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Full text of "Messager des sciences et des arts"

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MESSAGER 

DES  SCIENCES  ET  DES  ARTS, 

RECUEIL 


PUBLIE  PAR  LA  SOCIETE  ROYALE  DES  BEAUX-ARTS  ET  DES 

LETTRES,  ET  PAR  CELLE  D'AGRICULTURE  ET  DE 

BOTANIQUE   DE   GAND. 


ANNÉE    1823. 


A  GAND, 

Chez  P.  F.  de  Goesin-Verhaeghe,  Imprimeur  de  l'Université 
et  des  deux  Sociétés,  rue  Hautport  N°  5-j. 


ORDRE  DES  PLANCHES  CONTENUES  DANS  CE  VOLUME. 


PI.  Pag. 

1  Graud  bns-relief  antique  du  Musée  de  Leyde.  1 

2  Autre  bas-relief  antique  du  Musée  de  Leyde.  4g 
5  Portrait  d'après  Jean  Van  Eyck.  8g 
t  Gastonia  palmata.  187 
5  Ancien  tableau  peint  par  Jean  Van  Eyck.  i55 
G  Portrait     de    S.    A.    R.    la   Princesse    d'Orange  d'après 

Fr.  Kinsou.  225 

7  Portrait  de  Jean  Second.  268 

8  Chèvre,  chevreau,  bouc  du  Thibet,  et  bélier  de  la  Circassie.  281 
g  Couronne  de  molaire  et  dents  d'éléphant.  356 

10  Anciens  morceaux  de  sculpture  récemment  importés  de  la 
Grèce  eu  Belgique.  377 

11  Momie  d'Egypte.  4i2 
11  Susaune  au  bain  ,  surprise  par  les  vieillards.  421 
j5  Guillaume  1er  d'après  M.  le  chevalier  Odevaere.  43ç« 

ERRATA. 

Pag.    80,   lig.    io:    à   l'histoire   naturelle:    lisez    aux 

sciences  physiques. 
Pag.  289 ,  lig.  i5  :  sont  tenues  sur  un  pivot;  lisez  sont 

tournées  sur  un  pivot. 
Pag.  462  lig.  27  :  M.  Van  Wyn  architecte  du  Royaume; 

lisez  archiviste  du  Royaume. 
Pag.  307,  lig.  32:   le  chtyophore  de   Wollastow,  lisez 

la  lampe  sans  Jlamme  de  Davy. 


TABLE  DES  MATIÈRES 

DU    MESSAGER     DES    SCIENCES    ET    DES    ARTS» 

urinée  1823. 


Page 
Notice  sur  deux  monumens  grecs  du  Musée  de  Leyde.      i  et  49 

sur  la  cathédrale  de  Liège.  4 

Botanique  :  introduction  de  la  culture  en  pleine  terre  des 
plantes  et  arbres  exotiques  ;  VHojtensia  flore  cœruleo.  7 

Vanilla  aromatica  :  Epidendrum  vanilla.  (  Lin.  )  12 

Economie  rurale  :  prix  décernés  par  la  société  royale  d'agri- 
culture et  de  botanique  à  Gand.  i4 
Prix  proposé  pour  encourager  la  culture  des  Larix.  i5 
Réflexions  sur  l'état  des  beaux-arts  dans  les  Pays-Bas.  16 
Histoire  de  la  Belgique,  par  J.  J.  de  Sraet.  19 
Fables  de  M.  Stassart,  5me  édition.  27 
Antiquités  romaines  trouvées  à  Crupet,  province  de  Namur.  55 
Agriculture.  Abeilles.  58 
Catalogue  descriptif  et  abrégé  d'une  partie  des  arbres  fruitiers 
de  la  collection  de  M.  Van  Mons.  68 

Portrait  peint  par  Jean  van  Eyck,  conservé  à  la  galerie 
impériale  du  Belvédère,   à  Vienne.  89 

Vita  Danielis  Wyttenbachii.  92 

Discours  du  Président  de  la  société  royale  d'agriculture  et  de 
botanique  de  Gand ,  à  la  distribution  des  prix ,  le  29  Juin  1823.    100 
Rapport  fait,  à  la  même  séance  publique  par  le  Secrétaire.    109 
Gastonia palmata ,  de  la  collection  de  M.  Caters-De  Wolf, 
à  Berchem  près  d'Anvers.  137 

Description  du  Sounguum  dans  la  parlieoccidentaledu  Tibet.  i38 
Chimie  :  beurre  d'antimoine  obtenu  saus  le  secours  du  feu.    i43 
Géographie  historique ,  physique  et  statistique  du  royaume 
des  Pays-Bas,  par  de  Cloet.  «46 

Type  de  la  pomme  de  terre.  i48 

Histoire  des  troubles  des  Pays-Bas,  sous  Philippe  II,  par 
Van  der  Vynckt.  ^2 


ij  Table. 

Page 

Tableau  de  Jean  van  Eyck,  cité  par  Van  Mander.  i55 

Lettre  de  M.  van  Lennep,  sur  les  antiquités  romaines  dé- 
couvertes à  Crupet,  proviuce  de  Namur.  (  voyez  page.  55.  )     177 

Observations  sur  un  essai  de  carte  géologique  de  la  France, 
et   des   Pays-Bas,    par  M.   d'Omalius  D'Halloy.  180 

Notice  sur  J.  H.   van  Swinden.  i85 

Liste  de  ses  ouvrages  non  mentionnés  dans  la  notice.  200 

Comme ntatio nés  Botanicœ}  par  B.  C.  Dumortier.  20g 

République  des  champs    élysées  ou   monde    ancien  ,    par 
M.  de  Grave:  Notes  inédites.  211,  270,  364  et  442 

Conversion  des  matières  charbonneuses  en  diamant.  21g 

Analyse  raisonuée  de  l'histoire  de  l'origine  des  droits  civils, 
politiques  et  religieux  de  la  Belgique  ,  par  J.   J.  Raepsaet.      220 

Annales  du  salon  de  Gaud  et  de  l'école  moderne  des  Pays- 
Bas  ,  par  L.  de  Bast.  224 
Portrait  de  S.  A.  R.  et  I.  la  princesse  d'Orange.  225 
Sur  les  tableaux  des  frères  Van  Eyck ,  placés  dans  l'église 
de  S.  Bavon,  à  Gand;  et  sur  le  mérite  de  Hubert  van  Eyck, 
comme  peintre.  257 
(Euvres  complètes  de  Jean  Second,  ornées  de  son  portrait.      268 
Agriculture.   Tferkdadige  landbouw-konst  der  Vlamingen , 
(agriculture  pratique  des  Flamands),  par  J.  L.  van  Aelbroek.   276 
Chèvres,  chevreau  ,  bouc  du  Thibet,  et  bélier  de  la  Circassie.  281 
Invention    d'un    mécanisme    pour     accorder    les  timbales.  289 
Hygiène   militaire  à  l'usage    des   armées  de  terre,   par  le 
chevalier  de  Kirckhoff.  290 

Recherches  historiques  sur  l'origine  de  notre  ancien  droit 
coutumier.  2g3 

Handleiding  by  het  onderrigt  in  de  toon  en  zangkunst  op 
de  scholen  van  het  lagere  onderwys.  (  Traité  élémentaire  de 
musique  à  l'usage  des  écoles),  publié  par  la  société  d'utilité 
publique.  3o3 

Découverte  dynamico-chimique.  Combustion,  par  le  con- 
tact de  l'air,  du  sous-oxide  et  de  l'hydrosulphure  de  platine; 
ou  briquet  de  platine.  3o5 

Dissertation  physico-mathématique  sur  la  machine  à  vapeur, 
par  M.  Egide  de  Wit.  3o8 

Sur  les  égagropiles  que  l'on  rencontre  dans  les  animaux.      337 
Sculpture  remarquable  du  XVlme  siècle.  344 

Sur  l'ancien  monnayage  dans  les  Pays-Bas.  348 

Extrait  d'une  notice  sur  les  ossemens  fossiles  ,  trouvés  eu 


Table.  Hj 

Page 
1823,  en  creusant  le  canal  entre  Mastricht  et  Hoclit.  354 

Sur  une  inscription  placée  à  Cologue,   devant  la  maison 
où  l'on  prétend  que  Rubens  est  né.  371 

Anciens  morceaux   de   sculpture ,   récemment  importés  de 
la  Grèce  en  Belgique;  dissertation  de  M.  Léop.  van  Alslein.     377 

Extrait  du  rapport  annuel  de  S.  Exe.  le  Ministre  de  l'In- 
struction publique,  aux  Etats-généraux.  3o/) 

Sur  M.  van  Hanselaere,  peintre,  de  Gaud.  417 

Sur  plusieurs  médailles  romaines  découvertes  aux  environs 
d'Audenarde.  422 

Doublure  en  cuivre  des  vaisseaux  de  mer,  préservée  de  la 
rouille.  429 

Description  des  plantes ,  arbres  et  arbustes  introduits  en 
Belgique  depuis  a 800.  43 1 

Extrait  d'une  notice  lue  à  la  société  royale  d'agriculture 
et  de  botanique  de  Gand  ;  Primula  sinensis.  437 

Guillaume  I.  Tableau  de  M.  Odevaere.  43g 

Extrait  d'une  lettre  de  Rome  sur  les  honneurs  rendus  à  la 
mémoire  de  Cauova.  44g 

Morceau  de  bronze  antique  incrusté  de  lettres  d'argent.       454 

Bulletin  des  académies  et  Sociétés  sapantes. 

Jugement  des  mémoires  sur  Lamoral,  comte  d'Egmont,  et 

prix  décerné  par  la  société  royale  des  beaux-arts  à  Gand.  28 

Institut  des  Pays-Bas:  mémoires  couronnés  et  prix  décer- 
nés par  la  deuxième  classe.  3o 
Exposition  des  objets  d'art  à  Douai.  33 
Société  d'agriculture  et  de  botanique  à  Gand  :  programme.  34 
Sixième  exposition  de  plantes  à  Harlem  :  programme.  36 
Koninglyk  genootschap  Concordia ,  te  Brussel:  programme.  37 
Société  des  sciences  et  des  arts  d'Utrecht:  programme.  3g  et  80 
Académie  royale  d'Amsterdam  :  concours  pour  le  grand  prix.  43 
Quaestiones  in  academia  Rheuo-Trajectina  propositae.  45  et  i65 
Société  économique  d'Harlem;  programmes.  46 
Société  d'émulation  de  Liège:  rapport,  éloge  de  Grétry.  70 
Programme  des  prix  proposés  par  la  même  société.  75 
Société  royale  des  beaux- arts  à  Bruxelles  ,  concours  et 
salon  de  i8a4.  76 


w  Table. 

Page 
Société  d'agriculture  et  de  botanique  de  Gand;  prix  décer- 
nés à  la  foire  aux  chevaux  du  9  Mai  1823.  83 
Fête  séculaire  pour  l'invention  de  l'imprimerie  à  Harlem.  84 
Salon  d'exposition  de  l'académie  du  dessin  à  La  Haye.  85 
Institut  royal  des  Pays-Bas  .  jugement  du  concours  pour 
la  gravure.                                                                                        126 

Société  d'agriculture  et  de  botanique  de  Gand  :  exposition 
des  plantes,  salon  d'été;  prix  pour  la  culture  du  Mélèze.        129 

Nouveaux  mémoires  de  l'Académie   royale   de  Bruxelles  : 
deuxième  et  troisième  volumes.  ibq  et  256 

Questions  proposées  par  la  dite  académie  pour  1824.     159  et  238 
Société  Félix  Merilis,  à  Amsterdam  :  jugement  du  concours 
de  peinture;  programme  des  prix  pour  1823  et  1824.  i64 

Académie  royale  de  Gand  :   salon   d'exposition.  169 

Jugement  du  concours  du  dit  salon.  175 

Description  et  envoi  par  M.   Lejeune,   de  Verviers,   d'un 
échantillon  de  la  Calotheca  bromoidea ,  nouvelle  espèce.         2o5 

Société  hollandaise  des  sciences  à  Harlem:  rapportet  jugement 
sur  les  mémoires  reçus  et  programmes.  2o4,  227  et3r5 

Société  royale  des  beaux- arts  de  Gand  :  séance  et  banquet.  243 
Société  Teylérienne  à  Harlem:  programmes.  3u 

Société  hollandaise  des  sciences  et  des  beaux-arts  :  distribu- 
tion de  médailles  adjugées  au  concours,  et  programmes.  3ia 

Société  de  la  langue  et  de  la  littérature  nationale,  à  Gand  : 
compte  sommaire  de  ses  travaux  et  programme.  324  et  45g 

Société  d'agriculture  et  de  botanique  de  Gaud  :  exposition 
d'hiver;  jugement,   banquet,  etc.  696 

Semences  d'arbres  de   l'Amérique  méridionale  ,  distribuées 
par  M.  le  Président  de  cette  Société.  4oi 

Académie  de  Gaud  :   concours  et  exposition  de   1826.  4o4 

Société  pour   l'eucouragement  de  l'architecture  à   Amster- 
dam :    programme  des  prix  proposés  pour  1824.  409 

Momie  d'Egypte  ,  exposée  au  salon  de  la  société  royale  des 
beaux- arts  à  Gand.  4i2 

Exposition  de  tableaux  ,    etc.    au   salon   de  la  dite  société  4i4 
Ouverture  du  Salon  d'exposition  de  Bruxelles  remise  au  i5 
octobre  1824.  4i6 

Société  de  Malines  :  exposition  d'objets  d'art  pour  1825.     463 
Exposition  de  plantes  à  Harlem.  463 

Exposition  de  fleurs  à  Tournay,  Louvain  et  Bruxelles.      464 


Table.  v 

Page 
Exposition  de  peintures,  etc.  à  Amsterdam.  467 

Envoi  de  plantes  et  arbres  au  jardin  de  botanique  deGand.  468 

Variétés. 

Nécrologie.  Mondez.  ^1 

Etat  du  thermomètre  de  Fahrenheit  à  Batavia ,  en  Sept.  1822,   48 
Semences  recueillies  sur  l'Himalaya,  dans  les  Indes,  et  en- 
voyées à  la  société  de  botanique  à  Gand.  85 
Dianthus  cœsius,  recueilli  par  M.  de  Cloet.  86 
Installation  de  M.  Reinwardt,   comme  professeur  à  l'uni- 
versité de  Leyde.  86 

Société    de  littérature   hébraïque  à  Amsterdam  ;  anniver- 
versaire  de  son  institution.  87 

Plâtre  moulé  sur  la  Vénus  de  Milo ,   exposé  à  l'académie 
royale  de  Gand.  87 

Visite  des  travaux  du  Palais  de  l'Université  de  Gand ,  par 
S.  M.  le  Roi.  87 

Bryologia  Germanica,  par  M.  Voti  Nées  von  Esenbeck.       88 
Nécrologie  :  Lambrechtsen.  88 

Salon  d'exposition  des  objets  d'art  à  Gand.  i33 

Lithographie  :  productions  des  établissemens  de  Bruxelles 
et  de  Tournai.  i33 

Vase  antique,  découvert  à  Merendré.  i55 

Restaurât,  de  la  maison  du  peintre  Wouwermans,  à  Harlem.  i35 
Vingt-septième  anniversaire  de  l'introduction  de  la  vaccine, 
célébrée  à  Amsterdam  par  la  société  Artis  salutifeiae.  i35 

Nécrologie  :  Jean  Oortman  ,  graveur  en  bois.  i35 

Commission  créée  par   la  société  royale  des  beaux-arts  à 
Gand ,  pour  acquérir  des  objets  d'art.  i36 

Gretry  :   ordre  de  la  cour  royale  de  Paris  d'extraire   son 
cœur  de  l'ermitage  de  Montmorency.  i36 

Restauration  d'un  tableau  de  Gérard  van  der  Meire  ,  élève 
de  Hubert  van  Eyck.  25g 

Solution  des  discussions ,  entre  les  villes  d'Harlem  et  de 
Mayence,  sur  la  priorité  d'invention  de  l'imprimerie.  283 

Collection  de  gravures  au  trait,  des  principaux  monumens 
d'architecture,  etc.  de  Bruges,  par  M.  Rudd.  286 

Nécrologie  :  le  docteur  de  Volder.  287 

Quatrième  anniversaire  de  la  société  pour  la  langue  et  la 


vj  Table. 

Page 

littérature  nationale,  à  Bruges.  288 

Règlement  des  commissions  pour  la  conservation  des  mo- 

numens  historiques  et  objets  d'art,  dans  la  Flandre  orientale.  328 
Publication  d'un  poème  latin  de  M.  le  chev.  Camberlyn.  55i 
Portrait  de  la  duchesse  d'Angoulême ,  par  M.  Kinson.  33i 

Société  des  sciences  et  d'agriculture  de  Munich.  532 

Manuel  de  l'administrateur,  du  manufacturier  et  du  négo- 
ciant, ou,  tableau  du  royaume  des  Pays-Bas,  par  De  Cloet.  33a 
Epitre  en  vers,  intitulée  :  L'âme  et  le  corps ,  par  M.  le 

Baron  De  Reiffenberg.  335 

Les  symposiaques,  ou  propos  de  table,  par Mad.Wyttenbach.  333 
Nouvelle   collection    des    vues   les   plus   remarquables    du 

Royaume  des  Pays-Bas,  par  M.  Van  den  Burggraaff.  334 

Lithographie,  du  chapeau  de  paille,  d'après Rubens  et  de 

Galathèe  et  Pjgmalion ,  de  M.  le  chevalier  Odevaere.  535 
Projet   de    lithographier    les   portraits  des  hommes  qui  se 

distinguent  dans  les  sciences  et  les  arts,  etc.  par  M.  Daiwaille.  335 
M.  Van  Brée  nommé  membre  de  la  société  de  Toulon.  555 
Nécrologie  :  Jacques  de  l'Epee.  335 

Visite  du  prince-royal  de  Bavière  à  l'atelier  du  peintre  Maes.  356 
Descente  de  croix,   tableau  de  M.  Moritz.  536 

Nomination  de  membres  de  l'Institut  royal.  556 

Fastes  Belgiques.  Leçons  élémentaires  de  géographie,  par 

M.  Ch.  le  Cocq.  46g 

Rétablissement  du  collège  Lambert  à  Borne.  470 

Extrait   d'une  notice    sur   François    van   der  Burch,  par 

M.    Duthillœul.  475 

Voyage  pittoresque  dans  le  royaume  des  Pays-Bas,    par 

M.  de  Cloet.  476 

Vers  de  M.   le   chev.   Camberlyn  sur  l'invention   de    la 

vaccine.  476 

Installation  de  la  commission  pour  la  conservation  d'objets 

d'art  à  Gand.  477 

Médaille  :  Aux  mânes  des  gardes  Suisses.  478 

Annales  de  la  société  Linuéenne  de  Paris.  479 

Monumens  élevés  à  Hendrik  Wester  et  à  Nieuwold.  48o 

Acquisition  du  tableau  de  M.  Pieneman  :  La  bataille  de 

JVaterloo.  48o 

FIN. 


MESSAGER 


DES  SCIENCES  ET  DES  ARTS. 


Ire.  Livraison  —  Mai  1823. 


NOTICE  SUR  DEUX  MONUMENS  GRECS  DU  MUSEUM 

DE  LE Y DE. 


Figure  Première. 


VjE  grand  morceau  antique  est  de  la  plus  belle  con- 
servation; nous  en  puiserons  la  description  dans  une 
notice  historique  envoyée  a  la  socie'té  royale  des  beaux- 
arts  de  Gand,  par  M.  le  colonel  Bottiers,  qui  l'a 
apporté  de  la  Grèce  ;  nous  l'accompagnerons  de  quel- 
ques remarques  qui  naîtront  de  cette  notice  même  et 
du  sujet. 

Ce  bas-relief  de  cinq  pieds  cinq  pouces  de  haut,  en 
marbre  pentélique,  fut  découvert  en  1819,  dans  une 
fouille  près  de  l'endroit  où  était  anciennement  le  bourg 
d'Exonès ,  peu  distant  d'un  autre  qui  était  célèbre 
dans  l'antiquité  par  le  nombre  de  statuaires  qui  s'y 
étaient  fixés  ;  il  fut  trouvé ,  renversé  avec  le  fronton , 
a  neuf  pieds  sous  terre  ,  et  au  milieu  d'une  grande 
masse  de  débris  de  marbres,  ce  qui  peut  faire  suppo- 
ser qu'il  avait  été  érigé  en  forme  d'autel. 

ïrc.  livraison.  i 


Sur  le  fronton  on  lit  l'inscription  grecque  : 
APXEETPATH  :  AAE£OT  :  ZOTNIEHS.  (i) 
L'ancienne   route    d'Athènes   a    Sunium    passait    a 
côté  de  l'endroit  où  le  bas-relief  fut  déterre'  ;  le  pro- 
montoire de  Sunium  même  est  célèbre  par  les  leçons 


(1)  Archistrate  (femme')  d'Alexis  de  Sunium  ;  peut-être  ce- 
pendant au  lieu  de  femme,  pourrait-on  sous-entendre  fille  ou 
veuve  de;  cet  idiotisme  est  propre  aux  Grecs,  et  a  passé  quel- 
quefois dans  la  langue  latine.  J'ai  toujours  pensé  que  le  Hectoris 
Andromache ,  du  IIIe  livre  de  l'Enéide,  était  un  hellénisme  de 
cette  espèce;  en  général  les  éditions  que  j'ai  consultées,  ponctuent, 

Hectoris,  Andromache ,  Pyrrhin'  connubia  servas  ? 
et  traduisent  à  peu  près,  est-ce  à  Hector  ou  à  Pyrrhus  que  vous 
êtes  restée  fidèle ,  6  Andromaque ,  ou  comme  traduit  trivialement 
et  même  un  peu  burlesquemeut  l'abbé  De  Lille  : 

Est-ce  Hector  ou  Pyrrhus  qui  dispose  de  vous  ? 
Enée  qui  savait  très-bien  comment  avait  fini  Hector,  pouvait-il 
faire  une  demande  aussi  impertinente  à  sa  veuve  ?  mais  à  son 
arrivée  dans  l'Epire ,  une  incroyable  nouvelle  l'a  frappé  ;  la 
troyenne  Andromaque  est  échue  à  Pyrrhus;  Pyrrhus  a  été  tué; 
Andromaque  s'est  remariée  avec  le  troyen  Heleuus,  son  parent; 
mais  ce  n'est  pas  ce  second  hymen  qui  doit  faire  rougir  la  veuve; 
c'est  l'ignominie  de  la  première  union ,  c'est  celle  du  servitio 
enixœ;  je  ponctue  donc: 

Hectoris  Andromache ,  Pyrrhin'  connubia  servas? 
j'adopte   comme  naturelle  et  juste ,    la  traduction    que  propose 
M.  le  professeur  Raoul  : 

Quoi!  la  veuve  d'Hector  dans  les  bras  de  Pyrrhus! 
Je  serais  fâché  d'être  seul  de  mon  opinion  contre  toutes  les  édi- 
tions françaises   de  Virgile ,   mais,   si  ma  mémoire  m'est  fidèle, 
le  traducteur  italien  a  dit  : 

Andromache  d' Et  tore,   a  Pirro,  a   Pirro 
Fusti  congianta  !  .  .  . 
et,  dès  lors,   le  vers  dans  l'édition  originale,  dont  il   s'est  servi, 
aura  été  ponctué  comme  il  m'a  paru  qu'il  devait  l'être. 

(Quoique  cette  note  contienne  une  observation  qui  est  étran- 
gère au  sujet,  elle  en  découle  assez  naturellement,  et  nous  nous 
sommes  empressés  de  l'accueillir.  ) 


(  5) 

de  Platon;  et  Barthélémy,  dans  son  Anacharsis ,  en 
a  fait  graver  la  vue  ;  ce  grand  écrivain  fait  figurer 
dans  son  ouvrage  un  Alexis  de  Sunium,  et  M.  Rot- 
tiers  se  demande  si  cette  Archistrate,  si  noble  et  si  belle, 
et  morte  a  la  fleur  de  son  âge,  ne  serait  pas  la  femme 
de  cet  Alexis  (i). 

La  principale  figure  est  assise,  écartant  d'une  main 
son  voile  et  paraissant  prêter  l'oreille  aux  consolations 
que,  selon  M.  Rottiers,  une  autre  jeune  femme,  une 
esclave  peut-être,  semble  lui  adresser,  tandis  que  der- 
rière la  maîtresse,  une  troisième  figure  ne  paraît  être 
placée  la  que  pour  la  soutenir  (2). 

M.  Rottiers  fait  observer  que  l'oreille  d' Archistrate 
est  percée,  nouvel  indice  que  souvent  les  figures  an- 
tiques avaient  des  boucles  d'oreille,  lorsqu'elles  étaient 
en  place. 

Le  Gouvernement,  sur  la  proposition  de  M.  le  Mi- 
nistre de  l'Instruction  publique,  s'est  empressé  défaire 
l'acquisition  de  plusieurs  morceaux  rapportés  de  la 
Grèce  par  M.  Rottiers ,  et  qui  font  le  plus  bel  orne- 
ment   du  Muséum   de   Leyde,    dont    la    direction    est 

(1)  Cela  pourrait  être;  mais  quand  on  parviendrait  à  s'en 
assurer ,  la  découverte  serait  peu  importante. 

(2)  La  partie  inférieure  du  dessin  paraitrait  indiquer  un  jeune 
homme  ;  on  croit  même  appercevoir  une  couronne  de  feuilles  sur 
sa  tête  ;  la  composition  en  général  semble  rappeler  celle  du  grouppe, 
improprement  nommé  Papirius  et  sa  mère.  Il  est  possible  au 
reste  que  la  faute  en  soit  à  quelqu'inattention  du  dessinateur 
(M.  Van  Brée  ,  d'Anvers,  qui  cependant  sait  parfaitement  voir 
et  juger);  mais  si  c'était  en  effet  la  figure  d'un  jeune  homme 
et  non  celle  d'une  esclave  ,  ne  représenterait-elle  pas  quelque  jeune 
athlète  couronné  dans  les  jeux  publics  et  racontant  à  sa  mère 
lus  détails  de  sou  triomphe;  rien  n'a  dû  empêcher  qu'une  circon- 
stance de  cette  nature  ne  fût  exprimée  sur  le  tombeau  d'une 
mère. 


(4  ) 

confiée  a  M.  ie  professeur  Reuvens  qui ,  quoique  Lien 
jeune  encore,  est  un  des  hommes  du  Royaume  les  plus 
instruits  dans  l'archéologie  (1). 

La  suite  au  N°  prochain. 


NOTICE  SUR  LA  CATHÉDRALE  DE  LIEGE, 

Envoyée  à  la  Société  royale  des  Beaux- Arts  de  G  and,  par  un 
de  ses  Membres  correspondans. 


J_j  ancienne  église  cathédrale  de  S.  Lambert,  démolie 
en  179^,  et  dont  il  ne  reste  plus  aucun  vestige,  avait 
été  bâtie  dans  le  XIme  siècle:  ce  grand  et  bel  édifice, 
d'architecture  gothique,  renfermait  plusieurs  monu- 
mens  précieux  pour  l'histoire  et  pour  les  arts,  qui  ont 
disparu  presque  tous  avec  lui. 

Ses  principaux  tableaux,  ses  bronzes  dorés  et  ses 
belles  colonnes  de  marbre  blanc,  ont  été  transportés 
en  France. 

Les  mausolées,  érigés  dans  cette  église  a  la  mémoire 
des  Princes-Evcques,  furent  vendus  sans  exception  dès 
que  la  démolition  de  ce  temple  eut  été  décrétée  : 
quelques-uns  de  ces  monumens  furent  achetés  par  les 
familles  des  Princes ,  dans  l'intention  de  ne  pas  les 
abandonner  a  la  destruction  5  d'autres  furent  morcelés 
et  mutilés:  celui  de  Velbruck  a  été  conservé,  et  les 
parties  qui  le  composaient  sont  dans   un  dépôt   en  at- 

(1)  J'ai  vu  ce  bas-relief  dans  le  Muséum;  il  est  d'un  très-beau 
style,  d'une  conservation  rare,  et  appartient  incontestablement  à 
nn  siècle  où  l'art  du  statuaire  avait  atteint  un  haut  degré  de 
mérite. 


(5) 

tendant  que  l'on  trouve  un  emplacement  convenable  a 
lui  donner. 

On  voyait  au  milieu  du  chœur  de  la  cathédrale,  le 
superbe  monument  que  le  cardinal  Erard  de  la  Marck , 
Prince-Evêque  de  Liège,  y  avait  fait  élever  de  son  vi- 
vant: ce  monument,  tout  de  bronze  doré,  était  d'une 
grande  richesse  de  composition,  mais  d'une  ordonnance 
assez  bisarre  :  son  piédestal  ou  plutôt  son  soubassement 
déforme  quadrilatère,  était  orné  dans  tout  son  pourtour 
d'une  espèce  de  colonnade  ou  galerie,  dans  laquelle 
étaient  rangées  une  trentaine  de  figures  allégoriques  : 
la  frise  de  l'entablement  était  décorée  de  bas-reliefs  et 
enrichie  de  nombreux  ornemens.  Ce  soubassement,  sur- 
monté d'un  grand  sarcophage  de  très-belle  forme,  qui 
était  orné  d'arabesques  et  porté  sur  des  griffes  de  lion, 
terminait  la  masse  principale  du  mausolée. 

Le  Prince-Evêque,  de  grandeur  colossale,  placé  à 
genoux  sur  un  stylobate  isolé  et  élevé  en  avant  du  sar- 
cophage, était  représenté  les  mains  jointes,  revêtu  de 
ses  habits  de  chœur,  et  fixant  des  yeux,  la  mort  figu- 
rée par  un  squelette  ailé ,  armé  d'une  faux  et  tenant  à 
la  main  un  clepsydre  dans  l'action  d'appeler  le  Prince, 
en  lui  montrant  sa  dernière  heure. 

Le  stylobate  était  décoré  de  bas-reliefs  et  des  armoi- 
ries du  Prince-Evêque. 

On  évaluait  à  plus  d'un  million,  la  dépense  de  ce 
monument. 

Liège  regrettera  toujours  cette  église,  superbe  monu- 
ment, impérissable  par  sa  nature,  mais  que  la  cupidité 
et  la  hache  révolutionnaire  ont  détruit  impitoyablement 
avec  tant  d'autres  objets  d'art  qui  auraient  dû  passer  a 
la  postérité.  C'est  le  Prince  Erard  de  la  Marck  qui  a 
fait  construire  le  palais  épiscopal  qui  existe  encore  et 


(6  ) 

qui  est  occupé  maintenant  par  la  cour  supérieure  de 
justice  et  les  tribunaux. 

Parmi  les  ouvrages  en  marbre  qui  existaient  a  l'an- 
cienne cathédrale ,  on  distinguait  les  tombeaux  des 
Princes  Georges-Louis  de  Bergues  et  de  Charles- 
Alexandre  D'Oultremont  ,  exécutés  par  Guillaume 
Evrard,  excellent  statuaire,  décédé  a  la  fin  du  XVIIme 
siècle ,  ainsi  que  plusieurs  bas-reliefs ,  et  notamment 
une  belle  statue  de  la  Vierge,  de  Robert  Henrard, 
nommé  le  Frère  Chartreux: 

Dans  le  nombre  des  tableaux  qui  décoraient  le  maître- 
autel  et  les  autels  des  chapelles,  on  remarquait  une 
Assomption,  de  Gérard  Lairesse;  le  Christ  au  sépulcre 
et  la  résurrection ,  de  Bertholot-Flemalle  ;  l'élévation 
de  la  croix  au  Calvaire  et  la  résurrection  du  Lazarre, 
par  Douffet.  Il  y  avait  aussi  plusieurs  autres  tableaux 
de  Fisen  et  de  Plumier,  tous  artistes  Liégeois,  pour 
la  plupart  d'un  grand  mérite. 

La  trésorerie  de  la  cathédrale  possédait  une  argen- 
terie d'une  grande  valeur  ;  on  y  voyait  de  fort  belles 
statues,  grandes  comme  nature,  exécutées  en  argent, 
d'après  les  modèles  du  célèbre  Delcour;  les  piédestaux 
de  ces  statues  étaient  décorés  de  bas-reliefs,  faits  sur 
les  dessins  du  même  maître.  Parmi  les  autres  objets 
d'art,  on  distinguait  sur-tout  le  buste  de  S.  Lambert, 
plus  grand  que  nature ,  élevé  et  posé  sur  un  socle , 
enrichi  d'une  galerie  d'architecture  gothique,  dans  la- 
quelle les  principaux  faits  de  la  vie  et  du  martyre  du 
S.  Evèque  sont  représentés  par  plusieurs  centaines  de 
figures  en  relief,  placées  dans  différens  compartimens 
de  cette  galerie,  disposés  en  petites  chapelles:  ce  buste, 
avec  ses  accessoires,  est  d'un  travail  considérable  et 
d'une  richesse  extraordinaire;  tout  y  est  fait  en  argent 
doré  et  en  or  pur. 


(  7) 

Différens  autres  objets  d'art  fixaient  l'attention  des 
curieux 5  c'étaient  de  superbes  sarcophages  d'argent, 
enrichis  de  pierreries  et  d'ornemens  dorés,  et  une  belle 
statue  de  S.  Georges,  en  or.,  revêtu  d'une  armure  à 
l'antique. 

L'ancien  chapitre  cathédrale  composé  de  soixante 
chanoines  qui  avaient  le  titre  de  trefonciers ,  était  au 
rang  des  plus  illustres  de  l'Europe ,  par  rapport  au 
grand  nombre  de  ses  membres,  issus  de  Princes  Sou- 
verains. 

On  comptait  parmi  eux  des  Archiducs  d'Autriche , 
des  Ducs,  des  Princes  électeurs  et  quantité  de  person- 
nages illustres,  descendant  des  premières  maisons  sou- 
veraines. 

Le  Prince-Evêque  avait  rang  entre  les  Princes  de 
l'empire  Germanique.  Les  trefonciers  étaient  tous 
décorés  d'une  croix.  Il  fallait  être  membre  du  chapitre 
pour  parvenir  a  la  principauté  qui  était  élective  a  la 
majorité  des  suffrages.  La  fabrique  de  la  cathédrale  était 
très-richement  dotée  ;  le  Prince-Evêque  tenait  une  cour 
très-brillante  et  jouissait  d'un  revenu  considérable. 


BOTANIQUE. 


r  eu  M.  Hopsomere  fut  l'un  des  premiers  qui  forma 
en  plein  champ  des  plantations  d'arbres  et  d'arbris- 
seaux étrangers  a  notre  sol  et  a  notre  climat.  Cet  ama- 
teur distingué  lit  de  sa  belle  habitation,  située  dans  la 
commune  de  Wetteren,  a  deux  lieues  de  Gand,  près 
de  l'Escaut,  un  lieu  si  enchanteur  par  le  bon  goût  et 
le  choix  de  végétaux   propres  a  s'acclimater  dans   les 


(2) 

terres  environnantes  de  sa  campagne ,  que  ce  ne  fut 
qu'avec  enthousiasme  que  Ton  en  parla  chez  l'étranger. 
M.  le  baron  Du  Mont  de  Courset,  savant  aussi 
infatigable  dans  ses  recherches  sur  la  culture  des  plan- 
tes indigènes  que  dans  ses  expériences  pour  parvenir 
a  la  naturalisation  des  plantes  étrangères,  étonné  d'en- 
tendre parler  toujours  avec  tant  d'éloges  des  plantations 
de  Wetteren ,  se  procura  l'occasion  d'obtenir  de  M.  Van 
Cassel ,  de  Gand ,  cultivateur  botaniste ,  une  liste  des 
arbres  les  plus  remarquables  de  M.  Hopsomere,  avec 
leur  hauteur,  leur  circonférence  et  l'époque  de  leur 
plantation  ;  elle  lui  servit  a  faire  une  comparaison  exacte 
entre  les  mêmes  individus  qu'il  cultivait  a  Courset;  il 
convint  que  tout  ce  que  l'on  avait  dit,  n'avait  rien 
d'exagéré  et  que  la  plantation  de  M.  Hopsomere  était 
vraiment  étonnante. 

M.  Du  Mont  de  Courset,  moins  infirme ,  serait  venu  lui- 
même  visiter  cette  belle  plantation  :  privé  de  ce  plaisir,  il 
fut  forcé  pour  juger  du  sol,  de  former  des  conjectures 
sur  trois  échantillons  de  la  terre  dans  laquelle  ces  arbres 
sont  plantés.  En  i8i3,  l'exposition  d'été  des  fleurs,  mit 
M.  Du  Mont  de  Courseten  correspondance  avecla  société, 
a  laquelle ,  comme  membre ,  il  avait  tout  droit  de  deman- 
der si  l'Hortense  a  fleur  bleue  céleste ,  exposée  parmi 
les  richesses  du  salon  d'été,  n'était  pas  l'effet  de  quel- 
que aimable  supercherie  pour  attirer  l'attention  des 
curieux  et  des  amateurs.  Quelle  ne  dut  pas  être  sa  sur- 
prise d'apprendre  que  la  terre  de  Wetteren  avait  opéré 
ce  prodige,  en  ajoutant  une  beauté  de  plus  a  une 
plante  que  l'on  se  disputait  dans  le  commerce  et  qui 
déjà  ,  sous  sa  couleur  naturelle,  méritait  l'hommage 
des  amis  de  flore  ! 

Le  hasard  a  maintefois  contribué  a  des  découvertes 


(9  ; 

laites  clans  les  arts  et  les  sciences  :  il  n'est  pas  jusques 
à  l'Hortense  qui  n'en  puisse  fournir  la  preuve. 

En  1801,  M.  Hopsomere  se  proposa  de  cultiver  ces 
plantes  bulbeuses  qui ,  par  tout  ailleurs  que  dans  les 
environs  de  Harlem ,  sont  loin  d'offrir  un  ensemble 
aussi  riche  en  belle  culture  et  en  variétés;  a  cet  effet, 
une  planche  de  terre  vierge  fut  destinée  a  faire  des 
essais,  lesquels,  par  le  concours  des  circonstances,  ne 
purent  avoir  lieu.  Cette  terre  vierge  et  meuble,  crcu- 
se'e  d'un  an,  reçut  une  toute  autre  destination:  les 
boutures  de  l'Hortense  remplaçant  les  oignons  de  Har- 
em ,  y  produisirent  pour  la  première  fois  ces  corymbes 
terminaux  azurés,  objet  d'étonnement  pour  M.  Hop- 
somere et  de  spéculation  pour  son  chef  jardinier. 

La  cause  de  ce  changement  de  couleur,  fut  pendant 
quelque  tems  un  secret,  que  tout  autre  eût  voulu  tenir 
dans  l'intérêt  du  commerce  :  mais ,  ce  n'en  fut  plus  un , 
lorsque  de  la  bouche  même  de  M.  Hopsomere  on  apprit 
l'historique  de  VHortensia  flore  cœruleo. 

On  sut  donc  que  l'Hydrangea  ou  l'Hortense  devait 
sa  couleur  azurée  a  la  terre  dans  laquelle  le  hasard  seul 
l'avait  fait  planter  ;  mais  il  se  passa  encore  quelque 
tems  avant  que  les  cultivateurs  les  plus  ingénieux  de 
Gand  et  de  ses  environs,  parvinssent  a  rencontrer  l'es- 
pèce de  terre  qui  convenait  à  l'Hortense  ,  pour  lui 
faire  subir  ce  changement. 

Les  essais  des  cultivateurs  de  Wondelghem,  a  une 
lieue  de  Gand,  eurent  le  succès  le  plus  complet  ; 
l'Hortense  a  fleur  azurée,  fut  cultivée  a  son  tour  en 
ce  village  qui,  pour  la  culture  des  plantes  étrangères, 
ne  le  cédera  pas  au  beau  terroir  de  Wetteren. 

M.  Du  Mont  de  Courset  voulut  aussi  savoir  si  cette  cou- 
leur était  accidentelle  ?  et  si ,  les  pieds  d'Hortenses  conser- 


(    K>  ) 

vaient  toujours  la  couleur  bleue?  L'intérêt  qu'il  mita 
une  découverte  qui  Pavait  tant  frappé,  fut  cause  que 
la  Société  songea  a  faire  l'analyse  de  cette  terre  dans 
l'intérêt  d'une  culture  qui  pouvait  assurer  des  succès  et 
procurer  de  nouveaux  essais  aux  cultivateurs. 

Il  fallut  nécessairement  prendre  un  point  de  compa- 
raison dans  une  terre  des  environs  de  Gand ,  où  l'Hor- 
tense  ne  subit  aucune  altération  dans  les  nuances  de 
sa  couleur,  pour  en  établir  la  différence  avec  celle  qui 
donne  la  fleur  bleue:  feu  M.  Cb.  Van  Hoorebeke  vou- 
lut bien  se  cbarger  d'en  faire  l'analyse.  Je  le  laisse  par- 
ler :  »Dans  la  vue  seulement  de  m'assurer  des  parties 
principales  que  contiennent  comparativement  les  terres 
que  je  pris  de  préférence  moi-même,  a  Gand  et  a 
Wondelghem,  j'ai  obtenu,  dit-il,  par  l'analyse  de  la 
terre  prise  a  Gand  : 

6-0  Humidité. 

60  -  5  Silice  ou  sable. 
i4  -  5  Carbonate  de  chaux. 

6-2  Alumine. 

3-8  Oxide  de  fer. 

7-0  Matière  charboneuse  ou  débris  de  végétaux. 

et    2-0  Perte  sur  l'opération. 

100  -  o 

et  par  l'analyse  de  la  terre  prise  a  Wondelghem  : 

10-0  Humidité. 

5i   -  6  Silice  ou  sable. 

3-5  Carbonate   de  chaux. 

6-5  Alumine. 

16  -  4  Matières  charboneuses  ou  débris  de  végétaux. 
10-0  Oxide  de  fer. 

2-0  Perte  sur  l'opération. 


100 


»  J'aurais  poussé  les  expériences  plus  loin  et  entrepris 
d'analyser  d'autres  terres  des  environs  de  Gand,  si  le 
iol  n'en  avait   offert    une    trop    grande    variété.     Les 


(II) 

analyses  des  deux  terres  ci-dessus,  ont  seules  fixe'  mon 
attention,  et  il  m'a  paru  que  les  matières  eharboneuses 
ou  débris  de  végétaux  joints  a  l'humidité  que  conte- 
naient ioo  parties  de  terre  de  Wondelghem,  ne  de- 
vaient pas  contribuer  pour  peu  a  donner  la  couleur 
bleue  aux  Hortenses. 

»  Peut-être  cette  surabondance  de  corps  forme-t-clle 
la  partie  constituante  qui  colore  cette  fleur  ;  peut-être 
la  grande  partie  de  gaz  azote  jointe  au  carbone  de  fer 
qu'offre  la  tourbière  de  Wondelgbem,  est-elle  la  cause 
unique  delà  transformation  de  la  couleur  de  l'Hortense. 
Cette  transformation  cesse  d'être  un  problême  a  résou- 
dre :  les  qualite's  colorantes  des  terres  tourbières  con- 
nues ou  des  terres  préparées  convenablement  pour  les 
remplacer,  procureront  aux  cultivateurs  ces  fleurs  qui 
naguères  n'e'taient  connues  qu'a  Wetteren." 

D'après  le  rapport  de  M.  Charles  van  Hoorebeke , 
on  a  pu  établir  que  c'est  le  sol  de  Wetteren  qui  a 
contribué  a  la  dégénération  de  l'Hortense  a  fleur  rouge 
par  le  principe  alimentaire  qu'il  lui  fournit ,  et  l'analyse 
chimique  permet  de  croire  que  c'est  a  la  fixation  d'une 
grande  partie  de  gaz  acide  carbonique,  ou  a  la  pré- 
sence d'un  hydro-sulphure  de  fer,  qu'est  dû  ce  chan- 
gement de  couleur.,  qui  cesse,  dès  que  l'Hortense  est 
cultivée  dans  une  terre  de  toute  autre  nature.  Ce  qui 
milite  en  faveur  de  notre  opinion,  c'est  qu'en  arrosant 
d'une  eau  ferrugineuse  une  Hortense  a  fleurs  rouges, 
plantée  dans  une  terre  ordinaire,  on  obtient  artificiel- 
lement ce  changement. 

Cette  découverte  paraîtra  peu  importante  a  quelques 
personnes  ;  mais  ne  pourrait-elle  point  un  jour  nous 
procurer  dans  nos  parterres  des  Pélargoniums  ou  autres 
plantes  a  fleurs  bleues? 


(  l»  ) 

L'Hortensia  (1)  paraît  sous  tous  les  rapports  se  plaire  a 
Gand  et  dans  ses  environs.  Cultivée  en  pleine  terre 
sans  pre'servatif  quelconque ,  elle  a  bravé  le  rude  hiver 
de  1822  à  1825,  et  moins  rebelle  en  Flandre  qu'a 
Paris,  d'après  ce  qu'on  en  dit  dans  le  Bon  Jardinier 
de  1823,  elle  sera  assez  complaisante  pour  s'accom- 
moder aussi  a  nos  gelées  de  printemps.  La  Société 
royale  d'Agriculture  et  de  Botanique  communiquera 
aux  amateurs  la  nomenclature  des  plantes  que  l'expé- 
rience a  prouvé  pouvoir  quitter  les  serres  chaudes  et 
les  orangeries. 


VANILLA  AROMATICA. 

EPIDENDRUM     VANILLA.     (  LIN.  ) 


vJn  sait  que  cette  plante  sarmenteuse  se  cultive  a  S1. 
Domingue  :  que  dans  nos  climats  elle  demande  la  serre 
chaude  et  veut  beaucoup  de  chaleur;  mais,  on  ignore 
jusqu'à  ce  jour,  si  cette  plante,  encore  très-rare  en 
France  et  cultivée  a  la  Malmaison ,  y  a  déjà  fleuri. 


(1)  L'IIortense,  Hydrangea  Hortensis ,  originaire  de  la  Chine, 
introduite  en  Europe  en  1788,  fut  dédié  par  Commersou,  à 
Hoiiense  Lejxiute ,  épouse  du  célèbre  horloger.  Déjà  depuis  1736 
on  tenait  de  la  Virginie  Y  Hydrangea  arborescens  ;  en  1789  et 
en  1806,  la  Caroline  nous  procura  V Hydrangea  radiata  et  V Hy- 
drangea glauca;  la  Floride  V Hydrangea  quercifolia  ;  et  l'Amé- 
rique du  nord  ÏHydrangea  lœvigata. 

Ces  plantes  sousligneuses  ou  arbrisseaux  de  la  famille  des  saxi- 
fragéts  de  M.  De  Jussieu  ,  se  multiplient  de  marcottes  et  de  bou- 
tures. 


(  '5) 

M.  le  comte  H.  Vilain  XII1I,  membre  de  la  Société 
royale  d'Agriculture  et  de  Botanique  a  Gand,  vient 
d'adresser  a  la  Société  une  notice  exacte  sur  YEpi- 
dendrum  Vanilla^  cultivé  dans  ses  serres  a  Wetteren  5 
il  a  en  l'extrême  obligeance  d'y  ajouter  quelques  dé- 
tails sur  le  cycas  revoluta,  plante  d'une  floraison 
non  moins  rare,  a  laquelle  en  1820  fut  adjugée  la 
grande  médaille  du  concours  d'été. 

VEpidéndrum  Vani\lay  nous  écrit-on,  était  depuis 
plusieurs  années  cultivé  dans  nos  serres ,  toujours 
entretenu  dans  la  plus  grande  chaleur,  enfermé  dans 
un  petit  pot,  mais  pouvant  par  ses  racines  s'étendre 
dans  la  tannée  ;  il  avait  déjà  acquis  une  croissance  re- 
marquable, lorsqu'une  grappe  de  boutons  s'est  montrée 
vers  le  ir  Janvier  1823  ;  nous  attribuons  sur-tout  cette 
apparition  a  la  prévoyance  qu'avait  eue  le  jardinier, 
d'ébrancher  fréquemment  les  tiges  sàrmenteuses  de  l'in- 
dividu: aux  premiers  jours  de  Mars,  les  fleurs  se  sont 
épanouies,  d'une  blancheur  verdâtre,  se  succédant  en 
grappe  et  diminuant  de  grosseur  vers  le  bout;  elles 
n'ont  pas  été  de  longue  durée;  la  rigueur  de  la  saison 
a  contrarié  leur  développement  et  même  les  dernières 
venues  se  sont  détachées  de  la  tige  sans  s'ouvrir. 

Buchoz  a  figuré  cette  plante  dans  ses  dons  merveil- 
leux de  la  nature,  sous  le  nom  tfEpidendrum  Fa- 
nilla,  tome  premier,  planche  65;  mais  soit  l'inexac- 
titude habituelle  de  cet  auteur,  soit  la  faiblesse  de 
l'individu,  notre  plante  est  loin  d'offrir  un  aussi  grand 
luxe  de  fleurs  et  de  boutons. 

Le  Cycas   Revoluta    (1),  a    trompé    heureusement 


OJ  Le  Cycas  Revoluta,  originaire  du  Japon,  fut  envoyé  par 
Rumphius  à   Amsterdam  en    170*;    il  ne  fut    introduit    en  An- 


(  iM 

toutes  les  conjectures  des  naturalistes;  il  a  échappé  a 
la  mort  que  lui  prédisaient  ces  Messieurs  depuis  1820 , 
époque  de  sa  floraison  ;  il  vient  même  de  pousser  une 
couronne  majestueuse  de  palmes,  et  par  la  fraîcheur  de 
sa  croissance,  ce  palmier  promet  de  donner  bientôt  aux 
botanistes  une  fleur  aussi  nouvelle  et  aussi  extraordi- 
naire que  la  première. 


ECONOMIE    RURALE. 




XjA  Société  royale  d'Agriculture  et  de  Botanique  a 
Gand,  dans  l'intention  de  concourir  a  l'amélioration 
des  races  de  bestiaux ,  dans  la  Flandre  orientale ,  avait 
annoncé,  en  1822,,  qu'elle  accorderait:  i°  une  montre 
d'or  au  cultivateur-propriétaire  de  la  plus  belle  génisse 
ou  du  plus  beau  bœuf  couronné  au  concours  des  bou- 
cheries de  Gand,  dans  la  huitaine  avant  Pâques;  20  une 
tabatière  d'argent  doré,  au  cultivateur-propriétaire  du 
veau  qui  aurait  été  jugé  digne  de  la  même  distinction; 
3°  une  houlette  d'argent  au  berger  dont  l'agneau  au- 
rait obtenu  les  honneurs  de  l'exposition. 

gleterre  qu'en  1707.  Selon  quelques  amateurs,  le  Cycas  Reuoluta 
aurait  fleuri  en  Angleterre  en  1780  —   1790. 

Rumphius,  Tliunberg,  Wildenow  et  plusieurs  autres  botanis- 
tes, ont  décrit  cette  plante  sous  des  noms  différens;  les  opinions 
ont  toujours  été  divisées  sur  le  dépérissement  de  celte  espèce  de 
palmier  lors  de  sa  floraison  :  l'individu,  dont  parle  M.  H.  Vilain 
X1III,  paraît  permettre  de  douter  qu'en  effet  le  Cycas  Jievo- 
luta  ait  jamais  fleuri  en  Angleterre,  si  toute  fois,  c'est  de  ce 
Royaume  que  l'on  tient  que  le  Cycas  Jteuoluta  périt,  après  sa 
floraison. 


(  i5  ) 

Ces  trois  prix  d'encouragement  ont  été  adjugés, 
l'avant-veille  de  Pâques,  par  le  jury,  en  présence  des 
commissaires  de  la  société,  et  la  remise  en  sera  faite  aux 
vainqueurs,  dans  la  séance  publique  du  29  Juin  1820. 

Il  a  été  bien  agréable  pour  la  Société  d'apprendre, 
des  membres  du  jury  ,  que  ses  efforts  pour  l'amé- 
lioration des  races  de  bestiaux,  n'avaient  pas  été  in- 
fructueux; que,  depuis  trois  ans,  les  cultivateurs  de 
la  Flandre  orientale ,  avaient  redoublé  de  zèle  a  cet 
égard,  et  qu'on  ne  se  rappelait  aucune  époque  où  un 
aussi  grand  nombre  d'animaux  abattus  se  fût  disputé 
les  divers  prix  proposés  au  concours. 

Constantin  Hoste,  a  Gendbrugge,  lez-Gand,  a  mé- 
rité la  montre  d'or. 

Pierre  Céli,  a  Oostakker,  la  tabatière  d'argent  doré. 

Pierre  Heye,  a  Exaerde,  la  houlette  d'argent. 

La  Société,  accordera  deux  montres  d'or,  l'une  au 
cultivateur-propriétaire  du  meilleur  cheval  de  trait  ou 
de  labour,  de  trois  a  six  ans;  l'autre  au  cultivateur- 
propriétaire  de  la  plus  belle  vache  à  vêler,  de  trois  a 
cinq  ans,  qui  se  seront  fait  distinguer  a  la  foire  de 
Gand  du  9  Mai  1823. 


La  Société,  dans  sa  prochaine  séance  d'été,  saisira 
l'occasion  de  proposer  divers  prix  pour  l'encourage- 
ment des  plantations  de  Larix  et  de  Mélèzes ,  dans  les 
Provinces  méridionales  du  Royaume. 

On  sait  que  l'écorce  des  jeunes  Mélèzes  ou  Larix 
est  astringente ,  et  s'emploie  beaucoup  en  Allemagne 
dans  les  tanneries  ;  elle  pourrait  en  conséquence  être 
employée  utilement  en  ce  pays,  pour  y  remplacer  l'écorce 
du  chêne. 


(  i6) 


Extrait  du  Discours  prononcé  par  le  Président  de  la 
quatrième  classe  de  V Institut  royal  des  Pays-Bas , 
à  la  séance  publique  du  2^  Novembre   1822. 


Ce  discours,    écrit   en    hollandais,    présente    quelques   réflexions 
sur  l'état  des  ïJeaux-Arts  dans  le  Royaume. 


Il  a  été  tien  satisfaisant  pour  nous,  dit  l'orateur, 
de  reconnaître  a  la  dernière  exposition  publique  qui 
eut  lieu  a  Amsterdam,  combien  nous  avions  fait  de 
progrès  dans  un  art  qui  naguères  illustrait  notre  patrie. 
Il  semblait,  a  l'aspect  de  cette  foule  de  tableaux  qui 
ornaient  le  salon,  qu'on  sentît  renaître  l'espoir  de  voir 
bientôt  l'Ecole  Belgique  reproduire  ses  Van  Dyk,  ses 
Van  der  Helst ,  ses  Bakhuizen  ,  ses  Van  de  Velde.  L'ob- 
servateur, ami  et  juge  de  l'art,  a  pu  se  convaincre  des 
avantages  réciproques  de  la  fusion  de  nos  écoles;  une 
belle  simplicité,  une  imitation  parfaite  de  la  nature, 
basées  sur  le  vrai  et  sur  le  vrai  seul,  y  signalaient  les 
productions  des  premiers  maîtres.  L'œil  n'y  était  pas 
fatigué  delà  répétition  de  ces  sujets  toujours  les  mêmes, 
où  les  divinités  mythologiques,  éternellement  représen- 
tées sous  le  même  costume,  ne  font,  ne  disent  que  ce 
qu'elles  ont  toujours  fait  et  toujours  dit;  de  ces  sujets 
où,  sans  une  connaissance  parfaite  de  la  fable  il  aurait 
été  impossible  de  comprendre  l'intention  de  l'artiste  et 
de  saisir  ce  qu'il  pouvait  y  avoir  de  défectueux  dans 


(  K  > 
sa   manière  d'exprimer  le  caractéristique,  le  pathétique 
ou  le  grandiose. 

C'est  en  unissant  la  simplicité,  qui  distingue  l'école 
hollandaise ,  au  sublime  dont  elle  est  susceptible  , 
que  les  artistes  ont  traité  des  sujets  dans  lesquels 
les  passions  ,  les  douces  passions  de  la  mélancolie 
et  de  la  douleur  excitent  la  compassion  des  specta- 
teurs même  les  moins  exercés.  Quelques-uns  des  évé- 
nemens  les  plus  mémorables  de  notre  histoire  et  de 
celle  d'autres  peuples  y  sont  représentés  de  la  manière 
la  plus  satisfaisante  et  présentent  un  caractère  plus 
grand  que  la  plupart  des  précédentes  productions  des 
peintres  d'histoire  de  l'école  hollandaise;  l'architecture, 
les  costumes ,  les  usages  y  sont  le  plus  généralement 
rendus  avec  exactitude  ;  l'expression  des  sentimens  y  est 
telle  que  peu  de  mots  suffisent  aux  moins  instruits  pour 
se  mettre  au  fait  de  l'événement;  les  sujets,  intéressans 
pour  l'histoire  en  général,  et  en  particulier  pour  la  nôtre, 
en  sont  instructifs  et  propres  a  réveiller ,  a  stimuler  l'es- 
prit national.  La  vérité  et  la  simplicité,  particulières  a  nos 
artistes,  se  reconnaissent  même  dans  quelques  tableaux 
peints  en  Italie  par  un  maître  de  l'école  Belgique,  (1) 
et  qui  nous  reproduisent  si  agréablement  le  costume 
des  divers  habitans  de  cette  contrée  pittoresque. 

Parmi  les  tableaux  de  mérite,  destinés  a  retracer  les 
scènes  de  la  vie  domestique,  plusieurs  ont  de  la  jo- 
vialité, mais  aucun  n'offre  rien  de  ce  trivial,  de  cette 
immoralité,  auxquels  on  s'est  si  souvent  abandonné  dans 
les  productions  de  ce  genre. 

Le  paysage  ,  cette  étude  chérie  de  l'école  Hollan- 
daise, s'y  distingue  au  premier  rang;  les  artistes,  dans 


(1)  M.  Navez,   de  Bruxelles, 
Ir   Cahier. 


(  i8) 

le  choix  des  sujets,  ont  évité  le  trivial,  l'ignoble,  le 
bisarre  ,  confondus  autrefois  avec  le  pittoresque  ;  on 
trouve  dans  les  principaux  morceaux  une  forte  et  vé- 
ritable expression  poétique;  des  ruines  ombragées 
d'arbres ,  au  travers  desquelles  se  joue  agréablement  la 
lumière  du  soleil;  des  scènes  intéressantes  de  la  vie 
rustique,  représentées  de  main  de  maître;  des  accidens 
de  lumière  et  d'ombre  produits  par  le  mouvement  des 
nuages,  ou  par  la  nature  dans  son  costume  d'hiver, 
y  indiquent  le  véritable  sentiment  de  la  peinture  et 
démontrent  que  l'école  Hollandaise  a  repris  son  carac- 
tère. Quelques  marines  rappellent  le  faire  de  fVillem 
van  de  Velde  et  de  Bàkhuizen  $  et  quoique  peintes 
d'une  manière  originale ,  elles  n'auraient  pas  déshonoré 
le  pinceau  de  ces  grands  maîtres. 

L'art  du  statuaire,  dont  le  goût  semblait  depuis  quel- 
ques années  avoir  disparu  parmi  nous,  a  aussi  fourni  la 
preuve  qu'il  n'était  pas  demeuré  stationuaire;  au  nom- 
bre des  pièces,  d'un  mérite  très-réel,  qu'il  a  produites, 
on  doit  distinguer  le  buste  de  la  première  actrice  des 
Pays-Bas  ;  une  imitation  fidèle  de  la  nature  jointe  a  un 
goût  pur  et  a  un  style  élevé,  caractérisent  le  talent  de 
l'auteur  (1). 

L'art  numismatique  se  relève  aussi  dans  le  Royaume; 
nous  avons  a  regretter  qu'une  médaille,  achevée  depuis 
l'exposition,  n'ait  pu  en  convaincre  le  public;  le  talent 
et  le  goût  avec  lesquels  cette  médaille  est  exécutée, 
font  honneur  a  l'artiste  et  lui  auraient  assuré  l'appro- 
bation de  tous  les  connaisseurs  (2). 

(1)  M.  Gabriel ,  d'Amsterdam,  membre  de  l'Institut  royal. 

(2)  Cette  médaille  a  été  gravée  pour  l'Institut,  par  M.  Braeml, 
de  Gand  ;  elle  est  supérieure  en  mérite  à  celle  du  même  artiste,  qui 
fut  décernée  aux  fabricaus,  lors  de  l'exposition  des  produits'de 


(  i9) 
Ainsi,  Lien  que,  dans  une  institution  de  cette  na- 
ture, il  y  ait  nécessité  d'admettre  des  productions  d'un 
mérite  inférieur,  l'ensemble  n'en  a  pas  moins  montré 
que  chaque  année  ajoute  dans  ce  Royaume  au  per- 
fectionnement des  beaux-arts. 


HISTOIRE    DE    LA    BELGIQUE, 

Par   J.  J.    De  Smet,    Professeur  de  Rhétorique  au 

Collège   d'Alost. 


iVl.  J.  J.  de  Smet,  professeur  de  rhétorique  au  col- 
lège d'Alost,  a  aussi  voulu  brûler  un  grain  d'encens 
sur  l'autel  de  la  patrie ,  ce  sont  ses  expressions ,  et 
il  nous  a  donné  un  nouvel  abrégé  de  l'histoire  de  la 
Belgique.  La  patrie  accueillera  avec  reconnaissance  le 
grain  d'encens  de  M.  De  Smet.  Son  abrégé  remplit  le 
but  qu'il  s'est  proposé,  et  ceux  qui  en  prendront 
lecture,  reconnaîtront  qu'il  a  eu  raison  de  choisir 
pour  devise  :  Craignez  Dieu,  Respectez  le  Roi,  Aimez 
vos  Frères.  C'est  la  devise  des  bons  citoyens,  elle  lui 
appartenait. 

M.  De  Smet  a  mis  de  l'ensemble  dans  sa  narration, 


l'industrie  nationale.  M.  Braemt  vient  d'être  nomme  graveur  de  la 
Société  générale  pour  l'encouragement  de  l'industrie  et  du  commerce , 
établie  à  Bruxelles  ;  l'activité  de  cet  artiste  lui  permettra  sans 
doute  encore,  tout  eu  satisfaisant  à  ses  eugagemens  envers  cette 
Société,  d'étudier  et  d'approfondir  le  secret  de  son  art  et  d'exé- 
cuter les  travaux  numismatkpues  dont   on  pourrait  le  charger. 

Note  du    Traducteur. 


(  *o  ) 
et  ce  n'était  pas  le  moins  difficile;  il  n'a  pris  que 
les  faits  importans,  les  a  resserrés  le  plus  qu'il  lui  a 
été  possible,  et  ses  époques,  toutes  bien  déterminées, 
sont  suivies  chacune  d'un  aperçu  général  sur  les  mœurs 
de  nos  ancêtres,  sur  leurs  progrès  dans  les  sciences  et 
dans  les  arts;  il  en  résulte,  comme  il  le  fait  très-bien 
observer  lui-même ,  une  diversion  agréable  au  récit  trop 
uniforme  des  sièges  et  des  batailles  dont  se  composent 
presque  uniquement  les  annales  des  peuples. 

Son  introduction ,  où  il  traite  de  l'état  de  l'ancienne 
Belgique,  est  un  excellent  résumé  de  tout  ce  qui  a  été 
écrit  de  mieux  sur  cette  matière  par  les  historiens  na- 
tionaux et  étrangers.  Son  style  est  celui  de  l'histoire, 
ses  réflexions  celles  d'un  philosophe  chrétien,  et  il 
est  peu  d'abrégés  dont  la  lecture  soit  plus  instructive 
et  plus  intéressante. 

Ces  éloges  pourraient  sembler  exagérés;  mais,  pour 
que  le  lecteur  puisse  en  juger  par  lui-même ,  nous 
transcrivons  ici  un  extrait  de  l'ouvrage  de  M.  De  Smet, 
dans  la  partie  où  il  jette  un  coup-d'œil  rapide  sur  l'état 
de  lettres  et  des  arts,  pendant  la  quatrième  époque. 

»  La  cour  du  bon  duc  Philippe,  qui  se  tenait  le  plus 
souvent  a  Bruges,  surpassait  en  magnificence  toutes  les 
cours  de  l'Europe.  Ce  prince  était  craint  et  respecté 
comme  un  des  plus  grands  souverains  de  la  chrétienté, 
les  Turcs  même  le  redoutaient  et  lui  donnaient  le 
titre  de  Grand  Duc  des  pays  occidentaux. 

«C'était  particulièrement  dans  la  parure  que  les  hommes 
et  les  femmes  étalaient  a  l'envi  tout  leur  faste  :  a  la  guerre 
même  on  affectait  de  revêtir  les  plus  riches  armures. 
Quand  le  duc  partit  pour  la  conquête  du  Luxembourg, 
il  menait  a  sa  suite  dix-huit  superbes  chevaux  de  main, 
couverts  de  velours  noir  aux  armes  de  Bourgogne,  et 


(  ai  ) 

orné  de  clous  d'or.  Les  pages  brillaient  d'or  et  de 
perles;  une  seule  salade  (espèce  de  casque)  était  de 
la  valeur  de  cent  mille  écus  d'or.  Le  duc  sur-tout  était 
richement  armé,  et  le  harnois  de  son  cheval  étincelait 
de  pierreries.  Quoique  toujours  en  guerre,  Charles  le 
Téméraire  n'avait  pas  moins  de  goût  que  Philippe  pour 
cette  magnificence ,  et  la  cour  impériale  fut  saisie  d'éton- 
nement,  quand  elle  vit  toute  la  splendeur  de  la  maison 
de  Bourgogne,  dans  la  conférence  que  Charles  eut  à 
Trêves  avec  l'empereur  Frédéric  III.  Les  particuliers 
imitaient  leurs  princes ,  les  domestiques  même  rivali- 
saient de  luxe  avec  leurs  maîtres,  et  la  dernière  classe 
du  peuple  s'habillait  de  soie  et  de  velours. 

»  La  chevalerie  brillait  encore  de  tout  son  éclat  sous 
Philippe-le-Bon,  et  c'est  de  son  tems  que  le  chevalier 
Jacques  de  Lalaing  alla  chercher  des  aventures  et  mon- 
trer sa  bravoure  par  toute  l'Europe  ;  mais  le  duc  porta 
un  grand  coup  a  la  chevalerie  en  instituant  l'Ordre  de  la 
Toison  d'Or,  un  des  plus  anciens  et  des  plus  illustres 
de  l'Europe.  Il  l'institua  a  Bruges  (i45o)  pendant  les 
fêtes  qui  suivirent  son  mariage  avec  Isabelle  de  Portugal, 
et  la  grande-maîtrise  en  demeura  aux  ducs  de  Bourgo- 
gne. Au  collier  qui  était  d'or ,  pendait  une  toison 
semblable  a  celle  que  Jason  conquit  dans  la  Colchide, 
sans  doute  pour  montrer  que  l'éducation  des  moutons 
et  les  manufactures  de  laine  étaient  les  sources  prin- 
cipales de  l'opulence  de  la  Belgique. 

»Les  faveurs  dont  Philippe-le-Bon,  Charles  le  Témé- 
raire et  Marguerite  d'Autriche  comblèrent  les  artistes, 
firent  faire  a  la  musique  des  progrès  remarquables.  Les 
Belges,  nés  avec  un  génie  heureux  pour  cet  art,  s'y 
appliquèrent  avec  zèle  et  en  furent  les  restaurateurs. 
La  plupart  des  premiers  musiciens  que  la  France  ait 


(22    ) 

eus ,  étaient  Flamands.  En  Italie ,  ils  acquirent  une 
si  grande  autorité  en  perfectionnant  le  contrepoint, 
qu'ils  firent  passer  leur  goût  national  dans  la  musique 
italienne.  En  France,  Josquin  Des  Prez ,  doyen  du  cha- 
pitre de  Condé,  fut  un  des  premiers  réformateurs  de 
la  musique;  Aubert  Ockergan,  né  en  Hainaut,  passait 
pour  le  plus  célèbre  musicien  sous  Louis  XII;  en  Italie, 
Jean  le  Teinturier,  chanoine  de  Nivelles  sa  patrie,  fonda 
a  Naples  une  école  de  musique  qui  devint  célèbre  ; 
Simon  van  der  Eycken  de  Bruxelles,  s'acquit  une  telle 
réputation  qu'il  fut  nommé  maître  de  musique  de  la 
métropole  de  Milan  ;  Cyprien  Rorus  de  Malines ,  le 
fut  a  Venise;  Orland  de  Lattre,  né  a  Mons,  nommé 
en  Italie  Orlando  di  Lasso,  fut  appelé  le  prince  des  mu- 
siciens de  son  tems. 

»La  peinture,  qui  n'avait  fait  que  languir  jusqu'au 
quinzième  siècle,  acquit  pour  ainsi  dire  une  existence 
nouvelle ,  par  la  découverte  de  Jean  Van  Eyck.  Ce 
peintre,  né  à  Maeseyck,  mais  connu  sous  le  nom  de 
Jean  de  Bruges,  était  employé  a  la  cour  du  bon  Duc; 
cherchant  un  jour  un  vernis  pour  donner  du  brillant 
à  ses  tableaux,  il  s'aperçut  que  l'huile  de  noix  ou  de 
lin,  mêlée  aux  couleurs,  faisait  un  corps  solide  et  écla- 
tant qui  pouvait  se  passer  de  vernis.  Sa  découverte 
passa   bientôt    en  Italie    et  dans  le  reste  de  l'Europe. 

»  Ces  tems  furent  féconds  en  découvertes ,  sur-tout 
dans  la  Belgique.  À  l'invention  de  la  peinture  a  l'huile, 
Jean  de  Bruges  ajouta  plusieurs  procédés  pour  colorer 
le  verre  dans  la  pâte.  Louis  Berken,  de  Bruges,  trouva 
le  moyen  de  tailler  et  de  polir  le  diamant  (1476):  les 
Anversois  ont  perfectionné  le  secret  de  Berken  au  point 
que,  presque  jusqu'à  nos  jours,  des  souverains  étran- 
gers leur  confièrent  les  diamans  de  leur  couronne.   On 


(  &  ) 

ne  peut  démontrer  que  les  Belges  aient  inventé  le  ca- 
rillon; mais  aucun  pays  n'y  a  des  prétentions  mieux 
fondées,  et  n'offre  des  carillons  aussi  anciens,  aussi 
nombreux  et  aussi  parfaits  que  ceux  de  la  Belgique. 
Philippe-le-Bon  fit  transporter  a  Dijon  la  belle  horloge 
a  carillon  de  Courtrai  ;  celle  d'Alost  fut  achevée  en  1487. 
Les  dentelles  ,  qui  formaient  naguères  une  branche  si 
considérable  de  commerce ,  sont  dues  aussi  a  la  Belgi- 
que ,  et  nulle  part  elles  n'ont  été  portées  a  une  si  haute 
perfection  qu'a  Malines,  Bruxelles  et  Valenciennes. 

»  A  leur  retour  des  croisades ,  les  Belges  charmés  des 
tapisseries  de  haute-lice  qu'ils  avaient  vues  dans  le 
Levant ,  songèrent  a  en  travailler  eux-mêmes  et  parvin- 
rent bientôt  a  surpasser  leurs  maîtres.  Les  pontifes  et 
les  rois  recherchèrent  les  tapis  de  la  Belgique.  Le  duc 
de  Mantoue  fit  venir  en  Italie  deux  ouvriers  Flamands 
pour  exécuter ,  sur  les  dessins  de  Jules  Romain ,  une 
superbe  tenture,  représentant  des  sujets  de  l'histoire 
sainte.  Ce  fut  le  fameux  Jans,  de  Bruges,  qui  établit 
depuis  en  France  la  manufacture  devenue  si  célèbre 
sous  le  nom  de  manufacture  des  Gobelins. 

»Un  nouveau  monde,  que  Colomb  avait  ouvert  aux 
Européens,  augmenta  la  richesse  d'Anvers,  qui  four- 
nissait les  principaux  objets  du  commerce  aux  pays  ré- 
cemment découverts.  Ces  quais  et  ces  canaux  si  com- 
modes pour  le  trafic,  cette  bourse,  modèle  de  celles  de 
Londres  et  d'Amsterdam ,  et  ce  magnifique  bâtiment 
construit  pour  les  négocians  de  la  Baltique,  sont  en- 
core aujourd'hui  des  monumens  de  rancienne  grandeur 
de  cette  ville  commerçante. 

»  Le  règne  de  Charles-Quint  fut  l'époque  de  la  plus 
grande  prospérité  d'Anvers.  Un  seul  négociant,  nommé 
Jean  Daens,  prêta  à  l'Empereur  2,000,000  de  florins;  aussi 


(*4  ) 

généreux  que  riche  il  invita  le  prince  a  dîner,  et  jeta 
au  feu  a  la  fin  du  repas  le  billet  d'obligation  :  »sire, 
»  dit-il,  je  suis  trop  bien  payé  par  l'honneur  que  me 
»  fait  votre  majesté." 

»  Philippe-le-Bon ,  a  qui  aucune  sorte  de  gloire  n'était 
étrangère,  se  déclara  aussi  le  protecteur  des  savans. 
Il  augmenta  considérablement  la  bibliothèque  de  Bour- 
gogne a  Bruxelles.  Son  successeur  également  ami  des 
lettres,  même  au  milieu  du  bruit  des  armes,  portait 
toujours  sur  lui  la  Cyropédie  traduite  en  français,  et 
elle  fut  trouvée  parmi  ses  bagages  après  la  bataille 
de  Nancy.  Les  troubles  continuels  qui  agitèrent  la 
Belgique  sous  Marie  et  Philippe-le-Bel ,  ne  leur  per- 
mirent pas  de  suivre  en  cela  l'exemple  de  leurs  pré- 
décesseurs. Mais  sous  le  règne  de  Charles-Quint, 
et  sous  la  régence  de  Marguerite  sa  tante  et  de  Marie 
sa  sœur,  les  lettres  furent  protégées  hautement.  Mar- 
guerite, si  célèbre  par  son  esprit,  sa  gaîté  et  ses 
malheurs ,  accueillit  les  gens  de  lettres  et  fit  plus  par 
son  zèle  et  son  amour  pour  le  progrès  des  arts  que 
les  souverains  les  plus  puissans.  Elle  écrivait  très-bien 
en   prose  et  en  vers. 

»Parmi  les  savans  qui  furent  attachés  a  cette  Princesse , 
on  distingue  Corneille  Agrippa,  Ramacle  de  Florennes, 
poëte  latin,  et  sur-tout  Erasme.  Ami  d'Erasme,  Clé- 
nard  de  Diest  donna  une  grammaire  grecqne  encore 
estimée  des  savans.  La  grammaire  latine  de  Despautère 
de  Ninove  fut  long-tems  en  vogue  dans  la  France  et 
dans  les  Pays-Bas. 

»La  science  aussi  utile  qu'agréable  de  la  botanique, 
comptait  déjà  parmi  les  Belges  des  favoris  distingués, 
dont  les  écrits  sont  dignes  d'être  consultés  même  au- 
jourdhui.  Charles   de  l'Ecluse  d'Arras  a  mis  dans  ses 


(    25    ) 

ouvrages  do  botanique  l'exactitude  la  plus  scrupuleuse; 
il  devint  le  directeur  du  jardin  des  plantes  des  empe- 
reurs Maximilien  II  et  Rodolphe  II;  Robert  Dodocns 
ou  Dodonée,  né  a  Malines  et  médecin  des  mêmes  em- 
pereurs, est  connu  par  son  herbier;  Mathias  de  Lobel , 
né  a  Lille,  a  donné  plusieurs  ouvrages  estimés.  Àuger 
de  Busbec  de  Comines,  célèbre  diplomate,  fit  présent 
a  l'Europe  du  lilas  qu'il  apporta  de  Constantinople. 

»L'érection  de  l'université  de  Louvain  avait  beaucoup 
contribué  a  répandre  parmi  les  Belges  le  goût  des 
sciences.  Cette  école,  justement  célèbre  dans  toute  la 
chrétienté,  fondée  en  i<±25  par  le  pape  Martin V, reçut 
depuis  plusieurs  beaux  privilèges  des  pontifes  et  des 
souverains;  le  nombre  des  professeurs  fut  porté  a  cin- 
quante-huit, et  plusieurs  riches  fondations  furent  éta- 
blies par  des  particuliers  pour  l'entretien  des  élèves. 

»  Au  quinzième  siècle  la  découverte  de  l'imprimerie 
vint  reculer  les  bornes  des  connaissances  humaines. 
Cet  art  aussi  dangereux  qu'utile ,  fit  tomber  celui  de  la 
calligraphie ,  et  en  multipliant  les  livres  rétrécit  peut- 
être  l'esprit  humain.  Les  auteurs  négligeant  le  grand 
livre  de  la  nature,  ne  pensèrent  et  n'écrivirent  plus  que 
d'après  les  autres.  Harlem  et  Mayence  se  disputent  cette 
découverte  ;  mais  il  est  sûr  que  Thierri  Martens  ou  Mer- 
tens  d'Alost,  est  le  premier  qui  l'ait  apportée  dans  nos 
Provinces  méridionales;  il  imprima  dans  sa  ville  natale 
en  1470.  Il  avait  des  liaisons  intimes  avec  les  écrivains 
les  plus  illustres  de  son  tems;  ses  éditions  et  particu- 
lièrement celles  de  quelques  auteurs  Grecs  ,  sont  si 
belles  et  si  exactes,  qu'on  peut,  sans  exagération,  le 
nommer  Y  Aide  des  Pays-Bas. 

»Les  édits  des  souverains  et  les  coutumes  municipales , 
que  Charles-Quint  fit  recueillir,  constituaient  le  droit 


(  a6  ) 

Belgique.  Eu  général,  chaque  bourgade  et  chaque  ville 
des  Pays-Bas  avait  un  corps  de  magistrature,  et  un 
officier  qui  veillait  au  maintien  de  l'ordre,  sous  le  titre 
d'amman,  de  bailli,  d'écoutêîc,  etc.  Charles  le  Témé- 
raire  iustitua  en  i4y3  un  parlement,  à  Malines,  pour 
l'administration  de  la  justice.  Ce  grand  conseil  était  le 
premier  tribunal  des  Pays-Bas;  il  jugeait  par  arrêt, 
et  il  n'y  avait  d'autre  recours  contre  ses  jugemens,  que 
les  grandes  revisions;  il  s'acquit  une  telle  réputation 
de  justice,  que  l'on  vit  plus  tard  des  puissances  étran- 
gères le  prendre  pour  arbitre  dans  leurs  différends. 

«Jusqu'au  quinzième  siècle,  les  princes  n'entretenaient 
point  de  troupes  réglées;  ce  fut  Philippe-le-Bon  qui, 
dans  la  longue  guerre  qu'il  fit  a  la  France,  commença 
à  tenir  sur  pied  quelques  troupes  soudoyées,  qu'il  con- 
gédia a  la  paix  d'Arras.  L'exemple  de  Charles  VII  et 
de  Louis  XI,  obligea  nos  souverains  à  changer  de  plan. 
Charles  le  Téméraire  obtint  des  états  un  subside  de 
i4o,ooo  florins  par  an  ,  porté  ensuite  a  un  million  , 
et  le  duc  fut  a  même  d'entretenir  un  corps  de 
18,000  combattans.  C'était  la  plus  belle  milice  de 
l'Europe  et  la  mieux  tenue;  elle  s'acquit  sous  Philippe- 
ie-Bel  et  Charles-Quint,  autant  de  célébrité  par  sa  bra- 
voure que  par  sa  discipline.  La  cavalerie,  connue  sous 
le  nom  de  bandes  d'ordonnance ,  contribua  beaucoup 
aux  victoires  de  l'Empereur;  elle  était  unique  dans  toute 
l'Europe,  et  devint  l'école  militaire  de  la  noblesse." 

Cet  extrait,  qu'il  nous  a  fallu  abréger,  justifiera  suf- 
fisamment ce  que  nous  avons  dit  du  style  et  de  l'es- 
prit philosophique  de  l'auteur;  les  dernières  lignes  de 
son  ouvrage  achèveront  d'en  donner  une  idée.  Enfin, 
dit-il ,  »  La  victoire  de  Waterloo  consolida  l'existence 
du  nouveau  royaume  des  Pays-Bas  et  assura  les  institu- 


(  *7  ) 
tions  qu'on  allait  lui  donner.  Puisse  la  sollicitude  d'un 
souverain,  ami  de  son  peuple,  et  la  sagesse  des  deux 
chambres,  parvenir  a  faire  régner  entre  les  Belges  et 
les  Bataves ,  cette  union  et  cette  concorde  qui  sont  le 
gage  assuré  de  la  prospérité  des  empires  ! 


yy 


FABLES  DE  M.  DE  STASSART, 

5me  Édition. 


Jue  nombre  des  éditions  de  ce  recueil  en  fait  assez 
l'éloge  j  peu  de  livres  ont  joui  du  même  honneur.  Au 
reste,  nous  ne  pourrions,  en  le  louant,  que  répéter  ce 
qu'on  a  dit,  puisqu'a  deux  fables  près,  cette  édition 
ne  diffère  en  rien  de  la  quatrième.  Les  deux  pièces 
ajoutées  sont ,  Le  crapaud  et  Le  cheval  et  l'âne.  La 
première  est  plutôt  une  moralité ,  un  trait  de  satire , 
qu'une  fable  5  la  seconde  développe  parfaitement  l'idée 
que,  si  nous  sommes  portés  a  oublier  promptement  les 
arrêts  de  la  critique,  nous  le  sommes  encore  plus  a 
nous  ressouvenir  de  ses  éloges.  L'une  et  l'autre  est 
fort  bien  écrite ,  et  ne  dépare  point  le  recueil.  L'auteur 
les  avait  adressées  avant  l'impression  a  la  Société  royale 
des  Beaux- Arts ,  a  Gand,,  pour  se  conformer  au  règle- 
ment de  cette  société  qui  invite  tous  ses  membres  a  lui 
envoyer  par  an  chacun  deux  pièces  de  leur  composition. 


(  *8) 


BULLETIN  DES  ARTS  ET  DES  SCIENCES. 


SOCIÉTÉ    DES    BEAUX-ARTS   A  GAKD.   —  EGMONT. 


I_iA  Société  royale  des  Beaux- Arts  et  de  Littérature  a 
Gand  avait  proposé  pour  le  concours  de  1820,  un  mé- 
moire a  écrire  sur  »  Lamoral,  comte  d'Egmont,  con- 
»  sidéré  comme  citoyen,  sujet  du  Roi,  général,  homme 
»  d'état,  homme  privé." 

Une  seule  réponse  envoyée  a  la  Société ,  fut  jugée 
trop  défectueuse  pour  obtenir  le  prix  et  le  sujet  fut 
remis  au  concours  ;  cependant  pour  encourager  le  con- 
current, on  crut  devoir  lui  accorder  une  mention  ho- 
norable ,  et  l'ouverture  du  billet  fit  connaître  que  M.  P. 
J.  Brunelle,  de  Bruxelles,  en  était  l'auteur. 

Cette  année  quatre  mémoires  sont  parvenus  sur  la 
même  question  ;  trois  seulement  ont  pu  concourir.  La 
commission  (1)  nommée  pour  en  faire  l'examen,    en  a 

(1)  Cette  commission  était  composée  de  MM.  le  chevalier  Cam- 
berlyn,  l'un  des  directeurs  de  la  classe  de  littérature;  Raoul, 
professeur  à  l'université;  Van  Bemmel  et  Lebrocquy,  professeurs 
au  collège  royal;  Comelisseu,  secrétaire-inspecteur  de  l'université  ; 
et  L.  DeBastj  secrétaire  de  la  société.  M.  le  professeur  Van  Bem- 
mel n'a  pu  assister  à  toutes  les  réunions  delà  commission,  ayant 
eu  le  malheur  de  se  casser  la  jambe  le  5  Janvier  182D  ;  mais 
comme  il  avait  déjà  vu  les  pièces,  il  n'a  pas  manqué  d'envoyer  sou 
vote  à  la  commission.  Depuis  quelques  jours  il  a  repris  la  directiou 
de  sa  classe  à  la  graude  satisfaction  de  ses  nombreux  amis  et 
des  élèves  dont  il  se  fait  respecter  et  chérir. 


(  *.) 

distingue  deux,  l'un  portant  pour  épigraphe:  Dulce  et 
décorum  est  pro  patria  mori.  (Ilorat.),  et  commençant 
par  ces  mots  :  Athènes  voulut  que  dans  le  tableau ,  etc. 
L'autre  :  Una  mihi  helgce  Belgarum  gloria  curœ.  L'un 
et  l'autre  contient  un  exposé  rapide  des  principaux 
faits  et  gestes  de  Lamoral,  comte  d'Egmont,  avec  des 
de'tails  authentiques  sur  le  fatal  moment  de  sa  mort. 
Il  est  vrai  que,  s'ils  présentent  tous  deux  une  esquisse 
historique,  pleine  d'intérêt,  et  généralement  puisée  a 
de  honnes  sources  ,  on  regrette  de  n'y  pas  trouver 
quelques  unes  de  ces  considérations  politiques  et  mora- 
les qui  devaient  naître  du  sujet;  ces  deux  mémoires 
rentrent ,  par  leur  texte  et  par  la  méthode  qui  en  a 
dirigé  la  rédaction,  dans  ce  qu'on  appelle  en  Hollande 
et  en  France,  des  éloges  historiques  ;  mais  la  société 
royale  n'avait  pas  demandé  un  éloge  proprement  dit. 
Il  s'agissait  de  montrer:  »  Lamoral,  comte  d'Eg- 
mont, citoyen ,  sujet  du  Roi ,  général,  homme  d'état , 
homme  privé."  Manière  de  poser  la  question,  d'où  il 
pouvait  résulter  que  quelqu'un  des  concurrents  cen- 
surât telle  ou  telle  circonstance  de  la  vie  du  comte 
d'Egmont. 

L'examen  des  mémoires  a  eu  pour  résultat  que  l'un 
et  l'autre  ont  paru  mériter  des  distinctions;  mais  l'un 
des  deux  ayant  été  jugé  supérieur  a  l'autre ,  le  mé- 
daillon d'or  a  été  décerné  a  celui  qui  porte  pour  épi- 
graphe :  Dulce  et  décorum  est  pro  patria  mori,  (Horat.) 
et  quoiqu'il  n'y  eût  pas  de  second  prix,  la  société  a 
voulu  témoigner  sa  satisfaction  au  deuxième,  en  lui 
présentant  un  médaillon  d'honneur. 

L'auteur  du  premier  mémoire  a  été  reconnu  être 
M.  Laitat ,  à  La  Haye  ;  l'auteur  du  deuxième,  M.  Pierre- 
Joseph  Mangez,  avocat  a  Bruxelles. 


(  So) 

Sur  les  deux  médaillons  sont  désignées  allégoriquement 
les  attributions  des  six  classes  de  la  Société  des  Beaux- 
Arts  ;  la  légende  indique  le  nom  de  Fauteur;  l'exergue, 
le  titre  de  la  société  et  le  millésime;  sur  le  revers.,  pour 
le  vainqueur,  on  lit: 

QTJOD 

ELOGIO 

EAMORALLl    EGMONDANI 

SOLUTA    ORATIONE 

CONSCRIBENDO 

PRAE   CETERIS 

EXCELEUISSE 

JUDICATUS    ELIT 

NUMISMA    AUR 

DD. 

le  revers,  pour  l'accessit,  est  le  même,  a  l'exception  des 
derniers  mots 

VICTORI   PROXUMUS 

ADCESSISSE 

JUDICATUS    FUIT 

NUMISMA  ARG. 

DD. 


INSTITUT    DES    PAYS-BAS. 


Lja  deuxième  classe  de  l'Institut  royal  des  Pays-Bas 
porte  a  la  connaissance  du  public,  que  sur  la  question 
d'histoire  proposée  au  concours  de  1820,  en  ces  termes: 
)>  Un  mémoire  sur  la  confédération  des  Provinces  des 
»  Pays-Bas  dans  Vannée  1676,  connue  sous  le  nom  de 
»  Pacification  de  Gand,  dans  lequel  on  développe  his- 
»  toriquement  et  sous  un  point  de  vue  philosophique , 
»  les  causes  qui  ont  amené  ce  traité ,  et  qui  Vont  dis- 
»  sout  en  si  peu  de  teins,  ainsi  que  ses  conséquences 
»  favorables  et  nuisibles.3* 


(3i  ) 

Deux  mémoires  lui  ayant  été  envoyés ,  le  premier  en 
hollandais  et  le  second  en  français ,  tous  les  deux  ont  été 
reconnus  défectueux  sous  plusieurs  rapports,  et  qu'en 
conséquence  la  classe  les  a  jugés  indignes  du  prix 
offert ,  et  a  retiré  la  question. 

Qu'un  seul  mémoire  est  parvenu  a  la  classe  sur  la 
question  suivante  : 

»  Qu'elle  a  été  l'influence  de  la  littérature  étrangère , 
»  notamment  celle  de  l'Italie ,  de  l'Espagne ,  de  la  France 
»  et  de  l'Allemagne  sur  la  langue  et  la  littérature  hol- 
»  landaise ,  depuis  le  commencement  du  quinzième  siècle 
»  jusqu'à  nos  jours  ?" 

Qu'en  général  l'auteur  s'est  trop  étendu  sur  l'his- 
toire de  la  littérature,  et  qu'il  a  quelquefois  perdu  de 
vue  le  véritable  objet  de  la  question; 

Qu'il  s'est  aussi  trop  exclusivement  occupé  de  la  poé- 
sie et  qu'il  a  négligé  la  prose  et  les  moyens  par  lesquels 
elle  s'est  formée;  que  par  une  suite  nécessaire  le  mémoire 
ne  dit  rien  ou  ne  parle  qu'incomplètement  de  l'influence 
que  la  langue  française,  sur-tout  depuis  la  révocation  de 
l'Edit  de  Nantes ,  et  la  langue  allemande  dans  les  derniers 
tems,  ont  exercée  sur  le  hollandais;  considération  d'au- 
tant plus  importante,  qu'il  est  facile  d'observer  dans  les 
ouvrages  qui  paraissent  journellement,  sans  exception 
même  de  ceux  qui  s'occupent  de  la  langue,  combien 
l'allemand  dénature  la  pureté  et  l'originalité  du  hol- 
landais ; 

Que  d'ailleurs  l'auteur  a  passé  sous  silence  l'influence 
de  la  littérature  espagnole,  très-remarquable  sur-tout  a 
l'égard  de  la  poésie  et  du  théâtre ,  ainsi  que  tous  les 
ouvrages  du  sixième  siècle,  quoique  cette  littérature  fût 
nommément  comprise   dans  la  question; 

Que  malgré  tous  ces  défauts,  la  classe  a  cru  devoir 
reconnaître  : 


(  30 

i°  Le  grand  mérite  du  mémoire,  dans  lequel  l'auteur 
a  prouvé  par  des  argumens  irrécusables  que  les  Pays- 
Bas  ont  maintenu  leur  indépendance  littéraire  contre 
toute  influence  étrangère,  en  dépit  même  de  l'oppres- 
sion et  de  la  conquête; 

2°  L'étendue  et  la  difficulté  d'une  question ,  dont  la 
solution  présuppose  un  auteur  également  versé  dans  la 
littérature  du  pays,  et  dans  celle  des  principaux  peu- 
ples de  l'Europe; 

5°  La  connaissance  de  l'histoire ,  de  l'état  de  chaque 
pays  et  des  circonstances  étroitement  liées  a  la  littéra- 
ture et  a  l'histoire  littéraire  de  chaque  nation  j 

4°  L'usage  des  langues  étrangères,  la  liberté  de  con- 
ception,  la  justesse  de  goût,  nécessaires  pour  résoudre 
la  question  proposée  ; 

5°  La  nouvelle  route  que  s'est  frayée  l'auteur,  en 
parcourant,  dans  la  direction  indiquée,  le  terrein  de 
l'histoire  littéraire  générale  de  l'Europe ,  qui  n'avait 
point  encore  été  considérée  sous  ce  point  de  vue  par 
ses  devanciers. 

La  classe  en  comparant  ce  qu'il  y  a  de  vraiment  mé- 
ritant dans  le  mémoire ,  ainsi  que  les  difficultés  sur- 
montées avec  les  défauts  encore  existans,  s'est  vue 
disposée  a  l'accueillir  favorablement.  Dans  l'attente 
que  l'auteur  voudra  bien  tirer  parti  des  observations 
précitées  et  de  celles  qui  pourront  lui  être  communi- 
quées, pour  compléter  et  perfectionner  son  travail,  et 
d'après  l'art.  55  de  son  règlement,  portant  que  l'ap- 
probation donnée  au  tout,  ne  s'étend  pas  aux  opinions 
énoncées  par  l'auteur,  particulièrement  sur  le  mérite 
de  quelques  auteurs  célèbres,  la  classe  a  décerné  la 
médaille  à  l'auteur  de  ce  mémoire,  lequel,  a  l'ouver- 
ture du  billet  cacheté,  a  été  reconnu  appartenir  a 
M.  Guillaume  de  Clercq ,  a  Amsterdam. 


(55) 

La  classe,  d'après  l'autorisation  accordée  par  Sa  Ma- 
jesté ,  propose  une  médaille  d'or  de  la  valeur  de  3oofl. 
ou  cette  somme  en  argent ,  pour  la  solution  de  la  ques- 
tion suivante  : 

»  Quelles  sont,  sur-tout  d'après  les  monumens  his- 
»  toriques,  les  révolutions  qu'a  subies  le  sol  du  Roy aume 
»  actuel  des  Pays-Bas ,  relativement  aux  bois ,  tour- 
»  bières ,  dunes,  rivières,  lacs  et  en  général  à  toute  sa 
»  superficie?" 

Les  mémoires  envoyés  au  concours  devront  être  écrits 
en  hollandais,  en  latin,  en  français,  en  anglais  ou  en 
allemand  (en  caractères  italiques)  et  adressés,  franc  de 
port ,  au  Secrétaire-perpétuel  de  la  classe ,  a  l'hôtel  de 
l'Institut  royal  a  Amsterdam,  avant  le  5i  Décembre  1823. 

Tous  les  savans  régnicoles  et  étrangers  sont  également 
admis  au  concours,  même  les  associés  et  correspondans 
de  l'Institut  et  les  membres  des  autres  classes  ',  les  seuls 
membres  effectifs  de  la  deuxième  classe  en  sont  exclus. 


EXPOSITION    DE    DOUAI. 


JLa  ville  de  Douai  fait  un  appel  aux  artistes  du  Royau- 
me des  Pays-Bas ,  en  les  invitant  a  concourir  a  l'em- 
bellissement de  l'exposition  d'objets  d'art  qui  aura  lieu 
dans  cette  ville,  pendant  le  courant  de  Juillet  prochain. 

Les  amis  des  arts ,  comptant  sur  la  protection  des 
autorités,  formeront  comme  en  1821,  une  société  qui 
aura  pour  but  d'acheter  les  ouvrages  les  plus  marquans 
du  salon  5  faciliter  ainsi  aux  artistes  le  placement  des 
produits  de  leur  génie  et  de  leurs  travaux,  c'est, 
comme  l'expérience  l'enseigne,  le  moyen  le  plus  propre 

Ire  Cahier.  5 


(  34) 

d'encourager  les  beaux -arts;  c'est  le  moyen  d'ajouter 
a  l'éclat  des  expositions,  d'agrandir  leur  influence  sur 
les  progrés  de  l'art  et  de  multiplier  le  nombre  de  ses 
protecteurs. 

La  ville  de  Douai,  qui  donna  le  jour  a  plusieurs 
artistes  distingués  de  l'école  flamande ,  quoique  sépa- 
rée aujourd'hui  de  la  mère  école,  se  glorifie  de  parta- 
ger l'honneur  de  son  ancienne  renommée  et  se  plait 
encore  a  s'entourer  des  ouvrages  et  a  encourager  le 
talent  de  nos  artistes.  A  la  dernière  exposition,  plusieurs 
de  nos  peintres  y  ont  reçu  des  distinctions  flatteuses  ; 
nous  espérons  que  l'appel  de  1825  ne  leur  sera  pas 
moins  avantageux  et  aura  les  mêmes  résultats. 

Le  salon  sera  ouvert  au  public  du  6  au  5i  Juillet; 
les  artistes  de  la  Belgique  sont  invités  a  diriger  leurs 
envois  par  Lille ,  bureau  indiqué  par  M.  le  Directeur- 
général  des  Douanes ,  de  manière  que  leurs  produc- 
tions puissent  arriver  a  Douai  avant  le  25  Juin. 

Les  artistes  sont  invités  a  joindre  aux  ouvrages  qu'ils 
désireraient  vendre,  la  note  du  prix  qu'ils  voudraient 
en  obtenir. 


SOCIÉTÉ    D'AGRICULTURE  ET  DE  BOTANIQUE  DE  GAND, 


JLa  Société  décernera  tous  les  ans  une  médaille  d'hon- 
neur au  propriétaire-cultivateur  de  douze  sortes  de 
poires  et  de  six  sortes  de  pommes,  dites  de  dessert, 
qui  seront  reconnues  pour  être  les  mieux  cultivées  et 
appartenir  aux  meilleures  espèces. 

11  est  établi  comme  condition  de  rigueur ,  i°  que  les 
concurrens  feront  leur  déclaration  au  Secrétaire  de  la 
Société,  avant  la  fin  de  Septembre  de  chaque  année; 


(35) 

2°  qu'aux  envois  des  fruits  seront  ajoutes  les  noms  de 
chaque  espèce  avec  un  billet  cacheté',  indiquant  le 
nom  et  la  demeure  du  concurrent  ;  5°  que  les  proprié- 
taires des  fruits  couronne's  seront  tenus  de  donner  sur 
leur  méthode  de  culture,  tous  les  renseignemens  qui 
leur  seront  demandés;  4°  que  les  envois  se  feront, 
franc  de  port,  au  Secrétaire  de  la  Société,  avant  le 
28  Janvier. 

Il  sera  également  accordé,  en  1823,  une  médaille 
d'honneur  :  i°  a  celui  qui  parviendra  a  cultiver  avec 
succès  dans  ce  pays,  une  plante  légumineusenon  encore 
acclimatée,  dont  l'espèce  sera  jugée  digne  d'être  propa- 
gée dans  le  Royaume. 

2°  A  celui  qui  le  premier  aura  fait  mûrir  dans  nos 
Provinces  méridionales  une  quantité  suffisante  de  fruits 
originaires  d'un  pays  plus  chaud,  et  sera  parvenu  a 
en  assurer  la  maturation  annuelle  (1). 

Les  concurrens  pour  la  première  de  ces  deux  médail- 
les, devront  faire  leur  déclaration  quinze  jours  avant 
l'époque  où  la  plante  légumineuse  sera  parvenue  au 
point  de  servir  a  la  nourriture  de  l'homme  ;  ils  devront 
en  outre  indiquer  l'époque  de  la  plantation  ou  du  semis, 
la  méthode  de  culture  propre  a  ce  végétal,  et  le  pays 
dont  il  est  originaire. 

Les  concurrens  pour  la  seconde  médaille ,  devront  se 
faire  connaître  au  Secrétaire  de  la  Société,  au  moins 
six  semaines  avant  la  maturité  des  fruits. 

Tous  les  amateurs  et  cultivateurs  des  Provinces  mé- 
ridionales du  Royaume,  sont  admis  au  concours. 

(1)  M.  J.  H.  Mussche,  a  offert  le  premier  à  la  Société  en  1819, 
une  quantité  suffisante  de  Fruits  du  Grenadier  ,(Pu/iica  Granatum.) 
La  médaille  d'honneur  lui  a  été  décernée.  M.  Dekin,  directeur 
du  jardin  de  Bruxelles,  a  également  obtenu  la  médaille  pour  le 
iSellier  (Mcspilus  Japonica   Willd._)  en  1820, 


(  56) 


EXPOSITION    DES    PLANTES    A    HARLEM. 


J-JA  6me  exposition   annuelle  des    plantes    a    Harlem  ( 
aura  lieu  les    n  ,    12,    i3,   i4  et  i5  Juin    1823. 

La  Société  invite  tous  les  amateurs,  cultivateurs  de  plan- 
tes, fleuristes,  etc.  du  Royaume,  a  y  faire  des  envois; 
ils  devront,  avant  le  ir  Juin,  en  prévenir  par  écrit 
M.  31.  N.  Berte,  directeur  de  la  société,  a  Harlem. 
La  nomenclature  des  plantes  devra  aussi  être  envoyée 
avant  le  9  Juin ,  pour  qu'elles  soient  portées  dans  le 
catalogue. 

Les  plantes  adressées ,  franc  de  port ,  au  local  du 
salon,  rue  dite  Zylstraat,  sect.  5,  n°  23g,  y  seront, 
reçues  depuis  le  samedi  7  jusqu'au  mardi  10  a  midi; 
aucun  prétexte  ne  pourra  en  faire  admettre  après  cette 
heure. 

Le  jeudi  12  Juin,  une  commisssion  fera  le  choix  des 
deux  plantes  les  plus  rares  et  des  deux  les  mieux  cul- 
tivées, auxquelles  les  quatre  médailles  seront  adjugées. 

Ceux  qui  voudront  concourir  pour  ces  prix,  sont 
rigoureusement  tenus  d'attacher  aux  plantes  qu'ils 
destinent  au  concours ,  une  devise  ou  une  marque 
et  d'y  joindre  un  billet  cacheté,  répétant  sur  l'adresse 
la  même  devise  ou  marque  et  contenant  le  nom  et 
la  demeure  du  concurrent. 

Pour  faciliter  le  jugement  de  la  commission,  on  prie 
les  concurrens  de  déclarer,  »  si  les  plantes  sont  importées 
»  de  l'étranger  et  depuis  quel  tems  ;  ou  Lien  si  elles 
»  sont  élevées  dans  le  Royaume,  et  quelles  ont  été 
»  la  méthode   et  la   durée  de   leur   culture." 

Sont  exclues  du  concours  les  plantes  couronnées 
aux  cinq  précédentes  expositions. 


(  37  ) 


KON1MLIJKE   GENOOTSCHA.P    CONCORDIA  ,   TE    BRUSSEL. 


-Het  Koninklijke  Genootschap  Concordiez ,  in  deszelfs 
jaarlijksclie  algemeene  vergadering  van  den  i4  van 
Loinvmaand  dczes  jaars  iBsS,  heeft  voorgestelt  om, 
ter  beantwoording  tegen  den  eersten  van  Sprokkel- 
maand  van  den  jare  1824,  drie  prijzen  uit  te  loven 
op  de  navolgende  vragen  : 

Vooreerst.  Wat  is  het  kenraerkende  vanhet  vlaamscli 
in  onderscheiding  van  het  hollandsch ,  ten  aanzien  van 
de  spelling  en  van  de  hiermede  verbonden  uitspraak 
der  woorden?  Welke  zijn  de  gronden ,  die,  ter  we- 
derzijde,  voor  het  hieromtrent  bestaande  verschil  wor- 
den  aangevoerd,  en  welke  der  beide  stelsels  van  spel- 
ling en  uitspraak,  eindelijk,  (het  vlaamsch  of  het  hol- 
landsch ,  )  zoude  men  ,  om  daarbij  op  te  geven  rede- 
nen  ,  vermeenen  de  voorkeur  te  verdienen  boven  het 
au der  ? 

Ten  anclere.  Wat  is  het  kenmerkende  van  het 
vlaamsch  in  onderscheiding  van  het  hollandsch ,  met 
betrekking  tôt  het  gebruik  van  naamwoorden  en  werk- 
woorden  ;  zoo  wel  van  die ,  welke  in  het  hollansch 
buiten  gebruik  zijn,  als  van  de  zoodanigen ,  welke 
in  het  vlaamsch  gebezigd  worden  in  eene  beteekenis, 
verschillende  van  die ,  welke  in  het  hollandsch  plaats 
vindt?  —  Omtrent  het  eerste  punt ,  te  onderzoeken, 
welk  nut  er  voor  de  algemeene  nederduitsche  taal  vanhet 
wederinvoeren  der  verouderde  woorden  zoude  te  trek- 
ken  zijn.  Omtrent  het  laatste  punt,  op  te  geven  ,  welke 


(  38) 
dcr  verschillende   beteekenissen   men  zoude    meenen , 
als  meer  overeenkomstig  met  het  oorspronkelijk   taal- 
eigen  ,  of  om  andere  ,    daarbij  aantevoeren  ,  redenen , 
de  voorkeur  te  verdienen  ?    En  eindelijk  : 

Ten  derde.  Wat  is  hetkenmerkende  van  hetvlaamsch 
in  onderscheiding  van  het  hollandsch ,  ten  aanzien  van 
de  verbuigingen  der  woorden,  mitsgaders  van  de  woord- 
voeging  in  het  algemeen  ?  Welke  zijn  de  gronden , 
waarop  het  hieromtrent  bestaande  verschil  berust,  en 
hoedanig ,  eindelijk ,  zonde  men ,  om  daarbij  op  te 
geven  redenen ,  achten  dat  aangaande  dit  vtrschil 
zoude  moeten  worden  uitspraak  gedaan? 

De  beantwoorders  der  voorschreven  vragen  zullen  , 
ten  aanzien  der  eerste  en  derde,  in  hunne  verhande- 
lingen  zich  hoofdzaklijk  bepalen  tôt  het  bijbrengen  der 
gronden  of  uitspraaken  van  verdienstelijke  taalopbou- 
wers  ?  zonder  zich  breedvoerig  in  te  laten  met  de 
ontwikkeling  van  hnn  afzonderlijk  gevoelen ,  en,  veel 
min  nog,  hier  uit  hnnne  beantwoordingen  af  te  leiden. 

Het  Genootschap  looft  vijf  en  twintig  gouden  du- 
katen  uit  aan  den  schrijver  van  het,  der  bekrooning 
waardig  en  best  gekeurde  stuk  op  ieder  der  boven- 
gemelde  onderwerpen. 

Aile  stukken,  als  tôt  de  nederduitsche  taalkunde  be- 
trekkelijk,  moeten  in  de  nederduitsche  taal  (om  het 
even  of  zulks  in  den  vlaamschen  of  hollan<lschen  tong- 
val  geschiede)  opgesteld  zijn,  dan  eene  andere  hand 
dan  die  der  opstellers  geschreven  worden  en  vrachtvrij 
met  eene  zinspreuk  en  niet  den  naem  der  opstellers 
onderteekend ,  vôor,  of  uiterlijk  op,  den  gemelden  tijd 
ingezonden  worden  aan  den  Sekretaris  van  het  Genoot- 
schap, P.  G,  van  Ghert. 


(59  ) 


SOCIETE    PROVINCIALE    DES    ARTS    ET    DES    SCIENCES 

A   UTRECHT. 

Questions  proposées  au  concours,  pour  être  répondues  avant  le 

1   Octobre   1825. 


Histoire  Naturelle. 

I.  On  demande  :  une  revue  historique  et  un  examen 
raisonné  des  améliorations  qu'on  a  essayé  de  faire , 
depuis  4o  ans,  aux  baromètres  de  mer;  sur-tout  pour 
déterminer  avec  exactitude ,  l'élévation  du  liquide  dans 
les  tubes ,  et  pour  que  cette  élévation  subisse  les  moin- 
dres variations  possibles  par  le  mouvement  des  navires. 

II.  Il  est  reconnu  d'une  part,  que  la  chaleur  an- 
nulle  le  magnétisme  artificiel ,  tandis  que  de  l'autre , 
il  paraît  constaté  par  les  expériences  de  Scoresby  et 
de  Erman  (1),  que  non-seulement  la  chaleur  aug- 
mente l'action  du  magnétisme  naturel ,  mais  qu'on  peut 
même ,  au  moyen  de  la  chaleur ,  communiquer  au  fer 
une  force  magnétique  permanente  ;  tandis  encore  que 
l'intensité  du  magnétisme  de  la  terre  augmente  au 
contraire  a  mesure  qu'on  se  rapproche  des  pôles. 

On  demande  :  comment  on  peut  concilier  ces  con- 
tradictions apparentes  ;  et  si  les  phénomènes  galvano- 
magnétiques  nouvellement  observés  peuvent  répandre 
quelques  lumières   sur  ce  sujet? 

III.  Quelle  est  l'origine  des  collines  ou  monticules 
de  sable  qui,  a  partir  du  Gooilancl ,  s'étendent,  en 
se  dirigeant  au  sud-est,   a  travers  la   province  à'Ut- 

(i)  Edimb.  phil.  journal,  vol  4.,  et  Abhandlungeu  derkonigl. 
akademie  der  wissenschaften  in  Berlin,  181  i.  —  i8i5,   pag.  i54. 


(  4o  ) 

recht  jusqu'au  Rhin,  et  de  la,  reprenant  une  nou- 
velle direction  vers  le  nord,  traversent  la  Vcluwe  jus- 
qu'aux bords  de  l'Yssei  ,  et  renferment  une  plaine 
traverse'e  par  un  ruisseau  nomme  Luntersche  Beek, 
et  par  l'Eems  qui  va  ensuite  se  décharger  dans  la  mer 
du  Sud?  —  Quelle  opinion  doit-on  se  former  de  ces 
blocs  de  granit  de  volumes  différens,  qui  semblent  tom- 
bés en  roulant  de  quelque  élévation ,  et ,  en  quelques 
endroits,  forment  des  couches  entières  dans  ces  colli- 
nes? A  quoi  fait-on  servir  les  substances  qu'elles  ren- 
ferment? sont-elles  susceptibles  d'être  employées  a  d'au- 
tres usages? 

IV.  Quelles  sont  les  races  distinctes  de  moutons 
qu'on  trouve  dans  les  provinces  septentrionales  de 
notre  Royaume?  —  E~  quoi  diffèrent-elles  les  unes 
des  autres  ,  particulièrement  quant  a  la  quantité  et 
a  la  qualité  de  la  laine?  —  Quelles  sont  celles  de 
ces  races  qu'il  conviendrait  de  conserver  pures?  — 
Quelles  sont  les  races  dont  la  laine  pourrait  être  amé- 
liorée par  des  croisemens  avec  d'autres  races;  et,  dans 
ce  cas,  de  quelle  manière  faut-il  traiter  ces  moutons 
et  a  quel  régime  de  vie  faut-il  les  soumettre?  —  Les 
tentatives  pour  améliorer  nos  laines  indigènes  par  des 
croisemens  avec  les  moutons  espagnols  ayant  presque 
généralement  mal  réussi,  sur-tout  dans  nos  provinces 
septentrionales,  le  but  de  la  dernière  partie  de  la  ques- 
tion tend  principalement  a  obtenir  une  amélioration 
des  races  dont  la  laine  est  d'une  faible  valeur,  par  des 
croisemens  avec  d'autres  races  du  pays  ;  ce  procédé 
a  été  essayé  déjà,  dans  quelques  provinces,  avec  des 
succès  qui   font  désirer  qu'on  le  répande   davantage. 

Les  concurrens  sont  invités  a  faire  connaître,  autant 
que  possible,  par  des  dessins,  les  différences  des  races 
indigènes. 


(  4i  ) 
V.  Quelle  différence  ofFrenl  nos  sols  argilleux  dans 
leur  essence  et  leur  fertilité  ;  sur-tout  ceux  qui  sont 
situés  le  long  de  nos  grandes  rivières ,  a  proximité 
de  la  mer  ou  entre  nos  golfes?  D'où,  résulte  leur 
moindre  ou  plus  grande  fertilité ,  et  en  quoi  cette 
recherche  peut-elle  contribuer  a  nous  faire  connaître 
les  moyens  d'améliorer  les  moins  fertiles  de  nos  ter- 
rains argilleux? 

Médecine. 

I.  Selon  les  observations  de  quelques  médecins  ha- 
biles et  dignes  de  foi ,  il  a  été  reconnu  que ,  dans 
quelques  endroits  de  notre  Royaume ,  l'emploi  de 
V huile  de  foie  (oleum  jecoris  aselli)  a  été  d'un  effet 
plus  efficace  que  tous  les  autres  remèdes  pour  la  gué- 
rison  du  rachitis ,  même  dans  des  cas  où  le  ramollisse- 
ment des  os  des  enfans  avait  déjà  fait  de  notables  pro- 
grès :    en  conséquence  on  demande  : 

i°  Une  explication  succinte  et  raisonnée  des  qua- 
lités sensibles  (qualitates  sensibiles)  de  l'huile  de  foie, 
telle  qu'on  l'obtient  sans  falsification ,  en  y  ajoutant 
l'analyse  chimique  de   ses  parties  constituantes  ; 

2°  Une  dissertation  thérapeutique ,  sur  le  degré  et 
le  mode  d'action  qu'exerce ,  le  plus  probablement , 
cette  substance ,  pour  fortifier  l'ensemble  de  la  con- 
stitution des  enfans,  et  sur-tout  pour  opérer,  avec 
tant  de  promptitude,  l'amélioration  du  système  osseux; 

5°  Un  exposé  exact  d'observations  et  d'expériences 
faites  par  l'auteur,  et,  s'il  était  possible,  de  semblables 
observations  et  expériences  a  lui  communiquées  par 
d'autres  praticiens,  d'après  lesquelles  la  vertu  et  l'effi- 
cacité de  ce  remède,  se  trouveraient  démontrées; 

4°    S'il    s'est    présenté   des  circonstances    ou    s'il   a 


(4*  ) 

été  fait  des  observations  d'où  il  résulte  que  l'huile  de 
foie  a  été  nuisible  a  l'économie  animale,  particulière- 
ment en  ce  qui  regarde  l'embarras  ou  le  ralentissement 
dans  l'action  des  premiers  organes  digestifs  ; 

5°  De  quelle  manière  et  en  quelle  quantité  ce  remède 
doit-il  être  administré  ? 

II.  Quelles  mesures  a-t-on  mises  en  usage  dans  les 
diverses  contrées  de  l'Europe  pour  surmonter  la  résis- 
tance que  les  hommes  ont  opposée  a  l'inoculation  de 
la  vaccine?  Quels  résultats  ont  produits  ces  mesures, 
et  quelles  sont  dans  ce  nombre  celles  qu'on  pourrait 
adapter  a  notre  patrie? 

Histoire. 

I.  Depuis  cinquante  ans,  on  a  introduit,  dans  la 
plupart  des  pays  de  l'Europe  et  nommément  en  France 
et  dans  notre  patrie,  de  nouveaux  systèmes  d'adminis- 
tration publique  et  locale  qui  semblent  avoir  eu  prin- 
cipalement pour  but  l'uniformité  et  ce  qu'on  a  nommé 
la  centralisation.  La  Société  demande  :  une  revue  de 
ces  nouveaux  systèmes  d'administration  ,  l'exposition 
des  principes  qui  leur  ont  servi  de  base  et  de  motifs, 
l'historique  des  principales  modifications  que  ces  sys- 
tèmes ont  subies  ;  et  enfin ,  une  réponse  a  la  question 
suivante  :  Quels  avantages  ou  désavantages  sont  résul- 
tés de  l'adoption  des  nouveaux  systèmes  d'administra- 
tion ,  et  jusqu'à  quel  point  peut-on  estimer  que  la  science 
administrative  ait  fait  des  progrès  depuis  un  demi-siècle? 

II.  Une  revue  générale  des  institutions  judiciaires 
des  contrées  septentrionales  du  Royaume  au  tems  de 
la  République;  leur  appréciation  sous  le  rapport  delà 
jurisprudence  et  de  la  politique. 

llf.  Un  rapport  sur  l'état  des  écoles  à   Ulrecht  aux 


(43  ) 

Xmc  et  XImc  siècles;  sur  leur  érection,  les  matières  qui 
y  étaient  enseignées,  les  professeurs  qui  s'y  sont  dis- 
tingués, le  bien  que  ces  écoles  ont  produit,  le  tems  de 
leur  durée  et  l'époque  de  leur  anéantissement? 

La  vie  de  Bruno,  décrite  par  Ruetgerus  ou  Rotge- 
rus,  et  mentionnée  par  Leibnitz,  scriptorum  rerum 
Rrunsvicensium ,  tom.  1.  pag.  275,  parle  d'une  école 
a  Utrecht  sous  l'évèque  Balderic;  Heda  en  fait  aussi 
mention,  historia  episc.  Ultra].,  pag.  7  5.  Saunoi,  de 
scholis  celebrioribus  à  Carolo  Magno  et  post  eum  per 
accidentent  instauratis ,  tom.  4.  pars  1.  cap.  5o.  pag.  09, 
parle  également  d'une  école  a  Utrecht,  érigée  par  l'évê- 
que  Adelbold,  ou  même  avant  lui  par  ses  prédécesseurs 
suivant  Ausfridus  ou  autres;  et  Meiners ,  dans' sa  com- 
paraison historique  des  mœurs  du  moyen  âge ,  2e  vol. 
pag.  584 ,  désigne  l'école  d'Utrecht  comme  la  plus 
brillante   du  tems  de  l'empereur  Henry  I. 

IV.  Une  revue  historique  des  colonies  Romaines. 
—  Quelle  influence  ont-elles  exercée  sur  l'agriculture 
de  l'Europe  et  sur  la  civilisation  des  peuples  encore 
grossiers  qui  habitaient  cette  partie  du  monde? 

La  suite  au  N°  prochain. 


ACADÉMIE    ROYALE    D'AMSTERDAM. 


JLe  conseil  d'administration  de  l'académie  royale  des 
beaux-arts  a  Amsterdam,  ouvrira  le  concours  pour  le 
grand  prix  bisannuel  dans  le  local  de  la  même  acadé- 
mie, le  2  Juin  prochain;  il  aura  pour  objet  la  sculp- 
ture. Ce  prix ,  dû  a  la  munificence  royale ,  consistera 
dans  la  jouissance  d'une  pension  de  1200  florins  pen- 
dant quatre  ans,  a  l'effet  de  faciliter  au  vainqueur  le 


(ii) 

moyen  de  continuer  ses  e'tudes  en  pays  étranger  et 
notamment  pendant  un  terme  de  trois  ans  en  Italie  ou 
dans  tout  autre  état  qui  sera  trouvé  plus  propre  a  rem- 
plir ce  but.  L'on  n'admettra  au  concours  que  des  per- 
sonnes nées  dans  les  Pays-Bas  ou  de  parens  Belges,  et 
qui  auront  fréquenté  en  dernier  lieu ,  pendant  une 
année,  une  des  académies  ou  écoles  du  Royaume. 

La  sculpture  est  la  partie  des  beaux-arts  la  moins 
encouragée;  nous  devons  savoir  gré  a  MM.  les  Admi- 
nistrateurs de  l'académie  d'Amsterdam,  d'avoir  fourni 
aux  jeunes  sculpteurs  l'occasion  d'obtenir  une  palme 
qui  leur  donnera  le  moyen  de  se  perfectionner  dans  un 
art  dont  les  premières  études  offrent  peu  de  ressources 
a  l'élève;  c'est  en  accordant  de  pareils  encouragemens, 
que  l'on  contribuera  a  former  des  sculpteurs  dignes  de 
marcher  un  jour  sur  la  même  ligne  que  nos  peintres,  et 
que  leurs  productions  plus  durables,  parvenant  a  la 
postérité,  attesteront  la  gloire  de  notre  école  régénérée. 

11  serait  a  désirer,  pour  seconder  le  but  que  Sa  Majesté 
s'est  proposé  en  instituant  nos  différentes  académies ,  que 
les  régences  des  villes  fissent  un  appel  aux  artistes  poul- 
ies engager  a  se  rendre  au  concours  triennal  d'Amster- 
dam et  d'Anvers,  en  leur  accordant  un  indemnité  pro- 
portionnée a  la  distance  du  lieu  et  au  séjour  qu'ils  se- 
raient obligés  de  faire  dans  l'une  ou  l'autre  de  ces  villes. 


Remise  de  l'ouverture  du  Salon  d'Exposition  d'Objets 

d'Art  à  G  and. 

L'académie  royale  de  Gand ,  sur  la  demande  des  ar- 
tistes, vient  de  remettre  l'ouverture  du  salon  d'exposi- 
tion au  4  Août  prochain.  Les  pièces  destinées  aux  diljfé- 
rens  concours,  devront  être  rentrées  avant  le  20  Juillet, 
ainsi  que  celles  qui  seront  envoyées  pour  l'exposition. 


(45  ) 


QU.ESTIONES     IN     ACADEMIA    RHENO-TR  UECTIVV 

PP.OPOSIT7E. 


Quœstio    Mechanica. 

.Ejxponatur  dilucide  et  accurate  theoria  compositions 
virium  in  qualibet  directione  in  spatio  agentium,  atque 
conditiones  scquilibrii  earnm  definiantur.  Perspicuitatis 
ita  habeatur  ratio,  ut,  quœ  in  propinquo  sint,  non  ex 
reraotioribus  fontibus  hauriantnr.  Neque  tamen  a  re 
alienum  est,  breviter  indicare  atque  inter  se  comparare 
diversas  methodos,  quibus  ad  easdem  régulas  générales 
constituendas  perveniri  possit. 

Quœstio  Chemica. 
Quseritur  accurata  analysis  chemica  aquarura  pluviœ, 
fontium  et  fluminum  urbis  Rheno-Trajectinœ  et  agri 
suburbani  :  ut  inde  efficiatur,  quales  ad  potuin  quoti- 
dianum  sint  salubervimœ,  quales  in  artibus  quibusdara 
usurpari  possiut ,    quales  evitandœ  sint. 

Quœstio    Théologien. 

Quibus  argumentis  usus  est  Tertullianus,  maxime  in 
Apologetico ,  pro  commendanda  ac  defendenda  religione 
cliristiana  ?  Quantum  singulis  pretium  est  statuendum  ? 
Quœstio  Juridica. 

Tradatur  doctrina  codicis  civilis,  quo  utimur,  de 
prsesumtionibus ,  tumjuris  tantum,  tum  jurîs  et  de  jure, 
quœ  vulgo  dicuntur  :  de  his  ita  disseratur,  ut  primum 
communis  harum  prœsumtionum  natura  investigetur, 
deinde  utriusque  speciei  vis  accurate  exponatur,  atque 
hsec  omnia  idoneis  exemplis  passim  illustrentur. 


(  46  ) 

Quœstio  Medica. 
Quandoquidem  noslris  temporibus  hiriidiniim  usus  in 
medicina  adeo  invaluit,  ut  multi  practici  earum  appli- 
cationem  generali  sanguinis  detractioni  praeferre  videan- 
tur  ;  alii  vero  posterions  evacuationis  honorera  vindicare 
pergant:  quEeritur,  quœnam  harum  sententiarnm  maxi- 
me solidis  innitatur  fundamentis,  imprimis,  quibusnam 
in  casibus  generalis  sanguinis  evacuatio  locali,  aut  lo- 
calis  generali,  prœferenda  sit. 

Quœstio   Literaria. 
Qnam  vim  in  vitam  Romanorum  domesticam  habnere 
Victoria?  de  Tarentinis,    tum  etiain  de  Grœciaî  populis 
et  de  Macedonibns  reportatœ? 


SOCIETE    ECONOMIQUE   A   HARLEM, 


Uans  ces  dernières  années ,  une  maladie  réputée  con- 
tagieuse, a  régné  parmi  les  porcs,  nommément  dans  la 
Hollande  septentrionale,  et  les  opinions  diffèrent  beau- 
coup sur  le  caractère  de  cette  maladie  ;  la  Société  de- 
mande:  quelle  était  la  nature  de  la  maladie?  Quelles 
en  étaient  les  causes  les  plus  probables?  Quels  étaient 
les  symptômes  plus  ou  moins  constans  qui  distinguaient 
cette  maladie  de  celles  qui  affectent  ordinairement  ces 
animaux?  Quels  ont  été  les  méthodes  et  les  moyens 
qu'on  a  proposés  et  employés  avec  le  plus  de  succès 
pour  préserver  de  celte  maladie  et  pour  la  guérir  ? 

La  Société  promet  la  médaille  d'argent  et  dix  ducats- 
a  celui  qui  donnera  sur  ces  questions  des  solutions  per- 
tinentes et  concises,  avant  la  fin  de  Septembre  1825  5 
elle   rappelle  qu'elle   ne   demande  pas  une  dissertation 


(47  ) 

théorique,  mais  une  réponse  fondée  sur  des  expérien- 
ces, et  qui  soit  appuyée  d'attestations  suffisantes,  sur- 
tout quant  aux  succès  des  moyens  de  guérison. 

Le  goût  croissant  pour  la  musique  vocale  fait  sentir 
de  plus  en  plus  le  manque  de  notes  mobiles ,  tellement 
qu'il  est  impossible  aux  imprimeurs  du  royaume  de  s'y  en 
procurer.  La  Société  accordera  la  médaille  d'argent  et  dix 
ducats  a  celui  qui  confectionnera  des  notes  mobiles  de 
musique ,  propres  a  l'impression  des  livres  d'église  et 
autres  livres  de  chant,  et  qui  fournira  des  épreuves 
aussi  parfaites  que  celles  des  meilleures  fabriques  étran- 
gères, telles  que  celles  de  Breitkopff  et  Hartel  de  Leip- 
zig ;  le  fabricant  devra  s'engager  a  en  procurer  la 
quantité  d'assortimens  que  demanderont  les  imprimeurs 
du  royaume.  Les  échantillons,  documens  et  attestations 
devront  être  envoyés  avant  le  5o  Septembre  1823. 


NECROLOGIE. 


La  Société  d'Agriculture  et  de  Botanique  de  Gand 
vient  de  perdre  un  de  ses  membres  régnicoles  les 
plus  distingués,  M.  J.  B.  Mondez  propriétaire,  aFras- 
nes ,  arrondissement  de  Charleroy.  Cet  habile  agro- 
nome ,  le  premier  qui  ait  introduit  la  culture  fla- 
mande dans  ses  terres ,  est  auteur  d'un  mémoire  sur 
les  avantages  de  cette  culture  et  sur  l'abolition  des 
Jachères,  mémoire  imprimé  a  Mons ,  en  i3n,  et 
qui  lui  a  valu  une  médaille  d'or,  de  la  Société  d'Agri- 
culture de  Paris.  Une  récompense  si  flatteuse  ne  laissa 
pas  que  de  l'exposer  a  quelques  diatribes  imprimées  ; 
mais  il  y  répondit,  comme  il  convieut  à  un  homme 
instruit,  par  le  silence,  et  continua  a  appuyer  sa 
théorie  sur  la  pratique. 

La  Société  se  propose,  lors  de  l'exposition  prochaine 
des  Fleurs  ,  d'exprimer  publiquement  ses  regrets  pour 
la  perte   de    cet  honorable   collègue. 


(  48-) 

ÉTAT  du  thermomètre  de  Fahrenheit ,  a  la  jette'e  oc- 
cidentale ,  autrefois  le  château  d'eau ,  près  de  Bata- 
via, pendant  le  mois  de  Septembre  1822. 


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AVANT-MIDI. 

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l'abri    des  grands  vents,   a  été  observe   à  l'om 
employé    du  waterstaal  à  Moleuvliet,    à    un 


Batavia  ,    i5  Octobre   1822. 


pieds  de  hauteur,  à 
bre  par  J.  Metsers  , 
quart   de   lieue  de 
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MESSAGER 


DES  SCIENCES  ET  DES  ARTS. 


lîme.  Livraison  —  Juin  1825. 


NOTICE    SUR    DEUX   MONUMENS   GRECS   DU   MUSEUM 

de   leyde.  (Suite.) 


Figure  deuxième  (1). 

vje  bas-relief  d'€nviron  quatre  pieds  de  haut,  de 
marbre  pentélique ,  semble,  dans  l'opinion  de  M.  Rot- 
tiers,  tenir  beaucoup  de  l'école  d'Egine;  il  fut  trouvé, 
en  1818,  dans  la  ligne  des  tombeaux,  a  deux  cents  pas 
environ  hors  de  l'enceinte  d'Athènes.,  sur  l'ancienne 
route  de  Thèbes  ;  l'adolescent  qu'il  représente,  a  quel- 
que chose  de  la  pose  de  la  figure  qu'on  désigne,  peut- 
être  sans  motif,   sous  le  nom  de  Y  Antinous,    et  plus 

(1)  Ces  dessins  sont  tracés  sur  la  pierre  par  M.  Eug.  F'erboeck- 
hoveu  et  les  impressions  sont  faites  par  M.  Kierdoiff,  lithographe 
à  Gand.  Ces  deux  artistes  ont  porté  ce  genre  de  lithographie 
à  un  tel  point  de  perfection  ,  que  l'on  prendrait  leurs  ouvrages 
pour  des  gravures  sur  cuivre. 

Dans  le  dessin  du  grand  bas-relief,  qui  nous  a  été  envoyé,  nous 
avons  cru  appercevoir  une  couronne  sur  la  tète  d'une  des  figures  ; 
mais  nous  venons  d'apprendre  par  M.  Rottiers  que  ce  sont  les  tres- 
ses de  la  chevelure  qui  sont  arrangées,  de  manière  à  ce  que,  sur 
un  simple  trait,  on  les  prendrait  pour  une  couronne. 
Ilme  Cahier.  4 


(  5o) 
trivialement  du  Lanlin  ;  de  la  main  droite,  il  tient  un 
oiseau  qui  semble  au  moment  de  s'échapper,  emblème 
allégorique,  peut-être,  d'un  décès  prématuré. 

Nous  nous  bornons  a  cette  description  analytique  de 
ces  deux  figures,  qui  seront  sans  doute  mieux  expliquées 
dans  la  description  détaillée  et  historique  que  les  ar- 
chéologues attendent  du  profond  savoir  et  du  zèle  éclairé 
du  jeune  professeur  que  nous  avons  déjà  nommé. 

Il  est  plus  que  probable  que  les  morceaux  importés 
en  Angleterre  par  lord  Elgin ,  et  dans  la  Belgique  par 
M.  Rottiers ,  seront  les  derniers  d'une  certaine  dimen- 
sion, qui  pourront  être  enlevés  a  la  Grèce  ;  en  effet  si, 
dans  la  lutte  que  les  descendans  des  Hellènes  soutien- 
nent avec  tant  de  valeur  et  de  sacrifices  contre  leurs 
oppresseurs ,  les  opprimés  succombent ,  le  fer  et  le  feu 
détruiront  le  peu  qui  reste ,  et  si  —  ce  qui  est  un  vœu , 
un  désir  ardent  de  toutes  les  âmes  généreuses ,  —  ils 
triomphent,  loin  de  détruire  ce  qui  reste  de  leurs  autels, 
de  leurs  tombeaux  et  des  images  de  leurs  ancêtres,  ils 
en  regarderont  la  conservation  comme  une  de  leurs  plus 
belles  conquêtes,  et  la  croix  grecque  (1)  défendra  ce 
qui  aura  été  conservé  des  Propylées,  comme  la  croix 
latine,  sous  Benoit  XIV,  a  défendu  le  Colysée  contre 
les  démolitions  et  les  spoliations  qui  se  succédaient. 

Plusieurs  autres  monumens  rapportés  delà  Grèce  par 
M.  Rottiers  (2),  ont  été  acquis  par  le  Gouvernement 
pour  le  Musée  de  Leyde,    entr'autres: 

(1)  La  croix  grecque  est  figurée  ►£  ;  la  croi^  iaïuie  ,  comme  on 
sait,  f. 

(2)  M.  le  colonel  Rot  ticrs(Bernard-Eiigène- Antoine)  né  le  i5  Août 
1772,  eut  toujours  un  goût  décidé  pour  les  arts;  tout  jeune  encore, 
il  fréquenta  l'académie  de  dessin  dans  sa  ville  natale.  Elève  en 
philosophie  à  Louvain  en  1789,  les  troubles  de  la  Belgique  l'en- 


(  5i  ) 

Un    beau  fragment  d'un  bas -relief,  trouvé  dans  le 
port  Léon  (Pirée)  près  d'Athènes  ;  ce  morceau  indique 


tramèrent  dans  la  carrière  militaire.  Il  servit  par  suite  LL.  HH. 
PP.  les  Etats  généraux  de  la  Hollande,  à  l'amirauté  d'Amster- 
dam,  et  il  commandait  à  bord  de  l'escadre,  une  compagnie  de 
mariniers,  lorsque,  à  l'invasion  des  Français,  en  179,5,  il  fut  fait 
prisonnier  au  Helder.  H  passa  alors  au  service  de  l'Angleterre, 
où  il  fut  employé  dans  le  corps  du  quartier-maitre  général  et  il  se 
trouva  à  l'expédition  de  la  Nord-Hollande,  eu  qualité  d'adjudant 
du  général  Macdonald.  De  retour  en  Hollande  après  la  paix 
d'Amiens,  il  fut  arrêté  par  ordre  du  Gouvernement  Français,  à 
l'époque  de  l'arrestation  du  Duc  d'Enghien,  et  conduit  à  Paris, 
où  il  suint  uue  longue  détention  au  Temple,  et  ne  dut  sa  liberté 
qu'à  la  réclamation  du  Roi  Louis,  qui  le  plaça  dans  son  état- 
major;  après  quoi,  l'amiral  De  Winter  se  l'adjoignit  comme  chef 
d'état-major  dans  sou  commandement-général  en  Nord-Hollande, 
pendant  1807  et  1808. 

Assez  heureux  pour  prévenir  l'orage  qui  devait  réunir  la  Hol- 
lande à  la  France,  il  passa  au  service  de  Russie,  avec  la  permis- 
sion du  Roi,  et  fut  reçu  en  qualité  de  major  dans  le  corps  des 
quartiers -mai  très  de  la  suite  de  S.  M.  l'Empereur;  l'Empereur 
après  l'avoir  envoyé  en  courrier  pour  rappeler  le  Prince  Serge 
Dolgoroucki  ,  son  ambassadeur  en  Hollande,  lors  de  la  réu- 
niou,  le  nomma  chef  d'état-major  de  la  2ome  division  à  l'armée 
de  Géorgie;  il  fit  plusieurs  campagnes  contre  les  Persans  et  les 
Turcs,  et  en  1810,  à  la  tète  d'un  corps  séparé,  conquit  le  beau 
district  d'Oujarli  dans  la  province  persanne  d'Aderbijaan,  où  il 
sut  se  maintenir  jusqu'au  traité  de  paix  de  Joulistan,  qui  conserva 
cette  province  à  la  Russie. 

Il  quitta  Tillis,  capitale  de  la  Géorgie,  en  1819,  dans  l'inten- 
tion de  traverser  l'Asie  mineure,  avec  son  épouse,  ses  trois  fils 
et  une  fille  cadette  âgée  de  six  ans,  et  de  se  rendre  à  Constanti- 
nople,  où  ils  se  reposèrent  pendant  six  mois  des  fatigues  et  des 
dangers  d'un  voyage  qu'aucune  famille  européene  n'avait  encore 
entrepris. 

De  là,  il  se  dirigea  vers  Athènes,  et  s'occupa  pendant  plu- 
sieurs mois  à  faire  des  fouilles  dans  les  environs  de  cette  ville. 
Ayant  visité  la  Grèce,  il  partit  de  Patras  pour  les  iles  Ioniennes; 
mais  des  vents  contraires  l'obligèrent  de  relâcher  à  Parga  en  Epire; 


(52) 

encore  parfaitement  le  grand  style  du  beau  siècle  des 
arts  et  fait  partie  d'une  procession  qui  orna  le  Pirée, 
dévasté  depuis  par  Scylla. 

Une  espèce  de  vase  sépulchral  de  marbre  pentélique, 
trouvé  en  1819,  dans  les  enviions  du  champ  de  bataille 
de  Marathon.  On  voit  sur  le  devant  de  ce  vase ,  un 
soldat  assis  avec  le  bonnet  phrygien  en  tête,  se  repo- 
sant sur  son  bouclier  et  faisant  de  la  main  droite  le 
salut  a  un  philosophe  ou  a  un  ami  qui  lui  tend  la  main, 
comme  pour  prendre  congé  de  lui.  On  ne  saurait  douter 
que  ce  morceau,  précieux  par  son  antiquité,  n'ait  été 

après  un  séjour  de  quelques  semaines  à  Corfou ,  il  passa  en  Italie 
à  bord  d'une  canonière  que  le  Gouvernement  des  Pays-Bas  lui  of- 
frit ;  Il  débarqua  à  Bari;  delà  il  se  rendit  par  Naples  à  Borne,  où 
l'àppellait  une  mission  pour  les  Arméniens  catholiques  de  l'Asie; 
enfin,  après  avoir  traversé  le  reste  de  l'Italie  et  la  France,  il  est 
rentré  au  sein  de  sa  patrie. 

Pendant  les  années  qu'il  passa  en  Asie,  il  forma  une  collection 
des  plus  rares,  consistant  en  plus  de  six  cent  pièces  d'or,  d'ar- 
gent et  de  cuivre,  des  monnaies  Parthes,  Arsacides,  Sassanides,  Cu- 
fiques,  Califes,  Persanues  et  Géorgiennes  dont  le  Duc  de  Blacas 
est  maintenant  possesseur.  L'abbé  Bainaud,  digne  élève  de  M.  le 
baron  Sylvestre  de  Sacy,  et  M.  B  ,  travaillent  à  l'illustration 
de  cette  belle  collection,  qui  sera  gravée  et  imprimée  aux  frais 
de  Son  Excellence. 

Outre  plusieurs  opuscules  militaires  et  mémoires  publiés  et  iné- 
dits, nous  avons  vu  paraître  de  lui,  en  1820.,  une  carte  du  pas- 
sage du  Caucase ,  avec  des  notes  historiques.  Elle  jette  des  lu- 
mières géographiques  sur  cette  partie  du  monde  si  peu  connue,  et 
il  serait  à  désirer  que  les  amis  du  Colonel  pussent  l'engager  à 
publier  une  foule  d'observations  qu'il  possède,  particulièrement 
sur  les  pays  entre  les  deux  mers. 

M.  Bottiers  grand  croix  de  l'ordre  du  Christ ,  chevalier  des 
ordres  de  S,e.  Anne,  S1.  Vladimir,  etc.;  est  membre  de  la  société 
royale  des  beaux-arts  et  de  celle  d'agriculture  et  botanique  de 
Gand,  agrégé  de  l'académie  d'Anvers  et  membre  de  plusieurs 
sociétés  savantes. 


(  53  ) 

érigé  sur  les  lieux  où  l'on  déposa  les  cendres  d'un  des 
braves  qui  tombèrent  dans  cette  célèbre  journée.  Quoi- 
que la  sculpture  des  figures  soit  bien  antérieure  au  beau 
tems  des  arts  en  Grèce ,  on  y  remarque  cependant  déjà 
les  grandes  dispositions  qui  le  firent  éclore. 

Une  lampe  de  bronze,  trouvée  dans  un  ancien  tom- 
beau de  marbre ,  a  une  lieue  de  Corintbe  ;  M.  Rottiers 
ne  la  croit  pas  très-ancienne,  mais  du  bas-empire,  sous 
Justinien,  et  cela  d'après  les  arabesques  en  marbre  ob- 
servés, par  lui,  dans  les  murs  de  Trébizonde  et  de 
Sinope,  où  les  Turcs  sous  Mahomet  II.,  employèrent 
tous  les  fragmens  antiques  'a  réparer  les  fortifications 
de  ces  villes.  Souvent  dans  le  moyen  âge  on  s'est  servi 
d'anciens  tombeaux  pour  y  enterrer  des  particuliers. 

M.  R.  vient  encore  de  recevoir  plusieurs  antiques 
restées  chez  M.  Dominique  Origone,  Consul  des  Pays- 
Bas  a  Athènes ,  et  qui  se  trouvent  actuellement  aussi 
dans  la  collection  de  Leyde  ;  elles  ont  été  acquises  par 
son  fils  aîné,  Jean-Nép. ,  pendant  son  dernier  voyage 
en  Grèce  dans  l'année  1821,  a  bord  du  bricq  Le  Tri- 
ton, de  M.  De  Lécluse  de  Bruges  5  ce  dernier  envoi  con- 
siste dans  un  grand  nombre  de  pièces ,  savoir  : 

Un  buste  de  femme,  en  bronze,  plus  grand  que  na- 
ture, parfaitement  conservé;  c'est  apparemment  le  por- 
trait de  la  donatrice  ou  bienfaitrice  du  temple  où  ces 
bustes  étaient  déposés  en  son  honneur,  et  dans  les  rui- 
nes duquel  on  l'a  trouvé. 

Un  grand  vase  cinéraire,  dit  vulgairement  étrusque. 
Quand  il  fut  déterré  près  de  Sunium,  aujourd'hui  Cap 
Colonne,  on  y  trouva  les  cendres  d'un  enfant  avec 
quelques  ossemens  qui  indiquaient  l'âge  de  l'individu. 
On  voit  d'un  côté  une  fille  de  10  a  12  ans ,  debout  sur  un 
degré  devant  Minos  qui  paraît  la  regarder  avec  intérêt  ;  elle 


C  54  ) 

est  suivie  par  un  musicien  armé  d'une  double  flûte,  dont 
il  tient  l'une  de  la  main  gauche,  tandis  qu'il  accorde 
l'autre  de  la  droite;  ensuite  paraît  son  ange  tutélaire 
qui  porte  un  coffret  renfermant  ses  vertus  innocentes 
pour  les  faire  valoir  près  du  Dieu  des  enfers;  de  l'autre 
côté,  on  remarque  sa  mère,  qui  voulant  suivre  ce  cor- 
tège funèbre,  en  est  empêchée  par  une  femme,  pen- 
dant qu'une  autre  va  la  retenir  par  derrière.  Ce  vase, 
bien  conservé  et  d'une  belle  forme,  a  vingt  pouces  de 
haut  sur  douze  de  diamètre. 

Trois  assiettes  d'un  pied  de  diamètre ,  pièces  uniques. 
Sur  la  première  on  voit  un  combat  de  trois  guerriers, 
dont  un  est  déjà  terrassé;  on  y  remarque  l'oiseau  de 
mauvais  augure  se  dirigeant  vers  le  second ,  prêt  a  être 
percé  d'une  lance.  La  seconde  représente  six  figures , 
dont  une  porte  un  faisan  et  une  autre  un  lièvre  ;  l'en- 
semble paraît  avoir  rapport  aux  fêtes  saturnales.  La  troi- 
sième offre  deux  figures  tenant  chacune  d'une  main  le 
lierre  qu'on  portait  aux  funérailles.  L'une  des  deux  tient 
de  l'autre  main  un  miroir  et  reçoit  la  coupe  de  la  mort. 
Ces  trois  morceaux,  où  tout  est  traité  en  silhouette, 
sont  remarquables  pour  leur  rareté;  aucun  cabinet  n'en 
possède  dans  ce  genre.  Ils  sont  classes  parmi  les  vases 
antiques  qu'on  a  trouvés  en  Grèce  et  qu'on  y  nomme 
Phéniciens. 

Cette  collection  contient  en  outre  un  grand  nombre 
de  lampes  ornées  de  bas -reliefs.  De  petites  figures 
en  terre  cuite ,  un  bas-relief  représentant  un  chariot 
de  parade  tiré  par  deux  chevaux,  sous  la  conduite 
d'un  cocher  ;  plusieurs  déesses  et  entr'elles  Léda 
assise.  Des  vases  lacrymatoires  avec  et  sans  figures. 
Des  coupes   de  différentes  formes ,   etc. 


(  55  ) 


ANTIQUITÉS    ROMAINES  , 


Trouvées  dans  la  commune  de  Crupet ,  province  de  Namur,  par 
M.   M.  D.  B  .  .  .  L. ,  membre   correspondant  de  la  Société 

des    beaux-arts. 


Uans  le  courant  d'Août  1811,  le  propriétaire  de  la 
ferme  deVenates,  a  une  demi-lieue  environ  de  la  Meuse, 
sur  la  rive  droite,  pour  faire  plus  aisément  passer  la 
charrue  dans  une  de  ses  terres,  qui  occupe  la  pente 
de  la  montagne ,  voulut  aplanir  un  petit  tertre  vers 
le  milieu  de  cette  pente.  Ses  ouvriers ,  en  creusant 
la  terre ,  trouvèrent  trois  tombeaux  ;  leur  forme  était 
celle  d'un  parallélogramme  rectangle ,  long  de  six 
pieds  environ,  large  de  deux,  et  profond  de  deux  et 
demi;  ils  étaient  entourés  d'une  muraille.  Les  pierres 
vers  l'intérieur  ,  étaient  taillées  a  la  masse  ;  le  reste 
de  l'épaisseur  du  mur  était  rempli  avec  du  moellon  et 
lié  avec  un  ciment  ordinaire,  composé  de  chaux  et  de 
sable  ;  la  maçonnerie  était  très-bien  conservée.  Rien 
n'indique  que  ces  tombeaux  s'élevaient  autrefois  au- 
dessus  de  la  terre;  il  n'y  a  aucun  doute  qu'ils  y  ont 
été  enfouis  dès  le  commencement;  la  preuve  en  est, 
que  l'intérieur  du  mur  n'est  composé  que  de  moellon  ; 
ils  étaient  couverts  de  grandes  pierres  plates. 

On  a  trouvé  dans  l'un  d'eux,  les  os  de  deux  corps 
humains  ,  assez  bien  conserves  ;  ils  étaient  placés  en 
sens  inverse,  c'est-a-dire  que  l'un  avait  les  pieds  près 
de  la  tête  de  l'autre.  Sur  la  pierre  plate  qui  les  cou- 
vrait,  était  taillée  une  petite  figure,  peu  digne  de 
remarque. 


(  56  ) 

Dans  le  tombeau  opposé  a  celui-ci,  se  trouvaient  les 
os  d'un  homme  ;  il  avait  a  côté  de  lui ,  une  lame  de 
sabre,  très-rouillée. 

Le  tombeau  du  milieu  contenait  aussi  les  os  d'un 
homme  ;  il  avait  au  cou  un  collier  de  graines  d'émail,  qui 
formaient  autant  de  petites  boules  percées,  ayant  la  gros- 
seur du  bout  du  petit  doigt,  de  couleur  jaune  orange; 
à  côté  était  placé  un  petit  vase  ;  c'était  certainement 
un  lacrymatoire ,  quoiqu'il  ne  ressemble  pas  a  ceux  que 
j'ai  vus  à  Rome  et  a  Naples ,  et  qu'on  avait  tirés  des 
ruines  de  Pompeia  et  d'Herculanum. 

Ce  tombeau  était  couvert  d'une  grande  pierre  plate, 
d'environ  8  pieds  de  long,  sur  5  et  demi  de  large,  bien 
équarrie.  Sur  la  parlie  vers  l'intérieur  du  tombeau,  se 
trouvait  l'inscription  grecque  qui  suit,  écrite  en  lettres 
majuscules;  elles  avaient  environ  un  pouce  de  haut,  je 
l'ai  copiée  très-exactement  : 

r.   i  o  t. 

MAShMOC 
KA  ICAP. 

Cette  inscription  est  conforme  a  celle  qui  se  trouve 
sur  un  médaillon  de  Maxime,  cité  par  le  P.  Jobert  , 
pour  prouver  qu'on  donnait  la  couronne  de  laurier 
aux  Césars  aussi  bien  qu'aux  Augustes,  parce  que  dans 
ce  médaillon,  il  est  représenté  avec  la  couronne  de 
laurier  et  qu'il  est  appelle  César  dans  l'inscription  (i). 

On  sait  que  Maxime  se  fit  proclamer  César  ou  Em- 
pereur en  Angleterre  en  583,  et  que  ce  fut  dans  les 
Gaules,  que  les  légions,  mécontentes  de  Gratien,  le 
reconnurent.  11  établit  ensuite  le  siège  de  son  empire 

O)  Science    des    médailles,    II.    îustruc.    t.   11=  p.  3.   e'dit.  de 
Pans,  1709. 


(  57  ) 
à  Trêves ,  où  St.  Martin  vint  le    trouver.  The'odosc  , 
quelques  années  après,  défit  l'armée  de    Maxime,    et 
le  poursuivit  jusqu'à  Aquilée.  Alors  ses  propres  soldats 
lui  coupèrent  la  tète  et  la  présentèrent  a  Théodose. 

