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Full text of "Messager des sciences historiques de Belgique"

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MESSAGER 


DES 


SCIENCES  HISTORIQUES 

DE  BELGIQUE. 


MESSAGER 


SES 


SCIENCES  HISTORIQUES 

DE  BELGIQUE. 

Hecweil  publié  par 

MM,  J.  DE  SAITST-GENOIS  ,  Archiviste  de  la  Flandre  Orientale}  C,  P.  SERRCRE, 
Professeur  à  l'Université  ;  PH.  BLOMMAERT ,  Docteur  en  droit  ;  A.  VOISIN , 
Conservateur  de  la  Bibliothèque  de  l'Université;  A.  VAN  LOKEREN  ,  Avocat; 
à  Gaud. 

AVEC  LA  COOPÉRATION  HABITUELLE 

De  MM.  F.  Db  Reiffenberg  ,  Conservateur  de  la  Bibliothèque  nationale,  et 
A.  ScHAYBs  ,  Employé  aux  Archives  du  royaume  ,  à  Bruxelles. 


Hnnh  1839. 


IMPRIMERIE    DE    LEONARD    HEBBELYNGK, 

Vieille  Citadelle,  N»  48. 


LISTE  DES  COLLABORATEURS. 


MM.  J.  H.  BoRMANS,  professeur  à  l'Université  de  Liège. 

R.  Chalon,  président  des  bibliophiles  belges  ,  à  Bruxelles. 

E.  CooMANs,  avocat,  à  Gand. 

N-  CoRNELissEN ,  membre  de  Tacadémie  de  Bruxelles  ,  à  Gand. 

P.  De  Decker,  directeur  de  la  Revue  de  Bruxelles,  à  Gand. 

H.  Du  Trieu,  avocat ,  à  Malines. 

J.  J.  De  Smet,  membre  de  la  Commission  royale  d'histoire,  à  Gand. 

O.  Delepierre,  archiviste  de  la  Flandre  occideulale  ,  à  Bruges. 

Fl.  Frocheur  ,  homme  de  lettres  ,  à  Bruxelles. 

L.  P.  Gacharo,  archivisie-général  du  royaume,  à  Bruxelles. 

J.  Gauthier,  propriétaire  ,  à  Bruxelles. 

V,  GoETHALS, conservateur  de  la  Bibliolh.  de  la  ville  de  Bruxelles. 

H.  Helbig  ,  à  Liège. 

Fr.  HENNEBEr.T,  arcliivi^îc  de  la  ville  de  Tournai. 

F.  Henai-X,  homme  de  lettres,  à  Liège. 
J.  Ketele,  avocat,  à  Audenarde. 

E.  Lavalleye  ,  professeur  à  lUniversilé  de  Liège. 
J.  J.  Lambim  ,  archivislc  de  la  ville  d'Ypres. 

F.  H  Mertens,  bibliothécaire  de  la  ville  d'Anvers. 
Ch.  Morren,  professeur  à  l'Université  de  Liège. 
M.  L.  PoLAiN,  archiviste  de  la  province  de  Liège. 
C.  PioT,  avocat,  àLonvain. 

J.  E.  G.  Roulez  ,  professeur  à  l'Université  de  Gaud. 

E.  Tandel,  professeur  à  l'Université  de  Liège. 

Pr.  Van  Duyse,  archiviste  de  la  ville  de  Gand. 

C.  Vervier  ,  président  de  la  Commission  des  Monuments,  à  Gand. 

Van  der  Meersch  ,  docteur  en  médecine ,  à  Audenarde. 

L.  A.  Warnroenig,  professeur  à  l'Université  de  Fribourg  (Bade). 

J.  F.  WiLLEMS ,  membre  de  la  Commiss.  royale  d'histoire,  à  Gand. 


%:»^4C^/ 


SUR  LES 


iîtottnoiejs  frappces  à  ïlummcn, 

PAR 

JEAN  II,  SIRE  DE  WESEMAEL. 


1415-1462. 


Tous  les  numismales  qui  recueillent  les  monnoies  du 
moyen-âge  ont  pu  faire  la  remarque  que  le  nombre  des 
barons  ou  seigneurs  subalternes,  autres  que  les  comtes  et 
les  ducs,  qui,  en  Belgique,  ont  exercé  le  droit  de  battre 
monnoie,  est  comparativement  beaucoup  petit  que  celui, 
qui,  en  France  et  en  Allemagne,  a  joui  de  ce  privilège. 
Jusqu'ici  on  n'a  pas  songé  à  en  rechercher  la  cause,  ni  à 
étudier  une  question  intéressante,  non-seulement  pour  la 
numismatique,  mais  encore  pour  l'histoire  politique  de 
notre  pays.  Les  bornes  de  cette  notice  ne  nous  permettront 
pas  d'examiner  les  motifs  pour  lesquels,  dans  quelques- 
unes  de  nos  provinces,  les  seigneurs  ont  conservé  certains 
droits  régaliens  (1),  entre  autres  celui  de  frapper  mon- 
noie, tandis  que  dans  d'autres,  telles  que  la  Flandre  et  le 
Brabant,  ils  en  furent  dépouillés  à  une  époque  très-reculée. 
En  attendant  que  nous  y  revenions  plus  tard,  nous  allons 

(1)  On  appelle  droits  régaliens  ceux  dont  la  possession  constituait  la 
souveraineté.  Tantôt  ils  étaient  attachés  aux  terres  mêmes ,  et  cela  de 
temps  immémorial ,  tantôt  ils  étaient  exercés  en  vertu  de  privilèges  et  de 
concessions.  On  peut  consulter  sur  cette  question  :  Von  Beust,  Sciagra- 
phia  jiiris  monetandi,  Leipzig,  1745,  ia-i" ,  et  Carrach,  de  Jlegali 
fudendi  monelam,  Halla; ,  174^,  m-i: 

1 


(2) 

prouver  que  les  monnoics  frappées  par  le  sire  de  Wese- 
mael,  n'ont  pas  élé  fabriquées  au  village  de  ce  nom, 
comme  on  l'a  cru  jusqu'ici. 

Le  savant  Heylen  est  le  premier,  qui,  dans  son  intéres- 
sante dissertation  sur  les  villes  et  autres  endroits  des  Pays- 
Bas  ,  qui  avaient  un  hôtel  de  monnoies  aux  XIV^  et  XV^ 
siècles  (1),  ait  parlé  de  celle  du  seigneur  de  Wesemael. 
Deux  chartes  imprimées  dans  le  recueil  de  Van  Mieris  (2), 
lui  en  avaient  révélé  l'existence.  Dans  la  première,  qui 
est  une  ordonnance  de  la  comtesse  Jacqueline ,  en  date 
du  13  novembre  1418,  on  assigne  la  même  valeur  aux 
blancs  de  Jean  de  Wesemael  qu'aux  blancs  de  Bourgo- 
gne. Les  uns  et  les  autres  y  sont  portés  à  4  gros.  L'autre 
pièce  du  21  juillet  1421,  émanée  de  Jean  de  Bavière, 
mambour  de  Hollande,  porte  défense  de  recevoir  dans 
toute  l'étendue  de  ce  pays  le  florin  de  Namur  et  l'agnelet 
de  Wesemael  {die  Namensche  gulden  noch  Wesemaehche 
Lammekeii). 

Heylen  rapporte  en  outre  qu'il  avait  trouvé  la  mention 
d'écus  {schilden) ,  de  l'alloi  de  14  1/2  carats,  et  de  69  au 
marc,  et  que  les  agnelets,  dont  nous  venons  de  parler, 
étaient  de  69  au  marc.  Ceci,  dit-il,  m'a  été  pleinement 
confirmé  par  un  manuscrit  de  M  Gérard ,  dans  lequel  il 
est  dit  encore  que  le  même  sire  de  Wesemael  avait  fait 
frapper  des  florins  du  Rhin  {Rhynsche  guldens)  de  14  1/2 
carats  d'alloi  et  de  74  pièces  au  marc  (3). 

(1)  Ce  mémoire  est  intitulé  :  Antwoord  van  den  H.'  Heylen  op  het 
vi-aeystuk:  Acn  te  toonen  de  steden  of  andere  plavtsen  der  Nederlan- 
den  in  de  ipvlke  de  rcspectiere  souvereynen  yeldspecien  hebben  dnen 
shiyen,  yeduerende  de  A7F"=  en  XF°  eeuwen.  Brussd,  1787,  iii-4». 
Voyez  p.  11,  12, 126  et  127. 

(2)  Grool  Charterboek  der  Graaven  van  Holland,  l\,  505  et  644. 

(3)  Il  serait  permis  de  douter  que  rexpression  Rhynsche  yuldens  ne 
s'applique  pas  aux  monnaies  des  seigneurs  de  Wesemael.  Heylen  n'au- 
rait-il pas  lourundu':' 


(  3) 

Les  recherches  de  ce  savant  lui  avaient  fait  connaître 
quatre  espèces  de  monnoies,  savoir  1"  en  or,  les  agnelets, 
les  écus  et  les  florins  de  Rhin,  2°  en  argent,  les  blancs. 
Il  ignorait  si  toutes  avaient  été  frappées  par  un  ou  par 
plusieurs  seigneurs  de  Wesemael. 

Un  autre  doute  que  Heylen  ne  put  éclaircir,  fut  celui 
du  lieu  précis  de  la  fabrication  de  ces  espèces.  11  avait  cru 
que  certains  barons  du  Brabant  et,  entre  autres,  ceux  de 
Wesemael,  y  avaient  joui  du  privilège  de  battre  monnoie 
nonobstant  un  article  très-formel  de  la  constitution  de  cette 
province,  qui  s'y  opposait  et  dont  nous  parlerons  plus  tard. 
Cependant  il  paraît  qu'il  conserva  quelques  doutes  à  cet 
égard,  même  pendant  l'impression  de  son  mémoire;  car 
dans  la  table  raisonnée  des  matières  à  la  fin  du  volume, 
il  s'exprime  ainsi  à  l'article  Wesemael  :  momioies  frappées 
à  Wesemael,  ou  ailleurs,  joar  les  seigneurs  de  ce  lieu, 

M.  Lelewel,  dans  son  savant  ouvrage  sur  la  numismati- 
que du  moyen-âge,  a,  d'après  Heylen,  placé  le  village  de 
Wesemael,  parmi  les  endroits  des  Pays-Bas  qui  avaient 
anciennement  un  hôtel  de  monnoies  (1).  La  présente  notice 
prouvera  que  cette  localité  y  figure  à  tort  et  nous  aurons 
peut-être  ailleurs  l'occasion  de  démontrer  que  telle  autre 
ville,  telle  autre  seigneurie  devrait  également,  pour  diffé- 
rents motifs,  être  rayée  de  la  liste  dressée  par  M.  Lelewel  (2). 

(1)  Vol.  11,296. 

(2)  Il  est  cviclent.  par  exemple,  que  jamais  ou  n'a  frappé  monnoie  à 
Wastines ,  village  du  Brabant  wallon.  M.  Lelewel  assigne  à  cette  localité 
les  petites  pièces  représentées  sous  les  N<"  35  et  36,  pi.  XX  de  son  atlas. 
Elles  portent  bastoubati.  L'explication  de  ces  lettres  reste  encore 
une  véritable  énigme  pour  nous,  et  si  nous  n'étions  embarrassés  par 
celles  qui  portent  bâti,  nous  aurions  aussi  une  conjecture  à  émettre. 
Nous  prendrions  les  quatre  lettres  b  a  s  t  pour  les  initiales  des  quatre 
villes  du  Brabant,  Bnurella ,  Antwerpia,  Sylru-Ducis ,  Thème,  qui 
auraient  pu  frapper  une  monnoie  commune,  tandis  que  Louvain ,  la 
capitale  du  duché,  en  frappait  nue  pour  elle  seule.  —  Ces  lettres  dési- 
<;uent  peut-être  lui  n«iu  dlioninic  ? 


(M 

Heylen  (1)  paraît  n'avoir  jamais  vu  des  monnoies  du 
seigneur  de  Wesemael:  par  là  il  n'a  pas  été  à  même  de  nous 
donner  des  renseignements  exacts  ni  sur  le  lieu,  ni  sur  la 
date  de  leur  fabrication.  M.  Lelewel  lui-même  (2)  n'avait 
rencontré  qu'une  pièce  de  billon ,  qui  apparemment  était 
assez  fruste ,  puisqu'il  y  avait  lu  moneta  de  kunrns.  Plus 
heureux  que  ces  auteurs,  nous  avons  trouvé,  lors  de  la 
vente  du  cabinet  de  feu  M.  le  comte  De  Renesse,  l'occasion 
de  nous  procurer  à  peu  près  toutes  celles  qu'il  possédait, 
et  par  conséquent  il  nous  est  devenu  possible  de  dire  quel- 
que chose  de  positif  à  leur  égard. 

Commençons  par  rechercher  l'endroit  où  elles  ont  été 
fabriquées.  Nous  avons  vu  que  l'opinion  commune  admet- 
tait que  c'était  à  Wesemael. 

Ce  village  situé  à  mi-chemin  entre  Louvain  et  Aerschol, 
était  autrefois  une  des  baronnies  les  plus  célèbres  du  Bra- 
bant,  parce  que  la  dignité  de  maréchal  héréditaire  de  ce 
duché  s'y  trouvait  attachée.  Cette  seigneurie  avait  donné 
son  nom  à  une  famille  qui  figure  dans  notre  histoire,  dès 
l'année  1 144,  et  qui,  depuis  lors,  jusqu'à  son  extinction  au 
XV*  siècle,  augmenta  toujours  en  richesse  et  en  puissance. 

A  l'aide  des  ouvrages  de  De  Vaddere  et  de  Butkens  (3), 
nous  aurions  pu  donner  la  liste  à  peu  près  complète  des 
seigneurs  de  Wesemael  ;  mais  comme  ce  n'est  pas  en  leur 
qualité  de  barons  du  Brabant,  qu'ils  exercèrent  le  droit 
de  battre  monnoie,  et  que  d'ailleurs,  il  n'y  a  apparemment 
qu'un  seul  membre  de  cette  famille  qui  ait  joui  de  cette 
prérogative,  cela  devenait  complètement  inutile  pour  la 
question  que  nous  traitons. 

(1)  Du  moins  avant  la  publication  de  son  ouvrage. 

('i)  Voir  les  Notes  supplémentaires,  pag.  7,  fie  ses  Observations  sur 
le  type,  au  vioyen-ùf/e,  de  la  monnoie  des  Pays-Bas. 

(3)  De  Vaddere,  Traité  de  Voriyine  des  Ducs  de  Brabant,  II. — 
Butkens,  Trophées  du  Brahanf,  II,  125  cf  127. 


(5  ) 

Malgré  la  haute  importance  de  la  terre  de  Wesemael  et 
le  rang  élevé  de  ceux  qui  la  possédaient,  ce  serait  une  er- 
reur de  croire  que  quelqu'un,  autre  que  le  duc  ou  les 
villes  franches,  en  vertu  de  sa  concession,  ait  jamais  pu 
exercer,  en  Brabant,  du  moins  depuis  le  XIIP  siècle, 
le  droit  de  battre  monnoie.  Là,  comme  au  comté  de 
Flandre,  les  souverains  avaient  su  de  bonne  heure  enlever 
la  plupart  des  droits  régaliens  au  petit  nombre  de  leurs 
grands  vassaux  qui  s'en  trouvaient  en  possession  (1).  Plus 
tard,  les  villes  franches  obtinrent  le  privilège  de  faire 
fabriquer  la  monnoie  dans  leurs  murs.  Dès  lors  nous  voyons, 
en  Brabant,  les  villes  tellement  jalouses  de  cette  pré- 
rogative, qu'elles  firent  stipuler  au  prince  que  jamais  il 
n'aurait  permis  à  qui  que  ce  fut  de  frapper  monnoie  dans 
toute  l'étendue  du  duché,  si  ce  n'est  dans  les  villes  et  cela 
sur  leur  avis.  Cette  disposition  se  trouve  énoncée  de  la 
manière  la  plus  expresse  dans  la  charte  solennelle  accor- 
dée au  Brabant,  en  1313,  à  l'avènement  de  Jean  III. 
L'article  2  de  ce  pacte  est  ainsi  conçu  :  on  ne  frappera,  ?ii 
fabriquera  aucune  monnoie  ^  si  ce  n'est  dans  les  villes 
franches  y  et  cela  après  avoir  pris  l'avis  desdittes  villes  ^ 
ainsi  que  celui  du  pays,  etc.  (2). 

Heylen  avait  connu  cette  clause  si  remarquable,  et  elle 
l'avait  embarrassé.  Il  l'explique,  en  disant  qu'elle  parais- 
sait ne  pas  s'appliquer  aux  barons  du  Brabant.  Cette 
interprétation  est  tout-à-fait  inexacte  ,  et  le  savant  acadé- 
micien avait  sans  doute  hésité  lui-même  à  la  donner. 

(1)  Il  en  fut  tout  autrement  dans  certaines  parties  de  Belgique,  telles 
que  le  pays  de  Liège,  le  comté  de  Gueldre,  etc.,  etc. 

(2)  Voici  larticle  en  entier  :/<e7«,  datmen  tioch  slaen,  noch  maecken 
en  sa!,  eenigh  pcnninck  in  Brabandt,  ten  sy  in  rry  steden,  ende  Inj 
rade  van  onse  voorz.  steden,  ende  ons  lundis,  en  desen  penninck  sal 
men  werderen,  ende  houden  in  goedcn  poiticten  by  rade  des  roorsz. 
steden,  en  des  landts  voorsz.^on-  le  traité  dans  Iooi'CH^,  Pracfyke  van 
procedccren,  I  .  'à2. 


(  6  ) 

Depuis  l'année  1313,  la  même  défense  fut  souvent 
répétée  ,  et  il  serait  impossible  de  citer  un  seul  seigneur 
qui  jamais  ait  fait  exception  à  la  règle  générale. 

C'est  donc  hors  du  Brabant  qu'il  faut  chercher  une  terre 
appartenant  à  la  famille  de  Wesemael  et  à  laquelle  a  été 
attaché  le  droit  régalien  qui  nous  occupe.  Heureusement 
les  monnoies  que  nous  avons  conservées,  nous  indiquent 
clairement  le  lieu  de  leur  fabrication.  Elles  nous  appren- 
nent que  c'est  à  Rummen,  village  de  l'ancien  pays  de  Liège. 

Rummen,  Humigny ,  Ruminis ,  situé  à  trois  quarts  de 
lieue  de  S'-Trond  et  à  une  lieue  et  demie  de  Léau ,  faisait 
partie  du  comté  de  Loos ,  et  formait  anciennement  une 
seigneurie  qui  comprenait  une  étendue  de  quatre  lieues. 
Au  dix-septième  siècle ,  celte  terre  était  encore  connue 
sous  le  nom  de  ville  et  hauteur  de  Ruminis. 

Le  jurisconsulte  Robyns,  qui  a  publié  le  recueil  des 
édits  de  ce  comté  (1)  ,  avait  déjà  fait  la  remarque  que 
Rummen  avait  eu,  au  XV^  siècle,  un  hôtel  de  monnoies.  Un 
passage  d'un  recueil  de  privilèges  de  la  ville  de  S'-Troud  , 
lui  avait  appris  celte  particularité.  Voici  la  traduction  de 
celte  citation  curieuse  :  le  lundi  avant  la  Chandeleur  de 
tannée  1419^  il  a  été  arrêté  entre  les  magistrats  de  la  tille 
et  ceux  du  jiays  que  personne^  soit  homme  ou  femme ,  ne 
pourra  introduire  dans  la  ville  ou  la  franchise  la  monnoie 
que  Von  frajjpo  actuellement  à  Maestricht ,  sous  peine  de 
deux  réaux  et  en  outre  la  confiscation  des  espèces }  la  même 
défense  s'étend  à  la  monnoie  tant  d'or  que  d'argent  que 
l'on  fabrique  à  Rummen;  ceux  qui  l' introduiraient  ou  la 
itiettraient  en  circulation  dans  la  ville  ou  la  franchise  , 
encomront  la  même  peine  (2), 

(1)  Statuta  Lossensia,  p.  170,  à  la  suite  de  Mantelii  historiœ  Los- 
sensis  libri  deceni. 

(2)  Op  mactidach  voor  nnsser  vronwen  licht-dach  amio  1419,  is 
vcrdiofjin  met  hecrcn  l'itdc  slaet  dut  niemant ,  xiychysy,  vyff'oft 


(  7) 

Voilà  un  témoignage  bien  formel  en  faveur  de  l'existence 
d'un  hôtel  de  monnoies  à  Rummen,  au  XV^  siècle,  qui  vien- 
drait dissiper  tous  les  doutes ,  si  quelqu'un  pouvait  en  con- 
server, après  l'inspection  des  pièces  gravées  sur  la  planche 
qui  accompagne  celte  notice. 

Nous  faisons  observer  ici  en  passant  que  les  monnoies 
de  Maestricht ,  dont  il  est  également  question  dans  le  pas- 
sage cité  plus  haut,  sont  celles  frappées  par  les  ducs  de 
Brabant ,  dans  la  seigneurie  de  Vroenhoven  ,  enclavée 
dans  la  ville  prédite.  Nous  aurons  apparemment  l'occasion 
de  nous  en  occuper  plus  tard  (1). 

Mais  revenons  à  Rummen.  Nous  avons  dit  plus  haut 
que  cette  terre  était  comprise  dans  l'ancien  comté  de 
Loos;  cependant  ce  ne  sont  pas  les  comtes  de  Loos,  comme 
l'a  cru  Robyns ,  mais  des  dynasles  particuliers  qui  y 
avaient  leur  hôtel  de  monnoies. 

Louis  IV,  comte  de  Loos ,  donna,  en  1331 ,  à  Jeanne  sa 
sœur,  dame  de  Quaetbeeck,  et  à  Arnoul  fils  de  cette  dernière 
la  terre  de  Rummen  (2).  Cet  Arnoul  était  fils  de  Guillaume 
d'Oreille  ou  de  Hurle.  C'est  donc  probablement  à  dater  de 
cette  époque  que  Rummen  a  dû  avoir  un  hôtel  de  monnoies. 

man,  die  moenfe  oft  gelt,  dut  men  nu  te  Triecht  sleet,  in  de  stndt  oft 
vryheyt  bringen  en  sal,  op  die  pêne  van  twee  realen  ende  'f  gelt  ver- 
loeren  ende  desgelycx  van  den  gelde ,  gouwe  en  silvere  dat  men  te  Rum- 
men sleet,  en  sal  oeck  niematit  bieden,  noch  bringen  in  de  stadt  oft 
vryeheyt  op  die  selve  pêne. 

(1)  Nous  avons  consigné  dans  le  Messager  des  Arts,  vol.  VI  p.  107,  une 
erreur  de  M.  Hermand ,  relativement  à  une  monnoie  de  Maestricht.  Cet 
article  a  été  reproduit  dans  la  Revue  yumismatique,  année  1838,  p.457- 

(2)  L'acte  de  donation  se  trouve  dans  Mantelius.  —  Il  parait  que  déjà 
à  une  époque  antérieure  à  l'année  1331 ,  Rummen  avait  des  seigneurs 
particuliers.  Dans  un  ancien  manuscrit  appartenant  à  M.  De  Roovcre 
de  Roosemersch  ,  de  Bruxelles  ,  à  qui  je  dois  ces  renseignements  ,  il 
est  dit  que  ,  Guillaume  de  Montferrand  ,  seigneur  d'Oreille  ,  qui  mou- 
rut sans  postérité,  releva  la  dimc  de  Rummen,  en  1313,  et  que  celle 
seigneurie  aj.partenait,  en  1329.  à  Jean  de  Montferrand. 


(  8  ) 

Cet  Arnoul  est  devenu  célèbre ,  à  cause  de  ses  préten- 
tions au  comté  de  Loos.  Voici  son  histoire  en  peu  de 
mots.  Thierri  de  Heinsberg ,  comte  de  Loos ,  étant  mort 
sans  enfants  ,  Godefroi  de  Dalembrouck  ,  son  neveu  et  son 
héritier,  vendit  ses  prétentions,  en  1363,  à  Arnoul 
d'Oreille;  ce  seigneur  descendait  lui-même  par  sa  mère, 
comme  nous  venons  de  le  voir,  des  anciens  comtes  de 
Loos.  Le  chapitre  de  Liège,  qui  avait  réclamé  depuis  plus 
de  trente  ans  le  comte  de  Loos,  comme  lui  étant  dévolu, 
faute  d'héritiers  directs  ,  en  revendiqua  la  possession. 
Arnoul  d'Oreille,  ayant  fait  quelques  excursions  et  ravagé 
le  pays,  les  Liégeois  résolurent  d'aller  attaquer  sa  forte- 
resse. Le  siège  du  château  de  Rummen  commença  le  9 
août  1365,  et  la  place  fut  obligée  de  se  rendre  au  bout  de 
neuf  semaines.  Elle  fut  rasée  de  fond  en  comble ,  et  le  com- 
mandant, qui  s'était  défendu  avec  un  courage  héroïque, 
eut  la  tète  tranchée.  Ce  désastre  ruina  le  parti  du  préten- 
dant, qui,  dénué  de  secours,  fut  obligé  de  transiger,  au 
bout  de  deux  ans,  avec  ceux  de  Liège.  L'évêque  accorda  à 
Arnoul  d'Oreille,  ainsi  qu'à  Guillaume  de  Hamale,  son 
beau-frère,  une  rente  viagère  de  3000  florins,  moyennant 
l'abandon  de  tous  les  droits  qu'ils  auraient  pu  faire  valoir 
sur  le  pays  de  Loos. 

Depuis  lors  le  comté  de  Loos  cessa  d'avoir  des  sei- 
gneurs particuliers  et  fut  définitivement  réuni  à  l'évèché 
de  Liège. 

Malgré  cette  violente  secousse ,  la  terre  de  Rummen 
conserva  ses  dynastes,  qui  restèrent  très-puissants,  puis- 
que ,  nonobstant  les  démêlés  d'Arnoul  d'Oreille  avec 
ceux  de  Liège,  ils  avaient  encore  dans  le  siècle 
suivant  le  droit  de  battre  monnoie.  Le  château  de 
Rummen  joua  comme  on  voit  un  moment  un  rôle  assez 
important ,  et  les  historiens  ne  manquent  pas  de  détails 
sur    les    circonstances   qui    amenèrent    sa    destruction  ; 


(  9) 

mais  nous  n'avons  pu  nous  procurer  des  renseignements 
complets  sur  le  sort  ultérieur  de  cette  terre. 

Nous  avons  dit  que  c'est  eu  faveur  d'Arnoul  d'Oreille 
et  de  sa  mère  Jeanne,  dame  de  Quaetbeeck  et  fille  d'Ar- 
noul VI.  comte  de  Loos,  que  la  terre  de  Rummen  fui 
détachée  des  autres  possessions  de  la  famille.  Cet  Arnoul 
qui,  depuis  lors,  est  surtout  connu  sous  le  nom  d'Arnoul 
de  Rummen,  avait  épousé  une  fille  naturelle  de  Louis  de 
Maie,  comte  de  Flandre,  dont  il  n'eut  pas  d'enfants.  Elle 
mourut  en  1367. 

Il  existe  deux  gros  frappés  par  ce  seigneur ,  qui  sont 
très-remarquables  (1).  Ils  figurent  sur  notre  planche  sous 
les  N°'  7  et  8. 

Le  premier ,  déjà  cité  par  M.  Lelewel  (2) ,  porte  d'un 
côté,  autour  du  lion,  f  MONETA  RUMENse*^  et  au  revers  : 
ARNO  :  QVC  DOMNI.  N'est-ce  pas  Arnoldi  Quaetbeeck 
domini?  La  seconde  inscription  est  celle-ci  :  SIT  NOME/i 
Hotnim  No^/RI  IHesU  XRIs^?  BENEDICTVw. 

L'autre  pièce  n'est  pas  moins  intéressante.  Celle-ci  porte 
autour  du  lion  :  t  MONETA  FRAN.  D.  —  M.  De  Gosier,  de  ^ 
LouvaiU)  qui  en  possède  également  un  exemplaire  dans  son 
riche  médailler,  croit  pouvoir  y  lire  MONETA  FRAN.B.  Sur 
celui  qui  a  servi  à  la  gravure,  les  lettres,  quoique  bien 
marquées,  ne  laissent  pas  que  de  se  lire  assez  difficilement. 

Au  reste,  quelle  que  soit  la  version  que  l'on  adopte,  nous 
ne  pouvons  guères  l'expliquer.  Ces  lettres  se  rapportent 
évidemment  à  l'une  ou  l'autre  terre  possédée  par  Arnoul 
de  Rummen  mais  nous  ignorons  à  laquelle. 

(1)  Ces  deux  pièces  ,  ainsi  que  toutes  celles  représentées  sur  la  plan- 
che, font  partie  de  la  collection  de  l'auteur  de  cet'e  notice. 

(2)  Observation  sur  le  type  des  monnaies  des  Pays-Bas.  Monnoic 
de  Liège,  p.  14. —  M-  Lelewel  a  lu  ki.ued'.  mon  exemplaire  porte  assez 
clairement  rumen,  quoique  les  lettres  m  et  e  soient  liées  ensemble,  comme 
cela  se  voit  encore  sur  d'autres  pièces.  Au  revers .  M.  Lelewel  a  vu  ovc' 
au  lieu  do  oic". 


(  10  ) 

Au  revers,  il  y  a  :  APviSOM"  DE  RUMOI.  et  eusuile  l'ins- 
cription ordinaire  :  SIT:  NOME/e  :  DotîiiM  :  Nos^RI  :  lUesV 
XPhH  BEmmCTYnt. 

Ainsi  Arnoul  d'Oreille  frappa  monnoie  en  sa  qualité 
de  seigneur  de  Rumraen ,  et  en  celle  d'une  autre  localité 
encore.  Mais  on  ne  pourrait  guères  soutenir  qu'il  a  frappé 
ces  pièces  vers  1363,  lorsqu'il  était  prétendant  au  comté 
de  Loos,  puisqu'on  peut  les  faire  remonter  à  l'année  1331, 
lorsqu'il  reçut,  conjoinctement  avec  sa  mère,  la  terre  de 
Rummen,  ou  du  moins  à  l'époque  de  la  mort  de  celte  der- 
nière, qui  ne  vécut  pas  long-temps  après  cette  donation. 

Nous  ignorons  si  les  successeurs  immédiats  d'Arnoul 
frappèrent  également  monnoie.  Sa  sœur ,  épouse  de  Jean , 
sire  de  Hamal,  porta  la  terre  de  Rummen  dans  celte  der- 
nière famille,  et  l'histoire  fait  ensuite  mention  d'un  Gérard 
Hane  qui ,  en  1 383,  fit  relief  de  celte  seigneurie  à  l'évêque 
de  Liège ,  Arnoul  de  Hornes  (  I  ). 

Il  s'agirait  pour  nous  de  savoir  comment  après  l'exlinc- 
lion  de  l'ancienne  famille  de  Rummen ,  leur  héritage  a 
passé  à  celle  de  Wesemael  et  de  combler  la  lacune  qui 
existe  depuis  l'année  1367  jusqu'à  l'année  1417  environ. 
Nous  aurions  désiré,  dans  l'intérêt  delà  numismatique,  de 
donner  une  liste  complète  des  seigneurs  de  Rummen  ,  qui 
tous  peuvent  avoir  frappé  monnoie,  mais  nous  n'y  avons 
pas  réussi,  toutes  nos  recherches  à  cet  égard  ayant  été 
infructueuses. 

Laissons  donc  le  soin  de  remplir  celle  lacune  à  ceux  qui 
sont  plus  versés  que  nous  dans  l'histoire  généalogique  de 
noire  pays  et  passons  directement  à  la  famille  de  Wesemael. 

Bulkens  nous  assure  que  c'est  Jean  II  de  Wesemael  qui 
acquit  la  terre  de  Rummen,  mais  il  nous  laisse  ignorer 
s'il  hérita  ou  s'il  acheta  celle  seigneurie.   L'autorité  de 

(1)  Délices  du  pays  dr  Licjr,  \.  W.  \).  225,  cl  Ma/i(clins. 


(  H   ) 

Bulkcns  est  ici  du  plus  grand  poids,  d'autant  plus  qu'au- 
cun témoignage  historique  ne  vient  la  contredire,  et  que 
d'ailleurs  Jean  II  est  le  seul  dans  sa  famille  qui  semble 
avoir  porté  le  titre  de  seigneur  de  Rummen. 

Nous  verrons  plus  tard  pour  quels  motifs  le  comte  de 
De  Renesse,  dans  son  catalogue,  avait  attribué  quelques 
pièces  à  Jean  I  et  les  autres  à  Jean  IL 

Voici  quelques  particularités  relatives  à  ces  deux  sei- 
gneurs. 

Jean  I  de  Wesemael,  père  de  celui  dont  nous  nous  oc- 
cupons principalement,  avait  été  d'abord  chanoine  d'U- 
trecht,  puis  il  devint  seigneur  de  Wesemael,  Westerloo, 
Falais,  etc.;  avoué  de  Duffel,  maréchal  de  Brabant,  etc.  II 
mourut  en  1417,  en  laissant  un  fils  unique  ,  qui  est 

Jean  II,  dit  Mejonker  Jan ,  sire  de  Wesemael,  de  Wes- 
terloo, Falais,  Fleron,  avoué  de  Duffel,  maréchal  de 
Brabant  II  acquit  le  pays  de  Malines,  Anderstat,  Rum- 
men. Il  avait  épousé  Jeanne  de  Bouchout,  vicomtesse  de 
Bruxelles  (1). 

Quand  ce  seigneur  succéda  à  son  père,  en  1417,  il 
devait  avoir  atteint  depuis  quelques  années  sa  majorité; 
car,  déjà  en  1415,  il  figure  sous  le  titre  de  Joatines ,  filius 
de  Wesemael ,  conjointement  avec  son  père  dans  l'acte 
d'union,  contracté  entre  les  Brabançons  et  les  Lirabour- 
geois.  Cette  circonstance  a  pour  nous  une  certaine  impor- 
tance, car  elle  sert  à  expliquer  la  différence  des  armoi- 
ries que  nous  remarquons  sur  les  monnoies  de  Jean,  et 
doit  faire  croire  que  ce  seigneur  était  déjà  en  possession 
de  la  terre  de  Rummen  avant  de  succéder  à  son  père. 

Jean  II  mourut  en  1464  (2).  Il  était  le  dernier  de  sa 
famille.  Son  testament  passé  à  Louvain,  en  1462,  nous  a  été 

(1)  Outre  les  auteurs  déjà  eifés,  on  peut  voir  :  Hiildenbcrtjhe,  Geboortc- 
linie  dcr  hecren  van  Mecheleii.  p.  21. 

(2)  Le  Guide  fidèle  de  Louvain. 


(  12) 

conservé  (1).  Dans  celle  pièce  remarquable ,  il  s'inlilule  : 
Noble  et  puissant ,  seigneur  temporel  de  Wesemael  et  de 
Phalais,  de  la  terre  de  Malines,  elc,  maréchal  héréditaire 
du  pays  de  Brahant  (2).  Par  cet  acte,  il  inslitue  pour  son 
hérilier  le  duc  Charles-le-Téméraire,  de  sorle  que  la  sei- 
gneurie de  Wesemael,  ainsi  que  la  plus  grande  partie  de 
ses  possessions ,  passèrent  à  la  maison  de  Bourgogne.  Quel- 
ques autres  terres,  qu'il  ne  possédait  qu'en  emphyléose , 
retournèrent  à  d'autres  familles.  Celle  de  Rummen  fut  ap- 
paremment du  nombre. 

Nous  ferons  remarquer  en  passant  qu'un  seigneur  qui 
se  plaisait  à  prendre  des  titres  aussi  solennels,  a  dû  user 
largement  des  droits  attachés  à  ses  terres.  Cela  explique  la 
grande  variété  des  monnoies  qu'il  fit  frapper. 

Les  monnoies  de  Jean  II  de  Wesemael  sont  devenues 
aujourd'hui  d'une  rareté  excessive.  Je  n'en  ai  rencontré 
ni  en  or,  ni  en  argent,  dans  aucun  des  cabinets  de  Bel- 
gique que  j'ai  eu  l'occasion  de  voir.  Le  cuivre  même 
manque  à  un  grand  nombre  de  collections ,  quoiqu'il 
devrait  être  beaucoup  plus  abondant,  parce  qu'il  avait  une 
circulation  plus  générale  qui  n'était  pas  défendue  par  des 
ordonnances,  comme  celle  des  espèces  d'or  et  d'argent. 

Le  cabinet  de  feu  M.  le  comte  De  Reuesse  offrait  une 
série  des  monnoies  de  Wesemael,  composée  de  trois  pièces 
d'argent  et  de  sept  de  cuivre.  J'ai  fait,  lors  de  la  vente, 
l'acquisition  de  ces  pièces,  à  l'exception  d'une  seule  en 
argent  et  d'une  en  cuivre,  qui  n'ont  pas  été  retrouvées. 
Depuis  j'ai  rencontré  encore  quelques  pièces  en  cuivre. 

Remarquons  ici  en  passant  que  c'est  d'après  un  système 
vicieux  et  qui  ne  peut  pas  être  suivi  par  les  numismates 

(1)  Mirœi,  Oj).  diiil.,  I,  458. 

(2)  Nobilis  et  paient  Joannes,  dominus  tempo ralis  de  Wesemale , 
(h:  Phalnis  et  ti'rrœ  Mcchliniensis.  etc. ,  murescakiis  h  ère  di  tari  us  in 

]ia(ria  Bnibaittid'. 


(  13  ) 

belges,  que  dans  le  catalogue  de  feu  le  comte  De  Renessc, 
les  monnoies  des  seigneurs  de  Wesemael ,  ainsi  que  celles 
de  Batenbourg ,  de  Berg  ('s  Heerenberg) ,  de  Brederode ,  de 
Herstal ,  de  Loos ,  de  Reckhem ,  etc. ,  etc. ,  ont  été  enle- 
vées aux  Pays-Bas  pour  être  classées  sous  la  rubrique  : 
princes,  ducs,  comtes  et  seigneurs  d' Allemagne.  S'il  fallait 
retrancher  de  notre  pays  toutes  les  provinces  qui ,  au 
moyen-àge,  relevaient  directement  ou  indirectement  de 
l'empire,  il  ne  resterait  que  le  comté  d'Artois  et  celui  de 
Flandre  (la  Flandre  impériale  exceptée ,  dont  Alost  était  la 
capitale  et  qui  comprenait  jusqu'à  l'abbaye  de  S'-Bavon, 
enclavée  aujourd'hui  dans  la  ville  de  Gand,  et  une  partie 
de  cette  ville  même). 

Venons  maintenant  à  l'énuméralion  de  toutes  les  pièces 
de  Jean  de  Wesemael,  tant  de  celles  qui  nous  sont  connues 
par  les  citations  de  Heylen ,  que  de  celles  que  nous  possé- 
dons en  nature. 

Nos  remarques  sur  les  difiFérentes  pièces  exposeront  les 
motifs  qui  nous  les  ont  fait  attribuer  toutes  à  Jean  II, 
contrairement  à  l'opinion  de  M.  De  Renesse. 

En  or  : 

L'extrait  du  livre  aux  privilèges  de  la  ville  de  S^-Trond , 
rapporté  plus  haut ,  nous  apprend  qu'on  frappait  des 
monnoies  d'or  à  Rummen,  en  1419,  mais  il  nous  laisse 
ignorer  les  espèces. 

Voici  celles  que  nous  connaissons: 

I.  Les  agnelets. 

II  en  est  fait  mention  dans  l'ordonnance  de  Jean  de 
Bavière,  en  date  du  21  juillet  1421,  pubbée  par  Mieris. 
Ils  étaient  de  96  au  marc. 

II.  Les  écus  {Schilden). 

D'après  le  témoignage  de  Heylen,  ils  étaient  de  l'alloi 
de  14  1/2  carats  et  de  69  au  marc. 

III.  Les  florins  du  Rliin  {Rhynsche  guldens). 


(  14  ) 

De  1 4  1/2  carats  d'alloi ,  de  74  pièces  au  marc. 

C'est  encore  d'après  Heylen  que  nous  citons  cette  espèce. 
Donnait-on  quelque  fois  ce  nom  aux  pièces  seigneuriales 
frappées  sur  le  pied  des  florins  du  Rhin,  ou  bien  le  savant 
académicien  s'est-il  trompé?  C'est  ce  que  nous  ignorons. 

Jusqu'ici  on  n'a  pas  retrouvé  les  monnoies  d'or;  venons 
à  celles  d'argent. 

IV.  Les  blancs  {blanke?i). 

Il  en  est  fait  mention  dans  l'ordonnance  de  la  comtesse 
Jacqueline,  du  13  novembre  1418,  que  nous  avons  citée 
plus  haut. 

Nous  possédons  un  exemplaire  de  cette  monnoie  qui 
figure  sur  la  planche  qui  accompagne  cet  article,  sous 
leNM. 

Ce  blanc  porte  d'un  côté  Finscription  :  -J-IOHANneS  :  DE  : 
WESEMA/e  :  DomifwS  :  KVM?uetiy  et  au  milieu  les  armoiries 
de  Wesemael,  offrant,  en  langage  héraldique,  un  écu  de 
gueules  à  3  fleurs  de  lys ,  au  pied  posé  d'argent ,  timbré 
d'wi  cercle  d'or.  L'écusson  est  surmonté  de  trois  lambels. 

La  présence  de  ces  lambels,  qui  ne  se  remarquent  pas 
sur  toutes  les  monnoies,  nous  porte  à  croire  que  celles  sur 
lesquelles  ils  se  trouvent  ont  été  frappées  avant  la  mort 
de  Jean  I,  c'est-à-dire,  avant  1417.  Le  fils,  qui  en  effet 
s'intitule  ici  simplement  Jean  de  Wesemael,  et  non  Jean 
seigneur  de  Wesemael,  devait  distinguer  ses  armoiries  de 
celles  de  son  père. 

Au  revers ,  on  lit  :  [  SIT  :  NOMEw  :  DoweNl  :  BENEDIC- 
TVwî ,  et  dans  le  champ,  il  y  a  une  croix,  cantonnée  de 
deux  couronnes  et  de  deux  fleurs  de  lys. 

L'ordonnance  de  la  comtesse  Jacqueline,  du  13  novem- 
bre 1418,  ne  fait  mention  que  de  cette  seule  pièce  en  ar- 
gent ;  cela  prouve  déjà,  en  quelque  sorte,  que  les  deux 
monnoies  qui  suivent  sont  d'une  date  p'.us  récente. 

On  est  frappé  de  la  ressemblance  (]u'oîfre  celle  pièce 


(  1-^  ) 

avec  les  blancs  français ,  du  roi  Charles  VI  (1380-1422). 
Le  revers  est  toul-à-fait  le  même,  et  à  l'avers,  il  n'y  a  que 
les  lambels,  le  cercle  autour  de  l'écusson  et  l'inscriplion 
qui  constituent  la  différence. 

C'est  évidemment  à  dessein  que  le  seigneur  de  Wesemael 
a  imité  d'une  manière  aussi  servile  le  type  français,  afin 
que  sa  monnoie  fut  confondue  avec  la  monnoie  royale  et 
eut  cours  au  même  taux. 

Jean-sans-Peur  (1405-1419)  frappa  aussi  en  Bourgogne 
des  blancs  à  peu  près  pareils. 

Le  poids  du  blanc  de  Wesemael  est  de  2  gr.  8  milL,  et 
équivaut  à  celui  des  blancs  français.  Le  titre  de  l'argent  est 
peut-être  un  peu  inférieur. 

V.  Les  kromsteerten. 

Sous  le  N"  3  de  notre  planche,  est  représentée  une  de  ces 
pièces  qui, chez  nous,  sont  assez  généralement  connues  sous 
le  nom  de  kro7iisteerten  (Lions  à  la  queue  recourbée). 

A  l'avers ,  on  lit  :  f  lOHawraeS  :  Viotni^v^  :  DE  :  WES- 
MALE  :  Z  :  VRALais  (1).  Au  milieu  :  lion  debout,  avec 
écusson  écartelé  de  Wesemael  et  d'une  autre  seigneurie. 

Au  revers  :  f  MOnETa.  NOVA  ROM ANORVM  :  et  au  milieu 
une  croix  pâtée,  cantonnée  des  lettres  :  F  A  L  S,  qu'il  faut 
interpréter  par  Falais ,  ou  Falesimn. 

Falais,  Fallais  ou  Phalais,  dont  il  s'agit  ici,  est  une  com- 
mune du  pays  de  Liège,  située  sur  la  Méhaigne.  Elle  avait 
autrefois  un  château  fortifié  et  entouré  par  l'eau  de  cette 
rivière.  Guillaume  I,  seigneur  de  Wesemael,  avait  épousé, 
en  1325,  Jeanne,  dame  de  Falais  ;  c'est  sans  doute  lui  qui 
porta  celle  terre  dans  sa  famille. 

Cette  pièce  a  été  frappée  après  la  mort  du  père  de  Jean  II 
(1417) ,  puisque  celui-ci  y  prend  les  litres  de  seigneur  de 
Wesemael  et  de  Falais,  taudis  que  sur  le  blanc  il  s'intitule 

(1)  On  sait  que  le  signe  Z  équivaut  sur  les  anciennes  monnoics  à  ET, 
et  la  lettre  Z  traversée  d'une  barre  ^i  ETC. 


(  16  ) 

simplement  Jean  de  Wesemael.  On  remarquera  également 
l'iibsence  des  lambels  et  les  mots  moneta  nova,  qui  prou- 
vent que  ce  n'est  pas  sa  première  monnoie. 

L'expression  moneta  nova  Romanorvm,  pour  moneta  nova 
rumensis ,  est  assez  curieuse.  On  croyait  sans  doute,  au 
XV  siècle,  que  le  château  de  Rummeu  devait  son  origine 
aux  Romains.  Des  traditions  pareilles  sont  attachées  à  un 
assez  grand  nombre  de  localités  de  notre  pays. 

Le  poids  de  cette  pièce,  qui  n'est  plus  à  fleur  de  coin,  est 
de  3  grammes  993  millièmes ,  c'est-à-dire  précisément 
celui  d'un  Kromsteert  de  Flandre ,  qui  a  un  peu  souffert. 
Le  titre  de  l'argent  ne  paraît  pas  tout-à-fait  aussi  bon. 

Le  type  de  cette  pièce  appartient  évidemment  à  la  Bel- 
gique. Nous  le  trouvons  dans  nos  différentes  provinces.  En 
Flandre,  sous  Jean-sans-Peur  (1405-1419):  sous  Philippc- 
le-Bon  avant  qu'il  eut  hérité  le  duché  de  Brabant  (1419- 
1430) ,  Duhij ,  pi.  LIV,  n°  6.  —  En  Brabant,  sous  Philippe 
deS»-Pol  (1427-1430).  —En  Hollande,  sous  Jacqueline  et 
Philippe-le-Bon  (vers  1428).  Alkemade ,  pi.  XXXI,  n"'  1 
et  2 ,  et  Duby ,  pi.  LVI ,  n°  7  et  8.  —  A  Liège ,  sous  Jean  de 
Heinsberg,  (1415-1456).  De  Renesse  ,\A.  XI ,  n°  3  (1). 

Jean  de  Wesemael,  qui  avait  d'abord  imité  le  type 
français,  copia  plus  tard  un  genre  de  monnoie  très-connu 
en  Belgique. 

hes  Kro7nsteerten  avaient,  si  nous  ne  nous  trompons,  la 
valeur  d'un  double  gros. 

VI.  Les  de?ni-kromsteerten. 

Nous  n'avons  trouvé  aucune  mention  de  ces  pièces , 
mais  de  l'existence  des  kromsteerten  ou  doubles  gros,  on 
peut  conclure  à  celle  du  1/2  kromsteert ,  ou  simple  gros. 

(1)  La  plupart  de  ces  pièces  font  partie  de  notre  collection  ;  nous  ferons 
connaître  sous  peu  celles  de  Philippe  de  S'-Pol ,  duc  de  Brabant,  qu' 
sont  inédites  et  d'une  très-grande  rareté.  Le  catalogue  de  Leclcrcqz 
attribue  par  erreur  un  de  ces  gros  à  Pliilippe-le-Bon,  sous  ic  N°  40  p.  114- 


(  17  ) 

VIL  Une  monnoie  ainsi  décrite  au  catalogue  du  comte 
De  Renesse  :  à  l'avers ,  f  lOHS  :  DNS  :  DE  :  WESMALE  :  Z  : 
PHAL,  Ecusson  à  trois  fleurs  de  lys. 

Au  revers ,  |  MOET— A  :  NOVA  :  —  ROMAN— OR VM. 
Croix  cantonnée  de  F  A  L  E, 

Celte  pièce  ne  s'est  pas  retrouvée  lors  de  la  vente  de  ce 
cabinet,  j'ignore  ce  qu'elle  est  devenue. 

Elle  s'explique  suffisamment  par  tout  ce  que  nous  avons 
dit  sur  notre  n°  V. 

L'avers  est  sans  doute  semblable  à  celui  du  n"  1  de  notre 
planche ,  mais  avec  absence  de  lambels  ;  et  le  revers,  à 
celui  du  n°  3. 

Venons  maintenant  au  cuivre,  qui  sans  être  aussi  rare 
que  l'or  et  l'argent,  n'est  cependant  pas  commun. 

VIIL  A  l'avers  :  f  lOHANwer  DE-  WESEMA/e.  Ecusson 
à  fleurs  de  lys ,  chargé  de  trois  lambels. 

Au  revers  :  f  MONETA-  DE-  RVMMEw.  Au  milieu ,  croix 
palée. 

Cette  pièce  figure  sous  le  n°  2  de  notre  planche. 

On  y  reconnait  facilement  une  imitation  de  la  monnoie 
des  rois  de  France. 

Une  variété  indiquée  au  catalogue  de  De  Renesse,  et  que 
je  possède,  porte  WESEMAL,  au  lieu  de  WESEiVEA.  Elle  est 
d'ailleurs  d'une  mauvaise  conservation. 

IX.  t  lOHANwes-  DE-  WESEMA/e.  Ecusson  à  trois  fleurs 
de  lys,  mais  sans  lambels. 

Au  revers,  f  MONETA  DE  RVMME/i ,  croix  pâtée. 

Cette  pièce  figure  sur  la  planche  sous  le  N°  4.  Elle  ne 
diffère  du  N"  2  que  par  l'absence  des  lambels.  Elle  est  donc 
d'une  date  postérieure  et  a  été  frappée  après  la  mort  de  Jean  L 

On  pourrait  objecter  que  cette  pièce  porte  simplement 
Johannes  de  lFese?nael,  au  lieu  de  Johannes  dominus  de 
TVesemael,  comme  cela  se  voit  sur  les  autres.  Mais  on  se 
rappelcra  qu'en  général  on  ne  tenait  pas  à  exprimer  les 

2 


(  IB  ) 

litres  d'une  manière  solennelle  sur  la  monnoie  de  cuivre, 
comme  sur  celle  d'or  et  d'argent. 

J'ai  remarqué  que  le  cuivre  de  Wesemael,  avec  l'écusson 
à  lambels,  est  presque  toujours  moins  bien  conservé  que 
l'autre.  Est-ce  l'effet  du  hasard?  ou  est-ce,  comme  je  le 
pense ,  parce  que  réellement  il  est  plus  ancien? 

X.  Une  pièce  ainsi  décrite  au  catalogue  de  De  Renesse  : 

f  lOH-  DE  WESMA...  Armes  à  cinq  quarts. 

Revers  :  MON— ETA  D— E  RV...  Croix  avec  lion. 

Elle  n'a  pas  été  retrouvée  lors  de  la  vente. 

XL  A  l'avers  :  f  lOHANwes-  DominuS-  DE-  WESEMA/e. 
Armes  à  cinq  quarts. 

Revers  :  MONETA  :  NOVA  :  DE  :  RVMEw.  Croix  cléchée  et 
pâtée  avec  une  fleur  de  lys  au  milieu. 

Voyez  le  N°  5  de  la  planche. 

J'en  possède  une  variété,  qui  parait  tout-à-fait  semblable 
à  celle  que  je  viens  de  décrire ,  si  ce  n'est  que  la  fleur  de 
lys  du  milieu  de  la  croix  s'y  trouve  remplacée  par  la  lettre 
S.  Cette  pièce  est  malheureusement  assez  fruste  pour  le  reste. 

Sur  une  autre  variété,  il  y  a  à  l'avers  :  ....  DE-  WESE- 
MALE,  et  au  revers  :  MONETA-  NOVA-  DE-  RVM.  (1) 

XII.  A  l'avers  :  ...  HAN.  DE.  WES...  Les  armoiries  à  cinq 
quarts. 

Au  revers,  croix  pâtée  traversant  toute  l'inscription.  Par 
là  elle  diffère  essentiellement  des  autres.  Au  milieu  de  la 
croix  la  fleur  de  lys. 

Cette  pièce  étant  malheureusement  très-fruste ,  il  n'est 
resté  de  l'inscription  que  les  lettres  D  BE. 

Jean  de  Wesemael  imita  pour  les  N°'  XI  et  XII  le  cuivre 
de  Philippe-le-Bon. 

Voilà  toutes  les  monnoies  de  Jean  II  de  Wesemael  que 
je  suis  parvenu  à  connaître. 

(1)  J'ai  présumé  que  c'est  celle  indiquée  an  catalogue  de  De  Renesse, 
sous  le  n«  27952:  mais  où  le  mot  ^0VA  parait  avoir  (Hé  oublié. 


(  19  ) 

Le  comte  De  Renesse  ne  possédait  que  des  exemplaires 
assez  mal  conservés  des  N"'  X  à  Xll,  y  compris  les  variétés. 
Il  a  énuméré  dans  son  catalogue  quelques  légères  variétés 
de  ces  pièces;  mais,  avec  la  meilleure  volonté  du  monde, 
nous  n'avons  pas  toujours  pu  retrouver  les  lettres  qu'il  y 
avait  lues. 

Il  a  attribué  à  Jean  I  les  pièces  indiquées  par  nous, 
sous  les  n"'  IV,  V,  VII  et  VIII,  et  n'avait  donné  à  Jean  II 
que  les  n°'  XI  et  XII ,  avec  des  variétés  de  peu  d'impor- 
tance (1).  Il  paraît  qu'il  n'avait  voulu  laisser  en  général  à 
ce  dernier  que  les  cuivres,  à  l'écusson  à  5  cinq  quarts. 
C'est  donc  la  différence  des  armoiries  qui  paraît  l'avoir 
induit  en  erreur. 

Jean  de  Wesemael  frappa  des  monnoies  avant  et  après 
la  mort  de  son  père,  arrivée  en  1417;  cela  explique  la 
différence  des  armoiries.  Les  n°'  1  et  2  de  notre  planche 
sont  de  la  première  époque. 

Il  imitait  alors  le  type  français ,  que  Ton  trouve  encore 
à  la  vérité  sur  le  n°  4 ,  postérieur  à  la  mort  de  Jean  I , 
mais  la  conservation  momentanée  de  l'ancien  système  se 

(1)  Voici  l'ordre   exact  dans   lequel  les  numéros  du  catalogue  de 

De  Renesse  correspondent  avec  ceux  de  notre  notice  et  ceux  de  la 

planche  qui  l'accompagne. 

Jean  I. 

N»  27944  du  catalogue,  à  notre  N»  IV.  Planche  N°  1. 

27945  «       »     VII.   »     — 

27946  »       »     V.    »     3. 

27947  »        »     rX-    »     4- 

27948  Variété  de IX.         »  — 

Jean  II. 

27949  du  catalogue ,  à  notre  N"  X.  »  — 

27950  »  »  XI.         »  5- 

27952  Variété  de XI.         »  — 

27953  Autre  variété  de XI.         »  — 

Je  n'ai  pu  reconnaître  le  N»  27951.  Le»  N»'  2  et  6  de  notre  planche 
ne  faisaient  pas  partiede  sa'collection. 


(  20  ) 

comprend  pour  le  cuivre,  auquel  on  attachait  moins  d'im- 
portance. D'ailleurs  il  était  déjà  essentiellement  modifié 
par  la  suppression  des  lambels. 

C'est  après  la  mort  du  père,  et  sans  doute  vers  1430, 
qu'il  adopta  un  nouveau  type  où  il  déploie  tous  ses  titres. 
Alors  il  copia  la  monnoie  de  Philippe-le-Bon,  qui  était 
devenu  duc  de  Brabant,  et  par  conséquent  son  maître,  et 
dont  la  puissance  égalait  pour  lors  celle  du  roi  de  France. 

Nous  avons  énuméré  jusqu'à  douze  monnoies  diffé- 
rentes de  Jean  II  de  Wesemael,  non  compris  quelques 
variétés  de  cuivre  de  peu  d'importance,  mais  nous  n'avons 
pas  été  assez  heureux  pour  les  rencontrer  toutes.  D'autres 
y  réussiront,  et  ils  trouveront  sans  doute  encore  des  pièces 
nouvelles,  car  un  seigneur  aussi  puissant  que  l'était  Jean 
II  de  Wesemael ,  un  seigneur  qui  tenait  tant  à  étaler  des 
titres  pompeux  et  à  imiter  le  roi  de  France  et  le  duc  de 
Bourgogne,  doit  n'avoir  rien  négligé  pour  la  fabrication 
de  sa  monnoie  et  avoir  fait  frapper  un  système  plus  com- 
plet encore  que  celui  que  nous  connaissons. 

Résumons  ici  en  peu  de  mots  le  résultat  de  nos  recher- 
ches. Voici  ce  qu'elles  nous  ont  appris  : 

Que  le  village  de  Wesemael,  près  de  Louvain,  figure  à^ 
tort  parmi  les  endroits  qui  autrefois  avaient  un  hôtel  de 
monnoies,  puisque  cette  localité,  en  vertu  de  l'ancienne 
constitution  du  Brabant ,  ne  pouvait  pas  en  avoir. 

Que  le  seigneur  de  Wesemael  fabriquait  sa  monnoie  au 
château  de  Rummen,  dans  l'ancien  comté  de  Loos,  où 
déjà  dans  le  siècle  précédent,  Arnoul  d'Oreille  avait  exercé 
la  même  prérogative. 

Et  qu'enfin  il  n'y  a  que  Jean  II  de  Wesemael  qui  ait 
pu  frapper  monnoie  à  Rummen,  puisque  d'après  le  témoi- 
gnage de  Butkens,  que  rien  ne  vient  contredire,  c'est  lui 
qui  le  premier  acquit  celte  seigneurie. 

C.  P.  Serrure. 


(  21  ) 


ÎOe  la  Ipetnturc  tn  vtxxc. 


Dans  un  numéro  du  journal  \ Emancipation,  du  1 1 
juillet  1838,  on  annonçait  qu'il  est  question  de  refaire  à 
S^^-Gudule,  à  Bruxelles,  plusieurs  vitraux  peints,  et  l'au- 
teur de  l'article  proposait  pour  l'un  des  sujets  à  traiter, 
la  copie  de  la  Descente  de  Croix ,  de  Rubens. 

Nous  applaudissons  à  une  pensée  qui  tend  à  faire  re- 
fleurir une  branche  importante  des  arts  dans  notre  pays, 
et  à  y  fonder,  peut-être,  une  industrie  productive,  en 
même  temps  que  cette  industrie  contribuerait  à  embellir 
nos  plus  beaux  monuments  de  l'architecture  fleurie  des 
X1I1«  et  XIV  siècles.  Depuis  trop  long-temps  on  semble 
avoir  pris  à  tâche  de  cacher  les  fûts  élancés  et  la  mysté- 
rieuse ogive  de  nos  églises,  sous  les  capricieux  rinceaux 
d'un  style  reproduit  par  la  mode,  et  donnant  pour  soutien 
au  code  des  institutions  plébéiennes,  le  tabouret  vermoulu 
de  l'œil-de-bœuf  de  Versailles,  Comme  si  l'on  pouvait  ja- 
mais avoir  honte  de  ces  monuments  religieux,  dont  les 
formes  emblématiques  nous  reportent,  par  un  enchaîne- 
ment d'idées  non  interrompues,  à  l'origine  du  culte  chré- 
tien, et  qui,  du  sol  où  nous  prions,  nous  ramènent  aux 
temps  les  plus  heureux  du  christianisme.  D'ailleurs  les 
cendres  de  ses  aïeux ,  sur  lesquelles  le  clirélien  est  age- 
nouillé, ne  lui  commandent-elles  pas  le  recueillement, 
comme  tout  ce  qui  l'entoure  rappelle  en  lui  l'enthousiasme 


(  ^2) 

religieux  qui  anima  ses  ancêtres,  et  l'esprit  de  prière  dont 
s'enveloppe  tout  homme  cherchant  Dieu.  Sous  ces  voûtes 
d'où  le  génie  normand  fait  descendre  de  si  riches  stalac- 
tites, le  peuple  ne  va  pas  admirer  avec  quel  art  le  sculp- 
teur a  fouillé  un  bouquet  de  houx;  mais  en  élevant  ses 
regards  vers  ces  piliers  qu'on  ne  saurait  toiser  qu'avec  le 
pin  élevé  des  forêts,  il  comprend  que  la  terre  n'est  pour 
lui  qu'une  habitation  passagère,  il  est  involontairement 
saisi  d'un  sentiment  poétique ,  qu'il  doit  à  l'aspect  de  ces 
lieux  pleins  de  grandeur  et  de  majesté;  car  le  soin  impé- 
rieux de  son  existence  de  chaque  jour,  ne  lui  permet  pas 
d'aller  puiser  ailleurs  ces  sentiments  tout  à  la  fois  poétiques 
et  religieux  qu'il  éprouve.  On  se  donne  tant  de  peine  pour 
l'arracher  à  des  habitudes  grossières  :  ce  livre  de  Dieu 
mis  entre  ses  mains,  serait  bien  plus  efficace  que  nos  règle- 
ments de  police  et  toutes  nos  institutions  philantropiques, 
qui  parlent  au  soldat  le  langage  de  la  peur,  et  cherchent 
vainement  à  frapper  de  crainte  le  prolétaire  qui  tient 
dans  sa  main  calleuse,  sa  fortune  du  lendemain.  Mais  ce 
n'est  pas  impunément  qu'on  va  tronquer  le  type  de  ce 
grand  style  de  bâtisse  :  il  n'est  point  indifférent  que  les 
parties  de  ces  palais  où  les  Titans  eussent  été  à  l'étroit , 
soient  complètes,  n'importe  en  quelle  marqueterie;  la 
vaste  nef  de  l'église  de  Strasbourg ,  une  plaine  immense 
que  borde  un  large  fleuve,  les  Alpes  brumeuses  vues  au 
détour  de  quelque  vieille  ville,  produisent  des  effets  d'une 
beauté  sublime,  comme  tout  ce  qui  est  grand  par  sa  masse, 
son  uniformité,  l'harmonie  de  ses  proportions,  la  magie 
de  ses  effets  de  lumière;  détruisez  cette  unité,  jetez  dans 
tout  cela  un  cahos  de  détails  incohérents ,  vous  n'aurez 
qu'un  imbroglio  fatiguant ,  bon  à  amuser  les  enfants  qu'on 
mène  voir  l'élable  de  Bethléem  en  cire.  Et  cependant  le 
sentiment  du  beau  s'est  à  tel  point  égaré,  que  la  richesse 
de  la  demeure  du  Roi  des  Rois  a  fini  par  ressembler  à 


(  23) 

l'étalage  d'un  brocanteur.  Des  hautes  verreries ,  ont  dis- 
paru ces  figures  gigantesques  d'empereurs  et  de  princes 
empourprés ,  de  saints  et  de  chevaliers ,  couverts  de  rubis 
et  de  lapis ,  et  auxquels  les  siècles  avaient  commis  la  garde 
de  leur  œuvre  impérissable.  A  leur  place,  le  vide,  vide 
effrayant  pour  l'œil  le  moins  exercé  à  apprécier  la  force 
d'un  cube  de  pierres,  à  travers  lequel  une  lumière  irritante 
semble  accuser  la  vanité  de  l'homme,  qui  veut  tout  voir 
à  nu  (1). 

Sans  doute  une  manie  qui  aujourd'hui  fait  rechercher 
tout  ce  qui  est  vieux ,  a ,  en  partie ,  donné  naissance  au 
zèle  de  restauration  qui  croit  pouvoir  s'écarter  enfin  de  la 
règle  qu'on  s'était  imposée  du  jour  où  l'on  commença  à 
effacer  le  coup  de  marteau  de  l'Iconoclaste  du  XVP  siècle, 
pour  perpétuer  de  génération  en  génération  les  barbares 
ajustements  d'alors.  Espérons  que,  venant  en  aide  à  un  goût 
mieux  raisonné,  on  ne  verra  plus  le  Saint  des  Saints  drapé 
comme  une  alcôve ,  lors  même  qu'on  trouvera  ailleurs  des 
cabinets  de  jeu  ressemblant  aux  baptistères  du  moyen-âge, 
et  des  boutiques  de  confiseurs  et  de  bonbons,  près  desquel- 
les on  se  croirait  dans  la  cour  des  lions  de  Grenade.  On 
comprendra  un  jour  que  la  nef  d'une  église,  étant  faite 
pour  contenir  l'autel,  il  faut  nécessairement  que  celui-ci 
participe  au  caractère  du  vaisseau  dans  lequel  il  se  trouve, 
et  qu'on  ne  peut  considérer  comme  un  meuble  cet  écha- 
faudage de  colonnes,  qui  du  sol  montent  jusqu'à  la  clef  des 
voûtes. 

La  pensée  de  remplacer  par  du  verre  teint  les  vitraux 
incolores  ,  rendra  à  chaque  bâtiment  la  quantité  de 
lumière  calculée  lors  de  sa  construction.  Les  plus  ancien- 
nes églises,   du  style  roman,  ne  présentent  que  de  très- 

(1)  La  fatigue  qu'on  éprouve  dans  certaines  églises,  depuis  qu'il  n'y  a 
que  du  verre  blanc  aux  fenêtres,  est  telle ,  qu'il  y  en  a  ,  comme  S'-Roch 
à  Paris,  où  Ion  a  été  obligé  de  placer  des  rideaux  d'étoffe  partout. 


.(  24  ) 

petites  ouvertures;  mais  dès  que  les  vides  devinrent  plus 
grands  que  les  pleins  des  murs  de  clôture,  il  fallut  songer 
à  ménager  le  jour,  et  on  employa  le  verre  de  couleur; 
cette  combinaison  tient  donc  essentiellement  aux  plans  de 
l'architecte,  et  il  est  aussi  important  de  ne  pas  s'en  écarter 
que  de  relever  un  mur  sur  son  alignement  primitif. 

Ce  projet  nous  mène  à  l'examen  de  cette  question  : 
Qu'y  a-l-il  de  vrai  dans  le  préjugé  que  l'art  de  peindre  en 
verre  (l)  a  été  perdu;  cet  art  est-il  compris  comme  il  doit 
l'être,  par  ceux  qui  prétendent  l'avoir  ressuscité;  peut-on 
espérer  de  voir  renaître  l'école  du  maître  verrier,  et  l'idée 
de  substituer  à  des  cartons  faits  exprès  pour  lui  des 
tableaux  peints  à  l'huile  est-elle  bonne  à  suivre? 

L'opinion  que  la  peinture  en  verre  se  perdait,  remonte 
déjà  fort  haut,  et  l'un  de  ceux  qui  l'accréditèrent,  fut  un 
certain  Guillaume  Trompe ,  d'Utrecht ,  qui  répara  les 
vitraux  à  Gouda,  après  l'ouragan  de  1581  (2).  Cependant 
on  n'a  point  cessé  de  connaître  la  nature  du  verre  dont  on 
s'est  anciennement  servi  ;  on  n'a  jamais  ignoré  les  matières 
colorantes  qui  se  mêlent  à  cette  composition,  ni  par  quels 
procédés  on  les  y  fait  pénétrer.  Plusieurs  ouvrages  décri- 
vent minutieusement  les  procédés  à  suivre  :  ceux  d'An- 
toine Neri,  Ars  vitraria  firenze ,  1612  ;  du  célèbre  chi- 
miste Hurkel,  1679,  tous  deux  traduits  par  le  baron 
d'Holbach  (Paris,  1752);  les  écrits  d'Hundigner  de  Blan- 
court,  imprimés  en  1697;  ceux  de  Pierre  Le  Vieil,  écrits 
en  1731  ,  d'autant  plus  curieux  que  sa  famille  exerçait 
depuis  près  de  deux  siècles  l'art  de  peindre  en  y^vvç.  (  son 
fils  les  publia  en  1772);  le  Journal  économique  de  mars 
1787,  et  un  article  inséré  dans  la  Gazette  d'Utrecht ,  en 

(1)  En  employant  le  terme  de  jtciniure  en  verre ,  nons  suivons 
l'exemple  de  M.  Brogniart  qui  a  publié  sur  la  matière  d'intéressants 
mémoires,  lus  à   llnstitut  de  France. 

(2)  Fiorillo  ;   t.   2  ,  pag.   483. 


(25  ) 

1773;  les  ouvrages  du  savant  Langlois,  du  Pont  de  l'Arche, 
réimprimés  tout  dernièrement  à  Rouen;  enfin  les  articles 
de  l'Encyclopédie,  et  un  mémoire  lu  à  l'Institut  de  France , 
le  17  mars  1802,  par  M.  Brogniart,  sont  les  preuves  écri- 
tes de  procédés  prélenduement  perdus  ,  qui  remontent 
jusqu'à  l'époque  où  ils  étaient  connus  par  une  pratique 
constante.  Au  temps  de  Neri,  il  n'y  avait  pas  un  siècle 
qu'avaient  été  peints  les  vitraux  de  Gouda,  réputés  les 
plus  beaux  du  monde  (1);  la  chapelle  de  la  Vierge  à 
S"'-Gudule,  à  Bruxelles,  ne  fut  achevée  qu'en  1653  (2). 

Van  Diepenbeek,  mort  seulement  en  1675  (3),  était  aussi 
peintre  en  verre  ;  nous  avons  vu  des  armoiries,  avec  la  date 
de  1 709 ,  dont  les  couleurs  étaient  aussi  belles  que  celles 
d'aucuns  vitraux  anciens.  Du  vivant  de  Pierre  Le  Vieil ,  qui 
écrivit  en  1731  ,  il  y  avait  encore  un  peintre  verrier  à 
Paris  :  il  paraît  cependant  que  cet  art  était  alors  arrivé , 
sur  le  continent  du  moins,  à  son  plus  infime  degré  d'abaisse- 
ment, et  vers  celle  époque,  on  ne  fabriquait  plus,  ni  en 
France  ,  ni  en  Allemagne  ,  de  verre  propre  à  la  peinture 
en  verre ,  ni  teint  en  masse.  Cependant  en  Angleterre , 
William  Peckil  et  Robert  Scolt  Godfrey  offrirent  encore , 
en  1768,  des  ouvrages  qui  furent  admirés;  vers  le 
même  temps,  on  plaça  à  Oxford  des  vitraux  dont  on 
vantait  la  beauté.  Cependant ,  en  général ,  cette  peinture 
n'offrait  plus  que  des  tons  fades  et  monotones,  qu'on  étalait 
sur  du  verre  incolore,  et  dont  on  peut  voir  des  échantil- 
lons au  Musée  céramique  de  la  fabrique  de  porcelaine ,  à 
Versailles. 

Il  y  eut  donc  interruption  réelle  d'environ  trois  quarts 
de  siècle  dans  la  fabrique  des  maîtres  en  verrerie;  il  n'en 

(1)  Les  peintures  des  fenêtres  de  léglise  de  Gouda  ,  gravées  par 
Boëtius ,  1736. 

(2)  Sanderus. 

(3)  Fiorillo  ,  t.  3  ,  pag.  24. 


