid attinet diutius ea fcrutari, quœ fi&a funt, & inania , cum AmiKn
aliud reftat diluendum, quod a fe admiflum effe, Sueci inficiari non pos- DF- SlJEDE
funt? Nam cum ea haétenus arguerat Mofcus, quas adverfus fe patrata ef- jj* DE
fent ; jam ad fociorum injurias dilabitur : quorum alterum armis ad iniquas pacis
leges adaclum effe criminaturj alterum , ut facilius opprimi poflit , a pace ex-
clufum. Hic primùra aliquid dicere videtur , quod magnanimo Principe
non indignum effet, fi ex juftâ caufà, fi juflo tempore , nec prœpofterè,
ut nunc fit, dictum effet. Quid enim œquius, quid majori laude ma6tan-
dum, quàm fidem fociis fervare, & ab iis prohibere periculum , in quod
praefertim non fuâ , fed adverfariorum culpâ inciderint? Sed cum diverfx
funt eorum, quos fœderatos appellat , caufae ; disjungenda etiam eorum
confideratio eft. Nam quod ad Sereniflimum Daniae Regem attinet, non
dubium eft , quin quisquis & fidem , & ratiocinationem , Mofcicam per-
penderit, fateatur ad caufam nihil abfurdius, ad exprimendam verô Mof-
corum imaginem accommodatius nihil adferri potuiffe. Fides in eo elu-
cet , quod quamdiu Holfatica cum Danis controverfia fervebat , neque
auxiliumei, cui fe ex fœdere opitulari debuiffe jam clamitat, ullum tu-
lit ; neque intercefiit , ut difcrimen a fœderato Rege averteretur : contra
in Belgio per legatum fuum juétavit , fe ifti diffidio, quod ad illum non
pertineret , nolle fe immifcere (V). Prseterea cum Ablegatus ejus S. R.
Majeftatem Sueciae prseterita a:Itate adiiffet, cum caftra in Selandia, Da-
norum infulâ, haberet, non modo faftam hanc exfcenfionem non repre-
hendit , fed ne verbo quidem ingratam fuiffe Czaro indicavit. Ratio-
cinatio autem talis eft, ut non ab ho mine fano , fed ab eo , qui ratio-
nis atque omnis humanitatis expers fit , profecla effe videatur. Quàm
enim inconfultae eft cupiditatis , quàm plénum infolentiae , jus & arbi-
trium fibi in illum vindicare , qui fummo in imperio conftitutus , libe-
ram habet voluntatem , nec cuiquam mortalium fubjeclus , Deo foli red-
dendam crédit faétorum fuorum rationem? Aéla Danorum Régis refcin-
dere Mofcus audet , inque dubium vocat , an fas effet illi controver-
fiam , quae cum Duce Holfatias erat , per amicam potius compofitio-
nem, quàm incertum armorum difcrimen tollere. Sed metu, inquit,&
vi coaclus eft in ea confentire, quse alioquin maxime averfaretur. Quod
fi effet, quid hoc ad alterum? Siquidem is, qui fui juris eft, amplexus
illa fit, quse fuis rébus proficua , nec alteri injuriofa effe judicaffet : &
quae amplexus effet , tueri poftea , & rata habere pergat. At neque
coaclus eft Rex Daniae rem in difcrimen adducere. Sponte arma fum-
fit , ea mente ab initio , ut ferro caufam difceptaret : depofuit illa ,
poftquam Martis aleam ancipitem judicavit , tutius autem via juris
transigere. An fuo arbitratu agere Rex Daniaî hic non potuit? Aut
regnum fuum in clientelam Mofcis tradidit, ut ad eorum nutum volun-
tatemque fefe componere deberet ? Sed , uti liquet , non tantum extra
oleas vagatur , cum litem alienam perfequitur ; fed etiam intolerabilem
impotentis animi faftum prodit, cum controverfiam maximo fummorum
Orbis Chriftiani Principum itudio ac labore fopitam , exagitare fuftinet
Ggz Mof-
ET [)E
Mosco-
V I K.
236 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET I
.Affaires Mofcus. Quin ccecam Hbidinem in propatalo ponit, cum , acquiefcen-
deSukde te jjj0 ^ cujUs res potitfimum agitur , bellum eo Domine fe dicat fufce-
pille. Jam verô ex fœdere, quod ipfi cum Dano intercedit , qui necef-
iitatem oftendet iibi elfe impofitam , aut jus natum ad arma Suecis infe-
renda? Ut auxilio contra hoites veniat , tendere illud fœdus non negabir.
At cum hoftium loco, neque tum, cum controverfia Holfatica erat, Sue-
cos haberet Rex Danise, acque jam, ut antea , iis utatur amicis : neque hi
rurfus Regem Daniœ hoftem judicarent , aut alias partes in Cimbrico né-
gocie fïbi fumèrent unquam , quàm Rex Britannise , quàm Batavi , qui-
buscum unà pacli Altenoenfis fponfronem fufeeperant: quàm inepte hoc
nomen immani fuae perndise prœtendat , nemo eit , qui non' percipiat.
Scilicet fœderum reverentiâ movebatur is , qui i lia. religiofo etiam facra-
mento fîrmata polluere non veritus eil: aut focii neceffitatibus fubvenire
voluit, qui, quoad ille in angultiis verfari vifus eft , opem omnem fub-
duxit: depulfo dudum periculo, cum illius non indiget , prsefto eft. Qua-
jQ cuiquam obfcurum elle polîlt, Czarum non fuâ potius libidine, quàm
fociorum caufa, in bellum hoc prorupifle : "a quo illum metus Turcarum
haclenus retinuerat.
Quemadmodum autem fimnltas illa, quae Régi Suecis cum Danis erat,
facile potuit aboleri; ità injurias, quas Rex Polonise obtulerat , akius in
animum penetraffe , quo majori cum indignitate ac perfidiâ conjunclie
funt, nemo paulo humanior demirabitur. Illum S. R. Majeflas Suecis,
ut amicum & propinquum, & fuper ha;c propiori fœderis nexu fibi jun-
gendum, omni officiorum génère cumulaverat : aggreffus ille eft S. R.
Majeftatem, innocuam, & paftis fidentem , non jufto bello , non legiti-
mû modo, quo Reges ad arma procedere folent, fed dolis, & turpi aftu-
tiâ. Florentiflimam provinciam expilavit , priusquàm Te inimicum profef-
fus eft: caftella intercepit : urbes oppugnavit : prodkores fovere , cives
ad feditionern illicere , cœlum terramque mifeere non deftitit, ut hofles
undique in Suecos concitaret: fparfis quaquaverfum teterrimis calumniis ,
& focietate nefanâ cum malevolis initâ , cum Suecis arclioris amickice
fpem quàm maxime faciebat. Hune igitur juris gentium violatorem, hof-
tem,»^ infidiatorem perniciofiflimum, cum neque de injuriis remitteret,
fed in propolito & nocendi animo pervicacius perfifteret , cuiquam ini-
quius videbitur, poli atrociffimas tôt injurias, a Rege Sueciae in gratiam
non receptum elle, quàm nunc a Czaro defendi atque protegi? Videlicet
illum Suecis conciiiare Mofcus voluit , quem a fpe conatuque potiundœ
Livoniae depulfum erexit, .& debilitatum fpe auxilii in fententiâ confirma-
vit. Qiiis ex pulcerrimâ iiiâ confpiratione reftaret , cujus confiliis atque
■opibus m bello hoc inaufpicatifiimo uteretur Czarus, fi hune llatorem, &
columen rerum fuarum unicum , ipfi fubduxiifent Sueci? Liquet emm iis-
dem confiliis innexum, jam diu peftem Suecis moliri : contraclam efle
focietatem eâ lege, ut, quàmprimum a bello Turcico refpiraret Mofcus,
in Suecos, quorum provincias inter fe partiti funt, omnem vim effunde-
ret : imerea, quantum poflot ., ille bellum traheret. Sed riiic ex alto
Deus
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 237
Deus temeritatem hominum; & inepta fœdifragorum confilia diflurbavit. Affairfs
Qui fiducià virium paulô ante ferox , magnam Sueciae partem fpe dévora- mSuf.de
ET DE
VIE.
verac , brevi ad moenia Narvse confliclu expercus eft, quàm parùm impiis
in numéro copiarum auxilii lit : quantum vero exigua rnanus virtute , &
caufà, fubnixa valeat. Atquc ita qui fubità & improviia irruptione Sue-
cos prohibuit, ne injurias a Rege Poloniaî fa&as pofTent ulcifci , illum
plagam, alterius perfidiae debitam, tergo fuo excepiffe omnes jure meri-
toque exHtimabunt. At vero, cum tain ar6tam inter fe coiviflent focie-
tatem , ratio non apparet , quare indignetur hune fibi foeium elle re-
liétum, quo per conciliationem cum Suecis erepto , doleret hodie fuper-
efle neminem , qui cum clades fuas communicare pollet. C^uod igitur
benefkium erat, injuriam nunc interpretari non debebat. Retineat pœni-
tentiac foeium , quem in bello incipiendo hortatorem confiliatoremque fe-
cutus eft. Non invident Sueci hanc tantam ipfi cum Rege Polonia; ami-
citiam , quam par eaufa, fimilis perfidia, gemma temeritas arcliffimè con-
glutinavit. Quanquam , fi hic quoquejurata fides plus apud Mofcum va-
luiiTet, quam levitas & dominandi libido , a focietate hac abltinuiflet: cum
seterno fœdere conventum efc , ne Suecorum hofeibus auxilium fer-
ret (X).
Quse practerea hoc feripto continentur , ad examen hic revocare non
attinet. Impuram quandam iniquilïimarum calumniarum elTe farraginem ,
quibus S. R. Majeftatem , gentemque Suecicam in odium adducere , res-
que ab illa fortiter geftas macula adipergere, laborai compilator, nemo
non intelligit. Sed , ut opinari licet , frultra hic malevolentiam fuam
confumfit. Quibus enim artibus famam , quam ampliffimam eile ipfe fa-
tetur, comparaiTent Sueci, novit univerfus Orbis : nec magnopere cu-
pit , ut facundiâ conviciatoris alicujus de eâ re dôceatur. Qui , cum
in Suecis alia deflcerent , quse dente carperet maiedico , perpetuam ar-
morum felicitatem, reique mjlitaris ftudium , criminatur. Sed ut traélan-
di arma neceiïitatem illis impofuerunt aliorum injuria, qui conjurati to-
ties in Suecicum nomen , extremam moliti funt perniciem ; ita fortu-
nam a Deo concefTam haclenus , donec juftitise ac virtuti fludent , pro-
pitiam fore fibi pollicentur. Longa armorum quies , quâ jam uli funt,
docebit non minus illacefîîtos pacem fequi , quàm ad arma prompri
funt , cum provocantur. Itaque gloriam virtute partam , virtute in po-
ilerum tuebuntur : née ab hac perenni conteftatâque majorum integrita-
te degenerabunt, quàm ad pofteros puram immaculatamque propagare,
Deo propitio , cogitant. Qui vero Suecorum vires acciiurum fe tara
ïnfolenter crepat , non reputat , quàm muki fua amiferint , dum aliéna
feclantur.
Non obfcurè autem innuit vitilitigator , quo hacc valeant con vicia,
ôc quafi forex fuo fe indicio tandem prodit. Careliam Ingriamque,
quas veteres & indubias Mofcorum provincias appellat , cum inteitinis
difiidiis , centum circiter ab hinc annis, Mofcovia laboraret, Suecorum
armis occupatas elle ; eas hoc bello repetendas. Hanc igitur genui-
Gg $ nam
Affaires
de Suéde
et de
Mosco-
VIE.
238 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
nam hujùs belli caufam effe non diffimulat : reîiqua , quse ne minimam
quidem jufli imaginem habent , obtentui fumta. De his enim provin-
ciis invadendis, ut portu aliqao maris Bakhici potiretur , minas crebro
jaftaffe Czarum conitat : & certos populos , quod teftibus locupletibus
compercum eit, ante triennium, cura illos adiiifet , immunitate veétiga-
lium , & magnis pollickationibus , in partes jam tune folickaiTe. Quod
cum animo fuo fixum deltinatumqne haberet , Sueci experiri debe-
bant, quàm levé innocentiae preefidium fit, ubi libido, viribus inftructa,
dominatur ; atque hanc fubire tempeftatem, quam non innocentiâ fuâ,
non ullà indultriâ declinaiTent. Neque enim folicitè belli caufam qua>
renti defuturum unquam effet , quod fpeciofè argui pofTet. Quanquam
verô harum regionum non eit controverfa poffeflio , in quam Sueci
non tam gladio inducti tune erant , quam jure poitliminii & pac-
tis folennibus redierant j tamen ut il li , quibus veterum actorum co-
gnitio fortaffe minus obvia eft , liquido intelligant , quàm juftè ac
légitimé à Suecis illae teneantur, quàm verô improba Mofci cupide
tas, & iniquitatis plena fit, non ab re fuerit paulo altius quaedam re-
petere. Ac primùm illud a vero longiffime abhorret , quod antiqui-
tus Mofcici regni fuiffe lias provincias tradit. Cum enim ex Annali-
bus Mofcorum domefticis, tum exterorum, qui veteris aevi monumen-
ta compofuerant , clariflimè patec , & nomen & regnum Mofcicum , ob-
feurum antea & orbi inauditum , quadringentis ab hinc annis , demum
emerfiffe : tune quoque perangultis finibus inclufum, Scythis feu Tarta-
ris tributa pependilTe, donec, circa finem feculi decimi quinti, a nato
Salvatore , Johannes Bafilides , avus tyranni ejufdem nominis , exeuflb
jugo, non tantum in libertatem fe aileruit, fed etiam vicinos Rufliaî po-
pulos, longé nobilio'res Mofcis potentiorefque, tuncautem inter fe difeor-
dantes , majori fraude , quam virtute , paulatim fuae fubjecit poteftati.
Cum Novogardiam , validam tune & amplam civitatem proditione quo-
rundam cepiiTet, afportatis veteribus incolis , horridam feramque gentem
fuam in eorum fedibus collocavit, primusque Mofcorum in Careliam fi-
nes imperii protulit. Itaque ante illud tempus nihiljuns in has provin-
cias fuiffe Mofco certum eit : fed quas poitea eadem, quâ finitima quae-
que , ferocia invadere cœpit , caufam interponens , partem earum ad
Novogardenfes olimpertinuiiTe. Suionumin illas jus ac imperium omnem
ferè hominum memoriam excedit. Nam ut vetuitiora non attingamus,
feculo poil natum Chriitum nono, cun6Hs regionibus, quas Sinus Finni-
cus interluit, imperitaffe Suiones teftatur Piiftoria Scandica : atque, ut
domitas in officio continerent , & barbaras fimul nationes a mari Balthi-
co, quod piraticis îembis infeftabant , arcerent, conilitutoshabuiiTe in in-
tïmo hujus maris receffu fiduciarios quofdam fui fanguinis Regulos, qui a
prima fede , quam in infulis litori vicinioribus habuerant , Holmgardici
prifeis Annalibus appellantur. Unde nomine in proximam continentem,
eorumque ditioni adjeftam , propagato , Holmgardia dicebatur totus ilJe
trapus, qui Careliam, Ingriam, & JELMx partem hodie compleétitur. Flo-
rentibus
ET D E
Mosco-
VI E.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. iyj
rentibus liorum rébus , quac opibus potiffimum Suecorum fulciebantur , Affaires
omnis barbarorum vis multis astatibus intra remotos ab hoc mari fines co- DE SuEDE
hibita eit: labefa&atis iifdem, & regno Holmgardico cum Rmhenorum,
tum Teutonum in Livoniam irruptionibus everfo, cum turbulentus domi
flatus Suecos a ferendà ope prohiberet , Ruthena colluvies e paludibus
fuis prorumpens , traftis in focietatem Carelis, maria latc percurfare cœ-
pit , Sueciae oris maxime infefta. Compefcendis horum incurfionibus
exercitus miffus, Careliam brevi pacavit, receptaKexholmiâ,quam rebel-
les infederant , anno MCCXCII, & , paulo poil , Lanscrona arce in
faucibus Lodogae lacus sediflcata. Atque ita ad primos conditores , & jam
Finniae , cujus pars olim fuerat , univerfae dominos Holmgardia redibat.
AtRutheni, quorum licentia his fhenis coercita erat, gravem Suecorum
vicinitatem rati, quàm primum metus aberat, clauflra revellere,&Sueci-
cum agrum continuis divexare populationibus, non definebanc, adjuti vi-
ribus Lituanorum Tatarorumque, qui eâ tempeflate Mofco viam tenebani.
Ingentes faepe clades pafli , pacem inftaurant : rumpunt , ubi occafio in-
vitabat; tam diu de alieno certantes, donec ipfi Mofcorum tandem inli-
diis praedae ceiferint. Ab eo tempore, quod a nofirâ setate d-ucentis pau-
lo plus annis abefl, has regiones, ut antediclum, Mofcus fibi vindicare
cœpit, diflriclà tuncSuecià, & civilibus difcordiis, quas exterorum Re-
gum eleclio excitaverat , propemodum exhaufta. . Ubi ab illis refpiravit,
lacefcente Mofco, cujus libidini nihil falis erat, veteres provincias , quas
nullo jure ifle invaferat , Sueci recuperarunt. Provenit ea res féliciter
adeo, utKexholmia,anno MDLXXX,&Ivangardia,quam MCCCCXCXVI
occupaverat , hofli ereptis, praeter Noteburgum , univerfae in Suecorum
poteftatem pervenerint. Et quanquam iterum Mofco certis legibus per-
mittebantur : pace tamen Stolboenfi, anno MDCXVII, ob navatam ad-
verfus hofles Mofcovise operam, in perpetuum Suecis funt reititutœ.
Quse fufius in publicis monumentis commemorantur , leviter hic per-
ftringere vifum efî, ut conflare poffit, utri Regno accenferi debeant haa
Provincial, Sueciaene , cujus à remotiffimo aevo pars fuerant, an Mofco-
rum, qui in illas noviffimè involarunt, ut indidem vicinos populos prae-
darentur. Quanquam de praerogativâ aetatis fupervacaneum efl difputare,
cum confiât eequiiiimo certiffimoque jure à Suecis nunc poflîderi : quorum
tanta cum in totam gentem Mofcicam, tum familiam regnatricem mérita
exilant, ut neutra dignam fatis gratiam illis rependere queat. Haec enim
Suecorum virtuti débet, quod imperet hodie : illa quod fuis potius, quàm
alienis dominis pareat, quod avham religionem, quod aliquod imperii no-
men habeat. Ablque Suecis fi fuiflet , aut fceleratiiïimi alicujus Deme-
trii nepoti ferviret , aut alienum jugum hodie ferret. Cum Mofcoviam
exterorum armis obfelTam recr-eaflènt Sueci , ac penè ex faucibus fati
ereptam confervaffent , prorligatis hoflibus , & ipsà imperii fede. libera-
tâ, debilitatis jam Mofcis & abjeclis quafi fignum ad benè fperandum
primi fuflulerunt. Quid? quod cum ipfam Novogardiam , oppida quam
plurima, & munimenta , fuis prajfidiis tenerent Sueci, atque adverfus
hofles
24o MEMOIRES, NEGOTÏATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires hoftes longo tempore defenderent, non tantum bond fide omnia reddi-
ueSof.de derunc, fed etiam jus fuum in univerfum Imperium, quod Mofci Caro-
îsîosco- ^° non°j Suecorum Régi, ejufque filiis , oblatum. jurejurando confirma-
vie, verant , fefignarunt. Quodnam autem par tantis laDonbus, impenfis,
■ ac periculis praemium reportarunt ? Non glebam ullam ex toto regno,
quod ab intérim revocaverant , fibi retinuerunt : veteres recepifle Pro-
vinces , quas fumma injuria occupatas reltituere dudum Mofcus debue-
rat, unicum lucrum erat. Tantulo impendio , (i impendium efl , cum
alienum reddas, tantum Mofcus Imperium redemit. Sed illud efl in-
gratiiiimœ gentis ingenium , ut , q.uos , rébus dubiis ac deploratis , tan-
quam cœlo miffos & fofpitatores fuos olim fummis laudibus extulerat ,
quorumque fide ac tutela ftetifle fortunam fuam declaraverat , eos nunc
turpiffimis fraudibus injuriifque circumventos opprimere nefas non pu-
tet. Quae tamen bénéficia à Suecis accepiffent Mofci , ipsâ eorum con-
feiïione , quœ hic apponitur, cognofci poteft (Y).
Itaque fcrupulofius forfan , quàm opus effet, fnvola hcec convelli ali-
quis dicet : in univerfum autem de hujus belli injuititiâ nemo paulo
sequior dubitabit. Quifquis enim hase , qusc dicTta funt , cum adverfa-
riorum aceufatione contenderit , non poterit non fateri , neque majori
perfidiâ ad bellum proceiîifle quemquam , neque viliores ineptiorefque
ad iilud exeufandum praetextus attuliflè. llluitrabit autem Sua: Regiae
Majeflatis virtutem iniquitas perfidiofiiîimorum hoflium : &. caufee inter
fe vehementius, quàm homines, confligent. Stabunt ab hac parte fum-
ma integritas , fides, innocentia, humanitas, mens bona & intrepida :
ab altéra confpicientur calumnia? , fraudes , perjuria , fidei paclorumque
violatio , fera immanifque natura , quam odium Dei hominumque co-
mitatur. Certè his omnibus tanta turpitudo inefl atque fœditas , ut
non unius populi , fed univerfi generis humani hollis atque everfor de-
putari debeat , qui iilud vinculum , quo focietas omnium gentium con-
neétitur , tam temerè rumpere atque violare non efl veritus. Quid e-
nim ad falutem reliquum erit mortalibus , û non perfidiam innocen-
tia , non libidinem fœderum fanctitas , non perjuria Dei omnipotentis
metus inhibere ac refrenare valeat ? Enimverô , ut haec Mofci auda-
cia quam maturrimè infringatur , non Suecias tantum , fed omnium e-
tiam vicinarum gentium, maxime intereffe, omnes intelligent, qui pro-
cellam , quae impendet , circumfpicere mentibus paulifper voîuerint.
Quam nihili putet facra omnia inquinare , quam perfidus fit , quam li-
bidine dominandi ardens , perfpicuum in Suecos documentum exilât :
quid vero cum animo agitet, quidque moliatur, obfcurum effe non potefï.
Non ili beilum hoc ingreffus efl, ut fu-as fociorumve injurias, quicnul-
lac crant, vindicaret, fed ut barbariem fuam in excultas Europa: regiones
importaret. Imperium, quod verfus orientern folem, per valïas folitudi-
nes, ad Sinenfes prope muros extenditur, in occidentem quoque dilatare
fibi propofuit. Tria maria, quoe terras in immenfum fpacium porredtas
alluunc, non fuffidunt tanta? aviditati: fi quartum addi poflet, univerfas
totius
RESOLUTIONS D'ETAT , M; DCC. 241
totius Orbis opes ad fe traheret, easque pro lubitu difpenfaret , turbatis aut .4f*aibF3
everfis omnium aliarum gentium commerciis. Obftare Suecos tam infa- dkSu*de
nis conatis dolet: quibus proculcatis, fperat omnia in expedito fore : tam- ^T DE
diu non fufcipi negocium pofTe, aut certè minori cum lucro. Facillimum Vi«."
cnim efle aflentatores perfuaferant, ut aromata mercefque Orientis adver-
fo Indo fubveclae, atque inde modico terreftri itinere in Oxum amnem ,
qui in mare Cafpium exoneratur, traductœ, apud portum Aftracanum fa-
cili navigatione fiiterentur: unde per Mofcoviam opportunis plerumque
fiuviis in oppidum aliquod maris Balthici comportatse, quœitu incredibili
diftraherentur. Quod commodius longé iter vifum eil , cùm ad fanum
Archangeli majori circuitu & periculo navigatur. Non nuper hoc confi-
Hum Mofcus concepit: vêtus illud efl, ut ex Paulo Jovio difcimus (Z);
quod haclenus dilatum defperatumque vefano impetu jam exfequi ftatuit.
Et quis fperet hifce finibus tantam contineri pofTe licentiam ? Quse, ruptis
femel repagulis , latius evagaretur, atque novos Attilas, novofque Ta-
merlanes, flagella orbis , produceret , fanguine atque csedibus finitimas
circumcirca regiones inundaturos. Quàm enim proclive effet ex vaftiffi-
inis terris , /atiuïmifque ferarum gentium fedibus , nubem cogère horribi-
lem, tempeflates a fe daturam, nullis viribus , nulloque humano confilio
poftea evitabiles. Et quemadmodum prima vis ac ferocia Suecis incum-
beret; ità illis, quod abfit, debilitatis, quin eadem omnes maris Balthici
accolas majori poftea violemiâ corriperet , dubitari nequit. Cernèrent
tune myoparonum piraticis roitris fîerni maria; invehi claiîibus truculenta
•barbarorum agmina ; populari urbes -, regiones cultifîîmas in folitudinem
redigij difîipari négocia; miferandum in modum csedi, aut in fœdiffimam
fervitutem abftrahi omnis {exûs mortales: ne illis quidem ipfis , qui furio-
fis Mofcorum deftinatis jam lenocinantur, innoxium lactumque ipeclacu-
lum.
Sed meliora fperare jubet immenfa Dei bonitas , qui hanc peflem a
nobis avertet: & ficut fingulari providentiâ inviclum Suecorum robur,
tanquam propugnaculum, furori huic oppofuit ; ità porro eorum animos
ad avitam veteremque gloriam inflammabit, addetque dignam juftiiiimâ
causa fortitudinem. Eundem , fupremum rerum omnium arbitrum &
reclorem, S. Regia Majeltas Suecise invocat teftem fuse innocentiae, ejufc
que Divinam opem implorât, plena fpei ac fiducie, ut, qui flagitia om-
nia deteftatur, nunc quoque temerati fanclifîimi nominis fui pœnam a fœ-
difragis ac perjuris expetat. Confidit denique non defuturum fibi favorem
bonorum omnium , qui contra juris gentium violatores , contra perfido-
rum hoflium nefariam confpirationem , contra perniciofifïimas machina-
tiones, pro communi denique causa confligentem , quantum opibus pof-
fint, votis certè & fauftis acclamationibus juvare atque profequi non
ceffabunt.
ïome XL H h Lit.
Affaires
peSuf.de
ET DE
Mosco-
VI E.
241 MEMOIRES, NEGOTIATÏONS, TRAITEZ, ET
Lit. A.
Artic. 24. Pacis Cardifienfis 5 1661.
S
/ qua controverfia inter utrafque partes fuborta fuerit , tune praefeftus âf mi-
nijler iftius partis , quae injuriant fibi inlatam putat , praefeclo alterius partis £p
magni Domini eam indicabit , qui absque mord convenire debent in limite utriusque
regni , vel aliquot bonoratos &? bonae fidei viros àb utraque parte denominare , qui
ha/ce lites legitimo modo examinent atque amicè componant.
Artic. 25".
Si autem négocia majoris momenti inciderint , quee componere non pojfunt provin-
ciarum limitanearum praefecli ac gubernatores , ijla tune ambobus magnis Dominis
fignificahmtur. Si tune magnis Dominis placuerit mittere fuos legatos vel alios,
quos-cunque voluerint , ad bas lites componendas , earum cognitio tam diu differetur ,
donec ab utriusque partis magnis Dominis aliquot ad eas examinandas mittantur ,
qui in ipfo limite vel ubicunque ex conjenfu utriusque partis commodiffimum vifum
fuerit , libère ac amicè concernent , atque fie pr opter ejusmodi négocia convenientes ,
absque mord ex jufto â? aequo omnia décident. Praeterea baec perpétua pax nullis de
caufis y fcf nullo modo , abrumpenda efi.
Lit. B.
juramentum Czari pro confervanda aeterna Face.
GRatid Dei in Trinitate culti Nos Czarus , Petrus Alexii filius , ejufdem Deî
nofiri fervus , fpondemus coram Deo atque hoc fancto Eva?igelio , nos omnia
quae cum in Nojirae Czaricae Majefiatis ultimo ratibabitionis diplomate , tum in
Suae Regiae Majefiatis literis cou rmatoriis per omnia conveniunt , exprejja funt ,
fanclè &? fideliler fervaturos , atque inviolatè impleturos ejfe.' Mofcuae 1684. àk
20 Maii.
Diploma Ratihabitionîs.
Nos Dei gratid magni Czari £f magni Domini , Jobannes Alexii filius , &? Pe-
trus Alexii filius , Nojtro nomine , £f Nofirorum Dominorum Haeredum , qui poji
Nos fut uri funt magni Domini, 6f magni Principes , promittimus per animas Nof-
trarum Czaricarum Majefiatum , 6f in Cbrifii Dei nofiri fanctijfima Evangelia fpon-
demus , Nos magnos Dominos , Nofiras Czaricas Maje fiâtes , aeterna foedera Cardi-
fienfia , & pacla Plyfenfia per legatos confecta, ut âf conventionem Mofcuenfem,
fanctè , perpétua, £f inviolatè, fine ulla mutatione , fervaturos , fecutur os , atque imple-
turos ejfe , in omnibus claufulis, jaxta eas conventiones , quas magno Domino, Suae
Cza-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 245
Czaricai Majejlati, Parerai Noflro beatae £? aeternae memoriae, cum Fejîra Regia Affaires
Majejlate, 6? regno Sueciae , per fupradiclkos magnos legatos, in congresfionibus ad deSuf.de
Cardifiam y PlyJ'am, & Mofcuae inftitutis , inire placuerat. Mofcuae 1684. die
20 Maii.
Alterum Pétri Alexii Diploma Ratihabitionis.
Nos Petrus Alexii filins , Dei gratid magnus RuJJiae Czarus , pro Nobis & Nof
tris Dominis fuccejjoribus , futuris magnis Dominis , 6? magnis Principibus Rusfiae,
hoc ratihabitionis diplomate affirmamus , Nos , magnum Dominum , Nojlram Czari-
cam Majeflatem , perpetuum hoc Cardifienfe fœdus , paàa Plyfenfia , per legatos
Nojîros utrinque confetla , Jimul 6f conventionem Mofcuenfem , fideliter , conftanter,
Ê? invioîatè fervaturos , fine ulla mutatione , eaque in omnibus claufulis juxta paSlo-
rum tenorem fecuturos effe. Mofcuae Anno 1699 die 8 Nov.
Ex Literis 3 quae ad Suam Regiam Majeftatem cum Legatis do-
mum redeuntibus miflae funt.
Nos Petrus Alexii filius £?c. declaramus , Nos velle juxta tenorem aeterni foede-
ris Cardifienfis , patti Plyfenfis, & Mofcuenfis conventionis , cum Regia Veflra Ma-
jejlate in arnica vicinia & perpetuo amore perfijlere : cujus rei gratid £f Nos Veflrae
Majejîatis diploma confirmationis a legatis Regiae Veflrae Majejtatis fufcepimus ; at-
que pariter hoc noftrae ratihabitionis diplomate fupradicla foedera atque pacta confir-
mamus , quae inviolata in pojlerum tempus manebunt. Mofcuae 1699 die 20 Nç~
'vembris.
Lit. C.
Literae Czari Mofcorum ad Sacram Regiam Majeftatem Sueciae,
1700 die 24. Aprilis.
NOS Dei gratid magnus Dominus Czarus ac magnas Princeps , Petrus Alexii
filius (tit.) Vobis , potentisfime ac ferenisfime Princeps, Domine CAROLE,
Rex Suecorum &c. (tit.) Regiae Vejlrae Majejlati falutem amicè deferimus. Pla-
cuit Nobis Nofiraeque Czaricœ Majejlati ad Regiam Vejiram Majeflatem mitters
nojlrum intimions admis fionis cubicularium &f Knefium Andream Chilcovium , ut
indicaret adventum nojlrorum magnorum £f plenâ potentid i?iJlruàorum Legatorum ,
quos Nos magnus Dominus , Nojlra Tzarica Majejlas , vigore perpetuae pacis , ad-
que eandem porrb confirmandam , ad Vejiram Regiam Majeflatem defiinàvimus , quo-
rum adventum coram Veflrae Regiae Majejîatis magnis £f plenipotentiariis Legatis,
per Noftrae Tzaricae Majejîatis Senatores in colloquio Mofcuae habito jam tum fi-
gnificavimus , nulli Nos magnus Dominus , Noftraque Czarica Majejlas , dubitan-
tes , quin Veflra Regia Majejlas curet , ut iidem nojlri magni Legati , juxta teno-
rem aeternae pacis, pro dignitate, excipiantur in vejlris finibus } £f ad regiam vejiram
H h 2 fedem
ET DE
Mosco-
VIE.
244 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
5>K Suéde
ET DE
Mosco-
VIE.
Affaires fedem debito modo deducantur. Eidem autem nofiro ablegato , Nos magnus Domi-
nus , Nofira Czarica Majefias , in mandatis dedimus , ut poftquam nofirorum ma-
gnorum & plenipotentiariorum Legatorum adventum fignificaverit , ad aulam Vefirae
Régine Majefiatis pofimodo ut Refulens permanent , fecundum conventionem Mofcmê,
inter Regiae Vefirae MajefiatU magnos £f plenipotentiarios Legatos nojlrosque inti-
mos Conjiliarios , faclam. Qjiare Nos magnus Dominus defideramus , ut , ratione
amicae viciniae mutuique amoris , velit Vefira Regia Majefias hum modo nomina-
tum Refidentem ad fuam regiam admittere , atque cum debito honore ibidem commo-
rari finere , & praeterea jubere fuos Jubditos , ne ipfi faciant impedimenta in corn-
municandis Nobiscum omnibus , quae [cire nofira interefi. Denique Nos magnus
Dominus , Nofira Czarica Majefias optamus Vefirae Regiae Majeftati multorum an-
norum falutem &f incolwnitatem , atque in vefiro regno felicisfimum imperium. Scrip-
îum in nofiro regno atque regia , in magna Czarica Urbe , Mofcud , anno pofi na-
tivitatem Salvatoris nofiri Jefu Chrifti , 1700 die 24 Aprilis , imperii nofiri anna
decimo. ofôavo,.
Lit. D.
Literae Knipercronae , qui Refidentis munere fungebatur in Ail-
la Mofcicâ , datae Mofcuae 1700 die 16 Maii.
SUA Czarica Majefias, die 14 hujus menjïs , falva & incoîumis ab oppiâo Voro-
roniciâ hue rediit , atque die infequenti me domi meae convenit. Inter aiia ef-
fufae benignitatis pignora , Janctè affirmavit , nibil Je contra Suam Regiam Majefta-
teni Sueciae îiiali vel cogitare vel moliri. Uxorem meam joco increpuit , quod pliai
fcripfijjet , defiïnare Czaricam Majefiatem cum exercitu ver fus Livoniam proficifei,
& propterea nos omnes Mofcuae magno in timoré vivere: Filiam, inquiens , tuam ef-
fu/ius lacrymantem confolari vix potui\ âf mepta, dixi , tu non meliora de meo ani-
rao fperas? putasne me injufium btllum Régi Sueciae illaturum , rupturumque aeter-
fium foedus , quod fervat arum me fanftè promijèram? limita je benignam ckmentem-
que gerebat , ut prae gautio à lacrymis abjiinere vix potuerimus. Cumque implora-
rem , ut ignorantiam uxoris meae exeufaret , me familiariter amplexa efi. Intsr
alla , JîngLiluri plané affecta Sua Czarica Majefias dicebat Regem Pohniae vel Ri-
gam occupaturum , vel fuas vires omninb attriturum , cum alioquin ignoraret , ubi
commode vitam degeret. Atqui , fubjecit , Jî Rigam Suecis adimat , eam tamen non
retinebit : îllam ego profeào manibus ej'us eripiam. Conjlantinopoli nibil certi de par
c'a allât um ejî. Mofcuae die 16 Maji 1700.
Lit.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 14?
Affairim
Lit. E. DR SuEDE
ET DE
JVÎOSCO
Ex Literis Legati Suedici , illuftris Viri 3 Lilierotii , Hagae 24^ vie.
juin 1700.
PRaeterito die Martis me convenit Legatus Mofcicus , atque inter alia iterum plu-
ribus verbis teftatus ejl Principis fui Jîncerum firmumque propojïtum colendi
cum Vejlra Regia Majejïate amicitiam. Ego rurfus affirmavi, Regiam I rejlram Ma-
jejlatem nunquam babuiffe fidem malevolorum faljis rumoribus , fed fiduciam certisfi-
mam ponere in Czari candore atque conjlantid , qui etiam à Jua parte fibi polliceri
poffet j Regiam Vejlram Majejlatem nib.il praetermiffuram ejje , quod ad banc amici-
tiam porro confirmandam augendamque faceret. Et cum pacis negocium cum Rege
Poloniae commendajjet , addidit , confultum Régi illi fore , ut quantocius Regiae
Vefirae Majeftati cenciliaretur , quum nulla omninb fpes effet auxilii à Czaro impe-
trandi. Interea E. Br. Secretarius , heic locorum commorans , retulit , quod quam-
vis Czarus bac ratione mentem fuam déclarant , non tamen certo quis promiffis ejus
fidere pojjet. In proclivi enim effe , fua promiffa in alium fenfum detorquere , quafi
noliet pacem cum Regid Vefird Majejïate fafitam vîolare , verum ne impediretur , vi-
gore foederis cum Rege Pulo7iiae initi , auxilia ipji mittere. Çhiamobrem , ficut Le-
gatus Mofcicus mibi propiorem amicitiam obtulerat , atque rogaverat , ut ipjum non
celarem , fiquando Jînifter aliquis rumor de Czaro fpargerttur ; ita banc occajiuneni
captans mentem ejus explorandi , Secretarium Hildebrandiwi ad eum mifi , qui prout
inter nos conventum fuerat , rumores bofce indicaret. Laudavit banc fiduciam Lega-
tus : fed juxta baec fummoperè admiratus ejl ejufmodi rumores absque filndament»
fpargi, dixitque abfurdam effe hominum arrogantiam , qui penitius in intimicm Cza-
ri confilia penetraffe fe putaverint , quàm ille ipfe , cui ifia utique nota efe cïebeant..
Czarum fuum anîmum finceris explicaffe verbis , quibus Regia Vefira Majeftas tut»
confidere pojfet. Qiiae ipfe mibi dixerat , v.era effe atque firma. : caeterorur.i fabulas-
contemni debere.
Ex Libello memoriali Praepotentibus Foederati Belgii Ordini-
bus exhibito die 4 Septembris' 1700.
MEmoratus enim Czaricae Majejlatis Legatus plus und vice banc domîni fui cleraen-
tisfimi mentem tejlatiorem reddidit , idque validisjimis deelarationibus conjlitutum
ei effe , non tantum hello , quo Livonia fiagraî , fe non immifcere , fed £? amicitiam
cum Sud Regid Majejïate omni exquifito ojficiorum génère excolere ; cahcmniam ap-
pellans , quicquid buic adverfum maligni bomines divulgare 'conaii funt. Ufus ejl
bac occajione verbis memovatu profeào dignis , utpote immortale decus Czaricae Suae
Majejlati conciliaturh :, £? quae praeclarum exemplam praebeani aliis , nifi finijlui
viliorque mens effet, imitandum. Haec fcilicet vcrba fuerimt : Saemffimum Czarum
■itàin animum vnduxiffe fuum, ut ante omnia fidei datae rdigiojisjimus cidior au lire
velit i memorem nimirum effe , infidere Je folio nuUi totius orbis potentki jècïmdo- , J'e-
H h 3, . que.
ttf MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires que adeb tam excelfo loco pofitum , nibil imquam committere velle , quo tanto faftigio
Suéde minus dignus cuipiam videatar : averfari igitur fe £f adfpernari quodcunque indeco-
rum f admis , quod praefens vel futura aetas ipfi exprobrare posfet : id quod fient ,
Ji amicum Regem , nullâ injuria hcesjitus , bello adoriretur.
DE
ET DE
Mosco-
VIE.
Lit. F.
Epiftola Czari ad Regem Poloniae.
FRATER DILECTISSIME ET DOMINE VICINE:
NON dubium ejje débet , quin propojîtum noftrum res arduae bacienus moratae
Jint: quoniam tamen nunc , auxiliante Deo, pax cum Turca triginta annorum
fancita efi , & quidem conditionibus non poenitendis ; jam toti in eo Jumus , ut
quàmprimum .bellum Régi Sueciae inferatur , âf fadtâ in hojliles fines irruptione , io-
ca opportuna occupentur. Qiiem in finem legiones nojlras , quanta pojjumus fejli-
natione, praemiffas ipfi circa finem bujus menfis infequi cogitamus , pleni fpe , £?
Dei auxilio confidentes. Speramus igitur votis Diledtionis vejlrae abundè fatisfac-
tum wi.
Veltrae Majeflatis bonus Frater,
Mo/cou die 9 Augufti P E T R U S.
1700.
Lit. G.
Ex memoriali Libello Legati Mofcici ad Ordines foederati Bel-
gii die 2 Septembris 1700.
CELSI AC PRAEPOTENTES ORDINES,
CUM mibi Literae die 16 Junii , Mofcoviae exaratae , pojleriori demum nuntio9
Augufti die 18 hic traditae funt , quae quoddam Mandatum Suae Czaricae Ma-
jejlatis continuant , quod P. C. ac P. Domination! bus absque alla mord infinuandavi
fit , ideb - - mearum partiwn ejje duxi , illud cum Mis communicare , demonftraiis te-
norem illius fequenti modo : Quod cum de Refponjîone certior facta fit Sua Czarea
Majejlas à Celfijfmiis ac Praepotentibus Veftris Statibus , illos perbenignè accepijje ,
(quod Sua Majejlas bello Lwonienji cum Coronâ Suecicd fefe immifeere no-
luit) hoc admodum contenta efi i banc eam démon ftrationem fuam nunc illaefè objer-
vare , ac pacem absque offen/ione cum Corona Sueciae , ob peùùonem Celforum ac Prae-
poteîitium Statuum confer-vare velit.
Ex
RESOLUTIONS D'ETAT, M, DCC. 247
Affaires
Ex Libello ejusdem die 6 O&obris iroo. deSuedb
» E T n ».
D Elude recepto etiam Suae Czaricae Majejlatis , clementisjîmi Domini, perbenigno
Mandato, in colloquio Veflrorum Celforum ac Praepotentium Dominorum, Dominis
tum temporis exijlentibus deputatis, Domino Ham , caeterisque demonjlravi , quod Sua Cza-
rica Majejlas fuperiorem fuam Declarationem Vejlris Dominationibus faàam , ad pacem
juxta requifitionem l^ejlrarum Domi?iationum cum Coronâ Sueciae confervare velit ,fed ut
Celjae Veflrae Dominationes finaliter demonfirarent Minijiro Suecico , ac Regiae Majejlati
Suecicae tranferibant de fequenti negotio , quoniam in praefentià ac commoratione ma-
gnorum ac plenipotentiariorum Legatorum Suecicorum , Mojcoviae ipjîs diàum fuit
fufficienUr cum requifitione , de communibus injuriis in partent Suae Czaricae Ma-
jejlatis , clementijjhni mei Domini , maxime autem de eâ quae ad dedecus Suae Cza-
ricae Majejlatis pertinet , ac Rigae ipfi illata ejl ; cum toti ferè mundo conjiet , Suam
Czaricam Majefiatem Rigae fuiffe praeteritis amis , ac iterfuum intendijje verjus
Bataviam.
Lit. H.
Libcîlus LegaÉi Mofcici , qualis Lalino Sermone Praepotentibus
Belgii foederati Ordinibus exhibitus eft.
CELSI AC PRAEPOTENTES DOMINI,
CUM mihi literae die i<5 Junii , Mofcoviae exaratae, pofteriori demum nuntio9
Augujli die 18, hic traditae funt , quae quoddam Mandatum fuae Czaricae Ma-
jejlatis contineant , quod V. C. ac P. Dominationibus absque ulld mord injinuandum
fit , ideb mearum partium ejje duxi, illud cum Mis communicare , dcmonjlrans teno-
rem illius fequenti modo : Quod cum de refponfione certior faàa fit Sua Czarica Ma-
jejlas à CelfiJJimis ac Praepotentibus Dominis Statibus , illos perbenignè accepijje (quod
Sua Czarica Majejlas bello Livonienfi cum Corona Suecica fefe immifeere noluif)
hoc admodum contenta ejl , banc eam demonjlrationem fuam nunc illaesè obfervare ,
ac pacem absque offenfione cum Corond Sueciae, ob petitionem Celfisfimorum ac Prae-
■potentisfimorum Statuum , confervare velit. Tantum defideraî apud illos Celfos ac Prae-
patentes Dominos Status , ut finaliter Jignificent Minijiro Suecico ac Suae Regiae
Majejlati feribant , quod in commoratione magnorum ac plenipotentiariorum Legaior dm
Suecicorum , Mujcoviae locutus fit illis intimus Bojarinus ac Pro-Rex Siberiae 3
Tbeodorus Alexides Golovinus , cum Collegis , de communibus injuriis in partem Suae
Czaricae Majejlatis , maxime autem inter alias , de bac , quae in dedecus ipfius Cza-
ricae Majejlatis perfonae illata ejl Rigae, cum toti ferè mundo conjiet, quod Sua
Czarica Majejlas praeteritis annis Rigae fuerit , indeque in Bataviam proficifei vo-
luerit , quod fe qiioque facturos ac relaturos effe absque ulld mord ad Sacram Regiam
Majefiatem in reditu fuo promiferunt , qui de re etiam illis feriptum tmditum ejl ,
cum
£ T D E
Mosco-
V IE.
248 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires cum fubfcriptione manuum fupradiftorum Conciliariorum Mufcoviae , fed boc usqus
tie Suedk a(i iempus nuUum refponfum fecutum , nec ulla adhuc fatisfadtio praejlita efi. Qitamr-
Moc^- obrem, Celjî ac Pracpotentes Domini, bis benè ac prudenter perpenfis , de injunae ip-
\ ik. fins perfonae Czar. Majejtatis fatisfactione vindiâd dignd Jcribant. Quae autem £?
quales illae fint injuriae , C. ac Praep. D. D. fufius exponetur in adjunfta ebarta,
quitus interea perpétua profperorum fuccejjuum incrementa apprecor , manfurus ad
quaevis amicitiae officia paratisfimus. Hagae-Com. die 2 Septembris , Anno 1700.
Signacum erat : Suae facratiffimae Czar. Majejiatis , magni potentijjimi Imperatoris
Mufcoviae, intimus Okolnicki, locum tenens Jaroslavius , Legatus,
Andréas Artemonides Marviecz.
Adjunclus erat Libellas hic, Caufas Belli continens.
CUM, anno 1697, Czar. Majejiatis magni ac plenipot. Legati, ex mandata iter
fuj'cepijjent Mufcoviâ cum quibusdam praeclaris voluntariis (voluntaires vulgofic die-
tis) in régna Europaea per ditionem Suae Regiae Majejiatis per urbem Rigam, tune
in praefata urbe non tantum in receptione juxta obfervantiam tradtatus pacis , fed
etiam in commoratione , maxime autem in dijcejju , Mi non tam fatisfacli , quin po-
tins injuria ac opprobrio affiecli &P inimicè tractati funt , cujus hic ex parte mentio
Jit. Certior enim fdàus Dominus Generalis ac Gubernator urbis Rigenfis , per Uté-
rus ipforum de adventu magnorum plenip. Legatorum in confinid , nejcivit illos jux-
ta dignitatem recipere , ac idoneos praefettos receptionis ÇPriftavos) nec equos Mis mit-
tere , aut pabida dare , non modo ob amicitiam vicinam, aut alias ob caufas , fed illud
quoque nequaquam pecunid expeti potuit , quâ ratione usque ad Rigam iter fuum ma-
ximd egejlate in fais equis profequi coaàijùnt. Rigae autem non modo ab bonejlis
viris &f nobilitate in receptione bonorati ac recepti non funt , fed à parvo numéro
mercatorum ipfis occurfus fadtus efi. Ajfignata funt ipfis domicilia baud bona &
quidem mercatoria , pro quitus autem Mi coafti funt folvere pecuniam pro talitus li-
gnas hypocauftis , pro qualitet domo tantum, quantum pro magnis lapideis palatiis.
Ad baec , à nemine , re ulld , honoris gratid donati funt , (quod etiam non defidera-
runt) Jed ignominiosè tempore diei fanBae refurreàionis Cbrifii, caeterisque omnibus
diebus , nibil , nec pabula pro equis , vendiderunt , quod autem Mi vendiderunt , pro
boc , quamvis Legati ijti magni pecuniae non pepercerint , plures decies fibi Jbivi cu-
rarunt. Apud aurigas (Muscoviticos) etiam equos bonos pro pretio minimo ob inven-
àibile pabulum decem Jliveris (folidis) fcp paulo pliais quafi fub venditione fumj'e-
runt. Perfonas, aefervos ad legationem pertinentes , absque vigilibus nulliti ire aut
tranfire non fiverunt , ac quemeunque , quascunque etiam ot caufas ire voluerint , fe-
quuti funt milites duo , dut plures tanquam maleficum , &? plures fex hominum nu-
méro non intromiferunt in urbem , nec etiam in areem ad Gubernatorem , fed prae-
terei graviter in eos investi funt , ac contumelia eos affecerunt , £? ijlos loco capita-
l'um bojlium ac cxplcratorum babuerunt. Ad baec illos percutere ac detinere gloriati
funt , quod autem man'fcftum Dci patrocinimn non per mi fit. De ceteris autem vertis
meliiis
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 24?
fncîius tacere quâmfcribere convenit: quod autem omne , ob malam adminijlrationm , Amx*M
à Domino Générale ac Gubernatore confulibusque provenu. Ouamvis autem Suae Cza- drSo«dh
ricae Majejlatis magni Legati, de hoc& alio multoties praeciaros fuos nobiles ad eum ^05C3.
mijerint, conquerentes dejuo infortunio , attamen Me non tantum ipfis in bac re auxi- yfr.
Hum ferre recufavit , fed etiam eos magnos Legatos confolari ac deleclare noluit. Mon-
Jîrans fenfibile ad amicitiam faftidium fimulaîè dixit , fe jacere aegrotum ob obilumfi-
liaejuae, quam ob caufam Je Dominos ple?ùpot. Legatos invifere non pvffe, cum ta-
men hoc nihil fuerit.
In dijcejfu magnorum illorum Dominorum, ac plenipotcntiariorum Legatorum ex Ri-
ga , trans fluvium Duinam , eos non modo quihufdam navibus bonejiioribus ( Jachti
£? Boot ) non honoravit , fed etiam pro parvis ac ferè deformibus fcaphis, cum qui-
bus eos milites ac alii mer cède conducli aurigae tranjvexerunt , pretium fumptum ejl
tantum, quantum pro navibus , £? ad confiîiia ufque Ducis Curlandiae deduài fuivt
illi abjque ullo honore atque comitatu. Curfor magnorum ac plenipotentiariorum Lega-
torum Jacobus Suraivetz mijjus è Curlandia in Rigam, à Domino Generali Guber-
natore très dies detentus , & examini fubjeâus ejl , ut diceret , ubi Sua Czarica Ma-
jefias nunc degat , £f alla buic contraria verba ; praeterea lujlrationi ac vifitationi
expo fit us , atque fummo opprobrio affectus ejl , ac ignominiosè tanquam inimicus c?
captivus in arrejlo detentus, & non modo fcripta aut literae , fed etiam res penè om-
îtes ei ablatae £f accuratè perluflratae fuerunt , quem demum , cum nihil contrarii in
ipfo inveniffent , cum omni exactione ac dedecore mijerunt. Adhuc etiam erubefcunt
illi grati Domini, Mis magnis ac plenipotentiaris Legatis Suae Regiae Majejlatis praeter
alla cujufdam barbaricae ac invifae Jufpicionis Domini Generalis ac Gubernatoris Ri-
■ genjis reminifci , quod multifariam ad magnos ac ple?iipote7itiarios Legatos mittens t
ajperè vociferatus fit , quafi quidam ex minijlris ac perfonis ad legatione?n pertinenti-
bus , circumeundo urbem fortalitia ac munimenta lujlrent ac dimetiantur , vocifera-
tiones , turbines, ac quemcunque tumultum excitent; quod verb fub verâ promiffione
non factum , &? omnes cum vigilibus ire cogebantur. Ad quid Suae Czaricae Maje-
jlatis mag?ii ac plenipotentiarii Legati refponderunt , ut illud facientes , Jî modo qui-
dam ex minijlris Legatorum cujufcunque conditionis ijlae perfonae fint , tanquam male-
Jici , juribus quibufcunque illi velint , capti fuerint , dijudicarentur , propterea quod
nobis certb certius conjlet , hoc ab ullo ex Mis fieri. Cum autem , tempore vernali in-
gruente , magni ac plenipotentiarii Legati naves fibi procurare defiderarent , ad con-
ficiendam Jibi propojitam viam, mittendo quofdam minijlros in portum ad mare Jt-
tum , ut naves ijlas praefcitu Generalis ac Gubernatoris lujlrarent , tune non tantum
ijlos non per urbem , vel propè urbem tranfmiferunt via ordinariâ , fed eos circa om-
nia fuburbia , in agro circumduxerunt , militibus circa plateas cum fclopetis Jlanti-
bus. Sed de aliis feribere non necejje ejl , quia jam toti mundo notum &f compertum
ejl , quod Sua Czarica Majejlas ipfa in perfona Mo tempore cum magnis & plenipo-
tentiariis Legatis praefens fuerit , £f baefupra memoratae omnes contumeliae ipfam per-
fonam illius tetigerunt. Qiiapropter Suae Czaricae Majejlatis intimus Bojarinus cum
Collegis fuis exijlens in colloquio , Suae Regiae Majejlatis magnos ac plenipotentiarios
Legatos rogat , ut de bis omnibus ad Suam Regiam Majejlatem verè deferatur , &?
Suae Czaricae Majejlatis fummo bonori , £f pojl ipfum magnis ac plenipotentiariis
Tome XL \\ Lega-
iSo MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ, ET
affaires Legatis in omnibus fatisfattio ac defenfio ab Ma injuria fiât ; jiquidem bac injuria
ce Suéde ac dedecuS mn iantum Traàatibus Paris & vicinitati admodum contraria ac infenfa ,
et de je^ etiam juri communi Gentium valdè incongruens atque inutilis audit , de quo non
VIE. dubitat ClementiJJimus Nojler Czar ac Dominas , quin Sua Regia Majeflas , tan-
quam Dominus valdè prudens , propenfo hoc , quod ad majorent amicitiam pertinet r
dederit defenfionem adverfus hanc contumeliam perpétrantes , &? Suae Czaricae Majs-
fiati per dileâas literas fignificaverit. In damnis autem fuis Mi magni ac plenipoten-
tiarii Legati contenti Junt gratid ac clementiâ Clementiffimi Czaris ac Domini Suae
Czaricae Majejiatis.
Ad haec affert quoque querelam , Suae Czaricae Majeflatis Legatus , intimas confi-
liarius , revertens ex Turcica coiumijjione , Procopius Bogdanovitz I^osnitzin , dicens ,
quod jures ruftici Livonmfes aurigae ipfum innocenter exfpoliaverint , avebendo totum
currum, in quo pecuniae , argenti, & alius variae fupellectilis plus quam millium Ru-
bloîiibus pofitum fuit , de quo Domino Generali Gubernatori cum literis ejus fpecifi-
catio mijja, Jed nunc eis accuratè perlujlratù rébus , praeter ijîam fpecificationem fi-
fert3 quod iftic etiam in cijld fuerit annulus cum adamantibus obductus, pretio 300.
thalcrorum , £? 2 tapetes Gallici admodum pulcbri.
Sequentes injuriae , quarum infra in hoc fcripto fit mentio , defiderat Suae Czaricae
Majeflatis intimus Bojarinus cum collegis , ut etiam parte Regiae Suae Majeflatis jux-
ta veritatem ipjam , fatisfaàione refarciantur , in quo nec dubitant , quin Sua Regia
Majeftas , pofl relationem illorum magnorum ac plenipotentiariorum Legatorum , ipjam
juftitiam , ad implendam amicabilem Paris confervationem , in perpetuum adminiftra-
ri, ac illam dignis folutionibus recompenjari jubeat. Sed bae infra nominatae injuriae
traditae funt juxta libellum praefecti fummi curforum , Matthaei Winnii, de multis in-
juriis in praefecl;um ac direëtorem poflae Rigenjîs , quia multas literas detinuerit ac re-
fignaverit , nec non multas literas non acceperit , ut diredtione poflae privetur , £f ip-
fi alius praeficiatur. Libellus fupplex Gorafini Bielfcowii ex vico bortulano de pecunid
pro mercibus in Rigenfem civem , Henricum Cliverum: fumma mille Rublonum Thale-
rorum , fumma expcnfarum 300. Rublorum , ut haec pecunia adjudicetur. Libellus
Oflaskowienfis Anthonii Fokini in Narveufes cives , in Henricum Funckenum £? Si-
meonem Numenjjenum , de pecunia pro mercibus , fumma 600. rublonum , ut manda-
tum exccutioni mandetur. Supplicatio £? extraàum negotii Tbomae Kellermanni in
bonis Martini Bucklingii , fumma 2000. rublonum. Supplicatio Boldwini Andreae
fiXii , in aulicum Suecicum , Carflenium Klingenflernum , in dcfedtu traditionis vêla-
rium iinteaminum ac tormentorum } fumma 3000. Rublonum.
Lit. I.
Vid. novifllma Mofcoviœ Defcriptio , quse Norimbergse typis im-
prefTa, anno 1687, in oftavo prodiit ; pag. 24.3. & 383.
& feqq.
Lit. L,
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. zfi
T . T Affaires
JLlt. L/. deSuede
et nv;
Articulus i? Pacis Cardifîenfis. Mosco
PARI modo conventum ejl , ut magni Domini , Suae Czaricae Majejlatis legati ,
nunc'ù ac tabellarii, cum omni fuo comitatu âf bonis, libère , fecure , tranquille.
£f abfque ulla detentione proficifcantur per omnes potentijfuni Domini , Suae Regiae
Majejlatis Provincias ac Regiones , ad omnia circumjacentia Régna âf Nationes ,
quibufcuin Regiae Majejlati bellum nullum intercedit , atque eodem modo in Mofco-
viam redeant : nullos tamen mcrcatores cum mercibus fuis fecum ducant. Imprimis
cautum ejl , ne utriufque Principis Legati, Nuncii,& Tabellarii, quando ad magnum
Dominum, cujus per regionem proficijcuntur , à magno Domino , qui eos miferat ,
nulla mandata aut negotia expediunda habent , quidquam viatici exigant , fed fuis
impcnfis iter inflituant. Propter amicitiam tamen , quae inter utrojque magnos Do-
minos viget , eorum Legati , Nuncii, ac Tabellarii ad iter accclerandum ac promo-
vendum utrinque omni Jiudio ac opéra juvabuntur.
Lit. M.
§. 16. Pacis Card.
PRaeterca potentijfuni Principis, Suae Regiae Majejlatis Sueciae , magni Legati,
qui ad magnum Dominum , Czaricam Majejlatem , cum literis coJifirmatoriis pis
bac aetema pace , aut aliorum negociorum caufd, miffi fuerint , à Czaricae Majejla-
tis Bojaris , praefeâis â? minifiris , honorifce atque eo modo , qui legatorum dignl-
tati convenerit , ad limitem regni excipientur : inde fufficienti â? neceffario praefidio ,
commeatu , viatico atque jumentis ad vetïuram fubminijlratis , Mofcuam ufque , vei
ad Muni locum, in quo Czarica Majejlas commorantur , deducentur: & rurfus , cum
domum revertantur , tuto & debito cum honore ad fines Suecicos Jijîentur ; adeo ut
nufquam à Czaricae Majejlatis minifiris vel Jltbditis if.Ua injuria aut ignominid ajji-
ciantur. Confeào autem negocio , cujus gratiâ advenerant , fine mora dimittentur :
neque in hoc itinere aperte vel per clandejlinas machinationes ullum eis incommodwn
inferetur : neque literae vel alla feripta eis auferentur.
§.4.. Pa&i Mofcuenfis , anno 1684.3 die 22 Maii.
INter magnos quoque Principes utrinque conventum ejl, ut eorum legatis, able-
gatis , & nunciisjoco cibariorum potuumque variigeneris , quae haStenus datafunt,
in pojlerum aequalis utrinque pecunia detur , nempe Legatis magnis £? Plenipoten-
tiariis centum, Ablegato triginta, Nuncio decem unciales thaleri quotidie folvantur ,
quamdiu iter faciant , five advenientes , five abeuntes , £f quamdiu ad aulam Princi-
pum commorentur , quolibet unciali , fi minuta vel alia moneta exhibeatur , ad aefti-
mationem unius thaleri imperialis, quantum ijlo tempore valeat , expendendo. Prae-
ter baec equi ad vecluram Legatis magnis quadringenti , Ablegato 100, Nuncio 30,
fine mercede praejlabuntur : commoda infuper hojpitia , aqua , candela , ligna , quan-
tum opusfit , fubminijlrabuntur.
Ii 2 Lit. N.
VIE.
152. MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
aifaieu LJt jsj.
de Suéde
et de Ex Literis Knipercronse , Mofcuse fcriptis, anno i<5q7,
Mosco- j- • T ... 1 ' ^<J
ViE. die iô Juin.
POJiquam aUquantum fecefjîmus , fôerai ?»$i ojîendebat à principe legationis ad
je Riga miffas , m gm'èttJ Generalis Gubernatoris prudentiffimam difpofitionem %
praefeàorum militarium bumanitatem , £? officiofam converfationem. , militumque perU
tiam âf promtitudinem fummis laudibus praedicabat.
Lit. O.
Epiftola Le Fortii ad illuftrifîimum Senatorem , Prrefi'dem CanceJ-
lariae , & Academiae Upfalenfis Cancellarium 3 Dominum
Comitem Benedidhim Oxenftiernam.
Illustrissime et Generosissime Domine Comes.
OUoniam Jatis certus fum de amicitia firma & amore mutuo , qui inter magnos
Dominos noftros , Czaricam Majeflatem , Dominum meum Clementiffimum ,
&? Potentiffimum Dominum veflrum , Suam Regiam Majeflatem intercedit , ficut
etiam de conflanti affeàu , fidaque vicinitate , quae inter ipforum Régna efl ; ideo au-
fus fum ad Excelle ntiam Veflram , Dominum ac Fratrem meum , pari intentione 3
ac be?ievolentia arnica , literas hafce fcribere : quibus fimul aperire volui , juffu Do-
mini mei Ckmentijfimi , me legationem fufcepiffe , eamque ad obeundam, nunc in iti-
nere Holla?idiam verfus conflitutum ejje. Hic vero ex infperato relatum mibi efl , in
Regno Poloniae Senatores quofdam^ oblitos publici commodi, Legum atque Libertatis
iftius Regni , planèque immcmores Fœderis cum Principibus Cbriftianis adverfus hoftem
Janàae Cruels initi , Paàorumque folenniter fancitorum , eligere , atque in Regem
Regni Poloniae , ut £f Magni Ducatïls Lituaniae , fibi adeptare velle , ex voto atque
clandefiinis cum Gallo Conventionibus , Principem Galliae Contium. Qjiem in finem
communes. Cbrifllani Orbls bofles , Sultanus Turcicus , &° Crimaeus Chanus, coopéran-
te-, quod ut perficerent -, Legatis fuis in Poloniam miffis } baàenus labor avérant y
etiamnumque omni ardore laborant. Qjiod fi vero ex voto conatus illorum féliciter
procédèrent , atque praenominatus Princeps Contins Regnum Poloniae adipifeeretur ,
omnino inimicis fancîae Crucis ingens gaudium obtingeret ; fœderatis contra Principe
bus Cbriftianis , ne cogitata fua in atrium deducere , boflemque iftum debellare poffent
impedimentum difficUlimum oboriretur. Quare neceffe efl , ut mature conatibus ejuf-
viodi obviam eatur , vafraeque macbinationes communis Cbriflianorum boflis Sultani
Turcici , £? Sociorum ejus , cautc praeveniantur. Atque in eo jam Dominum mag-
num noftrum , Czaricam Majeflatem , aeque ac Suam Regiam Majeflatem vi Paào-
rum Caràifienfium aeterna fide ftabilitorum , opprime confentire &? convenir e credo,
quandoquidem in Us exprimitur , ut alter alterius commoda quaerat , omnique ex par-
te bene cupiat. Si vero Princeps ifle Contins , gente Borbonica fatus , permittente ita
D EO , Regnum Poloniae atque Lituaniae affequeretur , quilibet vicinorum amicorum
quem diligenter caveret > adjunclum fibi cerneret. Quapropter ccnvenkns duco , ut
Dominus
ET DR
Mosco-
VIE.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC *;*
Dominus magnus nofter , Czarica Majeftas , &f potentiffimus Dominus vejlcr , Sua Affairf*
jRég/a Majejlas , confentiant in mutuum Fœdus adverfus eum , ne bofies Mi adver- nE Suedk
tentes , quantum qui/que bello adverfus Janclae Cruels bofies occupatus fit , noceant
alterutri vicinorum Dominordm. Atque bocce jam propofitum num placeat potentijfi-
mo Domino veftro , Suae Régine Majefiati , efi , quod rogo , rejeribat propedie-n
Dileùtio Vefira , Frater meus. Çhiod fi Regiae Majefiati id gratum vifum fuerit ,
atque , permittente ita Deo , Coronam Poloniae impeîraverit Contins , tune ege , qui
ex Czarica Majefiate fpeciale màndatum babeo ex Hollandia ifiud négociant traàan-
di , cum tota legatione Stockbolmiam proficifear , ut illud praefens perficiam & oh-
fignem. Dum proinde exfpeào benevolam optatamque refponfionem , commendo Dllec-
tionem Vefiram , Dominum meum & Fratrem 3 omnîpotentis Dd tutelae y qui fum
Excellentiae Vefirae
Promptiffimus Servus ,
Liebfiadii die 20. Augufti S. V. L e Fort
Anna 1697. Gen. Am. Amb.extr. v.Koy de Novogrod..
Ad eundem.
EXcellentiae Vefirae , Domïrii mei ac Fratris , ad literas meas refponfùm die \g.
Septembris , currentis anni , Suae Regiae Majeftatis extraordinarius Legatus
tnibi Hagae tradidit : ex quo fatis intellexi , amicitiae atque fiduciae mutuae , qua
Serenifiimus &f Potentifiimus magnus Dominus meus, Czarica Majejlas, £f Potentif-
Jîmus Dominus , Sua Regia Majejlas , fejè inviceni ampkcluntur , praefens incre-
mentum ; atque proinde etiam addo votum , velit Dcus Omnipotens benedicere idterius
integritati amoris magnorum Dominorum , ut incorrupta maneat aeternum , feliciJJi-
moque fiatu tut a femper ac firma vigeat. Praeterea Domino meo ac Fratri notum
facio, mibi nunciatum ejje , quod Sua Regia Majejlas merd amicitid, pronoque amo-
u , mota, erga magnum Dominum, Suam Czaricam Majejlatevi, ad tefiandum af
fectum fuum fincerum , in commodum unkserfi Cbrifliani Orbis, quo compleatur or-
matures clajjis maritimae, largita fit trecenta tormenta bellica, quae fflarvam quo-
que tranfportata dicuntur. Certè pofiquam magnus Dominus , Sua Czarica Ma-
jejlas , ifiud comperiit , Suae Regiae Majefiati , fibi tam prone fauenti , fuppetiafquc
amice Jerenti , ad gratias referendas fefe fummopere obligatam cenjuit, gratum injuper
animum vel per Suae Czaricae Majeftatis literas , vel per Legatum extraordinarium ,
Suae Regiae Majefiati declaratura. Interea autem non dubito , quin Dominus &?
Frater meus boc à me jam indicatum Suae Regiae Majefiati fideliter fit relaturus.
De caetero fiait Epiftold prima Jufiius edifierui de rébus Polonicis , Jaàione Gallica-
na , &? Principe Co?itio , ijlorumque bominum aujibus , ut fignificarem , quâ vvn-
lantid ifias obfer-vare deceat , quamque ferio molitionibus eorum occurri debeat ; ji-
quidêm confilia baecce , quibus Regnum Poloniae Jubigere intendunt , minime vcrgimt
in ufum Orbis Cbrifliani : ita Domino ac Frairi meo, coîififus fincerae ipfius in
me benevolentiae , celare nequeo , dubium mibi quoddam movere ISuncios bine inde
allatos , atque inprimis Mundum univerfum peragrantes novellas , quibus enarratur
Legatum Gallicum, Comitem d'Avaux, omnem navare operam , ut aulam Suecicam
in partes Principis Contii trahat. Equïdem fat-ccr me parum jjdei Mis tribucre , ne-
I.i 2 qw
VIE.
2f4 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires qUe ùlh modo dubitè de conftanti & immutabili amicitid, cbaritaîeque mutua inter
de Suéde £)om{?m magn0s ?ioftros , Suam Czaricam fcp Suam Regiam Majeftatem, per con-
Mosco- fer-vationem Fœderis â? aeternae Pacis , & qmdquid porro ad majorent certioremqm
fccurlîatem utriufque Domini magni , ipjbrumque R.egnorum pertineat : non pcjfum
tamen non mentionem barum rerum denuo injicere , fi à parte Polonorum vel Gallo-
rum , in causa Principis Contii , ipfiufque cœptis faventium , petitiones quaedam utri-
que magnorum Dominorum ac Regnis Ipforum , Majeftatîque Regide Poloniae no-
xiae deferantur , vie. fiait ante dixeram , utiliffimum & convenientijfimum judkàre,
ut non modo neuîiqitam attendatur , fsd âf prorfus tanquam Orbi univerfo Cbrifiiano
inutiles ê? nocime rejicianiut , amoveantur , fi? in nibilum redigantur. Qjiippe omni
ftudiu cavendicm arbitror , ne perniciofi Gallorum motus hifce in Terris & Finibus
nofiris , quod Deus avertat ! foveantur } mitlto minus fcopum fuum attingant , aut ex
voto fua peragant. Qiiod defiderium meum Domino meo & Fratri commendo , clarioi
rem de ils fententiam cum rcfponfione fraterna cxfpectans : quibus Excellentiam Jref~
tram tutelae Dei Omnipotentis committo. Dabam Amftelodami , Anno Cbrifti 1697 ,
me 16. Oâobriîf
Exceilentise Veftns
Paratifîïmus Servus,
Le Fort,
Gen. Am. Amb. extr. v. R,
Lit. P.
Czari Epiftola ad Suam Regiam Majeftatem Sueciae."
CÎ7JV/ Vejlra Regia Majejlate Jinceram amicitiam , fidamque vieillit atem colère ,
Nos magnus Dominus , Nojîra Czarica Majefias ex toto animo cupimus , op-
tantes, ut mutuis officiis amicitia noftra in dies crefeat , majoraque copiât incremen-
ta : quod omni loco ac tempore nos quaeremus. Sicut autem optamus, ut tormenta
bellica , quae nobis mijfa finit 9 in pemiciem fcf excidium Mabumedanorum , Cbriftia-
ni Nomhiis bojlium , féliciter convertantur ; ita Veflrae Regiae Majeftaii, amicQ
noftro ac vicino optimo & dileciijjimo , pro tam infigni dono gr atlas agimus fummas ,
atque promittimus Nos quolibet occafione operam daturos ut hoc beneficium demereri
•poffimus. Ultimo , Nos magnus Dominus , Noftra Czarica Majefias Regiae Veftrae
MajeftaXi voluimus indicare , Nos noftro Praefeào &? Gubematori magnae Novo-
gardiae in mandatis dediffe , ut in Veftrae Regiae Majeftatis Regnum atque ad Urbes
viciniores , Revaliam, Narvam, aliafque nobiles aliquot viros mitteret, qui in ufum
atque commodum noftrum, inque expeditionem navalem , quam animo agitamus , Ca-
pitaneos , Navarcbas , Gubernatores , atque nautas rei nauticae peritos conducerent ; £?
proinde Regiam Veftram Majeftatem , cariffimum noftrum amicum cf vicinum , ma-
ximopere rogamus 3 ut tam illis , qui à Praefeftis noftris mercede conducantur , quàm
aîiis , qui fponte nomina fua profiteantur , venia concedatur , ad militiam noftram
tranfeundi. Ouod aux'Mum tum ad commune rei Cbriftianae commodum pertinet ,
tum ad augendam , ftabiliendamque mutuam inter nos amicitiam & caritatem , appri-
wt1 faciet &c. Mofcuae, die 1. Decembris, anm 1698.
Lit. Q.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. iÎS
j . -^ Affaires
X-rfl t. V^. deSuede.
Epiftola Apologetica
IlluftrilTimi Comitis, Erici Dahlbergii, Senatoris Regii, Campi-
dudoris , & generalis Gubernatoris Livoniae , ad Suam Re-
giam Majeftatcm Suecice , Rigx anno 1700. die iS.Martii.
OUantb magis e re putabam effe , Rex clementiffme , ad amiciîiam vicinita-
tis fir mandant , ut Legatio Mofcica quàm hpnqrifiçentijjimè cxcipcretur ;
1antb major i cura t3 folicitudine in id incumbtbam ,ut prae caeteris Lcgatis , qui
per Livoniam antea profecli funt , fplendidiori haec apparat u cultuque ornaretur.
Equidem nihil mihï fufffet optatius , quàm fi à Sua Régla Majeflate mandata
accepiffem , quce in dubiis quibufdam negociis fequerer : verùm cum ad interrvga-
ta refponfum tant celeriter reddi non potuijfet , tcmporis anguftiae me cogcbant ,
ut , datif ad Praefeclos Revaliae Narvaeque literis , fententiam eorum exquire-
rem , eofque rogarem , ut me certiorem facerent de omnibus , quae in re fimili iftic
locorum obfervata effe noverint, inprimis , an moris erat , Légat os Mofcicos ad
/viennes epulas invitare. Refpondebant , ufu id nujquam efje receptum , neminem
Legatorum , qui per hafce Provincias , five in Stieciam , five ad extera Régna ,
iter inflituiJJ'ent , publias conviviis adhibitum : omnes confuetis bonoribus fuijje
content os., Eorum autem nomina , qui , ab anno 1 660 , ad hoc ufque tempus ,
per Eftoniam , Livoniam , lngriamque commeaverant , adjunclâ rccenfentur char-
te. Interea , quae ad Legatorum ufum neceffaria videbantur , diligenîer ordina-
bam , cogitationefque omnes eo intendebam , ut non tantum exacle ca fervarentur ,
quae Paclis prae fer ibuntur ; verum etiam ut joliti honores , quantum convenir e
judicabam , in gratiam horum Legatorum adaugerentur. Qui eos Rigam dedu-
ceret, confitutus efi Glafenappius , vigiliarum praefeclus , vir & claritate gene-
ris , & furnma humanitate confpicuus : adjuncîi ei collegae funt Dornfeldius cen-
turio, aliufque nobilis , Mojcicae linguae périt us. Mis imperaium efi , quam
primum nunciaretur Légat os Mofcuâ abiijfe, ut Nyhhfam pr ope fines Livoniae fe
conferrent , adventum ibi Legatorum praeftolaîuri. Territoriorum Praefecli jufji
funt mature annonam convehere , equos rhedafque cegere , diverforia cum ad per-
neclandum, tum ad prandendum commoda defignare , atque diligenter providere,
ne quidquam , quod ad iter rite conficiendum faceret , Légat is deejj'et. Non fegni-
ter illijujfa exfecuti funt : verum in propo/ito fuo non parum funt perturbât i ,
cum , quantacunque cura adhibita , expifeari non poffent , quo tempore îegati do-
mo proficifci conflituifjent , mira folertiâ abitum fuum celantes , ne cuiquam inno-
te fecret Czarum una fuifj'e profetlum. ghiare aliquandlu Mofcuae fevere inter-
diclum erat , ne cur fores publia hue mitterentur , detentis etiam omnibus , qui
Livoniam verjus iter facerent : quorum e numéro tntepres nofier , Soldanus , Ion-
go tempore Mofcuae fubfiftere coaiïus eft. Pofiquam vero commeatus iterum con-
fefius erat, omnes literae quae Mofcuâ mittebantur, refignatae atque perlufiratae
cunt. Praeterea ab illis tpfis fama quaqua verfum vulgabatur, Légat os f mu-
tata
ET DE
MoïCO-
VIE.
ET DE
Mosco
VIF.
zf6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AnAÙto tato confdio hue eundi, per Livoniam Pohnieam iter converti]?}. Cum omnes
oeSùebs jam in ea opmione effemus , fubito Schmidius quidam, praefeclus vigiliarum ,
cum parte impedimentorum hue accefferat : illum mox infecutus veredarius , lite*
ras à praefetio Plefcovienfi adferebat , die 14. Martii feriptas } quibus adventus
quidem Legatorum nunciaba.tur , caeterum quando , aut quo numéro , nihil addi-
îum. Unde faclum cfl , ut tempus [ex hebdomadum , cum inftgni ruricoîarum
damno atque molefliâ , teretur , antequam fines noflros Legati intrarent , veclo-
ribus toties convocatis , toties domum remijjïs , quos longâ morâ feffos atque ludi-
brio habit os ex cire tandem difficilïmum erat. Cum Legati die 22. Martii Plefco-
viâ de ad-ventu fuo mihi fcripfijfent , nulla tamen mentione facla , quando ad //-
mitem noftrum ac céder e dccrevifjent , die 16. ejujdem menfis in hanc fente ntiam
eis refpondcbam : quod etiamfi literis meis ■, quas die 23. Martii de deram , nihil
refcripjifjet Praefeclus Plefcovienfi s, neque de tempore , quo adfuturi efjent Le-
ti , neque de comitum numéro , ullo verbo me certiorem fecijjet , quod tamen ab
eo pojiulatum , atque fieri acquum erat ; nihilo tamen minus omni cura provifum
ejffe , ut decenter (s? condignis honoribus exciperentur , rebufque neceffariis fuble-
vati , per hanc Prcvincïam ducerentur. Sperare me , ipfos bénigne candideque
accepturos , quae diffeilimo hoc tempore, atque infoiita annonae caritate , quae
hanc Provinciam per aliquot annos graviter affiixerat , in eorum ufum conferri
pojjent : cum perfuadere Jibi dîberent , nihil me praetermittere voluijfe , quod cum
ad amïcïtiam erga vicïnum populum teflandam , tum ad conventionem aeternae
Pacis implendam pertinere judicajfem. Longa igitur interpofita morâ ad limitem
tandem improvisé apparucrunt , atque in praedio Nyhufenfi hofpitaliter, invitati
pernoclarunt. Inde juftis itineribus Rigam pervenerunt , deducli ab ils , qui-
bus cura importa erat videndi , ut , quae ad iter ne ce [far ia ejfent, abunde fup-
peditarentur.
ghium conftaret Légat os haud procul abeffe , fub tribunum Palmflrauchium , ac
vigiliarum Praefeclum Ranchium , fejuge meo veclos ac flipatos duodecim fatelli-
tibus regûi , nec non decem meis pediffequis , pro habit u praefentium rerum fat
décore ornât is , obviam us procéder e juffî : fequentibus quinquaginta & amplius
tant militiae duclorum , quam aliorum in urbe hofpitum oppidanorumque curri-
bus y atque uno fenis equis junclo , per magiftratum urbicum fubmiffo. Hos ex-
cepit or do militarium virorum , non numéro tantum , fed etiam cultu atque
magnificentiâ praeftantium. Proximi ivêre, quos Nigricipes , feu Schwartzen-
hofder, vocant , pile os albentibus plumis décorât os, ac veflimenta, auro argen-
toque difiincla , gefantes. Hoc agmen claufit turma equitum oppidanorum ,
centum omnino fcf quadraginta , decoris armis veflibufque , ac ftriclis enfibus ,
tubarum etiam ac tympanorum , vexillor unique fuorum adparatu fuperbientium.
Quae utique omnia acceffum ingrejjumque Legatorum in urbem ita celebrem ac
mémorandum reddiderunt , ut vix quemquam reperiri creda'm , qui neget honores
prioribus Légat ionibus & heic £s? alibi locorum habitos ,modicos omnino fui (Je , fi
cum hifee conférant ur. Jtque hoc online introït um eji per portam arenariam^
ubi cohors milituyn in armis Jlabat , exfpeclatura adventum Legatorum : perrec-
tumque inde per médium forum , pari milïtum numéro infejfum , ufque ad por-
tam Carolinam ; ubi r'urfum tertia cohors ces operkbatur , contmuo tibiarum
tympa-
ET PE
Mosr.o-
V1F.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 2;7
tympanorumque fuorum fonitu , quemadmodum & prions Mae , perfirepens. Sub- Affaires
euntem valvas Mofcum triginta &? duo forment a bellica explofa falutarunt , io- oeSuf.de
tidcmque , quum per ait cram port am priori oppofitam defcendcret , ad fréquent a-
tum omnibus Mofcoviticis legationibus diverjorium , in loco quodam fuburbii ,
Lafladicn diclo, detonuêre. Cum Légat i cbjamdeducli ejfent , ad eos , quo par
erat , vcrborum honore falutandos , tejtandumque laetitiae affeclum , ^#m ?* eo-
f«j» adventu perceperam , Vrangclium Praefetlum vigiliarum , £5? L'ilieflier-
nant centurioncm , w//? ; ./'tf^fo yfa##/ indicare , ###/# optionem quinquaginta milù
tibus , in fingnlos dies cammutandis , fuccinclum , /o/o e<? tempore , ^ z» #,--££
commorari placeret , <2<^ ^^j ipforum excubias aclurum.
Gratum inprimis hoc officium ipfis fuijfe , £# £0 apparuït , ^«0^ extcmplo unum
è fuis fubtribunum , ### «/;# quodam alio propinqua cognatione Domino Lcfortio
junclo, ad gratias eo nomine mihi agendas mitterent. Sicuti autem praediclus
Lillieflierna m aida Legatorum finguli s diebus comparerez ac vel praecipue Do-
mina Lefortio operam fuam atque officia , y? <jwi ;'» r£ defiderarcnîur , praeflare
debuit ; //# »c« tantum ea , f ##£ ara* receptionem eorum in urbem , y?^/ &? ^,7tf£
reliquo tempore apud eos cuntigerunt , adeuratâ diligentïâ ob/ervavit , #/^#<? /&#-
y « /fo narrationis feriem inde contexmt ; multis verbis indicans , £#rt#2 £/vz /<? <?#/'-
#/<? Dominus Lefortius femper agnoverit honores , Zw/V Legationi tributes. Quod
quidem non in fpeciem tum ab eo faclum , /W <?# interiore ejus confeientiae fenfu
expromtum fuijfe , Kniperus fuis lit eris Mofcuae datis die i<5. ^«//ï confirmât',
commemorando fibi comperîum , principem legationis per [cripfiffè ad fuos Mof
cuam , ^/W mirum in modum fuerit content us fplendidifjimo illo comitatu , quo
in urbe fit receptus , nec non exquifitâ illâ magnificentià , atque honoribus am-
fliffimis , quels toto commorationis fuae tempore à Rigenfibus fuerit maclatus.
Tribum ac reliqui militum praefebli , -quotquot in urbe aderant , fuis quisque
vicibus , ut imperatum erat , aulam Legatorum fréquent arunt , comis officii teflan-
di causa , ac ut taedia ipforum , quibuscunque poffent , obleclamentis f allèrent.
Ipfe quoque , miffis , qui de illorum valet udine atque reliquo rerum Jlatu comiter
cognofeerent , officia mea iis quotidie deferenda curavi. Sed quo minus ipfe eos
inviferem , aut in arcem ad epulas invitarem , ob/labat vêtus confuetudo antece [fo-
rum meorum , qui nullas Legationes , per has oras tendentes , aliâ , quam à me
faclum fit , ratiune excepiffent. Quae quidem res mihi tanto magis nunc in imi-
tationem trahenda videbatur , quod hanc Legationem non ad S. K. Majeflatem ,
fed ad extraneos Principes mifjam fuiffe conftaret. Et fi vel maxime aliâ mihi
mens fuiffet circa hoc negocium, nec hae rationes fatis apud me valuiffent ; ipfa
tamen rei impoffibilitas ex adverfa valetudine , quae totis propemodum quinque
hebdomadibus me in leblo detinuit , a propofito me retraxijfct. Neque enim cb-
duclum ex obitufiliae meae hoc officii a me intermiffum eft , ut falfo , ac vix
titra calumniam , perhibent \ quandoquidem ijle cafus,fexto demum diemenfisOclo*
bris i6y8- adeoque pofl annum ac menfes feptem à Legatorum ad nos adventu
accidit.
Caeterum qtium ex morâ , quam in hac urbe egerunt , aliqui licentiam fibi
fumèrent in urbe obequitandi , atque locis eminentioribus non modo Jitum ejus
Tome XL Kk cura*
VIE.
i;8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Attairfs curât ius contemplandi \ verum etïam totam munit ionum rationem in charta
df.Suf.de fclineanâi , explorandique fojfae altitudinem \ confcenfs hinc inde maeniorum
vt" DE fummitatibus , caeterisque ad urbis tutelam exflruclis operibus , ut reclius
cuntla perluflrarent\ officii mei ejje duxi , à Domino Lefortio décent er requi-
rere , ut talia fuis interdiccret , quayidoquidem , ipfe rerum militarium longe pe-
ritiffmus , ignorare non poffet , nuspiam in totâ Europâ , ubi aliqua loca J'unt
munita , ejusmodi hofpitum tentamenta permitti folere. h folitâ fibi humant-
tate excepit hanc expoftulationem , comiterque excufavit , quae haclenus , fe
infcio , acla erant\ pollicitus fe prohibiturum , ne qui d f mile in poflerum com-
mlttatur a frontis perfrièlae Ru fis , uti erant propria ejus verba. Atque
hinc nata eft improba illorum adverfus nos qucrela , quafi eos fepfiffemus tam
arclâ cuflodiâ, ut omnis plane liber tas domibus egrediendi fuerit ipfs ademta.
Quae profiClo hoc injujlior cenfcri débet , quod omnes , quotquot in hac urbe
a^unt , probe norint , fuoque teflimonio docere pofint , illos non fingulos , fed
ferè univerfos gregatim^ omnes vicos urbis pervagatos , mercatorum tabernas,
cpificium officinas atque aenopolia omnia libère , ac ut eos vel libido vel indi-
gentia ferebat , frequentafe. De caetcro infolenter admodum ac praeter omnem
exfpcclationem noftram , à Mofcoviticis commifjdrus jaclatum efl , ob auguf
tifimam magni Principis pracfcntiam , utique exftantius aliquod honoris ar-
gumentum expromi debuiffe. Nam cum intra focietatem Legationis poena ca-
pitis in ipfum dicla effet , qui praefentiam Czari proderet , an non cogitare
debebamus , fnifirè admodum ab codem acceptum tri , fi, qualicunque fgno ex-
teriore palam faceremus , nos in aïiquam if ius fecreti notitiam pervenife ?
Aut quomodo^quaefo, nos deceret id ipfum detegcre, quod ifii ta?n folicitè oc-
cultum ibant ?
Grata atque accepta Us fuisfe, quae haclenus egeramus , vel id ipfum ar-
gumento esfe pote fi , quod nullas omnino difplicentiae , aut antmi nobis parum
amici , notas toto co tempore oftenderent , uti eas nec oflendere poterant , niji
prius omnem aequitatis hnmanitatisque fenfum plane exuisfent. Verum cum
ad pofremum rerum hic confumtarum ratio esfet fubducenda , folutioque prae-
fiauda , quaedam ajfeclati frigoris indicia fefe produlerunt. g)uâ quidem oc-
cafione quum nonnutli , qui hofpiîio eos exceperant , pretia rerum creditarum
ultra , quàm Mofcis aequum videbatur , extenderent , muneris mei aublorita-
tem ipfs commodavi : redublo ad cam mediocritatem pretio , quae utrique pa-
cifcentium aequa & tolerabilis judicabatur. Atque ut S. R. Majeflas co-
gnofcat , quant omni prorfus fundamento careat ipforum criminatio , quâ nos
arguant ultra dimidium auxisfe rerum vendendarum pretia , atque , dum hinc
décédèrent , oftoginta aureos popofcisjc in compenfationem operae , transport an-
dis impedimentis ipforum navatae \ mitto rationarium a magiftratu civitatis
eâ de re, me requirente , confeclum\ unà cum nominibus perjonarum , comita-
tum hune fat numeréfùm conflit uentium. Adjungo etiam librum menwrialem9
in quo accurate confgnata funt- omnia ea , quae in vicem locatarum aedium ,
pracbita-' unique candeiarum , atque aliarum rerum ad ufum vitae necesfariarum,
non tanquam ex debito^ fed ex mero beneplaciîo atque arbitrio Légat or um cuique
civi.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC.
*f£>
clvi foluta [tint. Equidem per confcientiam meam vel jurejurando ajjirmaverim ,
me nihil eorum omïfisfe , quae ad fludia me a ojficiaque ils rite ac décent er decla-
randa facere novisjem : utut fmijlre admodum cadem nunc interpretari fcdeat.
Caritas rerum ad vitlum necesfarïarum , è tenuijjïmo terrae his in locis proven-
tu or ta , mihi utique imputari non poterat : fiquidem non ipfe minus , quant qui-
vis alius, iflius incommoda fentire coati us fuerim.
Ghtoniam autem magnas querelas ex eo movent, quod difcedentes parum déco-
ro navigiorum apparat u transmijji fuerint per jlumen Dunam\ com?ncmorare ne-
ces fum habeo, quod tametfi nulla, ejusmodi in fpeciem aut pompant conjlrucla
mvigia hic in ufu ftnt , ijlum tamen defeclum quodammodo fupplere conatus fue-
rim, comparât a in ufum ip forum Legatorum , ac honoratiorum e comitatu mi-
mjirorum , una celoce , rubri coloris panno inflrutla , atque regio apluftri deco-
rata. Cui adjuntlae erant binae aliae , una cum triginta majufculis navigiis
heic ufitatis. jitque ita cum omnia trajeclui parata ejjent , triginta £5? duo tor-
menta aenea majora in honorem abeuntium explofa funt ; ut vel inde appareat
falfitas eorum , qui hune tranfitum plus quàm ignominiofum fingere aliisque per-
fuadere fuftinuerunt. Hue accedit , quod duo currus , a fenatu urbis ad dedu-
cendos , ad fines territorii Ducis Curlandiae , Légat os, praemijji ', in adverfa
jluminis ripa conftjlerent. Ac fuijfcnt profeclo longe plures una cum agmine
equitum eodem mifji in gratiam Legatorum , fi infefto tune maxime ac impedi-
to Dunae alveo ob fluitantem glaciem , necesfarius ijlis transvehendis nume-
rus navigiorum haberi potuïsfet : quandoquidem ea omnia , quae tune ad ma-
nus erant , farcinis Legatorum portandis vix jufficerent.
Ad haec nullo jure mihi impingi potefi culpa contraclûs , Mofcos inter , qui
cum e qui % fuis e Curlandia redierant , atque cives aliquot , ijlis conditionibus
initi , ut pro fingulis equis non nifi decem folidi (copecas vocant) folverentur :
fiquidem res ifta nullo modo ad me fpeclet , nec ego iflius unquam confeius
juerim: ficuti nec veredarii ipforum e Curlandia remijji , quem Jacobum Sca-
roujofs nominant. Sanè iflum hominem nunquam vel viju vel auditu cogni-
ium habui. f^hiemadmodum etiam Mermannus , Rusfomm hojpes Rigae , ac
duo illic mer cat ores, ad quos literae e Mojcoviâ venientes, ut plurimum, de-
feruntur , Heinfius & Oefkingus : nec non Jarmerfledius , infpecloris munere
apud nos fungens , atque Gertius , Graenius , Tabellariorum magijlcr , juis
tcjlimoniis probare poterunt , ijlum veredarium Rigae nunquam fuis je , jed esfè
merum commentum Mvfcovitarum. f^uae porrb memorantur de jaepius iterata
mijjione cujusdam Surowoi ad Légat os , quae jujpicionem mihi injecerit : .jateor
eci talia esfe , quae meam feientiam plané jugiant , meque permoveant ad creden-
dum , imo verô ad dicendum , ijla fine ullo fundamento , aut veri fpecie confiéta
esje: atque adeo indigna, quibus refellendis quant illum operae impendam. Ex
hijce omnibus , S. R. Alaje fias facile , utijpero, perjpiciet non tantum innocen-*
tiam meam, jed etiam iniquisfimas adverjdriorum criminationes -, ac ea propter
nt me regio juo patrocinio clément er dignetur , etiam atque etiam contendo , fanclè
affirmans , ji tanti fafligii Principem hue advenisfe certo fcivisjem , me nunquam
pasfurum fuis je , ullum devotijjimac meae erga illum pietatis atque obfequii do-
Kk 2 cumen-
Attaires
DE SUKOS
F.T DE
Mosco-
V1E.
zôo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaikes cumcnîum defiderari. jîjî quod urbis circa limitent regni poftae , munimento-
DESohDE rumque fifci ac cuftodiae meae concredttorum, Jolicitam curant gesferim , id gra~
Mosco- tiam ac commendationem potius , quàm iram arque indignationem Czaricae Ma-
" vie. jeftatis , tôt operum militarium gloriâ indytae , provocaturum exijlimaveram*
Haec funt , Rex ClementiJJir/.e, quae per fummam feftinationem , ad crimina-
tiones adverfariorum dduendas , innocentiamque meam declarandam , adornare
fotui.
Dab. Rigae die S Martii. 1700.
Lit. R.
Foedus Teufinenfe i?9?- die 10 Maii.
SI qui ab alterutrâ parte irrumpentes , caedibus , rapinis , incendiisve damna
intulerint , aliaque maleficia commiferint , »o# idcirco pax interrupta cenje-
bitur, aut bello haec vindicare liccbit: verhm ejusmodi grajfatores à prac/cclis
utriui que Prihcipis, qui ad limitent eiloco, in quo crimen patratum efi , proxi-
miïni convenient, inquir entur , atque debitis fùpplicih ajjicientur. Idem Arti-
cuiis 22 & 23 Foederis Cardifienlîs itatukur.
Lit. S.
Conventio Plyfenfis 1666. die 12 Odlob. Artic. 4. Ç. 4..
UT" commenta tantb meîius exerceantur , conventum eft , #/ utriusque magni
Principis cives , ^//i caufam babent de aliquo negocio conquercndi , vel ab
aliis aliquid exigcndi , potejiatem habeant adcundi magiftratum in w bibus , qui
juftitiam adminifirat , 6? praeterea praefetlos ac gubematores à parte S. R. Ma-
jeftatis , <à />tff7<? 1W0 Cz. Mâjeftatis fenatores & gubematores feu Fcivodas corn-
pellare us licebit , qui juxta atîa & probata judicabunt , jus aequum reddent ,
atque absque ullâ tergiverfatione implorantibus operam fuam conw:odabunt , ne
in itiueribus fuis moram fentiant : atque haec omnia ad tenorem fœderis Car-
dijienfts obfervabuntur.
Lit.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. D C C. 261
r • ry\ ntSvEax.
Mosciô-
Libellus Mofcoviae vulgatus die 18 Septemb. 1700. «.*"*■..
INter ovines caufas , quibus Czarica Majefias ad runpendam cum S'.iecis pacem
per.nota fucrat , baSv vel praec:pua ejl , quod Rex Sueclae externa qu'de-n fpec'c
cmnia officie amicae tranqiï.llaeque vicihitatis ei exhibuerlt , atque ut de f.de fua ma-
gis perfuaâeret , & Czarum q112.fi in foporem daret , legationem quoque folennem vii-
Jtrit, quae repetitam paclorum confirmationem in fpeciem urgeret ; clanculum aute.n
varias infidias ei machinatus fit , atque inter alla Regem Pvlon'ae in focietatem invi-
taverit, ut conjunctis v'ribus Czarum aggrederentur. Cïandefiinae quoque Suecorum
tnacbinationes effecerant , ut Confiantinopoli pax Turcam inter Ê? Mofcu.n multis mo-
dis retardata fuerit. Ita Su.ci ultimam Mofcis moliti funt pernxiem. Cum igitur
Rcx Sueciae nullci jujta de caufa Czarum ï'aceffiiffèt , & fimulata amicitia ipfum , to-
tumque ejus imper ium, potentifjimis bojlibus adverjus eu:n conc'tat's , evertere atque
pejjundare frauduknter cog'taffet : non potuerat non Czarus corà.n univerjb orbe ef
Chriftian;s maxime Princip'-bus perfdian banc atque fraude ,n detegsre , fperans di-
vinis bumairsque leg'bus jufluni ce conveniens jud'eatum iri , ut Czarica Majefias
imper ii fui curant gerat , atque à Deo conceffa fibi pot e fiât e utatur , illatoque bello ,
glfcentem nimis Suecorum potent'.asn ita confringat , inque eo fiatu collocet , ne perni-
ciofas perfidasque machinât iones. in pefierum exfequi vaîeant. Atque confiait fore , ut
hoc propofitum jliu.n ab boneft's omnibus , £f jîudio partium vacu:s , eb jufiius ha~
beatur , quo mag's nctun eft , provincias Careliam & Ingriam antiquités magno Du-
catui Mofcoviae extra omnem controverfiam fubjectas fu'ffe , à Suecis verb , qui,
juxta eorum fymbolum , ex rapto vivuni, £f omnes vicinos fpoliaverant , fub initium
bujusfeculi, cum Mofcovia internis dijjidiis hboraret, occupatas atque avuljas. Qiio
facto cum v'am primum invenifjènt occupandi Livoniam , & bellum pofiea in Pruf-
fiam, inde in Germanium transferendi 3 maximum ex rébus gefiis gloriam , fummam-
que famam confecuti funt.
; 2. Cum regno Daniae Czarus ejusque antecefiores ant'.quo foederis vinculo junfti
funt, quo ad auxilia ei ferenda , £? injurias quaslibet , tanquam ipfis fibi f atlas ,
mndicandas obligantur. Raque quoniam Rex Sueciae Selandiam valida manu invafe-
rat, Metropolique abfentis Régis infeflata, B toto regno Daniae in ultimum diferi-
men conjefto , Regem non modo ad iniquàm pacem cum Duce Holjatiae ineundamy
fed etiam ad Regem Poloniae, amicum & focium, ab eadem excludendum adegerat ,
quo difîraclwn à Jocio opprimendi major occafio effet ; Sua Czarica Majefias °ararn
Deo & howJnibusfe adfiricfam faîetur , ut. Jnjurias hafee fidifjimis amicis fociisque
illatas ulcifeatur , è? inita cmt'ra illos confil'a infringat : quo fuam èf foederatorim
fecuriiitem armis necejariis aliquando Jlabiliat , confidens jufiifftmae caufae Dewn
-ad/ort.
Kk 3 Lit.
262 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires T f- T T
deSuf.de A-/1C. LJ.
ET DE
Mocos- Artic. 2% Foederis Cardifienfis.
VIE.
CUm ex providentiel divina contingat , ut alteruter magnorum Principum è vita
migret , Me Pr inceps , qui in locum defunài fuccejjerit , continuandae aeternae
pacis caufa ad fuperftitem mittet , fuamque amicitiam ita declarabit: hic quoque ma-
gnus Princeps rurfus per fuos legatos alterum conveniet , £? fimili modo amicitiam
j'uam benevolentiamque declarabit, at que ita ab utraque parte perpétua haec pax > mif-
fis utrinqm diplomatibus , confirmabitur ac Jîabilietur.
Lit. V.
Ex Libello Mofcici Legati fupra citato die 6. Odtobris 1700.
POfi diuturnam vero exfpeftationem illïus refponfi , bis diebus à Sua Czarica Ma-
jefiate, clementifiimo meo Domino, accepi mandatum, in quo mibi Vefiris Civi-
tatis Dominibus demonfirare jujjit , quod Sua Czarica Majefias , ob petitionem Vef-
trarum Dominationum, inter Danicam ê? Suecicam Coronas,in incepta negotiafe immifee-
re nolit; tantum ut fatisfaclio fiât ex parte Suecica in {(lis manifefiis injuriis erga
partem Suae Czaricae Majefiatis maxime autem de ea Rigae illata illius Czaricae per-
fonae , de quibus ex mea propojitione vefiris Dominationibus omnimodo confiât, adquas
injurias Suecici Legati , qui fuerunt Mofcoviae , refponderunt , quod certo certius il-
lam notoriam injuriam ipfi perfonae Suae Czaricae Majefiatis Rigae illatam , ad Re-
gem Dominum illorum referre voluerint , ac putent , ut Mi fatisfiat.
Lit. X.
Artic. 9. Foederis Cardifienfis.
PAriter magnus Dux Sua Czarica Majefias , contra potentifiimum Dominum ,
Suam Regiam Majeflatem âf Coronam Sueciae , atque provincias , quae nunc ei
fubjeclae finit , aut pofibaec fubjici pojjunt , nulli Suae Régine Majefiatis hofii auxi-
Humferet, aut pecuniam , militem, ullamque aliam rem fuppeditabit , neque cum Mis
in hune finem foedera junget. Nullos praeterea hofies clam aut pahm in Suecos im-
mitlet , concitabit , aut , ut immittantur concitenturque adfentiet. Neque praeterea
Sua Czarica Majefias , ipfa , aut per alios , Suae Regiae Majefiati âf provinciis
regno Sueciae Jubjeàis , inprimis Finlandiae , Efthoniae , Livoniae , Careliae , £f In'
griae, urbibusque £? territoriis ad Mas pertinentibus , aut aliis Sueciae provinciis ,
quoeunque reniant nomine , perniciem ullam aut detrimentum macbinabitur ; 7nultb
minus aliquam earum partem aut munimentum occupabit , aut quaeret illas fubjugare
atque retinere , aut ullo modo, ullave occafwne , Mis damnum inferet , inferri patie-.
lur , aut ad ici confentiet. Eltj
RESOLUTIONS D'ET AT , M. DCC. 263
j
' Affatrf.s'
J_^lt. Y. de Suéde
Literse Ordinum magnze Novogardise ad Carolum IX. Regem
Suecise 3 anno 1 6 1 1 . die 17. Augulti.
NOS Dominii magnae Novogardiae Ordines , utpote Metropolita , & Palatin! re-
liqui, Knaefii, Bajori , Praefedti, AuHti, Dapiferi, Tribun! , Patrie!! , Mer-
catores , Agricolae omnes , gwi /«Z? magnae Novogardiae Ducatu continemur ; iVw
omww cap/ta ^zo/^ra incllnamus coram Magnitudine Tua.
Regiae Tuae Majejlati fat! s cognitum er.at3 colluviem bominum rebelV.um partibus
nequifihni Demetrii, qui Je poientiffîmi Domini Czarl ac Principis Jobannis Bafilidis,
Demetrii Ivanovitzii de Uglitz, filium venditaverat , acceflijje , auxiliaribufque copiis
à S'gismundo Rege Poloniae acceptis , longo tempore Mofcboviam obfidlone prejfijje ,
multa.ii fànguinem ejfudijje, templa De! ac cœnobia profan.ijje, Janctorum loca ac Jla-
tu.s viohjfe, pagos â? regiones dsvajlajfe , incultafque reliquiffe. Ea tempejlate j'um-
mum Imper ium Mo fcoviae , ac Volidimiriae BafiUus Ivanovitz Suifcbi tenebut , cum- .
que memoratus nèquam Mofcuam pervenifi'et , ibique J'pe dominii MuJ'cbovitici confie-
quendi , Cbrijllanaeque eorum fidei e-vertendae Je continufiet , mi fit magnus eorum
Dux pracdïàus Suifchius confanguineum fuum magnum Bajorum & Palatinum Knae-
Jium Micbaelem Bajilium Suifcbi Novogardiam , ut dominium illud tueretur , impel-
leretque ut dominio Mufcbovitico opemferret. Haec Zari mandata Fajîllvitz Suifcbi
Jlrenue efi executus , £f ego Metropolita cum Bajoris , ad Te , potentijfvne Rex , Ca~
rôle y literas mifimus , quibus auxilium tuum imploravimus. Tu precibus nojtris com-
nwtus , religionis nojlrae magnam curam gejjtjti ; & ut nos ab extrena pernicie lïbe-
rares , Jacobum Pontum de la Gardie Juprema armorum autoritate in MoJ'cboviani.
cum magno exercitu mifijii , qui cum Bajoro ac Palatino Knaejio Micbaele Vafilivitz
Suifcbi , plurima Mofcboviae munimenta , oppida, âf cœnobia occupaverat , eaque ah.
bofitili impetu tuitus eft, multis in locis bojlem profl'gaverat , dominium Mujcbovlti-
cum à Pelonorum , Litbuanorum, êf nequiffimi ifiius bominis Demetrii objîdione lïbe-
raverat. Inde Jacobus Pontius Mofaijcum ufque Polonis fcf Litbuanis obviam pro-
cejfit, fed, prob dolor , proptcr delicla nofira factum , ut Rujfi £f Sueci (Peregrini à
Suecis mercède condudtÇ) in medio pugnae ardore animos amitterent , deficerentque ad
bojles. In patriam deinde Majeftatis tuae fupremus dux rediit , bojlis vero in mala
fuo propojito perfeveram , undique viâor volitabat. Quare, cum potentijjimus Domi-
nas Zar us , £5* totius Rujficae nationis Jummus Princeps fe nullo modo Rujfos libcra-
re pojje cerneret , in cœnobia Je contulit , formamque angeli ajjumpfit. Quo faclto ,
Mofcbovitici domini Bojari âfc. à Sigifmundo Rege Poloniae petierunt , ut filium fuum
Uladiftaum dominum ac magnum Ducem fibi permitteret ; quod Staniflaus Zolkev:us
vi ofculi S. Crucis firmamt. Rex vèro Poloniae pafta eludens, filium fuum in Ruf-
jiam non mi fit , fed vi armata primariam eorum urbem Mofcbuam occupavit, magnam-
que îyr.nmidem in ea exercuit , donec Mufcbovitae caeterique ordines impulji fuerint ,
Regem Poloniae , filium , omnemquc eorum pofteritatem regno Mufcbovitico abdicare ;
nos quoque cum ill'.s unanimi confenfu decrevimus , ipfis ut bojïibus rejifiere, ac pro
patriac
ET DE
Mosco-
VIE.
ET DE
VlOiCI
VIE.
264 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ETC.
Affaires paîrlae falute nec vitae nec fortunis parcere. Literas praeterea à Mofcbovitico domi-
ne. Suéde m-0 ^e 2. Julii datas ac propriis man;b:is fubfcrlptas , accepimuï, quitus jubemur ,
M ^ hic Novogardiae cum Regiae Tuae Mnjejiatis fupremo duce tali modo tr an figer e , ut
nempe unum ex Regiae Tuae Majejlatis filiis nobis permittas , quem Zarum ac totius
RuJJiae , omniumque ejus Dominiorum Principem confi'.tuamus. Qùamvis vero Zarni-
cius Palatinus , B.ifil'us îvanovitz Bùtterlin cum Majejl'atis Tuae fupremo duce fae-
pius de hoc egerint , negocium tamen hoc ad optatum finem perduci non pctuit. Pop
tremo , anno hoc 7119- d'e 6. Julii prov;dentia Del accidit ut Majejlatis Tuie fupre-
mus dux Jicobus Pontius armis exterius munimentum dv'tatis Nougardiae occupant t
cumque in molimine arc' s expugnindie conjlltutus effet , Nos Nougardiae Ordines â?
caetcrarum urbium cives de Cbrijliinorum falute cog'tare cospimus. Itaque juramento
fcp S. Cruels ofculo Tibi, potentijjim Rex , Cirole, fide;n nojlram bac ratione firma-
vimus, ut Tu nempe, Rsx potentijftm , nos c on fer vires , imperio protegeres , unumque
ex filiis , quem potijjimum villes , aut GufiWum Adolpbum , aut Carolum Philippun,
nob:s in Zarum ac magnum Ducem omnium Rufforum, Nougardiaeque Dominii offer-
res , cui etiam nos abj'que dulo malo omnem fidem £f obedientiam cxbiberemus. Vice
verfii , Regiae Tuae Majejlatis fupremus dux , tribuni, praefteli equitum £? aulici,
nomine totius Suecici exerc'tus , ticlo S. Evmgelio cum nobis £f toto Nougardiae Do-
minio convenerunt , ut Tu, Rex potentifvne , nojlri defenfionem fufe 'pères & alterum
fil 'orum ad nos mitteres. Nos viciffvn ab ipfo impetravimus , ne aliam praeter banc
Cbr.jlianam ReUgionem nobis obtruderet , nec pateretur quemquam ob eam caufamfpo-
liari aut injujla nece affici , tum juntHis potius cum reliquis Rujfis viribus 3 omni co-
natu rebelles & boftes , utpote Litbuanos & Polonos profligaret.
Interei Jacobo diSto audientes fumus , omniaque apud nos rite geruntur , fummam
quoque operam nobifeum dat , ut refractarias arces , oppida , &f munimenta ad obfequium
futuri Ducis redigantur. MiJJi denique funt Legati , viri cujufcunque ordinis leclif-
fimi &? bonoratijftmi , qui de bis tranfigerent , &f ab Rege ipfo paàa confirmari cura-
rent. Aàum Nougardiae anno mundi 71 19. die 27. Augujlp.
Lit. Z.
Via. Pauli Jovii Liber de Légations Bafilii , Magni Frincipis Mofcoviae , adClemen-
tem VIL Pontificem Romanum , exeufus Francofurti 3 anno 1606.
SUPPLE-
SUPPLEMENT
AUX
MEMOIRES
D E
L A M B E R T Y-
ANNEE M. D C C. I.
loms XI.
L)
w$£*?3> *£ # &&&& 3>\*3gK\+& %.+& î\+ï£ &*yS VvS *.♦-# *.«■# %:*&&&*?
MEMOIRES,
NEGOTIATIONS,
TRAITEZ,
E T
RÉSOLUTIONS D'ÉTAT:
ANNÉE M. DCC. I.
9H&* * $*4&$tt& 3*^3*-£3*-& «3H&«3H&*4& gM&4H&$Mg> gM&€H&§tfê£H&$H& «3*^
: AFFAIRES DES PROVINCES-UNIES.
Réponfe de V Amirauté de Jîoorn aux Etats -Généraux fur leur Amn«i
Information de PEmpîoi des Deniers de cette Amirauté ; DES Pro-
^ 7 *V • VIMCES-
du 13. janvier 1701. unies.
^^:(55)^é>our obeïr aux ordres de VV. H H. PP. compris dans IeurLet- Réponfe
^ }0 tre & Refolution du 4. Janvier dernier, touchant Je Ra- dei'Amî-
■© \y © port demandé comment & de quelle manière les deniers TiUté de
S A © du petit Sceau font adminiftrez dans nôtre Collège, il plaira Ho°£Gt
5^( )fa à VV.HH.PP.de felailTer informer, qu'on fe règle à l'égard
WSW^i.^ de ces deniers fur ce qui a été ordonné par VV.HH.PP.en
1669, mais que les Revenus des dits deniers n'ont pas été allez impor-
tans pour faire quelque Négociation là-deflus, ni pour acheter quelques
Pièces de Canons, puifqu'après les gages du CommiiTaire, des Contrôla
Ll 2 leurs
fi<58 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AmmEs leurs, & autres Officiers, il n'efl pas beaucoup refté pour le Païs,par où
»»s Pro- i'on croit avoir fatisfait aux intentions de VV. HH. PP.
VINCKS-
■" FaitàHoorn, le 13. Janvier. 1701.
1
Réfohtion des Etats-Généraux fur une Pétition du Confeiî d'Etat
pour deux Millions ; du Lundi 17. Janvier 1701.
Rcfoîu- T) E9U une Lettre du Confeil d'Etat, écrite ici à la Haie, le ij. du cou-
tion fur -IV rant , laquelle porte, que le dit Confeil, après avoir délibéré avec
unePé- Sa Maj. Britannique ne fauroit s'empêcher, pour les raifons alléguées dans
titiondu ladite Lettre, de remettre à la confideration de VV.HH.PP.fi l'onnepou-
A?t£.û roit pas négocier encore deux millions fur le même fonds que les 4 millions
dernièrement rembourlez avoient ete négociez en id88, & fur lequel VV„
HH.PP. avoient refolu depuis de négocier de nouveau 2,9408 $6: 13.4. bien
entendu fous les mêmes claufes & engagemens par raport aux Provinces
que les dernières Négociations avoient été faites. Surquoi ayant été dé-
libéré, il a été trouvé bon & arrêté, qu'il fera envoyé Copie de la dite Pé-
tition aux Seigneurs Etats des Provinces, en demandant leur confentement
au plutôt là-deffus, & d'en vouloir faire part inceflament à l'AlTemblée.
, Réfolution des Etat s- Généraux Jur une Requête de 9 Bataillons
PruJJiens pour leurs Gages ; du Mardi 1 8.
Janvier 1701.
Réfolu- T U à l'AlTemblée la Requête des Officiers foufîîgnez & autorifez des
tion tou. 1-/ neuf Bataillons de S. Maj. le Roi de PruïTe, ci-devant au Service de
chants». l'Etat, fupliant pour des raifons exprimées dans la dite Requête, qu'il
Batail- plaife à LL. HH. PP. d'autorifer encore & d'ordonner au Receveur General
(knsP jeune d'Ellemeet d'accepter les arrérages & les dettes des Suplians , por-
tant la fomme de 616$ f : 9; o. & Je promettre par écrit de les payer
avant le dernier Février prochain & de les acquiter promptement ; com-
me aufli que LL. HH.PP. veuillent accorder aux Suplians par ordonnance
audit Receveur General une fomme qu'Elles jugeront équitable & propor-
tionnée aux gros intérêts qui leur ont été portez en compte de tant de Ca-
pitaux confiderables , au préjudice des Soldats, foit pour habits , argent ,.
ou monture, de même qu'aux autres fraix caufez par leurs follicitations &
leur long fejour ici, afin que de cette manière les Suplians ne foient ar-
rêtez plus long tems ici à leur propre ruine & au préjudice du Pais, &
qu'enfin il leur foit ôté tout fujet de plainte. Surquoi ayant été délibéré, il
a été trouvé bon & arrêté d'écrire de nouveau aux Seigneurs Etats de
la Province de Gro.ning.ue , & de les exhorter ferieufement à confentir fans
délai
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. z69
délai à la Négociation du 3mc terme fixé pour le payement des Dettes con- AffairE3
traêtées par les depenfes des Camps & des Magazins, afin que la dite Né- DES Pi>°-
gociation puifTe être faite, & que les Suplians,de même que d'autres, foienc ^1NCES-
contentez de leurs arrérages. wtE$»
Refolution des Etats-Généraux touchant les Réparations £*? F ré eau-
tions neceffaires fur le Rhin ; du Samedi 2 2 Janvier 1 7 1 o.
Ouï le Raport des Srs. d'Eflen & autres Députez de LL. HH. PP. pour Réfolu-
les Affaires du Bas-Rhin & de FYfler, aïanc examiné conjointement u?n ^u"
avec quelques Députez du Confeil d'Etat, la Lettre du dit Confeil écrite Répara-**
ici à la Haïe le 12. Janv. précédent, laquelle porte, qu'il étoit connu àLL. tions &
HH.PP. qu'à moins qu'on ne voulût entièrement négliger les réparations Précan-
de l'embouchure du Bas-Rhin, il falloit fonger à laconfervation de lapoin- J,0^fur
te de Schenckenfchans & du Botterdyck, foit par manière de coupure,
ou en travaillant à la féconde embouchure : Que le dit Confeil régardoiù
les moïens propofés par le Mémoire joint à cette Lettre comme indifpen-
fablement neceflaires pour la confervation de Schenckenfchans & du Bot-
terdyck, mais qu'il fe trouvoit en même tems obligé de dire, qu'il ne
pouvoit pas donner ordre de les mettre en œuvre, puifque les Provin-
ces , qui ont été taxées fur l'état de guerre pour l'entretien du Fafcmage
deSchenkenfchans, n'avoient accepté & paie que très lentement les aéles
de réquifition qu'on leur avoit dépêché dans ces dernières années fur cet
Article , & que jufqu'ici elles n'avoient fourni que iyoo. Florins fur
une Somme de 9803 - 4 - 7. que le Confeil avoit avancé fur des pro-
mefTes préalables de rembourfement, & qu'elles paroifîbient peu portées
à fournir d'avantage fur le même pied , tant que les délibérations fur les
réparations des rivières refterioent dans l'incertitude préfente ; de forte
que le dit Confeil ne fauroit faire autrement que de porter le dit Mémoi-
re à la connohTance & délibération de LL. HH. PP. Surquoi aïant été
délibéré, il a été trouvé bon & arrêté, qu'il fera envoie Copie de la dite
Lettre & du Mémoire y joint aux Srs. Etats des Provinces de Gueldre,.
d'Utrecht , & d'Overylîel , lefquelles font mifes fur l'Etat de Guerre pour
une Somme deftinée à l'entretien du Fafcinage de Schenckenfchans, &
qu'elles feront priées d'envoïer au comptoir du Receveur gênerai chacu-
ne quatre années de la dite Somme en diminution de ce qu'elles font en
arrière, afin que les Ouvrages neceffaires à la confervation de la pointe
de Schenckenfchans & du Botterdyck puifTent être commencez, & de
faire le dit fournifTement au plutôt, vit que le branchage neceflaire doit
éxxQ acheté dès à préfent, & ne peut fe trouver en Eté,
L.1 | &tf*-
a7o MEMOIRES, NEGOTIATîONS, TRAITEZ, ET
Affaires Réfolution des Etats-Généraux , touchant le Confentement de la
Dv/Snces°" Hollande à la Pétition de deux Millions , £•? exigeant celui
Unies- des autres Provinces ; du Lundi 3 1 . Janvier 1 70 1 .
Réfolu
tion tou
Les Srs. Députez de la Province de Hollande & Weilfrife ont porté k
l'Aflemblée, & y fait lire, laRéfolution des Seign. Etats leurs Prin-
chant 2 cipaux , par laquelle Elle confent à la Pétition de deux Millions pour
Millions. p0urvoir ies Magazins aux Frontières de l'Etat, & l'Etape des Magazins,
fuivant la teneur de la Réfolution ci-jointe.
Extrait des Réjolutions des Seign. Etats de Hollande £5? de
Weflfrife , prifes dans VAffemblée de LL. NN. & Gr.
PP. le Jeudi 1 3. Janvier 1701.
Aï a nt été délibéré par réfomption fur la Pétition formée par le Confeil
d'Etat pour la Somme de deux Millions de florins deftinée à pourvoir
les Magazins fur les Frontières de cet Etat , & l'Etape des Magazins , infé-
rée dans les Réfolutions du 7. du courant, les Srs. de la NobleiTe, de même que
les Villes Refpe&ives , au nom & de la part des Bourguemaîtres & Regens
defdites Villes, ont confenti & acordé, comme LL. NN &GG.PP. con-
fentent & acordent, par la préfente, la dite Pétition de deux Millions pour
être emploïez à pourvoir les dits Magazins , ôç à nul autre ufage, ce
qui doit être déclaré à la Généralité.
Sur quoi aiant été délibéré, il a été trouvé bon & arrêté, de prier les
Srs. Députez des autres Provinces, dont le confentement n'a pas encore
paru, d'infilter auprès des Seign. Etats leurs Principaux, afin qu'ils veuil-
lent pareillement l'envoïer au plutôt ici à l'AfTemblée.
Réfolution des Etats-Généraux , pour envoler à leur Mini [Ire en
Ejpagne leurs Réjolutions touchant la Paix, déjà envolée à
leur Miniflre en France; du Mardi 1. Février 1701.
Rcfoiu- ÂPRES 4e mûres Délibérations, il a été trouvé bon & arrêté, que les
tion tou- Fi Réfolutions de LL. H H. PP. du if & 29. du paiTé, contenantes les ordres
chant la donnez auSr. de Heemskerck AmbalTadeur de l'Etat à la Cour du Roi de
tion des ^rance' Pour témoigner combien LL. HI 1. PP. font portées à la Confervation
E. G. à la ^e 'a ^a^x & de ^a Tranquillité publique , & pour offrir une Conférence
Paix. afin d'y traiter fur les moïens qu'on pouroit trouver pour parvenir à ce
but falutaire, feront envoïées au Sr. de Schoneberg chargé des Afaires de
l'Etat à la Cour d'Efpagne , pour lui fervir d'Inftru&ion , & pour qu'il
en fade un ufage convenable , fur-tout contre le bruit courant , en cas
qu'il
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 1. i7t
qu'il foit aufli répandu là comme ailleurs, q^eLL. HH. PR defiroient la guer-
re, & pouraffurer au contraire, par-tout où il poura être de quelque utili-
té, de leur fincere inclination pour là Paix & la Tranquillité publique.
affaires
des Pro-
vinces-
Unies.
Réfolution des Etats-Généraux touchant les faux Bruits répandus
de leur Bifpoftiïon à la Guerre ; du Mardi i . Février 1 70 1 .
Apre' s de mûres Délibérations, il a été trouvé bon & arrêté d'écrire au ^utrc fur
Réfident Hulft, que LL.HH.PP. ont appris avec chagrin le bruit ré- lemêms
pandu par-tout, & particulièrement aux Pais-Bas Efpagnols, comme fi Elles SuJct-
étoient portéesàla Guerre, & la defiroient. Que LL.HH.PP. ne fauroient
régarder ce bruit que comme femé par des Perfonnes mal-intentionées pour
l'Etat, vu que LL.HH.PP. abhorrent entièrement la Guerre, & ne foûhaitent
rien plus que la confervation de la Paix & de la Tranquillité publique ,
étant de l'intérêt de l'Etat d'en pouvoir jouir long-tems avec une feureté
raifonable. Que pour ces raifons , lui Réiident doit tacher à obvier a ce
bruit, & témoigner par-tout où il poura être de quelque utilité la lincè-
re intention de LL. HH. PP. pour la confervation de la Paix & de la
Tranquillité publique ; & qu'il fera envoie audit Réfident Copie des Ré-
folutions de LL. HH. PP. du ij. & 29. du paffé, pour lui fervir d'Initru-
érion , & pour qu'il en fafle un ufage convenable.
Pétition du Confeil d'Etat 5 touchant le Paiement de la Flotte,
du 21 Février 1701.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
Nous avons préfenté dépuis peu à VV.HH. PP.furcequ'Elles avoient
crû à propos pour pluileurs raifons, & pour le bien Public, d'équi-
per vers le Printems prochain douze VaiiTeaux de Guerre avec leurs Fré-
gates & Brûlots, une Pétition des deniers neceiTaires pour cet Armement;
mais , comme du depuis les Affaires de l'Europe ont pris une face qui a
fait juger necelTaire à VV.HH. PP. pour affermir d'autant plus la fureté de
l'Etat par Mer, & pour affùrer les Fleuves & Rivières du Pais, d'augmen-
ter ledit Armement en nombre , équipage , & pièces de Canon des Vaif-
feaux de Guerre, comme aufli en Frégates, Brûlots, & Galiotes à Bom-
bes, avec une quantité convenable de VaiiTeaux à bas-bord, & qu'EUes
nous ont prié par leur Réfolution du 17. du courant de former une Pétition
des deniers indifpenfablement necefTaires pour cet effet, nous avons crû
conforme aux intentions de VV.HH. PP. que l'Efcadrequi doit fervir fur
Mer confifte en VaiiTeaux de ligne, favoir troi^ de po. pièces de Canon
&
Pétition
du Conf.
d'Et. tou-
chant la
Flotte.
iyi MEMOIRES , NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
Amisis & foo. hommes d'équipage, fix de 72. pièces de Canon & 2,7$-. Hom«
forte que l'Equipage des dics 24. VaifTeauxde Guerre, fix Frégates ,& au-
tant de Brûlots fera en tout 842 y- Hommes, qui comptez par tête à 36.
florins par mois , pour folde , penfion , & ce qui s'ufe , coûteront chaque mois
3033oo.florins^à quoi il faut encore ajouter fix Galiotes à Bombes qui coû-
teront chacune ss°- A- de louage par mois, ce qui montera à une fom-
me de 3300.fl. Les Bâtimens à bas-bord , qui doivent fervir à la defenfe
des fleuves & rivières du Païs, ayant été mis par la Réfolution de VV.HH.
PP. du 17. d. c. au nombre de douze ; & l'Etat pouvant, fuivant l'avis
des Députez des Amirautés, mieux trouver fon compte en les achetanc
qu'en les louant, l'achat desdits douze Bâtimens à bas-bord coûtera 72000.
fl. & chacun devant être équipé de fo. Hommes , fait pour les douze 600.
Hommes , comptez par tête à 40. fl. par mois pour folde , penfion des
Officiers & des Matelots , y compris ce qui s'ufe, cela montera en tout à
une fomme 24000. fl. par mois.
Et comme VV. HH. PP. ont jugé pour plufieurs bonnes raifons, que lef.
dits équipages devroient être engagés du moins pour huit mois , celui de
vingt & quatre
VaîfTeaux de Guerre, Frégates, & Brûlots fera en huit mois, fl. 2426400
L'équipage des Bâtimens à bas-bord ------- ip2ooo
L'achat des dits Bâtimens ---------- 72000
Et le louage des Galiotes pour 8. mois ------ 26400
fomme totale 2.7 16800
De cette fomme devroit être rabatu îe
montant de la Pétition pour 12. VahTeaux
de Guerre en date du 12. du courant, fi
les Provinces y avoient confenti, lequel
faifant --------------- 943200
il relie encore - - fl. 1773600
Nous envoyons donc à VV.HII.PP., conformément à leur volonté, cette
Pétition pour la dite fomme de 1773600. fl. , en les priant de vouloir la dé-
pécher au plutôt aux Provinces, afin qu'elles envoient fans perte de tems
leur confentement là-deffus , aufli-bien que fur notre précédente Pétition
du 12. du courant de la fomme de fl 043200. pour autant que quelques-uns
àes Confederez pouroient n'y avoir pas encore confenti, & que leur con-
fentement foit apuïé par des fourniiïemens promts & effectifs. Nous ne
doutons pas que les Seigneurs Etats des Provinces ne foient autant con-
vaincus que VV.HII.PP., & nous, de la dernière necefiité qu'il y a dans la
con-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC I. i7
«
conjoncture préfente de fonger fans délai à la fureté de l'Etat & de fes Affaires
habitans, tant par Mer que par Terre, de même qu'à la defenfe des Fleu- DES Pr°-
ves & Rivières du Pais , vu que le Printems efl fi proche , & que les A- u^n?"
mirautés doivent courageufement mettre les fers au feu, fi l'Armement ci- -
deffus mentioné doit être de quelqu'utilité, &û conformément au falutai-
re butdeVV.HH. PP. l'Etat doit être gardé & défendu par-là par eau j que
par confequent lesdits Collèges des Amirautés doivent être mis en état d'y
travailler, ce qui ne fauroit fe faire que par le prompt confentement, &
les fournifTemens réels des confederez; lefquels nous nous trouvons obligez
de preffer , d'autant plus que plufieurs Provinces ont été dépuis quelques
années fort tardives à ce llijet, ce qui a caufé de grands embarras aux A-
mirautés refpeélives.
Fait à la Haie ce 21. de Fevr. 1701.
Réfolution des Etats-Généraux , en contenant deux des Etats de
Zélande touchant leur Contingent des deux Millions
demandez; du Samedi 26. Février 1701,
Les Sieurs Députez de la Province de Zelande ont porté à l'Aflem- Réfolu-
blée, & y ont fait lire, les Réfolutions des Sgneurs Etats leurs Principaux, tion tou'
par lefquelles ils confentent aux Pétitions de deux millions pour pour- ^ant le!
voir les Magazins, de la Négociation de deux autres millions pour les For- Misons
tifications, de 72,5717. pour apareiller 18. VahTeaux nouvellement con-
ftruks, & de 949500. fl. pour la conftruction de 12. VaifTeaux de Guerre.
Lefquelles Réfolutions font ci-jointes.
Extrait du Regître des Réfolutions de LL. NN. PP. les Seigneurs
Etats de Zélande ; du 2. Février 1701.
Aiant été délibéré fur la Pétition formée par le Confeil d'Etat pour
une fomme de deux millions deflinée à pourvoir les Magazins fur
les Frontières de cet Etat, & l'Etape des Magazins, tous les Membres ont
unanimement confenti à la dite Pétition de z. millions, pour être em-
ploïez à cet ufage & à nul autre, à quoi cette Province fournira de tems
à autre fa quote-part en fe réglant précifement fur l'exemple des autres
Confederez, fans en faire ni plus ni moins : le tout dans la ferme atten-
te que les Frontières de cette Province & les Quartiers adjacens en feront
fiififamment pourvus. Aiant enfuite été délibéré fur la Lettre de LL.HH.PP.
du 12. du paffé, pour en accompagner une du Confeil d'Etat des Pro-
ZomeXL Mm vinces-
*74 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires vinces-Unies , par laquelle on propofe une nouvelle Négociation de deux
des i'Ho- millions fur le même fonds que \qs 4. millions dernièrement rembourfez
vinces- avoient ^ negotiez dans l'année 1688. afin d'achever les Fortifications,
1 vu que la plufpart des places frontières ne fe trouvent pas en bon état de
defenfe j & les Membres aïant réfléchi que depuis les dernières Délibéra-
tions fur les Fortifications la face des Affaires a beaucoup changé, & que
du depuis cette Province fe trouve allez à l'extrémité des Frontières pour
pouvoir devenir la plus expofée, ils ont jugé, que pour cette raifbn il
eft indifpenfablement neceffaire de demander auifi de ce fonds la Fortifi-
cation de leurs Frontières, & en particulier de la Ville de Sluys, & d'au-
tres Places en Flandres, qui font la fureté de cette Province ; & fe fiant
à cet égard entièrement à l'équité de leurs Confederez, ils ont, après de
mures Délibérations, unaniment trouvé oon de conîentir que lëÇonfei! d'E-
tat refte autorifé, s'il fe trouve que le fonds affecté pour les Fortifications
a effectivement été emploie & depenfé en conformité, & pas autrement,
à negotier encore pour la même fin une fomme de deux millions fur le
même fonds que les premiers 4. millions ont été négociez, le tout fous les
Reftrictions comprifesdans JaRéfolutiondeLL. HH. PP. du 18.J ui'Iet ic>88.
& fous les mêmes engagemens des Provinces jufqu'à ce qu'outre les 300000.fl.
emploiez aux Fortifications cette Négociation foit entièrement rembour-
fée • Que la dite Négociation de 2. millions de florins ne fe doit pas fai-
re tout à la fois , mais de tems à autre , &à mefure que les ouvrages feront
entrepris & que les païemens feront neceffaires ; comme auffi que le rem-
bourfement fera continué fur le même pied à raifon de 2000. h1, par an les
revenus de la Généralité. Qu'outre cela , la Province de Frifè fera priée
de fournir au Comptoir General ce qu'elle fera trouvée devoir encore fur
fa quote-part pour l'Article des Fortifications jufqu'au ijr, Juillet 1688. où
il fut refolu de negotier une fomme de 4. millions fans le concours de la
Province de Frife.
Ayant auffi été délibéré fur une autre Lettre du 27. Janvier, & en mê-
me tems fur la Pétition faite par le Confeil d'Etat pour une fomme de
72^17. fl. deftinée à appareiller 13. Vaiffeaux de Guerre, il a été trou-
vé bon d'un cdnfehtemerit unanime, que lefdits jzffiy. û. pourront être
negotiés par la Généralité fur le même pied, & à la charge des Provinces
qui en paieront double intérêt, tout comme il a été fait ci-devant pour la
conftruction desdits Vaiffeaux & qu'il fera fourni de même de ce fonds à
chaque Collège des Amirautés fon contingent.
Extrait du Regître des Rêjolutions de LL. NN. PP. les Seigneurs
Etats des Provinces de Zêlande \ du 9. Février 1701.
LU à l' Affemblée la Lettre fecrete de LL. HH. PP. en date de la Haïe du
y. du courant, contenant entre autres des infïances réitérées pour
confentir à la conitruclion de 12. Vaiffeaux, & aïant été délibéré enfuite
par
Unies.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. i1$
par réfomption fur la Pétition du Confeil d'Etat pour une fomme 5j45tfoo.fi. Affairm
neceffaire pour cet effet , les Villes refpeêtives ont d'un confentement nES Pk°-
unanime accordé la dite conftruétion de 12. Vaiffeaux de Guerre, moïen-
nant que les deniers, qui doivent être negotiez par la Généralité, le fe-
ront pareillement fur le même pied, & à la charge des Provinces contre
un double intérêt, tant comme il a été fait à la précédente conftruclion ,
afinque chaque Collège des Amirautés aïant eu de ce fond fon contin-
gent, ils puiilent commencer à y faire travailler.
Les Seigneurs Députez de Zelande ont auflî confenti , au nom & de la
part des Seigneurs Etats leurs Principaux à la Pétition de$>43zoo. fl. pour
l'Armement extraordinaire de 12. Vaiffeaux de Guerre, & ont déclaré en
même tems, que lefdits Seigneurs Etats étoient prêts de fournir de tems à
autre leur quote-part à cette Pétition & à toutes les autres fommes confen-
ties pour le Bien Public, & particulièrement pour les Affaires de la Mari-
ne ; mais , qu'en cas que les autres Provinces ne fourniffent pas pareille-
ment leur contingent à ce dernier article, lefdits Seigneurs Etats ne pou-
vant pas laiffer la Marine abandonnée , feroient obligez d'en prendre tous
les foins poflibles , mais auflî au contraire de retenir leur quote-part à des
Pétitions pour d'autres objets. Surquoi aïant été délibéré il a été trouvé
bon & arrêté de remettre les proportions ci-deffus entre les mains des Dé-
putez de LL. HH. PP. pour les Affaires de Finances afin de conliderer &
d'examiner tout & d'en faire raport à l'Aflemblée.
Apre' s de mures Délibérations, il a été trouvé bon d'écrire aux Collèges
des Amirautés, que LL. HH. PP. font informées, que fur des Paffeports , qui
ne doivent valoir que dans le Pais, plufieurs chevaux font tranfportez fur
les rivières en des places frontières ou autres, d'où ils peuvent être menez
facilement hors du Païs, de forte que non obflant le Placard de LL. HH. PP.
quantité de chevaux fortent du Païs. Que pareillement plufieurs mar~
chandifes, dont la fortie eit défendue dans le dernier Placard de LL. HH. PP.
font tranfportées de la même manière hors du Païs fous prétexte & à la
faveur desdits Paffeports, valables feulement dans le Païs. Que pour ces
raifons les Collèges des Amirautés doivent mettre de tels ordres, & pren-
dre toutes les précautions imaginables, afin que les Placards de LL.HH.PP.
contre la fortie de Chevaux & de Marchandifes de contrebande y fpeci-
fiées foient exécutez duëment & exactement, tant à l'égard des chevaux
qu'il n'en paffe point, à la faveur des Paffeports qui ne doivent valoir que
dans l'étendue du Païs, aux Frontières & en des Places d'où ils peuvent
être aifément menez hors du Païs, fur-tout point de chevaux de Maqui-
gnons; que par raport aux Marchandifes fur la fortie des quelles on doic
veiller avec une application particulière.
Mm 2 Lifte
z76 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AFFAIRES
des Pro- £jfle fles Yaiffeaux de Guerre qu'on prépare a V Amirauté d^AmJ-
umes." terdam; en Février 1701.
VairTeaux
d'Amf-
terdam.
Pièces de
Capitaines Vaisseaux Canon
1. Allemonde, Amiral - - L'Union - - - - 92 -
z. WafTenaer, Contre-Amiral Catwick fur Meer - - 72 -
3. Lynflager ----- Le Dôme d'Utrecht - 64 -
4. Sommelsdyck - - - - Harlem ----- ^4 -
y. Van den Berg - - - Leyde ----- ^4 -
6. Teengs ----- Wulverkorft - - - fz -
7. Bodaan ----- Damiaten - - - - 72 -
8. Graaf Le Defenfeur - - 52 -
p. Van der Duiïen - - - Le Flamand - - - $z -
10. Sweerts Ripperda - - - - y 2 -
11. Langenhoven - - - Edam ----- 40 -
12. Czaay Le Grifon - - - - 40 -
12. Van de Bofch - Landfcroon - - - 36 -
14. Braak ------ Anne - - , - - z6 -
if. Jean de Meyer - - - L'Epervier - - - 24 -
16. Schaap - - - - - Le Milan - - - - 24 -
1 7. Van der Wayen - - - L'Aigle - - - - 24 -
18. Toi Le Faucon - - - 24 -
2. BRULOTS
Capitaines Vaisseaux.
19. De Jong ----- Le Salamandre
20. Jean Tyfch - - - - La Concorde.
Equi-
page.
Sf°
400
325
3*f
220
220
220
220
220
180
180
150
150
9°
po
9T
9Î
Re'fblu-
tion fur
les Li-
gnes
des
François
à Lillo ,
& leur
Entrée à
Oude-
*arde.
Réfolution des Etats-Généraux touchant les Lignes des François-
vers Lillo , £5? leur Entrée dans Oudenarde ; avec la Lettre
du Lieutenant-Colonel Sikers à ce Sujet , du
Lundi 27. Février 1701.
Reçu une Lettre du Confeil d'Etat écrite ici à la Haye le 24. du
courant, laquelle porte, que ledit Confeil n'avoit pu s'empêcher de
donner connoiffance à LL HH.PP. des Avis qu'il avoit du Sergeant major
Paul Brunet de Rochebrune commandant préfentement à Lillo & dans
les Forts Voifins , que les François avoient tiré une Ligne fur la Digue qui
s'étend depuis le fort de Parel jufqu'à Calloshoek: que la Ligne paiTant près
des moulins de Calloo étoit à portée du Canon de Liefkenshoek , & qu'il
avoit
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 277
avoit vu lui-même que les piquets étoient fichez pour le retranchement , Affairfs
& qu'on coupoit déjà les gazons pour le Fort qui devoit être bâti à Cal- des Pro-
ïooshoek. Surquoi aïant été délibéré , il a été trouvé bon de remettre copie vincks-
de la dite Lettre entre les mains des Députez de LL. HH. PP. pour les Unies-
Affaires Militaires , pour voir & examiner tout , & en faire Raport ici à
l'Affemblée.
Lettre du Sieur Colonel Siekers.
J'ai crû de mon devoir de rendre compte à W. MIL PP. que ce matin
à la pointe du jour il vint devant mon lit un Lieutenant- Colonel de la
Cavallerie Efpagnole, me donnant part que dans ce moment les François
entreroient dans la ville: que cela ne devoit pas m'efraïer, m'afTùrant de
même que tous mes Officiers que nous pourrions refier ici paifiblement
jufqu'à ce que l'Etat nous réclamât. Je fautai auffi-tôt du lit , & me rendis
avec mon Major à la Maifon Gouverneur, voïant en chemin faifant entrer
les Troupes Françoifes par la porte de Tournay, où les Efpagnoles fai-
foient la garde. Venant chez le Gouverneur je lui fis mes plaintes de
cette manière indue d'agir > mais, il me donna pour réponfe, que cela s'étoit
fait par ordre de l'Electeur, & m'affùra en fon nom, que nous pourions
vivre en bons amis enfemble jufqu'au tems que nous ferions réclamez par
fEiat, & que je devois ordonner à mes Soldats, comme il a auffi été
publié ici, qu'on ne devoit pas fe molefter l'un l'autre, ni fe regarder de
travers. Autant qu'il m'a paru, j'ai vu fur la grande Place deux Regimens
de Cavalerie & deux d'Infanterie. J'ai d'abord dépêché un Officier en
Courier à Bruxelles, pour donner part de tout ceci à Mr. le Maréchal de
Camp Heukelom. Ce qui efl arrivé ici s'eft auffi pratiqué ce même jour,
& dans la même heure, par tous les Païs-Bas Efpagnols -, à ce que le Gou-
verneur m'a dit.
Oudenarde le 6. Février. 1701.
Réfohtion de LL. HH. PP. les Seigneurs Etats-Generaux des Provin-
ces-Unies des Pais -Bas > pour écrire au Roi d"* Angleter-
re ; du Samedi 12. Mars 1701.
eçu deux Relations du Sr. Geldennalfen, Envoie Extraordinaire de Réfoîa-
LL. HH. PP. à la Cour du Roi de la Grande-Bretagne, écrites à tionpour
Londres le 4. & 8- du courant, lefquelles, entre plufieurs autres Avis,, con- ■^nrf>,au
tiennent auffî que la Chambre - Baffe avoit réfolu ncmïne contradicente de g]eterre/
prier S. M. par Addreffe, qu'il lui plaife d'entrer avec LL. HH. PP. & au-
tres Potentats dans les Négociations les plus efficaces pour conduire à la
fureté des Royaumes & Etats de S. M. & de LL.HILPP. comme auffi
Mm 3 à la
2.78 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires à la confervation de la paix de l'Europe , afïïirant S. M. de toute affilia n-
ues Peo- ce conformément au l'raité conclu avec LL. HH. PP. le 3. (13.) Mars
Y*NCES" 1678 i à quoi eil auffi ajoutée la Réponfe de S. M. à la dite Adreiîe. Sur-
IL quoi aiant été délibéré, il a été trouvé bon & arrêté, de témoigner à S. M.
par une Lettre en termes honnêtes, que LL. HH. PP. ont appris avec
beaucoup de plaifir, par les dites Relations, l'attention gratieufe qu'il a plû
à S. M. de faire au Mémoire préfenté par le Sr. de Geldermalfen de la part
de LL. HH. PP. fur la conjoncture préfente, de même que la promte &u-
nanime Réfolution de la Chambre des Communes, à qui S. M. avoit trou-
vé à propos de communiquer le dit Mémoire , & l'Adrefle qu'elle a pré-
fentée en conformité à S. M. Que LL.HH.PP. connoiflant la profonde
fagelTe de S. M., & ayant tant de preuves de fon amitié & affection pour
l'État , ne fauroient douter que les fentimens de S. M. ne foient à cet
égard entièrement conformes à ceux de fon Peuple. Que LL. HH. PP.
l'ont déjà remarqué par la Réponfe fur ladite Adrefle , & qu'Elles ont trou-
vé l'une & l'autre fi avantageufe pour les intérêts communs, fi obligean-
tes à leur égard, & fi ju fies & genereufes par raport aux Traités, qu'El-
les n'ont pu s'empêcher de témoigner à S. M. fans aucun délai le conten-
tement que cela leur a caufé, & la réconnoiffance qu'Elles en conferve-
ront toujours. Que LL. HH.PP. ont regardé depuis long-tems la bonne
intelligence & une union étroite entre les deux Nations comme neceflai-
res pour leur fureté réciproque & pour la confervation de leur Liberté &
Religion : que, dans la fituation préfente des Affaires , Elles jugent cette
bonne harmonie & liaifon encore plus necefïaire que jamais ; & que
pour cette raifon Elles ont crû, & croient encore, que leurs intérêts font
inféparables de ceux de S. M. & de fes Royaumes & Etats; & que LL.
HH. PP. , animées comme Elles font préfentement par la favorable difpo-
fition de S. M. & de fon Parlement, ne défifleront en aucune manière
des ces fentimens. Qu 'Elles efpérent que dans la Négociation à entamer,
avec S. M. on pourra trouver des moyens propres à affurer leur fureté
réciproque & la confervation de la Paix dans l'Europe, étant perfuadées
que S. M. ne fe propofe d'autre but dans cette Affaire. Que LL. HH. PP.
remercient S. M. de ce qu'il lui a plû d'envoier des Ordres & Inflruclions
à fon Miniflre fur ce fujet, & qu'Elles afTurent encore, que leur intention
efl de ne faire la moindre démarche dans cette importante Affaire que de
concert & conjointement avec S. M. Qu'Elle peut compter entièrement
ià-deffus, de même que fur la- bonne-foi avec laquelle LL. HH. PP. fatis-
feront promptement, en cas de befoin , aux obligations des Traités &
Alliances, par lefquelles Elles ont l'honneur d'être liées avec S. M. Que
cette Lettre, avec une Copie d'icelle,fera envoiée audit Sr. de Geldermal-
fen , pour remettre l'Original à S. M. & donner en même tems à S. M.
& à tous ceux où il fera convenable, des affurances de la fincerité des
fentimens & intentions de LL.HH.PP. à ce fujet.
Êêfolu-
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. ï. 279
Affaîtfs
Réfolution des Etats - Généraux touchant la Flotte ; du UES l'-°-
Lundi 4.. Avril 1701. Uot«."
Flotte.
Apres de mûres Délibérations , il a été trouvé bon d'écrire au Roi de Réfoiu-
la Grande-Bretagne, que S. M. comme Amiral-General de l'Etat tinn to^-
avant aiîigné à Dunes le rendez- vous des VaiiTeaux que Sa République 5jantla
tait équiper, LL. 1111. Pi . avoient ete informées, tant par le Lieutenant-
Amiral d'Almonde que par d'autres , que le fond elt fort pierreux à Du-
nes , & que les ancres de l'Etat plus larges que celles des Anglois n'y
fauroient prendre, par où lefdits VaiiTeaux feroient expofez à de grands
dangers dans cette faifon , courant rifque à tout moment de perdre leurs
ancres, il fera remisa la corifideration de S. M. fi telle ne trouveroit pas à
propos de faire afiigner ledit rendez -vous à la Baye de Ste. Hélène au
lieu de Dunes : Qu'en attendant LL.HH. PP. ordonneront aux Amirau-
tés d'envoier les VaiiTeaux qui font prêts à Dunes , pour y attendre les
Ordres de S. M. Qu'il fera fait part de cette Réfolution aux Collèges ref-
pectifs des Amirautez, & qu'il leur fera écrit de donner ordre aux Vaif-
feaux que chacun a déjà équipé , pour Ion contingent à l'Armement ex-
traordinaire, de partir au premier vent pour Dunes, & d'y attendre les
ordres de S. M. Que les dites Amirautés doivent outre cela faire tous
leurs devoirs, afin que les VaiiTeaux, qui ne font pas encore prêts pour
ledit Armement , foient pareillemeut équipez au plutôt & envoiez fans
délai au rendez- vous ailîgné : Qu'elles doivent rendre compte à LL. H H.
PP. de tout ce qu'elles feront à cet égard, comme auifi de l'état où fe
trouvent actuellement les VaiiTeaux qu'elles équipent, & quand ils pour-
ront tous être prêts. Qu'il fera auffi ordonné aux dites Amirautés de pré-
parer, outre cet Armement extraordinaire, encore 12. VaiiTeaux de guerre,
pour pouvoir être équipez & mis en mer au premier ordre de LL.HH.
PP. Et enfin, que les dites Amirautés doivent faire raport à LL.HH.
PP. fi, & quand, les Frégates équipées outre l'Armement ordinaire des
Revenus courans de chaque Amirauté ont été envoiées au rendez-vous
aux Wklingues \ & , au cas qu'elles ne foient pas encore parties , les dites A-
mirautés doivent avoir foin de les faire mettre à la voile fans aucun délai.
Après de mures Délibérations, il a été trouvé bon & arrêté, que le Con-
tre-Amiral den Boer , qui fe trouve préfentement aux TViellngues , fera
chargé, comme il l'eft par la préfente , de veiller avec les VaiiTeaux ou
Frégates qui y font fous fon commandement , ou qui lui feront encore
envoiez, for tout ce qui s'y paflera; &, en cas que contre toute attente
on entreprit quelques hoflilités contre l'Etat ou fi^s habitans, de. s'y opo-
fer& de les détourner autant qu'il elt poflible, fe fervant pour cet effet des
Soldats & Equipages, & de fe conformer au relie exactement aux or-
dres qui lui feront envoyez par LL.HH. PP. ou par S. M. Britannique
comme Amiral- General.
Réfolu-
23o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires
dbs Pro-
vinces-
Unies.
Réfolu-
tion en
Réponfe
à Stanho*
pe.
Réfolution des Etats - Généraux fur le Mémoire de l'Envoyé Stan°
hope 3 avec ce Mémoire ; du Vendredi 22. Avril 1701.
Les Srs. d'Eflen & autres Députez de LL. HH.PP. pour les Affaires
Etrangères, ayant été en Conférence conformément à leur Réfolution
CommiiToriaîe du 21. Décembre avec le Sr. Stanhope Envoyé Extraordi-
naire de S. M. le Roi de la Grande-Bretagne, ont raporté à l'Aflemblée,
que ledit Sr. Stanhope leur avoit non -feulement déclaré de bouche, mais
aufli délivré par écrit , ce qui eft contenu dans le Mémoire inféré ici.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
LE foufllgné Envoyé Extraordinaire du Roi de la Grande - Bretagne
aiant informé Sa Majelté de ce qui s'eft palTé à la dernière Conféren-
ce qu'il a eue avec lesDéputez de VV. HH.PP. & Sa Majefté ayant auiîi re-
çu les Réfolutions de VV. HH.PP. du 4. Avril par raport aux fecours qu'el-
les ont de nouveau requis de Sa Majefté en exécution du Traité de 167 {.
Le dit Envoyé a ordre de faire favoir à VV. HH. PP. que Sa Majefté eft
non- feulement réfolue de fatisfaire aux Conditions dudit Traité, confor-
mément aux defirs de fes bons & ridelles Sujets alTemblez en Parlement,
qui concourent unanimement avec Elle dans ce jufte deffein , mais aufîî
d'entrer dans tels autres moyens qui feront trouvez convenables pour
procurer leur fureté 5 pour laquelle fin ledit Envoyé a ordre de continuer
à agir de concert avec VV. HH.PP. dans les Négociations qui peuvent
y conduire de la manière qui fera jugée la plus efficace , & d'affurer W.
HH.PP. que toutes les mefures qui feront prifes en Angleterre pour la fu-
reté commune, leur feront communiquées de tems entems, comme elles
ont été jufqu'à-préfent. A la Haye ce 11. Avril 1701.
A. Stanhope.
Réfolution des Etats-Généraux fur le même Mémoire ; du Samedi
23. Avril 1701.
Autre de f^Ul ^e Report des S r s. d'Eflen & autres Députez de LL. HH.PP. pour
même. V^/ les Affaires Etrangères, qui en confequence & pour fatisfaire à leur
Réfolution Commiflariale du 22. du courant , ont examiné le Mémoire du Sr,
Stanhope Envoïé Extraordinaire de Sa Majefté Britannique, en Réponfe à
leurRefolutiondu8.de ce mois, faifant favoir àLL.HH.PP.que Sa Majefté
étoit réfolue de fatisfaire, non -feulement aux Conditions du Traité de
1677 & 1678. mais auffi d'entrer dans tels autres moïens qui feront trou-
vez convenables pour procurer leur fureté, le tout déduit plus ample-
ment
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 281
ment dans ledit Mémoire, inféré dans le Régître des Réfoîutions d'hier. Affaire*
Surquoi aiant été délibéré, il a été trouvé bon & arrêté, de témoignera DFS I>H°-
à S. M. Britannique par Lettre , que fadite Réfolution , iî juite & li con- JJnijmu
forme à ce que LL. MIL PP. avoient déliré, leur a caufé une grande joie & — "_
un contentement particulier , principalement dans un tems où elles voient
la manière plus qu'indiferente dont on traite les Propofitions qu'elles onc
faites conjointement avec Sa Majefté, peur la confervation de la Paix &
de leur fureté commune, & qu'on augmente de jour en jour les troupes,
& les préparatifs de Guerre fur leur Frontières , ce qui ne peut que leur
cauferde l'apréhenfion. Que LL.HH. PP. ont toujours trop compté fur l'ami-
tié & affection de S. M. pour l'Etat , autant que fur fon équité & fidélité
naturelle avec lefquelles Elle eiï acoûiumée de fatisfaire à fes engage-
mens , pour avoir jamais pu douter que quand le cas- écherrait à. M.
n'exécutât exactement les Conditions de l'Alliance qu'elles ont eu l'hon-
neur de conclure avec S. M.; mais que les nouvelles affûrances qu'il a plu
à S. M. de leur donner tout récemment leur fert de nouveaux gages d'au-
tant plus fùrs & agréables que ces aflurances font fondées fur les fenti-
mens de bons & fidèles fujets de S. M. afTemblez en Parlement, & fur
leur concours unanime pour le même but; par où LL.HH. PP. fe trouvent
confirmées dans la confiance & dans l'efperance , qu'elles ont que le fc-
cours demandé ne tardera point , & qu'elles jouiront toutes les fois que la
neceiTité l'exige de l'entier effet & acompliffement du Traité. Que LL. HIÏ.
PP. ont été touchées fi fenfiblement parla, qu'elles fe trouvent obligées
d'en témoigner leur fincère reconnoiffance à S. M. & de l'en remercier
du fond de leur cœur, en l'afftirant de nouveau de la manière la plus for-
te, comme elles ont déjà fait ci-devant, que de leur côté elles exécute—
ront pareillement en tout tems avec fidélité ledit Traité, & s'y conforme-
meront religieufement. Qu'elles font entièrement perfuadées que leurs
intérêts par raport à la confervation de la Paix& de la Sûreté & maintien
de leur Liberté & Religion , font fi étroitement liez avec ceux de S. M.
& de fes Roïaumes & Etats , qu'ils en font tout à fait infeparables. Et
comme Elles voient que S. M. prend l'intérêt de l'Etat tant à cœur, elles
ne fe bifferont non plus jamais détacher de ceux de S. M. aïant refolû fur
ce fondement de ne prendre aucunes mefures dans la Négociation enta-
mée fur ce fujèt, que de concert avec S. M. de même qu'ells ont fait jus-
qu'à préfent; fâchant que S. M. conjointement avec LL. HH. PP. n'a d'autre
but que le maintien de la tranquillité publique & de leur fureté réciproque.
Que cette Lettre avec Copie d'icelle fera envoiée au Sr. de Geldermal-
fen Envoie Extr. de LL.HH. PP. à la Cour Brit. pour rémettre l'Original à
à S. M. Et les Srs.d'Effen& autres Députez de LL.HH. PP. pour les Affai-
res Etrangères font requis par la préfente , de faire part du contenu de
cette Réfolution au Sr. Stanhope, pour fervir de Réponfeà fon Mémoire
ci-deffus mentionné , & de remercier en même tems le dit Miniftre des
bons Offices qu'il a emploies à cet égard , en le priant de vouloir bien
Tome XL. Nn con-
2S2 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires continuer à apuïer leurs inilances afin que le fecours demandé foit envoie
DES PkO- icj au plutôt.
VINCF.S
Unies.
vaux.
— — _^__ »
Rejoint ion des Etats-Généraux pour conférer avec le Comte ctA-
vauXy du Jeudi 12. Mai 1701.
Réfolu- <f~"\Ul ^e RaPort ^es Srs. de Gent & autres Députez de LL. MIL PP. pour
tionpour V-/ les Affaires Etrangères, qui en confequence de ieur Réfolution com-
conféret mifforiale du 10. d. c. ont examiné le Mémoire du Sr. Comte d'Avaux
Hï- ~ AmbaiT. Extr. du Roi de France , tendant à reprendre les Conférences con-
jointement avec le Miniftre -Anglois , fin" la confervation de la paix & l'é-
tabliffement de la fureté de l'Etat, les dits Députez aïant été en Confé-
rence avec le Sr. Stanhope Envoie Extr. de S. M. Britannique fur le con-
tenu du dit Mémoire. Surquoi aïant été délibéré , il a été trouvé bon &
arrêté de repréfenter au Sr. Comte d'Avaux dans une Conférence , que
LL. Mil. PP. ont vu avec plaifir par fon Mémoire les nouveaux témoignages
des fentimens favorables de S. M. le Roi de France pour le maintien
de la tranquillité publique, & qu'Elle a jugé à propos de laiiTer le dit Sr.
Comte encore ici pour réprendre les Conférences. Que LL. HII. PP. y font
portées de leur côté; fouhaitant ardemment qu'on puiflè trouver des
moïens propres & fufifans pour la confervation de la tranquillité en Euro-
pe, & de leur fureté, à quoi elles contribueront tout ce qui dépend d'el-
les. Que LL. HïI.PP. aprennent de plus par le dit Mémoire , qu'il a plu
à S. M. d'aprouver la Réponfe que lui Sr. Comte d'Avaux avuit donné.
auxSrs. Députez deLL. IIH. PP. au fujètde la participation du Sr. Envoie
Extr. de S. M. Brit. aux dites Conférences ; laquelle Réponfe porioit que
lui Sr. Comte d'Avaux pouvoit bien foufrir que l'Envoie d'Angleterre af-
filiât aux Conférences pour apuïer les intérêts de l'Etat, mais non pas
pour parler des Affaires de S. M. Brit. îefquelles dévoient être traitées ail-
leurs. Que LL. III I . PP. en ont fait part au dit Sr. Envoie Extr. de même
que du Mémoire ci-deffus mentioné, mais qu'elles y ont trouvé quelques
difficultez,vû que les Affaires de LL. I III. PP. qui font l'objet de la préfente
Négociation ont toujours été, & ne peuvent encore aêtiiellement être
confédérées par elles , que comme des Affaires qui leur font à tous égards
communes avec S. M. Brit. , & par rapport auxquelles leurs intérêts ne
diferent en rien y que pour ces raifons , elles fe font aufîi engagées à Sa
dite-Majefté par une Lettre du 23 Avril dernier, de laquelle il fera re-
mis copie au Sr. Comte d'Avaux , h ne rien faire dans cette Négociation
que de concert & du confentement de S. M. Brit.; de forte que pour ac-
célérer la dite Négociation LL. Mil. PP. ont jugé neceffaire de prier le Sr.
Comte d'Avaux de vouloir les éclaircir s'il n'eff, pas d'intention de conti-
nuer fur ce pied-là & fur ces fondemens la Négociation avec l'Angle-
terre
RESOLUTIONS. D'ETAT, M. DCC. I. 283
terre & l'Etat. Et les Sieurs deGent & autres Députez de LL. III I. PP. pour Awrun&
les Allai res Etrangères font priez par la préfente d'entrer fur ce que defllis Drs p*°-
en Conférence avec le Sr. Comte d'Avaux, & d'en faire Raport ici à l'Af- y^NCES"
r , , , * UNIES.
1 emblée. ,
Confcntcment des Etais de la Province de Groninguç aux Ar-
ticles fuïv ans; du 23 Mai 1701.
1. A Six Compagnies du Régiment de Reinhardt. Confen-
2. jLjl à Six Nouvelles Compagnies d'Infanterie. tement
x. A Cinq Nouvelles Compagnies de Cavallerie. uro'
4. A la Pétition de yoo. fis.
7. A la Pétition de ce qui efl neceflaire pour mettre l'Armée en Cam-
pagne.
6. Aux deux Regimens de HeiTe-CafTel.
Les Seigneurs de la Ville de Groningue ont confenti.
1. A la première récriie de 13320. hommes, & par confequent à 7.
Nouvelles Compagnies à la charge de la Province , fuivant le premier
Etat extraordinaire de guerre.
2. A la féconde & troifième récriie & levée de 15016. hommes & 72.
Nouvelles Compagnies de Cavalerie, en confequence du fécond Etat ex-
traordinaire de guerre, & outre cela à la levée d'encore deux Compagnies
d'Infanterie & fix de Cavalerie à la charge de la Province.
Sans préjudicierà ceConfentement gênerai , lesSgnrs. delà Ville ont pro-
vifionellement confenti à la levée de (ix Compagnies d'Infanterie & fix
de Cavallerie en conformité du Confentement des Sgnrs. Etats de la dite
Province.
3. A fe charger de fix Compagnies étant encore fur pied de dix Com-
pagnies du Régiment de Reinhard , & des deux Compagnies détâchées
mifes dans les dernières années fur la répartition de cette Province , fans
avoir été acceptez, à condition de n'être point engagées aux arrérages des
dites Compagnies que du jour de la date, & uniquement pour le tems de
la préfente dangereufe fituation des affaires.
4. Non-feulement à la Pétition provifionelle de y 00. fls. pour le paie-
ment des Troupes étrangères, mais aufli à la fuivante de f. 132,2747— : 3— :o.
dans laquelle la première de yoo. fis. efl comprife, fans pourtant s'engager
par-là à la Négociation démandée de fix millions , pour les cas de be-
foin.
5. A f. 749475*-- :6— q:. pour ce qui efl necefTaire à mettre une Armée
en Campagne, à condition que deux Ingénieurs, un Bombardier, & quin-
ze Canoniers foïent païez par la Province feule, à la charge de laquelle
ils feront pareillement portez.
6. A la ratification de la convention faite avec le Landgrave de HefTe-
Caffel fur deux Regimens à prendre au fervice de l'Etat.
Nn 2 7- A.
Affaikes
des Pro-
vinces-
Unies.
284 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
7. À l'Armement de 24. Vaiflfeaux de guerre avec tout ce qui y apar-
tient, & à ^pareillement de iS- Vaiffeaux.
g. A la Négociation du troilième terme pour les arrérages des fraix de
l'Armée & des Magazins de la dernière guerre , moïennant le rabais de ce
qui a déjà été paie.
9. Ils aprouvent la convention faite avec l'Elecleur de Hanovre &
Cell fur un confiderable Corps de Troupes à prendre à la folde de
l'Etat.
10. Ils font toujours de fentiment que les arrérages des Troupes de
Cell mifes dans l'Année 1693. fur la répartition de cette Province , de-
vroient être paies par termes, & que d'abord il leur foit paie 9000. fis.
Réponfe
«lu Quar-
tier
d'Arn-
hem au
Confeil
d'Etat ,
touchant
îe Rhin ,
& l'Iffel.
Extrait du Recés de la Diète ternie h Arnhem , en Reponfe à une
Lettre du Conjeil d'Etat touchant le Rhin £«p rJffel; du
Mardi 24.. Mai 1701.
Eçû & lu une Lettre du Confeil d'Etat des Provinces-Unies des Païs-
Bas , écrite à la Haïe le jp. Décembre , par laquelle le dit Confeil fe
croit obligé de communiquer à LL. NN. PP. un Projet de mettre les ter-
res baffes, entre Greb & la Ville d'Amersford en état par le moïen d'inon-
dation ou de retranchemens, ou par l'un & par l'autre , qu'aucun enne-
mi n'y puifTe paffer; pour lequel effet il feroit neceffaire découvrir le pais
entre Grebben & Slaperdycken des eaux de mai à quoi l'on doit s'atten-
dre tous les jours : qu'il a d'autant moins pu s'empêcher de faire cette
communication, que cette Province s'y trouve intereffée, puifqu'en répan-
dant les eaux de l'Eclufe de Grebben il y auroit des Terres de fon terri-
toire d'inondées , & qu'il ne doutoit pas que LL. NN. PP. ne vouluffent
bien dans la dangereufe fituation où étoient préfentement les Affaires de
la Patrie fpecifier pour le bien publie les fruits des dites Terres.
Qu'il étoit bien vrai que cette Inondation ne contribue rien à la fureté
de la Province de Gueldre, mais que d'un autre côté les depenfes qu'on
fait pour les Fortifications de Nimegue, de Zutphen , d'Arnhem, & de
Grave, pour finfpection du haut & du bas-Rhin & de HiTel , de même
que pour tous les autres préparatifs,. de vroient entièrement affûrer LL. NN..
PP. qu'on a deffein , en cas de rupture, de défendre opiniâtrement la Pro-
vince de Gueldre; outre qu'il plairoit à LL. NN. PP. de confiderer, que
le foin qu'on prend d'arrêter l'ennemi, quand môme il fe feroit rendu maî-
tre de la Gueldre y ce que Dieu veuille détourner , lui feroit bien pafîer
l'envie d'attaquer l'Etat de ce coté-fa. Surquoi aïanx été délibéré, il a
été trouvé bon & arrêté , de repréfenter au Confeil d'Etat en Réponfe,
qu'il e(l connu au dit Confeil , aufii-bien qu'à tous les Confederez , que les-
Provinces de Gueldre, d'Utrecht,& d'Overyffd ont infilté dépuis plufieurs-
années, & fait des inltances réitérées, pour qu'on veiiille enfin commen-
cer à rendre le. Bas-Rhin & 1 Yffel plus profonds , & que même cette
Pr.o
VINCES-
Un1£S,
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. tty
Province y a acrôché plufieurs fois fonConfentemént pour d'autres objets, tommhï
comme encore en dernier lieu pour la Négociation du fécond ternie des Affai- DES Pro~
res de la Manne, deftiné au paiement des detes de la dernière guerre; lequel
acrôchement LL. i\N. PP. ont pourtant levé par une Lettre à LL. HH.
PP. du 3. Avril 16pp. en donnant leur Confentement fans aucune reitn&ion,
dans Telperance & entière confiance, que les Confederez feroient portez,
par les raifons & motifs alieguez dans la dite Lettre, à entreprendre en-
fin cet ouvrage avec vigueur, étant fans contredit de la dernière importance
pour la defenfe des frontières de l'Etat, fur-tout dans la conjoncture pré-
lente} c'eif. pourquoi il a aufli été récommandé , à diverfes reprifes , avec
tant d'empreilement , par S. M. Britannique , & en particulier à ion dernier
départ, & fur lequel ouvrage il a plû pareillement aux Srs. Etats de la-
Province de Frife d'infiiter par leur Réfolution du n. Mars dernier, le
nommant comme de raifon un Ouvrage de très falutaire & de fort grande
importance pour la fureté du commerce de ce païs. Que fi Ton avoit
exécuté ce projet , bien plus facile qu'on ne s'imagine , on n'auroit pas
eu befoin de fonger à inonder des eaux de mai le plat -païs dépuis G-reb-
ben-Sluys jufqu'à Amersfoort, comme il a plû au dit Confeil de repréfen-
ter par fa Lettre ; fur laquelle LL. NW. PP. ne fauroient s'empêcher de- ré-
pondre , qu'Elles font de l'opinion , qu'il faut fonger principalement
à mettre en bon état de defenfe les frontières du corps de la République
hors des limites defquelles il n'y a préfentement point de Barrière , a fa-
voir de l'Ëclufe en Flandres jufqu'à la Ville de Campen , & de- là jufqu'à
Lieroort, à quoi l'on ne fauroit mieux contribuer qu'en rendant les dites
Rivières plus profondes, avant que de former en faveur des membres de ce
Gorps de projets de rétranchemens particuliers en dedans du païs pour
arrêter l'ennemi. Que LL. NN. PP. font d'autant plus portées à croire que
l'Inondation propofée, dont les fraix monteroient bien plus haut que ceux.
qu'on emploïeroit à rendre les Rivières plus profondes , ne de vroit pas fe faire
à l'heure qu'il eft, pour ne pas faire par-là impreffion à l'ennemi , même-
avant le tems d'une rupture , comme fi l'on ne fauroit l'arrêter fur le*
frontières, & pour ne le pas attirer quafi de ce côté-là en faifant paroître"
une foiblefTe imaginaire.
Que de pareilles rétranchemens ou féparations ne devroient non plusr
être entreprifes dans cette conjoncture, puifque le cours des finances fe-
roit aufiî-tôt interrompu dans les Provinces fituées hors de cette fepara-
tion projettée, & qu'elles ne feroient plus en état de contribuer d'avanta-
ge aux affaires* de l'union, par aprehenfion des habicans qu'on ne fongeac
aies abandonner à l'ap'rôche de l'ennemi. LL. NN. PP. foûtiennent de plus-
que la dite Inondation projettée ne fauroit préfentement en aucune ma»
mère avoir lieu , vu que les eaux de Mai font déjà paflees , & que celles
dû Bas-Rhin ne font actuellement que de deux pieds & demi de profon-
deur au lieu de dix dont elles devroient être avant que les terres balles eii
puiffent être couvertes, fuivant le raport des Ingénieurs Patavant &. de
Roi fait le 16, Mars dernier par. ordre du Sr. Cochera Directeur General
Nn 3 des
2%S MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires des Fortifications. D'où l'on peut conclure, que le Bas-Rhin étant ren-
ias Pro- dû plus profond, il s'y trouveroit toujours autant d'eau qu'il en faudroit
vinces- pQur ^-ajre |a jjte jnonc|ation lorfque la neceffité viendroit à l'exiger, &
que l'ennemi , ce que Dieu ne veuille , auroit fait une Invafion fur les fron-
tières de l'Etat.
Que LL. NN. PP. feront toujours prêtes à contribuer de tout ce qui dé-
pend d'elles à la fùretc 6c defenfe des Provinces moins expofées par leur
iituation , dés que les dites Rivières feront miles dans l'état ci-deiïus
mentionné, 6c que les Fortifications commencées des frontières feroienc
achevées.
Enfin, queLL.NN.PP. efperent, que le Confeil d'Etat, en réflechiflant
fur-tout ce qu'on vient d'avancer, ne défiftera pas feulement de l'Inon-
dation propofée , mais fera auiîi tous fes efforts pour diriger les affaires
en forte que le dit Accommodement des Rivières, chofe extrêmement im-
portante pour la confervation de l'Etat, foit exécuté esc achevé avec tou-
te la diligence imaginable.
Surquoi aïant été délibéré, il a été trouvé bon qu'il fera remis copie de
cette Réfolution entre les mains du Sr. Ham, & autres Députez de LL,
I i 1 1 . PP. pour les Affaires Militaires.
Rapport du Confeiller-Penfonnaire Heinfius de fa Conférence
avec le Comte cVAvaux \ du Lundi 6. Juin 1 70 1 .
Confé- T E Confeiller-Penfionaire Heinfius a raporté à TAfTemblée, que le
rence &_j sn Comte d'Avaux AmbafTadeur Extraordinaire du Roi de France
«rivaux ' lui avoit notifié de bouche les ordres qu'il avoit reçus du Roi fon Maitre
de demander une Réponfe finale au fujet des Conférences entamées ici ,
favoir fi LL. HH. PP. font d'intention de les continuer en y admettant
l'Envoyé Extraordinaire de S. M. Britannique, fans qu'il y puilTe faire au-
cune Demande particulière en faveur du Roi fon Maitre , & fi lefdites
Conférences feroient tout à fait rompues , fi ce Miniitre n'y fut admis
qu'à cette condition ? Que ledit Sr: Comte d'Avaux y avoit ajouté, que
S. M. n'avoit pas deffein de féparer l'Angleterre de l'Etat, preuve dequoi
S. M. pouvoit bien fouffrir .que comme les prétentions du Roi de la
Grande-Bretagne dévoient être propofées à la Cour de France par fon
AmbafTadeur, LL. HH. PP. y envoyafient un Miniftre pour agir de con-
cert avec ledit AmbafTadeur ; 6c que le Sr. Comte d'Avaux avoit fait di-
re enfuite à lui Penfionaire, en explication de ce que defTus, que l' Am-
bafTadeur Britannique y étant pouvoit expofer les Intérêts particuliers de
l'Angleterre, de môme que le Miniftre de LL. HH. PP. les leurs, pour
traiter là -defTus conjointement. Surquoi ayant été délibéré, il a été trou-
vé bon de prier & charger par la préfente les Srs. van EfTen 6c autres
Députez de LL. HH. PP. pour les Affaires Etrangères, de faire part de
ce Raport au Sr. Stanhope Envoyé Extraordinaire de S. M. Britannique,
d'oiiir
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. zS7
d'oiiir Tes Confiderations là- defltis , & de rendre compte de tout ici à Am«ti
„ v r ,,, DES PllO-
lAifemblee. TlNCKS.
Unies»
Réfolution touchant des Troupes ; du Jeudi 9. de Juin 1701.
REçu une Lettre du Confeil d'Etat écrite à la Haye en date cfau- Réfolu-
iourd'hui, à laquelle il a joint en confequence & pour fatisfaire à t¥)ia'I0J£
• \ r t.i t nn J •/'i 1 t» tr 1 ■ ,, ■ chant des
l'intention de LL. HII. PP. comprife dans leur Réfolution du 27. Mai Troupes»
dernier, un Etat delà répartition des foîdes des Troupes que LL. HIL du 9.
PP. , depuis la Recrue & Augmentation faites de l'Armée de la Républi- Juilu
que, avoient trouvé bon, en conformité des Pétitions du 31. Janvier, 21.
de Février, & 7. Mars, de prendre, pour d'autant plus de fureté de l'E-
tat, de plulieurs Princes de l'Empire & d'ailleurs, au nombre de $360.
Maitres, 1584. Dragons, & 125*00. Fantafîins, en tout de 17644. hômi
mes. Surquoi ayant été délibéré, il a été trouvé bon & arrêté d'envoier
Copie de cette Lettre aux Seigneurs Etats des Provinces , en les priant
de paier conformément audit Etat les Troupes qui ont été mifes fur leur
répartition.
Réfolution du Meeredi 1 5". Juin 1 70 1 .
P\Ans la Conférence, que les Députez pour les Affaires des Finances, ReTolu»
•*-^ ont eue avec quelques Committez du Confeil d'Etat, il a été trouvé tion d"
bon, qu'à chaque Cavalier des Troupes qui doivent effectivement camper if-Jum»
ou cantonner, il fera paie 3. fols par jour pour envoler paître fon che-
val dans le pré, & qu'il fera écrit aux Magilirats & Officiers de donner
ordre qu'on n'exige pas plus pour le pâturage de ces chevaux que les 3-,
fols réglez.
Pareillement il a été trouvé bon , que les Seigneurs Etats des Provinces
feront priez par Lettre de faire les difpoGtions neceffaires, afin que les
Troupes de leur répartition qui font en Garnifon à Maftricht ou- à Grave
y trouvent de l'argent ou du crédit pour quelques mois, afin d'en pouvoir
profiter en cas de Siège»
Réfolution du Jeudi 16. Juin 1701.
LES Seigneurs Etats de Weft-Frife ont confenti à la Négociation de Réfol'al
deux cent mille Ecus pour le Roi de Prulfe fous la Garantie de l'E- t!0n du
tat , lefquels doivent être emploiez aux Fortifications de Wefel & de l6'Jum'
liruek.
Les Seigneurs Etats de Weft-Frife ont confenti à la Pétition de 75-0000,
florins deftinez à faire les Remparts & ouvrages projetiez , pour affurer
le palfage fur le Bas -Rhin & ï'YfTel, & entre Grebbe & Amen, fort. En
même
288 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ, ET
Atîaires même tems, lefdits Srs. Députez ont infifté qu'on veuille pareillement
des Pro- prencjre f0]n pour ia fureté de la dite Province conformément à la Réfo-
VINCES- f . . r , r • x
Unjes. lucion inférée ci -après.
Extrait du Regiftre des Réfolutions de LL. NN. PP. les Sei-
gneurs Etats de Frife, du n. Juin 1701.
Réfoiu- T U & examiné une Lettre de LL. HH. PP. à laquelle étoit jointe une
tion des £_j p^Qtion du Confeil d'Etat de la fomme de 770000. florins , qui , con-
Frife * jointement avec 170000. florins à fournir par la Province d'Utrecht en
diminution de fes Arrérages fur l'Article des Fortifications intérieures &
extérieures , doivent être employez à faire plufieurs Retranchemeus &
ouvrages necellaires pour élever des Remparts qui puiïTent fervir de Dé-
fenfe & de Sûreté du Paflage entre Grebbe- Sluys, & Amer s fort. Surquoi
aiant été délibéré, il a été trouvé bon & arrêté de confentir à la dite Pé-
tition de 7foooo. florins pour être emploiez à la fureté & défenfe des
Frontières de l'Etat , & de prendre en même tems tous les dûs foins
pour la fureté & fortification de cette Province, en empêchant le PaiTage
par les Marais , & en fortifiant les avenues \ pour laquelle fin les Srs. Dé-
putez font chargez & autorifez par la préfente d'entrer au plutôt en Con-
férence avec le General Coehoorn, d'entendre Ton fentiment & avis fur
la manière la plus propre à garantir cette Province d'une invafion de
l'ennemi, d'en former un Projet, & de l'envoier au Confeil d'Etat, en le
priant de vouloir l'exécuter incefïamment , & en cas que la fomme de-
mandée ne fuffît point aux fraix necellaires pour ces Ouvrages , de vou-
loir encore faire une autre Pétition fur ce fujet , & la préfenter aux
Provinces refpe6lives.
Surquoi aiant été délibéré, il a été trouvé bon de remettre Copie de
cette Réfolution entre les mains des Srs. Députez de LL. HH. PP. pour
les Affaires Militaires, afin de voir & examiner tout & d'en faire Ra-
port ici à l'AiTemblée.
Réjoluîion du Lundi 20. Juin 1701.
Réfolu- A iant été délibéré fur la Lettre du Collège de l'Amirauté de Weflfrife
tion du jLjL & du Quartier du Nord , par laquelle on avoit apris que la Frégate
ao. Jum. Enckhuyfen, & le Brûlot Y Africain , n'étoient pas hors d'état de faire le fer-
vice requis, il a été trouvé bon qu'il fera donné ordre de réparer les dits
VaifTeaux avec toute la diligence pofïible, & de hs renvoïer à l'Efcadre
fous le Lieutenant- Amiral , & d'équiper en attendant & d'envoïer à la-
dite Efcadre une Galiote propre à fervir de VaiiTeau d'Avis.
Aiant été délibéré fur la Lettre de l'Amiral Allemonde, portant, qu'il
étoit arrivé chez lui du Texel deux Galiotes, chargez de Vivres pour les
Vaif-
RESOLUTIONS D'ETAT/ M. DCC. I. 289
Vaifleaux du Collège de l'Amirauté d'Amfterdam , lefquels alloient être Affaire
fuivis d'encore deux Flûtes, pour en pouvoir avitailler tous les Vaifleaux DES Pro-
de fon Reflbrt jufqu'à la mi-Novembre prochaine, &c. il a été trouvé Y*NCES-
bon d'écrire au Collège de l'Amirauté de Zelande de faire les difpofitions 11
neceffaires , afin que Tes Vaifleaux foient pareillement avitaillez jufqu'au
15. Novembre, conformément à la précédente Réfolution de LL. HH. Puif-
fances.
Rejoint ions des i<5. £5? 20. Juin^ pour négocier avec le Comte
d'Avaux (*) ; du Jeudi 1 6. Juin 1 70 1 .
Le Confeiller Penfionaire Heinfius a raporté à l'Aflemblée, que le Sr. Réfolu-
Comte d'Avaux, AmbafT.Extr. du Roi de France , lui a notifié de boû- tion du
che, d'avoir eu ordre de Sadite Majefté d'admettre le Sr. Stanhope En- I<5- Juin*
voïé Extr. de S. M. Britanique aux Conférences pour l'avancement de la
Négociation commencée, fur le pied que LL.HH.PP. l'ont demandé, & que
le Roi fon Maître avoit voulu donner par-là marque & preuve de ion in-
clination fmcère pour la confervation de la Paix & Tranquillité publique.
Surquoi aïant été délibéré, il a été trouvé bon & arrêté de prier & de
charger par la préfente les Srs. d'Effen & autres Députez de LL. HH. PP.
pour les Affaires Etrangères, de faire part de cette Déclaration au Sr.
Stanhope , de délibérer conjointement avec lui fur ce qui doit être fait
de plus fur ce Sujet, & de faire Raport de tout ici à l'Aflemblée.
Du Lundi 20. Juin 1701.
Oui le Raport des Srs. d'Effen & autres Députez de LL.HH.PP.pour les ReTolu-
Affaires Etrangères , aïant en confequence & pour fatisfaire à leur tion du
Réfolution Commiflbriale du 17. d. c. confulté, fur ce qu'il y aura à fai- 20- Juin*
re après que le Sr. Comte d'Avaux AmbaiT. Extr. du Roi de France a dé-
claré d'avoir ordre d'admettre le Sr. Stanhope Envoie Extr. de S. M. Brit.
aux Conférences pour la Négociation entamée ici , fur le pied que LL.
HH. PP. l'avoient demandé j& en aïant fait part au Sr. Stanhope, il a dé-
claré qu'il ne feroit plus de dificulté d'aflîfter aux dites Conférences.
Surquoi aïant été délibéré, il a été trouvé bon & arrêté, que les Srs. d'Ef-
fen& autres Députez de LL.HH.PP. pour les Affaires étrangères feront
priez & chargez par la préfente de rentrer 5 conjointement avec le Sr.
Stanhope, en Conférence avec le Sr. Comte d'Avaux, & de témoigner
àce dernier qu'il a été très-agréable à LL. HH. PP. que S.M.leRoide Fran-
ce a trouvé bon de laifler continuer ici les Conférences furie dit pied,
& de remercier le dit Sr. Comte d'Avaux de la part de LL. HH. PP. des bons
Offices qu'il a bien voulu emploïer pour cet éfèt, & de délibérer con-
jointe-
(*) Elles font plus amples que celles , qui font rapportées dans le Tome I, à pareilles Dates.
Tome XI, Oo
2c,o MEMOIRES, tfEGOTïATIONS, TRAITEZ, ET
Aftaikxs jointement avec le dit Sr. Stanhope & le Sr. Comte d'Avaux fur I&s
desPro- moïens les plus propres à avancer avec toute la diligence poftible la Ne-
vixcks- grociatîoii commencée & à la terminer heureufement; dequoi les dits Srs,
. .Ni!s' Députez doivent faire Raport ici à l'AfTemblée.
RéfoJuîion touchant des Retmnchemens £5? Réparations \ du
Lundi 20. Juin 1701.
Rcfolu- |r~'\ui *e raPort des Sieurs Ham & autres Députez deLL. HH. PP. pour
tion fur \~J les Affaires Militaires, aiant, conjointement avec quelques Députez
des Re- du Confeil d'Etat, examiné la Réfoludon des Seigneurs Etats de Gueldre
P.ar:l* prife fur la Pétition dudit Confeil pour une Somme de 75*0000. fl. outre
15*0000. que laProvince d'Utrecht doit fournir en diminution de ce qu'elle doit
pour l'article des Fortifications intérieures & extérieures, lefquelles fom-
mes doivent être emploiées à faire des Retranchemens dans laBetuwe pour
pouvoir élever des remparts le long des Rivières du Bas-Rhin & de l'Yffel,
h faire une inondation entre Grebbe-Siuys & Amersfoort, & à conilruire-
les ouvrages neceffaires pour couvrir ces remparts & cette inondation.
Surquoi il a été trouvé bon que le Confeil d'Etat fera prié & autorifé , en
attendant le confentement des Provinces fur la Pétition ci-defllis mentio-
née , de faire commencer au plutôt à travailler au Retranchement projette
près de Doesbourg, à la contrticarpe paliffadée de Deventer, & aux ou-
vrages propofez aux environs de Wye,& de faire pouffer ce travail avec
toute la diiigence poffible , afin de Je finir le plutôt qu'il fe poura. Que
pour ce qui regarde les Remparts à faire dans le Bas-Rhin, & I'Yffel, con-
formément à la dite Pétition , LL.HH.PP. infiffent fur leurRéfolution du 8-
d. c. par laquelle le Confeil d'Etat a déjà été prié de faire affembler à l'en-
droit requis tous les matériaux & autres chofes neceffaires pour cette fin.
Et quant à l'inondation entre Grebbe-Sluys & Amersfoort, & les ouvrages
requis à la couvrir, le dit Confeil elt prié de régler avec le Directeur Ge-
neral des Fortifications Coehoorn le plan & les projets des Ouvrages ne-
ceffaires, de les arrêter ,& exécuter. Que de plus les Sieurs Etats des
Provinces, qui n'ont pas encore confenti à la dite Pétition, feront exhor-
tez par Lettre, à vouloir envoyer fans aucun délai leur confentement fur
cette Pétition ici à l'Affemblée , & fournir leurs quotes-parts en argent
comptant au Comptoir du Receveur General. Et les Sieurs Etats
des Provinces de Gueldre, d'Utrecht, & Overyffel, comme des trois
Provinces les plus intereffées à ces ouvrages, feront priez particulièrement
de fournir, non feulement fur le champ leur quote-part, mais aufii d'aller
jufqu'à avancer, outre cette quote-part, la fomme totale, des deniers de-
mandez pour ces ouvrages dans la dite Pétition , & les dits Seigneurs E-
tats pouront rabattre ce qu'ils auront avancé au delà de leur quote-part
pour le montant de la dite Pétition, fans toutes fois l'excéder, & il leur
vaudra
RESOLUTIONS D'ETAT, M, DCC. L tpi
vaudra en compte fur leur quotepartà la Pétition pour l'Armement extra- âmauus
ordinaire de l'année courante. Les Sieurs Députez de la Province de ms Pno'
Gueldre ont fait annoter fur la dite Conclusion, qu'ils n'y fauroient eonfentir uJJ^8."
que pour autant qu'elle efl conforme à la Réfolution des Seigneurs Etats - ' * ■
leurs Principaux, pas au delà;furquoi lesdits Sieurs Députez ont été priez
de rétracter cette Annotation & de fe conformer à la précédente Conclu-
fion, ou qu'autrement les autres Provinces ne veulent pas être obligées
aux confentements déjà donnez ou à donner encore à la dite Pétition.
Les Sieurs Députez de la Province de Zelande ont déclaré de n'avoir en-
core aucunes Inftruclions fur fujet , au défaut defquelles ils n'y fauroient
confemir. Les Sieurs Députez de la Province d'Utrecht ont déclaré de
ne point eonfentir h la Réfolution ci-deffus pour autant qu'elle efl contrai-
re à la Lettre des Seigneurs Etats leurs Principaux remile àLL. HII.PP. fur
cette affaire après la réfomption, refervée à leurs Principaux la libre déli-
bération fur la demande qu'ils leur feroient conformément à la dite Con-
clufion. Les Sieurs Députez de la Province de Frife ont infiflé fur la Ré-
folution des Seigneurs Etats leurs Principaux prife & délivrée fur ce fu-
jet. Le Député préfent de la Province de Groningue a déclaré de n'a-
voir point d'ordre & de ne pouvoir rien dire là-deifus avant d'avoir reçu
la Réfolution des Seigneurs Etats Cqs Principaux.
Réfolutions des 24. & 2?. Juin touchant les Lignes des EJpagmls
en Flandres ; du Fendredi 24.. Juin 1 70 1 .
Reçu une Lettre du Confeil d'Etat écrite ici à la Haïe le 20. d. c. la- Réfolu-
quelle porte que ledit Confeilfe croioit obligé de notifier àLL.HH.PP. tion" tou-
que fur le territoire d'Efpagne on droit une Ligne environ du Sas de Gant, j*"1 sles
jufqu'au Fort la Perle fur lEfcaut, laquelle on garniiToit de Forts & de Re- lg
doutes, & qu'en particulier on conftruifoit un Fort confiderable fur le Ca-
nal de Gant environ à trois quart d'heures de Hulft; ce que le Confeil d'E-
tat regardoit comme une chofe digne de réflexions. Surquoi ayant été
délibéré, il a été trouvé bon & arrêté qu'il fera remis copie de cette Lettre
entre les mains des Sieurs Députez deLL. HH. PP. pour les Affaires Militai-
res, afin d'examiner tout conjointement avec quelques Committez du Con-
feil d'Etat , & en faire Raport ici à l'Affemblée.
Du Samedi 25. de Juin 1701.
Ouï le Raport des Sieurs Députez 'de LL.HH. PP. pour les Affaires Mili- Autre,
taires fur la Conférence qu'ils ont eue avec quelques Sieurs Commit-
tez du Confeil d'Etat au fujet de la continuation des ouvrages projettez
dans & près du Bas-Rhin, & de l'Yflel, comme auffi près de Greùôe-Sluys,
& d'Amersfort, pour la fureté de l'Etat de ce côté-là, plus amplement
mentionez dans la Pétition du Confeil d'Etat du 4. & dans la Réfolution
O01 de
292. MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Araires de LL.HH. PP. du 20. d. c. Surquoi ayant été délibéré, il a été trouvé bon,
DES
Pro
de repréfenter encore aux Seigneurs Eiats des Provinces refpeftives par
Unies." Lettres, que LL.HH. PP. ont propofé par leur précédente aux Confederez
— l'importance & la necefîité des ouvrages prbjettez , pour alTùrer non-feu-
lement le pallage du Bas-Rhin & de l'Yflel, mais aufli la féconde Barrière
par le moyen d'une Inondation entre Grebbe-Sluys, & Amersfort, &
& par des Retranchements neceflaires à la couvrir. Que LL.HH. PP. ont
ont aufii donné connoiflance auxdits Seigneurs Etats le 2.0. d. c. qu'en
attendant le Confentement des Provinces refpectives, & pour ménager
le tems fi prétieux dans cette occafion , elles avoient prié le Confeil
d'Etat de faire mettre au plutôt la main à l'œuvre, & que pour cet effet
LL. HH. PP. ont rémontré le 20. d.c. aux Provinces , à laquelle Lettre elles
iè rapportent encore à préfent , que ce travail demandoit de l'argent
contant, fans lequel il eft impofîible de pouvoir continuer & achever lef-
dits ouvrages avec la diligence requife, & que faute d'argent ces ouvra-
ges refteroient-là ou feroient retardez au grand préjudice du Pais dans une
lltuation aufli dangereufe des affaires que la préfente : Que pour ces rai-
fons LL. HH. PP. prient encore très-ferieufement les Seigneurs Etats , qui
n'ont pas encore confenti à la dite Pétition, de vouloir s'y prêter fans
aucun délai, & envoier leur Confentement ici à l'Aflemblée: & les Sei-
gneurs Etats des Provinces qui ont bien pris une Réfolution à cefujet,mais
peu conforme à la dite Pétition, font priez de vouloir annuller les claufes
& reltrictions comprifes dans leurs Réfolutions, & confentir purement &
Amplement à la dite Pétitionnant à l'égard de la première que de la fécon-
de Barrière; & que les Seigneurs Etats de toutes les Provinces refpeéti-
ves veuillent au plutôt fournir leur quote-part au comptoir du Receveur
General , afin que faute des deniers requis ces ouvrages fi neceflaires ne
foient arrêtez, & que l'Etat n'en foufre du préjudice. Les Sieurs Dépu-
tez de la Province de Gueldre ont infifté fur la Réfolution des Seigneurs
Etats leurs Principaux , & fur ce qu'ils ont fait infcrire dans les Regîtres
le 20. d. c. Les Sieurs Députez de la Province d'Utrecht ont pareille-
ment infilté fur la Lettre écrite fur ce fujet par les Seigneurs leurs Princi-
paux à LL.HH. PP. &fur cequ'ils ont fait enregîtrer le 20. d.c. Les Sieurs
Députez de la Province de Frife ont de même perfiité fur la Réfolution
remife de la part des Seigneurs Etats leurs Principaux fur ce fujet. Les
Sieurs Députez de la Province d'Overyffel ont aufli perfiité fur la Réfo-
lution des Seigneurs Etats leurs Principaux.
Samedi 25". de Juin 1701.
LES Srs. Députez de la Province d'OveryfTel ont porté à l'Aflemblée,
& y fait lire, la Réfolution des Seigneurs P2tats leurs Principaux, par
laquelle ils confèntent a la Pétition de 7f00c0.fl. outre 1 rcooo, fl.à fournir
en particulier par la Province d'Utrecht, pour faire des Retraiichemens &
con-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
2P*
conflruire plufieurs ouvrages dans laBetivwe, dans & près de l'YfTel & du
Bas-Rhin , comme auiîi près de Grebbe-Sluys & Amersfort , fuivant la
teneur de Ja Réfolution inférée ci-après.
Affaires
des Pro-
vinces-
Unies.
SïvoII le 21. de Juin i^or.
LA NoblefTe & les Villes qui compofent les Etats d'Overyflel ayant
vu & examiné la Lettre de LL. HH. PP. du 3. d. c. conjointement avec
une Pétition du Confeil d'Etat de la même date pour une fomme de 750000. fl.
à laquelle la Province d'Utrecht doit encore ajouter iyoooo. fl. en diminu-
tion de Tes arrérages pour les Fortifications intérieures & extérieures de
la dite Province mifes fur les états refpeélifs de Guerres lefquelles Tom-
mes doivent être employées à faire divers Retranchemens tant dans la Be-
tuwe que près de l'YfTel , comme auffi quelques Remparts dans le Bas-
Rhin & l'YfTel & près de Grebbe-Sluys , de plus la contreTcarpe de De-
venter, le tout plus amplement mentioné dans la dite Pétition. Sur quoi
ayant été délibéré & confédéré qu'il eft inconteftable que l'intérêt de la
patrie & les raiTons d'Etat & de Guerre demandent que l'ennemi Toit ar-
rêté autant qu'il eft potfïble fur les Frontières les plus éloignées de la Répu-
blique, ce qui félon toute aparence ne fe peut mieux faire que de ce cô-
té-là, fuppofé qu'il ne puilTe entièrement être retenu des Frontières de
l'Etat ,.LL.NN. PP. foùtiennent qu'avant tout il faut travailler au Retranche-
ment projette du Wael jufqu'au Bas-Rhyn & au delà de Gent, & qu'a-
près cela elles aprouvent qu'on falTe un Rempart dans l'embouchure du Bas-
Rhyn en deçà d'Yflel-Oort: que de plus on doit purger la dite embouchu-
re de lTilel de fable: Qu'en cas que les moyens & remèdes propofez ne
foyent jugez fuffifans pour avoir afTez d'eau, LL.NN.PP.confentent qu'alors
ou aufii en même tems on faffe de concert & avec i'aprobation de quelques
Committez de cette Province des Remparts dans la Rivière même de l'YfTel
fur les- places où cela pourra être jugé le plus necefïaire, moyennant qu'ils
foyent ôtez dans l'hiver: Qu'enfuite on faffe aufîi la contrescarpe de la
Ville de Deventer & tels autres Retranchement le long de l'YfTel qu'on ju-
gera convenables à la defenfe d'icelle. Que de plus LL. NN. PP., en cas que
LL.HH. PP. le jugent à propos, peuvent fouffrir qu'avant que les dits ou-
vrages foient achevez ou en même tems, on faffë celui près de la Grebbe,
& le Retranchement pour couvrir la Ville d'Amersfort; & après que tout
cela fera mis en fa perfection, on délibérera s'il eft neceffaire de faire un
autre Retranchement depuis Doesbourg jufqu'à Heuflen; en attendantes
confentent, fous les conditions exprimées ci-defïus, à la Pétition de 770000. fl.
à payer par les Provinces de Gueldre,d'Utrecht, & Overyffel ; moyennant
que ce que cette dernière paye à cette Pétition outre fa quote-part lui paf-
fera en compte fur ce qu'elle doit fournir pour les Affaires de la Marine,
pour les deniers de levée & de recrue des troupes étrangères prifes à la
foïde de l'Etat, pour les fraix de l'Armée & des Magazins,& autres cho-
Oo 3 fes
des Pro-
VIN'CtS-
UnKS.
Pétition
duCon-
feil d'E-
tat.
1*4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
tes de cette nature, fuirant une exacte liquidation qui en doit être tenue»
aufti dans la fupofuion que les autres Provinces confentiront, non feulement
à la dite Pétition, mais acquiteront aufli leur quote-part réellement , &
payeront par compenfation pour la dite Province aux articles ci-defTus
mentionez ce quelle a fourni à celui des Fortifications par deffus ion
contingent en la Pétition de 7^0000. fl.
Pétition du Confcil d'Etat 3 "du 2 S. Juin 1701.
Comme le grand changement qui eft arrivé dans la fituation des Affai-
res de l'Europe, à la fin du fiecle dont nous venons de fortir, &
l'incertitude delà tranquillité publique non feulement, mais aufli en particu-
lier de celle de cet Etat, caufée par ledit changement, a fourni à VV.
IiH.PP.plufieurs Raifons très-preiîantes a réfoudre une augmentation confi-
derable des Troupes du Pais, tant en fortifiant les Régimens & les Com-
pagnies qui ont reftées au fervice depuis la fin de la dernière Guerre,
qu'en prenant à la Solde de l'Etat plufieurs autres Troupes Etrangères,
afin de fe mettre par-là en bon état de defenfe,il n'a pas paru moins digne
des foins de VV. HH. PP. de pourvoir h tout ce qui pouroit fervir à tirer,
en cas de befoin,de ces Troupes le fervice necellaire, foit par la defenfe
des Frontières, foit en Campagne pour affûrer ces mêmes Frontières con-
tre toute Invafion imprévue. Pour avancer ce but falu taire, il a non-feiî-
lement été travaillé depuis quelque tems,avec un zèle redoublé, aux For-
tifications des Places Frontières les plus expofées, ouvrage qu'on continue
encore journellement, mais pour les pourvoir auffi de tout ce qui elt ne-
cefiaire à une bonne defenfe, nous avons emploie fans celle tout ce qui a
pu être amaiTé des fourniffemens des Provinces fur la Pétition pour les
Magazins, dans l'attente que nous ferons de plus en plus mis en état d'y
continuer par la Contribution du reliant que les Confederez doivent en-
core fur cet Article.
Pour mettre l'Armée de l'Etat en Campagne, nous avons demandé au
mois de Mars dernier conformément aux intentions de VV. Hfi. PP. , ce que
nous avons jugé indifpenfablement neceffaire pour les befoins auxquels il
faut pourvoir avant que de pouvoir tirer un nombre affez confiderable de
Troupes des Garnifons; & pour obferver toute la prudence œconomique
à cette occafion , nous avons provifionellement fixé un terme de trois
Mois pendant lefquels les dits befoins, dévoient être fournis, afin devoir
en attendant quel train prendront les Affaires du Public, & ce qu'il y au-
roit à attendre des Conférences & Négociations entamées pour l'Etablie
fement de la Paix générale & la fureté de cet Etat. Mais, comme du de-
puis le danger, bien loin d'être diminué, augmente de jour en jour par
les grands préparatifs de guerre qui fe font dans le voifinage, par le nom-
bre redoutable de Troupes qu'on a fait défiler jufqu'aux environs des
Frontières de l'Etat , par la groffe Artillerie qu'on y fait mener avec tout
fon
\ INCKS-
Umes.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. tp$
Ton train, & par tout ce qui pouroit être exigé à l'ouverture d'une Cam- Ambres
pagne & à toutes fortes d'Actes d'hoftilité, comme aufli par le Cantonne- des Pro-
ment de ces Troupes dans des places voifines, & par la difpofition de pou-
voir les faire camper & marcher au premier ordre; VV. HH.PP. ont donc,
conjointement avec S. M. Britannique , jugé de la dernière'neceffité de
prendre de telles mefures à l'égard des Troupes de cet Etat, pour qu'elles
puiflent avoir l'œil fur les mouvemens des voifins , & avoir loin de la de-
•îenfe & fureté du Païs. .
Pour cet effet, il aplûàS. M. de choifir les Généraux, & les Regimens
tant d'Infanterie que de Cavallerie, pour les Campemens refpe6l:fs qui leur
font affignez ,& à VV. I III. PP. de nous requérir parleur Réfolutiondu 17.
d. c. de former une Pétition pour plufieurs fraix extraordinaires que la
neceffité exige lorfque des Troupes doivent être mifes en Campagne & en
état de pouvoir agir en cas de befoin pour la defenfe du Pais.
Nous avons , pour fatisfaire à la Réfolution de V V. HH. PP. , réfléchi avec
toute l'Aplication neceiTaire d'un côté fur le fer vice de l'Etat, & de l'autre fur
tout le ménage qui pouroit s'obferver en cette occafion, &nous avons ju-
gé préalablement, que la Campagne, & le tems qu'il faut pour renvoyer
les Troupes mifes en Campagne fans rifque à leurs Garnifons , pouroit
bien durer jufqu'à la fin d'Oclobre, & que par confequen.t les befoins que
nous n'avons démandé que pour trois Mois par nôtre Pétition du 25). de
Mars dernier, doivent être continuez & fournis jufqu'à ce tems-là, de
même que les befoins ultérieurs dont il fera parlé dans la fuite plus am-
plement, lefquels depuis les ordres donnez aux Troupes de fe tenir prê-
tes à marcher, & depuis la marche éfeclive qui s'en eitfuivie ne font deve-
nus guère moins preffans , que ceux que nous avons démandé par nôtre
Pétition du 2.9. de Mars. Nous ne faurions cependant nous empê-
cher de faire remarquer en même tems, qu'à l'égard des befoins qui font
l'objet de cette Pétition en conformité de la Réfolution de VV. HH.PP. du
17. du courant, nous avons fait quelque différence .par raportau tems qu'ils
doivent commencer, ou qu'ils ont déjà été commencez; qu'ainfi on doit
fatisfaire pour 4. mois à compter du 1. de Juillet prochain, premièrement
aux Apointemens Extraordinaires des Généraux &. des autres principaux
Officiers des Regimens qui ont été nommez pour la Campagne, fur le mê-
me pied qu'ils leur ont été païez dans la dernière Guerre; car, quoique le
feu de la Guerre ne fe foit pas encore aliumé dans ces quartiersrci, ce que
Dieu veuïîle encore empêcher par fa grâce, il efl pourtant fort incertain
que ce qu'on craint aujourd'hui n'arrive demain, & alors il feroit trop tard
de faire les préparatifs neceffaires, c'efl; pour quoi les dits Généraux &
autres principaux Officiers font obligez de s'équiper dès à préfent & de
faire les mêmes fraix que s'ils alloient actuellement en campagne. En fé-
cond lieu nous croyons, que les Collonels & Majors de Cavallerie, qui
depuis la dernière Guerre n'ont point tiré des gages, & n'ont été pour
ainfi dire qu'honoraires, ayant eu ordre préfentement d'aller en campa-
gne
Affaires
des Pro-
vinces-
Unies.