Je  ne  connais  pas  l'interprétation  qu'on  a  donnée  a 
l'inscription  grecque  qui  se  trouve  sur  les  monnaies  que 
Maxime  a  fait  frapper.  Voici  celle  que  je  crois  pouvoir 
lui  donner  :  ripuv  tovXtor  Mx^i^o^  Kxtrap.  (1).  Sur  toutes 
les  médailles  ou    pièces  de  monnaie  de  Maxime,   qui 
ont  été  frappées  a  Trêves,  on  lit  cette  légende  en  latin: 
D.  N.  MAG.  MAXIMUS.  P.  F.  AVG. ,   c'est-à-dire , 
Dominus  noster  magtius  Maximus  pius  felix  augustus. 
D'après  cela,  je  pense  que  le  r.  est  l'abrégé  du  mot 
répm,  qui  signifie  un  sénateur,  un  homme  respectable, 
ce   qui   répond   assez   aux   mots    Dominus  noster,  des 
légendes  latines.  On  sait  que  beaucoup  d'Empereurs  et 
de  Césars ,  proclamés  tels  par  l'armée ,  comme  Maxime , 
ont  pris  le  prénom  de  Julius ,  voulant  persuader  qu'ils 
étaient  de  la  famille  de  Jules,  ce  qui  a  existé  jusqu'au 
règne  de  Théodose,  et  ce  qu'aura  fait  Maxime. 

Reste  a  savoir  présentement,  comment  cette  inscrip- 
tion s'est  trouvée  dans  l'intérieur  d'un  tombeau?  On 
peut  supposer  que  la  pierre  faisait  partie  d'un  monu- 
ment plus  ancien,  et  qu'ensuite  on  l'aura  prise  pour 
en  couvrir  ce  tombeau. 


(1)  Le  r.  de  l'inscription  serait  plutôt  le  monogramme  de 
TtpfAccvtxoT  On  sait  en  effet,  et  plusieurs  médailles  grecques  et  la- 
tines le  prouvent,  que  Jules  Maxime,  avait,  ainsi  que  Commode, 
reçu  du  sénat,  le  surnom  de  Germauicus. 


(  58  ) 


AGRICULTURE.     —    ABEILLES. 


Notice  soumise  à   la   Société  royale  d'agriculture  et 
de  Botanique ,  par  l'un  de  ses  Membres. 


V  ous  avez  désiré ,  MM. ,  que  je  fisse  quelques  véri- 
fications sur  un  fait  annoncé  par  M.  Decouëdic,  culti- 
vateur d'abeilles  en  France;  c'est-a-dire  sur  une  espèce 
de  résurrection  ou  repeuplement  spontané  des  ruches 
qui  périssent  de  besoin  pendant  l'hiver  ou  le  printems. 

Vous  jugiez  que  ce  fait,  s'il  se  vérifiait,  était  inté- 
ressant sous  le  double  rapport  de  l'histoire-naturelle 
et  de  l'éducation  économique  des  abeilles. 

Je  viens  vous  rendre  compte  de  quelques  résultats 
assez  remarquables  que  j'ai  obtenus  jusqu'ici,  en  cher- 
chant a  remplir  vos  intentions. 

M.  Decouëdic  annonçait  ce  fait  avec  tant  d'assurance 
et  de  détails,  que,  malgré  la  juste  méfiance  que  nous 
avait  inspirée  l'ensemble  de  ses  opinions  et  de  ses 
systèmes  ,  il  nous  était  difficile  de  lui  refuser  toute 
croyance. 

D'ailleurs,  ce  que  nous  connaissons  jusqu'ici  de  l'his- 
toire-naturelle des  abeilles,  tout  en  repoussant  les  ex- 
plications données  par  M.  Decouëdic ,  semblait  nous 
fournir  les  bases  d'une  hypothèse ,  d'après  laquelle  la 
résurrection  annoncée  par  ses  écrits  eût  pu  s'expliquer 
plausiblement. 

En  effet:  que  dans  une  ruche  que  le  besoin  a  fait 
périr,  il  y  ait,  lors  de  la  mort  de  la  reine  et  des  abeilles 


(  fe  ) 
ouvrières,  1"  des  nymphes  ou  des  vers  adultes  renfer- 
més, a  la  manière  ordinaire,  dans  les  alvéoles  où  ils 
ont  été  élevés  et  n'ayant  par  conséquent  plus  Lcsoin 
ni  de  nourriture  ni  de  soins  de  la  part  des  abeilles;  et 
2°  des  œufs  non  encore  éclos  ou  des  vers  assez  jeunes 
pour  pouvoir  produire  des  reines  ; 

Qu'il  soit  dans  les  règles  d'après  lesquelles  la  nature 
régit  les  abeilles  que,  dans  ces  occasions,  aussitôt  que 
la  chaleur  naturelle  causée  par  la  présence  des  abeilles 
a  cessé  d'exercer  son  influence  sur  les  nymphes ,  les 
vers  et  les  œufs ,  tout  ce  couvain  cesse  de  croître  et 
passe  a  l'état  d'engourdissement  que  subissent  beau- 
coup d'autres  insectes; 

Qu'au  retour  de  l'été,  les  nymphes  et  les  grands  vers 
renfermés  dans  les  alvéoles,  soient  les  premiers  a  se  res- 
sentir des  effets  de  la  chaleur  atmosphérique  et  des  in- 
fluences de  la  saison,  et  a  parvenir  ainsi  naturellement 
a  l'état  d'insectes  parfaits  ; 

Qu'enfin  il  soit  dans  l'instinct  de  ces  jeunes  abeilles 
de  soigner  de  suite  le  jeune  couvain  ;  c'est-à-dire , 
d'ajouter  leur  chaleur  naturelle  a  celle  de  l'atmosphère 
pour  faire  éclore  les  œufs ,  de  nourrir  et  de  soigner  les 
jeunes  vers  et  de  donner  a  un  ou  a  plusieurs  de  ceux-ci 
les  soins  spéciaux  qui  en  font  provenir  des  reines  ; 

Cette  hypothèse  étant  en  harmonie  avec  l'état  actuel 
de  la  science,  je  crus  devoir  la  choisir  pour  guide  dans 
les  vérifications  que  je  me  proposais  d'entreprendre. 

J'en  eus  bientôt  l'occasion;  en  1816,  année  mémo- 
rablement  désastreuse  pour  la  culture  des  abeilles,  de 
4o  ruches,  qu'après  la  floraison  du  sarrasin,  je  rame- 
nai a  mon  rucher.,  a  peine  2  ou  5  avaient  un  appro- 
visionnement suffisant  pour  l'hiver  ;  a  force  de  soins  et 
de  dépenses,  je  réussis  a  en  conserver  une  vingtaine; 


(6o) 

quant  aux  autres,  la  douceur  et  l'humidité  de  l'hiver 
et  la  longue  rigueur  du  printems  de  1817,  rendirent 
mes  efforts  infructueux  ;  il  en  pe'rit  successivement 
douze  en  Janvier  et  en  Février 5  dans  toutes,  la  moi- 
sissure avait  envahi  l'intérieur  et  couvrait  même  les 
rayons.  Peu  de  jours  après  la  mort  des  mouches  tout  y 
était  corrompu  et,  quoiqu'il  pût  y  avoir  devrai  dans  la 
résurrection  annoncée  par  M.  Decouè'dic,  aucune  de 
ces  ruches  n'offrait  la  moindre  chance  d'y  participer. 

Je  ne  les  jugeai  pas  non  plus  convenables  aux  véri- 
fications que  je  voulais  faire  ;  mais  plus  tard  je  réfléchis 
que  si,  malgré  l'état  de  corruption,  j'y  trouvais  des 
alvéoles  fermés  contenant  des  nymphes  ou  des  vers 
adultes,  et  que  d'autres  alvéoles  renfermassent  des  res- 
tes reconnaissables  d'œufs  ou  de  jeunes  vers,  un  grand 
pas  était  fait  pour  convertir  en  réalité  l'hypothèse  qui 
me  guidait. 

Résolu  d'utiliser  sous  ce  rapport,  les  ruches  mortes  que 
j'avais  sous  la  main  et  les  trouvant  toutes  dans  le  même 
état  de  corruption ,  j'en  pris  une  an  hasard  dont  j'ôtai 
les  traverses  avec  les  précautions  convenables  pour  dé- 
ranger ou  rompre  le  moins  possible  les  rayons,  que 
j'enlevai  avec  non  moins  de  soins. 

J'examinai  très-attentivement  tous  les  alvéoles  et  n'y 
trouvai  exactement  aucune  espèce  de  trace  ou  d'indice 
d'œufs  ni  de  vers  ;  mais  dans  l'endroit  où  j'avais  le  plus 
compté  en  trouver,  c'est-a-dire ,  vers  le  milieu  où  les 
deux  tiers  de  la  hauteur  des  4  a  5  rayons  du  milieu, 
endroit  que  nos  cultivateurs  d'abeilles  appellent  le  lit 
de  la  mère  (het  moerbedde) ,  les  deux  surfaces  des  deux 
rayons  du  milieu  et  l'une  des  surfaces  de  chacun  des 
deux  rayons  qui  les  avoisinent  a  droite  et  a  gauche  , 
étaient  encombrées  d'abeilles  mortes,  sur  une  étendue 


<6i  ) 

circulaire  d'environ   cinq  pouces   (  ancienne  mesure  ) 
de    diamètre;    j'en  débarrassai   une   des  surfaces  dans 
l'intention  d'examiner  les    alvéoles;    mais   j'y   trouvai 
chaque   alvéole ,     sans    exception ,    occupé    par    une 
abeille  qui  s'y  était  enfoncée,  la  tête  en  avant,  et  de 
telle  manière  que  l'extrémité  de  l'abdomen  de  chacune 
d'elles  faisait  saillie  d'un  peu  moins  d'une  ligne  a  la 
surface  du  rayon.  Cet  amoncelement  de  mouches  mor- 
tes, couvrant  d'autres  mouches  implantées  en  quelque 
sorte  dans  les  alvéoles ,  me  parut  digne  d'attention  et 
semblait  déceler  un  des  résultats  de  l'instinct  des  abeilles 
qu'on  est  toujours  tenté  de  prendre  pour  le  produit 
d'une  prévoyante  intelligence;  mais  quel  mystère  était 
caché  ici?     Allais-je  trouver  des   œufs  au    fond    des 
alvéoles  ainsi  abrités?    et  la  nature   avait-elle  modifié 
l'instinct  des  abeilles  de  manière  a  leur  faire  prendre 
les  précautions  que  je  voyais  pour  la  conservation  de 
ces  germes,  seul  reste  de  la  famille  éteinte,  seul  espoir 
de  sa  renaissance,  de  la  conservation  de  l'espèce? 

Rien  de  tout  cela  ne  se  vérifia;  j'employai  plus  de 
deux  heures  a  chercher  au  fond  des  alvéoles  les  œufs 
que  les  abeilles  y  recelaient  peut-être  ;  j'épuisai  toutes 
les  précautions  pour  m'assurer  si  le  hasard  ou  l'instinct 
des  abeilles  ne  me  dérobaient  pas  l'objet  de  mes  recher- 
ches; tout  fut  inutile;  je  ne  trouvai  absolument  rien. 

Cependant ,  la  formation  de  ces  masses  d'abeilles ,  avait 
un  but;  en  l'examinant  sur  la  surface  opposée  a  celle 
qui  m'avait  occupé  si  long-tems,  la  symétrie,  la  stricte 
régularité  de  l'ordre  qu'avaient  observé  les  abeilles  en 
s'y  rangeant ,  ne  me  laissaient  plus  la  possibilité  d'en 
douter;  mais  quel  était  ce  but?  eùt-il  fallu  disséquer  une 
a  une  toutes  les  mouches  qui  composaient  le  massif,  et 
il  n'y  en  avait  pas  moins  de  2000 ,  je  m'y  étais  résigné , 


(  W) 
munauté  se  dissout  clans  l'automne,  lorsque  la  saison 
n'oppose  encore  aucun  obstacle  aux  recherches  qu'elles 
ont  a  faire;  la  femelle  de  l'espèce cultive'e  doit,  au  con- 
traire, avoir  nécessairement  son  abri  dans  son  habitation 
même;  elle  n'en  aura  besoin  que  dans  le  cas  et  au 
moment  où  l'épuisement  des  provisions  nécessitera  la 
dissolution  de  la  communauté;  ce  cas  et  ce  moment 
sont  incertains;  ils  peuvent  survenir  dans  tout  le  cours 
de  l'hiver  et  la  femelle  serait  ainsi  trop  souvent  expo- 
sée a  une  mort  certaine,  si  elle  était  obligée  de  quit- 
ter son  habitation  pour  chercher  un  abri. 

Les  femelles  des  autres  espèces  se  placent  seules  dans 
les  abris  qu'elles  choisissent,  et  ne  trouveront,  a  leur 
réveil,  aucune  ouvrière  pour  les  aider  a  remplir  les 
devoirs  que  les  lois  de  la  nature  leur  imposeront;  c'est 
que  la  nature  leur  a  enseigné  a  construire  seules  une 
nouvelle  habitation,  a  se  nourrir  et  a  nourrir  leurs  élè- 
ves jusqu'à  ce  que  celles-ci  puissent  leur  servir  d'aides; 
tandis,  au  contraire,  que  les  femelles  des  mouches  a 
miel  ne  sont  instruites  a  se  procurer  ni  leur  propre 
nourriture  ni  celle  des  vers  qui  naîtront  des  premiers 
œufs  qu'elles  auront  à  pondre  après  leur  réveil;  aussi 
la  reine  ou  femelle  que  je  venais  de  trouver,  était-elle  au 
milieu  d'un  groupe  d'ouvrières,  subissant  probablement 
le  même  engourdissement  qu'elle,  lui  formant  actuelle- 
ment de  leurs  corps  l'abri  qui  devait  la  conserver,  et 
destinées ,  si  rien  d'extraordinaire  ne  les  eût  fait  périr, 
a  remplir,  a  son  réveil,  leur  portion  de  devoirs  dans  la 
régénération  de  la  famille. 

Tout  concourait  donc  a  me  confirmer  que  j'étais  désor- 
mais dans  la  bonne  voie  ;  le  but  auquel  je  visais  était 
nettement  tracé;  il  était  atteint  dès  l'instant  que,  sous 
mes  yeux,  la  reine  et  les  abeilles  d'un  massif  sembla- 


(65) 

ble  a  celui  que  je  venais  de  voir,  reviendraient  a  la  vie. 
Aucune  des  ruches  que  j'avais  sous  la  main  ne  pouvait  me 
laisser  cet  espoir;  je  n'en  avais  encore  exploré  qu'une, 
et  les  autres  ne  pouvaient  me  servir  que  pour  vérifier 
si  ce  que  j'avais  vu  était  un  fait  général  et  toujours 
identique  dans  les  mêmes  circonstances. 

En  tenant  ces  ruches  renversées  et  en  plongeant  la 
vue  entre  les  rayons  >  quatre  laissaient  voir  les  bords 
des  groupes  ou  massifs  que  je  voulais  y  chercher  ;  je 
ne  vis  rien  dans  les  autres  et  ce  fut  des  premières  que 
je  résolus  de  m'occuper  d'abord. 

Déjà  mieux  instruit  des  soins  qu'il  y  avait  a  prendre 
pour  ne  rien  déranger  en  vuidant  les  ruches ,  j'ajoutai 
aux  précautions  précédentes  celle  de  placer  des  broches 
de  bois  entre  les  rayons  ;  ce  qui  me  fit  réussir  a  les 
extraire  en  conservant  la  position  respective  et  les  dis- 
tances qui  avaient  existé  dans  chaque  ruche. 

Dans  chacune  des  quatre,  je  commençai  mon  exa- 
men en  laissant  intactes  les  deux  portions  latérales  des 
groupes,  et,  en  écartant  les  deux  rayous  entre  lesquels 
se  trouvait  la  portion  centrale,  j'ouvris  chaque  massif 
par  son  milieu  et  en  mis  le  centre  a  nu;  les  quatre  fois, 
en  portant  la  vue  sur  ce  centre ,  la  reine  fut  le  pre- 
mier objet  qui  me  frappa  ;  seulement  il  arriva  qu'il  me 
fallut  porter  le  regard  sur  le  2me  rayon  lorsque  je  ne  la 
rencontrai  pas  sur  l'autre. 

Du  reste  toujours  la  même  pose,  toujours  le  même 
entourage  et  le  même  ordre  régulier  observé  dans  la 
formation  des  massifs. 

Quatre  des  sept  ruches  entre  les  rayons  desquelles  je 
n'avais  rien  vu,  étaient  totalement  abandonnées;  je  n'y 
trouvai  que  quelques  mouches  mortes,  accrochées  ça  et 
la  aux  bords  et  aux  surfaces  des  rayons  ou  aux  traverses; 

II m".  Cahier,  5 


(  66  ) 

circonstance  qui  ne  s'était  pas  rencontrée  dans  les  ru- 
ches où  il  s'était  trouvé  des  groupes  ;  n'en  faut-il  pas 
conclure  qu'avant  de  se  grouper ,  les  abeilles  obéissent 
à  une  impulsion  de  leur  instinct  en  recherchant  et  en 
expulsant  les  cadavres  qui  pouvaient  infecter  leur  ha- 
bitation. 

Quoiqu'il  en  soit,  je  fus  frappé  de  cette  circonstance, 
en  examinant  la  première  des  sept  ruches,  qui ,  prise 
au  hasard,  se  trouvait  dépourvue  de  groupe  ou  massif, 
et  elle  me  fournit  une  indication  ;  en  retournant  les  six 
ruches  qui  me  restaient,  je  vis  des  mouches  mortes 
dans  trois ,  mais  pas  une  seule  dans  les  trois  autres , 
ce  qui  me  fit  juger  que  les  premières  étaient  évacuées 
et  qu'il  y  avait  des  groupes  dans  les  trois  dernières. 

L'examen  confirma  ce  jugement.  Dans  les  trois  au 
centre  desquelles  je  trouvai  des  groupes  et  des  reines, 
j'eus  l'occasion  d'admirer  quelques  traits  de  plus  de 
cette  étonnante  ressource  dont  l'instinct  des  abeilles  est 
pourvu:  celle  d'adapter  a  ce  qu'elles  ont  a  exécuter, 
des  modifications  souvent  très- compliquées,  chaque 
fois  que  des  accidens  imprévus  ou  des  irrégularités  du 
local  qu'elles  occupent ,  offrent  quelque  utilité  ou  né- 
cessité 'a  le  faire. 

Dans  les  cinq  premiers  groupes,  tout  avait  offert  cette 
régularité  uniforme  qui  caractérise  le  plus  générale- 
ment les  ouvres  de  l'industrie  des  abeilles  ,  parce 
qu'a  la  place  qu'ils  occupaient,  les  rayons  étaient  ré- 
gulièrement construits,  dirigés  et  espacés.  Chaque 
portion  de  groupe  se  composait:  d'abord,  des  mouches 
enfoncées  dans  les  alvéoles ,  comme  je  l'ai  dit  plus 
haut j  ?n  comblant  ces  alvéoles,  elles  applanissaient  les 
surfaces  des  rayons  et  servaient  de  base  au  reste  de 
la  construction  j  ensuite,  de  trois  ou  de  quatre  cercles 


(«7  ) 
nu  enceintes  concentriques  de  mouches,  qui  toutes 
rivaient  la  tetc  tournée  vers  le  centre  et  l'abdomen  vers 
la  circonférence  ;  ces  cercles  étaient  autant  de  cloisons 
qui,  sur  tout  leur  contour,  fermaient  hermétiquement, 
du  moins,  autant  que  la  vue  peut  en  faire  juger,  l'in- 
terstice entre  deux  rayons  ;  ils  se  composaient  de  trois 
rangs  de  mouches  ;  celles  de  Pun  des  rangs  étaient  cou- 
chées a  plat  ventre  sur  la  surface  de  l'un  des  rayons 5 
celles  du  deuxième,  l'étaient  de  la  même  manière  sur 
la  surface  du  rayon  opposé;  et  celles  du  troisième, 
étaient  comme  intercalées  entre  les  premiers  et  en  re- 
couvrement de  l'un  et  de  l'autre  ;  c'est-a-dire  ,  que 
chaque  mouche  de  ce  rang  intermédiaire  y  était  posée 
de  manière  a  combler  exactement  l'espace  existant  entre 
deux  mouches  du  rang  qu'elle  touchait  du  dos,  deux 
du  rang  qu'elle  touchait  du  ventre  et  les  deux  qui 
étaient  a  chacun  de  ses  côtés.  Ce  rapport,  cette  con- 
cordance entre  la  forme  et  la  grosseur  des  mouches  et 
l'espace  qu'elles  ont  a  combler  dans  une  circonstance 
réglée  par  la  nature ,  constitue  ici  un  trait  de  plus  de 
cette  espèce  d'automatisme  auquel  Buffon  a  voulu  attri- 
buer et  borner  toute  l'industrie  des  abeilles;  mais,  ici 
comme  dans  une  multitude  d'autres  circonstances,  l'er- 
reur qui  accorderait  a  ces  insectes  une  intelligence  égale 
et  quelquefois  supérieure  à  la  nôtre,  serait  beaucoup 
moins  déraisonnable  que  celle  du  grand  naturaliste. 

En  effet,  il  n'y  avait  plus  rien  de  machinal  dans  l'or- 
ganisation des  trois  derniers  groupes  que  j'examinai  ; 
tout,  au  contraire,  y  paraissait  ca]cul  et  combinaison; 
les  cmplacemens  qu'ils  occupaient  n'avaient  rien  de  ré- 
gulier dans  leur  forme  ni  dans  leur  étendue;  c'étaient 
des  espaces  vuides  formés  accidentellement  par  des  irré- 
gularités plus  ou  moins  compliquées  dans  la  forme  et  la 


(M) 

direction  des  rayons;  et  chacun  des  nombreux  accidens 
de  ces  irrégularite's  avait,  dans  l'organisation  des  grou- 
pes ,  sa  combinaison  correspondante  qui  y  remédiait 
plus  parfaitement  que  toute  autre  qu'eût  pu  inventer 
le  génie  de  l'homme;  j'ose  presqu'ajouter  que  chacun 
de  ces  incidens  offrait,  dans  son  harmonie  avec  la  régu- 
larité de  l'ensemble ,  la  solution  la  plus  heureuse  d'un 
problême  particulier. 

Quoique  fort  intéressans ,  les  détails  de  ces  combi- 
naisons ne  le  sont  peut-être  pas  assez  pour  justifier  les 
loûgueurs  d'une  description  aussi  difficile  a  faire  qu'elle 
serait  fatiguante  a  lire.        (  La  suite  au  prochain  N°.  ) 


CATALOGUE   DESCRIPTIF   ABREGE  , 

Contenant  une  partie  des  Arbrrs  Fruitiers,    qui,   depuis  1798 
jusqu'en  1823,  ont  formé  la  collection  de  J.  B.  van  Mous. 


ÎVI.  Van  Mons  a  rédigé  ce  catalogue ,  pour  ne  pas 
exposer  ses  correspondans  a  se  tromper  sur  la  nature 
des  fruits  qu'il  leur  avait  envoyés,  sous  des  numéros 
distincts. 

Dans  un  établissement  qui  ne  comprenait  pas  moins 
de  80  mille  pieds  d'arbres ,  il  était  difficile  de  satisfaire 
a  toutes  les  demandes  de  greffes,  en  inscrivant  au  long 
le  nom  des  fruits  sur  des  étiquettes,  et  il  paraissait  plus 
simple  de  marquer  sur  une  bandelette  de  papier  les  nu- 
méros attachés  a  l'arbre,  sauf  a  indiquer  ensuite  les  sortes 
auxquelles  les  numéros  appartenaient.  M.  V.  M...  dans 
l'impossibilité  de  donner  individuellement  tous  les  ren- 
seignemens  qu'on  aurait  pu  lui  demander,  a  jugé  con- 


(69  ) 
vcnable  de  rendre  son  catalogue  public  par  la  voie  de 
l'impression. 

L'auteur  ne  rapporte  dans  ce  catalogue  que  les  espè- 
ces qu'il  a  pu  expédier,  sous  la  forme  de  greffes,  telles 
que  le  poirrier,  le  pommier,  le  prunier  et  le  cerisier. 
11  a  cependant  trouvé  une  méthode  pour  faire  voyager 
sous  la  même  forme,  le  pêcher  et  l'abricotier;  elle  con- 
siste a  ccussonner  ces  espèces  sur  les  sommets  ou  sur 
les  bourgeons  latéraux  des  pruniers,  et  a  expédier  la 
branche  porte-écusson  avant  ou  après  le  développement 
de  l'œil,  pour  être  greffée  en  fente  sur  un  autre  prunier; 
Si  on  demande  a  M.  Van  Mons,  par  quel  procédé  il 
est  parvenu  a  obtenir  de  ses  semis ,    un  aussi  grand 
nombre  de  fruits  extraordinaires,  en  tout  genre,  et  de 
qualités  si  exquises,  il  répond  que  sa  méthode  a  con- 
sisté a  renoweller  sans  cesse  les  anciennes  variétés  re- 
connues pour  les  meilleures ,  c'est-a-dire ,  a  ne  semer 
jamais  que  les  pépins  et  les  noyaux  des  derniers  fruits 
récoltés.  Il  entre  a  ce  sujet  dans  beaucoup  d'autres  dé- 
tails pour  lesquels  nous  renvoyons  a  son  catalogue. 

La  greffe  sur  pieds  levés  de  terre ,  et  par  copulation , 
lui  paraît  préférable  a  toute  autre,  pour  le  poirier  et  le 
pommier.  La  souffrance  commune,  dans  ce  cas,  au  pied 
et  a  la  greffe ,  assure  la  reprise  et  détermine  une  force 
égale  de  développement.  Cette  greffe,  ajoute-t-il,  pour- 
rait s'appeler  greffe  sur  genou,  ou  greffe  au  coin  du 
feu;  c'est  la  seule  que  l'on  doive  pratiquer,  mais  en 
fente,  pour  le  paradis  et  le  cognassier. 

Une  remarque,  qui  ne  doit  pas  être  passée  sous  si- 
lence, c'est  que,  plus  les  fruits  sont  renouvelles }  moins 
les  variétés  qu'on  obtient  sont  précoces. 

M.  Van  Mons  a  principalement  fait  porter  ses  recher- 
ches sur  le  perfectionnement  des  poiriers.  Jusqu'ici  celle 


(70) 
espèce  ne  s'est  pas  encore  reproduite  a  ses  yeux  sous 
«ne  forme  identique.  Après  des  milliers  d'essais,  il  a 
bien  trouve'  quelques  fruits  qui  se  rapprochaient  pour 
la  forme;  mais  alors  le  port,  le  bois,  le  feuillage  diffé- 
raient entièrement,  ou  bien,  s'ils  avaient  quelque  res- 
semblance, les  fruits  étaient  distincts  du  tout  au  tout. 

Ces  faits,  que  nous  puisons  dans  l'avis  que  Fauteur 
a  mis  en  tête  de  son  catalogue,  donneront  une  idée  de 
ses  travaux  pomologiques.  Ceux  qui  recourront  a  l'ou- 
vrage ,  y  verront  qu'il  serait  difficile  de  trouver,  en  ce 
genre ,  un  établissement  comparable  au  sien  ;  que  peu 
d'agronomes  ont  obtenu  des  résultats  aussi  satisfaisans, 
et  que,  par  les  envois  multipliés  qu'il  s'est  plu  a 
faire  a  différentes  sociétés  d'agriculture  et  de  pomolo- 
gie,  ainsi  qu'a  une  foule  de  particuliers,  le  savant  pro- 
fesseur a  montré  qu'il  ne  travaillait  pas  moins  pour 
l'intérêt  de  la  science  que  pour  celui  de  sa  gloire. 

Nous  avons  dans  nos  archives  un  petit  traité  du 
même  auteur  sur  les  fruits  a  pépin.  S'il  nous  autori- 
sait a  le  publier,  nous  nous  empresserions  d'en  faire 
jouir  nos  lecteurs. 


BULLETIN 
DES  ACADÉMIES   ET  SOCIÉTÉS  SAVANTES. 


société  d'émulation  de  liège. 


JLje  secrétaire-général,  M.  De  Gerlache,  dans  la  séance 
du  25  Décembre  dernier,  a  tracé  en  peu  de  mots  l'his- 
torique de  la  société,  en  remontant  jusqu'au  règne  de 


(  71  ) 

Velbruck;  il  a  analysé  les  rapports  des  différentes  com- 
missions sur  les  pièces  envoyées  au  concours  j  il  a 
communiqué  des  notices  intéressantes  sur  la  vie  et  les 
travaux  des  membres  ordinaires  et  correspondais  ;  il  a 
fait  mention  de  l'envoi  fait  a  la  société  de  plusieurs 
ouvrages,  parmi  lesquels  il  a  distingué  les  sfnnales  du 
Salon  de  Gand,  destinées  a  reproduire  par  la  gravure 
les  tableaux  les  plus  remarquables  de  notre  école  mo- 
derne ;  et  il  a  terminé  son  rapport  par  l'annonce  des 
questions  et  des  prix,  mis  au  concours  pour  182 3  et  i824. 
L'examen  de  la  pièce  envoyée  au  concours  pour 
Y  éloge  de  Grétry ,  a  naturellement  amené  le  rapporteur 
à  parler  du  procès  de  la  ville  de  Liège,  contre  le  sieur 
Flariiand-Grétry ,  et  il  a  réfuté  les  calomnies  de  ce  der- 
nier contre  les  Magistrats  de  la  ville.  Nous  citerons 
quelques  traits  de  sa  réfutation. 

»  Vous  savez,  MM.,  que  Grétry,  qui  aimait  sa  ville 
natale  autant  qu'il  Phonorait,  avait  toujours  témoigné 
le  désir  que  son  cœur  lui  fût  renvoyé,  et  qu'il  pria  ses 
héritiers  d'accomplir  son  dernier  vœu.  Mais  l'un  d'eux, 
celui-là  même  qui  avait  le  plus  ouvertement  reconnu  et 
le  plus  formellement  exécuté  l'ordre  de  son  bienfaiteur, 
de  celui  qu'il  appelle  son  oncle,  prétend  aujourd'hui 
retenir,  sous  d'indignes  prétextes,  un  objet  sur  lequel 
il  n'a  nul  droit  :  vous  l'avez  poursuivi  devant  les  tri- 
bunaux pour  obtenir  justice  de  ce  manque  de  foi  envers 
Grétry  et  envers  vous. 

y>  Nous  venons  de  lire  dans  une  Biographie  nou- 
velle ,  a  l'article  Grétry,  »  que  ce  dernier  avait  légué 
»  son  cœur  a  la  ville  de  Liège  ;  mais  que  notre  bourg- 
»  mestre  ayant  invité  les  exécuteurs  testamentaires  a 
»  Y  envoyer  port-franc,  par  le  coche ,  la  ville  en  avait 
»  été  privée  par  l'économie  de  son  magistrat  ! ....»  Cette 


(  7*  ) 
calomnie  est  de  M.  Flamand:   permettez-moi,  MM., 
d^entrer  seulement  dans  quelques  détails  de  fait. 

»  Notre  célèbre  compatriote  mourut  le  24  Septem- 
bre i8i5.  M.  Flamand,  tant  en  son  nom,  qu'au  nom 
de  ses  co-héritiers ,  adressa  une  requête  a  M.  le  con- 
seiller-d'état, préfet  de  police  du  département  de  la 
Seine,  pour  être  autorisé  à  faire  extraire  le  cœur  de 
Grétrj,  dont  il  désirait  faire  hommage  à  la  ville  de 
Liège,  sa  patrie.  L'autorisation  fut  accordée  j  il  fut 
procédé  a  ladite  opération  le  23  Novembre  i8id.  Le 
procès-verbal  d'extraction  porte ,  que  le  cœur  a  été 
laissé  en  la  possession  d'un  Sr.  Souberbielle ,  chirur-> 
gien ,  chargé  de  V  ambaumer ,  pour  être  remis  au  Sr.  Fla- 
mand, à  ï effet  d' en  effectuer  V envoi  à  la  ville  de  Liège. 
C'est  M.  Flamand  qui  nous  fournit  ces  renseignemens 
dans  les  notes  de  son  poëme ,  intitulé  :  l'Ermitage  de 
J.  J.  Rousseau  et  de  Grétrj,  pag.  268  et  269. 

»  Le  28  Novembre,  M.  Flamand  écrivit  la  lettre  sui- 
vante a  M.  le  maire  de  Liège. 

»  Monsieur:  je  viens  de  faire  faire  avec  toute  la  dé- 
)>  cence  et  toutes  les  formalités  d'usage,  l'extraction  du 
»  cœur  de  feu  notre  oncle,  du  célèbre  Grétry,  qui  aima 
»  toujours  si  ardemment  ses  chers  compatriotes ,  ses  amis 
)>  et  sa  famille,  pour  en  faire  hommage  à  la  ville  de 
»  Liège,  sa  patrie, 

»  J'ai  profité  du  moment  où  nous  faisions  ériger  un 
»  monument  a  sa  mémoire  pour  le  faire  exhumer,  et 
»  pour  accomplir  le  vœu  qu'il  avait  manifesté  de  son 
»  vivant  (relativement  a  son  cœur)  :  j'ai  été  assez  heureux 
»  pour  réussir:  nous  en  faisons  hommage  à  votre  ville. 

»  J'ai  eu  l'honneur  d'en  instruire  M.  le  préfet  de  voire 
»  département  j  je  l'ai  prié  de  me  faire  savoir  comment 
»  la  ville  prendra  possession  de  ce  précieux  dépôt  !  '\ 


(  *3  ) 

M.  le  maire  de  Liège  fit  a  M.  Flamand  une  re'ponse , 
en  date  du  5  Janvier  i8i4,  dont  voici  quelques  passages: 

»  Monsieur  :  j'ai  sous  les  yeux  la  lettre  que  vous  avez 
»  écrite  a  M.  Bailly,  mon  prédécesseur,  le  28  Novem- 
»  bre  dernier ,  et  qui  lui  annonce  que  les  volontés  de 
»  M.  Grétry  ont  été  de  faire  hommage  de  son  cœur  a 
»  la  ville  de  Liège ,  sa  patrie.  L'honorable   dépôt  que 
»  vous  annoncez  être  à  ma  disposition ,    appartenant 
)>  aux  concitoyens  de  cet  homme  illustre ,    sera  placé 
»  sous  les  yeux  de  tous,    à  l'hôtel-de-ville,    dans  le 
»  piédestal  de  son  buste  en  marbre,  dont  M.  Ruxthiel 
»  a  fait  hommage  a  la  ville ,  chef-lieu  du  département , 
»  qui  l'a  également  vu  naître.  11  y  sera  incrusté  dans 
»  une   urne  funéraire,   et  nous  lui  appliquerons  l'in- 
»  scription  faite  pour  un  autre  grand  homme  qui  reçut, 
»  a  Ferney ,    Grétry ,  a  son  retour  de  l'Italie ,  et  en 
»  homme  de  génie,  sut  deviner  celui  que  le  jeune  voya- 
»  geur  développerait  un  jour  : 

»  Son  génie  est  partout,  mais  son  cœur  n'est  qu'ici.  .  .  » 

»  C'est  cette  réponse  que  M.  Flamand  a  qualifiée  d'in- 
convenante dans  tous  les  journaux  de  la  France  et  de  la 
Belgique,  et  qui  ne  lui  a  point  paru  assez  solennelle 
apparemment ,  parce  qu'on  y  parle  trop  peu  de  lui.  Mais 
on  ne  connaissait  pas  alors  M.  Flamand!  mais  on  sup- 
posait,  d'après  ses  propres  paroles,  qu'il  ne  faisait 
qu'exécuter  le  mandat  de  ses  frètes  et  sœurs  et  les 
ordres  de  l'autorité  !  mais  il  était  plus  naturel  de  son- 
ger alors  a  l'illustre  défunt  qu'a  M.  Flamand!  Il  nous 
semble  d'ailleurs,  que  si  la  ville  de  Liège  avait  réelle- 
ment des  droits  sur  le  cœur  de  Grétry,  elle  n'a  point 
dû  les  perdre  ,  parce  que  l'auteur ,  ou  l'écrivain  de 
ladite  lettre ,  aurait  manqué  aux  convenances  envers 
M.    Flamand. 


(7*) 
»  Sans  moi ,  dit  M.  Flamand  ,  le  cœur  de  Grétry 
n  existerait  plus!  Sans  nous,  MM.,  il  ne  l'a  lirait  ja- 
mais en  seulement  en  sa  possession  !  ses  co-he'ritiers  n'y 
auraient  jamais  consenti  ;  et  M.  le  pre'fet  de  police  ne 
l'aurait  point  permis.  C'est  a  vous  et  a  votre  nom  qu'il 
le  doit!  M.  Flamand,  qui  croit  apparemment  n'avoir 
plus  rien  à  craindre  ni  a  espérer  de  nous,  veut  se  pré- 
valoir de  ce  que  nous  ne  sommes  plus  Français ,  pour 
s'approprier  le  cœur  de  Grétry  !  Mais  il  fait  injure  aux 
magistrats  de  son  pays  (1),  en  supposant  qu'ils  puissent 
cesser  d'être  justes  envers  des  étrangers,  au  point  de 
les  priver  de  ce  qui  leur  appartient.  Nous  ne  sommes 
pas  sans  doute  hors  du  droit  des  gens!  Et  M.  Flamand, 
qui  fait  des  poèmes ,  est-il  tellement  étranger  lui-même 
à  la  république  des  lettres,  qu'il  ignore,  qu'elle  ne  re- 
connaît pas  ces  barrières  que  la  politique  et  l'intérêt 
élèvent  parmi  les  hommes,  et  que  c'est  un  de  ses  plus 
beaux  privilèges?  M.  Flamand,  l'héritier  de  Grétry, 
n'était-il  pas  du  moins  obligé  de  lire  avec  quelque  at- 
tention les  Mémoires  de  ce  grand  homme,  dont  une 
grande  partie  est  consacrée  aux  souvenirs  de  son  pays? 
11  y  aurait  appris  que  Grétry  ne  l'avait  point  quitté , 
dès  V enfance,  mais  a  l'âge  de  19  ans,  lorqu'il  était 
déjà  bon  musicien,  pour  aller  se  perfectionner  à  Rome, 
dans  un  établissement  liégeois  ,  où  il  passa  cinq  années, 
aux  dépens  de  la  ville!  Il  y  aurait  appris  que  sans  le 
patriotisme  des  Liégeois ,  Grétry  n'eût  jamais  existé 
comme  artiste.  Voila  ce  qu'ont  fait  pour  Grétry  ,  et 
pour  M.  Flamand  lui-même,  qui  jouit  aujourd'hui  d'une 
partie  de  sa  fortune ,  ces  Liégeois ,  qu'il  représente 
comme  si  peu  capables  d' apprécier  un  grand  artiste,  et 

(i)  En  effet,    nous  apprenons   que  la   ville   de   Liège  vient  de 
gagner  son  procès  contre  le  Sr.  Flamand. 


(  f*  ) 
auxquels  Grètry  n'appartient,  dit-il,  que  par  le  hasard 
de  la  naissance  !  " 

Le  discours  de  M.  le  comte  de  Mercy-d'Argenteau , 
président  de  la  société,  n'a  pas  le  moins  contribué  a  la 
solennité  de  la  séance.  Il  est  difficile  de  dire  autant  de 
bonnes  choses  en  aussi  peu  de  mots  et  dans  un  style 
aussi  mesuré.  Nous  en  conseillons  la  lecture  a  tous  les 
présidens  de  sociétés  littéraires. 


Programme  des  questions  et  des  prix  mis  au  concours  par 
la  Société  d'Émulation  de  Liège,  pour  1823 et  1824. 

La  comité  de  littérature  propose  : 

i°.  Une  branche  de  laurier  en  argent  de  la  valeur  de 
100  francs,  pour  une  pièce  de  poésie  de  100  à  i5o  vers 
français,  dont  le  sujet  est  laissé  au  choix  des  concurrens. 

2°.  Une  médaille  en  or  de  la  valeur  de  800  francs , 
pour  VÊloge  académique  de  Grétry. 

5°.  Une  médaille  en  or  de  100  francs  sur  cette  ques- 
tion :  Quelles  sont  les  variations  qu'ont  éprouvées  le 
commerce  et  l'industrie  dans  la  province  de  Liège  ,  de- 
puis Velhruck  ? 

La  société  désire  que  la  réponse  à  cette  question  soit 
précédée  d'un  coup-d'œil  général  sur  l'état  du  commerce 
et  de  l'industrie  avant  Velbruck. 

4°.  Une  médaille  en  or  de  200  francs,  pour  un  Dis- 
cours sur  la  vie  et  les  ouvrages  des  écrivains  Liégeois. 

5°.  Une  branche  de  laurier  en  argent  de  la  valeur  de 
200  francs ,  pour  un  Discours  sur  la  vie  et  les  ouvrages 
des  Liégeois  qui  se  sont  distingués  dans  les  arts  du  dessin. 

Les  réponses  aux  trois  premières  questions  devront 
être  remises  au  Secrétariat  de  la  Société,  place  de 
V Université ,  à  Liège,  avant  le  1er  Octobre  1825  ;  et  les 
réponses  aux  deux  dernières,  avant  le  ier  0<  tobrs  io24, 


(76) 

Le  comité  des  sciences  physiques  et  mathématiques  a 
mis  au  concours  la  question  suivante  :  Parmi  les  Phleg- 
masies  locales  ou  générales  des  tissus,  en  existe-t-il  qui 
exigent  un  traitement  autre  que  celui  des  antiphlogis- 
tiques  ? 

Le  prix  sera  une  médaille  en  or  delà  valeur  de  100  fr. 
Le  comité  des  arts  et  manufactures  propose  un  prix 
de  100  francs,  pour  un  chapeau  de  paille  indigène  le 
plus  approchant  possible  des  chapeaux  de  paille  d'Italie. 
Le  chapeau  doit  être  accompagné  de  certificats  de  l'au- 
torité locale ,  qui  constatent  qu'il  a  été  fabriqué  en  Bel- 
gique, avec  de  la  paille  indigène. 

Le  comité  d'agriculture  et  d'économie  rurale  maintient 
au  concours  la  question  qu'il  avait  proposée  l'année 
précédente,  sur  le  mode  d'assolement  le  plus  favorable 
dans  la  culture  d'une  ferme,  i°  en  Hesbaje;  2°  en  Con- 
droz  ;  et  sur  la  meilleure  proportion  des  prairies  artifi- 
cielles et  naturelles  avec  les  champs  ensemencés  en  cé- 
réales t  tant  sous  le  rapport  du  profit  immédiat  *  que 
sous  le  rapport  de  V amélioration  du  terrain. 

Le  prix  sera  une  médaille  en  or  de  la  valeur  de  îoo  fr. 
Les  réponses  a  ces  trois  dernières  questions ,  écrites 
en  français,  devront  être  adressées  au  Secrétariat  de  la 
Société,  avant  le  ier  Octobre  1825. 


SOCIÉTÉ   ROYALE  DES   BEAUX-ARTS   DE   BRUXELLES. 


Concours   et  Salon  de  1824. 

La  Commission  administrative  de  la  Société  a  résolu , 
dans  sa  séance  du  18  Février  dernier,  de  faire  un  nouvel 
essai  pour  le  concours  des  tableaux  d'Histoire  et  de  sui- 


(11) 

vre ,  tant  pour  ce  genre  que  pour  la  Conversation ,  le 
Paysage ,  la  Sculpture  et  le  Dessin ,  le  système  déjà  offert 
par  le  programme  de  1821,  en  laissant  aux  artistes  dis- 
posés a  concourir,  la  liberté  de  choisir  dans  chacune  de 
ces  classes  le  sujet  qui  leur  paraîtra  le  plus  convenable, 
sous  les  conditions  suivantes: 

Peinture. 

I.  Histoire.  —  A.  Le  tableau  devra  comprendre  au 
moins  trois  figures ,  de  grandeur  naturelle  et  a  mi-corps. 
Ses  dimensions  ne  pourront  dépasser  une  aune  45  pou- 
ces des  Pays-Bas,  sur  une  aune  i5  pouces.  Il  est  libre 
au  concurrent  de  prendre  la  plus  grande  de  ces  dimen- 
sions ,  soit  dans  la  hauteur ,  soit  dans  la  largeur  du  ta- 
bleau ,  sans  le  cadre. 

Le  prix  sera  une  médaille  et  800  florins. 

B.  Un  autre  prix  de  800  florins  sera  décerné  avec 
une  médaille  a  l'auteur  du  meilleur  tableau  de  concours 
pour  l'Histoire,  dont  les  figures,  au  nombre  de  trois  au 
moins ,  seront  en  pied ,  demi-nature  ou  même  moins , 
mais  pas  en-dessous  de  65  pouces. 

Les  dimensions  du  tableau  comme  a  l'article  précédent. 

II.  Conversation.  —  Les  figures  auront  au  moins  25 
pouces  de  hauteur  :  la  grandeur  du  tableau  est  fixée  h 
48  pouces  sur  65.  Le  prix  est  une  médaille  et  5oo  florins. 

III.  Paysage.  —  Les  dimensions  du  tableau  sont 
fixées  a  65  pouces  sur  81.  Il  est  de  rigueur  que  la  com- 
position soit  ornée  de  figures  et  d'animaux.  Le  prix  est 
une  médaille  et  5oo  florins. 

Sculpture. 
Les  artistes  pourront  présenter  au  concours,  soit  un 
groupe.,  soit  une  statue:  l'exécution  doit  en  être  faite 
en  pierre,  en  plâtre  ou  en  terre  cuite.  La  proportion 
en  est  déterminée  à  81  pouces  ou  plus.  Le  prix  est  une 
médaille  et  4oo  florins. 


'(7»:) 

Architecture. 

Un  hospice  pour  les  insensés.  Cet  édifice,  destiné  a 
contenir  1000  malades,  doit  réunir  dans  sa  construc- 
tion tout  ce  qui  peut  favoriser  le  service  sanitaire  dans 
le  meilleur  système  connu.  Il  comprendra  infirmerie, 
pharmacie,  bains,  buanderie,  cuisines,  logemens  pour 
le  directeur,  le  contrôleur,  les  médecins,  chirurgiens , 
ainsi  que  pour  les  garde-malades  et  autres  domesti- 
ques de  l'établissement ,  loges  pour  les  furieux ,  salles 
particulières  pour  les  convalescens  ;  en  un  mot  tout 
ce  qui  doit  se  rattacher  a  une  maison  de  ce  genre. 

Il  sera  présenté  sur  un  terrain  isolé,  de  manière  a 
pouvoir  y  annexer  de  vastes  jardins  qui  ne  feront  ce- 
pendant pas  partie  du  plan. 

Ce  bâtiment ,  supposé  a  portée  d'une  grande  ville , 
doit  joindre  a  la  commodité  de  sa  distribution,  une  fa- 
çade principale  d'un  style  élégant  et  pur. 

La  surface  du  terrain  est  laissée  au  choix  de  l'artiste. 

Le  plan  général  sera  établi  sur  une  échelle  telle  que 
le  dessin  avec  son  châssis  ne  puisse  dépasser  en  super- 
ficie une  aune  quarrée.  L'élévation  principale,  la  coupe 
et  les  autres  détails  seront  rapportés  sur  une  échelle 
d'un  pour  cent  au  moins. 

On  rejettera  toute  copie  ainsi  que  tout  ce  qui  pour 
les  parties  essentielles  aurait  été  puisé  dans  les  bâtimens 
du  même  genre  ou  dans  les  ouvrages  connus.  Les  juges 
seront  invités  a  y  apporter  une  attention  particulière. 

Le  prix  est  une  médaille  et  une  gratification  de  200  flor. 

Dessin. 

Une  composition,  soit  au  crayon  noir,  soit  en  crayon 
de  deux  couleurs,  dont  les  dimensions  seront  les  mêmes 
qu'au  tableau  de  conversation. 

Le  prix  est  une  médaille  et  une  gratification  de  200  flor. 


(:9> 

Gravure. 
11  sera  accordé  une  médaille  pour  le  meilleur  ouvrage 
présenté  au  concours  dans  les  quatre  genres  suivans, 
savoir:  gravure  au  burin,  a  l'eau-forte,  en  pierre  fine 
et  en  médaille. 

Conditions  du  Concours. 

1.  Les  tableaux,  statues,  plans,  dessins  et  gravures 
destinés  pour  le  concours  et  l'exposition,  devront  être 
adressés  francs  de  port,  au  Musée  de  Bruxelles,  le 
5o  Septembre  i324,  au  plus  tard. 

2.  Les  ouvrages  qui  auraient  déjà  paru  dans  d'autres 
expositions  publiques,  ne  seront  pas  admis  a  concourir. 

Un  billet  constatant  le  nom  du  concurrent,  renfer- 
mera également  une  attestation  de  quatre  témoins  con- 
nus qui  certifieront  que  les  tableaux,  sculptures,  dessins 
dont  le  sujet  est  laissé  au  choix  de  l'artiste,  sont  sortis 
de  ses  mains  et  ont  été  exécutés  pendant  l'intervalle 
qui  s'est  écoulé  entre  la  publication  du  programme  et 
l'époque  du  concours. 

Pour  les  quatre  objets  de  gravure,  il  suffira  d'une 
attestation  semblable  qui  prouve  que  l'ouvrage  présenté 
a  été  terminé  pendant  l'époque  qui  vient  d'être  indi- 
quée, et  non  encore  livré  au  commerce. 

5.  Les  artistes  nés  ou  naturalisés  dans  le  Royaume 
sont  seuls  admis  au  concours:  ceux  de  ces  artistes  qui 
continuent  leurs  études  en  France  ou  en  Italie ,  sont 
compris  dans  cette  admission. 

4.  On  recevra  a  l'exposition  tout  objet  de  peinture, 
sculpture ,  architecture ,  dessin  et  gravure ,  exécuté  par 
des  artistes  vivans,  quelles  que  soient  leur  patrie  et  leur 
résidence;  il  n'y  aura  d'exception  que  pour  les  ouvra- 
ges qui  pécheraient  contre  l'ordre  public. 

5.  Le  salon  sera  ouvert  dans  la  première  quinzaine 
d'Octobre  1824  ;  sa  clôture  définitive  un  mois  après. 


(8o) 


SOCIETE   PROVINCIALE   DES   ARTS    ET   DES    SCIENCES 

A   UTRECIIT. 


Questions  proposés  au  concours,  pour  être  répondues 
avant  le  1   Octobre  1823.  (Suite.) 

PHILOSOPHIE   ET    MORALE. 

I.  Par  quels  rapports  se  lient  entr' elles  la  philoso- 
phie spéculative  et  les  mathématiques  ?  Quel  secours 
mutuel  se  prêtent  ces  deux  sciences?  Pourquoi  l 'étude 
des  mathématiques  ,  même  en  faisant  abstraction  de  son 
application  à  l'histoire  naturelle ,  est-elle  nécessaire  au 
philosophe;  et  par  quels  moyens  la  philosophie  spécu- 
lative peut-elle  seconder  les  progrès  et  le  perfectionne- 
ment  des  mathématiques  ? 

II.  La  vie  publique  et  sociale  ou  civile  telle  qu'il 
parait  qu'on  la  menait  chez  les  peuples  de  l'antiquité 
et  particulièrement  dans  les  républiques  libres ,  est-elle 
moins  avantageuse  pour  les  mœurs  et  le  bonheur  des 
hommes  que  cette  vie  privée  et  domestique  adoptée  par 
des  peuples  modernes  et  qui  s'y  introduit  de  plus  en  plus  ? 
Dans  quelle  mesure  conviendrait-il  de  favoriser  l'une 
aux  dépens  de  l'autre  ?  Quels  sont  les  moyens  d  empêcher 
qu'on  ne  s'écarte  en  ce  point  d'un  juste  milieu  et  défaire 
prévaloir  ce  qu'il  y  a  dans  les  relations  publiques  de 
la  vie  sociale  et  civile ,  de  préférable  à  celles  de  la 
vie  privée  et  domestique? 

III.  Quelle  est  la  juste  distinction  entre  l'espvit  et  la 

raison?  (1)  On  désire  que  la  re'ponse ,  faite  avec  pre'ci- 

* 

(1)  Le  mot  Te/stand,  employé  dans  le  texte,  se  traduit  rigou- 
rc-nsi  ment  par  intelligence  ;iions  le  traduisons  ici  par  le  mot  esprit, 
qui  nous  semble  indiqué  par  la  nature  elle  sens  de  la  question. 


C  «i  ) 

sion,  soit  déduite  d'observations  sur  la  nature  de  l'hom- 
me et  particulièrement  sur  ses  facultés  morales;  et  qu'il 
soit  porté  un  jugement  raisonné  sur  les  différentes  limi- 
tes que  les  philosophes  anciens  et  modernes,  sur-tout 
les  derniers ,  ont  assignées  a  chacune  de  ces  deux  facultés. 
IV.  Qu'est  ce  que  la  vérité  et  quel  en  est  le  signe 
distinctij  (le  critérium)?  On  désire  qu'une  dissertation 
historique  et  un  jugement  raisonné  sur  les  efforts  que 
les  philosophes  anciens  et  modernes  ont  faits  pour  ré- 
soudre cette  question,  démontrent  si  la  philosophie  cri- 
tique et  les  diverses  écoles  de  philosophie  qui  lui  ont 
succédé  jusqu'à  nos  jours,  ont  plus  ou  moins  éclairé 
et  précisé  cette  matière.  On  désire  particulièrement  que 
la  conclusion  soit  une  appréciation  du  degré  de  valeur 
qu'ont  ou  peuvent  avoir  les  connaissances  humaines 
relatives  a  la  vérité. 

LITTÉRATURE   ET    AUTRES    SUJETS. 

I.  Quel  usage ,  adapté  à  nos  mœurs  ,  les  poètes  mo- 
dernes pourraient-ils  faire  de  la  constitution  et  de  l'es- 
prit de  la  tragédie  grecque  pour  enrichir  notre  scène  na- 
tionale ? 

II.  Depuis  long-tems  le  latin  a  cessé  d'être  la  langue 
exclusive  des  savans,  ce  que  lés  uns  approuvent  aussi 
hautement  que  les  autres  le  désaprouvent;  on  demande: 
i°  Quel  avantage  ou  désavantage  a  produit  V emploi 
des  langues  modernes  dans  V enseignement  et  la  culture 
des  lettres  et  des  sciences  ;  2°  y  a-t-il ,  dans  les  lettres 
et  les  sciences ,  des  branches  ou  parties  dans  lesquelles 
l'emploi  des  langues  vulgaires  convient  d'avantage,  et 
d'autres  oit  il  est  préférable  de  conserver  la  langue  la- 
tine ;  s'il  en  était  ainsi ,  on  particularisera  ces  bran- 
ches, et  on  indiquera  les  rai  sons  des  différences  proposées. 

II me.  Cahier.  6 


(82    ) 

ACTA   LITERARIA. 

I.  Veteris  Thessaliœ  quœ  fuit  conâitio  cum  physica 
tum  civilis  ?  Quœ  fuit  inprimîs  tyrannorum  Thessalo- 
rum  et  ratio  interse  et  cum  exteris  necessitudo ,  quamqué 
in  universce  Grceciœ  historiam  vim  habuerunt  ? 

II.  Quamnam  vim  Epicuri  philosophia  habuit  in 
mores  et  ipsam  adeo  Rempublicam  Romanorum  ? 

III.  Critica  instituatur  disquisitio  defide  cum  Poly- 
bii  tum  Livii  in  gravioribus  bellorum  Punicorum  rébus 
enarrandis. 

IV.  Memoria  Ludovici  Gaspari  Valkenaerii. 


Questions  à  répondre  avant  le  1  Octobre  1824. 

PHYSIQUE. 

I.  Quelle  influence  ont  ou  peuvent  avoir  les  canons 
de  fer  et  le  fer  employé  dans  la  construction  d'un  bâ- 
timent de  mer  y  sur  le  cours  du  bâtiment,  sur  les  erreurs 
d'indication  et  les  soudages,  observés  et  déterminés  à 
bord  au  moyen  du  compas?  Comment  cette  influence 
peut-elle  être  annullèe  ou  tellement  précisée  qu'on  puisse 
en  dégager  les  observations  ou  vérifications  avec  une 
exactitude  satisfaisante. 

On  de'sire  qu'on  donne  un  jugement  raisonne  sur  les 
instructions  et  les  règles  que  Flinders,  (appendix  n°n 
a  son  voyage  en  Australie)  Sabine,  (transactions  phi- 
losopbiques ,  partie  iro.  1819)  Barlow ,  (an  essay  on 
magnetic  attractions,  by  Peter  Barlow  1820)  et  Lecount, 
(a  description  of  tbe  changeable  magnetic  properties 
possessedby  ail  iron  bodies,  by  D.  Lecount,  1820)  ont 
proposées  a  cet  effet,  ou  de'duites  de  leurs  observations. 

II.  Quelle  influence  ont  ou  peuvent  avoir  les  canons 
de  fer  et  le  fer  employés  dans  la  construction  d'un  bâ- 
timent de  mer  sur  la  marche  [les  mouvemens  ou  oscil- 


(  8J  ) 

lulions)  dune  pendule  de  mer  placée  à  bord  du  bâtiment  '? 
Quels  sont  les  meilleurs  moyens  pour  annuller  cette  in- 
fluence ou  pour  la  préciser  de  telle  manière  que ,  dans 
le  calcul  du  mouvement  de  la  pendule ,  on  puisse  la 
déterminer  comme  quantité  connue. 

L'auteur  de  la  réponse  a  cette  question  ajoutera  \\n 
grand  mérite  a  son  travail  s'il  peut  l'appuyer  d'expé- 
riences et  d'observations  satisfaisantes  et  bien  appropriées 
au  sujet,  faites  par  lui-même. 

ACTA   LITERARIA. 

I.  Critica  disquisitio  de  Theramene ,  Agnonis  filio  ; 
t/uœ  diversœ  veterumde  ejus  moribus  rebusque  in  repu- 
blicagestis  sententiœ  tradantur,  explicentur ,  dijudicentur. 

II.  Collectis  diligenter ,  quœ  veterum  pythagoreorum 
nomine  Jeruntur,  scriptis  ,  fragmentisque ,  critica  insti- 
tuatur  de  eorum  auctoritate  disquisitio. 


SOCIÉTÉ    D'AGRICULTURE  ET  DE  BOTANIQUE  DE  GAND. 


JDans  la  matinée  du  12  Mai  dernier,  des  commissions 
de  la  Société  royale  d'Agriculture  et  de  Botanique  de 
Gand ,  se  sont  rendues  dans  l'enceinte  de  la  foire , 
tenue  près  de  Gand  au  faubourg  d'Anvers ,  et  ont  dé- 
cerné les  deux  prix  que  la  société  y  fait  distribuer 
annuellement  pour  récompenser  et  encourager,  dans  lu 
Province,  l'amélioration  de  la  race  des  chevaux  et  de 
relie  des  bêtes  a  cornes. 

La  montre  d'or,  prix  du  concours  pour  le  meilleur 
cheval  de  labour  et  de  trait,  a  été  obtenue  par  Jacques 
Leenesone,  cultivateur  a  Wondelgbein  près  de  Gand  ; 
il  avait  déjà  mérité  la  même  distinction  à  la  foire  Je 
l'année  dernière. 


(84) 

Liivin  MoeiiSj  de  la  même  commune,  a  reçu  l'autre 
montre  d'or  5  ce  cultivateur,  déjà  mentionné  honora- 
blement au  dernier  concours,  avait  encore  amené  a  la 
foire  plusieurs  vaches  d'une  belle  perfection  5  l'une  de 
celles  qu'il  présenta  cette  fois,  réunit  la  presqu'una- 
jïimiîé  des  suffrages. 

La  Société  a  fait  cette  année  l'essai  d'une  inno- 
vation 5  elle  a  laissé  aux  deux  commissions  la  fa- 
culté de  s'adjoindre  trois  membres  sur  les  lieux ,  et 
choisis  parmi  les  spectateurs 5  par  la,  le  public  s'est 
trouvé,  en  quelque  sorte,  admis  a  prendre  part  aux 
jugemens;  les  commissions  ont  vu  dans  l'assentiment 
des  nombreux  amateurs  et  curieux  qui  les  entouraient, 
de  grands  motifs  pour  recommander  la  continuation  de 
cette  mesure. 

Du  reste,  elles  certifient  dans  leur  procès-verbal  que 
les  deux  concours,  et  la  foire  en  général,  ont  fourni 
des  preuves  remarquables  des  progrès  de  l'émulation 
que  la  Société  a  en  vue  d'exciter  et  de  propager. 


VARIETES 


JLa  régence  de  la  ville  de  Harlem  vient  d'arrêter  que  la 
quatrième  fête  séculaire  pour  l'invention  de  l'imprimerie, 
serait  célébrée  dans  cette  ville,  le  10  Juillet  prochain  ; 
h  l'occasion  de  cette  fête,  on  fera  l'inauguration  solen- 
nelle du  monument  élevé  au  bois  de  Harlem,  en  l'hon- 
neur de  Laurent  Koster,  qui  le  premier  imprima  avec 
des  lettres  mobiles.  Ce  fait  est  contesté  par  plusieurs 
ilvains;  niais  la  plupart  ont  traité  ce  sujet  avec  beau- 
coup trop  de  légèreté.  M.  De  Koning,  dans  une  disser- 
tation très-judicieuse,  a  approfondi  la  matière  non-seule- 


(85  ) 

ment  eu  typographe  mais  en  praticien ,  en  ouvrier  même , 
si  Ton  peut  s'exprimer  ainsi;  car  il  faut  être  en  quelque 
sorte  du  métier  ou  connaître  parfaitement  la  partie  mé- 
canique de  cet  art  pour  décider  sur  les  différens  points 
en  contestation.  Nous  nous  proposons  de  donner  dans 
un  des  prochains  cahiers,  l'analyse  de  cette  intéressante 
dissertation. 

Des  Réputations  de  toutes  les  académies  et  sociétés 
du  royaume  se  rendront  a  cette  fête.  Les  imprimeurs  et 
libraires  de  Philadelphie  se  sont  réunis  dernièrement  a 
l'effet  de  nommer  quelques  députés,  chargés  d'y  assis- 
ter et  de  porter  un  tribut  d'hommage,  de  la  part  des 
Américains ,  au  pied  du  monument  qui  doit  éterniser 
la  mémoire  d'un  homme  a  qui  les  sciences  et  les  lettres 
doivent  en  partie  leurs  progrès  et  leur  perfection. 

Le  discours  d'usage  sera  fait  par  le  célèbre  profes- 
seur Van  der   Palm. 

—  L^académie  de  dessin  a  La  Haye  a  résolu  d'ou- 
vrir un  salon  d'exposition  le  i5  Septembre  prochain; 
la  clôture  s'en  fera  le  i5  Octobre  suivant. 

Tous  les  objets  d'art  devront  être  adressés ,  franc  de 
port,  avant  le  ier  Septembre,  à  la  direction  générale  de 

l'académie,  pour  être  remis  chez   M.  Hendriks  (in  den 

nieuwen  doelen)  a  La  Haye. 

Huit  jours  après  la  clôture  du  salon  on  renverra  toutes 

les  pièces ,  franc  de  port,  aux  propriétaires  respectifs; 

en  conséquence  tous  les  artistes  et  amateurs  demeurant 

hors  des  provinces  sud  et  nord  Hollande ,  sont  invite's 

a   faire   connaître    de  quelle  manière  ils  désirent  que 

leurs  envois  leur  soient  retournés. 

—  Il  est  arrivé  a  la  Société  royale  d'Agriculture  et  de 

Botanique  de  Gand,  par  la  voie  de  la  Rochelle,  une 

boîte  de  semences  recueillies  sur  l'Himalaya,  dans  les 

possessions  Britanniques ,  aux  Indes. 


(  86  ) 

Cet  envoi  de  semences  n'est  qu'une  continuation  de 
ceux  dont  nous  sommes  déjà  redevables  a  M.  Broeager, 
membre  correspondant  de  la  société,  a  Hoogly,  au 
Bengale.  Nous  avons  encore  reçu  de  ce  cultivateur  des 
notions  précieuses  sur  les  précautions  a  prendre  pour  la 
conservation  des  semences  et  végétaux  envoyés  a  de 
longues  distances. 

—  M.  De  Cloet,  de  Bruxelles,  nous  a  fait  remettre 
pour  l'herbier  de  la  société,  un  échantillon  du  Dian- 
thus  Cœsius,  découvert  par  lui,  en  1821,  sur  les  ro- 
chers incultes  de  la  commune  de  Waulsort,  arrondis- 
sement de  Dinant.  Ce  Dianthus ,  qui  est  celui  du 
Dauphiné,  paraît  s'être  dérobé  jusqu'ici  aux  recher- 
ches des  botanographes  de  ce  Royaume. 

—  L'installation  de  Mr.  C.  G.  C.  Reinwardt,  comme 
professeur  des  sciences  physiques  et  mathématiques  a 
l'université  de  Leyde,  a  eu  lieu  le  5  Mai  dernier.  Le 
discours  qu'il  a  prononcé  dans  cette  solennité  :  sur  les 
progrès  dont  l'histoire-naturelle  est  redevable  aux  re- 
cherches faites  dans  Vlnde ,  n'honore  pas  moins  son  talent 
que  l'hommage  rendu  a  Brugmans ,  auquel  il  succède, 
ne  fait  l'éloge  de  son  cœur.  Quelques  vers  latins,  ana- 
logues a  la  circonstance ,  ont  été  lus  par  M.  le  profes- 
seur Siegenbeek,  recteur  académique. 

M.  Reinwardt  vient  d'arriver,  très-récemment,  de 
Java,  où  il  a  recueilli  des  objets  d'histoire-naturelle  et 
de  botanique  du  plus  grand  intérêt.  Pendant  son  séjour 
aux  Indes  ,  il  a  envoyé  a  la  société  de  botanique  de  Gand, 
dont  il  est  membre ,  plusieurs  espèces  de  semences  qui 
ont  déjà  donné  quelques  plantes  au  jardin  de  l'uni- 
versité de  cette  ville. 

La  société  reconnaissante  des  précieux  envois  de  ce 
savant  naturaliste,  en  a  consacré  le  souvenir,  en  lui 


(87  ) 
offrant  une  médaille  d'honneur,  dans  sa  séance  du  6 
Février  dernier. 

—  La  société  de  littérature  hébraïque  a  Amsterdam, 
a  célébré,  en  Avril  dernier,  le  huitième  anniversaire 
de  son  institution.  Mr.  S.  J.  Muller,  président,  fonda- 
teur de  la  société,  a  prononcé  un  discours  en  hébreu, 
dans  lequel  il  a  retracé  le  mérite  particulier  de  l'immor- 
telle Anne-Marie  Schuurmans,  et  sa  profonde  connais- 
sance de  la  langue  sacrée.  M.  le  secrétaire  a  lu  ensuite 
le  rapport  des  travaux  pendant  les  deux  années  précé- 
dentes,  et  s'est  étendu  sur  les  progrès  et  l'accroisse- 
ment de  la  société. 

—  On  vient  d'exposer  a  la  galerie  des  antiques  de 
l'académie  deGand,  un  plâtre  moulé  sur  la  belle  Vénus 
de  Milo,  du  musée  de  Paris.  Cette  statue  est  regardée 
comme  supérieure  a  la  Vénus  de  Médicis.  Elle  réunit, 
dit  M.  De  Clame ,  toutes  les  beautés  célestes  de  l'âme 
a  toutes  les  perfections  du  corps  :  une  douce  fierté 
anime  ses  traits  divins,  et  l'on  reconnaît  la  fille  de  Ju- 
piter :  aucune  création  de  la  sculpture  n'a  plus  de  vie, 
et  n'offre  avec  autant  de  vérité  une  imitation  plus  par- 
faite de  la  nature  féminine,  la  plus  élevée  dans  toute 
la  beauté  et  la  pureté  de  ses  formes.  C'est  a  la  libéra- 
lité de  S.  E.  le  Ministre  de  l'Instruction' publique,  que 
nous  devons  cette  acquisition. 

—  S.  M.  le  Roi,  en  visitant  la  ville  de  Gand,  a  été 
extrêmement  satisfaite  des  travaux  du  Palais  de  l'Uni- 
versité, et  en  a  témoigné  sa  satisfaction  a  M.  l'archi- 
tecte Roelandt;  la  grande  salle  circulaire  de  100  pieds 
de  diamètre ,  était  déblayée  de  manière  a  ce  que  S.  M. 
pût  voir  sans  obstacle,  la  belle  coupole  dont  les  cais- 
sons, ornés  de  rosaces,  ainsi  que  l'entablement  de  la  ga- 
lerie, avec  ses  ornemens,  sont  déjà  achevés.  Cette  salle  ne 
le  cédera  ni  en  grandeur,  ni  en  beauté  a  aucune  des 


(  uu  ) 

salles  exécutées  dans  ce  genre.  Le  Roi  a  également  paru 
satisfait  de  l'esquisse  du  bas-relief,  composée  par  M.  Cal- 
loigne,  sculpteur  a  Bruges,  pour  le  fronton  de  la  co- 
lonnade extérieure.  Ce  grand  morceau  de  sculpture, 
représente  le  génie  du  Royaume  des  Pays-bas,  sous  les 
traits  de  Minerve ,  remettant  a  la  ville  les  faisceaux 
académiques.  Les  figures  allégoriques  des  différentes 
facultés  y  sont  représentées  avec  leurs  attributs.  L'Escaut 
et  la  Lys  terminent  les  angles. 

—  M.  Von  Nées  von  Esenbeck,  membre  correspon- 
dant de  la  société  d'agriculture  et  de  botanique  de  Gand , 
publie  en  ce  moment  un  ouvrage  intitulé  :  Bryologia 
Germanica ,  ou,  description  des  mousses  qui  croissent 
en  Allemagne  et  en  Suisse. 

L'ouvrage  paraîtra  en  4  livraisons  5  les  mousses  dé- 
crites seront  figurées  au  naturel  et  coloriées;  il  y  aura 
des  exemplaires  avec  les  figures  en  noir. 

La  première  livraison  de  22  feuilles  et  demie  de  texte, 
grand  in-8°. ,  avec  12  planches,  a  paru  en  Février  der- 
nier, et  sera  bientôt  suivie  de  la  seconde. 

L'ouvrage  se  trouve  chez  M.  Von  Nées  von  Esenbeck, 
professeur  de  botanique  a  Bonn;  ou  chez  Wcbcr,  li- 
braire, dans  la  même  ville. 

—  La  speiété  royale  d'agriculture  et  de  botanique  et 
celle  des  beaux-arts  de  Gand ,  viennent  de  perdre  un  de 
leurs  membres  les  plus  respectables,  dans  la  personne 
de  M.  Lambrechtsen ,  chevalier  du  lion  Belgique  et  pré- 
sident de  l'académie  des  sciences  de  la  Zélande,  décédé 
dernièrement  a  Middclbourg ,  a  l'âge  de  71  ans  ;  adminis- 
trateur habile  et  savant  distingué,  M.  Lambrechtsen, 
dans  le  cours  d'une  longue  carrière,  a  toujours  scu  se 
concilier  l'attachement  de  ses  administrés  et  l'estime  de 
ses  collègues. 


MESSAGER 

DES  SCIENCES  ET  DES  ARTS. 


IIIme.  Livraison  —  Juillet  1823. 


PORTRAIT    PEINT     PAR    JEAN    VAN    EYCK, 
Conservé  à  la  galerie  impériale  du  Belvédère  à  Vienne. 


Figure  Troisième. 

Lues  tableaux  de  Van  Eyck  sont  si  rares,  sur-tout  ceux 
dont  l'originalité  est  prouvée  par  les  inscriptions  que 
ce  peintre  avait  l'usage  de  mettre  sur  les  bordures  dans 
lesquelles  il  enchâssait  ses  panneaux,  qu'il  est  du  plus 
grand  intérêt  pour  l'histoire  de  l'art,  de  faire  connaître 
ses  différentes  productions  et  les  inscriptions  qui  les 
accompagnent.  Jusqu'ici  il  n'est  parvenu  a  notre  con- 
naissance que  six  tableaux  qui  portent  cette  marque 
évidente  qu'ils  sont  sortis  du  pinceau  de  ce  célèbre 
peintre. 

Le  plus  important  est  la  grande  composition  placée 
dans  l'église  de  S.  Bavon  a  Gand,  dont  l'inscription ,  dé- 
truite par  les  iconoclastes  dans  la  soirée  du  21  Aoûti566, 
nous  a  été  conservée  dans  un  manuscrit  de  ce  temsj  elle 
est  encore  inédite  et  nous  la  ferons  connaître  dans  un 
des  prochains  numéros  du  Messager,  en  y  joignant  la 
gravure  de  cette  vaste  composition. 

L'académie  de  Bruges  en  possède  trois  :  une  tête  de 
IIIme.  livraison.  7 


(90  ) 
Christ,  une  tête  de  femme  et  un  grand  tableau  repré- 
sentant la  Vierge  avec  l'enfant  Jésus,  accompagnée  de 
trois  figures  ;  le  cinquième  est  cité  dans  la  dernière 
édition  de  Van  Mander  ;  nous  donnerons  aussi  suc- 
cessivement les  traits  de  ces  tableaux. 

Le  sixième  fait  partie  de  la  galerie  du  Belvédère  a 
Vienne;  M.  Perger,  artiste  distingué,  habitant  la  capi- 
tale de  l'Autriche,  a  eu  la  complaisance  d'en  faire  le 
dessin,  d'après  le  tableau  même,  pour  la  Société  royale 
des  Beaux-Arts.  Il  représente  le  portrait  de  Jean  de 
Leeuw  (Lion)  né  le  jour  de  Ste  Ursule  l'année  i4oi , 
et  peint  par  Jean  van  Eyck  en  ii36,  ce  que  nous 
apprend  l'inscription  suivante ,  placée  sur  le  cadre  du 
tableau  : 

JAN   DE  (l)  OP    SANT    ORSEI.EN  DACH. 

DAT    CLAR   EERST    MET   OGHEN  SACH.  (l4oi) 

GHECONTERFEIT    NU  HEEFT    MI    JAN. 

VAN  EYCK  WEL    BLYCT  WANNEER  BEGAN.  (l456.) 

M.  Perger  a  copié  ce  tableau  très-exactement;  l'in- 
scription flamande  est  peinte  en  jaune  relevée  d'une 
ombre  noire  sur  un  fond  anciennement  vert  clair;  les 
moulures  du  cadre  sont  noires  ainsi  que  le  fond  du 
tableau  ;  le  portrait  est  bien  conservé  ;  la  carnation 
n'est  pas  aussi  jaune  que  celle  qu'on  remarque  dans 
les  anciens  portraits;  l'exécution  est  faite  avec  un  soin 
extrême  ;  les  poils  de  la  barbe  sur-tout  sont  peints 
d'une  manière  très-délicate.  Le  bonnet  se  distingue  a 
peine  du  fond  ;  l'œil  le  plus  exercé  ne  l'apperçoit  que 
difficilement. 

Nous  nous  proposons  de  donner  de  tems  en  tems  des 
notices  sur  plusieurs  peintres   du  XVme  siècle,    dont 

(i)  Ici  se  trouve  figuré  un  Lion,  en  flamand  Leeuw,  pour  indi- 
quer le  nom  de  la  personne  représentée  daus  le  tableau. 


(9i  ) 
quelques-uns  ont  e'té  forme's  a  l'école  d'Hubert  van 
Eyck  pendant  le  séjour  qu'il  fit  à  Gand,  où  il  est  mort 
en  i426.  Malheureusement,  les  productions  de  la  plu- 
part de  ces  peintres  ont  e'té  détruites  pendant  les  trou- 
bles du  XVIme  siècle,  époque  où  les  églises  de  Gand 
ont  horriblement  souffert;  les  mémoires  du  teins  nous 
rapportent,  avec  le  plus  grand  détail ,  que  dès  le  19  Août 
1 566 ,  les  autels  furent  brisés  par  les  iconoclastes  dans 
l'église  des  Augustins;  que  trois  jours  après  ils  se  réu- 
nirent en  comité  pour  préparer  une  dévastation  générale 
de  tout  ce  qui  représentait  des  sujets  religieux  vénérés 
par  les  catholiques  ;  ils  se  réunirent  en  assemblée  dans 
l'église  des  Templiers,  après  avoir  lacéré,  brûlé  et  brisé 
les  tableaux,  statues  et  vitraux  peints  qui  ornaient  ce 
temple;  se  divisèrent  ensuite  par  bande,  parcoururent 
la  ville,  saccagèrent  les  églises,  de  manière  a  ne  nous 
laisser  qu'un  triste  souvenir  des  anciennes  peintures  et 
sculptures  de  notre  école  du  XV,ue  siècle  et  des  nom- 
breux monumens  d'une  époque  encore  antérieure  dont 
elles  étaient  ornées.  Dans  ces  tems  orageux,  on  tâcha 
avant  tout  de  mettre  en  sûreté  les  châsses  et  les  reli- 
quaires, montés  en  or,  en  argent  ou  garnis  de  pier- 
res précieuses;  mais  si  les  chefs-d'œuvre  des  frères 
Van  Eyck,  de  Frans  Floris  et  de  plusieurs  autres 
maîtres  échappèrent  a  ces  ravages,  nous  en  sommes 
redevables  au  zèle  et  a  l'amour  des  arts  d'un  peintre 
recommandable,  Lucas  de  Heere,  Gantois,  qui  con- 
tribua beaucoup  a  la  conservation  de  ces  tableaux  , 
en  les  mettant  en  sûreté  et  a  l'abri  du  Vandalisme; 
quelques-uns  trouvèrent  asile  dans  sa  propre  maison, 
que  par  ses  talens  et  sa  conduite  modérée  il  sut  faire 
respecter  par  la  faction  turbulente  qui  s'était  emparée 
du  pouvoir  de  la  ville. 


(  9*  ) 


VITA   DANIELIS   WYTTENBACHII, 


JLa  vie  de  Wyttenbach,  par  M.  Mahne,  est  un  mo- 
nument honorable ,  élevé  par  une  main  habile  a  la 
gloire  de  la  littérature  ancienne ,  et  les  détails  pré- 
cieux d'une  biographie  si  complète  consoleront  facile- 
ment l'ombre  du  célèbre  professeur,  de  l'injurieux  oubli 
des  rédacteurs  de  la  biographie  universelle  des  contem- 
porains ,  imprimée  a  Bruxelles.  L'ouvrage  que  nous 
annonçons,  ne  sera  pas  seulementutile  aux  élèves  qu'elle 
dirigera  dans  le  choix  et  le  plan  de  leurs  études ,  elle 
le  sera  encore  aux  maîtres  a  qui  elle  offrira  de  bonnes 
méthodes  a  suivre  et  d'excellents  modèles  a  imiter  : 
elle  le  sera  a  toutes  les  classes  de  lecteurs  qu'elle  en- 
flammera de  l'amour  de  la  philosophie  et  des  lettres,  et 
qu'elle  convaincra  de  cette  importante  vérité ,  qu'il  n'y 
a  que  le  travail  et  la  constance  qui,  dans  une  carrière 
quelconque,  puissent  faire  sortir  un  homme  de  la  classe 
ordinaire.  On  y  apprendra  encore  comment  un  bon  pro- 
fesseur s'empare  du  cœur  de  ses  élèves ,  et  comment  a 
son  tour  un  bon  élève  sait  rendre  hommage  a  ses  maîtres. 
Il  serait  trop  long  de  donner  ici  l'analyse  d'un  livre 
de  25o  pages  environ  ;  nous  n'en  citerons  que  les  traits 
les  plus  saillans,  et  sans  nous  arrêter  a  la  généalogie  de 
Wyttenbach,  a  ses  études  premières,  ni  même  au  tems 
qu'il  passa  successivement  dans  les  universités  de  Mar- 
bourg ,  de  Goettingue  et  de  Leyde,  nous  le  prendrons 
a  l'instant  où,  après  avoir  profité  des  leçons  de  Heyne, 
de  Ruhnkenius  et  de  Valckenaer,  il  se  vit,  sur  la  re- 
commandation   de   ces  deux  derniers,   nommé    par  la 


(95  ) 
société  des  Rèmonstrans ,  professeur  de  philosophie  et 
de  littérature  a  Amsterdam.  On  cite  comme  un  mo- 
dèle le  discours  inaugural  qu'il  prononça  a  cette  occa- 
sion: De  conjunctione  philosophiœ  cum  elegantioribus 
literis. 

Pénétre  de  la  lecture  de  tous  les  auteurs  grecs  et  la- 
tins, tant  poètes  que  prosateurs,  Wyttenbach  méditait 
un  ouvrage  qui  devait  faire  l'occupation  d'une  grande 
partie  de  sa  vie,  c'était  une  nouvelle  édition  des  œuvres 
de  Plutarque;  après  quatre  ans  d'un  travail  consacré 
sans  interruption  a  cette  importante  entreprise,  il  réso- 
lut d'aller  consulter  les  principales  bibliothèques  de 
l'Europe  et  se  rendit  d'abord  a  Paris  où,  en  six  mois, 
il  eut  le  tems  de  lire  et  de  confronter  douze  manuscrits 
différens  de  son  auteur.  Une  application  si  soutenue 
dérangea  sa  santé  et  il  ne  dut  sa  guérison  qu'aux  soins 
attentifs  d'un  habile  médecin,  M.  Lorry,  pour  qui  il 
conserva  depuis  la  plus  tendre  amitié,  ainsi  que  pour 
un  grand  nombre  de  savans  français  dont,  en  plusieurs 
endroits  de  ses  ouvrages ,  il  se  plait  a  reconnaître  l'ur- 
banité et  parmi  lesquels  il  cite  particulièrement  Larcher  , 
Sainte  Croix  et  Villoison* 

De  retour  a  Amsterdam ,  il  reprit  les  fonctions  de  sa 
chaire,  mit  en  ordre  les  matériaux  qu'il  avait  rassem- 
blés, retoucha  ce  qu'il  avait  déjà  écrit,  et,  quelque 
tems  après ,  pour  faire  diversion  a  un  travail  trop  con- 
tinu, il  entreprit  sa  Bibliothèque  critique,  dont  il  pu- 
blia les  deux  premières  parties  en  1777. 

Cette  même  année,  porté  sur  une  liste  de  candidats 
pour  la  chaire  de  philosophie  et  de  littérature  a  l'Athé- 
née d'Amsterdam,  il  eut  le  déplaisir  de  se  voir  préférer 
Tollius.  Les  savans  hollandais  en  murmurèrent  et  une 
lettre  de  Heyne  exprime,  a  cet  égard,  les  mêmes  sen- 
timens.  Van  den  Bosch,  Temminck,  Cras  et  ses  autres 


amis,  craignant  que  cette  espèce  de  passe-droit  ne  le 
portât  a  accepter  les  avantages  qu'on  lui  offrait  en  Al- 
lemagne et  dans  la  Suisse  sa  patrie,  se  réunirent  pour 
engager  les  curateurs  de  l'Athénée  a  le  retenir  en  Hol- 
lande, en  le  nommant  professeur  de  philosophie;  ils 
obtinrent  ce  qu'ils  demandaient,  et  le  25  Octobre  1779, 
Wyttenbach  prononça  en  cette  qualité  son  discours 
d'inauguration  où  il  traita:  De  philosophie,  autore 
Cicérone  y  laudatarum  artium  omnium  procréatrice  et 
quasi  parente. 

On  connaît  de  lui  un  traité  de  logique  et  de  méta- 
physique, qu'il  prenait  chaque  année  pour  texte  de  ses 
leçons,  et  une  histoire  manuscrite  de  la  philosophie, 
depuis  l'origine  de  cette  science ,  jusqu'à  la  mort  de  Wolf , 
vers  le  milieu  du  XVIII'ue  siècle.  M.  Mahne,  si  la  veuve 
de  Fauteur  y  consent,  nous  laisse  espérer  qu'il  pourra 
un  jour  publier  ce  manuscrit  dont  il  fait  un  grand  éloge. 

La  philosophie  n'absorbait  point  tellement  le  tems  de 
Wyttenbach  qu'il  ne  lui  restât  encore  quelques  loisirs 
qu'il  partageait  entre  son  Plntarque  et  sa  Bibliothèque 
critique.  La  troisième  partie  de  ce  dernier  ouvrage  avait 
déjà  paru,  et  en  ce  moment  il  publiait  la  quatrième. 
Peu  de  tems  après ,  une  société  hollandaise  ayant  mis 
au  concours  la  question  suivante  :  Num  sola  rationis 
vi ,  et  quibus  afgumentis ,  demonstrari  potest ,  non 
esse  plures  uno  Deos?  Et  fueruntne  unquam  populi 
aut  philosoplii ,  qui  hujiis  veritatis  cognitionem  sine 
revelationis  divince.  ,  ad  ipsos  propagatœ ,  auxilio  ha- 
buerunt?  Il  la  trouva  assez  importante  pour  croire  qu'il 
pouvait  concourir  ,  et  c'est  à  sa  dissertation  que  le 
prix  fut  adjugé. 

En  1781,  il  donna  la  5mc  et  la  6ra8  partie  de  sa  Bi- 
bliothèque critique. 


(95  ) 

L'année  suivante ,  un  prix  ayant  été  proposé  par  la 
société  Teylerienne,  pour  l'auteur  de  la  meilleure  ré- 
ponse a  la  question  :  Quœ  fuit  veterum  philosophorum, 
inde  a  Thalete  et  Pjihagora ,  usque  ad  Senecam,  sen- 
tentia  de  vitâ  et  statu  animorum  post  morteni  corporis? 
C'est  encore  sa  réponse  qui  fut  jugée  la  meilleure.  A 
cette  occasion,  il  rédigea  pour  ses  élèves,  sur  l'origine 
et  les  progrès  du  dogme  de  l'immortalité  de  Pâme,  un 
certain  nombre  de  leçons  que  M.  Mahne  a  retrouvées 
dans  ses  papiers,  et  qu'il  est,  dit-il,  dans  l'intention 
de  mettre  au  jour.  Cependant ,  l'infatigable  professeur 
n'avait  pas  interrompu  ses  recherches  sur  Plutarque, 
et  dans  l'intervalle,  il  avait  donné  la  jme  et  la  8me  par- 
tie da  sa  Bibliothèque  critique. 

Tollius  avait  renoncé  a  sa  chaire,  pour  se  charger  de 
l'éducation  des  fils  de  Guillaume  V,  Prince  d'Orange, 
dont  l'un  est  aujourd'hui  notre  auguste  Monarque,  et 
l'autre  est  mort  en  Italie.  Wyttenbach ,  choisi  pour  le 
remplacer ,  n'avait  pas  encore  prononcé  son  discours 
inaugural ,  quand  Valckenaer  étant  venu  a  mourir, 
Ruhnkenius  fit  tous  ses  efforts  pour  l'attirer  à  Leyde, 
où  on  lui  proposait  5ooo  florins  de  traitement.  Ces  offres 
avantageuses  ne  purent  le  déterminer  a  quitter  Amster- 
dam, et  il  entra  le  18  Avril  dans  l'exercice  de  ses  nou- 
velles fonctions  qui  consistaient  a  enseigner  les  lettres 
grecques  et  latines,  l'histoire  universelle,  celle  de  la 
patrie,  l'éloquence,  la  poésie  et  les  antiquités.  Le  dis- 
cours d'usage  qu'il  prononça  dans  cette  circonstance, 
avait  pour  titre  :  De  vi  et  efficaciâ  historiée  ad  virtutis 
studium.  On  lira  avec  intérêt  et  non  sans  utilité  les 
détails  dans  lesquels  M.  Mahne  entre  ici  sur  les  princi- 
pes et  la  méthode  suivis  par  Wyttenbach  dans  l'ensei- 
gnement de  ces  différentes  branches. 


(  9û  ) 

Les  troubles  de  1787  ,  qui  interrompirent  quelque  tems 
le  cours  ordinaire  des  études  en  Hollande,  ne  détour- 
nèrent pas  Wyttenbach  de  ses  occupations  domestiques, 
et  la  9me  partie  de  sa  Bibliothèijue  critique  parut  vers 
la  fin  de  celte  année.  Ce  n'est  qu'alors  qu'il  se  déclara 
publiquement  l'auteur  de  cet  ouvrage,  auquel  jusqu'ici 
il  avait  avec  raison  jugé  a  propos  de  ne  point  attacher 
son  nom. 

Le  traité  de  Plutarque  :  De  sera  nwninis  vindictâ , 
était  parvenu  en  Angleterre  avec  le  commentaire  de 
Wyttenbach ,  et  y  avait  fait  une  si  grande  sensation , 
que  M.  Burgess ,  chapelain  de  l'évêque  de  Salisbury, 
se  trouvant  en  Hollande,  dans  une  visite  a  M.  Wyt- 
tenbach, l'assura  que,  si  le  Plutarque  s'imprimait  en 
Angleterre,  toutes  les  bibliothèques  y  seraient  ouvertes 
pour  lui ,  comme  M.  Saïgas  Pavait  déjà  promis  par 
écrit  à  Ruhnkenius.  Dans  le  même  moment,  des  pro- 
positions semblables  lui  étaient  faites  par  les  libraires 
de  Deux-Ponts,  et  après  avoir  flotté  quelque  tems  dans 
l'incertitude  entre  des  conditions  également  honora- 
bles, il  se  décida  pour  les  éditeurs  anglais.  Ce  fut 
une  heureuse  inspiration  ;  car  on  sait  ce  que  seraient 
devenus  ses  manuscrits  a  Deux-Ponts,  lors  de  l'occu- 
pation de  cette  ville  par  les  Français. 

Son  grand  ouvrage,  quelque  tems  qu'il  y  consacrât, 
lui  laissait  encore  des  intervalles  de  liberté,  pendant 
lesquels,  après  avoir  achevé  ses  remarques  In  Juliani 
orationem  primant,  il  donna  la  iomc  partie  de  sa  Bi- 
bliothèque critique. 

En  1795,  il  fit  paraître  un  choix  de  morceaux  des 
principaux  historiens  :  Selecta  principum  historicorum, 
ouvrage,  comme  il  le  dit  lui-même,  destiné  aux  jeunes 
gens  plus  qu'aux  hommes  instruits,  et  qui  cependant 


(  97  ) 
fut  tellement  goûte  en  Hollande,  qu'on  en  fit  jusqu'à 
trois  éditions. 

Nous  voici  parvenus  a  la  catastrophe  de  l'invasion  des 
Français.  Wyttenbach  craignant  pour  ses  manuscrits  les 
troubles  d'une  si  grande  commotion  politique,  se  hâta 
d'envoyer  a  Oxford,  les  œuvres  morales  de  Plutarque , 
avec  la  pre'face  qu'il  y  avait  jointe,  et  le  tout  y  arriva 
heureusement  vers  la  fin  de  1794.  Dans  ces  circonstan- 
ces difficiles,  appelé  a  Leyde  et  a  Berne,  ni  les  sollici- 
tations de  Ruhnkenius,  ni  les  prières  de  sa  famille  ne 
purent  l'enlever  a  sa  patrie  adoptive.  Il  y  avait  jette 
des  racines  trop  profondes  pour  qu'aucune  considé- 
ration pût  l'en  arracher.  Ruhnkenius  même  en  éprouva, 
à  son  égard,  une  espèce  de  refroidissement,  dont  tou- 
tefois il  revint  a  la  première  explication  5  ce  ne  fut  qu'a 
la  mort  de  cet  illustre  professeur,  que  par  un  motif  de 
délicatesse,  celui  de  secourir  la  famille  de  son  ami,  il  se 
décida  enfin  a  accepter  la  chaire  de  Leyde,  avec  des 
appointemens  fixes  de  cinq  mille  florins ,  et  l'exemption 
de  toutes  les  charges  académiques.  Ruhnkenius  avait  été 
son  prédécesseur,  son  maître,  son  ami;  c'était  un  beau 
texte  pour  un  discours  inaugural;  il  n'eut  garde  d'en 
choisir  un  autre,  et  le  4  Mai  1799,  il  le  traita  sous  le 
titre  :  De  adolescentiâ  Davidis  Ruhnhenii  in  exemplum 
propositd  adolescentibus  Batavis  bonarum  artium  stu- 
diosis.  Ce  discours  fut  le  germe  d'un  ouvrage  plus  im- 
portant qu'il  ne  tarda  pas  a  publier,  je  veux  parler  de 
la  vie  de  Ruhnkenius,  dont  les  journaux  du  tems rendi- 
rent un  compte  honorable ,  et  que  M.  Mahne  paraît 
s'être  proposée  pour  modèle,  en  écrivant  celle  dont  nous 
rendons  compte. 

Deux  ans  s'étaient  écoulés  depuis  l'envoi  des  premières 
feuilles  du  Plutarque  a  Oxford,  et  les  communications 


<;#  ) 

interrompues,  à  cause  delà  guerre,  mettaient  l'auteur 
idans  l'embarras  de  savoir  comment  il  y  ferait  passer  les 
antres  parties  de  son  ouvrage,  qui  se  trouvaient  prêtes, 
savoir:  Fragmenta  Plutarchi,  les  livres  de  jluminibus  , 
nobilitate,  Homero  ,  proverbiis,  metris ,  et  enfin,  prœ- 
fatio  ad  animadversiones  et  disputatio  de  spuriâ  auto- 
ritate  îibri  Yïsp)  r&v  wmèw  ccyoôyy*  On  lui  indiqua  la 
voie  de  Hambourg,  comme  la  plus  sûre;  mais  ce  ne 
fut  que  long-tems  ensuite,  et  après  de  vives  inquiétu- 
des qui  faillirent  le  de'goûter  de  son  entreprise ,  qu'il 
fut  informe'  par  Randolph,  évêque  d'Oxford,  son  cor- 
respondant ,  qu'enfin  son  manuscrit  e'tait  parvenu  a  sa 
destination. 

Une  lettre  a  un  de  ses  élèves  les  plus  distingués , 
Van  Heusde ,  une  édition  nouvelle  du  Phaedon ,  la  on- 
zième partie  de  sa  Bibliothèque  critique,  parurent  suc- 
cessivement à  cette  époque  ,  et  tout  en  le  délassant  de 
ses  occupations  plus  sérieuses ,  ajoutèrent  a  sa  réputation. 

La  catastrophe  arrivée  a  Leyde  le  12  Janvier  1807, 
par  l'explosion  d'un  vaisseau  rempli  de  poudre,  faillit 
être  funeste  a  Wyttenbach ,  comme  elle  le  fut  à  un 
grand  nombre  de  citoyens  et  a  plusieurs  de  ses  amis; 
sa  maison  en  fut  ébranlée,  sa  bibliothèque  endomma- 
gée, une  partie  de  son  mobilier  détruite;  mais  heu- 
reusement le  Plutarque  en  sortit  sain  et  sauf.  Pressé  par 
les  instances  de  Randolph,  évêque  d'Oxford,  il  aurait 
voulu  y  mettre  la  dernière  main  ;  mais  on  conçoit  qu'un 
pareil  événement  dut  lui  causer  quelque  trouble  et  qu'il 
s'en  suivit  nécessairement  une  nouvelle  interruption.  Il 
ne  resta  cependant  pas  oisif.  Une  seconde  édition  Selec- 
torum  principuni  kistoricorum ,  avec  un  supplément  de 
notes ,  et  le  dernier  volume  de  sa  Bibliothèque  criti- 
que ,  remplirent  cet  intervalle.  Une  lettre  au  baron  Van 


(  9y  ) 

Lynden  sur  la  philosophie  de  Kant,  insérée  au  com- 
mencement de  ce  dernier  volume,  amena  une  série  de 
discussions  désagréables  pour  l'auteur,  et  dans  lesquelles 
M.  Mahne ,  défenseur  naturel  de  son  maître ,  ne  crut  pas 
devoir  rester  neutre  ;  nous  imiterons  la  discrétion  du 
biographe  en  évitant  de  réveiller  cette  querelle  litté- 
raire ,  heureusement  assoupie. 

Dans  le  bouleversement  général  qui  suivit  l'érection 
du  nouveau  royaume  de  Hollande,  et  ensuite  son  in- 
corporation a  la  France,  quelque  dommage  qu'il  en 
résultât  pour  Wyttenbach ,  son  mérite  rie  resta  point 
sans  récompense;  il  se  vit  tour  a  tour  nommé  membre 
de  l'institut  de  Hollande,  chevalier  de  l'ordre  de  la 
réunion,  et,  après  la  chute  de  Napoléon,  membre  cor- 
respondant de  l'institut  de  France,  et  chevalier  de 
de  Tordre  du  lion  Belgique. 

"Wyttenbach  ne  s'était  point  marié.  Une  nièce  élevée 
dans  ses  principes,  et  qui  partageait  son  goût  pour 
l'étude,  avait  pris  soin  de  ses  intérêts  domestiques,  et 
par  le  charme  de  sa  conversation ,  par  la  tendresse  de 
ses  sentimens  avait  contribué  a  lui  rendre  l'existence 
agréable  ;  il  voulut  reconnaître  ses  soins ,  et  l'épousa  le 
17  Février  1817.  Par  Ta,  il  lui  procura  un  état  honora- 
ble, et  transmit  son  nom  a  une  femme  digne  de  le  porter 
et  qui  le  justifie  tous  les  jours  par  des  ouvrages  que  son 
mari  lui-même  ne  démentirait  pas.  On  annonce  aujour- 
d'hui un  nouvel  opuscule  de  cette  dame,  intitulé:  Les 
symposiaques  :  c'est  un  dialogue  dans  lequel ,  sous 
des  noms  de  convention,  elle  introduit  ses  amis  et  ceux 
de  Wyttenbach  ,  discourant,  selon  la  méthode  de  So- 
crate,  sur  le  dogme  de  l'immortalité  de  l'âme.  Nous 
en  rendrons  compte  aussitôt  qu'il  nous  sera  parvenu. 

Cependant    le    respectable    vieillard    approchait  du 


(  ioo  ) 
ternie  de  sa  carrière.  Ses  forces  diminuaient  de  jour  en 
jour,  sa  vue  s'affaiblissait,  ses  mains  tremblaient,  il  ne 
pouvait  presque  plus  lire,  il  n'écrivait  qu'avec  peine,  et 
ni  les  voyages,  ni  les  eaux,  ni  les  médecins  ne  pouvaient 
apporter  de  remède  a  ses  infirmite's  ;  dans  cet  état  il  lisait, 
il  écrivait  encore,  achevait  le  3me livre  de  sa  Philomathie 
qu'il  avait  commencée  depuis- sept  ans,  continuait  ses 
remarques  sur  Eunape^  et  quoique  professeur  émérite, 
s'annonçait  encore  dans  le  Séries  lectionum  >  comme 
devant  continuer  ses  cours.  Une  page,  la  dernière  sans 
doute  qui  soit  sortie  de  sa  main,  et  que  M.  Mahne  a 
fait  lithographier ,  termine  sa  biographie  ;  on  y  reconnaît 
au  tremblement  successif  et  toujours  croissant  de  la  plu- 
me ,  comme  les  derniers  efforts  d'une  ardeur  qui  tombe  et 
qui  s'éteint.  Il  mourut  d'apoplexie  le  17  Janvier  1820, 
et  fut,  d'après  sa  volonté,  enterré  dans  son  jardin, 
où  son  épouse  se  propose  de  lui  élever  un  modeste 
monument. 


DISCOURS 

Prononcé  à  ta  distribution  solennelle  des  prix  de  la  Société 
royale  d' Agriculture  et  de  Botanique  de  Gand,  le  iqJnin  1825 , 
par  M.  Vau  Hultliem,  Président  de  la  Société  et  Membre  des 
Etats-généraux. 


TRES  CHERS  ET  HONORABLES  CONFRERES , 

JMotre  Société  obtient  chaque  année  de  nouveaux 
succès,  et  il  est  impossible  d'en  méconnaître  l'utile 
influence  ;  de  nouvelles  plantes  sont  continuellement 
acquises  par  ses  Membres  et  cultivées  avec  un  zèle  peu 
commun;  nos  habiles  Jardiniers  les  multiplient  a  l'infini 


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(  101  ) 

et  les  communiquent  à  toutes  ies  villes  des  Pays-Bas  ; 
par  leur  soin  les  plantes  les  plus  rares  deviennent  la 
propriété  de  tous  les  Amateurs ,  et  nos  jardins ,  grâces 
à  leur  industrie,  brillent  des  plus  beaux  arbustes  et  des 
fleurs  les  plus  éclatantes  de  l'Amérique,  des  Indes,  de 
la  Chine  et  du  Japon.  Dans  nos  Expositions  d'été  et 
d'hiver,  le  public  apprend  a  connaître  les  plantes  les 
plus  rares  et  les  Fleurs  les  plus  belles  de  la  terre.  Le 
goût  pour  les  belles  productions  de  la  nature  s'accroît 
chaque  jour,  et  l'empire  de  Flore  étend  de  toutes  parts 
ses  limites. 

Cette  institution  des  Expositions  publiques  de  Plan- 
tes et  de  Fleurs  a  été  imitée  par  les  villes  de  Harlem, 
de  Tournai,  de  Louvain  et  de  Courtrai,  et  la  ville  de 
Bruxelles  a  suivi  l'exemple  de  celle  de  Gand ,  en 
ouvrant  l'année  passée,  pour  la  première  fois,  son 
salon  aux  productions  de  Flore. 

Nous  ne  pouvons  que  nous  réjouir  du  bon  accueil 
que  notre  institution  a  reçu  par  tout  ;  on  ne  peut  se 
dissimuler  qu'elle  n'ait  contribué  puissamment  a  aug- 
menter dans  notre  Royaume,  le  goût  de  la  culture  des 
plantes  utiles  et  agréables.  La  Société  a  encore  voulu  éten- 
dre ses  soins  sur  des  objets  d'une  plus  grande  importance  ; 
ainsi  elle  encourage  la  culture  des  abeilles  ,  elle  distribue 
des  prix  pour  le  perfectionnement  de  la  culture  des  fruits 
et  l'amélioration  des  races  de  chevaux ,  de  vaches  et  de 
moutons ,  elle  récompense  le  modeste  jardinier  qui  cul- 
tive avec  le  plus  de  soin  le  jardin  de  son  maître,  et  le 
cultivateur  industrieux  qui,  dans  un  terrain  peu  favora- 
ble et  inculte,  est  parvenu  a  cultiver  les  meilleurs  légu- 
mes et  les  plus  beaux  fruits  3  elle  accorde  des  médailles 
au  possesseur  de  la  collection  la  plus  riche  en  plantes 
nouvellement  introduites ,  au  propriétaire  de  la  pépi- 


(    1Q2    ) 

nière  la  mieux  soignée  et  la  plus  riche  en  arbres  fruitiers 
de  bonne  qualité',  et  a  ceux  qui  par  des  méthodes  par- 
ticulières parviennent  a  faire  mûrir  des  fruits  étrangers 
qu'il  serait  agréable  d'obtenir  dans  nos  jardins,  comme 
déjà  nous  possédons  la  culture  de  l'Ananas ,  des  Me- 
lons ,  des  Figues  et  des  Grenades. 

Le  jardin  de  Gand  conserve  toujours  sa  prééminence 
parmi  les  plus  beaux  jardins  des  Pays-Bas.  Tous  les  ama- 
teurs s'empressent  chaque  année  a  y  présenter  leur  of- 
frande. Parmi  les  bienfaiteurs  de  notre  Société,  nous 
devons  mettre  en  première  ligne ,  S.  E.  M.  le  baron  Vande 
Capellen,  Gouverneur-général  des  possessions  Belgiques 
aux  Indes  orientales  et  M.  le  professeur  Reinwardt  qui , 
après  un  séjour  de  six  ans  dans  l'île  de  Java  et  les  Mo- 
luques,  aujourd'hui  de  retour  dans  la  patrie,  a  apporté 
une  riche  collection  d'objets  d'histoire  naturelle  et  une 
grande  variété  de  graines  de  toutes  espèces  de  plantes 
de  ces  heureux  climats,  dont  il  a  bien  voulu  donner 
une  partie  au  jardin. 

Les  plantes  envoyées  au  jardin  par  lord  Moira ,  mar- 
quis d'Hastings ,  Gouverneur -général  des  possessions 
Britanniques  aux  Indes  orientales,  et  celles  qui  provien- 
nent des  graines  recueillies  au  Brésil  par  le  prince  de 
ÏNeuvvied  et  par  les  soins  du  P.  Leandro  do  Sacramento, 
directeur  du  jardin  royal  de  Rio  Janeiro,  communiquées 
par  M.  le  baron  Keverberg  de  Kessel  et  par  M.  le  che- 
valier de  Britto,  sont  en  pleine  croissance,  et  répandent 
dans  nos  serres  chaudes  une  agréable  variété  parmi  un 
grand  nombre  de  plantes  des  zones  torrides ,  qui  s'y 
trouvent. 

M.  André  Thouin ,  ce  constant  bienfaiteur  du  jardin, 
n'a  pas  manqué  de  lui  faire  parvenir  son  offrande  an- 
nuelle. 

Notre    collègue    Broaeger  ,     cultivateur -botaniste   a 


(  ici  ) 

Hoogly  au  Bengale,  nous  a  fait  parvenir  une  belle  col- 
lection de  graines  recueillies  sur  les  montagnes  septen- 
trionales des  Indes  orientales. 

M.  Michaux  m'a  envoyé  pour  le  jardin  quelques 
graines  d'arbres  rares  de  l'Ame'rique  septentrionale. 

M.  De  Beeldsnyder  a  également  fait  parvenir  au  jardin 
plusieurs  plantes  précieuses  qui  manquaient  a  notre 
collection. 

Si  le  jardin  de  l'Université  s'enrichit  chaque  jour  de 
plantes  qui  lui  sont  données,  le  jardinier  en  chef,  notre 
confrère  Mussche,  s'est  toujours  fait  un  plaisir  de  com- 
muniquer aux  autres  jardins  publics  et  a  des  amateurs 
distingués,  des  plantes  que  jusqu'à  présent  ils  n'avaient 
pu  acquérir.  Cet  échange  mutuel  tourne  au  profit  de 
la  science,  et  enrichit  nos  jardins  Belgiques  d'un  grand 
nombre  de  plantes  rares  et  curieuses. 

Parmi  les  plantes  remarquables  qui  embellissent  le 
jardin  de  Gand,  la  nombreuse  famille  des  Palmiers  et 
les  arbres  et  arbustes  de  la  Nouvelle-Hollande,  se  dis- 
tinguent d'une  manière  touie  particulière. 

A  l'exemple  du  jardin  de  l'Université  de  Gand,  tous 
les  jardins  des  autres  Universités  du  Royaume  s'enri- 
chissent chaque  jour  de  nouvelles  plantes.  Les  profes- 
seurs de  Leyde,  de  Groningue  et  d'Amsterdam  ont 
récemment  publié  les  catalogues  des  plantes  qui  se 
trouvent  aux  jardins  confiés  a  leurs  soins. 

Le  nouveau  jardin  de  l'Université  de  Louvain,  quoi- 
qu'il ne  soit  cultivé  que  depuis  quatre  ans,  contient 
déjà  une  riche  collection  de  plantes,  parmi  lesquelles 
il  s'en  trouve  de  très  rares.  On  vient  d'y  construire 
de  superbes  serres  et  une  très  belle  orangerie;  confié 
aux  soins  du  jardinier  en  chef,  notre  honorable  con- 
frère, Van  Donkelaar,  ce  jardin  deviendra  en  peu  de 
temps  un  des  plus  beaux  du  Royaume. 


(  io4  ) 

Si  Pétat  florissant  de  notre  agriculture  a  fréquem- 
ment engagé  des  étrangers  a  venir  étudier  dans  notre 
pays  ce  premier  des  arts ,  la  culture  des  légumes  ,  des 
arbres  fruitiers  et  celle  des  arbres  et  arbustes  exotiques 
ont  aussi  plusieurs  fois  attiré  dans  nos  contrées  des 
amis  de  l'horticulture  et  de  la  botanique.  C'est  ainsi 
que  dans  ces  dernières  années,  la  Société  Calédonienne 
d'Horticulture  d'Edimbourg,  a  envoyé  une  députation 
solennelle ,  composée  de  trois  de  ses  membres ,  MM.  Pat. 
Neill,  John  Hay  et  James  Macdonald,  dans  les  Pro- 
vinces des  deux  Flandres,  du  Brabant,  et  dans  celles 
de  la  Hollande ,  d'Utrecht  et  du  Hainaut.  Le  but  de 
leur  voyage  était  de  prendre  une  notice  des  variétés 
rares  ou  nouvelles  de  légumes  et  de  fruits,  dont  l'ac- 
quisition serait  utile  a  l'Ecosse,  et  d'établir  une  cor- 
respondance avec  quelques-uns  des  principaux  amateurs 
ou  pépiniéristes  de  profession,  par  les  bons  offices  des- 
quels, ils  pourraient  dans  la  suite  obtenir  ces  végétaux 
culinaires  et  arbres  fruitiers  par  le  moyen  des  graines 
et  des  greffes.  Les  trois  députés  parcoururent  successi- 
vement les  villes  d'Ostende ,  de  Bruges,  de  Gand , 
d'Anvers ,  de  Rotterdam ,  de  la  Haye ,  de  Leyde ,  de 
Harlem  ,  d'Amsterdam  ,  d'Utrecht ,  de  Breda  ,  de 
Bruxelles,  d'Enghicn  et  de  Tournay,  ils  visitèrent  dans 
toutes  les  villes  les  marchés  aux  herbes,  les  jardins  pu- 
blics et  particuliers ,  et  firent  des  excursions  dans  les 
campagnes  pour  examiner  les  établissemens  des  ama- 
teurs qui  y  ont  leur  résidence.  Au  commencement  de 
cette  année,  ils  ont  publié  dans  un  assez  gros  volume (*) 

(*)  Journal  of  a    Horticultural  tour  through    some  parts    of 
Flandres,   Hollaud,  and  the  north  of  France,   in  the  autumn 
of  18 17 ,   h  y  a  députation  of  the    Caledonian  Horticultural  So- 
ciety.   Kdinburgh  and  London  ,  Longmati-,   1823.Grandin-8.de 
574  pages  avec  figures. 


C  »o5  ) 

le  résultat  de  leurs  recherches  et.  de  leurs  observations. 
Le  but  de  cette  mission  scientifique  est  louable,  et  le 
Rapport  de  leur  voyage  est  instructif.  Ils  ont  sûrement 
vu  les  principaux  établissemens  d'horticulture  de  nos 
Provinces;  si  quelques  jardins  remarquables  ont  échappé 
a  leur  exploration ,  si  partout  ils  n'ont  pas  observé  tout 
ce  qui  méritait  leur  attention,  si  dans  leur  Rapport, 
ils  ont  consigné  quelques  légères  erreurs ,  c'est  proba- 
blement que  la  brièveté  du  temps  ne  leur  a  pas  permis 
de  tout  voir,  et  que  dans  plusieurs  endroits,  ils  ne  se 
sont  pas  adressés  aux  personnes  qui  fussent  le  plus  en  état 
de  leur  faire  observer  les  objets  les  plus  remarquables. 
Quoiqu'il  en  soit,  leur  travail  est  utile  et  sera  lu  avec 
plaisir  par  tous  ceux  qui  s'occupent  de  ces  sortes  de 
matières.  Les  députés  se  sont  plus  au  reste  a  rendre 
un  témoignage  honorable  de  l'accueil  amical  et  cordial, 
avec  lequel  ils  ont  été  reçus  de  toutes  les  personnes 
qu'ils  ont  visitées ,  et  ils  ont  saisi  cette  occasion  pour 
leur  en  témoigner  publiquement  leur  reconnaissance. 

Notre  confrère  Audoor  qui,  après  un  long  intervalle, 
a  rétabli  le  premier  en  grand  la  culture  de  la  vigne  dans 
les  environs  de  Louvain,  vient  d'agrandir  lui-même  ses 
vignobles  de  Wezemael,  et  a  trouvé  des  imitateurs  dans 
d'autres  provinces ,  qui,  dans  des  situations  également 
heureuses ,  ont  l'espoir  de  faire  dans  quelques  années 
des  récoltes  abondantes  de  vin. 

Si ,  a  la  séance  publique  du  mois  de  Juin  de  l'année 
passée ,  j'ai  fait  connaître ,  combien  il  serait  a  désirer  de 
faire  l'acquisition  de  quelques  beaux  arbres  et  arbustes 
du  Japon ,  j'ai  aujourd'hui  la  satisfaction  d'annoncer  a 
la  Société  que  ce  désir  a  reçu  un  commencement  d'exé- 
cution. Il  a  suffi  d'en  faire  apercevoir  l'utilité  a  notre 
digne  confrère  M.  Falck,  ministre  de  l'instruction  pu- 

III ">e  livraison.  8 


(  io6) 

blique,  de  l'industrie  nationale  et  des  colonies,  pour 
engager  Son  Excellence  a  prendre  les  moyens  les  plus 
sûrs  et  les  plus  prompts  pour  nous  faire  obtenir  cette 
utile  acquisition.  Nous  avons  donc  l'espoir  de  voir  un 
jour  ces  superbes  Erables  du  Japon  ,  auxquels  le  célèbre 
Tbunberg  ne  craint  point  de  décerner  le  premier  rang 
parmi  les  plus  beaux  arbres  de  la  terre,  l'incomparable 
Thuiadolabrata,  le  plus  admirable  de  tous  les  arbres  verts, 
le  Cupressiis  Japonica,  le  plus  baut  et  le  plus  droit  des 
espèces  de  Cyprès ,  dont  le  bois  presque  incorruptible 
est  employé  a  la  construction  des  vaisseaux,  des  ponts 
et  de  tous  les  ouvrages  hydrauliques ,  le  Lierre  du  Ja- 
pon ,  dont  la  magnifique  verdure  charme  tous  les  yeux, 
l'arbre  au  vernis,  le  Rhus  Vemix  du  Japon,  qui  donne 
la  meilleure  résine  et  la  plus  propre  a  vernir,  et  plusieurs 
autres  plantes  utiles  et  agréables ,  dont  le  tems  ne  me 
permet  point  de  faire  ici  l'énumération. 

Notre  confrère  M.  Thunberg,  professeur  de  botanique 
à  Upzal,  qui  a  fait  le  voyage  aux  Indes  et  au  Japon  aux 
frais  de  la  compagnie  asiatique  de  Hollande,  a  résidé 
pendant  seize  mois  au  Japon,  dans  les  années  1775  et 
1776 ,  il  envoya  en  Europe  par  la  voie  de  Batavia  un 
grand  nombre  de  végétaux,  dont  la  plupart  périrent 
dans  le  trajet ,  et  en  revenant  lui-même  du  Cap  de  Bonne- 
Espérance,  il  essuya  le  28  septembre  1778  dans  la  Man- 
che une  horrible  tempête  qui  fit  perdre ,  culbuta  et  dé- 
truisit presque  toutes  les  plantes  qu'il  avait  avec  lui. 

Notre  nation  est  seule  admise  et  établie  au  Japon  ; 
seule  de  toutes  les  nations ,  elle  fait  le  commerce  avec 
les  habitans  de  ce  pays.  Vous  penserez  probablement 
avec  moi  qu'il  serait  avantageux  de  faire  une  nouvelle 
tentative  pour  acquérir  ces  arbres  utiles  et  précieux  ; 
mais  si  cette  acquisition  est  avantageuse,  on  ne  peut  se 


(  107  ) 
dissimuler  cfu'eUe n'exige  beaucoup  de  peines  et  Je  soins , 
et  que  son  succès  n'est  pas  sans  de  grandes  difficultés  : 
en  effet,  la  recherche  des  graines  et  le  transport  des 
plantes  de  l'intérieur  du  Japon  jusqu'au  port  de  Naga- 
zaki ,  leur  entretien ,  l'arrosement ,  et  le  transport  bien 
plus  long  jusque  dans  nos  ports,  ne  sont  pas  aussi  faci- 
les qu'au  premier  abord  on  pourrait  se  le  persuader. 
Les  tempêtes ,  le  roulis  du  vaisseau ,  la  grande  chaleur 
au  double  passage  de  la  ligne ,  la  quantité  d'eau ,  néces- 
saire a  arroser  les  plantes  dans  un  si  long  trajet,  font 
souvent  avorter  ces  sortes  d'expéditions.  Aussi  si  le  mi- 
nistre parvient  a  y  réussir,  il  méritera  la  reconnaissance 
de  l'Europe,  et  son  nom  sera  inscrit  dans  les  fastes  de 
la  botanique  et  de  l'agriculture ,  a  côté  de  ceux  de  Clu- 
sius,  du  père  tflncarville ,  de  Banks  et  des  deux  Mi- 
chaux ,  qui  ont  communiqué  a  l'Europe  un  grand  nom- 
bre de  beaux  arbres  et  de  plantes  distinguées. 

Quoique  la  latitude  du  Japon  soit  beaucoup  plus  mé- 
ridionale que  celle  de  notre  pays,  cependant,  comme 
la  partie  située  vers  le  nord ,  est  montagneuse  et  froide , 
les  aïbres  qui  y  croissent  ont  l'avantage  de  ne  pas 
craindre  nos  gelées  même  les  plus  fortes,  et  de  résis- 
ter aux  rigueurs  de  nos  climats.  Ces  arbres  une  fois 
transportés  dans  nos  jardins ,  leur  multiplication  s'en 
fera  avec  la  plus  grande  facilité,  et  leur  existence  sera 
a  jamais  assurée  en  Europe. 

Parmi  les  arbres  étrangers  que  l'on  a  commencé  à 
cultiver  dans  notre  pays,  il  y  a  environ  soixante  ans, 
le  Mélèse ou  Larix  d'Europe,  se  distingue  par  la  promp- 
titude de  sa  croissance  et  l'utilité  de  son  bois.  Feu 
M.  Van  Severen,  abbé  des  Dunes,  et  M.  Van  den  Bo- 
gaerde  ont  fait  de  nombreuses  plantations  de  cet  arbre 
dans  les  environs  de  Bruges,  dans  des  terres  sablonne u- 


(  io8  ) 
ses  et  presque  stériles.  M.  De  Scliietere  Je  Capreyck, 
de  Bruges ,  qui  depuis  quelques  années  est  venu  habi- 
ter la  ville  de  Gand,  a  fait  placer  devant  sa  maison  au 
mois  de  Mai  dernier,  un  bel  arbre  de  cette  espèce,  qu'il 
a  semé  lui-même  en  1768 ,  arbre  qui  a  9 5  pieds  d'élévation 
et  7  pieds  et  demi  d'épaisseur.  M.  De  Capreyck  a  donné 
par  la  un  exemple  utile  qui ,  a  ce  que  nous  espérons , 
aura  de  nombreux  imitateurs.  Nous  nous  faisons  un 
plaisir  de  lui  en  adresser  nos  complimens  et  de  lui  en 
témoigner  notre  reconnaissance. 

La  Société  convaincue  de  l'utilité  de  cet  arbre ,  se 
propose  de  donner  des  encouragemens  et  des  récom- 
penses a  ceux  qui  dans  nos  Provinces ,  auront  planté 
dans  de  terres  légères  et  sablonneuses ,  le  plus  grand 
nombre  de  Mélèses,  et  qui  les  entretiendront  avec  le 
plus  de  soin. 

S.  A.  R.  le  Prince  Frédéric  continue  a  étendre  ses 
soins  sur  les  deux  établissemens  agricoles  qu'il  s'est 
plu  a  former.  La  colonie  de  Frédérics-oord  est  en  pleine 
activité,  celle  de  Woltel  commence  et  donne  des  es- 
pérances. Notre  illustre  confrère  en  recevant  la  mé- 
daille d'or  que  vous  lui  avez  décernée  a  la  séance  pu- 
blique de  l'année  dernière  ,  et  que  j'ai  eu  l'honneur 
de  lui  remettre  de  votre  part,  m'a  témoigné  combien 
il  était  sensible  a  votre  attention,  et  m'a  chargé  de 
vous  en  témoigner  sa  reconnaissance. 

Tels  sont,  chers  et  honorables  Confrères,  les  résul- 
tats des  travaux  de  la  Société  et  de  l'utile  influence 
qu'elle  exerce  sur  toutes  les  branches  de  l'économie 
agricole.  Nous  ne  pouvons  qu'applaudir  au  zèle,  aux 
soins  et  aux  efforts  assidus  de  nos  associés ,  et  nous 
saisissons  cette  occasion  pour  leur  en  offrir  l'expres- 
sion de  notre  reconnaissance. 


(  109  ) 
M.  le  Secrétaire  va  vous  donner  lecture  de  son  Rap- 
port en  vous  faisant  connaître  les   noms  de   ceux   qui 
auront  mérite  les  prix. 


RAPPORT 

Fait  à  la  Société  royale  d'Agriculture  et  de  Botanique  de  Gaitd, 
dans  sa  séance  solennelle  et  publique  du  29  Juin  1 823 ,  par 
J.   B.  Delbccq,  Secrétaire  de  la  Société. 


Veneficia  meâ,  Quirites,  hxc  sont. 

PLIlï. 


vj  est  devant  une  réunion  de  personnes  qui  aiment 
l'Agriculture  et  la  Botanique  que  je  viens  présenter 
l'historique  des  essais  et  des  travaux  de  la  Société  :  je 
sais  que  je  ne  puis  mériter  son  attention  qu'en  lui 
offrant  des  idées  justes  et  des  observations  utiles  ;  am- 
bitieux seulement  de  vous  donner  une  preuve  de  mes 
efforts  et  de  mon  zèle,  je  tâcherai,  Messieurs,  de  jus- 
tifier la  confiance  dont  vous  m'avez  honoré. 

Dans  le  Rapport  que  j'ai  eu  l'honneur  de  vous  met- 
tre sous  les  yeux,  lors  de  la  dernière  séance,  j'ai  mani- 
festé le  vœu  que  le  Gouvernement  s'occupât  un  jour 
de  l'établissement  d'une  pépinière -nationale  d'arbres 
forestiers  et  fruitiers.  Je  vous  ai  entretenu  des  moyens 
d'encouragement  a  employer  pour  perfectionner  la 
race  des  chevaux  de  trait  et  de  labour  de  la  Pro- 
vince ,  j'ai  essayé  de  fixer  votre  attention  sur  les 
bêtes-a-cornes,  j'ai  indiqué  des  espèces  d'arbres  appar- 
tenant au  sol  des  Etats-Unis  d'Amérique ,  qui  pourraient 
croître  dans  les  terres  les  plus  incultes  et  augmenter 


(  no  ) 

le  nombre  de  nos  arbres  forestiers.  J'aurai  à  vous  en- 
tretenir encore  de  ces  mêmes  objets  ,  puisque  le  Gou- 
vernement daigne  encourager  nos  travaux  et  semble 
s'y  associer  en  procurant  a  la  Socie'té  des  moyens  d'en- 
couragement dans  l'intérêt  de  l'Agriculture ,  de  la  Bo- 
tanique et  de  l'Economie  rurale. 

L'année  qui  vient  de  s'écouler  ,  fera   époque    dans 
l'histoire  de  la  culture   des  arbres  et   des   plantes   de 
pleine  terre  :    eilc    a    été    remarquable    par   les  succès 
qu'ont  obtenus  collectivement  les  travaux  de  la  Société. 
L'année  dernière ,  la  chaleur  et  la  sécheresse  ont  été 
extrêmes  pendant  les  mois  du  printems   et  de  l'été  : 
cette  température,  qui  paraît  avoir  dominé  en  notre  Pro- 
vince, y  a  contrarié  le  progrès  de  la  végétation  ,  et  non 
seulement  elle  a  beaucoup  nui  a  la  récolte  des  bonnes 
graines  de  fleurs  et  de  plantes  potagères,  mais  encore 
a  la  récolte   des  fruits  a  pépins   qui  n'ont  pas   été  de 
garde.  A  la  température  chaude  et  sèche  de  l'été,  s'est 
jointe  une  extrême  pénurie  d'eau  :  les  sources  tarissaient; 
l'agriculteur  et  le  jardinier  étaient  forcés  d'aller  cher- 
cher l'eau   a  des  distances  souvent  considérables;  des 
légions  de   mouches   et  d'insectes  pleuvaient  du   ciel, 
des  maladies  putrides  et  malignes  se  promenaient  dans 
l'atmosphère    et   une    épizootie   menaçait   a  la  fois  les 
bêtes-à-cornes  et  les  cochons. 

Un  hiver  rude  a  terminé  les  saisons  de  cette  année  : 
la  végétation  souffrante  par  l'excès  de  chaleur  et  de 
sécheresse ,  n'a  point  permis  a  un  grand  nombre  d'ar- 
bres,  d'arbustes  et  de  plantes  de  pleine  terre  de  se 
rétablir  assez  pour  résister  a  cette  saison  rigoureuse: 
les  plantes,  arbustes,  et  arbres  fruitiers  en  ont  égale- 
ment souffert,  et  nous  en  remarquons  encore  les  funes- 
tes suites   dans  nos  jardins. 


C  in  ) 

L'exposition  des  plantes  et  le  nombre  de  celles  qui 
se  sont  offertes  pour  obtenir  le  prix  de  la  belle  culture, 
au  concours  d'hiver ,  ont  fixé  l'attention  des  curieux. 

Le  prix  du  concours  pour  le  Lilium  tigrinum  qui 
devait  être  épanoui  au  6  Février,  n'a  pas  été  adjugé. 
Le  beau  pied  du  Pœonia  papaveracea ,  cultivé  par 
M.  Josse  Verleeuwen  ,  jardinier-fleuriste  a  Gand,  a 
mérité  la  médaille  pour  le  prix  de  Belle  Culture. 

Le  premier  accessit  a  été  donné  au  Kamellia  sasanqua , 
var.jl.  rub.pl.,  cultivé  dans  la  collection  de  M.  De 
Caters-De  Wolf ,  a  Berchem  près  d'Anvers  ;  le  deuxième 
au  Citrus  aurantium,  cultivé  dans  la  collection  de 
M.  Burggrave,  a  Gendbrugge.  Parmi  le  grand  nombre 
de  plantes  et  arbustes  qui  ont  embelli  le  salon  d'hiver , 
plusieurs  ont  mérité  les  honneurs  de  la  mention  hono- 
rable ,  plusieurs  sont  venus  pour  la  première  fois  em- 
bellir l'exposition ,  dont  des  amateurs  étrangers  et  le 
public  se   plurent  a  admirer  le  magnifique  ensemble. 

A  des  travaux  agréables  auxquels  la  Société  met 
quelque  importance,  il  en  a  succédé  d'autres  plus 
intéressans  pour  l'horticulture  ,  la  botanique ,  l'agri- 
culture et  l'économie  rurale. 

M.  le  vicomte  Vilain  XIIII ,  Membre  de  la  Société , 
nous  a  envoyé  une  notice  exacte  sur  VEpidendrum  va- 
nilla,  cultivé  dans  ses  serres  a  Wetteren  ;  il  a  eu  l'ex- 
trême obligeance  d'y  ajouter  quelquels  détails  sur  le 
Cjcas  revoluta,  plante  d'une  floraison  non  moins  rare, 
à  laquelle  en  1820  fut  adjugée  la  grande  médaille  du 
concours  d'été. 

M.  Van  Cassel ,  cultivateur-botaniste ,  a  donné  a  la 
Société  l'énumération  des  plantes  introduites  et  mises 
dans  le  commerce  depuis  son  institution. 

M.  Mussche  a  lu  des  observations  sur  la  température 


(    IM    ) 
de  l'hiver   et  sur  les  végétaux  qui  en  ont  été  le  plus 
remarquablement  maltraités. 

M.  le  docteur  Vander  Woestyne  a  lu  une  notice  sur 
les  espèces  des  Rhododendrum  et  autres  rosacées ,  qui 
ont  le  plus  souffert  par  la  rigueur  de  la  saison  :  ses  re- 
marques sur  les  plantes  bruyères  déjà  acclimatées  par 
le  semis,  sont  d'un  excellent  observateur. 

M.  P.  de  Cock,  cultivateur-grainier,  a  parcouru  en 
détail  les  espèces  d'arbres  fruitiers  les  plus  endommagées 
par  l'inclémence  de  la  saison  ;  il  s'est  attaché  sur-tout  a 
des  recherches  pour  savoir  si  les  pêchers  greffés  sur  sujets 
pêchers  ou  amandiers  en  ont  indistinctement  souffert. 

M.  Verschaffelt  a  présenté  des  réflexions  sur  la  né- 
gligence que  l'on  met  a  enlever  les  engrais  des  rues  de 
la  ville  et  sur  l'échenillage  qui  ne  se  fait  plus  comme 
autrefois.  Les  réflexions  de  ce  cultivateur  attestent  ses 
connaissances  en  économie  rurale. 

11  a  été  fait  lecture  de  différentes  notices  qui  ont 
ajouté  a  l'intérêt  des  séances  de  la  Société. 

Un  de  nos  Confrères  entr'autres ,  a  communiqué  des 
dispositions  prises  sur  l'échenillage  dès  l'an  1704  jus- 
qu'à ce  jour,  dans  la  Province  de  la  Flandre-orientale, 
et  qui  subsistent  encore. 

M.  l'avocat  D'Hoop ,  a  l'occasion  d'un  envoi  de 
semences  des  monts  Himalaya  ,  nous  a  remis  de  la 
part  de  M.  Léopold  Van  Alstcin  de  cette  ville,  la 
description  exacte  faite  par  MM.  les  commissaires  du 
Gouvernement  Britannique ,  de  cette  chaîne  de  monta- 
gnes dans  les  Indes. 

M.  P.  Milliau,  notre  confrère,  artiste  vétérinaire  de 
première  classe ,  a  rendu  compte  de  la  guéri  son  faite 
par  lui  de  différentes  maladies  qui  paraissaient  incu- 
rables :    élève  d'Altorf,   il  honore  cette  école   par   ses 


(  ii3  ) 
connaissances  en  pathologie  et  en  thérapeutique  vétéri- 
naire, et  dans  l'exercice  de  son  art  il  continue  de  jus- 
tifier la  considération  que  lui  ont  accordée  les  amis  de 
l'agriculture. 

Une  espèce  de  résurrection  ou  repeuplement  spon- 
tané des  ruches  qui  périssent  de  besoin  pendant  l'hiver 
ou  le  printems,  a  été  observée  par  un  autre  de  nos 
Confrères:  l'histoire  naturelle  des  abeilles,  déjà  si  fé- 
conde en  faits  intéressans ,  paraît  s'enrichir  encore  sous 
ses  yeux,  d'une  série  de  faits  nouveaux. 

M.  le  comte  Joseph  de  Lichterveldc  a  lu  une  notice 
détaillée  sur  les  mesures  qu'il  serait  le  plus  facile  et 
le  plus  important  de  provoquer  pour  l'amélioration 
des  races  de  nos  animaux  domestiques  par  divers  en- 
couragemens.  L'expérience  de  tous  les  tems ,  l'exem- 
ple des  nations  étrangères  ,  le  nôtre  même  doivent  nous 
convaincre  que,  pour  le  perfectionnement  des  races  de 
bestiaux  et  pour  favoriser  leur  consommation  et  leur 
exportation,  il  faut  que  la  main  du  Gouvernement  se 
montre  :  tous  les  efforts  d'une  nation  commerçante  et 
agricole  sont  portés  vers  la  multiplication  des  bestiaux 
et  leur  amélioration. 

Au  reste,  ces  principes  sont  généralement  adoptés  ;  le 
Gouvernement  ne  doit  et  ne  saurait  pas  tout  faire  ;  il 
donne  partout  l'impulsion  et  l'exemple,  et  comme  une 
seconde  providence,  il  met  en  jeu  les  causes  secondes  : 
déjà  l'on  aperçoit  dans  la  Flandre  orientale  une  éducation 
mieux  soignée  des  bestiaux  et  une  amélioration  sen- 
sible dans  quelques  espèces.  La  Société  se  plait  a 
témoigner  ici  sa  juste  reconnaissance  a  M.  Falck, 
Ministre  de  l'instruction  publique,  de  l'industrie  na- 
tionale et  des  colonies ,  qui  ne  s'est  pas  borné  a  de 
brillantes  promesses  pour  la  seconder  dans  ses  travaux. 


(  u4) 

Les  secours  qui  nous  sont  accordés  clans  l'intérêt  de 
l'agriculture  et  de  l'économie  rurale  ,  attestent  les 
bienfaits  du  Gouvernement  et  la  munificence  du  Sou- 
verain notre  protecteur. 

La  Société  a  institué ,  en  1821,  des  prix  annuels  pour 
l'amélioration  des  races  de  bestiaux  dans  la  Flandre 
orientale;  elle  annonça  en  1822,  qu'elle  accorderait  une 
montre  d'or  au  cultivateur ,  propriétaire  de  la  plus  belle 
génisse  ou  du  plus  beau  bœuf  couronné  au  concours 
des  boucheries  de  Gand  dans  la  huitaine  avant  Pâques  ; 
une  tabatière  d'argent  doré  au  cultivateur ,  propriétaire 
du  veau  qui  aurait  été  jugé  digne  de  la  même  distinc- 
tion; et  une  houlette  d'argent  au  berger  dont  l'agneau 
aurait  obtenu  les  honneurs  de  l'exposition. 

Dans  la  matinée  du  12  Mai  dernier,  des  commissions 
de  la  Société  s'étant  rendues  dans  l'enceinte  de  la  foire, 
tenue  près  de  Gand  au  faubourg  d'Anvers,  y  ont 
décerné  les  deux  prix  que  la  Société  fait  distribuer  an- 
nuellement pour  récompenser  et  encourager,  dans  la 
Province,  l'amélioration  de  la  race  des  chevaux  et  celle 
des  bêtes-a-cornes. 

Il  nous  a  été  bien  agréable  d'apprendre  des  Membres 
du  Jury  des  deux  différens  concours,  que  nos  efforts 
pour  l'amélioration  des  races  de  bestiaux  n'avaient  pas 
été  infructueux,  et  que,  depuis  trois  ans,  les  cultiva- 
teurs de  la  Flandre  orientale  avaient  redoublé  de  zèle  , 
de  manière  a  attirer  l'attention  du  Gouvernement  sur 
les  progrès  de  l'émulation  que  la  Société  a  en  vue 
d'exciter  et  de  propager  encore. 

La  remise  de  ces  prix  sera  faite  aux  vainqueurs  dans 
cette  séance ,  conformément  au  programme  :  la  montre 
d'or  accordée  au  cultivateur r- propriétaire  de  la  plus 
belle  génisse  ou  du  plus  beau  bœuf,  couronné  l'avant- 


(  »i5  ) 
veille   de   Pâques  <le    i8'i5,   dans  l'une  des  boueherics 
de  Gand,  sera  remise  au  cultivateur  Constantin  Hoste, 
de  Gcndbrugge  lcz-Gand. 

La  tabatière  d'argent  dore,  a  Pierre  Celi ,  d'Oostac- 
ker,  cultivateur,  propriétaire  du  veau  couronné:  et  la 
houlette  d'argeiit,   a  Pierre  Hcje,  d'Exaerde. 

La  montre  d'or ,  prix  du  concours  pour  le  meilleur 
cheval  de  labour  et  de  trait,  adjugée  a  la  foire  du  12 
Mai,  sera  remise  a  Jacques  Leenesone ,  cultivateur  a 
Wondclghem  près  de  Gand,  qui,  a  la  foire  de  l'année 
dernière ,  a  déjà  mérité  la  même  distinction. 

Le  cultivateur  Lièvin  31oensy  de  la  même  commune, 
déjà  mentionné  honorablement  au  dernier  concours  , 
recevra  la  montre  d'or  pour  avoir  amené  a  la  susdite 
foire  la  plus  belle  vache ,  propre  a  propager  la  bonne 
race  en  cette  Province. 

La  Société,  en  1818,  avait  résolu  de  décerner  tous 
les  ans  une  médaille  d'honneur  au  propriétaire,  cultiva- 
teur de  douze  sortes  de  poires  et  de  six  sortes  de  pom- 
mes, dites  de  dessert,  reconnues  pour  être  le  mieux 
cultivées  et  appartenir  aux  meilleures  espèces. 

Les  envois  de  six  sortes  de  pommes  et  de  douze  sortes 
de  poires,  dites  de  dessert,  devaient  se  faire  avant  le 
28  Janvier  1825.  Tous  les  amateurs  et  cultivateurs  de 
fruits  a  pépins  dans  le  Province  de  la  Flandre  orien- 
tale étaient  admis  au  concours  ;  la  Société  regrette  de 
ne  pouvoir  remettre  ce  prix  d'encouragement  en  cette 
séance,  et,  en  admettant  que  la  conservation  des  fruits 
à  pépins  a  été  singulièrement  contrariée  par  la  saison, 
elle  invite  les  amateurs  de  cette  espèce  de  culture ,  a  ne 
point  se  décourager  pour  l'année  prochaine. 

Les  concours  pour  l'acclimatation  des  plantes  pota- 
gères ou  légumineuses,  et  celui  pour  les  fruits  origi- 


(  *iï  ) 

naires  d'un  pays  plus  chaud  dont  on  aurait  constate  la 
maturation  annuelle,  sont  continués.  Les  amateurs  et 
cultivateurs  des  Provinces  méridionales  du  Royaume , 
admis  indistinctement  a  ce  concours ,  n'en  sont  peut-être 
pas  assez  régulièrement  instruits.  Pour  donner  une  plus 
grande  publicité  a  leurs  programmes  et  a  leurs  actes  ,  les 
Sociétés  royales  d'Agriculture  et  des  Beaux-Arts  de  Gand, 
ont  trouvé  bon  qu'un  recueil  périodique ,  sous  la  dénomi- 
nation de  Messager ,  portât  a  la  connaissance  du  public 
les  programmes  et  les  travaux  des  deux  institutions. 

La  Société  avait  proposé  une  médaille  d'honneur  et 
60  florins  des  Pays-Bas,  pour  une  description  exacte 
des  instrumens  et  outils  aratoires  et  de  jardinage,  em- 
ployés en  cette  Province ,  dans  l'intention  de  les  réunir 
dans  une  petite  dimension  ;  a  fin  de  faciliter  ce  travail, 
elle  n'avait  demandé  que  la  description  exacte  de  ceux 
employés  dans  les  districts  de  Gand  et  d'Oudenarde ,  en 
y  joignant  l'indication  exacte  des  différences  de  chaque 
instrument  dans  les  diverses  parties  de  la  Flandre  orien- 
tale, et  les  motifs  qui  auraient  porté  les  cultivateurs  a 
leur  donner  la  préférence.  —  L'étendue  des  districts 
de  Gand  et  d'Oudenarde,  les  frais  de  déplacement  pour 
prendre  sur  le  lieu  des  indications  précises ,  sont  pro- 
bablement la  cause  qu'il  n'y  a  point  eu  de  concurrens 
pour  ce  prix.  La  Société  n'abandonne  pas  la  question  5 
elle  tâchera  d'engager  les  concurrens  a  y  répondre  sous 
des  conditions  plus  favorables. 

Une  commission  s'est  rendue  chez  les  cultivateurs- 
pépiniéristes ,  Membres  de  la  Société  en  cette  ville;  et 
dans  des  visites  inattendues ,  a  su  apprécier  le  mérite 
de  chacun  d'eux.  Elle  a  invité  la  Société  a  adjuger  la 
médaille  d'honneur  pour  la  pépinière  d'arbres  a  fruits, 
la  plus  riche  eu  espèces  et  la  mieux  soignée  ,   a  notre 


(  "ï  ) 

confrère  M.  Jean  van  Geert;  a  accorder  des  mentions 
honorables  a  MM.  Ferschaffelt,  Lanchnanet  François 
Spae,  et  a  donner  a  M.  F.  van  D anime»  des  éloges 
pour  la  belle  tenue  de  sa  riche  pépinière  déjà  précédem- 
ment couronnée  et  qui  promet  de  devenir  la  plus  riche 
de  la  Province. 

Le  prix  d'encouragement  accordé  au  jardinier  qui 
soigne  ie  mieux  dans  la  Province,  le  potager^  les  arbres 
fruitiers,  les  arbres  et  plantes  d'agrément  de  ses  maî- 
tres, nous  a  fait  faire  dans  le  district  de  St.  Nicolas  une 
tournée  et  des  observations  intéressantes.  Cette  partie 
de  la  Flandre  orientale,  mieux  connue  chez  l'étranger  sous 
le  nom  de  pays  de  Waes ,  mérite  a  juste  titre  l'admira- 
tion que  lui  portent  les  nations  agricoles  étrangères. 

La  commission  nommée  a  cet  effet,  rend  au  district 
de  St.  Nicolas  la  justice  que  lui  méritent  de  belles  col- 
lections de  plantes  d'agrément  et  potagères  et  des  pé- 
pinières uniques  peut-être  en  arbres  a  fruits,  d'agré- 
ment et  des  forêts  ;  chargée  seulement  d'adjuger  la 
médaille  d'encouragement  au  jardinier  qui  soignait  le 
mieux  les  plantes  potagères,  les  plantes  d'agrément, 
les  arbres  fruitiers  et  autres  végétaux  de  serre  et  d'oran- 
gerie de  ses  maîtres ,  elle  regrette  de  n'avoir  pu  en 
offrir  une  a  François  Niels,  jardinier  de  M.  Lebegue 
a  St.  Nicolas,  notre  confrère,  au  nom  duquel,  la  So- 
ciété attache  de  si  doux  souvenirs.  La  belle  et  soigneuse 
tenue  du  jardin  de  plantes  d'agrément  de  M.  Alex. 
Janssen,  fabricant  a  St.  Nicolas,  fait  également  hon- 
neur au  zèle  et  a  l'intelligence  de  ses  jardiniers. 

Propriétaire  de  vastes  possessions  récemment  rendues 
a  la  culture  a  Exaerde ,  M.  Vranken ,  de  Lokeren ,  ama- 
teur distingué  des  beaux-arts,  a  montré  en  cultivant  ses 
terres  par  lui-même  et  en  soignant  ses  superbes  planta- 


(  i«8  ) 

tions,  comment  un  père  de  famille  travaille  à  la  fois 
dans  l'intérêt  de  ses  en  fan  s  et  pour  le  progrès  de  l'éco- 
nomie rurale. 

La  commission  frappée  du  bel  entretien  des  planta- 
tions de  M.  Vranken ,  a  Exaerde ,  et  satifaite  des  soins 
que  prend  son  jardinier  Jacques  Janssens  de  ses  plantes 
et  arbres   d'agrément ,    demande    que    le  nom   de    cet 
estimable  jardinier  soit  porté  sur  le  tableau  de  ceux  de 
la  Province ,  que  la  Société  mentionne  honorablement. 
Le  district  de  St.  Nicolas  offre  partout  des  plantations 
nouvelles  qui  joignent  l'utile  à  l'agréable  :  faire  Pénu- 
mération  des  jardiniers  qui  se  distinguent  dans  les  di- 
verses brandies  de  la  belle  culture,  ne  rentre  pas  dans 
les  attributions  des  commissaires  ;  ils  ne  peuvent  cepen- 
dant se  dispenser  de  mentionner  le  jardinier  Benedict 
D'Hooge,  qui  soigne  si  bien  a  Belcele,  campagne  de  M. 
Vande  Voorde ,  le  jardin  potager  elles  plantes  d'agrément. 
Basele  et  ses  environs  terminèrent  la  tournée  si  diffi- 
cile   de   la   commission.    La   belle  campagne  de  M.  le 
comte  Vilain  XIIII,  offrit  enfin  un    ensemble  complet 
de  plantes  potagères ,  d'arbres  a   fruits  ,   de  plantes  et 
d'arbustes  de  pleine  terre,   d'orangerie,   de  couches, 
de  serres  tempérées  et  de  serres  chaudes ,  le  tout  con- 
duit par  le  jardinier  Jean-Baptiste  Fischer;  cette  réu- 
nion des  cultures  différentes  exigée  par  le  programme , 
trouvée  dans  un   état  si  parfait ,  mérite  des  éloges  au 
jardinier  et  sur-tout   a  son   maître. 

Les  frères  Carels ,  jardiniers,  cultivateurs  de  plantes 
potagères  a  Tamise,  et  les  frères  Fan  Biesen,  a  St. 
Nicolas,  cultivateurs,  propriétaires  d'une  pépinière  qui 
offre  en  toutes  espèces  d'arbres  une  collection  unique 
en  cette  Province ,  ne  pouvant  être  mis  sur  le  rang  des 
jardiniers  auxquels   la   Société  se  propose  de  remettre 


C   ny) 

des  médailles  d'honneur ,  apprendront  sans  doute  avec 
plaisir  que  la  Socie'té  a  sçu  apprécier  leur  mérite  en 
accordant  a  leurs  plantations  les  éloges  dont  elles  sont 
dignes. 

La  Société ,  sur  le  rapport  de  la  commission ,  voulant 
provoquer  une  utile  émulation  entre  les  jardiniers  de 
la  Province,  et  récompenser  le  soin  et  le  dévouement 
que  portent  ces  hommes  estimables  aux  intérêts  de 
leurs  maîtres ,  adjuge  la  médaille  d'encouragement  a 
/.  B.  Fischer,  jardinier  de  M.  le  comte  Vilain  XII1Ï, 
a  Basele;  la  mention  honorable  au  jardinier  de  M.  Vran- 
ken ,  a  Exaerde,  Jacques  Janssens;  et  a  celui  de  M.  le 
greffier  Lebegue,  François  Niels,  a  St.  Nicolas.  Elle 
arrête  que  les  noms  des  jardiniers  de  M.  Alexandre 
Janssen,  a  St.  Nicolas,  celui  de  Benedict  D'Ifooge,  a 
Belcele ,  seront  consignés  parmi  ceux  des  jardiniers 
les  plus  méritans  de  la  Flandre. 

Un  antre  prix  annuel  est  accordé  en  cette  séance, 
aux  jardiniers  des  environs  de  Gand ,  qui  sur  une 
terre  ingrate  cultivent  avec  succès  des  plantes  pota- 
gères ou  légumes,  et  des  arbres  a  fruits  qui  se  font 
distinguer  sur  nos  marchés.  L'industrie ,  l'amour  du 
travail  sont  des  qualités  si  communes  parmi  les  culti- 
vateurs-jardiniers de  Gand  et  de  ses  environs,  que  la 
commission,  nommée  pour  adjuger  la  médaille  d'encou- 
ragement, n'en  ayant  qu'un  seul  a  désigner,  a  regretté 
de  ne  pouvoir  faire  tomber  son  choix  que  sur  le  jardinier- 
cultivateur  Pierre  Bruyneel ,  faubourg  de  Saint-Pierre. 

De  toutes  les  classes  d'hommes  qui  se  livrent  a  la 
culture  de  la  terre ,  il  n'en  est  aucune  qui  doive  donner 
plus  de  preuves  d'industrie,  d'application  au  travail  et 
montrer  une  plus  infatigable  activité  que  celle  qui  en- 
treprend de  féconder  une  terre  inculte  et  revêche,  par 


(    12°    ) 

l'exploitation  de  laquelle  elle  compte   sur-tout  trouver 
des  moyens  de  subsistance. 

Mais  ce  n'est  point  a  des  ouvriers,  c'est  a  des  pro- 
priétaires, a  des  personnes  aisées  qu'il  appartiendrait 
de  rendre  a  la  culture  les  sables  et  terres  incultes  des 
environs  de  Gand. 

La  Société,  en  appellant  l'attention  des  propriétaires 
sur  la  culture  d'un  sablon  mouvant  contigu  à  la  chaus- 
sée de  Gand  a  Termonde ,  saisit  cette  occasion  de 
donner  a  son  propriétaire  M.  l'architecte  Van  de  Cap- 
pelle,  notre  confrère,  une  marque  publique  de  l'estime 
qu'elle  fait  de  son  intelligente  exploitation. 

Au  langage  de  satisfaction  que  doivent  produire  tant 
de  travaux  et  de  succès,  il  m'est  pénible,  Messieurs, 
de  faire  succéder  les  expressions  de  la  douleur. 

L'année,  depuis  le  dernier  Rapport  de  vos  travaux, 
a  été  signalée  par  des  pertes  sensibles  :  la  mort  nous  a 
enlevé  le  cultivateur  Pierre  de  Reu,  dont  le  nom  se 
rattache  a  la  belle  culture  que  l'on  se  plaît  a  admirer 
dans  les  environs  de  Gand  5  c'est  son  exemple  qui  dé- 
termina ses  voisins  a  adopter  les  bonnes  méthodes  agri- 
coles. Arbitre  de  leurs  différens  et  de  leurs  doutes,  il 
fut  toujours  pour  eux  un  père  et  un  ami  qu'ils  regret- 
tent encore  ;  les  enfans  de  ce  cultivateur  en  l'honneur 
duquel  nous  avons  exposé  un  arbre  funéraire,  ont  hé- 
rité de  ses  vertus;  et  la  Société  conserve  la  bêche  de 
cet  homme  estimable  comme  un  pieux  souvenir. 