(  26  ) 

existait  plus:  il  fallait  rechercher  leurs  procédés  dans  les 
ouvrages  qu'ils  avaient  laissés.  En  180-4j  un  nommé  Michel 
Frank,  de  Nuremberg,  peignit  sur  verre  des  armoiries,  puis 
des  paysages,  des  sujets  mythologiques;  mais  ce  fut  la  res- 
tauration des  vitraux  de  Ratisbonne,  commencée  en  1821, 
qui  ramena  entièrement  la  peinture  en  verre  à  son  but 
primitif.  Ceux  qui  s'en  étaient  occupés  dans  les  temps 
modernes,  avaient  surtout  voulu  peindre  de  petits  sujets, 
employer  plusieurs  couleurs  sur  le  même  panneau ,  pour 
éviter  les  plombs ,  dont  l'effet  paraissait  peu  agréable,  sans 
cependant  recourir  aux  émaux  dont  nous  parlerons  plus 
tard  ;  on  voulut  aussi  introduire  dans  cette  peinture  des 
nuances  inconnues  aux  anciens  ;  ce  qu'on  fit  de  plus 
remarquable  en  ce  genre ,  furent  les  glaces  peintes ,  expo- 
sées en  France  en  1829.  Cependant  les  nouveaux  vitraux, 
pour  avoir  voulu  être  supérieurs  aux  anciens,  n'en  présen- 
taient pas  l'éclat  éblouissant;  on  restait  d'accord  qu'il  y 
avait  telles  couleurs,  les  rouges,  les  verts  entre  autres,  qu'on 
ne  pouvait  plus  faire  aussi  belles  qu'autrefois  :  les  théories 
étant  parfaitement  connues,  on  comprit  toute  l'impor- 
tance de  la  pratique,  dans  laquelle  nous  sommes  restés 
inférieurs  jusqu'ici.  Presque  dans  tous  les  pays,  se  sont 
alors  formés  quelques  artistes  qui ,  faute  de  connaître  ce 
qui  avait  été  écrit  et  les  essais  tentés  autour  d'eux,  ont  cru 
avoir  retrouvé  un  secret  perdu,  tandis  qu'ils  n'avaient  que 
repris  des  travaux  assez  long-temps  suspendus  pour  que 
la  tradition  des  ateliers  se  soit  entièrement  éteinte.  Cepen- 
dant on  a  fait  depuis  à  Sèvres  et  en  Bavière,  ainsi  qu'en 
Suisse ,  de  magnifiques  vitraux  avec  les  procédés  des 
anciens  et  qui  laissent  peu  de  chose  à  désirer  ;  quelques 
échantillons  non  moins  beaux  sont  dûs  à  des  artistes  isolés, 
et  sans  contredit,  une  des  productions  les  plus  remarqua- 
bles en  ce  genre,  est  la  copie  d'une  ancienne  verrerie  par 
M.  Dony ,  exposée  au  salon  de  Gand  de  cette  année  (1838). 


(  27) 

Rien  de  plus  simple  que  la  manière  de  procéder  pour 
faire  un  tableau  à  l'huile;  dès  qu'il  s'agit  d'en  transporter  le 
sujet  en  verre,  le  travail  se  complique  singulièrement  (1). 
Il  faut  un  verre  composé  tout  exprès,  qui  ait  la  dureté 
nécessaire  pour  pouvoir  être  exposé  au  feu  de  moufle, 
sans  se  gondoler  :  l'art  de  le  teindre  en  masse  demande 
des  connaissances  en  chimie  toutes  particulières;  il  faut 
encore  une  grande  pratique  pour  la  fabrication  des  oxides 
métalliques  colorants  et  pour  les  faire  pénétrer  dans  les  pan- 
neaux de  verre.  Quelques  mots  sur  la  marche  tenue  par  les 
peintres  verriers,  ne  seront  pas  inutiles  pour  faire  com- 
prendre en  quoi  consiste  leur  art,  à  ceux  qui  n'ont  pas  fait 
de  cet  art  une  étude  spéciale  et  auxquels  nous  voulons 
prouver  avec  quelle  facilité  on  peut  le  ressusciter. 

La  matière  vitrée  était  connue  des  anciens  ;  ils  en  fai- 
saient des  vases  de  diverses  formes,  que  nous  avons  trou- 
vés dans  les  tombeaux,  et  qu'on  voit  dans  presque  tous  les 
cabinets  d'antiquités  romaines.  S'-Jérôme  en  parle  comme 
étant  employée  en  carreaux  ,  dans  les  fenêtres  ,  déjà  à  la  fin 
du  IIP  siècle ,  fenestrœ  quœ  vitro  in  tenues  laminas  fuso 
obductœ  erant.  Il  en  est  ensuite  question  dans  S'-Grégoire 
de  Tours  (2)  ;  les  fenêtres  de  S'-Germain  le  Rond  ,  aujour- 
d'hui S'-Germain  l'Auxerrois  à  Paris,  que  brisèrent  les 
Normands  en  faisant  le  siège  de  cette  ville,  étaient  garnies 
de  verre ,  suivant  la  Chronique  d'Abbon  ;  le  pape  Léon  III , 
qui  couronna  Charlemagne  à  Rome ,  employa  le  verre 
dans  la  construction  de  S'-Jean  de  Lalran  (3).  Vasari  nous 
dit  que  dans  l'origine  il  était  en  forme  d'yeux ,  le  finestre  si 
facevaro  in principio  d' occhi  bianchi^  e  con  argoli  bianchi^ 


(1)  C'est  précisément  à  cause  de  cela  que  nous  avons  adopté ,  pour 
signifier  la  peinture  ou  la  couleur  pénétrée  dans  le  verre ,  des  termes 
qui  ne  peuvent  convenir  qu'à  elle  seule. 

(2)  De  Gloria  Martirum ,  I.  I,  c.  59. 

(3)  Anast.  in  Vit.  Léon.  III. 


(28) 

0  por  colorati.  Celle  sorte  d'assemblage  de  morceaux  circu- 
laires se  trouve  représentée  dans  beaucoup  de  tableaux  du 
XV^  siècle  :  à  Bruges ,  dans  celui  de  Jean  Van  Eyck ,  et  nous 
ne  serions  pas  surpris  d'en  voir  encore  dans  quelque  vieille 
bâtisse.  Les  fenêtres  supérieures  de  l'église  de  Bourges  sont 
encore  à  compartiments  circulaires  ;  dans  le  milieu  est  un 
morceau  de  verre  coloré.  Les  Italiens  connaissaient  très- 
anciennement  le  verre  de  couleur,  qu'ils  employaient 
pour  la  fabrication  de  la  mosaïque.  Au  Vil"  siècle ,  l'art 
de  teindre  le  verre  passa  en  France,  d'où  il  s'introduisit 
en  Angleterre  ;  il  dût  aussi  de  bonne  heure  pénétrer  dans 
le  midi  de  l'Allemagne,  où  nous  avons  des  preuves  qu'il 
fut  employé  plus  d'un  siècle  avant  que  nous  le  voyons 
dans  les  monuments  du  nord.  S'-Willefrid  fit  venir  de 
France  le  verre  qu'il  employa  à  l'église  de  S'-Paulin 
d'York  ,  et  les  missionnaires  anglais  qui  convertirent  le 
nord  de  la  Germanie  et  la  Frise,  y  importèrent  sans  doute, 
avec  le  culte  nouveau ,  les  arts  qui  pouvaient  les  aider  à 
frapper  l'imagination  de  ces  peuples  grossiers,  pour  y  faire 
pénétrer  quelques  vérités  ;  les  effets  magiques  du  verre  co- 
loré ne  pouvaient  être  oubliés  par  ceux  qui  construisirent 
les  premières  églises  chrétiennes.  Long-temps  on  se  contenta 
des  assemblages  qui  représentaient  une  sorte  de  mosaïque 
de  diverses  couleurs  unies,  sans  songer  à  tracer  sur  ce  verre 
aucun  dessin  au  moyen  d'une  couleur  qui  fil  corps  avec 
le  fond  sur  lequel  elle  était  appliquée. 

Le  monument  le  plus  ancien  où  il  soit  parlé  de  la  pein- 
ture en  verre,  est  une  lettre  de  l'abbé  Gosbert  de  Tengersee 
en  Bavière,  983  à  1001  (1);  les  moines  furent  les  pre- 
miers peintres  verriers,  comme  ils  étaient  aussi  les  plus 
habiles  artistes  dont  nous  admirons  les  ouvrages  dans  les 

(1)  Pes  anccd.  1.  6,  et  la  plupart  des  auteurs  qui  ont  traité  de  l'art 
de  peindre  sur  verre. 


(29  ) 

manuscrits  (1).  Si  les  Allemands  furent  des  premiers  à 
s'exercer  dans  cet  art  nouveau,  dont  les  productions  exci- 
taient l'admiration ,  ils  furent  ensuite  dépassés  par  les 
Français  et  les  Flamands,  in  questi  arte  hanno  lavorato  i 
Francesi  et  i  Fla7ninghi,  dit  Vasari.  Les  plus  anciens  mo- 
numents qui  nous  soient  restés  de  verres  colorés  et  peints, 
sont  les  vitraux  de  S'-Denis,  du  XIP  siècle;  ce  sont  de 
simples  contours,  tracés  avec  une  couleur  noirâtre ,  qu'on 
faisait  imparfaitement  pénétrer  dans  le  verre  en  chauffant 
celui-ci  sur  un  lit  de  chaux;  méthode  vicieuse  en  ce  que  la 
chaux  absorbe  une  partie  des  sels  du  fondant ,  mêlé  à  la 
couleur  (2).  Cependant  Le  Vieil  parle  encore  de  ce  procédé , 
dont  on  m'a  fait  remarquer  le  défaut  à  la  fabrique  de 
Sèvres  même;  l'action  du  temps  vient  ensuite  ajouter  son 
effet  à  cette  cause  première  de  destruction,  et  il  y  a  de  ces 
vitraux  dont  la  couleur  se  dissolvait  à  l'eau;  il  y  en  a 
même  que  j'ai  entièrement  dénaturés  avec  de  l'acide 
hydrocloronilrique,  à  26  degrés.  Jusqu'au  XIV*  siècle, 
l'art  fit  peu  de  progrès,  et  le  procédé  technique  resta  le 
même.  Les  verres  de  cette  époque,  qui  avaient  jusqu'à  cinq 
millimètres  d'épaisseur,  sont  extrêmement  gondolés;  les 
figures  ne  tournent  pas  :  seulement  on  aperçoit  des 
hachures,  souvent  en  partie  effacées,  dans  les  plis  des 
draperies.  Le  verre  était  teint  en  masse ,  en  vert ,  bleu  ou 
jaune  et  couleur  lie  de  vin  :  c'était  le  ton  de  chair;  mais 
ces  couleurs  acquirent  plus  de  puissance  au  XV^  siècle.  Le 
rouge  purpurin  s'obtenait  en  étendant  une  couche  de 
verre  rouge  sur  un  plateau  incolore;  aujourd'hui  on  le 


(1)  In  prœdicto  monasterio  omni  divino  dogmate  erant  ernditae  diver- 
sis  usibus  divini  ofTicii...  necnon  quod  nostris  temporibus  valde  niirum 
est.  etiam  scribendo  et  pingendo.  Vit.  S.HarUndis  ctJleinulœ,  act.  ord. 
S.  Benedict. 

(2)  Le  fondant  est  toujours  un  verre  plus  tendre  que  celui  du  panneau  ; 
il  se  compose  de  <lifrrrcntes  manières.  Voir  l'article,  dans  l'Encyclopédie. 


(  30  ) 

fait  au  moyen  du  tube  du  souffleur  de  verre.  On  était 
moins  habile  alors,  d'où  résultait  un  slriage  que  Le  Vieil 
attribue  à  l'effet  de  la  brosse;  il  est  cependant  probable 
que  ce  défaut  doit  être  attribué  à  d'autres  causes  :  l'emploi 
de  la  brosse  eût  empêché  que  la  couleur  ne  fût  aussi  riche 
et  l'abbé  Suger,  qui  en  parle  dans  le  compte  rendu  de 
son  administration,  qui  se  trouve  dans  l'histoire  de  cette 
abbaye  par  Félibien,  le  nomme  miri  vestiH^  \erre  revêtu 
ou  doublé;  ce  qu'il  n'eut  pas  dit  s'il  avait  été  peint  à  la 
brosse.  Ce  verre  était  beaucoup  plus  cher  que  d'autres;  en 
1689,  il  coûtait  encore  35  sols  le  pied  (1).  On  a  cru  ne 
pouvoir  obtenir  un  beau  rouge  que  par  une  dissolution 
d'or;  c'était  souvent  le  seul  résultat  des  travaux  de  ceux 
qui  cherchaient  à  faire  de  l'or  avec  de  l'or,  et  il  en  existe 
à  Munich  plusieurs  morceaux  qui  n'ont  point  d'autre 
origine.  Cependant  il  est  prouvé  qu'avec  le  protoxide  de 
cuivre,  on  arrive  au  même  but;  mais  jusqu'à  présent  les 
fabriques  de  France  n'ont  point  encore  fourni  de  rouge 
aussi  beau  que  celui  qui  vient  de  Bohème.  On  n'est  point 
parvenu  non  plus  à  fabriquer  du  verre  vert  aussi  foncé 
de  ton,  aussi  velouté  que  celui  des  anciens,  et  la  différence 
se  fait  surtout  remarquer  dans  les  restaurations  de  S^-Denis 
et  de  S*-Germain  des  Prés. 

On  ne  dessina  d'abord  que  des  ligures  de  petite  propor- 
tion, les  grandes  figures  à  torsons  et  à  bourges  sont  du 
XIII'  siècle;  pour  chaque  partie  qui  avait  une  couleur 
différente,  on  prenait  un  morceau  de  verre  de  cette  cou- 
leur teint  en  masse  -.  le  tout  était  réuni  par  des  plombs,  et 
l'ensemble  du  sujet  arrêté  dans  un  cadre  de  fer,  fixé  avec 
des  clavettes  au  montant  de  la  croisée  :  on  pouvait  démon- 
ter toute  une  croisée  par  parties  et  la  nettoyer  facilement. 
Dans  les  vitraux  des  siècles  postérieurs,  on  n'a  pas  suivi 

(1)  Speth  die  lunst  in  linlicn. 


(  31   ) 

celte  méthode,  et  il  en  est  résulté  que  les  verres  coloriés 
sont  tellement  crasseux  qu'on  ne  peut  les  nettoyer  aujour- 
d'hui sans  en  enlever  la  peinture  ;  on  réussit  le  mieux  avec 
de  la  potasse  pour  cette  opération. 

Dans  les  bordures,  il  se  trouve  dès  le  XIP  siècle  des 
morceaux  où  le  bleu,  le  jaune,  qu'on  obtenait  au  moyen 
du  bois  pourri  qu'on  trouve  en  poudre  dans  les  vieux  ar- 
bres, et  le  noir  sont  appliqués  sur  le  même  morceau  de 
verre,  mais  ces  couleurs  sont  très-mal  fondues;  on  y  re- 
marque aussi  des  jours  obtenus  au  moyen  d'un  grattage. 
Ainsi  dès  l'origine  trouve-t-on  la  trace  des  perfectionne- 
ments obtenus  plus  tard  dans  la  peinture  d'émail,  et  celle 
de  nos  jours  a  plusieurs  tons  sur  le  même  morceau. 

Sous  le  rapport  de  l'art,  ces  premiers  travaux  sont  assez 
grossiers  :  on  jugerait  mal  par  eux  du  talent  des  artistes 
de  ce  temps.  Nous  avons  comparé  les  dessins  des  vitraux 
de  S'-Denis  avec  le  livre  d'Heures  de  S'-Louis ,  qui  est  à 
la  Bibliothèque  royale;  non-seulement  la  proportion  des 
figures  n'y  est  point  aussi  ramassée ,  mais  il  y  a  telle  figure 
dont  le  dessin  est  fort  remarquable ,  celle  de  la  femme 
entre  autres  dans  la  miniature  des  Plaies  d'Egypte;  une 
autre  où  les  draperies  accusent  parfaitement  le  nu.  Il  y  a 
dés  draperies  très-bien  ombrées;  un  groupe  de  lutteurs 
et  un  cheval  offrent  une  certaine  entente  de  l'anatomie 
dont  on  ne  voit  nulle  trace  dans  les  vitraux.  Le  MS.  2710 
a  plus  de  rapport  avec  les  dessins  de  S'-Denis  et  de  la  Sainte- 
Chapelle  :  il  est  du  XUP  siècle  ;  cependant  il  y  a  du  mou- 
vement dans  les  figures.  Il  y  a  des  statues  de  ce  temps,  dont 
on  rencontre  facilement  les  plâtres  maintenant,  et  qui  ont 
un  mérite  réel;  mais  les  vitraux  n'étaient  considérés,  ainsi 
que  les  statues  à  l'extérieur  des  églises,  que  comme  un  dé- 
cor, où  il  ne  fallait  rechercher  qu'un  effet  de  masse.  Sur 
des  morceaux  de  verre ,  qui  n'avaient  que  quelques  pou- 
ces, on  ne  pouvait  appliquer  des  teintes  sans  nuire  à  la 


(32) 

richesse  de  la  couleur  du  verre  teint  en  masse  :  dès-lors  il 
fallut  se  contenter  de  simples  contours,  et  nous  venons  de 
voir  que  ce  n'étaient  pas  d'ailleurs  les  peintres  les  plus  in- 
struits qui  s'appliquaient  à  ce  genre  de  travail.  Cependant 
ces  vitraux  ont  un  ton  de  couleur  fort  harmonieux,  obtenu 
sans  doute  en  partie  par  l'effet  du  temps  qui  a  dépoli  le 
verre  à  l'extérieur  ;  aussi  a-t-on  observé  qu'il  eut  été  à 
désirer  que  l'on  eut  dépoli  les  verres  de  l'église  de  Ratis- 
bonne,  et  il  serait  à  désirer  qu'on  ne  négligeât  pas  ce  moyen 
dans  la  restauration  d'anciennes  verreries,  afin  d'éviter  un 
certain  ton  cru  qui  saute  aux  yeux  à  S'-Denis. 

Dans  le  XV^  siècle,  le  talent  du  peintre  en  verre  avait 
atteint  un  haut  degré  de  perfection;  seulement  le  verre  est 
encore  gondolé ,  mais  les  couleurs  teintes  en  masse  sont 
admirables  et  partout  les  ombres  soigneusement  indiquées. 
Pierre  Le  Vieil  fait  hoimeur  à  Jean  Van  Eyck  de  ce  pro- 
grès (1);  les  Allemands  ont  admis  cette  tradition,  qui  ne 
remonte  pas  au-delà  du  XVI^  siècle ,  et  en  général  il  est 
regardé  comme  l'inventeur  des  émaux ,  c'est-à-dire  des 
verres  doubles,  comme  nous  avons  dit  qu'on  fabriquait  le 
verre  purpurin,  et  à  l'emploi  desquels  il  aurait  du  moins 
donné  beaucou  p  d'extension.  L'auteur  d'une  notice  traduite 
de  l'anglais,  insérée  au  Mercure  de  France,  du  mois  de 
novembre  1836,  dit  que  ce  perfectionnement  eut  pour 
résultat  de  donner  aux  figures  un  relief  qu'elles  n'avaient 
pas;  que  les  peintures  exécutées  d'après  ce  système,  au 
temps  de  Primatice  et  sous  la  direction  de  Jean  Cousin, 
ne  sont  pas  inférieures  à  celles  d'Italie,  et  qu'elles  ont  plus 
de  vivacité  de  couleur.  Nous  nous  sommes  donné  beaucoup 
de  peines  pour  savoir  s'il  existait  quelque  part  des  ouvra- 
ges de  ce  genre  à  attribuer  à  Jean  Van  Eyck;  on  n'a  pu 
rien  nous  indiquer  à  ce  sujet.  Le  savant  auteur  de  \ Essai 

(1)  De  l'Art  de  la  Peinture  sur  verre ,  pag.  30 ,  I'«  partie. 


(33  ) 

sur  la  peinture  sur  verre ,  avec  lequel  nous  sommes 
entrés  en  correspondance  à  cet  égard,  mit  à  nous  éclairer 
une  obligeance  dont  nous  le  prions  de  recevoir  ici  nos 
remerciements;  il  n'avait  acquis  aucune  preuve  dans  les 
recherches  qu'il  poursuit  depuis  longues  années,  que  Jean 
Van  Eyck  ait  peint  lui-même  sur  verre  :  seulement  il  se 
rappelait  avoir  vu  à  Paris,  il  y  a  quelque  vingt  ans,  un 
petit  vitrail  d'environ  deux  pieds  en  tous  sens,  représentant 
un  prince  et  sa  femme,  tous  deux  debout,  supérieurement 
vêtus,  et  supportant  chacun  d'une  main  un  magnifique 
reliquaire;  il  n'y  avait  point  de  monogramme,  seulement 
le  millésime  1417.  Les  émaux  incrustés  dans  les  orfrois  des 
manteaux,  les  pierreries  de  la  couronne  de  ces  personnages, 
firent,  ainsi  que  le  style  et  le  caractère  de  cette  composition, 
croire  à  tous  les  amateurs,  que  ce  morceau  ne  pouvait  être 
que  de  Jean  Van  Eyck  :  cette  peinture  a  passé  en  Russie.  Je 
ne  pense  pas  qu'avec  l'esprit  de  critique  dont  on  use  à  notre 
époque,  où  l'on  est  parvenu  à  distinguer  Jean  Van  Eyck 
de  ses  élèves,  et  même  quelques-uns  de  ceux-ci  entre  eux, 
nous  eussions  pu  assurer  que  ce  vitrail,  où  ne  pouvaient 
se  trouver  certains  tons  brunâtres  qui,  dans  les  teintes,  font 
distinguer  les  ouvrages  de  Jean  Van  Eyck ,  fût  réellement 
de  la  main  de  ce  maître  :  nous  avons  comparé  beaucoup 
de  vitraux  de  la  seconde  moitié  du  XV  siècle,  avec  une 
grisaille  fort  connue  de  Jean  Van  Eyck ,  et  il  nous  eut  été 
fort  difficile  de  dire  que  quelques-uns  ne  sont  pas  du  même 
artiste.  Nous  n'avons  point  vu  les  vitraux  faits  au  temps  de 
Primalice  et  ne  pouvons  juger  de  l'effet  des  émaux  dont 
on  vient  de  parler  ;  ils  doivent  être  rares.  Cependant  un 
habile  vitrier  de  Paris,  occupé  exclusivement  de  la  restau- 
ration d'anciens  vitraux,  nous  assura  avoir  plus  d'une  fois 
vu  de  ces  sortes  de  vitraux,  tant  en  bleu  qu'en  vert,  comme 
en  rouge ,  mais  point  d'autres  couleurs.  Peut-être  n'ont-ils 
pas  été  employés  pour  les  verreries  d'église;  ce  que  nous 

3 


(  34  ) 

serions  portés  à  croire  d'après  l'observation  de  M.  Bro- 
gniart,  dans  son  Mémoire  sur  la  peinture  sur  verre,  où  il 
dit,  qu'ils  n'étaient  point  nécessaires  pour  la  peinture  en 
grand,  ce  qui  vient  à  l'appui  de  nos  observations. 

Pour  atteindre  toute  la  perfection  dont  est  susceptible 
l'art  du  peintre  verrier,  il  restait  au  XIV^  siècle  encore 
un  pas  à  faire  :  c'était  de  donner  plus  de  puissance  aux 
ombres  ;  on  l'obtint  en  étendant  un  fond  noir  avant 
d'appliquer  la  couleur  locale,  appropriée  au  sujet,  là  où 
on  voulait  obtenir  cette  augmentation  d'effet.  On  ne  le 
pourrait  sans  cela,  qu'en  revenant  plusieurs  fois  avec  la 
même  couleur  sur  la  même  pièce  et  en  la  faisant  passer 
autant  de  fois  au  feu ,  ce  qui  en  rendrait  le  prix  fort  élevé. 
Aujourd'hui  ce  fond  noir  s'applique  à  l'eau  gommée  ; 
autrefois  on  employait  une  sorte  de  vernis,  c'est  ce  qu'on 
nomme  la  peinture  d'apprêt.  On  en  remarque  facilement 
l'emploi  dans  les  beaux  vitraux  de  la  chapelle  du  S'-Sacre- 
ment  de  l'église  de  S^^-Gudule ,  à  Bruxelles ,  qui  sont  d'un 
certain  Jean  Ack,  peintre  d'Anvers,  suivant  Guichardin  et 
Vasari  (1),  et  non  de  Rogier,  que  nomme  Sanderus. 

Jusqu'ici  nous  avons  vu  que  chaque  partie  du  sujet 
peint  en  verre,  était  un  morceau  à  part,  teint  en  masse; 
c'est-à-dire  que  la  couleur  était  mêlée  à  la  pâte  même  du 
verre  avant  qu'on  le  soufflât;  on  le  choisissait  d'après  le 
ton  principal  de  sa  couleur  locale,  et  on  étendait  dessus  les 
ombres  à  la  brosse  qui  y  pénétraient  au  moyen  d'une  récuis- 
son :  toutes  ces  pièces  sont  rejointes  par  des  plombs.  On  vou- 
lut, tout  en  conservant  la  transparence  du  verre,  qui  se  perd 
par  la  brosse,  éviter  les  plombs  d'un  effet  désagréable  dans 
les  vitraux  de  petite  dimension  :  alors  parurent  les  verres 
émaillés,  connus  sous  le  nom  de  verres  suisses.  Ce  sont  des 
tables  de  verre  incolore,   sur  lesquelles  on  applique,  au 

(1)  Descn'ttione  di  futi  Paesi-Bassi,  p.  131. 


(  35  ) 

moyen  du  feu  et  suivant  un  contour  premièrement  tracé, 
une  ou  plusieurs  couclies,  les  unes  à  côté  des  autres,  de 
verre  teint  en  masse,  qu'on  usait  à  la  meule  pour  avoir 
une  couleur  plus  ou  moins  intense ,  ou  pour  atteindre  le 
fond.  Aujourd'hui  les  émaux  s'usent  avec  l'acide  fluorique, 
les  nuances  se  peignent  à  la  brosse  du  côté  opposé  où  ont  été 
fixés  les  verres  colorés.  Ainsi  une  draperie  bleue  s'obtient 
en  coulant  d'abord  du  verre  de  celte  couleur  sur  toute 
l'étendue  qu'elle  doit  occuper;  les  plis  et  les  ombres  s'ob- 
tiennent avec  de  la  couleur  foncée  sur  le  côté  opposé  :  on 
applique  ces  couleurs  au  feu  avec  un  verre  alcalin,  et  elles 
ne  pénètrent  guère  dans  l'épaisseur  du  verre,  y  adhèrent 
seulement  avec  force  et  laissent  à  la  surface  souvent  une 
certaine  rudesse.  Voulant  sur  le  même  panneau  figurer 
un  drapeau  rouge  avec  une  croix  d'or ,  on  coule  du  verre 
purpurin  à  l'endroit  que  doit  occuper  le  drapeau;  on  use 
le  milieu  à  l'émeri  dans  la  forme  d'une  croix,  et  ayant 
ainsi  mis  à  nu  le  fond  incolore,  on  teint  cette  partie  en 
jaune.  On  peut  voir  de  très-beaux  vitraux  en  ce  genre  au 
Musée  céramique  de  Sèvres.  Jamais  celte  méthode  n'a  été 
employée  pour  les  grandes  verreries,  parce  que  les  émaux 
sont  sujets  à  s'écailler,  seulement  quelquefois  pour  des 
ornements  et  des  armoiries,  et  les  ouvriers  dont  on  se 
servait,  étaient  si  peu  entendus  qu'il  leur  arrivait  d'user  à 
la  meule  le  côté  incolore  du  verre ,  comme  nous  en  avons 
vu  des  exemples  aux  verreries  de  Bourges. 

Toujours  pour  éviter  les  plombs,  on  voulut  ensuite 
peindre  à  la  brosse  différentes  couleurs  et  toutes  leurs 
nuances  sur  le  même  panneau;  il  est  résulté  de  cette 
méthode ,  dans  laquelle  les  Anglais  se  sont  distingués ,  des 
peintures  qui  manquaient  entièrement  de  transparence 
et  de  richesse  de  couleur.  Nous  l'avons  déjà  dit,  il  n'y  a 
que  le  verre  teint  en  masse  dont  on  puisse  espérer  cet  effet, 
qui  est  le  principal  mérite  de  la  peinture  en  verre;  il  faut. 


(  36  ) 

autant  que  possible,  négliger  les  nuances  pour  ménager  le 
ton  de  couleur  du  verre  pur.  C'est  une  attention  que 
n'avaient  pas  toujours  les  peintres  anciens  des  derniers 
temps;  trop  souvent  ils  couvraient  toute  une  verrerie  de 
leur  brosse  et  n'offraient,  avec  beaucoup  de  saillie  sans 
doute,  que  des  tons  terreux,  reproche  que  l'on  peut  même 
adresser  à  quelques  parties  des  beaux  vitraux  de  la  cha- 
pelle de  la  Vierge ,  à  S"'-Gudule. 

La  peinture  en  verre  étant  essentiellement  une  peinture 
à  effets,  qui  a  besoin  de  transparence,  et  ne  supportant  pas 
des  nuances  trop  multipliées,  qui  détruisent  la  richesse  de 
couleur  du  verre  teint  en  masse,  il  s'ensuit  qu'elle  est  peu 
propre  à  retracer  les  sujets  de  la  peinture  à  l'huile ,  dont 
elle  ne  doit  pas  chercher  à  reproduire  la  dégradation  des 
tons ,  les  effets  de  perspective  ni  les  couleurs  indécises ,  et 
qu'elle  ne  peut  nullement  servir,  comme  la  mosaïque,  à 
éterniser  le  souvenir  des  ouvrages  des  grands  maîtres,  qui 
ont  employé  des  toiles  ou  des  panneaux.  L'idée  de  la 
faire  servir  à  celte  fin,  a  été  mise  en  avant  sans  que  son 
auteur  ait  sans  doute  réfléchi  à  la  fragilité  du  verre  ,  dont 
la  durée  peut  être  détruite  par  la  pierre  lancée  par  le  plus 
petit  gamin.  Il  est  une  autre  considération  ,  nous  paraît-il, 
qui  doit  empêcher  de  vouloir  jamais  copier  pour  un 
vitrail  d'église  ,  un  tableau  ,  quel  qu'il  soit  ;  c'est  que 
jamais  on  n'en  trouvera  qui  ait  été  composé  pour  remplir 
l'espace  d'une  de  ces  immenses  fenêtres  d'église.  Le  sujet 
de  la  Descente  de  Croix,  de  Rubens,  serait  perdu  dans  les 
accessoires  dont  on  devrait  l'entourer.  Il  faut  pour  cela 
des  compositions  à  part ,  des  sujets  de  figures  richement 
drapées,  des  fonds  d'architecture  où  il  y  ait  peu  de  per- 
spective. On  évitera  la  couleur  de  chair,  qu'on  n'obtiendra 
point  par  cette  variété  de  nuances  fondues  l'une  dans 
l'autre,  qui  en  constitue  le  mérite,  et  font  la  principale 
élude   du  peintre   à   l'huile.    Ainsi   faudra-t-il   toujours 


(  37) 

renoncer  à  cette  harmonie  de  tons,  qui  lui  fait  sans  cesse 
sacrifier  les  entourages,  dont  le  verrier  tire  toutes  ses  res- 
sources :  chez  lui ,  le  vert ,  le  rouge ,  le  bleu  et  le  jaune 
s'entrechoquent  avec  toute  la  rudesse  du  langage  ,  que 
nous  aimons  à  entendre  comme  expression  des  mœurs  de 
cette  époque  de  transformation  sociale,  où  cette  peinture 
prit  naissance.  C'est  moins  une  imitation  fidèle  de  la 
nature  qu'une  sorte  de  représentation  fantastique,  dans 
laquelle  on  croit  voir  agir  des  personnages  sans  corps; 
la  vue  passe  à  travers ,  comme  l'épée  qui  s'attaque  à  un 
fantôme,  et  au  lieu  d'ombres,  ils  projettent  sur  le  par- 
vis du  temple  les  teintes  mystérieuses  de  la  Jérusalem 
céleste ,  dont  les  murs  étaient  d'or  pur ,  transparents 
d'améthystes,  de  calcédoines  et  de  toutes  sortes  de  pierres 
précieuses. 

L'art  dont  on  redemande  le  rétablissement ,  doit  être 
considéré  comme  un  produit  de  fabrique  ,  auquel  le 
peintre  vient  prêter  l'appui  de  son  talent  :  le  souffleur  en 
verre  fournit  les  tables  teintes  en  masse  ;  le  chimiste  fera 
le  choix  des  oxides  vitrifiables,  qu'il  livrera  au  peintre,  et 
dirigera  les  feux  de  moufle  ;  un  ouvrier ,  qui  ne  doit  pas 
manquer  d'habileté  et  avoir  des  notions  du  dessin,  réunira 
les  diverses  pièces  dans  leur  entourage  de  plomb.  Ce  n'est 
donc  pas  des  travaux  d'un  seul  homme  qu'on  peut  atten- 
dre des  résultats  d'une  véritable  importance.  Il  n'y  a  en 
Belgique  ni  fabrique,  ni  dépôt  de  verres  teints,  et  aucun 
marchand  n'en  fera  venir  des  assortiments ,  s'il  n'est  cer- 
tain d'un  débit  qu'arrête  le  défaut  de  matière  première. 
Les  études  du  peintre  d'histoire  sont  déjà  assez  multipliées 
pour  qu'il  lui  soit  difficile  d'acquérir  de  l'habileté  dans 
un  laboratoire  de  chimie,  en  lui  supposant  même  les 
connaissances  théoriques  nécessaires,  mais  qui  ne  suffisent 
pas.  Ce  n'est  qu'autant  qu'on  aura  en  chimie  des  connais- 
sances plus  étendues ,  qu'on  sera  plus  industrieux  raanipu- 


(  38  ) 

lateur,  dit  M.  Brogniart  (1),  qu'on  obtiendra  les  plus  belles 
couleurs  et  qu'on  parviendra  à  les  mieux  fixer.  Cette 
réunion  de  personnes  concourant  au  même  but,  ne  s'est 
pas  formée  jusqu'ici,  malgré  les  circonstances  favorables 
où  la  Belgique  s'est  trouvée  depuis  1815;  c'est  cependant 
sur  ce  sol  où  les  colonnes  milliaires  sont  les  tours  des  plus 
belles  églises,  où  l'amour  des  pompes  du  culte  est  universel, 
où  le  sentiment  religieux  est  un  des  caractères  princi- 
paux de  la  nation,  qu'une  telle  réunion  doit  se  former , 
dès  qu'aura  été  donnée  une  impulsion  que  nous  voudrions 
contribuer  à  faire  naitre. 

En  un  temps  si  fécond  en  prodiges  dûs  au  déve- 
loppement de  l'esprit  d'association  ,  il  nous  semble  que 
c'est  encore  de  lui  qu'on  doit  attendre  l'initiative  à 
prendre.  Le  siège  des  opérations  à  fonder  devrait  être 
Gand  ou  Bruxelles,  à  cause  des  universités,  près  desquelles 
il  serait  plus  facile  de  trouver  les  chimistes  dont  on  a 
besoin.  Les  frais  se  borneraient  à  l'acquisition  d'un  petit 
local,  pour  l'établissement  d'un  feu  de  moufle  ,  le  labo- 
ratoire du  vitrier  et  le  magasin  de  verres;  le  traitement 
d'un  chimiste  et  d'un  ouvrier.  On  formerait  un  dépôt  de 
verres  teints  des  fabriques  de  Gherty  ou  d'Allemagne  ; 
peut-être  que  pour  quelques  qualités,  ils  seraient  livrés  au 
prix  coûtant,  ainsi  que  les  couleurs.  Le  prix  de  cuisson  de 
chaque  pièce,  calculé  par  pouces  carrés,  serait  fixé  de  ma- 
nière à  prévenir  les  abus  que  pourrait  faire  naître  un  re- 
cours trop  facile  aux  avantages  qu'offrirait  cette  société.  Dès 
que  la  fabrication  aurait  pris  quelqu'extension  ,  nous  ne 
doutons  pas  que  les  frais  de  l'établissement,  et  les  intérêts 
du  capitale  avancer  par  actions,  ne  fussent  bientôt  couverts. 
Nous  espérons  ce  résultat ^  parce  que  le  nombre  d'églises 
auxquelles  manquent  des  vitraux  peints  est  considérable , 

(1)  Mémoire  lu  à  rAcadémie  le  7  juin  1828. 


(  39  ) 

et  que  le  prix  n'en  doit  pas  être  très-élevé.  Une  figure  de 
quatre  pieds  de  proportion ,  avec  son  encadrement  en  fer  . 
coûtait  à  Sèvres,  en  1836,  environ  400  francs.  Plus  on 
acquerrera  d'habitude,  moins  les  prix  seront  élevés;  on 
en  était  venu  autrefois  à  des  résultats  qui  peuvent  étonner 
aujourd'hui  :  les  vieilles  croisées  du  Louvre,  faites  au  temps 
de  Charles  V,  roi  de  France,  ne  revenaient  pas  à  plus  de 
11  à  12  francs  de  notre  monnaie,  vingt-deux  sols  d'alors, 
suivant  Sauvai. 

Dans  un  pays  aussi  industriel,  on  s'affranchirait  bientôt 
de  l'obligation  d'aller  à  l'étranger  demander  le  verre 
coloré;  on  lui  livrerait  même  le  verre  incolore  propre  à 
la  peinture  en  verre,  qu'on  a  tant  de  peine  à  se  procurer 
maintenant  :  bientôt  les  artistes  dont  le  talent  n'a  point 
atteint  toute  la  perfection  de  l'art,  ne  seraient  plus  obligés 
d'aller  chercher  au-dehors,  dans  les  ateliers  de  décor,  une 
existence  aisée  ;  ils  viendraient  se  grouper  autour  des 
maîtres  de  l'école ,  qui  leur  fourniraient  des  cartons.  En 
offrant  à  tous  la  faculté  de  faire  recuire  leurs  vitraux  peints, 
on  obtiendra  l'avantage  de  ne  pas  devoir  recourir  néces- 
sairement ,  pour  se  procurer  ces  vitraux,  à  des  artistes  dont 
le  mérite  est  quelquefois  peu  approprié  au  genre  de  travail 
qu'on  voudrait  leur  confier,  et  ainsi  l'Ecole  flamande  ne 
peut  manquer  de  redevenir  la  première  dans  cette  pein- 
ture où  elle  a  acquis  jadis  tant  de  renommée.  A  côté  des 
ateliers  d'une  première  société,  pourquoi  ne  s'en  forme- 
rait-il pas  d'autres  qui  livreraient  en  concurrence  ,  au 
commerce  étranger,  cette  sorte  de  décor  religieux ,  tout 
comme  Lyon  lui  fournit  les  riches  étoffes  des  ornements 
d'autels;  les  artistes  étudiant  dans  nos  académies  seraient, 
pour  ces  établissements,  des  ouvriers  tout  trouvés,  pour 
lesquels  ce  serait  un  encouragement  à  ne  pas  négliger  l'étude 
des  grandes  compositions.  Maintenant  il  suffit  d'un  homme 
auquel  le  patronage  du  clergé  ne  peut  faillir  dans  un 


(40) 

semblable  projet,  qui  veuille  mettre  ces  idées  à  exécution, 
les  compléter  d'abord  en  y  faisant  entrer  les  détails  qu'il 
nous  était  interdit  d'aborder,  dans  l'ignorance  où  nous 
sommes  des  facilités  locales  à  trouver  dans  une  ville  plutôt 
que  dans  une  autre;  le  moment  ne  peut  être  mieux  choisi  : 
qui  ne  serait  jaloux  de  restituer  aujourd'hui  à  son  pays 
l'une  de  ses  gloires  artistiques  les  plus  brillantes?  La 
réussite  n'est-elle  pas  assurée ,  quand  en  même  temps  ou 
s'adresse  aux  sentiments  les  plus  intimes  de  la  nation ,  et 
qu'on  a  déjà  osé  aborder  l'idée  d'achever  la  tour  de  la 
métropole  archiépiscopale?  (1) 

Anvers,  août  1838. 


(1)  Je  n'avais  pu  me  procurer,  lorsque  je  m'occupais  de  cette  notice, 
l'ouvrage  de  M.  le  baron  de  Reiffenberg  sur  la  peinture  sur  verre  dans 
les  Pays-Bas.  J'ai  lu  depuis  ces  curieuses  recherches ,  auxquelles  la 
plume  de  l'élégant  commentateur  de  Barante  a  prêté  tout  le  charme  de 
son  style ,  pour  nous  faire  regretter  davantage  les  belles  verreries  de 
nos  églises  emportées  en  pays  étranger.  C'est  avec  une  complaisance 
amère  qu'il  se  plait  à  énumércr  une  à  une  toutes  ces  pertes,  que  son 
goût  éclairé  lui  a  rendu  plus  sensibles,  et  quil  déplore  en  homme  aimant 
la  gloire  de  son  pays.  A  lui  appartenait  de  lui  restituer,  dans  l'invention 
de  l'art  de  peindre  sur  verre,  une  part  trop  souvent  réduite  à  la  citation 
du  verre  de  Jean  de  Bruges  ,  et  il  l'a  fait  avec  ce  tact  fin  qui  laisse  arriver 
la  vérité  sans  blesser  les  prétentions  rivales ,  et  doit  nous  faire  espérer 
qu'il  pourra  quelque  jour  reprendre  le  fil  de  l'histoire  de  cette  branche 
des  arts  d'imitation  ,  qu'il  croit  rompu  à  jamais ,  et  le  rattacher  aux  siècles 
ou  venue  d'Orient,  elle  s'est  naturalisée  parmi  nous  avec  le  christianisme. 


(  41  ) 
LITTÉRAIRES  ET  BIBLIOGRAPHIQUES 


Sl'H 


QUELQUES  ANCIENNES  mPKESSIONS  DES  l'AYS-BAS. 


En  publiant,  il  y  a  très-peu  de  temps  (I),  la  liste  des 
ouvrages  imprimés  par  notre  célèbre  Arend  de  Keyser , 
qui  eut  la  gloire  d'importer  la  typographie  à  Audenarde 
et  à  Gand,  la  perte  d'une  partie  de  notre  manuscrit, 
nous  a  fait  omettre  deux  opuscules  fort  rares,  sortis  des 
presses  du  même  artiste  :  ce  qui  fait  monter  à  dix  le 
chiffre  de  ses  impressions  connues  jusqu'ici.  M.  Du  Puy 
de  Monlbruu ,  dans  ses  savantes  Recherches  (2) ,  avait 
déjà  indiqué  exactement  sept  ouvrages  publiés  par  Arend 
de  Keyser:  plus  heureux  que  lui,  nous  avons  eu  presque 
toutes  ces  rarissimes  éditions  entre  les  mains  ,  et  nous 
avons  cherché  à  les  décrire  avec  tout  le  soin  qu'il  y  eut 
mis  lui-même,  s'il  se  fut  trouvé  dans  notre  position.  Voici 
les  intitulés  de  ces  deux  précieux  opuscules,  qui  serviront 
à  compléter  la  liste  de  toutes  les  impressions  connues 
d'Arend  de  Keyser  : 


(1)  Recherches  historiques  et  bibliographiques  sur  la  bibliothèque  de 
l'Université  et  de  la  ville  de  Gand.  Gand,  Annoot-Braeckraan ,  1839; 
in-S»  de  82  pag.,  avec  une  pi.  gravée. 

(2)  Reclierches  hibllographi(iucs  sur  quelques  impressions  Néerlan- 
daises du  XV»  et  du  XVI»  siècles.  Leide,  Luchtmans,  1336;  in-S»  de 
98  pag.,  avec  des  planches  xylographiques. 


(  42) 

Tractatus  de  periciilis  circa  sacramejitmn  eucharistie 
contingentihîis.  Petit  in-4°,  sans  date,  de  12  pages  non  chif- 
frées; sur  le  frontispice,  une  figure  gravée  en  bois,  repré- 
sentant la  Sainte  Gène. 

Après  ce  titre,  on  lit  à  la  seconde  page  :  Incipit  tractatus 
de  periculis  que  contingunt  circa  sacramentum  eucharistie 
et  de  remediis  eorumdem,  ex  dictis  Sancti  Thome  deAquino. 
Souscription  :  Explicit  de  suffragiis  misse  i?fipressis  Gan- 
davi per  Arnoldmn  CesaWs  (circa  1483). 

Voici  l'autre  impression  : 

Tractaet  van  aliantie  ende  eendragticheyt  tusschen  die 
drie  staten  van  den  hertoghdom  van  Brahant  ende  die  van 
Middelborch ,  Lutsenhorch ,  Vlaenderen ,  enz.  :  souscrip- 
tion :  Ghedaen  tôt  Ghent  den  eersten  dach  in  mei  1488. 
Petit  in-folio,  de  6  feuillets,  à  longues  lignes,  au  nombre 
de  38  la  page  pleine;  sans  nom  d'imprimeur  et  sans  date, 
mais  très-probablement  de  1488. 

Pour  montrer  que  le  dernier  mot  n'est  pas  encore  dit 
sur  notre  Arend  de  Keyser,  nous  nous  empressons  de 
relever  une  erreur  dont  nous  sommes  seuls  coupables  et 
qui  n'appartient  nullement  à  M.  Fr.  Vergauweu,  biblio- 
phile instruit,  qui  a  bien  voulu  nous  aider  de  ses  investi- 
gations particulières.  Le  Liber  domini  Mancini  de  passione 
Doinini,  n'est  pas  sorti  des  presses  d'Arend  de  Keyser , 
comme  nous  l'avons  écrit  (1),  mais  bien  de  celles  de  son 
fils  Pierre  :  ainsi  donc  nous  serions  parvenus  à  découvrir 
quinze  impressions  de  ce  typographe  gantois,  non  compris 
le  grand  tableau  avec  les  armoiries  des  nobles  de  Gand , 
pièce  aussi  précieuse  qu'intéressante,  qui  fait  partie  du 
cabinet  de  M.  l'architecte  Goedlghebuer. 

Nous  appellerons  en  passant  l'attention  de  tous  ceux  qui, 
comme  nous,  s'occupent  d'études  bibliographiques,  sur 

(1)  Page  66  de  nos  Rechercha  déjà  citées. 


(  43) 

deux  imprimeurs  gantois,  Simon  de  Gock  cl  Judocus 
Pelrus,  de  Halle,  en  Brabant.  Nous  avons  déjà  indiqué  (1) 
une  de  leurs  impressions  de  l'année  1513:  ils  semblent 
avoir  exercé  leur  art  dans  notre  ville,  même  avant  Pierre 
de  Keysere,  dont  le  premier  livre  avec  date,  connu  jus- 
qu'ici ,  remonte  seulement  à  1516. 

Nous  avons  la  douce  jouissance  de  posséder  dans  notre 
petite  collection  particulière  de  raretés  un  mince  in-quarto, 
dont  l'énoncé  va  mettre  en  émoi  tous  les  bibliophiles  du 
département  du  Nord  :  c'est  une  grammaire  latine ,  avec 
la  date  de  1518,  imprimée  à  Cambrai,  et  dans  laquelle 
l'on  a  fait  l'emploi  de  quelques  caractères  grecs!  Ainsi 
notre  précieux  in-quarto,  qui  ne  porte  malheureusement 
pas  de  nom  d'imprimeur,  reculerait  de  cinq  ans  pour 
Cambrai  l'époque  de  l'introduction  de  l'imprimerie  en 
celte  ville,  puisqu'il  est  plus  vieux  de  cinq  ans  que  le 
Voyage  de  Jacques  Le  Saige ,  auquel  la  plume  facile  et 
spirituelle  de  M.  Aimé  Le  Roy  a  consacré  un  si  charmant 
article  dans  les  Archives  historiques  et  littéraires  du  Nord 
de  la  France  et  du  Midi  de  la  Belgique. 

Voici  la  description  de  notre  volume  : 

Rudimenta  grainmatices  ad  instituendos  iuvenes  non 
jKinmi  conducentia.  —  rfAs;.  Impressum  Cameraci.  Anno 
Bomini.  M.  CCCCCXVIII.  Sans  nom  d'imprimeur,  :n-4*'  de 
6  feuillets.  Beaux  caractères  gothiques. 

Sans  chiffres  ni  réclames,  signatures  Aii. — Aiiii.  Au- 
dessous  du  titre  sont  des  armoiries,  probablement  de  Cam- 
brai :  au  bas  de  la  page,  ce  distique  : 

Si  me  forte  légat  :  studii  compulsus  amore 
Parvuïus.  Emuncta  nare  latinus  erit. 
Au  verso  du  titre ,  on  lit  :  sequitur  aljjhabetutn  grccum  : 

(1)  Mêmes  Rcchcrchus ,  page  G7. 


(  44  ) 

cette  page  est  consacrée  seule  et  exclusivement  à  la  con- 
naissance et  à  la  prononciation  des  lettres  grecques  :  cette 
dernière  était ,  à  ce  qu'il  paraît,  très-différente  de  la  nôtre. 
C'est  ainsi ,  par  exemple,  que  le  ^  se  prononçait  zita,  »  ita, 
fi  thita,  V  gny,  t  taf,  etc.  Après  l'explication  des  diphthon- 
gues  propres  et  impropres ,  suivent  cinq  règles  pour  la 
prononciation.  C'est  à  quoi  se  borne  tout  ce  que  notre 
grammairien  avait  probablement  à  enseigner  sur  le  grec. 

Nous  transcrirons  le  premier  paragraphe  du  second 
feuillet  :  il  nous  fera  connaître  ce  qu'on  entendait  alors 
par  Grammaire  : 

Rudimenta  Grammatices. 

Quant  artc?np)rofite}'is9  Graminaticam.  Quid  est  Gram- 
viatica  ?  Est  ars  recte  loquendi.  Recteque  scribendi.  Unde 
dicitur  Grammatica?  citto  twv  ypaf^fx.KTciv.  Hoc  est  a  litteris. 
Latine  etiitn  interpretatur grammatica  litteraria.  Quoi  sunt 
j)artes  gra7nmaticesf  Quattuor.  Littera,  Syllaha,  Dictio  et 
Oratio. 

Le  reste  de  la  grammaire,  où  tous  les  préceptes  se  ré- 
duisent en  questions  et  en  réponses ,  est  consacré  au  déve- 
loppement très-succinct  de  ces  quatre  grandes  divisions, 
ce  qui  nous  fait  supposer  que  le  maître  devait  donner  bien 
des  explications  verbales. 

Les  caractères  grecs  employés  dans  cet  opuscule  sont 
assez  semblables  à  ceux  dont  on  se  servait  alors  en  Italie  , 
et  Cambrai  est  jusqu'à  ce  moment  la  première  ville  du 
Nord  de  la  France,  qui  aura  eu  l'honneur  de  faire  usage 
de  ces  caractères.  On  sait  que  chez  nous  l'immortel 
Thierry  Martens,  qu'Erasme,  qui  s'y  connaissait ,  saluait 
du  litre  de  premier  typographe  des  Pays-Bas,  s'était  déjà 
servi  de  caractères  grecs  dans  quelques-unes  de  ses  éditions 
latines  de  1501  et  1502,  et  qu'il  eut  la  gloire  d'y  impri- 
mer le  premier  livre  grec,  en  1513,  et  non  en  1516  , 
comme  le   prétendait   Lambinel.  Voyez   notre    note   au 


(  45  ) 

N'*  4223,  de  la  Biblioth.  Hullhemiana ,  vol,  1.  La  gram- 
maire grecque  de  Luscaris,  Milan ,  per  magistnim  Diony- 
sium  Paravisinum ,  1476,  in-4",  est  regardée  comme  le 
premier  livre  imprimé  en  grec. 

Si  nous  avions  eu  la  faculté  de  comparer  les  caractères 
qui  ont  servi  à  l'impression  de  cet  opuscule ,  avec  ceux, 
du  voyage  de  Jacques  Le  Saige,  peut-être  reconnailrait-on 
qu'il  sort  des  presses  de  Bonaventure  Brassart  demnurant 
en  la  rue  sainct  Jehan  empres  la  Magdelaine. 

Un  haut  fonctionnaire  qui  a  laissé  d'honorables  souve- 
nirs à  Lille,  M.  le  préfet  Dieudonné,  avait  avancé,  dans  la 
statistique,  exellente  du  reste ,  qu'il  a  donnée  du  départe- 
ment du  Nord,  en  1804,  que  la  ville  de  Lille  était  la  pre- 
mière de  ce  Département,  qui  eût  eu  l'honneur  de  posséder 
une  imprimerie.  Il  citait  à  l'appui  de  son  opinion  le  volume 
des  poésies  sacrées  d'un  poète  lillois,  Frrmco^s  Hœmus,  Tnsu- 
lisapud  Guilielmum  Hammelin ,  1556.  Depuis,  de  savantes 
recherches  ont  prouvé  qu'on  imprimait  à  Valenciennes  en 
1500  et  à  Cambrai  en  1520,  de  sorte  que  Lille  loin  «Toc- 
cuper  le  premier  rang,  n'en  occupait  plus  que  le  troisième. 
Le  peu  de  soin  avec  lequel  les  bibliographes  et  catalogra- 
phes  avaient  transmis  le  titre  de  la  première  impression  des 
poésies  d'Hœmus,  et  d'autres  observations  qu'il  serait  trop 
long  de  rapporter  ici,  firent  soupçonner  que  ce  livre  pou- 
vait ne  pas  être  sorti  des  presses  lilloises.  Des  débats,  aussi 
intéressants  qu'instructifs,  s'élevèrent  à  ce  sujet  dans  la 
Revue  du  Nord  et  dans  les  Archives  du  nord  de  la  France 
et  du  midi  de  la  Belgique.  M.  Duthillœul,  bibliothécaire 
de  Douai ,  fut  le  premier ,  si  nous  ne  nous  trompons ,  à 
émettre  de  doutes  fondés  sur  l'authenticité  de  l'édi- 
tion lilloise,  qui  fut  défendue,  mais  avec  beaucoup  de 
réserve,  par  M.  Brun-Lavaine,  archiviste  de  la  ville  de 
Lille  et  M.  Dufaitelle,  bibliophile  à  Calais.  Mais  la  ques- 
tion resta  indécise  ,  faute  de  preuves. 


(  àQ  ) 

Nous  avons  été  assez  heureux  pour  Irouver,  sous  le 
11°  23,439 ,  dans  le  catalogue  Van  Hulthem ,  qui  renferme 
tant  de  trésors  bibliographiques  encore  inexplorés,  la  pré- 
tendue impression  lilloise  de  1556,  livre  introuvable, 
comme  l'appellent  MM.  Dufailelle  et  Dulhillœul.  Nous  al- 
lons en  donner  une  description  exacte,  qui,  nous  l'espé- 
rons, ne  laissera  plus  le  moindre  doute^  aux  bibliophiles 
les  plus  incrédules. 

Francisci  Hemi  Insulani,  sacrorum  hymnorum  lihri 
duo.  Ejusdem  variorum  cartninum  sylva  una.  Insulis  apud 
Gulielmum  Hamelin  hibliojjolam  sub  msùjni  hominis  syl~ 
vestris.  M.D.LVI.  In-16,  de  85  feuillets  chiffrés  au  recto 
seulement. 

Ainsi  donc  Guillaume  Hamelin,  qui  demeurait  à  l'en- 
seigne de  Vhomme  sauvage,  était  bien  libraire,  bibliopola , 
et  non  imprimeur,  et  si  les  catalographes  n'eussent  pas 
omis  cette  désignation,  imprimée  au  titre  même,  il  y  a 
long-lemps  que  le  procès  eût  été  jugé;  ils  auraient  fait 
épargner  bien  de  l'encre  et  du  papier  :  mais  nous  y  au- 
rions perdu  les  curieuses  recherches  auxquelles  ce  débat 
a  donné  lieu. 

Nous  savons  maintenant  que  Guillaume  Hamelin  était 
seulement  libraire;  mais  il  n'est  pas  moins  intéressant  de 
connaître  quel  est  enfin  l'imprimeur  de  ce  livre  introuva- 
ble. C'est  ce  que  nous  apprend  le  dernier  feuillet  non  chif- 
fré, sur  le  recto  duquel  on  lit  ces  seuls  mots,  imprimés  eu 
gros  caractères  S^-Augustin,  qui  contrastent  singuhère- 
ment  avec  l'exiguilé  des  caractères  italiques  du  texte  : 
Impressum  Parùiis per  Michaëlem  Fezandat. 

Il  ne  reste  plus  par  conséquent  le  moindre  doute  :  la 
première  édition  d'Hemus  a  été  imprimée  à  Paris,  par 
Michel  Fezandat,  et  j'en  demande  bien  pardon  à  mes 
amis,  les  bibliophiles  lillois  ;  leur  ville  cesse  non-seulement 
d'occuper  le  troisième  rang  dans  l'ordre  chronologique  de 


(47) 

riniroduclion  de  l'imprimerie  dans  le  département  du 
Nord,  mais  elle  est  même  rejetée  jusqu'au  commencement 
du  XVII''  siècle,  si  l'on  ne  produit  pas  d'autre  livre  que 
celui  cité  par  M.  Duthillœul,  comme  la  plus  ancienne  im- 
pression lilloise  qu'il  connaisse  (1). 

Quant  à  Michel  Fezandat,  il  est  bien  connu-:  c'était  un 
habile  typographe  qui  imprima  pour  Jean  Petit,  François 
Regnault  et  Maurice  de  La  Porte.  11  avait  pour  marque  la 
vipère  qui  s'attache,  sans  lui  faire  mal,  au  doigt  deS'-Paul, 
dans  l'île  de  Malte,  avec  ces  mots  pour  devise  :  Si  Deus 
pro  nobis ,  quis  contra  nos?  (2)  Le  savant  et  infaiUible 
bibhophile,  Charles  Nodier,  cite,  comme  imprimé  chez 
Michel  Fezandat ,  le  plus  rare  volume  de  la  collection  de 
Baïf  (3)  ,  qui  résulte  de  l'association  de  ce  poète  avec  d'Her- 
beray  des  Essars  et  Nicolas  Denisot ,  surnommé  le  comte 
d'Alsinois. 

Si  nous  donnons  quelque  étendue  à  ces  notes,  c'est  que 
l'Hemus  de  1556,  ce  petit  volume,  si  rare  qu'on  en  a 
révoqué  en  doute  l'existence,  fixera  non-seulement  un 
point  important  de  l'histoire  d'une  des  plus  admirables 
découvertes  de  l'esprit  humain ,  pour  ce  qui  concerne  son 
introduction  dans  la  capitale  delà  Flandre  française,  mais 
procurera  encore  d'utiles  renseignements  à  notre  histoire 
littéraire  et  aux  annales  de  la  ville  de  Lille. 

Nous  ne  nous  arrêterons  pas  à  relever  les  erreurs  bi- 
bliographiques commises  dans  l'indication  des  ouvrages 
d'Hemus ,  par  Valère  André ,  Sanderus ,  Swertius ,  Paquot  et 

(1)  Les  Châtelains  de  Lille ,  par  F  loris  van  derHaer.  A  Lille,  1611. 
chez  Christofle  Beys,  imprimeur-libraire,  rue  de  la  Clef,  à  l'image  de 
S'-Luc.  In-4°. 

(2)  Jean  de  la  Caille ,  histoire  de  l'imprimerie  et  de  la  librairie, 
p.  116. 

(3)  Tombeau  de  Marguerite  de  Valois.  Var'is,  Michel  Fezandat,  1551, 
in- 8.  A-N-iiij.  Voy.  Mélanges  tirés  d'une  petite  bibliothèque.  Paris, 
1829,  pag.  265. 


(  48  ) 

l'auteur  du  manuscrit  de  la  Biijliotlièquc  de  Lille  intitulé  : 
Autours  et  écrivains  de  Lille  (en  latin)  :  ce  travail  nous 
conduirait  trop  loin.  Plus  heureux  qu'ils  ne  lont  été,  puis- 
que nous  avons  sous  les  yeux  les  trois  volumes  du  poète 
lillois,  nous  allons  nous  efforcer  d'en  donner  une  descrij)- 
lion  exacte  et  détaillée.  Quant  à  des  renseignements  sur  sa 
vie,  on  en  trouvera  suffisamment  dans  Paquol. 

François  Hemus,  comme  Ovide,  ne  paraît  avoir  écrit 
qu'en  vers  :  dans  toutes  ses  préfaces,  dans  toutes  ses  rela- 
tions avec  ses  amis  les  plus  intimes,  comme  le  prouve  la 
lecture  de  ses  poésies,  il  dédaignait  d'avoir  recours  à  l'hum- 
ble prose.  C'était  assez  l'habitude  de  son  temps  et  du  siècle 
suivant,  époque  à  laquelle  la  Belgique  a  produit  tant  de 
poètes  latins. 

Le  premier  livre  des  hymnes  sacrées  contient  la  para- 
phrase des  sept  psaumes  de  la  pénitence  et  d'autres  poésies 
analogues  :  le  second,  des  hymnes  en  l'honneur  des  saints  : 
dans  le  premier,  on  remarque  une  poème  d'assez  longue 
haleine  sur  la  naissance  du  Christ,  et  dans  le  second  un 
autre  poème,  adressé  à  une  religieuse ,  et  dont  le  sujet  est 
l'éloge  de  la  virginité. 

Ses  mélanges  de  poésies  {diver^orum  carminwn  sylva 
una)  qu'on  pourrait  appeler  profanes,  par  opposition  aux 
premières ,  commencent  au  feuillet  47 ,  et  la  préface  en  est 
datée  de  Courtrai,  \"  août  1554. 

L'une  des  premières  pièces  de  celte  partie,  et  des  plus 
importantes,  est  le  poème  sur  l'incendie  de  Lille  (1)  en 
1545,  poème  que  Paquot  croyait  encore  manuscrit,  preuve 


(1)  L'historien  le  plus  récent  de  Lille ,  M.  De  Rosny ,  consacre  quelques 
lignes  à  ce  terrible  désastre ,  connu  sous  le  nom  de  grand  feu  de  Lille , 
et  cite  à  ce  sujet  le  titre  du  poème  d'Hemus,  imprime,  dit-il,  ^jar 
Guillaume  Hameliti,  le  jilns  ancien  ou  Vun  de  plus  anciens  impri- 
meurs de  cette  ville.  Histoire  de  Lii-le,  Valenciennes .  1837,  in-8", 
«g.,  pag.  IGG. 


(  49  ) 

qu'il  n'avait  pas  vu  rédilion  dont  nous  nous  occupons,  el 
dont  il  donne  le  titre,  bien  que  d'une  manière  incomplète. 
Si  la  lecture  des  odes  de  François  Hemus  nous  rappelle  sou- 
vent le  prince  des  lyriques  latins,  par  de  nombreuses  imi- 
tations, ses  hexamètres  nous  prouvent  qu'il  avait  fait  des 
vers  admirables  de  Virgile  une  étude  bien  assidue,  car  il 
lui  arrive  parfois  de  lui  emprunter  même  des  vers  entiers. 
C'était  chose  permise  alors,  et  nous  pourrions  citer  vingt 
poètes  latins  modernes  qui  sont  dans  le  même  cas.  Du  reste 
ses  poésies  accusent  beaucoup  de  facilité,  une  érudition 
aussi  variée  qu'agréable  et  un  goût  qu'on  ne  rencontre  pas 
toujours  dans  les  écrivains  de  cette  époque. 

Ce  poème  d'Hemusa  dû  produire,  lorsqu'il  parut,  beau- 
coup d'effet,  si  nous  en  jugeons  par  les  vers  qu'adressa  à 
l'auteur  son  ami  François  Simon,  poète  lillois,  et  dont 
nous  traduirons  quelques  distiques  : 

«Félicite-toi ,  charmante  Lille,  el  envoie  en  même  temps 
»tes  félicitations  à  ton  poète.  As-tu  jamais  pu  espérer  une 
»  telle  gloire?  Déjà  ton  renom  est  illustre,  si  l'on  considère 
»ta  bravoure  militaire,  tes  exploits  guerriers  et  tes  im- 
»  menses  richesses  ;  maintenant  ce  livre  va  parcourir  rapi- 
»  dément  les  contrées  les  plus  lointaines  pour  y  accroître  ta 
«renommée.  Ton  malheur  fut  heureux-  cet  incendie  n'est 
»  plus  déplorable ,  puisqu'un  tel  poème  consacre  le  souve- 
»  nir  de  tes  pleurs ,  etc.  » 

Parmi  les  autres  pièces  de  ces  mélanges,  les  unes  sont 
traduites  du  grec,  telle  que  le  Dialogue  de  Vénus  et  do 
Cupidon ,  les  autres  sont  des  poésies  fugitives  adressées  à 
des  amis,  quelques-unes  d'entre  elles  appartiennent  au 
genre  dit  erotique  et  bachique  ;  mais  la  justice  exige  que 
nous  disions  à  la  mémoire  d'Hemus,  qu'elles  sont  écrites 
avec  un  profond  sentiment  des  convenances  et  qu'on  n'y 
trouve  pas  un  vers  qui  puisse  blesser  l'oreille  la  plus  dé- 
licate. Une  circonstance  que  Paquot  n'a  pas  connue,  c'est 

4 


{  50  ) 

qu'avant  d'embrasser  l'état  ecclésiastique,  Hemus  avait 
éprouvé  le  plus  vif  attachement  pour  une  jeune  et  mo- 
deste courtraisienne,  nommée  Isabelle  Villemeyne,  à  la- 
quelle il  consacra  deux  odes  charmantes.  Parla  première, 
il  lui  fait  naïvement  l'aveu  de  son  chaste  amour  :  la  seconde 
accompagne  l'envoi  d'un  recueil  de  prières  qu'il  avait  tra- 
duites pour  elle  du  latin.  C'est  pour  ainsi  dire  un  tendre 
et  vertueux  adieu,  dans  lequel  il  lui  dit  qu'ils  se  retrouve- 
ront enfin  dans  un  monde  meilleur,  puisqu'il  ne  leur  était 
pas  permis  d'être  unis  en  celui-ci  : 

Quando  hic  {nescio  sorte  qua  sinistia) 
Pertinaciteresl  neyalum  utrique. 

Nous  allons  passer  aux  autres  poésies  d'Hemus,  qui  sont 
plus  connues,  quoique  leur  apparition  dans  les  catalogues 
soit  infréquente.  Le  premier  exemplaire  appartient  encore 
à  la  bibliothèque  Van  Hullhem  ,  devenue  aujourd'hui  bi- 
bliothèque royale,  à  Bruxelles;  le  second  est  de  la  collec- 
tion de  l'université  de  Gand. 

Poemata  Francisci  Hœmi  Insulani,  ad  référendum  Pa- 
trem  D.  Joannem  Loaeuni ,  Prœpositum  Eversamensem  ; 
jam  jirimum  in  liicem  édita.  Antverpiœ,  ex  officina  Chris- 
toph.  Planlini ,  M.D.LXXVIÏI.  In-16  de  198  pages. 

L'auteur  du  MS.  de  la  bibliothèque  de  Lille,  dont 
M.  Brun-Lavaine  nous  donne  l'extrait  dans  la  Revue  du 
Nord,  février  1833,  pag.  29-4,  indique  une  autre  édition 
qui  serait  publiée  chez  le  même  imprimeur ,  un  an  après, 
en  1579,  édition  inconnue  à  tous  les  bibliographes,  et  il 
omet  celle  de  1578,  dont  l'existence  est  bien  réelle,  puis- 
que nous  l'avons  sous  les  yeux.  Aussi  ne  balançons-nous 
pas  à  regarder  comme  une  nouvelle  erreur  ce  millésime 
de  1579;  elle  nesurprendra  pas  de  la  part  d'un  biographe 
qui  néglige  d'indiquer  l'année  de  l'impression  d'un  livre 
dont  il  donne  le  litre,  et  qui  confond  un  grand  in-8"  avec 
un  in-16. 


(  51   ) 

Noire  volume  conlient  : 

1°  Dix-huit  pages,  y  compris  le  litre,  de  pièces  prélimi- 
naires, parmi  lesquelles  une  ode  à  la  postérité  (Vosteritati 
henevolœ ,  pag.  8  à  16),  dans  laquelle  le  poète  nous  ra- 
conte toute  sa  vie.  C'est  là  que  Paquot  a  puisé  les  détails 
qui  lui  ont  servi  de  matériaux  pour  son  article  biogra- 
phique, 

2"  Funebrium  lihri  duo  :  2irior  ecclesiasticorum  habet 
tmnulos,  aller  làicorum  (pag.  19-139). 

3"  Miscellaneormn  carminum  liber  primus  sacra  coni- 
plectens  (pag.  149-204).  —  Liber  secundus  complectens 
profana  (pag.  205-245).  — Liber  tertius partini  ethica, 
partim  encomiastica  complectens  (pag.  246-298). 

Ce  volume,  comme  l'indique  le  \\ire: pœmatajam pri- 
mum  in  lucem  édita ,  ne  contient  aucune  des  pièces  qui 
ont  paru  dans  l'édition  de  Paris,  1556. 

Pœmata  Francisci  Uœmi ,  Lnsulani ,  jam  tertio  in 
lucem  édita.  Cortraci,  apud  Joannem  Van  Gliemmert , 
ad  D.  Martini^  in  tribus  Columbis.  M.D.C.XXX.  In-S" 
de  282  pages ,  y  compris  4  feuillets  non  chiffrés ,  pour  la 
dédicace  et  trois  pièces  de  vers  adi'essées  à  Hemus ,  les 
deux  premières  par  Guillaume  De  Steenhuyse,  l'un  de  ses 
anciens  élèves,  la  troisième  par  un  médecin  de  Courlrai, 
Jean  Stullius. 

Comme  il  n'y  a  que  4  feuillets  de  liminaires,  le  texte 
devrait  commencer  pag.  9,  tandis  qu'il  ne  commence  que 
pag.  17.  La  réclame  du  4*^  feuillet  indique  cependant  que 
l'exemplaire  est  complet,  et  que  Jean  Van  Ghemmerl ,  qui 
a  imprimé  d'abord  le  texte  de  l'auteur,  a  donné  à  la  pre- 
mière page  le  chiffre  17,  parce  qu'il  espérait  probable- 
ment que  les  liminaires  auraient  occupé  deux  feuilles  et 
non  une  seule. 

Jean  Van  Ghemmert,  que  nous  avons  tout  lieu  de  re- 
garder comme  le  premier  imprimeur  de  Courlrai,  mais 


(  52  ) 

qui  avait  déjà  imprimé  auparavant  (en  1627),  avait  poiir 
fleuron  trois  colombes ,  avec  cette  légende  entre  deux  cor- 
nes d'abondance  :  Estote  si?iiplices  sicut  colombœ  :  au  bas, 
les  armes  de  la  ville  entre  des  livres  ouverts. 

L'on  se  tromperait  fort,  si  l'on  croyait,  sur  la  foi  du 
litre,  que  cette  édition  est  la  troisième  des  œuvres  d'He- 
mus:  elle  n'est  que  la  réimpression  fidèle  des  poésies  éditées 
chez  Plantin,  en  1578,  moins  les  dix-huit  feuillets  de  pièces 
préliminaires,  dont  plusieurs,  l'ode  entre  autres  à  la  pos- 
térité, méritaient  assurément  les  honneurs  d'une  nouvelle 
édition.  Cette  erreur ,  commise  par  le  magistrat  de  Cour- 
trai  (senatus  populusque  Cortracencis ) ,  qui  a  pompeuse- 
ment dédié  cette  réimpression  au  très-noble  seigneur 
Guillaume  de  Steenhuyze,  conseiller  du  roi,  etc.,  etc., 
provient  de  ce  que  l'édition  de  1558,  étant  déjà  devenue 
d'autant  plus  rare  qu'elle  avait  été  imprimée  hors  du  pays, 
on  a  pu  croire ,  faute  de  les  avoir  comparées ,  qu'elle  était 
d'un  contenu  identique  avec  celle  de  Plantin. 

Guillaume  Hamelin,  qui  vendait  à  Lille,  mais  n'impri- 
mait pas  les  poésies  d'Hémus,  en  1556  ,  était  déjà  libraire 
dans  la  même  ville  et  demeurait  sur  le  marché  au  Blé , 
en  1539  :  il  faisait  alors  imprimer  pour  son  compte  chez 
un  célèbre  typographe  gantois  ,  Josse  Lambert ,  dont  nous 
avons  rencontré  le  livre  suivant,  qui  n'est  cité  à  ce  que 
nous  sachions,  par  aucun  bibliographe  :  ce  livre,  dont 
nous  possédons  une  copie  manuscrite  ,  étant  singulière- 
ment intéressant  sous  le  rapport  historique,  nous  ne 
craignons  pas  d'en  donner  le  titre  en  entier,  quoiqu'il 
soit  un  peu  long  : 

Scnsuyvent  les  triomphantes  et  honorables  entrées , 
faictes  j)ar  lo  commandement  du  roy  très  christien  Fran- 
coys  premier  de  ce  nom ,  a  la  sacrée  Majesté  Impériale 
Charles  V.  de  ce  no?n  tousiours  auguste,  es  villes  de 
Poictiers  et  Orléans.  Avecque  la  harengue  faicte  2icir  le 


(  33  ) 

halUif  Dorlcans  a  sa  dicte  M.  I.  et  la  rcsponce  de  sa  dicte 
M.  au  dict  Bailli f. 