25)6 MEMOIRES, NEGOTÏAf IONS, TRAITEZ, ET
gne, doivent pareillement être fatisfaits de leur gages ordinaires & ex-*
traordinaires fur le même pied de quatre mois , tout comme les autres
Collonels & Majors dont le falaire elt réglé fur l'Etat de Guerre , vu que
notoirement les uns & les autres font obligez aux mêmes fatigues & de-
penfes; mais les articles fuivans pas moins conformes à laRefolution ci-
deflus mentionnée de VV. HH. PP. doivent être payez pour quelque tems
de plus que les apointemens des Généraux & autres Principaux Officiers,
favoir pour 4. Mois & demi à compter du 16. du courant ; car ayant déjà-
été ordonné avant ce terme aux troupes deltànées pour la campagne de
s'y préparer, elles ont été neceffitées dès ce tems-là à faire plulieurs dé-
pendes fans lefquelles elles ne fauroient faire utilement la campagne > ou-
tre cela il a fallu dès ce tems-là préparer & difpofer tout ce qui eit necef-
faire pour mettre des troupes en campagne, & pour les faire agir s'il en
efl befoin. C'eft donc fur ce pied-là qu'il faut payer les Adjutans des Gé-
néraux & le petit Etat Major des Regimens , tout comme au tems des
précédentes Guerres, vu que fans eux , non feulement les ordres des Gé-
néraux ne fauroient être exécutez avec toute la promtitude requife, mais
on ne fauroit auffi tirer des Regimens le fervice exigé. Pareillement, il
doit être payé aux Officiers de Cavallerie & des Dragons qui vont en
campagne l'augmentation d'autant de chevaux qu'ils ont eu de plus dans
la dernière Guerre que depuis la Paix conclue, favoir de fix chevaux par
compagnie de Cavallerie & deux par Compagnie de Dragons, afin de
pouvoir d'autant mieux faire le fervice, comme auffi parce qu'on n'acor-
de point des chariots à la Cavallerie pour mener le bagage, ce qui rend
la dite augmentation d'autant plus neceffaire pour les Officiers. Déplus
il doit être payé aux fix Bataillons Suifles qui ont pareillemenr été com-
mandez de faire la Campagne , & auxquels on n'accorde point de cha-
riots, l'augmentation de leur folde, & la gratification ftipulée dans la Ca-
pitulation. Enfin, il doit être payé aux Généraux , aux Regimens d'In-
fanterie & de Dragons cojnmandez ou à commander encore pour la Cam-
pagne, aux hauts & bas Officiers de l'Artillerie, & à pîufieurs autres per-
sonnes qui font employées au camp, le chariage, que nous avons pour-
tant calculé, conformément à l'intention de VV. HH. PP. comprife dans
leurRéfolution du 17. du courant, à un tiers de moins qu'ils n'a été ci-de-
vant, moyennant qu'il foit permis aux troupes de fe fervir de charettes à
deux chevaux en place de chariots à trois.
De plus, il doit être mis fur le rang de ceux qui feront payez pour qua-
tre mois &demi, les Gens du Confeil de Guerre, le Prévôt General a-
vec fes fubalternes, afin de pouvoir tenir les Soldats en bonne difcipline,
& d'empêcher tout defordre & dérèglement : les Miniitres , les Ingé-
nieurs, l'Intendant General des Chariots, avec tous ceux qui dépendent
de lui, le Comrniffaire des Bateaux, qui doit être payé pour neuf mois,
ayant été actuellement employé depuis le printems : l'hôpital avec ^ss
Officiers, &les medicamcns qu'on diftribue aux Regimens, le Commiiîai-
re
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. i?;
rc des vivres , le Capitaine des Pontons , avec Tes Officiers fubalternes , Amiuss
& Ouvriers, enfin toutes les perfonnes necefTaires à un Camp compofé DES Pi'°"
d'un Corps confiderable de Troupes. vinces-
Outre cela, il faut aufîï comprendre dans cette Pétition l'augmetation , N
qui, de concert & après de mures Délibérations avec les Généraux, a été
jugée necefTaire, des chariots de vivres au nombre de quatre- vingt , ou-
tre les cent & vingt mentionnez dans nôtre précédente Pétition du 25?. de
Mars dernier, comme aufiï celle des chevaux d'Artillerie jufqu'à trois cent
quatre- vingt, outre les quatre cent quatre- vingt treize demandez dans la
même Pétition, & enfin l'augmentation des Officiers Subalternes de l'Ar-
tillerie, qui fuivant la difpofuion faite pour la campagne ont été jugez ne-
cefTaires d'être encore levez, fans compter ceux qui ont été ci-devant au
fervice.
Enfin, on nefauroit paiTer'fous illence dans cette Pétition pluileurs be-
foins & incidens qui arrivent tous les jours , & qui ne fauroient être fpé-
cifiez, mais qui ne laiiTent pas d'aller fort loin au bout du compte, com-
me il a paru plufieurs fois dans les Campagnes précédentes.
Tout cela, Hauts & PuiiTans Seigneurs, ayant été mûrement pefé par
nous, & tous les Articles indifpenfablement necefTaires de cette Pétition,
ayant été calculés avec toute l'économie poffible, nous avons trouvé, que
pour y fatisfaire , il faudra, outre le montant de notre Pétition fou vent
mentionnée du 29. de Mars, du moins encore une fomme d'un million de
florins , laquelle nous fommes par confequent obligez de demander par la
préfente, priant VV. HH. PP. de vouloir difpofer par leur recommenda-
tion ferieufe & efficace, les Sgrs. Etats des Provinces refpeétives, en
leur envoyant au plutôt cette Pétition , à y confentir promtement & à
apuyer leur confentement par des fourniiTemens également promis, vu
que le fervice du Pays & la necefiité urgente le demandent abfolument.
Ainfi fait & demandé par ]e Confeil d'Etat, à la Haie, le 28. Juin 1701.
Etoit Paraphé,
J. DE ÏDSINGA.
Plus bas il y avoit :
Par ordre du Confeil d'Etat des Provinces-Urnes des Pays-Bas.
S. DE SUNGELANDL
Réfoluîion du Vendredi 1 >. Juillet 1701.
SA Majefté le Roi de la Grande-Bretagne , aiant paru à J'AfTemblée, a
propofé en des termes très-gracieux à LL. HH. PP. qu'Elle étoit tou-
jours venue avec plaifir dans ce païs-ci, mais principalement dans la
préfente dangereufe fuuation des Affaires , où Elle croioit plus qu'en tou-
Tome XL Pp te
z9% MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires te autre occafion pouvoir fervir l'Etat par fa préfence. Que S. M. avoit
des Pko- efperé & fouhaité de finir le relie de Tes jours en tranquillité & paix, &
viNCEs- ^e laiffer en mourant la République dans un état paifible & floriffant, à
N1ES> quoi Elle avoit travaillé toujours, & particulièrement depuis la conclufion
de la dernière Paix ; mais que depuis peu les Affaires de l'Europe avoient
tellement changé de face, qu'on ne fauroit prévoir ce qui en refulteroit
fuivant les ordres de la Providence. S. M. pouvoit cependant aflurer
fincèrement LL. HH.PP. que foit que les chofes en reilaffent-là fans que
le feu s'allumât, foit qu'on fût obligé à reprendre les Armes, Elle ne re-
lâcheroit rien de l'affection & du zèle avec lefquels Elle avoit appuie cï-
devant l'intérêt & le bonheur de ces Provinces , mais continueroit à a-
vancer leur bien & avantage, & contribueroit à tout ce qui pourroic fer-
vir à maintenir l'Etat dans fa Liberté & Religion, & à affermir fa fureté
& le bien public. Que S. M. fe réjouiffoit de trouver encore ici les cho-
fes dans un état affez paifible, ce qui, après la Bénédiction divine, ne
fauroit être attribué qu'aux promtes & vigoureufes Réfolutions de LL.
HH. PP. pour fe mettre en bon état de defenfe : Qu'EUe ne doutoit pas
que tous les Conféderez n'y vouluffent contribuer, vu qu'Elle regardoit
une bonne pofture comme l'unique, moien foit pour prévenir une Guerre,
ou, quand il en faudroit venir-là, pour garantir l'Etat du danger dont les
forces combinées de tant de Puiffances confiderables le menacent. Qu'au
relie S. M. reffentoit une particulière fatisfaction de pouvoir affurer LL.
HH.PP., non feulement pour Elle-même, mais auili pour toute la Na-
tion Angloife j de leur affection pour cet Etat , lequel ils étoient prêts
d'affilier, & de contribuer conjointement tout ce qui étoit neceffaire pour
leur fureté commune ; c'eil furquoi LL. HH.PP. pouvoient compter en-
tièrement. S. M. efperoit que le Tout-puiffant beniroit les moiens em-
ploiez, & que par la voye de négociation, ou en cas de necefïité , par
la voye des Armes, on parviendroit au but propofé d'une fureté raiiona-
ble en gênerai , & particulièrement de la confervation de l'Etat dans fa.
Liberté & Religion; que S. M. ne fouhaitoit rien tant, & v contribue-
roit tout ce qui étoit en fon pouvoir , jugeant inutile d'y ajouter autre
chofe préfentement que de fe recommander toujours à la continuation
de la bienveuiliance de LL. HH.PP. Surquoi aiant été délibéré, LL.
HH. PP. ont fort remercié S. M. de l'honneur qu'il lui avoit plû de
leur faire de nouveau en venant dans leur AlTemblée , & ont en mê-
me tems témoigné leur grande joie de l'heureufe arrivée de S. M.; que
comme fon abfence leur avoit toujours fait de la peine , & fon retour
en tout tems beaucoup de plaifir, fa venue & préfence leur étoit prin-
cipalement agréable & confolante dans cette Conjoncture fàcheufe &
dangereufe. Qu'Elles favoient fort bien que S. M. fongeok & travail-
joit même dans fon abfence à leur bonheur, mais que malgré cela El-
les avoient defiré fortement fon arrivée , fâchant combien fa préfence
cil utile & neceffaire en ce Païs-ci dans une fituation auffi épineufe,
afin de mettre leurs Affaires fur un bon pied ,, & de les y maintenir
avec
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 299
avec l'afliflance de Dieu , vu la confiance que tous & un chacun de cet Avfatre*
Etat, du plus grand jufqu'au plus petit, a en la prudence & l'expérience nFS ?*°"
de S. M. de même qu'en Ton affection & zèle pour la confervation & le unies"
bien de ces Provinces. Que LL.HII. PP. font. pénétrées de reconnoiffance - — ----
des bons & gracieux fentimens dans lefquels S. M. continue d'être pour
leur tranquillité & bonheur : qu'Elles ne fauroient exprimer combien El-
les font charmées , outre tant de preuves réelles qu'Elles en avoient ,
d'en recevoir encore de nouveau des affurances fi cordiales de la propre
bouche de S. M. Qu'Elles reconnoiffent avec une entière perfuafion,
que depuis la Paix dernièrement conclue, tous les foins & toutes les pei-
nes de S. M. n'ont eu pour but que de procurer, outre la tranquillité gé-
nérale, auiîi une fureté raifonable à cet Etat & en même tems à fes pro-
pres Royaumes. Que LL. HH. PP. font bien aifes de l'approbation de
S. M. fur la conduite qu'Elles ont tenue depuis le changement arrivé tout,
récemment } que cela les animeroit à y continuer d'autant plus conftam-
ment, étanf convaincues que fans les derniers efforts la Paix & leur Li-
berté ne fauroient être confervées ou regagnées. Que l'Etat fe trouve
préfentement dans un extrême danger , où il ne s'agit pas de moins que
de la perte totale de fa Liberté & Religion : c'eit pourquoi Elles étoient
réfolues d'emploier tous les moiens imaginables afin de conferver des ga-
ges aufîi prétieux, & Elles tacheroient de faciliter autant qu'il feroit pof-
fible les foins & le travail infatigable de S. M. pour cet effet, en contri-
buant tout ce qui pouroit être dans leur pouvoir pour féconder les falutai-
res intentions de S. M. dans l'efperance que le Tout-puiffant y donnera
fa bénédiction. Que LL. HH. PP. ne fauroient s'empêcher de remercier
encore S. M. du fond de leur cœur des affurances, non-feulement de fon
inclination perfonnelle, mais auffi de la bonne volonté de fes peuples à af-
filier l'Etat : Que LL. H H. PP. font fenfiblement touchées de cette fa-
vorable difpofition de la Nation Angloife en leur faveur & pour le bien
public, fâchant de quel poids leur eft l'affiltance d'un peuple dont la ma-
gnanimité & valeur font renommées par toute la terre : que c'eit une nou-
velle obligation qu'Elles ont à S. M. des foins qu'Elle a pris de mettre fes
peuples dans cette difpofition favorable ; de même que du fecours qu'Elle
va leur envoier comme un effet de la dite difpofition. Que LL. HH. PP.
regarderont pareillement de leur côté leurs intérêts comme infeparables de
ceux. d'Angleterre , efperant pourtant que cette Couronne n'aura jamais
befoin de leur aiîiftance , 'mais qu'en pareil cas LL. HH. PP. ne man-
queroient jamais à remplir leurs engagemens. Qu'en attendant Elles prient
Dieu très- ardemment de vouloir bénir les confeils de S. M. & lui accor-
der encore plufieurs années la fanté & les forces neceffaires à les exécuter
pour le bien du public, des Royaumes de S. M. & de cet Etat, & pour
l'affermiffement de la Liberté & Religion. Qu'enfin LL. HH. PP. prient
S. M. de vouloir être entièrement perfuadée, que comme fon affection &
fon zèle pour l'Etat eft inviolable, l'amour refpectueux de LL. HH. PP.
& leur eiiime pour S. M. ne cefferont non plus jamais, mais que tant que
Pp 2 l'Etat
3co MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
Affaires l'Etat fubfiftera Elles conferveront toujours une très- vive reconnoiffancc
des Pko- pour les grands & incomparables fcrvices qu'Elles ont reçu de S. M. & de
viNCF.s- j-a prucjente & genereufe Direction, par où elles ont été, avec l'afilftance
NIE$* divine , plufieurs fois fauvées des plus grands dangers , & par où elles
efperent d'être pareillement tirées du péril qui ies menace actuellement.
Réfolution fur une Réponfe du Czar\ du Jeudi 14. Juillet 1701.
ReColu- 4f\ u ï le Raport des Srs. d'Effen & autres Députez de LL. MIL PP. pour les
tion fur \^Jr Affaires Etrangères , qui en confequenee de leurs Réfolutions Commit-
une Re- forjales du 26. Janv. & 9. de Fevr. derniers, & pour y fatisfaire ont exa-
Czar mmé une Lettre de S. M. Czarienne écrite en Réponfe à la Réfolution de
LL. HH. PP. du 29. de Septembre de l'année pallée, touchant les troubles
qui fe font élevez entre S. M. Czarienne & le Roi de Suéde, comme aufli
deux Mémoires du Sr. André ArtemonidesMattuof, AmbafT. Ord. de S. M.
Czarienne fur le même fujèi, le tout plus amplement allégué dans le Regï-
tre des Réfolutions du 26. Janv. & 9 de Fevr. de l'année courante. Sur
quoi aïant été délibéré , il a été trouvé bon & arrêté , de marquer en ré-
ponfe à la dite Lettre de S. M. Czarienne ,que LL. Mil. PP. ont vii avec
beaucoup de regret & de chagrin les troubles qui fe font élevez entre S.
M. Czarienne, que L. H. P. ont vu avec beaucoup de regret & de cha-
grin les troubles qui fe font élevez entre S. M. Czarienne & S. M. le Roi
de Suéde , & par raport auxquels Elles ont emploie leurs bons offices
afin d'effectuer s'il étoit pofîible que ces differens fulTent terminez plutôt
par un accommodement amiable que par la voie des armes. Que dès que
S. M. Czarienne avoit fait part àLL. HH.PP. du tort qu'elle croïoit lui a-
voir été fait par le Roi de Suéde , LL. HH. PP. ont d'abord communiqué ces
plaintes à S. M. Suedoife, qui ayant témoigné dans fa Réponfe d'être près
à continuer la paix & l'amitié avec S. M. Czarienne, & déclaré d'avoir
chargé fon AmbaiTadeur ici d'entrer dans la difcution de ces plaintes, LL.
HH. PP. en ont donné connoiflance à S. M. Czarienne par leur Lettre du2p.
de Septembre de l'année palTée, en la priant de vouloir pareillement au-
torifer fon Ambaffadeur ici , d'entrer en Negciation fur un Accommode-
ment amiable, mais qu'elles doivent régarder comme un très-grand mal-
heur qu'avant que leur dite Lettre ait pu parvenir entre les mains de S.
M. Czarienne les chofes en font venues à des extrémités & à une guerre
©uverte. Que du depuis Elles ont bien reçu la Réponfe de S. M. Czarien-
ne , mais que la guerre ayant changé la face des affaires, LL. HH.PP. n'y
ont d'abord pu rien faire de plus, vu que leurs bons offices pour le main-
tien & la confervation de la paix ayant été infructueux , elles n'ofoient
efperer qu'on voulût les écouter fous le bruit des armes. Que pour ces rai-
fbns LL. HH. PP. ont bien laiffé paffer quelque tems avant de répliquer à
la Réponfe de S. M. Czarienne, mais qu'elles n'ont jamais defifté de leurs
fentimens pacifiques , ni de leur inclination à féconder de tout leur pou-
voir
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. L 301
voir les moyens qui peuvent fervir au rétabli (Te ment de la paix & au ré- Affairi-s
noiïemenc d une amitié lincère. Qu'il eit bien vrai que LL. MM. Czarienne ™1 ?**
ôi Suedoife ont eu la bonté d'admettre leurs bons offices pour accommo- u*"*"
der les differens dont la guerre s'en eil fuivie, afin de prévenir que le feu
ne s'ailumât; mais que ces offices ayant été employez fans fuccès , ils ont
necefiairement dû ceffer pour autant qu'ils dévoient fervir à prévenir la
guerre. Qu'il a bien plu à S. M. Czarienne de témoigner paria Lettre que la
médiation de LL. I1H. PP. pour lerétabliiTement de la paix lui feroit agréa-
ble; mais, comme S. M. Suedoife n'a pas, depuis la guerre commencée,
demandé & admis de la même manière leur médiation, & que fans le
eonfentement de toutes les Hautes Parties interefTées. Elles ne fauroient
faire les fonctions de Médiateurs, LL. HH. PP. , n'étant pas également recon-
nues pour Médiateurs par l'une & l'autre partie, ne fauroient faire autre
chofe que de contribuer à apuyer par leurs bons offices toutes les propo-
rtions qui pouroient être faites par les Médiateurs déjà établis ou à établir
encore par les Hautes parties pour le rétablilTement de la Paix, & de con-
feiller en toute manière une chofe auffi defirable que la Paix. Que dans
cet efprit LL. HH. PP. ont envoyé le Sr. de Haerfolte en Pologne & en
Livonie , pour être d'autant plus à portée , & pouvoir profiter de tou-
tes les occafions propres à avancer la bonne & falutaire intention de LL.
HH. PP. pour le rétablilTement de la Paix. Qu'Elles ont auflï chargé
leur Réfident Hulft d'en donner connoifTance à S. M. Czarienne , dont
la haute fageffe & équité leur fait efperer qu'Elle jugera que c'eil tout ce
que LL. HH. PP. ont pu faire après que les chofes en font venues à
des hoflilités. LL. HH. PP. déclarent encore, qu'elles voyent avec bien
du chagrin que les differens font allez fi loin entre LL. MM. Czarienne &
Suedoife , ayant l'honneur de vivre avec l'une & l'autre en amitié,
outre qu'elles font encore dans une Alliance Defenfive avec le Roi de
Suéde. Que LL. HH. PP. foûhaitent auiTi de tout leur cœur, que la dite
Guerre foit au plutôt finie , & la Paix <3c l'Amitié, necelTaire LL. MM. Cza-
rienne & Suedoife, entièrement & pour toujours rétablie. Que LL.HH.
PP., quoiqu'Elles ne puiiTent faire les fonctions de Médiateurs, refient ce-
pendant toujours portées à y contribuer tout ce qui dépend d'elles, dans
î'efperance que les efprits des deux Hautes parties ayant de l'inclination
pour la Paix , il fe poura trouver des moyens propres à faire celTer
les hoflilités & révivre la tranquillité & l'union entre elles. Que LL. HH.
PP. étant, par une eftime pour Sa M. Czarienne & pour fon amitié, prê-
tes à faire tout ce qui peut fervir au dit but, efperent que Sa M. Cza-
rienne, félon fon afecTion ordinaire pour cet Etat, & félon fon équité
rénommée , fera contente de ce qu'elles ont fait jufqu'ici dans cette
afaire : & comme elles font portées à rendre à S. M. Czarienne tous
les fervices les plus agréables , elle? font aufll perfuadées que fadite
Maj. n'exigera rien d'elles qu'elles ne puiffent faire, ou qui puiffe don-
ner à S. M. Suedoife , de l'Amitié & Alliance de la quelle elles ne fau-
roient fe départir fans de grandes raifons , de jufles fujets à fe croire
Pp 3 ofen-
302 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Amaires ofenfée. Mais que LL. HH. PP., comme elles font obligées d'entretenir
des Pko- f Amitié & Alliance avec S. M. Suedoife , tâcheront aufîi , autant qu'il leur
UkiesT e^ P°fflble » de donner à S. M. Czarienne des preuves de leur véritable
- — JL eitime pour Ton amitié, & compteront pour un grand bonheur fi elles
ont pu contribuer, ou le pouroient encore, à l'avancement d'un but aufli
falutair.e que le rétabliffement de la Paix &de l'Union de LL. MM. Cza-
rienne & Suedoife. Qu'il fera remis Copie de cette Réfolution par
l'Agent Rofenboom audit Sr. Ambaffadeur, pour fervir de Réponfe à
fes Mémoires ci-deffus mentionez ; que la Letre à écrire à S. M. Cza-
rienne lui fera pareillement rendue par le même, en le priant de vou-
loir la faire tenir à fon Maître.
Raport du Lundi i$. de Juillet 1701.
Raport T es Srs. Députez de la Province de Hollande & de Weflfrife ont
du 2f. JL/ propofé a l'Aflemblée, que les Députez de la Ville de Dort, au nom
Juillet. q je ja parc cje jeurs principaux ? avoient reprefenté à l'AlTemblée des
<ies Sgrs. Etats de la dite Province, d'avoir apris qu'on ne faifoit aucuns
Remparts le long du Bas-Rhin & de 1'Iflel, ni des Retranchemens pour
les couvrir, conformément à la Pétition du Confeil du 4. du paiTé, mais
qu'au contraire on creufoit un Canal au travers de la Betuwe pour diver-
tir le cours des Rivières, ce qui n'avoit jamais été propofé par aucu-
ne Pétition , bien loin d'y avoir été confenti par les Sgrs. Principaux.
Que des perfonnes entendues avoient trouvé que ce Canal avoit non-feu-
lement été commencé, mais que même la digue qui traverfe la Betuwe,
& particulièrement le IVaeldyck en deçà de Pandercn, avec la SaufTaïe de-
vant ceite digue dans la Rivière, étoit tracé pour régler là-defius l'ouvra-
ge commencé & l'achever s'il étoit faifable j & comme les Srs. leur Prin-
cipaux étoient entièrement perfuadez,que la diverfion des Rivières, fur le
pied ci-deflus marqué, ferviroit aufli au préjudice du négoce, à la dimi-
nution des Douanes du Pais, & à la ruine de plusieurs Villes, particuliè-
rement de celle de, Dort, les Srs. Députez avoient demandé de mettre
promtement ordre que l'ouvrage commencé, n'étant fondé fur aucune Pé-
tition ni Confentement, foit arrêté & le tout remis en fon entier, afin que
les Srs. leurs Principaux reftent en état de pouvoir contribuer aux befoins
de l'Etat. Que les dits Sgrs. Etats avoient trouvé bon de faire examiner
plus exactement la dite Propofition dans une Conférence, & de faire part
de tout à l'AiTemblée: Qu'en attendant eux Srs. Députez, ayant apris que
quelques Srs. Committez du Confeil d'Etat alîoient partir pour faire l'Iq-
fpection de ces Ouvrages , n'avoient pu s'empocher de prier , que les
dits Srs. Committez foyent chargez de s'informer du fait, & de rendre
compte au plutôt à LL. IIH. PP. comment & en quelle fituation ils au-
ront trouvé cet Ouvrage; & que pendant ces entrefaites on veuille don-
ner les ordres neceffaires poux faire cefler tous juites fujets de plaintes.
Sur-
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. 305
Surquoi ayant été délibéré, il a été trouvé bon, qu'il fera envoyé Copie Affaires
de cette Prôpofition au Confeil d'Etat, en le priant de s'informer par DES ri-°-
fes Committez pour l'Infpeélion des fufdits Ouvrages au fuiet du contenu *INCES-
, - tj rs j i« « «J r rt Unies.
de cette même Propolition , de communiquer au plutôt a Leurs Hautes —
PuiiT. leur Raport de la fituation de l'Ouvrage, & de faire en attendant
toutes les difpofitions propres à lever tout fujèt de plaintes. Les Sgrs. Dé-
putez des Provinces de Gueldre & d'Overyiîel ont pris Copie de la Pro-
pofition ci-devant mentionée pour être communiquée a leur AfTemblée.
Lettre du Confeil d'Etat aux Et at s -Généraux , avec le Rapport de
Jes Députez à r Examen des Travaux de la Betuwe ;
■ des 31. Juillet, g*? 2. Août.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS.
Nous envoions ci -joint à VV. H H. .PP. la Relation des Sirs, nos Lettre &
Committez qui ont fait l'Infpeclion des Ouvrages à quoi l'on tra- RaPP°rt
raille dans la haute Betuwe , efperant qu'elle donnera fatisfaction à f\ S?*
VV.HH. PP. A la Haie, ce 2. Août i7oi. ^L
A Bev enter Je 31. Juillet 170T.
; NOBLES ET PUISSANS SEIGNEURS.
Nous avons bien reçu à Arnhem par un Exprès la Réfolution de
VV. NN. PP. du 26. du courant , par laquelle Elles nous ordon-
nent de nous informer fur ce qui a été propofé par les Sgrs. Députez
de la Province de Hollande & de Weit-Frife le tfi précédent au fu-
jet des Ouvrages commencez dans la haute Betuwe au de-là de Gent,
& d'en rendre compte au plutôt à VV. NN. PP. Pour cet effet, &
pour nous conformer aux Réfolutions de VV. NN. PP. du 6. &
18. du courant, tendantes à faire entreprendre le Retranchement dans
4a haute Betuwe, plus amplement mentionné dans la Pétition de VV.
NN. PP. du 4. Juin , & dans la Réfolution prife là-deflus par LL.
HH.PP. le 20. du même mois, nous nous fommes rendus avanthier fur
les lieux , & nous avons trouvé, que le Retranchement, y tracé par le
Sr. General Coehoorn pour la fureté du pais , commence depuis le
M/acldyck un petit quart d'heure en deçà de Panderen, & traverfe la Be-
tuwe jufqu'au Leppehgraft près du. Rhin au-delà ÏÏAngeren: que fuivant
le raport des Ingénieurs qui s'y trouvent fa longueur étoit d'environ
iofo. toifes de Rhynland , & l'étendue réglée par le dit General Coe-
hoorn telle. que le deffein H. qui e(t entre les mains de VV. NN. PP.
le marque dittin&ement , afin de ménager en quelques endroits le ter-
rain qui pourroit être avantageux à la défenfe dudit Retranchement :
que pour trouver les terres neceffaires à la hauteur , épaiffeur , & le
talus du Retranchement y & le mettre par confequent en, dû état de
de-
\t\rrs-
ÙSIESJ
304 MEMOIRES, negotiations, traitez, et
Attmksa defenfe < on a jugé d'une né^efTué indifpenfable de creufer devant ce
des !'«"- Retranchement un foffé , improprement nommé ailleurs un canal , de
telle forte pourtant eue ce folTé ne commence qu'à 4. toiles de li Di-
gue de IVacl vers le dedans: Que le Retranchement touchera à la Di-
gue, où l'on a projette d'élever une bonne Redoute ou autre Fort pour
défendre les' avenues de la Digue. Quant a la Digue de JVasl même
on n'y a abfokiment rien fait , & les dits Ingénieurs nous ont témoi-
gné d'avoir appris avec étonnement les bruits répandus & l'allarme pri-
fé comme fi l'on vouloit percer ladite Digue , piii [qu'il leur a toujours
été enjoint, très-poiitivement , de ne creufer qu'à une diftance de 4.
toifes de la Digue vers le dedans. Qu'à la vérité les Païfans de Guel-
dres , commandez & du depuis renvoiez, aiant travaillé du commence-
ment avec beaucoup de defordre & de confufion , avoient abatu quel-
ques arbres du côté intérieur de la Digue , & coupé quelques gazons
environ à un pied de -là , mais que cela avoit d'abord été arrêté , de
forte qu'il n'en fauroit ré lui ter aucun endommagement à la Digue. Le
côté extérieur de la Digue, & la Sauffaie devant elle, font comme elles
ont toujours été, à cela près que du tems que le Sr. Coehoorn s'y trouvoit
il a été fait dans la dite SaufTue, pour pouvoir d'autant plus commodé-
ment former le Retranchement, un tracement, mais fi petit qu'il ne mé-
rite aucune reflexion. Hors de cette SaulTaie il y a encore deux gros ou-
vrages de fafeinage, qui fervent à foutenir la dite Digue, de forte qu'à nô-
tre avis la Digue ell parfaitement bien conditionnée & garantie du côté
dudit Retranchement. La Digue qui traverfe la Betuwe a été ôtée, vu
qu'elle entreroit prefque diamétralement au milieu du Retranchement , &
le rendrait notoirement moins fort ; mais, cette Digue n'a aucun raporc
avec la Rivière de Wael , n'aiant été élevée que contre le Rhin; outre ce-
la, le terrain y eib aujourd'hui aufïï étendu & haut, & là où il ell le plus
bas , il efl bien pourvu d'amas de terre ; & cette Digue feroit en effet
inutile, quand même l'eau du Rhin deviendrait plus haute qu'elle n'a été
depuis plufieurs années. A l'endroit où le Retranchement aboutit au Rhin
on a fait une ouverture dans un bout de Digue qui y a été élevée pour cou-
vrir le terrain bas entre le haut & le médiocre, & on en a ôté en partie
le fommet. Suivant le raport des Ingénieurs, cette ouverture efl neceffai-
re pour le découlement des eaux de pluie , qui fans cela empécheroient
l'ouvrage du foffé dudit Retranchement, & on avoit commencé à ôter la
Digue môme de la largeur du foffé , afin de rendre le Retranchement plus
fort , fans que le cours du Rhin en feroit aucunement détourné. Outre
cela, on nous a encore reprefenté que ce qui a été ôté de ladite Digue
pourra être aifément rétabli lors qu'il feroit jugé neceffaire, auquel cas on
fuirait par des conduits & autres expediens faire découler les eaux, qui
. pourraient troubler les travailleurs au foffé du Retranchement.
Voici NN. & PP. Seigneurs l'Information que nous pouvons donner à
VV. NN. PP. fur la Propofition des Sgrs. Députez de la Province de Hol-
lande & de Wdl-Frife: nous nous croions de plus obligez de mander
que
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. $o$
que nous avons trouvé ledit Retranchement affez avancé des deux bouts, Affaires
& qu'en conformité des Ordres de VV. NN. PP. nous avons commandé DES 1ko"
tout l'ouvrage par toiles pour être achevé en dix femaines. Nous aurons UnieT"
l'honneur à nôtre retour de faire à VV. NN. PP. un ample Raport de tout JL
cela, de même que de l'ouvrage du Retranchement près de Doesbourg,
lequel nous avons commandé hier. En attendant, nous avons, avant de
fortifier le Retranchement au-delà de Gent, donné des ordres précis aux
Ingénieurs, à qui la direction de cet ouvrage ell confiée , de ne rien faire
aux Digues refpectives du Wael & du Rhin, afin prévenir par- là tous juf-
tes fujecs de plaintes, ce qu'ils fe font engagez d'obferver exactement.
Guillaume d'Egmont van der Nieuwenburq.
J. L. v. Doys. J. Hop.
Refolution du Mardi p. d\4oât 1701. avec une de Groningue
du 5". duâit Mois.
Lu à l' AfTemblée une Requête de David Rutgers, comme ayant pleinpou- RefoHi-
voir des Mennonites Proteltans , qui ont demeuré dans le pays de tiondu
Juliers & fous la Domination de l'Electeur Palatin, laquelle porte, que 9. Août.
LL. HH. PP. étoient convenues par l'Accord y allégué du 18 Octobre
1700. conclu avec le Sr. Heuerman Envoyé du dit Electeur, fur les pré-
tendus fubiîdes de l'année 1676. de payer à S. A. E. une fbmme de
60000. Risdales, moyennant qu'il foit payé préalablement aux dits Men-
nonites 20000. Risdales ; répréfentant, qu'une grande partie de ces deniers
de la caiiTe pour les pauvres des dits Mennonites avoit été employée.
en faveur de leur frères réfugiez , & que les 20000. Risdales ci-deiTus
mentionnez avoient été accordez par S. A. E. fuivant l'affignation de
l'Envoyé Jean Arnold Bywegh jointe à la dite Requête, lequel avoit
été autorifé exprefTement à cet effet. Que pour ces raifons, ils fuplioienc
que LL. HH. PP. veuillent bien charger le Confeil d'Etat d'expé-
dier des Ordonnances fur les Revenus courans , pour faire payer les dits
20000. Risdales au fusdit Rutgers félon fa procuration & fes documens.
Surquoi il a été trouvé bon qu'il fera envoyé copie de la dite Requê-
te & de l'affignation y annexée au Confei! d'Etat , en le priant , de
faire expédier une Ordonnance de 20000. Risdales en conformité de la
dite affignation , pour être payez au fuppliant des 60000. Risdales qui
ont été mifes au profit de S. À. E. Palatine pour des fubfides arréragez,
fur la Pétition de 282960. fis. en Date du 4 Juin dernier.
Ayant été de nouveau propofé à l'AiTemblée le projet compris dans la
Refolution de LL. HH. PP. du zp. de Novembre 1697. pour trouver les
derniers neceffaires au payement des dettes de la dernière guerre , favoir
trois millions pour les fraix de l'armée, quinze cent mille florins pour les
rnagazins de fourages , & douze Millions pour les armemens extraordi-
2 ont. XL Qq nai-
Affaires
jdes I'ro-
VINCES-
Unies.
$o6 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ, ET
naires , payables en divers termes , comme il a été plus amplement men-
tionné dans la Réfolution de LL. HH. PP. du. 27. de Novembre 1697.
defquelles fommes il n'a été negotié jufqu'à préfent que les deux premiers
termes, nommément deux millions pour les dettes des dits fraix, & un
million pour celles des Magazins de fourages , & les trois premiers ter-
mes , favoir fix millions pour les dettes des armemens extraordinaires de
la dernière guerre. Il a été trouvé bon après de mûres Réflexions, que,
mettant h part les délibérations ultérieures des confederez fur la négocia-
tion des trois derniers termes pour les dettes des armemens extraordinai-
res, de laquelle il a été fait mention dans ledit projet, il doit être négocié
pour le payement les dettes des fraix de l'armée & des magazins de fou-
rage, encore un million pour les premiers & cinq cent mille florins pour
les derniers. Que les Provinces refpeclives donneront un triple intérêt
par an des dites fommes à negotier pour être employé au payement des
intérêts, & au rembourfement des capitaux, jufqu'à ce que les intérêts &
les capitaux foyent entièrement aquités & rembourfés. Que chaque Pro-
vince fera taxée & obligée de payer ce triple intérêt à proportion de ce
qu'elle doit de fa quote-part à la Pétition faite pour les dits fraix de l'Ar-
mée & les Magazins j & que les Provinces feront à l'égard de cette Né-
gociation fujettes aux moyens de contrainte compris dans la Réfolution de
LL. HH. PP. du iy. Juillet 168 8- & du 16. Janv. 1696. & fera un Ex-
trait de cette Réfolution envoyé auConfeil d'Etat, en le priant & autorifant
de faire négocier en confequence par le Receveur gênerai le jeune d'Elle-
meèt les fommes y fpecifiées. Les Srs. Députez de la Province de Zelan-
de ont infifté fur les Annotations faites de la part de leurs Principaux fur
les négociations des précédens termes. Les Srs. Députez de la Provin-
ce ce Frife ont confend à la fufdite conclufion fous les reflriclions
comprifes dans la Réfolution des Sgrs. Etats leurs Principaux, délivrée
a l'Aflemblée fur ce fujèt.
Les Srs. Députez de la Province de Groningue ont remis à l'Aflem-
blée la Réfolution des Sgrs. Etats leurs Principaux, par laquelle ils con-
fentént au troilième Etat extraordinaire de Guerre.
Extrait du Regître des Réfoluîions de LL. NN. PP. les Sgrs. Etats
de la Province de Groningue ; du Vendredi >. d'Août 1701.
Suit la Proportion faite à l'Aflemblée , & fur la concurrence des Sgrs.
des Ommelandes , les Sgrs. Etats de la Province de Groningue ont
plus étendu leur consentement au troifiéme Etat Extraordinaire de
Guerre , en fe chargeant de l'Etat Major Extraordinaire du Régiment
du Landgrave de Hefle-Cafleî mis à la Répartition de cette Province.
Les Srs. Députez de la Province de Groningue ont remis à l'Af-
(emblée la Réfolution des Sgrs. Etats leurs Principaux, par laquelle ils
confentènt au troifiéme terme de la Négociation pour les dettes
des
RESOLUTIONS D'ETA T, M. DCC. I. 307
des fraix de l'Armée & des Magazins de Fourages de la dernière Affadi*
Guerre. DFS Pro
De plus, les Srs. Députez de la Province de Groningue ont porté Unies!"
à l'AiTemblée la Réfolution des Sgrs. Etats leurs Principaux touchant le
fourniiïement de leur quote-part aux Pétitions de deux Millions pour la
provifion des Magazins , & de 74547/. florins pour les befoins d'un.
Camp.
Réfolution du Mecreài 10. Août 1701.
Le Sr. Confeiller Penfionaire a raporté à PAfTemblée, que S. M. le Roi Réfolu-
de la Grande Bretagne avoit recommandé très-ferieufement le promt tlon du
payement des erres pour lei troupes prifes à la folde de la Republique fu°r'de°sut"
de l'Electeur Palatin, puifqu'on faifoit des dificultés de faire mettre ces Erres de
troupes en marche tant que les dites erres ne fulTent payées conforme- Troupes,
ment à la Capitulation. Sur quoi ayant été délibéré, il a été trouvé bon
que les Sgrs. Etats des Provinces deZelande & de Groningue feront priez
par Lettres de faire les difpofitions neceflaires, afin que les Ailignations
pour le payement d'une partie des erres des troupes Palatines , les-
quelles Affignations ont été données fur leur quote-part aux Pétitions
pour les erres & les fraix de Troupes Etrangères , foient payées fans plus
de délai , afin que faute de payement la marche des dites troupes ne
foit retardée plus long-tems.
Raport du Mardi , 16. 1701.
Les Sieurs van EfTen & autres Députez de LL. HH. PP. pour les Af- Raport,
faires des Finances ont, en confequence de leur Réfolution commiflb- j|u ?6'
riale du 12,. de ce mois, examiné conjointement avec quelques Srs. Com-
mittez du Confeil d'Etat la Lettre du dit Confeil d'Etat du 10. précèdent
& les Refolutions y jointes des Srs. Députez des Provinces de Gueldre,
d'Utrecht, & d'Overyffel prifes des Srs.Committez du Confeil d'Etat, qui
ont été dans les fufdites Provinces, & lesquelles concernent la fomme de
ce qui doit être payé par les Sgrs. Etats de leurs Provinces par deïïus
leur quote-part à la fomme de 770. mille florins demandez pour les ouvra-
ges le long du Bas-Rhin & de l'Iflel, & du côté du Grebbe-SIuys & d'A-
mersfort; ont raporté à l'Affemblée, qu'eux Srs. Députez feroient d'avis,
que les fufdites Provinces , ayant payé leur quote-part à la dite Pétition
de 7f o. mille florins , pouvoient rabatre ce qu'elles payeront de trop pour
ces ouvrages, favoir fur la moitié de leurs quote-parts à la Pétition pour
l'Equipement extraordinaire de l'année courante de la fomme de 2716800.
florins, de plus fur la moitié de leurs quote-parts à la Pétition de 945)500.
florins pour la Condruclion de 12. nouveaux VaifTeaux de Guerre, & à
Q_q 2 celle
3o8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affiftftis celle de 715517- florins pour apareiller 18. Vaiflèaux de Guerre, faite
joj-s Pko- j'une g l'autre le 22. Janvier de cette année, & à la Pétition faite le 27.
TiNCEs- ^g juj{}et pafl*é de 706860 florins pour l'équipement extraordinaire de 16.
^* Fregatr.es; cV, au cas qu'on ne pût faire bon le furplus de la moitié des
quote-parts des dites trois Provinces aux Pétitions fufmentionnées, qu'a-
lors Elles peuvent difcompter ce qu'elles ont payé excédant la moitié de
leurs quote-parts aux dites Pétitions , fur leurs quote-parts à deux millions
demandez pour ies Magazins , & aux 749475". flor. de même qu'à un
million de florins pour les befoins d'un Camp. Surquoi ayant été délibéré,
il a été trouvé bon , que Copie du précédent Raport fera envoyée aux Sei-
gneurs Etats des Provinces refpeclives , en leur demandant de vouloir fe
déclarer au plutôt fur ce fujet, comme aulil de confentir aux Pétitions fufdi-
tes pour autant qu'ils ne l'ayent encore fait à quelques-unes d'icelles, de
même que de fournir au Comptoir du Receveur General le reliant de leurs
quote-parts qui ne fera pas difcompté de la manière ci-deffus. Et que
l'Extrait de cette Réfolution de LL. II H. PP. fera envoyé à S. Maj.
Britannique, la priant d'appuyer par fon très puiffant crédit auprès des
Seigneurs Etats des Provinces refpeélives ce qui a été dit ci-devant.
Les Srs. Députez de la Province de Zeîande ont déclaré fur le fcf-
dit Raport de n'avoir pas encore confenti à la Pétition qui a pour prin-
cipal objet les Retranchemens , & de confentir ainlï encore moins à ce
qui a été rapporté ci-delfus, mais d'en referver expreffement la libre De-
libération aux Sgrs. Etats leurs Principaux; les Srs. Députez des Pro-
vinces de Gueldre, & d'Utrecbt, comme auffi ceux de celle d'OveryfTeL
ont à la refomption ref-rvé pareillement la libre Délibération aux Sgrs»
Etats leurs Principaux.
Réfolution du Lundi , 22. Août 1701.
Réfolu- -f^\v ï le Raport des Srs. van ElTen & autres Députez de LL. IIM. PP.
Tf'si1.'. V^ pour les Affaires des Finances, ayant examiné une Lettre du Con-
feil d'Etat y jointe une autre Lettre des Sgrs. Etats de Zelande, dans
laquelle ils déclinent le payement des deux Àffignations l'une de 44806 .fl.
$\ d. & donnée aux Regimens de Meklembourg pris à la folde de l'Etat,
& fautie de 79186": 2.: 9. & donnée aux autorifez de S. A. E. Pala-
tine pour les Troupes qu'on attend de fa part, non puifqu'il y ait à redi-
re fur ces Affignations, mais puifque les Provinces qui ne contribuent
rien à l'équipement n'ont pas payé ce qu'elles dévoient au Collège de
FAmirauté de Middeîbourg à caufe de l'Equipement extraordinaire pour
l'année courante. Surquoi ayant été délibéré, il a été trouvé bon & en-
tendu , qu'on repréfentera par une Lettre aux Seigneurs Etats de la dite
Province de Zelande , qu'il e(t de la nature & de l'ordre des finances, que
les deniers de chaque confentement foient employez à tel fujet pour lequel
On les a demandez, fans les mêler les uns avec les autres, ou divertir les
zz. Aoû'
deniers
Unies.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. 1. 30?
deniers d'un confentement deflinez a des chofes d'une autre nature; qu'à Affairm
]:i vérité les fufdits Seigneurs Etats de Zelande ont commencé dans la des pk0-
derniere Guerre à s'écarter de ces fondemens au regret de LL. liH.PP. y*1*?**
qui regardent cela comme une affaire de pernicieufe confequence , mais
qu'alors ils ne font pas allez plus outre qu'en employant leurs quote-parts
aux Pétitions pour les fraix de l'Armée et pour les Magazins de Fourage ,
Pendons en quelque façon conformes par raport à la manière & au tems
du payement à celles pour les Affaires de la Marine: que cependant, lef-
dits Seigneurs Etats allant à préfent plus loin,& prétendant, en revange
des défauts des Provinces pour les Affaires de la Marine, leurs quote-parts
aux confentemens, qui demandent un plus prompt payement, tels que
font les erres & les deniers de tranfport des Troupes prifes à la folae>
cela eft non feulement contraire à Tordre des finances , mais même doit
être d'un très mauvais effet pour le fervice du Pais, comme il vient de
paroitre par le retardement desTroupes, pour lefqueiles on a contracté a-
vec l'Electeur Palatin , qui font retenues faute du payement des Afîigna-
tions données à leur égard, <3c que le crédit de l'Etat ne peut que tomber
entièrement, quand on ne fatisfait point aux Conventions, Capitulations,
& Contracts faits, tant avec des Princes étrangers qu'avec des particuliers,
fur des prétextes ou difputes dont fe fervent les Provinces, ou qui fe lè-
vent entre elles, lefqueiles ne regardent nullement ceux avec qui l'on a
contracté au nom de l'Etat ; que le non-payement defdites Afïignations
paroît d'autant moins fondé, que parmi les Pétitions, fur lefqueiles les fuf-
dits Seigneurs Etats tachent de difeompter ce payement, il y en a de
trop fraiches, pour y avoir encore pu confentir, comme par exemple celle
pour les Fregattes, qui n'a été faite tout au plus que depuis trois femai-
nes, & généralement fur dételles, pour le payement & acquit entier chC-
quelles fuivant l'ordre de fEtat le tems n'eit pas encore éclui, & outre
cela, quand même quelque difeompte pouroit avoir lieu, que les fufdits
Seigneurs Etats ne pourroient , du moins par raport aux défauts des
Provinces qui n'équipent point, retenir plus que ce que l'Amirauté de
Zelande doit avoir des quotes-parts des mêmes Provinces j car, quand
même l'Equipement feroit pleinement fait conformément à la Pétition,
que pourtant les fufdits Seigneurs Etats femblent vouloir retenir beaucoup
plus, comme on peut voir, quand on joint enfemble les Pétitions pour
les erres & les deniers de tranfport des Trouppes prifes à la folde,
celle pour les Retranchemens dans les Provinces de Gueldre , d'Utrecht,
& d'Overyffel,& les deux qui ont été faites cette année pour les fraix
de l'Armée. Que LL. HH. PP. ont exhorté ferieufement à diverfes re-
prifes,& encore depuis peu, les Seigneurs Etats des Provinces, qui n'é-«
quipent point, à acquiter leurs quote-parts aux Pétitions pour les Affai-
res de la Marine, mais qu'Elles prient aufii les fufdits Etats qu'en con-
fideration des raifons ci-deffus , ils veuillent plus différer de contribuer
par leurs quote-parts dans les Pétitions pour les dictes erres & deniers
de tranfport des Troupes engagées aux Afiignations ci-devant mention-
Qq 3 nées,
pu MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AîtAtRss nées , afin que le fervice du Pays n'en foie point retardé, & que les
des Pro- p]a'mtes ceffent, qu'on fait journellement fur le non-payement des dites
tinces- Aflignationsj qu'on fera part de ceci à S. Maj. Brit. en la priant, de
- ■ , - — vouloir , en qualité de Stadhouder de la dite Province deZelande, apuyer de
fon mieux les bonnes intentions de LL. HH. PP. à cet égard 5 que de
plus les Seigneurs Etats de Groningue, à la charge defquels une pareille
Aflignation a été donnée pour payer une partie des erres & des deniers
de transport des Troupes Palatines, laquelle n'eft pas encore fatisfaite,
feront pareillement requis ferieufement d'acquiter fans plus de délai ladi-
te Afiignation.
Les Srs. Députez de la Province de Zelande fe font rapportez aux Re-
marques qu'ils ont faites ci-devant fur ce fujet.
Lettre de V Amirauté fîAmfterdam aux Etats-Généraux.
Lettre de VTous avons reçu la Refolution de VV. HH. PP. & la Lettre tendan-
l'Ami- JJ%J te a avoir prêt vers le Printems prochain nôtre Contingent à fix
<?ïtCft - Vaifleaux 'du premier rang, 12. du fécond, 18. du 3me & 12. du 4^,
dam. tous doublez pour pouvoir fervir par-tout -, & nous trouvons pouvoir fatis-
faire de nôtre côté a l'intention de VV. HH. PP. fi nous recevons à tems
les reftans des Subfides extraordinairement confentis dans les années pré-
cédentes, de même que d'autres deniers , fur lefquels il a plû à VV.HH.PP.
de faire égard dans ladite Refolution du 23. du courant, & d'y exhorter
les Provinces qui y font interelfées. Nous en attendons l'effet, afin qu'au
défaut de cela nous ne foyons pas obligez de différer le commencement du
dit Equipement, dequoi nous Jaiffons les fuites à la grande Jageffe de
VV. HH. PP. les priant de vouloir encore recommander auprès des fuf-
dites Provinces le confentement demandé & le fourniffement des deniers
mentionnez dans ladite Refolution, afin qu'elles prennent fur ce fujet une
Refolution finale.
Aufïi fommes-nous obligez de demander un confentement pour les fub-
fides neceffaires à l'entretien des Fregattes envoyées au Printems aux Wey-
lingues pour la fureté de la Province de Zelande, & employez de V V.HH. PP.
pour la Flotte de l'Etat , defquels fubfides il y a long-tems que les Collè-
ges interelTez ont remis par Mémoire le montant. Nous prions enfin,
qu'on nous fournifle aulli les Subfides pour les VaiiTeaux de la Flotte de
l'Etat fous les Lieuttnans Amiraux Allemonde & Callembergh fervans
cette année; nôtre Contingent en e(t une fomme de $f6ooo. florins,
mais nous n'avons reçu jufqu'à préfent là-deiTus que de la Province de
Hollande & de Wellfrife une fomme de 325000. fl. & de la Province
d'Utrecht ioj-fi fl., fans avoir rien touché des Provinces de Gueldre,
d'OverylTel, & de Groningue, lequel fourniffement VV. HH. PP. veuil-
lent recommander plus particulièrement fuivant qu'EUes le jugeront ne-
ceflaire. Fait àAmiterdam, le 22. Août 1701,
Réfo-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 3n
Affaires
Réfolution du Lundi 22. Août 1-701. Minces!"
Uàies.
Ouï le Raport des Srs. van Effen & autres Députez de LL. HH. PP.
pour les Affaires des Finances, ayant examiné la Lettre du Refi- Réfoiu-
dent Kuyften , écrite à Itzehoe du 11. précèdent, addreffée au Greffier Fa- tlon' ™
gel,& portant avis & entr'autres un Projet fur la Proviiion neceffaire
pour le tranfport de l'Infanterie, favoir, qu'il feroit donné à bon compte
à chaque Compagnie 200. écus & qu'alors chacun auroit foin pour fun
particulier de faProvifion, comme auili que LL. HH. PP. voudroient
accorder aux Officiers autant que le tranfport de leurs chevaux par des
Vaiffeaux pourroit coûter, & qu'ils employeront cet argent à les envoyer
par terre, & que de plus il étoit demandé un Paffeport de LL. III I. PP.
pour les Draps, Bayettes, Fil , Chapeaux, Bas, &c. pour l'habillement &
la monture des Soldats, lequel à caufe de la brièveté du tems ne pour-
roit être fait & achevé avant le transport. Surquoi ayant été délibéré, il a
été trouvé bon, qu'il fera répondu audit Refident Kuyften, que LL.
HH. PP., pour ce qui les regarde en particulier, font d'intention de fai-
re payer aux Regimens , lorfqu'ils viendront au fervice de S. M. Britan-
nique, & de l'Etat, la folde du premier mois, faifant plus de 200. écus
par Compagnie, & qu'ainfi LL.HH. PP. jugent, qu'il fera le moins coû-
teux pour S. M. Britannique & pour l'Etat, & le plus avantageux aux
Troupes, que ces Troupes fe pourvoyent elles-mêmes de leur provifion ;
que pour à l'égard d'une fomme réglée à donner pour le tranfport de leurs
Chevaux, LL. HH. PP. n'y ont rien à redire pour leur particulier ; mais
que lui Refident, conjointement avec le CommiiTaire de Bye, délibéreront
fur cette Affaire avec le CommiiTaire ou CommilTaires Anglois, & con-
certeront enfemble & feront ce qu'ils trouveront le plus convenable au
fervice de S. M. Britannique & de LL. HH. PP. Que déplus il fera ex-
pédié un Paffeport en due forme, & envoyé audit Refident Kuyften, pour
que les Draps, Bayettes, Chapeaux, Bas, & autres Etoffes fervant à
l'habillement & à la monture desdites Troupes puilTent entrer librement
& fans payer les Droits du Pays-, mais, que lui Refident aura foin, autant
qu'il eft potTible , qu'à cette occafîon il ne fe commette point de fraudes
avec des Marchandifes.
Ouï le Raport des Srs. van EfFen & autres Députez de LL. HH. PP. Autre»
pour les Affaires Etrangères , ayant, en confequence de leur Réfolution Com-
mifforiale du 16. & 20. du courant, examiné la Lettre du Refident Goes
du 9. & celle du Commiffaire de Bye du 16. Août, touchant la difficulté,
qu'il y auroit pour ledit CommiiTaire d'aller prendre le Régiment à Olden-
bourg & la Cavallerie près du Tolspiexer, comme devant fe faire prefque
au même tems. Surquoi ayant été délibéré, il a été trouvé bon, qu'il fera
répondu audit Commiffaire de Bye, que vu que Sa Maj. Brit. a pareille-
ment nommé des Commiffaires pour le tranfport defdlts Regimens , il
con
3i2 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires concertera avec eux fur ces Affaires, & les réglera ainfi qu'ils- le pourront
des Pro- je pius commodément.
VïNCES
Unies.
Lettre du
Confdl
4' Etat.
Lettre du Confeiî (TE tût touchant les Frontières ; du 27
Août 1701.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
Comme il importe beaucoup à VV. HH. PP. d'être informées de
l'Etat des Frontières , afin d'y pouvoir faire égard dans leurs Consta-
tions fur la fureté des Provinces-Unies , le grand objet de leurs Délibéra-
tions \ nous nous fommes crus obligez, non de reprefenter à VV. HH.
PP. comme une nouveauté , mais de les faire reflouvemr du mauvais état
de l'Etape des Magazins de la Généralité, & de ceux qui font dans la plu-
part des Frontières, n'y ayant été fait aucun ou peu de changement depuis
nôtre dernière Lettre, attendu que depuis ce tems-îà les Provinces ont
fourni de fi petites fommes fur les 2 Millions accordez pour le fournifie-
ment des Magazins, qu'il s'en faut encore plus de 100 mille florins pour
le payement des Dettes déjà contractées. Nous y ajouterons feulement,
qu'il elt notoire , qu'avant la demande des dits deux Millions, les Maga-
zins étoient également mal pourvus ;, qu'il parok quafi palpablement par
la Pétition même, que deux Millions ne font nullement proportionnez aux
grands défauts dans les Magazins , & que pour prouver que les Magazins
doivent être encore fort mal-pourvus, il ne faut pas d'autre marque que la
Lille ci-jointe des fourniffemens des Provinces fur la dite Pétition , à l'é-
gard de laquelle Lille il plaira néanmoins à VV. HH. PP. de remarquer,
que quelques Provinces ont bien four-ni , ou promis de fournir, de l'Artille-
rie & des Munitions , lesquelles n'y font pas fpecifiées , mais que ces Pro-
vinces ne iaillent pas pour cela de devoir encore beaucoup fur leurs quo-
tes-parts. Fait à la Haye, le 2.7. Août 1701.
Kêfolutïon des Etats -Généraux, en renfermant 2. des Etats de
Grorimgue, du 27. Août 1701.
Réfolu- T E préfent Sr. Député de la Province de Groningue a remis à l'Affem-
tiondes 1— / blée la Refolution des Seigneurs Etats de la dite Province fes
Etats de Principaux, par laquelle ils confement au Fourniffement de 84045". flor.
fur la Pétition de \6o^-]q-j. flor. pour les. erres & deniers de tranfport
des Trouppes prifes à la folde de l'Etat.
Gronin-
gue fur
leFour-
nule-
ment.
Extrait
U;ms.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. |i|
Affaires
Dts Pro^
Extrait du Livre de Réfolutions de LL. NN. PP. les Seigneurs V,NCES-
£ta/j *fo /# Province de Groningue \ du Samedi 27.
Août 1701.
Aiant été délibéré fur le premier Article de la Propofition touchant
le FournilTement demandé du Contingent de cette Province de la
fomme de 84045. flor. à la Pétition de 1322747 flor. & à celle de 2825*60.
flor. faifant en tout 1605707. flor pour les erres & deniers de tranfport
des Troupes engagées en confequence de la Lettre de LL. HH. PP. du
10. Août dernier, pour fervir conformément à la Capitulation à avancer
la Marche des 3200 Hommes d'Infanterie, & 1200 de Cavalerie qu'on a
pris de l'Ele&eur Palatin, les Seigneurs Etats de Groningue ont inlifté à
la Réfolution du 16. Juillet dernier, par laquelle il étoit arrêté, qu'on dref-
feroit l'Ordonnance demandée en faveur du Sr. Comte de NaiTau-Wei! bourg
fur l'Affignation de 84045 flor. donnée du Receveur General , moyennant
qu'elle puilfe paiïer en Compte fur les Pétitions pour les deniers de tranfport
& les erres des Troupes étrangères ; & les Sieurs Députez font autori-
fez de faire les payemens là-deflus, à tems & par termes, des premiers
deniers qui entreront en caiffe.
Le préfent Sieur Député de la Province de Groningue a remis à l'Af-
femblée la Réfolution des Seigneurs Etats de la dite Province Ces Princi-
paux, par laquelle ils confentent à la Pétition d'un Million pour les frais
de l'Armée de l'année courante.
Extrait du Livre des Réfolutions de LL. NN. PP. les Seigneurs
Etats de Groningue; du Samedi 3 27. Août 1701.
Aiant été délibéré fur le 2 Article de la Propofition dans laquelle
LL. HH. PP. par leur Lettre du 16. du courant avoient demandé
le FournilTement de la quote-part de cette Province à la Pétition de
749477 fl. pour les neceflkez d'un Camp à former cette année, de même
que le Confentement à la Pétition d'un Million de flor. faite pour la même
fin, les Seigneurs Etats de Groningue , en confequence de leurs Réfo-
lutions Provinciales ci-devant prifes fur ce fujet & confirmées à l'Aflem-
blée des Etats du f. Août dernier , ont non-feulement confenti à la dite
Pétition de 749477 flor. pour les befoins d'un Camp de cette année , mais
aufïï outre cela a celle d'un Million faite pour la même fin, fous l'expreffe
condition réitérée, que les deux Ingénieurs , un Bombardier, & »f Ca-
nonmers, étant actuellement au fervice du Pays,& étant omis jufqu'à pré-
fent dans l'Etat de Guerre, malgré les initances renouvellées, foient por-
Tome XL Rr tez
Affaires
nés Pro-
VINCF.S-
Umfs.
lat.
514 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
tez à la charge de la Généralité, en Diminution de la quote-part de cette
Province.
Pétition du Confeil d'Etat-, du 2. Septembre 1701.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
•Pétition XTous avons par la Pétition du 17. Janvier dernier propofé à VV. HII.
duCon- J[\J pp une Négociation de 2 autres [Millions fur le fonds, fur lequel é-
J^1 dE" toient 'levez les quatre dans l'année 1688 , & après leur rembourfement,
les 2940836: 13 .-4. afin de pouvoir continuer à fortifier les Places, aux-
quelles on travailla alors, & même de pouvoir en entreprendre quelques au-
tres, en attendant que les Confederez délibéreraient fur un fonds fuffi-
fant à trouver pour pouvoir mettre enfin en fureté les Frontières du Païs,
lequel dernier point étoit proprement le but de la Pétition, comptant que
ce fonds provifionel fuffiroit pour le moins jufqu'à la fin de l'année, & que
vers ce tems-là les Confederez termineroient les Délibérations fur le prin-
cipal point,
Mais , comme ces Délibérations font encore différées, fans doute à caufe
d'autres Délibérations de pas moindre importance, dont les Confederez
ont été occupez du depuis , & que la Conclufion en eft peut-être encore
fort éloignée , le fonds Provifionel eft déjà debourfé contre l'état que
nous fîmes alors; & il y manque des centaines de milliers, fi l'on doit con-
tinuer les ouvrages auxquels on travaille & qui peuvent & doivent être
achevez avant l'hiver , à moins qu'on ne veuille négliger la fureté du
Païs.
Et il n'efl pas étonnant, Hauts & PuiiTants Seigneurs, qu'il y manque
des centaines de milliers, carie danger qui menaçoit l'Etat a tant aug-
menté depuis la Pétition , qu'il n'y a point de Frontière , du moins au-
cune qui eft tant foit peu expofée , pour laquelle nous n'ayons été obligez
de faire de groffes depenfes , les défauts des Fortifications n'étant vus
pour la plupart que quand il s'agit de les défendre: à peine même a-t-on
trouvé un Polte ou Avenue, (car nous avons fait examiner tout exacte-
ment), pourvu dans la Guerre d'Efpagne d'un Fort ou Redoute, qu'on
n'ait jugé neceiTaire de fortifier félon la manière d'aujourd'hui , enforte
qu'il ne faut pas s'étonner, que deux Millions foient déjà abforbez cette
année pour ces Ouvrages , fans y fuffire. Si les Provinces n'étoient (1 fort
embarafiées à trouver les deniers neceffaires pour le courant de l'année,
qu'il n'y a pas d'aparence d'avoir des Comptoirs des Provinces de prompts
Subfides pour les Fortifications , nous n'aurions garde de propofer une
troifième Négociation fur le même Fonds, fur lequel les deux précéden-
tes ont été faites; non-feulement, puifque le Comptoir de la Généralité
fe trouve trop chargé pour ce Fonds à proportion des Provinces , comme
nous croyons l'avoir clairement démontré ci-devant, & qu'il ell fort dan-
gereux
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. jif
gereux dans cet état incertain des affaires du Pais de l'engager encore Amiasa
quelques années pour le fourniflement d'une Somme fi confiderable; mais MS Pro".
principalement auîîi pareeque l'entretien de tant d'Ouvrages nouveaux, unm»
qui fe font aux Frontières dans le RefTort de la Généralité, eft une char- —
ge nouvelle & onereufe, qui tombe fur (es Revenus du moins aufïi long-
tems que le fonds du Comptoir General pour les Fortifications hors des
Provinces continué à fervir au payement des Capitaux & Intérêts, & que
les Confederez ne confentent point à quelque nouveau fonds à la place
d^ celui-là.
Mais, comme nous ne voyons point moyen de trouver de l'Argent par
une autre voye, nous avons jugé devoir préférer la fureté du Pais à tou-
tes autres confiderations , & que fi un des deux doit courir danger, ou le
Pais d'être continuellement expofé à l'ennemi, ou le Comptoir-General
de l'Union de n'être pas fecouru par les Provinces, comme il court grand
danger en cas d'une Guerre inattendue, la différence eft trop grande en-
tre les deux, pour ne pas propofer à VV. HH.PP. une Négociation d'un
autre Million jo. mille cent & foixante <& trois flor. 6. f. 8. d. fur le mô-
me fonds , & fous les mêmes engagemens & accords, fur lequel & fous
lefqueis les deux Négociations précédentes du 30. Juin 1698. & du 31. du
Mois pafTé ont été refoluô's : alors le fonds fera chargé de fîx Millions , Cx
par confequent fi fort qu'il ne pourra pas raporter double intérêt, & que
îes Confederez feront obligez de ne lever plus de deniers là-deiTus, du
moins pas plutôt qu'après quelques années.
Et puifqu'il manquera encore beaucoup vers l'année qui vient, lorfque'
]e nouveau fonds fera debourfé pour mettre les Frontières dans une due
defenfe, àcaufe de leur nombre & de leur grande décadence, nous prions
qu'on délibère au plutôt fur le moyen de trouver encore un fonds du moins
de trois Millions.
Le degré de tranquillité , où font les Provinces & leurs bons habi-
tans contre une Invafion fubite , depuis que non feulement la Milice eft
augmentée, mais que les Frontières font aufîimifes en meilleur état de de-
fenfe, fait voir l'utilité de la depenfe pour les Fortifications, puifqu'autre-
ment la fureté du Pais dépend de la décifion d'une Bataille. C'eft pourquoi
nous ne pourons que nous attendre à des Réfolutions promptes & defirées
fur cette Pétition , tant par raport à la Négociation d'encore une Somme
de ioyoi6$ : 6: 8. qui eft neceffaire d'être arrêtée au plutôt, qu'à l'égard
d'un autre Fonds. Nous prions auffî VV. HH. PP. qu'EUes veuillent, en
envoyant cette Pétition aux Provinces, l'apuyer le plus efficacement, & les
exhorter très ferieufement à ne pas oublier ni négliger ce point de leur
fureté , pendant qu'EUes délibèrent avec un foin infatigable & non fans
fuccès fur d'autres points qui les regardent. Fait à la Haye, le 2. Sept*
1701.
Rr 2 ; Rcfc
Affaires
des Pro-
vinces-
Unies.
Réfolu-
tion du
22.
116 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Rêfolution du 22. Septembre ; avec une des Etats de Hollan-
de du 16 y £sP un Mémoire de Mr. dIEllemet
du 20. Septembre 1701.
Les Srs. Députez de la Province de Hollande & de Wefl-Frife ont
remis à l'Aflemblée, & y ont fait lire, la Rêfolution des Seigneurs
Etats leurs Principaux, par laquelle ils confentent à la Pétition du Con-
feil d'Etat , & en confequence de cela au fourniiTement de leur quote-
part aux fommes qui, fuivant le dernier Traité, doivent être payées au Roi
de Dannemarc & pour l'entretien de fes Troupes ; fuivant la Rêfolution
ci - jointe.
Extrait des Réfolutions des Seigneurs Etats de Hollande & de
Wefl-Frife dans VAffemblée de Leurs Nobles gjp Grandes
Fuiffances , le Vendredi 16. Septembre 1701.
Ayant été délibéré fur la Lettre des Seigneurs Etats -Généraux des
Provinces -Unies des Pais -Bas, écrite ici à la Haie, le 5. du cou-
rant, à laquelle étoit jointe une Pétition du Confeil d'Etat du 2. pafle
portant une Supputation exacte des articles qui doivent être payez de la
part de Tritat pendant cette année pour fatisfaire au Traité dernièrement
conclu avec le Roi de Dannemark & qui ont été envoyez aux Membres
refpeclifs; les Seigneurs de la NoblefTe , de même que les Députez des Vil-
les refpeétives , ont, au nom & delà part des Bourguemaitres & Eche-
vins de ces Villes, confenti & accordé, ainfi que comme LL. NN. &
GG. PP. confentent par la préfente à la dite Pétition ou Supputation des
articles fufdits : & de plus il a été trouvé bon & entendu, que les Srs.
Confeillers Committez de LL. NN. & GG. PP. feront chargez & autori-
fez, comme ils font chargez & autorifez par la préfente, de fournir en con-
formité les deniers requis au Comptoir General de l'Union.
Surquoi ayant été délibéré, il a été trouvé bon & arrêté, que les Sei-
gneurs Etats des autres Provinces feront encore exhortez & requis ferieu-
fement de fournir en confequence de la fufdite Pétition & de la Suppu-
tation y comprife leurs quotes-parts fans le moindre retardement au Comp-
toir du Receveur General.
Mémoire du Receveur General.
LE foufîigné Receveur General des Provinces- Unies des Païs-Bas,
pour obéir à la Rêfolution de VV. HH. PP. du o. du courant, donne
Mémoire
de Mr.
mct c avec tout le dû rçfpect fes conGderations & avis fur le Mémoire du Sr.
Com-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 317
Comte de Goes, Envoyé Extraordinaire de S. M. Imp., préfenté à l'Etat Affaire»
demandant la Garantie de VV. Hli. PP. pour une Négociation d'encore ms Pao*
1 25-0. mille florins fur le vif- argent. Comme donc, conformément à la no- J?1^?"
tice jointe audit Mémoire, la Veuve Deutz & fils ont remis des Obligations -
pour la fomme de 999000. florins au Souiîigné , qui a notifié à VV. HH.
PP. le premier du mois pafYé de les avoir entre les mains en diminution
du Capital négocié fur ledit vif- argent en i6pf. de 1570000. &.qu'ainfi il
eft rentré dans l'efpace de 6. ans deux tiers du Capital, non-obltant que
le terme du rembourfement itipulé dans l'obligation de Sa Majefté Impé-
riale étoit de 12. ans, enforte que les 1570000. florins foient augmentez
dans l'année 1698- d'une fomme de 800. mille, le rembourfement fe fera,
pourtant plus promptement qu'on l'avoit projette au commencement, fur-
tout en y ajoutant la grande quantité de pots remplis de vif-argent, qui
font encore dans le Magazin ou qu'on allure être en chemin; le ooufïigné
feroit , fauf correction, pour ces raifons d'avis , que VV. HH. PP. pour*
roient bien dans les Conjonctures préfentes, accorder par forme de rem-
placement fous la Garantie de VV. HH. PP. la fufdite Négociation de-
mandée fur une due Obligation de Sa Majefté Impériale. A la Haie, le
20. Septembre 17 01.
Réfoîution du Lundi 26. Septembre 1701.
Les Srs. de Gent & autres Députez de LL. HH. PP. pour les Affaires Réfoiu-
Etrangères aiant en confequence & pour fatisfaire à leur Réfoîution tl"nsdu
Commilîonale du 21. du courant examiné le Mémoire du Sr. van Stocken, 2 • eP n
Envoyé Extraordinaire de Sa Majefté le Roi de Dannemarc, par lequel
il avoit prié qu'en conformité du Traité dernièrement conclu , dont les
Obligations que le feu Roi Frédéric III. de gloneufe mémoire avoit don-
nées à la Province de Hollande & a la Ville d'Amfterdam, lui feroient
rendues, & aiant été en Conférence fur ce fujet avec ledit Sr. van Stoc-
ken, ils ont fait raport à l'Affemblée que pour ajuller les affaires ci-def-
fus on avoit couché fur le papier une Formule de Quitance, qui feroit mi-
fe de la part de la Province de Hollande & de la ville d'Amfterdam fur les
fufdites Obligations, & d'un acquit qui feroit paiïe en'échange par le dit
Sr. van Stocken, comme auilï d'un A6le à donner par la Province de
Hollande pour alfurer le payement des fubfides courans ; que le dit Sr»
van Stocken s'étoit chargé d'envoyer les fufdites Formules en Dannemarc
pour fa voir l'intention du Roi fon Maitre là-deffus ; qu'eux Srs. Députez
avoient de plus recommandé audit Sr. van Stocken l'exécution du Traité
de la part de Dannemarc & que les Troupes puiffent venir ici fans plus de
délai \ ce qu'on le prioit d'appuyer de fon mieux par fes bons offices, vu
que LL. HH. PP. de leur côté avoient déjà fait plus qu'on ne faufoit de-
mander d'Elles en vertu du Traité. Surquoi aiant été délibéré, LL. HH.
PP. ont remercié lefdits Srs. Députez de la peine qu'ils ont prife, & de
•plus il a été trouvé bon & entendu, qu'il fera reprefenté' à S. AL Danoife
Rr 1 par
Pi MEMOIRES, NEGOTIATÎONS, TRAITEZ, ET
Amures par une Lettre , de quelle manière LL. HH. PP. de leur côté ont déjà fa-
des Piw>- risfait a tout ce qui jufqu'à préfent leur a pu être demandé avec juftice
Unies5" dudit Traité , & que Sa Majefté doit être priée de le faire pareillement
. 1 exécuter de Ton côté & de donner ordre pour que les Troupes viennent
ici fans plus de délai $ que la Lettre à écrire fur ce fujet fera envoyée a-
vec la Copie au Refident Goes , pour délivrer l'original au Roi de Dan-
nemarc & en appuyer de fort mieux le contenu.
Autre' TJ F'ÇU une lettre ^e l 'Electeur de Brunfwic & Lunebourg écrite à
Ja liannovre le 13. du courant en Reponfe à celle de LL. HH. PP. du
§0. du pafle, leur faifant favoir qu'il avoit accordé le paffage de 8. Regi-
inens Danois par fes Provinces: furquoi il a été trouvé bon, qu'on répon-
dra audit Electeur, & qu'on le remerciera en des termes obligeans,& que
cette Reponfe fera envoyée au CommiiTaire van der Meer pour Ja remet-
tre là où il convient.
Du Lundi 26. Sept. 1701.
Autre T es Srs. Députez de la Province de Frife ont raporté & fait favoir à
JL- / l'AiTemblée, que les Seigneurs Etats de la dite Province avoient don-
né ordre pour payer leur quote-part aux deniers, qui en vertu du dernier
Traité doivent être payez au Roi de Dannemarc , fuivant la Pétition du
Confeil d'Etat. Surquoi ayant été délibéré, il a été trouvé bon & enten-
du, que l'on donnera connoiiTance de ce qui eft dit ci-deiTus, au Confeil
d'Etat pour lui fervir d'information, & que les Seigneurs Etats des Pro-
vinces Refpeclives , exceptez de celles de Hollande & de Frife, feront
encore exhortez & requis de payer pareillement leurs quote-parts fans re-
tardement, & de les faire fournir au Comptoir du Receveur General.
Du Lundi 26. Sept. 1701.
Autre. TD EÇÛ une Lettre du Confeil d'Etat écrite ici à la Haye le 14. du cou-
Jlv rant, laquelle porte, que la Province de Frife n'avoit levé que 13.
Compagnies de Cavallerie au lieu de 17 , & qu'elle avoit refolu en place
d'augmenter la Compagnie des Gardes du Seign. Prince de Naflau Stad-
houder,avec le montant de deux Compagnies, mais en rabatant les gages
des Officiers , laquelle claufe (comme le Confeil d'Etat avoit été informé)
étoitcaufe, que cette augmentation n'avoit point eu lieu, tout ainil que la
Réfolution avoit caufé la non-levée de ces deux Compagnies; qu'en casque
la Province eût voulu agréer le Projet fait par Sa Maj. Brit. & par le dit
Confeil d'Etat dans la Pétition Générale pour l'année 1699. Ja dite Corn-
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. ^uj
Que le dit Confeii d'Etat, puifque la Province de Frife continuent à de- Affaire
cliner ce Projet, & que la dite Compagnie ne coniîltoit par confequent nES Fh°-
que de go. Chevaux au lieu que dans l'Etat de Guerre elle étoit mife fur JPW
126, donnoit à coniiderer à LL.IIFI.PP.fi Elles ne trouveroient pas bon
d'aprouver qu'on employé les Soldes de deux Compagnies de Cavallerie à
leur augmentation, moyennant que les gages des Officiers, auiîi-bien que
ceux des Cavaliers, fer viroient à cet effet, & d'exhorter enfuite fur ce pied
là la Province de Frife a livrer ce qui manquoit à fon confentement dans
la nouvelle levée. Que le dit Confeii d'Etat jugeoit en même tems , qu'il
feroit à propos d'écrire à la Province de Groningue ,qui étoit encore plus
en défaut, comme ne fe contentant point d'avoir depuis la Paix décliné
11. Compagnies d'Infanterie , & de continuer à en décliner encore 6,
mais ne levant point outre cela , non pas une Compagnie d'Infanterie , mais
de Cavallerie, de celles qu'elle étoit obligée de lever en confequence de
fes engagemens. Surquoi ayant été délibéré, il a été trouvé bon, que,
fuivant le Projet du Confeii d'Etat mentionné ci-deifus , il fera écrit aux
Seigneurs Etats de Frife, en les priant d'employer le montant des Soldes
de deux Compagnies de Cavallerie, que les dits Seigneurs Etats nonf pas
encore levées, à l'augmentation de la Compagnie des Gardes du fufdit
Seigneur Prince de Naflau, moyennant que les gages des Officiers auiïi-
bien que les Soldes des Cavaliers foient employées à ladite augmentation.
Que déplus les Seigneurs Etats de Groningue feront requis par une Let-
tre de faire lever fans plus de délai ladite Compagnie de Cavallerie & 4.
Compagnies d'Infanterie, qui ont été mifes fur leur Repartition , & dont
ils n'ont pas encore voulu fe charger, & de faire pareillement lever les
dites Compagnies de l'Etat de Guerre ordinaire, auquel ils n'ont par fatis-
fait jufqu a prefent.
Réfolutions fur les Affaires Militaires \ du Mardi 27. Sept. 1701."
Oui le Rapport des Sieurs de Gent & autres Dépurez de LL. HH. £??!*"
PP. pour les Affaires des Finances , ayant examiné fur quel pied il fe- res!#u?l"
roit convenable de régler les Appointemens extraordinaires des Généraux
& autres Officiers qui font allez en Campagne, lefqueîs Apointemens ne
font point réglez par la Refolution de LL. HH. PP. du 17. Juin dernier,
& quels autres points de ménage pourroient être trouvez par rapport
aux fraix de l'Armée. Surquoi ayant été délibéré , il a été trqu-
vé bon, conformément au très fage avis de S. M. Britannique, que par ra-
port au montant des Appointemens extraordinaires du Maréciial , & des
Généraux de Cavallerie & d'Infanterie, on fe réglera fur la coutume des
deux àernicres Guerres; bien entendu dans les Mois de Campagne, mais
que ni ces Généraux ni ceux de moiodre rang ne tireront pas des Apoin-
temens Extraordinaires dans les Mois d'hiver , quoiqu'il leur en foit afîï-
gné, & qu'ils ayent ordre d'avoir l'œil fur les Troupes & de fe tenir prêts,
eK~
3iô MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
A^airï.3 excepté uniquement pour le tems qu'on envoyeroit en hiver des Troupes
ses Pro- en 'Campagne; que le Sr. d'Auwerkerek fera tenu fur l'ancien pied corn--
Umls' me ^ ^l01t avam Çui' ^ut revetu du Caractère de General de Cavallerie;
. L Qu'il fera donné au Comte de Tilly une recompenfe de 3000. florins ,' &
au Major General Dompré une autre de ifoo. florins, pour les fervices
qu'ils ont rendu en Gueldre en formant les Camps; Que quant aux Gé-
néraux, quoiqu'étant fur la Lifte pour fervir en Campagne, il ne leur fe-
ra point donné d'Apointemens extraordinaires, qu'au cas & pour le tems
qu'ils y feront effectivement employez & qu'ils feront leur fonction ; Que
les fervices de Chariots & les Apointemens extraordinaires des Généraux
& desRegimens, qui ont campé cet Eté, feront réglez en gênerai fur trois
mois, excepté ceux du Seigneur Prince de Naffau-Saarbruck, Veltmarê-
chal, à l'égard duquel ils feront réglez dès le 1. Juin; Que les Aides de
Camp des Généraux feront payez durant le tems que l'augmentation des
Apointemens des Colonels, Lieutenuns-Colonels , & Sergeans-Majors des
Regimens,qui ont campé, & de plus celle des Chevaux des Officiers de
Cavallerie & de Dragons y compris la Garnifon de Maitncht fera payée
pour un pareil tems de 3. mois, & enfin que le bas état Major des Regi-
mens pour cette année ne fera pas rembourfé.
Autre. df^\u ï ^e RaPort des Sieurs de Gent & autres Députez de LL. HH. PP.
V_^ pour les Affaires des Finances, aïant examiné le Mémoire du Comte
de Naffau-Weilbourg, General des Troupes de S. A. Electorale Palatine,
lequel porte qu'il étoit chargé de S. A. Electorale de remontrer à LL. HH.
PP. qu'en confequence du Contract fait entre S. A. Electorale d'un côté
& LL. HH. PP. de l'autre, il y avoit déjà 2. mois que les Trouppes y
mentionnées , étoient mifes fur pied par l'Electeur fon Maître, & un mois
que fur l'ordre de Sa Maj. Brit. elles étoient allé camper pour le fervice
de cet Etat du côté de Cologne ; qu'au contraire on n'avoit pas encore
envoie de la part de LL. HH. PP. les erres qui font en arrière & qui
montent à 170 mille fior. lefquelles devroient être payées félon le dit Con-
trat! depuis trois mois, de même que le mois de marche, qui devroit
même être promptement acquité ; que S. A. Electorale avoit fourni
depuis ce tems-là jufqu'à préfent aux dites Trouppes , conliftant en 8
Regimens , les Provifions de bouche & le fourage neceffaire , mais qu'il
lui étoit impoffible de le continuer plus long-tems & de porter le far-
deau de ces 8- Regimens, vu que S. A. Electorale avoit déjà rendu com-
plètes fes propres Trouppes, d'où ces 8 Regimens étoient tirez, priant
pour ces caufes LL. HH. PP. de vouloir, en confédération de ce qui a
été dit ci-deflus, faire payer promptement le reliant les dites erres , de
même que le mois de marche; & de nommer des Commiffaires pour paffer
en revue & venir prendre les dites Troupes ; & comme de*puis le tems
ftipulé dans le dit Contracl les Troupes avoient été prêtes à pouvoir paf-
fer la revue pour le fervice de LL HH. PP. que les Ordonnances de
leurs gages feroient dreffées & arrêtées , de même que le haut & bas état
Major
RESOLUTIONS D'ETAT, M, DCC. I. 321
Major depuis ce tems-là. Surquoi il a été trouvé bon, que les Seigneurs Affaires
Etats des Provinces de Zelande & de Groningue feront exhortez par DES Pro"
Lettre à payer, fans plus de délai , de leurs quote-parts aux "Pétitions pour uniesT
les erres & deniers de tranfport des Trouppes engagées , les Afîignations —
données au profit S. A. E. Palatine fur leurs dites quote-parts } que les
Seigneurs Etats des Provinces refpeétives , à la charge defquelles les
Troupes de l'Electeur Palatin font reparties par le troifieme Etat de Guer-
re extraordinaire, feront pareillement requis par Lettre, de faire payer
chacune aux Troupes de fa repartition le mois de marche, qui fuivant la
Convention doit être payé aux dites Troupes, fans attendre les rôles des
revues j depius, que Sa Maj. Britt. fera priée de nommer & d'envoyer
quelqu'un des Officiers de l'Etat pour pafler en revue les dites Troupes,
& pour les prendre au ferment & fervice de l'Etat; enfin que le Confeil
d'Etat fera requis & autorifé de conférer avec le dit Sieur Comte de Naf-
fau-Weilbourg fur le tems , que les gages des dites Troupes commence-
ront, de régler ce tems & d'en donner enfuite Connoiffance aux Provin-
ces, à la charge defquelles les Troupes refpe&ives font reparties afin d'a-
voir foin depuis ce tems-là de leur payement.
Sur la demande du Collège de l'Amirauté d'Amflerdam, qu'il plaife à
LL. HH. PP. de difpenfer de la defenfe faite par Placard contre la fortie des
marchandifes de contrebande pour autant que cela regarde le chanvre &
les cordages , puifqu'il entre ici afTez de chanvre par les VaifTeaux venant
de Mofcovie , & pour d'autres raifons propofées audit Collège , il a été
trouvé bon, que pour l'avenir la fortie du chanvre, des cordages, & mè-
ches eft permife, à quel égard il efl dérogé par-là à la defenfe contre la
fortie des marchandées de contrebande.
Réjolution fur les Affaires Militaires; du Mercredi 28. Sep-
tembre 1701.
^u ï le Raport des Sieurs van Gent & autres Députez de LL. HH. PP. Autrc'
pour les Affaires des Finances , aïant été en Conférence avec quel-
ques Sieurs Committez du Confeil d'Etat fur le contenu de la Lettre du
dit Confeil , touchant quelques arrangemens à faire dans les Regimens
Hefjois & Suffis, qui font au fervice de l'Etat , il a été , conformément
au très-fage avis de Sa Maj. Brittan. trouvé bon & entendu, que des deux
Regimens de Hejfe-Cajj'el confi fiant chacun de 12. Compagnies , il fera formé 3 . Ba-
taillons chacun de 1 o. Compagnies & quà cette fin Us feront augmentez de fix
nouvelles Compagnies ; que pour en trouver les fraix fans un nouvel impôt
fur le Pais , il fera levé 7. Compagnies SuifTes au-lieu de 8 , qui devraient
compofer un Régiment fous le Colonel Erlach , lefquelles feront jointes
aux Regimens du Comte d'Albemarle & de Murait, & que les djtes 7.
Compagnies feront réduites chacune à 178. hommes pour être égales aux
autres Compagnies Suiffes ; que les Compagnies du Régiment de Dragons
Tome XL S f d'An-
32î MEMOIRES, NEGOTÎATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires d'Anfpach feront augmentées chacune de 63. à 66. Hommes & de 72. à
des Pro- ^ chevaux, pour ies mettre fur le même pied avec les autres Compagnies
Unies!] ^e Dragons-, que dans le Régiment de Carabiniers du Comte d'Albemarle
1_ il fera établi dans la Compagnie de Grenadiers du dit 4. Lieutenans au-lieu
de 2, & que cette Compagnie fera augmentée de 20. Granadiers à che-
val, & chaque Compagnie de Carabiniers de 4. Maîtres, afin de les met-
tre fur l'ancien pied; & comme le dit Régiment confilte de 10. Compa-
gnies, & que par confequent il eft d'autant plus fort que d'autres Regimens
de Cavallerie, il y fera joint un Lieutenant-Colonel & fes apointemens
mis fur l'Etat de Guerre > que pour mettre les Compagnies du Régiment
Suiiïe, dont le Comte d'Albemarle eft Colonel , au même nombre avec
d'autres, chaque Compagnie fera augmentée de deux Hommes ; de plus
qu'à caufe des préfentes fortes Garnifons dans les Villes & Places de l'E-
tat, l'Article des fervices fera augmenté fur l'Etat de Guerre, 3000. flo-
rins, & mis ainfi de 2000. à j*ooo. florins, comme il l'a été depuis l'année
1675. jufqu'à 167-8; que le nombre des Ingénieurs fera mis fur l'Etat de
Guerre à 60 , comme il l'a été dans la dernière Guerre; que la Compagnie
des Mineurs fera agrandie jufqu'à 100. Hommes; que les 8. Compagnies
de l'Artillerie feront recrutées d'encore . . . Hommes par defTus la der-
nière augmentation, & que les apointemens & gages des Officiers dans
les Forts de Knodfenbourg, de Crevecœur, & autres nouveaux Forts fe-
ront mis fur l'Etat de Guerre comme parle paffé;que les intérêts des Obli-
gations de la fomme d'un million de florins à donner à la Province de
Hollande , & à la Ville d'Amlterdam , pour celles qu'elles ont à la charge
du Roi de Dannemarc , & qu'elles doivent en vertu du dernier Traité
lui reftituer , commenceront avec le jour de la Ratification du dit Trai-
té ; qu'on ne portera fur l'Etat de Guerre pour l'année ■ prochaine
qu'un fimple intérêt , mais qu'il y fera mis au double , la Paix conti-
nuant , l'année fuivante ; qu'on mettra enfin fur l'Etat de Guerre les
apointemens des Lieutenans-Generaux & des Maréchaux de Camp, qui
ont été faits en dernier lieu, pour autant qu'ils ne peuvent rentrer dans les
Places vacantes. Et l'Extrait de cette Refolution fera envoyé à Sa Maj.
Brit, comme Capitaine General de l'Etat, en la priant, pour ce qui re-
garde le changement dans les Troupes, de donner les Ordres necefîaires
à cet effet : & fera remis pareil Extrait au Confei! d'Etat , pour lui ler-
vir d'information, & pour fe régler là-defïus en dreffant l'Etat de Guer-
re; le tout fauves les libres Délibérations fur l'Etat de Guerre, & par-
ticulièrement fur les points fus-mentionnez.
Refolution en préfentant V Etat de Guerre pour T Année 1702.;
du Vendredi 4. Novembre 1 70 1 .
Etat de ÇA Majeflé le Roi de la Grande- Bretagne aiant paru conjointement a-
Guerre ^3 vec le Confeil d'Etat en corps àl'Aflemblée ont, en vertu de leur char-
Ï70L Se & fui vant leur foigneufe attention, remis à LL. ÏIII. PP. la Pétition
gène-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 313
générale des confentemens, comme aufli l'Etat ordinaire & extraordinai- Affaires
re de Guerre pour l'Année prochaine 1702., laquelle Pétition aiant été DES Fr°-
lue en préfence de Sa dite Majefté & du Confeil d'Etat, Sa Majefté a pro- ™«*
pofé à LL. HH.PP. en fubftance, que LL. HH. PP. auroient remarqué — — *~
par la Lecture de ladite Pétition générale, que les Etats de Guerre é-
toient formez fur des reflexions d'une Guerre prochaine • que Sa Ma-
jefté & le Confeil d'Etat y avoient allez fuivi les Réfolutions prifes de
terns en tems par LL. HH. PP. pour la Sûreté de l'Etat & pour le
mettre dans une pofture raifonnable de defenfe ; que la cordialité & la
promptitude, avec lefquelles lefdites Réfolutions étoient prifes, doivent
être confiderées comYne la feule chofe qui puifle fauver la République
dans les tems préfens; que Sa Majelté voyoit avec regret, qu'on étoiï
obligé de demander aux Habitans de l'Etat des Charges Ci onereufes
dans un tems de Paix, mais qu'à peine ce tems pouvoit-il mériter le nom
de Paix j que toute efperance à un Accommodement amiable étant éva-
nouie , on étoit forcé de prendre des mefures comme en tems de Guerre ;
que de grandes forces s'étoient approchées des Frontières de l'Etat; qu'on
tàchoit de le priver de toutes fes Alliances, de troubler fon Commerce, &
de le rendre infructueux ; que l'Etat étoit comme afïïegé, & que félon
l'avis de Sa Majefté une Guerre publique valoit mieux qu'une incertitude
aufïï dangereufe; que les çliofes étoient venues à un point, qu'il fembloit,
qu'on ne pourroit obtenir d'Accommodement que par la voye des armes ;
qu'ainft il faudroit s'y prendre avec vigueur pour maintenir l'Etat dans fa
Liberté & Religion. Sa Majefté ne doutoit point, que LL. HH.PP. &
les Seigneurs Etats des Provinces refpeftives ne conliderallent cela due-
ment,& que fur la dite Pétition générale des Etats de Guerre, de même
que fur d'autres Pétitions qu'il faudra faire pour le bien des Affaires du
Païs par Mer & par Terre, ils ne s'engageaffent à des Confentemens una-
nimes & prompts, & principalement à les mettre en effet par des four-
niflemens réels, fans lelquels les Confentemens ne pourroient être d'au-
cune utilité, Sa Majefté recommandant tout cela ferieufement à LL. HH.
PP. Déplus, Sa Majefté y a ajouté, que dans cette occafion Elle pren-
droit congé de LL. H IL PP. puifque fes Affaires demandoient fon retour
en Angleterre; qu'Elle a voit déjà mis ordre, & qu'Elle le mettroit d'avan-
tage, à ce qui s'étoit requis pour le fervice de l'Etat & qui dependoit de
Sa Majelté, que fon départ preftbit d'autant plus qu'Elle pouvoit afîurer
LL. \\U. PP. que la Nation étoit difpofée à mettre Sa Majefté en état à
fon arrivée de pouvoir appuyer puifiamment les intérêts , que i"cs Royau-
mes ont de commun avec ces Provinces, & ceux de toute l'Europe, &
que Sa Majefté efperoit de revenir au commencement du Printems pro-
chain pour remplir ici fes fonctions , fe recommendant en outre à la bien-
veillance de LL. HH. PP. dans la confiance, qu'il n'étoit pas necellaire,
qu'Elle affuràt LL. HH. PP. de fon amitié & •affe&ion pour la Patrie,
puifqu'Elle efperoit que LL. HH. PP. en feroient fuflhTamment perfua-
dées. Surquoi aiant été délibéré, LL. HH. PP. ont remercié Sa Majefté
Sfa &le-
"» ■»
M MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires & ledit Confeil d'Etat, du foin, de la peine, & du zèle, qu'ils ont pris &
i*i.s
Pro* employé en formant la fufdite Pétition générale & les Etats de Guerre,
Unie?" & qu'ont témoigné en particulier à Sa Majefté fur ce qu'EIie avoit propo-
— fé, que LL. HH. PP. étoient obligées à Sa Majefté de l'honneur qu'Elle
leur faifoit de paroitre encore dans leur Affemblée; qu'EI es regardoient
la recommandation qu'il avoit plù à S. M. de leur faire au fujet de l'Etat
de Guerre, comme un effet de la conftante & inébranlable affection &
zèle de Sa Majefté pour la Confervation & le Bien de l'Etat , dont Elles
avoient vu & iénti au tems patte des fruits & effets Ci confiderables , dont
Elles conferveroient une vive & perpétuelle reconnoiflance; qu'Elles s'en
Cenoient toujours au très-fage confeil de Sa Majefté, & s'en étant bien
trouvées Elles étoient d'Avis de continuer de même &. d'employer toutes
leurs forces pour s'y conformer, fâchant qu'il tend uniquement au Bien
des Intérêts communs de toute l'Europe , & particulièrement à conierver
la Liberté & Religion de l'Etat ; que LL. HH. PP. avoient fouhaké, que
les Affaires de Sa Majefté euffent pu permettre de relier plus long- tems
dans ce Païs, que fa préfence leur étoit toujours agréable ck leur donnoit
beaucoup de tranquilité ; mais , qu'étant entièrement perfuadées que les
raifons qui portent Sa Majefté à repalîér en Angleterre étoient tout- à-
fait peremptoires, Elles louhaitoient à Sa Majefté un heureux & prompt
paffage, & qu'Elle trouvât à fon arrivée en Angleterre le cœur de tous fes
Sujets comme celui d'une feule Perfonne, rempli d'affe&ion & de fourni f-
fion à Sa Majefté , & prêt à féconder de tout leur pouvoir ks bonnes & fa-
lutaires intentions pour leur propre Bien & celui du Commun, tout ainft
que LL. H H. PP. feront toujours de leur côté de toute leur force ; que
de plus Elles conferveront la même eftime inviolable qu'Elles ont toujours
eue pour S. M., priant Dieu de vouloir garder en fanté la précieufe Perfon-
ne de Sa Majefté , de la ramener ici au Printems, & de bénir fes Confeila,
au bien de les Roiaumes , de cet Etat, & de toute l'Europe. Et enfuite il a
été trouvé bon & entendu, que la dite Pétition générale & les Etats de
Guerre feront envoyez aux Seigneurs Etats des Provinces refpectives,
afin de prendre tels engagemens ou donner telles inftruclions là-deïTus-
qu'ils trouveront à propos: pour laquelle fin ladite Pétition & les Etats de
Guerre feront copiez au plus vite nuit & jour fans perte de tems, pour les
dites Provinces.
Résolu-
tion du
7. Nov.
Rêfoïution du Lundi 7. Novembre 1701.
Aiant été repréfenté & propofé à PAflembléë , qne certaines Gens
qui trafiquent en argent non monnoyé , pour éluder Je dernier
Placard de LL. HH. PP. contre la fortie de l'argent, & les pénalitez y
ftatuées, achetoient encore dans ce Pays en quantité les bares & lingots
d'argent & les Ducatons, les faifoient fondre & en fraper des écus de
banque j la fortie defquels comme d'une moenoye de négoce eft permife,
& qu'ils
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 52;
& qu'ils les fortoient ainfi , & reduifoient hors du Pays en bares d'argent, Affaires
& que fpecialement de tels écus de banque étoient frappez fur la mon- DES Pk°-
noye de Hardenvyckj il a été trouvé bon de charger par les préfentes Un°RS*
les Srs. de Haren & autres Députez de LL. HH. PP. pour les Affaires -1
de la Monnoye, puiir délibérer quelles mefures feroient les plus propres
& quelles précautions les plus convenables pour s'y opofer ; qu'il en fera
donné connoiiTance aux Seigneurs Etats des Provinces respectives, & qu'ils
feront requis de mettre (ans perte de tems de tels ordres, que par provi-
sion, & jufqu'a ce que LL. HH. PP. ayent pris fur ce fujet d'autres Refo-
lutions , il ne foit plus dans les Monnoyes des Provinces refpe&ives batu
des écus de banque, ii-non uniquement pour & fur l'ordre des Banques
d'Amiterdam, de Rotterdam, & de Middelbourg, & que les Seigneurs
Etats des Provinces de Hollande & de Weltfrife & de Zelande feront
requis de donner avis de cela aux CommifTaires de leurs Banques refpecli-
ves en leur recommendant d'en agir avec ménagement & circonfpeclion
dans la Fabrication & dans le débit defdits écus de Banque.
Extrait du Regijlre des} Réfolutiom de LL. HH PP. tou-
chant le Mémoire des Amirautez ; du Lundi 14.. No-
vembre 1701.
Lu à l'Affemblée le Mémoire des Députez âes Collèges de l'Amirauté, Amirau-
portant, qu'ils jugeoient , que les Conjonctures préfentes exigeoient tez-
de plus en plus le prompt Equipement extraordinaire de 48. VaifTeaux
avec ce qui y apartient, confiitant en 6. Vaiffeaux du premier rang, 12.
du fécond, 18. du troifieme, & 12. du quatrième rang, de même que 12.
Fregattes, avec 6 Brûlots & 6 Galiotes à Bombes , armez enfemble de
18 108. Hommes, & 6. Vaiifeaux de Provilîon , & 6. Galiotes à engager
par mois , dont les derniers emporteroient chaque mois enfemble une
ïbmme de 664908. flor. comme il a été noté par les dits Députez fur ua
Mémoire remis à LL. HH. PP. le 18. Sept, dernier , donnant ainfi à
connoitre à LL. HH. PP. que les confentemens neceffaires pour le
dit Equipement extraordinaire feroient joints pour un certain tems à ceux
que les dits Députez propoferoient (fauf le très fage avis de Sa Maj. Bri-
tannique) pour 8. Mois, parce que les affaires venant, fuivant toutes les
circonllances , aune Guerre, ce tems feroit neceffaire pour employer la
Flotte, & pourrait être étendu davantage félon l'occafion , Iefqueîs 8- Mois
feroient pour des penfions,ibldes , & pour ce qui s'ufe, de même que pour
le loiiage des Vaiffeaux de Provifion & des Galiotes, une fomme de
5319264. florins & pour la réparation des Brûlots 18000. flor. ainfi en tout
53372<H. flor. j que les dits Députez prioient à ce fujèt. que les Provinces
veuillent s'y refoudre aufîi promptement qu'il feroit pofiible , puif^u'un
auiîi grand Equipement demandoit beaucoup de tems pour le mettre en
S f ,3 Per-
Affaires
des Pro-
vinces-
Unies.
326 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Perfection, & que les depenfes feroient autrement inutiles, il les Vaif-
feaux n'étoient prêts & fournis à tems. Surquoi aïant été délibéré , il a
été trouvé bon & entendu, que Copie du dit Mémoire fera envoyée au
Confeil d'Etat, & qu'il fera requis en même tems de faire une Pétition de
la fomme de 73 37264. flor. pour l'Equipement extraordinaire de 48. Vaif-
feaux de Guerre , 12. Fregattes , 6. Brûlots, 6'. VailTeaux à Bombes, 6.
VaiïTeaux de Provifion , & 6. Galiotes mentionnez ci-deflus 5 & de remettre
la dite Pétition à LL. HH. PP.
Affaires
de Mari-
ne.
Du Mardi 15". Novembre 1701.
ut le Rapport des Srs. van Gent & autres Députez de LL. HH. PP.
pour les Affaires de la Marine, aïant vifité & examiné le Mé-
moire des Committez ici préfens de l'Amirauté, lequel porte leur avis
pour engager 9. mille matelots au fervice de l'Etat durant l'hyver fur des
gages Provifionels de 10. fols par jour , afin de trouver par ce moyen
d'autant mieux les Hommes neceffaires pour l'Armement de la Flotte de
l'Etat au Printems prochain. Surquoi aïant été délibéré, il a été trouvé
bon , que Copie dudit Mémoire fera envoyée au Confeil d'Etat, & qu'il
fera requis en môme tems de former une Pétition de la fomme de 137000.
flor. par mois faifant 407000. flor. pour 3. Mois, afin d'être employez à
lever fur ces gages Provifionels de 10. fols par jour pooo. Hommes, con-
finant de Gens expérimentez, de bas Officiers, & de Matelots les plus ha-
biles , qui feront repartis fuivant la proportion ordinaire fur les Collèges
refpectifs de l'Amirauté , à commencer comme de coutume le premier
Janvier 1702. & à finir avec le dernier Mars fuivant, & de faire remettre
la dite Pétition à LL. HH. PP.
Réfolu-
tion du
21. Nov
Réfoîution du Lundi 21. Novembre 1701 3 fur une Lettre
du Conjeil d'Etat.
eçû une Lettre du Confeil- d'Etat écrite ici à la Haye le 19. du cou-
rant, laquelle porte, qu'en confequence de la Refolution de LL.
HH. PP. du 2$. Sept, il ne fera donné des deniers de Chariots à d'au-
tres Regimens qu'à ceux qui ont campé effectivement \ qu'il fe trouvoit à
préfent, que le Printems pafle Sa Maj. Brit. avoit donné ordre à divers
Regimens de camper & de fe pourvoir à cet effet de Chariots & d'Equi-
pages necefiaires , lefquels neantmoins n'avoient pas enfuite reçu d'ordre
de fortir des Garnifons, vu que les affaires n'étoient point venues à une
rupture l'Eté dernier , priant ainfi LL. HH. PP. de vouloir déclarer
comment Elles voudroient qu'on en ùfat à l'égard de ces Regimens par
raport aux deniers de Chariots, Surquoi ayant été délibéré, il a été trouvé
bon
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 327
bon&arrcté, que Copie de la fufdite Lettre fera remife entre les mains Affairf.s
des Srs. de Lintelo & autres Députez de LL. HH. PP. pour les Affai- DES Pro-
res des Finances, pour > conjointement avec quelques Srs. Cornmittez du u^"s"
Confeil d'Etat qu'il nommera lui-même, vifuer, examiner, & faire raport — — L
de tout à J'AfTemblée.
Lettre de PElecleur Palatin aux Etats Généraux ;
du 23. Novembre 1701.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
Il plaira à VV. HH. PP. d'aprendre par les Copies ci-jointes les avis Lettre de
qu'on reçoit dans les Païs-Bas Efpagnols & dans l'Archevêché de Co- l'Elec-
logne au fujet de la Marche des François par nos Etats de Juliers. Corn- teurPala"
me VV. HH. PP. jugeront elles-mêmes , qu'on ne peut prendre cela au- È# q*
trement que pour un commencement de rupture, puifque de telle forte
les Troupes Françoifes mettent !e pied fur le Territoire indifputabîe de
l'Empire dans le Duché de juliers, fans le confemement de SaMaj. Impé-
riale, & fans nôtre requilition comme Seigneur Territorial > de même quel-
le calamité & devaflation que cela cauferoit à nos Pays, & que Nous fe-
rions entièrement enfermez dans notre Refidence en deçà & en delà du
Rhin , & coupez de nos voifins bien-intentionnez & particulièrement de
VV. HH. PP. quand on laifferoit affez de tems & de loîfir aux François
d'entrer non feulement en Nuys & Keyfersweert, où vont félon des avis
leurs deifeins abfolument , mais s'y retrancher aufTi & de. fe mettre en
plus grande poflure: Nous prions VV. HH. PP. en Ami & bon Voifin
de délibérer fur les moyens de prévenir cela, & de prendre de telles Refo-
lutions que le demandent l'importance & la neceffité de l'affaire à la con-
fervation & au bien, tant de VV. HH.PP. & des Provinces-Unies, que
de leurs Hauts Alliez & Voifins, & de nous en donner enfuite une fi-
dèle communication. VV. HH. PP. peuvent être affurées , que de nôtre
côté nous ne manquerons point de concourir félon nôtre pouvoir à tout
ce qui pourroit être refolu pour cette fin.
A Dufieldorff, le 23. Novembr. 1701.
Jean Guillaume,
Electeur.
Réfoïution du Samedi 26. Novembre 170
T.
ui le Raport des Srs. Députez de LL. H H. PP. pour les Affaires Réfoïu-
des Pays d'Outremeufe , ayant pour fatisfaire à leurs Refoiucions ticn fur
Commifforiales du 24. Sept. & 12. Octobre dernier examiné les deux Me- [a ^onf-
* tniction
o
moires
Affaires
dés Pro-
vinces-
Unies.
du Baf-
tion de S.
Pierre
à Maf-
tricht.
328 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
moires du Sr. Norf, Confeiller & Refident de l'Electeur de Cologne, E-
vèque & Prince de Liège, portant plainte fur la conftruétion d'un Fort
fur le mont de St. Pierre près de Maftricht, étant territoire de Liège,
fans connoiiTance préalable & fans le confentement du fufdit Electeur ,
comme Evêque & Prince de Liège, mentionné plus amplement dans les
Notules du 2 s- Sept. & 22. Oclobr. dernier. Surquoi ayant été délibéré,
il a été trouvé bon, qu'il fera répondu au Sr. Norf fur lefdits Mémoires,
que l'ouvrage, fur lequel on fe plaint, & qu'on appelle dans les Mémoires
un Fort, n'eft qu'un Baftion détaché, ou un ouvrage de dehors de la Vil-
le de Maftricht, ci ne fervant ou pouvant fervir qu'a éloigner d'autant plus
l'ennemi de la Ville; que LL. HH.PP., ayant examiné lefdits Mémoires,
n'ont pu trouver, que la conftruétion dudit ouvrage, à l'infçu & fans le
confentement du Prince de Liège, ait porté aucune atteinte à fes Droits,
ou qu'il en eût été donné lieu à de juftes plaintes; que ledit ouvrage eft
construit à la vérité fur le Territoire de Liège, & fous la junfdiction Sei-
gneuriale de St. Pierre ; mais qu'il eft fi proche de la Ville de Maftricht,
qu'il ne fauroit être confideré autrement , fi-non comme une exten-
fion des Fortifications précédentes & préfentes de cette Ville; que la Vil-
le de Maftricht reconnoiffant deux Seigneurs, LL. HH. PP. y ont
neantmoins le Jus Prœfidii & Fortalttiï par deflus & féparement du Sgr.
Prince de Liège, & d'y faire tout ce qui fe pratique fuivant les Droits
communs par rapport à toutes les Fortereffes; qu'en confequence de cela
LL. HH. PP. ont de tems en tems fait à la Ville de Maftricht avec de
fort grandes depenfes tous les ouvrages , qui ont été neceffaires pour la
confervation de la dite Ville, fans regarder, fi le terrain, fur lequel on
fait quelques ouvrages, apartient à la Ville de Maftricht ou pnvativement
à LL. HH. PP. ou au Prince de Liège , trois cas differens qui s'y ren-
contrent; que pour ce qui eft des Ouvrages conftruits fur le Territoire de
Liège, fans alléguer apréfent de quelle façon l'extenfion des Fortifications
de la Ville de Maftricht a été déjà accordée dès long-tems par les Princes
de Liège, S. A. Electorale, de même que le Sr. Norf, ne fauroient igno-
rer, que LL. HH. PP. font en bonne & tranquile Poflefïion d'excercer
ledit Droit, fans qu'il foit jamais requis, qu'il falùt, en faifant de nou-
veaux Ouvrages, donner connoiiTance au Sgr. Prince de Liège, ou deman-
der fon confentement, témoin un grand nombre d'Ouvrages détachez
conftruits depuis quelques années & fubliftant actuellement furie Territoi-
re de Liège; que le Roi de France, dans le tems qu'il a été maitre de
Maftricht a fait en confequence de ce Droit plufieurs Baftions & toute
l'inondation du côté de St. Pierre fur Je Territoire de Liège , fans en don-
ner aucune notification, & fans qu'on y ait fait aucune opofition j le
"nouvel ouvrage, auquel on travaille prefentement fur le mont de St. Pier-
re étant contigu à ces ouvrages & occupant à peine la 10 ou 2o"ie. partie
du terrain que les François ont occupé dans ce tems-là avec lefdits ouvra-
ges & l'inondation ; & LL. HH. PP. dans la conftruction de cet nouvel
ouvrage ufant de leur Droit efperent que Sa dite Altefle Electorale ne
s'en
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. L 329
ES
s'en plaindra plus, d'autant que cet ouvrage fert uniquement à rendre plus Akfaip.
forte & mieux conferver la Ville de Maftricht, dont elle elf. Seigneur, DES Pko
comme Prince de Liège, conjointement avec LL. HH. PP.; que S. A. ™NCB8"
Electorale pourra aufii juger, fuivant fa grande fageffe, avec combien peu — —
de fondement les François fe fervent du prétexte de cet ouvrage pour fe ren-
forcer fur le Territoire de Liège. Et fera l'Extrait de cette Refolution de
LL. HH. PP. envoyé au Refident Spanheim à Ratisbonne, pour lui fer-
vir d'information, &pour réfuter par fon contenu ce qu'on y débite com-
me (ï LL. HH. PP. empietoient fur le Territoire de l'Empire , & entre-
prenoient des chofes auxquelles elles n'avoient aucun Droit.
Refolution du Mercredi?. Décembre 1701.
Oui le Rapport des Srs. de Linteîo & autres Députez de LL. HH. Refolu-
PP. pour les Affaires des Finances , ayant conjointement avec quel- tI0"^"
ques Srs. Committez du Confeil d'Etat examiné la Lettre de l'Electeur cêmbrc
Palatin écrite à Duffeldorff, le 22. Novembre dernier, laquelle porte que
LL. HH. PP. avOient aparement déjà apris, qu'il étoit impoflible à leurs
Troupes, qui font dans les Provinces de S. A. Elecl. de fe procurer el-
les-mêmes les Fourages à caufe du haut prix où ils font à préfent , & que
S.A. EleéL de fon côté, ne pouvant abfolument point s'en charger , ne
doutoit pas, que LL. HH. PP. ne veuillent prendre inceffamenc de tel-
les mefures à ce fujet, pour que la Cavallerie, faute de Fourage, n'en
fouffre aucun préjudice, d'autant plus que S. A. Elecl. n'étoit pas d'hu-
meur d'en charger fes fujets par deffus le tems propofé par le Lieut. Ge-
neral Dopf, ni eux en état de le pouvoir fupporter. Surquoi ayant été
délibéré , il a été trouvé bon d'écrire en réponfe audit Elecleur, que LL.
HH. PP. ne s'étoient pas attendues à la Repréfentation faite par fa Lettre;
que comme Elles ont laiiTé dans ks Provinces de S. A. Eleft. leurs Trou-
pes envoyées à fon fervice en les payant hors de leur propre Pays , El-
les jugent qu'il falloit qu'elles en fubfiftaflent dans les Provinces de S. A.
Elect. & que les fourages étant trop chers pour que le Cavalier fe puiffe
nourrir de fa folde lui & fon cheval, S. A. ElecL y pourvût du moins
par le règlement du prix des Fourages ou autrement, vu qu'il neferoit pas
raifonnable,que l'Etat envoyant fes Troupes hors du Pays fût chargé, ou-
tre les foldes ordinaires, encore du foin & des fraix de Fourages; qu'ainfi
le dit Elecleur fera prié de mettre de tels ordres, pour que la Cavalle-
rie de l'Etat puiffe fubfifter dans les Provinces de S. A. Electorale fans
que LL. HH. PP. foient chargées de plus que des foldes ordinaires;
qu'elle fuit pourvue de Fourages, & que les Trouppes en gênerai puif-
fent être confervées comme il faut.
T'orne XI. Te Ré fi-
Affaires
des Pro-
vinces-
Unies.
Refolu-
du 30.
Dec.
Lettre du
Confeil
d'Etat.
330 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Réfohition du Vendredi 30. Décembre 1701.
Comme on a délibéré & pris en confideration, qu'avec le 1. Janvier
prochain il vient à expirer le tems de deux fois 4. ans, durant lequel
en confequence de la Refolution de LL. HH. PP. du 16. Avril 169$. les
Monnoyes de l'Empire ont été arrêtées ou fufpenduês , moyennant que les
Villes, où font ces Monnoyes, en tirent par an chacune 400. florins , la-
quelle fomme a été encore portée fur le prochain Etat de Guerre , dans
l'attente que ces Villes continueront la fufpenfion des dites Monnoyes de
l'Empire, il a été trouvé bon & arrêté, que les Magiitrats des Villes de
Monnoye, /avoir de Nimegue, de Zutphen,Deventer, Campen , Zwoll,
& Groningue feront requis de fufpendre ces Monnoyes fous les mêmes
conditions pour le tems d'encore 4. ans à commencer du 1. Janvier 1701.
Lettre du Confeil d'Etat ; du 30. Décembre 1701.
Nous avo'ns communiqué à VV. HH. PP. le 22. du courant une Re-
quête de l'Entrepreneur du Magazin de Fourage à Maftricht, paria-
quelle il nous remet fon Contra6t, & nous prie d'en être déchargé. A
préfent il faut que nous notifions à VV. HH. PP. que l'Entrepreneur des
Magazins de Fourage dans les Frontières de Gueldre & de Brabant nous
a averti par une Requête de difeontinuer fa livraifon faute de paye-
ment.
Dépareilles Dénonciations nous parviennent, Hauts & Puiffans Sei-
gneurs, dans un tems que nous fommes preffez d'autres cotez, non fans de
grandes raifons, à former des Magazins de vivres & de fourage dans diver-
ses Places. Il plaira à VV. HH. PP. de faire fur 'ce fujet de telles re-
flexions qu'Elles trouveront convenables , & fe laiffer avertir à cette occa-
fion de grands maux, qui fuivront immancablement, en cas d'une Guerre,
la négligence de beaucoup de chofes, fans lefquelles, ni les Troupes ne
peuvent agir, ni les Frontières faire une due defenfe. Pour nous, il faut
que nous difions, que nous ne pouvons plus tenir les affaires fur le bon bout
faute d'argent &de crédit; & , quoique nous en puifîions attendre peu de
fuccès, nous demandons neantmoins une Conférence pour délibérer avec
des Députez deVV. HH. PP. û, & comment, on pourra difpofer, après
tant de Lettres infruétueufes, les Provinces h l'acquit des confentemens ac-
cordez cette année pour l'Adminiitration des Affaires du Pais, & particu-
lièrement de celles qui regardent le fourniffement de Magazins & les fraix
de l'Armée ; confentemens, qui ne fuffiroient point , quand même ils fe-
roient acquitez jufqu'au dernier fol], & fur lefquels pourtant diverfes Pro-
vinces font de beaucoup en arrière. A la Haie, le 30. Décembre 1701.
NEGO-
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I.
331
NEGOTIATIONS TOUCHANT LES £TK
TROUPES DANOISES &c;
JUIN DECEMBRE M. DCC. I.
Extrait d'une Letttv des Bourguemaîtrcs £2? Conjeiïïers de la
Ville de Groningue.
VINCES-
Unies.
L
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
es Pétitions, auxquelles les Seigneurs des Ommelandes n'ont pas con- Lettre de
M* l%r,r Inn r^tronroc 11 Ville
ti, font les fuivantes:
Le 3. Etat extraordinaire de Guerre; l'Equipement extraordinaire \ la
Négociation du troifième terme fur l'Article qui regarde les fraix de l'Ar-
mée & des Magazins ; & la Ratification du Traité conclu entre l'Angleterre ,
le Dannemarc, & cet Etat. De plus, la Négociation déjà arrêtée de iyooDo.
florins pour avoir par provifion de l'argent comptant ; le 40^ denier rap-
portant le plus de tous les Revenus de la Province levez pendant toute la
dernière Guerre. Outre cela, ils chargent & bornent les nouvelles levées,
qu'on a refoluës en confequence du fécond Etat extraordinaire de Guer-
re, de tant de limitations, reftriftions , additions, exceptions, & difficul-
tez, qu'elles les font, ou entièrement tomber, ouïes rendent impraticables»
Nous croyons de plus , que les dits Seigneurs en fe chargeant de 6. Com-
pagnies du Régiment du Colonel Reinhard , aparament avec aucune au-
tre vue que pour en donner les Emplois , comme VV. HH. PP. ont bien
voulu le remanquer dans leur Lettre du 7. du courant, & en déclinant au
contraire fix Compagnies de Hefîe-CalTel portées fur la repartition de cet-
te Province, ont fait plus de préjudice que d'avantage àlaCaufe commu-
ne & à cette Province, entr'autres parce que les dernières, confiftant en
Hommes agueris & expérimentez , même en confequence de la Conven-
tion faite avec le Landgrave de HefTe & ratifiée par cette Province,
ne fauroient être renvoyés par un Membre d'icelle, & que d'un autre
côté les nouvelles Compagnies ne doivent qu'être très mauvaifes , peu
exercées , & guêres en état de rendre fervice au Pais pendant le cours de
l'année. Nous paffons fous filence, comme n'ayant point de raport à ce
que ci-deffus , qu'ils font encore difficulté de faire quelque payement
raifonable aux ainfi nommez Créanciers de Hollande.
de Gro-
ningue.
Du Lundi 27. Juin 1701.
'tant délibéré fur le Traité d'Alliance defenfive entre S. M. le Roi de Ratifie*
J Dannemarc, Sa Maj. Britannique , & cet Etat \ de même que fur le ^°"it^ua>
Traité de Commerce , les Seigneurs de la Ville de Groningue ont approu- verca]eeD^
vé & ratifié le dit Traité , iuivant la Copie qu'on en a envoyé à cette neTOart,
Tt 2 Pro-
E
33i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Province, à condition que S. M. Brk. aprouve cette Convention & que
des Pro- jes autres Provinces y confentent pareillement. Surquoi les Seigneurs des
Unies" Ommclandes ont déclaré qu'ils ne declinoient pas l'aprobation du dit Trai-
'- té, mais, l'Affaire n'étant pas fi prenante, qu'ils fouhaitoient de voir pre-
mièrement des preuves de liquidation, qui manquent encore à ce Traité,
& qui pourroient être données par S. M. Bric. & les autres Provinces, &
qu'ils approuveroient pareillement le dit Traité, quand ils le jugeroient
avantageux.
Ayant été délibéré par Refomption fur le troifième Etat de Guerre, les
Seigneurs de la Ville ont infiflé à leur Confentement précédent pour des
raifons ci-devant amplement déduites, & les Seigneurs des Ommclandes
fefont engagez de délibérer lh-deffus à la Diète prochaine. Surquoi les Sei-
gneurs de la Ville ont déclaré de ne vouloir pas être refponfables de tou-
tes les Confufions, que les Seigneurs des Ommelandes pouroient caufer aux
Confederez, & à cette Province en particulier, en différant & tenant incer-
tain leur Confentement. Les Seigneurs des Ommelandes ont encore décla-
ré, que leurs Remarques fur ledit troifième Etat de Guerre; ne provenoient
pas d'un refus d'y concourir conjointement avec les Seigneurs de la Ville,
mais du mauvais état où cette Province fe trouvoit de fournir de prompts
payemens en confequence de la dite Convention , fe refervant en outre
leurs Remarques ultérieures.
Rêfolution du Lundi 15". Août 1701.
Réfolu- /f~^uï le Raport des Srs. d'Effen & autres Députez de LL. HH. PP.
tion du \^J pour les Affaires Etrangères, ayant examiné la Lettre du Refidenc
! 5-. Août. Qoes écrite à Copenhague le 6. de ce Mois, laquelle porte entr'autres,
qu'on demandoit de la part de Sa Maj. le Roi de Dannemarc, que les
Obligations paffées du Roi Frédéric III. de glorieufe mémoire au profit de
ia Province de Hollande &. de la Ville d'Amlterdam feroient renvoyées &
délivrées en conformité de l'Art. <?. du Traité dernièrement conclu. Sur-
quoi ayant été délibéré, & pris en confideration la Rêfolution de LL.
HH. PP. du 11. Avril dernier, il a été arrêté, que pour dédommager en
quelque manière la Province de Hollande & la Ville d'Amlterdam à cau-
fe de ces Obligations, il leur feroit donné premièrement les f 00. mille flor.
promis par le 7. Article fecret de l'année 1696 , & puis encore joo. mille
flor. & ainfi en tout un Million; que l'acquit en feroit fait en Obligations
à la charge de l'Union , & les intérêts portez fur l'Etat de Guerre des Pro-
vinces Refpe&ives chacune fuivant leurs juftes quote-parts , favoir, en
cas d'une Guerre, pendant qu'elle dure, uniquement les dits intérêts, &
autrement, ou la Guerre finie, un double intérêt, pour en employer la
moitié, conjointement avec ce qu'on profitera de tems en tems par le rem-
bourfement, à la reftitution dudit Million, jufqu'à ce qu'il fera entièrement
payé avec les intérêts; il a été trouvé bon& entendu, que le Confeil d'E-
tat
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 333
tat fera prié, comme il eft prié par la préfente, d'expédier des Obliga- Affaiiu»
tions pour le montant d'un Million de florins, pour être remifes en échange DFS PiK°-
à la Province de Hollande & de Weftfrife & à la Ville d'Amfterdam con- ^f*"
tre les dues Obligations du Roi Frédéric III. & de porter les intérêts des 'NlLS*
dites Sommes de la manière ci-deflus fur l'Etat de Guerre. EtlesSrs. Dé-
putez de la Province de Hollande & de Weftfrife font priez par la préfen-
te de faire en forte dans leur AflTemblée , que les dites Obligations du
Roi Frédéric III. foient prêtes pour être échangées fur la prochaine Réfo-
lution de LL. I1II. PP. contre les Obligations à expédier par le Confeil
d'Etat.
Extrait du Regître des Réfolutions de LL. HH. PP. les Etats-Genc-
raux des Provinces-Unies ; du Samedi 3. Septembre 1701.
Reçu une Lettre du Confeil d'Etat écrite ici à la Haie le 2. du cou- Réfoïu-
rant, laquelle porte par forme de Pétition une Supputation des Som- tkindu j.
mes, qui, en confequence du dernier Traité conclu avec le Roi de Danne- pt'
marc , doivent être payées cette année: les divers Articles qui font à
payer incontinent lorfque les Troupes commencent à marcher faifant un
million neuf mille fept cens & dix florins, 14. fols, 4. deniers , à laquelle
fomme il faut encore ajouter trois mois de fubfides à payer le i$\ Décem-
bre prochain, portant conjointement avec l'agio & le change cent mille
trois cens douze flor. 10. fols, outre la portion de l'Etat pour trois mois
de folde & d'apointemens ordinaires , à commencer le premier Octobre,
laquelle doit être acquitée précifement au commencement de chaque mois
^87984. flor. 2. fols par mois. Surquoi aiant été délibéré, il a été trouvé
bon & entendu, qu'il fera envoyé Copie de ladite Pétition aux Provinces
refpeclives, en les priant, non de confentir, vu que les Confederez y ont
déjà confenti par la conclufion du Traité avec le Dannemarc, mais de
fournir chacune leur quote-part avec la promptitude requife à la Pétition
fufmentionnée.
A Zivoïï , le ±. Octobre 1701.
LA NobleiTe & les Villes qui compofent les Etats d'Over-YfTeî ont con- Confen-
fenti par des Confiderations particulières, comme LL.NN.PP. con- tement
fentent par la préfente, à une Pétition de 7275 17. flor. pour ^pareillement ^«Efats
de 18. VaifTeaux de Guerre, qui en confequence de la Pétition de 1697. .^./àW.
doivent être conftruits, tellement pourtant, que cela fera non-feulement nePéti-
fans confequence, mais que même LL. NN. PP. déclarent par cette Ré- tion.
folution de ne vouloir plus être moleltées par des Pétitions de cette na-
ture , mais que les depenfes en doivent être faites par les Amirautez ro
fpe&ives.
La NobleiTe & les Villes , & les Etats d'Over-Yflel , confentent par h pré-
fente à la Pétition de 249700. florins pour la conilruclion de 12. Vaifleaux
Tt 3 de
DES PSO-
VINCES-
Unies.
ReTolu-
tion fur
des Ga-
ges du
bas Etat
Major
d'Infan-
terie.
Réfolu-
tion fur
le Paye-
ment des
Danois.
334 MEMOIRES, NEGOTIÀTIONS, TRAITEZ, ET
de Guerre, mentionnée plus amplement dans la Pétition du Confeil d'Etat
du 20. Janvier 1701., en forte pourtant, que par la préfente Refolution
eft annullé & fupprimé le Confentement de LL.NN. PP. accordé ci- de-
vant pour la conftru6tion de 18. VahTeaux de Guerre.
Refolution pour régler les Gages du bas Etat Major d? Infanterie.
Oui le Raport des Sieurs de Haren & autres Députez de LL. HH. PP.
pour les Affaires des Finances , Iefquels ont été encore en Conféren-
ce avec des Srs. Committez du Confeil d'Etat fur quelques points de l'Etat
de Guerre. Surquoi aiant été délibéré, il a été trouvé bon, conformément
au très-fage Avis de Sa Majefté Britannique, que, pour égaler fur l'Etat
de Guerre fuivant une proportion raifonnable le bas Etat Major d'un Ré-
giment d'Infanterie à celui d'un Régiment de Cavallerie, il fera mis fur
l'Etat de Guerre, pour les gages dudit Eçat Major d'un Régiment d'Infan-
terie, 40. florins pour un Adjutant, au lieu de 32. n.o.; 20. flor. pour un
Chirurgien, au lieu de iy. ; pour un Quartiermaitre fo.au lieu de 25*. flor. ;
& pour un Prévôt if: au lieu de 20. flor.: & que par ce moyen celTera le
grand nombre de gages extraordinaires, dont lefdites Perfonnes du bas
Etat Major d'un Régiment d'Infanterie ont accoutumé de jouir par-deffus
leurs gages ordinaires; & que le Confeil d'Etat fera prié & authorifé de
mettre lefdits gages de la manière comme il a été dit ci-deffus fur l'Etat
de Guerre, & de régler d'autres petits points femblables qui pourroient
fe trouver en dreffant l'Etat de Guerre , comme ils ont été réglez dans la
Guerre précédente; le tout fans préjudicier aux libres Délibérations des
Provinces refpe&ives fur l'Etat de Guerre, & particulièrement fur les
points fus -mentionnez.
Refolution Jur le Payement des Troupes Danoifes; du Samedi 8.
Ofîobre 1701.
tuï le Raport des Srs. de Gent & autres Députez de LL. HH. PP.
pour les Affaires des Finances, aiant été en Conférence avec quel-
ques Srs. Committez du Confeil d'Etat fur l'acquit des deniers, qui doi-
vent être payez au Dannemarc & pour l'entretien des Troupes Danoifes.
Surquoi aiant été délibéré, il a été trouvé bon, que les Seigneurs Etats des
Provinces refpeclives feront priez de fournir , outre les fommes compri-
fes & mifes dans la Pétition du Confeil d'Etat, qui leur a été envoyée le
3. du courant, encore en argent comptant au Comptoir du Receveur Ge-
nenal , chacune fa quote-part de la portion de l'Etat à la moitié des fubfi-
des arréragez, cette moitié montant à 187700. flor. , laquelle fomme n'efl
point portée dans ladite Pétition, puifqu'on n'y a mis que tels articles qui
doivent être acquitez cette année, & queè cette féconde moitié des fubli-
des n'auroit dû être payée que fix mois après la première : mais , que le
Dannemarc s'étant opiniâtre à ne pas laiifer marcher les Troupes avant
qu'on lui eut aiuTi remis cette fomme en Lettres de change acceptées, on
n'a
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 535
Affaires
DES PRO-
VINCES-
n'a pû le lui refhfer en lui remettant cette fomme comme elle l'a déjà été.
Que de dIus il fera de nouveau envoyé aux Seigneurs Etats des Provinces
un bref état des fommes qui doivent être payées au Dannemarc , oc qui ont uN1ES#
déjà été remifes, en les priant de fournir chacune fa quote-part fans retar-
dément au Comptoir du Receveur General & de l'acquker, pour autant
que cela n'eft pas encore fait, favoir fur les termes mentionnez dans ladi-
te Pétition, & qu'on y exhortera encore très - ferieufement les Seigneurs
Etats des Provinces de Zelande & de Groningue, qui n'ont encore rien
fourni, & ceux d'Over-YlTel qui n'ont fourni que leur quote-part aux
j-oo. mille florins.
Réfolutionfur le Payement des Troupes Danoijès ; du
Jeudi 27. Octobre 1701.
Reçu une Lettre du Confeil d'Etat écrite ici à la Haie ie 26. du cou- Autre d©
rant, laquelle fert de Réponfe fur les Réfolutions de LL. I1M. PP. du même.
7. & 18- de ce mois touchant les deux quarts des fubfides courans à remet-
tre au Roi de Dannemarc, qui écherront cette année, & tendante à dif-
pofer les Provinces à fournir, non-feulement les deniers y neceifaires, mais
auiïï ceux qu'il faut pour le payement des foldes des Troupes Danoifes
qu'on attend. Surquoi aiant été délibéré, il a été trouvé bon & arrêté, que
le Receveur General fera chargé, comme il eit chargé par la préfente, de
délivrer à LL.HH.PP. un état de ce qui a été fourni par les Provinces &
de ce qu'Elles doivent encore fur la Pétition pour les fraix provenans du
dernier Traité avec le Dannemarc à la charge de l'Etat , y comprife la
moitié des fubfides arréragez qui a été déjà remife, mais dont il n'a point
été fait mention dans ladite Pétition.
Extrait du Regître des Etats de Groningue \ du Samedi
29. Oclobr. 1701.
& les Seigneurs des Ommelandes ont fbutenu d'avoir fatis- R^fpla-
fait au but de la Diète concernant la Convention entre Leurs Majeftez tionde
Britannique, & Suedoife, & cet Etat, laquelle étoit ratifiée ,& qu'ils con- Gr°nin-
fereront à la Diète prochaine avec les Srs. Députez fur d'autres Affaires §ue*
non réglées. Surquoi les Seigneurs de la Ville fe font refervez leur An-
notation , & ceux des Ommelandes leur Contre - Annotation.
Réfoîution touchant le Paiement des Troupes Danoifes ; du
Mercredi 2. Novembr. 1701.
Ouï le Raport des Srs. van Eflen & autres Députez de LL. 1 1 F I. PP. paVement
pour les Affaires des Finances , aiant en confequence & pour fatis- desDa-
faire à leur Réfoîution CommhToriale d» 31. du paire & conjointement nois- •
avec
$$6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires avec quelques Srs. Committez du Confeil d'Etat examiné la Lettre du dit
des Puo- Confeil, concernant le payement des Troupes Danoifes , dont on attend
TJm£$~ tous Ies Jolirs ^zniv^e dans ce ^als > ^e meme <lue Je Mémoire du Rece-
WIE8'._ veur General d'Ellemeet, avec un Etat des deniers qui ont été fournis par
les Provinces refpe&ives fur ceux qui refultent du Traité avec le Danne-
marc, & de ce qu'elles doivent encore fur cet article. Surquoi aiant été
délibéré, il a été trouvé bon , que les Seigneurs Etats des Provinces fe-
ront priez par Lettre d'acquiter au plutôt leurs quote- parts à la Pétition
pour les fraix refuîtans dudit Traité, du moins en diminution de leurs ar-
rérages, & de fournir inceiTamment & fans aucun délai une bonne fomme
d'argent; & que les Seigneurs Etats de la Province de Groningue, qui
font en défaut plus qu'aucune autre Province, n'aiant encore rien payé,
feront priez particulièrement, & exhortez le plus ierieufement,de fournir
pareillement leur quote-part fans plus de délai.
Extrait du Regître des Réfolutions de LL. HH. PP. les Etats-Gene*
raux des Provinces- Unies ; du Lundi 19. Décembre 1701.
Réfolu- i^11'1 Ie Raport des Srs. van EfTen & autres Députez de LL. HH. PP.
tionfur \^J p0ur les Affaires des Finances, aiant en confequence & pour fatisfai-
pointe- re a ^eLirs Réfolutions Commiiïbriales du 10. & 12. du courant examiné
mens des conjointement avec quelques Srs. Committez du Confeil d'Etat les Re-
Danois. montrances du Duc de Wurtemberg, General des Troupes de Sa Majeité
Danoife, lefquelles font au fervice de S. M. Brit. & de LL. HH. PP. les
priant, premièrement de vouloir changer leur Réfolution du premier du
courant par raport au payement defdites Troupes, en tant qu'elles foient
payées promptement & fans rabais , du moins fur le même pied que celles
de Hanovre, de Zelie,& d'autres Princes ; fecondement de vouloir payer
pour un mois , tant aux Généraux qu'aux autres Officiers & Perfonnes de
l'Etat major, non -feulement les ordonnances des Chariots, mais auiïi les
appointemens extraordinaires , comme S. M. Brit. avoit refolu de faire
pour fa portion. Les dits Srs. Députez aiant pareillement examiné le Mé-
moire du Sr. van Stocken, Envoyé Extraordinaire du Roi deDannemarc,
fur le même fujet. Surquoi aiant été délibéré, il a été trouvé bon & en-
tendu, qu'à l'égard du premier point, les Seigneurs Etats des Provinces,
à la charge defquelles les Troupes Danoifes font reparties par l'Etat de
Guerre, feront priés par Lettre de faire de telles difpofitions pour que
lefdites Troupes foient payées conformément au Traité; & quant au fé-
cond point, qu'il fera payé pour un mois aux Généraux de Cavallerie &
aux autres Officiers & Perfonnes de l'Etat major, non- feulement les deniers
de Chariots , mais auffi les appointemens extraordinaires : & fera remis
Extrait de cette Réfolution de LL. HH. PP. par l'Agent Rofenboom en-
tre les mains du Sr. van Stocken pour lui fervir d'information.
De W e e d e.
Accorde avec ledit Regître. F. F a g e l.
Nous
N
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 337
ou s Soufîlgnez CommilTaires de Sa Majefté Britannique & de LL. Araire»
HH. PP. les Seigneurs Etats- Généraux des Provinces - Unies 5 nom- DES Pr°-
mément William Cadogan, Quartier - Maitre General & Colonel, & Wil- ™™~
liam Aldershey de la part de Sa dite Majefté ; comme auffi Gérard Kuyf- _J^_
ten, Réfident à Hambourg, & Jaques de Bie, de la part de LL. HH. PP. Aftedc
lefdits Seigneurs Etats -Généraux} avouons par la préfente, que, fuivant S-ecep-
le contenu de nos ordres & inftru£tions, nous avons reçu, en conformité ÎA°ndes
des Articles du Traité conclu entre S. M. le Roi de Dannemarc, Norve- Danois
gue &c. d'un côté, & S. M. Britann. & LL. HH. PP. les Seigneurs Etats- fes.
Généraux des Provinces -Unies de l'autre, complets & en bon état huit
Regimens de Cavallerie , qui font trois mille trois cens & vingt Hommes ,
& fept Bataillons d'Infanterie chacun de fix Compagnies : fçavoir,
Les Gardes, confiitans en ----- 675). Hommes.
Le Bataillon de S.A.R. le Prince Charles 643.
Le Bataillon de S. A. R. le Prince George 643.
Le Bataillon de Zeelande ----- 643.
Le Bat. du Duc de Wurtemberg - - - 643.
Le Bat. du Lieut. General Scholtzen - - 643.
Le Bat. du Maj. General Harboe - - - (543. .
& outre cela encore le Bataillon de Fuhnen avec la Compagnie de Gre-
nadiers, ne faifant que 7. Compagnies, puifqu'il y manque i2f. y com-
pris ceux qui font caliez, pour lefquels on ne paye point d'erres, confi-
nant en - 664.
Une Compagnie de Grenadiers du Bataillon du
Prince Charles, à laquelle il manque fept,
faifant ----------- 104.
La Compagnie de Grenadiers du Bataillon de
S.A.R. le Prince George, à laquelle il man-
que 14., faifant ------ - - 97.
k La Compagnie de Grenadiers du Bataillon de
Zeelande, dont il manque pareillement 18. #3.
en tout , cinq mille quatre cens nonante & cinq Hommes. Surquoi nous
quitons le plus efficacement par la préfente, en vertu du Pleinpouvoir dont
nous fommes munis pour cet effet des Seigneurs nos Principaux, fous nô-
tre fein & cachet , le Sr. Chrifloph-Joachim Giefe , Confeiller actuel de
Juftice, & CommifTaire General de Guerre de S. Maj. Danoife, comme
étant chargé par Sadite Majefté de délivrer les Troupes fus-mentionnées.
Et comme ledit Sr. Confeiller de Juftice Giefe prétend, qu'il faut en-
core payer go. Rifdales pour un Charretier avec z. Chevaux & un Chariot
de l'armée dans chaque Compagnie de Cavallerie, de même que 30. Rif-
dales pour un Prévôt & foa Valet dans chaque Bataillon d'Infanterie ; &
que nous ne nous trouvons pas autorifez de le payer, fans un ordre parti-
culier de nos Hauts Principaux refpeétifs ; nous promettons par la préfen-
te de leur en faire un très-humble Raport. Et, quoique cette Quitance foit
Tome XL V v ex-
3^8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires expédiée & lignée in duplo , elle n'en vaudra pourtant que pour une.
»esFro- Ydàt à Hambourg, le 3. Novembre 170 1.
VINCES-
Unies.
(L.S.) Cadogan. (L.S.) Gekard Kuyste.n»
(L.S.) Al D ERS HE Y.
J'attelle par la préfente , que cette Copie s'accorde avec fon Original. A
Hambourg, le 3. Novembre 1701.
C. J. G I E 3 !.
Défaite
des Fran-
çois à
Carpi.
LETTRES DE DIVERS ENDROITS AUX
ETATS -GENERAUX.
A Taris , le 18. 'juillet 1701.
IL eft arrivé des Couriers d'Italie, des 8, ?, 10 & 11 de ce Moisj&àpré-
fent on avoue en quelque manière publiquement , que Mr. de St. Fre-
mont a été entièrement défait par les Allemans à Carpi; & que tout fbn
Détachement, qui confiftoit en 4. Regimens de Dragons, un de Cavaîle-
rie, & 2. Bataillons d'Infanterie, a été prefque tout taillé en pièces. Cette
Cour eft fi peu accoutumée à aprendre de mauvaifes Nouvelles, que cet-
te Difgrace ne l'a pas peu allarmée. Le Chevalier d'Albret , & le Marquis
de Cambout, ont été tuez, & on à difpofé de leurs Regimens en faveur de
leurs Frères. H y a environ zy. autres Officiers de tuez, & plufieurs
bleflez. La Ratification du Traité entre les Turcs & les Vénitiens eil ar-
rivé à Venife, ligné par le Grand Seigneur.
A Taris 5 le 12. Août 1701.
Rapels E Marquis deTorcy a réïtérement dit à mon Secrétaire, qu'on ne de-
des Com- JL-/ voit attribuer le Rapel du Comte d'Avaux , qu'au Mélange que LL.
HH. PP. faifoient de leurs intérêts avec ceux de l'Empereur contre les
Princes qui tachoient de vivre avec Elles dans une fincere Amitié.
Son Excellence demanda aufîi, fi LL. HH. PP. ne m'avoient pas en-
voyé, conjointement avec leurRéponfe furie Mémoire en Queiiion, une
Lettre au Roi fur ce fujet? Surquoi le Secrétaire ayant repondu que non,
S E. ajouta , que le dit Comte le lui avoit pourtant marqué. Cela don-
ne lieu de croire, à mon avis, que cette Cour l'auroit bien fouhaité,au lieu
qu'à préfent elle ne paroit pas contente que le dit Comte d'Avaux
n&
vaux &
Z/inzen-
dorff.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. ^9
ne Toit pas parti incontinent après la dite Réponfe de LL. HH. PP.; puif- AmntEt
qu'il avoit dû juger, que l'unique pierre d'achopement , favoir la préten- DES Pro-
due fatisfaclion de l'Empereur, n'étant point levée , fon Rapel ne pourroit J^"
qu'être confirmé. - — JL
Il eft arrivé ici hier à midi un Courrier d'Italie, fans qu'on fâche en-
core avec quels avis; mais, il ell certain par des Lettres du 3 du cou-
rant, que les Impériaux, après avoir paiTé le Mincio à la vue des Fran-
çois , font avancez de deux marches vers VOgiio.
Le Comte de Sintzendorff a été rapellé de l'Empereur fon Maître; &,
en ayant donné connoiflance au Marquis de Torcy, il prendra Mardi pro-
chain congé de cette Cour, & partira enfuite à la fin de la Semaine
avec tout fon train.
A Mafîrkht , k 13. Août 1701.
Les Avantgardes de l'Armée, fous les Marquis de Villeroi & de Crequi, Entrée
au nombre de 7. Bataillons & 10. Efcadrons, font arrivées à Amalie^ des Fran-
ce marcheront aujourd'hui à Theu , étant la route la plus droite de Limbourg : f° l,^"s
les autres, fous Tallard& Villeroi, fuivent en deux Colonnes à mefure que bourg &
les premières avancent; il y en a 26. à 28. Bataillons, & f4- Efcadrons. Le lePaïsde
defTem paroît être de s'afîurer de l'Archevêché de Cologne. Les Fran- Uegc.
çois ont demandé de Theu (Territoire de Liège) 8- mille rations de
Fourage, avec quelques Charettesj & ceux de Liège, auxquels le Prince
avoit envoyé ordre depuis quelques jours pour empêcher, autant qu'il eft
pofîible , que la Garnifon d'ici ne dût camper hors de la Ville, près de St.
Pierre, lui ont répondu, que, pour relier dans une exa6te Neutralité.
ils attendoient de S. A. Electorale, qu'Elle les affranchiroit de dits Fou-
rages demandez.
Avanthier,une grande quantité de Farine & de Bétail a pafTé par Liège
à Limbourg & Herre ; & les Liégeois ne font pas fans crainte , qu'on ne
s'empare de leur Citadelle :plufieurs en font d'autant plus en peine, qu'il efi:
arrivé un ordre du Prince de difeontinuer la Démolition de l'Ouvrage de
la Charireufe^ vu, comme il paroît, que les François pourroient s'en
fervir.
Dans ce moment, j'aprens par quelqu'un qui vient du Païs de Luxem-
bourg, qu'il n'y. a eu zAiwalie que 9000. Hommes tant d'Infanterie que de
Cavallerie, & que deux Regimens des derniers étoient marchez hier à
Theu ; que Mr. Tallard étoit encore a ïhomme , avec un Corps de 6. à 7000.
Hommes; & qu'il y en avoit environ f. à 6. mille , du côté d'Pkteîbruck &
Hetterchett , où le Maréchal de Villeroi avoit fon Quartier , mais qu'ils
dévoient aller hier ou ce matin camper à Stavelo, où l'on portoit quelque
Fourage; que l'Artillerie étoit à Linquer ; & qu'avec la Maifon du Roi,
qu'on attendoit, l'Armée feroit de 15. à 30000. Hommes.
V.v 2 yf
34-0 MEMOIRES, NEGOTÏÂTIONS, TRAITEZ, ET
Affaires
DES Pjao-
VINCES-
Unies.
Echange
du Traité
entre la
France ,
l'Efpa-
gne, & le
Portugal.
A Lisbonne, le \6. Août 1701.
IL y a eu jeudi pafTé 8 jours que le Traité fait depuis peu entre la France,
l'Efpagne , & cette Couronne , fut échangé ici, non-obitant tous les de-
voirs que nous avions employez l'Envoyé d'Angleterre & moi, afin de le
différer jufqu'à ce qu'on eût reçu de Hollande de plus fùrs Avis de la Guer-
re ou de la Paix ; &, le lendemain, il fut divulgué un Billet, qu'on fermeroic
les Ports à ceux qui viendroient à troubler le prefent Roi d'Efpagne dans
la Succeflion.
Marche
de la Ca-
valerie
Danoife.
A Hambourg, le 30. Août. 1701.
Aussitôt que j'eus apris , que le Quartier- Maître -General Cado-
gan étoit arrivé ici, j'ai été trouver S. E. pour concerter enfemble les
moyens d'exécuter les Ordres de Sa Maj. Brit. & de LL. HH. PP. pour
prendre en leur fervice les Troupes Danoifes & d'avancer la Marche de la
Cavallerie vers les Frontières de l'Etat. Le Réfultat de nos Conférences a
été, que, d'abord qu'on recevra avis que l'Infanterie fera venue près de
Gluckftadt, on louera des Vaiifeaux pour l'embarquer , & réglera avec
les Officiers la manière dont on fera la Provifion pour leur fubfiflance,
ou dont on conviendra avec les dits Officiers. A l'égard de la Cavallerie,
on trouve le plus expédient de la diviferpour lui faire pafTer l'Elbe, la moi-
tié près deTollenfpicker&de les faire marcher par les Etats du Duc deZel-
le, de l'Elecleur de Hannover, del'Evèque de Munfler, & par le Comté
de Lingen, vers les Villes Frontières de l'Etat; &pour l'autre moitié, de
la faire pafTer la dite Rivière près de Blanckenefe, pour faire leur marche
par l'Eveché de Bremen & le Païs de Munfier, pareillement vers les Fron-
tières de la Patrie; & comme il n'y a perfonne ici pour régler de la part
de la Cour de Dannemarc la route, j'ai écrit là-deffus au CommifTaire van
der Meer, qui me fait efperer qu'il pourra la régler avec les Miniltres
du Duc de Zelle, & qui a auffi écrit au Gouverneur General de Suéde
Guldenfliern pour demander le libre paffage par le Duché de Bremen de
l'autre moitié de la dite Cavallerie, furquoi on attendoit réponfe.
Et puifque Mr. Cadogan nous a témoigné, que Sa Maj. Brit. trouve ex-
trêmement neceffaire, dans la fituation préfente des Affaires, défaire venir
le plutôt le mieux les Troupes Danoifes dans les Provinces-Unies ; &
voyant que les Officiers n'ont point eu de payement depuis quelques
mois du Roi de Dannemarck; il feroit à craindre, que cela ne caufat du
retardement, en cas que les erres promifes par le Traité ne fuffent pas
fournies ponctuellement par le Roi & LL. HH. PP.fuivant la Notice ci-
jointe. C'eft pourquoi Mr. Cadogan en envoie aujourd'hui une Copie au
Sr. Blâckwaith, & une autre pour la même fin à Mr. de Schoulembourg,
remettant à la grande Sageife du Roi fon Maître & de LL. HH. PP. s'il
ne
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
34i
DFS PKO-
VINC.'.S-
UtifES.
neferoit pas bon, pour obtenir leur but falutaire, d'anticiper le payement, Affaires
afin de prévenir tout fujet de retardement.
Il me falloit pourvoir de deniers , pour fournir les étapes de la Cavalle-
rie* & il m'a falu payer pour cette fin aux Officiers un mois de folde,
avant que j'aie tiré, comme je l'ai fait aujourd'hui, conformément aux Or-
dres de LL. HH. PP., fur Mr. d'Ellemeei 10. mille florins à payer a 12.
jours de vue'.
De B y e.
Lettre du Commïffaire van der Meer> du 2 Septembre 1701.
J'Ai eu l'honneur de parler avec M-">nfr. de Bernftorf fur la Route de la R0Ute de
Cavalerie de Dannemarc, & il m'adonne pour réponfe , qu'il -ne pou- laCavak-
Voit pas me dire précifement l'endroit où la Cavalerie devoit paffer, mais rie Da-
qu'elle prendroit fa Marche depuis Tollenfpicker fur Winjen, delà à Reihem , "°1,rf.'?ans
Hoya & Nienbourg\ qu'il avoit fait écrire aux Villages fituez entre ces Pla- iatdeHa-
ces-là, pour favoir , comment on logeroit & nouriroit ces Troupes fur nover.
leur paffage le plus commodément; qu'il n'avoit pas encore reçu réponfe,
mais que les Commiflaires , que S. A. S. enverroit à Winfen, y regle-
roient tout cela parfaitement ,& combien de Regimens pourroient paffer à
la fois, mais qu'il lui faloit favoir une femaine auparavant le jour précis
que ces Troupes arriveroient près de l'fclbe & à Tollenjptcker , afin que les
Commifiaires de S. A. S. plaident s'y trouver à tems. J'ai donné avis de
tout cela par la poite d'aujourd'hui au Sr. de Byej & je lui ai écrit, pour
gagner du tems , de marquer en droiture de Hambourg à Mr. de Bern-
fiorff le jour que les dites Troupes arriveront à Tollenfpicker ; mais ce
Miniflre ayant oublié la Taxe des vivres il en fit écrire en ma préfence à
Zelle.
A Hannovre , le 2. Septembre 1701.
Van der M e e r.
A Vienne 3 le 14. Septembre 1701.
vanthïer au foir, un autre Courier du Miniflre Impérial arriva ici Alliance
delà Haye, des Dépêches duquel j'ignore le contenu, fi non que l'on rfe 11Fm-
conje&ure qu'elles regardent l'affaire de l'Alliance qu'on fouhaite ici fi ^"[,
fortement, entre l'Empereur, S. M. Brit. , &VV. HH. PP. , & qu'on re- terre,' &
garde ici comme le fondement du Bien de toute l'Europe dans la préfente desE. G.
Conjon6lure dangereufe. On entend même par-tout à cetteCour des Plain-
tes de ce que cette Alliance n'elt pas déjà conclue depuis long-tems.
Vv
Â
des Pro-
vinces-
Unies.
342 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
A Cologne , Z? 23. Septembre 1701.
ues
Divifions /^YN dh que la Cour de Cologne tient les Patentes prêtes pour quelqu
entre v/ nouveaux Regimens, mais qu'elles ne font pas encore diilribuées.
l'Arch. & La ]^iete de Cologne s'efl: rompue hier à Bonn , fans avoir rien conclu &
le Chapi- rep0|u fur ja première Propofuion de S.A. Eleél. ; & les Députez duChapi-
Golognc. *re revinrent ici hier au foir après qu'ils eurent fait remettre à S. A. Eleél.
une Lettre de leurs Principaux, portant la raifon de leur Rappel. Il efl fur-
prenant, que les Membres du Chapitre ayent été (1 d'accord dans toute
cette affaire, que même ceux qui étoient ci-devant pour le Parti de la
France viennent de témoigner le plus grand Zélé pour la Confervation
des Privilèges & des Prérogatives de l'Eglife de Cologne.
Dans ce moment, j'aprens que tous les Etats demeurent feparez à Bonn,
uniquement pour le bien commun , que l'Eleéleur les a congédiés en de-
mandant 12. Simples pour une année à payer au Comptoir du CommifTaire
de Guerre; menaçant, au défaut, le Païs d Exécution. S.A. Eleél. a écrit au
Chapitre de l'Eglife Cathédrale, pour confentir à la Diète en Weflphalie,
& elle y a déjà envoyé ordre pour faire affembler les Etats le 6 Oélobre
à Arensberg. Le Chapitre, prenant cela fort mal,-a refufé à l'Eleéleur
cette demande, & a averti les dits Etats de ne pas s'alTembler, puifque le
Chapitre n'y confentoit point. Le Comte de Sr. Maurice efl devenu Gou-
verneur de Keyferswerth à la Place du Colonel Bernfaw ; il eft appa-
rent qu'il y aura auiîi quelques changemens dans les autres Places.
t,evée
d'un N.
Régi-
ment
é' Artil-
lerie.
A Bruxelles > le 26. Septembre 1701.
On dit ici, que fous la Levée, qui fe fera encore dans ce Païs-ci, il
fera compris un Régiment d'Artillerie, compofé de Grenadiers, Ca-
nonniers, Bombardiers, Mineurs, Charpentiers , & de tout ce qu'il y a
d'Ouvriers necefTaires à l'Artillerie: le Duc deBifcaria, General de l'Artil-
lerie, le devant commander comme Colonel.
Propor-
tion des
Cantons
aux Al-
liés.
A Baden, le il. Ofîobre.
Le Comte de Trautmansdorff m'a fait dire par fon Secrétaire, qu'il y a-
voit grande aparence, qu'on pourroit difpofer les ûx Cantons Alliez
du Milanez d'éviter toute forte de Contravention , foit à l'égard du Servi-
ce de leurs Troupes qui font à la folde delà France , foit autrement,
en cas que la Guerre vint à s'allumer tout de bon , foit dans le Pays-
Bas, foit ailleurs; pourvu qu'on leur donne une afiurance du payemenc
ponc-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 343
pon&uel de la Penfion annuelle de 300. Philippes flipulée par le Capitu- Affaires
lac, & ceci feulement pour l'avenir, me faifant prier d'en vouloir inceffa- »*s P*o-
ment donner avis. Il eft aiféàjuger, où cette Propofition des Cantons y;NCES*
tend , & qu'ils fouhaiteroient que S. M. Brit. & LL. HH. PP., comme _
Alliez de Sa Maj. Impériale , vouiuflent fe charger de la Garantie de ce
payement, ou du payement même* & qu a moins de cela ils ne vou-
droient rien faire.
A Bruxelles 3 le 31. Ottobre 1701.
On prétend ici, que le principal motif du Voyage du Prince Tzerclas Exac-
à Bonn feroit pour tacher de détourner l'Electeur de Cologne de tions de
faire quelque exécution fur ceux qui refufent de payer les Subfides de- jE1£a,e,,r
mandez, comme aufïï de porter ce Prince à fe defifter d'autres Exactions, gne. °°"
afin de pouvoir ajuiter d'autant plus facilement les differens avec fon Cha-
pitre, & de prévenir la rupture de ce côté-là. On dit auffi, que la Mar-
che contremandée des Troupes Françoifes aux quartiers d'hiver en Fran-
ce, & dans le Païs conquis, regarde pareillement cette Affaire , comme
aufli le Voyage différé du Maréchal de Bouflers à Lille , celui-ci y aiant
envoyé pour cet effet des ordres de changer en fon nom les Magiitrats.
A Lisbonne > le 22. Novembre 1701.
Certain Mr. Cuiflbn, Maréchal du Camp, qui a été envoyé ici de intrigues
la part de la Cour de France, fans connoiflance préalable ou de- de la
mande du Roi de Portugal, pour difcipliner les Troupes Portugaifes, & France
qui a été préfenté à Sa Maj. par l'Ambaffadeur de France, a été remer- n^es.Ur"
cié du Roi dans des termes très-civils, & fon emploi décliné; & il eft
prêt à s'en retourner à la première occafion en France, quoique les
François fe vantent de cette rencontre, & débitent, qu'il a été rappelle,
parceque l'on avoit befoin de fon fervice dans le Royaume. Il eil cer-
tain que le Miniftre de France, aiant fait ici des infiances pour porter
cette Cour à reconnoitre le prétendu Prince de Galles pour légitime Roi
de la Grande-Bretagne, a eu un refus qui confifle en ces termes, que le
Roi de Portugal étoit intentionné de vivre avec la France dans une étroi-
te amitié & correfpondance , & d'exécuter fidèlement les Alliances réci-
proques; mais, que Sa Maj. Portug. ne fauroit fe prêter à une Affaire de
cette nature, qui pourroit amener des Brouilleries inévitables. On a aufîî
affuré l'Envoyé d'Angleterre refidant ici, qu'il n'y avoit pas à„craindre
le moindre changement de difpofition à cet égard ; que , pour éviter
même toute autre requifition ou communication, & par conséquent une
notification folemnelle de la mort du feu Roi Jaques , foit par une Am-
baflade
344 MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
Affaires ballade ou par une Lettre, cette Cour avoit pris la femaine pafiee proprio
dfs Pro- motu le petit deuil. Toutes les Trouppes , tant de Cavallerie que d'Infan-
terie, qui ont durant l'Eté gardé cette Côte & fervi de Garnifon à cette
Ville, font retournées dans leurs Provinces refpe&ives.
A Cologne , le 16. Décembre 1701.
VINCES-
Unies.
Mouve-
mens
dans les
LE Régiment de Slangenbourg, venant de Duren,efl entré ici le 15, de
forte qu'il y a à préfent en Garnifon dans cette Ville $. Regimens
eSo-* d'Infanterie de l'Etat, le Régiment de Cavalerie du Comte de Frife étant
rats de encore à Mulheim au de-là du Rhin , pas loin d'ici. Hier , il entra encore ici
Cologne en Garnifon un Bataillon Fruffien. Le Prince de Saxe, Evêque de Raab,
f Pala" partit d'ici hier au matin pour Duffeliôrff avec une grande Efcorte , où
fe trouve encore le General duR.oi de PruiTe , le Baron de Heyde;mais,
le Lieutenant General Dopf doit s'en retourner aujourd'hui à Maltricht.
Les Habitans de la Ville de DuflTeldorfffauvent leurs meilleurs effets dans
d'autres Places ; même on empaqueté à la Cour Palatine les Meubles pré-
cieux, jufques à la plupart des Papiers des Archives. Avanthier, 24.
Bateaux de ceux qui font chargez à Metz , & Thionville, de Grains, Pal-
liffades, Pelés, Planches, Ancres, & Cordages, defcendirent près de cet-
-te Ville la Rivière 5 laquelle Cargaifon fera déchargée en partie à Zons,
en partie à Nuys , Keyfèrsweert , & Rhinberg. L'Electeur fait tellement
reparer les Ouvrages du Fortfitué vis-à-vis de Bonn, qu'il fera plus grand
qu'il n'étoit dans la dernière Guerre; 200. Hommes y travaillent fans
celle , & l'Electeur y va fouvent , pour avancer le travail. Il y a peu de
jours qu'on a détaché, des Troupes Françoifes qui font dans le Sleyder-
dal, 4. Bataillons, dont 2. ont été mis à Lintz, & 2. à Andernach au-
defîus de Bonn.
Le Marquis de Montrevel, qui fe tient toujours à Bonn, commande à
préfent les Troupes de l'Electeur de Cologne , qu'on dit avoir reçu il n'y
a pas long-tems une Lettre du Pape en des termes très forts. Dans peu
on attend encore ici d'autres Troupes de Prufle, de Muniter, & de Pa-
terborn.
A Majlrkht) le 17. Décembre 1701.
Mouve- Y es Etats du Païs de Liège font convoquez vers le 2. du mois pro-
mens fL, chain : on ne fait pas au vrai, ii le Prince viendra vers ce tems-là à
M- de ^e'ëeî rria^s on anTi-ire> Ç11^ demandera des Subfides pour la Levée des
Liep-e. Troupes, le Lieutenant General de Ximencs ayant déjà donné à con-
noitre,que Iesdits Etats dévoient fonger à de propres Troupes, pareeque
le Roi pouroit avoir befoin de Tiennes ailleurs: & comme le Doyen du
Chapitre eft emmené, les autres n'oferont pas s'expofer à la difgrace du
Prince; mais, la difficulcé. fera de trouver ûqs efpeces, auquel effet je
crois
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
34?
crois que les François propoferont une Capitation, tant fur les Eccléfiafli- Affai?e£
ques, que fur les Séculiers , fans fe foucier des Plaintes du Peuple.
VINCES-
Unies.
Lettre fur ce que du Sas de Gand on avoit tiré fur les Travail-
leurs François \ de Paris 3 le 30. Décembre 1701.
Ce fut Lundi dernier au foir, que j'eus l'honneur de recevoir les gra-
cieux Ordres de VV. HH. PP. touchant des coups de Canon que
le Commandant du Sas van Ghent a tiré fur les Ouvrages des François
fous leur ForterefTe, & le jour d'après je me fuis addreïfé par Mémoire
fur ce fujet au Sr. Marquis de Torcy. Son Excell. me donna à connoitre
là-deffus , que, quoique l'Infolence d'avoir ôfé faire tirer fur l'ouvrage
d'un fi puiitant Roi foit infuportable , Sa Maj. avoit neantmoins bien
voulu, par un excès de fa bonté, accorder la Conférence demandée fur
ce fujet, & faire ceffer en attendant les travaux ; que les menaces d'un
Bombardement étoient faites à l'infçu de Sa Maj. ; & que le Maréchal
de Boufflers les defavouoit auffi, quoique nous l'euffions bien mérité.
Et, pour ce qui regardoit l'inclination de LL. HH. PP. pour la Paix,
qu Elles pronoient tant, que S. Excell. étoit trop perfuadée que LL. HH.
PP. n'attendoient que le Secours d'Angleterre pour faire la Guerre. Je
pris la liberté de lui répondre, que la Manutention de leur Droit avec au-
tant de Modération ne pourroit jamais être nommé Infolence par des im-
partiaux 5 que LL. HH. PP. aimeroient d'autant mieux traiter amiable-
ment, qu'Elles fouhaiteroient de conferver la mutuelle bonne intelligen-
ce; qu'on ne pouvoit pas croire, que fa fufdite Majeftéeût voulu recom-
penferleur Difcretion d'un Bombardement} & enfin que LL. HH. PP.'a-
voient donné trop de preuves de leur amour pour la Paix , pour le révo-
quer en doute, ou pour croire, que, fans y être contraintes, Elles de-
manderoient le Secours de leurs Alliez à leur Defenfe. Je parlai, le même
jour, & enfuite,avec divers Seigneurs de Diflinclion fur la même matiè-
re, lefquels ne pouvoient pas s'empêcher de dire qu'ils aprouvoient la
Conduite de LL. HH. PP. \ & qu'ils étoient d'avis, que la Conférence ac-
cordée feroit trainée , afin que , convaincu de ce côté-ci d'un tel tort , on
ne fût pas obligé de le defavouer devant tout le monde. Outre cela, une
Perfonne d'une Confideration particulière m'a dit en confidence , qu'afiu-
rément il ne falloit attribuer cet Ouvrage fi proche de la Fortereife de
LL. HH. PP. qu'au Maréchal de Boufflers, qui l'avoit entrepris de fa
propre Autorité, à l'infçu du Roi & des Miniftres d'Etat pour les Affaires
de Guerre^ mais, qu'on faifoit difficulté a préfent de defavouer publique-
ment ledit Maréchal,
Difputcs
touchant
un Fort
entrepris
près du
Sas de
Gand , &
touchant
le Ca-
non tiré
fur les
Trav ail-
leurs.
Tome XI
Xx
' Vfle
34<? MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires
DES ?RO
VIN
Unies.
™? LISTE DE QUELQUES TROUPES ET
VAISSEAUX DE L'ETAT.
Infanterie.
ig Recrues par Comp. font environ -
66 Nouvelles Comp. d'Infanterie à 66 Hommes
3 Regimens François, $6 Comp. à 66 Hommes
2 Regimens de Meklembourg, 20. Comp. à 84
z Regimens d'Anfpach comme ci-devant
3 Regimens Ecoffois 36 Comp. à 66 Hommes
10 Regimens de Lunebourg & autres Regimens Allemans
chacun à 7^0 ---.__
Les 36 Compagnies de Mariniers font augmentez au
de-là de la Recrue ordinaire chacune d'encore
34 Hommes
Une Compagnie franche
% Regimens de Hefle-Caflel
7^
2
Cavalerie.
Compagnies de Cavalerie à f 1 Maîtres
Regimens de Lunebourg, environ
La Recrue de la Cavalerie environ
Comp. de Grenadiers
Dragons.
1 Régiment de Dragons d'Anfpach , 61 Hommes
4 Comp. fous Matha, comme ci-devant
\ Regimens de Lunebourg , environ
Infanterie
Cavalerie
Dragons
Ci-devant environ
I Régiment SuifTe de
4 Regimens d'Infant. \ de TEleét.
4 Regimems de CavaL j Palatin
10000
4*5^
2376
1680
1680
1^6
7foo
« « «
1224
107
2000
342^9
1
ss
3^ci
600
■ . m» m m *■ _ m
1000
-
100
53°i
[ommes
496
248
Szo
34*PP
f302
if 44
4^000
1/44
85HT
1600
4000
Noms
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I 347
ArvKtutM
D«s Pro-
vinces»
Noms des FaiJJeaux du Pais arrivez des Indes Orientales^ avec „„w
une Spécification de la Valeur de leur Cargaijbn. Un,es-
Les trois fuivans font arrivez il y a quelques femaines,
Les 3. Couronnes - 52.839? ~ 16 -
Ofterityn - - - - 545497 - 10-8
Van Iiuyfen - - - 320669 - 4-8
La Charité
Dombourg
Schonderloo
Jerufalem
Schoondyck
Ifelmonde
La Bavière
Hoeflendaal
Le Poivrier
Cologne
't Huys by Wegh -
3420117 - 1-8
Rygersdaal.
Vofmer.
Theeboom.
Haak.
Dieven.
De ces cinq, dont les trois derniers font des Vaifleaux de retour, on
ignore encore la Valeur de leur Cargaifon, qui montera environ à un
million.
14945-62 -
II
-
à toute heure.
439973 -
10
17
- 8
20O|lO -
2
-
3oy820 -
6
-
3IO439 -
3$3964 -
324^69 -
339206 -
1/3126 -
10
1 1
9.
6
- 8
- 8
- 8
- 8
444HO -
I * 87*1 "
6
1
- 8
- 8
USÉE
TÉTOËSàU
l^g
Ï412.
Xx a' MEMOI.
348 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
5*» MEMOIRES DES MINISTRES PUBLICS
Minis-
T»EsPu- AUx ETATS-GENERAUX.
ÏLICS.
Mémoire de Mr. Lilienrooth pour du Secours ; du 12.
Juillet 1701.
CELSI ET PRiEFOTENTES DOMINI,
iMemoïre TyRaterire non poiefi S acné Rcgia Majefiatis Suecia Légat us Extraordinarivs
de l' A m- j[_ ^HQ minus memores reddat Celfas & Prapotentes Domïnatioms Vefiras , quem-
ë. £ à X admodum Rex ac Dominus ejus ClementiJJimus banc meritb fpem foveat , fe con-
tra hofiesfiuos , vigore fœdcrum , quitus cum Celfis ac Prapotentijjïmis Dvminationi-
bus Veflris invicem obfiringitur , jam pridem auxiliô fuijje potiturum. Cum au-
\ tem nihilominus ipfe in bunc ufque diem cô carcre , ■■& neque ad tôt Sac. Reg. Ma-
jeflatis proprias Literas refponfum fubfequi , neque tôt ipfius juj/u exhibitos Libel-
los memoriales effet! um habuijfe contigerit , Sacra Regui Majcftas diclo fuo Le-
gato Extraordinario injunxit , ut CC. ac PP. DD. Vefiras en- nomine quàm iw
fiantijfime denub compelhret. Videlicet , haud ignorant ipfa , quid jubcant fœ~
derum Legcs , quibus diferiè cautum auxilia intra tertium menfem à prima requi-
fitione computandum , quinimo citius , fi, fieri pojjit , prafiari oportere , cum tamen
jam integri fedccim menfes & amplius effiuxerint , ex quo Sacra Regia Majejias
primum nunciatô péri eu lô opem fibi fer ri ex pet Ht. Neque dubium quin CC. ac
PP. DD. Vefira , pro eo ac par efi, reput atura Jînt animis , quid amicitia
quid communis hic militas fuadeat atque requirat : ità ut vel hoc intuitu tametfi
fœdera dee (fient , fubjidia bine expeclare liceret , praferlim cum hifee caufis meri-
■ tb adjungenda fit ratio Summis certè Potefiatibus digna , quarum unumquemque
Qhrifiiana fidei ,. vec non te qui honefiique fenfu imbutum hoc fibi officium ultro
imponere deceret , ut ju-vandum tuendumque fufeiperet cumy qui culpa vel minima
«•xpers vïm tamen & injuriam patitur , bonisque omnibus defiituitur. De catero CC.
ac PP. DD. Fcfiris ipfis dijuduandum relmquitur quanta amicitia illarum fir-
mitas , fœderibus authoritas fit accefi/ura , fi bac occafione validis fiubfidiis Sa-
çram Regiam Majeflatem fublevent , £s? ex advsrfio fi eandem defiituant quantum
roboris amicitia quantum dignationis fœderibus earum decederet , & quantum de-
nique in temporis habitum juxta perpendant CC. ac PP. DD. Vefira , £5?
quid de Sua Regia Majefiatis atnicitiœ fibi vicififim polliceri queant , procul du-
bio agnoficent quant opère fuis rébus expédiât , ita admimeulo ejjè Sacra Regia
Majefiaii ut hoc laudabih cxemplum fecutura , vicem exfolvere valeat. Nec fa-
cile quifqnam difjidebitur quin arcla inter Suam Regiam Mafiftatem ac CC. ac
PP. DD. Vefiras amicitia , quin mutua utilitas Regnorum , Ditionum , &f
Subjeclorum ' fiecuritas , propria ajiimatio , fœderumque diguitas , ejufmodi jint ra-
tiones , quibus CC. ac PP. DD. Vefira non pofiint non induci, ad prafianda
ea ma Sacra JRegia Majefias fummo jure parique fiducia defiderat» Nihilequi-
.\( : dem
TRES Pu-
EUC3.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 34?
dem quod alicujus fit momenti hic vel dubitandi anfam prabere poffe videtur. Memoi-
Nam nec bello baclenus dtfiritla fuit bac Refpublica , nec virium defetlum ferio RES dis
caujabuntur, quos confiât caufiam fuam, ea qua pro oculis cjl potentia , etiam J^oN*j!
contra validifiïmum qUemque nullo non tempore defenfuros. ylccedit quod lucrum
prafentifijimum ad fit , ubi officii prafi/ti gratiam non pertturam , fed eum infigni
fœnore redit urum appareat. Ncque profeclo Sacra Regia Majefiatis amicitia eo
loco habenda efi ,quafi opéra pratiumvix fit follicithts eandem tueri, cum non tan-
tum fœdera inita aliud évinçant , fed & Sacra Regia Regia Majefias ea jam du-
dum edid&rit virtutis fpecimina qua dubitare non finunt , quid impofterum Or«
bi de eo fit exfipeïïandum. Quo praterea ajfeclu in banc Rempublicam fera-
iur, aequo animo confervanda augendaque amicitia fi udeat , (f! id Celfa ac
Prapotentes Dominations Feftra cognitum habent. Abfit itaque unius vel ahe-
rius ifive privatas rationes , five erga bofies Sacra Regia Majefiatis propenfione?n
majoris fieri pojfe , quant publicam utilitatem , ac publicam fidem ut i que où
talia de fer i 6? minus dignum & vaîde anceps futur um CC. ac PP. DD,
Vcftra pro folita fua prudentia fponte judicabunt. Subhtellexit quidem me-
moratus Légat us Extraordinarius ejfe qui ajfcrere fufiineant, pan fatisfaclum
effe cb quod anno fuperiori Claffis navium bdlicarum ver fus Fretim Qre-Sitn~
dium miffa fit. Afi vero non animadvertunt hi taies , fi una parte vebemen-
ter immtnere infigne alias CC. ac PP. DD. Vefirarum in Ducem Holfittia
meritum^ verumque illud de lis ex garanti a fideliter ci frafiita partum , ex
altéra vero frufira CC. ac PP. DD. repris tribuere velle ea qua ipfa ,
qua funt aquanimitate , fibi vindicare dedignabuntur , haud agre agnofeentes
nundum liber atam esfe fidem Sacra Règne Majefiatis Suecia ex fœderum Pra-
feripto adfiriclam. Hac fiquidem non folummodo mari fed & terra auxilia
fer ri pracipiunt , ejufque pro péri eu li magnitudine {quod pofi finit am expedi-
tionem Holfaticam quàm maxime evidens fui s fie , nemo negavit^) utrobivis in
duplum vel triplant augenda neque pofi perexigui temporis fpatium Domum
rêver fur a , fed ad belli usque finem permanfura , quorum quidquam faclum esfe
fane non apparet. Quod cateroquin Caufam Holfaticam cujus ralione Claffis
ifia mis fa unit rè fuit , attinet CC. ac PP. DD. Fefira fibi haud club 10 ;>;
mentent revocabunt quoties fubinde Sacra Regia Majefias in aniecesfum de-
claravit , fie ea non alio quàm reliquos pâclor.um Rolfaticorum vindices &
fpon fores nomine fufeepturam , feque adeo in toto hoc negotio m h il quidquam
aclurum nifi quod commum confilio atque fuffragio gereretur. Et rêvera que-
que rem ita peraclam fuijfe vel bine liquida confiât , quod appellentibus ifiis
Cla (films Anglica Belgicaque ratione Imper ii navalis eo demum modo ageretur qui
conveniens imprimis videbatur fociis ex aquo , 13 ità ut nullius pro altero
potiores partes effent , rem gèrent 'iùus, id quod abfonum utique fuiffet , fi tan-
quam fubjidiarïa adventafjent ; cum nimirum fœdera mure etiam alioquin ufi-*
tato , eum cafium difertis vérins ita defimant ut auxiliarci five naves , five
copia, a requirent is fœderati aufpiciis ducluque omnino dependeant. Id interea
p;o eo quo Ducis Hvifatia Rationes comphtlitur ajfeclu , pralubens aguojcit
Sua Regia Majefias banc garantie prœjkitioncm oppida acceptant fibi fuijfe ,
quam où rem etiam gratum ayumum dum erga Serenifjlmum Magna B%itannits
Xx x Rc~
.TRES
3^o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Msmoi- Regem, tum erga CC. ac PP. DD. Veftras profitera non dubitat. Unde ta-
bes des men nmxiqUam colîigi débet praftita ei ejfe auxilia vi fœderum contra hofies.
rfsTpÛ- Nam Suecia Regia Majeftatis bellum cum Serenifjîmo Kege Dania nullum in-
uucs. tercefft , quapropter etiam opus non fuit pacem inter altifjimè memoratas Ma-
- jeftates conciliari , reftituta nihilo fecius publica tranquilitate.
Nihil prorfus igitur obftat , quo minus confidat Sacra Regia Majejlas in
prafentiarum non tantiim auxilia fibi quàm primîim fubmijfum tri Jed & CC.
ac PP. DD. Vefiras abfque ulteriore mora apertè graviter que denuntiaturas
ejfe prafatis hojiibus quemadmodum tam arclis fanclifque cum Sacra Regia
Majeftate junganiur fœderibus , ut nullo modo a ferendâ ei ope defiftere in-
tegrum ipfts fit antcquam Sacra Regia Majeftati tanquam fœdè adeo ac
enor miter la fée conveniens fatisfaclio obtigerit^ quod & ipfum paclorum tabu-
lis cxpreffè ineft, cum & praterea apud hofies rem ferib demum agi fenfuros ,
maximum abfque dubio pondus habebit.
Cum déni que fa pins memorata fœdcrà , prafertim novifflmum die 13. (i}.)Ja-
tiuarii anni 1700. hic percuffum $. 12. , id inter alla flatuant , ut ejufmodi occa-
jionibus quales prafens rerum faciès offert , pacifeentes tum de tollendo commer-
ciorum ufu cum hofle fœderati bcllo impliciti , tum etiam de mediis diclo hojli
quovis modo nocendi virefque ejus imminuendi confilia conférant , itaque Sua
Regia Majeftas id enixè contenait ut ceffent omninb cummercia inter hanc
Rempublicam £5? hofies Regia Sua Majeftatis , idque eb magis quod ficut his ap-
parat um bellicum fubvehi, quantumque ei rei impedienda folertia adhibeatur.
Demum etiam fmgulari cum fiduciâ hoc requirit , ut committantur qui CC. ac
PP. DD. Veflrarum nomine cum Legato fuo Extraord. délibèrent rationefque
ineant quibus potifjimum modis diclis hojiibus damnum inferri virefque eorum
infringi pofftnt. Super quibus omnibus infraferiptus Sua Regia Majeftatis
Legatus Extraord. gratam CC. ac PP. DD. Veftrarum Declarationem abf-
que temporis difpendio , ut fperat , fibi impertiendam , quâ par efl obfervantiâ
pra/loy
N. LlLLIENROOTH.
Datup Haga-Comitis die 1. (12.) Julii 1701.
Mémoire de Monfr. Bondely , Envoyé Extr. du Roi de PruJJè^
préfenté à LL. HH. PP. le 6. Nov. 1 70 1 .
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
Mémoire
de l'En-
Sa Maj. le Roi mon Maître ayant trouvé à propos, pour fon fervice,
de me rappeiler auprès de lui , avec ordre de prendre coneé de
ffie VV- IiIL P,P" J'efPere qu'E1!es auronc !* bonté d'agréer, puifque l'Etat
de ma fonte ne me permet pas d'avoir l'honneur de leur rendre ce de-
voir enPerfonne, que je m'en acquite par écrit. Ce que je prend la li-
berté
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 35Ï
berté de faire aujourd'hui, remerciant très-humblement VV. HH. PP. Mfmoi-
de la bonté avec laquelle Elles ont bien voulu concourir avec moi au RES DES
maintien & affermïflement de l'étroite union, qu'il y a toujours eu en- T ■ ^'^
tre Sa Majefté le Roi mon Maître & VV. HH. PP. Je puis les afTurer, bucs*"
que Sa Maj. fera toujours tout ce qui dépendra d'Eile pour en ferrer ■
le nœud de plus en plus, dans la perfuafion, que VV. IIH. PP. feront
aufîï de leur côté leur polïible pour le rendre indiflpluble-. Je dois auf-
fi remercier tres-humblementVV.HIi. PP. de la bienveillance qu'elles m'ont
témoigné en mon particulier , de même que de la manière tres-obli-
geante avec la quelle Elles ont reçu, ce que j'ai eu l'honneur de leur
propofer de la part de Sa M. le Roi mon Maître. Je n'en perdrai
jamais le fouvenir , <& ne manquerai pas de leur témoigner ma recon-
noiiïance, foit auprès de S. M. le Roi mon Maître, foit par-tout ou il
s'agira du fervice de VV. HH. PP. •. fouhaittant à leur glorieufe République
un état toujours floiïffant, &à VV. llll. PP. une fuite continuelle de
Bonheur & de Profperké. A la Haie, ce 6. Nov. 1701.
B 0 N D E L Y.
AFFAIRES D'ANGLETERRE.
Affaires
d'Angle-
Lettre au Roi (V Angleterre aux Etats Généraux \ du 16. Mal TERKE»
1700.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS, NOS BONS
AMIS, ALLIEZ, ET CONFEDEREZ, &c.&c.
Les AfTurances, que Vous Nous avez données par vôtre Lettre du 13. Lettre du
de ce Mois N. St. que Vous croyés Nos intérêts infeparablement Roi d' An-
unis aux Vôtres , & que quoi qu'il arrive Vous ne voulez pas vous en de- guerre.
partir, ny prendre d'autres mefures dans la conjoncture prefente, que de
concert avec Nous, font fi fortes & û cordiales, que Nous nous trouvons
obligés, non-feulement de Vous en faire Nos remercimens, mais aulTi de
Vous aiTurer de nouveau, que Nous fommes tout -à-fait dans les mêmes
difpofitions, & les mêmes fentimens h l'égard de Vos intérêts, que Nous
ne confiderons par autrement que les Nôtres. Nous vous donnons en
même tems avis, que Nous vous envoyerons inceflamment le Secours que
Vous avés demandé. Les inclinations de Nôtre Parlement ayant promp-
tement repondu aux Nôtres; ce qui Nous a donné beaucoup de fatis-
faclàon , voyant que Nôtre Peuple eft fi fenfible à l'Etat prefent où Vous
êtes, & aux dangers qui vous menacent, qu'il fonge avec ardeur à pro-
curer Vôtre feureté. Ainfi Nous prions Bieu, quai Vous ait, Hauts &
Puiff.
jji MEMOIRES, NEGOTIATÏONS, TRAITEZ, ET
Awaîres PuifT. Seigneurs,Nos bons Amis, Alliez, & Confederez, en fa fainte & digne
d'Angle- garcje# Ecrit à Notre Cour à Hamptoncourt, le 16. May 1701.& de nô-
TERRE- tre Règne le 13.
Vôtre bien bon Allié,
Signé 7
WILHELMUS RE&
Addrefle
des Com-
munes au
Roi.
Très-Humble Addreffe de la Chambre des Communes au Roi.
TRES-GRACIEUX SOUVERAIN,
Comme rien ne fauroit plus contribuer à la fureté & à l'honneur de
Vôtre Majefté, & de cette Nation, que de prendre Avis de Vos Con-
feils Anglois , Nous, les très-humbles & très-fideles Sujets de V. M. les Com-
munes aifemblées en Parlement, rendons à Vôtre Majefté toutes les grâces
très-humbles du gracieux Meflage, par lequel il lui a plû de nous com-
muniquer fes Royales intentions, d'informer cette Chambre de l'état & du
fuccès des Négociations où Vôtre Majefté eft entrée conformément à l'Ad-
dreffe de cette AfTemblée. Si Vôtre Majefté s'étoit avifée d'obferver cette
Méthode avant que le Traité de Partage fut conclu , lequel avoit paffé le
grand Seau d'Angleterre durant l'AfTemblée du Parlement, & pourtant fans
fon Avis, nous ferions difpenfez de repréfenter à Vôtre Majefté ce que
nous fommes obligez de faire, quoi qu'avec regret, favoir les facheufes
Confequences de ce Traité, pour ce Royaume, & pour le Repos de l'Eu-
rope; lequel tend fi directement à augmenter la PuifTance & la Grandeur
de la France, en livrant à fon Roi de fi vaftes Territoires des Dominations
du Roi d'Efpagne, & à détruire le Commerce de ce Royaume; & auquel
Traité peuvent être attribuez avec juftice les Dangers qui menacent pré-
fentement ce Royaume, aufli bien que la Paix de l'Europe.
L'Etat du Bill pour un Parlement annuel £3? triennal ; avec des
Obje [lions £5? des Reflexions néceffaires là-deffus*
iîll pour /~*1
n Parie- v^ e Bill confifte en III. Parties :
I. Premièrement, qu'un Parlement doit être tenu une fois par an.
Bi
un
iaent an-
triennal- ^' Secondement, qu'il y aura un nouveau Parlement tous les trois ans,
avec des & que le vieux ne doit pas durer au de-là de 3. ans , mais cefTer &
Objec- être diffous.
tions & \i\ Troifiemement , que le préfent Parlement finira le zf . de Mars ,
flexions" ** mQms que te R°i ne Ie c<uTe plutôt.
Tout
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. T. $?$
Tout cela font les plus grandes Ufurpations fur les Prérogatives les plus Aftairfs
efïentielles de la Couronne,, de convoquer, continuer, & difïbudre les d'Anglè-
Parlemens : ce font auiïi des Diminutions des Droits & du Pouvoir du r**Rt~
Roi,& des Violations des Conititutions du Gouvernement , & préjudicia-
bles au Bien du Peuple, comme il paroitra par les Points fuivans.
i. Quant au premier , qui regarde la tenue d'un Parlement annuel, on I. Point.
dira peut- être qu'il y a 3. Loix du tems d'Edouard III. & de Richard II,
que les Parlemens retiendront une fois par an, ou plus Couvent, s'il eft ne-
ceiTaire > de forte que cela n'eft point une nouvelle Loi.
1. La Conilitution du Parlement a beaucoup changé du depuis , de mê- i.Rcpon-
me que l'occalion de ces fréquentes Ailembléesj le Parlement étant alors &•
une Cour ordinaire de Jultice, qui décidoit tous les Procès d'Importance,
qui font renvoyez préfentement à la Halle de Weftminfter , vid. Placita,
Parlamentar. de Reyly\ & quand il s'agiflbit d'établir des Loix, on préfen-
toit feulement de courts Chefs de Demandes, auxquels le Roi donnoit telle
Réponfe qu'il trouvoit à propos, & en accordoit une partie ou le tout, ou le
rejettoitj les Juges dreflbient des Actes là-deflus après le Parlement, & il
y eut toujours un jour nommé au commencement de chaque Parlement,
pour y mettre fur le tapis toutes les caufes & matières , & un Committé
pour examiner ce qui pouvoit être vuidé dans cette Affemblée-là, & ce
qui duroit rarement plus d'un mois , mais Je cas eft changé dans ces Affaires
èc dans plufieurs autres.
2,. Ce n'étoit qu'une Loi directive, & qui n'étoit point obfervée la même 2- Re-
année après que le premier Acte fut fait , ni jamais du depuis fi-non du ^on e'
tems de Richard II. ce qui lui fut fatal, y ayant eu une conteflation per-
pétuelle entre lui & le Parlement; & le grand nombre de ces AiTemblées
devint fi onéreux au Peuple, que fur la prière des Gentilshommes on fit
divers Acles de Parlement, qu'ils neferoient point contraints àfervir dans
le Parlement, pour aucune Comté , où ils ne féjournoient point, ni pour
aucune Communauté ou Bourg où ils n'avoient pas de Droit de franchife
& de demeure, ce qui donnoit lieu à l'entrée des Gens de métier & aux
Actes pour des gages, & plufieurs Communautez étaient difpenfées à cau-
fe de leur pauvreté d'envoyer des Membres, & le Roi enfin mis tout à fait
hors d'oeuvre.
3. Mais on ne prend pas cela pour une Loi aujourd'hui , car l' Acte trien- v Ré-
nal en 1640., & l'Acte du tems de Charles II. qui n'en eft qu'une repéti- Ponre*
tion, ordonne, qu'à l'avenir il n'y aura point dintermifikm de Parlement
pour plus de 5. ans ; ce qui permet que les Parlemens puiffent être dis-
continuez pour $. ans, & c'en elt par confequent une abolition: & il faut
obferver, que le long Parlement, qui fe tourna en Rébellion & en une
Guerre civile, étoit encore fi modeite, qu'on n'affura pas le Droit d'un
Parlement annuel, uniquement parce qu'on étoit en Droit d'affilier aux
Parlemens en vertu de ces Actes.
Il faut venir aux Objeclions.
Si cette claufe pailé, non -feulement on fera revivre ce Droit, & on i- Objec-
te XL Y y obii- t'ou'
3J-4 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ, ET
AnMxmà obligera le Roi de tenir un Parlement annuel, mais de lui faire pafler aufîî
©'Angle- quelque A.£le & d'en flatuer qu'on faffe une Séance : car par l'autorité de
Tt,RRE' Coke dyer & de Crooke, les grands Juges de la Loi , aucun Parlement ne
peut fe tenir fans qu'il y ait une Séance; & il elt à remarquer, que dans
l'Acle triennal de 1640. la Convocation la Tenue , & Seiiion des Parle-
mens étoient comptées pour des chofes différentes : il ne pouvoit y avoir
non plus d'autre établifiement de ces vieux Actes, du moins dans le tems
qu'on les fit, tant à caufe de leur pratique, que parce que les prorogations
& ajournemens n'étoient pas alors en ufage, fi-non avant la feance d'un
Parlement, & l'on ne fauroit trouver à quel deflfein on convoquoit ces
Parlemens : il eft pareillement fort remarquable, que lorfque Mr. Smith
voulut que le mot iïajjembïer fut changé en celui de tenir, & que le Che-
valier In. Lowther propofa enfuite une claufe pour l'expliquer, & conferver
le pouvoir du Roi de difïbudre le Parlement avant la Séance , cela fut re-
jette.
1. Objec- " Tjn Parlement annuel dans le tems de Paix met aufïl au joug le Gou-
tion. vernement, arrête l'adminiftration de l'autorité d'exécuter, décourage tous
d'agir fous lui, & caufe une contention perpétuelle entre le Roi & le Par-
lement, qui ne finit que par le renverfement de l'un ou de tous les deux
même, comme le prouve l'exemple de Richard II. Et le Roi, dans ces
circonitances , n'a pas tant de pouvoir qu'un Stadhoudre en Hollande.
Objec- Par -là la JurifdicHon des Seigneurs feroit merveilleufement augmentée,
non. & le Peuple lezé, en examinant tous les Procès à la Halle de Welhnunf-
ter, & en les rapportant par appel comme d'abus à la Chambre des Sei-
gneurs.
l. Objec- ' La continuation du pouvoir de faire des Loix, fi fouvent exercé, de-
ti'on. viendra par la multitude des Loix , & la continuation des Privilèges , fore
préjudiciable au règlement de la Nation, à la due exécution de ces Loix
& du maintien du Droit & de la propriété des Sujets , comme il donna
jadis occafion au renverfement de la Republique.
Il Point. Quant au fécond Point, d'avoir des Parlemens tous les 3. ans, avec un
tems limité pour leur Caflation.
i Objec Cecieft pareillement une nouveauté & une ufurpation de prérogative:
ti'on. car tout le monde fait, qu'il n'y a jamais eu de Loi propofée jufqu'à pre-
fent, qui bornât le Roi dans la convocation d'un nouveau Parlement, ou
dans fa caflation, puifque les Loix pour des Parlemens annuels ou trien-
naux ne regloient point la convocation d'un nouveau Parlement , mais
dicloient, qu'un Parlement devoit être tenu premièrement tous les ans &
puis tous les 3. ans: cela exigeoit, qu'un Parlement devoit être tenu une
fois par an \ encore ces Loix nevouloient-elles point qu'il y en eut tous les
ans un nouveau: auiîi ne pourroient- elles fouffrir cette explication, puif-
que quelques Actes demandoient qu'on tint un Parlement une ou deux
fois par an, & tous les Aéles enfemble plus fouvent, s'il étoit neceffaire.
En vérité, on ne pouvoit pas s'imaginer , qu'il y auroit toujours un nouveau
Parlement élu dans la même année, & le Bill triennal veut feulement,
qu'il
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. 377
qu'il n'y ait point d'intermiffion de Parlement pour plus de 3. ans depuis la Awairsi
caflation du dernier. d'Anglk-
II ieroit fort embaralTant de fixer un certain tems pour une nouvelle é- TERRE-
lection & caflation, fi cela arrivoit dans un tems de Rébellion ou d'Ufur- ?,.objeo
pation, ou dans un tems de Guerre, ce qui dépend beaucoup de la bon- tion.
ne difpofmon du Parlement, & particulièrement quand les depenfes font
fi grandes qu'une grande partie en doit être levée fur le crédit , ce qui dé-
truit toute confiance en la Couronne & au pouvoir de faire la Guerre en
cas de neceffité.
Puifque la Nation eft divifée en Partis à l'égard des vues pour fixer un 3.objco
certain tems par raport à la caflation d'un Parlement & à l'élection d'un tion.
nouveau, cela pourroit cauferdes fermentations dangereufes & des brigues ;
& ce fera toujours un iconvenient fâcheux , fi l'on a un tems aufîi long
pour faire fon parti pour une Election.
Néanmoins, comme le Roi peut encore prévenir cela, & que les deux
longs Parlemens du tems de Charles I. & de Charles II. ont donné lieu à
beaucoup de Griefs au Peuple, tant par la continuation du Privilège, que
par le foupçon de corruption de la Cour dans le dernier de ces deux Par-
lemens (quoiqu'il n'y en eut, y compris les Officiers & les Pensionnaires,
qu'une cinquième partie ) il feroit neceflaire d'employer quelque remède
pour empêcher que les Parlemens foient continuez fi long -tems, fi-non
dans un cas de grande neceffité.
A l'égard du troifième Point , qui concerne la féparation du préfent Par- in.
lement, j'ofe aflurer hardiment, qu'il n'y a pas d'exemple antérieur, qu'un Point.
Parlement aflemblé dût être diflous par Acte de Parlement, & un jour fi- ^Objec-
xé pour cet effet, à moins que le Roi ne le diflblve plutôt. tlon"
Rien ne déroge plus à l'Honneur & au Droit d'un Roi, que d'admettre z.Objcc-
un tel exemple, c'eft- à- dire, de fe mettre dans le befoin d'avoir un Acte tion«
de Parlement pour faire agir fon pouvoir exécutif, dont il ne peut s'attri-
buer l'honneur s'il y confent, puifque les deux Chambres lui en impofent
la Loi contre la coutume ordinaire; & cela ne va pas à moins qu'à l'indi-
gne méfiance de fon Jugement ou de quelque mauvais defîein envers fon
peuple lorfqu'il continue un Parlement.
Cette Nouveauté des Seigneurs eft le plus grand Abus qui fe fit jamais , 3.objec-
en fixant un jour pour la continuation d'un Parlement au cas que le Roi tion.
ne le diflblve avant ce tems-îà, & elle intereffe grandement ceux de la
Chambre Baffe auffi-bien que le Roi; ce Parlement ne pouvant être chan-
gé que par une pareille caflation ou élection, ce qui eff. d'une fort mau-
vaife confequence ii l'on en fait un exemple ; puifqu'un parti oppofé dans
la Chambre des Seigneurs de concert avec un autre dans celle des Com-
munes peut en tout tems furprendre une Chambre lors qu'il n'y a que peu
de Membres , & impofer la neceffité au Roi de diflbudre un Parlement
auffi bien 2ffectionné au fervice du Public qu'au fien propre.
Ceci mérite la plus grande Reflexion de la Chambre des Communes , & 4. Objec-
ne renferme pas moins que ceux-là ont été fubornez par la Cour & qu'ils tion.
Y y 2 en
TERRE.
3j6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires en ont donné tant de preuves , par ce qu'ils ont accordé à la Couronne au
D^««rE" ^e^ ^e ce <lu^ ^t0*c nece^dire» que le peuple ne pouvoit plus long-tems
fe fier à eux ; & quoiqu'il foit vrai que ce point l'emporta fur toute la mo-
deitie des Gentilhommes de Province qui ne dévoient pas demander leur
propre continuation, mais laifTer la liberté d'une nouvelle Election à la
Province, on l'entendra cependant ainfi au dehors, & une faclion en fera
ion profit contre eux de propos délibéré en l'envifageant comme un aveu
de la venté de cette imputation, afin de prévenir qu'ils ne foient enco-
re choifis.
Enfin , ce Point de la caiïâtion du préfent Parlement fut aflurément celui
que fe propofa ce Parti, qui porta le Bill fur le tapis & le favorifa dans
Jes deux Chambres, en efperance , par une nouvelle rufe, de renforcer
Ion Parti , comme cela parut fuffifamment par les differens artifices dont
il fe fervit pour noircir ce Parlement par un Bill qui excluoit à l'avenir
tous ceux qui écoient en charge , en portant fes plaintes contre nos privi-
lèges, y propofant des changemens, lâchant des reflexions d'importance
contre les Miniilres, fous prétexte de donner des avis & de faire des re-
cherches de leur mauvaife conduite, & en faifant plufieurs autres chofes,
qui occupèrent entièrement le plus grand nombre de la préfente Aifem-
blée, jufques là que la caflation de ce Parlement pour un tems limité, eft
tout ce qu'on s'eft propofe.
Après tout, je ne puis m'empêcher de remarquer, que dans le cours de
nôtre liifloire , aucun Roi qui ait fouffert qu'une Faction le confondit, ou
]e dupât dans quelque point confiderable de les prérogatives, n'a jamais
été en état de fe foutenir lui-même \ & que de l'aveu de tout le monde,
Je dernier exemple que le Roi Charles I. en donna, en fouffrant que fa
prérogative par raport à la caiïâtion fut reftrainte, fut la caufe fatale de fa
ruine : voilà la raifon pourquoi je ne faurois trouver à propos que Sa Ma-
jeité paife ce Bill; mais, s'il plait à Sa Majeflé , lors qu'elle rejettera ledit
Bill de remarquer dans fa Harangue, que comme Elle étoit venue pour
défendre nos juftes Droits, Elle ne pouvoit croire que nous vouluffions en
échange ufurper de cette manière les Droits de la Couronne , que nous a-
vons tous juré de maintenir, & dont Elle ne peut jamais rien relâcher en
confideration de nous-mêmes; & que, comme Elle ne voudroit jamais
nous donner une jufte occafion de tenir fufpecle la continuation de ce
Parlement, ou de tous autres, au delà de ce qu'exige le bien public & la né-
cefiité des Affaires, Elle feroit pareillement prête de paiTer tout Bill qui fe-
ruit propofé d'une manière convenable , pour prévenir la longue conti-
nuation des Parlemens à venir, & qu'Elle termineroic celui-ci de manière
qu'il ne refteroit aucune jufte raifon de s'en plaindre.
Fro-
Fi
5»
5
5
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 3)-7
AîFAIRtfc
•Qclamation pour âijjouare le Parlement 3 S3 ^ convoquer un au- i/angle.
/;t; */« il. Novembre 1701. . T£**E-.
GUILLAUME ROI.
D'Autant que nos amés Sujets ont unanimement témoigné, par pr0cla-
leurs fidèles Adrelfes, le reflentiment qu'ils ont de l'injuibce & de mation
, l'indignité qui nous ont été faites, ainlï qu'à nôtre Peuple , par le Pro- pourdif-
, cédé du R. T. C. en prefumant de reconnoitre & de déclarer le pre- ion rc_
„ tendu Prince de Galles, Roy d'Angleterre, d'Ecoffe, & d'Irlande; Et quer je
„ nous ayant en même tems, donné auiîi de la manière la plus refpeclueu- Parie*
„ fe , des marques de leur affection pour nôtre Perfonne & nôtre Gou- ment*
„ vernement , & de leur ferme Refolution de faire en cette occafion,
„ toutes les chofes qu'on peut fouhaitter de véritables Anglois & de bons
„ Proteitants : Nous les avons reçeu avec beaucoup de fatisfaétion , &
„ Nous avons trouvé qu'il étoit raifonnable dans cette conjoncture ex-
„ traordinaire, de donner occafion à nos Sujets de choifir des Perfonnes
,, pour les reprefenter en Parlement, telles qu'ils jugeront être les plus
„ propres à accomplir leurs j uft.es & pieufes intentions & pour cet ef-
,, fect. de cafTer ce prefent Parlement , qui eft prorogé jufqu'au Jeudi 1 ;
„ de ce prefent Mois de Novembre (vieux ilile.) A ces caufes, de l'A-
„ vis de nôtre Confeil privé, nous faifons publier cette Proclamation Ro-
„ yale, fuivant laquelle nous diffolvons le dit Parlement; de forte que
„ les Seigneurs Ecclefiaftiques & Séculiers, & les Chevaliers , Citoyens,
,, & Bourgeois du dit Parlement, font par la prefente Proclamation dif-
,, penfés de s'afTembler le Jeudi treizième de ce prefent Mois de Novem-
„ bre. Et nous faifons favoir par les prefentes , à nos dits Sujets , que
„ nous avons deffein de donner Ordre au Garde de nôtre Grand Seau,
„ d'expédier des Ordres ou Lettres circulaires félon la diie forme de laLoy,
„ pour convoquer un nouveau Parlement, qui commencera & fe tiendra
,, à Weftmuniter le Mardi trentième du Mois de Décembre prochain.
Donné en nôtre Cour à Hamptoncourt l'onzième jour du Mois de No-
vembre 1701 (V. St.) , & de nôtre Règne le treizième.
AdreÇfe de TEvêque £5? du Clergé de la Fille de Londres.