Vous  avez  encore  perdu  pendant  le  courant  de  l'année 
un  des  premiers  directeurs  du  jardin  des  plantes  de  cette 
ville,  M.  le  chev.  Ch.  Diericx,  ancien  conseiller  pen- 
sionnaire de  Gand ,  attaché  des  premiers  a  notre  insti- 
>  tution  ;  il  a  montré  pendant  toute  sa  vie ,  combien  un 
esprit  ardent  et  éclairé  peut  embrasser  a  la  fois  d'objets 


(    121    j 

différens  :  avide  de  toute  espèce  d'instruction  ,  aucune 
ne  lui  était  étrangère;  ses  recherches  sur  l'état  de  la 
ville  de  Gand ,  dans  un  tenis  dont  il  ne  nous  reste 
aucun  monument  historique,  nous  avaient  fait  espérer 
des  recherches  du  même  genre  sur  la  culture  de  diffé- 
rentes espèces  d'arbres  a  fruits  et  sur  notre  ancienne 
agriculture  ;  la  mort  ne  lui  a  point  permis  de  tenir  ses 
promesses. 

Une  perte  non  moins  douloureuse  que  les  précé- 
dentes ,  est  celle  du  cultivateur  M.  J.  B.  Mondez , 
bourguemaître  de  la  commune  de  Frasnes,  arrondisse- 
ment de  Charleroy.  Auteur  d'un  mémoire  sur  les  avan- 
tages de  la  culture  flamande  et  sur  l'abolition  des  jachères, 
la  Société  centrale  d'Agriculture  de  Paris,  avait  remis 
une  médaille  d'or  a  cet  intelligent  cultivateur  qui  joignit 
si  bien  Pexemple  a  la  théorie  en  introduisant  le  premier 
la  culture  flamande  dans  ses  terres  et  en  y  supprimant 
les  jachères. 

Vous  avez  fait  récemment  une  quatrième  perte  dans 
la  personne  de  M.  Lambrechtsen  de  Rithem,  membre 
de  différentes  institutions  savantes ,  président  de  la  so- 
ciété Zélandaise ,  a  Middelbourg  ;  ses  qualités  éminentes 
étaient  relevées  par  celle  d'un  cœur  excellent  :  doué 
d'une  vaste  érudition ,  d'un  jugement  sain  et  d'une 
âme  aimante  et  désintéressée,  la  Société  qui  a  eu  le 
bonheur  de  le  compter  au  nombre  de  ses  Membres, 
a    voulu   aussi    payer    a    sa    mémoire    un   juste   tribut 

d'estime. 

Vous  avez,  Messieurs,  en  cette  séance,  exprimé  des 
sentimens  de  regret  pour  des  Collègues  qui  ne  sont 
plus;  vous  exprimerez  avec  plus  de  satisfaction  ceux 
de  la  reconnaissance  envers  nos  bienfaiteurs. 

Une  réunion  d'Amis  de  la  Botanique,  Membres  de  la 

ffl1™   livraison.  9 


(  123  ) 
Société,  a  fait  l'acquisition  de  la  Flore  Je  la  Province 
et  du  bel  Herbier  de  l'eu  notre  Collègue  Ch.  Van  Hoo- 
rebeke,  ils  se  présentent  les  premiers  a  nos  souvenirs 
et  a  nos  affections;  et  quant  a  la  manière  dont  ce  tra- 
vail nous  a  été  remis ,  nous  devons  aussi  de  la  recon- 
naissance a  M.  J.  van  Hoorebeke,  notre  Collègue,  frère 
du  défunt. 

Nous  en  devons  encore  a  notre  excellent  Confrère 
M.  Broaeger  qui ,  de  Hoogly  au  Bengale ,  nous  a  fait 
remettre  une  riche  collection  de  semences ,  récemment 
recueillies  dans  les  Indes  sur  les  monts  Himalaya. 

Le  jardin  des  plantes  de  Gand,  attaché  a  l'Univer- 
sité, a  reçu  de  la  Société  le  gage  de  l'affection  que 
nous  porte  cet  ami  de  la  Botanique ,  et  notre  digne 
Confrère  M,  Mussche ,  auquel  M.  le  professeur  Van 
Breda  a  confié  ces  semences ,  nous  fait  espérer  une 
heureuse  croissance  de  végétaux  qui  augmenteront,  a 
ne  pas  en  douter,  les  richesses  d'un  établissement  qui 
conserve  chez  l'étranger  et,  a  bien  juste  titre,  la  ré- 
putation de  supériorité  que  les  amis  de  la  Botanique 
lui  ont  acquise. 

Plusieurs  ouvrages  recommandables  ont  été  envoyés 
a  la  Société.  La  bibliothèque  doit  a  la  munificence  de 
S.  E.  le  Ministre  de  l'instruction  publique,  la  conti- 
nuation de  la  Flora  Bataçay  de  M.  J.  Kops,  notre 
Confrère. 

Elle  doit  de  la  reconnaissance  a  l'Académie  des 
sciences  de  Bruxelles  ,  pour  l'envoi  de  ses  Mémoires , 
et  a  M.  Lefebvre,  éditeur  du  journal  d'agriculture  de  la 
même  ville,  pour  celui  de  son  intéressant  recueil. 

M.  le  professeur  Van  Breda  a  bien  voulu  se  charger 
de  nous  remetlre  au  nom  de  M.  le  professeur  Sandifort , 
le   catalogue    du   jardin   de    Leyden  ,    et   M,    l'avocat 


(    Ï23    ) 

D'Hoop,  celui  des  plantes  que  M.  Bceldsnyder  cultive 
a  sa  campagne  Je  Ruppelmonde,  province  de  Hollande. 

M.  Le  Jeune,  médecin  h  Verviers,  nous  a  adressé 
la  thèse  qu'il  a  défendue  pour  son  doctorat  a  l'Uni- 
versité de  Liège.  M.  Desmazieres ,  amateur-botaniste  a 
Lille  et  M.  Dumortier-Tliitteau ,  secrétaire  de  la  Société 
d'Horticulture  aTournay,  leurs  recherches  botaniques. 

La  Société  tient  de  M.  Van  Mons,  professeur  a  l'Uni- 
niversité  de  Louvain ,  notre  savant  Confrère ,  un  cata- 
logue descriptif  abrégé ,  contenant  une  partie  des  arbres 
fruitiers  qui,  depuis  1798  jusqu'en  i8'i5,  ont  forai é 
sa   superbe  collection. 

M.  Piérard  a  fait  passer  a  la  Société  son  mémoire 
couronné  par  la  Société  royale  et  centrale  d'Agriculture 
à  Paris,  sur  la  culture  des  arbres  a  cidre  dans  un  pays 
où  elle  n'est  pas  encore  connue. 

Nous  tenons  de  M.  Thiebaut  de  Berneaud,  Membre 
correspondant  de  la  Société,  la  relation  de  la  première 
fête  champêtre  célébrée  par  la  Société  Linnéenne  de 
Paris. 

M.  Huzard  nous  a  communiqué  différens  rapports 
faits  a  la  Société  royale  et  centrale  d'Agriculture  à  Paris, 
sur  le  concours  pour  les  mémoires  et  observations  pra- 
tiques de  médecine  vétérinaire. 

M.  André  Thouin,  notre  Confrère,  nous  a  envoyé, 
comme  un  hommage  d'attachement  a  la  Société  (  ce 
sont  les  expressions  de  ce  savant  ) ,  ses  mémoires  sur 
différentes  nouvelles  sortes  de  greffes,  une  instruction 
sur  la  greffe  du  caffeyer,  la  description  d'une  nou- 
velle espèce  de  poirier,  des  notes  sur  la  culture  et  les 
usages  du  chêne  a  glands  doux  (quercus  ballota)  et  du 
pin  Laricio  de  Corse  (pinus  Laricio.),  etc. 


(  «-24  ) 

Les  relations  de  la  Société  avec  celles  qui  se  réunis- 
sent dans  les  mêmes  vues  sont  établies  ou  continuées. 

La  Société  royale  et  centrale  d'Agriculture  a  Paris 
nous  a  envoyé  par  l'entremise  de  M.  le  Secrétaire-perpé- 
tuel Silvestre,  notre  Confrère,  le  Rapport  de  ses  tra- 
vaux et  une  notice  biographique  sur  M.  le  marquis  De 
Cubières  ;  l'envoi  fait  de  cette  notice  a  justifié  l'ex- 
pression de  notre  douleur  et  l'hommage  de  nos  regrets 
pour  un  savant  modeste,  a  la  mémoire  duquel  la  Société 
royale  de  Paris  a  rendu  les  mêmes  devoirs. 

La  Société  Economique  de  Harlem,  dirigée  par  des 
hommes  dont  nouc.  apprécions  le  mérite,  nous  a  fait 
remettre  les  apperçus  de  ses  travaux  ,  ses  programmes 
et  ses  notices  d'expositions  de  plantes.  L'Académie 
d'Utrccht  a  l'extrême  obligeance  de  nous  continuer 
l'envoi  des  programmes  qu'elle  publie  chaque  année 
pour  l'encouragement  des  arts  et  des  sciences. 

Les  Sociétés  d'Horticulture  de  Tournay,  de  Bota- 
nique de  Louvain,  de  Flore  de  Bruxelles,  nous  ont 
fait  passer  le  catalogue  de  leurs  expositions  de  plantes; 
a  cet  égard,  je  ne  puis  me  dispenser  d'ajouter  ici  avec 
une  espèce  d'orgueil,  que  l'exemple  donné  par  la  So- 
ciété de  Gand,  réagit  trop  puissamment  sur  tous  les 
points  du  Royaume ,  pour  ne  pas  croire  a  l'érection 
prochaine  de  nouvelles  institutions  en  ce  genre  dans 
toutes  nos  Provinces. 

Nos  relations  s'étendent  partoul  :  l'intérêt  que  nous 
portent  la  Société  royale  d'Agriculture  et  la  Société 
Liunéenne  de  Paris,  celle  de  New-Yorck ,  le  Bureau 
d'Agriculture  et  la  Société  d'Horticulture  de  Londres, 
l'administration  du  bel  établissement  botanique  de  Cal- 
cuta  et  autres  institutions  botaniques    étrangères,   ne 


(  ia5  ) 

se  home  pas  a  des  lettres  souvent  stériles,  ce  sont 
des  envois  précieux  de  graines ,  de  semences  d'ar- 
bustes et  la  communication  d'ouvrages  précieux  sur 
l'agriculture,  pour  lesquels  nous  renouvellerons  ici  les 
expressions  de  notre  reconnaissance.  S'il  fallait  insérer 
indistinctement  dans  le  cadre  de  votre  Rapport,  Mes- 
sieurs, toutes  les  personnes  qui  ont  bien  mérité  de  la 
patrie,  par  les  services  qu'ils  ont  rendus  a  l'Agricul- 
ture, à  l'Horticulture  et  a  la  Botanique,  il  n'est  pas 
depuis  le  modeste  échantillon  du  Dianlhus  cœsius  , 
cueilli  sur  des  rochers  incultes  dans  L'arrondissement 
de  Dinant,  par  M.  De  Cloet ,  de  Bruxelles,  jusqu'aux 
étonnantes  plantations  de  nos  colonies  nouvelles  ,  qui 
ne  dussent  y  tenir  leur  place. 

La  Société  regrette  que  les  noms  des  personnes  qui 
par  l'introduction  de  nouvelles  productions  exotiques, 
céréales,  arbres  fruitiers,  arbres  et  arbustes  d'ornement, 
contribuent  a  embellir  nos  jardins  et  fournissent  des 
substances  utiles  aux  arts,  lui  soient  pour  la  plupart 
inconnues  ;  elle  les  désigne  collectivement  a  la  recon- 
naissance nationale,  comme  ayant  bien  mérité  de  l'Agri- 
culture et  de  la  Botanique. 

Pour  finir  la  tâche  qui  m'est  imposée ,  Messieurs ,  il 
est  de  mon  devoir  de  vous  entretenir  un  instant  sur  le 
désir  que  vous  avez  exprimé  que  des  plantations  en 
pépinières  d'arbres  forestiers  entr'autres  fussent  recom- 
mandées au  Gouvernement  ;  le  dépérissement  de  nos 
forêts  de  chênes,  le  dépouillement  de  leurs  écorces, 
l'abattis  des  chênes  avant  maturité ,  ont  justifié  vos 
craintes  et  vos  vœux  ;  ils  ont  porté  le  Ministère  h 
encourager  la  culture  d'autres  arbres  dissiminés  en  ce 
Royaume,  et  dont  le  bois  et  l'écorce  ne  le  cèdent  en 
rien  a  ceux  des  chênes  que  nous  cultivons.  Les   vues 


(  1^6  ) 

bienfaisantes  du  Gouvernement  se  ne  bornent  pas  à 
h  encourager  la  culture  du  Larix  dans  les  Provinces 
méridionales  du  Royaume  ;  elles  sont  générales  pour 
l'amélioration  de  toutes  les  branches  de  l'Agriculture 
et  de  l'Economie  Rurale. 

La  Société  saisit  cette  occasion  d'exprimer  publique- 
ment sa  reconnaissance  a  S.  E.  M.  Falck ,  pour  l'ho- 
norable confiance  qu'il  a  bien  voulu  témoigner  a  la  So- 
ciété en  mettant,  cette  année,  a  sa  disposition  des 
fonds  pour  encourager  les  progrès  de  notre  Agriculture. 

Puisse  Sa  Majesté,  protecteur  de  la  Société  d'Agri- 
culture et  de  Botanique  de  Gand,  apprendre  de  nos 
honorables  Président  et  Vice-Président,  que  la  Société, 
fidèle  exécutrice  des  intentions  bienveillantes  du  Roi , 
ose  demander  que  son  auguste  protection  lui  soit  con- 
tinuée et  qu'elle  daigne  apostiller  notre  supplique  d'un 
Je  Maintiendrai. 


BULLETIN 
DES  ACADÉMIES   ET  SOCIÉTÉS  SAVANTES. 


INSTITUT    ROYAL    DES    PAYS-BAS. 


Aja  classe  des  beaux-arts  avait  proposé  pour  1822  un 
prix  de  3oo  florins  à  l'auteur  de  la  gravure,  jugée  la 
meilleure,  d'après  l'ouvrage  d'un  artiste  vivant. 

Quatre  pièces  sont  parvenues  a  la  classe:  i°  un  pay- 
sage, d'après  M.  Hanssen ;    20  un  idem,    d'après  M. 


(  ï*l  ) 

Brondgeest  ;  5°  Narcisse,,  d'après  M.  Odevaere;  4° 
Phèdre  dévoilant  son  crime  à  Thésée ,  d'après  le  même. 

La  commission ,  chargée  de  Pexamen  des  pièces , 
aurait  vu  avec  plaisir  que  toutes  ces  gravures  eussent 
assez  de  perfection  pour  se  disputer  la  palme,  ou  qu'une 
d'elles  fût  assez  parfaite  pour  déterminer  la  classe  a 
décerner  le  prix. 

La  classe,  d'après  les  conditions  généreuses  du  pro- 
gramme ,  qui  laissait  le  choix  du  sujet  a  l'artiste  même , 
s'était  attendue  'a  ce  qu'un  graveur  expérimenté  se  mît 
sur  les  rangs  avec  un  ouvrage  en  quelque  sorte  parfait 
et  qui  déjà,  destiné  au  public,  n'aurait  acquis  que  plus 
de  valeur  par  la  palme  académique. 

Deux  pièces  seulement  ont  fixé  l'attention  de  la  com- 
mission, le  paysage  d'après  M.  Brondgeest  et  la  Phèdre 
d'après  M.  Odevaere.  Elle  a  examiné  d'abord  s'il  ne 
convenait  pas  d'avoir  plus  d'indulgence  pour  cette 
branche  de  l'art  que  pour  toute  autre,  et  si,  dans  le 
présent  cas,  quoique  l'Institut  ne  puisse  pas  décerner 
des  prix  d'encouragement,  il  ne  serait  pas  utile  de  faire 
une  exception;  la  commission  a  trouvé  aussi  de  la  diffi- 
culté a  recommander  particulièrement  l'une  ou  l'autre 
des  deux  pièces.  Elle  remarquait  dans  le  paysage  une 
certaine  originalité,  qui  faisait  juger  que  l'artiste  était 
capable  d'exécuter  des  sujets  d'une  plus  grande  impor- 
tance, qu'il  avait  en  quelque  sorte,  saisi  le  ton  et  la 
couleur  du  maître,  mais  qu'en  général  il  était  monotone 
et  sec  et  de  trop  peu  d'importance  pour  être  considéré 
comme  objet  d'art.  Le  sujet  historique  démontre  certai- 
nement du  talent  et  de  la  disposition  naturelle  dans  l'exé- 
cution des  physionomies  et  des  draperies  de  Thésée  et 
de  Théramène,  mais  on  remarque  dans  d'autres  parties, 
une  certaine  faiblesse,  nommément  dans  les  figures  des 


(  «rô  ) 

femmes,  qui  nuit  a  l'ensemble  et  décèle  une  manière 
encore  incertaine. 

Une  entreprise  pareille  mériterait  sans  doute  un  en- 
couragement, mais  la  commission  croit  ne  pouvoir  en- 
gager la  classe  a  décerner  le  prix,  et  soumet  son  avis 
au  jugement  éclairé  des  membres. 

La  classe  reconnaît  avoir  trouvé  des  preuves  d'un 
vrai  mérite  et  de  bonnes  dispositions  dans  la  gravure 
de  la  Phèdre;  elle  aurait  volontiers  décerné  a  cet  ou- 
vrage un  prix  d'encouragement  si  cette  mesure  eût  été 
compatible  avec  les  statuts  de  cette  institution. 

Après  la  lecture  de  ce  rapport  fait  par  M.  Versteegh, 
la  commission  chargée  de  rendre  compte  du  concours 
de  peinture,  dont  le  sujet  était:  l'arrivée  d'Hugues  de 
Groot  dans  la  maison  de  Daalselaar  à  Gorcum ,  après 
sa  fuite  du  château  de  Loevestein  ,  a  fait  connaître  par 
l'organe  de  M.  Molkenboer  le  résultat  suivant  de  ses 
délibérations  :  deux  pièces  ont  été  envoyées  a  la  classe  j 
mais,  tout  en  rendant  hommage  aux  talens  des  con- 
currens,  la  commission  est  d'opinion  qu'aucune  des 
pièces  n'est  assez  parfaite  pour  mériter  le  prix. 

L'état  florissant  de  la  peinture  et  le  grand  nombre 
d'artistes  qui  s'y  distinguent,  tant  dans  les  Provinces 
méridionales  que  septentrionales  du  Royaume,  avait 
fait  espérer  qu'un  plus  grand  nombre  de  peintres  se 
seraient  mis  sur  les  rangs  et  auraient  rendu  ce  concours 
en  quelque  sorte  général  pour  les  deux  écoles  actuel- 
lement réunies. 

La  Classe,  après  avoir  pris  en  considération  les  rap- 
ports des  commissions  respectives,  déclare  que  le  prix 
de  gravure  et  celui  de  peinture  ne  seront  point  décernés. 

Ensuite  le  secrétaire  fait  lecture  du  programme ,  d'après 
lequel  la  classe  des  beaux-ails  décernera  une  médaille 


(  >'->9  ) 
d'or  de  la   valeur  de  trois   cents   florins  a  l'auteur  du 
plan,  jugé  le   meilleur,  d'une  salle  de  spectacle   pour 
l'une  des  grandes  villes  du  Royaume. 

Les  artistes,  ne's  ou  domiciliés  dans  le  Royaume  des 
Pays-Bas,  sont  invités  a  concourir  pour  ce  prix. 

Les  pièces  doivent  être  envoyées,  franc  de  port, 
avant  le  ir  Mars  io:>4,  au  secrétaire  de  la  classe,  a 
l'hôtel  de  l'Institut ,  a  Amsterdam. 

Les  artistes  qui  désirent  de  plus  amples  renscigne- 
mens ,  peuvent  se  procurer  les  programmes  de  ce  prix 
a  la  société  royale  des  beaux-arts  a  Gand. 


SOCIÉTÉ   D'AGRICULTURE  ET  DE  BOTANIQUE  DE  GAND. 


Salon  d'été. 


JL  exposition  des  Fleurs  a  eu  lieu  le  29  Juin  dernier;  elle  s'est 
fait  remarquer  aussi  bien  par  le  grand  nombre  des  plantes  expo- 
sées que  par  la  beauté  des  fleurs. 

La  médaille  pour  la  plante  qui  par  sa  rareté  mérite  d'être  dis- 
tinguée, a  été  adjugée  à  la  presque  totalité  des  voix,  au  superbe 
Gastonia  palmata  ,  de  la  collection  de  M.  Caters-De  Wolf ,  à 
Berchem  près  d'Anvers. 

M.  Josse  Verleeuwen,  cultivateur,  jardinier,  fleuriste  et  pépi- 
niériste à  Gand ,  a  reçu  la  médaille  d'honneur  pour  la  collection 
la  plus  riche  eu  plantes  nouvellement  introduites,  remarquables 
par  leur  rareté  et  par  leur  culture. 

Le  prix  de  Belle  Culture  a  été  adjugé  au  Kalmia  lat/'folia  , 
de  la  collection  de  M.  J.  Van  Crombrugge,  à  Gand,  membre 
des  états-généraux. 

Le  premier  accessit  a  été  décerné,  à  la  suite  de  trois  scrutins, 
à  YEugciiia  jambus,  n°  Go5 ,  de  la  collection  de  M.  Van  de 
Wocstyne-Ktrrcmano,   à  Wondclghem. 


(  »5o  ) 

Le  deuxième  accessit,  au  Cy liant hus  ventricosus ,  n°  207,  de 
la  collection  de  M.  J.  de  Meulemeester-Van  Aken,  à  Maltebrugge. 

Les  autres  Plantes  et  Arbustes  qui  ont  été  admis  à  l'honneur 
d'entrer  en  lice,  emportent  par  cette  seule  distinction  la  mention 
honorable;  désignes  d'après  le  numéro  d'ordre  de  la  notice  des 
Plantes  exposées  ,  MM.  les  Juges  n'entendent  pas  y  attacher  la 
moindre  idée  de  priorité  ou  d'infériorité. 

N°    g3.  Erica  ventricosa ,   de  M.  Buyck- Valider  Meersch. 
a43.  Elœocarpus  cyaueus,  }    de  M.  l'avocat  F.   D'Hoop, 
a44.  Polygala  speciosa ,      \        collection  de  Heusden. 
rz5i.  Eriosthemum  dentatum  ,  de    M,   le    baron   Du  Bois -De 

Vroyelande,  collection  de  Maria-Leêrne. 
3o6.  Ixora  coccinea,  de  M.  P.  Gotthardt,  collection  de  Wet- 

teren. 

564.  EUchtysum  proliferum ,  >    T     __    _.     x    ,  ,  „      , 

_,      »r    .  ,        ,    '  i  de  M.  Ch.  Lefevre,  à  Gand. 

007.  JSerium  oleander ,  1 

54G.  Elichrysum  sesamoïdes ,  de  M.  Van  Berghen,  collection 
de  Maria-Leérne. 

682.  Amaryllis  vittata,   de  M.   Vauderlinden,  à  Gand. 

587.  Erica  ventricosa,  de  M.  Emm.  Vander  Meersch,  à  Gand. 

6o4.  Ardisia  solanacea,  de  M.  Vande  Woestyne-Kerremans. 

&62.  Dais  cotinifolia  ,  de  M.  Van  Tieghem-Vander  Meersch, 
collection  de  Gendbmgge. 

Ggc.  Erica  ventricosa,  de  M.  P.  Verleeuvven,  cultivateur- 
fleuriste,  à  Gand. 

6rj3.  Ardisia  crenata,  de  M.  P.  Verschaffelt ,  cultivateur- 
fleuriste  ,   à  Gand. 

69g.  Gardénia  Jlorida  ,  fl.  pi. ,  de  M.  le  vicomte  Vilain  XII1I , 
collection  de  Wetteren. 

Au  nombre  des  autres  Plantes  qui  embellissent  le  Salon,  MM. 
les  Juges  distinguent  sur-tout  la  culture  du  Pandanus  humilis , 
du  Sagus  rumphii  „  exposés  pour  S.  M.  le  Roi  ;  du  Crinum  spe- 
ciosum ,  de  M.  N.  de  Cock;  du  Cactus  speciosus  et  du  Gloxi- 
nia  speciosa,  de  M.  le  baron  Baul-De  Rasmon  ;  de  VErythrina 
herbacca,  de  M.  le  vicomte  Vilain  X1III.  ;  des  deux  Nerium 
splcndcns,  cultivés  par  M.  Verschaffelt;  du  Bégonia  guitata,  de  M. 
Wkgcis,  à  Malines;  du  Clethra  arborea ,  de  M.  J-  van  Geert  ;  de 
YElychrisum  proliferum,  de  M.  Burggrave  ;  du  Pclargoniuni 
davianum  et  du  Plumbago  capensis  ,  de  M.  L.  Papeleu;  et  du 
Lasiopetalnm  put  pure  uni ,  de   M.  Jossc  Vcrleeuwen  ,  père. 


(  i3i  ) 

Plantes  envoyées  au  Concours  pour  la  médaille  d'honneur 
à  décerner  à  la  plante  la  plus  rare,  pai  M.  Gateïis- 
de  Wolf  ,  de  sa  collection  de  Bercliem ,  près 
d'Anvers. 

Banksia  marcescens.  T/ansaclionsofthc  Linnœa  Society  ofLondon. 

Gaslonia  palmata.     Commerson ,   Lamarck. 

Dracœua  termiualis.     Lin.  7'arietas. 

Enkiautbus  quinqueflora.     Loureiro ,  fl.   Cochinchinensis. 

Plante  envoyée  pour  le  même  Concours ,  par  M.  Josse 
Verleeuwen,  cultivateur,  fleuriste  et  pépiniériste 
à  Gancl. 

Eukianthus  quinqueflora.     Loureiro  Jl.  Cochinchinensis. 


Plantes  envoyées  au  Concours  pour  la  collection  la  plus 
riche  en  plantes  rares ,  par  M.  Josse  Verleeuwen, 
cultivateur,  fleuriste  et  pépiniériste  à  Gand. 

Kamellia  sasauqua,  var.  rosea.   Thunberg. 

welbaukii,    hort.  angl. 

oleifera ,  hort.  angl. 

Strelitzia  humilis,  hort.  angl. 

Combretum  purpureum,   Vahl. 

Eugenia  Malaceusis,  Lin. 

Laurus  glauca  ,    Thunberg. 

Bonapartia  juncea,  Ruiz  fl.  Peruv. 

Brachysema  undulata,   var.   Brachysemae  latifol. 

Magnolia  macrophylla ,   Michaux. 

Thompsonia ,  Botan.   mag.  N°  2i64. 

Rhododcndrum  arboreum,  Smith. 


(  »3?  ) 

PRIX    POUR    LA    CULTURE    DU    MELEZE. 


La  culture  du  Mélèze,  Larix  Europœa,  H.  P.  ;  PintU  Larix, 
Lin.,  appartient  au  nord  de  l'Europe:  elle  se  refuse  complètement 
aux  pays  chauds,  s'accoutume  facilement  aux  tempérés  et  réussit 
même  bien  sous  le  climat  de  Paris. 

La  culture  d'un  arbre  dont  l'écorce  s  emploie  avec  succès  dans 
les  tanneries  et  dont  le  bois  ne  le  cède  à  aucun  autre  pour  la 
charpente,  la  menuiserie,  les  conduits  d'eau,  etc.  et  qui  parait 
réunir  des  qualités  que  n'ont  pas  les  autres  arbres  de  nos  Provîn- 
tes,  a  fixé  l'attention  de  la  Société  royale  d'Agriculture  et  de 
Botanique  de  Gand;  en  conséquence,  elle  a  résolu  de  décerner 
annuellement,  pendant  neuf  années  consécutives,  des  médailles 
d'honneur  aux  cultivateurs-propriétaires  des  plus  belles  et  des  plus 
riches  plantations  faites  en  Larix  ou  Mélèze  dans  les  Provinces 
méridionales  du  Royaume  des  Pays-Bas. 

Les  propriétaires-cultivateurs  qui  se  proposent  de  concourir  pour 
ce  prix,  seront  tenus  d'en  donner  avis,  franc  de  port,  au  Secré- 
taire de  la  Société  et  de  lui  faire  connaître  quelle  superficie  mé- 
trique ils  ont  dessein  d'ensemencer  en  Larix,  en  quelle  province 
et  en  quelle  commune  du  Royaume  la  plantation  aura  lieu ,  et 
l'époque  précise  de  l'ensemencement. 

Eu  1827,  la  Société  décernera  la  grande  médaille  en  or  et  vingt 
ducats  à  la  plantation  de  Larix,  la  plus  belle,  la  plus  riche  et  lu 
mieux  tenue,  ensemencée  dans  l'année  1824,  et  dont  l'annonce 
aura  été  faite  dès  le  premier  semis.  Cette  même  médaille  sera  con- 
tinuée d'année  en  année  à  dater  de  1827,  pour  les  plantations 
faites  depuis  trois  ans. 

Les  propriétaires  des  plantations  de  Larix,  cultivés  pour  le 
concours,  devront  en  faire  l'annonce  de  nouveau,  franc  de  port, 
au  bout  des  trois  années  de  culture,  à  M.  /.  B.  Delbecq,  Secré- 
taire  de  la  Société,  vers  la  fin  du  mois  de  Mars  de  chaque  année. 

En  i832,  la  Société  proposera  un  coucours  général  entre  toutes 
les  plantations  de  Larix  semés  et  cultivés  dans  les  Provinces  mé- 
ridionales du  Royaume. 

Les  Commissions  d'Agriculture  des  Provinces  méridionales  se- 
ront invitées  à  vouloir  bien  seconder  la  Société  dans  ses  vues 
d'amélioration,  en  lui  donnant  les  informations  qu'elles  jugeront 
utiles  sur  les  nouvelles  plantations  de  Larix  qui  se  feraient  dans 
leurs  provinces  respectives. 


(  i55  ) 


VARIETES 


r  lusieurs  objets  d'arts  sont  déjà  arrivés  a  Gand  pour 
le  salon  d'exposition  qui  s'ouvrira  le  4  Août  prochain; 
au  nombre  des  pièces  arrivées  on  désigne  une  jolie 
Baigneuse,  statue  en  marbre  par  M.  Parmentier,  de 
Feluy  près  de  Nivelles.  Cet  artiste  vient  de  s'établir  dans 
sa  patrie  après  avoir  fait  ses  études  a  Paris  chez  les 
principaux  sculpteurs,  et  en  dernier  lieu  chez  MM.  Bosio 
et  Bridan. 

On  attend  tous  les  jours  les  portraits  en  pied  de 
LL.  AA.  RR.  et  II.  le  Prince  et  la  Princesse  d'Orange, 
par  M.  Kinson.  L'envoi  de  plusieurs  tableaux  est  an- 
noncé par  les  artistes  des  Provinces  septentrionales  et 
tout  fait  espérer  que  le  salon  de  cette  année  sera  bril- 
lant et  nombreux. 

—  La  lithographie  se  propage  d'une  manière  frap- 
pante; chaque  ville  commence  a  avoir  la  sienne  et  toutes 
rivalisent  de  zèle  pour  parvenir  a  la  perfection.  M.  Jo- 
bard ,  à  Bruxelles ,  se  distingue  par  la  réimpression 
d'ouvrages  qui,  en  nous  affranchissant  d'un  tribut  a 
l'étranger,  deviendra  insensiblement  pour  ce  pays  une 
nouvelle  branche  d'industrie;  les  productions  natio- 
nales n'occupent  pas  moins  ses  presses.  Son  ï'oyage 
pittoresque  est  au  iGmc  cahier;  il  contient  des  vues 
d'Anvers,  de  Gand,  de  Bruxelles,  l'abbaye  de  Floreffe, 
le  tombeau  de  l'amiral  Van  Wassenaar  et  le  château  de 
Bioul. 

M.  Jobard  est  aussi  chargé  des  planches  de  l'intéres- 
sant ouvrage  de  M,  le  professeur  Rheinwardt ,  sur  la 
botanique  et  l'histoire  naturelle  de  Pile  de  Java. 


(  15*  ) 

L'établissement  lithographique  de  Tournay  s'occupe 
d'une  collection  des  principales  vues  du  Royaume , 
dessinées  avec  une  exacte  vérité  et  d'une  exécution  facile 
et  soignée.  Cet  ouvrage,  quoique  calqué  sur  le  Voyage 
pittoresque  de  M.  Jobard,  ne  lui  causera  et  n'en  éprou- 
vera aucun  dommage;  les  éditeurs  évitent  de  donner 
les  mêmes  sites  au  moins  sous  un  même  aspect.  Un 
pays  aussi  riche  en  monumens  et  en  vues  pittoresques, 
dont  la  plupart  n'ont  pas  encore  été  gravés,  fournira 
des  sujets  plus  que  suffisants  pour  ces  deux  entreprises, 
et  l'amateur  en  souscrivant  pour  l'une  et  l'autre,  ne  fera 
qu'augmenter  sa  jouissance  en  multipliant  les  moyens 
de  satisfaire  sa  curiosité.  Deux  cahiers  de  ce  recueil 
ont  déjà  paru  ;  ils  contiennent  en  grande  partie  des 
vues  de  la  Flandre,  aussi  intéressantes  pour  les  mo- 
numens qu'elles  représentent  que  pour  les  événemens 
remarquables   qu'elles  rappellent. 

M.  Van  den  Burggraaff  a  Bruxelles,  publie  les  Por- 
traits des  artistes  modernes  nés  clans  le  royaume  des 
Pays-Bas.  Ces  portraits  dessinés  d'après  nature,  sont 
d'une  grande  ressemblance;  le  dernier  cahier  contient 
ceux  de  MM.  Delvaux  et  Gelissen,  de  Bruxelles;  Hen- 
driks,  d'Amsterdam;  Verateeg,  de  Dordreeht ;  Berré, 
d'Anvers;  et  Verboeckhoven ,  de  Gand. 

L'album  des  artistes  du  Royaume ,  publié  par  le 
même  lithographe,  sera  un  ouvrage  curieux;  chaque 
artiste  est  invité  a  dessiner  sur  la  pierre  un  sujet  de 
sa  composition.  Déjà  MM.  Ommeganck,  Verboeckhoven 
et  plusieurs  autres  ont  répondu  a  cet  appel,  et  sous 
peu  de  jours  nous  verrons  paraître  le  premier  cahier 
qui    sera   exposé  au   salon  de  Gand. 

—  Dans  le  courant  de  Juin  dernier  un  cultivateur, 
en  déracinant  un  buisson  dans  la  commune  de  Merendrée 
a  2  lieues   de  Gand,   dans  un  endroit  marécageux,  a 


(  i35  ) 

environ  600  pas  du  canal  de  Bruges,  déterra  un  vase 
antique  bien  conservé  et  d'une  exécution  très-délicate. 
La  terre  et  la  forme  du  vase  ne  laissent  aucun  doute 
sur  son  ancienneté ,  et  tout  fait  croire  qu'il  date  du 
séjour  des  Romains  dans  la  Belgique. 

—  On  a  restauré  dernièrement  a  Harlem  la  façade  de 
la  maison  qu'habitait  le  célèbre  peintre  Wouwermans , 
et  placé  au-dessus  de  la  porte  d'entrée  une  pierre  con- 
tenant son  nom.  C'est  un  hommage  rendu  a  la  mémoire 
de  cet  artiste  par  quelques  amis  des  arts  dans  une  cité 
qui  s'honore  de  l'avoir  vu  naître. 

—  La  société  Artis  Salutiferae ,  a  Amsterdam ,  a  cé- 
lébré le  i4  Mai  dernier  le  vingt-septième  anniversaire 
de  l'introduction  de  la  vaccine  dans  cette  ville;  M.  le 
président,  Fr.  van  der  Breggen  .,  a  porté  la  parole  et, 
en  faisant  l'éloge  du  célèbre  médecin  anglais,  a  com- 
paré ce  jour  a  une  fête  universelle  pour  l'humanité. 
Le  buste  de  Jenner,  placé  dans  la  salle  sous  un  voile, 
a  été  découvert  par  le  Président  au  milieu  de  son  dis- 
cours, pour  y  poser  la  couronne  civique.  Sur  le  pié- 
destal était  placée  l'inscription  suivante  : 

J.  Jennero,  insitionis   variolarum  vaccinarum 

PRINCIPI  DE  GENERE    HUMANO  OPTIME    MERITO,    DIES 
XIV    MAII   SEMPITERNUM   SACRA. 

—  Jean  Oortman,  graveur  en  bois,  vient  de  mourir 
a  Amsterdam  a  l'âge  de  70  ans;  cet  artiste  qui  s'est 
acquis  une  certaine  réputation  dans  les  Provinces  sep- 
tentrionales, entra  dans  la  carrière  des  arts  en  travaillant 
pour  les  manufactures  d'indiennes  de  Weesp;  il  revint 
à  Amsterdam,  lieu  de  sa  naissance,  en  1781 ,  et  y  grava 
beaucoup  pour  les  imprimeurs-libraires;  son  talent  se 
reconnaît  dans  les  jolies  gravures  qui  ornent  les  ouvra- 
ges publiés    par  la  société    tôt   nul  van   't   algemeen; 


(  *M  ) 
en  1817,  la  société  Economique  de  Harlem  lui  accorda 
une  gratification   pour  la  perfection   où   il  avait  porté 
cette  branche   de  la   gravure,    dont   la   culture   paraît 
négligée  depuis  nombre    données, 

—  La  Société  royale  des  Beaux -Arts  de  Gand  a 
formé  une  Commission  chargée  de  recueillir  par  sous- 
cription des  fonds  pour  être  employés  a  l'acquisition 
des  objets  d'art,  exposés  au  salon  de  cette  ville,  et 
qui,  par  un  tirage  au  sort,  seront  repartis  entre  les  sous- 
cripteurs. Cette  mesure  ajoutera  beaucoup  a  la  splen- 
deur des  expositions,  engagera  les  artistes  a  les  enrichir 
d'un  plus  grand  nombre  de  productions  et  animera  de 
plus  en  plus  l'esprit  public  déjà  si  fortement  prononcé 
à  Gand  en  faveur  des  arts. 

La  première  nomination  de  la  Commission  a  été  faite 
par  la  société  ;  elle  se  compose  de  M.  D'Hoop-Van  Alsiein  , 
président;  M.Jean  D'IInyvetler,  vice-président;  com- 
missaires: MM.  J.  Schamp;  E.  van  Larebeke;  Rooman- 
de  Block;  N.  Cornclissen;  F.  van  de  Woestyne;  Louis 
Rottier;  Jadot;  Van  den  Abeele  ;  Goetghebuer,  tréso- 
rier; De  Bast,  secrétaire.  Les  places  vacantes  seront  rem- 
plies successivement  par  les  plus  forts  souscripteurs. 

—  La  cour  royale  de  Paris  vient  d'ordonner  que  le 
cœur  de  Gretry  sera  retiré  de  l'ermitage  de  Montmo- 
rency pour  être  remis  au  Magistrat  de  la  ville  de  Liège. 
Le  monument  destiné  a  renfermer  cette  dépouille  d'un 
des  plus  illustres  compositeurs  Belges,  sera  élevé  dans 
une  des  places  publiques  de  la  ville;  a  cet  effet,  la 
société  d'émulation  vient  d'ouvrir  une  souscription. 

Le  monument  de  Grétry  étant  essentiellement  national, 
les  moindres  souscriptions  seront  reçues  avec  reconnais- 
sance; la  liste  pour  recevoir  les  signatures,  est  déposée 
a  la  Société  royale  des  Beaux- Arts. 


«*!^'-"; *>y.  '.,.■. 


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m&SmUL  îPAIaMATÂ 


MESSAGER 

DES  SCIENCES  ET  DES  ARTS. 


IVme.  Livraison  —  Août  1825. 


GASTONIA     FALMATA, 

De  la  collection  de  M.  Caters-De  Wolf ,  à  Berchem ,  près  d'Anvers. 


Figure    Quatrième. 

J-jE  Gastonia ,  ainsi  nommé  par  Commerson ,  plante 
nouvellement  introduite  en  Europe  ,  est  un  arbre  que  le 
dictionnaire  d'histoire-naturelle  rapporte  a  la  famille  des 
Aralies  :  le  port  de  cette  plante  a  en  effet  beaucoup  de 
rapport  avec  cette  famille,  qui  comprend  trois  genres 
semblables  a  la  vue  par  leur  port,  mais  qui  cependant 
en  sont  bien  éloignés  d'après  le  système  de  Linnée,  vu 
que  le  premier  genre,  le  Cussonia,  appartient  a  la  pen- 
tandrie  digynie,  le  second,  VAralie^  a  la  pentandrie 
pentagynie,  et  le  troisième,  le  Panax ,  a  la  polygamie 
diœcie. 

Le  Nomenclator  Botanicus,  du  docteur  Ernest  Sten- 
del,  édition  de  Stuttgart  1821 ,  en  décrit  deux  espèces  , 
sous  les  noms  de  Gastonia  cutispongia,  Lamarck ;  Gas- 
tonia spongiosa ,  Persoon;  et  Gastonia  Nalagu  ,  Lamarck. 

Il  est  fait  mention  dans  la  dernière  édition  du  Dic- 
tionnaire d'histoire-naturelle,  imprimé  a  Paris  en  1817, 
d'une  troisième  espèce  de  Gastonia,  dont,  les  feuilles 

lyme  livraiSOnt  Ao 


C  i38  ) 
sont  pinnées,  et  qui  est  décrite  sous  le  nom  de  Gastonia 
suberosa;  vu  l'analogie  des  mots,  on  aime  a  croire  que 
cette  espèce  est  la  même  que  celle  du  Gastonia  spongiosa  ; 
jusques  a  ce  jour  on  ne  connaît  pas  de  description  de 
l'espèce  Palmata  qui ,  a  l'exposition  des  plantes  rares  a 
Gand,  a  reçu  les  honneurs  du  salon. 

Le  Gastonia  suberosa  paraît  originaire  de  l'Ile  de 
France  :  dans  notre  climat ,  il  doit  être  cultivé  en  serre 
chaude. 

M.  De  Caters-De  Wolf ,  est  vraisemblablement  le 
premier  qui  ait  introduit  sur  notre  continent  le  Gas- 
tonia palmata,  et  peut-être  il  est  le  seul  qui  le  possède. 


DESCRIPTION     DE     SOUNGNUM     DANS     LA    PARTIE 
OCCIDENTALE     DU     TIBET. 


U  n  membre  de  la  société  d'agriculture  et  de  botanique 
de  Gand,  a  l'occasion  de  l'envoi  fait  par  M.  Broaeger, 
de  semences  recueillies  sur  l'Himalaya  (1),  a  cru  devoir 
communiquer  a  la  société  cet  extrait  du  journal  de 
Calcula ,  dont  l'insertion  dans  le  Messager  sera  sans  doute 
agréable  a  nos  lecteurs.  Les  relations  de  la  société  avec 
ce  pays,  ne  peuvent  que  donner  plus  d'intérêt  à  une 
description  écrite  de  la  chaîne  même  de  PHimâlaya. 

»  Soungnum  est  dans  la  Parganna,  district  de  Choaï 
sur  la  rive  droite  du  Setledj,  et  appartenait  il  y  a  neuf 
cents  ans  a  un  chef  indépendant.  Ce  village  comparati- 


(1)  L'Himalaya  est  une  chaîne  de  montagnes  qui  sépare  les  pos- 
sessions Britanniques  de  l'empire  du  Tibet.  Les  pics  les  plus  élevés 
du  monde  se  trouvent  dans  l'Himalaya;  un  de  ces  pics  a  7821 
mètres,  tandis  que  le  Mont  lîlanc  u'eu  a  que  4775  et  le  Chimbo- 
raço  que  053o. 


C  i^9  ) 
verneiH  populeux  et  florissant,  est  la  résidence  Je  70 
familles,  et  renferme  un  couvent  de  5o  religieuses. 
Suivant  un  usage  établi  dans  le  Kouncwar,  les  maisons 
des  principaux  habitans  ont  chacune  un  nom  qui  s'ap- 
plique aussi  au  propriétaire,  semblables  aux  Lairs  écos- 
sais qui  sont  généralement  connus  sous  le  nom  de  leurs 
terres.  Il  y  a  dans  ce  village  16  maisons  ainsi  dénommées. 
Le  village  de  Soungnum  est  situé  a  9,55o  pieds  anglais 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  et  près  du  Tond  d'une 
longue  vallée  qu'arrose  un  torrent  considérable.  Cette 
vallée  offre  dans  une  étendue  de  trois  milles,  l'aspect 
d'une  culture  continue;  on  y  voit  des  forêts  d'abrico- 
tiers, de  pommiers,  de  noyers  et  des  vignobles,  dont  le 
raisin  rivalise  de  volume  et  de  saveur  avec  les  meilleurs 
crus  du  Kabsul;  au  nord  et  au  sud-ouest,  dans  une 
direction  transversale  par  rapport  a  la  vallée,  les  mon- 
tagnes s'élèvent  jusqu'à  la  limite  des  neiges,  et  sont 
coupées  vis-a-vis  du  village  par  des  défdés  de  i5,ooo 
pieds  de  hauteur;  leurs  bases  s'étendent  jusqu'à  un 
demi-mille  du  fond  de  la  vallée  au  nord-ouest,  près  du 
cours  du  Darboung  et  la  ligne  de  la  vallée  ;  les  monta- 
gnes se  joignent  et  forment  une  barrière  imposante  entre 
le  pays  de  Soungnum  et  le  Spiti  de  Ladak.  En  cet  en- 
droit, le  Darbourg  s'élève  jusqu'à  la  région  des  neiges 
éternelles,  et,  grossi  dans  sa  marche  par  le  tribut  gla- 
cial de  plusieurs  autres  courants,  devient  bientôt  un  tor- 
rent considérable,  qui,  après  avoir  arrosé  une  immense 
étendue  de  terrain,  se  précipite  dans  le  Setlcdj  a  cinq 
milles  au-dessous  du  village. 

C'est  de  ce  côté  que  le  Kelou  commence  a  montrer 
ses  tiges  rabougries  et  clair-semées.  Le  climat  du  pays 
fournit  deux  récoltes;  ks  principaux  grains  sont:  l'orge, 
l'ogoul  et  le  phapour,  L'orge  se  sème  en  bysahk  et  se 


(  *4o  ) 

recueille  en  sawoun  (1);  on  prépare  ensuite  la  terre  U 
recevoir  l'ogoul  et  le  phapour,  que  l'on  récolte  en  har- 
tik  (2).  On  ne  cultive  point  ici  le  froment  5  mais  dans 
des  situations  plus  élevées,  sur  le  flanc  des  montagnes, 
il  y  a  un  petit  nombre  de  champs  de  froment  qui  four- 
nissent d'abondantes  moissons.  Les  pois,  fèves,  navets, 
y  sont  aussi  très-communs.  Le  climat  est  très-agréable 
dans  la  saison  où  nous  sommes;  la  douce  chaleur  du 
soleil  entretient  la  vie  et  la  verdure  sur  tous  les  points 
du  sol  dont  la  couleur  est  blanche. 

Mais  comment  peut-on  reconnaître  que  la  hauteur 
du  village,  au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  est  de  9,55o 
pieds?  Le  thermomètre  oscille,  en  plein  air,  entre  6o° 
et  82°( limites  extérieures)  et  dans  l'intérieur  des  maisons 
entre  65  et  78.  Pendant  deux  ou  trois  heures  après 
le  lever  du  soleil,  des  nuages  planent  a  peu  de  hauteur 
autour  des  collines;  ils  se  dispersent  a  mesure  que  le 
soleil  s'élève,  et  ne  forment  plus  vers  le  milieu  du  jour 
que  de  légers  flocons  ;  dans  la  soirée  et  durant  la  nuit, 
le  ciel  est  pur  partout  ailleurs  que  dans  le  nord-ouest 
et  l'ouest  où  de  sombres  nuages,  qui  récèlent  la  fou- 
dre, reposent  sur  les  plus  hautes  montagnes.  Un  vent 
d'est  s'élève  vers  une  heure  après-midi  et  augmente 
d'intensité  jusqu'à  cinq  heures;  sa  vitesse  qui  est  alors 
a  son  maximum,  diminue  graduellement,  a  partir  de 
de  ce  terme,  et  devient  nulle  a  9  heures  du  soir.  La 
neige  qui  tombe  ici  pendant  toute  la  durée  du  mois 
de  novembre,  forme  sur  la  surface  du  sol  une  couche 
plus  ou  moins  profonde  qui  subsiste  jusqu'en  mars, 
mais  qui  atteint  rarement  deux  pieds  d'épaisseur.  Les 

(1)  Ce  sont  les  noms  des  mois  indiens  qui  répondent  à  peu- 
près  à  uos  mois  d'ectobre  et  de  janvier. 

(2)  Le  mois  d'Avril. 


(  i4?  ) 

bètes  de  somme  sont  :  les  chevaux,  ânes  et  mulets;  mais 
il  n'y  a  que  deux  yak  dans  le  village. 

Il  y  a  ici  quelques  Lamas  et  un  doupka  qui  imprime 
des  sentences  avec  des  planches  de  bois.  Les  Lamas 
s'assemblent  et  chantent  des  hymnes. 

Environ  un  demi-mille  au  nord-ouest  de  Soungnum 
s'élève  un  grand  lubrong,  lieu  destiné  a  leur  culte,  et 
on  voit  au  fond  de  la  salle  une  image  hideuse,  appelée 
daJcpo  ;  une  autre  dans  une  salle  h  côté  représente  une 
figure  gigantesque,  appelée  chikatouba,  dont  l'expres- 
sion en  revanche  est  douce  et  paisible;  devant  sont  ran- 
gés plusieurs  vases  remplis  de  fruits. 

Il  y  a  un  grand  Lama ,  chef  de  tous  les  autres. 

J'ai  trouvé  ici  une  grande  quantité  de  gram,  et  j'ai 
fait  des  provisions  pour  quinze  jours.  Les  denrées  se 
pèsent  au  moyen  d'un  instrument  appelé  pora. 

J'ai  observé  deux  fois  le  passage  au  méridien  et  j'ai 
fait  voir  a  beaucoup  de  gens  des  étoiles  en  plein  jour. 

La  latitude  de  Soungnum  est  de  5i°  45  environ,  et 
la  longitude,  déduite  de  l'immersion  du  premier  satel- 
lite de  Jupiter  observée  le  18,  est  de  78°,  27  ,  24,  ce 
qui  reporte  ce  lieu  a  un  mille  environ  a  Test  de  la  posi- 
tion qui  lui  est  assignée  sur  la  carte. 

Il  y  a  dans  le  voisinage  de  Soungnum  une  grande 
quantité  d'excellentes  pierres  a  chaux;  je  montrai  aux 
habitans  la  manière  de  la  cuire.  Ils  me  firent  prendre 
tous  les  jours  du  thé  à  la  tartare;  on  le  prépare  dans 
une  théière  d'étain,  semblable  pour  la  forme  a  celles 
dont  nous  nous  servons;  on  le  remue  avec  un  morceau 
de  bois  fendu  tel  que  celui  dont  on  fait  usage  dans 
l'Inde  pour  la  préparation  du  sprini  béer.  Ce  thé  est 
bon;  les  habitans  du  pays  en  boivent  toute  la  journée, 
au  camp,  en  voyage  etc. 


(  ifcO 

Au  commencement  de  septembre  tous  ceux  qui  peu- 
vent se  remuer,  quittent  leur  village  et  montent  les 
collines  au  son  des  tambours  et  trompettes,  et  passent 
le  jour  a  danser,  chanter,  et  a  toutes  sortes  de  diver- 
tissemens. 

La  route  d'ici  a  Ladak  par  Schialkhur  passe  a  travers 
plusieurs  chaines  élevées;  cependant  elle  est  très-fré- 
quentée  en  tout  teins  ,  et  les  neiges  ne  la  rendent 
jamais  impraticable;  les  liabitans  se  couvrent  de  redin- 
gotes de  peaux  de  moutons  et  portent  des  gants  d'une 
épaisse  flanelle;  et  la  mule  porte  sa  charge  de  couver- 
tures qui  forment  le  lit  pour  coucher  sur  la  neige. 

Les  habitans  de  Schonong  vont  faire  le  commerce  à 
Ladak,  Garon  et  Rondok  ;  ils  exportent  les  produits 
de  la  plaine,  tels  que  sabres,  sucre,  tabac,  draps, 
indiennes,  indigo,  cuivre,  étain,,  papier,  fer,  grains, 
épices,  etc.  et  prennent  en  retour  du  sel,  de  la  laine, 
de  la  poudre  d'or,  le  thé,  le  borax  et  la  laine  a  schalls. 
Le  sel  et  le  borax  se  tirent  des  lacs  qui  sont  nombreux 
dans  la  Tartarie  Chinoise  et  dans  le  pays  de  Ladak. 
La  laine  nommée  beangi ,  est  longue  et  très-fine;  on 
fait  paître  les  moutons  dans  de  hautes  prairies  situées 
près  de  Garon  et  a  l'est  de  cet  endroit;  la  laine  a  schall 
appellée  lena  est  fournie  par  des  chèvres  du  pays. 

Garon  ressemble  a  un  camp  couvert  de  tentes  noires, 
et  n'est  habité  que  pendant  huit  mois  de  l'année  ;  l'hiver, 
les  Tartares  se  retirent  a  Tourliigang  sur  le  bord  de 
l'Ikhung.  La  plus  grande  quantité  de  sel  se  tire  du  voi- 
sinage de  Kontho,  ville  populeuse  sur  la  rive  droite  de 
l'Indus  et  contenant  plus  de  5oo  familles.  Les  princi- 
paux lacs  salés  sont  Gok,  Dungtcham,  Zangtchaka,  etc. 
Le  borax  se  trouve  aussi  dans  le  lac  Tchalletchaka  \  rcs 
de  Jlonko  ou  Kontho. 


(  *&  ) 

Toutes  les  rivières  sont  riches  en  poudre  d'or;  on 
Pobtient  en  lavant  le  sable  dans  un  courant  d'eau  et  en 
l'agitant  jusqu'à  ce  que  les  parties  les  plus  légères  s'élè- 
vent et  soient  emportées.  On  fait  sécher  le  résidu,  et  l'or, 
qui  est  quelque  fois  en  grains  assez  fins  pour  que  l'œil 
ne  puisse  le  distinguer  du  sable,  est  séparé  au  moyen  du 
mercure. 

L'or  se  trouve  aussi  dans  la  terre  a  Dango  Boukpa, 
a  douze  journées  au  sud-ouest  de  Mapang  ;  ott  a  dé- 
couvert dernièrement  une  nouvelle  mine  qui  le  fournit 
en  assez  gros  morceaux,  entre  le  lac  Goungeou  et 
Mansourawar. 

On  apporte  le  thé  d'un  pays  situé  à  une  grande  dis- 
tance a  l'est  de  Garou.  Le  soufre  se  trouve  dans  le 
Ladak,  a  Kolok,  a  Dimahog  et  a  Neouma.  Quelques-uns 
de  ces  noms  se  trouvent  probablement  sur  la  carte. 

Le  i4ma  volume  des  mémoires  de  l'académie  asiatique 
de  Calcuta  a  été  publié  dans  l'Inde  ;  il  contient ,  entre 
autres ,  la  notice  des  travaux  astronomiques  et  trigo- 
nométriques,  pour  déterminer  la  hauteur  et  la  position 
des  principaux  pics  de  l'Himalaya ,  par  le  capitaine 
Hodgson  et  le  lieutenant  Herbert. 


CHIMIE. 

Extrait  d'une  lettre  de  M.  le  professeur  Van  Mons ,  à  la  Société 
royale  Botanique  de   Gand. 


Je  crois  n'avoir  lu  nulle  part  qu'on  puisse  bien  faire 
le  beurre  d'antimoine  sans  le  secours  du  feu,  ou  comme 
on  dit,  a  froid.  M.  llensmans,  mon  préparateur,  le 
même  qui  a  remporté  cette  année,  le  prix  de  PAcadé- 


(  m  ) 

mie  des  Sciences  de  Bruxelles,  est  parvenu  a  l'obtenir 
de  cette  manière  :  il  le  mélange  du  régule  d'antimoine 
avec  le  sublimé  corrosif,  dans  les  proportions  déter- 
minées et  étend  le  mélange  sur  une  assiette  de  porce- 
laine pour  le  mettre  par  une  grande  surface  en  contact 
avec  Pair.  L'humidité  de  l'air  que  le  beurre  d'anti- 
moine attire  puissamment,  détermine  sa  formation. 
L'effet  est,  en  grande  partie,  produit  au  bout  de  quel- 
ques heures.  Ce  n'est  proprement  pas  du  beurre,  mais 
de  l'huile  d'antimoine  qu'on  obtient.  On  retourne  la 
matière  pour  en  porter  successivement  toutes  les  parties 
en  contact  avec  l'air.  S'il  règne  un  peu  d'humidité,  le 
produit  est  immédiatement  assez  liquide  pour  faire  lâcher 
prise  au  mercure 5  mais  lorsque  le  tems  est  sec,  l'huile, 
un  peu  visqueuse ,  retient  les  globules  de  mercure  en 
interposition  ;  mais  on  n'a  qu'a  atténuer  l'huile  par  un 
peu  de  chaleur  pour  déterminer  la  réunion  du  métal  au 
fond  du  liquide.  Le  muriate  ainsi  obtenu  n'est  pas  du 
chlorum,  puisqu'il  contient  de  l'eau  :  il  peut  emprunter 
beaucoup  de  ce  liquide  a  un  air  humide  sans  en  être 
précipité  en  poudre  d'algaroth.  Après  qu'il  s'est  saturé 
d'eau  dans  un  air  très-humide,  si  l'air  devient  sec,  il 
lui  cède  a  son  tour  de  son  eau;  ce  qui  a  fait  concevoir 
a  M.  Hensmans ,  l'idée  d'en  faire  usage  comme  d'un 
hygromètre  physique.  Ce  procédé  précieux  déjà  pour  se 
procurer  aisément  du  muriate  d'antimoine,  que  la  dé- 
composition du  sulfure  par  l'acide  muriatique  ne  four- 
nit jamais  exempt  de  soufre  ou  sans -union  avec  du 
composé  non  précipitable  de  Thomson ,  l'est  encore  par 
la  voie  aisée  qu'il  indique  pour  se  procurer  du  mercure 
sans  amalgamation.  Le  beurre  d'antimoine  est  actuelle- 
ment très-employé  pour  le  tartre  émetique.,  qu'il  fournit 
par  son  mélange  avec  double  proportion  de  tartrate  de 


(  i*5  ) 

potasse,  pour  le  nouveau  kermès  minéral  ou  hydrosul- 
fure a  oxide  qu'on  en  précipite  par  l'hydrogène  sulfuré 
ou  par  l'hydrosulfure  d'ammoniaque  simple;  je  dis  sim- 
ple ,  attendu  qu'avec  le  surhydrosuîfure  la  moitié  de 
l'hydrogène  sulfuré  se  gazifie  parce  qu'il  ne  peut  exister 
de  surhydrosuîfure  de  métal  qu'en  conjonction  avec  un 
alcali.  C'est  ce  surhydrosuîfure  qu'on  décompose  en  le 
séparant  de  l'alcali  dans  la  préparation  du  soufre  doré 
d'antimoine.  Enfin ,  il  est  beaucoup  employé  par  lui- 
même  en  chirurgie. 

Dans  la  confection  du  beurre  d'antimoine,  on  obtient 
constamment  une  partie  liquide  a  côté  de  la  partie  con- 
crète :  on  doit  maintenant  savoir  que  cette  partie  pro- 
vient de  l'eau  que  le  mélange  absorbe  pendant  la  tri- 
turation ;  mais  comme  l'huile  d'antimoine  est  recueillie 
aussi  bien  en  procédant  avec  du  sulfure  qu'avec  du 
métal,  M.  Hensmans  s'est  mis  en  devoir  d'examiner  si 
sans  feu  ou  avec  peu  de  chaleur  et  par  l'intermède  de 
de  Pair  humide ,  la  même  décomposition  ne  pourrait  pas 
être  obtenue  sur  le  sulfure,  ce  qui  donnerait  du  cin- 
nabre  précipité  ou  par  la  voie  humide  et  qui  n'aurait 
pas  besoin  d'être  broyé. 

Le  même  chimiste  a  obtenu  l'acide  oxalique  artificiel 
par  la  réaction  froide  de  l'acide  nitrique  concentré  sur 
le  sucre.  Le  procédé  s'achève  en  5  ou  4  heures:  il  en 
est  de  même  avec  la  manne ,  la  fécule  de  pomme  de  terre, 
le  bois  de  réglisse,  qui  s'y  dissolvent  totalement,  le  jus 
de  réglisse  et  autres  corps.  Les  dernières  substances  veu- 
lent qu'on  favorise  l'action  par  un  couple  de  charbons 
allumés. 


(  1*6) 


GÉOGRAPHIE  HISTORIQUE,    PHYSIQUE  ET  STATISTIQUE 

DU    ROYAUME    DES  PAYS-BAS    ET    DE    SES    COLONIES , 

PAR    J.    J.    DE    CLOET. 


Uepuis  que  les  Provinces  Belgiques  et  Bataves ,  réu- 
nies sotis  un  seul  chef,  forment  un  royaume  distinct, 
un  noble  orgueil  national ,  étouffé  pendant  trop  long- 
tems,  et  que  diverses  dominations  étrangères  semblaient 
avoir  presque  éteint  dans  le  cœur  des  habitans  de  ce 
beau  pays,  se  montre  journellement  avec  plus  d'énergie. 
Le  Belge  veut  avoir,  comme  les  autres  nations,  une 
histoire,  une  langue,  des  loix  qui  lui  soient  particuliè- 
res, comme  il  a  eu  de  tout  tems  une  école  des  beaux- 
arts  a  laquelle  il  a  donné  son  nom. 

Déjà  des  citoyens  zélés  se  sont  occupés  d'écrire  les 
fastes  de  leur  patrie;  déjà  MM.  Dewez,  Stuart,  Van  der 
Palm,  etc.  ont  saisi  le  burin  de  l'histoire  et  de  l'élo- 
quence; déjà  d'autres  citoyens,  également  recomman- 
dables,  ont  montré  aux  peuples  voisins  que  la  Belgique 
cultivait  aussi  avec  succès  les  sciences  et  les  lettres. 
Mais  il  nous  manquait  encore  une  géographie  histori- 
que, physique  et  statistique  du  royaume  des  Pays-Bas; 
car  l'ouvrage  que  M.  Dewez  avait  publié  sur  cet  objet, 
n'était  qu'un  léger  aperçu  auquel  ses  gi'aves  occupa- 
tions ne  lui  avaient  pas  permis  de  mettre  la  dernière 
main:  ouvrage  qui,  soit  dit  en  passant,  ne  méritait 
point  les  critiques  amères  qu'on  en  a  laites,  et  qui, 
malgré  quelques  défauts,  n'en  sert,  et  n'en  servira  pas 
moins  de  modèle  k  tous  ceux  qui  s'occupent  de  celte 
matière. 


(  >4:  ) 

M.  De  Cloet  s'est  donc  chargé  Je  remplir  eette  lacune, 
et  l'a  fait,  nous  osons  le  dire,  avec  un  succès  qui  lui 
sera  difficilement  contesté. 

Son  livre  est  divisé  en  t\i;u\  parties.  La  première  com- 
prend une  histoire  abrégée  du  royaume  des  Pays-Bas , 
et  des  détails  généraux  de  statistique.  Cette  partie  est 
traitée  avec  le  plus  grand  soin,  et  ne  laisse  presque 
rien  a  désirer. 

La  seconde  se  compose  de  la  statistique  particulière 
des  provinces  et  des  colonies.  M.  De  Cloet,  craignant 
sans  doute  le  reproche  qu'on  a  fait  à  M.  Dewez  d'avoir 
omis  quelques  endroits  remarquables  de  notre  royaume, 
ou  de  n'en  avoir  point  donné  une  description  suffisante, 
est  entré  h  cet  égard  dans  quelques  détails  que,  peut- 
être,  il  aurait  pu  négliger. 

Mais,  a  propos  d'exactitude,  ne  pourrait-on  pas  re- 
procher a  M.  De  Cloet,  d'avoir  dit  que  les  droits  des 
Belges  à  l'estime  littéraire  de  V Europe  sont  diminués  ? 
Il  me  semble  qu'un  pays  de  si  peu  d'étendue,  qui 
compte  des  poètes  et  des  prosateurs  d'un  mérite  distin- 
gué ,  et  en  beaucoup  plus  grand  nombre  qu'il  n'eu  a 
jamais  possédés,  a  droit  de  prétendre  a  quelque  estime 
littéraire.  MM.  Dewez,  Vander  Palm,  Stuart,  Lesbrous- 
sart ,  Bilderdyk  ,  ReifFenberg ,  Tollens,  De  Stassart, 
Helmers,  Quetelet,  Hubin,  Clavareau  ,  etc.  Ne  pour- 
raient-ils point  réclamer  contre  l'assertion  de  M.  De 
Cloet? 

Au  reste,  malgré  ces  légères  omissions,  et  quelques 
autres  que  l'auteur  aura  sans  doute  déjà  remarquées 
lui-même,  nous  ne  pouvons  trop  recommander  cet  ou- 
vrage a  toutes  les  personnes  qui  veulent  acquérir  une 
connaissance  juste,  claire  et  détaillée  du  pays  qu'elle* 
habitent. 


(  1*8) 


SUR   LE   TYPE   DE   LA   POMME-DE-TERRE  , 

Par  Al.   Van  Mous. 


JLJes  recherches  faites  sur  les  lieux ,  ont  appris  que  la 
pomme-de-terre  croît  spontanément  et  en  masse ,  dans 
des  ravins  proche  de  Valparaiso,  partie  ouest  de  l'A- 
mérique méridionale.  Les  feuilles  et  les  fleurs  sont  sem- 
blables, sous  tous  les  rapports,  a  celles  de  la  plante 
cultivée  en  Europe;  mais  les  tubercules  peu  nombreux 
et  petits,  sont  amers,  et  ont  une  peau  les  unes  blanche 
et  les  autres  rouge.  Elle  fleurit  en  Octobre,  qui  coïncide 
avec  le  printems  de  ce  pays.  On  pense  qu'elle  croît  sur 
une  grande  étendue  des  côtes;  car  on  la  rencontre  au 
sud  du  Chili,  dont  les  habitans  la  nomment  Maglia , 
mais  n'en  font  aucun  usage.  Ces  renseignemens  datent 
du  24  Février  de  cette  année.  Deux  tubercules  de  la 
pomme-de-terre  sauvage  furent  plantés  ,  Tannée  der- 
nière, en  Angleterre;  ils  poussèrent  vigoureusement  et 
ne  tardèrent  pas  a  fleurir:  leur  fleur  était  blanche, 
mais  elle  ne  noua  pas  son  fruit.  Au  mois  d'Août,  des 
tubercules  en  grand  nombre  et  dont  les  uns  partaient 
des  racines,  les  autres,  des  articulations  de  la  tige  sous 
terre,  se  montrèrent  a  la  surface  du  sol  et  poussèrent 
des  tiges  qui  fleurirent  a  leur  tour.  La  récolte  en  fut  très- 
riche  ,  chaque  plante  ayant  donné  plus  de  5oo  tubercu- 
les de  la  grosseur  d'un  œuf  de  pigeon,  et  au-dessous. 
Leur  saveur  n'était  plus  amère,  et  lorsqu'ils  avaient  été 
bouillis,  leur  goût  était  celui  de  la  pomme-de-lerre  hâ- 
tive :  ils  Savaient  point  atteint  la  maturité. 

11  est  encore  fait  mention  d'une  pomme-de-terre  jaune , 


(  i*9) 

très-bonne,  qu'on  cultive  dans  l'Amérique  septentrio- 
nale, et  qu'a  Lima,  on  connaît  sous  le  nom  de  pomme- 
de-terre  dorée. 

Une  pomme-de-terre  pareille  en  couleur  et  aussi  très- 
bonne,  est  cultivée  aux  environs  d'Anvers,  et  en  quel- 
ques endroits  delà  Flandre.  Elle  reprend  dans  son  épui- 
sement, uitgedragendheid,  les  caractères  du  type  sau- 
vage; et,  a  tout  bien  considérer,  l'épuisemeut  est  une 
sorte  de  retour  vers  l'état  de  la  plante  spontanée;  elle 
forme  une  longue  fane,  s'établit  sur  une  tige  unique, 
ou  n'ayant  que  peu  de  sousdivisions;  cette  tige  qui, 
le  plus  souvent,  a  de  3|  a 4 pieds,  se  tient  dressée:  des 
racines ,  partant  des  tubercules  ainsi  que  des  articula- 
tions de  la  tige  sous  terre,  portent,  en  Août,  de  petits 
tubercules ,  qui  viennent  s'élever  au-dessus  du  sol ,  et 
poussent  a  leur  tour  des  tiges  pour  peu  qu'ils  soient 
couverts  de  terre,  ou  en  contact  avec  le  sol  par  un  de 
leurs  œilletons;  ces  tiges  ne  donnent  point  de  tubercu- 
les :  alors  les  tubercules  de  récolte,  qui  sont  peu  nom- 
breux et  petits ,  se  pourissent.  Pour  éviter  ce  vice  de 
second  rapport,  on  ne  les  butte  pas,  mais,  a  la  planta- 
tion, on  les  enfouit  a  un  demi-pied,  et  on  les  plante 
sous  le  fumier.  Cette  sorte  fleurit  d'abord  très-peu, mais 
sa  fleur  augmente  a  mesure  qu'elle  marche  vers  l'épuise- 
ment :  elle  est  plus  sujette  a  la  repousse  qu'aucune  autre 
sorte.  On  doit  en  changer  le  plantis,  plantgoed,  au  plus 
tard  tous  les  trois  ans;  mais  il  suffit  d'une  distance  de 
deux  lieues  pour  la  rétablir  dans  sa  croissance  domes- 
tique, quoique  une  distance  plus  grande,  produise  plus 
complètement  cet  effet;  on  leur  donne  de  préférence  un 
terrain  argilleux.  Je  suis  entré  dans  ces  détails,  parce 
que  des  caractères  analogues  ont  failli  faire  prendre  la 
pomme-de-terre  sauvage,  cultivée  en  Angleterre,  pour 


(  l~°  ) 

une  espèce  particulière  ;  il  n'y  a  la  de  particulier  que  de 
passer,  en  sortant  de  l'état  sauvage,  par  un  mode  de 
végétation  que  la  plante  cultivée  suit  en  retournant 
vers  cet  état.  On  ne  donne  a  la  pomme-de-terre  tardive 
un  fumier  abondant,  que  dans  la  vue  de  la  faire  mûrir 
plus  tard  :  l'espèce  hâtive  est  plantée  en  terre  maigre.  On  a 
suivi  en  Angleterre  une  marche  opposée  pour  la  pomme- 
de-terre  sauvage;  car  on  l'a  fumée  considérablement, 
et  on  l'a  buttée  hors  de  mesure;  et  il  est  probable  que, 
sans  ce  traitement,  les  tubercules  auraient  été  moins 
nombreux  et  plus  gros  et,  qu'en  outre,  ils  auraient  suf- 
fisamment mûri.  La  fane  des  pommes-de-terre,  en  se 
pourissant  en  tas,  pousse  a  chacun  de  ses  nœuds  un 
petit  tubercule  blanc,  lequel,  étant  propagé,  passe  par 
le  genre  de  végétation  qu'on  observe  a  la  pomme- 
de-terre  sauvage.  L'épuisement,  qui  se  répare  par  le 
changement  de  lieu,  provient  de  la  dégénération  par 
défaut  de  rajeunissement  a  l'aide  du  semis.  M.  Van  Bave- 
gem,  de  la  Flandre,  a  indiqué  dans  le  rajeunissement 
de  la  pomme-de-terre  par  cette  voie ,  un  remède  contre 
la  frisure,  dont,  en  raison  de  la  vétusté  du  plant,  elle 
commençait  a  être  généralement  attaquée,  et,  en  sau- 
vant ainsi  ce  comestible  d'un  entier  dépérissement,  a 
rendu  a  l'espèce  humaine  un  service  auquel  aucun  autre 
n'est  comparable.  Il  en  est  cependant  une  sorte  qui,  de- 
puis son  introduction,  n'a  pas  dégénéré  :  c'est  la  ronde 
blanche ,  d'abord  cultivée  en  Zélande  et  qui  s'y  est 
maintenue  saine  jusqu'à  présent  :  mais  hors  de  cette 
Province ,  elle  dégénère  dès  la  seconde  plantation. 

La  pomme-de-terre  sauvage  d'Angleterre  aura,  en  par- 
tie, été  conduite  a  un.  second  rapport,  par  la  circon- 
stance que  sa  fleur  a  coulé.  Cette  même  cause  a  pro- 
voqué, l'été  dernier  en  ce  pays,  la  seconde  floraison 


(  i-5 1  ) 

d'un  grand  nombre  de  plantes ,  dont  la  sécheresse  chaude 
avait  fait  avorter  la  fleur. 

La  pomme-de-terrc ,  dans  son  e'tat  sauvage,  s'est  trou- 
ve'e  impropre  a  la  nourriture  de  l'homme  ;  il  en  est  de 
même  pour  nos  poires  et  nos  pommes  spontanées ,  pour  les 
pêches  spontanées  de  l'Amérique  méridionale  et  pour 
tout  ce  qui  n'a  pas  été  renouvelle  de  semis  en  sol  exo- 
tique; mais  ce  renouvellement  une  fois  fait,  l'amélio- 
ration qui  en  résulte ,  se  maintient  et  augmente  par 
d'autres  semis,  en  sol  indigène  comme  en  ce  dernier 
sol  ;  et  ce  serait  payer  avec  usure  a  l'Amérique  le  ser- 
vice qu'elle  nous  a  rendu  de  nous  donner  sa  pomme- 
de- terre  sauvage,  que  de  lui  renvoyer  ce  tubercule  ap- 
privoisé par  son  semis  en  Europe,  si  déjà  la  restitution 
dans  cet  état  n'en  a  pas  été  faite.  Nos  poires  et  nos  pom- 
mes nous  sont  revenues  de  cette  manière,  et  il  en  a  été 
de  même  de  plusieurs  légumes,  que  nous  cultivons,  et 
dont  les  types  croissent  chez  nous  a  l'état  sauvage. 
Le  premier  semis  de  la  pomme-de-terre  sauvage,  après 
qu'elle  aura  donné  de  la  graine,  la  reproduira  identi- 
que, mais  au  semis  suivant  elle  pourra  déjà  varier.  Dans 
les  provinces  de  l'Amérique  septentrionale,  où  elle  n'est 
pas  spontanée,  elle  suivra  cette  même  marche  de  va- 
riation. La  pomme-de-terre  a  immanquablement  été  trans- 
portée en  Europe  par  un  botaniste  ,  comme  plante  étran- 
gère,et  non  par  un  économiste,  comme  végétal  culinaire. 


(  rôa  ) 


HISTOIRE      DES      TROUBLES       DES      PAYS-BAS 
SOUS     PHILIPPE     II. 

Par  Van  dcr  Vynckt ,  de  Gand,  conseiller  du  conseil  de  Flandre. 


V  an  der  Vynckt  est  un  des  historiens  qui,  s'il  ne  se 
sont  pas  sacrifiés  pour  la  tle'fense  de  la  vérité',  du  moins 
n'ont  pas  brillé  a  ses  dépens  :  il  a  eu  soin  dans  son 
histoire  des  troubles  des  Pays-Bas,  de  n'annoncer  que 
des  faits  dont  la  vérité  ne  pouvait  être  équivoque  ;  en 
effet  tout  en  nous  montrant  les  qualités  brillantes  des 
grands  hommes,  dont  il  retrace  les  portraits,,  il  est  loin 
de  vouloir  cacher  leurs  faiblesses,  qu'il  reproduit  indis- 
tinctement avec  leurs  vertus,  afin  que  le  public  éclairé, 
juste  appréciateur  du  mérite,  soit  en  état  de  leur  ren- 
dre la  justice  qui  leur  est  due.  L'histoire  des  troubles 
des  Pays-Bas  était  trop  récente  pour  être  facilement  dé- 
figurée j  aussi  l'auteur  ne  s'cst-il  servi  que  de  docu- 
ments et  de  mémoires  certains,  grâce  a  la  bienveillante 
protection  du  ministre  Cobenzel,  qui  lui  permit  l'accès 
aux  archives  secrètes  du  Gouvernement. 

Il  serait  superflu  d'entrer  ici  dans  les  détails  de  la  vie 
du  savant  laborieux  qui  honora  en  même  tems  la 
magistrature  et  les  belles  lettres,  (1)  et  dont  la  mé- 
moire, sous  ce  double  rapport,  doit  être  chère  a  ses 

(1)  Lorsque  M.  le  comte  de  Cobenzel  eut  formé  le  projet  de 
fonder  l'académie  des  sciences  à  Bruxelles,  il  jeta  les  yeux  pour 
en  rédiger  les  statuts  sur  le  conseiller  Van  der  Vynckt;  ou  trouve 
deux  notices  biographiques  sur  l'auteur  des  troubles  des  Pays-Bas, 
l'une  dans  les  mémoires  de  l'académie  de  Bruxelles,  l'autre  dans 
le  supplément  du  dictionnaire  historique  de  Feller,  imprimé  à 
Paris  j  elles  contiennent  l'une  et  l'autre  la  liste  de  ses  ouvrages. 


(  *53  ) 

compatriotes.  Les  éditeurs  de  l'histoire  des  troubles  des 
Pays-Bas  (i),  Messieurs  l'avocat  Tarte  et  le  baron  de 
Rciffenberg ,  lui  ont  paye  un  juste  tribut  d'éloges. 

L'histoire  des    troubles  des  Pays-Bas   commence  au 
traité  d'alliance  entre  l'Espagne  eî  les  Pays-Bas,  cimenté 
par  le  mariage  de  l'archiduc  Philippe-le-Bel  avec  Fin- 
fante  Isabelle,  et  comprend  tout  le  règne  de  Charles- 
Quint,  et  celui  de  Philippe  II;  Van  der  Vynckt  expose 
les  fausses  démarches  par  lesquelles  Philippe  travailla  a 
s'aliéner ,  dès  le  commencement  de  son  règne ,  le  cœur  des 
Flamands  ;  il  raisonna  (dit-il)  sur  les  Flamands ,  à-peu-près 
comme  il  avait  fait  sur  les  Indiens;  il  crut  que  pour 
régner  absolument  sur  eux ,  il  fallait  répandre  du  sang , 
et   qu'il  ne  serait  jamais   plus  puissant  que  quand  ses 
sujets  seraient  plus  faibles;  la  haute  noblesse  voulait 
avoir  quelque  part  au  gouvernement,  il  le  confia  tout 
a  des  étrangers.    Les  provinces  étaient  attentives  a  la 
conservation  de  leurs  privilèges,  que  ses  prédécesseurs 
avaient  respectés  ,    Philippe   affecta    de  les   confondre 
toutes  dans  un  même  régime,   et    voulut  régner  dans 
les   Pays-Bas  plus  impérieusement  qu'en   Castille  ;    la 
franchise  de  ces  peuples  était  incompatible  avec  l'éta- 
blissement de  l'inquisition ,  il  voulut  les  assujettir  a  ce 
tribunal,  et  ce  prince  si  habile  a  fomenter  les  divisions 
et  les  troubles  dans  les  états  de  ses  voisins,  prétendit 
ne  gouverner  les  siens  que  par  cet  art  dangereux. 

Van  der  Vynckt  établit  ensuite  que  rien  ne  saurait 
être  comparé  aux  progrès  immenses  faits  par  les  Hol- 
landais au  moyen  de  leur  commerce  ;  il  montre  com- 

(1)  Deux  éditions  différentes  de  l'histoire  des  troubles  des  Pays- 
Bas,  viennent  d'être  imprimées  à  Bruxelles,  chez  Hublou  et 
Lacrosse,  Dans  ce  moment  on  s'occupe  d'eu  donner  une  traduc- 
tion en  hollandais. 

ÏVmo  livraison.  n 


(  i54) 
ment,  ayant  abattu  la  puissance  énorme  de  la  monar- 
chie espagnole  et  l'ayant  obligée  a  la  paix ,  ils  fondè- 
rent un  état  assez  puissant  pour  maintenir  en  quelque 
manière  l'équilibre  entre  toutes  les  autres  puissances  de 
l'Europe;  il  prouve  que  la  guerre,  loin  d'avoir  inter- 
rompu leur  commerce ,  fut  au  contraire  l'époque  de 
celui  qu'ils  entreprirent  dans  les  Indes  orientales  et 
occidentales  et  sur  les  côtes  d'Afrique.  Malgré  toutes  les 
précautions  des  Espagnols,  ils  trouvèrent  en  commerçant 
avec  cette  nation  même,  le  moyen  de  soutenir  la  guerre. 

Cette  histoire  développe  encore  les  causes  pour  les- 
quelles sept  seulement  des  Provinces  de  la  Belgique  sont 
restées  unies ,  tandis  que  les  autres ,  dégoûtées  sur- 
tout de  la  conduite  extravagante  de  quelques  factieux 
qui  dominaient  a  Gand,  se  sont  réconciliées  avec  l'Es- 
pagne. 

Une  autre  merveille  que  l'auteur  n'oublie  pas  de  faire 
remarquer,  est  celle  de  trois  grands  hommes,  de  la 
même  famille,  qui  se  succédèrent  dans  le  gouvernement 
de  la  république  :  Guillaume  le  libérateur  et  ses  deux 
fds  Maurice  et  Frédéric-Henri.  Voici  ce  que  Van  der 
Vynckt  dit  du  premier  :  »  Il  résulte  de  ses  actions  que 
»  c'était  un  grand  homme."  Il  s'exprime  ainsi  sur  le 
second:  »  Il  surpassa  l'attente  du  public;  nourri  dans 
»  l'adversité,  il  en  fit  un  si  bon  usage  qu'il  devint  le 
»  plus  grand  homme  de  son  tems ...  ;  les  armées  qu'il 
)>  commandait,  ont  été  pendant  quarante  ans,  l'école 
»  militaire  des  étrangers  qui  voulaient  apprendre  la 
»  guerre; il  jouissait  dans  sa  patrie  de  l'amour  des  peu- 
»  pies  et  de  la  considération  qu'il  méritait."  Enfin  il 
s'énonce  de  la  manière  suivante  sur  le  troisième,  qui 
termina  la  guerre  de  la  révolution  :  »  La  république  des 
»  Provinces -Unies  confia  ses  armes   et  la  direction  de 


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(  i55  ) 

»  la  guerre  a  son  Stadhouder  Frédéric-Henri,  nouveau 
»  Prince  d'Orange,  qui  venait  de  succéder  a  son  frère 
»  Maurice,  non-seulement  dans  toutes  les  charges  de 
»  la  république,  mais  dans  tous  les  biens  de  la  maison 
»  d'Orange."  Ce  Prince  était  né  en  Février  i5o,4,  qua- 
tre mois  avant  le  funeste  assassinat  de  son  père 

Les  Rois  Henri  IV.  de  France  et  Frédéric  de  Danemarck 
étaient  ses  parrains. . . .;  il  s'attacha  constamment  a  son 
frère  Maurice,  qui  lui  apprit  le  métier  de  la  guerre  ; 
il  y  fit  de  si  grands  progrès,  qu'il  devint  aussi  bon  capi- 
taine que  lui ,  et  l'emporta  dans  la  confiance  des  états- 
généraux.  Le  Prince  Frédéric  était  désintéressé,  géné- 
reux, franc,  sincère;  en  matière  de  religion,  il  voulait 
une  entière  liberté,  sans  s'ingérer  dans  les  partis,  etc. 
que  de  brillans  souvenirs  et  quelles  garanties! 

L'histoire  finit  a  la  paix  de  Westphalie,  où  la  sou- 
veraineté et  l'indépendance  des  Provinces-Unies  furent 
reconnues  par  le  Roi  d'Espagne,  a-peu-près  jusqu'au 
tems  où  Grotius  a  conduit  ses  annales. 


TABLEAU   DE   JEAN    VAN   EYCK , 

Cité  dans  la  Biographie  des  peintres,  par    C.  van  Mander , 
édition  in-8.    1764. 


Figure    cinquième. 

.Lors  de  la  publication  de  cette  nouvelle  édition,  l'édi- 
teur cita  dans  une  note  le  tableau  dont  nous  donnons 
ici  la  lithographie.  Cette  belle  production  du  régénéra- 
teur de  la  peinture,  fut  vendue  après  le  décès  de  M.  Jean 
Enschedé  de  Harlem,  qui  en  était  le  possesseur. 


(i56  ) 

Ce  taLleau  est  peint  a  l'huile  et  en  grisaille  ;  le  dessin 
est  fait  par  hacli ures  sur  un  fond  blanc,  jauni  par  le 
tems,  et  ressemble  parfaitement  a  un  dessin  a  l'encre 
de  la  Chine.  Le  panneau  est  enchâssé  dans  un  cadre, 
au  bas  du  quel  est  écrit  Jolies  de  Ejck  me  fecit  îtôj. 
Il  était  encore  parfaitement  conservé  a  l'époque  où  il 
appartenait  a  M.  Enschedé,  qui  en  1769,  le  fit  graver 
de  la  grandeur  du  tableau,  (i5  pouces  sur  10,  y  com- 
pris le  cadre.)  M.  Enschedé,  l'un  de  ses  petits -fils, 
établi  a  Harlem,  a  eu  l'obligeance  de  nous  faire  par- 
venir un  exemplaire  de  cette  gravure ,  exécutée  par  Corn, 
van  Noorde,  de  Harlem,  dans  la  manière  de  Ploos  van 
Amstel. 

Le  sujet  représenté  dans  ce  tableau  est  la  fondation 
d'une  église,  avec  la  construction  de  la  tour  déjà  très- 
avancée  ;  sur  l'avant-plan  est  assise  une  Vierge  martyre, 
tournant  de  la  main  droite  la  page  d'un  livre  ouvert, 
placé  sur  ses  genoux ,  et  tenant  de  la  gauche  la  palme  ; 
elle  représente  sans  doute  la  patrone  de  l'église  qu'on 
suppose  être  Ste.  Agnès  ;  derrière  la  Vierge  et  a  sa 
gauche  on  voit  plusieurs  personnes  qu'on  croit  être  les 
fondateurs  du  monument  consacré  a  cette  sainte;  le 
fond  représente  un  paysage  ;  on  y  aperçoit  une  mon- 
tagne sur  laquelle  est  un  hameau,  un  grand  château, 
etc.  H  y  a  quelque  probabilité  que  ce  tableau  est  le 
même  que  Van  Mander,  dans  la  biographie  de  J.  van  Eyck  , 
dit  avoir  vu  chez  son  maître  Lucas  de  Heere  a  Gand. 

On  ne  sait  point  quelle  est  la  tour  représentée  dans  ce 
tableau;  peut-être  par  le  moyen  de  cette  lithographie  on 
parviendra  à  le  découvrir,  si  toutefois  elle  a  été  exé- 
cutée. 


(  i57  ) 

BULLETIN 
DES  ACADÉMIES   ET  SOCIÉTÉS  SAVANTES. 


ACADÉMIE   ROYALE   DE    BRUXELLES. 

JLiE  second  volume  des  nouveaux  mémoires  de  l'Aca- 
de'mie  des  Sciences  et  Belles-Lettres  de  Bruxelles,  vient 
de  paraître.  Nous  n'entrerons  point  dans  le  de'tail,  qui 
serait  un  peu  long,  du  mérite  des  diffe'rens  me'moires 
dont  ce  volume  est  composé  ;  il  suffira  d'en  indiquer 
les  titres  pour  donner  au  public  une  idée  avantageuse 
des  travaux  entrepris  et  exécutés ,  depuis  1819 ,  par  les 
quarante-huit  membres  ordinaires  de  l'académie  : 

i°.  Un  mémoire  de  M.  le  commandeur  de  Nieuport 
sur  la  pression  qu'un  même  corps  exerce  sur  plusieurs 
points  a  la  fois. 

2°.  Un  mémoire  sur  la  métaphysique  du  principe  de 
la  differentiation ,  par  le  même. 

3°.  Un  mémoire  sur  une  formule  générale  pour  déter- 
miner la  surface  d'un  polygone  formé  sur  une  sphère 
par  des  arcs  de  grands  ou  petits  cercles ,  disposés 
entr'eux  d'une  manière  quelconque,  par  M.  A.  Quetelet. 

4°.  Un  mémoire  sur  une  nouvelle  théorie  des  sections 
coniques,  considérées  dans  le  solide,  par  le  même. 

5°.  Une  dissertation  sur  les  traps  stratiformes ,  par 
M.  J.  Kickx. 

6°.  Un  mémoire  sur  quelques  propriétés  remarqua- 
bles de  la  focale  parabolique  ,  par  M.  G.  Dandelin. 

70.  Un  mémoire  sur  la  législation  des  Gaules,  par 
M.  J=  J,  Pvaepsaet. 


(  >58  ) 

8°.  Un  mémoire  dans  lequel  on  examine  quelle  peut 
être  la  situation  des  différents  endroits  de  l'ancienne 
Belgique,  devenus  célèbres  dans  les  commentaires  de 
César,  par  les  événemens  mémorables  qui  s'y  sont  pas- 
sés,   par  M.  Dewez. 

9°.  Un  mémoire  sur  cette  question  :  a  quelle  époque 
les  Comtes  et  les  Ducs  sont-ils  devenus  héréditaires 
dans  la  Belgique,  par  le  même. 

io°.  Un  mémoire  sur  cette  question:  a  quel  titre  Bau- 
douin, surnommé  bras-de-fer,  premier  comte  de  Flan- 
dre ,  a-t-il  gouverné  cette  province  ?  Est-ce  comme 
Comte  héréditaire  ou  comme  usurpateur?  par  le  même. 

ii°.  Recherches  sur  la  découverte  du  charbon  de 
terre ,  dans  la  ci-devant  principauté  de  Liège ,  par  M.  le 
baron  De  Villenfangne  d'Inghoul. 

12°.  Extraits  des  observations  météorologiques  faites 
a  Bruxelles,  pendant  le  premier  semestre  de  l'an  1822. 

i3°.  Relation  d'un  voyage  fait  a  la  grotte  de  Han, 
par  MM.  Kickx  et  Quetelet. 

Cette  table  des  matières  indique  assez  généralement 
l'objet  des  travaux  de  l'académie  et  l'activité  de  ses 
membres;  on  voit  que  c'est  particulièrement  des  scien- 
ces et  de  l'histoire  du  pays  qu'elle  s'occupe.  L'acadé- 
mie de  Bruxelles ,  en  suivant  toujours  cette  carrière 
avec  le  même  succès  ,  ne  peut  manquer  de  jetter  un 
grand  lustre  sur  nos  Provinces  méridionales,  et  de 
rivaliser  bientôt,  non  seulement  avec  l'institut  de  Hol- 
lande ,  mais  encore  avec  les  académies  royales  des 
grandes  capitales  de  l'Europe. 

L'article  du  règlement  qui  détermine  que,  dans  48 
membres  ordinaires ,  il  y  en  aura  32  pour  les  sciences  et 
16  seulement  pour  l'histoire  et  les  belles-lettres,  est 
un  de  ceux  qui  font  le  plus  d'honneur  a  nos  Provinces  j 


(  «59  ) 
il  prouve  que  le  nombre  des  savans  y  est  beaucoup  plus 
considérable  que  celui  des  simples  gens  de  lettres,  et 
c'est  un   avantage   qui  se  ne  rencontre  pas   dans  un 
grand  nombre  de  pays. 

L'Académie  propose  pour  le  concours   de  1824,  les 
questions  suivantes  : 

CLASSE    D'HISTOIRE. 

Ire  question.  Quel  a  été  l'état  de  la  population,  des 
fabriques  et  manufactures  et  du  commerce  dans  nos 
provinces ,  depuis  le  commencement  du  dix-septième  siècle 
jusqu'à  l'an  1715,  époque  de  la  paix  d'Utrecht. 

Ijme  question.  En  quels  tems  les  corporations ,  con- 
nues sous  le  nom  de  métiers  (  neeringen  ende  ambach- 
ten  ) ,  se  sont-elles  établies  dans  les  provinces  des  Pays- 
Bas?  Quels  étaient  les  droits ,  privilèges  et  attributions 
de  ces  corporations  y  et  par  quels  moyens  parvenait-on 
à  y  être  reçu  et  à  en  devenir  membre  effectif? 

jljme  question.  Quelle  est  l'origine  de  la  différence 
qui  existe,  par  rapport  à  la  langue,  entre  les  provinces 
dites  Flamandes  et  celles  dites  Wallonnes?  A  quelle 
époque  cette  différence  doit-elle  être  rapportée?  Quelle 
est  la  raison  pour  laquelle  des  contrées  qui  faisaient 
partie  de  la  France,  parlent  flamand ,  tandis  que 
d'autres  qui  appartenaient  à  l'empire  germanique,  se 
servent  exclusivement  de  la  langue  française  ? 

IVme  question.  Quel  était  l'état  des  institutions  re- 
ligieuses et  des  ètablissemens  ecclésiastiques  dans  les 
provinces  méridionales  du  royaume  des  Pays-Bas  , 
depuis  le  commencement  du  règne  de  Marie-Thérèse, 
jusqu'à  ce  jour,  et  quels  changemens  y  ont  été  succes- 
sivement introduits  ? 


(  mi 

Vme  Question.  Les  Belges  formaient  au  tems  de  César 
la  troisième  partie  des  Gaules.  On  compte  dans  cette 
partie,  d'après  ses  Commentaires,  vingt-quatre  nations 
ou  peuplades  qui,  pour  la  plupart,  étaient  d'origine 
germanique ,  et  elles  avaient  les  vertus ,  comme  les  de'fauts 
de  leurs  ancêtres.  César  leur  donne  un  caractère  com- 
mun qui  les  distinguait  éminemment  de  tous  les  Gau- 
lois ;  c'est  la  bravoure.  Mais  ces  différentes  nations 
avaient  un  caractère  particulier:  la  fierté  et  la  haine  du 
luxe  étaient  les  qualités  dominantes  des  Nerviens  ;  la 
sobriété  et  l'amour  du  travail,  celles  des  Morins  et  des 
Ménapîens.  Les  Nerviens  étaient  les  ennemis  du  com- 
merce, et  ils  avaient  défendu  l'entrée  de  leur  pays  a 
tous  les  marchands  étrangers;  les  autres,  au  contraire, 
faisaient  leur  grande  occupation  de  l'agriculture,  de 
l'éducation  des  bestiaux ,  de  la  culture  des  arbres  et 
des  genres  de  commerce  qui  y  tiennent. 

L'espèce  de  férocité  que  les  anciens  Belges  tenaient 
des  Germains,  leurs  aïeux,  s'adoucit  insensiblement 
par  le  commerce  des  Romains. 

Après  avoir  été  soumis  aux  Francs,  ils  ont  été  parta- 
gés en  provinces  et  gouvernés  par  des  ducs,  des  com- 
tes, etc.  Ils  ont  enfin  été  réunis  sous  la  maison  de 
Bourgogne,  et  sont  passés  sous  les  dominations  espa- 
gnole, allemande  et.  française.  Les  différentes  provinces 
ont  cependant  conservé  long-tems  leurs  usages  et  leurs 
lois  particulières. 

L'académie  demande  : 

Quel  caractère  ces  peuples  ont-ils  déployé  dans  ces 
diverses  positions  ?  Peut-on  leur  assigner  un  caractère 
dominant ,  qui  soit  commun  à  toute  la  nation  connue 
sous  le  nom  générique  de  Belges;  ou  les  habitans  des 
diverses  parties  qui  ont  formé  les  Pays-Bas  espagnols 


(  i6i  ) 
et  autrichiens ,  aujourd'hui  les  provinces  méridionales 
du  royaume  des  Pays-Bas ,  ont-ils  montré  un  caractère 
particulier  qui  les  dislingue  les  uns  des  autres  ?  Leur 
caractère  a-t-il  éprouvé  des  altérations  ou  des  modifica- 
tions dans  ces  diverses  révolutions ,  soit  par  V influence 
des  événemens ,  soit  par  les  différentes  formes  de  gou- 
vernement ? 

yjme  question.  Quels  ont  été  les  changemens  intro- 
duits dans  V instruction  publique  dans  ce  pays,  depuis 
le  commencement  du  règne  de  Marie-Thérèse ,  jusqu'à 
ce  jour ,  et  quelle  a  été  V influence  de  ces  changemens 
sur  la  propagation  des  lumières  en  général  et  sur  la 
culture  des  sciences  et  des  lettres  en  particulier  ? 

yjjmc  qUestion.  L'académie  a  dans  le  tems  proposé 
deux  questions  relatives  a  l'organisation  des  états  de 
Brabant;  l'une  en  1782,  sur  le  tems  et  les  causes  de 
l'admission  de  l'état  ecclésiastique  5  l'autre  en  1786, 
sur  l'époque  de  la  formation  du  tiers-état. 

Ces  deux  intéressantes  questions  ont  donné  naissance 
a  d'excellens  mémoires  qui  ont  développé  et  éclairci  le 
sujet  de  la  manière  la  plus  satisfaisante. 

Mais  d'abord  ces  deux  questions  ne  concernent  qu'une 
province,  et  elles  n'ont  d'ailleurs  qu'un  rapport  indi- 
rect a  l'organisation  politique  des  états. 
L'académie  demande  donc  : 

Quelles  étaient  les  véritables  attributions  des  états 
dans  les  différentes  provinces ,  d'après  la  constitution 
de  chacune?  Quels  étaient  leurs  rapports  tant  avec  le 
souverain  qu'avec  la  nation  ?  Quel  était  celui  des  trois 
ordres  qui  avait  le  plus  cV influence  dans  les  diverses 
provinces  ?  Quels  changemens  ont-ils  subis  dans  leur 
organisation  aux  diverses  époques  ? 

Ce  ri'est  pas  sous  le  point  de  vue  purement  historique 


(  «Ç*  ) 

que  l'académie  désire  que  cette  question  soit  traitée  ; 
c'est  principalement  sous  le  rapport  politique  qu'elle 
doit  être  envisagée.  Ce  n'est  pas  la  simple  histoire, 
ce  n'est  pas  l'organisation  matérielle  des  états  que 
l'académie  demande  (les  mémoires  de  Nény  ont  suffi- 
samment développé  la  matière  sous  ce  double  aspect); 
ce  sont  sur-tout  leurs  attributions  constitutionnelles  , 
leurs  relations  administratives ,  leur  influence  morale 
qu'il  importe  de  faire  connaître. 

yjjjme  question.  Donner  un  précis  historique  de 
f  administration  des  diverses  provinces  des  Pays-Bas 
Autrichiens  à  l'époque  du  règne  de  l'impératrice  Marie- 
Thérèse. 

IXm*  question.  Parmi  les  villes  de  la  Belgique  qui 
prirent  une  part  active  a  l'insurrection  contre  le  gou- 
vernement de  Philippe  II ,  celle  de  Gand  joua  un 
des  premiers  rôles.  On  sait  que  Guillaume  I ,  prince 
d'Orange,  a  entretenu  des  relations  avec  les  différentes 
administrations  qui  se  sont  succédées.  Cette  ville  pa- 
raissait s'être  attachée  plus  particulièrement  a  la  for- 
tune de  ce  prince,  et  dans  toutes  les  affaires  elle  parut 
suivre  ses  conseils  avec  docilité  :  elle  ne  s'écarta  guère 
des  principes  de  modération  et  de  prudence  qui  diri- 
geaient le  prince  lui-même.  Cependant  elle  manqua 
quelquefois  de  déférence  pour  ses  conseils;  elle  résista 
même  a  ses  prières;  et  bientôt,  sous  l'administration 
tyraiinique  du  fougeux  Hemhjse,  après  son  retour  du 
Palatinat ,  elle  parut  vouloir  se  soustraire  entièrement 
a  l'influence  de  son  protecteur,  et,  peu  de  tems  après, 
les  troupes  d'Alexandre  Farnèse  la  rendirent  a  la  do- 
mination  espagnole. 

L'académie  demande  : 

Quel  fut  le  but  politique  des  fréquens  voyages  que 


(  m  ) 

Guillaume  1,  prince  J'Orange,  fit  à  Gand  pendant  les 
troubles  du  X FI™  siècle?  En  d'autres  termes:  Quelle 
influence  le  succès  des  relations  de  ce  prince  avec  la 
capitale  de  V ancienne  Flandre,  ou  le  défaut  de  ce 
même  succès  a-t-il  eue,  à  différentes  époques ,  sur  la 
part  active  que  cette  ville  a  prise  plus  particuliè- 
rement ,  dans  l'insurrection  de  nos  provinces  contre  les 
troupes  espagnoles y  et  plus  tard  contre  le  gouvernement 
de  Philippe  II? 

Xme  question.  La  cour  des  ducs  de  Bourgogne  était 
distingue'e  entre  toutes  celles  de  l'Europe  par  sa  magni- 
ficence. L'opulence  des  Pays-Bas,  née  de  leur  vaste 
commerce,  l'avait  fait  naître  et  la  soutenait.  Les  arts 
s'uuissaient  a  l'industrie  pour  donner  aux  fêtes  un  éclat 
et  une  élégance  peu  connus  ailleurs. 

L'académie  demande  un  tableau  de  la  cour  et  du 
gouvernement  de  Philippe-le-Bon,  considérée  sur-tout 
dans  ses  rapports  avec  le  commerce  qui  faisait  aborder 
aux  Pays-Bas  les  diverses  productions  du  Levant  et  de 
V Italie,  avec  les  arts  et  les  brandies  d'industrie,  qui, 
telles  que  les  tapisseries ,  doivent  aux  arts  leurs  plus 
grands  progrès. 

L'académie  désire  que  ce  tableau  forme  un  ensemble 
composé  de  faits  qui,  réunis,  fassent  mieux  appré- 
cier l'influence  réciproque  des  richesses  des  Pays-Bas 
sur  toutes  les  branches  d'industrie  (les  arts  compris), 
et  de  cette  industrie  sur  l'emploi  des  richesses,  et  par 
suite,  sur  les  mœurs  et  les  habitudes  d'une  époque  cé- 
lèbre dans  les  annales  belgiques. 

L'académie  propose  pour  1825  les  deux  questions 
suivantes  : 

Iro  question.  Faire  connaître  l'état  politique,  admi- 
nistratif, civil,  religieux  et  militaire,  ainsi  que  celui 


(  i'64  ) 
de  la  population^  des  fabriques  et  manufactures ,  du 
commerce y  de  l'instruction  publique,  des  lettres,  des 
arts  et  sciences  sous  le  règne  des  archiducs  Albert  et 
Isabelle,  dans  les  provinces  des  Pays-Bas ,  soumises 
à  leur  autorité, 

Hme  question.  Donner  une  notice  historique  des  ca- 
naux navigables  qui  existent  dans  les  provinces  tant 
septentrionales  que  méridionales  des  Pays-Bas,  con- 
struits depuis  les  tems  les  plus  reculés  jusqu7 à  nos  jours. 

La  suite  au  prochain  cahier. 


SOCIÉTÉ    FELIX    MERITIS   A    AMSTERDAM. 


Ija  section  de  peinture  a  reçu,  pour  le  concours 
de  1022  ,  cinq  tableaux  représentant  un  Intérieur  de 
maison  rustique;  et  cinq  antres  représentant  une  vue 
de  ville  au  clair  de  la  lune.  Parmi  les  cinq  premiers, 
le  prix  d'encouragement  de  cent  florins,  a  été'  décerné 
a  celui  dont  M.  George-Adam  Schmidt ,  peintre  a  Dor- 
dreclit,  a  été  reconnu  l'auteur  ;  et  l'exposition  dans  les 
salles  de  la  société  a  été  accordée  a  ceux  de  MM.  /. 
Ilari  et  Henri  van  der  Burgh,  tous  deux  de  La  Haye. 

Parmi  les  cinq  autres,  l'honneur  de  l'exposition  a 
été  décerné  au  tableau  de  M.  Bartholomé  van  ffove, 
de  La  Haye ,  et  a  un  autre  dont  l'auteur  ne  s'est  pas 
fait  connaître. 

La  même  section  de  la  société ,  pour  donner  aux  ar- 
tistes l'occasion  de  faire  connaître  et  apprécier  leurs 
talens,  propose  les  prix  suivans  : 

i°  Trois  cent  florins ,  une  médaille  d"  argent  et  une 
attestation  honorable ,   pour  le  meilleur  tableau,  haut 


(  i,65  ) 

de  7  5  et  large  de  60  pouces  des  Pays-Bas  (centimètres), 
représentant  un  sujet  a  deux  figures ,  savoir  :  L'entre- 
tien du  prophète  Nathan  avec  le  roi  David,  au  sujet 
diUrias$  le  moment  indiqué  est  celui  où  Nathan,  après 
avoir  fait  ressortir  le  crime  par  une  comparaison ,  dit 
à  David:  »  Fous  êtes  cet  homme/'  Voyez  2.  Sara.  12. 

2°  Cent  florins ,  comme  accessit,  au  peintre  dont  le 
tableau,  traitant  le  même  sujet,  s'approchera  le  plus 
de  celui  qui  aura  mérité  le  prix  d'honneur. 

3°  Cent  florins  et  une  attestation  honorable,  pour  le 
meilleur  dessin  non-colorié,,  haut  32  et  large  46  pouces 
des  Pays-Bas  (centimètres)  représentant  une  eau  calme, 
ornée  d'accessoires  propres  au  sujet. 

La  section  invite  ses  membres  et  tous  les  artistes  du 
Royaume  a  concourir  pour  ces  prix. 

Les  tableaux  envoyés  au  concours,  y  compris  ceux 
qui  auront  remporté  les  prix ,  resteront  la  propriété 
de  leurs  auteurs  et  leur  seront  restitués,  après  la  dis- 
tribution des  prix. 

Les  envois  devront  être  arrivés  avant  le  ir  Octobre 
i824,  au  local  de  la  Société  Félix  Meritis ,  et  adressés 
aux  Directeurs  de  la  section  de  peinture,  franc  de  port. 


SOCIÉTÉ    ÉCONOMIQUE   DES    PAYS-BAS   A   HARLEM. 


Programme   des   Prix. 

JDans  beaucoup  d'endroits,  les  pêchers  et  principale- 
ment l'espèce  nommée  double  montagne,  sont  affectés 
d'une  maladie  appelée  le  blanc;  elle  se  manifeste  par 
un  enduit  blanc  qui  se  montre  sur  le  jeune  bois  et  les 
jeunes  feuilles,  et  arrête  là  végétation,  fait  crisper  et 


(  i66  ) 

mourir  les  feuilles ,  tache  le  fruit  et  lui  fait  perdre  son 
goût.  La  société  donnera  sa  deuxième  médaille  en  or 
ou  vingt-cinq  ducats ,  a  celui  qui  indiquera  le  meilleur 
moyen  de  guérir  cette  maladie  et  de  la  prévenir,  en  en 
prouvant  l'efficacité  par  des  expériences  bien  constatées. 

Dans  la  réponse,  l'attention  doit  principalement  se 
fixer  sur  les  points  suivans  : 

i°.  En  quoi  consiste  cet  enduit  blanc?  de  quelle  ma- 
nière se  montre-t-il  dans  son  principe  et  ensuite  dans 
ses  développemens  successifs?  et  quelle  est  l'influence 
nuisible  qu'il  exerce  sur  la  végétation  de  l'arbre  et  des 
fruits? 

2°.  Cette  maladie  est-elle  contagieuse? 

5°.  Si  elle  l'est,  que  faut-il  faire  pour  prévenir  la 
communication  soit  d'une  partie  malade  avec  les  autres 
parties  du  même  arbre ,  soit  d'un  pêcber  malade  avec 
les  autres  pêchers? 

4°.  Si  la  maladie  était  reconnue  non-contagieuse , 
peut-on  en  préserver  les  pêchers  par  quelques  précau- 
tions? par  exemple  en  affaiblissant  ou  en  modifiant  la 
végétation  dans  Pécorce? 

5°.  Comment  pourrait-on  extirper  la  maladie? 

Les  descriptions  d'expériences  satisfaisantes  et  dûment 
attestées,  doivent  être  envoyées  avant  le  ir  Octobre  182e. 


L'année  1819  a  été  remarquable  par  la  grande  mul- 
tiplication des  souris  des  champs  (mulots  ou  campa-' 
gnols).  Les  grands  dégâts  qu'elles  ont  faits,  ont  prouvé 
l'insuffisance  des  moyens  proposés  jusqu'ici  contre  cette 
multiplication  5  mais,  en  se  faisant  remarquer  comme  un 
fait  intéressant  d'histoire-naturelle,  cette  multiplication 
a  pu  donner  lieu  a  des  observations  utiles  pour  l'ave- 
nir; ce  qui  a  engagé  la  société  a  proposer  en  concours: 


(  i67  ) 

L'indication  de  faits,  bien  constate's  et  appuyés  sur 
des  expériences  qui  feraient  connaître  un  ou  plusieurs 
moyens,  inconnus  jusqu'à  pre'sent,  pour  la  destruc- 
tion des  mulots,  et  qui  seraient  d'un  usage  général, 
non  nuisibles ,  peu  dispendieux  et  suffisamment  efficaces. 

La  société  donnera  a  celui  qui  fera  cette  indication 
d'une  manière  satisfaisante,  la  deuxième  médaille  dyor 
ou  25  ducats. 

Les  mémoires  et  attestations  doivent  être  envoyés 
avant  le  ir  Octobre  io24. 


Commerce  et  Colonies. 
La  société  payera  aux  deux  premiers  qui  importeront 
et  débiteront  dans  le  Royaume  de  la  Gomme  Copal , 
de  bonne  qualité  marchande,  recueillie  dans  les  colonies 
occidentales  des  Pays-Bas,  une  prime  de  soixante  cents 
par  livre  des  Pays-Bas ,  jusqu'à  concurrence  de  25o  livres 
qu'ils  prouveront  avoir  ainsi  importées  et  débitées.  Les 
preuves  et  justifications  doivent  être  envoyées  avant  le 
ir  Octobre  1820.  Cette  prime  sera  prorogée  jusqu'au 
iT  Octobre  1825. 

La  société  donnera  la  deuxième  médaille  en  or  ou 
25  ducats,  a  celui  qui  découvrira  et  mettra  en  usage 
une  étoffe  ou  matière,  propre  a  remplacer,  soit  pour 
le  tout  soit  pour  une  partie  majeure ,  le  poil  de  lièvre 
dans  la  fabrication  des  chapeaux,  mais  de  telle  manière 
que,  sans  augmentation  de  dépenses,  les  chapeaux  fins 
ne  perdent  rien  de  leurs  qualités  essentielles. 

Des  échantillons,  avec  les  justifications  et  attestations 
doivent  être  envoyés  avant  le  ir  Octobre  1825.  Cette 
prime  sera  prorogée  jusqu'au  5o  Septembre  1824. 

Ustenciles.     Chimie. 
Depuis  l'introduction  d'une  méthode  de  brasser  déjà 


c  rfë  ) 

usitée  depuis  iong-tems  dans  quelques  provinces  méri- 
dionales, on  a  acquis  l'expérience  qu'ici  comme  dans 
ces  provinces  ,  la  bierre  devient  collante  et  file  , 
souvent  en  très-peu  de  tems  et  de  manière  a  devenir 
désagréable  et  a  peu  près  hors  d'usage.  La  société 
allouera  la  deuxième  médaille  en  or  ou  20  ducats ,  a 
celui  qui  démontrera,  non-seulement  en  théorie  mais 
aussi  par  des  expériences  de  quelques  années,  les  causes 
de  la  dégradation  qui  fait  ainsi  filer  la  bierre  ,  et  qui 
indiquera  comment,  en  conservant  a  la  Lierre  toutes 
ses  bonnes  qualités ,  on  peut  prévenir  cette  dégrada- 
tion ou  la  faire  cesser.  L'indication  de  ce  moyen,  les 
preuves  et  justifications  doivent  être  envoyées  avant  le 
ir  Octobre  io24. 


La  société  donnera  la  deuxième  médaille  d'or  ou  25 
ducats ,  a  celui  qui,  le  premier  dans  le  Royaume,  aura 
employé,  selon  le  conseil  du  comte  de  Rumford ,  la 
vapeur  de  Peau  dans  une  fabrique  ou  usine ,  non- 
seulement  pour  chauffer  les  emplacemens ,  mais  aussi 
pour  la  cuisson  et  la  préparation  des  substances  dont  il 
y  est  fait  emploi.  On  demande  une  description  concise 
et  claire  des  procédés  employés ,  et ,  s'il  y  a  lieu ,  des 
notices  sur  les  améliorations  dont  l'invention  du  comte 
de  Rumford  pourrait  être  susceptible. 

Les  notices,  dessins,  descriptions  et  attestations, 
doivent  être  envoyés  avant  le  ir  Octobre   182e. 


La  société  ayant  appris  que  des  peaux  préparées  d'ani- 
maux, importées  de  pays  étrangers  au  lointain,    sont 
envoyées  en  France  pour  y  être  rembourrées  et  empail- 
lées ,   allouera    la    deuxième  médaille  d'or  ou    25  du- 
cats ,  a  l'habitant  ou  artiste  des  Pays-Bas,  qui  prouvera 


(  i69) 
par  des  faits  qu'il  connaît  et  sait  exécuter ,  aussi  bien 
qu'on  le  fait  en  France ,  le  rembourrage  ou  empaillage 
de  ces  peaux  préparées ,  et  s'engagera  a  le  faire  a  aussi 
bon  marché.  Pour  obtenir  ce  prix,  il  faut  envoyer  au 
moins  deux  peaux  rembourrées  ou  empaillées  de  mam- 
mifères et  deux  d'oiseaux,  et  y  joindre  des  preuves 
que  ces  peaux  ne  proviennent  pas  d'animaux  entiers 
mais  que  le  concurrent  les  a  reçues,  préparées,  de  pays 


étrangers. 


Les  preuves ,  documens  et  attestations  doivent  être 
envoyés  avant  le   ir  Octobre  182e. 


ACADEMIE  ROYALE  DE  GAND. 


Exposition.   —   Concours. 

JLe  salon  a  été  ouvert  le  4  Août  ;  cette  solennité  a  eu 

lieu  en  présence  des  autorités  civiles  et  militaires ,  de 

MM.  les  directeurs  de  l'académie  et  des  artistes  résidant  a 

Gand.  Aucune  de  nos  expositions  n'a  été  plus  nombreuse 

en  tableaux  d'un  vrai  mérite.  La  partie  historique  y  est 

parfaitement  représentée  par  le  beau  et  gracieux  tableau  de 

M.  Paelinck,  la  toilette  de  Psyché,  et  par  les  admirables 

productions  de  M.  Navez.  Le  tableau  d'autel,  exposé 

par  M.  De  Cauwer ,  tient  avantageusement  sa  place  a  côté 

de  ces  beaux  ouvrages,  et  les  sujets  historiques  qu'il 

a  exposés ,  quoique  peints  sur  des  dimensions   moins 

grandes ,  inspirent  le  même  intérêt.  Nous  voyons  avec 

plaisir  que  ce  genre ,  qui  a  l'avantage  de  donner  aux 

artistes  plus  de  facilité  pour  placer  leurs  ouvrages ,  se 

cultive  avec  beaucoup  de  succès,  comme  le  prouvent 

lyme  livraison.  12 


(  *7°  ) 
encore  les  jolies   productions    de   MM.   Beaufort,   de 
Bruges,  Laue  et  du  Bois,  de  Bruxelles,  Moons  et  Van 
Ysendyck ,  d'Anvers ,    etc.    Les   portraits  en  pied  se 
placent  immédiatement  après  l'histoire.  Ceux  exposés  par 
M.  Kinson,  tiennent  le  premier  rang;  les  deux  person- 
nages illustres  qu'ils  représentent,  contribuent  encore 
a  y  fixer  les  regards  et  l'admiration  du  public;  chacun 
y  reconnaît  les  traits  de  l'auguste  Princesse  et  ceux  de 
son  illustre  époux  qui,  dans  les  plaines  de  Waterloo,  se 
couvrit  de  gloire  et  de  lauriers.  M.  Autrique  a  exposé 
un  portrait  qui  ferait  honneur  a  une  main  exercée; 
nous  ne  doutons  pas  qu'en  suivant  les  leçons  et  les 
conseils  de  M.  Kinson  ,  son  maître  ,  il  ne  parvienne  un 
jour  a  l'égaler.  Un  tableau  de  famille ,  l'arrestation  du 
comte  d'Egmonty  et  V intérieur  d'une  écurie,  exposés 
par  M.  Geirnaert,  prouvent  que  ce  jeune  artiste  réussit 
en  différens  genres.  Les  paysages  de  MM.  Ommeganck 
et  Regemoorter  ,   d'Anvers,    Van  Os  et  Ravensway, 
de  Hilversum,  Couckc,  peintre,  et  Surmont,  amateur 
a  Gand,  Van  Assche  et  Hellemans ,  de  Bruxelles,  Cogels , 
actuellement  a  Munich,  Ducorron,  d'Ath,  et  plusieurs 
autres,  dont  la  nomenclature  serait  trop  longue  pour 
trouver  place  dans  cette  petite  revue,  ont  fourni  un 
riche  contingent  pour  cette  partie  de  l'art. 

Au  nombre  des  tableaux  appelés  de  genre ,  nous  cite- 
rons celui  de  M.  Senave,  de  Loo  a  trois  lieues  d'Ypres; 
ce  tableau  a  pour  sujet  l'atelier  de  Rembrant  ;  l'artiste 
y  a  figuré  un  grand  nombre  de  peintres  de  ce  tems. 
C'est  un  présent  qu'il  a  fait,  en  1821,  a  l'académie 
d'Ypres  où  il  apprit  les  premiers  élémens  de  son  art.  La 
direction  de  cette  académie  s'est  empressée  de  l'envoyer 
a  l'exposition  pour  faire  connaître  le  talent  d'un  Belge 
dont  les  productions  ne  se  trouvent  guère  dans  sa  patrie 


(  ijfi  ) 
et  que  les  arts  viennent  de  perdre  récemment  ;  c'est  en 
quelque  sorte  un  hommage  public  rendu  à  sa  mémoire. 
M.  Senave,  établi  depuis  nombre  d'années  a  Paris,  vient 
de  décéder  dans  cette  ville,  a  l'âge  d'environ  70  ans. 

Le  lit  de  mort  de  Napoléon;  tableau  dont  l'auteur  ne 
s'est  point  fait  connaître,  attire  les  regards  des  curieux. 
Une  division  française  attaquée  par  une  guérilla,  com- 
position exposée  par  M.  le  colonel  Groenia,  est  peinte 
avec  tout  le  génie  et  l'originalité  qui  distinguent  ses 
ouvrages.  Les  productions  de  MM.  Coene,  Eecbaudt, 
Steyaert  père ,  De  Landtsheer ,  père  et  fils ,  Vanden  Abeele 
et  Van  Oppen ,  se  font  remarquer  avantageusement , 
ainsi  que  le  joueur  de  flûte  de  M.  Vander  Kooi  ; 
on  regrette  beaucoup  que  cet  artiste  n'ait  point 
envoyé  au  salon  un  de  ses  derniers  ouvrages.  Otto  de 
Boer,  son  élève,  a  exposé  le  portrait  d'un  jeune  homme 
occupé  a  dessiner,  dans  lequel  on  remarque  des  beautés 
dignes  du  maître.  M.  Vander  Donckt  nous  a  représenté 
Raphaël  et  la  belle  Fornarina,  sujet  gracieux,  agréable- 
ment composé  et  peint  d'une  manière  facile.  Mad.  De  la 
Tour  cultive  avec  un  succès  toujours  croissant  le  joli 
talent  qu'elle  possède.  Mad.  Muller  continne  d'enrichir 
nos  expositions  par  de  nouvelles  productions  qui  nous 
marquent  ses  progrès  dans  la  peinture  quelle  étudie  avec 
amour  et  assiduité.  Les  demoiselles  Elisa  Gamond  et 
Fanny  Horgnies,  élèves  de  M.  Paelinck,  ont  essayé  un 
genre  plus  rapproché  de  l'historique,  en  exposant  une 
composition  dont  les  figures  a  mi-corps  sont  de  gran- 
deur naturelle.  Ces  aimables  élèves  unissent  les  grâces 
de  la  jeunesse  a  la  beauté  et  au  talent. 

M.  De  Noter  occupe  toujours  le  premier  rang  parmi 
les  peintres  d'intérieurs  de  ville.  La  vue  de  Bruges, 
exposée  sous  le  numéro  127,  estime  des  meilleures  pro- 


(  »72  ) 
ductions  du  salon.  Un  hiver  du  même  peintre,  est 
exécuté  avec  la  plus  grande  vérité;  c'est  un  genre 
que  l'artiste  traite  avec  la  même  perfection  que  ses 
agréables  vues  de  ville.  M.  Vandcr  Steene  fils,  de  Bru- 
ges ,  suit  les  traces  de  M.  De  Noter  ;  un  intérieur  de 
ville,  sous  le  n°  137,  fait  croire  que  les  conseils  de  ce 
maître  ne  lui  sont  pas  étrangers.  Le  jeune  Poelman ,  a 
Gand,  fait  aussi  des  progrès  dans  cette  partie  ;  en  étu- 
diant un  peu  plus  la  nature  il  parviendra  a  y  exceller. 
L'intérieur  du  musée  de  Paris,  par  M.  Warlincourt, 
est  un  bel  ouvrage  ;  et  les  intérieurs  d'église ,  par  M. 
Nicolié,  méritent  de  trouver  leur  place  dans  le  cabinet 
de  quelqu'amateur. 

Les  paysages  où  les  animaux  sont  l'objet  principal  du 
tableau,  se  traitent  avec  la  plus  grande  perfection  par 
MM.  Berré,  Verboeckhoven  et  De  Roi. 

Parmi  les  tableaux  de  fleurs,  nous  voyons  avec  satisfac- 
tion les  ouvrages  de  M.  Speeckaert,  de  Bruxelles,  de  Mle 
Evrard,  d'Ath,  et  des  demoiselles  De  Noter,  de  Gand. 

On  distingue  parmi  les  marines ,  les  ouvrages  de 
MM.  Schotel  et  de  Schouman,  de  Dort,  et  ceux  de 
M.  Dominique  de  Bast,  peintre-amateur,  a  Gand. 

Les  miniatures  sont  peu  nombreuses;  M.  De  la  Tour, 
de  Bruxelles ,  a  exposé  un  portrait  de  fantaisie  ;  c'est 
une  des  meilleurs  productions  de  cet  artiste.  M.  Gau- 
thier Stirurn,  amateur  qui,  dans  ses  momens  de  loisir, 
cultive  la  peinture  avec  un  succès  heureux,  s'est  amusé, 
pendant  le  court  séjour  qu'il  a  fait  a  Gand ,  a  peindre  les 
portraits  de  plusieurs  personnes  ;  ses  miniatures  sont 
traitées  comme  des  peintures  à  l'huile  ;  le  dessin  en  est 
correct  et  la  ressemblance  en  est  bien  saisie;  élève  de 
M.  Devosges,  fondateur  de  l'académie  de  Dijon,  il  reçut 
les  bons  principes  que  ce  digne  professeur  sçut  incul- 
quer à  tous  ses  élèves. 


(  !7.5  ) 

Les  dessins  de  M.  De  Noter-Maya ,  nous  rappellent 
toujours  des  éve'nemens  historiques  par  les  monumens 
qu'ils  représentent.  lia  exposé,  sous  le  n°  545,  l'éléva- 
tion de  la  superbe  tour  de  l'église  métropolitaine  de 
Malines,  d'après  le  dessin  original  conservé  aux  archi- 
ves de  cette  ville.  Un  autre  dessin  non  moins  intéres- 
sant, représente  l'hôtel-de-ville  et  le  beffroi  de  Gand, 
fait  aussi  d'après  les  dessins  originaux  conservés  aux 
archives;  celui  du  beffroi  date  de  l'année  n85;  celui 
de  la  maison -de -ville  fut  projette  vers  le  milieu  du 
XVme  siècle. 

Parmi  les  morceaux  de  sculpture,  les  yeux  se  por- 
tent généralement  sur  une  statue  en  marbre,  par  M.  Par- 
mentier  ;  c'est  une  baigneuse  dans  l'action  de  descendre 
dans  l'eau  ;  sa  pose  est  gracieuse  et  l'exécution  en  est 
belle.  On  voit  dans  la  même  salle  une  statue  et  un  buste 
de  Grétry,  coulés  en  fer.  Ces  objets  n'y  sont  point  ex- 
posés comme  des  ouvrages  parfaits  de  sculpture,  mais 
seulement  pour  donner  une  idée  de  la  précision  avec 
laquelle  on  peut  exécuter  des  statues  en  fonte  qui  ont 
toute  la  perfection  du  modèle.  Afin  d'éloigner  l'idée 
des  moyens  souvent  employés  pour  cacher  les  défauts, 
ces  objets  sont  exposés  tels  qu'ils  sont  sortis  du  moule, 
sans  même  qu'ils  soyeut  nettoyés,  et  de  manière  a  lais- 
ser voir  qu'on  est  parvenu  a  travailler  cette  matière, 
qu'on  croyait  si  ingrate ,  avec  plus  de  facilité  que  le 
bronze ,  et  qu'elle  est  susceptible  d'être  restaurée  a  la 
lime  et  au  ciselet.  MM.  James  et  John  Cockerill,  de 
Liège,  ont  exposé  ces  produits  de  leur  industrie,  pour 
combattre  le  préjugé  des  personnes  qui  jugeaient  du 
degré  de  perfection  de  la  fonte  d'après  les  mauvais 
produits  de  nos  anciennes  fonderies,  et  qui  sont  dans 
la  fausse  croyance  que  le  fer,  placé  en  plein  air,  est 


(  *74  ) 

plus  exposé  a  la  détérioration  par  son  action  que  le 
bronze  ou  le  marbre. 

En  Allemagne  on  est  déjà  revenu  de  ces  erreurs;  plu- 
sieurs statues  élevées  aux  grands  hommes  qui  ont  illustré 
la  patrie  sont  fondues  en  fer.  C'est  une  grande  res- 
source pour  les  statuaires  et  une  grande  économie  dans 
un  pays  où  on  ne  peut  employer  de  fortes  sommes  pour 
l'érection  d'un  monument.  Le  fer  a  l'avantage  de  réduire 
au  quart  les  frais  de  fonte  et  de  ne  point  être  exposé, 
comme  le  bronze,  a  la  cupidité  d'un  ennemi  qui  en  fait 
battre  de  la  monnaie  ou  le  fait  transformer  en  canons. 

Un  amateur  de  Tongres,  M.  Vandermeer,  a  exposé 
deux  peintures  sur  verre;  l'une  représente  la  Vierge  au 
Poisson,  et  l'autre  la  Sainte  Famille  d'après  Raphaël. 
Après  plusieurs  essais  pénibles  et  infructueux ,  il  est 
parvenu  à  trouver  un  procédé  pour  colorier  le  verre  et 
le  nuancer  par  le  moyen  du  feu  ;  ses  ouvrages  nous 
rendent  parfaitement  cette  ancienne  peinture. 

La  gravure  et  la  sculpture  ne  reçoivent  pas  en 
Belgique  les  mêmes  encouragemens  que  la  peinture, 
quoique  nous  possédions  des  statuaires  et  des  graveurs 
qui  ont  un  talent  distingué  et  que,  de  tems  en  tems, 
nous  voyions  a  nos  expositions  des  ouvrages  dignes  des 
premiers  maîtres.  M.  Claessens  a  exposé  une  superbe 
gravure  d'après  la  femme  hy (tropique  de  Gérard  Douw, 
et  M.  Braemt  des  médailles  qui  rivalisent  avec  les  belles 
productions  de  l'école  française.  La  gravure  sur  pierres 
fines  est  encore  moins  en  usage;  M.  Simon  est  celui  qui 
l'exécute  avec  le  plus  de  perfection  ;  il  a  formé  plu- 
sieurs élèves  qui  nous  promettent  de  dignes  succes- 
seurs de  leur  maître. 

Nous  avions  espéré  de  voir  a  l'exposition    quelques 
épreuves  des  gravures  du  grand  ouvrage,  d'après  Ra- 


(  *5*  ) 

phaèl,  dont  s'occupe  M.  De  Meulemeester  ;  mais  des 
circonstances  particulières  l'ont  empêché  de  satisfaire 
a  la  curiosité  de  ses  nombreux  souscripteurs  5  cet  ar- 
tiste vient  de  recevoir  récemment  de  Sa  Majesté  notre 
auguste  Reine,  protectrice  des  arts  qu'elle  cultive  elle- 
même  avec  un  rare  talent,  une  bague  en  brillans 
pour  le  dessin ,  fait  de  mémoire ,  du  célèbre  chapeau 
de  paille,  de  Rubens,  que  la  Reine  a  daigné  accepter 
du  graveur. 


Le  jugement  du  concours  a  eu  lieu  le  10  Août  dans 
la  salle  du  musée.  L'académie  avait  proposé,  pour  les 
maîtres  de  l'art,  un  prix  de  peinture  dont  le  sujet  était 
Pindare  et  les  Grâces;  aucun  tableau  n'est  parvenu 
au  concours. 

Pour  les  élèves,  on  demandait  le  Seigneur  et  la  Sa- 
maritaine; onze  tableaux  ont  été  admis  a  concourir.  Le 
premier  prix  a  été  décerné  a  M.  François  Bodumont, 
de  Bruxelles ,  élève  de  M.  Paelinck  ;  l'accessit  a  MM.  Van 
den  Abeele ,  de  Gand,  élève  de  M.  Gros,  et  Félix 
Heyndrickx,  élève  de  MM.  Navez,  David  et  Gros. 

Le  tableau  de  genre  devait  représenter  l'échec  et  mat; 
neuf  tableaux  ont  concouru  5  le  premier  prix  a  été  adjugé 
a  M.  Jacques-Joseph  Eeckhout,  demeurant  a  Bruxelles; 
l'accessit  a  M.  Antoine  Goovaerts ,  de  la  même  ville. 

On  demandait  un  hiver  pour  le  prix  du  paysage;  quatre 
morceaux  ont  été  envoyés  au  concours;  celui  de  M.  An- 
dré Schelfhout,  de  La  Haye,  a  obtenu  la  médaille. 

Le  prix  du  concours  d'architecture  n'a  point  été  dé- 
cerné, quoiqu'il  y  eût  quatre  concurrens  ;  mais  on  a 
accordé  un  prix  d'encouragement  au  projet  de  M.  Ferdi- 
nand Berckmans ,  d'Anvers  ;  on  avait  demandé  les  façade , 


(  176  ) 

coupe  et  plan  d'un  théâtre  destiné  a  faire  la  distribution 
des  prix  de  l'industrie  nationale.  M.  Ange  François, 
de  Bruxelles,  élève  de  son  père,  a  obtenu  le  premier 
prix  du  dessin  d'une  composition  allégorique  :  le  Royau- 
me des  Pays-Bas.  Celui  du  dessin  d'après  l'antique,  a 
été  accordé  a  M.  Geens ,  de  Gand ,  élève  de  M.  De  Cauwer 
aîné  ;  celui  de  la  sculpture  n'a  point  été  décerné. 

Dans  la  soirée,  après  le  jugement,  l'académie  a  réuni 
dans  un  banquet  de  80  couverts  les  juges  du  concours  5 
parmi  ceux  des  provinces  septentrionales,  on  comptait 
MM.  Van  Os  et  Moritz,  membres  de  l'institut  royal, 
De  Vos  Willemsz,  secrétaire  delà  classe  des  beaux-arts 
de  l'institut  et  Schotel,  peintre  de  marines,  a  Dordrecht. 

Le  11,  tous  les  artistes  étrangers  étant  invités  a  un 
diner  splendide,  M.  Van  Hultliem  a  remis  a  M.  Pae- 
linck,  en  présence  de  ses  collègues,  une  médaille  en  or 
de  la  valeur  de  200  florins,  comme  un  témoignage  de 
satisfaction  générale  pour  le  beau  tableau  qui  représente 
la  toilette  de  Psyché,  exposé  au  salon.  Immédiatement 
après  le  diner  on  p'est  rendu  a  la  grande  salle  de  la 
rnaison-de-ville  pour  assister  a  la  distribution  solennelle 
des  prix.  M.  Cornelissen ,  après  avoir  fait  en  langue 
nationale  le  discours  d'usage  ,  a  donné  lecture  du  procès- 
verbal  par  lequel  l'académie  décernait,  outre  les  prix  du 
concours,  quatre  médailles  aux  artistes  dont  les  produc- 
tions exposées  au  salon  approchaient  le  plus  de  la  per- 
fection ;  les  noms  proclamés  furent  ceux  de  M.  Pae- 
linck,  peintre  de  S.  M.  la  Reine,  M.  Kinson,  peintre 
de  S.  A.  R.  la  Duchesse  de  Berry;  M.  Navez,  peintre  a 
Bruxelles,  et  M.  Schotel,  peintre  de  marines  a  Dort. 


MESSAGER 

DES  SCIENCES  ET  DES  ARTS. 


Vmo.  Livraison  —  Septembre  1823. 


LETTKE  ADRESSE  A    LA    SOCIETE   ROYALE  DES  BEAUX-ARTS, 

Par  M.  D.  F.  van  Lennep,  membre  de  la  classe  de 

littérature. 

J'ai  lu  avec  intérêt  dans  le  Messager  de  Juin  la  notice 
touchant  quelques  Antiquités  Romaines,  trouvées  dans 
la  commune  de  Crupet ,  province  de  Namur ,  par  M. 

M.  D.  B L.,  membre   correspondant  de  la  société 

des  beaux-arts.  Mon  attention  a  été  sur-tout  fixée  par 
l'inscription  grecque  trouvée  sur  la  pierre  qui  couvrait 
l'intérieur  d'un  des  tombeaux  découverts  en  cet  endroit. 
Je  suis  parfaitement  d'accord  avec  le  savant  auteur  de 
l'article,  que  cette  pierre  a  fait  partie  d'un  monument 
plus  ancien ,  et  qu'ensuite  on  l'a  prise  pour  en  cou- 
vrir ce  tombeau.  Elle  me  paraît  avoir  appartenu  à  la 
base  d'une  statue  représentant  le  prince  mentionné 
dans  l'inscription  ;  car  des  quatre  mots,  qu'on  y  lit, 
r.  loï.  mahimoc  kaicap,  le  dernier  bien  certainement 
nous  désigne  un  prince  romain,  un  César.  Mais  ce 
prince  est-il,  comme  le  croit  M.  D.  B L. ,  l'empe- 
reur ou  tyran  Maxime,  qui  usurpa  l'empire  sur  Gra- 
tien  et  en  fut  privé  par  Théodose  ?  Le  nom  mazimoc 
semble  donner  quelque  fondement  a  cette  opinion ,  mais 
ou  s  les  autres  mots,  dont  l'inscription  se  compose, 
Vme  livraison.                                   i3 


(  i?8  ) 

lui  sont,  a  ce  qu'il  me  paraît,  contraires.  D'abord, 
sur  toutes  les  médailles  du  tyran  Maxime  on  lit  après 
sou  nom  aug.  Auguste ,  en  grec  cebactoc  ,  et  non 
pas  kaicap,  titre  qu'alors  on  donnait  au  prince,  qui 
par  sa  naissance  ou  par  la  volonté  de  l'empereur  était 
considéré  comme  devant  lui  succéder  et  souvent  déjà 
commandait  immédiatement  sous  lui.  Un  tel  titre  ne 
convint  jamais  a  Maxime ,  qui  régna  après  Gratien. 
Ensuite ,  ce  tyran  se  nommait  Magnus  Maximus  et  non 
pas  Jiilius  Maximus.  11  m'est  impossible  aussi  d'accor- 
der a  M.  D.  B L.  que  1er  de  l'inscription  puisse  être 

l'abrégé  du  mot  y'tpm  et  que  ce  mot  signifie  lin  sénateur, 
un  homme  respectable,  tellement  qu'il  réponde  aux  mots 
Dominus  noster  des  médailles  du  tyran  Maxime  j  r  n'a 
jamais  été  le  monogramme  de  yépm  et  quoiqu'a  Sparte  les 
sénateurs  fussent  nommés  yé^ems  et  que  les  historiens 
grecs  se  soient  servis  du  mot  yepovri*  pour  rendre  la 
dénominatian  latine  de  Senatus ,  jamais  yipm  dans  les 
inscriptions  grecques  n'a  signifié  un  sénateur  romain; 
jamais  aussi,  je  crois,  empereur  romain  ne  fut  qualifié 
sénateur  dans  un  acte  ou  monument  public.  Il  est  dit 
dans  une  note  sur  l'article  que  le  r  de  l'inscription 
serait  plutôt  le  monogramme  de  rEPMANiKOC.  Cette  opi- 
nion me  paraît  également  inadmissible.  Déplus  repp.x-nx.oc 
comme  surnom  d'honneur  n'aurait  pas  précédé ,  mais 
suivi  les  noms  propres,  r  comme  prénom  est  ici,  comme 
par-tout  TAioc  Cajus.  Et  pourquoi  chercher  une  autre 
explication  de  ce  monogramme,  lorsque  nous  savons 
par  plusieurs  monumens  de  l'antiquité,  connus  depuis 
long-tems,  que  le  fils  de  l'empereur  Maximin,  destiné 
par  son  père  a  lui  succéder,  et  décoré  du  titre  de 
César ,  fut  appelé  c.  iyltvs  maximvs  ou  c.  ivlivs 
yervs  maximvs.  C'est  a  ce  Jules  Maxime  que  se  rap- 


<  179  ) 

porte  le  médaillon  cite'  par  le  P.  Jobert,  et  c'est  à  lui 
que  fut  donné  le  surnom  de  Germanicus ,  dont  la  note 
fait  mention.  Le  prédécesseur  de  Maximin,  Alexandre 
Sévère  avait  fait  de  grands  préparatifs  dans  les  Gaules 
pour  faire  la  guerre  aux  Germains  et  allait  passer  le 
Rhin  avec  ses  troupes,  lorsqu'il  fut  assassiné,  l'an  235 
de  notre  ère.  Maximin  proclamé  en  sa  place  empereur 
par  les  soldats,  passa  la  rivière  et  remporta  plusieurs 
victoires   sur  les  Germains ,   a  l'occasion  desquelles  le 
surnom  de  Germanicus  lui  fut  donné  sur  les  médailles 
dès  l'année    suivante.    Son  fils    Maxime,    qui  l'avait 
accompagné   dans  son  expédition ,  participa  aux  hon- 
neurs paternels.  Il  paraît  avec  son  père  sur  le  revers 
de  quelques  médailles  de  Maximin,  frappées  par  ordre 
du  sénat,  et  la  légende  porte  Victoria  avgvstorvm 
s.  c.  Sur  d'autres  médailles  on  trouve  maximinvs  et 
maximvs  avgvst  germanici  avec  la  tête  de  Maximin 
couronnée  et  celle   de  Maxime  nue.  Maxime  se  trouva 
doue  assez  long-tems  dans  des  régions  voisines  de  nos 
provinces ,  et  il  est  assez  naturel  que  des  victoires  rem- 
portées sur  un  ennemi ,  que  les   Gaules  avaient  sur- 
tout a  craindre ,  lui  aient  fait  ériger  des  statues  en  Bel- 
gique, lesquelles  cependant  furent  renversées  avec  celles 
de  Maximin ,   lorsque  celui-ci  succomba  sous  le  poids 
de  la  haine  publique,  qu'il  s'était  attirée  par  ses  cruau- 
tés. Je  crois  devoir  dire  encore  un  mot  sur  les  noms  de 
Maximin  et  de  son  fils  :    Capitolin   nous  atteste  que 
Maximin  était  d'origine  barbare  et  avait  eu  pour  père 
un  Goth,  appelé  Micca;  ce  nom  en  langue  gothique 
signifie  très-grand,  et  cette  signification  se  retrouve  dans 
les  noms  latins  de  Maximinus  et  de  Maximus.  Devenu 
empereur,   Maximin  s'efforça  de  cacher    son  origine; 
non  content  d'avoir  échangé  son  nom  barbare  contre  un 


(  i8o  ) 

nom  romain,  il  prit  aussi  les  noms  de  C.  Julius,  porte'* 
par  le  premier  fondateur  de  la  puissance  des  empereurs, 
et  y  joignit  celui  de  Verus  porté  par  les  collègues  des 
Antonins  ,  pour  rappeler  les  tems  heureux  de  leur  règne. 
On  le  trouve  donc  sur  une  médaille  de  Cibyre  en 
Phrygie,  désigné  avec  son  fils  sous  les  noms  et  titres 

de    Aï.    K.    Txios    ïovXtoi    OÏH^oç     MAZElMEINOC  Keit   IV/oç 

lai/Aies  OYHpoç  kaicap  cebb.  ,  c'est-à-dire  o-eGcts-oi  Augus- 
tes. Dans  une  médaille  latine  le  fils  est  appelé  c.  ivl. 

VERUS    MAXIMUS   CAESAR. 

Ce  jeune  prince  était  bien  élevé  et  très-versé  dans 
la  langue  grecque.  Peut-être  a-t-on  cru  lui  faire  la 
cour  en  mettant  l'inscription  dans  cette  langue,  qui  du 
reste  était  familière  dans  les  Gaules,  comme  dans  toutes 
les  parties  civilisées  de  l'Empire  Romain. 

Je  vous  offre,  Messieurs,  ces  réflexions  pour  ce  qu'el- 
les valent.  Vous  en  ferez  l'usage  que  vous  jugerez 
convenable.  Ayant  l'honneur  d'être  membre  de  votre 
Société ,  j'ai  voulu  prouver  du  moins  que  je  m'inté- 
resse a  ses  travaux. 


Observations 

Sur  un  essai  de  carte  géologique  de  la  France ,  des 
Pays-Bas  et  des  contrées  voisines,  par  M.  J.  J. 
D'Ômalius  D'Halloy.  Paris,  1823,  chez  31.  Delà- 
marche,  rue  du  jardinet ,  n°  i3. 


Au  milieu  des  progrès  rapides  qu'ont  faits  depuis 
un  demi-siècle,  toutes  les  branches  de  l'histoire-natu- 
rellp,  il  s'est  formé  une  nouvelle  science,  dont  les  ré- 
sultats offrent  a  l'industrie  les  ressources  les  plus  pré- 


(  «8i  ) 
cieuses.  Cette  science,  telle  qu'elle  existe,  doit  son 
origine  au  célèbre  Pallas,  qui,  dans  un  mémoire  im- 
primé en  1777,  établit  le  premier  cette  règle  générale, 
vérifiée  par  toutes  les  observations  subséquentes  sur 
la  succession  des  trois  ordres  primitifs  des  montagnes  : 
les  granitiques  au  milieu,  les  schisteuses  a  leurs  côtés 
et  les  calcaires  en  dehors.  Ce  fut  de  la  que  partirent 
les  Saussure,  les  Deluc,  les  Weiner  pour  fonder  les 
principes  de  la  géologie  moderne,  perfectionnée  depuis 
par  un  grand  nombre  d'observations  faites  tant  dans 
l'ancien  que  dans  le  nouveau  monde. 

Parmi  ceux  de  nos  compatriotes  qui  cultivent  cette 
science  avec  le  plus  de  succès  et  de  talens ,  il  faut 
mettre  en  première  ligne  M.  D'Omalius,  connu  comme 
géologue  par  plusieurs  mémoires  très-intéressans,  insé- 
rés a  diversess  époques  dans  les  Annales  des  mines. 
M.  D'Omalius  est  un  des  savans  les  plus  aimables  qu'on 
puisse  trouver,  et  le  genre  d'études  auquel  il  s'est 
livré,  parfaitement  en  rapport  avec  les  intérêts  de  la 
province  qu'il  est  appelé  a  administrer,  le  met  en  état 
de  favoriser  toutes  les  branches  de  l'industrie  Namu- 
roise ,  fondée  particulièrement  sur  les  produits  des 
mines. 

La  carte  géologique  que  ce  savant  vient  de  publier, 
suppose  des  recherches  immenses  et  plusieurs  années 
de  travaux.  Elle  résout  un  problême,  qui  jusqu'ici  a 
beaucoup  occupé  les  géologues,  en  démontrant  la  liaison 
des  terrains  crétacées  qui  disparaissent  a  la  surface  du 
sol  près  d'Aix-la-Chapelle,  reparaissent  un  peu  au  N. 
N.  E.  de  Dusseldorf ,  pour  aller  se  lier  aux  terrains  cré- 
tacées, dont  se  compose  la  majeure  partie  du  Danemarck. 
La  longue  étude  que  M.  D'Omalius  a  faite  de  la  géo- 
logie, les  matériaux  qu'il  a  recueillis  par  la  correspon- 


(  i8a  ) 

dance  du  bureau  de  statistique,  ses  relations  person- 
nelles avec  les  minéralogistes  les  plus  instruits  de  la 
France,  et  les  observations  que  lui-même  a  faites  dans 
ses  nombreux  voyages,  lui  ont  permis  de  rectifier  l'an- 
cienne classification  et  la  nomenclature  sovvent  fautive 
de  ses  devanciers. 

L'ancienne  division  des  terrains  en  primitifs  et  se- 
condaires, c'est-a-dire  antérieurs  et  postérieurs  a  l'exis- 
tence des  êtres  organisés,  ne  pouvait  plus  s'accorder 
avec  l'intime  liaison  qu'on  a  remarquée  entre  les  ter- 
rains primitifs  et  certaines  couches  remplies  de  débris 
d'êtres  vivans.  La  célèbre  école  de  Freyberg  avait  in- 
troduit une  classe  intermédiaire  pour  y  placer  ces  der- 
nières couches.  Depuis  lors  des  observations  nouvelles 
ont  prouvé  que  ces  terrains  intermédiaires,  au  lieu 
d'être  constamment  postérieurs  a  toutes  les  roches,  qui 
avaient  les  caractères  généraux  assignés  aux  terrains 
primitifs,  se  trouvaient  intercalés  entre  des  roches  cris- 
tallisées qui  n'offrent  aucune  pétrification.  Les  difficul- 
tés qui  résultent  de  ces  derniers  faits  ont  engagé 
M.  D'Omalius  a  réunir  les  deux  classes  séparées  par 
l'école  de  Freyberg,  et  a  les  désigner  sous  le  nom  de 
terrains  primordiaux ,  nom  qu'on  a  déjà  employé  pour 
indiquer  une  propriété  moins  exclusive  que  celle  qu'on 
attribue  au  mot  primitif.  11  assigne  a  cette  classe  pour 
caractères  généraux,  des  couches  inclinées,  boulever- 
sées et  souvent  verticales,  et  il  appuie  la  nécessité  de 
la  réforme  qu'il  propose  sur  de  très-bonnes  raisons, 
puisées  toutes  dans  les  observations  des  géologues  les 
plus  estimés. 

Passant  ensuite  aux  terrains  secondaires,  qui  n'offrent 
pas  les  mêmes  incertitudes  que  les  terrains  primordiaux, 
M.  D'Omalius  les  divise  en  cinq  groupes,  dont  le  pre- 


C  i33  ) 

mier,  forme  dos  terrains  Pénèens ,  a  pour  type  les  ro- 
ches connues  dans  la  géognosie  allemande  sous  le  nom 
de  todte  liegenth ,  ou  grès  rouge,  auxquelles  on  peut 
réunir  le  Macigno  des  Toscans  et  plusieurs  terrains 
houillers,  notamment  ceux  du  centre  de  la  France.  Le 
second  groupe,  celui  des  terrains  Ammonèens ,  est  formé 
de  plusieurs  systèmes  de  terrains,  dont  les  plus  impor- 
tans  ont  été  désignés  par  les  noms  de  Zechsîein  ou 
ancien  calcaire  des  Alpes,  grès  bigarré,  Muschelkalk , 
Quadersandstein  et  calcaire  jurassique.  La  formation  de 
la  craie,  y  compris  les  tuffeaux,  les  sables  et  les  marnes 
qui  se  trouvent  en  dessous  de  la  craie  proprement  dite , 
constitue  le  troisième  groupe ,  et  se  trouve  désigné  par 
le  nom  de  terrain  crétacée.  Dans  le  quatrième  groupe 
M.  D'Omalius  réunit  tous  les  terrains  postérieurs  a  la 
craie,  et  dont  l'origine  n'est  pas  contestée.  Ces  terrains, 
qui  étaient  peu  connus  il  y  a  quelques  années ,  se 
retrouvent  presque  partout,  et  leur  histoire  forme 
actuellement  une  des  parties  les  plus  importantes  de 
la  géologie;  ils  sont  désignés  sous  le  nom  de  Masto- 
zootiijiie.  Dans  le  cinquième  groupe  sous  le  nom  de 
pjroïde ,  se  trouvent  rangés  les  terrains  volcaniques, 
trachytiques  et  basaltiques. 