Item  le  honorable  7'ecueil  que  luy  feit  le  dict  roi  très 
christien ,  a  son  entrée  du  Chasteau  de  Fontayne  Bleau. 
Lan  M  D.  XXXIX. 

Item  le  complainte  de  Mars  Dieu  des  hataylles  sur  la 
venue  de  Lempereur  en  France ,  par  Claude  Chappuys 
varlet  de  Chambre  du  roy.  Le  tout  imprimé  sur  la  copie 
de  celles ,  lesquelles  ont  été  imprimées  à  Paris,  /*«/■ 
jjrévileye  du  roi  et  diffeîices. 

Item  un  eingramme  de  Clément  Marot,  sur  la  venue  de 
Lempereur  en  France.  On  les  vent  a  Lille  par  Guillaume 
Hamelin,  Librayre  demourant  sur  le  marche  au  Blé, 
dudict  Lille.  Souscription './wi/jnwe  à  Gand,pres  Ihostel 
de  la  ville  par  Josse  Lambert,  Lan  1539.  Petit  in-S"  de, 
32  fetiillels. 

Ce  Joos  Lambert,  qui  signait  Lambrecht ,  quand  il  im- 
primait un  ouvrage  en  flamand,  était  un  homme  fort  re- 
marquable, bien  que  nos  biographes  n'aient  pas  pensé  à 
s'occuper  de  lui,  injustice  que  du  reste  il  partage  avec  bien 
d'autres  encore:  il  fut  tout  à  la  fois  philologue,  grammai- 
rien ,  imprimeur  et  graveur  :  peu  de  typographes  surpas- 
saient en  son  temps  la  beauté  de  ses  impressions ,  celles 
surtout  de  ses  gravures,  de  ses  empreintes  de  monnaies,  et 
l'on  sait  avec  quelle  ardeur  les  bibliophiles  belges  et  fran- 
çais recherchent  ses  ouvrages  sur  les  monnaies.  Nous  avons 
recueilli  sur  Josse  Lambert  des  renseignements  que  nous 
céderons  avec  bien  du  plaisir  à  la  personne  qui  aurait  le 
loisir  de  lui  consacrer  une  notice  biographique. 

Un  autre  typographe  gantois ,  également  fort  remarqua- 
ble, mais  à  un  moindre  degré  peut-être  ,  est  Henri  van  den 
Keere,  éditeur  du  célèbre  voyage  en  Orient  du  seigneur 
Joos  van  Gistele.  Ce  livre  étant  excessivement  curieux  , 
nous  croyons  devoir  en  examiner  la  forme  avec  quelque 


(54  ) 

nllcnliou  :  quant  au  voyage  proprement  dit,  rexcellenl 
article  que  lui  a  consacré  M.  Schayes,  dans  le  Messager 
des  Sciences  et  des  Arts,  année  1836,  nous  dispense  d'en 
parler. 

Voici  la  description  de  l'édition  princeps  de  ce  voyage 
dont  nous  devons  la  publication  et  l'impression  au  zèle 
de  Henri  van  den  Keere  : 

Tvoyaxje  van  Mher  Joos  van  Ghistele,  oft  anders,  texcel- 
letit  groot ,  zclds.iem  cnde  vremd  voyage  ,  ghedaen  hy 
îvylent,  Edelen  ende  iceerden  Heere ,  Mher  Joos  van 
Ghistele.  In  zynen  levene  riddere ,  Heere  van  Axele,  van 
Maelstede  ende  van  den  Moere ,  etc.  Tanderen  tyd  vier- 
macl  voorschepene  van  Ghendt.  Tracterende  van  veel- 
derande  ivonderlicke  ende  vremde  dynghen,  geobserveerd 
over  d'zee.  in  dmi  landen  van  Sclavonien ,  Griecken, 
Turckien,  Candien ,  Rhodes  en  Cyprès.  Voords  ooc  in  den 
lande  van  Beloflen,  Assirien ,  Arabien ,  Egypten,  Ethyo- 
pien,  Barbarien,  Indien,  Perssen,  Meden,  Caldien  ende 
Tartarien  :  met  der  gheleghentheden  der  zeher  landen 
ende  meer  ander  plaetsen ,  Insulsen  ende  steden,  van 
Eurojien. — ïe  Ghendt,  by  Henric  van  den  Keere,  ghe- 
zworen  drucker  van  's  conynghs  ,  ons  gheduchte  Heeren 
Munten,  M.CCCCC.LVII.  Met  gralie  ende  privilégie  van 
vier  jaren.  In-4°,  caract.  goth. 

Au  litre  est  le  fleuron  de  l'imprimeur,  représentant  un 
cadran  solaire,  au  milieu  duquel  se  trouve  une  tête  de 
mort.  Autour  on  lit  :  Aenziet  theynde ,    Van  den  Keeren. 
Au  verso,  les  armes  de  Messire  Philippe  de  Liedekeercke 
auquel  l'ouvrage  est  dédié. 

Le  volume  contient  d'abord  six  feuillets,  non  cotés,  de 
liminaires;  on  y  lit  : 

1°  L'épitre  dédicatoire  de  l'imprimeur  (en  français). 

2"  Un  avertissement  de  l'imprimeur  au  lecteur  (en  fla- 
mand). 


(55  ) 

3°  La  liste  des  auleurs  cités  dans  l'ouvrage. 

4°  La  préface  d'Ambroise  Zeebout,  prêtre,  rédacteur  de 
la  relaliou  du  voyage. 

Suivent  348  pages  chiffrées  de  texte,  à  la  fin  desquelles 
on  voit  page  346,  les  armes  de  Josse  van  Ghistele, gravées 
en  bois;  page  347  et  348,  une  pièce  de  vers  de  Henry 
van  den  Keere,  fils  de  Henri ^  à  la  louange  de  Van  Ghis- 
tele, et  enfin  le  privilège,  daté  de  Bruxelles  le  6  juin  et 
le  5  août  1556. 

Ce  privilège  accorde  aussi  à  Henry  van  den  Keere ,  la 
permission  d'imprimer  les  ouvrages  suivants,  que  nous 
n'avons  jamais  vus  et  que  nous  recommandons  aux  re- 
cherches de  nos  bibliophiles ,  le  dernier  surtout  :  Com- 
mentaria  Plutarchi  Chœronis  de  esu  carnium.  —  Item, 
ejiisdcm  de  supei'stitione.  —  Item,  de  complurium  amici- 
tia.  —  Item,  Flores  Terentie  ex  Heantontumerumeno , 
vernaculo  Flandrorum  idiomate. 

L'éditeur  était  un  homme  instruit,  comme  l'était  à  son 
époque  ,  la  plupart  des  imprimeurs  ;  il  paraît  même  qu'il 
s'était  livré  à  la  noble  et  pénible  fonction  d'instruire  la 
jeunesse  ,  car  son  épitre  dédicatoire  est  ainsi  datée  :  A 
Gand,  de  nostre  Escole  Françoise,  ce  samedi  XI  de  juillet 
Van  de  grâce  M.D.IVI.  H  nous  raconte,  dans  les  termes 
suivants,  comment  l'envie  lui  prit  de  publier  le  voyage 
de  Van  Ghistele. 

«  Or  est  advenu ,  comme  j'ai  eu  toutjours  le  cœur  à 
sl'estude,  et  esté  curieus  délivres  et  bones  lettres,  que 
»  cest  yver  passé  soit  tombé  en  nos  mains  le  livre  contenant 
»le  discours  de  très  excellent,  loingtain  ,  rare  et  estrange 
»  Voyage,  de,  feu  bone  mémoire,  Mon  seigneur.  Monsieur 
»  Josse  de  Ghistelles,  à  qui  Dieu  absolve,  Pere-grand  de 
sma  Dame  vostre  espouse  Marie,  Dame  des  Fossez,  et  de 
«Heule,  etc.  En  lisant  lequel,  j'y  trouvai  si  bon  goust  et 
«saveur,  tant  à  cause  de  la  bone  phrase  et  élégant  slile 


(  56  ) 

»  (pour  le  temps  qu'il  fust  escript)  que  pour  la  belle,  ex- 
»  presse  et  ample  déclaration  des  lieus  y  allégués  :  choses 
»  admirables  et  cas  estranges  y  contenus ,  envie  m'est  prins 
»  de  le  mettre  en  lumière  et  imprimer.  » 

Il  nous  apprend  ensuite  qu'il  avait  l'intention  de  le  tra- 
duire en  français  :  «  Pour  l'assurance  de  laquele  (votre 
«protection)  je  ne  craindrais  la  dent  de  l'envieuse  ver- 
»  mine ,  aius  m'auseray  advancer ,  pour  l'edvenir ,  de  le 
»  faire  parler  françois,  si  vous  et  le  temps  me  le  permettez , 
»avec  l'ayde  du  souverain  seigneur  et  créateur  de  toutes 
»  choses.  » 

M.  Schayes  indique ,  au  commencement  de  son  inté- 
ressant article,  une  édition  de  cet  ouvrage  qui  aurait  été 
faite  à  Louvain,  en  1530;  c'est  là  évidemment  une  erreur, 
qu'il  est  important  de  rectifier  dans  l'intérêt  de  nos  étu- 
des bibliographiques  ,  car  cette  édition  n'a  jamais  existé. 
Nous  nous  étions  d'adord  livrés  à  des  recherches  pour  la 
découvrir,  car  c'eut  été  une  bonne  fortune  pour  nous,  et 
ne  pouvant  parvenir  à  arriver  à  notre  but,  nous  nous 
sommes  adressés  à  M.  Schayes  lui-même ,  qui  a  r^-connu 
avec  nous  qu'elle  n'existait  pas.  Au  reste  l'épitre  dédicatoire 
de  H.  Van  den  Keere,  de  l'édition  de  1557 ,  prouve  à  l'é- 
vidence que  l'impression  de  cette  année  est  bien  la  pre- 
mière. 

A,  Voisin. 


é^  û'/'zyA-t^^-'i  (■'' 


(  57) 


tableau  par  iîlemling. 

HAUTEUR,  00*"  SS'^'  ;  LARGEUR,  00""  16'='. 


Tous  les  tableaux  de  Memling  ne  sont  pas  connus 
comme  ceux  de  Raphaël,  qui  sont  annotés,  comptés  et 
même  dénomés  jusqu'au  dernier  :  quand  le  hasard  en 
fait  encore  découvrir ,  échappés  qu'ils  sont  comme  par 
merveille  aux  dégoûtantes  et  vindicatives  saturnales  de 
nos  dissenlions  religieuses  du  seizième  siècle ,  ils  ne  nous 
apparaissent  presque  toujours  que  ternis ,  endommagés 
et  qui  pis  est,  souvent  alors  on  les  confie  à  des  mains 
inhabiles ,  qui  donnent  à  Van  Eyck  ,  ce  qui  revient  à 
Memling  et  les  travestissent  d'une  manière  méconnaissa- 
ble. Toutefois  M.  Warnkœnig  vient  de  nous  faire  parve- 
nir un  petit  tableau  de  l'un  ceux  que  l'on  peut  nommer,  à 
juste  titre,  les  chefs  de  toutes  les  écoles  de  peinture  :  à  part 
son  mérite  d'exécution  ,  il  est  d'une  conservation  parfaite. 

Ce  tableau  n'était  pas  isolé,  mais  il  faisait  le  pendant 
d'un  autre  de  la  même  grandeur,  qui  représentait  la  Sainte- 
Vierge,  tandis  que  celui-ci  nous  offre  S'<=-Barbe,  M.  de  Issel, 
de  Fribourg,  qui  fut  possesseur  de  ce  tableau,  pense  qu'ils 
formaient  les  deux  battants  d'un  petit  autel.  L'autre  tableau 
était  tout-à-fait  gâté,  soit  par  le  temps,  soit  par  la  main 
inhabile  de  celui  qui  avait  voulu  le  restaurer. 

S'^-Barbe  est  en  méditation,  les  mains  jointes;  son  esprit 
s'est  laissé  entraîner  à  une  profonde  contemplation  :  les 
traits  de  sa  figure  sont  empreints  d'une  austère  gravité  , 
et  au  mouvement  de  son  manteau,  on  pourrait  croire  que 
primitivement  elle  était  agenouillée. 


(  58) 

Ce  pelit  tableau  porte  tous  les  caractères  du  faire,  du 
coloris,  du  dessin  et  de  la  manière  de  draper  du  maître  : 
la  tête  et  les  mains  sont  traitées  avec  toute  la  candeur  et 
la  finesse  si  familières  à  Memling  ;  les  formes  du  nez  et  sur- 
tout de  la  bouche,  sont  de  la  pureté  la  plus  exquise  :  la 
couleur  des  chairs  est  veloutée,  c'est  le  type  du  coloris  de 
ce  maître.  La  chevelure,  d'une  teinte  dorée,  tombe  en  tres- 
ses légères  sur  ses  épaules.  L'arrangement  des  plis,  qui  ne 
laissent  point  ignorer  de  gracieux  contours,  n'accusent 
point  cette  raideur  si  souvent  reprochée  aux  maîtres  des 
premiers  siècles  de  la  peinture  à  l'huile  :  la  draperie  sur- 
tout qui  couvre  le  bras  droit  est  d'une  grâce  accomplie.  La 
conservation  de  ce  tableau  est  rare  ;  à  peine  y  a-t-il  à  rele- 
ver une  marque  presqu'imperceptible  sur  la  lèvre  supé- 
rieure, mais  le  temps  a  fait  disparaître  l'azur  du  manteau 
qui  pousse  maintenant  au  noir.  Le  fond  du  tableau  est  orné 
d'un  riche  site  montueux,  qu'anime  un  pâtre  jouant  de  la 
cornemuse  :  le  ton  et  le  feuille  de  ce  paysage  est  identique 
avec  ceux  que  nous  connaissons  de  ce  maître  ;  le  petit 
temple  qui  s'élève  au  troisième  plan,  semble  une  répéti- 
tion de  celui  qui  se  voit  sur  le  tableau  de  l'Apocalypse  de 
Van  Eyck,  à  l'église  de  S'-Bavon,  à  Gand.  En  somme,  ce 
charmant  tableau,  tel  qu'il  est,  ne  déparerait  point  la  plus 
belle  galerie  :  maintenant  il  fait  partie  de  la  collection  de 
M.  Baer,  conseiller  à  la  cour  d'appel  à  Fribourg.  Avant 
lui,  il  appartenait  à  M.  de  Issel,  de  la  même  ville,  qui  l'a- 
vait acheté  d'un  ancien  moine  de  l'abbaye  de  Salem  (Sal- 
mansweiler),  sécularisée  en  1803,  et  dont  les  possessions 
forment  aujourd'hui  la  propriété  de  S.  A.  le  marcgrave , 
Guillaume  de  Bade,  qui  y  réside  en  été.  Cette  abbaye  pos- 
sédait'une  riche  collection  de  tableaux,  et  jusqu'à  ce  jour 
il  en  est  resté  quatre  de  l'école  flamande  du  XV<^  siècle  qui 
ornent  les  appartements  du  marcgrave. 


(  59  ) 


LA 


(îonfcàcrattan  it  ©crmonic, 


ou 


LE   4  OCTOBRE  1566. 


D'inbooilingh  is  in  zijne  wiegh  gchouden 
En  bakermat  :  hoe  kan  ik  die  voorby  ? 
Al  wort  de  meick  der  moeder  niet  vergouden 
Van  't  kint,  dit  streek  ton  allerminstcn  dy 
Een  klein  bcuijs  van  mijn  genegentlieden, 
En  groote  zucht  tôt  mijn  geboorteplaets. 
VoNDELS  Maeghdeii. 


Celait  en  1566  :  une  lettre  écrite  à  la  gouvernante 
Marguerite,  par  d'Alava,  ambassadeur  d'Espagne  à  Paris, 
sous  la  date  du  26  août  1566  ,  ayant  été  interceptée  j 
les  intéressés  purent  s'assurer,  par  leurs  propres  yeux, 
qu'on  engageait  cette  princesse  à  dissimuler  avec  le  prince 
d'Orange,  ainsi  qu'avec  les  comtes  dEgmont  et  de  Horne; 
le  roi  Philippe  ayant  pris  la  résolution  de  les  punir  en 
temps  et  lieu  ,  et  cela,  d'après  les  termes  mêmes  de  la 
missive  qui  a  été  imprimée,  de  ma?iière  à  faire  tinter  les 
oreilles  de  la  chrétienté  ^  dût-il  mettre  en  danger  tout  le 
reste  de  ses  états. 

On  annonçait  en  même  temps  dans  cette  lettre,  ou  du 
moins  le  bruit  courait,  qu'ivre  du  désir  de  vengeance,  le 
roi  s'apprêtait  à  venir  châtier  la  Flandre,  et  marcherait  à 
la  tète  d'une  armée  formidable. 

Dans  ces  circonstances  périlleuses,  le  prince  d'Orange 


(60) 

ne  perdit  pas  courage;  il  chercha  un  lieu  sûr,  dévoué  à 
sa  cause,  où  son  parti  pourrait  s'assembler.  Aucune  ville 
ne  lui  parut  plus  propre  à  cette  fin  que  Termonde.  Une 
convocation  en  ces  murs  fut  donc  arrêtée,  pour  y  délibérer 
sur  les  mesures  à  prendre;  on  choisit,  pour  s'y  réunir,  la 
maison  de  Jean  van  Royen,  que  nous  croyons  avoir  été 
capitaine  de  la  garde  bourgeoise  à  celle  époque.  Chose 
remarquable!  c'était  dans  celte  même  maison  où  Philippe 
avait  logé  quelques  années  auparavant,  que  maintenant 
on  allait  se  coaliser  contre  son  fanatique  despotisme! 

Voilà  qu'en  effet  le  prince  d'Orange,  ainsi  que  les  comtes 
Louis  de  Nassau,  d'Egmont,  de  Horne  et  de  Hoogstralen, 
chevaliers  de  la  Toison  d'or  (1),  volent  à  Termonde;  ils 
étaient  suivis  de  quelques  autres  seigneurs,  indiqués  sous 
le  nom  de  partisans  et  cotiseillers  d' Orange  (2).  Outre  la 
lettre  écrite  par  d'Alava ,  le  prince  d'Orange  leur  en  com- 
muniqua une  de  l'infortuné  Montigny,  alors  envoyé  à 
Madrid,  dans  laquelle  ce  dernier  leur  faisait  connaître  la 
colère  mal  cachée  de  Philippe. 

On  balança  trois  partis  dans  cette  assemblée  :  le  premier 
tendait  à  quitter  le  pays;  le  second  à  demeurer  sur  les 
lieux,  puisque  les  secours  de  leurs  compatriotes  ne  leur 
manqueraient  pas  au  besoin  pour  repousser  la  force  par 
la  force.  Le  troisième  parti  qu'on  proposa ,  fut  de  se  con- 
fier à  la  clémence  et  à  la  justice  du  roi,  qui  en  tout  cas, 
ne  s'oublierait  jamais  au  point  de  porter  aux  seigneurs 
des  Pays-Bas,  une  haine  telle  qu'il  oserait  méconnaître 
ses  devoirs  envers  eux;  car,  comme  lui,  ils  étaient  che- 
valiers de  la  Toison  d'or,  et  ils  avaient  plusieurs  fois,  au 


(1)  Consultez  à  cet  égard  :  Strada,  de  la  Guerre  de  Flandre  (Paris, 
1765);  t.  1  ,  p.  384  et  415. 

(2)  Oranjes  aeuhangeis  en  mcfleraedslieeren.  Voyez  Clironyke  vaii 
Vlacndercn  ,  door  Blootackcr  en  Vcruimnien  (Bruggc,  1727)  ;  in-fol. 
D.  III,  bl.  308. 


(  61   ) 

prix  de  leurs  biens  et  de  leur  sang,  défendu  la  cause 
commune  (1). 

Un  chevalier,  modèle  de  l'ancienne  loyauté  clievaleres- 
que ,  adhéra  seul  à  ce  troisième  parti  :  ce  fut  Egmont. 

A  cause  de  l'opinion  vacillante  du  héros  qui  tenait  les 
forces  de  l'armée  entre  les  mains,  et  que  le  peuple  aimait 
comme  un  père,  amour  dont  il  fournit  des  preuves  lors  du 
martyre  d'un  homme  plus  brave  que  prudent,  Strada  (2) 
et  d'autres  auteurs,  d'après  lui,  prétendent  que  cette 
assemblée  eut  lieu  sans  qu'on  y  prit  aucune  résolution  ; 
mais  une  chronique  qui  se  distingue  par  une  grande 
exactitude  (3)  assure  que  les  confédérés  y  résolurent  de 
s'insurger  contre  Philippe ,  et  arrêtèrent  d'invoquer  à  cet 
effet  le  secours  de  l'empereur  Maximilien. 

L'historien  Van  Meerbeke  (4)  dit  également,  que  la  lec- 
ture de  la  lettre  écrite  par  l'ambassadeur  d'Alava  ou 
d'Aldava  ,  leur  fit  prendre  la  décision  de  courir  aux 
armes  contre  l'Espagne. 

Burgundius  (5)  ne  décide  rien  à  cet  égard ,  parce  que 
quelques  personnes  qui  avaient  assisté  à  celte  assemblée, 
ayant  été  apphquées  à  la  torture  par  le  duc  d'Albe, 
l'avaient  fortement  compromise  ;  mais  elles  s'étaient  re- 


(1)  De  Thou,  Histoire  universelle,  t.V,  livr.  XL,  p.  236.  — Burgun- 
dius, Historla  Bclgica,  lib.  III,  p.  401-407. 

(2)  T.  I,p.  521. 

(3)  Chronyke  van  Vlaendercn,  D.  III,  bl.  308. 

(4)  Chronyke  van  de  gantsche  wereld,  Antw.  1620,  in-fol.  bl.  231. 

(5)  Pag.  407.  De  quo  plerique  postea  ab  Albano  torti,  atrociora 
confessi  sunt.  Âtqtie  anceps  quidem  est  conjectura.  Quia  hoc  se 
niendacio  libérasse  cruciatu,  morie?ites  testabaiitur.  Nos  aliorum 
judicio  veriiatem  reliiiquimus.  De  cetero  prope  otimes  scriptoi-es 
mecum  coiisentiunt. 

Burgundius  du  reste  s'est  trompé  en  fixant  l'assemblée  au  2  octobre. 
L'historien  philosophique  Schiller  a  copié  en  grande  partie  cet  auteur 
dans  le  fait  dont  il  s'agit. 


(62) 

tractées  en  mourant,  et  avaient  confessé  n'avoir  porté 
leurs  accusations,  que  pour  être  délivrées  de  la  torture. 

Benlivoglio  pousse  ses  doutes  plus  loin  :  non-seulement 
il  prétend  que  l'assemblée  se  sépara  sans  avoir  pris  aucune 
résolution,  mais  il  dit  encore  que  la  lettre  d'Alava  qu'on 
intercepta ,  fut  une  fable  inventée  par  le  prince  d'Orange. 
Van  Meteren  n'élève  aucun  soupçon  sur  la  vérité  de  cette 
lettre,  mais  il  glisse  sur  toutes  les  suites  de  cette  assemblée. 

Le  prince  d'Orange  et  le  comte  de  Hoogstraten  s'en 
retournèrent  à  Anvers,  et  aucun  d'eux  n'osa  se  rendre  à 
Bruxelles,  quoique  différentes  lettres  les  eussent  engagés 
à  venir  assister  au  conseil.  Egraont  seul  fit  ici  encorQ  une 
exception. 

La  gouvernante  Marguerite  était  instruite  de  ce  qui 
s'était  passé  à  Termonde,  soit  par  des  espions,  soit  par  la 
trahison  du  comte  de  Mansfeld.  L'imprudent  Kgmont  avait 
écrit  au  comte  en  secret ,  pour  lui  communiquer  qu'il 
savait,  par  la  lettre  lue  à  ïermonde,  que  Philippe  avait 
résolu  d'abattre  quatre  têtes  de  seigneurs ,  parmi  les- 
quelles se  trouverait  celle  de  Mansfeld.  Egmont  finissait 
par  lui  demander  conseil  comme  à  un  ami  intime.  Le 
traître  communiqua  cette  missive  à  Marguerite,  et  d'après 
l'avis  de  la  gouvernante  il  répondit  à  Egmont ,  pour  l'en- 
gager à  se  confier  en  la  bonté  royale.  La  gouvernante 
s'empressa  d'envoyer  les  deux  lettres  à  Madrid ,  et  de 
recommander  fortement  à  la  cour  l'odieux  Blansfeld , 
qu'elle  tâcha  d'attirer  entièrement  à  son  parti ,  en  lui 
prodiguant  les  éloges  et  les  caresses.  Elle  voulut  également 
apprendre  de  la  bouche  d'Egmont,  quel  avait  été  le  résul- 
tat de  l'assemblée  de  Termonde.  Pour  toute  réponse,  il  lui 
montre  une  copie  de  la  lettre  d'Alava ,  et  lui  adresse  les 
plus  vifs  reproches.  Elle  pâlit  d'abord,  mais  se  remet  bien- 
tôt ,  et  déclare  hardiment  que  la  lettre  est  supposée. 

On  put  s'assurer  bien  vile  ,  que  la  décision  prise  à  Ter- 


(  03  ) 

monde  était  insuffisante  pour  atteindre  le  but  désiré.  Peu 
de  temps  après  cette  assemblée,  les  membres  qui  y  avaient 
concouru,  se  rendirent  à  Amsterdam,  pour  délibérer  sur 
les  moyens  ultérieurs  à  mettre  en  œuvre. 

Il  fallait  que  la  ferme  résolution  de  s'insurger  fut  déjà 
prise,  pour  hasarder  ouvertement  ce  second  pas  si  plein 
de  dangers. 

Le  prince  d'Orange,  dans  son  éloquente  apologie  contre 
l'abominable  factum  que  Philippe  lança  contre  lui,  nie 
d'avoir  assisté  à  cette  seconde  assemblée  ;  ce  qui  nous 
porte  à  croire  que  sa  présence  y  aura  été  moins  néces- 
saire, à  cause  des  déterminations  déjà  prises  à  Termonde. 

En  triant  les  archives  de  la  ville  de  Termonde,  nous 
avons  eu  le  bonheur  de  découvrir  le  rapport  fait  par 
le  Magistrat  de  cette  ville  au  duc  d'Albe,  relativement 
à  la  célèbre  assemblée.  Nous  pensons  que  cette  pièce, 
écrite  sur  parchemin,  était  destinée  à  servir  d'original; 
mais  que  les  ratures,  qu'on  avait  trouvé  convenable 
d'y  faire  pour  alléger  l'inculpation ,  en  ont  empêché 
l'envoi. 

Voici  cette  charte,  écrite  en  un  contexte,  que  nous 
avons  ponctué  et  divisé  pour  en  faciliter  la  lecture. 

Tious  Burghenf  et  Eschevins  de  la  ville  de  Terreinonde , 
sçavoir  faisons  que  ,  es  fans  colle  giallement  assamhlés  avecq, 
Christoffel  De  Rop ,  Lieutenant  de  Messgr.  Joseph  De  Baenst 
chevallier,  sgr  de  dlelisont,  Oostkerke ,  etc.,  grandtbailly  de 
la  dicte  ville  et  pays  de  T erre  monde ,  elles  eschevins  de  l'aimée 
précédente ,  quinze  cens  soixante  six. 

Avons  joinctement  leii ,  communicquié  et  visité  certains 
poinctz  et  interrogatz ,  à  nous  envoyez  de  la  part  de  don 
Fernando  Alvares  de  Toledo,  duc  d'Alve,  lieutenant-gouverneur 
et  capitain-gcnéral ,  pour  ausquelz  satisfaire  et  respondre  avons 
certifié ,  attesté ,  certifiions  et  attestons  pur  cestes ,  estre  véri- 
table que  le  Jiurgliju^^  de  la  dicte  ville ,  de  Vannée  précede7ite 


(  64  ) 

la  qnattriesme  jour  du,  mois  d'octobre  (1)  en  la  mesme  année, 
estant  sur  le  marchié  à'icelle  ville ,  auroitveu  entrer  en  l'hoterie 
de  l'estoille  trois  personnes  de  cheval  portans  livrée  ;  que  lors 
se  serait  addressché  à  eulx  leur  demandant  à  quij  ils  estaient  j 
quy  luy  respondoient  qu'ilz  estaient  a  3Iansgr  d'Egmonf.  Ce  ayant 
leur  demandoif  au  que  icelluy  Sgr  estait?  Sur  quoy  luy  firent 
respance  qu'il  apprachoit  la  dicte  ville ,  et  que  dedens  une  bonne 
demye  heure  il  arriverait.  Ce  entendu  ledict  Burghmaistre  s'est 
incontinent  trouvé  au  callegie  et  a  icelluy  donné  à  cognoistre 
la  venue  dudict  Sgr.  quy  lors  advisèrent  comment  Hz  useraient 
vers  ledict  Sgr;  portant  la  conclusion  que  le  hailly ,  burghmais- 
tre et  deux  eschevins ,  prins  avecq  eulx  douze  hallehardiers ,  quy 
estaient  pour  lors  en  solde  de  la  ville  pour  la  garde  et  assurance 
d'icelle ,  yroient  au  devant  dudict  Sgr.  jusques  à  la  porte  nom  • 
mée  la  porte  de  Bruxelles;  ce  qu'ilz  feisrent.  Et  illecq  aians 
arresté  une  demye  heure  serait  arrivée  ledict  Sgr.,  et  après  avoir 
faict  et  présenté  les  salutations  a  accoustume,  le  suyverent  au 
logis  de  Mansgr.  de  Paddeschoot  (2)  et  avant  quilz  pouvient 

(1)  Burgundius  {Historia  Belgica,  ad  annum  1556  ab  1627,  Antv. 
1629),  indique  le  2  octobre  :  dans  différents  auteurs  on  trouve  le  3  du 
même  mois.  Il  est  évident  que  c'est  une  erreur. 

(2)  Dans  le  volume  du  Messager  de  1838,  nous  avons  consacré  un 
article  à  l'Eglise  collégiale  de  cette  ville,  où  nous  avons  émis  l'opinion 
probable  que  c'était  chez  Jeau  van  Royen  ,  seigneur  de  Paddeschoot  (un 
endroit  sous  Hamme) ,  que  l'assemblée ,  de  1566,  avait  eu  lieu.  Notre 
opinion  se  trouve  confirmée  par  cette  partie  du  rapport.  Voici  la  particu- 
larité qu'un  vieillard  ,  dernièrement  décédé  ,  M.  De  Wolf  de  cette  ville  , 
m'a  communiqué  relativement  à  la  mort  du  seigneur  de  Paddeschoot. 
Il  était  capitaine  de  la  garde  bourgeoise  et  fit  tendre  des  chaînes  au 
pont  de  la  Dendre  ,  qui  alors  était  en  pierres  ,  pour  empêcher  le  passage 
de  quelques  séditieux  qui  voulaient  se  porter  du  marché  aux  Blés  ,  dans 
la  diicction  du  Grand-Marché.  Ceux-ci  ayant  brisé  cet  obstacle,  le  capi- 
taine Jeau  qui  s'était  posté  au  coin  de  la  rue  menant  à  la  Grande  Place, 
fut  occis.  En  mémoire  du  brave,  la  maison  située  du  côté  gauche,  au  coin 
du  marché  ,  en  y  arrivant  de  la  rue  du  Chevalier,  fut  chargée  dallumcr 
tous  les  huit  jours  un  luminaire  devant  l'image  de  la  Vierge. 

Nous  possédons  les  épitapbes  relatives  à  la  famille  Van  Royen  ,  tirées 
d'un  MS. ,  porté  sous  le  n»  167  au  catalogue  des  livres  de  M.  Hye- 
ScUoutheet,  en  son  vivant  secrétaire  de  la  ville  de  Gund ,  vendus 
en  1833.  Voyez  également  Lindanus. 


(  65  ) 

approchier  leâict  logis,  estait  ledict  Sgr.  descendu  de  son  cheval, 
et  monté  en  hault  en  quolcqiie  chambre;  où  que  lors  Icsdictz 
bailly ,  hiirghniaistre  et  cschevins  entendirent  que  les  aultrcs 
Sgrs.,  assçnvoir  le  prince  d'Orainges ,  le  conte  de  Homes,  et  le 
conte  de  lloogstratc  y  estaient  aussy  trestous  en  hault;  lesquels 
Sgrs.  lesdictz  hailly,  burghinaistrc  et  cschevins  attendaient  une 
heure  ou  environ  cmhas  audict  logis,  qui  lors  descendirent  et 
leur  faisoient présent  du  vin  de  la  dicte  ville ,  selon  l'ancienne 
cousfume.  Et  ce  faict,  chacun  de  la  dicte  ville  se  retirait  vers  sa 
maison,  et  lesdictz  Sgrs.  se  mectoicnt  à  table  pour  disner,  où 
Hz  ont  faict  rappeler  Icsdicts  bailly,  burghmaistre  et  eschevins , 
lors  retirés.  Et  eulx  retournans  estait  ledict  disner  desjà  fort 
advanché ,  et  près  à  inectre  la  déserte  :  et  illecq  ayantz  estez 
quelcque  bon  espace ,  se  sont  lesdictz  Sgrs.  relevez  de  la  table , 
et  aussy  lesdictz  de  la  ville;  ce  que  voyant  lesdictz  Sgrs.  ex- 
hortaient lesditz  de  la  ville  ne  se  bougier  de  la  table,  par  ce 
quilz  estaient  venuz  sur  le  tard;  et  quilz  demourassent  et  fe- 
raient bonne  chière  avecq  les  geiitilz  hommes;  à  quoy  lesdictz 
de  la  ville  obcyrenf ,  et  estant  debout,  après  avoir  entendu  que 
le  cincquiesme  desdictz  Sgrs.  estait  le  conte  Loys ,  frère  dudict 
prince  d'Orainges,  luy  ont  aussi  présenté  le  vin  de  la  ville  ,  et 
virent  les  dictz  Sgrs.  par  ensemble  retirer  et  monter  en  hault 
dudict  logis  en  quelque  chambre  à  part  (1),  les  attendant  le 
temps  d'une  heure  et  demye  ou  environ;  quy  lors  sont  descen- 
duz  (2),  et  hientost  apirès  montez  à  cheval ,  et  pnrtiz  de  ladicte, 
d'entre  les  dculx  et  trois  heures  dudict  mesme  après  disner. 
Ccrtiffions  et  attestons  en  oultre  que  lesdictz  Sgrs.  chascun  do 
sa  chascune  seraient  estez  arrivez  en  ladicte  ville  au  jour  que 
dict  est,  environ  une  demye  heure  l'un  après  l'aultre ,  avant  le 
disner  et  avant  les  douze  heures  du  midy;  non  scachans  les 
villes  particulièrement  dont  chascun  desdicts  Sgrs.  serait  venu 
en  ladicte  ville  ;  ny  aussy  avoir  entendu  pourquay  ladicte  as- 
semblée se  faisait,  nayans  aussi  esté  auparavant préadvcrtiz  de 
leur  venue.  Certiffions  et  attestons  pardessus  qu'avons  examiné 

(1)  On  a  CiTacé  dans  le  rapport  les  mots  qui  se  trouvent  ici  en  romain, 
pour  y  substituer  ceux  :  Sortir  de  la  chambre. 

(2)  On  a  barré  le  mot  descenduz  ponr  y  suscrire  le  mot  revenuz. 

5 


(  66  ) 

deuement  sur  serment  en  nos  mai7is  faict,  la  conipaignie  et 
mesnaige  du  Sgr.  de  Paddeschoot,  les  plus  à  propos  et  discretz; 
lesquelz  ont  déclaré  et  affirmé  et  entre  aultres  le  filz  de  la  mai- 
son competenient  agie ,  que  entre  les  huyet  et  noef  heures  audict 
jour  devant  disner  sont  esté  illecq  arrivez  trois  personnes  boitez 
et  esperonnez  demandans  si  ccstuy  estait  le  logis  ou  naguaires 
auparavant  aurait  esté  logé  la  princesse  de  Portugale  (1)  et 
ayant  entendu  que  si,  ont  incontinent  demandé  après  la  cuisine 
disans  que  Monsgr.  d'Egmont  viendrait  là  disner  avecq  aultre 
compnignie ,  et  que  l'on  leur  administrait  ce  que  fault  pour  ser- 
vice de  la  cuisine,  comme  lignes ,  estain  platz  et  choses  som- 
blablcs  :  ce  que  fut  faict,  sans  que  quelcquuîi  du  mesnaige 
entrait  depuis  en  la  dicte  cuysine ,  sans  scavoir  parquy  et  au 
nom  duquel  la  provision  ou  despence  se  faisait;  bien  scachans 
toutes  fois  que  lesdictz  trais  personnes  dessus  nommez  achap- 
toient  tout  ce  quil  falloit pour  ledict  disner,  et  que  Icsdicfs  Sgrs. 
sont  venuz  audict  logis,  l'un  après  V aultre,  devant  disner,  après 
les  dix  heures,  et  devant  les  onze  heures,  et  departiz  entre  les 
deux  et  trois  heures  après  disner.  Et  n'ont  entendu  la  cause  de 
l'arrivée  desdictz  Sgrs,  ny  aussy  d'où  Hz  venaient,  comme  aussy 
ils  ignorent,  sy  lesdictz  Sgrs.  se  seraient  montrés  sur  les  ram- 
pars,  rues  ou  marchiés  de  ladicte  ville.  En  tesmoing  de  vérité 
nous  les  csschevins  dessus  nommez  avons  faict  mectre  le  scel 
des  causes  de  ladicte  ville  à  ces  présentes ,  le  vingtcinquiesme 
january  l'an  mil  cinq  cens  soixante  sept. 

Ce  rapport  n'esl  ni  signé  ni  scellé  :  nous  avons  déjà 
élabli  notre  présomption  à  cet  égard.  Egmont  ne  fut 
arrêté  que  l'année  suivante,  et  sa  présence  à  la  maison 


(1)  Quant  à  la  maison  de  Jean  van  Royen,  il  nous  parait  assez  probable 
que  c'était  celle  nommée  ci-devant  la  Cigogne,  alors  tenante  à  Ihôtcl-de- 
villeet  que  nous  avons  vu  démolir.  En  ellct,  il  y  avait  dans  cette  maison 
un  appartement  nommé  la  chambre  des  princes,  (pii  a  «lu  être  destiné 
à  recevoir  les  nobles  étrangers.  Or  quelques  années  avant  rassemblée  de 
1566,  Philippe  II  avait  logé  a  la  maison  de  Jean  van  Royen  ;  le  maréchal 
de  Biron  en  fit  autant  en  1583;  et  Albert,  ainsi  ([ue  sa  fille  Isabelle, 
étant  venus  visiter  le  pays  en  1600,  y  logèrent  également.  (P.  Salomons 
7  (trrlsch  Jubile  van  Dendermonde ,  pag.  271  et  274). 


(  67  ) 

de  J.  Van  Royen  fut  un  des  griefs  relatés  contre  lui  au 
procès  dressé  sous  l'influence  du  duc  d'Albe. 

On  se  trompe  en  prétendant  que  le  prince  d'Orange 
aurait  adressé  à  Egmont,  lors  de  son  départ  de  Termonde, 
les  mots  connus  :  o  Je  prévois  que  ton  corps  sera  le  pont 
que  les  Espagnols  fouleront  aux  pieds  pour  entrer  en 
Flandre.  «C'est  au  château  de  Willebroek,  que  cette  triste 
prophétie  fut  adressée  au  malheureux  comte. 

Il  ne  conste  pas  seulement  de  l'endroit  choisi  pour  une 
assemblée  politique,  que  Termonde  était  attaché  au  parti 
d'Orange  ;  cela  est  également  prouvé  par  les  événements 
qui  suivirent  cet  assemblée.  En  effet,  lorsque  vers  1572, 
le  comte  Louis  de  Nassau  se  fut  emparé  de  la  ville  de 
Mons ,  plusieurs  villes  abandonnèrent  le  parti  du  duc 
d'Albe,  ou  durent  céder  aux  armes  du  prince  d'Orange, 
entre  autres  Malines.  Une  troupe  de  350  soldats,  ennemis 
des  Espagnols,  se  rendit  de  cette  dernière  ville  à  Ter- 
monde,  où  on  les  reçut  avec  joie.  Quelque  temps  après, 
Mons  fut  repris  par  le  duc  d'Albe  ,  et  les  soldats  qui  occu- 
paient Termonde  se  virent  obligés  de  quitter  ses  murs.  Bien- 
tôt les  Espagnols  se  portèrent  sur  Termonde  :  le  Magistrat 
s'empressa  d'envoyer  trois  seigneurs  au  duc  vindicatif  pour 
implorer  son  pardon^  mais  ce  ne  fut  qu'après  une  forte 
opposition  que  les  bourgeois  de  Termonde  permirent  aux 
lances  espagnoles  de  pénétrer  dans  leurs  murs.  Aussi  la 
ville  ne  fut  pas  seulement  frappée  d'une  forte  amende 
pécuniaire ,  mais  comme  Malines,  elle  fut  livrée  au  pillage 
et  à  la  dévastation  (1), 

La  ville  de  Termonde  ne  perdit  pas  le  souvenir  de  la 
confédération  que  nous  venons  d'esquisser.  Elle  n'attendait 
qu'une  occasion  favorable  pour  en  renouveller  la  mémoire 
d'une  manière  éclatante. 

Cette  occasion  se  présenta. 

(1)  Liiulaïuis,  de  Teueracmonda,  p.  69  et  alilii. 


(  68  ) 

.  Le  11  mai  1823,  jour  où  le  loi  Guillaume  visita  Ter- 
monde  avec  une  solennilé  extraordinaire  ,  on  érigea  un 
arc  de  triomphe  devant  la  maison  tenante  à  rilôlel-de- 
VillCj  nommée  la  Cigogne  ;  car  là  se  trouvait  la  chambre 
des  princes  {Prince?ika?ner),  où,  selon  la  tradition,  l'assem- 
blée confédérative  avait  eu  lieu.  Sur  cet  arc  de  triomphe, 
se  trouvait  l'inscription  suivante  ,  de  feu  M.  Périer  : 

GUILIELMO  1. 

TESERAEMOXDA 

LIBERTATIS.  BELGICAE 

INCCNABULA. 

G'est-à  -dire  :  Erigé  à  Guillaume  I ,  j^ja/'  la  ville  de  Ter- 
monde ,  berceau  de  la  liberté  des  Pays-Bas. 

De  nouvelles  constructions  ont  fait  disparaître  la  vieille 
hôtellerie  la  Cigogne.  Quelque  temps  avant  la  révolution, 
on  avait  formé  le  plan  de  placer  dans  le  mur  de  l'hôtol-de- 
ville,  qui  aboutissait  ci-devant  à  la  Chambre  des  Princes, 
une  pierre  avec  une  inscription  consacrée  à  rappeler  le 
glorieux  événement  qui  s'était  passé  sur  les  lieux.  Nous 
n'avons  pas  encore  renoncé  à  l'espoir  de  voir  réaliser  cette 
noble  pensée;  et  nous  formons  le  vœu  qu'on  n'emploie  point 
une  langue  morte,  pour  rappeler  aux  citoyens  ce  grand 
souvenir,  éminemment  patriotique.  Après  tout,  le  peuple 
n'y  perd  rien  quand  on  efface  quelque  inscription  latine, 
comme  on  l'a  fait  récemment  sur  la  façade  du  tribunal  de 
Termonde ,  à  cause  de  Vauspice  Wilhelmo.  Voici  en  atten- 
dant celle  que  nous  proposerions  : 

TER  GEDACHTEXISSE 

VAN  HET  BONDGEXOOTSCIIAP 

DOOK  PRISS  WILLEM  I 

EK  DE  GRAVEN  lODEWYK  VAN   NASSOCWEN  ,  EGIÏONT  , 

UOORN  EN  VAN  HOOGSTRATEN  , 

HIER     TEGEN     SPANJE     GESLOTEN  , 

DEJi  IV  OCTOBER  MDLXVI , 

DE  STAD  DENDERMONDE  , 

WJEO  DER  NEDEHLANDSCUE  VRTfHElD. 

MDCCC... 


(  Gd  ) 

Gloire  donc  àTermoiide!  son  nom  peut  rayonner  dans 
les  fastes  de  l'histoire. 

Malgré  M.  De  Smet  qui ,  dans  son  Histoire  de  la  Bel- 
gique,  a  traité  l'immortel  fondateur  de  la  liberté  batave, 
d'un  manière  peu  affectueuse,  pour  ne  rien  dire  de  plus, 
nous  admirons  l'immortel  Nassau.  Malgré  M.  Le  Mayeur , 
qui  a  tâché  de  défendre  indirectement  le  démon  du  Midi, 
mais  qui  du  moins  n'a  pas  eu  le  tort  de  le  faire  en  vers, 
nous  abhorrons  l'indigne  fds  de  Charles  V, 

Ce  roi  qu'avec  Tibère  a  rélégué  Thistoire  , 
Tyran  sans  énergie,  et  conquérant  sans  gloire, 

comme  l'a  dit  un  autre  poète,  qui  a  chanté  les  Belges  en 
beaux  vers. 

Les  mots  :  Termonde  fut  le  berceau  de  la  liberté  des 
Pays-Bas!  feront  toujours  palpiter  notre  cœur  d'un  noble 
orgueil. 

Termonde,  1839. 

Van  Duyse. 


(  70  ) 


Ttotice  l)tj5tDrtquc 

SUR  LE  NOTARIAT  BELGE. 


L'instilulion  du  notariat  se  perd  dans  la  nuit  des  temps. 
Celte  profession  était  inconnue  chez  plusieurs  peuples  de 
l'antiquité.  Il  est  certain  que  dans  l'enfance  du  genre  hu- 
main, les  contrats  n'étaient  que  de  simples  promesses,  qui 
se  faisaient  en  présence  de  quelques  témoins,  tel  que  ceci 
se  pratique  encore  chez  certaines  nations  du  nouveau 
monde.  Ces  peuplades,  lors  qu'elles  s'engagent  à  un  acte 
quelconque,  se  rendent  au  lieu  le  plus  fréquenté  de  leurs 
tribus;  là  elles  traitent,  elles  conviennent,  et  elles  inter- 
pellent ensuite  les  passants  et  les  témoins  de  se  souvenir 
de  leurs  contrats  et  d'en  rendre  témoignage  au  besoin. 

La  civilisation  a3a7it  peu -à- peu  tiré  l'humanité  des 
siècles  de  ténèbres  et  de  barbarie,  celte  sorte  de  simples 
promesses  donna  prise  à  la  mauvaise  foi,  et  l'on  sentit  la 
nécessité  d'avoir  des  conventions  plus  sûres,  que  la  mé- 
moire des  assistants;  alors  on  eut  recours  à  l'écriture.  Au 
premier  abord ,  les  Phéniciens  et  les  autres  peuples  mar- 
chands, en  contractant,  écrivaient  eux-mêmes  leurs  enga- 
gements, et  y  apposaient  leurs  sceaux.  Les  sceaux ,  dont 
les  parties  se  servaient  alors,  ainsi  que  ceux  dont  ils  firent 
usage  au  moyen-âge,  n'étaient  pas  des  signatures  comme 
aujourd'hui,  mais  seulement  de  simples  appositions  d'un 


(  71  ) 

cachet  particulier  à  chacune ,  ou  d'un  signe ,  ou  d'une 
marque  particulière. 

Quelquefois  aussi  les  parties  écrivaient  seulement  au 
bas  de  l'acte  dressé  par  l'officier  public  (comme  ceci  se 
pratiquait  à  Rome  sous  les  Césars),  qu'elles  l'approuvaient, 
sans  y  tracer  leurs  noms. 

La  profession  de  notaire  naquit  donc,  comme  toutes  les 
autres,  du  besoin  delà  société  :  quelques  citoyens  plus  éclai- 
rés se  constituèrent  en  officiers  publics  pour  recevoir  les 
actes,  soit  par  l'appât  du  gain,  soit  par  dévouement.  — 
L'importance  de  leurs  fonctions  détermina  les  législateurs 
à  leur  donner  des  règlements  particuliers.  Ils  furent  dé- 
clarés officiers  publics,  mais  l'Ecriture  sainte,  les  Pandectes 
et  les  lois  grecques  nous  apprennent  que  leur  intervention 
ne  donnait  aucun  caractère  de  légalité  aux  actes  qu'ils 
avaient  dressés;  les  contrats  tiraient  toute  leur  force  de 
l'apposition  des  sceaux  des  parties ,  des  témoins  et  des 
juges. 

Les  Argentiers  d'Athènes  et  les  Tabellions  romains, 
étaient  tenus  de  présenter  les  actes  qu'ils  avaient  rédigés, 
au  juge,  qui  y  apposait  le  sceau  public  pour  les  rendre 
authentiques. 

Dans  l'empire  romain,  les  officiers  publics,  chargés  de 
recevoir  les  actes  des  citoyens ,  étaient  des  lettrés  que  les 
horreurs  de  la  guerre  avaient  réduits  en  esclavage.  Les 
Romains  les  nommaient  scribae ,  parce  qu'ils  écrivaient; 
cursorcs  ou  logographi ,  parce  qu'ils  écrivaient  aussi  vite 
que  la  parole;  notarii ,  parce  qu'ils  faisaient  des  notes; 
tabelliones  ou  tabellarii,  parce  qu'ils  écrivaient  sur  des 
tablettes. 

Les  Digestes  désignent  sous  la  dénomination  d^actuarii 
ceux  qui  ne  rédigaient  que  des  contrats  pour  des  négocia- 
tions d'argent,  tel  que  le  dépôt,  le  prêl. 

Il  y  avait  encore   à  Rome  une  autre  sorte  d'officiers 


{  72  ) 

publics  nommés  actuaru,  allachés  aux  préfets  cl  aux  pro- 
consuls; ceux-ci  étaient  chargés  de  recevoir  les  actes 
d'adoption,  d'émancipations,  de  manumissions ,  les  testa- 
ments et  les  donations  à  cause  de  mort. 

Ils  étaient  tous  officiers  des  magistrats;  alors  la  distinc- 
tion entre  les  greffiers  et  les  notaires  n'était  pas  aussi  bien 
établie  que  de  nos  jours.  Les  mêmes  officiers  écrivaient  les 
sentences  et  les  actes. 

Les  notaires  [nofaru)  écrivaient  les  notes  et  les  remet- 
taient aux  tabellions,  qui  seuls  avaient  le  droit  de  rédiger 
les  actes  sur  ces  notes.  Cette  nouvelle  rédaction  s'appellait 
complectio  contractas. 

Les  empereurs  Honorius  et  Arcadius  érigèrent  les  fonc- 
tions des  notaires  en  charges  publiques,  que  tout  citoyen 
lettré  devait  exercer  gratuitement  à  son  tour. 

L'envahissement  de  la  Gaule  belgique  par  les  barbares, 
fit  disparaître,  chez  nous,  l'institution  du  notarial,  jus- 
qu'en 803,  que  Charlemagne  le  rétablit. 

Les  Belges ,  à  l'exception  de  ceux  qui  habitaient  les 
bords  du  Rhin  et  de  la  Moselle,  ne  connaissaient  de  con- 
tra ts  que  celui  de  \ échange. 

Les  Germains  ignoraient  l'usage  de  l'argent  monnayé. 
Ils  traitaient  verbalement;  mais  ils  assuraient  leurs  enga- 
gements personnels  et  mobiliers  par  des  signes  symboli- 
ques, soit  pour  les  garantir,  soit  pour  les  consommer.  Leur 
parole  était  inviolable,  ils  subissaient  la  mort  plutôt  que 
de  la  fausser;  mais  une  fois  fixés  dans  la  Gaule  belgique, 
et  vivant  au  milieu  des  Romains ,  ils  n'y  rencontrèrent 
guères  une  loyauté  réciproque,  et  sentant  le  besoin  d'en 
assurer  l'exécution,  ils  adoptèrent  l'usage  d'écrire  leurs 
conventions,  comme  les  autres  habitants  des  Gaules. 

Agathias  nous  apprend  que  ce  n'est  que  vers  le  VI** 
siècle  de  l'ère  chrétienne,  que  les  Francs  commencèrent 
à  connaitrc  les  contrats  et  qu'ils  les  rédigèrent  par  écrit. 


(  73  ) 

Dans  l'ignorance  de  consacrer  leurs  ftlalions  habituelles 
par  des  actes  écrits,  même  après  qu'ils  eurent  acquis  la 
connaissance  de  la  plupart  des  contrats,  ils  les  rendaient 
exécutoires  par  des  formes  symboliques  :  ainsi ,  pour  faire 
la  délivrance  d'un  fond,  le  vendeur  jcttait  dans  le  giron 
de  l'acheteur  un  gazon;  pour  opérer  une  cession  de  biens 
pour  dettes,  celui  qui  abandonnait  ses  biens  ramassait  une 
poignée  de  poudre ,  qu'il  plaçait  sur  le  seuil  de  la  porte  de 
son  habitation ,  la  face  tournée  vers  l'intérieur  de  sa  mai- 
son; il  la  jcttait  de  la  main  gauche  par-dessus  les  épaules  de 
son  plus  proche  parent.  Après  celte  cérémonie.  Je  cédant  se 
mettait  en  chemise ,  prenait  une  canne  en  main ,  et  sautait 
la  haie  de  son  enclos,  après  avoir  fait  serment  par  douze 
témoins,  qu'il  n  avait  pas  7in  sou  de  plus  qu'il  n'avait  offert. 

Ce  fut  Gharlemagne,  qui  le  premier  investit  les  notaires 
du  pouvoir  d'imprimer  à  leurs  actes  un  caractère  d'auto- 
rité publique. 

Il  limita  leurs  attributions  dans  l'expédition  des  actes 
de  jurisdiclion  volontaire  et  contentieuse.  Dans  un  de  ses 
Capitulaires  de  l'an  805,  il  les  désigne  sous  la  dénomina- 
tion de  jiidices  chartularii ,  et  oblige  les  évêques  et  les 
vassaux  de  la  couronne  d'avoir  chacun  un  judex  chartu- 
larius^  mais  ses  Capitulaires  ne  furent  point  exécutés,  et 
après  sa  mort ,  la  Belgique  replongée  dans  les  ténèbres  de 
la  barbarie ,  oublia  les  projets  de  réforme  conçus  par  ce 
grand  prince. 

Sous  les  règnes  de  nos  souverains  particuliers,  les  prin- 
ces, les  nobles  et  les  hommes  libres  remettaient  leurs  actes 
de  vente  ,  de  donation  et  autres  sur  les  autels,  où  un  prê- 
tre venait  les  prendre  et  les  déposait  ensuite  dans  les 
archives  de  l'église. 

Ces  contrats  étaient  alors  rédigés  par  les  moines,  qui 
exerçaient  à  la  fois  les  fonctions  de  notaire  et  d'avocat. 
On  en  assurait   l'exéculion  par  des  signes  symboliques, 


(  74  ) 

tels  qu'une  bible,  un  chapeau,  un  cheveu ,  un  gazon  ,  etc., 
qu'on  conservait  dans  les  archives  des  églises  avec  le  plus 
grand  soin. 

Ducange  nous  apprend  qu'on  les  attachait  même  à 
l'acte,  et  qu'on  les  cachait  en  cas  de  danger,  pour  qu'un 
tiers  ne  put  s'en  emparer.  Au  moyen-âge,  c'était  dans 
une  église,  un  monastère  ou  une  abbaye,  que  les  contrac- 
tants se  rendaient  pour  y  passer  un  acte;  le  prêtre,  après 
sa  rédaction,  le  transcrivait  sur  un  livre  d'église  et  en 
déposait  ensuite  l'original  dans  les  archives  de  la  maison, 
pour  les  mettre  à  l'abri  des  ravages  des  guerres  intestines. 
Il  y  avait  dans  chaque  église,  monastère  ou  abbaye  un 
garde  d'archives,  qui  était  en  même  temps  trésorier  et 
secrétaire  :  une  grande  considération  était  attachée  à  ces 
fonctions;  il  délivrait  en  son  nom  les  expéditions  des  actes 
dont  la  amservation  lui  était  confiée.  Il  ne  signait  pas  de 
son  nom,  comme  aujourd'hui,  les  actes  originaux,  ni 
leurs  expéditions;  mais  y  apposait  seulement  le  signe  de 
la  croix ,  et  un  sceau  ou  un  cachet  particulier  en  cire. 

Louis  ÏX,  roi  de  France,  fut  le  premier  législateur  qui 
établit  l'uniformité  de  la  profession  des  notaires  et  qui 
régla  leurs  attributions.  Aussi  nos  cours  et  conseils  sou- 
verains s'empressèrent,  lors  de  leur  érection,  à  prendre 
pour  base  de  l'institution  du  notariat,  les  ordonnances 
de  Louis  IX. 

Dès  le  XI"  siècle,  on  rencontre  en  Belgique  des  officiers 
publics,  chargés  de  recevoir  les  actes  des  citoyens;  mais  ils 
n'avaient  aucun  caractère  d'autorité  publique.  Ils  étaient, 
pour  îa  plupart,  attachés  aux  cours  des  nos  princes,  où  ils 
remplissaient  en  même  temps  les  fonctions  de  notaires  et 
de  secrétaires  intimes  (1). 

Une  instruction  pour  le  conseil  de  Flandre ,  en  date  du 

(1)  Ces  officiers  étaient  alors  presque  tous  des  moines. 


(  75  ) 

J7  août  1409 ,  nous  apprend  que  Maître  Guyol  de  Boge 
est  classé  comme  notaire  parmi  les  membres  du  même 
conseil,  et  qu'il  y  est  allaché  comme  substitut  du  cliance- 
!ii;r  de  Flandre  {advicem  cance/hrii). 

Robert  I,  comte  de  Flandre,  investit,  en  1089,  son  chan- 
relier  (1)  dos  fonctions  de  maître  des  notaires  du  comte. 
Le  titre  de  chancelier  de  Flandre  était  attaché  à  perpétuité 
à  la  prévôté  de  S'-Donat  à  Bruges;  mais,  en  1560,  il  fut 
réuni  au  nouvel  évéché  de  Bruges ,  par  Pie  IV  (2). 

Le  grand  conseil  de  Malines ,  et  les  autres  cours  des  pro- 
vinces belgiques  admirent  aussi ,  dès  leur  érection  ,  des 
notaires  parmi  leurs  membres ,  et  les  assujettirent  aux 
règlements  de  Louis  IX. 

Les  notaires,  reçus  à  une  cour  provinciale,  avaient  le 
droit  d'instrumenter  dans  tout  son  ressort.  Ils  pouvaient 
même  avoir  deux  résidences.  Ils  exerçaient  souvent  en 
même  temps  les  fonctions  de  notaire  et  de  procureur. 

Personne  ne  pouvait  être  nommé  notaire  s'il  n'était  âgé 
de  vingt-cinq  ans,  bon  catholique,  et  s'il  n'avait  travaillé 
j)endaiit  plusieurs  années  chez  un  notaire.  L'aspirant  qui 
venait  de  recevoir  sa  provision  du  souverain,  était  tenu, 
avant  d'entrer  en  fonctions,  de  prêter  serment  à  la  cour 
dans  le  ressort  de  laquelle  il  allait  instrumenter. 

A  Malines,  à  Namur,  à  Mons ,  à  Luxembourg  et  à 
Bruxelles ,  c'étaient  les  greffiers  des  cours  où  ils  élaienl 
admis,  qui  devaient  présider  leurs  réunions,  et  légaliser 
leiirs  signatures  ;  celte  légalisation  n'était  nécessaire  que 
lorsqu'on  devait  se  servir  de  leurs  actes  dans  le  ressort 
d'une  autre  cour.  —  Sous  l'ancien  régime,  pour  qu'un 

(1)  Cancellarium  nostrura  et  omnium  successorum  nostrorum....  per- 
Itetuo  constituitiir,  ciquc  magisterium  meorum  notariorum  et  caj)pel- 
tionini,  et  omnium  clericorum  in  curia  comilis  scrvientium  iiotestatem 
foncedimus.  (Wiraei,  tom.  I,  pag.  359). 

(2)  MiRAEi .  tom.  I ,  pa^.  187. 


{  73  ) 

acte  fùl  valable ,  il  devait  être  passé  en  présence  de  deux 
lémuins,  signé  parles  contractants,  les  témoins  et  le  notaire. 

Les  parties  contractantes  pouvaient  signer  l'acte,  en  y 
apposant  une  croix;  mais  les  notaires  et  les  témoins  ne 
le  pouvaient  pas,  sous  peine  de  nullité. 

Les  témoins  devaient  être ,  pour  ne  point  entraîner  la 
nullité  de  l'acte  auquel  ils  auraient  assisté,  âgés  de  vingt- 
trois  ans  accomplis  et  bons  catholiques. 

Le  fisc  s'était  emparé  de  ces  places  et  en  avait  fait  une 
branche  de  finances.  Un  notaire  avait-il  rendu  le  dernier 
soupir ,  on -mettait  en  quelque  sorte  sa  place  à  l'encan,  et 
on  la  vendait  au  i^lus  offrant.  Telle  était  la  déplorable  JM)- 
silion  où  par  leur  cupidité,  les  Espagnols,  et  ensuite  les 
Autrichiens,  avaient  mis  l'institution  du  notariat. 

L'électeur  de  Bavière,  ayant,  en  1704,  besoin  d'argent , 
supprima  par  un  édit  tous  les  notaires  et  en  créa  des  nou- 
veaux, à  cAar^e  de  finances.  Il  institua  en  titre  de  propriété, 
avec  défenses  de  tous  hommes  de  fiefs ,  aux  bourgmestres 
et  échevins  des  municipalités,  de  recevoir  à  l'avenir  des 
contrats,  nonobstant  les  dispositions  des  coutumes  ,  qui  le 
leur  permettaient. 

Cet  édit,  aussi  injuste  qu'inconstitutionnel,  fut  rapporté 
le  28  septembre  1706. 

Un  autre  édit,  du  10  décembre  1728  ,  établit  le  tahel- 
lionage ,  qui  n'a  pu  se  maintenir  qu'en  quelques-unes  de 
nos  provinces. 

Le  gouvernement  ne  put  même  jamais  le  faire  exécuter 
en  Flandre;  et  les  notaires,  ainsi  que  les  cours  féodales, 
les  magistrats  des  villes  et  les  gens  de  loi  des  campagnes , 
furent  réintégrés  dans  leurs  fonctions  de  recevoir  et  de 
garder  tous  les  actes,  conformément  aux  coutumes  et  aux 
dénombrements  des  seigneuries. 

Quelques  seigneurs  justiciers  de  villages  nommaient 
aussi  des  notaires  ;  mais  ceux-ci  ne  pouvaient  exercer  que 


(77  ) 

dans  l'étendue  seulement  de  la  justice  qui  les  avait  éta- 
blis. Il  n'existait  aucune  communauté  entre  eux,  et  ils 
n'étaient  soumis  qu'aux  seigneurs  qui  les  avaient  nommés 
et  à  leurs  tribunaux  particuliers. 

Les  notaires  apostoliques  avaient  été  principalement 
institués  pour  la  prise  de  possession  des  bénéfices  et  des 
autres  actes  ecclésiastiques.  Ces  charges  étaient  exercées 
par  des  hommes  qui  ne  faisaient  aucune  profession  du 
notariat  ordinaire  ;  cependant  ils  en  usurpaient  souvent 
les  fonctions ,  ce  qui  donnait  lieu  à  de  fréquentes  con- 
testations entre  eux  et  les  notaires.  Ils  n'étaient  soumis 
à  aucune  discipline  et  ne  connaissaient  point  d'autorité 
supérieure  pour  leur  régime  ;  mais  ils  furent  obligés,  sous 
Joseph  II  (1785),  de  soumettre  leur  nomination  au  placet 
roval. 

En  cet  état ,  est  intervenue  la  loi  du  29  septembre  et 
6  octobre  1791 ,  qui  a  supprimé  les  notaires  royaux  et  les 
autres,  ainsi  que  la  'vénalité  et  l'hérédité  des  offices.  Cette 
loi,  rendue  exécutoire  en  Belgique  par  la  réunion  de 
celle-ci  à  la  France  ,  est  la  première  qui  ait  formé  de  tou- 
tes les  classes  de  notaires  un  corps,  sous  la  dénomination 
de  notaires  publics  ;  mais  elle  était  encore  imparfaite  et 
ne  reçut  son  entière  exécution  que  par  la  promulgation 
de  la  loi  du  25  venlôse  an  XI,  qui  régit  l'institution  ac- 
tuelle du  notariat. 

HiLàiRE  Du  Trieu. 


(  78) 


SUR  * 

LA  DOMINATION  FRANÇAISE  EN  BELGIQUE. 


1792  —  1798. 


=fS>^Jc 


Le  trop  fameux  baron  prussien  CIoolz  qui ,  dans  la  révo- 
lution française,  changea  son  nom  de  baptême  contre  celui 
du  philosophe  scythe  Anacharsis,  et  s'intitula  modestement 
Y  Orateur  du  genre  humain,  envoya,  en  1792,  à  Dumou- 
rier,  conquérant  de  la  Belgique,  l'adresse  suivante  : 

A  Duniourier,  vainqueur  des  Prussiens ,  des  ffessois,  des 
Autrichiens  et  autres  rebelles. 

Général  du  genre  humain  ! 
L'irlandais  Ward  et  le  prussien  Gerresheim  sont  animés 
d'un  zèle  révolutionnaire.  Leur  bravoure  égale  la  vôtre,  et 
leurs  talents  dirigés  par  votre  génie,  seront  funestes  à  la 
cause  des  rois.  Amant  de  la  victoire,  vous  allez  engendrer 
les  départements  de  l'Escaut,  de  la  Lys,  de  la  Meuse  infé- 
rieure, de  la  Moselle  inférieure,  de  Tlssel,  des  Bouches-du- 
Rliin,  etc.  C'est  ce  que  vous  souhaite  l'orateur  du  genre 
humain. 

Signé,  A>A.GHARsis  Clootz. 

Le  pauvre  orateur  du  genre  humain  fut  proscrit  en  1794, 
par  la  faction  Robespierrrc,  comme  appartenant  à  celle 


(  79  ) 

des  Héberlistes,  ultra-révolutionnaires  et  athées.  Il  périt 
sur  l'échafaud  le  23  mars  1794.  En  recevant  son  arrêt  de 
mort,  Anacharsis  Clootz  interjeta  appel  au  tribunal  du 
genre  humain  (1). 

(1)  J.  B.  Clootz,  baron  prussien,  connu  sous  le  nom  d'Anacharsis 
Clootz  ,  naquit  à  Clèves  en  1755  et  devint  possesseur  d'une  fortune  consi- 
dérable, qu'il  dissipa  en  peu  de  temps  par  son  inconduite.  Il  était  neveu  du 
célèbre  De  Pauw,  chanoine  de  Xantcnct  auteur  des  Considérations phi- 
losopliiques  sur  les  Egyptiens,  sitr  les  Grecs  et  sur  les  Américains.  Un 
amour  fanatique  de  la  liberté  et  cette  métaphysique  subtile  et  nébuleuse 
qui  plait  tant  aux  Allemands ,  ébranlèrent  fortement  son  cerveau.  Long- 
temps avant  la  révolution  française,  dont  il  devint  un  des  principaux  cory- 
phées, il  avait  donné  de  nombreux  signes  de  folie.  Le  19  juin  1790,  Clootz 
se  présenta  à  la  barre  de  TAssemblee  nationale,  suivi  de  plusieurs  croche- 
tcurs  ramassés  dans  les  ruisseaux  de  Paris  et  portant  le  costume  de 
différents  peuples  des  quatre  parties  du  globe,  qu'il  eut  l'impudence 
d'annoncer  comme  députés  «le  toutes  les  nations,  et  il  prit  la  qualité 
d'orateur  du  genre  humain.  Cette  misérable  farce  .  digne  du  Mardi-gras 
et  que  son  auteur  qualifia  d  ambassade  du  genre  humain  ,  fut  lionora- 
blement  accueillie  par  l'assemblée  et  obtint  les  honneurs  de  la  séance. 
Le  22  janvier  179'2,  Clootz  adressa  à  l'assemblée  législative  une  lettre 
qui  commençait  ainsi  :  «  L'orateur  du  genre  humain  aux  législateurs  du 
genre  humain  ,  salut!  »  Le  12  août,  notre  maitre-fou  vint  féUciter  l'as- 
semblée sur  la  journée  du  10,  dans  laquelle  le  faible  et  bton  Louis  XVI 
avait  été  expulsé  de  son  palais  par  une  horde  de  bandits,  nomma  le  roi 
de  Prusse  le  Sardanaple  du  Nord  et  vomit  les  plus  dégoûtantes  injures 
contre  l'impératrice  de  Russie  et  l'infortunée  Marie-Antoinette.  Le  27 
août,  il  revint  supplier  l'assemblée  de  mettre  à  prix  la  tête  du  monarque 
prussien,  du  duc  deBrunsv\ick,  et  célébra  la  bravoure  deBrutus  Anckar- 
strôm,  assassin  de  Gustave  III .  roi  de  Suède.  Il  prononça  à  ce  sujet  un 
discours  où  il  dit  :  «  Charles  I^"'  eut  un  successeur  :  Louis  XVI  n'en  aura 
pas.  Vous  savez  apprécier  les  têtes  des  philosophes ,  il  vous  reste  de  met- 
tre à  prix  celles  des  tyrans  ;  —  mon  cœur  est  français ,  mon  ame  est 
sans-culotte.  »  Il  se  déclara  en  même  temps  l'ennemi  personnel  de  Jésus- 
Christ.  Anacharsis  Clootz  fut  élu  député  à  la  Convention,  où  il  vota  la 
mort  du  roi ,  au  nom  du  genre  humain  ,  et  il  ajouta  :  Je  condamne  pa- 
reillement à  mort  l'iiifàme  Frédéric-Guillaume  (le  roi  de  Prusse).  Dans 
un  ouvrage  publié  en  1792,  Clootz  pose  en  principe  «  que  le  peuple  est 
le  souverain  du  monde:  ([ue  ,  de  plus  ,  il  est  Dieu  ;  que  la  France  est  le 
berceau  et  le  point  de  ralliement  du  peuple-Dieu;  que  les  sots  seuls 
croient  à  un  Être  sin>rême,  etc. ,  etc.  »  Clootz,  devenu  suspect  à  Robes- 


(  80  ) 


Le  Conseil  exécutif  provisoire  de  la  répubique  française 
prit,  le  6  novembre  1792,  l'arrêlé  révolutionnaire  sui- 
vant, qui  anéantissait  l'article  du  traité  de  Weslplialie  par 
lequel  la  république  des  Provinces-Unies  s'était  assuré  le 
monopole  de  la  navigation  sur  l'Escaut  et  la  Meuse  : 

a  Le  Conseil  exécutif,  délibérant  sur  la  conduite  des 
armées  françaises  dans  le  pays  qu'elles  occupent,  spé- 
cialement dans  la  Belgique  ,  un  de  ses  membres  a 
observé  : 

»  1"  Que  les  gênes  ou  les  entraves,  que  jusqu'à  présent  la 
navigation  et  le  commerce  ont  souffertes  tant  sur  l'Escaut 
que  sur  la  Meuse,  sont  directement  contraires  aux  principes 
fondamentaux  du  droit  naturel,  que  tous  les  Français  ont 
juré  de  maintenir. 

5)2''  Que  le  cours  des  fleuves  est  la  propriété  commune 
et  iniiliénable  des  habitants  de  toutes  les  contrées,  arrosées 
par  leurs  eaux;  qu'une  nation  ne  saurait,  sans  injustice, 
prétendre  au  droit  d'occuper  exclusivement  le  canal  d'une 
rivière,  et  d'empêcher  que  les  peuples  voisins  qui  bordent 
les  rivages  supérieurs  ne  jouissent  du  même  avantage  ; 
qu'un  tel  droit  est  un  reste  des  servitudes  féodales,  ou  du 
moins  un  monopole  odieux  qui  n'a  pu  être  établi  ({ue  par 
la  force,  ni  consenti  que  par  l'impuissance  ;  qu'il  est  consé- 


picrrc,  et  traduit  devant  le  tribunal  révolutionnaire  comme  faisant  partie 
delà  faction  des  athées,  fut  condamné  à  mort  le  23  mars  1794.  En  allant  au 
supplice,  il  apostropha  Hébert  pour  rcmi)ôcher  de  prendre  des  sentiments 
rcligf'cux  dans  ses  derniers  moments.  Il  demanda  à  être  exécuté  le  der- 
nier, (i  afin,  dit-il,  d'avoir  le  temps  d'établir  certains  principes  pendant 
que  l'on  ferait  tondjcr  les  têtes  de  ses  camarades.  »  La  mort  d'Anacbarsis 
Clootz  est  un  des  crinjes  de  la  révolution  française.  L'humanité  réclamait 
que  l'orateur  du  genre  humain  fût  cnchainé  comme  fou  furieux  et  finit 
sa  carrière  dans  un  des  cabanons  de  Bicêtrc. 