SIRE,
5, ^Tous , les très fidèles & obeiffants Sujets de Vôtre Majeflé, l'Eve- Adrefle
„ 1 >l que & le Clergé de vôtre Ville de Londres , remercions Dieu de dl^"*
„ tout nôtre cœur, & congratulons V. M. fur fon heureux retour au mi- fondjes>
„ lieu de nous. Nous fouhaitterions, SIRE , n'avoir eu d'autre rai-
Yy 3 »fcn,
TERRE.
J>
3f3 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Amaibm „ fon , pour vous prefenter cette AdrefTe , que de réitérer à V. M. les
«'Angle- ^ afTurances de nôtre fidélité & de nôtre zèle , pour la fureté & la
„ profperité de vôtre Perfonne Sacrée & de vôtre Gouvernement.
„ Mais , ce que nous avons apris de l'étrange Procédé du Roy T. C.
„ en prefumant fi injuftement d'ériger le prétendu Prince de Galles
,, en qualité de Roy d'Angleterre , d'Ecoffe, & d'Irlande , nous donnant
une julte horreur de l'injure & de l'indignité faites à V. M., nous faic
„ connoitre aulTi qu'il eft de nôtre devoir de donner en cette occafion à
„ V. M. de nouvelles afTurances de nôtre inviolable fidélité , que de tels
„ Prétextes , ou de femblables Entreprifes , ne pourront jamais ébranler.
,, Nous fommes trop fenfibles, Grand Roy, aux dangers que nous
,, avons fi récemment courus, de tomber dans le Papifme & dans le Pou-
„ voir arbitraire; & nous reconnoiffbns trop la grande Bonté de Dieu, de
,, nous en avoir délivrés , en élevant V. M. fur le Thrône , pour n'en
,, rendre pas nos très humbles Actions de Grâces à la Divine Providence,
„ & être fi ingrats envers nôtre Libérateur, que de nous expofer à de
,, nouveaux dangers.
,, Nous prions donc le Dieu Tout PuifTant d'infpirer à tous vos Sujets,
„ nos Compatriotes , de concourir avec nous en nôtre zèle & dans nos
„ prières, ainfi que dans nos efforts félon nos différentes capacités &
„ nos polies, pour renverfer le pouvoir, & faire échouer les mauvais défi-
,, feins, de tous les Ennemis de V. M. & de rendre vôtre Règne heureux
,, & glorieux , que nous prions Dieu de continuer long-tems au milieu de
„ nous.
.Adrefle
de la Vil-
le de
Marlbo-
roug.
Adreffe de la Ville de Marlboroug.
SIRE,
Le Roy T. C. , ce grand Raviffeur des Libertés de l'Europe, ayant
violé les Articles de la Paix concilie à Ryfwich , en proclamant
, le prétendu Prince de Galles Roy de tous le Etats de Vôtre Ma-
, jelté , excepté la France; Nous, les très obeiffants & fidèles Sujets
, de V. M., le Maire, les Magiflrats, & les principaux Bourgeois de la
, Ville de Marlborough au Comte de Wilts , fuplions très humble-
, ment Vôtre très Sacrée Majefté d'envoyer de telles Armées de Mer
, & de Terre au fecours de vos Alliés , qu'on puiffe châtier l'Infolence de
, cet orgeilleux Monarque , afin de lui faire connoitre , que non-feule-
ment fon petit Fils le Duc d'Anjou n'a aucun Droit à la Couronne d'Ef-
pagne, mais que même la Couronne qu'il porte eft une dépendance de
la Couronne d'Angleterre, pour le maintien de laquelle & de tous les
autres Etats de V. M. nous fommes prêts à facrifier nos biens & nos
vies. Et, ayant congratulé de tout nôtre cœur V. M. fur fon heureux
retour, nous prierons toujours Dieu,ainfi que nôtre devoir nous y obli-
ge, de donnera V.M. une longue & heureufevie, & un Règne glorieux.
Aârejje
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. L 35<>
AdreJJe du Comté de Lclccjîer.
GRAND ROY,
.Affaires
d'Angle-
terre.
Nous, les très-obéiflans & fidèles Sujets de Vôtre Majefté, Tommes Adreiïe
très-perfuadez, & reconnoîtrons toujours avec actions de grâces, duCom-
que V. M., par fa valeur & par fa conduite, nous a rendu nôtre Reli- tédeLei-
gion & nos Libertez , lorfqu'elles étoïent dans le plus grand danger : ccfter'
& que V. M. , par fa fageffe, nous a protégé & maintenu dans la paifible
jounTance de ces avantages, pendant tout le cours de ion Régne.
Nous croyons donc que nôtre devoir nous oblige à employer tous nos
efforts , pour procurer & entretenir la paix & la bonne union dans le
Royaume, & contribuer de tout nôtre pouvoir à maintenir le jufte & très-
légitime titre qu'à V. M. à la Couronne Impériale de ces Royaumes , fé-
lon les Actes pour fon établissement, contre le prétendu Prince de Galles,
fes Adhérens, & tous les autres Ennemis de V. M. quels qu'ils foient: &
nous choifirons toujours , autant que nous le pourrons , des Perfonnes
pour nous repréfenter en Parlement , qui concouront volontiers & de bon
cœur avec V. M. , pour obtenir ces bonnes chofes.
AdreJJe du Comte de Saïïsbury.
SIRE,
Nous fommes très-perfuadez que nôtre devoir & nôtre fidélité nous Adrefle
obligent à reffentir l'Infolence du Roy T. C. , & la grande Indignité d? Gom-
faite par lui à V. M., en donnant le titre de Roy d'Angleterre, d'Ecoffe, |£. **' '*"
& d'Irlande au prétendu Prince de Galles, contre le très-julle & légitime
droit que V. M. y a, & les Loix faites pour établir la Succefiion dans la
Ligne Proteflante. Il eft évident par-là, que ce Roi a deffein de tâcher,
autant qu'il lui fera poflîble , de détrôner V. M. , d'extirper la Religion
Proteflante dans ces Royaumes, & de renverfer & détruire nos Libertez,
nos Droits, & nos Privilèges, pour le maintien & la confervation defquel-
les chofes V. M. à fait voir un (ï grand zeîe, en hazardant fi fouvent vô-
tre prétieufe & chère vie.
Nous, les très- fidèles & obéïffans Sujets de V. M., lui demandons donc
Permillion de l'afiurer, qu'en quelque tems q\ie ce foit, nous fervirons
fincerernent &. unanimement V. M., & que nous employerons tout nôtre
pouvoir & toutes nos forces, pour la confervation de fa Perfonne Sacrée
& de fon Gouvernement , contre tous les Ufurpateurs > & tous ceux qui
voudront prétendre au Litre de V. M.
Adref-
3<?o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires
"Vekr"" Aàreffe du Comté de Worvcfler,
SIRE,
Adrefle XJous, les très-obéiffans & fidèles Sujets de Vôtre Majeflé, fbuhaitons
du Com- J^%| ^ demandons humblement permiiiion de faire voir le grand reffen-
Worcef- timent que nous avons de l'Affront fait h V. M. & à vos Royaumes par le
ter. Roy T. C. en déclarant le prétendu Prince de Galles Roy d'Angleterre,
d'Ecoffe, & d'Irlande. Nous fommes obligez d'avouer & de reconnoître
les grandes chofes que V. M. a faites pour nous , & confeffer que c'efl
une Bénédiction particulière de Dieu fur ces Royaumes , qu'en de fem-
blables entreprifes & attentats pour détruire nôtre Religion & nos Liber-
tez, nous avons le meilleur des Rois pour les défendre. Nous prions
donc très-humblement V M. de nous permettre de l'affurer , que nous fe-
rons tout nôtre poffible,& employerons tous nos efforts, pour la conferva-
tion & la défence de Vôtre Perfonne Sacrée & de vôtre Gouvernement,
contre le prétendu Prince de Galles & tous vos Ennemis, foit dedans foie
dehors vos Royaumes.
AdreJJe de la Ville &? Comté de Toolc. \
SIRE, 1
Nous, les très-obéïffans & fidèles Sujets de Vôtre Majeflé, étant trèsj
fenfibles & fort irritez de la grande Indignité & de l'Affront fait à
Vôtre Perfonne Sacrée & à vôtre Gouvernement par le Roy T. C. , en
proclamant le prétendu Prince de Galles Roy d'Angleterre , d'Ecoffe, &
d'Irlande , en quoi il a ouvertement violé le Droit & le Titre inconteftable
qu'a V. M. à ces Royaumes, & contre nos Loix faites pour établir la Suc-
celTion à la Couronne dans une Ligne Proteltante.
Nous demandons humblement permifiïon de déclarer, que nous abho-
rons & dételions cette perfide Action de ce Monarque: comme auflî d'afc
furer V. M. , qu'au péril de nôtre vie & de tout ce qui nous eft le plus
cher, nous nous tiendrons attachez à V. M. , pour défendre fa Perfonne
Sacrée & fon Gouvernement, & la Succeliion à la Couronne, ainfi qu'el-
le a été depuis peu établie, contre le prétendu Prince de Galles, & tous
autres qui pretendroient ou voudroient ufurper vôtre Couronne ou vôtre
Dignité.
Mrer
Adrefle
du Com-
té de
Poole.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 361
Affaires
Adreffe de la Fille de Sandwich. d'anolb-
*" TERUK.
SIRE,
„ "VTous, les très-obéifTants Sujets de Vôtre Majeflé, la congratulons Adreflb
„ 1^1 de tout nôtre cœur , de ion heureux retour dans Ton Royaume} ?e laVl1"
„ Et nous nous fervons de cette occafion, pour aflurer Vôtre Majeflé sand-
„ autfi-tôt après fon débarquement, que nous ne faurions afTés exprimer wich.
combien nous refTentons l'Action du Roy de France, en donnant le ti-
tre de Roy d'Angleterre, d'EcofTe, & d'Irlande au Prétendu Prince de
Galles, & le nommant jaques III. pour faire revivre & ranimer un
Parti qui a toujours été Ennemi de vôtre Majeflé dans fon Royaume ,
& cela contre les engagements dans lefquels il elt entré par le dernier
Traité de Paix.
„ Nous croyons donc qu'il efl de nôtre devoir, d'affurer très-humble-
„ ment Vôtre Majeflé, que nous employerons tout nôtre pouvoir, pour
„ vanger l'honneur de V. M. & maintenir le titre incontellable qu'a V.
„ M. à ces Royaumes durant fa vie, que nous prions Dieu de vous don-
,, ner longue & heureufe , & après cela à vos SuccefTeurs dans la Ligne
„ Proteflante, ainfi qu'il efl établi par les Loix.
Adreffe de la Fille de Wïlton.
ledeWil-
ton.
„ "Permettez nous, Grand Roy, de nous joindre à un fi grand nom- Adrefle
„ A bre de vos autres très-obéifTants & fidèles Sujets , pour expofer à Jf J^îf
„ vos pieds le profond reiTentiment que nous avons de cet horrible Af-
„ front fait depuis peu à Vôtre Majeflé par le Roy de France. Nous a-
„ vons lieu de croire, qu'il n'auroit pas été afTés hardi pour le faire, s'il
„ n'y avoit été encouragé par un Parti corrompu qui eft dans vos propres
„ Etats, lequel Milord Melford réprefenta dans la Lettre qu'il écrivit
„ l'hiver pafTé, comme fes Amis. Mais fon Infolence,en proclamant le
„ Prétendu Prince de Galles Roi de la Grande-Bretagne & d'Irlande,
„ pour s'oppofer au juile titre que Vôtre Majeflé y a , efl une û grande
„ Indignité faite à V. M. & aux trois Royaumes, que tout le Monde la
„ doit avoir en horreur, excepté des Traitres de la plus noire Trahifon ; fi
„ on confidere principalement toutes les grandes chofes que V. M. a fai-
„ tes pour ces Nations , & tous les périls qu'Elle a courus pour nous de-
„ livrer du plus dur de tous les Efciavages.
„ Nous efperons, Sire, que nos Députez à la Chambre des Com-
„ munes feront toujours prêts à concourir avec V. M. en tout ce qui la
„ pourra mettre en état, non-feulement d'arrêter, mais aufîi d'abbatre &
„ d'humilier ce grand Perturbateur.de l'Europe, dont la vie a été une
„ fuite continuelle de ruine, de carnage, & de rapine. S'ils ne le font
l'orne XL Z z „ pas
Aftaires
d'Angle-
TEKRE.
$Si MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
„ pas , nous aflfeurons V. M. qu'ils agiront contre nos fentimens , & ce
„ que nous attendions d'eux, lorfque nous les avons choifis pour nous
„ reprefenter en Parlement.
„ Nous efperons encore (en nous foumettant pourtant humblement à
„ Vôtre Majefté) que dans un jufte reflentiment de cette Infolence, V.
„ M., avec le fecours de fon Peuple & de fon Parlement, fera en état de
„ luy faire rendre compte de ces autres Titres qu'il a érigés en Europe, &
„ dans l'Amérique , au préjudice de fa Foy & de fes Traités ; & qu'en
„ rétabliffant la Maifon d'Autriche & la Couronne d'Efpagne, Elle lui fe-
„ ra abandonner fes Ufurpations fur ces Païs-là, & lui fera perdre l'efpe-
,, rance de devenir Maître du Commerce & de la Liberté deceRoyaume>
„ & de tout le monde voifin.
Adreffe de la Fille dAylsbury.
Adreffe
de la Vil-
le d'Ayls-
jbury.
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SIRE,
Le Reflentiment & l'Horreur, que nous avons de la Perfidie du Roy
de France, qu'aucun Serment ne peut lier, aucun Traité engager,
ni aucun Sacrement obliger; qui, au préjudice & contre la Paix de Ryf-
wich, a érigé le Prétendu Prince de Galles, nonobftant le juite titre &
le légitime Droit qu'a Vôtre Majeité à la Couronne Impériale de ces
Royaumes ; nous obligent à demander tres-humblement permiffion à V.
M. de lui renouveller les vœux de nôtre obéiflance, & de l'aflurer, que
nous employerons tout nôtre pouvoir & nôtre induftrie, pour défendre
fa Perfonne Sacrée, fa Couronne, & fa Dignité, contre tous ceux qui y-
voudront prétendre, ou les envahir, de quelque rang ou qualité qu'ils
foient; & que nous foutiendrons V. M. dans toutes les Alliances qu'EÎ-
le a faites ou fera, pour l'honneur, l'intereft, & la feureté de tous les
Etats de vôtre Domination, & la Paix publique de l'Europe.
Adreffe
de la Vil-
le de Ti-
verton.
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55
Adreffe de la Ville de Tiverton.
S î R E,
Etant très fenfibîes avec combien de gloire Vôtre Majefté a déli-
vré nôtre Religion, nos Loix, & nos Libertés, de la violation ma-
nifelte des précédents Règnes j & comment ces chofes nous ont été
depuis inviolablement confervées; nous ne faurio.ns, fans nous rendre
coupables de la plus haute ingratitude, nous empêcher de dire & faire
connoitre combien nous detefïons & avons en horreur cette dernière
Action du Roy de France, en prefumant & ôfant donner le titre de
Roy d'Angleterre, d'Ecofle,& d'Irlande au Prétendu Prince de Galles,
violant par-là le très julte, tres-legitime , & inconteltable Titre de V.
M.
55
RESOLUTIONS D'ETAT, M, DCC. I.
3<53
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TERRE.
M. & méprifant toutes nos Loix. Nous fommes très-perfuadés, que le Affaire*
motif qui l'y aporté a été les aflurances qui lui ont été données par un "L^!3""
Parti dans ce Royaume , qui , pendant les Règnes précédents , a fait tout
ce qu'il a pu pour augmenter fon pouvoir, afin d'introduire le Papifme
& l'Efclavage dans ces Royaumes, & qui s'oppofa à mettre la Couron-
ne fur la tête de Vôtre Majeité. Nous prenons donc, avec toute l'hu-
milité pofïïble, la permiiïion d'aflurer V. M. que de tout nôtre pouvoir,
& avec touts nos efforts, nous maintiendrons & défendrons la Perfon-
ne Sacrée & le Gouvernement de V. M. comme auffi la Succeflîon aux
Couronnes de ces Royaumes, ainfi qu'elle eft à prefent établie par les
Loix , contre le Prétendu Prince de Galles , & fes Adhérents , & tous les
ennemis de V. M. dedans ou dehors le Royaume. Et lorfque V. M.
trouvera à propos de prendre l'avis de fon Peuple aflemblé en Parle-
ment, nous ne choiiirons que des Perfonnes qui metront efficacement
Vôtre Majefté en état de protéger la Religion Proteflante, de mainte-
nir la balance de l'Europe, & de réduire le pouvoir exhorbitant de la
France.
Aàreffe de la Fille de Cantorbery,
SIRE,
" "^r°us» ^es très-humbles & tres-fidelles Sujets de V. M., qui avons eu Adrefle
„ JlN fi foi
uvent l'honneur de la congratuler fur fon heureufe arrivée en dela.vfl-
cette Ville; Nous croirions manquer à nôtre devoir, Ci nous tardions en lede
ce tems à vous donner de nouvelles marques de nôtre fidélité & affec- £ arn..tor"
tion. Principalement , depuis que le Roy des François a proclamé & re-
connu le Prétendu Prince de Galles pour Roy d'Angleterre, d'Ecofle,
& d'Irlande ; contre les Droits légitimes de V. M. à la Couronne Im-
périale de ces Royaumes , contraire à l'établifTement de la Succeflîon à
la Couronne , fait par plusieurs Aftes de Parlement.
„ C'eit pourquoy nous affurons tres-humblement V. M. que nous em-
ployerons tout nôtre pouvoir pour défendre & affilier vôtre Perfonne
facrée, & vôtre Gouvernement, contre le Prétendu Prince de Galles, fes
adherens, & tous les autres Ennemis de V. M.
„ Nous prions le Dieu tout puiffant, qui a donné de Ci heureux fuccès
„ aux Armes de V. M. pour la defenfe & la confervation de nos Libertés
„ & de la Religion Proteftante , qu'il lui plaife de bénir continuellement ces
„ Royaumes, & toute la Chrétienté, & en confervant vôtre precieufe vie
vous donner un long & heureux Règne.
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3*4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
AïîAIRÎS
D'ANGLE-
TERRE.
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de la Pr.
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Aàrcffe de la Province de Cumberland.
SIRE,
L'insolent Procédé du Roy T. C. , en s'ingerantde donner le Ti-
tre de Roy d'Ang'eterre, d'Ecoffe, & d'Irlande, au Prétendu Prince
de Galles ,qui eft un Affront & une Indignité de la plus haute nature
faits à Vôtre Majefté, nous fait embraffer cette occafiond'afïurer V. M,
que nous en fentons tout le reffentiment & toute l'horreur que doivent
en avoir de véritables, obeiflants, & fidèles Sujets.
Il n'étoit pas nécelTaire de cette nouvelle preuve , pour nous convain-
cre que ce Monarque, violant toutes fortes de Serments, & tous les
Traités qu'il a faits avec V. M , embrafTera la première occafion qui fe
prefentera pour affujettir vos Royaumes à fon Pouvoir deipotique.
„ C'eft pourquoy nous affurons V. M. , que , toutes les fois que vous le
trouvères nécelTaire, nous l'arTilterons de toutes nos forces & de tout nôtre
pouvoir, à réduire & rabaifTer la PuifTance exhorbitante & dangereufe
de la France. Et pour mieux faire voir, que nous nous y employerons,
avec tout le zèle & toute l'affection dont nous fouîmes capables , nous
prenons la liberté de dire à V. M. que nous fommes perfuadés qu'il fera
très-difficile de conferver nos Loix, nos Libertés, & nôtre Religion, fi
on ne met ce Monarque en état de ne les pouvoir jamais molefter. C'efl
ce que nous avons tout fujet d'efperer, de la conduite, de la prudence,
& de la Sageffe de Votre Majefté.
Permetez-nous encore , Sire, de vous affeurer très-humblement, que
non feulement nous défendrons au péril de nos vies la Perfonne facrée
de V. M. & maintiendrons fon Gouvernement, que nous prions Dieu
de nous conferver long-temsj mais que nous avons aum folemnellement
refolu & déclarons, que nous ferons les derniers efforts, pour fuutenir&
protéger la Succeffion à la Couronne, ainfi qu'elle eit à prefeni établie
parA6le du Parlement, dans la Ligne Proteftante, contre tous ceux qui
voudroient l'envahir ou y prétendre.
In/irufîions de la Ville de Londres a fes Députez au prochain
Parlement; en Novembre 1701.
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Jnftru-
étions de
Londres
à fes Dé-
putez.
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33
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MESSIEURS,
'ou s vous prions, & vous recommandons expreffement,que, dans
le prochain Parlement, vous pourfuiviés les engagemens faits à Sa
Majefté, dans l'Adreffe de cette Ville, & dans toutes les autres du
Royaume, Pour cet effet, nous nous attendons, que, fans perte detems,
„ vous
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TERRE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. tfs
vous tacherés de tout vôtre pouvoir de mettre S. M. en état de main- Affaires
tenir fon Droit inconteltable & Ton Titre à la Couronne ; De vangerfon d'Angle-
honneur, & celui delà Nation; De mettre S. M. en état dans cette
conjoncture délicate à pourvoir à la feureté de ces Royaumes; De pa-
roitre à la tête de l'Intérêt Proteflant; De faire bon Tes Alliances pour,
conjointement avec fes Alliés , réduire tellement le Roy des François,
qu'il ne puifle plus être en état d'inquiéter & d'oprimer l'Euro-
pe. Et, pour y reuffir, nous vous chargeons de travailler diligemment
à conferver une entière & bonne correfpondance entre les deux Cham-
bres du Parlement, & empêcher d'y pourfuivre les Animofités particu-
lières ; d'avoir foin du Commerce; de foutenir le Crédit public 3 de
faire bon les non-valeurs des fonds , & d'avoir foin fur toutes choies de
la Flotte Royale. En ce faifant , il ne faut pas douter que Dieu ne faf-
fe profperer vos Entreprifes.
AFFAIRES DE FRANCE, D'ESPAGNE, A™"
7 3 DE FraM-
ET D'ITALIE. £££
d'Italie.
Harangue du Cardinal de Noailles au Roi, à la tête du Clergé,
du iq. Juin,
SIRE,
Le Clergé, aflemblé par vos Ordres, vient rencuveller fes hommages à Harangue
Vôtre Majellé avec la foûmifllon & la reconnoiffance que nous inf- du em-
pirent fon Trône augufle, fon Mérite éclatant, & la Protection puiffante deNoai1*
dont Elle nous honore. Nous venons dans cette occafion, avec autant j^0,-.
d'ardeur & de zeîe, que vous avez eu de peine à nous faire venir.
Après avoir donné à l'Europe une Paix fi avantageufe, qui n'efl pas
moins l'effet de vôtre modération que de vôtre puiffance, V. M. ne pen-
foit plus qu'à nous procurer la tranquilité falutaire , qu'on attend des bons
Rois, félon la parole de St. Paul; & l'on vous force de vous préparer à
laGuerre.
Nous favons, Sire, que le Titre de Père des Peuples efl plus cher à
V. M. , comme à tout Prince véritablement grand & chrétien , que le
Nom flateur,mais dangereux, de Conquérant. Nous fbmmes encore per-
fuadez, que fi vous pouviez feul fournir aux fraix de la Guerre, en re-
tranchant à vôtre Perfonne ce qui efl dû d'ailleurs à vôtre Dignité, nous
jouirions tous en repos de nos biens; que vous les conferveriez aux dé-
pens des vôtres par la tendrefle que vous avez pour vos Sujets , & par la
juflice & la force de vos Armes. Mais, il efl jufte que nous partagions
avec V. M. les Dépenfes qu'Elle fait pour nous défendre.
L/amour de vos Peuples, l'expérience du paûe, vous répondent de la
Zz 3 difpo-
166 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires difpofition de tous les Corps de vôtre Roiaume. Le Clergé , qui a
deFran- l'honneur d'en être le premier par le rang que la Religion lui don-
ce, n Es- ne^ en fera toujours, comme il l'a été jufques ici, le premier par fon
d'Italis. zèle. _ ,
Quoi qu'en puiflent dire des Politiques trop humains , le Cierge a fait
voir plus d'une fois, qu'il n'elt pas moins utile pour le bien temporel de
l'Etat, qu'il eft néceffaire pour le maintien de la Religion. Affligé que
fes forces épuifées ne puilîent répondre à fon zélé , il conferve , s'il eft
permis de parler ainfi , un dévouement inépuifable pour vôtre fervice.
Telles que font fes forces, nous les offrons à V.M. ,perfuadez qu'Elle nous
ménagera plus que nôtre attachement ne nous permettroit de nous ména-
ger nous mêmes. Que pourrions-nous refufer à un Maître qui donne tant
àl'Eglife?
C'eft vôtre Religion, Sire, il faut le déclarer, qui, parmi tant de qua-
litez héroïques , excite le plus nôtre gratitude. Nous connoiflbns & ad-
mirons comme, les autres, les merveilles de vôtre Régne: mais , V. M. ne
veut recevoir de nous que des louanges , qui foient dignes de nôtre mini-
ilére & d'un Roi T. C. Vos actions politiques & militaires ont épuifé les
éloges, & fatigué vôtre modeilie. Vôtre piété vous fait anéantir devant
devant Dieu, comme David, tout ce qui a paru en vous de plus éclatant
devant les hommes : tant vous avez compris que la véritable gloire eft
dûë à Dieu feul.
C'efl lui que nous glorifions, quand nous célébrons les grâces que vous
en avez reçues. Cette foi non-feinte , que recommande St. Paul , qui
vous attache fi fortement à la Religion : Ce zélé pour la gloire de Jefus-
Chrift , qui, malgré la timide politique des fages du Siècle, vous a fait tout
entreprendre & tout fouffrir pour la deftruction de l'Héréiie: Cet amour
pour l'Eglife , qui vous fait appuyer par-tout la pureté de fes dogmes, de
fa morale, de fa difcipline, & maintenir fes droits Sacrez, même contre
ceux de vos Officiers, qui voudroient diminuer fon autorité pour augmen-
ter la leur fous prétexte de défendre la vôtre: Cette foûmiflion aux ordres
de la Providence, qui vous rend fi égal dans tous les événemens, qui vous
fait recevoir de fa main les maux, comme les biens, l'affliclion comme la
joye : Ce font-là , Sire, les qualitez qui vous rendent véritablement
grand & louable, parce qu'elles viennent de Dieu, & fe rapportent à
Dieu. La valeur, les richelTes , les conquêtes, peuvent rendre pour quel-
ques momens un Roi célèbre fur la terre; mais, fi la Religion n'en régie
l'ufage, l'éclat & le bruit fe diffipent bien-tôt, & il n'en refte plus qu'un
nom itérile, & une trille défolation.
Ce Roi,fi fameux par fes richelTes & fes profpéritez, n'efpéroit que par
la fageffe acquérir l'immortalité & rendre fa mémoire éternelle. Par elle,
difoit-il, je ferai illuftre parmi les Nations, la terreur des Rois les plus
redoutables, les délices de mon Peuple pendant la Paix, fon efpérance &
fa force pendant la Guerre. Ce même Roi, qui a parlé û dignement de
l'utilité de la fageffe, lui attribue encore le pouvoir de difpofer des Peu-
ples
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. tf7
pies & des Royaumes. Vous l'éprouvez, Sire, & toute l'Europe en Affaires
voit aujourd'hui avec admiration, ou avec envie, un exemple éclatant. Tu- DK *»an-
fle récompenfe de vôtre modération, & de la protection que vous donnez CE' D'Es*
aux Princes dépouillez de leurs Etats. S?*? **
L'Efpagne,^ cette Nation fiére & généreufe, incapable de fouffrir une — ■ ■
Domination Étrangère, oublie tout d'un coup Ton ancienne jaloufie exci-
tée par le voifinage de la France, par l'émulation, par de longues Guer-
res, vient remettre Ton fort entre le mains de V. M., lui demande un Roi
de fon Sang. Qui l'auroit crû, Sire , Ci les prodiges de vôtre Règne
n'avoient rendu tout croyable.
Elle voit déjà avec tranfport, cette Nation accoutumée à n'admirer
qu'elle même , ce qu'elle s'étoit promis d'un Prince choifi dans une Maifon
toute née pour gouverner, inftruit dans l'Art de régner par un fi grand
Maître, d'un Prince forti de la Race de St. Louis, pour reporter dans la
Caftille toutes les vertus Chrétiennes & Royales , que la Reine Blanche
apporta en France. A qui ne refiflera point un Roi, que Dieu vient de
donner aux Peuples de cette illuftre & vafle Monarchie , félon leur cœur,
& félon le fien?
Mais, fi l'ambition, l'envie, & peut-être l'Hérefie, par des pratiques fe- •
crettes, l'emportent fur les régies de la Jultice & de la Religion, Nous
vous offrons, Sire, tout ce qui peut dépendre de nous, pour foûtenir
Ja Caufe de DIEU, des Rois, & des Peuples.
Nous ne pouvons changer ladeflination des Biens Eccléfiaftiques : nous
n'en fommes pas les maîtres, mais les difpenfateurs. Vous favez comme
nous, Sire, que ces biens facrez font deflinez à l'entretien du culte de
Dieu, de fes Miniflres, & des Pauvres. Malheur à nous, fi nous en fai-
fons un autre ufage. Mais, nous croyons employer nos revenus conformé-
ment aux intentions de l'Eglife , en les faifant fervir à défendre la Reli-
gion Catholique, à empêcher les Peuples de fuccomber foas les charges
inévitables de l'Etat, & de tomber dans une plus grande pauvreté.
Nous fçavons jufques où les Saints Evéques ont pouffé leur Compafïion
pour les Pauvres. lis ont dépouillé leurs Eglifes, & vendu ce qu'elles a-
voient de plus précieux , quand il a été néceiTaire , rjour les foulager. Mais
ils nous apprennent auffi, que ce qu'ils ont fait comme un Acte de chari-
té parfaite dans les grands befoins, eft dans les autres tems un larcin,
un facrilége.
C'efl à vous , Sire, à juger des tems & des befoins, & à nous à
nous foumettrej vôtre Pieté nous le fait faire fans fcrupule. Nous voyons
que, loin de dépouiller les Eglifes, V. M. les orne avec magnificence ; l'E-
glife de Paris en fera un monument perpétuel à la Poflerité. Nous fom-
mes convaincus que vous ne vous préparez à la Guerre, que dans un efprit
de Paix : comme nous fommes les Anges & les Miniitres de la Paix ,
félon les paroles de l'Ecriture, nous la fouhaitons, nous y devons con-
tribuer de toutes nos forces.
Puiffiez-vous , Sire, avec la Protection du Dieu des Armées, pro-
curer
S68 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires curer encore bientôt à l'Europe cette Paix qui fait fleurir les Etats de l'E-
vr, Fran- glife. Puifiiez-vous , tn confervant plufieurs Couronnes au Roi vôtre pe-
ce, d'Es- -t y[\s, en meriter une, dont toutes celles de la Terre enfemble ne font
ViSue! qLie l'ombre. FaiTe le Ciel, que jufques à la vieillefle la plus reculée & la
„_J plus heureufe, au milieu d'une Famille augufte plus touchée de vos ver-
tus que de vôtre puiflance, vous jouifiîez de la juitice, de l'abondance, &
de tous les autres fruits de la Paix que vous nous aurez rendue.
Plainte faite a l'Envoie de TEtat , de la part du Luc d'An-
jou , fur ce que l'Etat ne le felicitoit pas ; en 1 70 1 .
S E N O R.
Plainte éT^O M P L I E N D O el Real Orden de V. M. que me comunico D. Jofeph
du Duc V^, Pères de la Puent e por Papel de 4 del cor rient e , pasfe a llamar a mi pof-
?P?OU fada al Embiado Extaord. de Inglaterra ,e Hollanda D. Francifco Schonneriberg,
voie des y haviendole noticiado quando Je me manda fobre 1er muy réparable que tos
E. G. EJlados Générales de lai Provincias-Unidas dilaten la Congratulation y Re-
connocimient que fe deve ha fer a V. M. corn motivo de baver recahido en
fu Real Performa la Subcefion de efla Cerona , le entregue tambien Papel fir-
mado mio , en que por ejerito , y con todas las Lazones que fe previenen le
dava a entender lo mifmo , y haviendolo entendido , reciviendo el Papel , me
manifefto ejlrahava que [e pajj'ace eflo oficio con Los EJlados Générales fin
hablar del Reg. Britt. y de/pues paffo a noiieiar me à noche que fue quando
tubimos efia conferentia , que haviendole llegado un Extr. me podia dizir de
parte del Reg. Britt. , el guflo grande D. S. M. ha tenido en la difpozitwn
del Teflamento del Reg. nuejlro Sehor. (que ejla en gloria) que S. M. B. y
Los EJlados Générales defian macho manter la amijlad , buena Correfpon-
dentia , y Confederationes que ban tenido hajla aqui con efta Corona , y que
que de indépendante como de an tes y pueda cozar de una liber t ad entera en cuja
manutencion S. M. B. y Los EJlados Générales contribuïran fiempire todo
fu poffible , y como S. ifcf. B. y Los EJlados Générales defean manter la efirecha
Amijîad y buena Correfpondencia con la Corona de Efpagha , défie avan tambien
que iquel me. de parte de Efpagha concurran a esfo , no Jolo en que fub-
fijlan los Trattados de Paz entre Efpagha, Inglaterra, y Hollanda , en Ju fiuerca,
& vigor,fino tambien que fe renueben dichos Tratados con todas aquellas cïaujulas
que pue dan hazerles mas firmes y (egur os para la reciproca combeniencia y benefi-
cio de los fiubditos de las très potencias , y de la tranquilidad de Europa ; y la
major prueba de que Efpaha , defea de fu parte vivir con buena inielligencia
con S. M. B. y EJlados Générales ; fera el que fe procuro que Los Payzes Bajos
Efpanoles queden fiempre uni dos a la Corona de Efpaha, y que aquellas Provin-
cias fean governadas como hafla aqui por fu Rey; de forma que fe eviften tas
occafiones de zelos y inquiétudes a fus vezinos , y de minera que en eflo no aja novi-
dad de lo que Je ha ejlilado bajla a hora ; y para obviar todo genero de Dejcon-
fian-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 3tf<?
fiança combendera que las Garniciones Olandezas que den en las Plaças de los Pay- Affaire*
[es Bajos del Rey Catt. como prefentemente y fe tlaman de bajo del mando de los deFran-
Governadores Efpagnoles fiendo el unico fin el que Je confier ven a que mas Pro- CE>nEs-
vmcïas en el Dvmmio Efipanol cornu oy to eflan quandu S. AL B. y Ejludos Gênera- D'iTAL^.
les, por inclinacton , como por proprio interes ,defean conjervar la amifiad y buena
correfpondencia en la Corona de Efpana , y para tefiimonio de ello, les fera muy
agradable que fe les participe en la forma acoftumbrada la Elevacion del nuebo
Rey a la Corona de Efpana , lue go que aya llgado a fu Cor te de Madrid para
reconocerlo por tal Rey de Efpaûa con tedas las demofiraciones de amifiad y fo~
lemnidad requerida y dévida en femejantès ocafioms amiados tan efirechos y
antigos como l^heram el Rey Britanico y Efiados Générales , luego que recivan la
notificacion del Rey Catt. D. Philippe Quinto.
Haviendole ohido efia Infinuacion con las mismas individualidades que la
participa a f^. M. follette perjuadirle que me la diefie por feripto para pajjdrla a
manos de V. M. en la forma que fe eflila, y fe efcufo de no poder me la dur , mani-
feflando que en vos me la communicara en conjequencia de las Ordenes que havia
havido del Rey Britanico , y pariciendo me efia Conferencia , y las circonftancias
de efia dignas de la Real mtiligencia de V. M. la pajfio a ejfa para que V. M. fu
hajfe noticiofo de todo. &c.
NOUVELLES D'ITALIE.
De du 4. Juin 1701.
Nous fommes de ce côté dans la même fituation, ayant fept Bataillons Campe-
fur le haut de Farraro, Pofte très-avantageux, & où les Vénériens a- ™em dci
voient fait autrefois un Fort qui obligea Charles V. de faire un chemin furr*"'Ç°j*.
exprès derrière le Mont Baldo, lequel chemin eil prefentement ruiné. Corn- ge,àFar-
me le nom de Farraro n'eit pas marqué fur les Cartes, il eil a deux mil- raro &
les au-delTous de Nôtre-Dame de la Couronne, de manière que nous te- Chiofa.
nons la tête par ce Pofle-la , & nous fommes ici fur le bord de l'Adige, un
peu au dcfTus de la Chiofa, petit Fort fur l'Adige appertenant aux Véni-
tiens, & où ils ont fo. hommes.
Les dernières Nouvelles qu'on a ici des Impériaux font que depuis y. ou
6. jours ils font des chemins* dans les Montagnes de tout côté; de ma-
nière que nous ne fçavons point, fi c'efl pour faire une marche vers le
Frioul , ou pour tomber par au-deffus du Lac de Garde à gauche à notre
égard, & entrer dans le BrefTan par le Val Canonique, où il y a un che-
min allez pratiquable : mais , leurs Magazins & leurs Provifions ayant été
faites du coté de Trente, on juge qu'ils voudroient nous depofler de ce
Pofte-ci ,afin de fe fervir de lAdige. Cependant, comme l'entrée dans le
Breffan les metroit tout d'un coup dans le Milanez, il paroit qu'on fon-
ge à former un Camp au débouché au dcfTus deBreile, & que nous commu-
niquerons par un Pont fous Pefcaire fur le Mincio.
Nous n'avons point de Nouvelles certaines de l'arrivée de Mr. le Pr. Eu-
gène. Comme leur* derrières font éloignez, & font Pays de Montagnes &
-^Come XI. Aaa de
37o MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ, ET
At?ures de peu de Commerce, l'on n'efl pas bien informé de ce qui fe paile au
d'Italie. vraY c[iez eux } & par confequent de la jufte quantité des troupes qu'ils
ont, étant les Maiftres de nous cacher ce qu'ils voudront jufqu'à leur De-
bouché.
Notre Cavalerie eft toute arrivée dans les Milanez: on la va faire cam-
per en plufieurs endroits. Les Trouppes de Mr.de Savoye vont aufli fe
mettre en Marche pour entrer dans le Milanez. Par les Lettres venues de
Vienne hier, on écrit que l'Armée de l'Empereur en Italie fera feulement
de 8- Régiments d'Infanterie, 8- de Cavallerie, trois de Dragons: fix
Régiments d'Infanterie & de Dragons font dans le Trentinj on n'a point,
de nouvelles que la Cavalerie foit encor avancée dans le Tirol. Pour
reprefenter notre fituation, le Pofte de Farraro & de l'Adige font ce qui
nous occupe de deçà: nous allons faire un Camp au deffus de BrefTe, &
un Pofle à la Mofa en la Roque d'Anfon , qui font les feuls pafTages par
où ils peuvent entrer de ce côté dans le Milanez.
De Fenife> le 4. Juin 1701.
Entrée y t^ Corps de Cavalerie, & un autre d'Infanterie, des Impériaux font
des im- \J entrés dans le Vicentin, où le Prince Eugène s'eft aufli rendu : ils
dinïïe croioient que ce mouvement obligeroit nos Généraux d'abandonner le Pof-
Vicentin. te de la Chiofa \ mais, ayant laiflë ce qu'il fuffifoit pour le rendre inataqua-
ble, ils ont pris le bon & le véritable parti, qui eft de garnir le bord
de l'Adige par des corps de troupes, qu'ils ont poftés en differens lieux,
& qui fe peuvent réunir en un moment: de forte que les Impériaux ne
peuvent hazarder ce paffage, fans s'expofer à une grande perte , & il
eft prefque aufli vrayfemblable que ce. fera inutilement. Les Impériaux
vivent avec allez de règle dans ce Pays Vénitien; mais, comme l'argent
eft rare parmi eux, pour peu qu'ils continuent d'y fejourner, il eft im-
pofilble qu'ils ne s'echapent, car neceiïité n'a point de loy. Voilà le vé-
ritable Etat où l'on eft.
Leur penfée feroit. à ce qu'on dit, de prendre le chemin du Ferrarois,
pour s'avancer 'de là vers Modene , fe croyant toujours un Parti favo-
rable dans le Milanez. Il y a de l'apparence que tout cela demeurera
dans leur Idée , & que dans quelque femaines leur partifans n'auront pas
lieu d'exalter la force & la bravoure de leurs Trouppes. Un grand
nombre de Noblefle eft allé voir notre Camp, ils en font revenus, aufli
contens de la force de notre armée, que de toutes les civilitez qu'ils y
ont receues. Toute notre Cavalerie eft arrivée; mais, pour incommoder
moins le Païs , & nous conferver des Fourages, Mr.de Catinat la tient
dans des Poftes où elle fubfjfte plus aifement, & d'où elle fe peut ren-
dre à lui plus facilement quand il le faudra.
Ju
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 57i
Affaires
Au Camp de Càâiïàéi , entre Legano & Vérone > D'lTALIE<
z? 9. y«//2 1701.
Le premier Deflein des Allemands, & fur lequel ils comptoient,a été d'à- situation
voirie Cours de l'Adige libre jufqu'à la Chiofa, s'en rendre Maîtres deslmpc-
& du Folle de Rivoli, au pied du quel ils pretendoient s'arrêter, faire la' riaux' &
defeente de leurs vivres, & y établir leurs difpofitions, qui fe trouvoient V*- lrm~
redoublées de leurs derrières par la facilité de la dite Rivière. En même
tems, ils pretendoient s'étendre par leur droite jufques au Lac de Garde,
pendant qu'ils euffent fait paffer leur première difpolition de vivres de Ri-
voli à couvert de leur Armée jufques audit Lac, & que fait à fait ils avoient
fait fuivre leurs vivres fur le Lac, toujours derrière eux, & en avoient fait
venir de même par Tortoli. Ils fe flattoient de pouvoir jouir de Pefcaire,
ou du moins de faire des Ponts fur le Minfchio à leur droite, & dans cet-
te lituation obliger les Armées des deux Couronnes à quitter l'Adige, &
même de les contraindre à couvrir Mantouë. Les dits Allemands preten-
doient auiTi fe couler par leur droite vers Brefcia,fe fervant du Lac, pour
i'aiTiirer de leurs vivres : & donnant par cette iïtuation à craindre jufqu'à
l'Oglio, & à l'Adda, ils obligeroient l'Armée des deux Couronnes à ve-
nir couvrir le Milannez , en mettant l'Oglio devant eux , abandonnant Man-
touë , à moins que l'Armée des Couronnes ne prenne le parti de pré-
férer Mantouë au Milannez, & de relier pour fa feureté entre le Minfchio
& l'Oglio , leur laiiTant en ce cas la liberté de marcher jufqu'à l'Adda, fai-
fant pour lors fortir tous leurs vivres des Débouchés du Trentin dans le
BreiTan,de Ruca,de Tortoli, & du Lac. C'étoit-là pofitivement le deflein
conçu à Vienne, & que le Prince Eugène s'étoit promis de pouvoir ex-
écuter. Le Pofte occupé de la Farrara & de Rivoli l'a rompu abfolu-
ment, & l'empêche de l'exécuter. C'elt pourquoi ils ont été contraints
de prendre l'autre parti, qui elt celui des Montagnes & du Vicentin, bien
différent dans toutes fes circonflancesdu premier, lequel tournoit &mena-
çoit Mantoue & le Milannez, & le dernier s'en éloigne, & ne regarde que
l'Etat de la Republique, contre laquelle l'Empereur affure n'avoir aucune
mauvaife volonté: ce qui prouve, que ce n'elt que par contrainte qu'ils y
vont, & parce qu'ils ne pouvoient plus relier dans le Trentin, fans en
fortir par quelque endroit: & l'avantage conllderable, que les Allemands
laiiTent aux Armées des deux Couronnes, le prouve afTée , puifqu'ils les lai fc
fent Maitreffes de la defrenfe de l'Adige, par la quelle ils mettent en feu-
reté derrière eux Mantouë , le Mantouan , & le Milannez , fans manger , ni
ruiner, ni l'un ni l'autre. Il femble que l'on attend dans l'armée Impériale
quelque ordre de Vienne , fur le compte qu'on y a rendu des difficultés
qu'on y trouvoit à l'exécution de ce premier deflein. Cependant, il y au-
ra de la difficulté fur la Refolution à prendre fur le fécond, confîderant
Aaa 2 que
372 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET;
Affaires que û l'Armée Imper, penfe à s'aprocher de l'Adige , pour y jetter un Pont
^'lTtL1E- & pour le paffer vers Lignage ou plus bas, il faut en même teros qu'elle
fe refolve à abandonner les communications des derrières du Tirol & du
Treniin , pour fe mettre en force & en état d'en venir à une Aclion géné-
rale, qui eft inévitable, en paflant l'Adige; mais, fi d'ailleurs on veutcon-
ferver la liberté des derrières du Tirol, & qu'on ne veuille pas abandonner
la Vallée du Trentin, on ne le peut faire que par une diminution allez con-
fîderable de l'Armée par un Corps fuffifant pour s'aiTurer la communication
du Pais , & les mettre à couvert d'infulte , les Milices ni les Paifans du
dit Pais ne fuffifans pas à cet effet. La dite Armée d'ailleurs n'a encore
aucun Magazin ni difpofition de faite pour fa fubiifbance dans le Vi-
centin , ni le long du bas de l'Adige. Ce manque de difpofition prouve en-
core la nouveauté & la contrainte de la Marche Impériale vers le fufdit
Vincentin.
Ce détail ci-deflus montre quel étoit le premier deffein des Impériaux;
mais, quant à prefent, ils en font fort éloignez & mangent, de l'autre côté de
l'Adige, le Pays Vénitien , parce qu'ainfi la voulu la République, pour s'être
voulu renfermer dans les étroites bornes d'une Neutralité dont elle fe re-
pent, d'autant plus qu'elle n'a tenu cette conduite qu'en confiance que le
Pape l'avoit toujours flattée de fe joindre à Elle pour s'oppofer par force
ou par prière aux defîeins ruineux de l'Empereur pour le Pays. Ils fe plai-
gnent donc que le Pape leur a manqué, & leur a fait perdre le tems de fe
mettre en état de garder l'Entrée de leur Pays, ou de la fermer aux Im-
périaux, foit par prières ou par voyes de fait, de forte que l'on peut comp-
ter qu'ils s'ennuyeront bien-tôt de la conduite defordonnée des Allemands.
Les troupes des deux Couronnes Alliées gardent toujours le Débouché du
Tirol à Rivoli, la Ferrara,& le Cours de l'Adige;& depuis là, par Briga-
des feparées, elles gardent les bords de cette rivière jufque auprès du Canal
blanc au défilais de Lignago : tous les Dragons font jettes fur la droite de
l'Armée Alliée le long du bord de l'eau & 30. Efcadronsde Cavalerie , com-
mandée par Mr. le Chevalier de TefTé, font à leur portée: le refie de la Cava-
lerie eft à peu de milles derrière le centre , en Pays de Fourage,mais tou-
jours prête, & à portée. Le Canon eft ici dans le centre, de forte qu'il
Vagit de voir s'il feroit pofîible à Mrs. les Allemands d'avoir envie de
jetter un Pont. C'elt pourtant de quoi ils menacent; ce qui eft certain,
c'eil qu'ils font fort contraints dans tous leurs Poltes, achetant du grain
au jour la journée, cent & 200 facs à la fois, avec beaucoup de peine, ce
qui marque qu'i's n'avoient pas de Magazins faits ni de commodités pour
en établir: l'avance où la necefîké les a obligés d'aller ; l'on eft bien in-
formé qu'ils n'ont aucuns Magazins dans le Ferrarois.
Les premières troupes de Mr. le Duc de Savoye, au nombre de huit Ba-
taillons, font entrées dans l'Etat de Milan, & fe fui vent allez régulièrement.
Mrs. les Généraux de lEmpereur font autant de fanfaronades qu'ils peu-
vent au de-là de l'Adige. L'on avoit mis iix Dragons à la fauve-garde
d'un
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 373
d'un Ponton, à la requifkion de la République de Venife. Les Al- d»""ukv
lemands en ont affafiine quelques-uns; & , quand on a envoyé repe-
ter les vivans, ils ont repondu, qu'il n'y avoit point de Cartel: fierté bru-
tale, qui deviendra rampante, au moment que l'on aura fur eux un feul
p ri Ton nier.
Il n'elt point vray, comme on tache de le publier, que les Troupes Efpa-
gnoies,& Italienes , vivent mal avec les François : au coniraire, tout elten
union, & l'on peut repondre que iî les Allemands ôfent fe prêter à une
Aéiion, ils feront traittés afTez mal pour ne pas s'expofer à une féconde,
à moins qu'il ne veulent rifquer d'être bien battus. Ces Meilleurs ayant
trouvé l'Adige occupée, aulfi-bien que les moyens d'entrer dans le l>=r-
gamafe ou Breffm , ont fait un chemin par delilis les Montagnes, & dans
les lieux uniquement connus des chèvres, pour pénétrer au cie-ià del'Adi-
ge entre Vérone & Vincence: ainfi ce qu'ils font n'ell plus que l'Affaire
des Venitien«i mais, s'ils jettent des Ponts fur l'Adige , ils pourront bien
en payer la façon.
Lettre des Généraux des deux Couronnes , du 22. Juillet 1701 ; avec
Copie d'une de PEkcleur de Cologne aux E/ecleurs de
Mayence , de Trêves 3 £$P de Bavière.
E
roniKS»
SSENDO pervenuto à notitia de" Gsnerali délie Armate délie due Corons , cbe Ji Efpece ^
fojjero dijjemenati per il Mantovano , ed altrove, alcuni placardi è Jcritti in- ç^lVi"
jïnitamente abufivi à difegno di portar del terrore neW ignoranza del Popoli, Ji è gm- Qéne-
dicato à propojito fenz'entrar nel detallio di tutte le ragioni del SercmiJimo D.ica di rsux de*
Mantova , cbe probab'.lmete , quando farà citato legitimtamejite , è da coi haïra il ai- 2» Cou
ritto di farlo , non manchera già di produrle ampiamente è di far conofeere al monda
Vinfuffiflenza, calunn'a, e falfità del detti placardi , di loro far intendere , che il
contenuto de placardi medeji.ni non bà venin fondamento ; poiebe S. M. Impériale non
bà ragione alcuna di trovar à redire alla condotta del fudt. SereniJJimo Duca di Man-
tova , corne lo prova à bajlanza la Lettera feritta dal Seren. Signor FAettor di Colonia-
di cui è qui appreffo la copia. Per altro , le due Corone cbe banno fempre havuto per
oggetto il Mantenimento délia tranqu'lliîà d'Italia, conofeendo quanto ellajarebbe non jo-
lamtente altérât a , ma per lo contrario tutta in Guerra, ? elle non preven'vano le
minaccie fatte da i Mlniftri delï Lnperatore , fopra il tutto dal Sigr. Co: di Cajiel-
barco , che S. Mîà. Impie volea impadromrfi, di Alantova , per fard la prima Jua
piazzd d"armi , per facil'.tar probabihnente anticipata la Guerra in Italia ; le Loro
Macjlà. banno trovato buono , di far raarchiare Trappe alla detta Mantova , e di
sferzar queflo Duca à ricevernele , neW mica épura intenzione di opporjî al fiageilo
délia Guerra , di cui l lnperatore mhiacciava il ripofo delï Italia , corne pare clf og-
gidi vi operi attaalmente. Egli t perciô , cbe i popoli devono aver menu di riguardo aile
A a a 3 fup-
374 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aïtaires fuppojizioni , che loro fi prefentano per la propria ruina , cbe alla verità , con la quale
d'Italie fi vuol loro prevenire e difenderli; ed è quejio ancora , che U Generali deW Armate dél-
ie due Corone banno giudicato à propofito di far publicare per intelligenza de Popoli,
e per impedire che ejji non fi lafcinoforprendere dalle fini fire infîuenze che lero potreb-
bero effere totalmente contrarie.
Carolo-Enrico di Lorena.
El Maresciallo di Catinat.
Dal Campo di Goito, nel 22. diLuglio 1701.
Lettre de
l'Elefteur
de Colo-
gne tou-
chant le
Duc de
Mantoue»
Copia délia Lettera circolare Jwittadal SereniJJimoElettor di Colonia
alîi Serenijfimi Elettori diMagonza, Treveri, e Baviera.
JO bb ricevuto hieri fera per la pofta Impériale una Lettra delf Imperalore data
à Laxemburg II 20. del mefe di Magglo pajfato , concernente il Duca di Mantova ,
nella quale io bb intefo , cbe alla Corte di Vienna fi imputa il delitto di lefa Maejlà à
quejio Duca, per baver ammeffe Truppe Slraniere nella fui Città, e fuo Ducato di
Mantova , e cbe digià fia egli flato citato per comparire alla datta Vienna nel termi-
ne didue mefi , ad audiendum & videndum fua, & Confiliorum &c:
Qiiantunque io ignori in quai maniera, &Jbtto quali condizioni , poffa queflo Principe
efferfi impegnato con potcnze Straniere , e niolto più ancora le Sicurezze , cbe pub egli
baver date à S. Mtà. Impie, fotto lafede di giuramento , e che percib io nonfiagià in
i flato di giudicare , fe egli veramente è colpevole de'fattl, di cui è caricato, e Je il fuo
trattato con le dette potenze contenga cofe , per le quali dcbba effere decaduto da"1 j'uoi
fondi dependenti dalV Imperio.
Corne tuttavolta non fi puo punto dubitare , che fe queflo Duca poteffe effer conv'nto
dhtna ver a felonia contro l^mperio, e V Imper atore corne capo deW Imperio, vi fareb-
be grand' occafione di procéder gli contro per parte dell Imper atore & deW Imperio , corne
verfo un Ribelle. Il mlo parère altrefi è, che bifogna convenlre che la Corte Impé-
riale non dere precipitarfi , ne far cofa alcuna di fua tefla, privatwamente à i diritti,
e coflituzioni deW Imperio in uno affare , che riguarda un tanto confiderabile Prenci-
pe , e Vaffallo del medefimo Imperio , e che egli è d'un grandiffimo intereffe per tutti
quelli , che ne compongono il corpo , di tener la mano , perche queflo affare fia tratta-
to con tutte leformalltà requifite; affine che la Corte Impériale in avvenire non fi arrcgbi
il diritto d'una fimile procédurale di décider e fola in fimili cafi nelle cofe impcrtanti,e
fenza laparticipazione degll Elettori, Principi, e Stati dell" Imperio , corne da qualche tem-
po in quà ne abbiamo molti efjhnpi , e pare che fi voglia metterlo in ufo.
Jo fcr'vo confidentemente tutto queflo alla VoflraDile ione , pregandola di vokrmi
eommunicare con la medefima finecrità , quanto più preflo potra, li J'uoi fentimenti.
Rela-
en 1701.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 37r
.Affaires
Relation véritable de ce qui s'efî pajTé entre les Armées Impériale d'Italib-
£5? Françoije en Italie. Du Camp Impérial^ près du Pont
d'Oglio, depuis Ze 3 1. Aout^ jujques au 3. Sep-
tembre 1 70 1 . indufivement.
Le 31. l'Ennemi ne bougea de Ton Camp, mais i! fît prendre les devans Mouve-
à cous les Grenadiers & à beaucoup d'autres ,-pouf coflftruire des ponts mens des
& nettoyer les chemins: &, de nôtre côté, on prit polie à Chiari, la- j.jmfes
quelle place étoit occupée par des Paifans & quelque Milice Vénitienne?,
qui, fous prétexte que cela feroit contre la Neutralité, ne voulut pas d'a-
bord nous recevoir: mais, Mr. le Commandant General leur fit /ça voir, que
Chiari ayant toujours été une place ouverte , il feroit obligé d'ufer de
force, s'ils s'opiniatroient à lui en refufer l'entrée; furquoi ils firent ou-
vrir les portes, & demandèrent une Atteltation par écrit, comment ils a-
voient été obligez de céder à la necefilté , ce qu'on leur accorda fans au-
cune difficulté: néanmoins, fon Alteffe Serenilîime fit dire aux Vénitiens,
qu'il étoit furpris qu'ils euffenc mis Garnifon dans cette place ouverte, &
tout de même comme û elle avoit été fortifiée; que cette Garnifon pou-
voit bien fervir à defièndre les PaïTans & les Ilabitans, & à empêcher
qu'il ne leur fut fait quelque dommage , mais non pas à s'oppofer qu'une
Armée y entrât, fur-tout fi la fituation des affaires ou !a necedîté le de-
mandoit. Cependant, le General de Bataille Guttenitein y mit deux Ba-
taillons de fon Régiment, & quelques pièces de Canon; &, ayant tiré une
Ligne jufques au ruiffeau, il fit faire au dehors un petit parapet le long du
chemin, pour couvrir l'Infanterie: l'on mit femblablement quelques Trou-
pes dans des moulins & maifons qui étoient fur la gauche du dit Chiari ;
mais on rangea tout le refle de l'Infanterie de l'Armée en deux lignes,
& la Cavallerie fut poflée par derrière dans le même ordre fur la droite
& fur la gauche, laiffant néanmoins quelques Regimens de Cavallerie le
long des deux petites Rivières, en cas que l'Ennemi voulut nous attaquer
de ce côté-là. Le Canon fut placé entre l'Infanterie, & dans cet état on
attendit l'Ennemi , qui rangea toute fon Armée en bataille & fit courir le
bruit, qu'il alloit droit à nous, mais que nous ne l'attendrions pas. En-
fuite on ordonna au Lieut. Col. de Sereni le Baron de Selb d'aller avec
1S0. chevaux reconnoitre l'Ennemi entre l'Oglio & fon Armée qui étoit
ppftée près de Caflro Fato , à quatre mille d'Italie de la nôtre. L'Avant-
garde de ce Détachement étant tombée fur la Garde avancée de l'Ennemi,
elle tua un Lieut. avec fept Soldats, & ramena un prifonnier avec (ix ou
fept chevaux. Après quoi ce Lieutenant-Colonel, s'étant aproché de l'Ar-
mée ennemie, s'aperçut qu'il y avoit 2. Regimens de Cavalerie qui sqti
étoient un peu écartez , & montez à cheval en confufion, de forte que
s'il l'eût fçu plutôt^ il les auroit prefque pu deifaire, d'autant plus que la
eonfufion étoit grande. On envoya ordre de nouveau aux deux Regimens
• de
37* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires de Gefwind & de Lorraine de fe tenir le long de la Montagne jufques à
d'Italie. Palazzolo. Lors qu'on donna la parole , il fut ordonné que la Cavallerie
&: l'infanterie fe tin0ent prêtes pour l'après midi Le i. de Septembre à là
pointe du jour Ton entendit battre l'allarme au Camp dans l'Armée enne«
mie, & tous nos partis rapportèrent qu'elle marchoit à nous, ce qui fut
aufii confirmé par tous les deferteurs & les prifonniers, en confequence
de quoi nôtre Armée fut auiîi-tôt portée de la manière qu'il eft raporté ci-
deiîlis, & outre cela on difpofa les-chofes comme s'enfuit. Après qu'on
fe fut faifi de Chiari, on mit trente hommes commandez par un Lieute-
nant dans un Moulin qui étoit devant cette place à main droite , & un
pareil nombre dans une grande Caiîine à main gauche, & un peu en der-
rière, entre le fufdit Moulin & la Caffine, fur le grand chemin devant le
foffé de cette Place, le troifième Bataillon du Régiment fufmentionné de
Guttenilein, pour deffendre ces deux polies ; & un autre Moulin, qui
étoit à environ 600. pas plus loin en devant, fut pareillement occupé par
le quatrième Bataillon, qui s'étant retranché, on commanda mille hom-
mes de Cavallerie, & le Régiment de Dragons de Dietricldlein, pour le
couvrir. Le Comte de Guttenilein, dont on a déjà parlé, fut chargé de
prendre exactement garde à tous ces pofr.es. Plus bas , à main droite , on
partagea aufii deux cents hommes de Herberilein & de Kirchbaum, dans
quatre autres CaiYines ou maifons fituée l'une derrière l'autre, comme aufïï
dans un jardin qui touche à l'Aile gauche de nôtre Ligne. Environ furies
dix heures, on aperçut les Officiers Généraux des Ennemis qui venoient
reconnoitre fous une forte efcorte ; & comme ils voulurent s'aprocher un
peu trop près de nôtre Ligne , on tira un coup de Canon fur eux , & il y
en eut quelqu'un qui tomba de fon cheval , après quoi ils fe retirèrent.
On ordonna là-deiTus au Colonel Comte de Daun de faire abattre un pe-
tit pont de pierre 3 & comme enfuite il alloit reconnoitre l'Ennemi, il at-
trapa un moufquetaire Irlandois, qui s'étoit égaré le jour de devant de fa
Troupe, & qui raporta que l'Ennemi s'étoit mis entièrement en ordre de
Bataille, marchoit pour donner fur nous, & avoit deiïein d'attaquer pre-
mièrement les fufdites Caiïines & Maifons, & en effccl il s'étoit déjà tel-
lement avancé à deux heures après midi, qu'enfin nos gardes avancées
furent obligées de fe retirer.
Environ fur les deux heures & demi, il attaqua lefdites Maifons & Caf-
fines avec trois Brigades, favoir une de Normandie, une d'Auvergne,
une d'Anjou, & la moitié de celle de Vaiffeaux ;de forte que ceux des nô-
tres qui y étoient poftez , étant trop inférieurs en nombre, furent, après
une réfiitance aiïez longue & fort vigoureufe, obligez de fe retirer, ce
qu'ils firent en bon ordre : mais l'Ennemi reperdit bien-tôt ces polies ; car,
le Bataillon de Guttenitein qui étoit poité en arrière, le Colonel Comte
de Daun, & le Major de Kirchbaum deWendt, avec les Compagnies des
Grenadiers Ni->re!!i, Herberilein, & Daun à la gauche, & à la droite le
Lieutenant-Colonel de Mansfeld Gonzalles avec un Bataillon, & la Com-
pagnie des Grenadiers de fon Régiment, attaquèrent û vigoureufement les
En-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 377
Ennemis , que celui-là après une perte confiderable des Officiers & SoU Ammf
dats fut obligé de fe retirer en confufion , tant defdits Poftes,que des Mou- p!t,Al]fej
lins, que les Irlandois avoient attaquez. L'Ennemi perdit quatre Dra-
peaux du Régiment de Normandie dans cette occafion. Et un Moufque-
taire du Régiment de Guttenftein avoit pris un Drapeau du Régiment Ir-
Jandois; mais, dans l'efperance de faire un plus gros butin, il le jetta dans
l'eau, & ne l'a pu retrouver jufques à préfent. Un peu avant que l'Enne-
mi eut fait attaquer les fufdites Caffmes & Maifons , il avoit déjà avec une
partie de fon Armée attaqué les Bataillons de Nigrelli, de Herberftein, &
de Kirchbaum ; mais ceux-ci , ayant laifle aprocher les attaquants fort près
d'eux ils firent une telle décharge, que prefque tous ceux qui s'avanture-
rent trop réitèrent fur la place , de forte que cela joint à ce qu'ils ont été
obligez de fe retirer de tous les lieux qu'ils attaquoient , à caufe du feu
continuel , & de nôtre moufqueterie & du Canon qui donnoient fur eux
de tous cotez, ils ont tant fouffert qu'on ne peut le décrire. Quoi que
l'Ennemi ait fait faire fes attaques par les fufdites Brigades, qui, à ce
qu'on aprend, conOiloient en 17. Bataillons de fes meilleures Troupes, &
qu'il les ait fait de plus foutenir de toute l'Infanterie de fon Armée , néan-
moins il a trouvé une fi vigoureufe réfiftance, qu'il o'eft vu repoufie avec
toute la bravoure poflible, encore que ceux qui ont foutenu fes efforts ne
confiltoient qu'en un Bataillon de Mansfeld, deux de Nigrelli, un de Gut-
tenflein, deux de Kirchbaum, & en quatre Compagnies de Grenadiers
de Mansfeld, Nigrelli, Herberflein, & Daun. Auffi ne fauroit-on tror>
donner de louanges tant aux Officiers qu'aux Soldats , qui , foutenus par le
zèle & la prudence des Généraux qui fe trouvoient préfens à tout, ont té-
moigné toute la bravoure poiîible.
La perte des Ennemis monte au moins à plus de deux mille hommes,
tant tuez que bleffez, entre lefquels on compte plus de deux cens Offi-
ciers dont environ feize font prifonniers ,1a plupart bleffez, & 100. com-
muns , toute la perte que nous avons faite de nôtre côté ne monte qu'à
ce qui fuit : < . .
Tuez. Bleffez.
De Mansfeld 4 23
j
De Nigrelli 2
De Herberflein 5
De Guttenftein 22
De Kirchbaum 13 17
De Herberflein 5 ip
De Guttenftein 22 ip
.
■
36 81
■
Au nombre de ceux qui ont été tuez , il fe trouve deux Lieutenants ;
fçavoir un de Taff, & un de Guttenftein ; & de ceux des bleffez trois ,
favoir un des Grenadiers de Mansfeld , un de Guttenftein , & un de
Kirchbaum, outre un Capitaine d'Artillerie. Les Deferteurs 901- nous font
Tome XL Bbb vc-
378 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires venus cette nuit ont unanimement confirmé la grande perte des Ennemis,
d'Italie, g fpécialement que nôtre Canon, comme il a été dit, leur a caufé un
très -grand dommage; qu'ils en avoient d'abord laide deux des leurs, mais
qu'ils avoient été depuis fauvez à grand' peine avec des cordes , & qu'en-
fuite ils Te font retirez la même nuit à une lieuë d'ici, mais qu'à un quart
de lieuë du Camp de bataille il étoit reflé beaucoup de leurs bleiTez.
Le 2. de ce mois , toute nôtre Infanterie & une partie de la Cavalerie
fe font tenus prêtes toute la nuit; mais les ennemis, comme il a été dit,
fe font retirez , & ont porté leur Aile gauche à un mille & demi d'i-
ci , & leur droite un peu plus loin. On a de notre part envoyé divers
partis pour reconnoitre de quel côté ils marchent ; ils ont ramenez plu-
sieurs prifonniers, & en ont tué plufieurs. Ayant environ fur les dix
heures du matin commandé deux Lieutenans Colonels , fçavoir le Sr.
le Marre Lieut. Col. de Savoye de l'Aile droite , & le Baron Spor
Lieun. Col. de Corobelli de l'Aile gauche, ils ont ramené encore au-
jourd'hui quarante prifonniers , tant Cavaliers que Fantafiins , & envi-
ron 50. autres font reliez fur la place. On a aufli ramené if. che-
vaux.
Les ennemis ont envoyé ici un Tambour du Régiment de Bourgo-
gne , fous prétexte de reclamer un Officier de fon Régiment ; mais il
a fait beaucoup d'inflance pour qu'on lui laiflat vifiter les morts , & a
avoué que la perte que l'ennemi a faite monte à beaucoup plus de
trois mille hommes , & que parmi ce nombre il y a bien 300. Offi-
ciers, à fçavoir entre autres Moniteur de Precontal Maréchal de Camp,
un Brigadier, & trois ou quatre Collonels d'Infanterie, outre d'autres
qui font bleiTez. Du Régiment de Bourgogne fusdit, il y manque 33.
Officiers à ce que rapporte le même Tambour, & que du Régiment de
Normandie il y en a près des deux tiers & 80. Officiers qui ont été
tués. On apprend à chaque moment que la perte des ennemis eft bien
plus grande qu'on ne l'a pas crue hier. Il elt venu fur le foir un de-
îerteur, qui rapporte que l'ennemi avoit diftribué des Munitions à
l'Infanterie, & que les Grenadiers avoient ordre de fe tenir prêts pour
minuit, dans le defTein de nous venir attaquer le matin. Tous les prifon-
niers & deferteurs difent qu'ils ont marché la nuit après l'action en gran-
de confufion, que tous leurs Régiments font délabrés, & qu'il y a beau-
coup de foldats d'eftropiés. Nous avons eu avis que nos deux Régiments
de Gefwind & Lorraine font arrivés à Palazzuolo , & le General Vaubon-
ne eit aufli venu ce matin avec le corps qu'il commande.
Le 3. de ce mois, lefdits deux Régiments de Gefwind & de Lorraine
ont joint l'Armée. Au refte, elle a été tout ce jour prête à entrer en
action , parce que fuivant les avis d'hier on s'attendoit que les Enne-
mis pourroient bien tenter quelque chofe : cependant, ils n'ont fait au-
cun autre mouvement , finon qu'ils ont changé la difpofition de leur
Armée ; & comme fon Altefle Sereniflime a apris , qu'un Convoi de-
voir arriver dans l'Armée Ennemie par Soncino, il avoit commandé dès
hier
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. S7<>
hier le General Palfi avec mille chevaux , mais à caufe du prétendu 6ef- AmiR»
fein des Ennemis, il n'avoit pas marché. Néanmoins, s étant mis en p'Itau»*
chemin ce matin , il a rencontré à quatre bons miles d'ici quelques Enne- ~
mis prés de Vrago , & ayant repoufle les Troupes avancées , comme
l'Infanterie fe tenoit trop couverte & que les Ennemis étoient beaucoup
fuperieurs, il s'ell retiré en bon ordre, après avoir tué fur la place en-
viron 60. Soldats & quelques Officiers; il a de plus ramené quelques che-
vaux, & de nôtre côté il n'eft relié que 8. à 10. hommes tant tuez que
bleiTez.
On a aufli envoyé deux autres partis fur l'aîle droite de l'Armée enne-
mie, qui fuivant qu'on l'avoit appris devoit aller au fourage; fcavoir trois
cens chevaux fous la conduite du Comte de Merci, Lieut. Col. du Reg.
de Lorraine j & 30. hommes fous le Capitaine de Dragons Colomba du
Reg. de Sereni. Le premier n'a rencontré perfonne , mais le fécond ayant
rencontré les fourageurs, il en a taillé en pièces environ 30., & comme il
ramenoit quelques prifonniers & 36. chevaux qu'il avoit pris, il fçut qu'il
y avoit des Ennemis près du lieu où il étoic ; il alla les attaquer & en défie
encore environ trente. Mais en revenant il tomba , près d'un pont, dans
un Parti ennemi, & n'y ayant pas d'autre paflage pour lui que celui-là,
il fut encore obligé de fe battre, & d'abandonner dans l'action tous (es
prifonniers, hors deux, & fes chevaux, à 7. près: au refte il tua encor»
quelques ennemis fans perdre que deux hommes.
Il eft arrivé pendant tout ce jour plufieurs deferteurs, tant Cavaliers
que Fantaffins, qui confirment la grande perte que firent les Ennemis dans
l'action d'avanthier.
Manifefle de François Spineîîi 3 Luc de Cqfleîluccia 3 en Novem-
bre 1701.
, f~\v iconque veut vivre avec honneur doit donner connohTance Manifef-
, V/ & rendre raifon de tout cequ'il fait; ainfi moi, Duc de Caitelluccia, teduDuc
, qui, grâces à Dieu , me trouve en fureté, nonobftant la cruauté de mes deCaftel-
, parens, qui ont refufé de me fecourir pour défendre ma vie, je défen- u aa*
, drai mon honneur, l'épée à la main, contre tous ceux qui ôferont me
, donner le nom de Rebelle, & à mes amis, pour s'être trouvez à Naples
, le 23. Septembre pour une jufte Entreprife. C'efl pourquoi je déclare
, qu'elle eit fondée fur la juftice, & que de louables raifons nous ont
, portez à chercher le bien & la liberté de nôtre Patrie. Ceux, qui ôfent
, nous regarder comme des Perfides, font indignes de dire la vérité , &
, je rends témoignage au monde contre l'ignorance & la tyrannie de quel-
, ques Miniflres, qui nous ont impofé les peines dont on a coutume de
, charger les Rebelles. Qu'ils me difent qui eft Roi de Naples ? Qui
, elt-ce , qui, après la mort de Charles Second, dont la Ligne efl finie en
} fa Perfonne, a établi un Roi légitime de Naples ? Qui eit-ce qui a tranf-
Bbb 2 „ por-
5)
3So MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
ATFÀiRr.s 5) porté les raifons de la Maifon d'Autriche à celle de Bourbon, & où pa-
©•Italie. „ roit l'Inveftiture qui doit aller avant chaque a&ion, afin qu'elle ne foie
__ ,, pas illégitime? Où a-t-on aiTemblé les Collèges de laNobleiTe? Où a-t-on
„ tenu les Etats Généraux du Royaume? Le Peuple a-t-il jamais prêté le
„ Serment de Fidélité? Eit-ce donc que le titre légitime de la Succelïion
„ du Royaume peut être donné & affermi par une Cavalcade faite par le
„ Duc de Médina-Celi au travers de la Ville , en la menaçant, & en la
,, forçant de le fuivre ? Le Royaume de Naples eft encore libre jufqu'à
., préfent. Jl faut que le Pape en donne l'Inveftiture; & cela, en vue de
„ la Jullice, & du bien des Sujets, & que chacun tache de fecouer le
joug injulte qu'il a fouffert iï long-temps. Ce n'efl pas un crime , mais
le devoir de chaque Bourgeois qui efl fidèle à fa Patrie } & l'on fçait
bien que ces fentimens, qui doivent être enracinez dans un honnête
„ homme, font unanimement imprimez dans le cœur des Napolitains, &
„ dans tout le Royaume, qui a toujours maintenu fa gloire de fon propre
„ fang. Ainfi, ceux-là même font infâmes, & des traîtres, qui oient nous
,, faire des reproches, parce que nous n'avons pas voulu nous foûmettre
„ à la violence d'un injufte Gouvernement. Nous avons proclamé pour
.,, nôtre Roi l'illuflre Archiduc Charles , parce qu'il a pour lui un Droit
„ inconteilable, & que nous y fommes portez par l'avantage dont nôtre
„ Patrie doit, jouir par ce moven. C'eft un Prince de la Maifon d'Au-
„ triche, du Sang de Charles V. nôtre Roi d'immortelle mémoire , &
„ fils de l'illuflre, pieux , & facré Empereur Leopold I. fur qui devroit
„ légitimement tomber l'Inveititure de nôtre Royaume , par le titre de
Succeflion, & les Accords faits dans les Traitez de Paix publics , af-
fermis par des Sermens, & bénits de la main du Pape. L'on voit fleu-
rir en lui la piété & les principales vertus qui ornent l'ame d'un Prince.
C'efl lui que l'Empereur a deftiné pour Roi, en ayant été prié par nous
„ & d'un commun confentement des Etats du Royaume; c'efl fans doute
le plus grand bonheur qui pût nous arriver, puis que, par la Perfonne
de l'Archiduc , nos anciennes miféres feroient diffipées. Il auroit af-
fermi fon àiége à Naples, l'on n'auroit plus méprifé nos fervices, &
nous n'aurions plus été forcez de nous abaiffer , & de remplir l'anti-
chambre d'un Miniflre qui auroit dû ambitionner l'honneur de fe
joindre à tant d'iHuftres Familles de nôtre Pais. Nos biens n'auroient
plus été le butin de l'avarice & de la cruauté, & nos femmes, re-
„ nommées par leur honneur & leurs autres vertus , n'auroient plus été
foûmifes aux paffions d'une femme miférable & méprifée. Nôtre
grand Prince nous promettoit un riche commerce, la diftribution des
Charges parmi les naturels du Païs, & d'élever un Confeil pour une
plus prompte Juflice. Le Peuple qu'on auroit tâché de tenir exempt,
„ n'auroir pas été opprimé par de continuelles & d'infuportables charges;
„ il ne feroit jamais forti tant d'argent du Royaume pour rafTafier tant de
,, Miniftres; mais, par une continuelle réfidence de la Cour à Naples, la
„ Noblefle auroit vé.cu dans l'honneur , la Bourgeoifie dans le repos, &
„ le
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RESOLUTIONS D'ETAT, M.DCC. I. 381
le Peuple dans l'abondance: les vertus auroient été récompenfées , & Aftairi*
nous aurions vu nôtre Fais, d'un abîme demifëre, fe rétablir dans Ton d'Italie*
ancien luilre. Les Privilèges originaux de l'Empereur, que nous avons
demandez, font entre nos mains, avec la confirmation de tous les au-
tres avantages accordez par Charles V. & les autres Rois fes Prédécef-
feurs; mais qui font tous les jours anéantis de plus en plus par la tiran-
nie du dernier Gouvernement , nonobftant tan: de Sermeiis. Voilà
,, les raifbas qui nous ont portez à une Entreprife il louable : & il n'y a
point d'homme allez téméraire , pour ôfer dire que cette aétion, ayant
été entreprife pour le bien public, ait été formée par un intérêt particu-
lier, puis qu'il eit évident que nous pouvions vivre commodément de
nos propres revenus , chacun félon fon état, & que nous avons bien
voulu tout facrifier; fans permettre que l'on pillât les maifons des En-
nemis publics, fuivant en cela l'intention de l'illuftre Archiduc Charles,
dont les Miniftres de l'Empereur nous ont fi fouvent parlé de fa part,
& voulant prévenir tous les defordres & le dommage des Bourgeois,
mettre des gardes aux banques pour empêcher le defavantage des inte-
refiez, préfenter aux Soldats & Officiers Efpagnols à chacun un Emploi
félon fon mérite, pour épargner le fang de ceux qui vouloient demeu-
rer fidèles au nom d'Autriche; mettre le Duc de Medina-CeJi dans un
Château en fureté contre la violence du Peuple & la vangeance de tant
„ de gens, à qui il a fait tort, & même lui faire paffer la mer en cas que
,, cela fût nécelfaire pour le faire fortir du Royaume , & après fon départ
„ faire mettre la DuchelTe fon Epoufe dans un Couvent au même defîein.
,, Ce Prince pieux & illuftre nous a de plus recommandé d'éviter de
,,. faire injure à Dieu & au Prochain, d'honorer les Eglifes-, d'épargner
,, l'honneur des femmes, & d'éloigner en cette occafion , félon fon or-
„ dre Royal, toute paffion , pour le Bien commun. Mais nous avons
,, efperance , que Dieu nous affiliera , & favorifera les armes bé-
„ nites de l'Empereur pour un û digne, fi jufte, & fi pieux Prince;
,, qu'il nous tirera du mépris, & qu'il rétablira le Païs dans fa liberté & fa
„ réputation. Enfin, je fais fçavoir à tous nos amis, que quoi que la Dé-
„ couverte, qui a été faite le jeudi d'auparavant à 22,. heures au Duc de
„ Medina-Céli de l'intelligence que nous avions au Château de Caltel-
„ nuovo, ait rendu vain l'avantage que nous en attendions, & que cet ac-
„ cident ait tenu en arriére le fecours qui nous étoit promis, l'Entreprife
ayant été fans fruit, ils ne doivent cependant pas croire que nôtre ef-
perance foit anéantie , mais plutôt que chacun , reprenant le deflêin con-
çu en faveur de la Maifon d'Autriche , cherche à fe faire de nou-
veaux adhérens pour cette digne Entreprife, qui déformais fera foûienuë
avec de telles forces, qu'on aura lieu de fe réjouïr de l'efperance que
„ nous avons d'ctre délivrez de l'efclavage , & de voir le bien commun
„ affermi. Il efl temps de ne plus fouffrir des iraitemens, & des manié-
„ res barbares , & de jouï'r du foulagement que nous trouverons dans le
„ pieux Archiduc. Je ne doute point que chacun ne mette la main à l'œu-
Bbb 5 » vre,
5>
55
55
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MAGNE.
J»
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3«i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aftàsu ,, vre, puis que nôtre véritable & légitime Souverain promet de grandes
d'Allé- " récompenfes à ceux qui fuivront fes armes , quand il entrera dans le
Royaume; & qu'au contraire, il menace du feu & du fer tous ceux qui,
en fuivant l'injufte Gouvernement préfent , fe font reconnoître pour
traîtres delà Liberté de la Patrie. Joignons-nous donc enfemble, pour
l'affermir fur le Trône , afin qu'il délivre le Royaume des miféres pré-
femes & pailées, & qu'il rende une fois fixe le bonheur particulier &
commun.
AFFAIRES D'ALLEMAGNE.
Offres de quelques Princes d'Allemagne pour des Troupes.
Offre. Je T e Sr. Spina , Réfident des Etats-Généraux à Francfort, a écrit une
Troupes J_, Lettre à LL. HH. PP. pour les avertir, que plufieurs Princes d'Ai-
de queiq. iemagne aVoient prefenté, de vouloir lever quelques Regimens au Service
d'AUema- de l'Etat > & particulièrement, que le Commiifaire des Troupes Mr. Ulman
gnc. avoit prefenté, au nom de l'Evéque de Wurtzbourg , d'envoyer & vendre
à LL. HH. PP.,moyenant une bonne &raifonnable Capitulation , z. Regi-
mens de Cavalerie & un d'Infanterie , qui étoient déjà en bon ordre &
état , & prêts à pouvoir d'abord marcher. Leurs HH. PP. ont envoyé
cette Lettre à leur Envoyé en Angleterre, pour en donner rapport à Sa
Majefté Britannique.
Lettre fur les Mouvemcns des François dans PElellorat de Cologne ;
de Cologne le 25*. Novembre 1701.
Entrée A la fin , des Troupes de France venues de la Meufe font entrées Mardy
desFran- Jljl palTé dans Nuis, Zons,& Keyfersweert , trois Villes duBas-Dioce-
çoisdans fe de Cologne , qui regorgent de monde à prefent. L'on en attend auflià
Cologne! RhinDerg « Linn , & Urdingen. Trois mille hommes de cette Nation dé-
voient entrer aulîi hier dans Bonn , où le fameux Partifan la Croix fe
trouve déjà. L'Electeur Palatin confeille à cette Ville de Cologne de
de prendre des Troupes Hollandoifes en Garnifon; mais, l'on aime mieux
y avoir plus de monde du Cercle. Des Troupes Palatines deftinées vers le
iiaut-Rnin, trois Régiments s'y font déjà acheminez depuis Mardi dernier.
L'Envoyé de France Mr. d'Iberville efl venu, il y a peu de jours, de Mayen-
ce à la Cour de l'Electeur de Trêves } & l'on dit que les François veulent
prendre des Quartiers dans le Païs de Trêves aufîï-bien que dans la Lor-
raine. Je fuis ,
Monsieur,
Cologne le. 25. Novemb. 1701.
Vôtre tres-humble & tres-obehTant
Serviteur ***
P. S. Les François ne font pas encore
entrez dans Bonn , mais l'on y fait des
Barques pour 5000. Hommes.
Ordotî-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. f.
38J
Ordonnances de PEIecleur de Cologne 3 touchant Rhinberg
Kcifcrswerti &? Alpen\ du 15*. Décembre 1701.
AFFAIRES
n'Ai 1 1-
MAGNE.
SA. E.de Cologne, Duc des deux Bavieres, nôtre tres-benin Maître, Ordon-
• voulant faire achever les Ouvrages de Rhinberg & de Keyferswert, nancJ
& jugeant, fuivant la tres-humble Requête & Remontrance, qu'il feroit r^.3'^
de l'avantage de fes Sujets de pouvoir dans ces conjun&ures prefentes, & berg,
pendant l'hiver, vaquer à leurs Affaires, S. A. E. les a bien voulu exemp- Keyfers-
ter de ces courvées, auxquelles tous les Sujets desBaiiiages & Seigneuries Y,ertï &
du Bas-Diocefe avoient été commandés. Et comme par une fupputation pcn*
julle & équitable la quote-part dejla Seigneurie d'Alpenffe monte à 8- écus
par 18. jours, ordonne S.A. E. aux Magillrats de ce Lieu de tenir la main
afin que les fufdits 8. écus, qui commencent dés le iy.de ce Mois, foient
payés régulièrement de ly. en quinze jours au Secrétaire de la Ville & à
l'Auditeur Dikhaufen, jufqu'a nouvel ordre, & cela fur peine d'exécu-
tion militaire. Donné a Bonn 15. Décembre 1717.
( L.S. )
JOSEPH CLEMENT, Electeur.
Et plus bas,
C. L. Caukol.
nance
touchant
Alpen,
S.A. E. de Cologne, Duc des deux Bavieres, nôtre Clementifîime Maître Ordon
&c. ordonne à tous les Commandans, Magillrats, & Bourgeois d'Alpen,
de recevoir dans leur Château & Ville, fans aucune contradiction ou délai,
le porteur de cette , un Officier commandé , le Comte de Coigny , avec fes
Soldats > &aufii-tôt qu'ils auront prêté le Serment ci-joint , de leur fournir
logement, lits, & lumière, feu d'holr.e,& les leur bailler de bon cœur, pour
un prix raifonnable de leurfolde, fous peine d'indignation, & peines ir-
remiffibles. A Bonn, utfuprà, &c.
(L.S.)
JOSEPH CLEMENT, Electeur»
Prefenté à Alpen le Lundi de Noël,
170 1. ante portas par leLieut. du Roy,
Commandant à Rhinbergue.
Et plus bas,
D. Simon Eizenberg.
Lettre de Hambourg aux Etats-Generaux , touchant les Lifférem
entre le Holfiein g«? le Danemarc; du 4. Fevr. 1701.
A
près que les Miniflres de l'Empereur, de Suéde, de Brandebourg , Di'ffe'rcns
de Lunebourg, &de VV.HH.PP. ont travaillé depuis quelques jours,
avec
du Huit
tcin.
MAGNE.
384 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires avec toute Implication pofîible, à diriger par leur entremife , tant auprès
d'Allé- du Miniilre de Danemarc que de celui de Holftein-Gottorp , les chofes en
forte que les points en difpute touchant la Seigneurie de Godsgave , & la
pofleflion acordée de la Seigneurie de Lindewis, ne donnent lieu à de nou-
velles querelles, ces deux derniers Miniftres les ont bien voulu écouter,
mais fous condition expreile que par-là ils ne prétendoient pas s'y
être fournis. Nous y avons répondu tous, que nous n'avions pas d'ordre
des Seigneurs nos Principaux pour nous mêler de cette Affaire , & que
tout ce que nous en avions fait n'étoit que pour l'Amour de la Paix
& dans la bonne intention de prévenir par-là toute mésintelligence,
que le défaut du payement des 260. mille écus pouroit caufer. On a
donc propofé , que quoique la reftitution de la Seigneurie de Gods-
gave ait été promife au Duc en vertu des Traités d'Altena & de
Travendahl , la valeur en devoit pourtant être payée au Duc de Nor-
bourg , ou par le Roi, ou par le Duc de Gottorp , ce qui étant une
queftion qui ne fauroit être décidée fi promtement, on donnoit à confi-
derer, fi le Roi, par généralité & par inclination pour la tranquillité,
ne voudrait donner au Duc de Gottorp 20. ou if. Arpens de terre, qui
font la moitié de trente pour lefquels la dite Seigneurie eft enregîtrée fur
la matricule, & qu'alors le Duc de Gottorp rendrait à celui de Norbourg
la dite Seigneurie, & la laifteroit pofleder tranquillement à lui &àfes Hé-
ritiers; par où tomberoit la queftion fur la féodalité. Le Sr. Lentke ré-
pondit là- deflus, qu'il n'étoitpas autorifé fur cefujèt, mais qu'il en rendroit
un compte fidèle au Roi, recommanderait la chofe de fon mieux, moyen-
nant qu'on s'engageât du côté de Holftein à ne point prendre poïfeflion
duBaillage deBrefted, dans l'efpace de 8. jours, tems qu'il lui falloit pour
avoir réponfe. Surquoi leMiniftre de Holftein difoit, que puifque le Duc
fe trouvoit lui même fur les lieux, nous pourrions lui faire cette Propor-
tion* ce qui ayant été fait cet après-midi par les Miniftres de Suéde, de
Lunebourg,& de VV.T1H. PP. le Duc nous écouta très-gratieufement,
& nous répondit, que quoique les points en difpute n'avoient point de
connexion avec le payement de 260. mille écus, il ne vouloit pourtant
pas fe prévaloir de fon Droit aquis dans l'efpace de 8- jours ;& il nous
fit affez efperér , qu'en cas que le Roi acceptât la Propofition , il s'y
conformerait auiïi : par confequent, le fécond point touchant la pofTef-
fion accordée trouvera d'autant moins de difkulté , n'étant qu'une pro-
cédure faite par la Régence de Holftein-Gottorp fur l'exhibition d'une
obligation , à quoi l'on pouroit bien aporter quelque tempérament par
le défaut de communication avec la Régence de Gluckftad , le quel
pouroit être agréable aux deux parties. En attendant , j'efpere que ce que
deilus, ayant été fait de concert par les Miniftres ci-deflus nommez , aura
l'Approbation de Vos "Hautes Puiifances.
TRAÏ.
Affaires
CEI*. DE
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. L 38?
TRAITES POLITIQUES CONCERNANT
LES AFFAIRES GENERALES
DE L'EUROPE.
Le Teftament de Charles IL dernier Roi d'EJpagne, gf le Trai-
té j ait touchant le Partage de la Monarchie Efpagnole : rap-
portez , 6? confidèrez 5 Article par Article , avec des Réfle-
xions fur Tun £5? fur Vautre , tendantes a prouver , que
toute VEurope eft intéreffée à s^en tenir inviolablement au Par-
tage de la Monarchie d?Efpagne; & plus particulièrement par
rapport à r Utilité &p au Bien de T Angleterre. Traduit de VAn-
glois , fuivant la Copie imprimée à Londres, pour J.Nutt, proche
de la Salle des Papetiers > en 1701.
Comme il n'y a rien qui ait tant exercé depuis quelque tems la Lan- Tefta-
gue & la Plume de plufieurs perfonnes, que les Difcours qui le font ment de
tenus touchant le Teftament du dernier Roi d'Efpagne , & la Divifion de £hArl<:s
cette Monarchie j j'ai crû ne pouvoir faire un plus grand plaifir aux Cu- d'Efpa-
rieux, que de leur mettre devant les yeux,& le Teftament même,& les gne,avec
Articles qui expofent le Partage, avec quelques Remarques modeftes fur desRé-
l'un & fur l'autre , tendantes à prouver fans aucune contradiction , que pe*.J°ns
c'eft l'Intérêt de toute l'Europe , & plus particulièrement de l'Angleterre 0itI<l*
nôtre Patrie, de s'en tenir inviolablement au Partage de la Monarchie
d'Efpagne, de la manière qu'il avoit été conçu, & dont la France, l'An-
gleterre, & les Etats Généraux des Provinces-Unies, étoient convenus
cnfemble , en cas que le Roi d'Efpagne vint à mourir fans Enfans. Mais ,
quand je devrois renverfer l'ordre du tems , dans lequel on eft convenu de
cette Affaire , je commencerai par le Teftament du Roi d'Efpagne , du-
quel fi l'on peut tirer quelque conféquence , c'eft qu'il va engager la Chré-
tienté dans une-Guerre fanglante , dont peut-être les plus jeunes de cette
Génération ne vivront pas afiez long-tems pour en voir la fin.
TESTAMENT.
Le Teftament 13 Difpofition de dernière Volonté de Charles Second , dernier
Roi d'Efpagne , qui vive en gloire , lequel il a fait pour établir la SucceJJïon de
la Couronne d'Efpagne.
Le Titre , aufli-bien que tout le Teftament, meriteroit de févéres Reflè-
te me XL Ccc xions,
386 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITER, ET
Affaires xions \ mais, le Refpe6t que je dois aux Têtes Couronnées m'empêche
gen. de d'en faire aucunes :ainfi,je me contenterai de palier à la teneur de l'Acte,
i/Euko- jeqUej j'aj fait diftinguer par des Caractères différens , afin de ne le pas
■ — ~ — confondre avec les Remarques.
TESTAMENT.
Nous , ayant remarqué , conformément au Réfaltat de toutes les Confultations
tenues par nos Miniftres d'Etat , & de Juftice ,que les Raifons pour le/quelles les
Infantes Donna Anna, & Donna Maria Thereiia , Reines de France , mes cïan~
te , & Sœur , ont renoncé à la Succeffion de ce Royaume , net oient fondées que
fur le Danger & le Préjudice (qui pourrok revenir à la Nation) Jï ce Royau-
me venoit à être uni à celui de France.
Il paroît par ce Paragraphe, que la Prudence des Efpagnols leur a tou-
jours fait envifager comme une chofe,qui étoit la plus propre à les mettre
à couvert de l'Opprellion, de prévenir, & d'empêcher par toutes fortes
de moyens , que la Couronne d'Efpagne ne tombât fur la tête d'un Roi
de France. C'eil pourquoi aufll,dans tous leurs Traitez de Paix, ou de Ma-
riage, ils ont pris tous les foins imaginables pour y remédier, en ne fe
familiarifant pas avec eux , en éludant toutes lesPrétenfions qu'ils auroient
pu former, & en tenant la Balance du Pouvoir en Europe dans un équi-
libre fi jufte, que fi la France afpiroit à faire à fes Etats une Réunion
aufii confidérable que celle de l'Efpagne, elle ne fût jamais en Pouvoir d'en
venir à bout, ni de l'opprimer, non plus que pas un des Princes de l'Eu-
rope.
C'étoient-là les Raifons pour lefquelles le Roi , & le Confeil d'Efpagne , ne
voulurent jamais accorder ces Princefles en Mariage aux Rois de France,
avant qu'elles euffent actuellement renoncé à leurs Droits fur la Couron-
ne d'Efpagne, non-feulement pour Elles-mêmes, en qualité de Reines de
France, mais auflï pour leurs Hoirs. Ce qui fembloit être un Lien affez.
fort en ce tems-là, quoi que depuis peu, encore que le Nœud ne pût,
être délié fans violer la Foi des Traitez, des Alliances, & des Contrats,
on ait crû qu'il étoit jufte & raifonnable de le couper, par le moyen des
Glofes & des Expofitions intereflees que l'on en a faites. Mais,n'eft-ce pas
une chofe furprenante & digne d'admiration, de voir maintenant de quelle
manière ces mêmes Raifons viennent àceflerdans cette Conjoncture , com-
me il elt infinué dans le Teftament ? Attendu que, fi le Roi de France avoit
deflein d'opprimer l'Efpagne & toute l'Europe, il eft maintenant plus puif-
fant lui feul, que jamais Roi de France ait été depuis l'Erection de cette
Monarchie: ainfi, que ne feroit-il pas alors, fi les mines d'or & d'argent
des Indes , & l'Efpagne toute entière , venoient à être unies aux Forces
dont il eft revêtu préfentement? Il n'eft pas fur de fe fiera l'Amitié ou au
bon Naturel d'un Prince ambitieux , quand même il auroit donné à fes
voifins
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 387
Voifins des Preuves plus fenfibles de fa Modération qu'il n'a plû au Roi Affaire
très-Chrêtien de nous en faire voir. CFÎC- de
TESTAMENT.
Et ayant confideré , que , puifque la Rai/on fondamentale ne fubfifloit plus , le
Droit de la SucceJJïon étoit dévolu au plus proche Parent , Jclon les Loix de ce
Royaume , lequel Cas ejl maintenant vérifié en la perfonne du fécond Fils de
France.
Ce petit Paragraphe femble avoir une double face; mais toutes deux
terribles. On diroit, à le prendre d'un fens , que c'eit une chofe avanta-
geufe pour l'Efpagne, de déshériter le plus prochain Héritier; mais, il
vous le prenés de l'autre, il femble donner à entendre, que le plus jeu-
ne Fils ait une efpece de Droit, tandis que l'Aine de toute la Famille,
lequel y pouroit plutôt prétendre, n'en a aucun. Que fi ce n'eft pas-
là une Injuflice, c'eft au moins une Erreur manifefle;car, le Duc d'An-
jou n'a pas plus de Droit à la Couronne d'Efpagne, pendant que le
Dauphin fon Père, ou le Duc de Bourgogne fon Frère aine , font en vie,
qu'un Athée a de Droit au Royaume des Cieux,ou que le Roi de Bantam
en a fur Je Royaume de France, & fur celui de Navarre.
TESTAMENT.
Cefi pourquoi , me réglant fur le [dites Loix , je déclare pour mon SucceJJeur ,
fi Dieu me retire fans avoir laijjé d'Enfant , le Duc d'Anjou , fécond Fils du
Dauphin : & , en confequence de ce , je l'établis & le nomme pour me fucceder
dans tous mes Royaumes 13 Dominations , fans en excepter aucuns ; £5? je corn-
mande (3 ordonne que tous mes Sujets & Vajfaux le reconnoijfent comme leur
Roi (3 Seigneur Naturel , & que fans aucun délai ils le mettent aclueU
lement en PoJjéJJion d'iceux , pourvu quil fafife £5? prête les Sermens accoutu-
més d'obferver les Loix , les Ordonnances , £s? les Coutumes de mefdits Royau-
mes, & Dominations.
Voilà le Legs du dernier Roi d'Efpagne, dont jamais perfonne n'aura
fujet de lui fçavoir gré, pas même le Roi de France; car, s'il l'accepte
en fon entier, comme un Don du feu Roi, le Monde ne manquera pas
infailliblement d'être fcandalizé de voir que le Roi Très-Chrétien rom-
pe un Traité, que l'on peut appeller fien, lequel il a déjà figné, auquel il a
confenti, par lequel il s'ed engagé à fe contenter d'une Portion de l'Hé-
ritage, & qui le contraindra malgré lui à foutenir une une nouvelle Guer-
re contre fes Voifins, avant que d'avoir remédié aux Pertes qu'il a faites
dans la dernière. Ce ne fera pas le Dauphin, ni le Duc de Bourgogne
fon Fils aine j car , le Teitâment établit leur Droit indubitable. Ce ne fera
pas aufiî le Duc d'Anjou, puis que, par ce moyen, il lui a fubftitué , à
Ccc : lui,
l'Euro-
pe.
388 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires lui, ou au moins à fa Pofterké après lui, une Guerre perpétuelle, en cas
«en. de qUe je £)uc jg Bourgogne laifîe des Enfans après fa mort. Car, par la
L PjR0" même Raifon que la Renonciation faite par le Père & par la Mère du
' Dauphin, à la Paix des Pyrénées, ne peut préjudicier au Droit qu'il a à la
Succeffion de la Couronne d'Efpagne , qui elt l'unique Argument fur le-
quel la France forme fes Prétendons; par cette même Raifon, ni le Con-
fentement du Dauphin, ni celui du Duc de Bourgogne, au Teftamenc
du Roi d'Efpagne, ne peut préjudicier au Droit de fa Pofterké, aufiï-
tôt qu'elle fe fendra aflez forte pour le répéter.
D'ailleurs, le Commandement exprès du feu Roi d'Efpagne, par lequel
il ordonne que le Duc d'Anjou foit înceffamment mis en PofTeflion de
fes Etats , ne fignifie rien autre chofe , fi-non que l'on y obeïfTe par la Rè-
gle des Contraires, & ne fert que pour mettre fes Sujets en PofTeflion de
leur Droit Naturel, en les autorifantà fe défendre contre l'Ufurpation d'un
Ennemi déclaré, qui les veut rendre Efclaves,& contre les Avanies d'u-
ne Nation Etrangère. D'autre part, fuppofés que la Haine naturelle des Es-
pagnols pour les François foit éteinte extérieurement , cela n'empêchera
pas que le Duc d'Anjou ne trouve deux grandes Difficultés dans cette Af-
faire. Car, fi, comme nous l'avons déjà dit, l'Ambaffadeur de l'Empereur
à la Cour d'Efpagne a déjà proteflé à Madrid contre le Teftament du feu
Roi, il peut bien s'imaginer, que quoi qu'il ait fon Grand-Pere pour le
fecourir, il ne fera que très-mal à fon aife en Efpagne, û il prétend s'y
maintenir fans le Confentement de fa Majefté Impériale, qui a^des Pré-
tendons fur ce Royaume plus anciennes que le Duc d'Anjou. Il ne faut
pas auffi croire que lesAnglois, & les Hollandois, ne s'intéreffent à fai-
re exécuter le Traité, & le Partage, qu'ils fe font fblemnellement obligés
de maintenir conjointement avec fon Grand-Pere.
TESTAMENT.
Et mon Intention étant , que pvur le Bien de mes Sujets , &? pour maintenir
la Paix de l'Europe, cette Monarchie foit fe parée de la Couronne de France ,
je déclare que fi ledit Duc d Anjou, venant à mourir, ou à hériter de la Cou-
ronne de France , preferoit la Jouïflance de cette Monarchie à celle d 'Efpagne -,
la Succefïon fera dévolue au Duc de Berry , /on Fi ère, troifiéme Fils du Dau-
phin, de la même manière , (ou) aux mêmes conditions."
Nous avons vu dans le Paragraphe précédent la Nature de la Donation*
& ce qui peut probablement en réfulter, à moins que le Roi de France
ne trouve à propos de fe conformer au Traité, & au Partage, dont il eft
déjà convenu, & auquel il s'eft engagé Je fe tenir;ou que, fuivant fa Pru-
dence accoutumée, il ne veuille regarder avant que- d'entreprendre, & voir
ce qu'il y a dans le fei/i de l'avenir. Les Raifons que le feu Roi en donne
font exprimées en termes vagues & généraux: c'eft , dit-il , pour le Bien de
fes
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 585»
Sujets , y pour la Paix &f la Tranquillité de toute V Europe \ fur quoi il naît Affaires;
naturellement du doute. Car, en premier lieu, eit-ce l'Avantage des Ef- GfN- nK
pagnols d'être rendus Efclaves de la France , ou d'être forcés, au moins,
de combattre pour la Confervation de leurs Libertés , de leurs Biens , & de
leurs Privilèges , lors qu'ils font dans une Pauvreté extrême, defarmés,&
qu'ils n'ont perfonne pour les fecourir? Car, cette Donation de l'Efpaene
Il vague, & comme au hazard, fans avoir prévu à la Sûreté des Peuples,
ni à la Confervation de leurSjPrivileges & de leurs Libertés , n'étant gueres
dilTemblab'e d'une Conquête, la Queftion que j'ai faite d'abord fubfifte
toujours, & c'elî à quoi la Nation doit s'attendre.
Secondement. Ett-ce le moyen de maintenir la Paix & la Tranquillité
de l'Europe, que de faire en forte que la France, en s'emparant de l'Ef-
pagne & des RichefTes des Indes, devienne plus grande, & plus puiflan-
te, que toute l'Europe enfemble, & en état d'opprimer à fon plaifir qui
elle voudra?
En troifiéme lieu. En donnant la Couronne d'Efpagne h la France, eft-
ee le moyen que les deux Royaumes foientfeparés? Au contraire, pouvoit-
on trouver d'Expédient plus propre pour les unir fous une même Domina-
tion, que celui que le Teftament a inventé, en cas que toute l'Europe
foit dans un Affoupiffement allez profond pour permettre qu'un Projet il
dangereux ait fon effet ?
Mais, dira un Fauteur corrompu & infatué du Teftament ,1e Duc d'An-
jou , fe voyant poffelTeur d'une. Couronne , & Maître d'un Royaume bien
afTûré, ne manquera pas de difpofer l'Efpritdes Efpagnols d'une manière,
qu'ils lui aideront à empêcher que la France n'ufurpe rien fur fon Terri-
toire; &, d'ailleurs ,1a Prudence & le Sens-commun veulent qu'il conferve
cette Monarchie pour fes Defcendans. Je réponds, que toutes ces belles
chofes peuvent être véritables, pourvu que ces deux Couronnes viennent
à avoir du Différent entre el!esj& que ce Différent dure toujours, car ce
n'eit pas une chofe impofiible , que le Duc d'Anjou celle d'être Due d'An-
jou , pour devenir Roi d'Efpagne. Mais auifi , fi la fantaifie prenoit au
Roi Très-Chrétien, de faire la Guerre à toute l'Europe , il ne faut pas
douter que ce même Roi d'Efpagne neredevint Duc d'Anjou , à la moin-
dre Sommation qui lui en feroit faite ;& que, comme un petit-fils obéïfTant,
il ne fe liât avec la France, & même avec le Grand Turc, contre toute
la Chrétienté. Et, en ce cas, dans quel épouvantable malheur l'Europe
ne fe verroit-elle pas plongée? Je lailTe aux perfonnes bien fenfées, & d'un
Jugement raftîs, à confiderer, & à faire leurs Réflexions là-deffus; & aux
fols à fe plaindre , quand ie mal fera parvenu à un point qu'il fera impoffi-
ble d'y apporter de remède.
Car, que la Couronne d'Efpagne foit mife fur la tète de qui que ce foit
de la Maifon de Bourbon^û eil certain que le Commandement ci: l'Autori-
té demeurera toute entière entre les mains de celui qui gouverne h Ver-
failles, & que le Confeil d'Efpagne n'agira que fuivant les Mefures qui y
feront prifes. Ainfi , le Roi d'Efpagne, prétendant éviter un Malheur en éii-
Ccc 3 fant
?9o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AifFAiMS Tant un fécond Fils, n'a fait autre chofe que de fortifier un Prince, & lui
gbn. df. donner des Moyens plus fùrs pour opprimer Cqs propres bujets, & toute
l'Euro- l'J£urope avec eux.
PE.
ne
TESTAMENT.
El en cas que ledit Duc de Berry vint à monrir , ou à hériter de la Couron-
ne de France , je déclare , C5? je nomme à la SucceJJlon , l'archiduc jecond Fils
de l'Empereur , excluant pour les mêmes Raifons , & pour les mêmes Inconveniens,
contraires à t Intérêt de mes Sujets , le Fit s aîné dudit Empereur \ & en cas que
t Ardxduc vint aujji à mourir , je déclare , & nomme à la dite SucceJJlon le Duc
de Savoyc & [on Fils.
Tout ce Difcours n'aboutit à autre chofe , fi-non , que fi le Duc d'Anjou
parvient à la Couronne de France, il pourra quitter la Couronne d'Efpa-
gne, s'il lui plaît, & que le Duc de Berry n'aura qu'à s'en emparer , s'il
peut. Mais, fi, laflee de pofTeder un Royaume Ci opulent, toute la Maifon
de Bourbon y renonce , & en fait une Abdication , en ce cas l'Archiduc,
ou le Duc de Savoye & fon Fils , n'auront qu'à jouer entre eux à pair
ou non à qui l'aura. Sans doute que le feu Roi d'heureufe mémoire
a crû qu'un Teftament , ou Difpofition de dernière Volonté , étoit un
Charme merveilleux, & qu'il renfermoit en foi une Vertu fecrette , à la-
quelle tous les Princes du Monde dévoient fe conformer bon gré malgré
qu'ils en euiïent. Car, on ne voit pas dans ce Teitament , qu'il ait pris aucunes
Mefures, ni qu'il ait mis aucun ordre, pour le faire exécuter félon fon In-
tention, & pour frultrer ceux qui ne s'y voudroient pas conformer ; &
partant c'eft une Porte ouverte à tous les Princes ; & c'elt ici que peut a-
voir lieu le Proverbe, Attrape qui peut. Il ne faut pas douter que ce ne
foit ainfi, qu'il faille. entendre cette Divifion de la Monarchie, fi la Fran-
ce ne veut pas fe foûmettre à ce qu'elle a déjà fait.
TESTAMENT.
Et cefi ma Volonté , que ceci foit exécuté par tous -mes Sujets , de la manière
que je f ordonne \ car , il efi expédient pour leur Bien , quils ne (ou firent pas que
la Monarchie foit partagée , ou diminuée , comme on ïa déjà projette ', mais quel-
le demeure dans le même état que mes Ancêtres font fondée. Et comme je defi-
re la Paix rj? f Union , que je fouhaitte (quant à te qui regarde l'Europe) qui
règne enti e f Empereur & le Roi Très- Chrétien, aujfi je Jouhaite , & je confeil-
le , que cette Union Joit plus fermement cimentée par te Lien d'un Mariage entre le
Duc d'Anjou y / ' ArchiducheJJê , afin que f Europe jouijjê du Repos qui lui efi fi
néceffaire.
Quiconque fera aflez fimple pour croire que cette Concîufion eft un vé-
ritable Compliment fait à l'Empereur, lequel ne fignifie pourtant rien, fait
bien
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. 191
bien voir par-là qu'il n'a jamais été en France, où tout regorge de Compli- Affaires
mens, par le moyen defquels on en impofe à toute la Terre: & celui qui G,F!J- DE
s'imaginera cffce la Cour de Madrid n'a pas confemi , ou même ébauché L pUBO"
ce Teftament par les Artifices de l'Ennemi commun de l'Europe , ne fçait ■ —
pas encore le pouvoir que les Loïus d'Or ont en Efpagne.
Voilà jufqu'où s'étendit la dernière volonté du feu Roi , au moins,
comme nous l'apprimes par le premier ordinaire, qui arriva après fa Mort,
& e'efl aufli tout ce qui a relation à la Dijpofition de cette Monarchie.
Mais la dernière Polie nous ayant apporté ce qui reftoit, & que la Mer
qui nous fépare nous avoit empêché de fçavoir plutôt, je l'ai ajouté à ce
qui a été fçû d'abord , afin qu'il ne nous manquât rien de ce Teftament
Royal. Quoi qu'il y ait des perfonnes éclairées , qui croyent , que fi le
Roi n'eût rien fait du tout, il auroit laifle un plus beau caractère de fa
prudence, & une plus haute eftime de ion intégrité, qu'il n'en a faitparoi-
tre dans fon Mémoire.
TESTAMENT.
Sa Majejîé a ordonné , que, pendant ï ht er régne, la Reine d'E/pagne fut Ré-
gente de ce Royaume , & qu Elle eût une Voix décifive , que les Préfidens de
Caftille ç$ d Arragon , C Archevêque de Tolède , Porto-Carero , V Inquïjïteur Gé-
néral , avec les Comtes d'Aguillar & de Frillana fufjent Confeillers d'Etat,
£5? le Comte de Bonavente pour les Grands ; & que s'il arrtvoit que quelqu'un
des Préfidens vint à mourir , le plus ancien Confeiller remplît fa place ju/qu'à
ce qu'on en eut élu un autre. §)ue la Scedule touchant l ' Inftitution ou ï Elec-
tion des Confeillers & dis Grands d'Efpagne, fgnée du Roi fé parement , fût
'valable ; 6)ue le Confeil s'affemblât dans l Appartement du Palais , que la
Reine ordonnera , auquel le Secrétaire des Ordres Généraux affifiera , £5? que
toutes les Dépêches fuffent fignées de la propre main de la Reine , £s? au
même Endroit ou le Roi avoit coutume de les figner de fon vivant.
Tout ceci eft d'aufli peu de conféquence , que ce qui a été dit plus
haut. Car, le Teftament ordonne une Exécution fi prompte & il im-
médiate , qu'il annulle toute la prétendue Régence de la Reine , &
n'eft, feulement qu'un bel Extérieur de Refpecl fans aucune Réalité. Car,
puis que le Pouvoir eft déjà entre les mains du Roi par le Teftament,
il ne faut pas douter que s'il l'accepte, il n'interdife toute Autorité, &
qu'il ne prenne lui-même en main l'Adminiftration du Gouvernement.
Que fi nous devons croire ce qu'on nous mande de Paris , il s'en eft;
déjà mis en PofTeffion, en créant Grand d'Efpagne l'Ambafladeur d'Ef-
pagne qui eft à la Cour de France , & en le faifant Grand Maître de
fa Maifon , & en déclarant que tous les Officiers feront maintenus
dans leurs Charges. Tellement que fa Cour d'Efpagne eft maintenant
obligée d'agir félon la Volonté du Roi vivant, ou de fon* Grand-Pere,
& non félon celle du défunt.
TES.
39i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
V™"" TESTAMENT.
l'Euro-
pe- // donne à la Reine un Douaire de quatre cens mille Ducats £ Efpagne , &?
tous fes Joyaux , à la réferve de ceux qui appartiennent à la Couronne , & lui
ajjïgne un de fes Royaumes, foit en Italie, ou en Efpagne , à fon choix, pour y
faire fa Réfidence , dans lequel Royaume elle gouvernera de concert avec les Mi-
nijlres , que fon Succeffeur lui preferira , & il joint de la même manière les Pats-
Bas à l'Italie.
Voilà certes un beau Legs pour une Douairière d'Efpagne, & bien ca-
pable de lui faire trouver un autre Mari; mais , chetive Récompenfe pour
une Princefle , qui a pafle tant de temps à faire le Métier de Nourrice de
fon premier.
TESTAMENT.
Il lègue tous les Meubles de fes Maifons Royales , & de fes Palais , à fon
Succeffeur, lequel il charge du Payement de toutes fes Dettes perfonnelles. Il or-
donne que ïon dife cent mille MeJJes pour le Repos de fon Ame. Il déclare Sain-
te Thérèse Patrone d' 'Efpagne. Il ordonne que le Monafiere des Pilles d'A-
villa foit fous le Patronage de la Couronne. Il fait un Legs à tous les autres
Couvens Royaux , dont la Reine doit être la Difpenfatrice \ £s? il ordonne que S&
Majeflé, conjointement avec les Préfidens de Cafiille, d'Arragon , & des Indes,
le Grand- Maître de fa Mai fon , Vlnquifiteur Général, fon Confeffeur , & le
Prieur de fEfcurial , foient les Exécuteurs de fon fejlament.
C'eft un Acte d'Equité de payer fes Dettes, c'en eft même un méritoi-
re, félon luij mais, pour dire la vérité , il faut qu'il n'en ait pas beau-
coup de cette nature dans fes parties , puis qu'il n'a pas befoin de moins
de cent mille Mefles, pour faire fon compte jufte dans l'autre Monde:
encore fcavoir fi on voudra les y recevoir en payement ? Car, c'eft une
chofe aflez incertaine , & même on ne fçait pas jufques où la Dévotion des
Religieufes pourra contribuer à fon repos : c'eft pourquoi il faudra s'en
rapporter à la Valeur de la Donation , ou au Caractère que la Reine don-
nera de fes Mérites extraordinaires , pour celles de fon Sexe , & qui font
les fruits de fa propre expérience. Mais , que peut on ajoutera la Pieté de
ce bon Prince, & au Soin tout particulier, qu'il a eu, en mourant, du Re-
pos & de la Profperité de l'Efpagne ? Perfuadé que le Bourdon de S. Ja-
ques n'étoit plus capable de protéger ce Royaume, il lui a donné & légué
par Teftament S. Therefe pour Patrone, attendu qu'étant née en Efpa-
gne, elle ne manqueroit pas d'avoir plus de Soin de fa Patrie, qu'un
Etranger.
T E S-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I 39i
TESTAMENT. lîîf.""'
Sa Majefié confirme tous les Vicerois , Gouverneurs, Minifires, &? Officiers
de fa Mai fon, dans leurs Charges , fc? </<?//>* $-#<? [on SucceJJ'eur les y continue ,
f» reconnoiffance des bons &? agréables Services qu'ils lui ont rendus.
Le Nouveau Roi ne manquera pas fans doute de s'acquiter de cette
Commiflïon, quant au Titre, pourvu qu'il ne fe trouve pas de François
qui en veuille ; car, autrement, ils fe trouveront bien éloignés de leur
compte rencore feront-ils bien heureux, s'ils peuvent s'en tirer fans y laif-
fer de leurs plumes, pour parer un Succefleur qui n'en a gueres plus qu'il
ne lui en faut.
TESTAMENT.
// fait mention de la Dévotion , quil avoit toujours eue' à la Conception
Immaculée de la Vierge Marie. Il dit qu'il avoit Couvent defiré de parler au
Pape fur ce Jujet , afin quil la déclarât un Article de Foi , £5? H fouhaite que fon
Succefjeur pouffe cette Affaire à bout. Il defire que les ouvrages de la Mai fon
Royale foient payés, après qu 'ils feront achevés par Jofeph del Olmo ArchitecJe
du Roi , & par le Secrétaire Dom Philippe s Eterres. Il ordonne , pour ï extrême
Vénération quil a toujours eue pour le S. Sacrement , que fon continué les Prières
de quarante heures dans la Chapelle fcoyale , avec les Cérémonies accoutumées , &
que les Officiers fcf les Prêtres de cette Chapelle jouïffent de leurs Revenus. Il
r en, et aux Grands tous les Subfides qu'ils lui doivent. Il enjoint à tous les Ducs ,
Ma> quir , Comtes , Gouverneurs , Ecuyers , & Gentilshommes , d'accomplir la 'Te-
neur de fon Te filament , £5? d'obéir au Roi fon Succefjeur. Et il conclud par une
ferieufe Exhortation à tous fies Sujets , de défendre la Religion Catholique -, ajou-
tant que fi quelqu'un de Jes Succeffeurs venoit à avoir des Opinions erronées , ou à
■être infeclé d'Herefie , il jeroit des le moment déchu de fa Succeffion.
Tout ce Paragraphe ne contient pas grand' chofe : ce ne font que de
fimples & de vagues prières, & de peu de confequence, qu'il fait à fon
Succeffeur. Il eft vrai, que fi le premier membre venoit à être reçu, comme
il l'a defiré, les Cordeliers auraient beau jeu , & qu'il faudrait que les
Dominicains rabaiflafTent d'un ton; mais, au refte, cela ne faifantrienau fu-
jet, je n'y infifterai pas: me contentant feulement de faire quelques Ré-
flexions fur l'Exhortation , qu'il fait à fes Sujets , de défendre la Reli-
gion Catholique, de laquelle j'expliquerai le fens en peu de mots^ & con-
clurai par une brève confequence que je tirerai de fes intentions , afin de
nous mettre devant les yeux le befoin que nous avons d'être inceffamment
fur nos gardes , de peur que nous ne tombions dans le piège que l'on
nous a tendu. Car il eft certain , que, fous la vénérable Epkhete de Reli-
gion Catholique, on entend la Superitition & l'Idolâtrie de J'Eghfe Romai-
Tome XL Ddd ne:
l'Euro-
pe.
PS.
$P4 MEMOIRES, NËGO'TIÀ-TIONS, TRAITEZ, ET
Affmrfs ne ; & que, par le mot de Défenfe , il faut entendre l'Extirpation totale de
«en. ce ja Re]igion prote liante , fous ie Nom de F Hère fie du Nord. Il y a long-
tems que ce deffein a été écrit en Lettres de Sang , par-tout où ils ont
été les Maîtres , & , s'il ne tenoit qu'à eux, nous nous détruirions nous-mê-
mes de nos propres armes, ce qu'à Dieu ne plaife.
Après avoir montré de la forte le Danger qui menace toute la Chrêtierr-
té , ii le contenu du Tellament elt exécuté , & que TEfpagne tombe en-
tre les mains de la France; il me refte à faire voir, que c'elt l'Intérêt de
toute l'Europe , de s'en tenir inviolablement.au Partage de la Monarchie
d'Efpagne, qui elt l'unique moyen d'empêcher que La France ne devienne
trop puiiTante à proportion de fes voifins, & pour mettre & rendre la Ba-
lance des Forces de l'Europe dans (on julte équilibre : fans quoi il eit im-
pollible que cette Paix & cette Profperité, qui nous a coûté tant de Sang
& tant d'Argent à procurer, puiffe durer long-tems. Or, parce que les Ar-
ticles touchant le Partage de la Monarchie d'Efpagne font mal interprétés
par quelques-uns de ceux qui ne les ont pas veus, & deguifés par d'au-
tres qui n'en entendent pas, ou qui n'en veulent pas concevoir le but
& le deffein , il ne fera pas hors de propos , d'en dire d'abord un
mot, & de tirer les confequences neceffaires de leur importance , afin
d impofer filence à ceux qui fe récrient fi fort à l'encontre , de con-
vaincre ceux que le doute & le fcrupule ronge , & de confirmer les
bien-intentionnés dans l'alfeurance que fa Majeité Britannique, & Mef-
fieurs les Etats Généraux des Provinces- Unies, n'ont jamais eu en ce-
la d'autre vue que la Paix & la Tranquillité de l'Europe. Que fi le Roi
de France trouve à propos de changer d'avis, il faut qu'il s'attende à ef-
fuyer tout ce qui doit s'en enfuivre neceffairement. La Préface des Arti-
cles dit, que l'état de la fanté du Roi d'Efpagne ayant été depuis quelque
tems fi languiifant, qu'il y avait fort à craindre pour fa vie, & que décé-
dant fans Enfans, l'Affaire de la Succeffion ne manqueroit pas de caufer
une nouvelle Guerre, fi le Roi très-Chretien vouloit maintenir le Droit de
fes Prétentions , & celui de Monfeigneur le Dauphin, ou de fes Defcen-
dans , à la Succeffion toute entière de l'Efpagne : ou ii l'Empereur vouloit
faire valoir les fiennes , celles du Roi des Romains, celles de l'Archiduc
fon Fils puilhé , ou de fes autres Enfans mâles & femelles, à ladite SucceC»
fion. Que pour prévenir ces Difputes, & ces Differens, & empêcher une
nouvelle Guerre en Europe, au fujet de ladite Succefiion, ou à caufe de
l'ombrage que pouroient caufer trois Etats réunis fous un même Prince ,
ILS, c'ett-à-dire ,. le Roi de France, le Roi d'Angleterre „ & les Etats
Généraux des Provincts-Unies, avoient trouvé bon de prendre des Me-
fures neceffaires , pour prévenir le- Mal , que le trilte Evénement de
la Mort du Roi d'Efpagne , venant à décéder fans Enfans , pou-
roit produire.
Les
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
W
Affaires
LES ARTICLES DU PARTAGE.
A ces Caufes , // a été arrêté , que fi un tel Cas arrivait , le Roi Tres-
Chrêtien, tant en [on Nom quen celui de Monfeigneur le Dauphin, fes Hoirs
G? Succeffcurs , fe tiendra Jatisfaït , fj? fe tient fatisfait par ces pré fentes .
que Monfeigneur le Dauphin ait pour fa Part & Portion , en entière (?
pleine Propriété & Pojffejjion , & en la place de toutes fes Prétenfions à là.
Succefjion d'Efpagne , le Royaume de Naples & de Sicile , les Places dépen-
dantes de la Monarchie d'Efpagne , fituées fur les Côtes de Tofcane , fètts le
Nom de Santo Stephano , Porto Hercole, Orbitelfo, Palamone , Porto-
longo , Piombino , la Fille & Marquifat de Final , la Province de Gui-
pufcoa , la Fille de Fontarabie , & S. Scbafien , le Port de Pajfage , la
moitié des Places qui font en deçà des Pyrénées-, quil ait, mitre cela , le Do-
maine du Duc de Lorraine, ce/i -à-dire, les Duchez de Lorraine & de Bar,
de la même manière que Charles quatrième du nom les a pofedcz: cf, en
confidération de cette Portion, il renoncera à tous les Titres fj? Prétenfions <,
quil peut avoir fur le refie du Domaine d 'Efpagne \ & , en échange du der-
nier Article , le Duc de Lorraine aura le Duché de Milan. La Couronne a" Ef-
pagne , £? les autres Royaumes, Iles, Etats, Terres , & Places , qui font au-
jourd'hui en la Jouïfjance du Roi Catholique , tant en Europe , qu ailleurs , fe-
ront donnés au SérémJJîme z/rchiduc Charles , Fils puif?ré de F Empereur , à la
referve de ce qui avoit déjà été donné au Dauphin. Et f Empereur , le Roi des
Ro?nams , (s F Archiduc Charles , renonceront à toutes leurs Prétenfions fur la
Part qui eft affignée dans le Partage du Dauphin. Ces Articles étoient (ignés
& fcellés par tous les Plénipotentiaires.
Maintenant, quoi qu'à l'égard du Point touchant le Droit héréditaire,
plufieurs croyent avoir raifon de fe récrier contre cette Divifion de là
Monarchie Efpagnole, cela n'empêche pas que le Bien public, & la Paix
univerfelle de l'Europe, ne doive être préférée à la Délicateffe d'un Point
de Juftice, dans des Matières d'Etat conteltées. Et, pour n'en rien dira
davantage, fi nous examinons cette Affaire dans toutes les formes, il n'y a
ni Prince, ni Nation, qui ait raifon de fe plaindre de ce Partage. Car
puifque la Sûreté des Conféderez ne leur permet pas en bonne Politique
d'approuver que la France foit la Maitrefle de toute l'Efpagne , &. que
d'ailleurs le Roi de France a réfolu de n'en rien céder à l'Empereur ; il
n'y arien au monde qui puiffe empêcher une Guerre, dans laquelle il faut
que les Conféderez prennent parti d'un côtéou d'autre, ou, ce qui vaut
autant, qu'ils foient forcez de lever des Troupes pour obferver les M oui-
vemens des Contendans, & pour garder leurs Territoires : je dis , qu'A
n'y a, humainement parlant, que ce Partage qui puifTe empêcher une
Guerre fangiante.
D'ailleurs, quiconque fera réflexion fur le grand Surcroît de Gloire, de
Puiflance , & de RichefTes , qui revient à l'Empire & à la France, de
Ddd z cette
l'Euro-
pe.
PE.
gptf MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires cette Addition qui fe fait par ce moyen à leurs Etats, doit penfer, que la
gen. de faifie d'une chofe plus grande qu'ils ne peuvent tenir de leurs mains ne
i/Euro- ferojt qUe jes affoiblir à la fin, puis qu'il eft impoilible , qu'ils jouiffcnt de
tout paifiblement & fans troubles, ou fans dépenfes, & qu'après avoir
ainfi confideré & balancé les Forces de l'Europe, ils ne pourroient, ou
tout au moins, ils ne devroient rien délirer davantage , fur- tout , s'ils
fbngeoient que le fort de la Guerre ell fort incertain, que deux Conten-
dans ne peuvent être Conquérans , & s'ils faifoient reflexion fur ce qui ar-
rive la plupart du tems , que tandis que deux difpuient d'une proye, &
qu'ils s'affoibliiïent l'un l'autre, il en vient un troifiéme qui' s'en faifit &
la leur enlève, ne leur laiflant qu'une chère & tardive repentance de leur
folie, pour n'avoir pas connu ce qui étoit de leur bien. C'eft ainfi que
l'Empire Roaiain fut fubjugué par ls Gots , que l'on appelloit Barbares 5
que la Palefline, la Syrie, l'Egypte, & la Grèce; ont été conquires par
les Turcs ; que la Bretagne a été envahie par les Saxons ; la Gaule par
les Gots, les Bourgignons, & les Francs ; l'Italie par les Huns; & l'Ef-
pagne par les Maures.
Quant à la Succeflion en droite Ligne, de laquelle nos Fr. . . . fiés
font tant de bruit, comme étant une cholè facrée & inviolable ; ils me
permettront de leur dire, qu'il n'y a point de Siècle qui nous fourniiïe
d'Exemple de ce qu'ils foutiennent, lors qu'il s'eft agi de l'Intérêt public
des Nations, de la Confervation de la Paix, & de l'EtablifTement d'un.
Pouvoir égal entre des Princes, qui étoient en Difpute pour ce fujet; & il
n'y a point de raifon pour foutenir le contraire. Car , comme le Tout vaut
mieux que la Partie , ainfi l'Intérêt tout entier de la Chrétienté doit être
préféré à celui d'une feule Famille, qui n'a déjà caufé que trop de Maux
à toute l'Europe. Ceux qui croyent, que je n'ai point d'Exemple pour
confirmer cette ConnoilTance inconteftable de Politique, n'ont jamais iû
l'Hiftoire. C'efl pourquoi je leur confeille de confiderer ferieufement en
quelle déplorable & quelle malheureufe condition auroit été l'Angleterre,
& toute l'Europe, Ci un Papifie bigot, entièrement dévoué aux Intérêts
de la France, eut pofTedé le Sceptre d'Angleterre: &, en ce cas, je ne
doute pas, quils ne bénilTent la Révolution arrivée dans ce Royaume, &
qu'ils ne rendent grâces à Dieu d'avoir mis le Roi GUILLAUME
fur un Trône, qui eft capable de faire pancher la Balance à l'Avantage
des Proteftans de l'Europe -, ce qui fans doute a été un des grands Motifs,
qui a porté Sa Majelté à fe mêler du Traité fufdit.
Ce font-là des Raifons qui me font croire que les Prétendans à la Cou-
ronne d'Efpagne doivent être contens de leurs Portions, fans fe meure en
peine du Tout. Maintenant, un mot ou deux, touchant le Sujet qu'ils
ont, à mon avis, de s'en contenter: mais, quoique je le puhTe ranger
fous plufieurs Chefs, & quejepuifle m'y étendre allez amplement, néan-
moins , pour couper coure , je ferai entrer tout ce que j'ai à dire dans
une Conclutîon générale , qui eft , parce que c'eft leur Intérêt d'être con-
tins du Partage, L'Empereur, malgré tout ce que l'on peut dire en fa fa-
veur,
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. $97
veur, en fe vantant d'être capable de rompre toutes ces Mefures, & de Affaire
venir à bout de toutes les Oppofitions que Ton peut faire aux Prétenfions GfN- "^
qu'il a fur toute la Monarchie, doit s'en contenter: car , je ne puis jamais L
avoir une il mauvaife opinion de la Prudence de ce Prince , que de pen-
fer, qu'après qu'un Domaine fi confiderable aura été établi pour l'Archi-
duc ion Fils, & duquel il peut jouir Daifibleinent , s'il lui plaît, il veuille
le rifquer au hazird d'une guerre; puis qu'après tout bien conlideré, il lui
fera împoifibie de fe faire une meilleure Condition, que celle qu'on lui a
déjà faite, & qu'en voulant tout avoir, il pourroit arriver , qu'il n'auroit rien
du tout. Car, quoiqu'il foit pofîible qu'il gronde, & qu'il faiTe même du
bruit fur le Rhin & en Italie , il ne doit pas fe flatter de pouvoir confer-
ver l'Efpag ne & la Flandre, quand même il en feroit déjà en poiTcffion.
Jimais l'Efpagne ne pourroit reiiittr à la France par Terre, & aux An-
glois & aux llollandois par Mer : & la Flandre fe verroit en moins de
rien envahie d'un côté par les François, & de l'autre par les Hollandois ;
& cela , fans beaucoup de peine , & avant même que l'Empereur , en vou-
lant avoir le tout, eut mis les fers au feu, & fût en état de leur faire au-
cune réfiltance confiderable. Non, il eit impoffible que Sa Majellé Im-
périale ne foit pas fenlible à ces Dangers , & à d'autres Difficultez insur-
montables, aufquelles il faut de néceiïité qu'Elle s'expofe, fi Elle entre-
prend une Guerre. Et, par confequent, c'efl fans railbn que l'on fuppofe,
qu'Elle refufera ie Royaume d'Efpagne, avec toutes les lues de l'Océan
dont on tire tant d'Avantages , la Flandre fi fertile , & toutes les Planta-
tions de l'Amérique, fans parler des Mines inépuifables d'or & d'argent qui
y font ; fur une limple & nue poffibihté d'en avoir davantage. Et ainiî ,
il ne faut pas douter qu'Elle ne donne les mains au Partage fait en fa
faveur.
Il eil vrai, que fi la France avoit la liberté de fuivre fes Inclinations, il
n'y a point de doute qu'Elle ne voulut s'emparer immédiatement de toute
la Domination d'Efpagne, comme d'un Bien qui lui appartient, ou que
tout au moins elle ne voulut maintenir les Droits du Dauphin, & l'anne-
xer à la France & à la Navarre; & qui pourroit la blâmer en cela? Mais ,
comme il y a deux grands Obitacles en chemin , pilonne ne peut devi-
ner ce qu'elle fera, & peut-être qu'Elle l'ignore elle-mcme, jufques à ce
qu'Elle voye ce qui fera pour ou contre Elle. Car, quoique nous appre-
nions par quelques Lettres des Pais étrangers, que le Roi de France ca-
reiTe le Duc d'Anjou, & lui donne le Titre de Roi d'Efpagne, nous appre-
nons par d'autres, qu'il a receu la Nouvelle du Teltarhent du Roi d'Ef-
pagne avec autant de froideur 6c autant d'indifférence, que û le Prefent
ne valoit pas la peine d'être accepté. Tellement que, félon les premières,
fi cela étoit vrai, il faudrait dire qu'il agit feulement comme un Mcdecin
Politique , & qu'il ne fait cela que pour tater. le poulx à fes voifins,
avant de fe déterminer fur ce qu'il doit faire , ou ordonner. Le premier
Obltacle,qui fe rencontre en fon chemin, pour aller prendre poff-iîion de
la Couronne d'Efpagne, c'eit le Traité , par lequel il a reconnu être fatis-
Ddd 3 fait
598 MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
Affaires fait de !a Portion qui lui avoit été faite, & par lequel il renonce, fous fon
gen. de Seing, & fous fon Sceau, à toutes fes Prétentions fur lereftei lefquels font
î-'huao- ^es Ljens trop forts & trop folemnels pour cire rompus par le Roi très-
PE' Chrétien , qui fe vante û fort de fon Honneur & de fon Intégrité.
Le fécond Obflacle, font deux puiiTans Voifins, àfçavoir le Roi d'An-
gleterre, &• les Etats de Hollande, lefquels il fçait, qui ne confentiront
jamais à le voir devenir fi formidable, qu'il le deviendrait par ce furcroit
de puifTance : & partant, comme on le peut fuppofer, il n'aime pas à
avoir la Guerre avec eux, fâchant qu'ils lui en ont donné tout fon faoul
la dernière fois. Si ayant par le Partage de la Monarchie d'Efpagne de 11
grandes Acquittions en Italie , qu'il efl le Maître de la Méditerranée , il
exclud la Maifon d'Autriche; par terre, il a les Clefs de l'Eglife Romaine
pendues à fa ceinture, & range les petits Princes d'Italie à fes pieds; il eft
à croire qu'il s'en tiendra étroitement à fon Alliance, & qu'il aimera mieux
accepter fans bruit le Partage de la Monarchie d'Efpagne , comme étant
fon Intérêt inconteftablement, que de perdre fes nouveaux Amis, & de
s'en faire des véritables Ennemis. En un mot , c'efl l'Intérêt de toute
l'Europe d'empêcher que l'un ou l'autre de ces deux Rivaux ne par-
vienne à la Monarchie toute entière d'Efpagne. Car,fi c'étoit l'Empereur
qui en devint le Maitre, il feroit alors trop puiffant pour les Princes d'Al-
lemagne, & pourroit les opprimer les uns après les autres, comme a fait
un de fes Prédéceffeurs à l'égard de l'Electeur Palatin du Rhin j ou tous
enfemble, û la fantailie lui prenoit de rendre la Couronne Impériale héré-
ditaire à fa Famille.
D'ailleurs, s'il arrivoit que ce fût le Roi de France, il efl évident que
ce ne pourroit être, qu'au Préjudice de l'Angleterre & de la Hollande,
dont les Habitans ne fubiiltent que par le moyen du Commerce, lefquels
il tacheroit afîeurement de fupplanter , foit en augmentant le nombre de
fes Vaiffeaux , à quoi il pourroit employer une partie des groffes Sommes
d'Argent qui viennent tous les ans du Mexique & du Pérou, foit en leur
prenant les leurs dans des Guerres & par des Avanies qu'il ne manqueroit
pas de leur faire inceffamment , pour ruiner par ce moyen le Négoce de
nos Marchands, qui font habiliter tant de milliers d'Anifans, en les obli-
geant à avoir toujours de nombreufes Flottes pour pouvoir trafiquer en
feureté , ou à demeurer les bras croifés; car le premier les obligeroit à vi-
vre fur le commun, & le fécond enrichiroit nos ennemis à nos propres
dépens. Quel Tort cela ne feroit-il pas à nos Manufactures , & au Trafic
que nous faifons avec tant d'avantage en Efpagne , en deçà ou au delà du
Détroit, fi tous les Ports de ce Royaume venoient à être libres & ouverts
à la France, par le moyen du nouveau Roi, qui mettrait de fi gros Im-
pôts fur toutes les Marchandifes de fes Voifins, que la France feule fe
verrait en état de pouvoir negotier & faire le Commerce des Marchandifes
tirées de fon crû, & de fes Manufactures , à meilleur marché qu'eux ?
Ii n'y a point de Mal , point de Tort , que la Malice de l'Homme puiffe in-
venter ou fuggerer pour ruiner le Commerce de l'Angleterre , & de la
IIol-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. $$>>
Iîol'ande, & pour appauvrir leurs Marchands, aufqueîs on ne doive s'at- Affaire
tendre, lî cette fatale Conjonction de ces deux Etats arrive. Que de- GV;N- nE
viendra nôtre Commerce du Levant, à Smyrne, à Scanderoon, àAlep, L URO'
dans tous les Forts de la Morée, à Zante, à Venife, à Gennes, à Li* 1' —
gourne,&c. ; lorfque nous trouverons Toulon , Alicant, Gibraltar, & Ca-
dix, aufii remplis de Corfaires, fur les Côtes de la Chrétienté, que Tu-
nis, Tripoli, & Alger, le font fur les Côtes de Barbarie ? Et que l'on
ne s'imagine pas que ces Appréhenfions ne foient que des malicieufes Sug-
gérions : c'elt une véritable Matière de Fait. Car , fi la dernière Paix a-
voit déjà engendré une fi grande quantité de Pyrates & de Voleurs de cet-
te Nation, qu'à une feule Séance , & dans une feule Place, c'elt au Old-
Bayiy , on en condamna quarante à être pendus ; il elt probable que kur
jN ombre ne manquera pas de croitre & d'augmenter, à proportion de leurs
Vaille aux.
Quel terrible Coup ne fera-ce pas pour nous, que cette Union des deux
Royaumes ( en un feul chef) par rapport a nos Colonies des Indes Oc-
cidentales , s'ils ont déjà la hardieffe de nous y infulter, en s'efforçint
d'attirer à eux le Trafic que nous y avons, & en rempliiTant tellement les
Mer3 de Boucaniers, qu'à moins qu'un Vaifieau ne foit des premiers rangs,
il a bien de la peine à échapper de leurs mains ? Que deviendra nôtre
Commerce du Nord, quand OItende & Nieuport feront, comme Dun-
kerque & Saint Malo , pleins de ces Ecumeurs de Mer ?
Ce n'eft-là qu'un petit Echantillon des Malheurs dont je prévois que
nous fommes menacés , fi l'Efpagne vient à être jointe à la France. Mais ,
ce qui nous doit confoler, c'eil que nous avons un bon Roi, qui connoit
nos Dangers, & qui fçait le Moyen de les prévenir, pourvu que de nôtre
part nous ne lui refufions pas les Moyens de le faire.
Reflexions fur une Lettre écrite à"* Anvers le 29. Décembre 1 700,
par Monfr. N. h Monfr. P. en Hollande , fur les Affaires pre-
Jentes de la Couronne d'Efpagne : avec quelques Pièces
authentiques. Imprimées Pan 1701^'),
MONSIEUR,
J'ai receu la Lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire le pre- Réa-
rmer jour du fiécîe où nous fommes entrez, avec un Exemplaire, qui siom fut
y étoit joint, d'une Lettre que vous me dites avoir paru à la Haye le J1^,^"
jour auparavant, & dont on a fait tirer cent Exemplaires. Vous me char- versJ
gez en même tems que je vous faile part des Reflexions que je pourrai fai-
(*) C«j Réflexions font fimpkment indiquées , Tome I, pag-Z^o.
l'Euro
PE.
400 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aminés re fur la dite Lettre. En vérité Mr. vous m'obligez à faire une chofe, que
gen. de je reconnois être abfolument hors de la fphere de ma capacité; mais, vos
ordres font fi précis , & mon obéiffance iï exacte à tout ce qui vient de
vôtre part, que je n'hefiteray point à vous en marquer quelques unes , au
hazard que vous les trouviez infipides. Il eft vrai que j'efpere que vous ne
vous attendez pas que j'aille fouiller pour cela , ni l'Hiftoire , ni les Endroits
Jes plus fecrets des Cabinets des Princes , puis que le feul Sens-commun
& les Affaires que nous avons vu de nôtre tems font plus que fuffifantes
pour me mettre en état de m'aquitter de ce que vous exigez de moi: & fi
vous ne trouvez pas mes Reflexions de vôtre goût, imputez-le au peu de
tems que vous me donnez pour vous répondre, & à peu de génie qui ne
me permet pas de traitter ces fortes de matières auflî ex profefj'o que le pré-
tend l'Auteur de la Lettre, qu'on fupofe avoir été écrite d'Anvers.
Pour procéder avec quelque ordre, vous me permettrez, je vous fuplie,
Mr. que je raporte tous les Articles de la Lettre, & je prendray la Liber-
té de dire fur chacun ce qui me femblera le plus raifonnable. Ainfi je com-
mencerai par le Titre qui eft.
Lettre écrite fi Anvers le 29. Décembre 1700. par Monfieur N.à Monfieur P.
en Hollande.
Le feul Tître , auparavant même que f eufTe jette l'œil fur la Lettre , mTa
d'abord donné une trés-méchante idée de fon contenu. Car, pourquoi fu-
pofer que laLtttre a été écrite d'Anvers, quand l'on fait que bien des jours
avant le 24. de Décembre , il y avoit quelques Miniflres auxquels Elle a-
voit été leiie, ou du moins auxquels on en avoit parlé. Ce Deguifement
ne m'a paru guéres convenable à unePerfonne qui fe pique dans toutes fes
Expreffions d'une candeur & d'une fmcerité fi peu commune, contre la-
quelle voici dès le commencement un Préjugé. Je pourray vous raporter,
dans la fuite, la raifon que quelques perfonnes croyent qu'on a eu de da-
ter cette Lettre d'Anvers. Ceci n'eft dit qu'en paffant,& fans aucune veiie
d'offenfer, l'Affaire ne méritant pas de s'y arreiter. Voyons l'entrée ou le
commencement de la Lettre.
MONSIEUR,
ÏOrfque feus T honneur de vous informer de la Mort du feu Roi , 6? du Tefla-
s ment plein de f âge (Je & d'équité , par lequel il avoit appelle le Duc d'Anjou
à la Couronne , je crus vous donner tout à la fois deux Nouvelles , dont l'une ferait
capable de calmer entièrement les Soucis que ï autre autoit pu vous caufer. Ce-
pendant , je vois par les Lettres , dont il vous a plu mhonnorer , que mes Conjectu-
res ne fe font pas rencontrées jufles. Fous me paroifjez, furpris £5? conjlerné. A
vous entendre, le leftament du Roi eji un Coup inopiné ^terrible ,& va devenir la
fource d'une infinité de maux & de mifere.
Vous
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
401
Vous me permettrez, Monfieur, que je ne vous dife rien fur'ce commen-
cement, parce que j'auray occafion dans la fuite de parler du Teftament
du feu Roi Catholique, que l'Auteur dit être plein fageffe & d'équité en
apellanrte Duc d'Anjou à la Couronne, aufti-bien que du relie du contenu:
ainfi, je continuerai la fuite de la Lettre.
Je ne fay , Monfieur, qui vous a pu fuggerer ces Notions étranges \ mais, je
confejfe ne pouvoir comprendre comment un homme aufji éclairé que vous a été
capable de les recevoir , ni comment vous pouvez accorder des idées aufji contra-
dicloires que celles dont il femble que vous foyez prévenu. Si vous craignez la
Grandeur de la France , pourquoi la voulez-vous augmenter , en détachant deux
Royaumes & deux Provinces d'Efpagne, pour les lui donner ? Et fi au contraire
cette Couronne vous par oit peu redoutable , pourquoy vous alarmez vous delapcn-
fée quelle pourra un jour vous faire la guerre , & que vous n'auriez pas F hj pa-
gne pour vous fout enir ? La contradiclion eft [enjibk. Mais , comme ceux qui cm-
brajjent une méchante caufe ont accoutumé de la foutenir par de méchantes rai-
fons, & que j'entrevois à peu près celles que l'on vous aura alléguées pour vous
infpirer les fentimem ou vous êtes , je veux bien entrer avec vous en quelque dif-
cuffion.
Je fuis furpris comment l'Auteur de la Lettre, qui traitte de Notions é-
tranges le jufte fujet qu'on a de craindre la fuite de l'étrange événement
qui eft arrivé en la fueceflion d'Efpagne , & qui dit de ne pouvoir com-
prendre comment un homme éefairé a été capable de les recevoir, veuil-
le y faire voir de la contradiction par un dilemme captieux, &, pour me
fervir des termes de l'Ecole, par une fallace & un fophifme d'Ecolier. Or,
ou cet Auteur a compris les propofitions de ion dikmme, ou il ne les a pas
compris. S'il les a compris, il a crû parler fans doute à des Enfans, & de
les éblouir par une contradiction, qui n'eft; peut-être que le caractère de fon
génie; & s'il ne les a pas compris, pourquoi s'amufe-t-il à affirmer la fen-
fibilité d'une contradiclion qu'il ne comprend pas ? Quelle qu'ait été cepen-
dant fa penfée, j'efpere qu'on ne trouvera pas étrange qu'à l'exemple de
l'Auteur je me ferve d'une diftinêtion pour répondre à fon argument. J'a-
voue qu'on craint la grandeur de la France, mais je nie que dans le cas,
en l'augmentant en détachant deux Royaumes & deux Provinces de l'Ef-
pagne pour les lui donner, on augmentoit la crainte. Depuis plus d'un
fiecle le but de toutes les Puiflances de l'Europe a été d'entretenir un équi-
libre entre les deux Maifons d'Autriche & de Bourbon , afin de n'être pas
accablées parcelle des deux qui auroit furpafle l'autre enPuiflance, & que
par-là elle fut parvenue à la Monarchie Univerfelle de l'Europe. Or, la
Branche d'Autriche d'Efpagne venant à manquer, & un Prince de la Bran-
che de celle d'Allemagne venant à fucceder à celle d'Efpagne, il eft fen-
fible qu'elle venoit au même point de PuhTance qu'elle avoit été fous Char-
les Quint, & qu'elle auroit emporté le poids, ainfi il n'y auroit pas eu
d'équilibre. C'eft pourquoi, par le Traitté de Partage, on ôtoic d'un cô-
Tome XL E e e té
Affaires
GI'.N. Dï
l'Euro-
PK.
PE.
402 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires té pour donner à l'autre, afin que l'équilibre fubfiftât. Ec il eft confiant,
gen.df. que ies deux Royaumes, & les deux Provinces, qu'on detachoit pour les
donner à la France, n'étoient que pour conferver l'équilibre, puis que Sa
- Majelté Tres-Chretienne en étoit convenue elle même dans le dit Traitté
de partage , auquel je vous renvoyé. Or , fi on craint la Grandeur de la
France, ce n'elt qu'en la fupofant emporter l'équilibre , & que la Maifon
d'Autriche ne fût pas en état de la contrebalancer ; mais , par les deux
Royaumes & les deux Provinces que la France aquerroit par le Partage,
cette Puiflance ne f ecevoit qu'une augmentation capable de fervir d'équi-
libre à la Maifon d'Autriche de la Branche d'Allemagne, & par confe-
quent la crainte de fes deifeins & de fes entreprifes n'augmêntoit pas,
puifque l'équilibre fubfiltoit par-là, & qu'on auroit toujours été en état de
fe joindre à la partie opofée à celle qui auroit voulu faire pancher la ba-
lance de fon côté , afin de tenir les chofes dans un poids égal. L'autre
partie du dilemme, qui dit que fi au contraire cette Couronne paroit peu
redoutable, pourquoi s'alarme-t-on de la penfée qu'elle pourroit un jour
faire la Guerre aux Etats & qu'on n'auroit pas l'Efpagne pour les foute-
nir, tombe d'elle-même par l'aveu que je fais qu'on craint fa grandeur, &
que cette crainte eft fondée fur l'infubfiftence de l'équilibre. J'auray oc-
cafion d'en parler plus amplement dans la fuite; & je me contenteray à
prefent de fuivre la Lettre pas à pas. Voici ce qu'elle continue de dire.
V Affaire confifte en deux Points généraux., qui renferment en eux tout ce qui
peut être dit fur cette matière, l'un de droit, f autre ^convenance: dans le pre-
mier , il s agit de f avoir fi le Teftament du feu Roi Charles efl jufie &? conforme
à ï équité \ & dans le fécond, fi le Traitté de Partage eft plus convenable à l'In-
térêt commun de l'Europe que ce même Teftament.
Je veux quant à prefent convenir de ces deux Points; mais, cependant,
par un tranfeat ,d\nb. que l'on s'en fert aux difputes , ou un dato £5? non
concejfo ; parce que peut-être dans quelque autre occafion il pourroit arri-
ver que je ne conviendray pas avec l'Auteur de la Lettre d'Anvers fur ces
deux Points. Voyons toujours la fuite.
J'ay mis le Droit en premier Chef , parce que toute caufe qui en eft dénuée eft
infoutcnable , & par ce aujfi que ceft le point le plus clair & le moins embarrafjé.
Je vousprie,Monfieur, de remarquer bien ce que l'Auteur de la Lettre
vient de dire; car, peut-être , dans la fuite, mefervira-t-il, pour rétorquer
contre lui.
Effectivement, pour démontrer la juftice du Teftament du feu Roi dans le règle-
ment de la fucceffon , il fufft de lafimple expofttion du fait.
Philippe JF. Roy d'Efpagne eut quatre Enfans de fes deux mariages avec Eli-
zabet
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. L 403
zabet de France , 6? Marie Anne d'Autriche, /avoir Marie-l'herefc , Marguerite- Affaires
ïhereje, Balthazar, & Char/es. «j^*
Marie-Therefe fut mariée en 1660.au Roy Très-Chrétien Louis XIV. & a eu ' ™
poflerité , Alarguer ite-ThereJe époufa en 1666. f Empereur Leopold Ignace au-
jourdloui régnant & eut une fille qui depuis a été femme de ÏElecleur de Baviè-
re, mais dont il ne relie point d'Enfant. Balt bazar mourut au berceau. Et
Charles, après avoir régné 3f. ans, vient de mourir fans pojîerité; de forte que la
Couronne a du tomber en Ligne Collatérale. Que toute pcrfonne, qui a jamais oui
parler de Succeffion , juge maintenant ou il faut chercher cette Ligne, (s fi ce ne fi
pas en celle qui tire /on droit de Marie-Thereje prejerablement à toute autre.
Voilà un beau détail généalogique des defcendans de Philippe IV. Je fou-
haiterois de pouvoir faire une Queftion à l'Auteur de la Lettre d'Anvers:
&, comme il efl permis à fon exemple de raifonner fur desSupofkions,je
voudrois bien favoir ce qu'il pourroit répondre à ce que je vay dire.
Louis XIII. Roi de France eut deux Enfans mâles, favoir Sa Majefté
Tres-Chretienne LouïsXlV. à prefent régnant, &Monfieur le Duc d'Or-
léans. Sa Majefté Tres-Chretienne a eu un fils qui efl Moniteur le Dau7
phin, qui a eu trois Princes , favoir les Ducs de Bourgogne, d'Anjou , <&
de Berry. Monfieur le Duc d'Orléans a eu entre autres le Duc de Char-
tres, la feue Reine d'Efpagne, & leurs ÀltefTes Royales la DuchefTe de Sa-
voye & la DuchefTe de Lorraine, qui ont eu poflerité. Or, comme l'on efl
mortel , fuppofons que Sa Majefté Tres-Chretienne , Monfieur le Dauphin,
& les Ducs de Bourgogne, d'Anjou, & de Berry, auffi-bien que Monfieur
le Duc d'Orléans & fon fils le Duc de Chartres, qui font les munimentaim-
perii félon Tacite, vinfientà mourir, (ce qu'a Dieu ne plaife, car je fou-
ha&e à tous ces illuitres Princes une longue vie,) & fans laiffer aucune
autre poiterité que celles qui viennent des deux DuchelTes de Savoye &
de Lorraine. Suivant l'Auteur de la Lettre d'Anvers, toute perfonne qui
a jamais ouï parler de Succeffion jugeroit que la Couronne devroit tomber
en Ligne collatérale, & l'on ne pourroit trouver cette Ligne qu'en celle
qui tire fon droit des DuchefTes de Savoye & de Lorraine. Ce qui paroi-
troit d'autant plusjufle, fi le dernier mâle régnant eut fortifié ce droit
par unTeftament. Cependant, Monfieur le Prince de Condé, ni le Prin-
ce fon fils, ne s'accommoderoient point de tout cela.
N'allez pas trop vifte,jevous fuplie Monfieur. Cette Queftion, toute ri-
dicule qu'elle vous doit paroitre du premier abord, a un but qui a fon
poids, aitifi que vous le verrez.
La Réponfe, que l'Auteur de la Lettre d'Anvers me feroit fans doute
d'un air magiftral & decifif, feroit que cette Queftion, (les fupofitions
admifes) n'a rien de commun avec la matière dont il s'agit: puis qu'en
France la Loy Salique décide, Rex Francis mafculus cfio , & que par-là les
femmes, font exclues duThronej au lieu que cette Loy n'eft point en
ufage dans la Monarchie d'Efpagne où les Conftitutions & Coutumes fon-
damentales admettent les femmes. Et bien, c'eft une affaire dont je con-
Eee 2 viens,
Affaires
G>-'N. DE
l'Euko-
PE.
404 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEE, ET
viens 5 mats je foutiens,que par la Renonciation de l'Infante Marie-Therefe
& par leTeiiament du feu Roy Philippe IV. la Monarchie d'Efpagne étoit
dévolue à la Branche Mafculine de laMaifon d'Autriche d'Allemagne, &à
fon défaut au Duc deSavoye, en cas que la ligne Mafculine de la branche
d'Efpagne vint à faillir; & celte Renonciation & cette Subilitution tien-
nent lieu de Loy Salique en Efpagne. Ainfl, fi la queftion que je viens de
faire fur des fupofitions elt hors de faifon , le raifonnement de l'Auteur
de la Lettre d'Anvers l'eit auiïï : s'il répond à la mienne, qu'il y a une Loy
Salique en France qui exclut les femmes, je diray auiïi qu'il y a une Re-
nonciation & une Subftitution en Efpagne, qui décide de la fucceiïion pre-
ftnte, tout de même que la Loy Salique en France -, & il ne fauroit rien
alléguer que je ne lui réponde, comme l'on dit à l'école, ad homimm.
11 s'enfuit de ce j'ay l'honneur de vous dire, que le feu Roi Charles Se*
cond ne pouvoit ny n'avoit aucun droit de faire unTeftament, & de
difpofer de la Monarchie, & qu'ainfi celui qu'il a fait efl de nulle valeur.
C'eft juiïement comme fi un particulier , auquel feroit écheu un héritage
par fubltitution ou fideicommis comme on l'appelle, alloit tefter en faveur
d'un tiers qui n'elt pas compris dans le fideicommis : nôtre Auteur trou-
veroit cela équitable, & même d'une équité unique , contre le fentiment
de tous les Jurifconfukes du Monde, & contre une infinité d'Exemples
dans tous les Etats de la Chrétienté. J'ai encore d'autres raifons tou-
chant l'invalidité de ce Teitament du Roi Catholique, mais qui me fervi-
ront ci-aprés.
Je ne doute nullement que l'Auteur de la Lettre d'Anvers ne fe récrie
d'abord contre la Subftitutionque j'avance y avoir dans la Monarchie d'Ef-
pagne, pour laMaifon d'Autriche de la branche d'Allemagne, & qu'il ne
le nie avec autant d'aflurance que s'il en avoit brûlé les Originaux. Mais,
c'eft un fait, Monfieur, qui eft inconteftable, & SaMajelté Impériale, qui
eft un Prince débonnaire & qui aime la juftice , en mettra l'évidence
devant les yeux de toute l'Europe; & je ne vous avance rien, donc je
ne fois par-là juftifié , comme vous le verrez en peu de tems.
Je prévois auiïi que cet Auteur iroit chanter triomphe, s'il fa voit ce
que je viens de dire, en infultant à caufe du Traité de Partage, difant
puis que par la Renonciation & par la Subilùution, la Monarchie d'Efpa-
gne venoit à tomber entre les mains des Princes de la Maifon d'Au-
triche de la branche d'Allemagne, pourquoi a-ton voulu leur faire in-
juflice , & leur enlever deux Royaumes & deux Provinces pour les
donner à la France? Je repondrai à ceci plus bas, lors que je touche-
rai la corde du point de convenance, que l'Auteur de la Lettre d'Anvers
a mis pour 1« fécond point général. En attendant que nous en foyons-
ià, je vai continuer la Lettre.
Vous me direz fans doute , que cette Prince (Je en fe mariant renonça à fon droit
de fucccjjion , Es? quainfi on nefi plus à lieu d'y revenir pour le faire valoir de nou-
veau. AJiiS) à cela je vms répondrai par une Dijlinëlion. La Renonciation eft
•vala-
p:-;.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. L 405
valable £5? doit fubfifler eu égard au motif & dans le cas qui Va eau fée : feu Affatres
conviens. Mais, qu'elle doive au jji avoir lieu dans le cas vu ce motif n'exifk G*N- DE
point , cefi ce que je nie, & ce que Vvn ne fauroit foutenir fans renverfer toutes Lf.u"°"
lesConjIitutions <3 Conventions du Monde. Or, te motif qui avait caufé la Re-
nonciation de la Reine Marie-Therefe net oit autre que la crainte de voir les deux
Monarchies réunies par fuccefiion dans une feule & même perfonne. Le fait efi
notoire , £i? le contrat! de mariage de la dite Reine Marie-Therefe le porte formellc-
ti/cnt Article IV. ou il efi dit que la Renonciation fe fait , à fin que les deux Cou-
ronnes étant fi grandes ijj fi puijfantes , elles ne puiffent être unies en une feule j Ci?
que des à prefent on prévienne le> occafions d'une pareille jonction. Le Tefiament
du Roi Philippe, qui fuivit peu apré , s'explique en termes peu differens Article
XVI l, & remarque expreffement que le motif de la Renonciation efi puur préve-
nir les grands dommages qui pour oient refait er de lajonclion des deux Couronnes ,
&? des Etats en dépendants.
Nous voici arrivez à la fameufe , légale, & authenrque Renonciation
faire par l'Infante Marie-Therefe, mariée à Sa Majeilé Très- Chrétienne
LouïsXIV. Je dirai plus bas le motif qu'on a eulorfqu'on exigea cette Re-
nonciation de l'Infante dans le contract de mariage qui elt tout autre que ce-
lui que l'Auteur de la Lettre veut infinuer, & en attendant je veux bien
examiner celui de l'Auteur. II dit que c'a été pour empêcher que les deux
Monarchies d'Efpagne& de France ne vinffentà être unies en une feule per-
fonne, &enfuite il rend valable la Renonciation par fexiftence de ce mo-
tif, lequel n'étant plus, la Renonciation tombe. Or, je demande à l'Auteur,
ou il y avoit de la jufiiee & de l'équité dans le prétendu droit de l'Infan-
te Marie-Therefe, ou il n'y en avoit pas. S'il n'y en avoit pas, donc
toutes les prétentions de la France font nulles & infoutenablesj & s'il y
en avoit, pourquoi exiger une Renonciation? Oh! me dira-t-il , il faut
une Diflinclion^ c'eft parce qu'il y avoit un motif, qui étoit, afin que les
deux Monarchies ne fuffent pas unies; mais, cette diltinélion ne convient
pas à ce que l'Auteur dit dans la fuite, que lajufiice & V équité font uniques \ elles
ne peuvent pas changer de nature en changeant de pais 5 ni protéger en même tems
deux partis contraires.
Je n'infiiterai pas fur le mot uniques qui eft trés-mal adapté, mais j'en-
tre dans fa penfée, qui eft, ce me femble,que la jultice eft une, l'équité
elt une, favoir indivillbles, non feulement en elles-mêmes, mais même
relativement , puis qu'elles ne peuvent changer de nature en changeant
de païs: donc, une diftinctiop ne leur convient pas, & elles ne peuvent
pas être juftice & équité relativement à un motif, & ne l'être pas en mê-
me tems. Il me femble qu'il paroit bien mieux ici une contradiction i"cn-
fible, que l'Auteur ne l'a trouvée ailleurs. Je n'ai jamais oui dire qu'une
chofe qui elt «wefTenciellement, puiffe être différente d'elle même par un
accident qui lui elt feparé & extrinfeque, qui ne fauroit abfolument lui
changer fa nature & fon effence.
Je ne dis ceci qu'en pafïànt ; car , j'ai bien des chofes plusfolides à vous
Eee 1 di-
l'Euro-
pe.
4g£ MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AmiRtf dire, pour vous montrer évidemment, que l'Auteur de la Lettre ne fait la
GEN-DB diftincîion raportée, qu'avec malice & avec peu de bonne-foi & de fince-
rité,&. que fa conclufion va abfolument à gauche. Je veux convenir avec
lui , qu'un des motifs énoncez dans lecontraél de mariage de l'Infante Ma-
rie-Therefe efl celui qu'il raporte; mais, outre qu'il n'efl pas le feul, il
n'en eft même que le plus foible. Ce beau Faifeur de Lettres croit peut-
être qu'on vienne du Japon, & qu'on ne fâche pas les chofes. Je veux
m'attacher comme lui au Contracî: de Mariage, pour le confondre par fes
propres armes. Il y eft dit, que moyennant le dot qui y efl flipulé, la Sere-
nijjime Infante fe tiendra pour contente & fe contentera du dit dot , fans que par
après elle puiffe alléguer aucun autre fien droit &c. & quelle en fera la Renon-
ciation en bonne & deïte forme &c. En fuite il efl dit que ,
D'autant que leurs Majeficz Très -Chrétienne & Catholique font venues , &?
viennent à faire le Mariage , afin de tant plus perpétuer & affeurer par ce nœud
13 lien te Paix publique de la Chrétienté , (3 entre leurs Majefiez t amour (3 la fra-
ternité que chacun efpere entre elles , 13 en contemplation auffi des jujles & legi-
mes caufes qui montrent & perfuadent î égalité & convenance dudit Mariage,
par le moyen duquel , (3 moyennant la faveur (3 grâce de Dieu , chacun en peut
efperer de tr es-heureux fuccez , au grand bien {3 augmentation de la Foi & Reli-
gion Chrétienne ,au bien 13 bénéfice commun des Royaumes Sujets (3 Vajfaux des
deux Couronnes -, comme auj/i( remarquez bien, Monfieur, ce comme aufîï)
pour ce qui touche (3 importe au bien de la chof'e publique (3 coyfervation défai-
tes Couronnes, le (quelle .s étant fi grandes (3 puiffantes ne puijjent être reunies en
une feule , 13 que des à prefent on prévienne les occafions d'une pareille jonction.
Doriques , attendu la qualité des fuj dites 13 autres raifons , i3 notament celle de
l'égalité qui fe doit conferver (3c.
Je tire de ce que je viens de vous rapporter trois chofes, qui font an-
nexées l'une à l'autre. L'une, qu'il y a plufieurs raifons qui ont fervi de
fondement à la Renonciation , ce qui fe voit parce qui efl dit qu attendu la
qualité des fufdites 13 autres jufles raifons; la féconde, que le motif, fur lequel
l'Auteur fonde fa diitin£lion , non feulement n'efl pas le feul, mais qu'il
n'eft pas le principal motif, & qu'il n'efl que fecondaire, & comme un ac-
ceflbire qui n'a pas autant de force que les autres , ce qui fe remarque par les
mots comme au fji\ & la troiiiéme,que le principal' motif efl l'égalité, & no-
tament , dit le Contracî, celle de V égalité. Ce qui combat directement ce que
l'Auteur dit: le motif de l'égalité efl le principal, & l'Auteur ne fauroit
nier la fubfiftence de ce motif. Vous me demanderez peut-être ce que
j'entends par le mot d'égalité: je vai vous l'expliquer.
L'un des principaux obflacles,& même le plus grand, du Mariage entre
l'Infante Marie-Therefe & le Roy Très -Chrétien, fut la contrariété des
Loix & des Coutumes des deux Couronnes, vu qu'en Efpagne les fem-
mes fuccédent, faute de mâles, & qu'en France les femmes font exclues
de la Succeffion par la Loy Salique que Philippe le Long inventa ou éten-
dit, pour exclure de la Succeffion du Royaume fa Nièce fille de Louis
I lutin. Or , quelle égalité y auroit-il eu entre les deux Couronnes, fi les
fem-
lSEUHQ-
r£.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 407
femmes de France, fe mariant en Efpagne, étoienc fans droit à la Suc- Asmma
ceiïlon de France , & fi celles d'Efpagne, en fe mariant en France, euf- ^ftx; DK
fent eu droit de fuccéder en Efpagne ? Cette égalité confilte à mettre
également à couvert les Loix fondamentales des deux Royaumes. La
France a autrefois exclues de tous droits & partage de fes Royaumes les
deux Ifabelles mariées aux deux Philippes Deuxième & Quatrième: ainfi
la Couronne d'Efpagne par une égalité a exclues Anne & Marie-Therefe,
mariées aux deux Louis Trezieme & Quatorzième ; la France l'a fait par
la Loi Salique, & l'Efpagne l'a fait par des Renonciations Légales & Au-
thentiques : voilà le véritable & le principal motif de la Renonciation de
l'Infante Marie-Théréfe, & non pas celui que l'Auteur de la Lettre allè-
gue, ainfi que l'on peut recueillir par ce que j'ai rapporté ci-defius du
Contract, ce qui me femble allez clair. Mais, je veux aller plus loin & di-
re, que quand même la Renonciation eut été faite en veue de ce feul mo-
tif, l'Auteur conclud malicieufement que le motif ne fubfiftant plus, la
Renonciation eft nulle. Je ne veux pour Je prouver que m'attacher au
Contra& de Mariage & au même Article qu'il allègue, qui conclud direc-
tement contre ce qu'il avance. Car, après avoir dit que l'Infante Marie-
l'herefe , & les Enfans procréez d'elle, [oient mâles ou femelles ,& leurs des-
cendant , premier ou Jecond, trois ou quatre , nez cy-aprez en quelque degré
qu'ils puijfent fe trouver , voire à tout jamais , ne peuvent fuccéder à aucun
des Royaumes , Etats , & Dominations , prefent ou à venir , par quelque titre ,
droits , ou raifons que ce puijfent être ; encore que ce fut durant la vie de la-
dite Sereniffime Infante Dame Marie-Therefe' ou après fa mort & celle de
qui que ce foit de fes défendants , premiers, féconds, troijiêmes nez, ou ulté-
rieurs, que le cas ou les cas, par lej f quels , ou de droit, ou par les Loix &
Coutumes des dits Royaumes , Etats, & 'Dominations, foit par difpofition de
titres , par lefquels ils puijfent fuccéder ou prétendre pouvoir fuccéder es dits
Royaumes , Etats , & Dominations leur deut appartenir la Succejfion, en
tous lefquels fuf dit s cas des à pré fent la dite Dame Marie -Thereje Infante
dit & déclare être & demeurer bien £s? deuement exclufe , enfemble tous fes
enfans mâles ou femelles , encore quils fe vuuluffent ou pujfent dire & pré-
tendre quen leurs perfonncs ne courent ni ne fe peuvent & doivent confide-
rer les dites raifons de la chofe publique, ni autres es quelles ladite Ex-
clufion fe pourroit fonder , ou quils voulujjent alléguer ( ce quà Dieu ne
plaife ) que la Succcffwn du Roy Cathodique vu de fes Succejfeurs Princes fj?
Infantes,& d'abondant des mâles quil a cjf pourra avoir , fes légitimes Suc-
cejfeurs , eut manqué & défailli- parce que , comme il a été dit , en aucun cas
ni en aucun terns , ni en quelque manière qui pût advenir , ni elle , ni eux , fes
hoirs & defcendans , nont à fucccder ni prétendre pouvoir fuccéder , nombfiant
toutes Loix , Coutumes , Ordonnances , fjf Difpofitions , en vertu defquelles on
a fuccedé en tous lefdits Royaumes, Etats, rjf Seigneuries &c.
Je recueille, de tout ce que je viens de rapporter, deux chofes confide-
rables: l'une, qu'il eft itipulé dans le Contracl de Mariage, que l'Infante re-
noncera à tous Droits &c. & qu'elle , ni fes defcendants à jamais ne
pour-
4o8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
pourront s'en prévaloir, & que les motifs & les autres raifons fur lefquel-
les-1'exclufion eil fondée ne doivent jamais être confiderées, encore qu'ils
fe vouluffent, ou puffent dire & prétendre qu'en leurs perfonnes ne cou-
rent ni ne fe peuvent & doivent conllderer lefdites raifons de la chofe pu-
blique, ni autres fur lefquelles ladite Exclufion fe pourroit fonder: donc
nôtre Auteur fait à préfent une Diftinclion directement contraire à une
claufe auffi clairement ftipulée. L'autre chofe que je recueille eft que les
defcendans de ladite Infante font exclus, même au défaut de Lignée dans
la Maifon d'Autriche d'Efpagne, & qu'ils n'y pourront fuccéder, non-ob-
ftant toutes Loix , Coutumes , Ordonnances , & Difpofitions. Remar-
quez bien, s'il vous plait, ce mot de Difpofition, car on doit entendre ce.
mot Difpofition pour un Teftament, & qu'ainfi c'eftmal à propos que l'Au-
teur de la Lettre d'Anvers attribue l'événement préfent en vertu du Tef-
tament qui ne fa-uroit en aucune manière, après une flipulation fi claire,
donner aucun droit aux Defcendans de l'Infante , en quel degré qu'ils
foient; & que même Charles fécond ne pouvoit pas en faire un, parce
qu'il déroge à ce Contraét auflî bien qu'aux Difpofitions du Roi Philippe
fon Père, qui lui a laiffé le Royaume en Subftitution. Ceci eft fi clair, que
je crois qu'il n'eft pas à propos, Monfieur, que j'y infifte d'avantage -y &
pour vous faire voir, que je n'avance rien que pièces en main, je joindrai à
la fin de mes Réflexions le Contraêf. de Mariage, la Ratification du Roi de
France , & les Renonciations de l'Infante, qui vous éclairciront mieux de
tout ce que j'ai l'honneur de vous repréfenter, & qui ferviront aufli à vous
convaincre que les fondemens des raifonnemens de l'Auteur de la Lettre
font dénués de tout droit, & par confèquent , & félon lui-même , infoutena-
bles , au lieu que ce dont j'ai l'honneur de vous entretenir eft un point clair
& non embaraifé. Ainfi, j'examinerai la Lettre qui continue ainfi.
Or ,je demande ou ejî aujourd'hui Texiftence de ce cas ? Efl-ce donc le Dau-
phin , ou le Duc de Bourgogne , que le feu Roy vient d'apeller à la Succefjïon ? Ni
l'un ni f autre. Cefl le Duc a" Anjou , fécond Fils de France, 13 fort éloigné fe-
Ion ï ordre de nature de parvenir à la Couronne de France , puifque fon Ayeul ,
fon Pére^ & fon Aine, font grâces à Dieu pleins de vie & de font é.
Je veux bien pafler à l'Auteur, (fans confequence pourtant) qu'il n'y a
pas aujourd'hui le cas ou le motif qu'il allègue. Mais, que veut-il inférer
par-là? iift-ce que ce cas ne peut pas venir à exifter un jour? Le Dau-
pnin & le Duc de Bourgogne ne font pas appeliez, dit-il, à la Succeffion;
mais, c'eft juftement par-la que le cas peut arriver un jour. Car, au fond,
fupofant unejultice & une équité des Droits de la feue Reine de France,
on ne fauroit fans une injuftice criante dépouiller le Dauphin & le Duc de
Bourgogne d'une Succelfion qu'une juftice & une équité, qui font félon
l'Auteur uniques , leur procure, pour y appeller un puifné à leur préjudice.
MaiSjdira-t-on,le Dauphin & le Duc de Bourgogne fe déportent de leurs
Droits en faveur du Duc d'Anjou. Cela va bien ; mais, le Dauphin, & le
Duc
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 400
Duc de Bourgogne , ont-ils fait quelque A6le authentique , pour s'en dépor- Aftairs»
ter? Point du touc. Mais, fupofons qu'ils en raflent, veut-on conclure par- gen.de
là qu'une telle Renonciation feroit valable? Abus! Quelle Renonciation L'EuR°-
étoit plus authentique que celle de l'Infante Marie-Théréfe , puifqu'elle é- __L_L__
toit flipulée dans un Contraét de Mariage, après plufieurs Négotiations ré-
itérées. Cependant, l'Auteur de la Lettre l'a jugée de nulle valeur. Mais,
me dira-t-il, elle eit jugée de nulle valeur, parce que le motif pour lequel
elle avoit été faite ne fubfiite plus. Supofons-le. Il ne me fauroit nier,
que, depuis le Mariage de l'Infante jufques à la nahTance du Duc d'Anjou,
le motif fubfiftoit. Ce motif a-t-il empêché le Roy Très-Chrétien de dé-
clarer en 1668. que cette Renonciation étoit nulle } & n'a-t-il pas fur cela
pouffe fes prétenfions quoi qu'elles fuifent mal fondées , & ne s'eit-il pas
emparé en ce tems-là de Lille & de quelques autres Places ? Il me femble
que je puis donc inférer fans abfurdité, que ces Renonciations ne font va-
lables, ou non valables, qu'en tant qu'elles s'accommoderont aux intérêts de
la France, auprès de laquelle id œquius quod validius. Et fi le Dauphin,
le Duc de Bourgogne, ou ks Enfans( au cas qu'il en ait,) trouvoient un
jour que ce fût leur Intérêt d'invalider la Renonciation tout de même que
le Roi Très-Chrêtien fit à la Campagne de Lille , foit en fupofant que le
Duc d'Anjou vint à manquer ou autrement, quel remède pour la rendre
valide? Suivons nôtre Auteur.
Déplus, fupofons , ce que Dieu ne veuille permettre , que ces trois auguftes tê~
tes venant a manquer , le Roi Catholique d'aujourd'hui fe trouvât appelle à la,
Couronne de France , il ne s'en fuivroit pas de- là que les deux Etats vinjfent à
fe réunir: le l'eftament du feu Roy y a pourvu ^en ordonnant qu'alors fon Succef-
feur feroit obligé d'opter , & qu'au cas qu'il voulut préférer la Couronne de Fran»
te , le Duc de Berri fon puifné deviendroit Roi d'Efpagne aux mêmes Conditions,
J'efpere que vous ne trouverez pas mauvais , fi , à l'exemple de l'Auteur,
qui fait des fupofitions fur des chofes pofîîbles , j'en fais auiïï quelques»
unes , & qu'on ne les traittera pas en fe moquant ( comme l'Auteur
fait) de fpeculations anticipées de ce qui pourroit arriver un jour, ni
d'idées d'une pofîibilité future, dont Dieu feul par fa toute -fcience peut
pénétrer l'événement. Les choies du Monde font incertaines, & les Fa-
milles les plus nombreufes viennent à manquer. Je fupofe donc là-defTus
qu'il peut arriver que le Dauphin , le Duc de Bourgogne , ou fes enfans f
foit que le Duc d'Anjou vint à manquer ou autrement, voudroient un jour
faire valoir leurs prétenfions fur la Monarchie d'Efpagne. Je fupofe auflî
avec l'Auteur , que ces auguftes Tefles venant à manquer il prit fantaifie
au Duc d'Anjou d'être aufïi-bien Roi de France que d'Efpagne, & que les
uns ou les autres fiffent entrer cent mille hommes en Efpagne , envoyaf-
fent des Flottes en Amérique, & eufTent introduit dans les places d'Italie
& du Païs-Bas de bonnes Garnifons ; quel remède trouveroit-on pour em-
pêcher cette union ? L'Auteur de la Lettre en fournit un qui me charme,
fente XL Fff JLeïefta*
4io MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AffkiKEs Le Teftament du feu Roi, dit-il, y a pourveu. Les Efpagnols n'auront alors
cen. de qU»a prendre le Teilament en main , & ils remporteront avec icelui des
l'Euro- Yjfl.0jres } encore plus complètes, que celle que le Roi de Suéde vient
* de remporter fur les Mofcovites à JNerva ; & ils obligeront les François
de s'en tenir, malgré eux, aux Difpofitions du Teilament. Je ne m'étonne
plus après cela fi dans la fuite de la Lettre nôtre Auteur fait des mena-
ces. La Nation Efpagnole a prefentement un Palladium, avec lequel elle
peut feurement braver toute la Fui/lance de la France, & fe faire craindre
de l'Angleterre & de la Hollande. Quel malheur pour le refte de l'Euro-
pe , que les Efpagnols n'ayent pas eu plutôt ce Palladium ! Oh ! qu'on auroit
bien évité des pertes de batailles & de places , & épargné tous les efforts
qu'on a faits pour fauver cette miferable Nation de tomber dans le néant.
Quel dommage pour l'Efpagne , qu'elle n'ait pas eu ce Palladium lors qu'el-
le perdit le Portugal , & lors qu'en dernier lieu Mr. de Pointy avec une
poignée de Monde attaqua, prit, & ravagea Cartagene ! On doit après une
raifon (i forte bannir toutes les jufles craintes pour l'avenir, & dormir en
feureté. Mais pour moi qui n'ai point de foi pour ces fortes de preferva-
tifs miraculeux, & qui regarde la Nation Efpagnole déchue de fon an-
cien luftre, & fur le pied que l'Auteur même nous la defigne dans la fui-
te, ainfi que j'aurai l'honneur de vous faire remarquer, je ne puis affez
m'étonner que l'Auteur, qui veut paifer pour un homme de poids, puiffe
avoir le front d'avancer des pauvretez de cette nature, & de vouloir re-
médier aux inconveniens qui peuvent arriver, & qu'on peut avec fonde-
ment conjecturer par le pafle, par un expédient auiïi ridicule. L'Auteur
de la Lettre me dira peut-être , qu'il efr. feur que la France s'en tiendra à la
Difpofition du Teftament. En vérité, j'avoue pour le coup qu'il me ferme
la bouche , puifqu'il eft 0 notoire que la France eit fi religieufe Obferva-
trice des Edits,des Traittez, & des Contracls, particulièrement lors qu'il
font ratifiez par des Sermens auifi folemnels , que ceux par lefquels on ra-
tifia le Contracl; de Mariage de la feue Reine Marie-Therefe. L'Archiduc
Charles, & le Duc de Savoye,ne devroient point là-deiTus fe mettre en
peine pour leur Subilitution,fi leur tour arrive; car , quand même la Fran-
ce occuperoit la plupart des places fortes de la Monarchie Efpagnole, elle
les vuideroit d'abord de même qu'elle a vuidée Lille & les autres places
qu'elle a prifes fur un prétexte qu'elle avoue par l'acceptation du Tefta»
ment ne plus être valable , pour les remettre à ceux que le Teftament
fubflitue, puifque le dit Teftament^ pourvoit , & que la France ne fe de-
part jamais de la louable coutume de maintenir religieufement tous les
Traittez, fans en excepter même celui de Partage. Continuons avoir la
fuite de la Lettre.
Je ne [ai fi je me trompe , mats il me femble que des difpofitions de cette
nature font entièrement irréprochables : fofervis même avancer , que fi un par»
ticulier ,fe trouvant dam le même cas , avoit tefié d'un autre façon , £5? avoit
wulu régler autrement F ordre de la fuccejfion 9 il ri y auroit point de Tribu-
nal
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 411
val qui ne déclarât fon Teftament nul , comme en effet , il le fer oit de a"airf8
&r0lt> l'Euro.
Je vous ai déjà donné à connoître, Monfleur, que la difpofition du Tefta-
ment, dont il eit queftion , eft infoutenable, puis qu'il y a une Subltitution
qui empêchoit le Roi Charles de pouvoir tefter; & fi un particulier, fe
trouvant dans le même cas, d'être en pofTeffion d'un bien fubftkùé, eut
telle de la façon que le Roi Charles a fait, & eut voulu régler l'ordre de
la Subftitution d'une autre manière qu'elle n'étoit réglée, il n'y auroit point
de Tribunal qui ne déclarât le Teftament nul , comme en effet il le feroit
de Droit, par tout ailleurs qu'au fupreme Tribunal de France, où l'Utilité
règle la Juflice. Ainfi , le Teftament du feu Roi Charles Secoad eft abfo-
lument de nulle valeur. L'Auteur continue ainfi.
Or , fi le 'Teftament du feu Roi eft jufle , ce que Von ne fauroit contefter ,
comment pourroit-on s'y oppofer jufte ment ? La juflice & ï équité font uniques.
Elles ne peuvent pas changer de nature en changeant de pais , ni protéger en
même temps deux partis contraires. Cefi auffi ce que le Roi Très-Chrêtien
a très-bien reconnu. S'il navoit voulu confulter que /es intérêts , il s'en feroit
tenu au Traitté de Partage ; & , au hazard d'une Guerre , il auroit efi'ayé de fi
rendre Maître des Provinces aui lui et oient defignées : mais , l'équité qu'il a re-
marquée dans le Teftament du feu Rjai Charles lui a fait quitter toutes ces pen-
fées. Il a veu que fon Honneur, fa Confcieîice , & la bonne Politique ne lui
permettaient pas d'entreprendre par complaifance pour les Etrangers une Guerre ,
dont l'unique but feroit de ravir à fon petit-fils une Couronne qui lui eft lé-
gitimement échue , mais qu'au contraire il trouverait dans le parti qu'il a
pris toute forte de feureté , d'honneur , £5? d'avantage.
J'ai déjà dit que le.Teftament du feu Roi d'Efpagne n'eft pas juile: ain-
fi j'infère, qu'il y a donc de la juflice à s'y opofer. C'eft , à la vérité , à la
partie lefée à le faire* mais, il y a aufîi de la charité à aider la partie op-
prefTée à recouvrer ce que la fupercherie ou la violence lui enlevé. Je
parle toujours fuivant le premier Point de Droit de l'Auteur; car, pour
l'Article de la convenance, j'aurai à dire bien des chofes de plus, lors que je
l'examinerai? à fond. L'Auteur dit que la juflice & l'équité font uniques ,
& queSaMajefléTrés-Chrêtienne l'a très-bien reconnu \ mais, ceci eft équi-
voque, car on peut bien connoître une chofe bonne fans la fuivre, video
meliora probcque , détériora fequor, & on ajoûteroit à propos utiliora. Mais
comme la fuite dit qu'elle a remarqué l'équité du Teftament, il eit à fupo-
fer qu'on regarde pour équitable tout ce qui eft utile , ici œquius quod valu
dius, ainfi que j'ai déjà dit; l'intérêt particulier faifant envifager les chofes
d'une autre manière qu'elles ne font, & qu'on n'a quitté les avantages de-
fignez parle Traitté de Partage, que parce qu'on avoit tout. A l'égard
de ce que l'Auteur dit, que fon honneur, fa confeience, & la bonne Poli-
tique ne lui permettoient pas &c. , j'avoiie que la bonne Politique de Saint
Fff 2 Machia-
PE.
4i2 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Amuss Machiavel , qui fait préférer l'utile aujufle & à l'honnête, peut avoir lieu;
cen. de mais, pour l'honneur, permettez moi, Monfieur , que je garde le filence. Je
v p^RO" ne parlerai jamais qu'avec refpect des perfonnes qui font élevées au-defîus
'. du commun des hommes: ainfi j'aime mieux me taire; ce qui fait que je
paiTerai fous filence ce que quelques perfonnes , qui n'ont pas le même
égard que j'ai pour ces Têtes facrées , difent qu'il y a toujours de l'hon-
neur de tenir fa parole , & non pas de la rompre de but en blanc. Pour
la confcience, je ne fai que dire là-defTus, puifque cela dépend de favoir
laquelle des Morales on fuit. Je fai bien qu'il n'y en devroit avoir qu'une
feule, puis qu'il n'y a qu'une Loi ancienne, ratifiée par la nouvelle; mais,
je fai auffi qu'il y a des gens qui flattent les confciences , & qui, en apla-
niffant le chemin du Ciel , font précipiter dans l'Abifme. J'avoue que je ne
fuis pas allez Théologien pour vous parler fur ces fortes de matières; mais,
je vous dirai ce qu'un homme de bon fens a trouvé dans ce nouvel évé-
nement, qui troubleroit une bonne confcience. C'eit, dit-il, que le Roi
Trés-Chrêtien ratifia le Con tract de Mariage avec toutes les Claufes de Re-
nonciation fpecifiées ci-devant, par deux Sermens confecutifs;car, le Roi
de France, incontinent après que la lecture du Serment fut achevée , pofa
la main fur le MiJJ'el qui lui fut prefenté par Mazarin , & jura fi vifte, que le
Roi Catholique ne s en aperceut pas: de forte que celui-ci, levant lente-
ment la main Droite, & ayant fait avec gravité un ligne de Croix, il
la pofa fur les Evangiles & les Canons que le Patriarche des Indes
lui prefenta , jurant tous les Articles fuivant la teneur des Contracts.
Puis , fe tournant vers le Roi Très-Chrétien , & voyant qu'il ne juroic
pas, il dit, Eh ! comment ! Le Roi de France m jure-t-il point ■? Et à ce mot
le Roi Très- Chrétien s'avançant réitéra le Serment. Voilà donc deux
Serments confecutifs d'obferver le Contract de Mariage & la Renoncia-
tion, & ce avec un Roi Catholique, & non pas foupçonné d'Herefie comme
Charles-Quint, & auxquels Serments tout le Relâchement delà Morale, ni
la Probabilité, ne fauroyent donner un tour flatteur. Ce contract de ma-
riage^ la Renonciation , excluent de la Monarchie d'Efpagne tous les
defeendans de l'Infante Marie-Therefe pour jamais , & fous quelque pré-
texte que ce foit : cependant , on y a contre-venu, & on y contrevient , non-
obitant un double Serment, & fur la feule Difpenfe d'une Pièce aulïi apo-
cryphe & clandefline, qu'eit le Teftament que le Roi d'Eipagne a fi-
gné , dans un temps que fa maladie i'avoit réduit à ne favoiT difeer-
ner le blanc du noir. Si la confcience le permet après cela, on a tort
dans les Cours Criminelles de faire le Procez à ceux qui font dans de
pareils casj & tout crime, pour criant qu'il foit, ne doit jamais blelTer
la confcience. Je vous prie, Monfieur, de remarquer dans le Contract
de Mariage , & dans les Actes de Renonciation, que je vous envoyerai
à la fin , qu'il y a des Articles tres-forts , & qui ne fauroient fauver l'in-
tégrité d'une confcience qui auroit juré de les obferver, & qui cependant
y manque. Et, afin que vous ne foupçonniez pas %p je vous avan-
ce
»3
1J
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 41;
ce rien de mon chef, voici la Forme du Serment que le Roi Très-Chrê- Affaire
tien lit. Gf-N- nE
„ Nous Louis, par la grâce de Dieu, Roi Tres-Chrêtien de France & LEUR°-
de Navarre , promettons fur nôtre honneur, en foi & parole de Roi, "
jurons fur la Croix, les Saints Evangiles, & Canons de la Méfie, que nous
avons touchez, que nous obferverons & accomplirons entièrement, de
„ bonne-foi, tous & chacun des Points & Articles contenus au Tràitté
„ de Paix, Renonciation, & Amitié, comme auffi les Articles fecrets du
„ même Traitté, fait & conclu en nôtre nom, par nôtre très-cher &
„ bien aimé Coufin le Cardinal Mazarin , & nôtre très-cher &. très-aimé
„ Coufin Don Louis Mendez de Haro & Gufman Duc d'Olivarés, au nom
„ de très-Haut, très-Excellent ,& tres-Puiffant Prince , Philippe , aufii par
„ la grâce de Dieu, Roi Catholique d'Efpagne, noflre très-cher & bien-
„ aimé, bon Frère, Oncle, & Beau-Pére, le 7. jour de Novembre 16 s 9.
„ dans l'Ifle des Faifans , & par nous ratifié le 24. du même mois &c.
„ Nous ferons tout obferver, tenir, & garder inviolablement de nôtre part,
„ fans venir au contraire , ni foufFrir qu'il y foit contrevenu en quelque
„ forte & manière que ce foit. En foi de quoi nous avons fîgné la pre-
,, fente de nôtre propre main , & y avons fait apofer nôtre Sceau, en la
„ dite Ifle le 6. jour de Juin 1660 , & de nôtre Règne le 18,
Suite de la Lettre.
Le fentiment d'un fi grand Roi , contre fes propres convenances , efl fans doute
d'un poids confiderable \ mais ce qui décide entièrement la quefiion , cefi le confient e-
ment univer/el & unanime de tous les Etats & Ordres de la Monarchie. Jus
efl in Regnis. On ne fiauroit nous conte fier le Droit de reconnoitre celui à qui
nous devons obeïr , £5? de juger s'il a les qualité?, pour cet effet. Cela eft Ji vrai ,
que le feu Roi , avant que de difpofer de la Succefjïon , trouva neccfjaire de
confulter fes Confeils d'Etat & de jufiice , & que ce fut fur leurs Con fuites
quil régla fon Tefiament de la manière quil fit. Nous adhérons tous à ce
Tefiament , & reconnoiffons le Duc d 'Anjou pour notre Roi & Seigneur. En
faut-il d'avantage? Peut -il vous rejler encore quelque difficulté fur la quefiion de
Droit? Je me perfuade que non \ Î3 > dans cette J'upofition , je pajfe à la féconde ,
/avoir celle de la convenance au bien public.
C'efl ici la conclufion de l'Auteur de la Lettre fur fon premier Point
de Droit, qu'il veut valider par le poids confiderable des fentimens d'un fi
grand- Roy contre Ces propres convenances. J'aurois ici lieu de lui contef-
ter que l'événement prefent foit contre les convenances, fi non prefentes,
du moins futures ,de la France; mais, j'auray lieu de vous dire quelque cho-
fe là-deffus dans la fuite. Je ne veux cependant pas nier que des fenti-
mens qui viennent de fi haut n'ayent un poids confiderable; car, fi je m'y
opofois , ce feroit à tort , & toutes les Procédures des Chambres de Réunion
établies depuis la Paix de Nimegue,pour dépouiller divers Princes de leurs
Fff 3 Etats
4H MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Etats héréditaires me dementiroient. Ainfije paiTerai à ce qu'il dit, que le
gen. de Y)UQ d'Anjou eft reconnu par un Confentement univerfel des Etats & Or-
l'Euuo- foe$ je ja jvionarchie. Peut-on avoir l'affeurance d'avancer des chofes fi
'1 — . opofées à la vérité? Efl-ce qu'un Cardinal, & quatre ou cinq perfonnes ga-
gnées , font tous les Etats & Ordres de la Monarchie ? Eh, me dira-t-on,
tous les Vice-Rois & Gouverneurs auiïi-bien que les Peuples ont reconnu
le Duc d'Anjou. Il eft vray; mais, c'eft par les ordres delà Régence, du
Cardinal , & de quatre ou cinq perfonnes gagnées pour renverfer les Confti-
tutions fondamentales de la Monarchie. Ce Cardinal a toujours eu le cœur
François , depuis les connoiffances familières qu'il a eu à Rome avec Ma-
dame de Ch. ... qui étoit Françoife , & il eft à prefumer que les autres
qui fe font joints à luy, pour obliger par des Menaces fpiritueîles , & des
Excommunications, un Roy foible, infirme, & délicat de confcience , à
faire un Teftament qu'il n'avoit pas Droit de faire, & abfolument contrai-
re aux Difpofitions du feu Roy fon Père (à quoi il a pourtant refifté, tan-
dis qu'il a eu le difcernement: ) les autres , dis je , font devenus François , à
fin de s'enrichir fans prendre la peine d'aller au Pérou. Compte-t-on pour
rien tant de Grands, qui font gens d'honneur, & des meilleures Teftesde
la Monarchie, qui n'ont eu aucune part à cette Filouterie d'Eftat, comme
on fapelle à Vienne, ou, comme d'autres, à ce Miftére d'Iniquité? Les
uns ayant été exilez de longue main, & les autres s'étant abfentez d'eux
même, pour ne pas tremper dans une Vilenie indigne de leur cœur géné-
reux. Compte-t-on pour rien un nombre infini de Peuples , tant enEfpagne
que dans les Etats qui en dépendent, qui ont le cœur outré de voir que ,
fans confulter l'inclination qu'ils ont pour la juftice, ils font obligez, pour
éviter pis, de fubir les ordres d'une Ufurpation? Je ne vous parle point,
Monfieur, par des fupofitions, & je ne vous avance rien que ce que les
Peuples difent; & le temps pourra vous en éclaircir, Ci jamais ces Peuples
peuvent avoir la liberté de dire leurs véritables fentimens: & fi jus eft in
regms, on eft feur que la pluralité regarde ce qui fepaiTe comme une Super-
cherie , & la dételle comme telle.
Je ne voudrois pas faire l'injuftice aux Confeils d'Etat & de Juftice d'EC
pagne de dire avec l'Auteur de la Lettre, que c'eft fur leur Confultes que
le feu Roy d'Efpagne a réglé le Teftament clandeftin qu'on luy a fait ligner
fans qu'il fût ce qu'il faifoit. Ces Confeils ont toujours été opofez à une
D-ifpofition fi contraire au bien de la Monarchie; & Sa Majefté Impériale
en a des preuves réïterées par plufieurs aflTeurances que le feu Roy luy a
données de fa main, & par fon AmbafTadeur, même peu avant fa mort,
auffi bien que par celle de ces Confeils , tandis qu'ils ont été remplis par
de véritables Efpagnols qui ont confervé l'ancienne Intégrité de cette Na-
tion genereufe. Mais, chacun fait que fous divers prétextes, emplois, ou
mecontentemens, on a tamifé la farine, & qu'on n'a retenu que le fon.
Quand Sa Majefté Impériale ne feroit pas fondée fur des Aftes auffi au-
thentiques que le font la Renonciation de l'Infante Marie -Therefe, & le
Teftament clu Roy Philippe IV. elle le feroit de s'infcrire en faux contre
le
l'Eukc-
Pê.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 4ir
le Teftament du feu Roy Charles Second , par les circonftances qui veri- Araires
fient , comment peu de gens, qui ont été corrompus , & qui font capables de Gf*- hy
tout entreprendre , ont extorqué le Teftament dont il s'agit d'un Prince
aifé à fe laifTer aller à tout ce que ces gens fubornezpouvoient lui repre-
fenter, & qui même ne l'a (Igné que dans un temps que fa maladie luy a-
voit affaibli le corps & l'efprit, de forte qu'il n'avoit pas cette fanté de ju-
gement qui donne la valeur aux Teftaments, lorfque d'autres chofes ne les
rendent pas nuls , comme dans le cas prefent. Je vous laiffe à penfer,
Monfitur, fi la Onclufion de l'Auteur de la Lettre a !a moindre vray-
femblance d'avoir éloigné les Difficultez', & fi au contraire on ne voit pas
manifeftement que fes principes font éloignez de la vérité, & qu on ne
fauroit en inférer qu'une confequence de même nature. Nous voici à
fon Point de Convenance qui commence ainfi.
Cette Çhieflion par oit fî abord un peu plus embarrajfée que f 'autre , £5? elle îcjl
en effet ; parce que la plu/part des hommes , accoutumez à ne reconnoitre bien-
feant & convenable que ce qui favori fe leurs intérêts particuliers, ne man*
quent jamais de raifonmmens bons ou mauvais -pour maintenir leur Thefe , £5? que
dans l'affaire dont il s agit , ces mêmes intérêts particuliers étant fort differens les
uns des autres, il ne faut pa^ douter auffi que chacun ne fe fafje une Convenance
publique à fa manière. Mais , pour peu quon veuille aporter ici de bonne-foi , &
fe défaire de tout préjugé , il ne fera pas malaifé de reconnoitre que le Teftament
du feu Roy , bien loin d'être de nature à devoir troubler la tranquilité publique ,
comme on le publie en vos Provinces , il en a pofé les fondemens folides, &
peut fervir très-utilement à rétablir & à la rendre durable t pourvu feulement
que de votre part & de la part de £ Angleterre , on ne fe laiffe point en-
gager mal-à-propos dans une Guerre qui paffsroit pour la plus injujle du
Monde.
La Queftion ,que l'Auteur trouve embarraffée, ne Peft qu'à fon égard ,
puifque, pour la tourner de fon côté & à fon avantageai ne fait comment
s'y prendre, & n'appuyé tout fon difeours que par des chofes qui font pi-
tié. Ce que je vous en diray vous en éclaircira. Mais, je vay faire au-
paravant, comme en paffant, une petite Réflexion fur l'Intérêt particulier,
qu'il pofe être une pierre d'achopement pour juger jufte de cette Queftion.
L'Auteur même n'eft-il point peut-être dans le cas qu'il veut opofer aux
autre- ? Le defir d'être payé peut-être de quelque vieux compte , qu'il con-
teroit aurrement pour perdu, ne luy feroit-il point prendre le parti de cet-
te nouveauté ? C'eit du moins le fentiment d'une perfonne qui me par-
tait l'autre jour là-delTus, me difant qu'il y avoit bien des raifons qui peu-
vent ctre connues à bien des gens , qui donnent lieu d'en faire la conjec-
ture : ce queftant,il y auroit julte fujet de craindre que fon intérêt parti-
culier ne' luy fit faire une fort méchante Convenance publique. Mais, ce
n'eft pas à quoi je veux m'arréter, & je pretens me défaire de tout pré-
jugé, & d'agir de bonne-foi , ainfi que l'Auteur demande ; mais, avec tout
cela
4i(5 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires cela, je ne faurois conduire que ce qui elt directement opofé à ce qu'il dit,
gen. de & qUe ce Teflament fubreptice, bien loin de pofer des fondemens folides
i.'Euro- ^une Paix , efl une fource infaillible d'une Guerre d'autant plus jufte,
__J qu'elle n'auroit pour but que la confervation de l'Europe, & d'empêcher
que les Eftats qui compofent cette Partie du Monde ne tombent fous
l'Efclavage de la France. Ce que l'on ne peut prévenir qu'en agifTant avec
vigueur, en forte que la Puiffance de la France foit réduite à de certaines
bornes, quelle ne puifie engloutir quand elle le trouvera à propos les
differens Eftats félon fa convenance particulière ; & c'eft-là le folide fon-
dement de la tranquillité publique, & non pas un Teflament qui ouvre
le chemin à la France pour réuiîir dans fes Invafions & fes Ufurpations , &
pour l'exécution des cruautez , dont Spire, Worms, & lePalatinat feront
des monumens éternels. L'Auteur fe mêle de vouloir infinuer à l'An-
gleterre & aux Provinces-Unies de ne pas s'engager mal à propos dans une
Guerre, qui pafferoit , dit-il, pour la plus injufte du Monde. Je fuis é-
tonné de voir jufques à quel point cet Auteur s'oublie. L'Angleterre a
un Roy fage, clairvoyant, & aclif, & un Parlement dont les Membres
qui le compofent, foit dant la Chambre Haute, foit dans la Baffe, font &
feront des perfonnes éclairées, qui, non feulement connoiffent l'Intérêt de
la Nation, mais quifavent les relations qu'il peut avoir avec l'Intérêt public.
Les Provinces-Unies ont dans leur illuftre Affemblée Générale des per-
fonnes d'une fageffe & d'une prudence confommée, & dont l'intention ne
tend qu'au bien gênerai de l'Europe. C'eft pourquoy il faut s'attendre de
leurs grandes lumières, qu'ils ne prendront qu'un parti bon & jufte & fans
prendre Confeil de l'Auteur de la Lettre, lequel, par la foibleffe de fes rai-
fonnemensje compare à un Ecolier, qui, aïant trop de prefomption & d'or-
gueil de foy-même, voudroit s'ingérer de donner des Leçons à fes Maî-
tres. Il n'y a perfonne ,qui s'étant défait de tout préjugé ne convienne que
c'eft la Convenance, non feulement de l'Angleterre & de la Hollande,
mais auffi de tout l'Empire, du Portugal , du Nord , de la Pologne, de l'I-
talie, de laSuiffe, & généralement de toute l'Europe, de s'opofer à l'exécu-
tion de cet injufte Teftament. Je dis bien plus, lavoir que c'eft aufîî la
Convenance de la Nation Efpagnole. Vous ne trouverez pas , Monfieur ,
que ce foient des Paradoxes que je vous avance, lorfque j'auray l'honneur
de vous en déduire les raifons , foit que l'Auteur m'en ouvre le chemin, ou
autrement. En attendant, je vai fuivre fa Lettre, qui continue ainfl.