Cette  nouvelle  nomenclature  proposée  par  M.  D'Oma- 
lius, a  sur  l'ancienne,  l'avantage  de  présenter  des  idées 
beaucoup  plus  précises  et  de  rappeler  l'époque  de  la 
formation  des  différens  terrains.  C'est  ainsi  que  le  mot 
Pénèens  signifie  des  couches  ordinairement  pauvres  en 
débris  d'animaux,  celui  iï  Ammonèens  indique  que  tous 
les  systèmes  dont  les  terrains  se  composent ,  ont  été 
formés  a  une  époque  où.  existaient  les  animaux  si  re- 
marquables qu'on  appelle  Ammonites.  Le  nom  de  Mas- 
tozootique,  appliqué    au   quatrième   groupe,  rappelle 


(  i84  ) 

que  c'est  dans  le  sein  de  ces  terrains  qu'on  a  trouvé 
ces  ossemens  de  mammifères,  dont  l'étude  a  donné  lieu 
au  beau  travail  qui  a  pour  ainsi  dire  créé  la  géologie 
parmi  nous. 

En  appliquant  au  royaume  des  Pays-Bas  la  division 
géologique  proposée  par  M.  D'Omalius,  et  en  consul- 
tant la  carte  qui  accompagne  son  intéressant  mémoire , 
on  trouve  que  les  provinces  de  Namur  et  de  Liège ,  les 
arrondissemens  de  Mons ,  de  Charleroi  et  partie  de  celui 
de  Tournai  en  Hainaut,  ainsi  que  les  arrondissemens 
de  Neuf-Château  et  de  Marche  dans  le  Grand-Duché 
de  Luxembourg,  font  partie  des  terrains  primordiaux  ; 
qu'une  partie  des  arrondissemens  de  Diekirch  et  de 
Luxembourg ,  appartient  aux  terrains  Ammonèens.  Les 
terrains  crétacées  sont  resserrés  entre  le  Hainaut  et  le 
Brabant,  de  manière  qu'en  se  figurant  une  ligne  a  peu 
près  droite  qui  irait  de  Courtrai  a  Bruxelles ,  et  de  Ta  a 
Aix-la-Chapelle ,  en  passant  par  Léau  et  Bilsen  ,  tout  ce 
qui  serait  au  midi  de  cette  ligne  jusqu'à  Peruwelz  ,  Ath, 
Genappe,  Gembloux,  Hannut,  Warcmme  etDaethem, 
ferait  partie  des  terrains  crétacées,  et  tout  ce  qui  serait 
au  nord  de  cette  ligne  jusqu'à  l'extrémité  du  Royaume, 
appartiendrait  aux  terrains  M asto zootiques. 

Il  résulte  de  cet  apperçu ,  que  si  l'on  excepte  les 
terrains  volcaniques,  le  royaume  des  Pays-Bas  réunit 
dans  un  espace  tres-resserré  tous  les  genres  de  terrains 
observés  jusqu'ici  par  les  géologues ,  et  que  par  consé- 
quent ce  royaume  doit  posséder  les  plus  grandes  res- 
sources tant  minéralogiques  qu'agricoles.  Ce  serait  en 
vain  qu'on  chercherait  ailleurs  un  pays  de  la  même 
étendue  joignant  a  ces  avantages  celui  d'être  baigné 
par  la  mer,  couvert  de  ports  commodes,  habité  par  une 
population  industrieuse,  gouverné  par  des  lois  sages  et 


(  i*5) 
protégé  par  une  constitution  libérale,  réflexion  des  plus 
consolantes  pour  le  véritable  ami  de  la  patrie ,  et  qui 
justifie  bien  cette  expression  d'un  député  français  : 
»  ]&>  dix-sept  provinces  de  la  Belgique  formeraient  un 
»  des  plus  beaux  états  de  Funivers  entier  :  cet  état 
»  pourrait  se  passer  de  tous  les  autres." 


NOTICE   SUR   J.    H.    VAN    SWINDEN. 


JEan  Henri  van  Swinden,  naquit  a  La  Haye,  en  17 46, 
de  Philippe  van  Swinden  et  de  Marie  Anne  Tollosan, 
tous  deux  issus  de  familles  réfugiées.  Il  fit  ses  études  a 
l'université  de  Leyde,  et  annonça  de  bonne-heure 
l'étendue  et  la  sagacité  de  son  esprit.  Son  goût  Fen- 
trainait  vers  les  sciences  naturelles  et  exactes;  un  jeune 
homme,  d'ordinaire,  en  apprend  ce  que  ses  contem- 
porains en  savent;  Van  Swinden  fit  plus;  il  porta  dès 
l'abord  son  attention  sur  leur  histoire ,  observa  la 
marche  qu'avaient  suivie  les  découvertes  et  les  expé- 
riences, et  voyant  ce  qu'on  avait  fait,  reconnut  bientôt 
combien  il  restait  a  faire.  Cette  direction,  qu'il  donna 
lui-même  a  ses  études ,  prouve  une  pénétration  peu 
commune ,  lorsqu'on  se  rappelle  que  quelque  tems 
après  ces  pressentimens  d'un  jeune  étudiant  de  Leyde, 
les  travaux  des  Franklin,  des  Priestley,  des  Lavoisier 
ont  commencé  a  renouveler  ou  a  raffermir  les  bases  de 
ces  connaissances.  A  20  ans,  Van  Swinden  obtint  le 
degré  de  docteur,  et  avant  la  fin  de  sa  2i1U0  année,  il 


(  »o6) 

fut  nommé  professeur  de  physique  et  de'iplj51<}sopliie  a 
l'université  de  Franeker,  en  Frise. 

L'électricité  occupait  les   physiciens;   la  théorie  de 
Franklin  s'était  répandue  avec  rapidité  ;  le  rcpuWHSfch 
recommandait  le  savant,  e.t  l'on  se  plaisait  a  étudifr les 
découvertes  de  l'ami  de  Washington.  Cette  braticrie,  si 
curieuse  des  connaissances  naturelles,  étaient  devenue 
presque  populaire ,  et  l'était  sur-tout  en  Hollande  ;  les  phé- 
nomènes magnétiques  avaient  été  comparés  aux  merveilles 
de  l'électricité,  et  partageaient  l'attention;  MM.  Mus- 
schenbroek  et  Brugmanspère  s'en  étaient  sur-tout  occu- 
pés; il  restait  bien  des  points  a  éclaircir;  Van  Swinden  se 
livra  avec  ardeur  a  cette  étude.   Une  lecture  immense , 
la  connaissance  des    langues  modernes,   cette  patience 
d'observation  qui  devient  de  plus  en  plus  rare,  l'esprit 
d'exactitude  dont  il  était  doué ,  lui  donnèrent  une  su- 
périorité décidée  sur  ses  devanciers.  Il  s'appliqua  mo- 
destement a  faire  disparaître  les  irrégularités  des  expé- 
riences connues;  il  observa  journellement  pendant  treize 
ans  la  déclinaison  magnétique,  et  nota  pendant  dix  ans 
ses  observations  heure  par  heure.  Sa  dissertation  Re- 
cherches sur  les  aiguilles  aimantées:,  fut  couronnée  en 
1777  Par  l'académie  des  sciences,  avec  celle  de  Cou- 
lomb, et  publiée  dans  le  recueil  des  Mémoires  présentés 
par  les  savans  étrangers.    Son  Analogie  de  V électricité 
et  du  magnétisme,    obtint,    dans   la   même  année,    la 
médaille  de  l'académie  électorale  de  Bavière.  On  trouve 
dans  ces  ouvrages  le  pressentiment  des  nouvelles  décou- 
vertes   électro- magnétiques    d'OEersted,    Ampère    et 
autres  sa  van  s. 

Animé  par  ce  double  succès,  Van  Swinden  continua 
ses  travaux ,  et  fit  paraître  divers  écrits  dont  nous  ren- 
voyons la  nomenclature  a  la  fin  de  cette  notice.  Vers 


(  -87  ) 
cette   époque ,    il  joignit  l'étude    de  la  météorologie  a 
celle  du  magnétisme  et  de  l'électricité,  et  les  approfon- 
dit dans  leurs  rapports.  <Sa  persévérance   d'observation 
semblait  redoubler;  six  ans  de  suite,  heure  par  heure, 
et  plusieurs  années  encore  cinq  l'ois  par  jour,  il  prit 
note  des  degrés  du  thermomètre  et  du  baromètre.   Ces 
expériences  assidues  formèrent  des  matériaux  immenses, 
et  d'année  et  année,  soit  dans  les  recueils  scientifiques, 
soit  dans  des  publications  séparées,  il  fit  connaître  les 
résultats  de  ces  longues  recherches.  Les  aurores  boréa- 
les, la  lumière  zodiacale  eurent  une  part  considérable 
dans  ses  travaux  et  dans  ses  écrits  sur  ces  matières:  Van 
Swinden  a  rendu  justice  aux  secours  qu'il  reçut  de  son 
frère  Siméon,  aujourd'hui  conseiller  a  la  Haute  Cour 
de  La  Haye,  qui,  au  milieu  des  devoirs  de  la  jurispru- 
dence,  a  trouvé  le  tems  d'acquérir  des  connaissances 
en   physique. 

La  tendre  amitié  des  deux  frères  ne  s'est  jamais  dé- 
mentie, et  la  vieillesse  les  a  trouvés  unissant  encore 
leurs  goûts  et  leurs  plaisirs.  La  belle  éclipse  de  1820 
n'avait  pas  été  peut-être  aussi  bien  calculée  que  tant 
d'autres  ;  plusieurs  astronomes  avaient  annoncé  qu'elle 
ne  serait  pas  annulaire  a  Amsterdam;  Van  Swinden 
avait  pensé  qu'elle  le  serait.  Toutes  ses  fenêtres  étaient 
ouvertes;  tous  ses  télescopes  étaient  braqués,  et  nous 
attendions  avec  impatience  le  moment;  le  ciel  était  sans 
nuage,  un  cri  s'élève,  l'anneau  brillant  paraît,  et  trans- 
porté d'admiration  a  ce  magnifique  spectacle ,  sans  que 
la  joie  d'avoir  raison  lui  fit  oublier  les  prévenances  de 
l'amitié  fraternelle,  le  vieux  professeur  s'écria:  Que 
c'est  beau!  .  .  .    Siméon  le  voit-il? 

Ses  nombreux  écrits,  et  ses  leçons  ne  l'empêchèrent 
pas  d'entretenir  avec  l'exactitude  qu'il  mettait  a  tout , 


(  188  ) 

la  correspondance  la  plus  étendue.  A  cette  époque,  il 
était  en  Hollande,  le  centre  des  relations  européennes 
pour  les  sciences  ;  jusqu'alors  il  avait  écrit  sur-tout  en 
latin  et  en  français,  et  pendant  les  dix-huit  ans  de  son 
séjour  a  Franeker,  sa  réputation  était  a  son  zénith.  C'est 
dans  ce  tems  qu'il  a  entretenu  avec  Bonnet,  sur  les  idées 
métaphysiques   de  ce    dernier ,  un  long   commerce  de 
lettres,  qui  n'ont  point  paru.  L'esprit  géométrique  du 
professeur   hollandais,   très-craintif  en  hypothèses   et 
très-lent  à  déduire  des  conséquences,  devait  un  peu 
s'effrayer  de  la  métaphysique  brillante  et  des   conclu- 
sions hardies  du  philosophe  genevois.  Cette  correspon- 
dance doit  se  trouver  parmi  ses  papiers  ;  il  serait  très- 
curieux  de  voir  aux  prises  deux  esprits  si  profonds  et  si 
différensj  c'est  principalement,  si  je  ne  me  trompe,  sur 
les  idées  innées  que  roule  la  discussion. 

En  1785,  Van  Swinden  fut  nommé  professeur  de 
philosophie ,  de  mathématiques ,  d'astronomie  et  de 
physique,  a  l'Athénée  d'Amsterdam.  L'enseignement, 
depuis  lors,  l'occupa  plus  que  jamais;  il  publia,  l'an- 
née suivante,  des  Elémens  de  mathématiques >  d'une 
clarté  et  d'une  méthode  admirable;  le  même  ouvrage, 
plus  étendu,  parut  en  hollandais  pour  ses  disciples,  et 
contient  un  plus  grand  nombre  de  propositions  mathé- 
matiques qu'on  n'en  avait  vu  encore  réunies.  Il  avait 
entrepris  sur  la  physique  un  travail  pareil,  sous  le  titre 
dePositiones  physîcœ;  cet  ouvrage  est  considéré  comme 
un  des  meilleurs  qu'il  ait  donnés,  et  les  juges  les  plus 
corapétens  le  regardent  comme  le  plus  complet  que  l'on 
possède  pour  la  littérature  de  la  physique  dans  les  di- 
verses langues.  On  y  reconnaît  cet  esprit  sévère  d'exac- 
titude qui  distingue  toutes  ses  productions.  Malheu- 
reusement, il  n'en  a  paru  que  le  ier  vol.  et  la  moitié 


(  09  ï 

du  second;  l'abondance  de  la  matière,  et  de  nouvelles 
occupations  forcèrent  Van  Swinden  à  le  laisser  inachevé. 

En  1787  ,  e'poque  de  la  guerre  avec  l'Angleterre,  il 
fut  nommé  membre  d'une  commission  par  l'amirauté 
d'Amsterdam;  il  écrivit  pour  les  marins  snr  l'almanack, 
sur  l'usage  du  sextant  et  de  l'octant,  sur  la  détermina- 
tion de  la  longitude  en  mer  par  la  distance  de  la  lune 
au  soleil  ou  aux  étoiles  fixes.  La  6me  édition  de  ce 
dernier  ouvrage  a  paru  en  1819;  Van  Swinden  en  avait 
conçu  le  plan  avec  son  ami  Nieuwland,  dont  il  a  pro- 
noncé l'oraison  funèbre  en  1795.  Ce  discours,  écrit 
avec  simplicité,  et  rempli  de  traits  curieux,  fait  bien 
connaître  cet  homme  extraordinaire,  philosophe,  ma- 
thématicien, physicien,  astronome  et  poëte  a  la  fois, 
dont  la  renommée,  comme  celle  d'un  si  grand  nombre 
de  ses  concitoyens,  est  restée  injustement  renfermée 
dans  leur   pays  natal. 

Le  mot  de  commission ,  que  nous  avons  employé 
pour  désigner  le  comité  dont  Van  Swinden  fut  un  mem- 
bre si  utile,  est  pris  ici  dans  un  sens  différent  de  son 
acception  ordinaire.  Le  gouvernement  a  l'usage,  en 
Hollande,  de  confier  l'examen,  et  quelquefois  la  direc- 
tion de  divers  projets  d'utilité  publique  a  des  commis- 
sions, composées  de  citoyens  notables,  de  savans  dis- 
tingués, qui  n'ont  de  salaire  que  l'honneur  du  choix, 
et  la  satisfaction  de  s'employer  au  bien  de  la  patrie. 
Cet  usage ,  peu  connu  dans  les  pays  où  le  pouvoir 
absolu  aime  a  tout  payer,  est  vieux  en  Hollande;  c'est 
un  reste  précieux  des  mœurs  républicaines,  et  l'on  a 
encore  la  sagesse  d'en  profiter.  Le  zèle  de  Van  Swinden, 
dans  ce  genre  de  travail ,  passe  toute  idée  ;  on  peut 
dire  sans  exagération,  que  pendant  sa  longue  carrière, 
il  ne  s'est  rien  fait  d'utile,  de  charitable,  de  littéraire, 


(  m  ) 

de  religieux  même,  où  il  n'ait  mis  la  main.  A  l'e'poque 
de  sa  vie ,  où  nous  nous  sommes  arrêtés  pour  faire  cette 
réflexion,    une  commission  de  salubrité  publique    fut 
instituée;  Van  Swinden  en  fut  nommé  président  ;  la  col- 
lection des  mémoires  de  cette  commission,  forme  5  vol. 
in-8°;  le  premier,  tout  entier  de  sa  main,  donne  l'histoire 
très-curieuse  de  la  commission  et  des  circonstances  qui 
l'avaient  rendue  nécessaire,  et  dans  les  2  vol.  suivans, 
il  a  inséré  les  mémoires  les  plus  profonds  et  les  plus 
minutieux  sur  les  immondices  des  canaux,  les  immon- 
dices des  rues,  l'eau  de  citerne  et  de  pluie,  l'eau  trans- 
portée en  barques,   (on  sait  qu'Amsterdam  n'a  point 
d'eau,  potable;  celle  des  canaux  est  saumâtre,  et  le  sol 
est  une  grève  sans  sources),  les  moyens  de  prévenir 
les  accidens,  les  hôpitaux,  les  maladies,  leurs  causes 
locales  et  leur  cours ,  le  mouvement  de  la  population ,  etc. 
L'été  de  1798  le  vit  a  Paris,  commissaire  de  la  Ré- 
publique Batave  avec  M.  iEneœ ,  pour  les  conférences 
avec  les  alliés  au  sujet  des  nouveaux  poids  et  mesures. 
L'année  suivante,  Van  Swinden  eut  l'honneur  de  faire 
le  rapport  a  la  classe  des  sciences  physiques  et  mathé- 
matiques, et  ensuite,  a  l'institut  en   séance  générale. 
Ce  travail  fut  imprimé  par    ordre    du   corps  législatif. 
Âiiêlons-noLiS  un  moment;  voici  le  descendant  de  deux 
familles  françaises,  sorties  de  leur  patrie  a  la  révocation 
de  l'édit  de   Nantes,  nommé  environ    un   siècle  après 
commissaire  a  Paris  pour  le  peuple  hospitalier  près  duquel 
i;es    ancêtres   avaient  trouvé    un   asile,   et  chargé   par 
l'élite  des  savans  français  de  proposer  a  la  France  une 
de    ces  grandes  innovations    qui  intéressent   toutes  les 
classes  de  la  société.   On  ne  peut  qu'être  frappé  de  ce 
rapprochement;  il  semble  que  Van  Swinden  soit  venu 
montrer  aux  Français  que  les  (ils  de  leurs  compatriotes 


(  m  ) 

proscrits  n'avaient  point  dégénéré,  et  que  la  science,  en 
la  personne  d'un  de  ses  plus  dignes  interprètes ,  avait 
voulu  montrer  quelle  part  elle  avait  dans  les  bienfaits 
de  la  tolérance  et  de  la  liberté.  Aussi,  c'est  avec  une  ' 
noble  générosité  que  l'irtstitut  avait  cédé  l'honneur  de 
ce  rapport  a  un  étranger,  et  Van  Swinden  n'était  point 
resté  insensible  a  tant  de  gloire  ;  il  aimait  ce  souvenir  ; 
il  m'a  souvent  conté  comment  au  milieu  des  distractions 
de  Paris,  il  était  venu  a  bout  de  ce  travail;  tous  les  ma- 
tériaux en  étaient  réunis  ;   la  séance  indiquée  appro- 
chait; rien  n'était  en. ordre,  et  vainement  Van  Swinden 
avait   plusieurs   fois  pris  la  plume;   les    phrases,    les   - 
idées,  n'arrivaient  pas;  un  soir,  peu  de  jours  avant  la 
séance,  il  travaillait  ainsi  sans  succès,  lorsque  Le  Gen- 
dre^  (ou  La  Place,  j'oublie  le   quel)  arrivé,   —    que 
faites-vous  la?  —  mon  rapport;  —  voyons,  et  dû  pre- 
mier coup-d'œil,    Le  Gendre  voit    et  montre    a    Van 
Swinden  une  faute  d'addition  dans  la  copie  d'un  calcul. 
Vous  ne  ferez    rien    de  bon  aujourd'hui,  'lui  "dit-il,- 
sortons;    les    deux    mathématiciens    se  promènent,   la 
conversation  s'engage*,  la  soirée   s'écoule;  Van  Swin- 
den rentre,  se  met  a  l'ouvrage,  passe  la  nuit,  et  le 
lendemain  l'esquisse   du   rapport   était  sur  le    papier.  • 
Depuis  ce  tems  aussi,  il  affectionnait,  pour  ainsi  dire, 
les  poids  et  mesures;  il  a  épuisé  la  matière  dans  son 
grand  onvrage  en   2  vol.  in-8°,  publié  en  1802  ;  a  di- 
verses époques,  il  a  donné  sur  ce  sujet  divers  écrits, 
les  uns-  profonds,  les  autres  populaires,  et  jusqu'aux 
dernières  années  de  sa  vie.  il  a  été  la  main  droite  du 
gouvernement,   pour  toute   amélioration   à    introduire 
dans  les  mesures  publiques. 

Un  citoyen-  si  utile  et  si   dévoué  ne    pouvait  être 
oublié  dans  les  diverses  révolutions  qui  ont  eu  lieu  en 


(    *92    ) 

Hollande,  a  l'instar  de  la  France.  Il  est  remarquable 
que  presque  tous  les  savans  de  notre  époque,  ont  de 
force  ou  de  gré  pris  quelque  part  aux  événemens  pu- 
blics. Van. Swinden  avait  coutume  de  dire:  la  politique 
ne  me  convient  pas,  et  je  ne  conviens  pas  a  la  politi- 
que; toutefois,  il  n'a  point  échappé  a  sa  destfnée,  et 
arraché  malgré  lui  à  ses  paisibles  études,  il  fut  nbmmé, 
en  Juin  1800,  l'un  des  directeurs  de  la  République 
Batave.  Ce  titre,  le  premier  du  moment,  ne  le  séduisait 
pas;  mais  envahi  il  s'empressa -d'écrire  au  Corps -Légis- 
latif; ses  refus  ne  furent  point  agréés,  et  dès  lors,,  il 
se  voua  tout  entier  aux  devoirs  nouveaux  .qu'il  s'impo- 
sait. Il  a  écrit ,  durant  son  administration ,  plusieurs 
pièces  intéressantes,  enlr'autres  une -lettre  au  Corps 
Législatif  contre  la  défense  de  l'importation  des  grains, 
ouvrage  où  la  matière  est  approfondie,  et- dont  il  ju- 
geait lui-même  favorablement.  C'est  la,  peut-être,  le 
seul  souvenir  agréable  qu'il  ait  gardé  de  son  élévation. 
Son  éloge,  comme  homme  public,  est  simple  et  court; 
entré  sans  fortune  dans  cette  carrière,  il  en  est  sorti 
de  même,  et  ses  opinions  ont  été  constamment  celles 
d'un  sage  ami  de  la  liberté  des  peuples.  Les  décorations 
étaient  contraires  a  ses  principes;  en  1807,  Louis  Napo- 
léon lui  offrit  l'Ordre  du  Mérite,  Van  Swinden  le  refusa  ; 
en  i8i5,  S.  M.  le  Roi  des  Pays-Bas  lui  fit  demander 
s'il  accepterait  l'Ordre  du  Lion  Belgique,  ses  principes 
n'avaient  point  varié,  il  fit  respectueusement  prier  S.  M. 
de  ne  pas  le  lui  offrir.  Tous  les  gonvernemens  l'ont  tour 
a  tour  respecté,  et  jamais  il  n'a  cherché  dans  ses  opi- 
nions particulières  un  prétexte  de  ne  pas  servir  sa  patrie. 
Nous  passons  sous  silence  une  foule  d'écrits  et  de 
travaux  remarquables.  A  l'entrée  de  l'hiver  de  1801, 
rentré  selon  ses  vœux  dans  la  république  des  lettres, 


(  *9$  ) 
îl  avait  repris  ses  études,  et  Louis  Napoléon  le  trouva 
simple    professeur    a    l'athénée    d'Amsterdam.    Il   fut 
nommé  membre   d'une   commission  chargée  d'un  rap- 
port sur  les  universités  du  royaume  ;  Van  Swinden  le 
dressa.  Ce  projet,  qui  n'a  point  été  mis  a  exécution, 
est  digne  a  tous  égards  d'être  médité  par  les  hommes 
qui  doivent  instituer  ou  maintenir  l'instruction  publi- 
que. Emule  des  Bacon  et  des  D'Alembert,  Van  Swinden 
y  considère  les  connaissances  humaines  d'un  point  de 
vue  très-élevé,   assigne  «a  chacune  son  degré  de  certi- 
tude et   d'importance,  les  classe  sans  les  séparer,   et 
les  rapproche  sans  les  confondre.   Ses  opinions  libéra- 
les, ennemies  des  distinctions  imaginaires,  percent  ici; 
îl  n'aimait  pas  les  divisions  et  subdivisions  des  métho- 
des allemandes.    Le  propre  d'un   esprit  supérieur   est 
de  voir,   de  saisir  et  de  régler  l'ensemble,  et  comme 
Alexandre,  de  laissera  ses  successeurs  le  soin  de  diviser. 
Van   Swinden  avait  été  plusieurs  fois  sur  le  point 
d'être  nommé  a  l'université  de  Ley.de  5   a  une  de  ces 
occasions ,   la  ville  d'Amsterdam  l'a  .conservé ,   en  lui 
offrant  de  la  manière,  la  plus  honorable  une  augmenta- 
tion d'émolument  ;  Louis*  Napoléon  voulait  a  toute  force 
lui  donner  un  témoignage   public  de  son  estime,     et 
contraint  de  choisir  entre  une  place  au  conseil  d'état, 
ou  une  chaire  a  Leyde ,  Van  Swinden  optait  pour  l'uni- 
versité,   lorsque  tout  a  coup,    au  moment   même    de 
signer  sa  nomination,  le  Roi  se  ravisa,  sans  que  Van 
Swinden  ait  jamais  su  pourquoi.  Il  se  consola  facile- 
ment de  ce  mécompte,  et  continua    les   services  que 
depuis  long-tems  il  rendait  a  l'école  de  marine  a  Ams- 
terdam.  Cet  établissement,  fondé  et  soutenu   par  les 
dons   des   citoyens  et  les  secours  du  gouvernement,  a 
traversé,  sans  trop  déchoir,  le  règne   de    Louis,  qui 
yiuc  livraison.  l^ 


X  >9'4  ) 

cependant  n'était  guères  maritime.  Van  Swinden  était 
Pâme  de  cette  institution;  adoré  des  élèves,  profondé- 
ment versé  dans  toutes  les  connaissances  *qui  tiennent 
a  Part  de  la  navigation ,  son  amour  de  la  patrie  et  son 
zèle  pour  la  science  Pont  soutenu  également  dans  ce» 
travaux,  toujours  gratuits,  qu'il  a  continués  5?  ans, 
sans  se  lasser.  Quelle  fut  sa  douleur,  lorsqu'à  l'époque 
de  la  réunion  de  la  Hollande  a  la  France,  Napoléon 
supprima  cet  établissement  !  L'une  des  plus  grandes  il- 
lusions de  ce  conquérant  a  sans  doute  été  l'espoir  de 
faire  d'un  peuple  nautique  ,  qui  devait  tout  a  la  mer,  un 
peuple  terrestre  ;  qu'on  me  passe  ces  termes.  Les  Ams- 
terdamois  ne  pouvaient  supporter  de  voir  leur  port  vide 
et  sans  vaisseaux ,  et  quelques  douaniers ,  sans  occupa- 
tion ,  se  promener  seuls  devant  l'école  déserte  ;  Van  Swin- 
den  se  rendit  l'interprète  de  la  douleur  publique;  il  fit 
paraître  un  compte  rendu  de  la  gestion  des  deux  der- 
nières années,  et  l'adressa  sans  mystère  a  tous  les  do- 
nateurs. Soit  oubli ,  soit  justice,  soit  respect,  ce  noble 
courage  ne  fut  point  puni,  et  en  i8i4,  lors  du  réta- 
blissement de  l'école ,  Van  Swinden  eut  la  joie  de  pré- 
sider a  cette  fête. 

Toujours  respecté  par  les  dépositaires  du  pouvoir , 
il  se  réjouit  de  voir  sa  patrie  reprendre  son  nom  sur  la 
carte,  reçut  des  Princes  d'Orange  les  plus  bonorables  * 
témoignages  d'estime ,  et  fut  nommé  par  S.  M.  Guillau- 
me I ,  conseiller  d'état  en  service  extraordinaire.  L'âge 
n'avait  point  ralenti  son  activité;  le  besoin  d'un  nou- 
veau système  monétaire  se  faisait  vivement  sentir  ;  la 
diversité  presque  incroyable  des  monnaies  frappées 
autrefois  par  les  Provinces,  rendait  la  tâche  si  difficile, 
que  Louis  Napoléon  s'était  résigné  a  n'émettre  qu'une 
seule  pièce  a   son   eiligie,   celle  de   2    florins  et    demi. 


(  i95  ) 

En  i8i5,  la  variété  des  monnaies  belgiques  vint  encore 
augmenter  l'embarras;  Van  Swinden  avait  approfondi 
cette  matière;  il  possédait  une  très-riche  collection;  il 
savait  par  cœur  l'histoire  des  monnaies  hollandaises;  il 
pouvait  dire  de  mémoire  la  quantité*  et  le  titre  des  pie- 
ces  frappées  depuis  près  d'un  siècle,  et  les  apperçus 
politiques  auxquels  cette  étude  Pavait  conduit,  étaient 
extrêmement  curieux.  Il  avait  remarqué,  par  exemple, 
qije  depuis  long-tems,  ni  guerre,  ni  trahison,  ni  dé- 
volution n'avait  éclaté  en  Europe,  que  le  prix  de 
l'or  n'eût  haussé  a  la  bourse  d'Amsterdam,  et  que 
la  mon.naie  d'Utrecht  n'eût  frappé  plus  de  ducats  que 
de  coutume,  sans  savoir  au  moment  pour  qui.  H  y 
a.  telles  guinées  que  Van  Swinden  savait  avoir  été  de 
Londres  a  Vienne,  où  on  1©6  réfusa,  et  qui  revinrent  a 
Utrechtj  d'où  elles  repartirent  converties  en  ducats, 
qui  furent  acceptés*.  Voila  un  point  de  vue  de  l'histoire 
des  monnaies,  qui,  je  crois,  ne  s'était  offert  a  per- 
sonne.,—  Le  gouvernement  eut  recours  a  Van  Swinden,- 
et  le  système,  adopté  aujourd'hui,  est  presqirentière- 
ment  son  ouvrage.  On  convient  qu'il  laisse  a  désirer; 
mais  le  hasard  peut,  accumuler  plus  de  difficultés  que  le 
genië  ne  saurait  trouver  de  ressources,  et  l'on  reconnaît 
généralement  que  le  système  introduit  est  aussi  parfait- 
qu'il  pouvait  l'être,  et  d'une  probité  scrupuleuse, 
quoiqu'avec  un  peu  d'alliage  il  eut  été  encore  meilleur. 
On  s'occupait  simultanément  de  l'introduction  de 
nouveaux  poids  et  mesures  ;  c'était  ramener  Van  Swin- 
den vers  ses  vieux  amis;  il  se  remit  a  l'ouvrage  avec 
son  ancienne  ardeur.  Cette  fois  l'issue  de  ce  travail  lui 
causa  quelque  chagrin;  il  conseillait» l'adoption  du  sys- 
tème français,  en  entier,  avec  toute  sa  nomenclature  et 
une  surveillance  rigoureuse,  en  se  reposant  sur  l'habi- 


(  *96  ) 

tude  du  soin  de  lever  avec  le  teras  la  répugnance  po- 
pulaire. L'exemple  de  la  France  plaidait  pour  lui;  ces 
avis  ne  furent  pas  entièrement  suivis;  on  eut  pitié  de 
la  routine,  on  montra  .quelque  indulgence,  et  Van 
Swinden  yit  avec  regret  ses  concitoyens  peu  disposés  en 
faveur  de  -ces  poids  et  mesures  qu'il  aimait  tant, 

De*  travaux  pins  pénibles  encore  et  plus  difficiles  ont 
rempli  ses  cornières  années.  11  a  toujours  pris  une  part 
active  au  Waterstaaf- (  administration  hydraulique  géné- 
rale). Lors,  de  la  terrible  "débâcle  de  l'an  1820,  pendant 
lequel  la  vjjle  de  Goreum.  semblait  une  rie  au  milieu 
d'une  *mer  de -glaces,  une  commission  fut  chargée  de 
présenter  un  pro'jet  pour  régler  le  cours  des  rivières  ; 
Van  Swinden,"  malgré  son  grand  âge  et  des  déplace,- 
mens  continuels,'  consentit  a  en  devenir  membre,  et  le 
Roi,  en  le  remerciant,  lui  dit:  Je  devais  vous  nom- 
mer, mais  je  ne  pensais  pas  que  vous  accepteriez'.' 
Malgré  tous  ces  travaux,  il  trouvait  du  tems  encore 
"pour  les  séances,  de  l'institut,  l'école  des  aveugles  ?  la 
société  biblique,  et  ne  négligeait  jamais  les  devoirs  de 
son  professorat.  Ses  leçons  étaient  toujours  improvisées 
avec 'une  facilité  étonnante.  Sa  mémoire  était  prodi- 
gieuse. L'hiver  avant  sa  mort,_  à  l'âge  de  76  ans,  il  a 
prononcé,  devant  une  -société  littéraire  d'Amsterdam, 
deux  discours  improvisés,  sur  l'histoire  de  l'horlogerie, 
dans  lesquels,  depuis  le  cadran  d'Àchaz  et  les  clepsy- 
dres anciens,  jusqu'à  l'horloge  d'Aaronn-al-Rascliild 
envoyée  a  Charlemagne",  jusqu'aux  montres  marines  de 
Bréguet,  il  a  tout  parcouru,'  citant  siècle  par  siècle  les 
artistes ,  expliquant  les  rouages  qu'ils  ont  inventés-  ou 
perfectionnés,  entremêlant  ses  récits  d'anecdotes  peu 
connues,  le  tout,  a  l'aide  de  quelques  notes  jettées 
sur, une  feuille  de  papier.   L'année  précédente,  il  avait 


(  "9?  ) 

traité  de  la  même  manière  l'histoire  des  lunettes  d'ap- 
proche. Il  n'était  pas  orateur,  et  le  savait  ;  il  était  plus 
en  quelque  sorte,  il  intéressait,  il  touchait  sans  être 
éloquent. 

Il   était  très-versé    dans  la  littérature    ancienne   et 
moderne  ,  savait  Racine  par   cœur,  et  le  préférait  de 
beaucoup  a  Corneille.    Véritable  hollandais  dans  toute 
'la  force  et  la  vieillesse  du  terme,  il  sentait,  disait-il, 
du   sang   français  couler  dans  ses  veines  ;  il  aimait  la 
France  ,    la  langue  et  la  littérature  française.   La  ma- 
nière dont  il  jugeait  les  auteurs  et  les  savans  de  cette' 
nation,  offrait  les  aperçus  les  plus  ingénieux  et  les  plus 
«frappans;  je  lui  ai  souvent  entendu  dire  ces  mots:  Le 
Gendre  e'st  un  versificateur  en  mathématiques  5  La  Place 
est  un  poëte ,  et  je  n.e  sais  si  Newton  a  fait  plus  en 
prenant  la  science  où  Descartes  l'avait  lais.sée,  que  La 
Place  en  la  prenant  où  NewJton  l'avait  laissée  a  son  tour. 
Accueillant  avec  bonté  les  jeunes  gens  qui  venaient 
le  consulter,  il  était  en  société  plein  d'enjouement  et 
d'amabilité.    Lé   savant  ne  paraissait  qu'au  besoin,   et 
se  mettait  a  la  portée  des  conversations  les  plus  ordi- 
naires. Dans  son  intérieur,  il  conservait  la  douce  gaité 
qu'il  portait  dans  le  monde.   Ardent  a  rendre  service , 
il  ne  s'arrêtait  qu'après  avoir  réussi;  je  le  sais,  et  aucun 
ami  n'était  plus  sûr. 

Mais  c'est  sur-tout  comme  chrétien  que  Van^Swinden 
était  admirable.  Un  fait  de  statistique  religieuse  que 
l'on  n'a  pas  assez  remarqué,  est  que  l'incrédulité,  ou 
si  l'on  veut ,  la  philosophie  française  du  dernier  siècle , 
s'est  arrêtée  (je  ne  sais  comment)  aux  frontières  de  la 
Belgique,  qui  cependant  ne  sont  pas  géographiques; 
on  croira  aisément  alors  qu'elle  n'est  point  venue  jus- 
qu'en Hollande.  D'autre  part,  l'obscure  métaphysique 


(  '93  ) 

et  l'étrange  exégèse  de  l'Allemagne  n'ont  pas  suivi  le 
Rhin,  et  quoiqu'on  les  ait  étudiées  en  Hollande,  elles 
n'y  ont  point  trouvé  de  partisans.*  Aussi,  la  foi  pro- 
testante s'y  est  conservée  dans  sa  pureté ,  sans'  avoir 
souffert  du  choc  que  la  religion  a  reçu  en  France,  et 
à  distance  égale,  des  rêves  de  l'Allemagne  et  des  divi- 
sions de  l'Angleterre.  A  peine  peut-on  citer  quelques 
savans  hollandais  de  ces  derniers  tems,-  qui  n'aient 
point  été  chrétiens.  Van  Swinden  l'était  dans  toute  la 
beauté  du  terme.  Il  savait  dans  ses  leçons  et  ses  dis- 
cours  ,  montrer  avec  un  art  admirable,  comment  les 
inventions,  les  découvertes,  les  hommes  sont  venus 
toujours  a  propos.  Il  croyait  fermement  a  la  divinité 
positive  de  la  révélation;  dans  plusieurs  de  ses  rap- 
ports, il  #  montré  comment  la  législation  de  Moïse 
avait  pris  sons  sa  garde  les  poids  et  mesures  du  peuple 
hébreu,  et  s'est  prévalu  de  cet  antique  exemple.  Des- 
cendant de  réfugiés  français ,  il  assistait  toujours  au 
culte  dans  l'église  wallonne,  presque  tous  les  diman- 
ches deux  fois,  et  notait  sur  sa  bible  usuelle  tous 
les  textes-  traités.  Sa  collection  de  sermonaires  était 
immense;  il  aimait  beaucoup  a  les  lire;  en  lisant  un 
sermon ,  disait-il ,  je  crois  qu'on  me  parle.  Sa  mort  a 
révélé  bien  des  charités  qui  étaient  restées  secrètes,  et 
l'influence  de  sa  piété  sur  les  jeunes  gens  a  été  remar- 
quable; ils  n'osaient  pas  douter  en  le  voyant  croire,  et  le 
jour  de  sa  mort,  en  présence  de  sa  veuve  et  d'une  foule 
d'amis,  j'ai  entendu  l'un  des  premiers  hommes  de  la 
Hollande,  d'abord  son  disciple  'et  long-tems  son  collè- 
gue, dire  en  pleurant  a  sa  veuve,  qu'il  devait  a  l'exem- 
ple de  Van  Swinden  d'avoir  senti  dès  sa  jeunesse  le 
prix  de  la  religion. 

Sa  vieillesse  n'a  connu   ni  infirmités  ni  souffrance  ; 


(  !99  ) 

sa  vie  a  été  heureuse ,  et  il  aimait  ia  vie;  je  ne  suis 
pas  pressé  de  m'en  aller,  nous  disait-il  souvent,  mais 
tout  ce  que  je  demande  est  de  ne  pas  me  survivre  a 
moi-même.  Ce  vœu,  digne  d'un  homme  tel  que  lui,  a 
été  rempli;  il  a  conservé  jusqu'au  dernier  moment  toutes 
ses  facultés,  au  point  qu'il  causait  avec  sa  famille  en 
hollandais,  et  que, pour  éviter  de  l'inquiéter,  il  parlait 
de  sa  maladie  en  latin,  a  M.  le  professeur  Vrolik,  son 
gendre,  qui  lui  prodiguait  ses  soins.  Son  dernier  sen- 
timent a  été  la  reconnaissance;  il  a  demandé  à  son  ami 
M.  le  pasteur  Reissédre  L'Ange ,  une  prière  dont  il  a 
choisi  lui-même  d'avance  les  humbles  et  pieuses  ex- 
pressions, et  après  avoir  dit  tranquillement  adieu  a  ses 
amis,  il  est  mort  avec  calme,  le  9  Mars  1825,  a  l'âge 
de  'j'j  ans. 

Il  avait  demandé  a  être  enseveli  sans  pompe;  mais 
on  s'est  spontanément  réuni,  et  tout  ce  qu'Amsterdam -•, 
renferme  de  citoyens  distingués,  s'est  pressé  autour  de 
sa  tombe;  M.  le  pasteur  L'Ange  a  prononcé  un  discours, 
dont  les  larmes  de  toute  l'assemblée  ont  prouvé  l'élo- 
quence et  la  vérité. 

Il  laisse  une  veuve,  avec  laquelle  il  avait  vécu  dans 
la  plus  douce  union  pendant  55  ans,  trois  filles  et  deux 
enfans  d'un  fils  qu'il  a  perdu. 

Il  était  membre  de  la  plupart  des  sociétés  savantes 
de  l'Europe.  > 

Je  sens  combien  cette  notice  est  incomplète  et  faible; 
mais  si  la  reconnaissance  et  l'affection  donnaient  le 
droit  de  la  rédiger,  on  ne  me  condamnera  pas  d'avoir 
osé  l'entreprendre. 

A.  L.  C.  Coquerel, 


(    200    ) 

Voici  la  liste  la  plus  exacte  que  nous  ayons  pu  dresser  des 
ouvrages  qui  n'ont  point  été  mentionnés  dans  la  notice. 

Tentamen   theoria?    mathematicae    de  phaenomenis   magneticis. 
Leydae.  in-4. 

Dissertation  sur  un  phénomène  magnétique,  paradoxe.   1778. 

Remarques  sur  le  principe  employé  par  M.  (Epiuus.   1783. 

Réflexions  sur  le  magnétisme  animal.  1783. 

Dissertation  sur  les  mouvemens  irréguliers  de  l'aiguille  aiman- 
tée.  1784. 

Recueil  de  mémoires  sur  l'analogie  de  l'électricité  et  du  magné- 
tisme. La  Haye,   1784. 

De  insolito  frigore  mensibus  Januario  1767  et   1768  et  Novem- 
bri  1770  Franequerae  observato.  Philos.  Trans.  vol.  63. 

Observations  sur  le  froid  de  Novembre  et  Décembre  1774  et 
Janvier  1775.  Journ.  de  Phys.  1776. 

Observations  sur  le  froid  de  Janvier  1776.  Amst. ,  chez  Rey. 

Résultats   des  observations  météorologiques  faites  à  Franeker, 
de  1771  à  1778.  Journ.  des  Sav.  1778. 

Mémoire  détaillé  sur  les  observations  météorologiques  faites  à 
Fraueker  en  1777.  Journ.  de  Phys.  1778. 

Mémoire  sur  les  observations  météorologiques   de   1778.  Mém. 
de  lAcad.  de  Bruxelles  ,  tom.  3. 

Aanmerkingen,   etc.  Observations  sur  les  variations  atmosphé- 
riques de  Décembre  1778  et  Janvier  1.779. 

Plan  tôt,  etc.  Plan  d'observations  météorologiques.  1780. 

Mémoires  sur  les  observât,  météorologiques  faites  à  Franeker, 
en  1779.  Amst. ,  chez  Rey,   1780. 

Observations  météorologiques  faites  en  Février  1783.  Mém.  de 
l'Acad.  de  Turin,  i784.  Tom.  I. 

Lettres  sur  les  grands  hivers  de  ce  siècle.  Journ.  de  Phys.  1800. 

Observations  sur  les  aurores  boréales  des  26  Janvier  et  3  Dé- 
cembre 1777.  Même  année. 

Plan  d'un  traité   sur  l'aurore  boréale  pour    servir   de  suite  à 
celui  de  Mairan.  Journ.  des  Sav.  1779. 

Esquisse  de  la  vie  de  J.  C.   Mohr.  1787. 

Dissertation  sur  la  comparaison  des  thermomètres.  Amst.,  chez 
Rey,  1777. 

Réflexions  sur  le  thermomètre  de  Michely  du  Crest.  Journ.  de 
Phys  1778. 


(  *oi  ) 

Rapport   de  la  première  classe  de   l'institut   des  Pays-Bas  au 
Prince  Souverain,  sur  les  poids  et  mesures.  i8i4. 

Wetten,  etc.  Eclaircissemens  sur  les  lois  et  décrets  concernant 
les  poids  et  mesures.    j8i4. 

Algemeen,  etc.    Registre   universel  et  raisonné   des   arrêtés  et 
ordonnances  sur  les  contributions  indirectes.  2  vol.  in-8.  1806. 

Verhandeling,  etc.    Dissertation   sur  le    binôme   de  Newton, 
1768.  Mém.  sur  la  Soc.  de  Harlem.   1768.  Tom.  12. 

Verhandeling  ,  etc.   Dissertation  sur  les  lois  de  la  pression  de 
l'atmosphère.  Ibid.  1812.   Tom.  I. 

Verhandeling,  etc.  Dissertation  sur  Huygens,  comme  inven- 
teur des  horloges  à  pendule.   Ibid.  1817.  Tom.  5. 

Oratio  de  causis  errorum  in  rébus  philosophicis ,  1767,  Franeker. 

Cogitationes  de  variis  philosophiœ  capitibus,  1767. 

Oratio  de  philosophià  Newtonianà.  1779. 

Oratio  de  hypothesibus  physicis.   1785. 

Beschryving ,  etc.  Description  d'un  planétaire  construit  par 
Eise  Eisinga  ,  paysan  Frison.  Franeker.  1780. 

Instructie ,  etc.  Instruction  pour  les  examinateurs  des  pilotes 
au  service  de  la  compagnie  des  Indes.  1794. 

Lessen,  etc.  Leçons  sur  le  planétaire  de  Laun.   Amst. ,   i8o3. 

Over,  etc.  Sur  la  mesure  d'un  degré  du  méridien  faite  au  com- 
mencement du  dernier  siècle  à  la  Chine  par  les  jésuites.  Letter- 
bode,  i8o4. 

Berigt,  etc.  Observations  sur  l'éclipsé  solaire  du  17  Sept.  1820. 
Ibid.   1820. 

Over,  etc.  Sur  le  mouvement  de  la  population  d'Amsterdam. 
Ibid.    i8o4. 

Onderzoek ,  etc.  R  echerches  sur  le  cours  à  donner  aux  rivières. 
Amst.   1821. 

Diverses  traductions  d'ouvrages  scientifiques.  Le  troisième  jubilé 
séculaire  de  la  maison  des  orphelins  Wallons  à  Amsterdam,  etc. 

La  relation  d'une  fête  de  charité  fut  le  dernier  écrit  de  Van 
Swinden. 


1202    ) 


SOCIÉTÉ   D'AGRICULTURE  ET  DE  BOTANIQUE  DE  GAND. 


JSÏ,  le  docteur  Lejeune,  à  Verviers,  auteur  de  la 
Flore  des  environs  de  Spa ,  vient  de  remettre  a  la  société 
dont  il  est  membre,  une  description  exacte  et  un  échan- 
tillon du  Caloiheca  bromoidea. 

CALOTHEC^l  (Desvaux)  NOVA  SPECIES  DESCRIPTA 
Auctore  A.  L.  S.  Lejeune. 

Calothecœ  genus,  a  Cl.  Desvaux  in  journal  de  Bota- 
nique T.  III.  P.  71  constitution,  ab  aliis  autem  cum 
Bromo  confusum,  apud  Rœmer  et  Schultes  Syst.  Vege- 
tabil.  T.  II.  P.  632.  duas  species  aniericanas,  C.  Brizoi- 
deam  et  Rotundatam  numerat  5  bis  sequentein  Europœam , 
a  nulloj  ut  credimus,  antea  inventam  addimus ,  C.  bro- 
mo ideam  ,  quse  sic  définit ur  : 

Diagnosis.  Calotheca  bromoidea  Lejeune.  —  Pani- 
culâ  apice  mitante  ,  spiculis  compressis,  viridibus  , 
oblongo-ovatis ,  aristâ  glumarum  longitudine,  setis  binis 
duplo  longiore  ;  foliis  villosis.  Nobis. 

Descriptio.  Radix  fibrosa ,  biennis.  —  Culmus  2-3 
pedalis,  lœvis ,  glaber,  apice  nudus,  teres  striatusque, 
geniculis  5-4,  villoso-tomentosis.  Vaginœ  lœves  , 
striatse,  glabrae,  foliis  breviores.  Ligulœ  brèves,  trun- 
catœ ,  lacérée.  Folia  lanceolata,  acuta,  3  lineas  lata, 
striata ,  facie  et  margine  villosa ,  scabra  ;  dorso  glabra , 
lœvia.  —  Panicida  patens ,  simplex,  apice  nutans  , 
exsiccatione  contracta,  pallide  virens,  pedunculis  sca- 
bris  ad  spiculas  dilatatis  ibique  carinatis  ;  inferioribus 
semi-verticillatis,  spiculis  triplo-quadruplovc  longioribusj 


(    2o5   ) 

siiperiovibus  soiitariis  iis  subœqualibus  vel   brcvioribus. 

Spiculœ  magnai  pollicem  cuin  aristis  superantes ,  valdc 
compressai,  oblongo-ovatœ,  6  -  10  florae.  Lepicena 
(Calix  L.  )  bivalvis  ,  valvulis  inœqualibus.  Exterior 
ovato-lanceolata,  acuta,  margine  scariosa ,  nervis  no- 
vem  instruct.a,  lateralibns  ante  apicem  excurrentihus  j 
Interior  dimidio  minor  ,  lineari-lanceolata,  acuta,  5 
nervis.  —  Glumce  dissimiles.  Exterior  ovato  lanceolata, 
carinata,  triloba  ,  lobis  lateralibus  membranaceis,  auri- 
cnlatini  dispositis  ;  lobo  intermedio  acuminato  majori 
îrifido  aristato  setoso  ;  arista  terminali  glumae  subœ- 
quali,  subflexuosa,  setis  dnplo  longiori.  Interior  seu 
Superior  ovata  ,   obtnsa  margine  ciliata. 

Observât.  Habitu  refert  Bromum  secalinum,  seu 
potius  forma  spicularnm  Bromum  pendulinum  Sessè. 
A  quibus  tamen  satis  superque  differt  cœteris  earaeteri- 
bus  genericis  et  specificis. 

Àb  aliis  ejusdem  generis  speciebus  differt  j  à  Bvizoi- 
deâ  spiculis  viridibus!  foliis  latis  ,  villosis ,  totoque 
habitu ,  à  Rotundatd  culmo  lœvi,  spiculis  acutis,  aristà 
longiori ,  etc. 

Cette  nouvelle  espèce  de  graminée  a  été  découverte 
en  ce  Royaume  près  de  Ai  w  aille,  dans  les  Ardennes, 
par  M.  P.  Michel,  cultivateur,  jardinier  et  botaniste 
a  Nessonvaux,  province  de  Liège,  en  182S. 

M.  Michel  se  propose  de  publier  par  souscription 
Pherbier  des  gramine'es  de  la  Belgique  en  trois  centu- 
ries; la  première  comprendrait  les  plantes  des  provin- 
ces de  Liège,  de  Namur  et  du  Limbourg,  et  paraîtrait 
au  plus  tard,  format  in-folio,  dans  le  courant  du  mois 
d'Octobre. 

Les  amis  de  la  botanique  sauront  gré  a  M.  Michel  , 
d'avoir  entrepris  un  travail  qui  sous  tous  les  rapports 
nous   semble  digne  d'être  encouragé. 


(    204    ) 

BULLETIN 
DES  ACADÉMIES   ET  SOCIÉTÉS  SAVANTES. 

SOCIÉTÉ   HOLLANDAISE   DES    SCIENCES    A   HARLEM. 

JLva  société  a  tenu  sa  soixante-dixième  assemblée  an- 
nuelle les  8  et  9  Juillet  dernier.  Le  président,  M.  J. 
P.  Van  Wickevoort-Crommelin ,  ayant  invité  M.  le  se- 
crétaire a  faire  le  rapport  sur  les  pièces  que  la  société 
avait  reçues  depuis  sa  dernière  séance  du  18  Mai  1822, 
concernant  : 

Les  Sciences  Physiques. 

Il  a  résulté  de  ce  rapport  : 

I.  Qu'on  avait  reçu  sur  la  question  ,  proposée  suivant 
le  désir  de  S.  M.  notre  Pioi,  dans  le  programme  de  1821, 
concernant  un  projet  de  séparer  le  bras  de  mer,  nommé 
l'Y,  du  Zuiderzée  par  une  digue  pourvue  d'écluses  , 
—  cinq  réponses ,  dont  deux  furent  jugées  très-satisfai- 
santes et  d'un  mérite  si  peu  différent,  que  la  société  a 
assigné  a  chacune  d'elles  la  médaille  d'or.  Quoiqu'on  eût 
promis,  par  le  programme  de  1821 ,  une  gratification  de 
f.  25oo  a  celui  qui  aurait  répondu  le  mieux  a  cette  ques- 
tion ,  et  dey.  1000  a  celui  qui  en  approcherait  le  plus, 
S.  M.,  ayant  été  informée  par  la  Direction  de  la  So- 
ciété ,  que  les  deux  réponses  susdites  s'approchaient 
beaucoup  en  mérite  ,  a  résolu  d'accorder  a  chacune  d'elles 
une  gratification  de  25oo  florins  d'Hollande.  A  l'ouver- 
ture du  billet  il  a  été  reconnu ,  que  l'auteur  du  premier 
de  ces  mémoires  est  Adrien-François  Goudriaany  in- 
specteur-général du  Waterstaat ,  et  celui  du  second  ,  D. 


(  io5) 

Mentz ,  ingénieur  en  chef  du  Watcrstaat  de  ce  Royaume. 

II.  Qu'on  avait  reçu  sur  la  question  suivante  :  — 
Quoique  l'introduction  plus  générale  de  la  vaccine  ait 
fait  cesser,  presque  partout,  l'épidémie  de  la  petite- 
vérole,  cette  maladie  se  montre  cependant  de  nouveau, 
depuis  quelques  années,  ici  et  ailleurs  ;  et  comme,  de- 
puis peu,  il  s'est  manifesté  chez  ceux  qui  avaient  été 
vaccinés  auparavant,  une  espèce  de  pustules  varioliques, 
décrites  premièrement  par  les  Anglais  sous  le  nom  de 
modijîcated  smalpox ,  on  demande  :  i°  »De  quel  genre 
»  sont  ces  pustules  de  fausse  petite-vérole ,  et  quel  en 
»  est  le  cours?  En  quoi  diffèrent-elles  de  celles  de  la 
»  véritable  petite-vérole  et  des  varicelles  ?  Dans  le  cas 
»  d'une  épidémie  chez  des  individus  non  vaccinés ,  celles- 
»  ci  produisent -elles  la  véritable  petite  vérole?  Dépen- 
»  dent-elles  de  la  constitution  particulière,  de  quelque 
»  indisposition,  de  la  manière  de  vacciner  elle-même, 
»  ou  d'autres  causes,  et  quel  est  le  moyen  de  les  pré- 
»  venir?  2.  Que  peut-on  soutenir,  concernant  la  durée 
»  de  la  faculté  préservative  de  la  vaccine?  Pourrait-il 
»  être  utile  que,  a  chaque  épidémie,  l'on  vaccinât  de 
»  nouveau?  5.  Les  moyens,  employés  chez  nous,  ten- 
»  dants  a  encourager  les  plus  nombreuses  vaccinations , 
»  sont-ils  utiles  et  suffisants  pour  les  progrès  de  la  vac- 
»  cine ,  et  pour  faire  disparaître  entièrement  la  petite 
»  vérole.  Au  cas  qu'on  fût  pour  la  négative ,  quels  se- 
»  raient  les  moyens  les  plus  propres  pour  parvenir  a  un 
»  but  aussi  salutaire?"  —  une  réponse  en  allemand, 
ayant  pour  dévise  multum  egerunt ,  qui  ante  nos  fuerunt  > 
sed  non  pergerunt.  On  a  jugé  unanimement  que  cette 
réponse  méritait  d'être  couronnée.  L'auteur  est  J.  W 
Gittermctn ,  médecin  et  chirurgien  ,  'a  Emden. 

III.  Qu'on  avait  reçu  sur  la   question:  —  »  Jusqu'il 
»  quel  point  peut-on  prouver  par  des  observations  fi- 


(    206    ) 

»  dèles ,  que  les  maladies,  qui  régnent  dans  les  Pays- 
»  Bas,  ont  changé  de  nature  depuis  un  certain  laps  de 
»  lems  ,  et  quelles  sont  les  causes  physiques  de  ce  chan- 
»  gement ,  surtout  par  rapport  a  la  manière  de  vivre  et 
»   de  se  nourrir  dans  ce  pays,  laquelle  est  différente  de 
»  celle  d'autrefois?" —  deux  réponses  en  hollandais, 
dont  l'une  a  pour  devise  :   solida  quœdam  res  est  etc. , 
et  l'autre;  —  de  raadzelachtige  gedaanlens  etc.  On  a 
reconnu  le  mérite  de  ces  mémoires,  mais  on  a  remarqué 
en  même  tems ,  que ,  dans  l'un  et  l'autre ,  il  est  resté 
encore  beaucoup  a  corriger,  tant  a  l'égard   de  l'ordre, 
qu'a  d'autres  égards  ,  et  on  a  résolu  d'inviter  les  auteurs 
a  corriger  leurs  mémoires ,  en  observant  les  remarques 
qu'on  y  a  faites,  et  dont  chaque  auteur  pourra  recevoir 
copie ,  en  s'adressant  au  secrétaire.  Pour  cet  effet  on  a 
prolongé  le  terme  du  concours  jusqu'au  1  Janvier  1824. 
IV.  Qu'on  avait   reçu   sur  la   question  :  —   »  Quels 
»  sont  les  caractères  certains  de  la  véritable  épizootie , 
»  laquelle,  il  y  a  trente  ans  et  au-delà,  a  ravagé  plu- 
»  sieurs  contrées  septentrionales  et  aussi  notre  patrie  ? 
»  Y  a-t-il  des  raisons  suffisantes  pour  déterminer  que 
»  ladite  maladie  ne  naît  jamais  sans  contagion  dans  ces 
»  contrées?  S'il  en  est  ainsi  :  les  moyens  employés' dans 
»   les  états  voisins,  pour  prévenir  l'introduction   et  le 
»  passage   de  cette  contagion  ,   sont-ils   suffisants  pour 
»  donner  a  cet  égard  une  entière  sécurité  ,  ou,  s'il  reste 
»  encore  quelque  crainte  de  contagion  pour  nos  con- 
»  liées  ,  que  peut  et  que  doit-on  conseiller  dans  ce  cas- 
»  la,  pour  prévenir,  autant  que  possible,  tout  danger 
»  de  contagion?"  —  une  réponse  en  hollandais,  ayant 
pour  dévise:  77  n'y  a  que  la  volonté  qui  manque  aux 
hommes.  Les  rapporteurs  ont  reconnu  beaucoup  de  mé- 
rite dans  ce  mémoire  ,  mais  aussi  plusieurs  défauts.  On 
a  donc  résolu  d'inviter  le  savant  auteur  a  corriger  son 


(  207  ) 
mémoire.,  suivant  les  remarques  qu'on  y  a  faites,  dont 
il  pourra  avoir  copie,  en  s'adressant  au  se'cretaire  de  la 
Société ,  et  de  décerner  a  l'auteur  la  médaille  d'or,  dans 
l'assemblée  générale  de  l'année  prochaine  ,  en  cas  qu'il 
y  ait  satisfait  et  qu'il  ait  envoyé  son  mémoire  corrigé 
avant  le  1  Janvier   1824. 

V.  Qu'on  avait  reçu  sur  la  question  :  —  »  On  de- 
»  mande  un  système  complet  et  succinct  des  règles 
»  suivant  lesquelles  les  arbres  fruitiers  doivent  être 
»  taillés  dans  les  Pays-Bas,  afin  d'en  augmenter  et  amé- 
»  liorer  les  fruits  :  et  quels  sont  les  principes  physi- 
»  ques ,  sur  lesquels  ces  règles  sont  fondées"  ?  —  deux 
mémoires,  dont  A  en  hollandais  a  pour  dévise:  Natu- 
ram  Mineiva  -perjîcit;  et  B  en  français:  —  77  est  plus 
aisé,  etc.  On  a  jugé  qu'aucun  de  ces  mémoires  ne  ré- 
pondait d'une  manière  satisfaisante,  sur-tout  a  la  se- 
conde partie  de  la  question,  et  on  a  résolu  de  répéter 
la  question  pour  un  tems  illimité. 

VI.  Qu'on  avait  reçu  sur  la  question  :  —  »  De  quelle 
»  nature  est  la  matière  verte,  qui  se  montre  a  la  sur- 
»  face  des  eaux  stagnantes ,  pendant  un  teins  calme  et 
»  chaud,  sur-tout  en  Juillet  et  Août,  et  qui  est  connue 
»  sous  le  nom  de  Bjssus  jlos  aquae?  Y  a-t-il  des  rai- 
»  sons  de  la  regarder,  suivant  l'opiuion  la  plus  géné- 
»  raie,  comme  un  végétal  cryptogame,  ou  est-elle  d'une 
»  nature  animale?  Serait-elle  une  production  inorgani- 
»  que,  prenant  son  origine  dans  l'union  chimique  de 
»  quelques  principes ,  quand  le  degré  de  chaleur  et 
»  d'autres  circonstances  sont  favorables?  Qu'est-ce  que 
»  l'analyse  chimique  pourra  démontrer  a  cet  égard?  Y 
»  a-t-il  quelque  moyen  de  prévenir  la  production  de 
»  cette  matière  dans  l'eau,  ou  de  la  faire  disparaître, 
»  en  cas  qu'elle  fût  nuisible  a  l'usage  qu'on  veut  faire 
»  de  l'eau,  sur  laquelle  elle  se  trouve?  Les  eaux  cou- 


(    20S    ) 

))  vertes  de  cette  matière,  qui  donne  une  odeur  désa- 
»  gréablè,  ont-elles  une  influence  nuisible  sur  la  santé 
»  de  l'homme;  et  s'il  en  est  ainsi,  que  pourrait-on  faire 
»  ou  observer  pour  se  garantir  de  cette  influence"?  — 
un  mémoire  en  allemand  ayant  pour  devise:  r*vxi>  y 
a^nBoi'-i.  On  a  jugé  que  ce  mémoire  a  beaucoup  de  mé- 
rite, mais  que  l'auteur  aurait  dû  décrire  plus  exacte- 
ment plusieurs  de  ses  observations  et  de  ses  expérien- 
ces, afin  qu'on  pût  juger  mieux,  jusqu'à  quel  point 
les  résultats,  qu'il  en  a  donnés,  y  sont  fondés;  qu'il 
aurait  dû  aussi  développer  davantage  plusieurs  de  ses  hy- 
pothèses; on  trouve  encore  que  ce  mémoire  s'étend  trop 
peu  sur  la  multiplication  ou  l'accroissement  des  corpus- 
cules, qu'il  a  observés.  On  a  donc  résolu  d'inviter  l'au- 
teur,  a  perfectionner  son  mémoire ,  suivantles  indications 
précédentes ,  et  de  prolonger  pour  lui  la  question  jusqu'au 
1  Janvier  1825. 

VII.  Qu'on  avait  reçu  sur  la  question:  —  »  Quelles 
»  sortes  de  pommes  de  terre  cultive-t-on  principalement 
»  dans  les  diverses  provinces  de  ce  Royaume  ;  quelle 
»  en  est  la  différence,  en  égard  au  genre  et  aux  pro- 
)>  priétés?  comment  diffèrent-elles  sur-tout,  en  princi- 
»  pes  constituants  et  dans  l'usage  qu'on  peut  en  faire? 
»  Y  a-t-il  quelque  raison,  fondée  sur  des  expériences, 
»  pour  envisager  une  de  ces  sortes  comme  plus  nutri- 
»  tive  ou  plus  avantageuse  pour  la  santé,  que  l'autre? 
»  et  quelles  améliorations  la  connaissance  de  ces  objets 
»  peut-elle  faire  espérer  pour  la  culture  des  pommes 
»  de  terre  dans  ce  Royaume."  —  Une  réponse  en  al- 
lemand ,  ayant  pour  devise  :  Nihil  sîmul  iiweniitin  et  per- 
fection. On  a  jugé  ce  mémoire  trop  défectueux  pour 
qu'il  pût  être  couronné,  et  on  a  résolu  de  répéter  la 
question  pour  y  répondre  avant  le  1  Janvier  182 5. 

La  suite  au  n°  prochain. 


MESSAGER 

DES  SCIENCES  ET  DES  ARTS. 


Vlme.  Livraison  —  Octobre  1820. 


COMMENTATIONES     BOTANIOΠ, 

Dédiées  à  la  Société  cV Horticulture  de    Toumay , 
par  B.  C.  Dumortier  (1). 


On  a  surnommé  Linné  l'Aristote  du  Nord  :  le  bota- 
niste suédois  mérite  cet  honneur  a  tous  les  égards  ; 
comme  le  philosophe  de  Stagyre,  il  a  porté  dans  les 
sciences  naturelles  la  précision  et  la  rigueur;  comme 
lui,  il  s'est  fait  de  nombreux  disciples;  comme  lui  en- 
core, il  a  vu  son  nom  invoqué  par  des  hommes  qui 
n'entendaient  pas  toujours  sa  doctrine.  En  effet ,  n'est- 
ce  pas  au  nom  de  Linné  qu'on  reproduit  contre  l'éta- 
blissement des  familles  naturelles  des  plantes,  ces  ob- 
jections si  souvent  et  si  complètement  refutées  par  la 
plupart  des  botanistes  français.  Ces  derniers  n'ont-ils 
pas  prouvé  jusqu'à  l'évidence  qu'on  ne  peut  plus  donner 
aux  doutes  de  Linné  sur  la  possibilité  d'une  méthode 
naturelle  l'importance  qu'ils  avaient  a  l'époque  où. 
parut  la  philosophie  botanique?  Envain  disent-ils  a  leurs 
antagonistes  que  Linné  n'attachant  pas  assez  d'impor- 

(1)  Imprimé  à  Toumay,  chez  Ch.  Casterman-Dieu ,   182J, 
yjme  livraison.  i5 


(    210    ) 

tance  au  fruit*  ne  pouvait  établir  solidement  les  carac- 
tères des  familles  naturelles,  qu'il  ignorait  ce  qu'on  a 
découvert  depuis  sur  la  position  respective  de  l'albumen 
et  de  l'embryon,  et  n'admettait  pas  de  valeur  graduée 
pour  les  caractères  ;  on  leur  répond  pour  la  centième 
fois  que  le  système  sexuel  est  préférable  à  toute  dis- 
tribution naturelle  des  plantes ,  parce  qu'il  n'est  aucun 
végétal  découvert  depuis  Linné  qui  n'ait  trouvé  sa 
place  dans  ce  système.  On  est  surpris  d'entendre  une 
objection  si  faible  dans  la  boucbe  d'hommes,  d'ailleurs 
très-versés  dans  la  connaissance  des  végétaux  et  qui, 
par  conséquent,  doivent  bien  savoir  a  quelle  foule 
d'exceptions  l'arrangement  artificiel  de  Linné  est  sujet. 
D'ailleurs  la  question  n'est  pas  de  savoir  de  quelle  ma- 
nière on  peut  distribuer  le  plus  commodément  les  vé- 
gétaux en  classes  et  trouver  avec  le  moins  de  peine  le 
nom  des  plantes,  mais  quel  est  le  moyen  le  plus  sûr 
d'en  acquérir  une  connaissance  philosophique  et  ap- 
profondie. Cela  posé,  il  semble  difficile  de  ne  pas 
accorder  la  préférence  a  la  méthode  naturelle.  Aussi, 
ne  peut-on  douter  que  les  bons  esprits  ne  félicitent 
M.  Dumortier  de  publier,  très-jeune  encore,  des  ob- 
servations botaniques  qui  annoncent  aux  Belges  un 
botaniste  non-seulement  instruit,  mais  encore  habitué 
aux  considérations  sévères  de  l'école  de  Jussieu. 

L'opuscule  de  M.  Dumortier  mérite  l'attention  des 
amis  de  la  botanique,  si  nombreux  dans  les  Pays-Bas. 
Ils  verront  avec  intérêt  que  l'auteur  rend  un  hommage 
mérité  a  plusieurs  de  nos  compatriotes  avantageusement 
connus  dans  la  science ,  en  donnant  leurs  noms  a  quelques 
genres  nouveaux,  dont  la  création  lui  a  paru  néces- 
saire et  sur-tout  qu'il  leur  promet ,  pour  notre  Royaume, 
une  flore  générale ,  où  il   se  propose  de  réunir   aux 


(211    ) 

avantages  réels  de  la  distribution  des  plantes  en  famil- 
les, toutes  les  facilités  des  classifications  artificielles. 
On  ne  peut  se  dissimuler  que  son  entreprise  est  vaste 
et  difficile,  et  la  supposition  qu'il  fait  de  l'existence 
d'un  organe  mâle  quelconque  dans  tous  les  végétaux, 
hardie;  mais  quelque  soit  le  succès  de  son  innovation, 
il  aura  donné  des  preuves  d'une  instruction  peu  com- 
mune; car,  pour  classer  le  règne  végétal  d'après  des 
considérations  nouvelles,  il  faut  embrasser  d'un  coup 
d'oeil  le  domaine  entier  de  la  science. 

Une  partie  des  Commentationes  Botanicœ ,  qui  ne 
peut  manquer  de  faire  généralement  plaisir,  est  une 
monographie  des  Jongermanes  et  une  autre  des  Sphé- 
ries,  qui  placent  M.  Dumortier  dans  le  petit  nombre 
de  ceux  qui  chez  nous  cultivent  avec  succès  la  partie 
de  la  botanique  qui  présente  le  plus  de  difficultés,  la 
Cryptogamie.  J.  L. 


RÉPUBLIQUE  DES  CHAMPS  ÈLYSEES  OU  MONDE  ANCIEN, 

Par  M.  De  Grave,  ancien  conseiller  au  conseil  de  Flandre, 
membre  du  conseil  des  anciens,  etc.  Gand,  1806.  3  vol.  in-S°. 


Le  but  de  cet  ouvrage  fort  extraordinaire  était  d'éta- 
blir que  la  Belgique  est  la  contrée  qui,  dans  l'antiquité, 
a  été  connue  sous  le  nom  d'Atlantide,  d'Iles  fortunées, 
etc.  ;  qu'elle  a  été  le  berceau  de  la  civilisation ,  du 
commerce,  des  arts,  des  sciences  et  des  diverses  my- 
thologies  et  théogonies  répandues  sur  la  surface  du  globe. 
L'extrême  importance  du  sujet,  les  éminentes  quali- 
tés de  l'auteur,  ses  habitudes  studieuses,  le  calme  et 


(    212   ) 

la  rectitude  de  son  jugement,  son  caractère  sérieux  et 
réfléchi,  la  vaste  étendue  et  la  profondeur  de  son  sa- 
voir, la  parfaite  sagesse  de  sa  vie  publique,  l'austère 
dignité  de  ses  mœurs,  semblaient  réclamer  plus  d'atten- 
tion qu'on  n'en  a  donné  jusqu'ici  a  cet  ouvrage,  qui 
fut  le  fruit  des  méditations  de  toute  la  vie  et  de  la  pro- 
fonde conviction  de  l'un  des  hommes  dont  la  patrie  a 
le  plus  de  droits  de  se  glorifier. 

L'auteur  n'existait  plus  depuis  un  an ,  lorsque  l'ou- 
vrage fut  publié;  et,  quoiqu'il  eût  fait  lui-même  quel- 
.  crues  dispositions  pour  en  préparer  la  publication,  il 
est  à  penser  qu'il  s'était  réservé ,  en  y  mettant  la  der- 
nière main,  de  trier,  d'élaguer  et  de  façonner  encore 
les  matériaux  qui  y  ont  été  consignés.  Ce  qui  nous  sug- 
gère cette  pensée,  c'est  qu'il  se  trouve  entre  les  mains 
de  membres  de  sa  famille  diverses  notes  et  écritures, 
plus  ou  moins  élaborées  et  dont  il  n'a  été  fait  aucun 
usage;  quoique,  dans  le  sens  de  ses  études,  plusieurs 
paraissent  avoir  un  grand  intérêt;  nous  avons  cru  ne  devoir 
pas  refuser  d'en  insérer  ici  une  qui,  comme  d'autres, 
offre  cela  de  particulier  que  les  preuves  en  faveur  des 
propositions  principales  de  l'auteur  y  paraissent  plus 
directes  et  plus  positives  que  celles  que  l'impression  nous 
a  communiquées,  tout  en  offrant  des  différences  et  même 
quelques  contradictions  apparentes  avec  elles;  la  voici: 

»  Connaissez-vous  ce  coin  de  l'ancienne  Flandre- 
française,  ou  plutôt,  ces  coins  de  la  Flandre-française 
et  de  l'Artois  où  se  trouvent  St.-Omer,  Haesebroek, 
Béthune,  Aire  et  cette  antique  Terouane  que  l'empe- 
reur Charles-Quint  fit  dévaster? 

»  J'ai  sous  les  yeux  un  vieille  carte  de  la  Flandre, 
par  Lotter ,  où  ce  coin  de  la  terre  montre  des  singularités 
très-remarquables;  et  c'en  est  déjà  une  que  ce  même 


(2Ï3   ) 

lieu  soit  précisément  cette  extrémité  de  la  terre,  ce 
séjour  des  extremi  hominum  morini  des  auteurs  et 
poètes  grecs  et  latins;  qu'il  soit  précisément  sous  cette 
latitude  septentrionale  de  5o  a  5i  degrés,  où  Bailli  et 
d'autres  prouvent  qu'était  le  pays  d'où  sont  sortis  les 
Atlantes,  les  Chaldéens,lesBorréens,  Hyper-Boréens  et 
Arimaspiens,  les  Brachmanes  et  leur  Zend-Avesta,  etc. 
Voulez-vous  y  voir  toutes  ces  origines?  Voulez-vous  y 
voir  des  origines  Egyptiennes,  Scandinaves,  Grecques, 
une  entrée  des  Enfers  ou  si  vous  voulez  des  Champs 
Elyséens,  etc.?  Tout  y  est  conservé  intact  comme  si  la 
main  du  tems  n'y  avait  touché  qu'en  caressant. 

»  Les  Boréens  ou  Borréens?  Voyez  vous  ce  village 
de  Borre  ou  Bore,  a  une  lieue  nord-est  d'Hasehroek, 
et  cette  petite  rivière  la  Borre  qui  prend  sa  source  au 
nord-ouest,  passe  entre  Haesebroek  et  Borre,  et  va  se 
décharger  dans  la  Lys  a  Merville?  Voyez-vous  encore 
cette  petite  ville  de  Borborgh  ou  Borburgh,  (bourg  de 
Bore)?  Les  habitans  du  village  comme  ceux  du  bourg 
de  Borre  ou  Bore,  nommés  en  masse,  ne  sont-ils  pas 
encore  aujourd'hui  des  Boréens?  et  s'il  y  avait  eu  la 
très-anciennement  une  corporation  ou  monastère  dont 
les  membres  eussent  été  envoyés  au-dehors  comme  con- 
ducteurs de  missions  ou  de  colonies,  ne  rempliraient-ils 
pas  toutes  les  indications  de  l'histoire? 

»  Les  Hjperboréens  ?  La  translation  a  Ypres  (en  lan- 
gue du  pays  Yper),  du  chapitre  de  Terouane ,  lors 
de  la  destruction  de  cette  ville ,  et  plusieurs  autres 
circonstances  dont  j'aurai  a  parler,  semblent  assigner 
a  la  ville  à'Yper  une  suprématie  sur  les  antiques  éta- 
blissemens  de  la  contrée  dont  je  parle;  que  la  corpo- 
ration des  Boréens  ait  eu  à  Ypres,  une  annexe,  un 
refuge,  un   séminaire  ou  école   de  missionnaires,   les 


( 

(  M  ) 

élèves  n'auront-ils  pas  dû  être  nommés  Yper-  ou  Hyper- 
Boréens? 

»  La  Fal-Halla  ou  W 'aile-Halle  ?  Voyez  cette  petite 
rivière  laBorre,  qui,  comme  je  Pai  dit,  prend  sa  source 
au-dessus  de  Haesebroek  et  se  jette  dans  la  Lys  a  Mer- 
ville  ;  voyez  cette  autre  petite  rivière,  nommée  la 
Nieppe,  qui  prend  sa  source  a  Haesebroek  même  et  va 
se  jetter  dans  la  Lys  près  du  village  de  Thiénes ,  a 
deux  heues  plus  haut  que  Merville  ;  deux  fossés  ou 
canaux  très-antiques  et  qui  paraissent  avoir  été  fort 
larges,  les  joignent  sur  deux  points  de  leur  cours  et 
forment  ainsi  deux  isles,  dont  l'une  est  renfermée  entre 
ces  deux  fossés  et  des  portions  des  deux  petites  riviè- 
res et  l'autre  entre  le  plus  méridional  de  ces  fossés  , 
les  deux  petites  rivières  et  la  Lys.  La  première  de  ces 
isles  s'appelle  la  fValle  ou  motte  au  bois ,  et  il  s'y  trou- 
vait une  de  ces  antiques  constructions,  dont  l'origine 
ne  se  rattache  à  rien  de  ce  qui  appartient  a  l'histoire 
connue;  si  c'était  une  Halle,  nom  que  portent  encore 
de  nos  jours  tous  les  grands  édifices  publics,  qui,  dans 
toutes  les  villes  de  la  Flandre  occidentale  et  française, 
servent  a  la  tenue  des  foires  ou  grands  marchés  pério- 
diques des  marchandises  étrangères,  etc.,  ce  qui,  selon 
bien  des  apparences,  a  existé  ici;  si,  en  même  tems , 
quelqu'objet  de  dévotion  du  culte  d'alors  y  attirait  des 
pèlerinages,  si,  peut-être,  il  y  avait  de  grandes  éco- 
les, comme  c'est  maintenant  l'un  ou  l'autre  cas  a 
l'égard  d'autres  lieux  qui  portent  le  nom  de  Halle,  la 
Wal-Halle  ou  Val-Halla  des  anciens  peuples  du  nord 
ne  serait-elle  pas  réalisée  avec  les  motifs  qui  y  atti- 
raient ces  peuples? 

»  Neptune  ?  La  seconde  des  isles  dont  je  viens  de 
parler,   celle  qni  est  au  midi  de  la  FF  aile  et  qui  en 


(215) 

forme  comme  l'avant-cour ,  porte  le  nom  de  Bois  de 
Nieppe;  son  nom  flamand  est  oublié;  mais  si,  en  effet, 
c'était  l'enclos  antérieur,  l'avenue,  le  parc  de  la  Wal- 
Halle,  l'appellation  de  tuyn  ou  tain  (prononcé  comme 
tune) ,  qui  maintenant  signifie  encore  enclos ,  enceinte, 
parc,  jardin,  serait  très-exacte,  et  cette  isle  se  serait 
appellée  leNieptuin,  (prononcez  comme  le  mot  français 
Neptune),  jardin  ou  parc  de  Nieppe. 

Ce  n'est  la  qu'une  supposition,  je  le  sais;  mais  on 
sera  tantôt  étonné  autant  que  moi  des  grandes  proba- 
lités  qui  l'appuyent. 

»  Un  thuin  ou  tuin  (prononcez  toujours  cette  syl- 
labe comme  s'il  y  avait  en  français  thune  ou  tune),  est 
plus  exactement  l'enceinte,  la  clôture  même  que  l'es- 
pace enclos ,  quoique  ce  mot  soit  en  usage  dans  l'un 
et  l'autre  sens;  le  verbe  bethunen  ou  betuinen,  signifie 
enclore  un  espace,  ou  bien  le  fermer,  l'abriter  par  des 
fossés,  des  digues,  des  haies,  des  palissades,  des  for- 
tifications, etc.  Jettez  les  yeux  sur  la  carte  de  Lotter, 
vous  y  verrez,  autour  des  deux  îles,  laWalle  et  le  Bois 
de  Nieppe ,  i°  une  première  enceinte  formée  par  les 
petites  rivières  la  Borre  et  la  Nieppe,  les  deux  fossés 
ou  canaux  qui  les  joignent  et  la  Lys;  2°  une  enceinte 
de  villages,  disposés,  d'une  manière  assez  remarquable, 
en  une  Pyramide  ou  triangle ,  dont  Borre  forme  le 
sommet ,  précisément  tourné  au  nord  ;  tandis  que  la 
G  orgue  et  un  village  nommé  ?^.  Martin  près  d'Aire, 
forment  les  deux  extrémités  de  la  base;  et  3°  une  troi- 
sième enceinte  bien  plus  importante  de  villes  ou  for- 
teresses, toutes  renommées  par  leur  haute  antiquité, 
disposées  circulairement  autour  de  la  Walle  et  qui 
offrent  plusieurs  étranges  singularités;  la  première  c'est 
que  toutes  sont,  a  très-peu  de  chose  près,  a  une  dis* 


(   216  ) 

tance  égale  de  la  Walle,  centre  du  cercle,  et  entr'elles; 
la  2me,  c'est  que  ces  villes  ou  forteresses,  au  nombre 
de  six,  savoir:  Béthune,  Etaire,  Bailleul ,  Cassel,  St. 
Orner  et  Aire  ,  complètent  leur  nombre  de  sept  par 
l'adjonction  de  Terouane,  placée  en  debors  du  cercle 
et  lui  servant  en  quelque  sorte  de  clef  et  de  barrière 
en  fermant  l'entrée  de  la  Lys  qui  le  traverse;  la  3me, 
c'est  que  le  nom  de  deux  des  six  villes ,  qui  forment 
l'enceinte  ou  le  cercle  ,  ont  conservé  et  conservent 
encore  dans  leurs  noms  l'énonciation  du  but  de  leur 
création  ;  le  nom  de  Bétbune  est  un  des  modes  du 
verbe  bethuinen  (enclore);  et  on  sait  que  St.  Orner 
s'appellait  anciennement  zeetuhi,  seetuin,  ou,  comme 
des  étrangers  antiques  l'ont  nommé  par  corruption , 
sétiun,  situni,  sitouin  ou  setouin,  (barrière  de  mer); 
la  4m%  c'est  qu'en  prolongeant,  à-peu-près  également, 
les  six  rayons  qui  du  centre  commun  vont  aboutir  aux 
six  villes  ou  forteresses  nommées  plus  baut,  ces  rayons 
prolongés  vont  se  terminer  a  six  autres  villes ,  savoir  : 
le  ir  par  Bétbune  a  Arras,  le  2me  par  Etaire  a  Lille, 
le  5me  par  Bailleul  a  Ypres,  le  4me  par  Cassel  a  Ber- 
gues-St.-Winox ,  le  5mc  par  St.  Orner  a  Calais,  et  le 
gmo  par  A;re  *a  Montrcuil  ;  la  5me,  c'est  qu'un  rayon 
tiré  du  même  centre  et  traversant  Terouane  irait  abou- 
tir a  Boulogne,  ce  qui  porte  également  au  complet  le 
nombre  des  sept  villes  de  cette  enceinte  extérieure  ; 
Boulogne  aurait-elle  éti ,  a  l'égard  des  arrivages  de 
l'étranger,  une  clef  extérieure  comme  l'était  Terouane 
pour  l'enceinte  intérieure?  C'est  ce  que  nous  verrons 
plus  tard. 

»  Voila  donc ,  la  Nieppe ,  le  Bois  de  Nieppe  ,  la 
Walle,  entourés  de  quatre  enceintes  régulières,  dont 
trois  appartiennent  évidemment  a  un  système  de  dé- 


(  2I7  ) 
fense;  et  il  n'y  aurait  pas  a  s'étonner  qu'on  trouvât 
des  traces  e'videntes  de  la  totalité  de  ce  système,  liant 
entr'elles  toutes  les  villes  de  chaque  enceinte  et  s'éten- 
dant  partout  de  l'une  a  l'autre.  N'est-ce  pas  ce  majes- 
tueux ensemble ,  cette  création  gigantesque  du  génie 
de  l'homme,  que  nous  trouvons  partout  et  de  mille 
manières  diverses,  proposé  a  l'admiration,  a  la  véné- 
ration, même  a  l'adoration  des  peuples  de  la  plus  haute 
antiquité?  Entr'autres,  n'est-ce  pas  le  génie  créateur  de 
cette  merveille  que  nous  trouvons  personnifié  et  divinisé 
sous  le  nom  de  Neptune,  dompteur,  maître,  dieu  des 
mers,  premier  fondateur  de  Troie?  N'avons  nous  pas 
réunis  ici,  outre  son  nom,  tous  les  attributs  de  cette 
divinité,  tout  ce  qui  la  caractérise  dans  la  mythologie? 
et  remarquez  cette  ville  de  Terouane  qui ,  outre  ce  que 
nous  en  avons  dit,  revient  encore  ici  nous  offrir  cette  sin- 
gularité :  qu'une  élision  de  la  lettre  e,  et  la  confusion, 
a  la  manière  des  Grecs,  des  lettres  u  et  y  la  transforment 
en  Troyane  (Troiana  urbs);  j'aurais  beaucoup  a  dire  la 
dessus  et  je  le  ferai  peut-être  un  jour.  Quelle  foule  de 
choses  obscures  semblent  ici  se  jetter  sous  la  lumière? 
»  Quelques  mots  encore  sur  Neptune,  sur  notre 
Nieptuin.  Son  souvenir  est  encore  bien  vivant  parmi 
nous  5  voyez-vous  ce  grand  village  de  Nieppe .,  notre 
Niep-  ou  Nepkerke,  que  vous  rencontrez  en  sortant 
d'Armentières  pour  aller  aBailleul?  est-ce  une  ancienne 
annexe  ou  dépendance  de  l'enclos  de  la  Nieppe?  en 
est-ce  une  commémoration  érigée  depuis  la  dévastation 
de  cet  enclos  ?  Voyez-vous  cette  ville  de  Niep-ort  ou 
Niep-oort  (plage  de  Nieppe),  que  nous  avons  pris 
l'habitude  de  travestir  si  risiblement  en  port-neuf , 
malgré  l'ortographe  de  son  nom,  malgré  sa  grande  an- 
tiquité  bien  reconnue,  malgré  le   ridicule  de  la  pré- 


(«8) 

tendue  jonction  de  Padjectif  local  nieuxv  a  un  substantif 
étranger,  port,  qui  fait  anachronisme? 

»  Voila  des  monumens  ,  mais  voici  des  souvenirs  : 
savez-vous  le  nom  de  la  grande  fête  d'Ypres  ?  c'est  la 
fête  de  l'enclos,  Ypertuin-dag.  Un  grand  tableau 
en  représentait  le  sujet  dans  l'église  du  couvent  des 
Récollets;  qu'est  devenu  ce  tableau  depuis  la  démoli- 
tion du  couvent?  Des  Barbares  étrangers ,  des  Infidèles 
assiégeaient  la  ville  et  la  pressaient  vivement  ;  un  matin , 
une  nouvelle  circonvallation  entoure  la  ville;  c'est  la 
Sainte  Vierge  qui  l'a  érigée  pendant  la  nuit  ;  effrayé , 
l'ennemi  s'enfuit  et  la  ville  est  sauvée.  Demandez-vous 
a  quel  événement  connu  cette  circonstance  s'attache? 
on  divague  et  on  finit  par  s'égarer  dans  la  nuit  des 
tems;  vous  souvenez-vous  que  les  Romains  n'ont  pu 
vaincre  les  Morins,  ni  entrer  dans  leur  pays?  Autre 
souvenir  :  vous  souvient-il  du  forsachistu  Diabolœ  end 
cdlum  Diabole  fVercum  de  Desroches  ;  monument  sin- 
gulier des  barbares  mutilations  que,  sous  peine  de  mort 
et  de  confiscation  générale,  les  Romains  avaient  fait 
subir  a  notre  langue?  Remarquez  y  qu'il  fallait  aussi  , 
pour  recevoir  le  baptême  chrétien  ,  abjurer  le  ou  les 
thunaer ,  le  ou  les  faiseurs  d'enclos ,  dont  il  a  plu  a 
Desroches  de  faire  donderaer,  le  tonneur.  Peut-être  y 
a-t-il  quelqu'apropos  pour  faire  ici  la  remarque  qu'en 
1253  et  54,  Guillaume  de  Rubriquis,  envoyé  par  le 
Roi  de  France  auprès  du  grand  Kan  des  Tartares, 
petit-fils  de  Gengis,  eut  beaucoup  a  faire  aux  Tuniens, 
(tuiniaenen)  prêtres  de  la  religion  du  pays  où  le  grand 
Kan  avait  sa  résidence.  Remarquez,  par  parenthèse, 
que  la  relation  de  ces  voyages  contient  une  foule  de 
grands  renseignemens  sur  notre  histoire  antique.  Quit- 
tons Neptune  pour  sa  mère  ou  grand-mère. 

La  suite  au  cahier  prochain. 


(  219  ) 

CONVERSION  DES   MATIÈRES   CHARBONNEUSES  EN 

DïAitlANT. 


On  sait  maintenant ,  d'après  le  journal  de  physique 
ame'ricain ,  a  qi  oî  s'en  tenu'  sur  la  fonte  des  matières 
charbonneuses ,  en  globules  vitreux  ressemblans  a  du 
diamant.  Le  charbon  et  la  plombagine  se  sont  liquéfiés 
entre  les  pôles  du  déflagrateur  calorico  électrique.  Les 
globules  de  la  dernière  ont  été  tantôt  transparens  et 
tantôt   opaques  et  ont    donné  une  grande  variété  de 
couleurs ,    telles  que  le  noir ,   le  brun ,  le   jaune ,  le 
blanc  grisâtre,  le  saphir;  il  y  avait  aussi  des  globules 
limpides,  et  tous  avaient  un  éclat  vitreux.  Le  charbon, 
placé  au  pôle  négatif,  se  dissipait  aisément  en  fumée, 
et  ce  qui  s'en  transportait  à  l'autre  pôle  était  fondu. 
Cette  fonte  de   charbon    avait  beaucoup   diminué  en 
faculté  conductrice  électrique.    La  plombagine  fondue 
devient  presque  aussi   isolatrice    que  le   diamant,    et 
prend   en  outre  des  propriétés   magnétiques.    Lorsque 
ce  fossile  est   employé   comme   continuateur  du  pôle, 
sa  lumière  est  beaucoup  plus  brillante  que    celle    du 
charbon.     L'anthracite ,     comme    faible    conducteur , 
n'a  pu  être   fondu  par   le   déflagrateur,    mais  il   l'a 
été   sous  la   flamme  du    chalumeau.    La  fonte  a   pré- 
senté   un  globule   noir    et   resplendissant  :    elle  avait 
été  faite  dans  l'excavation  d'un  morceau  de  chaux  vive. 
L^anthracite   fondu   reste    isolateur  comme   avant.    Le 
diamant ,   qui  est  un   non-conducteur  absolu ,  s'est  a 
plus  forte  raison  soustrait  a  la  fusion  par  le  déflagra- 
teur et  sa  fonte  au  chalumeau  composé  a  été  douteuse 


(   220   ) 

et  a  surface,  si  elle  a  eu  lieu  comme  a  semblé  Pindi- 
quer  la  force  magnétique  qu'il  avait  acquise.  De  tout 
cela,  les  auteurs  de  ces  expériences  concluent  simple- 
ment que  les  matières  charbonneuses  fondues  s'appro- 
chent de  la  condition  du  diamant. 

M.  Silliman,  pendant  le  cours  de  ces  expériences, 
a  cru  observer  que  les  pôles  du  déflagrateur  sont  ren- 
versés, que  l'extrémité  cuivre  est  positive,  tandis  que 
l'extrémité  zinc  est  négative,  et  qu'ainsi  le  courant 
électrique  suit  une  direction  opposée  a  sa  marche  dans 
les  appareils  ordinaires.  V.  M. 


Analyse  Raisonnée 

De  l'Histoire  de  V origine  des  droits  civils,  politiques  et  reli- 
gieux des  Gaules ,  spécialement  de  la  Belgique  ,  par  AI.  Jean- 
Joseph  Raepsaet,  Membre  de  l'Institut  royal  des  Pays-Bas, 
de  la  Société  royale  des  Beaux-Arts  et  de  Littérature  à  Gand,  etc. 


Vje  nouvel  ouvrage,  qui,  avec  le  Mémoire  sur  V  origine 
des  Belges ,  les  Recherches  sur  les  Inaugurations  des 
Souverains  des  Pays-Bas ,  et  Y  Histoire  de  V  origine, 
de  l'organisation  et  des  pouvoirs  des  Etats-généraux 
et  provinciaux ,  formera  le  complément  de  l'origine 
de  la  législation  civile,  politique  et  religieuse  de  la 
Gaule  et  des  Pays-Bas,  depuis  l'époque  Germanique  ou 
Gauloise,  jusqu'au  XVIme  siècle,  est  le  résultat  de 
trente  années  de  recherches ,  rassemblées  dans  six  vo- 
lumes in-folio  manuscrits ,  que  l'âge  avancé  de  Pauteur 
ne  lui  permet  plus  de  mettre  en  état  d'être  imprimés  ; 
mais,  sollicité  et  encouragé  par  plusieurs  Savans,  il 
s'est  déterminé  a  en  donner  l'analyse. 


(    321    ) 

Elle  est  intitulée  Analyse  raisonnée,  parce  que  les 
sources  dans  lesquelles  l'auteur  a  puisé ,  y  sont  scrupu- 
leusement indique'es  ;  elle  servira  de  répertoire  aux  sa- 
vans  et  de  livre  d'instruction  ou  d'amusement  aux 
autres,  en  laissant  les  citations  de  côté. 

Divisée  en  cinq  périodes ,  elle  comprend  l'histoire  de 
la  législation  de  la  période  Germanique  ou  Gauloise, 
de  la  Romaine,  de  la  Franque ,  de  la  Féodale  et  de  la 
Coutumière;  et  pour  mieux  prouver  comment  cette 
même  législation  a  passé  d'une  période  a  l'autre,  l'ou- 
vrage est  précédé  d'un  Précis  topographique  de  la  Bel- 
gique pendant  les  cinq  périodes. 

Il  existe ,  a  la  vérité ,  des  traités  précieux  sur  cette 
topographie  ancienne  ;  mais  il  reste  toujours  a  glaner 
dans  un  si  vaste  champ  ;  et  les  notions  que  M.  R.  pré- 
sente sur  les  Liti  ou  Leti ,  sur  les  Propontii ,  sur 
Y  A  Ibis,  sur  Yisle  des  Bataves ,  sur  le  Tractus ,  sur  le 
Mempiscus ,  sur  les  anciennes  limites  de  la  Flandre  et 
sur  ses  Forestiers ,  pourront  paraître  neuves  et  dignes 
de  l'attention  des  savans. 

La  seconde  partie  se  compose  de  Y  Analyse  des  Droits , 
et  forme ,  proprement ,  le  corps  de  l'ouvrage.  Elle  com- 
prend les  périodes  Germanique  et  Romaine;  on  n'a  pas 
cru  pouvoir  les  séparer,  parce  que  les  Belges  ont  su 
conserver  leurs  usages  nationaux  au  milieu  même  des 
entraves  du  despotisme  Romain. 

On  y  lève  le  voile  qui  cachait  la  source  de  notre 
législation  civile  et  politique;  elle  est  toute  entière  dans 
le  Traité  des  mœurs  des  Germains;  Tacite  y  indique 
tous  les  cadres  et  toutes  les  parties  de  cette  législation  ; 
mais  son  inimitable  laconisme  n'en  laisse  pas  aperce- 
voir l'organisation ,  sans  une  étude  approfondie. 

On  y  démontre,  comment  cette  législation,  qui  ren- 


(    2?Û   ) 

fermait  toutes  les  bases  d'un  excellent  gouvernement 
aux  yeux  même  de  Tacite,  mais  qui  ne  consistait  qu'en 
mœurs  et  usages,  a  été  rédigée  sous  le  nom  de  Loi  na- 
tionale; et  comment  ensuite,  régularisée  et  perfectionnée 
par  les  capitulaires ,  elle  a  passé  a  travers  l'anarchie  du 
moyen  âge,  de  la  période  féodale,  dans  la  coutumière, 
au  point,  que  nos  coutumes  ont  conservé  la  plupart 
des  titres  de  ces  anciens  juges  et  officiers  avec  la  pro- 
cédure, les  formules,  les  solennités,  les  symboles,  et 
jusqu'aux  mots  techniques  des  Francs  et  des  Gennains, 
ainsi  que  nous  en  avons  conservé  et  conservons  encore 
les  institutions ,  les  jeux ,  les  mœurs ,  les  vices ,  les 
vertus  et,  même,  les  préjugés  et  les  superstitions. 

La  troisième  partie  comprend  toute  la  législation 
féodale;  la  véritable  origine  des  Fiefs,  sur  laquelle  on 
a  débité  tant  de  fables ,  faute  de  connaître  le  séniorat 
du  moyen  âge  ;  l'origine  des  Redevances  foncières  et  des 
Services  personnels  y  fruits  naturels  d'une  propriété  alo- 
diale,  que  l'ignorance  de  l'état  des  campagnes  au  moyen 
âge ,  attribue  aujourd'hui  a  la  féodalité  ;  l'origine  des 
Seigneuries y  des  Villages,  des  Paroisses,  des  Dîmes 
ecclésiastiques  et  de  la  Portion  congrue;  l'origine  des 
Grands-officiers  du  Palais,  leurs  attributions  avant 
l'érection  des  corps  de  métier;  celle  de  nos  Collèges 
d'êcaevins  et  jurés,  avec  les  variations  qu'ils  ont  éprou- 
vées; celle  des  Officiers  de  justice  et  d'Administra- 
tion, etc. 

Aucun  de  tous  ces  points  n'est  traité  systématique- 
ment; tous  sont  basés  sur  des  actes  contemporains,  que 
chaque  lecteur  pourra  consulter,  critiquer  et  rejetter, 
s'il  y  a  lieu. 

M.  R.  croit,  que  c'est  la  le  seul  moyen  de  parvenir 
a  avoir  une  bonne  histoire  de  la  Patrie  et  d'empêcher 


(    **3    ) 

que  la  génération  qui  va  succéder,  ne  tombe  dans  le 
chaos  où  nous  ont  jettes  une  foule  de  notions  fausses 
et  incohérentes. 

La  quatrième  partie  traite  de  l'origine  de  nos  Keuren 
ou  Chartes  de  liberté ,  de  nos  Coutumes ,  de  nos  Villes 
à  loi  et  de  nos  Villes  de  commune. 

Il  existe  quelques  mémoires  imprimés  sur  ce  sujet, 
auxquels  M.  R.  n'est  pas  tout  a  fait  étranger,  a  raison 
de  l'empressement  avec  lequel  il  a  donné  a  quelques 
savans  la  communication  franche  et  libre  de  tous  les 
matériaux  qu'il  avait  déjà  rassemblés  sur  cette  matière; 
mais  il  reste  encore  beaucoup  a  dire  ;  d'une  part ,  on 
semble  ne  pas  avoir  senti  la  liaison  intime  qui  existe 
sur  ce  point  entre  la  période  féodale  et  la  coutumicre 
et  ne  pas  avoir  assez  regardé  celle-ci  comme  la  suite  et 
l'effet  de  celle-là. 

D'autre  part,  l'établissement  des  Communes  ou  Poor- 
teryen,  pris  isolément,  y  a  été  considéré,  moins  sous 
le  rapport  de  leur  nature ,  de  leur  but  et  des  motifs 
de  leur  introduction ,  que  sous  celui  des  droits  qui  en 
dérivent  et  des  obstacles  qu'a  rencontrés  leur  établis- 
sement. 

M.  R.  s'attache  a  remplir  ces  lacunes  et  a  donner  plus 
de  développement  a  ces  titres  précieux  de  nos  libertés 
belgiques. 

Cet  ouvrage  formera  2  vol.  in-8.  et  se  publiera  par 
souscription  à  raison  de  cinq  francs  le  volume  j  on 
souscrit  chez  l'imprimeur  de  cette  feuille, 


(   224   ) 

ANNALES    DU    SALON    DE    GAND    ET    DE    L'ÉCOLE 
MODERNE   DES   PAYS-BAS    (l). 


JLes  quatre  dernières  livraisons  des  Annales  du  Salon 
de  Gand  ont  paru  depuis  quelques  jours  et  complètent 
cet  intéressant   ouvrage.   Au   nombre  des  productions 
gravées  dans  ce  Recueil,  on  remarque  avec  beaucoup 
de  satisfaction  le  grand  tableau  de  M.  Pieneman,  repré- 
sentant   le   Combat   de    Quatre-  Bras ,    qui    mérita  à 
l'artiste  la  décoration  du  Lion  Belgique;  Hector  pleuré 
par  les  Troyens  et  sa  famille,  par  M.  Duvivier,  de 
Bruges;   le  tombeau  du  Prince  Velbrueq,  évêque  de 
Liège ,  par  M.  Dewandre  ;  Claudius  Civilis ,  statue  par 
M.  Royer;  le  bas-relief  qui  mérita  a  M.  VanGeelle  se- 
cond grand  prix  de  sculpture;  des  ouvrages  de  MM. 
Ommeganck ,  Van   Regemoorter ,   Cogels    et  plusieurs 
autres  paysagistes,  ont  trouvé  place  dans  ces  Annales, 
ainsi   que  les  médailles  de  M.   Braemt,  gravées  l'une 
par  ordre  du  Gouvernement  pour  perpétuer  la  victoire 
de   Palembanc,   l'autre   pour   l'Institut   royal,    chefs- 
d'œuvre  qui  assignent  a  M.  Braemt  la  première  place 
parmi  nos  graveurs. 

Le  succès  qu'a  obtenu  cette  entreprise,  vraiment 
nationale,  et  le  but  louable  que  l'éditeur  s'est  proposé,  et 
qu'il  a  atteint,  de  faire  connaître,  dans  ce  pays  et  chez 
l'étranger,  les  productions  de  nos  artistes,  fait  espérer 
qu'il  trouvera  des  imitateurs  dans  d'autres  villes  et  pour 
d'autres  salons,  comme  il  le  dit  très-bien  dans  sa  lettre 

(i)  Un  vol-  in-8.  contenant  g5  planches  «raves  au  Irait,  à  Gand, 
chez  P.    F.  de  Goesiu-Verhaeg/ie,  imprimeur  de  l'Université. 


(    225   ) 

dédicatoire  a  l'Académie  de  dessin,  peinture  et  archi- 
tecture de  Gand;  en  attendant  que  ce  vœu  se  réalise 
nous  donnerons  dans  le  Messager,  la  gravure  au  trait 
des  principaux  ouvrages  de  nos  artistes,  qui  seront  suc- 
cessivement exposés  dans  les  difîérens  salons  du  Royaume. 
Nous  avons  cru  ne  pouvoir  mieux  commencer  qu'en 
donnant  les  traits  du  tableau  (1)  représentant  le  portrait 
d'une  Princesse  chérie ,  amie  des  arts  et  compagne  du 
Prince  qui  se  couvrit  de  lauriers ,  en  combattant  pour 
l'indépendance  de  la  patrie.  M.  Kinson ,  notre  compa- 
triote, peintre  de  S.  A.  royale  la  duchesse  de  Berry, 
auteur  de  ce  beau  tableau,  jouit  d'une  réputation  mé- 
ritée dans  la  capitale  de  la  France,  où  son  talent  lui  a" 
valu  de  justes  récompenses  et  la  décoration  royale  de 
la  légion  d'honneur. 


Planche  6me.  —  Portrait  de  S.  A.  R.  et  I.  la  Princesse 
d'Orange y  tableau  de  M.  Fr.  Kinson» 

S.  A.  R.  et  I.  la  Princesse  d'Orange  est  debout  devant 
une  table,  sur  laquelle  est  placé  un  vase  contenant  des 
fleurs  ;  delà  main  droite,  la  Princesse  tient  un  mou- 
choir, la  gauche  est  dans  l'action  de  prendre  un  livre 

(i)  On  ne  doit  pas  chercher  dans  ce  trait  lithographie  la  pureté 
du  dessin ,  la  ressemblance  du  portrait  et  encore  moins  l'effet  du 
coloris  qui  font  le  mérite  de  ce  tableau  ;  mais  il  faut  le  considérer 
comme  un  moyen  de  faire  connaître  l'ensemble  d'une  composi- 
tion; c'est  l'essai  d'un  jemie  peintre  qui  commence  à  s'exercer  dans 
cette  branche ,  encore  peu  cultivée  chez  nous ,  et  nous  ne  doutons  pas 
que  si  plusieurs  de  nos  artistes  devaient  s'adonner  à  ce  genre,  nous 
ne  parvenions  à  la  perfection  avec  laquelle  on  traite  cette  partie  chez 
nos  voisins;  les  progrès  qu'ils  ont  faits  pendant  un  court  espace 
de  teins,  se  remarquent  facilement  dans  les  Annales  du  Musée 3 
publiées  à  Paris  par  M.  Landon,  en  comparant  la  première  plan- 
che, qui  est  d'une  exécution  extrêmement  faible,  aux  planches 
insérées  daus  ce  recueil  et  gravées  quelques  années  plus  tard  par 
le  même  graveur.    - 

VIme.   livraison.  16 


(    226    ) 

placé  sur  la  table.  L'appartement  est  richement  orné; 
un  fauteuil  doré  et  un  beau  tapis  de  Tournai ,  com- 
plètent l'ameublement  du  salon. 

Le  costume  de  S.  A.  est  d'une  riche  simplicité  ; 
il  se  compose  d'un  habit  de  velours  violet,  garni  en 
perles  fines  ;  des  bracelets  d'or ,  enrichis  du  portrait 
en  émail  de  son  auguste  époux,  font  ressortir  la  blan- 
cheur de  la  carnation  et  la  beauté  du  bras. 

Ce  tableau  a  été  exposé  au  salon  de  Gand,  de  cette 
année,  à  côté  de  celui  de  S.  A.  R.  le  Prince  d'Orange; 
l'un  et  l'autre  réunissent  une  ressemblance  heureuse 
au  coloris  suave  et  brillant  qui  distingue  si  éminem- 
ment les  ouvrages  de  M.  Kinson  ;  la  pose  et  l'ajuste- 
ment de  la  Princesse  sont  traités  avec  grâce,  les  ac- 
cessoires sont  faits  avec  goût  et  donnent  a  l'ensemble 
un  charme  qui  plait  et  séduit. 

Sa  Majesté  le  Roi  voulant  témoigner  a  M.  Kinson  sa 
satisfaction  pour  le  succès  avec  lequel  il  a  traité  ces  por- 
traits, et  reconnaître  en  même  teins  le  talent  d'un  artiste, 
qui  soutient  si  honorablement,  en  pays  étranger, l'hon- 
neur de  notre  école  moderne,  l'a  décoré  de  l'ordre  du 
Lion  Belgique.  Il  est  a  remarquer  qu'aux  deux  derniè- 
res expositions  qui  ont  eu  lieu  a  Gand ,  S.  M.  a  déféré 
cet  honneur  a  des  artistes  qui  s'y  étaient  distingués. 

C'est  pour  l'exposition  de  ces  portraits  que  M.  Kinson 
a  reçu  de  l'académie,  la  médaille  qui  lui  a  été  remise 
dans  la  séance  solennelle  et  publique  du  11  Août  der- 
nier. 

La  clôture  du  salon  de  Gand  a  eu  lieu  le  4  Septem- 
bre ;  la  plupart  des  artistes  y  ont  trouvé  l'occasion 
de  placer  avantageusement  leurs  ouvrages;  quarante- 
trois  morceaux  ont  été  acquis  par  la  commission  pour 
l'encouragement  des  arts.  Les  succès  qu'obtiennent  les 


(  2*1    ) 

artistes  qui  exposent  a  Gand,  font  espérer  que  les  Bel- 
ges e'tablis  hors  du  Royaume  s'empresseront  de  re'pon- 
dre  aux  vœux  de  la  mère-patrie,  en  envoyant  quel- 
ques-unes de  leurs  productions  au  salon  de  1826;  déjà 
plusieurs  ont  promis  de  l'enrichir;  de  ce  nombre  sont 
MM.  Corneille  van  Spaendonck,  Van  Dael,  Redouté 
et  Van  Os,  a  Paris,  et  nous  ne  doutons  pas  que  les 
artistes  qui  jouissent  a  Rome  d'une  juste  renommée, 
MM.  Verstappen ,  Henri  Voogd,  Pitloo,  Kruseman  , 
Teerlinck  et  le  statuaire  Kessels ,  ainsi  que  M.  Tilman 
a  Coppenhague ,  ne  se  fassent  un  devoir  de  suivre 
l'exemple  de  leurs  compatriotes  résidant  en  France. 


BULLETIN 
DES  ACADÉMIES  ET  SOCIÉTÉS  SAVANTES. 


SOCIETE   HOLLANDAISE   DES   SCIENCES   A  HARLEM. 

Suite ,  voyez  page  208. 

J-JA  Société  a  proposé ,  les  années  précédentes ,  les 
dix-neuf  questions  suivantes,  dans  les  sciences  physi~ 
dues,  pour  qu'on  y  fasse  réponse  avant  le  1  Janvier  1824. 

I.  »  Jusqu'à  quel  point  la  physiologie  du  corps  hu- 
»  main  donne-t-elle  suffisamment  des  preuves,  que  le 
»  gaz  oxygène  est  un  des  remèdes  les  plus  efficaces  pour 
»  secourir  les  noyés  et  les  suffoqués  ou  asphyxiés  5  et 
»  quels  sont  les  moyens  les  plus  convenables  pour  l'em- 
»  ployer  a  cet  effet  de  la  manière  la  plus  prompte  et  la 
»  plus  sûre?" 

II.  Comme  la  nouvelle  manière  de  distiller,  prati- 
quée depuis  quelques  années,  premièrement  à  Mont- 


(    228    ) 

pellier,  améliorée  ensuite  dans  la  France  méridionale, 
et  d'après  laquelle  les  liqueurs  spiritueuses  ne  sont  pas 
immédiatement  exposées  au  feu,  mais  sont  échauffées 
par  la  vapeur  de  l'eau  bouillante,  n'est  pas  seulement 
plus  économique  que  la  manière  ordinaire,  mais  qu'elle 
a  de  plus  l'avantage  que  ces  liqueurs  sont  d'un  goût 
plus  pur  et  plus  agréable,  et  qu'il  est  par  conséquent 
a  désirer,  que  cette  manière  puisse  être  introduite  dans 
nos  fabriques ,  la  société  demande  :  »  Quel  serait  le 
»  meilleur  appareil  a  adopter  dans  nos  distilleries  pour 
»  tirer  du  grain ,  d'après  cette  méthode  et  avec  le  plus 
»  de  profit,  les  liqueurs  spiritueuses  les  plus  pures, 
»  comme  on  les  tire  du  vin  en  France?  " 

III.  »  Est-il  vrai,  comme  plusieurs  le  soutiennent, 
»  que  le  fer  indigène  n'a  pas  la  bonté  de  celui  de  la 
»  Suède  ou  de  quelqu'autre  pays,  employé  dans  nos 
»  contrées;  que  même  on  ne  pourrait  pas  s'en  servir 
»  dans  plusieurs  cas  où  l'on  a  maintenant  la  coutume 
»  de  faire  usage  de  ce  fer  étranger?  Au  cas  que  ceci 
»  soit  affirmé,  a  quelles  causes  faut-il  attribuer  ce  dé- 
»  faut?  faut-il  le  chercher  dans  la  qualité  du  fer  indi- 
»  gène  ou  dans  la  manière  de  le  préparer?  Supposé 
»  que  ce  dernier  cas  ait  lieu,  notre  fer  peut-il  être 
»  porté  a  un  degré  de  perfection  auquel,  sous  tous  les 
»  rapports,  il  égale  en  bonté  le  meilleur  fer  étranger, 
»  et  quelle  est  la  manière  de  le  mettre  en  oeuvre  pour 
»  parvenir  a  ce  but?  " 

IV.  »  Jusqu'à  quel  point  connaît-on  l'économie  des 
»  taupes ,  et  quels  moyens  peuvent  en  être  déduits , 
»  comme  les  plus  propres  a  en  délivrer  les  terres  où 
»  elles  sont  nuisibles?  N'y  a-t-ilpas,  au  contraire,  des 
»  observations  qui  établissent  que  les  taupes,  en  détrui- 
»  sant  ou  diminuant  quelque  vermine  plus  ou  moins 


(    229    ) 

»  nuisible,  sont  utiles  dans  quelque  cas,  et  qui  indi- 
»  quent  en  même  tems  ceux,  où  l'on  doit  éviter  de 
»  détruire  les  taupes  ?  " 

V.  »  Jusqu'à  quel  point  est-il  actuellement  démontré 
»  que  les  fumigations  au  moyen  du  gaz  muriatique  oxy- 
»  gêné  (chlorine),  a  la  manière  de  Guyton,  ont  servi  a 
»  prévenir  la  propagation  des  maladies  contagieuses? 
»  Quelles  sont  les  maladies  contagieuses,  dans  lesquelles 
»  l'effet  de  ce  gaz  mérite  d'être  essayé?  Qu'est-ce  qu'on 
»  doit  principalement  observer  dans  ces  expériences? 
»  Quelles  précautions  pourrait-on  prendre  et  quelles 
»  règles  pourrait-on  établir  pour  introduire  ces  fumi- 
«  gâtions,  plus  généralement  et  plus  convenablement, 
»  dans  les  maisons  où  commencent  des  maladies  con- 
»  tagieuses  dont  il  est  prouvé  ou  très-vraisemblable 
»  que  la  propagation  pourra  être  prévenue,  pourvu 
»  que  ces  fumigations  aient  lieu  a  tems,  qu'elles  soient 
»  faites  sans  délai  et  de  la  meilleure  manière  ?" 

On  désire  qu'en  répondant  a  cette  question ,  il  soit 
donné  une  énumération  succincte  des  cas  dans  lesquels 
ces  fumigations  ont  efficacement  servi  a  empêclier  dif- 
férentes maladies  contagieuses. 

VI.  »  Que  peut-on  regarder  comme  bien  prouvé  a 
»  l'égard  du  suc  gastrique  du  corps  humain,  et  de  son 
»  influence  sur  la  digestion  des  alimens?  son  existence 
)>  est-elle  suffisamment  prouvée  par  les  expériences  de 
»  Spallanzani  et  de  Senebier,  ou  est-elle  devenue  dou- 
»  teuse  par  les  expériences  de  Montègre  ?  qu'est  ce  que 
»  l'anatomie  comparative  et  principalement  l'ouverture 
»  de  l'estomac  d'animaux  tués,  soit  a  jeun  soit  peu  de 
»  tems  après  qu'ils  ont  pris  de  la  nourriture,  ont 
»  démontré  ou  rendu  vraisemblable  a  cet  égard?  et  au 
»  cas  qu'on  puisse  regarder  l'existence  du  suc  gastrique 


(    250    ) 

»  dans  le  corps  humain  comme  bien  prouvée,  qu'est 
»  ce  qu'on  doit  éviter  alors,  pour  ne  pas  en  affaiblir 
»  l'effet  dans  la  digestion  ?  " 

VII.  »  Quelle  est  la  cause  pour  laquelle,  de  tems  en 
»  tems,  et  particulièrement  dans  l'année  1819,  les  huî- 
»  très  de  quelques  endroits  sont  devenues  nuisibles  a  la 
»  santé  $  ceci  est-il  occasionné  par  quelque  petit  ver 
»  qui  se  trouve  dans  l'huître?  Si  cela  est,  de  quelle 
»  espèce  est  celui-ci ,  et  où  peut-on  le  mieux  l'observer 
»  dans  l'huître?  Les  huîtres  ne  sont-elles  sujettes  a  ceci 
»  que  dans  quelques  tems  de  l'année,  et  y  a-t-il  des 
»  circonstances  qui  produisent  cet  inconvénient?  Le 
»  venin  des  huîtres  a  t-il  quelque  analogie  avec  celui 
»  qui  rend,  de  tems  en  tems,  les  moules  venimeuses 
»  ou  nuisibles  a  la  santé ,  et  quels  sont  les  caractères 
»  distinctifs  de  ces  deux  espèces  de  venin?  Quelles  sont 
»  les  indispositions  occasionnées  par  l'usage  de  ces 
»  huîtres  ou  moules  venimeuses,  et  quels  sont  les  re- 
»  mèdes  les  plus  propres  a  arrêter*  dans  l'origine  les 
»  progrès  du  mal,  ou  à  le  guérir?" 

VIII.  »  A  quoi  doit-on  attribuer  la  propriété,  que  les 
»  chevrettes  ont  quelquefois  d'être  pernicieuses  a  la 
»  santé?  A  quoi  distingue-t-on  les  chevrettes  venimeu- 
»  ses?  De  quel  genre  sont  les  indispositions  que  l'usage 
»  de  ces  chevrettes  fait  naître ,  et  quels  sont  les  remèdes 
»  propres  a  en  arrêter  les  progrès  ou  a  les  guérir?" 

IX.  »  Comme  on  chauffe  actuellement  en  Angleterre 
»  les  grandes  serres,  d'une  manière  fort  utile  a  la  cul- 
»  ture  des  plantes,  au  moyen  de  la  vapeur  d'eau  bouil- 
»  lante  dirigée  par  des  tuyaux,  au  lieu  de  se  servir  de 
)>  poêles,  ceci  pourrait-il  être  imité  avantageusement 
»  chez  nous,  dans  des  serres  moins  étendues,  et  quels 
»  sciaient  l'appareil  et  la  construction  les  plus  conve- 
»  nablcs?" 


(    301    ) 

On  désire  qu'on  réponde  a  cette  question  ,  non  seu- 
lement théoriquement,  mais  d'une  manière  fondée  sur 
des  expériences,  en  indiquant  l'appareil  et  la  construc- 
tion, trouvés  les  plus  convenables  pendant  tout  l'hiver; 
quel  est  le  degré  de  chaleur  qu'on  a  entretenu  et  réglé, 
et  quelle  a  été  l'influence  de  ce  genre  de  chauffage  sur 
les  plantes. 

X.  »  Quelle  est  la  connaissance  acquise  concernant  la 
»  nature,  l'économie  et  la  génération  de  ces  petits  insec- 
»  tes  qui  font  le  plus  de  mal  aux  arbres  et  aux  plantes 
»  que  l'on  cultive  dans  les  serres  chaudes,  et  quels 
»  moyens  peut-on  déduire  de  cette  connaissance,  pour 
»  prévenir  ou  pour  diminuer,  autant  que  ceci  est  pra- 
»  ticable,  la  propagation  de  ces  insectes  et  pour  en  dé- 
»  livrerait  plutôt  les  plantes  qui  en  sont  infectées?  " 

XI.  «L'expérience  a-t-elle  suffisamment  démontré, 
»  qu'il  y  a  des  espèces  d'arbres  ou  de  plantes,  sur-tout 
»  de  celles  qui  sont  des  plus  utiles,  qui  ne  peuvent  pas 
»  bien  végéter  lorsqu'elles  se  trouvent  les  unes  près 
»  des  autres?  Et,  en  ce  cas-la,  quelles  sont  les  expé- 
»  riences  qu'on  pourrait  en  citer?  Cette  antipathie 
»  entre  quelques  espèces  peut-elle,  en  quelque  ma- 
»  nière,  être  expliquée  par  ce  qu'on  connaît  de  la  na- 
»  ture  de  ces  plantes?  Quelles  instructions  utiles  peu- 
»  vent  être  tirées  de  ceci ,  pour  la  culture  des  arbres 
»  et  des  plantes  utiles." 

XII.  »  Quels  sont  les  insectes  les  plus  nuisibles  aux 
»  arbres  et  arbrisseaux  dans  les  forêts?  En  quoi  con- 
»  sistent  les  dommages  et  les  maux  qu'ils  font  éprou- 
»  ver  a  ces  végétaux.  Quels  sont  les  remèdes  tirés  de  la 
»  connaissance  de  l'économie  ou  du  genre  de  vie  de  ces 
»  insectes,  qui  sont  fondés  en  même  tems  sur  l'expé- 
»  rience,  et  qui  sont  propres  a  prévenir  le  dommage 
»  que  ces  insectes  font  aux  arbres ,  ou  à  les  en  délivrer?  " 


(    232    ) 

XIII.  »  Jusqu'à  quel  degré  peut-on  démontrer,  par 
»  la  nature  des  sols  et  des  différentes  couches  qui  se 
)>  Succèdent,  et  que  l'on  a  observés  spécialement  dans  nos 
»  provinces  septentrionales,  que  plusieurs  provinces 
»  ou  quelques  parties  de  celles-ci,  se  soient  formées  par 
»  des  alluvions,  et  quelles  sont  les  preuves  que  l'on 
»  trouve,  dans  la  nature  différente  de  ces  couches  et 
»  dans  ce  qui  y  a  été  découvert,  que  ces  couches  ayent 
»  pris  naissance  a  des  époques  fort  différentes  ?  " 

On  désire  voir  les  principales  observations  sur  ce 
sujet  rassemblées  avec  exactitude. 

XIV.  »  Quelle  est  l'idée,  la  plus  fondée  sur  des  ob- 
»  servations,  qu'on  puisse  se  faire  quant  a  la  formation 
»  des  dunes  sur  les  côtes  maritimes  de  ce  royaume ,  et 
»  quelles  observations  peut-on  alléguer  sur  les  change- 
»  ments  qu'ont  subis  ces  dunes  qui  servent  de  digues 
»  contre  la  mer  ?  " 

XV.  La  Société  désirant  voir  que  la  Fauna  Belgica, 
dont  elle  a  couronné,  l'année  précédente,  les  premiers 
commencements,  qui  contiennent  une  nomenclature 
de  mammifères,  d'oiseaux  et  d'amphibies,  soit  com- 
plétée pour  celle  des  autres  classes  d'animaux ,  propose  : 
»  Qu'on  fasse  une  nomenclature  exacte  des  poissons  et 
»  des  insectes  indigènes  de  ces  pays,  et  non  de  ceux 
•»  qui  sont  venus  de  quelques  autres  contrées ,  ou  de 
»  ceux  qui  habitent  la  mer,  a  peu  de  distance  de  nos 
)>  côtes,  et  qu'on  y  ajoute  leurs  dénominations  différen- 
»  tes ,  dans  diverses  contrées  des  Pays-Bas ,  et  les  ca- 
»  ractères  génériques  et  spécifiques ,  autant  que  possible, 
»  selon  le  système  de  Linné ,  en  citant  toutefois  les  sys- 
>>  têmes  plus  récents." 

On  désire  qu'on  réponde  d'une  manière  concise,  et 
qu'on  indique  une  ou  plusieurs  des  meilleures  figures 
ou  représentations  de  chaque  animal. 


(  233  ) 

La  Société  offre  a  celui  qui  aura  répondu  d'une  ma- 
nière satisfaisante  à  cette  question,  sa  médaille  ordi- 
naire et  une  gratification  de  i5o  florins;  elle  accordera 
a  une  réponse  satisfaisante  sur  les  poissons  unique- 
ment, la  médaille  ordinaire  sans  récompense  pécu- 
niaire ;  et  si  celui  qui  répondra  a  cette  question 
pouvait  y  ajouter  encore  une  nomenclature  exacte  des 
animaux  des  Pays-Bas,  appartenant  a  la  sixième  et  der- 
nière classe  de  Linné,  et  que  ce  supplément  remportât 
les  suffrages,  on  lui  accordera  une  seconde  gratification 
de  i5o  florins. 

On  désirerait  que,  eu  égard  a  la  forme,  cette  conti- 
nuation de  la  Fauna  Belgica  fût  conforme  au  commen- 
cement rappelle ,  qui  a  remporté  le  prix  et  qui  est  publié 
dans  le  volume  XI.  des  mémoires  physiques  de  la  société. 

»  La  Société  promet  en  outre  des  prix  a  ceux  qui 
»  fourniront  des  observations  intéressantes  sur  les  ani- 
»  maux  des  Pays-Bas ,  qui  ne  sont  pas  nommés  dans 
»  le  mémoire  couronné.  Les  récompenses  seront  pro- 
»  portionnées  au  degré  d'importance.  Quant  aux 
»  observations  moins  intéressantes,  relatives  a  la  Fauna 
»  JBelgica,  il  en  sera  fait  mention  honorable/' 

XVI.  Vu  que,  depuis  quelques  années,  on  croit  avoir 
découvert  plusieurs  principes  constituans  dans  quelques 
végétaux  ou  productions  du  règne  végétal,  on  demande: 
»  Qu'est-ce  que  les  expériences  réitérées  ont  fait  voir 
»  incontestablement  a  cet  égard?  Comment  se  procure- 
»  t-on  ces  principes  constituants  et  propres  a  ces  pro- 
»  ductions,dela  manière  la  plus  sûre  et  la  plus  simple, 
»  et,  en  tant  qu'on  les  a  découvertes  dans  les  médica- 
»  ments  actuellement  usités,  quelle  est  l'utilité  qui  a 
»  résulté  de  ces  découvertes,  pour  l'art  de  guérir,  et 
»  quels  avantages  peut-on  encore  en  attendre  par  la 
»  suite?" 


(  234  ) 

XVII.  »  Quels  sont  les  progrès  qu'on  a  faits  dans  la 
»  connaissance  de  la  fermentation  par  laquelle  on  pro- 
»  duit  l'acide  végétal?  Peut-on  expliquer  par-la  les 
»  difïe'rents  procédés,  usités,  pour  obtenir  les  diver- 
»  ses  sortes  de  vinaigre,  y  compris  la  nouvelle  ma- 
»  nière  d'opérer,  pratiquée  primitivement  en  Alle- 
»  magne  dans  la  fabrication  du  vinaigre,  par  laquelle, 
»  en  l'atténuant  au  moyen  d'une  égale  quantité  d'eau , 
»  et  en  y  ajoutant  quelque  matière ,  on  obtient  de  nou- 
»  veau  une  double  quantité  de  vinaigre  de  la  même 
»  force?  Quels  sont  les  préceptes  utiles  qu'on  peut  dé- 
»  duire  de  ce  qu'on  en  connaît,  pour  l'amélioration 
»  des  vinaigreries  qui  existent  chez  nous?" 

XVIII.  Comme  l'ascension  de  l'air  échauffé  dans  les 
cheminées,  par  laquelle  la  fumée  est  emportée,  dépend 
d'une  cause  physique  bien  connue,  et  qu'il  parait  qu'on 
en  pourrait  déduire  de  quelle  manière  les  cheminées 
doivent  être  construites,  afin  que  toute  la  fumée  du  feu 
fût  emportée  par  l'air  qui  s'élève,  on  demande:  »  une 
»  théorie  claire,  déduite  de  principes  physiques  et  con- 
»  firmée  par  des  expériences  sur  la  manière  dont  il 
»  conviendrait  que,  dans  tous  les  cas,  les  cheminées 
»  fussent  construites,  et  sur  ce  qu'il  y  aurait  encore  a 
»  observer  pour  qu'on  soit  entièrement  délivré  de  la 
»  fumée?" 

On  désire  que  la  théorie  qu'on  exposera,  soit  autant 
que  possible  fondée  sur  des  expériences  bien  confirmées, 
et  qu'on  en  ait  aussi  fait  dériver  quels  sont  les  moyens 
les  plus  sûrs  et  les  plus  simples  pour  remédier  aux 
défauts  des  cheminées  qui  projettent  la  fumée  dans 
les  appartemens. 

XIX.  Comme  il  est  de  la  plus  haute  importance  pour 
les  progrès  des  sciences  physiques,  que,  dans  chaque 


(  235  ) 

branche,  on  distingue  bien  ce  que  l'expérience  a  fait 
connaître  avec  une  certitude  absolue ,  de  ce  que  l'on 
suppose  avec  plus  ou  moins  de  vraisemblance,  la  société 
demande  :  »  i°  une  énumération  concise  de  tous  les  phé- 
»  nomènes,  bien  connus,  produits  par  là  forcé  magné- 
»  tique?  2°  Un  re'sume'  pre'cis  et  qui  fasse  voir  évi- 
»  demment  ,  quels  phénomènes  magnétiques  peuvent 
»  être  expliquc's  d'une  manière  bien  fonde'e,  et  quelles 
»  hypothèses  imaginées,  pour  l'explication  des  phéno- 
»  mènes  magnétiques,  sont  encore  trop  peu  fondées 
»  pour  qu'on  puisse  s'y  fier.  5°  Les  expériences  électro- 
»  magnétiques  d'Oersted ,  <¥  Ampère  et  autres ,  qui  les 
»  ont  réitérées  et  étendues,  ont-elles  déterminé  avec 
»  certitude  quelque  chose  a  ce  sujet  ;  ou  y  a-t-il  des 
»  raisons  pour  considérer  les  théories ,  avancées  sur 
»  ces  dernières  expériences,  comme  douteuses  encore-, 
»  ou  comme  fondées  ?  " 

SCIENCES    PHILOSOPHIQUES    ET    MOP^ALES. 

La  Société  a  proposé,  les  années  passées,  les  deux 
questions  suivantes  pour  qu'on  y  réponde  avant  le 
î  Janvier  1824. 

I.  *  De  quelle  influence  sont  les  villes ,  principalement 
»  les  grandes,  sur  les  mœurs,  la  culture  et  la  prospé- 
»  rite  d'un  état?  En  quoi  et  a  quel  point  sont-elles  per- 
»  nicieuses?  La  où  elles  existent,  est-il  a  propos  ou 
»  non  de  les  conserver  ou  de  les  agrandir,  et  la  où  il 
w  n'y  a  point  encore  de  villes,  doit-on  en  conseiller  ou 
»  non  la  fondation,  ou  prendre  les  mesures  propres  a 
w  en  encourager  la  construction?  Qu'y  a-t-il  a  faire  pour 
*  favoriser  ce  qu'elles  ont  d'utile  et  de  bon,  et  pour 
»  détruire  ou  prévenir  ce  qu'elles  ont  de  pernicieux?" 

La  société  désire,  qu'on  ne  cite  d'autres  faits  histori- 


(  236  ) 

qnes  des  teins  antérieurs,  que  ceux  qui  seront  néces- 
saires pour  prêter  a  la  solution  de  la  question  l'an  tonte 
et  la  clarté  requises.  11  n'en  est  pas  de  même  des  exem- 
ples de  l'influence,  que,  dans  des  teins  postérieurs,  les 
villes  ont  exercée  et  exercent  encore  sur  le  sort  des 
états,  sur  les  mœurs  et  la  prospérité,  et  enfin  sur  l'in- 
dustrie et  les  richesses  ;  exemples  propres  a  traiter  plu- 
tôt la  question  au  moyen  de  faits,  qu'a  y  répondre  uni- 
quement d'une  manière  spéculative. 

IL    »  Les  autorités  publiques   constituées    sont-elles 
»  dans  l'obligation  d'avoir  soin  que  les  travaux ,  infligés 
»  aux  détenus ,  dans  les  maisons  de  correction  ou  dans 
»  les  prisons,  ne  puissent  nuire  ou  porter  préjudice  a 
»  ceux  d'entre  les  habitants  qui,   soit   entièrement  ou 
»  en  partie,  trouvent  leur  existence  ou  leur  entretien 
n  dans  des  occupations  d'un  genre  analogue?   En  cas 
»  d'affirmation,  quels  sont  les  principes  politiques  ou 
n  moraux  sur  lesquels  se  fonde  cette  obligation  des  au- 
«  torités  publiques?   est-elle  illimitée,    ou  quelles    en 
»  sont  les  bornes?  Et  quels  seraient  les  travaux  les  moins 
»  nuisibles  aux  fabricans,  artisans,  gens  de  profession , 
n  ou  habitans,  exerçant  quelque  métier,  qu'on  pourrait 
n  introduire  avec  le  plus  d'avantage  et  le  plus  convena- 
n  blement  dans  les  maisons  de  force  ou  dans  les  prisons?' 
On  désirerait   que    ies   réponses   sur  cette   question 
fussent  disposées  de  manière  a  ce  qu'elles  n'offrissent 
pas  uniquement  des  théories  ou  des  spéculations,  mais 
qu'elles  fournissent  des  résultats  qui  puissent  être  mis 
en  pratique,  dans  un  pays  où  V ohli gation  de  travailler, 
et  de  se  procurer  par  la  l'entretien,  est  directement  liée 
a  la  punition  de  détention. 

SCIENCES    LITTÉRAIRES   ET    ANTIQUITÉS. 
La  Société   a  proposé,  les   années  précédentes,    les 


(  a37  ) 
deux  questions  suivantes,  pour  qu'il  y  soit  répondu 
avant  le  1  Janvier  1824. 

I.    Comme  les  anciens  peuples,  tels  que  les  Phéni- 
ciens, les  Grecs  et  les  Romains,  envovaient  dans  des 
contrées,  peu  ou  point  habitées,  des  colonies,  qui  con- 
servaient leurs  relations  avec  la  métropole  et  concou- 
raient a  sa  prospérité ,  on  demande  :  »  i°  Que  sait-on 
»  du  système  politique  de  ces  peuples,  en  conséquence 
»  duquel  ils  faisaient  ces  colonisations  ;   de  quelle  nia- 
»  nière  les  ont-ils  établies  et  quels  étaient  les  avantages 
"  qui  en  sont  résultés  pour  eux?  "    »  20  Les  exemples, 
»  qu'ils  ont    donnés    a   cet  égard,  pourraient-ils  être 
»  suivis  dans  la  situation  actuelle  des  choses ,  par  les 
»  états  de  l'Europe  dont  la  population  pourrait  actuel- 
»  lement  paraître  trop  nombreuse  en  raison  des  moyens 
»  de  subsistance?  Y  a-t-il  (ce  qui  doit  nécessairement 
»  et  avant  tout  être  bien  examiné)  en  effet  des  contrées 
«  connues,  mais  moins  peuplées,  qu'on  pourrait  encore 
»  de  nos  jours  acquérir  et  conserver  avec  sécurité ,  et 
"  qui,  soit  par  la  fertilité  du  sol  ou  par  leurs  produits, 
n  soit  d'une  manière   quelconque  ,   puissent  suffire  a 
t  l'entretien  des  colonies?  En  cas  d3une  réponse  affir- 
»  raative,  qu'est-ce  que  les  relations  sur  lesquelles  on 
n-  peut  se  fier  avec  pleine  confiance ,  ont  appris  a  cet 
*  égard?   Et  si,  en  effet,   il   était  possible,   encore  à 
»  présent,  d'acquérir  des  contrées  tout  a  fait  convena- 
it blés  a  ces  colonisations,  quels  seraient  les  meilleurs 
»  moyens  pour  atteindre  le  but   qu'on   se   serait  pro- 
»  posé,  et  pour  les  rendre  utiles  a  la  classe  du  peuple, 
»  laquelle,  faute  de  travail,  ne  pourrait  pas  fournir  a 
»  sa  subsistance  ?  " 

MM.  Les  Directeurs  de  la  Société  ont  résolu  d'offrir 
une   double    médaille  d'or  a  l'auteur  qui,   d'après  la 


(  258  ) 

décision  de  la  société ,  aura  résolu  la  question  dans 
toute  son  étendue,  et  la  médaille  d'or  ordinaire  a  celui 
qui  en  aurait  résolu  une  des  deux  parties. 

II.  »  Quels  ont  été  les  événemens  ou  circonstances 
m  qui,  dans  les  siècles  du  moyen  âge  ou  postérieurs, 
»  ont  contribué  a  ce  que  plusieurs  arbres  et  autres 
*  plantes  utiles  ont  été  transportés  d'autres  parties  du 
n  monde  en  Europe,  et  y  sont  cultivés?" 

La  suite  au  cahier  prochain. 


ACADEMIE    ROYALE    DE    BRUXELLE3. 


Suite,  voyez  page  i64. 

J-j  Académie  propose  pour  le  concours   de  182e,  les 
questions  suivantes  : 

CLASSE   DES    SCIENCES. 

Ire.  On  sait  que  les  lignes  spiriques  ou  sections  an- 
nulaires sont  les  courbes  formées  par  l'intersection  d'un 
plan  avec  la  surface  du  solide*  engendrée  par  la  cir- 
convolution d'un  cercle  autour  d'un  axe  donné  de  po- 
sition. On  demande  l'équation  générale  de  ces  courbes 
et  une  discussion  complète  de  cette  équation. 

PHYSICO-MATHÉMATIQUE. 

II"ie.  Un  fil  flexible  et  uniformément  pesant ,  étant 
suspendu  par  l'une  de  ses  extrémités  à  un  point  fixe ,  et 
soulevé  par  son  autre  extrémité  à  une  hauteur  et  une 
distance  quelconque,  si  l'on  vient  à  lâcher  cette  se- 
conde extrémité 3  et  à  abandonner  ainsi  ce  fil  à  l'action 
libre  de  la  pesanteur,  on  demande  les  circonstances  de 
son  mouvement  dans  V espace  supposé  vide. 


(>59) 

IIImc.  Décrire  la  constitution  géologique  de  la  pro- 
vince de  Namur,  les  espèces  minérales  et  les  fissiles 
accidentels  que  les  divers  terrains  renferment  y  avec 
V indication  des  localités  et  la  synonymie  d^s  auteurs 
qui  en  ont  déjà  traité. 

lVmo.  Quel  a  été  l'état  de  la  côte  maritime  d'Anvers 
à  Boulogne,  depuis  la  conquête  de  César  jusqu'à  nos 
jours  ?  Indiquer  les  grandes  inondations  de  la  mer  que 
cette  côte  a  éprouvées  pendant  cette  période,  et  déter- 
miner les  parties  que  la  mer  a  englouties ,  sans  avoir 
été  jusqu'ici  reconquises. 

Vme.  Quels  sont  les  genres  et  les  degrés  de  fermenta- 
tion que  subissent  successivement  les  différentes  espèces 
de  fumier  animal?  Quels  sont  les  procédés  pour  retar- 
der ou  accélérer  ces  fermentations?  Par  quels  carac- 
tères peut-on  les  distinguer?  Quelles  sont  les  époques 
de  fermentation  où  ces  différentes  espèces  de  fumier 
peuvent  être  employées  avec  le  plus  d'avantage  comme 
engrais,  eu  égard  à  la  nature  des  divers  terrains? 

VIme.  Les  observations  modernes  ayant  fait  voir  que 
les  combinaisons  entre  corps  gazeux  et  corps  gazifiables 
par  le  feu  ou  par  des  engagemens  5  se  font  en  des  rap- 
ports très-simples  de  'volumes,  et  qu'après  la  combi- 
naison, la  même  simplicité  de  rapports  est  maintenue 
entre  les  volumes  des  gaz  résultans  et  ceux  de  leurs 
composans ,  l'Académie  demande  qu'on  détermine  d'après 
l'expérience  les  volumes  proportionnels  des  divers  corps 
gazeux  et  des  gazifiables  par  les  moyens  mentionnés. 
On  vérifiera  l'accord  des  volumes  avec  les  poids  spé- 
cifiques indiqués  par  la  molécule  représentative  pesée , 
et  l'on  spécifiera  la  température  et  la  pression  aux- 
quelles les  mesures  auront  été  prises.  L'Académie  désire 
que  le  tableau  synoptique  des  résultats  soit  joint  à  la 
réponse. 


(  *4o) 

Vllme.  Les  racines  développées  en  fraction  continue 
doivent  avoir  pour  chaque  degré  un  caractère  particulier. 

Dansle  premier  degré,  la  fraction  continue  se  termine. 

Dans  le  second,  elle  se  présente  sous  forme  périodique. 

A  quel  caractère  reconnaîtra-t-on  qu'une  fraction 
continue  proposée  est  racine  d'une  équation  d'un  degré 
supérieur  donné  '.' 

Est-il  possible  d'asngnerle  cairé,  le  cube,  etc.  d'une 
fraction  continue  en  fraction  continue? 

VIIImc.  Les  grandes  découvertes  faites  depuis  un  cer- 
tain nombre  d'années  ayant  considérablement  augmente 
le  domaine  du  botaniste ,  l'Académie  demande  que  l'on 
établisse  ou  que  l'on  réfute  par  un  examen  critique , 
d'après  les  lois  données  par  Linné,  les  genres  et  espèces 
introduits  en  botanique ,  depuis  la  mort  de  ce  grand 
homme,  et  que  l'on  détermine  d'après  les  mêmes  lois  la 
'valeur  des  dénominations  qili  ont  été  imposées  à  ces 
genres  et  à  ces  espèces. 

L'Académie  n'exige  point  qu'il  soit  fait  une  revue 
minutieuse  de  tout  ce  qui  a  été  écrit  sur  cette  matière, 
mais  seulement  des  changemens  et  additions  opérés  par 
les  écrivains  les  plus  marquans  des  différens  pays.  Les 
titres  et  éditions  des  ouvrages  rapportés  doivent  être 
cités  avec  soin  et  exactitude. 

ÎX*"5.  Déterminer  les  changemens  que  peut  occasion- 
ner le  déboisement  de  forets  considérables  sur  les  con- 
trées et  les  communes  adjacentes ,  relativement  à  la 
température  et  à  la  salubrité  de  l'air,  à  la  direction  et 
à  la  violence  des  vents  domiuans ,  à  l'abondance  et  à 
la  localité  des  pluies  ,  d'où  dérivent  les  sources  et  les 
eaux  courantes,  et  en  général  à  tout  ce  qui  constitue 
snn  état  physique  actuel. 

L'Académie  exige  qu'on  considère  la  forêt  et  la  con- 


C  *4«  ) 

tfée  adjacente  en  question  dans  leurs  diverses  positions 
respectives,  relativement  tant  aux  vents  qui  y  régnent 
le  plus  fréquemment,  qu'a  ceux  qui  y  amènent  les 
pluies  les  plus  abondantes. 

L'académie  propose  pour  1825  les   deux   questions 
suivantes  : 

Ire.  Les  causes  du  mouvement  de  nutation  de  l'axe 
terrestre  sont-elles  parfaitement  connues  et  rigoureuse- 
ment démontrées  ?  A-t-on  des  raisons  d'observations  ou 
de  théorie  qui  puissent  faire  présumer  un  semblable 
mouvement  dans  les  autres  globes  du  système  planétaire? 
Existerait-il  un  moyen  de  renfermer  (  en  ce  cas  supposé) 
toutes  les  conséquences  et  les  lois  de  ces  mouvemens 
dans  une  même  formule  ou  dans  l'expression  analytique 
d'une  loi  commune  à  tous  les  corps  célestes  dépendans 
du  système  solaire?  ou  enfin  pourrait-on  conclure  de 
là,  ainsi  que  des  perturbations  des  corps  planétaires, 
quelque  chose  qui  ne  s'accordât  point  avec  la  théorie 
hypothétique  admise  par  Copernic  et  développée  par 
Newton  ? 

IIme.  La  cause  des  inclinaisons  et  des  déclinaisons 
très-variables  de  l'aiguille  aimantée  a  semblé  jusqu'à 
présent  se  dérober  aux  efforts  des  théories  les  plus  sub- 
tiles; mais  comme  on  a  cru  observer  dans  ses  irrégu- 
larités mêmes  l'existence  de  lois  très-régulières,  l'Aca- 
démie demande  : 

S'il  y  a  des  raisons  pour  supposer  Vexistence  d'un 
noyau  magnétique  dans  l'intérieur  du  globe  terrestre, 
ou  s'il  n'y  a  pas  des  moyens  de  réfuter  victorieuse-* 
ment  cette  hypothèse. 

DaDs  l'une  et  dans  l'autre  supposition ,  il  faudra  ex- 
pliquer toutes  les  observations  dont  on  pourra  constater 
la  certitude,  et  fournir  des  moyens  de  soumettre  a  une 

VIrao  livraison.  ij 


(    242    ) 

analyse  rigoureuse  les  élémens  hypothétiques  que  Ton 
jugera  eonvenable  d'employer. 

Relativement  a  ces  deux  questions,  l'Académie  n'a 
ni  le  droit  ni  la  volonté  d'exiger  ou  d'attendre  des  ob- 
servations ni  des  the'ories  nouvelles;  mais  comme  son 
but  n'est  ni  ne  peut  être  d'avoir  des  transcriptions  de 
ce  que  l'on  trouve  dans  tour  les  livres,  elle  ne  consi- 
dérera comme  ayant  .rempli  les  conditions  énoncées , 
que  les  ouvrages ,  qui,  par  une  concordance  rigoureuse 
de  faits  et  de  principes,  auront  rassemblé  autour  de 
leur  opinion  un  plus  grand  nombre  de  probabilité  qu'au- 
cun des  systèmes  déjà  connus  sur  ces  diverses  matières. 

Le  prix  de  chacune  de  ces  questions  sera  une  mé- 
daille d'or  du  poids  de  trente  ducats.  Les  mémoires, 
écrits  lisiblement  en  latin ,  français ,  hollandais  ou  fla- 
mand, seront  adressés,  franc  déport,  avant  le  ier  Février 
1824,  a  M.Dewez,  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie. 

L'Académie  exige  la  plus  grande  exactitude  dans  les 
citations  :  a  cet  effet  les  auteurs  auront  soin  d'indiquer 
les  éditions  et  les  pages  des  ouvrages  qu'ils  citeront. 
Ils  ne  mettront  point  leurs  noms  a  leurs  ouvrages,  mais 
seulement  une  devise,  qu'ils  répéteront  dans  un  billet 
cacheté  qui  renfermera  leur  nom  et  leur  adresse.  Ceux 
qui  se  feront  connaître  de  quelque  manière  que  ce  soit, 
ainsi  que  ceux  dont  les  mémoires  seront  remis  après 
le  terme  prescrit ,  seront  absolument  exclus  du  concours. 

L'Académie  croit  devoir  rappeler  aux  concurrens  que 
dès  que  les  mémoires  ont  été  soumis  a  son  jugement , 
les  auteurs  n'ont  plus  le  droit  de  les  reprendre  ,  et 
qu'ils  restent  déposés  dans  ses  archives,  comme  étant 
devenus  sa  propriété,  sauf  aux  intéressés  a  en  faire 
tirer  des  copies  frais,  s'ils  le  trouvent  convenir,  en 
s'adressant  a  cet  effet  au  secrétaire  perpétuel. 

DeweZj    secrétaire  perpétuel. 


(  245  ) 


SOCIÉTÉ  ROYALE  DES  BEAUX-ARTS  ET  DE  LITTERATURE 

DE   GAND. 


JDe  la  même  manière  que  l'institution  de  la  Société, 
en  1808,  devait  être  considérée  comme  un  lien  com- 
mun qui,  tendant  a  re'unir  d'estime  et  d'amitié  les 
Artistes  et  les  Amis  des  Beaux-Arts,  disséminés  dans 
toutes  les  villes  de  la  Belgique ,  et  les  rapprocher  par 
leurs  sentimens  comme  par  leur  talent ,  il  faut  regarder 
le  banquet  de  S1  Luc ,  qui  s'y  donne  annuellement,  comme 
une  réunion  où  l'expression  de  ses  sentimens  peut  se 
faire  entendre,  et  où  la  présence  des  premiers  Magis- 
trats de  la  province  «t  de  la  ville,  honore  ceux  qui 
cultivent  les  arts,  comme  dans  les  banquets  de  la  So- 
ciété Botanique,  elle  honore  la  culture  des  champs  et 
des  jardins. 

La  réunion  de  1825  a  offert  deux  circonstances  par- 
ticulières; la  présence  de  S.  E.  M.  /.  G.  Reinhold  , 
ministre  du  Roi  des  Pays-Bas  près  du  Saint-Siège  a  Rome, 
et  le  don  de  deux  médailles  d'or,  l'une  a  M.  Panuentier, 
de  Feluy  près  de  Nivelles,  sculpteur,  comme  une  ex- 
pression de  satisfaction  de  la  Société,  de  ce  qu'il  est 
venu  se  fixer  dans  sa  patrie  (1),  et  l'autre  au  jeune  Louis 
Ermcl,  de  Gand,  comme  un  noble  encouragement  du 
succès  qu'il  vient  d'obtenir  a  l'Institut  royal  de  France , 
où  il  a  obtenu  le  Grand-Prix  de  composition  musicale  (2). 