(81  ) 

quemmenl  révocable  dans  tous  les  moments,  et  malgré 
toutes  les  conventions,  parce  que  la  nature  ne  reconnaît 
pas  plus  de  peuples  que  d'individus  privilégiés,  et  que  les 
droits  de  l'homme  sont  à  jamais  imprescriptibles. 

»  3"  Que  la  gloire  de  la  république  française  veut  que 
partout  où  s'étend  la  protection  de  ses  armées,  la  liberté 
soit  rétablie  et  la  tyrannie  renversée. 

»4°  Que  lorsqu'aux  avantages  procurés  au  peuple  belge 
par  les  armées  françaises  (!),  se  joindra  la  navigation  bbre 
des  fleuves  et  l'affranchissement  du  commerce  de  ces  pro- 
vinces, non-seulement  ce  peuple  n'aura  plus  lieu  de  crain- 
dre pour  sa  propre  indépendance,  ni  de  douter  du  désin- 
téressement qui  dirige  la  république  {!!!),  mais  même 
que  les  nations  de  l'Europe  ne  pourront  dès-lors  refuser 
de  reconnaître  que  la  destruction  de  toutes  les  tyrannies 
et  le  triomphe  des  droits  de  l' hotn?ne  sonl  la  seule  ambition 
du  peuple  français. 

»Le  conseil  frappé  de  ces  puissantes  considérations,  ar- 
rête :  que  le  général  commandant  en  chef  les  armées  fran- 
çaises dans  l'expédition  de  la  Belgique,  sera  tenu  de  prendre 
les  mesures  les  plus  précises  et  d'employer  tous  les  moyens 
qui  sont  à  sa  disposition,  pour  assurer  la  liberté  de  la 
navigation  et  des  transports  dans  tout  le  cours  de  l'Escaut 
et  de  la  Meuse.  » 

Ce  décret  bienfaisant  resta  long-temps  illusoire,  comme 
tous  les  décrets  de  la  Convention  et  du  Directoire  qui  n'or- 
donnaient point  quelqu'acte  de  spoliation  et  de  tyrannie, 
car  alors  les  agents  de  l'autorité  ne  se  montraient  que 
trop  zélés  pour  leur  donner  l'exécution  la  plus  prompte 
et  la  plus  complète.  Lorsque  Bonaparte,  premier  consul, 
visita,  en  1803,  la  ville  d'Anvers,  il  répondit  aux  discours 
d'apparat  que  lui  adressèrent  le  conseil-général  du  dépar- 
tement et  celui  de  l'arrondissement  :  a  J'ai  parcouru  votre 
ville,  elle  ne  présente  que  des  décombres  et  des  ruines: 

6 


(  82  ) 

elle  ressemble  à  peine  à  une  ville  européenne;  j'ai  cru  me 
trouver  ce  matin  dans  une  ville  d'Afrique.  Tout  est  à  y 
faire;  port,  quai,  bassin  dechouage...  il  faut  enfin  qu'elle 
mette  à  profit  les  avantages  immenses  de  sa  centralité 
entre  le  Nord  et  le  Midi,  de  son  (leuve  magnifique  et  pro- 
fond ,  et  qu'elle  devienne  la  cinquième  ou  la  sixième  ville 
commerçante  du  monde....  On  porte  à  20  millions  les  fonds 
nécessaires  pour  la  confection  de  ces  ouvrages  :  la  guerre 
ne  nous  permet  pas  de  vous  les  accorder,  mais  dès  à  pré- 
sent nous  ferons  ce  que  nous  pourrons  ;  c'est  à  la  ville  et 
au  commerce  à  nous  seconder  au  moins  par  des  avances.... 
il  faut  marcher  avec  le  temps  ;  il  ne  dépend  pas  toujours 
de  nous  d'accélérer  sa  marche.  » 


Après  notre  révolution  de  1789  qui  eut  une  si  triste  fin, 
l'empereur  Léopold,  faisant  droit  à  tous  les  griefs  élevés 
par  les  Belges  contre  son  prédécesseur,  les  rétablit  dans 
la  plénitude  de  leurs  anciens  droits  et  privilèges.  Mais  tous 
ses  efforts  pour  ramener  avec  l'oubli  du  passé,  la  paix  et 
la  concorde  en  Belgique ,  ne  parvinrent  point  à  triom- 
pher des  passions  et  de  la'haine  des  partis.  La  prudence  et 
la  modération  qui  ont  si  souvent  manqué  aux  Belges,  leur 
faillirent  encore  dans  cette  occasion.  La  première  invasion 
des  Français  même ,  pendant  laquelle  la  Belgique  gémit 
sous   la   plus   horrible  tyrannie    qui   apprit  aux  Belges 
le  triste  sort  que  leur  réservaient  leurs  libérateurs  répu- 
blicains, ne  fut  point  capable  d'inspirer  des  principes  plus 
sages  aux  principaux  moteurs  des  troubles  de  1787.  La 
lettre  suivante,  écrite  par  le  prince  Charles  d'Autriche, 
gouverneur-général  des  Pays-Bas,  aux  Etats  de  Brabant, 
offre  à  ce  sujet  un  document  assez  curieux.  Nous  la  trans- 
crivons sur  l'original  encore  inédit: 


(83  ) 

«Charles-Louis,  archiduc  d'Autriche,  prince  de  Hongrie 
et  de  Bohème,  etc.,  gouverneur  et  capitaine-général  des 
Pays-Bas ,  etc. ,  etc. ,  etc. 

»Très  révérend,  révérends  pères  en  Dieu,  nobles  chers 
et  bien  amés.  Le  comte  de  Limminghe,  l'un  d'entre  vos 
députés,  s'étant  permis  en  notre  présence,  dans  une  jointe 
que  nous  avions  rassemblée  en  notre  palais,  à  l'interven- 
tion de  vos  députés,  le  propos  le  plus  révoltant  et  le  plus 
contraire  aux  sentimens  que  tout  bon  sujet  de  Sa  Majesté 
doit  avoir,  puisqu'il  y  a  dit  qii  il  préférait  de  ravoir  en  ce 
pays  les  carmagnoles  aux  vexations  actuelles  ^  nous  vous 
faisons  la  présente  pour  vous  dire  que  ne  voulant  plus 
nous  exposer  à  être  témoins  de  propos  aussi  indignes  et 
d'ailleurs  si  peu  compatibles  avec  la  reconnoissance  qui 
devoit  être  si  générale  de  tout  ce  que  Sa  Majesté  a  fait  de- 
puis son  avènement,  pour  le  bien  de  ce  pays  et  de  votre 
province  en  particulier,  ainsi  qu'avec  le  respect  qui  nous 
est  dû,  nous  désirons  que  vous  arrangiez  à  l'avenir  les 
députations  que  vous  pourriez  être  dans  le  cas  de  nous 
faire,  de  manière  que  le  comte  de  Limminghe  susdit  n'en 
soit  plus.  Et  comme  nous  sommes  persuadés  que  vos  sen- 
timens sont  absolument  contraires  à  ce  que  ce  député  a 
exprimé ,  nous  vous  prévenons  qu'en  portant  le  fait  à  la 
connoissance  de  l'empereur,  nous  en  avons  fait  l'observa- 
tion à  ce  monarque. 

»  x\  tant,  cher  révérend ,  révérends  pères  en  Dieu ,  nobles, 
chers  et  bien  amés.  Dieu  vous  ait  en  sa  sainte  garde. 


»  Bruxelles,  le  10  août  1793. 


Signé,  Cha.rles-Louis. 


Par  ordonnance  de  S.  A.  R. , 
Signé ,  L.  C.  Van  de  Velde. 


Au  bas  était  écrit  : 

Aux  États  de  Brahant  ou  à  leurs  députés. 


(  84  ) 

En  1794,  M.  de  Metternich,  minisire  plénipotentiaire, 
réunit  les  députés  des  différentes  provinces  de  la  Belgique, 
et  les  exhorta  de  la  manière  la  plus  pressante  à  joindre 
leurs  efforts  à  ceux  de  l'empereur  pour  triompher  de  l'en- 
nemi ,  mais  ses  propositions  furent  accueillies  avec  la  plus 
grande  froideur.  Dès-lors  l'empereur,  vivement  irrité  contre 
ses  sujets  belges,  sur  le  dévouement  desquels  il  avait  cru 
pouvoir  compter,  résolut  d'abandonner  la  Belgique.  La 
perte  de  la  bataille  de  Fleurus,  où  l'armée  autrichienne 
n'avait  opposé  qu'une  molle  résistance,  lui  en  offrit 
bientôt  l'occasion.  Ce  qui  prouve  que  cette  retraite  des 
Autrichiens  fut  en  quelque  sorte  volontaire  et  préparée  de 
longue  main,  c'est  que  depuis  plusieurs  mois  on  s'occupait 
sans  relâche  à  faire  transporter  à  Vienne  les  archives  de 
l'état,  les  objets  d'art  et  tous  les  effets  appartenant  au 
gouvernement. 


Pour  preuve  de  leur  désintéressement  et  que  l'unique 
but  des  républicains  français  était  de  ramener  l'âge  d'or 
chez  tous  les  peuples,  que  les  armes  de  la  république  ve- 
naient affranchir  de  la  tyrannie  des  despotes,  des  nobles 
et  des  prêtres,  nos  libérateurs,  dès  leur  seconde  entrée  en 
Belgique,  en  1794,  commencèrent  par  frapper  dix-huit 
villes  de  cette  contrée  d'une  imposition  de  plus  de  soixante 
millions  de  livres  (602,908,75) ,  somme  sextuple  de  celle 
que  produisaient  annuellement  les  revenus  de  la  Belgique 
entière!  Bruxelles  fut  imposée  à  5,000,000  délivres,  Anvers 
à  10,000,000 ,  Malines  à  2.000,000,  Liere  à  500,000,  Gand 
à  7,000,000,  Audenarde  à  500,000,  Bruges  à  4,000,000, 
Ostende  à  200.000,  Ypres  à  1 ,000,000,  Courtrai  à  300,000, 
Louvain  à  2,000,000 ,  Namur  à  5,000,000 ,  Tournai  à 
4,000,000,  Alost  et  Ninove  à  4,000,000,  Mous  à  1,640,875 
et  Alh  à  150.000  livres. 


(85  ) 


Depuis  la  promulgation  de  la  loi  du  19  fructidor  an  V, 
loi  qui  autorisait  le  Directoire  exécutif  à  faire  déporter  tous 
les  prêtres  insermentés,  jusqu'au  18  brumaire  an  VIII, 
9422  arrêtés  de  déportation  furent  lancés  contre  les  prêtres 
de  la  Belgique  seule.  Des  ecclésiastiques  assermentés  ou 
mariés  même,  des  paysans  pères  d'une  nombreuse  famille, 
dont  tout  le  crime  était  d'avoir  chanté  au  lutrin ,  des  cui- 
siniers ,  des  jardiniers ,  des  brasseurs,  des  apothicaires 
attachés  à  quelque  corporation  religieuse,  etc.,  etc.,  furent 
enveloppés  dans  celte  proscription.  On  était  emprisonné 
pour  avoir  fermé  boutique  le  dimanche  ou  pour  l'avoir 
tenu  ouverte  le  jour  de  décadi.  Le  bel  âge  d'or,  le  gouver- 
nement libéral ,  tolérant  et  éclairé  que  celui  de  la  répu- 
blique française ,  qui  heureusement  ne  trouve  plus  guère 
aujourd'hui  de  preneurs  que  parmi  les  ignorants  ou  les 
hommes  pervers. 


Le  Directoire  porta  l'arrêté  suivant ,  en  date  du  18  ven- 
démiaire an  VI  (1797)  :  «  Le  Directoire  exécutif,  ouï  le 
rapport  du  ministre  de  la  police  générale;  considérant 
que  Jean-Henri  Franckenberg ,  se  disant  archevêque  de 
Malines,  dans  le  département  des  Deux-Nèthes,  a  refusé, 
tant  en  son  nom  qu'en  celui  de  son  prétendu  clergé ,  de  se 
conformer  à  l'article  25  de  la  loi  du  19  fructidor  dernier, 
relatif  au  serment  à  prêter  par  les  ministres  du  culte  j 
considérant  que  son  refus  est  fondé  sur  une  doctrine  sub- 
vertive  des  bases  fondamentales  de  toute  association  poli- 
tique, en  ce  qu'il  méconnaît  la  souveraineté  du  peuple, 
et  que  par  son  exemple,  il  a  entraîné  à  la  révolte  contre 
les  lois  tous  les  prêtres  de  son  arrondissement  : 

»  Arrête,  en  vertu  de  l'article  24  de  la  loi  du  19  fructidor 
dernier  : 


(  86  ) 

»  Art.  I.  Le  nommé  Jean-Henri  de  Franckenberg,  se  disant 
archevêque  de  Malines,  sera  mis  sur-le-champ  en  arresta- 
tion et  déporté. 

»  II,  Les  scellés  seront  apposés  sur  ses  papiers  :  ceux  qui 
paraîtront  mériter  quelque  attention,  en  seront  distraits 
pour  être  remis  entre  les  mains  du  juge-de-paix  de  l'ar- 
rondissement, qui  en  dressera  inventaire  et  les  remettra  de 
suite  au  ministre  de  la  police  générale, 

»III,  Le  ministre  de  la  police  générale  est  chargé  de 
l'exécution  du  présent  arrêté. 

Pour  expédition  conforme , 

Le  président  du  Directoire  exécutif, 

Signé,  L,  M.  Reveilliere-Lepaux, 

En  vertu  de  ce  décret  inique,  le  cardinal-archevêque 
fut  arrêté  et  conduit  à  Bruxelles  le  20  octobre  1797.  Il 
eut  pour  prison  la  ci-devant  chambre  des  comptes,  d'où  il 
fut  déporté ,  le  23  octobre,  à  Cologne, 

Dans  une  lettre  que  l'archevêque  écrivit  au  commis- 
saire du  Directoire  près  de  l'administration  du  canton  de 
Malines,  pour  rendre  compte  des  motifs  de  son  refus  de 
faire  le  serment  exigé  il  s'exprima  avec  beaucoup  de 
dignité  et  de  sagesse:  «  Citoyen  commissaire,  disait-il, 
la  religion  catholique,  apostolique  et  romaine  que  je  pro- 
fesse de  tout  mon  cœur,  et  dont  je  suis  un  des  premiers 
pasteurs,  obligé  de  donner  l'exemple  aux  autres,  me  dé- 
fend positivement  de  prêter  un  serment  de  haine,  soit  que 
cette  haine  se  rapporte  à  la  personne  d'un  roi ,  soit  qu'elle 
regarde  l'état  delà  royauté  même.  Dans  le  premier  cas, 
nous  devons  aimer  notre  prochain,  quoiqu'il  nous  fasse 
le  plus  grand  mal.  Dans  le  second  cas,  la  royauté  étant 
bonne  en  elle-même  et  établie  par  Dieu  même,  elle  ne 
peut  être  un  objet  de  haine.  Il  ne  nous  est  donc  pas  per- 
mis de  haïr  ni  l'un  ni  l'autre,  sans  renoncer  aux  principes 


(87) 

du  christianisme,  moins  encore  de  prendre  Dieu  à  témoin 
d'une  action  qu'il  nous  défend  rigoureusement  sous  des 
peines  éternelles.  Cette  impossibilité,  dans  laquelle  nous 
nous  trouvons  de  pouvoir  remplir  ce  qu'on  exige  de  nous 
dans  la  présente  circonstance,  ne  doit  aucunement  rendre 
notre  fidélité  suspecte.  Car  je  me  flatte  que  vous  voudrez 
bien  faire  connaître  au  gouvernement ,  que  ni  moi  ni 
aucun  membre  de  mon  clergé,  n'aurons  la  moindre  diffi- 
culté de  promettre  à  la  republique ,  même  sous  serment , 
s'il  le  faut,  de  ne  jamais  coopérer  ni  directement  ni  indi- 
rectement au  rétablissement  de  la  royauté  en  France,  et 
que  ledit  gouvernement  peut  être  entièrement  assuré  qu'il 
n'aura  jamais  des  infractions  à  punir  dans  les  prêtres  et 
ne  les  trouvera  en-deça  de  ses  vues  que  lorsque  la  con- 
stitution et  ses  lois  ne  se  trouveront  pas  conciliables  avec 
les  lois  de  Dieu  et  les  préceptes  de  l'Évangile.  Nous  avons 
donné  et  donnerons  pour  tout  le  reste  des  preuves  éviden- 
tes de  notre  soumission  aux  puissances  auxquelles  la  divine 
Providence  nous  a  soumis;  et  le  clergé  belgique  s'est  si 
sagement  conduit  jusqu'à  cette  heure,  en  souffrant  avec 
patience  la  perte  de  tous  ses  biens,  qu'on  n'a  guères  jus- 
qu'ici trouvé  de  quoi  faire  des  plaintes  contre  lui.  Salut 
et  fraternité.  » 

Signé ,  Jean-Henri  Frangkenberg  , 
Archevêque  de  Maliîtes. 


Beaucoup  de  personnes  se  souviennent  qu'il  n'était 
bruit,  en  1797,  que  de  cette  prétendue  énergumène  qui 
fut  publiquement  exorcisée  dans  l'église  de  Montaigu.  Le 
docteur  ô^ Huvelcmge ,  recteur  de  l'université  de  Louvain, 
et  les  pères  Kerckhofs  et  Vliegen ,  oratoriens,  eurent  beau 
couvrir  de  reliques  la  prétendue  possédée,  l'inonder  de 
flots  d'eau  bénite  et  réciter  le  nec  te  lateat ,  satané ,  exor- 


(  88) 

ciso  te  immunde  spiritus,  adjuro  te ,  serpens  antique, 
draco  nequissime ,  et  autres  exorcismes  du  pastoral  du 
diocèse  de  Malines,  ils  y  perdirent  leur  latin,  et  Satan 
aurait  fait  long-temps  la  sourde  oreille  si  l'arrêté  suivant 
ne  fut  venu  le  mettre  à  la  raison  : 

a  Le  Directoire  exécutif,  après  avoir  entendu  le  rapport 
du  ministre  de  la  police  générale  ; 

»  Vu  différentes  pièces ,  desquelles  il  résulte  : 

»  Qu'une  fille,  prétendue  possédée  du  diable,  a  été  ame- 
née de  Louvain  à  la  chapelle  de  Montaigu ,  département 
de  laDyle,  pour  y  être  exorcisée;  que  cette  scène  ridicule 
a  été  la  cause  de  rassemblements,  dans  lesquels  les  lois 
et  la  morale  publique  ont  été  impudemment  violées. 

»  Que  les  nommés  ^Havelange ,  recteur  de  l'université 
de  Louvain,  Kerckhofs  çX  Miegen,  prêtres  ex-oratoriens , 
ont  été  les  instigateurs  de  cette  jonglerie  scandaleuse; 
qu'ils  se  sont  chargés  du  soin  d'exorciser  cette  fille,  qu'ils 
ont  accompagné  cette  opération  de  mille  momeries  reli- 
gieuses, et  qu'ils  ont  débité  que  celte  fille  ne  survivrait 
que  deux  ou  trois  jours  à  la  sortie  du  diable. 

»  Considérant  que  ces  trois  ex-prêtres,  en  employant  les 
moyens  les  plus  honteux  pour  égarer  le  peuple  et  le  re- 
mettre sous  le  joug  du  fanatisme,  troublent  l'ordre  public 
et  ne  peuvent  être  considérés  que  comme  des  hommes 
très-dangereux ,  arrête  ce  qui  suit  : 

»Les  nommés  d'Havelange,  recteur  de  l'université  de 
Louvain,  Kerckhofs  et  Vliegen,  ex-oratoriens,  seront 
déportés  en  conformité  de  l'article  24  de  la  loi  du  19 
fructidor  dernier. 

j)Le  ministre  de  la  police  est  chargé  de  l'exécution  du 
présent  arrêté. 

Pour  expédition  conforme, 

Le  président  du  Directoire  exécutif, 
Signé,  L.  M.  Revelliere-Lepaux. 


(  89  ) 

Cet  arrêté  était  daté  du  28  vendémiaire  an  VI.  La  possé- 
dée fut  enfermée  comme  folle ,  au  couvent  des  Sœurs- 
Noires  à  Louvaiu.  La  leçon  qu'on  donna  à  Belzébulh  fut 
sévère;  aussi  ne  sachons-nous  pas  que  depuis  lors  il  se  soit 
encore  hasardé  à  venir  faire  de  l'esclandre  en  Belgique. 


Au  mois  de  prairial  de  l'an  VIII,  la  municipalité  de 
Bruxelles  prit  un  long  et  surtout  un  très-singulier  arrêté, 
relatif  à  l'instruction  publique  et  à  la  suppression  de  tout 
ce  qui  tenait  à  l'ancien  ordre  de  choses,  qui  y  était  qualifié 
de  monstrueux  édifice,  élevé  par  l' ignorance  et  les  préjugés. 
Par  cet  arrêté,  il  fut  enjoint  à  tous  les  instituteurs  et  insti- 
tutrices de  fermer  leurs  classes  les  décadis  et  jours  de 
fêtes  nationales;  de  mettre  entre  les  mains  de  leurs  élèves, 
comme  base  de  la  première  instruction  ,  les  droits  de 
l'homme  et  la  constitution  de  l'an  III  ;  de  ne  se  servir  dans 
leurs  écoles  que  du  titre  de  citoyen  et  de  citoyenne,  et  d'en- 
seigner à  leurs  élèves  la  nouvelle  division  de  l'année 
républicaine.  Il  était  ordonné  aux  commissaires  de  police 
d'arracher  les  affiches  où  l'ancien  calendrier  serait  accolé 
au  nouveau,  et  celles  des  maisons  à  louer  où  se  trouveraient 
les  mots  S'-Remi,  mi-mars,  Noël,  S'-Jean,  etc,  Il  était  de 
même  ordonné  aux  cabaretiers  et  marchands  ayant  des 
enseignes,  portant  des  désignations  telles  que  noms  de 
saints,  cardinaux,  princes,  etc.,  de  les  changer  dans  le  délai 
d'une  décade.  L'usage  des  boulangers  d'annoncer  à  cer- 
tains jours  la  cuisson  de  leur  pain  par  le  son  du  cornet  ou 
autres  instruments  quelconques,  leur  fut  interdit  comme 
rappellant  l'ancien  ordre  des  choses  ;  il  fut  statué  de 
ne  tenir  les  marchés  que  les  primidis,  tridis,  quintidis, 
septidis,  nonidis  de  chaque  décade,  etc.,  etc.  Le  dernier 
article  de  cet  arrêté  ordonne  le  changement  de  noms  de 


(90) 

plusieurs  places,  rues,  hôpitaux  et  établissements  publics. 
Cette  métamorphose  était  des  plus  ingénieuses  ,  et  les 
noms  nouveaux  substitués  aux  anciens  témoignent  du 
bon  sens  et  du  génie  poétique  et  philosophique  des 
membres  de  cette  sage  municipalité.  Le  lecteur  en  jugera 
par  cet  échantillon  : 

PREMIÈRE   SECTION. 


Anciennes  dénominations. 

Rue  Sainte-Anne, 
»     des  Petits  Carmes  , 
»     de  Notre-Seigneur, 
»     des  Minimes , 

de  la  Samaritaine, 
de  N.  D.  de  Grâce, 
d'Enfer, 
du  Paradis  , 
»     de  S'-Pierre ,  près  de  la  porte 
de  Hal , 

Marclié  de  la  Cliapelle, 


» 


Dénominations  républicaines. 

Rue  de  la  Fécondité, 
de  la  Jeunesse, 
de  la  Vieillesse, 
de  rAmitié. 
de  la  Prudence, 
des  Piquets, 
du  Vieux-Conte. 
de  l'Olympe. 


n 
» 
» 
» 
I) 
» 


Rue  des  Bogards , 
»     des  Alexiens , 
du  Curé, 

de  Notre-Seigneur, 
du  Diable, 
de  Saint-Guislain, 
)i     des  Visitandines, 
»     des  Brigittines, 
Grande  rue  des  Capucins , 
Petite  rue  des  Capucins  , 
Rue  du  Sacristain , 
1)     de  Saint-Jacques , 


»     du  Cercueil. 
Marché  de  la  Pourvoyance. 

DEUXIÈME  SECTION. 

Rue  de  J.  J.  Rousseau. 

»  de  la  Révolution. 

»  du  Petit-Coq. 

))  de  Voltaire, 

n  de  la  Malice. 

))  du  Courage. 

H  du  Contrat  social. 

»  du  dix  Août. 

I)  du  Trésorier. 

)  du  Travail. 

I)  de  l'Adjudant. 

»  de  Guillaume  Tell. 


Rue  des  Moines, 
Rempart  des  Moines , 
Rue  des  Sœurs  Noires, 
»     de  N.  D.  du  Sommeil, 
))     de  Sainte-Catherine, 
»     des  Chartreux , 
Place  de  Jéricho  , 


TR0ISIÈ9IE  SECTION. 

Rue  des  Exclus. 
Rempart  Cisalpin. 
Rue  de  IHospitalité. 

))     du  Calendrier  républicain. 

»     du  Commerce. 

»     de  l'Arsenal. 
Place  des  Munitions. 


(91  ) 


QDATRIÈÎIE 

SECTIOPI. 

Rue  du  Nom-Jésus , 

Rue  de  Mucius  Scevola 

»     de  Saint-Roch, 

»     de  rOubli. 

»      du  Samedi , 

»     de  Solon. 

La  rue  du  Curé,  donnant  dans  celle 

du  Quai  aux  Tourbes, 

»     du  Ratteau. 

Celledu  Curé,  près  de  la  rue  Neuve, 

»     du  Copiste. 

Le  cul-de-sac  du  Curé,  dans  la  rue 

du  Pont-Neuf, 

Cul-de-sac  du  Petit-Ho 

Lagranderue  du  Grand-Béguinage,  Rue  de  la  République. 

Treize  autres  rues  de  cette  section  reçurent  le  nom  de 
rues  du  Peuplier,  du  Cyprès,  du  Bouleau,  de  la  Serpette, 
de  la  Ruche,  de  la  Belette,  du  Maronnier,  du  Lillas,  de 
la  Pensée,  de  l'Accacia,  du  Muguet,  du  Sureau. 


CINQUIÈME  SECTION. 

Rue  de  Saint-Pierre,  Rue  de  la  Clef. 

»     de  Saint-Hubert ,  »     du  Chasseur. 

»     des  Capucines ,  »     du  Sans-Souci. 

Petite  rue  des  Dominicains  .  Ruelle  de  la  Démolition. 

Rue  d'Aremberg  ,  Rue  d'Anneessens. 

SIXIÈME  SECTION. 

Montagne  de  Sion ,  Montagne  de  la  Gloire. 

»           de  Sainte-Elisabeth,  »           de  la  Félicité. 

»  des  Oratoires , 

Cul-de-sac  de  Berlaimont, 
Place  de  Sainte-Gudule. 


))  de  la  Philosophie. 

Rue  de  TÉducation. 
Place  du  Beffroi. 


SEPTIÈME  SECTION. 


Rue  de  la  Magdelalne  , 
»     des  Douze-Apôtres , 
))     Terarcken , 
»     de  Saint-Laurent, 
»     Notre-Dame , 
Gance  Saint-Roch, 
Cour  Saint-Roch  , 
Petite  rue  de  la  Magdelaine, 
Rue  des  Paroissiens  , 
Longue  rue  de  l'Écuyer , 
Petite  rue  de  l'Écuyer , 
Rue  de  l'Impératrice , 


Rue  du  Capitole. 

»     de  la  Démocratie. 

»     de  la  Postérité. 

))     des  Droits  de  l'Homme. 

»     de  la  Renommée. 
Ruelle  de  l'Innocence. 
Cour  de  l'Innocence. 
Petite  rue  du  Capitole. 
Rue  des  Amis. 

»     de  la  Réunion. 

»     du  Télégraphe. 

»     des  Républicains. 


(  92  ) 

Rue  de  l'Empereur  ,  Rue  du  Peuple. 

Plaine  de  la  Cour,  Plaine  de  l'Égalité. 

Rue  Royale ,  Rue  de  la  Liberté. 

H     du  Conseil,  »     de  la  Loi. 

n     Ducale ,  »     de  rÉgalitè. 

))     disabelle ,  »     de  la  Ribliothèque 

»     du  Marquis,  »     du  Citoyen. 

Place  de  la  Chancellerie ,  Place  de  la  Vertu. 

HUITIÈME  SECTION. 

Rue  des  Alexiens ,  Rue  de  la  Révolution. 

»     des  Grands  Carmes  ,  »     de  la  Constitution. 

»     de  Bavière,  .  »     de  la  Fraternité. 

Marché  de  Bavière.  Marché  de  la  Fraternité. 


Le  4  thermidor  de  l'an  III,  le  représentant  du  peuple 
près  des  armées  du  Nord  et  de  Sambre-el-Meuse,  Giroust, 
porta  l'arrêté  suivant  : 

tt  Considérant,  que  dans  quelques  communes  les  proces- 
sions hors  de  l'enceinte  des  égHses,  ont  donné  lieu  à  des 
rixes  indécentes  entre  gens  de  différents  cultes, 

»  Arrête  ce  qui  suit  : 

»  Art.  I.  Il  ne  sera  fait  provisoirement  aucune  procession 
hors  de  l'enceinte  des  églises. 

»  II.  Les  commandants  militaires  tiendront  la  main  à  ce 
que  l'ordre  et  la  décence  ne  soient  aucunement  troublés 
dans  l'exercice  du  culte.  Le  culte  devant  s'exercer  dans 
l'intérieur  des  églises,  et  non  dans  les  rues  environantes, 
il  ne  pourra  y  avoir  ni  queues  ni  rassemblements  aux  por- 
tails ,  etc.,  etc.  » 

Quelques  prêtres  à  Bruxelles  ne  s'étant  pas  conformés 
à  cet  arrêté,  le  citoyen  Rouppe,  alors  commissaire  du 
Directoire,  adressa  la  lettre  suivante  aux  curés  de  cette 
commune. 


(93  ) 

Bruxelles,  le  12  germinal,  Tan IV"»' de  la  république 
une  et  indivisible. 

a  Le  commissaire  du  Directoire  exécutif  près  de  la  mu- 
nicipalité de  Bruxelles. 

»  Je  suis  surpris,  citoyen,  qu'au  mépris  des  lois  qui  vous 
assurent  le  libre  exercice  de  votre  culte,  dans  l'enceinte 
de  vos  églises  respectives,  vous  vous  permettiez  encore  de 
porter  processionnellement  ce  que  vous  appeliez  votre 
bon  Dieu. 

»  Citoyen,  votre  désobéissance  est  coupable;  yoire  audace 
est  on  ne  peut  plus  répréhensible.  Vous  avez  indignement 
abusé  de  la  douceur  d'un  gouvernement  Juste  et  hu- 
main (!),  et  ce  n'est  qu'à  votre  opiniâtreté  seule  que  vous 
devez  attribuer  les  mesures  de  rigueur,  qu'on  pourrait 
être  dans  le  cas  de  prendre  contre  vous. 

»  Chargé  de  la  surveillance  et  de  l'exécution  des  lois,  je 

vous  somme  à  vous  conformer  dorénavant  au  prescrit  de 

l'arrêté   des   représentants  du   peuple,    du    4  thermidor 

an  III,  publié  dans  cette  commune  le  5  du  même  mois,  et 

à  ne  plus  porter  le  viatique  que  caché  et  sans  flambeaux, 

sonnette, baldaquin,  surplis,  queue  ou  suite  de  personnes, 

ou  autre  signe  extérieur  quelconque;  vous  prévenant  que 

la  moindre  infraction  au  présent   réquisitoire  sera  puni 

suivant  toute  la  rigueur  des  lois  et  que,  si  par  des  gestes 

ou  des  signes  quelconques,  vous  tâchiez  d'attirer  autour 

de  vous  des  attroupements  prohibés  par  la  loi,  vous  serez 

responsable  des  suites  et  regardé  comme  perturbateur  de 

la  tranquilité  publique. 

»  Salut  et  fraternité. 

Signé,  N.  RouppE  (1). 


(1)M.  Rouppe,  né  dans  le  Brabant  septentrional,  se  destina  d'abord 
à  l'état  ecclésiastique.  Il  étufiia  en  qualité  de  boursier  au  collège  hollan- 
dais à  Louvain.  Sous-diacre  et  bachelier  en  théologie,  il  soutint  dans  une 
tiièse  publique,  le  24  février  1794,  l'iiKUssolubilité  du  mariage,  lu  pri- 


(94) 

Le  15  germinal  suivant,  le  commissaire  du  Directoire 
adressa  un  second  réquisitoire  aux  curés  de  Bruxelles, 
relatif  aux  enterrements  accompagnés  de  cérémonies  reli- 
gieuses. Il  était  conçu  dans  les  termes  suivants  : 

Le  commissaire  du  Directoire  exécutif  près  de  la  muni- 
cipalité de  Bruxelles.  ■ 
Au  citoyen....  curé  de  la  paroisse  de.... 

a  Citoyen,  on  m'a  dénonce  que  quelques-uns  de  vos  col- 
lègues ont  osé  prendre  sur  eux  de  ne  pas  se  conformer  à 
l'arrêté  des  représentants  du  peuple  du  4  thermidor ,  ni 
au  réquisitoire  que  je  vous  ai  adressé,  sous  la  date  du  12 
de  ce  mois  :  des  prêtres  en  surplis ,  précédés  d'une  croix , 
ont  paru  hier,  à  trois  heures  de  relevée,  dans  les  environs 
du  Parc,  et  le  hasard  a  voulu  qu'ils  ne  sont  pas  tombés 
dans  les  mains  de  la  police. 

«Citoyen,  que  ce  soit  la  dernière  fois  que  je  me  trouve 
forcé  à  vous  rappeler  au  respect  et  à  l'obéissance  de  la  loi  ! 
Ne  vous  avisez  plus  de  faire  des  restrictions  ridicules,  en 

mauté  (lu  pape,  etc.,  etc.  A  la  seconde  entrée  des  Fiançais,  il  quitta 
la  soutane,  fut  nommé  secrétaire  de  la  nouvelle  municipalité  et  exerça 
ensuite  remploi  de  commissaire  du  Directoire  exécutif  à  Louvain , 
puis  à  Bruxelles,  où  il  sattira  lestinie  général  de  ses  concitoyens,  qui 
lui  offrirent,  le  21  prairial  de  l'an  VIII  (1800),  une  médaille  en  or,  à 
laquelle  était  jointe  la  lettre  suivante  : 

((  Les  soussignés  habitants  de  cette  commune,  au  citoyen  Rouppe  , 
ci-devant  commissaire  du  gouvernement  près  l'administration  de  la 
Dyle. 

«Citoyen,  la  médaille  que  nos  députes  vous  offrent,  en  vous  remettant 
la  présente ,  est  un  hommage  ([ue  nous  nous  plaisons  à  rendre  à  celui 
qui  a  su  concilier  la  philantrophie  aux  devoirs  rigoureux  que  l'exécution 
des  lois  lui  imposait  l'obligation  de  remplir  :  à  ces  titres,  elle  vous  est 
due,  citoyen;  veuillez  lagrécr  comme  un  bien  faible  gage  de  l'estime 
que  nous  et  nos  concitoyens  vous  avons  vouée ,  et  puisse  son  emblème 
vous  rappeler  notre  gratitude  aussi  long-temps  que  nous  conserverons 
le  souvenir  de  vos  vertus.  Salut  et  attachement.  » 

Suivaient  plus  de  3000  signatures. 


(95  ) 

disant  que  l'arrêlé  des  représenlants,  que  mon  réquisitoire 
ne  vous  ont  pas  défendu  les  enterrements  cérémonieux  qui 
prouvent  que  vous  voulez  maintenir  l'inégalité  jusqu'après 
la  mort.  Sachez  que  tout  signe  de  culte  extérieur,  sous 
quelque  dénomination  que  ce  puisse  être,  est  rigoureuse- 
ment défendu  hors  de  l'enceinte  de  votre  éghse,  dans 
laquelle  seule  vous  avez  le  droit  d'exercer  vos  fonctions, 
et  les  cérémonies  de  votre  culte,  sans  que  personne  les 
puisse  troubler. 

«Appréciez  finalement  que,  si  par  une  opiniâtreté  cou- 
pable, que  je  suis  loin  de  vous  supposer,  vous  osez  encore 
contrevenir,  de  quelque  manière  que  ce  soit ,  aux  dispo- 
sitions susdites  ,  ce  ne  sera  plus  avec  des  mots  qu'on  vous 
réduira  à  l'obéissance  de  la  loi  j  non  citoyen  :  je  vous 
montrerai  alors  que  je  sais  faire  respecter  l'autorité  pu- 
blique, et  que  la  responsabilité  qu'elle  nous  impose,  n'est 
pas  un  mot  vide  de  sens. 

«Salut  et  fraternité. 

Signé ,  N.  RouppE , 
Commissaire  du  Directoire  exécutif. 


Suin ,  directeur  des  domaines  nationaux  dans  la  Bel- 
gique ,  sous  le  Directoire ,  cite  dans  un  écrit  curieux  et 
devenu  rare,  wxùinXé,  Désastreux  effets  de  la  contribution 
militaire,  une  foule  d'exemples  de  dilapidations  commises 
dans  la  vente  de  ces  domaines.  11  rapporte  entre  autres  que 
des  propriétés  appartenant  au  duc  d'Arenberg,  et  confis- 
quées pendant  son  émigration,  furent  adjugées  et  livrées 
pourl50,000  livres,  quoiqu'elles  en  valussentplus  de  quinze 
cent  mille!  Le  château  de  Moerbeeck,  avec  450  arpents  de 
terre,  dont  le  produit  annuel  était  de  36,000  livres,  fut 
vendu  pour  12,000  livres,  une  fois  payées;  de  sorte  que  le 
capital  était  alloué  poin-  le  tiers  du  revenu  d'une  année. 


(96  ) 

Le  château  de  Tamise ,  valant  au  moins  50,000  écus ,  fut 
acquis  au  prix  de  1800  livres.  L'hôtel  du  prince  deGavres 
à  Bruxelles,  estimé  aussi  50,000  écus,  fut  aliéné  pour  200 
livres.  Un  autre  hôtel  à  Gand,  dont  les  meubles  d'un  seul 
appartement  avaient  coûté  plus  de  50,000  écus,  fut  vendu 
avec  les  meubles  pour  6000  livres.  On  vendit  pour  13400 
livres ,  la  ferme  de  Sommay ,  appartenant  à  l'abbaye 
d'Heylissem  et  valant  au  moins  250,000  livres.  L'arche- 
vêché de  Malines  fut  acquis  au  prix  de  900,000  francs  en 
bons,  ce  qui  ne  faisait  qu'à-peu-près  8000  livres  en  numé- 
raire. Le  plomb  seul  des  bâtiments  valait  davantage.  Nous 
ajouterons  que  le  refuge  de  l'abbaye  de  Vlierbeeck  à 
Louvain,  vaste  bâtiment,  construit  en  pierre  de  taille  et 
entouré  d'un  grand  jardin,  fut  vendu  pour  800  francs! 
Ces  faits  et  une  foule  d'autres  de  ce  genre  que  nous  passons 
sous  silence ,  donnent  une  idée  du  génie  financier  ou  de 
la  probité  des  faiseurs  de  cette  époque  déplorable. 


Peu  de  personnes  se  rappel ent  que  c'est  le  fameux 
Cambacères  que  les  amis  des  arts  doivent ,  en  quelque 
sorte  ,  accuser  d'avoir  été  le  moteur  de  la  plupart  des 
actes  de  vandalisme  commis  pendant  la  révolution  en 
France  et  en  Belgique.  Ce  futur  archi-chancelier  de  l'em- 
pire fit  décréter  par  le  conseil  des  cinq-cents,  le  25  ventôse 
de  l'an  V  (1797),  la  vente  de  tous  les  bâtiments  nationaux 
qui  ne  tenaient  pas  à  des  propriétés  rurales  ou  ne  servaient 
pas  à  leur  exploitation.  Ce  n'est  que  depuis  l'adoption  de 
cette  loi  funeste ,  digne  plutôt  des  barbares  du  V  siècle 
que  des  législateurs  d'un  peuple  civilisé  de  la  fin  du  XVIII*, 
que  commença  véritablement  la  destruction  de  celte  foule 
d'églises,  d'abbayes,  de  châteaux  et  autres  monuments  qui 
ornaient  le  sol  de  la  France  et  de  la  Belgique,  et  dont  nous 
déplorons  encore  journellement  la  perte:  c'est  alors  qu'on 


(  97  ) 

abattit  les  châteaux  de  Marly,  de  Sceaux,  de  Choisy,  de 
Chantilly,  dont  la  conservation  avait  cependant  été  dé- 
crétée par  la  Convention  nationale  ,  la  cathédrale  de 
Cambrai  ,  Tabbaye  de  Si^-Bertin  à  S'-Omer ,  l'abbaye  de 
S'-Amand  ,  l'église  de  S'-Nicaise  à  Reims ,  l'abbaye  de 
Villers,  près  de  Nivelles,  et  nombre  d'autres  édifices  Jion 
moins  remarquables.  On  alla  jusqu'à  mettre  en  vente 
pour  la  démolir  la  superbe  église  de  N.  D.  à  Anvers  !  Il  se 
forma  alors  des  compagnies  de  démolisseurs ,  connues  sous 
le  nom  caractéristique  de  bande  ?wire  ,  nouvelle  espèce 
d'industriels  toisant  les  édifices  nationaux  pour  en  vendre 
les  débris ,  estimant  les  monuments  publics  non  par  la 
beauté  de  leur  architecture  et  le  génie  des  artistes  qui  les 
avaient  élevés,  mais  d'après  la  quantité  de  plomb,  de 
pierres  et  de  bois  qui  entrait  dans  leur  construction.  Les 
législateurs  auteurs  de  la  loi  du  25  ventôse,  braves  et 
honnêtes  avocats  ou  propriétaires  ,  ayant  le  bon  sens  de 
ne  voir  dans  les  sculptures  de  Jean  Goujon ,  de  Germain 
Pillon,  du  Puget ,  de  Houdon,  etc.,  et  dans  les  temples 
et  les  palais  que  des  pierres  taillées ,  ne  refusaient  point 
de  partager  le  gâteau  avec  les  citoyens  de  la  bande 
noire ,  témoin  l'honorable  Crétel  ,  futur  ministre  de 
Napoléon ,  qui  acheta  et  fit  démolir  la  belle  Chartreuse 
de  Dijon. 

L'arrêté  du  Directoire  exécutif,  en  date  du  5  brumaire 
an  VI ,  qui  ordonnait  la  séquestration  et  la  vente  des 
biens,  maisons  presbytérales  et  églises  des  cures  non  des- 
servies dans  les  neuf  départements  et  de  celles  où  le  culte 
serait  exercé  par  des  prêtres  insermentés,  ne  fut  pas  moins 
funeste  aux  beaux-arts  que  la  loi  du  25  ventôse.  D'après 
cet  arrêté,  tous  les  ornements  et  les  objets  d'art  que  ren- 
fermaient les  églises,  furent  vendus  à  vil  prix;  plusieurs  de 
ces  édifices  même  furent  démolis. 


(98) 


Lorsqu'à  la  fin  du  siècle  dernier,  une  grande  partie  de 
la  Belgique  poussée  au  désespoir,  tenta  de  secouer  le  joug 
de  fer  que  lui  avaient  imposé  les  Français,  les  insurgés 
de  Salm,  au  pays  de  Liège,  envoyèrent  en  1798,  la 
sommation  suivante  aux  villages  voisins ,  pour  les  obliger 
à  prendre  les  armes  : 

«  L'armée  de  Jésus-Christ.  Pour  combattre  contre  la 
république,  nous  invitons  et  nous  ordonnons  à  toutes  les 
communes  de  la  Vaux-Ghavagne  à  se  rendre  à  Salm  et 
sommons  Grand-Mesnil  et  tous  les  environs  d'alentour 
et  Grand-Mesnil  à  sommer  la  commune  de  Mormont ,  et 
Mormont  tous  les  environs,  ci-devant  terre  de  l'Empire, 
pays  de  Stavelot,  pays  de  Liège,  pour  se  rendre  à  Vieux- 
Salm,  ou  si  non,  s'ils  ne  se  rendent  pas  sur-le-champ  pour 
avoir  les  ordres  des  généraux,  ou  s'ils  ne  se  rendent  pas 
en-déans  les  vingt-quatre  heures  à  Vieux-Salm,  ils  seront 
punis  d'être  hachés  et  brûlés,  tant  filles  et  enfants  que  capa- 
bles et  non-capables  de  porter  les  armes. 

»  Fait  au  quartier-général  à  Salm,  le  10  brumaire, 
an  VIL  » 

Le  lecteur  voudra  bien  nous  dispenser  de  tout  commen- 
taire tant  sur  le  fond  que  sur  le  style  de  cette  pièce.  La 
lettre  suivante  prouve  que  les  insurgés  avaient  cherché  à 
intéresser  l'Autriche  à  leur  cause.  Cette  lettre  fut  écrite  par 
le  prince  Charles,  généralissime  des  armées  autrichiennes, 
à  une  personne  qui  occupa  une  place  distinguée  au  con- 
grès belge  pendant  la  révolution  de  1789,  et  qu'il  nous 
est  défendu  de  nommer  ici  : 

a  Monsieur,  j'ai  exactement  reçu  la  lettre  par  laquelle 
vous  me  faites  part  de  l'exécution  d'un  plan  tendant  à 
seconder  le  succès  de  la  bonne  cause  et  les  armes  de 
Sa  Majesté  impériale  dans  les  Pays-Bas.  Je  m'empresse  d'à- 


(99) 

bord  de  vous  charger  de  témoigner  aux  deux  chefs  occupés 
de  la  formalion  du  corps  des  Belges ,  toute  la  satisfaction 
que  m'inspire  leur  zèle  pour  le  service  de  Sa  Majesté.  Vous 
voudrez  bien  de  plus  leur  déclarer,  que  non-seulement  je 
regarde  la  levée  et  le  service  de  ce  corps ,  comme  d'un 
intérêt  immédiat  et  majeur  pour  l'avantage  de  la  cause 
commune  et  de  nos  opérations  militaires  ,  mais  même 
qu'aussitôt  qu'il  sera  en  état  d'être  utile,  je  me  propose 
de  correspondre  et  de  m'entendre  avec  ses  chefs  ,  sur  les 
moyens  de  combiner  ses  mouvements  avec  ceux  de  mon 
armée.  Veuillez  donc  assurer  ces  messieurs  qu'en  consé- 
quence je  donne  mon  approbation  à  ce  projet  et  à  toutes  les 
démarches  qui  pourraient  tendre  à  le  faire  réussir.  Il  ne 
me  reste  plus,  Monsieur,  qu'à  vous  offrir  tous  mes  remer- 
ciments  pour  votre  zèle  et  votre  empressement  à  me  faire 
connaître  un  objet  aussi  important.  J'y  joins  avec  plaisir 
l'assurance  des  sentiments  distingués ,  avec  lesquels  je 
suis,  etc. 

»  Signé ,  Charles. 
«Au  quartier-général  de  Douau-Eschingen ,  !e  8  octobre  1799.  » 


A.  G.  B.  SCHAYES. 


(  100  ) 


:3lnala0e0  mUques  îï'(DuDragc0- 


a»^»c-" 


Verhandeliing  over  de  nederlakdsche  DiCHTKiwsT  15  Belgie, 
sedert  hare  eerste  opkomst  tôt  aen  de  dood  van  Albert  en 
Isahella,  door  F.  A.  Snellaert,  doctorin  de  Geneeskunde. 
Bekroond  door  de  koninklyke  Académie  van  wetenschap- 
pen  en  fraeie  letteren  te  Brussel,  in  de  zitting  van  den 
1  mei  1838.  Brussel,  Hayez,  1838.  111-4",  bl.  288. 

Das  Franiœsisclie  ist  den  Belgiern  nur  aufgeklebt ,  um 
fruehei  oder  spaeter,  vcie  ein  moderner  sehlechter  Kalk- 
Sueberwurf  von  der  sclioenern  gothischen  Slruktur  ihres 
Grundcbarakters  wieder  abzufallen. 

WOLFGANC  MENZEL. 

La  langue  flamande  est,  sans  contredit,  un  des  éléments 
les  plus  forts  de  notre  nationalité  :  c'est  par  elle  que  le  pré- 
sent et  le  passé  se  touchent  et  se  lient;  les  faits  héroïques 
de  nos  ancêtres  ont  été  célébrés  en  flamand,  et  dans  les 
grandes  crises  politiques,  ce  fut  dans  cette  langue  que 
retentirent  les  chants  de  vengeance  qui  précédèrent  main- 
tes fois  la  délivrance  de  notre  patrie  du  joug  étranger. 

Opprimée  depuis  plus  d'un  siècle  par  un  gouverne- 
ment étranger,  la  Belgique  était  tombée  dans  un  état  de 
marasme  moral;  la  langue  nationale  était  négligée,  et  pen- 
dant toute  cette  période,  aucun  auteur  de  quelque  nom  ne 
surgit  parmi  nous  ;  l'influence  française  s'étendait  de  plus 
en  plus,  et  dédaigner  le  flamand  fut  bientôt  de  mode.  Le 
gouvernement,  au  lieu  de  réprimer  cette  tendance  perni- 


(  101  ) 

cieuse,  suivit  l'impulsion  générale  en  introduisant  le  fran- 
çais dans  l'administration,  et  maintenant  un  parti  s'élève, 
qui  voudrait  étendre  davantage  encore  ce  système,  et  qui 
semble  avoir  pris  à  cœur  d'opprimer ,  d'extirper ,  s'il  est 
possible ,  la  langue  du  pays. 

La  nation  qui  se  laisse  dépouiller  de  sa  langue,  perdra 
bientôt  la  mémoire  de  son  origine  ,  et ,  comme  le  jouet 
des  peuples  voisins  ,  elle  rampera  à  la  voix  du  premier 
conquérant  qui  paraîtra  à  ses  frontières. 

C'est  un  des  devoirs  les  plus  sacrés  d'un  gouvernement 
de  réagir  de  toutes  ses  forces  contre  la  marche  de  la  nation, 
faussée  par  l'influence  morale  d'une  nation  voisine  j  c'est 
à  lui  de  prendre  sous  sa  protection  la  langue  et  la  littéra- 
ture nationales,  et  d'en  encourager  la  culture  par  tous  les 
moyens  qui  sont  en  son  pouvoir,  car  la  faveur  qu'on 
accorde  à  l'élude  d'un  idiome  étranger  ne  sert  qu'à  cor- 
rompre l'esprit  national. 

La  langue  flamande,  ose-t-on  nous  dire,  n'a  point  de 
force  civilisatrice.  Cependant  notre  patrie  possède  une  litté- 
rature ancienne  qui  ne  le  cède  en  rien  à  celle  des  plus  grands 
peuples,  et  dans  l'époque  actuelle  même,  les  ouvrages  qui 
paraissent  ici  en  flamand,  l'emportent,  tant  sous  le  rapport 
du  mérite  que  sous  celui  du  nombre,  sur  tout  ce  que  les 
Wallons  font  chez  nous  en  français.  Aussi  M.  Fred,  Thiersch, 
dans  son  ouvrage  sur  l'état  actuel  de  l' instruction  publique 
dans  les  parties  occidentales  de  V Allemagne ,  en  Hollande , 
en  France  et  en  Belgique ,  pense  plus  sensément  et  avec 
plus  de  justesse  de  l'avenir  de  la  nationalité  belge  :  a  Mon 
séjour  à  Gand,  dit-il,  m'avait  appris  à  connaître  le  centre 
d'une  activité  qui,  prenant  sa  source  au  fond  même  de 
l'ancien  esprit  des  Flamands  ,  a  commencé  à  raviver  les 
racines  de  leur  antique  nationalité,  et  à  développer  de  la 
même  manière  l'industrie ,  les  sciences  et  les  arts.  Gand  ? 
comme  chef-lieu  de  la  Flandre,  a,  par -là   même,  une 


(  102  ) 

importance  plus  particulière  et  plus  haute  pour  l'avenir 
de  la  Belgique  ,  même  sous  le  rapport  politique ,  que  celle 
que  Bruxelles  a  dans  le  Brabant.  A  Bruxelles,  tout  ce  qui 
est  indigène,  tout  ce  qui  tient  à  l'ancien  esprit  de  la  po- 
pulation, se  trouve  envahi  ou  remplacé  par  l'esprit  étran- 
ger ou  par  celui  de  la  nouveauté  ;  et  si ,  le  royaume  réussit, 
placé  qu'il  est  sur  la  grande  limite  de  la  nation  romane  et 
de  la  nation  germanique  ,  à  se  créer  un  esprit  et  une  civi- 
lisation particulière,  ce  ne  peut  être  que  par  le  développe- 
ment de  ce  qu'il  y  a  de  national  et  d'indigène  dans  les  deux 
Flandres  et  par  la  prépondérance  que  cette  partie  du  pays 
pourra  acquérir  sur  l'influence  des  autres  provinces  plus 
françaises  ou  plus  allemandes,  »  D'autres,  au  contraire, 
regardent  notre  langue  comme  une  langue  morte,  dont 
la  culture  peut,  pendant  un  certain  temps  encore,  être 
utile  aux  écrivains  français  pour  leur  mettre  sous  la  main 
les  documents  de  notre  histoire.  «  Que  l'idiome  flamand  se 
cultive,  dit  M.  Van  Hasselt,  pour  l'intelligence  de  noire 
histoire,  de  notre  passé,  des  choses  qui  ne  sont  plus,  des 
hommes  qui  ne  sont  plus.  Qu'il  se  cultive  pour  aider  à 
compléter  tout  ce  qu'il  y  a  d'incomplet  encore  dans  les 
connaissances  que  nous  possédons  sur  ces  magnifiques 
annales  des  Flandres  et  du  Brabant,  si  obscures  encore 
à  plus  d'une  de  leurs  pages.  Qu'il  se  cultive  pour  donner 
à  tous  ceux  qui  s'occupent  d'études  historiques  en  Belgi- 
que ,  la  clef  de  Van  Heelu  et  de  Van  Velthem  ,  de  Melis 
Stoke  et  de  Van  Blaerlant.  »  On  refuserait  bientôt  toute 
gloire  littéraire  à  notre  pays,  et  on  y  serait  déjà  venu  si 
l'histoire  n'était  là  pour  constater  notre  richesse  en  fait 
d'ouvrages  littéraires  et  d'oeuvres  poétiques  de  tout  genre. 
Plus  de  dix  ans  se  sont  écoulés  depuis  que  M.  Willems 
publia  l'histoire  de  la  littérature  flamande.  Wilsen  Geys- 
beek  et  Hofman  von  Fallersleben  suivirent  ses  traces  et 
firent  connaître  plusieurs  de  nos  anciens  auteurs,  par  la 


(  103  ) 

publication  d'importants  poèmes.  Maintenant,  en  même 
temps  que  M.  Mone,  archiviste-général  à  Garlsruhe,  fait 
paraître  eu  Allemagne  une  revue  de  notre  littérature 
(Uehersicht  der  Niederl.  Volksliter.  altérer  zeit),  M.  Snel- 
laert,  médecin  à  Gand,  publie  dans  le  mémoire,  dont 
nous  donnons  le  titre  en  tête  de  cet  article,  une  œuvre 
mieux  conçue,  qui,  en  même  temps  qu'elle  nous  donne 
une  idée  générale  des  différentes  époques,  est  encore 
entraînante  sous  le  rapport  du  style  ,  et  très-agréable  à  la 
lectur. 

L'écrit  de  Mone  n'est  que  l'esquisse  d'un  plus  grand 
ouvrage;  il  nous  donne  les  titres  des  productions  littérai- 
res ,  décrit  les  manuscrits,  mais  il  effleure  le  contenu  et  se 
contente  de  transcrire  les  premiers  et  derniers  vers.  Le  mé- 
moire de  M.  Snellaert  est  un  tableau  raisonné,  dans  lequel 
la  vie  des  poètes  et  les  aventures  des  héros  qu'ils  célé- 
braient dans  leurs  chants  sont  retracés  avec  des  couleurs 
aussi  vives  que  vraies.  Les  événements  politiques,  les  moeurs 
de  nos  ancêtres  et  l'influence  qu'ils  eurent  sur  notre  litté- 
rature, y  sont  décrits  de  main  de  maître. 

L'ouvrage  est  divisé  en  trois  périodes.  Dans  la  préface, 
l'écrivain  nous  donne  une  idée  des  règles  de  prosodie  , 
suivies  par  nos  poètes  du  moyen-âge,  et  jette  un  coup- 
d'œil  sur  les  auteurs  qui  fleurirent  avant  le  siècle  de 
Maerlant.  «  La  poésie  avant  Maerlant,  dit-il,  était  l'image 
de  la  chevalerie  ;  elle  était  errante  comme  elle.  Pour 
abréger  les  longues  soirées  d'hiver,  elle  était  assise  au  coin 
du  feu  dans  la  grande  salle  du  château  ;  sa  voix  mélo- 
dieuse y  consolait  la  jeune  fille  ou  célébrait  les  tournois  et 
hauts  faits  des  guerriers  :  pendant  l'été,  quand  les  champs 
reverdissaient  et  brillaientdes  couleurs  les  plus  variées,  elle 
errait  avec  la  châtelaine  par  les  campagnes  et  les  sombres 
forêts,  ou  de  château  en  château  elle  cherchait  de  nouvel- 
les aventures  et  les  illustrait  dans  des  chants  pleins  de 


(  104) 

grâce  et  de  force.  Celte  vie  errante  nous  retrace  l'esprit  de 
celte  époque  :  les  chevaliers  habitaient  les  forts  dont  le 
pays  était  hérissé,  et  les  princes  eux-mêmes  résidaient 
ordinairement  dans  l'un  ou  l'autre  de  leurs  châteaux  et 
ne  tenaient  que  rarement  leur  cour  dans  les  villes,  »  Aussi 
est-il  à  présumer  que  presque  tous  nos  romans  de  cheva- 
lerie appartiennent  à  cette  période,  et  existaient  avant  le 
temps  deMaerlant,  avant  le  XIIP  siècle.  Maerlant  fut  chez 
nous  le  premier  poète  didactique,  il  critiquait  vertement 
celte  poésie  descriptive  et  romantique;  et  voulait  instruire 
autant  que  plaire  par  ses  poésies:  c'est  à  lui  que  nous 
sommes  redevables  de  la  première  chronique  rimée;  il 
traduisit  aussi  la  Bible  et  composa  un  grand  nombre  d'ou- 
vrage, sur  la  morale,  l'histoire  naturelle  et  la  religion, 

A  la  page  63,  il  parle  du  poème  du  Renard  :  a  Quel 
poème,  dit-il,  peut  être  comparé  à  celui  du  Pvenard? 
Les  nations  voisines  élèvent  avec  orgueil  leurs  meil- 
leures poésies  ;  nous  ne  craignons  pas  de  comparer  notre 
poème  allégorique  avec  tout  ce  qu'ils  ont  de  meilleur 
et  dont  ils  sont  les  plus  fiers.  Quel  tissu  de  fines  intri- 
gues !  Quelle  variété  de  caractères  dans  les  acteurs ,  qui 
sont  maintenus  jusqu'à  la  fin  dans  leur  véritable  jour! 
Renard  est  le  type  de  l'intrigant;  Isegrim,  qui  lui  est  op- 
posé, pense  que  la  justice  et  la  raison  ont  toujours  leur 
cours:  quel  chagrin  ne  concoit-il  pas  quand  il  voit  que  la 
vérité  la  mieux  établie  doit  le  céder  au  mensonge  émiellé  ! 
Le  roi  qui  connaît  les  flatteurs  et  les  estime  à  leur  juste 
valeur,  est  disposé  à  donner  une  bonne  leçon  aux  mé- 
chants, le  roi  perd  tout  son  courroux  à  la  voix  de  Renard, 
qui  lui  apprend  qu'il  a  entravé  l'exécution  d'un  coup 
d'état,  et  en  parlant  de  bijoux  et  de  trésors  cachés,  il 
désarme  la  reine  qui  ne  songe  qu'à  sa  toilette.  Avec  quel 
art ,  ne  s'insinue-t-il  pas  dans  la  bonne  grâce  de  Brun  et  de 
Tibert  dont  il  connait  le  faible?  Le  poète  nous  peint  sous 


(  105  ) 

ses  véritables  traits  Courtois  le  flatteur,  qui  ne  parle  que 
français.  Qui  ne  rit  point  des  mésaventures  de  Belyn  ? 
Grimbert  est  un  exemple  de  bonne  foi  et  d'amitié  inviola- 
bles. *  —  La  langue  et  le  style  nous  prouvent  que  le  poème 
a  été  composé  à  diverses  époques  par  différents  auteurs. 
M.  Willems  a  démontré  que  la  première  partie  (les  3394 
premiers  vers  )  a  été  écrite  vers  le  milieu  du  XIP  siècle,  et 
il  attribue  le  reste  à  Guillaume  Utenho\e,  prêtre  à  Arden- 
burch,  qui  vivait  dans  le  XIIP  siècle. 

La  première  période  du  Mémoire  s'étend  jusqu'au 
XV^  siècle,  et  l'auteur,  après  avoir  parlé  du  poème  fla- 
mand des  Niebelungen  ,  dont  M.  le  professeur  Serrure 
vient  de  trouver  un  nouveau  fragment,  passe  en  revue 
les  romans  du  cycle  de  Charlemagne  et  d'Arthur,  et  nous 
donne  en  raccourci  le  contenu  des  principaux:  de  Charles 
et  Elegast,  de  Floris  et  Blancefleur,  Renaut  de  Montal- 
ban,  Maugis,  Lancelot ,  Walewein,  Fergut,  etc.  Cette  ma- 
tière, dont  chaque  chapitre  mériterait  une  dissertation 
particulière,  n'a  été  traitée  que  superficiellement ,  car  le 
cadre  qu'on  avait  imposé  à  M.  Snellaert  était  trop  rétréci 
pour  contenir  tous  les  détails  sur  les  oeuvres  littéraires  de 
ce  siècle  si  riche  en  productions  poétiques.  Il  serait  à  dési- 
rer que  l'Académie  de  Bruxelles  mit  au  concours  comme 
sujet  d'un  mémoire  spécial,  la  vie  et  les  écrits  de  l'un  ou 
l'autre  de  nos  grands  écrivains,  ou  une  époque  ou  une 
branche  de  la  littérature,  afin  qu'un  écrit  particulier  de 
chaque  poète,  de  chaque  époque,  nous  mît  à  même  de 
connaître  avec  plus  de  justesse  les  chants  des  siècles  passés 
et  les  faits  héroïques  de  nos  ancêtres.  Le  tableau  que 
M.  Snellaert  nous  met  sous  les  yeux ,  nous  donne  une  idée 
générale  de  chaque  époque,  mais  il  est  loin  de  nous  faire 
connaître  tous  les  auteurs,  et  toutes  les  compositions  dont 
notre  littérature  peut  ajuste  titre  s'enorgueillir. 

Le  second  chapitre   contient   la  seconde  période,  qui 


{  lOG) 

commence  au  XV*  siècle  et  s'étend  jusqu'au  XVII^  Notre 
langue  perdit,  sous  le  gouvernement  des  princes  bour- 
guignons, sa  pureté,  et  notre  littérature  sa  vogue  et  sa 
richesse.  A  la  cour  on  parlait  le  français,  et  cet  exemple 
pernicieux  s'étendit  dans  les  villes  de  Flandre.  Ce  fut  alors 
aussi  que  les  chambres  de  rhétorique  s'élevèrent  et  que  les 
drames  allégoriques  et  les  refrains  philosophiques  furent 
transplantés  de  France  en  Belgique.  —  Durant  la  troi- 
sième période  (1584-1632),  les  lettres  se  relèvent  de  nou- 
veau; à  la  voix  d'Ymmeloot,  on  quitta  la  route  que  sui- 
vait la  France,  et  une  meilleure  prosodie,  qui  est  restée 
jusqu'à  nos  jours,  fut  introduite;  Olivier  de  Wree,  Guil- 
laume Van  den  Nieuwelant ,  Poirters  écrivaient  une  lan- 
gue plus  douce  et  plus  pure.  Mais  Daniel  Heins  et  Van 
Zevecote  dominaient  cette  époque ,  tant  sous  le  rapport  de 
l'élévation  des  idées  que  sous  celui  du  rythme  et  de  la  pu- 
reté du  langage.  Jacques  Van  Zevecote  naquit  à  Gand, 
vers  1596,  et  Willems  le  regarde  comme  le  prince  des 
poètes  belges;  l'écrivain  de  ce  mémoire  le  place  comme 
poète  lyrique  à  côté  de  Hooft,  et  pense  qu'une  édition  des 
œuvres  complètes  de  Zevecote  et  de  Heins  manque  à  la 
gloire  de  notre  pays. 

Nous  finirons  cet  article  en  transcrivant  quelques  lignes 
de  la  post-face,  qui  retracent  d'une  manière  forte,  mais 
juste,  l'avenir  de  nos  provinces  flamandes  et  font  connaître 
les  sentiments  patriotiques  dont  l'auteur  est  animé.  «Vers 
le  XVII*  siècle  ,  le  joug  étranger  opprima  de  nouveau 
le  peuple  des  Pays-Bas  méridionaux.  Durant  un  certain 
temps  encore,  la  Belgique  eut  quelques  Bardes  dignes  de 
son  antique  splendeur,  mais  la  barbarie  couvrit  bientôt 
de  ses  noires  ailes  le  pays  découragé  et  énervé,  et  l'obscu- 
rité la  plus  épaisse  régna  durant  un  siècle  entier.  Le  temps 
s'éclaircit  depuis  de  plus  en  plus,  et  maintenant  l'avenir  se 
fait  voir  sous  de  plus  brillantes  couleurs.  Voulons -nous 


(  107) 

fonder  un  état  sur  des  fondements  stables ,  c'est  sur  la  lan- 
gue du  pays  qu'ils  doivent  reposer.  La  cultiver  et  l'illustrer 
nous  délivrera  de  l'esclavage  moral ,  sous  lequel  nous  som- 
mes encore  courbés.  Non,  nous  ne  pouvons  nous  rallier  à 
la  France.  Il  ne  peut  exister  entre  la  Belgique  et  ce  pays 
que  des  traités  de  bon  voisinage.  La  France  doit  perdre 
tout  espoir  de  nous  conquérir.  Et  quels  moyens  avons  nous 
de  nous  élever  au  yeux  des  étrangers,  si  nous  méprisons 
nous-mêmes  la  langue  de  nos  ancêtres,  si  nous  jie  possé- 
dons nous-mêmes  la  conscience  de  notre  force  et  la  dignité 
d'une  nation?  Ou  bien  ,  veut-on  que  nous  nous  courbions 
sous  le  sceptre  français ,  que  nous  adoptions  la  langue  et 
les  mœurs  de  cette  nation  ennemie?  A  cette  proposition 
je  vois  les  Flamands  tressaillir  d'indignation!  Non,  nous 
sommes ,  par  notre  langue  et  par  le  sang  ,  Germains 
d'origine,  et  tout  ce  qui  est  national  chez  eux,  l'est  chez 
nous.  Aussi  l'Allemagne  nous  tend  les  bras  comme  à  des 
descendants  de  la  même  famille ,  tandis  que  la  France 
nous  traite  avec  mépris  et  nous  regarde  comme  une 
branche  bâtarde.  Comprenons  ces  marques  d'amour  et 
de  mépris.  Ce  sont  les  expressions  d'un  sentiment  intime, 
dont  les  nations  aussi  bien  que  les  particuliers  sentent 
l'impulsion.  Soyons  comme  autrefois  Germains  de  la 
souche  flamande  ,  soyons  Belges  !  » 


Pfl.  Blommaert. 


(  108) 

OUDVLAEMSCHE    GEDICHTEÎi  DER  XII",    XIIP  EN   XIV''   EEUWEIt, 

nitgegeven  f/oor /owi;/ieer  Ph.  Blommaert.  Ce;?/;  1838; 
Uebbelynck,  groot  8" ,  jo.  VI  en  128  (sur  deux  colonnes). 

M.  Philippe  Blommaei't  est  un  de  nos  philologues  qui 
ont  rendu  le  plus  de  services  à  la  littérature  flamande. 
Chaque  année ,  le  Letterkundig  Jaerhoekje ,  dont  tout  le 
monde  aime  à  apprécier  l'esprit  et  la  rédaction,  contient  de 
cet  écri\ain  quelques  pièces  de  poésie,  quelques  ballades 
qui  sont  toutes  empreintes  d'un  profond  caractère  de  natio- 
nalité. Sous  sa  plume  facile  et  agréable,  la  tradition  popu- 
laire revêt  toutes  les  formes  d'un  drame  palpitant  d'intérêt. 
En  1834,  ce  jeune  littérateur  entra  en  quelque  sorte  dans 
la  carrière,  en  publiant  Liederick  de  Buck,  poème  en  trois 
chants,  dans  lequel  il  raconte  en  vers  pleins  de  charmes 
les  aventures  romanesques  du  premier  forestier  de  Flandre, 
cette  Saga  si  connue,  dont  la  véritable  origine  se  perd  dans 
la  nuit  des  temps.  Dans  la  même  année ,  il  faisait  paraître 
avec  MM.  Willems,  Serrure,  Van  Duyse,  etc. ,  un  recueil 
périodique  sous  le  titre  àt  JSederdidtsche Lctteroeffeningen. 
Cet  ouvrage,  spécialement  destiné  à  la  langue  et  à  l'histoire 
de  la  Flandre,  a  malheureusement  cessé  trop  vite  d'exister. 

En  1836,  il  publia  pour  la  première  fois  le  Théophilus , 
ce  mystique  et  bizarre  poème  flamand  du  XIV^  siècle,  qui 
semble  renfermer  l'idée  première  du  Faust,  de  Goethe.  11 
y  joignit  trois  autres  productions  poétiques  de  la  même 
époque,  qui  ne  manquent  ni  d'originalité  ni  de  verve,  et 
enrichît  ce  volume  d'observations  grammaticales,  d'anno- 
tations et  d'un  glossaire.  Cet  ouvrage  fut  suivi  d'une 
intéressante  histoire  des  Chambres  de  Rhétorique  de  Gand 
{Beknopte  geschiedenis  der  Kamers  vmiRhetorica,  teGent), 
à  laquelle  il  annexa  plusieurs  documents  inédits,  concer- 
nant l'organisation,  la  comptabilité,  etc.,  de  ces  assemblées 
qui  donnent  si  bien  la  mesure  du  développement  intellec- 


(  l09  ) 

luel  de  nos  villes  au  moyen-âge.  La  rédaction  du  Bclgisch 
Museimi  doit  aussi  à  M.  Blommaert  plusieurs  articles,  qui 
tous  ont  pour  but,  la  défense  de  la  langue  flamande  et 
l'histoire  de  la  littérature. 

Nous  allons  nous  occuper  de  la  dernière  publication  de 
M.  Blommaert,  dont  le  litre  se  trouve  en  tête  de  cet  article. 

L'éditeur  a  réuni  en  un  volume  cinq  vieux  poèmes 
flamands,  qui  n'avaient  jamais  vu  le  jour  et  qui  se  trou- 
vaient transcrits  dans  un  MS.  de  la  bibliothèque  Van 
Hullhem.  (Cat.  Hullh.  t.  V,  N°  192). 

Nous  dirons  un  mot  de  chacune  de  ces  productions,  en 
y  joignant  les  particularités  qu'émet  M.  Blommaert  dans 
les  petites  préfaces  dont  il  les  fait  précéder. 

L  De  Trojciensche  Oorlog.  (La  guerre  de  Troie.) 