Je fay que vofire 'Traîné de Partage porte au fvontifpice le motif du Bien Pu-
blic &? de £ Affermiffement de la Paix générale , (3 je veux croire qucn lefaifanî
vous aviez réellement ce but en vue. Mais , la première chofe , que je vous re-
pondray là-deffus,fcra la même que fay déjà eu ï honneur de vous reprefenter tou-
chant la Renonciation , cefi-à-dire , que là où le motif ceffe ,1a conftitution &
la convention ceffent auffi. Fous vous e fies portez, au Traitté de Partage ,
pour empêcher la Guerre \& il fe trouve , que , bien loin de f empêcher , il rallume-
rait dans le Monde. Donc, ii doit refter nul & fans valeur. §ue fi vous me
deman-
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 4r7
demandez comment ce Traité ayant été fait dans une fi louable intention pourvoit Atfairfs
produire un effet fi contraire à fa fin, je vous repondray avec Mr. de Qu'iras GEN- "e
Ambajfadeur Extraordinaire du Roy dans fon Mémoire aux Eftats du 12.
Oclobre itfpo:
„ Si les PuiiTances, qui recherchent ou qui font recherchées pour de fem-
„ blables Traitrez, n'ont en veue que de rendre la Faix durable, comme
„ cela eft à croire , Elles doivent s'affurer que ce feroit au contraire le mo-
„ yen d'allumer en Europe le feu d'une fanglante guerre, & qu'en tel cas,
„ non- feulement on verroit prendre les armes d'un commun accord à tout
„ ce qu'il y a d'Efpagnols & d'autres Sujets de la Couronne , depuis les Enfans
„ de quinze ans jufques aux vieillards de foixante; mais que, plutôt que de
„ fouffrirle moindre partage des Etats quicompofent la Monarchie, & qu'on
„ difpofât ainfi de leur fort, ils auroient recours à tous les moyens légitimes
,, qu'ils jugeroient leur pouvoir fervir, quels qu'ils puiiTent être, fuivant en
„ cela la maxime qui veut que dans les maux extrêmes on employé d'extrê-
„ mes remèdes, & fe confiant que Dieu Protecteur du bon droit favorife-
„ roit leurs jufles efforts & fe déclarerait pour eux.
L'Auteur dit qu'il veut croire que le but, qu'on a eu en faifant le Traitté
de Partage, a été le bien public: ce mot veut marque qu'il ne le dit que
par une complaifance , qui efl éloignée de la perfuafion ; cependant, fi , fé-
lon lui, les fentimens de Sa Majefté Très-Chrêtienne font d'un poids con-
fiderable, fes mêmes fentimens énoncez dans le Traitté de Partage lui en
devroient ôter tout doute. Mais, je paffe fur ces fortes de bagatelles, & je
viens à fon raifonnement , où je lui nie la féconde propofition de fon fyl-
logifme, favoir que le Traité de Partage auroit allumé la guerre dans le
monde. Je donnerai la raifon de ma négation , lors que je viendrai à un des
articles fuivants de fa Lettre, où il parle de nouveau de ce Traité. Je
vois cependant que fa féconde propofition n'eit fondée que fur un Article
qu'il raporte d'un prétendu Mémoire aux Etats le 12. Oclobre 1699. Il
ne conîte pas par les Regiftres de Meilleurs les Etats qu'on ait reçu & lu
dans cette Illuftre AiTemblée un pareil Mémoire j ainfi il me femble que
n'étant pas auffi authentique que l'Auteur le fupofe, fon fondement n'eft
pas de grands poids. L'Article qu'il raporte contient que tous les Ef.
pagnols & Sujets depuis quinze ans jufques à foixante auroient pris les ar-
mes, & voilà la Guerre que le Traité de Partage auroit allumée. En vé-
rité, les exploits glorieux, les conquêtes nombreufes,que lesEfpagnols ont
faites depuis,cinquante ans, & l'Etat formidable dans lequel la Nation Êf-
pagnole fe trouve préfentement tant par Mer que par Terre, ôtent tout
fujet de dire que l'exprefllori rapportée ci-deflus n'eft qu'une Rodomonta-
de Efpagnole. Mais, laiiTant cela à part jufques à une autre occafion, je
me trouve fort embaraffé pour juger par qu'elle raifon l'Auteur va mêler
dans fa chetive Lettre un auffi grand Miniftre que l'eft Son Excellence
Monfieur Don Francifco Bernardo de Quiros qui a eu la gloire de ligner,
fous les fages directions de fon AltefTe Electorale de Bavière , auquel il a-
Tome XL Ggg voit
PE.
4ï8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Actawes voit eu ordre d'Efpagne de fe conformer ; de figner ,dis-je , le Traitté de Paix
cen. de de Rvfwick, qui félon les conjonctures étoit très- avantageux à l'Efpagne.
l'Euko- çependant, de crainte de ne pas conjecturer julle, je me tairai, & je ne
m'attacherai pas aux trop fubtiles fpéculations de quelques perfonnes qui
croient que cet extrême remède du Teftament eil une Affaire fuggerée & né-
gociée par ce Miniflre pendant fon féjour à Anvers, & que c'eft-là ce qui
eft dit dans l'article de queftion, que les Efpagnols aur oient recours à tous les
moyens légitimes qti 'ils juger oient leur pouvoir fervir , & que l'Auteur dit plus
bas que l'événement a juliifié la fincérité des remonftrances. Et que même
c'eft la raifon qu'on a eue de dater d'Anvers la Lettre que j'examine, afin
que le coup du Teftament ayant eu fa fource dans cette Ville-là, on duc
craindre quelque effet funefte des menaces qu'on fait dans la fuite de la
Letrre, dont je vous donne la continuation.
Voilà, Monfieur, et qui rendroit vôtre Traitté T lnfirument de la Guerre , & '
non pas celui de la Paix. Mr. Quiros vous parloit en homme fincère , lors qu'il
vous faijoit ces Remonftrances , & l'événement les a jufiifiées , puis qu'à peine a-
t-on eu connoiffance du Teftament du Roy en Ef pagne , que tous les differens Etats
qui cumpofent la Monarchie ont déclaré qu'ils facrifieroient bien, & vies, pour le
maintenir , rj? pour s'oppofer à toute forte de démembrement. J'efpére que vous
ferez ià-defus une férieufe réflexion , rj? que vous ne rejetterez pas les offres a-
miables de Paix & d'Union que fon vous fait tous les jours de la part du Roy &
de la Nation. Il ne faut pas que vous ceffiez de nous confiderer comme vos
Amis, ni que la bonne correfpondance qui va s'établir entre les deux Couronnes,
vous donne la moindre inquiétude. Quoique nous aions receu pour Roy un Prin-
ce de France, il ne s'enfuit pas que nous devenions François pour cela , ni même
qu'api es avoir été animez d'un zélé fi ardent & fi unanime pour le maintien de
i honneur £5? des prérogatives de la Couronne i$ pour la confervation de la totali-
té de la Monarchie, nous nous defiftions de ce but honnête & ju fie , maintenant que
nous l'avons obtenu. Fous devez , Monfieur, avoir meilleure opinion de la Nation
Efpùignole. On ne lui a jamais reproché d'avoir le cœur bas , ni d'aimer Vefcla-
vage , £57' elle ne donnera pas fujet de le faire à l'avenir. L 'amitié du Roy Très-
Chrétien nous efi chère & précieufe, £5? nous ferons toutes chofes pofjïbles & juftes
pour la cultiver & la conferver. Mais , quelque eftime que nous en faffions , elle
ne nous obligera pas à renoncer fans fujet à nos anciennes Alliances & Con-
fédérations. La conduite , que nous avons tenue par le paffé avec la Branche
d'Autriche en Allemagne, pourra vous faire juger de celle que nous tiendrons
à l'avenir avec celle de Bourbon en France. L'Union étoit étroite , elle a-
voit été laifsée pour maxime aux deux Branches par les anciens Fondateurs ,
£5? de part & d'autre on s'efforçoit chaque jour de l'entretenir par toutes
fortes d'égards & de bienfeances. Mais, cela n'empechoit point que l'une (S
l'autre Branche ne tendît à fes propres intérêts & avantages dans toutes les
chofes ou la Raifon d'Etat fe trouvoit engagée. Je n'en veux point d'autres
exemples que ceux des Traitez de Munfler, de Nimegue ,& de Ryfwick, qui
tous trois ont été conclus feparement , malgré les vives infiances des Minifires
refpec
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. 4xp
refpeïïifs de ï ' Augufie Mai (on; ou bien la dernière Guerre , dans laquelle le Roy Affaires
Catholique ne s'engagea à la Jolliciiation des trois Putfsances, que long-tems après cen.de
que £ Empereur s'y fut interefsé.
Cet Article efl long,& contient différentes chofes; ainfi, je crois qu'il fe-
ra neceffaire de l'examiner par période, ou du moins d'en tirer le fens de
plutieurs , lors qu'elles ont du raport l'une avec l'autre. En premier lieu,
il remet fur le tapis Mr. Quiros & parle de h fincerité. Que veut-t-il dire
par-là? Perfonne ne difputeque Mr. Quiros ne foit fincere, même au de-
là de la Coutume d'un Minilire, & d'un Miniftre Ëfpagnol qui a fait fon
aprentiflage à Rome. Si l'Auteur pretendoit par-là d'infulter à ce grand
Miniflre, dont chacun refpecle le mérite, il en feroit démenti par l'incli-
nation fincere que ce grand homme a toujours témoigné pour le bien & l'a-
vantage des Etats des Provinces-Unies , foit par le foin qu'il a eu d'entre-
tenir une bonne correfpondance entre le Roy fon Maître & Eux, lors mê-
me qu'on foupçonnoit la Négociation duTraitté de Partage , foit en empé-*
chant quon ne fit le Canal projette dans les Païs-Bas Efpagnols pour réta-
blir le commerce d'Anvers, & qu'on n'y établit des Manufactures , foit en
travaillant auRetablilTement du Commerce avec leurs Voifins,& notament
avec laHollande.nes'étant même engagé d'envoyer à Madrid une Requête des
Communes de Bruxelles qui lui fut prefentée fur ce fujet, que pour entre-
tenir une parfaite intelligence avec les Etats Généraux, & la bonne union
amitié, foumiiîion,& déférence qu'il a toujours eue pour Son AltefTe Electo-
rale de Bavière. Ces chofes font fi notoires , fur-tout aux Miniflres pu-
blics, qu'il feroit fuperflu de m'y arrêter. Les Reflexions que l'Auteur de-
mande qu'on faffe fur les differens Etats de la Monarchie Efpagnole, à l'é-
gard du Teftament , font déjà faites plus haut , où on le nie , & fur des fon-
demens folides, qu'il n'efl pas neceffaire de révéler à l'Auteur. Sur les
offres amiables de Paix & d'Union qu'il dit qu'on fait ,ce ne font que des
pièges pour attraper des innocens, & non pas pour leurrer des perfonnes
clairvoyantes ; car il efl incontellable par plufieurs preuves réitérées, & mê-
me récentes, qu'il ny a aucun fond à faire fur les Traittez qu'on fait avec
certaines Puiffances, non plus que fur ceux qu'on feroit à prefent avec les
Efpagnols animez de l'efprit de ceux qui n'en tiennent aucun. C'efl parler
en Oltrogot, que de dire, que pour avoir reçeu pour Roy un Prince Fran-
çois, les Efpagnols ne deviendront pas François; c'eft raifonner comme
un homme qui ne connoit pas les principes des chofes fur lefquelles il
veut faire le difeoureur, & qui ignore les Maximes de la France: j'auray
heu de détruire cy-après fon abfurde confequence. Quelle opinion veut-
il qu'on ait de la Nation Efpagnole, quand on voit qu'elle prend le chemin
de l'Efclavage, qu'elle n'a jamais aimé, dit Y Auteur? Ëfl-ce n'avoir pas
le cœur bas, mais au contraire l'avoir généreux & bien placé , que défaire
les fournirions ferviles qu'on a faites envers la France depuis la mort de
Charles lecond? & Dieu fait quelles elles feront à l'avenir. Il efl vray, qu'il
ne faut point imputer à toute la Nation Efpagnole ce que quelques mal-
Ggg 2 heu-
l'Euro«
PE.
42o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires heureux font après s'être emparez de l'Autorité, par une fraude auffi crian-
te que celle du Teitament. Ainfi , ceux d'entre la Nation Efpagnole , qui
confervent l'ancienne intégrité, trouveront toujours que les honneftes gens
GEN. DE
JEv
PE.
les ïauront diltinguer entre ceux que l'intérêt particulier & fordide a abâ-
tardi; & l'on fera toujours prêt de faire réparation à toute la Nation, fi
elle ne fe laiffe pas aller au torrent qui par la violence la peut entrainer aa
précipice qu'on lui prépare.
La conduite pafTée avec la Branche d'Autriche d'Allemagne ne fauroit
faire juger jufle de celle que l'Auteur prétend que les Efpagnols tien-
droient à l'avenir avec celle de Bourbon : la comparaifon n'a abfolument
point de lieu; & les trois exemples des Paix de Weitphalie, de Nime-
gue, & de Ryfwick, ne font rien au but pour lequel on les avance ; en
voici la raifon. Chacun fait que la Guerre, qui fut commencée par l'en-
trée de Guftave-Adolphe Roi de Suéde en Allemagne, n'a eu pour but
que de diminuer la grande PuiiTance de la Maifon d'Autriche, qui donnoit
♦le même ombrage aux differens Princes & Etats de l'Europe, que la Fran-
ce leur donne à prefent. Les échecs que la Maifon d'Autriche receut dans
cette guerre-là , l'ayant réduite à la foibleffe qu'on fouhaittoit , on traitta la
Paix à Munlter, & la même foibleiTe obligea les deux Branches à figner
k Paix l'une avant l'autre. Celle de Nimegue fut lignée de même , mais
avec la foibleffe qui en étoit une des caufes: il y en eut une autre, qui é-
toit la grande PuiiTance de laFrance,quipretendoit de donner laLoy ; ain-
fi falut-il lafubir & la figner feparementpour éviter l'effet des menaces que
la France faifoit, & qu'on n'étoit pas en état de parer. Pour la Paix de
Ryswick, l'Auteur pourroit favoir les raifons qui l'ont fait figner feparé-
ment, fans conter ni les foiblefles de l'Efpagne , ni les allarmes qu'on y
avoit eu après la perte de Barcellonne , ni la hauteur avec la quelle
la France prefcrivoit le tems de la figner. Je voudrois bien voir, en fupo-
fant entre l'Efpagne & la France une pareille Union qu'il y a eu en-
tre les Branches d'Autriche, d'Efpagne, & d'Allemague, & qu'on fut
dans la conjoncture de figner quelques Traittez , ii les Efpagnols ,
quelque intérêt qu'ils y trouvaifent, ôferoient aller ligner, feparement de
la France , aucun Traitté , & fans fè conformer à ks Inir.ruc~r.ions
& à Confeils , de la même manière fervile que la Régence prefente
d'Efpagne le fait à prefent, ce qui n'efl encore qu'un prélude de ce à
quoi on doit s'attendre pour l'avenir; ce qui deftruit abfolument la com-
paraifon que l'Auteur allègue ,& qui continue fa Lettre ainfi.
Le peu ^exemples, que je vous cite entre plufieurs autres comme les plus re~
cens ci? les plus remarquables , doivent fuffire pour vous faire connoitre , qu'il n'y
a parentage ny union qui puijfe engager un Prince fage à fe départir de fes
vrais intérêts , pour faire plaifir à [on Parent 13 à [on Àmi. D'où vous devez
conclurre deux chofes\ l'une, que Sa Majefté ne le fer oit pas , quand même elle
en fer oit fortement follicitée; t" autre , que le Roi Tres-Chrêticn ne lui demande-
ra jamais rien quelle ne puijfe faire avec juflice.
L'Au-
tE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 421
L'Auteur fait confifler la fagefîe d'un Prince à n'avoir égard qu'à Tes in- Armixè
terêts, & par-là il fait tacitement le Portrait de fon nouveau Maitre. [e g en. ce
lailfe à juger à toute perfonne qui n'efl point prévenue ce à quoi on doit L'EuR°-
s'attendre, puifque par-là il l'annonce fur le modèle de la France. Il con-
clut deux chofes de cet Article. La première, que fon nouveau Maître ne.
le feroit pas, quand même il enferoit fortement follicité. C'efi décider avec
bien de l'aiTêurance. C'efi: tout ce que pourroit faire le Duc de Beauvij-
liers , qui a été Gouverneur du Duc d'Anjou, & qui a eu le loifir d'étudier
le naturel de ce Prince. J'admire la pénétration de l'Auteur dans l'ave-
nir: il ne s'explique pourtant pas de même dans la fuite, où il dit que Dieu
feul par fa toute-puifîance peut pénétrer l'avenir. Quoy qu'il en foit, la fé-
conde chofe qu'il veut conclurre femble n'avoir aucune connexion ni re-
lation à ce qui précède. D'ailleurs, la première chofe qu'il conclut paroic
détruire directement la féconde j car il veut que fon nouveau Maître ne
fera jamais rien contre fes vrais intérêts, quand même il en feroit follici-
té : or, on ne fauroit difconvenir que le propre intérêt ne fuit pas toujours
les règles de la juflice; ainfi , fi ce qu'on demanderoit à fon Maître étoit:
fuivant fes intérêts , il n'heziteroit pas^ y confentir,. juflice ou non. Je
ne veux cependant pas m'arrêter fur cette féconde chofe qu'il conclut, qui
n'efl: pas à contredire, puisque tout le monde fait par une infinité d'exem-
ples, que la France n'a jamais fait ni demandé que ce que la Juflice Gal-
licane permettait j & û elle a dépouillé des Princes de leurs Etats, ce n'a.
été que parce que la Juflice y avoit été trouvée parles Chambres de Réu-
nion qu'elle avoit établies à l'imitation de celle que Tacite raporte que Ti-
bère, dont la Juflice a fervi de modèle, avoit établi pour fe défaire des.
Sénateurs & Chevaliers confiderables de la Republique Romaine, dont il
fe defioit à caufe de leurs vertus. L'Auteur pourfuit ainfi.
D'ailleurs, on fait avec certitude, que Sa Ma je fié Très- Chrétienne ne veut point
la guerre , £s? que toutes fes intentions font tournées du côté de la Paix. Vous ne
pouviez V ignorer , Monfleur , aprez la preuve éclat ante.de modération , de juflice ^
& de defintereffement , que ce Monarque donna auflîtôt après la mort du Roy Char-
les fécond , en acceptant purement & Jimplement les difpofitions de [on Teflament
dans le point de la fuccejflon. Mais , bien moins encore à cette heure , puifque par un,
effet fingulier de fon affeclion envers vous , & de fa propenfon à la tranquillité de
V Europe , il vous a fait faire des ouvertures les plus avantageufes du monde tou-
chant la Barrière du Pais- Bas , vous offrant de concourir en ce point avec Sa Ma-
jeflé Catholique pour vous procurer une raifonnable fleuret é. Vous êtes bien per-
fuadé auffl que dans la conjoncture pre fente V Eflpagne ne fonge point à vous atta-
quer. Ainfi voilà toutes vos craintes & vos frayeurs réduites à un advenir incer-
tain, £5? à des floupçons {j? des fpeculations anticipées de ce qui pourroit arriver
un jour. Avouez moi, Monfleur, qu il faut aimer bien peu fon repos pour fe tour-
menter réellement & de fait fur des idées d'une poflibilité future, dont Dieu feul
par fa tout e-feience peut pénétrer ï événement. Mais , fi en cela il y a peu de rai-
fo», il y en auroit encore moins à fe porter fans caufe à une guerre effet! ive fur
Ggg 3 des
422 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires des aprehenftons vaines , puifque ce fer oit choifir dez à prejent pour remède le mal
gf.n. de je pius grand que l'on pourvoit craindre à l'avenir.
l'Euro-
pe. Tout le monde ne convient pas de la certitude que l'Auteur donne que
les intentions de Sa Majeflé Très-Chretienne foient toutes tournées du cô-
té de la Paix, fice n'eft en tant que le rette de l'Europe voulût bien fe fou-
mettre à Tes Lcix. Il eft vray que ce Grand Prince le dit , & le fait dire
par fes Ambafladeurs; on ne fauroit le nier: mais, bien des gens difent qu'en
France on fuit les Maximes de Mazarin, qui difoit & alfeuroit toujours le
contraire de ce qu'il penfoit. Quoy qu'il en foit, l'Auteur le confirme par
l'acceptation duTeftament: mais, la preuve me femble fans force; car Sa
Majefté Très-Chrétienne avoit bien fait le Traité de Partage en vue de
la tranquillité publique: cependant, dèfqu'elle a trouvé mieux, Elle ne s'y
eft pas tenue. Or, fi l'acceptation du Teflament eft en vue de la Paix Pu-
blique, on peut inférer, que trouvant de l'utilité à révoquer l'acceptation,
on le fera tout de même qu'on a fait à l'égard du Traire de Partage: c'eft
une confequence jufte, tirée ab exemple récent i. Les Offres pour la Barriè-
re ne fignirient rien > car, quel fond peut-on faire fur Offres, Paroles, Pro-
mettes, Traittez, & Sermens, puis qu'ils ne fervent qu'autant de tems
qu'ils peuvent aider à faire réùffir des vues plus étendues? Ce ne font
que des amufemens, afin de gagner du tems. Et des Avis feurs, dont je
vous ay entretenu de bouche il y a quelques jours, montrent la nature des
Offres , & quel fond on y doit faire.
On peut avouera l'Auteur, qu'on eft perfuadé que dans la conjonc-
ture prefente l'Efpagne ne fonge point à attaquer les Provinces-Unies;
mais, la conjoncture prefente aura bien-tôt une autre face. Et puifqu'on
ne peut pas faire fond fur les Traitez ftipulez, lorfque les conjonctures
ouvrent les occafions à de plus grands avantages que ceux en vue def-
quels les Traitez font faits , que fait-on fi on n'entreprendra pas d'enfrain-
dre ceux qui ont été faits pour la feureté defdites Provinces? Les raifons
que vous favez ne donnent pas lieu de croire que les frayeurs & les crain-
tes qu'on a ne font que de pures fpeculatîons. Et, bien loin que ce foit
aimer peu fon repos, que de fe tourmenter réellement de l'avenir, je trou-
ve que ce font des précautions que la vraye Prudence infpire. Un Maî-
tre de Navire, qui par quelques nuages qui s'élèvent aprehende une Tem-
pelle , devroit félon l'Auteur être traitté de ridicule, s'il travaille, & s'il
fait travailler fes Matelots à mettre le Navire en état de refifter aux Flots
& aux Vents. C'eft cependant une bonne conduite, qui luy fuggere le
v travail; & on traiteroit un Pilote d e:re dépourvu de la raifon, s'il ne pre-
noit à temps les précautions neceifaires pour fe garantir du naufrage.
Voici la fuite de la Lettre.
Quant aux bruits qui courent parmi vous , comme fi Von avoït âefjein de donner les
Pais- Bas au Roy Très Chrétien, en échange de quelque autre Province, je puis vous
affeurer qu'ils font faux , artificieux , &f controuvez ; ainfi , vous n'y devezpas faire
plus d'attention qu'à tant d'autres fupofitions aujfi grofftéres que malignes, dont cer-
tains
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 425
tains mechans cfprits rempVjfent le PubVc par le moyen des Libelles fatyriques qui pa- Amin*»
roijfent journellement fur ces matières, 63 qui certainement ne devroient être foufferts GfN- DK
ni départ ni d'autre. Non feulement le Tejiament du feu Roy défend expreffement r'EuK0~
Articles 13. &? yo. de faire dans la Monarchie aucune forte cVAl'enation ou de fepara- — —
tion , même en faveur des Enfans du Succeffeur; mais, ce qui efl encore plus fort , £f
fait voir clairement le peu de fondement de ces bruits , c'efi que V intérêt de la Couronne
ne peut pas compatir avec un femblable démembrement , fur -tout dans une partie de la,
Monarchie aujjî confidcrable que le Païs-Bas, de h pojfejfion duquel dépendent nos prin-
t'pales relations avec les Puiffances du Nord, fcp diverfes autres convenances &f confx-
derations d'EJiat non moins grandes que celle-là.
Noflre Auteur afieure tout ce qu'il luy plaît d'une manière fort hardie.
Les bons Avis, que vous lavez qu'on a, devroient faire juger, ou que l'Au-
teur a delTein d'endormir les gens , ou qu'il ne fait pas le fëcret j mais
je vois parla fuite, que l'affeurance qu'il donne efr. fondée fur la ridicule de-
fenfe que le Teftament fait d'aliéner aucune partie de la Monarchie , aufïï
bien que fur des Intérêts & des Convenances d'Effet. Mais, ce font jufle-
ment ces Convenances qui donnent de la vrayfemblance aux bruits que
l'Auteur dit qui courent; car, la Convenance "de la France feroit d'avoir
le Païs-Bas, & la Convenance de l'Efpagne feroit d'avoir le Rouiîîllon &
le Portugal, dont on feroit la Conquête, & qui efi: dans fes entrailles, à
la place du Païs-Bas qui en efl éloigné , & qui eft plus à charge à l'Efpa-
gne qu'à profit. Mais, voyons la fuite.
D'ailleurs , quelle aparence y a-t-il que nous pui fions abandonner ces Provinces, pour
la confervation defquglles rions avons combattu tant d'années £? depenjé tant de mil-
lions , maintenant que par le moyen de la bonne intelligence , dans laquelle nous allons
vivre avec la Couronne de France, nous avons lieu d'efperer de les poffeder en repos , £f
de les voir fe rétablir par une longue Paix de leurs dommages pajfez. Non,M:nfieurr
vous ne le devez pas croire. Les Flamands ont marqué trop de fidélité , trop de conf-
tance , £f trop de zèle dans leur union à la Monarchie: l'amour que les Efpagnols leur
portent en conjîderation de ce qu'ils ont fouffert pour le maintien de cette union eft
trop grand ; &? enfin il y a entre les deux Nations une ejîime trop mutuelle ; pour per-
mettre jamais ni aux uns ni aux autres de confentir à une feparation. Auffi peu a-t-
on fongé à faire fortir de ce Pais les Troupes Hollandoifes , pour y faire entrer celles
de France, fcp tout ce qu'on vous débite là- de ff us ne tend qu'à vous jette r mal à pro-
pos en des foupçons capables de produire de très-mechans effets: ne vous y liijfez donc
point furprendre ; & fur-tout prenez garde que les vailles allarmes que vous avez déjà
témoignées, en faifant marcher vos Officiers avec tant de précipitation dans les Garni-
fons de Flandre êf de Luxembourg , ne vous engagent encore en quelque autre démar-
che contraire à vos intérêts. Je vous l'ai déjà dit , £f on l'a fait entendre à Meffietirs
les Eftats d'une manière qui ne fouffre point d'équivoque , il ne tiendra qu'à vu us que
le Païs-Bas Efpagnol ne vous ferve de Barrière à l'avenir comme par le paffê. Mais,
vous jugez bien, que le moyen de vous conferver cette Barrière 71e feroit pas de faire la
Guerre à VEjpagne. Ce feroit aucontraire celuy de la perdre, d'ouvrir la porte aux
424 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aïfairfs armées Ennemies, de les introduire jufques au cœur de voftre Païs , &? en un mot
-gen. de d'attirer fur vous tous les maux que vous craignez.
PE.
L'Auteur parle dans cet Article des Provinces du Pais-Bas Efpagnol a-
vec des marques très-grandes de l'Amitié qu'il a pour elles. C'eit tout ce
que pourraient dire ceux qui ont tant travaillé pour y établir le Commerce
& pour y faire le Canal projette il y a bien-tôt deux ans; mais, comme
ces projets n'étoient qu'en veuë de préjudicier à la Hollande, il y a à crain-
dre qu'on ne les remette fur pied pour rétablir félon l'Auteur ces Provin-
ces de leurs dommages paffez. Je regarde donc ce que l'Auteur dît com-
me une menace tacite qui mérite fes Réflexions, & qui doit jetter fort à
propos dans de juites foupçons. Ce ferait fe laifTer furprendre, que de
prendre garde aux expreffions équivoques, qu'il ne tiendra qu'à la Hol-
lande que les Pais Bas Efpagnols ne lui fervent de Barrière. Je ne diray
rien là-deflus, parce que j'ay déjà touché cette corde plus haut, où j ay
dit qu'on ne pouvoit faire fond fur rien, lors qu'on à faire à des gens qui
ne gardent les Traitez, & les Sermens mêmes, qu'autant de temps qu'un
nouvel avantage leur ouvre le chemin de s'en moquer. Ses menaces
ne font guerres de faifon , lors qu'il dit que, perdant cette Barrière , le
cœur du Païs ferait ouvert aux Armées ennemies. Le pais eft-il moins
expofe à prefent, que la France y peut commander fuivant les ordres
que la Régence de Madrid a donné pour cela? L'Auteur fe jette d'un
autre côté dans la fuite: voici ce qu'il dit.
Quelques Avis d'Amfterdam portent que Von arme plujïeurs Vaiffeaux dans ce Port,
£? qu'il y a fur le tapis un dejjein pour les envoyer aux Indes d'Efpagne, afin d'y fai-
re reconnaître V Archiduc de gré ou de force. Je veux croire qu'il n'en ejb rien , 6?
que ces Avis font mal fondez. Mais, fupofé qu'ils fe trouvaient bons , je ne pourrois
m empècker de vous dire, que jamais Csnjeil plus pernicieux que celuy-là riauroit été
donné à Meffieurs les EJlats. La cbofe ejl fenjible : car enfin , ou cet Armement fe-
rait peu confiderable ,ou il le ferait beaucoup. S'il étoit peu confiderable , vous jugez
lien qu'il deviendrait dès lors inutile (ce n'ejl pas avec dix ou douze Fregattes qu'il
faut entreprendre de fi grandes expéditions;) &f s'il étoit grandB fort , tout l'avanta-
ge que vous en retireriez c'ejl que vous laijjeriez ici vos Cotes expofées , &? vos Mar-
chands à l'abandon, tandis qu'avec beaucoup d'ofientation £? de depenfe vous iriez
chercher les Avantures à l'autre bout du Monde , èf tenter une Révolution d'un Succès
à1 autant plus douteux & difficile , que les François ne manquement pas fans doute de s'y
trouver auffi-tot que vous , pour nous prêter la main, & nous aider à vous bien recevoir.
Je ne veux pas entrer dans la Difcufïion fi les Avis que l'Auteur dit
venir d'Amfterdam font vrays ou non, puis qu'ils n'ont pas la moindre
ombre de vrai femblance. Mais, vous me permettrez, Monfieur que je
vousdife deux mots fur fon argument cornu; car, les confequences qu'il
en infère font pitié. Il dit que fi l'Armement étoit peu confiderable, il fe-
roit inutile. Si l'Auteur étoit du Confeil de la Chambre des Indes, &
qu'il
i-'Luro-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 42;
qu'il eut fait les Fondions de fa Charge , je m'imagine qu'il feroit mieux Affaires
informé de la Foibldîe des Indes Efpagnoles, & qu'il ne feroit pas necef- Gf*- de
Taire , pour y faire des Conquêtes, d'y tnvoyer des Flottes aufli confidera-
ble que l'Invincible que Philippe II. envoya contre l'Angleterre: vingt &
deux Flibuftiers ont attaqué & pris une Ville dans la Mer du Sud, où il y
avoit quatre cents Hommes de Garnifon & cinq cent habitans, les uns
& les autres Efpagnols natifs, ou defcendans de ces Efpagnols qui en fi-
rent la Conquête par les belles Actions qui fe trouvent dans le Livre qu'en
fit l'Evêque Barthélémy de las Cafas. Et l'Entreprife de Mr. de Pointy
fur Cartagene , qui eft la plus forte Place de ce Pais-là, devroit perfuader,
qu'il ne faut pas de grandes forces pour des Expéditions fur des gens enco-
re moins vaillans que les Mofcovites qui étoient tout fraîchement devant
Nerva. Mais,fupofant ce deiTein,& qu'on fit un Armement fort & grand,
il dit que tout l'avantage feroit qu'on laiflëroit les Côtes & les Marchands
à l'abandon, & que les François y feroient au(îi-tôt pour leur prêter la
main. Ne trouverez- vous pas Monfieur, que ce vaillant Efpagnol, car je
crois l'Auteur de cette Nation-là, horsmis qu'il ne fe deguife en Efpagnol,
s'oublie en cet endroit , & ne fondent pas bien fa gravité & la bonne opi-
nion qu'il veut donner ailleurs de la Monarchie Efpagnole, comme étant
capable d'être l'équilibre de l'Europe contre la France, puifque ces vail-
lantes menaces ne font fondées que fur les François mêmes: les François ,
dit-il, ne manqueraient pas de s'y trouver en même temps. Eh bien. Dans
la fupofition qu'on envoyeroit un grand Armement aux Indes Efpagnoles,
les François que feroient ils? S'ils y envoyoient un pareil Armement, ne
laiil.roient-ils pas eux-mêmes leurs Côtes & celles d'Efpagne même à l'a-
bandon ? Lors de l'Expédition de Mr. de Pointy à Cartagene , a-t-on
laiifé d'y envoyer une bonne Efcadre, de laquelle, s'il a échapé, la Re-
lation qu'il en a fait lui-même fait voir que ça été un pur coup de bon-
heur; & n'a-t-on pas cependant entretenu une (1 bonne Flotte en Mer,
que les François n'y oferent pas paroitre? J'auray occafion de dire encore
quelque chofe là-delfus. En attendant, voyons noitre Auteur, qui conti-
nue ainfi.
Voulez-vous donc m'en croire , mettez fin à vos méfiances , ne différez plus de ren-
dre à Sa Majefté l'honneur qui lui eft dû à fon avènement à la Couronne. Montrez-
vous amis des Efpagnols , &? ne vous portez à aucune nouveauté. Par ce moyen , vous
obtiendrez ce que vous avez eu en veuë ; le Pats- Bas fera toujours vôtre feur été ; la li-
berté de vôtre Commerce ne recevra aucune ateinte ; £f vous trouverez dans la Nation
Efpagnole une correfpondance £f une amitié réciproque, Vous voyez, Monfieur , que
je ne vous donne pas des Confeils interejjez. Di moins, le devez-vous voir. Car en-
fin , envoyez des Ambaffadeurs pour féliciter Sa Majefté , ou n'en envoyez pas ; opofez
vous à fon exaltation, ou marqvez en de lajoye; il n en fera ni plus ni moins Rui £f
Mmarque Univer'èl de toute l Ef pagne , au grand consentement de [es Peuples. Le
plus grand malheur qui nous pût arriver , fi vous veniez à nous faire la Guerre à ce
Tome XL Hh h j»i"
426 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
fujeî , feroit de nom défendre ; &? je vous donne à conjiderer Ji dans une telle occajion
les fecours du dedans £f du dehors nous manquement.
Cet Article contient des exhortations à fe foumettre à attendre tranquil-
lement fa deitmée ,par une infenfibilité, qui feroit feulement propre à des
Gens dépourvus de fens. Je veux bien croire , que fi on avoit à faire aux
Efpagnols , qui n'ont pas donné dans le paneau de la France, & qui n'ont
pas trempé dans le Teltament , on pourroit efperer tout ce que l'Auteur
promet, afTavoir une Amitié réciproque: auffi, quand on a été feur de la
correfpondance dont l'Auteur parle , on a vu comment on y a correfpon-
du; mais, ceux qui gouvernent à prefent en Efpagne ont trop le Morbus
G ai Tt eu s jufques dans la moelle, pour ne pas craindre que leur amitiéne foit
envenimée. Dans l'Article précèdent , félon l'Auteur, toutes les chofes
futures ont un fuccès douteux, lorfqu'elles ne s'accomodent pas à fes def-
feins; mais, lors qu'elles luy plaifent, il décide de l'avenir plus que jamais
Noftradamus n'a fait. S'il avoit été du temps de Charles V. , il n'auroit pas
manqué de le proclamer Monarque Univerfel de l'Europe ; il auroit juré
que la Flotte invincible de Philippe IL auroit tranfporté l'Angleterre dans
une autre Mer > & que la France, qui étoit dans une grande décadence,
feroit bien-tôt devenue une Province d'Efpagne , tout de même que le
Duché de Milan. Mais, helas ! il auroit auffi mal prédit, que peut-être
il le fait à prefent. Car, on m'avouera que les Monarchies ont leurs pé-
riodes. Voilà la Maifon d'Autriche, qui a été la terreur de lEurope, tom-
bée en beaucoup moins d'un fiécle dans un état 11 abject, qu'à peine pour-
roit-on croire tout ce que l'Hiftoire dit de grand de cette Maifon. Et la
France, qui a été dans une condition digne de compafilon , avant que la
Maifon de Bourbon en occupât le Throne, la voilà à prefent fur le même
pied que la Maifon d'Autriche étoit du temps de Charles Quint & de Phi-
lippe il. C'eit pour dire, qu'il y a de l'incertitude dans les chofes futures.
Mais,noflre Auteur voit à travers de l'avenir, & décide d'une manière fort
pofittve de la poiTeffion Univerfelle de la Monarchie d'Efpagne par fon
Nouveau Maître, quoy que l'on faffe. C'eft dommage qu'il ne fe mette
à faire des Almanachs} mais, il eft vray qu'on ne s'arréteroit pas à fes pré-
dictions, & il y auroit à craindre pour luy qu'il ne feroit pas rembourfé des
fraix qu'il pourroit avoir faits, fi on attendoit à le dédommager que la
predicîion fut vérifiée par le fuccès. Cecy paroitroit obfcur à tout autre
qu'à vous, qui pouvez avoir quelque connoiflance de ma penfée. Je vois
cependant que l'Auteur eft fi entêté des François, que dès qu'il s'agit de me-
nacer en brave, il s'apuye d'abord fur les François: du moins doit-on en-
tendre ,ce me femble, ainli ce fecours de dehors qu'il dit que l'Efpagne au-
roit dans une telle occafion ; car, il eft à fupofer que ce neferoientpas les
Mores qui afîiegent Ceuta. Mais, s'il n'eft brave que par-là, en vérité, on
pourroit fort bien le mettre en paralelle avec Don Quixote. Continuons de
voir ce qu'il dit.
&
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 4z7
Si toute î 'Europe a paru furprife , émerveillée, indignée, quand vous avez entrepris Atf.up.is
de partager les Etats d'un Roi viva?it, à combien plus forte rai/on entrer a-t-elle dans gew, dk
tous ces fentiments , fi elle venoit à reconnoître , qxCauffi-tot après Jon trépas , vous vou- L'EuR°-
luffiez prendre les armes contre jon légitime Succejfeur , e? empêcher l'exécution d'un Tef-
tament qui n'a pour objet que la confervation des anciens Domaines de la Monarchie &f
la tranquillité publique. Encore un coup, vous y devez réfléchir meurement , avant que
de pajjer outre en chofe de cette importance. Une Guerre auffi injujîe que j'eroit celle-
là ne pouroit pas être favorifée de Dieu. A la vérité, il vous fer oit aijé d'y entrer ,
mais fort difficile d'enfortir avec avantage. So?igez aux maux Jans nombre quelle en-
traineroit après elle, & fur -tout au préjudice qu'elle caujeroit à votre commerce à ce-
lui de r Angleterre , &f enfin à tous vos Marchons qui négotient fi avantageujèment
dans les Ports d'Efpagne , de France, £? d'Italie. Il n'y auroit plus rien à faire pour
eux en tous ces Ports. Une fimple Efcadre aifée à entretenir leur fermerait pour tou-
jours le Détroit de Gibraltar, & par confequent la Méditerranée, d'où dépend le ri-
che Commerce du Levant. Cadix, qui leur fert de Clef & de Canal paur faire couler
dans leurs Coffres la meilleure partie des Tréfors du Nouveau Monde , leur fer oit auffi
fermé ; £f qui jçait fi la For-tune inconjiante , venant à changer de parti dans le
Nord, ne vous oteroit point encore la Mer Baltique , £f 72e vous réduirait point par ce
moyen à la déplorable extrémité de manquer de pain , &f de n'en pouvoir pas obtenir
pour de l'argent.
Le voici encore au Traité de Parcage. Je panche prefque plus à croi-
re qu'il revient à la charge là-deflus pour infulter ceux qui ont fait le Trai-
té, à caufe qu'il été fans effet , que pour en témoigner de l'averfion. Mais,
cela étant, il me femble que c'ell faire mal fa Cour aux François, fur les
bras defquels il s'apuie; car, au fond, la rupture de ce Traité porte avec
foi des reproches. Quoi qu'il en foit, pourquoi toute l'Europe en auroit-
elle été furprife, émerveillée, & indignée? E(t-ce la première fois que ce-
la a été pratiqué? Philippe II. n'avoit-il pas entrepris une pareille Affaire,
& n'a-t-il pas fait des Traitez pour régler la Succeilion d'Elizabet Reine
d'Angleterre pendant la vie de cette Reine ? Et n'a-t-il pas fait de même
en France fous le dernier Roi des Valois ? Encore la différence , qu'il y a
entre les Traittez de Philippe II. & le prefent Traité de Partage, eft que
Philippe les avoit faits pour démembrer l'Angleterre & la France à Ion
profit, au lieu que Sa Majeité Britannique, & leurs Hautes Puiffances,
ne l'ont fait qu'en veue de la tranquillité publique, fans itipuler le moindre
avantage pour eux. Voyez,. Monfieur, dans le Mémoire écrit de Vcrfiilies
le 2p. Novembre, & figné LOUIS , & préfemé par Monfieur le Comte
de Briord aux Etats, oùMl eit dit en termes exprès ,, que la feule veue
,, que les Etats (l'Angleterre eft fupofée fur le même pied) ont eue tn
„ traittant, leur unique intérêt, a été d'afleurer la tranquillité générale: on
„ leur doit la jufticede déclarer, qu'ils n'ont ltipulé pour eux-mêmes ancus
„ avantage particulier, nulle Province , nulle Place, nul Port de Mer, de-
,, pendant de la Monarchie d'Efpagne, foit dans l'ancien foit dans le nuu-
„ veau Monde , nul article écrit pour faciliter leur Commerce. Ils ont
H h h 2 „ pro-
428 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires „ proprement fait l'office de Médiateurs defmtereflez entre le Roi &
gen. de ^ l'Empereur, ils ont voulu pacifier les troubles que les differens reci-
** pfeUO" " Procllies ^e 'a fuccefiîon fembloient devoir bien tôt produire. ,, Peut-on
1__ après cela être furpris, émerveillé, & indigné ? On n'avoit que fuivi l'e-
xemple de Philippe Second, mais d'une manière à en rejetter tout le hon-
teux , & à n'en fuivre que l'honnête. 11 elt vray que les Princes de l'Eu-
rope n'ont pas voulu entrer dans la Guarantie de ce Traité ; mais , outre
les foupçons qu'on peut avoir que la France, Te fondant fur les Négocia-
tions que le Marquis d'f Iarcourt faifoit en Efpagne pour le coup fatal du
Teftament, l'a empêché fous main, par les voyes directes à fa mode, ces
Princes, par une fageffe digne d'eux, ont auparavant voulu attendre la Ré-
folution que Sa Majefté Impériale prendroit là-deffus. Il eft vrai que Sa
Majeftélmpériale a refufé le Traité; mais,c'eft par des motifs dignes d'un
grand Prince, Chrétien, &. religieux de fa parole & de fes fermens, ce qui
devroit à préfent porter tout le relte de l'Europe à le féconder dans fes
jufles & indifputables prétentions. Sa Majefté Impériale l'a refufé par
trois motifs : le premier, pour ne pas déplaire au Roi d'Efpagne fon ne-
veu, fon beaufrere, & fon parent; ce qui efl une bienfeance que la
France n'a pas eu, en faifant le Traité de Partage. Sa Majefté Impériale
étoit d'autant plus portée à cette genereufe aêtion-là, que l'expérience a
fait voir être contraire à fes intérêts, que le feu Roy d'Espagne l'aiTeuroit,
ainfi qu'il a continué de faire jufques au clandeitin Ttftament, qu'il ne
feroit rien au préjudice de l'Augufte Maifon d'Autriche, dont il étoit une
Branche, & qu'il pouvoit s'aflurer que toute la Succeffion lui feroit tom-
bée. Ces affurances font des témoignages authentiques, que le Teftamenc
n'a pas été fait félon les intentions du Roy d'Efpagne, & qu'il n'étoit pas
dans fon fens, lors qu'on lui a tenu la main pour le lui faire foufcrire, ou
qu'il a pouiTé jufques à fa mort une diffimulatiun que les cent mille Méfies
qu'il a ordonné dans le Teftament ne fauroient laver; ce qu'on ne doit
pas croire de la probité du feu Roy d'Efpagne. La féconde raifon , pour
laquelle Sa Majefté Impériale a refufé d'entrer dans le Traité de Partage,
elt toute opofée à la conduite de la France à l'égard de la Renonciation
de l'Infante Marie-Theréfe; c'elt par un principe pieux & religieux, car
elle favoit que lorsqu'on lui préfenta la Couronne Impériale, elle avoic
fait ferment de ne point confentir à l'aliénation d'aucune partie ou fief de
l'Empire: or, s'agiffant de confentir à l'aliénation des Fiefs Impériaux qui
font en Italie, & de la Lorraine, Sa Majefté Impériale auroit par-là con-
trevenu à fon ferment , ce qu'Elle ne pouvoit pas réellement faire en
bonne Confcience, horfmis que les Parties Conftituantes le Sacré Empire
Romain ne l'eufTent relevé du Serment prêté, & n'y euflènt donné leur
confentement. Si la France avoit eu une fi louable délicateflè de con-
fcience, elle n'auroit pas révoqué en doute la Renonciation de l'Infante
Marie-Theréfe, qu'elle avoit juré d'obferver par un double Serment, ainfi
que j'ai déjà eu l'honneur de vous dire ci-devant ; & on ne feroit pas à
préfent dans l'embarras où l'Europe fe trouve. La troifième raifon, que
Sa
l'Euro-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 42^
Sa Majefté Impériale a eu de refufer le 'Traité de Partage , a été en quali- Apf/iikï*
té d'Archiduc d'Autriche, auquel toute la Monarchie Efpagnole dévoie GE*; nK
tomber , pour être une Branche de la même Maifon , par la Renoncia-
tion de l'Infante Marie Theréfe , & par la Subilitui.ion qui a été faite
entre autres par Philippe IV. & en cette qualité d'Archiduc Sa Maje-
flé Impériale a fait entendre que la mort du Roy d'Efpagne arrivant,
elle feroit difpofée d'entrer en Négociation pour quelque Accommode-
ment qui put conferver la tranquilué publique. Le cas elt cependant
arrivé; mais, fans confulter les Intentions pacifiques, juites , & honnêtes
de Sa Majeité Impériale, on lui a été le moyen d'en donner des mar-
ques, par l'acceptation que la France a faite -d'un Teflament de nulle
valeur , que quelque nombre d'Efpagnoîs ont extorqué de la manière
dont la Cour Impériale elt bien informée, je vous prie de remarquer,
que les deux Branches d'Autriche, d'Efpagne , & d'Allemagne, font an-
nexées en forte l'une à l'autre pour hériter mutuellement, qu'elles pren-
nent également les Titres d'Archiduc d'Autriche, Comte d'Hasbourg, de
Tirol , &c.
On nie d'ailleurs formellement à l'Auteur la Légitimation de la Suc-
cefiion par les raifons rapportées ci- devant, & que l'exécution d'un
Teflament de nulle valeur ait pour objet la tranquillité publique ; &
par confequent, que la Guerre, qu'on feroit, feroit injufle. Dieu lui a-
t-i) révélé, qu'il ne favoriferoit pas une Guerre que ceux, qui font lefez par
]e Teitament, feroient pour leurs juitts Droits? Quand même la Guerre
feroit in,uir.e, eft-ce que Dieu ne laiife pas quelque fois profperer le Mé-
chant par des raifons impénétrables de fa Sagefle éternelle? JN'a-t-il pas
fait profperer les Armes Efpagnoles en la Conquête du nouveau Monde, quoi
qu'ils s'en emparaffent par des Cruautez aufli criantes que celles qui font
rapportées par l'Eveque de las Cafas ? Et, de nos jours,, n'avons-nous pas
vu des chofes qui nous ont fait toucher au doigt cette vérité de la profpé-
rité du Méchant? Mais, aufli, la Patience du même Dieu fe laiîe,. par
manière de parler, & fou vent fait voir des effets terribles de fa Juftice éter-
nelle. Eh ! qui fçait que le tems n.c foit venu que Dieu veuille manifeiter
au Monde qu'il efl auiïi juite que bon ? Il faut donc remettre à fa Provi-
dence à pourvoir aux chofes de la manière que fa SageiTe infinie le trou-
vera à propos.
Je trouve cependant allez plaifant que l'Auteur, qui veut que la tran-
quillité publique foit l'Objet du Teitament, fourniffe lui-même les raifons-
pour prouver le contraire, & qu'il mette devant les yeux en forme de
menaces tout ce qui peut arriver pour détruire cette même tranquillité ,,
alléguant des Maux fans nombre, l'Interruption du Commerce, les Ports
d'K.foagne & d'Italie, & le Détroit de Gibraltar , fermez, auffi-bien que
Cadiz & la Mer Baltique. Ce font des chofes à réflexion; &, dès qu'on
voudra tant foit peu prendre des mefures pour fa propre feureté, ou lorf*
que les Ennemis voudront exiger quelque chofe , juite ou non, on croira.
d'avoir la Verge à la main pour obliger à fe foumettre. J'aurois là-deffus*
H h h- 1 beau-
l'Euro
pi
450 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires beaucoup à dire; mais, quelques raifons m'obligeanc à être plus court que
gen. de je ne voudrois , je les paiTerai fous filence, me rapportant à vôtre pru-
dente prévoyance 5 car, toutes les menaces qu'il fait, en fupofant la Guerre,
ne font pas prévenues en ne la faifant pas ; au contraire, les deux Monar-
chies de France & d'Efpagne étant en fi bonne correfpondance qu'elles
font , & fâchant d'ai'.ieurs par expérience les mauvaifes Intentions qu'elles
ont contre l'Angleterre .& les Etats , on peut voir clairement, que par
l'acquiefcement au Teflament elles feront beaucoup mieux en état d'exé-
cuter ces Menaces. La Menace à l'égard de la Mer Baltique me fait ré-
fléchir fur ce que chacun efl amoureux de fon propre ouvrage; car, je
crois que cette menace n'eil fondée que fur un Projet qui a été une fois
far le Tapis, & entre les mains de l'Auteur de la Lettre: mais, quoi que
cette menace foit faite à la légère, elle mérite pourtant qu'on y penfe;
car, fi on va fi loin dans un tcrns que les Efpagnols commencent feulement
à montrer le nez, que fera*ce lorfque la France aura rétabli la Monarchie
Efpagnole dans fon ancien luflre, ainfi qu'elle le promet ? Venons à
la Conclufion de fa Lettre , qui efl la fuivanie.
Ne m' alléguez point vos Forces Maritimes. Je fai qu'elles font grandes , mais je
fai en même te-ms qu'elles coûtent beaucoup , aujji-bien que les Troupes étrangères que
mus pourriez obtenir des Princes d'Allemagne , £f qu'ainfi il vous fera très - difficile
de les entretenir. D'ailleurs , l'expérience ne vous a-t-elle pas fait voir pendant toute
la dernière Guerre , que , malgré les nombreufes Flottes que vous équipiez tous les ans
avec l'Angleterre, les François vous ont enlevé un nombre infini de Vaiffeaux à l'em-
bouchure même de vos Ports ? Çhie fera-ce donc s'ils viennent à unir leurs Forces Na-
vales à celles des Efpagnols,, après avoir mis ces dernières en bon Etat , comme il
leur fera très-facile, pour peu qu'ils vewllent ouvrir leurs Magazins , £f donner une
partie de leur fuperflu ? Nefi-il pos à craindre que la même cbofe arrive encore une
fois ? Je ne dis rien de la difficulté que vos Flottes trouveraient à tenir la Mer dans
les tems orageux , fans pouvoir fe réfugier en aucun Port d'Efpagne ou de France.
Peut-être efperez -vous qu'à leur défaut , ceux de Portugal vous feront ouverts : mais,
outre que la cbofe efi encore dowteufe , puifque vraifembhbkment Sa Majejlé Portu-
gaife gardera de grandes mefures avec les deux Couronnes, cette feule reffource nefuf-
firoit pas pour vous mettre à couvert de tout Danger. Mais , c'ejl à vous d'y penfer 9
V affaire vous regarde. Pour moi , qui n'ai pris la plume que pour vous donner nji
€onfeil falutaire , &f vous détourner de prendre des engagements qui pourroient vous
devenir préjudiciables , j'attendrai avec patience l'iffue de tout ceci; £f je vai finir
ma Lettre , après vous avoir conjuré de pefer meuremmt les chofes que j'ai eu l'hon-
neur de vous dire. Sur-iout , Monfieur , je vous prie de bien confiderer , que s'il efl.
vrai qu'il foit nécejjaire au Bien Commun qu'il y ait en Europe une Puiffance capable
de contrebalancer celle de la France , il n'efh pas à propos de chercher à affoiblir celle
d'Efpagne ; £p qu'enfin , s'il n'y a que la jcureté de la Barrière qui vous faffe de h
peine , vous avez lieu de vous mettre l'Efprit en repos , puifque l'on efi difpofé à en-
trer là-dejjus en tout équitable Accommodement , e? qu'il ne dépend abf&lument que de
vous .
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M, DCC. I. 431
vous , d'obtenir dès à préfent ,par les voyesde la douceur , le plus gra?id avantage que Affaire
vous pourriez efperer par celles d'une longue Guerre , quand même vous la feriez avec Gf-N
fuccès, ce qui néanmoins eft fort douteux. En un mot , Monfieur , fi? pour conclu- L'Ey*°
fion , il faut que vous conveniez , qu'il n'y a Intérêt quelconque , ni Rai/on Divine ou
Humaine, qui puijfe vous confeiller de prendre les Armes contre les Efpagnols vos an-
ciens Amis 6P Alliez , uniquement par ce qu'ils ne veulent pas fouler aux pieds les
faintes &? dernières Difpojitions de leur Roi, donner les mains à leur propre Déflruc-
îion & Démembrement , & fe rendre coupables de Rébellion envers celui que Dieu leur
a donné pour légitime Roy & Seigneur. Mais que plutôt vous devez rendre à Dieu
des Aàions de grâces infinies , de vous voir beureufement tirez du terrible embarras
dans lequel vous feriez infailliblement tombez , par les Suites d'un Traité aujji généra-
lement defaprouvé , même en Angleterre & en Hollande, que l'étoit celui de Partage*
Je fuis , Monfieur, &c.
Il faut fuivre pas h pas ce que l'Auteur dit. Si les grandes Forces Ma-
ritimes coûtent beaucoup, eft-ce qu'il n'en coûtera pas autant à la France
& à l'Efpagne, ft elles veulent fe montrer ? Ainfi , les raifons font commu-
nes à fon Parti aufli bien qu'aux autres. Si les Troupes étrangères coû-
tent, du moins elles peuvent être employées avec plus de fuccès que par
le paffe , puis qu'on n'auroit plus à garder les Pais, apartenant à la Mo-
narchie d'Efpagne, dont la Mifere ne lui permettait pas de faire le moin-
dre effort pour foufager ceux qui l'avoient prife en Protection.
On a perdu, il eflvrai,un nombre de Navires pendant la dernière guer-
re, mais pourquoi cela? C'elt parce qu'on empioyoic les Forces mariti-
mes à garder l'Efpagne, foit dans l'Océan, foit dans la Méditerranée; &
le plus qu'on en a perdu, elt dans le tems que l'Amiral alla dans la Méditerra-
née pour leur fauver Barcelone, qui fut enfuite prife lorfque la Flotte eue
pafFé le Détroit pour retourner dans fes propres ports,; car, pour les For-
ces navales d'Efpagne, l'Auteur avoue lui-même qu'elles font en mauvais
état, & que, pour les reparer, elles ont befoin du fuperflu des François.
Il faut que la mifere de la Nation Efpagnole foit extrême, puis qu'il faut
qu'elle mendie de ceux qui ont été fes plus grands Ennemis un fuperflu
qui d'ordinaire eit le fbulagement des plus miiêrables ! Mais-, je ne conviens
pas avec l'Auteur que la même perte ferok à craindre encore une fois, car
on n'auroit pa? h garder toutes le Côtes d'Efpagne^ & les Navires, qui furent
employez dans la dernière guerre pour garder cette miferable Nation, fe-
roient fort bien employez utilement à garder le propre. L'Auteur n'a pas
fans doute beaucoup voyagé fur Mer, ou ne fçait pas la difpofkon de cette
partie de l'Océan où les Flottes feroient expofées aux orages. J'avoue
qu'il peut arriver aux Flottes ce qui arriva à l'Invincible de Philippe II ,
mais n'en peut-il pas arriver de même à celle de France & aux Forces Na-
vales d'Efpagne? Le fuperflu que celle-ci auroit receu des Magazins des
François feroit-il fuffifant pour les mettre en affez bon état pour éviter le
danger? Si fe vent chaïîbit à terre du côté de l'Efpagne ou de la France,
il pourroit véritablement, mettre ea danger les* Flottes j mais ne peut- il
pas
s
PE
PK.
432 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Avtairvs pas arriver qu'un autre vent chafTeroit les leurs vers l'Irlande & l'Ang'e-
f in . d [Crre. & les Forts de ces deux Jfîes ne feroient-ils pas aufli fermez à leurs
Flottes? Le danger paroit egai: ainiî , e'efl mal à propos, ce me femble,
„ qu'il veut infpirer des aprehenfions fur des chofes qui peuvent arriver
aufli-bien à leurs Flottes qu'à celles des autres. Pendant la dernière guer-
re, les Flottes combinées ont-elles eu befoin de fe réfugier dans les Ports
d'Efpagne pour éviter les orages? Point, du tout. C'etf. pour vous dire,
Monfieur, que quand les Ports d'Efpagne feroient fermez, i ' s ne por-
teroient pas un grand préjudice. Je ne veux faire aucune réflexion fur ce
qu'il dit du Portugal, par raifon.
Je trouve que l'Auteur fait, tantôt comme Sirène qui endort par fon
chaut ceux qui lui preltent l'oreille, parlant d'amitié, de bonne correfpon-
dance, de Barrière &c, & tantôt comme le Crocodil, déplorant les mal-
heurs qui peuvent arriver; mais je vous prie, Monfieur, de faire reflexion
que le but de la Sirène & du Crocodil n'eit à la fin que pour dévorer.
Je ne faurois, Monfieur , m'empecher de rire, lorfque je lis ce que l'Au-
teur dit touchant la necefiité, qu'il y ait en Europe. une PuilTance capable
de contrebalancer celle de la France, & qu'il veut infinuè'r que l'Efpagne
ne doit point être affoiblie, afin qu'elle puifie fervir'pour cet effet. L'Au-
teur ne fe fou vient pas , fans doute i des menaces qu'il vient de faire de la
jonélion des Forces Navales de France & d'Efpagne , du fecours que
l'Efpagne auroit des François, foit en Efpagne, foit aux Indes Efpagnoles.
Elt-ce donc que l'Union & la bonne Correfpondance entre ces deux Mo-
narchies ferviroit pour fe contrebalancer réciproquement l'une l'autre?
La fourmilion fervile de la Régence de Madrid aux Confeils & aux Or-
dres de la France efl la plus belie preuve du monde du contrebalancement
que l'Efpagne fera. Je vous laiffe à juger Monfieur fi une pareille raifon
a la moindre ombre de bon Sens. Ce qu'il dit de la Barrière & de la
difpofition où on efl d'entrer dans un Accommodement équitable, efl un
refrain de l'Auteur, qui ne mérite pas qu'on y fafie reflexion ; car, ainfi
que j'ay eu l'honneur de vous dire ci-devant, il n'y aucun fond à faire
fur Accommodemens, ni Paroles, ni Traittez, ni Sermens , non feulement
avec la PuilTance qui efl en poffefîion de contrevenir à tout, mais pas mê-
me avec les Efpignols qui fuivent à prefent les directions qui ont un pa-
reil but.
Ce feroit une queflion, s'il n'y a raifon divine ni humaine, qui puifie
confeiiltrr de prendre les armes contre les Efpagnols qui font les anciens
Amis & Alliez, &c. Mais comme je fupofe que l'on n'a pas defTein de fai-
re la Guerre aux Ëfpagnols de but en blanc, je ne m'arréteray pas à dire
bien des chofes qui pourroient s'y raporter. Je diray feulement en pat
fant, qu'il feroit beaucoup moins étrange de voir deux Amis devenir En-
nemis, que de voir l'Union des Ëfpagnols avec les François, qui aupara-
vant étoient mortels Ennemis. Nôtre Auteur finit fa Lettre en donnant
i'Epitheie de Saintes aux Difpofitions de leur Roy. La Cour de Vien-
ne , qui fçait que ces Difpofitions ne font que l'effet d'une Politique
de
PE.
RESOLUTIONS D'ET AT , M. DCC. I. 453
de Machiavel , trouvera que c'efl prophaner en impie que de parler de Attairïs
la forte. Tout attentat , ufurpation , manquement de foy, contreven- GfN- UE
lions aux fermens, doivent, félon JTAuteur, etre'des chofes faintes ; voilà
une nouvelle Théologie qui va s'établir en Efpagne: c'efl dommage qu'un
tel perfonnage ne foit Chanoine de Tolède , pour pouvoir afpirer à en être
l'Archevêque.
Enfin, l'Auteur achevé en foutenant que leTraitté de Partage eft géné-
ralement defaprouvé tant en Angleterre qu'en Hollande. Il y a aparen-
ce que l'Auteur fe tenant à Anvers n'eit pas informé de la difpoution
des peuples en Angleterre & en Hollande; car, bien loin qu'on y defa-
prouvé leTraitté de Partage, on le trouve tout-à-fait bon, & ils louent la
prudence de Sa Majcfté Britanique & de Leurs Hautes Puiifances d'avoir
conclu un Traitté qui tendoit abfolu>nent au maintien du repos public.
Et pour vous faire voir , que je n'avance rien de moi-même , je vous en-
voyé ci-jointe une Lettre imprimée en Angleterre, qu'un Gentilhomme
Anglois de mes Amis m'a envoyée de la Haye, & que j'ai fait traduire ici,
par laquelle vous verrez les Sentimens des véritables Anglois. A l'égard
de la Hollande, j'ay vu que tous les Ecrits qui s'impriment tous les mois
parlent de même, fans en excepter les Lettres Hiltoriques, dont l'Au-
teur clairvoyant, enfaifant, comme c'elt fa coutume, les Eloges des Efpa-
gnols, ne lailTe pas de donner toujours le Titre de fage Traitté & celui de
Partage.
Voilà, Monfieur, les Reflexions que' ]ay faites currenteCalamo fur la Let-
tre en queftion. A vous parler franchement , j'avois deflein en prenant la
plume de m'étendre beaucoup plus ; mais , quelque raifon m'oblige à re-
ferver beaucoup d'autres chofes à une autre occatïon , & vous vous con-
tenterez s'il vous plaît de ce que je viens de vous dire là-deffus. Mais
comme je vous ay promis ci-devant de vous marquer que ce n'ell pas la
Convenance non feulement de l'Angleterre, de la Hollande &c. , que le
Teflament ait lieu, permeuez-moy ,je vous fuplie, Monfieur, que je vous
en raporte quelques raifons le plus fuccinétement qu'il me fera poffible,
& comme un abrégé de ce que j'aurai peut-être l'honneur de vous envoyer
ci-après.
A l'égard de l'Angleterre, la Lettre Angloife expofe alTez ce que cette
Nation-là doit aprehender. On y peut ajouter que la Jamaïque x qui eft
l'Ifle la plus à portée du Mexique, & qui a ete enlevée, comme vous favez,
aux Efpagnols, feia peut-être la première txpofée en proye. Encore ce
ne feroit rien, û la Nation n'a voit à craindre des chofes infiniment plus
importantes. Un faux zèle de Religion pourra infpirer d'annuller l'Abdi-
cation du dernier Roi, & on a d'autant plus de raifon de le craindre, que
vous favez par quelles voyes iniques, & par quels attentats horribles, on
a déjà taché par plufieurs fois d'y reiïilirj ce qui entraineroit après foi
l'abolition de la Religion dominante, de tous les Privilèges, & de toutes
lesLibertez qui contribuent le plus à la profperité & au bonheur de la Na-
tion. C'efl un Projet , qui fubfifte depuis plus de foixante. ans ; & la Fran-
lom. XI. I i i ce
&FN. DE
Eun
PE.
434 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Ce n'eft pas bien aife qu'il y ait un Pais, qui, par la confervation de fesLî-
&fn. de bertez, puiffe faire fouvemr aux François qu'avant le prefent Règne ils
ont été fur le même pied. Il eft vray , qu'il y a encore un Parlement en
France; mais , chacun fçait qu'on a fait à fon égard ce que Tacite dit que
fit A/Ugtffte; x qui laifïa eadcm magijîratuum vocabula^ mais fans autorité: Ôl
le Parlement d'Angleterre, qui ell fi jaloux de les Prérogatives, doit ex-
trêmement craindre qu'il ne lui en arrive de même. Vous favez les In-
formations qu'on a des Projets contre l'Angleterre, & qu'il n'efl pas ne-
ceffaire de confier au Papier.
La Hollande fe trouve par le Teftament dans de plus grands dangers
que l'Angleterre , puis qu'on fait de longue main qu'on en veut aux Pro-
vinces-Unies, qu'on regarde comme celles qui ont Je plus traverfé l'agran-
diflement de la France. Les efforts', qu'on a récemment faits pour réta-
blir le Commerce d'Anvers par le deiTein du Canal, auront à prefent plus
de fuccès, & peut-être voudra-t-on en ouvrir le paffage par la Zelande,.
qui n'eit fermé que par lesTraittez, qu'on n'aura pas honte d'enfraindre ,
puis qu'ils ne font inviolables qu'autant que la force les rend tels. Les
perfonnes, qui en ont apuïé ci-devant l'Entreprife, fe trouvent à prefent
avoir tout crédit auprès du nouveau Roy & auprès de la France; & quand
même cela n'auroit pas d'abord tout le fuccès qu'on s'en promet, on tâ-
chera de faper peu à peu le Commerce. On tarira, tant à l'Angleterre
qu'à la Hollande, les fources des Indes Occidentales, & tout l'argent ne cou-
lera que dans les Coffres de la France. La bonne correfpondance entre
la France & l'Efpagne les fera entreprendre de traverfer le Commerce
des Indes Orientales , qui eft un des principaux foutiens des Provinces-U-
nies; fans compter celui du Levant, qui n'eit pas un des moins confidera-
bies. La France faifant enlever toutes les Laines d'Efpagne pour faire
valoir fes Manufactures, celles des Provinces-Unies tomberont faute de
matière, ce qui fer oit deferter du Pais un nombre tres-confiderable d'ou-
vriers & autres gens, qui , étant réduits à la mendicité , fe tranfporteroienc
ailleurs pour trouver dequoi vivre. Les menaces mêmes de l'Auteur, &
les Remarques de la Lettre d'Angleterre que vous pourrez voir en leur
lieu, peuvent aider à vous donner une idée jufte, que ce n'eit pas la Con-
venance des Etats Généraux que le Teftament s'exécute.
Cette exécution n'eft pas non plus laConvenance de l'Empire; car, l'a-
grandhTemenc de la France, par la bonne correfpondance avec l'Efpagne,
par l'accroiffement de fes Manufactures &de fon Commerce, par l'abaiflè-
ment de l'Angleterre & de la Hollande, & par l'Argent du Pérou, redui-
*ra Sa Majefté Impériale , & tous les Sereniffimes Electeurs & Princes
d'Allemagne , dans une dépendance à n'ôfer contredire à la France en
rien. Que devindra alors l'Election libre d'un Empereur, que devien-
dront les Souverainetez des Princes qui peuvent à prefent tenir des trou-
pes , en lever de nouvelles , & faire des Alliances ? Il leur arrivera toute
la même chofe , qu'on voit arriver prefentement au Duc de Savoye, au-
quel la France fait dire de livrer aux Efpagiiols Verceil qui elt la meilleu-
re
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 435-
re place qu'il ait, & de congédier Tes troupes. Les Chambres de Réunion Artum
feront renouvellées, & les Droits de Charlemagne, ou an pis aller ceux de GfN- nE
la Dépendance des Enfans de Noé ou d'Adam , donneront lieu à la Fran- L ^KO'
ce de dépouiller tant de braves Princes de leurs Souveraintez, & d'être ! —
des Vaiîaux réduits à l'état pitoyable où la Noblefle de France fe
trouve.
Le Portugal eft le premier qui fera expofé. La mémoire eft encore
récente de l'Etabliflement de ce Royaume détaché de la Monarchie d'Efpa-
gne. L'écarteleure de fes Armes dans celles d'Efpagne qu'on vient de fai-
re eft une Comète fatale qui ne lui prédit que malheur. Si l'Archiduc
Charles avoit été Roy d'Efpagne , fuivant le Traitté de Partage , le
Royaume de Portugal auroit été hors de danger; mais, à prefent, la mê-
me raifon que la France a eue d'affilier la Maifon de Piragance à faire le
démembrement du Portugal de la Couronne Caftille, elle l'a pour le réunir
aux Etats de fon petit Fils , quand ce ne feroit que pour la bonne con-
fcience que la France a, & qu'ayant aidé à ôter le Portugal à l'Efpagne,
elle veuille à prefent aider à en faire faire la reftitution par un prétexte
d'équité. L'exécution du Teflament n'ell donc pas non plus de la Con-
venance du Portugal.
Les Couronnes de Suéde & de Dannemark peuvent attendre de fe
voir, non-feulement négligées ,mais encore obligez d'envoyer comme par
tribut à la France le Goudron, les Mats , & les autres matériaux pour les
Navires que leurs Royaumes produifent, quand ce ne feroit que pour rem-
placer le fuperflu, dont on feroit la charité aux Efpagnols pour mettre en
état leurs Forces navales. Croyez-vous, Monfieur , que la France, fe
voyant en état de commander à baguette au relie de l'Europe, voulût
continuer à envoyer des Ambalfadeurs à ces deux Tètes Couronnées, non
plus qu'aux autres PuhTances? Elle voudroit imiter la Porte Ottomane, qui
reçoit des Ambalfadeurs, & n'en envoyé point, parce que le Grand Sei-
gneur fe dit Roi des Rois;& il eft à prefumer, que la France voudra éle-
ver fa grandeur par des Titres qu'on n'oferoit après lui difputer. Elle
n'auroit plus befoin de femer la zizanie parmi les PuhTances : ainlî, elle
les priveroit de l'honneur qu'elle leur fait à .prefent pour les per-
dre , & leur envoyeroit le Tel eft mon Plaifir pour tout ce qu'elle vou-
droit.
Que deviendra l'Election libre d'un Roi de Pologne? La pauvre Re-
publique feroit obligée, bon gré, mal gré, de mettre fur le Throne, non
pas un Prince digne de la Couronne, comme le Prince de Conty, mais
peut-être un Légitimé de France. Et cette Couronne-là viendroit à être
comme un Eveché ou une Abaye en France, à laquelle cette Cour
voudroit avoir Droit de Nomination.
Les Princes d'Italie doivent s'attendre au même traittement que la
France fait à prefent au Duc de Savoye. L'Adouciffement qu'ils pour-
roient peut-être avoir , c'eft qu'au lieu de livrer leurs places fortes ,
oa les obligeroit feulement à les démolir , afin de pouvoir envoyer des
I i i 2 Trou-
Affaires
GEN. DE
l'Euro-
pe.
4V* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Troupes à Difcretion pour les châtier , lorfqu'ils ne voudroient pas fubir
le joug. > _ ■
Le Pape même, & le Collège des Cardinaux, feront réduits à une Soumif-
fion aveugle ;& iîs doivent s'attendre, que dans un Conclave il n'y auroit
point d'autre Saint Efprit pour diriger les Scrutins, que celui de l'Or-
dre de France.
Et les pauvres SuifTes fe verront enlever le Païs de Vaux & Genè-
ve , & feront obligez de rendre avec ufure les Penfions publiques &
fecretes que la France leur diflribuë depuis fi long-tems.
Je tranche court fur toutes les craintes que les Puiffances de l'Europe
doivent avoir par l'exécution de l'injulte Teftament , parce que, lorf-
que j'aurai un peu plus de loifir , je vous ferai un Portrait dans tou-
tes les couleurs de ce dont je ne vous donne ici qu'un Crayon. Mais
je ne faurois m'abftenir de vous dire, que l'Execution de ce Teftament eft
même contre la Convenance des Efpagnols. Un changement fi grand
dans la Monarchie d'Efpagne, & de la nature .dont il eft, entraine indif-
penfablement après foi un Abaiffement des Grands & un AppauvrifTemenE
des Peuples, afin de ne trouver aucun empêchement dans la Domination.
Que ne doivent-ils pas aprehender , tant de Grands , dont le crime ne
fera que d'être riches , puifTants , ou douez d'intelligence ? Il n'auront pas
des exils doux comme dans les Règnes précédens : on les éloignera dans
les climats les plus dangereux du nouveau Monde & dans les Ifles , afin
de les y faire périr miferablement. On ira remuer les cendres des Pérès
& des Ayeuls; & fuivant les Vice-Royautez & les Gouvernemens, on leur,
imputera des Extoriions, qu'on condamnera les vivans de payer, & on
les traittera avec une rigueur pareille à celle qu'on vient de pratiquer en
en France contre les Traittans. Il eft même à prefumer, que ceux-là mê-
me qui ont contribué à cet Evénement n'auront pas un meilleur fort. On
fe fert d'eux à prefent jufques à ce que les chofes foient affermies ; mais,
après, il ne faut point douter qu'on ne les éloigne des Confeils, & on leur
fera voir qu'on aime bien les Trahifons, mais non pas les Traîtres. Il ne
faut pas que les Efpagnols s'attendent que leur nouveau Roi fe conduira
par les Refolutions du ponfeil d'Etat. Les Maximes de la France font
defpotiques; & fi le Confeil d'Efpagne fubfifte, ce ne fera que comme le
Parlement de Paris , pour exécuter les ordres qu'on leur donnera. Les
Peuples Efpagnols font à plaindre, eux, qui , par une pareffe naturelle &
une ambition hors de faifon, font dans une extrême miférej parce qu'on
va encore les réduire à une condition plus pitoyable , fans compter qu'on
tâchera d'en tranfporter la plus grande partie à périr dans les garnifons
■éloignées, afin de peupler peu à peu l'Efpagne de François." Et enfin il
n'eft pas impolïible,que nous, ou nôtre Pofterité, ne voyons un jour cette
Monarchie, aufïï bien que toutes les autres Puiffances, réduites par la Loi
Salique en Provinces , & avoir le même fort qu'ont eu une partie de celles
qui compofent à prefent la Monarchie Françoife. Je vous réitère, Monfieur,
que je pourrai un jour vous fatisfaire plus amplement.
Mais
PK.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. ï. 457
Mais, après-tout, que faudroit-il donc faire? Le danger eft grand, il eft Affa^fs
preffant, je vous l'avoue, il eft même temps d'y réfléchir. C'efl pour- °fN: DE
quoi il me femble que le plus feur ell de faire ce que l'Auteur de la Let-
tre Angloife infinuë, qui ell de fe mettre en bonne pofture , & de faire
que l'Angleterre & la Hollande s'unifient pour fe foutenir mutuellement;
& de fe remettre à la Prudence de Sa Majefté Britannique, pour ménager
dedans & dehors la feureté des deux Maifons. 11 eft certain que les Peu-
ples de ces deux Puiflances y contribueront; car, s'ils ont defaprouvé en
quelque manière le Traitté de Partage, c'eft parce qu'il accordoit quel-
que chofe à la France, & qu'ils auroient voulu qu'elle n'eut rien eu, ainfi
que la Juftice le requeroit. Et jugez de leur Difpofftion, à prefent qu'ils
voyent que la France a tout.
Je connois des perfonnes fages , qui vont encore plus loin , & foutien-
nent que la PuifTance qui peut fervir d'équilibre dans la conjoncture pre-
fente eft Sa Majefté Impériale & l'Empire, & qu'il feroit neceflaire que
les autres Puiflances de l'Europe fuiTent de la partie pour lès foutenir. Sa
Majefté Impériale eft un Prince , à la bonne-foi duquel on peut fe fier,
& on trouvera toujours toute feureté à entrer en Traitté avec lui. Non-
feulement l'Angleterre & la Hollande pourront trouver leur feureté dans
une telle Union , mais auïïi les autres Puiflances de l'Europe y & Sa Ma-
jefté Suedoife, qui, à l'âge où elle eft, a fait de û beaux coups de Maître,
a le même intérêt, en s'uniffant à l'Empereur, de faire contre la Maifon
de Bourbon ce que le Grand Guftave-Adolphe en Union avec la France
fit contre la Maifon d'Autriche. Je ne fuis pas un Trompette de Guer-
re; j'aime la paix & la tranquillité. Mais, il me femble, qu'il y a plus de Pru-
dence de foutenir quelque trouble pour hazarder de la conferver , que
d'attendre avec infenfibilité qu'elle foit pour jamais renverfée : &, périr
pour périr, il vaut mieux périr en braves gens, & hazarder dans le fort'
des Armes de fe fauver du Naufrage. On n'auroit plus à prefent à em-
ployer tant de Forces ni-de Flottes à garder l'Efpagne & ies Dépendan-
ces , ce qui rendrait les Forces opofées à la France plus puiflantes , au-lieu
qu'à prefent ce foin apartenant à la France, lui fera une diverOon à forr
defavantage & l'affaiblira. Ce ne fera pas auiîi une chofe facile de faire
marcher des Troupes du Milanez dans l'Efpagne, comme il a été aifé à la
France de le faire du Rhyn à la Meufe , & de celle-ci au Rhin. Il faut
confiderer que l'Efpagne n'a ni Soldats, ni argent, ni hommes , pour en fai-
re; fon étendue eft grande, & requiert par confequent de plus grandes
forces pour fa defenfe; le mauvais état de fes Magafins, devant être repa-
ré: vuidera en partie ceux de la France; & en un mot je ne vois pas qu'il
y ait jamais eu une plus belle conjoncture d'avoir des fuccès heureux con-
tre la France. Si les Flottes & les Forces coûtent , éft-ce que la France
ne fera pas obligée à faire de pareilles depenfes, & même plus pour four-
nir pour l'Efpagne ce que les Alliez fourniflbient pendant la dernière guer-
re? D'ailleurs , les depenfes de la dernière guerre ne feront pas il grandes à
l'avenir j car, comme c'eft à prefent l'intérêt commun de toutes les
I i i 3 Pui£-
PE.
438 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires PuifTances de l'Europe de tacher de fe fauver du Naufrage dont on eft
■gen. de menacé , il ne faut point douter que chacun ne fafTe fans intérêt fes
efforts particuliers. La principale chofe eft de fe mettre en bonne
pofture, & de faire voir que fi l'on vient à une guerre, on eft refolu
de la foutenir avec vigueur, & mieux qu'on n'a jamais fait. Si Dieu par fa
mifericorde veut envoyer fa délivrance à l'Europe par quelque coup inopi-
né de fa Providence , on ne fe repentira pas d'avoir pris les mefures
que la prudence humaine fuggere pour fa propre confervation , & on
aura d'autant plus lieu de rendre des actions de grâces infinies au Tout-
Puiflant qui aura voulu épargner l'effufion du Sang Chrétien.
Voila, Monfieur, ce que mon petit Génie m'a fourni à la hâte. Je fouhai-
terois d'avoir une plus grande étendue de connoiflance, pour vous faiis-
faire ; ce que je viens de faire n'étant que pour vous témoigner que
je fuis , <5cc.
Lettre à un Membre du Parlement à la Campagne , touchant la
Situation prefente des Affaires dans la Chrétienté , en Réponfe
à une de fes Lettres fur ce Sujet.
MONSIEUR,
à Te voi par celle que vous m'avez fait l'honneur de m'ecrire, que vous
■m- J fouhaitez que j'ajoute aux Nouvelles, que j'ai foin de vous envoyer,
Lettre
un Mem-
plrie-11 mes Reflexions fur" le Teftament du feu Roi d'Efpagne , & fur la Ré-
ment folution que la Cour de France a faite de l'accepter au préjudice du
d'Angle- Traitté de Partage. Vous m'avez communiqué par avance les vôtres,
terre. Q j'aj examiné avec tout le foin pofïïble les Raifons , par lefquelles
vous voulez prouver qu'il étoit plus avantageux pour l'Europe en gê-
nerai , & pour l'Angleterre en particulier, que la France acceptât le
Teftament , comme elle a fait , que de fe tenir au Traitté de Par-
tage.
La qualité que vous avez d'un excellent Compatriote, qui vous fait en-
tendre raifon fans vous emporter & fans pancher dans aucun des Partis , &
fâchant que vous me croyez abfolument porté pour le bien public, & par
confequent que je vife au même but que vous, (quoique nous différions à
prefent dans nos penfées touchant les moyens) m'a encouragé de vous
envoyer avec d'autant plus de liberté cette Reponfeà ce que vous fouhait-
tés , dans l'affeurance qu'elle fera acceptée dans la même intention qu'elle
a été conçue.
En premier lieu. Vous tâchez d'expliquer dans vôtre Lettre , qiïau
lieu d'entrer dans un Traitté ', qui auroit été trop à V Avantage de la Fran-
ce, cet oit plutôt nôtre Intérêt de fe tenir en bonne intelligence avec V Empe-
reur , £5? de prendre conjointement avec lui des mefûres capables de procurer
la Succefiïon d'Efpagne à l'Archiduc.
Je
P£.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. L w
Je conviens avec vous, que ç'auroit été mieux pour nous d'avoir ce Affaires
Prince pour Monarque d'Efpagne, plutôt que le Duc d'Anjou; ex que ce- GfN- DB
la auroit tenu les Affaires de l'Europe dans un meilleur équilibre pour le
maintien de la tranquillité publique. Mais, vous m'avouerez en même
temps , que ce Prince ne pouvoit être mis fur ce Throne-là, que par une
de ces deux voyes, favoir, ou par un engagement d'une guerre confédé-
rée contre la France pour avoir tout , ou en entrant dans un Trait-
té de Partage qui pût accommoder amiablement l'un & l'autre Parti.
Vous infiftez que ce Traitté auroït été trop avantageux à la France , s il
avoit eu [on effet. Mais , croyez-vous de bonne-foi que les François euf-
fent moins gagné par une guerre , que ce que le Traitté leur accor-
doit ? Ou pouvez-vous croire que la France eut jamais voulu confentir
à un Traitté pour abandonner le tout , & pour renoncer à tous les a-
vantages , qu'elle avoit raifon d'efperer de la poiture où elle eil, pou-
vant agir beaucoup avant aucuns alliez , & dans un alTeurance prefque
certaine d'une foumiffion générale des Ejpagnols , pour éviter qu'ils ne
fulTent envahiz & ruinez tout d'un coup par le rapide torrent de les ar-
mes? D'ailleurs, ce n'étoit pas un petit point gagné d'avoir conduit la Fran-
ce à une Renonciation de toutes fes Prétentions fur le Royaume de Na-
varre, qui auroit donné occafion une fois ou l'autre à de nouvelles ruptu-
res. Et non-feulement cela ; mais, la principale Affaire écoit û'affeurer
I'Efpagne & les Indes avec le Païs-Bas à l'Archiduc, fçavoir à un Prince,
que ce fervice auroit unis à nos intérêts pour épargner à la Nation la de-
penfe d'une dangereufe & onereufe guerre, & pour lui affeurer ce qui fait
tout à la fois nôtre Profperité & nôtre Gloire, favoir l'ineitimable Préro-
gative de tenir l'équilibre de l'Europe entre nos mains. Ces avantages ne
meritoient-ils pas d'être recherchez au prix de quelque petit Sa-
crifice?
Vous prétendez de plus, que le dernier Roi d'Efpagne rf auroit jamais été
porté à nommer le Duc d" Anjou pour [on Héritier Univerfcl , fi ce ri eût été
pour le Traitté , pour tenir par-là la Monarchie entière contre les defjcins & les
intentions d'icelui , ainfi quil nous faut regarder le Traité comme ayant donné
eccafion au Teltament. Penfez , plus loin. Que l'aprehenfion , que nous
avions d'un pareil Teftament en faveur de la France , étoit le principal
moùf pour entrer dans ce Traitté \ & fur cela j'ôiè dire que vos
fentiments aprochent beaucoup de la vérité. Nôtre Cour avoit de bon»
avis , lors qu'on mit le Traitté fur le tapis , que le Parti de l'Empereur
ehancelloit, & que le Marquis $ Rar court avançait toujours de plus en
plus les intérêts de fon Maître à la Cour d'Efpagne. Nous avions de nou-
velles feures, que les perfonnes qui avoient le plus grand afeendant fur le
Roi , & qui en aparence auraient eu la plus grande influence dans la con-
duite de fon Teftament, étoient tous portez pour un desEnfans du Dau-
phin. Les Minières de France tant dedans que dehors n'en faifoient
point un fecretj mais ils affecloient plutôt de le publier, & ce qu'ils di-
foir;-r
l'Euko-
PE
440 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Atiaires foient là-deffus nous étoit confirmé de bonne main. Ainfi le deffein de
cen. de Y Angleterre & de la Hollande étoit réellement pour prévenir les effets
d'un pareil Teilament par le moyen d'un 'Traitté de Partage , dans lequel il
y avoit par confequent une neceffité aparente de donner quelque partie
pour éviter la perte du tout. C'étoit pour pourvoir contre toutes les
prétentions d'un tel Teilament , que la France a été induite aux Renoncia-
tions politives & expreffes qu'on y peut voir; &, à moins qu'ils ne veuil-
lent les faire paffer pour une tromperie, & au plus que cela engage feu-
lement l'Angleterre & la Hollande, fans inférer aucune obligation du cô-
té de la France, il faut avouer que le Teilament, tel qu'il elt à prefent,
eil le véritable cas dans lequel cette Couronne-là s'efl directement obli-
gée à un- exacte maintien du Traitté , fi elle avoit été d'humeur de s'en
tenir aux termes & aux intentions d'icelui.
Mais, fupofons que le Traité de Partage n'eut point été fait, croyez-
vous que le Roy & les Grands d'Efpagne euffent eu alfez de foypour croi-
re que l'Archiduc auroit pu être inflitué Héritier & mis en poffeffion de
toute la Monarchie fans en démembrer quelque partie? Ils ne pouvoient
qu'être fort fenfibles d'avance que la France auroit affeurément fait fes der-
niers efforts pour empêcher l'avènement de ce Prince à la Couronne , &
qu'après une longue <k cruelle Guerre dans leur propre Païs, il auroit été
impoftible à la fin d'empêcher cette Couronne de tenir quelque partie en-
tre fes mains. D'ailleurs, pour l'exécution d'un fi grand deffein, il leur au-
roit fallu être abfolument affeurez de l'Angleterre. Mais, voyoient-ils la
Nation d'humeur à s'engager vigoureufement dans une nouvelle Guerre,
fur le fimple motif que i'Ârchiduc eut deux ou trois Provinces plus ou
moins? Ou pouvoient-ils s'imaginer que l'Archiduc eut été en état d'obli-
ger à une totale refignation, fans les plus grands efforts que l'Angleterre
ait jamais fait. Ils ne pouvoient que prévoir que la Nomination de l'Ar-
chiduc auroit infailliblement allumé une Guerre Univerfelle, & dans la-
quelle l'Efpagne auroit été expofée comme en proye à la France, pendant
qu'à même temps il auroit été hors du pouvoir d'aucun de leurs Alliez de
leur fournir à temps du fecours. De pareils dangers aparens & inévitables
auroient d'eux-mêmes fait déterminer le Roy & les Grands d'Efpagne en
faveur du Duc d'Anjou, quand même on n'auroit jamais fongé au Traitté
de Partage. Feu Sa Majeflé & fes Mimflres, ainfi que l'on a évidem-
ment vu, étoient refolus d'inltituer un Héritier qui pût être tranquille*
ment fur le Throne. Et pouvoit-il être fur un moins puiffant mot f que
celui-cy , qu'un Roy, qui , pendant toute fa vie a entretenu une étroite cor-
respondance avec l'Empereur; qui a été fi fouvent engagé en Allianceavec
lui pour faire la Guerre à la France; qui a paru toujours fort zèle pour la
M.iifon d'Autriche, dont-il étoit la Branche aînée; eut été obligé de le
rejouer de fa Succefïïon , & de tranfporter fes valles Etats i un Etranger,
pour ne pas dire à une Famille Ennemie? Vous me repondrez peut être,
que le Traitté de Partage avoit tellement aigri Sa Majelté Catholique, que
cela l'avoit mis dans le chemin qu'il a pris. Mais , n'étoit-ce pas plutôt
au
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
44i
au contraire un motif récent & fort engageant pour favorifer l'Archiduc
dans le point de la Succefiion, puifque l'Empereur n'a pas voulu donner
les mains au Traitté, par la feule raifon, qu'il deplailbit extrêmement au
Roy d'Efpagne? N'ctoit-ce pas plutôt une nouvelle raifon pour exclure la
France , de ce qu'elle a été la principale partie qui a mis fur le tapis une
pièce fi defagreable?ll faut donc conclurre, qu'il faut regarder le Teltament.
du Roy d'Efpagne comme un effet d'une prudence timide, qui ne lui a pas
permis de fuivre les mouvemens de fon propre cœur.
Vous dites de plus , que le Traité de Partage tendait à mettre de la mefinteU
licence entre nous ùf l'Empereur. Mais, pour moi, je crois que nous avions
raifon d'en attendre un effet direétement contraire: Ci la Cour de l'Em-
pereur avoit connu ou avoit voulu fuivre fon véritable interefl, il n'y a
rien qui auroit pu fervir avec plus d'effet pour une plus étroite & plus in-
violable union entre nous que ce Traité.
On n'efl: convenu de rien, pendant la Négociation, qu'on n'ait com-
muniqué à cette Cour-là, & on a mis tout en ufage pour obtenir fon apro-
bation avant fa conclufion : & les démarches étant inutiles, l'Empereur a
eu trois mois de temps, qu'on luy a donné par le Traité pour délibérer
meurement deffus, & même pour pouvoir, contre Ton refus, y entrer
après le temps prefcriti & afin qu'il ne récent par-là aucun préjudice,
on a perfuadé à la France de foufcrire un Article fecret (qui e(t à pre-
fent univerfellement connu) par lequel il étoit flipulé , que l'acceptation
de l'Empereur auroit été reçue encore dans le terme de deux mois après
la mort de Sa Majeflé Catholique.
Vous continuez à dire , que la France ne manquera pas d'aporter en fa de-
fence , que dans la fituation pre fente des affaires, £5? confiderani que l Empe-
reur a continué fi long-temps dans Jin refus , il ejl plus convenable pour le
maintien de la Paix Publique de h Chrétienté , que la France accepte le Tefia-
ment , que de fe tenir au Traité de Partage; parce que , fi le Tefiament étoit
refufé , & que les Ducs d'Anjou £5? de Berry euffent rejette le Bénéfice d'icelui ,
les Efpagnols aur oient infailliblement invité l'Archiduc à prendre pour lui tou-
te la Succefiion, C5? à maintenir par-là les intentions du Tefiament , qui lui don-
ne la Subfiitution immédiatement après ces deux Princes. Et que l'Empereur
étant par-là engagé de mainte-air le Tefiament, & de tacher de confierver la Mo-
narchie en fon entier , il y auroit eu une neceffité évidente d'entrer en Guerre
avec luy £5? fies Alliez & toute la Monarchie d'Efpagne, comme fe foumettant
■unanimement à V Archiduc: ainfi, nous aurions eu divers Royaumes entiers à
conquérir afin de fat is faire aux termes du Traité.
Je viens à confiderer votre principal Argument contre le Traité de Par-
tage, que vous expofez en exagérant l'état dans lequel la France auroit été par
le Traité de commander abfolument le Commerce de la Méditerranée , ce qui
auroit de neceffité entraîné une ruine inévitable fur le Commerce d Angleterre &
de Hollande ■> d'où vous inferez que le Tefiament du jeu Roy d' Efpagne efi plus
pour noflre avantage que le Traité. Je ne faurois m'empecher de vous
dire que je trouve dans vollre Argument une partialité , dont je ne vous
Tome XL Kkk croiois.
Affaikkï
GEN. DE
l'Euro-
pe.
442 MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
Affaires croiois pas capable. Car , fi vous êtes vrayement perfuadé que la France
gen.de étant une fois en poffeiïïon des Royaumes de Sicile & de Naples feroic
lEuho- g ^e ruiner noftre Commerce dans la Méditerranée, fans être obli-
* gée d'avoir aucun égard à l'Alliance fondée fur le même Traité, qui au-
roit alors eu fon effet, pouvez- vous vous imaginer qu'il aura pour nous plus de
de complaifance à prefent qu'il l'a rompu dans toutes les obligations d'ice-
luï , fans faire le moindre ufage des avantages qu'il femble que l'Avènement
du Duc d'Anjou à la Couronne d'Efpagne lui offre? Pourquoy faut-il que
vous vous imaginiez que la France fe feroit retractée defes engagemens au
premier cas, lors qu'il ne pouvoit feulement prétendre qu'interrompre no-
tre Commerce du Levant, & qu'il veuille être dans le fécond cas plus
exact & £lus fcrupuleux , nonobffant l'état où il fe trouve d'afpirer au
commandement, non feulement du commerce de la Méditerranée, mais
même de celui des Indes? lorfqu'il a une li belle occafion d'entrepren-
dre un Monopole de la Laine d'Efpagne, pour mettre à perfection fes Ma-
nufactures, ck pour ruiner par-là les noilres? lorfqu'il a auffi-bien le pou-
voir que les prétendons pour faire telles entreprifes fur le Païs-Bas Efpa-
gnol qu'elles entraîneront après elles par confequence la ruine de la Hol-
lande qui fera bien-tôt fuivie neceffairement par celle de l'Angleterre?
J'ôfe dire que vous avouerez que fi l'Angleterre & la Hollande paroiiïenc
l'une & l'autre infenfibles dans une conjoncture û délicate, fans témoi-
gner la moindre inclination à fe remuer, il fera plus aifé à la France de
venir à bout de tous fes grands deffeins, que d'avoir ruiné noflre Com-
merce dans la Méditerranée fi le Traité de Partage eut eu fon effet:
parce qu'en ce dernier cas, il feroit toujours refté un tel contrepoids &
équilibre des Affaires dans l'Europe, qui auroit tenu la France dans une
paifible conduite, & éloignée des infractions & nouveautez. Le Pape &
tous les Princes d'Italie , qui auroient été fort jaloux de û puiffans Voi-
fins , auroient été prêts d'embraffer la première occafion favorable de fai-
re une Ligue contre eux, dans laquelle l'Empereur auroit été bien aife
d'entrer, tant pour fes intérêts, que pour ceux du Duc de Lorraine fon
neveu, qui alors auroit été Duc de Milan. L'Archiduc, étant alors Roy
d'Efpagne, fe feroit tenu attaché à nous, & auroit concouru à toutes les
mefures que nous mêmes aurions trouvé neceffaires pour la feureté de
ja Flandre, qui e(t la barrière commune, tant à l'égard de l'Angleterre,
que de la Hollande, contre la France.
Je me trouvay l'autre jour en compagnie d'un Gentilhomme, qui n'a-
voit pas des penfées auffi charitables que vous avez de la difpofition où
on eit en France : Ne pcnfez pas , dit-il s'adreffant à moi , que le Roi de Fran-
ce s'arrefle dans un fi beau chemin de former de grands deffeins , m quil ait re-
noncé à 'tant de belles Provinces qui auroient été annexées à fa Couronne par le
traité de Partage • s'il ne s'attendoit à de plus grands avantages en acceptant le
l'eftament. On fait trop bien que cette Cour nagit abfolument que par [es
intérêts , pour laiffer lieu au rejle du Monde de croire quelle a contrevenu à
toutes les obligations d'un Traité fait recemme?it & fi folemnellement , pour le
ftmph
r
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 443
Jimple motif de l'aggrandiffement du Duc d 'Anjou. Vous pouvez-vous affairer Affaires
GF.N. DE
l'Euko-
Monfieur , quelle a eu des vues avantageufes pour elle , en faifant cela. La Fran-
ce s'attend indubitablement de gouverner fous le nom du Nouveau Roy , & le
Grand-Pere d'avoir toute l'influence qu'il peut defirer dans les Confeils du Pe-
tit-Fils. La recompenfe donnée en dernier lieu au Marquis d'Harcourt parla
dignité de Duc , ne montre que trop évidemment lot nature des fer vices qu'il a ren-
dus pendant fon Ambajfade à Madrid \ (3 le choix qu'on a fait de lui , pour y
retourner dans la même qualité découvre totalement les fervices qu'on y attend
de lui pour V avenir , ajfavoir de continuer indubitablement fes intrigues dans une
Cour qu'il connoit à fond. Ceux d'entre les Grands, qu'il a trouvé moyen de
gagner pour porter le feu Roy à un Teflament fit favorable h la France , & qui
font les feuls employez dan: le prefent Mini fi ère , feront fort propres à le fécon-
der dans tous fes projets. Ils Je feront une Affaire de perfuader leur nouveau
Maître , qui ne fera déjà que trop difpofé à recevoir de telles impreffïons , que
fe tenant bien uni à la France , il n'y aura rien d'impofjîble pour luy , & qu'il ne
doive point douter de fe mettre un jour en Eflat de reunir à fa Monarchie ces
fiorijfans Eflat s, qui en ont été démembrez il ri y a pas long-temps. En un mot ,
non feulement l'Angleterre 13 la Hollande doivent appréhender la perte de leux
Commerce , mais toute ï Europe doit craindre la perte de fa Liberté.
Ce Gentilhomme étoit bien éloigné de regarder l'Acceptation du Tefla-
ment du Roy d'Efpagne comme plus à noflre avantage que le Traité. Vous
me repondrez peut-être, que fes craintes & fes apprehenfions étoient fans
fondement; mais, la Cour de France n'a-t-elle pas elle-même réellement
infinué le contraire? Puifque dans le premier Article Elle déclare comme
Je principal motif pour faire le Traité de Partage conjointement avec SaMa-
jefïé & les Eflat s Généraux, que c'était à deffein cïoflcr tous, les ombrages que
donner oient autrement de fi vafle s Eflat s unis fous une Perfonne. A la vérité,
ils parlent à prefent en France tout d'un autre ton ;&, trouvant qu'au lieu
de l'Archiduc le Duc d'Anjou a été nommé, ils ne trouvent plus aucu-
ne jaloufie, ni crainte, par l'union de tant d'Eflats en une feule PuilTance.
Mais, j'ôfe dire que vous trouverez ce tour trop partial, pour ne pas le
foupçonner.
C'eft pourquoy je puis attendre que vous conviendrez avec moy en
ce point , que dans la fituation prefente des Affaires , que l' Angleterre & la
Hollande ne fauroient allez fe tenir fur. leurs gardes. Nous favons tous
combien de fois la France a taché d'avoir en fa Poifeflion le Païs-Bas Es-
pagnol , & d'en faire la Conquête, ce qui auroit augmenté fi confiderablè-
ment fon pouvoir. Je puis dire déplus, que nous voyons tout ce Pays-là
(à moins que nous ne voulions fermer les yeux) à prefent en plus grand
danger que jamais de tomber lous la Domination de la France. Elle ne
manquera, ni de prétentions pour envoyer des forces contre eux , ny de
moyens de porter les Efpagnols à y confentir. Et on ne manquera pas de
leur donner de fréquentes allarmes , leur infmuant que des ennemis font
prêts de s'emparer de ces riches Provinces , & de les arracher à une fo,is
de leur Monarchie & de. la Religion Catholique.. La promptitude duj Roy
Kkk 2 Três-
r£.
i.'Euko-
PE.
444 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Araires Très-Chrctien de prendre les Etats de Ton Petit-Fils fous fa Protection
gfn.de j'eri mettra enfuite en poffeflion, & on y donnera les plus plaufibles cou-
leurs & avantages. Et qui fçait fi l'on ne mettra pas fur le tapis le vieux
Projet de remettre ce Pais à la France pour un équivalent.
je ne doute point que vous ne comprenniez fort bien de quelle fatale
confequence un tel événement feroit pour nous. Non-feulement les Païs
voifins de Liège, Juliers, Trêves, & Cologne, ne pourront alors éviter de
tomber fous le joug de la France , mais ce qui mérite le plus nos foins &
nôtre attention, la Hollande même, dont les Flottes & les Armées ont
eu fi bonne part parmi les Alliez pour la Sûreté commune, étant expofée
de tous cotez au formidable Pouvoir de la France, courra un rifque évi-
dent , ou d'être par elle foumife , ou du moins d'être réduite à un état de
Vaflelage envers elle.
Les François, étant une fois Maîtres de la Flandre , n'ont pas d'avantage
à faire pour donner un coup mortel à cette République, que de rétablir
le Commerce à Anvers, en forçant une libre Navigation dans l'Efcaut; ce
qui ne laiflera aux Hollandois aucun autre moyen de parer un tel coup,
que de fe mettre fous la Protection de la France , comme aufli d'être bri-
dez d'entrer en aucune Ligue fans avoir l'approbation de cette Cour , ôc
pour la jouiiTance de leur fiorilTant Commerce, mais à condition que la
France aura part dans fes profits, & qu'eux conjointement avec cette
Couronne tâcheront de détruire nos Commerces. Si la France, n'ayant
dans lePaïs-Ras autre Port queDunkerque,a trouvé le moyen d'en tirer de
û grands Avantages, & de le faire tourner fi fort au préjudice de nôtre
Navigation, que faudra-t-il que nous attendions, lors qu'étant en Poiief-
fion du relie des Ports de Mer de Flandres , elle aura ceux de Zelande &
de Hollande fi à fon Commandement, que d'en difpofer avec la même
autorité que s'ils apartenoient actuellement à cette Couronne? Croyez-
vous en vôtre confcience, que nous ferons alors capables de lui faire tête?
Et que fes richeffes étant Ci confiderablement augmentées par le nombre
de fes Sujets, & fon Union avec l'Efpagne le mettant en beau chemin
d'avoir le principal afcendant ou plutôt le Commandement du Négoce de-
puis la Mer Baltique jufques au Levant & aux Indes, nous puiffons trou-
ver un fuffifant Rempart dans nôtre Flotte, qui feroit alors le feul qui
nous refteroit pour réfiiler à une PuilTance fi formidable tant par Terre
que par Mer ?
Nous avons certaines Gens en Angleterre, aiTez extravagants pour s'i-
maginer, qu'avec une bonne Flotte nous n'avons rien à craindre quand tout
îe Monde feroit contre nous, laquelle opinion les jette dans cette Maxime
très dangereufe , §)ue nous ne devons pas nous mêler abfolument de ÎEtat des
thofe* étrangères, pas même parmi nos plus proches Foi fins. Mais, après l'Ex-
périence de la dernière Guerre, il fembleroit fort inutile de réfuter une
Erreur fi mal-fondée. Nous ne le trouvons à prefent que dans les bou-
ches de quelques Proteflans mal-intentionnez par certaines veues obliques
qui font connues à chacun , ou dans celles des Papilles ouverts , qui fe-
roient
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
44)-
roient bien-aifes de voir la Religion Proteftante, & Ton Intérêt, tout à fait
oppreiïes parmi nos Voifins, auiïi-bien que leurs Loix & leurs Libertez,
en efperance de voir par-là exécutée bien-tôt après la même chofe en An-
gleterre , l'une étant une confequence aparente de l'autre. C'elt ce dont
les repréfentatifs de la Nation étoient fort fenfibles dans la dernière Guer-
re, & qui les porta à faire de tels efforts, afin de montrer qu'ils n'avoient
pas moins de pénétration à juger de nos Dangers , que de zèle & de
promptitude à les prévenir. Us étoient pleinement convaincus que l'inté-
rêt, auffi-bien que la gloire de l'Angleterre, confiile à garder l'équilibre
de l'Europe entre nos mains, qui tire après foi une néceffité indifpenfa-
ble de nous intereffer dans ce qui y arrive. Us étoient perfuadez que la
Nation ne pouvoit pas continuer fon Négoce en tant de Places , & que
pour cet effet il falloit faire beaucoup d'Alliances, que par conféquent nô-
tre véritable Intérêt nous obligeoit de maintenir & d'obferver fidelle-
ment. Si d'un côté ils croyoient être de leur devoir d'aider & fécourir
leurs Alliez, ils étoieut de l'autre fort éloignez de méprifer les Secours
qu'on pouvoit tirer d'eux. Us confentirent fans aucune difficulté à la
jonétion de la Flotte Hollandoife avec la nôtre , étant bien perfuadez
qu'elle augmentoit beaucoup nos Forces & nôtre PuifTance. En un mot,
toute leur conduite fit voir clairement, qu'ils étoient entièrement perfua-
dez que comme £ Europe ne fauroit être garantie de ÏEfc lavage fans un Se-
cours effectif de î Angleterre ^ aufli l'Angleterre ne fauroit échaper, fi le reite
de l'Europe y tombe.
Et cependant c'eit une extrémité où nous nons verrions bien-tôt ré-
duits, fi la France étant en poiTeffion de la Flandre rendoit un jour les
Hollandois incapables d'être en état de nous fécourir, ou, ce qui eit enco-
re pis, les réduifoit à la nécefiité de fe joindre contre nous pour leur pro-
pre défenfe, & de jetter fur les autres la ruine préfente qui feroit autre-
ment tombée fur eux. Toute communication étant alors coupée entre
nous & l'Allemagne, l'Empire, trouvant de l'impoiTibilité de recevoir au-
cun fecours de l'Angleterre, n'auroit non plus la volonté ni le pouvoir de
faire la moindre diverfion en nôtre faveur. Et, pour comble de nos mal-
heurs, en quel état ferions-nous, fi nôtre Flotte, qui alors feroit nôtre
feul, quoique foible, refuge venoit à être détruite par une Tempête, ou
défaite dans un Combat? J'apelle, Monfieur, à vôtre propre jugement,
fi, après la ruine de nôtre Commerce, nous ferions en état de foutenir
une Guerre contre une Couronne déjà formidable , après une fi grande
Augmentation de fes Forces tant par Mer que par Terre ? Que nos Mar-
chands jugent, fi nous pourrions continuer nôtre Négoce, fi les Ports
de Mer de Hollande, & ceux d'Efpagne, tant dans le vieux que dans
le Nouveau Monde, nous étoient fermés ? Quand la France , étant Mai-
trefie des Tréfors du Pérou & du Mexique , en feroit un tout au-
tre u fa ge, que celui que l'Efpagne en a fait ? En peu de mots, quand
nos Navires marchands , noslfles, & nos Plantations, feroient expofées
à la diferetion de ces nombreufes Flottes, tant de VauTeaux de Guerre
Kkk 3 que
PE.
446 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Amnus que d'Armateurs , avec lefquelles cette Puiffance couvrirait alors les
gfn.de Mefs? S'il étoit necelTaire d'entrer dans un plus grand détail pour prou-
ver une vérité fi palpable, je pourrois aifément demonftrer, que fur le pied
que les chofes feraient alors, on pourroit nous empêcher la Liberté de la
Mer Baltique, aufîi-bien que celle de la Méditerranée, & de négocier
nous-mêmes en Efpagne, Italie, au Levant, & aux Indes. Que le Por-
tugal n'ôferoit recevoir nos Navires dans fes Havres, ou, ce qui eft en-
core plus à craindre, ferait en danger d'être réuni, ainfi qu'il a été ci-de-
vant, à la Couronne d'Efpagne. Que la ruine de nos iManu factures fui-
vroit bien-tôt celle de nôtre Navigation. Mais , ceci elt trop clair pour
que j'y infifte davantage.
Peut-être vous êtes prêt de me repondre , que ces chofes ne peuvent pas ar-
river fans fuppofer l'Union de V Efpagne avec la France , ce qui ne femble pas
devoir arriver , £5? quil y a à efperer que le nouveau Roi deviendra bien-tôt un
fort bon Efpagnol. Mais , plutôt, n'eft-il pas plus vrai-femblable, que ce Prin-
ce fuivra au fond l'humeur & les directions de la France dans le manie-
ment de fes Affaires, & que le Duc d'Harcourt fera du fecret & du pro-
fond de fes Confeils? Je puis ajouter, qu'un faux zèle de Religion, dont
les maximes font aveuglement fuivies par la France, & qui ne prévaut pas
moins en Efpagne , fera un fort puifîant motif pour unir enfemble. ces
deux Couronnes dans des mêmes mefures & des mêmes intérêts , &
les exciter à la ruine de ceux qui paflent parmi eux pour Hérétiques;
particulièrement, lors que cela leur fera projetter de faire entre eux tout le
Négoce de l'Europe. D'ailleurs, il eft plus que probable, que les Grands
d'Efpagne s'étant déclarés fi ouvertement contre les Prétenfions de FEm-*
pereur , & qui par cette raifon ne peuvent pas être bien vus à la Cour de
Vienne, fe jetteront tous enfemble dans les Intérêts de la France. Je de-
mande donc, fi, pendant que nous fommes menacés d'un Danger fi grand
& (ï aparent, il faut que nous attendions tranquillement nôtre Deftinée,
fans nous fervir des Remèdes qui font encore en nôtre pouvoir pour nous
munir contr'eux?
11 n'y a pas d'autre moyen, pour nous pour détourner ces malheurs, qu'en
nous mettant ( avec la Hollande ) dans une bonne pofture de defenfe.
Ceci de foi-même donnera encore quelque crainte à la France, & l'ob-
ligera de garder des mefures avec nous; autrement, il faut nous attendre
à de telles infractions & nouveautez capables de nous jetter enfin dans
une malheureufe Guerre; & le meilleur moyen ,pour l'éviter, eft de fai-
re voir que nous fommes difpofez à Toccafion de la faire avec la plus
grande vigueur. Si quelque chofe eft capable d'ouvrir les yeux aux Ef-
pagnols , & de leur faire écouter leur véritable Intérêt , qui eft de fe
maintenir avec l'Angleterre & la Hollande fur le même pied que dans lés
Règnes précédens , ce fera de leur faire connoitre que nous avons la vo-
lonté & le pouvoir de prendre garde à nous, & de foutenir effectivement
nos Alliez. Sans cela, il faut qu'ils fe tiennent attachez à la France, &
nous laifleront le déplaifir de les y avoir obligez. Si nos préparatifs pre-
itn-
DE
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 447
viennent une Guerre, pouvons -nous fouhaiter un plus heureux fuccès Affaire*
d'eux? Mais, s'ils ne peuvent pas empêcher que nous foyons attaquez, ne G™
deviennent -ils pas alors abfolument neceflaires pour nôtre deffenlè ?
Selon les circonftances préfentes que nôtre Négoce ne court pas un
petit rifque, j'efpére que vous m'accorderezmie nous fommes dans une
obligation indifpenfable d'avoir une bonne frotte en Mer, & qu'il n'elt
pas moins neceffaire de maintenir le crédit public de la Nation, en feu-
lant bons les fonds qui n'ont pas été fuffifants. Mais , ce qui doit être te
foin principal de cette Nation, nous devons donner toutes les démon-
ftrations poilibles d'une entière Confiance au Roi, & donner à connoitre
au Monde dans la manière la plus authentique que nous pouvons, que
nous ferons toujours prêts de concourir avec lui & de le féconder de tout
nôtre pouvoir dans les engagemens où il trouvera necelTaire d'entrer dans
les Pais Etrangers pour la fureté & le falut de fon Peuple.
Pour grands que nos Dangers puiffent paroitre, nous avons cependant
ceci à préfent pour nôtre confolation, que nous ne manquerons pas de
Pouvoir pour nous aider pendant que nous avons ce fameux Prince, qui
occupe fi glorieufement le Throne à la tête des Affaires. Il efr. impoiïi-
ble de réfléchir même fur ces Malheurs dans lefquels la préfente fituation
des Affaires va inévitablement enveloper l'Europe en gênerai, & l'An-
gleterre en particulier, fans trembler, fi nous étions à préfent deflituez
de l'ineflimable avantage de fa prudente Adminiftration. Nous n'avons
rien moins qu'un Prince qui a un û grand crédit & pouvoir dans toutes
les Cours d'Allemagne, qui a une fi grande autorité en Hollande, & ain-
û eft très-propre à cimenter une Union entre nous & cette République ,
qui eft plus que jamais neceffaire pour pouvoir réellement pourvoir pour
la fureté commune. Et puis que l'expérience paffée de fon Règne nous
fait voir que Dieu nous a accordé & confervé ce Prince pour nôtre déli-
vrance en tant de preffants Dangers & Difficultez, profitons de tout nôtre
mieux du tems que Dieu referve encore pour lui dans fes Tréfors. Fai-
fons voir à toute la Chrétienté par nôtre zèle & nôtre courage , en foute-
nant un auffi digne Chef, que nous ne fommes pas une Nation dont on
doive négliger l'Alliance, ni méprifer l'Inimitié. Je fuis, Monfleur, &c.
A Londres le 1.(12.) Décembre 1700.
Aile de Renonciation fait le 2. de Juin de VAn 1660. a Font ara-
ble-y par Madame Marie-Thereje Infante d^Efpagne promije
au Roy Très-Chrétien ^ tant de ce qui lui pourvoit
toucher de la Légitime , comme de tout T Héri-
tage du Roy Catholique.
M
Ad a me Marie -Therefe Infante des Efpagnes, & par la grâce de
Dieu Reine future de France, Fille aînée du très-Haut, très-Ex-
cellent
1/JlUKO-
Pf..
44g MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aff.ukfs cellent & très-Puiflant Prince Philippe quatrième par la même grâce Roy
gf.v. de Catholique des Efpagnes Monfeigneur, & de la très-Haute, très-Excel-
lente, & très- PuifTante Princeife Madame Ifabelle Reine Catholique qui
foit en gloire- par cet lnflrument & Acte de Renonciation, & du fur-
plus qui y fera contenu , fok notoire <Sc manifefte a ceux qui en auront
connoiflance, en quelque façon que ce foit, que parles Articles i. & 4. du
Traitté de mon Mariage promis avec le très-Haut, très-Excellent, & très-
PuifTant Prince Louis XIV. Roi Très-Chrétien de France , conclu dans
rifle nommée des Faifans dans la Rivière Vidaflba, du refïbrt de la Pro-
vince de Guïpufcoa & confins de ces Royaumes avec celui de France, le
feptième Novembre de l'année paiTée 1659. il a été réfolu & arrêté que
îe Roy Monfeigneur ( à caufe & au regard de ce Mariage, & afin que j'y
porterois mon Dot & mes Biens propres ) a promis qu'il me donneroit
cinq cent mille écus d'or au Soleil , qui fe payeroient & delivreroient au lieu ,
&aux termes fpécitiez dans ledit Article au Roy Très-Chrctien, ou à la per-
sonne qui auroit fon pouvoir, & qu'avec iceux je me devrois contenter,
& tenir pour contente de tous, & quelconques Droits, & Actions qui
m'appartiennent, ou pourroient appartenir à prefent ou à l'avenir, fur
les Biens & Hoirie de la Sereniffime Reine Madame Ifabelle ma Mère,
& fur la future Succeiîion du Roi Monfeigneur, ( que Dieu ait en fa gar-
de) fur tout ce qui me pourroit competer & appartenir comme à Fille,
& Héritière de leurs Majeftez Catholiques, & pour leur Droit, & Chef,
& pour quelconque autre titre penfé , ou non penfé , fçû, ou ignoré,
tant pour la Ligne Paternelle, que Maternelle, droite, ou tranfverfale,
médiatement & immédiatement, & que devant de célébrer le Mariage
par parole de prefent j'aurois à céder & renoncer tous mes Droits, &
Actions au Roy Monfeigneur, & aux Perfonnes qui auront la fienne, &
que Sa Majefté voudra, & aura agréable, ainfi qu'il eft ftipulé & déclaré
plus particulièrement par les dits Articles 1. & 4. que j'ai lu , & ouï lire
plufieurs fois devant que de confentir à ce que l'on formeroit cet Acte,
îefquels je veux qu'ils y foient inferez & mis de lettre à autre, & de mot
à autre, dont la teneur eft la fuivante,
I I.
Que Sa Majefté Catholique promet, & demeure obligée de donner,
& qu'Elle donnera à la Séréniffime Infante Marie -Therefe, en Dot &
Mariage avec le Roi Très-Chrêtien de France , & payera à Sa Majefté
Très-Chrétienne , ou à qui aura fon pouvoir & commiflion, cinq cent
mille écus d'or au Soleil, ou leur jufte valeur dans la Cité de Paris, &
cette Somme fe payera en la façon fuivante ; le tiers au tems de la con-
fommation du Mariage, l'autre tiers à la fin de l'Année après ladite con-
fommation, & le dernier tiers fix mois après; de forte que l'entier paye-
ment de la dite Somme de y 00. mille écus d'or au Soleil fe fera dans dix
huit mois , aux termes & portions qui font fpecifiées.
IV.Que
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 445>
Affaires
I V. GEN- DK
Que moyennant le payement effectif à Sa Majeflé Très-Chrctienne, ou
à la Perfonne qui le devra recevoir par Ton ordre, defdits fooooo. écus
d'or au Soleil , ou leur jufte valeur , dans les termes fufmentionnez, la Se-
reniffime Infante Madame Marie - Therefe aura à le contenter, & fe con-
tente avec le dit Dot , fans qu'il lui refte aucun recours , action , ni droit,
pour demander , ou précendre qu'il lui appartiendroient , ou pourroient
appartenir d'autre Bien , ou Droits fur les Hoiries de Leurs Majeftez Ca-
tholiques {es Parents, foit au regard de leurs perfonnes , foit en quelcon-
que autre façon, ou quelque autre titre, fçû ou ignoré, parce qu'elle doit
demeurer exclue de tout s Droits de quelconque condition , nature, ou qualité
qu'ils [oient, & devant 'd'effecluer les fiançailles, elle en fera Renoncia-
tion en forme avec toutes les afîurances, fermetez , & folemnitez qui font
requifes & necelTairesi ce quelle fera avant de fe marier par paroles de
prefent , & après elle l'approuvera, & ratifiera conjointement avec le
Roi Très-Chretien , auffi-tôt qu'elle aura célébré fon Mariage, avec les
mêmes aiîiirances & folemnitez, avec lefquelles elle a.ura fait la première
Renonciation & celles qui fembleront plus convenables & neceffaires ; à
quoi doivent demeurer , & demeurent obligez dès à préfent & pour lors
Sa Majefté Très- Chrétienne, & fon AltefTe, & qu'en cas qu'ils ne faffent
pas la dite Renonciation , elles les tiennent pour faites, & expédiées dès main-
tenant pour lors , feulement en vertu de ce Traitté : lefquelles devront être en
la forme la plus efficace & convenable que faire fe pourra pour leur vali-
dité, & fermeté, avec toutes les claufes, dérogations , & abrogations de
toutes quelconques Loix, Ufages , ■& Coutumes, Arrêts, & Conftitutions
y contraires, ou qui l'empêchent en tout, ou en partie, auxquelles à cet
effecl: leurs Majeflé s Catholique £s? Très-Chrêtienne doivent déroger, & que
Von entendra demeurer derogées dès à prefent pour lors par l'approbation quelles
feront de ce 'Traitté.
Et comme, par la grâce de Dieu, je me trouve en âge majeur de plus
de vingt ans, & que dans peu de jours, s'il plait à Dieu, nôtre maria-
ge fe doit effectuer par paroles de prefent, & que je fuis certaine, ad-
vertie, & informée à mon entière fatisfaclion de la fubltance & effet
defdits Articles, & reconnois , & ai reconnu, que de la future Succefïion
du Roi Monfeigneur, & de l'Hoirie de la Serenifîîme Reine ma Mère, il
ne me pouroit competer, ni appartenir en rigueur, pour héritage & lé-
gitime ladite Somme de joo. mille Ecus d'or au Soleil & que quand mê-
me elle me pourroit appartenir, c'eil un dot fort compétent, & le plus
grand que l'on ait donné jufques à prefent à aucune Infante d'Efpagne,
& que le Roi Monfeigneur s'eil incliné & porté à me le donner fi grand
pour me gratifier , & en confideration & contemplation de la perfon-
ne du Roy Tres-Chrétien , afin que par le moyen de ce Mariage l'on ob-
tiendroit les effets mentionnés dans le dit Traitté de Mariage, lefquels
Tome XL LU font
l'Euro-
pe.
PE.
450 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires font fi importants au bien public de la Chrétienté, & au contentement
gkn. df. <% fatisfaftion de ces Royaumes-ci. Partant de ma certaine fcienee , &
fçavoir, d'agréable & fpontanée volonté J'aprouve & veux , que l'on ob-
ferve & accomplifle ce qui a été refoiu, & arrêté par lefdits deux Arti-
cles, & que l'on entende, que ce Mariage fe devra conclurre & effec-
tuer fous les conditions y contenues, & déclarées, & que fans icelles con-
ditions il n'auroit pas parvenu à l'état où il efl ce jourd'huy , & dès
maintenant je me tiens pour contente, & pour payée entièrement, &
abfblument, &. fatisfaite de tout ce qui m'appartient, ou pourroic appar-
tenir, à prefent ou à l'avenir, par quelconque droit fceu ou ignoré, de
la future Succeflion & Hoirie de Leurs Majeflés Catholiques mes Parents,
& à caufe de la légitime Paternelle & Maternelle, ou pour leur Supplé-
ment ou à caufe des Aliments, ou de Dot, tant des Biens libres comme
de ceux de la Couronne de leurs Royaumes, Etats, & Seigneuries, fans
qu'il me refle à moy, ou aux miens, aucune acfion ou recours contre Sa
Majeité, ou fes Succeffeurs, pour demander ou prétendre que je devrois
avoir une plus grande Somme, ou portion de plus grande valeur, & im-
portance que lefdits 500. mille Ecus; & je veux que cette Renonciation
s'entende auifi de quelconque autre drok, où aclions, qui me pourroient
competer ou appartenir par Hoirie, ou Succeffion jde quelque droits,
ou Parent de lignée droite ou tranfverfale par tête, ou par perfonnes,
comme à fille de Leurs Majeflez, & que je les abandonne & quitte tous
les uns fj? les autres , de quelconque condition, nature , qualité , valeur , & im-
portance qu'ils [oient , £5? les cède , renonce , & tranfporte au Roy Aîonfeigneur &
à fes Héritiers , £5? Succcjfeurs univerfds & finguliers , le/quels auront fon
droit , & afin qu'il en puilfe difpofer comme il lui plaira, & que bon lui
fembiera,tant par donation entre vifs, comme parTeftament, & derniè-
re volonté, fans que Sa Majefté foit obligée de minflituer , ou laijfer fon hé-
ritière , ou légataire, ou de' faire mention de moi , par ce que pour lefdits ef-
fets je' me déclare, & dois être teniie & réputée pour Etrangère , & com-
me à telle il ne m'y doit demeurer aucun recours, afin de pouvoir récla-
mer, ou propofer quelque complainte, nonobflant que l'Hoirie que lair-
ra la Majeité de mon Père, foit tres-opulente, & de Ci grande valeur,
& importance que d'icelle , & comme un des Enfans , que nous fommes
à prelent , ou ferons à l'avenir , il m'en pourroit appartenir une Somme
plus grande, & plus haute , que celle des dits joo. mille écus, pour fi grand,
£5? extraordinaire que foit f excès; & encore que le cas arriveroit (ce que
Dieu ne permette pas) qu'au tems de fa mort je demeurrois, & viendrois
à être fa fille unique , à caufe que mes Frères, & les autres fiens dépen-
dants légitimes feroient morts auparavant, afin qu'en nul cas, ni pour aucun
événement l'on ne puilfe demander ni prétendre pour moy, ou en mon
nom, ni fur le droit de ma perfonne, aucune autre portion plus grande
de légitime des B ens & Hoiries du Roy mon Seigneur, je promets qu'en
nul tems, ni pour aucune raifon , fous quelconque prétexte que ce foit,
je ne confentirai ni permettrai, que l'on agiiTe contre cette mienne Re-
noncia-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 4;i
nonciation & defiftance que je fais de mes dits droits , actions , ou pre- Avvkirm
tendons; & je defifte conjointement, & renonce à tous, £5? quelconque gen-de
rei/.edc ordinaires & extraordinaires , qui m'appartiennent, ou pourroient lEuro°
appartenir par droit commun, & loix de ces Royaumes, ou par fpecial
Privilège, & particulièrement à celui de la Refiitution in Integrum , fondée
fur le manquement de mon âge , ou fur dire que le dot auroit été caufe de ce
Contrat! , ou fur l'incertitude de ce que je renonce , afin que nul defdits re-
mèdes, & recours fufmentionnés me fervent, ou puiïTent fervir en voye
de Juitice , ou en conteilation, ni que par iceux moi & mes Enfans &
Héritiers puiiîions y être oiiis, & admis, & que l'on nous en dénie ôc
ferme l'accez, pour les pouvoir déduire & propofer judiciellement , ou
extrajudiciellement, ni par voye de grief, ou de recours, ou de fimple
complainte, ainfi que toujours, &en tout tems , l'on obferve & accom-
plhTe ce qui eit difpofé par les dits Articles fufmentionés , & ce que j'ai
promis par cet Acte touchant leur Confirmation ôc Approbation , & pro-
mets en foi de ma Parole Royale , qu'il fera maintenu , accompli , &
obfervé en tout tems inviolablement , fous l'obligation que je fais de mes
Biens & Rentes que j'ai, & aurai, &je donne pouvoir au Confeil de Sa
Majeflé, & aux Seigneurs Rois fes SuccelTeurs , & aux perfonnes aux
quelles ils enchargeront l'exécution de cet Acte, à ce qu'ils Je faifent ob-
ferver & exécuter, & pour plus grande validité, je jure par les Saints
Evangiles contenus dans ce Miflel , (fur lequel je mets ma main droite)
qu'en tout tems, & autant qu'il pourra dépendre de moi, je l'obferverai,
& accomplirai, fans dire, ni alléguer que pour le faire, & accorder, j'ai
été induite, attirée, ou perfuadée par le refpect, ou vénération que je
dois & porte au Roy mon Seigneur, lequel m'a tenu, & me tient en-
core fous fa puilTance Paternelle; d'autant que je déclare que Sa Maje-
flé s'eil toujours remife à mon franc arbitre , & volonté , & que je
l'ai eu libre, & nullement refpective en tout ce qui a touché à ce Con-
tracta & je promets de ne point demander Difpenfe 'de Serment à nôtre
trelTaint Pere& au Saint Siège Apoftolique, ni à fon Nonce, & Légat à
Tatere , ni à autre Perfonne qui ait pouvoir ou faculté de me l'octroyer,
& que fi elle venoit à être demandée à mon inftance, ou de quelque Per-
fonne tierce, ou à être octroyée, motii proprio , je n'en ulerai point, ni ne
m'en prévaudrai , encore que ce ne feroit feulement que pour entrer en ju-
ftice , fans toucher à la force & fubftance des dits deux Articles de Ma-
riage, ni à celle de cet Acte que je fais pour les confirmer, nonobltanc
que ce foit avec quelconque claufe dérogatoire de ce Serment. Et en
cas que l'on me l'accorde , une ou plufieurs fois, je fais de nouveau d'au-
tres Serments , & tant qu'il y en demeure toujours un fur toutes les di-
tes Difpenfes, & fur le même je déclare & promets, que je n'ai fait, ni
ferai , aucune proteftation , ni réclamation , en public, ou en fecret , contrai-
re à cette mienne promefie & obligation, pour l'afFoi'blir, ou diminuer
fa force, & que fi je venois à la faire, encore que ce fut avec un autre
Serment contraire à celui-ci, qu'elle ne me puiiîe point fervir, ni être
LU 2 d'au-
Aekaires
GEN. DE
x. 'Euro-
pe.
4f2 MEMOIRES , -NEGOCIATIONS , TRAITEZ, ET
d'aucun avantage , & je promets , & m'oblige , qu'auffiiôt que l'on
m'aura menée , & que je ferai en Compagnie du Roy Très-Chrêtien , en
fuitte des dits Articles , ferai conjointement avec fa Majeflé un autre
Aéte , avec toutes les Claufes , Serments , & Obligations neceflaires .,
avec infertion & ratification de celui-ci, qui a été fait en cette Cité de
Fontarabie, où fe trouve à prefent le Roy Mon Seigneur avec fa Cour,
& Palais, le z. jour du mois de Juin de cette année \66o. en prefence
du Roy nôtre Maître, lequel en continuation de l'O&roy fufmentionné
dit, que Sa Majeflé Catholique fupleoit avec fa Royale authorité, & vou-
Joit que l'on tint pour fuppléez quelconques défauts , ou omiflions de
fait, ou de droit, de fubitance , ou de qualité, de ltile, ou de Coutu-
me, qu'il y pourroit avoir dans la formation de cet Acle de Renoncia-
tion , des Légitimes ,. & futures Succeffions qu'a fait & accordé la Sere-
niflime Infante Reine promile de France, fa très-chere très-aimée Fille,
& que de fa pleine & abfoluë puiflance comme Roi, qui ne reconnoif-
foit aucun fuperieur dans le temporel, elle la confirmoit, & approuvoit,
<& la confirma , & approuva avec dérogation pour cette fois de quelcon-
ques Loix, Ordonnances, Ufages , & Coutumes qu'il y auroit au con-
traire, lefquels pourroient empêcher fon effet & exécution, & pour plus
grande affurance commanda que l'on le fcelleroit avec le Scel Royal, er-
rant témoins à ce' appelles & requis , Don Louis Mendez de Haro, Mar-
quis del Carpio, Conte Duc d'Olivares; Don Ramiro Nunez de Guz-
man, Duc de Médina de la Torres ; Don Gafpar de Haro, Marquis de
Eliche ; Don Jean Dominicq de Guzman, Comte de Monterey ; Don
Diego de Aragon, Duc de Terranovaj Don Guillen Ramon de Monca-
da , Marquis de Aytona ; Don Pedro Puerto Carrero , Comte de Medel-
lin :, Don Pedro Colon de Portugal , Duc de Veraguas; Don Antonio
de Peralto Hurtado de Mendoza , Marquis de Mondejar ; Don Alonfo
Perez de Guzman, Patriarche des Indes; Don Alonfo Perez de Vivero,
Comte de Fuenfaldagne du Confeil d'Etat ; Don Jean de Caravajal, 6c
Sardi du Confeil & Chambre; Don Diego de Tajada Evêque de Pampe-
îune , & plufieurs autres Seigneurs & Cavaliers qui fe trouvèrent pre-
fens. Etoit ilgné, JE LE ROY, MARIE-THERESE.
Je Don Fernando de Fonfeca Ruiz de Contreras , Marquis de la Lipaî-
îa, Chevalier de l'Ordre de Saint Jaques, des Confeils de Guerre, des In^
des, & Chambre d'icelles de Sa Majeflé Catholique, Secrétaire d'Etat,.
& de la Dépêche Univerfdle , & Notaire dans fes Royaumes & Seigneu-
ries, qui ai été prefent au Serment, Oclroy, & à tout le furplus ci-deïTus
contenu, en fais foi, & que les dits Articles 2. & 4. du Mariage ainfi
qu'ils font ci-deffus mentionnés, ont été tirez fidellement, & collation-
nés avec l'Original qui eft en mon pouvoir. En témoignage de vérité
je l'ai figné & foufcript de mon nom. Don Fernando de Fonseca Ruiz
de Contreras.
Le Roi Catjiolique Mon Seigneur , ayant été fervi de réordonner à
moi
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 1. 4Si
moi Don Blafco de Loyola , Commandeur de Villarubia de Ocava , de Affaits-s
l'Ordre & Chevalerie de Saint Jaques, de ion Confeil ,. &. ion Secrétaire Gy-N- DE
d'Etat, que je ferois faire la copie ci-deffus écrite de la Renonciation, que lEUiîo*
la Dame Infante Madame Mane-Therefe fa Fille ce jourd'hui Reine de "
France fit, & oclroya devant le Sieur Don Fernando de Fonfeca Ruiz de
Contreras, Marquis de. la Lapilla, Chevalier de l'Ordre, de Saint Jaques
des Confeiis de Guerre , des Indes, & Chambre d'icelles de Sa Majeflé
Catholique, Secrétaire d'Etat, & de la Dépêche Univerfelie, & Notaire
en fes Royaumes & Seigneuries, des Légitimes Paternelle & Maternelle,
pour envoyer au Seigneur Don Eflevan de Gammera fon AmbafTadeur
aux Etats Généraux des Pais-Bas, & l'ayant ainfi exécuté, je certifie que
cette Copie accorde avec flnflrument Original , .qui demeure en mon pou-
voir , avec lequel elle a été collationée ■■, & afin qu'elle confie , je la
figne de mon nom, & elle va fcellée avec le. Seel Royal fecret , le-
quel eft auifi en mon pouvoir. A Madrid le 16. de Juillet 166$. étoic
figné Don Blasco de Loyola. Et au côté le Seel de. Sa Majeflé fur
une Holtie rouge.
Madame Marie-Therefe Infante des Elpagnes , & par la grâce de
Dieu Reine future de France , Fille aînée du très-Hauit , très-excel-
lent, & tres-Puiffant Prince , Don Philippe quatrième , par la même
grâce Roi Catholique des Efpagnes mon heigneur , (que Dieu ait en
là garde , & profpere tres-heureufement) &. de la tres-liaulte , très-
Excellente , & tres-Puiffante Princefle Madame Ifabelle Reine Catholi-
que, de glorieufe mémoire , ma Mère & Dame (qui eil au Ciel) par
la relation & notice de cet Infiniment, & acle d'approbation , confir-
mation & ratification , & du fur-plus qu'il s'y contient , & afin qu'il
demeure en éternelle mémoire , je fais notoire &. manifefle au Rois ,
Princes, Potentats, Republiques, Communautés, & Perfonnes particuliè-
res, qui font ou feront aux fiecles à venir, que d'autant que le tres-
Hault , très-Excellent , & tres-PuiiTant Prince Louis quatorfieme Roi
Tres-Chrêtien de France, mon Coufin Germain, & en fon nom & avec
Ambaflade particulière le Marefchal Duc de Grammont demanda &
propofà mes Françaiiles & Mariage pour le dit Roi Tres-Chretien mon
Coufin au Roi Catholique, mon Seigneur, & que Sa Majeflé Catholique
faifant une juile eflime de cet office & proportion , & ayant les égards
deus aux fujets de décence, égalité, & convenances publiques, qui con-
courrent en ce Mariage, l'accorda & y confentit, ayant à précéder la dif-
penfe de fa Sainteté pour le Parentage & Confanguinité que j'ai avec le
Roi Tres-Chrétien mon Coufin, & que par après enfuite de cet Oclroy &
Accord, & avec pouvoir des deux Majeflez Catholique & Tres-Chrê-
tienne l'on a arreflé , & figné nôtre Traitté de Mariage le 7. Novembre
de l'année paffée 1659. dans rifle nommée des Faifans , fituée fur la Ri-
vière de Vidaffoa du reffort de la Province du Guipufcoa , & confins de
ces Royaumes avec celui de France , & que dans les Articles 5. & 6. du
dit Traitté il a été refolu, & arrêté de commun accord, & de même vo~
LU 3 leru
PE.
4f4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires lonté, & comme une chofe tres-convenable, après l'avoir confiderée at>
gf.n. de tentivement , & avec meure délibération, que moi & les Enfans & Def-
l'Euro- cencjarits, qUe Dieu nous donnera de ce Mariage , foyons & demeurons
inhabiles & incapables, & abfolument exclus du Droit & Efpoir defucce-
der à aucuns des Royaumes, Etats, & Seigneuries, dont fe compofe cette
"Couronne & Monarchie d'Efpagne, & à ceux qui s'y pourroient agréger
par Sa Majefté Catholique, & (après fes longs & heureux jours) par les
Rois fes Snccefleurs \ & quoi que pour s'être réduit à paélion conventio-
nelle par des Princes & Rois Souverains (lefquels dans le temporel ne re-
cognoiiTent aucun /uperieur) par grâce, & en faveur de la caufe publi-
que des deux Royaumes , & en condefcendant à ceci avec le defir ,
& fouhait commun de leurs fujets , vaiTaux , & naturels , qui veuil-
lent , qu'il ait la force , & vigueur de Loi , & Sanction Pragma-
tique ; & qu'elle foit receuë & obfervée comme telle , & pour ce
fujet il fembloit, que pour fa fermeté il ne feroit pas befoin d'aucune au-
tre folemnité, mais toutefois leurs Majeftez voulurent, que fi mon appro-
bation pouvoit être convenable pour quelque confideration , je l'aurois à
faire incontinent, que le cas arriveroit, que le mariage accordé fe devroit
célébrer, & contracter par parolles de prefent , & que mon approbation
fut avec toutes les claufes & folemnitez necefTaires , félon , & comme il
efl ftipulé & déclaré, particulièrement par l'Aéte de dix Articles dont la
teneur du $.. & 6. tirée de fon Original efl inférée ici de mot à autre, &
efl la fuivante.
V.
Que d'autant que Leurs Majeftez Catholique, & Très- Chrétienne, ont
confenti & confentent à ce Mariage , afin de rendre perpétuelle par ce
lien, & aiïurer davantage , la Paix publique de la Chrétienté , & l'amour
& fraternité qui fe fouhaite entre Leurs Majeflés , & en confideration des
jufles caufes , qui font cognoître & perfuadent les convenances dudit
Mariage, moyennant lequel &. avec la faveur & grâce de Dieu , on peut
efperer des heureux fuccés au grand bien &accrohTement de la Foi & Reli-
gion Chrétienne, & au bénéfice commun des Royaumes, fujets, & vaf.
faux des deux Couronnes; eu égard à ce qu'il importe à l'Etat public, &
à leur confervation , qu'étant fi grandes, elles ne viennent pas à fe join-
dre , & que l'on prévienne les occafions qu'il y pourroit avoir de les join-
dre, & en confideration de l'égalité, & autres jufles raifons , l'on arrêta
par Accord conventionel , que Leurs Majeflés veulent, qu'il ait force & vi-
gueur de Loi érablie en faveur de leurs Royaumes, & l'intérêt public d'i-
ceux , que la Seremffime Infante Madame Marie-Therefe, & les Enfans
qu'elle aura, maies ou femelles, & leur Defcendants tant fils ainez, com-
me i. 3. & 4. & de là en avant en quelconque degré qu'ils fe trouvent;
pour toujours, & à jamais, ne puiffent fucceder, ni fuccedent aux Royau-
mes, Etats, & Seigneuries de Sa Majefté Catholique, fpecifiés dans ce
Trait-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. T. jjff
Traitté, ni aucun de tous les autres Royaumes, Etats & Seigneuries, Pro- Affaires
vinees; lfles adjacentes, Fiefs &Frontiers, que Sa Ma- GRN- DIi
jSîé Catholique a , & poflfede à prefent , & qui lui appartiennent, ou 3L^^ui"
puiffent appartenir, tant en Efpagne que hors d'icelle, & qu'à l'avenir Sa *"
Majcilé Catholique, & Tes Succeiîeurs auront, poiTederont, & qui leur ap-
partiendront, nia tous ceux y compris, inclus, & aggregez à iceux , ni
à tout ce qui s'acquerra en quelconque temps que ce ibit , & s'accroitra
aux dits Royaumes, Etats , & Seigneuries, & qui fe recouvrera ou y
fera dévolu, pour quelconque tiltre ou caufe que ce foit ou puifTe être,
encore que pendant la vie de la Serenifiime Infante Madame Marie-
Therefe , ou après pendant celles de quelconques liens Defcendants ,
Aines , 2.. ou autres arriveroit ou efchoiroit le cas , & les cas , aux-
quels par Droit, Loix, ou Coutumes defdits Royaumes, Etats, & Sei-
gneuries, & par les difpofitions & tiltres par lefquels on fuccede &
pretendroit y fucceder , la iuceeilion leur devroit appartenir, parce que
Ton déclare dés maintenant que la dite Serenihame Infante Marie-Therefe
demeure exclufe d'icelle, & du Droit, & de l'Efpoir,de pouvoir fucceder
à ces Royaumes, Etats, & Seigneuries, & à chacun d'iceux , & tous fes
Enfants, & Defcendants, Maies & Femelles , nonobstant qu'il diroient,
ou pourroient dire, ou prétendre, qu'en leurs perfonnes ne concourroient,
& ne fe pourroient confiderer les raifons de la caufe publique , ni autres
fur lefquelles fe pourroit fonder cette exclufion, & qu'ils voudroient allé-
guer que la fucceffion de Sa Majefté Catholique, & des Sereniflimes Prin-
ces & Infantes, & des autres Enfants qu'il a, & aura, de tous les légiti-
mes SuccelTeurs (ce que Dieu ne veuille , ni permette) feroit venue à
manquer, d'autant que ce nonobïtant ils ne devront pas fucceder, ni pré-
tendre de fucceder en aucun cas, temps, ni accident, ni événement,
Elle, ni fes Enfants , ni Defcendants , fans avoir égard aux dites Loix,
Coutumes, Ordonnances, & Difpofitions, en vertu defquelles l'on a fucce-
de, & fe fuccede à tous lefdits Royaumes, Etats, & Seigneuries, & à
quelconques Loix & Coutumes de la Couronne de France, lefquelles em-
pêchent cette exclufion au préjudice des fuccefleurs d'icelle , tant à pre-
fent, comme aux temps & cas que la fucceffion fe difrereroit, à toutes Ici-
quelles, & à chacune d'icelles Leurs Majeftez devront déroger , & abro-
ger en tout ce qu'elles feront contraires , & empêcheront le contenu en
ces Articles , & fon accompliiïement, & exécution, & que l'on entende,
que par l'approbation de ce Traitté elles y dérogent, & les tiennent pour
derogées, & que le même foit, & s'entende, que Madame l'infante & fes
Defcendants demeurent exclufe & exclus de pouvoir fucceder en aucun
temps, ni cas, aux Etats, & Païs-Bas de Flandres , & Comté de Bour-
gogne & de Charoîois , avec tout ce qui y eft adjacent & leur apartitn-
nent. Mais auffi on déclare expreffément, que s'il arrivoit (ce que Dieu
n-e veuille, ni permette) que la SerenilTime Infante viendroit à être veu-
ve, fans avoir En fans de ce Mariage, qu'en ce cas elle demeurera libre
de l'Exclufion fufmentionnée , & pourra jouir des Droits de fucceder à
tout
A?*AIRES
GEN. DE
l'Euro-
pe.
4*6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
tout ce qui lui pourroit appartenir en deux cas. L'un, fi elle s'en retour-
nent en Efpagne, étant veuve de ce Mariage, & fansEnfans; l'autre, û
pour convenance du bien public, & pour juftes confiderations , elle fe ma-
rioit du confentement du Roi Catholique Ton père, & du Prince d'Efpagne
fon frère i aux quels cas elle demeurera capable, & habilitée, à pouvoir hé-
riter, & fucceder.
VI.
Que la Serenifîïme Infante Madame Marïe-Therefe aura à faire dépé-
cher un A été, avant de célébrer & contracter le Mariage par parole de
prefentj s'obligeant pour foy, & fes Succefleurs , à l'accompliffement &
obfervance de ce que deffus, & de fon Exclufion, & de fesDefcendants;
approuvant le tout, félon & comme il eft contenu en ceTrakté,avec les
claufes neceflaires, & ferment, & à ce qu'inférant ce Traitté, & l'Acte
d'obligation & approbation, que Son Al telle aura fait faire , elle en fera
un autre femblable conjointement avec le Roi Très-Chrétien auiîi-tôt qu'el-
le fera mariée avec Sa Majefté , lequel devra être enregistré , & paifé
par le Parlement de Paris en la forme, & avec les Claufes accoutumées,
& Sa Majefté Catholique devra approuver ladite Renonciation & Ratifica-
tion en la forme, & avec les Claufes accoutumées & autres neceffaires, la
faifant aufîi paffer & enregiftrer par le Confeil d'Etat, & les dites-Renon-
ciations & Approbations étant faites, ou obmifes de faire , dès à prefent
en vertu de ce Traitté, & du Mariage qui s'en-fuivra en vertu d'icellui,
on les tient pour faites & expédiées , & pour pafTées , & enregift: ées
par le Parlement de Paris par la Publication de la Paix en ce Royau-
me-là,
Et d'autant qu'après le Traitté fufmentionné , nôtre très Saint Père
Alexandre VIL a difpenfé pour les Degrez de Parentage , qu'il y a entre
ledit Roi Très-Chrêtien & moi, & approuve par fon autorité & bénédic-
tion Apoftolique nôtre Traitté de Mariage , & les Articles , & que le cas
& temps eft venu, que le Mariage fe doit célébrer, & contracter avec
la bénédiction de Dieu, & à ce que l'on doit efperer pour fa gloire & fer-
vice, exaltation de la Saincte Foi, & tranquillité de la République Chré-
tienne; moyennant quoi le cas & temps eit auffi arrivé, que je dois ac-
complir pour ce qui me touche (avant mes Epoufailles & Mariage) le
contenu aux Articles 5. & 6. qui font inferez en cet Acte, & qu'il eft
ainfi que je me trouve en âge majeur de 2.0. Ans, & que dans icelle il a
plu à nôtre Seigneur de me donner capacité & difcreiion, pour entendre,
& comprendre la fubftance & l'effcct desdits Articles, dont je fuis certai-
ne & advertie , d'autant que je m'en fuis fouvent informée, & de leur
convenance pendant le temps de ûx mois , qu'il y a que l'on les a arrêtés
& publiés, & qu'ils ont étérefolus & arreftés,& qu'il fuffifoit, afin que j'au-
r-ois la faiis faction que je dois de leur juflificaiion de fçavoir que c'a été
une Affaire examinée & accordée par le Roy Mon Seigneur, lequel fou-
hai«
RESOLUTIONS D'ETAT, M, DCC. I. 4S7
haite & procure mon contentement, & mon bien, avec tant d'amour, & Affais^
de foin, prenant conjointement égard au Public & Commun des Royau- <«*• »■
mes que Dieu luy a enchargé , kfquels & ceux de la Couronne de Fran- lE**°"
ce font égaliement intereffez à ce que la Grandeur & Majeité qu'ils foû- P""'
tiennent , & confervent en eux-mêmes depuis tant d'années , avec tant
de bonheur & de gloire du nom de leurs Roys Catholiques & Très-Chré-
tiens, ne (bit point diminuée, & ne defcheoit point, comme nécessaire-
ment elle fe diminueroit & defcherroit, fi par le moyen, & à caufe de ce
Mariage, ils fe vicndroient à unir, & conjoindre dans quelqu'une des En-
fans & Descendants, dont le fuccès cauferoit aux Sujets & VaiTaux le mé-
contentement & affliction , qui fe peut confiderer , & dont juftement
on pourroit craindre qu'il refulteroit les dommages & inconvénients
qui fe rencontrent & fe reconnoiffent plus facilement avant qu'ils
arrivent, qu'ils ne fe repareroient & remedieroient, après qu'ils feroient
arrivés , & que l'on les auroit expérimentés ; & partant il a convenu
prévenir les remèdes à ce qu'ils n'arriveroient pas , & que ce Mariage ne
foit caufe d'efTe&s contraires à ceux que l'on fè promet, & que l'on doit
efperer, que l'on obtiendra par icelui 5 outre qu'avec cet exemple, & à
fon imitation, on facilitera dorénavant les Mariages réciproques entre
mes Enfans, & Defcendants, & ceux du Roy Mon Seigneur, ce qui
m'eft une confideration de particulière confolation , & contentement,
d'autant que ce fera le moyen d'étroicir & renouveller plufieurs fois le
lien du Sang, & du Parentage , & d'afiurer, & affermir plus fortement
& efficacement les Alliances, Amitiez, & bonne correfpondance, lefqueî-
les ont été liées par de li heureux Principes , & contractées entre ces deux
Royaumes, & fe continueront à la gloire de Dieu, & demeureront glo-
rieufement entre iceux, & les Roys Catholiques & Très-Chrétiens, ce
qui étant le bien Public & Commun fe doit par bonne raifon préférer au
mien particulier, & à celui de mes Enfans & Defcendants ; lequel dans
l'Etat prefent doit être tenu un peu en confideration- d'autant qu'il eft fore
éloigné, ainfi qu'il fe reconnoit. A quoy il concourt pour ma plus grande
fatisfaftion , &Ac~te, que je me conforme, & fuis, en l'accordant, l'e-
xemple de celui qu'o£lroya pour fon Mariage, & avant iceluy , la Très-
Haute, Très-Excellente, & Très-Puiffante PrincefTe Madame Anne Infan-
te dEfpagne, & aujourd'huy Reine Très-Chrétienne de France, & ma
très aimée & révérée Tante & Dame, & qu'outre les confédérations , &
caufes publiques fufmentionées , & celle de conferver & aflurer la Paix en-
tre les deux Couronnes (lefquelles concoururent auiïi, & s'alléguèrent dans
ledit Traité, & Renonciation ) il a concouru dans l'Etat prefent, & a été
confideré comme caufe publique, la plus principale, & la plus grande,
peur la Renonciation accordée dans mon Traité de Mariage, que l'accord
de mon Mariage auroit été notoirement le moyen, & caufe plus principal
le de 1 >. pacification d'une Guerre de vingt cinq ans entre les deux Cou-
ronne , Catholique & Très- Chrétienne ( dans laquelle s'étoient inte-
refTez , par Alliance ou Dependence, les plus grands Potentats de la Chrê-
Tvme XL Mm m tienté)
4?8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires' tienté) & fon bien univerfel & la caufe publique, & fuprême de la Reli-
G,EN- DE gion Catholique ^ le tout ayant pati notablement par la Guerre, & ne
PE.
s'y pouvant remédier que par la Paix accordée par le moyen & à caufe
de ce Mariage, leouel ne s'accorderoit point, & le Roy Monfeigneur
n'y confentiroit point, fans la Renonciation accordée, ainli qu'il a été con-
fideré dans l'Article premier de mon Mariage, & dans le 35. de la Paix
des deux Couronnes , lequel en cette considération fe réfère au Traité par-
ticulier fait fur les conditions de mon Mariage: & tous deux ont été fignés
en même jour & date, & dans ledit Article 33. de la Paix, l'on a décla-
ré que ledit Traité, fait fur les conditions de mon Mariage, nonobfhint
qu'il fût feparé , auroit la même force, & vigueur que celui de la Paix j
comme en étant la partie plus principale , & les Airrhes plus precieufes
pour fa plus grande fureté, & durée. Partant, de mon propre mouve-
ment, libre, fpontanée, & agréable volonté , & ayant certaine fcience,
& connoiffance de l'acte que je fais, & de ce qu'il importe , & peut im-
porter mon confentement, j'aprouve, confirme, & ratifie en la voye &
forme que mieux je puis, & dois, ledit accord félon & de la façon
qu'il eft contenu plus particulièrement dans ledit Article 5. & en cas qu'il
fembleroit necefiaire, & convenable, je donne mon pouvoir abfolu & fuf-
fifant au Roy Mon Seigneur, &au Roy Très-Chrétien, à ce qu'ils le puif-
fent arrêter , & accorder de nouveau. Quoy qu'en vertu & accomplie
fement du dit Article je me déclare & tiens pour exclufe , & éloignée, &
les Enfans & Defcendants de ce Mariage pour exclus & inhabilités ab-
folument, & fans limitation, différence , ou diftinction des perfonnes , de-
grez, Sexes, & temps de l'Action & Droit de fucceder aux Royaumes, E-
tats , Provinces, Terres, & Seigneuries de cette Couronne d'Efpagne ex-
primés, & déclarez par iceluy, & que je veux, & confens pour moy, &
pour leidits miens Defcendants, que dès maintenant comme pour lors
l'on les tienne comme cédez , & transferez à celuy qui fe trouvera le plus
proche en degré ( à caufe que moy, & eux fommes exclus, inhabiles &
incapables) & immédiat au Roy par la mort duquel il vaquera, & fe de-
vra régler, & déférer la Succeiïion defdits Royaumes, & afin qu'il les
tienne & poifede comme légitime, & vray SucceiTeur de même façon que
fi moi, & mes Defcendats, ne fuffions pas nez, ni étions au Monde, par-
ce que nous devons être tenus, & reputez pour tels, à fin qu'en m'a per-
sonne, & en la leur, l'on ne puiffe confiderer, ni faire fondement de re-
prefentation active, ou paiïîve, principe, ou continuation de lignée ef-
fective, ou contenu ve de fubftance, de fang, ou qualité, ni tirer la Defc
cendance & computation des degrez de celle du Roy Monfeigneur , ni
de celle des glorieux Roys fes PredeceiTeurs , ni pour aucun autre efFect ,
afin d'entrer en la Succeiîîon , ou préoccuper le degré de proximité, &
d'en exclnrre la perfonne qui fe trouvera (comme dit eft ) proche en de-
gré ; & je promets, & m'oblige en Foy & Parole Royale, qu'en tout ce
qui dépendra de moy, & de mes dits Enfants, & Defcendants, l'on pro-
curera toujours & en tout temps, que lobfervation, & accompJiffement
dudic
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC I. 45-9
dudit Article, & de ce mien A£te, que je fais pour Ton approbation , & Affaires
confirmation, foit inviolable, fans permettre, ni confentir que l'on aille, G',N- nï
ou agifTe au contraire, directement, ou indirectement, en tout, ou en
partie, & je dédite, & cède tous, & quelconques remèdes feeus, ou
ignorez, ordinaires, ou extraordinaires, & qui nous pourroient appartenir
par Droit commun, ou Privilège fpecia! , à moi ou à mes dits Enfants &
Defcendants pour reclamer , dire, & alléguer cont-re ce que diffus, &
je renonce à tous, & fpecialement à celui de lareftitution in integram , fon-
dée fur l'ignorance, ou inadvertence du ma minorité, ou fur la Le'ion
évidente, énorme & très-enorme que l'on pourroit confiderer être in-
tervenue dans la defiftance & renonciation du Droit de pouvoir fuc-
ceder en aucun temps à tant & à de fi grands Royaumes, Etats, &
Seigneuries, & je veux que nul defdits remèdes, n'y aucuns autres de
quelconque nom, caractère, importance, & qualité qu'ils foyent, nous
fervent ou nous puiffent fervir judiciellement, ou extrajudiciellement, &
que fi nous les intentions, ou tafehions de les déduire en voye de ju-
ftice & conteftations , l'on nous dénie & ferme toute forte d'audiance,
& fi de fait ou fous quelconque couleur mal prétendue, deffaut de la
Juftice (parce que nous devons toujours reconnoître, &. confeffer, que
nous n'en avons aucune pour fucceder auxdits Royaumes ) nous les
vouluffions occuper par force d'armes, faifant, ou mouvant guerre of-
fenfive , que dès maintenant comme pour lors, l'on la tienne, juge, &
déclare pour illicite, injufte, & mal attentée, & pour violence , inva-
fion , & ufurpation tiranique & faite contre raifon , & confeience , &
& qu'au contraire on juge , & qualifie pour jufle , licite , & permife
celle qui fe viendroit à faire, ou mouvoir, par celui qui y devroit fuc-
ceder, à mon excluiion, & de mes dits Enfants & Defcendants, lequel
les Sujets & Habitans devront recevoir, & obeïr^lui faire, & prêter Ser-
ment, & l'Hommage de fidélité, & le fervir comme à leur Roy & Sei-
gneur légitime* & j'affirme & certifie , que pour oclroyer cet Acte, je
n'ai été induite, attirée, ni perfuadée par le refpeèr., & vénération que
je dois, & ay pour le Roi Monfeigneur, comme à Prince fi puiffant, &
comme à Père qui m'aime tant, & que j'aime , & qui me tient, & m'a
tenue fous fa Puiffance Paternelle, parce que véritablement en tout ce qui
fe patte, & s'eft paifé au regard de la conclufion, & effecl: de ce Maria-
ge, touchant le dit Accord, & Article de mon Exclufion, & de celle de
mes Defcendants, j'ay eu toute la liberté que j'ay pu fouhaiter, pour dire
& déclarer ma volonté, fans que de fa part, ou d'aucune autre perfonne
l'on m'ait fait aucune peur ni menace , pour m'y induire , ou attirer
à faire aucune chofe contre elle, & que pour plus grande validité, & af.
furance de ce qui eft dit, & promis de ma part, je jure folemnellement
par les Evangiles contenus en ce Miflel (fur lequel je mets ma main droite)
que je le garderai , mantiendrai, & accomplirai en tout, & par-tout, &
que je ne demanderai point de Difpenfe de ce Serment à notre très Saint
rere, ni au Saint Siège Apoftolique , ni à fon Légat, ou à aucune digni-
jyimm 2 té
Atfaires
GEN. DE
l'Euro-
pe.
460 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
té qui auroic faculté de me la pouvoir oftroyer, & que fi l'on me l'oc-
troyeroit à mon inilance, ou de quelconque UniverOté, ou perfonne par-
ticulière, ou moîu proprio, encore que ce feroit feulement afin de pouvoir
entrer en jugement fans toucher à la fubftance defdits remèdes, & de la
force de cet Aéle, & du Traité, que j'approuve par icelui, je ne me pré-
vaudrai point ni m'en fervirai \ au contraire, en cas que l'on me l'oclroye-
roit, je fais un autre fembîablé Serment, afin qu'il y en ait, & demeure
toujours fur toutes les Difpences qui me feront oélroyées, & fous le même
je dis, & promets que je ne fais, ni feray aucune proteftation, ou récla-
mation en Public, ou en fecret , qui puilTe empêcher, ou diminuer la
la force du contenu en cet Acle, & que G. je la fais (encore qu'elle foie
fous Serment) qu'elle ne fera d'aucune valeur, &. ne puiffe avoir aucune
force, ni èffeéi; & je fupplie fa Sainteté, que puifque ce Mariage, &
Ion Traité, a été conclu, & accordé avec fa Sainte &Apo(tolique Appro-
bation, & fe doit effectuer, & célébrer avec fa benediclion , elle foit fer-
vie d'accroitre la force du Lien & Religion de ce mien ferment par l'auto-
rité de fa confirmation Apoilolique- & je promets, & m'oblige , qu'en,
conformité, & accompliffement de l'Article 6. fufinentioné, aufïi-tôc que
j'arriverai au lieu, où le Roi très-Chrétien me doit recevoir, je ferai &
ferai faire avec fon intervention, & autorité, & conjointement avec fa
Majefté très-Clïrêtienne, & avec toutes les claufes, Serments, & condi-
tions neceflaires, & convenables, un autre femblable Acte de confirma-
tion, & ratification de celui qui a été fait, & dépêché dans cette Cité
de Fontarabie, où fe trouve à prefent le Roy Catholique Monfeigneur ,
avec fa Cour, & Palais, le fécond jour de Juin de cette Année , mille
lix cent & foixante, en prefence du Roy notre Maître. Et pour plus
grande folemnité, autorité, & validité de cet Aéle, Sa Majefté Catho-
lique a dit, pour l'accompliiTement des Articles f. & 6. y inférés, que
pour ce qui regarde la caufe publique & le bien commun de fes Royau-
mes, Sujets, & Vaflaux d'iceux, elle confirmoit, & a confirmé cet Acle
félon & en la forme que l'a fait, & fait depefeher la Serenifîime Infante
Madame Marie -Therefe, Reine promife, & future de France, fa très-
chere & très-aimée Fille, & que de fon propre mouvement , certaine
feience , pleine & abfoiue PuiiTance, & comme Roi & Seigneur, qui ne
reconnoit point de fuperieur dans le temporel, elle fupleoit, & vouloit
que l'on tint pour fuplées par fa Royalle autorité quelconques defFauts, ou
omiffion de fait, ou de droit, de fubltance, ou de qualité, de ftile , ou
de Coutume, qu'il y pour.roit avoir en cet Acle, & qu'elle confirmoit, &
approuvoit fpeeialement & particulièrement le dit Article 5. & ce qui efi:
refolu & arrêté par icelui entre Sa Majefté Catholique, & Très-Chrê-
tienne de France, <k qu'elle vouloit, & commandoit qu'il auroit force &
vigueur de Loy, & de Sanction Pragmatique, & que comme tel il feroit
receu, & fe garderoit, & obferveroit & executeroit dans ihs Royaumes,
Etats, & Seigneuries , fans prendre garde au Loix , Ordonnances , Ufages
& Coutumes qu'il y auroit, ou pourroic avoir au contraire, auxquelles el-
le
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. ï. 461
le derogeoit, & veut que pour cette fois elles foient tenues pour abrogées,
& derogées, encore qu'elles feroient telles, & de telle qualité, que pour
leur dérogation ferait requife, & necefTiire, une autre plus expreiïe, &
fpeciale mention, & commanda que l'on le fcelleroit avec Ton féel Royal
& qu'il feroit entregillré, & publié en Ton Confeil de Chambre & dans
les autres, auxquels il appartiendra; de tout quoi ont été temoings à ce
appeliez, & requis, Don Louis Mendez de Flaro, Comte, Duc d'Oliva-
rez: Don Ramiro Nunnez de Guzman, Duc de Médina de las Torres:
Don Gafpar de Haro, Marquis de Eliche : Don Juan Domingo de Guz-
man, Comte de Monterey : Don Diego d'Arragon, Duc deTerranova:
DonGillen Ramofi de Moncada, Marquis de Aytona, Don Pedro Porto-
Carrero , Comte de Medeliin : Don Pedro Colon de Portugal, Duc de
Veraguas: Don Antonio de Peralta Hurtado de Mendoza, Marquis de
JVlondejar: Don Alonço Perés de Guzman, Patriarche des Indes: Don
Alonco Pères de Vivero , Comte de Fuenfaldagne du Confeil d'Etat: Don
Juan de Caravajal &Sandi, du Confeil & Chambre: Don Diego de Je-
fada Ëvêq-ue de Pamplune , & plufieurs autres Seigneurs, & Cavaliers, &
Domeftiques de fa Majelté qui fe trouvèrent prefens.
Signé,
JE LE ROY.
JE MARIE-THERESE.
APrAIKVS
CFN. 1ÎK
l'Euro-
PK.
riage de
uïs
XIV,
Contraiï de Mariage du Roy Très-Chrétien £5? de la SereniJJime
Injante, Fille aînée du Roy Catholique , le feptieim
Novembre i6)£l
Louis, par la grâce de Dieu, Roy de France & de Navarre: A tous Contrat
ceux qui ces prefentes Lettres veront , Salut. Comme ainfi foit que de M*
Je Traite de Mariage d'entre nous, & la Sereniffime Infante d'Efpagne, V^
Donna Maria- Thcreja, Fille aînée de notre très cher & très-aimé Frère xiv,
& Oncle, le Roi des Efpagnes, Don Philippe IF. de ce Nom, ait été
conclu, arrêté, & (igné par notre très- cher & très-aimé Coulin le Car-
dinal Mazarini, de notre part: Et le Seigneur Don Loiiis Mendez de
Haro , de la part dudit Roy d'Efpagne , le feptieme jour de Novembre:
dans l'Ifle dite des Faifans, dans la Rivière de BidalToa, aux confins des
deux Royaumes de France & d'Efpagne, & en vertu de leur Pouvoirs
& Commiflions. Par le dernier Article duquel Traité, notre dit Cou-
fin le Cardinal Mazarini ayant promis & flipulé, en notre nom, de faire
fournir nos Lettres de Ratification, en la forme & manière accoutumées,
& de la faire délivrer en trente jours avec les dérogations à quelconques
Loys, Coutumes, & D.ifpoiitions qui feroient au contraire dudic Traite,
duquel la- teneur enfuit.
M m m 3 Au,
ÂWAIRES
CENT. DE
l'Euro-
pe.
4S1 MEMOIRES, NEGOTÏATIONS, TRAITEZ, ET
Au nom de la tres-Ste. 'Trinité, Père, Fils, & St. Efprit , trois Per-
fonnes en un feul Dieu véritable, à Ton Honneur & Gloire, & au bien de
ces Royaumes; foit notoire à tous ceux qui ces prefemes Lettres veronr,
& cet Accord de Mariage : Que comme en l'Ifle appeHée des Faifans, fi-
tuée dans la Rivière de Bidaflba, à demi heiie du Bourg d'Andaye, Pro-?
vince de Gyenne-, & autant de la Viile d'Irura, en la Province de Gui-
puzcoa , & dans la Maifon qui a été cette année bâtie en ladite Ifle, pour
y traitter de Paix, entre leurs Majeltés Très -Chrétienne & Catholique,
ce jourdhuy fepiieme du mois de Novembre, de l'année que l'on compte,
depuis la Naiflance de Jefus-Chnjl , notre Seigneur & Rédempteur, mil
iix cent cinquante-neuf. Par devant moy Pedro Coloma, Chevalier de
l'Ordre de Saint Jaques, Seigneur des Villes de Chozas , de Cavales, &
de Junchiliers, du Confeil des Indes, Secrétaire d'Etat, Ecrivain, &
Notaire de la Catholique Royale Majeflé} ont comparu, trés-Eminent
Seigneur Meiîire Jules Mazarini , Cardinal de la Ste. Eglife Romaine ,
Duc de Mayene, Chef de tous les Confeils du très-Excellent, & très-
Puiflant Prince Louis XIV. par la Grâce de Dieu Roy très-Chrétien de
France & de Navarre, en vertu du Pouvoir qu'il a de Sa Majeflé Très-
Chrétienne, écrit en Langue Francoifej figné de fa Royale main, &
feelé de fon Seau Royal , contre-figné par fon Secrétaire d'Etat , le Sieur
de Lomenie, donné à Paris le vingt unième jour de Juin 1659 lequel
Pouvoir eit demeuré en mes mains, & dont la copie fera inférée à la fin
des prefentes, d'une part: Et.de l'autre, très-Excellent Seigneur Don
Louis Mendez de Haro & Guzman, Marquis de Carpio , Comte Duc d'O-
livarez, Gouverneur perpétuel des Palais Royaux & Arfenal de Seville ,
Grand-Chancelier perpétuel des Indes, du Confeil d'Etat de Sa Majefté
Catholique, Grand-Commandeur de l'Ordre d'Aicantara, Gentil-homme
de la Chambre de fadite Majeité, & fbn Grand E'cuyer ; & au nom du
très-Haut, très-Excellent, & très PuifTant Prince Philippe IV. auffi par
la Grâce de Dieu Roy de Caflille, Léon, Arragon, des deux Siciles, de
Jerufalem, de Portugal, de Navarre, & des Indes , &c. Archiduc d'Au-
triche, Duc de Bourgogne, de Brabant , & de Milan, Comte de Haps-
bourg, de Flandre, ck de Tirol, &c. & en vertu du Pouvoir qu'il a de
Sa Majellé Catholique, par Acle figné de fa main Royale, féelé de fon
Sceau Royal, & contre-fignée par Don Fernand deFonfecaRuyz de Con-
treras, fon Secrétaire d'Etat ; fait à Madrit le cinquième jour de Juillet
de la prefente année..
Comme le Roy, Père & légitime Adminiflrateur de la Sereniffime In-
fante Dame Marie-Therefe, la Fille ainée de la Majefté de la feue Rei-
ne Elifabeth fa légitime Epoufe: & ledit Seigneur Cardinal Mazarini, au
nom de Sa Mijelté Très-Chretienne : & ledit Marquis Comte d'Oliva-
rez, au nom de Sa Majeflé Catholique, ufans de leurs Pouvoirs fufdits,
ont dit &: déclaré que leurs Maîtres,, comme Rois Très Chrétien & Ca-
tholique, qui ont fort à cœur le bien de leurs Royaumes, & d'affermir
la Paix , qui s'établit aujourd'hui entre les deux Couronnes ; défirans
que
PE,
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 4*5
que la durée de cette Paix ne s'étende pas feulement à celle de la vie de Affaires
Leurs Majèftez, mai-s pafle avec la me me fermeté à leurs SucceiTeurs & gen.de
Dépendants; & jugeant que le plus efficace moyen, pour parvenir à cet-
te faincte fin, eft de renouer étroitement leurs Alliances par le lien d'un
Mari.ige : Leurs Majèftez avec la Grâce de Dieu, & à fon fervice , ont
trait te & accordé les Efpoufailles & Mariage de Sa Majefté le Roi Très-
Chrctien , avec la Sereniffime Infante Dame Marie-Therefe, Fille ainée
de Sa Majelté le Roy Catholique; afin de confirmer davantage, par ce
nouveau Nœud, l'amour, l'amitié, ck l'union qui eft, & que l'on délire
conferver, entre Leurs Majèftez. Et pour cet effeél: , lelctits Seigneurs
Plénipotentiaires , aux noms fufdits , ont traitté & accordé les Articles
qui fuivent.
Qu'avec la Grâce & Bénédiction de Dieu, & préalablement obtenue
Difpenfe de fa Saincleté , à raifon de la proximité & confanguinité, qui
eft entre le Roi Très-Chrétien, & la Sereniffime Infante -, ils falTent célé-
brer leurs Efpoufail'es & Mariage, par paroles de prefent , félon la for-
me & folemnité préferite par les facrez Canons, & Conftitutions de l'E-
glife Catholique, Apoftolique, & Romaine. Et fe feront lefdites Efpou-
failles & Mariage en la Cour de Sa Majefté Catholique, où elle fera, a-
vec la Sereniffime Infante Dame Marie-Therefe ; & ce en vertu du Pou-
voir & Commiffion du Roi Très-Chrctien, qui le ratifiera & accomplira
en Perfonne, quand la Sereniffime Infante Dame Marie-Therefe, fera a-
menée & arrivée en France j Sa Majeflé fe joignant avec fon Aiteffe, &
recevant les bénédictions de l'Eglife : Et la Conclufion & Ratification du-
dit Mariage, foit par pouvoir fpecial, ou en prefence, fe fera quand &
dans le tems accordé & concerté entre Leurs Majèftez.
Que Sa Majefté Catholique promet & demeure obligée de donner, &
donnera a la Sereniffime Infante Dame Marie-Therefe, en Dot & en fa-
veur de Mariage avec le Roy Très- Chrétien de France, & payera à Sa
Majefté Très-Chrêtienne, ou à celui qui aura pouvoir ou commiffion d'El-
le, la fomme de cinq cent mille écus d'or fol, ou leur jufte valeur, en ia
Ville de Paris. Et ladite fomme fera payée en la manière fuivante : le
tiers, au tems de la confommation du Mariage ; l'autre tiers , a la fin de
l'année, depuis ladite confommation > & la dernière &troifieme partie, fix
mois après: en forte que l'entier payement de la dite fomme de cinq cent
mille écus d'or fol, ou leur jufte valeur, fera faite en dix huit mois de
tems, aux termes & portions, qui viennent d'être fpécifiées.
Que Sa Majefté Très-Chrétienne s'oblige d'afTûrer, & alTùrera le Dot
de la Sereniffime Infante Dame Marie-Therefe, fur rentes bonnes & bien
alTurées, & fur Fonds & Affignations valables, & au contentement de
Sa Majefté Catholique, ou des perfonnes qu'il nommera pour cet effecl >
à mefure & à proportion de ce que Saditc Majefté aura reçu les cinq cent
mille écus d'or fol, ou leur jufte valeur, dans les termes ci-dellus dits ^
& envoyera auffi-tôt à Sa Majefté Catholique les A6tes de ladite Afïigna-
tion & Confignation de Rentes ; Et en cas de Diiîblution du Mariage, &
que
AH MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
ÀFFA1-.E3 que de Droit, la Reflitution du Dot ait lieu; il fera rendu à la Sereniffime
ben. de Infante, ou à celui qui aura charge ou droit de Ton AltelTe- & pendant le
i'£oko- tems qui courra, qu'on ne lui rendra point fon dit Dot, Son AltefTe , ou
. _Î! fes Héritiers & Succeffeurs jouiront des Revenus, à quoi fe monteront
lefdits cinq cent mille écus d'or fol, à raifon du denier vingt, qui feront
payez en vertu defdites Afîignations.
Que moyennant le payement effectif fait à Sa Mnjefté Très-Chrétien-
ne defdits cinq cent miile écus d'or fol, ou leur julte valeur, aux termes
qu'il a été ci-devant dit, ladite Sereniiiime Infante fe tiendra pour conten-
te, & fe contentera dudit Dot, fans que par ci-après elle puiife alléguer
aucun fien autre Droit, ni intenter aucune autre Action ou Demandes,
prétendant qu'il lui appartienne, ou puifïe appartenir, autres plus grands
Biens, Droits, Raifons, Actions, pour caufe des Héritages & plus gran-
de Succeffion de Leurs Majeftez Catholiques &s Pérès & Mères ; ni pour
conteitation de leurs Perfonnes en quelque autre manière , ou pour quel-
que caufe & titre que ce foit, foit qu'elle le fcût, ou qu'elle l'ignorât;
attendu que de quelque qualité & condition que lefdites Actions & chofes
ci-deffus foient , elle en doit demeurer exclufe , & avant l'effeèluation
de fes Efpoufailles , elle en fera la Renonciation en bonne & due forme,
& avec toutes les affurances, formes, & folemnitez qui y font requifes &
neceiTaires. Laquelle dite Renonciation, elle fera avant que d'être ma-
riée, par parole de prefent ; qu'elle, auiïi- tôt après ta célébration du Ma-
riage , approuvera & ratifiera conjointement avec le Roi Très-Chrétien ,
avec les mêmes formes & folemnitez qu'elle aura fait à la fufdite première
Renonciation, voire avec les claufes qu'ils verront être les plus convena-
bles & neceiTaires : A l'effect & accompluTement de laquelle Renoncia-
tion, Sa Majeité Très-Chrétienne & Son Alteffe demeureront & demeu-
rent dès à préfent, comme pour lors, obligez; & au cas qu'elles ne faffenc
ladite Renonciation & Ratification , en vertu du préfent Contract , par
Capitulation, iceux fufdits Traitiez, Renonciation, & Ratification, fe-
ront tenus & cenfez dès à préfent, comme pour lors, pour bien & dûë-
ment faits, pafîez , & octroyez. Ce qui fe fera en la forme la plus authen-
tique & efficace que faire fe pourra, pour être bonnes & valides ; enfem-
ble avec toutes les claufes dérogatoires de quelconque Loy, Jurifdiction,
Coutume, Droits, & Conftitutions , à ce contraires, ou qui einpêchaf-
fent du tout, ou en partie, lefdites Renonciations & Ratifications: Aux-
quelles, à l'effet & validité que defTus, Leurs Majeflés Très- Chrétienne,
èk. Catholique dérogeront, & dès à préfent elles y dérogent entièrement:
& par l'Approbation & Ratification qu'elles feront de ce prefent Con-
tract & Capitulation, dès à préfent comme dès-lors, elles entendront &
entendent avoir déroge à toutes exceptions ci-deffus.
Que d'autant que Leurs Majeftez Très-Chrétienne & Catholique font
venues & viennent à faire ce Mariage, afin de tant plus perpétuer & aflii-
ref par ce nœud & lien la Paix publique de la Chrétienté, & entre Leurs
Majeflés , l'amour & la fraternité , que chacun efpére entre elles; & en
con-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 46r
contemplation aufli desjultes & légitimes caufes, qui montrent & per- Affaikfs
fuadent l'égalité & convenance dudit Mariage, par le moyen duquel & gen.de
moyennant la faveur & grâce de Dieu , chacun en peut eîpérer de très-
heureux fuccès au grand bien & augmentation de laFoy & Religion Chré-
tienne, au bien & bénéfice commun des Royaumes, Sujets, é^Vaflaux
des deux Couronnes ; comme auiïi'pour ce qui touche & importe au bien
de la chofe publique , & confervation defdites Couronnes ; lefquelles
étant fi grandes & puiifantes, ne puiflent être reunies en une feule, &
que dès à préfent on prévienne les occafions d'une pareille conjonction.
Donques, attendu la qualité des fufdites, & autres jufles raifons, & no-
tamment celle de l'égalité qui fe doit conferver, Leurs Majeftés accor-
dent , arrêtent, parContracl: & Pacte conventionel entre elles, qui fortî-
ra, & aura lieu, force, & vigueur de Loy ferme & itable à tout jamais,
en faveur de leurs Royaumes, & de toute la chofe publique d'iceuxj que
la Sereniftime Infante d'Efpagne, Dame Marie -Therefe, & les Enfans
procréez d'elle, foient malles ou femelles & leurs defcendants, premiers,
ou féconds, trois ou quatre, nez ci-après , en quelque degré qu'ils fe puif-
fent trouver, voire à tout jamais, ne piaffent fuccéder, ni fuccédent es
Royaumes , Etats , Seigneuries , & Dominations , qui appartiennent &
appartiendront à fa Majefté Catholique, & qui font compris au defibus
des Titres & Qualités mentionnées en cette préfente Capitulation, ni en
aucun de Cas autres Royaumes, Etats, Seigneuries, Provinces, Ifles ad-
jacentes, Fiefs, Capitaineries, ni es Frontières que Sa Majefté Catholi-
que pofféde dès à préfent, ou qui lui appartiennent, ou pourront appar-
tenir, tant dedans, que dehors le Royaume d'Efpagne; & qu'à l'ave-
nir Sadite Majefté Catholique, ou fes SuccefTeurs, auront, pofféderont,
& leur appartiendront j ni en tous ceux qui font compris en iceux, ou
dépendent d'iceux ; ni même en tous ceux qui par ci- après, en quelque
tems que ce foit, elle pourroit acquérir, ou accroitre, & adjouter aux
fufdits fiens Royaumes, Etats, & Dominations , ou qu'elle pourroit reti-
rer, ou qui lui pourroit échoir par dévolution ou par quelques autres
Titres, Droits, ou Raifons que ce puiffe être, encore que ce fut durant la
vie de ladite Serenifiime Infante Dame Marie-Therefe, ou après fa mort,
ou celle de qui que ce foit de fes defcendans, premier, féconds, troilié-
mes, nez ou ultérieurs, que le cas ou les cas, par lefquels, ou de Droit,
ou par les Loix, & Coutumes defdits Royames , Etats, & Dominations,
foit par Difpofitions de Titres, par lefquels ils puiflent fuccéder éfdits Ro-
yaumes, Etats, ou Dominations, leur dût appartenir la Succeflion en
tous lefquels fufdits cas, dès à préfent ladite Dame Marie-Therefe Infan-
te, dit & déclare être & demeure bien & dûement exclufe, enfemble
tous fes Enfans & Defcendans,- Mâles ou Femelles, encore qu'ils /£ vou-
lurent ou pûffent dire ou prétendre , quen leurs perfonnes ne courent , ne ni Je
peuvent £5? doivent confiderer lefdites raifons de la chofe publique , ni autres èf-
quelles ladite Exdujion fe pourroit fonder , ou qu'ils voulufient alléguer ( ce
qu'à Dieu ne plaife ) que la SucceJJïon du Roy Catholique , ou de fis Sercnif-
Tome XL Nnn /mes
PE.
466 MEMOIRES, NEGOT1ATIONS, TRAITEZ, ET
&ï*Ai*Es fîmes Princes & Infantes, £5? d'abondant des Mâles, quil a (3 pourra avoir
gen. de les légitimes SucceJJeurs , eût manqué & défaUly\ parce que, comme i! a éié
l'Euro- dit, en aucun cas, ni en aucun tems, ni en quelque manière qui peut ad-
venir, ni elle, ni eux, fes hoirs ck les defcendans, n'ont à fucceder, m
prétenejje pouvoir fucceder, non-obffant toutes Loix, Coutumes, Or-
donnances, & Difpolkions en vertu desquelles on a fuccedé en tous lef-
dits Royaumes , Etats, Seigneuries: Et non-obfiant auflî toutes les Loix
& Coutumes de la Couronne de France, qui, au préjudice des Succeffeurs
en icelle, s'oppofent à cette fufdite Exclulion , auffi-bien à préfent , com-
me aux tems à venir, & aux cas qui auroient long- tems différé leldites
Succédions, à toutes lefquelles considérations, enfemble, & à chacune
en particulier d'icelles, Leurs dites Majeftez dérogent, en ce qu'elles con-
trarient ou empêchent, le contenu en ce Contrat, ou l'accomplifTement
& éxecution d'icelui: Et que pour l'Approbation & Ratification de cette
préfente Capitulation, elles y dérogent, & les tiennent pour dérogées :
Veulent & entendent, que la Serenilïîme Infante, & les Defcendans d'icel-
le demeurent à l'avenir & pour jamais exclus de pouvoir fucceder en au-
cun tems , ni en aucun cas , es Etats du Païs de Flandres , Comté de
Bourgogne & de Charolois, leurs appartenances & dépendances. Pa-
reillement auffi ils déclarent très-exprelfément, qu'en cas que la Serenif-
fime Infante demeure veuve ( ce qu'à Dieu ne plaife ) fans Enfans de ce
Mariage, qu'elle demeurera libre & franche de ladite Exclufion ; & par-
tant déclarée perfonne capable de fes Droits , & pouvoir fucceder en
tout ce qui lui pourra appartenir ou efcheoir , en deux cas feulement :
l'un, fi elle, demeurant veuve de ce Mariage, fans Enfans, venoit en
Efpagne ; l'autre, û par raifon d'Etat, pour le Bien public, & pour juf-
tes Confiderations, elle fe remarioit , par la volonté du Roy Catholique
ion Père, ou du Prince fon Frère: efquels deux cas elle demeurera capa-
ble & habile à pouvoir fucceder & hériter.
Que la Sereniffime Infante Dame Marie - Therefe , avant que célébrer
le Mariage , par paroles de prêtent, donnera , promettra, & oéTroyera
fon Efcrit, par lequel elle s'obligera , tant pour elle , que pour fes fuc-
ceffeurs, héritiers, à raccompliffement & obfervation de tout ce que def-
fus , & de fon Exclufion , & de celle de fes Defcendans ; approuvera le
tout félon comme il efl contenu en cette prefente Capitulation avec les
claufes & jurements neceffaires & requis. Et en inférant la fufdite obli-
gation & ratification, que fon Attelle aura donnée & faite à la prefente
Capitulation , elle en fera une autre pareille & femblable conjointement
avec le Roi tres-Chrétien , fi-tôt qu'elle fera Epoufée & Mariée, laquelle
fera enregiltrée au Parlement de Paris, félon la forme accoutumée , avec
les autres claufes neceffaires. Comme aufli de la part de fa Maj-eflé Ca-
tholique, elle fera approuver & ratifier la renonciation & ratification en la
forme & force accoutumée avec les autres claufes neceffaires j la fera
auflî enregiftrcr en fon Confeil d'Etat. Et foit que les dites renoncia-
tions , ratifications, & approbations foieni faites, ou non faites ; dés à pré-
fent %
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. 4«?7
fent, en vertu de cette Capitulation & du Mariage qui s'enfuivra, & en Amni.v
contemplation de toutes les fufdites chofes, elles feront teniies 6c cenfées QEW; nt-
pour bien & deuè'ment faites & octroyées, & pour paflees & enregiflrées L'^"R0"
dans le Parlement de Paris , par la publication de la Paix dans le Royau-
me de France.
Que Sa Majeflé Trés-Chrêtienne donnera à la Sereniffime Infante Dame
Marie-Therefe, pour fes Bagues ck Joyaux, la valeur de cinquante mille
écus d'or fol , iefquels , & toutes autres qu'elle portera avec loi , lui
appartiendront fans difficulté , comme étant bien de fon patrimoine, pro-
pres à Son AlteiTe, & à fes Héritiers & Succeileurs, ou à ceux qui auront
fon droit ou caufe.
Que Sa Majeflé Trés-Chrêtienne , fuivant l'ancienne & Ioiiable coutu-
me de la Maifon de France, alignera & conflituera à la Sereniffime Infan-
te Dame Marie -Therefe, pour fon doiiaire , vingt mille écus d'or fol,
chacun an, qui feront afïignez fur revenus & terres, où il y aura Juftice,
dont le Principal lieu aura titre de Duché, & confecutivement jufques à
la concurrence de ladite fomme de vingt mille écus d'or fol chacun an:
defquels lieux & terres ainfi données & affignées , ladite Sereniffime In-
fante joiiira par fes mains, & de fon autorité, & de celle de fes Commif-
faires & Officiers, & aura la Juflice , comme il a été toujours pratique.
D'avantage à elle appartiendra la provifion de tous les Officiers vaquants,
comme ont accoutumé d'avoir les Reynes de France j bien entendu néan-
moins, que les dits Offices , ne pourront être donnez qu'à naturels Fran-
çois , comme auffi l'adminiflration & les termes défaites terres , conformé-
ment aux Loix & Coutumes du Royaume de France. De laquelle fufdite
Affignation ladite Sereniffime Infante DameMarie-Therefe entrera en pof-
feffion & jouïlTance fl-tôt que le douaire aura lieu, pour en jouir toute ù.
vie, foit qu'elle demeure en France, ou qu'elle fe retirât ailleurs hors de
France.
Que Sa Majeflé Très-Chrétienne donnera & afîignera à la Sereniffime
Infante Dame Marie-Therefe , pour la dépenfe de fa Chambre, & entre-
tenement de fon Etat , .& de fa Maifon , une fomme convenable, telle
qu'appartient à Femme & Fille de fi grands & puiffans Rois; la lui ali-
gnant en la forme & manière qu'on a accoutumé en France de donner
affignations pour tels entretenements.
Que le Roi Très-Chrétien, & la Sereniffime Infante Dame Marie-There-
fe , s'epouferont & marieront par Procureur , qu'envoyera le Roi Très-
Chretien à la Sereniffime Infante par parole de prefent. Ce qu'étant fait,
Sa MijeiléCarhoiique la fera mener à fes frais & dépens jufques à la Fron-
tière du Royaume de France, avec la dignité & appareil qui appartient à
Femme & Fille de fi grands Rois; & avec le même appareil elle fera re-
ceue par le Roi Très-Chrétien.
Qu'en cas que le Mariage fe diffolve entre Sa Majellé Très-Chrétienne
& la Sereniffime Infante Dame Marie-Therefe, & que Son Aiteffe fur vive
Sa Majeflé Très-Chrétienne , en ce cas elle s'en pourra retourner libre-
Nnn 2 ment
Pï.
4*8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Attairï-s ment & fans autre empêchement quelconque, au Royaume d'Efpagne, &
gen.de aux lieux & endroits qu'elle choifira plus convenables hors de France, tou-
t'EuRo- tes f0js & quantes que bon lui femblera , avec tous fes Biens , Dot, &
Douaire, Bagues , Joyaux, & Vêtements, Vaiflaille d'Argent, & tous
autres meubles quelconques, avec fes Officiers & Serviteurs de fa Maifonj
fans que, pour aucune chofe que ce foit, ou feroit furvenuë , on lui puiffe
donner aucun empêchement quelconque , ni arrêter fon départ directe-
ment, ni indirectement, empêcher la jouïffance & recouvrement de fes
dits Dot, & Douaire, ni autres Affignations qu'on lui auroit données, ou
dû donner. Et pour cet effect Sa Majelté Très-Chrêtienne donnera à Sa
Majelté Catholique pour ladite Sereniffime Infante Dame Marie-Therefe,
fa Fille, telles Lettres de feureté, qui feront neceffaires , fignées de fa
propre main, & fcelées de fon féel; & dès à prefent , comme dès lors,
Sa Majefté Très-Chrêtienne le leur afïûrera , & promettra , pour lors &
pour fes SuccefTeurs Rois, en foi & parole de Roi.
Ce Traitté & Contract de Mariage a été fait , avec defTein de fuplier no-
tre Saint Père le Pape, comme dès à prefent Leurs Majeftez l'enfupplient,
qu'il ait agréable de l'approuver, & lui donner fa Bénédiction Apoftoli-
que; comme auiîi d'en approuver les Capitulations & les Ratifications
qu'en auront faites Leurs Majeitez & Son Airelle, & ces Ecritures & Ju-
remens qui fe feront & octroyeront pour fon accomplilTement , les inférant
en fes Lettres d'Approbation & Bénédiction. Que. Leurs Majeitez Très-
Chrêtienne & Catholique approuveront & ratifieront cette prefente Ca-
pitulation , & tout ce qu'elle contient; promettront & s'obiigeront, fur
leur foi & parole Royale , de la garder & accomplir inviolablement,
délivreront à. cet effect leurs Brevets , ou Lettres , en la forme accou-
tumée , avec les dérogatoires de quelconques Loix, Juftices, & Coutu-
mes qui feroient à ce contraires , & auxquelles il convient déroger.
Lefquels fufdits Brevets ou Lettres de Ratification de la prefente Ecri-
ture , ils fe délivreront l'un à l'autre refpectivement dans trente jours ,
à compter du jour &. date de la prefente, par le moyen des AmbaiTa-
deurs ou Minïitres qui refideront dans les Cours de leurs Majeftez
Très-Chrêtienne, & Catholique; avec l'obligation & lien de leur foi &
parole Royale, qu'ils effectueront & garderont, commanderont qu'il foit
obfervé & accompli entièrement , fans qu'en tout , ou en partie , il y
manque chofe quelconque, & qu'ils n'iront, ni confentiront aller ni ve-
nir au contraire , directement ni indirectement , ni en autre façon , ni ma-
nière aucune; car àinfi l'ont promis & itipulé les dits Seigneurs Plénipo-
tentiaires , en vertu des Pouvoirs qu'ils ont de Leurs Majeftez. A quoi fu-
ssent prefents, de la part de la France, Meilleurs le Duc de Guife, Com-
te d'Harcourt, Grand-Efcuyer de France, & Gouverneur aAlface & de
Philisbourg; le Maréchal de Clérembaud, Gouverneur de Berri; le Duc
de Crequi , Premier Gentilhomme de la Chambre du dit Seigneur Roi
Très-Chrêtien y le Bailly de Souvré; le Comte d'Olonne > le Marquis de
Vardes* Capitaine des cent Suifles de la. Garde de Sadite Majelté ; le
Mar-
1701.
A V E R T I S S E« M E N T.
L'Original de cette Pièce a été fi favorablement reçu en Angleterre ,
qu'on ne fauroit douter du Succès de la Traduction. Si le haut
rang que tient un Auteur dans le monde, Pefprit, le bon-fens , la pe-
nétration,Ie favoir, & la droiture, donnent du relief à un Ouvrage, on
Nnn 5. peuc
PK.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 409
Marquis deSoyecourt, Maître de la Garderobe de fa dite Majefté ; de Affairm
Lyonne Miniltre d'Etat ; Courtin l'un des Maitres des Requêtes de l'Hô- c.en. dk
tel de fa Majefté ; d' Avaux aufîi Maître des Requêtes de l'Hôtel ; & plulieurs L'E«*°-
autres Seigneurs & Cavaliers. Et de la part d'Efpagne Meilleurs le Mar-
quis deMondejar, Gentilhomme de la Chambre du ditSeigneurRoi Catho-
lique* le Duc de Naxara & de Maquedaj le Marquis de losBalbazez, Ca-
pitaine General des Gens d'Armes de l'Etat de Milan: le Licentié Don Jo-
feph Goncalez, du Confeil & Chambre de fa dite Majefté & Prefident de
fes Finances -, le Licentié Don Francifco Ramos de Mançano , du Con-
feil de fa dite Majefté, dans le Souverain de Caftille ; le Baron de Vate-
ville, du Confeil de Guerre de fa dite Majefté, & fon Capitaine General
dans la Province de Guipufcoa ; Don Rodrigo de Moxica , du Confeil
de Guerre de la dite Majeité & Maitre de Camp General de l'Armée
d'Eftramadura, & plufieurs autres Seigneurs & Cavaliers. Et les dits Sei-
gneurs contraclans l'ont figné de leurs mains & noms j & m'ont requis
que de toute cette Capitulation je leur en baillafle copie , & de toutes
celles qui feront traduittes, & tranflatées , qui leur feront neceffaires. Si-
gné, le Cardinal Mazarini, & Don Louis Mendez. Fait & paiTé par de-
vant moi Secretaite ci-deflus dit, Ecrivain & Notaire public, les ans &
jours fusdits. Signé, Pedro Colonna, pour témoignage de vérité, Pe-
dro Colonna, avec Paraphe.
Remarques fur la Succejfion du Duc d'Anjou , tant par rapport
à Ja Validité qu'a F égard de Jes Conjèquences. Avec des Re-
flexions Jur le Mémoire du Roi de France aux Hollandois 3 £«?'
jur ly Intérêt de divers Princes & Etats de la Chrétienté ,
dans la Conjoncture préjente. A quoi on a ajouté la Claufe'
du Contrat! de Mariage de Louis XIV. par où il renonce à
la Succejfion d'Efpagne ; g«p Ja Ratification 3 Ja Renonciation
de r Infante ) V Article du Traité des Firénèes 3 gsp la Claufe
du Tejlament de Philippe IV. conforme a cette Renonciation,
Traduit de PAnglois. Suivant la Copie imprimée à Londres
PE.
470 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Amaires peut dire que celui-ci n'en manquera pas. C'ed une Perfonne de la
on. de première Qualité, ornée de tous ces dons & de toutes ces vertus , qui
L£if0" l'a m*s au )our• D'ailleurs, fi le .prompt Débit e(t une marque de la bon-
té d'une Pièce , celle-ci doit être excellente ; puis qu'il s'en eil faic
trois Editions à Londres en trois Semaines de tems. L'Importance des
Affaires qu on y traite, & la Conjoncture où nous fommes, ne peuvent
auiîi qu'en relever le prix. Quoi qu'il en foit , on laifTe aux Lecteurs
équitables à juger par eux-mêmes de ce qu'elle vaut.
PREFACE.
CES Confi 'aérations , qu'en donne au Public, ne font que les premières P en fée s
qui font venues dans l'efprit d'une Perfonne qui jouhaite le Bien de l'Eu-
rope en général , & de la Grande-Bretagne en particulier -, elle ejpére même
quelles Jeront d'autant mieux reçues , que fon intention efl bonne & légitime.
Nous avons fujet de bénir Dieu de ce que la Conflit ut ion de nôtre Gouver-
nement efl fi hcureuje , que nns Princes (s'il y en avoit jamais quelcun d'af-
fez méchant pour l'entreprendre ) n'ont pas droit , fans notre conjentement , de
difpojer de nos biens , & encore moins de nôtre fidélité & de nos perfonnes ,
par Tefiamcnts & Codicilles > comme chaque particulier le peut faire de [es
biens. Puis donc que nous fommes exemts de ce danger dans nôtre patrie ,
nous devons prendre de jufles me jures , pour empêcher les deffem* des Etran-
gers qui voudraient noui priver de ces avantages. Nous ne fçavons pa> juf-
ques ou ce- que nous volons arriver aujourd'hui peut fervir d'exemple. Nous
devons conjidértr , qu'outre les Etrangers , il y en a encore d'autres qu'on dit
être défendus de la Famille d 'Angleterre ,qui pi étendent avoir Dr vit à la Suc-
ceffion. Qui peut dire fi un malheur de cette nature ne peut pas nous arri-
ver par un Mariage quon dit être propofê entre une certaine PrinceJJé , &
un troij.éme petit-fils , £5? que ce mariage ne donne peut-être lieu à un deu-
xième entre un Prince 'Titulaire , £f? quelque proche Parente ? Nous devons
donc , puifque la Ligne de nôtre Succefii on établie peut à peine faire une plu-
ralité , prendre foin de ne pas donner occafion aux Etrangers de ta régler
pour nous , comme ils ont fait pour d'autres. Dans cette ve'ue on peut faire
trop ou trop peu; mais^ la Nation efl ajfez éclairée pour / avoir les mejures
les plus propres , pour éviter ces deux extrém tez. Cependant, on peut dire
fûrement , qu'une des meilleures Méthodes qu'on puifife prendre ejt de j aire des
Alliances Etrangères , Jur tout avec les Pretefians , qui peuvent nous afjifter
de Forces Navales, £s? d'entretenir une bonne •Correjponaance avec nos Fvifins,
afin de rompre les me fur es de ^1 Puijj'ance que mus croions avec fujet avoir
le plus d inclination à nous chagriner ià-aejjus.
CON^
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 4?r
Affaires
CONSIDERATIONS SUR LA SUCCESSION DU
DUC D'ANJOU.
l'Euro-
pe.
La Succelîîon du Duc d'Anjou à la Couronne d'Efpagne , & les fuites Confidé-
qui en peuvent arriver, font de telle importance, & interéfTéhtfi gène- rations"
ralement tout le monde, quelles font le fujet des difcours <k des penfées iuc la
de toutes les perfonnes de bon fens. Succef-
A l'égard de la Sacceflîon, on fçait en général: i. Que le Duc d'An- Suc
jou eft élevé fur le Thrône d'Efpagne, contre les Loix du Royaume, qui d'Anjou.
ne permettent pas d'aliéner la Couronne, ni qu'elle tombe entre les mains
d'un Etranger , la Succeiïion aiant été réglée du confentement des Etats
du Roiaume en faveur de la Maifon d'Arragon ou d'AuLriche.
2. Que cette Sacceflîon eil contraire à la Renonciation de Louis XIII.
& de l'Infante Marie -Anne fon Epoufe , au tems de leur Mariage, &
que la validité de cette Renonciation ne fut pas alors conteltée.
3. Qu'elle eil contre la Renonciation de Louis XIV. à préfent Rai
de France, & de l'Infante Mane-Therefe fon Epoufe, au tems de leur
Mariage.
4. Qu'elle efl contre le Traité des Pirenées , dont cette Renonciation
étoit le principal Fondement.
5-. Qu'elle eil contraire au Teftament de Philippe IV. fait en confé-
quence de cette Renonciation.
6. Qu'elle efl: contraire au Traité de Partage fait entre la France, l'An-
gleterre, & la Hollande.
7. Qu'elle elt expreifément contraire à tous les Argumens dont Louis
XIV. s'ell fervi contre la Renonciation de fon Père 6c de fa Mère , 6c
celle qu'il a faite lui-même avec fon Epoufe, & qu'elle fait la même injuiti-
ce au Dauphin & au Duc de Bourgogne, qu'on difoit que ces Renoncia-
tions leur faifoient; & ,par conféquent, le Mémoire, par lequel on prétend
jultifier la Succefîion du Duc d'Anjou, la condamne, puifqu'il établit ex-
preifément le Droit du Dauphin à la Ceuronne , & annulle la Renoncia-
tion de fa Mère.
Cela étant incomeilablement vrai, il s'enfuit que le Duc d'Anjou ne
peut avoir d'autre Droit à la Couronne d'Efpagne, que celui qu'il prétend
établir en vertu du Teltament de fa Majeilé Catholique Charles II. Car,
quoiqu'on allègue encore le Defir unanime des Sujets d'Efpagne, on ne s'en
fert pourtant que comme d'une raifon acceiïbire , fur laquelle le Mémoire
ne fait pas grand fond: auffi ne voïons-nous pas que les Cortes ou E-
tats d'Efpagne ayent en aucune manière confenti à établir le Droit du Duc
d'Anjou, de forte que cette Raifon eil très-mal fondée; & s'ils y con-
fentent dans la fuite," tout le Monde regardera leur confentement comme
un effet de la force, & non de leur choix, ce qui expofcra fon Droit à de
dangereufes Objections.
Mais, pour revenir au Teflamen-t du feu Roi d'Efpagne, qui eil le meiî-
leur
PE.
472 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires leur Titre du Duc d'Anjou, on peut dire: 1. Qu'il elt contraire à un Tefc
cen. de tament précédent que le Père de ce dernier Teftateur lui avoit fait, ce
qui n'eft pas une marque de grande piété en ceux qui l'ont porté à faire
un Teftament contraire à celui de fon Père. A l'égard de la part que le
Teftateur a eue en ce Teftament, nous n'en parlerons point, puifque la
bienféance nous ordonne de marcher doucement fur le Tombeau d'un
Prince qui eft décédé, & que la compaffion ne permet pas que nous trou-
blions les cendres d'un Monarque qui a fi peu joui des douceurs de la
vie.
2. On ne peut pas regarder ce Teftament comme aiant la même for-
ce que celui de Philippe IF. parce que ce dernier fut fait en confé-
quence du Traité des Pirenées, & de la Renonciation folemnelle que deux
Rois & Reines de France firent fucceffivement, & qui fut ratifiée par
tout le Pouvoir Legiflatif de France & d'Efpagne j au lieu que le Tefta-
ment de Charles IL eft contraire à tout cela.