(1)  La  Baigneuse,  statue  de  marbre,  expose'e  au  salon,  est 
un  des  plus  beaux  ouvrages  de  M.  Parmentier. 

(2)  La  cantate,  mise  en  musique,  avait  pour  thème  Pyratne 


(  244  ) 

Le  banquet  a  réuni  environ  80  convives  j  après  que 
M.  le  Pre'sident  de  la  Société  eut  porté  les  toasts  au 
Roi  et  a  la  Famille  Royale,  et  successivement  a  S.  E. 
le  Ministre  de  l'Instruction  publique.,  et  aux  premiers 
Magistrats  ,  d'autres  toasts  a  M.  Reinhold,  au  jeune 
Ermel,  et  aux  Artistes  Belges,  a  Rome,  ont  été  nioti- 
vés  par  le  discours  d'un  des  membres,  qu'il  nous  a 
mis  a  portée  de  transcrire  dans  le  Messager: 

n  Messieurs,  a-t-il  dit,  après  que  le  toast  a  S.  M., 
protecteur  des  beaux-arts ,  eut  été  accueilli  : 

»  Dans  un  pays  où  le  Monarque  sent  que  les  pro- 
grès des  sciences  et  des  arts  contribuent  a  l'éclat  de  son 
règne  et  a  la  gloire  de  l'administration ,  il  doit  être  doux 
à  son  cœur  de'  proclamer ,  tous  les  ans ,  dans  le  dis- 
cours qui  émane  du  trône,  qu'il  est  satisfait  de  l'état 
florissant  de  l'instruction  et  de  celui  des  beaux-arts  (1). 

»  Il  est  naturel  encore  que,  sous  un  Prince  animé 
de  ces  principes,  les  premiers  Dignitaires,  les  Magis- 
trats qui  secondent  ses  grandes  vues  dans  toutes  les 
brandies ,  suivent  une  si  belle  impulsion  ;  —  je  m'ex- 
prime avec  inexactitude  :  ce  n'est  pas  parce  que  la 
confiance  du  Prince  les  élève  a  de  hautes  dignités 
qu'ils  suivent  cette  impulsion  ;  mais ,  ils  y  sont  élevés 
par  cette  raison  même  qu'a  d'autres  vertus ,  a  d'autres 

et  Thisbé  ;  quoiqu'elle  présente  im  monologue  de  Thisbê , 
M.  Campenhout,  en  la  chantant  dans  la  séance  qui  précéda  le 
banquet  a  pu  ,  par  la  fraîcheur  de  sa  voix  et  son  expression 
soutenue,  eu  faire  sentir  toutes  les  beautés;  l'ouvrage  a  paru  forte- 
ment pensé,  purement  écrit,   plein  d'harmonie  et  de  sentiment, 

(1)  »  Le  progrès  des  bonnes  études  dans  nos  Universités,  l'ex- 
»  tension  des  avantages  de  l'instruction  primaire,  et  l'état  flo- 
»  rissant  des  beaux-arts,  sont  évidens."  Discours  de  l'ouverture 
des  Chambres-^  le  20  Octobre  1823, 


(  245  ) 

mérites,  ils  joignent  l'amour  des  arts  et  des  sciences, 
et  sentent  combien  il  est  beau  de  les  honorer,  quand 
même  des  connaissances  plus  particulières  dans  cette 
branche,  leur  seraient  étrangères. 

»  C'est  sans  doute  avec  des  talens  administratifs,  et 
des  vues  plus  élevées  dans  d'autres  branches,  que  le 
personnage  éminent  que  nous  voyons  organiser  et  sur- 
veiller l'enseignement  public ,  cumule  le  désir  et  la 
volonté  de  reculer  le  domaine  des  arts ,  et  de  les  ra- 
mener ,  s'il  était  possible,  vers  ces  époques,  où  les 
Rubens  et  van  Dyck,  les  Rembrant  et  JSerckem,  les 
van  Kampen  et  Quellin,  les  Edelinch  et  Bolsweert,  assi- 
gnaient un  si  beau  rang  aux  deux  Belgiques,  —  épo- 
ques brillantes  et  heureuses  auxquelles,  dans  nos  Pro- 
vinces méridionales  sur-tout,  succéda  bientôt  un  long 
interrègne  que,  sous  les  auspices  de  l'auguste  Marie- 
Thérèse  ,  la  création  des  écoles  et  des  académies ,  fit  cesser. 

»  Sans  doute,  l'illustre  représentant  du  Roi  dans  la 
capitale  du  monde  chrétien,  met  toute  sa  sollicitude, 
a  remplir  les  devoirs  d'une  mission  bien  autrement 
importante  5  mais  n'est -il  pas  également  vrai  que, 
considéré  sous  un  autre  point  de  vue ,  il  est  encore 
celui  que  l'Ecole  Belgique  elle-même  se  fût  choisi 
pour  représenter  ses  plus  dignes  protecteurs  dans 
cette  même  ville ,  où  par  le  ministère  de  Pollion  et  de 
Mécène,  Auguste  répandit  ses  bienfaits;  où  Jules  II. 
reçut  Raphaël  des  mains  du  Bramante}  où  Léon  X. 
ceignit  le  triple  diadème,  et  en  était  digne,  non  pas 
peut-être  comme  père  des  Rois  et  maître  de  l'univers ,  (i) 
—  les  événemens  contemporains  ne  justifièrent  pas  cette 

I  |  ,1    I  ,  I  I. 

(i)  »  Accipe  thiaram  tribus  coronis  ornatara,  et  (ut?)  scias 
»  te  esse  patrem  priucipum  et  regum,  rectorem  orbis."  V.  Rela- 
tion officielle  de  l'intronisation  de  Léon  XII. 


(  *46) 
prétention  a  la  suprématie  religieuse;  —  mais  comme 
protecteur  des  arts ,  et  Médicis  ;  mais  comme  Pami  de 
Michel- Ange ,   trois   fois   grand  ,  en  sa  qualité  d'ar- 
chitecte ,  de  peintre  et  de  statuaire» 

»  Oui,  Messieurs,  la,  dans  cette  ville,  où  furent  le 
Capitole  et  le  palais  des  Césars ,  mais  où  le  Panthéon , 
encore  debout,  et  le  Colysée,  quoique  mutilé,  attestent 
la  puissance  de  l'architecture  ancienne ,  tandis  que 
l'époque  moderne  élève  et  embellit  de  tous  les  prestiges 
des  arts,  la  Basilique  de  Saint -Pierre  et  le  palais  du 
Vatican  ;  oui  ,  dans  cette  ville  impérissable ,  l'Ecole 
Belgique  trouve  un  protecteur  ;  les  artistes ,  tous  les 
hommes  de  mérite,  quelque  soit  le  genre  de  leur  talent, 
un  ami;  c'est  eux,  c'est  vous,  c'est  nous,  Messieurs, 
et  non  pas  lui  que  j'en  félicite  ;  j'hésite  presque  a  le 
remercier  ;  tant  je  suis  sûr ,  (  et  vous  partagez  ce  sen- 
timent avec  moi ,  )  qu'en  accueillant,  en  honorant,  en 
aimant  les  artistes,  il  éprouve  une  jouissance  non  moins 
douce  que  celle  qu'il  fait  éprouver  aux  autres.  Sa  pre- 
mière récompense  est  donc  dans  la  conscience  du  bien 
qu'il  fait  ;  la  seconde  dans  le  plaisir  qu'il  en  ressent  ; 
maïs  qu'il  en  reçoive  une  troisième,  dans  la  sincère 
expression  de  notre  reconnaissance. 

»  Parlons  ici  de  lui-même,  de  Rome  et  des  arts;  mais 
de  Rome  et  des  arts  avec  chaleur,  de  lui  avec  une 
extrême  réserve ,  et  sur-tout  évitons  les  formules  d'élo- 
ges, quand  le  mot  d'Horace, 

Omari  res  ipsa  negat ,  contenta  doceri, 
est  si  naturellement  appliqué  h  l'homme  et   a  la  cir- 
constance. 

»  Que  n'avons  nous  pu,  dans  cette  enceinte,  réunir 
tous  nos  Concit03rcns  Belges,  que  des  palmes  académi- 
ques, ou,  le  désir  de   s'instruire    et  de  voir  l'Italie, 


{Al  ) 

ont  envoyés  on  attirés  à  Rome;  que  n'ont-ils  tons  pn 
connaître  le  noble  accueil  qui  leur  y  était  réservé?  mais 
que  de  vicissitudes,  quels  événemens  n'a-t-il  pas  fallu, 
pour  renverser  ce  qui  était  établi ,  pour  consolider  ce 
qu'un  nouvel  ordre  de  choses  y  a  substitué  ! 

»  Nous  nous  en  souvenons.  Odevaere  et  Paellnck 
furent ,  un  jour ,  désignés  pour  représenter  sur  les 
murs  du  palais  Quirinal,  a  Rome,  des  sujets  allégori- 
ques qui,  sous  les  traits  de  Trajan  et  à."1  Auguste, 
devaient  faire  allusion  a  l'homme ,  dont  l'ambition , 
mal  combinée  avec  les  résistances  qu'elle  avait  a  crain- 
dre de  l'Europe  entière,  sans  en  excepter  la  France, 
a  causé  la  perte  (1),  —  a  l'homme  qui,  d'un  trait  de 
plume,  croyait  pouvoir  faire  de  Rome,  de  cette  Rome 
éternelle,  et  du  pays  où  fut  le  berceau  des  Médicis, 

(1)  M.  Odevaere  devait  peindre  le  triomphe  de  Trajan, ,M.  JPae-i 
linck ,  les  embellissemens  de  Rome  sous  Auguste  ;  c'était  toujours 
Lui  et  il  eut  été  difficile  de  s'y  méprendre;  Napoléon,  sans  doute,  a 
voulu  beaucoup  faire,  et  a  beaucoup  fait  pour  les  arts;  mais  il  était 
à  craindre  que  la  direction  donnée  à  la  peinture  historique,  par 
exemple,  n'eùtfinipar  la  resserrer  dausdes  limites  très-étroites;  déjà 
le  premier  Consul  avait  renversé  la  République  ;  et  comme  avec  elle , 
les  Aristide  etlesCaton  cessèrent  d'être  à  la  mode,  il  n'est  pas  sur- 
prenant que  le  Régulus  de  M.  van  Brèe  soit  resté  dans  son  atelier; 
je  doute  même  très-fort  si  le  Serment  du  jeu  de  paume,  quoique 
de  M.  David,  eût  fait  plus  de  fortune  anx  Tuileries  en  i8i3,  que 
son  Couronnement  n'eût  pu  en  faire  en  i8i5;  le  peintre  pouvait 
exploiter  ou  l'ancienne  histoire  de  France,  sous  condition  d'y  choi- 
sir des  sujets  qui  ne  pussent  déplaire  au  maître;  (et  les  artistes 
qui  avaient  de  l'esprit  et  de  l'instruction  y  savaient  très-bien 
trouver  des  allusions;)  ou  l'histoire  de  France  de  nos  jours,  et 
c'était  la  sienne  ;  de  là  ces  nombreuses  batailles,  peintes  et  gra- 
vées où,  sur  tous  les  plans,  il  est  le  premier  personnage,  entouré 
des  princes  Eugène  et  Murât ,  des  maréchaux  Ney  et  Oudinot , 
f  t  d'autres  portraits  inévitables ,  que  la  flatterie  ou  les  ordres  du 
maître,  groupaient  autour  de  lui  dans  toutes  les  directions;  eu 


(  *4«  ) 

deux  provinces  de  son  empire ,  avec  la  même  facilité 
que  César  et  ses  lieutenans  ,  ajoutaient  les  Gaules , 
alors  barbares ,  et  l'Hispanie ,  au  nombre  des  provinces 
Romaines;  mais  Odevaere  et  Paelhick  pouvaient -ils 
s'imaginer  a  cette  époque  que  peu  d'années  plus  tard , 
leur  pinceau  ,  devenu  national ,  représenterait  surtout 
des  sujets  nationaux,  et  qu'ils  seraient  nommés  pre- 
miers peintres  d'un  Roi  et  d'une  Reine,  légalement 
constitués  sur  un  fertile  et  beau  pays,  alors  simple 
province  d'un  grand  Empire,  et  qui  est  aujourd'hui 
indépendant,  représenté  par  des  mandataires  de  son 
choix,  et  gouverné  par  ses  propres  lois? 

»  Et  JDucq ,  quand  de  ses  gracieuses  productions  il 
embellissait  le  palais  du  beau-fils  de  Napoléon ,  et  Tilman 
Suys,  quandson  élégantcompasmesuraitlepalaisifcT^^imi 
a  Rome,  s'attendaient-ils,  le  premier,  a  placer  son  Jean 
van  JEjck ,  dans  le  palais  d'un  Prince  qui  combattait 
alors  sous  les  bannières  de  Wellington ,  le  second ,  a 
construire  cette  Porte  Guillaume ,  qui  conduit  si  no- 
blement dans  une  résidence  royale  ? 

»  Comment  Calloigne  aurait-il  pu  prévoir  qu'un  jour, 
il  projeterait  la  belle  statue  à'JSgmont,  et  celle  de  l'in- 
génieur Sievin ,  qui  sera  exposée  dans  une  place  publi- 
que de  Bruges,  parce  qu'il  fut  l'ami  de  Maurice,  et 


vérité  ,  lorsqu'on  veut  songer  à  la  signification  du  nom  grec 
ftAdrasle  t  (*)  aux  traits  un  peu  pâles  du  héros  ,  et  à  la  bril- 
lante valeur  de  Murât,  celui  de  ses  lieutenans  qui  fut  ensuite  roi 
de  l'ancienne  Parlhênope,  on  croit  lire  la  description  d'un  de 
ces  tableaux  dans  les  beaux  vers  du  VIe  livre  de  l'Enéide  ; 

Hic  illi  occurrunt  Tydeus  ;  hic,  inclytus  armis , 

Parthenopaeus  et  Adrasti  pallentis  imago. 

(*)  On   peut  le  traduire  par  Yffomme  an  destin  ,  si  toutefois  on  Vent   SDp- 
poser  qu'il  ait  de  l'analogie  arec    Koftirnct }  autïe   nom    grec  de  Nêmisis. 


qu'a  d'autres  mérites  éminens,  il  joignit  celui  d'écrire 
purement  sa  langue  maternelle. 

»  Et  toi ,  Roelandt  ,  lorsqu'au  sortir  des  savantes 
leçons  de  Percier ,  tu  t'occupais  a  copier  les  plans  d'un 
gigantesque  palais  pour  l'enfant  qu'au  berceau  même, 
on  avait  déjà  salue'  du  nom  de  Roi  de  Rome  (1),  eusses 
tu  osé  espérer  ,  a  une  époque  où  l'Université  de 
France ,  véritable  Autocrate  dans  le  domaine  de  l'en- 
seignement général ,  régnait  seule ,  d'être  un  jour  désigné 
pour  bâtir  dans  ta  patrie,  et  sur  les  ruines  mêmes  de 
l'ancien  collège  des  Jésuites ,  un  palais  universitaire  , 
monument  de  la  reconnaissance  municipale  envers  le 
bienfait  d'un  Roi  Belge,  —  et  un  des  plus  beaux  que 
l'architecture  et  la  réunion  de  tous  les  arts,  auront  élevé 
au  culte  des  muses? 

»  Mais  repassons  les  Alpes  et  revenus  en  Italie,  in- 
terrogeons quelques  artistes  et  d'autres  Belges  qui, 
dans  des  teins  plus  rapprochés  de  l'époque  présente, 
ont  vu  Rome  et  sou  ciel,  et  ont  consulté  ses  anti- 
ques souvenirs. 

«  Entendons  avec  quelle  vivacité,  quelle  chaleur,  le 
cœur  du  graveur  de  Meulemeester  et  sa  reconnaissance 
se  reportent  tour  a  tour  et  sur  les  fresques  de  Raphaël, 
et  sur  l'amitié  d'un  homme  révéré. 

»  Van  Brêe,  revenu  naguère,  n'a  qu'un  regret;  il  a 
vu  Rome  et  le  Ministre  Belge  ;  c'est  Rome  encore,  c'est 
encore  le  Ministre   qu'il  voudrait  revoir. 

»  Lorsque ,  occupé  de  la  savante  histoire  des  Conci- 
les, vous  aviez,  pendant  des  heures  entières,    secoué 

(O  M>  Roelandt,  qui  travaille  comme  s'il  avait  long-tems  de- 
meuré en  Italie,  n'y  a  pas  encore  été,  une  maladie  qui  le  sur- 
prit à  Paris,  l'ayant  empêché  de  pouvoir  concourir  pour  le  graud 
prix  auquel  était  attaché  le  voyage  de  Rome. 


(  a5o  ) 

la  poussière  des  manuscrits  du  Vatican,  et  que  sur 
des  points  de  discipline  moderne,  vous  interrogiez 
la  discipline  et  les  irrécusables  documens  des  siècles 
primitifs  de  l'église,  aimable  et  spirituelle  Potter  ,  chez 
qui  alliez-vous  vous  de'lasser  de  vos  travaux,  recueillir 
des  conseils  et  des  discours  pleins  d'instruction,  et 
être  te'moin  de  toutes  les  vertus  qui  font  le  bonheur 
domestique?.  .  .  . 

»  Dans  une  autre  solennité ,  l'orateur  venait  de  nom- 
mer Navez3  revenu  de  Rome,  digne  de  lui  et  de  nous  ; 
il  nomma  f^erstappen  et  Teirlinck,  et  Phil.  van  Brêey 
et  Vervloet)  et  nos  van  Hanselaere  et  Maes ,  comme 
faisant,  en  Italie,  la  gloire  de  notre  patrie,  ou  comme 
en  étant  l'espoir;  il  oublia  de  nommer  Voogd,  et  Kru- 
seman,  et  Pitsloo ,  et  ce  Kessels ,  dont  le  mâle  et  antique 
ciseau  semble  promettre  un  Thomwaldson  a  la  Belgi- 
que (1)  ;  mais  jamais  faute  ne  fut  punie  par  une  censure 
plus  douce  et  plus  délicate;  jamais  oubli  ne  fut  plus  ho- 
norablement vengé  en  faveur  de  ces  artistes ,  et  par  qui? — 
vous  le  devinez,  Messieurs;  mais  l'orateur  avait  a  se  re- 
procher bien  plus  sévèrement  un  autre  oubli  ;  je  veux  dire, 
le  nom  même  de  Heinholdqaiy  protecteur  de  l'académie, 
puisqu'il  aime  tant  a  en  protéger  les  élèves ,  pouvait  et 
devait  être  désigné  à  la  reconnaissance,  dans  une  so- 
lennité publique. 

»  Je  le  répète  :  pas  un  mot  d'éloge  n'est  échappé  de 
ma  bouche  ;  j'ai  dit  ce  qu'un  ami  des  arts  fait  pour 
les  artistes,  et  si  la  simple  réunion  de  quelques  circon- 
stances et  de  quelques  noms  semble  avoir  les  couleurs 
d'un  panégyrique,  le  tort  en  est  il  a  moi." 

CO  M.  Reinhold  nous  a  annoncé  que  sous  peu  M.  Falck  rece- 
vrait une  copie  du  Discobole  de  M.  Kessels,  statue  digne,  dit- 
il.  (i"i;:i  ciseau  antique;  Thomwaldson  est  Danois  ;  il  était,  avec 
Canova,  Je  premier  statuaire  de  Rome. 


(25i) 

La  santé  de  M.  Reinhold  ayant  été  portée  et  accueillie 
au  milieu  des  applaudissemens  de  l'assemblée,  l'orateur 
se  tournant  vers  le  jeune  Ermel ,  ajouta  : 

»  Une  autre  circonstance  particulière  augmente  l'intérêt 
de  cette  solennité  5  nous  voyons  au  milieu  de  nous,  celui 
qui  protège  les  arts  a  Rome ,  et  en  face  de  cet  homme 
éclairé  et  généreux,  deux  jeunes  artistes,  dont  l'un 
M.  /.  van  den  Aheele ,  déjà  distingué  dans  nos  con- 
cours académiques,  va  voir  Raphaël  et  le  Corrège , 
pour  revenir  peintre,  et  dont  l'autre,  Louis  Ermel , 
successivement  décoré  de  plusieurs  palmes  au  conserva- 
toire de  musique  a  Paris ,  vient  de  remporter  le  Grand-Prix 
de  composition  musicale  de  l'Institut  royal  de  France. 

»  Gloire  aux  Artistes  Belges  qui ,  par  leurs  talens  et 
leurs  succès,  honorent  la  patrie  dans  les  pays  étrangers  ! 

»  Heureux  jeune  homme  !  dans  cet  âge  où  toutes  les 
nobles  impressions  se  gravent  si  facilement  dans  l'àme , 
ton  beau  talent  t'a  ouvert  la  route  de  Rome  et  de  Naples, 
de  ce  classique  pays ,  où  la  population  entière  semble 
naître  avec  l'instinct  et  —  pourquoi  ne  m'exprimerais^ 
je  pas  ainsi?  —  avec  l'organe  de  la  musique  ;  où  notre 
Grélry,  en  y  recevant  ses  grandes  et  gracieuses  inspi- 
rations, eut  le  premier  sentiment  de  ses  forces,  et  put 
redire ,  avec  orgueil ,  le  mot  du  peintre  :  »  et  moi 
»  aussi,  je  connais   la  musique!  » 

»  A  Carthage!  à  Carthage!  s'écrie  le  héros  de  la 
tragédie ,  et  la  valeur  Romaine ,  avec  enthousiasme  , 
répond,  à  Carthage!  —  Italiam!  Italiam,  m'écrierai- 
je  avec  Virgile ,  et  a  ce  nom  vos  cœurs  ont  palpité , 
jeunes  amis  des  muses  et  des  arts  ! 

»  Apollon,  Vénus ,  les  Muses ,  avaient,  comme  dans 
l'ère  mythologique,  quitté  un  instant  l'olympe;  vous 
allez  les  voir  rendus  a  leurs  temples. 


(  352    ) 

»  Raphaël,  Michel-Ange ,  Palladio  ont  rempli  Puni- 
vers  de  leur  nom  ;  vous  allez  voir  leur  berceau. 

»  Partout,  en  France  ,  ici,  comme  a  JNaples  et  k 
Rome,  Pergolèze ,  Paè'siello  ,  Cimarosa ,  le  décevant 
Rossiniy  vous  enlèvent,  vous  touclient,  vous  enchan- 
tent; vous  allez  entendre  l'école  qui  les  forma,  sentir 
l'influence  du  ciel  qui  les  inspira. .... 

Pars ,  jeune  tomme ,  et  poursuivant  avec  âme ,  ta 
carrière,  sois  digne  de  la  munificence  du  Gouvernement 
Français,  digne  de  toi-même,  digne  aussi  de  tes  con- 
citoyens; n'oublie  pas  que  ce  fut  ici,  à  Gand,  delà 
bouche  de  ton  père  ,  que  tu  reçus  tes  premières  inspi- 
rations; il  les  jugea  heureuses  et  aucun  sacrifice  ne  lui 
coûta  pour  te  mettre  a  portée  d'entendre  les  maîtres  de 
l'art;  continue  a  justifier  ces  sacrifices  par  des  succès  ; 
—  Oh  !  je  le  sais  bien  ;  il  te  reste  une  immense  carrière 
a  parcourir  avant  d'atteindre  cette  grande  renommée, 
digne  récompense  de  quelques  hommes  privilégiés  et 
rares;  mais  ces  hommes  ont  commencé  comme  toi, 
sous  des  auspices  moins  heureux  que  toi;  lis  et  relis 
Grètry  >  et  souviens  toi  de  ce  qu'il  dit  de  l'époque  où, 
il  alla  voir  l'Italie Reviens  comme  lui ,  reconnais- 
sant envers  la  France,  mais  Belge,  par  ta  reconnaissance 
aussi  et  par  tes  affections;  reviens,  si  tu  peux,  dans 
te  patrie;  mais  reviens,  couronné  de  nouveaux  lauriers; 

Va  ,  toma  mio ,  se  puoi , 
Ma  toma  vincitor, 

ta  dit-elle ,  par  ma  voix ,  en  empruntant  a  la  langue  du 
Métastase  ,  deux  vers  harmonieux  ;  ne  l'oublie  jamais  : 
Grétry  vécut  et  mourut  en  France  ;  mais  ,  en  mourant , 
il   légua  son  cœur  a  la  ville  qui  le  vit  naître 

»  Depuis    près    d'un    siècle    et   demi,  les    peintres 


(253) 

français,  proclamés  vainqueurs  a  Paris,  sont  envoyés 
a  l'académie  de  France,  a  Rome;  a  une  époque  plus 
récente  ,   les  compositeurs  de  musique  ont  mérité   la 
même  faveur;  ainsi,  en  rendant  hommage  a  la  muni- 
ficence   d'un  Monarque  étranger  ,  j'eusse  pu.  ajouter  , 
Sans  vouloir  toutefois  atténuer  le  bienfait,  qu'il  ne  fait 
que  suivre  l'exemple  de  ses  prédécesseurs  ;  plus  heu- 
reux, le  Prince  a  qui  les  destinées  de  la  Belgique  sont 
confiées,  lègue  lui-même  ce  noble  exemple  a  ses  suc- 
cesseurs ,  et  l'Italie ,  aussi ,   est  promise  aux  lauriers , 
remportés  dans  les  grands  concours  d'Anvers  et  d'Am- 
sterdam; l'année  dernière ,  nous  accompagnâmes  de  nos 
acclamations  et  de  nos  vœux,  notre  concitoyen  Maes; 
cette  année-ci,  van  Yzendycke ,  d'Anvers,  le  réjoin- 
dra, et  Rojer,  de  Malines,  y  trouvera  Kessels  ;  Ermel, 
van  den  Abeele ,  et  toi,  jeune  Auguste  de  Boy ,  dont 
nous  avons  apprécié  le  talent  au  dernier  salon ,  et  qui , 
né  français,  n'en  appartiens  pas  moins  a  un  père  dont 
la  Belgique  s'honore  (1);  cultivez  l'amitié  des  Artistes, 
a  Rome  ;  transmettez  de  notre  part  aux  Belges  l'ex- 
pression   de    nos    sentimens  ;    rendez     leur  celle    du 
plaisir  que  nous  éprouvons  en  apprenant  du  Ministre 
de  notre  Souverain  ,  ou  leurs  succès ,  ou  leurs  progrès  ; 
sachez  tous  mériter  son  estime ,  non-seulement  par  vos  ta- 
lens,  mais  mieux  encore  par  la  culture  de  votre  esprit, 
et  par  cette  noblesse  de  caractère  et  de  conduite  qui 

(1)  M.  de  Bay ,  statuaire  de  Malines,  mais  établi  en  France j 
Auguste  de  Bay,  son  fils,  a  remporté  le  grand-prix  de  peinture, 
au  concours  de  Paris,  et  part  pour  Rome  avec  M-  Ermel; 
Victor,  un  autre  de  ses  fils,  a  remporté  un  des  grands-prix  de 
sculpture  et  partira  probablement  l'année  prochaine;  jamais  les 
Artistes  Belges  ne  se  sont  montrés ,  sous  des  auspices  plus  hono- 
rables, dans  un  pays  étranger. 


(  254  ) 

distingue   l'artiste  dans  l'époque  actuelle  ;    mais   déjà 
nous  lisons   l'expression  de  la   bienveillance  dans   ses 


VcUa»   •   •   •  •   • 


Ici  un  toast  fut,'  porté  »à  M.  Ermel,  et  aux  Artistes 
»  Belges  qui  résident  a  Rome",  et  S.  Ex.  M.  Reinhold , 
fut  prié  de  leur  transmettre  ce  souvenir,  solennelle! 
ment  exprimé,  au  nom  de  leurs  Compatriotes. 

Après  ce  discours ,  M.  Gabriels  a  clianté  quelques 
couplets ,  et  quoique  chaque  couplet  n'exprime  a  peu 
près  qu'une  même  idée  ,  nous  les  transcrivons  ici ,  parce 
qu'ils  rendent ,  avec  effusion ,  une  pensée  et  des  vœux 
patriotiques,  et  que  l'expression  de  ce  sentiment ,  quand 
même  la  forme  en  serait  moins  poétique,  fait  toujours 
naître  quelqu'intérêt. 


i. 

Qu'à  chanter  d'immortels  exploits, 

Uu  autre  invoque  son  génie  ; 
Dieux  des  Arts,  anime  ma  voix! 

Inspire  moi,  douce  harmonie! 
Célébrons  d'un  jeune  vainqueur 

Les  amours   avec  Polymnie  ; 
Qu'il  soit  heureux!  que  son  bonheur 

Retentisse  dans  sa  patrie! 


2. 


Poursuis,    jeune  Ermel ,   tes  progrès; 

Entends  Naples,   Rome,  Florence! 
Poursuis;  et  de  nouveaux  succès 

Répondront  aux  vœux  de  la   France j 
Poursuis  ;  par  tes  accords  si  doux 

Charme  aussi  la  belle  Ausonie } 
Et  reviens  au  milieu   de  nous  , 

Voir  les  transports  de  ta  patrie. 


(  255) 
3. 

Sois  satisfait;  par  les  accens, 

Plais  au  Tibre,  plais  à  la  Seine; 
Mais  au  milieu  des  bons  Flamand» 

Que  souvent  ton  cœur  te  ramène  ! 
Ton  beau  talent  charma  Paris; 

La  France  entière  t'appre'cie; 
Sois  fier  aussi  du  noble  prix , 

Que  te  donne  encor  ta  Patrie,  (*) 

4. 

Envoi  à  M.  Reinhold. 

Reinhold,  digue  représentant 

D'un  Roi  que  le  Belge  révère, 
Protège  Ermel  ;    à  son  talent 

Accorde  un  appui  tutélaire  ;  — 
Et  toi ,  fort  d'un  si  noble  appui , 

Prends  tou  essor  vers  l'Italie, 
Et  de  retour ,  nouveau    Grétry  , 

Deviens  l'honneur  de  ta  Patrie. 


(*)  Un  grand  médaillon  d'or,  sur  lequel  est  gravé  une  Lyre 
antique  entre  des  branches  de  laurier  et  d'oranger,  surmonté  du 
nom  de  Grétry,  avec  la  divise  :  Italiam!  Italiaml  Virg.  Ma.  III. 

Légende  : 

Ludovico  C.  Ermel,  Gandavensi. 

Exergue  : 

SOCIETA3   REG.    ART.   ET   LIT.   GAND. 

FESTO   D.    LUCAE   DIE 

M.DCCC.XXIII. 

Inscription  au  revers  : 

QUOD 

CANTICO   GALLICO 

CUI  THISBE-PYRAMI  ARGUMENTUM  , 

MTJSICIS   MODIS   AFTANDO 

AB   INSTITUTO   REG.    PARIS. 

VICTRICI   LAURO   INSIGNITUS   EST 

SODALES 

SODALI   LAUREATO 

ROMAM   PROFECTCRO 

PRAESENTE   EXC.    VIRO   J.   G.    REINHOLD 

BELGAR.    REGIS   AD   PONT.    ROM.    LEGATO 

LAETI    ET    GRATI 

D.   nn. 


(  256  ) 


VARIETES, 


Ljes  Sociétés  des  Beaux-Arts  et  d'Agriculture  viennent 
de  recevoir,  par  l'intermédiaire  de  S.  E.  le  Ministre  de 
l'Instruction  publique,  le  troisième  volume  imprimé  des 
Mémoires  de  l'Académie  royale  des  Sciences  et  Belles- 
Lettres  de  Bruxelles;  il  contient  trois  mémoires  cou- 
ronnés par  cette  Académie  :  celui  de  M.  le  baron  de  Reif- 
fenberg,  de  Justi  Lipsii  V.  INL.  vita  et  scriptis;  Coup- 
d'œil  minéralogique  sur  le  Hainaut,  par  M.  Drapiez;  et 
la  réponse  à  la  question  :  Quelle  est  la  véritable  com- 
position chimique  des  sulfures,  tant  oxidés  qu'hydro- 
génés ,  faits  d'après  les  divers  procédés,  et  quels  sont 
leurs  usages  dans  les  arts?  écrit  en  hollandais  par  M. 
G.  A.  Marée ,  de  Louvain. 

■ —  MM.  les  chanoines  de  la  cathédrale  de  St.  Bavon 
à  Gand ,  viennent  de  faire  restaurer  par  M.  Lorent ,  ar- 
tiste exercé  dans  cette  partie  ,  un  ancien  et  beau  tableau 
par  Gérard  vancler  Meire,un  des  peintres  formés  a  Gand 
par  Hubert  van  Eyck,  pendant  qu'il  habitait  cette  ville,  où 
il  est  mort  en  i426.  Ce  tableau  est  d'une  exécution  admi- 
rable et  se  soutient  a  côté  de  l'immortel  chef-d'œuvre  de 
l'inventeur  de  la  peinture  a  l'huile,  placé  dans  ïa  même 
église;  il  a  environ  sept  pieds  de  haut  sur  10  de  large 
avec  les  battans,  et  représente  le  Christ  entre  les  lar- 
rons. Nous  donnerons  dans  un  des  prochains  cahiers 
du  Messager,  une  notice  sur  ce  peintre  Gantois  et 
une  description  du  tablean ,  un  des  monumens  les  plus 
curieux  de  l'histoire  de  la  peinture  dans  nos  contrées. 


MESSAGER 

DES  SCIENCES  ET  DES  ARTS. 


VIlmc.  Livraison  —  Novembre  1823. 


SUR  LES   TABLEAUX   DES   FRÈRES  VAN   EYCK, 

Placés  dans  V église  de  S.  Bavon  à  Gand  et  plus  par- 
ticulièrement sur  le  mérite  J'Hubert  comme  peintre. 


J:  our  peu  qu'on  se  donne  la  peine  de  remonter  a  la 
source  même  des  faits  historiques  et  a  celle  des  ori- 
gines et  des  découvertes  les  mieux  établies,  on  est 
étonné  de  voir  sur  combien  d'erreurs  l'exposé  même 
de  ces  faits  repose;  j'ai  donc  voulu  remonter  à  l'ori- 
gine  d'une  des  plus  belles  découvertes  dans  l'histoire 
des  arts,,  celle  de  la  peinture  a  l'huile;  je  me  suis 
convaincu  de  plus  en  plus  que  la  gloire  en  reste  in- 
contestablement acquise  (1)  aux  frères  van  Eyck  $ 
mais  combien  n'ai-je  pas  dû  être  surpris  de  voir  un  si 

(1)  Incontestablement  est  le  mot;  je  ne  conteste  pas  qu'avant 
l'époque  des  van  Eyck,  on  ait  pu  dorer,  argenter,  peindre  en  noir 
ou  en  bleu,  au  moyen  de  l'huile;  mais  les  van  EycJc,  avant 
aucun  autre,  ont  trouvé  l'art  de  mêler  les  couleurs  dans  un  ta- 
bleau, et  de  les  y  fixer  au  moyen  d'une  mixtion  d'huile  de  lin, 
et  c'est  en  cela  que  consiste  l'invention. 

M.  L.  de  Bast,  secrétaire  de  la  société  des  beaux-arts,  a  fait 
de  grandes  recherches  sur  cet  objet,  et  il  ne  renonce  pas  au  plai- 
VIlmc  livraison.  18 


(  258  ) 

grand  nombre  d'auteurs,  non-seulement  parmi  les  étran- 
gers, mais  parmi  ceux  du  pays,  ne  pas  faire  a  Hubert 
van  Eyck  la  part  de  gloire  qui  lui  revient  comme  grand 

sir  de  les  publier  successivement;  si  quelques  lecteurs  du  Mes- 
sager veulent  se  préparer  à  examiner,  dès- ù- présent ,  le  pour  et 
le  contre  sur  la  matière,  ils  pourront  consulter,  outre  les  ouvrages 
nationaux  qui  sont  dans  les  mains  de  tout  le  monde  ,  les  écrits 
étrangers  que  j'indique  en  partie  d'après  le  savant  abbé  Morelli, 
bibliothécaire  de  S.  Marc,  à  Venise,  et  quelques  ouvrages  nou- 
veaux publiés  récemment  en  Allemagne. 

i<*  A  critical  essay  on  oil-paiuling.  Loudon,   1781. 

20  CequeVernazzaaécritdansle/cw/yw/afcP/se.  (t.  XCIV.p.220.) 

3°  Dellavalle  dans  les  annotations  sur  Vasari.   (t.  III.  p.  3i3; 

t.  X.  p.  5.  ) 
4°  Le  Tiraboschi ,  dans  son  histoire  de  la  littérature  italienne. 
(t.  VI.  2e  partie,  p.  407.) 

5°  Dans  la  Bibliolheca  Modenese.  (t.  VI.  p.  48i.) 

G°  Lauzi  dans  la  Storta  pittorica  delP  Italia.  (t.  I.  p.  4g.  586; 

II.  22.) 
70  Il  Baldinucci   (Decen.  I.  part.  I.  sect.  III.  tom.  III,  pag* 

G2.   edit.  Fiorent,  1768.) 
8°  Ce  que  Chrétien  Leist  a  réuni  dans  le  tome  VI.  de  la  collec- 
tion de  Lessing  :   Zur  geschichl  und  litteratur.  Bruns- 
wick ,    1781. 
vf  Le  baron  de  Budbey  (  Esprit  des  journaux ,  Octobre  1792  , 

p.  417,  indiqué  comme  ayant  paru  à  Gottingue.  ) 
io°  Joann  van  Eyck  und  seine  nachfolger  von  Johanua  Scho- 

penhoveu.   Frankfurt,   1822. 
ii°  Ueber  Hubert  und   Johann  van  Eyck,  von  Gustav.  Frid- 

rich  Waagen.  Breslau  ,  1822. 
Quand  toutes  ces  allégations,  que  j'engage  M.  L.  de  Bast  à 
réunir  en  corps,  autant  qu'il  pourra  le  faire ,  auront  été  bien  dis- 
cutées, bien  pesées,  il  restera  difficile  de  ne  pas  prendre  des  conclu- 
sions avec  le  savant  Morelli;  il  faut  se  rappeler  ou  revoir  aussi 
ce  que  M.  le  baron  de  Keverberg  a  réuni  sur  la  matière,  dans 
les  excellentes  et  judicieuses  recherches,  qu'il  a  consignées  à  la 
suite  du  discours,  qu'il  prononça  devant  l'académie  de  Bruges, 
lors  de  la  fête  séculaire  de  l'invention  des  van  Eyck.  (\ '.  Ursula, 
noies.)  N.  C. 


(  a59) 

peintre,  égalant  dans  l'opinion  des  contemporains,  et 
même  surpassant  sou  frère,  qui  était  plus  jeune  de 
quelques  années,  et  auquel  néanmoins  il  paraît  toujours 
subordonné  en  mérite  et  en  talens. 

Que  des  auteurs  étrangers  aient  servilement  copié 
le  biographe  van  Mander ,  je  le  conçois  ;  mais  comment 
van  Mander  a-t-il  commis  ces  erreurs?  Comment,  par 
exemple ,  en  a-t-il  pu  accumuler  un  si  grand  nombre 
dans  la  seule  description  du  chef-d'œuvre  des  frères 
van  Eyck ,  de  cette  vaste  composition  de  douze  panneaux 
qui  représente  Adam  et  Eve,  V Agneau  de  l'Apocalypse 
et  plusieurs  autres  sujets  ascétiques? 

Cela  s'explique  :  si  Karel  van  Mander  a  vu  ce  ta- 
bleau (1) ,  il  est  a  croire  que  ce  fut  dans  sa  première 
jeunesse 5  a  l'âge  de  26  ans,  il  quitta  la  Flandre,  alla 
voir  Tltalie ,  s'expatria  ensuite ,  et  se  fixa  en  Hol- 
lande ;  Ta,  il  écrivit  de  mémoire,  et  dépara  son  ouvrage 
par  de  nombreuses  inexactitudes  qu'il  a  été  très-difficile 
de  réfuter  pendant  plus  de  soixante  ans  que  les  commu- 
nications entre  la  Hollande  et  la  Flandre  ont  été  fermées. 
Comment,  si  on  n'admet  pas  cette  supposition,  ex- 
pliquer toutes  ces  erreurs? 

Nous  allons  rétablir  la  vérité,  et  rendre  à  Hubert, 
avec  la  justice  qu'il  mérite ,  la  réputation  dont  il 
jouissait  dans  son  siècle,  parmi  ses  contemporains  et 
du  vivant  même  de  Jean. 

i°  Hubert  demeura  a  Gand ,  et  y  forma  une  école  et 
nombre  d'élèves  5   ce  ne  fut   pas   Philippe-le-Bon  qui 


(1)  Je  dis,  s'il  a  vu  ces  tableaux;  parce  que  van  Mander  n'est 
veau  à  Gand  qu'après  la  destruction  de  nos  églises,  et  qu'il  a  quitté 
cette  ville  avant  que  les  tableaux  sauvés  fussent  remis  en  place  ;  et 
de  plus  que  la  description  qu'il  en  donne  est  trop  inexacte.  L.  D.  B. 


(  2Go  ) 

lui  commanda  et  paya  les  tableaux,  mais  le  chef  d'une 
famille  noble  de  Gand  ;  il  commença  l'ouvrage  vers  i420 , 
mourut  en  i426,  et  seulement  alors,  Jean,  son  frère, 
fut  chargé  de  l'achever;  comme  Jules  Romain  acheva 
la  Transfiguration  après  la  mort  de  Raphaël ,  son  maître. 

2°  Le  chef  de  famille  auquel  je  viens  de  faire  allu- 
sion, était  Josse  Vydt  {x)  ,  seigneur  de  Pamele.  Ce  fait 
était  connu  de  Sanderus  (2)  ;  il  Tétait  également  de 
Max.  Vrientius,  secrétaire  de  la  ville  au  commence- 
ment du  XVIImo  siècle  (5). 

3°  La  famille  Vydt,  alliée  a  celle  des  Borluut, 
une  des  plus  anciennes  de  Gand ,  acheta,  selon  Pu- 
sage  du  teins,  une  chapelle  dans  l'église  de  S.  Jean 
pour  lui  servir  de  sépulture  ;  cette  chapelle  fut  con- 
sacrée le  6  Mai  i432  (  remarquez  l'époque  )  ;  les  ar- 
moiries de  la  famille  sont  sculptées  dans  la  clef  de 
la  voûte,  ce  qui  peut  raisonnablement  induire  a  croire, 
qu'elle  l'a  fait  construire  (4)  ;  on  remarque  aussi 
au-dessus  de  la  porte  ces  mêmes  armoiries  de  Vydt  et 


(1)  Josse  Vydt  fut  élu  en  i434,  chef  du  magistrat  de  Gand, 
(premier  échevin  de  la  Keure). 

(2)  Flandria  illustrata ,  edit.a.  i64i.  tom.  I.  p.  11i.de  reb.  Gand. 
(5)         Quos  JJeus  ob  Vitium  paradlso  exegit,  Apelles 

Eyciius,  hos  Vitii  reddidit  œre  patres. 

Ces  vers  de  Vrientius  font  allusion  à  deux  des  panneaux,  qui 
représentent  Adam  et  Eue;  ils  offrent  un  jeu  de  mots  assez  pué- 
ril ;  mais  ils  établissent  très-bien  les  faits;  le  témoignage  de  ces 
deux  Gaulois,  très-versés  dans  l'histoire  de  leur  pays,  seraient 
déjà  une  garautie  suffisante. 

(4)  Comme  l'évèque  Triest  a  fait  construire  la  voûte  du  chœur; 
l'incendie  du  12  Septembre  1822,  porta  sur  cette  chapelle  avec  la 
plus  grande  intensité  ;  le  feu  y  pénétra  par  les  trous  percés  dans 
la  voûte ,  et  les  tableaux,  placés  dans  un  autel  construit  en  bois, 
coururent  le  plus  grand  danger  ;  mais  la  solidité  de  la  construction 
conserva  l'intérieur  de  la  chapelle  et  toutes  les  chapelles  latérales. 


(   *6l    ) 

de  son  épouse  (  ne'e  B orluut  )  ;  plusieurs  personnes  de  la 
même  famille  sont  enterrées  dans  l'église  souterraine  (1) 
sous  cette  chapelle. 

Mais  on  me  demandera,  et  avec  raison,  comment 
j'ose,  avec  tant  de  confiance,  donner  des  dates  et  des 
assertions  si  positives.  Voici  mes  garans. 

Peu  de  tems  avant  l'époque  des  iconoclastes ,  vers 
le  milieu  du  XVIme  siècle,  un  jurisconsulte  éclairé, 
plein  de  zèle  pour  les  recherches  et  la  conservation 
des  antiquités  nationales,  Christophe  van  Huerne  (2), 
avait  recueilli  a  Gand  et  dans  toute  la  Flandre,  un 
nombre  infini  d'épitaphes  et  d'autres  inscriptions  mo- 
numentales ,  fort  heureusement  a  tems  ;  car  le  pillage 
et  la  suppression  violente  de  plusieurs  monastères  et 
églises  devait  bientôt  en  détruire  le  plus  grand  nombre. 

Ces  inscriptions,  en  deux  volumes  in-folio ,  toutes 
autographes,  sont  conservées  jusqu'à  ce  jour,  chez 
M.  van  Huerne,  de  Bruges,  descendant  de  la  même 
famille,  et  qui  a  hérité  de  son  noble  aïeul,  le  goût 
des  antiquités  et  cette  vive  et  inépuisable  obligeance,  qui 
le  porte  a  protéger  les  arts  et  a  encourager  les  artistes. 

Or,  dans  le  nombre  de  ces  inscriptions,  il  s'en  trouve 


(1)  On  dit  krocht,  et  mieux  krofb  ou  kropht  de  crypta,  mot 
dérivé  du  grec. 

(2)  Christophe  van  Huerne  était  constamment  resté  attaché  à 
la  religion  catholique  et  à  l'Espagne,  ainsi  que  sa  sœur  Anna, 
quoique  celle-ci,  jeune  encore,  eût  épousé  le  famueux  Jean  van 
Hembyze,  déjà  septuagénaire;  s'il  est  vrai,  comme  on  l'a  écrit, 
qu'avant  d'être  conduit  à  Féchaffaud  par  ces  mêmes  Gantois  qu'if 
avait  si  long-tems  dominés,  il  ait  en  quelques  retours  vers  l'Es- 
pagne et  la  religion  romaine,  la  persuasion  de  sa  femme  aura 
pu  l'y  pousser.  Quelques  lettres  que  lui  écrivit  ce  vieillard,  en 
prison  et  avant  de  mourir,  et  que  M.  van  Huerne  de  SchierveMe 
à  Bruges ,  conserve ,  sont  extrêmement  touchantes. 


(    262    ) 

une  qui,  selon  l'usage  du  tems,  e'tait  conservée  sur  la 
bordure  même  des  tableaux  des  vanEyck,  et  qui  date, 
jusqu'à  l'évidence,  de  l'époque  a  laquelle  ces  tableaux 
furent  exposés. 

M.  Hye  Schoutheer  ,  secrétarire  de  la  ville  qui  possède 
lui-même  une  belle  collection  de  documens  nationaux, 
entr'autres  des  notes  trés-curieuses  concernant  nos  an- 
ciens peintres,  eut  la  complaisance  de  me  la  faire  con- 
naître ;  je  la  communiquai  a  M.  N.  Cornelissen  qui, 
en  voyant  l'inscription,  et  n'y  trouvant  pas  le  moindre 
indice  de  ponctuation,  pensa  que  la  chose  valait  la  peine 
de  faire  une  course  a  Bruges;  il  y  alla  le  i4  Novembre 
dernier,  et  reçut  chez  M.  van  Huerne,  l'accueil  le  plus 
hospitalier;  tous  les  manuscrits  littéraires  et  historiques 
du  respectable  vieillard  lui  furent  ouverts. 

Après  avoir  examiné  avec  soin  le  recueil  des  inscrip- 
tions, il  vit  facilement  que  Christophe  van  Huerne  ne 
les  avait  recueillies  que  comme  devant  lui  servir  pour 
aider  sa  mémoire  dans  quelqu'autre  ouvrage ,  dont  il 
dit  lui-même  s'occuper,  mais  que  les  dissentions  reli- 
gieuses ,  survenues  a  l'époque  même ,  auront  inter- 
rompu ;  ces  inscriptions  en  conséquence  n'étaient  co- 
piées qu'a  la  hâte;  quelques  mots  étaient  abbréviés 
d'après  une  espèce  de  sténographie  que  tout  copi"te  se 
forme  pour  la  célérité,  et  d'autres  mots  qui  devaient 
servir  a  l'intelligence  du  texte  semblaient  avoir  été 
ajoutés;  dans  l'inscription  dont  il  s'agit,  les  mots  étaient 
très-bien  conservés;  malheureusement,  soit  que  Chris- 
tophe van  Huerne  eût  négligé  la  ponctuation  ,  soit  qu'en 
effet  l'auteur  de  l'inscription  ne  l'eût  pas  soignée  (1),  le 
manuscrit  n'en  donne  aucune  trace,  et  cependant  l'on 

(i)  Beaucoup  des  inscriptions  de  ce  temps  ue  sont  pas  ponctuées. 


(  >i63  ) 

verra  dans  une  tics  notes  qu'elle  eût  été  nécessaire  pour 
bien  établir  le  sens. 

Voici  comment  M.  N.  Cornclissen  pense  que  l'inscrip- 
tion avait  e'té  primitivement  composée  et  probablement 
figurée  : 

pictor  hubertus  ,  (l)  major  quo  nemo  repertus  , 
incepit  pondus,  quod  johes,(2)  arte  secundus , 
frater  perfectus,  (5)  judoci  vydt(4)  prece  fretus; 
VersU  seXta  MaY  Vos  CoLLoCat  aCta  tVerI. 

De  la  main  du  copiste,  est  ajouté  après  le  mot  tVebI, 
le  millésime  i43'2  ,  qui,  comme  on  Pa  vu,  coïncide 
avec  l'époque  de  la  consécration  de  la  chapelle. 

Si  la  leçon  et  la  ponctuation  de  M.  N.  C.  sont 
exactes,  cette  inscription   dit: 

Le  peintre  Hubert ,  le  plus  grand  qui  ait  jamais 
existé ,  a  commencé  l'ouvrage;  son  frère,  Jean,  le 
premier  de  son  art  après  lui,  la  achevé,  à  la  prière 
de  Josse  Vydt;  ce  vers  (chronogramme)  vous  indique 
(  par  les  lettres  numérales)  que  ce  fut  le  6  Mai  i452  (5)  , 

(i)  Il  y  a  dans  le  MS.  Hubertus  e  Eyck  (Hubert  de  la  com- 
mune qu'on  appelle  Eyck  ;  —  Maeseyck  ,  si  l'on  veut,  ou  si 
l'on  aime  mieux,  Eyck,  tout  simplement,  d'après  le  nom  d'un 
village  voisin,  comme  M.   le  Baron    de  Keverberg  le  conjectura. 

(2)  Il  y  a  Joanncs;  mais  le  peintre  lui-même  écrivait  commu- 
nément Johes. 

(5)  Perfectus  est  probablement  là  pour  perfecit;  des  barba- 
rismes de  cette  nature  étaient  les  elegantiœ  du  tems  dans  les 
vers  léonins;  on  peut  en  voir  des  exemples  classiques  dans  l'in- 
génieux badinage  qu'on  attribue  à  Reuchlin  et  à  Huttenus ,  et 
auquel  notre  Erasme ,  dit-on,  ne  fut  pas  étranger;  ce  sont  les 
Litterœ  obscurorum  virorum. 

(4)  Le  MS.  porte  Vyd,  erreur  évidente  du  copiste.        N.  C. 

(5)  L'église  célèbre  ce  jour  la  fête  de  Saint- Jean  de  la  Porte 
Latine;  il  est  probable  que  la  solennité  avait  quelque  rapport 
;ivec  S.  Jean  ,  le  patron  de  la  chapelle. 


(    2Ô4    ) 

que  les  tableaux  achevés  furent  exposés  à  la  vue  du, 
public  (1). 

Puisque  l'ouvrage,  entrepris  vers  i420,  l'a  été  par 
Hubert,  le  peintre  aura  commencé  par  les  trois  pan- 
neaux où  figurent  Dieu  le  Père,  la  Vierge  et  Saint" 
Jean,  tableaux  qui  en  effet  sont  d'un  faire  plus  vi- 
goureux, d'une  expression  plus  noble  et  d'un  style  plus 
grandiose  (2) ,  qui  semble  se  rattacher  a  l'ancienne  école 
Byzantine  (3),   et   très- certainement  sous  ce  rapport, 

(1)  Très-certaiueinent  je  n'oserais  pas  garantir  l'exactitude  de  la 
ponctuation,  Johes ,  arte  secundus  y  f rater  peifecit ;  mais  je  le 
demande  à  ceux  qui  sont  sans  prévention  ,  si  après  le  Major 
quo  nemo  repertus ,  le  Arte  secundus ,  n'est  pas  amené  par  l'éco- 
nomie naturelle  de  la  phrase?  cependant,  j'avouerai  qu'on  peut 
ponctuer  et  écrire  comme  s'il  y  avait,  Johes  secundus  f  rater, 
arte  perfecit,  ou  Frater  Johes,  secundus  peifecit,  arte  (sua); 
j'admets  encore  qu'en  mettant  une  simple  virgule  (,  )  après  fretus  , 
on  peut  laisser  perfectus  comme  un  adjectif;  toujours  en  résul- 
terait-il,  eu  dernière  analyse  que  c'est  Hubert  qui  est  nommé 
le  plus  grand  de  tous  les  peintres  ;  que  ce  fut  lui  qui  a  entrepris 
l'ouvrage,  et  que  ce  fut  (après  la  mort  de  Hubert,  décédé  en  i4a6) 
que  Jean ,  à  la  prière  du  seigneur  de  Pamele ,  et  non  par  ordre 
du  duc  de  Bourgogne,  l'acheva;  c'est  là,  ce  me  semble,  ce  que 
M.  L.  de  Bast,  dans  son  thème,  s'est  proposé  de  démontrer,  et 
ce  but,  il  l'a  atteint.  N.   C. 

(2)  Le  conseiller  De  Burtiu,  en  parlant  de  ces  trois  tableaux, 
dit  :  »  qu'ils  offrent  pour  la  partie  idéale  et  l'exécution  mécani- 
i)  que,  des  modèles  précieux  ,  que  les  plus  grands  artistes  peuvent 
»  étudier  avec  fruit,  et  qu'ils  sont  dignes  du  pinceau  de  Raphaël 
»  dont  ils  présentent  le  style  et  le  dessin/'  (  Traité  des  connais- 
sances nécessaires  aux  amateurs  de  tableaux ,  lom.   1.  p.  i3i. 

(3)  »  Ces  tableaux ,  dit  M.  le  Baron  de  Keverberg ,  dans  une  de  ses 
»  notes,  tiennent  fortement  de  l'école  Byzantine,  et,  nous  parais- 
»  sent  avoir  été  exécutés  long-tems  avant  V Adoration  de  V Agneau. 
La  différence  que  M.  D.  K.  y  remarque,  ne  résulte  pas  de  l'espace 
de  tems  qui  s'est  écoulée  entre  l'exécution  des  deux  parties  de  cette 
composition;  mais  elle  provient  de  ce  que  deux  peintres  y  ayant 
travaillé  séparément,  chacun  aura  donné,  à  la  partie  qu'il  a  con- 
fectionnée ,  le  caractère  qui  distingue  ses  ouvrages ,  et  cette  dilié- 


(  265  ) 

leur  exécution  justifie  le  surcroît  d'éloges  donné  h  l'aîné 
des  frères ,  quoiqu'il  y  ait  peut-être  plus  de  finesse 
dans  l'exécution  des  petites  figures  de  la  composition 
de  V Agneau ,  et  c'est  dans  ce  sens  que  nous  croyons 
devoir  entendre  les  éloges  donnés  par  M.  le  Baron  de 
Keverberg  a  cette  partie  du  tableau  (1). 

Terminons  la  discussion  en  rappelant  un  dernier  fait. 

Hubert,  pendant  son  entreprise,  étant  mort  a  Gand, 
reçut  les  honneurs  de  la  sépulture  dans  la  chapelle 
même  que  la  noble  famille  des  Vydt  s'était  désignée 
pour  elle-même,  et  qu'elle  faisait  si  richement  embellir; 
il  lui  fut  donné,  dans  le  langage  du  tems,  une  épita- 
phe  qui  fut  conservée  jusqu'à  l'époque  de  la  démoli- 
tion des  monumens  intérieurs  de  l'église  (2) 

rence  devait  être  d'autant  plus  sensible,  que  c'est  le  travail  d:un 
niaitre  et  de  son  élève,  à  une  époque  où  une  grande  découverte 
devait  amener  une  révolution  dans  la  manière  de  peindre. 

Le  célèbre  Goethe  a  considéré  l'ancien  tableau  de  la  cathédrale 
de  Cologne,  si  pompeusement  décrit  par  M.  Wallraf ,  comme 
Fessieu  qui  conduit  de  l'ancienne  école  à  l'école  régénérée.  Si 
Gœthe  avait  vu  le  chef-d'œuvre  des  frères  van  Eyck ,  il  y  aurait 
trouvé  le  véritable  essieu  de  la  régénération  de  la  peinture  et 
aurait  admiré,  dans  une  partie  de  cette  composition,  toute  la 
sévérité ,  les  beautés  et  la  symétrie  dans  l'ordonnance ,  qui  distin- 
guent l'école  Grecque  ou  Byzantine;  dans  l'autre  partie,  celle 
exécutée  par  Jean,  des  édifices  somptueux  et  des  paysages  ornés 
de  tout  ce  que  la  nature  a  de  plus  riche  en  productions  végé- 
tales,  substitués  aux  fonds  conventionnels.  L.  D.  B. 

(1)  Ces  tableaux  étaient  placés  beaucoup  trop  haut  pour  qu'on 
ait  pu  en  saisir  toutes  les  beautés;  ajoutez  à  cela  que  ces  peintures 
semblent  couvertes  d'un  vernis  jaunâtre  qui  en  ôte  toute  la  fraî- 
cheur et  ternit  l'éclat  des  belles  carnations.  Le  déplacement  de 
ces  tableaux,  pendant  l'incendie  du  toit  latéral,  en  Septembre  1822  , 
nous  a  mis  à  portée  de  les  mettre  en  comparaison  et  de  les  exami- 
ner avec  la  plus  grande  attention.  L.  -D.  B. 

(2)  Cette  épitaphe  conservée  par  plusieurs  écrivains,  commence 
par  ce  vers  :  Spieghelt  u  an  my  die  op  my  treden , 

Dans  les  mémoires  du  conseiller  Kempenaer  et  d'autres  .  re- 


(  266  ) 

Un  témoin  oculaire,  Marc  van  Vaemewyck,  (tou- 
jours véridique  quand  il  parle  de  ce  qu'il  a  vu),  dit 
»  que  Vos  du  bras  de  Hubert,  auquel  avait  été  attachée 
la  main  habile  de  ce  peintre ,  a  été  long-tems  exposé  à 
la  vénération  publique ,  ce  qu'il  a  vu  lui-même,  dans 
une  armoire  en  fer,  au  cimetière  à  Ventrée  de 
V église"  (1);  honneurs  extrêmement  remarquables,  et 
dont  je  ne  trouve  d'exemple  analogue,  que  cent  cin- 
quante ans  après,  dans  la  translation  et  l'exposition ,  (si 
toutefois  ce  dernier  fait  est  exprimé  avec  exactitude) 
du  crâne  de   Raphaël  dans  le  Panthéon  de  Rome. 

Les  vers  de  Luc  de  Heere  a  ce  sujet,  ne  manquent 
pas  de  naïveté  pour  tons  ceux  qui,  sans  prévention, 
se  reportent  au  style  et  a  la  manière  de  l'époque; 
celui-ci  sur-tout  est  remarquable  en  ce  qu'il  exprime 
clairement  les  motifs  et  la  nature  des  honneurs  rendus, 
à  Hubert: 

»ffy  hadde  't  iverck  begonst ,  alsoo  hy  *t  was  gewent , 
yimaer d al-vernielsche  doot  zynvoorneemheeftverondert7 
enz. 

Aucun  indice  n'a  fait  découvrir  l'épitaphe  de  Jean 


cueillis  par  le  père  de  Jor/g/ie,  Dominiquain,  on  voit  que  les 
marguilliers  avaient  été  assez  heureux  pour  sauver  la  composi- 
tion des  frères  van  Eyck  de  la  fureur  des  iconoclastes;  les  tableaux 
ont  été  intégralement  restitués  à  l'autel,  après  la  réprise  de  Gand 
par  Farnèse ,  en  1 585  ;  mais  les  bordures  et  l'inscription  ont 
disparu  à  cette  époque,  la  plus  déplorable  qui  soit  à  trouver 
dans  les  annales  de  Gand. 

(1)  Die  arm-pype ,  daer  zyn  constigh  handt  aenghestaen  heeft, 
heeft  langhe  gehanghen  in  een  yser  besloten  opt  kerkhof.  (_  Soo 
ik  ook  gesien  hebbe.)  Historié  van  Belgis ,  ofte  spiegel  dcr 
nederlandsche  oudtkcyt.  Ouvrage  écrit  dans  la  première  moitié 
du  XVI mc  siècle. 


(261    ) 

van  Eyck,  mort  a  Bruges,  plusieurs  années  après 
son  frère,  mais  a  ce  qu'il  paraît,  dans  un  âge  peu 
avancé,  d'après  les  traditions,  consignées  entr'autrcs 
dans  ce  vers  du  même  Luc  de  Heere: 

Van  deser  weereld  vroegh  dees  edel  bloeme  schiedt  (1). 

S'il  a  eu  une  épitaphe  dans  l'église  de  Saint  Do- 
nat,  où  on  dit  qu'il  a  été  enterré,  elle  aura  dis- 
paru peu  de  tems  après  y  avoir  été  placée  ;  car 
l'inscription  qu'on  y  lisait  jusques  a  ces  derniers  tems, 
paraît  postérieure-  de  près  d'un  siècle  ;  elle  n'indique  ni 
l'endroit  du  tombeau ,  ni  même  l'époque  de  la  mort  (2). 

J'ai  communiqué  le  résultat  de  mes  recherches  a 
quelques  amis    des  arts    et  des    antiquités   nationales, 

(1)  Il  est  inconcevable  que  van  Mander  ait  osé  se  permettre 
de  révoquer  en  doute  plusieurs  faits  avancés  par  son  maître 
Luc  de  Heere  ,  artiste  instruit  qui  laissa  plusieurs  manuscrits 
très-intéressans,  entr'autres  une  biographie  des  peintres  écrite  en 
vers.  Ce  recueil,  qui  a  été  connu  de  van  Mander,  lui  a  peut-être 
servi  pour  composer  son  ouvrage  ;  mais  s'il  s'est  permis  de 
rejetter  les  faits  avancés  par  ses  prédécesseurs  et  d'en  donner 
de  nouveaux,  sans  autre  autorité  et  sans  autres  preuves  que  des 
suppositions  qu'il  lui  a  plu  d'inventer,  comme  il  a  fait  dans  la 
notice  des  van  Eyck,  combien  d'erreurs  ne  peuvent-il  pas  encore 
se  trouver  dans  les  autres  notices  qu'il  nous  a  laissées?  enfin  s'il 
nous  avait  donné  littéralement  les  vers  de  Luc  de  Heere,  sans 
les  avoir  arrangés  à  sa  façon  et  affaiblis  dans  différens  endroits, 
la  vérité  eut  été  facilement  saisie  de  ses  lecteurs.       L.  D.  B. 

(2)  Il  suffira  d'en  citer  ici  les  premiers  vers,  pour  prouver 
que  leur  élégante  correction  appartient  à  une  époque,  plus  ré- 
cente au  moins  de  cent  ans  ;  cette  inscription  s'y  trouvait  déjà 
avant  les  troubles  du  XVlme  siècle. 

Hic  jacet  eximia  clarus  virtute  Joliannes , 

In  quo  picturje  gratia  mira  fuit; 
Spiranles  formas,  et  humum  Jlorentibus  herlis , 

Pinxit,  ctadvivum  quodlibet  egii  opus ,  etc.     N.  C. 


(  268  ) 

et  j'ai  eu  la  satisfaction  de  voir  que  dans  leur  opinion 
j'avais  prouvé  que  »  Van  Mander  et  ceux  qui  Pont  lé- 
»  gèrement  et  inconsidérément  copié,  n'ont  pas  donné  a 
y>  Hubert  la  part  de  gloire  qui  lui  revenait  équitable- 
»  ment  du  vivant  même  de  son  frère  (i)h  qui,  selon 
»  des  documens  irrévocables ,  il  était  supérieur." 

Le  lecteur  en  conclura  probablement  que  les  ta- 
bleaux de  Hubert  méritent  d'être  recherchés  aussi  bien 
que  ceux  de  Jean ,  et  que,  comme  de  toutes  les  pro- 
ductions qui  leur  sont  attribuées  dans  les  divers  ca- 
binets et  collections,  les  bonnes  le  sont  a  celui-ci,  et 
les  mauvaises  ou  moins  bonnes  à  celui-là,  il  serait  pos- 
sible que  ,  dans  le  fait,  on  se  trompât  quelquefois  très- 
réellement  ,  et  qu'il  fallût  chercher  les  ouvrages  de  Hubert 
parmi  les  beaux  tableaux  attribués  ordinairement  a 
Jean,  et  non  parmi  les  ouvrages  de  quelques  peintres 
du  troisième  ordre,  comme  on  l'a  fait  jusqu'à  présent. 


ŒUVRES    COMPLETES    DE   JEAN    SECOND, 

orné  de  son  portrait, 

lJAP.    p.    130SSCHA. 


vjette  édition,  en  deux  gros  volumes  in-8. ,  est  un 
monument  honorable ,  élevé  à  la  mémoire  de  l'un  de 
nos  plus  illustres  poètes.  On  y  trouve  rassemblé  dans 
une  excellente  préface  et  dans  une  dissertation  savante, 

mwn  ■  ii  ■  ■     ii  ■  m— mm m       n  ■■■.....        m      ■    i  -         - —  —  ■ ■  ■—■■■■ 

(i)  Je  dis.  »  du  vivant  même  de  son  frère";  car  Jean,  par 
des  tableaux,  peints  après  la  mort  de  Hubert ,  et  qui  me  sont 
encore  inconnus,  a  pu  acquérir  un  talent,  jugé  plus  ou  moins 
supérieur  ;  mais  cela  ne  fait  pas  ici  lu  question.  Nous  revien- 
drons sur  cet  objet  dans  un  autre  article.         L.   D.  B. 


■■■y. j 


O  patriae  lux  clara  tune!  quam  misit  Olympe 

Ipsa  Venus,   fovit   Calliopea   si  nu: 
Aetatis   quod„    1ANE,    tibi    tua  fata  neo-aliant,. 

Divitis    impies ti    dotibus    ingenii.  ' 
Carmina  tu  vatiim  aequasti  célébrât  a  priorum  : 
Vix    tibi  "vidertmt    seeula  prisra   parein. 

•}   plnra?  ïïagano  nimirum     BEZA   SECUKDO 
1  radiait    Ausorùae   praemia  prima   Ivrae, 

P.  B  , 


(269  ) 

tout  ce  qu'il  est  possible  Je  réunir,  sur  la  vie  et  les  ou* 
vrages  de  Fauteur.  Ce  qui  donnera  sur-tout  du  prix  a 
cette  édition ,  c'est  qu'indépendamment  du  travail  par- 
ticulier de  M.  Bosscha,  elle  est  enrichie  de  notes  encore 
inédites,  par  C.  Burmann,  et  ornée  d'un  portrait  de 
Jean  second,  d'après  l'original  de  Schoorel,  avec  qui 
son  goût  pour  la  peinture  et  la  sculpture,  lui  avait 
fait  contracter  une  amitié  intime. 

L'original  de  ce  portrait,  qui  a  autrefois  appartenu 
a  Constantin  Huygens,  est  maintenant  entre  les  mains 
de  M.  E.  W.  Bagelaar  (1).  Suivant  M.  Bosscha ,  le 
tableau  de  Schoorel,  qui  se  voit  encore  aujourd'hui  dans 
le  palais  des  Etats-généraux  à  La  Haye  et  qui  a  servi 
de  modèle  a  ceux  qu'on  rencontre  partout,  est  différent 
de  celui  que  possède  M.  Bagelaar  ;  M.  Hooffman  Peerl- 
kamp,  dans  ses  notes  sur  la  vie  de  Huygens,  fait  à  la 

(1)  M.  Bagelaar  a  gravé  lui-même  ce  portrait,  avec  une  scru- 
puleuse exactitude,  et  a  en  la  complaisance  de  nous  en  confier  la 
planche  pour  l'insérer  dans  le  Messager.  Cet  amateur  s'occupe 
particulièrement  de  gravera  l'eau  forte,  sur-tout  le  paysage  avec 
bestiaux;  le  nombre  de  ces  gravures  dépasse  déjà  trois  cent;  la 
collection  complète  en  est  très-rare;  l'auteur  en  offrit  un  exemplaire  à 
la  Société  royale  des  Beaux-Arts  de  Gand,  qui  l'admit  au  nom- 
bre de  ses  membres;  n'exerçant  la  gravure  qu'en  amateur,  il  n'a  fait 
tirer  qu'un  très-petit  nombre  d'exemplaires  de  chaque  planche.  Ses 
ouvrages  ont  un  faire  original  qui  les  distingue.  M.  Bagelaar 
remporta  en  1816  la  médaille  d'honneur  à  la  Société  de  Harlem, 
pour  la  gravure  imitant  le  dessin  et  pour  la  préparation  d'un  noir 
composé  de  productions  indigènes  et  propre  à  imprimer  en 
taille- douce  ;  il  mérita  quelques  années  après  un  autre  prix 
pour  une  gravure  à  l'eau  forte.  Cet  amateur  imite  parti- 
culièrement les  dessins  de  J.  et  G.  Luyken,  dont  il  possède 
une  collection  de  plus  de  quatre  mille  gravures.  Ayant  obtenu 
au  service  de  S.  M.  le  grade  et  la  pension  de  Major,  il  s'est  retiré 
à  Zon  près  de  Eyndhoveu,  sa  ville  natale,  et  s'adonne  aujour- 
d'hui exclusivement  à  la  culture  des  arts;  il  a  exposé  deux  tableaux 
au  dernier  salon  de  Gand. 


(270    ) 

vérité  mention  d'un  portrait  de  Jean  second  par  Picart^ 
et  qui  appartint  a  Huygens  ,  mais  il  paraît  que  ce  ne 
fut  pas  le  même.  M.  Bosscha  le  prouve  par  deux  rai- 
sons: l'une  tirée  du  tableau  même  où  les  connaisseurs 
reconnaissent  la  manière  de  Schoorel ,  l'autre  de  l'in- 
scription qui  est  ancienne,  et  certainement  antérieure 
a  Huygens, 

M.  Bosscha  diffère  encore  d'opinion  avec  M.  Hoff- 
man  Peerlkamp,  au  sujet  du  surnom  Secundus  donné 
a  notre  poëte.  Le  premier  pense  qu'il  lui  a  été  donné 
pour  le  distinguer  de  Jean,  son  oncle  ;  le  second,  pour 
empêcher  de  le  confondre  avec  un  de  ses  frères,  mort 
en  bas  âge,  et  qui  avait  porté  le  même  nom.  L'opinion 
de  M.  Peerlkamp  ne  nous  semble  pas  la  moins  vrai-* 
semblable. 


REPUBLIQUE  DES  CHAMPS  ELYSEES  OU  MONDE  ANCIEN, 

Par  M.  De  Grave,  ancien  conseiller  au  conseil  de  Flandre , 
membre  du  conseil  des  anciens,  etc.  Gand  3  1806.  3  vol.  iri-S°. 


Suite,  voyez  page  218. 

JjEvecyniliia  mater,  des  Latins;  Bepexvv6i<n  wmp  (bere- 
kynikia  mêler)  des  Grecs?  c'est  la  Cybèle,  la  Vesta, 
que  la  mythologie  fait  tantôt  mère  de  Saturne,  et  tantôt 
sa  femme.  Remarquons  d'abord  que  Veste,  au  pluriel 
Vesten ,  est  un  rempart  ;  et  nous  venons  de  voir  deux 
cercles  concentriques  de  villes  fortifiées,  considérés 
ensemble  et  en  rapport  avec  un  lieu  central,  et  l'en- 
clos qu'ils  renferment;  ces  cercles  sont  deux  remparts, 
et  chacune  des  villes  dont  ils  se  composent  a  encore  oti 


(  271  ) 

a  en  ses  remparts  particuliers  ;  que  de  Festen , 
quelle  Vesta  par  excellence  pour  les  mythologues  des 
bords  de  la  méditerranéen  Donnez  a  nos  peintres  a  figu- 
rer allcgoriquement  un  lieu  ainsi  fortifie'  :  dites  leur 
que  ce  lieu  doit  offrir  le  type  caractéristique  d'une 
grande  puissance  ,  d'un  grand  empire  dont  il  est  en 
quelque  sorte  la  tête,  ou,  comme  nous  nous  exprimons 
aujourd'hui,  un  chef-lieu,  une  capitale,  ne  peindront- 
ils  pas  tous  une  femme  ayant  la  tète  ceinte  ou  eou- 
ronne'e  de  tours  et  de  remparts  ,  une  Berecynihia  ? 
mais  que,  dans  leur  imagination,  cette  puissance  soit 
la  mère,  la  cre'atrice  des  autres,  que  ce  soit  la  Belgi- 
que avec  ses  propres  attributs,  tels  que  nous  les  con- 
servons encore,  et  avec  ceux  de  ses  relations  de  su- 
prématie avec  les  autres  peuples  ;  ces  peintres  ne  pla- 
ceront-ils pas  leur  matrone  couronne'e  de  remparts , 
leur  turrita  Mater ,  sur  un  char  de  triomphe  traîné 
par  des  Lions?  ne  l'entoureront-ils  pas  des  divers  ani- 
maux qui  figurent  dans  les  armoiries  des  divers  peu- 
ples qui  reconnaissent  sa  domination? 

Voulez -vous  de  plus  le  nom  écrit  sur  le  tableau  ? 
Jettez  les  yeux  sur  le  coin  que  nous  explorons  5  une 
petite  rivière  s'y  jette  dans  la  Lys  a  Etairej  elle  s'ap- 
pelle Meterbeek  (ruisseau  de  Meter);  son  cours  est,  a 
peu  près ,  parallèle  a  celui  de  la  Borre  ;  l'intervalle 
entre  les  deux,  d'un  peu  plus  d'une  lieue  de  large, 
est  un  terrain  très-bas  et  consiste  pour  la  majeure  partie 
en  prés ,  inondés  l'hiver  par  les  débordemens  des  deux 
petites  rivières  et  de  la  Lys;  c'est  encore  maintenant 
un  lac  pendant  plusieurs  mois  de  l'année ,  quoique 
la  nature  n'ait  pas  été  interrompue,  depuis  bien  des 
siècles,  dans  les  procédés  qu'elle  employé  pour  rehaus- 
ser les  sols  de  cette  espèce.    Sur  ce  terrain  et  a  peu 


(    2?2    ) 

près  h  égale  distance  Je  la  Borrc  et  de  la  Meter,  se 
trouvent  deux  villages ,  nommés:  l'un  sud-Berquin,  à 
une  lieue  nord-ouest  d'Etairej  et  l'autre  nord-Berquiny 
dans  la  même  direction  et  a  une  lieue  du  premier;  l'or- 
thographe française  a  substitué  le  qu  au  A"  dans  le  nom 
de  ces    deux  villages  ;  mais  le  nom  de   la   petite   ri- 
vière qui  en  borde  le  territoire,  est  resté  intact,  et  les 
Berquins  sur  la  Meter  ne    retracent-ils  pas  bien  encore 
le  nom  de  la  Berekynlhia  Mêler  des  Grecs?  si  l'allonge 
tîâai  qu'ils  ont  ajoutée  au  mot  Berquin,  vous  tracasse, 
choisissez  dans  le  grec  tout  ce  que  peut  signifier  cette 
allonge ,   et  toujours   vous  vous   trouverez  ramené  Ta. 
Sert -elle   a   transformer  ce  nom  propre    en   adjectif, 
comme  en  flamand  on  dirait  Berkynsche  meter,  pour 
distinguer  cette  petite  rivière  de  toute  autre  qui  por- 
terait le   même   nom?    cela  expliquerait  pourquoi   on 
trouve  presque  toujours  le  mot  de  Meter  en  grec  et  de 
Mater  en  latin  joint  a  Berekynthia;  cela  voudrait  dire 
alors  la  Meter  Berquinienne  ou  des  Berkins,  et  nous 
ne  tarderons  pas  a  voir  les  causes  de  la  célébrité  de 
ce  ruisseau.  Voulez-vous  que  ce  soit  l'adjectif  theios, 
theia,  divin,    divine?   nous  verrons  tantôt   qu'il  y  a 
eu  plus  de  sujets    qu'il  n'en   faut  pour  diviniser   ces 
lieux.  Voulez-vous  que  l'allonge  soit  empruntée  de  tins, 
ihin?  ces  mots,  qui  signifient  une  colline,  un  monticule, 
un   tertre  ou  élévation  de   terre,   et,    en  même  tems 
une  rive,  un  rivage,  un  attérage,  conviendraient  encore 
parfaitement  aux  deux  Berquins ,  puisque  ces  villages 
sont  effectivement  sur  des  éminences   formées,   selon 
toutes  les  apparences,  par  l'emploi  des  terres  prove- 
nues du  creusement  du   lac,   au  milieu  duquel  ils  se 
trouvent  et  où  ils  forment  encore,  lors  des  inondations 
d'hiver,    des  espèces  d'îles,  sur-tout  le  sud-Bcrqiiin. 


(273) 

Le  Lac  Mœris?  A  la  sommité  du  lac  dont  nous 
Venons  de  parler,  sur  le  bord  de  la  Meter,  et  a  une 
demi  lieue  nord -est  de  nord  Berquin,  se  trouve  un 
village  dont  le  nom  s'e'crit  assez  habituellement  Meris 
ou  Meirîsy  mais,  dans  toute  la  contre'c  environnante, 
ce  nom  est  prononce'  Meeris.  Nous  avons  déjà  vu  l'im- 
portance de  ce  lac  et  de  la  Meter;  nous  allons  voir 
augmenter  de  plus  en  plus  cette  importance,  et  bientôt 
il  ne  nous  étonnera  plus  que  les  Egyptiens  ayent  trans- 
porté un  de  ses  noms  dans  leur  contrée.  Il  est  déjà 
remarquable  de  voir  les  deux  villages  de  Berquin, 
placés  dans  ce  lac,  comme  on  voit  des  Pyramides  pla- 
cées dans  le  lac  Mœris  de  l'Egypte  ;  mais  il  est  plus 
remarquable  encore  que  l'un  des  cotés  de  la  Pyramide  , 
formée  de  villages  et  dont,  comme  je  Pai  dit,  Borre  est 
le  sommet,  traverse  par  le  milieu,  toute  la  longueur  du 
lac  ;  il  y  la  des  études  a  faire  dont  probablement  je  ne 
pourrai  jamais  m'occuper  $  d'autres  s'en  occuperont  un 
jour,  et,  peut-être,  pourrai-je  leur  fournir  quelques 
données  de  plus.  Remarquez  du  reste  que  nous  nous 
trouvons  la  très-près  des  sources  des  rivières  l'Aa> 
PYser  et  la  Lys  qui  se  rendent  dans  la  mer  du  nord  , 
la  Lyane  et  le  Chan  qui  se  déchargent  dans  la  Manche 
a  Boulogne  et  à  Estaples.  Un  coup-d'œil  attentif  mon- 
trera toute  cette  contrée  comme  un  vaste  marais  (inoeras) 
desséché  par  le  travail  des  hommes  ;  les  lits  mêmes  des 
rivières  et  les  nombreux  ruisseaux  qui  s'y  jettent ,  sont 
autant  de  saignées  régulièrement  pratiquées  pour  opérer 
ce  dessèchement  5  et ,  quoique  leur  creusement  ait  dû 
fournir  beaucoup  de  terres  pour  rehausser  le  sol  inter- 
médiaire, ce  sol  est  encore  partout  très-bas  et  consiste, 
pour  la  majeure  partie,  en  prés  qui,  inondés  pendant 
l'hiver,  présentent  encore  annuellement  l'image  de  l'état 

VHmc   livraison.  19 


(274) 

primitif.  Un  vaste  système  de  navigation  extérieure  et 
intérieure  paraît  avoir  été  combiné  et  réalisé  avec  ce 
dessèchement  ;  le  lac  entre  Merville  et  Etaire  s'offre  la 
comme  un  port  ou  bassin  a  l'usage  de  ces  navigations, 
et  les  Berquin  comme  des  môles ,  des  magasins  ;  peut- 
être  ce  lac  était-il  aussi  un  diminutif,  une  commémo- 
ration du  grand  lac  ou  marais  primitif;  peut-être  était-ce 
le  premier  de  tous  les  travaux  exécutés  dans  cette  con- 
trée; on  conçoit  en  elfet  que,  pour  le  succès  îles  autres 
travaux,  il  t\  pu  être  utile  de  creuser  une  espèce  de 
puisard ,  de  réservoir,  a  l'effet  de  maîtriser  et  de  concentrer 
les  eaux  et  tic  les  verser  de  Ta  dans  les  courans  inférieurs. 
Cette  primordialité  expliquerait  la  profonde  vénération 
pour  ses  eaux  (1),  qui,  invoquées  par  les  dieux 
mêmes,  liaient  irrévocablement  leur  parole.  Il  y  a 
ici  une  autre  remarque  a  faire  qui  va  au  même  but  : 
Énéc  entendit  dans  le  premier  vestibule  des  enfers , 
le  vagissement  et  les  pleurs  des  enfans  morts  en  naissant 
ou  pendant  qu'ils  étaient  a  la  mamelle  ;  beè'rd-kind 
veut  dire  enfant  enseveli  ou  inhumé;  si  le  nom  des 
Berhins  était  la  contraction  de  ces  deux  mots,  si  en 
effet  on  y  enterrait  les  enfans  du  premier  âge,  n'était- 
ce  pas  une  commémoration  perpétuelle  de  l'enfance 
d'un  immense  établissement  commencé  par  la  création 
des  deux  villages,  dont  les  grecs  ont  aussi  constaté 
l'antériorité  en  en  composant  le  nom  de  la  mère  de  leurs 
dieux?  Du  reste  il  n'échappera  pas  a  l'attention  quelle 
foule  de  maternités  nous  avons  ici  sous  les  yeux  ; 
Meter,  nom  du  ruisseau  qui  borde  le  lac,  s'identifie 
avec  la  pimfy ,  des  Grecs ,  et ,  par  la  transformation  habi- 
tuelle de  W  en  «,  avec  la  mater ,  des  Latins;  Meer , 
le  lac  lui-même,  avec  la  mère,  des  Français,  et  moer, 

0)  On  va  voir  que  c'est  aussi  le  Styx  des  ancieus. 


(  *75) 
jynonyme  Je  meer,  avec  la  moer  ou  moere ,  des  Fla- 
mands; ce  mot  signifie  généralement  une  mère,  même 
parmi  l'espèce  humaine,  mais,  pour  celle-ci  seulement, 
la  politesse  y  a  introduit  la  lettre  d;  par  mépris ,  mau- 
vaise humeur  ou  main  aise  éducation,  on  dit  encore 
moere  au  (ieu  de  mneder.  Il  y  a  donc  ici  des  mères 
pour  les  hommes  comme  pour  les  dieux. 

Un  grand  renseignement  qui,  parmi  tant  d'autres, 
désigne  ce  lac  comme  tut  nœud,  un  centre  de  naviga- 
tion, c'est  le  nom  du  village  de  Schoutenhove ,  situé 
au  sommet  de  la  Meter ,  et  près  de  celui  de  Merris. 
Ce  nom  signifie  rigoureusement  cour  de  l'amirauté,  cour 
des  chefs,  des  directeurs ,  des  préposés  de  la  navigation  ; 
Schout  est  un  amiral,  Schout  by  nagt,  un  vice-amiral, 
ou  amiral  de  nuit,  water-Schout ,  un  officier  ou  bailli 
de  port  ou  de  navigation. 

S'il  y  a,  en  effet,  la  une  origine  égyptienne,  le  vil- 
lage de  Niele,  (prononcez  comme  Nile),  qui  est  aux 
portes  de  Terouane,  sur  le  bord  de  la  Lys  et  du  côté 
où  cette  rivière  entrait  dans  la  ville,  pourrait  très- 
bien  en  être  une  autre.  Terouane,  comme  nous  l'avons 
vu ,  était  une  barrière  sur  la  Lys ,  une  clef  et  comme 
un  poste  avancé  sur  cette  importante  entrée  d'une 
grande  enceinte  de  défense;  on  a  pu,  je  n'en  doute 
pas,  arriver  par  bateaux  de  Montreuil  et  de  Boulogne 
dans  la  Lys  et  jusques  devant  Terouane  ;  la  commen- 
çait la  navigation  intérieure  a  laquelle  il  paraît  que  les 
étrangers  ou  n'étaient  pas  admis  ou  ne  l'étaieut  que 
sur  des  bateaux  du  pays,  avec  des  précautions  et  un 
cérémonial  qui  la  leur  rendaient  sacrée  et  dont  nous 
reconnaîtrons  plus  bas  de  grandes  traces.  C'est  à  Niele 
devant  Terouane,  qu'il  fallait  s'arrêter  et  séjourner; 
c'était  le  premier  point  qui  séparait  la  navigation  sur 


la  Lys  en  extérieure  et  intérieure,  en  profane  et 
sacrée;  et  il  serait  beaucoup  moins  étonnant  qu'on  ne 
le  croit  que  ce  fût  la  le  type  du  nom  donné  au  fleuve 
principal  des  Egyptiens ,  en  commémoration  de  la  Lys , 
qui,  pour  ces  étrangers,  était  le  grand  fleuve  de  la 
contrée  mère. 

La  suite  au  cahier  prochain. 


AGRICULTURE. 


IV  crhdadige  Landbouw-honst  der  Vlamingen ,  ver- 
handeld  in  zes  zamensprahen ,  tusschen  eenen  grond- 
cigenaar  en  zynejipachter;  door  J.  L.  van  Aelbroek, 
lid  van  den  stedeljhen  raad  te  G  end  (1). 

Omnium  rerum  ex  quibus  aliquid  acquiritur, 
nihil   Agriculture    est    melius  ,     nifail  uberins, 
nihil  dulcius,   nihil  Iîbero   homme  dignius. 
Cicero  ,  de  offlciis  ,  lib.  I. 


bous  quelque  point  de  vue  qu'on  envisage  l'Agri- 
culture, elle  est,  a  juste  titre,  placée  an  premier  rang 
parmi  les  connaissances  humaines  :  c'est  une  science 
d'application  par  excellence,  c'est  l'art  le  plus  généra- 
lement utile;  c'est  elle  enfin  qui  vivifie  toutes  les 
sources  du  Lien-être  public.  Nous  nous  félicitons  que 
cette  vérité  n'ait  pas  besoin  d'être  répétée  dans  notre 
patrie  ,  honorée  de  tout  tems  comme  la  terre  classi- 
que de  l'Agriculture. 


(1)  A  Gand  ,  chez  Snoeck-Ducaju  et  Dujardin,  et  pour  les 
provinces  septentrionales,  chez  C.  C.  vander  Hoek ,  à  Leyden  , 
successeur  des  frères  Murra.y.  Un  vol.  iu-8.  de  322  pages  et  19  plauch. 


(  277  ) 

îl  peut  paraître  étonnant,  néanmoins,  que  jusqu'à 
nos  jours,  peu  ou  point  d'auteurs  aient  traité  a  fond, 
c'est-h-dire  d'après  leur  propre  expérience ,  un  sujet 
d'une  importance  aussi  majeure.  Si  Ton  peut  citer 
quelques  écrits,  leurs  auteurs  ou  se  sont  égarés  dans 
le  labyrinthe  des  spéculations  hypothétiques ,  puisées 
dans  les  sciences  accessoires,  ou  bien,  ils  se  sont  opi- 
niâtrement restreints  aux  anciennes  données ,  dictées 
d'âge  en  âge  aux  cultivateurs  par  une  tradition  plus 
ou  moins  aveugle. 

Il  était  réservé  a  notre  digne  concitoyen  /.  L.  van 
Aelbroek ,  non-seulement  de  faire  connaître  exactement 
l'état  actuel  de  l'Agriculture  Flamande,  mais  en  outre, 
de  tracer  des  routes  nouvelles,  indiquées  par  sa  pro- 
pre expérience ,  afin  de  porter  Part  de  nourrir  les 
hommes  a  une  hauteur  qui  approche  de  la  perfection  : 
une  constance  admirable  dans  les  recherches,  une  rec- 
titude de  jugement  a  toute  épreuve  dans  l'appréciation 
des  résultats  obtenus  ,  tout  enfin  ,  prouve  la  haute 
importance  du  beau  travail  de  notre  compatriote. 

Les  bornes  de  cet  écrit  périodique  ne  permettant 
point  d'entrer  dans  les  détails  techniques  de  l'agricul- 
ture, (détails  qu'il  faut  lire  et  méditer  dans  l'ouvrage 
même),  nous  avons  cru  devoir  offrir  ici  a  nos  lecteurs 
quelques  idées  générales,  applicables  toutefois  a  l'état 
de  situation  où  se  trouve  maintenant  le  Royaume  des 
Pays-Bas ,  et  suggérées ,  pour  la  plupart ,  par  notre  auteur 
lui-même. 

C'est  a  la  constante  application  a  l'agriculture  et 
à.  leur  infatigable  activité  dans  les  manufactures  et  le 
commerce,  que  les  Flamands  doivent  leur  perfectionne- 
ment social  :  on  voit  dans  les  mémoires  de  l'Académie 
de  Bruxelles  (année  1777)  que  dans  le  XUIn,c  siècle, 


C  s;*  ) 
la  ville  de  Gand  possédait  4o,ooo  tisserands  pour  les 
toiles  et  les  draps  ;  ces  productions  du  sol  et  quelques 
autres  fruits  des  travaux  agricoles  composaient  la 
charge  des  vaisseaux  flamands  qui ,  dès  lors ,  navi- 
guaient sur  l'Archipel  et  la  Me'dilerrannée  ;  Bruges 
était  une  des  vilLs  anséaliques  ;  les  marchands  de  tous 
les  pays  avaient  appris  a  faire  le  Vf  yage  de  la  Flandre, 
Mais  rien  n'est  stable,  disons  nons  avec  l'auteur  5  les 
manufactures  ,  le  commerce  et  la  navigation  des  Fla- 
mands ont  reçu  plus  d'une  fois  des  atteintes  mortelles, 
et  a  chacun  de  ces  coups,  l'agriculture  est  tombée  en 
langueur  :  dans  ces  Provinces ,  il  faut  que  le  commerce , 
l'industrie  manufacturière  et  l'agriculture  se  tiennent 
par  la  main,  pour  que  l'un  et  l'autre  puisse  marcher 
d'un  pas  sûr.  Nous  n'hésitons  pas  d'ajouter  :  l'éclat 
même  dont  brillent  les  nations  par  l'industrie  des  ate- 
liers peut  être  passager;  la  prospérité  établie  sur  une 
bonne  culture  est  impérissable. 

Cependant  il  ne  suffit  pas  d'éclairer  l'agriculture  , 
pour  en  accélérer  les  progrès,  le  Goiivernement  a  aussi 
sa  tâche  a  remplir  envers  elle.  Ce  n'est  que  par  les  lu- 
mières et  les  encouragemens  réunis  qu'on  peut  lui  as- 
surer une  prospérité  durable  (1). 

De  conséquence  en  conséquence,  notre  auteur  fait 
successivement  voir  quelles  doivent  être  les  relations 
du  Gouvernement  avec  son  e'tat  agronome;  il  voit  beau- 
coup d'avantages  dans  la  coopération  des  sociétés 
d'agriculture;  il  est  persuadé  que  les  chefs  de  l'ad- 
ministration n'ont  qu'a  le  vouloir ,  pour  augmenter  de 
plus  en  plus  l'éclat  de  cette  branche  de  notre  prospérité 
et  il  prend  sur  lui  de  leur  indiquer  ces  moyens  :  réussir 

(1)  Chaptal,  la  chimie  appliquée  à  l'agriculture.  Disc,  prèlim. 


(  279  ) 
a  donner  à  l'industrie  manufacturière  et  au  commerce 
l'appui  de  l'agriculture  nationale ,  c'est  être  sûr  de  dou- 
bler les  bénéfices  de  chacune  de  ces  branches  de  revenu. 
Et  en  effet  quelles  sources  d'intarrisablcs  richesses 
que  les  fabriques  et  le  commerce  dont  la  matière  pre- 
mière se  trouve  en  Flandre!  tel  que  le  chanvre  pour 
les  voiles  et  les  cables,  le  lin  pour  les  fils  et  les  toiles 
et  pour  tant  d'autres  étoffes  où  nos  fds  de  lin  peuvent 
être  employée,  ainsi  que  les  fds  les  plus  fins,  dont  on 
se  sert  pour  la  fabrication  des  dentelles;  le  colza  pour 
le  commerce  des  J  miles,  et  le  houblon  pour  les  br; 


séries,  etc.  etc. 


Le  Traité  de  l'Agriculture  pratique  des  Flamands 
est  rédigé  en  forme  de  dialogues  entre  un.  propriétaire 
et  son  fermier  ;  ils  soi  it  au  nom]  »re  de  six  : 

Le  Ier  dialogue  roule  sur  les  diverses  qualités  des 
terres  dans  les  deux  Flandres,  sur  la  manière  de  les 
apprécier  relativement  a  la  culture;  sur  leurs  défauts 
ei  sur  les  moyens  de  les  corriger ,  etc. 

Le  IImc,  sur  les  bonnes  et  mauvaises  espèces  de  prés, 
sur  les  moyens  de  les  améliorer,  sur  les  prairies  natu- 
relles et  artificielles. 

Le  JRmey  sur  les  engrais,  quelles  en  sont  les  meil- 
leures espèces,  pour  quelles  terres  et  quels  fruits  on 
les  employé,  —  de  la  nécessité  des  distilleries,  enfin 
de  l'engrais  atmosphérique. 

Le  IVme,  sur  les  principaux  instrumens  aratoires, 
le  labour,  le  bêchement  et  le  nettoyement  des  terres. 

Le  Vme,  sur  l'éducation,  la  nourriture  et  Pengrais- 
sement  des  bêtes  a  cornes;  sur  la  saison,  la  manière  et 
l'ordre  dans  lequel  il  faut  semer  et  planter  toutes  sortes 
de  productions  et  sur  leur  rapport;  etc. 

Le  VImc ,  sur  les  plantations  d'arbres  a  l'entour  des 


(  280  ) 

terres ,  sur  la  disposition  et  l'utilité  des  vergers ,  sur 
Pextirpation  de  l'orobanche  dans  les  trèfles  et  la  mala- 
die du  froment  ;  enfin ,  sur  les  grandes  et  petites  fer- 
mes ,  sur  l'état  des  petits  fermiers ,  des  fileuses  et 
des  tisserands;  sur  l'exportation  du  lin,  etc. 

C'est  a  la  circonstance  du  concours,  ouvert  en  1818, 
par  le  Bureau  d'Agriculture  de  Londres,  (Agricultural 
JBoard)^  que  nous  devons  l'excellent  Traité  d'Agricul- 
ture pratique ,  publié  aujourd'hui  en  langue  nationale, 
dans  un  style  clair  et  précis ,  adapté  au  sujet  et  naturel- 
lement destiné  a  être  lu  et  médité  aussi  bien  par  les 
propriétaires,  que  par  les  cultivateurs.  Quant  a  ces 
derniers,  nous  joignons  nos  vœux  a  ceux  de  Fauteur 
pour  que  le  Gouvernement  puisse  trouver  les  moyens 
de  faire  entier  comme  livres  élémentaires  dans  Pin- 
struction  primaire,  quelques  écrits  rédigés  d'une  ma- 
nière claire  et  populaire  ,  sur  les  principes  de  Pagri- 
culture  ;  comme  ,  a  P imitation  des  Suédois ,  nous 
Pavons  vu  introduire  par  Padministration  actuelle  dans 
nos  Cours  des  Universités.  Déjà  en  1761,  Pauteur  des 
Essais  sur  divers  sujets  de  politique  et  de  morale , 
(M.  Schmidtd'Avenstein),  avait  écrit  »  pour  éclairer 
»  le  laboureur ,  on  pourrait  distribuer  un  bon  abrégé 
)>  clair  et  simple  des  premiers  principes  de  l'agriculture 
»  et  des  méthodes  les  plus  convenables  a  chaque  pro- 
»  vince  :  abrégé  qu'il  faudrait  introduire  dans  les  écoles, 
y>  où  la  jeunesse  du  peuple  reçoit  son  éducation.  On  a 
»  souvent  indiqué  ce  moyen  et  on  ne  saurait  assez  le 
»  proposer  a  l'attention  du  Souverain." 

Swift  fait  exposer  par  Gulli\er  a  un  des  rois  de  ses 
pays  imaginaires,  toutes  les  finesses  de  la  politique  du 
système  de  l'Europe.  Le  roi  lui  répond  :  »  si  j'avais  un 
homme   qui  seût  faire  venir  deux   épis,  où,  jusqu'ici 


(  a8i  ) 

il  n'en  vient  qu'un  seul,  je  ferais  plus  de  cas  Je  cet 
homme  que  de  tous  vos  grands  politiques.  »  Notre 
compatriote  est  un  de  ces  hommes  la,  et  toute  sa  po- 
litique consiste  a  être  utile  a  son  pays  :  son  travail 
me'rite  donc  le  plus  éclatant  succès,  et  nous  osons 
prédire  qu'il  l'obtiendra. 

J.  L.  Resteloot. 


CHEVRE  ,    CHEVREAU  ,     BOUC    DU    THIBET  , 
ET    BÉLIER    DE    LA    CIRCASSIE. 


Planche   huitième. 

MM.  les  Commissaires  de  la  Société  royale  d'Agri- 
culture et  de  Botanique  de  Gand ,  se  sont  rendus  a 
Bruges ,  a  la  nouvelle  de  l'arrivée  du  navire  le  Triton , 
capitaine  Thomas-Jean  Coellinck,  a  Ostende  le  4  No- 
vembre dernier,  pour  y  recevoir,  d'après  les  instructions 
de  Son  Exe.  M.  le  Ministre  Falck,  une  chèvre,  un 
chevreau,  un  bouc  du  Thibet,  et  un  bélier  de  la  Cir- 
cassie  a  quatre  cornes;  en  faire  le  transport  a  Gand  et 
leur  donner  tous  les  soins  nécessaires  jusqu'à  ce  qu'il 
fût  décidé   de  leur  destination  définitive. 

Ces  beaux  lanifères  envoyés  en  présent  a  S.  M.  le  Roi 
des  Pays-Bas ,  par  M.  P.  De  Lescluze  de  Bruges ,  ac- 
tuellement encore  dans  les  parages  du  Levant,  jouissent 
de  la  meilleure  santé.  Sous  le  rapport  de  l'industrie 
manufacturière  du  Royaume ,  il  serait  a  désirer  que 
M.  De  Lescluze  fit  passer  encore  dans  sa  patrie  quelques- 
unes  de  ces  belles  chèvres  avec  un  bouc  de  la  même 


(    282    ) 

espèce,  non-seulement  pour  hâter  la  jouissance  d'une 
nouvelle  richesse  agricole,  mais  encore  pour  s'assurer 
en  ce  Royaume  la  race  pure  de  ces  utiles  animaux. 

La  Frauce  aime  a  se  rappeler  qu'elle  doit  a  M.  Dé- 
clieux,  de  Rouen,  les  plantations  du  Cafc'yer  en  ses 
possessions  d'Amérique  :  dans  la  traverse'c  qu'il  eut  a 
faire  pour  la  Martinique,  avec  le  premier  Caféyer  qu'il 
tenait  du  jardin  des  plantes  d'Amsterdam ,  il  partagea 
journellement  avec  ce  précieux  arbuste,  sa  ration  d'eau; 
des  privations  pareilles  ne  sont  pas  rares  dans  les  tra- 
versées que  font  des  pays  lointains  les  marins  de  notre 
Royaume  ;  et ,  l'équipage  du  navire  le  Triton  vient 
d'en  fournir  une  nouvelle  preuve. 

C'est  non-seulement  aux  instructions  de  M.  De  Les- 
cluze ,  qu'est  due  la  conservation  cic  ces  animaux , 
mais  encore  à  la  diminution  de  la  ration  d'eau  a  la- 
quelle l'équipage  s'est  volontairement  soumis. 

Les  chèvres  et  le  bouc  arrivés  a  Taganrok,  ville 
située  sur  les  côtes  de  la  mer  d'Azof ,  y  furent  embar- 
qués le  16  Juin  de  cette  année;  un  bélier  a  quatre 
cornes  et  une  brebis  a  laine  noire,  transportés  aussi 
par  un  des  navires  de  la  maison  De  Lescluze,  venu 
d'Anappa,  en  Circassie,  furent  pris  a  bord  du  Triton, 
'a  Caffa  (l'ancienne  Théodosie)  dans  la  Crimée.  La 
femelle  se  portant  inoins  bien  que  le  bélier  ,  a  suc- 
combé a  une  maladie  de  langueur,  pendant  le  voyage. 

D'honorables  souvenirs  pour  l'Agriculture  et  la  Bota- 
nique se  rattachent  au  nom  de  Lescluze  (1).  Charles  De 
Lescluze,  plus  connu  sous  le  nom  de  Clusius,  a  le  pre- 


(1)  Charles  De  Lescluze  fit  ses  études  à  Gaud,  à  Louvain  et  à 
Moutpellier;  il  devint  eu  i5g2,  directeur  du  jardin  de  l'Université 
de  Leyden;  il  y  mourut  en  i6o<j,   âgé  ue  83  ans. 


(  285  ) 

mier  importé  dans  notre  pays  un  nombre  considérable 
d'arbres,  d'arbustes  et  de  fleurs  inconnus,  et  des  ac- 
tions de  grâces  sont  dues  a  sa  mémoire  a  bien  plus 
juste  titre  encore,  parce  qu'il  a  répandu  la  connais- 
sance de  la  pomme  de  terre,  qui  cependant  ne  fut  cul- 
tivée en  grand  que  plus  d'un  siècle  après  lui. 

Descendant  d'un  liomme  aussi  méritant,  si  M.  P. 
De  Lescluze ,  non  moins  instruit  dans  toutes  les  bran- 
ches du  commerce  qu'amateur  zélé  des  beaux-arts,  a 
rempli  près  du  Gouvernement  la  tâche  qui  lui  était 
confiée,  les  beaux-arts  a  leur  tour  lui  doivent  de  la 
reconnaissance  pour  avoir  importé  dans  sa  patrie,  des 
marbres  et  antiquités  provenues  de  fouilles  récemment 
faites  au  temple  d'Eleusis ,  et  au  Pirée  a  Athènes  : 
nous  en  donnerons  quelques  dessins  dans  le  prochain 
cahier,  avec  Pagréation  de  M.  Ch.  Senveytens,  de  Bru- 
ges, possesseur  de  ces  précieux  antiques. 

Un  jour  sans  doute  et  l'occasion  n'eu  est  peut-être 
pas  très-éloignée,  l'industrie  nationale  aimera  a  se  res- 
souvenir qu'elle  a  trouvé  dans  la  maison  de  MM.  P.  De 
Lescluse  père  et  fils,  des  amis  éclairés  de  leur  patrie 
qui  n'ont  pas  de  plus  douce  jouissance  que  de  la  servir 
dans  l'intérêt  de  l'agriculture  et  des  beaux-arts. 


VARIETES. 


JCiN  rendant  compte  de  la  fête  célébrée  a  Harlem  5  nous 
avons  fait  mention  du  mémoire  de  M.  Koning,  rela- 
tivement a  l'invention  de  l'imprimerie.  Nous  nous 
étions  proposé  d'en  donner  l'analyse  :  mais  M.  Schel- 


(  284  ) 
tema  Fa  fait  avec  un  rare  discernement  ,  et  nous  ne 
pourrions  que  répéter  ce  qu'il  a  dit:  seulement,  pour 
qu'on  sache  a  quoi  s'en  tenir  sur  l'honneur  attribué  a 
Laurent  Coster ,  nous  transcrivons  ici  les  conclusions 
par  lesquelles  M.  Scheltema  termine  sa  lettre  a  MM. 
les  Rédacteurs  de  la  galerie  des  contemporains,  sur  la 
nécessité  de  rectifier  l'article  concernant  M.  de  Koning , 
et  nous  donnons  ainsi  en  peu  de  mots  le  résultat,  le 
tout  ce  qui  a  été  écrit  de  mieux  sur  cette  question. 

M.  Scheltema ,  d'après  ses  lumières  qu'il  a  puisés 
dans  le  mémoire  de  M.  Koning,  et  ailleurs,  déclare 
qu'il  tient   pour  constant  : 

i°  Que  les  impressions  sur  lesquelles  la  ville  de  Har- 
lem fonde  son  titre  a  l'honneur  de  la  première  inven- 
tion de  l'imprimerie,  étant  examinées  avec  les  connais- 
sances requises  de  cet  art,  portent  les  preuves  indu- 
bitables qu'elles  sont  faites  avec  des  caractères  fondus 
et  mobiles;  que  ces  caractères  appartiennent  a  l'enfance 
de  l'art,  et  que  ces  impressions  ont  une  affinité  di- 
recte avec  les  premières  épreuves  de  la  Xylographie, 
(imprimerie  en  caractères  de  bois  de  EuAok  et  TpxÇtn) 
laquelle  est  généralement  considérée  comme  l'art  pré- 
curseur de  l'imprimerie. 

2°  Que  ces  impressions  portent  des  preuves  intrinsè- 
ques et  extrinsèques  d'une  origine  hollandaise,  et 
qu'elles  appartiennent  a  la  première  moitié  du  XVmesiècle. 

3°  Qu'il  existe  plusieurs  preuves  résultant  du  témoi- 
gnage d'écrivains  étrangers  et  nationaux  (sur -tout 
après  que  ces  pièces  eussent  été  trouvées  a  Harlem  )  , 
que  ces  ouvrages  ont  été  imprimés  dans  cette  ville. 

4°  Qu'il  n'existe  aucun  motif  pour  rejetter  le  témoi- 
gnage motivé  et  modeste  de  J  uni  us  ;  qu'ainsi  on  peut 
regarder  comme   imprimeur  de  ces  ouvrages  Laurent , 


(  285  ) 

[fils  (h  Jean),   homme  d'un  caractère  irréprochable, 
qu'on  n'a  jamais  accusé  d'aucune  prétention  gratuite. 

5°  Que  toutes  les  objections  qu'on  a  faites  contre 
l'existence  de  Laurent  Coster  et  contre  la  crédibilité 
du  témoignage  de  Junius ,  peuvent  dès  maintenant 
être  considérées  comme  résolues. 

6°  Qu'un  concours  de  circonstances ,  et  sur-tout  une 
conformité  qu'on  ne  peut  méconnaître,  entre  les  der- 
nières productions  de  la  presse  de  Coster ,  (  la  2me  édi- 
tion du  Spiegel  et  les  Donats)  et  les  premières  pro- 
ductions de  Mayence  (  la  Grammatica  de  Gallus  )  ont 
fourni  une  preuve  juridique,  que  les  caractères  et  les 
instruments  de  la  fonderie  de  Harlem  ont  été  transpor- 
tés a  Mayence. 

7°  Que  la  priorité  de  l'existence  de  l'imprimerie  de 
Harlem  ,  se  prouve  encore  par  les  productions  d'une 
presse  qui  y  fut  établie  plus  tard,  productions  qui  ont 
beaucoup  de  conformité  avec  les  premières  impressions 
de  Coster y  mais  aucune  avec  celles  de  Mayence;  d'où 
l'on  peut  conclure  de  l'enfant  a  la  mère. 

8°  Que  l'existence  de  cette  presse  de  Harlem,  si- 
multanément avec  celle  de  Mayence,  résulte  des  ten- 
tatives que  les  Anglais  firent  en  1462  pour  faire  venir 
un  imprimeur  de  Harlem,  et  de  ce  que  tant  d'imprimeurs 
de  cette  ville,  se  sont  rendus  célèbres  a  cette  époque 
en  pays  étrangers,  sur-tout  en  Italie. 

90  Que  Guttenberg  et  Fust  ont  établi  la  première 
imprimerie  en  Allemagne  ,  postérieurement  a  l'année 
i44o ,  et  qu'on  a  imprimé  a  Mayence  divers  ouvra- 
ges sans  millésime ,  nommément  la  Bible  ;  que  plus 
tard,  sur-tout  après  que  Pierre  Scheffer  se  fut  joint 
a  cette  association,  l'art  de  l'imprimerie  y  fut  porté  à 
sa  perfection  ;  que  cependant  cette  imprimerie  ne  se  fit 


{  286  ) 

connaître  qu'en  i457 ,  par  l'édition  du  fameux  Codex 
Psalnwrum. 

io°  Que  les  allc'gations  des  champions  de  Mayence 
et  de  Strasbourg,  contre  la  prétention  de  Harlem,  ne 
peuvent  soutenir  l'épreuve  d'un  examen  impartial,  tant 
h  cause  de  la  contradiction  qu*on  voit  dans  (eurs  rap- 
ports ,  que  parce  qu'on  ne  pourrait  admettre  leurs 
assertions  sans  taxer  de  mauvaise  foi  et  d'ignorance  un 
grand  nombre  d'hommes  qui  se  sont  rendus  aussi  cé- 
lèbres par  leur  caractère  que  par  leurs  lumières. 

Toutes  ces  raisons  qu'il  faut  voir  dans  l'ouvrage 
même,  conduisent  RI.  Schcltcma  a  donner  des  conclu- 
pions  dans  cette  discussion,  et  elles  sont: 

»  L'art  de  l'imprimerie  ;  été  invente  a  Harlem  par 
»  Laurent  Coster ,  peu  de  tems  après  l'année  ii22j 
»  il  a  étc  exercé  et  constamment  amélioré  par  i'expé- 
»  rienec,  jusqu'en  i43o,.  » 

»  L'imprimerie  a  été  introduite  a  Mayence,  l'aimée 
»  i44o;  et  c'est  h  Guitenherg  ,  a  Fust  et  a  Schejfer , 
»  qu'est  dû  l'honneur  des  principales  améliorations,  de 
r>   la  perfection  et  de  la  propagation  de  cet  art.  » 


Collection  de  gravures  au  trait,  représentant  les  plans , 
coupes,  élévations  ,  profils?  voûtes,  plafonds,  etc. 
des  principaux,  raonmnens  d'architecture  et  de  sculp- 
ture de  la  ville  de  Bruges,  depuis  le  i4mc  jusqu'au 
i7me  siècle,  par  M.  Rudd,  architecte  ;  dédié  à  S.  E. 
M.  Falck,  Ministre  de  l'Instruction  publique. 

Bruges  a  tenu  long-tems  le  premier  rang  parmi  les 
villes  de  la  Flandre.  Cette  cité  si  intéressante  par  les 
souvenirs  historiques  qui  s'y  rattachent,  si  célèbre 
jadis  par  la  résidence  de  cette  cour  fastueuse  et  bril- 


i    ^OJ'AV. 


11! 


(287  ) 

lante  des  Comtes  de  Flandre,  si  importante  par  l'in- 
dustrie et  la  richesse  de  ses  habitans,  attira  dans  son 
sein ,  vers  le  milieu  du  XIV"16  siècle ,  les  consulats  de 
tous  les  peuples  commerçans  du  Nord  et  du  Midi,  qui 
en  firent  le  centre  de  leurs  relations  commerciales, 
depuis  le  golfe  de  Livonie  jusqu'à  l'Adriatique  et  les 
mers  d'Espagne. 

Ces  divers  peuples  élevèrent  au  milieu  de  Bruges, 
dans  le  ^oût  de  leur  architecture  nationale,  des  édifi- 
ces  et  des  monuraens,  qui  n'ont  plus  guère  d'autres 
modèles  que  dans  cette  ville. 

M.  Rudd  rend  un  véritable  service  aux  arts,  en  pu- 
bliant la  collection  gravée  de  ces  monumens. 

Chaque  monument  a  été  scrupuleusement  mesuré 
dans  ses  plus  petits  détails;  a  l'aide  de  l'échelle  qui  y 
est  jointe,  on  peut  en  connaître  toutes  les  dimensions. 

L'ouvrage  se  composera  de  huit  cahiers,  contenant 
chacun  sept  gravures,  parmi  lesquelles  se  trouvera  une 
vue  perspective  prise  dans  Bruges  ;  on  ajoutera  à  la 
collection  une  vue  générale  de  cette  ville  hors  des  murs 
et  un  texte  explicatif  dans  les  deux  langues. 

Le  prix  de  chaque  cahier  sera  de  huit  francs;  il 
paraîtra  un  cahier  tous  les  deux  ou  trois  mois. 

On  souscrit  a  Bruges,  chez  Bogaert-Dumortier, 
imprimeur-libraire  ;  et  a  Gand ,  chez  P.  F,  de  Goesin- 
Verliaeghe ,  imprimeur  de  l'Université,  rue  hautport. 


La  Société  royale  d'Agriculture  et  de  Botanique  de 
Gand  ,  vient  de  faire  une  perte  sensible  par  la  mort 
prématurée  de  M.  le  docteur  De  Volder ,  de  Gistelles; 
médecin  distingué ,  il  avait  sur-tout  des  connaissances 
étendues  en  histoire  naturelle,  qu'il  avait  puisées  dans 


(  288  ) 

ses  longs  voyages;  le  jardin  de  botanique,  de  Gand,  lui 
est  redevable  de  plusieurs  plantes  qu'il  a  rapportées  de 
Batavia ,  dans  un  voyage  dont  M.  Sinave ,  de  Bruges , 
lui  a  procuré  l'occasion  sur  un  de  ses  navires.  Peu 
de  tèms  avant  sa  mort  il  avait  encore  envoyé  pour  le 
cabinet  de  l'Université  quelques  anciennes  monnaies 
nationales,   assez  curieuses,  trouvées  a  Gistelles. 


La  société  royale  pour  la  langue  et  la  littérature  na- 
tionales a  Bruges ,  a  tenu  le  premier  de  ce  mois  la  4me 
fête  anniversaire  de  son  installation. 

M.  le  conseiller  d'état  Holvoet  ,  gouverneur  de  la 
province ,  dans  le  discours  d'ouverture  a  retracé  les 
progrès  de  la  société ,  et  s'est  rendu  l'interprète  de  la 
reconnaissance  de  tous  les  membres  pour  les  encoura- 
gemens  que  la  société  reçoit  de  S.  M. 

M.  Sandelin ,  a  lu  le  rapport  des  travaux  de  la  so- 
ciété pendant  cette  dernière  année. 

M.  Verhaeglie  ,  a  fait  connaître  le  jugement  des  pièces 
envoyées  au  concours,  pour  le  Poème  sur  les  colonies 
de  Frederiks-oord  et  de  Wortel.  La  médaille  d'or  a  été 
décernée  a  M.  /.  van  ffarderwyk,  de  Rotterdam,  et 
celle  d'argent  sur  le  même  sujet  a  M.  R.  If.  van  60- 
meren,  de  la  même  ville.  La  médaille  d'or  pour  le 
prix  d'Histoire  n'a  pas  été  décernée ,  mais  les  réponses 
de  MM.  /.  van  Harderwyh  susnommé,  et  A.  van 
Zutphen,  de  Gorcum  ,  furent  trouvées  dignes  de  la 
médaille  d'argent. 

Cette  société  vient  de  faire  imprimer  le  recueil  de 
différons  morceaux  de  poésie  couronnés  dans  les  con- 
cours et  d'autres  pièces  lues  dans  les  séances  particu- 
lières. 


MESSAGER 

DES  SCIENCES  ET  DES  ARTS. 


VITIme.  Livraison  —  Décembre  182a. 


INVENTION  NOUVELLE. 


Xje  sieur  J.  C.  N.  StumpfF,  musicien  attaché  a  un  des 
théâtres  d'Amsterdam,  vient  d'inventer,  il  y  a  quelque 
tems ,  un  mécanisme  pour  accorder  les  timhales  j  in- 
vention peu  connue,  qui  mérite  l'attention  des  com- 
positeurs et  des  artistes. 

On  se  sert  ordinairement  pour  accorder  ces  instru- 
mens,  de  douze  a  quatorze  vis,  pour  rendre  par  une 
expansion  plus  ou  moins  forte  de  la  peau,  le  ton  plus 
haut  ou  plus  bas;  il  est  difficile,  sinon  impossible,  de 
faire  cette  opération  vite  et  avec  justesse  en  même  tems. 
On  avait  déjà  cherché  pour  remédier  a  cet  inconvénient, 
mais  il  paraît  qu'on  n'a  point  encore  réussi  j  le  moyen 
employé  par  M.  Stumpff,  remplit  parfaitement  le  but 5 
il  est  simple  et  se  recommande  sous  tous  les  rapports. 

Les  timbales  posées  sur  un  trépied ,  sont  tenues 
sur  un  pivot,  par  un  mécanisme  intérieur,  qui  ne  nuit 
nullement  au  son,  soit  a  droite  ou  a  gauche,  selon 
qu'il  doit  être  haut  ou  bas.  L'accord  se  fait  dans  4a5 
secondes  sans  le  moindre  bruit  et  avec  la  plus  grande 
justesse  ;  toutes  les  vis  étant  attirées  ou  relâchées  avec 

VIIIme  livraison.  20 


(  290  ) 

la  même  force.  Le  mécanisme  peut  être  adapté  aux 
timbales  ordinaires;  il  est  durable  sans  être  coûteux. 

On  sent  quel  parti  les  compositeurs  peuvent  tirer  de 
cette  invention  dans  leurs  combinaisons  harmoniques  ^ 
lesquelles,  dans  la  même  pièce,  se  succèdent  quelque- 
fois avec  rapidité  ,  et  empêchent  souvent  de  faire  usage 
d'un  instrument,  qui  bien  employé,  est  d'un  effet 
surprenant. 

Sur  le  rapport  de  la  IV,ne  classe  de  l'Institut  royal 
des  Pays-Bas ,  Sa  Majesté  a  accordé  a  l'inventeur  une 
gratification  de  5oo  florins. 


HYGIÈNE  MILITAIRE  A  L'USAGE  DES  ARMEES  DE  TERRE, 

par  le  chevalier  J.  Rom.  Louis  de  Kirckhoff, 

Ancien   médecin    des   armées    et    des    hôpitaux   militaires. 
Anvers,    1823.  in-8. 


_LiE  domaine  de  la  médecine  est  immense  ;  elle  exerce 
sou  influence  salutaire  sur  toutes  les  classes  de  la  so- 
ciété; occupée  sans  cesse  de  l'homme  sain  et  de  l'homme 
malade,  elle  procure  a  celui-ci  les  moyens  de  soulager 
ou  de  guérir  ses  maux,  a  celui-là,  des  avis  salutaires 
pour  conserver  la  santé ,  le  plus  grand  de  tous  les 
biens.  Le  cercle  des  connaissances  médicales  est  si 
vaste,  que  la  vie  de  plusieurs  hommes  de  génie  suffit 
a  peine  pour  l'embrasser  dans  sa  totalité  ;  ajoutez  a 
cela  que  la  médecine  est  une  science  d'observation  et 
d'expérience,  que  celui  qui  cherche  a  être  utile  a  ses 
semblables,  soit  par  ses  écrits,  soit  par  ses  conseils, 
est  obligé,  pour  atteindre  son  but,  de  vivre  au  milieu 
d'eux,  de  s'identifier  avec  eux;   de   tenir  compte  de 


(  >.gi  ) 

leur  caractère,  de  leurs  mœurs ,  de  leurs  habitudes 
sociales;  de  connaître  l'état  moral  de  ceux  a  qui  il 
veut  sacrifier  ses  veilles,  de  partager  en  quelque  sorte 
leurs  peines,  leurs  privations,  leurs  chagrins  et  leurs 
plaisirs.  Alors,  et  seulement  alors,  le  me'decin  fort 
de  son  expérience  et  de  ses  observations,  sera  capable 
de  prescrire  des  règles  utiles  et  salutaires,  tant  pour 
la  gue'rison  des  maladies  que  pour  la  conservation  de 
la  santé'.  En  vain  cherchera-t-on  dans  un  traité  d'hy- 
giène, écrit  dans  le  silence  du  cabinet,  les  préceptes 
conservateurs  et  bienfaisans,  basés  sur  une  longue  ex- 
périence et  sur  l'observation. 

Parmi  les  différentes  classes  d'hommes  qUi  composent 
la  société,  l'ouvrier,  l'agriculteur,  le  matelot  et  le  sol- 
dat, méritent  sans  contredit  toute  la  sollicitude  et  toute 
l'attention  du  médecin;  l'hygiène  militaire  est  donc  une 
partie  de  l'hygiène  générale,  qui  par  son  importance 
a  occupé  les  loisirs  des  Esculapes  de  tous  les  siècles  : 
car  la  profession  des  armes  est  celle  qui  offre  des  chan- 
gemens  continuels  et  les  conditions  les  plus  variées  ; 
c'est  par  la  même  raison,  celle  dans  laquelle  l'homme 
est  pour  ainsi  dire  entraîné  malgré  lui  a  l'inobservance 
des  lois  de  l'hygiène,  dont  l'application  rencontre 
souvent  des  obstacles  insurmontables. 

L'ouvrage  de  M.  Kirckhoff  est  divisé  en  neuf  sec- 
tions, qui  comprenent  successivement  le  recrutement, 
le  service  de  santé  militaire,  les  alimens ,  les  boissons, 
les  vêtemens  du  soldat,  etc.  tous  ces  articles  sont  traités 
avec  netteté  et  précision;  l'auteur  montre  partout  qu'il 
a  puisé  dans  de  bonnes  sources,  et  qu'il  a  su  profiter 
de  l'expérience  qu'il  s'est  acquise  pendant  le  teins  qu'il 
a  suivi  la  carrière  militaire  en  qualité  de  médecin.  II 
est  un  objet  relativement  auquel  je  ne  partage  nulle- 


(   292   ) 

ment  son  avis  :  il  prétend  qu'il  ne  convient  pas  d'ad- 
mettre a  la   milice  des   gens  mariés ,    et  il  fonde  son 
opinion  sur  des   raisons  plus  spécieuses  que  convain- 
cantes ;   car  l'exemple   des    Romains  et    des   Germains 
chez  les  anciens ,    celui  des  Prussiens ,    des  Suisses  et 
des  Suédois  chez  les  modernes,  prouve  d'une  manière 
incontestable  combien  cette  opinion  est  erronée  ;  d'ail- 
leurs,   comment   pourrait-on  prévenir  ou  détruire  les 
habitudes  honteuses  auxquelles  se  livre  le  soldat  obligé 
de  se  passer   d'une  épouse  légitime  ?    Comment  par- 
viendrait-on   a  empêcher   la  propagation   du  virus-sy- 
phillitique,  ce  fléau  plus  terrible  que  la  peste,  et  qui 
sous   une    apparence    trompeuse   de   santé   empoisonne 
souvent  et  compromet   l'existence   de  générations    en- 
tières?  Le  soldat  marié  est  rarement  déserteur;  il  ne 
se  livre  pas    si  facilement    aux  débauches   de    cabaret 
que    le    célibataire  ,    il    est    au    moins    aussi    brave 
que  lui,   lorsqu'il  s'agit  de  défendre  les  siens,  et  en 
général  il  est  l'ami  de  l'ordre  et  de  la  tempérance.  Du 
reste  ,   je    crois   qu'a  fin    de    compléter  la    doctrine  de 
l'hygiène    militaire,    l'auteur   aurait   pu   ajouter    quel- 
ques   lignes    relatives    aux    troupes    embarquées  :    un 
militaire  embarqué    est  dans  une  situation  bien  diffé- 
rente de  celle  où  il  se  trouve  lorsqu'il  fait  son  métier 
sur    le    continent  j    ensuite  il    y    a    des  précautions   a 
prendre    au   moment   de  l'embarquement,   pendant   la 
navigation  et  au  débarquement,  précautions  qui  varient 
d'après  le  nouveau  climat  sous  lequel  le  soldat  doit  vi- 
vre.   En  somme,    l'ouvrage    de    M.    Kirckhoff  mérite 
d'être  consulté  par   les   gens    chargés   de   surveiller  la 
conduite  des  gens  de  guerre  et  la  conservation  de  leur 
santé. 


(    3<P    ) 


RECHERCHES    HISTORIQUES    SUR  L'ORIGINE  DE  NOTRE 
ANCIEN   DROIT    COUTUMIER. 


Nescio  quà  natale  solum   dulcedine  cunclos 
Ducit  et  immemores  non  siuit  esse  sui. 
Ovid.  de  Pont.  I.  1. 

i3i  l'on  ne  s'arrête  qu'au  nom  de  coutume.,  et  a  l'idée 
générale  que  donne  ce  terme,  on  ne  peut  g  itères  dou- 
ter que  ce  ne  soit  un  droit  qui  a  long-tems  prévalu 
dans  un  pays.  Jules-César  nous  apprend  dans  ses 
Commentaires  de  JBello  Gallico ,  lib.  6.  cap.  4. ,  que 
c'était  ainsi  que  les  différens  peuples  des  Gaules 
étaient  gouvernés,  lorsqu'il  les  subjugua;  mais  aus- 
sitôt que  ces  peuples  furent  soumis  \x  l'empire  romain, 
ils  prirent  volontairement  ses  loix  5  car  les  Pvomains 
n'obligeaint  pas  toujours  les  vaincus  a  suivie  leur 
droit ,  comme  il  se  voit  dans  les  aulorités  suivan- 
tes :  Prudentius  lib.  '2.  contra  Sjmmachum  n°  601. 
Critognates  dans  le  cliap.  i5.  liv.  7.  de  JBello  Gallico, 
Rutilius  poù'ta  itiner.  1.  n"  68. 

Quand  Théodose  le  jeune,  qui  s'avisa  le  premier  de 
faire  un  corps  de  constitution  ,  eut  donné  son  code 
en  l'année  438  de  J.  C,  ce  code  passa  dans  les  Gaules 
peu  de  lems  après  sa  publication ,  et  il  y  fut  observé  ; 
les  preuves  en  sont  certaines  dans  Sidonius  Apollinaris 
et  dans  les  notes  de  Savaron.  Mais  après  l'irrupîion 
des  Goths,  Alaric  leur  roi  ayant,  fait  réformer  ce  code 
a  sa  manière,  en  retranebant  plusieurs  de  ses  consti- 
tutions, et  en  ajoutant  ses  interprétations  a  celles  qu'il 
laissait,  ce  nouveau  code,  tout  changé  qu'il  était,  passa 


(?94) 

dans  les  parties  des  Gaules  soumises  alors  aux  Français, 
et  effaça  tellement  la  me'moire  du  véritable  code  Théo-? 
dosien  qu'on  n'a  plus  connu  que  celui  d'Alaric  dans 
la  suite;  ce  passage  si  brusque  d'un  code  a  un  autre 
qui  a  été  reçu  par  des  peuples,  absolument  indépen- 
dans  des  Rois  des  Goths,  est  l'effet  d'une  cause  qui 
ne  paraît  pas  connue  jusqu'ici. 

On  peut  donner  pour  raison  de  ce  changement,  la 
différence  même  qu'il  y  a  entre  ces  deux  codes,  et 
dire  que  les  Gaulois  soumis  a  la  domination  française , 
préférèrent  le  dernier  au  premier,  parce  qu'Alaric 
avait  suprimé  dans  le  sien,  plusieurs  loix  qui  ne  con- 
venaient peut-être  plus  a  leurs  mœurs  ,  ou  plutôt 
parce  qu'il  avait  ajouté  des  interprétations  a  chacune 
de  celles  qu'il  avait  retenues,  et  que  ces  interprétations 
étant  très-claires,  on  s'en  accommoda  mieux  que  du 
texte  même.  Le  code  d'Alaric  était  la  loi  des  Gaulois 
qu'on  nommait  Romains  5  sous  la  première  et  la  seconde 
race  des  Rois  de  France,  les  autres  nations  soumises 
à  l'empire  français ,  avaient  aussi  leurs  loix  particu- 
lières; telles  étaient  les  loix  Salique,  Ripuaire,  Bour- 
guignonne et  celles  des  Allemands  et  des  Bavarois , 
recueillies  par  Lindenborg  (1). 

Il  se  fit  aussi  plusieurs  loix  générales  sous  les  Rois 
de  France  de  la  deuxième  race,  tant  pour  la  discipline 
ecclésiastique ,  que  pour  le  règlement  des  mœurs  et 
pour  le  gouvernement  public,  et  ce  sont  ces  loix  qui 
qui  se  trouveut  dans  les  Capitulaires  de  Charlemagne. 

Le  changement  que  souffrit  le  gouvernemet  sur  le 
déclin  de  la  seconde  race  et  au  commencement  de  la 
troisième,  semble  avoir  effacé  tout  ce  qu'il  y  avait  de 

(1)  Celte  bonne  et  rare  édition,  fut  soignée  par  le  jurisconsulte 
Lindenborg  et  imprimée  à  Francfort  l'an  i6o5,  par  les  frères  Marn. 


C    295    ) 

loix  auparavant,  et  il  n'y  a  peut-être  rien  de  plus  dif- 
ficile a  développer  dans  notre  histoire,  que  la  manière 
dont  s'est  fait  cet  abandon  de  toutes  les  anciennes  loix, 
tant  Romaine,  que  Salique,  Ripuaire,  etc. 

Parmi  ceux  qui  ont  traité  de  l'origine  de  nos  cou- 
tumes ,  quelques-uns  ont  cru  qu'il  fallait  les  chercher 
dans  les  anciennes  loix  :  que  quand  les  peuples  se  trou- 
vèrent tellement  confondus,  qu'il  ne  fut  plus  possible 
de  les  distinguer  pour  les  juger  chacun  suivant  leur 
droit,  la  confusion  se  jetta  dans  les  loix  comme  dans 
les  nations 5  que,  de  cette  confusion  se  formèrent  les 
coutumes,  ainsi  appelées,  parce  qu'elles  n'étaient  point 
rédigées  par  écrit,  et  que  les  faits  ne  se  prouvaient  que 
par  témoins  et  par  turbes  :  en  sorte  que  nos  coutumes 
devaient  leurs  différences  a  la  diversité  des  loix,  aux- 
quelles chaque  peuple  avait  été  attaché. 

Mais  trois  réilexions  détruisent  cette  conjecture  ;  la 
première  est,  que  nos  coutumes  n'avaient  presque  rien 
de  conforme  aux  dispositions  du  code  Théodosien  , 
des  loix  Salique  et  Ripuaire  etc.  La  seconde,  que  la 
loi  Romaine,  la  loi  Salique,  la  loi  Ripuaire,  et  les 
autres  étaient  affectées  a  de  certaines  nations,  et  non 
pas  a  de  certains  pays.  Ainsi  la  loi  Romaine  était  pour 
tous  les  Gaulois  d'origine,  en  quelque  lieu  qu'ils  demeu- 
rassent, la  Bourguignonne  pour  tous  les  Bourguignons, 
la  Salique  pour  tous  les  Saliens.  Cette  vérité  est  par- 
faitement démontrée  par  un  passage  d'Agobard ,  archevê- 
que de  Lyon ,  qui  vivait  sous  Louis  le  Débonnaire ,  où 
il  relève  les  inconvéniens  de  cette  diversité  de  loix,  et 
remarque  enti  'autres  choses,  que  de  cinq  personnes  qui  se 
rencontraient  ou  qui  demeuraient  ensemble  ,  souvent  il 
n'y  en  avait  pas  deux  qui  suivissent  une  même   loi(i). 


CO  Agobardus  ad  versus  legeru  Gondobudi,  n°  4.  p.   m', 


(  *g6  ) 
La  troisième:  qu'on  ne  peut  douter,  qu'il  ne  soit 
arrivé  dans  ce  pays  comme  en  Italie,  c'est-à-dire  que 
Pon  n'ait  permis  a  chacun  de  choisir  la  loi  sous  laquelle 
il  voulait  vivre  :  c'était  en  effet  une  suite  presque  né- 
cessaire de  la  liberté  où  Pon  avait  lait.se  tous  les  peu- 
ples qui  habitaient  les  Gaules ,  de  conserver  leurs  loix  : 
comme  ces  peuples  s'étaient  alliés,  et  s'étaient  trans- 
plantés d'un  pays  dans  un  autre,  selon  les  différentes 
occurences,  il  n'était  guères  possible  qu'après  deux,  ou 
trois  cents  ans,  plusieurs  n'ignorassent  leur  véritable 
origine,  et  Sigonius  ,  lib.  8.  de  regno  Italiœ  ad  ami.  1007, 
observe  que  c'était  l'usage  commun  de  ce  teuis  la,  que 
tous  les  particuliers   fissent  leur  déclaration    de  la  loi 
qu'ils  voulaient  suivre,  et  il  en  apporte  des  exemples. 
Une  preuve    qu'on   en   usait    a    cet  égard    en   France 
comme  en  Italie,  ce  sont  les  paroles  suivantes  que  Pon 
trouve  dans  la  loi  des  Bourguignons  :  Si  qui  s  post  hoc 
barbants  vel  teslari  voluerit  vel  donare ,  aut  romanam 
consuetudinem  aut   barbaricam   esse    servandam   sciât. 
Lex  Burgund.   cap.  60.    Ainsi  en  Bourgogne  on  avait 
le  choix  de  ces  deux  loix. 

Il  y  a  donc  beaucoup  plus  d'apparence,  que  la  source 
véritable  de  nos  coutumes ,  est  l'oubli  et  le  non-usage 
de  ces  anciennes  loix.  iYIais  la  grande  difficulté  est  de 
savoir  comment  toutes  ces  loix  se  sont  abrogées ,  et  de 
quelle  manière  on  a  passé  d'une  jurisprudence  a  une 
autre. 

Pour  parvenir  a  en  découvrir  la  cause,  il  faut  la  cher» 
cher  dans  les  divers  changements  que  les  personnes  et 
les  biens  ont  soufferts  depuis  l'établisement  de  la  mo- 
narchie 5  on  sait  que  sous  les  deux  premières  races  des 
Rois,  la  France  était  occupée  par  des  personnes  libres, 
et  que    ces  personnes  libres  avaient  sous   elles  ,   a  la 


(  29v  ) 
Hianière  des  Romains,  de  véritables  esclaves, seivos  (i), 
et  des  serfs  dont  la  condition   n'était  pas  entièrement 
incompatible  avec  la  liberté,  adscriptitios  colnnos. 

Sous  la  troisième  race  on  trouve  qu'a  Ja  réserve  des 
grands  seigneurs  et  des  possesseurs  de  fiels,  toute  la 
France  était  devenue  mainmoi  table ,  et  que  des  lors 
elle  fut  soumise  a  la  servitude  de  corps  et  àliéritage. 
Cet  asservissement  général  a  duré  quelque  tenis,  et 
on  a  vu  ensuite  trois  élats  de  personnes,  les  nobles , 
les  roturiers  qui  étaient  libres,  et  les  mainmorlables  ou 
les  serfs   de  corps  et  d'béritage. 

Enfin,  les  sei-vitudes  ont  été  presqu'eutièrement  abo- 
lies, et  tous   les  états   réduits  aux  nobles,  et  aux  ro- 
turiers. De  si  grands  ebangemens  n'ont  pu  se  faire  sans 
des   causes  extraordinaires  ,    et  sans  un    renversement 
presqu'entier  des   anciennes  loix  de   l'état.    11  a   fallu 
néanmoins  qu'on  ait  passé    d'une    extrémité   a  l'autre 
par  degré  et  insensiblement;  c'est  ce  qui  rend  l'éclair- 
cissement de  tout  ce  mystère   beaucoup   plus    difficile. 
Mais  le  point  principal  est  de  découvrir,   comment  le 
commun  des  personnes  et  des  terres  s'est  trouvé  réduit 
a    la   servitude ,    au    commencement    de    la    troisième 
race:   delà  dépend  tout  le  reste;  car  il  est  aisé  de  juger 
que  les  anciennes  loix  ont  été  inutiles,  quand  les  peu- 
ples sont  devenus  serfs  de  corps  et  ^héritage ,  et  ont 
été   contraints  de   suivre  aveuglement   les  volontés   de 
ceux  qui  leur  avaient  ravi  leur  franchise'. 

La  première  cause  de  tous  ces  désordres  (2)  a  peut- 
être  été  le  partage  qui  se  faisait  du  royaume  entre  les 
enfans  des  Rois;  de  la,  en  effet,  entre  les  deseendans 

(1)  Vide  D.  Bignoninm  ad  appeildicem  Marculfi,  cap.  I.  tom. 
2.  Capitular.  D.  Baluzii.  Clos.  g55  et  g54. 

(2)  Voyez  Caseueuve  du  Fraiic  Aleu,  liv.  I.  chap.  11. 


(  293  ) 

de  Charlemagne  ces  guerres  continuelles  qui  ont  insen- 
siblement e'puise'  l'état,  de  la,  la  faiblesse  des  Rois,  et 
la  puissance  despotique  des  gouverneurs  de  province, 
des  grands  seigneurs,  qu'on  ne  pouvait  retenir  dans 
leur  devoir,  parce  qu'ils  avaient  la  force  en  main,  et 
qu'ils  échappaient  aux  châtimens,  par  la  facilité  de 
se  jetter  entre  les  bras  de  celui  des  frères  du  Roi  qui 
leur  plaisait  le  plus,  ou  qui  leur  proposait  un  meilleur 
parti. 

Mais  rien  ne  contribua  plus  a  l'élévation  des  grands 
seigneurs,  que  celle  de  Hugues  Capet  sur  le  trône  des 
Français,  quand  les  seigneurs  s'étant  rendus  les  maîtres 
de  leurs  gouvernemens,  en  formèrent  autant  de  petites 
monarchies  5  ainsi  on  ne  doit  pas  être  surpris  que  les 
anciennes  loix  aient  été  presque  toutes  abolies  sous  la 
troisième  race  des  Rois  de  France. 

La  misère  du  peuple  avait  été  si  grande  sur  le  déclin 
de  la  seconde  race,  qu'il  ne  fut  pas  difficile  aux  grands 
seigneurs  de  faire  de  nouveaux  établissemens  :  ils  se 
servirent  de  trois  moyens  pour  parvenir  a  cet  asservis- 
sement (1).  Le  premier  fut  le  serment  de  fidélité  dont 
on  abusa,  le  second  et  le  troisième,  l'établissement 
des  serfs  et  des  mainmortes. 

Dans  ce  renouvellement  de  la  monarchie,  où  la  loi 
du  plus  fort  était  la  loi  souveraine,  la  plus  grande  par- 
tie de  la  campagne  se  trouva  asservie  ;  soit  parce  qu'il 
y  avait  déjà  beaucoup  de  serfs  et  d'esclaves,  soit  parce 
que  plusieurs  paysans  se  virent  obligés  de  se  donner 
eux-mêmes  aux  seigneurs,  pour  se  mettre,  dans  leurs 
châteaux,  a  couvert  contre  les  gens  de  guerre,  soit 
enfin   que  les  famines  qui   furent  violentes  alors,    en 

(1)  Caseneuve  du  Franc  Alevi ,  liv.  1.  chap.   12. 


(  299  ) 
eussent  forcé  une  autre  partie,  a  racheter  leur  vie  aux 
dépens  de  leur  liberté. 

Quand  les  seigneurs  eurent  une  fois  établi  leur  puis- 
sance, on  ne  saurait  dire  par  combien  de  manières  ils 
l'augmentèrent  :  ils  établirent  suivant  ce  qui  avait  été 
pratiqué  autrefois  pour  les  esclaves,  que  les  serfs  qui 
épouseraient  des  personnes  libres,  leur  communique- 
raient la  servitude  ;  ils  donnèrent  en  mainmorte,  les 
terres  qui  leur  étaient  inutiles,  ou  dont  ils  s'étaient 
emparés  :  ou  bien  ils  cédèrent  de  certaines  portions  de 
terre  a  ceux  qui  avaient  des  biens  francs,  a  la  charge 
de  tenir  en  mainmorte  les  terres  franches  qu'ils  possé- 
daient   comme  celles  qui  leur  étaient  cédées. 

Mais  si  les  servitudes  contribuèrent  beaucoup  a  la 
perte  des  loix  anciennes,  les  fiefs  qui  devinrent  héré- 
ditaires sur  la  fin  delà  seconde  race  des  Rois  de  France, 
ou  au  commencement  de  la  troisième,  n'y  contribuèrent 
pas  moins;  ceux  qui  ont  étudié  ces  matières,  sont  sur- 
pris de  voir  que  les  fiefs,  tels  qu'ils  étaient  sous  la  troi- 
sième race,  aient  été  presqu'inconnus  sous  la  seconde, 
et  que  la  plupart  des  fonds  de  la  France  soient  de- 
venus fiefs  héréditaires  sous  la  troisième  ;  les  fiefs 
étaient  une  émanation  médiate  ou  immédiate  de  la 
couronne  ;  cependant  on  ne  voit  point  que  quand  les 
Francs  sont  venus  dans  les  Gaules,  ils  se  soient  partagé 
toutes  les  terres  ;  au  contraire ,  ils  ont  laissé  aux 
Gaulois  leurs  biens,  leurs  liberté  et  leurs  loix  (1). 

Il  ne  faut  pas  douter  que  par  le  changement  de  gou- 
vernement sous  la  troisième  race,  chacun  de  ces  gou- 
verneurs, devenus  propriétaires  de  leurs  duchés  ou  de 
leurs  comtés ,    n'ait    eu   soin   de  faire   renouveler    de 


(i)  Procop.  de  Francis,  ap.  D.  Bouquet,  tom.  I.  pag,  5o  et  ôi. 


(  5oo  ) 

tems  en  tcms  les  sermens  de  fidélité  5  ainsi  l'hérédité 
des  fiefs  s'étant  établie  a-peu-près  en  ce  tems  Va ,  il 
n'a  pas  été  difficile  ii  tous  les  seigneurs,  dans  l'igno- 
rance où  l'on  était  aux  Xm%  XIme,  Xllrac  et  XHIme 
siècles,  de  soutenir  a  tous  ceux  qui  étaient  dans  leur 
dépendance,  que  c'étaient  leurs  ancêtres  qui  leur  avaient 
donné  en  fief  les  terres  qu'ils  possédaient. 

Ainsi  celui  qui  voudra  rechercher  l'origine  de  nos 
coutumes,  et  qui  s'imaginera  trouver,  dans  les  monu- 
mens  anciens,  des  règles  certaines  et  générales,  et  des 
preuves  de  tous  les  principes  du  droit  coutumier,  se 
trompera;  il  sera  encore  dans  l'erreur,  s'il  prétend 
puiser  dans  des  sources  pures,  et  s'il  croit  trouver  a 
la  fin  de  la  seconde  race,  et  au  commencement  de  la 
troisième,  un  gouvernement  fixe  et  régulier;  ce  n'est 
qu'avec  des  peines  inconcevables  de  la  part  des  Rois, 
et  par  le  soin  du  parlement  de  Paris  (1),  qu'enfin  l'état 
a  été  remis  dans  l'ordre,  que  les  grands  seigneurs  ont 
été  soumis,  que  la  liberté  a  été  rendue  aux  peuples,  et 
que  le  droit  coutumier  a  reçu  sa  dernière  perfection. 

Mais  pour  revenir  a  notre  sujet,  on  voit  par  ce  qui 
a  été  dit,  que  les  servitudes  et  les  mainmortes  de  corps 
et  àliéritage  d'une  part,  et  les  fiefs  de  l'autre,  ayant 
rempli  toutes  les  Gaules,  il  n'est  pas  surprenant  que 
toutes  les  anciennes  loix  se  soient  abolies,  puisqu'elles 
devenaient  inutiles  par  ces  deux  droits  qui  réglaient  le 
peuple  et  la  noblesse.  Insensiblement  les  Rois  de  France 

(i)  Il  est  avéré  que  nos  anciennes  coutumes  nous  venaient  des 
Français.,  et  que  la  Flandre  ressortit  en  dernière  instance  du  par- 
lement de  Paris,  jusqu'au  traite  de  Madrid  de  1526  et  celui  de 
de  Cambrai  de  1529  ,  par  lesquels  Je  Roi  de  France  renonça  à  la 
suzeraineté  et  au  droit  de  ressort  sur  les  proviuces  de  Flandre  et 
d'Artois  et  consentit  à  ce  que  la  ville  de  Tournay  et  le  Touruesis 
restassent  unis  et  incorporés  au  comté  de  Flandre. 


(  Soi  ) 

par  rétablissement  des  coutumes  ont  reformé  les  abus 
existans;  mais  comme  ce  remède  n'était  qu'indirect,  le 
mal  a  continué  encore  long-tems  après  eux.  D'ailleurs 
ils  n'ont  établi  des  communes  que  dans  quelques  en- 
droits et  il  en  aurait  fallu  établir  par  tout,  ce  qui  était 
impossible;  ils  ont  commencé  ce  système  et  les  succes- 
seurs de  Philippe-Auguste  l'ont  achevé  avec  le  tems,  en 
sorte  que  ce  n'est  qu'imperceptiblement  qu'on  a  passé 
d'une  servitude  presqu'universelle  a  la  liberté. 

Pour  savoir  maintenant  comment  le  droit  coutumier 
s'est  formé ,  il  n'y  a  qu'a  se  représenter  l'état  où  étaient 
les  provinces  lorsque  les  servitudes  ont  cessé. 

Il  n'y  avait  plus  que  des  nobles  et  de  roturiers;  à 
l'égard  des  nobles,  ils  avaient  le  droit  de  fief,  qui 
réglait  la  plus  considérable  partie  de  leurs  biens  ;  pour 
ce  qui  est  des  roturiers ,  il  faut  considérer  première- 
ment que  la  plupart  des  seigneurs  avaient  donné  quel- 
ques loix  en  les  affranchissant.  C'est  une  vérité  qui  se 
prouve  par  toutes  les  chartes  de  communes ,  qui  ont 
été  les  premières  sources  de  nos  coutumes  générales , 
et  par  les  chartes  d'affranchissement  d'où  sont  venues 
nos  coutumes  locales. 

En  second  lieu  tous  ces  seigneurs  en  affranchissant 
leurs  sujets,  se  reservaient  la  jurisdiction  sur  eux,  et 
l'exerçaient  en  personne.  Ainsi  on  ne  doit  pas  être  sur- 
pris de  trouver  dans  la  jurisprudence  coutumière  tant 
de  dispositions  qui  semblaient  tenir  du  droit  de  fief 
et  de  mainmorte. 

Troisièmement,  on  doit  observer  que  par  la  suite  des 
tems  les  bailliages  et  chatellenies  ayant  été  érigés,  et 
que  des  juges  plus  (1)  éclairés  empruntaient  quelques 

(1)  Vers  Ttipoque  de  l'établissement  des  chatellenies,  lorsque  les 


(    302  ) 

lumière  dit  droit  de  Justinien,  cela  fit  passer  dans 
nos  coutumes  plusieurs  dispositions  du  droit  romain 
et  plusieurs  opinions  des  docteurs;  ainsi  presque  tout 
ce  qu'il  y  avait  dans  notre  droit  cout umier  touchant 
la  prescription ,  les  servitudes  pre'diales  et  plusieurs 
antres  matières,  est  en  partie  extrait  des  loix  romaines. 

Quatrièmement,  le  respect  qu'on  avait  pour  les  ec- 
clésiastiques, a  fait  entrer  dans  nos  coutumes  plusieurs 
dispositions  du  droit  canonique,  et  sur-tout  des  dé- 
cre'tales. 

Cinquièmement  ,  les  ordonnances  ont  règle'  plu- 
sieurs matières,  aussi  Lien  que  les  arrêts  des  parle- 
ments. C'est  une  chose  dont  on  ne  peut  pas  douter, 
sur-tout  pour  les  articles  des  coutumes,  qui  ont  été 
ajoutés  ou  changés  dans  les  réformations  de  ces 
coutumes.  Voila  de  quelle  manière  notre  droit  coutu- 
mier  s'est  établi  et  perfectionné. 