Ce  poème  a  1305  vers.  L'idée  de  l'origine  troyenne,  attri- 
buée aux  Francs  depuis  les  temps  les  plus  anciens  engagea 
de  bonne  heure  les  poètes  du  moyen-âge  à  s'en  emparer 
pour  rehausser  la  dignité  de  lanation  à  laquelle  ils  apparte- 
naient. Peu-à-peu  l'histoire  de  cette  grande  épopée  militaire 
fut  altérée  dans  son  ensemble,  des  traditions  chevaleresques 
vinrent  promptement  s'y  mêler,  et,  l'imagination  des  poètes 
aidant,  il  se  trouva  bientôt  que  l'admirable  œuvre  de  Vir- 
gile ne  fut  plus  reconnaissable  :  histoire,  géographie,  noms 
propres,  tout  se  ressentit  de  cette  confusion  de  faits  homo- 
gènes et  étrangers.  La  lecture  du  Trojciensche  Oorlog,  con- 
vaincra quiconque  de  la  vérité  de  celte  assertion.  La  mga 
qui  prétend  que  nous  descendons  des  Troyens,  est  une  des 
plus  anciennes  qui  existent.  Nous  ferons  remarquer  que  l'on 
peut  consulter  à  ce  sujet  avec  fruit  deux  excellentes  disserta- 
tions de  M.  Moue  dans  XAnzeiger^  1 835  :  Veher  die  Franken. 

Le  roman  en  vers  dont  nous  nous  occupons  ici ,  appar- 
tient au  cycle  classique;  Seger  (1)  Dieregodgaf  tn  est 

(1)  En  français  ;  Sohier  Dieudonné ;  en  latin  :  Sigents  Dcodaius. 


(  110  ) 

l'auteur.  M.  Blommaerl  pense  que  ce  poème  fut  traité 
originairement  en  flamand  et  que  ce  n'est  pas  une  tra- 
duction d'un  vieux  roman  français. 

Nous  nous  abstenons  de  donner  l'analyse  de  cette  pro- 
duction, où,  autour  de  l'histoire  grecque,  viennent  se 
grouper  une  foule  d'incidents  inventés  par  le  poète.  Nous 
nous  contenterons  de  dire  que  ce  poème  est  divisé  en  cinq 
parties. 

r  La  fêle  de  Troie  ;  2"  le  parlement  (!)  de  Troie;  3°  le 
combat  d'Hector  et  d'Achille;  4"  Hector  volant  au  secours 
des  combattants;  5"  la  mort  d'Hector.  —  L'éditeur  fait  suivre 
ce  roman  rimé  de  deux  fragments  du  même  roman  publiés 
par  M.  Ackersdyck  ,  l'un  contenant  739  vers,  l'autre  370. 

IL  De  Borc/ic/ravinne  van  Vergi.  (La  Châtellaine  de 
Vergy.) 

Voici  ce  qu'en  dit  M.  Blommaert  dans  la  préface  :  ce 
poème  fut  écrit  au  commencement  du  XIV"  siècle ,  et 
terminé  le  24  mai  1315.  Un  poème  français,  traitant  le 
même  sujet,  fut  pubHé  par  Barbazan,  et  contient  960  vers. 
Le  fond  de  ce  roman  n'a  rien  de  commun  avec  la  sanglante 
tragédie  qu'écrivit  Dubelloy  sous  le  titre  de  Gabrielle  de 
Vergy;  l'histoire  qui  donna  lieu  à  celte  dernière,  arriva 
près  de  S'-Quenlin  en  Vermandois,  tandis  que  la  scène  de 
notre  poème  se  passe  en  Bourgogne,  près  de  Dijon;  il 
s'agit  ici  simplement  d'une  intrigue  amoureuse  entre  une 
châtelaine  de  Vergi  et  un  chevalier  de  la  cour  de  Bour- 
gogne. Ce  roman  a  1 125  vers. 

III.  DU  syn  Seneka  lereti.  (  Ce  sont  les  Maximes  de 
Sénèque.) 

C'est  une  ancienne  traduction  d'un  recueil  latin  intitulé  : 
Excerjita  quœdam  e  libris  Senecœ.  Le  poète  flamand  a 
traité  celle  matière  en  forme  de  dialogue,  entre  un  père 
et  un  fds.  Parfois  le  traducteur  amplifie  le  texte  original  j 
parfois  il  y  intercalle  des  l'éflexions  qui  lui  appartiennent  ; 


{  m  ) 

on  remarque  aussi  ça  et  là  qu'il  y  a  mêlé  des  idées  et  des 
façons  de  voir  qui  sentent  le  pays  où  il  était  né.  Les  maxi- 
mes de  Sénèque  contiennent  780  vers. 

IV.  Korte  Rymkronyk  van  Braband.  (Courte  Chronique 
rimée  de  Brabant.) 

Cette  chronique  qui  a  365  vers ,  M.  Biommaert  l'a 
publiée  d'après  le  MS.  qui  appartenait  au  savant  Kluit , 
au  bas  de  chaque  page,  il  a  soin  de  marquer  les  variantes 
qu'il  a  rencontrées  dans  le  texte  de  cette  chronique  qui  se 
trouve  dans  le  MS.  de  Van  Hulthem. 

V.  Reisvan  Sinte  Brandaen.  (Voyage  de  S'-Brandaine). 
Sous  le  rapport  de  la  bizarrerie  de  conception  et  de 

l'imagination  qui  préside  partout  à  ce  roman  rimé  de 
2198  vers,  il  est  difficile  de  trouver  quelque  chose  de  plus 
singulier  que  le  voyage  de  S'-Brandaine. 

La  légende  de  S'-Brandaine  existe  dans  toutes  les 
langues  de  l'Europe.  C'est  un  des  plus  anciens  poèmes 
flamands  que  nous  possédions.  M.  Willems  pense  qu'il 
appartient  au  XIP  siècle.  Ce  roman  étant  la  partie  la  plus 
intéressante  du  volume,  nous  ne  pouvons  nous  empêcher 
d'en  donner  ici  le  sujet  d'après  M.  Biommaert. 

<i  Saint-Brandaine  lut  un  jour  des  choses  si  singulières 
«qu'il  n'y  put  croire  et  jeta  le  livre  au  feu.  La  même  nuit 
»lui  apparut  un  ange  qui  lui  ordonna  de  quitter  sa  patrie 
»  et  de  s'embarquer  pour  aller  voir  de  ses  propres  yeux , 
»les  merveilles  auxquelles  il  n'avait  point  voulu  ajouter 
»  foi ,  pour  en  écrire  ensuite  lui-même  la  relation  et  pour 
«refaire  ainsi  le  livre  qu'il  avait  brûlé.  Saint-Brandaine 
»  obéit ,  approvisionne  un  vaisseau  pour  9  années  et  s'em- 
»  barque  avec  son  chapelain  et  quelques  moines.  Après 
«avoir  erré  une  année,  sans  avoir  touché  la  terre,  ilsarri- 
«  vèrent  à  une  grande  forêt  et  s'empressèrent  d'y  descendre. 
«A  peine  avaient-ils  mis  le  pied  sur  l'île,  qu'ils  s'aperçu- 
»  rent  que  c'était  un  immense  poisson.  Aussi  se  hâtèrent- 


(  112  ) 

»  ils  de  remonter  sur  leur  vaisseau  ;  le  grand  poisson  se 
»  mit  à  leur  poursuite  et  porta  un  coup  si  violent  au  navire 
»  qu'il  manqua  le  renverser.  A  peine  échappés  à  ce  prfe- 
»  mier  danger  j  ils  aperçurent  un  monstre  marin  à  moitié 
«homme,   à  moitié  femme;  une  prière  du  Saint  les  en 

«délivra  bientôt Ils  se  dirigent  vers  l'Orient  et  voient 

»  une  belle  église  qui  s'élève  sur  un  rocher.  Il  y  a  là  sept 
»  moines  à  qui  une  colombe  et  un  corbeau  apportent  la 
»  nourriture.  Puis  nos  voyageurs  entrent  dans  la  mer  sau- 
y>vage.  Ils  y  trouvent  au  milieu  des  flots  un  rocher,  sur 
«lequel  un  homme  est  assis ,  seul  depuis  99  ans  :  le  Saint 
»lui  demande  son  nom?  C'est  un  roi  de  Cappadoce,  il  a 
»  épousé  sa  sœur,  qui  lui  a  donné  deux  fils  ;  il  a  tué  l'un  de 
»sa  main,  la  foudre  a  écrasé  l'autre.  Après  ce  forfait,  il  est 
»  allé  demander  son  pardon  au  pape  ;  une  tempête  en- 
»  gloutit  son  navire,  tous  ses  compagnons  périssent,  lui  seul 
«échappe  sur  ce  rocher....  Plus  tard  S'-Brandâine  arrive 
«dans  une  contrée  fertile  ;  il  y  trouve  le  trou  de  l'enfer, 
»  d'où  sortent  des  cris  sinistres  et  étranges  ;  il  se  penche 
»  au-dessus  de  l'abyme  et  demande  au  prince  qui  règne  en 
«ce  lieu,  qui  est  là?  Une  voix  lui  répond  :  les  parjures, 
«les  femmes  injustes,  les  échevins  prévaricateurs,  les 
«traitres,  etc.,  sont  plongés  dans  ce  gouffre.  Après  plu- 
»  sieurs  aventures  où  le  diable  et  \auri  sacra  fmnes  jouent 
»  un  grand  rôle,  S'-Brandaine  rencontre  un  dernier  débri 
«de  Sodome,  de  Gomorre  et  de  Boga,  un  malheureux 
«pécheur  que  Dieu  a  condamné  à  errer  éternellement  eu 
»  mer ,  assis  sur  un  gazon. 

«Enfin  un  immense  poisson  entourra  leur  vaisseau,  et 
«ils  naviguèrent  encore  14  jours  dans  le  cercle  que  for- 
«mait  ce  poisson,  lequel  tenait  sa  queue  dans  la  gueule. 
«Alors  ils  jetèrent  l'ancre,  S'-lirandaine  demanda  à  son 
»  chapelain  Noé ,  s'il  avait  eu  soin  de  tout  écrire.  Le  cha- 
«pelain  répondit  affirmativement.  Nos  voyageurs  débar- 


{   U3  ) 

»quèi'ciit ,  et  le  livre  conlenant  toutes  les  merveilles  qu'ils 
savaient  vues,  fut  déposé  sur  l'autel  de  S^'^-Marie.  » 

Tel  est  le  sujet  sommaire  de  ce  poème  ,  qu'on  pourrait 
classer  parmi  les  histoires  incroyables  de  Palephate.  On  y 
retrouve  partout  des  idées  qui  appartiennent  à  l'Edda ,  et 
nous  ne  serions  pas  étonné  que  le  poète,  en  composant 
cette  oeuvre  bizarre,  eut  pris  pour  modèle  l'Apocalypse 
de  S'-Jeau,  dont  le  voyage  de  S'--Brandaine  paraît  avoir 
emprunté  la  forme  descriptive.  Le  savant  Goerres  prétend 
que  cette  légende  repose  sur  d'anciens  mythes  bretons;  il 
la  considère  comme  une  sorte  d'antique  Bivina  Comoedia, 
qui  a  peut-être  donné  à  Dante  la  première  idée  de  son  livre. 

Quoiqu'il  en  soit,  M.  BJommaert  fait  remarquer  que  ce 
n'est  pas  ici  la  traduction  du  vieux  roman  français,  publié 
par  M.  A.  Jubinal,  et  qu'il  y  a  même  peu  de  ressemblance 
entre  ces  deux  productions  poétiques, 

La  langue  des  cinq  ouvrages  rimes  dont  nous  venons  d'en- 
tretenif  le  lecteur,  se  distingue  par  une  grande  pureté  gram- 
maticale et  une  absence  presque  générale  de  mots  empruntés 
au  français  ou  au  latin;  aussi  faut-il  dire  que  ces  productions 
appartiennent  à  la  bonne  époque  de  la  littérature  flamande. 

Une  liste  ou  glossaire  des  vieux  mots  termine  cet  inté- 
ressant volume,  qui  est  imprimé  avec  cette  exactitude 
philologique  à  laquelle  la  science  attache  tant  de  prix. 

En  finissant  cet  article,  nous  ajouterons  un  mot  encore  : 
nous  regrettons  que  l'éditeur  ait  été  si  sobre  de  notes- 
dans  la  Chro7iique  rimée  do  Brabant,  cette  lacune  se  fait 
surtout  sentir.  A  la  place  des  variantes  du  MS.  Van  Hul- 
them,  nous  eussions  mieux  aimé  de  voir  au  bas  des  pages 
quelques  explications  des  passages  difficiles,  quelques 
interprétations  des  noms  propres  altérés  et  rendus  mé- 
connaissables par  le  poète.  Les  connaissances  de  M.  Blom- 
maert  eussent  été  ici  au  lecteur  d'un  grand  secours. 

Jules  De  Saint-Genois. 
8 


{  114  ) 


bulletin  0ibli0grapl)itiue. 


HISTOIRE  ET  GEOGRAPHIE  DE  BELGIQUE. 

Flandrische  Staats-  und  Rechtsgescliichte  bis  zum  Jalir  lâ08, 
von  L.  A.  Warnkœnig.  Dritten  Bandes  Zweiten  Abtheilung. 
Tûbingen,  1839;  in-8%  p.  VI  et  244. 

[Ce  volume ,  dont  le  texte  paraîtra  dans  le  courant  de  l'année,  contient 
un  choix  de  chartes,  divisé  en  chapitres  :  1"  Freilassungsacte;2»Urkun- 
denbetreffendSchutz-oder  Allarhôrige(<r<i^<iariae7}er50wce),■3''Urkun- 
den  betreffend  die  Rechtsverhâltnisse  von  Submansores  :  4»  Urkunden 
ùber  Ministerialitâtsverhâltnisse,  besonders  von  Villici,  Schulteti  und 
Majores  ;  5°  Die  àitesten  criminalregister  des  klosters  St.  Pieter  bei  Gent  ; 
6»  AusgeAviihlte  urkunden  betreffend  das  Gerichtswesen  in  Flanderen,  etc.] 

Recherches  historiques  et  bibliograpliiques  sur  la  biblio- 
thèque de  l'université  et  de  la  ville  de  Gand,  par  le  biblio- 
thécaire A.  Voisin.  Gand,  1839;  in-S". 

[Ce  volume  contient  des  notices  sur  Arnoud  et  Pierre  De  Keyser, 
premiers  imprimeurs  de  Gand ,  et  sur  la  liste  des  ouvrages  imprimés 
par  eux.] 

Réception  solennelle  faite  par  la  ville  de  Malines,  à  S.  Em. 
révérendissime  Mgr.  le  cardinal  Sterckx,  le  23  octobre  1838. 
Malines,  1838;  in -8°,  p.  36. 

Essai  sur  l'histoire  politique  et  constitutionnelle  de  la  Bel- 
gique, parV.  A.  Waille.  Bruxelles,  1838;  in-8". 

Additions  et  corrections  à  la  notice  sur  les  archives  de  la 
ville  de  Malines,  de  Monsieur  L.  P.  Gachard,  archiviste  du 
royaume  de  Belgique.  Insérée  dans  son  ouvrage  intitulé  Collec- 
tion de  Documents,  etc.  Troisième  volume.  —  Première  partie. 
Malines,  1838;  p.  XX  et  128,  in-12. 

Naedere  opzoelcing  der  gevoelens  van  nog  andere  schry  vers 
nopeus  de  oude  geschrevene  chronjken,  legenden  der  heyli- 


{  115  ) 

gen  en  hedendaegsche  historien- fabelschr^'vers,  tlienende  tôt 
staving  onzer  voorafgaende  Naspeuring  van  de  gevoelens  der 
schrjvers  van  de  XYP  en  X\  II"  eeuw.  In  druk  uytgegeven  teii 
jaere  1837.  Blalines,  1838;  46  pag.  in-12. 

[On  doit  ces  deux  publications  à  M.  Gyseleers-Thys  ,  archiviste  de 
Malines.] 

De  l'Industrie  en  Belgique.  Sa  situation  actuelle.  Causes  de 
décadence  et  de  prospérité.  Par  M.  N.  Briavoinne.  Bruxelles, 
Soc.  nat.  pour  la  prop.  des  bons  livres,  1839;  2  vol.  Tom.  I", 
p.  4oO. 

[Cet  ouvrage  est  trèf-curieux  et  très-exact  pour  l'état  actuel  de  l'in- 
dustrie en  Belgique  ;  mais  les  époques  antérieures  y  sont  à  peine  effleurées 
et  le  système  politique  des  deux  Artevelde  y  est  mis  sous  un  faux  jour. 
L'erreur  historique,  qu'en  moins  d'une  année  (1379)  1400  meurtres  fu- 
rent commis  à  Gand,  se  retrouve  dans  cet  écrit,  quoique  M.  le  professeur 
Lenz  en  ait  démontré  toute  la  fausseté  dans  un  article  placé  dans  tes 
Nouvelles  Archives  historiques  (t.  I,  p.  95),  intitulé  :  Recherches  sur 
l'état  moral  de  la  Flandre  au  XIV'  siècle.] 

Dictionnaire  géographique  du  Luxembourg,  par  Ph.  Van  der 
Maelen.  Bruxelles,  1838;  pag.  282  et  210  in-S". 

Histoire  de  la  religion  catholique  en  Brabant ,  et  en  parti- 
culier à  Bruxelles,  par  le  P.  C.  Smet;  traduit  du  flamand  par 
M.  l'abbé  Tiron.  —  Bruxelles,  Soc.  nat.  pour  la  propag.  des 
bons  livres,  1839;  in-8%  p.  387. 

Lectures  relatives  à  l'histoire  des  sciences,  des  arts,  des 
mœurs  et  de  la  politique  en  Belgique  et  dans  les  pays  limi- 
trophes, par  M.  F.  V.  Goethals,  tome  IV^  Bruxelles,  1838; 
in-8°,  374  p. 

Carte  topographique  des  frontières  belges  et  hollandaises, 
par  le  général-major  Van  Gorkum.  Bruxelles,  Etablissement 
géographique,  1839;  12  feuilles. 

Carte  topographique  des  rives  de  l'Escaut  occidental  et  du 
canal  de  Gand  à  Terneusen,  par  Gheldolf.  Ibid. ,  une  feuille 
grand  monde. 

Carte  des  poldres  et  des  forts  des  deux  rives  de  l'Escaut,  par 
H.  Le  Hon  ,  officier  d'infanterie.  Ibid.  ,  une  feuille  grand 
colombier. 

Géographie  de  la  Belgique,  par  J.  B.  Bivort  et  A.  WinkelL 
Mons,  Manceaux-Hoyois,  1839;  in-12. 


(  HG  ) 

BIOGRAPHIE. 

Herzog  Albrecht  der  Beherzte,  Stammvater  des  K.  Hauses 
Sachsen.  Von  Dr.  F.  A.  von  Langenn.  Leipzig,  Heinriclis,  1838. 

[Cette  biographie  se  rattache  à  l'histoire  de  notre  patrie.  Albert  de 
Saxe  était  général  en  chef  de  l'armée  allemande,  dans  la  guerre  que 
l'empereur  Maximilien  fit  dans  les  Flandres  (1489-1491).  Plus  tard  il 
devint  gouverneur  de  Frise  et  mourut  à  Embden  en  1500.] 

LITTÉRATURE. 

De  Leeuw  van  Vlaenderen,  of  de  Slag  der  gulden  Sporen; 
door  Hendrik  Conscience,  schryver  van  het  Wonderjaer  en 
der  Phantazy.  Antwerpen,  1838;  3  deelen  in-B",  pag.  206, 
194  et  190. 

[Nous  publierons  un  compte-rendu  de  cet  ouvrage.] 

Richilde,  ou  Épisodes  de  l'histoire  de  la  Flandre,  au  XI' 
siècle , par  Coomans  aine.  Gand,  L.  Hebbelynck ;  2  vol.  gr.  in-1  '2, 
pag.  200  et  207. 

Le  même  ouvrage,  grand  in-4°,  imprimé  sur  deux  colonnes. 
Gand ,  Hebbelynck ,  1838;  2'=  édition,  p.  128. 

[Cette  édition  de  luxe  renferme  10  lithographies,  exécutées  avec  soin 
par  MM.  J.  Coomans,  DeBlock,  J.  Jacops,  Melzer  et  Corrcns.  Ce  roman 
historique  embrasse  tout  le  règne  si  agité  de  la  comtesse  Richilde. 
M.  Coomans  y  a  traité  quelques  épisodes  avec  autant  d'exactitude 
que  d'intérêt.  Il  a  surtout  tiré  un  parti  remarquable  de  l'existence  des 
populations  sauvages  qui  habitaient  alors  le  pays  de  Ghistelles.  Ce  sujet 
entièrement  neuf,  occupe  une  grande  partie  du  livre  de  M.  Coomans.] 

Le  Livre  des  Salons,  recueil  littéraire,  artistique  et  fashio- 
nable.  Bruxelles,   1839;  in-B". 

[Une   livraison  par  semaine.] 

Histoire  de  Gilion  de  Trasignyes  et  de  dame  Marie  sa 
femme,  publiée  d'après  le  manuscrit  delà  bibliothèque  de 
l'Université  d'Iena ,  par  0.  L.  B.  Wolff.  Paris,  Brockhom; 
Leipzig,  Weber,  1839;  in-8°,  XIV  et  214  pag. 

[La  jolie  légende  de  Gilion  de  Trasignies ,  qui  fut  connétable  de 
France  sous  S'-Louis  ,  se  retrouve  dans  l'histoire  des  comtes  de 
Mansfeldt  et  de  Gleichen.  Elle  avait  inspiré,  au  «lix-scpticme  siècle, 
un  assez  méchant  roman.  M.  Baron,  dans  sa  Mosaïque  behje,  en 
a  tiré    une  nouvelle  piquante ,  mais  peut-être  écrite  avec  une  caus- 


(   117  ) 

ticité  trop  moderne.  Cependant  l'original  restait  toujours  enfoncé  dans 
la  poussière  des  bibliothèques.  Seulement  feu  M.  le  comte  de  S'-Genois 
en  avait  donné  un  extrait  dans  les  Pairies  du  Hainaut,  et  M.  Wolff 
en  avait  publié  à  la  suite  de  ses  chansons  populaires ,  im  autre  extrait 
reproduit  par  SDI.  Serrure  et  Voisin,  à  la  (in  du  Livre  de  Baudouin. 
M.  Wolff,  philologue  connu  par  son  goût  et  par  son  savoir,  vient 
d'en  mettre  au  jour  le  te\te  entier.  Il  a  dédié  son  livre  au  duc  de 
Saxe-Altenbourg,  comme  protecteur  éclairé  de  l'Université  diena  , 
et  à  M.  le  baron  de  Reiffenberg,  comme  homme  de  lettres,  cultivant 
la  littérature  du  moyen-âge.] 

PrijsTerz,en  op  de  dood  van  Egmont,  bekroond  door  het 
ïlhetorijk  van  Sotteghem.  Gent  ,  Vanderliaeghen -Hulin , 
1839;  in-8%  p.  40. 

[Les  poèmes  couronnés  sont  de  M.  Pr.  Van  Duyse  et  de  M"' Van 
Ackere ,  née  Marie  Doolaghe.] 

Nederduitsch  Jaerboekje  Toor  het  jaer  1839.  Gent,  Vander- 
haeghe-BIaja;  230  pag.  in-12. 

[Cet  annuaire  poétique  contient  des  pièces  devers  deUtJI.  Ledeganck, 
Van  Duyse,  Rens,  Blieck,  Blommaert,  De  Laet ,  Vervier,  Conscience, 
M""=  Van  Acker,  etc.] 

Genoveva  van  Braband.  —  Historié  van  Godfried  van  Bouillon. 

—  liet  Kasteel  van  Gaesbeek.  —  Het  Leven  van  de  H.  Gudula. 

—  Het  Leven  van  de  H.  Alena.  —  Een  belgisch  Huysgezin  voor 
J.  C.  — Eeuwige  Grondregelen  of  Meditatien.  —  De  Légende  der 
broeders  Van  Eyck.  —  De  Légende  van  den  H.  Albert  van  Luyk. 

—  De  Vlaemsche  Robinson.  Brussel ,  Maetschappy  ter  versprey- 
dingvan  goede  boeken;  1838,  in-32. 

[Ces  dix  petits  volumes  forment  la  1"  série  de  la  collection  des  livres 
pojxdaires  en  flamand ,  dont  la  Société  pour  la  propagation  des  bons  livres 
a  entrepris  la  publication.  Ce  sont  toutes  traductions  du  français.] 

Le  Bourgeois  de  Gand ,  ou  le  Secrétaire  du  duc  d'Albe,  drame 
en  cinq  actes  et  en  prose,  par  M.  Hipjwlyte  Romand.  Bruxelles, 
1838. 

Les  deux  Cousins,  ou  les  Suites  de  l'Education,  comédie  en 
trois  actes  et  en  vers,  dédiée  à  S.  A.  S.  le  prince  héréditaire 
de  Saxe-Cobourg-Gotha,  par  P.  Bergeron,  professeur  à  l'uni- 
versité libre,  etc.,  etc.  Bruxelles,  Parent,  1839;  in-8°  de  68 
pages. 

[Cet  ouvrage,  imprimé  aux  frais  de  Tautcur.  n'est  pas  dans  le  com- 
merce] 


{  ns  ) 

lets  over  Ferguut.  Leyden ,  Hazenherg,  1838  ;  in-8°. 

[C'est  une  analyse  critique  de  ce  roman  du  cycle  d'Arthur,  composé 
par  un  poète  flamand  du  XIII«  siècle ,  et  publié  récemment  par  le  pro- 
fesseur L.  G.  Visscher.] 

Gent,  dichtbespiegeling,  door  M''  Prudentius  Van  Duyse. 
Gent,  Vanderhaeghen-Hulin,  1839;  8  pag.  in-S". 

Napoléon  en  Belgique  et  en  Hollande ,  en  1811,  par  Charlotte 
De  Sor.  Bruxelles,  Hauman,  1838;  2  vol.  in-18. 

PUBLIGA-TIONS  PERIODIQUES. 

Revue  belge,  5°  année,  janvier  et  février.  Liège,  Jeune- 
homme,  1839. 

[Cette  livraison  contient  un  article  fort  important  sur  la  bataille  de 
Steppe ,  par  M.  Polain  ;  —  un  travail  tout  d'actualité  sur  l'état  de 
l'instruction  publique  en  Belgique  ,  par  M.  De  Haut  ;  —  une  chronique 
pleine  de  mouvement  et  de  chaleur,  par  M.  A.  Van  Hasselt,  etc.,  etc.] 

Annuaire  de  l'Académie  royale  des  Sciences  et  Belles-Lettres 
de  Bruxelles.  Cinquième  année.  Bruxelles,  1839;  148  p.  in-12. 

[Cet  annuaire  contient  des  notices  biographiques  sur  G.  Mol,  par 
A.  Quctelet;  sur  J.  P.  Minkelcers,  par  Ch.  Morren  ;  sur  Richard  Cour- 
tois, par  le  même;  sur  F.  J.  Raynouard,  par  le  baron  de  Reiffenbcrg; 
et  sur  Jacques  Goethals-Vercruysse,  par  A.  Voisin.] 

Belgisch  Muséum^  2^  deel,  A^  aflevering.  Gent,  Gyselinck, 
1838. 

[Les  principaux  articles  de  cette  livraison  sont  :  1»  les  chambres  de 
rhétorique  de  Furnes  et  des  environs,  par  Ph.  Blommaert  ;  —  2°  droits 
de  la  langue  flamande  au  XIX^  siècle,  par  J.  F.  Willenis;  —  3"  charte 
flamande  du  roi  de  France,  de  1385; —  4°  notice  biographique  sur  Sidro- 
nius  Hosschius ,  et  la  traduction  de  la  belle  élégie  Au  Sommeil,  par 
Pr.  Van  Duyse;  —  5°  une  pièce  de  poésie  :  Richesse  et  Pauvreté,  par 
C.  J.  Bogacrts;  —  6»  un  article  sur  J.  Van  Macrlant,  et  sur  le  heu  de 
sa  naissance,  la  ville  de  Damme  ,  par  J.  F.  Willcms.] 

Revue  de  Bruxelles,  livr.  de  février.  Bruxelles,  1839. 

[Cette  livraison  renferme  :  l»  Une  Conjuration  en  1568,  par  le  baron 
J.  de  Saint-Génois  ;  —  2o  Migrations  des  Flamands  au  XII"=  siècle ,  par 
G.;  — 3»  Huit  jours  à  Newcastle  en  1838,  par  Ch.  3Iorren;  —  4»  Bcl- 
giqiie  et  Pologne  ,  par  P.  De  Decker  ;  —  5"  un  morceau  de  poésie ,  par 
V.  H.  :  —  60  articles  ctraiig<"rs.] 


(  H9  ) 

Annuaire  de  l'Observatoire  de  Bruxelles,  pour  l'an  1839, 
par  le  directeur  A.  Quetelet.  Bruxelles,  Tircher;  in-16. 

Bulletin  de  l'Académie  des  Sciences  et  Belles-Lettres  de 
Bruxelles,  n°  %  Bruxelles,  Hayez,  1838;  in-S". 

[CcN"  renferme  des  conimuiiications  faites  par  MM.  Scheidweiler, 
Stas  5  Quetelet ,  De  Sniet ,  De  Reift'enberg  ,  De  Saint-Génois  ,  Roulez.] 

Compte-rendu  des  séances  de  la  Commission  royale  d'histoire 
ou  Recueil  de  ses  bulletins,  t.  II;  N°'  1  à  6.  Bruxelles,  1838  et 
1839,  Hayez ;in-8<'. 

ÉCRITS  POLITIQUES  ET  PAMPHLETS. 

Staetkundigen  catechismus  voor  het  belgisch  volk.  Gend, 
in-8°,  p.  33. 

Zamenspraken  der  Dooden  over  de  rechten  des  volks, 
gegrondvest  op  het  natuerrecht  van  den  mensch,  door  Sim- 
pliciusPublicola.  Gent,  by  C.  Van  Goelhem,1839;  in-8°,  p.  SS. 

Lettre  au  comte  de  Seneft-Pilsach ,  envoyé  extraordinaire 
d'Autriche  à  La  Haye  et  à  la  conférence  de  Londres ,  par 
L.  F.  De  Robiano  de  Borsbeeck.  Bruxelles ,  1839  ;  in-B". 

La  Lumière  portée  dans  les  ténèbres  de  la  banque  de  Bel- 
gique,  dédié  aux  capitalistes  belges,  français,  allemands  et 
hollandais,  par  P.  H.  Pauw,  de  Gand.  Bruxelles,  librairie  belge- 
française;  1838,  in-12,  p.  68. 

Aux  vrais  Belges  et  aux  Doctrinaires,  par  l'abbé  Peurette. 
Bruxelles,  De  Mat,  1838;  in-18,  pp.  21. 

Les  Masques  arrachés ,  par  De  Prenne,  avocat.  Bruxelles,  1 839. 

Aenspraek  tôt  het  vlaerasche  volk ,  gedaen  door  Hendrik 
Conscience  ,  op  den  vlaemschen  Schouwburg  te  Antwerpen  , 
den  6  february  1839.  Antwerpen ,  L.  J.  De  Cort;  in-S",  p.  12. 

Des  vingt-quatre  Articles  et  du  Luxembourg,  par  F.  Dubois, 
président  du  conseil  provincial  du  Luxembourg,  ia-8<'. 

Lettre  de  bonne  année  à  la  conférence  de  Londres ,  par  le 
baron  de  Bacilly.  Tournay,  Massart,  1839;  in-S". 

Aux  Armes  !  Aux  Armes  !  ou  la  Honte  et  la  Servitude  ; 
extraits  d'une  seconde  édition  de  la  brochure  intitulée  :  Aux 
peuples  de  l'Allemagne  ,  de  l'Italie ,  de   la  France ,  de  la 


(  120  ) 

Belgique,  etc.,  augmentés  de  réflexions  sur  la  jésuitocratie 
et  le  doctrinarisme;  par  l'abbé  Peurette.  Bruxelles,  J.  De  Mat, 
1839;  in-8°. 

De  l'honneur  national  à  propos  des  vingt-quatre  articles, 
avec  cette  épigraphe  :  Bcati  pacifici  quoniam  filii  Dei  voca~ 
buntiir,  Math.  V,  9.  Bruxelles,  Muquardt,  1839;  in-8",  IS  pag. 

Question  politique ,  lettre  à  M.  Thiers ,  par  un  pair  de 
France ,  relative  aux  affaires  actuelles  de  la  Belgique. 
Bruxelles,  Muquardt;    1839. 

MÉDECINE. 

Considérations  critiques  sur  la  phrénologie  et  la  cranios- 
copie,  par  F.  J.  Mathjssens.  Bruxelles,  Soc.  encycl.,  1839; 
59  pag.  in-12. 

Mémoires  de  la  Société  de  Médecine  d'Anvers,  1838-1838. 
Anvers,  J.  B.  Heirstraeten,  gr.  in-8°  à  2  col,,  XVI  et  68  p. 

ARCHITECTURE. 

Projet  de  communication  entre  le  Marché  aux  Herbes  et 
la  Montagne  aux  Herbes  potagères  à  Bruxelles.  Bruxelles  , 
Hauman,  1838  ;  in-8°,  12  p.,  avec  une  vue  et  un  plan  gravés. 

Plan  du  palais  de  justice  à  construire  à  Bruxelles,  dressé 
par  T.  F.  Suys,  architecte  du  roi.  Bruxelles,  impr.  du  3Ioniteur 
Belge ,  1838  ;  in-fol.,  6  pages  de  texte  et  7  planches. 

[L'auteur  vient  de  faire  de  grandes  modifications  à  ces  plans.] 

Plan  du  quartier  Léopold,  dressé  par  M.  Suys ,  en  exécution 
de  l'art.  4°  des  statuts  de  la  Société  civile  pour  l'agrandlsse- 
raent  et  l'embellissement  de  la  capitale  de  la  Belgique. 
Bruxelles,  1838;  1  feuille  piano. 

SCIENCES  JURIDIQUES. 

Code  de  l'Organisation  judiciaire  en  Belgique,  ou  Recueil, 
par  ordre  chronologique,  de  toutes  les  lois  ,  décrets  et  ordon- 
nances qui,  depuis  1789  jusqu'en  1838,  ont  été  rendus  sur 
cette  matière;  accompagné  de  notes,  etc. ,  par  Ch.  L.  Lefevi-e. 
Bruxelles,  Société  typographique  belge,  1839;  gr.  iu-S". 


(  121   ) 

Dictionnaire  de  Droit  commercial,  par  L.  M.  de  Villeneuve 
et  G.  Massé,  augmenté  en  Belgique  des  modifications  intro- 
duites dans  cette  partie  de  la  législation,  Ibid.,  gr,  in-B". 

Traité  de  l'Action  publique  et  de  l'x^ction  civile,  en  matière 
criminelle,  par  M.  Mangin.  Edition  mise  en  rapport  avec  la 
législation  belge.  Ibid.,  V°  livr. ,  gr,  in-8". 

ÉG0X03IIE    POUTIQUE. 

Indicateur  belge,  ou  Guide  du  commerce  et  de  l'industrie 
pour  1839,  Bruxelles,  Beauhard-Riuche,  in-8°. 

Exposé  historique  des  finances  du  royaume  des  Pays-Bas. 
Bruxelles,  De  Mat,  1838. 

Sur  le  Droit  difFérentiel ,  par  M.  J.-C.  Cassiers.  Bruxelles , 
De  Mat,  1838. 

Le  Répertoire  administratif  du  Hainaut,  par  J.  B.  Bivort,et 
précédé  d'une  notice,  par  Delecourt.   Mons,  Leroux,  1839; 


gr.  in-B**. 


ASCETIQUE. 


Meditatien  op  het  lyden  en  de  dood  van  Jésus,  voor  den 
vasten ,  door  H.  M.  Scliellens ,  pastor  te  Borgt-Loorabeek. 
Mechelen,  by  P.  J.  Hanicq,  1839;  in-B",  p.  430. 

Eerste  en  tweede  Verslag  van  het  belgische  en  buytenland- 
sclie  bybel-genootschap.  Voorgedragen  den  -4  april  1837  en  den 
3  april  1838.  Brussel,  Hodd ,  1839;  70  pag.  in-8°, 

Uytlegging  van  de  twaelf  artikelen  des  Geloofs,  een  lees- 
boekje  voor  kinderen,  door  J.  Pieters.  Malines,  Hanicq,  1838; 
72  pag.  in-18. 

Een  Maend  van  Jésus,  of  de  Maend  van  January  toegewyd 
aen  Jesus-Christus  en  geheyligd  door  meditatien  van  iederen 
dag  der  maend,  uit  het  fransch.  Ibid. ,  400  pag.  in-S". 

GRAM3LA.IRE. 

Cours  de  prononciation  de  lecture  à  haute  voix  et  de  réci- 
tation,  d'après  les  grammaires  les  plus  estimées,  par  un  pro- 
fesseur (Fred.  lL),2«édit.  Tournai,  Casterraan,  in-12,  p.  VI  et  182. 

[Ouvrage  d'une  utilité  reconnue ,  qu'il  serait  heureux  de  voir  adopter 


(  122) 

dans  les  établissements  d'instruction  publique.  Nous  félicitons  l'auteur 
de  cet  ouvrage  d"avoir  comblé  par  cet  important  et  minutieux  travail  la 
lacune  qui  existait  dans  cette  partie  si  essentielle  de  l'éducation.] 

Grammaire  flamande,  adaptée  à  la  grammaire  française  de 
Noël  et  Chapsal,  par  Cb.  Yan  der  Vorst.  Louvain,  Van  Linthout, 
18g8;in-12. 

OUVPiAGES  DIVERS. 

Traité  complet  sur  les  causes  d'explosion  des  machines  et 
chaudières  à  vapeur  et  sur  les  raovens  et  mesures  propres  à 
prévenir  désormais  les  explosions,  avec  le  texte  annoté  et 
commenté  de  l'ordonnance  ministérielle  promulguée  dans  le 
Moniteur  Belge  du  -i  décembre  1838  ,  sur  la  police  des 
machines  à  vapeur  en  Belgique  ,  par  D.  Tack.  Bruxelles , 
Jamar,  1839;  in-S". 

Catalogue  des  livres  rares  et  précieux  de  la  Bibliothèque 
de  feu  M.  Lamraens,  première  partie.  Gand,  1839  ;  in-8",  deVI 
et  406  pag. 

[Il  contient  6000  numéros.  En  fête  se  trouve  une  notice  biographique 
sur  M.  Lammens.] 

L'Ecole  dominicale  considérée  comme  base  fondamentale 
du  bonheur  de  la  classe  ouvrière,  par  Melchior  J,  C.  Kramp. 
Anvers,  1838;  141  pag.  in-8°. 

Notice  sur  un  voyage  horticole  et  botanique ,  en  Belgique  et 
en  Hollande  ;  par  M.  BafFeneau-Delile  (Alire).  Montpellier,  1 838  ; 
in-8°  de  72  pages. 

[ Extrait  du  Bulletin  de  la  Société  d'Agriculture  de  IHérault  et  orné 
de  cinq  planches ,  dont  deux  représentent  les  serres  de  M.  le  sénateur 
Hendrickx,  près  de  Gand  :  la  troisième  ,  les  serres  et  l'orangerie  de  l'Uni- 
versité de  la  même  ville,  et  la  quatrième  .  les  serres  de  Louvain.  L'auteur 
donne  des  détails  très-curieux  sur  les  jardins  botaniques  de  Bruxelles, 
Gand ,  Liège,  Anvers ,  Louvain  et  sur  plusieurs  collections  particulières.] 

Guide  des  officiers,  sous-officiers  et  soldats  de  la  garde  civi- 
que, revu  et  augmenté  de  l'uniforme  des  gardes.  Bruxelles, 
J.  De  Mat,  1839;in-12. 


(  123  ) 


2mivBC  ^C5  bulletins 

BES     SÉANCES     DE      LA     COMMISSION     ROÏALE     d'UISTOIHE. 

6^  Bulletin.  —  Séance  du  3  novembre  1838  (1). 

Il  est  donné  lecture  d'un  arrêté  royal  qui  nomme  mem- 
bre de  la  commission,  en  remplacement  de  M.  Warnkœnig, 
M.  Duraortier,  membre  de  la  chambre  des  représentants  et  de 
l'Académie, 

Parmi  la  correspondance  que  le  secrétaire  fait  connaître , 
M.  le  marquis  de  Fortia  annonce  qu'il  publie  en  ce  moment 
Hugues  Metellus,  précédé  d'une  longue  introduction  sur  la 
Lotharingie  ; 

M.  Francisque  Michel  promet  d'envoyer  sous  peu  une  no- 
tice de  quelques  manuscrits  en  vers  et  en  prose  relatifs  à 
l'histoire  de  Tournay.  Il  ajoute  qu'il  termine  le  second  vo- 
lume de  ses  chroniques  anglo-normandes ,  ainsi  que  son 
édition  du  Roman  de  Foulques  Fitz-Warin ; 

M.  Lucien  De  Rosny,  en  mettant  au  jour  des  Nouvelles  re- 
cherches sur  les  rois  de  l'Epinette,  y  joindra  une  Notice  sur  la 
fête  des  forestiers  à  Bruges; 

M.  Fréd.  Wolf,  secrétaire  de  la  Bibliothèque  impériale  de 
Vienne,  fera  parvenir  incessamment  un  Essai  sur  les  lois  fran- 
çaises et  anglaises  du  moyen-âge  et  sur  leurs  formes  primitives  ; 

M.  Jules  Desnovers,  secrétaire  de  la  société  de  l'histoire  de 
France,  fait  savoir  que  cette  société,  sur  la  proposition  de 
31.  Guérard,  membre  de  l'Institut,  a  arrêté  la  publication  d'une 
nouvelle  édition  de  Philippe  de  Commines,  dont  on  rétabli- 
rait le  texte ,  et  qui  serait  en  outre  éclaircie  par  l'adjonction 

(1)  Ce  6=  Bulletin  complète  le  2*  volume  des  comi)tes  rendus  de  la 
Commission. 


(  124  ) 

de  pièces  importantes  conservées  à  la  Bibliothèque  royale  et 
dans  les  archives  du  rovaume; 

M.  A.  Lacroix ,  archiviste  de  la  province  du  Hainaut ,  a  en- 
voyé à  M.  De  ReifFenberg,  pour  son  Recueil  de  documents  sur 
le  Hainaut,  une  notice  historique  extraite  d'un  mémorial  des 
années  1402-l-iâ2,  relative  aux  différends  de  Jean  de  Bavière, 
évêqne  de  Liège,  et  de  Guillaume,  comte  de  Hainaut,  son  frère. 
Il  y  joint  divers  manuscrits  héraldiques  de  son  cabinet  part- 
iculier, dont  il  pense  qu'on  pourrait  tirer  quelques  extraits  (l), 

M.  De  Reiffenberg,  qui  vient  de  visiter  les  archives  commu- 
nales de  Mous,  y  a  vu  un  tableau,  formé  en  177-4,  d'après  des 
documents  plus  anciens,  sur  l'ordre  des  Etats  du  Hainaut,  par 
le  greffier  Dumont.  Il  est  intitulé  :  Nohilis  Hannoniœ  coniita- 
tus  Descriptio ,  et  contient,  avec  des  légendes,  les  armoiries 
coloriées  de  toutes  les  villes,  bourgs,  pairies,  seigneuries  et 
nobles  de  la  province.  M.  De  Reiffenberg  se  propose  d'en  faire 
prendre  une  copie  pour  en  orner  ses  Monumenta  ad  Hannoniœ 
historiani  sjjectantia. 

M.  L.  De  Maslatrie,  de  l'école  des  Chartres,  a  examiné  le 
MS.  latin,  N"  5440,  de  la  Bibliothèque  royale  de  Paris,  ren- 
fermant les  Annales  Acquicinctenses.  La  feuille  de  garde  ofiFre 
la  note  suivante  ; 

«  Ex  mS'°.  S.  Pétri  Gandavi. 

•  Annales  quidam  maxime  Belgici  et  de  terra  sancta  ab 
.  anno  MCXLV  ad  annum  MCCLXXXVIII. 

•  Annales  Acquicinctensis  monasterii.  Sunt  in  hoc  codice 
«  multa  quce  ex  codice  Acquicinctino  édita  sun t  ab  AubertoMirœo 
»  in  auctariis  ad  chronicon  Sigeberti  nimirum  ab  anno  MCLXIII 
»  usque  ad  annum  MCCXXV.  Sed  tamen  sunt  istic  variis  in  locis 
•  raulta  quae  non  exstabant  in  auctario  Acquicinctino.  » 

Le  MS.  a  278  pages.  La  partie  publiée  par  Le  Mire  ne  com- 
mence qu'à  la  page  28  et  ne  va  que  jusqu'à  la  page  224.  Il 
y  a  donc  au  commencement  du  MS. ,  27  pages  inédites  et  à  la 

(1)  M.  Lacroix  acliève  en  ce  moment  un  inventaire  analytique  des 
archives  de  Mons.  Il  est  mi  des  éditeurs  du  recueil  que  fait  imprimer  la 
société  des  bibliophiles  de  la  même  ville,  et  qui  a  pour  objet  la  célèbre 
Jacqueline  de  Bavière. 


(  125  ) 

• 

fin  ii4  pages.  Ces  })artics  non  publiées,  ainsi  que  les  leçons 
qui  différeront  du  te^te  de  Le  Mire,  seront  insérées  dans  le 
Recueil  sur  le  Uaiuaut,  suivant  la  résolutiou  déjà  prise  dans  la 
séance  du  28  octobre  183-i. 

M.  De  ReifFenberg  dépose  sur  le  bureau  une  description 
d'un  manuscrit  dont  l'acquisition  a  été  proposée  à  la  Biblio- 
thèque royale  : 

«  Généalogie  ou  descente  de  la  noble  et  ancbiene  maison 
«de  L'herniite,  recopilié,  curieusement  recerchée  et  extraicte 
»de  divers  autheurs  ,  papiers  et  documens,  par  Nicolas  de 
»  Campis ,  dict  Bourgoigne ,  roy  d'armes  de  Sa  Majesté  Ca th. 
»  Philippe  II,  roy  des  Espaignes  et  successivement  de  son  fils 
«Philippe  III,  et  parachevée  l'an  MD.CII.  »  Grand  in-fol.,  pap., 
orné  d'une  multitude  d'armoiries  coloriées,  de  portraits, 
sceaux  et  autres  dessins,  etc. 

L'auteur,  Nicolas  Deschamps,  était  né  à  Maubeuge.  Il  sui- 
vit en  Espagne  le  cardinal  de  Granvelle,  qui  lui  fit  obtenir 
l'emploi  de  roi  d'armes,  du  titre  de  llainaut,  puis  de  Brabant 
et  enfin  de  Bourgogne.  Eu  1580,  il  fut  envoyé  par  le  roi  aux 
Pays-Bas,  pour  porter  l'ordre  de  la  Toison  d'or  à  plusieurs 
seigneurs.  Il  mourut  à  Valladolid  le  9  mai  160-i. 

Deschauips  dédie  son  travail,  qui  parait  être  fait  avec  un 
soin  extrême,  à  Jean  l'Hermite  ,  gentilhomme  de  la  chambre 
de  Philippe  II  et  de  Philippe  III;  il  s'étend  dans  cette  dédicace 
sur  l'ancienneté  reconnue  de  sa  maison  et  sur  celle  de  ses 
armoiries  de  Sinople,  au  dizain  ou  patenotre  d'or ,  enfilé  et 
houppe  de  même ,  mis  en  chevron,  accompagné  de  trois  quinte 
feuilles  d'argent  percées ,  deux  en  chef  et  l'autre  en  pointe; 
armoiries  qui  se  trouvaient,  dit-il  ,  au  chef  de  Jérusalem,  sur 
une  médaille  possédée  par  le  roi  d'Espagne,  qui  en  fit  cadeau 
à  Jean  l'ilermite,  en  1597.  Elle  portait  pour  légende  Ntimus 
pcregrinorum,  et  représentait  le  blason  d'Albert  l'Hermite, 
patriarche  de  Jérusalem,  en  1206.  L'empreinte  se  voit  au 
revers  du  222"  feuillet. 

Après  cette  dédicace,  le  savant  roi  d'armes  entre  en  matière 
et  se  borne  à  remonter  à  Pierre  l'Hermite ,  dont  il  donne  le 
vrct/j^  pourtraict,  ainsi  que  celui  de  Godefroid  de  Bouillon. 
La  vie  de  Pierre  l'Hermite  d'Amiens ,  est  extraite  mol  à  mot 


(  126  ) 

d'un  manuscrit,  authentiqué,  en  1305,  par  quatre  hommes  de 
fief  du  Hainaut.  On  y  lit  qu'il  épousa  Béatrice  de  Roussy  dont 
il  eût  la  postérité,  qui  a  déjà  été  déduite  dans  un  précédent 
bulletin  (1). 

Cette  vie  est  suivie  d'un  seconde  biographie  du  même  per- 
sonnage, par  Guillaume  de  Tyr  et  plusieurs  autres  écrivains. 

Deschamps,  sur  le  témoignage  de  quelques  auteurs,  attri- 
bue à  Pierre  l'IIermite  l'invention  du  chapelet. 

A  ce  long  morceau  d'histoire  succèdent  plusieurs  listes  des 
croisés  de  renom  avec  leurs  armoiries;  les  noms  des  princes 
et  seigneurs  qui  furent  à  la  bataille  de  Poitiers,  en  13o6  : 
parmi  eux,  on  remarque  Jean  de  Lalaing;  les  seigneurs  et 
chevaliers  assiégés  dans  Audenarde  par  les  Gantois ,  en 
1380,  etc.,  etc. 

Il  est  peu  de  généalogies  dressées  d'une  manière  plus  com- 
plète et  qu'on  ait  tâché  de  rallier  plus  étroitement  à  l'histoire. 
Toutefois  celle-ci  n'y  trouverait  pas  de  fiiits  nouveaux,  du 
moins  de  ceux  qui  lui  appartiennent  par  leur  importance.  Il 
a  donc  fallu  que  la  Bibliothèque  royale  renonçât  à  cette  ac- 
quisition, puisque  l'utilité  et  la  valeur  du  manuscrit  n'étaient 
pas  proportionnées  au  prix  considérable  qu'on  en  demandait. 

M.  E.  Gachet,  ayant  à  faire  un  voyage  dans  le  Hainaut,  a 
saisi  cette  occasion  pour  recueillir  des  renseignements  sur  les 
documents  historiques  qui  concernent  cette  province.  Parmi 
les  notes  qu'il  a  remises  à  M.  De  Reiffenberg,  chargé  de  travail- 
ler sur  le  Hainaut,  et  qui  roulent  sur  les  archives  de  S'^-Wau- 
dru,  sur  les  archives  provinciales,  sur  celle  de  la  commune  de 
Beaumont ,  sur  le  cartulaire  de  S'-Denis  en  Broqueroie ,  etc.,  le 
bulletin  transcrit  la  pièce  suivante  : 

«  Extrait  de  l'inventaire  des  titres  et  papiers  autrefois  dé- 
»  posés  aux  archives  du  château  à  Boussu  et  actuellement  au 
•  château  de  Beaumont.  «(Suit  la  description  qui  occupe  26 
pages  d'impression). 

M.  le  baron  Jules  de  S'-Genois  écrit  que  parmi  les  extraits 
(1)  Voyez  page  343  du  volume  de  1838. 


(  127  ) 

du  compte  des  recettes  et  des  dépenses  de  Guy  de  Dampierre , 
il  a  trouvé  encore  un  nouveau  rôîe  contenant  les  dépenses  et 
les  recettes  faites  par  Makiaus ,  pendant  le  voyage  de  Guy 
de  Dampierre  en  Sicile,  depuis  le  lundi  après  la  Toussaint 
(3  nov.  1270)  jusqu'au  mardi  après  la  Chandeleur  (4  février) 
même  année  (1271).  La  suite  du  prince  était  fort  nombreuse. 
Outre  une  foule  de  grands  seigneurs  qui  la  composaient,  on 
y  voyait  son  barbier,  son  pannetier,  son  bouteillier,  son  huis- 
sier, son  intendant  des  menues  dépenses,  son  argentier,  son 
fauconnier,  son  aumônier,  son  tailleur,  etc.  Parmi  tous  ces 
personnages,  se  trouve  Adan-le-Menestrel,  qui  accompagne  par- 
tout Guy  de  Dampierre,  à  Palerme,  à  Messines,  à  Cosensa,  à 
Catane,  à  Mont-Réal.  D'après  ce  compte,  il  paraîtrait  que  cha- 
que personne  recevait  des  mains  de  BInkiaus  une  certaine 
somme  proportionnée  aux  besoins  de  chaque  jour,  qu'on  appe- 
lait gages.  Ainsi,  le  jour  qu'Aclan-le-Blenestrel  partit  de  Pa- 
lerme pour  Messines,  on  lui  donna  V  sols  VIII  deniers,  à 
Messines  il  reçut  VI  sols  VIII  deniers,  à  Catane  XX  deniers. 

Le  comte  Guy  semble  avoir  affectionné  particulièrement 
les  ménestrels;  il  entretenait  avec  eux  une  familiarité  qui  est 
à  elle  seule  un  beau  titre  d'éloges  pour  ce  prince  si  diverse- 
ment jugé  par  les  historiens.  Arrivé  de  Palerme  à  Calabou- 
îon  (?)  le  lundi  après  Noël,  au  soir,  nous  voyons  que  fu  là  celé 
nuit,  et  lendemain  disnaavoec  les  ménestrels.  A  cette  occasion, 
il  dépensa  pour  sa  cuisine  XI  lib.  XIII  sols  I  denier;  pour  le 
pain,  CV  sols;  pour  le  vin,  IIII  lib.  V  sols;  pour  l'appartement 
où  ils  dinèrent  XV  sols. 

Ces  renseignements  semblent  au  premier  abord  être  de  peu 
d'importance  ;  cependant  lorsque  toutes  ces  particularités  épar- 
pillées se  réunissent  ensuite  pour  expliquer  la  vie  d'un  hom- 
me, on  ne  peut  les  négliger,  surtout  quand  cet  homme  est 
Adenez-le-Roy. 

M.  De  S'-Genois,  saisit  cette  occasion  pour  faire  connaître 
que  son  Inventaire  des  char  très  de  Rupeî  monde  est  achevé  main- 
tenant jusqu'à  l'an  1300,  et  que  cette  première  série  contient 
à  peu  près  mille  pièces  différentes  (chartes,  diplômes,  lettres, 
bulles  et  rôles).  Parmi  ces  pièces,  il  en  est  une  grande  quan- 


(  128  ) 

tité  qui  concernent  la  lutte  si  célèbre  des  d'Avesnes  et  des 
Dampierre,  et  la  situation  financière  de  la  Flandre  pendant 
cette  période  du  moyen-âge. 

La  seconde  série  comprendra  toutes  les  chartes  et  autres 
documents  (des  dépôts  de  Rupelmonde)  d'une  époque  posté- 
rieure. Le  nombre  en  est  estimé  à  ISOO.  L'ancien  dépôt  des 
Comtes  est  excessivement  pauvre  pour  la  partie  bourgui- 
gnonne, ainsi  que  pour  l'époque  subséquente.  11  n'y  a  peut- 
être  pas  100  pièces  des  comtes  après  Marguerite  de  Maie  et 
Philippe-le-Hardi. 

Cette  lettre  est  suivie  d'un  nouveau  rapport  de  M.  le  doc- 
teur Coremans  sur  les  archives  allemandes  : 

Depuis  son  dernier  rapport,  il  a  inventorié  au-delà  de  500 
liasses,  et  restant  fidèle  à  l'ordre  adopté  précédemment,  il 
consigne  de  la  manière  suivante  ce  qu'elles  offrent  de  plus 
saillant  : 

5  1.  Réforme  religieuse  et  époque  de  Charles -Quint. 

Le  nombre  des  volumes  reliés  s'élève  à 'présent  à  15,  et 
ils  vont  jusqu'en  1552  :  mais  des  recherches  postérieures  ont 
encore  fait  retrouver  un  grand  nombre  de  pièces  intéres- 
santes relatives  au  même  sujet  : 

1°  Papiers  concernant  ce  qui  s'est  passé  à  la  diète  de  Ratis- 
bonne,  en  1532,  et  surtout  à  l'égard  du  concile-général; 

2°  Une  suite  de  documents  sur  la  réforme  et  sur  d'autres 
sujets,  écrits  de  la  main  de  Viglius;  un  traité  sur  la  fondation 
et  les  progrès  de  la  cour  impériale  de  Spire,  par  le  même. 

En  outre,  les  pièces  concernant  les  différents  épisodes 
historiques,  auxquels  se  rapportent  les  volumes  de  la  collec- 
tion de  documents  sur  la  reforme,  se  sont  notablement  com- 
plétées. Elles  forment  5  à  6  volumes  de  supplément  à  la 
collection  précitée. 

D'autres  documents  de  la  même  époque  ont  été  réunis  et 
méritent  d'attirer  l'attention.  Ce  sont  des  pièces  concernant 
les  affaires  de  la  Hongrie,  les  guerres  et  les  négociations  avec 
les  Turcs,  l'ambassade  de  Gérard  Weltwick  à  Constantinople, 
en  1544.  Enfin  des  papiers  touchant  le  voyage  du  chevalier 


(  129  ) 

de  Balbi,  envoyé,  en  loSO,  près  du  roi  de  Perse,  pour  le  porter 
à  déclarer  la  guerre  aux  Turcs  en  même  temps  que  l'empe- 
reur. Ces  papiers  sont  curieux. 

§  2.  Guerre  de  trente  ans. 

Les  documents  relatifs  à  cette  période  se  sont  augmentés 
d'un  très-grand  nombre  de  liasses,  de  correspondances  et 
d'autres  pièces  qui  jettent  un  grand  jour  sur  les  événements 
majeurs.  Tous  les  principaux  personnages  d'alors  se  montrent 
à  nous  avec  leurs  passions,  leurs  espérances,  leurs  talents, 
leurs  vertus  et  leurs  défauts. 

Plusieurs  lettres  de  Wallenstein  sont  venues  se  joindre  à 
celles  déjà  rassemblées.  Cependant  sa  dernière  lettre  originale 
est  toujours  celle  du  28  novembre  1632,  écrite  un  an  et  deux 
mois  avant  sa  mort.  Dans  un  rapport  précédent,  en  parlant  des 
Wallons  commandés  par  un  De  Mérode ,  l'adjudant  fidèle  de 
Wallenstein,  il  a  été  remarqué  que  la  Belgique,  sous  le  rap- 
port militaire  comme  sous  le  rapport  diplomatique,  avait  pris 
une  part  très-remarquable  à  la  guerre  de  trente  ans,  que  la 
gloire  du  duc  de  Friedlant  fut  en  partie  celle  des  Belges. 
Cela  est  plus  vrai  encore  de  Tilly,  un  des  plus  illustres  capi- 
taines de  l'Europe  moderne,  qui  nous  appartient  et  dans 
l'armée  duquel  les  Belges  jouaient  un  rôle  principal. 

5  3.  Histoire  des  Pays-Bas, 

Des  documents  importants  sont  venus  se  joindre  à  ceux  déjà 
énumérés  dans  les  précédents  rapports,  touchant  le  célèbre 
traité  de  fédération  qui,  en  134^8,  rattacha  les  destinées  des 
Pays-Bas  à  celles  de  l'Allemagne,  et  surtout  touchant  son 
exécution  jusqu'en  1700.  Ban  de  la  pragmatique  sanction  de 
Charles-Quint,  formant  de  toutes  les  provinces  des  Pays-Bas 
l'état  du  cercle  de  Bourgogne,  première  transaction  diploma- 
tique reconnaissant  la  nationalité  de  nos  provinces,  pierre 
fondamentale  de  tous  les  actes  et  traités  postérieurs,  dérivés 
de  cette  nationalité.  Ce  traité  restera  toujours  mémorable 
pour  nous. 

La  correspondance  du  conseiller  de  la  Neuve-Forge,  notre 
ambassadeur  à  la  diète  de  Batisbonne  pendant  tout  le  der- 

9 


{    130) 

nier  quart  du  XVIP  siècle,  s'est  augmentée  d'uiie  douzaine 
de  liasses.  Elle  offre  aussi,  sur  la  question  des  relations  des 
Pays-Bas  avec  la  Belgique,  les  données  les  plus  précieuses 
De  la  Neuve-Forge,  durant  tout  le  temps  de  son  ambassade 
ne  cessa  de  défendre,  avec  la  plus  grande  énergie,  le  droit  de 
toutes  les  provinces  à  l'aide  et  protection  de  l'Allemagne,  et 
il  prophétisait  la  chute  de  l'empire,  du  jour  où  il  renoncerait 
au  cercle  de  Bourgogne,  prophétie  qui  s'est  complètement 
réalisée. 

Une  multitude  de  documents  relatifs  à  l'histoire  de  la  Bel- 
gique sous  le  gouvernement  de  la  reine  Marie  de  Hongrie,  s'est 
réunie  à  ceux  indiqués  antérieurement.  Les  correspondances 
de  la  reine  Marie  forment  à  présent  une  suite  intéressante  et 
riche  en  renseignements  remarquables  de  tout  genre.  Ceci  se 
rapporte  aussi  aux  pièces  de  celles  du  duc  Philibert,  de  la 
duchesse  de  Parme,  du  duc  d'Albe ,  du  grand  commandeur 
Requesens ,  du  duc  de  Parme  et  du  comte  de  Mansfeld.  La  cor- 
respondance d'Albert-le-Magnanime  avec  les  gouverneurs  des 
Pays-Bas,  depuis  1557  jusqu'en  1579,  a  encore  acquis  une 
nouvelle  valeur  par  la  découverte  d'une  suite  de  réponses 
faites  par  ces  gouverneurs  aux  lettres  du  duc.  Ces  réponses 
donnent  des  détails  sur  les  événements  qui  se  passaient  aux 
Pays-Bas,  et  qui ,  rapportés  par  un  duc  d'Albe  ou  un  Don  Juan 
d'Autriche,  ont  de  l'importance.  Il  a  été  joint  à  cette  corres- 
pondance plusieurs  lettres  confidentielles  du  roi  Philippe  II, 
à  son  ami  intime  de  Munich  sur  la  situation  des  Pays-Bas,  en 
1366  en  1567,  et  les  mesures  qu'il  avait  été  forcé  de  prendre 
pour  rétablir  l'ordre  dans  ces  provinces.  La  duchesse  de  Parme 
semblait  avoir  douté  de  l'opportunité  des  aveux  faits  dans 
une  des  lettres  du  roi  Philippe,  et  elle  l'avait  retenue  à 
Bruxelles  Le  roi  mentionne  cette  circonstance  dans  une 
autre  lettre  et  entre  dans  de  nouveaux  détails  sur  les  affaires 
des  Pays-Bas. 

Les  liasses  du  règne  de  l'archiduc  Albert  et  de  l'infante 
Isabelle,  se  sont  très-considérablement  accrues;  on  ne  croit  pas 
qu'il  puisse  exister  une  collection  de  documents  donnant  un 
tableau  plus  fidèle  du  caractère  politique  et  diplomatique  de 
ce  temps.  Une  de  ces  liasses  renferme  des  renseignements  tout- 


(  131  ) 

à-fait  inconnus  touchant  le  constructeur  d'une  œuvre  souvent 
admirée,  de  la  machine  hydraulique  de  Bruxelles.  Ce  con- 
structeur est  un  Allemand,  nommé  Maître  Georges  Muller, 
d'Augsbourg,  qui  a  aussi  construit  à  Bruxelles  deux  pompes, 
l'une  dans  le  labyrinthe  et  l'autre  dans  les  écuries  de  la 
cour. 

Les  documents  de  l'époque  de  l'archiduc  Léopold-Guillaume 
et  plus  encore  de  celle  de  l'électeur  de  Bavière,  Maximilien 
Emmanuel  «  le  roi  hleu  «vainqueur  des  Turcs,  se  sont  aug- 
mentés de  plus  de  moitié. 

M.  Corenians  mentionne  enfin  une  liasse  contenant  des 
lettres  confidentielles,  écrites  par  les  ministres  de  l'empereur 
à  Londres  et  à  La  Haye,  concernant  les  négociations  du  fameux 
traité  de  la  Barrière  ;  ces  lettres  sont  pleines  d'intérêt. 

§  h.   —  Histoire  d' Allemagne. 

Dans  les  liasses  nouvellement  inventoriées,  plusieurs  con- 
tiennent des  documents  remarquables  qui  se  rapportent 
exclusivement  à  l'histoire  d'Allemagne.  Les  révélations  pi- 
quantes sur  les  cours  des  empereurs  Rodolphe  II,  Mathins  et 
Ferdinand  11,  se  sont  complétées  par  la  découverte  de  nou- 
velles correspondances,  entrant  aussi  en  des  détails  impor- 
tants sur  les  démêlés  des  princes  de  la  famille  d'Autriche, 
au  commencement  du  XVIP  siècle.  Une  quantité  d'autres  cor- 
respondances nous  initient  aux  affaires  politiques  de  l'Alle- 
magne. Dans  la  seconde  partie  du  XVIP  siècle,  ce  sont  celles 
du  baron  de  Metternich ,  du  baron  de  Landsa  (1673-1680),  du 
baron  Goesse ,  notre  résident  à  Berlin  (1667-1703),  etc.,  etc. 

Bï.  Gachard  a  adressé  le  rapport  suivant  (par  extrait),  daté 
de  Dijon,  le  29  octobre  1838 ,  pour  être  mis  sous  les  yeux  de 
la  commission. 

«  Je  vous  annonçais  dans  ma  dernière  lettre  que  je  partais 
pour  Aix  ,  où  l'on  m'avait  assuré  qu'il  existait  des  correspon- 
dances du  cardinal  de  Granvelle. 

•  J'y  ai  en  effet  trouvé  4  vol.  gr.  in-folio,  intitulés  Manus- 
crits de  Granvelle.  ;  mais  j'ai  reconnu  qu'ils  n'offraient  qu'une 
copie  d  une  faible  partie  des  documents  conservés  à  Besançon. 


(  132  ) 

Deux  de  ces  volumes  contiennent  ce  qiie  l'abbé  Boisot  a 
appelé  l'Apologie  de  l'empereur  Charles- Quint  ;  c'est  un 
recueil  de  mémoires,  de  lettres,  d'instructions  diplomatiques 
ou  de  traités ,  relatifs  aux  différends  que  fit  naitre  la  rivalité 
de  Charles-Quint  et  de  François  I,  etc.  Dans  toute  cette  affaire, 
la  conduite  de  François  I  ne  se  montre  pas,  il  faut  bien  en 
convenir,  sous  un  jour  aussi  brillant  que  les  écrivains  français 
ont  voulu  le  faire  croire  ,  etc. 

»Dom  Berthot  avait  pour  \' Apologie  de  Charles-Quint  une 
estime  particulière  :  il  se  trompe  au  reste  lorsqu'il  dit  que 
la  plupart  des  pièces  dont  elle  se  compose  sont  originales. 
C'est  aux  archives  de  Bruxelles  que  s'en  conservaient  les 
originaux  ;  malheureusement  on  leur  fit  prendre,  en  179-4,  le 
chemin  de  Vienne  où  ils  sont  restés. 

«Les  deux  autres  volumes  intitulés  Manuscrits  de  Granvclle, 
renferment  des  dépèches  adressées  par  Charles-Quint  à  ses 
ambassadeurs  en  France,  dans  les  années  1 531  -1  S35,et  quelques 
lettres  envoyées  au  cardinal ,  écrites  par  lui-même.  Ce  que 
j'y  ai  trouvé  de  plus  intéressant,  c'est  une  lettre  du  cardinal 
à  l'empereur  Maximilien  II,  datée  de  Besançon,  le  8  mai  1564, 
et  une  lettre  de  Viglius  au  cardinal,  écrite  de  Bruxelles  le 
9  du  même  mois,  toutes  deux  relatives  à  sa  retraite  en  Bour- 
gogne. Vous  savez  que  nos  historiens  attribuent  cette  retraite 
à  un  ordre  de  Philippe  II,  et  qu'ils  en  font  un  sujet  de  mor- 
tification pour  Antoine  Perrenot  :  vous  allez  voir  par  les 
extraits  de  ces  lettres,  que  son  départ  de  Bruxelles  fut  tout- 
à-fait  volontaire  et  que  le  roi  n'y  donna  qu'à  regret  son  con- 
sentement. 

»  J'étais  instruit  que  la  bibliothèque  d'Aix  possède  un 
recueil  volumineux  des  correspondances  de  Peiresc,  et  j'avais 
conçu  l'espoir  d'y  trouver  des  lettres  de  Ilubens,  qui  entre- 
tenait avec  ce  savant  des  relations  suivies.  Mon  attente  n'a 
pas  été  trompée.  Dans  l'un  des  volumes  de  cette  (correspon- 
dance, côté  RS,  il  y  a  dix-sept  lettres  de  notre  grand  peintre  : 
toutes  sont  en  italien. 

«Dans  sa  correspondance  avec  Dupuy,  que  j'ai  fait  copier  à 
Paris,  Rubens  s'occupe  principalement  des  affaires  politiques 
et   militaires  de  son   temps.  Les   lettres  conservées  à  Aix  , 


(   133  ) 

offrent  un  intérêt  supérieur;  l'ami  de  Peiresc  et  de  Valarés  y 
traite  des  questions  d'archéologie  qui  lui  étaient  familières 
tout  autant  que  celles  qui  se  rapportaient  aux  beaux-arts  :  il 
y  parle  de  ses  ouvrages  et  de  lui-même. 

»Le  bibliothécaire  d'Aix ,  M.  Rouard,  m'a  obligeamment 
promis  qu'il  chercherait  une  personne  capable  de  transcrire 
correctement  le  texte  italien  de  ces  lettres. 

•  Après  les  manuscrits  de  Granvelle  et  les  correspondances 
de  Peiresc  ,  la  bibliothèque  d'Aix  ne  renferme  plus  que  deux 
ouvrages  qui  aient  quelque  intérêt  pour  la  Belgique  :  le  1" 
est  une  chronique  de  Tongres  et  du  pays  de  Liège,  jusqu'à 
l'an  IS31 ,  et  l'autre  est  une  relation  détaillée  de  la  bataille, 
du  siège  et  de  la  prise  de  S'-Quentin. 

A  mon  passage  par  Ljon,  je  n'ai  pas  négligé  de  visiter  la 
bibliothèque  de  cette  grande  ville.  Il  existe  un  catalogue 
imprimé  en  3  vol.  in-8°,  des  manuscrits  qu'elle  possède.  Les 
ouvrages  qu'il  renseigne  sont  au  nombre  de  1518  ;  mais  tout 
au  plus  pourrait-on  citer  deux  ou  trois  manuscrits  qui  aient 
rapport  à  la  Belgique. 

»  Les  archives  des  ducs  de  Bourgogne,  dont  l'examen  m'oc- 
cupe ici  (Dijon)  depuis  8  jours,  n'ont  pas  pour  nous  l'impor- 
tance de  celles  des  mêmes  princes,  conservées  à  Lille. 

»  Il  s'en  faut  cependant  que  les  Bénédictins  qui  ont  com- 
pulsé les  archives  de  Dijon,  aient  fait  connaître  toutes  les 
pièces  qui  offrent  de  l'intérêt.  J'en  ai  déjà  recueilli  un  bon 
nombre  qui  leur  ont  échappé,  et  ma  liste  se  grossit  chaque 
jour.  Je  suis  surtout  heureux  de  la  trouvaille  d'une  dixaine 
d'actes  sur  les  débats  que  fit  naitre  le  mariage  de  Jacqueline 
de  Bavière  avec  le  duc  de  Glocester,  débats  qui  occupent  une 
place  si  marquante  dans  la  vie  agitée  de  cette  aventureuse 
princesse. 

»  Ici  comme  à  Lille,  on  trouve  réunies  aux  archives  propres 
des  ducs  celles  de  la  chambre  des  comptes.  J'ai  remarqué 
dans  ces  derniers,  une  série  de  comptes  des  recettes  et  des 
dépenses  générales  de  Philippe-le-Hardi,  de  Jean-sans-Peur 
et  de  Philippe-le-Bon,  qui  précède  et  complète  la  collection 
de  Lille.  Elle  s'étend  jusqu'à  l'année  1423. 

•  J'avais  infructueusement  recherché  à  Lille  les  comptes  de 


(  134  ) 

la  chambre  aux  deniers  ou  des  dépenses  de  l'hôtel  des  ducs, 
dans  lesquels  étaient  indiqués  journées  par  journées  les 
séjours  de  ces  princes.  Les  archives  de  Dijon  eu  renferment 
une  quinzaine,  qui  appartiennent  aux  règnes  de  Philippe-le- 
Hardj'  et  de  Jean-sans-Peur.  Je  n'ai  pas  hésité  à  entreprendre 
le  dépouillement  de  l'itinéraire  des  deux  princes  dans  les 
comptes  ci-dessus  mentionnés.  C'est  un  travail  dont  le  fruit 
me  dédommagera  de  la  peine  qu'il  m'aura  coîité. 