3. Le Teftament de Philipe IV. étoit conforme au Droit civil, & à la
Decretale du Pape Boniface VIII., qui dit, „Que toute Renonciation fai-
„ te fur Serment par une Fille au-deflus de l'âge de 10. ans, en faveur de
„ fon Père, afin défaire un Contra6t de Mariage, par lequel un Douaire
„ fuffifanc lui eft afligné , doit être bonne en Loi, quoiqu'elle foit alors
„ fous la Jurifdiction de fon Père. Toutes ces Conditions fe rencontrent
dans la Renonciation de la Reine de France; au lieu que le Teftament
du feu Roi d'Efpagne eft contraire à cette Decretale, pour laquelle cer-
tainement tous les Catholiques-Romains doivent avoir un Refpect très-
particulier.
4. L'Empereur objecte contre le Teftament de Charles IL d'Efpa-
gne, qu'il a été fait lorfque ce Prince n'étoit pas en état de dicter, & en-
core moins d'écrire un Teftament fi bien digéré, & fi fubtilement compo-
fé que celui-ci, avec une Préface remplie de Raifons politiques. Cette
Objection a d'autant plus de force, qu'elle eft fondée fur la fuibleife de Corps
& d'Efprit, dont tout le Monde feait que ce pauvre Prince a été fi long-
tems affligé : auffi ne paroit-il en aucune manière , que ce Teftament ait été
compofé par une peribnne qui combat contre la violence d'une telle mala-
die , comme celle dont il eft mort.
jr. On objecte contre ce Teftament, que par l'Artifice de la Faction Fran-
çoife le Cardinal Portocarero l'a extorqué de ce Prince , lorfqu'il étoit
prefque à l'article de la mort, fous peine de lui refufer l'Abfolution , qui
eft la chofe du monde la plus épouvantable à un Catholique -Romain bi-
got, tel qu'étoit ce Prince. Cette Objection eft d'autant plus forte, que
îe feu Roi d'Efpagne étoit obligé par tous les Liens desLoix, des Traitez,
de la Nature, & de l'Inclination, à préférer un Prince de la Mailbn d'Au-
triche à tout autre, pour fon Succefleur; aufii n'ignore-t-on pas qu'un peu
avant qu'il lignât ce prétendu Teftament, il en avoit fait un autre en fa-
veur de l'Archiduc.
6. On objecte contre ce Teftament , que les Efpagnols ont été obligez
d'y
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M.-DCC. I. 473
d'y acquiefcer, gagnez par les promefTes & intimidez par les menaces des Affaires
François, qui faifoient marcher leurs Troupes, avant que ce Prince fut GF
mort , pour prendre PofTefiion des Terres d'Efpagne , que le Roi de Fran-
ce prétendoit lui appartenir en vertu du Traité de Partage, dans lequel il
femble par le Mémoire préfenté aux Hollandois , que les François n'étoient
entrez qu'à ce deffein.
7. On objecle contre ce Tefiament, qu'il ne paroit pas qu'il foit pofîî-
ble d'empêcher que la Couronne d'Efpagne ne foit réunie à celle de Fran-
ce 9 quoique ce foit un des principaux Prétextes du Teftament. Cela eft
vifible par le Teftament même , qui laiffe à la liberté du Duc d'Anjou
d'accepter la Couronne de France , en cas que le Duc de Bourgogne
meure fans enfans maies, à condition qu'il nommera le Duc de Berry
pour lui fucceder comme Roi d'Efpagne. Mais , cette condition paroîtra
fort dangereufe & même impraticable, fi on confidere l'ambition qui règne
dans la plupart des Têtes couronnées, & fur-tout dans la Maifon de Bour-
bon, & le Génie de la France. On fçait fort bien que ce n'eft pas d'au-
jourd'hui que cette Couronne afpire à la Monarchie univerfelle, & que
pour cet effet la Cour de France a mis tout en ufage pour réunir la Cou-
ronne d'Efpagne à celle de France. Cela étant ain fi, à peine peut-on fup-
pofer qu'un Prince, aufîi hautain que le Duc d'Anjou paroit l'être , aban-
donne facilement fes prétendons à la Couronne d'Efpagne , dont il eft en
PofTeiTion, quand même la Couronne de France lui feroit dévolue.
C'efl en vain qu'on alléguera l'exemple de Henry III. qui quitta la Cou-
ronne de Pologne pour prendre celle de France après la Mort de Charles
IX. fon Frère ; le cas n'efl pas le même, la Couronne de Pologne ne vaut
pas à beaucoup près celle d'Efpagne. D'ailleurs, Henry III. n'y avoit pas
Droit par fa Naiffance, & il ne la pouvoit pas garder, à caufe de la con-
ftitution du Gouvernement, & de fon éloignement de France: au lieu
que le Duc d'Anjou , en cas que le Duc de Bourgogne meure fans Enfans
maies, prétendra retenir la Couronne d'Efpagne comme fon Droit d'ainef.
fe: il mettra fes Créatures & fes Miniflres dans l'Adminiftration des Af-
faires , & il aura par ce moyen une puiffante Fa6lion en Efpagne pour
fupporter le Gouvernement, outre toutes les forces de France qui feront
à Ces ordres pour le maintenir. Ceci ne paroitra pas une vaine fpeculation ,
fi on confidere que ces deux Royaumes font contigus, & que le Roi d'Ef-
pagne peut avoir les Armées de France prêtes lors qu'il lui plaira, pour
forcer les Efpagnols à lui obéïr en cas qu'ils s'opofaffent à fon Gouverne-
ment.
Mais, parce qu'on peut dire, que cette Supofition eft trop éloignée, &
qu'il eft probable que le Duc de Bourgogne aura afîez d'Héritiers pour la
Couronne de France, examinons des chofes qui femblent être plus près
de nous.
1. Il faut avouer que le Duc d'Anjou eft un Prince de France, &
que par conféquent la Nature l'oblige à aimer fon Païs natal.
Tome XI. Ooo 2.. Il
PE.
474 MEMOIRES, NEGOTÏATIO NS, TRAITEZ, ET
Affaires 2. Il f&ut demeurer d'accord, qu'il doit fon Avènement à la Couronne
gen. de d'Efpagne à fon Grand-Pere, à préfeni Roi de France.
l'Euro- • Qn ne peuc pas nier, qu'il ne foit nécefTairemenr obligé de fe gou-
verner par les Avis de fon Grand-Pere, & qu'il ne doive Te mettre fous
fa Protection, afin de fe maintenir dans fa nouvelle Dignité.
De tout cela il s'enfuit naturellement, que l'Efpagne fous le Duc d'An-
jou doit être gouvernée d'une manière conforme aux Deffeins de Louïs
XIV.: autrement, il eft en fon pouvoir de dépouiller quand il lui plaira le
Duc d'Anjou de fa Souveraineté, & de mettre ie Dauphin fon Père en
Poffeffion de la Couronne, que le Mémoire prétend lui apartenir par le
Droit de fa NaifTance.
On ne peut pas raifonnablement dire que les Efpagnols ne permettront
pas à leur nouveau Roi de prendre de telles mefures ; car, il eft évident
qu'ils ne peuvent pas l'en empêcher. Son Grand-Pere peut l'aiTifter, quand
il lui plaira, d'un tel nombre de forces par Mer & par Terre, que tout le
pouvoir d'Efpagne joint enfemble ne feroit pas capable de leur refifter; &
encore moins lorfque leur Roi agira de concert avec la France. Cela eft
inconteftable, fur-tout fi on confédéré, i. Que le Duc d'Anjou aura tou-
jours une Faélion confiderable, à caufe de plufieurs Grands d'Efpagne,
&c. qui dépendront toujours de lui & de la Cour. Le pouvoir de difpo-
fer des Dignitez Ecclefiafiiques ,'& des Poftes d'honneur dans l'Etat, l'Ar-
mée, & la Flote,a des charmes auxquels on ne peut refifler. Les Gouver-
nemens du Pérou, du Mexique, de la Sicile, de Milan , & des Pais- Bas
Efpagnols , avec les grands Emplois Ecclefiafiiques & Militaires de ces
Royaumes & de ces Provinces, outre ce que fa Majefté a en fa difpoii-
tion en divers Royaumes qui paffent pour dépendant de l'Efpagne , feront
donnez à la folicitation fecrete de la France, aux Grands du Pais, ou a
d'autres, pour fatisfaire leur ambition & leurs befoins,& ils les recevront
comme des faveurs du Duc d'Anjou ; ce qui les engagera infailliblement
dans fes intérêts, quelque contraires qu'ils foient au bien de l'Efpagne.
Il y a peu d'exemples dans ce fiécle , qui faffent voir que les homn.es
fjient à l'épreuve de pareilles tentations. Où font les Royaumes en Eu-
rope, dont les Princes, lors qu'ils ont voulu étendre leurs prérogatives,
n'aient pas trouvé des perfonnes du premier Rang capables d'être gagnées
parles honneurs, les emplois, ou les pemions, & difpofées à facrifier leur
Religion & leur Liberté à l'Ambition de leurs Monarques? Et pourquoi
croirions-nous que la Vertu règne plus en Efpagne , qu'en aucune autre
Nation? 2. Si nous confiderons, que depuis plufieurs années le Roi de
France s'eft déclaré le Protecteur du Papifme, contre ce qu'on appelle
l'Herefie du Nord:, & qu'une des principales Raifons qui l'ont obligé,
contre la bonne Politique, à perfecuter fi cruellement fes Sujets Protef-
tans, eft qu'il avoit en veiie la Succeffion d'Efpagne, & qu'il vouloit par-
là fe rendre lui-même avec toute fi Famille recomman lab>e aux Efpagnols
bigots : Si nous regardons encore avec quelle hardiefTe & quelle impu-
dence
PS.
RESOLUTIONS D'ETA T, M. DCC. I. 47;
dence l'Inquifition s'étoit déclarée contre le feu Roi, pour s'être joint Affaires
contre la France avec ceux des Alliez , qu'ils appellent Hérétiques ; nous Gf<. de
ferons bien-tôt convaincus qu'il a une telle influence fur ces Ecclefiafti-
ques , que par leur moien il peut en très-peu de tems obliger le relie de
l'Efpagne à confentir à tout ce qu'il lui plaira. 11 n'a qu'a leur perfuader
qu'il veut faire fervir la PuifTance d'Efpagne & de France jointes enfem-
ble, à la propagation de la foi Catholique, & h l'extirpation des Héréti-
ques , & alors il peut s'aiTurer que le Clergé l'affillera de toutes fes Rufes,
& de fes Artifices. Sans ces confiderations , & quelques autres fembla-
bles , les Efpagnols , qui d'ailleurs font alTez bons Politiques , auroient
plutôt appelle l'Archiduc à la Couronne , que d'expofer leur Liberté à être
engloutie par le Pouvoir de la France. Mais , en l'état où les choies font
aujourd'hui , ils doivent embraffer leurs chaînes , afin de rendre l'efclava-
ge, qu'ils ne peuvent éviter, aufîi doux qu'il leur fera poffiblej car il ell
dangereux de chagriner ceux, au pouvoir defquels on e(t forcé de fe fou-
mettre.
D'ailleurs , il ell évident que l'Efpagne deviendra de plus en plus fujet-
te à la France, & en danger d'être entièrement envahie par cette Cou-
ronne : car, il faut de toute neceflité que les Efpagnols s'endettent pour
de grandes fbmmes au Roy de France} puis qu'il difoit autrefois qu'il lui
étoit du beaucoup pour le refte de la dot de l'Infante, & qu'il offre au-
jourd'hui de rembourfer les Hollandois de plufieurs millions que les Efpa-
gnols leur doivent, à condition qu'ils évacueront les Places Elpagnoles des
Pais-Bas, dont leurs troupes font à préfent en PolTeffion. Il leur promec
aufîi de les ajîifter de fa fiote, pour forcer les Maures à lever le Siège de
Ceuta ; &, en cas de Guerre avec l'Empereur, ce qui femble inévitable
en un tems ou en un autre, il n'y a nul doute que l'Efpagne ne foit ref-
ponfable des frais qu'il fera obligé de faire pour la foutenir j & comme fé-
lon toutes les apparences l'Empereur tâchera d'engager des Alliez dans fa
querelle , qui auront des forces navales pour obliger la France à faire di-
verfion, & qui pourroient peut-être fe faifir des Indes Occidentales pour
la Maifon d'Autriche, cela ne peut qu'augmenter les dettes de l'Efpagne,
qui fera chargée des frais des flotes dont la France l'affillera} &, alors, le
Roi de France ne manquera pas, pour la fureté de ces dettes , à fe met-
tre en Poffefiion de Villes Frontières, de Ports de Mer, & de Provinces
entières. D'ailleurs , fuppofant qu'il n'y eut point de Guerre à cette occa-
fon pendant plufieurs années, il efl toujours certain que les frais des mar-
ches & contremarches, & des préparations Navales, pour établir & main-
tenir fon petit-fils fur le Thrône d'Efpagne , rendront cette Couronne tel-
lement endettée à la France, que ces dettes feront toujours un bon pré-
texte au Roi de France à préfent régnant , ou à quelcun de fes Succef-
feurs , pour s'en faifir. Et qui fçait s'il n'y a pas quelques Articles fecrets
de cette Nature entre lui, fon Petit-Fils, & les Regens Efpagnols Fran-
cifez ? Il femble du moins que ce foit à préfent la coutume dans tous les
Traitez de faire de tels Articles. Si cela eit, le Duc d'Anjou n'a pas tant
Ooo z perdu
C.EN. DE
l'Euro-
pe.
476 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
,
Amuss perdu au change, quand même il ne feroit réellement que Viceroy d'Ef-
pagné & des Pays-Bas qui appartiennent à cette Couronne, fous fon Grand-
Pere, ou Ton Père ; cette Viceroyauté vaut beaucoup mieux qu'aucun
Apanage qu'il auroit pu prétendre , comme Fils de France.
Ceci doit fuffire pour desabufer ceux, qui difent, que lors que le Duc
d'Anjou fera une fois établi en Efpagne, il deviendra autant Elpagnol que
s'il étoit né dans le Pais. On ne fçauroit répondre à ce que dit Ovide,
Nefcio qua natale folum\ & il y a des Exemples parlans de Princes qui ont
préféré l'intérêt du Païs de leur naifiance, ou du moins de leurs compa-
triotes, à ceux d'une Couronne nouvellement acquife. On dit même, que
c étoit un défaut de Jacques I. Roy de la Grande-Bretagne ; & ceux, qui
ont écrit fa Vie , en raportent plufieurs Exemples, quoique les Ecoflbis
difent, que les Hifloriens Anglois ne lui ont pas rendu juftice là^deffus.
Mais, quand même on ne tacheroit pas d'aiïujettir la Couronne d'Efpa-
gne à celle de France , il eft certain que la Cour de France tirera avanta-
ge de la Succefîion du Duc d'Anjou, qu'elle aura les Efpagnols pour fes
Amis & fes Alliez ;& peut-être qu'à l'avenir ils fe joindront enfernble dans
ia Guerre, & fans doute que les Efpagnols s'eflimeront heureux fi les cho-
fes en demeurent-là. D'ailleurs , il n'eft pas de la bienféance qu'on prive
tout d'un coup le jeune Roi de la Converfation des François , qui font
fes Amis; & il efl aflez vraifemblable que les vifites de la NoblefTe de
France à la Cour de Madrid deviendront à la Mode. On ne doit pas dou-
ter non plus que les Miniftres de France ne refident à Madrid , & qu'on
n'y élevé quelques François aux Dignitez & aux principaux Emplois de
l'Etat, comme on voit que cela arrive en d'autres Royaumes en pareil cas:
tout cela ne fervira qu'à atacher plus fortement ce Prince aux Intérêts de
la France. Et fi cette conduite allumoit quelque jaloufie dans l'Efprit des
Efpagnols, il y a encore une autre voye infaillible, qui eft , de trouver
des Penfionnaires parmi eux. Il y a mille manières pour perfuader aux
Efpagnols, qu'ils doivent tirer de grands avantages d'une telle alliance.
Quelques Rodomontades bien inventées, & quelques chimères de zèle,
font un grand effet fur un Peuple aufli ambitieux & aufîi bigot. La Cour
de France fçait fort bien, que c'eft-là leur foible ; c'efl pourquoi elle a com-
mencé à les attaquer de ce côté-là. Car, autrement, que veulent dire ces
pompeux éloges qui retentiffent à Verfailles de la bravoure & de la fagelfe
de la vafte étendue* de leur Empire?. &c. On carefie les Grands d'Efpa-
gne, & fi on peut les gagner par de groffes fommes d'argent, ou de bel-
les promettes, il efl fur qu'ils n'en manqueront pas. A préfent, on leur
dit que la France & l'Efpagne ne feront plus qu'une Nation: on excufe
les outrages qu'on leur a faits autrefois, comme des fuites de la conjonctu-
re des terris ; & on leur dit qu'ils ne doivent rien craindre de pareil à l'a-
venir. Il eft aifé de concevoir, qu'un répit de Guerre dans le fein decet-
te Monarchie languiffante doit lui être agréable; & ce n'eft pas un petit
avantage , que d'avoir l'efperance d'une longue Paix avec leur plus proche
& plus formidable Ennemi. Si, outre cela, on leur propofe de fe joindre
*4 1C4
l'Euko-
PK.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I." 477
à la France, pour faire fleurir le Commerce, & fur-tout pour rétablir leur Affaires
Manufacture de Laine, & s'emparer entr'eux du Commerce du Détroit & gkn.de
de Turquie , ce que les François ont entrepris d'eux mêmes avec beaucoup
moins de probabilité de réuflir , on peut s'afliirer qu'ils y donneront les mains.
De plus , fi on leur propofe d'entreprendre la Conquête de quelques Païs
qu'ils ont autrefois pofledé en Europe, comme les fept Provinces & le
Portugal, ou quelque autre partie de leurs Etats en Amérique; cela fans
doute ne manquera pas à les tenter. Et fi on y ajoutoit , que la France
les affiliera dans ce deffein, & qu'en même tems ils détruiront l'Herefie,
& rétabliront la Foy Catholique, leurs Prêtres ne manqueront pas de di-
re, que c'eft fe rebeller contre le Ciel , que de négliger une telle occaiion.
Et y a-t'-il rien que toute l'Europe & les Proteftans en particulier doivent
plus appréhender que cette formidable union des forces de France avec
les RicheiTes d'Efpagne? On peut s'aflurer que les Princes d'Italie donneront
volontiers les mains à un deffein de cette Nature : c'eft plus leur intérêt à pré-
fent, qu'il ne l'étoit en if 88. lorfqu'ils contribuèrent avec tant de zèle pour
empêcher les forces d'Efpagne de tomber fur eux , & les envoyèrent avec
l'Armée Invincible pour détruire l'Herefie du Nord. La France feule eflà
préfent plus formidable, que l'Efpagne ne l'étoit alors, & elle le devien-
dra beaucoup d'avantage aiant un Roi Catholique de fa Famille & fa Créa-
ture, qui dépend entièrement d'Elle. Le jeune Pape eft affez bon Poli-
tique pour voir qu'un jour un Prince de la Maifon de Bourbon pourroit
bien lui envoyer des Gendarmes, au lieu de la Haquenée dont on lui fait
préfent pour le Roïaume de INaples; c'eft pourquoi il croira fans doute
qu'il eft de fon intérêt, de lui confacrer en reconnoiffance une Armée de
Cavalerie , pourvu qu'il l'emploïe à quelque expédition dans le Nord. Les
Cardinaux zelez, qui ont choifi Albani, parce qu'ils connoifîbient qu'il
avoit des qualitez propres à maintenir la Dignité de la Chaire Papale, &
qu'il y étoit bien difpofé, feront prêts à concourir avec lui en tout ce
qui peut aider à reprendre les Païs que l'Eglife a perdus; & fans doute
qu'ils ont quelque occafion en vue, qu'ils croient propre à faire paroitre
leur zèle, en faveur d'un certain Prince, qu'ils appellent ConfefTeur, par-
ce qu'il a facnfié trois Couronnes à fon Zélé pour la Tiare Pontificale.
C'eit-ce que la Gazette imprimée à Anvers , & publiée avec la permifîïon
du jeune Roy Catholique, nous apprend; du moins on y trouve que le
jeune Roy parlant à ce Prince, lui dit, qu'il efperoit en peu de tems féliciter
le Prétendu Prince de Galles fur un fucces égal au fien , & ajouta , qu'il pou-
*voit compter fur fon amitié & fon ajfiflance. Ce ne fera pas la faute des In-
quifiteurs d'Efpagne, s'il fe trompe dans ks efperances, ou s'il ne tient
pas fa promeffe. Si la caufe de Religion ne fuffit pas pour faire une rup-
ture, il n'y a qu'à établir une Chambre à Madrid, comme celle de Metz,
& on trouvera bientôt des raifons d'une autre efJDece. La Prefcription de
tems ne paffe plus pour une raifon fuffifante parmi les François ; qui déci-
dent à préfent des Affaires d'Etat; ainfi quand il n'y auroit rien de plus
nouveau, que les Expéditions de Chevalier François Dràke, & du Che-,
Ooo 3 va-
478 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires valier Walter Raleigh, ou le fecours que la Reine Elizabeth donna aux
cen. de Hollandais, pour s'ériger en République, lorsqu'ils fecouérent le joug d'Ef-
t'EuRo- p.agnej ou ce qUe les Anglois rirent pour maintenir le Titre du Roy Jac-
s J ques d'Ecoffe en oppofition à celui de l'Infante d'Efpagne, l'un ou l'au-
tre de ces filets fufira • &, plutôt que de manquer de prétexte, ils infifte-
ront fur la prife de la Jamaïque, lors que les Anglois en dépofledérentles
Efpagnois du tems de Cromwell, & fur leurs établiffemens dans l'Améri-
que , à laquelle ils prétendent par Droit de découverte. C'eft en vain
qu'on alléguera pour fe défendre des Traitez particuliers, ou le Traité de
Ryswick: car Je Traité de Partage a été fait depuis ceux-là; & la même
diîtinchon de DefTein & de Termes , dont on fe fert pour pallier la ruptu-
re de celui-ci, fervira à excufer l'infraction de tous les autres: outre que
fi cela ne fuffit pas, on aura recours à la Décifion du Concile de Confian-
ce, qui pofe en termes exprès , qu'on ne doit pas tenir la Foy aux Hérétiques»
Il nous faut à préfent confiderer le Mémoire du Roi de France.
Suivant ce que nous avons déjà dit, il paroît qu'il eil plus avantageux
à la France , que tous les Etats d'Efpagne foient gouvernés par fon Con-
feil, & unis, ou aflujetis à fa Couronne, en forme de Vice-Royautés, ou
de Fiefs qui foient obligés de lui faire Hommage, que d'avoir eu la Por-
tion, que le Traité de Partage lui aiïignoit; ce qui fait révoquer en doute
la vérité de ce qu'on alégue , Que le Roi de France , en acceptant le Te/ta-
ment du feu Roi d'Efpagne , a préféré la Paix publique à fon propre intérêt.
La Reflexion qu'on fait fur le Traité de Partage, p. z. Qtiil auroit pro-
duit une infinité de troubles , £5? de malheurs communs à toute t' Europe , fonne
très-mal dans la bouche de ceux qui l'ont premièrement propofé, & four-
ni des Argumens folides pour prouver les grands Avantages qui en fe-
roient revenus , & perfuader à toute l'Europe qu'elle doit en procurer
l'éxecution. Si ceux qui raifonnent de cette manière avoient préveu ces
troubles infinis & ces malheurs communs à l'Europe, avant qu'ils entraf-
fent dans ce Traité, c'étoit une très-grande injuftice à eux que de s'y en-
gager. Le Mémoire reconnoit , p. 3. Que ï Elévation des Rois ne peut les
difpenfer de faire connoitre l'Equité des Guerres qu'ils entreprennent.
Quelque grand que foit un Monarque qui entreprend une Guerre qu'il
fçait être injuite , il doit fe fouvenir que celui , qui eli plus grand que les
plus grands Rois, a déclaré ceux-là maudits, qui répandent le fang inno-
cent. Mais, fi on n'a jamais concerté la julHce du Traité de Partage que
lors qu'on a offert la Couronne d'Efpagne à un Petit-fils de France, il
femble qu'on peut fort bien appliquer à ce fujet ce qu'un grand Prince &
Legiflateur a dit , que le Préfent aveugle les yeux du Sage.
La fubtile DiftinCtion entre le DefTein & les Termes du Trait-é fent
plus la Férule que le Sceptre, & paraîtra très-mal fondée, fi on confide-
re, que le DefTein du Traité ,par lia Majorité de ceux qui traitoient, étoit
de préf-rver la Paix de l'Europe, en empêchant la Réunion des Couron-
nes d'Efpagne & de France ; ce qu'un Teftament obtenu par furpriie
rend inutile aujourd'hui: & la Paix de l'Europe e!t autant en diriger par
cet-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 479
cette Réiinion, quefi les deux Couronnes étoient fur la tête d'une feule & Affaires
même Perfonne. On a d'autant plus de raifon de parler ainfi, que le Roi GfN- DE
de France a répète diverfes fois depuis la mort du dernier Roi d'Efpagne,
Qu'à l'avenir la France & £ E [pagne ne fer oient plus qu'un, & que fes Mi-
mllres ont déclaré a la Diète de l'Empire, Qu'à préfent il a, dejjein d'entre-
tenir une bonne Correspondance avec le Roi dy Ejpagne , ce qui le met en meilleur
état qu'auparavant , d'ajjfifter les Princes de £ Empire & de maintenir la Paix de
l'Empire. Il auroit pu auiîi-bien ajouter, & troubler aujjji la P aix de l'Europe.
On avoue p. 1. Que le Teftament Ï3 la Mort du Roi à! Ejpagne mettent la diffé-
rence entre le Traité d'aujourd'hui & celui d'alors. Ce qui fait évidemment voir
la partialité de la Cour de France, qui règle la juftice & finjutlice par fon
intérêt. Le Traité ne donne pas lieu de diftinguer le Deffein du Traité, des
Termes du Traité, fi le Roi d'Efpagne meurt, ou s'il vit. 11 efi évident que
le Traité ne devoit être mis en éxecution qu'après la mort de ce Prince ; de
forte que tout le différent vient du Teftament, & fa mort efl feulement
allcguée dans le Mémoire, comme un mot emploie pour remplir le Pa-
pier & amufer le Lecteur.
Au lieu qu'il eft dit dans la même page , que le deffein du Traité étoit de
maintenir la Paix générale \ mais à préfent que le Roy d' Ejpagne efi mort , &
a fait un Teftament en faveur du Duc cl' Anjou y les termes de ce Traité caufent
une Guerre univerfclle. Cela fait voir que ceux qui étoient intereffés dans
ce Traité agiffoient de bonne-foi, mais qu'il n'en étoit pas de même 2 l'é-
gard de la France. Nous avons la parole du Prophète Royal garand de
ce que nous avançons , lorfqu'il dit que l'homme droit tiendra ce qu'il a pro-
mis y quand même ce feroit à fon préjudice. Si cette doctrine efi: celefte , il n'eil
pas difficile de deviner d'où vient celle qui enfeigne à rompre les Traitez
& à vioier les ferments , fous prétexte d'une diitinction entre le Def-
fein & les Termes; autrement, l'Ecrivain facré infpiré de Dieu auroit
renverfé la Propofition, & dit que l'homme droit ne tiendra pas ce qu'il a
promis fous ferment , fi cela lui porte préjudice , parce que quand il a fait Ser-
ment, il avoit en veuë fon propre avantage; mais que la chofe tournant
à préfent a fon defavantage, il doit s'en tenir au defîein, & non pas aux
termes du Serment qu'il a fait.
A l'égard de ce qu'on allègue, que fi on s'en étoit tenu aux Termes
du Traité, cela auroit caufé une Guerre univerfelle : fi les François avoient
agi de bonne- foi , & qu'ils euffent exécuté de leur part ce qu'ils dévoient
faire , cela eft évidemment faux , & contraire à ce qu'ils ont îi fouvent dit,,
avant qu'ils euffent un Teftament en leur faveur > fçavoir, Que les Parties-
ir>tereffé(S dans le Traité étoient capables de le mettre éxecution , malgré tous op-
pofans. C'elt ce que le Mémoire reconnoit, lorfqu'il dit, Que le Roy de
France auroit peut-être obtenu des avantages plus confi durables par /es armes, que-
ce qui étoit jlipulé pour lui par le Partage \t s'il avoit voulu les emploie)' à ïoeca-
fion de la mort du Roy d'Efpagne. Qui doute donc qu'il n'eut pu beaucoup
plus facilement avec l'aifiltance des Anglois & des Hoilandoîs fe mettre
. tn poileffion de ce qui avoit ttéltipulé pour lui par le Traité de Partage?
Mais
l'Euro
pe.
480 MEMOIRES, NEGO TI A TIONS, TRAITEZ, ET
AmtixES Mais , la principale Objection confifte en ce que, l'Empereur refufoit de
gen. oe Joufcrire au irait é du Partage , dans l'efperance que V Archiduc fer oit déclaré
SucceJ/eur de toute la Monarchie ; & que fi la France ri avoit pas accepté le
'Tefiament, ï Archiduc aurait été déclaré SucceJ/eur Univer/èl de tous les Etats .
dépandants de la Monarchie d 'Ejpagne. Mais , que fignifie tout cela ? Les
François, les Anglois, les Hollandois, n'étoient ils pas capables d'obliger
l'Archiduc à fe contenter de l'Efpagne , des Indes Occidentales , & des
Pais-Bas , de quelque manière que le Roi d'Efpagne en eut difpofé par
fon Teilament ? On fçait qu'il étoit flipulé par le Traité, que l'Archiduc ne
pafTeroit dans aucun des Etats qui appartiennent à l'Efpagne , du vivant
de Sa Majeflé Catholique ; & qu'il ne le pourroit faire en aucune maniè-
re, que conformément au Traité après la mort du Roi d'Efpagne. Le
Roi de France avoit fes Troupes prêtes long-tems avant que Sa Majefté
Catholique fut décédée, pour prendre polleffion de ce qui avoit été ftipu-
lé pour lui par le Traité, ce qui auroit rendu le pafTage de l'Archiduc en
Efpagne très-difficile, s'il avoit voulu l'entreprendre contre les Termes
du Traité; & quand même il auroit trouvé le moien d'y paffer, les Forces
de ces trois Nations l'en auroient bien-tôt fait déloger, s'il n'avoit pas
confenti au Traité. Les François n'en peuvent pas douter, eux, qui n'igno-
rent pas les Conquêtes qu'ils rirent fur les Etats d'Efpagne durant la der-
nière Guerre avec leur Forces feules, malgré les efforts de l'Empereur,
de l'Efpagne , de l'Angleterre , & de la Hollande unis tous enfemble.
Mais, il faut qu'ils difent quelque chofe, & ils aiment mieux parler mal-
à-propos , que de ne rien dire du tout. Pourquoi , conformément au
Traité, ne fe font-ils pas joints aux autres Alliez, pour donner à l'Empe-
reur deux mois de terme après la mort du Roi d'Efpagne, afin de con-
fiderer s'il accepteroit Je Traité ou non ? Comme le Teflament du Roi
d'Efpagne fruftroit l'attente de l'Empereur ? qui efperoit que l'Archiduc
feroit déclaré SuccefTeur univerfel, il donnoit aulîi une occafion à la Fran-
ce de faire voir fa fincerité & fa juftice à tout le monde, en obfervant
le Traité , & en propofant de laifter prendre pofTeiîion à l'Archiduc de ce
qui avoit été ftipuié par lui par le Partage. Qui fait fi l'Empereur ne
l'auroit pas accepté? Il n'eft pas improblable qu'il l'eut fait, puifqu'il fe
voioït fruftré de fon attente, à l'égard du Teftament du Roi d'Efpagne;
& qu'il eft évident, que l'honneur & l'avantage qui lui dévoient revenir
de la Monarchie d'Efpagne, quoi qu'ainfi démembrée, font beaucoup
plus confiderables, que tout ce qu'il peut attendre de fon fils, continuant
à être Archiduc. Si les François en avoient ufé de cette manière, ils
auroient pu avoir raifon de dire, qu'ils avoient defTein de maintenir la
Paix Univerfelle de l'Europe; mais, puifque contre le Traité, ils ont viis
& rnodis obtenu un Teflament en leur faveur, & qu'ils font refolus de s'y
tenir, ils ont jette de juiies fondemens pour une Guerre Univerfelle, &
donné lieu à leurs Alliés de fe joindre avec l'Empereur pour faire valoir
le Droit de fa Famille fur tous les Etats dépendants de l'Efpagne; & s'ils
trouvent à propos de le faire, cela pourroit à la fin traverser les deffeins
de
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. ï. 4S1
de la Maifon de Bourbon, de même que le Teflament a frultré l'attente Affaires
de la Maifon d'Autriche. GfN- n*
Cefl une chofe plaifante d'entendre ce que le Mémoire dit, Que fes
alliés ri avaient pas de Droit aux Etats ftipulés pour lui par le Traite'; lorfque
tout le monde fçait , qu'il ne pouvoit lui-même y prétendre aucun droit ,
qu'en vertu de ce Traité. Avant Ton Mariage avec l'Infante, il a voit re-
noncé à tous les droits qu'il y auroit pu prétendre, comme on l'a déjà dit:
fans cette Renonciation on n'auroit jamais confenti au Mariage j Sa Re-
nonciation & celle de l'Infante furent enfuite ratifiées par le Traité des
Pirenées. Cefl en vain que les François allèguent , qu'il n'étoit pas en
fon pouvoir de céder le Droit de fon fils: car, fi cela étoit ainfi, c'étoit
une injuflice à lui de contracter ce Mariage & d'entrer dans le Traité;
& il a fait encore une autre injullice en donnant le Droit du Dauphin &
du Duc de Bourgogne au Duc d'Anjou; mais, puifqu'ils infiftent fi fort fur
la nullité de cette Renonciation, cela confirme dans le foupçon que le
Duc d'Anjou doit feulement agir comme Vice-Roi de la Couronne de
France; autrement, ils fe moquent du Monde en parlant ainfi du Droit,
lorfqu'en même tems ils juflifient ce qu'ils ont fait contre ce prétendu
Droit. Quoi qu'il en foit, il efl certain que cette raifon fera un Fonde-
ment éternel de querelle entre les Couronnes de France & d'Efpagne, fi
le Duc d'Anjou, & les Héritiers qui naitront de lui, font quelque chofe
de plus qtie Vicerois ; tant s'en faut, que l'Acceptation du Teflament du
feu Roi d'Efpagne foit le meilleur expédient pour maintenir la Paix de
l'Europe.
Ils ne font pas moins plaifants, lors qu'ils nous difent, Que ce ri étoit pas
la vue de Sa Majefté d'aquerir par un Traité les Royaumes de Naples & de Si-
cile , la Province de Guipufcoa , £5? la Duché de Lorraine ; mais , que fon prin-
cipal but étoit de maintenir la Paix , & quelle a traité fur cet unique fonde-
ment. Si l'unique fondement du Traité qu'il a fait étoit de maintenir la
Paix générale , il n'avoit pas befoin de faire aucun Traité , il n'avoit
qu'à obferver le Traité des Pirenées , par lequel il renonçoit pour lui,
& fes SuccefTeurs à jamais , à toutes prétentions à la Couronne d'Efpa-
gne; & s'il en avoit agi de cette manière , nous pouvons bien nous ha-
zarder à dire , que fes Alliez ne l'auroient pas forcé à prendre
ces Royaumes & ces Provinces: de forte que s'il n'a pas traité en vue des
Etats itipulez pour lui dans le Partage , il a traité , ou pour rien , ou
bien pour éfraïer les Efpagnols & les obliger à lui donner le tout, comme
il efl plus vrai-femblable , & comme l'événement l'a vérifié.
Mais, pour une plus grande marque dereconnoifîance envers fes Alliez,
le Mémoire nous dit , Que peut-être il auroit pu obtenir des avantages plus
confiderables par fes armes , s il avoit voulu les emploier à ïoccafion de la mort
du Roy d'Efpagne. A quoi il efl aifé de répondre, que peut-être il auroit
perdu de plus grands avantages par les Armes des Alliez; & ceci ne pa-
roitra plus un Paradoxe, lors qu'on confiderera; que fi pour maintenir le
Traité des Pirenées, & conferver la Paix & la Balance de l'Europe, ils
Tome XL Ppp s'étoienc
P£.
482 MEMOIRES, NEGOTIATIÔNS, TRAITEZ, ET
Apures s'étoient joints avec l'Empereur & l'Efpagne pour l'attaquer , & qu'ils
gen. de euflent envoyé une puiflante Flote pour harafïer Tes Côtes & bombarder
l'Euro- jes villes de Ton Royaume } il ne feroit pas aujourd'hui en état de refiller
fi aifément à leurs forces jointes enfemble, comme il a fait pendant la der-
• niere Guerre , puis fur-tout qu'il eil déjà épuifé d'hommes & d'argent.
D'où nous pouvons raifonnablement conclure, fans un peut-être, qu'ils
lui auroient donné un vomitif plus fort qu'il ne rirent à la conclufion de la
dernière Guerre, lors qu'ils l'obligèrent à rendre gorge & à reitituer tant
de fortes Places & de vafles Provinces. C'eil encore une abfurdité de
nous dire , dans le Mémoire , les merveilles qu'il auroit pu faire avec Ces
Armes, s'il avoit eu defTein de s'en fervir à l'occafion de la mort du Roi
d'Efpagne:, quand tout le monde fçait, que non feulement il menaçoit de
fes Armes les deux Branches de laMaifon d'Autriche, fi elles faifoient au-
cune démarche pour empêcher l'exécution du Traité de Fartage ; mais
qu'il faifoit encore marcher fes Troupes fur les Frontières d'Efpagne, pour
être prêtes à fe faifir de Fontarabie, &c. auiîi-tôt que fon Beaufrére feroit
mort ; ce qui épouvanta tellement ce pauvre Prince, qui d'ailleurs avoit
l'efprit foible, qu'il y a tout fujet de croire, que la peur dont il fut faifi à
cette occafion lui abrégea fes jours..
Ce qu'on allègue encore, que s'il avoit accepté le Partage, il fe feroit at-
tiré par-là une longue & fanglante Guerre , & que les Efpagnols fe met-
toient en pofïure de maintenir leur Monarchie entière, n'elb qu'un vain &
ridicule prétexte. Qu'auroit pu faire cette Monarchie foible & difperfée
en plulieurs Parties du Monde pour fe maintenir unie & entière, contre
le Pouvoir de France, d'Angleterre, & de Hollande, joint enfemble ? Ils
ne font pas capables d'eux-mêmes de refiiler à la France feule, & par
conféquent ils le feroient encore moins lors que ces trois PuilTances fe
trouveroient jointes enfemble. L'Empereur ne pouvoit les fécourir par
Mer, ni empêcher qu'on entrât par Terre dans leur Pais. On ne peut
pas raifonnablement dire , qu'il auroit pu faire diverfion fur le Rhin , car
Louis XIV. lui a taillé alTez de befogne chez lui, en encourageant les
Princes qui s'oppofent au neuvième Ele&orat, ôc qui fe plaignent de plu-
iieurs autres Griefs, à armer contre lui : ou fi cela n'avoit pas réuili , il
auroit pu avoir recours à un ancien Artifice des Rois Très-Chrétiens, qui
ne leur a jamais manqué , qui eil d'engager les Turcs à envahir la Chré-
tienté. Les François & les Hollandois font dans le même Continent
que l'Empereur, & font plus capables d'envahir fes Etats, qu'il ne l'eft
de fe rendre maître des leurs : Les Etats appartenant à l'Efpagne & fti-
pulez pour la France dans le Traité , auroient pu être démembrez du
corps de la Monarchie d'Efpagne, avant que l'Empereur pût venir à leur
fecours,. & les Flottes Confédérées auroient aifément démembré l'Ame-
nque, qui eft l'ame de leur Monarchie, ce qui Tauroit fait périr à ja-
mais : c'eil ce que les Efpagnols voyent bien, auffi n'y avoit-il pas d'au-
tre voye que de confentir au Traité de Partage, ce qui leur auroit été
désavantageux & deshonorable j ou tacher de rompre ce Traité , en fe
jet-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 4g;
jettant entre les bras d'une Nation qui Te moque d'être efclave de fa pa- AriA»**
rôle : & devenir plutôt entièrement efclaves, que de continuer à être li- ***». »«
bres dans un Etat démembré. Cela peut fervir de réponfe au Duc de Sa- L'EuRO~
voye qui vouloit faire valoir fon Droit , en cas que l'Archiduc s'en tint PF'
au Traité de Partage } tout le monde fçait que ce petit Prince auroit iné-
vitablement cherché fa ruine, s'il avoit entrepris de difputer fes droits
contre l'Empereur, la France, l'Angleterre, & la Hollande.
Ce qui a été dit fuffira pour prouver, qu'aucun Prince de la Maifon de
France n avoit Droit à la Couronne d'Efpagne: nous examinerons à pré-
fent ce qui eft répandu par-ci par-là dans le Mémoire , comme, §)ue le
feu Roy d' Efpagne , par fon l'ejl ciment , a enfin fait jujlke aux véritables héri-
tiers. Il feroit à fouhaiter que l'Auteur du Mémoire eut marqué & fixé
en quoi confifte cette juftice: car, quelquefois il dit que cette Juftice eft
feulement dûë au Dauphin , & dans cette vue il déclare que la Renon-
ciation de fon Père & de fa Mère elt entièrement nulle; & il parle ici
de la Juftice que le Teftament du Roy d'Efpagne a faite aux véritables
Héritiers, qui exclut le Dauphin, le Duc de Bourgogne, & tous ceux
qui feront Rois de France après eux, & l'applique au Duc d'Anjou,
&c. deforte que cette Notion & cette Pratique détruifent entièrement la
juftice d'une Succeffion en droite Ligne , qui a coûté la vie à tant de
milliers de Sujets, dans la plupart des Royaumes de l'Europe. De plus,
comme on l'a déjà remarqué , le Mémoire fe contredit là-deffus : car fî
les Renonciations de Louis XIII. & de Louis XIV. étoient injultes, celle
du Dauphin le doit être aufîi. Et quoique le Dauphin foit un Prince d'un
(ï bon naturel , que de déclarer qu il fera bien aife de dire pendant toute fa vie ,
le Roy mon Père, & le Roy mon Fils , on doute que le Duc de Bourgogne
foit un Prince d'un auffi bon naturel : peut-être qu'il viendra un tems où
on lui dira à l'oreille, que la Cour de France a eu tout à la fois deux dif-
férentes Notions de Juftice ; l'une, qu'un Père ne pouvoit pas juftement
renoncer au Droit de fon Fils aine : & l'autre qu'un Père peut juftement
renoncer au Droit de fon fils aîné en faveur du fécond : & puifque ces
deux Idées font juftes, celle-là doit être la plus jufte, qui fait plus pour
fa gloire & pour fon avantage ; & par conféquent puifqu'il eft plus glo-
rieux & plus avantageux d'être Roi de France, de Navarre, & d'Efpa-
gne, &c. que d'être feulement Roi de France & de Navarre : fon Frère
le Duc d'Anjou , feroit fort juftement de revenir chez foi, de fe conten-
ter de fon Apanage en France, & lui reftituer la Couronne d'Efpagne,
qui eft fon Droit d'aîneffe. Si cela arrive, comme il n'eft nullement im-
poffible, la plus longue épée doit déterminer de la Juftice ; & ainfi le Te-
ftament du feu Roi d'Efpagne maintient admirablement bien la Paix de
l'Europe.
Nous ne ferons plus qu'une Remarque pour finir cet Article , c'eft que
pour rendre le Teftament du Roi d'Efpagne julte, la Ratification devoit
s'en faire avec une folemnité & une autorité égale à celle avec laquelle
fe fit la Ratification du Contract; de Mariage de Louïs XIV., & le
Ppp 2 Trai^
jl'Euro-
PE
3>
484 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Traitté des Pyrénées, qui eft entièrement renverfé par ce Teftament.
gen. ue Après avoir examiné les principaux Chefs du Mémoire, nous parcour-
rons feulement quelques autres Particularitez qui s'y rencontrent.
L'Auteur dit, ,, Que tant d'Etats fi confiderables étant ajoutez à la
France, fuivant la difpofition du Traité, auraient pu donner de la ja-
, loufie contre le Pouvoir de France, & que par conféquent les Etats •
, doivent préférer la Succeffion établie par le Teftament, au Traité de
,, Partage.,, Mais, qui peut s'empêcher de voir que les Etats, & toute
l'Europe, ont beaucoup plus de raifon d'être jaloux de la Réunion de tous
les Etats d'Efpagne h la Couronne de France, ou ce qui ell la même
chofe, que toute la Monarchie d'Efpagne foit fous le Gouvernement du
Confeil de France. Puifque l 'infraction du Traité de Partage efl un exem-
ple fi récent de l'InconllanceFrançoife, & du plus grand mépris & affront
qu'on pût faire à Sa Majeilé Britannique & aux Etats -Généraux ; qui fe-
ra garand, que cette infraction n'ira pas plus loin, & qu'elle ne fera pas
encore fuivie de Contraventions à tous les Traitez pour troubler la Paix
dont ils jouiffent, & la Tranquilité univerfelle de l'Europe ? Lorfque le
Roy de la Grande-Bretagne & les Hollandois entrèrent dans le Traité-de
Partage, on leur fit croire que les François n'avoient point d'autre dcffein
par ce Traité , que de prévenir de nouvelles Guerres , ou comme ils s'en
exprimoient eux - mêmes dans leurs Mémoires aux autres Potentats de
l'Europe, que la Conjoncture des Affaires rendoit ce Traité aufli nécef-
faire , qu'il fefl d'abattre une rue ou quelques maifons , pour prévenir f incen-
die d'une Fille entière. Ils n'avoient pas lieu de croire, qu'après avoir fait
une 11 bonne part aux François, ils voulurent encore s'emparer de toute
la Monarchie d'Efpagne, ou entreprendre de troubler davantage f Euro-
pe fur ce fujet ; c'eft pourquoi , quelles que puiffent être les fuggeftions
de leurs Sujets à l'égard du danger de leur Commerce de la Mer Médi-
terranée, ils étoient bien fondez de croire que les François auroient dilîî-
pé ces craintes en obfervant fidellement le Traité de leur côté; mais,puif-
qu'il en ell arrivé autrement, ils ont toutes les raifons imaginables de di-
re , que les craintes de leurs Sujets, & de ceux d'Angleterre, font les
effets d'une fage prévoyance ; de forte qu'ils doivent à l'avenir faire plus
de fond fur le jugement des uns & des autres, foit à l'égard des Traitez,
ou des évenemens, qu'ils n'en ont fait jufques ici, à ce que le Mémoire
femble infinuer.
Ce que nous venons de dire fuffit pour répondre à ce qui efl: déclaré
dans le Mémoire, ghton ne voit pas que les Etats reçoivent aucun préjudice
de ce que le Roy a accepté le Teftament. Mais, de plus, il ell fur que les
Peuples de Hollande & d'Angleterre s'apperçoivent fort bien du préjudi-
ce que cette pratique de la Cour de France leur fait \ fur-tout les Hollan-
dois croient avoir de bonnes raifons pour cela , lors qu'ils voyent que le Roi de
France a promis dans fa Lettre à la Reine Douairière & à la Régence
d'Efpagne, Que fon principal foin fera de rétablir la Monarchie d'Efpagne au
plus haut point de Gloire vu elle (bit jamais parvenue. Cela rapelle en leur
mé-
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 48r
mémoire , qu'ils faifoient autrefois partie de la Monarchie d'Efpngne; Affaires
qu'en fecouant le joug de fa Tyrannie, ils lui ont fait perdre une partie Gf£- DE
de fa gloire; & que l'EtabliiTement de leur République n'a pas peu con-
tribué à fa décadence. Ils fçavent auffi, & ils en fou firent encore, que
la France a fait plus d'une fois fes efforts pour fe mettre en pofTefïion de
tous les Païs-Bas, & fur-tout de leurs Provinces, fous prétexte qu'ils lui
donnoient du Mécontentement ; car c'eft aujourd'hui une des plus terribles
chofes du monde, lorique les grands Monarques fe plaignent d'avoir reçu
du Mécontentement , ou d'avoir été mal fervis. Rien ne peut fatisfaire l'In-
dignation Royale, que la ruine de ces pauvres Républiques ou Royaumes,
dont on fe plaint. On leur reproche. encore qu'ils manquent de fincéritê
en demandant ce qu'ils n'ont jamais eu deffein d'obtenir , 6? quils font des
vœux contraires à l'Intérêt de leur République. Cela n'efï: pas feulement ca-
pable de leur attirer le refTentiment de Louïs XIV. mais auffi d'animer
leurs Peuples contr'eux : on les menace encore , s ils ne tachent par leur
conduite de mériter l'honneur de /on 'affeclion, 6r la continuation de (a bien-
veillance ; & on les accufe de ne s'être pas comportez d'une manière qui
réponde à la Pruteclion qu'ils ont reçue de Sa Majefté , & de fes Ancêtres.
Voilà des crimes encore plus grands , que ceux de lui avoir donné du
mécontentement ; ce qui néanmoins donna occafion aux Troupes de
France de faire une Irruption dans leur Pais en 1672. & par conféquent
les pauvres Etats ont raifon de s'attendre à être aujourd'hui plus fevére-
ment traittez qu'ils ne le furent alors, s'ils ne font au plutôt leur Paix
en rompant le Traire de Partage , & reconnoiffant le Duc d'Anjou pour
Roi d'Efpagne. Voilà, félon toutes les apparences, leur recompenfe & la
nôtre, pour avoir eu l'honnêteté d'entrer dans un Traité, par lequel la
France agrandiflbit fi considérablement fes Etats, comme le Mémoire le
reconnoit , & dans lequel nous avons agi d'une manière fi defintereffée,
que les François avouent de bonne-foi , que nous navions fiipulé aucun a-,
vantage particulier pour nous-mêmes. Mais, puifque le Mémoire dit, Que
l' Equité du Roi , & fa tendre Affetlion pour le Roi d'Efpagne, ne pouvoient p.is-
lui permetre de tourner fes armes contre une Nation, /ans autre raifon que
parce quelle a offert à [on nouveau Roi , petit -fils de Sa Majefié, Y une des
plus puiffantes Monarchies de ï Europe \ nous efpérons auffi que l'Equité &
la Reconnoifiance envers fts Alliez ne lui permettra pas non plus de tour-
ner Ces armes contre deux Nations par le motif qu'elles ont voulu ajouter
plufieurs Royaumes & Provinces à la France, qui elt déjà beaucoup plus
puiflante qu'aucune autre Monarchie de l'Europe, & qu'ils ont une pîus
grande confideration pour Sa Majelté & fon Royaume, que pour fon Pe-
lit-fils & fes Etats.
Cette déférence eft d'autant plus confiderable, que les François n'a-
xaient pas fujet de l'attendre d'aucune de ces deux Nations, qui avoienc
ie plus beau prétexte du monde de s en excufer, Ci elles avoient eu queî-
qu'autre chofe en veiïe, que de maintenir la Paix de l'Europe. Elles fça-
voient fort bien, que le Roi de France s'étoit exclus lui même de toutes
Ppp 3 pré-
486' MEMOIRES , NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
prétentions à la Succeffion d'Efpagne par le Traité des Pirenées, & quoi
qu'il eut fait plufieurs infractions à ce Traité, elles n'étoient pourtant pas
obligées de croire qu'il fut annullé à cet égard. On peut dire même que
fi elles n'avoient pas préféré le defir qu'elles avoient pour la Paix, aux
jultes fujets de leur reffentiment, elles auroient pu le faire fervir de fon-
dement à une nouvelle Alliance contre lui, en cas qu'il attentat de fe ren-
dre maître de quelques Païs dépendants la Monarchie d'E'pagne , après la
mort de fon Beaufrere. L'honnêteté donc, que ces deux Nations ont eue
pour !e Roi de.France, doit être d'autant plus efthnée, qu'elle étoit libre
ck délinterefTée , comme le Mémoire le reconnoit \ & la jufle eftime que
les François en doivent faire ne doit pas être diminuée par la eonfide-
ration que leurs Alliez ont fait voir par ce Traité, qu'ils avoient aufli peu
en vue la Bigoterie, que leurs Intérêts temporels ; car, ils n'ont rien ftipulé
en faveur des Proteflans de France , qui font perfecucez de la manière la
plus barbare qui fut jamais -, ni en faveur de ceux d'Allemagne, qui font
opprimez & accablez, fous prétexte du quatrième Article du Traité de
Ryfwiek , parce qu'ils étoient opprimez de la même manière par les Fran-
çois avant ce Traité : & fi Louis XIV. vouloit déclarer que ce n'eil pas
en ce fens qu'il prend cet Article , les Princes d'Allemagne fes Voifïns
n'ôferoient l'étendre, comme ils ont fait, à la ruine des Proteflans. Les
Alliez pouvoient infiHer là-deffus, avant que d'entrer dans ce Traité avec
la France, & ils l'auroient fait fans doute, s'ils n'avoient préféré la Paix
générale à celle de quelques particuliers. Mais il femble qu'on a beau re-
lâcher de fes Intérêts, foit dans les chofes civiles, ou celles qui regar-
dent la Religion, tout cela n'eft pas. capable de contenter l'affection ex-
tcaordinaire que le Roi porte au Duc d'Anjou, à moins que toute l'Euro-
pe ne facrifie fon honneur & fon Intérêt à l'avancement de fon Petit-
Fils , ce qui eft contre le Droit du Dauphin fon propre Fils , comme le Mé-
moire en tombe d'accord.
Ce que nous avons enfuite à confiderer eft l'Influence que cette Suc-
ceffion peut avoir fur les Affaires de l'Europe, & quel peut-être l'Inté-
rêt des Princes & des Etats de la Chrétienté, à l'égard de cette Succeflïon.
En premier lieu, nous confidererons la Hollande, parce que c'eli le
Païs le. plus expofé au danger, & qui félon toutes les apparences fera
un des premiers qui reffentira les effets de cette Union. En voici les
raifons.
i. Les Efpagnols les regardent comme des Rebelles, & le Roi de
France en promettant de faire fes efforts pour rétablir l'Efpagne au plus
haut point de fon ancienne gloire, femble s'être engagé à les affilier pour
réduire les Hollandois.
2. Il femble encore y être engagé, en qualité de Champion déclaré de
ce qu'on appelle la Foy Catholique, que le feu Roy d'Efpagne recomman-
de à fon Succeffeur d'avancer, quand même* il devroit tout facrifier pour
cette Entreprife. Et Ton n'ignore pas, qu'après la Grande-Bretagne, la
Hollande eft le grand Boulevard de la Reformation.
2. Corn-
l'Euho-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 487
3. Comme, après l'Angleterre, les Hollandois font la grande Barrière des Aïfaiius
Intérêts des Proteftans , ils font auifi le Boulevard de la Liberté de toute gen.dk
l'Europe, &, après les Anglois , il forment le plus grand Obitacle à la Mo-
narchie Univerfelle , à laquelle ils fe font plus oppofez qu'aucune autre Na-
tion de l'Europe, fi on en excepte la Nation Angloife. Les François l'ont
reconnu par une trifte expérience, aufïi ne faut-il pas douter qu'ils ne fe
fervent aujourd'hui contr'eux de leur avantage.
4. La Conjoncture préfente des Affaires les expofe plus que jamais à
être conquis par la France. La Flandre & le Brabant, qui étoient leurs
Barrières naturelles, ne doivent plus à préfent être regardées comme tel-
les. Et fi les Efpagnols gardoient ces Provinces, ce n'efl pas qu'ils en re-
tiraflent aucun avantage, car tout le monde fçait qu'elles étoient à charge
à cette Monarchie; mais, la principale raifon qui les obligeoit à les garder,
c'ell que c'étoit une épine dans le côté de la France , ou un os à ronger
pour les François, & par ce moïen ils étoient fûrs qu'ils les obligeroient à
faire diverfion , lorsqu'ils auroient deffein d'attaquer le corps de leur Mo-
narchie, parce que la confervation de ces Provinces Espagnoles étoic
d'une telle conféquence à l'Empereur, l'Angleterre, & la Hollande , que
faifant en quelque forte une Barrière qui leur étoit commune à tous , ils
n'auroient jamais fouffert que \qs François s'en fuifent entièrement ren-
dus les Maîtres.
Mais à préfent que la Scène des Affaires efr. changée, & que la France
& l'Efpagne font gouvernées par les mêmes Confeils ; ces deux Couron-
nes feront bien aifes de trouver l'occafion de réduire les Hollandois. Li
France s'y portera aifément , à caufe des raifons que nous avons dites , &
l'Efpagne y donnera volontiers les mains , non-feulement à caufe de la
haine qui lui eft commune avec la France contre les Provinces-Unies,
mais auiïi parce qu'elle ne peut jamais efperer une occafion plus favorable
pour les ramener à leur ancienne obenTance , ce qui fervira de prétexte,
du moins pour quelque tems.
Les raifons fuivantes feront encore mieux voir le Danger auquel les
Hollandois font expofez.
1. Les Habitans du Païs-Bas Efpagnol font leurs Ennemis à l'égard de la
Religion; les Flamands font des Papilles û bigots, qu'ils croient que tous
les Proteftans font damnez, ou peu s'en faut. 2. Ils les haïfTent,à caufe
du Commerce, qu'Amflerdam a enlevé* à Anvers , qui en étoit autrefois
le fiege, & qui rendoit cette Ville Ci fîoriiTante. 3. Ils leur veulent enco-
re du mal pour quelques brouilleries qu'ils ont eues entr'eux, & ils les ac-
cufent d'avoir à leur préjudice cherché indirectement leur avantage par le
dernier Traité, en déclarant le Prince Electoral de Bavière Succeflèur de
l'Efpagne. 4. Les Ports & les Havres de la Hollande font fi neceffaires
aux François, que fans ce'a ils ne peuvent jamais réuîTir dans leurs Entre-
prifes; car, quoique Nieuport & Oltende, que nous regardons à préfent
comme étant au commandement de la Cour de France , foient fort avan-
tageux aux flottes, qu'ils peuvent avoir dans ie Canal, neanmeins pen-
dant
488 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aitatres dant que les Hollandois feront capables de traverfer leurs deffeins avec
GEN. DE
1,'Euao-
leurs flottes, ils ne feront jamais fùrs de leurs Entreprifes & de leurs Expe-
PK.
ditions de mer fur cette partie de l'Europe. Outre que le commerce ne
peut jamais fe rétablir dans les Païs-Bas Efpagnols , que les forces des
Hollandois ne foient auparavant ruinées par mer.
Les chofes étant ainfi à l'égard des Hollandois, leur Intérêt doit être, en
premier lieu, d'entretenir une bonne correfpondance avec la Grande-Bre-
tagne, & de faire une Ligue offenfive & défenfive avec les Angloisjmais
auffi, pour la rendre ferme & durable, ils doivent prendre des mefures qui
puifl'ent les juflifier de ce qu'on leur impute, d'être trop attachez à leurs
propres intérêts, & de vouloir entreprendre fur le commerce d'autrui, &
fe comporter en un mot de telle manière que nous n'aïons plus fujet de
nous plaindre de leurs entreprifes pour empêcher le commerce de nos ne-
gotians.
Il eft encore de leur Intérêt d'entretenir une bonne Correfpondance avec
les Couronnes du Nord, qui peuvent les affilier de leurs Forces par mer
& par terre. Ils en doivent faire de même avec l'Electeur de Brandebourg,
& les trois Princes de la Maifon de Brunswick, qui font en état de balan-
cer les forces de l'Evêque de Munfter, de l'Electeur de Cologne, du Duc
de Nieubourg, & du Chapitre de Liège, leurs voifins Papilles, en cas d'u-
ne guerre de Religion, dont la conjoncture préfente des Affaires fembîe
menacer.
Il eft aufll de leur Intérêt d'entretenir l'amitié de ces voifins, dont nous
venons de parler, & tâcher de les attirer dans une Ligue défenfive, par la
confideration du Danger commun, dont ils font tous menacez par l'Union
de la France & de l'Efpagne; &, fur-tout, ils doivent bien prendre gar-
de à ne pas fe précipiter dans leurs refblutions , pour faire aucune ligue
avec la France, quelque preflante que foit la necefîîté de leurs Affaires:
leur trop grande précipitation fur ce fujet, fans confulter l'Angleterre , &
les autres Proteftans leurs voifins, pouroit leur être fatale, de même qu'à
toute l'Europe. Les faufïès démarches qu'ils firent autrefois en fe preffant
trop de conclure la Paix de Nimégue, contre le fentiment de leur Stadt-
houder, & de l'Electeur de Brandebourg leur Allié, peut leur fervir de
précaution là-deffus.
Nous devons examiner à-préfeqt quel peut être l'Intérêt de l'Angleterre
dans cette Conjoncture : & , en premier lieu , il femble qu'il eft abfolu-
ment néceffaire d'entrer en une Amitié plus étroite que jamais avec les
Hollandois. Pour cet effet, il feroit à propos que le Roi & le Parlement
fiffent énfemble tous leurs efforts , afin d'éloigner , s'il eft poiîible , tous
les fujets réels & imaginaires , dont on s'eft autrefois fervi, pour nous
brouiller avec des Voifins , dont nous avons tant de befoin ; il faudroit donc
accommoder à l'amiable tous lesDifférens qui regardent le Commerce, &
les terminer & régler d'une telle manière , qu'ils ne puiffent plus à l'ave-
nir , s'il eft pofîible, fervir de prétexte à faire naître de nouvelles Di-
vifions. !
Sous
PF.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. 449
Sous le Règne glorieux de la Reine Elizabeth, on trouva que l'Intérêt Affaire»
de l'Angleterre l'obligeoit indifpenfablement à affilier les Hollandois. Et GFN- °£
les fàcheufes conféquences de nos differens furent repréfentées par deux L'EuRO*
pjtsde terre, qui flotoient enfemble , avec cette devife , Si coliidimur ,
frangimur, c'eft-à-dire , Si nous choquons ï un contre l'autre , nous Comme s caf-
fz. Il eft plus de nôtre Intérêt à préfent, qu'il n'étoit alors , d'entrete-
nir une bonne Intelligence , & d'éviter toute forte de Divifions avec eux.
Les Efpagnols, qui étoient alors les Champions du Papifme , & les Pré-
tendants à la Monarchie Univerfelle, avoient la France, qui s'oppofoit à
leurs delTeins , & n'avoient point d'autres Pais , d'où il leur fût poffible
d'entrer en Angleterre, que la Flandre j au-lieu qu'à préfent la France &
l'Efpagne font jointes enfemble, & ont la Flandre à leur commandement.
De forte qu'on peut entrer en Angleterre de France & de Flandre , &
de la Hollande auffi ,' Ci une fois les François en deviennent les Maitres;
ce qui pourroit arriver bientôt, fi nous ne faifons pas tous nos efforts, &
ne nous joignons unanimement avec les Hollandois pour l'empêcher.
Nous y fommes obligez auffi-bien par Intérêt que par Reconnoiffance.
C'eft au fecours qu'ils nous donnèrent dans la dernière Révolution , que
nous fommes redevables de tout ce que nous poffedons, puis qu'ils nous
ont maintenus dans la poffeffion de nos Biens & de nôtre Religion qu'on
vouloit nous ravir. Ce fecours ne doit pas feulement être regardé com-
me un équivalent de ce que nous fîmes pour eux fous le Règne de la Rei-
ne Elizabeth , mais il doit encore nous obliger à prendre foin de leur fure-
té, qui fait auffi la nôtre.
Il paroitra vifiblement que nôtre propre Intérêt doit nous y engager, Ci
nous confiderons , qu'il n'y a point de Nation fi capable que les Hollan-
dois d'obliger la France à faire diverfion par mer & par terre, fi elle en-
treprenoit d'entrer en Angleterre. Il eft certain qu'il eft de nôtre Intérêt
d'éloigner la guerre le plus loin de nous , qu'il nous fera poiïible ; &
qu'elle fe faffe plutôt hors de nôtre pais, que dans le fein de nôtre propre
patrie. C'eft ce qu'on a pratiqué avec fuccès fous les Règnes de la Reine
Elizabeth & de fà Majefté qui règne à préfent. Nous pouvons le faire
auffi long-tems que les Hollandois conferveront leur Liberté. Nous pou-
vons les afïifter des forces Angloifes, ou prendre à nôtre folde des Trou-
pes d'Allemagne & des Couronnes du Nord, & les joindre aux Hollan-
dois pour agir avec eux contre la France (ï la neceffité le requiert ; ce-
la obligera la France, à faire diverfion par terre } & on fait fort bien que
les Hollandois & les Anglois peuvent agir par mer d'une manière offenli-
ve ou défenfive, félon qu'ils le trouvent à propos.
Mais fi nous nous laiffions tellement aveugler par quelque confideration,
•ou prétexte que ce foit, que de ne pas prendre des mefures conjointe-
ment avec les Hollandois pour nôtre mutuelle confervation , nous pou-
vons facilement prévoir les conféquences qui en refultent^ favoir,
r. Qu'il faut que les Hollandois fe foumettent entièrement au Pouvoir
ïïom. xi. Qqq ^c
Affaires
G EN DE
l'Euro-
pe.
4fo MEMOIRES , NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
de la France, & que leur Gouvernement foit diflbus, ou qu'ils fe foumet-
tent aux François aux termes qu'ils leur impoferont.
2. Si cela arrive, nous ne pouvons plus en aucune manière débarquer
tranquilement nos troupes en aucun endroit de l'Europe , ni par confé-
quent obliger la France à faire diverfion.
3. Nous ne ferons pas feulement privez du puiiïant fecours que les Hol-
landois nous peuvent donner par mer, mais il nous faudra de plus refifler
à toutes leurs Forces navales jointes à celles de France & d'Efpagne ; &
alors fans contredit la partie feroit trop forte pour nous.
4. Nous courons rifque, non-feulement qu'on nous empêche tout nôtre
Commerce de la Mer Méditerranée , mais encore qu'on ne ruine entière-
ment celui de la Mer Baltique, & des Indes Orientales & Occidentales.
Nous avons veu dans la dernière Guerre comment Bart & fes Dunquer-
quois ont interrompu nôtre Commerce dans les mers du Nord; ce qui doit
nous convaincre , que nous ne pourrons plus trafiquer fûrement de ce cô-
té-la, lorfque les Ports de Hollande, Zelande, & de Flandres, feront en-
tre les mains des François. A l'égard de nôtre Commerce de Turquie &
de la Mer Méditerranée, il faut nous refoudre à palier le Détroit à force
ouverte, & quand même nous réunirions contre tant de forces de Mer
unies enfemble, comme celles dont nous venons de parler, ce qui paroit
impoffible, les Portugais & les Italiens n'ôferoient nous recevoir dans
leurs Ports } mais, fupofé qu'ils voulufTent bien nous y donner azile, ils ne
pouroient pas être long-tems fans fuivre la deltinée des Hollandois , puis
qu'ils ne lont pas en état de refifterau Pouvoir de la France, de i'Efpagne,
& de la Hollande unies enfemble: d'ailleurs, ces Peuples trouveront des
moiens pour fe rendre maîtres des marchandifes propres pour ces Païs-là,
en établiiïant des manufactures de laine, &c. & ils les vendront eux-mê-
mes. Nôtre Commerce des Indes Orientales fera expofé aux mêmes in-
commoditez ; nous ne ferons pas feulement en danger d'être attaquez en
allant & venant, mais nous verrons auffi les Comptoirs François & Hol-
landois des Indes joints enfemble contre les nôtres pour les détruire; ou fi
cela n'arrivoit pas, les François étant plus forts que nous fur mer , nous
n'aurions pas la liberté de tranfporter les marchandifes que nous en rapor-
terions,. comme nous l'avons eue jufques ici; & nôtre Commerce venant
à diminuer, nos peuples deviendroient de toute neceffité pauvres, & par
conféquent incapables de pouvoir Confumer beaucoup de ces marchandifes
dans le pais. Les mêmes difficukez fe rencontreront à l'égard de nos
Plantations & de nôtre Commerce aux Indes Occidentales. Les Fran-
çois ont des Ftablifîemens fi proches des nôtres , & les Efpagnols font II
jaloux du Commerce de l'Amérique , qu'ils donneront promptement & vo-
lontiers les mains pour aider à nous y ruiner. 11 eft vrai qu'à prefent nos
forces font confiderables de ce côté-là , mais fi nous ne fommes pas en
état de les encourager & de les fecourir, comme on ne peut pas raifonna-
blement fuppofer que nous le foions, les chofes étant fur le pié que nous
avons
l'Euko-
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. 451
avons dit, ces Plantations feront infailliblement ruinées, par nos Enne- Affaires
mis Confederez. G.Ej*- DR
f. Nôtre Commerce étant ainfi détruit par mer, nous tomberons inévi-
tablement dans la pauvreté, & nôtre puiflance fur mer diminuera: ce qui
ne peut que caufer, outre la perte des grands thréfors que la Nation a
dans le négoce, la ruine d'un nombre innombrable de familles, non feu-
lement de ceux qui font emploiez fur mer , comme les Matelots & les
Maitres de Navire, mais auffi des Marchands & des Ouvriers qui gagnent
leur vie à fabriquer, à acheter, tranfporter, & charier les marchartdifés
d'un côté & d'autre. Toute la Nation en gênerai , depuis le Roi jufques au
moindre Ouvrier qui travaille à la journée , en reffentiroit bien-iot les fa-
cheufes conféquences : il faut que toutes les branches des revenus du
Gouvernement diminuent par-là; & ceux, qui vivent des emplois qu'ils
tiennent du Gouvernement, doivent penfer à prendre une nouvelle ma-
nière de vivre. Les revenus des terres foufFriront aufïi une diminution
considérable : ceux qui s'appliquent à cultiver la terre, ou trafiquer en
beftiaux , ne trouveront pas que leur travail & leur induftrie leur rapporte
autant de profit qu'auparavant; de forte que, par une conféquence ne-
celTaire , il faut que nous devenions pauvres & hors d'état de nous
pouvoir défendre.
6. La Hollande étant ainfi réduite , nous fommes expofez à une In-
vafion de la part de la France & de l'Efpagne , fans qu'il nous relie
aucune efperance de pouvoir obtenir le moindre fecours de l'Europe.
Voilà les conféquences qui doivent neceffairement arriver , fi nous ne
nous intereflbns pas à la confervation des Hollandois, qui , réduits à l'ex-
trémité faute de fecours, fuivront l'exemple des Espagnols , & compo-
feront pour eux-mêmes du mieux qu'il leur fera poffible , afin de pro-
longer le tems de leur Liberté, & d'avoir la tnite confolaLion d'être les
derniers détruits. Il paroit par les Lettres de Mr. le Chevalier Tem-
ple , qu'ils étoient aufîï difpofez à prendre une pareille refolution lors
que le danger étoit moindre, ou qu'il égaloit à peine celui dont ils
font menacez : Voici ce qu'il nous dit là-deflus : „ Si les François fe
„ rendent Maitres de la Flandre , comme ils le peuvent fort bien dans
„ une Campagne, à caufe de la foibleile & des defordres du Gouverne-
„ ment , les Hollandois voient bien qu'il faut qu'ils deviennent une Pro-
,, vince maritime de la France , aux meilleures Conditions qu'il leur fera
„ poffible d'obtenir.
Mais, parce que ce grand Politique nous dit immédiatement après ce
qu'il penfoit du danger auquel un tel malheur auroit expofé toutes les
autres Parties de l'Europe, & fur-tout l'Angleterre, on a trouvé à pro-
pos de rapporter ici fon fentiment fur ce fujet : ,, L'Empire , dit-il ,
„ doit s'attendre de les voir bien-tôt fur le Rhin, & par-là Maitres de
,, quatre Electeurs ; & il eil facile de juger en quelle condition fe
„ trouveroit l'Angleterre par cette augmentation de Forces de Mer,&
Q_qq 2. „ de
FE.
4fi MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aftaihe? „ de Provinces à une Puiflance comme eft déjà celle de France ; c'efi
çen. de }J à quoi on ne fçauroit penfer fans en être affligé.
J*'^i"KO" Si cet habile Miniitre étoit alors dans ce fentiment, n'avons-nous pas
raifon de conclurre , que le danger eft aujourd'hui beaucoup plus grand
pour nous? Les François font actuellement fur le Rhin , en polie fiion de
Strasbourg, une des plus importantes places qui foit fur ce fleuve; & fans
efluïer les fatigues ou les hazards d'une campagne, ils ont la liberté d'en-
trer en Flandre, quand il leur plaira. 11 paroit aufîi qu'ils ont deflein de
Je faire, & qu'ils font prêts à l'exécuter, lorfqu'on confidere les offres
qu'ils ont depuis faites au Gouvernement des Pais-Bas Efpagnols, les me-
naces qu'ils font aux Hollandois dans leur Mémoire, & les ordres qu'ils
ont donnez à tous les Proteftans étrangers de fe retirer de Dun-
querque.
C'eft en vain qu'on diroit, que le Gouvernement Efpagnol ne le permet-
tra pas ; la môme voye, dont on s'eft fervi pour les obliger à recevoir le
Duc d'Anjou pour leur Roi , aura allez d'influence pour les obliger à le
permettre, & à faire encore beaucoup davantage s'il eft nécefTkire. Ils
ne manquent pas de prétextes de neceflité; c'elt pour garantir ces Provin-
ces d'une Invafion de l'Angleterre & de la Hollande, qui n'ont pas recon-
nu jufques ici le Duc d'Anjou ; c'eft pour faire fortir les Troupes Hollan-
doifes des Garnifons Efpagnoles , êc depofer l'argent qui elt necefîaire
pour cela. Ces raifons font li fortes, que le Gouvernement d'Efpagne n'efl
pas en état d'y pouvoir répondre. D'ailleurs , la prudence ne leur permet
pas de faire paroitre préfentement qu'ils fe défient de Louïs XIV. de peur
de le fâcher. Que fçait-on s'ils le mettoient en colère, s'il ne prétendroit
pas quelqu'autre forte de Droit fur leur Couronne , que celui, qu'il fonde
fur leur Invitation , & le Teftament de leur Roi défunt ? Puis donc qu'ils
font obligez à demeurer en Paix avec la France , les Païs-Bas ne leur
font plus de la même importance , qu'ils étoient autrefois ; & il n'y a
nulle apparence qu'ils veuillent donner aucun chagrin aux François à
cet égard, & encore moins rompre avec eux pour cela.
11 y a encore deux autres Confiderations qui rendent cette Union de
la France & de l'Efpagne plus dangereufe à l'Angleterre, que n'étoienc
les Entreprifes des Efpagnols feuls, lors qu'ils afpiroient à la Monarchie
Univerfelle.
La première eft, que ces deux Royaumes font contigus, & peuvent fa-
cilement fe communiquer leurs defTeins,& leurs délibérations, & s'envoier
l'un à l'autre leurs Forces ; au- lieu que les deux Branches de la Maifon
d'Autriche étoient fort éloignées l'une de l'autre, & ne pouvoient join-
dre leurs Forces fans faire de grands fraix & prendre beaucoup de peine
à les tranfporter par mer, ou les expofer à de longues & pénibles marches
par terre. Mais, les François peuvent facilement de leurs Côtes & de la
Flandre entrer en Angleterre, fans fatiguer leurs Troupes, comme les Es-
pagnols étoient obligez de faire en pareil cas.
La
PK.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 455
La féconde Confideration eft , que les François ont chez eux le Roi Aptaire»
Jaques & fes prétendus Delcendans; ils peuvent nous faire une querelle ci-n. de
îà-deflus , & Te joindre aux Papilles & à plufieurs Proteitans déraifonna-
bles qui ont de mauvais principes & maintiennent Ton Droit. Nous aurions
appris par une trilte expérience, combien cette forte de gens font dange-
reux, fi Dieu n'avoit pas empêché l'exécution de l'horrible deffein qu'on
avoît d'aflaiîiner le Roi & de la Defcente des François. Ou bien s'ils trou-
vent à propos d'abandonner les prétentions du Roi Jaques , & de retenir
lui & fes enfans comme prifonniers en France, ou d'en difpofer de quel-
qu'autre manière, ils ont un Prince de la Maifon de Savoye, & plufieurs
Princes du Sang, qui ont autant de Droit par leur n ai (Tance à la Couronne
de la Grande-Bretagne, que le Duc d'Anjou en avoit à la Couronne d'Ef-
pagne; ils n'ont qu'à s'éloigner un peu plus de la Ligne directe, ce qui en
pareil cas n'elt pas une Affaire, & ils tâcheront d'établir un de leurs Prin-
ces fur le Ttirone de nos Rois. Que fçait-on (1 à préfent l'humeur ambi-
tieufe des François, foutenus par un fi grand Pouvoir, & encouragez par
une occafion fi favorable, ne les engagera pas dans ce projet? Ce feroit
le véritable moyen de faire voir, qu'ils ont plus d'efprit, & qu'ils font plus
adroits, que la Maifon d'Autriche, quia donné deux têtes à fon Aigle ,
car par ce coup d'Etat les François pourroient enter leurs Lys fur trois ti-
ges. Je croi que toutes ces raifons fuffifent pour faire voir évidemment
qu'il e(t de nôtre Intérêt de faire une Alliance fort étroite avec les Hollan-
dois, & de nous affilier mutuellement les uns les autres.
Enfuite, il femble qu'il e(t de nôtre Intérêt de faire une Ligue avec
l'Empereur & l'Empire , pour maintenir la Liberté de toute l'Europe 9
contre le Pouvoir formidable de la France , & de faire valoir le Droit de
l'Archiduc d'Autriche à la Couronne d'Efpagne. Les avantages qui nous
en peuvent revenir , font :
1. Que par ce moien la France fera obligée à faire une puifFante Diver-
llon fur le Haut Rhin & en Italie; car cela encouragera l'Empereur a met-
tre tout en œuvre , pour établir le Droit de fa Famille , & fe vanger lui-
même de l'injuflice qu'on lui a faite ^ fts éforts obligeront le Roi de Fran-
ce à lui opofer de puiffantes armées; & par conféquent ce Monarque ne
pourra pas exécuter les deffeins qu'il a formé fur la Hollande & fur l'An-
gleterre.
2. Cela peut engager le Parti de la Maifon d'Autriche en Efpagne à
s'oppofer autant qu'il pourra aux Intérêts de la France: fi l'Empereur mê-
me entroit en Alliance avec ie Roi de Portugal , il pourroit encore faire
Diverfion de ce côté- là , & empêcher que les Forces de France ne
fulTtnt pas fi puiffantes ailleurs. Car le véritable moien de diminuer
la force d'un courant , c'eft d'en détourner les eaux par plufieurs en-
droits.
3. En vertu de cette Ligue avec l'Empereur, il y a toute apparen-
ce que nous pourrions obtenir quelque relâche pour nos Frères Pro-
teitans perfecutez , non-feulement dans l'Empire , mais auiîi en Ilon-
Qqq 3 £ne>
4*4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
àftmrfs grie , & les autres Pais qui lui apartiennent. Il n'y a nul doute qu'en-
of.s. de reconnoiflancc de ce que nous ferions pour lui, & en veiie de Ton pro-
l'Euko- pre jntergt) \\ ne founriroit pas que les François allumallent davantage la
FF" perfecution en Hongrie , à deflein de conferver un pafTage aux Turcs
pour rentrer dans l'Empire. Si on obtenoit une telle chofe, cela fupplée-
roit au défaut de l'article du Traité de Ryfwick, qui a ruiné tant de cen-
taines d'Eghfes Protestantes , & expofé les Reformez de l'Empire à de
fi cruelles Perfecutions , fur-tout ceux du Palatinat , qui pourront aifé-
rnent obtenir leur Liberté , lorfque l'Empereur voudra parler en leur
faveur , ou plutôt donner fes Ordres à fon Beaufrere l'Electeur Pa-
latin.
4. Cette Alliance entre l'Angleterre, la Hollande, & l'Empire, feroit
un des moyens du monde le plus fur pour prévenir une Guerre de Reli-
gion, & cbaffer en Italie la tempête que la Cour de Rome a defiein de
faire tomber fur nous.
Mais , en cas que le Conclave de Rome, guidé par la Politique de fon
Chef, eut l'adreiTe de trouver des voyes pour ajulter les différents Intérêts
de l'Empereur & de la France, & de les unir enfemble contre les Prote-
flans, fou par des Mariages, ou la Ceffion du Milanez à la Maifon d'Au-
triche, ou par des promelïes que la France aiîitteroit l'Empereur pour fe
rendre abfolu en Allemagne, à condition qu'il abandonneroit de fon côté
fes prétentions à la Couronne d'Efpagne, il femble qu'il feroit necdfaire
de nous précautionner là-detTus. Il elt vrai que ce Projet fera difficile à
exécuter , & qu'on peut s'imaginer qu'il eit contraire a la Politique de
France, parce que l'Empereur deviendroit par-là trop redoutable; mais
fi on coniidere que ces deux Familles font pofTedées par la Bigoterie, &
par cette Maxime de l'Eglife Romaine, que la Propagation de fa Foi doit
être préférée atout autre Intérêt, & que fi l'Empereur étoit abfoiu en
Allemagne, les Forces de la France, de l'Efpagne,& des Païs-Bas join-
tes enfemble & fupôrtées par les Threfors de l'Amérique , feroient enco-
re trop puiflantes pour lui , on verra que cette proposition peut tenter
un efprit foible & ambitieux plus qu'on ne pourroit d'abord fe l'ima-
giner.
Quoiqu'il en foit, il eft certain que l'intérêt des Proteftans efl en très-
grand danger, & qu'il y feroit encore beaucoup davantage fi une telle
Union venoit à fe faire. " C'elt pourquoi il elt à propos qu'ils penfent aux
méthodes qu'ils doivent prendre pour leur fureté, quelque chofe qu'il ar-
rive; & il faut remarquer que l'Idolâtrie Romaine a de grands avantages
fur la Reformation, à plufieurs égards.
1. Elle s'accommode mieux aux deffeins ambitieux des Princes qui afpi-
rent au Pouvoir Arbitraire. Pour une Libéralité faite à l'Eglife, ils font
bientôt abfous de toutes les Obligations qui les engagent à maintenir leurs
Sujets dans la poiTeiîion de leurs Libertez. Les Serments faits au Couron-
nement, les Paffa Conveuta, les Bulles d'Or, les Conltitutions des Diètes,
les Parlemens 6c les Coriès, ou tout ce qu'il vous phira, ne font qu'au-
tant
P£.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. en-
tant de toiles d'araignée qui ne fcauroient les arrêter, & que la difpenfa- Affaires
tion du Pape peut abatre facilement. Les Meurtres, les Aflaffinats, les G'N- DE
MafTacres, & les plus grands Crimes que l'Enfer puiffe fuggerer, ou que
la malice des hommes puiffe exécuter , peuvent être fanétifiés par la con-
fecration du Pape. C'ell une vertu, que de ne pas tenir la Foy aux Héré-
tiques ; & l'obferver ceft un crime, par la Décifion de leurs Conciles;
de forte que nousnefaurions prendre trop de précautions contre cette Re-
ligion, & les Princes qui la profeiTent. Il eft vrai, que les principes d'hon-
neur & le bon naturel prévalent quelquefois fur le poifon de leurs Princi-
pes; mais, on ne doit pas trop fe repofer là-defTus.
Un fécond avantage que le Papifme a fur la Reformation c'eft que , fui-
vant fes Principes , les homn.es peuvent être aufîi méchants qu'il leur
plait, & malgré tout cela fe faire un paiTuge pour aller au Ciel avec des
Pardons, des Indulgences , des Jubilez , des Pénitences, des Méfies pour
les Ames , .&c. mais la meilleure de toutes les voyes pour parvenir au
Ciel, c eft de perfecuter & de détruire ceux qu'ils appellent Hérétiques:
voili quelle eit la manière la plus facile pour expier les plus grandes cruau-
tez, & les crimes les plus abominables; & par confequent un Principe
contre lequel les Reformez doivent fe précautionner comme le plus per-
nicieux & le plus propre à déterminer la nature corrompue de l'homme au
mal, que jamais l'Auteur des faufles Religions ait inventé.
Un troiliéme avantage que les Catholiques Romains ont fur les Refor-
mez, c'eft qu'ils ont un Chef fke & certain, qui les protège & les affi-
lie par tout le monde, & à qui ils ont recours dans toutes leurs pref-
fantes neceflitez. Le Pape, ou plutôt le Siège de Rome, ell le centre
de leur Union, & quoique leurs différents Sentimens foient plus confi-
derables , en plus grand nombre , & pouffez avec beaucoup plus d'ai-
greur, que ceux qui fe rencontrent entre les Proteilans, néanmoins le
Pape & fon Conclave font fi Politiques, qu'ils les retiennent tous dans
la Communion de l'Eglife; & , à la honte de quelques Proteltans, ils ne
reftraignent pas fi fort les termes de Communion, qu'ils en excluent au-
cun de leurs Membres; & leurs différentes Opinions n'empêchent pas les
les Laïques, de quelque Secle qu'ils foient parmi eux, de pofieder des em-
plois civils.
Pour contrepefer tous ces avantages, il s'enfuit naturellement que les
Princes & Etats Proteilans devroient faire entr'eux une Alliance offen-
ûve & défenfive à caufe de leur Religion : afin que le Gouvernement
de chaque Royaume ou Etat prit foin , qu'aucun de fes Sujets Proteflans ,
qui reconnoiffent la Doctrine établie dans le Pais, ne fut rendu incapable
de pofieder les Emplois Ecclefiaftiques & Civils , par cela feul qu'ils diffé-
rent en d'autres choies; & qu'il y eut une Tolérance mutuelle des uns &
des autres fur ces petites différences; fans qu'on impofat à perfonne d'au-
tres termes de Communion , que les termes révélez du faiut. 11 n'y a
point de Nation Reformée dans Je Monde , qui foit plus coupable en ceci
que
4r6 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ, ET
ftmxuEs que l'Angleterre : c'ell pourquoi nous devons y prendre garde de plus
eu», oe pic3 qu'aucune autre.
l'Euro-
PE.
Quoique les Principes de la Reformation , ou , ce qui eit la même chofe ,
du Véritable Chriltianifme, foient fi nobles & fi fublimes, qu'ils ne nous
permettent pas d'avoir un Chef Spirituel fur laTerre, il ne s'enfuit pas dé-
jà, que les Proteftans ne puiffent s'accorder entr'eux à reconnoitre un
Protecteur commun & un Chef civil fur la Terre. Cela regarde le Gou-
vernement de notre Ifle, & la Reine Elizabeth s'aquita glorieufement de
cet Emploi malgré tous les defavantages de fon Sexe : mais , les caufes qui
ont empêché fes SucceÛeurs , jufques à la dernière Révolution, de s'en
aquiter avec la même exactitude, font fi connues qu'il feroit inutile d'en
parler ici.
Mais , à préfent , que Dieu nous a donné en fa bénédiction un Prince, qui
efl le Héros de ion Siècle, defeendu d'une Famille, qui, pendant le Siècle
dernier, a été le Fléau du Papifme & le Bouclier de la Réformation, qui
peut empêcher les Proteftans de le reconnoitre pour leur commun Pro-
tecteur ? Il femble que, pour en venir à bout, il elt de l'Intérêt de cette
XsTation de fournir à Sa Majefié les moiens d'agir comme tel, & de lui ai-
der à trouver & prévenir les caufes qui ont fait diminuer depuis peu le
Crédit des Reformez par tout le Monde. On n'avoit pas fujet de s'en é-
tonner , lorfque Louis XIV. triomphoit par-tout fans trouver aucune opo-
fition , parce qu'alors le Trône de la Grande-Bretagne étoit dévoué au
Siège de Rome. Mais , fi cette Eglife continue à étendre fes Conquêtes ,
lorfque l'Angleterre & la Hollande, qui font les deux grandes PuhTances
Proteftantes de l'Europe, feront jointes enfemble fous un Prince Prof-
itant, qui s'eit autant distingué par fon zèle pour fa Religion, que par fa
valeur dans le Champ de Mars, on doit reconnoitre de toute necefiité
qu'il y a quelque défaut fecret efl qui impardonnable.
Afin donc que Sa Majelté fe puhTe charger d'une Ci glorieufe Commif-
lion, il ne faut pas feulement qu'il y ait une Alliance, faite entre les Prin-
ces & les Etats Proteflans, comme celle dont nous avons parlé, & qu'ils
aient tous conlènti à donner à Sa Majelté un plein Pouvoir de rechercher
les ufurpations faites au préjudice de l'Intérêt Protef tant, par tout le mon-
de , & au nom de tout le Parti de proteiter contre , de demander , & faire
en forte que les chofes foient rétablies; mais il faut encore que tous les dif-
férents qui font entre nous foient tellement remisa faDécifion,qu'ilnepuifle
pas être a l'avenir au pouvoir d'aucun Prince ou Parti Domeltique , ou étran-
ger, d'armer les Proteflans les uns contre les autres, fous quelque prétexte
que ce foit. On fuivoit cette Méthode fous les derniers Règnes pour intro-
duire le Papilme & TEfclavageà la faveur de nos Divifions: de forte que
nous devons les éviter avec d'autant plus de foin qu'elles nous ont caufé de
terribles maux. Cette précaution ne doit pas feulement s'étendre aux Diffé-
rends fur les matières de Religion, mais au(ii aux Démêlez d'une autre nature,
dont on s'eit fervi pour fomenter la difeorde parmi nous, comme font par
éxem-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 407
exemple les différentes opinions fur l'étendue des Prérogatives , Privile- Affaires
ges,& Pouvoir des Parlemens; ce qui nous a divifez, & nous divife en- skn.de
core, par des Diitinclions odieufes de Whigs & de Torys, c'eft- à-dire,
de Républicains & de Royaliftes. Il n'y a point d'homme fage de l'un &•
de lautre Parti, qui ne vous dife, lorfqu'il parle de fens ralîis , qu'il eft
pour préferver la vraie Conftitution du Gouvernement d'Angleterre. Puis
donc que cela eft ainfi , & que les Loix de l'Etat fervent de limites, en-
tre la Prérogative & le Droit, quelle raifon y a-t-il, qu'une perfonne qui
veut donner cette aiTurance de fa fidélité, que la Loi requiert, foit regar-
dée de mauvais œil, ou comme incapable de fervir la Patrie? De telles
Divifions n'âffoiblifîent pas feulement la confiance mutuelle que nous de-
vons avoir les uns pour les autres, mais interrompent auffi la tranquilité
publique, nous font moins confiderer au dehors, & nous expofent aux
Intrigues des Princes & des Etats étrangers. Mr. le Chevalier Temple a
fait une Remarque fort judicieufe dans le fécond Volume de fes Lettres.
Il écrivoit de la Haye le 22. Juillet 16 70. à Mr. le Chevalier Trevor, &
il lui difoit : „ Je fuis fâché que l'Affaire des Conventicules vous donne
„ tant de peine. Je fouhaiterois que toutes ces Controverfes fuffent fi-
„ nies, car elles font voir dans les Pais étrangers, que le Roi a un très-
„ grand nombre de fujets,qui ne favent pas lui obéir, & qui, bien loin de
,, faire une partie de là force, femblent plutôt la diminuer, & qu'il amu-
,, fe le Peuple au dedans & au dehors du Royaume par de vaines efpé-
„ rances de remédier à tous ces defordres. Cependant, Mr. van Beunin-
,, ghen a reprefenté ici la chofe comme une Affaire dont Sa Majefté vien-
,, dra plus aifément à bout que vous ne penfez; mais l'Intérêt des Hoilan-
„ dois leur perfuade peut être ce qu'ils défirent, dans l'attente que cela don-
„ neroit lieu à beaucoup de perfonnes de venir parmi eux avec leurs
„ éfets, & qu'ils augmenteroient ainfi leur Commerce parla diminution
„ du nôtre. „
Ces divifions à l'égard des fentimens ne font pas le feul mal qui nous af-
flige, nous fommes encore divifez au fujet du Commerce: nous avons
Compagnie contre Compagnie, & il femble que toutes deux veuillent ex-
clurre de leur Trafic le relie de la Nation. Tout le Monde fçait quelle
influence ont eu ces Démêlez dans quelques-unes de nos dernières E-
ledtions ; & il n'efl pas facile de prévoir jufqu'où cela peut s'étendre
dans la fuite, ni quel effet peuvent avoir ces Elections, qui regardent le
Gouvernement, & par une conféquence neceiîaire la Paix de l'Etat. Il
fera même difficile d'arrêter leurs brigues là-deilus, fi les perfonnes qui
les doivent accommoder, ne prennent au plutôt de juites mefures pour
terminer leur différent.
On peut dire la même chofe des Griefs, dont les Ecoffois & les Ir-
landois fe plaignent. On doit avoir foin de remédier aux chofes dont
ils fe plaignent avecjuitice. Et il femble que les Avis des Compagnies
de Commerce, ou de ceux qui ont des vues différentes de ce que les
Parlemens de ces deux Nations croient être indifpenjdblcment de leur
îome XL Rrr Inte-
PE.
498 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Intérêt, ne devroient pas être fuivis à cet égard, & qu'une Conférence
gen. de à l'amiable entre des CommifTaires choifis par les Parlemens des trois
î/Euro- £jatjons t & autorifez pour cet effet par fa Majefté , feroit un bon ex-
pédient pour remédier à la mauvaife intelligence qui s'y efl déjà glif-
fée , & prévenir une pareille brouillerie à l'avenir. Nôtre fureté dé-
pend de nôtre Union; ces divifions,- pouffées plus loin dans la conjonctu-
re où nous fommes, peuvent ouvrir la porte à l'Ennemi commun, &
jufques-à ce qu'on ait pris de plus exactes mefures, on ne devroit rien
faire qui parût tendre à refufer à ces deux Nations ce qu'elles peuvent
jultement demander, félon le Droit & la Conftitution de leur Gouverne-
ment. Il a plu à fa Majefté de déclarer plufieurs fois, qu'elle ne croira ja-
mais , que le véritable Intérêt de fa Couronne & celui de fes Sujets puif-
fent être opofez en aucune manière : ce qui doit fervir de précaution à
tous ceux, qui voudroient attenter de divifer les Intérêts du Roi &de fon
Peuple , qui doivent être infeparables.
Puis donc que Sa Majefté a donné de fon côté de telles aflurances à
fes Sujets, c'eft à nous à y répondre du nôtre, & à lui donner toutes les
marques poffibles de nôtre fidélité & de nôtre confiance. On n'ignore
pas d'ailleurs que les Ennemis mêmes de Sa Majefté ne peuvent s'empê-
cher de reconnoitre fon Courage dans la Guerre, & fa bonne Conduite
dans la Paix , & qu'ainfi nous ne faurions trop déférer à fes Confeils & à
fes Avis, en ce qui eft néceflaire pour nôtre défenfe, & pour affilier nos
Voifins félon que l'occafion le requiert. Pour ce qui eft de la manière,
dont cela fe peut exécuter, foit par la levée de nouvelles Forces dans le
Royaume, pour les envoyer fervir ailleurs, ou pour les employer à nô-
tre propre défenfe ; foit en prenant des Troupes Etrangères à nôtre folde
pour affilier nos Alliez ; ou des Réglemens qu'on doit faire pour garantir
nôtre Liberté du Danger qu'on pourroit craindre des Armées à nôtre paye
au dedans & au dehors du Royaume ; cela doit être laiiTé à la fagelTe du
Roi & du Parlement, qui en décideront comme ils le trouveront le plus
à propos ; feulement je prie Dieu d'établir une bonne intelligence entr'-
eux lorfqu'ils feront affemblez.
Cependant, û Sa Majefté & le Parlement trouvoient qu'il fût de l'In-
térêt de la Nation de faire une Ligue avec les Hollandois & l'Empire,
&c. pour obliger le Roi de France à s'en tenir au Traité de Partage , ou
faire valoir le Droit de l'Archiduc à la Succeffion entière, nous pouvons
dire hardiment, que les Forces Navales d'Angleterre & de Hollande com-
mandées par des perfonnes à qui le Roi & les deux Nations pourroient
fe confier, mettroient bien-tôt fin à la Guerre félon toutes les aparences.
Et nous fommes bien fondez à le fupofer, fi outre ce qui eft neceffaire
pour nôtre propre défenfe , nous envoïons des Efcadres aflez fortes pour
fe faifir du Thréfor de l'Amérique; ce qui ferviroit beaucoup à maintenir
la Ligue. Par-là nous nous rendrions Maîtres du Pais le plus riche de la
Monarchie d'Efpagne , jufques à ce que la Succeffion fût réglée & nous
tiendrions la balance de l'Europe dans un jufte équilibre. Par-là nous ôte-
lions
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 499
rions le Nerf de la Guerre à l'Ennemi commun, & bien loin que l'Efpa- Affaire.
§ne,& les Etats qui lui appartiennent en Europe, foient un avantage à la GfN- D£
rance, ils lui feront à charge. l'Eubo-
Dans la vue de tous ces grands Projets , il faut avoir un foin tout extra-
ordinaire de la Perfonne Sacrée de fa Majeité , puis qu'il femble qu'après
la Protection Divine, nôtre fureté, & celle de toute l'Europe, dépendent
de la confervation de fa Vie. Et nous ne pouvons pas douter qu'elle ne
foit en très-grand danger; car, outre l'expérience que nous avons des Com-
plots faits pour l'affafliner, la Lettre attribuée à Charnock qui vient d'ê-
tre publiée, le naturel barbare des nos Ennemis, la conjonêture préfente
des Affaires , & les Avis qu'on reçoit de dehors , ne nous donnent que
trop de jufles fujets d'appréhender pour fa perfonne.
Je me fuis déjà plus étendu fur ces Confidérations que je ne m'étois
d'abord propofé. Je finirai ce que j'ai à y ajouter en aufîî peu de mots
qu'il me fera poffible. II y a quelque aparence , que la Conjoncture préfen-
te pourra caufer du changement dans la Conduite de la Cour de Vienne.
Il femble qu'il efl de fon Intérêt de donner une prompte fatisfacîion aux
Princes & Etats de l'Empire fur tous les Griefs, dont-ils fe plaignent au
fujet de la Religion & des Affaires Civiles. C'efl une très-fauffe démar-
che , que les Princes font en matière de Gouvernement , d'ufurper les
Droits de leurs Sujets, mais fur-tout les Droits qui regardent la Confcien-
ce , fur laquelle il n'y a que le Tribunal du Ciel qui puifTe prétendre au-
cune Jurifdiétion. C'efl; le point de tous le plus délicat pour les Gens qui
ont quelque principe de Religion , & comme les Injuflices de cette natu-
re les touchent plus au vif, auffi le refTentiment qu'ils ont fait des im-
preiTions plus profondes fur eux. C'efl pourquoi il efl de l'Intérêt de l'Em-
pereur de défendre inceffanment toute forte de violences fur le chapitre
de la Religion. C'efl une mortification à la vérité pour des Princes fiers
d'être obligez à confentir aux demandes de leurs Sujets, mais lorsqu'elles
font fondées fur la juftice, & qu'en même tems ces Princes ont befoin du
bras & de la bourfe de leurs Sujets, il efl de leur Intérêt de leur accorder
ce qu'ils demandent. L'expérience auroit du rendre la Maifon d'Autriche
fage fur cet Article. Il y a tant de Liberté entrelaffée dans la Confii:u-
tion du Gouvernement de l'Empire , que les gens de bon fens en Allema-
gne, de même qu'en quelques autres parties du Monde, fe croient mal
traitez quand on les oblige d'acheter de bonnes Loix au prix de leurs
Tréfors & de leur Sang> puifque,par toutes les Idées que la Nature & la
Religion nous donnent du Gouvernement, il femble que les Princes foient
obligez, par ordre du grand Legiflateur, à établir eux-mêmes de pareil-
les Loix fans attendre qu'on les exige. Comme c'efl donc l'Intérêt de
l'Empereur d'en ufer de cette manière, c'efl aufîî l'Intérêt des Ele6teurs
& des Princes de l'Empire d'accommoder les différents qu'ils ont avec
lui, fous des Conditions raifonnables , & le plutôt qu'il leur fera poffible;
car leur Apel à la Cour de France ne fera qu'irriter les efprits & les expo-
fer eux-mêmes au danger de perdre leur Liberté : Sur-tout les Princes &
Rrr 2. les
l'Euro-
pe.
500 MEMOIRES, NEGOTÎATIONS, TRAITEZ, ET
AïfMBFs les Ecats Proteftans doivent craindre la Médiation de la France. Il fem-
gen.de ble du moins qu'il feroit plus à propos pour eux d'avoir recours en pa-
reils cas à l'Entremife de l'Angleterre, ou de la Hollande; en particulier
dans la fituation préfente des Affaires, où l'on voit que le Pouvoir de la
France eft dévenu fi formidable.
Pour ce qui eit des Cantons SuifTes & de leurs Alliez , il y a quelque
aparence que la Conjoncture; où nous fommes, ne leur fera point aban-
donner la Neutralité, parce qu'ils fe trouvent expofez aux Invafionsdes
deux cotez; 'néanmoins, eu égard à la Paix, qu'on voit aujourd'hui entre
l'Efpagne & la France , les 6uiffes doivent fe précautionner contre les
deffeins de cette dernière Couronne , & faire de nouvelles Alliances.
Mais, il femble que les Cantons Proteftans, qui font beaucoup plus forts
que les autres, foient indifpenfablement obligez à former une Ligue Pro-
teftante, & à tenir la balance égale entre la France & la Maifon d'Au-
triche, de la manière que leur Prudence le jugera le plus à propos.
A l'égard des Princes & des Etats d'Italie, il ell fans doute de leur In-
térêt de faire la même chofe , pour conferver l'Equilibre en Europe: car
de quelque côté que la balance tombe , ils font en danger; mais, s'ils con-
fiderent que les Etats des deux Branches de la Maifon de Bourbon font
contigus, & qu'elle eft très-puiffante par Mer ; ils trouveront qu'il eft de
leur Intérêt que l'Archiduc luccede à la Monarchie d'Efpagne plutôt que
le Duc d'Anjou; & ils doivent y contribuer fous main, jufques à ce que
l'occafion fe préfente de le faire ouvertement.
" 11 en eft de même à l'égard des Portugais; mais, fi le danger, où ils fe
voyent d'être engloutis tout-d'un-coup, les oblige à fe conduire avec pré-
caution, cela doit auffi engager les autres Princes de l'Europe à prévenir
que ce Royaume, & les EtablilTements qu'il a faits dans le Nouveau Mon-
de, foient réunis à la Maifon de Bourbon; & lorfque les Puiflances de
la Chrétienté feront quelque effort de cette nature, il eft indubitablement-
de l'Intérêt du Portugal de fe joindre à eux avec toutes fes Forces , &
d'agir à la fourdinejjufqu'à ce que le tems foit venu qu'il fe puiffe déclarer
en toute affurance.
Pour les Couronnes du Nord, elles doivent de toute neceflité s'attendre
à perdre leurs Etats qui font fur leurs Frontières, fi une fois les François
deviennent Maitres des Pais- Bas. Enfuite leur Navigation ne fera libre,
qu'autant qu'il plaira à la France de le permettre, & leur Religion & leur
Liberté feront à la merci de la Maifon de Bourbon. Mais comme c'eft
une Maxime conftante de ces deux Couronnes de prendre toujours de
différents partis, il eft au pouvoir des Anglois & des Hollandois joints a-
vec l'Empire, d'engager la plus puiffante de leur côté, & d'obliger l'autre
à fe bien comporter, fur peine de lui faire fentir les effets de leur jufte
reffentiment, en cas qu'elle prenne des mefures opofées à l'Intérêt Protes-
tant & à la Liberté de l'Europe.
Pour ce qui eft des Villes Anféatiques du Nord, la forme de leur Gou-
vernement, & l'Intérêt de leur Commerce, les obligeront: à fe joindre aux
dé-
RESOLUTIONS D'ET AT , M. DCC. ï. foi
Défenfeurs de la Liberté. La Republique de Pologne a le même Intérêt: Affaires
Elle n'a pas moins de raifon, qu'aucun autre Fais que ce foit, de craindre G^N- RE
l'agrandiffement du Pouvoir de la France; car, outre qu'il feroit fatal à fa L'EuR°-
Liberté & à la Forme de Ton Gouvernement, elle doit auffi prendre gar- PE'
de à ne lui fournir pas les moyens defe vanger de l'Affront qu'elle prétend
avoir reçu en la perfonne du Prince de Conti. Et fi on confidere que les
Polonois foupçonnent leur Roi de vouloir fe rendre abfolu , & la Couron-
ne Héréditaire, & qu'ils font agitez de brouilleries inteftines, on avouera
que la Guerre qu'ils font à la Suéde ne peut pas durer long-tems. L'Elec-
teur de Brandebourg feul peut contribuer beaucoup à mettre fin à cette
Guerre, & on a fujet d'efperer qu'il prendra de bonnes mefures pour la ter-
miner au plutôt, puis que fon Intérêt & les Obligations où il s'eit mis en-
vers l'Empereur pour la Couronne de Pruffe , l'y engagent indifpenfa-
blement.
Le Czar de Mofcovie a témoigné dans le voiage qu'il a fait dans cette
partie du Monde, qu'il n'étoit pas pour l'Intérêt de la France, mais qu'au,
contraire il la haïiToit; deforte qu'il ne peut pas trouver fon avantage a fé-
conder les Dciîcins des François. Et s'il continue dans fon Entreprife fur
la Suéde, ce qui n'eft pas trop vraifemblable, après l'échec qu'il a reçu
devant Nerva, les Anglois, les Huilandois,& les Suédois peuvent ruiner
Arch .ngel & fes Côtes. Ainfi, fupofé qu'il ait envie d'exercer fon humeur
guerrure , le meilleur parti qu'il ait à prendre eft de tourner fcs armes du
côté des Nations de l'Orient, où il trouvera plus de butin, & moins de
hazard.
Pour la fatisfaclion du Leéleur, & afin de mettre ce Différent au fujet
de la Succeffion d'Efpagne dans tout fon jour, nous conclurrons ces Ré-
flexions par les Articles du Contraét de Mariage du Roi de France, où il
renonce pour lui & Ces Héritiers à la Succefilon d'Efpagne ; par l'Article
du Traité des Pirenées fur le même fujet ; & par l'Article du Teltament
de Philippe IV. en conféquence de ce Traité.
La Claufe du Contrat de Mariage entre fa Majeflé Très 'Chrétien-
ne £s? Dame Marie- Thrrefe d^ Autriche , par laquelle
fa Majeflé renonce à la Succeffion
d'Efpagne^
„ TV'autant que Leurs Majeftez très- Chrétienne & Catholique font
7, -1_>^ venues & viennent à faire ce Mariage, afin de tant plus perpétuer
„ & affûrer par ce nœud & Lien la Paix publique de la Chrétienté , &
„ entre Leurs Majeftez, l'amour & la fraternité, que chacun efpere en-
„ tr'elles; & en contemplation aufîî des juftes & légitimes caufes, qui
Rrr $ 3, mon»
Affaires
GEN. DE
l'Euro-
pe.
502 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
montrent & perfuadent l'égalité & convenance dudit Mariage , par le
moien duquel, & moyennant la faveur & grâce de Dieu , chacun en
peut efpérer de très-heureux fuccès, au grand bien & augmentation de
la Foi & Religion Chrétienne , au bien & bénéfice commun des Royau-
mes, Sujets, & VafTaux des deux Couronnes; comme auffi pour ce qui
touche & importe au bien de la chofe publique, & confervation des di-
tes Couronnes ; lefquelles étant fi grandes & puifTantes ne puifTent être
réunies en une feule , & que dès à préfent on prévienne les occafions
d'une pareille jon&ion. Doncques , attendu la qualité des fufdites &
autres juftes raifons , & notamment celle de l'égalité qui fe doit confer-
ver, Leurs Majeftez accordent & arrêtent, par ContracT: & Paéte con-
ventionel entr'elles, qui fortira, & aura lieu, force, & vigueur de Loi
ferme & fiable à tout jamais , en faveur de leurs Royaumes, & de tou-
te la chofe publique d'iceux; que la Serenifiïme Infante d'Efpagne Da-
me Marie-Therefe , & les Enfans procréez d'elle, foit mâles ou femel-
les, & leurs defeendants, premiers, ou féconds, trois ou quatre nez,
„ cy-après , en quelque degré qu'ils fe puùTent trouver, voire à tout ja-
mais, ne puifTent fucceder, ni fuccedent aux Royaumes, Etats, Seigneu-
ries, & Dominations qui appartiennent & appartiendront à fa Majefté
Catholique, & qui font compris au defTous des Titres & qualitez men-
tionnées en cette préfente Capitulation , ni en aucun de Ces autres Ro-
yaumes, Etats, Seigneuries , Provinces , Ifles adjacentes , Fiefs, Capi-
taineries , ni es Frontières que fa Majefté Catholique pofTede dès à pré-
fent, ou qui lui appartiennent, ou pourront appartenir, tant dedans,
que dehors le Royaume d'Efpagne; & qu'à l'avenir ladite Majefté Ca-
tholique, ou fes SuccelTeurs, auront, pofTederont, & leur appartien-
dront; ni en tous ceux qui font compris en iceux, ou dépendent d'i-
ceux; ni même en tous ceux qui par cy après en quelque tems que ce
foit, elle pourroit aquerir, ou accroitre , & ajouter aux fufdits fiens
^, Royaumes, Etats, & Dominations, ou qu'elle pouroit retirer, ou qui
lui pouroient échoir par dévolution , ou quelques autres Titres , Droits ,
ou Raifons que ce puifTe être, encore que ce fut durant la vie de ladite
Serenifîime Infante Dame Marie-Therefe, ou après fa mort, en celle
de qui que ce foit de fes defeendants, premiers, féconds, troifiémes,
nez ou ultérieurs, que le Cas ou les Cas, par Iefquels, ou de Droit,
ou parles Loix & Coutumes defdits Royaumes, Etats, & Dominations,
foit par difpofitions de Titres, par Iefquels ils puifTent fucceder ou pré-
tendre pouvoir fucceder auxdits Royaumes, Etats, ou Dominations,
leur dut appartenir la SuccefTion , en tous Iefquels fufdits cas , dès à
préfent 'ladite Dame Marie-Therefe Infante dit & déclare être & de-
meure bien & duëment exclufe, enièmble tous fes Enfans & Defcendans
Maies ou Femelles, encore quils fe voulurent, ou puffent dire Ci? prête»-
dre qu'en leurs perfonnes ne courent , ni ne fe peuvent & doivent confiderer
Uf dites raifons de la chofe publique , ni autres auxquelles ladite exclu/ion fe
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RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. ^03
„ pour -oit fonder , ou qu'ils vouluflent alléguer (ce qu'à Dieu ne plaife) que Affaires
„ la Succejjion du Roi Catholique , ou de fes SereniJJïmes Princes & Infantes, Gf u- DE
„ fj? d'abondant des Maies quila ou pourra avoir pour fes légitimes Succefjeurs, L'EuR°-
,, eut manqué & défailli; parce que comme il a été die, eu aucun cas, ni
„ en aucun tems, ni en quelque manière qui peut avenir, nielle ni eux,
„ fes hoirs & fes defeendans n'ont à fucceder, ni prétendre pouvoir fuc-
ceder; nonobitant toutes Loix, Coutumes, Ordonnances, & Difpofi-
tions, en vertu defquelles on a fuccedé en tous lefdits Royaumes, E-
tats & Seigneuries: Et nonobftant auffi toutes les Loix & Coutumes de
la Couronne de France, qui au préjudice des Succefleurs en icelle,
s'oppofent à cette fufdife exclufion, auffi bien à préfent, qu'au tems à
venir. A toutes lefquelles confiderations Leurs Majeftez dérogent, en
ce qu'elles contrarient, ou empêchent le contenu en ce Contract, ou
l'accomplhTement & éxecution d'icelui; & que pour l'approbation &
„ ratification de cette prefente Capitulation, elles y dérogent, & les tien-
3> nent pour dérogées, &c.
La Ratification de Sa Majejîé Très-Chrétienne.
N'ous, de l'Avis de la Reine, nôtre très-honorée Dame & Mère,
de nôtre très-cher & très-aimé Frère unique le Duc d'Anjou , plu-
sieurs Princes , Ducs , & Pairs, & Officiers de nôtre Couronne, &
autres Grands & Notables Perfonnages de nôtre Confeil : après nous
être fait lire de mot à autre ledit Traité, avons icelui en tous & cha-
cuns de fes points & articles agréé, approuvé, & ratifié, approuvons
& ratifions par ces préfentes lignées de nôtre main : promettant en.
bonne foi & parole de Roi, de l'accomplir, faire garder, & entrete-
nir inviolablement , fans jamais aller ni venir au contraire , directe-
ment ni indirectement, en quelque forte & manière que ce foit, dé-
rogeant à cette fin , comme nous dérogeons, à toutes Loix, Coutumes,
& Difpofitions au contraire. Car tel eft nôtre plailir, en témoin de
quoi nous avons fait mettre nôtre Seau à ces dites préfentes. Donné
à Thouloufe le 24. de Novembre, l'an de grâce 1659. & le 17. de nô-
tre Règne.
„ Signé,
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„ L O U I S.
» Et plus bas:
v Par le Roi, de Lomenie,
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p4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires
jl'eÙro- Aiïe de la Renonciation de V Infante.
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Adame Marie-Therefe Infante des Efpagnes, par la Grâce de
XVa Dieu, Reine future de France, fille aine de très haut, très-ex-
cellent, & très-puifllint Prince , Don Philippe Quatrième, par la mê-
me Grâce, Roi Catholique des Efpagnes Monfeigneur, & de très-hau-
te , très-excellente, & tres-puiflante Princefle Madame Ifabelle Reine
Catholique , qui foit en gloire : Par cet Infiniment & Acte de Re-
nonciation, & du furplus qui y fera contenu, foit notoire & manife-
fle à ceux qui en auront connoiflance, en quelque façon que ce foit,
que par les Articles fécond & quatrième de mon Contraèl de Mariage,
promis avec le très-haut, très-excelient , & trés-puiffant Prince Louis
XIV. Roi Très-Chrétien de France conclu dans l'Ifle nommée des Faz-
fans dans la rivière Bidaflba , du reiîort de la Province de Guipufcoa,
& confins de ces Roiaumes avec celui de France, le 7. de • ovembre
de l'année pafTée 1659. il a été refolu & arrête, que le Roi Monfei-
gneur ( à caufe & au regard de ce Mariage , & afin que je portafle avec
moi mon Dot & mes biens propres) a promis qu'il me donneroit cinq
cens mille écus d'or au Soleil , qui fe payeroient & délivreraient au
lieu, & aux termes fpecifiés dans ledit Article au Roi Très-Chrétien,
ou à la perfonne qui aurait fon pouvoir, & qu'avec iceux je me devrois
contenter , & tenir pour contente de tous & quelconques droits , &
actions qui m'appartiennent, ou pourraient appartenir à prefent ou à
l'avenir, fur les biens & hoirie de la Sereniiîime Reine M idame Ifa-
belle ma Mère, & fur la future fuccefîion du Roi Monfeigneur (que
Dieu ait en fa garde) & fur tout ce qui me pourrait appartenir, com-
me fille & héritière de Leurs Majeflés Catholiques, & pour leur droit,
& chef, & pour quelque autre titre penfé ou nonpenfé, fçeu ou igno-
ré, tant pour la Ligne Paternelle que Maternelle, droite ou tranfver-
fale, mediatement & immédiatement, &que devant de célébrer le Ma-
riage , par paroles de préfent j'aurois à céder & renoncer tous mes
droits , & actions au Roi Monfeigneur , & aux perfonnes qui auront la
Tienne, & que Sa Majefté voudra, & aura agréable \ ainfi qu'il eft fti-
pulé & déclaré plus particulièrement par lefdits Articles fécond & qua-
trième , que jai leus, & oui lire plufieurs fois devant que de confentir
„ à ce que l'on formât cet Acte, lefquels je veux qu'ils y foient inferez &
„ mis de Lettre à autre, & de mot à autre.
Le Dix-fcptiême Article du Tejlament de Philippe IF. qui confirme
cette Renonciation.
33 D 0UR l'AccompliiTement de ces TraitezJ'Infante Dame Marie-Therefe,
;:P
ma fille, a paffé cette Renonciation fous Serment folemnel dans la Vil-
le
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RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. fof
m le de Fontarabie le 2. de Juin itftfo. contrefignée par Don Ferdinand Affaires
„ de Fonfeca , Ruiz de Contrera , nôtre Secrétaire d'Etat , & Notaire se». nE
„ public de ces Roiaumes, & quoy que nous efperions que ladite ïnfan- L'£uRo-
„ te , & le Roi Très -Chrétien fon Mari, accompliront & obferveront
„ tout ce qui eft ci-deffus mentionné , & tout ce qui eft de plus contenu
dans ledit ContracT: de Mariage, &dans ladite Reno-nciation , comme
y étant obligez en Juflice & en Confcience ; Néanmoins , afin d'en a£
furer l'AccomplilTement par toutes les voyes les plus dire6r.es fur un
Sujet & dans une Affaire, en quoi confifte la Paix & le Repos de tou-
te la Chrétienté , nous comportant comme nous devons en qualité de
Père, & Seigneur Naturel de tous nos Roiaumes, Etats, & Domaines,
„ en vertu de la Souveraine Autorité, que nous poffedons en tout Droit,
„ pour difpofer, & pour le plus grand avantage de nos Sujets &laCaufe
„ commune, pour pourvoira ce qu'ils foient mieux gouvernez, & pour
„ prévenir les grands maux qui peuvent s'enfuivre de l'union des deux
„ Couronnes, & leurs Dépendances; de nôtre propre mouvement,
„ certaine ConnoifTance , & Pouvoir Royal & abfolu, dont il nous plaît
„ de nous fervir, & dont nous fervons avec pleine & entière aiTurance
„ de l'exemple de nos Royaumes & Etats, à exclurre les Enfans ainez
„ & leur Poflerité à raifon & à caufe des Traitez de Paix & de Maria-
„ ge, & pour d'autres confidérations qui nous y meuvent, nous decla-
„ rons que la Sereniffime Infante , Dame Marie-Therefe , nôtre Fille,
„ & les Enfans qu'elle aura dudit Mariage, mâles ou femelles, & leur
Poflerité, feront & demeureront exclus : Et d'autant que, comme par ne»
ceïïité, nous les excluons de tout droit ou efperance , qu'ils pourroient
ou peuvent avoir en quelque cas que ce foit, qui puiiTe arriver, à au-
cun de nos Royaumes, Etats, & Dominations, à jamais, comme s'ils
„ n'avoient jamais été nez. Nous déclarons que cette Exchifion & tout
ce qui a été établi , en fa confideration , en la Perfonne de l'Infan-
te Dame Marie-Therefe, nôtre Fille, & fa Poflerité par ce Mariage,
doit être obfervé : Et d'autant qu'il y a pour cela une neceflité, Nous
„ voulons & commandons , qu'elle foit obfervée , accomplie , & execu-
„ tée en la Perfonne de la Serenifîïme Reine Dame Anne nôtre Sœur,
„ & fa Poflerité, conformément à fon Traité devant le Mariage & la
,, Renonciation, & ce que Sa Majellé Don Philippe III. nôtre Seigneur
„ & Père a établi par fa dite Loy, & par fon Teflament ci-deiïus men-
„ tionné, concerté & accordé entre les deux Couronnes, & nous l'ap-
„ prouvons fous les mêmes conditions, & avec la même force que les
Loix doivent avoir, qui font accordées & faites entre Princes Souve-
rains, ufant de leur Pouvoir abfolu. Et nous révoquons, annulions,
dérogeons, & abrogeons toutes & chaque Loi & Loix, Droits; Eta-
„ blifTemens & Coutumes , qui puffent,en aucune manière que ce pui£
fe être, empêcher cette Exclufion , comme fi chacune étoit expri-
„ mée, & qu'on en fit mention en particulier. Nous déclarons auffi,
„ que s'il arriyoit ainfi , ce qu'à Dieu ne plaife , que la Sereniffime
Terne XL S {Ç ,, In-
So6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aminés J5 Infante , devint Veuve , fans avoir des Enfans par ce Mariage ,
<3en. de & qU'e]]e revint en Efpagne , pour le bien public , ou pour de ju-
ites confiderations , fe remariât de nôtre consentement, ou du Prin-
ce nôtre Fils après nôtre décès ; Nous ordonnons & telle eft nôtre
volonté & plaifïr , que ni ladite Exclufion ni Renonciation la pri
vent d'aucune chofe
l'Euro-
pe. "
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:hofe, mais qu'elle & fes Enfans du fécond Mariage,
„ pourveu que ce ne foit pas en France, peuvent être capables de fucce-
„ der auxdits Royaumes , Etats , &c.
Le troijîéme Article du Traité des Pyrénées.
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ET afin que cette Paix & Union, Confédération, & bonne Corres-
pondance, foit, comme on le dédire , d'autant plus ferme, durable,
& indiffoluble ; lefdits deux principaux Miniltres Cardinal -Duc , &
Marquis -Comte -Duc, en vertu du Pouvoir fpécial qu'ils ont eu à cet
effet des deux Seigneurs Rois , ont accordé & arrêté en leur nom le
Mariage du Roi Très -Chrétien avec la Sereniffime Infante , Dame
Marie - Therefe , Fille ainée du Roi Catholique, & ce même jour
datte des préfentes ont fait & figné un Traité particulier, auquel on fe
remet touchant les Conditions réciproques dudit Mariage, & le tems de
fa célébration : lequel Traité à-part , & Capitulation de Mariage , font
de la même force & vigueur, que le préfent Traité de la Paix , comme
en étant la partie principale, & la plus digne, auffi-bien que le plus
grand & le plus plus précieux gage de la fureté de fa durée.
Par tous ces Actes autentiques & folemnels, nous pouvons aifément
voir quelle peut être la Juitice des prétentions de la France à la Succef-
fion d'Efpagne. Il paroit que fuivant l'opinion de tous les plus fages de
la Nation Efpagnole , cette Succeflion étoit contraire à leurs Intérêts.
On ne peut pas dire que les chofes ont changé depuis; car, les Raifons ,
fur lefquelles ces Renonciations étoient fondées, fubflitent toujours, en
ce qui regarde l'Europe & le Royaume d'Efpagne en particulier. La
précaution que le Roy Catholique a prife par fon Teftament , favoir qu'on
n'admettra point d'Etrangers dans les Poftes d'honneur ni dans le Confeil,
ne lignifie rien. La Cabale, qui a l'Adminiftration des Affaires, peut être
aifément gagnée , puis qu'elle a fur-tout un Prêtre Cardinal à fa tête. Il
n'y a point de personnes qui foient plus capables de trahir, ou qui aient
plus fouvent trahi, les Royaumes & les Etats, que ceux de cet Ordre,
lors qu'on les a une fois admis dans le Confeil, ou qu'on leur a donné
part aux Affaires. Il eit donc de l'Intérêt de l'Efpagne, de tâcher, autant
qu'il lui fera poffible, de rétablir fon Gouvernement fur un pié con-
forme à la Difpofition de ces Traitez , & d'agir en fecret , & avec a-
dreffe , en faveur des Prétentions de la Famille Impériale ; & , lorfque cel-
îe-ci fera en état de les faire valoir, l'Efpagne doit emploier toutes fes
fo-
l'Furo-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 1. ro;
forces , pour fécouer le joug de la France ; autrement elle doit s'atten- Affaires
dre à devenir une Province de. ce Royaume, & à ne conferver que le gen.de
vain titre de Souveraineté. Il ne manque pas de ces Exemples en Eu-
rope pour convaincre les Efpagnols , qu'ils font expofez à un pareil trai-
tement ; & , fans aller plus loin que les François , leurs nouveaux Maî-
tres , ne fçait-on pas que de tems en tems ils ont réuni des Souveraine-
tez à leur Couronne, qu'ils fe font aggrandis par-là eux-mêmes, & qu'ils
ont abimé les Païs qu'ils ont réuni à leur Couronne , afin de les mieux te-
nir en fujétion ? Pour éviter une pareille deftinée, les Efpagnols doivent
prendre garde à ne pas refufer leurs Ports de Mer aux Anglois & aux
rlollandois, à ne décourager pas les Négotians de ces deux Nations par
de nouveaux Induites fur leur billon , & à n'empêcher pas le débit de
leurs Manufactures, &c. fous quelque prétexte que ce foit ; car, fi nous
ne pouvons pas bien faire nôtre Commerce de la Mer Méditerranée fans
nous fervir de leurs Ports, fur-tout de celui de Cadix, & qu'ils nous en
défendent l'entrée , cela tournera bien-tôt à leur propre ruine , & les
privera des feuls Amis qu'ils aient, & qui foient en état de leur confer-
ver le peu de Liberté qui leur relie, ou de leur aider à recouvrer ce
qu'ils en ont perdu.
i
Remarques fur la Succejfwn du Bue à1 Anjou , par rapport au
"Danger qui menace P Europe en gênerai ^ V Angleterre en par-
ticulier, gep principalement toutes les Parties de fin Commerce:
féconde Partie , par P Auteur de la première. Suivant la Co-
pie imprimée à Londres par A. Ealdwin y in Warwick-Lane >
prés les Armes tfOxford? 1701.
AVERTISSEMENT.
LA première Partie de ces Remarques a été reçue avec tant d'avidité,
& a eu une Approbation (ï générale, & dans fon Païs natal, & en
ces Provinces, qu'on ne peut douter du Succès de cette féconde Partie,
fans faire tort au goût du Public. La Perfonne iîluflre, qui en efl l'Au-
teur, & qui donna comme en courant à fa Patrie les premières Penfées
qui fe préfenterent à fon efprit fur l'important Evénement qui attire l'at-
tention de toute l'Europe, a eu le tems de méditer la matière, & de
l'envifager de tous fes cotez, & fur -tout par rapport au Commerce,
qui fait la RiehefTe de fon Gouvernement & du nôtre, & qui ne peut
fouffrir d'atteinte fans ébranler le plus ferme fondement de ces deux
puifïans Etats. Aulfi entre-t-il dans un Détail tout autrement étendu que
celui de la première Partie , & tel qu'il étoit nécefTaire pour traitter une
Sffz rna-
l'Euro
pe
fo8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires matière de fi grande importance. On a fait connoitre au commence-
cEN. de ment de la première Partie le rang & le mérite de l'Auteur. Pour ce qui
efl de Ton Ouvrage, je dois en laiiTer le Jugement au Public, qui n'aime
pas qu'on le prévienne, & qui veut ne devoir qu'à Ton propre Difcerne-
ment l'Aprobation qu'il donne au mérite. Je le prie feulement de me par-
donner les négligences qui peuvent m'étre échapées, & de ne les im-
puter qu'à moi - même. La Pièce efl bien & nettement écrite , & j'au-
rois fort fbuhaité de lui donner toutes les beautez de l'original ; mais, le
malheur eft qu'on efl contraint de travailler en courant fur des Pièces de
cette nature, & je n'ai eu qu'à peine le tems de relire mon Manufcrit de
gros en gros.
PREFACE.
LA SucceJJÎon du Duc £ Anjou efl un fujet fi vafle 6? fi riche , qu'il y au*
voit dequoi faire de gros Volumes. Il efl aufiji impojjible d'en dire dans
un ou deux Ecrits comme celui-ci tout ce qui pourrait s en dire , qu'il le Jeroit à
une feule -plume d'exprimer tout ce qui fer oit nécejfaire & à- propos.
J'efpére que cela contentera ceux qui trouvent peut - être que nous ri avons
pas dit tout ce qu'on auroit lieu d'en dire. Le meilleur moyen de reparer ce défaut ,
efl que les autres me communiquent leurs Penfées , comme je leur ai communiqué
les miennes -, car une tête ri efl non plus capable d'épuifer la matière, qu'une
feule épée l'eft de décider le différent.
J'ai tâché dans cette féconde Partie de repréfenter à la Nation le Danger
qui menace notre Commerce , & d'entrer pour cet effet dans un plus grand
détail que je ri ai fait dans la première. Comme c'eft une chofe qui nous inte-
reffe tous , j'efpére que cela fera ouvrir leurs bourfes à plufieurs qui les tien-
dr oient fem.ées s'il s'agiffoit de toute autre chofe.
Il efl queflion de notre tout , £5? nous fommes peut - être dans un auffi grand
Danger ou nous ayons jamais été depuis que nous compofons une Nation. Il
nous efl de conféquence que nos Réfolutions) foient promptes , £s? nos Efforts vi-
goureux. Le retardement peut être fatal dans cette Conjonclurc \ nous avons
h faire à un Ennemi naturellement ardent , (es Réfolutions (ont promptes , &f
il efl prêt d'en venir à l'exécution \ il nous a aj/^z fait pour nous obliger à
prendre feu , & nous avons affez fujet de nous tenir fur nos gardes. Chacun
de nous a intérêt d'engager à un foin extraordinaire ceux qui les reprefenteront
au Parlement prochain. Ils n'y font envoyez que pour prendre foin des
Affaires de la Nation, qui ri ont jamais eu plus de befoin qu'à préfent de Ré-
foîutions fag&s 6? promptes. Dieu veuille unir Sa Majefté £s? le Parlement ,
& leur infpirer les moyens propres à prévenir les Dangers éminens dont nous,
fommes menacez.
REMAR-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. So9
.Affaire*!
REMARQUES SUR LA SUCCESSION DU DUC G,EN-DE
D'ANJOU
IL PARTIE.
epuis les premières Remarques que nous avons faites fur la Su ccef-
fion du Duc d'Anjou , les intérêts & la puiilance de la France ont
fait des progrez formidables ; & , s'il nous eft permis de nous fervir d'un
Proverbe qui convient fort à la Conjoncture, c'eft une boule de neige qui
grojfit à mefute quelle roule. Il ne fera pas difficile de démontrer cette vé-
rité par les Preuves que nous allons produire.
I. Toutes les Lettres, qui nous font venues de de-là la Mer, convien-
nent, que ceux qui compofent la Régence d'Efpagne ont donné au Roi
de France la plus effentielle partie de leur Gouvernement, & mis leur
Monarchie fous fa conduite & fous fa protection. Il eft vrai qu'il fait
mine de le refufer ; il remercie la Junte de la confiance extraordinaire
qu'elle a en lui, & lui répond qu'il ne peut accepter fes offres, de peur
d'augmenter l'ombrage de ceux qui ne veulent pas acquiefcer au Tefta-
ment du feu Roi d'Efpagne. Mais, en même tems, il eft maniiefte, qu'il
agit dans les Affaires d'Efpagne, comme fi c'étoit les lîennes propres,
é( ne fait aucune difficulté de faire dire à tous fes Ambaffadeurs dans
toutes les Cours de l'Europe, que les Intérêts de l'Efpagne & ceux de la
France font devenus les mêmes Intérêts par la mort du Roi d'Efpagne.
Cela paroit vifiblement par les Difcours des Ambaffadeurs de France aux
Cantons Suiffes & aux Etats de Hollande. Il ne trouve pas indigne de
fa modefhe de faire negotier en Suiffe les Affaires d'Efpagne par fon Am-
baffadeur, & d'anticiper les démarches du Miniftre d'Efpagne, quoique
ee dernier foit fur les lieux. L'Ambaffadeur de France fait encore plus.
Il fe donne la liberté d'annoncer à l'avance. aux Cantons les Inftruclions
que le Miniftre d'Efpagne recevra fur ce fujet, & d'offrir la bourfe de fon
Maître pour fournir à la dépenfe qu'il faut faire à la garde des paffages
du Milahez; preuve évidente que l'Efpagne eft, & doit être, dirigée par
la France. Il eft inutile de rien oppofer à cela, & ceux qui le feroient
donneroient h connoitre par-là qu'ils n'ont qu'une connoiffance très-fuper-
ficielle des Affaires. Mais, qu'on en dife ce qu'on voudra, Sa Majefté
Très-Chrétienne peut aifément donner un bon tour à la chofe, en di-
fint au Public qu'il n'y a perfonne plus capable que lui de la Tutelle de
fon Petit-fils. Il n'eft,ni nouveau, ni extraordinaire, que ceux, à qui l'on
confie l'adminiftration des pupilles , en tirent avantage , leur minorité
rend un Gouverneur neceffaire. Et qui fait fi ce n'ett peut-être pas une
des principales Raifons qui a fait choifir le Duc d'Anjou préférablement
au Dauphin fon Père, pour Succeffeur à la Couronne d'Efpagne? Com-
me il auroit été moins fujet aux exceptions de ceux dont l'Intérêt n'elr
pas de fouffrir que la Puiilance de la France devienne trop grande, fi le
gff3 Dau-
PE,
TE.
Sio MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Dauphin avoit été appelle a la Couronne d'Efpagne ; aulll auroit-on trou-
gen. de v£ p|us mauvajs de voir un Prince de fon âge gouverné par un autre
que par foi-mème. Cela n'auroit point du tout quadré avec le titre de
Louis le Hardi, qu'on lui donna au Siège de Philipsboutg. Car il faut re-
marquer en paiïant , que les François font dès l'heure qu'il efl aufli com-
plaifans pour leurs Princes, que s'ils avoient été de tout tems dans la
plus abjefte & la plus lâche Servitude des Payens, ou des Levantins. Us
ne font point difficulté de leur rendre les honneurs divins durant toute
leur vie , & font de fi bonne volonté qu'ils n'attendent pas leur mort
pour faire leur apotheofe.
Une féconde preuve de l'augmentation du Pouvoir du Roi de France,
& qu'il gouverne entièrement l'Efpagne, efl que la Junte ordonne à tous
fes Vice-Rois & Gouverneurs de fe foumettre à fes ordres ; & de fon
côté il a fait favoir a la Junte, qu'il avoit donné ordre aux Gouverneurs
de fes Pais & Places frontières du côté des terres d'Efpagne, de leur
fournir en toute occafion des Troupes, des Munitions, & de l'Argent.
Une troifième Preuve très-prefîante de cette vérité efl , que les Am-
baiTadeurs d'Efpagne dans toutes les Cours ont ordre de ne rien faire que
par l'avis du Roi de France ; ce qui, joint avec l'autre Preuve dont on
vient de parler , fait voir démonflrativement , que la Régence d'Efpagne re-
garde r Intérêt des deux Monarchies comme le même Intérêt , & par confe-
q Ment quelles doivent unir leurs Forces £# leurs Confeils. A cela s'accor-
dent fort bien les Inflruclions que le Roi de France a donné à fon Am-
bafladeur à Madrid, qui a eu ordre de les communiquer au Cardinal de
Porto - Carero.
Une quatrième Preuve que le crédit du Roi de France augmente efl
que le Pape fait mine de reconnoitre la Succeflion du Duc d'Anjou , &
offre de s'oppofer conjointement avec les autres Princes d'Italie aux Pré-
tentions de l'Empereur fur le Milanez. Il n'efl pas facile de s'imaginer
l'impreffion que feront cette démarche , & la médiation du Siège de Ro-
me & des autres Princes Catholiques Romains \ mais , tous ceux qui con-
nohTent le monde conviendront volontiers , que c'efl un des plus grands
Points que le Roi de France pouvoit peut-être gagner, & que rien n'é-
toit capable de produire un plus grand effet fur les Efpagnols bigots, ou
de contribuer davantage à gagner ceux qui ne font pas contens que le
Duc d'Anjou fuccede à la Couronne d'Efpagne.
Une cinquième Preuve de l'accroifTement de la PuilTance de la France
efl que le Roi de Portugal a reconnu le Duc d'Anjou. Par ce moyen , la
France efl affùrée de tout ce côté de l'Europe, <â, par confequent, plus
en état de faire tête par tout à l'Empereur ci aux autres Puiflances.
Ajoutons pour fixiéme Preuve, que le Duc d'Anjou efl reconnu pour
Roi d'Efpagne par le Roi de Danemarc, le Duc de Brunlwic-Wolfcnbut-
tel, l'Eveque de Munller, & par plufieurs Princes d'Italie.
Cela étant, nous avons fujet de craindre, que fi l'on y remédie à tems,
le Pouvoir de la France ne s'augmente de jour en jour ; que ceux qui
n'ai-
PK.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. fn
n'aiment pas Louis XIV. ne foient réduits par la crainte à la néceffité de Affaires
fe foumettre , comme plufieurs ont déjà fait, & que ce Prince ne veuille G™- DE
obliger avec le tems tous les Potentats de l'Europe à fuivre fon Char de
Triomphe.
Des idées de cette nature cauferoient moins d'indignation, fi, comme
plufieurs des Païs qui furent fubjuguez par les Romains , nous pouvions
efperer que fes Conquêtes amelioreroient nôtre condition. Mais, au lieu de
cela, tout ce que nous avons à attendre du progrez de fes armes, c'ell le
Papifme , la Servitude , & la Pauvreté , les plus grands maux qui peu-
vent arriver aux hommes , & qui tendent directement à les rendre éter-
nellement miferables.
Ceux, qui ont quelque connohTance de l'Hiftoire , ne trouveront nulle-
ment hors d'apparence, que ce ne puifle être-là la deitinée de la Chré-
tienté, fi l'on ne prend inceflamment de bonnes mefures pour mettre la
France à la raifon. La Maifon d'Autriche auroit fait fubir le même fort
à l'Europe du tems de la Reine Ehfabeth, fi Dieu n'avoit pas donné à
cette grande Princeffe des Confeiilers habiles & honnétes-gens, & affez
de fageiTe à cette Reine , pour fuivre leurs confeils. La Maifon de
Bourbon, comme on l'a déjà dit, efl tout autrement formidable aujour-
d'hui que ne l'étoit alors la Maifon d'Autriche. Louis XIV. a été auffi
heureux qu'aucun Prince qui ait fuivi les mêmes Maximes depuis Nim-
rod. Que n'a-t-on donc point à craindre des richeffes immenfes des In*
des, & d'une PuiiTance fi redoutable en Europe, fous la Conduite d'un tel
Prince ? Nous devons compter que ces richeiTes feront tout autrement
ménagées qu'elles ne l'ont jamais été depuis le Règne de Philippe IV.
Elles tombent de l'Heure qu'il efl entre les mains d'un Prince qui en a
befoin , & qui fait fort bien s'en fervir.
Il efl trop fage & trop prudent pour n'avoir pas remarqué les Fautes
que le Gouvernement d'Efpagne a fait autrefois, & l'on peut compter fû-
rement qu'il prendra foin de les éviter. Il a allez de connoifîance des
Affaires du Commerce , & il fent fi bien qu'il efl de fon intérêt de le fa-
vorifer, qu'il n'y a pas à douter qu'il ne mette à profit les Trefors de l'Améri-
que, qu'il n'établifîe des Manufactures, & ne protège les arts& les fcien-
ces miles , au lieu de fouffrir que fes peuples confument leurs forces &
leurs biens dans l'oifiveté, comme ont fait fes Efpagnols fous une mau-
vaife Adminiflrarion de près de quatre-vingts ans.
Cela étant, il n'y a pas d'apparence que le Roi de France manque de
troupes^ comme il efl le Maître des mines d'argent, il ne paroit pas vrai-
femblable qu'il manque de ce métal pour les payer. L'humeur guerrière de
fes Sujets efl fuffifamment connue de l'heure qu'il eil ; & il n'y a aucun
Sujet de douter qu'elle n'aille en augmentant à mefure que le nerf de la
guerre augmentera chez eux.
Cela mérite que nous y faffions une attentiou d'autant plus ferieufe,
qu'il faut que nos richelTes & nôtre puiffance diminuent à proportion que
les fiennes augmenter*, ne, Cette venté paroitra plus clairement, fi nous
fai-
Sfr-
PE.
512 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires faifons attention à l'influence que l'union de ces deux Monarchies aura
gen. dr vrai-femblablement fur plufieurs Branches de nôtre Commerce.
l'Euro- j 5ur ce]uj d'Efpagne tant pour envoyer que pour recevoir. C'eft com-
me on voit une des plus confiderables parties de nôtre Commerce ; &
comme le danger qui nous menace à cet égard eft le plus proche, auffi
merite-t-il que nous nous mettions inceffamment en devoir de le préve-
nir. Nous avons befoin de la Laine d'Efpagne pour la Fabrique de nos
Draps fins. On compte que nous en pouvons fabriquer annuellement
19054. pièces, & que nous en envoyons tous les ans hors du Royaume
9034. pièces. Puis donc que nôtre Manufacture de Laines eft une des
principa'es fources de nos richeffes domeftiques , n'efl-il pas tout naturel
de conclure, qu'elle recevra an dangereux échec, fi la France nous dé-
fend le tranfport des Laines d'Efpagne en Angleterre. Il y a alfez d'ap-
parence qu'elle ne manquera pas de le faire. En voici les Raifons.
1. Nonobilant la Paix de Ryfwick, les François, & nous, ne fommes
point encore d'accord au fujec du Commerce ; il n'y a point de Tarif en-
tr'eux & nous , comme il y en a entr'eux & les Hollandois : par confe-
quent , nous avons fujet .de craindre que les François ne tâchent d'inter-
rompre nôtre Commerce avec l'Efpagne en Reprefailles des Impôts que
nous avons mis fur leurs Marchandifes.
2. On fait allez que les François ont tenté d'établir une Manufacture
de leurs propres Laines, & d'avoir de leur propre cru tout ce qui eitnecef-
faire pour la teinture, &c. en vue de nous difputer le Commerce de Tur-
quie & du Détroit. Peut-on donc douter que dans la même vue ils ne
s'emparent de la Laine d'Efpagne pour fabriquer leurs Draps fins, & les
faire mieux recevoir? Ce qui joint avec les Havres qu'ils ont dans la Mé-
diterranée , fans parler de ceux d'Efpagne qui font de l'heure qu'il eft à
leur Commandement, les mettra en état de les donner à meilleur marché
que nous. Je ne croi pas que perfonne s'avife de foûtenir que nous na-
viguerons plus commodément qu'eux, & que nous aurons à meilleur mar-
ché les vivres néceffaires à nos vaifleaux.
3. Il paroit évidemment par la même raifon, qu'ils peuvent avoir en
vûë de fournir aux Efpagnols les Etoffes de Laine à meilleur marché que
nous ne pouvons faire, ou leur infpirer l'envie de porter leurs méchantes
Etoffes^ ce qui peut-être d'une très-fâeheufe confequence pour les Mar-
chandifes que nous envoyons en Efpagne, fi nous confiderons la chaleur
du climat , & le penchant que les Efpagnols ont , ou auront , de fe
mettre à la Françoife. Les fuites en feront fatales, non feulement à nôtre
Commerce d'Efpagne, mais encore à celui des Indes Orientales. Nos
Marchands le fentent affezj car , en envoyant en Efpagne nos Manufactu-
res de Laine &c. & en créditant les Efpagnols jufques aux Indes Occi-
dentales, &c. nous en avons de gros retours en billon, qui font le pro-
duit de nos Marchandifes. Si donc l'onno.;s ferme une fois cette fource,
& nous devons compter à coup fur que les François tenteront de s'tn em-
parer, nous ferons obligez, ou de tranfponer nôtre propre argent, ce qui
nous
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 513
nous ruineroit bien vite, ou de laifler périr les Indes Orientales, & au- Affames
très Commerces, où il faut de l'argent comptant, & par-là nous perdrions °en- de
en même tems& nôtre gloire & nos richefles. La plus conflderable Ob- L'Euao.
jeétion qu'on puilTe faire contre cela eft de dire, Que les François n'ont Pt"
pas le même befoin que nous des vins d'Efpagne que nous achetons en
retour de nos Marchandifes. On peut répondre à cela. 1. Que les
François , qui font les Maîtres de l'Efpagne de l'heure qu'il eft, n'auront
pas tant d'égard à l'intérêt des Efpagnols qu'aux leurs ; & il eft certain
que la confiante Politique de la France eft abfolument de tenir l'Efpagne
dans une fîtuation encore plus trifte que celle où elle eft maintenant, afin
de la mieux retenir fous le joug.
Le Duc de Rohan dans- fon Traité de la Guerre propofe comme une
des plus excellentes Maximes pour s'affeurer d'une Conquête, d'ôter à
ceux qu'on a conquis toute envie & tout pouvoir de fe révolter. Il ne pa-
roit aucunement difficile de pratiquer cette Maxime à l'égard de l'Efpa-
gne. Il y a fi long-tems que fa puifîance a commencé de tomber, que les
François , qui en ont fait la Conquête par le moyen de leurs Prêtres &
Penfionnaires, n'auront pas de peine à l'accabler, & auront bientôt fou-
rnis l'efprit des Efpagnols en flattant leur vanité & leur bigotterie, com-
me on la déjà dit. Ils ont un moyen fort naturel pour en venir à bout,
c'eft d'affeurer le Clergé qu'ils concourront à la ruine de la Reformation ,
de donner aux Grands Efpagne des poftes honorables & lucratifs, & de
tranfpîanter mutuellement tour à tour des perfonnes de confequence. Les
François ont déjà commencé de mettre ce dernier expédient en ufage. Le
Duc d'Harcourt occupe déjà un des plus importans Poftes d'Efpagne, puis
qu'il eft la troifiéme perfonne delà Régence. Par ce moyen, il connoit non
feulement tous lesmouvemens& les refforts du Confeil, mais il a aufli fur
tout cela une conflderable influence, de laquelle il ne faut pas douter qu'il
ne profite en faveur de la France. Comme c'eft une prompte contravention
au Teftament du feu Roi d'Efpagne, qui porte Art. 33. que chacun de fes
Royaumes feroit gouverné par les Originaires, fans aucune innovation, à
caufe des grands inconveniens qu'on a éprouvé lors qu'on a voulu faire le
contraire , on a fujet de craindre que cette contravention ne foit fuivie
d'infractions de la même nature.
Les François ne fauroient manquer de prétextes pour cela, & fur-tout
en cas qu'il y ait guerre , & que leurs Troupes & leurs Efcadres foient
néceflaires pour maintenir le Duc d'Anjou en pofTeflion. Ils regarderont
cela comme une occafion légitime de mettre des Gouverneurs François
& des Garnifons Françoifes dans les Frontières & dans les Ports d'Efpa-
gne. Il faudra que leurs Généraux affilient à tous leurs Confeils de Guer-
re à la Cour & au Camp; &, à en juger par l'Inclination & le Génie que
les François ont fait connoître jufqu'ici , l'on n'a aucun fujet de croire
qu'ils feront plus modeftes que les autres Troupes Auxiliaires ont accou-
tumé de l'être en pareil cas ; ils prétendront indubitablement être en Droit
de demeurer en pofTeflion jufques à ce qu'on les ait rembourfé de leurs
T'orne XL Ttt fraix.
GKN. DE
l'Euro-
pe.
fi4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires fraix. Contefter que les Efpagnols foient incapables ou de payer ou de
déloger les François, ce feroit connoître bien mai les chofcs dont il s'agit.
Les Efpagnois mêmes le Tentent (i bien, que nous voyons qu'ils prennent
déjà des devans pour fauver leur honneur autant qu'il dépend d'eux, &
croient qu'il vaut mieux mettre les François en polfeiîion en fe foumet-
tant volontairement , que de s'y laiffer forcer par Execution militaire.
Une fourmilion faite de fi bonne grâce eft le vrai moyen de s'empêcher
d'être mis en pièces par un Ennemi puiffant: il femble au contraire que
c'eft le meilleur moyen d'émouvoir fa compafîîon & fa generofité; ainfi
les Efpagnols, fe voyant abandonnez, & menacez du partage de leurs E-
tats, fe font jettez entre les bras d'un Prince, qui étoit le plus capable
& le plus difpofe qu'aucun autre de leur nuire, dans l'efperance qu'une
démarche fi foumiîe l'adoucira un peu, & l'obligera par confequent à ren-
dre leurs chaînes moins pefàntes. Il n'elt pas a la vérité tout-à-fait excu-
fable, & à plus forte raifon digne de l'ancienne vertu des Romains, que
des Perfonnes diitinguées fe joignent aux Ennemis de leur Patrie, pour-!
vu qu'on les aflure d'une partie de fes dépouilles ; cependant , quand ils
voyer;t que fa ruine e(t inévitable, & qu'ils font reflexion qu'ils ont au-
tant de Droit que des Voifins ambitieux ou des Ennemis étrangers, l'ufa-
ge de la plupart des Cours eft à prefent de leur faire grâce. Cela facili-
tera la tranfplantation des Grands d'Efpagne, pour aiTûrer la poffeiïion des
François , comme on l'a àé'fa. dit. On peut envoyer les plus riches en
Ambaflade , donner aux plus pauvres des Gouvernemens éloignez Civils
ou Militaires dans leurs propres Etats; &, en vertu de la Régence d'Efpa-
gne qu'on vient d'offrir volontairement, ils feront tous obligez de rendre
compte à la France de leur Adminiftration. Il efl difficile de concevoir
l'ufage que les François peuvent en faire > mais il eft confiant, qu'il fau-
droit qu'ils radotaffent en Politique, s'ils n'en profuoient pas pour réduire
Les Efpagnols à offrir de l'encens fur leurs Autels, à dépendre d'eux pour
les honneurs & les dignitez , & confequemment pour les mettre hors
d'état de cabaler contre leurs Intérêts.
Mais, revenons à l'Objection, qu'il n'y a pas d'apparence que les Fran-
çois nous, difputent le Commerce d'Efpagne, parce qu'ils n'ont pas befoin
de fes vins. On peut répondre en fécond lieu , que cela n'empêche pas
que les François ne puiflent negotier & tranfporter les vins d'Efpagne , &
les vendre aux Anglois & aux autres Nations qui en ont befoin. Les Ha.-
rangs & autre PoilTon falé d'Ecoffe nous fourmfTent un exemple de la mê-
me nature. Les François refufent d'en prendre des Ecoffois, à caufe des
impôts que les Anglois ont mis fur les denrées de France , & aiment mieux
les acheter des Hollandois à plus haut prix qu'à cekn que les Ecoffois les
leur offrent. Les François ne pourront-ils pas propofer aux Efpagnols de
prendre de leurs marchandifes la même quantité que les Anglois en pre-
rioient, pourvu qu'ils affoibliffent nôtre Commerce ; & il cela les accom-
mode, les Efpagnols ne doivent pas le réfuter.
La féconde Branche de nôtre Commerce, dont les François unis avec les
Efpa-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. ^
Efpagnols peuvent nous dépouiller , elt celui de la Méditerranée & du Affaires
Levant en gênerai. Cela fe peut faire aifémettt, en nous refufant la Rade G,EN- DE
& le Havre de Cadix, & entretenant une Efeadre pour nous en empêcher
l'entrée. Par-là nous voilà privez d'un lieu où nous piaffions attendre un
vent favorable pour palier le Détroit. Mais , fupofé que nous puiffions fai-
re en forte de n'avoir befoin , ni de ce Huvre, ni de cette Rade, n'eit-il
pas au pouvoir de la France & del'Efpagne de nous empêcher, & à tou-
tes les autres Nations , de palier le Détroit fans leur permiflîon , & fans
payer un Droit? Cela ell allez évident à ceux qui font attention à la fi-
tuation de Gibraltar & de Ceuta, qui confiderent combien le Détroit eft
ferré en cet endroit, & combien il elt facile de' bâtir des forts fur les
deux côtes, & d'interrompre la navigation par le moyen de quelques Fré-
gates. Qui fait d'ailleurs fi le Roi de France ne reirufcitera pas le def-
fein qu'avoit Cromwel de faire une Me parfaite de la Peninfule de Gilbra-
tar. Louis XIV., par pure fantaifie & par oftentation, a entrepris &
fait des chofes de moindre éclat ;& s'il fait celle-ci, comme c'efl un moyen
afluré pour nous empêcher de palTer le Détroit fans fa permilîîon , ce fera
autli une fàeheufe gourmete pour les Efpagnols, s'ils redeviennent jamais
allez fages ou alTez habiles pour maintenir encore leurs véritables intérêts.
Mais, quand il ne feroit ni l'un ni l'autre, l'expérience nous a appris, que
plufieurs Rois de France n'ont pas cru qu'il fut incompatible, avec le titre
de Très-Chrétien , d'unir la Croix & le CroilFant dans le louable deflein de
mettre aux fers la Chrétienté; il y en a eu même qui n'ont pas cru indi-
gne de l'homme immortel d'entrer en des petits Traitez avec les Pirates
de Barbarie. Ainfi nous n'avons aucun fujet de nous flater qu'on face au-
jourd'hui difficulté d'engager les Corfaires à contribuer à la ruine de nôtre
Commerce du Détroit. La terreur des garnifons Efpagnoles fur la côte
d'Afrique, compofées de Troupes Françoifes, & foûtenuês de VaùTeaux
François, les obligera bien-tôt à des chofes aufquelles ils ont moins de
penchant qu'à celle-ci. Si ces expediens ne leur reuffiffent pas , ce qui
ell prefque impolfible, il y en a encore un de referve , c'ell d'engager
les Turcs dans un Traité pour r liner nos Manufactures. Moyenant cela,
les François entreprendront de les leur fournir à meilleur marché; ce qu'ils
peuvent faire aifément, comme on Ta déjà dit, avec le fecours de la Laine
d'Efpagne &c. Pour y encourager les Turcs d'autant mieux , le Roi
de France leur promettra de faire une puiffante diverflon dans l'Empire ,
pour faciliter aux Ottomans le recouvrement de ce qu'ils ont perdu en
Hongrie, &c. Nous ne devons pas croire que l'honneur & la confcien-
ce caufent au Turc aucun fcrupule là-deflus ; car, le Grand Seigneur ne
manque pas deCafuiltes, qui, comme ceux du Roi de France, lavent diftin-
guer non-feulement entre l'efprit & !a lettre d'un Traité, mais ont encore
pour eux la Loi Mahometane, qui défend pofitivement de rendre ce qu'ils
ont conquis. Ainfi, voici un cas entr'autres , où il vaut mieux être Turc
que Chrétien Romain.
De tout cela il paroit manifeilement , qu'il dépend de la France & de
Ttt 2 l'Ef-
PE.
$i6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Awaires l'Efpagne, pendant qu'elles feront unies comme elles le font, de ruiner en-
gen. de tierement nôtre Commerce de Turquie & du Détroit, qui a été fi glo-
i^RO" rieux & fi avantageux à l'Angleterre. Pour prévenir cet inconvénient,
- & la ruine de nôtre Commerce en Efpagne , comme il femble qu'il y a de
la néceffité de faire promptement de fortes Alliances avec les Puilfances
étrangères, & de vigoureux efforts par Mer, il me femble auffi qu'il n'eib
pas moins de nôtre intérêt de prendre de meilleures mefures que celles
qui ont été prifes jufqu'ici pour empêcher le tranfport de nos Laines en
France. Pour cet effet, il ne fuffit pas de créer de nouvelles charges , &
de les donner à nos amis ou à gens qui foient fous nôtre dépendance; mais
on doit prendre garde que ces poftes foient occupez par des perfonnes
tout- à-fait bien intentionnées pour le Gouvernement d'Angleterre, & qui
fe foient plutôt diftinguées en fouffrant pour leur Patrie lors qu'elle a été
opprimée, que par flater un Gouvernement auquel on ne trouvoit pas de
feureté à rellller. Il eit certain que des gens de ce caractère fuivronc
toujours le torrent, & ne feront à l'épreuve, ni de la corruption d'un Enne-
mi étranger, ni de la brigue d'un Tiran domeftique. On peut juger aifé-
ment combien cela eft, à craindre dans un fiecle auffi corrompu que celui*
ci. Les gens de cette trempe, entant qu'ils ont concouru avec nos Enne-
mis pour ruiner nôtre Commerce , ont été les Canaux ordinaires de leur
perfide correfpondance : & par confequent ces Polies , quoi qu'ils ne
foient pas fort confiderables en eux-mêmes , ne doivent pas néanmoins
être proftitùez à leur faveur ou à l'intérêt particulier} mais, on en doit dif-
pofer uniquement pour le bien public, & avec une autorité plus publique
qu'il n'a été pratiqué jufqu'ici.
Une troifiéme Branche de nôtre Commerce , & qui mérite nôtre plus
profonde attention, eft celui de nos Plantations de l'Amérique. L'Im-
portance de ce Commerce, le grand avantage , aufïï-bien que l'honneur
qui en reviennent à l'Angleterre, font fi bien connus, qu'il fuffit de dire
qu'ils périclitent pour reveiller tous les mouvemens de nôtre efprit , &
nous faire faire les efforts les plus vigoureux pour prévenir un ii grand
mal. On fait fort bien les allarmes que l'Acle du Parlement d'Ecoffe don-
na à l'Angleterre au fujet de l'Etabliffement des Ecoffois dans les Indes
Occidentales. Que n'avons nous donc point à craindre pour nôtre Com-
merce en ce païs-là de la Puiffance de la France & de l'Efpagne unies en-
femble? Puifqu'étant encore divifées elles étoient nos Ennemies & nos An-
tagonifles à cet égard, il efl certain que leur union les rendra plus entre-
prenantes , parce qu'elles font plus en état d'exécuter ce qu'elles entre-
prendront. Le Traité de Commerce entre nous & l'Efpagne ne fera
qu'une foible defenfe pour nous mettre à couvert de la nouvelle méthode
d'argumenter des François. Il y a apparence que la fubtile diftinclion
entre la lettre & I'efprit du Traité va être d'un auffi grand ufage chez
les Princes Catholiques-Romains , que le Dogme des Opinions probables
& du Péché Philofophique l'a été chez leurs Moines; & comme à peine
y a-t-il de crime fi noir, que la dernière ne puiffe pallier , auffi n'y aura-
. t-il
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. fi7
t-il point de fi indigne violation de la foi publique , que Ja première ne Affaires
foit capable d'excufer. ■ gen. j>r
Mais, fi cela ne reuiîit pas, il y a un autre expédient dont on efl: pareil- Xi'^w>"
lement redevable à la gratitude & à i'adreffe des François , c'eft de deve- -
nir nos Accufateurs, & de nous rendre odieux aux Efpagnols. à l'occafion
du Traité de Partage, quoiqu'il ne fe foit fait qu'à leur follicitation. lis
nous ont déjà décriez dans leur Manifefte aux Hollandois , comme des
gens qui prétendoient difpofer des Royaumes & des Provinces fans aucun
Droit. C'eft en bon François accufer les Traitans de la plus grande In-
juftice dont on ait jamais entendu parler j on les décrie comme des gens
qui veulent donner des Souverains aux Peuples fans leur confentement ,
&: qui prétendent difpofer des Etats , des Provinces , & des Hommes ,
comme s'ils étoient des Bêtes brutes & des Troupeaux égarez , qui n'euf-
fept,ni Droit de difpofer d'eux-mêmes , ni un Maître pour en reclamer la
propriété. On nous accufe pareillement d'avoir voulu ruiner l'équilibre
de la Chrétienté en donnant tant d'Etats à la France pour augmenter fa
Puiffance, qui n'elt déjà que trop formidable. Cela s'appelle intenter un
procez aux Traitans par devant le Tribunal de toute l'Europe, & les ac-
cufer d'avoir confpiré contre la Liberté. On n'a pas oublié de faire ]&
même accufation aux Traitans par devant les Peuples d'Angleterre & de
Hollande , comme s'ils avoient expofé par-là reur Commerce de la Medi-
terrannée. On les accufe auffi par rapport à leurs Sujets d'une autre omit
fion criminelle , c'elt de n'avoir rien itipulé pour eux. Cela fignifie en
bon François , qu'encore que les Traitans ne pûlTent exécuter le Traité
qu'aux dépens du fang & des biens de leurs Sujets, ils ont cependant eu il
peu d'égards à leurs intérêts, qu'ils n'ont rien demandé ni pour leur Liber-
té , ni pour leur Commerce, ni pour leur Religion , ni pour leurs Frères
Proteftans des autres Parties de l'Univers.
Mais, ce n'eft pas encore tout, ils accufent de plus les Traitans d'Im-
prudence & de Folie, & d'avoir pris des mefures qui n'étoient nullement
propres à les conduire à la fin qu'ils fe propofoient. On reconnoit dans
le Mémoire, quele But du Traité étoit de conferver la Paix à l'Europe ;
mais les François difent en même tems, que fi l'on s'en tenoit au Traité
de l'heure qu'il efl, cela produiront une infinité de troubles & de malheurs com-
muns à tous. On ne peut pas faire le Procez à la Prudence des Traitans
d'une manière plus fanglante; & il efl certain qu'ils ont toute la raifon du
monde d'en avoir du relTentiment ; raifon d'amant plus grande, que, par un
foible commun à tous les hommes, on aime mieux palier pour méchant
que pour fimple.
Les François ayant donc déjà fait paroître tant d'ingratitude & de mali-
gnité dans leurs accufations ,nous ne devons pas douter le moins du mon-
de, qu'ils ne foient capables d'aller plus loin, &. qu'ils ne tâchent auffi de.
nous rendre odieux aux Efpagnols , comme fi nous avions concouru à la
violation du Traité des Pirenées, par lequel la Ligne de France fut exclue
pour toujours de la Succeflion d'Efpagne , & qu'ils ne difent que nôtre
Ttt | vue
l'£uro-
PE
5-18 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Atiairfs vue étoit bien moins de traverfer l'élévation de la France , que d'abaifîer
gen. de l'ftfpagne. 11 ne faut pas douter non plus qu'ils n'en profitent avec la
même lâcheté à la Cour de Vienne, & que non-feulement ils ne nous ac-
culent d'ingratitude d'avoir abandonné nos Alliez dans la dernière guerre,
par le Traité de Partage ; mais aufïi d'infidélité dans nos propres prin-
cipes , pour avoir concouru par un Traité à la violation de celui des
Pirenées , qui fut fi folemnel , & fur lequel le nom de Dieu fut in-
voqué. Ils ne manqueront pas d'en tirer avantage au préjudice de la
Religion que nous profeiïbns , & prendront occafion de-là de ren-
dre la Réformation plus odieuse à ceux qui font déjà fes ennemis dé-
clarez. Jl eft vrai que nous pouvons récriminer contr'eux , & les ac-
cufer, non-feulement d'avoir eu part au Traité dont on parle fi mal au-
jourd'hui, mais d'en être auffi les principaux Auteurs. Nous pourrions
aufîi leur reprocher d'avoir fuivi en cela l'exemple du Dieu de ce iMon-
de, qui accufe les hommes des crimes qu'il leur fait commettre: mais
peut-être ne regarderont-ils pas cela comme une Accufation de grande im-
portance, puifqu'il eft fi ordinaire à ceux qui font, ou qui voudroient être,
Monarques abfolus, de fuivre plutôt les préceptes de ce méchant Efprit,
que les commandemens du grand Dieu du ciel & de la terre. D'ailleurs
les François ont pluiieurs autres chofes pour fe défendre de cette Accufa-
tion, & d'une plus atrocetneore. Ils plaident pour l'inexécution du Trai-
té de la part de l'Efpagne, & pour leur Droit naturel à laSucceffion; ou fi
cela ne reiifîitpas, ils font afiurez de l'Abfolution du Pape, qui dans leurs
principes rend le plus noir de tous les criminels, auOi innocent que l'En-
fant qui elt encore à naitre. Mais, de plus, l'on n'a fait cela qu'en vue de
rendre fervice à la Sainte Eglife Catholique , comme il n'y a point de
doute qu'on ne le prétende, cela fuffit pour faire du crime le plus noir
l'action du monde la plus méritoire. Je n'ai, ni lefpace, ni le tems, ni
peut-être la volonté , de défendre les autres interefllz au Traité de
Partage : ils peuvent employer , s'ils le jugent néceifaire , un Avocat
d'un tout autre mérite que moi > mais, je puis bien avancer fans rifque,
que les François ont fait la guerre à leurs voifins pour un moindre fu-
jet ; & fi l'Angleterre & la Hollande jugeoient à propos de leur de-
mander réparation, à la pointe de l'épée, de l'outrage qu'on leur a fait
en les engageant dans un Traité qu'un n'a jamais eu deiTein d'exécu-
ter, perfonne ne pourroit les en blâmer. Mais, il n'eft pas befoin de
fonder fur cela feul la caufe de la guerre. Si Elles trouvent qu'il foit
de leur intérêt d'y entrer , Elles n'ont qu'à rétorquer l'Argument des
François contre eux-mêmes, & leur dire, que puifque Louis XIV".
n'a pas voulu reconnoître le Traité de Partage pour un bon moyen
pour maintenir la Paix de l'Europe, elles ne croient pas de leur part,
que l'Union de la France & de l'Efpagne foit un bon moyen pour ce-
la même. Surquoi je puis dire fans rien rifquer , que la plupart des
PuhTances de la Chrétienté feroient de leur fentiment à cet égard \ &
con-
PF..
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC I. fi9
eonfequemment on eft en Droit de demander de nouvelles furetés pour Affaire*
l'équilibre de l'Europe, ou de dire aux François qu'on eft dans la néceffi- G*N- DE
té de prendre des mefures pour s'empêcher aulfi-bien que les autres d'être
engloutis par ces deux Couronnes. Si l'on en ufe de cette manière, &
qu'on prefTe les François de s'en tenir à l'efprit du Traité , puis qu'ils
en ont défaprouvé la lettre , avec quel front pourront-ils le refufer?
Ils ne doivent pas prétendre d'être juges & parties; & ii l'on renvoyé
Je jugement de la caufe à un juge deuntereffe , il n'elt pas difficile de
deviner quelle en fera la decilion.
Mais , revenons au Danger qui menace nôtre Commerce des Indes Oc-
cidentales. Les François étant unis avec les Efpagnols , ou les ayant
pour mieux dire fous leur Dépendance , ne manqueront pas de trouver
des prétextes pour nous incommoder dans les Indes Occidentales. Ils
font en droit de l'heure qu'il eft de prendre \qs Plantations Efpagnoles
fous leur protection , & fous ce prétexte ils peuvent faire revivre les
prétendons des Efpagnols fondées fur le Droit de la Découverte de l'A-
mérique, ou s'établir du moins fur la Rivière de Miiîilîipi , ou ailleurs.
De-là, ils peuvent beaucoup incommoder nos Plantations Septentrionales
de la Nouvelle York, de Jerfey , de la Caroline, de Maryland, de la
Nouvelle Angleterre, &c. Leur Commerce avec le Canada peut ruiner
le nôtre de ce côté - là ; & en interrompant le Commerce de ces Planta-
tions Septentrionales avec nos Colonies Méridionales, ils font en beau
train de ruiner les unes & les autres. 11 n'eft pas faciie de s'imaginer
combien les fuites en feroient funeftes à la Nation ; on peut le conjectu-
rer en partie fi nous confiderons, que fuhrant le calcul de ceux qui fe
font occupez à examiner l'état de nôtre Commerce, comme le Docteur
Davenant en particulier, les envois que nous faifons tous les ans dans
l'Amérique vont à environ 350000. liv. ft. & que le gain que nous fai-
fons par ce Commerce revient annuellement à 600000. liv. lt. ou fi nous
fuppofons fuivant la conclufion de certaines gens, que les Anglois em-
ploient 1 00000. Nègres dans l'Amérique, & que le travail de cent Nè-
gres, fuivant l'eftimation qui en a été faite, produit 1600. liv. ft. par an.
L'Angleterre gagne 1600000. liv. ft. par ce feul Commerce; ce qui, plus
ou moins, eft fuffifant pour montrer, que la ruine de nos Plantations,
ou la perte de leur Commerce, fi les François & les Efpagnols en fai-
foient la Conquête, feroit une li grande perte pour l'Angleterre, qu'il fe-
roit impomble,ni de la fuputer, ni de la reparer.
Mais, outre la perte de nôtre Commerce, quel trifte fujet de Reflexion
ne fera-ce point de fonger que 2.00300. de nos frères & originaires An-
glois, ou leurs defcendans,qui font dans l'Amérique, feroient ou détruits
par les François & les Efpagnols, ou forcez de s'abandonner à l'Idolâtrie
Romaine ? Que cela fera avantageux au Papifme, & fatal à la Reforma-
tion ? Mais , comme cette penfée ne fauroit feulement trouver place
dans le cœur de ceux qui ont pour la Religion l'attachement qu'ils doi-
vent, envifageons lachofe d'un autre côté, & confiderons quelle perte
& (ju'el-
A M'A IRE S
GEN. DE
PE.
fio MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
& quelle douleur ce fera pour nos peuples , de voir tant d'amis & de pa-
rens qu'ils ont en ces Pais - là , ou pafTez au fil de l'épée par l'ennemi
L EZ*°~ commun , ou condamnez aux mines , & autre fervitude infuportable.
Nous ne devons pas efperer que les François & les Efpagnols, également
imbus des languinaires & barbares principes de l'Eglife de Rome, traitent
les Proteftants plus favorablement que les Efpagnols traitèrent les Indiens
de l'Amérique dans le tems qu'ils s'y établirent.
Il y a encore une conlideration qui frapera peut-être ceux qui ne
comptent pas pour grand - chofe leurs Compatriotes ou leur Religion dans
l'Amérique. Comment eft-il poflible que les Anglois puifient fe palier
des Marchandifes & Denrées que nous recevons tous les ans de ces Païs-
là, comme Tabac, Sucre, Cotton , Gingembre, Poivre de la Jamaïque,
Bois de Fuftic, Indigo, Cacao, Mats, Fourures, PoifTon de Terre-neu-
ve, &c. dans un tems où nous perdons non -feulement les chofes nécef-
faires à nôtre propre confommation , mais encore le gain que nous fai-
sons par le tranfport de ce que nôtre Pai's nous produit, & les retours
des Marchandifes de l'Amérique qui nous viennent par ce moyen, & que
nous fommes pareillement privez du profit qui nous revient en tranfpor-
tant dans les autres Pais de l'Europe ce qui ne nous efl pas néceffaire.
Cela ne fera pas feulement incommode à ceux qui vivent dans l'abon-
dance, pour ne pas dire dans le luxe, ce fera la ruine d'une infinité de
familles qui gagnent leur vie à préparer nos Marchandifes qu'on efl obli-
gé de tranfporter pour l'entretien du Commerce , ou à voyager fur les
VaiiTeaux employez à ce Commerce.
Si quelqu'un s'avifoit de dire, que nous groffiffons le Danger, & que
nous regardons les chofes au travers d'un miroir qui les multiplie , qu'il
pefe mûrement la matière, & il trouvera que ces appréhenfions ne font
pas les effets d'une mélancolie noire, mais le réfultat d'une crainte fon-
dée fur la raifon. On fait par expérience les Avanies que les François
nous ont déjà faites dans notre Commerce de Terre-neuve & de la Baye
de Hudfon. Le Comte de Bellamont a remontré dans plufieurs de fes
dernières Harangues, à ceux repréfentent nos Colonies Septentrionales,
ce qu'elles ont à craindre de la part des Colonies Françoifes, & de leurs
Cabales avec les Indiens du voifinage- & conféquemment fi l'on confidére
la PuilTance des François par Mer, & la facilité qu'ils ont de l'augmenter
par leur union avec les Efpagnols , & les richeffes de l'Amérique , nos
craintes ne feront que trop bien fondées. Et fi l'on ne fonge pas tout de
bon, pendant qu'il eft encore tems, aux moyens de prévenir leurs de£
feins , ce que nous craignons pourroit bien nous arriver bien -tôt.
Une autre partie de notre Commerce, que nous avons à conflderer, efl
le Commerce d'Afrique. La Portion de ce Commerce, qui fe fait du coté
du Détroit, eft entièrement à la merci des François & des Efpagnols,
comme on l'a déjà démontré, & pour ce qui eft de celui que nous faifons
fur la Mer Atlantique, ou au de-là du Tropique de Cancer & de la Li-
gne Equinoxiale, ils nous ont caufé des pertes confiderables durant les
der-
PE.
RESOLUTIONS D'ET AT , M. DCC. I. 5zr
dernières Guerres, en ruinant nos Forts & nos Colonies. Il faut donc Affaires
convenir comme d'une chofe évidente , qu'ils font à préfent plus en état GfN- DF-
de nous nuire dans ce Commerce par leur union avec les Efpagnols, non-
feulement à cauie de leurs Forces navales unies, mais auili parce qu'ils
peuvent nous incommoder pour le Commerce des Efclaves j car ne leur
eft-il pas aifé d'obliger les Efpagnols de n'acheter plus d'efclaves de nous,
moyennant qu'ils leur en fourniffent à meilleur marché ? C'efi le prétexte
qu'ils peuvent prendre d'abord 5 & il ne faut pas douter qu'ils ne traitent
enfuite pour leur compte avec les Efpagnols, & ne nous enlèvent par ce
moyen cette autre fource du Billon que nous tirons des Indes Occidenta-
les, aulîi bien que l'avantage avec lequel nous pouvons le faire valoir
dans la Jamaïque , &c. & ne nous ôtent les moyens de faire pafTer en
Angleterre les Denrées de ce Païs-là, qui non-feulement nous fourniffent
les chofes néceffaires à notre confommation, mais aufll celles dont nous
avons befoin pour notre Commerce dans les Pais étrangers. Outre ce
dommage , ils ruineront notre Commerce de Dents d'Eléphant & de
Poudre d'Or ; ce qui nous privera non-feulement de l'avantage qui nous
revient du fret & de la vente des Marchandifes" que nous envoyons ëc
que nous recevons par le moyen de ce Commerce ; mais encore inter-
rompra la Fabrique de nos monnoyes, & la circulation de nos efpèces.
S'étant enfin rendus les Maîtres de la Mer, ils empêcheront que notre
Compagnie d'Afrique ne faife pafTer dans la Jamaïque, & dans nos au-
tres Plantations des Efclaves, dont le travail fait la principale partie de
nos richeffes, dans les Indes Occidentales ; & par cela feul ils peuvent
ruiner ces riches Plantations.
Voyons maintenant les fuites que peut avoir l'Union des François &.
des Efpagnols à l'égard de notre Commerce des Indes Orientales. On a
déjaintinué, qu'une pareille augmentation de puiffance mettra les Fran-
çois plus en état de nous incommoder, foit en allant, foit en revenant ;
qu'ils font ce femble en beau début de nous priver de notre argent comp-
tant, fans lequel il nous feroit impoffible de faire le Commerce du Le-
vant ; que s'ils fubjuguent les Hollandois, ou les réduifent à traiter aux
conditions qu'ils voudront ; ce qui elt très-poiïïble à moins que nous ne
les fécourions , les Comptoirs des uns & des autres s'uniront pour ruiner
les nôtres. On peut ajouter à cela, qu'ils n'ont qu'à fe rendre maîtres
de la Côte d'Afrique fur la Mer Atlantique, &c. pour nous enlever tou-
tes nos Places de retraité ou de rafraichiffement au Cap de Bonne- Efpé-
rance & par-tout ailleurs. Ou ils peuvent donner des commiflïons aux
Corfaires de Madagafcar qui traverleront nos voyages, ou ils peuvent y
loger leurs Vaiffeaux qui feront la même chofe. Leur crédit auprès du
Grand -Mogol, & autres Potentats de l'Orient, qui dans ce cas l'empor-
tera fans contredit fur le nôtre, peut ruiner notre Commerce en ces Païs-
là > &., devenus plus puiiTans dans la Manche , ils peuvent nous empêcher
de tranfporter ces Marchandifes dans les autres Ports de l'Europe, ilippo-
Titme XL Vvv fé
PF..
52.2 MEMOIRES, NEGOTTATIONS, TRAITEZ, ET
Attairf.s fé que nous foyons allez heureux pour conduire fans accident nos Vaif-
gen. de féaux dans nos Forts.
l'Euao- Nous connoitrons de quelle dangereufe conféquence cela feroit pour
l'Angleterre, fi nous considérons : 1. Que nos VaiiTeaux, nos fonds, &
les gens que nous occupons a cela, nous deviendront néceiliirement in-
utiles, & par conféquent nous perdrons tout le profit qui nous revenait
de ce Commerce. Cette raifon paroitra de très -grand poLis , fi- nous jet-
tons les yeux fur la fupputation (lavante de la façon du Docteur Deve-
nant. Il fait monter ce que nous y iraniportons en Billon & en Mar-
chandifes à 500000. liv. IL par an.
Les retours à 1800000.
Ce qui fe confomme chez nous à 1300000.
Ce que nous rapportons en Europe à fooooo.
Ce que nous gagnons par ce tranfport à 180000.
Si nous ajoutons à cela ce qu'il dit dans fon Traité du Commerce âcs
Indes Orientales , nous épargnons en baillant le prix des foyes & des
toiles étrangères, & par la confommation que nous faifons de nos ma-
tériaux , aufquels ces iMarchandifes fuppléent ; ce qui rend nos envois
plus confiderables , nous épargnons, dis- je , & gagnons annuellement
par ce Commerce 680000. liv. IL
De-là il paroit encore manifellement, qu'en perdant nôtre Commerce
des Indes Orientales, nous perdons pareillement une grande partie de no-
tre Commerce de l'Europe, & comme acheteurs, & comme vendeurs.
Nous perdons encore le Salpêtre pour faire la Poudre , néceffaire à no-
tre défenfe ^ perte d'autant plus confiderable, qu'il n'y a pas moyen de
îa reparer d'ailleurs. Si donc les François, ou en fubjuguant les Ilollan-
dois, ou en les mettant dans la nécefîité de traiter à leur mot, s'empa-
rent de cette Marchandife par cette fupériorité dans le Commerce des In-
des Orientales, voilà tout le refte de l'Europe defarmé, voilà les Fran-
çois à la Monarchie Univerfelle après laquelle ils foupirent avec tant
d'ambition, & à laquelle ils ont tâché de parvenir depuis 11 long-tems
avec tant d'induihïe. La perte de notre Commerce étranger en gênerai
nous dépouillera d'une partie de notre Navigation & de nos gens de ma-
rine, qui font une fi confiderable partie de notre force.
Faifons enfin quelques Confiderations fur nôtre Commerce de l'Europe
en gênerai. Il paroit manifellement par ce qu'on a déjà dit, qu'il dépend
en grande partie de celui que nous avons aux Indes Orientales , lequel
étant une fois ruiné, il faut nécelTairement que celui de l'Europe tombe;
ou s'il ne tombe pas, les François étant les Maîtres de la Mer, & uni/Tant
leurs forces avec l'Efpagne , nous voilà dans l'impolîibilité de lé continuer.
Par cette malheureufe Union nôtre Commerce d'Efpagne, du Détroit, &
du Levant, le meilleur que nous ayons en Europe, eil vifiblement en
danger. Si les François fe rendent une fois les Maîtres de la Hollande,
nôtre Commerce d'Allemagne & du Pais Oriental eil entièrement ruiné,
& com-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. Si«
& comme il fera fort expofé à caufe des Havres de Nieuport & ci'Oflende Amt$Èà
joints avec ceux de Dunkerque, de Graveline , & de Calais, ce fera un GFN'- CF
effet particulier fur nôtre Manufacture de Laine , qui ell fort eltimée de L '^RO"
ce côté-là.
On compte que la Laine d'Angleterre va annuellement à deux millions,
& l'on fuppofe qu'elle monte à huit lors qu'on l'a mife en œuvre. On como-
te qu'on peut tous les ans envoyer dehors pour deux millions de ces Ma-
nufactures. A décompter 10. pour cent pour le fret & pour les retours,
le gain qui en revient annuellement à la Nation monte à 2.00000. liv. ft.
Il paroit par-la, que le Royaume fouffriroit un grand préjudice, fi l'on nous
empêchoït le tranfport de nos Manufactures de Laine, & qu'une infinité
de Familles qui ne fubfiltent que par-Là feroient ruinées fans reflource.
Pour ce qui regarde le Commerce de la Pêche, dont les Hollandoîs
& les François fe font déjà emparez en grande partie, nous devons nous
attendre à le perdre entièrement, fi l'on n'arrête promptement l'élévation
de la France. Les Hoilandois fe font déjà fi bien rendus les Maîtres de
ce Commerce, qu'à peine veulent-ils nous permettre de pêcher dans nos
Mers. Or fi une fois ils viennent à être fujets de la France, ou à fe
joindre avec Elle, nous n'aurions pas le pouvoir de mettre en Mer une
Barque de Pêcheur, qui ne foit en danger de tomber entre leurs mains,
comme il a paru par les infultes que les Dunkerquois ont fait à nos Pêcheurs
de Maquereaux durant la dernière Guerre.
Pour renfermer en peu de mots ce qui regarde le Commerce étranger,
difons que le profit qui nous en revient monte fuivant la fuputation qu'on
en a faite à deux millions par an, & c'elt-ce que la grandeur exorbitan-
te de la France nous met fort en danger de perdre.
Encore feroit-ce une confolation,fi nous n'avions que cela feul à crain-
dre j mais, il n'y a point d'homme fenfé qui puiffe fe flater que nous en
ferons quittes pour cela j car non feulement nous avons à craindre d'ê-
tre dépouillez de tout Commerce étranger, mais encore d'être envahis
dans nôtre Ifle. Les François & les Efpagnols fentent fort bien , que c'efb
nous qui avons fait échouer leurs defïeins pour la Monarchie Univerfelle,
lorsqu'ils fe font mis fucceiîivement ce projet en tètej ils lavent pareille-
ment que tant que nous demeurerons en nôtre entier, il ne leur fera pas
facile d'y réunir, quoi qu'ils unifient leurs Forces & leurs Confeiîs. Nous
pouvons ajouter à cela la haine qu'ils ont pour nous au fujet de la Reli-
gion, & l'obligation où ils font de rétablir le Prince qui nous a quitté, ou
{ts Defcendans ; ou peut-être l'envie qu'ils ont, pour mieux dire, de met-
tre un Prince François fur le Trône de la Grand-Bretagne, de nous rendre
Feudataires de la France, de nous appauvrir de manière, que nous ne
fbyons plus en état déformais de traverfer l'acheminement de leurs projets-
pour la Monarchie Univerfelle, & d'extirper ce qu'ils apellent l 'liéréjie du .
Nord.
Les chofes étant ainfi , & le danger fi grand & fi proche , il refte à
Vvv 2. exa-
l'Euro-
pe
f24 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires examiner ce qu'on peut faire de mieux pour nous mettre à couvert de
gkn. dk l'Orage qui nous menace.
A bien envifàger la nature de ce danger, il eft certain que nôtre prin-
cipale fureté, après la Protection divine, dépend d'une bonne Flotte,
c'eft-à-dire d'une Flotte qui nous mette en état de défendre nos Côtes,
de protéger nôtre Commerce étranger, & d'incommoder l'ennemi public,
ou dans lès propres Etats, ou dans fes Plantations étrangères fi befoin
eit. Nous fommes déjà en fort bon état pour cela, puifque nous avons
au moins 175». VaiiTeaux de Guerre. Si nous ajoutons à cela les forces
Navales des liollandois, comme il dépend de nous de le faire par le moyen
d'une étroite alliance , nous n'avons humainement parlant rien à crain-
dre pourvu que ces Flottes foient bien équipées, bien pourvues de vivres,
& commandées par des gens de probité & d'honneur.
Pour cet effet, il eit très-raifonnable, que nôtre Parlement, à qui l'on
confie la. difpofition de nôtre bourlè, afiîlte Sa Majefté de ks meilleurs
Confeils, & foit en même tems fon grand Confeil, & le Corps qui repré-
lènte les Peuples. Il y a un grand & inconteitable intérêt d'aider à
ehoiilr ceux qui méritent d'être chargez de la défenfe de la nation , qui
font propres à avoir la difpofition de fa bourfe, & à prendre garde qu'on
n'emploie dans des affaires de fi grand poids , & que des gens afYe£tiori-
nez au public, & plus attentifs à ménager nôtre honneur & nôtre Com-
merce, que de s'enriehir aux dépens du Public. C'efl une chofe à la-
quelle il faut bien prendre garde en tout tems, mais fur-tout dans une
pareille conjoncture , où nous ne fommes pas plutôt fortis d'une ennuyeu-
le & pefante Guerre, qu'on va nous forcer vraifemblablemcnt d'entrer
dans une autre, à moins que nous ne foyons d'humeur de demeurer (im-
pies Spectateurs, & de voir mettre toute l'Europe aux fers, en attendant
qu'on vienne enfin nous charger des plus pefantes chaînes fans pitié ni
compallion.
JMôtre Gouvernement eft fi heureux, que nous ne pouvons être taxez
que de nôtre confentement , comme on taxe les fujets de la plupart des
autres Monarchies de l'Europe; d'ailleurs nous fommes heureux d'avoir
un tel Souverain, qui a toujours témoigné contre la maxime de quelques-
uns de fes Prédeceifeurs, qu'il étoit bien aife que ceux qui accordent les
fonds eufTent aufîi infpeétion fur les comptes publics; de forte que s'il eft
arrivé que quelque chofe ait été mal adminiitré, nous ne devons nous en
prendre qu'à nous-mêmes. Comme cela fournit une bonne occafion à
ceux qui font affectionnez au public, de fe déclarer pour les intérêts de la
Patrie, il eit tems ou jamais qu'ils le faffent. Il y auroit bien du mérite
pour des gens d'honneur & de diftinction, à fervjr la Nation en remphf-
fant de pareils poftes publics dans une occafion fi préfixante , ou fans aucun
falaire , ou du moins pour ce qui leur feroit précifement néceffaire pour
leur dépenfe. La frugalité des Hollandois nos voifins, au fujet des pen-
iions qu'ils donnent aux perfonnes publiques, eit un de leurs meilleurs
prefer-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 525
prefervatifs contre la corruption & les préfens. Leurs falaires ne font pas Affaires
allez considérables pour tenter des avares'à briguer les charges de l'Etat: sen.de
Aufll les donne-t-on en gênerai à des gens de. vertu, & de mérite, à des
gens riches qui fervent la patrie pour la gloire, & que le lucre ne détache
pas aifément de Tes intérêts. La première fois qu'ils îecouërent le joug
Efpagnol , un Miniftre d'Efpagne remarqua fagement, que leur frugalité
ruineroit ion Maître. Or, puilque l'événement a confirmé la prédiction,
leur exemple en cela mérite bien d'être imité.
Quoique nôtre principale fureté dépende d'une bonne Flotte, cela n'em-
pêche pas que nous ne devions avoir une Armée fuffifante, de peur de
donner trop de tentation aux ennemis étrangers & aux mécohtens domef-
tiques; mais, depuis que les Libertés de la France & du Dannemark ont
été englouties par des Armées, & que nôtre Gouvernement compofé du
Roi& du Parlement a été entièrement renverfé par Cromwel & par l'Ar-
mée qui étoit fous fon commandement , des ombrages de la Nation contre
les Troupes fur pied ne doivent pas être méprifez, mais, auili ils ne doi-
vent pas être fomentez. Comme il faut avoir de raifonnables égards au
péril qui nous menace au dehors, on doit avoir foin à proportion de pré-
venir les ombrages contre une Armée en pied au dedans, je conçois, s'il
m'eit permis de le dire, qu'on peut aifément prévenir les fuites de cet
inconvénient par le concours mutuel du Roi & du Parlement, qui régle-
ront le commandement & le nombre des Troupes comme ils le jugeront
à propos.
Quoi qu'il n'y ait aucun danger en cela de la part de Sa Majeftc,
ce n'ell pas une fuffifante fureté pour la Nation. Cromwel, qui n'étoit que
Lieutenant General , ménagea l'Armée de manière, qu'elle ne vouloic
obéir, ni au Roi, ni au Parlement, ni au General; mais, s'étant emparée
de la puiffance législative qui n'appartient qu'à la Nation, elle faifoit faire
& défaire les Acles qu'elle jugeoit à propos , mettoit le Pais fous contri-
bution, & donnoit à certains Cavaliers qu'on appelloit Agitateurs, plus
d'Autorité qu'elle n'en vouloit donner à la Chambre des Communes. Elle
fit tant enfin, qu'elle renverfa entièrement nôtre Gouvernement, détrôna
le Roi, chafla le Parlement, & tomba enfin heureufement pour la Nation
dans une parfaite Anarchie, qui ne finit que par fa ruine. Au lieu de ce-
la, fi elle s'étoit fixée à un Chef certain, ou qu'elle fe fût attachée invaria-
blement quelque forte de Gouvernement, il y a toutes les apparences
du Monde qu'elle nous auroit aiïujettis à une Puiffance militaire fous la->
quelle nous ferions encore de l'heure qu'il elt. Nous n'avons aucune cer-
titude de la Vie de Sa Majeiîé ou de la PrinceiTe. Nous ne favons qui leur
fuccedera, & par confequent s'ils venoient à mourir nous aurions plus à
craindre d'une Armée fur pied. Qui nous aifûrera, que des Troupes mer-
cenaires, commandées par des Généraux ambitieux & politiques, ne iè
laifferont pas en pareil cas corrompre par argent, pour concourir avec les
François au rétabliifement du dernier Roi ou de fon prétendu Fils ; ce qui
V v v 3 ne
l'Euho
PE
fz6 MEMOIRES, NEGGTIATIONS , TRAITEZ, ET
Ayfaihts ne peut jamais arriver fans renverfer totalement nôtre Religion & peut-
ciF.N.DE eLre an;|i nôtre Souveraineté; car, il n'y a point de vraisemblance que
les François Subjuguent cette Nation pour le ci-devant Roi, s'ils trou-
vent quelque pofiibilité à la garder pour eux-mêmes ; ce qu'on ne peut
pas dire qui fût fort difficile en pareil cas.
Je n'iniifte point fur ceci, pour combattre la nécefîîté d'avoir une Armée
en cas de Guerre, mais feulement pour prouver que comme nous fommes
établis à préfent, il femble qu'il y ait de la nécelfitéque les parties qui
condiment nôtre Gouvernement s'attachent extraordinairement à écarter
tout ce dont les mal-intentionnaz peuvent tirer avantage pour donner om-
brage aux uns & aux autres, ou aux Peuples. Ce n'elt pas faire le per-
sonnage de fage, ou d'homme de bien, que de contefterla'Puiflance execu-
tive ou de Souverain Magiilrat que nos Loix donnent au Roy : mais,
comme il efl impoiîible à Sa Majeité de faire tout ce qui appartient à la
Puiflance executive qui refide en fa perfonne, & que nos Loix dans la
plupart des cas de confequence déterminent les qualitez de ceux aufquels
on doit confier S Adminittration, aufii doit-on regarder nos Législateurs
comme les Juges les plus competens , & qui ont les qualitez requifes à
l'Adminiitration. Comme il efl: nécefTaire de reconnoitre en tout tems
cette vérité, il femble qu'il l'efl encore d'avantage dans la conjoncture
préfente, où nous avons le malheur d'être divifez en Factions , d'avoir a
faire à un ennemi puiïïant & artificieux, & de nourrir dans nôtre fein
des gens qu'on Soupçonne avec raifon d'être dans fes intérêts. Une mu-
tuelle confiance , & une bonne Union entie le Roi &le Parlement, efi: le
meilleur moyen du Monde pour nous empêcher de craindre les injuftes
progrés de la prérogative d'un côté , ou de prévenir les attentats qu'on
pourroit y faire d'un autre. II paroît mani Tellement par nôtre Hiftoire,
que le premier nous a donné Sujet de craindre plus Souvent que l'autre;
& on a toujours remarqué, que le vrai moyen d'éviter ces deux incon-
veniens étoit que nos Rois agiffent de concert avec le Parlement leur grand
ConSeil , & que ceux qui en ont uSé autrement, & ont voulu gouverner
plus par des Favoris que par l'Avis de nos Parlemens, n'ont jamais été
heureux, & n'ont jamais reùifi.
La Reine Elifabeth nous fournit un glorieux Exemple de ce que nôtre
Monarchie efl capable de faire, quand nos Souverains agiffent par de Sa-
ges conSeils, & de concert avec les Parlemens. En un mot, qflfc nôtre
Gouvernement Soit entre les mains d'une Femme ou d'un Enfant, comme
il étoit du teras de cette excellente Princeffe & de Son frère Edouard VI.
pourvu q'ïe l'on gouverne par l'avis & par l'autorité des Parlemens libre-
ment & légalement élus, nous Sommes capables de faire des progrez, &
de maintenir l'Europe dans unjulte équilibre. Mais, au contraire, l'ex-
ptrience nous a apris, que quelque grandes qualitez personnelles dont nos
Princes Soient revêtus, li l'Harmonie entre eux & leurs Parlemens vient
une fois à être interrompue , ils ne Sont pas en état de Soutenir la dignité
de
51
5?
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 5i7
de leur caractère, ni la gloire de leur Couronne, ni chez eux, ni chez les Afïawe*
étrangers. La raifon en e(t naturelle, & Te préfente d el.e riiême. Dans G™- 0E
un Gouvernement limité comme eft le nôtre, qui j'ejpere le fera toujours,
les fujets craignent pour leurs libertcz & privilèges, & le Prince ne peut
jamais bien compter fur leurs perfonnes où fur leurs boudes , ni fur la dé-
pendance de leur Serment. 11 elr. tout naturel aux hommes de fouhaiter
d'être affranchis de tout fujets de crainte, ou d'un fardeau qu'ils trouvent
trop pefant. 11 n'y a eu aucun de nos quatre derniers Princes, qui n'ait
reconnu cela pour la Théorie, quelque éloignée qu'en fut leur Pratique.
L'opinion du Roi Charles II. à l'égard du Prince d'Orange, à préfent nôtre
Souverain, eit remarquable fur ce fujet. Le Chevalier Temple ayant eu
occafion d'en parler dans fa Conférence avec Mr. de Witt,* la rapporte
ainfi. ,, Je lui ai dit qu'il étoit vrai, que nous avions des gens allez figes
,, pour lavoir qu'il nous étoit impoflible d'avoir jamais une ferme confian-
„ ce aux Etats, attendu leur Gouvernement prélent , & particulièrement
en luy à l'occalion du Prince d'Orange. Que pour moi je n'étois pas
tout à fait de ce fentiment. Qu'encure que le Roi ne put pas fe dé-
pouiller de l'affection qu'il avoit pour fon Neveu, il croyoit neantmoins
,, qu'il ne pouvoit jamais mieux la luy témoigner, qu'en le perfuadant,que
„ rien ne pouvoit le rendre û heureux que la b.-nne volonté des Etats, en
„ leur abandonnant entièrement fa fortune, & non aux factions particu-
„ lieres, ou aux intrigues des puiffances étrangères; Que Sa Majefté mê-
„ me étoit perfuadée, Que les Primes ne fauroient fe faire plus de mal, ni
fe rendre -plus petits en toutes manières, quen affectant trop d'autorité, ou bien
une autorité directement contraire à l'inclination £5 'au génie du Pays quitsavoiart
en partage. Nous ajouterons à cela ce que Mr. Temple dit enfuite du Gé-
nie des Anglois, dont perfonne n'étoit plus capable de parler que lui.
D'ailleurs, dit-il, ,, je (ai que Sa Majeité étoit fi julte & fi raifonnable,
„ qu'encore qu'EUe (eut bon gré aux Etats de témoigner des égards à fon
„ Neveu, je ne croyois pas néanmoins qu'elle voulût propoier à aucun
„ autre Prince ou Etat, une chofe qu'Elie ne trouveroit pas bon qu'on
„ lui propofat-, que je ne croyois pas que fon Confeil ou le penchant de
„ ks peuples lui infpiraffent jamais un pareil deffein , car regardant le
„ Prince comme pouvant un jour devenir leur Roi, & aimant les Princes
„ qui fondent leur puillance fur le cœur de leurs peuples, & qui fe font
„ un plaifir de les gouverner fuivant les Loix, ils aimeroient peut-être
„ mieux voir le Prince d'Orange tenir fa fortune de la bonne volonté des
3, Etats, & poffeder l'autorité modérée qu'i's jugeroient compatible avec
„ leur gouvernement, que de le voir d'humeur à former des deffeins qui
,, pourroient ten ire à renverfer leurs conllitutions civiles. *
Il s'enfuit naturellement de tout cela , que les Rois de la Grande-
Bretagne n'ont que faire de fonger à aucune forte de Gouvernement
nouveau, ils n'ont qu'à fuivre le chemin batu, qui eit de prendre? gar-
de que leurs Parlemens foient élus avec liberté, & de fe conduire par
leurs
* Lettre de Tem'x> vol. 2. pag. 13. 14.. édit. Fram. pag. 18. )$. 20,
PF..
pS MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aktaires leurs confeils. Par ce moyen, ils peuvent compter fur le cœur, fur les
gen. ue bras, & fur les bourfes de leurs fujets ; & par cette route ils parvien-
lE^r0' dront infailliblement à la plus haute gloire à laquelle aucun Prince *du
__ monde puiffe jamais afpirer^ c'elï-à-dire qu'ils feront aimez au dedans,
craints au dehors, & capables de faire du bien à l'Europe, & de pré-
venir l'efclavage de la Chrétienté.
Nos Rois ont voulu fe faire donner depuis quelque tems le titre de
Lieutenans de Dieu, Titre excellent, & le plus propre que la Sageffe
humaine pouvoit choifir pour exprimer le devoir des Princes. Le Roi
des Rois, quoi qu'il ait donné l'être à fes fujets, ne veut avoir fur eux que
la prérogative de leur donner des Loix propres à les rendre heureux, de
leur faire trouver un avantage certain auffî-bien que leur Devoir dans ce
qu'ils font pour fa gloire , de recompenfer ceux qui obfervent fes Loix,
Ck de punir ceux qui les violent. Mais , s'il y a dans le monde des Monar-
ques qui n'aient pour principales bornes de l'obeïiïance de leurs fujets que
leur volonté & leur caprice , qui élèvent leur autorité au préjudice de
leurs peuples, qui entêtez de leur grandeur, ne fe foucient guère delà
mifere de leurs fujets, qui avancent & employent des gens vicieux, pen-
dant qu'ils négligent ou oppriment ceux qui ont de la vertu , qu'ils pren-
nent tant qu'il leur plaira la qualité de très-Chrètien , de tres-Sacré , de
très-Excellent i tant qu'ils en uferont ainfi , bien loin d'être les Lieute-
nans de Dieu , ils ne feront que les Lieutenans de fon plus cruel En-
nemi.
Si l'on traite ceci d'impertinente Digreffion, tout ce que j'ai à répondre
eft, que je l'ai cru néceifaire pour aller au devant de certaines Erreurs
fur le Gouvernement, que certaines gens fe mettent en devoir d'avancer
tout de nouveau parmi nous. Us voudroient fort perfuader, que les Rois
& les Sujets ont des intérêts difFerens , que les Princes font Maîtres de
tout #, comme le Czar de Mofcovie fe nomme, & que les fujets fonc
tellement leur propre, qu'ils ne peuvent leur refiiler en rien. Ces maxi-
mes une fois répandues produifent nécelTairement la tirannie. Ces prin-
cipes furent defavantageux à Jaques I., portèrent Charles I. fur l'échafaut,
firent exiler Charles II. , & abdiquer Jaques II. Mais, l'Epée du Roi Guil-
laume leur a donné le coup de mort par nôtre heureufe Révolution. Auiîi
n'y aura-t-il,ni particulier, ni Faction qui entreprenne de les refïïifciter fous
quelqu'autre nom ou prétexte que ce foit , û ce n'efl ceux qui voudront
en même tems travailler de tout leur pouvoir , foit qu'ils le croyent ou
non , à guérir la playe mortelle qui a été faite a la Béte de l'Apocalipfe.
La Tirannie & l'Idolâtrie font deux parties effentiellement néceifaires à la
compofition de l'Empire de l'Antechrifl , & par-tout où la première fe
fourre, l'autre prétend être en Droit de la fuivre. C'eft la chofe du mon-
de la plus furprenante, de voir que le Clergé en gênerai , fans diliinclion de
rang, fente fi peu cette vérité , quoi que l'expérience de tous les fiecles
prou-
* Le mot Angloii eji Self-Holders.
TE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. Ti9
prouve démonftrativement, que la tirannie , la puiflance fans bornes, la A?kaiues
prérogative par excellence, ou tout ce qu'on voudra la nommer , eft la GfN- DE
fource des plus grands & des plus énormes crimes dont la nature humaine
foit capable, & finit toujours par l'opprefTion des plus gens de bien & de
probité. Ainfi, s'il efl vrai qu'il faille juger de l'arbre par Ton fruit, com-
me nous enfeigne le Sauveur , nous pouvons raifonnablement conclure ,
que la puiflance fans bornes de quelque homme qui foit fur la terre efl
une plante que Dieu n'a jamais plantée.