Ces  réflexions  sur  notre  ancien  droit  coutumier,  ne 
sont  ici  proposées  que  comme  des  conjectures,  et  comme 
les  premiers  fruits  d'une  étude  et  d'une  application 
qui  pourront  dans  la  suite  donner  des  recherches  plus 
approfondies  dans  ces  antiquités  pleines  de  ténèbres 
dont  l'éclaircissement  serait  d'une  extrême  utilité. 

disciples  d'Irnerius  de  l'école  de  Bologne,  à  leur  retour  d'Italie, 
eurent  répandu  les  notions  du  droit  romain,  il  naquit  un  nouvel 
ordre  de  choses;  la  considération  des  jurisconsultes  allait  en  crois- 
sant, car  on  leur  accordait  le  titre  de  chevalier.  (  Du  Cange  verbo 
miles.  )  Outre  cette  illustration  ils  furent  appelles  à  raison  de 
leur  savoir  aux  places  administratives  et  judiciaires,  et  à  l'exem- 
ple des  princes,  les  villes  et  les  seigneurs  leur  ouvrirent  les  tri- 
bunaux. (Voyez  Diericx,  mémoires  sur  la  ville  de  Qand.jp.  175.) 


(  3o3  ) 


HANDLEIDING 


By  het  onderrigt  in  de  toon  en  zangkunst  op  de  scholen 
van  het  lagere  onderwys,  uitgegeven  door  de  Maet- 
schappj  :  Tôt  nut  van  't  algeraeen  (1). 


Ija.  société  d'utilité  publique  (totnutvan'taïgemeen) 
établie  depuis  une  trentaine  d'années  dans  les  pro- 
vinces septentrionales  du  Royaume,  pour  l'améliora- 
tion de  l'instruction  primaire  des  basses  classes ,  vient 
de  publier  un  traité  élémentaire  de  musique  a  l'usage 
des  écoles. 

La  méthode  du  méloplaste,  presque  universellement 
mal  accueillie  par  les  gens  de  l'art  en  Hollande,  a  fait 
naître  une  lutte  parmi  les  fauteurs  du  nouveau  et  de 
l'ancien  système,  dont  le  résultat  a  été  favorable  aux 
arts.  —  Aussitôt  qu'on  a  ouvert  des  cours  pour  l'en- 
seignement d'après  la  méthode  de  M.  Galin,  d'autres» 
professeurs  ont  annoncé  des  cours  selon  la  vieille  mé- 
thode, et  le  chant  négligé  parmi  nous,  a  pris  vogue. 
Il  ne  s'agit  pas  ici,  de  discuter  l'avantage  d'une  de  ces 
méthodes  sur  l'autre  ;  tout  ce  que  nous  en  pouvons 
dire,  c'est  que  l'expérience  n'a  pas  été  favorable  a  la 
nouvelle,  les  preuves  qu'on  a  données  au  public  étant 
loin  de  répondre  aux  promesses,  tandis  que  des  élèves, 
instruits  dans  le  même  espace  de  tems  seloD  l'ancienne 
méthode ,  ont  donné  des  résultats  très-satisfaisans. 


(i)  Un  vol.  iu-4.  oblongo',  imprime  chez  J.  Enschedé  et  fils,  à 
Harlem,  et  se  vend  à  Leyden,  Deventer  et  Groeningue  ,  chez 
Dumortier  et  fils,  J.  de  Lange  et  J.  Oomkens ,  et  à  Gand  chez 
P.  F.  de  Goesiu-Verhaeghe. 


(  5o4  ) 

Un  négociant  d'Amsterdam,  natif  de  cette  ville,  MrJ» 
R.  Linsen,  amateur  de  musique  et  de  chant,  appelle'  il 
y  a  quelques  années  aux  fonctions  d'administrateur  de 
riiospice  des  orphelins  pauvres  et  des  enfans  trouvés  et 
abandonnés  (  aelmoesseniers  weeshuis  )  de  la  même 
ville,  composa  une  méthode  pour  l'enseignement  du 
chant,  qu'il  fit  servir  a  l'usage  des  classes  dans  l'hos- 
pice susdit.  A  la  demande j  qui  lui  en  fut  faite,  l'au- 
teur céda  son  manuscrit  a  la  société  d'utilité  publique, 
qui  lé  fit  imprimer  et  distribuer,  afin  d'en  rendre 
l'usage  général  pour  l'instruction  des  écoles  primaires. 

D'après  l'opinion  des  experts,  mais  sur-tout  d'après 
les  preuves  que  nous  avons  vues  dans  l'hospice 
même  ,  nous  croyons  pouvoir  recommander  ce  petit 
traité,  qui,  par  sa  clarté  et  sa  simplicité,  suffit  aux 
besoins  d'une  instruction  élémentaire,  et  remplit  une 
lacune  qui  existait  parmi  nous  dans  cette  branche  de 
l'éducation. 

Mais  c'est  sur- tout  sur  Ja  partie  typographique 
que  nous  voulons  fixer  l'attention  des  amateurs.  Sorti 
des  presses  de  MAI.  Enschedé  et  fils  a  Haarlcm,  succes- 
seurs d'une  famille  qui  s'est  toujours  distinguée  dans 
l'art  de  l'imprimerie  et  de  la  fonderie,  et  dont  il  suffit 
de  nbmmer  une  édition  récente  de  la  Jiible  en  langue 
malaise,  faite  aux  frais  de  la  Société  Biblique  à  Londres, 
ce  traité  de  musique  imprimé  avec  des  caractères  mobi- 
les y  est  bien  supérieur  a  tout  ce  que  l'Allemagne  ou  la 
Fiance  ont  produit  dans  ce  genre.  Les  lettres  et  carac- 
tères sont  de  la  plus  grande  pureté;  les  lignes  de  musi- 
que, les  notes,  crochets,  clefs,  signes,  marques,  mesu- 
res, pauses,  etc.  sont  parfaits:  le  mélange  alternatif  des 
phrases  du  texte  et  des  phrases  de  musique;  les  figures 
imitatives ,   par  lesquelles  l'auteur  a  voulu ,    que   les 


C  Jo5  ) 

intervalle  des  différentes  gammes  fussent  offertes  a  la 
vue,  tout  comme  on  les  fait  entendre  par  l'ouïe  ;  le 
total  enfin  est  un  modèle  de  bon  ordre,  de  distribution 
judicieuse  et  de  la  plus  précise  exactitude.  La  meilleure 
gravure  d'un  ouvrage  en  ce  genre  laisserait  bien  plus 
a  désirer. 

Nous  croyons  que  cette  manière  d'imprimer  est  la 
plus  convenable  pour  des  partitions,  des  méthodes  de 
chant,  etc.  vu  qu'elle  n'est  pas  aussi  chère  que  la  gra- 
vure., ni  même  que  la  musique  lithographiée,  a  laquelle 
elle  est  de  beaucoup  préférable  sous  tous  les  rapports. 


DECOUVERTES   DVNAMICO-CIIIMIQUES. 


M.  Doebereiner,  de  Jena,  a  fait  des  expériences  ex- 
trêmement   importantes    et   qui  peuvent    recevoir   les 
applications  les  plus  heureuses  dans  les  arts.  Il  avait 
précédemment  observé  que  le  platine,  a  son  plus  bas 
degré  d'oxidation,   étant  imbibé  d'alcohol  et  soumis  a 
Faction  de  l'air,  provoquait  la  conversion  complète  de 
l'alcohol  en  vinaigre  et  eau  ;  l'oxide   de  platine  n'en 
était. point  changé   de  nature,  et  lorsqu'au  lieu  d'air 
atmosphérique   on   employait    de  l'oxigène  ,  il  y  avait 
inflammation   et  explosion.    Etendant  ces  expériences, 
il  a  vu  que  le  même  sous-oxide  de  platine  et  l'hvdro- 
sulfure  du  même  métal,  déshydrogéné  par  une  exposi- 
tion de  quelques  semaines  a  l'air,   condensaient  l'hy- 
drogène et  autres  gaz  inflammables  et  en  déterminaient 
la  combustion  obscure  au  contact  de  l'air.  Dans  cette 
circonstance  le  sous-oxide  rougit,  et   si  l'hydrogène, 
avant  d'être  présenté  a  l'absorption,  est  mêlé  avec  de 
VIIIme   livraison.  21 


(  3o6) 

Pair  atmosphérique  ou  de  l'oxigène,  il  y  a  combustion 
avec  détonation:  le  sous-oxide  est  aussi  réduit.  Lors- 
que, dans  ce  cas,  il  y  a  excès  d'hydrogène,  l'azote  de 
l'air,  a  défaut  d'oxigène,  s'en  empare  et  il  se  forme 
de  l'ammoniaque.  Le  platine  réduit  ne  réagit  plus,  ni 
sur  l'alcohol,  ni  sur  les  gaz  combustibles,  mais  il  dé- 
termine encore,  et  par  une  action  qui  se  prolonge  à. 
l'infini,  la  conversion  en  eau  d'un  mélange  d'hydro- 
gène et  d'oxigène  ou  d'air  atmosphérique ,  avec  lequel 
on  le  met  en  contact.  Le  mélange  ne  doit  pas  être  fait 
d'avance,  mais  il  suffit  que  les  deux  gaz  se  rencontrent 
au  moment  d'arriver  au  contact  du  métal  ;  la  combus- 
tion est  obscure  ou  lumineuse  suivant  que  l'hydrogène 
s'échappe  avec  plus  ou  moins  de  rapidité  de  son  ré- 
servoir. On  sent  que  déjà  M.  Doebereiner  a  dû  utiliser 
le  nouveau  phénomène  comme  oxigénimètre  et  comme 
batte-feu  ou  briquet  spontané,  et  l'appliquer  'a  la  con- 
struction d'un  nouveau  système  de  lampes;  le  platine 
réduit  ne  provoque  point  la  combustion  de  l'hydro- 
gène uni  a  des  combustibles  ou  a  des  comburans  acidi- 
fiables ,  si  ce  n'est  toutefois ,  d'après  un  essai  postérieur , 
celle  de  l'hydrogène  sulfuré.  L'oxide  gazeux  de  carbone  , 
par  son  contact  avec  le  sulfure  oxidé  de  platine,  perd 
la  moitié  de  son  combustible,  se  condense  de  la  moitié 
et  se  transforme  en  acide  carbonique.  L'auteur  regarde 
comme  probable  que,  dans  les  expériences  avec  le  platine 
réduit ,  ce  métal  forme  avec  l'hydrogène  un  élément 
de  pile  ou  chaîne  électrique,  dans  lequel  le  gaz  rem- 
place le  métal  négatif,  mais  où  se  trouve  toutefois  cette 
différence  que  le  corps  électronégatif  s'oxide  ,  tandis 
que,  dans  une  chaîne  ordinaire,  c'est  le  corps  électro- 
positif  qui  éprouve  l'oxidation  (1). 

(1)  .Nous  penserions  plutôt  que  le  platine  exerce  sur  le  calorique 


(5o7  ) 

M.  Docbereiner,  pour  plus  de  commodité  dans 
l'emploi  du  platine  ,  a  imagine'  de  le  réduire  en 
boules  de  la  grosseur  d'un  pois,  en  le  pétrissant  avec 
de  l'argile  à  fayence  ;  il  fait  sécher  les  Loules  et  les 
porte  ensuite  à  l'incandescence  au  moyen  du  chalumeau  ; 
une  telle  boule  peut  servir  indéfiniment,  pourvu 
qu'après  chaque  opération  on  la  fasse  dûment  sécher. 
Depuis  la  communication  qui  précède,  M.  Doe- 
bereiner  a  appliqué  son  briquet  de  platine  a  l'in- 
flammation de  l'hydrogène  formant  le  combustible  de 
la  lampe  deVolta,  et  a  celle  de  la  poudre  a  canon. 
Il  a  reconnu,  dans  son  expérience,  que  de  l'hydrogène 
engagé  ne  brûle  pas  avec  l'oxigène  libre ,  ni  l'oxigène 
engagé,  avec  de  l'hydrogène  libre,  et,  a  plus  forte 
raison  ,  que  l'action  cesse  entre  les  engagemens  des 
deux.  —  Dans  une  atmosphère  contenant  de  l'azote  en 
même  tems  que  de  l'oxigène  et  de  l'hydrogène,  lors- 
que la  combustion  est  déterminée  par  du  platine  réduit, 
l'excès  du  dernier  gaz  ne  donne  pas  lieu  à  la  produc- 
tion de  l'amoniaque,,  ni  l'excès  du  premier,  à  celle  de 
1,'acide  nitrique,  ce  qui,  joint  a  la  condensation  totale 
de  l'oxigène,  donne  au  procédé  une  valeur  inappré- 
ciable comme  oxigénimètre.  —  Pour  l'inflammation  de 
la  lampe  de  Volta ,  il  place  sous  le  bec  de  lampe  un 
verre  de  montre  contenant  un  grain  de  platine  spon- 

*"    *  i   ■       h  h  i  m i..  ■.  — ■       ,    .       ^ 

de  l'oxygène  une  attraction  d'incandescence  en  même  tems  que 
l'hydrogène  exerce  sur  l'oxygèue  une  attraction  pour  former  de 
l'eau,  et  qu'ainsi  la  combustion  qui  a  pour  résultat  la  production 
de  ce  liquide  est  l'effet  d'une  double  affinité;  on  reconnaît,  en 
effet,  au  platine  une  singulière  propension  à  l'ignition  et  qui  ne 
saurait  être  déterminée  que  par  une  affinité  d'incandescence  avec 
le  calorique.  On  se  rapellera  le  chryopliore  de  Wollaston,  la 
pile  modifiante  de  Childeren  et  d'autres  appareils,  qui,  par  les 
causes,  eu  apparence  les  plus  futiles,  le  font  rougir.  V.  AI. 


(  5o8  ) 

gieux  et  ouvre  le  robinet  pour  lâcher  le  gaz  :  le  métal 
rougit  bientôt  au  blanc  et  met  le  feu  a  la  lampe. 

L'auteur  a  imaginé  pour  son  expérience  fondamen- 
tale un  mode  d'exécution  qui  la  rend  très-éclatante  a 
la  vue  :  il  descend  une  de  ses  boules  argilleuses  de 
platine,  suspendue  a  un  fil  du  même  métal ,  jusqu'au 
centre  d'un  bocal  contenant  le  mélange  de  cinq  me- 
sures d'air  atmosphérique  et  de  deux  mesures  d'hydro- 
gène et  d'une  mesure  d'oxigène  :  la  boule  rougit  pres- 
qu'aussitôt ,  et  le  gaz  brûle  sans  détonatiou  5  mais 
substitue-t-on  a  ce  mélange  celui  de  deux  mesures 
d'hydrogène  et  d'une  mesure  d'oxigène, la  boule  rougit 
au  blanc  et  il  y  a  forte  détonation.  Cependant,  en 
renforçant  le  rapport  de  l'hydrogène,  par  exemple, 
jusqu'à  cinq  mesures  sur  une  d'oxigène,  ce  qui  fait 
encore  la  moitié  d'oxigène  de  plus  que  dans  le  mélange 
avec  l'air  atmosphérique,  alors  la  combustion  se  passe 
paisiblement  ou  sans  détonation.  V.  M. 


DISSERTATION     PHYSICO-MATHEMATIQUE   SUR   LA   MA- 
CHINE  A   VAPEUR ,   PAR   M.   EGID.   DE   WIT. 


»3ELON  M.  Cuvier ,  le  génie  ne  serait  autre  chose 
qu'un  esprit  juste  et  persévérant  :  c'est  a  peu  près  a 
quoi  le  réduit  Newton  auquel  il  était ,  sans  doute , 
bien  permis  de  se  tromper  sur  ce  point;  cependant 
cette  définition  nous  paraît  pêcher  par  défaut  :  le  mot 
de  génie,  suivant  nous,  désigne  le  plus  haut  degré  de 
l'intelligence  humaine,  la  plus  grande  puissance  de  la 
mémoire  et  de  l'imagination  jointe  a  la  rapidité  de  la 
pensée  j  la  faculté  de  saisir  au  même  instant  et  avec  la 


(  3o9) 

même  netteté  une  multitude  de  rapports  et  ces  rap- 
ports les  plus  éloignés  qui  forment ,  en  quelque  sorte , 
les  deux  extrémités  d'une  longue  série  d'idées,  tandis 
que  l'esprit  ordinaire  ,  quelque  juste  et  persévérant 
qu'il  puisse  être,  ne  découvre  qu'un  horison  limité  et 
ne  saisit  que  des  rapports  immédiats.  Quoiqu'il  en 
soit  de  ces  deux  facultés,  toujours  est-il  vrai  de  dire 
que  la  persévérance  et  le  tems  président  aux  œuvres 
du  génie  comme  a  celles  de  l'esprit  ;  c'est  ce  qu'on 
sait  bien  dans  quelques-unes  des  Universités  du 
Royaume;  c'est  ce  qu'a  bien  reconnu  M.  Egide  de 
Wity  élève  de  celle  d'Utreclit ,  en  se  préparant  par 
sept  années  de  bonnes  études  a  la  composition  de  son 
spécimen  qui  a  pour  titre  :  Dissertatio  physico-mathe- 
maiica  de  machina  atmica  (  macLine  a  vapeur  )  pro 
gradu  doctoratûs  et  magisterii,  etc.  Encore  cet  élève 
croit-il,  contre  l'opinion  trop  généralement  reçue  , 
n'avoir  fait  qu'une  chose  toute  simple  et  fort  récréa- 
tive ;  car  il  nous  dit  :  Cum  per  septem  annorum 
spatium  in  Academia  nostra,  matheseos  et  philosophiœ 
naturalis  studiis  magnopere  essem  delectatus  ,  et  huic 
jam  exercitationi  Academicœ  finis  mihi  esset  statuen- 
dus ,  antea  tamen  laboris  impensi  spécimen  quoddam 
exhibere  volui  y  quo  summos  in  ea  facultate  ambirem 
honores,  etc.  Il  nous  révèle  ainsi  le  secret  de  ses  suc- 
cès attestés  tant  par  le  fonds  de  sa  dissertation  que  par 
le  choix  des  questions  ou  positions  qui  la  terminent. 

L'introduction  a  la  dissertation  ,  est  un  plaidoyer 
bien  fait  en  faveur  des  machines,  dans  lequel  on  trouve 
une  érudition  bien  assortie  au  sujet  et  des  documens 
curieux  que  l'auteur  a  dû  chercher  hors  du  cercle  des 
études  académiques  :  c'est  de  conviction  que  M.  De 
JVit  défend  les  machines  ;    il  dit  :    Qiutndo  autem  ita 


(  5io  ) 

proponitur  quœstio ,  quisque  videt  àbsurdum  esse  hu- 
mani  ingenii  cursiim  impedire  ....  jure  igitur ,  hac 
in  causa ,  cum  Cicérone,  possumus  quœrere  quœ  est  in 
hominibus  iantaperversitas  ut,  itwentisjï'ugibus,  glande 
vescantur.    J'aurais   pourtant  désiré  que  l'auteur  em- 
ployât un  argument  qui  se  présente  de  lui-même;  la 
fabrication  des  machines  réclame  une  grande  partie  des 
bras  que  leur  emploi  met  hors  d'oeuvre,  et,  dans  cer- 
tains cas,  elle  en  exige  un  plus  grand  nombre  :  nous 
citerons    entrautres    l'invention   de   l'imprimerie    qui 
occupe  plus  d'individus  qu'elle  n'a  rendu  de  copistes 
inutiles  ;  d'ailleurs  tout  instrument ,  tout  outil  est  une 
machine,  et,  sous  ce  point  de  vue,  la  presque  totalité 
des   travaux    s'exécute    par    des  machines..    L'auteur 
termine    cette  introduction    par  une  autre  pensée  de 
Cicêron  (De  Republica):  maxime  rapimur  ad  opes  au- 
gendas  generis  humant,  studemusque  nostris    consiliis 
et  laborihus  tutiorem  et  opulentiorem  ziitam  hominum 
reddere  et   ad  hanc  voluptatem  ipsius  naturœ  stimulis 
incitamur  :    teneamus  illum  cursum ,    qui   semper  fuit 
optimi  cujusque ,  neque  ea  signa  audiamus  quce  recep- 
tui  canunt,  ut  eos  etiam  revocent  qui  jam  processerint  : 
avis  a  nos  voisins. 

La  dissertation  est  divisée  en  deux  parties ,  dont  la 
première  a  pour  titre  :  De  'vapore ,  imprimis  aquœ. 
M.  De  Wit  a  habilement  exploité  et  combiné  les  re- 
cherches sur  cette  matière,  faites  dans  sa  patrie,  en 
France,  en  Angleterre  et  ailleurs;  il  fait  preuve  ici  de 
connaissances  étendues  en  physique  et  en  analyse,  et 
d'un  esprit  de  discussion  éminemment  nécessaire  dans 
ce  genre  de  questions  :  ce  dont  nous  devons  lui  tenir 
compte ,  c'est  de  descendre  des  formules  aux  évalua- 
tions numériques,  genre  de  mérite  dont  les  élèves  en 


(3n  ) 

sciences  ne  sont  pas  assez  jaloux  ;  et  cependant  une 
question  ne  doit  être  regardée  comme  complètement 
résolue  qu'autant  qu'on  est  arrivé  a  un  résultat  en 
nombre  ou  en  lignes. 

La  seconde  et  dernière  partie  a  pour  titre  :  De  ma- 
china atmica:  M.  De  fVit  donne  d'abord  la  liste  des 
ouvrages  qu'il  a  consultés  ;  il  passe  ensuite  a  l'histori- 
que de  la  découverte  et  des  perfectionnemens  succes- 
sifs de  la  machine  a  vapeur ,  qu'il  conduit  jusqu'aux 
perfectionnemens  apportés  par  le  célèbre  Watt  et  qui 
forment  comme  une  ère  nouvelle  par  rapport  a  cette 
belle  machine  dont  il  décrit  enfin  toutes  les  améliora- 
tions ultérieures.  L'auteur  ne  pouvait  encore  connaî- 
tre la  pompe  a  vapeur,  sans  piston,  de  M.  Gensoul 
de  Lyon,  ni  celle  de  M.  Gingembre. 

Après  ce  juste  tribut  d'éloges  donnés  a  l'élève ,  nous 
devons  reconnaître  l'exellente  direction  imprimée  a  ses 
études  par  les  célèbres  professeurs  Moll ,  Schroder  et 
de  Fremery.  J.  G.  Garnier. 


BULLETIN 
DES  ACADÉMIES  ET  SOCIÉTÉS  SAVANTES. 

SOCIÉTÉ    TEYLÉRIENNE   A   HARLEM. 


.Lia  division  de  la  société  de  Teyler,  consacrée  aux 
sciences,  d'après  les  intentions  du  fondateur,  pro- 
pose pour  sujet  de  prix  la  question  suivante  : 

»   La  connaissance  du  monnayage  étant  d'un  grand 


(  3ia  ) 

«  intérêt  pour  l'histoire  en  général  et  pour  l'économie 
•»  politique   en  particulier,  la  société  désire,  pour  au- 

*  tant  qu'il  soit  possible,   une  histoire  complète  et  cri" 
n  tique  du  monnayage  dans   les  Pays-Bas ,   des  tems 

*  les  plus  reculés  jusqu'à  nos  jours"  (1). 

Le  prix,  pour  la  réponse  jugée  la  meilleure,  sera  une 
médaille  d'or  de  4oo  florins  d'Hollande,  valeur  intrin- 
sèque. 

Les  pièces  doivent  être  envoyées  de  la  manière  ac- 
coutumée, accompagnées  d'un  billet  cacheté  contenant  le 
nom  de  l'auteur,  a  l'adresse  de  la  société  à  Harlem  (2), 
avant  le  1  Janvier  1825. 


SOCIETE    HOLLANDAISE  DES    SCIENCES  ET    DES    BEAUX-ARTS. 


J-iA  Société  hollandaise  des  Sciences  et  des  Beaux- 
Arts  a  tenu ,  cette  année ,  son  assemblée  générale  an- 
nuelle a  La  Haye,  le  20  Septembre  dernier. 

Elle  avait  a  distribuer  les  médailles  adjugées  dans 
sa  dernière  assemblée,  tenue  à  Leyde  le  21  Septem- 
bre 1822,   savoir  : 

i°  Une  médaille  d'or  a  M.  Van  Limburg-Brouwer, 
qui  avait  le  mieux  résolu  la  question  suivante  :  Pos- 
sède-t-on,  dans  les  Pays-Bas  ,  une  scène  tragique 
nationale?   si   on  V  affirme,  quel  en  est  le   caractère  $ 

(ï)  »  De  kennis  Tan  het  muniwezen  van  belang  zijnde  voor  de 
•»  geschiedkunde  in  het  algemeen,  en  voor  de  staats-huishoud- 
»  kunde  in  hei  bijzonder  ,  zoo  verlangt  het  geuootschap  eene 
»  zooveel  mogelijk  volledige  en  oordeelkundige  geschiedenis  van 
»  het  muntwezen  in  de  Nederlanden,  van  hare  vroegste  lijdeu 
»  ai  tôt  op  onzen  tegenwoordigen  tijd." 

(2)  Aan   Teylcrs  fimdutie-huis  te  Harlem. 


( 515  ) 

sinon ,  quels  sont  les  meilleurs  moyens  pour  en  créer 
une?  Dans  ce  dernier  cas,  est-il  nécessaire  de  pren- 
dre pour  modèle  V une  des  écoles  existantes,  et  d'après 
quelles  raisons  doit-on  en  déterminer  le  choix  ? 

2°  Une  médaille  d'or  a  M.  N.  G.  van  Kampen,  a 
Leyde,  pour  la  réponse  à  la  question  :  Quelle  est  la 
différence  caractéristique  entre  la  poésie  classique  des 
anciens  et  celle  qu'on  nomme  la  poésie  romantique  des 
modernes  ?  Quel  en  est  le  mérite  respectif  et  le  plus 
ou  le  moins  de  concordance  avec  les  mœurs  et  les  be- 
soins moraux  de  notre  époque  ? 

5°  une  médaille  d'or  a  M.  Tollens  ,  de  Rotter- 
dam; et  des  médailles  d'argent,  a  MM.  J.  L.  Nier- 
strasz  Jr ,  a  Rotterdam ,  et  A.  Beeloo  ,  a  La  Haye , 
pour  leurs  pièces  de  poésie  sur  le  sujet  proposé  : 
Poème  séculaire  sur  V invention  de  l'imprimerie. 

Les  jugemens  sur  les  sujets  en  concours  pour  la  pré- 
sente année ,   ont  été  proclamés  comme   suit  : 

Sur  la  Ire  question  :  Quels  avantages  résultent  de  la 
conservation  d'une  langue  nationale ,  pour  le  bien-être, 
la  civilisation  et  les  mœurs  d'un  peuple  ?  et  a  quels  désa- 
vantages doit-on  s'attendre  en  négligeant  plus  ou  moins 
la  langue  maternelle  ?  Aucun  mémoire  n'a  été  reçu. 

Sur  la  2me  question  :  Qu'entend-on  par  /'Idéal  dans 
le  domaine  des  arts,  et  jusqu'à  quel  point  l'artiste 
doit-il  s'y  conformer?  — Parmi  trois  mémoires,  dont 
l'un  n'était  pas  achevé,  celui  dont  M.  J.  A.  Bakker, 
peintre  a  Rotterdam,  fut  reconnu  l'auteur,  a  mérité 
la  médaille  d'or. 

Le  troisième  sujet  était  l'éloge  de  S.  J.  JBrugmans; 
parmi  trois  concurrens ,  M.  H.  C.  van  der  Boon  Mesch, 
docteur  en  médecine   a  Leyde,    a  mérité  la  médaille 


(  3.4  ) 

d'or,  et  M.  A.  Capadose  ,  docteur  en  médecine  a 
Amsterdam,  la  médaille  d'argent. 

Pour  le  quatrième  sujet,  l'éloge  de  l'amiral  De 
Ruiter,  de  six  pièces  envoyées  au  concours,  aucune 
n'a  été  jugée  digne  du  prix. 

L'assemblée  ouvrant  ensuite  un  nouveau  concours, 
pour  le  premier  Février  1825,   demande: 

i°  Qu'y  a-t-il  à  dire  de  l'état  actuel  des  lumières 
qui  éclairent  les  -peuples,  et  de  l'influence  qui  en 
résulte  sur  leur  état  moral?  quels  seraient  les  moyens 
convenables  pour  en  seconder  ou  en  modifier  les 
progrès  ? 

2P  Une  dissertation  sur  ce  qui  constitue  l'essence  et  le 
mérite  de  la  poésie  descriptive  dans  les  diffèrens  genres; 
on  syappuyera  d'exemples  pris  dans  les  poètes  anciens  , 
dans  ceux  des  tems  intermédiaires  et  dans  les  modernes, 

3°  L'éloge  de  Jérôme  van  Alplien. 

Les  premiers  prix  sont  des  médailles  d'or  de  la  va- 
leur intrinsèque  de  3o  ducats;  les  seconds  des  médailles 
d'argent  d'une  égale  grandeur  et  frappées  au  même  coin. 

Les  éloges  seront  en  langue  nationale  ;  les  autres 
sujets  peuvent  être  traités  dans  la  même  langue, 
en  latin,  en  anglais,  en  français  ou  en  allemand  ca- 
ractères italiques;  les  écrits,  les  notes,  les  correc- 
tions ni  les  changemens  qui  s'y  rapportent,  ne  peu- 
vent être  de  la  main»  des  auteurs  ;  ils  porteront  une 
devise  répétée  sur  l'adresse  d'un  billet  cacheté  qui 
contiendra  le  nom  du  concurrent;  ils  seront  adressés, 
franc  de  port,  a  M.  J.  van  Oosterwjk  Bruin ,  secré- 
taire-général de  la  société ,  a  Amsterdam. 

La  société  rappelle  qu'elle  a  demandé  antérieurement  : 

Pour  le  1  Février  1825.  Un  vocabulaire  hollandais 
complet  et   raisonné  de   tous  les   termes   techniques   et 


(  3.5  ) 

nomenclatures  usités  dans  les  différens  arts  et  métiers , 
rangés  sous  le  nom  de  la  branche  de  Vart  ou  du  métier 
auquel  ils  appartiennent  respectivement. 


SOCIETE   HOLLANDAISE   DES    SCIENCES    A   HARLEM. 


Suite ,  voyez  N°  6.  page  238. 

JLiA  Société  a  trouvé  bon  de  répéter  les  sept  questions 
suivantes y  auxquelles  on  n'a  point  répondu,  et  pour 
lesquelles  le  terme  du  concours  est  jixé  avant  le  1  Jan- 


vier 1826. 


I.  »  Quelles  sont  les  altérations  salutaires  ou  nuisi- 
»  blés  a  la  santé  de  l'homme,  que  les  substances  nour- 
»  rissantes,  soit  animales  soit  végétales ,  subissent,  dans 
»  la   composition   de  leurs  parties    constituantes,    par 
»  l'action  du  feiij  et  quelles  règles  peut-on  en  déduire 
»  pour   modifier  la    préparation  de    certains    alimens , 
»  afin  qu'ils  soient  le  mieux  adaptés  a  la  plus  grande 
»  nutrition  et  a  la  conservation  de  la  santé  de  l'homme  ?" 
II.   »  Jusqu'à  quel  point  connaît-on  la  nature  et  les 
»  propriétés  de  cette  espèce  de  champignons  qui  r.ais- 
»  sent  sous  les  planchers  de  bois,  sur-tout  dans  des  ap- 
»  partemens  humides,  qui  s'y  multiplient  très-subite- 
»  ment,   et  causent,  en  peu  de  tems,  la  putréfaction 
»  du  bois.  Peut-on  déduire  de  la  nature  connue  de  cette 
»  plante,  et  de  la  manière  dont  elle  accélère  la  putré- 
»  faction  du  bois,  des  moyens  d'en  prévenir  la  nais- 
»  sance,  de  l'extirper  entièrement  où  elle  a  lieu,  ou 
»  d'en  diminuer  au  moins  les  effets  pernicieux?" 
III.  Attendu  que,  pendant   le   cours    des  dernières 


(3i6) 

années,  plusieurs  savans,  et  entr'autres  Buttley  (1) , 
Real  (2),  Dobereiner,  Rommershausen  (5),  Barry  (4), 
ont  proposé  plusieurs  manières  de  préparer  les  extraits, 
destinés  a  l'usage  de  la  médecine,  dans  le  but  de  con- 
server le  mieux  les  vertus  qu'on  leur  attribue ,  la  Société 
demande  : 

»  Quelle  est  la  meilleure  manière  de  préparer  les  ex- 
»  traits  destinés  a  quelque  usage  médical,  et  dans  les- 
»  quels  les  propriétés  et  les  vertus  des  plantes  sont 
»  conservées  autant  que  possible ,  et  ne  subissent  aucune 
»  altération  ?  Entre  les  procédés  des  chimistes  ci-dessus 
»  nommés,  lequel  mérite  d'être  préféré  en  général? 
»  Une  manière  encore  plus  propre  ou  avantageuse , 
«  peut-elle  être  imaginée  ?  Faut-il  rejeter  entièrement 
»  le  procédé  usité  jusqu'ici,  ou  faut-il  plutôt  donner 
»  la  préférence,  tantôt  a  l'un,  tantôt  a  l'autre,  selon 
»  la  nature  différente  des  plantes?  Dans  le  cas  affir- 
»  matif,  quels  sont  les  principes  fondamentaux  et  les 
»  règles,  qui  en  dérivent,  et  d'après  lesquelles  un 
»  pharmacien,  dans  chaque  cas  indiqué,  peut  déter- 
»  miner  la  meilleure  manière  de  préparer  les  extraits?" 

IV.  Comme  l'usage  des  sangsues ,  qui  donnent  au 
sang  des  issues  locales,  prévaut  actuellement  de  plus 
en  plus,  pour  guérir  certaiues  maladies,  et  comme  ces 
animaux  ne  se  trouvent  pas  prêts  partout  et  dans  tous 
les  tems ,  on  demande:  »  L'instrument,  pour  suppléer 
»  au  défaut  des  sangsues,  inventé  par  le  docteur  Sar- 
»  landière }  et  nommé  Bdellomètre ,  est-il  porté  au  plus, 

(1)  Trommsdorf  journ.  de  pharra.  XXV.  b.  2.  st.  s.  54. 

(2)  Schweiggers  journ.  fùrchemie,  XV.  53g.  Gilbert's  annal. 
LXIV.   i4. 

(3)  Algemeene  korist-  en  letterbode,    1820.  N°  6  en  9. 

(4)  Aimais  of  philosopher  by  T.  Thompson,  XIV,  587  et 
Schweiggers  journal,  XXV11I,  260. 


(3i7) 
»  haut  degré  de  perfection  et  d'utilité'  ;  quels  en  sont 
»  encore  les  de'fauts  5  comment  pourrait-on  les  préve- 
»  nir,  ou  comment  pourraient-ils  être  évités,  au  moyen 
»  d'une  meilleure  construction?" 

V.  »  A  quel  degré  la  connaissance  des  principes  con- 
»  stituans  des  substances  animales  et  végétales,  est- 
»  elle  étendue  parles  expériences  intéressantes  de  Br<t~ 
»  connot,  dans  lesquelles,  au  moyen  de  l'acide  sulfu- 
»  rique,  ces  substances  sont  converties  en  autres  sub- 
»  stances  très-différentes  (1).  Les  résultats  de  ces  ex- 
»  périences  sont-ils  entièrement  confirmés  par  des  ex- 
»  périences  réitérées?  Qu'est-ce  que  des  expériences 
»  de  ce  genre  font  voir  au  reste,  en  les  essayant  sur 
»  d'autres  substances,  qu'on  n'y  a  point  encore  sou- 
»  mises?  Et  quels  avantages  pourrait-on  tirer  d'une 
»  transmutation  de  cette  nature,  pour  se  procurer 
»  des  produits  utiles?" 

VI.  »  Vu  que,  depuis  peu,  on  a  appris  par  des  ex- 
»  périences,  que  le  feu  et  la  flamme  peuvent  prendre 
)>  un  degré  d'activité  très-considérable ,  au  moyen  d'un 
)>  torrent  de  vapeur  d'eau  ,  appliqué  d'une  certaine 
»  manière ,  on  demande  ,  de  quelle  manière  et  dans 
»  quels  cas  on  pourrait  en  tirer  des  effets  avantageux, 
»  soit  dans  l'économie ,  soit  dans  les  fabriques ,  et  dans 
»  tous  les  cas  où  il  importe  de  donner  plus  d'activité 
»  au  feu?" 

VII.  »  Quels  sont  les  genres  de  fabriques ,  qui  com- 
»  muniquent  a  l'atmospbère  une  qualité  nuisible  a  la 
»  respiration  de  l'homme.  L'effet  nuisible,  que  ces 
»  branches  d'industrie  produisent 'sur  la  santé  de  l'hom- 
»  me,  est-il   si  considérable  qu'il  exige  quelque  pré- 

(1)  Journal  de  chimie  et  de  physique  XII,  172  et  XHI ,  110. 
Schweiggers  journ.  XXVII,  028  et  XXIX,  o-t5. 


(  3i8  ) 

m  caution?  En  ce  cas-ia,  quelles  sont  les  précautions 
»  a  prendre  dans  l'établissement,  ou  dans  l'état  actuel 
»  de  ces  fabriques  ?  " 

Et  les   questions  suivantes  pour  un  tems  illimité. 

I.  »  Quel  est  dans  ce  pays  l'état  des  prisons  en  géné- 
»  rai?  Quels  sont  les  défauts  qu'un  examen  physique 
»  pourrait  y  indiquer?  et  quels  moyens  pourrait-on 
»  employer  pour  améliorer  le  sort  des  prisonniers  re- 
»  lativement  a  leur  santé  ?  " 

II.  »  Qu'est-ce  que  l'expérience  nous  a  fait  voir,  re- 
»  lativement  a  la  meilleure  méthode  de  greffer  les  arbres 
»  fruitiers?  A  quel  point  sait-on  expliquer,  par  la  phy- 
)>  siologie  des  arbres ,  les  différentes  manières  de  gref- 
»  fer,  et  quelles  conséquences  peut-on  en  tirer  pour 
»  réussir  le  mieux ,  dans  cet  art ,  sur  tous  les  arbres 
»  fruitiers  ?  v 

La  société  désire,  en  proposant  cette  question,  un 
traité,  dans  lequel,  en  évitant  toute  diffusion,  la  con- 
naissance théorique  et  pratique  de  cet  art  soit  exposée 
succinctement^  mais  toutefois  d'une  manière  complète; 
elle  désirerait  aussi  que  ce  sujet  fût  enrichi,  s'il  est 
possible,  d'observations  nouvelles  ou  peu  connues. 

La  Société  propose  les  onze  questions  suivantes  pour 
qu'on  y  réponde  avant  le  1  Janvier  182 5. 

I.  Plusieurs  architectes  hydrauliques  expérimentés 
conviennent  de  l'impossibilité  ,  qui  existe  souvent  dans 
ce  pays ,  de  contenir  ou  de  faire  dériver  les  sources 
(wellen)y  qui  se  montrent  souvent,  lorsqu'on  pose  les 
fondements  de  profondes  écluses;  et,  comme  dans  d'au- 
tres pays,  en  construisant  des  ouvrages  de  ce  genre, 
on  est  parvenu  a  se  rendre  maître  de  sources  très-con- 
sidérables, au  moyen  de  machines  a  vapeur,  la  société 
met  au  concours  la  question  suivante  : 


C  5i9  ) 

»  Outre  les  moyens  usités  et  insuffisans,  quels  pour- 
»  raient  être  ceux  qu'on  peut  mettre  en  œuvre  ponr 
»  -que ,  en  fondant  des  écluses  profondes ,  ces  sources 
»  fussent  contenues,  de  manière  qu'on  se  trouvât  tou- 
»  jours  en  état  de  donner  a  ces  écluses  la  profondeur 
»  déterminée  préalablement.  Pourrait-on  a  cet  effet, 
»  comme  ceci  a  lieu  ailleurs,  employer  avec  fruit  les 
»  macliines  a  vapeur,  et  qu'est-ce  que  l'expérience  a 
»  démontré  sur  la  meilleure  manière,  de  se  servir  le 
»  le  plus  avantageusement  de  ces  machines,  pour  con- 
»  tenir  les  sources?" 

IL  »  Qu'est-ce  que  l'expérience  a  prouvé  incontes- 
»  tablement  sur  la  formation  de  la  glace  au  fond  des 
»  rivières  des  Pays-Bas  et  ailleurs?  Quelles  sont  les 
»  causes  auxquelles  on  pourrait  attribuer  ce  phéno- 
»  mène,  que  plusieurs  physiciens  pouvaient  autrefois 
»  et  peuvent  maintenant  révoquer  en  doute?  et  quelles 
»  sont  les  lumières  qu'on  peut  en  tirer ,  soit  pour  la 
»  théorie  de  la  congélation,  soit  a  d'autres  égards,  ou 
»  pour  quelque  but  utile?" 

III.  »  Quelles  sont  les  maladies  du  corps  humain, 
»  dont  on  peut  dire,  que,  d'après  des  principes  phy- 
»  siques  et  chimiques,  on  les  connaît  et  qu'on  est  en 
»  état  d'en  conclure  quels  sont  les  remèdes  les  plus 
»  efficaces  contre  ces  maladies,  et  de  quelle  manière 
»  ils  opèrent  dans  le  corps  humain,  pour  les  guérir?" 

IV.  »  Quelle  est  la  meilleure  manière  de  préparer 
»  les  sulfates  de  quinine,  tant  a  l'égard  de  leurs  vertus 
»  qu'a  l'égard  de  la  quantité  produite  et  du  ménage- 
»  gement  des  frais.  En  quoi  diffèrent-ils,  tant  sous  des 
»  rapports  physiques  que  sous  des  rapports  purement 
»  chimiques?  Quels  sont  les  caractères  auxquels  on 
»  peut  les  reconnaître  avec  sûreté  ,  pour  découvrir 
»  toute  falsification?" 


(    320    ) 

Il  n'est  pas  nécessaire  qu'on  indique  toutes  les  ma- 
nières de  procéder,  qui  sont  déjà  décrites.  11  suffit 
qu'on  prouve  uniquement,  par  des  raisons  bien  fondées 
sur  l'expérience ,  que  le  procédé  proposé  est  le  meilleur. 

V.  »  De  quelle  valeur  sont,  en  général,  dans  lamé- 
»  decine,  les  sulfates  de  quinine,  particulièrement  pour 
»  les  fièvres?  Opèrent-ils  de  la  même  manière  que  les 
»  autres  préparations  de  quinquina,  ou  en  quoi  diffè- 
)>  rent-ils ,  et  quels  sont  les  cas  ou  l'une  est  préférable 
»  a  l'autre?  Peut-on  dans  toutes  sortes  de  fièvre,  et  a 
»  tous  les  périodes  en  faire  usage:  ou  faut-il  que  le 
»  médecin  s'en  tienne  aux  mêmes  règles  que  dans  les 
»  autres  préparations  de  quinquina,  ou  a  quelques 
»  autres  règles?  " 

VI.  Comme  dans  l'art  vétérinaire  on  trouve  beaucoup 

d'indices,  que  les  principes  de  la  médecine  du  corps 

humain  y  ont  été  appliqués  mal-a-propos ,  et  que  ceci 

met  peut-être  des  entraves  aux  progrès  de  l'art  susdit  ; 

la   société   demande  :   »  Quelle  est  l'analogie  entre  les 

»  maladies  ayant  le  plus  lieu  chez  nos  bêtes  domesti- 

»  ques,  et  les  maladies  des  hommes,  tant  a  l'égard  de 

»  la  naissance,   de  la  marche  et  de  l'issue,  que  prin- 

»  cipalement  a  la  manière,  dont  ces  maladies  doivent 

»  être   traitées?    En   quoi  diffèrent-elles   les  unes  des 

>>  autres  sous  leurs  différents  rapports?  Comment  cette 

»  différence  peut-elle  être  expliquée  par  la  différence  de 

)>  constitution  de  l'homme  et  des  animaux,  et  quels  prin- 

»  cipes  faut-il  suivre  dans  l'art  vétérinaire,  pour  par- 

»  venir  a  bien  connaître ,  et  a  traiter  de  la  manière  la 

»  plus  fondée,  les  maladies  des  bêtes  domestiques?" 

VII.  »  La  société  demande  un  tableau  historique  des 
»  découvertes  utiles,  déduites  de  principes  physiques 
»  ou  chimiques,  lesquelles  ont  été  faites  autrefois,  soit 


(321    ) 

»  ici ,  soit  ailleurs ,  mais  qu'on  a  remplacées  par  d'au- 
»  très  découvertes  ou  améliorations,  ou  qui  se  sont 
»  perdues  de  quelqu'autre  manière.  On  demande  sur- 
»  tout  qu'on  examine,  si  les  découvertes  ou  amé- 
»  liorations  postérieures  étaient  en  effet  des  améliora- 
)>  tions,  ou  plutôt  de  simples  changemens  qui  n'abou- 
»  tissaient  pas  a  quelque  but  utile?" 

VIII.  »  Qu'est-ce  que  les  observations  faites  en  beau- 
»  coup  d'endroits,  l'hiver  dernier,  sur  le  froid  rigou- 
»  reux,  ont  démontré  a  plusieurs  égards,  pour  l'aug- 
»  mentation  de  nos  connaissances  physiques,  spéciale- 
»  ment  quant  a  la  théorie  de  la  congélation.  —  Parmi 
»  les  observations  des  effets  extraordinaires  ou  moins 
»  connus  et  pernicieux  du  dernier  froid  si  violent,  y 
»  en  a  t-il ,  dont  on  puisse  déduire  des  préceptes  utiles , 
»  pour  pouvoir,  pendant  les  hivers  rigoureux,  se  ga- 
»  rantir  le  mieux  contre  ces  effets?" 

On  ne  demande  pas ,  que  ,  en  répondant  a  cette  ques- 
tion, on  donne  des  séries  d'observations  thermométri- 
ques ,  a  moins  qu'elles  ne  puissent  servir  a  confirmer 
ce  que  l'on  veut  soutenir. 

IX.  »  Quels  ont  été  les  effets  pernicieux  et  extraor- 
»  dinaires  du  froid  vif  de  l'hiver  dernier  sur  les  arbres, 
»  arbrisseaux  et  plantes ,  sur-tout  a  l'égard  de  ceux 
»  qui ,  pour  leur  utilité ,  sont  cultivés  dans  les  pro- 
»  vinces  septentrionales  de  ce  Royaume,  comme  aussi 
»  dans  d'autres  pays,  dont  la  température  ne  diffère 
»  guères  de  celle  de  ces  provinces.  Et  quels  préceptes 
»  pourrait-on  déduire  de  ce  qu'on  a  observé  des  effets 
»  pernicieux  des  gelées  sur  les  arbres  et  les  plantes, 
»  pour  trouver  des  moyens  de  prévenir,  en  quelque 
»  manière,  ces  effets  dans  les  hivers  rigoureux?' 

X.    Comme  on   ne   faisait   usage  ,   il  y  a  quelques 
VIIIme  livraison.  a  a 


(    522    ) 

années,  Je  la  pompe  pneumatique,  que  pour  des  ex- 
périences physiques,  et  qu/on  se  sert  maintenant  très- 
utilement  de  cette  machine  dans  plusieurs  fabriques  de 
l'Angleterre  et  de  l'Allemagne,  soit  pour  faire  bouillir 
l'eau  an  moyen  d'une  chaleur  Beaucoup  moins  forte , 
procédé  qu'on  a  commencé  a  introduire  dans  les  raffi- 
neries de  sucre  en  Angleterre  ,  suivant  l'invention  de 
Howard  et  Hodgson ,  soit  pour  faire  pénétrer  mieux  la 
matière  colorante  des  teintures  dans  les  étoffes  qu'on 
veut  teindre,  dans  des  chaudières  fermées,  moyennant 
la  pression  de  l'air  atmosphérique  qu'on  y  introduit, 
après  aAoir  fait  raréfier  l'air  qui  était  dans  la  chaudière, 
la  société  demande:  »  Dans  quelles  autres  fabriques  ou 
»  manufactures  on  pourrait ,  d'après  des  principes  phy- 
»  siques,  introduire  avec  avantage  l'usage  delà  pompe 
»  pneumatique  pour  l'un  ou  l'autre  but?"' 

XL  Attendu  que ,  actuellement ,  on  n'emploie  pas 
uniquement  la  vapeur  comme  force  motrice  dans  les 
machiues  a  vapeur,  mais  qu'on  s'en  sert  même  avec 
beaucoup  d'avantage  a  plusieurs  effets,  comme  dans  les 
blanchisseries  de  fil ,  dans  les  serres  chaudes  pour  la 
culture  des  plantes,  et  aussi  dans  la  préparation  des 
aliments,  la  société  demande  :  »  Peut-on  juger,  sur  des 
»  principes  bien  fondés ,  pour  quelles  fabriques  ou 
»  pour  quels  usages  domestiques  on  pourrait  employer 
»  la  vapeur  ?  " 

La  Société  a  trouvé  bon  de  répéter,  dans  les  Sciences' 
Philosophiques  et  Morales ,  la  question  suivante,  pour 
qu'on  y   réponde  avant  le   1  Janvier   iv'25. 

»  Les  préceptes  de  la  morale  a  observer  par  des  in- 
»  dividus,  doivent-ils  être  aussi  remplis  par  les  peu- 
»  pies,  de  sorte  que  l'observation  de  ces  mêmes  pré- 
»  ceptes  soit  du  nombre  des  devoirs  de  celui    qui  gou- 


(  323  ) 

»  verne:  et,  si  on  ne  doit  re'pondre  a  cette  question  ni 
»  entièrement  d'une  manière  affirmative  ni  tout  a  fait 
)>  négativement,  quelles  sont  les  limites  auxquelles  on 
»  doit  se  tenir  en  ceci  ?  " 

La  Société  répète,  dans  les  Sciences  Littéraires  et 
Antiquités ,  la  question  suivante,  pour  qu'on  y  réponde 
avant  le  1  Janvier  1825. 

»  De  quelle  manière  doit-on,  eu  e'gard  a  la  forme, 
»  composer  une  histoire  pragmatique,  afin  qu'elle  n'ait 
»  pas  l'apparence  d'un  traité  philosophique  ou  politi- 
»  que,  mais  pour  qu'elle  conserve  le  caractère  propre 
»  a  un  récit  des  événemens  ?  " 

La  société  verra  avec  plaisir ,  que  les  auteurs  abrè- 
gent leurs  mémoires,  autant  qu'il  leur  sera  possible,  en 
retranchant  tout  ce  qui  n'appartient  pas  essentiellement 
a  la  question.  Elle  désire,  que  tout  ce  qu'on  lui  offre, 
soit  écrit  clairement  et  succinctement,  et  qu'on  distin- 
gue bien  ce  qui  est  effectivement  démontré  de  ce  qui 
doit-être  regardé  comme  hypothétique. 

Aucun  mémoire  ne  sera  admis  au  concours ,  qui  pa- 
raîtra évidemment  être  écrit  de  la  main  de  l'auteur,  et 
une  médaille  adjugée  ne  pourra  même  être  délivrée , 
lorsqu'on  découvrira  la  main  de  l'auteur  dans  le  mé- 
moire jugé  digne  d'être  couronné. 

Tous  les  membres  ont  la  liberté  de  concourir ,  a  con- 
dition que  leurs  mémoires ,  comme  aussi  les  billets  qui 
renferment  la  devise ,  soient  marqués  de  la  lettre  L. 

Les  réponses  peuvent  être  faites  en  hollandais ,  en 
français,  en  latin  et  en  allemand,  mais  non  en  carac- 
tères allemands  ;  elles  doivent  être  accompagnées  d'un 
^billet  cacheté    qui  contienne  le   nom,   et   envoyées  à 
M.  Van  M  arum ,  secrétaire  perpétuel. 

Le  prix  destiné  a  celui  qui ,  au  jugement  de  la  so- 


(  324) 
ciété,  aura  le  mieux  répondu  a  chacune  des  questions 
mentionne'es  ci-dessus,  est  une  médaille  d'or,  frappée 
au  coin  ordinaire  de  la  Société,  au  Lord  de  laquelle 
sera  marqué  le  nom  de  l'auteur ,  et  l'année  où  il  a  reçu 
le  prix,  ou  i5o  florins  d'Hollande,  au  choix  de  l'auteur. 

»  MM.  les  Directeurs  de  la  Société  ont  pris ,  dans 
»  Vannée  1821,  la  résolution  de  joindre  à  la  médaille 
))  ordinaire  une  gratification  de  cent  cinquante  florins 
»  de  Hollande ,  pour  chaque  réponse  sur  chacune  des 
»  questions  déjà  proposées ,  ou  qui  sont  répétées  ou 
»  proposées  par  ce  programme ,  au  cas  que  la  société 
»  juge  ces  réponses  dignes  d'être  couronnées.  La  société 
»  espère ,  que  cette  gratification,  jointe  à  la  valeur  de  la 
»  médaille  ordinaire,  engagera  quelques  savans  à  se 
»  donner  plus  de  peine  pour  répondre  aux  questions 
»  proposées." 

Il  ne  sera  pas  permis  a  ceux,  qui  auront  remporté 
un  prix  ou  nn  accsssit,  de  faire  imprimer  leurs  mé- 
moires ,  soit  en  entier  ou  en  partie ,  soit  a  part  ou  dans 
quelque  autre  ouvrage,  sans  en  avoir  obtenu  expres- 
sément l'aveu  de  la  société. 


SOCIÉTÉ  DE  LA  LANGUE  ET  DE  LA  LITTÉRATURE  NATIONALE 

A    G AND. 

JNous  croyons  faire  plaisir  a  nos  lecteurs  en  leur 
donnant  quelques  détails  sur  une  société  littéraire  qui , 
par  l'honorable  but  qu'elle  se  propose ,  mérite  un  rang 
distingué  parmi  les  réunions  d'hommes  instruits  dans 
la  capitale  de  la  Flandre.  Nous  nous  proposons  de  con- 
tinuer les  notices,  sur  ses  progrès,  et  de  tenir  ainsi  le 
lecteur  au  courant  de  ses  utiles  et  intéressans  travaux. 


(  325  ) 

Cette  société  doit  son  origine  a  quelques  amateurs 
de  la  langue  et  de  la  littérature  nationale,  qui  désiraient 
depuis  long-tems  se  réunir  et  mettre  en  commun 
leurs  connaissances  en  ce  genre  d'instruction  d'autant 
plus  qu'aucune  réunion  n'était  encore  exclusivement 
consacrée,  en  cette  ville,  a  la  culture  des  belles-lettres 
nationales,  considérées  dans  toute  leur  étendue.  S.  Exe. 
M.  Falcky  ministre  de  l'instruction  publique,  vou- 
lut bien,  a  la  demande  des  fondateurs,  accepter  le  titre 
de  protecteur,  et  la  Régence  de  Gand  s'empressa  d'ac- 
corder une  salle  dans  l'enclos  de  l'ancienne  abbaye  de 
Baudeloo,  pour  y  tenir  les  séances;  les  membres  de  la 
société  commencèrent  leurs  travaux  le  4  Décembre  1821 , 
jour  de  l'installation,   célébré  avec  solennité  (1). 

M.  Schrant ,  fit  a  cette  occasion  un  discours  Sur  le 
sentiment  de  l'indépendance  nationale ,  envisagé  comme 
moyen  propre  à  favoriser  la  culture  de  la  langue 
maternelle.  Des  hommes  instruits ,  assistant  a  celte 
séance ,  manifestèrent  leur  satisfaction  de  la  manière 
dont  l'orateur  s'était  acquitté  de  sa  tâche.  M.  Schrant 
prouva  par  l'exemple  des  Grecs,  des  Romains  et  des 
Français,  que  ces  nations,  lettrées  par  excellence , 
n'avaient  jamais  jette  un  éclat  plus  brillant ,  obtenu 
une  gloire  plus  solide  qu'a  l'époque  où  elles  jouissaient 
le  plus  de  ce  noble  sentiment  d'indépendance  et  de 
véritable  amour  de   la    patrie.     L'orateur   rappella     la 

(1)  Les  fondateurs,  proclamés  ensuite  directeurs  ou  membres 
du  comité  de  l'administration,  sont  MM.  le  vénérable  Schrant, 
président,  professeur  de  littérature  nationale,  J.  L.  '  Kesteloot, 
vice-président,  professeur  en  la  faculté  de  médecine,  Maline , 
professeur  de  littérature  ancienne,  tous  trois  à  l'Université  de 
cette  ville  ;  D'Hulster,  De  Potier,  régens  au  collège  royal  ; 
Tan  Toers,  greffier  des  états,  et  Hye-Schoutheer,  secrétaire  de 
la  régence,  etc. 


(  526    ) 

mémoire  de  ces  jouis  heureux  lorsque  les  Belges  et 
les  Bataves  développaient  toute  leur  énergie  pour  ob- 
tenir les  précieux  avantages  d'une  sage  liberté ,  et  que  leur 
courage  les  rendait  si  dignes  des  plus  grandes  destinées. 
Alors  fleurissaient  également  les  arts,  les  sciences  et  les 
lettres  nationales.  Tout  enfin,  suivant  l'orateur,  devait 
nous  disposer  a  nourrir,  a  exciter  en  nos  cœurs  ces 
nobles  sentimens. 

MM.  De  Potter  et  Fervier  récitèrent  des  morceaux 
poétiques:  le  premier  célébra  la  Poésie,  le  second 
consacra  ses  chants  a  la  Patrie. 

Dans  une  des  assemblées  suivantes,  M.  le  professeur 
Kesteloot  ouvrit  la  séance  par  un  discours  ayant  pour 
objet  :  La  puissante  influence  que  les  Belges  ont  exer- 
cée sur  les  progrès  des  sciences ,  pendant  le  dix-huitième 
siècle;  l'orateur  fit  voir  par  des  preuves  irrécusables 
combien  nos  compatriotes  ont  coopéré  a  faire  naître  le 
goût  des  sciences  ,  a  en  propager  les  heureux  résultats , 
la  vraie  civilisation.  M.  Kesteloot  désigna  les  branches 
des  connaissances  humaines  dans  lesquelles  ils  avaient 
spécialement  excellé ,  les  découvertes  qu'ils  avaient  fai- 
tes, et  par  suite,  il  rappela  les  motifs  de  la  reconnais- 
sance européenne  qui  leur  était  si  dûement  acquise. 

M.  D'Hulster  lut  l'extrait  d'une  production  poé- 
tique ancienne  et  peu  connue.  M.  De  Potter  récita 
des  stances  sur  l'Hiver. 

Au  mois  de  Février  suivant ,  M.  le  professeur  Mahne 
fit  un  discours  Sur  l'indispensable  nécessité  de  la  con- 
naissance approjondie  des  auteurs  Grecs  et  Romains 
pour  étudier  avec  fruit  et  avec  goût  les  belles-lettres  natio" 
nales.  L'orateur  démontra  que  les  plus  célèbres  auteurs 
nationaux,  a  compter  du  dix-septième  siècle  jusqu'à  ce 
jour,    avaient  su    dignement  apprécier  les   écrits   des 


C  3a7  ) 

anciens  et  les  avaient  considérés  comme  les  sources 
inépuisables  du  vrai,  du  beau,  du  sublime. 

M.  De  Potter  lit  lecture  d'un  poëmc  ayant  pour 
titre  :  David  et  Jonathan;  M.  D'Hulster  préseuta  quel- 
ques recherches  grammaticales  et  étymologiques  sur  la 
manière  d'ortographier  la  dénomination  de  notre  ville 
(G  end). 

Le  5  Avril ,  M.  Fervier  traita  De  l'étude  des  scien- 
ces considérée  comme  principal  moyen  d'acquérir  le 
vrai  bonheur.  Après  avoir  défini  ce  bonheur,  l'orateur 
fit  voir  par  des  témoignages  historiques  que  les  siècles 
qui  favorisaient  le  plus  la  culture  des  arts  et  des  scien- 
ces ,  furent  ceux  qui  offrirent  moins  de  guerres  civi- 
les et  religieuses. 

A  la  séance  suivante ,  M.  De  Potter  fit  un  discours 
Sur  le  puissant  intérêt  qu'offre  Vhistoire  de  la  patrie. 
L'orateur  démontra  la  grande  utilité  de  l'histoire  en 
général,  et,  tout  en  rendant  justice  aux  anciens,  il 
accorda  néanmoins  la  préférence  a  l'histoire  moderne 
et  nommément  a  celle  de  sa  patrie. 

M.  Schranl  termina  la  séance  par  une  dissertation 
sur  les  mérites  poétiques  de  Justus   Harduin. 

Dans  la  dernière  réunion  d'hiver ,  M.  D'Hulster 
y  lut  une  pièce  intitulée:  Philippine ,  fille  de  Guidon 
de  Dampierre ,  comte  de  Flandre  a  la  fin  du  troi- 
sième siècle.  Le  poète  décrivit  en  beaux  vers  les 
querelles  du  Roi  de  France  Philippe -le- Bel  avec 
Edouard  I.  Roi  d'Angleterre  ,  ainsi  qu'avec  les  Fla- 
mands, qui  se  vengèrent  enfin  de  la  trahison  du  Roi 
de  France  parla  célèbre  victoire  dite  des  éperons  d'au 
M.  De  Potter  lut  des  stances  sur  V Amour  maternel. 

La  société  compte  plus  de  soixante-dix  membres 
résidans    et  plus    de    quarante   membres    honoraires  ; 


(  3^8  ) 

parmi  ces  derniers  on  distingue  LL.  Exe.  les  Ministres 
de  l'Instruction  publique,  de  l'Intérieur  et  de  la  Jus- 
tice ,  des  Conseillers-d'état ,  des  Gouverneurs  de  Pro- 
vince ,  plusieurs  savants  et  littérateurs  du  premier 
ordre  :  tels  que  MM.  Bilderdyk  ,  le  chanoine  DeBast, 
Feith  y  Kemper  _,  Kinker ,  Siegenbeek ,  Stuart ,  van 
der  Palm,  van  Hemert,  Weiland,  etc.  qui  tous  se 
sont  plu  a  répondre  de  leur  empressement  et  de  leur 
zèle  pour  la  nouvelle  société. 

La  suite  au  cahier  prochain. 


VARIÉTÉS. 

Jua  sanction  royale,  accordée  a  un  règlement  arrêté, 
le  i4  Juillet  182D  ,  par  les  états -provinciaux  de  la 
Flandre  orientale ,  crée  parmi  nous  une  institution  nou- 
velle pour  la  conservation  de  nos  richesses  publiques 
en  Productions  des  Arts  et  en  Monumens  historiques  $ 
nous  nous  empressons  d'insérer  une  traduction  de  ce 
monument  de  la  noble  sollicitude  de  notre  Monarque 
et  de  nos  Magistrats  pour  les  Sciences  et  les  Arts. 

ARTICLE   PREMIER. 

Tous  les  objets  d'art  et  tous  les  monumens  histori- 
ques, quels  qu'en  soient  le  sujet  ou  la  nature,  qui  ne 
sont  pas  la  propriété  de  sociétés  privées  ou  de  parti- 
culiers, et  qui  se  trouvent  placés  dans  les  églises,  les 
édifices  communaux ,  les  établissemens  de  charité  et 
tous  autres  établissemens  publics,  sont  mis  sous  la  sur-  ' 
veillance  et  la  protection  de  l'autorité  publique. 

Art.  II.  Dans  les  villes  et  communes  dont  les  ad- 
ministrations locales  trouveront  la  possibilité  de  former 
des  commissions    composées   d'artistes    ou    d'amis  des 


(  ^9  ) 
arts,  ayant  les  connaissances  nécessaires  pour  juger  les 
objets  d'arts,  les  collèges  des  Bonrguemaîire  etEchevins 
en  nommeront  sans  délai  et  donneront  connaissance  de 
ces  nominations  aux  Etals  députés. 

Art.  III.  Les  commissions  étant  nommées  et  instal- 
lées ,  s'assureront  sans  délai  quels  objets  d'art  on  mo- 
nnmens  historiques,  parmi  ceux  qui  se  trouvent  dans 
les  églises,  établissemens  de  charité  on  antres  établis- 
semens publics,  offrent,  selon  l'art,  un  mérite  essentiel , 
ou  sont  reconnus  comme  mormmens  d'histoire  et  ne 
sont  la  propriété  ni  de  sociétés  privées  ni  de  particu- 
liers ;  ils  en  dresseront  une  notice  historique  qui  con- 
tiendra toutes  les  particularités  qui  s'y  rapportent  et 
offrent  quelqu'intérêt;  des  copies  de  ces  notices  seront 
adressées  a  l'administration  locale  et  aux  Etats  députés. 

Art.  IV.  Tous  les  objets  inscrits  dans  la  notice, 
seront  mis  sous  la  surveillance  de  l'autorité  locale;  les 
administrateurs  ou  chefs  des  établissemens  où  ils  se 
trouveront  placés,  en  seront  responsables  et  le  devoir 
leur  sera  imposé  d'informer  sur  le  champ  les  administra- 
tions locales  de  toute  soustraction  de  ces  objets. 

Art.  V.  Les  commissions  feront,  de  six  en  six  mois, 
une  inspection  des  objets  placés  sous  leur  surveillance; 
elles  dresseront  un  procès-verbal  de  chaque  inspection 
et  y  consigneront  leurs  observations;  ces  procès-verbaux 
seront  transmis  a  l'administration  locale. 

Si  les  observations  ainsi  faites  par  les  commissions 
donnaient  lieu  a  quelque  mesure,  de  la  part  de  l'ad- 
ministration locale ,  dans  l'intérêt  de  la  conservation  des 
objets  dont  il  s'agit  ,  ces  mesures  seront  prises  sans 
délai,  sauf  aies  faire  connaître  dans  le  délai  d'un  mois 
aux  Etats  députés. 

En  tous  cas,  les  administrations  communales  adres- 


(  55o  ) 

seront  sans  délai  aux  Etats   députés,   un  rapport  sur 
les  inspections  qui  auront  été  faites. 

Art.  VI.  Dans  les  communes  où  la  création  des 
commissions  sei*a  difficile  ou  impossible ,  les  commissai- 
res de  districts  s'assureront,  dans  leurs  tournées  ordi- 
naires, jusqu'à  quel  point  les  dispositions  du  présent 
règlement  peuvent  s'appliquer  a  ces  communes,  et  en 
feront  leur  rapport  aux  Etats  députés,  pour  agir 
selon  l'occurrence. 

Art.  VIL  Aucun  des  objets  d'art  mentionnés  ci- 
dessus  ,  ne  pourra  être  déplacé  sans  l'avis  préa- 
lable de  l'administration  locale  ,  qui  n'autorisera  ces 
déplacemens  qu'après  s'être  assurée  qu'ils  ne  nuiront 
en  rien  a  l'objet  même  et  ne  porteront  aucun  préjudice 
a  l'art  ;  dans  tous  les  cas  la  commission  devra  être  en- 
tendue. 

Art.  VIII.  Aucun  nettoyage  ni  restauration  ne  pour- 
ront être  faits  auxdits  objets  sans  le  consentement  de 
l'administration  locale  qui  devra  également  approuver  le 
choix  de  l'artiste  ou  des  artistes  qui  en  seront  chargés, 
après  avoir  au  préalable  délibéré  sur  ce  sujet  avec  la 
commission. 

Art.  IX.  Aucun  des  objets  d'art  ou  des  monumens 
historiques  qui  se  trouvent  dans  les  établissemens  pu- 
blics et  qui  appartiennent  a  la  cathégorie  établie  par 
l'article  premier,  ne  pourra  être  aliéné  ou  vendu  par 
ceux  qui  en  sont  les  gardiens ,  sans  une  autorisation 
spéciale  de  l'administration  locale,  approuvée  par  les 
Etats  députés,  et  avant  que  la  commission  locale  n'ait 
été  entendue. 

L'arrêté  royal  du  5  Décembre  1820  qui  approuve  ce 
règlement  et  en  ordonne  l'exécution,  contient  en  outre 
la  disposition  suivante  : 


(  35-i  ) 

»  Notre  Ministre  (de  l'instruction  publique,  etc.) 
»  est  autorisé  a  envoyer,  de  tems  en  tems,  un  expert 
»  dans  une  ou  plusieurs  Provinces  pour  inspecter  les 
»  objets  d'art  et,  dans  les  cas  d'abus  ou  de  négligence  , 
»  donner  des  instructions  aux  commissions  établies  sur 
»  les  lieux  et  en  faire  rapport  au  Ministère." 


M.  le  chevalier  Camberlyn  vient  d'acquérir  un  nou- 
veau titre  a  l'estime  de  ceux  qui  cultivent  encore  les 
lettres  latines,  par  un  poëme  en  l'honneur  de  la  maison 
de  Saxe-Weimar.  Ce  ne  sont  pas  de  ces  louanges  bana- 
les qui  peuvent  s'appliquer  a  tous  les  grands  hommes, 
et  qui  conviendraient  a  Witikind  comme  a  Charlemagne  ; 
c'est  un  tableau  rapide  des  mémorables  événemens  qui 
ont  placé  les  Ducs  de  Saxe-Weimar  au  rang  des  familles 
régnantes  les  plus  illustres  de  l'Europe.  M.  Camberlyn 
ne  pouvait  faire  un  meilleur  emploi  de  son  talent,  ni 
consacrer  la  poésie  a  un  plus  noble  usage  qu'en  célé- 
brant ,  comme  ils  méritent  de  l'être ,  des  Princes  éclai- 
rés ,  qui  ont  fait  revivre  dans  leur  capitale  les  siècles  de 
Périclès  et  d'Auguste. 

Nous  saisissons  cette  occasion  d'annoncer  que  M.  Cam- 
berlyn a  reçu,  il  y  a  quelques  jours,  le  diplôme  de 
membre  correspondant  de  la  Société  Linnéenne  de  Paris. 
C'est  un  hommage  flatteur  rendu  a  notre  compatriote, 
et  dont  sans  doute  il  est  redevable  a  l'épitre  latine 
adressée  par  lui,  il  y  a  quelques  tems,  a  cette  société, 
sur  les  charmes  de  la  Botanique. 


M.  Kinson  a  eu  l'honneur  de  présenter  a  S.  M.  le 
Roi  de  France  et  a  la  Famille  Royale,  le  beau  por- 
trait en   pied    qu'il  vient  d'achever  ,   de  S.  À.  R.  la 


Duchesse  d'Angoulême. 


(  552  ) 

—  M.  le  baron  de  Grimer,  de  Munich,  qui,  a  un 
savoir  très-étendu  et  très-distingué ,  joint  un  grand 
esprit  d'observation,  avait  fait,  il  y  a  deux  ans,  un 
assez  long  séjour  a  Gand  et  dans  plusieurs  communes 
des  deux  Flandres,  pour  se  pénétrer,  sur  les  lieux 
même ,  de  tout  ce  que  l'économie  rurale  et  l'Agri- 
culture pratique ,  y  offrent  de  remarquable  ;  le  pre- 
mier Magistrat  de  la  province  ,  comme  tous  les  agro- 
nomes, s'était  fait  un  devoir  de  l'accueillir  et  de  l'aider 
de  tous  les  renseignemens  que  ses  fonctions  et  sa  propre 
expérience  lui  avaient  pu  fournir,  et  avait,  par  l'inter- 
médiaire de  M.  de  Grûner,  fait  présent  a  l'Académie 
royale  des  Sciences  et  d'Agriculture  de  Munich ,  de 
l'ouvrage,  devenu  rare,  de  feu  M.  Vilain  XIIII,  sur 
la  Maison  de  Correction  de  Gand;  des  lettres  de  Mu- 
nich nous  apprennent,  que  cette  institution,  recon- 
naissante des  communications  reçues,  s'est  adjoint  M. 
le  comte  de  Lens ,  comme  un  de  ses  membres  honoraires. 


M.  J.  J.  de  Cloet ,  membre  de  la  société  royale  des 
beaux-arts  et  de  littérature  de  Gand,  a  fait  remettre  au 
bureau  de  la  société,  un  exemplaire  de  son  nouvel  ou- 
vrage ,  intitulé  :  Manuel  de  l 'administrateur ,  du  manu- 
facturier et  du  négociant ,  ou,  tableau  statistique  de 
l'industrie  des  Pays-Bas. 

M.  de  Cloet  observe  avec  beaucoup  de  justesse  que 
dans  un  état  composé,  comme  le  nôtre,  de  deux  gran- 
des divisions  qui  présentent  des  intérêts  si  différens, 
toutes  les  branches  de  l'industrie  doivent  marcher  de 
pair  et  méritent  une  égale  protection.  En  effet,  nos 
provinces  agricoles  et  manufacturières  produisent  un 
grand  nombre  d'objets  de  consommation  dont  le  haut 
commerce  pourrait  s'emparer ,  en  même  tems  qu'il  les 


(  333  ) 

approvisionnerait  des  articles  nécessaires  a  leurs  travaux. 
Ce  n'est  certes  pas  un  des  moindres  avantages  de  notre 
position  géographique  et  politique  que  la  réunion  de 
ces  trois  sources  de  richesse  nationale;  réunion  qu'on 
chercherait  envain  dans  tout  autre  état  de  la  même 
étendue. 

C'est  dans  la  vue  de  mettre  cette  vérité  dans  tout  son 
jour,  que  l'auteur  a  entrepris  cet  ouvrage;  son  tahleau 
offre  une  foule  d'apperçus  lumineux ,  et ,  quoique  nous 
n'osions  assurer  que  tous  ses  calculs  soient  d'une  exac- 
titude rigoureuse,  ses  approximations  au  moins  nous 
ont  paru  suffisantes  pour  être  consultées  avec  fruit  par 
tous  ceux  qui  s'occupent  de  statistique  agricole ,  in- 
dustrielle et  commerciale. 


M.  de  Reiffenberg  nous  adresse  une  nouvelle  épître 
de  sa  composition,  sous  le  titre  de:  Uâme  et  le  corps. 
Poëte  et  professeur  de  philosophie,  l'auteur  a  voulu 
montrer,  non-seulement  que  la  philosophie  et  la  poésie 
n'étaient  pas  incompatibles,  mais  encore  que  la  poésie 
n'était  jamais  plus  belle,  plus  digne  de  son  origine, 
que  lorsqu'elle  consacrait  ses  accens  a  embellir  les  vé- 
rités philosophiques.  L'épître  est  dédiée  a  M.  Victor 
Cousin.  L'adresse  d'un  ouvrage  inspiré  par  Platon,  ne 
pouvait  être  mieux  choisie. 


Les  Symposiacjues ,  ou  propos  de  table,  par  Mad. 
Wyttenbach  née  G. ,  ont  été  annoncés  par  plusieurs 
journaux  en  Belgique  et  eu  France.  Ce  nouvel  ouvrage 
n'est  pas  au-dessous  des  autres  productions  de  l'auteur; 
c'est  toujours  le  même  esprit  philosophique ,  le  même 
goût  pour  la  vertu  et  les  arts.  Qu'on  en  juge  par  quel- 
ques lignes  du  prologue  :  »  Je  consacre  l'ouvrage  pré- 
»  sent  aux  braves  et  infortunés  Hellènes  qui  s'efforcent 


(  554  ) 

»  de  se  soustraire  au  joug   du  barbare Hellènes, 

»  c'est  de  vous  que  nous  tenons  le  culte  des  Muses. 
»  Quel  mortel,  s'il  en  a  jamais  goûté  les  fruits,  serait 
»  insensible  a  vos  malheurs  !  Combattez  sous  l'égide 
»  de  Minerve  ,  et  que  vos  généreux  efforts  soient 
»  couronnés   du  succès  !  " 

Nous  rendrons  compte  de  cet  ouvrage  qui  honore 
la  veuve  du  savant  professeur  de  Leyde,  ce  n'est  pas 
seulement  un  bon  livre,  mais,  ce  qui  est  préférable, 
c'est  une  bonne  œuvre  puisque  le  produit  en  est  des- 
tiné aux   Hellènes. 


M.  van  den  Burggraaff,  lithographe  de  l'académie 
royale  a  Bruxelles,  vient  d'envoyer  a  la  société  royale 
des  beaux-arts  ,  le  premier  cahier  d'une  nouvelle  collec- 
tion des  vues  les  plus  remarquables  du  Royaume  5  le 
but  de  l'éditeur  est  d'offrir  au  public  un  recueil  choisi 
des  sites  et  des  monumens  auxquels  se  rattachent  quel- 
ques souvenirs  bistoriques,  d'après  les  dessins  de  M. 
Paul  \  itzhumb  ,  accompagné  d'un  texte  explicatif. 
M.  van  den  Burggraaff  s'efforcera,  dit-il,  de  rendre 
celte  collection  digne  du  public  et  de  l'attention  parti- 
culière des  artistes.  Si  le  mérite  de  son  entreprise  ne 
se  soutenait  pas,  une  des  conditions  de  la  souscription 
serait  tout  a  son  désavantage  5  en  effet  les  souscripteurs 
ne  s'engagent  que  pour  cinq  cahiers,  et,  en  renvoyant 
le  sixième  on  est  censé  avoir  renoncé  a  la  suite  de  la 
collection.  C'est  le  troisième  recueil  de  ce  genre  qui 
se  publie  dans  les  provinces  méridionales;  cette  riva- 
lité èiltte  plusieurs  ateliers  lithographiques  ne  peut 
être  que  favorable  aux  progrès  de  cet  art  et  stimuler 
de  plus  en  plus  le  zèle  et  l'activité  des  artistes  placés 
à  la  tête  de  ces  établissemens. 


(  335  ) 

—  Les  presses  de  M.  Jobard  ont  parfaitement  imité  la 
gravure  du  fameux  portrait  peint  par  Rubens  et  connu 
sous  le  nom  du  chapeau  de  paille;  le  vingtième,  cahier 
de  son  voyage  pittoresque  surpasse  tout  ce  qui  a  été 
publié  dans  cette  collection,  tant  sous  le  rapport  du 
dessin  que  sous  celui  de  l'impression.  Le  vingt-unième 
cahier  est  accompagne'  d'une  notice  explicative  rédigée 
par  un  homme  de  lettres  connu  par  plusieurs  ouvrages 


d'un  mérite  distingué. 


—  Le  tableau  de  Galaihée  et  Pygmalion  ,  point  par 
M.  le  chevalier  Odevaere,  et  qui  a  été  exposé  dernière- 
ment dans  une  des  salles  de  Fhôtel-de-ville  a  Gand,  va 
aussi  être  reproduit  par  la  lithographie.  Le  dessin  en 
sera  confié  a  un  des  premiers  artistes  de  Paris ,  et 
exécuté  dans  le  genre  de  Y  Ariane  de  M.  Girodet,  et  des 
portraits  de  Mesdemoiselles  Georges  et  Mars  par  M.  Gé- 
rard. M.  Odevaere  en  soignera  lui-même  l'exécution. 

—  M.  /.  A.  Daiwaille,  l'un  des  directeurs  de  l'aca- 
démie royale  d'Amsterdam,  se  propose  de  publier  par 
souscription  les  portraits  lithographies  des  hommes  qui 
se  distinguent  dans  les  sciences,  les  lettres  et  les  arts. 
Cet  artiste,  dont  le  talent  est  avantageusement  connu, 
les  dessinera  lui-même  d'après  nature  ou  d'après  des  ta- 
bleaux de  nos  premiers  maîtres  ;  tous  les  portraits  seront 
faits  sur  la  même  dimension. 

—  L'académie  des  sciences  ,  belles-lettres  et  arts  de 
Toulon,  vient  d'admettre  M.  Van  Brée,  premier  pro- 
fesseur de  l'académie  royale  des  beaux-arts  d'Anvers, 
au  nombre  de  ses  associés  étrangers. 

—  Nous  avons  a  déplorer  la  mort  d'un  de  nos  con- 
citovens  les  plus  recommandables ,  JM.  Jacques  de 
l'Epée ,  de  Bruges.  Parmi  une  foule  d'actions  géné- 
reuses qui  honorent  sa  mémoire,  nous  citerons  un  don 


(  336  ) 

de  10,000  florins,  fait  par  lui,  peu  de  terris  avant  sa 
mort,  a  la  société  de  bienfaisance  des  provinces  mé*- 
ridionales,  pour  le  défrichement  des  terres  incultes  de 
la  colonie  de  Wortel. 

—  Le  i5  Novembre  dernier,  S.  À.  R.  le  Prince  hé- 
réditaire de  Bavière  est  venu  visiter  l'atelier  de  peinture 
de  notre  compatriote  J.  B.  Maes,  pensionnaire  de  S.  M. 
le  Roi  des  Pays-Bas,  a  Rome.  Il  fit  le  même  honneur 
à  tous  les  Artistes  Belges  et  Allemands  qui  se  trouvent 
dans  la  capitale  du  monde  chrétien.  S.  A.  R.  commanda 
a  M.  Kessels  ,  de  Maestiïcht ,  le  buste  de  l'amiral 
Tromp.  Ce  statuaire ,  déjà  très-renommé ,  vient  d'ache- 
ver un  discobole,  statue  qu'on  s'accorde  a  trouver  ad- 
mirable et  dont  il  a  fait  hommage  a  S.  Exe.  M.  Falck, 
Ministre  de  l'Instruction  publique. 

—  M.  Morilz,  un  de  nos  premiers  peintres  d'his- 
toire, vient  d'achever  une  Descente  de  Croix,  pen- 
dant du  tableau  qui  représente  Le  Crucifiement ,  placé 
dans  une  église  catholique  a  Amsterdam.  On  remarque 
dans  ce  tableau  un  dessin  correct,  une  belle  ordon- 
nance et  la  plus  exacte  vérité  dans  l'exposition  du 
sujet,  le  caractère  des  personnages  et  les  costum  3. 

Ce  tableau  est  exposé  au  profit  de  l'hospice  des 
pauvres  vieillards  d'Amsterdam  ;  le  public  s'est  em- 
pressé d'aller  payer  un  juste  tribut  d'éloges  et  d'ad- 
miration a  la  production  d'un  maître  qui  honore  notre 
école  moderne. 

—  S.  M.  a  approuvé  le  choix  fait  par  la  classe  des 
beaux-arts  de  l'Institut  royal  des  Pays-Bas,  de  M.  Scho- 
tel,  peintre  de  marines,  a  Dordrecht  ;  de  M.  Calloigne, 
statuaire,  a, Bruges;  et  de  M.  Braemt,  de  Gand,  graveur 
en  médailles,  comme  membres  de  ladite  classe,  en  rem- 
placement de  feu  MM.  André  Lens,  Verstegb  et  Cardon. 


MESSAGER 

DES  SCIENCES  ET  DES  ARTS. 


ÏXme  et  Xme  Livraisons  —  Janvier  et  Février  1824. 


Erratum  dans  la  8™  livraison  ;  page  289,  §  3,  lig.  i«j  sont  tenues 
sur  un  pivot,   lisez ,  sont  tournées  sur  un  pivot. 


SUR  LES  ÉGAGROPILES  QUE  l'on  RENCONTRE  DANS 

LES  ANIMAUX, 


Èj gagropile ,  s.  m.;  œgagropilus.  On  nomme  ainsi 
des  concrétions  terreuses  ou  plâtreuses,  ou  une  sub- 
stance analogue  a  celle  des  calculs  ,  qu'on  rencontre 
quelquefois  dans  l'estomac  et  le  cœcnm  des  solipèdes, 
et  moins  rarement  dans  le  rumen  et  la  caillette  des 
ruminans,  spécialement  du  chamois.  Les  élémens  qui 
entrent  dans  la  composition  des  e'gagropiles  se  trou- 
vent dans  le  détritus  des  plantes  qui  ont  servi  de  nour- 
riture aux  animaux,  dans  des  poils  qu'ils  détachent  en 
se  léchant,  et  dans  des  molécules  calcaires  fixées  aux 
alimens ,  et  qu'un  goût  dépravé  leur  fait  rechercher. 
Ainsi,  ces  substances  sont  constamment  prises  du  de- 
hors ou  sur  les  animaux  eux-mêmes  5  elles  n'ont  besoin  , 
pour  s'amasser  en  pelotes ,  que  d'un  corps  agglutinatif 
qui  se  rencontre  en  assez  grande  quantité  dans  le  canal 
alimentaire. 

IXme  eî.  Xme  livraisons.  2  5 


(  338  ) 

Le  volume  et  la  forme  des  e'gagvopiîes  -Varient  beau- 
coup; on  en  voit  de  la  grosseur  d'une  noisette,  d?une 
noix,  d'un  œuf,  et  d'aussi  gros  que  la  tète  d'un  enfant, 
c[ui  pèsent  jusqu'à  six  ou  huit  livres.  11  en  est  de  sphéri- 
ques ,  comme  ceux  qui  se  rencontrent  solitaires  dans  l'in- 
testin des  solipèdes ,  d'ovoïdes  ou  aplatis  sur  deux  sens , 
et  diversement  allongés  ,  comme  les  gobbes  des  mou- 
tons, toujours  beaucoup  plus  petites;  d'are'ole's,  comme 
ceux  du  cœcum  du  cheval.  Les  uns  et  les  autres  sont 
forme's  de  couches  superposées,  communément  autour 
d'un  corps  étranger  qui  leur  sert  de  noyau  central;  les 
uns  sont  couverts  d'une  espèce  de  velouté  plus  ou  moins 
épais;  les  autres  ont  comme  une  écorce ,  use  couche 
brune  ou  noirâtre ,  d'autres  encore  en  sont  dépour- 
vus. Ces  concrétions  ont  une  odeur  et  une  saveur 
légèrement  aromatique;  elles  impriment  en  outre  sur  la 
langue  une  certaine  astriction. 

i°  E gagropiles  simples.  Formés  seulement  de  poils 
ou  de  filamens  laineux  réunis,  agglomérés,  agglutinés, 
ils  ont,  en  outre,  pour  caractère,  d'être  légers,  petits, 
ronds  ou  oblongs,  bruns,  jaunâtres,  inodores,  insipides 
et  doués  de  très-peu  de  mollesse.  Les  corps  filiformes 
qui  les  composent  sont  disposés  en  tourbillons  ou  en 
spirales,  comme  s'ils  avaient  suivi  un  mouvement  ver- 
miculaire.  Si  l'on  coupe  l'égagropile  par  moitié,  on  voit 
que  les  poils  se  confondent  dans  l'intérieur,  et  que  leur 
adhérence,  affermie  par  quelques  sucs  du  canal  alimen- 
taire, ressemble  passablement  au  feutre  des  chapeaux. 

Ces  égagropiles  existent  dans  le  rumen  des  ruminans, 
dans  l'estomac  du  cheval,  rarement  chez  le  cochon, 
mais  plus  particulièrement  dans  la  caillette  du  mouton, 
chez  lequel,  ainsi  que  nous  l'avons  dit,  ils  portent  le 
nom  de  gobbes. 


(339) 

Comme  les  gobbes  ont  souvent  occasionné  des  plain- 
tes et  donne'  lieu  a  des  procès  criminels,  nous  nous  y 
arrêtons  un  instant.  Leur  coïncidence  avec  quelques  mor- 
talite's  de  moutons  a,  dans  de  telles  circonstances,  porté 
le  public  a  croire  que  ces  corps  pouvaient  être  une 
composition  empoisonnée,  semée  a  dessein  par  des  mal- 
veillans  sur  certaines  pâtures,  certains  chemins,  afin 
que  les  moutons  les  gobent  et  en  meurent  ;  mais  c'est 
une  grave  erreur ,  démentie  par  la  disposition  des  esto- 
macs des  ruminans ,  et  par  la  composition  même  des 
gobbes.  D'après  la  disposition  des  estomacs,  il  est  évi- 
dent que  la  gobbe,  en  supposant  qu'elle  fût  prise  par 
le  mouton ,  doit  tomber  dans  le  rumen  et  ne  peut  pas- 
ser dans  la  caillette,  estomac  où  on  la  trouve  constam- 
ment, qu'après  avoir  été  altérée  dans  sa  forme,  sa  con- 
sistance et  sa  composition  intime.  Ce  qui  prouve  encore 
que  la  gobbe  n'est  pas  une  composition  confectionnée 
par  la  main  de  l'homme,  c'est  sa  parfaite  analogie  avec 
l'organisation  des  autres  égagropiles.  Enfin,  pour  établir 
ou  supposer  qu'on  eût  donné  ces  corps  pour  faire  mou- 
rir les  animaux,  il  eût  fallu  qu'ils  continssent  des  sub- 
stances vénéneuses,  et  c'est  ce  que  les  expériences 
n'ont  point  démontré. 

Chabert  en  a  fait  plusieurs  a  ce  sujet.  Il  a  composé 
des  gobbes  qui  ne  furent  point  prises  volontairement 
par  les  animaux  j  on  fut  obligé  de  les  introduire  dans 
leur  bouche ,  pour  les  forcer  de  les  avaler.  L'ouverture 
des  moutons  qui  avaient  avalé  de  ces  gobbes  ne  démon- 
tra aucune  trace  de  ces  corps  dans  aucun  des  estomacs. 
Certaines  personnes  ont  présumé  que  pour  que  les 
gobbes  fussent  prises  par  les  moutons ,  il  fallait  qu'elles 
fussent  enduites  de  quelque  substance  savoureuse,  telle 
que  la  farine,  le  sel,  le  miel,  la  friture,  à  l'effet  d'exciter 


(  34o  ) 
les  animaux  a  les   ramasser  ;  on  a  fait  des  essais  a  ce 
sujet,  et  ils  n'ont  nullement  réussi.  Il  est  toujours  ré- 
sulté du  rapport  des  chimistes  et  des  vétérinaires,  que 
les  gobbes,  examinées  a  la  lentille,  sont  composées  de 
laine  et  de  débris  de  végétaux  agglutinés;  que  les  brins 
de  laine  sont  un  peu  altérés  par  leur  séjour  dans  l'esto- 
mac; qu'on  n'y  trouve  point  de  goudron,  comme  beau- 
coup de  gens  le  croient;  qu'il  n'y  a  point  d'arsenic  ni 
d'autre  poison.   Les   résultats  chimiques  obtenus  par 
l'analyse  d'un  grand  nombre  de  gobbes,   sont  que  leur 
combustion  sur  une  pelle  chauffée  jusqu'à  l'incandes- 
cence ,    ne  donne  ni  fumée  blanche  ni  aucune  odeur 
d'ail,  mais   une  odeur  empyreumatique  ammoniacale; 
une  pièce   de  cuivre  bien   décapée  ne  blanchit  point, 
étant  exposée  a  la  fumée  de  la  gobbe  ;  en  ayant  recueilli 
la  vapeur  sous  un  verre,  la  lentille   n'y  a  fait  aperce- 
voir aucune  molécule  de  mercure  après  le  refroidisse- 
ment. L'eau  commune  dans  laquelle  on  en  a  fait  bouil- 
lir pendant  un  quart  d'heure,  prend  un  teinte  légère- 
ment ambrée.  La  liqueur,  filtrée  au  papier,  n'a  point 
de  saveur  bien  prononcée  ;  elle  n'altère  point  le  sirop 
de  violette;  en  y  mêlant  quelques  gouttes  de  carbonate 
de  potasse,   on  n'obtient  aucune   effervescence;  l'eau 
de  chaux  récente  n'y  forme  point  de  précipité.  D'autres 
portions  de  cette  liqueur,  traitées  successivement  par 
les  acides  sulfurique,  nitrique  et  hydrochlorique,  n'ont 
subi  aucun  changement. 

Pour  prouver,  en  outre,  que  les  gobbes  ne  sont 
point  l'ouvrage  de  l'homme,  mais  bien  celui  de  l'animal 
même,  il  suffit  de  rappeler  les  principales  circonstances 
dans  lesquelles  elles  se  forment.  En  mangeant  aux  râ- 
teliers, il  se  trouve  des  portions  de  fourrages  portées 
sur  la  toison  ,  et  même   dans  quelques  enfoncemens  ; 


(  34 1  ) 
d'autres  moutons  les  recherchent,  et  les  prennent  avec 
des  filamens  de  laine,  qu'ils  avalent  en  même  teins.  Les 
troupeaux,  en  passant  près  des  haies,  des  huissons, 
s'y  accrochent  et  y  laissent  des  flocons  de  laine,  qui, 
touchant  a  des  feuilles,  a  des  hourgeons,  sont  de  même 
avales  en  broutant.  Les  agneaux  avalent  de  la  laine  en 
tétant  leurs  mères.  Il  est  d'ailleurs  des  affections  cuta- 
ne'es  dans  lesquelles  la  laine  se  détache  facilement,  et 
pend  en  mèches:  telles  sont  la  gale,  la  clavelée,  etc. 

2°  Egagropiles  composés.  Les  égagropiles  de  cette 
espèce  sont  formés  de  matières  terreuses  (presque  tou- 
jours argileuses)  ou  plâtreuses  ou  calcaires,  souvent 
mêlées  avec  d'autres  corps,  ainsi  qu'avec  des  poils, 
mais  en  moindre  proportion  que  dans  la  variété  précé- 
dente. La  matière  terreuse,  calcaire  ou  plâtreuse,  est 
prise  par  les  animaux  lorsqu'ils  lèchent  les  murs  5  elle 
s'unit  et  s'agglutine  aux  poils,  et  forme  ainsi  des  con- 
crétions composées,  qui  ont  pour  caractère  d'être  plus 
pesantes,  friables,  dépourvues  d'écorce ,  quelquefois 
aréolées,  et  d'avoir  un  corps  dur  pour  noyau.  Elles  se 
trouvent  dans  l'estomac  et  le  cœcum  des  monogastri- 
ques, et  dans  le  rumen  des  didactyles. 

3°  Egagropiles  calculeux.  Cette  troisième  variété 
comprend  les  égagropiles  qui  sont  composés  de  poils 
et  de  matières  analogues  aux  élémens  des  calculs,  des- 
quels ils  se  rapprochent  beaucoup  aussi  par  la  forme 
et  les  dimensions.  Ils  sont  plus  courts  que  les  précé- 
dents, plus  friables  et  plus  cassans;  les  poils,  toujours 
en  petite  quantité,  sont  unis  ensemble  par  cette  ma- 
tière calculeuse ,  disposés  par  couches  et  quelquefois 
aréoles.  Ces  corps  présentent  aussi  a  l'extérieur  une 
espèce  de  velouté,  produit  par  la  matière  agglutinative 
que  sécrètent  les  organes  qui  les  récèlent.    Si   on  les 


(    5*2    ) 

coupe  par  le  milieu ,  on  voit  qu'il  y  a  un  noyau  cen- 
tral. Cette  variété  se  rencontre  le  plus  ordinairement 
dans  Pestomac  des  monodactyles. 

Ainsi  que  nous  l'avons  déjà  fait  remarquer,  les  ani- 
maux qui  se  lèchent  et  qui  lèchent  les  murailles  ou  les 
grattent  avec  les  dents,  les  veaux  qui  tètent  leurs  mères, 
les  agneaux  des  brebis  qui  ont  de  la  laine  aux  mamelles, 
les  troupeaux  affectés  de  maladies  psoriques  ou  de  dé- 
mangeaisons quelconques,  tous  ces  animaux  sont  ex- 
posés aux  égagropiles.  Sont  dans  le  même  cas  les  ani- 
maux qui  ont  éprouvé  des  douleurs  d'entrailles  qui  les 
ont  excites  a  se  mordre  ,  et  ceux  qui  se  nourrissent 
d'alimens  chargés  de  terre ,  d'argile ,  de  craie  ou  de 
plâtre.  Peut-être  est-ce  une  irritation  quelconque  de 
la  membrane  muqueuse  du  canal  alimentaire,  ou  la 
faiblesse  et  le  dépérissement  qui  s'en  sont  suivis,  qui 
porte  les  animaux  a  se  lécher,  a  lécher  les  murs,  etc. 
Ce  qui  peut  autoriser  cette  conjecture,  c'est  que  les 
égagropiles  ne  s'observent  guère  que  dans  les  tems  de 
disette  et  de  misère ,  ou  lorsque  les  saisons  sont  fort 
contraires,  qu'il  y  a  des  inondations,  que  la  sécheresse 
est  longue  et  considérable,  et  que  les  animaux,  ne 
trouvant  plus  rien  a  paître,  cherchent  a  profiter  de 
tout  ce  qu'ils  rencontrent. 

Les  signes  qui  décèlent  la  présence  des  égagropiles 
sont  encore  très-difficiles  a  reconnaître,  même  dans  le 
cheval  ou  le  bœuf,  où  ils  peuvent  être  aisément  con- 
fondus avec  les  symptômes  de  diverses  coliques,  d'en- 
térite, de  néphrite  et  de  cystite.  Néanmoins  le  cheval 
ne  se  roule  pas  beaucoup,  comme  il  le  fait  dans  les 
violentes  douleurs  d'entrailles;  il  se  couche  et  reste  assez 
tranquille;  relevé,  il  regarde  le  flanc,  essaie  de  se  frap- 
per la  région   ombilicale   avec  les  pieds    de  derrière  ; 


(  345  ) 

puis  est  saisi  de  tremblemens  et  de  sueurs.  Ces  symptô- 
mes se  de'veloppent  par  accès  de  quelques  heures, 
assez  ëloigue's  les  uns  des  autres.  Aucun  signe  certain 
ne  de'note  la  présence  des  c'gagropiles  dans  le  mouton  ; 
car  le  dépérissement  qui  en  est  ordinairement  le  résul- 
tat, peut  être  amené  par  une  autre  cause. 

On  ne  connaît  encore  aucun  moyen  curatif  certain 
contre  les  égagropiles;  cependant  on  pourrait  essayer 
de  provoquer  l'expulsion  de  ces  corps  au  moyen  des 
huileux  et  des  purgatifs. 

Quant  aux  moyens  propres  a  empêcher  la  formation 
des  égagropiles  dans  le  corps  des  animaux,  ils  sont 
mieux  connus,  et  consistent  en  général  a  nourrir  con- 
venablement les  agneaux  et  leurs  mères,  et  a  les  pro- 
mener suffisamment.  La  même  chose  convient  aux  veaux 
et  aux  vaches.  Dans  les  tems  de  disette  et  de  misère, 
l'agriculture  peut  beaucoup  pour  ces  sortes  de  cas,  où 
l'art  est  trop  souvent  impuissant,  et  où  les  remèdes  et 
les  soins  sont  impossibles  ou  trop  dispendieux.  La  pré- 
voyance du  cultivatenr  doit  le  porter  à  profiter  des 
terres  habituellement  en  jachères,  pour  y  faire  croître 
des  végétaux  précoces  que  les  animaux  mangent  frais 
a  la  fin  du  printemps  et  au  commencement  de  l'été, 
qui  est  le  moment  où  l'on  manque  de  nourriture  5  et 
d'ailleurs  il  doit  se  ménager  des  récoltes  de  pommes  de 
terre,  de  carottes ,  de  betteraves  et  d'autres  racines  que 
l'on  donne  hachées  aux  animaux,  en  y  mêlant  du  sel, 
ce  qui  les  soutient  dans  toutes  les  saisons.  Des  alimens 
sains  et  en  proportion  convenable ,  un  travail  modéré , 
qui  dure  une  grande  partie  de  la  journée,  tels  sont 
aussi  les  moyens  de  préserver  les  chevaux  des  concré- 
tions de  cette  sorte  qui  se  forment  dans  leurs  intestins. 

A  une  certaine  époque,  les  égagropiles  ont  passé  pour 


(  544  ) 

une  véritable  panacée,  applicable  a  presque  toutes  les 
maladies.  La  thérapeutique  est  aujourd'hui  débarassée 
de  cette  erreur,  comme  de  tant  d'autres  qui  l'ont  pen- 
dant si  long-tems  déshonorée. 

Heurtrel  d'Arboval, 

Amateur,  correspondant  de  la  Société  royale  d'Agriculture 
et  de  Botanique  de  Gand ,  et  de  plusieurs  Sociétés  savantes. 


Lettre   adressée    au  Secrétaire    de   la    Société   royale 
des  Beaux-Arts  et  de  Littérature  à  Gand. 

Monsieur  et  cher  Collègue, 

JLjes  connaisseurs  et  amis  des  beaux-arts ,  étrangers 
et  regnicoles,  viennent  voir  et  admirer  le  magnifique 
portail  de  la  chambre  collégiale  de  MM.  les  Bourgue- 
maître  et  Echevins  de  la  ville  d'Audenarde;  ce  chef- 
d'œuvre  de  sculpture  est  remarquable,  par  la  variété 
de  ses  arabesques,  sculptées  en  bois  et  exécutées  avec 
une  légèreté  et  une  supériorité  de  ciseau  vraiment  éton- 
nantes. C'est  une  production  digne  de  ce  que  l'Italie 
et  la  France  ont  produit  a  la  même  époque  de  plus 
beau  dans  ce  genre  ;  comme  on  s'occupe  dans  le  mo- 
ment de  reproduire  cet  ouvrage  parla  gravure,  j'ai  cru, 
Monsieur,  contribuer  a  la  gloire  du  pays  en  faisant 
connaître  que  c'est  a  un  artiste  belge  que  nous  devons 
cet  ancien  monument,  aussi  honorable  pour  la  sculp- 
ture (1),  que  pour  la  ville  d'Audenarde,  qui  déjà 
possédait  un  artiste  aussi  distingué. 

Ci)  Il  est  à  remarquer  que  cet  ouvrage  fut  exécuté  à  une  époque 
où  le  goût  gothique  dominait  encore,  et  que  ce  fut  pendant  qu'on 
élevait,  sous  les  yeux  de  l'auteur,  l'hôtel-de-ville,  d'une  architec- 
ture mauresque,  que  l'artiste  exécuta   ce  portail,  dont  le  style 


c  345  ) 

Le  nom  du  grand  maître,  dont  l'ouvrage  fait  le  sujet 
de  cette  lettre,  était  tombé  dans  l'oubli  5  non-seulement 
il  n'en  existait  plus  le  moindre  souvenir  ,  mais  on 
ignorait  même  l'époque  de  la  création  de  ce  monument. 
Mon  opinion  particulière  a  toujours  été,  qu'il  ne  pou- 
vait pas  être  antérieur  au  règne  de  Charles-Quint, 
parce  que  je  crois  avoir  de  bonnes  preuves  que  l'hôtel- 
de-ville  n'a  été  commencé  qu'en  l'année  i5j5,  cl  que 
rien,  dans  ce  portail,  n'annonce  qu'il  ait  appartenu, 
a  un  tems  antérieur.  On  eu  était  donc  encore  aux  con- 
jectures sur  ce  fait,  lorsque,  depuis  peu,  des  recherches 
heureuses  sont  venues  eu  établir  toute  la  certitude. 

M.  Barthélémy  de  Rantere  ,  compilateur  infatigable 
d'une  chronique  de  la  ville  d'Audenarde,  en  forme  de 
journal  de  tout  ce  qui  s'y  est  passé  et  de  tout  ce  qui  s'y 
passe  encore,  et  M.  Jean  de  Merlier  ,  commis  a- la 
secrétairerie  de  la  ville  ,   viennent    enfin   de  découvrir 

et  l'exécution  rappelent  les  sculptures  arabesques  de  l'école  Floren- 
tine exécutées  à  la  renaissance  des  arts  :  il  n'y  a  pas  de  doute  que 
ce  sculpteur  habile  n'ait  vu  cette  terre  classique  où  les  arts  Turent 
toujours  en  honneur  et  que,  de  retour  dans  sa  patrie,  il  n'y  ait  élé 
un  de  ceux  qui  ont  le  plus  contribué  à  la  régénération  de  cette 
branche  de  l'art. 

La  Belgique  possédait  un  grand  nombre  de  ces  monumens;  une 
partie  en  a  été  détruite  pendant  les  troubles,  et  ceux  qui  nous 
restent  encore,  exposés  aux  caprices  de  la  mode,  disparaîtraient 
successivement  si  le  patriotisme  de  quelques  amis  de  l'ordre  et  de 
la  conservation  de  nos  monumens  ne  s'y  opposaient  et  que  nos 
amateurs  n'en  fissent  point  connaître  le  mérite  et  la  valeur. 

L'histoire  de  l'art  dans  les  Pays  Bas  est  très -imparfaitement 
connue  ;  peu  d'écrivains  s'en  sont  occupés  et  ceux  qui  ont  traite 
cette  matière  l'ont  fait  avec  beaucoup  trop  de  légèreté  ;  à  peine 
connait-on  les  noms  de  nos  peintres,  de  nos  sculpteurs  et  de  nos 
architectes  qui  vécurent  avant  Rubeus  et  à  qui  nous  sommes  re- 
devables de  plusieurs  ouvrages  qui  excitent  l'admiration  des  con- 
naisseurs. L.  D.  B. 


(  346  ) 

dans  les  comptes  des  années  i53i  à  i535,  conservés 
aux  archives ,  et  de  me  communiquer  les  preuves  : 
que  Pierre  de  Merlier  et  Paul  vander  Schelden  ont 
entrepris  ce  portail  en  i55o  ,  sous  l'échevinage  de 
Jean  van  der  Meere  et  ses  collègues  ;  que  Paul  van 
der  Schelden  en  est  le  sculpteur  ;  que  Pierre  de  Merlier 
en  est  le  menuisier;  qu'il  a  coûté  449  ^  parisis;  et  que 
Barthélémy  Pourtant  ,  sculpteur ,  maîtres  Lièvin  Opzaedt 
et  Biaise  Vassies,  menuisiers,  de  Gand,  ont  été  nom- 
més en  i535,  pour  faire  l'expertise  de  l'ouvrage  (1) 
et  ont  touché  ensemble,  pour  honoraires,  douze  livres 
parisis.  C'est  ce  qui  se  prouve  par  les  extraits  des 
comptes  de  la  ville  que  j'ai  placés  ci-dessous. 

J'espère,  Monsieur,  pouvoir  vous  transmettre  sous 
peu ,  des  notes  relatives  a  la  construction  de  la  belle 
façade  gothique  de  l'hôtel-de-ville  d'Audenarde,  et 
spécialement  a  cette  figure  armée  de  toutes  pièces  , 
appelée  vulgairement  Hansken  het  Krygelken  ou  het 
Krygerken,  qui  couronne  la  belle  tourelle  de  cet  hôtel; 
cette  figure  a  de  tout  tems,  prêté  matière  a  bien  des 
contes  populaires,  depuis  qu'on  en  a  oublié  l'origine. 
Voila,  Monsieur,  l'effet  de  l'indifférence  des  peuples 
pour  l'histoire  de  la  patrie  !  Ils  finissent  par  oublier 
l'origine  de  leurs  monumens  domestiques  et  tombent, 
a  la  longue,  dans  cette  enfance  que  Cicéron  reproche 
a  tous  ceux  qui  ignorent  ce  qui  s'est  passé  avant  qu'ils 
ne  fussent  nés:  »  Ignorare  quœ ,  antea  quant  nalus  sis, 
facta  sunt ,  est  semper  esse  puerum" 

Cicero,  oratio  ad  Brutum. 


(1)  Il  serait  à  désirer  que  la  Régence  de  la  ville  d'Audenarde 
fit  restaurer  ce  bel  ouvrage  et  tracer  sur  un  des  panneaux  ou  platte 
bandes  le  nom  de  l'artiste  qui  l'a  exécuté  avec  la  date  de  l'année. 


(547  ) 

Extrait  des  comptes  de  la  ville  dAude- 
narde  de  Vannée  i53i  ,fol.  Ixxx  cl  su'w. 

»  Item  betaelt  Pieterde  Me/lier,  tôt  Etichove,  in 
»  mindering  van  het  maeken  van  een  portaele  hy 
»  hem  aengenomen  met  Pauwel  van  der  Schelden, 
»  dat  te  stellene  in  de  nieuwe  camere  van  don  nieu- 
»  wen  schepen-huyse ,  besteedt  te  werkene  hy  Jan  van 
»  der  Meere  en  zyne  tuedegezellen,  die  Schepenen  wae- 
*  ren  in  't  jaer  gepasseert,  hier  fol.  Ixxx  van  den 
»  selven  boek xij- 

»  Nog  betaelt  aen  Pieler  de  Mériter xxiiij. 

»  Betaelt  aen  den  selven lx. 

»  Betaelt  aen  den  selven xij. 

»  Betaelt  aen  den  selven v. 

»  Betaelt  aen  Pamvelvan  der  Schelden,  beeldsnyder.     iiii»  ij. 

»  Aen    den   selven clx. 

»  Betaelt  aen  den  selven xlviij. 

»  Betaelt  aen  den  selven xxxvj. 

»  Betaelt  aen  Adriàen  de  Rantere,  schrynwcrker(i) , 
y>  voorgekoclit tehebbentotGendnegenspiesschhaulen, 
»  negen  voeten  lanck  voor  den  portaele  van  den  nien- 
»  wen  schepen-huyse,  vermits  die  alhier  niet  kryge- 
»  lyck  eu  waeren  ;  koint  met  den  onkost  van  de  vrecht.     x. 

Compte  de  Vannée  i555. 
»  Item  betaelt  aen  M.  Bartholomeus  Pourtant ,  beeld- 
»  snyder,  M.  Livinus  Opzaedt  en  Blazius  Vassies , 
»  schrynwerker,  die  ontboden  waeren ,  by  laste  van 
»  8chepeuen ,  van  Gend  ,  voor  het  goedkeuren  van 
»  den  nieuwen  portaele  gçmaekt  door  Pauwel  van 
»  der  Schelden x jj . 


449. 


(1)  Il  semble  donc  qu'un  Adrien  de  Rantere,  menuisier,  a  eu 
part  à  l'entreprise,  ou  du  moins  qu'il  a  travaillé  à  ce  portail;  et 
c'est  alors  un  singulier  hazard,  que  ce  soient  ieurs  descendans  même 
qui  les  aient  retirés  d'un  injuste  oubli. 

Cet  article  permet  de  croire,  que  la  main-d'œuvre  seule  a  fait 
l'objet  de  l'entreprise  de  Merlier  et  de  Van  der  Schelden,  et  que 
le  Magistral  a  fourni  les  matériaux  ? 


(  348  ) 

En  vous  priant ,  Monsieur ,  d'accorder  à  ma  lettre 
une  place  dans  l'intéressant  Recueil  publié  par  notre 
Société,  j'ai  l'honneur  d'être  avec  la  juste  considéra- 
tion que  me'ritent  vos  travaux  littéraires. 

J.  J.  Raepsaet, 

Membre  de  l'Institut. 
Audenarde ,  /e  19  Janvier  1824. 


PRIVILEGES  DONNES  AUX  FRANCS  MONNOYERS  DE  FLANDRES. 


JLa  Société  Teylérienne  a  Harlem,  ayant  proposé  pour 
sujet  de  prix  :  l'histoire  complète  et  critique  du  mon- 
nojage  dans  les  Pays-Bas ,  des  tems  les  plus  reculés 
jusqu'à  ce  jour,  le  possesseur  d'un  manuscrit,  écrit 
vers  la  fin  du  XVme  siècle  (1),  nous  a  permis,  dans 
l'intérêt  de  ceux  qui  se  proposent  de  concourir  pour  ce 
prix,  d'eu  extraire  le  chapitre  qui  traite  des  monnaies. 
Plusieurs  auteurs  estimables  ont  traité  cette  matière , 
qui  intéresse  l'histoire  générale  du  pays  :  l'Académie 
de  Bruxelles,  en  1787,  a  couronné  le  mémoire  de 
M.  A.  Heylen,  chanoine  et  archiviste  de  l'abbaye  de 
Tongerloo,  lequel,  dans  le  sens  de  la  question  propo- 
sée par  la  Société  Teylérienne,  traite  des  monnaies  qui 
circulaient  dans  les  Pays-Bas  pendant  les  XIVme  et  XVmo 
siècles.  On  cite  dans  ce  mémoire ,  écrit  en  flamand  et 
imprimé  aux  frais  de  l'académie,  les  Auteurs  qui  ont 
traité  la  même  matière  dans  les  provinces  septentrionales 
et  méridionales  du  Royaume. 

(1)  Ce  manuscrit  in-folio  de  3oo  feuilles,  supérieurement  e'crit 
et  conservé,  fut  vendu  à  la  mortuaire  d'Ant.  Sanderus.  C'est  un 
traité  curieux  de  l'histoire  de  la  Flandre  depuis  les  premiers  tems 
jusqu'à  l'Archiduc  Philippe,  fils  de  Maximilieu  d'Autriche,  Roi 
des  Romains. 


(34g) 

Extrait  du  manuscrit  (1). 

»  Le  conte  Guy  prinst  ses  francs  monoyers  leurs 
femmes  maismes  en  sa  saulvegarde  et  leur  doua  telz 
previleges  et  franchises  que  les  Roys  de  France  ont 
donné  aux  francs  monoyers  du  serremèt  de  frace  est 
asscavoir  quilz  seront  francs  et  quictes  de  toutes  gabel- 
les et  coustumes  soit  pour  raison  de  marchandise  ou 
aultremët  ensemble  de  toutes  servitutes  ouvrans  ou  non 
ouvrans  marchandans  et  non  marchandans  Et  veult 
quilz  nayent  a  respondre  pardevat  aultre  juge  que  le 
prevost  de  la  monoye  fors  de  trois  cas  seullement  est 
asscavoir  raptmurdre  et  larchin  (2)  Et  se  faict  ung  contract 

(1)  On  a  suivi  littéralement  l'orthographe  du  manuscrit. 

(2)  Cette  manie  du  nombre  ternal  ou  impair  se  trouve  souvent 
dans  la  jurisprudence  du  Xme  siècle  et  même  plutard;  dans  les 
coutum.  angl.  nortn.  de  M.  Houard,  tom.  a.  pag.  88. ,  où  il  a 
mis  ces  ternes  en  note  sur  le  chap.  5.  liv.  2.  de  la  loi  Réglant 
maj estaient  du  XlVme  siècle  et  où  il  dit:  débet  autem  compromitti 
in  nnmerum  imparem ,  quo  numéro  deus  gaudet  ,  scilicet  in 
unum  aut  très,  on  lit,  entr'autres,  qu'on  distingue  : 

Trois  causes  pour  lesquelles  une  femme  ne  perd  pas  sa  dot , 
lors  même  qu'elle  abandonne  son  mari:  la  lèpre,  rimpuissauce, 
la  respiration  effrayante  (anhelitum  tetrum). 

Trois  motifs  de  confiscation:  la  révélation  des  secrets  de  l'état, 
la  trahison  ,  l'homicide  clandestin. 

Trois  reproches  contre  les  témoins  :  le  non-payement  d'une 
amende  encourue  pour  crime;  des  contestations  avec  l'une  des 
parties ,  pour  les  mêmes  sujets  que  ceux  qui  occasionnent  le 
procès  sur  lequel  ils  doivent  être  entendus;  l'adultère  commis 
avec  la  femme  du  demandeur  ou  du  défendeur. 

Trois  animaux  qu'on  peut  valablement  vendre  avant  l'âge 
d'un  an  :  le  chien  domestique  ,  la  brebis  et  la  chèvre. 

Trois  autres  qui  ne  peuvent  être  exposés  en  vente,  s'ils  sont 
boiteux:   le   cheval,  l'épervier  ,  le  lévrier. 

Trois  armes  permises  :  l'épée ,  la  lance ,  l'arc  avec  douze  flèches. 

Trois  professions  qu'on  ne  peut  embrasser  sans  la  permission  de 
•on  seigneur  :  les  arts  libéraux,  les  arts  raéchaniques  et  la  musique. 


(  35o  ) 

avecq  eulx  cument  et  par  quele  manière  ilz  devront  servir 
en  ses  mônoyes  par  ses  lectres  de  lan  mil  ijc  iiij**  xvij. 

»  Le  conte  Loys  cofirma  aulx  francs  mônoyers  ledict 
previlege  du  conte  Guy  pourveu  quilz  seront  tenuz  de 
ouvrer  garnir  et  furnir  sa  monnoye  en  quelqz  lieu  que 
ce  puist  estre  et  se  faulte  y  avoit  le  conte  pourra  pren- 
dre aultres  telz  qui  luy  plaira  dont  sont  ltres  de  lan 
mil  iij°  xlix. 

»  En  lan  mil  ijc  lxxvj  la  cotesse  Marguerite  et  le  c5te 
Guy  son  nlz  envoyerêt  en  frace  consulter  aux  maistres 
de  la  monnoye  du  Roy  cornet  et  pour  quelz  cas  les 
delinquans  en  faict  de  monîi  faisoient  a  punir  et  il  leur 
feust  respondu  que  quat  on  treuve  que  ^.s  Loistes  ayt 
faulte  en  lassay  de  iiij  d.  jusques  a  grain  etdemy  c'est  a 
dire  en  la  demy  once  quattre  grains  de  faulte  Ion  ar- 
reste  les  Loistes  jusqs  ad  ce  que  le  maistre  en  ayt  faict 
aultant  de  larges  et  se  la  faulte  en  lassay  de  iiij  d.  est 
de  deux  grains  est  asscavoir  de  six  grains  en  la  demy 
onze  on  prent  le  maistre  et  ses  biens  et  est  la  mercy 
du  prince. 

»  Ou  meisme  an  lxxvij  la  dicte  cotesse  bailla  ses  mo- 


Trois  indices  de  ce  qu'un  canton  est  habite:  des  enfans,  des 
chiens  et  des  poules. 

Le  Roi  peut,  sans  l'intervention  du  Juge  du  Palais,  avoir 
conversation  avec  trois  sortes  de  personnes  :  avec  sa  femme  , 
avec  son  confesseur  et  avec  son  médecin. 

Trois  officiers ,  eu  l'absence  du  Roi ,  peuvent  tenir  sa  cour  : 
le  grand  aumônier  ,   le  dépensier   et  le  juge  du  palais. 

On  compte,  selon  la  loi,  trois  espèces  d'arbitres:  ceux  qui  dé- 
terminent par  leurs  remontrances  les  parties  à  exécuter  les  juge- 
mens;  ceux  qui  se  sont  rendus  garants  des  conventions  ,  et  le 
juge  choisi  par  les  plaideurs  pour  les  réconcilier,  etc. 

Trois  cornes  de  Buffle  appartenantes  au  Roi  qui  toutes  ont  la 
même  valeur  :  celle  dans  laquelle  il  boit,  celle  dont  on  se  sert 
pour  éveiller  ses  domestiques,   et  celle  du  grand  veneur. 


(35i  ) 

noyés  a  ClaysDekin  bourgeois  de  Bruges  sur  la  coheriïo 
et  paine  dessus  pour  trois  ans.  Et  se  forga  lors  la  monn 
pour  Flandres  a  sainet  Bavon  a  Gand  et  Alost  et  pour 
Hayniï  a  Valenchiennes. 

»  En  lan  mil  ijc  iiij  Jehan  conte  de  Namur  rewaert  de 
Flandres  feist  pour  la  guerre  et  povrete  du  pays  forgier 
monoie  plus  legiere  que  jammais  conte  navoit  faict  et 
ce  par  ladveu  des  cincq  villes  de  Flandres  dont  ceulx 
de  Gand  prinsdrent  de  luy  ltres  de  non  préjudice. 

Monnaye    d'or. 

»  Monsieur  le  conte  Loys  de  Maie  feist  forgier  Heaul- 
mes  de  Flandres  de  lxvij  au  marc  de  xxiij  carras  et  demi 
Lyons  rampans  de  xxxv  5  au  marc  de  xxiij  carras  aul- 
tres  Lyons  de  xliiij  au  marc  a  xxiij  carras  et  demi  An- 
gelotz  de  Flandres  de  xliiij  au  marc  a  xxiij  carras.  Escus 
de  Gand  de  liiij  au  marc  au  xxiij  carras.  Escus  de  Ma- 
lines  de  liiij  au  marc  de  xxiij  carras  et  demy.  Il  feist 
aussi  forgier  Frans  a  pied. 

»  Monsieur  le  duc  Philippe  dict  le  hardi  son  successeur 
forga  Nobles  de  Flandres  de  xxxij  au  marck  a  xxiij  car- 
ras et  demy. 

»  Monsieur  le  duc  Jehan  forga  pareillement  Nobles 
de  xxxv  3  au  marc  de  xxiij  carras  et  ung  quart. 

»  Monsieur  le  duc  Philippe  dict  le  bon  duc  forga  Nobles 
à  la  rose  de  xxxv  3  au  marc  a  xxij  carras  et  demi. 
Clynckaerts  de  divers  cours  les  premiers  faict  a  Gand 
Utrecht  et  Namur  de  lxviij  au  marc  a  xvj  carras  aultres 
a  Louvain  Zevemberghc  et  Namur  de  lxviij  3  au  marc 
a  xv  carras  aultres  faietz  a  Namur  dudict  poix  a  xiiij 
carras  et  les  derr.  de  lxviij  au  marc  a  xiij  carras  et 
demi.  Et  depuis  il  forgea  Riders  de  lxvij  3  au  marc  a 
xxiij  carras  et  trois  quarts  et  demi  Riders  a  ladvenant. 
Et  quat  il  eust  conquis  Luxembourg  il  forga  a  Luxem- 


(  350 

bourg  des  Florins  au  salnct  André  de  lxxj  au  marc  a 
xviij  carras  et  demi.  Après  la  paix  de  Gavcre  il  forga 
Lyons  de  lviij  au  marc  de  xxiij  carras  deux  pars  de  Lyon 
et  tiers  de  Lyon  a  ladvenant  et  ung  peu  avant  son  très- 
pas  il  feist  forgrer  Florins  de  Bourgoigne  qui  se  nomment 
a  la  croix  de  lxix  au  marc  a  xix  carras. 

»  Monsieur  le  duc  Charles  continua  le  meisme  Florin 
a  la  croix  et  ne  feist  jammais  aultre  monnoye. 

)>  Monsieur  le  duc  Maximilian  et  madame  Marie  for- 
gèrent semblablement  Florins  a  la  croix  et  quant  il  feust 
devenu  Roy  desRommains  {[forga  Roy  aulx  etScuutkins. 

»  Monsieur  larchiduc  Pille  forga  Deniers  dor  qui  se 
nôment  Thoisons  dor  et  aultre  dor  nomme  de  Philippus. 

»  Et  mosieur  Larchiduc  Charles  son  filz  a  cotinue 
icelle  monnoye  dor. 

Monoye   darget. 

»  Madame  la  cotesse  Marguerite  feist  forgier  ung  De- 
nier dargent  dont  les  trois  valoient  en  poix  et  en  aloy 
et  de  taille  a  lafferant  de  deux  tourîi  le  roy. 

)>  Depuis  le  conte  Guy  son  filz  forga  monn  blanche 
que  nous  appelions  Clayskins  (1)  aussi  feist  le  conte 
Robert  son  iilz. 

»  Le  conte  Loys  de  Cressi  forga  deniers  dargèt  divers 
et  entre  aultres  ung  denier  sur  lequel  estoit  dung  coste 
escript  Gadavù  et  de  laultre  coste  Lovanium  et  ce  po 
une  alliance  quil  avoit  faict  avecq  le  duc  de  Brabant. 

»  Monsieur  le  conte  Loys  de  Maie  forga  pareillement 
diverse  monoye  blanche  et  entre  aultres  Roosekens* 
Aussi  feict  monsieur  le  duc  Philippe  le  hardi. 

»  Monsieur  le  duc  Jehan  forga  Patars  qui  se  sont 
nomez  Braspenninc  et  demi  Patars  a  ladvenant. 


(1)    Ce  nom  dérive  sans  doute  de    Clays  Dekin,  de  Bruges, 
qui  peuleUe  frappa  le  premier  ces  monnaies. 


(  353  ) 

»  Monsieur  le  duc  Philippe  feist  au  comcnchemcnt 
forgier  Patars  de  cincq  esterlins  que  depuis  avons  ap- 
pelle vieilz  Patars  et  depuis  feist  forgier  Patars  de  deux 
gros  appeliez  Vierlanders  et  gros  et  demy  gros  et  quart 
de  gros  a  ladvenàt  et  ung  peu  devât  sa  mort  il  feist 
forgier  double  Patars  au  cirele  de  iiij  gr.  la  pièce. 

»  Monsieur  le  duc  Charles  feist  semblablemèt  forgier 
Patars  de  deux  et  double  Patars  de  quatre  gros  et  demy 
gros  et  quart  de  gros  et  depuys  aultres  Patars  a  ung  Lyb 
et  double  Patare  a  deux  Lyons. 

»  Monsieur  le  duc  Daustrice  et  madame  Marie  feisrent 
forgier  Patars  doubles  a  deux  Lyotis  et  sengles  a  ung 
Lyon. 

»  Et  depuis  quàt  elle  feust  morte  Maximilian  et  Phi- 
lippe feisrent  forgier  doubles  et  sengles  Patars  de  31  a- 
lines  item  doubles  Griffons  et  sengles  item  doubles 
Heaulmes  et  seingles  et  quât  Maximilian  feust  devenu 
Roy  des  Rommains  il  forga  Roy  aulx  dargent  a  six  Patars 
la  pièce  item  ung  grant  double  a  la  couronne  a  unze 
gros  la  pièce. 

»  Monsieur  Larchiduc  Philippe  feist  forgier  ung  de- 
nier de  fin  argent  nome  Toyson  pour  six  gros  ung  dou- 
ble Patart  non  fin  et  qnatre  gros  et  ung  seingle  a  deux 


yy 


gros. 

IXrae  et  Xme  livraisons.  24 


(354) 


EXTRAIT 


D'une  notice  sur  les  ossemens  foss'iles ,  trouvés  en  1823 , 
en  creusant  le  canal  entre  Maestricht  et  Hoclit,  lue 
à  la  réunion  générale  de  la  Société  des  Amis  des 
Sciences ,  Lettres  et  Arts  de  Maestricht ,  du  4  Novem- 
bre 1823,  par  J.  G.  Craiiay,  l'un  de  ses  Membres, 


JLiE  sol  traversé  par  le  canal,  comme  celui  de  tout  le 
bassin  de  la  Meuse,  est  formé  d'un  terrain  de  transport: 
une  couche  de  terre  argileuse  jaune,  variable  en  épais- 
seur, constitue  la  surface  et  repose  sur  un  vaste  dépôt 
de  cailloux  roulés,  de  quartz,  de  silex  pyromaque  et 
de  grès,  de  toutes  les  dimensions  jusqu'à  celle  de  plus 
d'un  mètre  cube,  liés  quelquefois  par  un  ciment  quart- 
zeux,  et  formant  des  poudingues  plus  ou  moins  volu- 
mineux. Ce  dépôt,  fortement  coloré  en  plusieurs  en- 
droits par  de  l'oxide  de  fer,  par  zones  horizontales,  et 
renfermant  fréquemment  des  lits  irréguliers  et  peu 
étendus  de  sable  siliceux  pur,  ou  d'argile  plus  ou  moins 
sablonneuse,  couvre  une  grande  partie  de  la  Province. 
A  une  demi-lieue  de  la  ville,  le  canal  s'engage  dans 
le  plateau  de  Caberg,  dont  l'élévation  au-dessus  de 
la  plaine  est  d'une  vingtaine  de  mètres  :  c'est  dans 
la  terre  argileuse  du  plateau  que,  sur  un  espace  de 
5  a  600  mètres  de  longueur,  a  une  centaine  de  mètres 
de  la  Meuse ,  on  a  trouvé  une  grande  quantité  d'osse- 
mens,  dont  le  plus  grand  nombre  provient  d'éléphans. 
Ces  restes  étaient  particulièrement  abondans  a  l'extré- 
mité du  hameau  de  Smeermaas ,  et  a  l'endroit  où  qnel- 


(  355  ) 

qucs  maisons  ont  été  abattues  pour  le  passage  du  canal; 
la,  la  surface  du  dépôt  de  cailloux  forme  une  espèce 
de  ravin  de  6  mètres  de  profondeur,  sur  i5o  environ 
de  largeur,  se  dirigeant  en  pente  vers  la  Meuse,  en 
s'élargissant.,  en  même  tems  que  les  coteaux  qui  le  ren- 
ferment vont  en  s'abaissant.  Ce  ravin,  ainsi  que  d'au- 
tres dépressions  que  le  banc  de  galets  subit  en  plusieurs 
endroits,  est  effacé  a  la  surface  du  sol,  dont  la  forme, 
ayant  en  général  une  plus  grande  tendance  vers  le  ni- 
veau, ne  suit  celle  du  banc  que  dans  les  très-grandes 
inégalités.  Le  ravin  se  dessine  parfaitement  dans  les  talus 
du  canal  qui  le  traverse  presque  perpendiculairement; 
son  fond  est  de  7  mètres  environ  au-dessous  de  la  su- 
perficie du  sol,  et  de  2  mètres  au-dessus  du  chemin 
de  Hallage,  qui  est  lui-même  de  5  ou  6  mètres  au-dessus 
des  moyennes  eaux  de  la  Meuse. 

Parmi  les  ossemens  découverts  jusqu'à  ce  moment , 
on  a  distingué  beaucoup  de  défenses  d'éléphans,  dont 
la  plus  volumineuse  avait  1-80  met.  de  longueur,  sur 

0  -  5o  met.  de  circonférence  près  de  la  base  ;  d'autres , 
remarquables  par  leur  forte  courbure  et  en  ce  que, 
proportionnellement  a  leur  grande  longueur,  (jusqu'à 

1  -  5o  met.),  elles  étaient  très-minces  et  presque  partout 
d'un  égal  diamètre  ;  elles  sont  toutes  a  double  cour- 
bure (1).  Ensuite  ,  un  nombre  considérable  de  dents 
mâchelières  d'éléphans,  dont  la  couronne,  dans  quel- 
ques-unes, a  conservé  son  poli.  Les  lames  usées  par 
la  trituration,  présentent  des  rubans  transversaux  pa- 
rallèles ,  espacés  de  5  a  10  millimètres ,  exactement 
droits  dans  le  plus  grand  nombre,  un  peu  flexueux  au 


(1)  La  fragilité  de  l'ivoire   de  ces  défenses  n'a  pas  permis   de 
vider  les  alvéoles,  afin  de  mesurer  leur  profondeur. 


(  556  ) 

milieu  dans  d'autres  ;  ces  couronnes  présentent  souvent 
une  forme  ovale  (i).  Dans  quelques-unes  de  ces  dents, 
la  partie  supérieure  n'était  pas  encore  usée,  ou  ne  l'était 
que  sur  une  très-petite  étendue  ;  ce  qui  annonçait 
qu'elles  avaient  appartenu  a  de  jeunes  individus,  ou 
qu'elles  étaient  des  dents  de  rechange  encore  trop  pro- 
fondement enfoncées  dans  les  alvéoles  des  mâchoires. 

Parmi  les  os  on  a  reconnu  des  mâchoires  inférieures, 
dont  l'une  était  d'une  telle  conservation  :  elle  portait 
quatre  mâchelières ;  les  deux  postérieures,  non  usées, 
étaient  plus  enfoncées  dans  les  alvéoles  que  les  anté- 
rieures, et  semblaient  soulever  celles-ci  en  les  poussant 
vers  le  devant  de  la  bouche  :  des  tybia,  des  omoplates, 
des  côtes,  des  rotules,  des  apophyses,  des  vertèbres, 
de  petits  os  du  pied ,  tous  d'éléphans.  En  outre  on  a 
rencontré  un  nombre  considérable  d'os  qui  ont  été  frac-- 
turés  pendant  l'extraction ,  ou  qu'il  a  été  impossible 
de  dégager  de  la  terre,  a  cause  de  leur  mollesse,  ce  qui 
empêcha  de  les  reconnaître;  mais  leur  forte  dimension 
fait  croire  que  la  plupart  étaient  d'éléphans.  Cependant 
on  a  trouvé  également  parmi  ces  débris,  des  morceaux 
de  bois  de  cerf  en  petit  nombre,  deux  noyaux  osseux  de 
cornes  de  bœuf,  plus  grands  qu'ils  ne  le  sont  ordinai- 
rement, avec  une  partie  du  crâne;  la  fracture  de  celui- 
ci  n'a  pas  permis  de  distinguer  si  ce  bœuf  était  de  l'es- 
pèce ordinaire;  ce  que  l'on  est  pourtant  tenté  de  croire, 
puisque  les  morceaux  d'os  annonçaient  plutôt  un  front 
plat  que  convexe.  De  plus  on  y  a  déterré  quelques 
dents  de  4  a  5  centimètres  dans  toutes  les  dimensions, 
d'un  aspect  extrêmement  étrange  ;  elles  sont  formées 
d'une  lame  continue,  laquelle,  en  se  répliant  profon- 

(i)  Voyez  plancha  9,   fig.  1 ,  le  dessin  d'une  de  ces  couronnes 
à  forme  ovale ,  réduit  à  deux  tiers  de  la  grandeur  naturelle. 


(357  ) 

dément  sur  elle-même,  produit  trois  tubercules,  sépares 
l'un  de  l'autre,  d'une  irrégularité'  remarquable,  dont 
les  extre'mite's  supérieures  vont  en  s'arrondissant  et  en 
se  rapprochant,  sans  se  toucher  (excepté  suivant  la 
continuation  de  la  lame),  de  sorte  que  la  forme  générale 
de  la  dent  devient  un  peu  conique.  Quelquefois  un  ou 
deux  de  ces  tubercules  sont  usés  par  la  trituration  et 
présentent  une  coupe  blanche,  finement  striée  du  cen- 
tre a  la  circonférence  ;  l'intérieur  des  tubercules  usés 
est  vide.  Dans  un  seule  dent,  tous  les  tubercules  étant 
usés  jusqu'à  la  réduire  a  la  moitié  de  la  hauteur  des 
autres,  la  coupe  offre  une  forme  irrégulière  et  bizarre: 
vers  la  partie  inférieure,  la  lame  se  termine  brusque- 
ment en  formant  des  festons  irréguliers  ;  la  matière  de 
ces  dents  est  blanche  et  d'une  grande  dureté.  La  sur- 
face extérieure  est  inégale  et  comme  chagrinée  ;  elle 
est  parsemée  de  petites  taches  brunes,  mais  sur-tout 
d'un  grand  nombre  de  points  noirs,  de  sorte  que  la 
couleur  en  masse  est  un  gris  brunâtre.  Les  points  noirs 
pénètrent  jusqu'à  une  certaine  profondeur  dans  le 
blanc  de  l'intérieur  de  la  lame.  Plusieurs  de  ces  dents 
sont  légèrement  usées  latéralement,  et  présentent  une 
teinte  bleuâtre  par  le  mélange  des  points  noirs  avec  le 
fond  blanc  :  le  poli  en  est  parfait.  Cette  particularité 
me  paraît  caractéristique  :  je  la  signale ,  puisqu'elle 
pourra  aider  les  savans  en  anatomie  comparée  a  recon- 
naître, sur  cette  description,  l'espèce  d'animal  auquel 
les  dents  ont  appartenu  ;  l'apparence  est  comme  si  elles 
avaient  été  plus  ou  moins  mobiles  dans  la  bouche  de 
l'animal,  et  qu'en  jouant  l'une  contre  l'autre,  elles 
se  soient  légèrement  usées  mutuellement.  Ces  dents  sont 
d'ailleurs  dépourvues  de  racines  5  infericurement  se 
montrent  de  petits  tubercules  qu'y  font  naître  les  rc- 


(  358  ) 

plis  de  la  lame  osseuse,  en  se  prolongeant  jusques  la, 
tellement  que  les  tubercules  infe'rieurs  correspondent 
aux  vides,  laissés  entre  les  tubercules  plus  grands  su- 
périeurs. Ces  petits  tubercules,  qui  ne  de'passent  guère 
les  festons  que  la  lame  forme  inférieurement,  sont  en- 
tourés de  lamelles  disposées  concentriquement  aux 
tubercules  et  composées  d'une  substance  osseuse  blan- 
che qui  remplit  inférieurement  la  dent.  Il  me  parait 
probable  que  ces  dents  ont  été  montées  sur  des  pieds 
osseux  a  racines ,  lesquels ,  par  leur  état  de  mollesse , 
se  seront  détachés  des  dents  lorsqu'on  a  soulevé  celles- 
ci,  et  n'auront  pas  été  remarqués  par  les  ouvriers;  car 
la  partie  inférieure  n'étant  aucunement  salie ,  montre 
qu'elle  a  été  garantie  du  contact  de  la  terre  argileuse 
par  quelque  corps  osseux  (1). 

Tous  cesossemens,  enveloppés  par  la  terre  argileuse, 
ont  été  trouvés  a  peu  près  à  la  même  hauteur  verticale 
dans  le  terrain  élevé  du  plateau,  et  étaient  placés  soit 
immédiatement  sur  la  surface  de  la  masse  de  cailloux 
roulés,  soit  a  une  certaine  distance  au-dessus,  dont  le 
maximum  peut  être  évalué  a  5  ou  4  mètres.  Ils  étaient 
répandus  par  tout  sans  ordre ,  et  isolés  les  uns  des 
autres,  même  a  d'assez  grandes  distances  ;  dans  le  ravin 
ils  étaient  plus  rapprochés,  quoiqu 'isolés,  leur  quan- 
tité y  étant  beaucoup  plus  grande  que  partout  ailleurs. 
Dans  la  masse  même  du  banc  de  cailloux ,  il  ne  s'est 
trouvé,  jusqu'à  la  profondeur  de  5  mètres,  (mais  au- 
dessous  du  niveau  de  Ja  plaine)  que  deux  ou  trois  mo- 
laires d'éléphans ,  et  des  fragmens  isolés  des  mêmes 
dents;  de  plus  quelques  vertèbres,   et  l'os  sacré  d'un 

(1.)  Une  de  ces  dents  est  figurée  planche  9 ,  fig.  2  et  3  , 
sous  deux  faces  opposées  et  de  grandeur  naturelle.  A.  est  le 
tubercule  usé,  et  B  est  la  partie  polie  latéralement. 


(  359  ) 

animal  qui,  a  en  juger  par  les  dimensions  de  ces  pièces, 
peut  avoir  été  de  la  grandeur  du  cerf.  Ces  molaires  pré- 
sentent des  lames  plus  épaisses  et  plus  espacées  que 
celles  trouvées  dans  la  terre  argileuse  supérieure.  Le 
banc  de  cailloux  roulés  ne  renferme  d'ailleurs  que  quel- 
ques oursins  et  madrépores  roulés ,  et  plus  rarement 
des  morceaux  de  bois  pétrifié.  Dans  un  des  lits  de  sable 
argileux ,  dont  il  est  quelquefois  entrecoupé ,  on  a  trouve 
quelques  coquilles  marines,  parmi  lesquelles  on  a  dis- 
tingué des  huîtres,  des  pétoncles  élargies,  des  peignes 
et  quelques  cérites;  plusieurs  de  ces  coquilles,  légère- 
ment usées ,  annoncent  qu'elles  ont  roulé.  La  terre  ar- 
gileuse qui  enveloppe  les  ossemens,  ne  contient  aucun 
corps  marin. 

La  plupart  des  ossemens  qu'on  est  parvenu  a  con- 
server, n'ont  pu  être  extraits  de  la  terre  que  par  mor- 
ceaux ,  a  cause  du   singulier  état  ou  ils  se  trouvaient. 
L'humidité  du   terrain  ,  en  les  pénétrant  intimement , 
avait  ramolli  les  dents  ainsi  que  les  os,  a  tel  point  que, 
sans  avoir  perdu  leur  forme  ,  ils  avaient   acquis   une 
consistance  onctueuse  qui  permettait  de  les  pétrir  entre 
les  doigts ,  comme  de  l'argile  molle  ;  leur  ressemblance 
a  une  matière  grasse  aurait  pu  les  faire  prendre  au  pre- 
mier abord  pour  de  Vadipocire ,  s'il  n'était  connu  que 
la  matière  osseuse  n'est  pas  susceptible  de  se  changer 
en  cette  substance  ,   dont  toutes   les  autres  propriétés 
manquaient  d'ailleurs  ici.  Cet  état  de  mollesse  était  plus 
ou  moins  grand,   suivant   que  le  terrain   était  plus  ou 
moins  humide.  Nombre  de  pièces  n'ont  pu  être  déta- 
chées de  la  terre.  Par  la  dessication  ,  la  matière  prenait 
plus  de  solidité  ;  mais  aussi  le  retrait  qui  s'en  suivait , 
faisait  souvent  tomber   en  morceaux  les  pièces  qu'on 
était  parvenu  a  déterrer  entières. 


(  56o  ) 

Ce  grand  degré  de  ramollissement  par  la  pénétration 
de  Peau,  fit  assez  pre'sumer  que  la  ge'latine  aurait  en- 
tièrement disparu ,  soit  par  dissolution ,  soit  par  décom- 
position, ce  que  les  essais  ont  confirmé  (1)  Néanmoins 
toute  matière  animale  n'y  avait  pas  été  totalement  dé- 
truite ;  probablement  la  graisse  avait  résisté  en  petite 
quantité,  car  la  calcination  donne  une  teinte  légère- 
ment grisâtre  aux  morceaux  qu'on  y  soumet. 

Dans  la  partie  la  plus  compacte ,  les  dents  ainsi  que 
les  os  ont  conservé  leur  couleur  blanche ,  quelquefois 
une  matière  colorante  noire  y  a  formé  des  dendrites. 
Les  parties  moins  compactes  sont  généralement  colorées 
en  noir  ou  en  brun. 

Une  chose  très-remarquable  dans  ce  dépôt,  c'est  que, 
quelle  que  soit  la  quantité  d'os  qu'on  ait  trouvés,  elle 
est  beaucoup  trop  petite  en  comparaison  du  nombre  des 
défenses  et  sur-tout  des  molaires,  et  cependant  il  semble 
que  Pon  ne  peut  pas  attribuer  cette  disproportion  a  ce 
que  les  dents,  a  raison  d'une  plus  grande  compacité, 
ont  pu  mieux  résister  a  la  décomposition  ;  car  les  os 
que  l'on  a  rétrouvés  n'avaient  pas  un  degré  de  mol- 
lesse plus  grand  que  les  dents  qui  avaient  séjourné 
dans  la  proximité;  ils  n'étaient  pas  même  dépouillés  de 
cette  partie  celluleuse  qui  garnit  leur  intérieur  et  qui 
aurait  dû.  disparaître  la  première;  qui  plus  est^  on 
a  retrouvé  beaucoup  d'os  entièrement  composés  de  ce 
tissu  celluleux,  comme  les  vertèbres,  etc.  et  ceux-là 
n'annonçaient  aucunement  un  degré  de  décomposition 
plus  avancé  que  l'ivoire.  Enfin ,  ces  débris  doivent 
nécessairement  avoir   été  enveloppés  par  la  terre  argi- 

CO  Beaucoup  de  pièces  ont  été  couservées  en  les  imbibant  de 
colle-forte;  il  faudra  donc  s'assurer  d'abord  si  le  morceau  <juoa 
examine  n'a  pas  subi  cette  opération. 


(  m  ) 

leuse ,  avant  que  la  macération  dans  l'eau  les  eût 
amene's  au  degré'  de  mollesse  où  nous  lesjavons  vus; 
sans  quoi,  non-seulement  ils  auraient  perdu  leurs  for- 
mes ,  mais  ils  se  seraient  désagrégés  entièrement  et 
auraient  disparu  par  le  mélange  de  leurs  particules  avec 
le  limon  d'attérissement.  Or,  si  la  décomposition  ne 
parvint  pas  a  ce  point  avant  que  la  terre  enveloppât 
ces  ossemens  de  tous  côtés ,  elle  n'a  pu  dans  la  suite 
occasionner  leur  déperdition  ,  puisque  leur  base  ter- 
reuse ,  se  conduisant  comme  une  masse  minérale ,  ne 
pouvait  s'anéantir,  et  devait  laisser  partout  des  traces 
non  équivoques  de  son  origine,  la  forme  étant  conser- 
vée par  l'empâtement  dans  la  terre  environnante. 

D'un  autre  côté,  ces  ossemens  ont  reproduit  la  cir- 
constance digne  de  remarque,  qui  s'est  rencontrée  le 
plus  souvent  dans  des  dépôts  pareils  découverts  dans 
presque  tous  les  pays  septentrionaux  dont  le  sol  est 
d'attérissement,  sur-tout  dans  les  bassins  des  grandes 
rivières,  savoir  qu'aucune  pièce  ne  présente  des  sigues 
d'avoir  long-tems  roulé  ;  si  la  plupart  de  celles  qu'on  a 
trouvées  dans  le  canal  sont  plus  ou  moins  fracturées, 
c'est  qu'a  cause  de  leur  mollesse  on  n'a  pu  les  extraire 
entières ,  ou  que  l'ouvrier  les  a  endommagées  de  son 
outil,  avant  de  les  appercevoir.  Beaucoup  de  molaires 
ont  retenu  le  poli  sur  leurs  couronnes  ;  toutes  les  dé- 
fenses ont  été  trouvées  entières,  quoique  leur  fragilité 
n'ait  permis  d'en  conserver  qu'un  petit  nombre;  parmi 
celles-ci  il  en  est  une  d'une  grande  dimi.-nsion ,  qui 
porte  latéralement,  près  de  la  pointe,  deux  espèces  de 
facettes  que  l'animal  y  a  fait  naître  lui-même  par  le 
frottement,  et  qui  sont  si  nettement  terminées,  qu'il 
semblerait  que  la  dent  n'a,  pour  ainsi  dire,  pas  été 
déplacée.  Enfin,  la  plupart  des  pièces  ont  conservé  des 


(  38a  ) 

arêtes  vives  et  indiquent  qu'elles  n'ont  pas  été  amenées 
de  bien  loin.  Si  à  cette  remarque  on  joint  les  autres 
considérations  qui  repoussent  également  l'idée  que  ces 
ossemens  auraient  été  charriés  des  contrées  équatoriales 
par  des  courans  d'eau,  ou  qu'ils  proviendraient  d'ani- 
maux amenés  par  les  armées  des  Romains  ou  d'autres 
peuples,  on  est  conduit  encore  une  fois  a  conclure  qu'a 
une  époque  reculée,  antérieure  aux  teins  historiques  , 
les  pays  septentrionaux  nourrissaient  des  Eléphans,  des 
Rhinocéros,  des  Hippopotames,  etc.  probablement  d'une 
espèce  appropriée  au  climat ,  mais  dont  les  analogues 
ne  vivent  plus  que  dans  la  Zone  Torride. 

Et  maintenant  on  peut  admettre  que  ces  ossemens, 
ramassés  dans  les  plaines  voisines  par  les  grandes  eaux 
du  fleuve,  probablement  a  plusieurs  reprises,  ont  été 
charriés  et  dispersés  sur  une  grande  étendue;  mais  que, 
dans  le  ravin  transversal  a  la  direction  du  courant,  ils 
ont  été  arrêtés  en  quantité  plus  grande  que  partout 
ailleurs  ;  que  les  molaires ,  les  défenses  et  les  autres 
pièces  d'une  grande  pesanteur  spécifique,  se  sont  en 
général  déposées  les  premières;  tandis  que  les  autres, 
entraînées  plus  facilement ,  ont  été  dispersées  sur  un 
plus  grand  espace,  même  charriées  jusque  dans  la  mer. 

Le  creusement  du  canal  a  fourni  quelques  autres 
découvertes  moins  remarquables  ;  telle  est  celle  d'une 
tête  d'homme  près  du  château  de  Hocht  a  5  m  5o  de 
profondeur,  dans  une  couche  d'argile  sablonneuse  noirâ- 
tre, d'une  formation  récente  comme  le  prouve  l'état  de 
conservation  des  substances  molles  qu'elle  renfermait 
abondamment  :  telles  que  feuilles,  gousses  de  légumineu- 
ses, châtaignes,  etc.  Dans  la  plaine,  entre  la  ville  et 
Smeermaas  ,  une  couche  d'argile  bleue,  sablonneuse,  re- 
posant sur  les  cailloux  roulés,  contenait  beaucoup  de  gros 


(  363  ) 

morceaux  de  bois  de  saule,  conservant  une  partie  de 
leur  ténacité,  du  fer  phosphaté,  des  coquilles  terrestres 
et  d'eau  douce,  des  Lois  de  cerf  et  la  tête  d'un  Carni- 
vore de  la  famille  des  chiens.  11  est  presqu'in utile  de 
dire  que  cette  couche  d'argile ,  ainsi  que  celle  de  Hocht 
dont  il  vient  d'être  parlé,  diffère  entièrement  de  la  terre 
d'attérissement  qui  renferme  les  restes  d'Eléphans  dans 
le  plateau  :  jusqu'ici  aucun  reste  de  ces  quadrupèdes 
n'a  été  trouvé  dans  la  plaine. 