»  Je  terminerai  par  quelques  mots  sur  la  bibliothèque  de 
Dijon.  Ce  dépôt  est  riche  de  SOO  manuscrits.  Dans  ce  nombre 
il  en  est  un  seul  qui  a  de  l'intérêt  pour  nous  :  c'est  une 
chronique  de  l'abbaye  de  Villers,  qui  commence  à  la  fonda- 
tion du  monastère  en  11-47,  et  fini  à  la  mort  du  46*  abbé, 
Mathias  Hortebeek,  arrivée  en  1368. 

»  Ce  manuscrit  in-4"  sur  papier,  provient  de  la  maison  de 
Citeaux,  de  laquelle  relevait,  comme  on  sait,  l'abbaye  de 
Villers. 

•  Je  compte  partir  sous  peu  pour  Paris,  où  j'achèverai  les 
travaux  que  j'ai  commencés  cet  été  dans  les  bibliothèques.» 

M.  le  chanoine  De  Sraet  lit  une  notice  sur  la  Chronique  de 
Baudouin  de  jMnove. 

«  Peu  intéressante  dans  les  }»remiers  temps,  où  l'auteur  ne 
fait  que  transcrire  Sigebert  de  Gembloux  ,  cette  chronique 
acquiert  une  importance  majeure  en  se  rapprochant  de 
l'époque  à  laquelle  l'auteur  entreprenait  ce  travail.  Aussi 
Aubert  Le  Mire,  Kluyt,  André  Du  Chesne  et  plusieurs  autres 
écrivains  y  ont  puisé  largement  et  avec  confiance.  Elle 
demeura  toutefois  manuscrite  jusqu'à  ce  que  Ch.  Louis  Hugo, 
abbé  d'Estival ,  en  Lorraine,  et  évèque  de  Ptolemaïde,  entre- 
prit de  la  publier  et  crut  par  là  rendre  un  service  signalé 
aux  lettres.  Il  l'inséra  dans  le  recueil  intitulé  :  Sacrœ  anti- 
quitatis  monumenta  historien  et  diploniatica,  2  vol.  petit  in-fol., 
le  1"  sorti  des  presses  d'Estival,  1723;  le  2»  de  S'-Dié,  173J. 
Mais  Foppens  a  tort  d'écrire  que  l'ouvrage  de  Baudouin  de 
Ninove  se  trouve  dans  le  l*^"^  volume,  et  M.  Warnkœnig,  qui 
copie  cette  erreur,  n'avait  pu  voir  sans  doute  le  recueil  de 
l'abbé  Hugo. 


(  135  ) 

•  Convaincu,  par  sa  propre  expérience,  de  la  rareté  de  ces 
monumenta,  M.  Warkœnig'  se  proposait  de  donner  une  place 
à  la  Chronique  de  Baudouin  de  Ninove  ,  parmi  les  chroniques 
de  Flandre ,  publiées  par  la  commission ,  et  nous  nous 
sommes  rangés  de  son  avis  d'autant  plus  facilement  qu'un 
hasard  heureux  nous  a  rais  entre  les  mains  l'original  même 
de  la  chronique ,  qui  vient  de  passer  dans  la  bibliothèque  de 
*  M.  F.  Vergauwen ,  membre  de  la  chambre  des  représentants, 
déjà  riche  en  incunables  et  en  manuscrits  importants  pour 
l'histoire  du  pays. 

»Ce  manuscrit  original  provient  de  l'abbaye  de  Ninove  où 
l'on  a  eu  soin  de  noter  sur  un  des  feuillets  de  garde  que 
l'auteur,  en  copiant  d'un'e  manière  trop  servile  Sigebert 
de  Gembloux ,  s'est  rendu  complice  de  son  injustice  envers 
Grégoire  VIT  et  Pascal  IL  C'est  un  petit  in-A" ,  écrit  sur  par- 
chemin d'une  main  ferme,  avec  des  majuscules  de  couleur 
et  quelquefois  ornées  d'arabesques.  N'ayant  pu  le  collationner 
encore  avec  l'édition  d'Hugo,  j'ignore  s'il  est  reproduit  avec 
exactitude  dans  les  Sacrœ  pionunienta  antiquitatis;  mais  il  est 
sûr  que  le  copiste  s'en  est  tenu  strictement  au  travail  du 
diacre  Baudouin,  et  n'a  tenu  aucun  compte  de  celui  de  ses 
continuateurs ,  puisque  la  chronique  finit  dans  l'édition  de 
S'-Dié,  à  l'an  129-4,  avec  la  mort  de  Jean  V,  duc  de  Brabant. 

»  Après  cette  date ,  on  lit  dans  le  manuscrit  des  vers 
composés  par  maitre  Gilbert  de  Outre.  Le  même  écrivain 
raconte  ensuite  la  naissance  d'un  monstre  à  deux  têtes, 
qui  eut  lieu  au  commencement  de  1299  ,  dans  la  paroisse 
d'Aygem,  et  une  autre  main  ajoute  la  triste  fin  d'un  sire 
d'Enghien,  pris  et  mis  ù  mort  en  lâ58,  par  le  frère  du  comte 
de  Hainaut. 

»  Après  ces  faits  détachés,  se  trouve  la  suite  des  abbés  de 
Ninove,  écrite  de  la  même  main  que  la  chronique  jusqu'à 
l'administration  de  Jean  de  Hartoux  ,  et  successivement 
continuée  par  différents  auteurs  jusqu'au  commencement 
du  XVIIP  siècle.  Les  courtes  notices  qu'on  y  trouve ,  ne  sont 
pas  mal  faites;  elles  sont  substantielles  et  présentent  quelque- 
fois des  traits  intéressants  :  il  nous  sera  aisé  de  les  conduire 
jusqu'à  la  destruction  de  cette  belle  abbaye. 


(  130  j 

•  Nous  espérons  que  la  chronique  de  Baudouin  de  Ninove, 
ainsi  complétée,  sera  bien  accueillie  des  savants  qui  s'inté- 
ressent à  nos  publications.  » 

M.  De  Ram  prend  la  parole  à  son  tour  pour  communiquer 
deux  notices,  l'une  sur  un  inventaire  des  chartes  du  comté 
de  Namur,  l'autre  sur  des  sermons  de  Sully,  évèque  de  Paris, 
au  XII^  siècle. 

1.  Inventaire  des  chartes  du  comté  de  Namur. 

M.  Gachard  a  donné  dans  ses  Analectes  belgiques ,  fome  I, 
p.  223-246,  une  notice  des  principaux  titres  que  contient 
le  chartrier  de  Namur,  rédigé  vers  la  fin  du  dernier  siècle  par 
l'avocat  Pierre  François  Motteau ,  greffier  du  magistrat  de  cette 
ville.  Le  marquis  du  Chasteler  avait  dans  sa  bibliothèque  un 
autre  inventaire  des  chartes  du  comté  de  Namur,  volume 
in-folio,  rédigé  en  1621  ;  l'extrait  suivant  que  nous  avons 
trouvé  dans  un  recueil  manuscrit  d'Adrien  Heylen  ,  chanoine 
régulier  et  archiviste  de  l'abbaye  de  Tongerloo ,  nous  a  paru 
digne  d'intérêt,  puisqu'on  y  remarque  également  l'indication 
de  plusieurs  documents  qui  n'ont  été  connus  ni  du  P.  de  Marne 
ni  de  Galliot. 

Cet  inventaire  se  compose  de  vingt  chapitres,  dont  chacun 
est  précédé  d'un  sommaire  et  renferme  l'analyse  d'un  nombre 
de  chartes,  distinguées  par  des  numéros.  On  lit  au  commen- 
cement du  manuscrit  :  «  Cestui  inventaire  ou  répertoire  at 

•  esté  doublé  par  charge  de  Jehan  Polchit,  conseiller  et  pro- 
■  cureur  général   de   Sa   Majesté,    au    pays  et  au  comté   de 

•  Namur,  en  l'an  1621 ,  pour  au  futur  demeurer  au  comptoir 

•  de  l'office  fiscal,   à  la  meilleure  direction  des  affaires  de 

•  Sa  Majesté.  Signé,  G.  Polchit.  1622.  » 

(Suivent  les  sommaires  des  XX  chapitres  et  l'analyse  d'un 
grand  nombre  de  chartes.) 

II.  Sermons  de  Maurice  de  Sully,  évéque  de  Paris,  mort  en  1 196. 

M.  Daunou  a  recueilli  dans  l'Histoire  littéraire  de  la  France , 
tome  XV,  pp.  1-49-158,  les  détails  relatifs  à  la  vie  et  aux  écrits 
de  ce  prélat,  célèbre  par  le  zèle  qu'il  a  montré  durant  S6  ans, 
pour  la  construction  de  la  cathédrale  de  Paris. 


(   V67  ) 

La  traduction  française  de  ses  sermons,  que  l'on  croit  avoir 
été  faite  de  son  temps,  ou  du  moins  au  commencement  du 
XIIP  siècle,  est  un  monument  remarquable  du  langage  de 
cette  époque.  L'abbé  Le  Beuf,  dans  ses  Recherches  sur  les 
anciennes  traductions  en  langue  française,  a  fait  connaître, 
d'après  un  manuscrit  conservé  dans  la  bibliothèque  du  cha- 
pitre de  Sens,  un  sermon  presque  entier,  avec  le  commence- 
ment d'un  autre.  M.  Daunon  en  a  transcrit  quelques  lignes, 
à  la  suite  desquelles  il  a  ajouté  un  fragment  extrait  d'un 
manuscrit  de  Saint-Victor. 

M.  le  professeur  Bormans,  de  Liège,  a  découvert  dernière- 
ment, sur  deux  feuillets  de  parchemin,  une  instruction  morale 
qui  renferme  peut-être  le  langage  de  Maurice  de  Sully  , 
lorsqu'il  parlait  au  peuple.  Ces  feuillets  étaient  collées  dans 
l'intérieur  de  la  couverture  de  la  prima  pars  operurn  sancti 
Amhrosii  épiscopi  Meciiolanensis ,  in-i",  sans  indication  de  lieu 
ni  d'imprimeur;  mais  avec  une  Epistola  prœmialis  de  F.  Con- 
radus  Leontarius  Blulhronnensis ,  qui  finit  par  ces  mots  : 
Ex  arta  valle  ultra  Basileanum  birsam  XII  kal.  sept,  anno 
D.MDVI. 

L'écriture  des  deux  feuillets  est  de  la  fin  du  XIII^  siècle ,  ou 
certainement  du  commencement  de  1300.  Sur  les  trois  pre- 
mières colonnes  se  trouvent  des  sermons  en  latin,  avec  la  sous- 
cription :  Expliciunt  sermoîies  3Iauritii  épiscopi  Parisiensis; 
une  partie  de  la  troisième  colonne  et  les  cinq  suivantes  ren- 
ferment l'instruction,  qu'on  va  lire  transcrite  par  M.  Bormans, 
avec  indication  des  leçons  douteuses  et  des  lacunes. 

(Suit  l'instruction  qui  roule  sur  les  péchés  capitaux,  les 
commandements  de  Dieu,  etc).  Au  bas,  une  main  beaucoup  plus 
récente,  mais  pourtant  antérieure  au  XV^  siècle,  a  mis  :  Liher 
conventus  fratrum  sancte  crucis  Huyensis  Leodensis  Diœcesis. 

ouite  de  la  notice  de  divers  manuscrits  concernant  l'Histoire  de 
la  Belgique.  Indications  analytiques  de  quelques  publications 
nouvelles.  (Communiqué  par  le  baron  de  Reifténberg). 

Cette  notice  indique  quelques  manuscrits  qui  se  trouvent 
1°  à  Vienne  ,  dans  les  bibliothèques  Eugénienne  et  llodeudor- 


(  13S  ) 

lieniie;  2°  à  Rome,  dans  la  bibliothèque  du  Vatican  ;  â"  à  Co- 
blence, dans  celle  du  Gymnase  et  de  la  ville;  -4°  à  Bruxelles, 
dans  le  cabinet  de  BI.  De  Roovere,  d'où  il  en  a  déjà  été  indiqué 
un  grand  nombre  dans  les  précédents  bulletins;  S°  à  Mous, 
dans  la  bibliothèque  de  la  ville,  d'où  c'est  également  une  suite, 
et  6°  à  Malines,  chez  le  libraire  De  Bruyn, 

Quant  aux  publications  nouvelles,  elles  se  trouvent  pour  la 
majeure  partie  annoncées  dans  les  bulletins  bibliographiques 
du  Messager, 

Une  table  de  matières,  avec  quelques  additions  et  correc- 
tions, termine  ce  6,"  bulletin,  qui  complète  le  second  volume 
du  compte  rendu  des  séances  de  la  Commission  d'histoire. 
(Il  se  vend  au-  prix  de  6  francs  chez  Berthot ,  libraire  à 
Bruxelles,  et  chez  Techener,  à  Paris). 


(  139  ) 


€l)r0ttiquc  tïC9  $cmcc$  et  2xt$,  ei  Daric'tc^» 


FosTS  BAPTISMAUX  DE  Satînt  Gebmain ,  A  TiRLEHOKT.  —  Quoiqiie  d'unc 
création  toute  récente,  le  Musée  d'Antiquités  à  Bruxelles  ren- 
ferme déjà  un  assez  grand  nombre  d'objets  remarquables, 
parmi  lesquels  une  châsse  en  vermeil  du  XP  ou  du  XIP  siècle 
et  les  fonts  baptismaux  dont  nous  donnons  ici  le  dessin,  méri- 
tent particulièrement  l'attention  de  l'arcliéologne  et  de  l'his- 
torien des  arts  eu  Belgique,  la  première  comme  offrant  pro- 
bablement le  plus  ancien  ouvrage  de  ciselure  et  d'orfèvrerie, 
les  seconds  comme  le  plus  ancien  ouvrage  de  fonte  d'une  date 
certaine,  existant  aujourd'hui  dans  ce  royaume.  Les  fonts  bap- 
tismaux, qui  proviennent  de  l'église  paroissiale  de  Saint-Ger- 
main àTirlemout  (1),  sont  en  cuivre  et  portent  le  millésime 
de  11-49.  Leur  forme  indique  qu'à  cette  époque,  le  baptême 
par  immersion  était  encore  d'usage  chez  nous.  Ils  ont  un  demi- 
mètre  trois  centimètres  de  profondeur  sur  un  demi-mètre 
sept  centimètres  de  largeur  à  l'ouverture.  La  face  extérieure 
du  vase  est  partagée  horizontalement  en  deux  zones  par  une 
bande  ou  côte,  sur  laquelle  on  a  tracé  l'inscription  suivante  : 

CRISTUS,  FO?iS  VITE,  FONTEM  CUNDIDIT  ISTC.M  DT ,   NISI    PER   MEDIUM  MISERI  , 

READMus  (2)  AD  IPSUM  ;  et  pi  US  bas  :  verbo  accedente  ad  elementum. 
La  zone  supérieure  est  occupée  par  un  bas-relief,  représen- 
tant quatorze  niches  ou  arcades  à  plein  cintre  ,  soutenues 
par    de    petites   colonnes   torses  ;   chacune   desquelles   con- 

(1)  Nous  félicitons  le  gouvernement  d'avoir  fait  l'acquisition  de  cet 
antique  et  curieux  monument ,  et  nous  espérons  qu'il  continuera  à  mon- 
trer le  même  zèle  pour  les  objets  qui  intéressent  si  vivement  notre  archéo- 
logie nationale. 

Note  de  la  Red. 

(2)  Pour  redeamus. 


(  140  ) 

tient  un  groupe  ou  une  figure  isolée,  le  baptême  du  Christ 
dans  le  Jourdain  par  Saint-Jean,  le  Clirist  à  la  croix  aux  deux 
côtés  de  laquelle  se  voient  les  figures  à  cheval  de  Longin  per- 
çant les  flancs  du  Sauveur  et  d'un  soldat  qui  lui  présente  le  fiel 
et  le  vinaigre,  dans  un  petit  vase  attaché  au  bout  d'un  bâton, 
l'Ascension  du  Christ,  l'Agneau  divin,  les  Évangélistes ,  les 
apôtres  Saint-Pierre,  Saint-Paul  et  Saint-André,  et  une  figure 
debout  devant  un  prie-Dieu,  sur  lequel  est  étendu  un  livre 
(peut-être  le  Christ  au  jardin  des  Oliviers).  Ce  bas-relief  est 
d'un  dessin  et  d'une  exécution  on  ne  peut  plus  barbares.  La 
zone  inférieure  n'a  pour  ornement  qu'une  espèce  de  rinceau 
gravé  en  creux  d'une  manière  très-grossière.  Cette  partie  infé- 
rieure du  vase  est  partagée  perpendiculairement  par  quatre 
côtes,  sur  lesquelles  on  lit  les  mots  qui  suivent  :  anno  dominice 

INCARN\TI0N1SM°C°  QUADRAGESIMO  NONO,  REGINANTE  CoSRADO  (l),  EPISCOPO 
HeNRICO  II  (2),  DE....AISTE  (3),  MARCHIONE  SEPTENNI  GoREFRIDO.  CcS  foutS 

reposaient  sur  un  socle,  des  deux  côtés  opposés  duquel  sor- 
taient à  nii-corps  la  figure  d'un  lion  et  celui  d'un  griffon,  ou 
plutôt  de  deux  monstres  d'un  style  plus  barbare  encore  que  la 
sculpture  du  reste  de  ce  monument.  Sur  la  croupe  du  premier 
était  assis  un  homme  les  pieds  placés  dans  lesétriers,  tenant 
une  coupe  dans  une  main  et  levant  l'autre  vers  le  ciel.  Le  se- 
cond porte  un  ange  ou  génie  ailé,  ayant  les  bras  étendus.  Ces 
deux  figures  existent  encore,  mais  le  socle  a  disparu.  Ce  der- 
nier était  placé  sur  une  base  octogone  en  pierre  et  décorée  à 
chaque  angle  d'une  tête  de  lion  en  bronze.  Les  fonts  baptismaux 
que  nous  venons  de  décrire  ainsi  que  ceux  de  Termonde  et  de 
Zedelgem  (4),  sont, sans  contredit,  les  plus  anciens  monuments 
de  ce  genre  qui  existent  en  Belgique;  ils  témoignent  î'un  et 
l'autre  de  la  profonde  décadence  dans  laquelle  la  sculpture  et 
l'art  du  dessin  étaient  tombés  aux  XP  et  XIP  siècles. 

A.  G.  B.  SCHAYES. 

(1)  C'est  l'empereur  Conrad  III,  mort  en  1152. 

(2)  Evoque  de  Liège. 

(3)  Nous  n'avons  pu  lire  en  entier  ce  mot  en  partie  fruste,  peut-être 
est-ce  dominante. 

(4)  Voyez  le  Messager  des  Sciences  et  des  Arts,  T»  série,  1825, 
p.  437,  et  2-=  série ,  1838  ,  p.  233  et  suiv. 


(  Ul  ) 

Société  d'Emulatios  s.  Bruges.  —  Une  société  d'émulation  pour 
l'histoire  et  les  antiquités  de  la  Flandre  occidentale  vient  de 
se  former  à  Bruges.  Les  membres  fondateurs  sont  MM.  l'abbé 
C.  Carton ,  directeur  de  l'institut  des  Sourds-Muets  et  des 
Aveugles,  président;  P.  De  Stoop ,  pharmacien,  trésorier; 
Edmond  Veys,  docteur  en  droit,  secrétaire;  l'abbé  J.  0.  Andries, 
membre  de  la  chambre  des  représentants;  F.  De  Hondt;  F.  Van 
de  Putte  ;  J.  Octave  Delepierre ,  archiviste  de  la  province; 
et  Bogaerts,  professeur.  Le  règlement  de  cette  société  que 
nous  insérons  ici,  à  été  arrêté  et  approuvé  par  le  comité,  le 
16janvierl839  : 

Art.  1.  La  société  a  pour  objet  : 

1°  Ln  recherche,  l'analyse  et  la  publication  en  entier  ou 
par  extrait,  dans  un  écrit  périodique,  des  chartes  et  diplômes, 
des  anciens  titres,  des  cartes  et  plans  du  moyen-àge,  etc., 
propres  à  éclaircir  l'histoire  de  nos  Comtes  en  particulier  et 
celle  de  notre  province  en  général. 

2°  La  recherche  et  la  publication  intégrale  ou  par  extrait, 
des  anciennes  chroniques,  des  mémoires  ou  recueils  histo- 
riques, inédits  ou  trop  peu  connus. 

3"  La  description  des  anciens  monuments  et  des  objets  d'art 
delà  Flandre  occidentale. 

A"  La  biographie  des  personnes  nées  dans  la  province  et  qui 
se  sont  illustrées  par  leurs  talents,  leurs  productions  ou  leurs 
services. 

Art.  2.  La  société  ne  fera  tirer  les  ouvrages  qu'elle  publiera 
qu'au  nombre  de  12S  exemplaires,  qui  tous  seront  numérotés 
et  signés  par  le  président  et  le  secrétaire. 

Art.  3.  La  société  est  composée  de  vingt-cinq  membres  ef- 
fectifs. 

Art.  -4.  Les  huit  premiers  membres  fondateurs  forment  le 
comité  directeur. 

Art.  5.  Les  membres  du  comité  directeur  doivent  résider  à 
Bruges. 

Art.  6.  Le  comité  directeur  remplace,  à  la  majorité  des 
deux  tiers  des  voix ,  les  membres  démissionnaires  ou  décédés. 

Art.  7.  Le  comité  est  tenu  de  pourvoir  au  remplacement  de 
ses  membres  décédés  ou  démissionnaires,  dans  le  délai  d'un 


(  142) 

mois,  a  partir  de  la  date  du  décès  ou  de  la  démission.  Avant 
d'avoir  satisfait  à  cette  condition  ,  le  comité  ne  sera  plus  com- 
pétent pour  prendre  aucune  décision. 

Art.  8.  Le  comité  directeur  désigne  les  ouvrages  à  publier  et 
les  publie  sous  sa  responsabilité. 

Art.  9.  Le  comité  élit  à  la  majorité  des  voix  et  pour  le  terme 
de  six  années,  un  président,  un  secrétaire  et  un  trésorier.  Il 
nomme  aussi  les  membres  effectifs. 

Art.  10.  Il  y  aura  annuellement  une  séance  générale  dans 
la  première  quinzaine  de  septembre  ;  le  comité  directeur  y 
rendra  compte  de  sa  gestion. 

Art.  11.  Les  membres,  réunis  en  séance  générale,  autorise- 
ront, s'ils  le  jugent  convenable,  le  comité  directeur  à  pro- 
poser, dans  le  courant  de  l'année,  une  ou  plusieurs  questions 
sur  un  point  de  l'histoire  provinciale,  et  ils  distribueront  des 
prix  ou  médailles,  s'il  y  a  lieu. 

Art.  12.  Les  ouvrages  envoyés  en  réponse  aux  questions 
proposées  par  la  société,  seront  jugés  en  une  séance  extraor- 
dinaire de  tous  les  membres  effectifs,  sur  un  rapport  de  trois 
membres  du  comité. 

Art.  13.  L'assemblée  générale  ainsi  que  le  comité  peuvent 
nommer  des  membres  honoraires. 

Art.  14.  Le  nombre  des  membres  honoraires  ne  pourra  excé- 
der celui  des  membres  effectifs.  ' 

Art.  13.  Le  titre  de  membre  honoraire  sera  accordé  de  pré- 
férence, aux  personnes  qui  contribueront  par  leurs  écrits, 
ou  par  la  communication  de  pièces  inédites  ou  rares,  à  l'é- 
claircissement de  notre  histoire. 

Art.  16.  L°s  membres  effectifs  s'obligent  à  une  rétribution 
annuelle  de  23  francs,  exigible  dans  le  premier  trimestre  de 
chaque  année. 

Art.  17.  Les  membres  effectifs  seuls  ont  droit  à  un  exem- 
plaire de  tous  les  ouvrages  que  publiera  la  société.  Ces  exem- 
plaires seront  tirés  sur  papier  de  choix. 

Art.  18.  Sera  considéré  de  plein  droit  comme  démission- 
naire le  membres  qui,  après  deux  invitations  par  écrit  du 
trésorier,  faites  à  quinze  jours  d'intervalle,  sera  resté  en  dé- 
faut de  payer  le  montant  de  la  rétribution. 


(  143  ) 

Art.  19.  Le  comité  et  les  membres  réunis  en  séance  générale 
s'interdisent  toute  discussion  politique. 

Art.  20,  Le  comité  directeur  se  mettra  en  communication 
avec  les  autres  sociétés  savantes  et  négociera  l'échange  des 
publications. 

Fait  et  approuvé  par  le  comité,  à  Bruges, le  IGjanvier  1839. 

Le  Président, 
Le  Secrétaire,  L'abbé  C.  Carton. 

Edmond  Yeys. 

Poème  DE  Foppens  sur  Anderlecht.  —  M.  J.  Gautier,  propriétaire 
à  Bruxelles,  a  eu  l'obligeance  de  nous  communiquer  un  poème 
lat'n  inédit  deD.  X.  Foppens,  qu'il  a  tiré  d'un  de  ses  manuscrits, 
contenant  l'éloge  du  chapitre  de  l'église  de  S'-Pierre  à  Ander- 
lecht; nous  nous  empressons  de  l'insérer  ici  (comme  document 
d'histoire)  avec  la  note  que  M.  Gautier  a  bien  voulu  y  joindre  : 
•  Cette  chronique  a  été  écrite,  dit-il,  par  D.  X.  Foppens; 
elle  est  en  tout  semblable,  pour  le  papier  et  l'écriture,  à  la 
Chronique  de  Bruxelles  du  même  auteur,  qui  se  trouve  à  la 
bibliothèque  de  Bourgogne.  Elle  fut  composée  vers  l'an  1737, 
et  contient  11-4  vers  latins  avec  deux  titres,  nous  allons  la 
transcrire  littéralement ,  sans  nous  arrêter  aux  fautes  qui 
peuvent  s'y  trouver,  laissant  à  d'autres  le  soin  de  les  corriger. 
Premier  titre  : 

ConCorDIa  saLUberuDIv   nxEn  DEcoca 

ET    CAPITrirM    I>"SIGMS    ECCLESIAE 

COLLEGIATAE    SANCTI    PETRI    ASDERLECHTENSIS  ,    .lUXTA   BRBXEILAM  , 

GRATULATORIO    CARMINE    EXHIBITA    REVERENDO    ADM.    AC 

AJIPLISS.    DOMINO    D.    DOTIIMCO    XAVERIO    FOPPESS , 

BRrXELLENSI ,    PRESB\TERO  ,    J  ,    C  ,    L.    EJCSDE3I    ECCLESIAE    COLLEG. 

CANOMCO    AC    DECANO  ,    IN    DIE    INEUÎiDI    KEDITUS    AD    RESIDENTIAM 

JUI.II 

ANSo  MDCCLVII. 
Anderlechtessis  Volt  CarMen. 

Ad  Bruxellensis  praeclara  Paraecia  mures 
Anderlechta  jacct  :  quae  jus  civile  colonis 
Attribuit  :  re<;natciue  illic  purissimus  aër  ; 
Rident  prata,  agri  frumento  seniper  abundant. 
Hic  Zennae  fluvius,  prius  atque  interfluit  Urbera  , 
Prata  aî^rosque  rigat.  sic  miscens  utile  dulci. 


(  144  ) 

Lactiferae  vaccae  prodncunt  pingiic  Biitynim, 
Quod  pro  deliciis  tofco  celebratiir  ia  orbe, 
Et  sibi  praeberi  velleiit  cum  Cacsare  rcges. 

Pagi  nomen.habet  :  sed  adaeqiians  oppida  multa. 
Insignes  aedes  hortis  ornantur  amoenis  ; 
Undiqne  concurrit  jucundus  .  et  advena  et  hospes. 
Conspicitur  sancto  sacrata  ecclesia  Petro, 
Inclyta  structuris,  veterique  décore  capitulo, 
Cujus  principium  Bruxella  antiquius  urbe  , 
Bisque  novem'  praebendati  numerantur  in  aede  : 
Régla  majestas  lioc  iiartim,  urbisques  senatus 
Nominat;  ast  plures  proprio  dat  jure  toparcba. 

Tu  quoque  Praesidium  praebes  ,  sanctissime  Guido, 
Guido  Brabantinae  non  infima  gloria  gentis. 
Anderlechta  dédit  lucem  ,  viditque  bubulcum, 
Custodera  coluit  Lakensis  virginis  aedes. 
Tum  peregrinantem  suscepit  Roma,  decani 
Anderlechtensis  quondam  socium  Wonedulphi. 
Felicem  tandem  niorientis  in  aede  decani 
Suspexit  finem,  conservât  et  ossa  sepulti. 

Patrono  eximio  nunc  terque  quaterque  beata, 
Cujus  honorarunt  mlracula  plura  sepulchrum , 
Cujus  et  ampUûcant  anathemata  plurima  cultum. 
Cessât  [laus  superis]  fatalis  cursus  equorum. 
Nec  tamen  inde  minus  veneratum  turba  Patrinum. 
Haec  Auderlechtae'descriptio  pura  localis. 
Subsequitur  nostri  narratio  vera  capitli. 

Hic  servire  Deo ,  regnare  est:  gloria  nostra 
Laetari  in  Domino,  concordem  ducere  vitam, 
Officiumque  chori  cum  majestate  tueri. 
Kon  hic  insoliti  fastus,  odiosave  régnât 
In  clero  levitas,  sibi  quam  gens  Galiica  praefert. 
Dicimus  hisce  :  vale,  procul  hinc,  procul  este  profani. 
Aurea  simplicitas ,  quam  nos  docuere  parentes  , 
Hic  sedem  fisit  :  nec  in  hoc  concedimus  uili  : 
Lautius  esto  alibi,  sed  non  est  iaetius  usquam. 
Gasconent  alii  .  seu  Galli ,  sive  Walones: 
Contenti  nos  sorte  humili ,  ridebimus  omnes. 


'  5 


Sed  nunc  tempus  adest,  quo  te,  venerande  Decane  , 
Versibus  aggredimur ,  tibi  prospéra  cuncta  voventcs 


(  145  ) 

Rcgina  Hungariae  pracsenti  aestate  Decanum 
Vcldcnum  abripuit ,  iiostri  qui  gloria  coetus. 
Sed  non  eripnit,  quando  ad  majora  vocavit. 
Et  Pétri ,  ad  Pétri  non  est  inglorius  aedes 
Transitas  ;  ad  Grudios  dum  migrât  ab  Anderlechtâ. 

Hic  modo  pro  meritis  ,  Griidiorum  clarus  in  urbe 
Pracpositus  ,  matris  qnoque  cancellarius  almae. 
Amisisse  virum  rara  virtute  décorum  , 
Ingratum  nobis  .  non  absque  dolore  fatemur. 
Attamen  est  ratio  misccndi  gandia  luctu  , 
Dum  sit  translatum ,  plures  comitantur  honores. 
Servit  et  ad  nostrum  promotio  tanta  decorem. 

Rcgina  Hungaridum  victricibns  aucta  trophoeis, 
Dcque  Borussorum  turibunda  gente  triomphans , 
Incljta  Belgarum  mater,  cui  fausta  precamur, 
Te  successorem  Veldeni  e  corpore  nostro. 
Foppenium,  gratum  nobis  dédit  esse  decanum. 
Notus  eras  pridem  ,  confratrum  verus  amator, 
Hinc  quoque  deliciae  nostrae  ,  coetusque  voluptas. 

Ferre  jugum  Domini  teneris  assuetus  ab  annis, 
Anderlechtanâ  tu  prœbendatur  in  aede, 
Ferme  octo  lustris  sacra  munia  complevisti  ; 
Sedulus  officiis  nocturnis  atque  diurnis  ; 
Atque  domus  Domini  satagens  curare  decorem , 
Vincuia  amicitiae,  per  quae  concordia  régnât, 
Sollicitus  servare,  animo  velut  omnibus  unus. 

Tum  cantor,  rectorquc  chori,  pietate  et  amore 
Fervidus  ac  zelo  pienns  ,  quaecumque  subisti 
Munia ,  saepe  etiam  viris  supcrantia  vestras. 
Adde  ,  quod  ex  zelo ,  bis  dénis  circiter  annis 
Ut  plebi  utilior  fieres,  mnltosque  juvares, 
Sponte  subintrasti  sacramentalc  tribunal , 
Omnibus  assistens  ,  seu  sanis ,  seu  moribundis. 

Robore  fortis  eras ,  nulloque  affecta  dolore 
Mens ,  accincta  novos  ardebat  adiré  labores  : 
Quando  Viennensi  noviter  diplomate  ,  noster 
Designatus  eras  ,  clero  applaudente ,  decanus. 
Ast ,  Dcus  a  cujus  dépendent  omnia  nutu; 
Confringens  cedros  Libani  ceu  fusile  vitrum , 
Prostravit  vegetum  :  morbusque  apoplecticus  accr 
Percutit  in  puncto  brachiumque  pcdemque  sinistrum. 

10 


(  146  ) 

Cogimur  infandiim  versu  rcnovarc  rlolorcm  ! 
Triste  mnlum,  quo  non  hoilic  communhis  ullnm  ! 
Ecquis  ab  hoc  casu  liber,  juvenisve  senexve  : 
Diim  sunt  membra  homiuum  tenui  pendentia  filo  ? 
Qui  sequitur  Christum,  qni  quaerit  régna  polorum  , 
Discat  ferre  crucem  ,  patienter  ferre  dolores. 
Hinc  te  detinuit  lecto  patientia,  vincens 
Ipsum  etiam  fortem  ,  divinis  subdita  jussis. 
Lenta  redire  soient,  tali  deperdita  fato. 

Sed  Deus  ilie  bonus  ,  qui  percutiendo  ,  salutcm 
Dum  vult ,  restituit  moestis  ,  solamina  praebens  , 
Nec  nimium  afiligi  potitur  quos  diligit  :  ipse 
(Ut  sperare  licet)  votis  precibusque  rogatus, 
Restituit  vires  ,  et  quae  sunt  perdita ,  reddet. 

Quando  isthaec  desunt ,  erit  acceptanda  voluntas. 

Nec  tibi  déficient  nostro  de  corpore  amici, 

Consilio,  auxilioque  vices  supplere  parati,  - 

Prisca  valetudo  donec  sit  reddita  tuto. 

Ista  tibi  ex  animo  sincero  ,  et  voce  vovemus  , 

Chare  Decane;  preces  non  desistemus  ad  astra 

Ingeminare  Deo  ,  per  quem  bona  cuncta  petenda  : 

Donec  te  vegetum  promptumque  ad  munia  reddat. 

Et  pro  praeterito  luctu  concédât  avitam 

Corporis  atque  animi,  fuerat  prout  ante  ,  salutem  , 

Ut  te  longaevos  liceat  spectare  per  annos , 

Floreat  et  nostri  felix  concordia  Coetus  , 

Anderlechtane  primaria  Gloria  terrac. 

Voici  le  second  titre  qui  se  trouve  à  la  fin  : 

FOIS    CHROMCAE    DeCaNO    sUo,    oLIM 

CaktorI  DoMIsIcO  foppens  ,  Laetameu 
offerUkt  Confratres. 

Bague  du  XÏIl'  siècle.  —  Un  orfèvre  de  Gand  acheta,  dans  les 
derniers  mois  de  l'année  1838,  une  bague  d'or  qu'un  paysan 
avait  déterrée  à  Malle ,  village  à  une  lieue  de  cette  ville.  Cette 
bague  porte  une  triple  inscription  en  très-beaux  caractères,  qui 
paraissent  avoir  été  émaillés  autrefois.  Ces  lettres  qui  remon- 
tent au  XllP  siècle,  se  suivent  sans  aucune  interruption  et 
sans  aucun  signe  qui  puisse  faire  supposer  qu'il  y  ait  des 
mots  écrits  par  abréviation. 


(  147) 

Voici  les  deux  lignes  qui  se  trouvent  à  la  partie  extérieure 
de  cette  bague. 

■f  NOCrSOVDICVROlLE^SICI 

f  WOVDEMIESTSHERTSCEURftUEN. 

A  l'intéri-eur  se  lisent  les  lettres  suivantes  : 

f   WASnSIENMEVSALAEUnARESTERGAL 

Cette  dernière  inscription  est  parfaitement  conservée,  de 
manière  qu'il  n'y  a  aucun  doute  à  former  sur  la  lecture  des 
lettres;  mais  dans  les  deux  premières  lignes,  les  lettres  r,  t  et  t, 
imprimées  en  italiques,  pourraient  peut-être  se  lire  autrement. 

Les  lettres  se  déchiffrent  assez  facilement  sans  que  l'on 
trouve  cependant  le  sens  qu'elles  peuvent  offrir.  Cette  inscrip- 
tion est-elle  en  français,  en  anglais  ou  en  flamand?  Quelques 
lettres  prises  isolément  forment  des  mots  flamands  du  XIIl" 
siècle,  telles  sont  want,  nie,  ivoude-ini,  hert,  sceurt-i ,  lien  y 
noch,  soud-i.  Mais  malgré  cela ,  nous  ne  sommes  pas  parvenus 
à  leur  donner  un  sens  suivi.  Il  est  à  remarquer  encore  qu'il 
existe  une  espèce  de  rime  entre  le  milieu  et  la  fin  de  chaque 
ligne  soudi ,  sici,  mien,  lien,  sal,  gai.  Cette  inscription  se 
compose  donc  apparemment  de  six  vers.  Ou  peut  donner  ici 
carrière  aux  conjectures.  Le  graveur  a-t-il  fait  usage  de 
l'écriture  mystérieuse,  si  commune  au  moyen-àge  ,  qui 
consistait  tantôt  dans  la  substitution  d'une  lettre  à  l'autre, 
tantôt  dans  la  suppression  de  quelques  lettres? 

Nous  laissons  à  d'autres  le  soin  d'expliquer  le  sens  complet 
de  cet  assemblage  de  lettres  qui  paraît  si  bizarre. 

Cette  bague  appartient  aujourd'hui  à  M.  le  professeur 
Serrure. 

Antiquités  romaises,  a  Audenarde,  —  En  creusant  un  puits 
dans  la  basse-cour  d'une  auberge  appelée  den  Sicitzer,  à  Aude- 
uarde,  l'on  a  trouvé  le  3  septembre  1838,  à  dix  ou  onze  pieds 
de  profondeur  dans  la  terre,  huit  grands  pots  de  terre-cuite, 
retournés  sur  leur  orifice.  Des  ouvriers  ignorants  en  ont  brisé 
six,  croyant  qu'ils  contenaient  de  l'argent;  niais  il  n'en  est 
sorti  qu'une  poussière  grisâtre,  mêlée  de  petits  os  calcines. 


(  148  ) 

Il  est  à  croire  que  ces  pots  étaient  autant  d'urnes  cinéraires, 
renfermant  les  ossements  réduits  en  cendre  de  quelques  morts. 
Deux  de  ces  vases  sont  conservés  en  entier.  Leur  forme  et  la 
nature  de  la  poterie  indiquent  qu'ils  appartiennent  à  l'épo- 
que de  la  domination  romano-germanique  dans  nos  contrées. 
Toute  cette  partie  de  la  Flandre  orientale  jusqu'au-delà  de 
Renaix,  est  extrêmement  curieuse  pour  l'archéologie  de  la 
première  période  de  notre  histoire.  Les  nombreuses  découver- 
tes en  antiquités  qu'on  y  a  faites  depuis  quelques  années,  ne 
sauraient  trop  attirer  la  sollicitude  des  hommes  instruits. 

Passage  Leîioîsmer  a  Liège.  —  Le  2-4  janvier  dernier,  eut  lieu 
l'inauguration  du  passage  Lemonnier ,  à  Liège.  C'est  une 
galerie  vitrée,  de  160  mètres  de  longueur  sur  i  de  large,  et 
8  de  hauteur.  Des  deux  côtés  s'étend  une  ligne  splendide  de 
magasins  qui  ne  tarderont  pas  à  être  ouverts.  Le  passage  est 
dallé  en  asphalte  Au  second  étage,  se  trouve  une  grande  et 
belle  salle,  destinée  à  un  bazar.  Mais  le  café  de  la  Rotonde 
surpasse  tout  le  reste  en  luxe  et  en  élégance  :  on  dirait  un 
palais  des  Mille  et  une  Nuits.  Ses  décors  sont  de  la  plus  grande 
richesse  et  d'un  goût  exquis.  L'escalier  en  spirale  est  en  fer 
de  fonte,  les  marches  en  sont  à  jour;  rien  n'en  égale  la  grâce 
et  la  légèreté.  Cette  galerie  sera  écla'rée  au  gaz. 

Galerie  vitrée  a  Bruxelles.  —  Un  édifice  semblable  à  celui 
dont  nous  venons  de  parler,  mais  exécuté  sur  des  proportions 
plus  vastes  et  avec  une  plus  grande  magnificence  encore ,  est 
sur  le  point  d'être  élevé  à  Bruxelles;  il  consistera  en  une 
galerie  vitrée,  longue  de  plus  de  700  pieds,  large  de  30  et 
d'une  élévation  considérable.  Elle  communiquera  du  Marché 
aux  Herbes  à  la  rue  des  Bouchers,  et  de  cette  dernière  à  la 
Montagne  aux  Herbes  potagères.  Les  façades  de  la  galerie 
donnant  sur  ces  différentes  rues  déploieront  un  grand  luxe 
d'architecture.  Celle  faisant  face  au  Marché  aux  Herbes,  sera 
décorée  de  statues  et  bas-reliefs  et  de  trois  rangs  de  pilastres 
doriques,  ioniques  et  corinthiens,  couronnés  par  une  balus- 
trade. Au  rez-de-chaussée,  un  magnifique  péristyle,  formé  de 
huit  colonnes  doi'iqnes,  donnera  accès  à  la  galerie  pavée  en 


(  149  ) 

mosaïque,  et  offrant  des  deux  côtés  une  longue  suite  de  bril- 
lants magiasins,  ornés  de  marbre,  de  bronze  et  de  glaces.  En 
un  mot,  ce  monument  effacera  par  sa  richesse  architecturale 
et  d'ornement,  tout  ce  qui  existe  aujourd'hui  en  ce  genre  à 
Londres  et  à  Paris ,  où  les  édifices  de  cette  espèce  ne  sont  pas 
rares,  comme  on  sait.  L'arrêté  royal  qui  autorise  l'expropria- 
tion ,  pour  cause  d'utilité  publique ,  de  tous  les  terrains 
nécessaires  pour  la  construction  de  la  galerie  couverte,  est 
daté  du  6  février.  Les  travaux  devront  être  terminés  dans 
l'espace  de  quatre  ans ,  aux  frais  de  MM.  Hauman  et  J.  De  Mol , 
auteurs  du  projet. 

Passeport  de  l'a«née  lâ49  (IB30).  —  Après  avoir  condamné 
la  fameuse  secte  des  Flagellants,  si  célèbre  par  les  cruautés 
qu'elle  exerça  sur  les  Israélites,  le  pape  Clément  VI  annonça 
un  grand  et  solennel  jubilé  à  Rome  pour  l'année  13S0.  A 
cette  occasion,  il  y  eut  un  concours  immense  de  pèlerins 
dans  la  ville  de  Saint-Pierre.  La  Flandre  ayant  eu  à  souffrir 
plusieurs  grandes  calamités  publiques,  ne  resta  pas  en  arrière 
de  la  ferveur  générale  :  beaucoup  de  fidèles  de  ce  comté 
se  rendirent  à  Rome,  afin  d'obtenir  de  Dieu  la  fin  des  maux 
qui  désolaient  leur  patrie  et  le  pardon  des  péchés,  dont  ces 
maux  paraissaient  être  le  châtiment.  Nous  publions  ici  un 
passeport,  donné  à  cette  occasion,  par  Louis  de  Maie  à  quel- 
ques-uns de  ces  pèlerins. 

Lettre  de  tesmoignage  des  gens  alans  à  Ronmie ,  qu'ils  sont  de 
bonne  condition  et  renommée. 

«Nous  Loys,  etc.,  faison  savoir  à  tous  que  comme  mestre 
t  Jehan  Ilonin,  sire  Gerars  de  Munte,  sire  Jehan  d'Osterzele, 

•  tout  prestre,  Bernard  le  Pape  et  Margriete  de  Munte,  seur  au 

•  devant  dit  sire  Gerart  de  Munte,  aient  très-grande  affection 
»de  visiter  et  acquerre  les  grands  pardons  qui  ores  sont  à 
»Romme-le-Grand ,  si  comme  on  dise.  Nous  tesmoignons  de 

•  vray,  selonc  le  bonne  information  que  nous  en  avons  emve 
»de  plusieurs  chevaliers,  escuiers  et  bourgoys  de  noire  pays 

•  de  Flandres,  asquels  Nous  adjoustons  plaine  foy,  que  lesdictes 
»  personnes  sont  bonne  loyale  geut  de  bonne  famé  et  renom- 


(  150  ) 

»  mée  et  de  bonne  vraye  vie  et  conscience  ce  que  tousjours  ont 

•  esté,  bon,  vray  obéissant  à  nous  et  nos  prédécesseurs  et  sont 
»  encore  pour  quoy  nous  prions  à  tous  seigneurs  ,  castelains , 
»  prevos ,  gouverneurs ,  baillis,  justicbiers ,  gardes  de  passages 

•  etdestroys,  leurz  fiex-tenant  et  autres  quelconques,  asquels 
»  ces  lettres  seront  monstréez ,  que  il  et  chascun  d'eaux  as 
»  dessusdictez  personnes  ne  facent  ne  seufFrent  estre  faiz 
Dgriefz,  moleste,  ne  domage  aucun  en  corps,  ne  en  biens, 
»  ains  les  lessent  et  facent  passer  pasivlement  par  leurs  pas- 
«  sages  et  destroys  sans  empeceraent  aucun ,  quant  en  ce  faisant 
»  cascuu  de  vous  tant  pour  Dieu  comme  à  nostre  prière  que 
»Diex  et  Nous  vous  en  sacent  gré,  et  que  Nous  en  soions  remis 
»à  vous  et  cascun  de  vous.  En  tesmoing,  etc. ,  donné  à  Bruges 
»le  second  jour  de  jenvier  l'an  xlix  (1349,  nouv.  st.  13S0). 

«Par  Monseigneur  le  conte  présent  Monseigneur  de  Rassi- 
»ghem,  Vous  et  Franchois  Sloeve.  [Signé),  H.  Yliederb.  (Henri 
»Van  der  Vliederbeke).  » 

Cette  curieuse  pièce  est  copiée  d'un  Registre  aux  Résolutions 
du  temps  de  Louis  de  Maie ,  comte  de  Flandre.  On  voit  que  les 
passeports  ne  sont  pas  d'une  origine  aussi  récente  qu'on  le 
croirait  bien. 

Association  pocr  favoriser  les  Arts  en  Belgique.  —  Il  vient  de 
se  former  à  Bruxelles  une  association  nationale,  dont  le  but 
éminemment  utile,  est  de  favoriser  le  progrès  de  l'art:  peinture, 
sculpture,  dessin  ,  gravure,  musique,  poésie,  architecture. Elle 
publiera  un  recueil  intitulé  laReîiaissatice,  chronique  des  arts 
et  de  la  littérature,  qui  paraîtra  deux  fois  par  mois  avec  plan- 
ches et  vignettes.  La  direction  de  cette  société  est  composée 
de  M3I.  le  prince  de  Ligne,  président;  le  marquis  de  BeauflFort, 
A.  De  Wasme-Pletincx,  vice-présidents;  A.  Van  Hasselt,  secré- 
taire; E.  Laurent ,  trésorier.  Toutes  personnes  qui  voudront 
faire  partie  de  cette  association,  seront  admises  en  prenant 
une  action  de  vingt  francs ,  qui  donne  droit  :  1°  à  un  exem- 
plaire du  journal  la  Renaissance;  2°  à  un  numéro,  qui  vaudra 
au  tirage  au  sort  des  objets  acquis  par  la  société, et  qui  gagnera 
à  la  fin  de  l'année,  soit  un  tableau,  soit  une  lithographie,  soit 
un  livre,  soit  une  gravure.  Cette  association,  qui  est  placée 


(  151  ) 

sous  le  patronage  de  la  Société  des  Beaux-Arts,  achètera,  au- 
tant qu'elle  le  pourra,  des  ouvrages  envoj'és  par  les  artistes 
belges  aux  expositions;  elle  fera  chaque  année  des  expositions 
permanentes,  et  s'occupera  de  placer  les  productions  des  ar- 
tistes; elle  leur  commandera  des  travaux,  si  ses  moyens  le  lui 
permettent  ;  elle  contribuera  à  entretenir  et  à  restaurer  les 
monuments  publics  de  l'art  ancien  en  Belgique;  elle  se  fera 
l'intermédiaire  entre  les  artistes,  les  amateurs  d'albums  ou 
de  tableaux,  les  fabriques  d'églises,  les  établissements  et  les 
particuliers  qui  désirent  des  ouvrages  d'art. 

Lambert  Massart  a  Paris.  —  Le  feuilleton  du  journal  français 
la  Presse,  en  date  du  26  février  dernier,  est  consacré  à  notre 
habile  musicien  Lambert  Massart.  Ce  feuilleton,  écrit  d'une 
manière  piquante,  est  de  M.  Henri  Berthoud,  de  Cambrai,  qui 
depuis  long-temps  a  reçu  ses  lettres  de  bourgeoisie  dans  le 
monde  littéraire  de  Paris.  Aussi  est-il  digne  d'un  Parisien,  qui 
ne  croit  pas  que  le  reste  du  monde  vaille  la  peine  qu'on  en 
parle  d'une  manière  exacte.  D'abord  Massart  est  représenté 
comme  un  gros  Flamand  blond  et  rose,  et  ce  portrait  est  à  la 
fois  trop  chargé  et  trop  poétique;  ensuite  on  nous  montre, 
en  1823  ,  Massart  enfant,  jouant  au  cheval  fondu  avec  le 
prince  Oscar  de  Suède.  Or,  si  j'en  crois  V Almanach  de  Gotha, 
le  prince  Oscar,  né  le  -4  juillet  1799,  avait,  en  1823,  environ 
vingt-quatre  ans;  il  se  maria  de  plus  cette  année  même,  et  il 
ne  semble  pas  que  ce  soit  l'âge  de  jouer  au  cheval  fondu  avec 
de  gros  Flamands  de  Liège.  L'anecdote  peut  donc  passer  pour 
apocryphe,  et  nous  espérons  que  les  biographes  futurs  ne  la 
recueilleront  pas  dans  leurs  compositions. 


De  R. 


Beffroi  de  Gaisd.  —  La  campanille  qui  couronne  le  Beffroi, 
étant  sur  le  point  d'être  démolie,  parce  qu'elle  menace  ruine, 
nous  faisons  des  vœux  pour  qu'elle  soit  reconstruite  d'après  le 
plan  primitif,  déposé  à  l'hôtel-de-ville.  Les  journaux  avaient 
annoncé  qu'on  aurait  suivi  le  plan  de  l'architecte  Crul;  mais 
ce  projet  étant  d'un  très-mauvais  goût,  nous  sommes  persuadés 
que  l'on  n'en  fera  pas  usage. 


(   152  ) 

ÉriTAPnES  ANCIENNES.  —  Avant  que  les  Iconoclastes  de  1566 
eussent  détruit  le  couvent  des  Chartreux,  à  Roygem,  faubourg 
de  Gand,  il  y  avuit  dans  l'église  de  ce  couvent  quelques  épi- 
taphes  fort  anciennes;  nous  en  transcrivons  ici  quelques-unes 
d'après  un  recueil  d'épitaphes  du  XVP  siècle,  appartenant  à 
M.  J.  De  S' -Génois. 

1°  Sur  une  tombe  en  cuivre ,  on  lisait  l'inscription  suivante 

de  1321  : 

Ex  digna  génie  Gande?isi  stirpe  potenti 
Simon  erat  natus  Wilhard  hic  tuinulatus. 
Prudens,  pactficus ,  itiorosus   et  ore  pudicus, 
Lucens  antistes  studiose   legerat  artes. 
Scriptura  tritus   erat  ac  in  jure  peritus 
Slusœ  curatus  et  ibi  populo   bene  grutus , 
Plures  prœbendas  hahvit  quod  non  reprehendas , 
Inde  sacerdotes  septem  capiunt  sihi  dotes  ; 
Dotans  Gandenses ,  fundavit  Cartusienses 
Quos  illuc  duxit  precibus,  quorum  sibi  luxit 
M-C.  ter,  duplex,  X.  I.  (1)  quater  ipse  ceduples  {9) 
sa  sibi  meta  vitœ,  conceptio  scmctœ  Mariœ. 

2°  Eier  light  hegraven  Michiel  de  Cock ,  cnape  was  van  de 
camere  ende  hôtelier  veele  jaeren  ons  edels  heeren  grave  van 
Vlaenderen  Lodewyck  van  Maele ,  die  starf  intjaer  14^08,  den 
œiij  decemher. 

S°  Jacet  hic  Nicolaus  Wyt  in  tempore  domini  Ludovici  piœ 
vnemoriœ  boni  comitis  Flandriœ,  castellanus  de  Beveren  XXXÎV 
annis,  specialis  benefactor  fratrum  istius  heremi,  qui  obiit 
a°  1412,  uîtima  die  mensis  augusti.  Anima  ejus  per  misericor- 
diam  Dei  régnât  in  pace. 

•4"  Hier  light  begraven  Reynier  de  Kempe ,  die  starf  int  jaer 
ons  Heeren  1S97  ,  den  23  october,  hidt  voor  de  siele.  Hier  light 
hegraven  Jo°  Cecilie  van  Vaernewyck,  Reyniers  Kempens  wyf 
was,  die  starf  int  jaer  l  MO. 

5"  Anno Domini  1331,  ïJi  ocfava  sanctormninnocentium,  obiit 
Hugo  de  Most;  anima  ejus  requiescat  in  pace. 

Dans  cette  église  se  trouvaient  encore  plusieurs  épitaphes 
des  familles  Steelant,  Masseraen,  Onredene,  Halewyn.  Les  fe- 
nêtres étaient  en  verres  peints  et  portaient  les  armoiries  de 
beaucoup  de  nobles  Gantois. 

(1)  Anno  ï  321. 


M^Ji-iu    .J^.Miik^ 


1^-^ 


■<^ 


(  153  ) 


îîlenljODenstecn. 


Communia  Gandavionim 

Turritis  domibus,  gazis,  et  gcnte  siipciba 

Brito,  Philipp. 


Ce  ne  serait  point  le  chapitre  le  moins  curieux  de  l'his- 
loire  de  Gand  que  celui  qui  contiendrait  la  description 
des  anciennes  maisons,  qui  s'élevaient  jadis  dans  l'en- 
ceinte de  cette  ville.  Le  nombre  de  ces  vastes  habitations 
à  créneaux  et  à  tourelles,  qu'on  désignait  sous  le  nom  de 
stee?i  ou  de  hof,  y  était  très-grand.  Les  plus  considérables 
étaient:  la  (/rande  Ameide^  rue  aux  Vaches;  \q  Serbraem- 
steeti,  que  Ryhove  habitait  au  XVI*  siècle,  et  dont  M.  De 
Saint-Génois  a  donné  une  description  dans  le  roman  his- 
torique (ï Ileînbysej  \q  Sanderswal ,  plus  tard  la  Cour  du 
Prince,  où  naquit  Charles-Quint;  la  maison  d'Artevelde^ 
la  cour  de  Ravestein,  près  l'église  de  S^-Michel  ;  la  maison 
aux  tourelles  [het  huis  metten  torens) ,  rue  des  Champs;  la 
cour  d'Egmont  ou  de  Fiennes;  la  cour  de  VVacken;  la 
maison  de  Hembyse;le  Gerardsteen  ^  qui  sert  aujourd'hui 
de  caserne  aux  pompiers,  et  la  maison  d'Utenhove  {Uten- 
hovensteen) ,  Blarché  du  Vendredi. 

De  tous  ces  anciens  manoirs,  trois  seulement  ont  con- 
servé leur  caractère  primitif ,  leur  première  construction, 
qui  date  d'une  époque  reculée  :  ce  sont  la  grande  Ameide, 


(  154  ) 

le  Gcrardsleen  et  la  maison  d'Uleiihove ,  dont  la  farade 
était  resiée  intacte  jusqu'à  nos  jours  (1), 

Le  Marché  du  Vendredi  élait  autrefois  le  centre  de  la 
cité,  le  forum  de  la  ville,  où  les  corporations  armées  s'as- 
semblaient dans  les  dangers  imminents  qui  menaçaient  la 
patrie,  soit  que  le  prince  eut  méconnu  les  droits  de  la  na- 
tion, ou  qu'une  armée  ennemie  approchât  des  frontières.  Là 
se  faisaient  aussi  les  inaugurations  des  comtes  de  Flandre, 
où  en  présence  des  magistrats  et  du  peuple,  ils  juraient  le 
maintien  des  privilèges  ,  des  lois  et  coutumes  établies. 

L'aspect  de  cette  place  est  bien  changé  depuis  l'époque  où 
les  nombreuses  armées  d'Artevelde  la  couvraient;  elle  était 
beaucoup  plus  grande  alors  qu'elle  n'est  aujourd'hui,  car 
le  carré  de  maisons ,  adossé  à  l'édifice  dit  Salle  de  la  Col- 
lace  (2)  [Collatie-solre) ^  n'existait  pas,  et  l'église  de  Saint- 
Jacques  dominait  cette  vaste  étendue.  Quelques  grandes 
maisons  s'élevaient  à  l'entour,  parmi  lesquelles  M.  Diericx, 
dans  la  description  détaillée  qu'il  nous  a  donné  de  la  ville, 
distingue  le  Eogerhuis,  la  Maison  des  Gorroyeurs  {Hude- 
Tcttersstee?i) ,  celle  du  prélat  de  S'-liavon,  des  Marchands 
de  toiles  [Lijnmakerssteen) ,  et  des  Horlogers  (Ilurmakers- 
steen). 

Là  s'élevait  aussi  la  maison  d'LUenhove,  dont  nous  don- 
nons ci-joint  le  dessin.  La  façade  à  fenêtres  gothiques  et  à 

(1)  Au  moment  où  nous  imprimons  cette  notice,  nous  entendons  tom- 
ber les  derniers  vestiges  de  VVtenhoreiisteeîi.  Nous  ne  savons  comment 
qualifier  cet  acte  de  vandalisme  qu'on  ne  saurait  trop  flétrir.  La  Com- 
mission des  Monuments  s'était  adressée  à  la  régence  de  Gand  pour  de- 
mander la  conservation  de  ce  curieux  monument ,  unique  dans  son  genre 
eu  Belgique.  Mais  quchiue  facile  qu"eùt  été  pour  notre  administration 
communale  de  s'épargner  un  acte  de  destruction,  indigne  de  notre  siècle, 
elle  n"a  rien  fait  pour  arracher  V Utetihovertsteen  à  une  démolition  cer- 
taine. Puissent  le  Bef/roi,  la  M(iiso7i  des  Bateliers,  etc.,  ne  pas  éprouver 
bientôt  un  sort  semblable  !  Note  de  laRëdact. 

(2)  On  nommait  Collaces,  les  assemblées  générales  des  corporations  et 
des  notables  de  la  ville. 


(  155) 

tourelles,  porte  le  caractère  «lu  XIV®  siècle.  Le  terrain,  où 
celle  maison  est  construite,  louche  par-derrière  à  la  Lys, 
et  a  une  issue  dans  la  petite  rue  latérale,  dite  Ziiivclstege; 
il  est  à  présinner  que  tout  ce  carré,  où  quelques  maisons 
furent  bâties  depuis ,  formait  l'enclos  de  cette  demeure.  Les 
caves  spacieuses,  et  les  voûtes  en  ogive,  sont  soutenues 
par  des  colonnes  rondes,  dont  les  cliapileaux  sont  ornés  de 
fleurs  de  trèfle.  Six  marches  conduisent  dans  la  maison  ; 
le  dedans  a  subi  bien  des  changements;  il  n^a  rien  retenu 
de  l'époque  primitive  de  sa  fondation  ;  la  division  inté- 
rieure, foile  apparemment  en  cloisons  de  bois,  a  disparu 
totalement.  Un  large  escalier  en  pierres  de  taille  mène  au 
premier  étage ,  qui  consiste  en  une  grande  salle  de  sept 
croisées.  Au  second  étage  on  découvre  la  charpente  du  toit, 
qui  repose  du  côté  de  la  façade  à  dix  pieds  de  distance 
du  mur,  sur  deux  arcs  en  ogive,  soutenus  par  une  co- 
lonne massive,  qui  a  ses  fondements  dans  le  souterrain. 
On  prétend  qu'anciennement  des  créneaux  s'élevaient  entre 
les  deux  tourelles,  et  qu'une  galerie  en  plate-forme  était 
établie  entre  le  toit  et  le  mur  antérieur.  Le  tableau  de 
,  W  P.  Goetghebuer,  représentant  la  ville  de  Gand,  peint 
en  1534,  ne  laisse  plus  aucun  doute  à  cet  égard,  car  on 
distingue  fort  bien  que  le  couronnement  de  la  maison  était 
en  forme  de  créneaux. 

Le  document  le  plus  ancien  que  nous  trouvions  sur  ce 
steen,  est  un  acte  de  vente  de  1450,  par  lequel  Jean  Uten- 
hove  cède  tous  les  droits  qu'il  a  sur  cette  maison,  à  Jacques 
Utenhove,  son  oncle;  nous  transcrivons  ici  le  contrat  en 
entier  (1)  : 

a  Kenîic,  etc.,  dat  Jan  Utenhove,  f'  Jans,  aen  de  Vrindach- 
marct  commen  es,  etc.,  ende  heeft  vercocht  Jacop  Utenhove,  zinen 


(1)  Archives  de  la  ville  de  Giind,  cahier  des  actes  et  contrats  des  éche- 
vins  de  la  Kcurc ,  reg.  1448,  1449 ,  1450  ,  f->  32  v»». 


(  156  ) 

oeni ,  al  zijn  deel  ende  recht,  dat  hy  heeft  in  de  huusivghen  hier 
naer  verclaerst,  te  loetene,  den  grooten  Steen  an  de  Vrindach- 
maerct,  't  huus  in  de  Veltstrate,  daer  die  vorseide  Jacop  Uten- 
hove,  nu  ter  tijtinne  tooont,  ende  de  Cancelrie  (1),  in  de  Volder- 
strate,  metten  Imsekins  in  den  Paddenhouc,  met  allen  den 
ghelaghen  ende  aysementen,  dicr  toehehoren,  van  voren  tôt 
achter ,  ecrtvast  ende  naghelvast,  metten  erven ,  denselven 
iij  husen  toehehorende  ende  anclevende.  De  groote  Steen  an 
de  Vrindachmaerct,  ende  'thuiis  in  de  Velstrate,  vry  huus  ende 
erve  zijnde,  van  den  wclkcn  huuse  ende  erve  de  selve  Jan  Uten- 
fu>ve,  in  also  verre  ah  hy  inné  gherecht  es,  tcas  wetteîik  ontuut, 
onthuust  ende  onteerft,  ende  de  voornoemde  Jacop  Utenhove, 
wasser  toeghedaen,  wettelic  inné  ghehuust  ende  gheerft,  als  in 
zijn  vry  proper  huus  ende  erve,  ende  de  weftelike  tcaerscip  was- 
ser  afhelooft,  ende  tceder  hevolen,  alsoo  't  hehoorde.  Dese  coep 
is  ghedaen  omme  de  somme  van  44  ponden,  te  hetalen  22^.  gr. 
te  Lichtmisse  eerstcommende,  ende  22  pond,  gr,  te  Lichtmisse, 
anno  SI  daernavolgende,  versekert,  etc.  Actum  6  maii  anno 
SO  (1450).  . 

Par  acte  du  12  août  1476,  Jean  Utenhove,  fils  de 
Jacques,  vendit  à  Lievin  Van  Biervliet,  pour  une  somme 
de  8  livres,  une  partie  de  terrain  avec  une  porte,  ayant 
issue  dans  la  rue  dite  Zîdvel-stege  (2). 

\] Utenhovensteen  appartenait,  au  XVP  siècle,  à  la  cor- 
poration des  Merciers,  et  lors  de  la  confiscation  effectuée 
par  Charles-Quint,  après  les  troubles  de  1539,  cette  maison 
fut  vendue,  le  16  décembre  1542,  aux  sieurs  De  Hertoghe 
et  Gérard  De  Cleerc,  pour  la  somme  de  56  livres  18  solz 
de  gros,  net  argent,  par-dessus  toutes  charges  de  7-entes  et 
vins  desfalcquiez  (3).  Durant  les  troubles  du  XVP  siècle , 


(1)  C'est  la  même  maison  qui  appartenait,  au  XVI«  siècle,  à  Jean 
Van  Hembyze. 

(2)  Arcliiv.  de  la  ville  de  Gand,  Jaer-register ,  p.  134 

(3)  Nous  insérons  ici  l'acte  qui  contient  toutes  les  maisons  des  corpo- 
rations existantes  à  cette  époque ,  et  les  prix  pour  lesquels  elles  ont  été 


(  157) 

plusieurs  séances  du  conseil  des  dix-huit  el  des  notables  y 
furent  tenues;  les  pièces  du  rez-de-chaussée  servaient  de 
corps-de-garde.  Le  magistral  de  la  ville,  qui  avait  cette 

vendues.  —  Cet  acte  se  trouve  aux  Archives  de  la  ville  de  Gand,  au 
registre  intitulé:  Den  rooden  boeck  viet  de  riemen,  f,  f»  93  v»,  et  le 
conservateur,  JM.  Van  Duijse,  a  eu  la  complaisance  de  nous  eu  remettre 
une  copie  : 

«  Charles,  par  la  divine  clémence,  empereur  des  Romains,  tousiours 
auguste,  roi  de  Germanie,  de  Castille ,  de  Léon,  de  Grenade,  d'Ar- 
ragon ,  etc. 

»  A  noz  bien  aniez  Ydrop  de  Waerhem,  nostre  conseillier  et  proca- 
reur-général  de  Flandres,  et  Josse  Van  den  Hecke,  recepveur  de  nostre 
extraordinaire  de  Flandres ,  ou  Josse  Laue ,  son  commis  ,  salut  f 

»  Comme  pour  satisfaire  à  plusieurs  adommagiez  fie  sainct  Bavon ,  tant 
à  cause  de  leurs  maisons  abatues  pour  l'érection  de  nostre  nouveau  chas- 
teau  à  Gand,  que  aultres  de  leurs  rentes,  qu'ilz  ont  euz  sur  icelles  maisons, 
selon  les  priseries  et  rachapts  d"icelles  ;  aussi  pour  pluisieurs  aultres  satis- 
faire et  récompenser  de  leurs  deuz ,  nous  avons  donné  charge  par  noz 
lettres ,  vendre  les  maisons ,  aians  esté  aux  mestiei's  de  Gand,  à  nous 
devoluz  par  confiscation,  par -dessus  celles  qui  par  nous  ont  esté  baillées 
en  récompense  aux  prevost  et  chanoines  de  sainct  Bavon,  et  à  aultres 
particuliers ,  et  est  de  par  vous  en  ce  faict  telz  dcbvoirs ,  que  plusieurs 
d'icelles  sont  vendues  après  pluisieurs  cryées,  et  solempnitéz  y  requises, 
net  argent  par-dessus* toutes  charges  de  rentes  et  vins  desfalcqniéz  en 
la  sorte  et  manière  que  s'ensuyt.  Premiers  la  maison  qui  fut  des  Bollen- 
guiers,  à  la  somme  de  187  livres  6  solz  de  groz.  La  maison  des  Mosniers, 
50  livres  ung  sold  G  deniers  groz.  La  maison  du  mestier,  nommé  en 
tliioys  5(:7(/7;ma/;e?^,  39  livres  18  solz  de  groz.  La  maison  des  Tisserans 
de  drap,  sur  le  Contre,  nommé  la  Cleppe,  18  livres  7  solz  six  deniers  groz. 
Quatre  petites  maisons  ayans  par-cydevant  estez  à  la  tierce  ordre  ,  que 
occupèrent  lesdicts  tisserans  de  drap  ;  asscavoir,  la  première,  nœuf  livres 
seize  solz  de  groz;  la  seconde,  10 livres  14  solz  II  deniers  gros,  huict  de- 
niers paresis  ;  la  tierce  maison  ,  5  livres  12  solz  9  deniers  gros  ,  et  la  qua- 
triesme  maison,  10  livres  18  sols  de  groz.  La  maison  du  mestier  des 
Frùtiers,  53  livres  6  solz  de  groz.  Lestampe  de  verjus  aians  esté  audict 
mestier  des  Frùtiers,  5  livres  17  soldz  de  groz.  Encoire  une  anltremai- 
soncelle  venant  desdits  Frùtiers ,  estant  située  en  une  ruelle  derrière 
saint  Nicolas,  nommé  In  't  Nieusteixkcn,  huict  livres  18  solz  de  gros.  La 
maison  dcsCuvellicrs,  99  livres  10  solz  de  groz.  Une  petite  maisoncelle 
venant  desdictz  Cuveliers ,  seize  Uvres  8  soldz  de  groz  :  encoires  une  pe- 
tite maisoncelle  venant  desdicts  Cuveliers,  15  livres  18  solz  de  groz.  La 


(  158  ) 

maison  en  location,  en  fit  l'acquisition,  le  5  mai  1576, 
pour  la  somme  de  500  livres.  Elle  fut  revendue  dans  la 
suite,  et  passa  en  1839,  à  M.  Van  der  Gote,  qui  la  dé- 
maison  des  Corroijeurs,  19  livres  11  solz  de  groz.  La  maison  en  thioys 
Stoeldraeyers,  25  livres  14  solz  10  deniers demy  groz.  La  maison  des  Cou- 
reurs de  cnyr  noir,  26  livres  9  solz  de  groz.  La  maison  des  Mesureurs 
de  bled,  53  livres  19  solz  six  deniers  groz.  La  maison  des  Coureurs  de 
cuyr  blanc,  54  livres  4  solz  de  groz.  Une  aultre  maison  ,  venant  du  mes- 
tier  des  Avaleurs  (1)  de  vin,  parce  qu'elle  est  chargée  près  autant  qu'elle 
vailloit,  net  36  solz  six  deniers  groz.  Une  petite  maisonccUe  où  que  de- 
mourait  ung  relieur  de  libvres,  venant  aussy  desdicts  Avaleurs  de  vin, 
6  livres  12  solz  nœuf  deniers  groz.  La  principale  maison  des  Krentellcurs 
et  Tisserans  de  taille, ^dl  livres  de  groz  :  une  petite  maison  venant  dudict 
mestier,  ouquel  leur  varlet  demourait,  8  livres  17  solz  de  gros.  La  maison 
des  Vieswariers  (2),  69  livres  5  soldz  de  gros.  La  maison  des  Brasseurs, 
avec  les  appartenances,  303  livres  3  solz  4  deniers  groz,  d"iceulx  osté 
52  livres  de  groz,  que  ont  esté  ordonnez  pour  satisfaire  aux  povres  de 
leur  maison  de  derière ,  demeure  net  deux  cent  cincqnante-ung  livres 
trois  solz  4  deniers  groz.  La  maison  des  Tapisseurs ,  97  livres  19  solz  de 
groz.  La  maison  des  Merchiers,  avec  les  appartenances,  vendue  en  deux 
marchiez,  56  livres  18  solz  de  groz.  La  maison  des  Porteurs  au  sacq, 
11  livres  8  solz  de  groz.  La  maison  des  Tordeurs  dliuyle,  162  livres  17 
solz  de  groz.  Encoires  une  aultre  petite  maison  venant  desdictz  tordeurs 
d'huyie,  située  auprès  de  l'esglise  de  sainct  Nicolas,  45  livres  18  solz 
de  groz.  La  maison  des  Poissonniers,  sur  le  Marchié  au  poisson,  9  livres 
15  solz  4  deniers  groz.  Une  maisoncelle  vers  oost  de  la  chapelle  des 
Ferres,  venant  desdictz  Fevres  ,  8  livres  13  solz  de  groz.  Une  aultre 
petite  maisoncelle  aussy  venant  desdicts  Fevres ,  8  livres  18  solz  de 
groz.  La  salle  desdicts  Fevres,  9  livres  16  solz  de  groz.  Encoires 
ime  maisoncelle  venant  desdits  Fevres,  17  livres  13  solz  de  groz.  La 
principale  maison  des  Couturiers,  61  livres  18  solz  de  groz,  par-dessus 
20  solz  de  gros  de  rente  héritière  ,  au  rachat  du  denier  seize  ,  que 
ont  esté  retenuz  sur  icelle  maison.  Une  aultre  petite  maison ,  venant 
desdicts  Couturiers,  20  livres  2  solz  6  deniers  groz.  Une  petite  maison, 
venant  des  Couvreurs  de  tieules,  située  auprès  du  Groenenbriel ,  13  livres 
18  solz  de  groz.  Une  petite  maisoncelle ,  venant  du  mestier  des  Orfèvres, 
située  en  une  ruelle  derrière  le  Werregareu,  18  livres  6  solz  de  groz.  La 
maison  des  Bogaerdc,  ayant  esté  auxdicts  tisserans  de  drap,  vendue  en 

(1)  Oéchargeurs  j  avaler  signifiait  descendre. 
(2J  Fiippicrs. 