Des gens, qui ont autrefois travaillé à la propagation de ces principes, &
tâché de les faire revivre parmi nous, en faifant paffer leurs Difciples dans
le Corps de ceux qui font lesLoix,&c. peuvent ufurper le Caraélere d'Am-
baifadeurs du Prince de Paix, & fe distinguer par tous les Titres qu'il leur
plaira; ils peuvent en impofer à la Prophétie de Samuel fur la tirannie de
Saiil #, au-lieu de s'en tenir à ce que Moïfe prefcrit du devoir du Roi
■J": mais , je prendrai la liberté de leur dire, que la définition que St. Paul
fait du Prince Souverain, qu'il apelle un homme ordonné pour protéger les
bons & punir les méchans -, & dont il dit que c'eft pour cela, & non pour
autre chofe, que les peuples lui doivent obeïflance & tribut **, fera de
plus grand poids pour les honnêtes-gens qui ont de la fenfibilité , que les
hétérodoxes Maximes de l'ObeilTance abfoluë. Si ces gens-là font les Am-
balTadeurs du Ciel , qu'ils étudient tant qu'il leur plaira les Livres divine-
ment infpiréz, ils ne trouveront pas dans leurs Inftructions une iyllabe qui
les autorife d'enfeigner, que celui , qui eft venu pour garentir les âmes de
la Tirannie du Dieu de ce Monde , a ordonné que le corps feroient efcla-
ves des Princes de la Terre. Telles gens , leurs Difciples, & leurs Adhe-
rens, font les plus pernicieux qui puhTent approcher du Trône , ils font
accroire aux Rois , qui ne font qu'Hommes , qu'ils font autant de Dieux.
Ainfi, nos Legiflateurs ont un intérêt particulier de fe donner garde de
leurs Confeils & de leurs Maximes -, & tout Peuple, qui veut conferver fa
Liberté doit avoir foin d'éloigner ces fortes des gens des polies d'autorité
& de confiance. Pareillement, les Princes, qui veulent aller au devant des
ombrages que pourroient prendre leurs fujets , doivent bien fe donner de
garde d'employer ou d'avancer des gens de ce Caractère, & fur-tout s'ils
ont déjà travaillé à mettre la Nation aux fers. A moins que de telles gens
ne fe foient reformez, ils ne peuvent fervir qu'à groiTir l'ombrage des
fujets, & à trahir tout Gouvernement fondé fur les Principes de la Liber-
té. Ils peuvent également en venir à bout, ou en jettant par furprife
les Princes dans des Maximes arbitraires autrefois pratiquées , ou en en-
tretenant correfpondance avec leurs ennemis déclarez. 11 n'y a pas la
moindre fureté pour un Gouvernement établi fur un légitime fondement,
& fur des principes comme les nôtres , de confier à ces fortes de gens
des
* i. Sam. 8. depuis le neuvième v. jufcju'à la fin du chapitre*
j" Deut. 17. depuis le 14. vtrf. jufciu'a la fin du cbap;tre.
** Rom. 15" depuis le commencement ju/c^u" an 8. du chapitre.
Tome XL Xxx
PK.
j3o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires des emplois de confequence, en cas qu'on entre en guerre contre ceux
gen. d£ qUj époufent la caufe d'un Prince qui a abdiqué , & qu'ils doivent néccf-
fairement croire bonne fuivant leurs principes.
D'ailleurs, il n'elt pas à propos, en toute manière , d'employer & d'a-
vancer des gens, qui, pour s'être laifîez corrompre, ont gagné de grands
biens dans les emplois publics , fait une manoeuvre qui pouvoit expofer
nôtre Conflitution, & dérogea leurs premiers principes. Le Divin Le-
giflateur nous a appris , que ce qui rend les hommes dignes des charges
publiques, c'ell de craindre Dieu & de haïr l'Avarice. Les titres pompeux,
les amis accréditez , & la faveur des Princes , font incapables d'infpirer
ces qualitez aux hommes j & confequemment ce ne doit pas être les ca-
ractères qui defignent ceux qui font propres au Service du Public, à moins
qu'il n'y ait déjà de l'intégrité & de la vertu. Si elles manquent , ils
peuvent ruiner l'Etat à la faveur de ces poftes publics, au lieu de le fer-
vir. Non tali auxilio,nec defenforibus iftis, tempus eget , le tems ne 1 aille pas
manquer d'un tel fecours., ni de tels défenfeurs. Puis donc qu'il elt impof-
fible que les Princes, quelque éclairez qu'ils foient, puiffent s'en rapporter
à ce qu'ils appellent leur certaine feience, quand il s'agit de juger du véri-
table caractère de ceux qui font propres à les fervir dans toutes les char-
ges publiques, il femble que dans une conjoncture pareille à celle-ci, l'a-
vis du grand confeil de la nation eft non-feulement convenable , mais
auffi absolument néceffaire. On ne fauroit rien faire de plus plaufible
pour maintenir comme il faut le gouvernement , pour écarter entiè-
rement les défiances que les mal-honnêtes-gens ont infpiré avec tant
d'adreiTe , & pour prévenir tout jufte fujet de plainte contre l'admi-
niflration.
Un des plus grands defavantages où puhTe être un gouvernement, c'eft
d'être obligé de baloter, s'il faut ainfi dire, l'adminifirarion, & de la faire
paffer d'une faction à l'autre: une telle conduite ne peut jamais être uni-
forme au dedans, & les Alliez n'y peuvent jamais bien compter. De-là
vient qu'étant en Traité avec les Hollandois fous le règne de Charles II.
ils nous oppoferent l'inconflance de nos refolutions , & nous dirent: §ue
depuis la Reine Elifabeth , l'Angleterre avoit été dans un flux ■& reflux perpé-
tuel <> & qu'ainji on ne pouvait pas compter deux ans fur [es refolutions , comme
nous apprend Mr. Temple *. Il eil bon d'ajouter à cela ce qu'a dit cet
habile Miniflre dans une autre occafion comme celle dont nous parlons.
*f- Sans beaucoup de vertu & de fermeté dans le gouvernement , £s? fans ui.e
bonne refolution d'exécuter ce qu'on a trouvé jufle & convenable , pour faire
voir que le mérite eft le feul chemin pour s élever , il eft auffi inutile de mo-
dérer les faclions , d'éloigner les feditieux , & d'adoucir les partis , que de
raccommoder une maifon ufée. J'entens par vertu ce que les plus illuftres
nations de l'antiquité ont fi fagement favorifé & rendu fi célèbre. Elle con-
fiftoii
* Lett. de Ter»p. Vol. i. p, ipj. de Vedit. Franc,
\ Ibid. vol. 2. pag. 41.
i-'Euao-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. r. ^i
fifloit cette vertu dans les grandes qualitcz qui rendent les hommes capables Affaire?
de fèrvir leur Prince & leur Patrie , & qui leur donnent des di/po fit ions for- GEN# Dfi
tes C5 vigoureujes , Joit pour le corps , Joit pour l ejprit.
Depuis ce qu'on a écrit ci-defTus , il femble que les François font deve-
nus plus forts & plus arrogans. Les Hambourgeois ont, ce femble, jugé à
propos de reconnoitre la SuccefTîon du Duc d'Anjou au Trône d'Efpagne;
& Louis XIV. eft tellement animé par les progrès qu'il fait de jour en
jour, qu'il menace les Hollandois d'une vigoureufe Guerre, s'ils ne recon-
noiflent au plutôt le Roi d'Efpagne. Cela nous donne jufte fujet d'apré-
hender, qu'il ne s'avife avant qu'il foit long-tems de nous faire faire le
même compliment: les préparatifs de Mer qu'il fait fur le Canal , la mar-
che de fes nombreufes Troupes en Flandres, & le Camp qu'on parle de
faire aux environs de Dunkerque , ne femblent promettre que cela. Il
fait affez, que tant que la Grande-Bretagne tiendra bon , le Duc d'Anjou
ne doit pas regarder fon Trône comme fi bien affermi qu'il ne puiffe être
ébranlé ; & qu'encore que plufieurs petits Princes & Etats croyent devoir
lui faire des complimens de congratulation , ils lui feront bien-tôt fentir,
qu'ii ne doit rien attendre d'eux, fi l'Angleterre & la Hollande fe décla-
rent une fois pour l'Empereur. Il faut donc convenir qu'il agit en fage
Politique de preiTer les Hollandois de prendre une prompte réfoiution ; &
d'être prêt à les attaquer brufquement fur leur refus. 11 ne fauroit non
plus faire rien de mieux pour nous empêcher d'envoyer du fecours aux
Hollandois, que d'avoir à Dunkerque une Armée toute prête à faire inva-
fion chez nous, & dans le Canal une Flotte pour efeorter & pour fécon-
der. Il n'y a point de doute , qu'il n'ait fenti la faute qu'il a faite autrefois
de retirer fes Troupes de nos frontières , & de les jetter fur le Haut-
Rhin dans le tems de la Révolution. Ilcomptoit alors fur la force du Par-
ti du Roi Jaques en Angleterre, & il crut que la Defcente du Prince d'O-
range devant nécefTairement produire une Guerre civile, le meilleur étoit
de nous lailTer détruire les uns les autres. Mais, il a connu à fes dépens,
que les habitans de nos Ifles font plus de cas de leur Religion & de leur
Liberté, qu'ils ne s'imaginoit qu'ils n'en feroient alors. Ou s'il ne croit
point cela, nous ne devons pas douter que nos querelleux Jacobites ne
î'ayent bien informé combien il avoit manqué à eux & à foi-même, de
n'avoir pas mis une armée à terre immédiatement après fa victoire navale
à la pointe de Beachy. Ils n'ont pas manqué non plus de le faire fouve-
nir de la faute impardonnable qu'il fit de fruftrer pareillement leurs efpe-
rances dans le tems qu'ils meditoient de faire un affaiïinat. Il eft certain
après tout, qu'il efl de fon intérêt de faire plier l'Angleterre & la Hollan-
de le plutôt, qu'il pourra ;&, foit qu'il en puiffe venir à bout ou non, il lui
eft de confequence de faire une diverfion, capable d'occuper leurs forces
au dedans, & les empêcher de fecourir l'Empereur.
Cela étant, ii eft certain qu'il eft de l'intérêt de l'Angleterre de fe met-
tre en état de donner la loi plutôt que de la recevoir /& de s'allier avec
Xxx z ce
$\i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires ce qu'il y a de pur dans l'Europe , plutôt que de biffer chacun fe tirer
gf.n. de d'Affaire comme il pourra ; ce qui efl le moyen infaillible de tout per-
u'Euko- ^^ ^es f^0}|anj0is ne doivent point appréhender de l'heure qu'il eft
— l'irrefolution de nôtre Cour. Il dépend donc à préfent de nôtre Patrie de
faire Ton perfonnage. Nous ne devons pas tant nous mettre en peine
de ce que les Hollandois doivent faire dans cette conjoncture, que de
ce que nous devons faire de concert les uns & les autres ; fi nous nous
divifons, nous fommes perdus: à moins que nous ne faffions agir con-
jointement toute nôtre vigueur, il faut néceffairement que toute l'Eu-
rope devienne efclave; & nous ne pouvons négliger les Hollandois,
fans nous négliger nous-mêmes. Nôtre appui leur fera prendre des re-
folutions vigoureufes; mais, fi nous les abandonnons, nous leur donne-
rons jufle fujet de s'arracher un œuil pour nous faire perdre les deux.
Si cela arrive , ce qu'à Dieu ne plaife , nous devons-nous attendre de
les voir revenir tout à coup à leur ancienne refolution, qui étoit * de
laiffer faire le bon Dieu , {$ de voir la France à leurs -portes fans fe remuer.
Cela fut dit à l'occafion de la défiance qu'ils avoient du Roi Charles IL
Mais Mr. Temple dit en même tems : Qu'ils êîoient capables de prendre de
concert avec nous telle refolution qu'il plaira à Sa Majefié\ ils f avoient qu'il dé-
pendoit d'Elle d'entretenir f équilibre dans la Chrétienté , & que F Empire 13
l'Efpagne , auff-bien que la Suéde £s? leur Etat 5 en pa (fer oient par où Sa Ma-
je fié voudroit.
C'eft la même chofe aujourd'hui, à la referve des Efpagnols ; & il n'y
a pas fujet de douter, que ceux même d'entr'eux qui en fecretou autrement
favorifent le Droit de la Maifon d'Autriche ne fuivent aujourd'hui les me-
fures que nous voudrons, comme ils vouloient le faire alors.
Il paroit de tout cela, que toutes les Nations de l'Europe attendent
que nous leur prononcions leur Sentence, & que nous leur diflons fi el-
les feront efclaves ou libres; on aquiefcera fuivant toutes les apparences
à la decifion que nous ferons fur cela: û nous les condamnons à la chaî-
ne, elles feroient bien peu politiques d'irriter leurs nouveaux Maîtres;
ainfi nous avons fujet de croire qu'elles recevront le joug fans refiitance,
au lieu de le rendre plus pefant en faifant de vains efforts pour s'en fe-
couër. Si cela elt,- comme il faut de néceffité que cela foit, & que nous
ne prononcions pas une Sentence favorable , il efl aifé de prévoir que
nôtre tour viendra bientôt. La Politique de la France ne lui permet pas
d'en ufer autrement. Elle a ruiné {"es Sujets Proteftans, qui ont foûtenu
la Couronne fur la Tête de Louïs XIV. , parce qu'on a cru que des gens
qui l'avoient maintenu fur le Trône feroient capables de l'en chaffer fur le
moindre mécontentement : il s'enfuit néceffairement , par la même métho-
de de raifonner, qu'on ne doit pas laiffer la Grande-Btetagne, qui a jufc
qu'ici fait échouer les deffeins de la France pour la Monarchie univerfel-
le, en état de le faire encore ; fi le reite de l'Europe fe foumet , les Fran-
çois
* Lett. de Tetvp. vol. z. pag. 3021 de Védil. Fravf.
I
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. f33
çois ne feront jamais allez Ennemis de leurs intérêts, pour laifTer l'Angle- Affaire
terre dans la iouiffance de fa Liberté 3 nous pouvons compter fùrement Gf*- DK
qu ils ne nous feront pas tant de grâce, mais qu ils profiteront au contrai- PE
re avec ardeur de Poccafion de nous perdre: ils diront de l'Empire d'An- '.
gleterre ce que difoit leur Roi Henri IV. de la Maifon d'Autriche, après
qu'il eut formé le vaite defTein de la mettre à la raifon, §jtil voulait ùiejftr
la bête au cœur.
Si les François ou autres difent, que la Paix de Ryfwick nous lie les
mains, & que la France & l'Efpagne ne nous ayant fait aucun Acte d'Ho-
ftilité, nous ne pouvons rien faire contre Elles fans violer ce Traité, il eft
aifé de répondre.
I. Qu'à peine y a-t-il aucun des Alliez à l'égard defquels la France n'aie
violé le Traité de Ryfwick. Combien de tems a- 1- Elle chicané avec
l'Empire, avant que d'évacuer Brifac? Combien de délais & d'é valions
n'a-t-elle pas mis en œuvre, avant que de régler la Frontière d'Efpa-
gne dans, les Païs-Bas, & d'évacuer Luxembourg? Combien d'In valions
n'a-t-Elle point fait & fait faire fur les Proteltans de l'Empire, fous pré-
texte du quatrième Article du Traité de Ryfwick? Avec quelle inhuma-
nité n'a-t-Elle point traité le Duc de Montbeliard ? Quelles Infractions
aux Libertés de Neuchaftel , & aux Traités qu'Elle a avec les SuifTes ?
Combien d'Avanies à l'Electeur Palatin, au fujet des Prétendons de hiDu-
chefTe d'Orléans? Combien de chicanes ne nous a-t-Elle point fait à l'oc-
cafion de nôtre Comptoir de la Baye de Hudfon , & de malhonnêtetés
aux Hollandois , avant que d'en venir au règlement du Tarif de Com-
merce ?
II. Mais, quoi qu'on 'n'eut rien de tout cela à oppofer, nous pourrions
rétorquer l'Argument des François contre eux-mêmes, en diftinguant en-
tre le Traité de Ryfwick & fes Termes. Le but de ce Traité fut certai-
nement de maintenir la Paix de l'Europe, en tenant là balance dans une
jufte (ituation. Mais, les François ont rompu le Traité, en annexant, ou
du moins alliant étroitement, la Couronne d'Efpagne à celle de France,
ce qui fait entièrement pancher la balance de leur côté; de forte que, fui-
vant leur propre argument, nous ne fommes plus obligez d'obferver ce
Traité. Il en faut demander l'Efprit fans aucun égard à la Lettre, & par
confequent nous voilà obligez d'arracher la Couronne d'Efpagne à la
Maifon de Bourbon , qui a fuffifamment fait connoître que fon defTein
étoit de mettre toute l'Europe aux fers, fi Elle avoit autant de force
que de bonne volonté.
On efpere qu'il n'y aura point d'Anglois fi entêté de la Paix de
Ryfwyck , que d'en faire un prétexte de refufer fon fecours pour met-
tre la France à la raifon. De toutes les Nations de l'Europe , la nôtre cil
celle qui a le moins de fujet d'être contente de ce Traité. Que ceux
qui en ont profité le défendent: les Anglois n'y ont rien gagné; mais,
ils y ont au contraire manifeifcement perdu y comme il paroitra par les
preuves fui vantes.
Xxx 3 I. En-
GF.N. DE
l'Euro
pe.
f34 MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
Affaires J. Encore que la Guerre nous ait plus coûté qu'à aucun des Alliez,
il n'y en a point qui ait moins tiré d'avantage de la Paix. L'Empire
s'en: fait reftituer plufieurs Provinces & Forte relies , & l'Efpagne aulïi ;
les Hollandois ont allure leurs Frontières , réglé leur Commerce avec
la France , & fe font fait reftituè'r leurs Plantations étrangères ; mais ,
pour nous, nous n'avons rien eu. ParceTraké, les Hollandois ont re-
tenu l'Artillerie, les Munitions, les Provifions, les Efclaves, & les Ef-
fets qu'ils ont enlevé aux François à Pontichery dans les Indes Occiden-
tales, aufli-bien que les terres & les droits qu'ils ontaquis du Prince &des
Habitans du Pais , comme il paroit par le huitième Article de Traité en-
tre la Hollande &la France; mais, pour nous, il a falu abandonner aux
François la Baye de Hudfon & fes dépendances , dont ils s'étoient em-
parez durant la Paix qui précéda la Guerre, quoique nôtre Compagnie
de la Baye de Hudfon les eut repris aux François à fes dépens en plei-
ne Guerre, comme il paroit par le huitième Article de nôtre Traité; &
pour furcroit,nous avons eu la mortification de traiter avec les Plénipoten-
tiaires François de chofes fur lefquelles nous avions un Droit indifpu-
table , & dont nous étions actuellement en poflefîion. C'étoit d'autant
plus honteux pour eux, que l'injuitice qu'on nous a faite étoit une des
caufes fur laquelle étoit fondé la Déclaration de Guerre du Roi Guil-
laume & de la Reine Marie au Roi de France , dattée du 7. de Mai
1685?. où le dernier eft accufé d'avoir envahi nos JJles Caribbes^ de s'ê-
tre emparé de nos terres de la Nouvelle Tork , & de la Baye de Hudfon , par
des A blés d'Hofiilitè, de s'être fat /î de nos Forts , d'avoir brûlé nos Maifons ,
13 enrichi fes peuples de nos dépouilles , retenu quelques- uns de nos fujets dans
une dure prifon , fait ôter inhumainement la vie à d'autres , & mis le refle
en Mer fur un petit Vaiffeau , fans vivres , & fans leur donner feulement le
néceffaire; actions inclignes même d'un Ennemi \ cependant tant s en faut qu'il
fe foit déclaré tel , ' qu'il négociait alors en Angleterre par fon Miniftre , un
Traité de Neutralité £5? de bonne Corrcfpondance dans l'Amérique. Voilà les
propres termes de la Déclaration. Il n'a nullement été glorieux à l'An-
gleterre , de n'avoir pas demandé au Traité de Ryfwyk , non-feulement
d être maintenue en polTeffion , mais de n'avoir pas parlé de compenfa-
tion. Que pouvoit faire Sa Majelté? Nous étions las de Guerre, & des
dépenfes qu'il falloit faire pour la ^continuer , actuellement abandonnez
par quelques-uns de nos Alliez , & en danger de l'être par d'autres;
ainfi nous ne pouvons nous plaindre que de nous mêmes & de la perfi-
die de quelques-uns de nos Alliez, û cet Article de la Paix & les autres
nous font peu d'honneur. Ce qu'on peut faire de mieux pour le repa-
rer, c'elt de meure à prefent Sa Majefté en état de faire juftice à h Na-
tion, & de demander une meilleure fureté pour nos Alliez, ii l'on juge à
propos d'entrer en de nouveaux Traités avec la France.
Une féconde Raifon, qui fait que nous ne devons pas être paflîonnez
pour le Traité de Ryfwyk eft, que nous ny avons eu aucune fatisfaclion
pour notre Pêche de Terreneuve, quoi qu'il fut dit dans la même Déclara-
tion
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. T. 5^
cion de Guerre: // ri y a pas Ivng-tcms que les François prenaient privilège A*rmrs«
du Gouverneur Anglois de Terre-neuve, pour pêcher dans les Mers de cette côte, GEN' D*-
& payaient pour ce privilège , corn h. e par recotmoifj'ance que la Couronne d'An-
gleterre a feule Droit fur cette JJle; cependant, les attentats des François fur la-
dite Ifle , fur le Commerce fc? la Pêche de nos fujet s , refjcmbloient mieux dans ces
derniers tems aux invafions d'un Ennemi , qu à des aôiions convenables à des A-
mis, qui -ne jouiJJ'oient que par tolérance de V avantage du Commerce. Au lieu
de reclamer nos Droits en ce Païs-là, les François font demeurez en po£
fefïion de Plaifance en Terre-neuve , qui peut avec le tems ruiner de
fonds en comble la Pèche des Anglois en ces Païs-là, parce que les Fran-
çois naviguent & ont les vivres à meilleur marché que nous ne pouvons
les avoir, qu'ils occupent de miferables Efclaves quupeuvent vivre de
pain & d'eau, & peuvent confequemment vendre à meilleur marché que
nous le Poiffon & autres Marchandifes qui en viennent, étant demeurez
les maîtres des places qu'ils nous ont enlevées dans la Baye de Hudfon.
Ils font en état par ce moyen de ruiner nôtre Commerce de Fourures &
Chapeaux, & particulièrement celui de nos Caftors d'Angleterre, autre-
fois tant eftimez. Cela doit nous être d'autant plus fenfible, que c'eft
une augmentation aux richeffes, à la gloire, & à la puiflance des Fran-
çois, & à tous égards une diminution de la nôtre, dont on croiroit que
nous fommes à préfent plus en état de nous reffentir, que nous ne l'é-
tions du tems de la Reine Elifabeth, que le Chevalier Humphrey Gil-
bert en prit pofTeffion au nom de cette Princefle, & y défendit la Pêche
aux autres Nations. D'ailleurs , nous avons droit d'y prétendre, en vertu
de la première Découverte de Sebaftien Cabot , qui préfenta trois Origi-
naires du Pais à notre Roi Henri VII.
Nous pouvons dire en troifiéme lieu, que nous n'avons pas fujet d'ê-
tre contens du Traité de Ryfwick, en ce que nous n'avons eu aucune fa-
tisfaclion des plaintes que nous avions faites dans la Déclaration de Guer-
re au fujet de nos Vailfeaux pris par les Pirates François. Le Roi de Fran-
ce en défendant le tranfport d'une grande partie des Denrées Cî? Manufactures de
nôtre Royaume , & en impofant des Droits ex or bit an s fur les autres , nonobjlant
le grand avantage que lui & la Nation Françoife tiroient de leur Commerce avec
V Angleterre \ ce qui, comme dit la Déclaration, montre évidemment que fon
deffein eft de ruiner nôtre Commerce, & par canfequent nôtre Navigation , d'où
dépendent ft fort la richeffe £5? la fureté de cette Nation.
Il eft vrai que nous leur avons rendu le change à l'égard de la Défenfe
& des Impots concernant nos Marchandifes, en les traitant de la même
manière; mais, nous fommes encore en arrière fur la Prifede nos VahTeaux.
Pour ce qui regarde le danger de notre Commerce & de notre Naviga-
tion , fi l'on a cru pour lors que c'étoit un légitime fujet de déclarer la
Guerre, la même raifon eft d'autant plus forte & plus preifante de l'heu-
re qu'il eft, que notre Commerce eft plus expofé par rapport à la France
qu'il ne l'a jamais été, comme on l'a déjà démontré.
Nous pouvons dire pour quatrième Raifon, que nous ne devons pas
avoir
PE.
Si6 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires avoir d'attachement pour le Traité de Ryfvvick, puis que nous n'avons eu
gf.n. de aucune fatisfaètion fur le Droit de Pavillon, attaché, comme le remarque
x-'Euko- ja Deciaration, à la Courone d'Angleterre; ,, au contraire il nous a été
„ difputé par les ordres de la France par une violation de Souveraineté
„ dans la Manche ; Souveraineté que nos PrédéceiTeurs ont défendue
,, dans tous les Siècles, & que nous fomrnes refolus de maintenir pour
,, l'honneur de notre Couronne , & de la Nation Angloife. „ Il ne
nous paroit pas qu'on ait rien fait par ce Traité pour ménager notre hon-
neur à cet égard; & nous n'avons aucun fujet de douter, que comme les
François fe font rendus plus puiiTans dans la Manche par ce Traité, qu'ils
ne l'étoient auparavant, leur obflination & leur fierté ne deviennent fem-
blablement plus grandes fur ce fujet.
Le dernier fujet de Guerre, dont il efl fait mention dans la Déclaration,
peut fervir de cinquième Raifon au mécontentement que nous devons a-
voir du Traité de Ryfwick. Le voici. ,, Mais , ce qui doit nous tou-
cher de près, c'eit la Perfécution peu Chrétienne qu'il a fait en France
pour la Religion à plufieurs de nos Sujets Proteftans Anglois, contre
le droit des gens, & les claufes expreilès des Traitez, en les forçant
d'abjurer leur Religion par des cruautez furprenantes & inoùies , en
emprifonnant des Capitaines & Matelots de nos VaifTeaux Marchands,
& condamnant les autres aux Galères, fous prétexte d'avoir reçu fur
leurs VaifTeaux, ou fes miferables Sujets Proteltants, ou des effets à eux
j, appartenans. Et enfin, comme il a tâché depuis quelques années, par
„ follicitations & promefTes de fecours, de renverfer le Gouvernement
,, d'Angleterre, aufîi emp!oye-t-il aujourd'hui tout ouvertement les mê-
„ mes voyes violentes par l'Invafion actuelle de nôtre Royaume d'Irlan-
„ de, pour foûtenir nos Sujets rébelles armez contre nous, & pour irri-
,, ter dans nôtre Royaume nos bons & ridelles Sujets.
Quiconque fe donnera la peine d'examiner le Traité de Ryfwick,
trouvera qu'il n'y a rien qui puûTe empêcher qu'on ne fafTe à l'avenir de
pareilles Infultes aux Proteftans Anglois , ni rien qui repare celles qui
ont déjà été faites. Il eft confiant aufîi que la Cour de France à toujours
la même envie de nous faire les mêmes outrages, comme il a paru de-
puis la Paix par l'Affaire arrivée au Chapelain d'un de nos AmbafTadeurs
en France. On en peut dire autant du traitement barbare qui a été fait
contre le Droit des gens aux Maitres & Matelots de nos VaifTeaux.
Nous n'avons point eu fatisfaétion de l'Invafion d'Irlande, quoi que le
Roi de France ne fût pas moins obligé de nous faire juitice à cet égard,
que de tenir compte des Revenus de la Principauté d'Orange, & des
Intérêts depuis le Traité de JNimegue jufqu'à la conclufion de la Paix.
11 eft manifefte par tout cela, que, pour ce qui nous concerne, nous a-
vons auffi peu de fujet qUe les François d'être mal fatisfaits du Traité de
Ryfwick i & que tous les fujets de guerre mentionnez dans la Déclara-
tion fe font multipliez au lieu de diminuer.
Une fixiéme Raifon de plainte contre le Traité de Ryfwick, qui efl
peut-
?»
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RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
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l'Euro-
pe.
peut-être d'autfi grand poids pour la Nation qu'aucune autre dont on ait Affaire.?
parlé jufqu'ici. Il efl ftipulé dans le quatrième Article : Que le Roi de GKN- D»
France fous quelque prétexte que ce pnijje être , ne troublera Sa Majefîé
régnante dans la libre PoJfeJJîon de ce dont Elle jouit préfentement ; mais ,
il n'y a rien pour aiïiirer notre Gouvernement préfent après la mort de
Sa Majelté. Ainfi , le Roi de France pourroit prétendre qu'il ne s'efl
point obligé par ce Traité à ne pas tâcher de dépoiTeder la PrincefTe &
tes Defcendans, ou, en cas qu'elle n'en ait pas, les Defcendans de Sa
Majeflé, s'il plait à Dieu de lui en donner. Il n'eft pas mal-aifé de
comprendre de quelle fàcheufe conféquence cela peut être à la Nation.
Si le Roi Jaques vient à furvivre le Souverain qui nous gouverne à pré-
fent; ou, cela n'arrivant pas, fi le Roi de France ou Ton SuccefTeur trou-
ve à propos pour fon Intérêt de foûtenir les prétendons du prétendu Prin-
ce de Galles; ou, en cas que l'occafion ne s'en préfente pas, (1 dans la
fuite quelque Roi de France juge qu'il lui foit avantageux de faire valoir
les Droits chimériques des Enfans de ce prétendu Prince , & de ceux que
peut avoir la jeune PrincefTe qu'on appelle fa Sœur ; il n'y a rien dans ce
Traité qui puiffe l'en empêcher, & nous nous verrons difputer des Droits
confirmez par une pofTeflion de plufieurs fiécles. Il eft. confiant que cet-
te feule omiffion pourroit être une fource éternelle de Querelles entre
l'Angleterre & la France , & rendre inutile le Sang & les Tréfors qu'il
nous en a coûté pour recouvrer notre Conflitution , & la Liberté de
l'Europe.
Il y a contre le Traité de Ryfwick une autre Objection , prife du fé-
cond paragraphe de la Déclaration de Guerre, qui porte : Quand nous con-
jiderons les moyens injujles dont le Roy de France s efl fervi depuis quelques an-
nées pour fatisfaire à fon ambition , & que nous faifons réflexion quil a non-
feulement envahi les Etats de f Empereur £5? de ï Empire , à préfent notre Al-
lié \ quil a ruiné des Pays entiers & leurs Habit ans par [es Armées , mais
auffl déclaré la Guerre à nos Alliez fans aucun fujet , & au préjudice des Trai-
tez confirmez par la Garantie de la Couronne d'Angleterre , quil a manifefle-
ment violez ; nous ne pouvons moins faire que de nous joindre avec nos Alliez
contre le Roi de France , comme Perturbateur de la Paix , & Ennemi commun
de la Chrétienté.
On fait allez que les Habitans du Palatinat, & des autres Pays d'Alle-
magne voifins de la France, ont le plus fouffert des In vallons de la Fran-
ce fur nos Alliez. Cependant, bien loin d'en avoir eu aucune réparation,
ceux qui s'étoient dérobez à la fureur de la perfécution des François, au
lieu du repos auquel ils dévoient s'attendre avec juitice, fe font trouvez
incontinent expofez à une nouvelle tempête de la part de l'Electeur Pala-
tin , animé de la Rage Papale &c. fous laquelle ils gémiflènt encore de
l'heure qu'il eft , & font retentir aciuellement leurs inutiles plaintes dans
toute l'Europe. L'Electeur de Brandebourg, le Landgrave de HefTe , le
Médiateur, & les Plénipotentiaires de quelques autres Princes Proteftans,
ont fait quelque réfiflance durant un tems , lors qu'ils ont vu leurs Frères
Tome XI, Yyy Pro-
Affaires
gën. HE
l'Euro-
pe.
138 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Proteftans fi vilainement trahis, mais cela n'a de rien fervi. Ce "fut en vain
que Sa Majefté Britannique voulut porter la réfiitance plus loin, la vio-
lence du torrent lui fit lâcher prifej Tes Sujets incommodez, & les Alliez
caufe de foi-même , & pour s'exempter de la Haine & du Danger , que pour
décharger [on Royaume du poids d'une Guerre de grande dépenje.
De tout cela il paroit clairement à notre avis, qu'il n'y a point de vé-
ritable Anglois , ou de bon Protestant, qui voulut oppofer le Traité de
Ryfwick aux nouvelles tentatives qu'on pourroit faire pour réduire la
France dans la néceffité d'accorder des conditions plus avantageufes , puis
qu'Elle a été la première à le violer.
La Maifon d'Autriche fe plaignit violemment de nous du tems de Ja-
ques I. , de ce que ce Prince ne faifoit rien pour l'Electeur Palatin Ton
Gendre, & pour fes Sujets Proteftans que les Papiftes d'Autriche perfé-
cutoient alors ; & qu'il fe contentoit d'envoyer des AmbafTadeurs. Ce
fut à cette occafion , qu'on plaifanta à Bruxelles aux dépens du Roi Jaques
dans une Pièce de Théâtre, où l'on demanda ce que le Roi de Grande-
Bretagne fer oit pour ï Elecleur Palatin? & où l'on fit répondre au Faquin
de la Farce, Qu'il le fecmrroit de 1 00000. Ambaffadeurs. Ce feroit quel-
que chofe de bien honteux de l'heure qu'il eft au zèle & à la fagefTe de
l'Angleterre, fi les Princes Catholiques avoient occafion de dire, que le
trop peu du Roi Jaques dont on fe moquoit alors , eft à préfent trop pour
nous. Il faut efpérer que la Nation Angloife ne regardera pas la Perfé-
cution des nos Frères & Alliez Proteftans, comme un des moindres Su-
jets d'entrer en de nouvelles Alliances contre la France. Ce Royaume
n'a jamais été plus floriffant & plus renommé , que lors qu'il a paru à la
tête des Proteftans , & pris la défenfe de nos Frères perfécutez. C'eft
une vérité que fentiront évidemment ceux qui feront attention à la figu-
re que nous faifions à cet égard dans le Monde Proteftant, fous le Rè-
gne de la Reine Elifabeth , & dans le tems du Parlement furnommé le
long s & même à la Réputation que nous nous acquîmes par cela même
fous l'Adminiftration de l'Ufurpateur.
Qui nous empêche donc d'inviter toutes Jes Puiflances Proteftantes
de l'Europe à s'allier avec nous pour la défenfe de notre commune Re-
ligion ? Elles peuvent toutes nous fecourir d'hommes & de
VaifTeaux. Nous avons la plus belle Flotte qu'il y ait au monde. Nous
n'avons que faire de chercher un Generaliffime , & nous avons un Roi
pour commander nos Armées. Il n'y a rien humainement parlant, qui
puifTe réfifter aux Forces Navales unies des Princes & Etats Proteftans j
ils font fi voifins que la France & l'Efpagne ne fauroient empêcher la
Jonction de ces mêmes forces. Ils font en état de laiffer dans le Canal
une Flotte affez formidable pour fe mettre à couvert des infultes de cel-
le de la France, pendant que le refte bombardera fes Places, bloquera
fes
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 539
fès VaifTeaux de guerre , pafTera le Détroit , mettra des Troupes à Civi- Awmrw
ta-Vechia, les fera marcher à Rome, délogera le Pape , & détruira gtn.de.
l'Empire de l'Antechrill. Cela ne paroitra,ni extravagant, ni vilionnaire, L °"
à ceux, qui fe fou viendront, que l'Amiral Ruffel , avec uneEfcadre de nos — .' . .
VailTeaux , fe rendit maître de la Méditerranée , tint renfermez les autres
dans leurs havres , & donna tant de réputation à nos affaires, que les fages
Vénitiens crurent qu'il étoit tems de féliciter le Roi Guillaume fur ion
Avènement à la Couronne par une pompeufe & folemnelle Ambaflade.
Si une de nos Efcadres a fait cela , que ne peuvent point faire de con-
cert les Forces navales dont on vient de parler? Si tous les Proteflans n'ont
pas fait conjointement des remontrances contre la barbare perfecution du
Palatinat, &c. & fi fur le refus d'y remédier ils ne font pas entrez dans
la ligue dont on a ci-devant parlé, qu'elle raifon peut-on en donner, fin on
le relâchement fcandaleux du zélé de la plupart des Royaumes & Etats
Proteflans? A la vérité, nous avons vu des Ecrits qui faifoient mention
d'un projet de cette nature ; mais, l'événement a montré qu'il n'y avoit
rien. Cela paroîtra d'autant plus furprenant & plus trille, fi l'on confide- .
re le juile fujet d'allarme qu'on pouvoit prendre du changement de l'Elec-
teur de Saxe, de la Guerre qui s'allumoit entre les Proteflans du Nord,
& des bruits qui fe répandoient du changement de Religion de quelques
autres grands Princes. 11 efl certain , qu'une pareille ligue auroit été plus
foûtenable que certains autres projets qu'on a vu éclore dans ces derniers
tems , & que la Providence divine a fait échouer: une ligue , pour la mu-
tuelle défenfe de nôtre Religion, auroit été beaucoup plus louable, que de
voir un Prince ou des Princes Proteflans courir après de vains titres qui
ne fignifient rien, ou faire d'injufles efforts pour étendre leurs Etats ou
leurs prérogatives. Tout ce que ces chofes peuvent produire, c'efl de
donner des ombrages à leurs voifins, d'apauvrir & mécontenter leurs fu-
jets, de les empêcher & de les mettre dans l'impuiflance d'entreprendre la
défenfe de la caufe commune. Comme on en efl beaucoup redevable à
la folle ambition des Princes , & aux artificieufes Intrigues du Clergé Ro-
main dans la plupart des Païs de l'Europe ; auffi n'a-t-on que trop de rai-
fon de l'imputer à la lâcheté & au manque de zèle des Ecclefiailiques Pro-
teltans , qui fuivent la Cour des Princes Protellans: ils font pour la plu-
part tellement enforcelez de la faveur de leur Cour, tellement infatuez de
leur manière de vivre commode &luxurieufe, & des efperances d'être
avancez , qu'ils n'ôfent dire leurs fautes aux Princes, ni leur réprefenter
en aucune manière l'injuftice de leur procédé. S'ils en avoient ufé autre-
ment , il y a fujet de croire, que l'Electeur de Saxe ne feroit pas deve-
nu fi aifément le Profelite de l'Eglife Romaine ; le Roi de Dannemarc
n'auroit pas non plus mis en danger la Paix du Nord, en s'alliant avec ce
Prince nouvellement Catholifé. Où trouver de l'heure qu'il ell dans l'Eu-
rope un Ecclefiaflique Courtifan de la fidélité & du zèle de l'Evêque Lati-
mer, qui cenfura le Roi Henri VIII. de fa vie licencieufe, en lui préfen-
Yyy 2 tant
FE.
540 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aïtaires tant une Bible avec ces paroles écrites fur la couverture : Dieu jugera les
gen. de Paillards & les Adultères} Le honteux relâchement de zèle dans nôtre
l'Euro- Clergé Proteflant, & le peu de foin qu'il prend d'élever les Princes Pro-
teflans dans la pieté, ce qui fe découvre par les mœurs de la plupart de
ces mêmes Princes, & de leurs principaux Courtifans, efl la chofe du
monde qui fait le plus craindre pour la Reformation.
C'efl une erreur de croire, qu'il ne fert pas de grand chofe que le Cler-
gé faffe une vigoureufe refiitance aux abus du gouvernement, ou à la mau-
vaife manœuvre de ceux qui gouvernent. L'oppofition, que firent nos E-
vêques à la dernière Déclaration du Roi Jaques , efl une récente & par-
lante démonftration du contraire. Nous pouvons ajouter à cela un ancien
exemple du Clergé Presbytérien de Genève, qui obligea cette Republi-
que à faire juflice d'un Meurtrier de qualité , en menaçant d'abandonner
la ville en cas de refus. La raifon efl naturelle; car les Tirans mêmes,
comme Saiïl, qui ne fe foucioit,ni de Dieu, ni de la Religion, croyent
qu'il eft néceflaire à leur réputation , que les Sacrificateurs & les Prophètes
les refpeclent devant le Peuple.
Cela fuffit pour montrer évidemment combien le Clergé Proteflant <Sc
la Nobleffe font refponfables par toute l'Europe de la décadence de la Re-
jformation; s'ils avoient affez de fidélité pour leurs Princes refpeélifs pour
leur faire connoître les fautes qu'ils font, ou pour refufer de les fervir dans
les chofes qui préjudicient à la Religion , ou à la Liberté du Peuple , on ne
verroit pas l'Irréligion & la Tirannie qu'on voit aujourd'hui dans la plupart
des Pais Proteflans. De-là vient principalement, qu'ils s'affoibliiTent de tous
cotez; & h Dieu n'y met la main , il faut qu'en peu de tems ils foient to-
talement engloutis. Nous avons peu de fujet d'efperer, que les Protef-
tans s'unifient , ou faffent une vigoureufe défenfe contre l'ennemi com-
mun , pendant qu'ils ont tant de Princes arbitraires qui par-tout où ils
peuvent oppriment leurs fujets autant que les Princes Papilles les leurs.
Tous ceux qui ont quelque connoifTance du Gouvernement des Couron-
nes du Nord, & de ia plupart des Princes d'Allemagne, ne s'aviferont
pas de contefler cette vérité. On fait affez de quelle manière les Rois de
Dannemarc & de Suéde font devenus abfolusj & à la vérité on ne fauroit
pardonner aux Princes d'Allemagne, qui de tems en tems ont fait de fi
généreux efforts contre la Tirannie de la Maifon d'Autriche , de pren-
dre comme ils ont fait une Autorité abfoluë fur leurs propres fujets.
Il s'enfuit donc, que le feul moyen vifible qui refle pour rétablir la ver-
tu & la liberté parmi les Proteflans , efl que l'Angleterre faffe la planche.
Nous avons reiiffi dans ce que nous avons fait pour recouvrer & conferver
nôtre Liberté. Nous avons fur le Trône le glorieux Héros dont Dieu s'efl
fervi pour cela. Il agira pour brifer les chaines de l'Europe, & nous met-
tre à couvert de l'efclavage pour l'avenir , à proportion que nôtre bon-
ne volonté , nos bourfes, & celles de nos Alliez, lui en faciliteront les
moyens , & non d'avantage.
Nous
.l'Euro*
FE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. L 541
Nous avons dequoi prouver démonflrativement, que les Papiftes ont Affaire
fait des progrez pour la propagation de l'Idolâtrie Romaine, depuis le 0,ECN*°*
Traité de Ryfvsfick. Les Plaintes des Proteftans d'Allemagne, dont les
Gazettes étrangères font remplies , ne nous permettent pas de douter de
cette vérité. Nous n'avons pas fujet de croire qu'ils ayent été auffi lents
à fe liguer pour détruire ce qu'ils apellent l'Hérefie du Nord, que l'ont été
les Proteftans à faire la même chofe pour fa défenfe. Tant s'en faut que
la chofe foit incertaine, fi nous en croyons les Avis qui nous viennent de
Hollande de très-bonne main, que le Miniftre de l'Empereur, pour faire
connoître la fincerité des intentions de fon Maître à fe joindre avec les
Hollandois & nous pour la Défenfe de fes Droits , & de la commune Liber-
té de l'Europe, a communiqué le Plan d'une Ligue faite , ou projettée , par les
Princes Catholiques , pour fub juger la Hollande, & rétablir le Papifme en An-
gleterre , en remettant le Roi Jaques fur le Trône.
Cela n'eft nullement improbable , mais que cela foit vrai ou faux pour
le préfent , nous n'avons aucun fujet de douter, que le Conclave de Ro-
me ne pouffe ce Projet avec toute la rapidité poffible. Les Catholiques-
Romains fentent fort bien, qu'ils ont perdu une très-belle occafion d'en
venir à bout, dans le tems que Louis XIV. étoit au faîte de fa grandeur,
& Jaques II. fur le Trône d'Angleterre, foûtenu d'une bonne Armée. Il
y a donc très-peu d'apparence qu'ils vueillent encore temporifer -, & , puis-
que la Reunion de la France & de l'Efpagne , la poffibilité de raccommo-
der les Maifons de Bourbon & d'Autriche par des mariages réciproques, &
la conceffion de quelques Provinces, à moins que nous & les Hollandois
ne prenions au plutôt le parti de l'Empereur, leur préfentent une fi belle
occafion, il ne faut pas douter qu'ils n'en profitent.
Le meilleur moyen du Monde pour le prévenir, & par confequent les
fuites d'une Ligue Catholique, eft d'entrer en Alliance avec l'Empereur
à des conditions honorables. Cela fe fera plus aifément qu'une Ligue Pro-
teftante,& afïïirera mieux, s'il plait à Dieu, l'intérêt des Proteftans. L'Em-
pereur nous le demande, & par-là nous empêcherons un des principaux
Chefs de la Catholicité de fe déclarer contre nous. Si nous refufons fes of-
fres , ce fera un aiguillon à fa vengeance ajouté au nouveau fujet que lui
a déjà donné le Traité de Partage, qui l'obligera à faire fon parti le meil-
leur qu'il pourra, & confequemment à fe joindre aux autres Puiflances Ca-
tholiques de l'Europe contre la Réformation.
Nous fommes ce femble d'autant plus obligez à faire cette Alliance, &
à prendre des mefures de cette nature , que Leurs Majeftés dans leur Dé-
claration de Guerre ont allégué pour première Raifon : ghie le Roi de Franr
ce avôit envahi les Etats de l'Empereur, & de l'Empire , alors nôtre Allié. Si
c'étoit dans ce tems-là un jufte fujet de Guerre, il eft certain que le Roi
de France ayant dépouillé la Maifon Impériale de toute la Succeffion d'Ek
pagne, la caufe n'en eft maintenant que plus légitime. Cela nous regarde
immédiatement , parce qu'il aura une influence direcle & prompte fur nô-
Yyy 3 tt*
l'Euro
TE.
5-42 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AïfA-iras tre Commerce & fur nôtre fureté, au lieu que rinvafion de la France fur
le haut Rhin ne nous touchoit que par un intérêt éloigné.
Si les Traités conclus avec nos Alliez étoient alors une bonne Raifon
pour juflifier nôtre prife d'armes, comme la Déclaration l'allègue avec jus-
tice, la même Raifon eil aujourd'hui d'une toute autre force. Lafraudu-
leufe ufurpation de la Couronne d'Efpagne , elt une violation de tant de
Traités, que nous perdrons pour jamais la gloire d'Arbitres de l'Europe,
ou deGarans des Traités, (j nous foufFrons tranquillement une fi infigne
violation de la Foi Publique qui retombe fur toute l'Europe. Nous de-
vons mettre tout en œuvre pour avoir réparation d'honneur à cet égard,
ou nous refoudre à perdre pour toujours nôtre réputation, & à nous ren-
dre l'objet des reproches & du mépris de toute la Terre.
y II y a apparence que la plupart des gens fentent fuffifamment le péril qui
nous menace j mais la grande objection fera, que la pauvreté de la nation,
& les grandes dettes où nous nous trouvons déjà engagez, ne nous per-
mettent pas d'en faire de nouvelles.
On peut répondre à cela, I. Que fi nous avions à faire à un ennemi qui
n'eut pas les mêmes defavantages , ou de beaucoup plus grands , l'objec-
tion feroit redoutable & fans reponfe ;mais , comme il eit. certain qu'à tous
ces égards nous fommes en beaucoup meilleur état que la France ou l'Ef-
pagne, l'objection perd beaucoup de fa force.
II. Il n'y a point de véritable Anglois,ou de bon Proteflant, qui n'aime
mieux donner dix Chellings d'une livre ft. pour faire la Guerre, que de
laifler prendre le tout aux François. Il n'y a point d'homme d'efprit fi
borné , qu'il ne voïe que nous courons rifque d'être ainfi traitez, à moins
que nous ne nous mettions en état de l'empêcher.
III. On a déjà dit que nôtre Commerce nous vaut deux millions par
an; mais, rabatons-en. N'eft-il pas vrai que la moitié de cette fomme
bien employée peut beaucoup contribuer à finir la Guerre promptement&
heureufement? Il- nous en faut moins à beaucoup-près pour équiper nôtre
Flotte; & cela étant une fois fait, une bonne Efcadre envoyée aux In-
des Occidentales, & commandée par de véritables Anglois ,pourroit fui-
vant toutes les apparences nous dédommager en peu de tems. Le moyen
le plus prompt & le plus efficace de réduire nos ennemis efl de fermer la
Source de leur Argent, & de traverfer leur Commerce. Les Hollandois,
& nous, fommes mieux en état de le faire, qu'ils ne le font de s'y oppofer;
& cela étant une fois fait, la France feroit bien-tôt obligée de fe renfer-
mer dans fes anciennes bornes, & bien aife d'en être quitte à fi bon mar-
ché. Il ne me femble pas difficile à démontrer, qu'une Guerre par Mer
efl le moyen le plus appparent pour dompter, ce Leviathanj or, fi cela eft,
c'eit une forte de Guerre que nous pouvons parfaitement bien-faire avec
moins de dépenfe & de danger. Nos Forces Navales confirment nos Mar-
chandifes, & l'argent qu'on levé pour les entretenir circule parmi nous,
au lieu qu'il fort du* Royaume lorfque nous avons une Armée dans les
Pais Etrangers. Une
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 5-43
Un autre avantage que nous avons dans une Guerre de Mer, c'eft que AmxRss
nous combatons fous la Conduite de Commandans de nôtre Nation, dont G*N'- DE
le génie a toujours été de chercher l'ennemi , de le combatre , & d'en-
venir à une prompte décifion : il n'en eft pas de même des Généraux é-
trangers, & de ceux qu'il nous faudroit avoir fi nous nous engagions au
delà de la Mer dans une Guerre de Terre; car, ils aiment à tirer les cho-
fes en longueur, pour avancer leur fortune. Il eft néceffaire de prendre
garde à cela, & de faire en forte , que, ni le Soldat étranger, ni le Politi-
que domeliique, n'ayent occafion de multiplier les affaires fans néceffité.
On dit qu'un certain Seigneur fit cela en Irlande dans le tems de la Révo-
lution. Sans cela, il y a toute forte d'apparence que ce Royaume nous au-
roit coûté le quart moins de fang & de dépenfe qu'il ne fit depuis. 11 eft
à préfent en fon lieu , & fa gloire eft éteinte avec fa pofterité. Puiffenc
les pernicieux Confeillers de ce Caractère avoir tous la même defti-
née.
Quand il s'agit de la Liberté & de l'Angleterre, il n'y a point de meil-
leur Confeil que le grand Confeil de la Nation , & les Anglois ne fau-
roient employer à leur défenfe de meilleurs bras que les leurs. Mais, puis
que la fituation préfente des Affaires rend néceffaires les Alliances étran-
gères^ que nous nous fommes ci-devant mal-trouvez de pareils Alliez, la
prudence unie de la Nation eft la plus capable de remédier à l'avenir à
cet inconvénient ; la plus capable de juger de la proportion du fardeau
que nous devons porter, & des facultez du Peuple qu'elle réprefente 5
& par conféquent la décifion de ces chofes eft de fa compétence.
On ne peut pas fuppofër avec raifon , que quand les Anglois fendront
le Danger où eft leur Patrie , ils épargnent leurs vies & leurs biens pour
la défendre & par Mer & par Terre. On efpére donc que les Projets de
ceux qui traverfent les Alliances Etrangères, & qui reprefentent l'impoffi-
bilité de nous engager dans une nouvelle Guerre, feront examinez avec
foin avant que d'être reçus. Nous avons dans nôtre fein une Faction de
gens qui ont toujours été les Ennemis des Intérêts de leur Patrie , &
pourvu qu'ils puffent fe procurer des poftes lucratifs , ou des penfions, & la
liberté de ruiner tous ceux qui ne font pas marquez au même coin qu'eux,
ils étoient bien aifes de nous rendre efclaves de nos Princes qui étoient
les Penfionnaires de la France. Il faut fuir avec foin les confeils de pa-
reilles gens Soyons affez prudens pour nous fervir de leurs
fecours & de leurs fuffrages pour tout ce qui peut améliorer, ou affeurer
de plus en plus notre Gouvernement, de quelque principe que cela puiffe
venir, ou à quelque fin qu'on le deftine ; mais prenons garde, qu'ils ne
nous engagent en rien qui puiffe nous jetter dans des animofitez à contre-
tems, ou ne retardent les préparatifs néceffaires à notre défenfe, & à la
défenfe de nos Alliez. Il eft certain qu'ils mettront en œuvre pour cela
toute l'adreffe & toutes les voies indirectes dont ils font capables , &
qu'ils couvriront leurs noirs deffeins des plus beaux prétextes dont ils
pourront s'avifer ; mais on efpére qu'ils font trop bien connus pour fe
fier
1,'EUKO
p
S44 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
araires fier en eux. Il fernble que la préfente fituation des Affaires nous apprend
gen. de à avoir plus de foin de nous tirer des facheufes circonitances où nous
nous trouvons, qu'à rechercher comment nous y fommes tombez; quoi
qu'en même tems il foit à propos , pourvu que l'un ne foit pas un obflacle
à l'autre, de faire une enquête de cette nature, afin de favoir mieux évi-
ter de pareils dangers dans la fuite: & s'il fe trouve quelqu'un, qu'on puif.
Je accufer avec juïHce d'avoir contribué au danger où nous nous voyons ,
par leur mauvaife conduite, ou par leurs pernicieux confeils, la raifon
veut qu'on les mette dans l'impuiifance de faire la même chofe une au-
tre fois.
On peut faire une autre Objection contre la Guerre pour la Succefîïon
d'Efpagne, qui elt de dire qu'elle ruinera plufieurs de nos Marchands qui
ont de grands Effets en Efpagne, & que ce fera une Perte commune à
toute la Nation. On peut répondre à cela, qu'on ne peut pas déclarer ou
commencer fi fubitement la Guerre, que nos Marchands n'ayent le tems
de retirer leurs Effets. D'ailleurs, par le douzième Article du Traité de
Ryfwick, on a fix mois de part & d'autre en cas de Guerre pour retirer
les Marchandifes & Vaiffeaux fans craindre la confifcation. Si les Fran-
çois & les Efpagnols violent cette claufe , il faut ufer de reprefàilles , &
traiter leurs Marchands de la même manière. Les Hollandois y ont le
même intérêt que nous , & s'ils le font nous pouvons le faire à coup feur.
On ne fauroit entreprendre de Guerre, qu'il n'en coûte quelque chofe aux
particuliers & à la Communauté du Royaume en gênerai. Mais , il faut
à tous égards préférer le Bien public au particulier. Il faut que la pruden-
ce de la Nation s'applique, 11 befoin eft, à compenfer les pertes des Mar-
chands s'il leur arrive d'en faire, en leur faifant part de ce qu'on pourra
prendre fur les Ennemis dans les Indes Occidentales, ou en Mer, ou de
quelqu'autre manière qu'on jugera à propos. Cependant, nous n'avons
aucun fujet de douter , que nos généreux Négocians ne fouffrent volon-
tiers quelque perte , pourvu qu'une vigoureufe Guerre puifle à l'avenir
garantir nôtre Commerce d'un pareil Danger, & le mettre fur un meil-
leur pied.
Si l'on objecte contre ce qui a déjà été dit des Indes Occidentales Ef.
pagnoles, que cette manœuvre ne fera pas du goût de l'Empereur, que
nous devons ménager en cas de Guerre. On peut répondre , qu'il n'efl
pas poflible que la Maifon d'Autriche connoiffe fi mal fes véritables Inté-
rêts, que de défapprouver cela. C'eft le moyen le plus prompt de rédui-
re nos Ennemis, & d'épargner l'argent & le fang qu'en coûteroit fans ce-
la une longue & ennuyeufe Guerre, & peut-être inutilement.
D'ailleurs , puifque l'Empereur efi le plus obligé par honneur & par in-
térêt d'arracher la Couronne d'Efpagne à la Maiibn de Bourbon, la Rai-
fon veut que nous demandions plus de liberté de negotier dans ces par-
ties du Monde, que les Efpagnols ne nous en ont voulu donner jufqu'ici.
Comme nous ne demanderons rien en cela qu'on ne doive nous accorder
avec jultice, peut-être trouverons -nous par-là moyen d'ajufier les diffé-
rent
l'Euro-
pi-..
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. f45
rens qu'on a porté en EcofTe à un point qui femble faire craindre. Corn- Affaire*
me il n'eft pa:> raifonnable que Ton Commerce faffe des progrez aux dé- GfN- DE
pens du nôtre, il efl de l'équité qu'on l'entende fur ce qu elle a à propo-
îer pour lever cette Objection. 11 efl certain qu'il elt plus de nôtre In-
térêt, qu'une Nation qui a prêté le même Serment de fidélité que nous,
& qui efl prefque dans une néceffité indifpenfable de faire à tous égards
fon Intérêt du nôtre, ait quelque part au Commerce, que de tout nfquer
par nos divifions. Il faut prendre garde , qu'aucun Politique intriguant ne
FaiTe clocher ce Royaume, comme on dit que cela arriva autrefois de
de l'Irlande, il vaut mieux que nos voifins gardent tous leurs membres
fains, que fi nous avions la peine de les guérir après qu'on les auroit rom-
pus. Ce n'eft pas le tems de fe divifer au dedans, quand nous fommes
en danger d'être attaquez par les Etrangers. Il e(t plus de nôtre Intérêt
d'encourager nos voifins à entretenir avec nous une bonne correfpondan-
ce par un traitement honnête , que de les irriter & les porter à des refc
fentimens qui pourroient avec le tems procurer des conflfcations à des
gens qui en ont befoin.
Depuis ces Remarques écrites, nous avons eu avis de Hollande, que
les Espagnols font déjà fi pleins d'efperance à Madrid de rentrer en po£
feflion des Provinces - Unies , & d'y ruiner la Religion Proteftante, aufli
bien qu'en Angleterre & en Irlande , qu'ils ne peuvent s'empêcher de le
faire connoitre publiquement. 11 n'en faut pas davantage pour confirmer
ce que nous avons déjà dit du Projet d'une Ligue pour extirper l'Héréfie
du Nord. Il n'y a pas de doute que Rome ne favorife ce defiein ; &
plutôt qu'Elle ne le fit pas, il y a dans le Monde un Potentat, qui pro-
mettra, moyennant le concours de Rome, de fubjuguer toute l'Europe,
de la divifer en deux Monarchies, de fe mettre à la tête de l'une, & le
Pape à la tête de l'autre , comme il étoit convenu de faire entre l'Em-
pereur Charles V. & un des Papes de fon tems , à ce que dit Gregorio
Leti ; mais , Dieu fit avorter ce Deifein par la mort du Pontife.
Reflexions fur divers Écrits concernans la Succesfîon à la Mo*
narchie d'E/pagne. A Ville ■- Franche , chez Jean le Droit y
Rue de la Liberté, à VEnJeigne de la Vérité. 1701,
PREFACE.
LEs Motifs £5? les Raiforts , dont les Edits , Déclarations , Manifefles, MémoU
res, £s? autres Ecrits publics des Souverains les plus abfolus font compofez^
font ajfez connoitre que les Peuples ont la Liberté & le Droit d'examiner la Con-
duite qui eft tenue dam V Admimftration des Etats , £5? de juger fi elle ejî jujîe ,
tu fi elle ne Vefi pas.
Tme XL Zzz Les
i/Euro
PE.
Stf MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Les Peuples doivent cependant remarquer , que , s'ils nont point une connoif-
gen. de fonce de tous les divers intérêts de ï Etat , il ne leur efl pas pojjible de por-
ter un jugement éclairé fur les Réfolutions £5? les Ordonnances d un Souve-
rain. Ainfi , les Peuples font obligez de s'infiruire fufifament des intérêts
publics & des motifs de la conduite des Souverains , avant que de prendre la
liberté d'examiner ce qu'ils propofent , & d'en dire ou écrire leur fenti-
mcnt.
De plus , tout particulier , quelque rang qu'il tienne , ne doit jamais dire
ni écrire fon fentiment , qu'avec beaucoup de /implicite , £s? une extrême circon-
fpeclion. Il y a de la témérité à prétendre qu'un jugement particulier doive paf-
fer pour le jugement du Public ; & ce fi s 'oublier foy- même , & manquer à ce qui
efl du au Souverain , que d'employer des manières , ou injurieufes , ou mal-
féantes.
Il ne fe peut rien lire de plus fage , ni de mieux "ménagé , que les Ecrits publiez,
par ordre des Souverains qui ont l'équité & le bonheur des Peuples pour principes
de leur Gouvernement. Que fi les Souverains ordonnent ce qu'ils nont pas Droit
d'ordonner , les Peuples [ont indifpenfablement obligez de maintenir & de repre-
fenter leur Droit , avec tout le rejpecl pojjible. C'efi pourquoi tous Difcours &
tous Ecrits compofez au fujet des Edits, Déclarations, Manifeftes, & Mémoi-
res des Souverains , doivent toujours être également jufies , judicieux , &? refpec-
tueux.
La Succeffion à la Monarchie d'Efpagne a déjà produit produit plufieurs Mé-
moires , (sf en fera naitre plufieurs autres, en intention de faire valoir les Préten-
tions de divers Souverains. Par conféquent, les Peuples ont la Liberté de méditer
& de s'expliquer fur la folidité des Mémoires , & fur la jufiiee des Préten-
tions. ■
Le Roi de France prétend que cette Succeffion apartient au Duc d'Anjou fon
Petit-Fils , en vertu du Tefiament de feu Charles II. Roy d'Efpagne , £5?
de l'Acceptation que Sa Majefté Três-Chrêtienne a faite de ce Tefia-
ment.
Sa Majefié Impériale a fait protefier contre la Validité de ce ïeftament ;
£5? le Roy d'Angleterre , & les Etats-Généraux des Provinces-Unies , ont fait
demander au Roy de France , fi Sa Majefié n'avoit pas intention d'exécuter
le Traité de Partage arrêté entre Sa Majefié Très - Chrétienne , Sa Majefié
Britannique , £5? Leurs Flautes PuifJ'ances , concernant les Pais dont la Mo-
narchie d'Efpagne efl compofée. Par ce Traité , Louis XI F. Roy de France
a déclaré qu'il fe tenoit fatisfait d'une Partie de ces Pays , qu'il renonçoit
aux autres, & les lai //bit à un Prince de la Mai fon d'Autriche, ou à quel-
qu autre qui ne foit point de la Maifon de France.
Il par oit une Lettre du Roy Très-Chrétien aux Etats -Généraux des Pro-
vinces-Unies, par laquelle Sa Majefié leur donne Avis de l'Avènement dû-
Duc d'Anjou fon Petit-Iils à la Couronne d'Efpagne , & en même tems on.
voit un Mémoire , ou l'on entreprend de prouver que le Traité de Partage
efi devenu nul par la Difpofition Teflament aire en faveur du Duc d'Anjou».
Le Tefiamtnt efl aufli rendu public avec la Lettre d'Acceptation de Sa Ma-
i4ê
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. f47
jefié Très - Chrétienne , ci? un Mémoire préfcnté par V Ambaffadeur d'Efpa- Affaires
gne aux Etats-Généraux , pour leur notifier la Mort de Charles I/.,fon Te- GEN- nE
fiament en faveur du Duc d'Anjou, £s? l'Acceptation qui en a été faite par L'f-URO"
Sa Majefié Très-Chrêtienne. Pour le Traité de Partage, il eji depuis long- ..
tems entre les mains du Public.
Ce font ces Ecrits , ci? quelques autres , fur lefquels je me propofe de former
des Réflexions , nullement à deffein de décider fur aucun Article , mais uni»
quement en vue d'engager a étudier & à prévoir les Conféquences de cette
matière. Tous les Etats Chrétiens y font intereffez , & particulièrement ceux
qui font voifins des Pays dépendans de la Monarchie d'Efpagne.
Il arrive des tems ci? des conjonctures , ou il ne fuffit pas que le Souve-
rain veille aux Intérêts de l'Etat ; chaque particulier eft obligé de laijfcr le
foin de [es propres Affaires , ou , pour le plus , de ne les conduire que de la
main gauche (3 d'une ftmple vue , pour appliquer fa principale attention , &?
tmploier les forces de (on bras droit , félon les be foins publics.
La Traité de Partage , arrêté dès le mois de Mars 1700, pouvant faire naî-
tre des difficultez, entre le Roy de la Grande-Bretagne & les Etats Généraux des
P. U. perfuadez de la Validité du Traité, 6? le Roy de France prétendant fa
Nullité, il e(l à propos de commencer par des Réflexions fur les Motifs , les Rai-
fons, la Teneur, la Force , ci? les Engagemens de ce Traité.
Réflexions fur le Traité entre le Roy Très- Chrétien , Je Roy de
la Grande-Bretagne , £s? les Seigneurs Etats Généraux des
Provinces -Unies des P aïs-Bas.
Le Difcours qui précède les Articles du Traité contient divers Motifs. Re'Ae-
En voici les termes. uTrlhé
Soit notoire à tous ceux qui ces préfentes verront , que le Sêréniffime & très- <je Parta»
Puiffant Prince Louis XIV. par la Grâce de Dieu Roi T. C. de France & ge de
de Navarre, &c. ci? le Sereniffime ci? tres-Puiffam Prince Guillaume lll.auffi Mars
par la Grâce de Dieu Roy delà Grande-Bretagne , £s? les Seigneurs Etats -Gé- I'00'
néraux des Provinces-Unies des P. B. n'ayant rien de plus à cœur que de for-
tifier par de nouvelles liaifons la bonne intelligence rétablie entre Sa Majefié T.
C. Sa Majefié de la G. B. ci? lesdits Seigneurs Etats-Généraux par le dernier
Traité conclu à Ryswick, & de prévenir , par mefures prifes à temps, les événe-
mens qui pouroient exciter de nouvelles Guerres dans V Europe , ont donné pour
cet effet leurs Plein-Pouvoirs pour couvenir d'un nouveau Traité , favoir &c*
La fuite eft une Lifte des noms & qualitez des Plénipotentiaires nom-
mez par chaque Puiffance.
Fortifier par de nouvelles liaifons la bonne intelligence rétablie entre Sa Ma-
jefié T. C. Sa Majefié de la G. B. ci? les Seigneurs Etats- Généraux par le der-
nier Traité conclu à Ryfwick, ci? prévenir , par mefures prifes à temps , les évé-
Zzz 2 wmens
548 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Attaibes nemens qui four oient exciter de nouvelles Guerres dans l'Europe, font deux Mo-
gen. de ufs du nouveau Traité.
i.'Euro- j^a Qrancjeur) |es RichefTes, & la Puiflance ne font point le bonheur
' d'un Etat; c'eit l'Union emre les Sujets d'une même Nation & la Paix
avec les États voifins. La différence de Génie des Peuples , des Loix du
Gouvernement, & des Intérêts des Souverains font les caufes ordinaires
delà Guerre; Et les maux & les malheurs, qui l'accompagnent, obli-
gent enfin à rechercher la Paix & à la rétablir. La véritable Paix confilte
dans une mutuelle correfpondance entre diverfes Nations pour fe procu-
rer réciproquement tous les avantages poiîibles, & dans une parfaite in-
telligence, pour prévenir tous fujèis de difeorde, & pour accommoder tous
differens.
On lupofe que, par le Traité conclu à Ryswick, la bonne intelligence a
été rétablie entre Sa Majefté Tres-Chrétienne , Sa Majelté de la Grande-
Bretagne, & les Seigneurs Etats Généraux. Pour connoitre en quoy peut
confiiter ce réfabliiK-ment de bonne intelligence , il convient de remarquer
en quoy elle avoit été détruite.
La Trêve conclue à Nimegue ayant paru à Louis XIV. Roy de Fran-
ce une Conjoncture propre à l'exécution du grand DelTein qu'il avoit
d'abolir la Religion Réformée dans fon Royaume, l'Edit de Nantes fut
révoqué, les Temples firent démolis, les Miniftres chafTez, tout Exerci-
ce de Religion interdit, & la Persécution ouverte par-tout contre les
Réformez.
Jacques IL Ducd'Yorck, étant en ces temps-là monté fur îe Trône
d'Angleterre , entreprit de rétablir la Religion Romaine , & d'introduire le
Pouvoir Arbitraire. Le Prince d'Orange , à la follicitation des Peuples
opprimez, paffa en Angleterre affilié des Troupes que les Etats Géné-
raux lui avoient accordées. Jacques IL, à l'arrivée du Prince, s'étant
retiré en France, le Roy T. C. déclara à l'Angleterre & à la Hollande
la Guerre qu'il avoit déjà commencée contre l'Empereur. Il y avoit une
Ligue entre l'Empire, l'Efpagne , l'Angleterre, les Provinces-Unies, &
plulieurs autres Princes, pour s'entraider mutuellement contre les Entre-
prifes de la France.
Ainfi,la bonne intelligence entre Louis XIV. Roy de France, Guil-
laume III. couronné Roy de la G.B. , & les Etats Généraux, avoit été
détruite en ce que Sa Majefté T. C. ayant déclaré la Guerre à l'Angle-
terre, pour rétablir le Roy Jacques, aux Etats Généraux, pour avoir
affilié le Prince d'Orange dans fon paffage en Angleterre, aux Princes
Confédérez pour ruiner & envahir ce qu'il pouroit de leurs Etats, Sa
Majelté Britannique étoit obligée de maintenir par la Guerre la Reli-
gion & les Libertez de la Nation ; les Etats Généraux étoient dans la
néceflité de fe défendre ; & l'Angleterre & la Hollande étoient conjoinc-
tement engagées à s'oppofer aux Ravages & aux Invafions de la France
fur les Pais des Princes confédérez.
Sa
FE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. U9
Sa Majefté T. C, après avoir éprouvé que route la fureur de Tes Ar- Affaire
mes n'étoit pas capable de venir à bouc de fes deffeins contre les Alliez, èEN* Dr
eut recours aux artifices pour les divifer. Les artifices ayant eu peu de Lt^RO~
fuccès, on fit femer des Proportions de Paix Générale. Guillaume III.
& les Etats Généraux, qui a voient foutenu & repouiTé avec vigeur la
furie des François, & ne s'étoient point taillez ébranler par le fuccés des
artifices, refuférent conitament d'entendre à des Propofitions de Paix pré-
judiciables aux juftes Intérêts des Alliez. Mais, enfin, les Parties lafîïes
de la Guerre, & la néceffité des Affaires le requérant, il fut convenu de
traiter de la Paix. Le Château de Ryswick , apartenant à Guillamne HT,
& fitué proche la Haye, féjour des Etats Généraux, fut choifi pour le lieu
du Traité. Ce choix étoit un aveu de la part de la France, que Guillau-
me III. & les Etats Généraux n'avoient rien plus à cœur que de rétablir
l'équité & l'union entre tous les Princes.
En Conféquence du Traité conclu à Ryswick, la France a reconnu
Guillaume III. pour légitime Roy de la Grande Bretagne , la Guerre a
cefle, & la Paix a dû ctre rétablie entre les François, les Anglois , & les
Hollandois.
Cependant, on fait les Difficultez que la France a fait naître au fujet
du rétabliffement de Commerce: & la manière, dont elle en a ufé à cet é-
gard envers l'Angleterre & la Hollande, eit- elle la manière d'une bonne
intelligence ?
De plus , il a été remarqué que Louis XIV. avoit déclaré la Guerre à
l'Angleterre & à la Hollande, pour foutenir les Prétentions du Roy Jac-
ques. Il n'y a point eu de Règlement aifez précis à l'égard de ces Préten-
tions pour empêcher qu'elles ne fervent de prétexte à de nouvelles Guer-
res , dès qu'il fe prefentera quelque occalion propre à les faire va-
loir.
Enfin, la Perfécution redoublée en France, pour achever, s'il eftpoffible,
la Ruine de la Religion Réformée ,1e grand nombre de Familles forties du
Royaume non-obftant les défenfes , reçues en Angleterre & en Hollande
contre l'intention de fa Majelté T. C, & toutes les follicitations de la part
du Roy de la G. B. & des Etats Généraux inutilement emploiées
auprès du Roy de France en faveur des Réformez , font voir que la bonne
intelligence en fait de Religion n'eit point encore rétablie entre ces trois
PuifTances.
Il efl facile de juger par les maximes , par la conduite, & par les dif-
pofitions de Sa Majefté Britannique & des Etats Généraux, qu'ils auroienc
fort à cœur d'entretenir une parfaite correfpondance pour tout ce qui con-
cerne le Commerce, la Politique, & la Religion avec Sa Majeilé T. C.
Mais, les maximes, la conduite, & les difpoûtions de ce Monarque en
paroiffent beaucoup éloignées.
Ainfif, toute cette idée de ri avoir rien plus à cœur que de fortifier par de nou-
velles liaifom la bonne intelligence rétablie entre (Se. & de prévenir , par mefures
prifes à temps , les événemens qui pour oient exciter dé nouvelles Guerres en Eu-
Zzz 3 ropey
PE.
450 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires ropgt doit s'entendre feulement d'une Union pour prévenir des Guerres pa-
cf.n. de reiuesà celles qui font arrivées à la fin du dix-feptiéme iiecle,dans lesquel-
les prefque toute l'Europe s'eit trouvée engagée par divers motifs.
On a coutume de louer les hommes qui le contentent d'un état mé-
diocre, & on admire ceux qui fe comportent avec modération dans une
grande fortune; parce qu'en effet rien n'eft plus commun que de voir les
perfonnes afpirer à des conditions plus relevées que celles où elles fe trou-
vent: & il eft vrai de dire, que la Puiiïànce, la Grandeur, & les Richef-
fes , font pour l'ordinaire un poifon qui excite des defirs exceflifs & in-
iatiables dans le cœur de l'homme.
Les Prétentions réciproques de la Maifon de France & de la Maifon
d'Autriche, ou plutôt l'Ambition qui leur eft naturelle pour s'élever par
la ruine l'une de l'autre, a été une fource continuelle de Guerres; & apa-
rament cette fource ne tarira point, que l'une des deux Maifons ne foie
entièrement détruite. Chaque Maifon étant perfuadée par expérience,
qu'il ne lui eft pas poflible de parvenir à fes fins, tant que les autres Etats
feront liguez avec fa Rivale , ne manque point de profiter des occafions,
ou pour s'en emparer, ou pour les ruiner, ou pour les attacher à fes inté-
rêts. Les autres Puiffances , de leur côté, ne pouvant ignorer que la ruine
de l'une des deux Maifons doit attirer la leur , font toujours prêtes à fe
joindre à celle qui femble la plus foible , afin de s'oppofer aux progrès de
celle qui eft la plus forte. Ce font-la les Motifs de la plupart des Ligues
qui ont été formées dans ces derniers fiecles.
L'Examen des Articles du Traité fera juger , fi l'intérêt particulier de la
Maifon de France n'eft pas le Motif qui a porté Louis XIV. , & fi l'intérêt
commun de toutes les autres Puiffances n'eft pas le Motif qui a engagé
Guillaume III. & les Etats Généraux, de fortifier par cette nouvelle liaifon
la bonne intelligence rétablie entre ces trois Souverains, & prévenir par
mefures prifes à temps les événemens qui pourroient exciter de nou-
velles Guerres en Europe.
On n'a point fçu dans le Public laquelle des trois Puiffances avoit fait
les premiers Projets de ce Traité. Que ce foient les Seigneurs Etats
Généraux des P. U., on n'en fera pas furpris. La Paix eft néceffaire
pour la confervation & l'entretien de leur République. L'Efprit de
paix en eft une Loi , ou un Principe fondamental ; & toutes les Guer-
res, que les Etats Généraux ont foutenuës, ont été néceffaires, ou pour
fe défendre, ou pour empêcher la ruine de leurs Alliez.
Que le Plan du Traité ait été formé & propofé par Guillaume III. Roy
de la Grande-Bretagne, tout le monde jugera bien que le Projet de pré-
venir de nouvelles Guerres dans l'Europe devoit naturellement naitre
dans la tête d'un Prince, qui dès fa plus tendre jeuneffe s'eft apliqué tout
entier aux foins & aux travaux néceffaires pour arrêter la Défolation de fa
Patrie & pour la rétablir; qui n'a point ceffé d'infpirer à toutes les Puiffan-
ces l'efprit de bonne intelligence entre elles pour la confervation de leurs
Etats particuliers ; qui a toujours également travaillé pour maintenir la Li-
ber-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 5-51
berté des Sujets & les Droits légitimes des Souverains; qui n'a jamais été Affaires
prévenu de cette Grandeur élevée par les miféres réelles d'une Nation & G*N- DK
fur la ruine des autres Peuples; & qui jamais n'a été fufceptible de la vai- tEuRO-
ne gloire de prétendre tracer à une Pofterité le chemin à la Monarchie ! .
Univerfelle. Peut>il y avoir de Grandeur & de Gloire plus excellentes
pour les fiecles préfents & à venir, que de mettre fon bonheur à rendre
heureux les Peuples de fon tems ?
Que fi Louis XIV. Roy de France a été le premier Auteur du Traité,
ne doit-on pas fe trouver dans un étonnement de joye,de ce que ce puif-
fant Monarque, aimé & craint de Tes Sujets, redouté des autres Peuples,
accoutumé à faire fentir le poids de Tes armes & la force de fes tréfors,
propofe & promet de prévenir de nouvelles Guerres en Europe?
Enfin, quelle que ce loit des trois PuifTances , qui ait fait les ouvertures
du Traité j puifque toutes l'ont arrêté de concert, & qu'elles ont le pou-
voir de l'exécuter, ne devoit-ce pas être une grande efpérance pour l'Eu-
rope? Auroit-elle pu defirer rien de plus avantageux? Mais, auroit-elle
pu s'imaginer de le voir conclu , & a-t-elle dû jamais fe promettre
qu'il pourroit être accompli?
ARTICLE. I.
La Paix rétablie par le Traité de Ryswick entre Sa Majefté Très- Chrétien-
ne, Sa Majefté Britannique , £5? les Seigneurs Etats-Généraux des Provinces-
Unies des Pais- Bas, leurs Héritiers & Succeffeurs , leurs Royaumes, Etats, &
Sujets , fera ferme & confiante ; &? Leurs Majefiez , & les dits Seigneurs Mr
tats-Généraux des Province s -Unie s des Pais-Bas, feront réciproquement tout ce
qui pourra contribuer à C avantage 13 à futilité de l'un & de f autre.
En premier lieu , tous les Réformez , réfugiez dans les Etats de la
Grande-Bretagne & dans les Provinces-Unies, de qui feront-ils réputez
Sujets? Si le Roy de France prétend les redemander , lui feront-ils ren-
voyez? Si on les retient, refteront-ils privez de la liberté d'aller & venir
en France pour leur commerce? Un point de cette conféquence n'étant
pas encore réglé, comment la Paix conclue à Ryswick' demeurera-t-elle
ferme &? confiante? Ce nouvel engagement entre Sa. Majefté T. C, Sa Ma-
jefté Britannique, & les Etats-Généraux, pour faire réciproquement tout ce qui
poura contribuer à l'avantage &? à futilité. de ïun & de l'autre , peut-il faire
efpérer que ce point fera bien-tôt réglé ?
En fécond lieu , fi l'occafion fe prefente en un temps ou en un autre de
rétablir le Roy Jacques ou fes Héritiers, que deviendra cette idée de Paix
ferme & confiante ?
Sa Majefté Très- Chrétienne, fes, Héritiers & SuccefTeurs, leurs Royau-
mes, Etats, & Sujets n'ont rien a apréhender des maximes de la Politique,
m
L'Eukô
Ffi.
fSi MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ', ET
Araires ni des principes de la Religion de Sa Majedé B. & des Seigneurs Etats-*
c.EN. ot Généraux. Mais, n'ont-ils rien à craindre des maximes Politiques & des
principes de Religion des François Catholiques-Romains? Y-a-t-il eu des
Sujets de Sa Majeflé Britannique, ou des Etats-Généraux, accufez en
France de Crime contre l'Etat? Et s'eft-il trouvé des Réformez à qui l'on
ait imputé avec juftice d'avoir formé des Entreprifes contre le Gouverne-
ment? Combien au contraire de François Catholiques-Rom. paflez en An-
gleterre pour y femer la divifion ; & combien de naturels de la Nation ex-
citez continuellement par des François à machiner des deiTeins pernicieux
à la Religion, & aux Loix du Royaume? Comment fe flatter de Paix fer-
me & cinflante au milieu d'un fi grand nombre de fujèts de Guerre tou-
jours prête à recommencer?
ARTICLE. IL
Comme le principal objet que Sadite Majeflé Très- Chrétienne , Sadite Ma*
jeflé de la Grande-Bretagne , £5? lesdits Seigneurs Etats-Généraux, fe propo-
fent , efl celui de maintenir la tranquilité générale de l'Europe , ils n'ont pu
voir fans douleur que Y état de la fanté du Roy a" Efpagne foit , depuis quel-
que temps, devenu fi languijfant , qu'il y a tout à craindre pour la vie de ce
Prince : quoi qu'ils ne puiffent tourner leurs penfées du côté de cet événement
fans affliction par l'amitié fincére &? véritable qu'ils ont pour lui, ils ont ce-
pendant efiimé quil étoit d'autant plus néceffaire de prévoir que Sa Majeflé
Catholique n'ayant point d' Enfans , l'ouverture de la SucceJJîon exciteroit in-
failliblement une nouvelle Guerre , fi le Roi Très-Chrêtien foûtenoit fes Pré-
tentions , celles de Monfeigneur le Dauphin , ou de fes Defcendans fur toute la
Succefjion d'Efpagne \ 6? que l'Empereur voulût auffi faire valoir fes Préten-
tions, celles du Roi des Romains , de V Archiduc [on fécond Fils , ou de fes
autres Enfans mafies ou femelles , fur laditte SucceJJîon,
N'eft-ce point ici le véritable Motif du Traité, & ceux qui ont pré-
cédé ne feroient-ils pas fimplement une manière de Préambule fans
confequence?
Charles II. Roi d'Efpagne en état de mort prochaine fans enfans, l'ou-
verture de la Succeflion eft regardée comme devant infailliblement exci-
ter une nouvelle Guerre entre le Roy de France ayant prétention, ou pour
foi , ou pour fes Defcendans , fur toute la Succeflion d'Efpagne , &
l'Empereur ayant une femblable prétention, ou pour foy , ou pour fes
Defcendans.
On n'entre dans aucun Examen du Droit des Prétentions , & l'on con-
fidére feulement, que l'un & l'autre peut les foutenir , & eft en état
de les faire valoir par les armes , d'où il s'enfuivroit une nouvelle
Guerre.
Cette Conjoncture donne lieu de remarquer la Vanité des Projets que
les
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. f5$
les Souverains fe forment. Charles d'Autriche, à l'âge de if. ans de-
venu en \fi6. Roi d'Efpagne par le Teftament de Ferdinand V. fon
ayeul maternel , & élu Empereur le 24 Février de 1515?. après le dé-
cès de Maximilien I. fon autre ayeul , avoit conceu les efpérances de
parvenir à la Monarchie Univerfelle. Cependant, quoiqu'il eût eu le bon-
heur de conquérir deux Empires de très grande étendue dans le nouveau
Monde, de fe rendre prefque Maître abfolu dans IAlIemagne, de retenir
à Madrid François I. fait prifonnier à la Bataille de Pavie, de fe faire re-
douter par les Papes, & de fe rendre formidable aux Turcs , il fe trouva
engagé à l'âge de f f . ans de renoncer au Monde , & de fe retirer dans un
Monaflére, fans avoir pu obtenir pour foy-même la Dignité de Pape
qu'il avoit procurée à Adrien VI. & à Clément VIL , & fans pouvoir
lailTer l'Empire & l'Efpagne réunis en la Perfonne de Philippe II.
fon Fils unique.
Philippe II, s'étant flaté, de même que Charles-Quint fon Père , d'éle-
ver la Maifon d'Autriche à la Monarchie Univerfelle, Ferdinand fon On-
cle étant Empereur, vit fa Flotte Y Invincible batuë , ruinée , diffipée aux
aproches de l'Angleterre , fes efpérances fur le Royaume de France en-
tièrement détruites, & une partie des Païs-Bas foultraite à fon obéiffance.
Et fa Poflérité, Philippe III., Philippe IV. ,& Charles II. , après avoir été
travaillez de Guerres, fe trouvent fur le point de lailTer à leurs Héritiers
de la Maifon d'Autriche une Succeffion à difputer par les armes, ou à par-
tager avec leurs plus grands Ennemis.
Deux Infantes d'Efpagne avoient été données en mariage à deux Rois
de France , afin de procurer la Paix entré les deux Maifons , en prenant
préalablement des Précautions pour empêcher la Couronne d'Efpagne de
tomber dans la Maifon de France au préjudice de celle d'Autriche. Mais
enfin ces Infantes ont été la fource de plufieurs Guerres entre les deux
Maifons , ont caufé la perte de plufieurs Pais dépendans de l'Efpagne u-
nis à la Couronne de France, & donnent aujourd'hui à Louis XIV. & au
Dauphin fon Fils lieu de prétendre à la Monarchie entière d'Efpagne , ou
de la partager après la mort prochaine de Charles II.
Les trois Fuiflances témoignent, qu'elles ne peuvent tourner leurs pen-
fées du côté de cette Mort fans affl-érion , par l'amitié fincére & véritable
quelles ont pour fa Majeflé Catholique. Je ne fçai , fi les maladies du
corps, & les dangers de la mort, font desévénemens plus à plaindre pour un
Prince, que le ravage de fes Etats, leur perte, & le rifque de s'en voir en-
tièrement dépouillé. Charles II. s'eft vu plufieurs fois à ces épreuves ; &
il y a bien de l'aparence qu'il auroit été impitoyablement réduit à d'étran-
ges extrémitez par les attaques de la France, s'il n'avoit été affilié de for-
ces & d'argent par la Grande-Bretagne & par les Etats-Généraux des
Provinces-Unies.
C'eft dans les temps fâcheux, que l'on connoit les amis fincéres & vé-
ritables. Quels ont été les temps les plus fâcheux du Règne de Charles
II. & quels ont été dans ces temps les mouvemens & les affeèlions de Sa
Tom. XL Aaaa Ma-
5*4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaihks Majefté Très-Chrétienne, de SaMajeflé Britannique, & des Seigneurs E-
gkn. dr lats-Generaux?
l'Euro- Les Ralfons du Traité font déduites dans l'Article III.
PE.
ARTICLE III.
Et comme les deux Seigneurs Rois £s? les Seigneurs Etats-Généraux 'veulent
fur toutes chofes la con/ervation du repos public , \J éviter une nouvelle Guerre
dans l 'Europe , pour ï accommodement des dif putes £5? des différens qui pour oient
réfulter au fujèt de la dite Succcjfïon, ou par F ombrage de trois Etats réunis
fous un même Prince , ils ont trouvé bon de prendre par avance des me fur es nécef-
J aires pour prévenir les malheurs que le trifie événement de la mort du Roy Ca-
tholique fans enfans pourroit produire.
Vouloir fur toutes chofes la confervation du repos public, c'eft non-feu-
lement ne rien projetter & ne rien entreprendre qui puifle le troubler j
mais encore relâcher plutôt de fes intérêts légitimes , fi on ne peut les fai-
re valoir fans que le repos public en foit troubjé. Et vouloir fur toutes
chofes éviter une nouvelle Guerre , c'efl examiner avec une fcrupuleufe
exactitude les caufes ou les raifons qui la peuvent faire naître , afin de
prendre les mefures convenables pour les arrêter. Voici deux Caufes ou
deux Raifons jugées capables de faire naître une nouvelle Guerre dans l'Eu-
rope après la mort du Roy d'Efpagne fans enfans.
La première , les dif put es & les différens qui pouroient réfulter au fujèt de
la Succefïon.
La féconde, V ombrage de trois Etats réunis fous un même Prince.
La première Caufe regarde feulement les Héritiers prétendus ; à fça-
voir , la Branche Impériale d'Autriche , Héritière préfomptive de la Bran-
che Royale, de la quelle Charles IL eli immédiatement iiïïi , & la Mai-
fon de France , qui a des Alliances allez étroites avec la Branche Royale
d'Autriche, pour prétendre droit d'hériter de Charles II, décédant
fans enfans , préferablement au plus pur fang de la Branche Impériale
d'Autriche.
L'Empereur, en qualité de Chef de la Maifon d'Autriche, prétend que la
Succeiîion entière de Charles d'Autriche , fécond du nom Roy d'Efpa-
gne, lui doit apartenir ou à fes Enfans. Le Roy de France, Chef de fa
Maifon , prétend également que cette Succeffion entière doit apartenir à lui
ou à fes Enfans, comme étans plus proches Païens de Charles II. que ne le
font l'Empereur & fes Defcendans.
Louis XIV. a eu pour Mère Anne d'Autriche, Infante. d'Efpagne, Fille
de Philippe III, Tante de Charles II. Le Dauphin de France eîr. Fils de
Marie-Théréfe d'Autriche, Infante d'Efpagne, Fille de Philippe IV. Sœur de
Charles IL Or, les Infantes d'Efpagne héritent la Couronne au défaut des
Mules &e£ en droite ligne. L'Empereur a au contraire, defcendu de Ferdi-
nand
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. SSS
nand Frère de Charles-Quint, ne peut être Parent de Charles lî. Roy d'Ef- 4»a»w
GKN. DK
pagne qu'en un degré fort éloigné. Mais, Sa Majefté Impériale fonde fon
Droit de préférence fur les Renonciations folemnelles faites par les deux In- PE.
fantes aux momens de leurs Mariages avec les Roys de France, aux-quels
elles n'eulTent jamais été données en des Mariages capables de porter pré-
judice aux Héritiers de la M ai fon d'Autriche. Et, en conféquence des Re-
nonciations, Philippe IV. , par unTeftament ,a fubftitué l'Archiduc Fils de
l'Empereur à fon propre Fils Charles II. au cas qu'il vienne à mourir fans
Enfans. La France, de fon côté,foutient que les Actes de Renonciation
font nuls , lorfque les maies & les femelles en droite ligne viennent à
manquer.
La difeuffion feroit d'une longue étendue , s'il faîloit raporter tout ce
qui peut autorifer ou exclure l'une ou l'autre Prétention. Mais, cette dif-
euffion poura être plus à propos dans une autre occafion, puis que, poul-
ie prefent il fufit de remarquer que le Roi de la Grande-Bretagne, & les
Etats Généraux, n'ont point jugé que le Droit de l'une ou de l'autre Mai-
Ion fut inconteftable : autrement, bien loin d'avoir pu avec juftice pro-
pofer d'accommoder les deux Maifons , ils auroient au contraire été obli-
gez en toute équité de maintenir en ion entier le Droit inconteftable dé
l'une ou de l'autre; de même qu'ils ont conftament maintenu & apuyé dé
toutes leurs forces les Droits de Charles II. contre les Prétentions de la
France , tant que ce Prince a vécu.
D'autre part, Louis XIV. ne croit pas lui-même que fes Prétentions
ni celles du Dauphin fon Fils fur l'entière Succeffion d'Efpagne foient ab-
folument inconteftables ; vu que Sa Majeité Très-Chrétienne , qui a fi
bien feu fe faire juftice par elle-même, non-obftant les Oppoiitions des
autres PuiiTances de l'Europe , fur diverfes Prétentions de moindre con-
féquence , touchant des Pais dépendants l'Efpagne , propofe aujourd'hui
& fait unTraitépour accommoder les difputes & les différens auxquels el-
le eft intéreflee touchant la Succeffion entière de cette Monarchie.
D'ailleurs, il fera remarqué dans les Articles fuivans, que la France a ac-
cordé, eft convenue, & s'eft tenue fatisfaite , d'avoir pour fon Partage
feulement divers Etats qui ne font point originairement parties de ce
qu'on apelle proprement le Royaume d'Efpagne , & qui ne lui ont été
annexez que par Succeffion de tems. D'où il eft à conclure, que la Fran-
ce, de fon plein gré & franc vouloir, a reconnu le Droit de Prétention de la
Maifon d'Autriche fupérieur au fien ; puis qu'elle a accordé & eft conve-
nue conjointement avec les deux autres Puiflances , que la Couronne, les
Pais proprement nommez l'Efpagne, & les deux Empires du nouveau
Monde, conquis fous Charles-Quint tris-ayeul de Charles IL, refteroient
ajugez à un Prince de la Maifon Impériale.
La féconde Caufe de Guerre, que l'a Succeffion de Charles II. doit pro-
duire, c'eft l'ombrage de tant d'Etats réunis fous un même Prince. Cet-
te Caufe regarde généralement tous les Souverains de l'Europe. La Fran-
ce , à qui il eft naturel de prétendre une Prééminence d'honneur & de
Aaaa 2 puiflan-
7/6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
puifiancc fur les autres Royaumes, a de juftes motifs de craindre, que
tous les Etats d'Efpagne poiîédez par un Fils de l'Empereur ne fifTent naî-
tre à Sa Majeiié Impériale ledefir & les moyens de redemander & de re-
prendre les raïs que Louis XIV. a conquis fur l'Empire & fur l'Efpagne.
L'Empereur, de fon côté, n'a pas moins de fujèt d'apréhender que les
forces de la France augmentées par celles de l'Efpagne , foumife à un
Prince François, ne réduife la Maifon d'Autriche à de grandes extrémî-
tez. La France s'elt trouvée ravagée par les Guerres civiles les plus hor-
ribles, ôl expofée en proye aux Etrangers, fous les Règnes de François IL
Charles IX. Henri III. & le commencement de celui d'Henri IV. Ces deux
derniers Roys étoient excommuniez par les Papes, & déclarez tels par
laSorbonne, & par la Ville de Paris. La Branche des Valois, finie en
la Perfonne d'Henri III. , étoit une occafion aux Princes du Royaume
de mettre tout en ufage pour fe faire couronner à l'excîufion d'Henri
IV. Héritier préfomptir de la Branche de Bourbon. Pendant ces tems
fi fu nèfles à la Maifon de France, & fi favorables à celle d'Autriche,
quel a été le fuccés de toutes les Entreprifes de ce grand. Politique &
puiffant Monarque Philippe II. , Roy d'Efpagne, Neveu de Ferdinand Em-
pereur? Malgré tous fes efforts, Henri IV. , couronné Roy de France,
a commencé à rétablir fa Maifon , au préjudice de celle d'Autriche.
Louis XIII. a fait de nouveaux progrès, & Louis XIV. s'elt acquis le
Nom de Grand par des Conquêtes fur l'Empire & fur l'Efpagne. S'il
arrive donc que les Etats d'Efpagne viennent à être occupez par un
Prince François , quel ombrage l'Empereur n'en doit-il point prendre
pour foi & pour fes Defcendans?
L'Allarme ne doit-elle pas fe répandre généralement parmi toutes les
autres PuhTances de l'Europe? L'Allemagne, l'Italie, l'Angleterre, les
Provinces-Unies des Pais-Bas, les Etats du Nord, peuvent-ils jimais ou-
blier les Projets de Charles-Quint & de la Maifon d'Autriche? Y a t-ii
Souverain en Europe, qui puiffe ignorer les Forces de la France &de
l'Efpagne réunies en une même Maifon? Et les Prétentions de la Fran-
ce ne font-elles pas ordinairement réglées félon fes Forces?
Outre le fujèt général que toutes les PuiiTances de l'Europe ont de prendre
ombrage d'une Réunion de la Succeflîon entière d'Efpagne à la Maifon
d'Autriche ou à celle de France, tous les Princes Proteitins en ont un
très-particulier & très-preilant. Aucun d'entre eux ne peut manquer,
d'être fufifament inftruit, que leurs Etats, ayant eu le malheur d'avoir
été fournis au Pape, il y a Sentence d'Interdit contre eux, & liberté &
injonction à tout Prince qui voudra s'en emparer , pour les réduire à
yÔbeilTance de Rome.
La Perfécmion exercée dans les Royaumes de Bohême & de Hongrie
dépendans de la Maifon d'Autriche; la Perfécution pomTée à un dernier
excès de rigueur contre les Réformez de France, & même contre des
Proteflans en Allemagne, par les ordres de Louis XIV; & enfin l'Inqui-
fition établie en Efpagnej font des Leçons afîez fortes pour éclairer tous
les
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. sri
les Etats Proteftans. Ils ont affez d'exemples pour ne devoir point pré- Affaires
tendre caiife d'ignorance qu'il n'y a ni équité naturelle , ni foy pu- G™- DE
blique, ni loy Chrétienne pour eux; & qu'ils ne peuvent s'aflurer d'au-
cune Liberté de Confeience, ni d'aucune tranquilité, qu'autant qu'ils font
capables de fe foutenir par leurs propres forces, ou que l'intérêt particu-
lier des Princes Catholiques Rom. permet qu'ils fubtiftent.
La France une fois jointe avec l'Efpagne, que ne doivent pas apréhen-
der les Provinces-Unies , pour s'être affranchies du Joug du Pape pour la
Religion & de celui d'Efpagne pour le Gouvernement ? Combien de pré-
textes, & de Religion, & de Gouvernement , contre l'Angleterre, & contre
tous les Etats Proteftans , fi la France & l'Efpagne peuvent fe promettre
de les fubjuguer, & de leur faire rendre Obéilfance au Pape?
En 16 if. la Propofhion du double Mariage d'Elizabet de France avec
Philippe IV. Roy d'Efpagne , & de l'Infante Anne d'Autriche avec Louis
XIII.) fut un grand fujèt d'ombrage pour la plupart des Etats de l'Euro-
pe. Les Proteftans fur-tout n'en attendoientque des fuites très facheufes.
C'eft pourquoi Edmon, AmbalTadeur de Jacques I. Roy de la Grande-
Bretagne à la Cour de France, foi.licitoit fon Maître de s'oppofer à ce
double Mariage. On prétendoit alors, que l'ombrage étoit'mal fondé , en
ce que cette Alliance ne feroit jamais capable d'éteindre la jalouiie des
deux Maifons entre elles, & qu'ainfi il n'étoit nullement à craindre de les
voir dans une intelligence affez étroite pour projeter & pour exécuter des
Entreprifes contre le Corps des Proteftans. Cependant, on voit préfente-
ment, que ce premier Mariage a donné lieu à un fécond, qui a été celui
de Marie -Thérefe Infante d'Efpagne Fille de Philippe IV. avec Louis
XIV. Roy de France; & Monfeigneur le Dauphin, *ifTu de ce Mariage,
donne aujourd'hui à la France lieu de former des prétentions fur la Suc-
celiïon entière la Monarchie d'Efpagne. Ainfi, l'ombrage du double Ma-
riage ,qui en 161 f. ne fembioit être qu'une idée de malheurs à venir, fort
éloignez, & même peu aparens, fe trouve en 1700. de véritables maux
tres-réels, & non-feulement prochains, mais commencez dès 1667. par la
Guerre déclarée à l'Efpagne fous le prétexte des Droits de Mane-Théréfe
fur une partie de la Flandre. Si la Guerre de 1667. ne regardoit point pré-
cifément les Etats Proteilms, la Révocation de fEdit de Nantes, & la Perfé-
cution ouverte par tout le Royaume eni68y.,a été un commencement de
la ruine du Corps Proteftant. On a répandu dans le Public, que Marie-Thé-
réfe n'avoit rien eu plus à cœur que cette Révocation, Cv qu'elle l'avoit foî-
licitée en mourant. Peu de terns" avant la conclufion de la Paix de Ry£
wick.on vu dans les Nouvelles publiques un Décret de l'Inquifkion d'Efpa-
gne , portant que toutes les pertes arrivées dans cette dernière Guerre
étaient des Punitions de Dieu contre le Royaume, pour s'être allié avec
des Puiffanc-: s Hérétiques j & qu'au contraire Jes victoires de la France é-
toieht des Bénédictions, que le Ciel répandoit fur un Roi qui perfécutoit
les Hérétiques d\ns fèï Etats, & qui faifoit la Guerre aux Pmlunces fé-
parées de la Communion du Pape. Ces Faits, & mille autres 3 arrivez
Aaaa 3 -de-
PE.
758 MEMOIRES, NEGOTÏATIONS, TRAITEZ, ET
affaires depuis longues années , font des voix tres-intelligibles qui avertiffent les E-
wn. »e tats Proteftans de ce qu'ils ont à attendre des Princes Catholiques Rom.
i/Euro- ^en particulier de la France, û elle peut fe trouver en parfaite intelli-
gence avec l'Efpagne.
Mais , les Etats Proteftans fubjugez par les Forces de la France & de
l'Efpagne , & fournis à l'Obeiffance du Pape , Rome & l'Italie n'ont-elles
rien a apréhender pour leurs Souverainetez ? Quelle étoit autrefois la Dé-
pendance de l'Italie entière fous les premiers Empereurs Chrétiens? &
qu'elle étoit la Dépendance des Papes fous les Empereurs Roys de
France ?
Ces juftes Sujets de différens, de difputes, & d'ombrage, ont fait trou-
ver bon aux deux Seigneurs Roys , & aux Seigneurs Etats Généraux , de
prendre par avance des mefures néceJJ aires pour prévenir les malheurs que le tri'
fie événement de la mort du Roy Catholique fans Enfans pour oit produire.
Mais , le Roy Catholique ne pouvoit-il pas lailTer un Teftament ? N'y
en avoit-il pas déjà eu un avant la mort du Prince Electoral de Bavière ?
N'étoit-il point à préfumer qu'il pouroit bien encore en être drelfé un
nouveau, foit du propre mouvement de Sa Majefté Catholique, foit aux
inftances des Princes intérefiez , foit à la follicitation des Grands & des
Peuples du Royaume? Ainfi,n'eût-ilpasété à propos de prendre des me-
fures touchant un Teftament tel qu'il eût pu être drelfé ? Cette idée de
Teftament ne feroit-elle point venue dans l'efprit d'aucune des trois Puif-
fances? ou bien auroit-elle été négligée, comme de nulle confequence?
Le Roy Catholique étoit-il jugé incapable à l'avenir de faire Teftament?
Nul autre Prince ne pouvoit-il être déclaré légitime Héritier au préjudice
des deux Maifons prétendantes? L'une ne pouvoit-elle être légitimement:
préférée à l'autre?
Quoy qu'il en foit , il y a bien de l'apparence que , nul Teftament
ne pouvant empêcher les difputes , les différens , & \ts ombrages que la
Succeflion devoit faire naître, les trois Puiflances , fans aucun égard de
Teftament , ou précédant, ou à venir, ont travaillé à un jufte Accommo-
dement des différens & des difputes, & à prévenir l'ombrage que tant
d'Etats réunis fous un même Prince pouvoient produire. C'eit dans cet-
te vue qu'on a dreffé le Partage contenu dans les Articles IV. & V. en fa-
veur de la France, & VI. en faveur de la Maifon d'Autriche.
ARTICLE IV.
JÎinfi a été accordé £5? convenu, que fi ledit cas arrivoit , le Roi Très-
Chrétien , tant en fon propre nom , quen celui de Monfeigneur le Dauphin,
fes Enfans Mâles , ou Héritiers & Succefjeurs , nez £5? à naître \ comme
auffi Monfeigneur le Dauphin pour Soi - même , fes Enfans,- Mâles , ou , &c.
fe tiendront fat is fait s , comme ils fe tiennent fat is fait s par la pré fente , que
Monfeigneur U Dauphin ait pour fon Partage , en toute propriété , pojfejfion
pie*,
RESOLUTIONS D'ET A T, M. DCC. I. S59
pléniere, & extinction de toutes fes Prétenfions fur la Succcffon d' Efpagne-, Affairfs
four en jouir , Lui , fes Héritiers , SucceJJeurs , Dcfcendans M» fes , ou , (je.
à perpétuité , fans pouvoir être jamais troublé fous quelque prétexte que ce
foit de droits ou de prétenfions , directement ou indircblement , même par cef-
Jions , appela révolte , vu autre voye de la part de l'Empereur , du Roy des
Romains , du Serenifime Monfeigneur Y Archiduc Charles fon fécond Fils , des
Archiducheffes , de fes autres Enfans Majles , ou , &c. les Royaumes de Na-
ples , £5? de Sicile , en la manière que les Efpagnols les poffédent préfentement ,
les Places dépendantes de la Monarchie d Efpagne , Jituées fur la Côte de
Tofcane , ou Ifles adjacentes, comprifes fous le nom. de Sanclo Stephano, Por-
to- Hercole , Orbiteiw, Palamone, Portolongo , Piombin, en la manière aujji
que les Efpagnols les tiennent préfentement , la Fille & le Marquifat de Fi-
nal en la manière pareillement que les tiennent les Efpagnols, la Province de
Guipufcoa , nommément les Filles de Font arable , Éj?* de Saint * Sebafiien , Ji-
tuées dans cette Province , & fpécialement le Port du Paffage qui y efl com-
pris ; avec cette refriclion feulement , que s'il y a quelques lieux dépendans de la-
dite Province qui fe trouvent f tuez au-delà de> Pyrénées ,- ou d'autres Mon-
tagnes de Navarre, d' /Jlava , ou de Bifcaye , du côté de ÏE (pagne, ils refe-
ront à l' Efpagne ,• (y s'il y a quelques lieux pareillement dépendans des Pro-
vinces fourni (es à l' Efpagne qui J oient en deçà des Pyrénées ou d'autres Mon-
tagnes qui fe trouveront entre ladite Province de Guipufcoa , Navarre , Ala-
*va , £5? de Bifcaye , à qui quelles appartiennent , feront partagées entre la
France & ï Efpagne , en forte qu'il refera autant de (dit es Montagnes &? tra-
jets, à la France de fon côté, qu'il en refera à î Efpagne du fien , le tout
avec les Fortifications , Munitions de Guerre , Poudres , Boulets , Canons ,
Galères, Chiourmes, qui fe trouveront appartenir au Roy d' Efpagne lors de
fon decez fans Enfans, & être attachez aux Royaumes, Places, /fes, £5?
Provinces , qui doivent compofer le Partage de Monfcigneur le Dauphin ;
bien entendu que les Galères , Chiourmes , ïfj autres Effecls appartenant au
Roy d' Efpagne par le Royaume d' Efpagne & autres Etats qui to?nbent dans
le Partage du Sereniffime Archiduc luy referont ; celles qui appartiennent aux
Royaumes de Naples c? de Sicile devant revenir à Monfcigneur le Dauphin , ain~
fi qu'il a été dit ci-deffus.
De plus , les Etats de Monfeigneur le Duc de Lorraine , à favoir les Duchez
de Lorraine & de Bar , ainfi que le Duc Charles IV. du nom les poffedoit , £s?
tels qu'ils ont été rendus par le Traité de Ryfvick , feront cédez & tr an [portez à
Monfeigneur le Dauphin, fes Enfans, Héritiers, £5? SuCcefèurs AF'fes , ou,
&C. en toute propriété i$ poffeff on pléniere à la place du Duché de Milan, qui
fera cédé & tranfporté en échange au dit Duc de Lorraine , fis Enfans Majles ,
ou , &c. en toute propriété & poffejfon pléniere , lequel ne refit fera point un
Parti f avantageux; bien entendu que le Comté de Bitcb appartienne à Mon-
feigneur le Prince de Vaudemont , lequel rentrera dans la poffejfon des Terres
dont il a joui ci-devant , qui lui ont été ou doivent être rendues en exécution du '
Traité de Ryfwick : moyennant lefquds Royaumes, Jjles, Provinces, 6? Pla-
ces, le f dit s Roy Très-Chrétien, tant en J on propre mm, qu'en celui' de Monfei-
gneur
gev. de
l'Euro-
pe.
56o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Araires gneur le Dauphin, [es Enfans Majles , ou, 13 c. lequel a aufiî donné [on Plein*
pouvoir au Sieur Comte de Tallard, & au Sieur Comte de Briord, promettent
& s engagent de renoncer lors de l'ouverture de ladite SucceJJion d 'Ej 'pagne , com-
me en ce cas-là ils renoncent dès à prefènt par celle-ci à tous leurs Droits £s?
prétenfions fur ladite Couronne d'Efpagne & fur tous les autres Royaumes , lfles^
Etats , Pais , Ci? Places , qui en dépendent préfentement , à l'exception de ce qui
eft énoncé ci-dcfjus pour [on Partage ; & de tout cela ils feront expédier des
Aïïes folemnels dans la plia forte (3 la meilleure forme quil f'e pourra, qui
feront délivrez au tems de l échange des Ratifications de ce préfent Traité au
Roy de la Grande- Bretagne , & aux Seigneurs les Etats -Généraux.
ARTICLE V.
• *
Toutes les Filles , Places , £5? Ports , fituez dans les Royaumes fc? Provin-
ces qui doivent compofer le Partage dudit Seigneur Dauphin ,/er ont confervez fans
être démolis.
Par la teneur de ces deux Articles, il eft notoire: I. Que Louis XIV.
Roi de France, & Monfeigneur le Dauphin, chacun en leur nom & en
celui de leurs Enfans Mâles ou Héritiers & SuccefTeurs nez & à naitre,
ayant donné leurs Plein-Pouvoirs au Sr. Comte de Tallard & au Sr. Com-
te de Briord, fe tiennent fatisfaits que Monfeigneur le Dauphin ait pour
fon Partage en toute propriété & pofTeffion pléniére les Païs fpécifiez dans
ces Articles. %
2. Qu'ils confentent & accordent que toutes leurs Prétentions fur la
Succefîion d'Efpagne feront éteintes moyennant la pofieiîion des Païs qui
leurs font attribuez.
3. Qu'ils promettent & s'engagent de renoncer lors de l'ouverture de la
Succefîion de Charles II. à tous leurs Droits & Prétenfions fur la Couron-
ne d'Efpagne & Etats qui en dépendent, à l'exception de ce qui eft é-
noncé pour le Partage du Sgr. Dauphin.
4. Que dès le tems du Traité ils ont effectivement renoncé à tous leurs
Droits & Prétenfions , & ont accepté les Païs fpécifiez pour le Partage
du Sgr. Dauphin.
f. Que Sa Majefté T. C. & Mgr. le Dauphin ont dû faire expédier
des Actes folemnels fur le fujet du Traité dans la plus forte & la meilleu-
re forme pofïible.
6. Qu'ils font convenus eux-mêmes & qu'ils ont arrêté ce qu'ils ont
eftimé leur pouvoir convenir de la Succefîion d'Efpagne, & qu'ils ont re-
noncé au relie fans aucune reftriction.
8. Que par les Actes folemnels, qui ont dû être délivrez dans le tems
de l'échange des Ratifications au Roi de la Grande-Bretagne & aux Sei-
gneurs Etats -Généraux, ces deux PuifTances font reconnues dépofltai-
res & garantes du Traité.
Pour
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. L S6i
Pour ce qui regarde le Partage en foi-même, il eft à obferver, que la Affaire:,
Monarchie û'Efpagne, la plus étendue & la plus puiffante de celles qui GE^- de
font en Europe, ayant caufé de terribles Guerres dans ces derniers fié- L'EvR°-
clés, tant par l'ombrage que les autres Etats en ont pris, que par l'ambi-
tion de Tes Rois, il étoit néceffaire, pour la-tranquilité publique, qu'elle
pût être refferrée dans des bornes plus étroites. L'Hiltoire nous apprend
qu'Henri IV. avoit formé le deifein de réduire la Maifon d'Autriche à fe
contenter de l'Efpagne & des Pais Héréditaires : on peut voir le Projet
qui en avoit été drelfé. On préfume qu'il auroit été exécuté, & que les
Partifans de la Maifon d'Autriche n'avoient point eu de meilleure reflbur-
ce , que de faire affafîiner ce grand Roi dans le tems qu'il étoit prêt de
partir pour en commencer l'exécution.
La Mort de Charles II. Roy d'Efpagne fans Enfans, & les Prétenfions
réciproques de la Maifon d'Autriche & de la Maifon de France , font des
conjonctures très -propres pour diminuer la trop grande PuiiTance de la
Monarchie Efpagnole, & pour affermir la tranquilité de l'Europe.
Il eût été à fouhaiter que Louis XIV. Roy de France & Mgr. le Dau-
phin fe fuiTent trouvez difpofez à former ce Projet avec autant de definté-
reffement , qu'il avoit été propofé fous Henri IV. Ayeul de ces Princes ;
mais , les tems & les Intérêts font fort differens. Henri IV. avoit peu à
prétendre fur l'Efpagne : elle étoit gouvernée par Philippe III. Roi puif-
lant, qui avoit des Enfans ; & le Projet ne pouvoit être exécuté que par
le moyen d'une Ligue entre les autres Princes de l'Europe intereifez à
l'abaiiTement de la Maifon d'Autriche. Au lieu que Louis XIV. & le
Dauphin ont des Prétenfions fur la Succeiïion entière de l'Efpagne au mo-
ment de la Mort prochaine de Charles II. fans Enfans ; & ces Princes
font en état de faire valoir leurs Prétenfions par leurs propres forces, fans
le fecours d'autres Puiflances, & contre tous oppofans. C'efl donc un
Bien pour l'Europe, de ce que la France fonge à ménager fes Prétenfions
par les voyes tranquilles d'un Partage arrêté par une manière de Média-
tion de la part du Roy de la Grande-Bretagne & des Sgrs. Etats- Géné-
raux des Provinces - Unies , deux Puiffances abfolument defintereffées
pour elles-mêmes, & qui, principalement vers la fin du lyéme. fiécle,
ont emploie tous leurs efforts pour maintenir l'équilibre entre les deux
Maifons, & les Droits particuliers de chaque Souverain de l'Europe.
11 efl fort vrai-femblable, que fi la France avoit été maitreffe, elle au-
roit choifi les Etats d'Efpagne qui étoient le plus à fa bien-féance ; mais,
ayant été pofé, pour fondement du Partage, d'accommoder les difputes &
les differens, & de prévenir l'ombrage à naître des Etats d'Efpagne réunis
fous un Prince trop puiffant, la France ne pouvoit pas faire des deman-
des qui ne pouvoient aucunement lui être accordées.
La Monarchie Efpagnole confifle à préfent dans cette étendue de terre
appellée proprement ÏEfpagr.e, & en plufieurs autres Pais fituez en diffe-
rens Endroits de l'Europe & des Amériques.
Tome XL Bbbb Les
PE.
$61 MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
AmiREs Les Montagnes des Pyrénées & celles de Navarre, d'Alava, & de Bif-
gen.de Caye, font des bornes naturelles pour réparer les Etats de la France d'a-
vec ceux de l'Efpagne. Les Acquifitions faites en deçà & en delà de ces
Montagnes ont été des Motifs continuels de Guerre entre les deux Na-
tions. Pour y remédier, le Partage établit, que le jufte milieu de ces
Montagnes fera à l'avenir les bornes précifes entre chaque Royaume.
Tout Pais en deçà du milieu de ces Montagnes du côté de la France fera
proprement Pais de France; & tout Pa'is au-delà du milieu des Monta-
gnes fera proprement Pais d'Efpagne. La féparation des Montagnes
une fois faite , il n'y aura plus de fujet de differens ni de difpute entre
les deux Nations touchant la dépendance des Païs. Et comme toute
l'étendue de ces Montagnes & les Terres de deçà & de delà appartien-
nent à la France & à l'Efpagne, un tel Partage doit être aprouvé de
toutes les autres Puiflances de l'Europe ; puifqu'il doit arrêter tous les
prétextes de Guerres que l'incertitude des limites, & le mélange des Jurif-
dictions , ont coutume de produire.
De plus , le Traité adjuge à la France les Royaumes de Naples & de
Sicile; les Places, dépendantes de la Monarchie d'Efpagne, fituées fur la
Côte de Tofcane, ou Mes adjacentes; la Ville & le Marquifat de Final.
Quoique tous ces Païs femblent extrêmement augmenter la Puiffance des
Rois de France, dont les Forces font déjà fi fort redoutables à fes Voi-
fms, on peut néantmoins faire les Remarques fuivantes.
En premier lieu, en cas de Partage de la Succeffion d'Efpagne, la
Part adjugée à Mgr. le Dauphin eft bien moins confiderable que les au-
tres Etats réfervez à un Prince qui ne foit point de la Maifon de France.
Ainfi, Louis XIV. & le Dauphin ne pouvoient pas moins demander, &
il ne pouvoit pas leur être accordé moins.
En fécond lieu , la France ayant eu depuis longues années diverfes Pré-
tendons fur la plupart de ces Etats , & ces Prétenfions ayant été des
fources de Guerres, les Prétenfions fe trouvent réglées & les fources de
Guerres taries.
En troifième lieu, les Païs devant être pofledez par la France en h
manière qu'ils font préfentement poffedez par l'Efpagne, les Droits d'In-
veftiture & toute autre Dépendance relient dans leur état naturel; & tou-
tes les Puiflances intéreffées peuvent entretenir une Ligue pour prévenir
& empêcher qu'il ne s'y introduife aucune nouveauté capable de porter
préjudice à la tranquillité publique.
En quatrième lieu, ces Etats étant féparez & éloignez des Terres d'Ef-
pagne, & proches de Voifîns capables de s'oppofer à des Entreprifes illé-
gitimes , ils ont plus augmenté l'étendue de la Monarchie Elpagnole ,
qu'ils ne l'ont rendue formidable. Il y a tout fujet de croire, que leur ac-
quifition augmentera plus le luflre que les forces de la Monarchie Fran-
• çoife ; d'autant que ces Etats font aufli féparez de la France.
En cinquième lieu , le Prince , qui fe trouvera Roy d'Efpagne , aura
un
P£.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. ^3
un intérêt fingulier d'empêcher que la France n'entreprenne aucune chofe Affaires
à la faveur de Tes nouveaux Etats au préjudice de la liberté & de la tran- GEN- DK
quilité de fes Voifins.
En fixième lieu, la France occupée de l'Adminiflration de cesPaïs, &
obligée d'établir & d'affermir fon Autorité parmi des Peuples , qui peu-
vent bien être confiderez comme peu avantageufement prévenus en fa-
veur de fa manière de gouverner, fera fort éloignée de fonger à troubler
la tranquilité de l'Europe, & encore moins celle des Puiïiknces voifines
de fes nouvelles Acquitkions.
En feptième lieu , tous les Etats démembrez de la Monarchie d'Efpagne
doivent apartenir en propre à Mgr. le Dauphin ; & la parfaite Obéifîance,
que ce Prince a toujours eue pour le Roy fon Père, efl un préjugé, que
s'il devient fouverain , il aimera véritablement fes Sujets , & entretiendra
une bonne intelligence avec les autres PuifTances.
En huitième lieu, il eli important de faire attention que les Etats étans
fujets à des viciffitudes perpétuelles, le plus haut point de leur élévation
elt le préfage d'un abaiifement prochain. La Splendeur de la France
fous Charlemagne Empereur perdit beaucoup de fon éclat fous fon Fils
Louis le Débonnaire auiîi Empereur ; & la grande fécondité de ce Prince -
fut une fource de troubles domeftiques, & de Guerres qui ont produit la
Defunion du Diadème Impérial d'avec la Couronne de France. Tous les
Etats de la Maifon d'Autriche fe font trouvez réunis en la Perfonne de
Charles-Quint -, mais , ce lui a été une néceflité de les partager entre
Ferdinand fon Frère, à qui il a réfigné l'Empire, & Philippe fécond fon
Fils , auquel il remit la Monarchie Efpagnole. Cette Monarchie n'a obéi
qu'à un feul Souverain depuis Charles-Quint ; parce que fes Defcendans
n'ont point eu plufieurs Enfans. Lors qu'un Monarque Chrétien, poffé-
dant de grands Etats féparez les uns des autres , fe trouve avoir nombre
d'Enfans Majeurs, il efl rare, ou que le Père ne leur partage point l'Auto-
rité Souveraine , ou que les Fils fe plaifent de reiter toujours Sujets.
L'éloignement des Royaumes deNaples, de Sicile, & autres Etats dé-
membrez de la Couronne d'Efpagne , feroit une forte raifon pour les fai-
re devenir l'Apanage de quelque fécond Fils de France, & pour former
une nouvelle Monarchie indépendante. En ce cas, toute l'Europe ne de-
vroit-elle pas aplaudir au Partage de la Succeffion d'Efpagne, lequel, en
établiifant un plus Julie équilibre entre les deux Maifons d'Autriche & de
France, arrêteroit l'émulation qui les porte réciproquement à entrepren-
dre l'une fur l'autre , & mettroit les autres PuifTances plus en état de pou-
voir, en cas de befoin, maintenir le plus foible contre le plus fort ? N'y
a-t-il pas même de l'aparence que ces Royaumes feroient érigez en nou-
velle Monarchie, avant que la France pût s'en prévaloir au préjudice des
Voifins ? En 1675". Louis XIV. étant devenu Maitre de la Ville de Mef-
fine, Sa Majefté fit publier en Italie un Manifefte, daté de Verfailles le
11. Octobre. Après une Déduction des Raifons qui onc engagé le Roy
Bbbb z Très-
S64- MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Très-Chretien à recevoir les Meffinois au nombre de fes Sujets & d'ac-
gen.de cepter, à leurs prières, le Serment de Fidélité qu'ils lui avoient prêté, on
l'Euro- yiz une Déclaration des intentions de la France en ces termes.
PE.
Sa Majefié pouvoit , par ce nouveau titre , £f par les Droits fi juftes & fi an-
ciens qu'elle a fur le Royaume des deux Siciles , unir à fa Couronne , non -feulement la
Ville de Mefjine , mais encore les autres Phces qu'elle pojjéde dans l'Ile, £f toutes
celles à qui l'amour de la Liberté infpireroit de fecoiier le joug des- Efpagnols. Mais,
parceque fa vile a bien moins été dans cette occafion d'étendre fes limites , que de fé-
courir des peuples qui avoient imploré fon affijlance ; elle veut bien déclarer par le
préfent Mémoire, qu'elle n'a reçu les Meffinois , quand ils fe font donnez à elle,
que pour les rendre en quelque forte à eux - mêmes , auffi - bien que les autres Villes
de Sicile qui voudront fuivre leur exemple: Qjiefon dejfein n'a pas été de les faire
vivre fous fes Loix ,. qui leur fembler oient toujours étrangères, en les uniffant à fa
Couronne ; mais , qu'à l'exemple de fes Prédeceffeurs , qui ont donné deux fois des
Roys à Naples â? à Sicile, dans deux Branches de la Maifon Royale de France, fon
intention ejt encore de donner à cette Ife un Souverain , qui tire fon origine du mê-
me fang ; qu'elle lui remettra tous les Droits qui font acquis à la France fur ce Ro-
yaume , ô? tous ceux que le confentement des Peuples a déjà déferez â? pourroit dé-
férer à l'avenir à Sa Majefié : Qiie ce Prince prendra les Mœurs, les Coutumes , âf
les Loix de fon Etat , âf qu'il rétablira chez les Siciliens un Trône que leurs Ancê-
tres ont vu avec douleur tranfporté en Arragon âf en Cafiille , £?c.
On doit inférer de cet Extrait, que Sa Majeilé Très -Chrétienne ne pré-
tend point avoir renoncé à fes anciens Droits fur les Royaumes de Na-
ples & de Sicile ; mais que , connoiffant alTez les difficultez de les pou-
voir réunir à fa Couronne, elle ne formeroit des delTeins pour les recou-
vrer, qu'annd'en remettre la Souveraineté à un Prince du Sang Royal
de France.
En neufvième lieu, le Pape, par fon Autorité Spirituelle & Tempo-
relle, peut facilement arrêter tous mouvemens injuites de la part de la
France en Italie; & cette Augmentation d'Etats rendroit les autres Prin-
ces de l'Europe plus éclairez pour veiller à leur confervation , & particu-
lière, & générale.
En dixième lieu, le Milanois, qui a été une autre fource de Guerres
en Italie entre les Maifons d'Autriche & de France, étant cédé & tranf-
porté au Duc de Lorraine & à fes Héritiers en toute propriété & poilef-
fion pléniere, il ne refteroit plus de prétexte de Guerre de ce côté-là, &
le Milanois deviendroit un nouvel Etat interelfé à fe joindre avec les au-
tres Princes de l'Italie, dont les Forces fe trouveroient par ce moyen
plus capables de faire tête à quiconque voudroit .entreprendre contre leurs
Droits. D'autre part, la Lorraine cédée à la France feroit encore un fu-
jet de dïffcrens & de difputes retranché. Il relie û peu de Païs au Duc
de Lorraine, & la liberté des Paflages accordée à la France par le Traité
de
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. j6f
de Ryfwick, eft d'une telle importance, qu'il n'étoit point à douter que Affaires
ce Prince ne dut pas refufer un échange autii coniiderable que celui du GEN- DE
Milanois. PE
Ne doit-il pas réfulter de toutes ces Remarques , qu'en cas de néceflîté 1__
de Fartage, les Propolitions de la France, n'étant point exceflives ni dé-
raifonnables , le Roy de la Grande-Bretagne & les Seigneurs Etats -Gé-
néraux n'avoient pu fe difpenfer d'y foufcrire & d'en arrêter l'exécution
par un Traité qui par avance accommodoit les differens & les difputes, &
prévenoit les ombrages à naître au tems de l'ouverture de la Succeflion
d'Efpagne.
Les Efpagnols pourroient prétendre qu'il n'y avoit,ni raifon, ni droit, de
démembrer leur Monarchie. Sa Majelté Impériale pourroit aufli trouver
mauvais le Partage d'une Succeflion appartenante à l'Archiduc fon fécond
Fils en vertu des Renonciations de Marie -Therefe & du Teftament de
Philippe IV. Les Italiens fe plaindroient peut-être de ce qu'on n'a pas
afiigné à la France d'autres Païs que ceux qui fe trouvent dans leur voi-
finage. Et enfin il pourroit fe rencontrer des PuiiTances , qui n'aprouve-
roient pas que le Roy de la Grande-Bretagne & les Seigneurs Etats -Gé-
néraux des Provinces -Unies foient entrez dans un Traité de cette natu-
re avec la France , & l'ayent conclu fans leur participation.
S'il fe trouve des Efpagnols, qui prétendent qu'il ne peut y avoir eu ni
raifon ni droit de démembrer leur Monarchie, ne leur demandera-t-on
pas avec juftice, pourquoi ils n'ont pas eu foin de faire régler les Préten-
dons de la France fur la Succeflion à la Couronne d'Efpagne, en cas de
Mort de Charles II. fans Enfans? Louis XIV. ayant aflez fait entendre fes
intentions par la Guerre de 166 7. il étoit de l'Intérêt particulier de l'Ef-
pacrne de prévenir par des mefures prifes à tems les differens & les dif-
putes à naître à l'ouverture de la Succeflion d'un Roy duquel on devoit
allez bien connoitre les difpofitions infirmes? De plus, les Efpagnols ayant
été puiflamment fecourus dans le befoin par diverfes Puiffances , & princi-
palement par le Roy de la Grande-Bretagne & par les Seigneurs Etats-
Generaux, n'étoient-ils pas obligez de mettre un fi bon ordre à la Suc-
ceflion qu'elle ne pût fournir aucun prétexte de renouveller la Guerre en
Europe ? Si l'Efpagne néglige fes véritables Intérêts, & û elle n'a aucun
égard pour les PuiiTances auxquelles elle a de fi étroites obligations , les
autres Etats n'ont-ils pas raifon de veiller à leur feureté ? & la France
propofant d'accommoder les differens, & de prévenir les fujets d'ombrage,
n'étoit-ce pas une neceflité de conclure un Traité pour entretenir la tran-
quilité publique & éviter de voir toute l'Europe en combultion ? Celui
qui prévoit f embrafement de la maifon de fon voifin , n'a-t-il pas droit
de le prévenir j & s'il ne le peut faire, fans que la maifon fouffre quelque
dommage, y aura-t-il lieu de le blâmer ? Que la Maifon d'Autriche & la
Maifon de France foutiennent également leurs Prétentions fur la Monar-
chie d'Efpagne, tous les Pays de cette Monarchie ne feront-ils pas expo-
fez à la fureur des armes ? La France n'ei't-elle pas en état d'en conquérir
Bbbb 3 la
FE.
f66 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires la meilleure partie ? D'ailleurs les autres PuifTances de l'Europe ne pour-
gen. de roient-elles pas avec juftice profiter de l'occafion, ou pour reprendre ce
qui leur a été autrefois enlevé , ou pour s'emparer des Pais à leur bien-
féance ? Ainfi, le démembrement de la Monarchie d'Efpagne étant inévi-
table, Sa Majelté T. C, Sa Majefté Britannique, & les Seigneurs Etats-
Generaux ont avec droit & raifon pourvu à ce que le démembrement
pût être fait d'une manière convenable aux diverfes Pretenfions , & fans
intereffer la tranquillité particulière des Peuples fournis à l'Efpagne ni celle
de toute l'Europe.
Pour ce qui regarde les mécontentemens de Sa Majefté Impériale,
il eft plus à propos d'en remetre l'examen après les Réflexions fur l'Ar-
ticle VI.
Quant aux plaintes des Italiens, il eft à obferver, i. que la plupart
des Etats Souverains de l'Italie font des Donations ou des Concertions
faites par les Empereurs , les unes à titre d'Indépendance de l'Empire ,
& les autres à titre de Dépendance.
2. Que l'Empire acquis à la Maifon de France par Charlemagne étant
palTé à la Maifon d'Autriche, pendant que celle-ci travaille pour fe con-
ferver cette première Dignité , l'autre prétend de pouvoir un jour ren-
trer dans un Bien poffédé originairement par fes Ancêtres. Ainfi, les Prin-
ces d'Italie fe trouvent dans l'Obligation de veiller aux Entreprifes des
deux Maifons concurrentes , afin de prévenir ce qui pouroit être préjudi-
ciable à leurs juftes Intérêts.
3. Que le Pape de Rome, étant non feulement reconnu Souverain de
l'Etat Eccléfiaftique, mais encore ayant les Droits de Père commun
généralement fur tous les Etats Catholiques-Romains , ce lui eft un De-
voir indifpenfable de s'oppofer conftament à toutes Entreprifes & Préten-
tions illégitimes de la part de la Maifon d'Autriche ou de celle de
France.
4. Que non-obftant ces Obligations des Princes Italiens, & ce Devoir
du Pape en particulier, les Souverains d'Italie ont eu très-peu d'égard aux
Intérêts publics &à la Juftice dans les démêlez furvenus entre les Princes
d'Autriche & ceux de France. On fçait par exemple que, dans toutes
les Entreprifes de Charles-Quint contre François I. , dans toutes les Intri-
gues de Philippe II. pour ruiner la France , les Papes , bien loin de fe
déclarer en faveur de la Juftice, au contraire fomentoient les divifions,
les complots, & les projets à proportion de l'utilité particulière qu'ils pou-
voient en efpérer pour l'accroi/Ternent de leur Autorité & l'augmenta-
tion de l'Etat Eccléfiaftique. De même, lorfque la France s'eft trouvée
en état d'ufer, pour ainfi dire, de reprefailles envers la Maifon d'Autri-
che, la Conduite de la Cour de Rome n'a point été celle d'une Cour de
Juftice, qui s'emploie à régler les Intérêts des Parties félon l'équité, & à
maintenir entre les Souverains une Correfpondance Chrétienne. Dans les
Alliances étroites des deux Maifons, dans les Prétentions, dans les Guer-
res, dans les Traitez de Paix entre les Couronnes de France & d'Ef-
pagne,
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. ^7
pagne, les Papes n'ont eu d'autres vues que celles de leur propre Inté- Affaires
rct. lis fe font donné beaucoup de mouvement pour éloigner la Guerre GfN- DE
de l'Italie} mais, il s'en faut beaucoup qu'ils n'ayent fait ce qu'ils auroient L^RO"
dû & ce qu'ils auroient pu , pour arrêter & prévenir les fuites facheufes '—
des Prétentions réciproques de la Maifon d'Autriche & de celle de Fran-
ce fur la Monarchie d'Efpagne.
Les autres Princes d'Italie en ont ufé à peu prés de la même manière.
Tous fe font fort remuez pour obtenir une Neutralité; fans confidérer,que
tôt ou tard ils auront à répondre à la Partie qui demeurera viclorieufe.
11 eft vrai que le Duc de Savoye n'efl pas relié dans l'indiférence, &
qu'il s'elt mêlé bien avant dans les tems de Guerre; mais, quel a été
fon Motif? Lors qu'il a efpéré de l'avantage du Parti de la Maifon d'Au-
triche, il s'elt déclaré contre la France; & lorfque la France lui a fait
des conditions félon Tes defirs , il eit devenu GeneralilTime des Trou-
pes de France contre la Maifon d'Autriche. Telle a été ordinairement
la Conduite des Ducs de Savoye à l'égard des DifFérens entre les deux
Maifons.
Ces difpofitions de l'Italie, uniquement intereflee pour fe ménager
quelqu'avantage particulier , ou pour jouir d'un repos préfent, & indif-
rente pour la tranquilité publique de toute l'Europe , a été caufe que
Louis XIV. Roy de France, étant réfolu de faire valoir fes Prétentions
fur la Succeiïîon à la Monarchie d'Efpagne, n'a point confulté les Prin-
ces Italiens, ni même le Pape, qui fans doute devroit être l'Arbitre de
toutes les Prétentions des Souverains, s'il avoit en effet les principes
de l'équité & du defintérefTement d'un Père commun & d'un Palteur,
qui fe tient établi Chef de TEglife univerfelle de Jefus-Chrifl. La Ré-
publique des Provinces-Unies des Pais-Bas , & Guillaume III. Roy de la
Grande-Bretagne, n'ayant eu rien plus à cœur que d'entretenir un équilibre
entre la Maifon d'Autriche & celle de France , & n'ayant rien négli-
gé de ce qui pouvoit accommoder leurs différens , & rétablir la tran-
quilité <}e l'Europe, font en dernier lieu entrez en Ligue, avec la Fran-
ce, afin de prévenir, s'il eft poffible, les difputes entre les deux Mai-
fons , les ombrages des autres PuifTances , & une Guerre à naître à l'ou-
verture de la Succeflion de Charles II. en état de mort prochaine fans
Enfans; furquoy les Princes d'Italie doivent obferver:
5". Que le Roy de la Grande-Bretagne, & les Seigneurs Etats Géné-
raux, dans le Traité ont eu généralement égard au bien de toute l'Euro-
pe, n'ayant recherché aucun avantage particulier pour leurs Etats. Si
l'on demande pourquoi l'on n'a pas ajugé à la France les Païs-Bas auffi-
bien que lesPaïs d'Italie? On répondra, que la France a des Prétentions
plus fortes fur Naples, Sicile, & le Milanois, qu'elle n'en peut avoir fur
les Païs-Bas. Que ces Pais n'étant pas fufifans pour éteindre les Préten-
tentions de la France , il éioit plus à propos de lui afîigner ce qui fe
trouvoit en Italie décaché de l'Efpagne , & féparé des Etats de la Fran-
ce ; Que les Païs-Bas étant contigûs à la France , les fept Provinces-
Unies,
S6$ MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Hollande aïant toujours été d'aréter les Entreprifes illégitimes de la Fran-
ce, il importe à toute l'Europe, & à la Maifon d'Autriche en particulier,
que ces deux Puifîances fe trouvent le plus qu'il e(l pofîible hors de la
portée des armes de Sa Majefté Très C. Que les Païs-Bas confervez
à la Maifon d'Autriche feroient toujours foutenus par les Provinces-
Unies , & que l'Italie en cas de befoin feroit plutôt fecouruë par les
Païs-Bas , par les Provinces- Unies , & par l'Angleterre, que ces Puif.
fances ne pouroient efpérer du fecours de l'Italie ; enfin , que le mo-
tif de Religion qui porte les Italiens à préférer la ruine de l'Angleterre &
de la Hollande à leur confervation, a été une raifon très-légitime & très-
preflante pour ces deux PuifTances de veiller à leur propre feureté, en
ménageant ce qui peut convenir de mieux à la tranquilité publique de
toute l'Europe.
Si les raifons, raportées touchant l'équité & la néceiîké du Partage des
Etats de la Monarchie d'Efpagne, peuvent être bien fondés, il n'y aura
aucune PuiiTance qui puiife defaprouver, que le Traité ait été conclu
fans fa participation; parce qu'il ne s'agit point ici de droit de fupériorité
ni de prérogative d'honneur, ni d'aucun profit réel. Ce font les Préten-
tions des deux Maifons d'Autriche & de France, qu'il efl queftion de ré-
gler pour le mieux, à la fatisfaction de l'une & de l'autre, & félon que
toute l'Europe peut defirer pour la tranquilité générale & particulière
de tous les Etats. Supofé donc que le Traité ait pourvu à tout, autant
que cela étoit poflîble, ne doit-ce pas être un très-grand contentement
pour tous les Souverains qui n'ont qu'à accepter & garentir un Traité qui
fe trouve abfolument tel que la Conjoncture des Affaires de la Succefîion
d'Efpagne le peut exiger , pour accommoder les difputes &? les différens , &?
prévenir une nouvelle Guerre dans l'Europe?
ARTICLE VI.
Ladite Couronne d'Efpagne & les autres Royaumes , //les , Etats , Pais , &?
Places que le Roy Catholique poffede préfentement tant dehors que dedans f Eu-
rope feront donnez & affgnez au Sereniffîme archiduc Charles fécond Fils de
ï 'Empereur , à l'exception de ce qui a été donné dans f Article quatrième qui
doit compofer le Partage de Monfeigneur le Dauphin , £5? du Duché de Milan
en conformité dudit Article quatrième , en toute propriété & poffeffwn pleniere en
partage , (jj exjlinclion de toutes fes preténfions fur ladite Succcffion d'Efpagne
pour en jouir, lui, fes Héritiers & -Succcfjeurs nez & à naître à perpétuité,
fans pouvoir être jamais troublé fous quelque prétexte que ce joit de droits ou
de pretenfons direclemcnt ni indirectement, même par ceffion, appel, révolte,
ou autre voye de la part du Roy Très-Chrêtien , de Monfeigneur le Dauphin ,
ou
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 56>
eu de fes Etoffas Mâles , ou , &c. moyennant laquelle Couronne £ Ef pagne &f les Affairzs
autres Royaumes , /fies, Etats, Pais, & Places qui en dépendent , l'Empereur GEN- DE
/#«/ ?« [on propre non quen celui du Roy des Romains , du. Sérénifjime Archi- L ^"i'°"
duc Charles [on fécond Fils , des Archiduchcffes fes Filles , fes Enfans , /<?«;-;
Enfans Mâles, ou, &c. comme auffi le Roy des Romains pour lui , & le Se-
remffime Archiduc Charles des qu'il fera Majeur pour lui-même , leurs En-
fans , &c. fe tiendront fatisfaits ; que ledit Sérénifjime Archiduc Charles ait ,
en exfiinclion de toute * leurs Prétentions fur la Succefjlon d Ejpagney ladite Cef~
Jion faite ci-deffus , & ledit Empereur tant en fon propre nom quen celui du
Roy des Romains renonceront , lorfquils entreront en ce prélent Traité & quils
le ratifieront , fc? le Seréni finie Archiduc Charles dés qu 'il fera Majeur, à tous
autres Droits & Pretenfons fur les Royaumes , //les, Etats, Pais, & Places
qui compofent les Partages fj? les Portions afjïgnez ci-deffus à Monfeigncur le
Dauphin , de celui qui aura le Duché de Milan par échange de ce qui fera donné
à Monfeigneur le Dauphin , .&? que de tout cela ils feront expédier des Actes fo-
lemnels dans la plus forte £5? la meilleure forme quil fe pourra, fç avoir ï Em-
pereur &? le Roy des Romains , quand ils ratifieront ce préfent Traité , £s? le Se-
reniffime Archiduc des quil fera Majeur , lef quels feront délivrez à Sa Majeflé
Britannique rj? aux Seigneurs Etats Généraux.
i. Cette Difpofirion de la Couronne d'Efpagne & de tous les Païs pofle-
dez par le Roy Catholique tant dedans que dehors de l'Europe, aflignez
à un Héritier de la Maifon d'Autriche, ell une Preuve que le Roy de la
Grande-Bretagne & les Seigneurs Etats Généraux ont eitimé que le droit
de prétention de cette Maifon à la Succeflion d'Efpagne ell fupérieur à
celui que la Maifon de France peut y avoir; & Sa Majefté Très-Chré-
tienne & Monfeigneur le Dauphin en font eux-mêmes tombez d'accord ,
lors qu'ils ont demandé & fe font tenus fatisfaits d'avoir une médio-
cre partie de cette Succefllon en extinction de tous leurs droits & pré-
tentions.
2. La France doit être cenfée convenir elle-même du droit des trois Puif-
fances pour le Partage de la Monarchie d'Efpagne; & en particulier elle
doit être cenfée reconnoître l'Angleterre & la Hollande pour Juges &
Médiatrices; puifque, de concert avec elles, elle régie & accepte ce qui
doit lui appartenir, & ce qui doit appartenir à la Maifon d'Autriche.
3. Dans les Médiations & dans les Traitez ordinaires il faut le confen-
tement de toutes les Parties intéreffées; de manière que fi une Partie ne
veut pas convenir du choix des Médiateurs , ou fi elle ne veut pas s'en
tenir aux articles arrêtez par le Traité, les autres ne peuvent être liées
par aucun engagement. Mais, il en elt tout autrement à l'égard de ce
Traité. L'Emptreur Chef de la Maifon d'Autriche, & Louis XIV. Chef
de la Maifon de France, ont des Prétentions fur la Succefllon d'Efpagne.
Pour prévenir une Guerre le Roy de France, & le Dauphin fon Fils fe re-
mettent de leurs prétenfions au jugement du Roy de la Grande Bretagne
& des Sgrs. Etats Généraux , enluite de qtioy les trois PmlTances, indé-
pendament de Sa Majelté Impériale, concluent un Traité de Partage de
Tome XL Ce ce la
l'Euro-
pe.
570 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires la Succeflion d'Efpagne entre la Maifon d'Autriche & celle de France. Par
gen. de conféquent , l'Empereur efl: abfolument libre d'accepter ou de rejetter le
Traité. Mais, au contraire, que le Traité fuit accepté ou rejette par
l'Empereur , le Roy de France & le Dauphin demeurent toujours indifpen-
fablement engagez à l'obferver fuivant les conditions arrêtées par eux-
mêmes avec Sa Majefté Britannique & les Sgrs. Etats Généraux des Pro-
vinces-Unies des Païs-Bas.
Quant au Partage aiïigné à la Maifon d'Autriche, en premier lieu, il
efl: fait en faveur du Sereniflîme Archiduc Charles fécond Fils de Sa Ma-
jelté Impériale, à l'exclufion de l'Empereur & du Roy des Romains fon
Fils aine. Cette Difpofition efl; la même que celle du Teftament de Phi-
lippe IV. Roy d'Efpagne, lequel exclut de fa Succeflion l'Empereur & le
Roy des Romains, comme Héritier préfomptif de la Couronne Impé-
riale.
Si les Peuples étoient capables de s'accorder bien les uns avec les au-
tres, & de régler leurs intérêts de manière que chacun put être content,
il n'y auroit point de Souverains. Et fi un Souverain étoit capable de
gouverner fagement & de faire obferver les régies d'une parfaite équité en-
tre divers Peuples, le Monde entier pouroit être gouverné par un feul
Souverain. Les grands Empires n'ont fubfifté qu'autant que la bonne in-
telligence s'eft confervée entre le Souverain & les Peuples. Le mécon-
tentement des Princes d'Allemagne leur a fait embrafler les Intérêts de
Ferdinand contre les Pourfuites de Charles-Quint fon Frère, pour bif-
fer l'Empire & l'Efpagne réunis en la Perfonne de Philippe III. fon Fils
unique.
Pour prévenir l'ombrage des autres Etats de l'Europe Philippe IV.
fubftitua à Charles II. fon Fils, en cas de mort fans Enfans, un Prince
de la Maifon d'Autriche , le quel ne dût point être Empereur. C'eft par
la même raifon que les trois PuhTances ont aiïigné à l'Archiduc Charles
ce que la Maifon d'Autriche doit prétendre de la Succeflion d'Efpagne.
En fécond lieu, le Partage en faveur de la Maifon d'Autriche efl: telle-
ment confidérable, que l'Archiduc fe trouve encore en état de pouvoir
être le plus puuTant Monarque de l'Europe en étendue de Païs, en fer-
tilité & en richefTes de Terrain, en commoditez pour le Commerce ,& en
forces pour fe faire redouter par les autres PuhTances de l'un & de l'au-
tre Monde.
En troifiéme lieu , il a déjà été remarqué que les Païs démembrez de la
Monarchie d'Efpagne, & aiïignez au Dauphin de France, font plutôt des
fujèts de Guerre inévitable retranchez, qu'une diminution de grandeur
& de puiffance. Que le Sereniflîme Archiduc, devenu Roy d'Efpagne,
fâche rendre fes Peuples laborieux, qu'il préne foin de repeupler les vaf-
tes Etats , qu'il établifle un bonne difcipline parmi tous les Ordres de fa
Monarchie ; on reconnoîtra bien-tôt que les Païs aiïignez à la France ne
font pas fufifans pour la mettre en état d'entreprendre quelque chofe au
prejV
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC I. 57i
préjudice de l'Efpagne, & qu'au contraire la France avoit befoin de ce Affaires
renfort pour fe garentir d'infulte de la part d'un Ray Catholique. GfN- DE
Quelqu'avantageufe que puiffe être cette difpofition du Partage afligné
au Serenifiime Archiduc Charles, il étoit neantmoins fort à croire que
l'Empereur fon Père n'en feroit pas fatisfait. Sa Majeflé Impériale préten-
doit que la Succefllon entière devoit apartenir de droit inconteltable à fes
Defcendans, après la mort de Charles IL Roy d'Efpagne. Cependant
en voilà une partie qui leur efl enlevée, en pleine paix, du vivant-mê-
me du Roy Catholique, par Louis XIV. Roy de France & le Dauphin
fon Fils, apuyez du confentement & de la garantie de Guillaume III.
Roy de la Grande Bretagne & des Seigneurs Etats Généraux des Pro-
vinces-Unies des Pais-Bas, deux PuifTances qui n'ont aucun droit fur la
Succeffion d'Efpagne, & qui d'ailleurs ont été fortement attachées aux
intérêts de la Maifon d'Autriche, pendant les dernières Guerres contre
la France.
Ces Confidérations femblent avoir dû naturellement caufer de la fur-
prife & du mécontentement à Sa Majeflé Impériale. Mais ceux, qui fe
plaifent à former des raifonnemens fur ce qu'ils voient arriver, doivent
le donner de garde de ne point parler avec trop de précifion touchant
les matières traitées dans le cabinet des Princes; parce qu'en effet il y a
mille particularitez qui ne viennent point à la connoiflance du Public. Il
paroit, par exemple, que ce Traité de Partage a été fait fécrétement
entre la France , l'Angleterre, & la Hollande, fans la participation de l'Em-
pereur & du Roy d'Efpagne ; il peut toutefois y avoir eu des démar-
ches & des négociations, lefqueîles, fl elles étoient connues , on trou-
veroit que Sa Majeflé Impériale & Sa Majeflé Catholique n'ont dû ni
être furprifes ni mal-fatis faites. Ainfi, fans vouloir trop aprofondir les
fecrêts de la politique particulière des Princes , il faut s'en tenir à des ré-
flexions générales fur ce qui peut être connu de tout le monde.
i. Chacun connoit la jaloufie qui efl entre la Maifon d'Autriche & la
Maifon de France. Cette jaloufie commença de parvenir à fon fupreme
degré fous les Régnes de François I. Roy de France & de Charles-
Quint Roy d'Efpagne. Ils étoient montez fur le Trône prefqu'au même
temps en ipf. François à 22. ans, & Charles à iy. Us eurent l'un &
l'autre des difpoiitions extraordinaires pour le Gouvernement ; mais ,
François I. aima toujours la Paix , & ne fit la Guerre que pour défen-
dre fes Etats , ou pour recouvrer ce qui luy apartenoit légitimement:
L'Empire étant venu à -vacquer , il follicita les fufrages des Electeurs
par des voyes naturelles à un Roy dont les Ancêtres avoient acquis
l'Empire d'Occident. Charles au contraire employa tous- les moyens
imaginables pour agrandir fes Royaumes 5 a 19. ans il fe fit élire Em-
pereur à l'exclufion de François I. il luy fufcita des Guerres continuelles:
il luy enleva le Milanois: après qu'il eût été fait prifonnier à la batail-
le de Pavie, il le fit amener à Madrid , & luy fit plufieurs traitemens
Ce ce 2. indi-
$72 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires indignes pendant une longue pnTon ; & ne le relâcha qu'après avoir exi-
gen. ue g^ une Renonciation «aux Souverainetez de la Flandre , & de l'Artois, &
l'Euro- aux pretentjons de la France fur Naples & fur Milan. Enfin , il mit en ufa-
ge tout ce que la rufe ait pu imaginer & la force exécuter pour ruiner la
France. Philippe II. , Fils unique de Charles-Quint , & fon Succeffeur à
la Monarchie Efpagnole , pourfuivant les deffeins de fon Père contre la
France, employa des fommes immenfes & toutes les intrigues poiïibles,
pour profiter de la foibleffe & du mauvais ordre du Royaume fous les Rè-
gnes de François 1 1. Charles I X. & Henri 1 1 1.
Mais, la face des afTaires ayant changé fous Henri IV. Roy de Fran-
ce , Philippe III. Philippe IV. & Charles II. Roys Catholiques ont été
obligez de le précautionner contre les deffeins , & de fe défendre contre
les attaques de Loïs XIII. & de Louïs XIV. Roys Très-Chrétiens. La
Politique de Charles-Quint a été introduite dans le Confeil de France par
le Cardinal de Richelieu, premier Miniftre fous Louis XIII: elle a été
continuée fous le Miniltére du Cardinal Mazarin au commencement du Ré-
gne de Louis XIV; & s'étant toujours rafinée de plus en plus, elle a pro-
duit tous les grands effets , qui ont étonné le monde depuis longues an-
nées.
Les Maximes de cette Politique de Charles- Quint font, une délicate^
fe extraordinaire pour le point de Souveraineté, un defir extrême de s'a-
grandir, un grand foin de ménager dans le Public une réputation de Reli-
gion, dejuftice,& de bonne-foy, une prévoyance aflîdue pour difpofer
& amener les évenemens, autant que la prudence humaine le peut per-
mettre , & une prompte diligence pour fçavoir profiter des occafions.
2. Les Entreprifes & les Intrigues de la Maifon d'Autriche ayant re-
veillé l'émulation de la Maifon de France, il étoit naturel que les démar-
ches du Roy de France au préjudice de la Maifon d'Autriche rendirent
les Princes de cette Maifon plus éclairez & plus vigilans pour la con-
fervation de leurs propres intérêts. Si les indifpofitions de Philippe
IV. & les infirmitez de Charles II. Roys d'Efpagne ont été favorables
à la France gouvernée par un Monarque plein de vigueur & de fanté,Sa
Majeité Impériale avoit affez de difpofitions avantageufes pour veiller
aux intérêts communs à toute la Maifon d'Autriche j & plus l'état de
Charles II. devenoit languiffant, & plus l'Empereur étoit obligé d'être
attentif & de prêter la main aux Affaires d'Efpagne.
3. Leopold I. Empereur prefentement régnant a eu des motifs très-
particuliers pour obferver les deffeins & les démarches de la France.
Ferdinand III. Empereur étant decedé le 2. Avril 1657. Louis XIV. Roy
de France avoit traverfé de tout fon pouvoir l'Eleclion de Leopold Frère
du défunt; &,fous le prétexte d'apuyer les mecontentemens des Elec-
teurs & des Princes d'Allemagne, il avoit fortement follické pour em-
pêcher que le Diadème Impérial ne demeurât plus long-temps fur la
tête des Princes de la Maifon d'Autriche. Si les fol incitations n'eurent pas
tout leur effet, au moins l'Ele&ion fut diferée jufqu'au mois de Juillet de
1652,
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 575
16 f%. & le 4. Juin précèdent a voie été faite la célèbre Capitulation de Amiiui
Francfort , fi avantageufe à la France. Le nouvel Empereur la figna le GEN- DE
18. Juillet: Il s'y oblige au XIII. Article de riaffiflcr en aucune manière que
ce [oit , d 'Armes , d'Argent, de Troupes, ou de Munitions , & de ne favorijer
aucunement les Ennemis de la Couronne de France , qui font hors de f Empire, pre-
fens ou futurs, fous aucun prétexte ou rai (on que ce [oit , de Différent ou de Guer-
re contre ladite Couronne. L'Article XIV. eft encore plus précis j c'eit l'Em-
pereur qui parle. Et de peur même que nôtre chère Patrie ta Nation Alleman-
de, ou nous-mêmes , ne J oyons enveloppez dans de nouvelles querelles, nous ne nous
mêlerons nullement dans les Guerres que ïon fait prefentement en Italie £s? dans
le Cercle de Bourgogne, & ne ferons la Guerre , ni pour nous comme Empereur ,
ni pour nôtre Maifon, contre la Couronne de France , ni fe s Alliez dans ladite Ita-
lie, 13 dans le Cercle de Bourgogne-, moins encore envoyerons-wus , fous aucun
prétexte de Guerre que ce puiJJ'e être , du fecours à fes ennemis , fait en 'troupes ,
argent , ou armes , foit en autre chofe , ni ne les favori ferons ou ajfjlerons en
aucune manière que ce Joit , pourvu que d ailleurs la Couronne de France 13 fes
Alliez n'envoyent , ni ne fajfent envoyer, aucun fecours en Troupes , en argent , en
armes, ou en autre manière que ce Joit à nos ennemis ou à ceux de l'Empire ,
aux ennemis de nôtre Maifon Allemande, ou &c.
La principale vue de la France étoit d'empêcher que l'Empereur ne
pût fecourir Philippe IV. Roy d'Efpagne, lequel déjà vieux & infirme,
n'ayant des enfans que très-jeunes , fut engagé de faire le Traité de Paix
des Pyrénées avec la France en 1659. & de donner l'Infante Marie-The-
refe fa Fille en Mariage à Louis XIV. Roy Très-Chrétien.
4. La France ayant commencé en 1667. de faire infirmer les A6f.es
les plus folemnels & les plus Authentiques , qui ayent pu être faits de la
Renonciation de Marie-Therefe à tous Droits de Succetfion à la Couron-
ne d'Efpagne en qualité de Reine de France, l'Empereur, Chef de la
Maifon d'Autriche, & Héritier prefomptif de la Monarchie Efpagnole pour
foi ou pour fes Defcendans , devoit fe mettre en pofture de faire enten-
dre à Sa Majefté Très-Chretienne que la Maifon d'Autriche auroit , en
cas de befoin, des épées auffi bonnes que les plumes des Jurifconfultes
d'Efpagne , pour maintenir fes Droits contre les Pretenfions de la France.
Il faloit dès ce moment étudier toutes les mefures du Confeil de Louis
XIV. pour attirer les autres PuiiTances dans fes intérêts, & les déconcer-
ter; & comme la France devenoit plus entreprenante & plus emprefiee
à proportion du fuccès de fes Négociations & de fes Armes, Sa Majefté
Impériale & fon Confeil dévoient aufii de plus en plus fe reveiller, crain-
dre, & fe précautionner contre un fâcheux avenir.
5. En 1671. l'Empereur s'étant trouvé veuf fans Enfans mâles, n'a-
yant qu'une Fille de l'Impératrice fa première Femme, fut obligé de s'op-
pofer au deffein que Louis XIV., rempli de grandes efperances par le
fuccès de fes Armes en Hollande , avoit formé, pour faire en forte que
le Daufln fon Fils fut élu Roy des Romains. Le Mémoire, contenant
les offres faites par Sa Majefté Très-Chrétienne à i'Ele£teur de Brande-
Cccc 3 bourg
p,
PE.
j74 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires bourg, pour obtenir Ton fuffrage, fut remis entre les mains de Sa Majeflé
gkn.de Impériale parle Prince d'Anhalt. Cette aplication & cette activité du
l'Euro- Confeil de France pour ne rien épargner dans les occalions, où il femble
y avoir quelque forte d'avantage à eiperer , devoit engager l'Empereur à
terminer inceflament cous mécontentemens entre les Princes de l'Empire,
à leur ôter tout prétexte de favorifer les intentions de la France , à les en-
tretenir dans une union très-étroite pour maintenir leurs intérêts communs,
& à s'affurer de leur fidélité & leur zèle pour foutenir les Droits attachez à
Sa Perfonne en qualité d'Empereur, & en qualité d'Héritier Prefomptif
de la Maifon d'Autriche pour foy , ou pour fes Defcendans.
6. L'Allemagne, l'Efpagne, & la Hollande s'étant trouvées en Armes
contre la France en 1674. & fur-tout en 1688. Guillaume III. Prince
d'Orange étant monté fur le Trône d'Angleterre, & la plupart des Prin-
ces de l'Europe étants liguez contre les François , Sa Majeflé Impériale
avoit, pour ainfi dire, l'occafion en main; & ii fon Confeil avoit été au-
tant éclairé & autant zélé pour les intérêts de la Maifon d'Autriche , com-
me celui de France pour la gloire de fes Roys, il eft certain que toutes les
mefures prifes par Louis XIV. & tous les grands avantages que Sa Ma-
jeflé Très- Chrétienne avoit remportez fur la Maifon d'Autriche depuis la
Paix de Munfler & le Traité des Pyrénées, auroient pu être entièrement
renverfez.
11 n'étoit pas difficile de remarquer que les bons fuccès de la France dé-
voient être atribuez à des foins continuels pour amafTer des Trefors,à des
Troupes extraordinairement nombreufes, également bien difeiplinées & en-
tretenues, toujours prêtes à entrer en action; & à des Négociations aflï-
dues pour ménager, ou par belles paroles, ou par menaces, ou par argent,
les autres PuifTances de l'Europe. Auroit-il été impoiiible à Sa Majeflé
Impériale d'ufer d'une femblable Politique, mais plus équitable & plus fin-
cere, pour déconcerter les mefures du Confeil de France? Les Princes
Alliez & les Generaux-mêmes de l'Empereur n'ont point ceffé de fe plain-
dre, de ce que les Troupes Allemandes ne pouvoient être prêtes à
temps ; & de ce que l'Argent & les Munitions manquoient toujours au
befoin.
Une féconde caufe des grands fuccès du Roi de France a été la fubor-
dination parfaite entre Sa Majeflé & fon Confeil, entre les ordres précis
de ce Monarque, & leur exécution poncluelle par les Minières & Officiers
Généraux & Subalternes & généralement par tous les Soldats & les Peu-
ples de fon obeiffance. Il étoit fans doute très-difficile qu'il fe rencontrât
une auffi parfaite conformité de commandement & d'exécution parmi les
Alliez. Cependant, fi Sa Majeflé Impériale , comme Chef de la Ligue,
avoit eu toute l'exaclitude & la févérité néceffaires pour les mefures , les
délibérations, les ordres, & les exécutions, que les diverfes conjonctures
pouvoient requérir de fon Confeil & de toutes perfonnes qui lui étoient
immédiatement fujettes, cet exemple au'rnic été une régie pour tous les
autres Souverains Conféderez. Et n'efl-il pas apparent qu'une jufle cor-
refpon-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
S7f
GF.N. DE
l'Euro-
pe.
refpondance entre tous les Membres de la Ligue auroit pu obtenir l'ifiué Amiar.s
qu'ils s'étoient propofée , en s'uniflant les uns avec les autres? L'Empe-
reur travailloit à des Conquêtes fur le Turc , pendant qu'il étoit beaucoup
plus important de reprendre fur la France ce qu'elle avoit enlevé à l'Em-
pire. Les Généraux Allemands en Italie ne fongeoient qu'à ménager cer-
tains intérêts particuliers à la Maifon d'Aûtricbe ou à l'Empire, & négli-
geoient ce qui étoit de principal pour la Caufc commune. D'où il efl ar-
rivé que les plus grands efforts des autres PuifTances Confédérées, n'ayant
pu empêcher la France de faire des progrès confidérables , il a fallu
enfin en venir à des Traitez toujours préjudiciables à la Maifon d'Au-
triche.
7. Les Traitez de Paix font des événemens plus en la difpofition du
Souverain que les actions de la Guerre. Ya-t-il Souverain qui puhTe ab-
folument compter fur l'expérience infaillible d'un Général & fur la valeur
intrépide de fes Soldats? Y en a-t-il qui puifTe aucunement prévoir mille
circonflances qui font allez fouvent le gain des batailles? Mais, pour ce qui
regarde les Négociations d'une Paix ; qu'il arrive à des Plénipotentiaires
de manquer d'habileté , ce défaut peut être réparé par le Souverain ; puis
qu'il peut prendre une connohTance exacte des intentions, des intrigues, &
de la conduite de fon Ennemi , envoyer les Inllructions fuffifantes à fes
Miniftres , & qu'il efl toujours le maître de rejetter ou de conclure les Ar-
ticles d'un Traité.
Ce fut la France , qui, dans la dernière Guerre, parla la première de
Paix: elle en fit femer des Propositions de tous cotez: elle mit tout en
ufage pour parvenir à la conclufion d'un Traité. Ceux, qui ont cru qu'el-
le étoit épuifée d'argent & de forces , fe font beaucoup abufez. Elle é-
toit encore en état de fournir plufieurs campagnes & de remporter des
victoires. Mais , entre plufieurs raifons qui l'obligeoient à rechercher la
Paix, la plus forte étoit, qu'il y avoit plus à gagner par les Négociations
que par les Armes. Les infirmitez du Roy d'Efpagne étoient fi confidéra-
bles, qu'on ne pouvoit plus douter que la fin de la vie de ce Monarque
n'étoit pas fort-éloignée. Si Sa Majeilé Catholique fut venue à mourir en
un temps, où la Maifon d'Autriche fe trouvoit liguée avec les principales
PuifTances de l'Europe contre la France , il eil certain qu'il eût été pref-
que impofiible au Roy Très-Chrêtien & à Mgr. le Dauphin de faire va-
loir aucune de leurs Prétentions fur la Succeffion à la Monarchie d'Ek
pagne. Ainfi, le principal Intérêt de la France étoit de rompre la Ligue,
& de changer les difpofitions des PuifTances Alliées de la Maifon d'Au-
triche.
Le Duc de Savoye étoit entré des derniers dans la Confédération , &
il n'avoit eu d'autre vue que de recouvrer ce qui lui avoit été enlevé par
les François. C'eft pourquoi Sa Majefté Très-Chrêtienne jugea fort julte,
que pour féparer ce Prince d'avec les Alliez, il fufifoit de lui faire des
conditions plus avantageufes qu'il n'avoit pu fe les promettre en prenant
parti contre la France. La fufpenfion d'armes , & la neutralité accordées
enfui-
5-5 MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
Affaires enfuite pour le Milanois & les Païs d'Italie, étoient des démarches pour
gen. de aCquerir les bonnes gr tces du Pape & des Princes Italiens, & pour cqiïï-
i.'Euko- mtnccr $ fe ménager des partifans dans le Confeil d'Efpagne , en même
rEV .. temps qu'elles procuroient la réunion des Troupes de France pour agir a-
vec plus d'effet contre la Ligue.
L'ahandonnement du rétabliffement du Roi Jacques , & les offres faites
à l'Angleterre & à la Hollande pour une Paix particulière n'eurent point
de fuccès ; parce que ces deux Puiflanccs, n'ayant foutenu la Guerre que
pour maintenir les intérêts communs, n'étoient point capables de la termi-
ner par quelque profit particulier.
Enfin la France ayant befoin de la Paix à quelque prix que ce fût,
elle confentit à des amples Reflitutions en faveur de l'Efpagne, préten-
dant bien qu'elles lui tiendroient lieu de mérite auprès du Gouverne-
ment; & s'attacha uniquement à retenir Strasbourg & le plus qu'il lui
fut pofîible de fes Conquêtes fur L'Empire. Par ce moyen, elle efpéroit
ménager l'efprit des Efpagnols & fortifier Çts Frontières du côté de
l'Allemagne.
Non-feulement la France s'étoit propofée de féparer les Alliez , mais
encore de les mettre en mauvaife intelligence les uns avec les autres. Le
Duc de Savoye étoit devenu ennemi déclaré de la Ligue par la Qualité
de Généraliflime des Troupes de France en Italie. L'Angleterre & la
Hollande fe feroient rendues odieufes, fi elles avoient accepté des offres
particulières au préjudice des autres Alliez. Les amples Reflitutions faites
à l'Efpagne difpofoient les Peuples à ne vouloir plus rifquer de nouvelles
pertes en fe déclarant contre la France. Enfin les principales vues , & qui
réuffirent le mieux , furent à l'égard du Traité avec l'Empereur & l'Empire. La
France fit des Propofitions plus avantageufes à la Maifon d'Autriche en parti-
culier qu'aux Etats de l'Empire en gênerai , à deffein de faire naître du mécon-
tentement entre les Membres & le Chef; & en dernier lieu , elle fit in-
férer à la fin de l'Article IV. une claufe conçue en ces termes ; la Religion
Catholique-Romaine néanmoins demeurant dans lesdits lieux âinfi rétablis clans
Vétat auquel elle efi à préjent. Cette claufe laiffoit à la France un prétex-
te pour continuer diverfes hoftilitez fur les Frontières de l'Allemagne;
comme il a été exécuté dans le Montbéliart & dans le Palatinat, & pro-
duisit des femences de plaintes, de defunion, & d'animofitez entre les
Princes Proteilans & les Princes Catholiques-Romains ; de manière que
la Paix même de la France avec l'Allemagne auroit allumé une guerre ci-
vile dans l'Empire, fi les Etats Proteftans n'avoient pas eu plus de mo-
dération que ceux de la Communion du Pape. Il eil bien aparent que le
Roi Très-Chrêtien avoit fort à cœur de faire naître cette guerre civile;
puis que, fans la participation de Sa Majeflé Impériale ni des Princes Ca-
tholiques Romains, il a fait commettre de grands defordres par fes Sol-
dats & par fes Dragons, en exécution de la Claufe pour le maintien delà
Religion Romaine dans les lieux reflituez, pendant qu'il ne fongeoit nul-
lement
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. ST7
lement à la reftitution de plufieurs Places importantes rendues à l'Empire Aaaaraw
par le Traité de Paix. gen. de
Quelle qu'ait pu être la Conduite de la Cour, de France dans le Traité L'EuR0"
conclu à Ryswick , je ne voy pas qu'il y ait lieu de s'en plaindre. Sa Po- !*
litique n'étoit point allez rafinée pour tromper ceux qui ne le vouloienc
pas être , & qui n'étoient point aifez aveugles potur préférer de faux inté-
rêts particuliers aux véritables intérêts communs. Depuis le Miniftére du
Cardinal de Richelieu, la France s'étant confirmée dans les vaftes projets
de s'agrandir de toutes parts, on peut dire avec. vérité qu'elle n'a confer-
vé aucun égard d'Amitié fïncére pour aucune autre Puiflance. Elle les a
regardées toutes comme devant en quelque manière lui être vaflalles ou
ennemies. C'eft fur ce pied que la France a toujours traité avec les au-
tres Etats , & d'une façon fi fenfible , que dans les circonftances -, où elle
a femblé être la mieux intentionnée , & même avoir le plus befoin des au-
tres, elle a toujours fait paroitre des marques de hauteur & de difïimula-
tion, contre les quelles il étoit nécefTaire de demeurer en méfiance & de
prendre de grandes précautions.
L'Empereur & la Maifon d'Autriche ne doivent poine méconnoître que
la Politique de la France eft celle que Charles-Quint a pratiquée pendant
fon régne, & dont il a donné les inilrudtions de ion vivant à Philippe II.
fon fils } ainfi, il leur feroit peu utile d'en former des plaintes} mais, s'ils
n'en font pas fatisfaits , il faut la combattre & travailler à la renverfer de
fond en comble par des voyes de droiture & d'équité.
Il y avoit plufieurs moyens pour retenir le Duc de Savoye dans le parti
de la Ligue. Si les Généraux Allemands avoient eu le foin qu'ils dé-
voient avoir pour s'oppofer aux ravages des Païs de Son Alteiïe Royale :
pour empêcher que les François ne pufTent porter le fer & le feu jufques
aux portes de Turin ; s'il y avoit eu une parfaite fubordination entre les
Chefs des Troupes des Alliez en Italie , pour concerter ce qui étoit de
plus-expédient, & faire exécuter les refolutions arrêtées d'un commun ac-
cord ; fi l'on avoit eu pour le Duc divers menagemens & de certaines
déférences qu'il pouvoit prétendre avec juftice ; fi on. lui eut propofé
quelque prérogative d'honneur extraordinaire, n'eft-il pas aparent que les
menaces & les offres de la France n'auroient point été capables de le déter-
miner à une Paix particulière?
Si déplus Sa Majefté Impériale avoit été fort févére pour faire obfer-
\-er une telle difeipline parmi fes Troupes, que les Princes Italiens n'euf-
fent pas fujet d'en être mal fatisfaits, toute la haine de la Guerre feroit
retombée fur les François, & l'Italie auroit conçu & entretenu des -dit
portions favorables pour la Maifon d'Autriche préférablement à celle de
France.
L'Empereur ne manqua pas à la vérité de bien connoitre que plus la
France étoit empreffée à folliciter une Paix générale , & plus il devoit
s'intérefTer pour la continuation de la Guerre ; mai? , ce n'en étoit plus le
temps. Les principales forces de l'Allemagne avoient toujours été em-
Tomc XI, Dddd ploiées
Srt MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Awaires ploiées à des Conquêtes fur le Turc , au profit de la Maifon d'Aûtri-
gen. de che, pendant qu'il n'y avoit eu qu'une médiocre défenfe oppofée aux
l'Euro- jnvaflons des François fur les Pais des Alliez. Les Peuples d'Angle-
FE' terre & de Hollande étoient rebutez par les dépenfes exceiïives qu'ilç
avoient fournies , pour foutenir les intérêts de la Maifon d'Autriche;
la quelle, bien éloignée de prendre des mefures pour une jufte recon-
noiffance envers les Anglois & les Hollandois , fembloit au contraire
confpirer par fa lenteur pour les épuifer & les ruiner. Quelque bon-
nes difpofitions que puffent avoir le Roi de la Grande-Bretagn^& les E-
tats-Generaux des Provinces-Unies en faveur de la Ligue , C étoit une
néceffité abfoluë de prendre foin de l'intérieur de leurs Gouvernemens;
d'autant plus qu'il y avoit très-peu à efpérer des démarches du Confèil de
Sa Majefté Impériale. La Cour de Vienne pouvoit-elle avec juflice fe
récrier contre les projets de Paix , & prétendre qu'on devoit fe repofer
fur les promettes qu'elle donnoit de faire à l'avenir des efforts de guerre
tout extraordinaires contre la France ?
Le Règne du Roi Jacques II. & la Révolution arrivée en 1688. avoient
donné lieu à de grands defordres dans les Finances & dans les principales
Affaires de la Grande-Bretagne. Cependant , la Nation par une fageffe &
par une générofité bien différentes de la politique de la plupart des autres
Peuples, avoit préféré le foin de remplir fes engagemens envers la Li-
gue à celui de remédier entièrement à fes propres befoins. Quelles
nombreufes Troupes d' Anglois paffées au fecours des Etrangers? Quel-
les fommes extraordinaires levées pour les entretenir ? Et quelles obli-
gations les Alliez ne devoient-ils pas avoir à la valeur de ces Trou-
pes? La France étoit fi bien perfuadée qu'elle n'avoit point d'Ennemis
plus redoutables , que fa plus grande aplication étoit d'exciter conti-
nuellement la Nation à faire attention au préjudice qu'elle pouvoit rece-
voir des dépences excefiives & de la quantité de Troupes fournies à des
Alliez, qui fe déchargeoient fur elle du plus grand fardeau de la Guerre,
fans efpérance d'aucune récompenfè. Combien fe trouvoit-il de fortes de
gens intéreffez à foire valoir des Réflexions fi plaufibles en elles-mê-
mes?
La Nation avoit encore un motif plus-preffrnt que ne pouvoit être
celui des Dépenfes & des Troupes ; c etoit la confèrvation de la vie
& de la fanté du Grand Roi que Dieu avoit élevé fur le Trône de la
Grande-Bretagne pour le Rétabliffement de la Religion & des Libertez
du Gouvernement. La grandeur d'ame , la foy des Traitez , le zèle
pour le maintien de l'équité naturelle entre tous les Peuples portoient
ce Prince à prendre tous les foins imaginables pour réveiller , éclairer
& mettre en mouvement les Puiffances Alliées, félon que leurs vérita-
bles intérêts le requeroient : chaque année, il paffoit & repaffoit la
Mer : fes fatigues & fes travaux n'avoient point de relâche : fa Per-
fonne étoit continuellement eypofée hors de fes Royaumes aux injures
des fajjbns , aux hazards de lu Guerre, aux périls des combats , aux
dan-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. 1. fS9
dangers des fiéges & à toutes les occafions auxquelles il falloit, ou pré- Affaire»
venir, ou repouffer, la plus grande furie des armes de la France: l'ab- G™' DE
fence du Monarque & les rifques d'une vie fi prétieufe étoient favora- L ™°'
blés aux Ennemis & aux mal-intentionnez , pour former des complots * — - —
& machiner des confpirations contre le Souverain au retour de fes glo-
rieufes Campagnes. Quels pouvoient & quels dévoient être les fenti-
mens & les affections des Peuples de la Grande-Bretagne , lorfqu'ils
venoient à confidérer que les autres Têtes Couronnées vivoient tran-
quiles en toute feureté dans le milieu de leurs Etats? Si une Providen-
ce finguliére paroiffoit viflblement veiller à la confervation du Monarque
que le Ciel avoit donné pour Chef à la Nation Angloife & à toute la Li-
gue, la prudence humaine exigeoit que les PuifTances Confédérées contri-
buaient tous les efforts poffibles, pour féconder les faveurs du Ciel , &
mettre à exécution les fages confeils que la Providence infpiroit au cœur
d'un tel Chef pour le bien commun de toute l'Europe.
L'émulation & le reffentiment devoient-ils avoir de moindres effets fur
les Princes d'Autriche , que la gloire des Conquêtes en produifoit dans les
Princes de France ? Il eft confiant que les Anglois , après être demeurez
victorieux des attaques particulières des François contre leurs Royaumes,
fans le fecours de la Maifon d'Autriche, ont plus dépenfé & fe font expo-
fez à des pertes plus confidérables en faveur de cette Maifon , qu'ils n'ont
fait pour eux-mêmes. Que cette valeur & cette générofité leur ayent ac-
quis une gloire immortelle, il n'eft pas moins certain que toute cette gloi-
re fe feroit tournée en blâme, fi ils n'avoient eu de jultes égards pour ne
point s'épuifer entièrement , & pour réformer les defordres introduits
dans leurs propres Affaires. La Maifon d'Autriche ayant laiffé échaper
les occafions de la Guerre , les Anglois dévoient profiter de celles de
la Paix.
La Cour de France offroit des Reflitutions fi amples , qu'elles fem-
bloient tourner à fa honte : elle n'étoit pas fâchée qu'il fe trouvât grand
nombre de gens capables de fe laiffer flater de cette honte apparente; ç'é-
toit le moyen de cacher les grandes vues qu'elle méditoit de faire valoir
à l'ombre de la paix. D'autre côté , il étoit facile d'apercevoir que la paix
étoit néceffaire à toute l'Europe, & qu'elle pouvoit être encore plus-utile
aux PuiiTances Confédérées , qu'à la France. La Paix de l'Europe ne
pouvoit manquer d'être fuivie de celle de l'Orient à l'avantage de l'Empe-
reur & de toute l'Allemagne. Le rétabliffement de Commerce pouvoit ré-
parer les pertes & reproduire l'abondance dans l'Angleterre & dans la
Hollande en moins d'années, que la fécondité ne pouvoit renaître dans
les Provinces de France. D'ailleurs le temps de Paix étoit plus propre
que celui de la guerre pour contreminer & faire diffiper en fumée tous les
projets que la France pourroit former.
La plupart des raifons qui engageoient les Anglois à terminer la Guer-
re, y engageoient également les Hollandois. Les deux Nations n'a-
Dddd 2 voient
PE.
S 60 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires voient qu'un même Chef- & la même Providence qui avoit mis les. Cou-
gen. n£ ronnes de la Grande-Bretagne fur la Tète de Guillaume III. lui avoit dès
L'^K° fa jeuneffe confié. le Gouvernement General des Provinces-Unies , pour
arrêter les lnvafions des François & rétablir la République dans fa premiè-
re fplendeur. Les Etats-Generaux connoiffoient fore-bien que la confer-
vation de leur Liberté dépendoit de celle de Sa Majeflé j parce qu'ils a-
voient abfolument befoin d'un Chef dans les conjonctures préfentes , &
outre qu'il n'étoit pas facile d'en choifir un au défaut du Roy Guillaume,
il étoit certainement impoiîible qu'il s'en pût rencontrer aucun d'une fem-
blable fagefTe & d'un femblable mérite. De plus, le Commerce étant pref-
que l'unique fotirce d'où les Provinces puiflent tirer des richeffes & les
commoditez nécefîaires à la vie, fon altération & les pertes caufées par la
longueur de la Guerre inquiétoient les Peuples , & faifoient naître des
plaintes contre la lenteur des Alliez. Il eil d'une extrême conféquence à
des Républiques compofées de plufieurs Provinces , qui n'ont point de dé-
pendence abfoluë les unes des autres , & qui fe trouvent remplies de peu-
ples de divers Nations & de Religions oppofées, de prévenir tout ce qui
peut donner lieu à quelque mésintelligence dans le Gouvernement & à
des foulevements populaires. Enfin , les fommes immenfes avancées à l'Ef-
pagne par la Hollande étoient une matière digne d'une grande attention
pour les Etats-Generaux. 11 faloit toujours fournir de nouvelles avances,
quoique les fonds , bien loing d'être inépuifables , eufTent befoin d'etre
• remplis j afin de fe précautionner contre la France, que l'on fçait avoir ré-
folu en un temps ou en un autre la ruine ou le pillage des Provinces-U-
nies , en vengeance de ce qu'elles ont été un des plus puifTans obflacles à
fes vafles projets. D'autre part, les chutes & rechutes de Charles II. fai-
foient apréhender une Révolution ou de grands changemens dans la Mo-
narchie d'Efpagne : un nouveau Roi pouvoit former divers prétextes &
même devenir Ennemi, afin de ne point acquiter la quantité de Millions
dont la Couronne fe trouveroit redevable à la Hollande : les difpofitions
mêmes des Miniflres Efpagnols encore plus languifîantes & plus-incertai-
nes que la fanté de Sa Majeflé Catholique, avec la prévention de cette
fuperilitieufe Nation en faveur du fuccès des armes de France en Cata-
logne, faifoient afTez juger que de nouvelles fommes prêtées à l'Eipagne
•ne pouvoient être d'aucune utilité pour la Caufe commune, & que la Paix
feroit plus avantageufe, il la France vouloit convenir de Proportions rai-
fonnables, comme elle s'emprefîbit de le perfuader.
C'eil pour cela que Sa Majeflé Britannique, qui avoit été le Confeil &
le Bras de la Ligue pendant la Guerre , prit foin d'abréger les Négocia-
lions, en faifant expliquer le Roi de France avec précifion , & en arrêtant
-les principales conditions à la fatisfa&ion de toutes les Puiffa ne es Confédé-
rées. On pouvoit bien s'en raporter à un Roi qui avoit une. parfaite con-
noifTance des véritables intérêts de chaque Etat 5 qui , non-obitant les be-'
Jbin de Ces propres Royaumes, non-obitant -la perte irréparable de fa glo-
rieufe Epoufe, la Reine Marie de triomphante mémoire, non-obflant les
divers
DE
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. ï. r6i
divers mécontemens qu'il auroit pu refTentir de la conduite des Alliez, Affaires
n'a jamais ceiTé d'expofer fa propre vie à la tète des Armées pendant tou- G™
tes les Campagnes ; qui n'a fait aucune entreprife de guerre ni aucune
condition de paix à ion avantage particulier ou à celui de l'Angleterre, ou
de la Hollande.
J'ay fait un détail de plufieurs motifs qui ont pu engager Sa Majeflé
Britannique & les Seigneurs Etats-Generaux des P. U. de iè déterminer à
la conclufion d'une Paix Générale, quoyque l'Empereur eût plus d'incli-
nation pour continuer la Guerre -, afin de donner plus fenfiblement à con-
noître que les Plénipotentiaires de Sa Majeflé Impériale n'ont pu fans
une très-grande injuitice foufcrire à la cîaufe concernant la Religion an-
nexée au quatrième Article de la Paix de Ryiwkk entre l'Allemagne & la
France, foit à deflein de chagriner tout le Corps des Proteflans & en par-
ticulier l'Angleterre & la Hollande , qui en furent très- mécontentes , &
qui s'y oppoférent, autant que les circonftances du temps le permettaient;
foit par un zélé de Catholicité Romaine entièrement oppofé aux intérêts
& aux intentions de l'Empereur leur Maître.
La Relation de l'AmbafTade Impériale de la Haye, envoyée à la Cour
de Vienne , & communiquée à la Diète de Ratisbonne , fuffit pour four-
nir une pleine Inltruélion fur cette matière. On trouve en premier lieu,
que les Miniiïres de l'Empereur fe jufliflent touchant les plaintes formées
par les Princes de l'Empire contre leur procédé dans les Délibérations &
I\éiblutio>ns concernant les Affaires générales 5 &ils concluent en ces termes.-
Mais il efi confiant aujji , £? l'effet le démontre , que les Minifires de V Empire voyant
qu'il n'y avoit plus rien à obtenir des François , nous ont obligé d'y acquiefeer ; de
forte que tout ce que nous avons traité en général, £f en particulier , a été fait de leur
fçu, âf de leur consentement , & mime fur leurs grandes infiances & empreffementsy
principalement quand ils virent V Empire abandonné des autres Alliez ; £p quand,
félon V opinion de quelques-uns , nous perfifidmes trop à demander une Déclaration des
Préliminaires plus claire fur le rétabliffement de la Paix de Wefiphalie , &f quand
enfuite nous finies un peu plus de difficulté qu'ils ne fouhaitoient de nous accommo-
der des points dictez le 11. de Février , & dans la refiitution de la Ville de Stras-
bourg , de nous contenter de l'état d'occupation d'icelle , plufieurs Minifires de l'Em-
pire £f Etrangers prirent tout cela pour un prétexte recherché de nous tout exprès pour
en retarder la conclufion de la Paix , & pour faire continuer la Guerre , £f ils nous
le reprochèrent, &f d'autres prétendues fuper cher les , avec des paroles affez dures, en
nous menaçant même , qu'en cas d'un plus grand retardement , ils s'affifieront eux-
mimes; &? finalement , que,fuivant l'exemple de ceux , qui n'étoient pas encore tant
preffez qu'eux, ils fe feront comprendre dans les Traitez d'Efpagne , d'Angleterre, &
de Hollande, comme on le leur avoit déjà offert.
En fécond lieu, on vient aux plaintes des Etats Proteflans qui fe trouvofent
principalement offenfez, de ce que bien loin de traiter de l'Intérêt de leur Religion],
on n'a pas voulu feulement les y écouter, ni admettre leurs Remontrances , ni en don-
ner quelque Déclaration par écrit pour la Médiation ; £? qu'on s'efi formalifé même
D d d d 3 dé
l-'KUHO-
PK.
Sôz MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aftaires de leurs fi jufies demandes , d'où il ejl arrivé, que la claufe en queftion , de l'Arti-
gj=.n. de cie quatrième, &? fi préjudiciable à la Paix de Religion dans V Empire , a été propo-
fée par l'Ambaffade de France dans un tems où les Protefians avoient à grand peine
encore quelques heures de refie , pour Je réfoudre. Ceft ce qui n'auroit pu arriver,
fi l'on avoit traité , dés le commencement , de l'Intérêt de leur Religion avec les
François. Nous ne défavoûons pas , pourfuit l'Auteur de la Relation , que quand
au mois de Mai on commençoit à former les Prétentions de Votre Majefié , &f le
mois fuivant à conférer Article par Article , ce qui discontinua pourtant avant
qu'un fortit du premier , nous ne jugeâmes pas à propos d'inférer dans nôtre projet de
V Article 3. que nous communiquâmes aux Minifires de V Empire , les mots in Sa-
cris & Profanis , pour la reftitution que nous demandâmes de la Paix de Wefiphalie,
parce que le rétabliffement abfolu &? entier de ladite Paix s'étend également en toutes
chofes , pour tout tems , £f fur-tout ce qui doit être rendit à V Empire en conformité
â'icclle , &? qu'il feroit d'autant plus fuperflu d'en demander le confentement des Fran-
çois , qu'on leur donneroit plutôt occafion d'y faire quelques exceptions. Il nous fem-
Ha même pour-lors , que plus d'un Minifire des Protefians avoit approuvé nôtre pro-
pofition , âf que quelques autres infifioient , plutôt à la perfuafion des Etrangers , qui
font d'une même Religion avec eux , que de leur propre mouvement. La Médiation de
Suéde , mémefon Plénipotentiaire pour la Duché de Brème , ne trouvèrent par après à
propos d'alléguer d'autre raifon que de dire que l'un valoit l'autre , quand au-lieu des
mots: Reitituatur Ducatus Bipontinus ad normam Inftrumenti Pacis Weftpha-
îicce tam in Politicis quàm in Ecclefiafticis cum annexis ; c'efi-à-dire , (Que le
Duché de Deux-Ponts foit reftitué félon la teneur du Traité de Paix de Wefl-
phalie } tant pour ce qui concerne les chofes Politiques que les Ecclefiaftiques
avec leurs dépendances) qu'ils avoient mis auparavant dans l'Article de Deux-Ponts,
qu'ils 7ious donnèrent pour porter aux François , ils foufrirent par après du change-
ment, fans nôtre communication, & fe contentèrent , de gré ou de force, de ces feuls
mots ad normam Pacis Weftphalicœ c'efi-à-dire, (félon la teneur de la Paix de
Weftphalie) qui fe trouvent préfentement exprimez dans l'Article 9. du Traité de
Rysvoick. Cependant, après avoir lu l'Inflruàion de l'Empire , cïf que quelques Mi-
nifires Protejians fe furent chargez de répondre du tout , nous ne manquâmes pas
d'inférer par deux fois les fusdits mots dans notre réponfe aux Articles 3. 4. & 5. du
Projet des François , que nous leur renvoyâmes encore le 1 . d'Août pour y délibérer ,
£f que nous ne portâmes aux François que le 5. dudit mois d'Août : In facris &
profanis plenè executioni mandetur, &c. quse nullâ ex caufâ feu rationi in Ec-
clefiafticis vel politicis à Rege Chriflianifiimo mutata feu innovata funt , abo-
leantur ac redintegrentur , &c. c'efi-à-dire, (foit entièrement mis à exécution
tant pour le Sacré que pour le Profane, &c. que tous changemens ou inno-
vations faites fans caufe ou fans raifon en matière Ecclefiaftique ou Politique
par le Roi Très-Chrétien foient abolies & rétablies en leur premier état,ox.
nous ajoutâmes conjointement avec les Minifires de l'Empire , &f fur leur demande ,
le mot Catholica aux Articles 15. &f 16. âf nous répétâmes enfuite l'un & l'autre
dans nôtre premier Projet de Paix, que nous fumes contrains d'abréger dans le com-
mencement d'Octobre.
L'Au,
FF..
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. f6}
L'Auteur continue après cela , qu'il eft vrai que les Minières des Protes- Affaires
tans propoférent le 7. d'Octobre dans l'Aflemblée commune de ceux de l'Em- GFN- DB
pire, & que deux Plénipotentiaires de Princes demandèrent enfuite à Ryswick
aux Miniitres de l'Empereur d'ajouter à l'Article troifiéme une claufe dont voi-
ci la fubftance : Que la Paix de Wejlphalie , £? tout ce qui avoit été exécuté en con-
féquence , demeurera félon toute fa force , £f que l'on n'admettra aucune Exception ni
aucune rejlritlion , au préjudice de ce Traité qui doit fervir de Loy fondamentale &?
perpétuelle au Gouvernement de l'Empire , fpécialement à l'égard des Affaires Eccle-
fiajïques , félon qu'il ejl porté par les Articles 4. & 5. où l'on a expreffement mar-
qué Vannée 1624. 6f l'état auquel les chofes fe trouvaient immédiatement avant les
Troubles de Bohême , qu'au contraire on retranchera incontinent tout ce qui fe fera,
trouvé de nouveautez introduites pendant le tems de la guerre pré fente dans les Ter-
res apartenantes en quelque manière que ce puiffe être à l'Empire Rom. £f qui doivent
lui être rendues par le Traité de Paix ; £p pour ce qui ejl des Affaires Politiques on
n'y admettra point d'autres changemens que ceux des quels on ejl expreffement conve-
nu dans le Traité. Il fut auffi démandé qu'on ajoutât à l'Article 6. touchant la
Reftitution de Strasbourg : Accorde auffi Sa Majejlé Très-Chrétienne , non-feulement
à la fusdite ville de Strasbourg , mais encore à tous les habitans des lieux qui lui
feront cédez par l'Empire , le libre exercice de leur Religion avec fes prérogatives , de
la même manière dont ils en ont jouï auparavant fous la domination de l'Empire,
&f une pleine jouiffance de toute forte de revenus , de quelque nature qu'ils puiffent
être ; fur quoi l'Auteur s'exprime ainli: Mais outre que nous avions grande rai/on
de nous tenir , autant qu'il étoit poffible , à la lettre de l'injlruiïion de l'Empire, &
de ne retarder pas davantage une Négociation , dont le terme étoit fi court , ni de la
rendre plus difficile par des chofes nouvelles £f particulières , qui n'y appartiennent
pas , ou qui fe trouvent déjà fuffifamment comprifes dans le Projet général ; &f que
nous ne J avions pas fi V on s'y pouvoit engager davantage, la Lijle des Rejlitutions à
faire en matière de Relgion n'étant pas encore prête , mais feulement promife par les
Protejlans ; &c.
Les Curieux prendront la peine de lire toute la Relation qui eft imprimée
en divers Ouvrages. Elle ne contient aucune Période qui ne mérite des Ré-
flexions très-févéres. Je paife à ce qui concerne plus précifément la Claufe
annexée au quatrième Article. L'Ambaffade de France prétendit enfuite le 22.
d'Octobre, lorsque nous examinâmes derechef avec elle notre Projet de Paix, effacer
pareillement les mots: in Sacris & Profanis, qui fe trouvoient encore dans l'Article
troifiéme-, mais Elle les y laiffa enfin fur nos infiances , à? fe contenta de dire , en
préfence des Médiateurs , pour raifon de cette condefcendance , que ces mots-là étant
fuivis de ceux-ci , nifi quatenus nunc aliter expreffe conventnm fuerit , ne
pourroient aucunement préjudicier à la claufe , quelle méditoit de faire en matière
de Religion , 8? qu'elle s' étoit refervée expreffement plus d'une fois. Tout ceci fe fit
de la manière , que nous venons de dire , en préfence des Médiateurs qui font de la
Confefjion d'Ausbourg , ou par eux-mêmes , &f nous ne manquâmes jamais ,
foit après , foit pendant nos conférences, où quelqu'un de nous fe levait tout exprès
pour aller trouver les Minijlres de l'Empire dans leur appartement, de communiquer
ex-
PE.
564 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires exactement tout ce qui s'y pajj'a , & le/dits Minifires de l'Empire le remarquèrent d'a-
gf.n. de bord & l'écrivirent fi ponctuellement que nous ne finies pas difficulté , de le tirer par
l'Euro- apr^s ^ ieurs Protocoles £f de leurs Relations pour nôtre ufage , & de prendre des Co-
pies de ce que le Directoire Electoral de Maye?ice leur avoit diCté , £f qui pour la plu-
part étoit beaucoup plus circonflancié , que nos très-humbles raports que nous finies à
Vôtre Majejlé dans Vembaras de nos autres occupations , & où toutes cbofes riéteient
pas toujours bien comprifes de nous tous. L'affaire de la Déclaration que nous refufâ-
mes de faire au Protocole des Médiateurs £f de nôtre emportement , comme on dit, dans
le fuffrage commun des Proteflans , Je réduit proprement à ceci : quand l' après-midi du
29. d'OCtobre fur nos injiances & fur celles des Minflres de V Empire, les Ambaffa-
àeurs d'Efpagne , d'Angleterre, £5? de Hollande comparurent avec nous à Ryswick , pour
tâcher d'obtenir d'avantage en ces cbofes qui avaient été déjà plufieurs fois proposées ,
mais pas encore ajuflées , £f que ceux des deux dernières Ambaffades avec quelques Mi-
nflres Proteflans de V Empire pafférent tout le teins jufqu'à 7. ou 8. heures du foir
à aller &f venir de la Chambre des Médiateurs , nous prefsdmes également tant ceux-là
que les Médiateurs de paffer dans ce peu de tems qui refloit encore, leurs Offices pro-
mis , ou de nous donner ce tems pour continuer nôtre conférence , £? pour y achever
l'Article difficile du Palatinat : £f qu'auparavant les Alliez demandeient d'en conférer
avec nous , les Ambaffadeurs d'Angleterre âf de Hollande entrèrent dans la Chambre
des Médiateurs. . . . Le Comte de Bonde premier Médiateur & Ambaffadeur de Sué-
de nous dit d'abord au nom de tous les autres , que les Proteflans , ayant trouvé la
claufe comprife dans tel Nouveau Traité, demandaient pour leur fureté £f tranquilité
une Déclaration de nous , portant que , touchant leur Religion , Vôtre Majeflé ferait
toujours objerver âf exécuter rigoureufement les Traitez de la Paix de Weflphalie , la,
Capitulation de fon EleClion, les Recès d'exécution de Nuremberg, &f toutes les autres
loix de l'Empire-, £f comme nous marquâmes nôtre étonnement fur des demandes extra-
ordinaires £f faites par des paroles fi dures , vil principalement que V obfervation de la,
Capitulation 6° des Loix, continuée exactement par Votre Majejlé, étoit notoire dans
l'Empire , £f que d'ailleurs ce 71' étoit pas ici le lieu ni le tems de nous en demander de
nouvelles Affuranccs &f Déclarations , le fécond Médiateur Suédois , &f après luy le
Sieur de Schmetau prit la parole , £p en préfentant le nombre, n'en défifla point juf-
qu'à ce que Manfieur le Comte de Caunitz l'eût lu , un Ambaffadeur étranger fe leva
de fon chef, âf apporta au milieu de nôtre cercle un guéridon avec la chandelle; mais ,
comme je remarquai leur manière d'agir fi peu conforme à ce qu'ils doivent au carac-
tère d'une Ambaffade Impériale , & que je confidérai d'ailleurs le peu de tems £f d'heu-
res qui nous refloit pour nôtre négociation, &? principalement les foupirs que tant d'â-
mes pouffoient inflament au Ciel pour une prompte conclufion , je mis ledit num. fur le
guéridon , êf après leur avoir dit & répété que dans le tems où les autres avoient déjà
leur Paix faite , ou leur inclufion dans celle des autres, perfonne ne pouroit trouver
mauvais, que nous Jonglons auffi.à la conclufion de celle de Vôtre Majeflé Impériale &
de tout l'Empire, fans nous laiffer amufer ou empêcher par des cbofes qui ne font ni
lie fa fon, ni de ce lieu, je m'en allai dans la Chambre des Conférences , où un mo-
ment après, les Médiateurs ô? les Ambaffadeurs de France fe rendirent auffi: on y
recommença l'Affaire du Palatinat 3 & les François demandèrent quelques ebangemens
dans
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 765
dans V Article feparé ; convenant avec nous , que moy le Baron de Seillern pour y tra- Atfaxrei
vailler plus à mon aijè £f plus promptement que dans cet embaras d'autres difcours , je cr;N- De
vie retirajje dans un des appartemens des Médiateurs qui étoit le plus proche. Cepen-
dant les Ambaffadeurs de France expoférent l'ordre de leur Roy pour ajouter à l'Arti-
cle quatrième la clauje qui concerne la Religion ; £?, plus les Médiateurs s'y oppoférent ,
plus les François y infijlerent , voulant ainfi à l'exemple des autres montrer leur zélé
pour leur ancienne &f véritable Religion. Tout ce que nous oppofdmes aux François,
dans le dejjein de conferver VUniun dans l'Empire , nefervit de rien. L'AmbaJJade de
France répondit fimplement , qu'elle avoit des ordres contraires du Roy , dont elle n'o-
feroit pas s'éloigner ,6f que par la rejlriâion de ladite clauje il fembleroit qu'on voulue
féparer un cheveu en quatre parties , voula?it dire que la chofe étoit fi petite de foi-
même. Les Médiateurs n'y rèuffrent pas mieux quand ils répétèrent leurs premières
injla?ices &? offices , tant de leur chef qu'au nom des Anglois &? des Hollandsis
Et votre Majejlé trouvera d'un coté mal fondé ce qu'on nous a voulu imputer , comme
fi on avoit refufé d'écouter les Proteftans , pendant toute la Négociation ô? de traiter
de l'intérêt de leur Religion avec les Ambaffadeurs de France > £f de l'autre coté qu'on
auroit plutôt fujet de faire une déduàion , & de fe rejfentir de toutes les irrévérences
commifes ici contre Votre Majejlé Impériale en la perjonne de fes Ambaffadeurs ; & com-
me on ne nous peut nullement aceufer de ce qui fe paffa le 30. d'Octobre en exécution
des menaces que par plufieurs importunitez on s' étoit attirées des François, ainfi au-
rolt-on pu aifêment prévoir par les bruits & par les éclairs continuels de leurs parolei
la foudre qu'ils lancèrent en effet , âfc.
On a cru qu'il étoit utile de donner un afTez long Extrait de la Relation
Originale de Mr. le Baron de Seillern, troifiéme & néantmoins principal
Plénipotentiaire de SaMajefté Impériale, pour ce qui regardoit en particu-
lier la Religion Proteftante. Comme il ne s'agiflbit que des intérêts poli-
tiques dans ce Traiié de Paix à Ryswick, l'ignorance du Baron de Seil-
lern en matière de vérité & d'ancienneté de Religion n'auroit été d'aucu-
ne conféquence, fi d'ailleurs ce Miniltre eût eu les qualitez d'un Pléni-
potentiaire parfaitement inftruit & entièrement zélé pour fori Maître. Tout
Miniftre public doit fçavoir que, dans les Fonctions de fon Emploi, il ne
lui eft pas permis d'agir félon fes fentimens & fes vues particulières; mais,
qu'il doit s'informer avec la dernière precifion des intentions du Maître
dont il repréfence la Perfonne , & les fuivre avec une exactitude telle-
ment fcrupuleufe, que, fi fa confeience fent de la répugnance en quelque
point, ou il faut quitter l'Emploi , ou il faut exécuter toutes chofes de la
même manière que le Souverain les executeroit lui-même.
Le Décret de la Commifïion Impériale, dicté à Ratisbonne le 11. Fé-
vrier 1^8. en réponfe de l'Adrefle prefentée le 6. Novembre & répétée
le 30. Décembre 1697. à l'Empereur au fujet des Plaintes des Proteftans
donne afTez à entendre les intentions de Sa Majeflé Impériale, quoy-
qu'elle ait de grands ménagemens pour la Conduite de fes Plénipoten-
tiaires.
tftme XL E e e e II
GEN. DE
l'Euro
fe.