Dans  une  pointe  que  forme  le  plateau  de  Caberg  , 
en  s'avançant  dans  la  plaine  près  de  Smeermaas ,  on  a 
rencontré  dans  la  terre  argileuse,  a  6  m  5o  au-dessous 
du  sol,  la  mâchoire  inférieure  d'un  homme,  garnie  de 
dents ,  sans  être  accompagnée  d'aucun  autre  reste  : 
elle  ne  semblait  pas  avoir  roulé  ;  les  ouvriers  assurent 
que  la  terre  n'y  avait  pas  été  remuée.  L'os  est  très- 
fragile,  mais  n'a  pas  été  dans  cet  état  de  mollesse  des 
ossemens  d'Eléphans  5  aussi,  n'est-ce  pas  la  même  cou- 
che de  terre  ;  car  au-dessous  de  cette  mâchoire  s'éten- 
dait une  couche  irrégulière  de  gravier  et  de  cailloux 
de  2  a  5  mètres  d'épaisseur,  au-dessous  de  laquelle 
était  placée  une  nouvelle  couche  de  terre  argileuse, 
dans  laquelle  on  a  trouvé  des  restes  d'Eléphans  a  qua- 
torze mètres  au-dessous  du  sol. 

Ajoutons  encore  qu'en  i8i5,  on  a  trouvé  sur  le 
penchant  du  plateau  de  Caherg,  près  de  la  ville,  en 
creusant  les  fondemens  du  fort  Guillaume,  des  restes 
d'Eléphans  et  quelques  débris  de  molaires  d'Hippopo- 
tames. 

Et  enfin  qu'il  a  été  découvert  des  défenses  d'Elé- 
phans dans  les  rives  de  la  Meuse  près  de  Ruremonde, 
et  des  restes  de  Castors  et  de  Rhinocéros  dans  des 
tourbières  aux  environs  de  la  même  ville. 


(  564  ) 


RÉPUBLIQUE  DES  CHAMPS  ELYSEES  OU  MONDE  ANCIEN, 

Par  M.  De  Grave,  ancien  conseiller  au  conseil  de  Flandre, 
membre  du  conseil  des  anciens,  etc.  Gand,  1806.  3  vol.  in-8°. 


'an- 


Suite  des  notes  inédites;  voyez  la  7me  livraison,  pag.  276 

JuE  Styx,  les  Enfers  etc.?  Pour  observer  l'ordre  d 
cienneté,  il  eût  fallu  faire  ressortir  auparavant  d'autres 
origines,  antérieures  a  celles-ci,  qui,  quant  aux  noms, 
paraissent  n'être  que  le  produit  d'impressions  reçues  par 
l'imagination  des  Grecs ,  peuple  très-moderne  dans  le  sens 
des  e'tudes  dont  nous  nous  occupons.  Si  nous  y  donnons 
ici  la  priorité',  c'est  pour  n'avoir  pas  a  de'tourner  les 
yeux  du  lac  dont  nous  ne  cessons  de  nous  occuper. 

Meerghem,  que  les  Français  nomment  Merville, 
signifie  ville,  village,  manoir,  habitation  ou  résidence 
du  lac;  et  remarquez  que  ce  chef -lieu  du  lac  est 
place'  dans  l'intérieur  de  l'enclos  de  la  Nieppe,  et  y 
occupe  l'angle  que  forme  la  Boire  en  débouchant  dans 
la  Lys.  Si,  pour  les  Egyptiens,  c'est  Meeris  qui  a 
donné  son  nom  au  lac,  c'est  Steegers ,  traduit  en  fran- 
çais par  Etaire,  qui  y  a  donné  le  nom  adopté  par  les 
Grecs  et  les  Latins. 

Styx,  Stjgis ,  vient,  disent  les  commentateurs,  de 
Stygeros ,  ce  qui  est  justement  le  mot;  et  notez  que 
ce  mot  semble  mieux  orthographié  par  les  Grecs  que 
par  nous-mêmes,  si,  comme  tout  l'indique,  ce  lieu, 
placé  la  comme  barrière  d'entrée  de  la  navigation  inté- 
rieure ,  était  la  première  et  la  principale  station  de  ces 
pilotes,  aides   ou    compagnons -bateliers  qui,   mainte- 


(  365  ) 

tiant  encore,  conduisent  les  bateaux  sur  nos  rivières^ 
en  se  relevant  de  poste  en  poste  ;  ve'ritables  stygers , 
(prononcez  steîgers),  dans  l'acception  la  plus  propre 
du  mot,  puisque  c'est  eux  qui  conduisent,  l'ont  avan- 
cer et  voyager  les  navires,  (de  reizende  schepen  sty-> 
gen)  (1).     Voila    donc   le   Styx ,    le   Stygis-lacus,  le 

(1)  Dans  une  grande  partie  de  la  Flandre  occidentale,  on 
nomme  steegers  les  marches  des  escaliers;  un  escalier  y  est  même 
nommé  steeger.  L'esprit  de  nos  au  tiques  ancêtres  était  entiè- 
rement adonné  à  la  navigation ,  comme  la  langue  que  nous 
avons  héritée  d'eux  le  prouve  de  toutes  les  manières.  La  vie  y 
était  tellement  adaptée  que,  de  nos  jours  encore,  avoir  des 
succès  ou  essuyer  des  revers  ,  être  heureux  ou  malheurenx  ,  c'est 
pour  nous ,  qui  ne  naviguons  presque  plus ,  bien  ou  mal  navi- 
guer,  wel  of  '  ktvalyk  vaeren;  il  semblerait  même  que  nous  de- 
vons naviguer  après  la  mort  comme  pendant  la  vie;  le  dernier 
adieu  est  un  souhait  d'éternelle  bonne  navigation,  eenen  eeu- 
wigen  vaert-wel;  nos  funérailles  sont  une  navigation  de  départ, 
eenen  uytvaert  ;  nos  âmes  naviguent  au  ciel,  ien  kernel  vaeren; 
etc.  etc.  Il  n'est  donc  pas  étonnant  qu'on  ait  comparé  les  mar- 
ches de  nos  escaliers  aux  postes  ou  stations  des  bateliers-pilotes, 
établis  le  long  de  nos  rivières.  Le  nom  d'échelles  du  Levant  n'a 
pas  eu  d'autre  origine;  car  les  Français  out  adopté  le  mot  romain 
scala,  pour  nommer  un  escalier  comme  pour  nommer  une  échelle. 
Y  avait-il,  à  chaque  station  de  nos  pilotes  dans  la  Méditerranée,  ce 
que,  dans  nos  grandes  villes,  nous  appelons  encore  weeg  ou  waeg- 
sciiale,  balance  publique  ou  poids  de  ville  ;  c'est-à-dire,  un  grand 
magasin  pourvu  de  poids  publics  pour  l'entrepôt  des  marchandises,  la 
facilité  des  transactions,  et  le  payement  des  droits?  — Est-ce  de 
là  que  vient  le  mot  romain  scala?  —  Les  navires  de  la  Méditerranée 
ne  pouvaient-ils  naviguer  que  d'une  scala  à  une  autre?  —  Avions 
nous  ainsi  sur  toutes  les  côtes  du  globe  nos  postes  de  pilotes? 
—  Nos  scala  de  la  Méditerranée  étaient-elles  appuyées  de  forces 
militaires  et  maritimes  pour  l'exécution  des  réglemeus  de  navi- 
gation? —  Est-ce  ces  scala,  ces  échelles  de  la  Syrie,  de  l'Asie  mi- 
neure ,  de  l'Egypte ,  de  la  Mer  Noire ,  du  continent  et  des  îles  de  la 
Grèce,  et  finalement  celle  du  Tibre  en  Italie,  qui,  deveuues  riches  et 
puissantes,  se  sont  successivement  soulevées  contre  nous?  —  Est-ce 
dans  nos  guerres  pour  les  soumettre  que  nous  avons  commis  les 


(  566  ) 

steegers-meer ,   qu'un   faisait    traverser    aux    étrangers 
auxquels  on  permettait  l'entrée  du  pays,  l'accès  dans 


fcrnantës  et  les  dévastations  dont  on  accuse  les  dernières  périodes 
de  l'existence  des  Atlantes?  • —  Est-ce  ainsi  qu'en  détruisant  la  pros- 
périté des  au  1res,  nous  avons  fait  décliner  progressivement  la  nôtre? 

—  Est-ce  l'imposition  des  droits  de  navigation  qui  a  occasionné 
tous  ces  malheurs  et  fait  accuser  les  Atlantes  d'avarice  et  d'exac- 
tions?—  Ces  droits  s'appellaient-ils  ,  comme  maintenant,  des  toi 
ou  tJiol?  —  Les  appellnit-on  kaep-tol,  droit  de  cap ,  et  la  navi- 
gation de  poste  en  poste  se  nommait-elle,  comme,  à  présent,  nos 
arméniens  ou  course,  Icaep-vaeren?  —  Est-ce  en  commémoration 
de  ltiir  soulèvement  contre  le  kaep-tol  et  de  son  abolition  que  les 
Romains  ont  institué  leur  Capitole  et  leur  Jupiter  Capîtolinus? 

—  Est-ce  contre  nos  kaep-vaerders ,  nos  corsaires ,  que  les  Romains, 
au  moment  de  venir  nous  attaquer  par  terre,  ont  armé  Pompée 
d'un  pouvoir  maritime  si  exorbitant?  —  Est-ce  là  le  hélium  p'ira- 
ticum>.    —  Carthage  fut-elle  notre  dernière  scala  dans  la  Méditer- 
ranée? —  Est-ce  après  la  destruction  de  Carthage  que  le  nec  plus 
ultra  fut  inscrit  sur  les  colonnes  d'Hercule;  c'est-à-dire,   que  les 
Romains  prétendirent  nous  défendre  l'entrée  de   la  Méditerranée 
comme  nous  avions  défendu  si   long-tems  l'entrée  de  la  Mer  du 
Nord  aux  peuples  méridionaux?  —  Toute  l'histoire  romaine  n'est- 
elle  autre  chose  que  l'histoire  des  efforts  que  nous  n'avons  cessé 
de  faire  pour    soumettre   cette  scala  du  Tibre?  —  Est-ce    par  la 
continuité  de  ces  efforts  que,  d'une  part,  nous  avons  tant  aguerri 
les  Romains,    tandis   que,    de    l'autre,  nous  nous  sommes  tant 
affaiblis  et   que  uous  avons  tant  affaibli,  lassé  et  désaffectionné 
nos  grandes  provinces  du  midi,  qu'à  la  longue,  les  Romains  ont 
pu  réussir  à  s'y  introduire  par  des  intrigues,   des  négociations  et 
la  force,   et,  qu'à  la   fin,   ils  sont  venus  nous  attaquer   et  nous 
détruire  chez  nous?  —   Est-ce  par  une  guerre  combinée  qu'au  bout 
de  quelques  centaines  d'années,  nos  provinces  du  nordel  de  Yest  oi\l 
définitivement  réussi  à  détruire  les  Romains?  —  Est-ce  une  continua- 
tion de  la  même  guerre  que  ces  mêmes  provinces  ont  ensuite  sou- 
tenue si  loug-tems  contre  les  Francs,  lorsque  ceux-ci,  sous  Clovis 
et  ses  successeurs,  s'étaient   détachés    de  notre    ancien   gouverne- 
ment pour  se  créer  une  existence  indépendante,    des   institutions 
et  une  langue,  calquées  en  partie  sur  celles  des  Romains  et   en 
partie  sur  leurs  anciennes?—  Nous  Relges,  nous  sommes  nous  trou- 


(  36j  ) 

les  eaux  etlespays  inférieurs,  (  ad  inferos)  ;  c'est-a-dirc , 
dans  ce  que  nous  appelions  encore  aujourd'hui  les  Pays- 
Bas  (de  Nederlanden).  Faites  attention  que  la,  on 
n'entrait  pas  encore  dans  le  plus  bas  du  pays  (  ad  in- 
fernum);  les  mots  concave  et  convexe  se  traduisent  en 
langue  du  pays,  par  ceux  de  hol  et  bol;  Hol-land  veut 
donc  dire  pays  concave,  pays  creux, bas  ou  profond;  la 
Hollande  et  les  isles  sont  bien  le  pays  le  plus  bas  possible 
(injernum),  puisqu'elles  reçoivent  les  fleuves  et  sont  au- 
dessous  des  eaux  de  leurs  embouchures  et  de  celles 
de  la  mer.  I/Aa  ,  l'Yser  et  la  Lys  y  conduisent  ;  mais 
ne  nous  e'loignons  pas  encore  de  notre  entrée. 

Il  faut  que  le  ce're'monial ,  qu'au  passage  du  lac,  on 
faisait  observer  ou  subir  aux  étrangers,  ait  été  calculé 
pour  leur  inspirer  une  singulière  terreur,  puisque  les 
mots  de  la  langue  grecque,  calqués  sur  les  noms  pro- 
pres de  ces  lieux  d'entrée,  expriment  tous  l'horreur, 
l'épouvante,  la  laideur  etc.  Steegers  était  la  forteresse 
qui  servait  de  barrière  sur  la  rive  gauche  de  la  Lys,  et 
c'est  l'origine  du  mot  stygeros ,  redoutable  ou  effrayant; 
la  Gorgue  servait  au  même  usage  sur  la  rive  droite,  et 

vés  ainsi,  pendant  plus  de  dix  siècles,  dans  l'horrible  position 
d'èlre  alternativement  pillés  et  égorgés  par  nos  anciens  sujets  du 
Nord  et  de  l'Est  chaque  fois  que ,  de  gré  ou  de  force ,  nous  nous 
soumettions  aux  Romains  ou  aux  Francs,  et  par  les  Romains  et 
leurs  successeurs  les  Francs,  chaque  fois  qu'il  se  rétablissait  parmi 
nous  quelqu'une  de  nos  anciennes  institutions  ou  de  nos  relations 
avec  nos  anciennes  provinces?  —  Ces  questions  s'adressent  aux 
générations  qui  succéderont  à  celle  qui  nous  est  contemporaine  ; 
celle-ci  ne  saurait  que  s'en  étonner  ou  peut-être  en  rire  ;  elles  n'en 
seront  plus  pour  les  générations  subséquentes,  qui  s  étonneront  et 
riront  peut-être  du  ridicule  état  d'enfance  dans  lequel  l'histoire 
a  pu  rester,  même  sous  notre  époque,  tandis  que  des  torrens  de 
lumière  se  répandaient  de  toutes  parts  sur  les  autres  partie*  du 
savoir  humain. 


(  56$  ) 

voua  l'effroyable  Gorgone.  Les  villages  <ie  Gore  et  de 
Gone-ghem ,  l'un  a  l'est  et  l'autre  a  l'ouest  de  Bethune > 
semblent  fournir  des  racines  pour  la  composition  du 
nom  de  cette  déité  infernale  ;  mais  il  est  plus  probable 
que  le  mot  se  compose  simplement  du  nom  du  lieu, 
auquel  les  Grecs  ont  ajouté  leur  mot  Jy^,  (oné),  ré- 
demption ou  péage  5  c'est  très-probablement  l'a  que  les 
marchandises,  entrant  dans  l'intérieur  du  pays,  acquit- 
taient les  droits  d'entrée  ;  le  nom  du  pays  de  YAllœûe ., 
dont  la  Gorgue  est  le  chef-lieu  ,  semble  dire,  en  effet, 
qu'on  y  faisait  subir  aux  marchandises  des  examens  et 
des  expertises  pour  en  constater  la  valeur  et  la  qualité} 
[V allai ,  —  het  alloeye  of  alloie).  Ce  qui  le  dit  encore 
plus,  c'est  le  mot  de  Pactole  (paktol) ,  droit  ou  accise  de 
ballots  ou  d'emballage ,  que  les  Grecs  ont  si  bien  re- 
tenu et  qu'ils  ont  fait  servir  de  nom  au  fleuve  d'Or  des 
enfers,  probablement  la  Lys,  qui  paraît,  en  effet,  avoir 
charrié  pendant  une  longue  série  de  siècles,  les  richesses 
du  monde.  Et  ce  terrible  fleuve  des  enfers  qui  roulait 
des  flots  enflammés ,  de  la  Lave  infernale  !  Voyez-vous 
cette  rivière  la  Lave,  qui  passe  par  Bethune  et  se  de'- 
charge  dans  la  Lys  a  la  Gorgue;  admirable  limite  de 
douanes,  admirable  moyen  d'empêcher  les  introductions 
frauduleuses  en  effrayant  les  imaginations  1  Exécutait-on 
de  nuit  les  passages  sur  le  lac,  comme  le  disent  Homère 
et  Virgile,  et  entretenait-on,  dans  ces  occasions,  le  long 
de  la  Lave ,  des  feux  que  ses  eaux  réfléchissaient? Quoi- 
qu'il en  soit ,  passons  le  Styx ,  laissons  a  droite  la  Gorgone 
et  le  fleuve  enflammé,  entrons  dans  la  Lys  inférieure, 
dans  les  bas-pays,  ad  inferos.  Quel  est  ce  village,  sur  la 
Meter,  a  quelques  minutes  de  distance  de  Steegers?  Les 
Français  l'appellent  la  Trinité ,m&\s  comment  s'appellait- 
il  en  langue  du  pays,  en  flamand?  serait-ce  ter  intrede ? 


(  ^9  > 
ter  intreed  ou  ter  intrad,  (lieu  d'entrée)?  mais  n'importe, 
contentons-nous  de  son  nom  français;  tel  qu'il  est,  c'est 
encore  une  bonne  enseigne  a  l'entrée  du  séjour  de  cette 
multitude  de  Trinités  infernales  des  mythologiesméditer- 
ranées.  Y  aurait-il  aussi  Ta  un  Cerbère  ou ,  pour  l'écrire 
comme  les  Grecs,  un  Kerbére?  On  sait  que  le  B  des 
Grecs  est  autant  un  V  qu'un  B,  et  que  des  grammaires 
grecques  l'appellent  même  vita  ou  V;  le  mot  Kerbere 
serait-il  pour  nous  l'équivalent  de  Keivère  ou  Kerkveer, 
passage  ou  trajet  de  l'église,  comme  nous  disons  Kerh- 
-weg,  chemin  de  l'église?  le  mot  Remisse,  fête  de 
l'église,  montre  que,  dans  les  vieux  mots  composés,  on 
omettait  le  deuxième  h  de  kerk ,  et  il  y  a  des  milliers 
de  veer ,  (passages  ou  trajets  d'eau)  dans  le  pavs.  Il  y 
eût  eu  plus  d'un  inconvénient  a  ce  que  le  passage  tra- 
versât Steegers ,  barrière  du  fleuve  ,  ou  même  s'en 
approchât  trop  ;  le  village  la  Trinité  offre ,  au  con- 
traire, tout  ce  qui  convient  pour  être  la  clef  du  trajet, 
du  passage  par  eau ,  pour  les  pèlerinages  de  dévotion 
des  étrangers;  et,  si  ce  passage  menait  a  une  église 
éminente,  il  était  bien  un  Rerkveer  ,  un  Retvere  ou 
Rerbere  par  excellence.  Avant  de  voir  a  quelle  église 
le  passage  menait,  il  faut  passer  le  Léthé;  mais  faisons 
observer,  en  passant,  que  les  trois  endroits:  la  Tri- 
nité ,  Steegers  et  la  Gorgue ,  considérés  comme  barriè- 
res ou  clefs  des  eaux  et  pays  inférieurs,  ne  sont  pas 
mal  figurés  par  trois  têtes  et  trois  gueules  et  que,  si 
pour  éviter  des  surprises ,  on  employait  des  chiens 
dressés  pour  servir  de  gardiens  et  de  sentinelles,  ce  qui 
paraît  extrêmement  probable ,  le  fameux  gardien  des 
enfers  aurait  ici ,  a  la  fois,  de  quoi  caractériser  son  nom, 
sa  qualité  de  chien,  ses  têtes  et  ses  gueules.  À  propos 
de  ces  gueules,  j'ai  oublié  de  faire  remarquer  ailleurs, 
IXme  et  Xme  livraisons.  2  5 


(  37o) 

que  le  nom  de  la  Gorgue  conserve  son  exacte  pronon- 
ciation en  flamand  en  l'écrivant  Gorge;  le  g,  dans  cette 
langue,  se  prononçant  toujours  gue.  Ce  mot  n'a  pas  de 
signification  vulgaire  en  flamand,  mais  la  langue  fran- 
çaise l'a  adopté  ;  est-ce  par  commémoration  de  cette 
Gorge  du  grand  fleuve,  de  cette  entrée  des  lieux  saints, 
de  cette  gueule  de  Kerbere,  de  l'Enfer? 

Continuons  notre  trajet.  En  quittant  la  Trinité  et  la 
Meter,  on  entre  encore  dans  des  prés  ;  si,  comme  il  y 
a  lieu  de  le  croire ,  il  y  avait  a  Etaire  des  écluses  pour 
retenir  les  eaux  supérieures,  les  eaux  du  Styx  pouvaient 
être  fort  élevées  dans  la  saison  des  pèlerinages ,  tandis 
que  les  prés  où  nous  entrons  pouvaient  présenter  une 
belle  verdure  parée  de  fleurs  ;  du  reste,  on  ne  dit  pas 
si  c'est  a  pied  ou  en  barque  qu'on  arrivait  des  bords 
du  Styx  au  Léthé.  Celui-ci  est  encore  aujourd'hui  la 
Leeth-beke  (le  ruisseau  le  Leeth),  dont  le  cours,  pa- 
rallèle a  celui  de  la  Meter ,  n'en  est  distant  que  d'un 
quart  de  lieue.  J'aime  bien  a  voir,  vers  le  milieu  du 
cours  du  Léthé ,  le  village  de  Zoeterstede  (  ville  aux 
douceurs  )  $  entrait-il  dans  le  cérémonial  qu'on  obser- 
vait en  traversant  ce  fleuve  de  l'oubli,  de  s'approvi- 
sionner de  friandises,  de  pain  d'épices ,  soit  pour  en 
faire  des  offrandes,  soit  pour  les  faire  bénir  ou,  comme 
le  disaient  les  Grecs ,  pour  se  faire  bien  venir  a  la  cour 
de  Proserpine?  Tout  le  monde,  dans  nos  pays,  a  mangé 
aux  desserts,  et  entendu,  des  milliers  de  fois,  crier  a 
vendre  dans  les  rues  de  nos  villes,  cette  friandise  si  gé- 
néralement nommée  oubli?  et  qui  de  nous  ne  connaît 
pas  le  pain  d'épices  nommé  àlieyligmaeker,  (sanctifica- 
teur)? Nous  voila  au-delà  du  Léthé,  sur  les  bords  de 
la  Lys,  et  précisément  au  veer ,  passage  ou  bac  de  Sailli, 
continuation  du  kerk-veer,  qui  va  ainsi  aboutir  a  Sailli. 


(37i  ) 

Les  mots  sael,  salig,  salven ,  sahare,  salus,  Salii  ou 
Salyi  nous  expliquent  la  destination  religieuse  et  civile 
de  ce  lieu  et  même  ses  rites;  n'est-ce  pas  la  que  les 
mythologues  grecs  et  leurs  imitateurs,  les  latins ,  placent 
un  tribunal  des  enfers?  Nous  y  reviendrons. 

Avant  de  nous  faire  admettre  et  de  nous  pre'parer  a 
pénétrer  plus  avant  dans  les  Pays-Bas,  les  inferi,  re- 
passons le  Léthé  et  le  Styx  ;  traversons  l'enclos  que 
nous  avons  commencé  a  explorer,  et  rendons  nous  sur 
les  tords  de  la  mer  pour  nous  informer  de  ceux  qui 
fréquentaient  ces  lieux,  du  but  de  leurs  voyages,  de 
leur  arrivée  et  du  cérémonial  de  leur  réception. 

La  suite  dans  un  cahier  prochain. 


Sur  une  inscription  placée ,  à  Cologne ,  devant  la 
maison  où  l'on  prétend  que  P.  P.  Rubens  est  né > 
et  à  ce  sujet  quelques  observations  générales. 


Il  y  a,  dans  les  efforts  que  fait  une  ville  ou  un  pays, 
pour  revendiquer  la  naissance  d'un  homme  célèbre  par 
ses  vertus  ou  par  ses  talens,  une  espèce  de  fierté  pa- 
triotique qui  plaît ,  parce  que  le  but  en  est  noble  ; 
ainsi  la  ville  de  Cologne  n'a  cessé  de  disputer  a  celle 
d'Anvers  ,  la  naissance  de  P.  P.  Paibens  ,  et  nous  y  con- 
sentons ,  pour  notre  part ,  d'autant  plus  volontiers ,  qu'elle 
convient  que  le  grand  peintre  était  originaire  d'Anvers; 
ce  fut  d'ailleurs  a  Anvers,  et  dans  les  leçons  de  Van 
Oort  et  d'Otto  van  Veen  qu'il  apprit  les  élémens  de 
son  art,  qu'il  en  agrandit  le  domaine  et  qu'il  forma  sa 
grande  école,  et,  dans  l'espèce,  ce  n'est  pas  seulement 
Pobjet  principal,  c'est  tout. 

Nous  admettons  donc  en  fait  que  le  chef  de  l'école 


(  372  ) 

flamande  est  né  a  Cologne,  et  les  efforts  que  fait  cette 
ville,  pour  établir  ce  point,  et  pour  en  consolider  et  en 
perpétuer  la  mémoire ,  emportent  toute  notre  appro- 
bation. 

Mais  peu  de  personnes  en  Flandre ,  et  sans  doute  a  An- 
vers même  ,  savent  que ,  sur  la  façade  de  la  maison  assez 
vaste ,  où  la  tradition  place  la  naissance  de  Rubens , 
un  ami  des  arts,  M.  F.  Wallrajf,  a  fait  placer,  en 
1822,  une  inscription  en  allemand,  dont  nous  devons 
la  copie  et  la  traduction  a  Pobligeance  de  M.  Rassman, 
professeur  de  notre  Université \  la  voici: 

»  Dans  cette  maison  naquit,  le  29  Juin  1677,  le  jour 
»  des  saints  apôtres  Pierre  et  Paul,  et  reçut  ensuite  le 
y>  baptême  dans  l'église  paroissiale  de  S.  Pierre  (1), 
»  Pierre  Paul  Rubens. 

»  Il  était  le  septième  enfant  de  ses  parens  qui  ont 
»  demeuré  ici  pendant  vingt  années.  Son  père,  le  doct. 
»  Jean  Rubens,  fut  pendant  six  ans  échevin  (2)  d'An- 
»  vers;  mais  forcé  par  les  troubles  religieux  d'émigrer, 
»  il  vint  s'établir  a  Cologne,  où  il  mourut  en  1607. 
»  11  fut  enterré  solennellement  a  S.  Pierre. 

»  Notre  P.  P.  Rubens,  l'Apelles  de  l'Allemagne  (3), 
»  désirait  revoir,  avant  de  mourir,  sa  ville  natale  et  y 
»  consacrer  de  ses  mains,  a  l'église  de  S.  Pierre,  où  il 
»  avait  été  baptisé,  le  superbe  tableau  du  crucifîment 
»  de  S.  Pierre,  qu'il  venait  de  peindre  sur  la  commande 
»  de  notre  célèbre  protecteur  des  arts ,  le  sénateur 
»  Eberhard  Jabach.  Mais  la  mort  le  surprit  a  Anvers 
»  le  5o  Mai  i64o,  dans  la  64me  année  de  sa  vie." 

F.  Wallraff  j.f.   1822. 

(i)  Cela  est-il  bien  prouvé?  A-t-on  les  registres? 

(2)  Rahts- schoeffen ;  Scabinus,  comme  le  dit  P.  P.  Rubens 
lui-même. 

(5)  Holbein  ,  Kranach  ,  seront,  si  l'on  veut,  les  Apelles  de 
l'Allemagne;  Rubens  est  le  nôtre. 


(37d  ) 

Par  une  coïncidence  assez  remarquable  ,  Marie  de 
Médicis ,  reine  de  France,  veuve  de  Henri  IV  et  mère 
de  Louis  XIII,  réfugie'e  a  Cologne ,  mourut  dans  cette 
même  maison,  le  3  Juillet  i642 ,  et  daus  la  même 
chambre  où  était  né  Rubens ,  qu'elle  avait  appelé  a 
Paris  pour  peindre  cette  magnifique  épopée  de  sa  vie, 
production  qui  fut  si  long-tems  le  plus  bel  ornement 
du  palais  du  Luxembourg  5  une  inscription ,  parallèle 
a  la  première  ,  et  placée  par  le  même  M.  Wallraff, 
apprend  toutes  ces  circonstances. 

Cette  idée  de  consacrer  en  quelque  sorte  et  de  per- 
pétuer la  tradition  d'un  événement  mémorable,  en  in- 
diquant l'endroit  où  il  eut  lieu ,  plait  a  l'imagination , 
et  on  a  lieu  d'être  surpris  qu'elle  ne  vienne  pas  plus 
souvent  a  l'esprit  des  Magistrats  d'une  ville.  Charles- 
Quint  naquit  a  Gand  en  i5oo,  et  un  événement  non 
moins  mémorable,  le  traité  qu'on  appelé  la  Pacification 
de  Gand,  y  fut  signé  en  15765  mais  tout  homme  un 
peu  instruit,  osera-t-il  affirmer  que  le  fils  de  Jeanne  la 
Jolie ,  soit  né  dans  une  des  chambres  de  l'ancienne 
Cour  du  Prince ,  et  n'y  a-t-il  pas  une  autre  tradition 
sur  l'endroit?  (1)  La  Pacification  a-t-elle  réellement  été 
signée  a  la  maison-de-ville?  Il  n'y  a  pas  dix  ans  qu'un 
mémorable  traité  de  paix  a  été  signé  a  Gand  entre 
l'Angleterre  et  les  Etats-Unis  ;  beaucoup  de  personnes 
savent-elles,  si  ce  fut  a  l'hôtel  Lovendeghem  où  logè- 
rent les  Ministres  Américains  ou  bien  aux  Chartreux, 


(1)  L'historieu  Vander  Vynckt  donne  quelques  détails  sur  cette 
naissance  ;  mais  une  tradition  porte  que  Jeanne  la  fblls ,  peu 
d'iustans  avant  son  terme,  ne  s'était  pas  seulement  échappée  du 
salon,  mais  du  palais  même,  et  qu'elle  a  mis  Charles  au  monde, 
daus  une  maison  de  la  rue  de  Brahaut  (Brabanddam) ,  qui  portait 
naguères  encore  pour  enseigne,  un  globe  surmonté  d'une  croix, 
un  des  insignes  de  L'empire,  niais  renversé. 


(  57*) 
où  logèrent  les  Ministres  Anglais;  clans  peu  d'années, 
M.  le  comte  de  Steenhuyze  se  souviendra  presque  seul, 
que  pendant  environ  cent  jours,  il  logea  dans  son  hôtel, 
un  Monarque  malheureux  et  fugitif;  la  tradition,  mais 
la  tradition  seide,  nous  a  conservé  l'emplacement  où 
furent  les  maisons  de  Jacques  van  Artevelde  et  de 
Jean  van  Hembyze ,  la  maison  même  de  Van  de  Ke- 
thulle,  seigneur  de  Ryhove,  l'hôtel  deFiennes ,  où  logea 
le  comte  d'Egmont ,  l'hôtel  de  Ravenstein,  plusieurs 
maisons  en  un  mot,  où  se  passèrent  de  grands  événe- 
mens  pendant  la  révolution  du  XVIme  siècle. 

Il  serait  équitable  et  en  même  tems  utile  qu'une  in- 
scription indiquât  un  endroit  célèbre,  comme  une  mé- 
daille perpétue  la  mémoire  d'une  grande  action  ;  niais 
il  faut  en  général  que  ces  consécrations,  souvent  tar- 
dives, soient  faites  avec  discernement  et  avec  goût;  il 
faut  que  l'opinion  consultée  et  préparée ,  les  saisisse 
non-seulement  sans  répugnance,  mais  avec  avidité;  a 
Anvers,  lorsqu'on  y  a  commencé  a  nommer  la  rue,  où 
était  la  demeure  de  Rubens  ,  la  rue  de  Rubens ,  [de  Ru- 
bens-straet) ,  l'assentiment  populaire  sourit  a  la  recon- 
naissance, et,  de  nos  jours  comme  alors,  cette  rue 
continue  a  être  désignée  par  ce  nom,  quoique  toutes  les 
formes  de  la  maison  aient  disparu;  en  i8i4,  lors  de 
la  réaction  qui,  dans  la  ville  d'Anvers  presque  seule, 
s'est  fait  sentir,  quoiqu'il  y  eût  moins  de  motifs  qu'ail- 
leurs, il  fallait  débaptiser  les  beaux  quais  que  le  Gou- 
vernement qui  venait  d'être  renversé,  y  avait  fait  con- 
struire le  long  de  l'Escaut;  je  conçois  bien  la  nature  et 
la  force  des  convenances  qui  devaient  interdire  de 
donner  ou  de  laisser  a  ces  quais  un  nom,  qu'on  devine 
bien  sans  que  je  l'indique;  mais  quelles  dénominations 
eut-on  la  maladresse  d'y  substituer?   on   donna  a  ces 


(375) 

quais  les  noms  de  Riibens ,  de  van  Dyck,  de  Jordaens , 
d' Orteli us ,  de  Planlin  ;  aussi,  malgré  l'étiquette  en 
lettres  d'or,  personne,  si  ce  n'est  peut-être  l'autorité 
ou  quelqu'officier  public,  ne  les  désigne-t-il  sous  ces 
noms,  et  je  persiste  a  croire  que,  pour  l'honneur  même 
des  patrons,  il  conviendrait  de  débaptiser,  une  seconde 
fois,  les  quais,  et  de  leur  emprunter  un  nom  de  quel- 
que monument  voisin ,  soit  qu'il  existe  encore ,  soit 
qu'il  ait  fallu  le  démolir  pour  construire  le  quai;  qu'on 
les  appelle,  par  exemple,  Burgt-Kaey  ,  Bakes-toren- 
Kaey ,  Bierlioojd-Kaey ,  St.  Michiels-Kaey  (1) ,  et 
une  expérience  de  quelques  mois  seulement  apprendra 
avec  quelle  avidité  l'assentiment  du  public  aura  ac- 
cueilli ces  dénominations. 

Je  sais  que  la  flatterie  donne  souvent. aux  grands  de 
la  terre  le  vaniteux  plaisir  d'imposer  leur  nom  a  quel- 
que nouvelle  construction  a  laquelle  ils  sont  étrangers; 
mais  la  reconnaissance  aussi ,  très-souvent ,  s'acquitte 
de  cette  dette  sacrée  et  de  suite  l'usage  la  consacre  ; 
le  public  a  un  goût  fin ,  un  tact  délicat  ;  il  se  méprend 
rarement  sur  les  convenances;  on  a  voulu,  dit-on, 
appeler  la  rue  de  Brabant ,  nouvellement  reconstruite  a 
Gand,  la  rue  Guillaume  ;  on  eût  commis  une  gaucherie 
d'autant  plus  inexplicable,  que  cette  rue  de  Brabant, 
et  le  Brabanddam ,  qui  suit,  n'ont  pas  démérité  d'un 
nom  qu'ils  portent  depuis  des  siècles ,  et  qui  devait 
d'autant  plus  convenablement  être  conservé  que ,  par 
la  loi  fondamentale  qui  nous  régit,  la  province  de  Bra- 
bant, vers  laquelle  ces  rues  conduisent,  vient  de  re- 
conquérir son  ancien   nom;  mais  on  a  donné  le  nom 


(O  En  français  quai  de  Ste  Jfralburge,  du  Phare,  du  Bier 
hoofd,  (eudroit  anciennement  destiné  au  chargement  el  au  de- 
chargement  des  Lierres  )  ,  de  5/.  Michel. 


(  376  ) 

de  Pont  Guillaume  {de  fVillem  Brugge)  au  nouveau 
pont  qui  joint  la  Pêcherie  a  la  porte  de  Bruxelles  5  ce 
projet  conçu ,  approuve'  et  exécuté  sous  les  auspices 
du  Monarque ,  méritait  qu'on  rappelât  le  bienfait ,  et 
la  nouvelle  dénomination  ,  déjà  devenue  populaire  , 
restera  (1). 

(1)  La  pose  de  la  première  pierre  de  la  construction  de  ce  pont, 
eut  lieu  avec  beaucoup  de  solennité  le  23  Mai  1820,  M.  D'Hoop 
van  Alstein,  directeur  des  domaines,  fit  un  discours  analogue  à 
la  circonstance,  et  remit,  à  S.  Exe.  le  Gouverneur  de  la  Pro- 
vince, pour  être  déposées  dans  une  boite  de  plomb,  incrustée 
dans  la  pierre  :  1°  une  médaille  à  l'effigie  de  S.  M.  le  Roi,  gravée 
par  notre  compatriote  M.  Braemt,  portant  sur  le  revers  une  in- 
scription qui  rappelle  cet  évéuemeut. 

20  Une  plaque  en  bronze,  sur  laquelle  était  gravé  . 

QIJEM 

GRBIS   ORNAMENTO 

CIVIUM   COMMODO 

OMNIUM    UTII.1TATI 

VOTA    PLBLIC'A    DUT   POSTULA VERANT 

PONTIS 

WILHELMO   I.   P.    P.    BELG.    REG.    AUSPICE 

CENSU   REGAL!   1NPENDIA    SUBPEDITANTE 

SCALDl    IMPONUNDI 

DIE    XXIII   MAJI   MDCCCXX 

FRINCIPEM   LAPID.    FOSUIT 

VIR   NOB,   ET   EXC.   PHIL.   EX   COM.    DE   LENS   PROV.    GUB. 

ADSTANTIBUS 

VIR   NOB.   PHIL.   PIERS   DE   RAVESCIIOOT  URB.   GAND.   PRAET. 

VIR   NOI5.    ANT.    FR.    D'iIOOP   CENSUI   REG.    DIRIG,    PRAEPOS.    PROV, 

CONSULT.    IGN.   VAN   TOEIIS   ORDINUM   PROV.   ACTUAR. 

VIRIS   SOLERT.   PETRO   BUELS   ARCHITECTO 

ET  JACOBO  FERMONDT 

OPERI    ADt'ELERANDO   ET   PERFICIUNDO   PRAEP. 

ET 

NE   BENEFICl   MEMORIA  PERIRET 

IIAECCE   AERI    INSCRIBUNDA 

ET   LAPIDIS   IPSIUS  VISCERIB.    INCLUDUNDA 

PONTEMQUE   AVILHELMl   NOMINE   INSIGNIUNDUM    ESSE 

COMMUN!   OMNIUM   ADSENSU 

DECRETUM    EST. 

5°  Le  procès-verbal  écrit  sur  parchemin  ,  signé  par  les  Autori- 
tés présentes  à  la  cérémonie,  par  M.  Butls,  l'architecte,  et  M.  Fer- 
mondt,  l'entrepreneur  du  pont. 


(  hi  ) 

-  * 

Planche  iome.  —  anciens  morceaux  de  sculpture 

RÉCEMMENT  IMPORTES  DE  LA  GRECE  EN  BELGIQUE. 


Dissertation  par  M.  Lêopold  van  Alstein. 

J-JES  recherches  de  M.  de  Lescluze  (1)  viennent  de  nous 
procurer  la  connaissance  de  plusieurs  objets  antiques 
trouve's  dans  la  Grèce.  A  cette  élégance  de  formes,  ce 
goût  si  pur,  cette  hardiesse  de  dessin  a  laquelle  on  re- 
connaît les  monumens  de  ses  plus  beaux  siècles ,  se 
joignent  des  circonstances  bien  propres  a  reveiller  la 
curiosité  des  antiquaires,  peut-être  même  a  donner  des 
lumières  sur  quelques  passages  des  anciens ,  dont  le 
défaut  de  monumens  empêchait  de  saisir  pleinement  le 
véritable  sens  5  mais  ce  qui  relève  sur-tout  le  mé- 
rite de  cette  découverte ,  c'est  la  haute  antiquité  de 
quelques-uns  de  ces  objets,  qui  se  prouve  par  le  mo- 
nument même  5  c'est  la  circonstance  non  moins  rare 
d'en  pouvoir  préciser  suffisamment  l'époque ,  et  se  for- 
mer ainsi  une  idée  du  costume,  du  goût,  des  usages  et 
des  opinions  même  du  siècle  où  la  gloire  et  les  arts  de 
la  Grèce  se  trouvaient  au  plus  haut  degré  de  perfec- 

(1)  M.  de  Lescluze ,  de  Bruges,  dans  ses  courses  commerciales, 
et  pendant  sa  résidence  dans  l'ancienne  Grèce  et  les  champs  où 
furent  Troye  et  le  Royaume  du  Pont,  n'explore  pas  seulemeut 
le  sol  dans  l'intérêt  de  l'agriculture  et  de  l'iudustrie(*) ,  mais  encore 
dans  celui  des' sciences  et  des  arts;  c'est  sur  un  de  ses  bàtimens 
que  sont  arrivés  les  morceaux  de  sculpture  décrits  dans  cette  no- 
tice. Nous  devons  deux  des  dessins  à  M.  Ducq ,  membre  de  l'in- 
stitut et  de  la  société  royale  des  beaux-arts  de  Gand  ;  le  cippe 
funéraire  nous  a  été  rendu  par  Fobligeance  de  M.  l'architecte 
Rudd,   de  Bruges.  ** 

(*)   Ployez  le  Ménager  du  mois  de  Novembre ,  pog.  281 . 


(3,8) 

tion  (1)  5  et,  quoique  le  cours  des  tems  semble  pouvoir 
ajouter  peu  de  prix  a  la  valeur  re'elle  des  objets  qui 
échappent  a  ses  ravages,  le  vase  le  plus  simple  cepen- 
dant, du  siècle  de  Platon  ou  d'Aristide,  est  bien  propre 
a  reveiller  en  nous  de  grandes  et  de  belles  idées.  Sem- 
blables a  ces  vieillards  respectables  que  de'core  l'expé- 
rience des  cages,  à  ces  ruines  imposantes  qui,  prêtes  a 
s'écrouler,  font  encore  l'admiration  et  le  désespoir  de 
ceux  qui  essaient  de  les  imiter,  les  débris  de  l'antiquité, 
reveillant  en  nous  mille  souvenirs ,  agrandissent  l'ame , 
et  l'arrachent  aux  préjugés  du  pays,  du  siècle  actuel  qui 
se  croit  toujours  le  plus  sage  (2) ,  pour  le  rendre  citoyen 
de  l'univers,  contemporain  de  tous  les  âges,  ami  des 
grands  hommes  de  tous  les  siècles,  et  juste  admirateur  de 
ceux  qui  font  la  gloire  du  sien.  C'est  Ta,  c'est  dans  ces 
lieux  poétiques ,  que  Socrate  et  Platon  ,  méprisant 
les  vains  discours  des  Sophistes,  leurs  fausses  asser- 
tions, leurs  argumens  captieux,  leurs  viles  intrigues, 
prouvaient  l'immortalité  de  l'âme ,  la  nécessité  d'une 
lumière  divine,  qu'ils  désiraient  la  connaître,  soupi- 
raient après  elle  (5) ,  et  ne  croiaient  point  que  ce  fût 

(1)  A  moins  de  suppléer  à  l'étude  des  grands  modèles  par  le 
plus  heureux  génie  ,  tout  homme  qui  voudra  se  former  ce  goût 
pur,  ces  idées  justes  et  profondes  à  la  fois  et  pleines  de  grâces  , 
qui  distinguent  les  grands  maîtres  dans  la  littérature  et  les  arts, 
sera  toujours  obligé,  pour  me  servir  de  l'expressiou  de  Rollin  : 
»  De  voyager,  pour  aiusi  dire,  loug-tems  chez  les  Grecs.  La  Grèce 
»  a  toujours  été  et  sera  toujours  la  source  du  bon  goût;  c'est  là 
i>  qu'il  faut  puiser  toutes  les  connaissances  si  l'on  veut  remonter 
i>  jusqu'à  leur  origine."  Traité  des  études,  tom.  I.  p.  98. 

(2)  Ita   comparata  est  hominum  naturel 

Aliéna  meliits  ut  videant  et  judicent  quant  sua. 

Terent. 

(5)  De  j'usto  dial.  6.  7.  10.  Alcib.  2.  etc.  Dans  le  Phédon, 


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le  propre  du  sage,  de  dédaigner  comme  indifférentes,' 
les  vérite's  les  plus  essentielles  a  l'homme,  ou  les  hom- 
mages dus  a  la  Divinité  ;  de  les  rejetter  sur  la  foi  des 
passions  ou  des  sophistes ,  ni  d'abandonner  au  cours 
du  hazard  le  sort  de  sa  partie  immortelle  3  et  la  con- 
naissance des  devoirs  et  des  droits  qu'il  doit  remplir 
envers  ses  semblables  ou  respecter  dans  l'intérêt  de  tous. 
Penché  sur  un  tombeau  de  la  Grèce,  au  milieu  des 
ombres  des  héros ,  qui  pourrait  dédaigner  ce  qu'ils  dé- 
siraient avec  tant  d'ardeur  (1)  :   un  ordre  stable,  gage 

Simmias ,  interrogeant  Socrate  sur  la  vie  et  le  sort  futur  de 
l'homme,  et  développant  l'opinion  de  son  .maitre  :  //u'il  n'y  a 
pas  d'occupation  plus  convenable  à  un  homme ,  que  d'examiner 
et  de  lâcher  de  connaître  à  fond  ce  voyage  qu'il  doit  faire  un 
jour,  s'exprime  ainsi:  »  Ne  pas  examiner  très-exactement  ce 
»  qu'on  en  dit,  se  lasser  avant  que  d 'avoir  fait  tous  ses  efforts , 
»  et  avant  que  des  difficultés  insurmontables  obligent  d'y  renon- 
»  cer,  c'est  l'action  d'un  homme  très-mou  et  très-ldche  ;  car,  il 
»  faut  faire  de  deux  choses  l'une,  ou  apprendre  des  autres  ce  qui 
»  en  est,  ou  le  trouver  par  soi-même;  que  si  l'une  et  l'autre  voie 
»  sont  impossibles,  parmi  toutes  les  raisons  humaines,  il  faut 
»  choisir  la  meilleure  et  la  plus  forte  ,  et  s'abandonnnnt  à  elle 
»  comme  à  une  nacelle,  passer  cette  mer  orageuse,  ettàcherd'échap- 
»  per  à  ses  tempêtes  et  à  ses  écueils,  à  moins  que  nous  ne  puis- 
»  sions  en  trouver  une  plus  sûre  et  plus  ferme ,  comme  quelque 
»  promesse  ou  quelque  révélation  divine,  afin  que  sur  elle, 
»  comme  sur  un  7'aisseau  qui  ne  craint  aucun  danger ,  nous  ache- 
»  vions  heureusemeul  le  voyage  de  celte  vie."  (  Phédon  ,  tra- 
duction de  Dacier.  ) 

Kci)  yùp  i<r<yç    KXt   //.aXis-ct  ?rp£7rei ,   utXXoflx    ikhtî   ÛTrooyftEÏv , 

àtOt7X.07TeiV    T£  j    etC.    l'rt-'jt    */&P   OOYAl  ,    U  (rCt)Kj)XTB<i  ,    7Tipt     1&*   Td'.OUiail  , 

la-as  uo-Tctp  xx)  c-Si ,    etc.   (Plato,    éd.   Bas.   i534.  p.  23  et   34. 
Phasd.  éd.  Wiukleri ,  Lips.   1744.  p.  8.  et  47.) 

(1)  Le  but  avoué  des  philosophes,  des  législateurs  et  des  guer- 
riers estimables,  était  la  vérité,  le  mainjlien  des  mœurs  et  des 
lois  de  la  patrie,  L'histoire  et  les  écrits  des  anciens,  nous  montrent 


(  J8o  ) 

de  la  véritable  liberté,  et  une  religion  divine;  des  prin- 
cipes immuables  et  des  vérités  positives  indépendantes 
des  tems,  au  milieu  des  progrès  de  la  civilisation? 

Athènes  sur -tout  est  riche  en  souvenirs.  Ici  la 
Grèce  sauvage,  embellie  par  l'imagination  des  poètes, 
nous  montre  les  combats  de  Thésée ,  Cérès  Thesmo- 
phore  (1)  fertilisant  la  terre  de  Minerve,  et  Mars  lui 
même  se  soumettant  a  l'empire  des  lois  (2).  Plus  loin  (5) 

l'ardeur  qu'ils  mettaieut  à  y  parvenir.  N'être  soumis  qu'aux 
lois  sous  des  magistrats  légitimes  était  pour  eux  la  pleine  li- 
berté (*),  comme  la  connaissance  du  souverain  bien  (?<>  âyuéov) 
et  des  autres  vérités  nécessaires  à  l'homme,  était  pour  les  philoso- 
phes la  vraie  sagesse.  Tous,  réunis  en  ce  seul  point  à  la  conscience 
du  genre  humain  entier,  reconnaissaient  la  nécessité  d'une  religion 
et  d'une  sanction  divine  ,  base  des  mœurs ,  des  lois  et  des  espé- 
rances; mais  l'idolâtrie  en  effaçant  les  traces  des  vérités  primiti- 
ves, les  contraignait  pour  ainsi  dire  à  une  espèce  d'indiffér- 
ence, marque  évidente  d'une  cause  perdue  ou  du  désespoir  de  la 
vérité,  sur  l'adoption  et  les  fondemens  d'une  religion  (le  paga- 
nisme) immorale  et  sans  vérité;  les  réduisait  enfin  à  baser  leurs  lois 
sur  une  ridicule  charlatanerie  ou  sur  l'ambition  qui  les  détruit; 
leur  philosophie  sur  de  vaines  hypothèses,  sans  certitude,  sans 
résultats;  et  leurs  espérances  futures  sur  des  mystères  et  des  initia- 
tions où  quelques  anciennes  traditions  étaient  noyées  sous  un 
amas  de  superstitions  et  de  fables. 

(*)  Epitaphe  des  Spartiates    morts  aux  Thermopyles  : 
12.  EEIN.    AITEIAON.   AAKEAA1MONIOIZ.    OTI.    THAE. 
KEIME0A.   TOIS.   KEINON.    l'HMAZr.    nElQOMENOl. 

Herod.    VII.    228. 

Dont  le  sens  est  :  passant  ,  cours  dire  à  Lacédémone  ,  que  nous  sommes 
morts  ici  pour  obéir  à  ses  saintes  lois.  Littéralement  :  étranger,  annonce  aux 
Lacédêmoniens  que  nous  sommes  campés  (j'acemus  )  en  ce  lieu  pour  obéir  à 
leurs  ordres.  Voyez  aussi  le  Criton  ,  d«  Platon  ,  et  la  définition  de  la  liberté 
d'après  les   Stoïciens  ,  conservéo  dans  les  lois  Romaines. 

(1)  Institutrice  des  lois.  Schol.  Sophocl.  oi^i7r.  1.  673.  Mann. 
Arund.  epoch.  12.  Schol.  Hesiod.  p.  18.  Diod.  lit».  1.  c.  i4.  29.  etc. 

(2)  L'aréopage.  Mann.  Arund.  ep.  3. 

(3)  Entre  l'île  de  Salamine,  le  port  Phoron  elle  Pirée.  Voyez 
i'atlaa  d'Anacharsis,  N.  III.  Herod.  lib.   VIII.  Plut.  Themist. 


(38i) 

les  vainqueurs  de  Salamine,  retirés  sur  de  frêles  vais- 
seaux, changeaient  les  destinées  du  monde,  en  sauvant 
leur  patrie  inondée  par  un  million  de  barbares;  près 
des  lieux  (1)  d'où  Menesthée  conduisit  ses  Grecs  aux 
rivages d'Ilion.  Quelquefois,  après  avoir  reposé  des  mil- 
liers d'années  sur  le  sol  de  l'Attique,  le  tombeau  de 
l'innocence  rappelle  la  mémoire  d'un  illustre  guerrier, 
et  la  beauté  protège  ainsi  la  gloire.  Telle  est  ce  cippe 
funéraire  représenté  par  la  fig.  1 ,  (2)  trouvé  ainsi  que  la 
statue  fig.  2. ,  entre  le  Pirée  et  le  port  Phoron ,  en 
face  de  l'île  de  Salamine.  L'inscription  (5)  doit  se  lire 
de  la  manière  suivante  : 


<PIA0ZTPATH.    OIAHNOS. 


$IAHN.    KAAAinilO. 

AIEQNET2. 

EN0AAE.THN.  IJA2H2.  AFETHS.  Eni.TEPMA.  MOAOSAN. 
GANArOPAN.  KATEXEI.   <t»EPZE<î>ONH2.  OAAAMOS. 

AAKIMAXH. 

KAAAIMAXOT. 

ANATTPASId 

En  lettres  minuscules,  et  suppléant  ce  qui  est  omis 
d'après  l'ortbographe  antique  et  la  fracture  de  la  pierre; 

cpi?,oqpciTyj  (piÀwvoç, 
<piÀwv  kuXXîttov 

(1)  Le  port  Phalere.   Pausan.  lib.  1.  p.  3. 

(2)  Ce  cippe  et  le  fragment  de  la  figure  N°  3,  sont  offert 
par  M.  De  Lescluze  à  S.  Exe.  le  Ministre"  de  l'instruction  publi- 
que. Cette  pierre  a  49  centimètres  de  large,  97  ceut.  eu  hauteur 
et  16  cent,   d'épaisseur.  ** 

(5)  Il  est  à  remarquer  que  pour  faciliter  la  lecture  et  l'intelli- 
gence, le  typographe  a  mis  partout  le  n  grec  ordinaire  ,  au  lieu 
de  la  forme  primitive  dont  s'est  servi  l'auteur  de  linscription ,  et 
qu'on  pourrait  au  premier  coup  d'œil  confondre  avec  le  ?  (gamma).** 


(  582  ) 

evùccèe  tvju  Tcco-yç  àperyç  st)  répfioc  fAOÀovcrtzv 
Cpuvuyopcôv  y.a,ré%si  Cpep<rs(p6v^ç  Ûccàu/uloç. 

y.UÏÀlfACCXQV 

ccvoiryvpcuTÎQV. 
Mot  a  mot  en  latin  : 


|PHILOSTRATAE.   PHILONIS. 


PHILO.  CALIPPI. 
AEXONENSIS. 

HIC.  OMNIS.  VIRTVÏIS.  AD  TERMINVM.  PROFECTAM. 
PHANAGORAM.    TENET.  PROSERPINAE.  THALAMVS. 

A  L  C  I  M  A  C  H  E. 
C  A  L  L  I  M  A  C  H  I. 
ANAGYRASII. 

En  suppléant  les  mots  nécessaires: 

PHILOSTRAT.E  PHILONIS  FILLE, 

PHILON  CALIPPI 

iEXONENSIS. 

HIC   PRvEDITAM   OMNI   VIRTUTE ,   AD   TERMINUM  VITJ2 

JAM    PROFECTAM 
PHANAGORAM   DETINET    PROSERPINAE   THALAMUS. 

ALCIMACHE 

FILIA    CALLIMACHI 

ANAGYRASII. 

En  français  : 


A  PHILOSTRATÉ  FILLE  DE  PHILON. 


PHILON  FILS  DE  CALIPPE 
DU  BOURG  D'AIXONE. 

ICI,  DÉJÀ  PARVENUE  AU  TERME  DE  LA  VIE, 
LA  DEMEURE  DE  PROSERPINE  RETIENT  PHANAGORE , 
DOUÉE  DE  TOUS  LES  MÉRITES  ET  DE  TOUTES  LES  VERTUS. 


(  585  ) 

ALCIMAQUE 

FILLE  DE  CALLIMAQUE 

DU  BOURG  D'ANAGYRUS. 

Sous  une  simplicité  apparente  cette  inscription  ren- 
ferme plus  d'une  difficulté.  Il  s'agit  d'en  de'terminer 
l'époque,  les  personnes  et  les  choses  dont  elle  fait 
mention,  d'en  développer  enfin  le  véritable  sens. 

Il  est  ordinairement  assez  difficile  de  déterminer  l'âge 
des  inscriptions  grecques  d'après  la  seule  forme  des 
caractères.  Le  peu  de  changement  qu'ils  éprouvèrent 
durant  l'espace  de  plusieurs  siècles  (1),  leurs  traits 
primitifs  reproduits  dans  des  tems  postérieurs,  nous 
privent  des  données  nécessaires;  et  les  médailles  même, 
en  nous  offrant  des  types  variés  et  des  époques,  ne 
peuvent  être  d'un  grand  secours,  parce  que  le  plus 
souvent  elles  ne  font  que  retracer  d'anciens  usages.  La 
forme  du  S  de  notre  inscription  peut  se  retrouver 
encore  sur  des  marbres  du  commencement  de  l'empire  (2) , 
mais ,  jointe  a  d'autres  formes  antiques,  elle  désigne  en 
général  des  tems  antérieurs  a  Alexandre  (5);  les  autres 
caractères  plus  récents  que  ceux  du  marbre  de  Nointel  (4), 
plus  anciens  que  ceux  de  la  chronique  de  Paros  (5), 
s'accordent  la  plupart  avec  ceux  du  marbre  de  Cyziquc , 
tracés  avant  que  la  Grèce  eût  subi  le  joug  des  Macé- 

(1)  Mont/.,  paleogr.  gr.  p.  i4i.  A  tempore  quod  interpelopo- 
nesiacum  bellum  et  initium  Romani  Iraperii  intercurrit,  iu  lite- 
rarum  formis  11011  multum  discriminis  deprehenditur ,  nam  in 
plerisque  parum  vel  nihil  mutatum  est. 

(2)  Paleogr.  gr.  p.  167.  inscr.  ancyr.  et  sq. 

(3)  Dict.  dipl.  de  Dora  de  Vaines,  t.  1.  p.  11.  et  t.  2.  pi.  53. 

(4)  Placé  immédiatement  après  la  mort  de  Cimon ,  ce  général 
Athénien  aussi  juste  que  vaillant,  44o,  av.  J.  C.  (v.  Paleogr. 
gr.  1.  1.  p.  i34  -  \bb.  )  tels  sont  le  T,  A  et  2. 

(5)  Sous  l'Archontat  de  Callislrate.  264  av.  J.  C.  ;  tel  est  le  S. 


(  m  ) 

donlens  (557);  quelques-uns  paraissent  même  anté- 
rieurs ou  se  rapprochent  des  inscriptions  du  tems  de 
la  guerre  du  Péloponèse  (1). 

Le  sigma  qui  dénote  une  grande  antiquité  (2),  pré- 
sente la  forme  de  l'arc  scytliique,  telle  qu'elle  commença 
d'être  en  usage  a  Athènes  des  teins  du  poète  Aga- 
thon  (5) ,  vers  la  o,ome  Olympiade  (420  av.  J.  C).  Le  thêta 
et  les  autres  caractères  s'accordent  également  avec  la 
description  que  fait  cet  auteur  du  nom  de  Thésée  (4)» 

(1)  45i  -  4o4.  tels  sont  en  quelques  endroits  le  K.  et  N.  ;   E  et 
A.  Voyez  l'inscription  de  Baudelot  et  Pal.  gr.  p.  i4i.  et  i35. 

(2)  Agathon  ,  dans  la  tragédie  de  Telephe,  décrivant  le  nom  de 
Thésée  : 

2KY0IKÎ2TE  TOSft  TPITON   HN   nPOSEMGEPES. 

»Le  troisième  (caractère)  était  semblable  à  un  arc  scythique.'* 

C'est  également  la  figure  du  M,  qui  dans  toute  l'étendue  du 
monument  ne  diffère  du  S  que  par  sa  position. 

Suivant  la  paléographie  grecque,  cette  forme  du  2  se  voit  sui- 
des marbres  et  des  médailles  d'un  haute  antiquité  :  In  quibus- 
dam  marmoribus  et  nummis  pervetustis  ,  ubi  lineœ  admodum 
diductœ  visuutur  (  Montf.  p.  35-j.  ).  On  la  retrouve  quoiqu'in- 
forme  dans  l'inscription  de  Sigée ,  (V.  Chishull,  antiquitates 
asiaticae,  pag.  21.)  ,  et  dans  celle  de  Melos  qu'on  rapporte  aux 
tems  héroïques. 

Du  tems  d'Euripide  (vers  442)  elle  se  rapprochait  de  l'S  latin, 
ce  que  cet  auteur  exprime  en  disant  quelle  est  semblable  à  une 
boucle  de  cheveux,  ou  à  un  repli  tortueux. 

froa-'zpw&oc,  t/ç  ,   àç   'uTiiyntvoç.   (Ath.  loc.  infra  cit.) 

(3)  Agathon,  poète  tragique,   disciple  de  Socrate  et  contempo- 
rain d'Aristophane.    Voyez  Suidas  et  les  notes  de  Kuster,   t.  U 
p.  18.  Fabricius  biblioth.  gr.  lib.  2.  c.  19.  t.  2.   p.  66t. 
(4)    yp<*-P',<;  «  TrpMToç  jjv  petréftÇccMs  kukXoç  0 

ôpSot-re  xxvoteç   i^vyuf^tvoi   ouo  ,  H 

G-KvSlxâlTS    TO^ù)    Tf)t70*    î;V    7T  pore[^lp£p£Ç.  2 

e7T£i7ci  rpicàovç   nXciym  r,v  vpoy.cty.evoç ,  E 

i&'   É»4S  T5  y.xvôvog  yo-œv  ifyya/xevoi  euo.  T 

o7T£fl  as  TpiTov  r,v  y-rM  lîXivlauov  7rct/Mv.  2 

»  Le  premier  (caractère)  est  un  cercle  avec  un  point  au  centre  et 


(  585  ) 

D'un  autre  coté,  l'inscription  est  postérieure  à  l'ar- 
chontat  d'Euclide  (4o5),  sous  qui  les  Athéniens,  par 
un  décret  public,  adoptèrenl  l'alphabet  Ionique,  dis- 
posé a  Samos  par  Callistrate  (i),  puisque  ce  ne  fut 
qu'alors  qu'ils  commencèrent  a  employer  les  lettres  in- 
ventées par  Simonide  (2),  le  H  et  le  *  et  les  longues  h  et 
fi:  l'H  se  prenant  auparavant  pour  une  aspiration  (5). 

L'ensemble  des  caractères  doit  donc  la  faire  rapporter 
a  la  première  moitié  du  lV,lie  siècle  avant  J.  C,  c'est- 
à-dire  aux  tems  de  Platon.  Bien  plus  ,  quelques-uns 
des  caractères  ,  tels  que  Tn  a  long  jambage ,  le  k  en 
forme  de  lambda  couché  et  traversé  d'un  long  trait, 
indiquent  une  main  accoutumée  a  tracer  les  ancien- 
nes lettres  Attiq ues  (4),  et  qui  n'en  abandonnait  l'usage 

deux  règles  droites  sout  conjointes,  le  troisième  est  semblable  à 
un  arc  de  scythie.  Ensuite  un  trident  est  couché  de  côté,  deux 
lignes  droites  sont  jointes  sur  une  seule,  et  tel  que  fut  le  troisième 
ainsi  est  le  dernier."  Q  Athen.  1.  10.  p.  224.  conf.  Mann.  Baudelot.  ) 

(1)  Plut,  vita  Aristidis.  Schol.  Eurip.  in  Phœnissis,  f  G88.  p. 
i36.  éd.  Barnes.  Suidas,  radian  à  £î-/u.eç ,  t.  5.  p.  279,  Euseb. 
chron.  éd.  Scaligeri,  :658.  p.  i34.  173.  Mediolani,  p.  343.  Venet. 
t.  2.  p.  217. 

L'ancien  alphabet  des  Grecs,  composé  originairement  de  seize 
lettres  (1/  se  confondant  d'abord  avec  Yo ,  comme  le  prouve 
l'inscription  d'Amyclée.  )  ,  et  quelques  épisemon  ou  chiffres,  à 
l'imitation  de  l'alphabet  Phénicierf,  fut  successivement  augmenté 
par  divers  savans;  mais  ce  ne  fut  que  sous  l'archontat  d'Euclide, 
que  les  Athéniens  adoptèrent  les  formes  et  le  nombre  de  carac- 
tères de  l'alphabet  actuel.  Tel  est  le  véritable  sens  du  passage 
d'Eusebe,  confirmé  par  tous  les  monumeus.  V.  Spon.  Mise.  er. 
antiq.  Insc.  p.  3i5.  etc. 

(2)  Suidas  en^ovi^jjç  ,  t.  5.  p.  3i5,  etc.  Ghishull.  mon.  asiat.  p.  8. 

(3)  V.  les  colonnes  d'Hérode  Atticus,  l'inscript.  de  Melos,  etc. 

(4)  Demosth.  in  Neœram,  p.  528.  Suidas  ÙTTtKHrpos ,  t.  1.  p.  070. 
confer    Herod.  1.  5.  c.  58. 

IXrae  et  Xmc  livraisons.  26 


(  586  ) 

qu'avec  peine  (1);  on  ne  peut  donc  se  dispenser  de 
rapporter  cette  inscription  au  commencement  du  qua- 
trième siècle  avant  J.  C. 

Enfin  ce  qui  achève  de  prouver  l'époque  que  nous 
lui  avons  assignée,  c'est  P«  mis  pour  la  diplithongue  «y 
ou  Mu  latin  ,  usage  qui  remonte  au  tems  les  plus  re- 
culés ,  comme  le  prouvent  les  auteurs  (2)  et  les  monu- 


(1)  Ce  sont  des  nuances  qu'il  faudrait  voir  sur  la  pierre  même 
ou  du  moins  dans  un  dessin  plus  étendu;  les  lettres  du  bas  du 
cippe  ne  paraissent  pas  les  moins  antiques,  puis  celles  de  la  se- 
conde et  troisième  ligue.  Celles  du  distique  sont  plus  régulières; 
et  leurs  formes  dans  ces  différentes  parties  du  monument  ne  sont 
pas  rigoureusement  les  mêmes.  Tel  est  l'E  qui  dans  le  distique  a 
la  forme  du  trident  couché,  tandis  que  dans  le  reste  de  l'inscrip- 
tion les  trois  ligues  sont  inégales.  Il  paraît  certain  cependant  que 
si  les  diverses  dédicaces ,  dont  la  réunion  sur  une  même  tombe 
n'est  nullement  sans  exemple  (*) ,,  ne  sont  point  exactement  du 
même  tems,  ces  différences  tiennent  plutôt  à  la  main  des  graveurs, 
puisque  la  plus  récente  ne  peut  guères  s'éloigner  du  tems  que 
nous  venons  de  fixer. 

(*)  Hesycli.  milesii xp*Tfl4  ad  calcem  Diog.  Laert.  i5g/(.  p.  4<j.  Montf.  diariam 
Italicum.  p.  4^4.  N.  g.  p.  43o.  Marmora  Oson.   LXXXVI.  LXIII.  LXIX.    etc. 

(2)  Voyez  le  témoignage  d'Achaeus  dans  Athénée,  1.  11.  ch.  5. 
p.  23i  ,  parlant  d'un  vase  où  »  la  dernière  syllabe  du  nom  de 
»  6~iovv<rx  ,  Bacchus,  se  trouvait  écrit  par  un  simple  o,  comme  par 
»  abbréviation.  Le  caractère  Y  manque,  d'autant  que  tous  les  an- 
»  ciens  employaient  Yo,  non-seulement  dans  sa  valeur  actuelle 
»  mais  encore  pour  exprimer  la  diphthongue."  Ov  était  même 
l'ancien  nom  de  cette  lettre  comme  on  le  voit  par  l'épi taphe  de 
Trasymaque  (Athen.  1.  10.  p.  224.) 

Touvo/tx.  êïia.  pu.  uXQtx..   trxv.  YM.   uXÇa.  %7.  OV.   eu». 

Mon  nom  est  ©PA£ÏMAXOS ,  ma  patrie  Chalcédoine,  et 
mon  art  la  sagesse. 

Omicron,  ut  vocatur  hodie  ,  est  inauditum  veteribus  (Jos. 
Seal,  anima d.  in  Chr.  Eus.  digr.  de  litt.  ionic.  p.  u5.  ) 


C  537  ) 

mens  (.1)  et  c'est  peut-être  ce  qui  a  fait  dire  a  Ausonc, 
que  les  Athéniens  ne  connaissaient  point  la  lettre  u  (2), 
Ce  n'était  point  une  différence  de  dialecte,  mais  une 
ancienne  manière  d'orthographier,  qui  ne  fut  jamais 
tout-a-fait  générale,  puisque  dans  l'inscription  d'Amy- 
clée  (5) ,  la  plus  ancienne  de  la  Grèce ,  comme  dans 
celle-ci ,  elle  n'est  pas  même  observée  dans  toute  l'éten- 
due du  monument  (4). 

Cet  usage  dont  on  ne  retrouve  plus  de  vestiges  sur  des 
inscriptions  de  Tarchontat  de  Neœchme  (820)  et  d'Eva?- 
nete  (555)  (5) ,  ni  sur  d'autres  fort  anciennes ,  n'était  point 
encore  entièrement  aboli  du  tems  du  poète  Philoxene  (6), 
ce  critique  rigide,  qui,  non  content  d'effacer  d'un  bout 
a  l'autre  une  pièce  que  le  Prince  lui  avait  donnée  a  cor- 

(1)  Voyez  l'inscription  de  Sigée,  (Chish.  p.  3i.  et  4.)  celle  du 
temple  d'Apollon  Amycléeu,  (Dipl.  des  Bened.  t.  1.  p.  616.  pi.  5. 
Mëm.  Ac.  t.  XVI.  p.  io4.  pi.  2.  et  3.  )  les  marbres  de  Baudelot, 
(Mise.  er.  ant.  p.  3i5.)  les  colonnes  d'Hérode  Atticus,  (  Paleogr. 
gr.  p.  i34.  Gruter  XXVII.  1.)  la  pierre  de  Delos  (Mon.  asiat.  p.  16. 
voyage  de  Tournefort,  1. 1.  p.  116);  enfin  la  plupart  des  inscriptions 
grecques  les  plus  anciennes,   tant  en  lettres  ioniques  qu'attiques. 

(2)  Hoc  tereti  argutoque  sono  negat  attica  gens  a. 
Cecropiis  ignota  notis  ferale  sonans  V. 

(3)  Mém.  Ac.  inscr.  t.   23.  in-4°.   planche   11.  p.  42i. 

(4)  Ins.  Amycl.  Mém.  Acad.  t.  23.  pi.  1.  et  2.  t.  16.  pi.  1.  p.  101. 
Vide  et  Uonarium  Ecphauti  in  insula  Melo  repertum,  nuovi  Mis- 
cellanei  Lucchesi  1773.  pi.  t.  2.  p.  48o,  etc. 

(5)  Voyage  de  Wheler,    en  Dalmalie,  liv.    2.   p.  433.  -  48o. 

Spon,  voyage,   tom.    2.  p.  187.-555,  etc.  hae inscriptiones 

rarae  sunt  propter  summara  antiquitatem.  Neaechmus  fuit  Archon 
anno  primo  CXV  Olympiadis,  U.  C.  434....  ut  vetustiores  sint 
inscriptione  romana  Duiliana.  Spon,  de  pag.  att.  p.  i3.  Le  notre 
se  rapporte  au  tems  de  Camille. 

(6)  Philoxeue ,  poète  dithyrambique  et  tragique.  V.  Fabr. 
bibl.  gr.  1.  2.  c.  19.  t.  1.  p.  <ï86. 


(  388  ) 

riger,  aima  mieux  (  suivant  quelques  auteurs)  retour- 
ner aux  carrières  que  de  voir  de  méchants  vers  re- 
vêtus de  son  approbation  (i)j  renfermé  dans  la  plus 
belle  de  leurs  cavernes  (2) ,  il  y  composa  le  Cyclope , 
son  meilleur  ouvrage  ,  puis  s'échappa  :  le  Roi  lui 
écrivit  pour  l'engager  a  revenir  a  la  cour, mais  Philoxene 
lui  fit  une  réponse  éminemment  laconique  ,  se  con- 
tentant de  remplir  sa  lettre  d'un  grand  nombre  de  ronds  : 

Una  fuit  quondam,  cjua  respondere  lacones, 
Littera ,  et  irato  ?-egi  placuere  negantes.  (5). 

Auson. 

Ce  qui  fit  donner  a  l'o  mis  pour  «  (c'est-a-dire  NON), 
le  nom  de  petite  lettre  de  Philoxene  (4). 

Cette  triple  valeur  d'un  même  caractère  (e,  u  et  «) 
devait  rendre  très-difficile  la  lecture  des  anciennes  lois  , 
gravées  sur  des  tables  (5)  et  des  colonnes  ou  cippes  (6). 
Aussi  le  décret  qui  ordonna  l'emploi  des  lettres  ioniques, 

(1)  Suidas  uKciys  (te.  t.  1.  p.  245.  e<«  Astra^u'aç.  t.2.p.35.Stobaei 
eerm.  i3.  p.  i45.  Voyez  cependant  lu  note  de  Kuhuius  sur  Elien 
loco  infra  citato  N.  7. 

(2)  Eliau.  var.  hist.  1.  12.  c.  44.  p.  799.  éd.  Gronovii  1701. 

(3)  Ce  fut  également  la  réponse  des  Spartiates  à  Philippe,  qui 
leur  demandait  s'ils  l'auraient  admis  dans  leur  ville:  f'ç  %û,fTi). 
OY  i*.iy«.  ypû-ipctv'jei;  .-  Us  se  contentèrent  d'écrire  un  grand  NON. 
Plutar.  de  garrulit.  Aus.  epist.  XXV. 

(4)  Suidas  £"/\o|Év«  ypccppotTiov ,    t.  3.  p.  606. 

(5)  Nommées  cyrbes  et  axones.  Plut.  Solou.  p.  92.  Pollux  lib. 
8.  c.  io.  s.  128.  v.  voc.  in  Harpoc.  et  etym.  magu.  Aul.  gel.  1.  2. 
c.  12.  Lysias  loc.  inf.  cit. 

(6)  La  dernière  partie  de  l'inscription  rappelle  en  quelque  sorte 
l'écriture  Kiouédon  ou  Columuaire  employée  à  cet  effet,  et  qu'on 
croit  aussi  ancienne  que  le  lionstrophédon.  Voyez  les  marbres 
d'Elgin  et  les  inscriptions  de  l'Opisthodomos  du  Parthenon.  (Ant. 
gr.  on  notice  sur  les  recherches  faites  en  Grèce,  p.  3o.  ) 


(589) 

fut-il  adopté  sur  la  proposition  d'Arcliinus  (i) ,  fils  d'Athe- 
née,  immédiatement  après  le  rétablissement  de  l'ancien 
gouvernement,  et  l'amnistie  qui  réunit  tous  les  citoyens 
d'Athènes  après  l'expulsion  des  trente  tyrans.  L'écri- 
vain (2)  Nicomaque  fut  chargé  de  transcrire  les,  lois  de 
Solon  dans  l'espace  de  quatre  mois ,  mais  cet  ouvrage 
difficile  ne  pût  être  achevé  qu'au  bout  de  six  ans  (5). 
On  peut  donc  fixer  avec  une  grande  prohabilité 
l'époque  de  cette  inscription  entre  4oo  et  38o ,  époque 
delà  mort  de  Philoxenesous  l'archontat  de  Pytheas  (4), 
ou  du  moins  très-peu  d'années  après  :  c'est-à-dire ,  vers 
le  tems  de  la  mort  de  Socrate  et  de  la  prise  de  Rome 
par  les  Gaulois  ;  elle  est  d'autant  plus  intéressante  pour 
les  archéologistes,  qu'elle  fournit  le  type  primitif  des 
lettres  adoptées  sous  l'archontat  d'Euclide  ,  et  même 
leurs  variations  successives  ,  sur  un  monument  qui 
forme  pour  ainsi  dire  la  nuance  entre  les  inscriptions 
en  caractères  actuels  et  celles  des  anciennes  lettres 
grecques. 

La  suite  à  un  autre  cahier. 


(1)  Orateur  distingué,  émule  de  Lysias.  V.  Plut,  de  vit.  dec. 
rhet.  p.  852.  855.  856. 

(2)  ypafiftc&Tevç.  C'était  proprement  l'écrivain  public,  le  secré- 
taire du  magistrat  j  chargé  de  garder  et  d'écrire  les  lois  et  les  dé- 
crets publics,  de  les  lire  au  sénat  et  au  peuple.  Il  y  en  avait  trois 
choisispar  le  sort.  V.  Potteri  archaeol.  p.  75.  Suid.  t.  1 .  p.  p.  4o/i ,  etc. 

(5)  Suidas  loc.  cit.  Lysias  in  Nicomachuru  ,  éd.  Taylor.  p. 
256.   sqq. 

(4)  Mann,  aruud.  ep.  67.  1.  82. 


(  59°  ) 


INSTRUCTION   PUBLIQUE. 


Extrait  du  Rapport  annuel ,  fait  par  S.  Exe.  le  Ministre 
de  l'Instruction  publique ,  aux  Etats-généraux ,  con- 
formément à  l'art.  226  de  la  charte  constitutionnelle. 


INSTRUCTION    PRIMAIRE. 

XXPRÈs  avoir  donné  quelques  détails  sur  les,  sommes 
employées  en  faveur  de  cette  branche  de  l'instruction  (1)  , 
S.  Exe.  s'exprime  en  ces  termes  : 

»  Les  écoles  pour  les  enfans  des  habitans  et  des  em- 
ployés militaires,  érigées  depuis  l'année  1818,  dans 
plusieurs  villes  des  provinces  méridionales,  présentent 
un  exemple  frappant  du  bien  que  peuvent  apporter 
les  soins  du  Gouvernement.  L'enseignement  primaire , 
dans  ces  provinces ,  était  très-négligé.  Si ,  dans  cette 
circonstance,  l'on  s'était  borné  a  recommander  l'intro- 
duction de  meilleures  méthodes ,  et  à  tâcher ,  par  des 
exhortations,  d'établir  ce  qui  n'existait  pas  encore ,  il  est 
bien  probable  que  l'on  eût  fait  peu  de  progrès  en  beau- 
coup d'années.  Au  lieu  de  suivre  cette  marche,  assez 
fréquemment  usitée ,  on  a  pris  une  route  qui ,  a  la  vé- 
rité ,  a  coûté  des  sacrifices  a  l'état ,  mais  qui  a  fait  at- 
teindre assez  promptement  le  but  :  c'est-à-dire  l'établis- 
sement et  la  propagation  d'un  système  d'enseignement 
primaire  amélioré." 

»  Déjà,  en  1817,  S.  M.  ordonna  l'érection  de  ces 
écoles ,  dans  lesquelles  on  devait  suivre  la  méthode  usi- 
tée en  Hollande.  Il  en  existe  maintenant  treize  de  cette 
nature:   dans  le  Brabant  méridional  deux,  a  Bruxelles 

(1)  Ces  sommes  montent  à  212,210-87  ilor.  ,011  512,691  -26  francs. 


(  59i  ) 
et  a  Louvain;  dans  le  Limbourg  trois,  a  Maestricht ,  n 
Venlo  et  a  Ruremondc  ;  a  Liège  une  ;  dans  la  Flandre 
orientale  une,  a  Garni;  dans  la  Flandre  occidentale  trois, 
a  Bruges,  a  Ostende  et  alpres;  dans  le  Hainautdeux,  à 
Mons  et  a  Tournai;  deux  enfin  dans  la  province  d'An- 
vers ,  l'une  dans  le  chef-lieu  et  l'autre  a  Malines." 

S.  Exe.  fait  sentir  ici  la  très-utile  influence  que  ces 
e'coles,  érigées  primitivement  dans  ces  villes ,  en  faveur 
desenfans  des  militaires,  ont  exerce'e  tant  sur  les  insti- 
tuteurs des  autres  classes ,  que  sur  la  jeunesse  de  ces 
classes  mêmes. 

»  L'intérêt  que  l'on  attache  a  l'amélioration  de  l'in- 
struction primaire  (poursuit  S.  Exe.  )  est  déjà  général 
dans  les  provinces  méridionales  ;  l'on  y  trouve  partout 
des  secours  et  nulle  part  des  contradicteurs. 

»  Les  écoles  dont  on  vient  de  parler  et  celle  sur-tout 
qui  est  établie  a  la  Cambre  près  de  Bruxelles  ont,  sans 
doute  ,  donné  le  premier  élan  a  ce  sentiment  public. 
Dans  le  Grand-Duché  de  Luxembourg,  l'influence  des 
écoles-modèles  s'est  fait  moins  sentir  ,  mais  partout 
ailleurs,  elles  continueront  encore  long-tems  a  produire 
le  plus  grand  bien,  parce  que  la  plupart  des  heureux 
effets   qu'elles  ont  amenés  ,   se  généraliseront  progres- 


sivement." 


Le  rapport  signale  quelques  contrées  où  l'instruction 
n'a  point  marché  dans  la  bonne  route ,  »  défaut  toléré 
jusqu'à  présent,  mais  qui  cessera  bientôt  lorsque  des 
inspecteurs  zélés  feront  tous  leurs  efforts  pour  conduire 
les  chefs  d'institution  des  communes  restées  en  arrière 
dans  des   écoles  bien  organisées." 

»  La ,  et  il  ne  paraît  être  question  que  d'un  seul 
district,  la,  il  faut  encore  en  grande  partie  jeter  les 
fondemens  d'un  meilleur  système  d'éducation ,  tandis 
qu'ailleurs  on  peut  travailler  à  l'achèvement  ou  a  l'a- 


(  M»  ) 

grandlssement  de  l'édifice.  Sous  ce  rapport,  il  existe 
deux  mémoires  remarquables  couronnés  récemment  par 
l'estimable  Société  du  bien  public,  (tôt  mit  van  9t  ttl- 
gemeen);  l'un  sur  les  causes  de  la  perte  et  de  l'oubli 
des  connaissances  acquises  dans  de  bonnes  écoles,  et 
sur  les  moyens  a  prendre  pour  obvier  a  ce  mal  ;  l'autre 
sur  la  bonne  organisation  des  petites  écoles  destinées 
aux  enfans  au-dessous  de  l'âge  de  6  ans.  L'expérience 
devra  nous  apprendre  jusqu'à  quel  point  ces  projets  peu- 
vent être  utilement  mis  en  usage.  On  a  déjà  fait  des  essais 
dans  la  ville  de  Leeirvvarden ,  pour  savoir  comment  on 
peut  entretenir  les  connaissances  acquises,  et  comment 
on  peut  le  mieux  conserver  ou  développer  les  principes 
de  science  et  de  vertu  chez  les  enfans  qui  ont  quitté 
les  écoles  primaires." 

ATHENEES,    COLLÈGES    ET    ÉCOLES    LATINES. 

»  En  général  on  peut  affirmer  que  l'enseignement 
s'améliore  progressivement  dans  les  athénées ,  les  collèges 
et  les  écoles  latines.  Il  se  trouve  a  la  vérité  plusieurs 
de  ces  établissemens,  sur-tout  les  plus  petits,  qui  lais- 
sent beaucoup  a  désirer  ,  mais  dans  la  plupart  des 
autres  les  progrès  sont  sensibles.  La  publication  de 
bons  livres  classiques,  de  même  qu'un  soin  assidu  dans 
la  formation  des  nouveaux  professeurs,  paraissent  être 
la  cause  de  cet  avancement.  Le  grec  et  les  mathéma- 
tiques sont  mieux  et  plus  généralement  enseignés  qu'au- 
paravaut;  mais  la  première  de  ces  études  est  cultivée 
avec  plus  de  fruit  dans  les  provinces  septentrionales, 
tandis  que  dans  les  provinces  méridionales  on  s'applique 
davantage  a  l'enseignement  de  la  seconde." 

»  Il  serait  a  souhaiter  que,  sans  nuire  a  la  connais- 
sance des  langues  anciennes,  on  pût  trouver  un  moyen 


(595  ) 

d'enseigner  a  fond  les  principes,  non-seulement  des  ma- 
thématiques, mais  encore  des  sciences  physiques.  Le 
grand  bien  que  les  jeunes  gens  en  retireraient  dans  la 
suite,  et  l'intérêt  de  la  société  dont  L'industrie  générale 
est  en  rapport  si  immédiat  avec  la  propagation  de  ces 
sciences,  paraissent  exiger  l'accomplissement  de  ce  vœu." 

UNIVERSITÉS. 

»  Lorsque  l'on  compare  le  nombre  d'étudians  dans 
les  universités,  d'après  le  tableau  ci-joint,  avec  celui 
des  années  précédentes,  on  aperçoit  une  augmentation 
notable." 

»  Les  bonnes  études  et  la  conduite  morale  des  jeunes- 
gens  ne  paraissent  pas  avoir  été  moins  dignes  d'éloges 
que  ci-devant,  suivant  les  témoignages  et  les  rapports 
divers  que  l'on  a  reçus  a  cet  égard.  Cependant,  les  dif- 
férentes branches  ne  peuvent  être  cultivées  partout  avec 
le  même  succès,  et  les  bâtimens  et  les  cabinets  ne  peu- 
vent non  plus  avoir  dans  chaque  université  le  même 
degré  de  splendeur." 

»  Les  rapports  précédons  ont  déjà  fait  connaître  en 
grande  partie  ce  qu'il  y  avait  de  plus  remarquable  sons 
ce  point  de  vue.  Néanmoins  les  particularités  suivantes 
ne  laissent  pas  de  mériter  l'attention.  A  Louvain  on 
fait  les  eilorts  les  plus  louables  pour  former  de  bons 
philologues,  qui  puissent  un  jour  faire  l'ornement  des 
athénées  et  des  collèges  ,  et  devenir  peut-être  profes- 
seurs d'universités.  La  clinique  pour  les  accouchemens 
a  reçu  une  extension  très-utile.  L'orangerie  et  les  serres 
du  jardin  botanique  peuvent  être  placées  au  nombre  des 
beaux  mouumens  du  règne  du  Souverain ,  tant  a  cause 
de  l'architecture,  que  pour  la  forme  extraordinaire  des 
serres  qui  sont  circulaires  et  garnies  de  tous  côtés  de 
vitres,  de  sorte  que  les  plantes  se  trouvent,  pour  ainsi 


(  5y4  ) 

dire,  exposées  en  plein  air.  Le  froid  excessif  du  mois  de 
Janvier  1823,  ne  leur  a  fait  e'prouver  aucun  dommage." 
»  A  Liège  on  s'applique  particulièrement  a  l'histoire 
moderne,  conside're'e  sous  un  point  de  vue  politique  ;  les 
études  du  droit  sur-tout,  ainsi  que  quelques  autres  par- 
ties y  obtiennent  le  plus  grand  succès.  La  médecine  légale 
y  est  traitée  avec  un  soin  plus  qu'ordinaire.  A  Gand,  la 
ville  poursuit  l'achèvement  du  superbe  bâtiment  acadé- 
mique j  ses  cabinets  commencent  peu  a  peu  a  s'orner  de 
collections  intéressantes.  Des  protecteurs  de  l'université 
rassemblent  a  leurs  propres  frais  un  cabinet  de  médailles 
et  montrent  par   cet  exemple  l'union  qui  ,   dans  une 
ville  amie  des  beaux-arts ,  peut  exister  entr'eux  et  les 
sciences.  L'enseignement  des  mathématiques  y  est  ex- 
cellent ,  plusieurs  bons  élèves  sont  déjà  sortis  de  cette 
école.  L'université  de  Leyde -peut,  a  juste  titre,  se  glori- 
fier de  conserver  intacte  son  ancienne  réputation.  La 
littérature    orientale    y   prend    un   nouvel   essor,    mais 
l'étude  approfondie  des  lettres,  n'empêche  pas  que  les 
sciences  physiques  n'y  aient  leur  siège  ;  avantage  que 
l'on  doit   aux  riches    cabinets   d'histoire  naturelle    et 
d'autres  parties  scientifiques.    Cette  université  possède 
des  collections  précieuses  pour  les  beaux-arts  ;  elles  doi- 
vent, pour  la  plupart,  leur  origine  a  des  legs  faits  par 
des  particuliers  ;    les   curateurs   et  professeurs  y  don- 
nent., depuis  quelque  tems,  des  soins  assidus  pour  les 
faire  servir  a  l'utilité  des  élèves  et  du  public." 

»  A  Utreckt  ,  l'étude  de  la  littérature  grecque  et 
latine  fleurit  par  excellence.  Cette  université  possède 
aussi  une  collection  d'instrumens  de  physique  plus  belle 
et  plus  complète  qu'ailleurs;  et  l'on  doit  être  satisfait 
qu'elle  soit  employée  a  des  expériences  intéressantes, 
qui  ont  déjà  servi  plusieurs  fois  a  agrandir  la  science." 

»  A  Groninjue ,  on  est  occupé  actuellement  a  élever 


(  5y5  ) 

un  nouveau  bâtiment  consacre  spécialement  a  renfermer 
les  collections  d'histoire  naturelle.  Les  frais  en  sont  en 
grande  partie  couverts  par  la  ville.  La  régence  prouve, 
par  cette  libéralité  et  par  le  subside  qu'elle  accorde  an- 
nuellement a  l'hôpital  clinique ,  le  prix  qu'elle  attache 
a  la  possession  d'une  université  bien  constituée." 

»  Lorsque  l'on  considère  maintenant  qu'il  existe 
encore  a  Amsterdam  un  athénée  très -bien  organisé, 
qu'il  s'en  trouve  un  autre  a  Deventer,  a  l'égard  duquel 
on  a  reçu  des  avis  très -favorables,  on  doit  avouer 
que  notre  Royaume  offre  assez  d'occasions  de  recevoir 
une  bonne  instruction  dans  les  lettres  et  dans  les  scien- 
ces ;  et  l'heureux  emploi  que  l'on  a  fait  de  ces  établis- 
semens,  confirme  la  vérité  de  ce  que  S.  M.  le  Roi  a  dit 
à  l'ouverture  de  la  session  annuelle  des  Etat-généraux  : 
»  La  continuation  des  bonnes  études  et  la  propagation 
des  avantages  de  l'instruction  primaire  sont  évidens." 

ETAT   relevé  du  nombre    des  Étudians  dans  chacune 
de  nos  Universités ,  classés  par  facultés. 


Scie  ne. 

Philo- 

Universités. 

Théo- 

Droit. 

Méde- 

natu- 
rell.  et 

sophie 

Total. 

Observa- 

logie. 

cine. 

mathè- 
matiy. 

et 
Lettres 

vations. 

Louvain. .  . 

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290 

N.B.  Comme  les  coins  reprennent  quelques  semaines  plus  tard  dans 
les  Provinces  méridionales,  il  eu  résulte  que  quelques  étudians  ues'y 
reudeut  que  dans  les  premiers  jours  du  mois  de  Novembre,  et  que, 
par  conséquent,  leurs  noms  ne  sont  pas  portés  sur  les  listes  à  adresser 
au  Ministère  avant  cette  époque.  Cette  circonstance  rend  raison  d'une 
légère  augmentation  de  nombre  dans  ces  Provinces;  et  c'est  ainsi 
qu'à  Gand  le  nombre  des  étudians  monte  actuellemeut  à  3oo. 


(596) 


BULLETIN 
DES  ACADÉMIES  ET  SOCIÉTÉS  SAVANTES. 


SOCIETE  ROYALE  D  AGRICULTURE  ET  DE  BOTANIQUE  DE  GAND. 


Exposition    d'Hiver. 


Séance  du  5  Janvier  1824. 

Arrêté,  que,  conformément  a  l'autorisation  contenue 
dans  la  lettre  de  M.  le  baron  Van  de  Capellen ,  un  des 
secrétaires  d'état.,  en  date  du  i4  Avril  i8i5,  la  société 
usera,  pour  le  salon  prochain,  de  la  faveur  qui  lui  est 
accordée  d'exposer  des  plantes  au  nom  de  Sa  Majesté  : 

Que,  pour  exprimer  ses  sentimens  d'affection  et  de 
dévouement  a  la  Maison  Royale  des  Pays-Bas ,  la  Société 
exposera  des  plantes  en  fleurs  au  nom  de  leurs  AA.  RR. 
le  Prince  héréditaire  et  le  Prince  Frédéric  d'Orange. 

Que  les  plantes  couronnées  aux  expositions  précé- 
dentes, pourront,  après  un  intervalle  de  cinq  années, 
se  présenter  de  nouveau  au  concours  ; 

Que  les  sociétaires  étrangers,  ainsi  que  les  régnicoles 
qui  ne  résident  pas  dans  un  rayon  de  quatre  lieues  de  la 
ville,  pourront  être  représentés  au  salon  par  la  Société 
ou  par  des  Membres  résidans. 

Qu'il  sera  accordé  annuellement  une  médaille  d'hon- 
neur a  la  plante  la  plus  nouvelle  ou  la  plus  rare,  ex- 
posée dans  les  salons  d'été. 

Que  pareille  médaille  sera  décernée  aussi  tous  les  ans 
a  la  même  époque,  a  la  plus  riche  collection  de  plantes 
nouvelles,  qui  se  fera  distinguer  par  sa  belle  culture, 


(%  ) 

Qu'une  médaille  d'honneur  sera  remise  au  capitaine 
du  navire  le  Triton,  Jean  Thomas  Coclinck,  de  Bruges, 
de  retour  de  la  mer  d'Azoff,  a  Ostende,  avec  le  bouc, 
les  chèvres  du  Thibet  etlebe'lier  de  Circassie,  offerts  a 
Sa  Majesté,  par  M.  De  Lescluze  père,  de  Bruges. 
Séance  du    12  Janvier. 

Arrêté  :  qu'en  remplacement  des  membres  décédés , 
et  pour  compléter  les  différentes  sections ,  le  titre  de 
membre  correspondant  sera  déféré  a  M.  /.  B.  Huzard 
fils ,  médecin  vétérinaire,  a  Paris,  et  a  M.  P.  de  Les- 
cluze père,  négociant-armateur,  a  Bruges. 

Que  celui  de  membre  associé  le  sera  aux  cultiva- 
teurs, botanistes  et  amis  de  la  science,  dont  les  noms 
suivent  :  M.  Charles  Beelaert ,  amateur  fleuriste  ; 
M.  Fr.  vander  Haeghen,  jardinier  fleuriste;  M.  Louis 
de  Buck  fils ,  amateur  fleuriste;  et  M.  Charles  Tyd- 
gadt ,  amateur  fleuriste,  a  Gand. 

Que  des  arbustes  ou  des  fleurs  seront  exposés  en 
l'honneur  des  salons  de  Harlem,  Tournay ,  Louvain, 
Bruxelles  et  Courtrai,  ainsi  que  pour  quelques  membres 
étranger?  et  régnicoles ,  savoir  :  M.  Noisette ,  cultivateur , 
pépiniériste  et  fleuriste,  a  Paris;  M.  Nées  von  Eesen- 
beek ,  professeur  de  botanique ,  a  Bonn  ;  M.  Séraphin 
van  Caneghem ,  vice-consul  a  Canton  ;  et  M.  De  Les- 
cluze  père,  a  Bruges. 

Enfin  ,  qu'un  arbre  funéraire  sera  exposé ,  en 
mémoire  de  trois  sociétaires  décédés,  depuis  le  dernier 
salon  d'été,  et  qui  sont:  M.  Dekin,  ancien  directeur  du 
jardin  botanique  a  Bruxelles  ;  M.  le  docteur  De  Folder, 
de  Ghistele  ;  M.  Broager ,  horticulteur  a  Hoogly ,  en 
Bengale. 

Séance  du  6  Février  1824. 

Le  Lilium   tigrinum  était  la  plante  dont  l'industrie 


(%8) 

des  cultivateurs  devait  offrir  la  fleur  épanouie,  a  l'épo- 
que précise  du  6  Février. 

L'an  passé,  cette  plante,  quoique  d'une  vigoureuse 
végétation,  n'avait  pas  rempli  toutes  les  conditions  du 
concours  ;  les  cultivateurs  ont  été  plus  heureux,  en  1 824 , 
et  la  médaille  a  été  décernée  au  ]N°  255,  cultivé  dans 
la  collection  de  M.  le  baron  Du  Bois  de  Vr  oey  lande  ^ 
a  Maria-Leêrne. 

Le  prix  de  Belle  Culture  a  été  adjugé  au  Kamellia 
japonica,  Jl.  ruh.  pi.,  N°35i,  cultivé  par  M.  C.  Lunch* 
man ,  a  Gand. 

Le  superbe  Crinum  amàbile ,  de  M.  Caters-De  JVolf* 
cultivé  dans  sa  collection  a  Bercbem  près  d'Anvers, 
l'aurait  probablement  emporté  sur  la  plante  couronnée  ; 
mais  il  avait  trop  souffert  dans  sa  floraison.  La  médaille 
en  bronze  lui  a  été  unanimement  votée. 

ISEnkiantkus  quinquejlora  ,  N°  684 ,  de  M.  Josse 
Verleeuwen,  cultivateur,  fleuriste  et  pépiniériste  a 
Gand,  et  le  Primula  chinensis ,  N°  690,  exposé  par 
M.  P.  Verleeuwen  fils ,  ont  obtenu  les  Accessit ,  a  la 
majorité  des  scrutins. 

Les  autres  Plantes  ou  Arbustes  qui  ont  été  admis  a 
entrer  dans  la  lice,  et  emportent  par  la  nature  même 
de  cette  distinction ,  les  honneurs  de  la  mention  hono~ 
rable ,  sont  les  Plantes  ou  arbustes  désignés  d'après  le 
numéro  d'ordre  de  la  notice  des  plantes  exposées,  sans 
que  MM.  les  Juges  entendent  y  attacher  la  moindre 
idée  de  priorité  ou  d'infériorité. 

N°     8g  Kamellia  japonica,  fl.  str.pl.  de  M.  Biirggraeve  de  Gand. 
iki  Erica  ardens ,   de  la  même   collection. 
i55  Amaryllis  brasiliensis ,  de  M.  N.   De  Cock  ,  collection 

de  Loochristi. 
254  Protea  molli  fera  ,  collection  de  M.  le  baron  Du  Bois  de 

Vroey lande  ,  à  Maria  -  Leèrne 
4i3  Brachizema  latifolia,  collection  de  M.L.  Papeleu ,  à  Gand. 


(  399) 

55o  Coodyera  discolor,  de  M.  Van  Casse! ,  cultivateur  bo- 
taniste à  Gand. 
55i   Cymbidium  hyacinthinum ,  de  la  même  collection. 

602  Strelitzia  reginœ ,   de  la  collection  de  M.   Vande  Woes- 

tyne  Kerremans,  à  "Wondelghem. 

603  Strelitzia  reginœ  ,  varictas ,   de  la  même  collection. 
671  Beaufortia  decussala,   collection  de  M.    Van   Ticgheui 

Vander  Meersch  ,  à  Gendbrugge. 
694  Pœonia  suffruticosa,  de  M.  Verleeuiven   fils. 
706  Protea  speciosa,  collection  de  M.  H.  Vilain  XIIII ,  à 

Wetteren. 
708  Epacris  grandiflora ,  de  la  même  collection. 

La  Société  a  encore  a  déplorer,  depuis  la  séance 
du  12  Janvier,  la  perte  d'un  de  ses  membres,  M.  Ch. 
de  Limnander,  commissaire  de  S.  M.  pour  le  district  de 
Gand. 

Après  avoir  entendu  le  Secrétaire,  il  a  été  proposé 
d'admettre  au  nombre  des  membres  correspondans  : 

M.  John  Torrey,  premier  vice -président  du  lycée 
d'histoire  naturelle  à  New-York,  en  reconnaissance  de 
l'envoi  fait  par  lui  du  N°  1.  d'une  Flore  des  États-Unis; 

M.  Abraham  Halsey ,  du  même  lycée,  pour  son  Ta- 
bleau synoptique  des  lichen  des  environs  de  New-Yorck ; 

M.  le  baron  De  Grutier,  membre  de  l'académie  royale 
d'agriculture  de  Munich  j  (1) 

M.  Lèandro  de  Sacramento ,  professeur  d'agriculture 


(1)  La  Société  vient  d'apprendre  que  M.  De  Grimer  a  eu  le  mal- 
heur, en  se  rendant  à  une  de  ses  fermes,  non  loin  de  Munich, 
d'être  renversé  par  ses  chevaux,  et  qu'il  est  mort  des  suites  de  cet 
accident;  cet  homme  aimable  qui,  lors  de  son  séjour  en  Flandre, 
se  plaisait  à  visiter  nos  institutions  d'Agriculture  et  de  Botanique, 
se  les  rappelait  dans  sa  patrie,  et  ne  désirait  rien  tant  que  d'être 
associé  à  nos  travaux,  et  de  conserver  un  souvenir  de  la  ville  de 
Gand;  généralement  regretté  dans  sa  patrie,  il  ne  l'est  pas  moins 
de  tous  les  amis  de  l'Agriculture  et  de  la  Botanique. 


(  4oo  ) 

a  Rio  Janeiro,  de  qui  la  Société  a  reçu  de  nombreux 
envois  de  graines  et  de  semences  du  Brésil. 

Le  Secrétaire,  se  réserve  de  donner  clans  la  séance  pu- 
blique d'été  le  détail  des  différens  mémoires  envoyés  a  la 
Société ,  et  d'exprimer  en  cette  réunion  aux  Sociétés 
correspondantes  et  Membres  associés ,  qui  enrichissent  le 
domaine  de  l'Agriculture  ou  de  la  Botanique,  les  sen- 
timens  d'estime  et  de  reconnaissance  de  la  Société. 

Parmi  plusieurs  envois  faits  a  la  Société ,  il  men- 
tionne particulièrement  : 

La  première  Centurie  de  PAgrostologie  Belgique,  re- 
cueillie par  M.  P.  Michel,  jardinier,  botaniste  et  pé- 
piniériste a  Nessonvaux ,  et  revue  par  le  M.  docteur  Le 
Jeune ,  de  Verriers.  ; 

Une  collection  de  plantes ,  recueillies  par  M.  Jean 
Rottiers ,  d'Anvers,  dans  les  environs  de  New-York. 

La  séance  a  été  suivie  du  Banquet  d'usage,  où,  sui- 
vant les  dispositions  du  règlement,  les  Magistrats  et 
les  citoyens  les  plus  recommandables ,  se  trouvaient 
assis  a  côté   des  plus  simples  cultivateurs. 

Parmi  les  Députés  des  Sociétés  correspondantes,  on 
distinguait  MM.  Du  Mortier-Rutteaii,  de  Tournay; 
/.  le  Maire,  de  la  même  ville,   etc. 

Le  banquet  s'est  terminé  par  les  couplets  suivans, 
chantés  par  M.  Gabriels ,  sur  un  air  de  sa  composition. 

COUPLETS. 
1. 

Je  ne  chanterai  pas  les  Fleurs, 
Dont  j'admire  ici  l'assemblage; 
Les  vers  même  les  plus  llatteurs 
Ne  valent  pas  votre  suffrage. 
L'éclat  de  si  rares  beautés 
Est  au-dessus  de  la  louange  ; 
]\lais,  si  vous  me  le  permettez, 
Je  chanterai  la  Fleur  A' Orange. 


(  tel  ) 

•2. 

On  dispute  aussi  sur  J,s  Fleurs; 
L'un  ne  veut  que  des  Fleurs  de  serre, 
L'autre,  pour  les  belles-  couleurs, 
N'estime  «pie  la  pleine  terre  : 
Chacun  croit  seul  avoir  raison: 
Pour  moi,  qui  chéris  la  Patrie, 
Je  ne  voudrais,  dans  ce  Salon, 
Voir  que  des  Fleurs  d'Orangerie. 

3. 

Pour  trouver  des  Fleurs  de  mon  goût 

Et  m'arrêter  sous  leur  ombrage, 

J'ai  parcouru,  visité  tout. 

De  l'Euphrate  jusques  au  Tage  ; 

L'Impériale  eût  ses  amis; 

Aujourd'hui,  par  un  sort  étrange, 

Ou  préfère  les  Fleurs  de  Lys  ; 

Moi  ,  j'aime  mieux  la  Fleur  d'ôràUge. 

4. 

On  trouve  ici  tous  les  états 
Confondus  sur  les  mêmes  listes. 
On  y  trouve  des  Magistrats, 
Des  Cultivateurs ,  des  Artistes  ; 
Ou  y  trouve  des  Avocats, 
Des  Jardiniers,   des  Botanistes; 
Moi,  qui  ne  les  distingue  pas, 
Je  n'y  vois  que  des  Orangistes. 

5. 

Vous  qui  croyez  que  le  bonheur 

Consiste  à  changer  de  régime , 

Repoussez  une  vaine  erreur 

Qui  inarque  un  état  cacochvme  : 

On  connaît  ce  désir  trompeur 

Qui  croit  toujours  gagner  au  change  : 

C'est  une  espèce  de  vapeur 

Qu'on  guérit  par  la  Fleur  d'Orange. 


Le  Gouvernement  ayant  fait  venir  des  graines  d'ar- 
bres de  l'Amérique  septentrionale,  dont  la  culture  en 
grand  pourrait  être  utile  dans  notre  pays,  a  Lien  voulu 
en  envoyer  une  partie  a  M.  Fan  Iluhhem ,  président 
de  la  Société,  pour  en  faire  la  distribution  aux  culti- 
vateurs dans  les  provinces  méridionales.  Tous  ces  arbres 

ÏXmc  et  Xme  livraisons.  27 


(    402    ) 

peuvent  croître  en  plein  air  aussi  bien  dans  nos  pro- 
vinces que  dans  leur  sol  natal.  Les  graines  ont  été  re- 
cueillies avec  soin  au  mois  d'Octobre  et  Novembre  der- 
niers ,  et  ont  été  apportées  de  New-Yorck  a  Rotterdam 
en  27  jours. 

La  plupart  de  ces  arbres  sont  dans  nos  Jardins  Bota- 
niques et  dans  quelques  campagnes  ;  mais  jusqu'ici  on 
ne  les  a  cultivés  qu'en  petit  nombre ,  et  plutôt  pour  l'agré- 
ment de  leur  feuillage  que  pour  l'utilité  de  leur  bois. 
Le  but  du  Gouvernement  est  de  propager  la  culture  de 
ces  arbres  en  grand,  et  la  Société  est  persuadée  que 
l'on  voudra  bien  contribuer  a  seconder  une  si  louable 
intention.  Si  ce  premier  essai  réussit,  comme  il  n'y  a 
pas  a  en  douter ,  la  Société  sollicitera  S.  Exe.  le  Ministre 
de  l'instruction  publique,  des  colonies  et  de  l'industrie 
nationale,  de  faire  venir  successivement  des  graines  d'un 
grand  nombre  d'autres  arbres  étrangers,  et  c'est  ainsi 
que  notre  Patrie,  déjà  si  distinguée  par  une  Agriculture 
excellente,  cultivera  bientôt  avec  le  même  succès  tous 
les  arbres  utiles  et  agréables. 

Espèces  de  graines  d'arbres  de  l'Amérique  septen- 
trionale, dont  la  distribution  a  été  faite  par  le  Prési- 
dent de  la  Société  : 

Quercus  rubra.  Chêne  rouge.  —  Qaercus  nigra. 
Chêne  noir.  —  Quercus  prinus.  Chêne  châtaignier.  — 
Juglans  nigra.  Noyer  noir.  —  Juglans  cinerea.  Noyer 
cendré.  —  Juglans  alba.  Noyer  ikori.  —  Juglans  oli- 
vœformis.  Noyer  pacanier.  —  Fagus  castanea.  Le  châ- 
taignier d'Amérique.  —  Tilia  Americana.  Tilleul  d'A- 
mérique. —  Tilia  tomentosa.  —  Acer  rubrum.  Erable 
rouge.  —  Acer  striatiwu  Erable  jaspé.  Acer  saccha- 
rinum.  Erable  a  sucre. 


(  4oJ) 

hôtes  sur  la  qualité  du  bois  de  ces  arbres  ,  tirées  de 
/'Histoire  des  arbres  et  arbrisseaux  ,  par  M.  Desfon- 
taines. Paris,  1809.  1  vol.  in-ft.  Un  des  meilleurs 
ouvrages  que  nous  ayons  sur  cet  objet. 

Le  Chine  rouge  parvient  à  la  hauteur  de  3o  à  40  mètres.  Cet 
arbre  l'un  des  plus  majestueux  dts  États-Unis,  mérite  délie  cul- 
tivé dans  nos  parcs  et  nos  forêts -,  son  bois  est  employé  au  char- 
ronnage  et  aux  constructions.  Son  écorce  fournit  un  tan  plus 
actif  que  nos  chênes.  Il  se  plait  dans  les  terrains  sablonneux 
et  froids.  Sou  accroissement  est  très-prompt. 

Le  Chêne  noir  ne  s'élève  guère  qu'à  3o  pieds  ;  il  a  le  tronc 
tortueux,  l'écorce  raboteuse  et  d'une  couleur  brune;  son  bois  est 
cassant  et  ne  peut  servir  qu'au  chauffage. 

Le  Chêne  châtaignier  est  un  arbre  d'une  grande  beauté  ,  qui 
s'élève  jusqu'à  80  et  90  pieds  ;  sou  bois  est  d'un  bon  usage  et 
employé  au  charronnage. 

Le  Noyer  noir  est  un  arbre  de  i5  à  16  mètres,  dont  le  bois 
est  employé  à  beaucoup  d'usages. 

Le  Noyer  cendré.  Son  bois  est  d'un  très-bon  usage  ;  il  parvient 
à  la  même  hauteur  que  le  précédent. 

Le  Noyer  blanc  ou  Ikori  parvient  à  une  grande  élévation.  Son 
bois  est  très-recherché;  on  en  fait  des  essieux,  des  manches  d'ou- 
tils, des  engrenures  de  roue  de  moulin,  des  instrumens  de  labou- 
rage, des  cercles  de  tonneaux,  et  il  est  excellent  polir  le  chauff.ge. 

Le  Pacanier  produit  des  noix  d'un  goût  agréable  et  donne  de 
très-bonne  huile.  Son  bois  est  dur,  coloré,  d'un  grain  très-fin, 
et  on  en  fait  de  fort  beaux  meubles.  Le  Pacanier  mérite  d'être 
cultivé  et   multiplié  dans  notre  pays. 

Le  bois  de  Y  Erable  rouge  est  fort  recherché  en  Amérique;  on 
eu  fait  des  meubles,  des  lits,  des  chaises  et  autres  ouvrages.  Son 
bois  est  très-sonore:  on  en  fait  en  Angleterre  les  tables  de  piano 
et  d'autres  iustrumens  de  musique.  Il  se  plait  dans  des  terrains 
frais,  ainsi  que  le  suivaut. 

Le  bois  de  l' Erable  à  sucre  est  ferme,  veiné,  propre  à  des 
ouvrages  de  tour  et  de  menuiserie.  On  en  fait  des  meubles  et 
des  montures  de  fusil.  On  tire  de  cet  arbre  en  Amérique  une 
grande  quantité  de  sucre. 

L Erable  jaspé  est  fort  recherché  à  cause  de  sou  écorce,  qui  est 
agréablement  veiné  de  vert  et  de  blanc. 


(4<4) 


ACADEMIE  ROYALE  DE  DESSIN  ,  PEINTURE  ,  SCULPTURE 
ET   ARCHITECTURE   DE   GAND. 


Concours  et  Exposition  de  1826. 

PEINTURE.    —   HISTOIRE. 

Pour  les   Maîtres  de  l'Art. 

s^ujet.  —  Hébéy  brillante  de  jeunesse,  de  grâce  et  de 
beauté,  se  tient  debout  sur  un  nuage,  au  milieu  des 
airs,   et  présente  une  coupe  a  l'aigle  de  Jupiter. 

La  figure  de  grandeur  naturelle. 

Le  perfectionnement  de  l'Art  est  le  but  que  V Acadé- 
mie se  propose;  elle  exige  en  conséquence  la  plus  grande 
beauté  dans  les  formes ,  la  perfection  dans  l'exécution 
et  dans  toutes  les  parties  de  l'Art  ;  le  prix  sera  une 
couronne  de  laurier  alexandrin,  une  médaille  d'honneur 
et  .une  indemnité  de  six  cents  florins  des  Pays-Bas. 

Pour  les   Elèves. 

Sujet.  —  Le  comte  d'Egmont,  un  instant  avant 
d'aller  a  la  mort ,  écrit  a  Philippe  II.  une  dernière 
lettre  dans  laquelle ,  en  lui  rapellant  ses  services ,  il  lui 
recommande  sa  femme  et  ses  nombreux  enfans. 

La  scène  se  passe  dans  un  salon  de  la  maison  du  Roi , 
sur  la  grand'place  a  Bruxelles,  devant  laquelle  l'écha- 
faud  était  dressé;  deux  officiers  des  gardes  espagnoles 
viennent  chercher  l'illustre  victime  ;  d'Egmont  s'est 
levé  et  donne  la  lettre  a  Rythovius  ,  évêque  d'Ypres, 
en  le  priant  de  la  faire  parvenir  au  Roi;  Sabine  de 
Bavière,  sa  femme,  assiste  a  cette  scène  déchirante. 


(4o5) 

Ces  cinq  figures  sont  de  rigueur;  chacune  aura  au 
moins  une  demi-aune  des  Pays-Bas  de  proportion  (1). 

Le  prix  sera  une  médaille  d'honneur  et  une  indem- 
nité de  trois  cents  florins  des  Pays-Bas. 

Pour  les  Dames. 

Comme  depuis  quelque  tems  sur-tout,  nombre  de 
Dames  et  de  Demoiselles,  s'adonnent  a  la  culture  des 
Arts  du  Dessin,  et  que  même  plusieurs,  sur  les  traces 
ÏÏAngelica  Kauffman  et  de  Madame  Le  Brun,  culti- 
vent, avec  succès,  la  Peinture  historique,  l'Académie 
a  cru  devoir  encourager  leurs  efforts  ;  elle  propose  un 
concours,  auquel  elles  sont  spécialement  et  exclusive- 
ment appelées ,  sans  néanmoins  qu'aucune  d'elles  soit 
exclue  de  la  faveur  de  concourir  pour  les  autres  prix. 

Sujet:  »Une  Nymphe  de  la  suite  de  Diane  s'est  éga- 
rée dans  un  bois  ;  succombant  a  la  fatigue ,  elle  s'est 
endormie  ;  son  chien  veille  a  ses  côtés." 

La  figure  de  grandeur  naturelle. 

Le  prix  sera  une  couronne  de  m}Tthe  et  de  roses, 
une  médaille  d'honneur  et  une  indemnité  de  deux  cents 
florins  des  Pays-Bas. 

TABLEAU  DE   GENRE. 

Une  jeune  fiancée,  accompagnée  de  sa  mère  et  de  sa 
sœur,  est  conduite  par  son  futur  époux  dans  l'atelier 
d'un  peintre,  qui  vient  d'achever  le  portrait  de  la  jeune 
personne. 

Ces  cinq  figures  sont  de  rigueur;  le  peintre  a  son 
choix  peut  en  augmenter  le  nombre. 

Le  prix  est  une  médaille  d'honneur  et  une  indemnité 
de  deux  cents  florins  des  Pays-Bas. 

(1)  L'aune  des  Pays-Bas  est  égale  au  mètre  frauçaÏ6. 


(  *°6  ) 

PAYSAGE. 

Un  clair  de  lune ,  un  pont  dans  le  lointain ,  un  clo- 
cher a  gauche  du  spectateur. 

Le  tableau  aura  une  demi-aune  des  Pays-Bas  en  lar- 
geur, la  hauteur  est  a  la  volonté  de  l'artiste. 

Le  prix  est  une  médaille  d'honneur  et  une  indemnité 
de  cent  cinquante  florins  des  Pays-Bas. 

SCULPTURE. 

Le  buste  d'Erasme.  Quoique  les  traits  de  cet  illustre 
savant  soient  classiquement  connus,  on  peut  indiquer 
la  gravure  d'après  Holbein ,  par  Vorstcrman ,  et  celles 
qui  se  trouvent  en  tête  des  (Œuvres  d'Erasme ,  édit.  de 
1705,  et  dans  le  Musée  de  Filhol. 

Le  prix  sera  une  médaille  d'honneur  et  une  indem- 
nité de  cent  florins  des  Pays-Bas. 

ARCHITECTURE. 

La  ville  de  Gand  possède  une  Société  royale  d'Agri- 
culture et  de  Botanique ,  qui  ouvre ,  deux  fois  par  année , 
un  Salon  disposition  de  Plantes  en  pleine  fleuraison  ; 
à  cette  occasion ,  des  prix  sont  solennellement  proclamés 
et  distribués,  et  des  banquets  réunissent  aux  membres 
de  la  Société ,  les  Magistrats  protecteurs  de  l'institution. 

L' utilité  d'obtenir,  un  jour,  un  vaste  local  qui,  par 
tous  les  accessoires,  réponde  a  la  dignité  de  cette  insti- 
tution et  a  la  considération  dont  elle  est  investie ,  a 
suggéré  a  l'Académie ,  l'idée  de  proposer  au  Concours 
d'Architecture,  le  sujet  suivant: 

Un  bâtiment ,  propre  au  but  que  s'est  proposé  la 
Société  royale  d'Agriculture  et  de  Botanique ,  à  Gand, 
par  son  règlement  et  ses  usages. 

Ce  bâtiment  contiendra  :  Un  vestibule.  —  Un 
salon  pour  l'exposition  des  plantes,  et  en  même  teins 


(  4o7  ) 

pour  la  distribution  des  prix,  de  4oo  a  45o  aunes 
des  Pays-Bas  de  superficie.  —  Une  salle  de  festin 
avec  ses  accessoires  nécessaires,  pour  i5o  convives. 
—  Une  salle,  pour  les  séances  du  conseil  d'adminis- 
tration. —  Une  bibliothèque.  —  Une  salle  de  dépôt 
pour  les  instrumens  d'agriculture  et  de  jardinage.  — 
Une  habitation    pour  un  jardinier- concierge. 

Le  bâtiment  sera  censé  devoir  être  construit  sur  un 
lerrein  entièrement  isolé  ou  adossé  d'un  seul  côté  a 
une  rivière  ou  canal  ;  la  superficie  du  terrein  sera  de 
5  a  6000  aunes. 

Les  constructions  ne  pourront  dépasser  2000  aunes  ; 
l'excédent  du  terrein  sera  planté  en  jardin  et  servira 
de  promenade  aux  Membres  de  la  Société. 

Tous  les  salons,  salles  et  locaux,  devront  se  trouver 
au  rez-de-chaussée,  a  l'exception  de  la  cuisine,  des 
offices  et  autres  accessoires  secondaires ,  qui  pourront 
être  placés  dans  le  souterrain  ou  dans  un  soubassement. 

On  demande  le  plan  du  rez-de-chaussée,  la  façade 
principale  du  bâtiment  et  la  coupe. 

Le  prix  sera  une  médaille  d'honneur  et  une  indem- 
nité de  deux  cent  cinquante  florins  des  Pays-Bas. 

DESSIN. 

La  Direction  donnera  une  médaille  d'honneur  a  celui 
des  élèves  ou  anciens  élèves  de  l'Académie  qui  fera  le 
meilleur  Dessin  d'après  la  Vénus  dite  de  Milo,  statue 
qui  est  au  Muséum  de  Paris. 

Le  plâtre  ,  donné  par  la  munificence  de  S.  Exe. 
M.  Falck,  Ministre  de  l'instruction  publique,  est  a  la 
galerie  des  antiques  de  l'Académie. 


(  m  ) 

Conditions  générales  du  Concours  et  de  l'Exposition. 

Sont  exclusivement  admis  au  Concours,  les  Artis- 
tes ne's  ou  domiciliés  dans  le  Royaume  des  Pays-Bas. 
Ceux  qui  ont  déjà  remporté  des  prix  aux  Concours 
précédens,  tant  a  Gand,  a  Bruxelles,  a  Anvers,  que 
dans  les  Provinces  septentrionales  ,  sont  particulièrement 
invités  a  s'illustrer  par  de  nouveaux  triomphes. 

Toutes  les  pièces  destinées  aux  différens  Concours 
doivent  être  remises  de  la  manière  accoutumée  et  franc 
de  port,  avant  le  20  Juillet  1826  ,  au  Sr.  Verplancke  y 
concierge  de  l'Académie,  rue  Sainte  Marguerite;  ce 
terme  est  de   ligueur. 

La  Direction  se  réserve  le  droit  de  ne  pas  accorder 
les  Prix,  si  elle  juge  que  les  pièces  envoyées  au  Con- 
cours ,  ne  répondent  point  suffisamment  a  son  attente. 

Les  morceaux  qui  remporteront  les  Prix ,  resteront 
a  la  disposition  de  l'Académie,  et  seront  placés  au 
Musée  comme  des  monumens  qui  rappelleront  le  mérite 
et  la  gloire   de  leurs  auteurs. 

L'ouverture  du  Salon  d'Exposition  se  fera  le  pre- 
mier Lundi  du  mois  d'Août  1826,  dans  la  grande  Salle 
du  Muséum  de  la  ville,  au  local  de  l'Académie. 

Il  sera  ouvert  pendant  un  mois  ;  on  y  recevra 
toute  espèce  de  production  des  Arts  du  Dessin  faite 
par  des  Artistes  vivans. 

Le  jugement  [sera  prononcé  le'dimanche  qui  suivra 
l'ouverture  du  Salon  ;  les  Vainqueurs  seront  solennel- 
lement proclamés ,  et  les  Prix  distribués  le  jour  suivant 
a  la  magnifique  rotonde  de  l'Université,  en  présence 
des  Autorités  constituées  et  des  Juges  du  Concours. 

Toutes  les  pièces  envoyées  pour  le  Concours  et  pour 
l'Exposition,  resteront  au  Salon  jusqu'à  la  clôture. 


(  4o9  ) 

Les  Artistes  sont  invités  a  envoyer,  franc  de  port, 
an  moins  quinze  jours  avant  l'ouverture  du  Salon ,  a 
M.  P.  F.  de  Goesin~Verhaeglie ,  Imprimeur  de  l'Uni- 
versité et  ancien  Professeur  de  l'Académie  ,  rue  Haut- 
port  n°  07,  une  note  contenant  leur  nom,  leur  demeu- 
re, le  nom  de  leur  maître,  s'ils  désirent  qu'il  en  soi  1 
fait  mention  dans  la  Notice,  les  dimeusions  des  pièces 
qu'ils  ont  Pintention  d'exposer  et  une  description  suc- 
cincte de  ce  quelles  représentent. 

Tous  les  envois  devront  se  faire  a  l'adresse  du 
Sr.  Verplancke ,  au  moins  huit  jours  avant  l'ouverture 
du  Salon.  Cette  époque  est  de  rigueur. 

Les  frais  de  transport  restent  a  charge  de  ceux  qui 
enverront  au  Salon  ;  ils  sont  priés  de  faire  connaître 
de  quelle  manière  ils  souhaitent  que  les  Tableaux  ou 
autres  productions  leur  soient  retournés. 

SOCIÉTÉ     POUR     L'ENCOURAGEMENT     DE     L ARCHITECTURE , 
ÉTART.IE    A    AMSTERDAM. 


PROGRAMME    DES    PRIX    PROPOSÉS    POUR     1824. 

Premier  sujet.  —  Une  Bourse  couverte. 

On  supposera  l'édifice  approprié  a  une  grande  ville 
de  commerce  maritime.  Le  projet  contiendra:  une  vaste 
salle  ou  espace  couvert,  d'environ  1600  aunes  quarrées 
pour  la  réunion  journalière  des  négocians ,  courtiers , 
etc.;  et  trois  ou  quatre  salles,  suffisantes  pour  la 
tenue  des  ventes  publiques  dont  chacune  sera  accom- 
pagnée au  moins  de  deux  pièces  a  l'usage  des  cour- 
tiers et  employés  publics.  Il  y  aura  de  plus ,  dans  le 


(4io) 

corps  du  bâtiment,  une  habitation  convenable  pour 
un  concierge  ou  gardien  de  la  bourse  ,  et,  a  proxi- 
mité de  cette  habitation  ,  un  grand  appartement  pour 
les  commissaires  ou  directeurs.  La  grande  salle  du 
bâtiment  pourra  être  précédée  d'une  galerie  servant  de 
vestibule. 

On  prendra  attention  a  ce  que,  sans  nuire  au  but 
principal,  les  avenues  en  général  et  les  escaliers  con- 
duisant aux  salles  de  ventes ,  puissent  servir  a  un  usage 
particulier. 

Le  plan,  l'élévation  et  la  coupe,  devront  être  faits 
sur- une  échelle  d'un  pouce  par  aune. 

Il  sera  accordé  a  l'auteur  du  plan ,  jugé  le  meilleur, 
une  attestation  honorable  et  cinquante  ducats  d'or. 

On  invite  a  ce  concours  tous  les  Artistes  nés  ou  do- 
miciliés dans  le  Royaume  des  Pays-Bas. 

Deuxième  sujet.  —  Une  Galerie  de  Statues. 

On  supposera  l'édifice  placé  dans  le  parc  ou  jardin 
d'un  riche  amateur  d'antiquités.  11  consistera  principa- 
lement :  en  un  vestibule  ,  une  grande  salle  pour  le 
placement  d'une  collection  d'antiques,  tels  que:  sta- 
tues, bustes,  vases,  ornemens ,  inscriptions,  etc.  et 
un  cabinet  d'étude. 

Le  terrein  est  fixé  a  200  aunes  carrées. 

On  tâchera  de  donner  a  ce  bâtiment  un  aspect  agréa- 
ble et  en  harmonie  avec  sa  destination. 

Le  plan,  l'élévation  et  la  coupe  seront  exécutés  sur 
une  échelle  d'un  pouce  pour  cinq  palmes. 

Il  sera  accordé  a  l'auteur  du  plan,  jugé  le  meilleur, 
une  attestation  honorable  et  une  prime  du  i5  ducats  d'or. 

Troisième  sujet.  —  Un  Réservoir  d'eau  douce  ou  salée. 

On  demande  le  dessin  d'un  petit  bâtiment,  placé  a 


(4*1  ) 

proximité  d'un  semblable  réservoir,  et  servant  a  mettre 
à  couvert  le  mécanisme  des  pompes  et  une  ou  deux, 
personnes,  chargées  de  la  surveillance  lors  des  distri- 
butions de  ces  eaux. 

On  s'efforcera  démettre  de  l'harmonie  entre  l'exécu- 
tion du  bâtiment  et  son  but ,  et  de  l'orner  de  manière 
qu'il  puisse  servir  a  l'embellissement  d'un  marché  pu- 
blic ou  d'une  place  publique. 

Le  plan  et  l'élévation  seront  exécutés  sur  une  échelle 
d'un  pouce  pour  2  palmes  (  un  centimètre  pour  20.  ) 

On  accordera  a  l'auteur  du  meilleur  projet,  une  at- 
testation honorable  et  une  prime  de  cinq  ducats  d'or. 

Le  concours  pour  ce  prix  et  le  précédent  n'est  ou- 
vert que  pour  les  Membres  de  la  Société  (1). 
Conditions  générales. 

Toutes  les  pièces  destinées  au  concours ,  devront  être 
envoyées,  franc  de  port,  et  de  la  manière  accoutumée, 
avant  le  i5  Juillet  1824  ,  a  M.  J.  J.  Vollenhoven^  se- 
crétaire de  la  société,  au  Rokin  710  i55. 

Les  pièces  couronnées  resteront  la  propriété  de  la 
Société. 

Pour  faciliter  la  gravure  des  pièces  couronnées,  les 
auteurs  seront  obligés  de  copier  leurs  dessins  sur 
telle  échelle  réduite  que  leur  indiquera  la  Direction. 

(1)  Chacun  peut  se  faire  inscrire  comme  Membre  de  la  Société 
en  payant  \\n  florin  d'entrée  et  4  florins  par  an.  A  s'adresser 
pour  cet  objet  au  Secrétaire  de  la  Société. 


(412  ) 


Planche  nme.  —    momie  d'égypte, 

Exposée  au   salon   de   la  Société  royale  des   Beaux- 
Arts  à  Gand. 


.La  Momie  exposée  au  salon  de  la  Socie'té  des  Beaux- 
Arts,  fut  trouvée  en  Egypte  et  transportée  d'Alexan- 
drie a  Smyrne  par  M.  De  Lescluze ,  de  Bruges. 
Il  l'envoya  en  Belgique ,  où  elle  arriva  dans  le  courant 
de  Janvier  1824,  laissant  a  S.  Exe.  le  Ministre  de 
l'instruction  publique,  la  faculté  d'en  disposer.  Lors- 
qu'elle fut  exposée  a  Bruges ,  la  foule ,  qui  se  pressait 
pour  jouir  de  la  vue  de  cet  intéressant  monument  de 
l'ancienne  Egypte,  était  si  grande,  que  pour  éviter  des 
malheurs ,  on  a  été  obligé ,  sur  l'invitation  de  la  Ré- 
gence de  la  ville,  de  la  déposer  dans  une  maison  non 
habitée,  et  de  n'y  admettre  le  public  que  moyennant 
une  légère  rétribution. 

Cette  Momie  est  encore  enveloppée  de  ses  bandes 
de  toile  entrelacées  avec  beaucoup  de  soin;  on  a  cru 
devoir  respecter  cette  enveloppe  (1)  jusqu'à  ce  que 
la  Momie  eût  une  destination  définitive  ;  la  toile  est 


(1)  M.  Belzoni,  dans  ses  voyages  en  Egypte  et  en  Nubie,  a 
dépouillé  plusieurs  Momies  auxquelles  personne  n'avait  encore  tou- 
ché ;  il  y  en  avait  une  entr'autres  qui  était  emmaillotée  dans  de 
la  toile  très-fine;  du  côté  du  cœur  il  trouva  une  plaque  de  métal 
recouverte  d'une  autre  plaque  très-semblable  à  de  l'argent;  sur  celle- 
ci  étaient  gravés  les  yeux  d'une  vache,  emblème  de  la  déesse  Isis; 
au  milieu  de  la  poitrine  il  y  avait  une  autre  plaque  sur  laquelle 
on  avait  figuré  un  globe  ailé;  sous  la  dernière  enveloppe,  la  toile 
était  encore  très-belle  ;  il  arriva  enfin  au  cadavre  dont  il  ne 
restait  que  les  ossemens  qui  avaient  pris  une  teinte  jaunâtre. 


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(4i5) 

assez  Lien  conservée,  quoique  dans  plusieurs  endroits 
elle  ait  souffert;  le  corps  a  i42  centimètres  de  long; 
on  le  prend  généralement  pour  celui  d'une  jeune  per- 
sonne d'un  rang  élevé  ;  auprès  d'elle  est  placé  uu 
animal  qu'on  suppose  être  un  chat,  emmailloté  de 
même;  les  oreilles  sont  couvertes  de  toile  et  se  laissent 
apercevoir  au-dessus  de  l'emmaillotage  ;  des  yeux  pos- 
tiches (1)  faits  de  toile ,  sont  figurés  sur  la  tête  de  l'animal. 
Le  cercueil  de  Lois  de  Sycomore,  est  peint  in- 
térieurement de  figures  symboliques  ;  la  peinture  en 
paraît  encore  toute  fraîche;  c'est  une  espèce  de  dé- 
trempe ;  à  l'extérieur  elle  est  moins  Lien  conservée  , 
quoiqu'on  en  distingue  facilement  les  différens  hiéro- 
glyphes; les  deux  extrémités  du  cercueil  ont  le  plus 
souffert.  Sur  le  couvercle  est  représentée  une  figure 
de  la  longueur  de  toute  la  caisse  ;  la  tète  est  de  haut 
relief  et  tout  le  corps  est  chargé  d'hiéroglyphes  ;  cette 

Deux  Momies  furent  ouvertes  à  Paris,  le  i5  Novembre  dernier, 
par  M.  Cailliaud;  l'une  était  un  homme  d'environ  cinquante  ans; 
on  a  trouvé  au-dessus  de  chacun  des  yeux  et  sur  la  pommette  des 
joues,  uue  lame  d'or  représentant  la  figure  d'un  œil;  sur  la  bou- 
che on  trouva  une  lame  du  même  métal;  singularité  dont  on  ne 
connaît  aucun  autre  exemple.  Plusieurs  parties  du  corps  étaient 
dorées. 

De  l'autre  Momie  on  a  enlevé  avec  la  plus  grande  facilité,  les 
Landes  et  les  toiles  roulées  autour  du  corps,  entre  lesquelles  on 
a  trouvé  des  couches  de  sciure  de  bois  qui  avaient  certainement 
pour  objet  d'absorber  l'humidité;  les  chairs  ont  été  trouvées  in- 
tactes par  l'effet  de  ce  simple  procédé  et  la  couleur  de  la  peau 
était  devenue  jaune;  on  a  trouvé  trois  petites  bretelles  ou  étoles 
autour  du  col,  marquées  d'empreintes  hiéroglyphiques.  Le  per- 
sonnage ainsi  embaumé  était  un  vieillard. 

Dans  l'intérieur  de  plusieurs  autres  Momies  on  a  trouvé  de 
petites  idoles,    des  amulettes,  des  nilomètres,  etc. 

(i)  Une  Momie  ouverte  par  M.  Blumenbach  avait  aussi  des  yeux 
postiches,  faits  de  toile  de  coton   enduite  de  poix  résine. 


C4'4) 

peinture  paraît  recouverte  ou  mêlée  d'un  vernis  ;  le 
bois  de  cette  partie  du  cercueil  est  préparé  avec  une 
espèce  d'enduit  qui  se  trouve  sous  la  couleur  et  qui 
dans  certaines  parties  donne  du  relief  a  quelques  figu- 
res emblématiques.    , 


La  Société  royale  des  Beaux-Arts  a  Gand ,  ouvre  an- 
nuellement deux  salons  où  tous  les  membres  résidans 
exposent  les  produits  de  leurs  travaux  ;  celui  qui  vient 
d'être  fermé  était  remarquable  par  plusieurs  tableaux 
envoyés  par  des  Artistes  non-résidans.  Le  plus  capital 
était  celui  de  Madame  Rude  née  Sophie  Fremiet, 
représentant  la  mort  de  Cenchrée  (1);  dans  la  compo- 
sition et  dans  l'exécution  de  ce  tableau ,  l'Artiste  a 
prouvé  que  la  peinture  historique  était  également  du 
domaine  de  son  sexe.  Le  sujet  offrait  plusieurs  dif- 
ficultés qu'un  grand  maître  aurait  eu  peine  a  sur- 
monter. Rendre  le  désespoir  d'une  mère  affligée  ,  en 
laissant  entrevoir  en  même  tems,  dans  sa  physiono- 
mie ,  la  possibilité  de  voir  son  fils  rendu  a  la  vie  ,  est 
une  de  ces  expressions  que  le  génie  seul  peut  rendre 
et  le  peintre  l'a  su  porter  sur  la  toile,  avec  l'expression 
de  la  nature  même.  Diane  avec  sa  fierté  sauvage,  pa- 
raît peu  émue  a  cette  scène  déchirante,  pour  le  cœur 
d'une  mère;  son  maintien,  sa  marche  tout  indique  en 
elle,  cette  divinité  chasseresse  qui  jette  l'épouvante  au 

(O  »  Vous  arrivez  ensuite  à  l'entrée  de  la  fontaine  Pirène. 
»  Elle  était  femme  jadis,  et  fut,  dit-on,  changée  en  fontaine, 
»  à  force  de  pleurer  la  mort  de  Cenchrée  son  fils ,  que  Diane 
»  avait  tué  involontairement."  {Pausan.  Corinth.  ch.  5.) 

L'artiste  a  supposé  l'instant  où  Pirène  soutenant  son  fils  mou- 
rant,   suppliait  la  Déesse  de  le  sauver. 


(4*5  ) 

milieu  des  bois.  Le  jeune  enfant  est  expirant  entre 
les  bras  de  sa  mère ,  le  dernier  souffle  de  la  vie  sem- 
ble encore  errant  sur  ses  lèvres.  Toutes  les  parties  de 
Part  y  sont  traitées  de  main  de  maître  ;  un  dessin  pur 
et  correct  se  remarque  dans  les  figures  principales,  la 
couleur  est  brillante  et  harmonieuse,  les  draperies  sont 
bien  jettées,  les  figures  ou  du  mouvement  et  sortent  de 
la  toile.  Le  fond  représente  un  paysage  parfaitement 
d'accord  avec  la  composition  générale. 

Mad.  Rude  n'occupe  pas  seulement  le  premier  rang 
parmi  les  Dames  qui  s'adonnent  a  la  peinture  histori- 
que ,  ses  ouvrages  lui  assignent  encore  une  place  dis- 
tinguée parmi  les  peintres  de  l'école  moderne.  Déjà 
avantageusement  connue  par  son  tableau  de  concours 
la  belle  Anilùa ,  elle  vient  de  mettre  le  sceau  a  sa 
réputation  par  la  mort  de  Cenchrée ,  la  plus  belle  peut- 
être  des  productions  sorties  du  pinceau  d'une  Dame. 

La  Société  royale  des  Beaux-Arts,  voulant  témoigner 
à  Mad.  Rude  sa  satisfaction  que  lui  a  fait  éprouver 
l'envoi  d'une  production  si  distinguée,  a  résolu  de  lui 
décerner  une  médaille  d'honneur. 

Parmi  les  tableaux  de  genre ,  une  jolie  production  de 
M.  François ,  de  Bruxelles ,  a  mérité  les  suffrages  de 
tous  les  amateurs;  elle  représente  une  mère  inquiète  sur 
la  santé  de  sa  fille  ;  on  y  a  distingué  aussi  les  ouvrages 
de  MM.  Geirnaert ,  Hcyndrikx  ,  Landsheer ,  Steyaert 
père,  et  Eeckhoudt;  les  paysages  de  MM.  Ducorron, 
De  Noter  ,  Donselaer  ,  Gelissen  ,  Dom.  de  Bast  et 
Vander  Poorten.  Les  productions  de  M.  Eug.  Ver- 
boeckhoven  ;  les  marines  de  L=  Verboeckhoven  ;  les 
tableaux  de  fleurs  des  demoiselles  De  Noter.  Les  por- 
traits peints  par  MM.  Van  Huffel ,  Moritz ,  Geens  ; 
les  ouvrages  MM.  Poelman,  Dilleman ,  Gras,  Rommel, 


(4i6  ) 

Devigne  el  En  gel  ;  les  belles  miniatures  de  M.  Autis- 
sier;  les  dessins  de  M.  Steyaert  fils,  de  Mad.  Mourian  , 
de  M.  De  Keghcl  et  des  élèves  de  M.  Delbecq  ;  le 
tableau  d'e'eritnre  de  M.  Prudent  de  Maesscbalk  ;  le 
gracieux  modèle  d'une  jeune  nymphe  jouant  avec  un 
papillon ,  ligure  en  plâtre,  que  M.  Parmentier  se  pro- 
pose d'exécuter  en  marbre;  et  plusieurs  autres  ouvrages 
les  uns  aussi  intéressans  que  les  autres,  qui  ont  attiré 
au  salon  pendant  trois  semaines  consécutives,  tout  ce 
que  la  ville  possédait  d'amateurs  et  qui  ramène  de  plus 
en  plus  l'esprit  public  vers  la  culture  des  arts,  le  plus 
noble  délassement  de  l'homme. 


La  Commission  administrative  de  la  société  royale  des 
beaux-arts  a  Bruxelles,  déterminée  par  des  considéra- 
tions supérieures ,  a  résolu ,  que  l'ouverture  de  son 
prochain  salon  au  musée  de  la  même  ville,  serait  recu- 
lée jusqu'à  la  mi-Octobre  io24 ,  et  que  par  suite  de  ce 
retard  les  Artistes  auraient  jusqu'au  12  du  même  mois 
pour  opérer  la  remise  au  musée  de  leurs  ouvrages  de 
simple  exposition. 

Elle  a  encore  arrêté  que,  conformément  a  ce  qui  a 
été  prescrit  pour  les  divers  genres  de  peinture  admis 
au  concours,  les  Graveurs  qui  ont  obtenu  une  médaille 
a  Bruxelles  pour  un  genre  donné,  n'en  sont  pas  moins 
reçus  a  concourir  pour  les  autres  genres  de  gravure 
indiqués  au  programme ,  et  pour  autant  que  la  société 
ne  les  aurait  pas  précédemment  couronnés  dans  les 
mêmes  parties. 

11  n'est  rien  dérogé  aux  autres  conditions  du  pro- 
gramme ,  et  les  concurrens  demeurent  tenus  a  l'envoi 
de  leurs  compositions  dans  le  terme  qui  y  est  établi. 


MESSAGER 

DES  SCIENCES  ET  DES  ARTS. 


%lme  et  XIIIui;  Livraisons. —  Mars  et  Avril  1824. 


SUR    M.    VAN    HANSELAERE, 
Peintre  de   Gand ,    actuellement  à  Naples. 


vJn  a  lu,  sur  cet  habile  artiste,   une   notice,  prise 
dans  une  très-bonne  source,  et  ainsi  conçue  : 

»  On  se  souvient  avec  quelle  satisfaction  les  compa- 
triotes et  amis  de  M.  van  Hanselaere  ,  de  Gand,  peintre 
actuellement  en  Italie,  avaient  accueilli  la  nouvelle  qu'il 
avait,  par  son  talent,  obtenu  le  grand-prix  a  Rome  5 
mais  ceux  qui  avaient  été  en  Italie  et  qui  savaient  que 
dans  l'école  de  cette  capitale  des  arts,  on  ne  propose 
pas  de  prix  de  cette  nature ,  s'attendaient  a  une  expli- 
cation, et  elle  est  satisfaisante  au-delà  de  tout  ce  qu'on 
pouvait  espérer." 

»  C'est  a  Naples  qu'il  y  a  eu  un  concours,  non  pas 
d'élèves ,  mais  de  maîtres  ;  des  peintres  napolitains ,  si- 
ciliens, toscans  et  français,  avaient  exposé,  et  la  palme 
a  été  décernée  au  peintre  belge  5  la  récompense  immé- 
diate d'un  pareil  bonneur  a  été  que  S.  M.  le  roi  de 
Naples  a  désigné  M.  van  Hanselaere,  pour  faire  un 
grand  tableau  d'autel,  destiné  a  embellir  la  nouvelle 
église  qu'on  bâtit  a  Naples,  et  qui  sera,  dit-on,  une 
des  plus  magnifiques  du  royaume.  Ces  honorables  dé- 

Xlrae  et  Xllme  livraisons.  28 


(  4*8  ) 

tails  prouvent  que  M.  van  Hanselaere  n'obtient  pas 
seulement  de  grands  succès  dans  le  portrait,  mais  en- 
core dans  la  peinture  historique,  et  qu'il  est  parvenu 
a  s'y  faire  distinguer  dans  la  terre  classique  des  beaux- 


arts." 


Nous  avons  trouvé ,  quelque  tems  après ,  dans  un 
journal  intitulé  Kunst-blatt ,  feuille  allemande  très- 
estimée ,  publiée  par  Cotta ,  a  Tubingue ,  un  article 
plus  intéressant  encore,  sous  la  rubrique  de  Naples; 
en  voici  un  extrait  : 

»  La  mort  nous  a  enlevé ,  il  y  a  quelque  tems ,  un 
digne  et  estimable  artiste,  M.  Berger,  piémontais.  Par 
la  perte  de  ce  vétéran  de  nos  peintres ,  qui  est  vive- 
ment regretté  de  tous  ceux  qui  l'ont  connu ,  une  place 
importante,  celle  de  premier  professeur  a  notre  acadé- 
mie des  beaux-arts,  est  devenue  vacante,  et  le  Gou- 
vernement, pour  la  remplir  dignement,  a  jugé  a  propos 
de  la  mettre  au  concours.  Trois  artistes  de  grand  mérite , 
Franque ,  Marsigli  et  van  Hanselaere,  sont  entrés  en 
lice,  en  athlètes  expérimentés.  Chacun  d'eux ,  fort  de 
son  talent,  a  fait  son  possible  pour  obtenir  la  palme, 
a  laquelle  sont  attachés  en  même  tems  des  appointemens 
considérables.  Par  suite  de  ce  concours ,  notre  public 
jouit  dans  ce  moment  du  grand  et  rare  plaisir  de  pou- 
voir contempler  et  comparer  entr'elles  les  productions 
de  ces  trois  maîtres.  L'exposition  a  lieu  au  musée  royal, 
où  l'on  a  assigné  a  chacun  des  concurrens  une  salle 
particulière,  afin  que  leurs  ouvrages  pussent  tous  être 
placés  dans  un  jour  également  favorable.  Comme  en  pa- 
reil cas  il  est  libre  a  chacun  de  porter  son  jugement,  je 
profite  de  cette  liberté  pour  dire  aussi  mon  avis  sur  ces 
productions.  M.  Franque  a  enrichi  l'art  d'un  sujet  évi- 
demment tragique,  et  fondé  en  même  tems  sur  l'his- 


(  4i9  ) 

toire.  Le  choix  du  sujet  et  la  manière  dont  il  l'a 
traité,  prouvent  en  lui  une  grande  force  d'invention. 
On  avait  trouvé  dans  les  fouilles  de  Pompéji  les  sque- 
lettes d'un  homme ,  d'une  femme ,  de  deux  jeunes 
filles  et  d'un  enfant,  les  mêmes  dont  on  conserve 
encore,  dans  le  musée  royal,  des  agraffes  en  ot,  des 
brasselets,  des  houclcs  d'oreilles,  etc.  C'est  de  ces  fai- 
bles restes  que  l'artiste  a  tiré  l'idée  de  son  sujet.  Il  a 
supposé  que ,  lors  de  l'éruption  désastreuse  du  Vésuve 
qui  ensevelit  la  ville  de  Pompéji,  cette  famille  s'était 
mise  a  fuir  pour  échapper  a  une  mort  affreuse ,  et  il  a 
choisi  le  moment  où  elle  est  atteinte  par  les  pierres  et  la 
lave.  Les  chevaux  s'abattent  ;  le  char  est  renversé  ;  la 
mère,  pressant  le  nourrisson  contre  son  sein,  tombe  en 
arrière;  l'aînée  des  filles,  déjà  lancée  hors  du  char,  pa- 
raît moins  en  peine  de  son  propre  sort  que  de  celui 
de  sa  mère.  La  fille  cadette,  prête  a  sauter  pour  secou- 
rir la  mère  ,  voit  avec  effroi  que  son  père  est  frappé 
par  les  pierres ,  tombe  et  tâche ,  en  se  cramponnant 
convulsivement  aux  chevaux,  de  se  soutenir  ou  de  se 
relever.  Autant  l'invention  de  cette  pièce  est  poétique, 
autant  l'ordonnance  en  est  pittoresque/' 

Nous  supprimons  d'autres  détails  qui  ne  semblent 
pouvoir  intéresser  que  ceux  qui  voient  le  tableau;  l'au- 
teur de  la  lettre  paraît  en  parler  avec  amour,  et  comme 
d'une  production  digne  des  plus  habiles  pinceaux;  voici 
les  mots  qui  terminent  la  description  : 

»  Le  tableau  de  M.  Franque,  selon  nous,  l'emporte 
sur  ceux  de  ses  concurrens;  mais,  comme  les  meilleurs 
mivrages  ne  sont  point  exempts  d'imperfections ,  nous 
aurions  encore ,  dans  cette  composition,  différentes  cho- 
ses a  désirer.  La  mère,  par  exemple,  paraît  un  peu  trop 
grande   en    proportion  de  la   fille,    qui  n'est    plus    un 


(  fao  ) 

enfant;  la  position  du  père  ne  se  conçoit  ou  ne  s'aper- 
çoit pas  assez  facilement.  Ensuite,  comme  la  scène  se 
passe  en  plein  jour,  et  qu'elle  est  éclaire'e  par  une  lu- 
mière assez  vive,  les  masses  volcaniques  ne  devraient 
pas  avoir  la  couleur  rougeâtre  du  feu/' 

L'auteur  passe  a  Philippe  Marsigli ,  »  Cet  artiste, 
dit-il ,  a  représenté  un  sujet  assez  souvent  traité  par  les 
peintres ,  Homère  chantant  devant  des  pâtres  ses  poésies 
divines.  La  composition  est  noble  et  simple.  Le  vieil- 
lard assis  devant  les  auditeurs,  déclame  ses  vers.  Une 
lyre  placée  a  côté  de  lui  et  la  ressemblance  de  la 
figure  avec  le  buste  antique,  que  l'on  connaît,  indi- 
quent d'une  manière  assez  claire,  que  c'est  le  père  des 
poètes.  La  figure ,  cependant ,  pourrait  avoir  un  peu 
plus  d'âme  et  d'inspiration.  Un  pâtre  basané ,  placé 
devant  le  vieillard,  l'écoute  attentivement.  Entr'eux  se 
tient  un  petit  garçon  qui  paraît  étonné  de  ce  récit 
de  choses  merveilleuses.  Il  manque  pourtant  a  ce  gar- 
çon l'expression  naïve  de  l'enfance ,  et  sa  position  a 
quelque  cliose  d'étudié  et  de  théâtral.  Le  grand  chien, 
couché  sur  le  premier  plan ,  est  d'une  vérité  frappante , 
et  telle  que  Sneyers  même  ne  l'eût  point  désavoué. 
Dans  le  dessin ,  l'artiste  montre  ,  outre  la  pureté  des 
formes,  un  style  large  et  aisé.  Pour  la  correction,  il 
laisse  beaucoup  a  désirer.  Dans  les  chairs  il  ne  peut 
égaler  ses  concurrens.  En  général  on  aperçoit  plus  de 
connaissance  de  l'académie  que  du  beau  idéal;  plus  de 
réflexion,  que  d'imagination  et  de  sentiment.  Un  second 
ouvrage  du  même  peintre  :  Mercure  conduisant  Psyché 
à  V Olympe ,  est  inférieur  a  celui-ci  sous  tous  les  rap- 
ports;  c'est  peut-être  une  de  ses  productions  déjà  an- 


ciennes." 