(  159  ) 

molit  la  mcnie  année  j  il  l'a  acquise  pour  la  somme  de 
40,025  francs. 

Il  serait  à  désirer  que  ces  anciens  moniimenls,  témoins 

trois  partyes,  à  charge  de  par  rachctciir  d'une  partie  démolir  etabbalre 
une  grande  tour,  deux  cent  vinjft-trois  livres  ung  sold  de  {yros. 

»  Montans  cnsamMe  lesdictcs  vcndicions  à  la  somme  de  1930  livres 
5  solz  6  deniers  groz,  deux  deniers  paresis.  Et  que  pour  le  présent  res- 
tent seulement  à  vendre  les  principales  maisons,  que  souloient  appertenir 
aux  mcstiers  des  Mâchons,  des  Tanneurs,  des  Orfèvres,  nommé  le  Samp- 
son,  et  des  Wijnmeters,  et  aultres  quatre  petites  maisoncelles,  que 
soulloient  estre  au  mestier  des  Carliers ,  le  plupart  d'icelles  grandement 
chargiez  de  rentes.  Et  pour  ce  que  ce  ne  serait  nostre  profj  t  retenir  les- 
dictes  maisons  parce  qu'ilz  sont  fort  chargiez,  comme  dict  est ,  et  anicuns 
«l'iceulx  tendans  àruyne.  Aussy  que  les  acheteurs,  ayans  acheté  les  dessus 
dictes  aultres  maisons  à  leur  sceurté.  désirent  estre  de  nostre  part  asseuréz 
de  leurs  dicts  achajjtz ,  et  adheritéz  en  icculx  comnie  rie  tout  rapport  nous 
a  esté  faict.  Si  est  il  que  nous  ayans  les  vendicions  de  tontes  les  dessus 
tlictes  maisons  pour  aggréables,  par  l'advis  et  délibération  de  nostre  très 
chiere  et  très  amée  seur  la  royne  douaigierc  de  Hongrie,  de  Bohème,  etc., 
pour  nous  régente  et  gouvernante  en  noz  ])ays  de  ])ar-deçà,  vous  avons 
de  rechief  commis,  ordonné  et  auctorisé,  commectons,  ordonnons  et 
auetorisons  par  ces  présentes,  les  trois,  les  deux  ou  l'un  de  vous  en  par- 
ticulier, qui  mieux  vacquier  y  pourra ,  pour  exposer  et  mcctre  à  vente  les 
dessus  dictes  maisons,  encoires  à  vendre,  le  tout  selon  et  en  la  manière, 
que  ont  esté  vendues  les  aultres  dessus  dictes  maisons ,  ou  anltrement 
ainsy  que  verrez  estre  à  faire ,  pour  nostre  plus  grand  proufyt.  Et  dabon- 
dant  comparoir  pardcvant  noz  csehevins  de  la  kuere  de  Gand ,  landtheeren 
et  tous  aultres  juges  et  justiciers,  que  besoing  et  requis  sera  ,  et  illec  en 
nostre  nom  faire  deshéritance ,  cession  et  transport  aussi  avant  que  be- 
soing soit,  tant  desdictes  maisons  et  héritages  y  appartenans,  par  vous 
vendues  que  des  dessusdictcs ,  encoires  à  vendre  au  proufyt  des  ache- 
teurs promettre  garant  en  nostre  nom. 

n  Et  au  surplus  passer  toutes  aultres  rccognoissanceset  œuvres  de  loy, 
en  tel  cas  requises  et  nécessaires,  pour  la  seurté  diceulx  acheteurs,  leurs 
hoyrs,  ou  ayans  cause,  saulf  toutcsfois  par  vous  recepveur  rcspondre, 
et  faire  compte  et  reliqua  des  deniers  en  venans,  là  et  ainsy  qu'il  appar- 
tiendra à  nostre  proufyt.  promcctant  en  parolle  de  prince  d'avoir  pour 
agréable,  ferme  et  estable  à  tousjours  ce  que  par  vous,  ou  lun  de  vous  , 
en  ce  que  dessus  desja  est  faict,  et  encoires  sera  faict,  passé  et  besoin- 
gnié,  comme  si  nous  mcsmes  faict  l'eussions.  Car  ainsi  nous  plait  il. 
Donné  en  nostre  ville  de  Louvain ,  le  4*=  jour  d'octobre  l'an  de  grâce  1542  , 


(  160  ) 

de  noire  gloire  passée,  et  qui  portent  le  cachet  de  grandeur 
dont  cette  époque,  le  siècle  d'Artevelde,  était  empreinte, 
lussent  conservés,  et  que  le  gouvernement  prit  des  mesures 
pour  les  préserver  de  toute  dégradation;  la  façade  de  la 
maison  des  Merciers  n'était  pas  moins  belle  qu'élégante, 
et  pour  llîisloire  de  l'art,  c'était  un  monument  des  plus 
curieux. 

Ph.  Blomma-ert, 


de  nostrc  empire  le  xxiij« ,  et  (îc  nos  régnes  de  Casfilic  et  atiltres  le  xxvij'. 
Soubzescript  par  rcmpereur,  et  signé  Veri-eyketi.Y.1  icelles  lettres  scel- 
lées en  cyre  ronge,  sur  simple  queue  de  parchemin. 

»  Et  au  dors  desdictes  letfres  estait  escript  : 

»  Les  chiefs  trésorier-général,  et  commis  des  domaines  et  Gnances  de 
l'empereur  nostrc  sire,  consentent  en  tant  qu'en  eulx  est,  le  contenu  ou 
blancq  de  cestes ,  estre  fourny  et  accompli  tout  ainsy  par  la  mesme  forme 
et  manière  que  Sa  Majesté  le  veuit ,  et  mandé  estre  faict  par  icelles  escript 
soubz  les  seings  manuelz  desdictz  chiefs  trésorier-général  et  commis,  le 
xxiiij<^  jour  d'octobre  1542,  soubszigné  :  Philippe  de  Lannoy,  RufTault, 
et  Claissone.  » 


(  161  ) 


fitblt0tl)cque  inanuscrite 


DE 


LA  VILLE  DE  BRUGES. 


Eu  1830,  le  savant  Gustave  Hœnel  publia  à  Leipsig  un 
catalogue  des  livres  manuscrits  des  bibliothèques  de  France, 
de  Suisse,  de  Belgique,  d'Angleterre,  d'Espagne  et  de  Por- 
lugal. 

Dans  cet  ouvrage,  fruit  d'immenses  recherches,  la  biblio- 
thèque publique  de  Bruges  est  portée  comme  renfermant 
2700  imprimés,  et  480  manuscrits  dont  il  donne  les  titres. 

Le  travail  de  M.  Hœnel  jouissant  d'une  réputation  mé- 
ritée sous  bien  des  rapports  et  faisant  autorité,  je  crois 
qu'il  est  nécessaire  de  rectifier  les  erreurs  dans  lesquelles 
il  est  tombé  pour  ce  qui  concerne  Bruges,  d'autant  plus 
que  tout  récemment  M.  Voisin  s'est  servi  des  renseignements 
de  l'ouvrage  allemand,  en  y  ajoutant  pleinement  foi. 

La  bibliothèque  publique  de  Bruges  renferme  passé  les 
10,000  volumes ,  formant  plus  de  trois  mille  articles,  dont 
en  ce  moment  se  refait  le  catalogue  dans  un  nouvel  ordre. 
Dans  les  480  articles  manuscrits  (nombre  d'ailleurs  inexact 
et  qui  doit  être  porté  à  536),  cités  par  Hœnel,  sont  oubliés 
la  plus  grande  partie  des  ouvrages  historiques  que  je  vais 
uidiquer,  en  entrant  dans  quelques  détails  puisés  en  partie 
dans  des  noies  laissées  par  M.  Scourion,  ancien  bibliothé- 


(  162  ) 

caire,  notes  dont  j'ai  eu  l'occasion  de  vérifier  par  moi- 
même  loute  l'exaclilude. 

Le  plus  grand  nombre  de  manuscrits  proviennent  de  la 
ci-devant  abbaye  des  Dunes;  aussi  Irailent-ils  pour  la  plu- 
part de  matières  ihéoîogiques.  Les  écritures  en  général  en 
sont  belles.  Les  plus  anciennes  sont  du  XIP  siècle. 

1"  Un  des  plus  précieux,  quoiqu'il  soit  écrit  sur  papier, 
est  le  recueil  des  comptes  de  la  confrérie  dite  de  S*-Jean 
l'Evangéliste,  à  Bruges ,  dont  les  membres  étaient  des  écri- 
vains, des  copistes  de  livres,  des  enlumineurs,  des  impri- 
meurs, etc.  Le  premier  de  ces  comptes  est  de  1454,  et  le 
dernier  de  1523.  On  voit  par  celui  de  1456  à  1457,  au 
folio  13  verso,  qu'avant  la  publication  du  fameux  Psal- 
viorum  codex,  de  Mayence,  le  premier  livre  imprimé  qui 
ait  paru  avec  date  certaine,  il  y  avait  déjà  à  Bruges,  et 
parmi  les  membres  de  ladite  confrérie,  une  famille  dont 
le  nom  patronimique  était  De  Printere,  c'est-à-dire  l'im- 
primeur (l).  Il  est  à  présumer  que  c'était  la  profession 
d'imprimeur  avec  des  planches  gravées  sur  bois,  qui  avait 
fait  donner  à  Bruges  le  nom  de  De  Printere  à  une  famille. 

Les  autres  articles  qui  méritent  le  plus  d'attention  parmi 
les  manuscrits  historiques  de  notre  bibliothèque,  sont  les 
suivants  : 

2°  Liber  de  naturis  rerum,  sur  vélin ,  de  la  fin  du  XV^ 
siècle,  et  orné  d'un  grand  nombre  de  miniatures  curieuses. 

3°  Chronicon  Monasterii  S.  Bertini,  sur  papier,  écriture 
du  XV^  siècle.  Cette  chronique  a  été  publiée  par  D.  Mar~ 
lène,  au  tome  3  du  Thésaurus  Anecdotorum  ;  mais  l'éditeur 
bénédictin  passe  sous  silence  le  fait  concernant  le  person- 
nage connu  sous  le  nom  de  Papesse  Jeanne,  qui  se  trouve 

(1)  Labbé  Glicsqiiièic  a  essayé  de  prouver,  dans  un  article  de  Y  Esprit 
des  Journaux,  juin  1779,  page  237  ,  que  des  1445,  douze  ans  avant  les 
premières  éditions  de  Mayciicc  ,  avec  date,  on  vendait  à  Bruges  des  livres 
imprimés  et  qu'on  en  faisait  même  commerce. 


(  163  ) 

raconté  tout  an  long  dans  noire  manuscrit.  Ce  passage  aui  a 
sans  doute  été  omis  comme  fabuleux. 

4°  Vincentii  Bellovacensis  speculmn  doctrinale ^  superbe 
écriture  du  XV^  siècle,  sur  vélin.  Ce  livre  est  orné  de  mi- 
niatures, dont  plusieurs  sont  de  nature  à  paraître  au  moins 
singulières  dans  la  copie  d'un  ouvrage  ihéologique  du  cha- 
pelain de  S'-Louis. 

5"  Un  cahier  en  papier  d'une  loterie  tirée  à  Bruges  en 
1445,  et  dans  laquelle  a  mis  la  veuve  de  Jan  Van  Eyck, 
ce  qui  pourrait  servir  à  fixer  la  date  du  décès  de  cet  illustre 
artiste  brugeois,  et  prouve  d'ailleurs  combien  les  loteries 
sont  anciennes  en  Flandre  (1). 

6»  Un  Missel  sur  vélin,  d'une  très-belle  écriture  du 
XV  siècle,  dans  lequel  sont  posées  diverses  propositions 
théologiques,  entre  autres  que  six  mille  messes  suffisent 
pour  délivrer  une  ame  du  purgatoire,  lors  même  que  sans 
ce  secours,  elle  aurait  dû  y  rester  jusqu'à  la  fin  du  monde. 


(1)  'V Encyclopédie  méûiodique  ou  Dictionnaire  des  Jeux ,  qui  fart 
suite  au  tome  3  des  Matliëmatiques,  prétend ,  page  148,  que  l'usage  des 
loteries  nous  est  venu  d'Italie.  On  y  avance  que  c'est  sous  le  doge  Erizzo 
qu'elles  ont  commencé.  Mais  le  doge  n'est  entré  en  fonctions  qu'en  1646. 
Donc  notre  registre  de  la  loterie  tirée  à  Bruges  et  au  profit  de  la  ville , 
eu  1 445 ,  prouve  linexactitude  de  l'assertion  des  Encyclopédistes.  D'après 
cette  antériorité  de  deux  siècles,  il  parait  que  c'est  dans  la  Belgique  que 
les  loteries  auraient  pris  naissance,  et  que  de  là  elles  seraient  passées  en 
Italie,  en  France  et  en  Angleterre.  M.  Noël ,  dans  son  nouveau  Diction- 
naire des  Inventions,  adnict  aussi  que  les  loteries  seraient  venues  d'Italie. 
Mais  les  mots  lot  et  loterie,  qui  appartiennent  à  la  langue  teutonique, 
n'ont  été  introduits  que  fort  tard  dans  les  langues  italienne  et  française. 
Ce  qui  semblerait  prouver  que  c'est  d'ici  que  sont  parties  les  loteries,  c'est 
que  déjà,  avant  la  fin  du  XV''  siècle  ,  celle  de  Bruges  fut  l'occasion  d'un 
cas  de  conscience  sur  la  licititè  de  ces  moyens  ,  que  les  villes  et  ensuite 
les  états  employèrent  pour  se  procurer  des  bénéfices.  Dans  la  dernière 
des  Questions  quodlibitiques  du  docteur  en  tliéologie  Jean  Briard  ,  vice- 
chancelier  de  l'université  de  Louvain  ,  dont  l'ouvrage  a  été  imprimé  en 
1527,  long-temps  après  sa  mort,  l'on  voit  la  solution  de  cette  question, 
soulevée  à  l'occasion  de  ce  qui  se  pratiquait  à  Bruges. 


^      (  164  ) 

7 "  Smtvna  jjauperum  in  leylhus  à  Mwjistro  Vacario.  Ou 
sait  que  ce  légiste  anglais  vivait  au  milieu  du  Xll"  siècle* 
Ce  manuscrit  est  sur  vélin  et  d'une  écriture  du  XllP  siècle. 
On  ne  connaît  que  cinq  copies  de  cet  ouvrage ,  qu'on  a 
fait  imprimer  depuis  à  Leipsig. 

8"  Ordonnance  de  la  Toison  d'or.  Beau  manuscrit  du 
XV  siècle  5  sur  vélin. 

9°  Plusieurs  anciens  livres  de  prières  en  latin,  en  fran- 
çais et  en  flamand,  écrits  sur  vélin  et  ornés  de  belles  mi- 
niatures, d'encadrements  et  d'arabesques.  Quelques-uns 
remontent  au  XIII^  siècle.  Ce  sont  des  dons  faits  à  la  bi- 
bliothèque par  M.  le  chevalier  de  Schietere  de  Lophem. 

lO"  Aîina/es  de  la  ville  de  Bruges  et  du  Franc  jusqu'à 
l'année  1763.  Un  volume  in-folio  de  1009  pages,  d'une 
écriture  très-lisible.  Cet  ouvrage  est  à-peu-près  en  français 
celui  qui  a  été  imprimé  en  flamand  en  cette  ville,  d'abord 
en  deux  volumes  petit  in-S",  sans  nom  d'auteur  en  1738, 
et  depuis  en  3  volumes  en  1765,  avec  le  nom  de  l'auteur 
Charles  Cuslis ,  ancien  échevin  de  la  ville.  Les  deux  éditions 
sont  intitulées  \Jaerboeken  der  stad  Brugge.  La  première 
finit  à  l'année  1700  et  la  seconde  va  jusqu'en  1765,  qui 
est  celle  de  l'impression  par  Joseph  Van  Praet,  imprimeur 
du  territoire  du  Franc. 

11°  Chronycke  van  den  lande  ende  graefschepe  van 
Vlaenderen ,  gemaeckt  door  Jo.  JSiclaeys  Despaers  (sic), 
poorter  en  inboorlynck  der  stede  van  Brugghe,  hacelier  in 
die  rechten.  2  vol.  in-folio,  écrits  sur  papier  et  d'une  lec- 
ture difficile.  Le  tome  P'  a  709  pages  et  une  table  des  noms-: 
propres.  Le  tome  2'=  a  572  pages  et  une  table. 

Cette  chronique  commence  à  l'an  405  et  finit  au  12  oc- 
tobre 1492.  Le  deuxième  volume  s'ouvre  par  le  régne  de 
Jean  de  Bourgogne,  en  1405. 

N.  Despars  fut  bourgmestre  des  échevins  de  la  ville  de 
Bruges,  en  1578  et  1584,  il  est  décédé  en  1597.  Sonépita- 


(  165  ) 

plie  dans  la  chapelle  de  l'hospice  de  la  Poterie,  dont  il 
était  tuteur  ,  porte  qu'il  était  :  nobilis  vir  litlcris,  et  armis 
clarus,  necnon  anliquitatis  indefessus  ifidagcUor. 

C'est  abusivement  que  son  nom  est  écrit  Despaers .  au 
titre  de  la  copie  que  nous  avons  de  sa  chronique.  Divers 
monuments  irrécusables  prouvent  que  son  nom  est  Despars. 

M.  De  Jonghe,  professeur  à  l'Athenée  de  Bruges,  fait  en 
ce  moment  imprimer  celte  chronique.  Il  est  à  regretter 
qu'il  n'ait  pas  accompagné  cette  publication  de  quelques 
notes  historiques ,  surtout  comme  elle  contient  des  faits 
entièrement  neufs,  qu'il  eut  été  bien  curieux  de  comparer 
à  ce  que  rapportent  les  autres  historiens,  M.  Goethals  , 
conservateur  de  la  bibliothèque  de  Bruxelles ,  a  donné 
une  biographie  de  Despars  dans  ses  Lectures  sur  l'histoire 
littéraire  de  la  Belgique. 

12°  Chronyke  van  Vlaender-en,  commençant  comme  suit  : 
Dit  is  de  tufle  van  der  Corniike  (sic)  van  Vlaetideren  ende 
van  der  forestiers  ende  princhen,  te  loeten,  VI  forestiers 
etide  XXVII graeven  van  Vlaenderen,  etc.  Suit  la  table  de  4 
feuillets  à  deux  colonnes,  puis  '.Eier  beg/iint  de  Cornycke 
van  Vlae?ideren....  Anno  Domini  621,  in  dien  tyd  datDeus 
Ledit  was  paaus  vanRoome.  238  feuillets,  écrits  à  deux 
colonnes,  finissant  in  humant  LXV  (1465).  Écriture  du 
XV*'  siècle ,  in-folio  assez  grand. 

L'auteur  raconte  à  la  page  79  verso,  l'histoire  d'après 
laquelle  le  comte  Baudouin,  empereur  de  Constantinople, 
qu'on  croyait  avoir  perdu  la  vie,  à  la  suite  de  la  bataille 
d'Andrinople ,  avait  été  fait  prisonnier  et  envoyé  comme 
esclave  en  Syrie,  où  on  lui  faisait  labourer  la  terre;  que 
des  marchands  d'Allemagne,  étant  venus  à  passer  auprès 
de  lui,  il  comprit  leur  langage  et  se  fit  connaître  à  eux; 
qu'ils  le  rachetèrent  et  l'emmenèrent  jusqu'à  Cologne;  que 
de  là  il  envoya  un  message  à  la  comtesse  Jeanne,  sa  fille, 
pour  lui  annoncer  son  retour,  et  que  dans  quatorze  jours  il 


(   166  ) 

serait  à  Lille;  queFerrandj  l'époux  de  Jeanne,  le  fit  arrêter 
cl  pendre  à  un  arbre,  à  un  demi-mille  de  Lille,  daer  nu 
't  klooster  van  Markette  stneL 

Au  folio  79  verso,  à  l'année  1234,  il  est  dit  que  Jeanne 
étant  décédée  ,  fut  enterrée  au  couvent  de  Marquette , 
(|u'elle  avait  fond'é  ou  fait  construire.  Le  texte  ajoute  : 
Meîi  wille  zegghen  dat  in  dut  clooster  daer  den  hooghen 
autaer  staet,  dat  daer  een  boom  stont  van  te  vooren,  daer 
de  goede  graeve  Boudin ,  keyser  van  Constantinopel ,  aen 
gheliangen  was. 

Pas  la  moindre  observation  pour  décharger  Jeanne  ou 
son  mari  de  cette  grave  inculpation  ! 

Dans  la  chronique  de  Despars,  il  existe  une  explica- 
tion très-probable  de  ce  mystère  historique ,  au  sujet  du 
Baudouin  mort  chez  les  Bulgares,  et  de  celui  qui  sous  ce 
nom  fut  pendu  près  de  Lille. 

13"  Cronicke  van  Vlaenderen.  Elle  commence  comme 
suit  :  lut  jaer  ons  Heeren  613,  doe  was  paus  te  Roeme 
Deus  Dédit,  en  Eraclius  loas  keyser  van  Rome,  en  Lotha- 
rius  de  Groote ,  coninc  Cilperich  suene ,  was  cueninc  van 
Vrayickeryck,  in  desen  tyd  îoas  een  edelman  in  Bourg honen 
geheeten  Salvaert,  en  hy  was  lirinche  van  Dygon,  etc. 

Petit  in-folio,  papier  de  la  grandeur  d'un  wv-k^  ordi- 
naire. Ecriture  en  deux  colonnes,  du  XVP  siècle.  L'ouvrage 
finit:  ûfe^i 23'""'  dach van  hoymaendtanno LXXVIII  {\^1S). 
Ce  volume  de  410  feuillets,  contient  surtout  beaucoup  de 
détails  sur  ce  qui  se  passa  à  Bruges  et  renferme  un  assez 
grand  nombre  d'armoiries  coloriées,  et  plusieurs  minia- 
tures peintes  à  l'aquarelle. 

14°  Nauiokeurige  beschrymng  van  het  land  van  den 

Vryen  (c'est-à-dire  du  Franc  ou  du  Franconat  de  Bruges), 

inhoudende  een  kort  verhaeL...  van  aile  de  privilegien,  oc- 

troyen ,  transactien ,  aiypointementen ,  enz.^  enz.^  van  de 

jaere  8G3  tôt  den  j aère  1551,  te  saetnen  vergadertuyt  ver' 


(  167  ) 

schei/de  en  autentique  registers,  etc. ,  hy  (flieer  an  meester 
AdriacnBaJtyn,  liconliacl  in  bcide  de  rechten,  greffier  van 
de  caemer  ende pensionaris  's  tandis  voornampt,  anno  1 604. 

In-folio  de  135  fcuillels,  écriture  du  XVIl^  siècle,  sur 
papier.  Cet  ouvrage,  doiil  nous  avons  inséré  un  abrégé 
dans  le  Messager  des  Sciences  et  des  Arts,  année  1838,  esl 
tm  exposé  historique  de  l'état  politique  du  Franc  de  Bru- 
ges. M.  Warnkœnig  en  a  tiré  grand  parti  dans  son  histoire 
des  Flandres. 

Ce  manuscrit  mérite  la  confiance,  parce  que  l'auteur  a 
travaillé  sur  les  chartes  et  autres  documents  qu'il  avait 
sous  les  yeux.  11  indique  presque  toujours,  à  la  fin  de  cha- 
que article,  les  chartes  sur  lesquelles  il  se  fonde  et  les  car- 
tulaires  où  elles  se  trouvent  transcrites. 

1 S^'  JVet  der  stede  van  Bricgghe ,  begîiinnende  van  den 
Jaere  1391  en  vervolgkende  toe  den  j aère  1767  ew  voorder. 

Après  l'énoncé  nominal  et  par  année  de  tous  les  mem- 
bres du  magistratde  celte  ville,  depuis  1331  jusqu'en  1771. 
suit  une  petite  chronique  intitulée  :  Ghedinckiveerdighe 
gheschiedetiissen  binnen  en  omirent  Brugghe  vooren  ghe- 
valleti,  en  volgens  dejaeren  dat  de  selve  ghebeiirt  syn  aen- 
geteehent. 

Ce  croquis  de  chronique  commence  à  l'année  565  et  finit 
le  3  août  1773.  Papier,  in-folio.  La  chronique  comprend 
45  feuillets. 

16''  Nauiokeurighe  beschryvinglie  van  de  onde  ende  he- 
dendagsche ghestaethedevan  de  edele  endevermaerde  stadt 
Brugghe  in  Vlaenderen,  door  heer  ende  maester  J.  P.  Van 
Maele. 

Ce  volume  format  in-4'',  écrit  sur  papier,  ne  traite  que 
des  particularités  de  la  ville  de  Bruges.  L'auteur  est  mort 
curé  de  la  commune  de  Vladsloo ,  en  1735. 

17°  Levens  der graeven  van  Vlaenderen  ofte  kart  begryp 
der  zelve ,  wanneer  sy  aen  de  regeeringe  syn  gckomen, 


(  168  ) 

kunne  huioelycke  en  kinders,  hunne  dood  en  beyraef2ilael- 
sen,  met  hunne  grafsc/iriften  en  ejntajihieti ,  by  een  ver- 
samelt  door  Petriis  Ledoulx,  konstschilder  tenjaere  1808, 
lot  BrucjCjhe  in  Vlaenderen. 

Ouvrage  de  peu  de  mérite  pour  le  style,  mais  orné  des 
dessins  coloriés  de  toutes  les  statues  en  pierre  des  comtes 
de  Flandre,  qui  décoraient  autrefois  la  façade  de  l'hôlel- 
de-ville,  et  dont  il  ne  reste  plus  que  les  niches. 

Nous  avons  reproduit  ces  statues  par  la  lithographie, 
d'après  les  dessins  de  M.  De  Vigne ,  dans  nos  Annales  de 
Bruges, 

Le  texte  du  manuscrit  qui  vient  d'être  cité ,  comprend 
274  pages  petit  in-folio,  d'une  écriture  très-lisible.  Il  finit 
à  l'année  1793. 

18"  Chronica  Monasterii  S.  Andreœ  upostolijiwtaBru- 
gas,  ordinis  Benedicti,  scrijita  ah  Arnulphio  Goetkalsio  ^ 
ejusdcm  monasterii. 

L'ouvrage  est  dédié  à  Jean  Asset ,  abbé  de  ce  monastère 
depuis  1534  jusqu'en  1554.  Il  ne  s'étend  que  jusqu'à  l'an- 
née 1504. 

Nous  avons  publié  (1)  la  presque  totalité  de  cette  chro- 
nique curieuse  et  jusqu'aujourd'hui  inédite,  dont  M.  Jules 
Van  Prael,  actuellement  secrétaire  du  roi,  avait  traduit 
deux  ou  trois  chapitres  à  la  suite  de  son  travail  sur  l'ori- 
gine des  communes.  Gand,  1829. 

19°  Un  volume  in-folio,  écrit  sur  parchemin,  écriture 
du  XV^  siècle,  contenant  les  chroniques  suivantes; 

X"  Chronicum  abbatuvi  Viturieiisium.  46  pages,  commençant 
à  l'année  1147  et  finissant  en  1333. 

2"  Gesta  vironim  iUustriiim  monasterii  Vitiiriensis.  92  pages, 
finissant  à  l'année  1380. 

3°j0e  origine  monasterii  Viridis  Vallis  in  Zonid.  S-4  pages, 
finissant  en  l'année  143S. 

(1)  Chez  Van  de  Castccic.  Bruges.  IS39  :  1  vol.  in-S". 


(  169  ) 

A°  Primordiale  monasterii  canonicarum  rcgalariwm  Ruheœ- 
Vallis  in  Zonid.  86  pages,  finissant  en  1-47J5. 

5°  Tractatus  de  origine  monasterii  Scptem  Fontium.  18  pages. 

A  la  fin  du  volume  on  lit  cette  note  :  Emjitis  à  dominis 
dunetisibus  \1  floreiiis  à  Carolo  van  Brusely  biblinpolâ  BrU' 
gensi,  anno  1614. 

20°  Wetten  dcr  stedc  van  Brugghe^  beginnende  van  den 
jacre  1322,  door  J.A.  Kerchove  ^  priester^  anno  1670. 

Continué  ensuite  par  d'autres  plumes  jusqu'en  1792; 
3  vol.  in-folio  sur  papier 

Ces  fastes  consulaires  de  la  ville  de  Bruges  contiennent 
beaucoup  d'annotations  historiques,  la  plupart  d'un  intérêt 
local. 

21  o  Yersaemelinge  van  aile  de  sepulturen  ^  waepens  ende 
blasoenen  die  gevonden  worden  in  aile  de  kercken  binnen 
de  stad  van  Brugghe^  door  31.  Ignace  de  Hooghe;  1789. 
6  vol.  in-folio,  écrits  sur  papier  et  ornés  d'une  quantité 
considérable  de  dessins  très-bien  coloriés. 

C'est  une  collection  d'un  haut  intérêt  sous  les  rapports 
historique  et  héraldique. 

22"  Incipit  prologiis  Ardensis  ecclesiœ  presbyteri  Lam- 
berti  super  Ghisnensem  historiain  et  Arnoldum  de  Ghisnea. 
In-folio,  papier,  104  feuillets,  écriture  du  XVP  siècle. 

Cette  chronique  de  Lambert  d'Ardres  finit  à  l'année  1 200. 
Elle  se  trouve  imprimée  dans  la  collection  de  J.  P.  Ludwig, 
intitulée  :  Reliquiœ  manuscriptormn  ^  in-8°,  Francof. ,  t.  8, 
page  369;  mais  ce  recueil,  assez  répandu  en  Allemagne,  ne 
se  voit  guère  en  Belgique.  Nous  n'avons  pu  comparer  notre 
manuscrit  avec  l'imprimé. 

23°-(4//<?  de  wetten  der  stadBrugghe  sedert  hetjaer  1250, 
ah  mede  het  gedenkweerdigste  dat  er  op  yder  jaer  is  voor- 
gcvallcn,  door  Pieter  Ledoulx  ^  racd,  schcpcn  en  hooftman 
der  seiccr  stadt.  2  vol,  in-folio,  de  l'écrilure  de  l'auteur. 
24"  Description  historique  de  l'église  collégiale  et  parois- 
siale de  S'-Souveur  à  Bruges.  12 


<  170  ) 

Idem  de  l'ancienne  église  de  S"'-Wàlburge,  démolie 
dnns  l'année  1780. 

Idem  de  l'érection  du  couvent  des  jésuites. 

Idem  de  l'église  paroissiale  de  S*-Jacques. 

îdem  des  églises  paroissiales  de  S -Gilles  et  de  S**-Anne, 

Idem  d'un  grand  nombre  de  couvents  et  hôpitaux,  par 
M,  Patrice  Beaucourt, 

Petits  opuscules  détachés,  format  in-4° ,  sur  papier. 

25°  Recueil  des  inscriptions  et  armoiries  de  toutes  les 
tombes,  épitaphes,  sépultures,  qui  se  trouvaient  encore, 
en  1691 ,  dans  l'église  cathédrale  à  Bruges,  tirés  des  ma- 
nuscrits de  M.  Corneille  Gaillaert,  et  des  mémoires  de 
M.  Casetta,  chanoine  de  cette  église. 

26<»  Verzaemeling  van  d' epitaphien  ende  grafschrîften 
liggende  in  do  kercken  der  vrouwe  cloosters,  zoo  ahdyen 
als  andere^  mitsgaders  liospitalen  en  cajjellcn  der  stede  van 
Brugghe  ,  hy  een  vergadert  door  Mhei'  Ignace  de  Hooghe, 

27°  Description  historique  de  l'église  de  S'-Donat ,  et  de 
l'ordre  de  la  Toison  d'or,  créé  en  cette  église  en  1432,  et 
un  recueil  d'inscriptions  sépulcrales. 

Idem  de  l'église  de  S*-Basile  ou  chapelle  du  Saint-Sang, 
par  Beaucourt. 

Tels  sont  les  manuscrits  de  la  bibliothèque  de  la  ville 
de  Bruges  qui  concernent  l'histoire  de  la  Belgique  ou  plu- 
tôt de  la  Flandre  particulièrement,  et  dont  pas  un  n'est 
cité  par  31.  Hœncl. 

Quant  aux  autres  qui  ont  également  été  oubliés  et  qui 
portent  le  chiffre  de  480  à  536,  ce  sont  pour  la  plupart  des 
ouvrages  Ihéologiques,  qui  feront  partie  du  catalogue  rai- 
sonné général  des  manuscrits  que  nous  préparons,  et  (Jans 
lequel  seront  rectifiés  quelques  autres  erreurs  de  moindre 
importance  qui  se  sont  glissées  dans  le  travail  du  savant 
Allemand, 

Octave  DELErjEURE. 


(  171  ) 


De  Vtxxsltntt  it  V®%xvt 


DANS 


LES  MONUMENTS  DES  TE3IPS  LES  PLUS  EECULÉS. 


Ref'Iiercber  l'origine  de  l'ogive  serait  un  travail  inutile; 
apparemment  existait-elle  avant  que  les  hommes  fussent 
en  état  de  rédiger  leurs  annales.  Plusieurs  opinions  ont  été 
émises  sur  la  Question  de  savoir  dans  quel  pays  on  employa 
d'abord  l'ogive:  les  uns  soutiennent  que  ce  fut  dans  le  Nord 
de  l'Europe;  que  l'emploi  de  l'arc  en  tiers-point  y  provint 
de  la  nécessité  d'élever  les  toitures,  pour  les  opposer  avec 
avantage  aux  pluies  et  aux  neiges  du  climat;  que  l'exhaus- 
sement des  toits,  qui  exigeait  l'exhaussement  des  voûtes, 
donna  naissance  à  l'arc  à  ogive.  D'autres  écrivains  préten- 
dent, au  contraire,  que  l'ogive  fut  primitivement  em- 
ployée dans  l'Orient.  C'est  pour  jeter  quelque  lumière  sur 
cette  intéressante  question  que  nous  allons  indiquer  un 
grand  nombre  de  monuments  de  long-temps  antérieurs 
au  XIP  siècle ,  où  l'arc  en  tiers-point  se  trouve  clairement 
formulé.  Toutefois  qu'on  ne  s'attende  pas  à  voir  sur  ce^ 
monuments  l'ogive  élégante  et  élancée  telle  que  nous  l'ad- 
mirons dans  nos  beaux  monuments  gothiques  des  XIIP 
et  XIV°  siècles  :  nous  n'avons  cherché  à  constater  sur  ces 
monuments  qu'un  fait,  l'existence  de  l'arc  ou  du  cintre, 
dont  les  lignes  forment  une  pointe  aiguë  par  leur  inter- 


(  172  ) 

section  diagonale.  Que  cet  arc  se  soit  diversifié  dans  ses 
contours,  qu'il  se  soit  relevé  en  spirale  par  le  haut,  qu'il 
se  soit  évasé  vers  le  milieu  pour  se  rétrécir  sur  les  im- 
postes, il  n'en  est  pas  moins  certain  que  c'est  un  arc  en 
tiers-point,  mais  diversement  modifié.  Venons  aux  faits  (1). 

C'est  dans  l'Indoustan  que  l'on  voit  les  plus  anciens 
monuments  où  l'arc  en  ogive  se  trouve  tracé  :  la  pagode 
de  Jagrenat,  située  vers  le  haut  de  la  côte  d'Orixa ,  est  le 
plus  ancien  temple  du  pays;  la  tradition  lui  prêle  une 
antiquité  toute  fabuleuse  :  il  aurait  onze  mille  ans  de  date! 
Sa  tour  (haute  de  340  pieds) ,  qui  surmonte  une  des  en- 
trées, est  formée  de  divers  étages,  soutenues  par  des  co- 
lonnes, qui  sont  couronnées  par  des  arcs  en  ogive,  relevés 
par  le  haut  (2). 

La  pagode  de  Chedambaram  ou  Chalamhron,  située  au 
même  endroit ,  est  faite  sur  le  même  plan  ;  ses  voûtes 
sont  en  ogive:  on  dit  que  ce  temple  existe  depuis  cinq 
mille  ans  (3).  La  plupart  des  plus  anciens  temples  de 
Pagahm,  dans  le  royaume  d'Ava  ou  l'empire  des  Birmans, 
ont  un  dôme  cintré,  surplombant  une  lourde  bâtisse,  dans 
laquelle  est  placée  l'image  de  Gaudma  assis,  a  Quatre  pas- 
sages de  forme  gothique  conduisent  sous  ce  dôme;  »  ce  sont 
les  expressions  du  major  Michel  Symes  dans  sa  relation  (4). 

Le  même  voyageur  dit  plus  loin  (5)  :  «  Les  ruines  de  Ma- 
valipouram,  le  Maliarpha  de  Plolémée,  ville  détruite  de- 

(1)  Il  eut  été  intéressant  d'avoir  pu  placer  sous  les  yeux  des  lecteurs 
tous  les  monuments  que  nous  allons  i)asser  en  revue  :  mais  le  cadre  du 
Messager  s'oppose  à  ce  qu'un  article  soit  accompagné  d'un  trop  grand 
nombre  de  gravures. 

(2)  Voyez  Histoire  et  Essai  sur  V hidoustan,  par  Lcgoux-Deflaix,  1807; 
tome  I.  pag.  118,  pi.  II. 

(3)  V.  ii>id.,pag.  118ctl20. 

(4)  Relation  de  l'ambassade  anglaise,  envoyée  en  1795  dans  le  royaume 
d'Ava  ou  l'empire  des  Birmans.  Paris,  1800;  tome  II,  pag.  112. 

(5)  lbi.l.,tome  III,  pag.  234. 


(  173  ) 

puis  plusieurs  siècles,  est  connue  sotis  le  nom  des  sept 
pngodes  :  leur  architecture  difFère  totalement  de  celle  qu'on 
voit  dans  les  temples  des  idoles,  qui  ont  été  bàlis  depuis  : 
ces  derniers  sont  tous  dans  le  goût  égyptien  ,  ayant  des 
tours  pyramidales,  des  portes  sans  cintre  et  des  toits  plats. 
Mais  l'architecture  des  pagodes  de  Mavalipouram  appro- 
che beaucoup  de  la  gothique.  L'espèce  de  voûte  qui  la 
couvre  n'est  pas  régulièrement  cintrée,  mais  composée  de 
deux  portions  de  cercle  tronqué,  qui  en  se  réunisscmt  par 
le  haut,  forment  une  pointe.  L'origine  et  la  décadence  de 
cette  ville  se  perdent  dans  la  nuit  des  siècles  :  ce  que  les 
Brahmes  en  disent  est  puisé  dans  le  poème  de  Mahahharit, 
mais  leurs  récits  sont  enlacés  de  tant  d'événements  fabu- 
leux, qui  ne  se  rattachent  à  aucun  fait  historique  avéré , 
qu'il  est  impossible  d'en  tirer  aucune  induction  propre  à 
fixer  l'époque  de  la  fondation  de  ces  monuments.  »  Quoique 
cette  description  ne  soit  point  accompagnée  de  plans  ou  de 
vues,  il  n'en  résulte  pas  moins  évidemment  que  la  voûte 
de  ces  monuments  ne  soit  en  ogive  (l). 

Les  célèbres  grottes  de  Karli,  situées  sur  la  route  de 
Bombay  à  Poonah,  aux  Indes  anglaises,  portent  aussi  des 
traces  évidentes  de  l'ogive  (2).  Ces  grottes  sont  creusées  dans 
le  roc  à  une  élévation  d'environ  trois  cents  pieds  au-dessus 

(1)  Tons  les  écrivains  font  la  description  la  plus  pompeuse  de  cet  en- 
droit. La  montagne,  disent-ils,  vue  d'une  certaine  distance,  offre  l'as- 
pect d'un  édiiice  antique  et  majestueux  :  vers  la  base  on  remarque  une 
pagode  d'un  seul  bloc  ;  elle  parait  avoir  été  taillée  dans  un  rocher  détaclié. 
Un  peu  plus  loin  ,  il  y  a  un  groupe  de  figures  humaines  en  bas-relief:  un 
escalier  tournant  conduit  au  haut  de  la  montagne  à  un  autre  temple 
creusé  dans  le  roc  :  dans  d'autres  endroits  on  trouve  divers  morceaux  de 
sculpture  qui  ont  rapport  à  la  mythologie  hindoue ,  tels  qu'un  éléphant 
de  grandeur  naturelle,  des  pagodes,  etc.  Il  a  fallu  des  siècles  pour  tailler 
et  creuser  tant  d'objets  étonnants.  Voyez  Rvchetch.  Asiat. ,  tome  I; 
Daniell  Antiquities  ofindin,  pi.  I  et  II. 

(2)  Voyez  Viens  in  Ihe  East ,  coviprising  India ,  Canton,  and  the 
shores  of  ihe  red  sea,  etc.,  by  cajtlain  Robert  EUiot,  1831. 


{  174  ) 

de  la  mer.  Les  portes  d'entrée  sont  surmontées  d'ogives , 
légèrement  relevées  en  spirale  :  un  vaste  cintre  surhaussé 
et  entouré  d'une  platte  bande,  qui  s'élève  en  pointe  vers 
le  milieu,  couronne  ce  magnifique  péristyle,  dont  les  pa- 
rois sont  couvertes  de  bas-reliei's  en  ronde  bosse  (1). 

L'intérieur  d'une  des  caves  d'EUora ,  nommée  Bisma 
Rurm,  a  complètement  une  forme  ogivale  :  la  roche  est 
taillée  en  rainure,  et  offre  l'image  de  la  charpente  d'un 
navire.  Au  fond  du  temple,  une  énorme  divinité  hindoue 
est  assise  sur  une  espèce  de  troue,  dont  le  sommet  se  relève 
légèrement  en  tiers-point. 

Les  relations  des  voyageurs  nous  ont  manqué  pour  con- 
tinuer des  recherches  à  l'égard  de  l'ogive ,  sur  l'antique 
territoire  de  l'Asie  :  Kanake,  au  confluent  du  Gange  et  du 
Kalini,  Mat/ira,  Beiulrabad ,  llastinajjour,  Aude  h  ,  sur  la 
Dewa,  et  son  vaste  temple  nommé  Swergedrari ,  &^mÂoz//, 
Prag  ou  Allahabhad,  Gajah,  Gour^  Ruttumpour,  Kalberge 
ou  Ahssctiabad,  capitale  du  plus  ancien  royaume  indou, 
connu  sous  le  nom  de  Décan  ,  Scringhatn,  Maduié,  la 
Modura  de  Plolemée,  capitale  il  y  a  deux  mille  ans  de 
la  dynastie  des  Pandys ,  toutes  villes  de  l'Indostan  de  la 
plus  haute  antiquité  et  remarquables  par  les  pagodes,  les 
ruines  des  palais  et  d'autres  monuments,  doivent  offrir,  à 


(1)  Kn'avaut  des  rochers  où  ces  grottes  sont  creusées,  on  a  taillé  un 
parvis  d'environ  cent  pieds  qiiarrés.  Sur  la  gauche  se  trouve  une  colonne 
haute  de  25  pieds  sur  1 1  pieds  de  diamètre  :  son  sommet  a  la  forme  d'une 
cloche  où  sont  sculptés  trois  lions  couchés  :  la  colonne  correspondante 
du  côté  opposé  a  été  enlevée,  pour  y  bâtir  un  petit  temple  dédié  à  la 
déesse Bowannée  (divinité  hraminc).  Un  vestibule  précède  les  salles  :  trois 
énormes  éléjjhants  sont  taillés  en  haut-relief  sur  les  cotés  des  parois.  Les 
salles  s'étendent  à  126  pieds  de  profondeur,  sur  une  largeur  de  46  pieds 
anglais;  elles  sont  élevées  de  50  à  60  pieds.  Un  rang  de  coloiujes  polygo- 
nales règne  autour  des  salles  :  les  chapiteaux  forment  un  tambour,  sur- 
monté déléphants,  poi  tant  sur  le  dos  trois  personnages  :  tout  y  est 
d'une  exécution  parfaite.  Ces  caves  sont  de  construction  Bhouddistc. 


(  175  ) 

n'en  pas  douter,  plus  d'une  trace  de  Tare  en  tiers-point.  Les 
énormes  ruines  de  palais ,  de  colonnades  de  marbre  et  de 
pierre,  d'inscriptions  taillées  dans  le  roc ,  de  ponts  avec  des 
arches  voûtées,  qui  se  rencontrent  dans  lîle  de  Geylan, 
nous  présenteraient  aussi  le  même  caractère  d'arc  (1). 

(1)  II  est  digne  tie  remarqne  que  l'on  rencontre  tin  plus  granci  nombre 
de  CCS  magnifiques  grottes,  dans  un  petit  territoire  sur  les  côtes  du  Ma- 
labar, autrefois  occupé  par  les  Mabrattes.  que  dans  aucmie  autre  partie 
de  l'Inde.  Les  caves  A'Eléphanta,  deEenera,  d^Amboli,  quelques  antres 
dans  File  de  Salzette,  celles  <Ie  Karli,  d'EUora  et  de  Kiokun,  se  trou- 
vent tontes  sur  le  territoire  3Iahratte.  Jusqu'ici  on  n'est  pas  parvenu  à 
fixer  l'époque  de  la  construction  de  ces  étonnantes  excavations  :  tes  sa- 
vants anglais,  qui  s'occupent  de  recherches  asiatiques ,  tombent  d'accord 
pour  dire  que  ces  grottes  sont  antérieures  à  l'expédition  li'Alesandre-le- 
Grand  aux  Indes.  Au  reste,  voici  ce  que  nous  avons  lu  à  ce  sujet  dans 
un  ouvrage  périodique,  intitulé  le  Grand  Livre,  journal  de  bibliogra- 
phie, de  littérature,  etc. ,  3«  année,  S»  série,  n»  4,  15  novembre  1835, 
page  73  :  Le  révérend  Stevenson  de  Poonah,  auteur  de  la  grammaire 
Mahnitte,  rapporte  qu'il  passa  près  d'un  an  à  s'enquérir  auprès  des  na- 
turels du  pays  de  la  clef  des  inscriptions  qui  se  trouvent  dans  les  cavernes 
de  Karli  :  après  des  recherches  infinies,  il  fit  la  collection  de  tous  les 
aljjhabets  dont  on  se  sert  sur  la  côte  occidentale  de  l'Inde  :  l'alphabet 
allahabad  donna  une  direction  convenable  à  ses  études  et  le  mit  bientôt 
en  état  de  lire  quelques-unes  des  inscriptions  de  Earli. 

Parmi  les  inscriptions,  qu'il  est  parvenu  à  déchiffrer,  se  trouve  la  sui- 
vante, taillée  sur  la  façade  du  temple  : 

((  Où  le  vieux  démon  avide  de  meurtre,  au  pouvoir  immense,  à  la  voix 
))  hennissante,  rodait  jadis  frénétique  au  milieu  de  l'horrible  monde  des 
»  diables  destructeurs,  là  dans  le  cours  de  l'année  101«=  d&Shalivahana, 
»)  fut  construit  le  divin  ermitage,  ennemi  de  l'enfer,  etc.,  etc.  » 

M.  Stevenson  pense  pouvoir  tirer,  entre  autres,  la  conséquence  sui- 
vante de  l'interprétation  de  ces  inscriptions  :  qu'il  y  a  seize  siècles  et 
demi  que  ce  temple  a  été  creusé.  L'inscription  votive,  gravée  sur  la  co- 
lonne en  face  du  temple  (dont  nous  avons  parlé  pins  haut)  parait  de  la 
même  époque  que  les  statues  sculptées,  et  quoiqu'un  peu  effacée,  la 
partie  où  se  trouvent  les  caractères  numérkjues  et  quelques  lettres  i)la- 
cées  avant  et  après  sont  hemeusement  dans  un  état  parfait  de  conserva- 
tion. Bien  (piil  ne  soit  pas  anthentiquement  établi  qne  l'érection  de  ces 
monuments  date  du  siècle  de  Shalivahana ,  toutefois  le  nom  d'un  de  ses 
successeurs,  désigné  par  le  titre  non- équivoque  de  dominateur  de  Sha 
vras ,  qu'on  lit  sur  une  colonne  voishie ,  ne  permet  pas  de  conserver  le 
moindre  doute  sur  ce  point. 


{  176  ) 

Les  Pélasges,  dont  ou  ignore  l'origine,  mais  qui  s'éta- 
blirent dans  le  Péloponèse  dix-huit  siècles  avant  notre  ère, 
nous  ont  laissé  une  idée  positive  de  leur  architecture  dans 
les  ruines  deTirynthe,  de  Mycènes,  de  la  citadelle  Larina 
d'Argos  et  de  l'édifice  que  l'on  croit  avoir  été  la  trésorerie 
d'Atrée.  Les  ruines  des  murailles  deTirynthe,  fondée  quinze 
siècles  avant  notre  ère  et  saccagée  466  ans  avant  J.-C, , 
offrent  encore  aujourd'hui  d'énormes  pierres  superposées 
et  qui  ne  sont  pas  équarries.  Au  sud  de  la  ville  on  voit 
aussi  des  galeries  qui,  dans  leur  état  actuel,  ont  douze 
pieds  de  haut;  elles  sont  formées  d'énormes  blocs  de  pierre  : 
les  portes  ou  fenêtres  qu'on  y  remarque  et  qui  communi- 
quaient à  d'autres  constructions  qui  ont  disparu ,  sont  en 
ogives  (1). 

Le  tombeau  ou  la  trésorerie  d'Atrée  àMicènes  (fondée  et 
saccagée  à  la  même  époque  que  Tirynthe)  est  un  monu- 
ment architectonique  très-curieux.  Pausanias  l'a  vu  et  en 
a  rendu  compte  :  les  murailles  diffèrent  de  celles  de  Tiryn- 
the, en  ce  qu'elles  sont  formées  de  polygones  irréguliers, 
taillés  et  ajustés  avec  art.  Toutes  les  portes  sont  surmontées 
de  fenêtres  coniques,  idée  primitive  de  l'ogive  (2).  L'expres- 
sion dont  se  sert  Platon  (400  ans  avant  J.-C),  quand  il 
parle  du  monument  à  élever  au  premier  magistrat  qui  aura 
bien  mérité  de  la  patrie,  est  digne  de  remarque.  «Sepul- 
chrum,  dit-il, illi  sit  fornix  longior  expulchrislapidibus.  » 
Platon  ne  semble-t-il  pas  indiquer  une  voûle  en  tiers-point? 

La  porte  de  l'Acropole  d'Arpino,  patrie  de  Marins  et  de 
Cicéron,  est  encore  d'origine  pélasgique  :  elle  ne  forme  pas 
un  angle,  mais  bien  une  ogive  élancée,  bâtie  en  grand 

(1)  Voyez  VU  Hivers  pittoresque,  Grèce,  planche  5. 

(2)  Voyez  la  iilanche  7  du  même  ouvrage. 

Il  existe  ù  Paris,  à  la  bibliothèque Mazaiine ,  une  collection  de  soixante 
monuments  pélasyicjues,  exécutés  en  jaspe  colorié  et  faits  d'après  les  des- 
sins de  Dodwell. 


(  177  ) 

appareil  (l).  Si  le  clélaul  de  livres  ne  nous  eût  empêché  de 
pousser  nos  recherches  plus  loin ,  nous  croyons  que  nous 
eussions  trouvé  des  traces  fréquentes  de  l'arc  en  tiers- 
point  dans  les  ruines  des  nombreuses  villes  bâties  dans 
l'espace  de  terre  compris  entre  le  Tibre,  l'Anio  et  le  Liris, 
et  dont  le  caractère  pélasgique  est  constaté  par  le  témoi- 
gnage d'Hérodote ,  de  Strabon ,  de  Denys  d'Halicarnasse , 
de  Pline  et  de  Pausanias. 

Nous  indiquerons  en  outre  d'autres  ouvrages  grecs  et 
romains,  où  l'ogive  a  été  mise  en  œuvre  : 

A  Tusculum,  la  voûte  d'un  aquedue. 

A  Tarquinie,  une  chambre  sépulcrale. 

En  Sardaigne,  près  de  Ploaghe,  un  des  monuments  dits 
iNuraghes. 

A  SefFi-ech,  dans  la  Cyrénaïque,  les  ruines  d'un  cime- 
tière antique. 

A  Catane,  l'entrée  et  la  voûte  d'un  tombeau  situé  dans 
le  jardin  du  couvent  de  Sanla-Maria-in-Jesu  (2). 

Ces  deux  dernières  constructions,  qui  doivent  être  attri- 
buées à  des  Grecs ,  offrent  le  système  de  l'arc  aigu  avec  des 
claveaux ,  employés  non  pas  comme  une  simple  déviation 
du  mur  perpendiculaire,  mais  comme  l'arc  qui  offre  le 
plus  de  solidité. 

Baalbeck,  la  ville  du  soleil,  la  merveille  du  désert jhkÙQ 
par  Antonin ,  porte  des  traces  évidentes  et  bien  arrêtées 
de  l'ogive  sur  ses  murailles  gigantesques  :  pour  s'en  con- 
vaincre on  n'a  qu'à  jeter  les  yeux  sur  la  vue  générale  du 
petit  temple,  prise  de  l'Ouest,  dans  le  Voyage  en  Orient, 
par  Léon  De  Laborde.  Paris  ,  1839. 


(1)  On  a  donné  nn  dessin  de  cette  porte  dans  \c  Magasin  pittoresque, 
année  1834,  vol.  2,  page  327. 

(2)  Voyez  le  discours  de  M.  Ilittorff  et  les  auteurs  qu'il  cite  à  l'appui, 
rapporté  dans  l'ouvrage  intitulé  Congrès  historique  Européen,  t.  II, 
p.  388. 


(  178  ) 

L'Egypte  nous  en  offre  aussi  des  exemples  :  noua  invo- 
querons les  galeries  qui  forment  la  partie  postérieure  du 
Ramesseum  à  Thëbes,  et  les  tombeaux  près  Nagadéh,  dans 
la  haute  Egypte  (1). 

Le  Mexique  a  conservé  dans  ses  forêts  vierges  des  monu- 
ments, dont  aucune  tradition  n'est  venue  révéler  les  fon- 
dateurs, et  qui  portent  des  traces  évidentes  de  l'arc  ogival  : 
entre  autres  l'entrée  d'une  galerie  souterraine  dans  le  voi- 
sinage de  la  colline  de  Xocliichalco ,  près  d'Antequera,  est 
construite  dans  ce  style  (2).  Dans  un  autre  ouvrage  sur  le 
Mexique  (3),  nous  avons  trouvé  un  pont  dont  l'arche  est 
complètement  ogivale: il  est  situé  au  village  indien  nommé 
Chihuitlan,  à  une  lieue  de  Tchuantepec. 

Au  premier  abord,  l'emploi  de  l'ogive  dans  des  monu- 
ments d'une  antiquité  si  reculée,  peut  causer  de  l'étonne- 
ment  ;  mais  il  cessera  si  l'on  observe  que  «  l'emploi  des 
voûtes  et  de  leurs  arcs  fut  le  premier  degré  de  perfection- 
nement dans  l'art  de  bâtir....  que  la  manière  dont  ce  per- 
fectionnement fut  mis  en  œuvre,  démontre  et  sa  haute 
antiquité  et  surtout  la  nécessité  de  la  ibrme  demi-sphé- 
roïdale  et  de  l'arc  aigu,  lors  de  l'origine  des  voûtes  et  des 
arcs;  que  la  construction  des  premières  voûtes  et  des  pre- 
miers arcs  n'étant  autre  chose  qu'une  supperposition  d'as- 
sises de  pierre  placées  horizontalement  les  unes  sur  les 
autres,  de  manière  à  dévier  de  la  perpendiculaire  pour 
arriver  par  un  rapprochement  progressif  à  la  rencontre 
du  centre;  qu'il  dut  en  résulter  la  forme  demi-sphéroïdale 
pour  les  voûtes  j  et  pour  les  arcades  celles  d'arcs  aigus;  que 

(1)  Voyez  VHistoire  de  l'expcdition  française  en  Eyyjftu ,  Atlas, 
tome  I",  planche  55. 

(2)  VojLZ  le  ma^iiiriqiic  ouvrage  mWinMi  Antiquilé s  mexicaines,  etc., 
Itlaiiche  197. 

(;i)  Voyage  j)iilorcsque  dans  les  deux  AmériqutSi  publié  par  A.  DOr- 
bigiiy,  planche  437. 


{  179  ) 

l'iuvcnlion  el  ia  forme  des  voûtes  s'expliquent  donc  tout 
nalurellemeut  par  le  moyen  d'efforts  graduels,  auxquels 
le  principe  de  la  construction  des  murs  élevés  perpendi- 
culairement sert  de  basej  que  c'est  de  là  que  provient  la 
cause  de  la  préexistence  de  l'arc  aigu  dans  la  plus  haute 
antiquité,  avant  l'emploi  du  plein-cinlre.  »  La  justesse  de 
cette  remarque,  laite  par  M.  Hittorff,  sera  facilement  ap- 
préciée et  n'exige  pas  de  commentaire. 

Le  sentiment  inné  du  beau,  la  pureté  et  la  simplicité 
des  formes ,  fit  bientôt  oublier  aux  Grecs  et  aux  Romains 
que  l'arc  en  tiers-point  avait  préludé  à  leurs  travaux;  l'uni- 
formité des  lignes  el  la  courbe  régulière  du  plein-cintre 
obtint  d'eux  une  constante  préférence.  Aussi  pendant  une 
longue  suite  d'années  perd-on  les  traces  des  monuments, 
soit  dans  l'Occident,  soit  dans  l'Orient,  où  l'arc  en  tiers-point 
ait  été  mis  en  pratique.  Cène  fut  qu'au  Vll^  siècle  denotre 
ère  que  l'usage  universel  s'en  introduisit  de  nouveau  en 
Orient.  A  celte  époque  (610  ans  après  J.-C),  Héraclius 
régnait  à  Constantinople  :  on  était  arrivé  à  une  de  ces  pha- 
ses qui  transforment  la  face  du  monde.  Déjà  l'Occident 
était  sous  la  dépendance  de  peuplades  conquérantes,  et  à 
l'Ouest  l'Arabe  se  mettait  en  marche  pour  la  conquête  du 
monde.  Mahomet  avait  été  assez  habile  pour  réunir  par 
les  liens  d'un  nouveau  culte  toutes  les  tribus  arabes,  diver- 
gentes d'opinions  religieuses.  Ce  culte,  qui  était  enté  sur 
le  vieux  culte  des  Mages,  du  Judaïsme  et  du  Christianisme, 
else  rattachait  à  celui  du  patriarche  Abraham  pour  caresser 
quelques  vieux  souvenirs  nationaux,  ce  culte,  dis-je,  fit 
emploi,  du  premier  moment  qu'il  érigea  des  temples  à 
l'Eternel ,  de  l'arc  en  tiers-point.  La  mosquée  que  Mahomet 
érigea  à  la  Mecque ,  servit  de  type  à  toutes  celles  que  l'Isla- 
misme fit  bâtir  depuis.  L'emploi  de  l'ogive  a-t-elle  été  reprise 
par  réminiscence  d'anciennes  constructions  où  elle  avait 
été  pratiquée?  ou  n'a-l-elle  été  que  la  suite  de  la  déca- 


(  180  ) 

dence  dans  laquelle  lésants  étaient  tombés  alors?  question 
qu'il  est  difficile  de  résoudre,  faute  de  données  certaines. 
Malheureusement  le  temple  primitif  de  la  Mecque,  tel  qu'il 
fut  bâti  par  Mahomet,  n'existe  plus;  il  a  été  réparé  à  tant 
de  reprises,  sous  tant  de  sultans,  qu'il  n'était  plus  qu'un 
monument  moderne,  lorsqu'en  1626,  il  fut  presque  tota- 
lement détruit,  ainsi  que  la  Ka'aba ,  par  une  terrible  inon- 
dation (I) ,  et  aucun  voyageur,  antérieur  à  cette  époque, 
ne  nous  en  a  conservé  un  souvenir  architectonique  exact. 
Cependant  cette  perte  est  moins  à  regretter,  puisque 
plusieurs  monuments  formulés  sur  celui-ci ,  sont  parvenus 
jusqu'à  nous,  presque  conservés  intacts  par  le  fanatisme 
musulman.  Omar,  qui  succéda  en  634  à  Aboubeker,  beau- 
père  de  Mahomet,  parvint  à  s'emparer  de  Jérusalem,  qui 
s'était  défendue  valeureusement  contre  ses  armes.  A  cette 
époque,  il  ne  restait  plus  pierre  sur  pierre  du  temple 
de  Salomon  :  même  paraît-il  que  l'espace  qu'il  occupait 
avait  été  abandonné  par  les  chrétiens  (2).  Saïd-ebn-batrik , 
historien  arabe,  raconte  que  le  calyfe  s'adressa  à  Sophro- 
iiius  pour  savoir  quel  serait  le  lieu  le  plus  propre  de  Jéru- 
salem pour  y  élever  une  mosquée;  le  patriarche  lui  indiqua 
les  ruines  du  temple  de  Salomon.  Omar  en  fit  donc  déblayer 
les  terres  et  il  découvrit  une  roche  où  Dieu  avait  parlé  à 

(1)  Voyez  Voyage  en  Arabie ,  par  Burchardt,  tom.  I,  p.  134. 

(2)  Le  temple  de  Salomon  fut  détruit  par  les  Syriens,  600  ans  avant 
la  naissance  de  J.-C.  :  après  les  soixante-dix  ans  de  la  captivité  du  peuple 
de  Dieu ,  Josué  et  Jozobabcl  le  relevèrent.  Hérode  TAscalonite  rebâtit  en 
entier  ce  second  temple  :  j)endant  neuf  ans,  onze  mille  ouvriers  y  tra- 
vaillèrent constamment.  Eniin  ,  à  la  prise  de  Jérusalem  par  Titus .  la 
deuxième  année  de  Vespasicn,on  le  détruisit  de  fond  en  comble.  Les 
Hébreux  ,  d'après  l'idée  qu'on  peut  s'en  former  sur  la  relation  de  l'Ecri- 
turc  sainte,  et  la  description  de  Josèphe  du  premier  et  du  second  temple, 
avaient  le  î^oùt  du  sombre  et  du  grandiose  dans  leurs  édifices,  mêlé  à  un 
enjjoucment  pour  les  petits  détails  et  les  ornements  reclierchés;  mais  ils 
n'avaient  aucune  connaissance  des  ordres. 

Voyez  M.  De  Chateaubriand,  liineraire  de  Paris  à  Jérusalem. 


(  181  ) 

Jacob  :  la  nouvelle  mosquée  en  prit  son  nom  Gàma-el- 
Saklira,  et  fut  aussi  vénérée  que  celles  de  Médine  et  de  la 
Mecque.  Quelques  années  plus  tard,  en  685,  le  calyfe 
Abd-èl-Melck  agrandit  ce  temple,  et  pour  ruiner  le  parti 
d'un  prétendant  à  son  trône,  il  fit  de  Jérusalem  la  ville 
du  pèlerinage,  ce  que  Mahomet  avait  déjà  songé  de  faire  : 
alors  la  Gâma-el-Sakra  remplaça  la  Kdaha  (1).  Enfin  le 
successeur  d' Abd-èl-Melck ,  le  calyfe  Oualyd  (708  à  705) 
couvrit  cette  mosquée  d'un  dôme  :  dans  la  suite,  les  Croisés 
la  convertirent  en  église  chrétienne,  et  Saladin  la  rendit 
à  sa  destination  première. 

Il  est  impossible  de  dire  quelle  est  l'architecture  de  cette 
mosquée  à  l'intérieur  :  il  y  a  peine  de  mort  contre  tout 
chrétien  qui  y  entrerait,  même  s'il  mettait  seulement  le 
pied  sur  le  parvis  qui  l'environne. 

Ce  parvis,  autrefois  la  place  du  temple,  est  visible  par 
une  fenêtre  de  la  maison  de  Pilate  :  M.  De  Chateaubriand, 
dans  son  Itinéraire,  en  fait  une  description  détaillée  (2) ,  et 
dans  un  ouvrage  intitulé  :  /a  Te/re  sainte  et  les  lieux  illus- 
trés par  les  apôtres  (3) ,  on  voit  une  planche  (jui  donne 


(1)  La  Ka'aba  est  un  temple  qui  se  trouve  dans  l'enceinte  de  la  mosquée 
de  la  Mecque  :  long-temps  avant  Mahomet,  la  Ka'aba  était  un  objet  de 
vénération  pour  les  Arabes,  qui  venaient  y  foire  le  ^oî^m/"  (pèlerinage). 
Ce  temple  qui  doit  son  origine,  sinon  à  Abraham  (opinion  fondée  sur  des 
traditions  assez  explicites)  rcj)réscntant  le  dogme  de  Tuiiité  de  Dieu  chez 
tous  les  peuples  sémitiques,  du  moins  à  un  personnage  revêtu  d'un  ca- 
ractère de  sainteté,  ce  temple  ,  dis-je,  était  le  centre  du  culte  religieux 
des  populations  ,  qui,  ainsi  que  les  Hébreux,  n'en  admettaient  qu'un  seul 
pour  toute  la  nation.  Au  dire  de  Burehardt  (  Voyatje  en  Arabie,  t.  I  , 
p.  129),  les  hommes  et  les  femmes  étaient  obligés  d'y  paraître  dans  uu 
état  de  nudité  complète.  Ce  temple  était  orné  d'un  grand  nombre  d'idoles 
et  de  statues  :  quand  Mahomet  s'en  empara  ,  il  renversa  lui-même  ces 
figures;  dans  le  nombre  il  y  en  avait  qui  représentaient  des  anges  ,  Abra- 
ham, et  la  vierge  Marie,  tenant  sur  les  genoux  Jésus  le  Messie. 

(2)  Voyez  t.  II,  pag.  368,  édit.  de  1811.  Paris. 

(3)  Voyez  page  32. 


(  182  ) 

une  vue  exacte  de  celte  mosquée  :  c'est  le  système  ogival 
qui  fut  employé  dans  sa  construction  octogonale,  toutes 
les  arcades  y  sont  à  double  courbure  (1). 

Amrou,  général  du  calyfe  Omar,  le  même  qui  enleva 
Jérusalem  à  l'empereu^r  Héraclius  ,  fit  la  conquête  de 
l'Egypte  en  639.  A  peine  s  était- il  rendu  maître  de  cette 
riche  province  qu'il  songea  à  élever  un  palais  à  l'islamisme  : 
il  le  conçut  sur  de  larges  dimensions  et  à  l'instar  de  la 
mosquée  de  la  Mecque.  Ce  fut  àFostàt,  près  du  Caire,  qu'il 
en  fixa  l'emplacement ,  à  l'endroit  même  d'un  antique 
pyrée  persan,  ruiné  depuis  l'ère  d'Alexandre.  Les  der- 
nières colonnades  de  Memphis  servirent  de  support  aux 
voûtes  de  la  mosquée ,  qui  forme  une  vaste  enceinte  de 
péristyles,  ayant  sur  un  côté  six  rangs  de  colonnes  et  sur 
les  autres  deux  ou  trois  rangées.  Dans  ce  vaste  monument 
on  ne  trouve  aucun  indice  apparent  de  richesse  dans  les 
ornements,  tant  vantée  par  les  écrivains  arabes;  mais  l'en- 
semble du  plan  est  d'une  grandeur  imposante.  L'architecte 
emprunta  aussi  aux  édifices  romains  pour  son  embellisse- 
ment :  des  chapiteaux  corinthiens,  des  bases  et  des  piédes- 
taux y  ont  été  ajustés  comme  par  hasard,  pour  atteindre 
une  élévation  de  cinq  mètres  :  à  cette  hauteur  s'élèvent  les 
arcades  en  pierre  bien  appareillées:  ces  arcades  sont 
aiguës,  formées  de  deux  courbes  ;  c'est  l'ogive  d'une 
forme  peu  élégante,  il  est  vrai,  mais  elle  y  est  nette- 
ment dessinée  :  ce  temple  fut  bâti  de  639  à  645  de  notre 
ère  (2). 

En  677,  le  patriarche  Yohannâfit  construire  à  ses  frais, 
à  Alexandrie,  l'église  de  S'-Marc  l'Evangéliste ,  nommée 

(1)  D'après  Guillaume  deTyr,  les  inscriptions  anciennes,  sculptées 
au-dedans  et  au-dehors  de  cet  édifice,  attestent  qu'Omar  fut  son  fon- 
dateur. 

(2)  Voyez  les  Monuments  du  Caire,  dessinés  par  Coste.  Paris.  1837- 
1838,  planche  I. 


(  183  ) 

êi-quamchâ  par  les  Arabes  :  si  cinq  siècles  et  demi  plus 
tard  elle  n'eût  été  détruite,  elle  aurait  pu  nous  fournir  un 
intéressant  spécimen  d'architecture.  La  comparaison  entre 
le  style  monumental  chrétien  primitif  et  celui  de  l'isla- 
misme aurait  peut-être  pu  étabhr  plus  d'un  point  de  rela- 
tion entre  eux!  l'emploi  subit  de  l'ogive  aurait  peut-être 
pu  s'expliquer  ?  Les  Arabes  n'ont  employé  l'arc  en  tiers- 
point  que  comme  ils  se  sont  servis  des  colonnes  et  chapi- 
teaux romains  et  égyptiens ,  c'est-à-dire  en  adoptant  l'u- 
sage qu'en  faisaient  les  peuples  conquis  par  eux?  Car 
si  l'on  considère  d'abord  l'isolement  dans  lequel  le  Maho- 
métan  s'était  placé  par  son  fanatisme,  qui  lui  défen- 
dait tout  emprunt  aux  autres  peuples,  et  ensuite  si  l'on 
songe  qu'à  l'époque  de  l'établissement  de  l'islamisme,  la 
culture  de  l'art  ancien  se  perdait  partout,  on  se  trouvera 
fort  embarrassé  pour  rattacher  le  système  de  construction 
des  Arabes,  qui  surgit  tout  d'un  coup,  à  tout  autre  sys- 
tème architectural  quelconque. 