Sm MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ:, ET
Affaires \\ eft porté dans ce Décret que les imputations & les plai7ites contre l'Ambaffade
Impériale ne fervoient ,ni pour rendre meilleures les conditions de la Paix , ni pour af~
fermir la bonne intelligence , qui doit être entre le Chef cîf les Membres de l'Evipi-
re. Pour ce qui efi de h Déclaration , qu'on demande, Sa Majefilé Impériale foufri-
ra toujours volontiers , qu'un chacun Jouijfe librement des avantages, que la Paix de
Wejïphalie luy donne 9 tant à V égard de ï ' Ecclejiafitique que du Politique , £? auroit
même foubaité , pour empêcher toute méfiance £f tout Jbupçon , que cette Paix fut réta-
blie fans aucun changement; que l'Ambaffade Impériale avoit plujieurs fois , par ordre
exprès de Sa Majejlé , déclaré aimer mieux continuer la Guerre , n'ayant enfin co?i-
jmti à la Paix , qu'après que les Députez £p les autres Miniflres de l'Empire l'avoient
jugée fi nèceffaire que la continuation de la Guerre leur paroififoit danger eufe &. im-
pojjible félon les conjonctures du tems. Du refile, Sa Majeflê Impériale Je tiendra tou-
jours aux 'Traitez de Wejïphalie. dans les cbofes de VEglife âf de Police , y . maintien*
dra puiffament un chacun , & fera adminifilrer lajujlice conformément à iceux , c? fans
aucune difilinàion de Religion. Cefil ce que Sa Majejlé Impériale promet cependant
aux Eleàeurs , aux Princes, £p aux Etats , en les exhortant encore -très-benignement à
bâter leurs confié ils &f à les diriger à cette fin, que la bonne intelligence foit confervée
&? continuée dans l'Empire , en y étant toute méfiance qui n'efl ni de faijon , ni fon*
dée , £f que la jouïfijance de la dernière Paix puiffe être au plutôt ajfurée £? affermie
par une garantie effective, £f conflitution commune de tout l'Empire.
N'eft-il donc pas notoire, que lés intentions de Sa Majefié Impériale
ctoient que Ton Ambiflade à Ryswick eue en vue d'affermir la bonne in-
telligence entre les Membres & le Chef de l'Empire, & d'obtenir des con<-
ditions de Paix les meilleures qu'il feroit poffible , félon l'efprit du Traité
de Weitphalie , tant à l'égard de l'Eccléfiaftique que du Politique ; & que
fa Majefté Impériale eût préféré volontiers de continuer la Guerre , plu-
tôt que de confentir à aucune altération contraire à ce Traité?
Quant à la continuation de la Guerre, elle étoit devenue impoflîble à
l'Angleterre & à la Hollande par les Confédérations raportées ci-delTus; la
principale des quelles regarde la lenteur du Confeil de l'Empereur, dont
on voit un exemple par la date du Décret donné le u. Février 165)8. fur
une affaire communiquée le 6. Novembre, & répétée le 30. Décembre
1697. & d'une telle importance, qu'en pareil cas, le Confeil de France
n'auroit laiffé écouler du tems qu'autant qu'il en eut été neceiTaire pour
l'arrivée & le retour d'un Exprés en pofte.
Dès le commencement du Traité, l'Ambaffade Impériale, pouvant voir
aiTez diftin Élément la necefîité de conclure la Paix, ne devoit-elle pas ê-
tre pleinement convaincue que le principal intérêt de l'Empire confiiîoit
en une parfaite intelligence entre les Membres & le Chef? N'etoit-ce
pas confpirer avec la France pour faire naître de la mefintelligence , en
connivant aux Proportions que les François méditoient de faire au préju-
dice particulier de la Religion Proteltante ? Les Proteftans avoient-ils
moins contribué que les Catholiques-Romains pour la confervation de
£xEmpire ? La Relation de l'Ambaflade Impériale raporte , comme quel-
que
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
5*7
que chofe de bien fpirituel , que quelques uns des Minijîres Catholiques de-
mandèrent tant en raillant que ferieufement aux Protejîans , s'ils avoient bien
ajjifté ci-devant à Munfler & à Ofnabrugh les Catholiques , pour leur conferver
VExerccie de la Religion Catholique obfrrvé depuis plujieurs fiécles , & les biens
deftinez à cet ufage ; s'ils avoient pour lors mieux aimé continuer la guerre con-
tre la France & la Suéde , que de permettre que les Catholiques en fujjent fru-
ftrez &c. Y a t-il la moindre aparance de fens à la raillerie ou au férieux
de cette demande ? Qui ne voit, au contraire, que la France Catholique,
liguée avec la Suéde Proteftante, ne s'étant pas extrêmement empreiTée
pour les intérêts de la Religion Romaine, parce-qu'il lui étoit utile de mé-
nager les Proteftans, les Catholiques auroient bien plus à propos fait leur
demande railleufe ou ferieufe aux Plénipotentiaires de France à Ryfwick,
les quels paroiflbient alors fi zélez pour la Religion Romaine ; parce qu'il
y avoit efperance de pouvoir mettre de la divifion dans l'Empire, & cail-
ler une mefintelligence préjudiciable à la Maifon d'Autriche. L'intention
de Sa Majeflé Impériale ayant été d'ôter toute méfiance & tout foupçon
entre les Membres & le Chef de l'Empire , pourquoi Mr. le Baron Plé-
nipotentiaire, qui avoit aifément prévu par les bruits & par les éclairs
continuels des paroles des François la foudre qu'ils lancèrent en ef-
fet, ne s'étoit-il pas mis en état, félon fon obligation envers fon Maître,
de la prévenir & de la diffiper ? N'y avoit-il point de cloche bénite con-
tre cette forte de foudre ? Mais , les ordres de l'Empereur ne devoient-ils
pas prévaloir à ceux du Roy de France, & la foudre lancée par des Plé-
nipotentiaires François ne devoit-elle pas être autant méprifée par des
Plénipotentiaires Impériaux, que le Parlement de Paris a coutume de mé-
prifer la foudre du Pape même , en matière d'Intérêts de la Couronne &
de Libertez du Royaume ? S'agifToit-il à Ryfwick aucunement d'intérêts
Eccléfiaftiques , & la France avoit-elle d'autre vue que de fe rendre puifl
fante au préjudice de la Maifon d'Autriche? Quelle fatisfaction & quelle
aflurance de fuccès pour l'AmbalTade Françoife d'avoir à négocier avec un
Plénipotentiaire de la trempe de Mr. le Baron de Seillern ? Quels auront
été les fentimens des Minillres de la Cour de France, lorfqu'ils auront
trouvé dans cette Relation de l'Ambaflade Impériale , que la claufe de
Religion a pafle chez les Plénipotentiaires Impériaux comme une chofe
d'aum* petite confequence , que fi l'on eût voulu feparer un cheveu en
quatre parties; & qu'ils s'étoient fort docilement fournis, lorfqu'à toutes
leurs opofitions les AmbaiTadeurs François avoient répondu fimplement
qu ils avoient des ordres contraires du Roy, dont ils nofer oient pas s éloigner ?
Il n'eft pas à douter que le Sieur Baron ne foit à la Cour de France en
«[lime d'un des meilleurs Catholiques- Romains; mais de s'imaginer qu'on
remit à fa diferetion les intérêts de la Couronne dans un Traité de Paix,
c'eft ce qui n'eft pas à croire. Le Roy Très-Chrêtien ne foufre pas que
le Zélé Catholique foit emploie avec indiferetion au préjudice de fa Gloire
& de fa Grandeur. Sa Majeflé , en même tems qu'elle aime & veut que
fes Miniftres l'oient jaloux de tous les égards dus à leur Caraclère, exige
Eeee z cle
Affairer
gen. DE
L'EURO-
l'Euro
pe.
56S MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires de l'habileté & une obeifTance entière à fes ordres dans les Perfonnes
gf.n. de qy'elie honore de la Dignité d'Ambaffadeurs; & il n'y auroit point d'in-
dulgence pour un Baron Plénipotentiaire, qui, après avoir laiffe écouler
près de fix mois de Négociation , à éluder, à tourner en ridicule, & à rejet-
ter toutes inllances fur la décifion d'un des points principaux, fe feroit
abandonné à un excès d'emportement au tems de la Conclufion; & qui,
pour juftifiér une Conduite fi irreguliére, raporteroit qu'il a confideré
principalement les foupirs que tant d'âmes poujjoient infirment au Ciel pour une
prompte Conclufion. 1! y eut eu plus de véritable piété à confidérer les cris
lamentables que tant de peuples expofez aux Exécutions des Dragons
François dévoient pouffer vers le Ciel. En un mot, comment ne pas ad-
mirer qu'un Plénipotentiaire Impérial entreprenne au milieu d'une AfTem-
blée célèbre , comme celle de Ryfwick , de faire valoir la Religion de
l'Empereur fon Maître, pour le maintien des Privilèges de Proteflans,
& le Zélé du Roy de France pour les violer. N'eft-ce pas Louïs XIV.
lui-même, qui en 1648- dans le Traité de Munlter, où il avoit encore
plus d'avantage qu'en celui de Ryfwick, a fait arêter l'Article concernant
les Proteflans; à fçavoir.
Que ceux de la Confejfîon c? ' Ausbsurg qui avoient été en poffejjîon des Eglifes ,
£5? entre autres les Bourgeois & Habitans d'Oppenbeim, /oient confervez dans
l'Etat Ecclejiafiique de l'année 1624. &? qu'il [oit libre aux autres qui defire-
roient embrajjer te même Exercice de la ConfeJJïon d' Ausbourg , de la pratiquer
tant en public qu 'en particulier , &c. Le même Article efl encore de mot à
mot dans le Traité d'Ofnabrug aufîi en 1648.
Ce qui efl de tout à fait fingulier, c'efl que le Baron Plénipotentiaire
eonfent & prête la main à l'AmbafTadeFrançoife pour faire la Loy à l'Em-
pereur fon Maître , en ce qui regarde la Religion Protellante dans les
Pais reflituez, & il laiffe volontiers à la diferetion de Sa M ajeflé Très-
Chrétienne les Proteflans de Strasbourg. Ce procédé ne doit-il pas être
cenfé féconder les François, pour infpirer aux Allemands Catholiques-Rom.
une préférence d'eflime en faveur du Zélé religieux de Sa Majeflé Très-
Chrécienne, & pour faire naître quelque forte d'averfion contre l'Empe-
reur dans le cœur des Proteflans Allemands paffez fous la Domination
Françoife, ou réunis à l'Empire?
Un Fait de cette conféquence efl afTez authentique, pour fervirde Le-
çon aux Etats Proteflans. Ils voient d'une part les difpofitions d'un Roy
Très-Chrétien pour les maintenir, autant qu'ils peuvent lui être utiles &
pour les détruire , fi leur ruine lui efl d'un plus grand grand profit ; &
d'autre part ils éprouvent le peu d'égard que le Confeil Impérial a eu à
leurs follicitations , quoiqu'elles aient été fortement appuiées par l'An-
gleterre, la Suéde, & la Hollande, aux quelles l'Empereur a de fi gran-
des Obligations, & dont il a fi grand befoin pour foutenir les Prétentions
de la Maifon d'Autriche contre celles de la France. Au moins , que tous
les Etats Proteflans p'i.fTent une fois comprendre parfaitement, combien
il leur efl important de demeurer étroitement unis entre eux , & de pren-
dre
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. f69
dre les mefures les plus fages & les plus jultes, pour ôter aux Catholi- Abvahm
ques-Rom. toutes penfées de travailler à leur ruine. «en. dk
8. La conduite du Confeil de France après la Paix conclue fut encore L'^R0*
une fufifante matière d'Inltruétions pour celui de l'Empereur. Comme
le Roy Très-Chrétien avoit eu principalement en vue de rompre la Ligue
d'Ausbourg, fi préjudiciable à Tes delfeins fur la Succefîion d'Efpagne,
aulïi-tôt que les Engagemens réciproques furent finis avec la Guerre, il
travailla à prévenir de femblables liailbns , en propofant de nouveaux
Traitez particuliers entre la France & diverfes autres Couronnes. Les
honneurs extraordinaires, rendus aux Ambafladeurs d'Angleterre, avoient
pour une des lins principales d'attirer le Roy Guillaume dans les intérêts
de la France, ou au moins de le rendre plus indiférent pour la Maifon
d'Autriche. On fçait quelles étoient les complaifances de Sa Majefté
Très-Chrétienne envers le Pape , quels étoient les ménagemens des Mi-
nières François dans les Cours d'Italie, & dans celles du Nord, dans
celles d'Allemagne, à l'égard même du Roy de Pologne; pendant que
l'AmbaiTadeur de France à la Cour de Madrid déclaroit ouvertement les
Prétentions du Roy fon Maître fur le Droit de Succeflion à la Monarchie
d'Efpagne. Sa Majefté Catholique ayant fait un Teftament à la fin de
1698, le Marquis d'Harcourt Ambafladeur du Roy Très-Chretien , luipre-
fenta le Mémoire fuivant, le 15. Janvier 1699.
Le Roy mon Maître ma commandé de me donner ï honneur de dire à Votre
Majefté , que depuis quelle l 'avoit pofitivement ajfîtré, & m avoit aujjl chargé
de l 'affurer , quelle ne fer oit jamais aucune nouveauté conttaire à la Paix &
à Ça ponctuelle obfervation , il fer oit , Sire , bien difficile à Sa Majefté d'ajouter
foy à la nouvelle d'un ïeftament fait par Votre Majefté en faveur du Prince
Electoral de Bavière , fi cela ne lui étoit pas confirmé d'une manière à rien pou-
voir plus douter.
En <e cas , Sire, 13 que le Roy mon Maître ne puijfe plus s'attendre à F en-
tière fatisfaclion qu'il prenoit à la Parole Royale de Votre Majefté , ce fer oit
manquer à la même amitié, dont Votre Majefté a reçu tant de marques depuis
la conclufion de la Paix , comme aufft à ce qu'on doit à la confervation du re-
pos de toute ï Europe , £5? finalement à maintenir le droit que les lois £5? les
Coutumes inviolables de la Monarchie établiffent en faveur du Dauphin [on
Fils unique, fi Sa Majefté ne déclaroit d'abord, comme elle ma donné char-
ge de le dire à Votre Majefté , quelle prendra les mefures nécejf aires pour empê-
cher en même tems le renouvellement de la Guerre ($ le préjudice qu'on, prétend
lui faire.
Ce que je dois ajouter à cela , Sire , Ceft que le Roy mon Maître n avoit
point de plus grand objet que de voir Votre Majefté jouir long tems des Etats
quelle a reçus de Dieuî3 de la Nature, & Vôtre Majefté fçait bien que je n'ay
jamais fait , de la part du Roy mon Maître , aucune inftance pour ce qui regarde
la Succeffion. Et enfin, Sire, Vôtre Majefté doit voir , fi cette attention tiéjin-
terejfée du Roy mon Maître , &? le defir fincère qu'il a témoigné d'entretenir une
Eeee 3 par-
Vf.
j7o MEMOIRES, NEGOTIATÏONS, TRAITEZ, ET
Affaires parfaite intelligence avec Votre Majejlé méritoit quon prit une pareille réfolu-
©kn. de fiQnn) & combien toute ï Europe trouvera un jour à redire , ji par malheur les
foins du Roy mon Maître ne peuvent empêcher , que la tranquilité publique ne
foii troublée par cet incident.
Cette Protection contre un Teftament de Charles II. , fupofé en fa-
veur du Prince Electoral de Bavière , ne dévoie laiffer à Sa Majefté
Impériale aucune aparence de doute que Louis XIV. ne fût entièrement
réfolu d'affurer au Dauphin fon Fils la Couronne d'Efpagne, comme lui
apartenante de plein Droit par les Loix & les Coutumes de la Monarchie*
lesquelles, félon Sa Majeflé Très-Chrétienne, devant être inviolables,
c'étoit un devoir de piété & de juilice d'en maintenir l'éxecution. Le
Roy de France n'en demeuroit pas aux (impies paroles. Si l'on déchar-
geoit les Peuples de quelques Subfides , & il l'on diminuoit les Tailles
de quelques Millions , on emploioit plufieurs autres moyens pour rem-
plir promptement leTreforRoyal, & pour tenir prêts les fonds nécefTaires
pour les plus grandes entreprifes: les Magazins étoient auffi bien fournis
qu'à la veille d'une Guerre: pour l'Armée, au lieu de la diminuer, on
l'avoit plutôt renforcée en donnant le congé aux Hommes de peu de
fervice , & par le choix de ce qu'il pouvoit y avoir de meilleurs Soldats:
on ne ceifoit point d'ailleurs de faire des achats extraordinaires de che-
vaux dans les Païs Etrangers , tant pour entretenir une nombreufe Cava-
lerie en parfaitement bon état , que pour ôter aux autres la commodité
d'en lever une femblabîe au befoin. La plupart des troupes étoient tou-
tes affemblées fur les Frontières vers l'Efpagne, pour intimider cette Na-
tion, & vers l'Allemagne pour entrer en Action, fi il étoit neceffaire,
au moment de l'ouverture de laSuccelTion de Charles II; &, afin de pou-
voir tourner les plus grands efforts du côté des Païs Efpagnols, li les Af-
faires le demandoient , on fortifioit toutes les Places qui pouvoient être
attaquées par l'Empereur; c'eft pour cette raifon qu'on differoit de refti-
tuer Brifac, jufqu'à ce qu'on eût achevé de perfectionner Jes Ouvrages
du Nouveau- Brifac bâti exprès pour tenir le vieux en bride. Après des
Proteftations fi exprelfes, & des préparatifs fi vifibles, il ne devoit plus
refter aucun prétexte de pouvoir reprocher à la France, comme on avoit
fait dans les dernières Guerres , qu'elle avoit attaqué fes Ennemis par
furprife, & qu'elle les avoit pris au dépourvu. Les marches des Trou-
pes Françoifes fur Terre, & les Voyages des Efcadres vers les Côtes d'Ek
pagne, n'étoient ignorez de perfonne : bien plus, la diilimulation de la
France à l'égard des chagrinantes Affaires de Pologne & de Neuchâ-
tel, & fa Conduite touchant les démêlez entre les Couronnes du Nord,
fans prendre parti , comme elle auroit pu le faire en tout autre tems , fai-
foient clairement connoître , qu'elle réfervoit toutes fes Forces pour la
Succeilion d'Efpagne. Le Prince Electoral de Bavière étant décédé à
Bruxelles le 6. P^evrier 169p. le Roy Très Chrétien ne manqua pas de
renouveler fes infiances auprès de Sa Majeilé Catholique. Chacun a fçu
tous
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 571
tous les ménagemens dont le Marquis d'Harcourtaufé dans Madrid, pour ÂWAraaft
prévenir les Peuples en faveur du Duc d'Anjou } jufque-là que les François GfN- DE
débitoient par-tout, comme allure, que ce Prince pafferoit cnEfpagne, tEuRO*
du vivant même de Charles II , & y feroit élevé en qualité de Succeifeur FE*
de Sa Majeflé Catholique.
Il n'elt pas à révoquer en doute que l'Empereur n'ait très-bien reconnu
les intentions du Roy Très-Chretien , & qu'il n'ait été donné des Inftruc-
tions très-prelTantes aux Ambaffadeurs de Sa Majefté Impériale auprès de
Sa Majefté Catholique , pour détruire les Entreprifes du Marquis d'Har-
court. Mais, cela furlfoit-il? Ne falloit-il pas fuivre pied à pied toutes les
autres Démarches de la Cour de France , les éclairer de bien près , &
marquer à chaque mouvement , qu'on étoit au moins en état d'une Défen-
fe vigoureufe ?
L'Angleterre & la Hollande , fans conferver aucun reffentiment tou-
chant les Injuftices de l'Ambaffade Impériale h l'égard des intérêts des
Proteftans dans le Traité de Ryfwick , offrirent leur Médiation pour la
Paix de l'Orient, la quelle ayant été conclue à Carlowitz avec le conten-
tement gênerai de toutes les PuilTances intereffées, la Cour de Vienne
n'avoit plus d'autre Affaire qui la pût détourner de l'attention qu'elle de-
voit donner aux Prétentions & aux Mouvemens de la Cour de France.
Cependant, le Confeil Impérial négligea beaucoup de faire évacuer les Pla-
ces qui dévoient être reftituées à l'Empire ou à l'Empereur en éxecution
du Traité de Ryfwick : on laiffa augmenter les mécontentemens des Pro-
teftans, au lieu de les faire ceiTer: on ne fe mit aucunement en peine de
remédier à diverfes plaintes excitées entre les Membres de l'Empire : on
ne travailla point, comme on auroit pu le faire, à arèter les troubles du
Nord , ni à dilpofer la Suéde , la Pologne , & le Dannemarc à des Al-
liances étroites pour le maintien des Intérêts de l'Empire : l'Affaire des
Fiefs, renouvellée en Italie, fervoit à aliéner l'efprit du Pape & de plu-
fleurs autres Princes au defavantage de la Maifon d'Autriche : les Suiiîés,
pour qui la Cour de France avoit de très-grands-ménagemens, étoient in-
quiétez par la Cour de Vienne au fujèt de dépendances trés-legeres : en-
fin on laiffoit caffer avec beaucoup d'indiference une partie des Troupes
de l'Empire, & emploier l'autre au préjudice de la tranquillité publique,
pendant que le Confeil Impérial faifoit tout au plus quelques fimples Pro-
pofitions de conferver la plupart de l'Armée des Païs Héréditaires de
l'Empereur , qui avoit fervi contre le Turc , de chercher des fonds pour
leur entretien , & de remplir quelques magazins d'Allemagne. Au-refte
il fembloit que les Miniftres de la Maifon d'Autriche préfupofoient, que
la préfence d'un Ambaffadeur auprès du Roy Catholique devoit être plus
que fuffifante, pour aïTurer la Succeflîon de la Branche Royale aux Hé-
ritiers de la Branche Impériale, non-obftant toutes follicitations & tous
efforts de la part des Princes de France. L'Expérience des tems paffez
pouvoit pourtant donner affez à connoître, que les Prétentions les mieux
fondées étoient fouvent obligées de céder à la force , que les Peuples &
les
l'Euro-
pe.
572. MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
.toxines les Souverains-mêmes avoient pour l'ordinaire plus d'égard à ce qui pa-
gen.de r.oifîbit de plus convenable félon les Conjonctures, qu'à ce qui pouvoit
être de plus jufte en foy-même, ou de plus conforme à leur inclination
particulière, & qu'enfin les derniers momens de la vie pouvoient chan-
ger ce qui avoit demeuré fermement arête pendant le cours de longues
années.
L'Hiftoire d'Efpagne contient diverfes Révolutions qui pouvoient fer-
vir d'inilruclion au Confeil de l'Empereur } & fans remonter plus haut
que les tems de Charles-Quint, on aprend que Ferdinand V. Roy d'Ef-
pagne avoit deltiné fa Succeflïon & l'avoit confirmée par plufieurs Tefta-
mens, lignez de fa main, à Ferdinand fon fécond Petit-fils Frère de Char-
les fon aîné ; mais que , peu d'heures avant fa mort , trois de fes Minif-
tres,profkans de fa foiblefle, lui avoient fait révoquer fes Difpofitions pré-
cédentes, & inllituer l'ainé de fes Petit-Fils fon Héritier univerfel, à l'ex-
clufion du cadet. Deux ans après, l'Empereur Maximilien I. Ayeul Pater-
nel de Charles , s'éiant ouvert au Cardinal de Sion du delfein qu'il avoit
de faire élire Roy de9 Romains Ferdinand fon fécond Petit-Fils préfera-
blement à l'ainé, ce Cardinal, qui avoit une haine implacable contre les
François , & qui avoit refolu de mettre en œuvre la force & l'adreffe ,
pour leur enlever une féconde fois le Milanois, en vengeance de l'Affront
qu'ils lui avoient fait à Marignan , entreprit de détourner l'Empereur de
fa refolution, laquelle, fi elle eût été effectuée , le jeune Ferdinand, ve-
nant à fucceder à l'Empire, n'auroit pas eu allez de Forces, pour ôfer
entreprendre fur le Milanois ; au lieu que, fi Charles pouvoit devenir
Empereur, les François n'en refteroient pas long-tems les Maures. Les
principales raifons que le Cardinal de Sion emploia furent , ,, que Sa Ma-
„ jeflé Impériale s'etant toujours propofé de rétablir l'Empire dans fon
«, ancien luftre , il y avoit lieu d'être furpris , de ce qu'elle parloit de per-
„ vertir l'ordre de la Nature, & d'ôter i'efperance de fa Succefiion au
„ feul Prince qui pouvoit exécuter un fi magnifique defTein -, Que le Roy
„ Catholique étoit defliné pour donner à l'Empire d'Occident la même
„ étendue qu'il avoit eue fous Charlemagne; & que de l'en priver après
„ tant de difpofitions que le Ciel avoit affemblées en fa Perfonne , ce fe-
„ roit renverfer l'ordre de la Providence divine; Que les Empereurs Ro-
„ mains avoient eu tant de peur d'affaiblir leur Monarchie, en la divifant,
„ qu'ils avoient mieux aimé, n'ayant point de fils, adopter des perfon-
„ nés étrangères , que d'élever fur le Trône leurs propres Filles , de
„ crainte qu'elles ne donnaflent lieu à le partager ; Que l'Empereur a-
w voit un exemple de fon tems en la Perfonne du Roy Catholique Fer-
„ dinand, qui avoit furpaffé tous les autres Princes tant anciens que nou-
„ veaux en l'art de régner; Que ce fage Monarque, quand il avoit été
„ queftion de faire fon dernier Tellament, avoit oublié fon bien- aimé
Ferdinand , fon fécond Petit-Fils , lequel il avoit vu naître , dont il
étoit Parain , à qui il avoit donné fon Nom , qu'il avoit lui-même élevé
dans fa Cour, qu'il avoit mené dans tous fes voyages, & qu'il n'avoic
„ jamais
9)
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 57j
„ jamais cefle d'aimer avec une tendreflb la plus grande qui fe puiffe Affaires
5, imaginer, pour aller chercher dans un coin de la Flandre fon autre gen.de
,, Petit- Fils Charles, qu'il n'avoit jamais vu, qu'il avoit toujours tenu com-
„ me étranger, & qui venoit de l'offenfer en la partie la plus fenfible ,
„ en traitant avec la France fans fa participation; & tout cela , par la feu-
„ le raifon d'oppofer à la Monarchie Francoife un Adverfaire allez puif-
„ fant pour lui refiiter. Que le même Roy Catholique ne s'étoit pas con-
„ tenté de témoigner dans fi une fameufe occafion, combien il haïflbit le
„ démembrement de la Monarchie Efpagnole ; puifque , pour l'éviter
„ dans une autre rencontre, il avoit confenti à la dégradation de fa pro-
„ pre Famille , en la fruftrant de la Couronne d'Arragon , qu'elle portoit
„ depuis tant d'années , & en la reduifant à la condition privée , quoi-
„ qu'elle ne manquât pas de mâles capables détenir le Sceptre, afin de
„ mettre en fa place la Maifon d'Autriche j par cette feule confideration,
„ que , ne pouvant empêcher ceux de cette Maifon de fucceder à la Ca-
„ fiille , il avoit jugé neceflaire qu'ils fuccedalfent à tout le relie. Qu'en-
„ fin les Turcs étoient devenus fi puiffans , que l'unique moyen de les
,, empêcher d'ufurper le refle de la Chrétienté confifloit à former dans
„ l'Europe une Domination capable de leur faire tête } au lieu de jetter
„ les femences d'une haine irréconciliable dans la Maifon d'Autriche,
„ qui l'engageroit infailliblement dans une Guerre éternelle , bien loin
„ de la mettre en état de fervir un jour de rempart à la Religion Chrê-
„ tienne. „
Ceux, qui feront une attention ferieufe aux Remontrances du Cardinal
de Sion, animé à la vengeance contre les François, concevront facile-
ment ce qu'un autre Cardinal , bien difpofé en leur faveur, aura pu faire
valoir auprès de Charles II. Roy d'Efpagne dans les derniers tems d'une
vie languiffante. L'Empereur prefentement régnant pouvoit-il être alïliré
que le Cardinal , qui étoit à la Cour de Madrid , feroit entièrement porté
pour la Maifon d'Autriche ? Y a-t-il nombre d'Exemples de Cardinaux,
qui ayent préféré les Intérêts publics, & le Droit des Familles, à l'éléva-
tion de leur propre fortune ? Ces premiers Princes de l'Eglife , à l'imita-
tion du Pape leur Seigneur & Maitre, n'ont-ils pas coutume de recher-
cher ce qui leur eft de plus utile & de plus honnorable, indépendamment
des devoirs de la, juflice ? Si un Prince de la Maifon d'Autriche fût
monté fur le Trône d'Efpagne, qu'elle recompenfe le Cardinal Efpagnol
en auroit-il pu prétendre ? Les Difpofitions Teftamentaires de Philippe
IV., arrêtées avec le confentement de toute la Nation touchant la Succef-
fion à la Monarchie, avoient fubftiiué a Charles II. un des Fils de l'Em-
pereur : le Roi de France lui-même avoit juré hautement fur les Evangi-
les, en prefence de -Sa Majefté Catholique & des Seigneurs de fa Cour,
avec les folemnitez les plus authentiques, & d'une volonté exempte de
toute aparence de contrainte, qu'il renonçoit, comme avoit fait l'Infan-
te d'Efpagne fon Epoufe, pour foi & pour fes Defcendans à toutes pré-
tendons de pouvoir fucceder aux Etats d'Efpagne : le Serment de Sa Ma-
Tome XL FT'ff jefté
l'Euro-
pe.
TE.
*74 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
ArTMRE3 jefté Très-Chrètienne avoit été confirmé par les Actes du Royaume de
gev. pe France en la meilleure forme, qu'on les eut pu faire en pareil cas. Ainfi
l'Euro- un Cardinal , qui eut apuyé les Droits d'un Prince d'Autriche , à l'exclu-
fion d'un Prince François, n'auroit eu d'autre mérite que celui d'un Su-
jet demeuré fidèle à fon Souverain, au Gouvernement de fa Nation , & à
la Religion des Sermens ; & de cette manière il n'eut pu prétendre au-
cune nouvelle Diitinclïon d'Honneur ni aucun profit extraordinaire, qu'au-
tant que le nouveau Roi de la Maifon d'Autriche s'y feroit trouvé difpo-
fé par fon eftime ou par fa bonne volonté, fans aucune obligation parti-
culière. Au contraire , fl Je Cardinal entreprend de faire valoir les préten-
dons du Roy Très-Chrêtien, & s'il procure l'élévation d'un Fils de Fran-
ce à l'exclulion d'un Prince d'Autriche, y aura-t-il Prérogative d'Honneur,
Dignkez , Emplois , Trefors , qui puiffent allez recompenfer un fervice
d'un prix ineftimable ? L'Adminiitration générale de la Monarchie Efpa-
gno'le ne pouvoit manquer au Cardinal Archevêque de Tolède fous un
Fi!s de l'Empereur; mais, elle auroit été partagée entre plusieurs Ré-
gens pendant les années de Minorité du Prince, la Reine Douairière y
auroit eu la principale Voix , & d'ailleurs il eut été libre à l'Empereur
d'entretenir un allez grand nombre de Confeillers & d'Officiers Alle-
mands auprès du Roy Ion Fils ; au lieu que le Petit-Fils du Roi Très-*.
Chrétien fe trouvant Majeur, & y ayant toute forte de Raifons plaufi-
bles, pour ne fbtifrrir auprès du jeune Roi Catholique aucuns François
de quelque rang qu'ils pûfTent être, qu'autant que le Cardinal le trou-
veroit bon, l'Eminence pouvoit fe rlater de difpoièr feule, non-feulement
du Gouvernement de toute la Monarchie , mais encore de la Perfonne
du Prince.
Si la Cour de Vienne croyoit affez bien connoitre Je Cardinal- Arche-
vê.jue, pour être perfuadce que l'Ambition & l'Intérêt ne lui feraient pas
préférer la Maifon de France h celle d'Autriche, il y avoit un autre fu-
jet de défiance très bien fondée. La Politique confiante dt.s Papes, en
matière de Contcitation entre les Souverains de la Communion, a tou-
jours été de fe déclarer pour le Parti auquel il paroilfoit impofïibie de
s'opofer. Suivant cette Pratique du Chef,, le Cardinal Efpagnol , Mem-
bre du Sacré Collège, voyant la France en état de s'emparer immanqua-
blement d'une partie des Pais fournis à l'Efpagne , d'exciter de grands
Troubles, & de caufer diverfes Révolutions dans la Monarchie au moment
du décès de Charles II; & ne voyant point que l'Empereur pût jamais
être capable de difputer le terrain à Sa Maieflé Très-Chrétienne; n'étoit-
il pas à a pp. hendcr , que la confideration de conferver la Monarchie
d'iïfpagne en fon entier, c\: de détourner les funeftes effets des Armées
Françoifes, ne fût plus forte fur l'efprit de fon Emmenée, que l'idée des
Droits de Suceeifion attachez à la Maifon d'Autriche? Si le Cardinal , par
quelque motif que ce put être, fe trouvoit une fois déterminé en faveur
de la France, combien luiécoit-il aifé de ménager les momens du Roy
Charles II ? Ce Prince , dont l'efprit étoit accablé par les infirmitez de.
ion
PK.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. f7j
de Ton corps, ne pouvoit plus avoir de vigueur pour les Intérêts de la Affaiwf*
Maifon d'Autriche ; & il étoit très-facile à le Iaifler faire illufion par cer- °>N- Dt
tains fentimens de pieté & de jultice aparentes, que les Prélats Romains L\
fçavent parfaitement bien accommoder félon leurs vues particulières.
Qu'on s'imagine donc un peu l'effet que pouvoit produire le Zèle d'un
Cardinal, le Sacrement à la main , s'il en étoit befoin, repréfentant au
Roy Charles II. en fon lit de mort ; Que l'unique deûeïn de Sa Majeiié
Catholique pendant tout fon Règne ayant été de prendre foin de la Con-
fervation de fes Royaumes, il y alloit de fon Salut éternel de régler avant
fa mort l'ordre de la Succelîion à la Monarchie ; Que de vouloir exclure
du Droit de fucceder les Defcendans du Roy Très-Chrêtien , c'étoit per-
vertir l'Ordre de la Nature, & éloigner les feuls Princes qui pouvoient ré-
tablir la Monarchie d'Efpagne dans fon ancien luflre ; Que, conformé-
ment aux Réfultats de plufieuts Confultations des Minières d'Etat & de la
Juftice, le fondement des Renonciations des Infantes d'Efpagne, Reines
de France, la Tante & la Sœur de Sa.Majeflé, ayant été d'éviter le dan-
ger d'unir la Couronne d'Efpagne avec celle de France , & ce danger
pouvant être évité par le Couronnement du fécond Fils du Dauphin de
France, le fondement de la Renonciation n'avoit plus de lieu, & qu'ain-
fi les Loix de la Monarchie vouloient que Sa Majeiié déclarât Monfei-
gneur le Duc d'Anjou , fécond Fils du Dauphin, en qualité de plus proche
Parent , fon SuccefTeur à la Monarchie entière de tous fes Etats ( au cas
que Dieu l'apelàt à lui fans Enfans. ) Que le Ciel ayant rafTemblé de fi
grandes Difpofitions dans la Perfonne du Roy Très-Chrêtien & dans cel-
les de fes Fils & Petit-Fils, ce feroit renverfer l'Ordre de la Providence,
que de vouloir les priver des Royaumes auxquels ils font apelez ; Que fes
Ayeuls de Triomphante Mémoire n'avoient eu rien plus à cœur que d'a-
grandir la Monarchie d'Efpagne, & d'en prévenir le démembrement ;
Que Ferdinand V., cinquième Ayeul de Sa Majeiié, avoit confenti à la
dégradation de fa propre Famille, & de la réduire à la condition privée,
afin de rendre la Monarchie d'Efpagne plus puhTante , en unifiant pour
toujours la Couronne d'Arragon à la Couronne de Cailille, qui étoit la
plus confiderable ; Que l'Empereur Charles-Quint, tris- Ayeul de S. M., a-
voit fait fon polîible pour lailTer l'Empire uni à l'Efpagne en la Perfonne
de Philippe II. fon Fils, à l'excîufion de Ferdinand fon Frère & de fes
Enfans ; mais, que les Conjonctures des tems ne l'ayant pas permis, au
moins il avoit attaché pour toujours à la Monarchie d'Efpagne toutes les
glorieufes Conquêtes qu'il avoit faites dans le Vieux & le Nouveau Mon-
de, tant par des Troupes Allemandes que par des Efpagnoles, & même
le Milanois & plufieurs autres Fiefs relevans de l'Empire ; Que Philippe
IL , quelque tendreiTe extraordinaire qu'il eut pour l'Infante Ifabelie fa
chère Fille, ne lui avoit affigné les Païs-Bas en Dot, qu'après avoir pris
toutes les Précautions imaginables pour conferverune étroite Union de ces
Païs avec l'Efpagne, & empêcher qu'ils ne puiTent jamais être démem-
brez de la Monarchie ; Que Philippe III. & Philippe IV. l'Ayeul & le
Ffff 2. Père
PE.
f76 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Père de Sa Majeilé , n'avoient pas été moins zelez que leurs Predecef-
gen. de feurs pour l'augmentation & la gloire des Royaumes d'Efpagne j mais,
jl'Euko- qa'en l'état prefent des Affaires , la Monarchie ne pouvoit éviter une ruine
prefque totale, fi. Sa Majefté venoit à mourir fans avoir réglé la Succef-
iion, ou fi«on vouloit exclure les plus proches Héritiers, qui étoient les
Princes de France ; Que le Roy Très-Chrétien, pendant un des plus longs
Règnes dont il foie fait mention , ayant toujours été comblé de victoires
& de profperitez, étoit en état de fe faire juitice par fes propres Armées,
de s'emparer d'une grande partie des Etats d'Efpagne, de devenir aiTez
puiffant pour fe rendre maitre de ce qui pourroit relier , & d'éteindre
ainli la Monarchie Efpagnole , en l'unifiant à celle de France comme un
Pays de Conquête ; Que V Empereur , bien éloigné de pouvoir s'oppofer
à cette Révolution, ieroit en danger avec toute fa Famille de fuccomber
dans une Guerre, que la Succefiion d'Efpagne auroit allumée entre les
deux Maifons d'Autriche & de France ; Qu'au contraire, fi le Duc d'An-
jou, fécond Fils du Dauphin, étoit déclare Succeffeur de Sa Majeilé Ca-
tholique, cette Juilice rendue à Sa Majeilé Très-Chrétienne l'engageroit
de maintenir la Monarchie d'Efpagne en faveur de fon Petit-Fils, & mê-
me à lui rcitituer tous les Pais, defquels il s'étoit déjà emparé, comme
ayant dus appartenir à la feue Reine de France, de tous les Droits de la
quelle le Petit-Fils feroit reconnu légitime Héritier ; Que d'ailleurs il fe
pourroit ménager , entre Je Duc d'Anjou Roy d'Efpagne, & l'Archidu-
ehefle Fille de l'Empereur, un Mariage qui ferviroit de lien pour entre-
tenir entre les Maifons d'Autriche & de France une Paix & une Union
très-avantageufe à toute l'Europe & à la Chrétienté ; Qu'enfin Sa Ma-
jcité , à l'exemple de fes PredecelTeurs Roys Catholiques, ayant toujours
'gouverné les chofes plutôt par la confideration de la Religion que par
des Intérêts Politiques, ne pouvoit rien faire de plus méritoire pour la
Vie éternelle, que de contribuer à l'Exaltation de la Foy Catholique, A-
poftoîique, & Romaine, en nommant, avant fa mort, le Duc d'Anjou
pour fon Succeffeur ; d'autant que l'Union étroite, qui fe trouveroit en-
tre la France & l'Efpagne , augmentant les forces de Sa Majedé Très-
Chrètienne , elle pourroit travailler plus puiifamment à l'extinction de
l'Hérefie , qu'elle avoit déjà fi heureufement exterminée de fes propres
Etats, & l'Alliance du Duc d'Anjou Roy d'Efpagne avec la Maifon d'Au-
triche pourroit procurer à Sa Majelté Impériale les moyens de travailler
plus efficacement à la Ruine de l'Empire des Turcs.
Je ne dis pas que le Cardinal Archevêque de Tolède ait dû parler en
ces termes ; je demande feulement, s'il n'étoit pas à craindre pour Sa
Majeilé Impériale, que cette Eminence n'emploiat en faveur de la Fran-
ce des Motifs plus rafinez , plus dévots, & plus capables de faire impref-
fion fur l'efprit du Roy Catholique , que je ne les puis imaginer ni expri-
mer ? Le Teftament de Charles IL fait connoitre quelles ont été les Dif-
portions- du Cardinal & des principaux Miniitres de Sa Majeilé pendant
les derniers tems de fa vie; & ces Diipoiitions ne pouvoient pas être allez
degui-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. S77
deguifées pour ne point être aperçues des Ambaffadeurs de l'Empereur, Affaires
s'ils les avoient examinées de bien près. Lors que je propoferai des Re- GEN- DE
flexions fur le Teitament du feu Roy d'Efpagne , je rechercherai plus L'E
particulièrement la folidité des Motifs qui ont pu déterminer Sa Majeité _
Catholique & fon Confeil aux Difpolitions qui le lifent dans les Articles
imprimez, & rendus publics.
La concurrence de la Maifon d'Autriche & de la Maifon de France
pour la Succeilion d'Efpagne peut bien être comparée à celle qui étoit
arrivée en ifi<>. entre ces deux Maifons pour l'Empire, devenu vacant
par le Décès prématuré de Maximilien 1. Cet Empereur, ébranlé par
l'Eloquence du Cardinal de Sion, avoit fufpendu l'exécution de fon def-
fein de faire couronner Roy des Romains Ferdinand fon fécond Petit- Fils;
&, après avoir laiiîé inutilement écouler le tems de la Diète des Electeurs,
laquelle fe termina avec l'année iyi8. le douzième jour de la fuivante,
ayant pris une médecine par précaution , il en fut étouffé dans la ville de
Lintz en Autriche , lors qu'il ne commençait que d'entrer en fon année
climaclerique. Son trépas donna lieu à François I. Roi de France de pré-
tendre ouvertement à l'Empire. Il s 'étoit contenté de traverfer indirec-
tement la Propolltion qui avoit été faite d'élever à la Dignité de Roi des
Romains Charles d'Autriche Roy d'Efpagne, lequel, fans s'amufer aux
Remontrances que le Roy Très-Chretien faifoit faire à fon defavantage,
s'étoit fecretement affuré de la voix de quatre des fept Electeurs, mo-
yennant deux cens mille écus. La vacance de l'Empire ayant changé
les Affaires, les Electeurs dégagèrent leur parole, François I. leur ayant
fait offrir quatre cens mille écus. Dans la fuite de la Négociation, le
Roy Très- Chrétien, perfuadé du fuccès de fon Entreprife par les Lettres
de Bonnivet fon Ambaffadeur à Francfort, où fe faifoit l'Election, né-
gligea d'arrêter dans fhs Intérêts Erard de la Mark Eveque de Liège, &
Sequinguen , fameux par fon crédit parmi les Gens de Guerre, & par la
facilité qu'il avoit de les alfembler. L'un & l'autre étant paffez au fervi-
ce du Roy d'Efpagne, l'Eveque de Liège, devenu Cardinal par la recom-
mandation de Sa Majeflé Catholique , ménagea tellement les Voix des
Electeurs par des Intrigues étudiées félon chaque diverfe Conjoncture, &
Sequinguen fçut fi à propos raffembler une Armée de vingt -quatre mille
hommes autour de la ville de Francfort , fous le prétexte d'affurer la Li-
berté de l'Election, mais en effet pour déterminer les Suffrages en faveur
de fon Maître, que Charles fut élu à l'Exclufion de François I.
Le Confeil de l'Empereur prefentement régnant, qui devoit avoir par-
faitement remarqué , combien celui de France fçait fe prévaloir habile-
ment desCirconitances arrivées dans les temps paifez, auroit du fe precau-
tionner un peu mieux contre les Intrigues, les Trefors, & les Armes de
Sa Majeité Très-Chretienne dans la Conjoncture de la Succeffion d'Efpa-
gne; de crainte qu'il n'arrivât a la Maifon d'Autriche d'être fupplantée par
celle de France, fous la fin du Règne de Louis XIV. comme il étoit ar-
Ffff 3 rivé
FE.
;78 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires rivé à celle de France d'avoir été fupplantée par la Maifon d'Autriche aïs
gxn. de commencement du Règne de Charles Roy d'Efpagne.
Le Roi de la Grande-Bretagne, & les Seigneurs Etats Généraux des
P. U., conftament attentifs à procurer la Tranquillité de leurs Pais, excel-
le de toute l'Europe , prevoians avec alTez de certitude les intentions de
la France & les effets de Tes Négociations & de fes Forces, auroient bien
fouhaité pouvoir, après la conclufion de la Paix de Ryswick, entretenir
un nombre de Troupes prêtes pour diverfes Conjonctures qui dévoient
accompagner la mort du Roi d'Efpagne, la quelle ne pouvoit plus être fort-
éloignée^ mais les deux Nations, plus attachées à faire valoir leur Com-
merce & à réparer leurs Pertes paflées,qu'à pénétrer les RefTortsde la Po-
litique , avoient deux fortes Raifons pour s'oppofer à la Continuation de
l'Entretien des Troupes. La première étoit le préjudice que le trop grand
nombre de Gens de Guerre ne manque jamais de caufer dans un Etat,
foit par leurs depenfes à charge à tout le peuple, foit par les defordres
qu'ils introduifent dans la Société publique par leur oifiveté , & par une
trop grande licence. La féconde raifon étoit qu'il n'y avoit aucun befoin
de groffes armées pour la confervation de leurs propres Païs , & qu'on ne
devoit pas fi fort s'intereffer pour les autres Puiffances , des quelles on a-
voit reçu fi peu de fatisfaétion pendant la Guerre, de fi grands meconten-
temens à la conclufion de la Paix, & qui prenoient 11 peu de foin de leur
propre Défenfe.
On ne peut pas avoir perdu le fouvenir de ce qui fe paffa en 1699. en-
tre le Parlement d'Angleterre, refolu de caffer toutes les Troupes , à la
referve de celles que la Nation avoit coutume d'entretenir en temps de
Paix, & Sa Majeiîé Britannique faifant les plus fortes inilances pour con-
ferver une Armée proportionnée aux befoins particulières de la Nation
& généraux, pour afîurer le repos de l'Europe. La Conduite de Sa Ma-
jefté fera dans tous les fiecles à venir un Exemple admirable d'un Monar-
que le plus emprelTé pour les véritables Intérêts de fes Sujets, & en mé%
me temps d'un Père le plus indulgent pour condefeendre aux Délibérations
de fes Peuples affemblez en Parlement.
Les Hollandois imitèrent les Anglois dans la Reforme des Gens de Guer-
re \ mais , pour certain , les uns & les autres auroient confenti à l'entretien
de la plus grande partie de leurs Troupes, fi les autres Souverains, in-
tereiïez à une confervation mutuelle , avoient eu des fentimens , & pris
des mefures , tels que l'état des Affaires Publiques les demandoient.
Cependant, Sa Majelté Britannique ne s'eiï jamais relâchée, & a tou-
jours avec uneextreme vigeur prévenu les Semences de nouvelles Guer-
res, autant qu'il a été en fon pouvoir: les Prétentions fur Neuchâtel, are-
tées dès leurs premiers mouvemens , en font une preuve ; & les Diffe-
rens fur le Holftein, réglez par un Traité de Paix à la prefence des Flotes
Angloifes & Hollandoifes , font les effets du Zèle de ces deux Nations
pour le maintien de la Tranquilité de l'Europe.
La fituation des Affaires de la Succeflion d'Efpagne ayant difpofé la
Fran-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. f79
France à vouloir convenir de quelque Partage pour Tes Prétentions, la ArrA1RïS
propofition étoic trop favorable pour n'être pis embraffée volontiers par l>£Ùro-
Sa Majeité Britannique & par les Seigneurs Etats Généraux des Provin- PE.
ces-Unies. Quoique le Procédé du Roi Très- Chrétien , à l'égard de cet- ~~
te idée de Partage, pût être regardé comme un Rafinement de Politique,
félon qu'il fera remarqué ci-apres,& que les fuites l'ont confirmé , il n'en
étoit pas moins d'une Politique bien entendue d'entrer en Traité, d'aréter
des Articles les plus propres pour accommoder les differens & prévenir
les ombrages à naître à l'ouverture de la Succefiion d'Efpagne, & de les
figner avec toutes les formalitez qui peuvenc rendre un Traité inviolable.
Si l'Empereur, qui a eu connoilïance d'une partie des démarches faites
pour le Traité de Partage , eût voulu fe mettre en polhire de pouvoir
vigoureufement difputer à la Maifon de France la SuccefTion du Roy Ca-
tholique, il y a quelque fujet de croire, que le Roi d'Angleterre 8l les E-
tats Généraux auroient pris d'autres mefures, en cas qu'il eût été h propos
de convenir d'un Partage; mais. Sa Majeité Impériale refufant tout Ac-
commodement, & (aillant neantmoins le Roi Tres-Chretien en état de fe
rendre Maître de ce qui feroit le plus à fon gré , de mettre toute l'Europe
en ailarme , & Je former aes projets qui ne pouvoient être exécutez fans
une horrible Guerre; ne faut-il pas avouer que c'étoit une SagefTe à Sa
Majeité Britannique ck aux Etats Généraux de conclure un Traité, qui
devoit aflurerà la Maifon d'Autriche le principal & le meilleur d'une Suc-
ceffiun qu'elle couroit rifque de perdre entièrement, & obliger la France
à fe tenir fatisfaite de conditions moins-confiderables , qu?elle ne les pou-
voit ootenir par les Armes? De plus, en même temps que ces deux Puif-
fances convenaient avec le Roi Très-Chrétien de maintenir le Règlement
qu'il propofoit lui-même touchant la Succeffion d'Efpagne, elles preve-
noient fort à propos le foupçon de quelque milterequi fe pouvoit rencon-
trer dans ce Trait de Politique de la Cour de France. En effet, fi Sa Ma-
jeité Très-Chrétienne venoit à violer un Traité de cette nature, & à vou-
loir entreprendre fur toute la Monarchie Efpagnoîe , ce feroit ouverte»
ment fe condamner elle-même de n'avoir employé la Foi du Traité, que-
pour parvenir plus feurementà fes fins; ce feroit confirmer les Nations
Etrangères dans la prévention où elles font que les François ne cherchent
qu'à les abufer par des apparences de ilncenté; ce feroit enfin faire une
Injure des plus outrageantes aux Ang'ois & aux Hollandois , & les met-
tre en droit d'appuyer de toutes leurs forces la Maifon d'Autriche, tant
pour foutenir fes prétentions, que pour prévenir de notables préjudices,
dt-nt 'es deux Nations feroient menacées par une telle conduite. Ces
Conùdcrations regardoient proprement les Anglois & les Hollandois 5 mais,
le Traité en foi-meme devoit fervir d'un dernier & du plus puhTant mo-
tif pour réveiller l'émulation & la j iloufie de la Maifon d'Autriche; &
c'en: le fujet d'une neuvième & dernière Reflexion.
#. La Ligue entre la France & l'Angleterre fut un des principaux Arti-
fices
PE.
580 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires fices que le Cardinal Mazarin mit en ufage pour faire reuflir le Projet qu'il
gen. dk avoit formé , pour engager Philippe IV. Roi d'Efpagne à faire la Paix
jl'Euro- avec ]a France , & à donner fa Fille l'Infante Marie- Therèfe en Maria-
ge à Louis XIV. Roi Très-Chrétien. Le Confeil d'Efpagne , voulant
confirmer Sa Majefté Catholique dans le fentiment où elle étoit de con-
clure l'un & l'autre , lui reprefenta , que la Ligue étroite qui étoit entre la
France & F Angleterre empêcher oit laréuffite de tous les Dejfeins cï Efpagne\quil
étoit confiant que Charles- Quint, tout victorieux qu il étoit de François I. , fut
contraint de faire la Paix avec lui à caufe de V Alliance ou ce Prince entra avec
les Anglois \ 13 qu après cet Exemple Sa Majefié ne pouvoit manquer de faire la
Paix par un femblable motif. Il ajout oit à cela que V Empereur avoit les mains
tellement liées , qu'il ne pouvait plus donner aucun fecours , ni à la Flandres , ni à
. V Etat de Milan -, & enfin que le Portugal par oijff oit fur le point d'entrer en Al-
liance avec les Anglois & les François d'une part , & peut-être avec les HoU
landois de l'autre , ce qui fer oit trés-facheux.
Philippe IV., Prince naturellement pacifique, confiderant qu'il étoit
vieux & infirme , aprehendoit de lahTer à fes Enfans extrêmement jeunes
une Guerre à pourfuivre contre un Roi victorieux & à la fleur de fon âge ; &
cette aprehenfion fervit à le perfuader que le Mariage de l'Infante avec
le Roy de France ne porteroit aucun préjudice, ni à fes Enfans, ni à fes
Etats j d'autant plus que le Marquis de Lionne, dans un voyage fait ex-
près à Madrid quelques années auparavant, avoit fait entendre, que le
Roi Très-Chretien ne pretendoit point époufer l'Infante à des Conditions
autres que celles qui avoient été ilipulées dans le Contrat de Mariage de
Louis XIII. avec l'Infante Anne, Fille de Philippe III.
Il y avoit une grande différence entre les Conjonctures de l'année itffp.
qui fut celle du Mariage de Louis XIV. Roi de France avec Marie-Thé-
refe Infante d'Efpagne, & les Conjonctures de l'année 1700. qui a été cel-
le du Traité de Partage de la Succeffion de Charles II. Roi Catholique.
Les intentions , les réfolutions, & les préparatifs de la France nétoient
plus couverts d'aucun déguifement. Sa Majefié Tres-Chretienne avoit
déclaré fes Prétentions fur la Monarchie d'Efpagne , & par provifion elle
s'en étoit affurée une partie par une Ligue avec l'Angleterre & la Hol-
lande, afin de pouvoir plus facilement obtenir l'autre , de même que,
pour parvenir à la conclufion du Mariage , elle s'étoit unie d'Intérêts avec
les Anglois. Au tems du Mariage, le Cardinal Mazarin n'avoit point
fait de.difficulté d'emploier les cérémonies les plus folemnelles & les
plus facrées qui puilTent accompagner une Renonciation , comme une
fimple Rufe de Politique qui pouvoit fervir à faire croire au Roi & aux
Peuples d'Efpagne que le Roi Très-Chretien & fes Defcendans ne fe pre-
vaudroient jamais de ce Mariage , pour former des Prétentions fur leurs
Etats-, & en 1700. la France s'eft fervie de la Foy d'un Traité, comme
d'une féconde Rufe de Politique, qui, pouvant faire croire qu'elle fe te-
noit fatisfoite d'une médiocre Partie de la Succeffion d'Efpagne, feroit
très-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. jSi
très-propre pour attirer dans Tes intérêts le Cardinal Portocarrero, un des Affaires
principaux Minières du Roi Catholique, & par fon moyen déterminer Sa GFN- °£
Majefté à inftituer par Ton Teftament le Petit- Fils du Roi Très-Chrétien L'EuK0-
Héritier de la Monarchie entière. PE*
Cette féconde Rufe de la France auroit été rendue inutile, & auroit peut-
être même fervi à détruire l'effet de la première , û l'Empereur étoit en-
tré dans le Traité de Partage. De quelque manière que les chofes tour-
naient, il étoit difficile qu'il ne fe rencontrât point d'occafion de Guerre}
& je douterois fort que le Roi de la Grande-Bretagne & les Etats Géné-
raux des P. U. fe foient perfuadez de voir les premiers temps de l'ouver-
ture de la Succeilion d'Efpagne fe paffer, comme ces belles journées, où
les rayons du foleil font tempérez de nuages qui n'ont que de bénignes in»
fluences. Mais, la France étant la feule en état de faire de grandes Ln-
treprifes , elle auroit été moins difpofée à fe prévaloir de fes forces, fi la
Succeflion fe fût trouvée réglée de concert entre Sa Majefté Très- Chré-
tienne & Sa Majefté Impériale. De vouloir fupofer que la France étoit
bien prévenue que l'Empereur ne voudroit jamais entendre à aucun Parta-
ge, ou, qu'en ce cas, elle auroit eu des expediens prêts pour rompre le
Traité & rendre nuls tous Engagemens , c'eft furquoi je ne raifonne point:
il eit inutile de fupofer ce qui n'efl point arrivé, & il faut s'en tenir aux
faits qui font hors de toute conteltation.
La France pretendoit à quelque prix que ce fût avoir fa part de la Suc-
ceflion à la Monarchie d'Efpagne: il n'y avoit aucune apparence, que
la Maifon d'Autriche pût lui oppofer des forces capables de l'obliger à
fe defifter de fes prétentions, ou d'empêcher qu'elles ne fulfcnt effectuées.
Sa Majefté Britannique & les Etats Généraux des P. U., très-perluadez
de la vérité de ces deux propolitions, avoient jugé neceffaire de préve-
nir les effets des prétentions de la France, en convenant avec Sa Majefté
Très-Chrétienne d'un Accommodement tel que les conjonctures des tems
le pouvoient exiger, pour fatisfaire les deux Concurrents à la Monarchie
d'Efpagne, & pour afîurer la tranquilité de l'Europe} non pas en retran-
chant abfolument tout prétexte de Guerre, mais feulement en difpofant
les chofes d'une manière plus propre à pacifier promptement , & avec
■moins de préjudice pour toute l'Europe, les émotions & les troubles iné"
vitables au moment du décès de Sa Majefté Catho'ique.
Voilà précifement le fait. Il elt bien vrai que la conduite de la France
envers l'Empereur, & l'Amitié fincére que Sa Majefté Impériale a tou-
jours eue* pour Majefté Catholique, ne lui permettoient pas d'entrer dans
un Partage des Etats d'Efpagne, du vivant de Charles IL aurïi délibéré-
ment, que le Roi Très- Chrétien, lequel n'avoit époufé la Sœur de S. M.
C. que pour acquérir l'Héritage d'Efpagne à fes Defcendans. Mais, enfin,
il n'y avoit plus de temps à perdre. En vain on fe laiflbit fhter de quel-
que recouvrement de fanté, ou prolongation de vie d'un Prince qui n'éioit
foutenu que par l'artifice des remédies. 11 étoit d'une dernière néceffité
que l'Empereur pût inceffamment engager Sa Majefté Catholique & fon
T<tme XI, Gggg Con-
t'EuRO
PE
7S2 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Confeil à donner une déclaration de leurs intentions touchant le Traité de
gfn. de Partage. Si le Roy Charles IL, de fon propre mouvement, ou par les In-
fpiraiions de fon Confeil , ne vouloit point confentir à aucun démembre-
ment de la Monarchie, il étoit d'une égale néceffité de faire refoudre Sa
Majeflé Catholique à donner des aflurances , hors de toute apparence de
doute, pour maintenir le Droit de la Maifon d'Autriche à la Succeffion de
la Monarchie entière de tous les Etats d'Efpagne : ces aflurances ne
pouvoient être fuffifamment fondées que fur un nouveau Teitament du
Roi Charles II. en faveur d'un Prince de cette Maifon ; & ce Tefta-
ment devoit être confirmé par toutes les formalitez les plus capables
d'obliger les Grands & les Peuples d'Efpagne à foutenir de leurs Biens &
de leurs Vies les Difpofitions Teflamentaires, qu'ils feraient cenfez avoir
faites eux-mêmes conjointement avec leur Souverain.
Trois mois de temps, marquez dans l'Article VU. du Traité, pour don-
ner lieu à Sa Majeilé Impériale de l'accepter, fuffifoient pour obtenir une
détermination du Roi d'Efpagne , & s'il fe rencontroit des obilacles in-
vincibles à un Teltament tel que je viens de le propofer , il n'étoit
nullement de la prudence de fe repofer fur de fimples promelles ou de
bouche ou écrites. Si Sa Majeilé Catholique n'étoit plus en état de
difpofer de fon Confeil , félon que les véritables intérêts de la Maifon
d'Autriche l'exigeoient; fi l'apréhenfion de mécontenter la France pré-
valoit fur les inltances de l'Empereur, il étoit indubitable que l'Accep-
tation du Traité de Partage étoit la meilleure reflburce pour la Maifon
d'Autriche.
Le feptième Article du Traité contient encore deux Points confidé-
rables. L'un efl que , fi Sa Majcjîé Impériale & le Roy des Remains re-
fufoient d'entrer dans le 'Traité & de convenir du Partage affigné au Sere-
'mjf. archiduc , les deux Seigneurs Roys ou leurs Succeffeurs , £5? les Sei-
gneurs Etats-Généraux , conviendront d'un Prince auquel le dit Partage fera
donné. Le fécond Point efl, quV» cas que , non-obftant la préfente Conven-
tion , le dit Serenijf. archiduc voulut prendre pojfejjïon de la Portion qui lui
fera échue , avant qu'il eût accepté le préfent Traité , ou de celle qui fer oit
affgnées à Mgr. le Dauphin ou à celui qui aura le Duché de Milan par
échange , comme il eft dit ci-deffus , lesdits deux Seigneurs Rois & les E-
tats-Generaux, en vertu de cette Convention , f empêcheront de toutes leurs
forces.
Ces deux Points, non plus que tout ce qui fe trouve dans le Traité de
defavantageux à la Maifon d'Autriche, ne doivent aucunement être imputé
au Rci de la Grande-Bretagne ni aux Etats-Generaux. La France ayant
propofé de faire valoir fes prétentions & de les apuyer d'un confentement
des deux autres Puiffances, elles ont fimplement, comme Médiatrices, eu
égard à ne rien accorder que ce qui ne pouvoit pas être refufé , fans ex-
pofer toute l'Europe à de terribles bouleverfemens; mais en même temps
que les deux Puiffances ont condefeendu à certaines proportions de la
France, elles ont pourvu à mettre des bornes aux prétentions de cette
Cou-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC I. jgj
Couronne. Car fi d'un côté Sa Majeflé Britannique & les Etats-Generaux Affaires
ont confenti de fixer un terme de trois mois à l'Empereur pour l'accepta- GEN- de
tion du Traité; s'ils font convenus de faire choix d'un autre Prince , en L'E^li0-
cas de refus de Sa Majelté Impériale; il efï manifefle que ce n'a été qu'à
defTein de folliciter plus vivement la Maifon d'Autriche à fe déterminer
inceffamment fur des circonftances qui ne pouvoient fouffrir de délay, &
afin d'engager la France à ne pouvoir plus prétendre à l'entière Succefîion
d'Efpagne pour un Prince François , & à ne pouvoir point faire de bri-
gues fans leur participation. Que fi d'autre côté , les deux Puiffances
ont contracté une obligation indifpenfable d'empêcher les entreprifes de
l'Archiduc au préjudice du Traité: elles ont en premier lieu pourvu à ce
qu'il ne fe fit point de mouvement, pendant la vie de Sa Majeflé Catho-
lique, capable de troubler la Paix de l'Europe; & en fécond lieu elles
ont acquis le Droit, & contracté l'obligation, d'empêcher la France de for-
mer & d'exécuter aucun projet au préjudice des conditions des quelles
elle eft convenue.
L'Article VIII. portant que le Séréni/f. Archiduc ne pourra pajfer en Efpa-
gne ni dans le Duché de Milan du vivant de Sa Majefté Catholique, que d'un
commun confentement 13 point autrement, n'efl qu'une extention de l'Article
précédent , & fait connoitre combien la France eft exacte à prendre
toutes les précautions neceffaires pour le fuccès de fes deffeins. Cette
extrême exactitude ne devok pas être regardée avec indifférence par
la Maifon d'Autriche; mais auffi elle pouvoit un jour fervir de bonne rai-
fon aux deux autres Puiffances , pour faire entendre à Sa Majeflé Très-
Chrétienne, que fi elle les avoit engagées à des mefures fi précifes contre
la Maifon d'Autriche , dont les entreprifes ne pouvoient être d'un grand
préjudice, il étoit de lajuftice de ne pas permettre que leur confentement
n'eût été recherché , que pour faire mieux valoir les prétentions de la
France, au defavantage de l'Empereur.
L'Article IX. affure à la Maifon d'Autriche le Partage afligné au Séré-
niffime Archiduc , en telle forte néanmoins , qu'il ne pourra jamais être
réuni, ni demeurer en la perfonne de celui qui fera Empereur ou Roi des
Romains de quelque manière que ce puiffe être.
Cela veut dire que les Trois Puiffances ont jugé , qu'il étoit néceffaire
pour le bien de toute l'Europe que les chofes demeuraffent ainfi arrêtées j
mais de fçavoir, fi elles peuvent en effet demeurer dans cette difpofition,
il faudroit auparavant avoir trouvé le moyen d'empêcher la force majeure
de fe rendre maitreffe des réglemens , des loix, & de tous les droits les
mieux établis, les plus jultes , & les plus facrez. Que, dans le temps-
même de ce Traité, on eût demandé à la France, û, l'occafion fe pré-
fentant de pouvoir réunir en la Perfonne d'un de fes Princes , ou Empe-
reur ou Roi des Romains ,1e Partage afiigné au Séréniffime Archiduc, elle
fe feroit quelque fcrupule de contrevenir à cet Article? Il efl à croire qu'el-
le auroit détourné la queflion ,en répondant, que ,jufqu'à ce que roccafion
Gggg 2 fût
>84 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Araires fût arrivée, il y avoit du temps pour avifer à ce qu'elle auroit à faire
cen. de alors.
x'Euro- i] me femble qu'il faut bien plus fonger à pourvoir généralement à tout
PE- ce que les conjonctures préfentes peuvent exiger, qu'à prévoir des événe-
mens éloignez. El certes , ce font proprement les négligences, de ce qui
concerne les temps prefens , qui donnent heu aux révolutions qui p;,roif-
fent furvenir inopinément. Si par exemple la Maifon d'Autriche eût imi-
té le procédé de la France, pour des négociations , des préparatifs, & gé-
néralement pour tout ce qui pouvoit allurer fes prétentions à la Succeflion
d'Lfpagne, le Roi Très-Chrétien n'auroit pas trouvé une lî grande facilité
pour amener les chofes à-peu près au point où il les vouloit, ni d'en dif.
pofer félon fon choix, non obftant toutes Conventions précédentes. D'au-
tre part, fi le Roi de la Grande-Bretagne & les Seigneurs Etats-Generaux
avoient fait une fcrupuleufe attention aux intentions, aux ratlnemens, aux
fubtilitez du Confeil de France dans les Négociations , ils auroient eu
principalement foin de former dans le préfent Traité un Article exprès
touchant un Teftament qui viendroit à être fait en faveur des Petits-Fils
de Sa Majeflé T. C. Ce Teftament ne pouvoit pas abfolument être jugé
impofllble ; & la France, qui avoit déjà publié hautement fon inclination
défaire paffer le Duc d'Anjou en Efpagne , pour y être élevé , comme
SuccefTeur de Sa Majefté Catholique , n'avoit pas aparament abandonné
toutes les grandes efpérances fur la hucceiîion entière , lorfqu'elle vouloit
paroître fatisfaite d'un médiocre Partage. Pour marque qu'elle fe propofoit
encore quelque choie de plus, elle a eu foin de faire ajouter à la fin de
cet Article IX. la Claufe fuivante.
Et de même le dit Partage du Sérénijf. Archiduc ne pourra jamais rêve*
n'tr , ni demeurer en la per/onne d'un Prince qui fera Roi de France ou Dau-
phin^ ou qui fera devenu ïun ou l'autre, (oit par SucceJJton, cïejiament , Con-
trat! de Mariage, &c.
A ne confidérer cette Claufe, que félon l'idée générale que les termes
femblent exprimer, & félon les vues de bonne-foi qui devroient régner
dans tous les Traitez, on fe lahTeroit perfuader, que les Trois PuifTances
n'ont eu égard qu'à des événemens capables d'arriver dans la fuite des
temps, fi l'Archiduc & la Maifon d'Autriche venoient à manquer d'Héri-
ritiers. Car, étant dit que le Partage du SérénilT. Archiduc ne pourra jamais
revenir ni demeurer en la perfbnne d'un Prince qui fera Roi de France ou
Dauphin &c, ne doit-on pas naturellement fupofer , que !e Partage ali-
gné à l'Archiduc lui fera confervé & à fes Héritiers , fuivant le règle-
ment arrêté au commencement de Cet Article IX. & qu'il ne pourra reve-
nir à la Maifon de France que par des Conjonctures à naître dans les tems
à venir. Cependant, fi l'on fait une Réflexion plus particulière fur la Poli-
tique que les Cardinaux de Richelieu & Mazarin ont introduite duns le Con-
feil de France , on pourroit avec fondement fe méfier que le véritable
Cens de cette Claufe auroit été, que les Pais de la Monarchie d'Elpagne ,
aflîguez
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC I. f$5
aftignez pour Partage au SérénifT. Archiduc , pourroient bien revenir & Affaires
demeurer en la perfonne d'un Prince de France, qui ne feroit point Roi gen.de
ni Dauphin , ni devenu l'un ou l'autre ;& de cette manière fi le Duc d'An- *-'Eu»°-
jou devenoit Roi de France ou Dauphin, en ce cas il ne pourroit jouir du
Partage que le Traité aiîigne au Seréniilime Archiduc; mais le Duc de
Berri ou un autre Prince de la Maifon de France auroient pu obtenir par
droit de Succeflion au Duc d'Anjou, ce que lui-même auroit pu obtenir par
Droit de Teitament.
Il eft certain, que le Roi de la Grande-Bretagne & les Etats- Généraux
ont etiimé que, pour accommoder les difputes & les différens , & pour
prévenir les ombrages à naître à l'ouverture de la Succellion d'Efpagne,
il étoit necefTaire que toute la Maifon de France fut exclue du Partage af-
figné à l'Archiduc, indépendament de tout Teitament de Charles II. Roi
d'Efpagne, fait en faveur des Defcendans de Sa Majelté Très-Chrétien-
ne; de même que l'Intention des deux PuhTances étoit , que tout Tefla-
ment précédent ou à venir en faveur de la Maifon d'Autriche ne pourroit
autorifer un Prince de cette Maifon de fe vouloir mettre en poffc(Fion du
Partage afîigné à Mgr. le Dauphin ; autrement il y auroit eu de l'injultice
à convenir que le Partage de l'Archiduc pourroit revenir à un Prince de
France, pendant que celui de Mgr. le Dauphin ne pouvoit revenir à un
Prince d'Autriche. Mais , comme il a déjà été remarqué , la France
ayant recherche de s'allier aux Rois d'Efpagne à deilein d'acquérir le
Droit de fuccéder à leur Monarchie , & les Renonciations n'ayant été
faites dans les Traitez précédens qu'en manière de Rufe politique em-
ployée par la France pour couvrir des prétentions , qu'elle fe refervoit
de faire valoir en tems & lieu, il étoit important à Sa Majefté Britan-
nique & aux Etats-Generaux des P. U. de pénétrer le véritable efprit,
& d'aprofondir toutes les vues fecrétes, des Propofitions avancées par
les François dans un dernier Traité exprès pour régler la Succeffiori
de Charles II. Roi d'Efpagne, en état de mort prochaine , fans Héritiers
de la Branche Royale d'Autriche.
Les Articles X. XI. & XIV. contiennent des Engagemens réciproques
entre les Trois PuiiTances pour maintenir la tranquillité de l'Europe au
moment du décès de Sa Majefté Catholique, i. de laitier toute la Suc-
cefiion dans l'état , comme elle fe trouvera alors ; 2. de louffrir qu'il
feu libre à chaque Prince de fe mettre en poiTeiïion de ce qui lui elt afîi-
gné pour Partage, pourvu qu'il ait préalablement fatisfait aux conditions
portez par les Articles IV. & Vil. du Traité -, $. de faire tous leurs de-
voirs poflibles, afin que chacun foit mis en poflelîion de h Portion, félon
cette Convention , & qu'elle puiiTe avoir fon entier c ffet ; 4. de s'aifi-
fter mutuellement l'une l'autre avec toutes fes forces, & de fe rendre Ga-
rant de la poncluelie exécution de la dite Convention. & des Renoncia-
tions faites en confequence \ 5. de s'entraider l'une l'autre contre tous
©ppoians à la prife de pofTefïion des partages convenus, & pour cet effet
Gggg 3 dc
l'Euko-
pr.
586 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires de régler entr'ellès ce qu'elles doivent contribuer de forces par Mer & par
ge*. m Terre.
Entre diverfes Réflexions à faire fur ces Engagemens les principales font :
la première, que la France avoit moyen de faire les plus grands prépara-
tifs de Guerre, fous le jufte prétexte de fe tenir en état d'entrer en pok
feffion de ce qui lui étoit afîigné par le Traité & d'en faire valoir toutes
les Conventions.
La féconde, que la Maifon d'Autriche étoit fuffifamment avertie & ex-
citée à en faire de même pour foutenir fes Droits & prendre toute forte
de précautions, ou pour combattre les Conventions du Traité , ou pour
prévenir toutes difficultez & conteflations à naitre au tems de leur exé-
cution.
La troifiéme, que le Roi de la Grande-Bretagne & les Etats-Generaux
des Provinces- Unies avoient pareillement tous les prétextes plaulibles
pour difpofer leurs Peuples à de puiiïants Armements, tant pour mainte-
nir les Conventions du Traité , que pour mettre leurs Etats en feureté en
cas de Révolutions imprévues.
La quatrième , que la manière dont la France en uferoit à l'égard des
mefures qui dévoient précéder le décès de Sa Majeflé Catholique, fer-
viroit aux deux PuifTances pour reconnoître plus particulièrement les In-
tentions qu'elle auroit pu avoir dans la Conclufion du Traité. Par exem-
ple , fi la France faifoit des infiances pour obliger les autres PuifTances
à préparer des Armements 5 fi elle requeroit que chacune de fon côté
difpofàt par avance tout ce qui fe trouveroit neceffaire pour la Garantie
du Traité au moment de l'ouverture de la Succefîion du Roy Catholi-
que ; fi elle témoignoit de l'empreffement pour que toutes Trois enfem-
ble fîiTent faire à la Cour d'Efpagne , & par-tout où befoin feroit, des
Déclarations nettes & precifes de la Refolution irrévocable , où elles é-
toient, de faire valoir les Conventions du Traité, non-obftant toutes op-
pofitions contraires: l'Angleterre & la Hollande n'avoient qu'à fonger à
contribuer de leur part à une pareille obfervation dans toute fon exacti-
tude. Que fi la France paroifîoit uniquement empreffée pour des Arme-
ments au dedans de fes Provinces; fi elle étoit indifférente pour deman-
der que les deux autres PuifTances fifTent des préparatifs de Guerre j fi
elle ménageoit quelques intrigues fecretes, fans en donner Communica-
tion au Roy de la Grande-Bretagne & aux Etats Généraux; fi elle con-
fervoit quelques vues au de-là du Partage qui lui étoit affigné ; fi dans
les Négociations de tous fes Envoyez dans les Cours de l'Europe elle ne
marquoit pas une détermination precife de demeurer irrévocablement
arétée aux Conventions du Partage ; enfin, s'il pouvoit naitre quelque for-
te de foupçon que la France ne fe feroit pas une Loy inviolable d'obfer-
ver le Traité, c'étoit alors une Obligation bien plus étroite à l'Angle-
terre & à la Hollande de fe tenir fur leur garde & d'être fufifament
préparées à tout événement.
J'exa.
pour une Julie decifion fies differens que la Succeilion d'Efpagne doit
faire naître entre Sa Majefté Impériale & Sa Majefté Trés-Chrè-
'il eût été néceflaire d'affembler des Plénipotentiaires de tous les E-
& de former une Negotiation fernblable à celles des Traitez de Paix
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. s%7
J'examinerai ailleurs les motifs que l'on pouvoit avoir, pour ne point Affaires
fe repofer fur la Foy de ce Traité \ la necefîké qu'il y avoit , que les An- GfN- DK
glois & les Hollandois fe trouvaient parfaitement bien difpofez, félon les
diverfes Conjonctures que l'ouverture de la SuccefTion d'Efpagne pourroit
occalionner ; & les mefures qui auroient pu être prifes à cet égard.
L'Article XII. porte que feront admis dans le Traité tous Rois, Princes, &?
Etats , qui 'voudront y entrer , & qu'il fera permis aux deux Seigneurs Rois £s?
aux Seigneurs Etats Généraux , cj? à chacun d'eux en particulier de requérir
&? inviter tous ceux qu'ils trouveront bon de requérir & inviter d'entrer dans le
Traité , & d'être (en.blablement Garands de jon exécution & de la validité des
Renonciations qui y font contenues.
La Révolution d'Efpagne étant un Evénement auquel toute l'Europe
doit être très-particuliérement intéreffée, n'auroit-il pas été plus convena-
ble de propofer à tous Rois , Princes , & Etats, le Projet du Traité avant
qu'il fut conclu ? Souvent le mécontentement de n'avoir pas été admis
aux délibérations d'une affaire , fait qu'on ne veut point prendre part, &
même que l'on s'oppofe à fon exécution , quoiqu'elle foit la plus jufle &
la plus conforme aux véritables intérêts du public & du particulier. Les
Conventions du Traité ayant été dreffées pour alïurer la tranquillité de
tous les Etats de l'Europe, n'étoit-il point naturel de communiquer à tous,
ce qui étoit eltimé de plus utile pour le bien général ? Cette Jullice &
cet Honneur rendus aux Souverains, dans une occafion qui les concernoit
de bien près, ne pouvoient manquer de produire de bons effets. Ils au-
roient eu plus de difpofition pour fe laiffer perfuader de l'importance, de
l'avantage , & de la necefîité des Conventions. Que fi des Préventions
d'Intérêt particulier, ou d'autres Confédérations, en avoient empêché quel-
ques-uns de prendre part dans le Traité, ou les avoient portez à s'y op-
pofer , au moins ils n'auroient pu fe plaindre de ce qu'on n'auroit point
eu pour eux une certaine defcrence d'honneur & de confeil , qu'ils au-
roient eu quelque Droit de prétendre.
En effet, qu'il s'élève une Guerre à l'ouverture de laSucceflion d'Efpa-
gne j dificilement fe trouverat-il des Etats qui puiffent demeurer neutres:
tous ceux, qui auroient eu part aux mouvemens de la Guerre, feroient
indubitablement admis dans les délibérations pour la Paix avant fa con-
clufion. 11 paroit donc que chaque Etat de l'Europe auroit eu raifon de
s'attendre d'être confulté & admis dans les délibérations du Traitéde Par-
tage , avant qu'il fut conclu -, puifqu'à proprement parler, ce Traité doit
tenir lieu d'un Accord gênerai entre toutes les Puiffances de l'Europe
tienne.
S
tats
TE.
188 MEMOIRES , NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
Affaires ordinaires, la chofe n'étoît pas praticable; mais ne s'agifTant que de de-
gkn.de pêcher des Extraordinaires pour folliciter une prompte Refolution delà
part des Souverains, de même qu'il a dû être pratiqué pour donner avis
du Traité conclu -t je ne conçois point la dificul'e qui auroit pu s'y rencon-
trer. Si l'état languiiTant de Charles fembloit ne point foufrir de retarde-
ment, ne pouvoit-il pas être déterminé entre Sa Majeilé Très-Chrétien-
ne, Sa Majeilé de la Grande-Bretagne, & les Seigneurs Etats Généraux,
qu'au cas que Sa Majeilé Catholique vint à mourir avant le retour des
Exprès dépêchez dans tous les Etats de l'Europe, les Conventions aré-
tées entre les Trois Puiffances auroient la force & la vigueur des Trai-
tez les plus folemnels ?
On poura trouver mauvais que j'infiile fur de fimples formalitez ; d'au-
tant que les Trois Puiffances, ayant une fois refolu de s'en tenir aux
Conventions arétées entre elles, il étoit indiferent d'en donner communi-
cation avant ou après la dernière Cô*riclufion du Traité. Ne doit-on pas re-
pondre, que s'il étoit indiferent, que les autres Etats acceptafTent , ou
îî'acceptaiîent point le Traité , il pourroit auffi être indiferent d'obferver
toutes les formalitez poiïibles pour les inviter d'y entrer? Mais n'eft-il
pas manifefle, que la parfaite exécution des Conventions dépendoit abfolu-
ment du confentement des autres Souverains , pour contribuer de leur
part au maintien de la tranquilité publique dans les tems de la Révolution
de l'Efpagne ? N'auroit il donc pas été à propos de ménager jufqu'aux
moindres formalitez utiles , pour engager plus feurement le confentement
des autres Souverains?
Il auroit bien pu arriver, que la France, accoutumée, comme elle efl,
de parler avec beaucoup de hauteur, & de commander les chofes plutôt
que de les propofer, auroit fait difficulté de prendre de tels ménagemens
dans une Affaire, où elle prétend avoir un plein Droit, & dont elle croit
pouvoir être MaitreiTe. Mais, les deux autres Puiffances, qui ne préten-
doient aucun avantage, & dont l'unique but étoit d'accommoder les dif-
ferens,de prévenir les ombrages, & d'ail urer la Paix Générale, ne pouvoient
prendre des précautions trop circonfpecles pour faire valoir leurs Inten-
tions parmi les Peuples de leurs Obeïffances, & pour attirer les autres E-
tats dans le même DelTein. Bien plus, comme la France n'avoit recher-
ché cette manière de Confédération %vec l'Angleterre & la Hollande,
que pour empêcher, qu'elles ne fe rencont raflent point oppofées aux Pro-
jets qu'elle meditoit, afin de tirer tout le fruit poffible du grand Evéne-
ment de l'ouverture de la Succeiïïon d'Efpagne, il éroit d'une dernière
importance que S. M. Britannique & les Etats Généraux ne fe iaiiTafTent
point induire à favorifer les vues fecrctes de cette Couronne, par les mê-
mes voyes, qu'elles emploioient pour leur propre feureté & celle de tou-
te l'Europe.
Je doute qu'entre tous les Traitez, que la France a faits depuis le
Miniftére du Cardinal Mnzarin , il s'en trouve un feul qui foit fondé fur
des principes de bonne-foy & de véritable efprit de concorde. Il feroit
aile
Pli.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. f%$
aifé de démontrer que tons les Traitez n'ont été, ni des réconciliations, Affaire*
des accords , de la part de la France , mais autant de Rufes étudiées par c™- DS
un Ennemi qui n'étoit plus difpofé à fe fervir de la force ouverte.
On a remarqué dans l'Hiftoire du Traité des Pyrénées , que quelques
Courtifans François, impatiens de ce que la Ratification d'Efpagne, tou-
chant les Préliminaires, n'arrivoit pas afTeztôt, avoient voulu infinuer au
jeune Monarque Louis XlV.de la méfiance contre le Confeil de Sa Majeflé
Catholique; mais que S. M. Très-Chrétienne avoit répondu, qu'elle ne pouvoit
croire que Dom Louis ( c'étoit le premier Miniftre du Roy d'Efpagne ) voulût
la tromper , & qu'on lui en avoit parlé de toutes parts comme d'un Cavalier plein
de Franchife& d'Honneur : Cette Réponfe témoigne alTezqueles Sentimens
intérieurs du jeune Roy étoient, qu'un Cavalier plein d'Honneur &deFran-
chife ne devoit jamais être capable de vouloir tromper , ni de manquer à
la parole qu'il avoit donnée. La Maxime efl d'une Obligation encore
plus indifpenfable pour un Roy, à proportion de l'élévation du Monarque
au defïus du Cavalier. Cependant, il s'agiflbit d'un Traité dont le principal
Article étoit le Mariage de l'Infante Marie-Therefe avec Louis XIV. Roy
de France; & les Renonciations faites au Sujet de ce Mariage, & jurées
fur les Evangiles parle même Louis XIV. Roy Très-Chrétien, n'étoient
autres que des Artifices employées par le Cardinal Mazarin pour trom-
per Sa Majellé Catholique & toute la Nation Efpagnolle. Je n'atribuë
ces Artifices qu'au Cardinal Mazarin ; parce qu'il y a de très-fortes Preu-
ves que Sa Majeflé T. C. eft naturellement éloignée de cette forte de
procédé tout-à-fait indigne d'un Cavalier plein d 'Honneur & de Francbife.
Que û l'on découvre toujours le même principe de Politique rufée dans
les Traitez que la France a faits du depuis , il en eil à cet égard comme
des trahifons; on fe fert des avantages qui en peuvent revenir; mais on
conferve toujours de l'averfion pour les Traîtres. Il y a eu dans les
Siècles paiTez plufieurs Princes dont le génie étoit fécond à inventer des
rufes & habile pour les faire reufîir ; mais je ne voy pas qu'on puhTe
imputer ni génie ni inclination femblables à Sa Majelté Très-Chrétien-
ne. Ce Prince , en fa jeuneffe , ayant appris d'un Cardinal fon premier
Miniitre, que les Traitez, jurez avec les formalitez les plus authentiques
& les plus facrées , ne doivent pas fervir de bornes à fes Prétentions ,
lors qu'il y a quelque efperance de les faire valoir, ne s'efl jamais fait
de fcrupule de fuivre une Maxime û utile dans tous les Traitez qu'il
lui a falu conclure pendant les longues années de fon Règne ; de ma-
nière qu'on peut dire fort jufle , que l'Epée de la Guerre, & la Plu-
me de la Paix, ont été des Armes, dont Sa Majeflé Très-Chrétienne s'eil
également fervie contre fes Ennemis.
Quoique les principes de droiture & de bonne-foi, qui font les fonde-
mens de la Republique des iëpt Provinces-Unies , & qui font la Règle
confiante de la Politique du Roy de la Grande-Bretagne & des Seigneurs
Etats - Généraux , ne leur permettent pas de croire qu'un Monarque
Très-Chrétien les voulût tromper, ils ont neantmoins fuffifamment apris
Tome XL. Hhhh par
PE.
f9o MEMOIRES, NEGOTIATÏONS, TRAITEZ, ET
Affaires par une funefte expérience, que quelques termes de Paix, de bonne Intel-
gen. de Hgefice , de Parole Royale, de Très- chers, de Grands Jmis , d' Alliez, de
Conféderez, qui foient exprimez dans des Traitez ou dans des Ecrits de la
part de la France, l'Intérêt particulier du Monarque en efl toujours le
véritable Efprit.
Dès que le Traité de Partage fut rendu public, il y eut des perfonnes,
qui ne purent s'empêcher de craindre qu'une des vues de la France ne
fût d'attirer la Jaloulie des Etats Catholiques-Romains fur les deux Puif-
fances Proteft intes , & d'exciter le Reifentiment du Confeil d'Efpagne
pour fe venger du Démembrement de la Monarchie. Toute la haine de
ce Partage auroit dû naturellement retomber fur la France : les deux au-
tres Puilfances n'étoient entrées en Traité avec elle , qu'afin de prévenir
de p'us funeltes effets de fes Pretenfions fur la Succefîion de Sa Majeité
Catholique. Mais, quelle équité & quelle raifon y avoit-il à attendre
d'une Nation vaine & fuperltitieufe ? N'étoit-il pas bien plus apparent,
qu'il fe formerait quelque Parti pour s'oppofer à un Démembrement de la
Monarchie, & pour lignaler le zèle Catholique- Romain contre les Puif-
fances Proteilantes , qui avoient confenti à un Partage des Etats d'Efpa-
gne ? En ce cas, le choix d'un^Succeffeur ne devoit-il pas immanquable-
ment tomber fur un Petit^Fils de Sa Majefté Tres-Chrêtienne, qui en cet-
te confideration employeroit toutes fes forces, non -feulement pour le
maintien de la Monarchie en fon entier j mais encore, pour effectuer le
Partage des Provinces Unies, que la France a plufieurs fois propofé à Sa
Majelié Catholique, & enfuite pour ruiner & renverfer la Conflitution
du Gouvernement d'Angleterre?
Ne pouvoit-on pas foupçonner à bon droit, que le Confeil de France
n'avoit projette le Traité de Partage , que comme un moyen capable
d'acquérir la Couronne d'Efpagne aux Defcendans de Sa Majefté T. C. &
de les mettre en état dans un tems ou dans un autre de fe rendre Mai-»
très de toute l'Europe ?
Il efl à croire que c'ell dans cette même apréhenfion , que Sa Majeflé
Britannique & les Etats Généraux ont fait drefler l'Article XIII. du Trai-
té, portant, que pour afjurer encore davantage le Repos de ï Europe, le [dit s
Roys'9 Princes, & Etat. s , feront non- feulement invitez d'être Garants de la-
dite exécution du préfent Traité ', & de la validité defdites Renonciations, com-
me ci-deffus ; mais , fi quelqu'un des Princes , en faveur defquels les Partages
font faits, voulait dans la fuite troubler f ordre établi par ce Traité, faire de
nouvelles Entreprifes qui y foient contraires , & amfi saggrandir aux dépens les
uns des autres , fous quelque prétexte que ce fait , la même Garantie du Traité
fera c en fée devoir s'étendre auffi en ce cas , en forte que les Roy s , Princes, &
Etats , qui promettent , feront tenus d'employer leurs forces pour s'oppofer aux
dites Entreprifes , & pour maintenir toutes chofes dans ïétat convenu par le f dit s
Articles.
Le véritable Efprit de cet Article n'efl-il pas ï. que le Traité a été
conclu, comme le moyen le plus propre pour alTurer le Repos de l'Euro-
pe j
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
ypi
l'Euro-
pe.
pe ; 2. que les trois Puiffances, & généralement tous ceux qui y entre- Aff.virk*
ront, font indifpenfablement obligez à en maintenir une ponctuelle exécu-
tion ; 3. que nul prétexte, tel qu'il puiiïe être, ne peut donner lieu à
aucune infraction des Conventions du Traité. Ces Ôbfervations feront
miles en ufage dans les Reflexions fur les Mémoires que la France a fait
publier pour jultifier l'Acceptation qu'elle a faite du Teitament de feu
Charles II. Roy d'Efpagne au préjudice du Traité.
On remarquera fimplement pour le prélènt, que Sa Majefté Britannique
& les Etats-Generaux, ayant eu foin que le Roy Très-Chrétien fe loic obli-
gé de la manière la plus étroite à s'en tenir précifement au Partage, fans
pouvoir en troubler l'ordre , ni faire aucune nouvelle Entreprife , fous
quelque prétexte que ce pût être, & ayant engagé les Souverains qui en-
tretient dans le Traité à en garantir très-exprefTement toutes les con-
ditions , il eut été très-utile , en premier lieu , de faire des follicitations
auprès de Sa Majefté Catholique & de fon Confeil, afin de les porter à
aprouver ces Réglemens pour l'affermilTement du Repos de l'Europe j en
fécond lieu, de faire des inltances auprès des Princes & Etats , qui fe-
roient entrez dans le Traité , à ce qu'ils fe tinlTent difpofez à en foutenir
l'exécution, lors que le tems en feroit arrivé; en troifiéme lieu, de ne
négliger aucuns des préparatifs , dont ils pourroient eux-mêmes avoir be-
foin, ou pour apuyer la France, ou pour empêcher qu'elle ne pût former
aucune Entreprife contraire aux engagemens , dont elle étoit convenue.
On ne pouvoit point de trop bonne heure faire entendre à la France,
que, fi le Roy de la Grande-Bretagne & les Seigneurs Etats-Generaux
des Provinces- Unies conjointement avec Sa M;tjefté Très-Chretienne,
avoient par avance pris les mefures necejjaires pour prévenir les malheurs que le
tri fie événement de la mort du Roy Catholique J ans En/ans pourrait produire ,
les Peuples Anglois & Hoîlandois ne manqueroient point de fe trouver
tous , au moment de l'ouverture de la SucceiTion de ce Prince , préparez
à maintenir une ponctuelle éxecution des fages Précautions de leurs Sou-
verains , & qu'ils ne lailTeroient point à la difcrétion des François d'entre-
prendre de difpofer, en Maitres , de la Monarchie d'Efpagne, des Con-
ventions du Traité de Partage, & du Repos de l'Europe.
Jus Auflriacum in Monarchiam Hifpanicam afjertum. Juxta
Exemplair impreffum Viennœ Auftria 3 Typis Joannis Jacobi
Kiirner , An. 1701. Excudit Ratisbona Jo.
Georg. Hofmann.
Summa»
n'a com-
AB excejju Phiïppi QuarDi Catbolici Hifpaniarum Régis , quoties mentio incl-
diflet de SucceJJione in illius Régna & Provintias , prcrtcr aliquos Gallos ex
more gentis Regibus fuis fupparafitari ajjuetos , vix al'um quendam invenin erat me a*
gnarum publicarum rerum , cui non perfuafijjimun effet , Regem CbriftiàniJJfrnu h
Hhhh 2 cjuj-
quarufl»
Atfaik.es
GF.N. DK
l'Euro-
pe.
rerum ,
qurecirca
fucceflîo-
nem H if-
pan icam
à morte
Philippi
Quarti
contige-
runt.
Paul b an-
tedecef-
fum Ca-
roli Se-
eundi.
Et poft il-
lius fata:
Hifpani-
eam Mo-
narchism
improbe
nuper
occupan-
te Duce
Andega-
venfi.
Qnx ad
Domum
Auftria-
camper-
tinet.
f92 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
ejufque pofleros omnes , ab omnibus Hifpanicœ D'tionis Regnis êf Provinciis perpé-
tua exclu/os ejje. Acîeb mmque manifefics , amples, & valides ah omnibus femper ha-
bites Jïtnt dùdum vulgates Renuntiationes duarum Hifpanies Infantum 3 Anna , âf
Maries -Tberefiee , quarum illa Filia Philippi Tertii , Ludovico Decimo tertio, hesc
Philippi Qjtarti Filia Ludovico Decimoquarto , Francics Regibus nuptes f itérant , ut
ad firmanclam banc Jententlam ultra Jblam earum leàionem à juftitiœ cultoribus am-
plius nïbil requijîtum fiterit. Ubi verb aliquos cupido incefferat accuratiùs indagan-
eli , quee majorls cautelee ergb eib Hifpanies £f Galilée Regibus , quos inter res tranf-
acta erat , adelita fuijjent ulteriora fulcra , tum plané nemo cor datas capere poterat ,
qua fronte non religione ver a imbutus £? DEI timorem près Je ferens , fed quillbet
bomo mentis compos & qui non omnia humanitatis jura funditus everfa cuperet , tôt
fimul paàlones fanàionefque vel leviter vellicandi defiderium qualecunque palam f acé-
ré J'ufiinuerit. Ipje quln etiam Chriftianijfimus Rcx poft fopitum , quod à morte
Régis Philippi Qjtarti ele aliquibus Belgii Catholici Provinciis moverat bellum , ielen-
tidem vifits eft agnovijje barum Renuntiationum validltatem , fpemque omnem pro fe ,
&f liber is fuis in reliquam quameumque Hifpanicœ Ditionis partent penitus abdicaffe,
beereditatis iftiits adeund.es folicitudine Mis reliââ , ad quos , fe fui/que remotis , pro
cafuum diverfttate ea juxta ordinem fuccedendi in Familid Hlfpanicd receptum de-
volvi quandoque pojjet. Eb inexfpeàatiits cunàis accidit , contendijfe haud pridem
Rege Catbolico-Catbclico Carolo adhuc in vivis agents Regem Chrijïianiffimum apud
Magnes Britannies Regem âf Ordines Générales Uniti Belgii , ut juncid opéra Sacra
Ceefarea Majejtûs ad partiendam fecum , Rege Catholico improie diem obeunte , Hif
paiv.cam Succejfionem compelleretur : tantum etiam obtinuiffe , ut juxta fœdus inter
eos initum ea de caufa communi nomine &f Sacra Cesjarea Majeftas compcllata , êf
mines omnlnb Cbriftiani Orbis Reges &? Status, ad fociandas in id vires invitati
fuerint. Nitperrimè verb , velut attonitas, ftupore perculfus nemo non fuit , cùm
fama primant tuliftet ,' paulbque poft éventas comprobaffet , inductum jam mente de-
bllem Regem fulfte , ac fi hoc unicum confervandes indivifim Hifpankes Monarchies
médium fuperejfet , ut teftamento ab aliis ipfi obtrufo quomodociinque fubfcriberet ,
quo Remintiatlonibus , quas diximus , ad Delpbinum Francies ejufque primogenitum
reftriàis ad Succejfionem Hifpa?iicam primo loco Dux Andegavenfis illius fecundo
genitus vocaretur : Acquieviffe etiam buic qitalicunque difpofitioni Regem Chriftianif-
Jimum , àf ipfo auciore Nepotem pro Rege Hifpanies Je gerere cœpijfe atque Tbroni
iftius invadendi caufa in Hifpaniam abiiffe , plerojque quoque preefeàos connexorum
feu fubjeclorum Regnorttm &f Provinciarum in verba illius adaiïos effe , non fins
occulto plurimorum cùm Hifpanorum tum aliorum fubditorum dolore , qui al'a omnia
fperarant. Ab eo tempore minimi maximique , plerique ubique omnes non aliud esquè
fermone frequentarunt , quùm Jummam , fi quee unquam allas , injuriam non tam
Auguftiffimo Imperatori ejufque célébrât ijfimee Familles , âr1 aliis oreline fuccedentibus
Domibus , quant toti Europes , vel univerfo pot' as Generi bumano fieri : eam proinele
confociatis omnium ftatuuin imb bominum confiais £f armis , DEO aufpice , non vo-
\ente folàm , fed vel rehtetante Cœfare, vindicandam , unaque fimul communem falu-
tem in maximum adduàam periculum in tuto locandam effe. Hœc apud omnes , qui
quidem publicarum rerum wn penitus incuriofi finit, quofque prava mens nondum
tranf-
PE.
oftenda-
tur , pr£-
mittun-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 55>3
tranfverfos egit , adeb in confcffo funt , ut fi inventes tantùm fpect.irl deberent , ni- Affaires
bil necejfe effet, de manifcjtandci ulterius Gallofum injufiitia, vel probando SereniJU- GEN- DE
mce Familiœ AuJlriavœ , ex omnibus, qui juris integri âefuncburn Regem C.irolun *~ "vKO
fanguine attigerunt , Jive Agnatio five Cognatio confideretur , proximcé', prœcipuo in
Hifpanicàm Suçcefjionem jure multàm hborare , aut quœ eu faciunt , operosè congere-
re. Sed prœterquam facile fieri poteji, ut aliquœ circumfjtantice , licet fcitu dignijji-
mœ , nonaum in omnium notitiam pervenerint , Jimpliciorum quoque feu ineruditorum
£f ferœ pojlerltatis ratio hahenda eft in re bac omnium , quotquot unquam contige-
runt j maxvmè fingulari, eff uni qmfi obtutui exponenda ceternœque memoriœ mandan-
àa funt , quœ , cùm ad caujle jufiitlam Jlatim dignofeendam , tum au ruborem vel Gallis
ipfis eor unique affeclis incutiendum pertinere ,aâ eorumfaltem continuas infidias vitandas
cunctos excitare poffent , non abfque fpe certa,fore ut us lectis vel auditis fimul fejè
mox expedire fatagant , qui imprudentes aliorum fraude in caffes inciderunt , forte
etiam eorum aliqui in viam redeant, qui inlquitatem conemnaffe vel Mi [ponte manus
âeuiffe nofeuntur. Id qub citius ajfequamur , primi fundamenli loco ex ipfa naturali Hoc ut e-
ratione ab omnibus gentibus approbata velut obviwn omnibus br -éviter repeter e juvat : videntiûa
fuijfe agnita neceffitate vit ce civilis introducem.ee in cujujvis populi liberrima volunta-
te , uti forme? , juxta quant ab uno vel pluribus régi debeat , cligëndœ , ita , ubi Prln-
cipatus Jeu Regnum placuiffet , id vel uni folum homini , vel univerfœ fimul Familiœ tur I.
ab Mo oriturce deferendi , flatuta hoc cafu perpétua Régies Familiœ fuccejfione fecun- principîa
dum œtàtem, gradus aut lineas , five exclufis omnino , Jive pofl cxtinàos mares om- ?uœdam.
nés , vel eos faltcm , qui in eadem linea eodemque gradu fuifl'ent , admiffis fœminis , verialia.
aliis etiam additis conditionibus regnantium perfonas earumque nativitatem , ftatum
vel matrimonia regnandive formulant refpicientibus , prout collibuiffet. Non minas
perfpeClum omnibus eft: recepta femel fucceffwnis forma non ita adflringi populum
regnatricemque familiam , quin conjentibus utrinque omnibus , qui eo tempore Juperfli-
tes funt , ilki vel in totum abrogari vel pro parte mutari, adeoque vel nova plané for-
ma reipubl'cœ, vel alla fuccedendi ratio Juhjlitui pojjît , qua omnes âeinceps nafeitu-
ri pofteri teneantur , donec communi rurfum confenju aliud conjlitutum fuijfet : cuicun-
que autem fuperfiiti ex familia regnatrice membro actu delatum Jive ex prima five fe-
quenti cum populo , inita conventione jus, vel quœjïtam jam ex nativltate fpem Miin-
vïto à nemine five rege , vel alio Familiœ Regiœ membro , five populo , quacunque ra-
tione auferri debere aut pojfe. Omnis porro rationis expers mérita ab aiîinibus judî-
cabitur ille , qui in controverfiam vocare aufitipacis inter bellum gèrent es Principes &
évitâtes componendœ gratia , Provincias & Régna , bonaque ac jura prœj'entia quœ-
cunque alla, ab ipfis belligerantibus eorumve Jubditis poffejfa: multoque adeb magis
fperata tantùm aut jure vel injuria petita abdicari, cedi, transferri, ubivis gentium
ab omni œvo confueffe , taie [que paCtiones & tranfactiones communi gentium jure niti,
nec abfque pernicie & detejiatlone gencris humani unquam temeratas efj'e. Hinc pari-
ter claret , ufufque omnium fœcidor um docet: acquiri à Rege unius Regni alla etiam
Rjegna £f Pr:ncipatus po_ffe , ita ut vel priori R.egno uniantur Jeu Jubjiciantur , £f
ad unum eundemque perpeîuum fuccjffvrem utraque clevolvantur ,vel fervato in fingu-
lis antiquo fucceffion's ordine aliifque juribus per fe poffideantur , ac pro'mde fœpe ad
àiverfos fucceffores perveniant : fpeclare quin etiam non rarb ad Regem feu Principem
H h. h h 3 ditiones
ÏM MEMOIRES, NSGOTIATÏONS, TRAITEZ, ET
Affaires dithnes feu hona quanlivis prstii prvoafi àominii feu patrimonii jure , de quibus ex
cen. oe propria voluntate vel ipfe neglexijfei aut fuperfediffet , fuccefforum aVquis dijponere
l'Euro- aàeoque etiam in familiœ utilitatëm fidekommifji œterni vinculù ea illigàre pojjit , quod
, à nullo deinceps fuccefforum in alïorum vocatorum necem , illorum non accedente con-
fenfu, tolli aut infringi feu immutari ullatenus queat. Nullus denique hœfitarc pote-
rit , qui jura in terris ad facram Ecclsjïam Romanam aut facrum Romanum Impe-
rium firce jeudi Jive alla ratione Jpectantibus ufiîatu nérit , quin falvo undique , £f
non mutât o fupremi vel directi domini jure familiœ nobiles quœcunque , prœjertim il-
iujires; ad earunâem fplendorem confervandwn vel augendum, futurafque controver-
Jias prœcidendas , certa inUr fe de fucceffione pacia , fiv2 perpétua , Jive temporaria vel
pcrfonalia, nullo hnpediente inire foleant , eaque uti pi er unique à fummis Pontifcibus
&f Imperatoribus confirmantur , ita,& abfque fpeciali eorum confirmatione fubfijlant
àummodo nihil in fraudcm Ecclejîœ vel Imperii admitti compertum fit , eôque etiam re-
futaticnes y quas vocant , feudorum pertinere : inprimis verô illic filiarum nobilium feu
illuflrium-, dum nuptui elocantur , Renuntiationes , Jive Jimplices five certis limitibus
circumfcriptas , alibi quoque non incognitos , vigere £f fummd obfervantid cujlodiri
quamvis primitùs ante ejujmodi pacia alla fucccjjionis ratio in famïliâ recepta Juifjet.
His ita , quantum ad deciâendam , quam prœ manibus babemus, quœjiionem fatis efl,
ex jure récenfitis pr.imis principiis , dij'piciendum nunc fecundo loco paucis erit , quœ
fucceffonis ratio in Hifpanice Monarclia , poflquàm ea ex pluribus parti bus feu mem-
hris in unum velut corpus coaluit , introduSta fuerit , etfi nec id penitus negligendum
videtur , quod fpcciatim de illis provinciis , quœ Jeudi jure ab Hijpaniœ Rcgibus tc-
lï. Dîver- mntur , flatutum fuit. IJlud ver o faillir i non pojjumus non Jîmul ante oculos po-
fa fuccef- nere partim diverfa longé feu potiàs contraria , uti in plerifque aliis rébus , ita & in
fionjs ra- fucceffione conflit uenda , partim quœ aliquamdiu yifa f aérant eadem Hifpanorum , £f
Hifoaniâ ^a^orum ftudia , dum hi ad excludendum omnes plané Jœminas non tantùm à Francm
& Galliâ -. Regno , Jed etiam ab Us ditionibus , quœ per fœminas ad Galliœ Reges pervenerunt ,
Hâc fuc- variis titulis connifi mafculam Regiœ familiœ Juccefjionem fecundum lineas jam dudum
ceffio- acerrimè propugnàrunt : Hifpani autem poft mares ejufdem lineœ £? gradés, etiam fœ-
ncalem TO""'i" ex ^-eê^ Familiâ ortis locum fecerunt , aliis tamen , quàm in Familiam Galli-
Agnati- cam enubentibus & ideo tum ad œqualitatem inter utraque Régna fervandam , tum oh
camam- alia caufas cum omni progenie Gallicd, ipfamet antehac adjlipulatd Franciâ, perpetim
PleCllFi" femotis •> œtc^'ls Prœrogativa ^ reliquis perinde ut in maribus Regiœ Familiœ femper
linealem obfervanda. De cujus affertionis generaliori parte , cjufque pofteriori ufu , (quamvis
Cognati- Arragonii olim communiter agnationis jus tuitijint, neque id nunc prœteriri debeat)
cam prx- cùm inter omnes etiamnum conveniat , ei probandœ ulteriùs immorari fuperfluum fue-
•EyT^ r*t ' I6^ ac-(^tœ tantu:'1 exceptionis veritas, quam, jure latiùs regnandi cauja violato ,
tamen Gallis primum oppugnare collibitum fuit , quamque nuper etiam Hifpani quidam , non
fsmp-r meliore undecunquc crto impulja, contra Majorum propriaque infiituîa non fcriptis fo-
Gallicis iùm Jéd armis nunquam non defenfa obfcurare , vel fi fieri potuifjet , obruere adorji
înn.C '£" funt ' in lucem denuà producenda , ê? vindicanda erit : prœflabiturque id adeb à no-
apudAr- bis deinceps manu pleniffima , flatim ac tertio loco agnationis & cognationis nexum9
ragonios qui inter utramque Domum Auflriacœ gentis intercedit , Germanicam nimirum &
non ex- tlifpanicavii , quàm poterimus brevijimè indicaverimus. Loneam enim 5 & accuratam
tmdom ejm
l'Eoko-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. $S>r
ejus fcriem hic texere nibil opus ejl , fed fuffècerit compendio dixijjf , uti Rex Car vins Affaii-m
origincm ex Imperatore Carolo V. primogenito in Êelgio edito traxît, iia Sacrum Ca- gen. de
faream Majeftatem ex P.iperatore Ferdinando Primo illius fratre verè Gefmano , HiJ-
pani arum Infante fcf Germine , Avique Ferdinandi Catbolici delkiis ortam ejje , ac .
proinde utrumque ex Philippo , cui corporis décor pulcbri jeu formoji cognomen cenci- R^gfa fa.
liavit, Maximiliani I. Imperatoris atque Maria Burgundiœ becredis filio , &? Joanna miliâ po-
Ferdimndi ac Ijabella Çatbolicorum Regum fi lia , continuato utrinque per duclas tlorc A§-
plerumque communis ftemmàtis agnatas ordine defeendere. In recentiori aclhuc omnium .
memoria ver futur : Sacra Cœfarea Majeflatis Matrem Mariam Régis Pbilippi Ttrtii
filiam , fororem verb Pbilippi Quartz fuiffe , nuptam Imperatori Ferdinando Tertio Sa- ' • '
cra Cajàrea Majeflatis Patri: Ipfi autem Sacra Cœfareœ Majejlati ah eodem Philip- ftrj2ci
po Quarto, 6? Maria Anna Aujiriaça illius conjuge , Sacrœ Cœfareœ Majeji itis So- hue fa-
rore , in matrimonium collocatam fuiffe Margaritam., iilorum filiam fecundo genitam, £lcns
ex qua nota Maria Antonia viatrhnonio junùta B avaria Eleàori fiUum Mi peperit, \(^li0^
qui Matri fuperftes eam vix fexennis ad Cœleflia régna fecutus ejl , Sacra Cafarea
Majefiate poft decejfum Margariîœ Hijpanica ex Augufia Magdalena Palatina pluri-
bus liberis utriufque fexûs auctd, qûos omnes Divina benignkas porrb.fofpitet. Bre-
vis bac enarratio uti ad oftendendum Sacra Cœfareœ Majeflatis Augufia que prolis
raafcula , £f faminea omnis in Hifpanicam fucceffionem ejus omitti non potuit ; ita ab
ea Rex Cbriftianijjimus ejufque filii vel frater non idée repelluntur, quod ex filiabus
Hijpa?io-Auftriacis geniti mgentur, càm id à i\obis ultrb commemoratum fit : fed
qubd, Uti jam evincere aggredimur, propter bac ipfa matrimonia G allie a , £? Mater pr0^ntur
Anna, & Conjux CbriftianiJJimi Régis Maria Tberejia 9 quorum mentio facta ejl, fabinde
cum omni propagine Gallica cujufcmque ordinis, gradés, & fexûs, donec bacjuper- fanguinis
effet , etiam vidua , ab omni qualicunque Hijpanica ditionis parte per leges & confie- G&]^"
tudines HiJ'panicas Regum anleriorum dijpofitiones , juratafque proprias £? maritorum
conventions œternùm exclu/a fuerint. Neque injblens hoc videri potefi Mi, qui ex i.Exjure
antiquiore hiftoria Hifpaniça meminerit , ne Hjpania Régna Gallia aliquando commit- & môre
terentur, iifve quicunque Gallus vel Galla moderaretur , à patribus jam olim atque J^f5"
univerfis ordinibus , adbibitis etiam folcnnififimis judicum fanait ate vita , eruditione & M5-"0*
rerum uju celeberrimorum fententiis , voluntate denique totius gentis , 6f majori Regum
Hifpanorum filia in Galliam elocata ejufque foboli minorent natu pralatam , & ex-
clu fis lege , tejlamento , renuntiatione Rcgiis filiabus Gallico fanguini mixtis ear unique
proli fratris fororumque filios Hifpaniça familia cretos antebabitos ejj'e. Tantoperè jam
tum Hifpanorum patria libertati 6? honori confulentium animis infederat , Gallicum
Principem non magis Hifpanis imperare debere aut jure pofife , quant Galli apud je
Hifpanico imperio locum dent , quoeunque tandem id nomme aut titulo affectari volue-
rit , nullumque contrariarum , fi qua extitiflent , molitionum avertenâarum caufa, la-
borem , aut periculum reeufandum effe. His igiîur vefiig;is infiflens pluribujque no-
vis rationibus, non una tantùm 9 permota , qub minor difeeptationi locus relinquere-
tur, provida Pbilippi Tertii Avi mater ni Sacra Cœfareœ Majeflatis cura effecit, ut
pacta matrimoniale Annam Auflriacam inter & Ludovicum Decimum Tertium Fran- co"nn^ '
cia Regem ab Hfpanicis Minifiris 6? Legato Gallico, prafente Legato Pontificio , £p bialibus
Arcbi-Epifcopo Capuano ex nobilijjima Cajetana familia oriundo , Magni quoque Vu- Annam
us Auftr*-
AFFAIRES
GEN. DE
l'Euro-
pe.
cam in-
ter & Lu-
dovicum
XIII.
S 96 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
cis HetrUriœ ceu pararii &? proxenetœ Legato , plurimorwnque Hifpamcorum Procc-
rum , Confeliarioruiii Regiorum & Nobilium Caterm, Madriti Anno Chrifti 1612.
inita fiierint , utcunque Latine reMito tenore fequenti.
n nomine SancYiffimae Trinitatis , Patris , Filii , & benedi&i Spiritûs
fanéli , trium perfonarum in uno folo & vero DEO , ad ipfius glo-
riam & obiequium , Regnorumque iftorum incrementum. Notum lie
omnibus pnefentem feripturam & inftrumentum vifuris , quod tractatum
continet, & conventionern matrimonialem fequentis tenoris.
Quandoquidem in urbe Madriti, auîa fuse Majeflatis Catholicae in illius
palatio die Mercurii 20. Augufti, Anno 1612. praefentibus IlluflrnTimo Do-
mino Antonio Cajetano Archi-Epifcopo Capuano , Legato à latere Sanéti
Patris noftri Papse Pauii V. ipfmfque Nuntio Apoftolico in hifee Regnis,
Sanclitatis fuse nomine: & Domino Comité Urfo d'Eîzi , Legato Magni
Ducis Hetruriac, quatenus ab illo poffidetur : nec non Dominis Ducibus
de l'Infantado & Albuquerque, Marchionibus de Cartel Rodrigo, & de
Villa Franca, omnibus quatuor Confiliariis Status Suae Majeflatis Catholi-
cae, Duce de Uzeda, Architalaflb Caflellac , Principe Tingrii , Duce de
Magueda, Duce de Pefiaranda , Duce de Arco, Duce He Sefta, Duce de
Feria, Duce de Montalto, Duce de Villa Hermofa , Duce de Veraguas,
Domino Joanne de Idiaques Magno Commendatore Legionis , Conliliario
Status Suae Majeflatis, &c. Domino Augudino Méfia , etiam Confiliario
Status, &c. & Licentiato Domno Didaco Lopez de Ayala fimiliter Con-
filiario Status Majeflatis Suae, &c. &c. Aliifque pluribus Magnatibus &
Equitibus, coram me Antonio Arefignii , Equité Ordinis S. Jacobi, Se-
cretario Status, Scriba & Notario Suoe Majeflatis Catholicae, comparue-
runt ExcellentifTimus Dominus Domnus Francifcus de Sandoval , & de
Roxas, Dux de Lerma, &c. &c. Sua: Majeflatis Confiliarius Status , CvC
&c. Gubernator , & primus Aulse Magiiter SerenifTimi & triumphantis
Philippi Principis Mifpaniarum , &c. &c. Nomine & ut Procurator Se-
renifîîmi , ExcellenthTimi, & Potentiflimi Principis Domni Philippi Ter-
tii, Domini noflri, DEI gratià Régis Caflellae , &c. &c. Vigore man-
dati, quod per inftrumentum fubfcriptum Regiâ fuà manu, Regioque fl-
gillo munitum atque fubfignatum à me nominato Secretario Regio in Mo-
nafterio S. Laurentii Efcurialis 30. Julii diélo anno, dictus Dominus Dux
de Lerma accepit à fuâMajeftate Catholicà, velutRege, pâtre, & legiti-
mo adminiftratore SerenifTimae Infantis filiae ipfius & Majeflatis fuie Regi-
na3 Margaretae conjugis fuae légitimas ex unâ parte : & ex altéra parte Ex-
çellentifîimus Dominus Henricus de Lotharingiâ , Dux Meduanae , cum
afliflentibus flbi Domino Vice Comité de Puifieux, &c. &c. Confiliario
Status fuee Majeflatis Chriilianiffimae , &c. &c. Illiufque ad Majeflatem
Catholicam fpeciatim ob hoc negotium miiTo Legato extraordinario , uti
& Domino Barone de Vaucelas, &c. &c. ATomine, & vice Serenifïimi,
Excellentiflimi,& Potentiflimi Principis Ludovici Decimi TertiiDEI gra-
tià Régis Francise & Navarrae Chriftianiflimi , & Sereniffimœ, Excellentif-
fimae
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. S97
firrïae ac potentiflimae Domina: Maria? Régime Francise & Navarrœ Chrif- Affaires
tianifïïmae, illius Màtris, tutricis, & Regnorum fuorum regentis, virtute- gen.de
que mandatorum , quse exhibuerunt fcripta linguà Gallicâ, fignaca Regiis
manibus & figillis Regiis munita in Regiâ urbe Parifiorum, à Rege qui-
dem 17. Julii, àReginàverô 19. ejufdem Menfis hujus Anni, quorumque
authentica exemplaria huic actui anneéïenda ego Secretarius Status pênes
me cuftodio, di&us Dux de Lerma nomine fuae Majeftatis Catholicae, &
diéli Domini Dux Meduanae, Vice-Cornes de Puifieux ,& Baro de Vauce-
las nomine Majeftatum fuarum Chriftianifîîmarum , quibus cordi curaeque
eft utiiitas Regnorum fuorum , & ut fecura reddatur per duarum Corona-
rum totiufque Chriftiani orbis , jam inde ab eo tempore jugiter obfervata,
quo conclufa fuit inter Majeftatem Catholicam defun&i Régis Domni Phi-
lippi Secundi, Dominum noftrum, & Majeftatem Chriftianifîimam Régis
quondam Henrici Quarti, Patres Majeflatum fuarum Catholicas & Chrif-
tianiflimae nunc rerum potientium , quaeque in votis habent , ut eadem
continuetur & perpetuetur non folùm ipfis fed etiam pofteris eorum fu-
perftitibus, cui fini affequendo non aliud médium sequè idoneum arbitrât»?
funt, quàm nexum matrimoniorum , nec majoris efficacia? , quàm fi illa
duplici vinculo colJigari poflint , profperante Divinâ benignitate , in aug-
mentum Divini honoris: jamque adeô benedicente Sanclifîimo Pâtre Pa-
pa Paulo Quinto, & conciliente Magno Hetruriae Duce traclata & con-
clufa funt fponfalia & matrimonia Sereniflimi Principis Hifpaniarum Dom-
ni Philippi cum Sereniflîmâ Ifabella forore & fïliâ primogenità fuarum Ma-
jeflatum ChriftianifTimarum , uti & Régis Chriftianiflimi cum Sereniflimâ
Infante Domnâ Anna filiâ primogenità fuae Majeftatis Catholica: , quo ma-
gis flringatur &confirmetur amor, amicitia , & fraternitas , quae eft, quae-
que perpes optatur inter Majeltates fuas. Ideô ut plénum & integrum ef-
fectuai îbrtiantur , fupradicli Domini Commiflarii ; quantum ad matrimo-
nium Régis Chriftianiiïimi cum Serenifiimâ Infante Domna Anna ipeftat ,
tranfegerunt & convenerunt, prout fequitur.
Quod divinâ benedicente gratiâ, praeviâ San&itatis fuae difpenfatione
ob proximitatem & confanguinitatem , quae intercedit inter Regem Chri-
ftianiflimum & Sereniffimam Infantem , ftatim atque haec duodecimum
annum compleverit, ipfi celebrare debeant fponfalia fua & matrimonium
per verbade prœfenti, forma & folennitatibus praefcriptis à Sacris Cano-
nibus & Conilitutionibus Ecclefiœ Catholica?, Apoftoliae, & Romana:.
Fietque iftud in Aulâ Regia? Majeftatis Catholica:, ubi Sereniffima Infans
Domna Anna confiftit, & quidem virtute mandati & commiffionis Régis
Chriftianiffimi , qui illud dein ratum habebit & ipfe confummabit ftatim
atque Sereniffima Infans Domna Anna in Galliam perducla fuerit illucque
pervenerit, jungente fe fua Majeftate Serenitati fua? per Ecclefiae bene-
di&ionem , perficieturque diéla folennitas fponfaliorum five per fpeciale
procuratorium five ab ipfis contrahentibus tempore inter fuas Majeftates
convento & definito.
Quod fua Majeftas Catholica promittat', & teneatur dare daturaque fit
T'orne XL Iiii Sere-
PE.
y98 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires SereniffimiE Infanti Domnae in dotem Matrimonii caufâ cum Rege Francise
gen. de Chriitianiflimee aut ipfius Procuratori & Commiffario quingenta millia au-
v'Ev&o- reorum fulis, quorum finguli valeant fedecim reaies, in Civitate Parifien-
fi pridie celebrandarum nuptiarum.
Quod ad fecuritatem doiis hujus fua M-ajeftas Chriftianiflima promittat
fe adîgnaturam , afiignaturaque fit reditus liquides & certos , &c. &c.
Quod Serenifîima Infans Domna Anna contenta elfe debeat & contenta
futura fit dicta dote, ita ut illi non fuperfit aliquis regrefTus ,a£tio,aut jus
petendi aut pnetendendi , quèd ad illam pertineant alia majora bona , ju-
ra, tituli, & acliones ex h&reditatibus amplioribufque fuceeiïlonibus fua-
rum Majeftatum Catholicarum Parentum fuorum, Cive ex illorum perfonis,
five alia ratione quacunque aut alio aliquo titulo, cognito aut incognito,
quoniam ab omnibus, cujufcunque conditionis , naturae aut qualitatis fine ,
nihilominus fe abdicabit forma optimà & débita cum omnibus fecuritati-
bus , firmamentis, & folennitatibus requiiitis & neceiTariis ante matrimo-
nium contrahendum per verba praefentia, illud etiam denuô poitea appro-
babit & ratum habebit unà cum Rege Chriftiaiiiffimp ftatim ac matrimo-
nium celebraverit, additis iifdem cautionibus & folemnitatibus, quae ob-
fervatx fuerint in prima renunciatione, aliifque quae maxime convenien-
tes & neceflarise videbuntur : ad quod tum faciendum tenebuntur, & nunc
" tenentur atque obligantur fua Majeiias Chriitianiifima & Tua Serenitas ,
quin imô fi renuntiationem illhanc & ratihabitionem facere négligèrent,
illec jam nunc per hune folum traétatum faclae & expeditae reputabuntur.
Fient vero modo, qui ad conciliandam aut teltandam validitatem & es»
mitatem excogitari poterit, efficaciliimo & maxime convenienti, expref-
lis omnibus claufulis derogatoriis derogatoriarum omnium legum, jurifdic-
tionum, confuetudinum, decretorum & lUtutortim contrariorum, quaeve
impedierint in toto aut in parte dictas renuntiationes & ratihabitiones,
quibus acleô ad hune effeclum & validitatem fupradiétam fuse Majeftates
Cathoîica & Chriilianiiîima derogare debebunt & ab hoc momento omni-
nô derogant , perque approbationem & ratihabitionem praefentis hujus
Contra&ùs & Capitulationis jam nunc uti tune cenfebuntur & cenfentur
derogafle omnibus exceptionibus fupra memoratis.
Cùm ambse Majeftates Cathoîica & Chriltianiflîma in hoc matrimo-
nium confenferint & confentiant, ut firmo hoc nodo & vinculo perpetue-
tur & magis-fecura reddatur pax publica Chriftianitatis fperataque ab om-
nibus mutua inter fuas Majeftates dileclio & fraternitas , & contemplatio-
ne juitarum caufarum , qua; commonftrant & perfuadent a:qualitatem &
convenientiam diclorum matrimoniorum, per quae Divinâ favente gratiâ
fperari poffunt reliées fucceffus in eximiam utilitatem & augmentum fidei
& religiqnis Chriftianac communeque beneficium Regnorum, fubditorum
& Vafallorum ambarum Coronarum : Cumque interfit Itatûs publici &
confervationis iilarum, ut quae tam magnse fmt, non conjungantnr, occa-
fionefque praecaveantur, quae evenire poffent illas jungendi, & ob aequali-
tatem & alias juitas rationes , flatuitur paclo convento, quod Majeltates
fuae
PE.
RESOLUTIONS ÏVETAT, M. DCC. I. S99
fuse obtinere volunt robur & vigorem legis Habilita? in favorem regnorum Affmrks
fuorum & publicae caufae illorum, ut Sereniffima Infans Domna Anna li- gem. de
berique, quos habuerit, mares & fœminae, illorumque & illarum defcen- L'Euurrt°"
dentés primo, fecundo, tertio, aut quarto geniti , ulteriorefque in quo-
cunque gradu confiftant , non poffint ullo unquam tempore venire aut
fuccedere in Régna, Status, & Dominia, quae pertinent aut pertinebunt
ad fuam Majeltatem Catholicam, quacquè comprehenfa funt in titulis rela-
tis in iftâ capitulatione , nec quodlibet aliud omnium reliquorum Regno-
rum, Statuum , & Dominiorum, Provinciarum , Infularum adjaceniium,
Feudorum, Capitaneatuum, Caitellorum feu locorum limitaneorum, quae
fua Majeftas Catholica nunc tenet ac pofîidet quaeque ad lllam pertinent
vel pertinere poflint cùm intra nifpaniam tum extra illam, quseve ante-
hac Majeftates fuae Catholicae & Illarum Majores deceflbrefVe habuerunt,
polTederunt, & ad illos fpeélarunt, aut illis comprehenduntur, vel ab iis
dépendent, nec in ea, quae fua Majeflas ullo tempore acquirere vel diclis
fuis Regnis , Statibus , & Dominationibus adjicere , quaeve ut devoluta
feu aperta , vel alio quovis titulo , jure aut ratione retrahere poffent,
cuamvis vivâ Domina infante Domnà Anna aut poft illius deceffum fuper-
ftite quocunque illius Defcendentium , primgenitorum , fecundogenito-
rum, tertiogenitorum, & ulteriorum eveniat & contingat cafus unus vel
plures , quibus ex jure Legum & Confuetudinum di&orum Regnorum ,
Statuum, & Dominiorum, difpofitionumque ac titulorum , quorum vi il-
lic fucceditur , praetendique fucceflio poiïit , ad illos pertinere fucceflio
deberet, namque in omnibus iltis cafibus dicla Domna Anna Infans ait &
déclarât effe fe & manere benè & débité exclufam unaque fimul omnes
illius liberos defcendentes mares & fœminas , licèt dicant , aut dicere vel
practendere queant , quôd in illorum perfonis locum non inveniant nec
confiderari debeant aut poilint rationes caufae publicae aliacve, fuper qui-
bus fundari poffit haec exclufio , quamvis etiam allegare velit , quod defe-
cerit, quodDEUS non permittat fed avertat, fucceflio fuae Majeflatis
Catholicae & Serenifiimorum Principum & Infantum , reliquorumque li-
berorum, quos habet & habuerit, omnium denique legitimorum fucceffo-
rum, namque nihilominus, prout diclum elt, in nullo cafu aut fucceden-
te eventu , nulloqne tempore aut modo fuccedere habent aut fucceuio-
nem prnetendere ipia ipfiufve fllii aut defcendentes , non obftantibus nec
illis legibus, confuetudinibus, ordinationibus , & difpofitionibus, quarum
virtute fuccefllim efl: & fucceditur in omnibus dicTlis Regnis, Statibus , &
Dominiis , nec quibufvis Legibus & Confuetudinibus Coronae Franciae,
quar. exiflente praejudicio illius fuccefforum exclufionem hanc impedire
queant, tam nunc quàm in temporibus & cafibus deferendae fuccefifionis ,
quibus omnibus & earum cuilibet Majeftates fuae derogare debent, eafque
abrogare, quatenus quocunque modo contrarix fuennt renori hujus capi-
tuli, illudque vel ejus adimpletionem & executionem impedierint, atque
approbando capitulationem iftam derogafle eafque pro derogatis habere
cenfentur. Voluntque & definiunt, ut exclufa & exclufi maneant Sere-
Iiii i nifli-
6oo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires niffima Infans & Illius defcendentes, ne pofîînt ullo tempore ullove eve-
gen. ue niente cafu fuccedere in Statibus & Provinciis Belgii, Comicatu Rurgun-
l'Euro- jj^ ^ Caroledsc, cum omnibus adjacentibus & pertinentibus , quse Pro-
vx" vinciae & Dominia data fuerunt à fua Majeftate Catholica SereniiTimae In-
fanti Domnœ ïfabelloe , quaeque redire debent ad fuam Majeflatem Catho-
"licam illiufve Succeflbres. Simul tamen declaratur , quod 11 accident,
quod DEUS prohibeat, ut viduetur Sereniflima Infans abfque liberis ex
hoc matrimonio , hoc cafu libéra maneat à dic1:à exclufione , capaxque ju-
rium fuccedendi in omnia, quae ad illam pertinere îllive deferri poiïint,
duobus folùm cafibus, uno nimirum, fi vidua permanens & abfque liberis
ex hoc matrimonio in Hifpaniam rediret, altero, fi in commodum boni
publici & ob juftas confiderationes denuô matrimonium iniret ex volun-
tate Régis Catholici Patris & Principis Hifpaniarum illius fratris , in qui-
bus cafibus capax & habilis elfe feu manere débet hsereditatem capeiTendi
& fuccedendi.
Quôd SerenilTima Infans Domna Anna mox à completo anno duodeci-
mo ante celebrationem & contraétum matrimonii per verba prœfentia
fcripto folenni inftrumento obligare fe teneatur pro fe fuisque fuccelToribus
ad implementum & obfervantiam fupradiclorum exclufionifque fuse & fuo-
rum defcendentinm approbando ea omnia, prout prsefenti contraétu & ca-
pitulatione continenter, cum claufulis neceiTariis &juramento, quôdque
infertà capitulatione fcripturâque obligatoriâ & approbatoriâ à Serenitate
fuà confe&â aliud fimile confeclura fit unâ cum Rege Chriilianiflimo , fta-
tim atque cum fuâ Majeftate matrimonium contraxerit,quod regeri & ac-
ceptai debeat à Pariamento Parifienfi forma & cum vigore folitis, ficut
<Sc fua Majeflas Catholica diétam renuntiationem & ratificationem appro-
bare teneatur atque curare, ut per Confilium Status pariter acceptetur &
regeratur forma & cum virtute folitis reliquisque claufulis neceffariis.
Faélis verô dïcTtis renuntiationibus , ratificatîonibus , & approbationibus vel
omifïis, illse nunc jam virtute illius Capitulationis prasfentis contra£tûs at-
que matrimonii , quod illius intuitu fecutum fuerit, contemplationeque
omnium fupradiclorum habentur & declarantnr pro benè & rite faélis &
peraclis.
Quod Majeftates fuse Chriflianiiîimae daturse fint Sereniflimre Infanti
Domnse Anna: pro annulis & monilibus, feu gemmis & magaritis valorem
quinquaginta millium aureorum, &c. &c.
Quod fua Majeflas Chriftianifîima fecundum antiquam & laudabilem
Domûs Francise confuetudinem affignatura fit & conltitutura Sereniflîmaî
Infanti Domnae Anna? pro dotalitio viginti millia aureorum, &c. &c.
Quôd fua Majeflas Chriflianiflima dare velit & afîïgnare Sereniflîmaî
Infanti Domnae Annae pro impenfis Camerae & ad fuftentationern Dignita-
tis ac Domus fuse fummam convenientem, quae deceat conjugem & filiam
tantorum & tam potentium regum, &c. &c.
Quôd completo à Sereniflima Infante anno setatis duodecimo fponfalia
& matrimonium verbis prœfentibus contrahentur perprocuratorem mitten-
dura.
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 601
dum à Rege Chriflianifîïmo ad Serenifiimam Infantem. Q110 facto fua Arnica
Majellas Catholica fuis fumptibus & impenfis illam deduci fackt ad Gai- gen.de
lise Regni fines, &c. &c. l'Euko-
Quôd diffoluto per mortem matrimonio inter fuam Majeftatem Chriftia-
niffimam & Sereniffimam Infantem , fuperftes Serenitas faa redire poffit li-
bère & abfque ullo impedimento in Regnum Hifpania; &c. &c.
Quôd cùm paclio & conventio hsec matrimonialis expetita atque pro-
mota fit à noftro Sancliflimo Pâtre, illiufque operà in. itatum praefentem
dedu&a, œquum fuerit fupplicare San&itati fuae, prout illi Majeflates fua:
jam nunc fupplicant, ut dignetur matrimonium hoc approbare & fuà be-
nedi&ione beare, uti etiam comprobare authoritate fuâ Apololicâ, Bullae-
que fuae inferere praefentem contractum & capitulationem ratihabitionefquc
fuarum Majeftatum & fua Serenitatis, nec non fcripturas &juramenta,
quse in illorum implementum fient & perficientur.
Quod fuae Majeftates Catholica & Chriftianifïïma approbaturae & ratam
habiturae fint prsefentem Capitulationem , promitrentes & recipientes fide
& verbo regio, illam à fe cuitoditum & inviolabiiiter impletum iri, editis
eum in finem ratificationum literis confuetis cum abolitione omnium le-
gum, jurium, & confuetudinum contrariarum quibufque proinde derogari
conveniat. Haeque literae mutuae ratificationis praefentis fcripturae exhi-
bebuntur intra duos menfes à die fubfcripto computandos per legatos &
miniftros in utrâque aulâ commorantes.
In omnia enarrata dicli Domini CommifTarii confenferunt ac convene-
runt prout hac capitulatione continentur, adftrictis ad ea Majeltatibus fuis
& fuâ Serenitate, cum obligatione & vinculo fidei verbique regii, ifthaec
ab illis effeclui mandatum & fervatum , ut plané cuftodiantur & implean-
tur juflum iri , abfque ullo defeclu totius aut partis , & fine ullâ contraven-
tionis permifiione directâ aut alià quacunque. Ita enim promiferunt dï6ci
Domini Plenipotentiarii vi mandatorum, quae à Majeftatibus fuis accepe-
runt. Prœfentes fuére illi, qui initio hujus capitulationis recenfiti fuerunt,
& di£ti Domini promittentes & contrahentes huic inllrumento nomina
fua propriis manibus fubfcripferunt, me requirentes,'ut illius exemplum,
unum vel plura qaae neceflaria fuerint, ipfis tradam.
Dux de Lerma, 6tV.
IIenricus de Lotharingia, &c.
OUoruni verborum complexu ad interminatam non proximi tantltm in Re~
gno Galli* fuccejforis , fed cujufcunque Gallici fanguinis ex hoc matri-
monio etiam ultimo loco orti 6? à fuccejjione Gallicâ remotijjimi vel pr opter
fœmineum fexum penitus femoti exclujionem à quâlibet Hifpanica fuccejjione , TIT. Fa&i
fublatâ omni fexâs , ordinis , £5? gradus dijiinclione , ut nihil clarius excogita- ab "? fo-
ri , nec inhœrens obllgatio arclius Jiringi potuit \ ita etiam ab Infante jinnâ e-nni °.m"
antc 13 poft confummatum matrimonium , ipfoque Rege GhriftianiJJïmQ faniïijfî- ttàauL
Xiii 3 mis
6oz MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
Affaires mis juramentis confirmata £5? inter leges Hifpaniœ £s? G allia fempiternas in
gen. de utr'wfque Regni Dicafieriis annotari folitas . relata , ne que antehac ab ullo
L pe*0" mortalium in dub'ium vocata fuit. Perpenfâ potins illius utilitate £s? ne ce fi-
— — - — fitate ciim fiât us feu ordines générales Regni Madriti Anno 161 8- congregati
IV Lege && Philippo fuggejferunt ac fuppl'icârunt , ut lege perpétua & renuntiatio-
Hifpanicâ ne m iflhanc denuh confirmant , & virtute illius omnes in univerfum utrius-
exprefTà. que fexus liber i ex matrimpnio hoc prognati & qui ex illis nafcituri effent ,
ab omni fuccejjione Hifpanicâ aterniim excluderentur , tum Rex Philippus
examinât â itcrum & mature difcujfâ re , eam , quœ petita fuerat , legem tu-
lit & promulgavit , rcpetitis & in novum Hifpanicarum Legum Codicem Ma-
driti Anno 1640. impreffum relatis de refervato pariter pofi matrimonium
Gallicum folutum ipfi Infant i fine proie fuperfliti , ac ejurato alias , uti dixi-
mus , cmni fuccefjîonis jure ipfifjîmis patlorum connubialium fupra defcripto-
•tum & confona renuntiationis ver bis , bac prœfixâ infcriptione £5? fummâ:
Lex duodecima. Quôd Regina Francise Chrillianiiîima Domna Anna
Illiufque liberi & defcendentes ex matrimonio cum Rege Chriliianifîimo
Ludovico Decimo tertio fuccedere non poiTînt in Regnis Iiifpaniae &
connexis, pranerquam in cafibus, quos lex iita compleélitur.
V. Con-
tractai ma-
trimonia-
li Infant is
Maris
Therefîa;
nupta» Lu-
dovico
XIV.
Concors plané in excludendis ob plures rurfum rationes allegatas in in finit um
quibufvis maribus & fœmints Gallicis ab omni Hifpanicâ fuccefjîonis parte ,
ejufdemque efficaciœ efi , quod tabulis connubii inter Philippi Quarti filiam In-
fantem Mariant Therefiam £5? Ludovicum Decimum Quartum modernum Fran-
ciœ Regem Anno 1 6f <?. contratli exprimitur , ut pêne defcripta tantîtm fupe-
rior formula videri potuifiet, ni fi enixioris contrahentium voluntatis declaran-
dœ & , fi fieri potuifjet , arclandœ magis obligationis ergb nova quœdam clau-
j'ula additœ fu'îfjent J'equentibus ex Galiico exemplari ratificationi Régis Chri-
fiianiffimi inferto hue tranflatis ver bis.
In nominefan&ifïimaeTrinitatis, Patris, Filii, & Spiritus Sanfli, trium
Perfonarum unius folius & veri Dei, ad illius honorem & gloriam & in
bonum horum regnorum. Notum fit omnibus iis , qui prasfentes literas
& contra&um hune connubialem videbunt. Quandoquidem in Infula à
Phafianis appellatâ, fitâ in flumine Bidaflba, quod dimidiâ leucâ diltat à
vico Andaya provincioc Aquitania? , & eodem fpatio ab urbe Irunenfi pro-
vincia: Guipofcoœ , inque domo ibidem exftru&â ad traciandam pacem
inter Majeihtes fuas Chriflianiflimam & Catholicam hodiernâ die feptimâ
Menfis Novembris Anno à Nativitate Jesu Chrifti Domini & Redemp-
toris nolhi, fupra Millefimum fexcenteîimum quinquagefimo nono, co-
ram me Petro Colom, Equité Ordinis fancli Jacodi, Domino Oppido-
rum &c. &c. Confiliario Indico , Secretario Status, Scribâ & Notario
Regise Catholica* Majeftatis , comparuerunt Eminentilîîmus Dominus ,
Dominus Juiius Mazarinius , Sacrçc Romane Ecelefia? Cardinalis , Dux
Meduanse , Praefes omnium Confiliorum Sereniiiimi , Excellentiffimi , &
Poten-
RESOLUTIONS D'ETAT, M.-DCC. I.
6&1
Potentiflîmi Principis Ludovici Decimi Quarti, Dei grarià Régis Francia:
& Navarrae Chriitianiffimi, vi mandati , îpii à fua Majeilate Chnftianif-
fima conceffi, quod Gallica lingua confcriptun , manu regià fubfcriptum
& regio figillo munitum, atque ab ipfius Secretario itatûs, Domino de
Lomenie fubùgnatum , daium fuerat Lutetiae Panliorum vigefima prima
Junii 1659. cujufque authenticum exemplar pênes me aflervatur, ejus
verô exemplum fini praefentium adnectetur ab una parte: & ab altéra
parte ExcellentifTimus Dominus, Dominus Ludovicus Mendez de Haro
& Guzman , Marchio del Carpio, Cornes Dux de Olivarez, Confilarius
Status fuse Majeftatis Catholicae &c. &c. Nomine Sereniffimi, Excel-
leniiilimi, & Potentiifimi Principis Philippi Quarti, Divinâ etiam gratiâ
Régis Caftelloe , Legionis, Arragonia? , utriufque Siciiia? , Hierolblymo-
rum, Ludtaniae, Navarre, & Indiarum &c. &c. Dueis' Auiinae', Bur-
gundiœ, Brabantix & Mediolani, Comitis Habfpurgi, Flandrias, & Ty-
rolis Sic. &c. Virtuteque mandati, quô à fua Majeilate Catholica in-
ftruclus fuit per inftrumentum Regià fuâ manu fubfcriptum, regioque fi-
gillo confirmatum & à Domno Ferdinando de Fonfeca Ruiz de Contreras
illius Secretario ftatûs fubfignatum Madrid $. Julii praefentis Anni, tan-
quàm Rege, Pâtre, &legitimo Adminiftratore SerennTimae Infantis Dom-
nae Mariae Therefiae , filiae lux* primogenkae procreatœ ex Majeilate quon-
dam Régine Elifabethae Conjugis fuae légitimai: atque fubinde diclus Do-
minus Cardinalis Mazarini nomine fuae Majeftatis Chriftianiffimae, & Mar-
chio de Olivarez , nomine fuse Majeftatis Catholicae , ufi mandatis fupra-
dicbs, dixerunt & enuntiarunt, quod ipforum Domini , uti Reges Chri-
itianifïïmus & Catholicus animum intendentes in utilitatem regnorum ilbi
concreditorum , & ut Habilitas pacis hodie inter ambas Coronas conclu-
fae, non folùm ipfis viventibus duret, fed eâdem firmitate ad omnes fuc-
cefibres & defcendentes perveniat , perpendentefque , quèd efficacihï-
mum ejus fcopi affequendi remedium fit, pacis fœdera per matrimonii
vinculum ar&ius flringere^ ea propter confirmandseque adeo amplius per
hoc matrimonium amicitise, & urrioni, quae eft & perpétua optatur inter
fuas Majeftates, Divinà adftipulante benignitate & in Omnipotentis h-o-
norem traclaverint & iniverint fponfalia & matrimonium Régis Chriftia-
niffimi cum Serenifiîma Infante Domna Maria Therefia fuse Majeftatis ^Ca-
thoîicae filia primogemtà, quodque eum.iiifinem dicti Domini Plenïpoten-
tarii nominibus fupradiclis tranfegerint: & convenerint de articulis'fequen-
tibus.
1. Quôd Divinâ benedicente gratiâ, prsevià San&itatis fuse difpenfatio-
ne ob proximitatem & confanguinitatem ,-quœ intercedit inter Rege-rri
Chriftianiffimum & Sereniiïïmam. Infant'èm^ ipii célebrare debeant fponfâ-
lia fua & matrimonium per verba de prxibnti , forma & iblennkati'bus
prœfcriptis a facris Canonibus & Conftitutionibus Ecclefioe Catholica' Àpo-
Itolicae & Romance. Fietque iftud in .Aula Regise Majeftatis Catholica:,
ubi cum Sereniflima Infante Domna Maria Theretia conftet, & q'uidem
Affaires
GKN. DE
l'£uro-
PE.
virtute mandati & commiiïionis Régis Chriftianiiîim
6l
qui îllud dein ratum
habe-
QEN. DE
l'Euro-
pe.
604 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Maires habebit & ipfe confummabit , ftatim atque Sereniflîma Infans Domna
Maria Therefia in Galliam perdu&a fuerit, illucque pervenerit, jungente
fe fua Majeftate Serenitati fuae per Ecclefiae benedictionern perficieturquc
concluflo ratihabitio di£U matrimonii five per fpeciale procuratorium, fi-
ve ab iplis contrahentibus tempore inter fuas Majeftates convento &
definito.
2. Quôd fua Majeftas Çatholica promittat & teneatur dare , daturaque
fit SereniiTimse Infanti Domnae Mariae Therefire in dotem matrimonii
caufâ cum Rege Francise Chriftianifîimo , foluturaque fit fuae Majeflati
Chriftianifiimae aut ipfius procuratori & commiflario quingenta millia au-
reorum folis, aut illorum valorem legitimum in civitate Parifienfi. Qiiae
fumma dependetur modo fequenti : triens tempore confummationis ma-
trimonii : alter triens fub flnem anni inde fequentis , & ultimus triens in-
tra fex Menfes ab eo tempore numerandos , ità ut intégra folutio diébe
fummae quingentorum millium aureorum folis perficiatur fpatio octodecim
menfium terminis & portionibus determinatis.
3. Quôd ad fecuritatem dotis hujus fua Majeftas Chriftianiflîma pro-
mittat fe affignaturam , affignaturaque fit reditus liquidos & certos &c.
4. Quôd per hanc realem folutionem diétorum quingentorum millium
aureorum folis vel jufti valoris fac~lam fuae Majeitati Chriftianiffimae aut
illius mandatario penfionibus fupradi&is , Sereniffimse Infanti Domnse Ma-
rias Therefiae plenè fatisfa&um cenfeatur illaque adeô contenta fit diclâ
dote, ità ut il li non fuperfit aliquis regreffus, a6tio,aut jus petendi, quôd
ad illam pertineant alia bona aut jura in haereditates fuarum Majeftatum
Catholicarum, Parentum fuorum, five ex illorum perfonis, five aliâ ra-
tione quacunque , aut alio aliquo titulo, cognito aut incognito, quoniam
ab omnibus, cujufcunque conditionis, naturae aut qualitatis fint, exclufa
efTe & manere débet , iifque fe exerte abdicabit cum omnibus fecuritati-
bus, firmamentis, & folennitatibus requifitis & neceffariis ante matrimo-
nium contrahendum per verba praefentia, illud etiam denuô pofteà appro-
babit & ratum habebit unâ cum Rege ChriftianifTimo ftatim ac matrimo-
nium celebraverit , additis iifdem cautionibus & folennitatibus, quas ob-
fervatœ fuerint in prima renuntiatione , aliifque quse maxime convenien-
tes & neceffarisc videbuntur: ad quod tum faciendum tenebuntur, &
nunc tenentur atque obligantur fua Majeftas Chriftianiflîma & fua Sereni-
tas , quinimô fi renuntiationem ifthanc & ratihabitionem facere négligè-
rent, illae jam nunc per hune folum tractatum fac~foe & expeditae repu-
tabuntur. Fient verô modo , qui ad conciliandàm aut teftandam validi-
tatem & firmitatem excogitari poterit, efficaciflimo & maxime conve-
nienti , expreflîs omnibus claufulis , derogationibus , & abrogationibus
omnium legum,morum, confuetudinum , decretorum,& ftatutorum con-
trariorum , quaeve impedimento fuerint in toto vel in parte , quibus adeô
ad hune efFe&um fuae Majeftates Çatholica & Chriftianhîima derogare de-
bebunt , quxque ab hoc momento in illud tempus per approbationem
hujus tra£htus abolita intelligentur.
S* Cùm
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. ï. éoT
$. Cùm ambae Majeftates Catholica & Chriftianiffiraa in hoc matri- Affaires
monium confenferinc & confentiant, ut illius vinculo perpetuetur & ma- grn.dk
gis fecura reddatur pax publica Chriitianitatis expetitaque inter Majelta- L'^URP-
tes fuas mutua dileétio ac fraternitas, & contemplatione juftarum caufà-
rum, quœcommonftrant& perfuadent coimxioda di&iconnubii , per quod
Divina favente gratià fperari poflunt felices fucceffus in eximiam utiiita-
tem & augmentum fidei & reiigionis Chriflianse communique beneficium
Regnorum, fubditorum & vafallorum ambarum Coronarum: Cumque in-
teriit itatûs publici & confervationis illarum, ut quac tam magnae imt, non
conjungantur, occafionefque prcecaveantur, quac evenire pofTent iilas jun-
gendi & ob aequalitatem & alias juitas rationes, ftatuitur paclo convento,
quod Majeilates fuse obtinere voiunt robur & vigorem legis Habilitée in
iavorem regnorum fuorum & publics caufse illorum, ut Serenifîima Infans
Domna Maria Therefiâ liberique, quos habuerit, mares &focminac, illo-
rumque & illarum defcendentes tam primogeniti, quàm fecundo, tertio,
aut quarto geniti, ukeriorefque in quocunque gradu confiltant, nonpof-
iint ullo unquam tempore fuccedere nec fuccedant in regnis, itatibus, &
Dominiis fuse Majeftatis Catholicac comprehenfis in titulis relatis in iflaca-
pkulatione, nec in quolibet alio omnium reliquorum regnorum, ftatuum,
& Dominiorum , Provinciarum , infularum adjacentium , feudorum , eu-
ltodiarum feu tuitionum & Caitellorum feu locorum limitaneorum, quac
fua Majeftas Catholica nunc tenet ac poffidet , quaeque ad illam pertinent
vel pertinere poffint cùm intra Hifpaniam tum extra illam & quae fua
Majettas Catholica & illius fuccefTores impofterum tenuerint, pofîèderint,
& ad îllos pertinuerint, nec in ullo quod comprehenfum , inclufum, & ag-
.gregatum fuerit , nec quod ullo tempore adquiri & aderefeere dictis re-
gnis, itatibus, & Dominiis recuperarique & reddipoffit, fub quocunque
titulo & caufa id fit aut elle poffit, quamvis vivà Domina Infante Dom-
na Maria Therefiâ, aut deinceps fuperftite quocunque illius defeenden-
tium primogenitorum,fecundogenitorum , & ulteriorum , eveniat & con-
tingat cafus unus vel plures, quibus ex jure legum & coniuetudinum diclo-
rum regnorum, flatuum, & Dominiorum, difpofiticnumque actitulorum,
quorum vi illic fucceditur prsetendique fuccefiio poffit, ad illos pertinere
fucceflio deberet, namque ab iita jureque & fpe fuccedendi in hifee re-
gnis, ftatibus,& Dominiis, & illorum unoquoque jamnunc declaratur peni-
tus exclufa dicta Sereniiîima Infans Domna Maria Therefiâ & omnes illius
liberi & defcendentes mares & fœminae, licet dicant aut dicere vel pra>
tendere queant, quod in illorum perfonis locum non inveniant nec confi-
derari poiïint rationes caufa; publics aliaeve, fuper quibus fundati pofïit
haec exclufio , quamvis etiam ailegare velint, quèd defecerit, quod Deus
non permittat fed avertat, fucceffio fuae Majeflatis Catholicae & Sereniffi-
morum Principum & Infantum reîiquorumque liberorum, quos habet &
habuerit , omnium denique legitimorum fucceflbrnm , namque nihilomi-
nus , prout di&um eft , in nullo cafu aut fuccedente eventu , nulloque
tempore fuccedere habent aut iucceffionem praetendere ipfa ipfiusve iilii
Tome XL Kkkk aut
FE.
606 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aminss aut defcendentes, non obftantibus nec illis legibus, confuetudinibus, or-
cen. de dinationibus , & difpofitionibus , quarura virtute fucceiTum efl & fuccedi-
i.'£uro- tQr in omnibus diclis regnis, ftatibus , & Dominiis, nec quibusvis legibus
& confuetudinibus Coronre Francise , quse exiftente praejudicio illius fuc-
cefTorum exclufionem hanc impedire queant, tam nunc, quàm in tempo-
ribus & cafibus deferendae fucceffionis, quibus omnibus & earum cuilibet
Majeftates fuae derogare debent , eafque abrogare , quatenus quocunque
modo contrariée fuerint tenori hujus capituli, illudque vel ejus adimpletio-
nem & executionem impedierint, atque approbando capitulationem iftam
derogaffe easque pro derogatis habere cenfentur. Eademque ratione pa-
riter erunt & intelligentur manere exclufa & exclufi Sereniffima Infans
& Illius Defcendentes , ne poffint ullo tempore uîlove eveniente cafu
fuccedere in itatibus & provinciis Belgii, Comitatu Burgundiae & Carole-
fiîc cum omnibus adjacentibus & pertinentibus. Simul tamen declara-
tur, quod fî acciderit, quod Deus prohibeat, ut videtur Sereniffima In-
fans abfque liberis ex hoc matrimonio , hoc cafu libéra maneat à dicta
exclufione capaxque jurium fuccedendi in omnia quae competunt, duo-
bus cafibus , uno nimirum fi vidua permanens & abfque liberis ex hoc
matrimonio in Hifpaniam rediret , altero , fi in commodum boni publici
& ob judas confiderationes denuo matrimonium iniret ex voluntate Régis
Catholici Patris , & Principis Hifpaniarum illius fratris, in quibus cafibus
capax & habilis efTe feu manere débet haereditatem capelfèndi & fuc-
cedendi.
6. Quod Sereniffima Infans Domna Maria Therefia ante célébration em
& comraclum matrimonii per verba praefentia fcripto folenni Inflrumento
obligare le teneatur pro fe fuifque fuccefforibus ad implementum & ob-
fervantiam fupradiftorum Exclufionifque fuae & fuorum defcendentium ,
approbando ea omnia, prout iitâ capitulatione continentur, cum claufu-
lis neceiïariis & juramento, quodque infertâ iflà capitulatione fcripturâ-
que obligatoriâ & approbatorià Serenitate fuà confe&â aliud fimile con-
feclura fit unà cum Rege Chriilianiffimo flatim atque cum fuà Majeflate
matrimonium contraxerit, quod regeri & acceptari debeat à Parlamento
Parifienfi forma & cum vigore folitis , ficut & fua Majeflas Catholica
diclam renunciationem & ratification em approbare teneatur atque cura-
re, ut per confllium ftatus pariter acceptetur & regeratur forma & cum
virtute folitis reliquifque claufulis necefTariis. Faclis verô diclis re-
nunciationibus , ratificationibus, & approbationibus vel omiffis , illac nunc
jam virtute illius Capitulationis & Matrimonii, quod illius intuitu fecu-
tum fuerit, habentur & declarantur pro factis & confcriptis ac à Parla-
mento Parifienfi acceptais atque regeitis per publicationem pacis in illo
regno fsciendam.
7. Quod fua Majeflas Chriftianiffima datura fît Sercnilîimce Infanti
Domnx Marias Therefia: pro annulis & monilibus feu gemmis & margari-
tis valorem quinquaginta milliurn aureorum &c.
g* Quod fua Majeilas Chriftianiiîima fecundum antiquam & laudabi-
lera
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 607
îem Domûs Francise confuetudinem affignatura fit & conflitutaSereniiîimoe Affaires
Infanti Domnoe Mariae Therefiae pro dotalkio viginti millia aureorum &c; gen.de
9. Quod fua Majeftas Chriflianiffima dare velit & aflîgnare Serenif- L^RO"
fimae Infand Domnac Marke Therefias pro impenfis Camerae & ad fu- \ —
ftentadonem dignitads, ac Domûs fuoc furamam convenientem , quae de-
ceat conjugem & filiam tantorum & tam potentium Regum &c.
10. Quôd Rex Chriftianifllmus & Sereniffima Infans Maria Therefia
fponfalia & matrimonium contrahere velinc verbis prafentibus per procu-
ratorem mittendum à Rege Chriftianiflîmo ad Serenifîimam Infantem.
Quo facto fua Majeftas Catholica fuis fumpdbus & impenfis illam deduci
faciet ad Galliae Regni fines &c.
ix. Quôd diflbluto per mortem matrimonio inter fuam Majeftatem
Chrianifïïmam & Serenifiimam Infantem fuperftes Serenitas fua redire
poffit libéré & abfque ullo impedimento in Regnum Hifpaniae &c.
12. Pactio & Conventio haec matrimonialis inita fuit eâ mente, ut fup-
plicetur fancto Patri nollro Papae, proutilli Majeftates fuae jam nunc fup-
plicant, ut dignetur matrimonium hoc approbare & fuâ bendictione Apo-
îlolicâ beare, uti etiam comprobare illius capitula feu articulos, ratihabi-
uonefque fuarum Majeftatum & fuce Serenitatis, nec non fcripturas &
juramenta, quae in illorum implementum fient & perficientur, inferendo
ifthaec litteris fuis approbadonis & benedictionis.
Quôd fuae Majeftates Chriftianiffima & Catholica approbaturac & ratam
habiturac fint praefentem Capitulationem , omnemque ejus continentiam,
promittentes & recipientes fide & verbo regîo , illam à fe cuftoditum &
inviolabiliter impletum iri, edids eum in finem ratificadonum literis con-
fuetis cum abolitione omnium legum , jurium, & confuetudinum contraria-
rum quibufque proinde derogari conveniat. Haeque litersemutuae ratifica-
donis prefentis fcripturae exhibebuntur intra triginta dies à die iubfcripto
computandos per legatos & miniftros in utraque aulâ commorantes , cum
obligatione & vinculo regiae fidei verbique , effeclui fe illam daturas &
cultodituras obfervarique & plenè impleri jufîuras efiè abfque ullo defedtu
totius aut partis, feque non contraventuras aut ut contra eatur permiffii-
ras , directe aut indirecte, ullâ ratione aut modo. Ita enim promiferunt
& ftipulati funt dicti Domini Plenipotentiarii, vi regiorum, quae habent,
mandatorum , praefentibus à parte Franciae, Dominis Duce Guifiae &c„
&c. Duce de Crequi &c. &c. Marchione de Soyecourt &c. Lionseo &c.
Courtin &c. &c. Comité ab Avaux &c. &c. Pluribufque aliis Dominis
& Nobilibus: Et à parte Hifpaniae Dominis Marchione de Mondejar &c.
&c. Duce de Mazara &c. &c. Marchione de los Balbazes &c. &c.
Licentiato Domno Francifco Ramos de Manzano &c. &c. Barone de
Battevile &c. &c. Domno Rodrigo de Mexia &c. &c. & pluribus aliis
proceribus & nobilibus. Iplique Domini contrahentes manibus fuis no-
rnina fubfcripferunt, meque requifiverunt, ut ejus exemplum, vel plura,
ubi neceflaria fuerint, exempla illis traderem.
Cakd, Mazarinus. D. Ludovicus Mendez.
Kkkk 2 Fac-
tfô8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ ,
Aminés Faclum & peraélxim coram me Secretario , Scriba & Notario publico
e£f:°£ fupradi&o, anno & die expreiïis.
Pet rus Coloma.
PE.
Vl.Secutâ
am^iifli-
mâRe-
nuncia-
tione
juratâ
omnium
hxredita-
îum.
CQnventioni bilic , antequam in Gaîlicam potejîatem concederet illiufque ar-
bitrio obtemperare coqeretur , exacliffime , qucmadmodum Hifpanici fangui-
n'is principe m decuit , fat'.sfecit Infans Maria Therefia , jamyue vïgejtmum e gref-
fa annum , & rerum humanarum intelligent ijfima , duobus , quod probe notandum ,
à fe fub/'cripti, & deinde unâ cum ip/à convention? matrimoniali in abla publica
Confliorum Hijpanicorum regeftis Inflrumenîis , fatlœ Renuntiationis alterorati-
bab.tœ Exclufionis à provinciis & regnis eorumque Cefîonis, utr unique corporali
juramento corroboravit , omnemque Jîmul petcnda vel u/ur panda cujufcunque ex-
ceptions , refit utionis , abjbluîioms , a ut difpenfationis Pontificia vel alterius^
etiam f ponte aut alio pof niante confefa facultatem penitus abjuravit. Id quod
Renunciationem comprebendit continent! a efi fequentis :
Domna Maria Therefia Infans Hifpaniarum & DEI gratiâ futura Re-
gina Francice, Filia primogenka Sercnifîimi,Excellentiffimi, & Potentif-
fimi Principis Domni Philippi Quarti eâdem gratiâ Régis Catholici Hifpa-
niarum , Domini mei, & Sereniffimoe, Excellentiffimae, & Potentiflimae
Principis Domnae IfabelUe Reginae Catholicae, quam osterna gloria beet,
per Initrumentum hoc & Aétum Renunciationis ampliorifque quem com-
pledtitur tenoris, notum facio & manifeiluin omnibus, quorum fcire quo-
modocunque refert, quod per Articulos fecundum & quartum Tra&atûs
mei connubialis iniii cum Serenifîimo , Excellentitfimo, & Potentiffimo
Principe Ludovico Decimoquarto Rege Franciae in Infula dicla Phafiano-
rum, fita in amne Bidaffoa Provincial Guipufcoae in confinio horum Re-
gnorum cum Regno Franciae feptimâ Novembris anni prseteriti 1 6yo. fta-
tutum & decretum fuerit, Rexque Dominus meus propter hoc matrimo-
îîium & ut congrue dotata bonifque propriis initrucla eiTem promiferit,
daturum fe mihi elle quingenta millia aureorum foiis , folvenda & reprae-
fentanda loco & temporibus diélo Tra&atu defignatis Régi Chriilianiiïimo
illiufve mandatario, quibus fatisfaclum mihi effe & haberi debeat pro om-
nibus & quibuflibet juribus & aclionibus , quae ad me pertinent aut per-
tinere pofîînt, nunc aut impoflerum , ob bona & hoereditatem Sereniffi-
mse Reginae Domnae Ifabellse Matris mese & ob futuram Succefïionem Ré-
gis Domini mei, quem DE US tueatur, & propter omne illud, quod mi-
hi competere poiTet tanquam filise & haeredi Majeflatum fuarum Catholi-
carum, tam ex ipforum jure & capite , quàm ex quocunque alio titulo,
cogitato aut non eogitato, noto aut incognito, ex lineâ cùm paternà tum
materna , rcclâ aut tranfverfali , médiate aut immédiate , quodque ante
celebrationem matrimonii per verba praefentia abdicare me debeam & ce-
ctere omnibus meis juribus & omnibus a&ionibus Régi Domino meo illif-
que qui perfonam illius reprsefentant, prout conventum & declaratum ell
fpecialius dictis Articulis i, & 4. quos ipfa legi, legique audivi pkiribus
vici»
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 6o9
vicibus antequam aflenfum huic ac"hii forrnando praslîarem, quos verbote- Aff.uues
nus hîc infen volo , tenore fequend. „ Quod fua Majeftas Catholica °*f Dfi
„ promitcat & teneatur dare, daturaque fit Sereniiïimre Infanti Domnx L'EuRo-
„ Mariac-Therefiae in dotem matrimonii caufà cum Rege Francis Chri- ^_„
„ ltiani^imo, foluturaque lit fuse Majeftati Chnitianilliraie aut ipfius pro-
,, curatori & commiiLrio quingenta millia aureorum folis , aut illorum
„ valorem legiumum in civitate Parilienii. Quse fumma dependetur mo-
„*do fequenti : triens tempore confummationis matrimonii : alter triens
,, fub finem anni inde fequentis, & ultimus triens intra fex menfes ab eo
„ tempore numerandos , ita ut intégra folutio didtae fummae quingentorum
„ millium aureorum folis perficiatur fpatio octodecim mentium terminis &
„ portionibus determinatis.
„ Quod per hanc realem folutionem dictorum quingentorum millium
„ aureorum folis vel juiti valons fa&am fuae Majeftati Chriftianiiîïmae auc
„ illius mandatario penliombus fupradiéds , Serenilfimse Infanti Domnce
„ Mariae-Therefiœ plenè fitisfadtum cenfeatur illaque adeô contenta fit
di6ta dote, ità ut îlii non fuperfit aliquis regreflùs, aftio aut jus peten-
di aut praetendendi quod ad illam perdneant alia bona aut jura in hae-
reditates fuarum Majeitatum Catholicarum , Parentum fuorum, five ex
„ illorum perfonis, iive alia ratione quacunque, aut aiio aliquo titulo co-
„ gnito aut incognito , quoniam at> omnibus , cujufcunque conditionis,
„ naturse aut qualitatis fint, exclufa effe & manere débet, iifque fe exer-
„ té abdicabit cum omnibus iecuritatibus, firmamentis , & folennitatibus
„ requifitis & neceflariis ante matrimonium contrahendum per verba
„ prsfentia, illud etiam denuô pofleà approbabit & ratum habebit una
„ cum Rege Chriftianiffimo , ftatim ac matrimonium celebraverit, addi-
„ ds iifdem cautionibus & folennitatibus, quae obfervatae fuerint in pri-
„ ma renuntiatione, aliifque quœ maxime convenientes & neceffarice vi-
„ debuntur : ad quod tum faciendum tenebuntur, & nunc tenentur at-
„ que obligantur fua Majeftas Çhriftianilnma & fua Serenitas, quinimô fi
„ renuntiationem ifthanc & ratihabitionem facere négligèrent, illse jam
„ nunc per hune folum Traclatum faclae & expeditas r^putabuntur -> fiene
„ verô modo qui ad conciliandam aut teftandam validitatem & firmita,-
„ tem excogitari poterit effieaciifimo & maxime convenienti expreiîis
„ omnibus claurulis , derogationibus , & abrogationibus omnium legum,
„ morum , confuetudinum , decretorum , & ftatutorum contrariorum ,
„ quaeve impedimento fuerint in toto vel in parte, quibus adeo ad hune
„ effeclum fus Majeftates Catholica & Chriftianiffima derogare debe-
„ bunt, quaeque ab hoc momento in illud tempus per approbationem hu-
„ jus Traclatûs aboîita intelligentur. „
Cùmque per DEI clementiam aetatem ingrefla fim majorem viginti
annis, & DEO volentè intra paucos dies matrimonium noftrum in effec-
tum deduci per verba praefentia debeat, certifîimè etiam edocla fim ac
quà;n defiderare potui plenilïimè perfpeclam habeam fubftandam & effec-
tum horum ardeuiorum , limul cognofeam & agnoverim , quod ex fut i ira
Kkkk 3 fuc-
6io MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AfrAi»» fucceffione Régis Domini mei , & hsereditate Sereniffimx Reginse matris
gen. de mege fummo jure ut haereditas vel légitima mihi competere aut ad me
l'Euko- fne$;are non poiTit diéla fumma quingentorum millium aureorum folis,
Ft" quod etiam, ubi competiifTet , dos fît valde congrua & omnium maxima,
qux ad hoc ufque tempus data fuerit alicui Infanti Hifpaniae , quodque
Rex Dominus meus in animum induxerit, ut tantam mihi daret iïudio mi-
hi gratificandi , & conlideratione ac contemplatione Régis Chriftianiffimi,
quo per hoc matrimonium obtineantur effeclus expofiti di£to tra&atu con-
nubiali, tantoperè neceiTarii & utiles bono publico Chriftiani orbis , ho-
rumque regnorum quieti & fatisfactioni : ideô ex certà fcientiâ, libéra &
fpontaneà voJuntate approbo & vo!o obfervari atque compleri flatuta &
décréta diclorum articulorum fimulque credi feu intelligi, quôd matrimo-
nium hoc fub conditionibus contenus & illic enuntiatis concludi & effeclui
mandari debeat, & quôd abfque illis nec ad ftatum, in quo hodie eft,
pervenilTet, mihique adeô jam nunc meo arbitrio fatisfaclum & plenè ab-
folutèque folutum cenfeo, quicquid ad me pertinet aut pertinere queat,
nunc aut impoiterum, quocunque jure , comperto aut latente, ex futurà
fucceffione & hsereditate fuarum Majeflatum Catholicarum Parentum
meorum , & prgpter legitimam paternam ac maternam , vel illius fupple-
mentum , vel ex causa alimentorum aut dotis ex bonis tam liberis, quàm
quae ad Coronam, régna, ftatus, & Dominia fpeétant , ut mihi meisque
non fuperfit aliqua actio vel regreffus contra Majeftatem fuam illiusve fuc-
ceffores, expetendae aut prœtendendse majoris fummse aut pretiofioris &
dignioris portionis quàm dicta quingenta millia aureorum efficiant. Volo
pariter , haec renuntiatio etiam faéta intelligatur ratione quorumlibet alio-
rum jurium aut a&ionum , quae mihi ceu filiae Majeftatum fuarum compe-
tere aut ad me pertinere poffent ex haereditate aut fucceffione cujufvis
juris aut cognationis linea: reclae aut transverfse , in capita vel ftirpes,
quodque illis fimul omnibus & cunclis me abdico & exuo cujuscunque
conditionis, naturae , qualitatis, pretii <5ç»ponderis fint , cedens, devol-
vens, & tranferens ea in Regem Dominum meum illiusque haeredes & fuc-
ceflbres univerfales & fingulares in jus illius fubeuntes , ita ut de iis pro
arbitrio & beneplacito dilponere poifit, tam per donationem inter vivos,
quàm per teltamentum & ultimam voluntatem , nullâ fuperftite obligatio-
ne, ut me haeredem inflituat, legato me honoret, aut mei mentionem fa-
ciat, in hos namque effeclus me extraneam conflituo & pro tali haberi &
reputari debeo, atque ut tali nullusmihi fupereiTe débet regrefTus obloquen-
di aut movendi quamlibet querelam, licet hsereditas à fua Majeftate relin-
quenda opulentiffimafit, tantique pretii & momenti, ut ex ipfa mihi tan-
quam uni ex illius liberis praefentibus aut futuris major diclis quingentis
millibus aureorum fumma competere poITet , quocunque tandem exceflus
pertingat. Etiamfi verô cafus contingeret (quod DKUS prohibeat) ut
tempore mords illius ego filia ejus unica fuperelTem , fratribus nimirum
meis aliifque ipfius legitimis defcendentibus praedefunélis , quô nullo ca-
fu, nulloque émergente fucceflu peti aut prsetendi pro me meove nomine
aut
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. 611
aut ex jure mihi compétente pofîît a!ia major portio légitima; ex bonis Affaire
& haereditate Régis Domini mei, polliceor nullo tempore nullaque ratio- t;))N- D&
ne fub quocunque prstextu me confenfuram aut permiffuram effe , ut aga-
tur. contra hanc meam renuntiationem & abdicationem meorum jurium,
actionutn aut prar.enfionum, unaque renuntio omnibus & quibuslibet re-
mediis ordinariis & exiraordinariis , quse fuppetunt aut fuppetere mihi
poiTent ex jure communi & legibus horum regnorum , aut ex ipeciali pri-
vilegio, pracfertim reftitutioni in integrum ob defeétum setatis , aut liseiid-
nem enormem vel enormifiïmam , aut quôd dos dicatur caufa efTe hujus
contra&us, aut propter incertkudinem ejus , cui renuntio , adeô ut nul-
lum diétorum remediorum nullusque recenfitorum regreikmm mihi fuffra-
getur aut fuffragari queat in judicio & contentione juridica , neque pro-
pter illa ego meique liberi & haeredes audiri adraittive poffimus , nobisque
aditus negetur & prœcludatur ea proponendi & deducendi judicialiter aut
extrajudicialiter, per viam gravaminis vel recurfus, feu implorationis aut
fimplicis querelee, fed femper & omni tempore obfervetur & compleatur ,
quod relatis articulis difpofitum elt, quodque omni tempore cuftoditum ,
impletum,& inviolabiliter obfervatum iri per hune a6lum confirmations <Sc
approbationis promifi & promitto fide meâ & verbo regio, fub hypotheca
omnium meorum bonorum & redituum prsefentium & futurorum, omnem
quoque poteltatem concedo Conlilio fuse Majeitatis Catholicse Dominisque
Regibus ipfius fuccelTuribus & perfonis, quibus executionem hujus A£tus
injunxerint, ut iitum obfervari faciant & executioni mandari. Ad majo-
rent validitatem juro infuper per fancla Evangelia contenta MifTaii hoc ,
quod dexterà mea contingo, quod omni tempore & quantum à me depen-
dere poterit, hsec obfervabo & implebo , neque dicam aut allegabo, me
ad ifta facienda & promittenda induclam, iliectam, aut perfuafam fuifle
per refpeclum aut venerationem Régis Domini mei, qui me habuit & ad»
hue habet fub fua patriâ poteilate, declaro potiùs, quôd fua Majeflas ea
femper libero meo arbitrio & voluntati proprise reliquerit & quôd eâ libé-
ra Si. nullatenus fubjeétâ ufa fim in omni eo quod concernit hune contrac-
tum. Promitto porrô me nunquam petituram difpenfationem feu liberatio-
nem hujus juramenti à noftro Sancliffimo Pâtre & Sanctà Sede Apoftolicâ,
neque ab illius Nuntio autLegato à latere, aut aliâ perfonâ, quœ potelta-
tem aut facultatem habeat illam largiendi , & û eam peti contingeret, me
aut alio quovis jubente , vel proprio motu concedi, illâ non utar, aut ex
illâ utilitatem capiam, quamvis ad id folum tenderet, ut jure contendere
pofTem non ta£tâ aut imperitâ virtute & fubftantià diélorum articuîorum
matrimonialium hujusve mei a6lus , quo illi confirmantur , etfi quibuslibet
amplifîimis claufuiis derogatoriis hujus juramenti muniretur. In contra-
rium quoties mihi concederetur talis difpenfatio, femel aut fsepius, toties
tôt alia nova juramenta pradto, ut femper unum fuperfit & integrum ma-
neat fuper & poil diclas difpeniationes : fub eodem Sacramento etiam de-
claro & recipio me non edidiffe aut edituram efTe aîiquam proteiïationem
aut contradictionem publiée aut privatim contra hanc meam promilTionem
& cb-
Pt.
612. MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires & obligationem , ad eam labefa&andam ejusve robur imminuendum , &.fî
gen. de '1(\ facerem etiam jurata, quôd raïhi nuliatenus fuffragari aut quàcunque ra-
L'Ejili° tione prodefle poilit. Promkto denique & recipio , me flatim atque ad
Regem Chriftianilîimum accefiero , edituram juxta di6los articulos unâ
cum Majeilate fuâ alium aflum fimilem munitum omnibus claufulis , jura-
mentis & obligationibus neceffariis , inferendo & ratum habendo hune,
qui fa&us eit in hâc civitate Fonds rapieii, ubi nunc confiftit Rex Domi-
nas meus cum fuâ Aulà & Falacio, fecunda die Menfis junii Anni hujus
1660. prœfente Rege Domino noftro. Qui continuando A£tum recitatum
dicit, quôd Majeftas fua Catholica iuppleat authoritate fuâ Regiâ & velit
pro fuppletis haberi omnes defe&us & omiiîiones facta aut juris, fubilan-
tirc aut qualitatis , ftyli aut confuetudinis, quse admiflae elfe aut dici poflent
in edendo aut formando hoc a£lu renuntiationis feu abdicationis legitima-
rum & futurarum fuccefiîonum faér.22 & pracltitae à Sereniflima Infante def-
ponfa Regina Francise, filia illius Charilïima & Dileétiiîima, quôdque ple-
nâ & abfolutâ poteftate ut Rex in temporalibus fuperiorem non agnofeens,
renuntiationem iftam feu abdicationem confirmet & comprobet , confir-
maverit & approbaverit, cum abrogatione valiturà hâc vice omnium le-
gum , ordinationum, ufuum, & confuetudinum, fi quas contrariée fuerint,
quasve impedire poffent illius effeélum & executionem , mihi in eviden-
tiorem fecuritatem mandans, ut ifthœc Sigillo Regio communirem , tefti-
bus ad id vocatis & requifitis Domno Ludovico Mendefio de Haro, Mar-
chione del Carpio , Comité Duce de Olivares , Domno Ramiro Nuîles de
Guzman Duce Medinae Turrium , Domno Gafpare de Haro Marchione de
Eliche , Domno Joanne Dominico de Guzman Comité de Monterey,
Domno Didaco de Arragon , Duce Terra; nova? , Domno GillefiO Ramo-
ne de Moncada Marchione Aytonae, Domno Petro de Portocarrero Co-
mité Medeliinae, Domno Petro Colon de Portugallia Duce de Veraguas,
Domno Antonio de Peralta Hurtado de Mendoza , Marchione de xMon-
dejar, Domno Alphonfo Perez de Vivero Comité de Fuenfaldagna Con-
filiario Status, Domno Joanne de Caravajal & Sandi Confiliario Camerae,
Domno Didaco de Tejada Epifcopo Pampelunse , pluribusque aliis Do-
minis, Nobilibus, &Equitibus, qui praefentes fuerunt.
EGO REX. MARIA THERESIA.
Ego Domnus Ferdinandus de Fonfeca Ruiz de Contreras Marchio La-
pilli, Eques Ordinis S. Jacobi, fax Majeftatis Catholicx Confiliarius Bel-
li , Indiarum & Camerœ Indicae, Secretarius Status & Expéditions univer-
falis , & Notarius in illius Regnis & Dominiis, qui praefens interfui Juramen-
to, Aétui, & reliquis fupra contenus , ea atteftor fidemque facio , quôd
dicli Articuli 2.. & 4. Paétorum connubialium, prout fupra deferipti repe-
riuntur, fideliter deprompti fini ex Exemplan-auihentico, quôd pênes me
eft,
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
tfi$
e(l, lllique collati. In teftimonium veritatis ego hifce Sigillo meo Arma- Amincs
tis nomen meura fubfcripfi.
D. Ferdinandus de Fonseca Ruiz de Contreras.
GEN. HE
l'Iiuko-
IE.
EXcîufionîs poflerioris verb à Rcgriis £5? Dominiis eorumque ceffionh inflrumcn-
îum , quo ftmul ip/à Maria l'berefia velut ex tabella pro tribunali Je-
dens juraîa judex foknnijjïmam fenîenîiam profert , quaincunque contrariam
ufurpationem feu molitionem pro illicitâ, violentiâ, invafione injufla, at-
que contra rationem naturalem & confcientiam adeoque pellîmè cœptâ
tyrannide habendam , quoe autem ifthanc depellere aggrediatur, vim juf-
tiam,licitam , & permiiTam effe, eique promovendse cunclos Ilifpaniae feu
Hifpanici juris fubditos omnemoperamcommodaredebere , hifce puris ,/impli-
cibuSy & à nullà conditione doits aut aliâ quâcunqae fufpenfis verbis concept um fuit :
Domna Maria Therefia Infans Hifpaniarum, & DEI gratiâ futura Regi-
na Francise , filia primogenita Sereniffimi, Excellentiffimi , ac Potentiiïïmi
Principis, Domni Philippi Quarti, eâdem Divinâ favente clementià Régis
Catholici Hifpaniarum , Domini mei, quem DEUS confervet & feliciflimè
profperet, & Sereniflimse , Excellentiflimae, atque PotentilTimae Principis
Domnas Ifabellae Reginœ Catholicœ , Matris & Dominas meae gloriofre me-
jnoriae, qux in cœlis agit, per expofitionem & publicationem Infîrumenti
hujus, Actusque approbationis , confirmationis , ac ratihabitionis, & quae
ulterius illo continentur , que eorum perpétua memoria vigeat , notum &
manifeftum facio omnibus Regibus , Principibus , Potentatibus , Rébus-
publicis , Communitatibus , & Hominibus privatis , qui funt aut fecuturis
remporibus erunt , cum Serenifîimus, Excellentiflimus, ac Potentiiïîmus
Princeps Ludovicus Decimus quartus, Rex Francise Chriilianifilmus, Con-
fobrinus meus , Ipfiusque nomine & mandato fpeciali Marefchallus Dux
Grammontius , expetiiifet à Rege Catholico Domino meo fponfalia mea &
matrimonium cum diclo Rege Chriftianiflïmo , fuaque Majeitas Catholica
juftè seftimans defiderium iftud & propofitionem , débité etiam attendens
decorem, sequalitatem, & utilitatem publicam huic matrimonto connexam
illud concefliffet eique aflènfa effet, falvâ, quae prsecedere debeat, difpen-
fatione Sanétitatis fuse ob cognationem & confanguinitatem , quae mihi
.cum Rege Chriftianiflîmo meo cognato intercedit, deinceps poft concef-
fionem & affenfionem hanc, auctoritate & juffu fpeciali duarum Majefta-
tum Catholicae & Chriftianiffim.T conclufum & fignatum effe noftrum Tra-
clatum matrimonialem feptimo Novembris Anni praeteriti 16 f 9. in Infula
difla Phafianorum fit a in flumineBidaffoa Provincial Guipufcose in confinio
iilorum Regnorum cum RegnoFranciae, illiusque Traclatûs Articulis f.&6.
praeviâ perpenfione ac maturâ deliberatione, communi confenfu eâdem-
que yoluntate ceu maxime conveniens decretum elfe & flatutum , uc
ego liberique & defcendentes , quos DEUS mihi ex hoc matrimonio
largiturus eïTet, fimus & maneamus inhabiles, incapaces, & omnimodo
abfoïutèque excluQ à jure & fpe fuccedendi in, aliquo Regnorum , Sta-
îome XL LUI Uium
nfumqut
ftatuum
feu pro*
vincia-
rum abf-
queullâ
mentio-
ne dotis
ah'ave
conditio-
ne, exclu-
faque
omni
Pontifî-
ciâvel a-
liâ abfo-
lutione
feu refti-
tutionc.
GEN. DE
l'Euro-
pe
tfi4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires tuum & Dominiorum , quibus nunc conitat Corona hxc & Monarchia
Hifpania? , quseque illis five à fua Majeftate Car.holicâ , five pofl illius
longam & felicem vitam à fuccedeniibus illi Regibus "aggegrabuntur.
- Quamvis verô Paétio illhaec convemionalis inita fuerit inter Principes
& Reges fupremos, qui in temporalibus fuperiorem non agnofcunt , ad
promovendam caufam publicam utriusque Regni juxta defiderium & vo-
ta communia fubjectorum , vafallorum, & indigenarum , qui volunt , ut
eadem vim habeat & vigorem legis & fanélionis pragmaticas , & tan-
quam talis recipiatur & obfervetur , indeque confequens fit , ad illius
firmitatem ullà alià folennitate opus non elle ; placuit nihilominus Ma-
jeilatibus fuis, ut fi approbatio mea aliquâ ratione utilis elTe poffet , il-
!am etiam edere haberem flatim ac contigeret , promiffum matrimonium
celebrari & contrahi per verba praefentia , atque approbatio iilhasc
muniretur omnibus claufulis & folennitatibus necefTariis , prout flipula-
tum & declaratum efl per inilrumentum decem Articulos complexum,
ex cujus exemplari authentico deprompti Articuli $. & 6. tenons funt
fequentis,
Videantur fupra pag. 6o|. & fiquentibus,
Cùmque pofl Traftatum fupra relatum Pater nofter fanâiflimus Aie-
xander VII. difpenfaverit ratione graduum cognationis, quae inter did-
tum Regem ChriftianifFimum & me intercedit, approbaverit etiam auto-
,,/itate fua & Apoilolicà benedictione noflrum Tra<5tatum matrimonialem
iliiufque Articulos , atque cafus tempusque extiterit celebrandi & com-
plendi DEO fortunante Matrimonium ad illius, ut fperare fas efl, glo-
riarn ac honorem, exaltationemque fanclae fidei & tranquillitatem Reipu-
blicac Chriflianae; adeoque etiam Cafus & tempus advenerit implendi an-
te meum Matrimonium, quatenus me concernunt, contenta xirticulis f.
& 6. infertis huic Inftrumento, maxime cum œtatem jam agam majorem
viginti annis , D EUSque pro fuâ benignitate me dotaverit judicio & ca-
pacitate intelligendi & comprehendendi fubflantiarn & •effeéfcum diclo-
rum Articulorum, quorum probe gnawfum, iis nempe fœpe confideratis
perfpe&âque illorum decentià fpatio fex Menfium , qui erfluxerunt ab il-
lorum conventione & publicatione \ fufficiat quin etiam ad illorum jùflifl-
cationem & ut illis à me débité fatisfiat, fcire quod à Rege Domino meo
examinati & conventi fuerkit, qui optât & promovet vota mea, meam-
que utilitatem tanto cum affe&u. & follicitudine, fimul animum intendens
egregio publico & communi Regnorum à DEO ipti commifibrum , quo-
■ rum œquè ac Coronce Francise intereft, ne Amplkudo ac Majeftas, quam
cum tantâ felicitate & Regum fuorum Catholicorum & Chfiltiàniffimorum
gloria in fe confervant poil tôt annorum curricuîum, diminuatur aut con-
cidat, uti neceffario imminuenda foret & coltapfura, fi per Matrimonium
hocce illiufve caufa unirentur & conjungerentiir in aliquo liberorùm &
defçend'enùum , <jui eventus allaturias eflet -fubditis & vafallis mœrorem
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
6i
& affli&ionem , quam quivis conflderare queat & ex quâ metui debent
refultatura damna & incommoda , quae futura faciliûs praevideri quam ena-
ta corrigi poflint, quaeque adeo remediis ne eveniant, praeveniri aequum
fueric, ne matrimonium hoc caufa lit efTectuum adverfantium fpei ex eo-
dem conceprae, prseterquam quod per iitud exemplum illiafque imitatione
expeditiora reddentur conjugia reciproca incer meos Regifque Domini
mei liberos, quod ipfum me praccipuè voluptate afficit & confolatur, ceu
médium & ratio vinculum fanguinis & confanguinitatis faepiùs ftringendi
& renovandi fortiufque folidandi ac firmandi fœdera & amicitiam mu-
tuam , quse tam felicibus aufpiciis nexa & contracta funt intef ambo hrec
Régna atque impolterum ad Divinam gloriam inter illa illorumque Reges
Catholicos & Chriftianiflimos continuabuniur & gloriosè permanebunt :
quod cùm publico bono cedat, etiam ut taie merito praeponderare débet
utilitati meae liberorumque & defcendentium meorum particulari , in prae-
fenti ltatu haud magni aeftimandae utpotè remotifltmae , prout cuivis co~
gnofcere eft. Accedit majori meae fatisfa&ioni renuntiationifque hujus &
a&us ampliori juftificationi, quôd exemplum fequar renuntiationis propter
& ante matrimonium peracïae à Sereniffima, Excellentiffima, & Potentif-
fima Principe Domna Anna Hifpaniarum Infante , hodierna Regina Fran-
ciae Chriftianiffima , Amita & Domina mea amatiflîma & plurimùm colen-
da : Quodque praeter confiderationes & caufas publicas fupra recenfitas
illamque confervandoc & firmandae pacis inter ambas Coronas ( quae etiam
concurrunt & allegantur in diéto Traclatu & Renuntiatione ) pro prae-
fenti rerum conditione locum fimiliter habuerit & confiderata fuerit ve-
lue Princeps maximaque caufa publica renuntiationis conventrc in Trafta-
tu meo matrimoniali, quôd paclio matrimonii mei notoriè effet médium
& caufa pr*ecipua pacis, quà bellum finiretur, quod per viginti quinque
annos non folùm ambas inter Coronas Catholicam & Chriftianifilmam ge-
flum fuerat, fed etiam fœderibus, aliifque modis maximas Chriftiani or-
bis Potentias involverat , procurandique boni univerfalis & quod pro Re-
ligione Catholica faciat & ad illam pertineat, fummi ; quorum immenfo
detrimento bellum ceflerat , nec aliter remedium afferri poterat, quam
per pacem per & ob matrimonium iitud initam, in hoc vero nunquam
condefeenfum aut à Rege Domino confenfum fuiffet abfque renuntiatione
con venta, prout confideratum fuit Articulo i. Pa&ionis connubialis, &
Articulo 33. Pacis inter ambas Coronas initae , quae propter hanc confide-
rationem repetit Tractatum particularem fa&um fuper conditionibus met
matrimonii, qui Traftatus uterque eodem die fubfcriptus & fignatus fuit,
expreffa in di6bo Articulo 33. declaratione , quod conventio matrimonia-
lis licet feparata eandem cum Traclatu Pacis virtutem & vim.habere de-
beat, cum fit praecipua ejus pars fecuritatifque & durationis nobiliffima
arrha. Ideoque proprio motu liberâque & fpontaneâ ac plenâ voluntate,
atque certô feiens & intelligens Actûs quem facio, & quid operetur &
operari queat confenfus meus, approbo, confirmo, & ratum habeo ra*
rione & forma , quâ optimè poiîim & debeo diclam conventionem fe-
LUI z. cun-
Affaires
Of.N. DK
i/Euuo-
PE.
PE.
616 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aftaires cundum modum & tenorem amplius expreflum di&o Artiçulo quinto, &
c en. de q neceffarium vifum fuerit & conveniens, facultatem concedo fufficien-
tem & iilimitatam Régi Domino meo & Régi Chriltianiffimo ut denuô id
decernere & mutuà conventione firmare rurfum queant. Virtute etiam
& in implementum dicli Articuli me declaro & teneo exclu fam & femo-
tam , meofque liberos Ck. defcendentes ex hoc matrimonio inhabiles &
exclufos abiblutè & illimitatè abfque differentiâ aut diitinctione perfona-
rum, graduum, fexûs, &temporis, ab omni fucceflîone jureque & fpe
fuccedendi in Régna, Status, Provinçias, Dominia, & ioca hujus Coro-
nx Hifpanicœ dicto Artiçulo enunciata & declarata , volens & confen-
tiens pro me & diclis meis defcendentibus, ut jam nunc ficuc tune cefîa
& tranflata reputentur in iilum, qui gradu proximus reperietur ( quando-
quidem ego & il li exclu!] , inhabiles , & incapaces fumus ) & immediatus
Régi, per & propter cujus mortem vacabit conilituique & deferri de-
beat fuccefiïo diftorum Regnorum, ut ea» obtineat & polîideat, ceu le-
gitimus & verus poiTeflbr, perinde ac fi ego & defcendentes mei nati
non fuiflêmus aut luce non frueremur, nam pro talibus haberi & cenferi
debemus , adeô ut nec in meâ nec in illorum perfonà confiderari aut at-
tendi polïit reprcefentatio activa aut pafliva, principium aut continuatio
lineae effe&ivae aut contentivae, fubflantiae, fanguinis aut qualitatis, nec
fupputari gradus juxta defeendendi rationem five à Rege Domino meo,
five à gloriofis Regibus illius decefforibus , nec ullâ aliâ ratione fubintrari
in fucceflionis ordinem aut occupari gradus proximitatis & excludi per-
ibna, quae reperietur, uti dictum eft, gradu propinqua. Promitto quo-
que fideque & verbo Regio recipio in omnibus , qure à me meifque libe-
ris & defcendentibus dépendent , femper & omni tempore curatum iri,
ut obfervatio & impletio ditti Articuli & hujus mei Aélùs, quo illum ap-
probo & confirmo , inviolata permaneat , nec permittatur aut afîenfus
prsebeatur, ut illi contraveniatur, directe aut indireétè, in toto aut par-
te, me abdicans & cedens omnibus & fingulis remediis, notis aut inco-
gnitis, ordinariis & extraordinariis, quœ competere pofTent jure commu-
ni aut privilegio fpeciali, mihi aut dictas meis liberis & defcendentibus,
eo fine ut aliquid proferre, dicere aut allegare poiTimus, contra id, quod
fuperiùs conflitutum eit , omnibus iiquidem renuntio , fpeciatim reititu-
tioni in integrum ob ignorantiam feu inconfiderantiam minoris mcas seta-
tis, aut lrcfionem evidentem, enormem vel enormilTimam , qu?e praeten-
di poflet intervenhTe in abdicatione & renuntiatione juris fuccedendi ullo
tempore tôt & tam vaftis Regnis , Statibus , & Dominiis, voloque ut
nullum dictorum remediorum, nec aliud ullum cujufcunque nominis, ca-
racteris, ponderis, & qualitatis nobis proficiat aut prodeffe poffit in judi-
cio aut extra illud, fique ea in judicium deducamus , aut deducere fata-
gamus, ut nobis omnis audientia negetur & prsecludatur : un facto & fub
colore aliquo malè praetenfo, juflitiee diffifi ( quandoquidem femper agnof-
cere & fateri debemus, quôd nulla nobis in fuccelîione dictorum Regno-
rujn fuifragetur ) vi armorum ea occupare velimus bellum gerendo auc
mo-
l'Euro-
pk.
RESOLUTIONS D'ETAT, M.--DCÇ. I. 617
movendo offenfivum, ut illud jam nunc uti tune habeatur, judicetur & Affaire
deelaretur illicitum, injuflum , & malè cceptum, fimulque adeô violentia, G™- DJ-
invafio, & ufurpatio tyrannica , fufeitata contra rationem & confeientiam ,
& in contrarium ut judicetur & nominetur vis juita, licita , & permilla il-
la, quam inferri aut moveri contigerit pe'r illum, qui fuccedere habet,
me meifque liberis & defeendentibus exclufis , quem omnes fubditi & in-
cola; recipere debebunt eique uti Régi illorum ck Domino legitimo obe-
dire atque Sacranientum ci fidelkatem jurare reque ipsà fervire. Ad Ac^
tum hune edendum affirmo & profïteor me non indu£Um aut perfuafam
refpeétu reverentiali , quem debeo & exhibeo-Regi Domino meo-, uti
Principi tam potenti & tanquam patri, qui me tantoperè diligit, quem-
cme viciffim diligo , quique me habet & habuit fub patrid poteitate, quo-
niam rêvera in omnibus, qu» peraguntur & peracla funt.in concludendo
& ad efFeclum deducendo matrimonio hoc , inque ftabiliendo Articulo ex-
clufionis meae meorumque defeendentium , omni libertate gavifa fum,
quam defiderare aut optare poiuerim, dicendi & declarandi meam vo-
luntatem, abfque ullo ab ipfo aut quâcunque aliâ perfonà mihi injecto me-
tu, aut ingeftis minis, ut ad aiiquid faciendum invita permoverer aut co-
gérer. Ad majorem validitatem &fecuritatem dictorum & à me promif-
ibrum, juro folenniter per & fuper fanc~ta Evangelia contenta in Miilali
hoc, quod impofita manu dextra tango, quod illa obfervabo, cuitodiam,
& implebo in omnibus & per omnia, quodque nullam difpenfationem hu-
jus juramenti petam à noltro fancliffimo Pâtre, nec àlanclaSede Apo-
ilolica, aut ab ipfius Legato, ullàve dignitate, quae illam concedendi po-
teflatem haberet , & û mihi concederetur , me ullave univerfitate aut
perfonà particulari petente, aut motu proprio , licèf ad eum finem fo-
lùm, ut judicium adiré polTem illœsâ lubftantiâ diclorum remediorum , &
intégra validitate hujus AéKis & Tra6latûs, quem per hune approbo, il-
lam non recipiam, nec illâ utar, quin contra, quoties talis difpenfatio
juramenti mihi concederetur, aliud nunc facio jnramentum .poil diipenfa-
tionem rurfus valiturum, ita ut femper fit & maneat juramentum(pp£t &
fuper omnes difpenfationes, quœ mihi coricedi valeant aut poterunt. Sub
eodem juramento dico & promuto, me non feciffe aut fa6turam eiïe ul-
lam proteflationem aut contradiclionem palam aut clam , quee impedire
aut imminuere valeat vim contentorum in hoc A6lu, & 0 feçero , etiam
jurata, illam non valituram nec ulium robur habituram aut effeclum for-
tituram efTe. Supplico pariter San6litati fuaç, cùm matrimonium hoc ini-
tum iiliusque traclatus conventus & conclufus fuerit fan&â & Apoilolica
ipfius approbatione accedente, efFeclui etiam mandari & celebrari Sancti-
tate fua benedicente debeat, ut authoritate Apoltolicœ fua? confirmationis
vim quoque feu robur augere dignetur vinculi & religionis hujus mei Sa-
cramenti. Promitto porro & memet obligo fecundum tenorem & in
implementum 'fupradicli Articula 6. itatim atque pervenero in lucum,
ubi Rex Chriihaniiïimus me recepturus elt, fa&uram me & fieri cura-
turam au&ore ac niterventore Rege Chriftianiirimo & unâ cum illo
Lill 3 aliud
PE.
£ià MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Ajtajrks aliud Fimile inftrumentum omnibus claufulis , juramentis , & condition!-
grn. pe bus neceflariis feu utilibus munitum , quo confirmetur & ratum habea-
x/Euao- tur jftud ipfum quod faétum & expeditum efl in urbe hac Fonds Ra-
pidi , ubi, nunc agit Rex Catholicus Dominus meus cum illius aula &
palatio fecunda die Menfis" junii Anno fupra Milleflmum Sexcentefi-
mum Sexagefimo, prsefente Rege Domino noltro.
Ad majorem' folennitatem , auéloritatem , & validitatem Aclûs hujus Ma-
jeftas fua Càtholiea in implementum Ardculorum f. & 6. fupra infertorum
dixit, quôd quatenus concernant caufam publicam & commune bonum
faorum Regnorum, fubditorum , & vafallorum confirmet & confirmaverit
actuna hune , juxta continentiam & formam , qua fecit & expediri juflit
Sereniffima Infans Domna Maria Therefia Regina defponfa & futura Fran-
cise j chariffima illius & amatiffima filia : quôdque proprio motu , certa
feientia, pleria & abfoluta poteftate ceu Rex & Dominus, qui in tempo-
ralibus fuperiorem non habet , fuppleat authoritate fua Regia & velit pro
fuppletis haberi omnes defe&us feu omifllones facti aut juris, fubflantia; aut
qualitatis; flyli aut confuetudinis , quse in hoc adtu contingere potuerint:
quôd inprimis & fpeciatim confirmet & approbet dictum Articulum f . Re-
giarumque fuarum Majeftatum Catholicae & Chriftianiihmac contentam illo
conventionem , quôdque velit & jubeat, ut robur & vigorem hàbeat le-
gis & fanclionis pragmaticae, & ut talis recipiatur , euftodiatur, obferve-
tur, & execudoni mandetur in omnibus fuis Regnis, Statibus, & Dominiis,
non attentis legibus, ordinationibus, ufibus, & confuetudinibus quae fue-
rint aut elfe poilint contraria? , quibus deroget & hâc vice pro abrogads
haberi velit, quamvis ejufmodi iint & talis qualkatis, ut ad illarum dero-
gatitlnem exprefla magis '& fpecialior mentio requireretur aut neceffaria
effet : jufîît denique Sigillo fuo Regio ha;c muniri inque Confilio fuo Ca-
merae aliifque' juxta morem confuetum regeri atque publicarf. Horum
omnium telles fuerunt ad id vocati & requifiti Domnus Ludovicus Men-
dez de Haro Cornes Dux de Olivarez, Domnus Ramirus Nunnes de Guz-
man j ,Dux Medinœ Turrium, Domnus Cafparus de Haro, Marchio de
Eliehe, Domnus Joannes Dominicus de Guzman , Cornes Montis Regii,
Domnus Didacus ab Arragoniâ, Dux Terne novae, Domnus Gilles Ramon
de Moncada, Marchio Aytonae , Domnus Petrus Porto-Carero , Cornes
Medellinse , Domnus Petrus Colon de Portugallia , Dux de Veraguas,
Domnus Antonius de Peralta, Hurtado de Mendoza , Marchio de Mon-
dejar, Domnus Aiphonfus Perezius de Vivero , Cornes de Fuenfaldagna,
Confiliarius ftatus ; Domnus Joannes de Caravajal & Sandi, Confiliarius
Camene, Domnus DidâCus de Tejada Epifcopus Pampelunae , plurefque
alii proceres, Equités, Nobiles & Domeftici fuae Majeftatis , qui praefen-
tes fuerunt.
■
EGO REX. MARIA THERESIA.
Ego
RESOLUTIONS D'ETAT, M.PCC. I. 6x?
Ego Domnus Ferdinandus Fonfeca Ruiz de Contreras , Marchio La-
pi!]^, Eques Ordinis fan&i Jacobi, Confiliarius Bellicus Indiarum & Ca-
méras Indicœ, Secretarius Status atqueExpeditionis univerfalis, &Notarius
in illius Regnis & Dominiis , qui prœfens interfui juramento , aclui , &
reliquis fupra recitatis, de illis fidem facio , teftorque quôd dicti Articuli
fupra inferti defcripti fint fideliter & collati cum lnflrumento authentico ,
quod pênes me eft. In teflimonium veritatis hifce manu meâ fubfcriptis
ilgillum meum appofui.