Voici  le  passage  remarquable  qui  concerne  notre  com- 
patriote : 


(4ai  ) 

»  Pierre  van  Hanselaere  a   exposé  toute  Ane  série 
de  portraits,  dans  lesquels  on  reconnaît  le  peintre  habile 
et  exercé.  Le  buste  de  la  princesse  de   Scylla  est  un 
vrai   chef-d'œuvre.   Dans  le  portrait    en  pied  du  duc 
d'Ascoli,  les  accessoires  l'emportent  en  quelque  sorte 
sur  l'essentiel.  La  pose  du  Duc  n'est  pas  assez  ferme  ; 
le  fond  rouge  paraît  monotone;  et  le  tableau  manque 
d'air;  c'est  cependant  celui  de  tous  qui  attire  le  plus 
de    spectateurs.    Mais    ces    costumes  brillants  d'or   et 
d'argent,    ces  bottes   et   ces  plumets   manquent  rare- 
ment leur  effet  sur  la  multitude.  On  voit  ensuite  trois 
compositions  historiques  ,  parmi  lesquelles  Susamie  au 
bain,  surprise  par  les  Vieillards,  se  distingue  avanta- 
geusement.  La  figure  principale,  faiblement  couverte 
d'un  vêtement  blanc,  a   un  coloris  fleuri  et  extrême- 
ment vrai.  C'est  sur-tout  la  cuisse  et  la  hanche  gauches, 
qui  ont  parfaitement  réussi.  Les  formes,  quoique  vraies, 
ne  sont  pas  d'un  choix  assez  sévère,  qui,  attestant  le 
goût  délicat  de  l'artiste,  attache  et  charme  irrésistible- 
ment le  spectateur.  La  tête  de  Susanne  devrait  avoir 
plus  d'expression ,  et  le  caractère  des  Vieillards  s'éloi- 
gner moins  des  formes  de  la  noblesse.  Les  deux  autres 
tableaux   de  M.  van  Hanselaere,  demi-figures,  prou- 
vent une  grande   dextérité  pour  le  technique  de   son 
art ,  mais  pas   autant    de    correction    dans    le   dessin. 
M.  van  Hanselaere,  en  général,  se  distingue  par  une 
manière  large,  sévère  et  vigoureuse.  Dans  son  coloris, 
on  reconnaît  qu'il  a  étudié  avec  soin  Rubens ,  Jordaens 
et  Craeyer.'1'' 

»  Les  tableaux,  exposés  par  trois  autres  artislcs  : 
Andréa  Celestino ,  Georgio  Berti  et  Paolo  Albertiy 
ne  peuvent  être  comparés  qu'entr'eux  et  nullement  être 
placés  en  même  ligne  avec  les  précédents.". 


(    422    ) 

Cette  lettre,  très-probablement,  a  c'té  écrite  avant  que 
la  décision  sur  les  artistes  qui  étaient  entrés  en  lice, 
eut  été  prononcée  5  la  notice  semble  annoncer  une 
décision  et  nous  autorise  a  conjecturer  que  Franque, 
ou  même  peut-être  Marsigli  (si  comme  il  est  probable, 
celui-ci  est  italien)  ont  obtenu  la  place  de  professeur, 
et  que  la  noble  et  encourageante  récompense  que  notre 
■van  H.  a  reçue,  consiste  dans  l'honneur  qui  lui  a  été 
déféré  de  peindre  un  grand  tableau,  pour  la  vaste  et 
belle  église  qu'on  est  occupé  a  construire  a  Naples  (1). 


Numismatique. 

Notice  par  D.  J.  v.  d.  M ,  sur  plusieurs  Médailles 

Romaines ,  découvertes  depuis  quelques  années  aux 
environs  d'Audenarde  :  lue  à  la  Société  royale  des 
Beaux-Arts. 


Xj  utilité  des  médailles  romaines  est  généralement  re- 
connue des  antiquaires  et  des  historiens.  Ce  sont  des 
restes  précieux  d'un  peuple  qui  imposa  des  loix  a 
l'univers  presqu'entier ,  et  domina  pendant  plusieurs 
siècles  sur  nos  provinces.  On  peut  les  regarder  comme 
de  véritables  guides  éclairant  en  beaucoup  d'endroits 
obscurs,  le  savant  laborieux,  qui  consacre  ses  veilles  a 
étudier  l'histoire  romaine  sous  quelque  rapport  politi- 
que, moral  ou  religieux.  Tantôt  on  s'en  sert  comme 
d'un  secours  indispensable  dans  ses  recherches;  tantôt 
elles  sont  d'utiles  complémens  aux  preuves  des  faits 
que  l'on  rapporte. 

(1)  Nous  ne  perdrons  pas  de  vue  ce  concours  ni  ses  résultats, 
et  nous  tiendrons  les  amis  des  arts  au  courant,  dès  «lue  nous 
serons  plus  positivement  informés. 


(4*3  ) 

C'est  ordinairement  sous  un  point  de  vue  moins 
élevé  et  plus  utile  que  l'on  considère  ces  objets  anti- 
ques :  le  mutuel  appui  que  se  prêtent  la  numismatique 
et  l'histoire  romaine.  Duchoul ,  savant  antiquaire  du 
XVIme  siècle,  composa,  le  premier,  a  l'aide  des  mé- 
dailles et  de  quelques  bas-reliefs,  un  traité  sur  la  reli- 
gion et  le  cidte  des  Romains ,  qui  est  encore  lu  et 
consulté  avec  fruit.  Les  P.P.  Catrou  et  Rouillé,  dans 
leur  grande  histoire  romaine ,  n'ont  point  oublié  d'en 
produire  un  bon  nombre  de  types  gravés  a  l'appui  des 
faits  qu'ils  rapportent.  Il  serait  facile  de  multiplier  ces 
exemples. 

Toutes  les  médailles  romaines  n'ont  point  le  même 
degré  de  mérite  aux  yeux  des  antiquaires ,  même  ab- 
straction faite  de  leur  degré  de  rareté.  Dans  les  beaux 
jours  de  la  république,  la  simplicité  des  mœurs  et  les 
autres  vertus  domestiques  de  ce  peuple  intrépide  firent 
le  repos  et  la  stabilité  de  l'état 5  aussi,  a  cette  époque, 
les   monnaies  ou  médailles,  comme  on  est  convenu  de 
les  nommer,  se  ressentent  de  leurs  habitudes  et  n'offrent 
rien  d'intéressant  aux  historiens  ;  mais ,  vers  le  déclin  de 
la  république  et  ensuite  sous  les  empereurs,  les  pas- 
sions diverses  qui  découlent  abondamment  de  l'opu- 
lence et  du  luxe,  firent  bientôt    remplacer   ces  types 
uniformes,  ces  liges ,  ces  quadriges,  ces  dioscures ,  par 
des   symboles  allégoriques,  des  types  historiques  rap- 
pelant de  hautes  dignités,  des  exploits  glorieux,   des 
titres  a  la  reconnaissance  et  a  l'admiration  de  la  pos- 
térité, etc.,  qu'on  exprima  avec  un  art  souvent  délicat 
sur  les  revers.  Certes,  ce  moyen  n'était  pas  le  moins 
propre  U  servir  la  vanité  de  ces  fiers  Romains  et  pins 
tard  a  répandre  quelque  lumière  sur  les  obscurités  de 
leur  histoire,  ou  a  en  confirmer  ta  évcnemeiis  les  plus 
remarquables. 


(  4*4  ) 

Ces  temples  superbes ,  ces  statues ,  ces  arcs ,  ces  co- 
lonnes magnifiques,  ces  vastes  et  hardis  édifices  d'uti- 
lité publique  qui  firent  de  Rome  la  capitale  la  plus 
somptueuse  du  monde  et  dont  les  tristes  débris  don- 
nent encore  une  faible  idée  de  sa  magnificence,  tous 
ces  monumens  que  les  dévastations  des  barbares,  le 
ravage  des  siècles,  le  changement  de  religion, de mœurs 
et  d'habitudes  ont  successivement  détruits,  se  retrou- 
vent en  miniatures  sur  les  médailles  qu'une  couche  mo- 
deste de  terre  a  soustraites  a  toutes  les  révolutions ,  pour 
les  offrir,  dans  des  siècles  de  lumières,  a  l'étude  et  a 
l'admiration  dos  curieux. 

Une  autre  utilité,  moins  directe  a  la  vérité,  relève 
pour  nous  le  prix  des  médailles  qu'on  découvre  sur 
notre  sol:  l'histoire  de  nos  provinces,  durant  la  pé- 
riode romaine,  est  loin  d'être  marquée  au  sceau  de 
l'exactitude  désirable.  C'est  dans  César,  Strabon,  Pom- 
ponius  Mêla  et  un  petit  nombre  d'autres  auteurs,  que 
nos  historiens  puisent  les  documens  dont  ils  ont  besoin 
et  qui  trop  souvent  sont  obscurs.  Or,  les  découvertes 
de  ces  monumens,  (bien  que  d'autres  plus  rares  puis- 
sent avoir  plus  de  valeur),  les  lieux  où  on  les  trouve, 
les  époques  auxquelles  ils  se  rattachent,  sont  autant 
de  matières  qu'un  antiquaire  attentif  ne  dédaignera  pas 
de  consulter,  et  qui  parfois  sont  propres  a  débrouiller 
des  passages  vagues  dans  les  textes  des  anciens  auteurs. 

Nous  le  répétons:  cette  période  historique,  avant  et 
pendant  laquelle  les  Belges  furent  soumis  a  la  domina- 
tion des  R.omains ,  est  encore  couverte  de  tant  de  té- 
nèbres, donne  matière  a  tant  de  conjectures  et  d'opi- 
nions diverses,  qu'on  ne  doit  point  s'étonner  que, 
jusqu'à  ce  jour,  les  auteurs  se  soient  si  peu  accordés  sur 
les  époques,  les  lieux  et  les  circonstances  de  beaucoup 


(  &5  ) 

d'événemens,  confusément  parvenus  jusqu'à  nous.  On 
doit  donc  savoir  gré  à  celui  qui ,  par  des  recherches 
infatigables,  et  soutenu  par  une  judicieuse  érudition, 
tâche ,  a  l'aide  de  monumens  antiques  ,  de  soulever 
d'avantage  le  voile  qui  couvre  encore  en  grande  par- 
tie l'histoire  de  cette  période.  Tel  a  été  le  but  que  s'est 
proposé  le  respectable  et  savant  antiquaire  M.  de  Bast, 
auteur  du  Recueil  d 'antiquités  romaines  et  gauloises , 
trouvées  dans  la  Flandre  proprement  dite',  ouvrage  par 
la  publication  duquel  il  a  rendu  un  service  éminent  a 
tous  les  amateurs  d'antiquités  et  de  diplomatique  dans 
notre  patrie. 

Mais  quelque  riches  qu'aient  été  les  matériaux  qui 
ont  servi  a  la  composition  de  ce  recueil ,  la  source  n'en 
est  point  épuisée  ;  le  sol  de  la  Flandre  reste  encore  fer- 
tile en  découvertes  de  médailles  romaines,  sans  parler 
d'autres  monumens  antiques  que  le  hasard  fait  quel- 
quefois déterrer  (i).  C'est  dans  l'intention  d'ajouter 
quelque  chose  a  ces  matériaux ,  que  nous  publions 
ce  que  notre  position  nous  a  permis  d'acquérir  ou 
d'examiner;  heureux,  si  nous  avons  tracé  quelques 
lignes  utiles,  et  si  nous  pouvons  engager  des  curieux 
plus  éclairés  que  nous ,  a  suivre  un  tel  exemple.  Par  ce 
moyen  on  connaîtrait  au  moins  les  objets  antiques  que 
possèdent  bien  des  personnes  a  l'insçu  des  amateurs 
qui  se  livrent  avec  passion  à  cette  étude. 

»  Audenarde  (ou  plutôt  ses  environs)  est  une  des 
villes  de  la  Flandre,  dit  M.  De  Bast,  où  l'on  déterre 
le  plus  de  médailles,  non-seulement  des  empereurs  ro- 
mains ,  mais  aussi  des  Gaulois  et  des  premiers  rois   do 

(i)  On  sait  quels  précieux  objets  d'antiquités  ont  été  trouvés 
dans  les  fouilles  du  conduit  d'eau  de  la  graude  place  de  Tournai, 
en  Mai  et  Juin  1821.  Voyez  la  notice  explicative  de  M.  Rl.nard. 


(  M  ) 
France."  (i).  Quoiqu'on,  en  rencontre  rarement  des  dé- 
pôts considérables,  il  n'est  pas  d'année  que  des  habi- 
tans  de  la  campagne  n'en  découvrent  quelques-unes 
isolées  qu'ils  vont  vendre  en  ville  a  des  curieux,  plus 
souvent  a  des  orfèvres ,  où  malheureusement  elles  ne 
sont  que  trop  souvent  condamnées  au  fatal  creuset. 

Les  médailles  que  nous  allons  décrire,  n'ont  pas 
toutes,  comme  on  peut  bien  se  l'imaginer,  un  mérite 
égal,  tant  pour  la  rareté  que  pour  l'intérêt  historique; 
mais  au  moins ,  elles  sont  authentiques  et  trouvées  dans 
un  rayon  de  deux  a  trois  lieues  autour  de  la  ville ,  bien 
que,  pour  plusieurs  ,  on  ne  puisse  au  juste  indiquer 
l'endroit  où  elles  ont  été  découvertes ,  faute  de  ren- 
seignemens  pris  par  ceux  qui  les  ont  acquises.  Nous 
ferons  mention  de  quelques-unes  des  Consulaires  et  des 
Impériales  d'Auguste,  provenant  d'un  dépôt  découvert 
en  Juin  1816 ,  a  Quaremont,  village  montueux  a  une 
lieue  et  demie  d'Audenarde.  Nous  regrettons  que  quel- 
que curieux  n'ait  pu  acquérir  en  entier  ce  dépôt  qui , 
d'après  les  médailles  dont  nous  avons  pu  prendre  con- 
naissance, doit  être  très-intéressant. 

Pour  éviter  l'aridité  d'un  simple  catalogue ,  nous 
nous  sommes  permis  d'ajouter  a  la  description  de  quel- 
ques médailles,  les  çvéneniens  historiques  qui  s'y  rat- 
tachent, ou  l'explication  des  figures  symboliques  des 
revers,  qui,  dans  les  auteurs  que  nous  avons  pu  con- 
sulter, ont  le  plus  fixé  notre  attention. 

Indocti  discant ,  et  ament  meminisse  periti. 

i°  Stips  uncialis ,  monnaie  de  bronze  du  premier 
module.  Un  côté  représente  un  vase  de  ménage  et  un 
globule  ;  l'autre  un  bâton  recourbé  a  une  extrémité  et 

(1)  Nous  ferons  mention  de  ces  deux,  dernières  espèces  dans  un 
autre  article. 


(4*7  ) 

un  même  globule.    Ghesquiere  (i),  planche  des  prolé- 
gomènes,  fig.  5. 

Cette  pièce  est  la  I2me  partie  de  Vas  ou  livre  romaine 
qui,  avec  ses  subdivisions,  était  la  première  monnaie 
des  Romains.  Au  rapport  de  Pline  (2),  ServiusTullins, 
sixième  roi  de  Rome,  fit,  le  premier,  marquer  le  cuivre 
pour  en  faire  de  la  monnaie,  vers  l'an  2o4  de  Rome. 
D'après  le  calcul  de  l'abbe'  Ghesquiere  ,V  as  pesait  a-peu- 
près  douze  onces,  poids  de  Bruxelles.  Il  se  divisait  en 
setnisses ,  six  onces  ou  demi-livre  ;  triunx  ou  quadrans , 
trois  onces  ou  quart  de  Vas;  sextans ,  deux  onces  ou 
sixième  de  Vas;  et  en  stips  uncialis,  qui  est  une  once 
ou  la  I2me  partie  de  Vas  romanus.  Pendant  la  première 
guerre  Punique,  vers  l'an  409  de  Rome,  Vas  fut  réduit 
a  deux  onces  de  poids  ;  et  a  la  seconde  guerre  Punique, 
l'an  556,  la  valeur  intrinsèque  en 'fut  encore  rédnite  a 
une  once,  avec  le  type  de  la  tête  de  Janus  et  la  proue 
d'un  navire.  Enfin,  peu  de  tems  après,  la  loi  Papiria 
fixa  le  poids  de  Vas  à.  une  demi-once  (5).  La  pièce  que 
nous  avons  sous  les  yeux,  pèse  une  once  quatre  ester- 
lins,  poids  de  marc;  elle  est  donc  de  l'espèce  la  plus 
ancienne,  et  date  a-peu-près  de  55o  ans  avant  J.  C. 

Le  globule  qu'on  observe  aux  deux  côtés ,  est  la 
marque  de  l'unité,  comme  on  en  voit  deux  et  trois 
sur  le  sextans  et  le  quadrans. 

Ce  petit  et  rare  monument  n'appartient  point  a  la 
Flandre  pour  la  découverte,  ce  qu'on  aurait  pu  croire 
sans  un  hasard  particulier  :  il  y  a  trois  ans ,  un  labou- 
reur des  environs  d'Audenarde,  jettant  de  la  cendre  de 


(1)  Mémoire  sur  trois  points  intéïessans  de  l'histoire  monétaire 
des  Pays-Bas.  Brux. ,   1786. 
[p.)  Hist.  nat.  lib.  53.  cap.  3. 
(5)  Ghesquiere  I.  c. 


(  45o  ) 

gnésie,  lequel  tend  a  former  un  sous-sel  insoluble  avec 
l'oxide  de  cuivre.  M.  Davy  a  imaginé  d'intervertir  cette 
action  galvanique  en  accouplant  le  cuivre  avec  un  métal 
électriquement  plus  énergique,  et  qui  dût  ainsi,  comme 
dans  un  élément  de  pile,  attirer  a  lui  tout  l'effet  de 
l'oxidation.  Un  tel  métal ,  parmi  les  plus  communs ,  ne 
fcê  présentait  que  dans  l'étain,  le  plomb  et  le  zinc  ; 
mais  le  zinc  est  trop  positif  pour  exercer  une  action 
durable  (1),  et  le  plomb  ne  s'oxide  qu'a  un  seul  degré, 
tandis  que  l'étain  a  deux  oxides  et  peut  ainsi  doubler, 
sinon  la  durée  de  l'action  ,  du  moins  Fintensité  de 
l'effet  :  il  possède  en  outre  l'avantage  de  pouvoir ,  a 
l'aide  de  la  soudure ,  être  maintenu  en  contact  intime 
avec  le  cuivre ,  et  de  se  laisser  facilement  nettoyer  du 
sous-muriate  dont,  après  un  certain  tems,  il  devient 
incrusté.  M.  Davy  lui  a  donné  la  préférence  et  a  trouvé 
qu'il  suffit  de  bandelettes  d'étain  laminé,  ayant  le  cen- 
tième de  la  surface  du  cuivre ,  pour  préserver  com- 
plètement celui-ci  de  la  corrosion.  L'oxigène  de  l'eau, 
îrendu  négatif,  s'accumule  sur  l'étain  positif  et  l'hy- 
drogène positif  garantit  de  l'oxidation  le  cuivre  néga- 


'(i)  En  181g  ,  M.  de  Lcscluze,  de  Bruges,  en  faisant  doubler 
en  cuivre  un  de  ses  navires  destiné  à  faire  un  voyage  à  la  Ha- 
vane, employa  du  zinc  pour  suppléer  à  quelques  feuillets  de  cuivre 

•que ,  dans  le  moment  ,  on  ne  pouvait  se  procurer  sur  les  lieux.  Au 
retour  du  navire,  le  doublage  en  cuivre  était  fortement  oxidé; 
on   y   trouva    même  attachée    une    quantité    assez    considérable 

-d'huîtres  parvenues  à  un  degré  plus  ou  moins  avancé  de  croissance  ; 
mais  il  n'était  détruit  en  aucune  partie.,  tandis  que  le  zinc  se 
trouvait  dans  un  état  de  destruction  remarquable.  Nous  en  avons 
sou«  les  yeux  une  pièce,  adressée  au  cabinet  d'histoire  naturelle 
de  notre  Université;   elle  est  criblée  de  trous  dont  plusieurs  out 

"un  pouce  de  diamètre  et  au-delà,  et,  partout  dans  les  interval- 
les, l'épaisseur  du  métal  sain  est  à-peu-près  nulle.  Le  contenu  de 
l'article    de    M.     P".    M.  ,    nous   fait    regretter   de    ne    pas  être 

àtifoFmés  si  quelque  différence  avait  pu  être  remarquée  ,  soit 
au  suivre  -soit  au  zinc ,  aux  endroits  où  ces  deux  métaux  s'étaient 
trouvés  en  contact.  Note  communiquée. 


(43i  ) 

tif ,  et  cette  action  préservative  se  prolonge  aussi  long- 
tems  que  de  Pétain  reste  a  oxider. 

Les  lords- commissaires  de  l'amirauté  ont  pris  des 
dispositions  pour  faire  exécuter  très  en  grand ,  le  procédé 
de  M.  Davy  sur  les  vaisseaux  de  la  marine  royale. 

Cette  méthode  ingénieuse  et  dont  les  journaux  ont 
donné  des  notions  si  erronnées  qu'ils  ont  été  jusqu'à  dire 
qu'elle  consistait  a  combiner  le  cuivre  avec  du  zinc 
ou  du  fer.... ,  doit  être  de  la  plus  grande  importance 
pour  tous  les  pays  qui  ont  une  marine  militaire  ou  mar- 
chande. V.  M. 


Botanique. 

Description  déposée  à  la  Société  royale  a" Agriculture  et  de  Bo- 
tanique à  Gand ,  des  Plantes,  Arbres  et  Arbustes  introduits  en 
Belgique,  et  répandus  dans  le  commerce  depuis  i8oo<z  1824  (1). 


Année  1800. 
-Classe  I, 

Floraisou. 
Renealmia,  calcarata,  s.  ch.  2j.  Indes  orientales.  septembre. 

Marantha,  dichotoma,  s.  ch.  2j.  Indes  occidentales.  août. 

Philydrurn,  lanugiuosum ,  or.  j  Chine.  juillet,  septemb. 

Classe  II. 
Jasminum,  simplicifbliutn ,  s.  ch.  f).  juin,  juillet. 
Olea,  salicifolia,  or.  f).  juin. 
Pimelea,  rosea ,  or.  f).  Nouvelle  Hollande.  mai,  juillet. 
Codarium,  nitidum,  s.  ch.  fj.  De  la  Guinée. 
Justicia  geudarussa ,  s.  ch.  {7.  Indes  orientales.  juin,  juillet. 
salicifolia,  s.  ch.  fj.  Indes  occidentales.                  juillet. 

(1)  Abréviations  :  0,  plantes  annuelles;  £,  bisannuelles; 
ÏJ,  arbres,  arbustes  ou  arbrisseaux;  2j-,  perenues  ou  vivaces;  le» 
racines  vivent  plusieurs  années,  mais  les  tiges  sont  annuelles; 
or.,  orangerie;  pi.  t.,  pleine  terre;  s.  ch.,  serre  chaude;  s.  t., 
serre  tempérée. 


(432) 

Floraisoi». 
Salvia,  foerskoelii,  pi.  t.  Levant.  juillet. 

l'iper,  macrophylluni ,  s.  cli.  ft.  Indes  occidentales, 

Classe   III. 
Witseniacorymbosa,  or.  2J..  Cap  de  Bonne-Espérance,  mai ,  juillet. 

mai. 

, mai ,  juin. 

.  mai. 

— .  mai,  juin. 

.  juin ,  juillet* 

mai  ,  juin . 

mai ,  juin . 

juin ,  juillet. 

mai,  juin. 

-  avril,  mai. 

. ■  mai,  juin* 

, —  mai ,  juin . 

avril,  mai. 

-  juin. 


Ixia,   (1)  speciosa,   or.    1\.. 

humilis ,  or.    2J.. 

bulbocodioïdes ,  or.  %..     

obtusata,  or.  2|..     

— miniata  ,  or.  2J..     

punctata  ,  or.  2|.     

feuestrata  ,         or.  2J.. 

Gladiolus,  montanus,  or.  2J..     ■ 

1 —  crispus  ,      or.  2|..     

gracilis,       or.  2L     

brevifolius,  or.  2J..     

iridifolius  ,  or.  2]..     

viperatus,   or.  2].. 

Iris,   viscaria,  or.  21.     

Classe   IV. 

Protea,  (2)  niveni,      or.  \\.  Cap  de  Bonne-Espérance,  juin,  juill. 


or.  fr. 
or.  % 


patula , 
triternata  , 

villosa ,  or.  f}. 

teretifolia,  or.  f). 

repens,  or.  fj. 

stellaris ,  or.  \). 

grandiflora  ,  or.  f). 

canalicnlata,  or.  f} 


juin ,  juill. 

juin ,  juill. 

mai  ,juin. 

juillet,  sept. 

mai ,  juillet. 

juin ,  juillet. 

mai,  juiii. 

dècemb.,  fèv. 


Houstonia,  purpurea,  pi.  t.  2|.   Amérique  septentr.    juin,  sept. 


juillet. 

août,  octobre. 

juin,  juillet. 

juin ,   août. 

août. 


Crucianella,  iEgyptiaca,  pi.  t.  0.   Egypte 

Ixora,   parvillora,  s.  ch.   ]}.   Indes  orientales. 

/Egiphila  fœtida,  s.  ch.    \).   Indes  occidentales. 

Blaeria,  ciliaris,  or.  \).  Cap  de  Bonne-Espérance 

Pothos,  .sagittata,  s.  ch.  2J-.  Indes  occidentales. 

Struthiola,  pubescens,  or.  fj.  Cap  de  Bonne-Espérance,  juin,  août. 

Mygiuda,  rhacoma,  s.  ch.  fj.  Indes  occidentales,  août,  septemb. 

(1)  Les  Ixia  sont  des  plantes  bulbeuses,  dont  les  graines  mû- 
rissent bien  chez  nous;  les  ognons  qui  en  viennent,  ne  fleuris- 
sent qu'au  bout  de  trois  années ,  et  donnent  des  variétés  nouvelles. 

(2)  Ces  beaux  arbrisseaux  se  multiplient  par  graines,  marcot- 
tes ou  boutures. 


(  433  ) 

Classe    V. 

t  .  Floraison. 

AncliUsa ,  Capensis ,  or.  $.  Cap  do  Bonne-Espérance.  juillet. 
Cynoglossum,  lanalum,  or.  2J..   du   Levant.  juin. 

Onosma  simplicissima,  pi.  t.  2j.   Sibérie.  mars ,  juin. 

Convolvulus,  angustifoliiis,  pi.  t.  0.   Indes  Orient,  juillet,  août. 

■ paiiiculatus,  s.  ch.   f>.  Malabar.  juin,  août. 

- spithamœns,   pi.   t.  0.  Virginie,      août ,  septembre. 

ïpoiuaea,  campanulata,   pi.  t.  0.  Indes  orient,   août,  septembre. 

■ heterophylla,  8.  ch.   £.  Cuba.  juillet. 

Polemouium,  sibiricum.,  pi.  t.   2[.   Sibérie.  juin. 

Nauclea,  oriental is,  s.  ch.  \).  Indes  orientales. 
Nicotiana,  odorata,  or.   2J..  Nouvelle  Hollande,   mai,  septembre. 
Solannm,  pseudo-lycopersicura  ,  pi.  t.  0.        juillet,  septembre. 
Nycterium,  lambertii,   s.  ch.  \).  Mexique.  juin,  août. 

Ardisia,  solanacea,  s.  ch.  fj.  Indes  orientales.  juillet,  août. 
Chironia  angustifolia,  or.  f).  Cap  de  Bonne-Espe'rance.  juin,  août. 
Sabbatia,  calycosa,  pi.  t.  $.  Amérique  septentr.  juillet,  sejytemb. 
Fhylica,  horifcontalis,  or.  f}.  Cap  de  Bonne-Espérance,  juin ,  août. 

•* eriophoros,    or.  f}. août ,  novemb. 

—    squarrosa  ,   or.  f).  ■ août,  novemb. 

Diosma ,  linearis ,  or.  ft.  mars,  juillet. 

ericifolia,  or.  fj.  novemb.,  décemb. 

virgala,  or.  f}.  mai,  juin. 

■ fumosa ,  or.  fj.  mars,  juillet. 

Brunia  ,  speciosa,  or.   f}.  '• ■— 


Galax,   cordifolia,  pi.  t.  2J..   Virginie.  juin,  juillet. 

Ribes,  resinosum,  pi.  t.  2L  Amérique  septentrionale,  avril,  mai. 
Viola ,   pygmaea ,  pi.  t.   2j..  mai. 

variegata,  pi.   t.  2L. mai ,  juin. 

palleus  ,  pi.  t.   2)..  Sibérie.  mai,  juin. 

Gardénia ,  longitlora ,  s.  ch.  f).  Sierra  Leone.       août,  septemb. 
Coralluma  ,  adscendens,  s.  t.  f).  Indes  orientales.  juillet. 

Gentiana,   adscendens,  pi.  t.   2)..   Sibérie.  juin, juillet. 

Sauicula ,   canadensis ,  pi.  t.  2j..   Canada.  mai,  juillet. 

Caucalis  ,  platycarpos  ,  pi.   t.  0.    Levant.  juillet,  août. 

Heracleum ,  taurîcum  ,  pi.  t.  2J..  Tauride  mai. 

Rhus,  pubescens,   or.  ft.  Cap  de  Bonne-Espérance. 

•  rosmarinifolium ,  or.  f}. 

Pharnaceum  lineare,  or.  f).  Cap  de  Bonne-Espérance,  juin,  sept. 
Stalice,   scoparia,  pi.  t.   2J..  Sibérie.  juillet,  août. 

XIul°  et  XIIme  livraisons.  29 


(434) 

Floraison. 
Statice,  purpurata,  or.  2J..  Cap  île  Bonne-Espérance,  juin,  juillet. 

Classe  VI. 

Pitcairnia,  média,  s.  ch.  f}.   Indes  orientales.  juin. 

Tradescantia,  erecta  ,  pi.   t.   ®.  Mexique.  juillet,  août. 

Massouia,  muricata,  or.  2]..  Cap  de  Boune-Espérance.  mars,  avril. 

Amaryllis,  capensis ,  or.  2].-         mars,  juin. 

Allium,  striatum,  or.  2}..  mai,  juin. 

Buonapartia  juncea,  s.  ch.   2J..  Pérou. 

Lilium  ,  nionadelphum ,  pi.  t.   2J..  Mont  Caucase,    juin,  juillet. 

Hypoxis,  obliqua,  or.  2L.  Cap  de  Bonne-Espérance,  juin,  juillet. 

Eriospermum,  latifolium,  or.   2J..     — juin,  août. 

Ôrnithogalum,  révolu tum,  or.  2]..     juin,  juillet. 

• odoratum  ,   or.  2J..     ■  mai ,  juin. 

rupeslre,    or.    2|-       mai,  juin. 

Scilla ,    sibirica ,    pi.    t.    2f..         Sibérie.  mars ,  avril. 

Asphodelus,  altaicus,  pi.  t.  2]..  ■ ■  mai  ,  juin. 

Ànthericum,  costatum,  or.  2j--  Cap  de  Bonne-Espérance,      avril. 

paniculatum,  or.  2J-.  Nouvelle  Hollande,  juin,  sept. 

Drimia  ,   elata  ,    or.    2j..  Cap  de  Bonne-Espérance,    juin,  juillet. 
Lachenalia,  lanceaefolia,  or.  21.   mars,  avril. 

imifolia  ,  or.  2J..       ■  mais  ,  avril. 

rosea  ,   or.    2]..  avril ,  mai. 

Aloé,    mirabilis,  s.   t.     2J-. mai ,  juillet. 

Doryanthes,  excelsa,  s.  ch.  f).  Nouvelle  Hollande,  juillet,  août. 
Duroia,  eriophila,  s.  ch.  f).   Surinam. 

Berberis,  chinensis,  pi.   t.  fj.  Chine.  mai ,  juin. 

Wurmbasa,  capensis,  or.  2]..  Cap  de  Bonne-Espérance,  /nai,  juillet. 

Classe    VIII. 

Corraea,   viridiilora,  or.  T}.  Nouvelle  Hollande.         avril,  juillet. 

Jambolifera,  pedunculata,   s.  ch.  \).  Indes  orientales. 

Amyris,  lloribunda  ,  s.  ch.  f}.  Indes  occidentales. 

Dodonœa  ,  heterophylla  ,   or.  f).  Nouvelle  Hollande. 

Erica  ,   mutabilis,   or.  fj.  Cap  do  Bonne-Espérance,  avril,  juillet. 

nivenia ,      or.   f).  février,  juin. 

flava  ,  or.   ^. septemb.,  octob. 

lenuiflora.,  or.  \\.  — avril,  juin. 

— — —     hibbertia  ,    or.  \\.  juin  ,  août. 

— r— -     lanuginosa,  or.  fj. septemb. ,  janvier. 

phylicoides,    or.  ft. —  avril,  juin. 


or. 

or.  ft 

or.  fj 

or.  |j 

or.  ft 
or. 


or.  r? 

or.  Tj 

or.  ft 

or.  fj 

or.  fj 

or.  ft 

or.  Tj 

or.  ft 


Erica,  latifolia,  or.  ft 
rotundifolia,  or.  f) 

satureifolia 

barbata, 

; ursina, 

pateiis  , 

■ staminea, 

—    divaricata, 

proboscidea ,    or.  f) 

llorida,  or.  f) 

■ smithiana, 

n savileia , 

; vernix, 

■ •   reflexa  , 

— lambertia, 

; venustata , 

arbutiflora  , 

elegans, 

■ andromedaeflora,  or. 

bracteata,        or.  f) 

tetragoua, 

quadrata, 

lucida  , 

■ acula  , 

•  fîmbriata , 

emarginata ,     or. 

mucronata ,     or. 

lauata,  or. 

horizon  talis  ,  or. 

ilaccida ,  or. 

laxa  , 

',  rigida  , 

'    caracola  , 

picta  , 

foliosa  , 

pilosa , 

birta , 

■    speciosa  , 

praestans  , 

■ blanda  , 


or. 
or. 
or. 
or. 
or. 


fi 
fi 
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magnifies 


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or.  \i 


(  435  ) 

Floraison. 
Cap  de  lîoune-Espëraiice.  mai,  audt. 

■ mai,   aodt. 

•  mai,  août. 

— mai,  août, 

mai,  août. 

~ mars ,  Juin. 

■  juillet,  novernb. 

— mars,  mai. 

— ■  juillet,  août. 

mal  f  septembre. 

■  juin,  juillet. 

juin,  juillet. 

— janvier,  mai. 

■ juin  ,  juillet. 

mai,  juillet. 

■ juin. 

—  août. 

février,  juillet. 

mai,  juin. 

mai ,  juin. 

juin,  juillet. 

juin ,  juillet. 

juillet,  septemb. 

mai  ,  juillet. 

mars,  juin. 

juin  ,  octobre. 

juillet,  novernb . 

mai,  août. 

août ,   octobre. 

juillet,  août. 

octobre,  février. 

•  juillet,  août. 

septembre. 

janvier,  avril. 

mai,  juillet. 

juillet ,  septemb. 

mai ,  juin. 

juillet,  septemb. 

novembre. 

avril,  septemb. 

juin. 


Erica,  hyacinthoïdes,  or.  fj 

fulgida ,  or.  fj 

rosea  ,  or.  fj. 

viridis,  or.  pj. 

■  virescens,       or.  fy. 

echiiflora  ,       or.  fj. 

cliffordia  ,       or.  fj. 

shamioneia ,   or.  ff, 

or.  fj. 
or.  ft. 
or.  fj. 
or.  ft. 
or.  ft. 
or.  îj. 
or.  ft. 
or.  T}. 
or.  ft. 
or.  Tj. 
or.  f). 


(  436  ) 

Floraison. 
Cap.de  Bonne-Espérance,  juin,  août. 
juin,  août. 


-  aurea  , 

-  spiralis  , 

-  rugosa  , 
'•"  forraosa , 

-  insulsa , 

-  pellucida , 

-  ignescens , 

-  tratisparens 

•  erubesceus, 

•  clavata , 

•  priûceps , 

-  scabriuscula ,  or.  \). 

■  ferruginea  ,      or.  T). 

■  acurainata,     or.  ]}. 
Irbyana ,         or.  f). 

mfundibuliformis,  or. 
filaraentosa,  or.  fj. 
talmiflora ,  or.  f}. 
lychnidea  ,  or.  f). 
mellifera  ,  or.  T?. 
trivialis  ,  or.  ft. 
triceps  ,  or.  f). 

flbribunda  ,  or.  \). 
imperialis,  or.  f}. 
imbuta  ,  or.  p}. 

Sulphurea,  or.  f). 
cïinita,   (1)     or.  f}. 


T?. 


juin,  octobre, 
inai,  septemb. 
septembre, 
mars ,  juin, 
septembre, 
juin, 
juillet,  septemb. 
juillet t  septemb. 
juillet,  novemb. 
août,  décembre, 
juin ,  juillet, 
novemb. ,  janvier, 
janvier,  juin, 
mai. 
mars  ,  juillet, 
mars ,  juin, 
mai,  octobre, 
juillet,  octobre, 
avril ,  juillet, 
juillet,  octobre, 
juin,  octobre, 
juin,  juillet, 
juillet,  novemb. 
mai,  septembre, 
juin ,  juillet, 
avril,  mai. 
avril,  mai. 
avril,  mai. 
juin,  juillet, 
mai ,  septembre, 
mai,  septembre, 
mai,  septembre, 
mai,  septembre. 


(1)  Nombre  de  ces  bruyères  sont  déjà  acclimatées  par  un  long 
séjour  chez  nous;  malgré  les  grands  soins  qu'on  leur  donne,  leur 
acclimatation  n'est  pas  toujours  heureuse;  on  doit  leur  conservation 
aux  salles  bien  aérées  et  sur-tout  bien  éclairées  du  haut,  où  elles 
sont  déposées,  ainsi  qu'aux  soins  que  l'on  prend  de  les  garantir 
du  froid  pendant  l'hiver,  et  de  les  arrosur  avec  précaution,  sans 
jamais  mouiller  la  tête  de  la  plante. 


(457  ) 

Floraison. 
Lachnaea,purpurea,  or.  f).  Cap  de  Bonne-Espérance,  juin,  juillet. 
Polygonum,  crispulum,  pi.   t.   2j-  Sibérie.  juillet,  août. 

erectum  ,   pi.  t.  2j_.  Amérique  septeul.  juillet,  août. 

La  suite  de  Vannée  1800,  dans  le  prochain  cahier. 


Botanique. 

Extrait  d'une  notice  lue  à  la  Société  royale  d'Agriculture  et  de 
Botanique  de  Gand,  par  un  de  ses  Membres. 


JV1.  le  baron  du  Mont  de  Courset,  auteur  du  Culti- 
vateur botaniste,  s'est  plaint  autrefois  de  l'inexactitude 
avec  laquelle  étaient  forme's  les  catalogues  des  collée-    , 
trons  botaniques  de  plusieurs  jardiniers  a  Londres;  il 
reçut  d'eux  entr'autres  plantes  le  Géranium  tomentosum , 
tantôt  sous  le  nom  d; 'odoratum ,  et  tantôt  sous  celui  de 
Géranium  fragrans.  Il  les  accuse,  et  peut-être  avec  un 
peu  d'humeur,  de  donner  a  une  seule  et  même  espèce 
de  plantes,  plusieurs   noms    différons,  sur-tout,   dans 
les  genres   composés  de   beaucoup  d'espèces  agréables 
par  leurs  fleurs  et  leur  forme  j   il  conseille  aux  ama- 
teurs d'aller  chercher  eux-mêmes  les  plantes  qu'ils  dé- 
sirent tirer  de  l'Angleterre,  ou  d'y  envoyer  leurs  jardi- 
niers ;   il  se  fâche  enfin ,  de  ce  que  la  multiplication 
étonnante  de  plantes  nouvelles ,   et  de  grand  prix  dans 
le  principe,  les  fait  promptement  descendre  a  une  petite 
valeur  ;   sous   ce  dernier   point  de  vue   on  se  plait  a 
admirer  le  génie  d'une  nation  industrieuse  et  commer- 
çante ,  dont  nos  cultivateurs-fleuristes ,  par  de  fréquens 
voyages ,  ont  appris  la  méthode  de  multiplier  assez  ra- 
pidement les  plantes  rares  en  Belgique. 

On  a  remarqué  au    dernier  salon  d'hiver  à  Gand, 


(  «8  ) 

plusieurs  plantes  nouvellement  introduites  et  seulement 
connues  sous  le  nom  donné  dans  le  catalogue  des  col- 
lections marchandes  de  Londres  ;  leur  nouveauté  n'a 
pas  été  contestée;  seulement  on  a  eu  la  curiosité  de 
faire  l'analyse  de  l'une  des  plantes  citées ,  et  d'en  éta- 
blir la  comparaison ,  pour  être  en  droit  de  taxer  d'in- 
exactitude les  catalogues  des  collections  de  fleurs  de 
Londres,  et  prouver  en  même  teins,  que  M.  du  Mont 
de  Courset  n'avait  pas  toujours  tort  dans  ses  accusa- 
tions. 

Dans  la  flore  de  Cochinchine  de  M.  de  Loureiro, 
a  laquelle  est  jointe  la  description  de  plantes  obser- 
vées dans  la  Chine,  dans  l'Afrique  orientale  et  aux 
Indes,  se  trouve  la  description  de  deux  Primula,  genre 
qui  appartient  a  la  pentandrie  monogynie. 

La  première  espèce  de  M.  de  Loureiro  n'est  autre  chose 
quel' Hjdrangea  hortensis  de  Smith ,  Y  Hortensia  speciosa 
de  Persoon,  V Hydrctngea  mutabi lis  des  jardiniers. 

Le  Primula  sinensis,  la  seconde  espèce  de  Loureiro, 
a  selon  lui  comme  caractères  spécifiques  ;  folia  ouata 
integerrima,  integumentata ,  petiolata,  iiwolucra  di~ 
phylla  polyjlora. 

Et  il  est  décrit  dans  le  Sjstema  vegetabilium  de 
Rômer  et  Schulter,  de  la  manière  suivante  : 

Radix  crassa,  subdivisa,  scapus  6  poil,  foliis  lon- 
gior ,  subterjlores  ;  folia  radicalia  cordato-ovata  acu- 
minata  glabra y  petiolis  longis  erectis.  Involucrum  jlo- 
ribus  subœquale.  Cor.  alba,  hypoçraterijormis ,  limbo 
piano  5-6  fido  ,  laciniis  acutis  inlegris ,  2J.. 

C'est  sous  le  nom  de  Primula  sinensis,  que  l'on  a 
vu  avec  plaisir  le  Primula ,  exposé  par  M.  J.  Ve  leeu- 
wen  ,  jardinier- cultivateur  a  Gand ,  qui  enrichit  de 
tems  à  autre  nos  collections,  dès  que  des  nouveautés 


en  botanique  paraissent  dans  celles  de  Londres  ;  ce 
cultivateur  estimable  a  permis ,  dans  L'intérêt  de  la 
botanique,  de  faire  l'analyse  de  la  fleur  de  cette  plan- 
te, qui  réunit  tous  les  caractères  du  genre  Primula  , 
mais  qui  est  évidemment  d'une  espèce  bien  différente 
du  Primula  sinensis. 

Il  se  pourrait  bien  que  cette  espèce  de  Primula  n'eût 
pas  été  décrite. 


GUILLLAUME    K 

Tableau  exposé  au  palais  de  S.  M.  le  Roi ,  à  Bruxelles; 
par  M.   le  chev.   Odevaere. 


(jtuillaume  de  Nassau  ,  Prince  d'Orange ,  qui ,  par 
ses  grandes  qualités  et  ses  services ,  avait  mérité  la  con- 
fiance des  peuples,  est  mis  a  la  tête  du  Gouvernement 
par  les  états-généraux. 

Avant  de  détailler  ce  tableau ,  nous  citerons  quelques 
passages  du  discours  que  M.  Bitaubé  a  mis  au-devant 
de  son  poëme  de  Guillaume  de  Nassau.  On  ne  saurait 
parler  plus  dignement  et  du  héros,  et  de  ses  successeurs. 

«  De  tous  les  héros  qu'offre  l'histoire ,  il  en  est  peu 
»  que  l'on  puisse  mettre  a  côté  du  fondateur  de  la  Ré- 
»  publique  des  Provinces-Unies.  L'étendue  de  son  gé- 
»  nie,  la  hauteur  de  son  projet,  les  obstacles  qu'il 
»  voyait  s'accumuler  a  chaque  pas ,  sa  constance  et 
»  l'intrépidité  avec  lesquelles  il  reparaissait  après  des 
»  défaites  qui  semblaient  devoir  l'anéantir,  ses  malheurs 
»  personnels  au  milieu  des  calamités  publiques ,  tontes 


(44o) 

»  ces  considérations  le  tirèrent ,  si  l'on  peut  s'exprimer 
»  ainsi  ,  de  la  foule  des  grands  hommes. 

»  Quant  a  ses  successeurs ,  l'histoire  ne  présente  au- 
»  cune  famille  qui  ait  produit  autant  de  héros.  D'ordi- 
»  naire  ils  ne  se  suivent  qu'a  de  longs  intervalles.  Les 
»  trophées  des  Nassau  se  touchent  :  et  (ce  qui  les  dis- 
»  tingue)  leur  valeur  s'illustra  moins  encore  par  des 
»  conquêtes  que  par  la  défense  d'une  nation  libre.  Ils 
»  triomphèrent  tour  a  tour  des  plus  formidables  puis- 
)>  sances.  Par  une  destinée  singulière,  la  Hollande, 
»  dans  son  berceau  comme  dans  son  accroissement ,  se 
»  vit  plus  d'une  fois  au  bord  de  sa  ruine  :  mais  comme 
»  si  tous  ses  Princes  avaient  eu  la  même  ame ,  c'est  dans 
»  les  plus  grands  orages  que  leur  valeur  a  le  plus  éclaté. 

»  D'un  autre  côté ,  si  l'on  considère  la  nation  qu'ils 
»  défendirent ,  il  n'en  est  point  qui  ait  fait  de  plus  grands 
»  efforts  pour  sa  liberté.  L'ancienne  Grèce  attaquée  par 
»  les  Perses,  eut  a  combattre  des  armées  innombrables  ; 
»  mais  elle  était  florissante,  guerrière,  tandis  que  cette 
»  multitude  d'ennemis,  énervés  eux-mêmes  parle  luxe, 
»  n'avaient  qu'un  fantôme  de  chef,  plus  enivré  de  sa 
»  puissance  que  capable  d'en  profiter.  Les  Suisses  ont 
»  joui  de  l'avantage  d'être  entourés  de  montagnes  et 
»  de  rochers.  Mais  dans  la  fondation  des  Provinces- 
»  Unies,  les  Hollandais  avaient  en  tête  un  monarque 
»  redoutable  par  ses  forces  et  par  sa  politique,  des  ar- 
»  mées  et  des  généraux  formés  a  l'école  de  Charles 
»  Quint,  un  chef  expérimenté  et  fameux  par  de  bril- 
»  lantes  victoires  :  et  ce  ne  fut  que  deux  provinces  qui 
»  soutinrent  d'abord  tout  le  poids  de  cette  guerre , 
)>  sans  en  être  accablées.  Quand  ensuite  elles  s'asso- 
»  cièrent  cinq  provinces,  on  les  vit  combattre  tour-a- 
»  tour  trois  illustres  capitaines,  et  conserver  leur  perse- 


(  44 1  ) 

»  vérance  dans  les  plus  grands  malheurs.  Ce  n'est  pas 
»  tout:  pendant  que  la  République,  a  peine  établie, 
»  avait  encore  a  lutter  contre  de  puissans  ennemis ,  ses 
»  vaisseaux  voyageaient  dans  toutes  les  mers  ,  abor- 
»  daient  au  Brésil ,  au  Pérou ,  arrivaient  a  l'Inde ,  et 
»  cherchaient ,  pour  y  pénétrer  par  le  Nord ,  des  rou- 
»  tes  nouvelles 

»...  En  un  mot,  comme  les  princes  d'Orange 
»  avaient  bien  mérité  de  la  nation ,  la  nation ,  par  son 
»  intrépidité ,  qu'aucun  revers  ne  pouvait  abattre ,  se 
»  montrait  digne  de  ses  chefs." 

Le  moment  choisi  par  l'artiste,  est  celui  où  Guillaume 
de  Nassau,  prince  d'Orange,  est  proclamé  par  les  dé- 
putés des  provinces  et  des  villes ,  chef  du  gouverne- 
ment (1).  Les  chanceliers  présentent  au  prince  l'épée 
du  commandement,  qu'il  n'accepte  que  pour  l'employer 
a  la  défense  de  la  patrie,  ainsi  que  le  traité,  première 
base  de  l'union  des  provinces. 

Guillaume,  debout,  sous  un  dais,  est  accompagné 
des  personnes  de  sa  suite ,  et  de  quelques  guerriers  les 
compagnons  de  ses  travaux  et  de  sa  gloire.  L'un  d'eux 
tient  l'étendard  aux  armes  du  héros  :  vis-a-vis  est  le 
groupe  des  députés,  suivis  de  hérauts  tenant  les  ar- 
mes des  provinces  et  des  villes  qxii  concoururent  au 
traité  d'Utrecht ,  et  qui  furent  le  duché  de  Gucldrc , 
la  Frise  et  les  ommelandes ,  l'Overisscl ,  les  provinces 
de  Hollande  et  de  Zélande  ,  Utrecht,Nimègue, le  comté 
de  Zutphen  ,  Groningue,  etc.  (2). 

(1)  «  Les  États  de  Hollande  et  Zélande  avaient  reconnu  pour 
»  leur  chef  le  prince  d'Orange;  ils  lui  avaient  donne  une  autorilr 
s  presque  souveraine,  pur  un  acte  intitule  :  Union  et  alliance  entre 
»  les  États  et  les  villes  de  Hollande  et  de  Zélande,  le  5  Avril  if>-Q." 
(Histoire  des  révolutions  des  Pays-Bas,  liv.  b.) 

(2)  «  Le  traité  fut  signé  depuis  par  les  députés  de  Gand , 
»  par  les  villes  de  Bruges,  Ypres  ,  Breda  et  autres."  ( Hist.  des 
Pays-Bas,  par  Van  Meteren.J 


(44M 

Le  portrait  de  Guillaume  est  aussi  ressemblant  qu'il 
a  e'té  possible  de  le  faire ,  d'après  des  gravures  et  des 
médailles  de  son  tems.  Quant  au  costume ,  il  est  celui 
des  Espagnols,  alors  généralement  adopté. 


RÉPUBLIQUE  DES  CHAMPS  ELYSEES  OU  MONDE  ANCIEN  , 

Par  M.  De  Grave,  ancien  conseiller  au  conseil  de  Flandre, 
membre  du  conseil  des  anciens,  etc.  Gand,  1806.  5  voL  in-8°. 

NOTES    INÉDITES. 


Suite;  voyez  la  9me  et  iome  livraisons,  pag.  371. 

1VJ.es  études  m'ont  déjà  fourni  une  foule  de  données 
qui  font  juger  que ,  peut-être  a  de  rares  exceptions  près  , 
les  vaisseaux  étrangers,  venant  du  Midi,  n'étaient  pas 
admis  a  dépasser  le  détroit  de  Calais,  pour  entrer  dans 
la  mer  du  Nord;  que  toute  cette  mer,  y  compris  celle 
dite  de  l'Allemagne,  était  comme  une  vaste  rade,  close 
et  uniquement  réservée  a  la  navigation  des  nationaux 
d'alors;  il  paraît  même  que  les  vaisseaux  étrangers  de 
la  mer  Baltique,  n'y  entraient  jamais,  et  ne  pouvaient 
point  passer  le  Sund.  C'était  le  plus  important  et  le  plus 
sûr  des  moyens  de  défense  et  de  sécurité  pour  un  Gou- 
vernement dont  tous  les  grands  établissemens,  tous  les 
chefs-lieux,  tous  les  départemens  du  pouvoir  étaient 
établis  ou  sur  les  bords  ou  dans  les  îles  de  cette  mer 
intérieure.   Dans  son  état  actuel ,  le  détroit  de  Calais 
serait  difficile  a  garder;  mais  on  peut  remarquer,   sur 
les  anciennes  cartes  des  XVII  Provinces  Belgiques ,  la 
trace  de  deux  bancs  de  sable  qui,  à  mer  basse,  parais- 
sent être,  maintenant  encore,  a  découvert;  ils  sont  jus- 
tement au  milieu  de  la  partie  la  plus  resserée  du  détroit, 


(  443  ) 

et  le  nom  de  FFissen  OU  IVissan,  qui  se  trouve  a 
côté,  donne  fortement  lieu  de  croire  qu'on  entretenait 
sur  ces  bancs  des  retrnnchcmens  de  fascinages,  nom- 
més dans  l'ancien  langage  du  pays,  Rys-  ou  Wisserv- 
schanzen ,  dans  le  genre  du  fameux  liysbanc ,  qui  na- 
guères  formait  une  si  bonne  défense  pour  le  port  de 
Dunkcrke.  Les  objections  tirées  des  violentes  marées  et 
des  mouvemens  fougueux  des  eaux  dans  le  détroit,  sont 
nulles  ;  nous  avons  affaire  ici  a  cette  race  d'hommes 
supérieurs  qui  ont  conquis,  sur  la  mer  et  les  eaux  de 
l'intérieur ,  la  Hollande  et  les  îles  ;  qui  ont  élevé  ces  digues 
de  sables,  ces  dunes  qui,  tout  autour  de  nous,  bor- 
dent la  mer,  et,  par  des  nivellemens  et  des  déséche- 
mens,  ont  créé  presque  toutes  les  autres  parties  de  la 
Belgique  ;  disons-le  :  qui  ont  conquis  le  sol  de  l'Europe 
sur  la  nature  sauvage,  l'ont,  en  quelque  sorte,  appri- 
voisé et  mis  en  harmonie  avec  les  besoins  et  les  com- 
modités de  la  civilisation  qu'eux-mêmes  ont  inculquée 
aux  habitans  qu'ils  y  ont  trouvés  ou  qu'ils  y  ont  établis. 
Ainsi,  c'est  dans  les  ports  de  la  Manche,  situés  au 
midi  de  Calais,  que  débarquaient  les  étrangers  venant 
de  la  Méditerranée  et  des  ports  de  l'Océan,  et  que  des 
relations  religieuses  ,  commerciales  ou  politiques  ame- 
naient dans  nos  contrées.  Le  nom  destapels  (magasins), 
que,  depuis,  les  français  ont  écrit  Estaples  et  Étaples  , 
se  présente  d'abord  la  comme  un  lieu  d'admission  .  un 
entrepôt  des  marchandises;  Estaples  est  a  l'embouchure 
de  la  rivière  le  Chan,  et  ce  nom  a  été  conservé  dans 
les  mots  français  change,  échange  et  chance,  qui  se 
rapportent  essentiellement  aux  transactions  commercia- 
les. En  remontant  le  Chan  et  a  une  lieue  de  son  em- 
bouchure, on  arrive  à  Monstrcuil;  VS  conservée  dans 
la  vieille  orthographe,  prouve  qu'il  ne  s'agit  pas  ici  de 


(  444  ) 

quelque  mont,  mais  de  montrer  (monstrer),  et  que  le 
nom  de  Montreuil  se  compose  des  mots  montre  et  lieu;  ce 
dernier  e'crit  a  rebours  pour  faciliter  la  prononciation  ;  faire 
montre  de  marchandises ,  c'est  les  étaler ,  les  exposer  pour 
la  vente.  Etaples  était  donc  le  lieu  de  décharge  et  d'em- 
magasinage ,  et  Montreuil  le  lieu  de  la  vente ,  l'empla- 
cement de  la  grande  foire  des  marchandises  étrangères; 
et  remarquez  qu'une  langue  de  terre  ou  plutôt  de  côte, 
qui  s'étend  depuis  Montreuil  jusqu'à  Calais  et  qui,  par 
sa  position  géographique,  devrait  appartenir  a  l'Artois  ou 
a  la  Flandre,  appartient  a  une  province  plus  éloignée, 
plus  extérieure  de  la  vieille  Belgique ,  à  la  Picardie  ou 
l'Ainbianois  ;  ce  qui  semble  indiquer   que  toute   cette 
langue  de  terre  était,  a  l'égard  de  l'intérieur  du  pays, 
dans  la  même  position  que,  de  nos  jours,  les  villes  et 
territoires  que  nous  appelons  ports  francs.   Il   semble 
encore  que  l'Artois  tout  entier  formait  un  espace  ren- 
fermé entre  deux  ligues  de  douanes;  que  les  limites  oc- 
cidentales et  méridionales  en  étaient  la  ligne  extérieure  , 
et  les  limites  orientales  et  septentrionales  la  ligne  inté- 
rieure. Il  est  plus  que  probable  que  le  nom  de  Douai 
a  donné  naissance  au  mot  douanes;  car  notez  que  cette 
ville  forme,  en  quelque  sorte,  un  nœud  entre  les  fron- 
tières de  l'Artois,  celles  de  la  Flandre  et  celles  du  Hai- 
naut,  province  alors  toute  militaire  et  où,  du  tems  des 
Romains  encore,   aucun   commerce   n'était  toléré;  ce 
qu'exigeaient  naturellement  les  institutions  d'une  pro- 
vince qui  n'était,  pour  ainsi  dire,  qu'un  vaste  camp, 
occupé  par  les  milices  régulières  et  d'élite,  les  strélitz, 
les  janissaires  du    Gouvernement  d'alors  ;   on  connaît 
l'armée  de  60,000  grenadiers  de  sept  pieds ,  qu'ils  op- 
posèrent aux  Romains  qui,  a  leur  aspect,  se  prépa- 
rèrent bien  plus  a  mourir  qu'a  combattre;  on  sait  que 


(445  ) 

la  puissance  de  Rome,  parvenue  a  son  apogée,  faillit  se 
briser  contre  cette  milice  (lesNerviens)  qui  ne  pût  être 
vaincue  qu'a  l'aide  d'un  stratagème ,  quoique  ses  flancs 
eussent  été  mis  a  découvert  par  la  trahison  des  Cham- 
penois et  la  défaite  des  Artésiens. 

En  revenant  a  nos  côtes  maritimes,  remarquons,  en 
passant,  qu'^?7vw  s'appelait  At-recht;  recht  veut  dire 
justice  et,  en  même  tems ,  droit,  impôt  ou  tribut,  de 
même  qu'en  français  on  dit  :  faire  droit  et  payer  un 
droit;  payer  tribut  se  traduit  aussi  par  schat-  ou 
scliatting  betaelen;  peut-être,  dans  le  langage  d'alors, 
par  le  mot  At-recht  lui-même.  Mais ,  que  le  mot  At  si- 
gnifiât alors  soit  le  pouvoir  qui  rendait  la  justice  ou 
prélevait  le  tribut,  soit  la  chose  sur  laquelle  il  y  avait 
des  contestations  a  juger  ou  un  tribut  a  payer  ou  l'impôt 
lui-même,  toujours  est  il  vrai  que  nous  voici  déjà  dans  le 
pays  de  cet  At,  quel  qu'il  soit,  dans  PAt-landt,  V At- 
lantide des  méridionaux  5  sans  parler  ici  de  la  ville  d'Ath, 
sur  les  confins  de  la  Flandre  et  du  Hainaut ,  il  y  a  déjà 
un  village  d'At-in  a  côté  de  Montreuil,  et  les  Romains, 
qui  ont  forgé  ou  défiguré  tous  les  noms  qu'ils  nous 
donnent,  ont  cependant  conservé  ce  mot  principal,  At9 
dans  le  nom  d'At-rebates  qu'ils  ont  donné  aux  Arté- 
siens. Comment  d'ailleurs  s'appelait  la  Province  en  lan- 
gue du  pays?  Il  est  trop  clair  que  la  prétendue  sub- 
mersion de  l'Atlantide  est  une  fiction  au  moyen  de 
laquelle  seule  des  chefs  de  nations,  des  chefs  de  nos  co- 
lonies ont  pu  réussir,  lorsque  ces  nations,  ces  colonies 
étaientmurespourl'indépendance,a  les  détacher  de  nous, 
delà  mère-patrie,  de  la  terre  de  salut,  du  séjour  de  la 
suprême  toute-puissance,  dispensatrice  de  tous  les  biens 
et  de  tous  les  maux  que  les  hommes  pouvaient  avoir 
a  espérer  ou  a  craindre  pendant  la  vie  et  après  la  mort. 


C  446  ) 

C'est  bien  la  ce  que  notre  pays  et  la  puissance  qui  y 
résidait,  ont  été  pendant  bien  des  siècles,  pour  tous 
les  habitans  du  globe. 

Les  instructions  que  nos  missionnaires  et  nos  conduc- 
teurs de  colonies  répandaient  au  loin ,  parmi  les  na- 
tions, aboutissaient  toutes  a  cette  mère-patrie,  qui,  a 
la  longue.,  devint  ainsi  le  centre  de  tous  les  intérêts 
temporels  et  spirituels,  de  toutes  les  affections  morales, 
de  tous  les  devoirs  civils  et  religieux  j  pour  ces  mis- 
sionnaires eux-mêmes  comme  pour  leurs  descendans  et 
pour  les  hommes  et  les  générations  formés  par  eux , 
l'attente  de  l'entrée  ou  de  la  rentrée,  pendant  la  vie  ou 
après  la  mort,  dans  ce  séjour  des  bienheureux,  dans 
ce  lieu  de  la  récompense  du  bien  comme  de  la  punition 
du  mal ,  était  le  grand  objet  de  tous  les  désirs ,  de 
toutes  les  espérances,  de  toutes  les  craintes;  c'était  le 
juotif  créateur  et  le  mobile  de  tous  les  ressorts  qui  met- 
taient en  jeu  et  maintenaient  en  activité  les  facultés 
intellectuelles  de  l'espèce  humaine. 

Les  institutions  que  l'histoire  nous  montre  chez  des 
portions  de  la  société  humaine  qui.,  plutôt  ou  plutard, 
se  sont  détachées  de  nous  pour  se  créer  une  existence 
indépendante,  ne  sont  que  des  fragmens  de  ces  grandes 
institutions  primitives,  ou  des  créations,  quelquefois 
heureuses  mais  plus  souvent  bizarres  et  fantasques, 
entées  sur  de  semblables  fragmens;  il  ne  faut  pas  d'autre 
effort  que  de  ne  pas  fermer  les  yeux  a  l'évidence  ,  pour 
reconnaître  ce  fait  dans  les  écritures,  les  monumens  et 
les  traditions  de  tous  les  peuples  anciens  et  modernes. 
Que  nous  sommes  encore  loin  de  la! 

Un  jour  viendra  cependant  où  cette  proposition  et  ses 
développemens  seront  l'histoire.  De  grandes  scissions 
avaient  déjà,  a  plusieurs  reprises,  fortement  agité  l'es- 


tm  ) 

pèce  humaine  et  fait  verser  des  torrens  Je  sang,  lors- 
que l'existence  momentanée  et  les  vastes  ravages  des 
..  Romains  vinrent  la  jetter,  pour  des  siècles,  dans  d'hor- 
ribles convulsions;  pour  faire  renaître  le  calme,  il  a 
fallu  peut-être  couvrir  d'un  voile  les  causes,  la  nature 
et  les  grandes  circonstances  de  ces  convulsions,  qui 
firent  tomber  en  dissolution  et  morcelèrent  les  grandes 
masses  ;  force' ,  comme  on  l'était ,  d'admettre  ces  mor- 
célemens  comme  élément  principal  d'une  nouvelle  or- 
ganisation sociale,  il  fallait,  pour  faire  cesser  les  résis- 
tances, pour  laisser  aux  impressions  le  teins  de  s'effacer, 
faire  oublier,  du  moins  momentanément,  et  les  institu- 
tions qui  faisaient  de  ces  morcélemens  le  plus  grand  et 
le  plus  irrémissible  des  crimes,  et  le  pays  où  elles 
avaient  pris  naissance ,  et  les  hommes  qui  étaient  a  la 
tête  de  ces  institutions;  il  a  fallu,  mais  plus  en  grand, 
faire  subir  une  autre  submersion  morale  a  l'Atlantide. 

Maintenant  que,  par  le  laps  de  siècles,  la  nouvelle 
organisation  sociale  a  pris  des  racines  profondes  et  ne 
peut  plus  recevoir  d'atteintes  que  du  jeu  de  ses  propres 
élémens  ;  maintenant  que  les  affections  ,  comme  les 
haines,  les  souvenirs  mêmes,  se  sont  détachés  de  l'an- 
cienne organisation,  dépouillée  désormais  de  la  magie 
de  ses  prestiges,  on  peut  croire  que  les  motifs  de  pru- 
dence qui  avaient  fait  lancer  sur  celle-ci  les  flots  de 
l'oubli,  ont  cessé  d'exister. 

Ces  prémisses  nous  préparent  a  continuer  nos  explo- 
rations sur  les  côtes  maritimes ,  a  reconnaître  les  grands 
monumens  historiques  qui  y  abondent  et  a  nous  rassu- 
rer sur  la  crainte  de  commettre  des  indiscrétions  en 
exhumant  les  souvenirs  qui  s'attachent  a  ces  monumens. 

Plaçons  nous  d'abord  a  Boulogne  et  commençons  par 
nous  rappeler  les  circonstances  et  les  formalités  du  ju- 


(  443  ) 

gement  qu'en  Egypte  on  faisait  subir  aux  morts,  juge- 
ment que  les  Grecs,  lorsqu'ils  se  sont  créé  une  exis- 
tence indépendante  et  une  mythologie,  déléguèrent  a 
des  fonctionnaires  infernaux  ;  nous  reconnaîtrons  ici 
l'origine  primitive  de  ces  institutions.  Nous  avons  déjà 
vu  plus  haut  des  noms  de  lieux  qui  ont  servi  aux  Grecs, 
lors  de  la  formation  de  leur  langue,  a  créer  des  mots 
dont  le  sens  rappelle  les  souvenirs  que ,  dans  leurs  pè- 
lerinages ,  la  visite  de  ces  lieux  leur  a  fait  recueillir  ; 
nous  allons  voir  ici ,  malgré  les  mutilations  que  l'inva- 
sion de  la  langue  française  a  causée  aux  noms  propres , 
cette  même  circonstance  se  multiplier  a  tel  point,  qu'il 
devient  impossible  d'en  attribuer  une  part  quelconque 
à  des  jeux  ou  a  des  coopérations  du  hasard. 

D'abord,  Boulogne  est  a  l'embouchure  de  la  rivière 
la  Lyane  ,  nom  qui  semble  avoir  servi  de  type  au  verbe 
Xven,  (Lyein),  le  même  que  luere  en  latin,  et  qui  si- 
gnifie: absoudre,  libérer,  donner  congé,  expédier; 
s'acquitter  d'un  devoir,  subir  une  peine,  faire  ou  subir 
des  expiations;  si,  a  cette  large  signification,  nous  ajou- 
tons que  le  nom  de  Boulogne  s'identifie  avec  le  verbe 
BovXevett  (Bouleyein),  délibérer,  tenir  conseil,  n'est-ce 
pas  comme  si  les  Grecs  nous  racontaient  que,  quicon- 
que venait  des  contrées  méridionales  ,  en  pèlerinage 
aux  Pays-Bas ,  a  la  Terre-Sainte ,  devait  aborder  a  Bou- 
logne sur  la  Lyane  ;  que  Ta  siégeait  un  tribunal  chargé., 
non-seulement  d'examiner  et  d'évaluer  les  droits  ou 
titres  d'admission,  mais  encore  de  scruter  et  de  juger 
la  vie,  la  conduite,  les  actions  des  arrivans,  et,  selon 
les  œuvres  ou  le  mérite  de  chacun  ,  d'absoudre,  de 
justifier .,  de  préconiser,  de  béatifier,  ou  de  réprouver, 
de  condamner,  de  punir,  de  faire  subir  des  expiations 
ou  des  délais  d'admission  dans  les  lieux  saints. 

La  suite  au  cahier  prochain. 


(**9) 


EXTRAIT   ft'UNE   LETTRE   DE    ROME, 

Adressée  à  la  Société  royale  de  Beaux-Arts  de  Gand, 
sur  les  honneurs  rendus  à  la  mémoire  de  Canova, 
membre  correspondant  de  la  Société. 


Jua  mort  de  ce  grand  sculpteur  est  une  perte  générale 
pour  les  arts;  ses  obsèques  funèbres  furent  célébrées  à 
Rome,  le  3i  Janvier  1823,  avec  une  pompe  et  une 
magnificence  dignes  de  son  mérite;  la  statue  de  la  Re- 
ligion triomphante  ornait  le  catafalque  placé  au  milieu 
de  l'église;  les  attributs  des  arts  et  sur-tout  de  la  sculp- 
ture se  trouvaient  au  pied  du  monument  ;  dans  l'église 
étaient  placés  les  modèles  en  plâtre  de  ses  principaux 
ouvrages,  qui  se  détachaient  sur  une  draperie  noire 
tendue  a  l'entour  de  Péglise  et  chargée  d'ornemens  en 
or  et  en  argent  ;  plus  de  douze  cents  cierges  étaient 
allumés  a  l'entour  du  catafalque;  des  médailles  en  or, 
en  argent  et  en  bronze  ont  été  distribués  après  le  ser- 
vice, pour  perpétuer  le  souvenir  de  cette  cérémonie. 

L'académie  de  S.  Luc  a  Rome,  pour  honorer  la  mé- 
moire de  ce  grand  maître,  son  ancien  président,  a  fait 
frapper  une  médaille  a  son  effigie ,  et  a  émis  le  vœu 
que  sa  statue  en  pied  fût  élevée  dans  la  salle  des 
séances  ;  un  de  ses  élèves  s'est  chargé  gratuitement 
de  l'exécution  de  ce  travail. 

Le  22  Janvier  1824,  l'académie  des  beaux-arts  de 
Venise  a  fait  l'inauguration  d'un  monument  funéraire, 
au  centre  duquel  est  une  urne  de  porphire  qui  ren- 
ferme le  cœur  de  l'illustre  statuaire. 

Antoine  Canova  naquit  le  1  Septembre  1757,  a  Pas- 

Xlme  et  XIImc  livraisons.  5o 


(  45o  ) 

sagno  près  de  Venise,  et  y  mourut  lorsqu'il  était  allé 
revoir  sa  patrie,  le  i3  Octobre  1822,  âgé  de  65  ans. 
Ses  talens  éminens  lui  valurent  pendant  sa  vie  de  grands 
honneurs.  La  république  de  Venise  lui  assigna,  par  dé- 
cret du  22  Décembre  1781,  une  pension  a  vie  et  une 
médaille  en  or  pour  l'exécution  d'un  monument  public. 
Il  fut  nommé  successivement  chevalier  de  l'ordre  des 
deux-Siciles,  de  celui  de  Léopold  d'Autriche,  comman- 
deur de  la  couronne  de  fer,,  et ,  .par  diplôme  du  10  Août 
1802,  inspecteur-général  pour  la  conservation  des  objets 
d'art  a  Rome  et  dans  tout  l'état  ecclésiastique,  avec  une 
pension  de  4oo  écus  d'or. 

S.  S.  Pie  VII,  le  créa  chevalier  de  l'ordre  du  Christ, 
fit  inscrire  son  nom  au  livre  d'or  du  Capitole  et  lui 
remit  de  sa  propre  main  les  lettres  patentes  de  marquis 
tVIschia ,  avec  une  rente  de  0000  scudi  par  an  5 
l'institut  de  France  l'agrégea  au  nombre  de  ses  associés 
étrangers,  et  il  fut  élu  président  de  l'académie  d'Ar- 
chéologie de  Rome. 

Canova  lit  un  noble  usage  delà  fortune  que  son  talent 
lui  avait  acquise;  plus  de  trente  élèves  étaient  pension- 
nés par  lui;  il  n'ignorait  pas  que  les  encouragemens 
sont  le  plus  grand  stimulant  pour  un  jeune  artiste,  et 
il  se  rappelait  toujours  avec  émotion  la  protection  qu'il 
avait  lui-même  obtenue  pendant  son  jeune  âge.  »  Mes 
amis",  disait-il  souvent  a  ses  élèves ,  »  je  dois  mon 
»  talent  aux  encouragemens  que  je  reçus  dans  ma  jeu- 
»  nesse;  je  vous  soutiendrai  aussi  long-tems  que  vos 
«études  l'exigeront;  mais  dès  qu'on  est  maître,  le 
»  talent  doit  être  notre  plus  grand  protecteur." 

Il  fonda  un  concours  annuel  de  sculpture,  où  les 
élèves  de  toutes  les  nations  sont  admis,  et  ce  fut  dans 
un  de  ces  concours  que  notre  compatriote,  M.  Kessels, 


C4&  ) 

de  Maestricht ,  élève  du  sculpteur  danois  Thorwaldsen , 
remporta  un  premier  prix,  en  partage  avec  un  élève 
de  Canova,  M.  Gondolvi,  de  Bologne. 

Canova  fit  construire  a  ses  frais,  au  Musée  du  Capi- 
tule, une  salle  pour  y  placer  les  bustes  en  marbre  des 
plus  célèbres  artistes,  exécutés  par  lui  et  par  plusieurs 
autres  sculpteurs  distingués.  Le  temple  élevé  a  ses  frais 
dans  sa  ville  natale,  sera  un  des  plus  élégans  montl- 
mens  modernes  construits  dans  ces  proportions  ;  cet 
édifice  en  marbre  coxitera  plus  de  cinq  cent  mille 
francs  ;  la  statue  de  la  Religion  triomphante ,  dont  le 
modèle  a  été  placé  sur  le  catafalque  pendant  le  service 
funèbre,  en  fera  un  des  plus  beaux  ornemens. 

Le  groupe  d'Orphée  et  Euridice  fut  le  premier  ou- 
vrage qui  mit  le  sceau  a  sa  réputation  comme  grand 
statuaire.  Ses  principaux  ouvrages  sont:  le  mausolée  de 
Marie-Christine ,  a  Vienne ,  connu  par  la  gravure  ;  la 
statue  colossale  de  Washington  ;  le  tombeau  du  car- 
dinal d'Yorck,  décoré  des  figures  des  trois  derniers 
princes  de  la  maison  royale  de  Stuart;  ce  monument, 
en  marbre  de  Carrare,  a  2^  palmes  de  haut  (1). 

Quelques  modèles  en  plâtre  des  plus  beaux  ouvrages 


(1)  Ce  monument  a  été  en  grande  partie  érigé  aux  frais  du 
Prince-Régent.,  aujourd'hui  Roi  d'Angleterre  ;  le  cardinal  d'Yorck 
était  le  dernier  rejeton  mâle  de  la  famille  des  Stuarts,  si  célèbre 
par  ses  malheurs  et  plus  encore  par  ses  fautes.  Le  cardinal,  fils 
du  prince  Edouard  plus  connu  sous  le  nom  de  Prétendant,  ré- 
clamait à  son  tour  ses  droits  au  trône  de  la  Grande-Bretagne,  et 
même  à  celui  de  la  France ,  et  ses  domestiques  l'appelaient  Votre 
Majesté.  George  IV  n'a  fait  aucune  difficulté  délaisser  consacrer 
cette  prétention  des  Stuarts,  en  permettant  d'iuscrire  sur  la 
tombe  ces  titres,  réellement  honoraires;  et  cette  concession,  si 
simple  et  si  naturelle,  est  celle  d'un  Prince  qui  a  beaucoup  de 
bon  sens  et  qui  a  la  conscience  de  sa  force  et  de  sa  position* 


(  452  ) 

de  ce  statuaire,  sont  dans  la  collection  de  S.  A.  le  duc 
d'Aremberg ,  a  Bruxelles  ;  entr'autresle  groupe  d?un  vieil- 
lard, d'une  femme  et  d'un  enfant,  placé  au  tombeau  de 
Marie-Christine;  Paris  et  Hélène ,  groupe  de  grandeur 
naturelle  ;  un  Gladiateur  et  un  Mercure ,  même  di- 
mension. A  l'acade'mie  royale  d'Anvers,  on  conserve 
un  plâtre  de  la  Madelaine  dont  l'original  appartient  a 
la  riche  collection  de  M.  Sommariva,  a  Paris  (1). 


(1)  Toutes  les  statues  de  Canova  tenaient  à  l'antique  par  le 
grandiose  de  la  pensée  et  du  dessin  et  par  la  pureté  classique 
des  formes  ,  comme  elles  marquent  en  même  tems  l'époque  mo- 
derne, ou,  si  l'on  aime  mieux,  l'ère  Canovienne ,  par  je  ne  sais 
quelles  nuances  de  style  qu'il  est  plus  facile  de  saisir  que  de  dé- 
finir. Outre  les  morceaux  indiqués  par  le  correspondant,  Canova, 
en  a  fait  un  grand  nombre  d'autres,  aujourd'hui  généralement 
connus  par  la  gravure  et  par  le  trait;  il  a  aussi  fait,  en  nombre 
plus  considérable  encore,  des  portraits  en  pied  ou  en  buste;  on 
distingue  sur-tout  la  mère  de  Napoléon,  qui,  par  son  air  et  la 
dignité  de  la  pose,  rappelle  YAgrippine  antique;  et  cette  gra- 
cieuse et  belle  Pauline  (Borghèse),  la  plus  jolie  de  ses  enfans 
qui,  moins  effrayée  que  Diane,  permit,  dit-on,  à  l'heureux  sta- 
tuaire de  juger,  par  ses  yeux,  de  toute  la  pureté  de  ses  formes;  on 
connaît  aussi  la  statue  colossale  de  l'Empereur,  qui  est  aujourd'hui 
dans  la  possession  du  duc  de  Wellington  ;  quant  à  ce  nombre 
prodigieux  de  bustes  qui,  stigmatisés  du  nom  de  Canova,  étaient 
successivement  placés  dans  tous  les  lieux  de  séance  des  conseils 
municipaux  ,  plusieurs  ont  été  détruits  lors  de  la  restauration 
en  France;  mais  il  sJen  est  conservé  d'autres.  Il  ne  sera  peut-être 
pas  déplacé  de  donner  ici  l'historique  de  l'envoi  de  plusieurs  de 
ces  bustes  et  tableaux  consulaires  et  impériaux. 

Il  faut  bien  se  garder  de  croire  que  tous  ces  bustes  indistincte- 
ment appartinssent  au  correct  et  classique  ciseau  de  Canova;  ils 
étaient  faits  les  uns  dans  ses  ateliers,  d'autres  à  Carrare  d'où  se  tirait 
le  marbre,  d'autres  enfin  dans  des  ateliers  de  Paris,  d'après  quel- 
que type  Canovien;  le  conseil  municipal  d'une  bonne  ville,  ou 
même  de  toute  autre  qui  n'était  pas  encore  élevée  à  cette  faveur; 
mais  qui  aspirait  à  l'être,  désirait-il  un  buste?    il  commençait 


(455) 

Canova  aimait  a  correspondre  quelquefois  avec  la 
société  royale  des  beaux-arts  de  Gand;  dans  une  de 
ses  lettres  écrites  de  Londres,  en  181 5,  il  la  prévenait 
de  sou  passage  a  Gand  ,    en  témoignant  le    désir  de 


par  voter  une  somme  de  2000  francs,  prix  du  prétendu  Canova 
qui  arrivait  parla  diligence.  11  en  est  probablement  ainsi  de  celui 
que  la  ville  de  Gand  obtint  et  qu'on  a  déposé,  depuis  i8i4,  dans 
le  salon  de  la  société  des  beaux-arts  avec  le  portrait  du  premier 
consul. 

Il  en  était  un  peu  des  portraits  comme  des  bustes,  mais  ceux- 
là  étaient  réellement  donnés  par  le  premier-consul  et  par  l'em- 
pereur. Pour  les  exécuter,  il  y  avait  des  peintres  à  qui  l'on 
accordait  la  préférence,  et  la  ville  devait  s'estimer  heureuse  d'en 
posséder  un  de  la  main  de  M.  Robert  Lefebvre,  de  M.  Girard  ou 
de  M.  Girodet;  malheureusement,  celui  qui  était  alors  chef  de 
division  dans  le  ministère  chargé  de  ces  envois,  était  M.  Benoit, 
le  même,  dit-on,  qui  est  aujourd'hui  conseiller  ou  ministre  d'état 
de  S.  M.  Louis  XVIII;  or,  Madame  Benoit  peignait  l'histoire  et 
le  portrait,  et  cette  simple  observation  a  déjà  fait  comprendre 
comment  et  pourquoi  le  portrait  du  premier-consul  a  pu  être 
l'ouvrage  de  cette  dame  et  non  pas  celui  d'un  peintre  de  mérite. 

Des  anecdotes  de  ce  genre  servent  à  l'histoire  de  l'art,  mais 
mieux  encore  à  celle  des  hommes  et  des  teins;  continuons  celle-ci: 
lorsque  le  portrait  que,  sur  quelques  données,  ou  croiait  devoir 
être  l'ouvrage  de  M.  Robert  Lefebvre,  arriva  à  l'administration, 
on  ouvrit  la  caisse,  et  qu'on  juge  du  désappointement!  Une  chose 
pouvait  consoler  :  par  suite  du  peu  de  soin  avec  lequel  on  avait 
emballé,  la  toile  était  déchirée  en  plusieurs  endroits;  on  rédigeait 
donc  un  procès-verbal,  constatant  le  mauvais  état  de  l'habit,  des 
culottes  et  des  bottine»  consulaires,  et  par  ce  biais,  on  espérait 
obtenir  l'envoi  d'un  autre  portrait;  mais  Mad.  B  *  *.  très-proba- 
blement jugea  que  le  mérite  du  portrait  ne  tenait  pas  à  quelques 
déchirures  ;  on  prouva  à  Paris  qu'on  savait  coudre  comme  on 
savait  peindre;  le  tout  fut  agréablement  surpeint,  et  le  même 
tableau  revint;  au  surplus  le  portrait  n'était  guère  placé,  qu'on 
apprit  que  le  premier-consul  lui-même,  ne  trouvait  plus  son 
habit  à  son  gré  et  qu'il  venait  d'endosser  le  manteau  impérial. 

Note  communiquée  par  M.  N.  C. 


(4M  ) 

connaître  ses  collègues  et  »  d'assister,  disait-il,  a  une 
»  réunion  d'artistes  qui  soutiennent  si  honorablement 
»  la  renommée  de  l'ancienne  école  flamande,  sœur  de 
»  celle  d'Italie,  lesquelles  sont  les  deux  mères  écoles 
»  très-distinctes ,  d'où  toutes  les  autres  dérivent." 

La  Société  lui  préparait  la  plus  brillante  réception  5 
mais  un  incident  survenu  ne  permit  pas  au  sculpteur 
de  suivre  la  route  qu'il  s'était  proposée. 


MORCEAU   DE   BRONZE   ANTIQUE,    INCRUSTE   DE 
LETTRES   D'ARGENT. 


vje  morceau  de  bronze  fut  déterré,  en  1820,  der- 
rière l'église  de  Meirelbeke,  village  situé  a  une  lieue 
de  Gand  sur  la  rive  droite  de  l'Escaut,  et  fait  ac- 
tuellement partie  de  la  collection  de  M.  P 'erhelst ,  fils  , 
à  Gand.  Pour  déterminer  a  quel  usage  il  peut  avoir 
servi ,  nous  essayerons  d'abord  d'en  expliquer  l'inscrip- 
tion. 


(  ***) 

Le  cinquième  caractère,  en  forme  de  lambda  on  V 
renversé,  n'est  autre  chose  qu'un  A  de  l'écriture  ro- 
maine dite  Rustique,  tel  qu'on  le  trouve  dans  le  plus 
ancien  diplôme  connu  :  celui  de  Galba ,  publié  par 
Maffei  (1)  et  dont  on  peut  voir  un  spécimen  dans  le 
dictionnaire  diplomatique  de  Dom  de  Vaines  (2). 

On  le  retrouve  également,  ainsi  que  l'R  de  cette 
forme,  dans  l'ancien  alphabet  de  la  Gaule  publié  par 
Mabillon  (5),  d'après  Boutcroue,  qui  l'avait  tiré  d'une 
très-ancienne  pierre  sépulcrale   découverte  a  Amiens. 

Ce  morceau  de  bronze  appartient  donc  au  Haut- 
Empire  ,  et  les  caractères  se  rapprochent  de  ceux  usités 
du  tems  de  Galba ,  au  premier  siècle  de  l'ère  chré- 
tienne (68),  dans  le  nord  de  la  Gaule. 

Les  deux  sigles  qui  forment  la  seconde  ligne,  expri- 
ment la  livre  gauloise ,  et  doivent  se  rendre  par  LI.  A. 
libra  una.  On  en  trouve  de  semblables  sur  un  poids 
d'une  livre,  de  forme  ronde-,  qu'on  conservait  a  Stc  Ge- 
neviève et  dont  Monti'aucon  (4)  a  donné  la  figure. 
Dans  les  deux  monumens,  c'est  toujours  la  forme  d'un 
lambda  dans  lequel  on  a  inscrit  un  I  et  qui  est  suivi 
d'un  A.  Seulement  dans  le  nôtre,  ce  dernier  caractère 
présente  une  forme  plus  ancienne  :  celle  de  l'alpha  grec 
primitif,  qu'on  retrouve  également,  ainsi  que  le  A  grec 
employé  pour  l'L  latin,  dans  le  monument  d'Amiens. 

Le  père  du  Molinet  lisait  xitpx,  livre,  Montfaucon 
xirpà  ec\  titra  mia,  mais  rien  n'empêche  de  les  pren- 
dre pour  des  mots  latins;  il  est  suffisamment  prouvé, 
en  effet ,  par  le  tombeau  du  martyr  Gordien ,  envoyé 

(1)  Istoria  diplomatica,  pag.  3o. 

(2)  T.  I.  pi.  9.  pages  442  et  397. 

(3)  De  re  diplomatica ,  lib.  V.   tab.  IL   pag.  54G. 

(4)  Antiquité  expliquée,  tora.  III.  pars  I.  pi.  XCV.  pag.  169. 


(  456  )  f 

des  Gaules  (1),  par  les  médailles  et  le  témoignage  des 
anciens  (2),  que  les  Gaulois,  pour  écrire  leur  langue 
et  la  latine,  se  servaient  de  caractères  grecs,  et  par  con- 
séquent de  sigles  et  de  chiffres  analogues.  Le  premier 
sigle  est  le  monogramme  de  la  livre  (poids);  le  second 
n'est  autre  chose  que  le  chiffre  grec  qui  exprime  l'unité. 

Le  mot  CILTAR  doit  donc  s'interpréter  par  Celta- 
rum ,  l'I  étant  mis  pour  l'E.,  comme  on  le  trouve 
assez  souvent  dans  les  inscriptions  :  Mircurius,  pon- 
ti/ix,  cinirariuni;  etc.  (3);  et  toute  l'inscription  doit 
se  lire  ainsi  : 

CILTARum  {sic,  pro  CELTARum) 

Llbja  A  (  id  est  vna  ) 

Une  livre  des  Celtes. 

La  livre  celtique. 

La  forme  du  morceau  de  bronze ,  qui  est  quarrée ,  (de 
60  millimètres  sur  55  et  de  l'épaisseur  d'un  centimè- 
tre), est  également  celle  d'un  grand  nombre  de  poids 
romains  antiques  (4)  ;  et ,  comme  les  lettres  d'argent 
semblent  indiquer  un  objet  précieux ,  on  peut  croire 
que  c'est  un  modèle  ou  étalon  authentique  de  la  livre 
celtique  ou  gauloise  ;  il  est  donc  très-intéressant  d'en 
connaître  le  poids  exact,  qui  est  de  262  grammes 
(4o,55  grains  poids  de  marc,  suivant  la  division  autre- 
fois en  usage   en  France.  ) 

(1)  Roma  subterranea,  lib.  3.  c.  22.  t.  I.  p.  33y.  —  Mabillou. 
—  Religion  des  Gaulois,  tom.  I.  p.  3gseq.  —  Parles  médailles: 
Bouteroue,  cité  ib. ,   p.  43,  62  ,  63  ,  191  ,  etc. 

(2)  Voyez  les  recherches  sur  la  laugue  celtique,  de  M.  le  cha- 
noine De  Bastj  où  il  rassemble  et  examine  les  passages  des  anciens 
sur  ce  sujet,  et  prouve  fort  bien  que  la  langue  gauloise  était  dif- 
férente de  la  grecque  ,  etc.  Caes.  de  bell.  lib.  5.  c.  48.  Varro  apud 
Hieron.  ,  etc. 

(3)  Voyez  le  recueil  de  Gruter  ,  p.  89  de  la  table. 

(4)  Antiquité  expliquée  ,  pi.  94  et  q5. 


(45^  ) 

C'est  le  monument  le  plus  ancien,  ou  plutôt  l'uni- 
que, qui  puisse  donner  une  juste  idée  des  poids  usite's 
dans  les  Gaules  au  premier  siècle  de  l'ère  chrétienne. 

11  rend  en  partie  raison  de  cette  extrême  diiï'érencc 
entre  les  poids  romains  découverts  jusqu'à  ce  jour,  en 
prouvant,  conformément  a  l'opinion  de  Joseph  Scali- 
ger  ,  que  les  diverses  provinces  de  l'empire  avaient 
conservé  leur  livre  particulière  (1). 

La  proportion  entre  le  poids  celtique  et  le  romain 
a  dû  être  de  4  a  5j  la  comparaison  serait  rigoureuse 
en  donnant  a  l'as  romain  primitif  ^27^  grammes 
(6166  grains  )  ce  qui  s'éloigne  peu  de  l'évaluation 
d'environ  6i44  grains  donnée  par  Leblanc  et  M.  de  la 
Nauze  (2),  d'après  le  poids  moyen  d'un  grand  nomhre 
d'aureus  ou  médailles  d'or  5  mais  comme  celui  de 
bronze,  quoique  d'ailleurs  assez  bien  conservé,  a  né- 
cessairement dû  éprouver  quelque  déchet,  on  doit 
supposer  la  livre  romaine  un  peu  plus  forte. 

Plusieurs  auteurs  ont  cru  que  les  Romains ,  outre  la 
livre  légale  qui  servait  a  régler  le  poids  des  espèces , 
en  avaient  une  autre  qui,  selon  Arbuthnot,  était  a  la 
première  dans  le  rapport  de  26  a  2i  (5 )  ;  et  celte  opi- 
nion ,  d'ailleurs  confirmée    par   un   grand    nombre    de 

(1;  Quia  imperatores  ad  legitimam  et  coramodam  libram  gen- 
tes  revocantj  manifestum  est  omnium  provinciarnm,  atque  adeo 
omnium  civitatum,  non  eandem  fuisse  libram  :  quod  passim  usur- 
pari  videmus,  quaudoquidem  quot  civitates,  tôt  pondéra  et  meu- 
surse.  »  11  est  évident  que  la  livre  de  toutes  les  provinces  et  même 
de  toutes  les  villes  n'était  pas  la  même  ,  puisque  les  empereurs 
tâchaient  de  ramener  les  peuples  à  une  même  livre  légale  et  com- 
mode, etc."  (Jos.  Seal,  de  re  numm.   161G.  p.  G5.  ) 

(2)  Mém.  de  l'acad.  des  inscr.  5o.  in-4°.  p.  55g. 

(3)  Voyez  Arbuthnot,  tab.  ant.  mira,  de  pondo ,  pag.  20,  21. 
Bud.  de  asse,  lib.  2  et  5.  De  la  Barre,  p.  672,  etc. 


(458) 

poids,  de  mesures  de  vases  et  de  divisions  de  l'as, 
explique  parfaitement  ceux  des  passages  des  anciens ,  qui 
semblent  donner  100  deniers  a  la  livre:  tandis  qu'il 
est  certain  quelle  se  composait  de  84  deniers  consu- 
laires, ou  de  96  deniers  impériaux,  conformément  a 
la  division  de  l'ancienne  livre  italique. 

Un  autre  poids  de  bronze  antique,  de  forme  ronde, 
également  incrusté  d'argent  ,  fait  partie  de  la  col- 
lection de  l'Université  de  G  and;  il  paraît  bien  con- 
servé, et  fut  trouvé  aux  environs  de  Bavay,  avec  quel- 
ques médailles  romaines  de  Faustme,  Victorin,  Gai- 
lien,  Tetricus,  etc.  (1).  La  lettre  S  dont  il  est  mar- 
qué ,  prouve  que  c'est  la  Semuncia  ou  demi- once 
romaine.  Le  trait  horizontal  qui  l'accompagne  et  qu'on 
retrouve  sur  d'autres  poids  antiques  (2),  pourrait  dési- 
gner que  celui-ci  est  une  division  de  cette  dernière  espèce 
de  livre ,  ou  la  distinguer  de  la  marque  du  Semissis 
(demi-as).  Pesé  avec  la  plus  grande  exactitude,  il  a 
donné  i42  décigrammes  (  267 1  grains  )  ;  d'où  résulte 
une  livre  d'environ  6420  grains  (34i  grammes),  qui 
est  en  effet  a  celle  donnée  par  le  poids  celtique  comme 
25  a  24,  et  doit  être  augmentée  en  même  raison  en 
supposant  que  les  bronzes  ayent  éprouvé  quelque 
léger  déchet. 

De  deux  Semuncia  rapportés  par  Fabreti  (5),  l'une 
pesait  une  demi-once  romaine  actuelle  plus  8  grains, 
l'autre  une  demi-once  plus  i3  grains. 

(1)  Ces  médailles  ainsi  que  le  poids  romain ,  ont  été  donnés  au 
cabinet  de  l'Université  par  MM.  De  Cock  et  Frères  ,  à  Gand. 

(2)  Ant.  expl.  ib.  pi.  g5.   fig.  3.  et  5. 

(3)  Ant.  expl.  ib.  pag.  167.  pi.  93.  fig.  4. 


(  4*e  ) 

- 

BULLETIN 
DES  ACADÉMIES  ET  SOCIÉTÉS  SAVANTES. 


SOCIÉTÉ  DE  LA  LANGUE  ET  DE  LA  LITTÉRATURE 
NATIONALE  A  GAND. 


Suite,  voyez  page  328. 

JLe  5  Octobre  1823  ,  M.  le  professeur  Schrant 
ouvrit  la  séance  par  un  Rapport  général  sur  l'état  de  la 
société  et  ses  travaux  littéraires ,  pendant  Vannée  qui 
venait  de  s'écouler;  ce  rapport  a  été  rendu  public  par 
l'impression. 

A  la  séance  suivante,  (  5  Novembre)  M.  le  professeur 
Mahne  prononça  un  discours,  par  lequel  il  fit  connaître 
plus  particulièrement  les  traits  historiques  de  la  vie  de 
Caton  d'Utique;  l'orateur  s'appuya  sur-tout  des  faits 
propres  'a  signaler  Caton  comme  le  dernier  des  Ro- 
mains; le  suicide  de  ce  rigide  citoyen  de  Rome,  quel- 
que vanté  qu'il  soit  par  les  philosophes  Stoïciens ,  ne 
put  néanmoins  mériter  l'approbation  de  l'orateur  chrétien. 

M.  le  professeur  Kesteloot  communiqua  a  l'assem- 
blée une  notice  nécrologique  sur  J.  W.  te  Water  , 
professeur  a  Leyde ,  membre  honoraire  de  la  société , 
décédé  le  19  Octobre  dernier. 

Le  4  Décembre,  M.  le  professeur  Kesteloot  ouvrit 
la  séance  par  un  discours  sur  l'état  florissant  de  la 
musique  pendant  le  dix-huitième  siècle  ;  il  moutra  les 
obligations  que,  sous  ce  rapport,  l'Europe  avait  aux 
Belges.  Appuyé  de  l'autorité  de  plusieurs  auteurs  dis- 


(  46o  ) 

tingués  et  nommément  des  Italiens ,  M.  K, ,  prouva 
que  la  très-célèbre  école  de  musique  italienne  a  dû  ses 
commencemens  ,  son  origine  même ,  tant  a  Rome 
qu'a  Naples,  a  des  artistes  compatriotes  ;  il  termina 
par  Péloge  de  Gretry^  de  Méhul  et  de  Gossec  , 
tous  les  trois  Belges,  et  il  assigna  le  caractère  esthé- 
tique qui  les  distingue. 

M.  le  professeur  Schrant  lut  quelques  observations 
littéraires  sur  VEpigramme  et  sur  l'étude  de  ce  genre 
de  poésie  parmi  nous. 

M.  de  Potier  fit  lecture  de  sa  traduction  en  vers  du 
premier  chant  de  Lucrèce. 

Au  mois  de  janvier  suivant,  M.  D'Hulster  lut  un 
poëme  de  sa  composition,  intitulé  la  Patrie;  il  sem- 
blait avoir  pris  a  tâche  de  faire  sentir  dans  toute  sa 
force  la  strophe  tVOvide; 

Nescio  auâ  natale  solum  dulcedine  cunctos 
Ducit ,  et  immemores  non  sinit  esse  sui. 

Le  poète  réunit  plus  particulièrement  les  suffrages  de 
l'assemblée  en  terminant  par  ces  vers  : 

»  Ja  Vaderland  !  uw  liefde  vonken 

»  Doorgloeyen  elk  regtschapen  hart; 
x>  Gy  schenkt,  ook  zelfs  in  't  slof  gezonken, 

»  Een'  roera,  die  graf  eu  eeùwen  tart. 
»  O  mogten ,  op  uw  weuk,   de  Belgen 

»  In  broedermin  met  Bato's  telgen 
»  Hun  Vorst  omstuwend,  hand  aan  hand. 

»  Het  zy  in  vrede  of  oorlogswoeden, 
»  Geen  zucht ,  geen  andre  wenschen  voeden , 

»  Dan  heil  en  roem  voor  't  Vaderland. 

M.  de  Potter  fit  lecture  d'un  extrait  de  De  Swaen  , 
poète  flamand  qui  fleurissait  dans  le  XVnme  siècle, 
et  M.  Haefkens ,  l'éloge  de  Ripperda  ,  le  vaillant  dé- 
fenseur de  Haarlem,   en  ib^s. 

Le  4  Février,  M.  de  Potter  lut  une  revue  histori- 


(46i) 

que  des  productions  littéraires,  publiées  dans  les  pro- 
vinces méridionales,  depuis  le  XVme  jusqu'à  la  fin  du 
XVIIme  siècle.  Cette  notice  fit  voir  que  l'étude  de  la 
poésie  n'avait  point  été  étrangère  a  nos  compatriotes, 
pendant  cet  intervalle  ,  et  que  depuis  lors ,  la  belle 
poésie  avait  compté  des  initiés  dont  les  productions 
avaient  honoré  la  Flandre. 

M.  Schrant  donna  communication  de  quelques  recher- 
ches étymologiques  sur  les  dénominations  des  mois 
Janvier  (  louwmaand)  et  Février  (  sprohkelmaand.  ) 

A  la  séance  suivante  ,  M.  le  professeur  Kluyskens 
traita  de  l'influence  des  différens  climats  sur  le  caractère 
et  les  mœurs  des  nations.  L'orateur  compara  entr'eux 
les  hahitans  des  différentes  zones ,  et,  après  avoir  examiné 
le  pour  et  le  contre,  il  accorda  la  préférence  aux  cli- 
mats tempérés ,  dont  les  habitans  se  distinguent  par 
les  vertus  domestiques  sans  exclure  le  véritable  hé- 
roïsme. En  appréciant  cette  éminente  vertu  civile, 
M.  Klujskens  rappela  les  faits  d'armes  des  Germains, 
des  Belges  et  des  Bataves  ,  reproduits,  de  nos  jours, 
dans  les  champs  de  Waterloo. 

M.  Vervier  fit  lecture  de  deux  morceaux  de  poésie , 
l'un  intitulé  :  Esope  et  la  vérité  ;  l'autre  la  force  du 
naturel  ou  les  Samoiédes. 

M.  Schrant  traça  quelques  règles,  d'après  lesquelles 
il  établit  la  composition  des  éloges    historiques. 

Le  1  Avril,  M.  Vervier  traita  dans  son  discours 
de  l'influence  de  la  poésie  sur  le  progrès  de  l'esprit 
humain.  Après  avoir  signalé  les  vicissitudes  de  ce  bel 
art,  l'orateur  en  prit  la  défense  contre  ses  plus  fa- 
meux détracteurs ,  parmi  lesquels  il  signala  Platon 
et  quelques  philosophes  de  l'école  platonicienne.  Jet- 
tant  enfin  un  coup-d'œil  rapide  sur  les  productions  de 


(  4&  ) 

nos  plus  célèbres  poètes,  il  émit  le  vœu  que  ce  bel 
art  par  excellence,  fleurît  encore  long-tenis  en  Bel- 
gique. 

A  la  dernière  séance,  le  6  Mai,  M.  le  général-major 
Muller  prononça  un  discours  sur  l'état  militaire  envi- 
sagé comme  une  carrière  ouverte  aux  âmes  magnanimes  $ 
il  énuméra  les  qualités  qui  doivent  caractériser  le  héros, 
les  devoirs  nombreux  qu'il  s'impose,  et,  en  proclamant 
les  noms  des  guerriers  qui  se  sont  immortalisés  par 
leur  courage  et  leur  patriotisme,  il  honora  la  mémoire 
à  jamais  glorieuse  des  défenseurs  de  la  patrie,  morts 
sur  le  champ  d'honneur  a  Waterloo. 

Le  zèle  des  MM.  les  membres  de  la  société  s'est  ma- 
nifesté dans  une  délibération  ,  par  laquelle ,  il  a  été 
statué  que  les  séances  ordinaires  se  tiendraient  doré- 
navant deux  fois  par  mois. 

La  société,  toujours  jalouse  d'atteindre  le  noble  but 
qu'elle  s'est  proposé,  avait  mis  au  concours  deux  prix: 
un  morceau  d'éloquence:  l'éloge  de  Charles-Quint; 
et,  une  description  en  vers  de  la  bataille  connue  sous 
le  nom  de  bataille  des  éperons  d'or. 

Parmi  les  réponses  qui  ont  été  adressées  h  la  direc- 
tion, une  pièce  seulement,  la  description  poétique  de 
la  bataille  ,  a  mérité  une  médaille  d'encouragement  ;  l'au- 
teur est  M.  Renier,  instituteur  a  Deerlyk  près'de  Courtrai. 

MM.  Loots ,  un  des  plus  grands  poètes  dont  la  nation 
s'honore;  van  Wyn,  architecte  du  Royaume  ;  et  van 
Toers,  conseiller  d'état,  sont  nommés  membres  honoraires. 

La  Société  a  mis  au   coucours  pour  1824  : 

L'éloge  de  Godejroid  de  Bouillon,  le  héros  du 
Tasse  ;  et  pour  prix  de  poésie  :  Le  commerce  consi-' 
dérée  comme  principal  moyen  de  civilisation. 

Le  prix  pour  l'un  et  l'autre  de  ces  sujets  sera  une 


(463  ) 

médaille  d'or  de  la  valeur  de  75  florins  des  Pays-Bas. 
Toutes  les  pièces  envoyées  au  concours,  doivent  être 
écrites  en  langue  nationale  et  envoyées ,  franc  de  port , 
avant  le  ir  Novembre  1824,  a  M.  D'ffulster,  secrétaire 
de  la  société,  rue  dite  Krommen-W al ,  n°  5,  a  Gand, 
où  l'on  peut  se  procurer  les  conditions  du  concours. 


SOCIETE   DE   MALINES 

Pour   l'encouragement  des   Beaux  -  Arts , 


Exposition  générale  de  1825. 

Ljes  fêtes  solennelles  du  grand  jubilé  de  Malines,  qui 
seront  célébrées  au  mois  de  Juillet  1825,  ont  paru  une 
époque  favorable  qui  doit  nécessairement  influer  d'une 
manière  avantageuse  sur  l'exposition  ,  ajouter  a  son 
éclat,  en  augmenter  l'intérêt,  la  rendre,  sous  tous 
les  rapports ,  plus  nombreuse  et  plus  brillante ,  et 
offrir  une  accumulation  considérable  de  ressources  des- 
tinées a  l'acquisition  des  objets  exposés. 

L'exposition  aura  lieu  du  2b  Juin  au  20  Juillet  i825; 
on  y  recevra  tous  les  ouvrages  d'art  et  d'industrie  faits 
par  des  Artistes  vivans. 

Les  pièces  destinées  a  l'exposition  doivent  être  adres- 
sées, franc  de  port,  a  l'hôtel  de  la  Régence,  avant 
le  10  Juin  1825. 

EXPOSITION   DE   PLANTES   A   HARLEM. 


Jua  septième  exposition  de  plantes,  a  Harlem,  aura 
lieu  les  2,  4,  5,  6  et  7  Juin  1824.  Tous  les  ama- 
teurs,   cultivateurs    de    plantes,    fleuristes,    etc.    du 


(  464  ) 

Royaume,  sont  invites  a  y  faire  des  envois,  et  a  en 
pre'venir  avant  le  26  Mai,  M.  N.  Beets  ,  directeur  de 
la  commission,  a  Harlem. 

Les  plantes,  adresse'es  franc  de  port,  au  local  du 
salon,  rue  dite  Zylstraat ,  sect.  5,  n°  239 ,  y  seront 
reçues  depuis  le  samedi  20  Mai,  jusqu'au  mardi  ir  juin 
a  midi,  au  plus   tard. 

Le  jeudi  5  Juin ,  une  commission  fera  le  choix  des 
deux  plantes  les  plus  rares  et  des  deux  les  mieux  cul- 
tivées, auxquelles  les  médailles  seront  adjugées. 

Il  est  de  rigueur  qu'aux  plantes  destinées  a  concou- 
rir, il  soit  attaché  une  devise  ou  une  marque,  et  qu'il 
y  soit  joint  un  billet  répétant  sur  l'adresse  la  même 
devise  ou  marque  et  contenant  le  nom  et  la  demeure 
du  concurrent. 

Pour  faciliter  le  jugement  de  la  commission,  les  con- 
currens  sont  priés  de  déclarer:  »si  les  plantes  sont  im- 
»  portées  de  l'étranger  et  depuis  quel  tems;  ou  Lien 
»  si  elles  sont  élevées  dans  le  Royaume,  et  quelles  ont 
»  été  la  méthode  et  la  durép  de  leur  culture." 

Sont  exclues  du  concours,  mais  non  de  l'exposition, 
les  plantes  couronnées  aux  six  expositions  précédentes. 


EXPOSITIONS    DES    FLEURS    A    TOURNAI,    LOUVAIN 
ET    liRUXELLES. 


1jes  salons  de  Flore  ouverts  au  public  pendant  le  mois 
de  Février,  a  Tournai ,  a  Louvain  et  a  Bruxelles ,  ont 
mérité  de  fixer  l'attention  des  curieux  :  a  Tournai , 
où  une  administration  amie  des  arts  et  des  sciences 
vient  de  créer  un  jardin  de  botanique,  le  prix  de  belle 
culture  a  été  décerné  au  Robinia  Hispida,  cultivé  par 


(  465  ) 

M.  J.  B.  Claes,  jardinier-fleuriste;  le  premier  accessit 
au  Correa  speciosa ,  de  M.  Dumortier-Rutteau ,  secré- 
taire de  la  société  ;  et  le  second  a  VHybiscus  rosa 
sinensis ,  de  M.  Dumon-Du mortier.  Le  prix  de  la  cul- 
ture des  fruits  a  pépins  n'a  pas  été  adjugé;  la  société 
a  voté  une  mention  honorable  pour  les  poires  et  les 
pommes  exposées  par  M.  F.  Buckon  ,  jardinier  de 
M.  Dapsens-Lenniaux,  a  Vaulx. 

A  Louvain,  la  société  d'agriculture  et  de  botanique 
avait  continué  le  concours  de  la  Pivoine  ordinaire  , 
Pœonia  officinalis ,  flore  rubro  pleno ,  et  celui  du  Lis 
blanc,  Lilium  candidum;  elle  avait  désigné  encore  pour 
paraître  en  pleine  floraison,  a  l'exposition  d'hiver  de 
1824,  le  Lis  tigré,  Lilium  tigrinum,  mais  ni  l'un  ni 
l'autre  de  ces  prix  n'ont  été  décernés. 

La  médaille  d'honneur  que  la  société  accorde  a  la 
plante  la  plus  rare  et  la  mieux  cultivée ,  a  été  remise  à 
M.  Ferdinand  d'Udekem,  pour  le  beau  Musa  coccinea, 
de  sa  collection,  exposé  au  salon. 

Le  premier  accessit  a  VAzalea  carnea,  exposé  par 
M.  Deschrynmaekers ,  de  Dormal  ;  le  deuxième  accessit 
a  VAzalea  auranciaca ,  de  M.  F.   d'Udekem. 

Si  la  société  avait  a  regretter  la  non  floraison  des 
plantes  proposées  au  concours,  elle  a  eu  l'avantage  de 
jouir  de  l'exposition  de  quarante -quatre  variétés  de 
pommes,  provenant  des  pépinières  de  M.  Van  Mons, 
professeur  de  chimie  et  d'horticulture  a  l'Université  de 
Louvain ,  toutes  d'espèce  nouvelle  ;  parmi  lesquelles 
on  en  remarqua  plusieurs  de  grand  volume,  d'une 
couleur  admirable  ,  d'une  odeur  suave  et  d'un  goût 
exquis. 

La  collection  de  M.  van  Mons    est   tellement  supé- 
rieure ,    qu'aucun   concurrent  ne   put  lui    disputer  la 
Xïme  et  XIImc  livraisons.  5i 


(  4156  ) 

médaille  d'honneur  ;  de  justes  éloges  lui  ont  été  votés 
par  le  conseil  de  la  société. 

La  société  de  Flore  de  Bruxelles  a  terminé  les  expo- 
sitions d'hiver  dans  ces  provinces,  le  îi  Février  passé. 
Le  prix  pour  la  plante  la  plus  rare  ou  dont  l'introduc- 
tion en  Europe  est  la  plus  récente ,  a  été  adjugé  a 
VEnkianthus  (juinqueflora  (1)  présenté  a  l'exposition 
par  M.  Ducorron,  de  Bruxelles.  U'Hjdvangœa  lior- 
tensis  ayant  paru  a  la  commission  la  plante  dont  la 
floraison  offrait  le  plus  de  difficultés  ou  était  la  plus 
éloignée  de  l'époque  naturelle ,  la  médaille  d'honneur 
a  été  décernée  a  M.  Lanckman,  fleuriste  et  pépinié- 
riste a  Gand.  Les  plantes  exposées  pour  disputer  le 
prix  de  ce  concours  et  qui  ont  mérité  l'attention  des 
amateurs,  étaient  :  un  Pœonia  officinalis ,  exposé  par 
M.  Van  der  Kelen ,  de  Bruxelles  ;  un  Baiiksia  mar- 
ginata,  de  M.  de  Caters-de  Wolf,  a  Anvers;  un  Ne- 
rium  splendens  ,  de  M.  Van  der  Sande,de  Bruxelles  ;  un 
Pelargonium  husseyanum ,  de  M.  Ducorron,  de  Moi- 
gnies;  un  Agayantlius  umbellatus ,  de  M.  Conrade,  a 
Enghien ,  et  un  pied  de  Rosa  muscosa ,  de  M.  Vander- 
maelen,  de  Bruxelles  (2). 

Une  troisième  médaille  que  la  société  de  Flore  de 
Bruxelles  accorde  a  la  plante  la  plus  remarquable  par 
sa  force,  son  éclat  et  sa  beauté,  a  été  adjugée  au  Ka- 

(1)  M.  de  Caters-de  Wolf,  à  Anvers,  et  M.  Josse  Verleeuwen, 
cultivateur-fleuriste  à  Gand,  envoyèrent  cette  plante  au  salon 
de  Gand  en  Juin  1825,  pour  concourir  avec  les  plantes  les  plus 
rares  et  les  plus  récemment  introduites  dans  nos  collections.  Ex- 
posée eu  Heurs,  au  salon  d'hiver  de  Gand  en  1824,  par  M.  Ver- 
îeeuwen  ,   elle  obtiut  le  premier  accessit. 

(2)  La  Rose  mousseuse  (  Rosa  muscosa  ) ,  proposée  au  con- 
cours à  Gand,  depuis  1809,  pour  être  épanouie  au  6  Février,  n'a 
pu  obtenir  la  médaille  qu'en  1817;  quoiqu'en  1810,  cette  plante 
eût  été  exposée  épanouie,  par  M.  Mussche,  directeur  du  jardin 
de  l'Université,  qui,  pour  des  motifs  de  délicatesse,  n'a  pas  cru 
devoir  concourir. 


(  467  ) 
mellin  japonica  .  fl.  abl.  pi.,  cultiva  par  M.  Lanckman, 
de  Gand,  et  une  quatrième  à  M.  Ducorron,  pour  avoir 
envoyé  a  1  exposition  de  Bruxelles,  la  plus  belle    col- 
lection de  plantes  rares  et  nouvelles. 

On  se  rappelle  avec  plaisir  que  toutes  ces  exposi- 
tions ont  fait  l'admiration  des  amis  de  Flore;  le  zèle 
d'amateurs  opulens  et  instruits ,  augmente  d'année  en 
année  les  ressources  pour  embellir  ces  salons ,  et  la 
société  d'agriculture  et  de  botanique  de  Gand  peut  se 
féliciter  d'avoir  eu,  la  première,  l'heureuse  idée  d'éri- 
ger une  institution  répandue  depuis  dans  plusieurs  pro- 
vinces du  Royaume. 

article  communiqué. 

EXPOSITION   A   AMSTERDAM, 

D'objets  de  Peinture ,  Sculpture,  Architecture,  Gravure, 
de  Dessin  des  Artistes  vivans. 


.L/ouverture  du  salon  d'exposition  à  Amsterdam  vient 
d'être  fixée  au  5o  Août  1824  j  il  restera  ouvert  au  pu- 
blic jusqu'au  25  Septembre  suivant.  Les  pièces  desti- 
nées pour  l'exposition,  devront  y  être  envoyées  avant 
le  25  Août. 

Les  artistes  qui  désirent  que  leurs  productions  soient 
envoyées  au  salon  de  Bruxelles,  dont  l'ouverture  se  fait 
le  i5  Octobre  suivant,  sont  priés  d'en  faire  la  demande 
par  lettre  jointe  aux  envois  faits  au  salon  d'Amsterdam. 


JARDIN    BOTANIQUE   DE   GAND. 


De  tous  les  bienfaiteurs  du  jardin,  après  l'auguste 
Fondateur  de  l'Université,  le  plus  persévérant  dans  sa 


(  468  ) 

sollicitude,  est  S.  E.  M.  le  baron  Van  de  Capelle, 
gouverneur-général  des  possessions  nationales  dans  les 
grandes  -  Indes  ;  M.  le  professeur  Reinwardt  partageait 
cette  bienveillance ,  et  la  même  impulsion  a  été  donnée 
a  tous  ceux  qui  cultivent  la  science  dans  cette  partie 
éloignée  du  globe.  M.  le  docteur  Blume,  inspecteur 
de  la  vaccine  et  directeur  du  jardin  de  Buitcnzorg,  ré- 
sidence du  Gouverneur,  vient  d'en  donner  une  nou- 
velle preuve,  en  envoyant  a  M.  le  Président  du  Collège 
des  Curateurs,  une  collection  de  plantes  et  arbres  que, 
par  l'inspection  du  catalogue  de  M.  Musscbe,  il  a  vu 
ne  pas  exister  dans  notre  jardin  ;  ces  plantes ,  parties 
vers  la  mi-Novembre  1823,  étaient  arrivées  avant  la  mi- 
Mars  1824,  par  le  bricq  V Auguste,  capitaine  Andersen 
qui,  pendant  le  trajet  en  a  eu  un  soin  tout  particulier 
et  tellement  couronné  de  succès,  qu'a  trois  ou  quatre 
près,  elles  sont  arrivées  en  pleine  vigueur;  la  plupart 
des  plantes  envoyées  paraissent  avoir  reçu  leur  nom  et 
leur  description  de  M.  Reinwardt  ou  de  M.  Blume  lui- 
même,  et  les  amis  de  la  botanique  ne  seront  pas  faciles 
d'apprendre  que  dans  leur  nombre  se  trouvent  les  sui- 
vans:  Padacarpus  Sprengeli  (BL);  Liquidambar  ra- 
saihala  (iEtingia  excelsa);  Leptospermum  javanicum 
(Rwdt.);  Dipterocarpus  trineivis  (R.),  tous  arbres 
d'une  grande  élévation;  Wallichia  (1)  arborea  (R.) 
arbre  a  fruits;  Fagrcea  jaçanica  (R.)?  Melastoma 
arborea  (R.);  Garcinia  Polyadelpha;  Guarea  cauli- 
folia  (R.  );  Chilocarpus  suaveolens  (Bl.)  ;  Laurus  alba 
(  R.  )  ;  Ardisia  macrophylla  (  R.  )  ;  Cyanitis  sylvatica 
(R.)  ;  Schinca  excelsa  (B.)  etc. 


(1)  Le  Wallichia ,  le  Leptospeiinum  et  le  Dipterocarpus  ont, 
en  arrivant  sur  nos  côtes,  succombé  à  la  rigueur  du  climat. 


(  4%  ) 

S.  E.  le  Ministre  de  l'instruction  publique  vient 
d'envoyer  h  l'Université  ,  le  catalogue  du  jardin  de 
Buitenzorg;  de  cette  manière,  on  connaîtra  ce  qui  man- 
que a  cette  collection ,  et  les  plus  heureux  échanges 
pourront,  par  la  suite,  avoir  lieu  dans  l'intérêt  de  la 
science. 


VARIETES. 


M.  le  Cocq  ,  de  Tournay ,  membre  delà  société  royale 
des  beaux-arts  de  Gand,  vient  de  faire  remettre  a  cette 
société  i°  un  discours  servant  d'introduction  aux 
Fastes  Belgiques ,  et  faisant  partie  de  la  dernière 
livraison  de  cet  ouvrage;  2°  les  deux  premiers  cabiers 
d'une  géographie  a  l'usage  des  enfans.  Ces  deux  pro- 
ductions, d'un  genre  fort  différent,  sont  l'une  et  l'autre 
dignes  de  leur  auteur;  c'est  en  faire  un  éloge  suffisant; 
c'est  dire  qu'elles  sont  inspirées  toutes  deux  par  le  pa- 
triotisme et  la  philantropie. 

Bans  le  discours  relatif  aux  Fastes  Belgiques,  M.  le 
Cocq  expose  a  grands  traits  le  plan  d'une  entreprise 
qu'on  regrette  de  voir  interrompue  ;  ce  ne  sont  point 
des  phrases  sonores ,  des  sentences  ampoulées  qu'il  offre 
a  ses  lecteurs,  mais  un  aperçu  rapide  des  principaux 
événemens  de  notre  histoire,  présenté  aux  amis  de  la 
patrie  sous  les  couleurs  simples  et  majestueuses  d'une 
raison  éclairée.  Nous  engageons  les  hommes  aux  yeux 
desquels  les  choses  substantielles  l'emportent  sur  des 
mots  ambitieux ,  a  lire  ce  morceau  digne  de  la  plume 
d'un  véritable  historien. 

Quant  aux  Leçons  élémentaires  de  géographie ,  qui 


(  470  ) 
font  suite  a  la  petite  grammaire  des  enfans  et  a  la  petite 
histoire  sainte  du  même  auteur,  on  ne  doit  pas  s'at- 
tendre a  y   trouver  des  beautés  du  même  ordre.  C'est 
une  simple  introduction  aux  géographies  de  M.  Raingo; 
et  M.  le  Cocq,  ainsi  qu'il  le  dit  lui-même,  n'a  cherché, 
dans  cet  opuscule,  qu'a  se  mettre  a  la  portée  du  plus 
jeune  âge.  Nous  faisons  grand  cas  d'une  foule  de  bons 
livres,  que  des  savans  ont  composés  pour  les  écoles  su- 
périeures ;  mais  il  n'y  a  peut-être  pas  moins  de  mérite 
réel,  a  savoir  se  mettre   a  la  portée   de   l'intelligence 
naissante    des  enfans.    La,  on   travaille  pour  la  masse 
et  l'on  rend  service  a  plus  d'individus;  la,  au  lieu  du 
couronnement  de  l'édifice,  on  en  pose  la  base,  et,  s'il 
y  a  moins  d'honneur  aux  yeux  d'un  académicien ,  il 
n'y  a  certainement  ni  moins  de  difficulté,  ni  moins  de 
gloire,  aux  yeux  d'un  philosophe. 

M.  le  Cocq  est  un  des  hommes  du  Royaume  qui  sent 
le  mieux  l'importance  d'un  bon  système  d'enseignement 
primaire,  et  qui,  en  sa  qualité  d'inspecteur  des  écoles, 
a  le  plus  efficacement  secondé  dans  sa  province  les  in- 
tentions du  Gouvernement  ;  c'est  ce  dont  sont  convaincus 
ceux  qui  ont  pu  voir  par  eux-mêmes  l'état  actuel  des 
écoles  primaires  de  Tournay  et  du  Tournaisis ,  et  le 
comparer  avec  ce  qu'il  était  il  y  a  peu  d'années.  Il  est 
beau  ,  quand  on  ne  sert  plus  l'état  dans  la  haute  ad- 
ministration,  de  lui  rendre,  dans  un  poste  inférieur , 
des  services  moins  éclatans  niais  non  moins  utiles. 


Le  rétablissement  du  collège  que  Lambert  Darchies 
fonda  a  Rome  en  1696  ,  en  faveur  de  Liégeois 
jaloux  de  se  former  sur  les  chefs-d'œuvre  qu'on  admire 
dans  cette  cité  célèbre,  va  augmenter  le  nombre  des 
Belges  qui  parcourent  avec  gloire  la  carrière  des  arts; 


(47i  ) 
les  Etals  députés  de  Liège  ont  déjà  indiqué  un  archi- 
tecte et  un  graveur  en  médailles,  pour  y  résider  gra- 
tuitement pendant  cinq  années.  Sa  Majesté  le  Roi  des 
Pays-Bas  vient  de  donner  une  nouvelle  preuve  de  son 
amour  pour  les  arts,  en  protégeant  ce  rétablissement 
que  l'on  doit  a  la  sollicitude  de  M.  Rcinliold ,  envo\  »'■ 
extraordinaire  a  la  cour  de  Rome. 

Le  choix  fait  par  les  Etats  députés  de  Liège,   d'un 
architecte  et  d'un  graveur,  prouve  le  véritable  amour 
pour  les  arts,  en  général,  qui  anime  les  Magistrats  de 
cette  province.  Depuis  nombre  d'années,  la  faveur  d'ob- 
tenir   des   pensions    était   exclusivement  réservée  aux 
peintres  et  aux  sculpteurs  ;   parmi  les  artistes  qui  ont 
reçu  des  encouragemens  parla  munificence  de  quelques 
administrations  locales,  on  ne  compte  ni   architectes, 
ni  graveurs,  ni  compositeurs  de  musique.  Liège  seule 
s'est  distinguée  des  autres  villes  par  cette  espèce  d'im- 
partialité qui  sait  apprécier  le  mérite  et  l'intérêt,  que 
doivent  inspirer   a  toute  administration  publique,  les 
différentes  branches  de  Part  qui  contribuent  également 
a  la  prospérité  de  l'industrie  nationale  et  au  bonheur 
des   peuples.   Déjà  plusieurs  artistes  distingués  ,    pen- 
sionnés par  la  ville   de  Liège,   et   a   la  tête  desquels 
nous   placerons  le   célèbre    Gretry,    ont   illustré    non- 
seulement  leur  ville  natale,  mais  encore   la  Belgique 
entière. 

C'est  par  la  munificence  royale  que  les  pensions  de 
MM.  Suys,  architecte,  et  De  Meulemccster,  graveur, 
ont  été  continuées  pendant  leur  séjour  a  Rome;  eYst 
à  la  même  bienveillance  que  notre  compatriote  M.  Braemt, 
graveur  en  médailles ,  doit  les  encouragemens  qu'il  a 
obtenus  pour  faire  ses  études  a  Paris,  dans  un  art  qui 
jusqu'ici  nous  a  rendus  tributaires  de  l'étranger,   jus- 


(  *72  ) 
ques  dans  la  confection  de  nos  monnaies  exécutées  a 
grands  frais  et  avec  moins  de  succès ,  peut-être ,  que  d'au- 
tres antécédens  n'avaient  pu  le  faire  espérer  du  talent 
de  M.  Micliaut.  C'est  bien  injustement,  que,  dans  le 
règlement  de  nos  académies  royales  des  beaux-arts,  l'ar- 
chitecture et  la  gravure  ont  été  oubliées  ;  car  dans  un 
état  constitué  ce  sont  les  deux  brandies  les  plus  indis- 
pensables ;  dans  le  pays  même  le  plus  indolent  pour  les 
progrès  des  arts  on  est  encore  obligé  d'élever  des  bâti- 
mens  publics  et  de  faire  graver  des  empreintes  sur  les 
monnaies.  L'architecte  particulièrement  est,  de  tous  les 
artistes  ,  celui  qui  a  le  plus  besoin  d'appui  pendant  ses 
années  d'études  5  le  produit  de  son  art  ne  lui  donnant 
aucun  moyen  pour  subvenir  a  son  existence. 

Dans  nos  expositions  publiques,  l'architecte  ne  reçoit 
d'encouragement  que  de  quelques  initiés  dans  son  art  ; 
les  médailles  du  graveur  ,  quelque  parfaites  qu'elles 
puissent  être ,  attirent  moins  l'attention  qu'une  informe 
et  vaste  ébauche  de  sculpture,  produite  par  un  artiste 
médiocre 5  de  même  le  plus  beau  projet  de  palais,  fini 
et  étudié  dans  toutes  ses  parties,  ou  le  plus  parfait  mor- 
ceau de  gravure  en  taille-douce  pâlissent  devant  un  ta- 
bleau d'un  mérite  bien  inférieur,  mais  dont  les  couleurs 
vives  éblouissent  les  yeux  de  la  multitude  et  comman- 
dent l'attention  du  plus  grand  nombre  des  spectateurs. 

Espérons  qu'insensiblement  nous  verrons  disparaître 
cette  inégalité  dans  la  distribution  des  encouragemens, 
et  que  l'exemple  que  nous  citons  sera  suivi ,  sur-tout 
par  les  administrations  placées  a  la  tête  des  institutions 
consacrées  spécialement  a  l'encouragement  des  arts  ;  pour 
elles  c'est  un  devoir.  Laissons  à  l'amateur  le  caprice  de 
n'encourager  qu'un  seul  genre;  mais,  chargé  de  diriger 
un  établissement  public,  ce  n'est  plus  sous  le  rapport 


(i75) 

de  son  agrément  qu'on  peut  envisager  les  productions 
duge'nie  des  artistes;  toutes  ont  droit  a  la  même  faveur; 
dans  toutes  les  branches  on  peut  s'illustrer.  Les  noms  de 
David,  de  Canova,  de  Percier,  de  Morghen,  de  Galle 
et  de  Gretry,  passeront  également  a  la  postérité'. 

La  Société  des  Beaux-Arts  de  Gand,  a  reçu  de  M.  M. 
If.  JR.  Duthillœul ,  un  de  ses  associés  étrangers,  une 
notice  imprimée,  fort-intéressante,  sur  François  vali- 
der Burch 3  archevêque  de  Cambrai,  au  XVIP"C  siècle; 
ouvrage  qui  a  remporté  un  des  prix  décernés  par  la  so- 
ciété d'émulation  de  Cambrai,   en  1825. 

François  vander  Burch  naquit  a  Gand ,  le  26  Juillet 
1567,  dans  le  teins  où  le  despotisme  de  Philippe  II, 
la  cruauté  du  duc  d'Albe  et  la  fureur  des  discussions 
religieuses  remplissaient  les  Pays-Bas  de  troubles  et  de 
sang.  Il  était  fils  de  vander  Burch ,  comte  d'Aubersart , 
seigneur  d'Escoussines,  d'Héronfontaine ,  gentilhomme 
attaché  a  la  maison  des  Princes  Gouverneurs-généraux 
des  Pays-Bas ,  et  président  du  conseil  privé  de  Flandre. 

Le  jeune  vander  Burch  ,  après  avoir  terminé  ses  huma- 
nités sous  la  direction  d'un  de  ses  oncles,  doyen  de  la 
cathédrale  d'Utrecht,  fut  envoyé  a  l'université  de  Douai, 
pour  y  faire  ses  études  philosophiques;  ensuite  on  le 
conduisit  a  Louvain,  où  il  prit  ses  degrés  dans  la  science 
des  lois.  Il  ne  se  sentait  point  appelé  aux  professions 
du  barreau  et  de  la  magistrature  ,  il  entra  dans  le 
ordres.  Peu  de  tems  après  son  ordination ,  élevé  a  la 
dignité  de  chanoine  de  l'église  cathédrale  de  St.  Lam- 
bert, a  Liège,  sa  modestie  lui  fit  refuser  un  office 
d'honneur  qu'il  ne  croyait  pas  encore  avoir  mérité. 

Nommé  depuis  vicaire -général  de  l'archevêché  de 
Malines,  il  ne  put  refuser;  mais  bientôt  il  quitta  un 
poste  qui  semblait  trop  au-dessus  de  ses  forces,  cl  il  se 


(474) 

contenta  d'un  simple  canonicat  a  la  collégiale  de  Ste  Vau- 
dru  a  Mons.  Les  honneurs  le  poursuivirent  encore  dans 
cette  retraite  ;  appelé  par  If  archiduc  Albert  a  l'évêché 
de  Gand,  il  se  vit  contraint,  malgré  sa  répugnance, 
de  céder  aux  ordres  paternels  du  Souverain  Pontife , 
et  il  se  rendit  dans  la  eapitalc  de  la  Flandre.  Ici  l'auteur 
entre  dans  le  détail  de  l'administration  véritablement 
apostolique  du  vénérable  pasteur,  dans  un  passage  qui, 
comme  tout  le  reste  du  discours ,  excite  le  plus  vif  intérêt. 

Cependant,  l'église  de  Cambrai  appelait  de  tous  ses 
vœux  et  cherchait  de  toutes  parts  un  digne  successeur 
de  Bnisseret.  Ses  regards  se  fixent  sur  l'évêque  deGand, 
sur  François  vander  Burch;  il  n'aurait  point  quitté  le 
troupeau  confié  a  ses  soins,  mais  Cambrai  était  en  proie 
a  tous  les  maux  qui  peuvent  accabler  l'humanité ,  la 
liberté  dégénérée  en  anarchie ,  la  religion  devenue  un 
instrument  de  mort  entre  les  mains  de  sectes  ennemies, 
un  ciel  d'airain  qui  dessèche  tous  les  fruits  de  la  terre, 
la  famine  qui  dévore  les  hommes  et  les  animaux,  la 
peste  enfin,  l'horrible  peste  qui  frappe  tout  ce  qui  a 
pu  échapper  a  tant  d'autres  maux.  Nouveau  Belzunce, 
il  court  a  son  poste;  bientôt  sa  bonté,  son  zèle,  sa 
patience  ont  fait  descendre  la  persuasion  dans  l'âme  de 
ses  auditeurs;  on  dépose  les  armes,  on  oublie  les  que- 
relles, on  se  réunît  dans  l'intérêt  commun;  le  calme 
se  rétablit,  la  religion  se  conserve,  d'abondantes  pluies 
rafraîchissent  la  terre,  la  peste  et  la  famine  sont  vaincues. 

Ce  n'était  pas  assez:  tant  de  malheurs,  tant  de  ra- 
vages avaient  laissé  des  traces  profondes ,  une  foule  de 
familles  étaient  réduites  a  l'indigence;  il  distribue  des 
secours,  fonde  des  hôpitaux,  et,  ce  qui  peut-être  était 
plus  propre  encore  a  prévenir  la  misère  et  les  vices 
futurs,  il  établit  des  écoles  pour  les  pauvres, l'une  sous 


(  4^  ) 

le  nom  à' école  dominicale ,  l'autre  sous  celui  de  mai- 
son de  bienfaisance  et  d'éducation. 

Dans  la  première,  qui  subsiste  encore  aujourd'hui, 
les  enfans  indigens  de  la  ville  reçoivent ,  avec  les  prin- 
cipes de  la  religion,  toutes  les  connaissances  nécessai- 
res a  leur  état ,  et ,  pour  vaincre  la  négligence  ou 
l'avidité  des  parens,  des  secours  en  pain  et  en  argent 
sont  accordés  à  ceux  dont  les  enfans  suivent  les  leçons 
de  l'école  dominicale.  C'est  ainsi  ,  connue  l'observe 
M.  Dutliillœul,  que  la  sagesse  du  fondateur  a  scu  même 
attacher  une  récompense  a  l'acceptation  d'un  bienfait. 
Nous  avons  vu  a  Tournai  la  même  disposition  produire 
d'cxcellens  effets  dans  plusieurs  écoles  de  cette  espèce, 
La  seconde,  où  cent  jeunes  filles  de  familles  honnê- 
tes, mais  peu  aisées,  sont  reçues  a  l'âge  de  douze  ans 
et  convenablement  élevées,  a  donné  à  Louis  XIV  l'idée 
de  la  maison  de  St.  Cyr,  et  ce  furent  les  statuts  de 
Slc  Agnès  (1)  qui  servirent  de  base  a  ceux  de  ce  célèbre 
établissement. 

Ce  digne  prélat,  après  une  vie  exemplaire  et  labo- 
rieuse, mourut  a  Mons,  dans  une  visite  pastorale,  à 
l'âge  de  77  ans.  Son  corps,  d'abord  inhumé  a  Mons, 
fut  ensuite  transporté  a  Cambrai,  où  on  le  déposa  dans 
le  caveau  des  archevêques,  près  de  la  cendre  de  Féné- 
lon,  jusqu'au  jour  où  les  cannibales  de  179^,  arracbant 
ses  restes  a  la  paix  du  tombeau,  les  traînèrent,  les 
dispersèrent  sur  la  voie  publique. 

Nous  n'avons  pu  résister  au  plaisir  d'extraire  de  la 
notice  de  M.  Dutliillœul,  ces  faits  qui  honorent  l'un 
de  nos  compatriotes  les  plus  distingués.  Au  resle, 
quoique  nous  nous  soyons  bornés  a  copier  ses  expres- 
sions, nous  sommes  loin  d'avoir  cherché  a  donner  une 

(1)  C'est  aiusi  qu'où  appelle  la  maison  île  vander  Bur-ch. 


(476) 

idée  de  son  style;  nous  renvoyons  pour  cela  a  Pou- 
vrage  lui-même  ;  on  verra  que  Fauteur  habitué  au  lan- 
gage profane  des  arts  et  des  sciences,  sait  aussi,  quand 
il  le  veut,  parler  des  choses  sacrées  dans  le  style  qui 
convient  au  sujet. 

MM.  les  Editeurs  du  Foyage  pittoresque  dans  le 
Royaume  des  Pays-Bas  ,  avaient  promis  a  leurs  nom- 
breux souscripteurs,  des  notices  explicatives  sur  cha- 
cune des  vues  dont  se  compose  leur  recueil  ;  ils  rem- 
plissent aujourd'hui  leur  engagement  d'une  manière 
qui  répond  parfaitement  a  l'attente  du  public.  M.  de 
Cloet,  de  Bruges,  déjà  connu  par  plusieurs  ouvrages 
estimables ,  s'est  chargé  de  rédiger  et  de  coordonner  ces 
différentes  notices ,  et  celles  que  nous  avons  lues ,  nous 
ont  paru  ajouter  un  nouveau  prix  a  Pouvrage  qu'elles 
sont  destinées  a  compléter  et  a  embellir.  On  y  trouve 
une  foule  de  détails  propres  a  intéresser  les  amateurs 
et  les  premières  familles  du  royaume  ;  rien  de  ce  qui 
se  rapporte  aux  sciences  ou  aux  arts  n'y  est  négligé; 
et  c'est  une  galerie  où.  l'antiquaire,  l'historien,  le  géo- 
logue, le  naturaliste  rencontreront  a  chaque  pas  ou  de 
nouvelles  observations  a  faire,  ou  des  souvenirs  qu'ils 
aimeront  a  se  rappeler.  Toutes  ces  notices  cependant 
ne  sauraient  avoir  le  même  mérite.  M.  de  Cloet  est 
circonscrit  dans  sa  narration  par  le  choix  des  vues,  et 
peut-être  s'en  trouve-t-il  dans  le  nombre  quelques-unes 
que  le  talent  de  Pécrivain ,  comme  celui  du  peintre, 
s'efforcerait  vainement  de  présenter  sous  des  couleurs 
brillantes. 


M.  le  chevalier  Camberlyu  publie  une  seconde  édi- 
tion de  sa  pièce  de  vers  sur  l'invention  de  la  vaccine. 
Quelques  corrections   et    quelques    additions    mettent 


(  4:7  ) 

cette  édition  au-dessus  de  la  première.  Un  brillant 
morceau  en  l'honneur  des  médecins  fiançais  qui  sont 
allés  braver  la  peste  a  Barcelone ,  revient  ici  fort  a 
propos,  et  on  y  lit  sur-tout  avec  plaisir  un  bd  hom- 
mage ,  rendu  en  peu  de  mots ,  a  notre  concitoyen 
Demanet,  le  propagateur  de  la  vaccine  dans  ce  pays, 
et  qui  mérite  a  si  juste  titre,  le  surnom  que  lui  donne 
M.  Camberlyn,  du  Jeûner  de  la  Flandre. 


L'installation  de  la  commission  chargée  de  faire  une 
notice  sur  les  objets  d'art  et  les  monumens  historiques, 
exposés  dans  les  monumens  publics,  et  de  veiller  a  la 
conservation  de  ces  objets,  autant  dans  l'intérêt  de 
l'art  que  dans  celui  de  l'histoire  nationale ,  a  eu  lieu 
dernièrement  dans  une  des  salles  de  l'hôtel-de-ville , 
sous  la  présidence  de  M.  le  Bourguemaître.  Les  mem- 
bres de  la  commission  sont:  MM.  le  comte  Dethiennes , 
S  champ  ,  D'Huyvetter  et  Hje-Schoutheer ,  directeurs 
de  l'académie  royale  de  Gand,  Roelandt,  architecte  de 
la  ville,  De  Bast,  secrétaire  de  la  société  royale  des 
beaux-arts,   et  Surmont  fils ,  peintre  amateur. 

De  pareilles  mesures  ont  été  prises  a  Rome  ;  un  édit 
de  Clément  XI,  provoqué,  en  1704,  par  le  cardinal 
Spinola,  défend,  sous  des  peines  très-sévères,  a  toutes 
personnes ,  aux  propriétaires  mêmes  de  détruire  ou  de 
déplacer ,  sans  la  permission  d'un  inspecteur  les  objets 
d'art  qu'ils  possèdent.  Un  relevé  des  tableaux ,  statues 
et  autres  monumens  de  l'histoire  et  de  l'art  a  été  fait  par 
ordre  de  Pie  VII,  dans  toutes  les  églises,  couvens  et 
communautés  de  Rome  et  de  l'état  ecclésiastique,  et  ils 
ont  été  mis  ensuite  sous  la  surveillance  d'une  com- 
mission  spéciale. 

—  Le  cabinet  de  médailles  de  l'Université  de  Gand, 


(  *j*  ) 
vient  de  s'enrichir  de  plusieurs  dons  particuliers,  qui 
rendent  cette  collection  de  plus  en  plus  intéressante  ;  au 
nombre  des  médailles  dernièrement  reçues,  on  distingue 
celle  qui  lut  frappée,  il  y  a  peu  de  tems,  pour  perpétuer 
le  souvenir  de  l'érection  du  monument  élevé  a  Luccrne: 
Aux  mânes  des  gardes  Suisses ,  morts  le  10  Août  1792. 
Sur  cette  médaille  est  gravé  le  monument  exécuté  d'après 
le  modèle  du  sculpteur  danois  Thorwaldsen ,  et  exé- 
cuté par  Luc  Aliorn ,  de  Constance;  il  consiste  en  un 
Lion  mourant  sur  des  débris  d'armes.  Le  lion  est  taillé 
dans  le  roc  vif,  ainsi  que  la  grotte  dans  laquelle  il  est 
couché,  et  qui  est  longue  de  44  pieds  de  France  sur 
26  pieds  de  haut  ;  il  a  'i'à\  pieds  de  longueur  et  18 
de  hauteur.  Une  inscription,  taillée  sur  le  roc,  indique 
l'événement.  Ce  monument,  simple  dans  sa  composition 
et  d'un  travail  parfait,  est  un  de  ceux  qui,  par  leur 
nature  même,  passeront  a  la  postérité  ;  il  est  creusé 
dans  un  roc  a  pic ,  a  vingt,  pieds  au-dessus  de  l'eau 
d'une  rivière  qui  coule  a  sa  hase  et  en  défend  l'appro- 
che sans  empêcher  que,  de  la  rive  opposée,  une  des 
grandes  route  de  la  Suisse,  les  curieux  ne  puissent  le 
contempler.  La  médaille  très-bien  exécutée,  est  une  des 
meilleures  productions  du  graveur  Aberli. 


Parmi  les  ouvrages  offerts  a  la  Société  royale  d'Agri- 
culture et  de  Botanique  de  Gand,  se  trouve  un  nouveau 
recueil  publié  sous  le  titre  à? Annales  de  la  Société 
Linnèenne  de  Paris.  Le  premier  cahier  a  paru  dans  le 
courant  de  Mars  dernier  ;  il  contient  :  l'éloge  de  Brous- 
son  et,  premier  fondateur  de  la  Société  Linnèenne,  par 
M.  Thièbaut-de-B erneaud ,  secrétaire  perpétuel  j  des 
observations  sur  le  genre  et  les  espèces  Trigla ,  vivant 
dans    la    Méditerranée ,   sur  les    côtes    de   Nice ,    par 


(*79) 
M.  Risso;  un  mémoire  sur  l'oologie,  ou  sur  les  ouïs 
des  animaux,  par  M.  Moquin-Tandon ;  mie  notice  sur 
deux  espèces  de  champignons  nouveaux,  découvertes 
et  décrites  par  M.  de  Brondeau  ;  observations  a  ce  sujet, 
et  création  du  genre  Gyrocéplialus,  par  M.  Persoon; 
on  y  trouve ,  sous  le  titre  de  Bulletin  Linnéen  :  le  pro- 
gramme pour  le  concours  de  182e,  dans  lequel  la  so- 
ciété propose  divers  prix  de  zoologie,  de  botanique  et 
de  physiologie  végétale  ;  le  résumé  des  séances  5  l'an- 
nonce des  ouvrages  adressés  a  la  Société ;  une  analyse 
de  ceux  de  ses  membres  ;  l'indication  des  établissemens , 
découvertes ,  inventions  et  perfectionnemens  qui  ont 
rapport  aux  sciences  naturelles. 

Ces  Annales  paraissent  tous  les  deux  mois,  par  ca- 
hiers de  six  feuilles  d'impression  in-8.,  avec  des  plan- 
ches gravées,  formant  a  la  fin  de  l'année  un  volume  de 
56  feuilles.  Le  prix  de  la  souscription  est  de  18  francs 
pour  Paris,  22  francs  pour  les  départemens ,  et  26  pour 
l'étranger.  D'après  le  règlement  de  la  Société,  tous  les 
Membres  en  général,  à  l'exception  des  correspondans 
étrangers  y  sont  de  droit  souscripteurs  aux  Annales  que 
la  Société  publie;  tous  ceux  qui  ne  les  prennent  point, 
sont  censés  avoir  quitté  la  Société.  Le  but  de  l'institu- 
tion étant  le  progrès  de  l'Agriculture  et  de  la  Botanique, 
la  Société  ne  peut  mieux  parvenir  a  cette  fin ,  qu'en 
propageant  par  l'impression  les  observations  et  les  mé- 
moires recueillis  par  ses  Membres,  qui  tous,  en  s'asso- 
ciant  a  ses  travaux,  contractent  les  mêmes  devoirs. 
Cette  considération  seule  a  suffi  pour  faire  adopter 
la  mesure  de  compter  de  droit  parmi  les  souscripteurs 
tous  les  Membres  de  la  Société. 

—  On  a  élevé  a  Groningue,  au  moyen  d'une  souscrip- 
tion, un  monument  en  marbre  en  l'honneur  de  Hen- 


(48o) 

drik  ff  ester ,  l'un  des  premiers  et  des  principaux  ré 
formateurs  de*  l'instruction  primaire  dans  ce  pays.  De- 
puis 1772,  il  travailla  a  cette  réformation  et  la  sociéU 
du  bien  public,  e'rige'e  en  1784,  suivit  bientôt  les  même! 
traces.    Vers  cette  époque,   Niemvold,    en  Frise,    s( 
présenta  aussi    comme  réformateur    de   l'enseignement 
primaire  ;    il    était   doué    d'un    esprit    philosophique, 
possédait  une  connaissance  profonde  du  caractère  de? 
enlans,   et   ses  vues  fourniront  encore  long-tems  ma- 
tière aux  améliorations.  On  a  également  et  de  la  mênre 
manière  élevé,  a  Leeuwarden,  en  1820,  un  monument 
a  sa  mémoire   semblable  à    celui  qu'on  vient  d'ériger 
pour  ff 'ester.   Ces  deux  hommes  ont  rendu  de  grands 
services,  et  c'est  une  bien  agréable  satifaction  de  voir  la 
manière  brillante  avec  laquelle  des  compatriotes  recon- 
naissans  honorent  des  travaux  aussi  utiles  que  modestes. 

—  Le  grand  tableau,  la  bataille  de  Waterloo,  peintt 
par  M.  Pieneman  ,  d'Amsterdam  ,  vient  d'être  acquis 
par  S.  M.  le  Roi ,  pour  la  somme  de  quarante  mille  flo- 
rins des  Pays-Bas ,  (85,656  francs  84 cent.).  Ce  tableau, 
quoiqu'il  ne  fût  pas  encore  entièrement  achevé,  causa 
la  plus  grande  satisfaction  a  la  Famille  Pvoyale.  Si  les 
beautés  que  nous  avons  remarquées  dans  la  belle  es^ 
quisse,  exposée  pendant  quelques  jours  a  Gand,  sont 
reproduites  en  grand  dans  cette  production ,  nous  ne 
doutons  pas  qu'elle  ne  soit  un  des  plus  beaux  ouvrages 
de  ce  peintre  ,  et  qu'elle  n'occupe  une  place  dis- 
tinguée parmi  les  chefs-d'œuvre  de  l'école  moderne. 
Une  composition  heureuse,  un  ton  local  et  naturel  et 
un  effet  de  perspective  aérienne  qui  donne  une  cer- 
taine magie  a  ses  peintures,  distinguent  particulière- 
ment le  pinceau  de  ce  maître. 


ETTY  CENTER  L 


NRARY 


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