D. Ferdinandus de Fonseca Ruis de Contreras.
ADditum fuit uîterius vinculum per Pacem Pyrenaani) citjus Articulo 33.
tejïc , non folum pnecipua & nobilijffima pars.faiïa , fed-.et'.am. fvalidif-
fimum duratïonis fundamenîum habita fuit- tôt. a , quanta eft , Conventio ma-
trimonialis ejufque objervatio , non aliter ac fi nulla omijfa vocuia in ipfi's pa-
cis tabulis exprejfa fuiffet. Ut adeb cuntla , quœ ad firmandam pacem ab
•utroque Rege & in utriusque regnis adhihi.ta fucrunt. adminicula feu fulcra
conventioni quoque matrimoniale novum impertiijfe robur çamqye vel maxime
fuftentaffe & fuffulfijfe cenferi debeant: ipfa etiam abdicatio ,cejj:.o y& tranftatio
juris cujufcunque paUis connubialibus & formulis renuntiationu/d contesta per
pacem hanc facla feu- repetit a intelligatur , ifë? per confequéns hic pariter locum
■habeant, qua fuperius de vi pacis ex nâturali & genlium pire attulimt<$. To-
■tum proinde jîrticulum unâ cum Claufulâ finali hue trcimfh ibère haud gr-%-
■vje erit:
Àrtic. 33,
Ouo Pax ift.a, fraterhitas , & bona amicida juxta voturri firmior, dum-
bilior, & indiffolubilior maneat , conventum & ftabilitum fuit nomi^
ne di6torum Dominorum Regum, ut fua Majeftas Chriftianiffima uxorem
ducat Infantem Domnam Mariam Therefam filiam majorem fune Majeftatis
CatholicîE , in quem finem diéti iMiniftri Cornes Dux de Olivarez & Car-
dinalis DuxMazarinus, vï mandati fpecialis , quo muniti funt, inierunt ëc-
'dem die, qui & huictraclatui fubnotatus eft, aliumtra&atum partieula-
Tem fuper conditionibus dicli matrimonii & tempore eelebrationis , prour
illic expreffum eft, qui quidem tra&atus etfi. feparatus à prœfenù traclau
pacis fit", ëjufdem nihiîominùs-cum hocroboris & vigoris eft tanquam
ejufdem .pars principalior illiufque feeuritatis & duratïonis pretiofuTims
■ârrha;
Ctafula finalis ex Inftrumento -Gallîco petila.
. ■
t in certiorem fecuritatem Traclatûs hujus Pacis , omniuraque m ec
contentorum-Capkum & Articiklorum , publicabitur, acceptabitur , &
rege
GEN. DE
l'Eu ko-
PE.
VIT. Pacc
Pyrcnsa,
E
■
AfEAtRFS
CEN. DE
l'Euro-
pe.
viii.
Non unâ
Ordinum
Hifpani-
corum
appro-
batione.
IX. Re-
jrisque
Chriftia-
jatiTimi
^confenfu.
6io MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
regeretur idem, in Curiâ Senatûs Parifienfis aliifque Regni Franciae , ficut
fimiiiter publicabitur , acceptabitur, &. regeretur ta m in Confilio majori
aliifque Coniiliis , & Camerà Rationum diéti Domini Régis Cathoiici Bel-
gicis, quàm in aliis Confiliis Coronarum Calleliae & Aragoniae eâ prorfus
forma quse in Traétatu Vervinenfl Anni 15*98. continetur, ejufque rei do-
cumenta mutuô tradentur intra très Menfes à publicatione hujus Tra&atûs
numerandos.
Quac Capita & Articuli fupra expofiti unâ cum omnibus iis quœ fingulis
continentur, traclati , convenu, admilîi, & itipulati fuerunt inter fupra-
diftos Plenipotentiarios diclorum Dominorum Regum Chriftianiflimorum
& Catholicorum nomine Majeftatum fuarum : qui PJenipotentiarii virtute
mandatorum, quorum apographa huicTraétatui fubneclentur, promiferunt
& promktunt , fub obligatione omnium & finguiorum bonorum & fta-
tuum , prsefentium & futurorum , Regum Dominorum fuorum , eos à
Majeftatibus fuis inviolabilker obfervatum & impletum, pureque & fim-
pliciter abf^ue ullà adjeétione auc immutatione ratihabitum literafque rati-
liabkionis authenticas & flgnatas,quibus hic Traclatus verbotenus infertus
fit, intra 30. dies à fubfcriptione hujus Traétatûs computandas mutuô exhi-
bitum iri. Pra^cerea' promiferunt & promktunt difti Plenipotentiârii nomi-
nibus expreflls Regem Chriftianiiîimum poft commutatas ratihabitionum
formulas, quàm citiffimè id fieri potuerit, prsefente aut prœfentibus per-
fonâ vel perfonis à DominoRege Catholico deputandis juraturum ta6lis Cruce,
fanftisque Evangeliis, Canone MilTae, & fub honore fuo, quôd obfervatu-
rus & impleturus fit plenè, reapfe, & bonâ fide, omnia contenta articu-
îis hujus tra&atûs. Idem quoque fiet quamprimùm id fieri poterit à Do-
mino Rege Catholico, prœfente vel prœfentibus perfonâ vel perfonis, quas
diftus Dominus Rex Chriftianiffimus deputare voluerit. In quarum rerum
-teftimonium di£bi Plenipotentiârii huic Tra&atui nominafua fubfcripferunt,
figillaque fua apponi fecerunt in Infula à Phafianis appellata 7. Novem-
bris 165p.
Cardinalis Mazarini. D. Ludoviçus Mendez de Haro.
1
SUfficere* quidem poterat ad firmandam etiam Ordinum Hifpanicorum ajfenfu
Mari<sTberef;œ Renuntiationem * qubd Pax Pvrenœa^ac Conventio matrimo-
niales tôt magnat ihts alihque - prafentibus confeclte publiceque denuntiatœ ^f in
Atla Confihorum relatœ fucrini : adhibitanihilominus in Comitiis Regni Anno
•I 662,, (s deinceps habitis -ad id ampliùs\& évident tus prœflandum ea quoque fpc-
cialior £5? expr.cjjïor folennitas tft , quam fupra recit-ayimus, cum de Rcnunciatio-
ne Anna agcremus , quamque adeb evitandœ nimiœ prolixitatii ergb 'hue rurfum
ingerere fuperfedemus , digitum illuc intendijf/e contenu.
Tempus cjl , ut de ipfiusmet Régis ChriJlianiJJimi Confenjione £5? de Ratihabi-
tione agamus, qu'as non dtfuijfe jam. imuimus , tametfi ad [oïid'amdos immunis
adhuc ab ejus nexu Infantis Therefiœ Aclus plane necejjariœ non fuerint. Po-
tuit namque ante connubium init'um ca fola commum naturœ i£! gentium jure
ad id fe adjiringeye idque libère agere , quod fuc cèdent e connubio in Domus
paier»
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 621
patenta commodum patriœque fecuritatem &? decus cejfurum ejfe , atque alias Awaikm
ante fe filias Hifpanicas familïœ Gallica inneclendas , probantibus & laudan- °,^"
tibus utriusque regni Dicafieriis & populo univerfo , exteris etiam principibus PK>
congratuïantibus feciffe , olim quoque â major ibus fuis defideratum fuijje &
alibi pajjim frequentari cognôrat. Régis Chriflianiffimi ajfenfum itaque quod
attinety mirari fatis non pojfumus incogitantiam vel venus impudentiam Scri-
ptorum G allie or um , qui prodere fuflinuerunt , absque mandata adjlipulatum
Cardinalem Mazarinum Renuntiationi atque Exclufioni ejfe : Neque enim ad
res tanti momenti , qu£ mandatnm fpeciale requirant , générale , quod habue-
rat mandatant , utut facultate illïmitatâ £s? fuppletoriâ claufulâ , fi quid mi-
nus exprejfum effet , aliisque inftruèlijfimum fuffeciffe. Ipfa enimverb Conven-
tio matrimonial] s 0 fendit , qui c quid eâ continent ur vi mandat or um utriusque
legati aclum efe , £5? Rex Chrilîianijfjimus eandem Conventionem , adeoque
etiam ipfjfîrna, quœ id ajunt , verba Ratihabitioni [uœ folenni inferuit. De Specîaîî
particulari nunc loquimur Ratihabitione Paclorum connubialium, cujus initium œque»
£5? finis efi hujusmodi:
Ludovicus DEI Gratiâ Rex Francise & Navarrse omnibus pne-
fentes h as literas vifuris falutem.
Cum concîufa, perfecla, & fignata fuerit Conventio matrimonialis inter
Nos & SereniiTimam Hifpaniae Infantem , Domnam Mariam There-
fam, filiam primogenitam Charifïimi & amatiffimi Fratris & Avunculi nofc
tri Régis Hifpaniarum , Domni Philippi Quarti , per Charifîimum & di-
]e£r.iflimum Cognatum noferum Cardinalem Mazarini noftrâ vice : & Do-
minum Domnum Ludovicum Mendezium de Haro verbis di£H Régis Hifc
paniae, 7. die Novembris in Infulâ à Phafianis vocabulum fortita fitaque
in flumine Bidaflba in confiniis utriusque Regni Francise & Hifpaniae, vir-
tute mandatofum & commhTionum ipfis injun&arum : inque ejus traclatûs
ultimo articulo Cognatus nofter Cardinalis Mazarini noftro nomine promi-
ferit & receperit exhibitum iri noftras Ratihabitionum literas , forma & ra-
tione folità inr.ra 30. dies cum derogatione quarumeunque legum , confue-
tudinum, & difpofitionum contrariarum. dïfto tra6latui , qui tenons efc
fequentis :
In nomine San&iffimse Trinitatis &c. &c.
Vide fuprà §. Concors plané &c. pag. 602. Poft infertum totum TracJa-
tum matrimonialem , deferiptaque Mandata Regum Chriftianijfimi & Catholici ,
pergit Ludovicus XIV",
Nos confilio Reginae honoratiffimas Domina? & Matris noftrse , noftri
Chariffimi & amatiflimi Fratris unici Ducis Andegavenfis , plurimorumque
Principum, Ducum, Parium^ Officialium Coronse noftrae, aliorum etiam
Magnatum,& notabilium perfonarum fenatûs noftri, poft auditam recitatio-
nem omnium verborum hujus tra&atûs , illum in omnibus & fingulis punc-
ïme XL Mm mm ti*
6ii MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires tis & articulis gratum & ratum habuimus atque approbavimus , gratum &
?£iiro* ra^ura habemus ac approbamus , per praefentes manu nollrâ fubfcnptas , pro-
PE#K mittentes bonâ fide & verbo R-gio, nos illum impleturos, cuitodïrique,
& inviolabilker fervari curaturos elfe, absque ul!â eujuscmique ^eneris in-
fra&ione aut contraventione, dire&â aut indire&à , afcrogatis eum in H-
nem, uti abrogamus , omnibus. legibus, confuetudinibus & difpofitionibus
contrariis. Nam ita placer. In quorum teitimonium iigillum noitrum prae-
fencibus apponi fecimus , qua? daté funt Tholofae vigeiimâ quar.â die No-
vembris Anno gratiae Millefimo fexcenteflmo quinquagetimo nono,Regni-
que noitri Decimo feptimo.
LUDOVICUS.
Et inferius per Regem.
De Lomenie.
ITa quoque ratihabita fuit Conventio hœc matrimonialis in omnibus Punclis Ç<?
Capitulis à Rege Catholico pro fe fuisque juccejjoribus , regnis , ac fiutibui^
Jablatis Jeu abolit is omnibus legibus confuetudinibusque feu rébus contrariis,
Madriti 10. Decembris 1659.
AcRatî- À L*à adhuc vice aliâque ratione non fuperficiariâ Paèla ijia ratihabita à Re-
kabitione Jl\. ge Chriftianifjimo fuiffe quivis haud difficulter colliget , cum paulb ante-
Pacis Py- dixerimus , illa in Pacis Pjrenaœ tabulas relata infgniorem ejusdem partent
conflit uiffè , atque proin non posfe non ratihabita eodem plane modo ejje quo ip/'a
pax ratihabita fuit. Faclum autem id eji ténor e fequenti.
Ludovicus DEI gratiâ Rex Francis & Navarras omnibus praefentes lite-
ras vifuris falutem. Cùm virtute Mandatorum à nobis & Sereniflimo , Ex-
cellentiflimo, atque Potentiflimo Rege Catholico Hifpaniarum nollro cha-
riffimo & amatiffimo , bono Fratre & Avunculo , noftro -chariflimo^ &
amatiffimo cognato Cardinali Mazarini & Domino Domno Ludovic©
Mendez de Haro & Gufman datorum , iidem in Infulâ àPhafianisdicl:a& in
amne Bidaflba in confiniis utriusque Regni juxta montes Pyrenaeos fita
feptimâ die praefentis Menfis Novembris concluferint , definierint , & fignâ-
rint tra&atum pacis & réconciliations tenore fequenti: (fequitur Pax Py-
rensea) Nos gratum habentes Tractatum fupradictum in omnibus & finguli»
capitibus & articulis eo contentis, eosdem tam pro nobis quàm pro noftris
haeredibus , fucceflbribus, Regnis, provinciis, terris, dominiis, &fubdi-
tis acceptavimus , approbavimus , ratos habuimus , & confirmamus , ac-
ceptants , ratos habemus , & confirmamus , promittentes fide verboque
Regio & iiib obligatione atque hypotheca omnium & fingulorum noftro-
rum bonorum, praefentium, & futurorum, nos omnia cuftodituros , obfer-
vaturos & completuros efle, absque ullâ infra&ione aut contraventione di-
recta aut indirectâ, cujufcunque generis aut conditionis ea efle poflit. In
cujus rei teflimonium praefentibus nomen noflrum apponi fecimus. Da-
tum Tholof» 24. Novembris Anno gratis: i6$p, Regnique noftri decimo
feptimo» His
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I,
62$
HIs ante matrimonii confummationem perfeclis accejjït reiigio jurisjuranâi pa-
ci s tabulis utrique Régi injuncli & à Rege Chriftianifjimo non minus ac
Rege Cathuiico prtfiiti , eâ folennitate , quâ inter Reges feu Chriflianos ho-
fnines denique aut excogitari major non pote fi , quam tamen , cum & in fimilibus
olim cajibus objervari confusverit & jamdudum innotuerit, hic particulatim re-
ferre fupervacaneum fuerit,
COnventum équidem per articules Paclorum connubialium fuperius récitât os in-
fuper fuerat , ut ijia etiam tempore celebrandarum nuptiarum ciim à Rege
Chrifiianifjimo tum ab Infante Maria l'herejia fpeciatim denuà rata haberentur
juramentoque confirmarentur £5? atlis Sénat as Parifienfis infererentur. Nec dif-
fitemur , uitrb potius cum Rege Philippo Quarto jam pœne moribundo aï que in
4eterna defixo incufamus , & ad Jequentium élucidai ionem legentium vel audien-
tium mémorise commendamus , nihil horum , quœ bis terve promiferant , vel à
Rege Chrifiianijfimo vel illius conjuge prafiitum ej/e. Id vero fimul affirmamus,
non idcirco quicquam vigori paclionis, renuntiationis, exclufonis décéder e , non
tantum quia propriâ negligentiâ aut perfidie nemo ab obligatione exfolvitur , fed
etiam quia in prima à Rege Chrifiianiffimo ratihabitâ cmventione exprejfè pro-
vifumfuit, ne talis omifiio , fi contigijfet, detrimenti quid paclis ajferret, fed
illâ nm obftante omnia perinde valerenî , ac fubfifierent , & ad ifium finem per
ipfam publicationem pacis prœfiita reputari debeant. Jfia vero qub altius in
animos omnium défendant , non abs re erït ipfamet Régis Philippi verba
re ferre , qua non feminecis lingua , fed inter C alite s jam agens omnisque fimu-
îationis & ficlioms expers mens profudit hoc ténor e :
Per aliam claufulam dictas Capitulations obtuli pro dote di&ae Infanti
meae filiae quingenta millia coronatorum folis, inclufis feu comprehenfis !e-
gitimis, paternâ & materna, & aliis quibuscunque juribus , idque factura
eft fub paéto & conditione approbandi & ratam habendi unâ cum Rege
Chriftianiffimo ftatim atque illius nuptiae celebrarentur , di&am renuncia-
tionem cum jurejurando ac claufulis neceffariis, & ut acceptaretur à Par-
lamento Pavifienfi forma & vigore folitis , documentaque mihi aut meo
fucceffori transmitterentur ; id vero hactenus à Rege ChriftiannTimo &
dicta Infante meâ filiâ impletum non eft , quare liber fui & fum ab obli-
gatione folvendas dotis , quam obtuli. Quia tamen fpero Regem Chrif-
tianiflimum & fîliam id prœftituros efle, prout juititiâ & confcientiâ dic-
tante tenentur, cùm certum fit, me nunquam , nifî fub conditionibus re-
latis in dictum matrimonium confenfurum fuiffe; Mando &Volo,quan-
tumvis Rex Chriftianisfimus & mea fiiia non fatisfecerint fuis partibus , ut
dosfolvatur, quampromifi, firmis & validis manentibus , prout manere
debent, omnibus & fingulis conditionibus in Capitulatione expresfis, quo-
niam ica expedit propter majorem exaltatjonem religionis noflrse Catholi-
cse, pacemque ac tranquillitatem inter utramque coronam.
Affaire»
GENT. OK
l'Euro-
pe.
Ejusque
juratâ
confîr-
matione.
Quae ad
validfta-
templus
fatis fuffi-
ciunt,
omifla li-
cèt à Gal-
liâ fuerit
débita
poftma*
trimo-
niumce-
lebratun»
iteratio.
Mmmm z
Con-
6i4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Afjaikes f^Ontuiti adduclorum hatlenus ad probandam omnis Gallici fanguinis Exclufto
GEN. DE ^^y
l'Euro
mm ab univerfa Hifpanicâ fucccffiom documentorum molem , quœ fub ma-
nu nobis non animadvcrtentibus jam pêne in immenfum cxcrevit , à pluribus t
■ ponendis deinceps libenter abfienturi effemus , nifi ea (uperefjhit , qua & quod-
Ablatum dam velut fummarium complecluntur pracedentium fiaiutorum , illaque irrefra-
feis Infan- gabiliter inter prêt antur , & difcrtis verbis immutabile duftriaca Domûs jus in
tibusea- clarifjimâ \ luce conflit uunt. Primum depromptum eft ex Convention Dotait 1m-
fbboli peratorem Ferdinandum Secundum inter 13 Regem Philippum ctertiu?n pro Fer-
Gallicaî dinando l'ertio Hungari<? tum adhuc ^f Bohemiœ Rege & Infante Maria ,
fucceden- felicif]ïmis Leopoldi Imper atoris parentibus slnno 161%. inita 0 fie habet :
di jus ac-
roribus " Et quia Serenisfima Regina Francise Domna Anna Hifpaniarum Infans
totique virtute paclorum dotalium renuntiationifque factae cum confenfu & per-
adeo Au- miffione Sereniffimi & Chriflianiiïimi Principis Ludovici XIII. Francise
ftriacîe Régis ipfms marki ita exclufa ell & manet ab omni jure fucceiîionis , ut
indTo1- omnes illius liberi ex illà nafeituri tam mares quàm fœminse omnefque def-
riunda;. cendentes , tam primo quàm fecundo , tertio, & quarto geniti , atque
juxta ta- adeô in infinitum cujufcunque gradûs fuerint perpetuis temporibus futuris,
buiasma- fub quolibet titulo aut caufà non pofîint nec debeant fuccedere in ullo
Ferdin. regno , ftatu , provincia , dominio , vel loco Sereniiïimi Régis Catholici
in. & in- ipfiufque hscredum & fuccefîbrum legitimorum tam intra régna Hifpanias
fantis quàm extra illam in reliquis provinciis & omnibus regnis, five prasfentibus,
Manx, five iis, quee venturis temporibus îpfe Sereniffimus Rex Catholicus ipfiuf-
natqeftUS 9ue fucceffores tenuerint, pofTederint, quaeque ad eos pertinuerint ; ideô
Leôpol- . dicta Sereniffima Infans Domna Maria fibi refervat jus fuum competens
duslm- una & junclim cum jure, quod ipfi accrevit per commemoratam renun-
perator. ciationem factam ab ipfius forore Regina Franciae , approbante iftud , il-
îudque confirmante per pactum expreflum (quod robur (& vigorem le-
gis întemeratae & inviolabilis & ftabilis obtinere débet) ipfo Sereniffi-
rao Rege Catholico pro fe & omnibus fuis hsereditariâ fucceffione &
hœreditate , duobus exiftentibus cafibus exceptis per allegata pacla do-
tilia matrimonii celebrati inter di£tos Sereniffimos Regem & Reginam
Francise j uno nimirum , fi diem Sereniffima Regina Francise Régi Chriltianif-
firao marito fuo fupervixerit eamque viduam nu!lâ fuperflite proie inliifpa-
niam reverti contigerit 5 altero vero fi ad augmentum & confervationem boni
publici & ob a'ias judas caufas & confiderationes voluntate & confenfu Sere-
niffimi Régis Catholici ipfius fratris illiufque fucceflbrumfecundà vice nupferit.
Qu2ê omnes & fmguîce res tractatse & conduise fuerunt inter fupe-
rius di6los Sereniffimos & Potentiffimos Principes & Dominos , Domi-
num Ferdinandum IL Romanorum Imperatorem & Dominum Domnum
Philippum IV. Catholicum Hifpaniarum Regem tam fuo nomine , quàm
kico & verbis diftorum Sereniffimi Ferdinandi IIL Hungarisc & Bohemiae
Régis & Sereniffimae Domnse M-ariae Infantis Hifpaniac, illorum refpeclivè
fîlii & fororis, vi ampliffimarum facultatum fupra relatarum , additâ reci-
proeâ promiffione interveniente folenni flipulatione per verbum Carfareum
& Re-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 61$
&Regium, fe firmum habere quicquid fupradiftis articulis continetur, eof- Affaires
que pariter à Sereniflimis Rege Ferdinando &c. & Infante Domna Maria G^N- DB
ratos & firmos habitum faclumque iri ut plénum & integrum effe6lum ob- x-EuR0"
tineant & confequantur. In quorum omnium teftimonium firmarunt prse- '
fentes hafce tabulas propriarum manuum fubfcriptione easque figillis fuis
obfignari fecerunt, dum ipfi praefentes adeiTent Domini Ramirus Philippus
de Guzm'an, Domûs Guzmaniœ Dominus , Dux Medinse Turrium , Mar-
chio Toralii, Marchio Monàfterii &c. &c. Supremus Pincerna Régis Hif-
paniarum Catholici , Magnus Cancellarius Indiarum, Capitaneus centum
nobilium proteétorum domefticorum, Régis &. Coronae Arragoniœ The-
faurarius generalis : Domnus Auguftinus Meffias Confiliarius Status fuoc
Majeftatis Catholicx &c. &c. Sereniiïimi Régis Catholici nobilis Cubicu-
larius , Confiliarius Status & fupremi Arragoniœ Confilii Prsefes &c. &c.
Domnus Philippus de Guzman Marchio de Leganez , nobilis Camerarius
fiia; Majeftatis , Confiliarius Status, levions Equitatûs Belgici & rei tormen-
taria3 Hiîpanicae Capitaneus generalis, & Melchior de Molina, Confilia-
rius Camerae & Status Regni Caftellae &c. &c. Madriti urbe Regia in Re-
gio palatio hàc die Dominicâ 3. Septerrtbris Anno nati Salvatoris noftri
Jefu-Chriiti Millefimo fexcentelimo & vigefimo o6lavo.
ALterum ex bis document um ad rem noflram pertinent efi omninh confen- Tcfta-
tanea pars Tefiamenti 30. Martii 162.1. à Philippo Tertio conditi , eo- m«n*aciuc
que magis notanda , quia difertiffïmè exprimit , qubd poji renuntiationem feu xcrtii^1
abdicationem Anna ChriflianiJJlmo Régi nuptœ , quœ per nativitatem major
fuerat , foror ilîius Maria junéla Ferdinando Tertio vel fola fuperfuijje vel
major natu facla cenferi debeat , bis ipfis ex Hïfpanico idiomate redditis
verbis.
Et quoniam DEO placuit duabus filiabus me augere , quarum natu
majorem Infantem Domnam Annam ob juftas confiderationes boni pu-
blici horum Regnorum & Chriftianitatis in matrimonium tradidi Régi
Franciae Chriftianisfimo fub pa<5lis & conditionibus. Uti in prainfertis Ar-
ticulis fuprà pag. 55>S. 6? feqq. vidcre licet. Prseterea ad inftantiam ho-
rum meorum Regnorum lex condita fuit juxta fupradiéla infertis iifdem
capitulis depromptis ex fcripturâ confecrâ fuper conditionibus matrimonii,
eaque quam perfecit dicla Serenisfima Infans Burgis 16. O&obris Anni
161 f. Ideô conflrmans, confentiens, & approbans iupra recenfita relatam-
que legem , jubeo & declaro fervari debere in omnibus &. per omnia dic-
tas conditiones Paélorum connubialium fcripturamque approbationis Burgis
confectam, uti & pra:fatam legem : ita enim convenit bono horum Re-
gnorum & Chriftiani Orbis, & propter alias multas rationes ultra expref-
fas in Inftrumentis matrimonialibus, quas tanquam notorias aliis etiam juf-
tis caufis motus non refero. flinc confequens eft , ut iiatu praefente RE-
MANSERîT CEU FILIA MAJOR ET UNICA in cafibus enunciatis
in diclis Capitulationibus matrimonialibus INFANS DOMNA MARIA ,
M m m m 5 quam
616 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
IfîAïKFs quam cum omni progenie légitima & non legitimata pofl extinétas per-
«en. de fonas & defcendentes dictorum Principis Domni Caroli & Domni Ferdi-
nandi eorumque defcendentium fuccedere debere in iftis Regnis &
Dominiis declaro & jubeo.
PE.
Et Phi- Tertium, quod injîar omnium haberi poteft, & vel folum ad idt quod in-
lippî m tendimus , fufficere débet , éft 'Tefiamemum Régis Philippi Quarti , non tan-
Quarti. fum 0y conciitoris kgibus £5? pacJis nixam authoritatem £5? potejîatem , fed
etiam quia majore forte ac diuturniore , adeoque &? perpenjiore dehberatione ,
quàm aliud ullum unquàm confeclum fuit , Regisque Legijlatoris , Patris , £5?
Teflatoris penitijjîmam mentem ac enixijjïmam voluntatem quàm diluctdisfimè
txplicat in hune Jenfum :
Si tamen , quod DEUS avertat, fato fungatur princeps filius meui
ante aut poftquàm in Regnis iflis fucceflerit , non relictis liberis aut aliis
defeendentibus legitimis maribus aut fœminis \ infeituo haeredem meurn uni-
verfalem in omnibus meis regnis, ftatibus, & Dominiis filium fecundum
marem, quem DEUS mihi concefTerit ex hoc vel alio matrimonio , ip-
fiusque defcendentes legitimos & ex legitimo matrimonio natos & pro-
creatos mares & fœminas eodem ordine primogeniturse : ipfoque & ipfis
deficientibus voco tertium filium marem ex hoc vel quoeunque alio ma-
trimonio , illiusque filios & defcendentes , mares & fœminas legitimos
& ex legitimo matrimonio genitos , ut fuccedant eodem ordine & ferie
primogeniturae. Et illud ipfum intelligatur in reliquis filiis maribus le-
gitimis & legitimo matrimonio prognatis , quos DEUS mihi largitus
fuerit, & in pofthumo fi Reginam gravidam reliquero & natus fuerit
mafculus, ut fuccedat fuo loco & gradu, ut dictum eft.
Si , ut dictum eft , princeps decefîerit , quod Deus prohibeat , non re-
liais liberis aut defeendentibus maribus aut fœminis legitimis & ex legi-
timo matrimonio genitis , aut fi Deus pluribus me filiis maribus ex hoc
vel alio matrimonio auxerit, illique mortui fuerint liberis aut defeendentibus
nonrelictis, prout diclum eft, in defeélu ipforum haeredem univerfalem
omnium diclorum meorum Regnorum , ftatuum , & Dominiorum inftituo
Infantem Domnam Margaritam filiam meam & Reginae Domnse Mari-An-
nas conjugis mese charifîim^e & amatiflimœ , illiusque filios & filias ac
defcendentes mares & fœminas, legitimos & ex legitimo matrimonio pro-
gnatos, quos Deus illi dederit: illaque & illis deficientibus voco tertiam
filiam ex eâque ortos f eodem etiam ordine voco reliquas filias légitimas
& ex legitimo matrimonio progenitas , quas mihi Deus donaverit , &
pofthumas ex hoc vel alio matrimonio, quod contraxero, & earum fingu-
larum defcendentes legitimos, qui fuccedere habent eodem ordine primo-
geniturae prseferendo majorem minori & marem fœminas ejufdem linesc
& gradûs.
Défi-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. «27
Befieientibus verô dictis meis liberis 5 maribus <Sc fbeminis, a»aihis
quos voco 5 ex hoc vel alio matrimonio, quod contraxero, de- G™* DK
claro, quod (ticceflib omnium dictorum meorum Regnorum, Do- pe?°
miniorum, Si >tatuum pertinere debeat & pertineat adliberos «Si " "-
defcendentès iegitimos, mares & fœminas , Infantis Imperatricis
Mariée mese cliariûimae & amatae Sororis jam defun&ce, eâ ratio-
ne iicut in inftitutione meorum filiorum & filiarum declaro.
Et in defe&u illorum & illarum fuaeque lineae aequè declaro, fucceflîo-
nem diétorum meorum Reçnorum , ftatuum , & Dominiorum pertinere ad
lineam Infantis Domnae Catharinae Amitae meae Sabaudiae DucifTae illius-
que liberos & defcendentcs Iegitimos & ex legitimo matrimonio natos
mares & fœminas , praelatâ lineà primogeniti reliquis , eâ forma quae
di£ta eft.
Omnibus temporibus & retatibus prœteritis valde fingularis adfoibita fuit
circumfpeÊtio in Matrimoniis Infantum Hifpaniae cum Regibus Francise,
ob incommoda, quae ex conjunétione & unione iftarum duarum Corona-
rum orirentur, n.iin cùm ambae & earum (ingulae per fe tam magnae fint,
ut confervarint magnitudinem fuam tantâ cum gloriâ Regum fuorum Ca-
tholicorum & Chriitianiflimorum , iliis junclâs minueretur & labafceree
ipfarum exaltatio aliaeque graviiïimae inconvenientiae redundarent ad ea-
rum fubditos & vafa'los & ad bonum publicum ftatumque amborum Re-
gnorum & totius Chriilianitatis. Et ad hsec praecavenda & faciliora red-
denda matrimonia inter ambas Coronas in utilitatem Vafallorum urrius-
que & Itatus univerfalis prohibita fuit illarum conjunclio inito pacl:o con-
vento, quod vim habeat legis ftabilis in favorem regnorum & caufx pu-
blics illorum , & praefertim in capitulatione matrimoniali confecta in hac
Regia 22. die Auguili Anno Millefimo & duodecimo inter Regcm Do-
minum meum & Patrem meum atque Regem Chriftianiiîrmum Francix
Ludovicum XIII. propter matrimonium, quod ego contraxi cum Kegina
Domna Ifabella Borbonia chariflîma & dileétifîima mea conjuge, quodque
ilîe ipfe Rex contraxit cum Chriftianiffima Regina Domna Anna mea cha-
riflîma & a'nata forore, pa-clum fuit & convenit, ne conjungerentur &
conjungi poiTent ambae Corona: & quod difta Infans foror mea pro fe fuis-
que defcendentibus ex illo matrimonio renuntiare deberet, renuntiaret
omni & cuilibet, quod ad illam pertineret aut aliquo tempore pertine-
re pnifet, juri fuccedendi in meis Regnis, adeô ut in nullo cafu, cogitato
aut non cogitato, in illis fuccederet, fucceffioque ad fequentem gradum
tranliret, quouiam h fucceflîone ilta & à {"pe fuccemonis protinus exclufa
declarata fuit d=6la Infans mea foror Domna Anna, illiufque defcenaentes
mares & fa-minse, abolitis per utramque Majeilatem Catholicam & Chri-
flianiffiinam legibus , juribus , confuetudinibus , difpolitionibus , &. titulis
di6l:tr m duarurr, Coronarum , ex quibus fucceditur aut fucceilîo prarten-
di poifet in diclis regnis, ftatibus, & Dominiis tam nuncquàm olim fu-
turis
<fi8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Aïfairïs tm"is temporibus & cafibus fucceffionis deferendrc, in quantum ulla ratio»
gen.dk ne obflarent aut impedimento eifent dictœ renundationi & exclufioni
diclae Infands Domnae Annœ , addita declaratione, quôd Mis fuse Majelta-
tes per approbatîonem dicli Tractatûs matrimonialis derogare eaque pro
derogads habuiffe intelligi debeant. Et in executionem hujus Traclatûs
dièla Regina Chriftianiffima mea foror ante fponfalia per verba de pr?e-
fenti renuntiationem fecit omni folenniori forma & cum juramento in ci-
vkate Burgenfi 17. Oclobris Anno Millefimo fexcentefimo decimo quin-
to pnefente Rege meo Domino meoque Pâtre, qui illam approbavit, co-
ram Antonio de Arefigny ipfius Secretario & Notario publico horum Re-
gnorum, & mediante dicta ifta Renunciatione effectum fortitum efl dictum
matrimonium, Rexque meus Dominus & meus Pater illam juffit fervari,
impleri & execudoni mandari per legem generalem , quam ad petitio-
nem & fupplicationem iftorum regnorum flatuit & publicavit tertia Junii
Anno Millefimo fexcentefimo decimo nono & per claufulam $8- Teflamen-
ti fui, qua declaravit elfe di6tam Reginam meam fororem ipfiufque libe-
ros & defcendentes ex illo matrimonio mares & fœminas exclufos à fuc-
ceffione omnium diclorum Regnorum , flatuum , & Dominiorum. Atque
juxta hoc exemplum aliaque, traélatibus conventis à me & Rege Chri-
flianitfimo Ludovico XIV. meo chariffimo & amato ex forore nepote de
pace & matrimonio, quod Divina conciliante gratia inque illius majorem
honorem , bonum univerfale fingularum coronarum , illarum quietem &
tranquillitatem contraclum e(t inter Infantem Domnam Mariam Therefam
meam chariffimam & amatam filiam eundemque Regem praeter a!ia po-
fita fuerunt duo capitula y. & 6. Jam tam pag. 605. (£ feq. recenfita. Uti
confiât ex diclo Tractatu matrimoniali convento per me & meo nomine
per Domnum Ludovicum Mendez de Haro, Comitem Ducem de Oliva-
rez, meique flabuli fupremum praefeétum ab unâ: & ab altéra parte per
Regem Chriftianiffimum & Julium Mazarinum vi mandati exarati 7. No-
vembris Anno fupra millefimum & fexcetefimum quinquagefimo nono ,
fubfcripto à Petro Coloma meo Confiliario Bellico & Secretario Status
Notarioque publico horum regnorum. Et in Traétatu Pacis convento per
eofdemPlenipotentiarioseodemdiecoram dicto Petro Coloma pofitum fuit
capkuium numéro 33. quod itahabet. Videatur fupra pag. 619. $. Additum fuit
u'terius vinculum &c. eut hic Articulus 33. annexus efl. Et in completionem
iftorum Traélatuum dicla Infans Domna Maria Therefa mea filia re ipfâ
praeititit dictam Renuntiationem juratam in Civitate Fonds Rapidi 2.
die Junii Anno Millefimo fexcentefimo & fexagefimo munitam teflimo-
nio Domni Ferdinandi de Fonfeca Ruiz de Concreras mei Confiliarii bel-
lici, Secretarii Status Expeditionis univerfalis , Notariique publici horum
Regnorum. Et quamvis fperem fore , ut Infans mea filia & Rex Chri-
itianiflimus illius Maritus impleant & obfervent omnia relata & reliqua
contenta diclo Traétatu matrimoniali & Renuntiatione , cùm obligatio haec
juftitiarri & confeientiam refpiciat; nihilominus quia ab hâc re & nego-
uo pax & tranquillitasChriftianiOrbis dependet, ut omnibus modis, quos
jura
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 6i9
juranôrunt, ejufdem impletio fecura reddatur, tanquam Pater, &Domi- Affaires
nus mtturalis omnium meorum Regnorum, ilatuum, & Dominiorum, ex gen.de
fupremà poteftate, quâ utor quamque habeo difponendi & ordinandi in L'^"RO"
Utilitatem meorum Vafallorum & caufae publicae, confulendi etiam opti-
mal illius adminiftrationi, atque praecavendi damna, quac ex conjunétione
dictarum duarum Coronarum, Regnorum, & Ilatuum ad earum unam-
quamque pertinentium oriri poffent , proprio motu , certâ fcientia, & ple-
nitudine poteilatis Regiae ablbluiae, quae uti volo & utor , certiiîimè &
optimè gnarus exemplorum deceflbrum meorum, qui difpofuerunt, mutâ-
runt, & inverterunt ordinem fuccefïionis Regnorum & flatuum meorum
exclufis primogenitis ipforumque defcendentibus, CONTEMPLATIO-
NS , ET EX CAUSA TRACTATUUM PACIS ET MATRIMO-
NIORUM,& ob jufias confiderationes, declaro, quod dicta Infans Dom-
na Maria Therefia mea fi!ia , omnefque illius defcendentes ex hoc matri-
monio, mares &fœminoe, erunt,manebunt,& funt exclufi,& quatenus ne-
ceffarium fuerit, eos excludo ab omni jure five fpe, quam in quovis ca-
ïu habere poïlint aut habent, fuccedendi in quolibet meorum Regnorum,
ilatuum, & Dominiorum perpétua, non fecus ac SI NATI NON FUIS-
SENT: iitamque exclufionem & omnia quae circa illam dilpofui & difpo-
no ratione perfonae diélae Infantis Domnae Mariai Therefiae meae fi-
liae illiufque defcendentium ex hoc matrimonio marium & fœminarum
declaro, debere obfervari, & ubi neceffe effet, volo, jubeo, & mando
obfervari, impleri, & executioni dari adverfus Chriilianiffimam Reginam
Domnam Annam fororem meam illiufque defcendentes fecundum illius
pafla matrimonialia & renuntiationem praeflitam, juxtaque difpolitionem
Régis Domni Philippi III. noilri Domini & Patris in diéla lege & ipfius
teflamento relatis, quod omnevim habuit legis conventae inter ambas co-
ronas, quamque approbo cum & fub eâdem qualitate, quae ineft legibus
conventionalibus inter fupremos Principes, utens plenitudine meae po-
teflatis , abolitis & caffatis omnibus legibus , ftatutis , juribus, difpofi-
tionibus, & confuetudinibus, quatenus neceffarium fuerit, illaeque aliqua
ratione impedire poffint diélam exclufionem, non fecus ac fi earum una-
quaeque hic expreffa ejufque mentio fpecialis faéla fuillet. Declaro ta-
men, volo & jubeo, fi, quod DEUS avertat, matrimonio diélae Infan-
tis Domnae Maris Therefiae meae filial fbluto fine liberis illa in Hifpaniam
reverfa vidua manferit, aut fi vidua ad promovendum bonum publicum
& ob judas confiderationes ad fecundas nuptias tranfierit me confentien-
te, aut poil meum deceffum Principe meo filio, ut illi tune non obflet
exclufio & renuntiatio, maneantque capaces illa illiufque filii & defcen-
dentes ex fecundo matrimonio, dummodo non fit in Franciâ, qui fucce-
dere poffint in diélis Regnis & Statibus.
Per aliam claufulam diélae capitulationis obtuli pro dote diéla? Infanti
meae filial quingentaMiiliaCoronatorum folis, £s? cœlera, qua relata funt fnpr a
ad§. Conventum equidem perarticulos &c. &c. pag. 623. & deinde : Omnia
quae dicla funt jubeo impieri, fervari, & executioni mandari in fuccefïio-
Tome XL Nnnn ne
<S56 MEMOIRES, NEGOTIATIÔNS, TRAITEZ, ET
Attaires ne meorum Regnorum & Dominiorum ab omnibus meîs fubditis & vafal-
gen.de lis cujufcunque qualitatis, &ab omnibus meis Regnis, ftatibus, &Domi-
i/Euro- njiSj utque eam obfervent & in vîgore confervent veluti legem & flatu-
rE* tum facturn & ftabilitum in Comitiis publicandum forma & folennitatibus
in quovis Regno, Statu, &Dominio confuetis.
Hïfce Re- f~*%Mnia hucufque allât a atque ob document or um idem contimntium multitudi-
nimtiatio- \^Jr ne m fepius repetita uti plerumque univerfam Hifpanïcam Monarchiam
m bus & refpiciunt, nec ad minimam ejus particulam vel quamlibet exiguum jus G allia
nibusFeu- fanguinis quemcunque admittunt -, ita ifte in univerfum omnis non femel nec
da quo- uno loco [peciatim à jeudis quibufcunque excluditur , Jive Reges Hifpaniœ ijf-
que com- ha c aliis contulerint , Jive illa ab aliis teneant : inter quœ abfque omni dubi-
prehen- fatatione cum prœcipua fint , quœ à Sanclâ Romand Rcclefiâ Sacroque Ro-
' mano Imperio acceperunt, ea etiam fub hoc nomine difpofitione exclufvâ Gai-
Nomma- iorum f (3 quœ eam confequitur , totius Hifpanicue fuccejjîonis in Sacram Cœfa-
cT tam" ream Majeftatem ejufque fobolem tranjlaîione comprehendi nemo inficias ive-
Pontif. vit. Hinc quis non videat , nequïcquam in contrarium allegari aut prœtexi
quàm verba invcftiturarum Jive quœ Regnum Neapolitanum concernant , Pontifcia-
Caefarea. rum f flVe CœJ'arearum de Ducat a Mediolanenfi , Marchionatu & Porta Fi-
literisYn" narïenfi , Principatu Plombini, Vicariat u Senenfi , feudi/que novelli Monfor-
veftitura- tis , Monfchieri , & Sinei &c. concejfarum , veterum aut recentiorum , qucê
rumpri- juxta ordinem primogeniturœ tam fœminis quàm maribus fuccejjionem defe-
mogeni- rant 9 cum ea potilis ita interpretanda reniant , ut fpecialibus Pontificum au-
runtur6 toritate initis paclis & promulgatis legibus de exclujione Gallici fanguinis,
afcititii aut nativi , falvis , jus inde ad alios tranjlatum femper integrum
Tranflato confervari debeat : Eâdem denique ratione juxta Tejlamentum Philippi Tertii
mmirum fuperiïis relatum rurfus dicendum fit , per leges 13 pacla enuptas in Galliam
Gaîlisnu- ^nfanîes Hifpanicas primogenitas eo ipfo taies efje defiiff'e, (3 in illarum lo-
ptarum ad cum proximos feu proximas Hifpanici fanguinis Principes , adepto fimul no-
Auftria- mine primogenitorum vel primogenitarum , fubiiffe , quâ minor Geminorum
cospn^ Patriarcha Jacob, futur us dein cum aliorum Patriarcharum, tum almi Jo-
Traf'no- fe$'1 beatijjïmus parens , pofl venditum fibi à fratre Majore Efau lentis edu-
mine & ti° primogeniturœ jus , Patri Ifaac roganti quis effet ? Filium fe ejus effe
jute. primogenitum Efau jure optimo refpondit, prout apud Judœos non minus
ac Chrijlianos indubiiatœ veritatis babetur & Divina per patrem cbtenta
etiam ad nos pertinens benedicHo comprobavit. ghiis potius Imperaterem non
monendum putet , etiam fi Domus fuœ negligens efje vellet , ne rem Imperii
prodigeret , conferendo in eam familiam fve ci relinquendo Imperialia feuda ,
quœ duâum 13 Imperii œmula fuit (3 infigmm illius partem quâ vi injuflâ,
quâ congenita fraude ad fe traxit , quœque nihil magis in votis habeat ,
quam ut pro obfequiv ob nexum feudalem debito omnibus porro Italiœ feudis
Imper ium fpoliet , totam demum Italiam fub jugum mittat , (3 ipfam Impe-
Idem de ratoriam dignitatem Germanis ablatam in Capiti pofteros transférât. Idem
Belgioaf- fa cunclis Belgicis £s? connexis Provinciis diclum ejlo , quarum pariter in re-
fentur- latis documentas frequens mentio ft , tum quia 13 ipf* non folum ad vicinos
popu-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 651
populos à Gallià fubjugandos , fed ad lerrorem eiiam longinquis incutiendum Affaire,
eorumque ad fe irahenda commoda opportunifjïmœ [tint , tum quia prœtcr a li- GEN- DE
quarum feudale , quo lmpcrio innexœ funt , vinculum , £5? rcceptam in lis an- L'£uK<>
tiquitus vel fulum vel potiorem marium eiiam remotiorem fuccejjîonem , omnes ?£*
ad Imperium fc? Domum Auftriacam adeo pertinent , ut pecuiiarem Imperii
Circulum , Burgundicum vocatum conjïituant , regibufque Hifpania earum
pojjejforibus & non nifi fub Archiducis Auitrise titulo & qua talibus fef- Cùm id
ftonem & votum unâ cum aliis Auguftœ Domâs prœrogativis in Imperii Co- ™x}mc ,
mitiis tribuant : Evidenti/fimo argumento non alio eas nomme feu alla caufâ w'^d0"
ad Reges Hifpaniœ pertinuijfe , nec ad alios quàm Archi-Duces Auflria de- Domum
volvi pojfe. Cantant id apertiffime , ut de aliis mine taceamus , ipfijjima Auflria-
verba notijfimœ tranfaclionis , quœ in Comitiis Auguflanis 16. Junii Anno cam *Pec"
Jupra Millcfimum quingentefimum quadragefimo otlavo de Belgicis & conjunc- et'
tis provinciis inter Imperium & Imperatorem Carolum ghtintum imta , 13 Prout
ab eodem tanquam Imperatore &? earum provinciarum Domino , nomine Im- patet ex
perii verb ab Elecloribus Moguntino £5? Palatino , Archi-Epifcopo Salisbur- c.onven-
genfi & Duce Bavaria , Abbate Wingartenfi , Comité Furjlembergenfi £5? euftauâ!1"
Magifiratu Civitatis Auguflanœ pro fe £s? reliquis Elecloribus , Principibus
Ecclefajlicis &? Secularibus , Prœlatis , Comitibus , & immediatis Imperii Ci-
vitatibus ad Comitiakm omnium flatuum requifitionem fubfignata , inque Im-
perii , quem vocant , Receffum relata (3 demum ut aterna judicandi formu-
la à Camerâ Imper iali , qitce Spirœ h [que ad ejus urbis excidium fuerat , nunc
Wetzdariœ efi , regejla atque acceptât a ^ fi militer etiam à flatibus ill arum provin-
ciarum ratihabita fuit , ténor e fequenti :
Nos Carolus Quintus DEI Gratià Romanorumlmperator femper Au»
guftus , Rex Germaniae , Caftellae , Aragoniae &c. &c. Archi-Dux Au-
ltrise, Dux Burgundiae &c. &c. Notum facimus &c. &c. Convenimus
etiam vi harum literarum omni meliori modo &c. &c. Quôd Nos ceu
verus hasreditariarum noftrarum provinciarum Belgicarum , pro nobis no-
flrifque hoeredibus & fuccefToribus unà cum deinceps nominandis noitris
provincis Belgicis nimirum &c. &c. impoflerum aeternis temporibus fub
proteclione , tuitione, defenfione, & ope Imperatorum &Regum Roma-
norum Sacrique Imperii elle ejufque privilegiis & juribus gaudere &
frui, atque à dicTtis Imperatoribus , Regibus, & Sacri Imperii itatibus in-
itar aliorum ejus principum,ftatuum,& membrorum femper protegi , de-
fendi & fideliter juvari, porrô etiam ad omnia Imperii Comitia & con-
ventus invitari & vocari, nofque & illi unà cum aliis itatibus pro arbitrio
illic comparendi aut illuc mittendi facultatem habere , atque Nos , noftri-
que hsredes & fuccefTores, Noftri & illorum legati ad feiîîonem & vo-
tum ratione recenfitarum provinciarum , tanquam Archi-Ducis Aufiriœ £5?
fub Archi-Ducis Auflriœ nomine admitti debeamus &c. &c. Prscterea quo-
que Nos , noftri haeredes & fuccelTores praediclas noftrse provincial unà
cum omnibus ad eas pertinentibus principibus &c. &c. pecuiiarem Im-
perii Circulum, fub Burgundici Circuli nomine conftituere debeamus,
Nnnn 2 quo
AFFAIRES
GEN. DE
l'Euro-
pe.
Tefta-
mentis-
que Phi-
lippi Ter-
îii &
Quarti.
Ad diaa-
rum con-
ventio-
num tui-
tionem
obligantur
tum alii
fîdeju fio-
les, tum
imprimis
fummi
Pontifi-
ces,qui eas
promove-
runt &
confmna-
runt.
£32 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
quo illse omnes comprehendentur, licèt earum aliquac aliis antehac Impe-
rii Circulis comprenfae fuiffent &c. &c. Quotquot tamen ex fupra me-
moratis principatibus & provinciis feudorum ab Imperio collatorum nomi-
ne & qualicate haclenus poiTeiîi vel poffefTae fuerunt, illi vel illae etiam
ficut hactenus ica & impofterum ab Imperio accipi & poffiden debe-
bunt &c. &c. Ideô promittimus & pollicemur verbo vero Caefareo pro
Nobis, noftris haeredibus & fucceiToribus , omnibufque noftris prœdiclis
provinciis hsereditariis Burgundicis à nobis & 1 1 lis tranfa&ionem , compo-
iitionem &conventionem, in omnibus &fingulis partibus, puncîis, clau-
fulis, & decretis, nos noftrofque concernentibus, iirmiter, perpetuô, &
ïnviolabiliter obfervari & execucioni mandari, iis nullà ratione contrave-
nire, nec ut id flat, noftris vel aliis permitti, omnia etiam, quae adver-
fus hune traclatum tentata, ordinata, ftatuta, impetrata, & obtenta fue-
rint , auttentari, ordinari &c. &c. impofterum queant, cafta, nulla, &
invalida effe & manere debere &c. &c.
GEminum germanum eji , quod de Beîgii Provinciis ad Hifpaniœ Reges quâ
Auflriacos pertinentibus Teflamentis fuis caverunt Philippus îertius &
Quartus adeb confoms formulis , ut pro ambabus ejje pojfît una ex Philippi
Quarti Teflamento defumpta his verbis conjians :
Et fpeciatim declaro , quô ftatus Flandrias, Belgii , & quicunque alii,
quos prseterito tempore poiTedit Sereniffima Infans, Domna Ifabella Ami-
ta mea, quofque ad Coronam meam revolutos ego pofTedi & pôffideo,
ex voluntate mea femper uniti manere debeant cum reliquis Regnis &
Dominiis meis , neque aliquo cafu dividi aut feparari. Injungo quoque &
mando meis fucceiToribus quoeunque tempore futuris, ut feriô omnique
ope protegant & défendant diclos Status illorumque Vafallos , quoniam id
tantopere pertinet ad exaltationem fidei Catholicae , confervationem &
pacem reliquorum meorum Regnorum , Statuum , & Dominiorum Jurium-
que Domus Auflriacœ , cujus Primogenituram 6? major atum obtineo , ut palam
omnibus eft.
COlophonem tandem huic DeduElionis noflrœ parti impojlturi , uno adhuc verbo in-
digitandum duximus , cùm omnia &f fingula pace , conventionibus , & fanàioni-
bus recitatis inferta cùm à fummi s Pontificibus tum ab Imperatoribus rata habita,
confirmata , £? pro potejlate iis compétente munita Jint , ad conventorum £f fancito-
rum vindicias & tutelam utrofque nonfecus ac alios coiumemoratorum fœderum pacis
vel particularium conventionem fide jujfores obligari , eoque pertinere , quod non felùm
juxta relata injlrumenta dotalia aliaque pars utraque contrahentium id à fummis
Pontificibus filiali reverentid expetierit , fed etiam hi , vel renunciationum formulis te-
Jlibus , preces ijlas lubentijfnnis animis admiferint , conventaque Âpojîolicd authorita-
te reapfe confirmârint ; ut de Imperatoribus pro Je aut fobole idipfum Jlipulantibus jam
dicla mokjtè non repetamus.
Poft
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. ^3
POfl omnes bas conventiones , fanttiones , renunciationes , abdicationes , feu ceffiones Affaires
éf Sacramentel nemini in mentem ventre potuifet , aut fi forte cuiquam talis in- gen. oe
cidiffet cogitatio , incredibilis fimul Mi proculdubio vifa fuijjet , ïm infuper babitis feu L'EuR°-
neglectis & fpretis religioni fibi non dufturum Regem Cbrijlianiffimunt ejusve liber os _J^1
effe , eveniente cafu , Sacrce Cœfareœ Majejiati illiufque proli de fucceffione Hifpanicd
litem movere , aut quameunque illius partent fibi vindicare , nifi ipfa experientia aliud
docui[fet. Qiùs verb injuflitiœ tegendœ color adfumptus fit , non alïunde aptiùs , quant
ex feriptis Gallicis antebac in lucem emiffis percipi potefl , ficut viciffim oppofitœ ab
ipfa Hifpanid refponfiones optimè exhibent , quàm dilutus is omninb fuerit : quee adeb
utrinque édita hic in compendium redaàa proponere expeditifftnium fit , fubjunclka ul-
tïmo loco ex Tejlamento, quod à Carolo Rege conditum novum argunientum Galllœ Objedtio
fubminijlrajfe perbibetur , claufula concernent e , quam vel recitaffe refutaffe erit. Non Pes
vidgare nempe invafo pofi mortem Pbïlippi Ouarti Belgio Catbolico , afi vanum in eo
ftudium pofuerunt Galli , ut aliis perfuaderent , quod ipfi non crediderunt: debere ju-
re naturœ , Divino & Humano, Civili potiffiutum Romano , parentum bœreditates li-
ber is , née citra graviffintam injuriam filias Us privari pojfe. Contra bonos mores effe
paàa de bœreditate viventis , &f quia cum Mis non minus ac juftitia pugnent renuntia-
tiones filiarum , ut dote contenta aliud quid ex bonis paternis fperare feu petere ne-
queant , ideb Mas jure Romano admiffas non fuiffe. Confirmajfe demum eas Papam
Bonifacium Octavwn, fi juratœ , non fraudulentœ aut violentœ fuijfent , prœtextu ju-
ramenti fervandi , rêvera proprii commodi £f extendendœ in rem alieni fori pontificiez
autboritatis eau fa, non fine novo fantœ undiquaque non optimœ difpendio. Efrencnt
tamen décrétaient iftam effe , exorbitantem âf abfurdam , nec vint fuam ad Reges &
Principes feu Principatus £f Imper ia, quœ nullo pretio œftimari poffint , porrigere.
Hanc nominatim, de qua nunc agitur , renuntiationent , non una licèt fed multis ab
Hifpaniœ confilio effictis rationibus fucatam &f infuetis claujulis munitam , omni jure
acœquitate dejiitui , £f ob minorennitatem renuntiantis , ejufdemque enormem Ixfio-
nem , prœcipuè vero ob non numeratam è vejligio die condiào dotent , <vel à primordio
non fubfkitijfe , feu invalidant fuiffe , vel deinceps illico corruijje, £f prifiinum Maria
Therefiœ jus revixiffe. Verùm & folidiffnnè jam à Miniftris atque Scriptoribus Hifpa- Refellim-
nis demonftratum efl , & rerum evidentia comprobatur : Qiiœftionum publicarum de- tur.ex.
cifionem ex jure civili five Romano , in plurimis ubivis antiquato , five alio de pri- «T^ni-
vatis fubditorum rébus lato non magis reclè peti, quàm publicœ controverfiœ inter funt- cis circa
mos principes vertentes à privatis eorum tribunalibus dirimi feu dijudkari poffint : tempus
Pejus Us Caufidicorunt privatorum argutias applicari. Èxpreffas quidem in connubia- mva^, a
libus inflrumentis diverfas claufulas abrogatorias feu cajjdtorias efj'e privatarum legum BeViînu-
& confuetudinum municipalium , quœ forfitan juxta verborum corticem contraries, cre- blicatis,
di potuifent , infpecie devolutionis in aliquibus Belgh provinciis inter privatos ufita- paucis
ta: Sedid faàum majoris tantùm, licèt plané abundantis cautelœ ergo , &? ut cou- 'junc a^*
îrabentes enixiffimunt fuum in auferendis feu preecavendis prœtextibus qulbufcunque
ftudium tanto clariùs tejlarentur , non quod aUas leges ilhe ad Principunt fucceffionem
convenientiàs trahi quivijfent, quàm Gallici feriptores Pontificum décréta h\c attendi
velint: abfurdiffimè vero ea quœ ad firmandant contrabentium difpofitionem pofita feu
potiùs remota fuerunt , ad eandem evertendam allegari. Infplciendum contra, f aten-
Nnnn 3 - tibus
634 MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
Affaires tibus ipfiufmet prudentiçribus Gallarum fcriptoribus , quid in quovis regno circa ill'us
g en. de jùccejjhnem ab us , quibus ea potejias competit, ftatutum, quidque inmutuam populo-
- p" rum concreditorum utilitatem £f communem quietem inter Reges Jeu Principes DEQ
<— joli fubjectos populi , de cujus fuccejfione agitur , accedente confenfu , tremjaâum fit.
Sufficere ad id quamvis œtatem aàionum humanarum capacem , eam utique , quœ cùm
in Hijpanid tum in ipfâmet Gallid Regio muneri par babeatur , 72e dum eam , quœ
veteribus firmata dicta, robujiifimœ , quam appellârunt , juventuti proxima non uno
loco Hifpanicce ditionis etiam privâtes rei adminijîrandœ idonea reputetur , cujujque œ*
tatis Infantem Mariam Tberejîam fponfalium tempore fuijje , vel ex renuntiationum
formulis eluceat. Licuiffe Galliœ aliifque Regnis , imo etiam minoribus Jlatibus feu
familiis , quoties è re fud exiflimajjent , & modum tam eleàionis quam fuccejjionis
antiquitus receptum immutare , & lege , pacïis , etiam ubi ea locum babeant , nec ■
aliis invitis jus competens auferatur, teftamentis , omnes à fe poffeffas , diverji quam-
vis anteà juris ac variis fuccejfionibus aliifque titulis acquijitas provincias aut bona
in unam velut maffam feu compagem unire &p quafi concorporare , atque ab Us in-
dijlinëtè omnibus cùm mares fecundo genitos ,. alimentis tantum , aut quœ eorum vicem
fubeunt , appanagiis ajjignatis , fecludere , tum maxime fœminas earumque propagi-
neniy modica concejja dote, arcere , aut aliis fuccefftonem conditionibus circumfcr ibère :
eoque jure Gallium adverfus Hifpaniam aliaque Régna £f ftatus illorumve principes
per exprejjas etiam filiarum fuarum renuntiationes identidem , & fpeciatim adbuc in
pactis 'jiuptialibiLS Elifabetbœ Burbonicœ Pbilippi quarti Hifpaniarum Régis primes
cojijugis, quam una cum omnibus ex eo matrimonio defcendcntïbus liberis à fuccejfione
omnium Regnorum & Dominiorum Patemorum , eorum etiam in quibus pojl extinàos
mares fuccedendi jus competeret fœminis , imo &f ab omni bœreditate Reginœ Galliœ
Matris fuœ in perpetum fubmovit , ufam effe. Çhiidni adverfus Galliam idem fas fit
aut fuerit Hijpaniœ , quam fingulares rationes , non una , fed plures , publicœ cf pri-
vâtes , uti ad non feparanda feu dividenela , fed una £f indivifa fuccejfione ad feros
pofteros tranfmittenda complura , quibus potitur , Régna âf Ditiones , ita ad remo-
vendas ab Us omnibus &? fingulis Regum Jùorum filias in familiam Gallicam innu-
bentes earumque prolem omnem mafculam £f fœmineam incitent fed compellant. Tan-
tum abeffe ut jus natures de bœreditatibus parentum ,fratrum 9aut aliorum cognatorum
aliquid perpétua obfervandum prescipiat , aut quœ lis modum Jlatuum , leges feu con-
ventions , juri natures adverjentur: ut apud omnes in confejfo fit , illo jure nec ipfos
parentes prœter educationem âf alimenta liberis quicquam debere , ^ jus divinum
Ifraèïitis promulgatum non folùm à Regno £? Patrimonio publico filias femovijfe , fed
in privata quoque fuccejfione marium potiorem caufam conjlituijfe. Longé adbuc ri-
gidiores fuijje antiquiores Romanos , qui prœter retenta vetujlijfima acquifitionum
aliaque patriee potefiatis fimul & liberrima emancipationum e familid jura ,
ne fesminarum perpetuam remotionem ab omnibus muneribus publicis , per legem
Cutone , lumine Romani Senatûs Juadente feitam , eas ab bœreditatibus adeo pro-
bibuerint , ut îiullus cenfus ullam virginem aut mulierem , ne peiter quielem imicam
filiam hœredem facere potuerit , etiam tune temporis , cùm in cœteris illibata patris-
familias de re fud legandi feu tejïandi facilitas co7ifiitiJJet. Mitigatam quidem per
intervalla aliquantijper illani feveritatem fuijfe 3 deterioris nibilominùs femper condi-
tionù
Affaire*
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. e^
tionis in bœreditatibus cernendis âf fœminas &? earum defcendentes maribus illorum-
que filiis manfiffe , donec fero tandem , non ad imper ium Capeffendum aut mimera gen. de
reipublicœ ambienda , fœminis via aperta , fed in privatis bœréditatibus dijferentia l'Euk°-
fexih nec non emancipatorum atque in potejlate retentorum Uberorum tolleretur. De
ihofficiofo tamen îejlamento cujufcunque militis five jure militari Jive Civili , prout
libuijjet , faëlo ; etiam tum nec filios queri potuijje , utut nihil penitùs Mis à pâtre
relitlùm effet, multo magis filias impunè prœteriri aut exbœredari quiviffe. Notius
effe, quàm ut operofa deduàwie egeat , quanta, pofi introduBa feuda , JucceJJionum
in Us diverfitas apud varios populos femper fuerit fcp quàm angujlis finibus fœmi-
narum ad ea jus , maxime ubi feuda ab Imperio Romano dérivent, coarâatum fit,
certijjimo argumcnto , nihil de ifia re jure natures definitum effe. Abfque bujus
dogmatis veritate fi foret , illas , quee cùm in plurhrtis regionibus aliis, tum in Sici-
iia œquè ac Italia , nominatim in Ducatu Mediohnenfi , circa peregrinos feu peregrè
natos aut alienigenas à fuccejfionibus privatis probibendos obtinent leges & confuetu-
aines crimine non vacaturas : diffamatam faltem ubivis gentium in ejufmodi bœrédi-
tatibus jure Albinagii fifeo vindicantis , nifi ubi major éf frequentior ex quotidiano
commerciorum ufu aut alla commoditate utilitas moderationem extorfiffet , Gallorum
aviditatem tanto minus exeufandam effe. Contra bonos mores quibufdam legibus Ro-
manis aliquamdiu habita fuiffe pafîka de bœreditate viventis , quia feilicet votum
captandœ mortis inducerent : at illa tantimt , quœ ignorante 6f invito fièrent eo , de
eujus bœreditate traftaretur , quœque teftandi libertatem adimerent , non quœ ipfo vo-
lente èf in eadem voluntate ufque ad extremum vivendi fpatium perfeverante , non
item quœ prompto Romanorum Principum favore inter milites fatta fuiffent , aut
quitus non bœreditas quœreretur fed abdicaretur. Ampliora adbuc fequentibus tem-
poribus indulta effe , & non tantùm feuda communiter refutari feu inter vivos aliis
prima inveftitura comprebenfis cedi & ad bis recipi femper potuiffe , fed £? alia bo-
na eorumque fpem pattis bodie atque contraclibus tum matrimonialibuf , tum aliis ,
inter perfonas illuftres prœfertim , repudiari , transferri , Ê? acquiri confueviffe. Dif-
fufa extare volumina primi nominis Juris-Confultorum Gallorum , ex quibus appa-
reat , in Galliâ œque atque alibi , inter privatos nobiles quoque , uti primogenituras
mafeulinas , renuntiationes filiarum vigere , Ufque magis quàm ulli cautelœ integri-
îatem nobilium familiarum fuperjirui. Pronuntiaffe non femel ex eorundem Jurïfpe-
ritorum fententia fuprema Dicafleria Gallica : hujufmodi renuntiationes etiam inter
privatos nec ob minorent nec ob enormitatem lœfionis revocari poffe , maxime fi ad
confervationem illuftrium feu nobilium familiarum quamlibet privatarum colliment.
Abundè ex Canonibus & Romanis legibus conftare : implenda effe omnia juramenta
minorennium fœminarum non minus quant aliorum, quœ fine periculo œtemœ damna-
tionis fervari poffmt , £? perfidiam ac perjuriam nominari , fi quicunque minor œta'
tem prœtexens juramentum à Je de rébus fuis prœflitum retracîare nitatur , aut tan-
tîïm Mo fe liberari poftulet , nec ideo audiri. Conceffd vero etiam dicis gratid in
quibuflibet cafibus , five ad Principes pertineant , Jive ad privatos , ob dotis exgui-
tatem renuncîationis refeiffione ; in hoc tamen cafu , quem prœ manibus babemus , non
fummam attendendam diëfœ dotis quamvis omnium Hifpanicarum maximes, e? quœprœ-
tereà Infanti Maiœ Tberefiœ vel tum data vel ante prœfîita fuerint; fed propter ne-
ceffmam
GEN. DE
l'Euro-
pe.
6tf MEMOIRES, NEGOTI AXIONS, TRAITEZ, ET
Affaires cefiariaM & indiffohibilem , quœ à contrahentibus reputabatur , pacis Pyrenœœ £f Ma*
trimonii unionem , fimul confuleranda immcnfa &f inœftiraabilia commoda 5 quœ non
minus favore âf defiderlo matrimonium ineundi per pacem ifiam ab Hifpania ad Gal-
liam tranflata funt , ac matrimonium ipfum ceu convenïentiffimum médium paci pro-
movendœ &f fiabiliendœ adbibitum fuit. Caufam ut non petites, à Gallia , ita ab
Hifpania non folutœ die conventa vel alia dotis pênes Galliam refidere câm nec rati-
babitionis à Rege &? Regina ChrljiianiJJimis continuo pojl nuptias celebrata* , adeo-
que ante die m reprœfentationi dotis prœfiitutum ex patio faciendœ, Jeu iter.tndœ re-
nuntiationis , ejufque in monumenta publica fummi Senatils Parijienjîs regerendee In-
fini mentum , Régi Philippo ad illius mortem ufque exbibitum , nec , Gallis fatenti-
bus , ipfa promiffa ratibabitio feu iteratio & publicatio expleta, doti etiam tefiamento
Philippi Ouarti fpontè oblatœ impreffio Belglca preelata fuerit, baneque Gallia feu
culpam , feu, quœ ex Scriptis Gallicis clareat , diu meditatam fraudent & peffimè con-
fultam proprii juramenti violationem o.lknœque rei violentam iiwafionem ullatenus aut
Mi pro défie aut Hifpania nocere non debere. Et fi effet quod jure firictifiimo , id efl,
iniquifjimo , imputari Hifpaniœ pojfet , quod tamen perpenfis omnibus circumfiantiis
nec ii, qui fyllabarum apices aucupari &f cunciorum afàibus injîdiari, non menîem
aut cequitatem feclari amant , facere abfque pudoris labe queant , purgari fecundum
praxin quotidianam cum in aliis promiffionibus ad diem certain factis , tum prœpri-
mis in dotis folutione moram poffe & folere. Hanc faltem non aliud operari , quàm
ut una cum folutione débita fortis pœnam adjectam prœjiare , aut damnum quod ex
mora emerjiffet , promijfur farcire teneatur , non ut conventio ipfa omnifque mutua
obligatio penitùs aboleatur. Commifforiam legem in nulla conuentione fubintelligi feu
fuppleri poffe , fed ut-locum inveniat , difertis verbis exprimendam atque tum etiam
odiofam effe , feu , quœ propria juris vox efl , difplicere & reflringi debere. Nullam
in toto contextu , quem Jupra retulimus , talem claufulam aut quœ eo tendat , reperi-
ri , fed potiùs facultatem folàm petendi dotem promiffam , donec fohatur , refer-vatam
fidjfe , nec antequam eam confequatur , acquiefeere feu contentam effe renuntiantem co-
gi. Ex articulis quinto &? fexto Paftorum Connubialium elucere : càm dotis promiffio
£f folutio feu petitio Articulo fecundo enuntiata effet, non ob illam , fed propter alias
longé jufiifjimas £f prœgnantiffimas rationes , quorum parte univerfi orbis tranquilli-
tas continetur, exclufionem Gallici fanguinis à quibufvis Hifpanici juris regnis âf di-
tionibus , œterna &? immutabili , non ex promifiione aut folutione dotis fufpenfa , fed
prœfenti £f abfoluta, nonfolum non renuntiatione arbitraria filiœ, fed necejfaria lege
feorfim Janclri , aut quœ antè in ufum venerat , rurfum firmari. Subfcripfijfe , ut
fupra audivimus , Infantem Mariam Tberefiam ante initum matrimonium duplici tum
renuntiationis tum exclufionis feu cejjionis inftrumento , &? altero quidem fucccffiones
omnes repudiaffe , altero regno êf principatus feu illorum fpem , nulla vel minima men-
tione dotis faëla , abdicajfe , feu legi id fiatuenti Jîmpliciter fe fubmififfe , edque de
caufa inprimis & articulum 33. Pacis Pyrenœœ eo , quem indicavimus , modo, con-
ception, Renuntiationemque adeo cefjionem & tranflationem in illd iteraîam , âf omnia
fie tranfaàa, conjunSlim & feparatim , in mimer um legum perpeîuarum repetitis rcici-
bus recepta fuiffe. Ad bœc facienda , quamvis in transferendis mutub per pacem. ,
bdli finiendi ergo fubditirum juribus illorum confenfus aut diffenfus rarb attendi folsat
aut
GEN. DE
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 637
aut poffit , nulîd vi Infantem Mariam Tberefiam ab indulgentiffimo non folàm fif a- Affaire*
mantijjimo pâtre, fed mitiffimo erga omnes Principe , adaclam fuijfc, necullum ejus rei
ullibi unquam indicium apparuijje , fed tejîante geftorum ferie £? , quœ extat , ultro-
nea déclarations , liberrima omnia illius voluntats psraÏÏa ejje , perinde atque ipfe Rcx
CbrijlianiJJlmus omnem à fe , cùm ad ea author fieret iliaque rata habcret , metum £?
coaàionem procul abfuijje , baud dubiè libens confiteatur. Niji fortajje expeditiffimo
ad infringendas feu eludendas quafcunque mutuas conventions , tranfacliones , &f paci-
ficationes commento , metus , violentia , &? coacVio , quam jura probibeant , nominari
velit , çuod , uti innuimus , abfque ijlbac renunciatione , abdications , csffions , nec
matrimonium boc fortin, nec per pacem tôt & tanta commoda confequi Gallia potuif
fet, eo fcilicet fine, ut perceptis &f retentis à Gallia commodis , nibilominus id quoi
in mutuâ prestations molejlum ejl , declinars, feu abs fe amoliri queat. Nulld tan-
dem rations faciliùs atque ipfa Isiïions Scriptorum Gallicorum intelligi aut mente con'
cipi pojje , quàm levia , quàm mania , quàm frivola Jint omnia effugia , objeftiones ,
iîitsrprstationss , detorjiones, uno aptiffimo vsrbo offuciœ , quibus ex genio & ufu gen-
tis , omnia patta , conventions* , fœdera , promiffionss , csjjionss, difpofitionss , tefia-
menta, claufulas , leges , canonss, facramsnta, execrationes s non tam ferio adoriri,
refellere , enervare, convellere , Ucèt fruftra conentur , quàm vel captatà literuld in
perverfum & non raro contrarium fenfum trabere aut aliàs eludere, vel apertè cavil-
lari S5 calumniari , imb proprio dolo & fids à fs rupta gloriari , indsqus caufefuce
patrocinium arceffere non vereantur. Paucis nunc dilucidioris sxplicationis gratia
nojlro jure addimus : cùm res ijta non tantùm Regem Pbilippuin , fed omnes Cogna-
tos integri juris omniaque illi fubjsàa régna & provincias fpeàarit , nequs ex more
in Serenijfima Domo Aufiriaca utriufqus linece nunquam non obfervato , in matrimo-
nia Gallica cum duobus Regibus Ludovicis ineunda, vel Sacra Cefarea Majeflas vel
illius Parentes aliter confenferint , quàm ut Isx base fsmpsr incolumis effet , nec ei
unquam contr avenir etur , jus familles Germano-Aufiriacœ ipfique adeo Sacrœ Cœfarccs
Majefiati £f illius Liberis , aliifqus Cognatis familiis femel qucejîtum & fœpiùs réno-
vation , per nullum Jive Pbilippi Jive illius Miniflrorum fivs aliorum quorumeunque
pofterius faquin , multb minus per ipforum omiffionem aut culpam feu quameunque
cujufvis temporis moram ulli eorum cognatorum eripi , aut in Regnorum Hifpanico-
rum fcf fubjeftarum regionum prœjuàicium quicquam mutari potuiffe aut poffe , fed
non objlantibus quibujlibet omiffionibus aut faftis alienis , quibufque omnss £? Jinguli
Cognati ad fuccejfionem vocati , Hifpanicaqus Régna sorumvs Jlatus , affenfum non
prœbuerint , omnia Mis competentia jura &f bénéficia intemerata femper psrmanfiffs &
in csvum permanfura effe.
Supereft poftremo loco , ut ex Tejlamento , qubd Régis Caroli nomine divulgatum Ultïmo
eft, verba hue pertinentia recitemus &? excutiamus , adbibita maxima , quoad fuis ali- locotefk-
quando vocabulis appellanda res patitur , moderatione, ea licet indigni merito exijli- ™entum
mentur , quos iftbœc macbinatos effe publica fama loquitur. Sunt autem bujufmodi: Caroh H
nomine
Agnofcens etiam juxta diverfas confultationes Miniiirorum flatus & ju- vuigatum
flitiœ , rationem , in quâ feu fuper quam fundatur renuntiatio Domina- recitatur,
rum, Domnae Annsc, & Domnse iMariae Therefiae Francise Reginarum,
tome XL Oooo mea-
638 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires mearum Amkx & Sororis , feu abdicatio fucceffionis in haec régna , illam
GEN. DE
l'Euko-
extitifle , ut evitetur praejudicium unionis cum Coronâ Francis: perfpi-
PE.
ciens fimul , cefTante iltâ ratione movente fundamentali, fucceffionis jus
fubfïïtere in proximo Cognato fecunduin Regnorum horum leges, hunc-
que ipfum cafum exiltere in filio fecundo genito Delphini Francise) ideô
régulas fequens dielarum legum declaro, fi volente DKO abfque liberis
deceflero, fuccellbrem meum futurum Ducem Andegavenfem filium fe-
cundum Delphini, euraque ut talem ad fucceflionem voco omnium meo-
rum Regnorum & Dominiorum nullâ omnino parte excepta. Mando quo-
que ëi praecipio omnibus meis Subditis & Vafallis omnium meorum Re-
gnorum & Dominiorum, ut eveniente memorato caiu mortis mea: nullâ
légitima fobole reliétà, illum habeant & agnofcant Regem Dominum fuum
naturalem , ipiique ftatim & abfque minimà dilatione realem poireiîionem.
tradant, prxvio Juramento quôd obfervari faciet leges , Itatuta & con-
fuetudines Regnorum & Dominiorum meorum. Quia porro mens mea
eft , expeditque paci Chriitiani orbis ac Europse totius , imprimis verô
tranquillitati meorum Regnorum , ut Monarchia ifthaec femper feparata à
Coronà Franciœ maneat, ilatuo confequenter antedictis, ut Duce Ande-
gavenfl diem obeunte aut ad fucceflionem Gallicam vocato ejufque adep-
tionem poffeflioni hujus Coronas prseferente, tune ipfa hujus Monarchies
fucceffio eâdem ratione transferri debeat ad Ducem Bituricenfem filium
tertium Delphini. Sin & Dux Bituricenfis fato fungatur aut in Regno
Francise fuccedat, iftis Cafibus defigno & voco ad fucceflionem Archi-
Ducem fiiium fecundogenitum Imperatoris Avunculi mei , exclufo per
eandem rationem damni feu praejudicii in falutem publicam xefukantis fllio
primogenito Imperatoris Avunculi mei. Ubi verô Archi-Dux defecerît,
illo cafu nomino & voco ad fucceiïionem Ducem Sabaudise illiufque filios.
Atque hoc modo voluntatem hanc meam ab omnibus meis Vafallis exe-
cutioni mandari jubeo, prout propria illorum fa lus exigit, nec minimam
permittentibus divifionem aut imminutionem Monarchie tanta cum glo-
ria à meis progenitoribus confràtutae. Quia verô maxime mihi cordi efl
unîcèque defidero , ut pax & unio Chnitianitati tam proficua inter Im-
peratorem Avunculum meum & Regem Chriilianiflimum confervetur, il-
los rogo & exhortor, ut ea per vinculum matrimonii inter Ducem Ande-
gavenfem & Archi-DuciiTam initi arclàùs adiïri&a iflo medio neceiTariam
Europa quietem confequatur &c. &c.
2. Oclobris Anno 1700.
Examina* s-\U?s hœc legens *vel audiens non âoleat vicem picntijjîmi cœtera Principis
V^f 13 Domûs fuœ , dum fanus erat , amant ïf]i mi , potuijfe paucos aliquos
rei augendœ tantltm intentos , vel odio & invidiœ li tant es , aut a lias perver-
fos illius œgritudine 13 mentis imhecilïitate ita abuti , ut ipfius nomir.e pro-
prium feelus peragerent eumque adeo reum orbi oftentarent non ingratitudinis
folîim fed injujiitiœ in propriam Familiam de ipfo ejufque Regnis (3 Ditioni-
bus
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. 630
bus optimè meritam omnium enormifjimœ , quant labem nulla temporis vetuf- Affaires
tas eluere unquàm valeat. Cui enim verifimile videri qucat , Principem °fN' DK
hune , fi mentis compos tune fuijfet , & qués deferiptâ claufulâ continent ur ,
perpcndifj'et , vel etiam obiter rejcijjet , eo adduci potuifje , ut contra innume-
ras , cum alias fœpe tum paulb ante teftamentum , quod illi trihuitur condi-
tum , ore & feriptis litteris à fe fanclifjime faclas promijjiones & offert io-
nes , tant indigna perpétrant , totque fimul pacliones & fancliones multis com-
munium majorum vigiliis excogitatas , plurimoque univerfa Domûs fanguine
£î? non unius ad eam antiquo jure Jpeclantis provinciœ jaclurà redemptas ,
faucifjimis juxta, & falfifjimis verbis , quantum in fe effet , evertere vellet.
Ait cognovifle fe juxta diverfas confultationes Miniftrorum Status & Juflitîse
(nempè talium , qui vel manifefti pnevaricatores feu transfuge fint nobilijve
jlirpis degener progenies , vel alii , quàm quorum majores quive ' ipfi tabidis
matrimonialibus &f tejlamentis prœcedentwm Regum Hifpanicorum exprefjï
funt , Comitiijve Regni interfuerunt , vel anterioribus Gallorwm prœtenfiombus
refetieyidis £s? depellendis operam navarunt) rationem quâ Renuntiatio utriuf.
que Infantis Ànnae & Mariae Therefiae {valida utique etiam fe judicc &
nullatenus convellenda feu impugnandd) nititur , la razon en que fe funda
la renuncia , illam extitiffe , ut evitetur periculum Unionis Monarchiae
Hifpanicae cum Galliâ. Avus verb illius & Pater , toto Regno vel potius
Orbe univerfo audiente & applaudente , nec Gallicis Scriptoribus negantibus ,
in Paclis connubialibus alibique non unâ Unionis amoliendœ occafonumque eo
tendentium prœcavendarum^ fed etiam œqualïtatis feu œqualis fucceflonis inter
utrumque Regnum retinend£ caujâ cœterijque rationibus relatis , alias adhuc
fuiffe , quibus moti ad hanc exclujionem Jiabiliendam defeenderint , apertè tra-
dunt : hœc certè Unionis avertendœ ratio , fi fola fuifj'st , fœminarum Gallica-
rum &7 ab iis defeendentium exclujionem ab Hifpanica fuccejjïone unquàm per-
fuafiffet , quas tarnen non minus ac mares Gallicos ab Hifpaniœ Regnis exclu-
di confiât , cum in Galliâ faltem hodie fuccedere nequeant. Pcrgit Carolus :
Perfpexifle Te ceffante iftâ ratione fundamentali fucceffionis jus fecun-
dùm Hifpaniae leges in proximo cognato adeôque in filiis fecundo &
tertio Delphini fubfiftere , quia fcilicet ante cos alii ad fucccffionem Galli-
cam vocentur , & ce(fante feu déficiente ratione legis ipfa quoque lex cefjare
debeat. Quis verb vulgari huic juris rcgulœ locum unquàm fecit , ubi plures
in lege ferendà rationes concurrerunt , quœ in cafu ex kge illâ àijudicando non
omnes cefjare nofeuntur ? a ut qui s etiam à fecundo & tertio filio Delphini
Unionis metum abefje abfuturumve ejfe fuo periculo affirmaverit ? quid déni-
que Pat ri £5? Avo , optimis abfque controverfià vo.untaîis & conventionis
propriœ legumque à fe latarum interpretibus , vel potius utrique contrahentium
parti abfque calumnia aut impietate refpondebitur , qui paclis connubialibus &
alibi exertijfime caverunt , omnes lnfanturn Gallue nuptarum liberos &
defeendentes , mares & fœminas , excludi & pro exclufis haberi debe-
re , quamvis ifti vel ex iis aliqui prsetendere vellent aut poffent , in il-
lorum pe.rfonis locum non invenire nec confiderari poire aut debere
rationes expreffas, aiiafve, quibus ceu fundamento excluiio ifthacc inni-
Oooo 2 ti
640 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires ti poflet. Caterum Hifpaniœ leges in Regni fuccejjlone fequendas efie adeo
gfn. df non negamus , ut eam ex illarum prœfcripto adornari pojiulemus , illud ftmul
L pertendentes , anterioribus per novijjimas derogari , hafque cum partis connu»
— bialibus juxta exprejfa m ils Legis firmae , ftabilis, & çeternae verba contineri,
tum in recentiorïbus Regni Commis promulguas in novo legum Hifpanicarum Co-
dice reperiri. Peffime verb &? contra legum harum tenorem porrb infcrt Caro-
lus : Idée à fe , fi abfque liberis deceffiifet , fucceflbrem Regnorum fuorum
declarari & vocari fecundo genitum Delphini Ducem Andegavenfem , il-
loque pariter defun&o Delphini filium tertio genitum , cum per ilîas ipfas
leges non femel) fed fiepiùs, £5? ipfie Infantes, non folum confiante, fed etiam
foluto matrimonio Gallico , non improli , & earum liberî Gallici omnes
mares & fœminee, illorumque defcendentes, primo, fecundo , tertio, aut
quarto loco geniti , in infinitum omnes , nullâ diltinftione gradûs atten-
ta , etiamfi Regum Catholicorum, qui tum fuerant, aut unquam fuccef-
furi efTent , Itirps non mafcula tantùm fed univerfa extingueretur , abfc
que ullà cogitati vel non cogitati cafùs, temporis, modive exceptione,
ab omni Ditionis Hifpanicae praefentis, praeteritac & futurse parte etiam
feudali excludantur , & exclufi declarentur , non aliter ac SI NATI
VEL IN LUCEM EDITI NUNQUAM FUISSENT. Cur autem ex
futili bâc argument andi ratione non eâdem opéra Dux quoque Aurclianenfis ad
fuccejfioncm vocatus fed plane prœtcritus fuijfet , ni fi tpfa ver i tas fateri corn*
pulifjet , non attento remotiore illius in Galliâ fuccedendi ordine , eum nihilo-
minus ob illimitatam renuntiationum validitatem unà cum Rege Chriflianijfi-
mo £s? fil 10 Delphino ejufque primogenito ab Hifpanicâ fuccejjïone penitus ex-
clufum ejfe & manere ? 6)uis non magis fecundum Regulam juris à Carolo
citaiam hinc colligendum putet , quamvis in illius poteftate fuijjet , uti refra-
gantibus téfiamentis , Avito & Paterno , totque reclamantibus legibus & ju-
ratis atque à Sede Apoflolicâ confirmatis consent ionibus non fuit , ifihœc dif-
pofitio feu déclarât io, ipfummet tamen noluifie , eam valere , fi pervidere po-
tuiffet , rationem à fe exprejfam, cui uni & Joli apertijfime fuperfirucla fuit,
manifefiè deficere , adebque nec Andegavenfem nec Bituricenfem Duces ab ipfo
vocatos cenjèri debere. Omnium autem iniquijjîmum atque abfurdiffimum ejl ,
tertio loco Archi-Ducem Imperatoris fecundo genitum vocari , exclufo
ob rationem antè commemoratam & ad sequalitatem fervandam , cum
fobole primogenito Rege Romanorum , omiffifque penitus filiabus Aufiria-
cis , fubftituto demum in dericientis Archi-Ducis locum cum flliis Sa-
baudiae Duce. Et nos equïdem inter Hifpania fucceffores , fed pofi Domum
Aufriacam hune Ducem numeramus^ adebque & illi injuriam faclam affeve-
ramus , duobus Gallicis Principibus pralatis , quos , uti funt , omnino exclu fos
eportuit. Domum Aufiriacam vero utriufque fexûs & cujufcunque dignitatis
non aliter ad Hifpanicam fucceffionem admittere velle , ut per egregios hojce novi
juris autlores Gallic£ familiœ ad illam aditus pateat , etiam nobis tacentibus
perinde effe quivis intelliget , atque apertè profit en , nolle eos , fi pênes ipfos fia-
ret , ut Domui Auftriacœ nullœ Hifpanicâ leges , antiquœ vel récent iores , ulla
priorum Regum dijpofitiones , ullœve pacliones connubiales aliœve amplius auàm
iilis
\
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 641
illis fedeat, fuffr agent ur : negare clenique contra vêlera £5? nova exempla, Hifpa- Affaires
nia Reges aut unquam Imper io Romano prafuisfe aut ilhul ambuisfe feu ad id GfN- Dï
afpirare potuisfe. Qjiod fub fi non annectitur de pace & concordiâ inter Im- L £uR0*
peratorem & Regem ChriltianitTimum non folîirn confervandâ , fed etiam !
per matrimonii nodum arftiùs conilringendâ , id ad fucum Carolo facien-
dum necesfarium fuit , quaji conftlio if hoc & obîefatione confeientia la fa
abundè fatisfaclum , omnifque Domni Anfiriaca illata injuria plcnè reparata
esfet, cum ne mine m lateat , qua cujufvis injufiitiâ colendà &? cuique tribuendâ
obligatio fit, quid Pater liberis , quid legitimus Princcps fubditis debeat , quid-
que adeo Imperatorem , ut ut pacis, fi ea honefie frui liceat , fludiofijjimum age-
re oporteat. Quicquid veto fraudis aut violent ia adhibitum haclenus fuerit , vel „. ..
in poflerum admitti poffït , aderit profeclb jufia caufa ope fuâ Author , tefiis & ^"j s
eufios fœderum Deus : confurgent ad coercendam immancm non unius Orbis Bur- DEU.VT
boniam cupiditatem cum reliqui Europa Principes & Status , tum praprimis & Homf-
Pacis Pyrenaa aliarumque explicitarum conventionum vindices : ipfi etiam popu- "es haud
/;' peregrinam nunc , quà funî oppreffi ', manum non magis ofculantes quàm exe- Jju!f
crantes , experta per tôt facula Auflriaca lenitatis officiique fui memores ad phaturâ.
prifiinum mox obfequium palam redibunt , perfidis jufiitia temeratoribus , per-
vaforibus £5? tyrannis , eorumque ajfeclis , fatellitibus ac mini/Iris pœnas Di-
vinas atque humanas haud dubie non evafuris,
Remarques fur les Affaires du Tems prefent , traduites de VAn- Remar-
glois : depuis le 26. Février (8 Mars) juf qu'au 5 (1?) îwAffd-
MarS) 1701.
1 . Réflexions fur les Préparatifs de Guerre faits en Hollande . z. Sur Je
dernier Mémoire préfenté aux Etats-Généraux par Mr. le Comte d Avaux.
3. Le Caraclére , que le Cardinal de Richelieu a attribué aux Efpa-
gnols , apliqué préjenttment aux François. •
SI le dernier Mémoire , préfenté à Sa Majefté par l'Ambafladeur de
Hollande, n'étoit pas fuffifant , pour convaincre la plupart des perfon-
nes, que les Etats-Generaux n'a voient point péché contre la Politique, en
reconnoiffant le Duc d'Anjou pour Roy d'Efpagne , que la chofe ne tire
à aucune conféquence , & qu'ils ne feroient point de Traité avec la Fran-
ce , ni avec l'Efpagne, fans le confentement de l'Angleterre & des autres
PuifTinces intéreffées à la Faix de l'Europe ; il eft à croire que ks grands
Préparatifs , qui fe font préfentement en Hollande , pour s'oppofer aux
Ennemis , feront ouvrir les yeux > & qu'on reconnoîtra la fidélité des Hol-
landois pour l'intérêt public. Il leur feroit difficile d'oublier la Cruauté
avec laquelle ils ont été traitez en 1672. lors que Louis XIV., fans aucun
fujèt, fut afTez injuite pour venir fubitement fondre fur eux avec une piaf-
fante Armée , qui les auroit engloutis , fans la conduite & le courage de
Oooo 3 nôtr
res du
Tems.
«^
PE.
642 MEMOIRES, NEGOTIATIO NS, TRAITEZ, ET
Affaires nôtre Grand Roy , alors jeune Prince d'Orange , lequel ranima les Peu-
gev de pi^g par fon exemple.
l'Euro- || ne £luc pOUlt s'imaginer que la République de Hollande puifTe fe bif-
fer gagner par aucun moïen. Elle a pour Chef un Confeil qui eit toujours
attentif à la confervation de les Membres, & qui ne manque point de ré-
veiller fes voitins aux aproches d'une tempête. Comme il eit certain,
que le Roy de France prend toujours pour injultice de la part des autres,
ce qui n'eit qu'une précaution néceffaire pour une jufle défenfe, il paroic
qu'il elt fort irrité , non-feulement contre les Hollandois qui témoignent
un fi grand zélé pour prévenir le danger* mais auiïi contre les Anglois,qui
embralTent leur parti : il les menace tacitement , parce qu'ils ne veulent
point prêter l'oreille à aucun Traité particulier; c'eft aufïi leur intérêt de
rejetter ces fortes de propofuions, devant être perfuadez, qu'ils feront fe-
courus par leurs Voilîns , lesquels font pleinement convaincus qu'il n'y a
rien de bon à attendre du Roy Très-Chrétien ; & encore moins, lors qu'on
luy voit f lire de fi grands préparatifs, avec des circonitances qui doivent
être regardées, comme le prélude certain d'une rupture.
On nous dit que , fi "Philippe de Macédoine n'obfervoit aucuns Trai-
tez que ceux qui fe trouvoient conformes à fes intérêts, & que, fi l'on
a vu en un même jour, par fon confeil , la paix fuivie de la guerre, pour
laquelle il ne manquoit jamais de prétexte , nous n'avons pas raifon de
nous plaindre de ce que Louis XIV. tient une pareille conduite, quand
l'occalion s'en préfente. Certainement , fes Sujets font fi fubtils , pour dé-
couvrir quelque forte de juitice dans tout ce qu'il luy plaît d'entreprendre,
que l'homme le plus éclairé & le plus pénétrant auroit peine à détruire
ces beaux prétextes , quelque injuftes qu ils foient en eux-mêmes. Ne
nous difent-ils pas, par exemple, que fi par le paifé la France a eu inté-
rêt de chercher , à faire naître de la mefintelligence entre les Provinces-
Unies & la Monarchie d'Efpagne, il eit prefentement de leur intérêt de
leur infpirer une intelligence parfaite avec cette même Monarchie. Mais
les Etats n'ignorent point ce qui a été dit par Manlius , fçavoir , que le
meilleur moien pour conferver la Paix, c'eft de fe préparer à la guerre, de
telle manière qu'on fe trouve toujours en état de s'oppofer à toute entre-
prife illégitime, & qu'une telle précaution arrêtera indubitablement toute
prétention de l'Ennemi. De plus, ils connoiflent très-bien que leur con-
fervation elt de la dernière confequence pour celle de l'Angleterre. Auflî
doivent- ils fe tenir affurez d'être fecourus de toutes les forces de leurs Voi-
fms, entièrement intéreffez à prévenir leur ruine; laquelle ne manque-
roit point de donner au Roy de France les moiens de pourfuivre fes def-
feins contre la Liberté de l'Europe.
Mais , pourquoy fe méfier des bonnes intentions de Louis le Grand ? il
a toujours été fi généreux , qu'il eltimeroit une lâcheté de fonger à fur-
prendre aucun de fes Voifins. Peut-on remarquer aucune de fes entre-
prifes qui n'ait eu la juitice pour fondement ? Non afTurément; jamais il
n'a formé de projet qui ne fut directement pour le maintien de la Paix
de
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. ty
de l'Europe , & pour procurer quelqu'avantage à Tes Voifins. S'il fait affaires
aujourd'huy p aller des Troupes dans la Flandre , & s'il remplie de Sol- <#*• de
dâts les Villes les plus proches de la Hollande ; c'eit feulement comme L'E^H0"
Ami, afin d'être à portée pour fecourir cette République contre quelque
Ennemi. Qui fçait il ce n'eft point cqritre le Czar de Mofcovie, ou con-
tre le Grand Seigneur, auprès duquel, & par-tout ailleurs, ce Monar-
que aiant beaucoup d'EmiiYaires par le moien de Tes Louis d'Or, il a pu
découvrir quelque deifein contre Tes chers Alliez les Hollandois.
2. Le Comte d'Avaux par ion dernier Mémoire affura les Etats-Géné-
raux de la fincérité des intentions de Ton Maître pour la confervation de
leur Commerce & de la Paix de l'Europe ; leur donnant parole , que les
Troupes, qui font en Flandres , feroient rappellées dès le moment qu'il
ne reiteroit plus aucun foupçon de jaloufie. Mais un Prince , dont les
Forces font il nombreufes , doit toujours être un fujèt d'ombrage; outre
que les François font à prefent fi bien connus , qu'on ne fait aucune efti-
me de leurs plus belles paroles.
Nous trouvons dans l'Hiitoire , que pendant les troubles caufez en Eu-
rope & en Aile par les mouvemens des Francs , leur Ambafladeur en Ma-
cédoine propofoit une bonne Paix> mais Ptoîomée leur répondit, qu'il
ne croioit point que ce fût tout de bon , & qu'il ne fe fîeroit jamais à leur
parole, à moins qu'ils n'euffent entièrement defarmé. Les Mémorialiites
François pourront bien recevoir une Réponfe femblable à celle des Macé-
doniens.
3. Nous pouvons dire aujourd'huy des François ce qu'autrefois le Car-
dinal de Richelieu difoit des Efpagnols. Il leur reprochoit, que toute leur
affectation à la dévotion n'étoit qu'un pur effet de leur intérêt. Cqs re-
proches étoient feulement par raport aux injuftices & à l'infatiable ambi-
tion de cette Nation, qu'il regardoit comme ennemie de la Chrétienté.
Un faïnt zélé, difoit-il, les a faits auteur i d' un fi bon Etabli [fement \ il enten-
doit les François Proteftans : cette obfervation eil fans neceiîité & par
conféquent fans raifon, excepté en ce qui regarde la continuation de leur
ufurpation , laquelle ils prétendent rectifier & rendre digne de louange
en vertu de leur bonne intention ; quoiqu'il foit défendu de faire du mai
en vue de produire un bien.
Pendant que le Cardinal parloit ainfl contre cette Monarchie, qu'il avoit
deffein de rabaifler , il prétendoit relever la gloire de fon Maître & l'hon-
neur de fon Miniftére. Louis XIII. aimoit mieux courir les risques d'une
Guerre, que d'expofer la Chrétienté aux armes de l'Ottoman qui lui avoienc
été plusieurs fois propofées. Il avoit pour Maxime fondamentale, quun
grand Prince doit non- feulement expofer (a Perfonne , mais encore tous les in-
térêts de fa Domination , plutôt que de manquer à fa parole ^laquelle il ne
peut 'violer , fans perdre de fa Réputation & Je rendre méprijable à tout le
monde. Ce qui doit obliger les Roys d'examiner de bien près de quel-
le manière ils s'engagent dans des Traitez; mais, lorsqu'ils les ont faits,
ils en doivent être religieux obfervateurs.
Les
l'Euro
te
£44 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Les François ont autrefois obfervé ces bonnes Maximes; mais, par une
gen. oe fatalité attachée au pouvoir abfolu, elles ne fe pratiquent plus en Fran-
ce. J'ôfe aflurer , qu'il n'y a pas une perfonne de bon fens qui ne con-
vienne que les Reproches du Cardinal de Richelieu ne puifTent être tres-
juflement appliquez à la France. Car, ce font autant de Cenfures des Ma-
ximes qui font aujourd'hui en ufagê dans fon Gouvernement. Nous avons
Jes Plaintes que les Efpagnols ont dreifées contre les Contravations faites
par les François au Traité des Pyrennées. Combien de Provinces & de
Villes le Roy de France leur a-t-i! enlevées , en violant la folemnité
des Traitez ? Nous voions un Duc de Lorraine privé de fa Duché ,
parties de l'Allemagne & de la Flandre démembrées & acquifes à la
Couronne de France , fous des prétextes de dépendances; c'eft-à-dire,
une Guerre continuelle , fous couleur d'une interprétation de Traitez
de Paix , par lesquels tout le monde croioit que la tranquillité devoit être
parfaitement rétablie.
Il nous efl venu de toutes les parties de la France des Plaintes les plus
améres, mais les plus refpeclueufes & les plus foumifes ; ces Plaintes fe
font répandues par tout le monde par l'oppreflîon de tant de bons Sujets
qui vivoient en pleine confiance fous la foy des Edits irrévocables , &
fur la parole inviolable de leur Roy. Tous ces fidèles Sujets n'ont-ils
pas été réputez comme autant de viclimes qui ont été immolées par ce
Zélé religieux que la France fçavoit fi bien autrefois reprocher à l'Ef-
pagne?
Sans alléguer d'autres Faits fur ce Sujet , je laifle à toutes perfonnes
judicieufes à fe repréfenter ce que nous devons attendre de l'union
de deux Nations , dont les fentimens font fi conformes en tirannie &
en bigoterie.
Relation Relation des Débats dans la Ville (de Londres) au fujet de la Faix
batsfUria & ^e &* Guer?v ^ comprife en deux Lettres à un Gentilhomme
Paix & ia à la Campagne: traduite de VAnglois.
Guerre.
I. L E T T R E,
Contenant des Raifons pour la Paix.
Mon sieur,
C'est une chofe étrange, que vous, qui êtes fi capable de fèrvir vo-
tre Païs, vous vous abfentez de la Ville, dans un tems où peut-être
cette Nation depuis fa Conquête n'a jamais eu plus befoin'des Confeils
& de l'afliftance des honnêtes & habiles gens. Je me flate pourtant que
vous viendrez. Néanmoins, s'il faut que je vous écrive, je vous prie de
me
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 64;
me permettre de le faire librement, & de n'être pas môme de votre fen- Afmirm
timent lorfqu'il le faudra. Je ne fuis pas furpris de vous trouver un peu GfN- nK
entier dans votre opinion à l'égard des débats préfents : permettez-moi de
vous dire, qu'il eft fâcheux pour un homme folitaire à la Campagne dans
cette faifon de l'année, & deltitué de toute converfation , de n'ctre pas
(Ci j'ofe parler ainfi) d'accord avec lui-même, c'eft-à-dire de n'embruf-
ier pas l'opinion qui lui convient le mieux, en s'abandonnant à fes propres
penfées & devenant la proye de fes inclinations. Un côté de la queltion
devient le côté favori: & ainfi, comme il arrive dans tout ce qui plait,
il eft trop tard pour s'inftruire fi ce côté mérite ou ne mérite pas de s'y
ranger j mais, je fuis pourtant ravi que vous ne foyez pas encore allé fi
loin. Car, quoique vos raifons foyent fans réplique, dites-vous, vous fou-
haitez de favoir fans partialité ce que je penfe en faveur ou contre vôtre
opinion; en quoi vous paroiffez avouer, que des raifons, en apparence
fans réplique, pour foutenir une opinion, ne doivent pas toujours y dé-
terminer entièrement un homme; ce que je crains que beaucoup de gens
n'apperçoivent point à rems dans la préfente Difpute,pu;fque fans cela ils
ne feroient pas fi pofitifs au commencement de la femaine, mais fe refer-
veroient la liberté de changer de fentiment vers la fin, comme cela arri-
ve tous les jours à des Meilleurs qui viennent de la Campagne. Il elt
vrai, que c'efl une matière de fi grande importance, & qu'il y a tant à
dire de côté & d'autre, qu'un homme a befoin de tems, & d'une conver-
fation mélangée, pour s'en inflruire duëment , afin d'être en état d'en juger ;
& il trouvera même encore après cela, qu'il ne fauroit venir à aucune ré-
folution, s'il prétend de répondre aux raifons d'un des cotez, finon en
pefant celles des deux. Je fuivrai donc cette Méthode, puis qu'elle vous
plait, & j'effayerai de cette manière fi vous & moi pourrions devenir du
même fentiment: car Ci nous ne devenons d'accord, en pefant la chofe
à la balance, & n'ayant d'autre vue que la bonté de la caufe, que peut-on
attendre d'une troupe de gens divifez en partis, & qui ont des vues &des
intérêts différens ?
Afin d'exécuter ce que j'ai promis avec toute l'impartialité pofîible ,
& pour m'épargner la peine d'une Collection, j'ai eu une longue conver-
fation avec Monfr. P. qui eft extrêmement porté pour une Paix. Après
vous avoir entretenu de ce qui s'eft pafTé avec lui , j'ai deffein d'aller trou-
ver Monfr. R. qui eft au contraire pafiionné pour une Guerre , & de vous
écrire dans ma prochaine Lettre ce qu'il me dira. J'ai fait choix de gens
chauds, parce que , généralement parlant, ils font plus finceres & plus
ouverts que les autres, Monfr. P. quoiqu'il s'échaufe & qu'il foit tenace
dans le difeours, ne laifTe pas d'avoir des penfées modérées, & eft très-
éloigné de réfoudre la moindre chofe avec précipitation ; & quoi qu'il
foit rempli de paflîon & de regret dans plufieurs chofes , à l'occafion
defquelles quelques pirrfonnes fe trompent à fon égard , le croyant contrai-
re à la Conftitution préfente, je vous aflïïre qu'on lui fait tort, & qu'on
feroit bien d'être fur les gardes en fe fervant d'un argument , qui , s'il
Terne XL PpPP paffe ,
6tf MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET"
AïfAïuEs paffe, prouveroit que la Conltitution , ou du moins le Gouvernement,
gen.de a peu de Partifans.
l'Euro- je juj $ls franchement, que je venois pour favoir ce qu'il penfoit dans
le préfent débat ; à quoi il me répondit , qu'il feroit ravi de favoir mon
opinion & de me dire la Tienne.
Pour ce qui efl de mon opinion, lui dis-je , je ferois pour la Paix ; mais
que je craignois quon trouveront la Guerre néceffaire, & que je fouhaitois
favoir de lui fi cela n'étoit pas ainfi. Ho, me dit-il , je vous entens.
Vous êtes pour la Guerre, une Guerre elt néceffaire, & ce qui ell né-
ceflfaire doit-être fait, c'eft en un mot tout ce qu'on peut dire; ce qu'il y
a à ajouter ce font de certaines raifons de prouver cette nécelîité,que
j'ai fans doute toutes prêtes en poche , car elles ont été foigneufement
difperfées par toute la Ville; ce qui faifoit qu'il crut que j'étois venu pour
avoir fa réponfe fur ces mêmes raifons: mais, me dit-il, je veux vous
faire changer de fentiment, & en même tems vous furprendre; car, au
lieu de prendre à tâche votre prétendue nécefîité, je la fuppoferai pré-
fentement; c'eft-à-dire, lui dis-je, que vous donnez gain de caufe? Non
vraiment, me repondit-il;fi un Médecin dit à ion malade que telle cho-
fe eit abfolument néceffaire pour le recouvrement de fa famé, laquelle
le malade lui dit qu'il elt impoflible de trouver , elt-il plus près de fa
fanté pour un tel avis? Si je fais voir qu'une Guerre elt impraticable dans
les circonflances où efl la Nation , vous ferez obligé vous même de
vous départir de votre nécefîité, & de trouver des réponfes à vos preu-
ves; ou bien de conclure que la Nation efl dans un état defefpéré ,
c'eft-à-dire dans la nécefîité de faire la Guerre, dont elle n'eft pas en é-
tat. A Dieu ne plaife, lui dis-je, qu'une Guerre foit remplie de diffi-
cultez, & que pourtant elle ne foit point impraticable ; & quoi qu'il y
ait beaucoup de fortes raifons pour la Guerre, me dit-il, cette Guerre
peut néanmoins n'être pas néceffaire. Hé bien , lui dis-je , je vous prie
que je fâche vos raifons pour le contraire. Mes raifons, me dit -il, font
toutes prifes des circonflances où nous nous trouvons.
En premier lieu, nous fommes fort divifez entre nous , & quoi que
nous layons été pendant la dernière Guerre, nous n'allons que de pis
en pis-, & il fe trouve quelque chofe de mauvais & de fmgulier dans
le cas préfent , qui fait une différence effentielle par raport à la Guér-
ie. Dans ce tems-là, une forte de Gens avoit toutes les Affaires en mani-
ment, & les autres étoient faits pour obéir. A préfent en toute apparence
un Parti doit régner à la Cour, & l'autre au Parlement ; & de cette maniè-
re nous avons une efpece de Guerre en dedans, à laquelle fi nous ajou-
tons une Guerre au dehors, quelle belle befogne n'en ferons-nous pas? Non,
lui dis je, le danger commun réunira les efprits, ou bien on aura de nou-
veau recours aux expédiens dont on s'efl déjafervi. Le Siège de Jerufa-
lem , dit-il, n'a pas réuni les Juifs, quoi qu'aucun d'eux n'eut jamais de-
mandé, ni ne fe fut attendu, d'avoir un Roi de la part des Romains; &
quand tout l'Art du Gouvernement n'a confifté fi long-tems que par l'ufa-
FE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. (547
ge des Factions , comment eft-il poflible de parvenir tout d'un coup à les Amutss
déraciner entièrement? Et pour ce qui e(l des expédiens, ils font tous GfN- D*
ufez, le charme en elt perdu ; il fe peut que quelques-uns s'en ferviront à L'^UR0"
leurs propres vues , mais tout le monde les a pénétrez. Rien n'efl plus
utile que les expédiens , mais lorfque l'artifice en eft connu, ils ne font
plus que des Stratagèmes dont un Général ne peut pas fe fervir fou-
vent.
Nonobftant cela, me dit-il, pour vous montrer combien je fuis bon,
je veux bien fuppofer que le danger commun (ou tout ce qui vous plaira)
nous réunira tous dans une vigoureufe Guerre , ou qu'il nous y fera don-
ner les mains ; mais ,que je vous faffe une fimple queftion: Avons-nous, ou
de l'argent, ou du crédit, ou des Troupes , ou des Conducteurs, pour une
Guerre telle que doit être celle-ci, une Guerre très-férieufe? Il n'y a per-
fonne qui aime moins à faire les chofes à demi que moi ; & quoique mon
opinion foit contre la Guerre, fi l'on vient à la réfoudre, j'y Ibufcrirai
d'auffi bon cœur que qui que ce foit de ma Nation ; car, je fuis convaincu
que tout ce qu'on peut entreprendre par cette voye doit être pouffé par
une courte & vigoureufe Guerre; mais, voici l'abrégé de toutes mes rai-
fons oppofées à une Guerre, c'efl que nous ne fommes pas en état, autant
que nous devrions l'être, pour la faire. Là-defTus, il tira de fa poche un
papier qui contenoit une fupputation des charges de la Nation dans la pré-
fente année, de la Flote, des Troupes, & des Dettes} à quoi il avoit a-
jouté les fommes dont on auroit befoin pour groiïir la Flote jufqu'à cent
VaifTeaux de Guerre & pour équiper ou emprunter deux cents autres Vaifc
féaux; pour augmenter nos Troupes en Angleterre jufqu'à 2.0000 hommes,
& pour envoyer de-là la Mer pour des Troupes & des Négociations
jcooooo Livres par an; jugeant tout cela nécefiaire en cas de Guerre. Et
comme l'argent doit être donné par avance chaque année, & que pour
cela le crédit doit être rétabli, il a mis dans le papier un Article de ce
dont il prétend qu'on auroit befoin pour payer les intérêts courants , ce
qu'il proportionne autant qu'il peut à la difette préfente, & ce que le Gou-
vernement ne fauroit trop bien éviter dans la fuite, en donnant de gros
intérêts des Fonds abaiflez déjà levez, ou qui doivent encore l'être. Je
ne faurois me fouvenir de toutes les particularitez. Il y a apparence que
cette fupputation fera publiée. Mais,fuppofant en général, que les fraix
de la Guerre ne monteront pas tout à fait fi haut, & qu'on pourra retran-
cher & rabattre quelque chofe de plufieurs Articles , la fomme ne laiffe pas
d'effrayer , & j'en fus extrêmement frapé. Ce qu'ayant remarqué , il me
prit par la main: Mon Ami, me dit-il, vous qui êtes un grand Guerrier,
vous ne devez pas perdre courage fi-tôt; fi les furprifes ne font pas de
mife dans la Guerre entre nous deux, je vous donnerai du tems pour vous
recueillir: je vous prie relifez encore le papier; ce que je fis: mais, com-
mençant à diminuer quelques Articles; j'ai trop d'avantage dans notre cau-
fe , me dit-il , & n'ai pas befoin de m'en fervir. Otez un demi Million , &
combien refte-t-il ? une prodigieufe fomme, lui répondis-je : mais n'êtes-
Pppp 2 vous
/
6\% MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
l'Eu ko
PE.
Aïfairfs vous pas fatisfait, me dit-il, ou bien avez* vous quelque chofeà répliquer?
G*.*, de je ]ui avouois qu'il m'avoit confondu , & que tout ce que je pouvois ef-
perer c'étoit qu'il y avoit de l'erreur quelque part. Non, me dit-il, fî
pour vous complaire je foufcrisàla nécefïité d'une Guerre, il feroit fâcheux
que vous ne foufcriviffiez pas, pour avoir votre Guerre, à la nécelïité
d'une fomme à laquelle vous ne fauriez trouver à redire. Mais , pour paf-
fer outre, où trouvera-t-on cette fomme? Ne peut-on pas l'avoir ? Si j'a-
vois confédéré, que le Crédit immenfe de Papier, & les fommes prodi-
gieufes que ce gros intérêt a apporté du dehors, nous avoient donné une
opinion trompeufe de nos Richeffes, comme fi nos pertes fur notre mo-
noye & dans notre commerce , & par ladépenfe pour nos Troupes au de-
hors pendant la Guerre, pouvoient avoir rempli nos poches. Mais, fup-
pofant qu'on peut trouver de l'argent, car je veux vous complaire autant
qu'il rneft poffible, comment, je vous prie, le levera-t-on? Dites ce que
vous voudrez, je veux bien vous entendre. J'avoue, lui dis-je, qu'il y a
beaucoup d'objections à faire contre une Guerre, & que celle-ci efl la
p!us grande de toutes \ mais , quoique je ne nous croye pas aufîi riches que
nous nous le faifons, j'efpere que la fomme mentionnée, ou bien une au-
tre qui en approche, pourra fe trouver, & que le Parlement aura des
moyens de la lever pour un an ou deux, ou du moins qu'on la lui avan-
cera en donnant un gros intérêt \ car , quoique nous nous arriérons de beau-
coup ce n'elt pas une grande affaire, fi dans un fi court efface c'etems, com-
me on doit le présumer , on fait un effort avec une fomme allez grande
pour nous procurer une Paix fure : mais, j'avoue franchement, que û la
Guerre dure plus long-tems, je ne vois pas comment trouver cette fom-
me, fi-non que le Peuple, fuivant fon rang & fa condition, ne retranchât
du fuperflu de fa manière de vivre, & fuppofantmême cela je ne vois pas
comment-elle peut-être levée fi-non par une Impofition générale , ou en
taxant le Païs également. On doit efperer que ces grands dangers ani-
meront le courage des gens, & les porteront à de grandes réfolutions.
Tout ceci véritablement ne donne qu'un fâcheux préfage , mais il nous
convient bien mieux de fuivre quelque vue de fureté, que de donner lâ-
chement les mains à notre ruine. La-deffus il me dit, qu'il croyoit que j'a-
vois raporté tout ce qui pouvoit fervir à ma caufe, & qu'en même tems
j'avois avoué tout ce qu'il prétendoit, c'efl- à-dire , que la Guerre étoit un
remède defefperé; car, me dit-il, vous êtes obligé, au cas que la Guer-
re dure plus d'un an ou deux (&qui pourra l'empêcher? ) d'avoir recours à
des fuppofitions qui ne font fondées que fur de fimples pohibilitez. Il pour-
fuivit en difant, que quoique tout ce qui avoit été dit des difficultez par
raport à l'argent fut feul fuffifànt pour prouver que la Guerre étoit imprati-
cable , pour rendre encore ces difficultez plus infurmontables , il me pri-
oit de fuppofer une interruption totale du Commerce ; car , comme nous
n'avons à prefent aucun port François ou Efpagnol, c'eft-à-dire, aucun
qui foit de la moindre défenfe depuis Flushing jufqu'à la Morée, excepté
en Afrique, & que probablement les François fe ferviront de toutes leurs
For-
PE.
RESOLUTIONS D'ET A T, M. DCC. I. 649
Forces Maritimes pour pirater, ce que les Efpagnols font pareillement en Affaires
état de faire ; rien ne feroit plus convenable en cas de Guerre, que d'em- GEN'- DE
pécher tout négoce pir Mer, puis que dans de pareilles circonilances nous L'ED"KO"
ne pouvons fans cela nous attendre qu'à perdre plus par-là que nous ne ga-
gnerons. De cette manière donc les Revenus des Douanes & les autres
Fonds tomberoient, & fans parler des pertes des Marchands, qui en met-
tant leur argent dans les Fonds pourront ferevanger fur le Public, que fe-
ra le pauvre Artifan, quand toutes les Manufactures n'auront plus de cours?
Vous croyez à préfent , dit-il, que j'ai tout dit; mais, pour vous en dé-
tromper, ajoutez ,je vous prie, au manque d'argent & à la perte du Com-
merce dans votre Guerre, (pour parler modeilement) le manque probable
du fuccès. Halte-là, lui dis-je, le fuccès dépend de Dieu; à la faveur
duquel nous avons (pour parler aufïi modeflement) autant de droit que
nos Ennemis. Pour ne pas vous difputer votre droit, dit-il, dont vous
faites fort bien de parler par comparaifon, le fuccès dépend aïlurément de
Dieu; mais Dieu fe fert de moyens, & les prépare prefque tous vifible-
ment à fes fins. Je fouhaiterois bien préfentement de favoir de vous qui
font les Gens fur la probité & la capacité defquels cette Nation peut fe
repofer, tant dans le maniment des Negotiations étrangères, que dans le
commandement de fes Troupes ? Nous fumes dernièrement impliquez dans
une aulîi grande Guerre, & dans autant d'affaires étrangères, qu'ait jamais
été cette Nation, & nous fommes cependant aulîi embarraifez à chercher
des Anglois capables pour l'une ou pour les autres, que nous l'avons ja-
mais été. Cela paroit incroyable; mais quiconque le croit, ce que la plu-
part fera d'abord, je le prie de réfléchir encore une fois là-deilus, quoi
que je fois convaincu que cela eiï vrai. J'accorderois même que cette vé-
rité efl incroyable, fi elle n'étoit pas de nature à ne pouvoir être, ni ca-
chée, ni éludée. La raifon n'en efl cachée à aucun homme d'efprit. Je
fouhaiterois que cela eut été auflî manifefte lorfqu'il en étoit tems , que cela
l'efl réellement à préfent. Il y avoit, fans doute, & il y a encore de bra-
ves Gens dans l'Armée, qui dans la conjoncture préfente pourroient être
capables de tout Commandement. Mais leur a-t-on jamais donné les oc-
cafions d'en donner des preuves ? A-t-on fouffert qu'ils fe fignalafTent ?
Les a-t-on foutenus & encouragez? Fit-on jamais la moindre diltinélion
quand les Gens fervoient bien ou mal? Un dévouement aveugle, qu'on
peut appeller une tromperie, & qui (avec la permiflion de l'Ecrivain dé-
naturé) efl diamétralement oppofé au Caractère d'un véritable Anglois;
un pareil dévouement, dis-je, & non le mérite, n'étoit-ii pas le feul
moyen pour parvenir à de grands polies ? Hïnc Me laebrima. Quelques
autres furent opprimez , foulez aux pieds , & eurent des mortifications pour
leur pain quotidien. Les Dupes alloient leur train > & que pouvoient fai-
re les gens d'efprit, fi ce n'eft d'aller où on les conduifoit, c'elt-à-dire de
fè laifTer prendre pour dupes, ou en feignant de l'être, tromper fes fupe-
rieurs en fe gliffant ainfi dans les Emplois? Pour ce qui efl des affaires é-
Pppp 3 tran-
GEN. DE
l'Euro
PE.
6$o MEMOIRES, NEGOTIATIONS , TRAITEZ, ET
Actai*m trangeres, je verrois volontiers une Lifte de quelques Anglois qui y eurent
part depuis la Révolution; on fait que les Secrétaires n'ont pas été en état
d'aller plus loin que ce qui leur étoit néceffairement prefcrit. Et ceux au
dehors avouent pour la plupart, fous le même prétexte, qu'ils îbnt reve-
nus auffi ignorans qu'ils s'en étoient allez, d'autres ayant le maniment des
affaires. C'efr. ainfi que les Emplois , qui étoient jadis l'Ecole pour élever
des gens à de grands Polies , ne font point recherchez à préfent par les
gens d'efprit , & en vain même les demanderoient-ils. Ce font ceux-là
qui les obtiennent, qui veulent bien être exclus du fecret, ou qui ne font
pas capables de le garder. Des gens fans nom , qui vraifemblablement ne
font point connus "aux Cours où ils réfident, puisqu'ils ne le font pas mê-
me en Angleterre. Cette année a été une année extraordinaire: une Ré-
volution furprenante en Efpagne; de grandes Négociations à Vienne; une
nouvelle Dignité en Brandebourg; les Rois de Dannemarc, de Suéde, de
Pologne, & le Czar de Mofcovie en Guerre. Qui, je vous prie, eft affez
favant pour dire les Noms de nos Miniftres à ces Cours : & qu'y gagnera-
t-on en les nommant; leurs noms ne ferviroient-ils point de matière à re-
proches? Et tout ceci dans un fiecle de Héros, qui nous difent qu'ils ont
mis dans les mains de cette Nation (dans ces mêmes mains) la Balance
de l'Europe. Des Héros afTûrément, puifque l'un d'entre eux, le Grand
Commandeur, & en même tems le Grand Politique (car un Héros doit
être tout enfemble) comme le fait fon dernier Panegirifte Renégat, pou-
voit renverfer par fon feul foufle des Royaumes entiers & des Provinces,
dont, ni lui, ni fon Maitre , n'ont aucun droit de difpofer. Nous avons
fouvent ri du Partage des Indes fait par le Pape, mais voici un Par-
tage de fa Grandeur qui fera pleurer un enfant encore à naitre.
je l'interrompis ici, & le priois de ne point continuer fes Réflexions,
qu'elles n'étoient point de fiifon à préfent, que l'Affaire étoit trop férieufe
pour en railler , & qu'il falloit oublier le paffé , s'unir & voir en avant.
Il ne fuffiroit donc pas, me dit-il, de pardonner ce qui eft paffé , fau-
droit-il encore l'oublier ? Ce feroit fans doute l'approuver. Pouvons-nous
prévenir la même chofe à l'avenir , fans fe rappeller la mémoire de ce
qu'on voudroit prévenir ? Et croyez-vous en confcience que de s'unir a-
vec de telles gens (comme par exemple avec le Grand Négotiateur) qui
ont mené la Nation dans des précipices ,- ce foit le moien d'en tirer cette
Nation? Lui & fon unique Ami Anglois le Panegyrifte font-ils des gens
de Ci grande importance? Vous êtes encore échauffé, lui dis-je; je vous
avoue que fans réfléchir ou déterminer où git la faute, les Hollandois ne
font pas de bons Maîtres d'Ecole pour les Anglois; la conduite qu'il tien-
nent avec nous , & la conduite qu'il faut tenir avec nous , font oppofées
comme le feu & l'eau, & il paroit qu'il y a quelque chofe d'incompatible
de leur génie au nôtre. Vraiment , dit-il , vous ne vous appercevez pas
que vous faites-là une grande Reflexion ,& qui paffe toutes celles que je
puis faire. Je ne fuis point contre les Hollandois , mais bien contre quel-
ques
GFN. DE
j-'Euko-
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. <&*
ques Hollandois , qui dans la Révolution font entrez dans des Pofles Affaires
(Dieu fait comment & pourquoi) fort au-delfus d'eux ;& qui, s'étant depuis
toujours approprié le fecret de toutes les Affaires d'importance, en ont
éloigné autant qu'il étoit poflibîe tous autres, à l'exception de quelque
peu de Dupes babillardes qui fe mefurent à leur aune. C'eit de-là que je
croi que tous nos malheurs ont pris leur fource. Mais, pour ce qui eii des
Hollandois en général , ce n'eit pas mon delfein de les accufer tous ; je
fai qu'ils foufTrent autant que nous par le penchant pour les Dupes & qu'ils
s'en apperçoivent tout comme nous. Ce font des gens fobres & induf.
trieux, de la même Religion que nous, dont le pais eit l'azyle de la vé-
rité & de la liberté, qu'i;s ont achetées fort cher, & qu'ils ne rendront ,
je croi, qu'à bon prix. Nous leur devons beaucoup par raport à la Révo-
lution. A préfent qu'ils font auiîi prêts du danger que nous étions alors ,
comprenez-moi bien je vous prie , quoique je fois pour la Paix , je fuis
bien éloigné de penfcr qu'il faille les abandonner. Hé bien , lui dis-je, fî
cela eit ainfi , je puis efperer encore quelque chofe de bon de vous -y &
puifque vous voilà de bonne humeur , parlons des remèdes qu'on peut ap-
porter à tout ceci. Des Remèdes, me répliqua- t-il ; c'eit l'ouvrage du
Parlement. C'eit fe moquer que d'attendre du remède de ceux dont vien-
nent les maux } de pareilles gens font hors d'état d'être convaincus de
leurs erreurs, & quand même ils en auroient du regret , ils vivent dans
un fiècle qui ne leur permet pas de s'en corriger. Parlez leur , ils vous
diront qu'il eit impoflible de faire quelque chofe des Anglois > à les enten-
dre, ils ont trouvé quelque chofe d'incorrigiblement mauvais dans la maniè-
re dont nous fommes faits , ou du moins defefperent-ils que nous ne nous
en cor igerons jamais. Ils n'ont certes pas tout-à-fait tort , puifqu'avec
50 Miilons d'Angleterre, &je ne fai combien de Millons de Hollande, ils
n'ont pas formé un corps de plus d'hommes tant Anglois que Hollandois ,
dans les conjonctures dont nous parlons, qu'ils ont de doigts à leurs mains.
Non, fi nous nous engageons dans une Guerre , ils n'ont pas un feul
homme Anglois ou Hollandois à oppofer aux Catinats. Ils n'en eurent
pas d'avantage dans la dernière Guerre , mais furent obligez d'avoir re-
cours à des Waldeks , Schombergs , & Vaudemonts, quoique \qs Païs-Bas fu-
rent jadis l'Ecole où tant nous que d'autres Nations apprimes à nous for-
mer pour la Guerre. Telles font les confequences fatales des Dupes en
faveur. Mais, allons plus loin; non-feulement nous n'avons pas des Offi-
ciers capables pour les grands Commandemens, mais nous n'en avons pas
même qu'on en puilTe rendre capables, fi ce n'eft que nous établirions une
nouvelle Bande de Penfionaires pour Généraux, Lieutenant-Generaux,
&c. Vous vous imaginez peut-être, que je veux parler de tels qui ne font
plus propres à la Guerre, mais bien plus je parle de ceux, tant Anglois
que Hollandois , qui n'y furent jamais propres. J'avoue, lui dis-je, que
nous fumes malheureux dans la dernière Guerre, mais cela peut avoir été
par nôtre Infortune , car le hazard ne préfide jamais pius que dans la
Guerre. Infortune! me dit-il: je vous prie, nommez les choies par leur
nom
6fi MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires nom. Les infortunes font-elles régulières , font-elles périodiques, comme
gen.de jes Eclipfes? Si le hazard avoit régné, nous aurions eu plus de coups de
l'Euro- bonheur. Le peu que nous en avons eu n'étoient aiïurément que des ef-
— 1^1 fets vifibles de hazard ; car nous ne les avons attnppez que par la bra-
voure de la Soldatefque & des Officiers Subalternes , & en quelque ma-
nière fans autorité. Après tout , vous devez avouer , que nous ne fau-
rions raifonnablement nous attendre à une meilleure conduite que cel-
le que nous avons expérimentée , & par confequent à un meilleur
fuccès que nous avons eu. Nôtre mauvais ménagement eft l'effet nécef-
faire des Caufes inévitables; nous pouvons les déplorer, mais nous ne
fommes pas en état de les détourner. J'ai infifté d'autant plus là-deffus,
que je croi que le defefpoir , où nous fommes du Succès , eft une Objeclion
contre la Guerre à laquelle on peut le moins répliquer. L'autorité d'un
Parlement peut aller ioin pour difpofer la Nation à fe foumettre à leurs
charges & à leurs pertes ; mais, quel remède peuvent-ils trouver pour une
mauvaife Conduite , fi ce riejl qu'ils prennent eux-mêmes le ménagement de la
guerre en leurs mains?
Après cela, il reprit haleine , & s'étant un peu recueilli, je croi , dit-il ,
en- avoir dit allez, & que 11 cela étoit raflemblé il vous donnerait une vue
fort defagreable dans Ion étendue. Confiderez donc, je vous prie, une
charge de Taxes dont cette Nation ne reffentit jamais la pareille ; aucun
Commerce, ou il vous voulez moins qu'on n'en a eu de mémoire d'hom-
me; moins de Sujets capables, tant pour les Negotiations épineufes , que
pour les grands Cornmandemens, moins, dis-je, que nous n'en avons eu
dans le tems d'une Paix profonde; des Factions élevées pour caufer une
Guerre intefline, joint à un Efprit de Parti qui facrifie tout à fes intérêts
propres ; un manque général d'eflime & de refoecl: pour fes Supérieurs ,
fans qu'il foit poffible de rétablir leur crédit perdu ; des -jalouiies & des
craintes dans le cœur des meilleures Perfonnes & des mieux affectionnées,
& une opinion naiffante parmi le bon peuple (pour des raifons que j'ai
évité de rapporter) que nous n'avons pas Dieu pour nous ; & , pour un
dernier trait , joignez à tout ceci un mauvais Succès , c'eft-à-dire , un
Succès tel que nous avons raifonnablement lieu d'attendre.
Enfuite il s'arrêta un peu, & ajouta après; je vous prie de confiderer
avec moi combien le Traité de Partage a changé l'efprit de la Nation Es-
pagnole contre fon Inclination naturelle, quoi qu'il ne s'y agiffoit unique-
ment que de l'intérêt des Grands , & que le gros du Peuple n'en reflen-
tit que de l'indignation, à laquelle la Maifon d'Autriche n'avoit aucune
part, & que tous dévoient perdre tout d'un coup leuts intérêts dans cet-
te Monarchie, quoiqu'il s'y fuffent habituez depuis 150. ans, & fortifiez
par les François , par toutes les inimitiez , préjudices , averlions, maxi-
mes incompatibles , coutumes , temperamens , & intérêts , qui font en
quelque manière capables de rendre un peuple odieux à un autre. Si
donc on ne f.iuroit compter fur rien de ce qui a été allégué , lors que le
Peuple
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. t ô*;$
Aftairec
GEN. DE
Peuple feul efl provoqué & irrité: furquoi peut-on compter, ou que doit
on attendre dun Peuple tel que je vous lai reprefente , ii-non qu a 1 ex- L>EuRO
emple d'un homme qui fe noyé il empoignera jufqu'à une plume , & tout PH.
ce qui a l'ombre de pouvoir le fauver. Vous favez auffi qu'il y a une o-
pinion au fond, conçue par plus de gens qu'on ne le croit généralement,
laquelle fe répandra enfin lors que la Guerre preflfera; une Opinion, dis-
je y qu'on trouvera alors un expédient. Je vous entens, lui dis-je, & je
puis vous alTurer que le Parlement ne manquera pas de pourvoir à ce
que vous penfez;mais, après tout, vous avez faifi mon foible. J'avoue que
la Révolution me tient véritablement aflervi, & que, quoi que j'aye des
yeux pour voir ce que je fuis fâché de voir, & ce qui n'eft que trop viii-
ble , rien n'efl capable de me détourner de l'opinion que j'ai de la Caufe ,
ou de l'inclination que j'ai pour elle. C'eil une Caufe noble , que la Caufe
de la Vérité & de la Liberté ; &, quoi qu'elle périfTe entre les mains de
la Génération préfente, elle pourra revivre & profperer même entre d'au-
tres mains. Si ceux , qui ont eu l'honneur d'en être les premiers Promo-
teurs , s'en font montrez indignes, & qu'au lieu de laiifer le foin à la Caufe
même de les jultifier, (laquelle feule le pouvoit faire ) ils en ont fait une Cau-
fe pleine de reproches par leur mauvaife conduite. Si cela , dis-je , y a
donné occafion , puijfent les Oeuvres de ténèbres venir au jour , rj? ce qui
s'efl dit tout bas dans des recoins être manifejlé publiquement , afin que la
Caufe foit vengée de pareilles gens , & quelle rfen fouffre point. Ma crain-
te eit que cette Nation, & même toute l'Europe, ne viennent à boire
d'une Coupe qu'ils n'ont aucunement remplie. Et je vous prie de me
pardonner fi je vous dis encore , que je n'y vois point d'autre Remède
qu'une vigoureufe Guerre; & qu'aucune difficulté n'y peut fervir d'Objec-
tion fuiïifante. Mais, vous m'avez, je vous l'avoue , mené jufques-là, que
j'efpere de toute mon ame, qu'on put trouver quelqu'autre remède. Ho !
dit-il, c'efl la tâche d'un Parlement; je vous promets que s'il n'en trouve
aucun autre que la Guerre, je me mettrai de vôtre fentiment. Et je vous
promets, lui dis-je, que s'il en trouve quelque autre, je me rengerai du
vôtre. Après cela, nous allions-nous féparer, Iorfque quelqu'un entra qui
nous engagea de nouveau dans un difcours fur le même fujèt, qui vous
furprendraj mais je ne faurois écrire d'avantage à préfent.
Je fuis, &c
Londres U 20. Janvier 1701.
Tome XL Qqqq II.
<?54 MEMOIRES, NEGOTIATIQNS, TRAITEZ, ET
.Affairfs . ,
gbn.pb IL L E T T R E.
l'Euro-
- fE' — Ou Raifons de croire que la Cour ifeft pas portée pour
la Guerre.
Monsieur.
il. Let- T'Es te re que vous avez reçu ma Lettre, & je ne doute pas que vous
tre , ou J Re f0yez fort fatisfait du Diicours de Monfr. P. en faveur d'une Paix;
ducroire i' a véritablement allégué de bonnes raifons- mais, je vous prie de fufpen-
kCour dre vôtre jugement jufqu'à ce qu'on vous ait fait voir la grandeur du dan-
portée à ger : alors j'ai lieu de croire que la mauvaife condition où nous nous trou-
laPaix. vons, & que nous avons à combattre, au-lieu de vous rendre vous &
d'autres honnêtes-gens fournis à elle, excitera en vous & dans toute la
Nation un efprit d'Union & de Réfolution convenable à une fi grande oc-
cafion. Mais Je n'ai pas encore eu le tems de difcourir avec Monfr. R.,
& il paroit que les François eux-mêmes mettront hors de doute dans huit
ou quinze jours la néceiîlté d'une Guerre. Contentez-vous , s'il vous
plait, à préfent du Récit de ce qui s'elt pafle de plus avant que nous nous
ieparamesi ce que je vous ai dit qui furprendra. Car, comme j'en ai
été informé, plufieurs de vous ,Gentilhommes de la Campagne , qui ne
voyez les chofes que de loin, vous vous flatez que la Cour a épuifé juf-
qu'au fond tout ce bruit de la nécefîité d'une guerre, qu'elle veut encore
une Armée & n'en démord point dans la conjoncture préfente, afin de
remplir le Peuple de craintes & de jaloufies pour des dangers imaginai-
res , auquels vous efperez pa(Tionnément qu'il n'y a aucun fondement. Le
Ciel veuille vous ouvrir les yeux , avant qu'il foit trop tard. Nous autres
ici en Ville , bien loin d'être attaquez de la contagion , comme vous le
penfez, nous ne favons que faire de la Cour, nous ne favons de quel cô-
té elle penche, ou à quoi elle eil contraire , ni même il elle dort ou û
elle veille, comme vous l'entendrez. Le Gentilhomme que je vous aï
dit qui entroit lorfque Monfr. P. & moi allions nous feparer , eii certain
Monfr. S. Monfr. P. avoit afTez de tems pour me dire à l'oreille que
c étoit un honnête-homme, avec qui nous pouvions parler librement. A-
près les Civilitez ordinaires , & quelque difcours fur l'Election , nous re-
vînmes infenfiblement à nôtre premier fujèti ce qui donna occadon à
Monfr. S. de nous dire, qu'à préfent il étoit fatisfait que le Gouvernement
étoit contre la Guerre; ce que vous (regardant Monfr. P.) ferez bîen-aife
je m'afïïire d'entendre. Pour ce qui eli de moi , dit Monfr. P. il y a
long-tems que je fuis de ce fentiment, je ferois pourtant bien-aife d'y être
confirmé, je commençois moi-même, répliqua Monfr. S. de ne m'y pas
fier, lors qu'après que le Roi de France eut accepté le Teitament, je vis
qu'on ne fit rien au de-là des mefures prifes l'Eté dernier de diiîbuare le
Parlement , & d'en convoquer un autre après les Fêtes alors prochaines.
Je
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. df5
Je fai que l'on prétendoit que la conjon&ure l'avoit exigé ainfi ; mais cet- Affaires
te raifon venoit trop tard pour une Réfolution prife avant qu'elle exiltât. ^m. de
Si on avoit réfolu la Guerre, la Cour auroit changé de mefures , exami-
né le dernier Parlement , & le trouvant difpofé à de vigoureufes Réfolu-
tions, fufpendu pour cette fois l'Acle Triennal dans une circonltance
de cette nature dans laquelle les préparatifs qu'on auroit pu faire n'au-
roient donné lieu à aucun danger , puifqu'il n'eft pas probable que la
même chofe arrive jamais; & li on s'étoit apperçu qu'on s'étoit trompé
dans ce qu'on attendoit du Vieux Parlement , il n'y auroit eu aucun
tems perdu pour en convoquer un autre; fi , comme on le prétendoit,
on ne pouvoit en convoquer un plutôt que nous le pouvons à préfent.
Quoiqu'il en foit , on perdit tout l'hiver à prendre des mefures ; &
toutes les Cours de l'Europe furent obligées de négocier avec la Fran-
ce , & fe préparèrent pour la Guerre pendant que nous nous entre-
difputions fur les Elections. Pourquoi , dit Monfr. P. , tout ceci ne
vous a-t-il donné que du foubçon ? N'y en avoit-il pas allez pour vous
convaincre? Peut-on accorder la CaiTation d'un Parlement, & le deffein
d'une Guerre ? Ou du moins ceux qui confeilloient l'un pouvoient-ils
avoir l'autre en vue? Et quoiqu'il y eut d'abord un bruit des mouve-
ments que la Cour faifoit en hâte en Hollande, & qu'elle dépêchoit
de toute-part fes petits Miniftres d'Etat fur de grandes Affaires ; tout
cela ne s'évanouït-il pas dans un moment? Et pouvez-vûus me dire
qu'il en fut dit un mot depuis , ou que quelque choie ait été fait qui
tendit à la Guerre? Car le grand Jglibnby n'a pas été envoyé , je penfe,
pour faire la Guerre , mais pour convaincre la Régence par une voye
amiable, qu'elle a mal interprété le Partage (c'efl dequoi je vous allure)
& fi l'on avoit eu la Guerre en vue, n'auroit-on pas eu foin de pacifier
les EcolTois, dont les Réfolutions unanimes montrent dans quelle difpofi-
tion ils font à préfent, laquelle, quoi qu'elle ne vaille pas la peine qu'on
s'y arrête lors que nous n'avons à faire qu'à eux feuls , mérite affurément nôtre
attention, fi nous avons maille à partir avec un Ennemi aulîi vigilant que
la France, qui ell leur ancienne Alliée. Et puis,fi nous voyons plus loin,
qu'à-t-on fait, je vous prie, pour dégager les Troupes Hollandoifes qui
font en Flandres , lefquelles j'ai fottement cru être maitres des Villes où
elles font en garnifon, comme pour gages de ce que les Efpagnols doivent
aux Etats: mais quelques Officiers m'ont dit qu'elles y font réellement
prifonnieres, & qu'elles feront conliderées comme telles fi quelque con-
cert fecrèt n'engage point les François à en agir plus honnêtement. Mais,
ce qui eft de bien plus grande importance encore, quelles mefures avons-
nous prifes nous & les Hollandois, pour mettre en futeté nos effets à bord
des Gallions, en cas de Guerre? Nous pûmes bien jadis envoyer atta-
quer la Flote Hollandoife de Smirne fans y avoir des effets , & contre le
Droit des Nations; car, nous avions feulement réfolu la Guerre, mais nous
ne l'avions pas déclarée. Mais , avec la France, il n'y a point de Droit des
Nations, puis qu'il n'y a point de Foi publique , & que fouvent elle fait
Q_qqq 2 la
Affaires
GEN. DE
l'Euro-
pe.
6f6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
la Guerre fans la déclarer ;& fi nous fommes encore un peu délicats , noire
n'avons qu'à embraffer nos intérêts propres , & abandonner charitablement
le refle. J'interrompis ici , & dis à Monfr. P. qu'il devoit m'excufer fi je
l'avois mal compris , à quoi pouvoit avoir donné lieu l'envie que j'avois
qu'il fut de mon fentiment; car, à dire la vérité, je ne pus conclure de tout
ceci, fi-non qu'il étoit fâché contre la Cour parce qu'elle ne prenoit point
de mefures pour la Guerre. Si j'avois pu croire, répondit-il, qu'elle fon-
geoit réellement à la Guerre, je ne lui pardonnerois jamais d'avoir perdu
tout l'hiver fans entrer dans des mefures à cet égard: mais, en vous mon-
trant qu'une pareille conduite de la Cour elt ridicule & incroyable , je
croi vous avoir fuffifamment prouvé qu'elle n'efl pas pour la Guerre , fa-
chant qu'elle efl impraticable , & que pour cela elle n'a pris aucun foin de
prévenir des pertes, qui après tout en cas de Guerre auroient été pour
la plupart inévitables & irréparables. Mais, lui dis-je, quand même j-e
ferois de vôtre fentiment, je ne laifferois pas de croire que le Gouverne-
ment auroit mieux fait d'avoir du moins témoigné quelque refTentiment.,
& donné quelque menace de Guerre pour avoir de meilleures conditions
pour la Paix. Mon ami, me dit Monfr. P., le Traité de Partage a mis
la Couronne d'Efpagne fur la Tête d'un François , quoiqu'il foit fait (du
mois fuivant la lettre du Traité) pour le prévenir. Ferons-nous une au-
tre folle expérience, & forcerons-nous les Efpagnols, fous les apparences
d'une Guerre, (laquelle nous n'avons pas deffein de faire, & pour la-
quelle nous ne fommes pas en état) à mettre la Flandre & toutes fes for-
ces entre les mains des François ; & lors que cela fera une fois fait, au-
lieu de fe battre à Breda, Frontière de la nouvelle Confédération , nous
pourrions en venir à un autre Traité de Reftitution. A Dieu ne plaife,
fui dis-je. Non, me répondit Monfr. P. je fuis autant contre cela que vous,
& plus même j car, quoi que vous penfiez autrement, je crains que vous
n'en preniez le chemin. Mais , dites moi je vous prie, lui dis-je, fur cette
manière d'argumenter ^ n'aurions-nous pas mieux fait de reconnoitre le
Duc d'Anjou dès le commencement? Car, nôtre refus tout plat de le re-
.connoitre.pourroit épouvanter les Efpagnols jufqu'à mettre la Flandre en-
tre les mains des François, comme il paroit qu'ils feront, s'il y a plus que
des complimens dans leurs offres. En vérité, me dit-il , je fuis.fi mal-
heureux, que quoique je fois de l'avis de la Cour dans cette Affaire, je ne
faurois pourtant approuver fa manière d'agir, qui pour l'ordinaire eir, iri-
compréhenfible, du moins pour moi, qui fuis un homme franc, & non
un Politique. Car il y en a qui pourroient croire que fur l'acceptation
du Teftament la Cour devoit être porrée pour la Guerre ou qu'elle ne le
devoit pas être} un Génie Supérieur ne héfite jamais dans les grandes oc-
calions} la véritable magnanimité fe déclare dans un moment, & ne pefe
point les conféquences, & en vérité ne faire rien dans des circoniîances
auxquelles il n'y a point de tems à perdre, c'efl perdre toute occafion de
-faire jamais la moindre chofe. Si la Cour ne vouloit abfolument point la
Guerre, qu'avoic-elle. à faire, fi-uon d'envoyer inceflàmment (non fon
Par-
Ï>E.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 6?7
Partifan) mais une bonne fois un habile homme en Efpagne, pour recon- Affaire*
noitre ce Roi, pour renouvelJer les Alliances, pour encourager la Regen- Gf- DE
ce & la fortifier dans les véritables intérêts de fon Païs ? Ou s'il, n'y avoit **E™°~
pas moyen de réuffir en cela, de n'épargner ni infiances ni indultrie pour
former une Faction fur ce pied-là. Mais, 11 la Cour étoit dans le deffein de
faire la Guerre, pourquoi ne fongeoit-on pas au plutôt à toutes les mefu-
res imaginables pour la pouffer j & à envoyer un autre habile homme (fl
nous en avons deux) en Allemagne, pour agir de concert avec l'Empe-
reur, & s'affurer de l'Electeur de Bavière, en lui donnant la Flandre, ou
ce qu'il auroit voulu, à ce qu'avec fes 6000. hommes & les 12000. Hol-
landois on eut couvert les meilleures Villes, & qu'on s'y fut tenu jufqu'àce
que les Troupes de Hollande & d'Allemagne les euifent joints. Il auroit
paru par-là, qu'on avoit deffein de faire quelque chofe, & qu'on vouloit
mfpirer de l'efperance & du courage; mais, en ne faifant rien de côté ni
d'autre on a abatu les efprits. Et joint à ce que je vous ai dit de ce qui
m'a convaincu, & beaucoup d'autres, qu'on ne pouvoit rien faire par la
voye des Armes, il paroit comme fi on avoit commis quelque grand faux-
pas, ou qu'il y eut eu quelque fecret fur le tapis. Vous me direz fans
doute, que tout dépend d'un Parlement. Mais, qui peut prévoir ce qu'un
Parlement fera? Puis que je n'ai jamais vu un Parlement qui ne veut pas
entendre raifon, ni même les plus fortes raifons , lors qu'on veut pren-
dre les plus juftes mefures pour fes intérêts. Je fuppofe une Séance ou-
verte par une Harangue qui fit connoitre que la Flandre eit entre nos
mains , & qu'on avoit befoin de vigueur & de diligence pour s'en rendre,
maitre, & pouffer ainfi la Guerre; que fans cela on feroit obligé de laif-
fer les villes au pouvoir des François. Y eut-il jamais un Monllre de
Parlement au monde, qui eut voulu abandonner ces villes dans les circon-
flances où nous fbmmes ? J'avoue, lui dis-je, qu'il n'y a que trop de véri-
té dans ce que vous me dites -, mais je ne laiffe pas d'efperer encore qu'on
ne faffe quelque chofe fous main , & que nous faifons des Portraits peu
reffemblans de tout ce que nous comparons. Car, pour revenir à nôtre
fujet, quoiqu'il ne paroifTe jufqu'ici, ni Réfolution, ni Jugement, dans la
conduite de la Cour, je ne la u rois me réfoudre à croire ii-non qu'ils font
portez pour la Guerre. Les Cours aiment à avoir des Armées ; le Roi a
vieilli dans les Campemens: Quelles autres vues peuvent-ils avoir? Com-
ment peuvent-ils fe croire en fureté? Je fai que le Peuple parle à tort &
à travers; mais, en fuppofant ce que vous fouhakez, quelle fureté ont-
ils de la France pour fe fier à elle? Si le Roi Jaques étoit lui-même de
.retour ici, pourroit-il avoir eu quelque confiance en la France ? Je ne
conçois pas ce qu'on peut alléguer à ceci, fi ce n'eflque nous fuppofions
que Dieu a abandonné nôtre Cour à l'efprit d'endurciffement. Ajouterai-
je ici ce qui a plus de pouvoir fur les gens d'efprit que toute autre confi-
deration, c'eft-à-dire , que s'ils fe montrent capables d'elTuyer l'affront qui
leur été fait , ils perdront tout crédit dans l'efprit de tout le monde. 11
eft plus que tems , dit Monfr, S., que je parle à mon tour ; ces Argumeas
Qqqq 3 font
PE.
(5f8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires font les mêmes qui m'ont fort choquez, & qui m'ont tracafTé pendant un
gïn. de mois dans la Ville. Mais, écoutez premièrement , je vous prie , ce que
i/Euuo- j'ay à ajouter à ce qu'a dit Monfr. P., & ce que j'avois deffein de vous
dire il y a Iong-tems, s'il ne m'avoit interrompu. Je vous demande bien
Pardon , dit Monfr. P. , les foubçons que vous formiez fur des Preuves
palpables m'ont échauffé.
Monfr. S. continua, & dit, que les raiions que j'avois alléguées, &
d'autres de cette nature , l'avoient long-tems aveuglé , & qu'il s'étoit flat-
té lui-même, que la Cour avoit quelque grand deffein, qu'elle cachoit
foigneufement. Mais à préfent , dit-il, telles & telles gens, qu'il nommoit,
fe déclarent contre la Guerre : & peut-on bien s'imaginer qu'ils ignorent
le fecret ? Et s'ils favent que ce fecret efl favorable à la Guerre , comment
le peut-il faire qu'ils fe déclarent contre la Guerre ? Leur intérêt propre,
ou celui de leur parti, peut les y rendre contraires: mais fi l'on eft dans
l'intention de faire la Guerre, cela ne les porteroit pas à s'y oppofer ou-
vertement, mais plutôt à la prévenir fous main , en la rendant encore plus
impraticable qu'elle n'eft, ou qu'ils l'ont faite. Ceci, je l'avoue, me paroit
de grande conféquence; &, à préfent que j'y fais réflexion, comment la
Cour, fi elle a réfolu la Guerre, n'a-t-elle pas empêché que fes partis fe
déclaraffent, jufqu'à ce qu'elle ait vu de quel côté fe tourneroient les E-
leétions? A l'égard de cela, dit Monfr. P., elle efperoit par-là de tourner
les Elections à Ton gré; mais l'effet n'a pas répondu à fon attente, à quoi
j'aurois voulu lui recommander de réfléchir le plus ferieufement. Elle eft
aiïurément dans PendurciiTement dont vous avez fait mention , fi elle ne
voit point dans quelle -fituation elle eft, & où elle s'eft mife elle même
en tems de Paix; elle eft trop fage affurément (quoique je n'aye pas gran-
de opinion de fa fageffe) pour hazarder la Guerre. Mais, je vous prie,
dit-il , en s'addrelTant à Monfr. S., apprenez-nous ce que vous avez à dire aux
Argumens de mon Ami , qui vous ont û long-tems aveuglé. Au dernier,
dit Monf. S., que je confidere comme le plus fort, j'ai ceci a répondre;
que fi à la Cour on juge que la Paix intereffe l'Angleterre, rien n'eft plus
héroïque à un Prince que de facrifier fon relTentiment au bien de fon peu-
ple; & quoi qu'il foit fâcheux à des perfonnes privées même, qui font
gens d'efprit, de préférer leur propre intérêt à leur rellentiment, & bien
moins encore l'intérêt des autres, & qu'on voit peu de Princes qui en
foyent capables ; il eft néanmoins confiant que fa Majefté deguifa fon fen-
timent fur l'infolente rejouïflance faite à Paris par authorité, fur la fauffe
nouvelle de fa mort à la Boyne, & de tout les villains artifices de cette
Cour pour l'affalliner , & fagotter une Paix le ptutôt po(ïïble;car les Fran-
çois croient fort portez pour la Paix au grand mécontentement des Alliez,
jugeant fans doute qu'elle étoit de faifon & abfolument nécelfaire. Les
autres raifons font fortes contre de tels concerts fecrets avec la France,
dont on a parlé, &. que je ne faurois croire; car comment cela fe peut-il?
Quoique je fois affez perfuadé qu'il y a plus dans le fond qu'on ne voudra
que nous fâchions. Mais , qu'il me foit permis d'ajouter une chofe,que l'in-
clina-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 655?
clination de la Cour pour la Paix eft le chemin de perfuader à bien des Affaires
gens delà vérité de pareils Concerts, qui (ans cela n'y auroient jamais, GfN- DE
fongé. On fe dit déjà communément, que Ja Cour ne veut ni ne peut rom- *-EvR0'
pre avec la France. Je me fouviens, dit Monfr. P. , que lorfque le Ne- ■
gociateur revint après avoir répandu ces femences de Jaloufie par Ton Am-
bafTade engageante, on fit beaucoup d'attention à fon Extravagance en
recommandant le Prince de Galles, comme s'il en étoit aimé. Ceci joint
à quelques autres de Tes imprudences & de celles de fa bande babillarde,
aufli-bien que des raifons de plus grand poids, dont on ne doit pas faire
mention, ont donné une jaloufie à des perfonnes d'efprit même, qu'il
ménageoit les intérêts de plus d'un Prince; fi c'eft la vérité, Dieu le
fait, mais je n'en fai rien. Quand le Peuple, lui dis-je , eft fâché & cha-
grin , c'eft l'a coutume de s'abandonner aux jaloiifiès & aux craintes , pour les
quelles il n'y a fouvent non plus de fonds , que pour fe repoferfur des Pro-
phéties & fur des Songes , autres refuges des efprits foibles. Comment ! dit
Monfr. P., vous nous traitez bien feverement. Je vous demande pardon,
lui dis-je, je ne vous traite pas plus feverement que moi-même; car vous
pouvez être aifuré, quefi j'étois une fois plainement convaincu que la Cour
elt pour la Paix, je deviendrons jaloux à mon tour ;& vous ne croyez pour-
tant pas, Monfr. P., que ce foit un bon fonds de jaloufie.
Mais , pour revenir encore à notre fajet„ 11 la Cour penche pour la Paix,
il eft vraifemblable qu'elle appréhende, qu'en cas de Guerre le Parlement
en prendra le ménagement dans fes propres mains: mais, j'ai cependant
lieu de croire que la Cour eft pour la Guerre, mais qu'elle le tient fur fes
gardes , pour remettre toute l'affaire au Parlement. Et,Monfr.P,, fi vousrai-
fonnez conféquemment , en difant que fi la Cour n'avoit découvert Cqs inclina-
tions avant les Elections, ces Elections feferoient faites plus conformément
h fes fouhaits. N'a-t-elle pas raifon, dans ces circonftances dangereufes , de te-
nir fa penfée cachée? Je fuppofe encore qu'elle fouhaitoit que le Parlement
ne s'affemblàt que jufqu'à ce que la Régence d'Efpagne& la Cour de Fran-
ce euiTent fait les pas nécelfaires pour faire porter des Refolutions unanimes
au Parlement: car, rien ne répond moins aux circonftances prefentes que
l'union & la vigueur convenable dont on eft entièrement convaincu. Peut-
être aufn la Cour a prévu, que (1 le Parlement s'étoit afTemblé plutôt, il
auroit voulu prendre fa part dans la Guerre fur Mer feulement : comme
auîTi le Parlement pourroit devenir du même fentiment , qu'une augmen-
tation des Forces par Terre fera néceiTaire. Si la Cour eft pour la Guerre,
vous avez rencontré jufte, s'écria Monfr. P., & je commence à compren-
dre la raifon des bruits que fement quelques grands hommes (j'entens quel-
ques gens qui font dans de grands poftes ) depuis peu de jours, c'eft-a- di-
re, que dans la vue d'une Guerre, l'avis de la CalTation du Parlement
feroit le meilleur qu'on put donner. Tout ce que j'ajouteiai eft, quefi
c'étoit-là l'intention de pareils avis (ce que je ne faurois croire) \\s doi-
vent avoir de bonnes épaules ;tnais que fi la raifon de leur avis étoit, com-
je l'efpere, qu'ils étoient du fecret , que la France veut nous donner fans
une
660 MEMOIRES, NEGOTÏATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires une Guerre toutes les furetez raifonnables que nous pouvons efperer d'à*
gen. de Voir par la Guerre , leur avis leur fera honeur.
ï/Euko- Mais, dit-il en fe tournant vers moi , approuvez -vous cette Politique
FE* de la Cour dont vous avez parlé , pour venir à bout de la Guerre , & que
vous croyez qu'elle pourroit avoir? Non, lui dis-je, j'en fuis bien éloigné,
ces fortes de manières d'agir ne conviennent , ni ne conviendront jamais,
à cette Nation. Nous fommes un Peuple franc & fincere, & nous vou-
lons être traitez comme tels. Je fouhaiterois de tout mon coeur que la
Cour eut convoqué d'abord le Parlement , & qu'elle eut pris les mefures
dans lefquelles elle l'auroit trouvé prêt d'entrer. Le Parlement feroit ve-
nu par degrez ( à l'ouverture de la Scène ) dans toutes les mefures nécef-
faires , & aujourd'hui même nos préparations auroient été fort avancées.
Je fuis & j'ai toujours été d'opinion, dit Monf. P., que lorfqu'il n'y a que
des deffeins fur pied qui peuvent fouffrir le jour, on peut les mettre ou-
vertement en exécution , & que c'elt-là la véritable manière dont il en
faut agir avec cette Nation, laquelle les Procédez Mifterieux remp'.iiTent
de jaloufies, donc elle ne fe défait pas aifément dès qu'elle les a conçues
une fois, mais qu'elle pouffe alors fort loin, comme nous voyons qu'il ar-
rive. Car, depuis ce tems-là, les Conférences obfcures en Flandre & l'ef-
pece de Paix qui les accompagna, laquelle fut fui vie de la diflblution de
toute Union & bonne intelligence avec les Conféderez & avec toutes les
apparences de la plus grande confiance , la plus étroite amitié avec la
France ; lorfqu'en même tems la perfécution de ceux de notre Religion en
France & autre part s'accroiflbit , fans qu'il parut qu'on s'en mettoit aucu-
nement en peine chez nous, & qu'il fembloit que Dieu & les hommes a-
voient abandonné par-tout l'intérêt Proteftant ; toutes ces chofes-là, dis-je,
ont rempli d'étonnement tous ceux qui font en quelque manière capables
de reflexion , & les ont fait trembler & appréhender quelque mauyaife
Cataftrophe. Après cela parut premièrement le Partage & depuis leTef-
tament ; & Dieu veuille nous fortifier contre ce qui doit les accompagner
encore. Nous fommes évidenment fous l'afpecl: de quelque mauvaife Pla-
nète, qui paroit nous avoir accablé en tems de Paix. En ce cas-là, fi le Par-
lement trouve pourtant qu'une Guerre foitle véritable remède, je m'y fou-
mets. Et après cela nous nous féparames.
J'efpere, Monfieur, que j'ai rendu juftice h Monfr. P. Je ne me fou-
viens pas d'avoir oublié aucune chofe eiTentieHe , fi ce n'eit qu'il infifla
beaucoup fur l'avantage que nous prétendions tirer de la Guerre, laquelle
Queftion je mettrai dans tout fon jour dans ma converfation avec Monfr.
R. , qui fans doute y fouferira abfolument.
Une autre chofe , qu'il dit tenir d'un Gentilhomme Ecoffois , eft que la
femaine pafTée dans le débat au Parlement d'Ecoffe aufujetd'un Aclepour
confirmer leur Droit à Caledonie, auquel il paroit que le Roi, dans fa Let-
tre à leur Parlement, leur avoit dit qu'il ne pouvoit confentir fans en ve-
nir à une Guerre; il y fut foutenu que les chofes ayant changé de face à
préfent, & que la Guerre étant devenue probable pour desraifons déplus
grand
RESOLUTIONS D'ETAT , M. DCC. I. 661
grand poids, il étoit hors de doute que Sa Majeflé en étoit devenue p'us Affatkf.s
libre. Sur cela le Commiiïkire leur dit qu'il avoit de nouvelles afilirances G™-DR
de Sa Majeité qu'elle avoit les mains liées plus que jamais dans cette affai- LÊUR0"
re. Cela n'a pas befoin de Commentaire: &, pour vous parler franche- —
ment, quoique je parle en compagnie, je fuis plainement fitisf.iit qu'on
ne (bit point porté à la Guerre ; mais non pas qu'on iouffre que les Alar-
mes du dehors, & les méfiances au dedans, aillent leur train, jufqu'à ce
que tout le crédit & tout l'argent foit perdu; de manière que lorfque le
Parlement s'aiTemblera (ce qui paroit être le plan) quelque nécefTaire que
foit la Guerre, elle fera en vérité impraticable; & alors cette malheureu-
se Nation dupée & abandonnée fera contrainte de foufcrireàde nouveaux
Papiers de Partage , & à toute autre chofe qui peut auffi aifément fe calTer,
fi-tôt que d'autres auront capitulé , & qu'on aura mis ordre aux Affaires
d'Efpagne.
Je fuis &c.
Londres Je 24. Janvier 1 70 1 .
p
Lettre de Af***** écrite à M**% Envoyé Extraordinaire de ***
à la Haye, contenant diverfes Réflexions Jur le Trait té conclu
entre P Empereur, le Roy d' 'Angleterre , & les Etats
Généraux des Provinces - Unies , le 7. Sep-
tembre 1701. A Francfort, chez
Pierre Olhenjlagher , 1701.
Vous m'avez mandé, Monfleur, les engagements réciproques qui ont Lettre
été pris dans le Traité d'Alliance conclu entre l'Empereur, le Roy furie
d'Angleterre , & les Etats Généraux des Provinces- Unies le 7. Septembre Traite
. .° - , - / 1 m • ' a o entre
dernier, mais vous ne m avez point envoyé copie du Iraite même, & i'Empe.
c'eft principalement ce que je vous avois demandé. J'ay trouvé moyen reur, le
d'en avoir une par un autre endroit ; & , depuis ce tems-là , le Pojîe que vous R°i
occupez ma empêché de m'étonner du refus que vous m'avez fait de me com- d'An§Ie-
muniquer la vôtre. ]es Et'ats
En effet, de pareils engagements débitez fans circonftances des motifs Gêné-
fur Iefquels ils font fondez en donnent d'abord une grande idée; mais, raux.
Monfieur, que cette idée s'efl diminuée, depuis que j'ay veu le Traité mê-
me ! Le foin que la Cour de Vienne a pris de ne le communiquer quen de
certaines Cours, fans le rendre entièrement public , m'avoit déjà donné quelque
foupçon; & je jugeois, que fi elle en avoit été aufîi contente, qu'elle a
voulu le faire croire, elle n'auroit pas d'abord manqué de le produire par-
tout, & entr'autres lieux à Ratisbonne,pour préparer la Diette à en con-
noitre les avantages. Mais, elle a craint avec ràifon , qu une communication
îome XL Rrrr fins
FE.
662. MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires plus générale ne donnât à des gens , comme nous fans partialité & fans intérêt ,
gen. de une trop facile occafion de l'examiner & d'en faire remarquer le foible. Elle a
crû qu'il fer oit plus à propos de ne rendre cette communication fi publique , que
■dans le tems que Al. le Cardinal de Lamberg inviteroit la Dictte de l 'Empire
d'y entrer , & elle a efperé de confondre par-là ces deux objets , £5? d'éloigner^
ou d'affuiblir au moins , par les propofitions de ce Prince les jufles Réflexions que
le Public auroit eu le tcms de faire à loijîr fur le Traité même.
Mais, Tes précautions onc écé inutiles. Ce Traitté efl tombé entre les
mains de tout le monde\ôc voici les Remarques judicieufes qui y ont été fai-
tes par ceux qu'une longue expérience fur de pareils engagements rend capables d'en
juger avec folniité É5 (ans pajjion.
Nous commencerons , s'il vous plaid , Monfieur , par le Préambule.
Dans tous les Traittez qui ont jamais été faits, c'eft ordinairement dans ce
Préambule où l'on établit les principes fur lefquels l'Alliance & les mefu-
res qu'on prend en confequence font fondées. Ces principes doivent être
certains dans l'opinion des parties qui contractent, quand ils ne le feroient
pas dans l'efprit des autres, & elles doivent au moins en convenir, & faire
paroitre qu'elles les croyent tels. C'eil pourtant ce qu'on ne voit en au-
cune façon dans le Préambule du Traité dont il s'agit. 11 y e(t feulement
fpecifié que l'Empereur, a foutenu que la Succefîion du Roi d'Efpagne lui
apartient, que le Roy de France s'en efl emparé pour le Duc d'Anjou fon
petit Fils en vertu d'un certain Teitament &c. Que par ce moyen les
Royaumes de France & d'Efpagne paroiffent ne pouvoir être confiderez
que comme un feul & même Royaume, enforte que fi on n'y pourvoit
il y a affez d'apparence que l'Empereur doit renoncer à toute efperance
d'avoir jamais fatisfaêtion fur fes prétentions. Que l'Empire perdra fes
droits fur les Fiefs d'Italie & des Pays-Bas Efpagnols; que le libre ufage
de la Navigation & du Commerce périra entièrement dans la -Mer Médi-
terranée, dans les Indes, & ailleurs, pour les Anglois & les Provinces-U-
nies. Que ces mêmes Provinces feront privées de la feureté qu'elles ti-
roient de la fituation des Pays-Bas Efpagnols entr'elles & les François,
nommée vulgairement Barrière. Qu'enfin les François & les Efpagnols
ainfi unis deviendroient bien-tôt fi formidables, qu'ils fe pourroient faci-
lement arroger l'Empire de toute la Terre, & que par cette conduite du
Roy de France l'Empereur avoit été obligé d'envoyer une armée en Italie
pour la confervation,tant de fes Droits particuliers, que des Fiefs de l'Em-
pire. Que le Roi d'Angleterre avoit creu de même neceflaire d'envoyer
fes Troupes auxiliaires aux Hollandois, dont les Affaires étoient dans le
même état que s'ils étoient en effet attaquez. Et que les Provinces-Unies,
dont les Frontières font prefque ouvertes de tous cotez par la rupture de
la Barrière qui les deffcndoit contre le voifinage des François , ont été
obligées de faire pour la feureté & le falutde leur Republique tout ce qu'el-
les ont dû &pû, de même que fi elles avoient été attaquées; Qu'ainliune
fituation fi douteufe des Affaires étant plus perilleufe que la Guerre même,
& la France & l'Efpagne abufant de cet état des chofes, pour s'unir de
plus
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 66\
plus dans le deflein d'opprimer la Liberté de l'Europe & de détruire leur Affaires
Commerce, par ces raifons , l'Empereur, le Roi d'Angleterre, & les Pro- GfN- DE
vinces-Unies , dans la veue d'aller au devant de tant de maux qui en re-
fulteroient, & dans le defir d'y remédier félon leurs forces, ont creu ne-
ceffure de faire entr'eux une étroite union & confédération , pour repouf-
fer la grandeur de ce péril commnn , & ont à cette fin muny de leurs or-
dres tels & tels , &c. qui font convenus des conditions fuivantes.
Voilà, Monfieur, le Préambule de ce Traitté mot pour mot. On n'y
convient d'aucun principe fixe & réel, que de celui de s'unir pour faire la
Guerre. L'Empereur y reprefente, à la vérité, fa prétention indéfinie
fur laSuccefiion d'Efpagne; mais, le Roi d'Angleterre, ni les Etats Géné-
raux, ne marquent en aucune façon qu'ils conviennent de fes Droits pré-
tendus. Cela feroit pourtant neceflaire dans ce Préambule pour fonde-
ment des mefures qu'on veut prendre; & c'eil, comme il a été dit ci-
delfus, l'ufage dans tous les Traittez.
Mais, cette irrégularité n'efl pas la feule. Après avoir manqué d'éta-
blir ce fondement, on en infinué d'autres dont on ne parle que comme
de fimples apparences, ainfi qu'on le voit par les mots Videantur, 13
autres , qui ne déterminent rien , & qui ne font que des traits d'éloquen-
ce inutile en matière de Traittez, qui demandent d'être établis fur des
principes certains, dent il faut au moins que les parties contractantes de-
meurent d'accord entr'elles.
On peut même dire que ces apparences font imaginaires. La pre-
mière ell fondée fur une prétendue Union des deux Monarchies de Fran-
ce & d'Efpagne en une feule. C'eil une idée inventée par ceux qui
veulent injuflement entrainer l'Europe dans une Guerre qui convient, à
l'égard de la Cour de Vienne, aux prétentions de l'Empereur, & au be-
foin d'avoir des quartiers , des aflignations , & des mois Romains dans
l'Empire, pour fubvenir aux frais de la Guerre; & à l'égard des autres,
au deflein de fortir d'un repos ennuieux & renfermé en des certains lieux,
& en de certaines bornes qui ne conviennent pas à leur génie & au de-
fir de finir leur carrière comme ils l'ont commencée , & de fe rendre
neceifaires dans l'Europe, où ils craignent d'être oubliez ou négligez, 11
la Paix n'en étoit pas troublée , fans fe mettre en peine des fuites, parce
qu'ils n'en ont point de fujet qui les touche dallez près pour y prendre
intérêt.
Dans ce deflein des uns & des autres, il a fallu établir dans les efprits du
public cette prétendue Union des deux Monarchies en une, & l'on a eu
grand foin d'en faire le fondement de tous les Libelles & autres Ecrits,
qui ont été débitez pour en abreuver le monde & profiter de fa cré-
dulité.
Cependant, rien n'efl: plus vain que cette idée. Pour en être defabufé,
il n'y qu'à lire le Teflament du Roi d'Efpagne deffunt. Il n'y a qu'à fe
fouvenir de l'Acceptation de ce Teflament, des démarches des Efpagnols
en venant jufqu'à Verfailles demander leur Roy, & des Explications tant
Rrrr 2 de
PE.
<tf4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
AtTAiâES de fois données dans toutes les Cours , que dans la Renonciation que
gen. de ]es Espagnols ont pu annuller , puifqu'ils l'avoient faite, on n'a pas lailfé
l'Euro- ^»en COpferver l'efprit & Ie t>ut > 9ui étaient d'empêcher que ces deux
Monarchies ne fuffent reiinies en la perfonne d'un même Prince. Tout
cela eft auffi réel, que la crainte dont on veut éblouir le public eft chi-
mérique, & ne tend vifiblement qu'à troubler l'Europe, pour des inté-
rêts Etrangers, pour les veuës particulières, qu'on a fait affez entendre
ei-defTus.
L'autre apparence qu'on raporte eft , que fi on n'y pourvoit , l'Empe-
reur n'aura point de fatisfa&ionfur fes prétentions ; & c'eft encore un mo-
tif fans fondement. L'Empereur prétend toute la Succefîion. On ne
voit pas même dans ce Traité qu'il le contente des Etats qu'on ftipule de
l'aider à recouvrer. En effet , dans les règles toute la Succefîion apartient
de droit au véritable héritier. C'eft fur ce fondement, que le Teftament
& la Nation Efpagnole ont apellé un Prince du Sang de France. Il ne
s'agit donc point de fatisfaclion en une chofe qui apartient de droit à un
feul Prince reconnu par tant de droits, & reçeu avec tant d'aplaudiffements
de toute la Nation Efpagnole, entre les bras de laquelle il s'ell jette,
fans qu'on y ait employé la moindre force : <& de fimples convenances
ne peuvent priver un héritier d'une partie d'une fucceffion qui lui apar-
tient toute entière. C'eft pourtant fur ces convenances de pure politi-
que, qu'on établit cette prétendue fatisfaclion , & l'on ne peut jamais di-
re qu'elles foient conformes à l'équité. On dit enfuite que l'Empire per-
dra fes Droits fur les Fiefs d'Italie & des Pais-Bas Efpagnols. C'eft un
fondement notoirement faux. L'Empire n'a point d'autre intérêt dans
cette Affaire, que le Vaffelage & laReconnohTance de ces Fiefs. Il fuffit
que le Prince qui en a hérité, & qui en eft en poffeiîion, y fatisfaffe: La
perfonne ne fait rien à la chofe pour affurer la mouveance. C'eft ce
que le Roy d'Efpagne a fait. Il a demandé à Vienne par fon Ambaffa-
deur l'Inveftiture du Duché de Milan à l'Empereur. Il s'eft reconnu
Membre de l'Empire pour le Cercle de Bourgogne qui comprend les Païs-
Bas Efpagnols, par le pouvoir qu'il avoit envoyé à fon Miniftre à Ratis-
bonne. Si cette Inveftiture n'a pas été donnée, & li, fans confulter la
Diette de l'Empire, comme cela étoit indifpenfable, la Cour de Vienne
a obligé ce Miniftre de fe retirer de la Diette, ce n'eft pas la faute du
Vaffal. Le Roy d'Efpagne a rempli de fa part toutes fes obligations. Il
eft encore prêt d'y fatisfairej & ce fondement du Traitté eft donc entiè-
rement contraire, non feulement à la vérité du fait, mais même à l'é-
quité.
On vient enfuite à la Navigation & au Commerce , & l'on témoigne
en craindre la perte. Mais , c'eft encore une autre fauffe idée fondée fur
l'Union des deux Monarchies en une, dont on a fait voir le peu de fon-
dement. En effet, ces Monarchies, feparées comme auparavant , laifferonc
le Commerce en l'état qu'il étoit ci-devant. C'eft même de quoy on
peut convenir plus particulièrement, comme la France & l'Efpagne l'ont
offert
PE.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 66f
offert plufieurs fois. La guerre qu'on médite contre ces deux Couronnes Affaires
efl bien plutôt un obftacle à ce même Commerce, que le maintien de la GEN- 1>R
Paix, pendant laquelle l'habileté & la parcimonie des Hollandois les ren- L'Ewo-
dront toujours fuperieurs à toutes les autres Nations dans le négoce. Et
le Commerce eit d'ailleurs naturellement libre par lui même, & ne peut
jamais être feul un jufle fujet de faire la Guerre, quand on fatisfait de
part & d'autre aux conditions établies réciproquement, dont il eit facile
de convenir encore plus amplement.
Après cela, on paiTe à la Barrière dont on craint d'être privé. C'efl de
même une vaine apprehenfion. Les Places Efpagnoles qui la forment
entre la France, & les Etats Généraux des Provinces-Unies, la forme-
ront toujours comme auparavant, en demeurant entre les mains de l'E-
fpagne. La France n'y prétend rien , & c'eit fur quoi Elle a témoigné
qu'elle étoic même prête de prendre avec eux toutes les mefures qui fe-
ront raifonnables.
Enfin, à Pégard de ce qui efl dit de l'état où les Provinces-Unies ont
été obligées de fe mettre avec tant de depenfe pour la feureté & le i'alut
de leur République comme fi elles étoient actuellement en Guerre , c'efl
un mal commun qu'on auroit pu éviter réciproquement. La France ni
l'Efpagne ne penfent point à attaquer ni cette Republique ny perfonne.
Ces deux Couronnes n'ont aucune autre intention que de fe deffen-
dre. La confervation de la' Paix fait leur unique intention. C'eft un but
falutaire autant qu'irreprocable , & c'efl celui de plufieurs Etats de l'Eu-
rope qui ne fe font pas laifTé éblouir par la vaine crainte d'une union ima-
ginaire des deux Monarchies, ny par des intérêts étrangers, ou par des
veuês particuliers qui en ont entrainé d'autres , par un effet de leur dé-
vouement pour la Cour de Vienne, ou de leur ambition perfonelle, qui
leur fait trouver trop peu de mouvement & de confideration dans le re-
pos de l'Europe.
Voilà, Monîieur, les prétendus fondements de ce Traitté, qui ne font,
comme vous voyez, que des prétentions indéterminées d'un côté dont on
ne convient pas même de l'autre, de fimples aparences fans realité, des
faits contraires à la vérité, des craintes imaginaires dont on veut éblouir
le public, & en effet un deffein formé de troubler toute l'Europe, & de
rejetter fur l'Empire la plus grande partie du poids de la Guerre pour fe
tirer enfuite d'intrigue , & faire fa Paix feparement malgré toutes les pro-
meffes qu'on donnera du contraire, comme cela efl déjà deux fois arrivé
de nos jours. Enfin, je vous avoue que je n'ay jamais veu un Traitté fi
mal fondé; &, encore une fois, non feulement je ne m'étonne plus que la
Cour de Vienne ait tant différé de le rendre entièrement public , mais je croîs
même qu'il efl plus capable de porter les autres Puiffances à en empêcher
l'exécution, qu'à y contribuer.
Je viens après cela aux Articles mêmes qui font réduits à 14.
Le premier, concernant une amitié & une correfpondance réciproque,
efl à peu près le même qu'on met dans tous les Traitiez.
Rrrr ? Le
666 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires Le fécond mérite Réflexion. On y dit qu'on a la Tranquilité gênera-
gen. m. le de toute l'Europe à cœur; cependant, on y témoigne qu'on trouve
l'Euro- ^ propos de la troubler, en procurant à l'Empereur une fatisfaction é-
F£' quitable &. conforme à la raifon fur fes prétentions à la SucceiTion
d'Efpagne, & une feureté particulière & fuffifante au Roy d'Angleter-
re & aux Etats Généraux, pour leurs Royaumes, Provinces, & Pais,
& pour la Navigation & le Commerce de leurs Sujets. J'avois toujours
ouï dire , qu'on faifoit la Guerre pour avoir la Paix: mais je n'avois ja-
mais oui parler que que quand on a la Paix on doit faire la Guerre
pour l'obtenir; & l'on auroit bien deu donner un autre tour à cet Arti-
cle pour le rendre recevable.
A l'égard de la fatisfaction , j'y ay répondu en examinant le Préam-
bule. J'y adjoûterai feulement, que ces termes indéfinis de fatisfaction
raifonnable laiifent un beau champ aux Hollandais de dire, quand ils le
trouveront de leur intérêt, que telle ou telle fatisfaction l'eft, & de faire
ainfi leur Paix particulière, comme dans les deux dernières Guerres. J'ay
de même répondu à la feureté mentionnée dans cet Article. Je ne vous
le repeteray point.
Dans le 3. on convient de deux mois qu'on employera à obtenir par
des voyes amiables cette fatisfaction raifonnable & cette feureté, à com-
pter du jour de la Ratification du Traitté. Le public eil bien obligé aux
Parties contractantes de cette modération , pendant qu'on voit que de
tous cotez elles travaillent à engager la Guerre par toutes fortes de voyes
contraires à cette veuë; & je ne fçais point que depuis ce tems-là elles
ayent fait aucune démarche pour parvenir à un Accommodement.
Dans le 4. il eft dit qu'après ce terme expiré, on unira fes forces fui-
vant la fpecification qui en fera faite dans une tranfaction particulière pour
obtenir cette fatisfaction & cette feureté. Je juge de-là , que cette
tranfaction n'étoit pas encore faite alors. Je ne fçais fi elle l'aura été
depuis.
Enfliitte, on dit dans le 5. Article, que pour procurer cette fatisfaction
& cette feureté, on travaillera à recouvrer les Païs-Bas Efpagnols pour
fervir de Barrière entre la France & les Provinces-Unies, le Duché de
Milan comme Fief de l'Empire, & fervant de feureté aux Pais héréditai-
res de l'Empereur, enfin les Royaumes de Naples & de Sicile, & les
Ifles de la Mer Méditerranée de la Domination d'Efpagne qui peuvent fer-
vir à la Navigation & au Commerce des Sujets du Roy d'Angleterre &
des Etats Généraux des Provinces-Unies. Voilà, Monfieur, de grands
projets. On devoit ajouter dans combien de tems on les exécutera;
autrement, je prévois qu'on ne parviendra jamais à la Paix qu'ils difent
avoir en veuë, puifque nous ne fommes plus dans le tems où la Conquê-
te d'un Royaume dépendoit du gain d'une Bataille & de la Prife d'une
Place. Aujourd'hui, les Fortereffes fe touchent prefque dans tous ces
païs-là. On fçait ce qu'une feule coûte à prendre , & l'expérience a fait
voir dans les Païs-Bas principalement, & même depuis peu en Italie, qu'on
ne
l'Euro-
pe.
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 667
ne donne pas Bataille quand on veut , & que tout le fruit d'une victoire Affaires
incertaine eft d'abord arrêté parla moindre Place, qu'on ne peut hazar- JSJ^J
der de laifler derrière foy par les raifons que les gens du métier vous
pourront expliquer mieux que moi. De plus , le péril fera réciproque; ce-
pendant, le Commerce, qui eft l'ame des Provinces-Unies, périra, & il
leur faudra pourtant trouver de l'argent, parce qu'on ne doit pas prefumer
que tant de Troupes Auxiliaires falTent la Guerre aux dépends des Frinces
qui les fourniront. On doit dire la même chofe à l'égard du Duché de
Milan, & des Royaumes de Naples & de Sicile ; & , pour ce qui eft de ce
Duché qu'on fait toujours regarder comme un Fief de l'Empire qu'il faut
recouvrer, j"ay amplement fait voir que ce faux prétexte eft entière-
ment détruit par l'Inveftiture demandée au nom du Roy d'Efpagne. Je
vous feray feulement remarquer la circonftance de futilité dont on dit
que ce Duché eft pour la feureté des Pais héréditaires de l'Empereur;
& je vous demanderai contre qui cette feureté, puifque le Roy d'Efpa-
gne ne veut attaquer perfonne, & quel intérêt affez grand l'Europe peut
avoir de s'expofer par cette raifon à une Guerre ruineufe, vraisemblable-
ment plus longue qu'aucune autre qui ait été faite depuis long-tems,
quand elle peut l'éviter, en confervant dès à prefent la Paix dont elle
jouit? Il faut auflî remarquer fur cet Article, comment toutes chofes y
îbnt raportées avec ambiguïté. On y parle bien de travailler à recouvrer
les Pais-Bas Efpagnols, mais on ne dit point pour qui, ny comment. Tout
cela n'elt exprimé qu'en termes généraux, & doit donner à toutes les
Puiifances non partiales de juftes doutes fur la véritable intention des Par-
ties contractantes.
Le 6. Article eft un Confentement & un Don que l'Empereur fait au
Roy d'Angleterre & aux Etats Généraux des Villes & Pais qu'ils pour-
ront occuper aux Indes de la Domination d'Efpagne. Que dites vous,
Monfieur, de cette Libéralité? Trouvez-vous qu'elle coûte beaucoup à
l'Empereur? Un pareil Confentement n'efl-il pas un Titre bien valable
pour autorifer des Conquêtes en ces Quartiers-là, & pour y foumettre de
juftes & anciens Poffeffeurs à la Domination des Anglois & des Hollan-
dois, & à une nouvelle Doctrine au préjudice de la Catholique Romaine
qui y été plantée avec tant de peine? Comment croyez-vous que la Cour
de Rome, & les autres Etats Catholiques de l'Europe , apprendront ce
Confentement? Et peut-on jamais fe perfaader qu'il fuffira de dire , com-
me on fait dans l'Article 10. qu'à cet égard on conviendra dans la fuite
de cet exercice par une tranfaclion qui fera faite lors de la Paix. C'eft
une excufe qui ne peut jamais être reçeuê dans ces Cours-là; & ce peu
de foin pour la confervation de la Religion Catholique y doit être généra-
lement blâmé, & faire connoitre que la pafîion a plus de part que l'équi-
té à tout ce Traitté.
Le 7. Article contient feulement une communication réciproque de
Cpnfeils fur les Opérations de la Guerre & fur toutes Ils autres chofes
tous
66% MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
.Affaires qui regarderont la caufe commune; & cet Article, qui eft ordinaire dans
GEN. DE
l'Euro-
pe.
tous lesTraittez de cette nature, ne demande point de Reflexions particu-
lières.
Dans le 8. il eft dit qu'on ne fera point de Paix que de concert , &
qu'on ne la conclura point fans la fatisfacYion raifonnable de l'Empereur ,
& fans la feureté particulière du Roy d'Angleterre & des Etats Généraux,
comme aufli fans avoir pris des juftes précautions pour empêcher que ja-
mais les Royaumes de France & d'Efpagne ne foient unis & fournis à un
même Roy, & que les François ne poffedent jamais les Indes de la Do-
mination d'Efpagne, ni même que la Navigation, fous ombre de Négo-
ce , leur y foit permife directement ni indirectement fous quelque prétex-
te que ce foit , enfin fans être auparavant convenu en faveur des fujets
du Roy d'Angleterre & des Etats Généraux de la Liberté du Commerce
& de tous les droits, immunitez, & privilèges par Mer & par Terre en
Efpagne , dans la Méditerranée , & dans tous les autres lieux que le Roy
d'Efpagne deffunt poffedoit, tant en Europe qu'ailleurs, &c. J'ay déjà
répondu à ce qui regarde la fatisfaclion & la feureté marquées dans cet
Article. La reponfe, que j'ay aufli faite fur la vaine crainte de l'Union des
deux Monarchies en une feule , montre de même , que cette circonftan-
ce ne peut jamais fervir de jufte caufe à une rupture. A l'égard des In-
des, la France ne penfe point à avoir aucune part aux Villes & Pais qui
y apartiennent au Roy d'Efpagne ; mais, pour ce qui eft de la précaution
d'interdire à la France tout Commerce direcl: ou indirect en ces Quar-
tiers-là , en vérité on ne peut trop s'étonner d'une penfée û téméraire &
fi opofée au pouvoir des Rois de faire en ces occalions ce qu'ils croienc
de leur intérêt, autant qu'au Droit des Gens , & à la Liberté du Commer-
ce : & enfin toutes les Puiffances Maritimes & autres de l'Europe ne peu-
vent trop voir par-là combien ces deux Nations cherchent de s'attribuer
feules le Commerce par-tout, à Pexclufion des autres.
Le 9. ne regarde aufli que le Commerce & la Navigation des Anglois
& des Hollandois , c'eft- à-dire , une Promeffe réciproque de convenir,
lors de la Paix , des moyens qui feront neceffaires pour établir l'un & l'au-
tre en faveur de leurs Sujets dans les terres & pais qui feront acquis, &
qui ont été poffedez par le Roy d'Efpagne deffunt. Il eft feulement die
un mot de la feureté de la Barrière à la fin de l'Article; & l'on voit tou-
jours le même efprit de pourvoir à leurs intérêts , & à leurs avantages par-
ticuliers, fans fe mettre en peine de ceux des autres Nations, qu'ils veu-
lent pourtant engager à la Guerre.
Le 10. Article regarde les Différends qui pourroient naître fur la Reli-
gion, dans les lieux que les Alliez pourront occuper par les armes; &
l'on remet à en convenir dans le tems que la Paix fera faite. J'ay déjà
repondu à cet Article dans le 6. & je vous feray feulement remarquer la
Parenihefe, Uti fperant , qui eft fins doute finguliere.
Par le 11. il eft dit que les Alliez s'aflifteront de toutes leurs forces
contre
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. 669
contre l'aggreffeur, en cas que le Roy de France, ou quelque autre, en- Aftaiks*
treprenne d'attaquer l'un des confederez à caufe du prefent Traitté. Cet G*N- Dfc
Article elt une fuite des autres engagements. Il ell allez ordinal- L p^ (
re dans tous les Traittez , & il ne mérite ainiî aucune Reflexion parti-
culiere,
Le 12. n'en demande pas d'avantage. Il dit feulement, qu'en cas
qu'on puiffe tranfiger prefentement fur la fatisfaction & fur la feureté dont
il s'agit, ou qu'après avoir été obligé de faire la Guerre, on puiffe con-
venir de la Paix , après la Tranfaétion , ou la Paix , les Parties contractan-
tes demeureront encore unies par une Alliance deffenlive , pour la ga-
rantie de ladite tranfaétion, ou paix. Cet Article efl de même une fuite
des précédentes mefures; & je vous y feray feulement regarder l'efprit
toujours le même de faire la Guerre , & combien il feroit jufte & facile
d'éviter la neceiTité qu'ils y veulent faire envifager, puis qu'elle n'efl fon-
dée , comme je vous l'ay montré , que fur des motifs imaginaires , ou
contraires à la vérité des chofes.
Le 13. Article efl plus confiderable. On y dit qu'on admettra dans
l'Alliance tous les Rois, Princes, & Etats, qui voudront y entrer, &qui
aimeront la Paix générale. C'eft plutôt les inviter à Guerre, qu'on a de£
fein de faire , qu'à la Paix , qu'il n'efl: pas neceffaire de chercher dans le
trouble, puifqu'on efl en état de conferver celle dont on jouit, en ne pre-
nant point de part à des mefures qui ne tendent qu'à troubler tou-
te l'Europe, fur les faux préjugez dont j'ay fait voir le peu de fonde-
ment.
Enfuite on dit, dans le même Article, que l'Empire étant particuliè-
rement intereffé à la confervation de la Paix publique, & s'aghTant , en-
tre autres chofes, de recouvrer les Fiefs de l'Empire, il fera fpeciale-
ment invité d'entrer dans la prefente Alliance. Je vous a y déjà fait voir,
combien ce prétexte eit faux , par la demande de l'inveititure du Duché
de Milan faite à l'Empereur même au nom du Roy d'Efpagne, & par le
pouvoir qu'il avoit envoyé à Ratisbonne au Sr. de la Neuveforge, pour
occuper de fa part le Suffrage du Cercle de Bourgogne comme Membre
de l'Empire. Je ne vous en parleray pas davantage. Je vous prieray
feulement de remarquer le Deffein formé des Anglois & des Hollandois
de rejetter, s'il efl pofiible, le Poids de la Guerre fur l'Empire, & de
lui faire prendre part au péril, & aux malheurs qui l'accompagnent, fans
avoir feulement penfé à les avantages particuliers , ni en avoir dit un
feul mot dans le Traitté. Ils n'ont fongé qu'à leurs intérêts & à leur
Commerce, comme on le voit dans prefque tous les Articles. Ceux de
l'Empereur ont enfuite occupé leur attention d'une manière même ambi-
guë; &, quoi-qu'il en foit, les Etats de l'Empire n'ont aucune raifon de
faire céder la Paix, dont ils jouiffent , à une Guerre , qui leur efl en-
tièrement Etrangère. Elle ne peut même que leur être ruineufe de tou-
tes manières , foit qu'elle fût malheureufe, ou heureufe. Dans le premier
Tme XL Sfff cas,
Aftaief-S
GfN. DE
l'Euro-
pe.
670 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
cas, ils s'expoferont à une Ruine infaillible, & dans l'autre l'Empereur
feul en profiteroit à leur exclufion. Il efl certain, que nulle puiflance ne
leur efl plus à craindre que la Tienne, fi elle fe trouvoit augmentée par
l'Union des Etats d'Italie, & des Païs-Bas aux Tiens ; & fi, dans des tems
faibles', ils ont efluié tant d'entreprifes contre leurs Droits , & leurs
Prérogatives , à quoy ne Teroient-ils pas expofez dans des tems de
profperité ?
Le 14. & dernier Article ne demande point de Reflexion. Il ne con-
tient que la condition de ratifier leTraitté dans Tix Temaines; & fi je vous
fais remarquer la date de la fignature du Traitté qui efl du 7. Septembre
1701. ce n'efl qu'à cauTe des deux Mois Tpecifiez dans le 3. Article,
pour travailler à une compofition amiable, fur laquelle je ne fçais point
qu'on ait encore rien fait propoTer, quoy qu'on m'ait écrit que le Traitté
a été ratifié en Hollande dès le 15. Octobre dernier.
Voilà, Monfieur, les jufles Reflexions qu'on fait en plufieurs Cours fur
ce Traitté. J'y ay adjoûté peu de chofe du mien. Je n'ai fait que vous
raporter les fèntiments de ceux qui en parlent fans pafïion; &, perfuadé
de vôtre difcernement, & de vôtre habileté, je vous avoue que j'attens
avec impatience d'apprendre le jugement que vous en faites. Cependant
je fuis toujours , &c.
^##### ce j0t Décembre 1701.
Lifo
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 671
1. Lille des Troupes mie T Angleterre ^ £5? les Etals des Provin- m*a*m
ces-Unies 3 payent de ce cote-ci de la Mer. • l'Euro-
'Troupes qui font toutes payées par l'Angleterre.
Bataillons Efcadrons Lifte des
Troupes
_ /»ii des Al-
Stuart ... 1 Schomberg 2 liés.
Anglois. Royal EcofTois 2 Windham 2
Rou. ... 1 Drag. de Raby. . . 3
Ferguflbn. . 1 Drag. de Ros. ... 2
Hamilton. . 1 Drag. de Tiriot. . . 2
Ingolsby. . . 1 Lumley 3
Blood. ... 1 Wood 2
Marlborough. 1 Cadogan 1
Leegh. . . 1 . . > ~
Derby. . . 1 *7
Bartimore. . 1
Gardes Ang. 1
Iiow. ... 1
North & Gray. 1
Webb. . . i
Lunebourg. . 8
Troupes que Y Angleterre & la Hollande payent par moitié.
Bataillons.
Efcadrons.
Anglois.
Stanhope.
Meredith.
Churchill.
Portmore.
1
1
1
1
Danois.
Le Prince de Son-
derbourg. . . 1
Gardes. . . 1
Fucnen. . . 1
Uytterwyck.
Nummerfon.
Randfau.
Cuiraiîiers.
Sfffa,
z
2
2
z
T
Ze-
67i MEMOIRES, NEGOTIATÏONS, TRAITEZ, ET
Affaires
gen. DE
l'Euro-
pe.
Pru (Tiens.
Bataillons.
Zelande. . . i
Le Prince Char-
les. . . . i
Wirtemberg. i
Schelte. . . i
Le Prince Geor-
ge. ... i
Harbor. . .
Bonar. . .
Prince de HefTe.
Varennes. .
i
i
7
i
i
Efcadrons.
Smettau z
Reg. des Gardes.
Broendorf.
Deurts. . . .
Drag. de Bonar.
2
2
Z
Heiden.
Schôning.
2
2
Heffiens.
L'Eleft. Palatin.
Munfter.
Wolfe. . . i
Anhalt-Zerbs. i
Gromkow. . î
Gardes.
Prince Heredit.
Schench. . . i
Wartensleben. i
Schôpping. i
Grenadiers. . i
Prin. Guillaume, i
Louvenftein. i
Le Bat. le dernier
venu. . . i
4. Bat. qui font
venu à l'Etat Je
20.A.1701. pour
renforcer les
Regimens. 4
Swartz. . . 1
Elverfeld. . 1
Cornarens. . 1
Gardes
Spiegel ,
Drag. du Prin. Heredit.
Drag. de Hombourg. .
z
2
4
±.
12.
Ba-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
<f7i
Gotha.
Gottorp.
Ofnabrug.
Ouilfrife.
Liège.
Bataillons
Bartels. . .
Kefevit. . .
E
i SteuburcLl. .
i Drag. de Ilarienberg.
2
i Bauditz Drag.
i Drag. de vander Natt.
fcadrons.
*>
• J_
6
• 4
• 4
Affaiues
G EN. DE
L'Eimo-
TE.
Aderhae. .
Berner. . .
Spiegel. .
Eggeluy. .
Trogne. .-•
Lamart. .
Caris.
2
I — I
I--I
I
i Drag. deWalef. .
_3_
8
4
SS
••
Total 44
Troupes qui font payées par l'Etat tout fiuL
Bataillons. Efcadrons.
Weldere. . i Athlone 2
Beinfein. . 1 Gardes 2
Mettenburgh. 1 Elk 2
Els. . . 3 Tilly 2
Gardes. . 2 Al be marie 2.
Holitein plein. 1 Obdam. 2
Hamaud. . 1 Rochcfort 2
Lindebo. . 1 Rhos. . . .2
Birchenwelt. 1 Tegnagel. . . 2
Coefor. . 1 Domyte. . . 2
Torfay. . 1 Ooflfrife. . . . z
Swarsbel. 1 Pr. Guill. de Hefle, Drag. y
Annelisward. 1 Drag. de Dopit. ... 4
Goor. . . 1 Drag. de Shlippenbach. . 4
Saldit . 1 Drag. de Matha. . , . 4
Fagel. . 1 Gardes du Corps. . . . 1
Zouteland. 1 Erpach. . . 2
Slangenburg. 1 Dridsbergh. . . z
Beggel. . 1 Gardes du Corps du Pr. de
de Frife 1
Noorburg. 1 Naflau de Fnfe. ... 2
Houckelen. 1 VutmghefF. . . 1
Prin AUreft. 1 Hefle-Hombourg. ... 5
Sfffj Ba-
Affaires
GEN. DE
l'Euro-
pe.
6;4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Efcadrons.
Bataillons.
Tranfporcé 26
Kromprins.
Ecoflbis.
Ranch. .
Dohna. .
Frieflem.
Naflau Walon.
Vanderbech.
Falais. .
Sparre. .
Steenhuyfe.
Holfteinbech.
Woudenberg.
Palland. .
Waas. .
Openften.
Naflàu Stad
houder. .
Schratenberg.
ldflnga. .
Vegelin. .
Eiierach. .
Rummema.
Heide. .
Willere. .
Ham. . .
Ripperda.
Iruis. . .
Rhynhard.
Linftau. .
Lauder. .
Coljiar.
Murrai.
Dalrimpl-e.
Lorn. . ,
Hamilton, .
Lalech.
Cralingen.
Sopen-Hcilbourg.
Hornberg.
Chaudler. .
Ech.
Nifla.
Wirtemberg.
Groveiteins.
Emminga.
Baldwyn.
Paurel.
59
1
z
2
2
2
1
1
2
z
z
l
2
73
73
Ba-
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I. <r7;
Efcadrons. ^ifaihi-.s
Bataillons.
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François. Belcaftel. . i
Lifle-Marais. i
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Albemarle. '
Logmar.
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Lunebourg.
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Fritcheapel. .
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Schuyîenburgh.
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Anhalt-Beren. i
Munfler.
Mecklenbourg.
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Som-
Atï AIRES
GEN. DB
l'Euro-
pe.
676 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Sommaire.
Des Troupes qui font payées
par l'Angleterre toute feule.
Des Troupes que l'Angleterre
paye par moitié avec la Hollande.
Des Troupes que la Hollande
paye toute feule.
Tellement que l'Angleterrepaye.
Les Etats.
Bataillons.
Efcadrons.
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RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
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//. Autre Lifte des Tivupes au Service des Alliés.
4.Efquadrons Villers Dra-
gons.
(^ du Régiment jaune.
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4 Prince Héréditaire Dra-
gons,
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Lifte
6j$ MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
Affaires
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Lifte des
Troupes
de l'Etat
en 1701.
Lift e des Troupes des Etats Généraux en 1701.
Dragons,
f Efcadrons, - - - - 125*0 Hommes.
Régiment du Roy,
- - de DopfF, 41
- - - de Mattha , 2 > 8 Efcad. - -
- - - de Slipenbag , 2.)
Cavalerie.
Une Compagnie des Gardes du Corps du Roy,
Une Compagnie des Gardes de Frife, - - -
Reg. Portland, Reg. Agrim,
- 1584 Hommes.
250 Hommes,
180 Hommes.
Albemarle,
Rhock ,
Dubuy ,
Mlle,
Boncourt,
Rochefort ,
Tengnagel ,
Laleck .
Schaek,
Erbag ,
Opdam ,
Tilly,
Wirtemberg,
Paul ,
Eck,
Nafïau-Vriefland ,
Athlone,
Madurant,
Saxen-Heylt:
Ooft-Vrifland,
Vittinghoff,
Hoornberg,
Homburg ,
Dompré ,
NaiTau-Sarbruk,
27 Régiments de Cavalerie , enfemble -
Chaque Régiment de 312 Hommes
Dragons & Cavalerie enfemble
Reg. Holftein-Pîoen ,
Oxenflern ,
Le Prince Royal
de PruiTe,
Soutlande,
Ileukelon ,
Slangenburg,
Beynheym ,
Goor,
Schratenbag,
Welderen ,
Ileyden ,
Infanterie.
Reg. Poot.
DenhofF Brand.
Dona.
Amelifwaar.t.
Friefen.
Holilein-Norburg.
Waas.
Plettenburg.
NaiTau.
Keppel.
Holflein-Beek.
Fagell.
8424 Hommes.
11 72 g Hommes.
Reg. Haerfoîte.
Birkenfelt.
Swaensbel.
Bayma.
Coehoorn Col-
lonel.
Rynharts.
Scheltinga.
Sparr.
Lofeeoot.
Eyfenag.
Murray.
Infan*
RESOLUTIONS D'ETAT, M. DCC. I.
679
Reg. Naffau-Waale ,
JNoyelies,
Salileh ,
Palan d ,
Arents,
Torcé,
Ouwerkerk,
Ten Harji.
Infanterie.
Reg. Wilkes.
Els.
Dedem.
Coehoorn, Gé-
néral.
S. Amand.
Lintdauw.
Reg. Lauden.
Coljiar.
Portmore.
Strathnaver,
Hamilton.
Belcaftel.
Lillemarais.
Vicoufe.
Lindeboom.
57 Régiments d'Infanterie de 12. Compagnies ,
chacune de 63 Hommes, - - - - - 43092 Hommes.
' Troupes qui font payées par de (fus.
Gardes du Roy 26 Comp. de 100 Hommes - --
Gardes de Frife 24 Comp. de 60 Hommes - -
Une Compagnie Franche ,
2600 Hommes.
1440 Hommes.
i|o Hommes.
Affaires
gf.n. DE
l'Euro-
pe.
Suijfes.
MontmoulinO
S cher er ,
Jaconnet,
Murait,
Loghman,
Cappoll.
Aibemarle.
>7 Régiments de 1600 H. chacun - - - 11200 Hommes.
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Infanterie, 58481 Hommes.
Cavalerie & Drag. 11728 Hommes.
70210 Hommes.
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Danois ,
£8o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, ET
AmmM Danois, - - - - Cavalerie, - - - - - 4000 Hommes,
gf-n. de Dragons ,-*--- 2000 Hommes.
L'Euil°" Infanterie, ----- gooo Hommes»
h* PrulTiens, 1 - - - - Cavalerie, ----- 3000 Hommes.
Dragons, ----- 2000 Hommes.
Infanterie, ----- 5000 Hommes.
Lunebourg-Hanover, - - Cavalerie, ----- 4000 Hommes.
Infanterie, ----- 4030 Hommes.
Saxe-Gotha, - - - - Cavalerie, ----- 2000 Hommes.
Infanterie, ----- 4000 Hommes.
HelTe-CalTel , - - - . Cavalerie, ----- 2000 Hommes.
Dragons, ----- 1000 Hommes.
Infanterie, -*•--- 3000 Hommes.
Palatin de Neubourg, - - Cavalerie, ----- zooo Hommes.
Infanterie, ----- 4000 Hommes.
Anfpaçb, K * - - * Dragons, ----- igoo Hommes.
Infanterie, ----- 2400 Hommes.
Mekelbourg, - - - - Infanterie, ----- 2000 Hommes.
5^200 Hommes.
De l'autre Part 70210 Hommes.
Font enfemble 1 26410 Hommes.
Sans les Troupes Auxiliaires.
Anglois Auxiliaires, - - - - 100 00 Hommes»
Outre les Troupes de Suéde, de Holftein-Gottorp, & autres, qui doivent
encore venir.
FIN.
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