Cependant  il  existe  encore  à  Alexandrie  une  ancienne 
basilique,  sous  l'invocation  de  S'-Alhanase,  qui  peut  nous 
mettre  quelque  peu  sur  la  voie  du  style  architectural  pri- 
mitif chrétien.  Cette  église  était  autrefois  primitive  (nous 
suivons  ici  mot  à  mot  la  description  qu'en  donne  l'his- 
toire militaire  et  scientifique  de  l'expédition  française  en 
Egypte);  elle  a  conservé  le  nom  du  saint  auquel  elle 
était  consacrée.  Son  enceinte  forme  un  parallélograme, 
entouré  de  quatre  rangs  de  colonnes  dans  la  partie  du 
fond,  de  deux  rangées  sur  chaque  côté,  et  d'une  seule 
dans  la  façade  d'entrée  :  les  colonnes  antiques  de  mar- 
bre portent  des  arcs  qui  soutiennent  un  plancher  et  for- 
ment un  portique  couvert,  dont  Ls  trois  murailles  et 
le  pavé  sont  revêtus  de  mosaïque  en  marbre...  Au  milieu 
on  voit  un  petit  pavillon  octogone  qui  renfermait  le 
monument  précieux  dans  lequel  on  a  reconnu  le  sarco- 


(  184) 

phage    d'Alexandre-]e-Grand  (1).    Celte  description  est 
accompa^^née  d'une  planche,    qui  représente  cette  anti- 
que basilique  :  tous  les  arcs  en  sont  recourbés  à-peu-près 
en  fer  à  cheval.  Cet  exemple,  isolé  il  est  vrai,  pourrait 
nous    faire    soupçonner  que  les   chrétiens  des    premiers 
siècles  auraient  bien  pu  avoir  fourni  aux  Arabes  les  pre- 
miers éléments  de  leur  type  architectural;  car  bien  souvent 
au  commencement  de  l'hégyre ,  ce  furent  des  artistes  chré- 
tiens qui  présidèrent  aux  travaux  de  calyfes.  La  reproduc- 
tion, par  le  dessin,   des  monuments  musulmans  des  diffé- 
rentes époques  et  des  différentes  parties  de  l'Orient ,  serait 
un  travail  du  plus  grand  intérêt  pour  l'histoire  de  l'art  ; 
un  tel  travail  ferait  apprécier  la  part  d'influence  des  mo- 
numents anti-islaniiques  sur  l'art  de  bâtir  de  l'Arabe,  et  on 
saurait  s'il  a  fait  quelque  chose  d'original.  Toutefois  il  nous 
paraît  très-probable  que  la  bataille  àc  Kadesia,  dans  l'Irak, 
gagnée  par  Omar  en  636,  et  qui  décida  du  sort  de  l'em- 
pire persan,  dût  avoir  aussi  une  grande  influence  sur  les 
arts  chez  les  Arabes.  Quand  ils  s'emparèrent  de  Madain, 
ancienne  capitale  de  la  Perse,  la  grandeur  de  cette  ville,  la 
magnificence  de  ses  édifices,  leur  luxe  intérieur,  dut  vive- 
ment les  frapper.  Et  ne  pourrait-on  pas  dire  que  c'est  sous 
la  puissante  impression  des  somptueux  édifices  des  CosroëSf 
qu'Omar  fonda  la  ville  de  Bassora,  à  l'embouchure  du  Tigre 
et  de  l'Euphrate,  et  celle  de  Coufa,  et  qu'il  fit  bâtir  ses 
mosquées  à  Jérusalem  et  ailleurs?  Car,  malgré  leur  mépris 
pour  les  nations  qui  n'avaient  pas  adopté  leur  croyance, 
les  Arabes  ne  laissaient  pas  cependant  de  les  consulter  : 
Omar  ne  s'adressa-t-il  pas  aux  Perses  pour  savoir  de  quelle 
manière  ils  computaient  le  temps?  il  n'est  donc  pas  impro- 
bable que  les  vainqueurs  des  Perses  aient  puisé  chez  ces 


(1)  Ce  chef-d'œuvre  du  ciseau  grec  se  trouve  au  British  Muséum,  à 
Londres. 


(  185) 

derniers  les  principes  de  leur  art  de  bâlir  :  et  peut-être  en 
trouvera-t-on  une  preuve  dans  un  genre  de  construction 
dont  ils  ont  fait  un  grand  usage ,  genre  exclusivement  ré- 
servé aux  tombeaux  de  leurs  princes?  je  veux  dire  des 
voûtes  sphériques  ou  dômes.  En  effet ,  il  est  certain  que 
dans  toutes  les  provinces  de  l'Orient  où  l'Arabe  a  étendu 
sa  domination,  on  trouve  des  monuments  bien  antérieurs 
à  l'islamisme,  couverts  de  dômes  ou  de  tops:  en  Perse,  les 
pyrées  ont  cette  forme,  voire  même  les  tombeaux j  le 
célèbre  mausolée  de  Nakshi-Roustam  en  offre  un  exemple 
remarquable  (1).  Quanta  ce  genre  de  monuments,  on  peut 
admettre  comme  positif  que  les  Arabes  l'ont  emprunté  aux 
Perses. 

Quelques  écrivains  ne  veulent  fixer  la  naissance  de  l'ar- 
chitecture arabe,  proprement  dite,  qu'au  règne  d'Oualyd, 
sixième  calyfe  ommiade  (705-715).  Le  goût  plus  épuré  de 
ce  prince  fit  adopter  la  coupe  élégante  et  hardie  du  minaret, 
qui  ne  tenait  ni  de  la  gravité  égyptienne,  ni  delà  régula- 
rité grecque.  Le  dogme  religieux  des  Arabes  eut  une  in- 
fluence directe  sur  leur  genre  d'ornement  :  la  loi  de  Maho- 
met interdisant  toute  représentation  de  figures  d'hommes  et 
d'animaux,  les  architectes  arabes  exercèrent  leur  riante 
imagination  à  multiplier  et  à  combiner  de  mille  manières 
les  diverses  sortes  de  plantes,  de  fleurs  et  de  feuillages  de 
leur  contrées,  et  ils  en  couvrirent  leurs  monuments. 

Quoiqu'il  en  soit,  ce  prince  embellit  son  empire  d'un 
grand  nombre  de  beaux  édifices;  il  fit  bâtir  à  Damas  des 
maisons  d'asile,  des  caravensérails,  \ç,Bimaristan,  hôpital 
qui  servit  de  modèle  au  Moristandu  Caire, et  la  magnifique 
mosquée  de  Damas,  connue  sous  le  nom  de  Mesged-ên-Naby, 
sur  l'emplacement  occupé  par  l'église  de  S*-Jean,  que  les 


(1)  V.  le  voyage  de  L.  De  Bruyne  ,  et  celui  de  Sir  Ker- porter,   Por- 
ifirs  fruvels  in  Georgia  ,  Persiu  ,  Babylonia ,  etc. ,  vol.  I ,  p.  51.5. 

M 


(  186  ) 

chrétiens  avaient  conservée  jusqu'à  celle  époque.  Au  XP 
siècle,  cette  mosquée  était  regardée  comme  une  des  mer- 
veilles du  monde  :  ce  temple  fastueux  ne  coula  pas  moins 
de  qualre-vingt  millions.  Oualyd  fit  aussi  embellir  et 
agrandir  les  monuments  de  la  Mecque,  de  Médine  et  de 
Fostàt. 

En  702 ,  le  gouverneur  de  l'Egj^pte ,  Qorrah-ben-cheryk, 
éleva  à  Foslàl  un  temple  nommé  A^^\x\^El-yàmé-él-atyq  (ou 
la  vieille  mosquée]  ;  il  est  inutile  de  dire  que  celte  mosquée 
dût  être  construite  sur  le  modèle  et  à  l'instar  de  celles  bâties 
par  son  maitre.  Nous  ne  connaissons ,  reproduits  par  le  des- 
sin, aucun  des  monuments  élevés  par  ce  prince  :  la  chose 
est  d'autant  plus  regrettable  que  les  historiens  s'accordent 
à  dire  que  les  mosquées  d'Oualid  ont  servi  de  type  aux 
constructions  élevées  depuis  par  les  Musulmans. 

Après  la  mort  d'Oualyd,  l'intendant  des  finances  de 
l'Egypte,  Asâmah,  fit  reconstruire  le  nilomèlre  de  Heloûan 
à  la  pointe  méridionale  de  l'île  de  Roudah,en  715.  La  co- 
lonne nilomélrique ,  qui  existe  encore  aujourd'hui  au  centre 
de  ce  monument,  est  la  même  qu'Asâmah  fit  élever;  la 
forme  particulière  des  caractères  koufiques  que  l'on  y  re- 
marque, concourt  à  confirmer  cette  opinion.  En  814:,  le 
calyfe  El-Mamoum  le  releva  de  ses  ruines  :  l'inscription 
placée  dans  le  fliéqyâs  au-dessus  de  l'entrée  intérieure  de 
l'aqueduc ,  et  les  deux  autres  qui  régnent  le  long  de  la 
frise,  autour  du  bassin  nilomélrique,  doivent  être  attri- 
buées à  cette  époque.  Le  calyfe  El-Motaouakel ,  eu  847, 
restaura  aussi  le  Bléqyàs  :  les  inscriptions  du  midi  et  du 
côté  occidental  de  la  frise  du  bassin ,  y  ont  été  placées 
par  ce  prince  :  enfin,  en  1092,  El-Mostan-ser-b-illah  le 
répara  aussi  et  y  ajouta  une  mosquée.  Depuis  cette  époque, 
le  Méqyàs  ne  subit  plus  aucun  changement  important. 
Lors  de  l'expédition  française  en  Egypte,  il  conservait 
encore  sa  forme  primitive:  elle  est  quadrangulaire,  quatre 


(  187  ) 

arcades  supportent  le  bâtiment,  trois  sont  pratiquées  dans 
les  murs  mêmes  du  bassin  et  immédiatement  placées  au- 
dessus  des  colonnes  ,  qui  soutiennent  la  galerie  inté- 
rieure, et  la  quatrième  est  prise  dans  le  massif  de  la 
première  portion  de  l'escalier  :  ces  quatre  arcades  sont 
en  tiers-point  (1). 

Nous  nous  sommes  étendus  un  peu  plus  longuement  sur 
le  Méfjyâs,  non  parce  qu'il  est  un  des  ouvrages  les  plus  im- 
portants des  calyfes,  soit  par  ses  inscriptions  et  son  usage, 
soit  par  les  diverses  époques  de  l'histoire  des  Arabes  aux- 
quelles il  se  rattache;  mais  par  la  raison  que  quelques 
écrivains,  contrariés  qu'ils  étaient  dans  leur  système  par 
l'existence  de  l'ogive  à  cette  époque,  et  ignorant  d'ailleurs 
qu'elle  eût  été  employée  dans  des  monuments  bien  plus 
anciens,  se  sont  plu  à  ne  regarder  leMéqyâs,  comme  une 
construction  moderne.  Cependant  on  ne  peut  nier  que 
ces  quatre  grandes  arcades  ogivales  n'aient  été  construi- 
tes de  705  à  847. 

Le  calyfat  de  Yézid  (  720  à  724  )  se  fait  remarquer  par 
une  de  ces  guerres  de  destruction  qui  furent  si  funestes 
aux  arts  :  sur  la  prédiction  d'un  juif,  ce  prince  donna  l'or- 
dre par  tout  son  empire  d'effacer  les  peintures  des  églises , 
soit  sur  bois,  soit  à  fresque,  et  même  celles  qui  se  trou- 
vaient sur  les  vases  sacrés  et  sur  les  ornements  d'autel. 
Cette  stupide  profanation  fut  mise  à  exécution  par  des 
Arabes  et  des  Juifs  :  dans  quelques  endroits  ces  misérables 
ne  s'entendant  pas,  envinrent  aux  mains,  et  la  lutte  abou- 
tissait d'ordinaire  à  la  destruction  de  l'église. 

Une  carrière  plus  brillante  pour  les  arts  s'ouvrit  à 
l'avènement  de  Haroun-él-Rachyd  :  le  faste  et  la  magni- 
ficence des  anciens  monarques  persans  présida  à  tous  les 


(1)  Voyez  le  grand  ouvrage  sur  TÉgypte ,  t.  15,  État  moderne,  p.  I , 
planche  23,  et  les  Monvments  du  Caire,  par  Coste  .  planche  60. 


(  188  ) 

édifices  qu'il  fit  élever.  Ce  fut  le  prince  le  plus  célèbre 
de  l'islamisme  :  contemporain  de  Charlemagne  et  cé- 
lèbre comme  lui,  il  porta  la  gloire  musulmane  à  son 
apogée. 

Bagdad  (l),  fondée  en  762,  par  El-Mansour-ben-Moham- 
med,  reçut  de  ce  prince  ses  principaux  embellissements  : 
non-seulement  il  en  agrandit  les  palais,  les  collèges  et  les 
autres  monuments  publics,  mais  il  fit  en  outre  étendre 
cette  royale  résidence  de  l'autre  côté  du  fleuve  et  réunir 
les  deux  parties  de  la  cité  par  un  pont  de  bateaux.  Un  seul 
des  monuments  bâtis  par  ce  prince  nous  est  connu ,  c'est 
le  monument  de  Zohiédë,  son  épouse  favorite;  il  est  bâti 
en  briques,  surmonté  d'un  cône,  sa  forme  est  octogonale. 
Les  ouvertures  qui  découpent  ses  huit  côtés  sont  couron- 
nées d'arcs  en  ogive.  On  trouve  cet  édifice  dans  Ker-porler 


(1)  Cette  ville,  résidence  des  calyfcs,  est  située  en-deçà  dn  Tigre,  sur 
les  ruines  de  Ctésiphon  et  de  Séleucie.  A  peu  de  distance  de  là  on  voit 
encore  debout  deux  des  plus  anciens  monuments  du  monde  :  le  premier 
oITrc  une  masse  compacte,  bâtie  de  briques  séchécs  au  soleil ,  qui  semble 
avoir  supporté  une  construction  plus  élevée,  propre  eu  même  temps  à  un 
observatoire  et  à  un  temple  :  genre  d'édifice  que  l'on  pourrait  tout  aussi 
bien  attribuer  aux  Cbaldéens  qu'à  tout  autre  peuple  adonné  au  culte  de 
Bélus  et  à  celui  des  astres.  Cette  masse  imposante  se  noïnm(t  Akarkouff, 
les  débris  qui  l'entourent ,  môme  à  une  distance  assez  éloignée,  font  croire 
qu'il  existait  jadis  une  ville  en  cet  endroit  ;  la  Genèse  parle  d'une  cité,  an 
pays  de  Shinar,  non  loin  de  Babel  ,  nommé  Accad  :  mot  qui  a  quelque 
affinité  avec  Akarkouff. 

Le  second  monument  est  bien  autrement  digne  de  notre  attention  :  c'est 
la  tour  de  Babel.  Cette  montagne  artificielle  fut  bâtie  par  Nemrod,  dans 
la  plaine  de  Sbinar,  à-peu-prcs  deux  siècles  après  le  déluge.  Dans  la  suite 
elle  servit  de  base  au  temple  de  Bélus ,  élevé  par  Nabucbodonozor  six  cents 
avant  J.-C.  Nicbuhr  avait  aperçu  cette  imposante  ruine,  sans  qu'il  pi\t 
en  approcber.  De  retour  dans  sa  patrie ,  ce  célèbre  voyageur  se  crut  en 
rlroit  d'avancer  l'existence  de  la  tour  de  Babel;  mais  on  le  traita  de  vision- 
naire. Depuis  les  investigations  de  M.  C.  J.  Ricli,  résident  anglais  à  Bag- 
da<l,  sont  venus  confirmer  ce  que  Niebulir  en  avait  dit  :  aujourd'bui  J{er- 
poifrr,  dans  son  Voyage  en  Perse ,  a  dissipé  l'ombre  de  doute  qui  pouvait 
encore  planer  sur  l'existence  de  cette  tour.  Cette  imposante  ruine  se 


i 


(  m  ) 

(planche  67,  lome  11)5  le  même  voyageur  rapporte  qu'il 
existe  aussi  dans  la  ville  de  Ililluh^siiuée  à  l'ouest  de  Baby- 
lone ,  une  mosquée  nommée  Mesched-Esshems ,  bâtie  dans 
le  même  style ,  et  qu'il  regarde  comme  fort  ancienne. 

Le  fils  de  ce  prince  célèbre ,  El-Mâmoûm ,  soutint  digne- 
ment le  nom  de  son  père;  il  releva,  comme  nous  l'avons 
vu  plus  haut,  le  Méqyâs  et  y  ajouta  des  constructions  con- 
sidérables. 

En  870,  sous  le  calyfat  de  El-Motamed-ala-alah ,  Ahmed- 
ben-Touloun  devint  gouverneur  de  l'Egypte  '.  à  Fostât  il  fit 
construire  un  nouveau  palais  sur  un  point  élevé ,  et  il  dis- 
tribua aux  chefs  sous  ses  ordres  des  parties  de  terrain  à 
l'entour ,  à  charge  d'y  bâtir.  Bientôt  une  nouvelle  ville  y 
surgit  comme  par  enchantement,  ornée  de  mosquées,  de 
bains  et  d'autres  monuments  d'utilité  publique.  La  princi- 


nomme  Birs-Nimrood  :  elle  s'élève  de  235  pieds  anglais  au-dessus  de  la 
plaine.  La  tour ,  de  forme  carrée ,  est  bâtie  en  briques  cuites  au  four  : 
elle  est  fortement  lézardée:  le  ciment,  qui  est  entremêlé  de  brins  de 
paille,  est  si  dur  qu'il  fut  impossible  à  Ker-portcr,  soit  de  disjoindre  les 
briques  qu'il  unissait,  soit  de  l'enlever  des  briques,  avec  lesquelles  il  ne 
faisait  qu'une  masse  compacte.  Cet  énorme  piédestal ,  qui  sert  de  base 
à  la  tour  de  Nabucbodonozor,  et  qui  forme  les  restes  de  la  tour  de 
Babel,  est  maçonnée  avec  des  briques,  seulement  sechées  au  soleil:  le 
ciment  est  composé  de  bitume,  mêlé  avec  de  la  paille  bâchée  d'après  la 
coutume  des  Chaldéens  :  dans  le  massif  de  la  maçonnerie  ,  on  a  pratiqué 
des  ouvertures  pour  y  faire  circuler  l'air,  afin  de  conserver  les  briques 
dans  un  état  de  siccité  parfaite  :  le  résultat  a  répondu  à  l'attente  de  l'ar- 
chitecte. Cette  masse  imposante ,  à  laquelle  tant  de  siècles  ont  porté  peu 
d'atteinte,  défie  la  main  destructrice  des  hommes;  les  débris  qui  l'entou- 
rent semblent  en  avoir  été  détachés  par  le  feu  du  ciel  et  sont,  pour  ainsi 
dire  ,  vitrifiés.  Quand  Ker-porter  alla  visiter  ces  ruines  pour  la  deuxième 
fois ,  trois  énormes  lions  se  reposaient  sur   leurs  débris  :   ils  étaient  là 
pour  vérifier  la  prédiction  d'Isaïe,  qu'un  jour  Babylonc  aurait  servi  de- 
repaire  aux  bêtes  fauves  !  V.  le  même  vol.  p.  387. 

Voyez  Ker-portcr,  t.  II ,  pay.  310  et  siiiv.,  ainsi  que  les  planche  s 
qui  sont  eu  regard  et  rei)résentant  la  tour  de  Babel.  Voyez  aussi  : 
u  Second  memoir  on  Bubylone ,  contuining  an  inqniry,  etc.  Lon- 
don,  1818.  .) 


(  190  ) 

pale  mosquée  qu'il  y  fit  bâtir  subsiste  encore  aujourd'lmi, 
c'est  la  Gamê-êhn-Touloim  :  il  ne  reste  plus  de  traces  ou  du 
moins  que  de  très-vagues,  des  autres  constructions  élevées 
par  ses  ordres. 

Ce  fut  un  chrétien  qui  présida  à  tous  ces  travaux  :  Tou- 
loun  ne  permit  point  que  l'on  employât  des  colonnes  de 
marbre  dans  sa  mosquée;  l'architecte  appuya  donc  ses 
portiques  sur  des  pilliers  en  briques,  construits  carrément, 
et  fit  résulter  la  beauté  du  monument  de  son  ordonnance, 
qu'il  imita,  selon  les  mis,  de  la  mosquée  de  la  Mecque  et 
selon  les  autres  de  celle  de  Samarrah,  et  peut-être,  ce  qui 
est  très-vraisemblable,  ne  suivit-il  que  le  plan  des  églises 
primitives  de  sa  religion.  Touloun  détermina  lui-même  la 
l'orme  d'un  minaret  indépendant  de  la  mosquée  :  l'entrée 
principale  fut  percée  prcsqu'eu  face  de  ce  minaret.  Trente- 
trois  petites  fenêtres,  aussi  hautes  que  larges,  formaient 
comme  un  attique  au-dessus  des  jiortes.  Leurs  trente-trois 
ouvertures  répondaient,  deux  à  deux,  à  dix-sept  arcades 
ou  entre-coîonnements  dans  les  galeries  intérieures.  Son 
plan  offre  une  grande  cour  carrée  de  90  mètres  de  côté  : 
trois  côtés  de  la  cour  sont  à  deux  rangs  de  nefs  ;  celui  du 
sanctuaire  en  a  cinq.  Tout  son  système  architectural  est  en 
tiers-point,  et  il  existe  un  certain  rapport  dans  la  hauteur 
et  la  largeur  des  nefs  et  des  arcades.  Ce  temple,  ainsi  que 
celui  d'Amrou,  offre  l'architecture  arabe  primitive  dans 
toute  sa  pureté  et  exempte  d'une  foule  de  détails  inutiles, 
dont  elle  fut  surchargée  dans  la  suite.  Cette  mosquée  fut 
inaugurée  en  879  de  l'ère  chrétienne  (1).  Nous  ignorons 
si  l'aqueduc  et  la  fontaine  que  Touloun  fit  ériger  sous  la 
conduite  du  même  architecte  chrétien  ,  existent  encore  :  ce 
même  primée  avait  déjà  fait  bâtir,  en  873,  une  mosquée 


(l)  Voyez  la  planche  7  et  8  de  l'ouvrage  sur  le  Caire,  par  M-  Coste, 
et  la  planche  31  du  grand  ouvrage  sur  l'Egypte. 


(  191  ) 

noniniée  Gamà-Tcnnour ,  sur  lemontMoqalàm,  endroit  au- 
quel la  tradition  avait  afiFecté  une  sanctiiicalion  antérieure, 

A-peu-près  un  siècle  plus  tard,  en  970,  Djouhar ,  lieu- 
tenant du  calyfe  Êl-Moezle-dys-illah ,  fit  le  tracé  de  l'en- 
ceinte du  Caire.  Il  y  bâtit  un  palais  calyfal  et  un  autre  pour 
lui-même.  A  l'arrivée  de  son  maître  ,  il  jeta  les  fondements 
de  la  Gamâ-el-azhar,  aujourd'hui  le  temple  métropolitain 
de  cette  capitale.  Son  sanctuaire  est  composé  de  neufs  rangs 
de  nefs  ou  travées  :  l'édifice  est  soutenu  par  380  colonnes  en 
marbre  et  porphyre,  avec  des  bases  et  des  chapiteaux  en- 
levés à  des  édifices  romains.  Les  a  rcades  des  deux  principales 
portes  d'entrée  sont  soutenues  par  plusieurs  petites  colon- 
nes, dans  le  style  des  portes  de  nos  églises  du  XV*  siècle.  Son 
ordonnance  se  rapporte  à  celle  d'Amrou  :  les  arcs  d'entre 
les  colonnes  sont  formées  par  une  ligne  brisée  en  quatre 
lignes  droites  et  de  trois  angles ,  les  fenêtres  sont  à  arc  aigu 
et  les  portes  d'entrée  sont  surmontées  d'arcades  à  plein- 
cintre  (1), 

La  mosquée  El-Hakim  est  l'ouvrage  du  sultan  fatémile 
Abou-el-Mansour  ;  déjà  du  temps  de  l'expédition  française 
en  Egypte,  elle  était  tombée  en  ruines  :  cependant  alors 
les  piliers,  quelques  arcades  et  les  minarets  subsistaient 
encore;  elle  fut  bâtie  de  l'an  996  à  1020  :  c'est  toujours  le 
même  système  ogival  qui  a  présidé  à  sa  construction  (2). 
Cette  mosquée  semble  flanquée  par  la  porte  Bâb-el-nasr, 
percée  dans  la  vieille  enceinte  du  Caire  :  l'époque  de  sa 
fondation  remonte  au  règne  d'El-Mostan-ser-b-illah ,  de 
1036  à  1094. 

Le  calyfe  Barkauk  fonda ,  en  1 149 ,  la  mosquée  qui  porte 
son  nom ,  elle  se  trouve  encore  dans  un  état  de  conserva- 


(1)  Voyez  Coste,  planches  17  et  8. 

(2)  Voyez  le  grand  ouvrage  sur  l'Egypte,  pi.  27,  fig.  I  et  pi.  28  , 
volume  1 8 ,  page  309  ,.  note  4- 


(  192  ) 

tioii  parfait.  Elle  est  bâtie  en  pierres  de  taille  et  surmoulée 
de  dômes,  dont  les  ornements,  tant  à  l'extérieur  qu'à  l'in- 
térieur, sont  travaillés  avec  beaucoup  de  recherche  et  de 
goût.  Cet  édifice,  tout-à-fait  de  style  ogival,  semble  avoir 
été  bâti  d'un  seul  jet:  il  offre,  par  l'accord  qui  règne 
dans  sa  disposition  et  dans  sa  décoration,  un  bel  exemple 
de  la  seconde  époque  de  l'architecture  arabe,  où  l'art  et 
la  science  ont  établi  une  espèce  de  système  et  de  goût  par- 
ticulier à  ce  peuple  (1).  M.  Coste  observe  qu'en  général 
ces  ornements  sont  composés  de  feuilles,  qui  affectent 
toujours  les  diverses  combinaisons  de  la  forme  qu'on 
donne  à  la  fleur  de  lis  du  blason,  qui  est  celle  du  lotus 
des  anciens  Egyptiens,  Cette  remarque,  dit-il,  n'est  peut- 
être  pas  sans  intérêt  pour  ceux  qui  cherchent  l'origine  de 
•  la  fleur  de  lis,  qui  ne  parut  point  sur  les  armes  de  France 
avant  les  Croisades.  La  mosquée  de  Él-fakdaâny  date  de 
1 150  à  1 154 ,  celle  de  Melik-el-nalih  remonte  vers  1 160  : 
tous  ces  monuments  sont  supportés  par  des  arcades  de 
forme  ogivale. 

Vers  cette  époque  (1175),  Saladin,  d'illustre  mémoire, 
jeta  les  fondations  de  la  citadelle  du  Caire  et  fit  élever  un  pa- 
lais dans  son  enceinte ,  connu  sous  la  dénomination  de  pa- 
lais de  Joseph,  de  Yousouf  prénom  de  Saladin.  Ce  palais 
contient  trenle-trois  colonnes  de  granit  monolithes;  elles 
n'ont  pas  été  destinées  pour  ce  monument,  le  diamètre  n'est 
pas  le  même  pour  toutes;  les  chapiteaux  diffèrent  entre 
eux,  le  galbe  approche  plus  du  type  corinthien  que  d'au- 
cun autre.  Ces  colonnes  sont  de  granit  rouge  et  supportent 
des  arcadesen  ogive;  les  frises  sont  couvertes  d'inscriptions 
arabes  à  lettres  gigantesques  :  aux  angles  du  plafond  sont 
des  ornements  en  bois  disposés  en  forme  d'encorbeille- 
ment. 

(1)  V.  Coste,  pi.  10,  11  ,  12,  13  et  14. 


(  193  ) 

Le  4"  volume  de  Y  Etat  ancien  du  grand  ouvrage  sur 
l'Egypte,  page  67,  et  un  mémoire  de  M.  A.  Lancret,  sur 
quelques  parties  de  l'architecture  des  Arabes,  inséré  dans 
le  18^  volume  de  \  État  moderne  du  même  ouvrage,  p.  508, 
contiennent  plusieurs  remarques  précieuses  sur  ce  mo- 
nument: on  y  avance  que  le  plan  du  divan  de  Joseph 
représente  celui  des  églises  chrétiennes  de  la  haute  Egypte, 
qu'on  peut  en  dire  autant  des  arcades  et  du  reste  de  l'élé- 
vation. On  s'y  demande  si  c'est  une  église  convertie  en 
mosquée  par  Saladin  ?  ou  bien  si  c'est  un  architecte  chré- 
tien qui  fut  chargé  de  sa  construction,  et  qui  aurait  em- 
prunté le  style  des  édifices  de  sa  religion?  que  celte 
dernière  supposition  n'est  pas' impossible,  vu  surtout  que 
le  sanctuaire  n'est  pas  tourné  vers  l'Orient;  mais  que, 
quoiqu'il  en  soit,  aucun  édifice  musulman  ne  ressemble 
plus  aux  églises  d'Egypte  que  ce  monument. 

Arrivés  à  l'époque  des  Croisades,  il  devient  inutile  de 
pousser  plus  loin  l'énumération  de  monuments  où  l'ogive 
fut  employée  comme  style.  La  nomenclature  qui  précède 
des  édifices  des  temps  les  plus  reculés  jusqu'au  XII®  siècle, 
qui  tousse  trouvent  dans  l'Orient  et  exclusivement,  fournit 
la  preuve  que  l'ogivea  existé  de  temps  immémorial  dans  les 
contrées  orientales  du  monde,  non  comme  accident,  mais 
comme  type  architectural.  L'histoire  établit  donc  par  une 
suite  non  interrompue  d'édifices,  un  chaînon  qui  lie  nos 
monuments  gothiques  à  ceux  de  tous  les  peuples,  de  toutes 
les  croyances  et  de  tous  les  siècles!  Et  il  est  assez  remar- 
quable que  les  plus  anciens  peuples  du  monde  sont  partis 
de  l'ogive  pour  atteindre  au  développement  de  l'arc  circu- 
laire, tandis  que  les  peuples  du  moyen-âge  ont  suivi  une 
marche  inverse  pour  arriver  au  zénith  de  leur  sublime 
architecture. 

En  présence  de  ces  faits ,  nous  ne  devrions  invoquer 
l'opinion  d'aucun  écrivain  qui  s'est  occupé  de  cette  ques- 


(  194  ) 

lion  :  cependant  avant  de  finir  cet  article,  nous  ne  pou- 
vons nous  empêcher  de  rappeler  au  souvenir   de  nos 
lecteurs  ce  qu'en  a  dit  M.  De  Chateaubriand,  dans  son 
Itinéraire  de  Paris  à  Jérusalem  :  je  cite  d'après  l'édition  de 
Paris  de  1811 ,  époque  qui  met  cet  illustre  voyageur  hors 
de  toute  atteinte  de  partialité  en  faveur  d'aucune  des  opi- 
nions émises  sur  cette  question.  A  la  page  378  du  tome  2, 
il  dit  :  a  Je  crois  apercevoir  dans  l'archileclure  égyptienne, 
si  pesante,  si  majestueuse,  si  vaste,  si  durable,  le  germe 
de  cette  architecture  sarrasine,  si  légère,  si  riante,  si  pe- 
tite, si  fragile:  le  minaret  est  l'imitation  de  Fobélisque,  les 
moresques  sont  des  hiéroglyphes  dessinés  au  lieu  d'hiéro- 
glyphes gravés.  Quant  à  ces  forêts  de  colonnes  qui  com- 
posent l'intérieur  des  mosquées  arabes  et  qui  portent  une 
voûte  plate  ,  les  temples  de  Memphis ,   de  Deudéra ,  de 
Thèbes,  de  Méroué,  offraient  encore  des  exemples  de  ce 
genre  de  construction.  Placés  sur  la  frontière  deMetzzaïm, 
les  descendants  d'Ismaël  ont  eu  nécessairement  fimagina- 
tion  frappée  des  merveilles  des  Pharaons  :  ils  n'ont  rien 
emprunté  des  Grecs  qu'ils  n'ont  point  connus,  mais  ils  ont 
cherché  à  copier  les  arts  d'une  nation  fameuse  qu'ils  avaient 
sans  cesse  sous  les  yeux....  J'incline  donc  à  croire  que  toute 
architecture  est  sortie  de  fEgypte,  même  l'architecture 
gothique  :  car  rien  n'est  venu  du  Nord,  hors  le  fer  et  la 
dévastation.  Mais  cette  architecture  égyptienne  s'est  mo- 
difiée selon  le  génie  des  peuples  :  elle  ne  changea  guère 
chez  les  premiers  Hébreux ,  où  elle  se  débarrassa  seulement 
des  monstres  et  des  dieux  de  f  idolâtrie.  En  Grèce,  où  elle 
fut  introduite  par  Cécrops  et  Inachus,  elle  s'épura  et  de- 
vint le  modèle  de  tous  les  genres  de  beautés.  Elle  parvint 
à  Rome  par  les  Toscans,  colonie  égyptienne  ;  elle  y  conserva 
sa  grandeur;  mais  elle  n'atteignit  jamais  la  perfection 
comme  à  Athènes.  Des  apôtres,  accourus  de  l'Orient,  la 
portèrent  aux  barbares  du  Nord;  sans  perdre  parmi  ces 


(  195  ) 

peuples  sou  caractère  religieux  et  sombre,  elle  s'éleva  avec 
les  forêts  des  Gaules  et  de  la  Germanie;  elle  présenta  la 
singulière  union  de  la  force ,  de  la  majesté ,  de  la  tristesse 
dans  l'ensemble  et  de  la  légèreté  la  plus  extraordinaire  dans 
les  détails.  Enfin  elle  prit  chez  les  Arabes  les  traits  dont  nous 
avons  parlé;  architecture  du  désert,  enchanté  comme  les 
oasis,  magique  comme  les  histoires  contées  sous  la  tente, 
mais  que  les  vents  peuvent  emporter  avec  le  sable  qui  lui 
servit  d'abord  de  fondement,  etc.  » 

Si  l'on  place  l'opinion  de  M.  De  Chateaubriand ,  émise  à 
une  époque  où  l'on  traitait  de  barbare  tout  ce  qui  ne  guin- 
dait  pas  la  raideur  grecque  ou  romaine ,  en  regard  avec 
les  faits  que  nous  venons  de  constater,  il  est  impossible  de 
nier,  à  moins  de  pousser  le  scepticisme  jusqu'au  ridicule, 
que  l'ogive  ne  soit  née  dans  l'Orient. 

A.V.L. 


{  196  ) 


ïlottce 


SUR  LA 


BIBLIOTHÈQUE  DE  LA  VILLE  D'ANVERS. 


L'origine  de  celte  bibliothèque  parait  remonter  à  l'épo- 
que de  l'établissement  de  l'imprimerie  en  cette  cité,  par  le 
célèbre  Thierry  Martens,  en  1476.  Dans  un  registre  de  la 
ville,  cité  par  Papebrochius  et  Dierexsens,  Antw.  Christ. 
Nasc.  tom.  III,  pag.  247,  il  est  fait  mention  d'un  juriscon- 
sulte qui  légua  sa  collection  de  livres  à  Anvers,  pour  aug- 
menter la  bibliothèque  publique.  Ce  jurisconsulte  était  le 
secrétaire  Guillaume  Pauwels,  et  nous  sommes  heureux  de 
pouvoir  faire  connaître  le  catalogue  de  sa  collection,  en- 
core inédit ,  et  dont  uous  devons  la  communication  à 
l'obligeance  du  savant  ami,  M.  J.-F.Willems  (1).  Ce  cata- 

(1)  Acngaende  den  boeken  die  meester  Willem  Pauwels  ,  wilen  pen- 
sionnaris  der  stad  van  Antw erpen ,  derselver  stad  in  testamente 
beset  heeft. 

Allen  den  ghenen  die  dese  letteren  zelen  zlen  oft  horen  Icscn,  borger- 
niccsters  ende  scliepcnen  der  stad  van  Antwerpen  ,  saluyt! 

Docn  cont  ende  kennen  openbaerlic  dat  wy  van  hère  Cornelis  Den 
llont,  priestcr,  Costcnc  Van  Halmale  ,  ende  Pictcrcn  De  Bot,  als  e\ecu- 
lucrs  van  den  testamente  wylen  meester  Willcms  Panwels,  advocacts 
docn  liy  îeefde  der  voirs.  stad,  gehadt  ende  ontfangen  hebben  ende  ons 
J)y  lien  ducghdclijc  acbtcrvolgendc  den  inventuris  dacr  op  gcmacct  ende 


(  107) 

logue  esl  d'autant  plus  intéressant  qu'il  pourra  fixer  l'époque 
de  l'impression  de  plusieurs  ouvrages,  sur  lesquels  on  ne 
pouvait  former  que  des  conjectures,  et  montrer  de  quoi 
se  composait  alors  la  bibliothèque  d'un  jurisconsulte 
belge. 

Ainsi  donc  la  bibliothèque  d'Anvers  existait  déjà,  au 
moins  en  1480  :  elle  était  placée  à  la  Maison-de-ville ,  et  on 

hier  na  geinsereert  van  stucke  te  stucke  gelevert  sijn  de  boeke  desselfs 
wylea  meester  Willems .  die  hy  in  cnde  met  synen  test^mente  deser 
vores.  stad  goederticriyke  gegeven  ende  gemaect  heeft  om  die  te  leggen 
in  een  camer  tôt  belioef  cnde  gcbrnke  der  pcnsionaris  ende  secretaryseii 
cnde  clercken  der  stad  diencnde  sonder  die  wccli  te  Icencn  ,  te  vercoepcn 
oft  te  verthierene.  Ende  mids  desen ,  achtervolgende  der  condicien  in  de 
voirs.  makinghe  toegevoeght,  soe  ontlasten  wy  in  den  nanie  ende  van 
wegen  der  voirs.  stad  dien  voirgenoeraden  wylen  meester  Willem ,  sine 
wedmve  ende  executuers  ende  aile  andere  des  qnifancie  bchoevende  van 
al  tgliene  des  hy  ten  tyde  van  sinon  overlidene  inder  voirs.  stad  gehonden 
nioclit  sijn.  Den  inventaris  voergekeurt  volglit  hier  na  ende  es  desen. 

Inventarium  librorum  qtiondam  magistri  Wilhelmi  Pauli  legaiorum 
opido  Antwerpiensi  et  in  sua  domo  repertonim. 

Primo  decretnm  cum  apparatu. 
Item  decretales. 

Sextus  Clémentine,  Panormitanus  super  quarto  et  quinte  decretalium, 
parvum  volumen  :  omnes  simul  in  pressura  et  papiro. 
Codex  in  pergameno. 

Digestum  vêtus  in  pergameno,  cujus  processus  est  per  littcras. 
Digestum  inforciatum  in  papiro  impressum. 
Digestum  novum  in  papiro  cujus  processus  est  per  magna  capita. 
Instituta  giosata. 

Alla  instituta  scripta  in  papiro  sive  glosi. 
Lectura  Bartoli  in  papiro  scripta  super  novem  libros  codicis. 
Ejusdem  lectura  scripta  super  prima  parte  digcsti  vctcris. 
Lectura  ejusdem  super  secunda  parte  fTveteris. 
Duo  volumina  Bartoli  super  digesto  novo. 
Casus  brèves  Bartoli  super  codice. 
Practica  Ferrariensis  scripta  in  papiro. 
Alvarotus  super  feudis  in  papiro ,  non  ligatus. 
Summa  Tancreti  sive  glosa  in  pergameno. 
Tractatus  Panormitani  impressus  de  ordinc  judiciornm. 


(  198  ) 

ignore  comment  elle  fut  dispersée.  On  voit  encore  dans 
Dierexsens  qu'on  en  institua  une  nouvelle  en  1505j  elle 
eut  apparemment  le  sort  de  la  première ,  dans  les  troubles 
et  les  scènes  de  destruction  dont  Anvers  fut  le  théâtre  ,  plus 
que  toute  autre  ville  de  la  Belgique,  pendant  les  guerres 
du  XVl^  siècle. 

Dans  les  premières  années  du  siècle  suivant,  époque  à 

Singularia  Ludovici  de  Roma  super  quinto  dccietalium ,  impressa  in 
papiio. 
Tractatus  clausularum  iii  contractibus  rescriptis  ,  etc. 
Appod  (?)  solitariim  cditus  per  dorainum  Vitalem  de  Cambanis. 
Catholicon  in  papiro  et  pressura. 
Biblia  in  papiro  et  pressura. 
Ysidorus  ethymologiaruni. 
Laurentius  de  Valia. 
Vegeitus  de  re  militari  scriptus. 
Terrcntius  cura  commento  Donati  impressus. 
Tractatus  de  clade  niagnae  Troj  ae  in  papiro  scriptus. 
Valerius  Maxiraus  scriptus,  sed  non  complétas. 
Cotnmentura  Valerii  Maximi  in  pressura. 
Epistoiœ  faniiliares  Tully. 
Epistolae  et  exordia  Gasparini. 
Tulius  de  offîciis  in  pressura. 
Epistolae  Karoli  in  lilio. 

Epistolae  Senecae  ad  Lucillum  scriptae  in  papiro. 
Declamationes  Quiutiliani. 
Salustius  in  Lucium  cum  aliis  tractatibus. 
Spéculum  regium  et  principum. 
Paradoxa  Tulii  de  senectutc. 

Eneas  de  duobus  amantibus  cum  aliis  tractatibus  in  une  volumine. 
Rethorica  Cyceronis  cum  praeceptis  et  Eleganciis  Gaspariui. 

In  orconden  van  welken  dinglien  hebben  wy  borgermeesters  ende  sce- 
penenvoirs.  der  voirs.  stadscgel  ten  sakendcse  letteren  doen  aenhangeu. 

Gegeven  int  jaer  0ns  Hceren  duysent  vier  hondert  ende  tachtentich , 
na  costume  van  scriivene  shoefs  van  Camerijck ,  op  ten  vijften  dach  van 
aprillc  vore  Passchcn. 

Collationnata  ctivi  or iginali  lit tera  concordat. 

80STVW. 


(  199  ) 

laquelle  les  arts  de  la  paix  commençaient  à  relleurir  aux 
Pays-Bas,  on  forma  une  troisième  collection  de  livres,  qui 
fut  placée  d'abord  à  la  galerie  de  la  Bourse  et  transpor- 
tée, en  1663,  à  l'Hôtel-de-ville,  où  elle  a  été  conservée 
jusqu'à  ce  jour. 

Le  savant  chanoine  Aubert  Le  Mire  en  fut  le  premier 
bibliothécaire  et  probablement  aussi  le  fondateur  ;  il  en  a 
publié,  en  1609  ,  le  catalogue  qui  est  devenu  d'une  très- 
grande  rareté  (l).  François  Swertius,  son  ami,  dont  le 
nom  est  également  connu  dans  l'histoire  littéraire  de 
nos  provinces ,  participa  à  ce  travail.  La  préface  qui  est 
très-courte,  mais  qui  paraît  avoir  servi  de  cadre  à  la  dis- 
sertation que  publia  plus  tard  Sanderus,  ne  nous  fournit 
malheureusement  aucune  particularité  littéraire  ou  biblio- 
graphique, intéressante  pour  la  Belgique.  Elle  nous  apprend 
seulement,  après  nous  avoir  fait  rapidement  passer  en  revue 
les  plus  grandes  bibliothèques  anciennes  et  modernes  et  les 
hommes  qui  en  furent  les  créateurs,  que  les  Anversois, 
stimulés  par  d'aussi  beaux  exemples,  songent  enfin  sérieu- 
sement à  établir  chez  eux  un  dépôt  des  connaissances  hu- 
maines :  car  «c'est  là,  ajoule-t-il ,  le  seul  ornement  qui 
semble  manquer  à  leur  ville ,  qui  est  la  plus  belle  de 
l'Europe ,  de  l'Afrique  et  de  l'Asie.  »  Cet  éloge  paraît  un 
I  peu  exagéré,  car  Anvers  était  alors  bien  déchue  de  sa 
j  splendeur,  depuis  les  troubles  du  XVP  siècle. 
I  Cette  bibliothèque  ne  contenait  alors  que  trois  cent 
cinquante-deux  ouvrages,  la  plupart  en  latin  et  quel- 

I  (1)  Bibliothecae  Antverpianae  primordia.  Aubcrtus  Mirœus ,  Bruxel- 
lensis,  canonicus  et  bibliothccarius  Antv.  colligendo  publicabat.  Antv. , 
apud  Davidcm  Martinuni ,  1609;  grand  in-4<'  de  24  pages,  non  com- 
pris le  titre  et  la  préface  qui  occupent  deux  feuillets.  Catalogue  de  la 
Bibliothèque  Van  Hulthnn ,  vol.  4,  pag.  6,  w  22,578.  Cet  ouvrage 
est  si  rare .  qu'il  n'a  pas  été  connu  de  Paquot.  Voyez  ses  Mémoi- 
res, l.  143. 


(  200  ) 

q»es-uns  en  grec  :  on  y  remarque  la  belle  Bible  d'Arias 
Monlanus,  qui  sortait  des  célèbres  presses  de  Plantin  et 
qui  avait  été  donnée  à  la  bibliothèque  par  le  magistrat 
d'Anvers.  11  est  assez  remarquable  qu'on  n'y  trouve  aucun 
livre  moderne,  soit  flamand,  soit  français  :  les  savants  en  us 
de  cette  époque  ont  sans  doute  craint  de  déroger  à  leur 
dignité,  en  introduisant  dans  ce  sanctuaire  de  la  science, 
les  langues  vulgaires,  qui,  dans  d'autres  pays,  avaient  ce- 
pendant déjà  fait  des  progrès  notables  et  produit  des  ou- 
vrages pour  lesquels  on  abandonne  aujourd'hui  les  Grecs 
et  les  Romains. 

Le  Mire  divise  son  catalogue  méthodique  en  quatre  sec- 
tions principales;  car  nous  ne  parlerons  pas  de  ses  sub- 
divisions. Ce  sont  : 

La  théologie. 

La  jurisprudence.  % 

La  médecine. 

L'histoire. 

Cette  dernière  partie  est  la  plus  riche  :  après  elle  vient 
la  théologie;  quant  à  la  jurisprudence,  elle  ne  compte  que 
quatre  ouvrages;  la  médecine  n'en  a  pas  d'avantage. 

Cette  bibliothèque  paraît  avoir  été  fondée  plutôt  par  la 
générosité  des  habitants  de  la  ville  que  par  la  munificence 
de  l'administration  communale,  qui  ne  figure  dans  les 
dons  que  pour  la  bible  d'Arias  Montanus ,  dont  il  a  déjà 
été  fait  mention.  Aubert  Le  Mire ,  qui  en  fut  le  donateur  le 
plus  généreux,  a  eu  soin  d'ajouter  après  chaque  ouvrage 
le  nom  de  celui  qui  en  avait  enrichi  la  bibliothèque  nais- 
sante. Si  tous  les  conservateurs  de  dépôts  publics  avaient 
cette  attention,  leurs  collections,  il  n'y  a  pas  de  doute, 
s'accroîtraient  plus  rapidement  :  car  s'il  est  des  hommes 
qui  aiment  à  cacher  leurs  bienfaits,  combien  ne  s'en  ren- 
conlre-t-il  pas  d'autres  qui  sont  flattés  de  voir  leur  géné- 
rosité mise  au  grand  jour.  Celte  remarque ,  au  reste ,  trouve 


(  201  ) 

plus  rarement  son  application  chez  nous  que  chez  d'autres 
peuples  plus  méridionaux. 

Parmi  les  autres  bienfaiteurs  de  la  hibliothèque  d'An- 
vers, dont  Le  Mire  nous  a  conservé  le  nom ,  tels  que  Laurent 
Beyerlynck,  chanoine  de  la  cathédrale  de  Notre  Dame,  le 
doyen  Jean  Del  Rio,  Jean  Gevaert,  clianoiue  et  olficial,  le 
chevalier  Antoine  Berchem ,  le  bourgmestre  Nie.  Roccoxe , 
l'ami  de  Rubens;  Jacques  Marchant,  l'auteur  de  la  Des- 
cription de  la  Flandre  :  Jean  Hovius;  Jean  Brant,  se- 
crétaire de  la  ville;  Emanuel  Ximènes,  chevalier  de  l'or- 
dre de  Saint-Elienne;  Jean  Happaert,  trésorier  de  la 
ville;  Louis  Nonius,  Antoniolti  Sivori,  consul  de  Gènes  à 
Anvers,  etc. ,  on  remarque  surtout  François  De  Sweert 
ouSweerlius.  qui  devait  lui-même  posséder  une  grande 
bibliothèque,  si  l'on  en  juge  par  les  précautions  qu'il 
impose  à  ceux  qui  la  visitent,  comme  l'indique  l'in- 
scription qu'il  y  avait  fait  placer  (l).  Cette  inscrip- 
tion, écrite  en  latin  du  temps  d'Ennius,  comme  si 
celui  du  siècle  d'Auguste  était  à  dédaigner,  accuse  le 
mauvais  goût  de  l'auteur,  Prosper  Stellart,  moine  de 
l'ordre  de  Saint-Augustin.  Nous  n'en  citerons  qu'une 
partie  : 

Quisquis  es 
Ilanc  legem  lege, 
TIeriis  et  hœres  edico  tihi: 
Musarum  Apollinisque  sacei'  hic  locus, 
Multis  clausus,  jjaucis  reclusus; 
Si  cinn  jiaucis  vivis,  sapis, 
Âdesto,  inesto. 

Quoscumque  libros.  qualeisvecunqiie 
Spectabis  inibi,  libère 
Tangito,  legito. 

(1)  Swertius,  AthenœBehjicœ,  p.  55,  et  M.  De  RcifFcnbcrg,  Archives 
de  Philologie,  tome  I. 

14 


(  202  ) 

Imjtressi  net  perturbantor  : 
MSS.  nei  tmujtmtorj 
Adtentare  secus 
Capital  esto. 

Visi,  lective,  electi,  placitive 
Nei  rofjantor,  nei  efferantor, 
Jmportunus  si  sies 
Exesto,  abito. 

Lors  de  la  destruction  des  couvents,  à  la  fin  du  XVIII® 
siècle,  elle  fut  considérablement  augmentée  par  les  biblio- 
thèques de  ces  établissements  :  jusqu'à  cette  époque,  elle 
ne  s'était  accrue  que  par  des  présents,  parmi  lesquels  ceux 
de  Plantin  et  de  ses  successeurs  occupent  la  première 
partie.  En  1803,  quelque  temps  après  l'abandon  qui  en 
fut  fait  par  le  gouvernement  français ,  la  bibliothèque 
centrale,  composée  en  grande  partie  des  dépouilles  des 
couvents,  fut  transférée  à  l'hôtel-de-ville ,  et  augmenta 
encore  l'ancienne  collection  qui  fut  ouverte  au  public  le 
1*"^  frimaire  an  XIV  (21  novembre  1805).  Dès  lors,  la  ville 
y  alloua  de  temps  en  temps  de  petites  sommes  pour  les 
acquisitions  :  ensuite  le  crédit  alloué  devint  régulier,  et 
jusqu'en  1836  fut  porté  à  1200  francs  par  an.  Celui  de  1837 
fut  de  2000  francs,  et  en  1838  il  fut  de  3600  francs.  Tous 
les  hommes  instruits  espèrent  que  le  conseil  communal 
sentira  la  nécessité  de  maintenir  au  moins  ce  dernier  cré- 
dit, afin  de  mettre  la  bibliothèque  d'Anvers  à  même  de 
satisfaire  aux  besoins  du  public ,  surtout  sous  le  rapport 
des  beaux-arts,  des  voyages,  du  commerce  et  de  l'histoire, 
et  de  la  littérature  des  Pays-Bas. 

Ce  dépôt  littéraire  possède  beaucoup  d'ouvrages  de 
théologie  :  cependant  comme  les  acquisitions  ont  toujours 
été  faites  pour  la  faculté  d'histoire,  cette  partie  est  mainte- 
nant la  plus  riche  et  forme  en  général  le  tiers  de  la  col- 
lection. 

La  bibliothèque  d'Anvers  compte  actuellement  14,000 


(  203  ) 

volumes  imprimés,  et  seulement  26  manuscrits.  Si  les  ren- 
seignements que  nous  avons  recueillis  ne  sont  pas  erronés, 
elle  ne  possédait  plus  en  1809  que  1500  volumes,  ce  qui 
ferait  croire  qu'elle  avait  éprouvé  de  grandes  pertes  :  eu 
1826,  ce  nombre  s'était  déjà  élevé  à  6000. 

L'école  flamande ,  dont  l'Académie  d'Anvers  est  la  pé- 
pinière, brille  en  ce  moment  d'un  nouvel  éclat.  Les 
magistrats  de  celte  ville  qui,  à  diverses  époques  ont  ac- 
cordé de  si  nobles  encouragements  aux  artistes  et  aux 
hommes  de  lettres ,  rendraient ,  nous  en  sommes  certains , 
un  immense  service  aux  peintres  de  cette  école  et  à  leurs 
nombreux  élèves,  en  leur  fournissant,  pour  leurs  études 
historiques  et  de  costumes,  des  ressources  bibliographi- 
ques que  ceux-ci  cherchent  envain  dans  le  dépôt  d'Anvers 
et  qu'ils  ne  trouvent  parfois  qu'à  Bruxelles  ou  à  Gand. 

M.  Mertens,  conservateur  actuel  de  cette  Bibliothèque, 
en  a  rédigé  avec  soin  un  bon  catalogue  qui  facilite  les 
recherches  et  empêchera  le  retour  des  dilapidations  que 
cet  établissement  a  éprouvées  autrefois  et  sans  lesquelles  il 
devrait  compter  25  à  30,000  volumes ,  comme  plusieurs 
autres  villes,  même  de  second  ordre  dans  noire  pays.  Car 
par  sa  population  la  \ille  d'Anvers  occupe  le  troisième 
rang  en  Belgique,  tandis  que  par  sa  bibliothèque  elle 
tient  à  peine  le  sixième  rang. 

A.  Voisiîî. 


(  204  ) 


Ce  JTilsi  bourreau  k  son  pcre. 


Biscite  justitiam  monitif  et  non  iemjiere  Divos, 


Jusqu'à  ce  jour  la  Belgique  a  dû  regretter  de  ne  posséder 
aucun  recueil  des  récils  populaires,  qui  se  sont  conservés 
par  la  tradition,  ou  qui  se  trouvent  consignés  dans  divers 
écrits.  Ces  récits  auxquels  les  Allemands  donnent  le  nom 
de  sagen  (1),  pour  les  distinguer  des  légendes,  reposent 
assez  généralement  sur  des  fictions  merveilleuses;  souvent 
elles  peignent  avec  des  traits  fort  caractéristiques  l'époque 
à  laquelle  on  les  rapporte  :  elles  sont  de  l'histoire  pour  le 
peuple;  espérons  que  le  moment  n'est  pas  loin  où  une 
main  habile  les  réunira  en  faisceau  ;  espérons  que  sous  ce 
rapport  la  Belgique  n'aura  plus  à  envier  un  Grimm  à  nos 
savants  voisins,  les  Allemands. 

En  attendant,  voici  le  fruit  de  nos  recherches  au  sujet 
d'une  saga  nationale,  d'autant  plus  remarquable  qu'elle  a 
donnée  naisssance  à  des  monuments  d'art,  dont  un  encore 
nous  est  resté.  ^ 

Voici  comment  quelques-uns  racontent  la  chose.  En  1 37 1 , 
deux  gentilshommes  de  la  Flandre  s'étaient  révoltés  contre 
leur  prince,  Louis  de  Maie.  Ils  furent  condamnés  à  mort; 
mais  le  prince  promit  la  vie  à  celui  des  deux  qui  pourrait 

(1)  En  flamand  sage,  zage  {zegging)  signifie  récit  populaire,  tradi- 
tionnel. 


-Ae  Ganût  Le  en   Fandt  Fraepe    Sae  père  Se   Taete    Defuu 
Maeis    Se     Heppe    Rompe     Si     Grâce      De    Lfeu  mccdxxi 


Xm'b  li 

piJUy 

il  luoq  é 


(  205  ) 

se  résoudre  à  décapiter  son  compagnon  d'infortune.  Le 
fils,  cédant  aux  instances  de  son  père,  entreprit  de  remplir 
l'office  de  bourreau  :  il  lève  le  bras  pour  frapper  l'auteur 
de  ses  jours ,  mais  le  glaive  tombe  brisé  à  ses  pieds.  D'au- 
tres versions  ajoutent  que  l'enfant  dénaturé  en  reçut  une 
blessure  mortelle. 

C'était  là  un  beau  lliéme  pour  notre  Vaernewyclc  ,  qui 
ne  demande  pas  mieux  que  d'amuser,  à  tout  prix,  son  béné- 
vole lecteur,  et  que  l'on  voit  toujours  à  l'affût  des  choses 
mirifiques  et  singulières ,  arrivées  depuis  l'heure  de  la 
création  jusqu'à  l'instant  où  il  tient  la  plume  :  on  est  un 
peu  surpris  de  le  voir  glisser  sur  l'aventure  de  1371;  voici 
comme  le  naïf  chroniqueur  en  parle  : 

a  En  1370  (style  ancien),  on  plaça  au  Pont  des  exécu- 
»  tions  le  père  et  le  fils  en  métal ,  en  éternelle  mémoire  du 
»fils  qui  y  décapita  son  père  (1).  » 

La  poitrine  du  fils  portait  une  lame  avec  cet  écrileau  ; 

Dits  DE  wetteuchede  der  «tede  van  Giiendt; 
Die  boets  [betere)  uem  die  hier  es  ontrent  (2). 

P.  Heelant. 

(1)  Anno  XIII  Iiondert  LXX  wcrden  op  die  Hooftbrugge  ghestelt  dca 
vader ,  ende  dcn  zone  van  metale ,  in  eeiiwighen  nienioi  ie  daer  dcn  zone 
den  vader  onthoofde.  Historié  van  Belgis ,  Ghendt,  1574,  in-folio, 
bl.  123. 

Hooftbnigge  est  la  syncope  de  Onthoofdbimgge ;  aussi  Meyerus  le 
designc-t-il  par  Pons  capitalis.  On  y  exécutait  avec  le  glaive  les  bour- 
geois de  Gand  ,  convaincus  d'avoir  perpétré  certains  crimes,  déterminés 
par  les  lois  de  leur  commune,  par  exemple,  ceux  qui  avaient  commis  un 
viol  ;  tandis  que  les  autres  criminels  étaient  exécutés  entre  les  balustrades 
du  château  (  tusschen  baillen  ).  Dicricx ,  Mémoires  sur  la  ville  de  Gand, 
1,457. 

(2)  Version  qui  nous  parait  préférable  à  celle  donnée  par  d'autres  : 

•■•■Die  loeis  wacruclUi.i]  ghclucrdc  hier  onifrent.  » 

Nous  serions  portés  à  croire  que  le  nom  de  P.  Ileelant  est  celui  de 
l'auteur  du  distique. 


(  206  ) 
Sous  la  figure  du  père,  on  lisait  ces  mots  en  gaulois  : 

Ae  GaNDT  le  en  FaNDT  FRAEPE  SAE  PERE  SE  TAETE  DESCU. 
MaEIS  se  HEPPE  rompe  si  GRACE  DE  DiEU   (1). 

Ce  monument  exista  jusqu'à  la  fin  du  dernier  siècle. 
Ces  Vandales,  qui  voulaient  effacer  le  dernier  vestige  du 
passé,  dussent-ils  subir  l'exécration  des  siècles  à  venir  , 
les  révolutionnaires  français  de  1794,  enlevèrent  ces  figu- 
res de  bronze,  qui,  comme  le  ditDiericx,  en  rappelant  la 
punition  d'un  fils  dénaturé,  inspiraient  l'horreur  du  crime. 
Dignes  rivaux  des  iconoclastes  de  1578,  qui  abattirent  la 
statue  en  bronze  de  la  Vierge  placée  du  côté  opposé ,  ils 
brisèrent  le  monument  historique  de  leur  marteau  cupide 
et  destructeur. 

Le  tableau  destiné  à  conserver  ce  souvenir  populaire, 
échappa  aux  mains  de  la  bande  noire.  11  pend  à  la  cham- 
bre de  la  chapelle  de  notre  Hôtel-de-ville,  aujourd'hui 
la  salle  de  l'état  civil.  Cette  toile  intéressante,  qui  parait 
appartenir  au  XV  siècle,  offre  une  composition  remar- 
quable pour  l'époque  à  laquelle  on  peut  l'attribuer.  Le 
regard  s'attache  d'abord  aux  deux  criminels  :  le  père, 
à  qui  un  religieux  adresse  les  dernières  exhortations , 
a  les  yeux  légèrement  bandés  ;  le  fils  tient  le  bras 
levé,  et  le  glaive  a  déjà  presque  entièrement  perdu  sa 
lame.  D'un  côté  se  trouve  le  comte,  près  du  bailli,  la 
baguette  de  justice  à  la  main,  et  près  de  quelques  gens 


(1)  Le  tableau  de  rHôtel-de-ville,  outre  les  inscriptions  flamande  et 
Avalione,  porte  sur  le  ceinturon  du  fds-bourreau  les  mots  :  Ripcluple 
ende  haie  MCCCLXXI.  Nous  ne  tenterons  pas  d'expliquer  cette  ligne, 
toute  faite  pour  ijréparer  des  tortures  aux  Saumaises  futurs. 

Le  Pont  des  exécutions  et  les  figures  en  question  se  trouvent  repro- 
duits dans  laFlandiia  illustrala,  Col.  1941, 1, 149.  Nous  ferons  rcmar- 
quer  en  même  temps  que  Sanderus,  eu  écrivant  Ae  Gasdt  le  esfant 

FRAPPE  SVE  PERE  SE  TA  ET  DES  SU,  au  liCU  de  Se  TAETE  DESUU  j  C'Cst-à-dirC  , 

sur  sa  tète,  a  donné  une  version  tronquée. 


(  207  ) 

de  sa  suite;  du  côté  opposé,  des  spectateurs  regardent 
pleins  d'anxiété,  non  loin  de  quelques  gens  de  guerre.  Sur 
le  pont,  on  aperçoit  la  maisonnette  où  se  trouvait  placée 
une  Madone  :  le  château  des  Comtes  se  dessine  dans  le 
lointain  (1). 

Cette  aventure  singulière  est  entourée  de  trop  d'authen- 
ticité pour  qu'elle  puisse  donner  lieu  à  des  doutes,  quant 
au  fond  de  la  chose.  Le  siècle  auquel  on  rapporte  l'évé- 
nement était  barbare  :  c'est  dire  assez  que  sa  justice 
était  bizarre  et  cruelle.  La  justice  pénale  n'est-elle  pas  la 
mesure  de  la  civilisation  chez  les  peuples?  Louis  de  Maie, 
par  un  caprice  de  prince,  ne  relevant  que  de  son  bon  plai- 
sir et  peu  humain  d'ailleurs,  a  voulu  peut-être  jouir  d'une 
lutte  déchirante  entre  l'amour  paternel  et  l'amour  filial, 
et  s'assurer  par  lui-même  lequel  des  deux  triompherait; 
peut-être  aussi  a-t-il  cédé  à  l'usage  de  faire  exécuter  des 
coupables  par  leurs  complices;  rajffinement  de  cruauté 
digne  d'une  justice  fantasque.  Adrien  Beyer ,  pension- 
naire de  Rotterdam,  ne  nous  dit-il  pas  qu'anciennement, 
il  arrivait  quelquefois  aux  juges  d'exécuter  eux-mêmes 
leurs  sentences ,  et  qu'en  Espagne ,  en  Italie  et  en  Alle- 
magne, on  donnait  souvent  la  vie  sauve  à  celui  d'entre 
plusieurs  condamnés  qui  consentirait  à  servir  de  bour- 
reau aux  autres  (2).  Ne  voyons-nous  pas,  un  siècle  plus 


(1)  Cette  toile,  haute  et  large  d'environ  10  pieds,  se  trouve  placée 
au-dessus  de  la  porte  d'entrée  de  la  salle  désignée ,  et  fait  partie  de  la 
boiserie ,  qui  fut  confectionnée  en  1779.  Il  existe  aux  archives  de  la  ville 
une  liste  des  tableaux  se  trouvant  dans  la  ville  de  Gand,  en  date 
du  3  septembre  Mil .  dressée  par  P.  L.  Spruyt,  premier  professeur  de 
l'Académie  de  peinture.  Cette  notice  fort  intéressante  ne  parle  pas  du 
tableau  du  fils-bourreau. 

(2)  Musée  des  Familles,  Paris  1833,  in-4o,  p.  30,  où  à  l'appui  de  ce  qui 
précède  on  parle  de  notre  sa(ja.  Quid  juris,  si  plusieurs  criminels  ambi- 
tionnaient l'olfice  momentané  de  bourreau?  Tiraient-ils  à  lacouitc  paille 
comme  les  juges  parfois  dans  des  cas  difficiles? 


(  208  ) 

tard  ,  le  comte  Charles  de  Valois  infligeant  une  punition 
de  ce  genre  à  ses  pages,  qui  s'étaient  amusés  à  lutter 
entre  eux  :  leur  très-grâcieux  seigneur,  pour  les  pu- 
nir de  cette  espièglerie  qu'il  avait  trouvée  trop  forte , 
en  fit  enfermer  trente-six  dans  un  endroit  bien  clos  ; 
et  les  ayant  fait  dépouiller  de  tous  leurs  vêtements  , 
il  arma  chacun  d'eux  d'une  verge  ,  dont  ils  devaient 
se  fustiger  l'un  l'autre  à  toute  outrance  ,  jusqu'à  ce 
que  le  noble  justicier  leur  ayant  dit  :  Assez,  gentils 
pages  ,  ils  eussent  à  répondre  :  Grand  merci  ,  mon 
Seigneur!  (1). 

Un  Augustin  de  cette  ville  ,  Ignace  De  Dycker ,  qui 
publia,  à  Cologne,  en  1648,  des  poésies  latines,  a  con- 
sacré quelques  vers  à  la  so^a  que  nous  venons  d'exa- 
miner. Les  voici  : 

Carcere  dum  pater  et  natus  cohibentur  eodem  , 

Et  manicis  iisdem  compedibusque  sedent, 
Pœnaque  damnutis  compar  ceriicibus  instat 

{Fecerat  una  pain  crimine  pœna  reos)  ; 
Solaque  restaret  feriendi  colla  vohmtas  , 

Qui  (jludmin  vellet  stringeie  nemo  fuit. 
Ipse  etiam  (jeniior  ferro  submittere  collum , 

Ultimaque  a  sœvo  vialuit  crise  pâli, 
Sanguine  quam  nati  dcxtram  violare  paternam  ; 

Non  j)otuit  patris  non  meminisse  jiatcr. 
Exuerat ,  vitœ  studio,  sed  viscera  natus , 

lit  licuit  vilain  extendere  morte  patris, 
Atque  truci  collum  messurus  cuspide ,  librat 

Sœvus  inhumana  tela  cnienta  manu. 
Jflilius  inyrato  mox  fractam  {^res  nova!)  ferrum 

Corruit  attonitos  judicis  ante  pedes. 

L'intéressant  manuscrit  Bouck  van  memorie  dor  stadt 


(l)  Chron.  van  Ylacndercn  ,  door  Wyts  ,  Blootacker  en  Verniinracn; 
11,411. 


(  209  ) 

Ghendt,  conservé  aux  archives  de  la  Flandre  orientale , 
et  qu'on  peut  regarder  comme  la  source  d'une  foule  de 
notions  remarquables  sur  cette  ville,  ne  parle  pas  de  ce 
récit  populaire  (1). 

P.  Van  Dlyse. 


(1)  Nous  n'ajouterons  qu'un  mot  à  cette  notice  :  M.  Van  Dnysc'a 
obtenu  la  médaille  fl'or  au  dernier  concours  de  la  Société  royale  des 
Beaux-Arts  et  de  Littérature  de  Gand ,  poiu-  un  poème  eu  langue 
flamande,  (jui  retrace  avec  verve  et  élégance  cette  sanglante  histoire. 
Le  Gentsche  Vaderbenl  vient  de  paraître. 

Note  de  la  rédaelion. 


(210  ) 


Itotice 


SDR  LES 


ARCHIVES  DU  CHATEAU  DE  RUPELMONDE. 


Nos  ancêtres  altaclialent  un  grand  prix  à  la  conserva» 
lion  de  leurs  archives;  ils  punissaient  des  peines  les  plus 
sévères  ceux  qui  avaient  osé  y  porter  une  main  impie. 
On  connait  le  supplice  auquel  fut  soumis  Liévin  Pyn^ 
accusé  d'avoir  violé  le  secret  du  Beffroi,  en  1540. 

Comme  tous  les  grands  feudataires  du  moyen-âge ,  les 
comtes  de  Flandre  avaient  aussi  leurs  archives  particuliè- 
res, privées  et  publiques.  Depuis  les  temps  les  plus  reculés, 
ils  les  conservaient  dans  deux  châteaux  forts.  Ils  avaient 
choisi  à  cet  effet ,  pour  la  Flandre  flamingante  ,  Rupel- 
monde  ;  pour  la  Flandre  wallonne  ou  française ,  la  forte- 
resse de  Lille  (1). 

C'est  seulement  à  dater  de  l'avènement  de  la  maison  de 
Bourgogne  qu'on  trouve  quelques  renseignements  cer- 
tains sur  la  trésorerie  des  Chartes  de  Flandre,  comme  on 
l'appelait  alors,  à  l'occasion  de  la  création  de  la  chambre 
des  comptes,  à  Lille,  en  1385  (1386)  par  Philippe-le-Hardi  ; 
les  archives  qui  existaient  dans  cette  ville  furent  réunies 

(1)  Wainkôuig.  Histoire  de  la  Flandre- 1,  8. 


(  211   ) 

à  la  nouvelle  institution.  On  y  transporta  de  Rupelmonde 
un  grand  nombre  d'actes,  de  cartulaires,  et  d'autres  docu- 
ments (1). 

Le  premier  personnage  à  qui  il  semble  qu'ait  été  con- 
fiée la  garde  des  archives  de  Flandre,  avec  le  titre  de 
trésorier  des  chartres,  est  Jacques  de  Libaufosse,  secré- 
taire du  comte  Louis  de  Maie,  eu  1357.  C'est  ce  qui  semble 
constaté  par  une  quittance  en  français  de  cette  même 
année ,  par  laquelle  Jean  Hardi  reconnait  avoir  reçu 
plusieurs  titres  et  papiers  des  mains  de  Libaufosse  (2). 
Avant  cette  époque,  tout  porte  à  croire  que  les  secrétaires 
des  comtes  étaient  en  même  temps  gardes  de  chartes. 

En  1387  nous  ti-ouvons  Pierre  Blanchet,  conseiller  et 
maître  de  requêtes  de  l'hôtel,  et  Thierry  Gherbode,  con- 
seiller du  duc,  investis  des  fonctions  dont  nous  nous 
occupons.  La  même  année  ils  dressent  un  inventaire  de 
toutes  les  pièces  confiées  à  leui'S  soins,  d'après  les  153 
layettes  où  elles  étaient  contenues  et  qui  toutes  portaient 
un  signe  particulier.  Blanchet  semble  avoir  cessé  de 
vivre  en  1399;  car  de  cette  époque  à  1421,  on  ne  ren- 
contre que  Thierry  Gherbode  seul.  M.  Le  Glay  donne  des 
renseignements  curieux  sur  ce  dernier ,  dans  sa  notice 
sur  les  Archives  du  département  du  Nord  (3).  Jean  de  la 
Kethulle,  conseiller  et  maître  des  requêtes  de  l'hôtel, 
succède  à  Gherbode;  il  meurt  en  1433.  11  est  remplacé  par 
Georges  dOostende,  secrétaire  du  duc  de  Bourgogne.  En 
1485,  nous  trouvons  Gérard  Numan  secrétaire  des  or- 
donnances de  l'empereur  Maximilien,  et  de  1482  à  1488, 
Barthélémy  Trottin.  Il  est  probable  que  ces  deux  person- 
nages   exerçaient    les    fonctions  de   gardes    des  chartes 

{l)Ibi<I.,9. 

(2)  Archiv.  FlaïKi.  orient.,  Riipcini. 

(3)  NoUce  sur  les  Arcliives  du  dt-paitemciit  du  ]\oiiI:  Lille,  1839, 
grand  in-8'',  pag.  15  et  IG. 


{  212  ) 

ensemble.  Car  nous  retrouvons  encore  Gérard  Numari , 
comme  secrétaire  et  audiencier  de  Piiilippe-le-Beau  ,  en 
1489  (I).  Au  dernier  succède  Pliiiippe  Hanelon,  premier 
secrétaire  audiencier  de  l'empereur  et  de  l'archiduc 
Charles.  Ils  ont  pour  remplaçant,  en  1515,  Guillaume 
de  le  Walle  d'Axpoele.  conseiller  de  l'empereur.  Pendant 
qu'il  était  garde-chartres ,  Jean  de  Sauvage  ,  seigneur 
d'Escaubec(j,  desservit  pendant  dix  ans  celte  place  pour 
et  au  nom  de  G.  de  le  Walle.  Celui-ci  mourut  en  1540. 
11  eut  pour  successeur  au  château  de  Rupelmonde ,  l'an- 
diencier  Pierre  Verreyrken.  Après  lui  vintViglius  de  Zui- 
chem.  La  nomination  d'un  homme  aussi  éminent  que 
Viglius  au  poste  de  garde  des  Chartres,  prouve  l'impor- 
tance que  l'on  attachait  autrefois  aux  archives.  Après  avoir 
donné  sa  démission  de  cette  place,  il  devint  garde-charlres 
de  Hollande.  Il  fut  remplacé  par  Hermès  de  Wynghene, 
maître  des  requêtes  du  conseil  privé,  à  qui  Philibert  de 
Bruxelles  avait  élé  chargé  de  la  part  de  l'empereur,  par 
acte  du  15  avril  1551 ,  de  remettre  les  archives  de  Rupel- 
nunde.  Il  paraît  qu  après  la  retraite  de  Viglius,  ce  fut  ce 
Philibert  de  Bruxelles  qui  remplit  l'emploi  de  garde  de 
chartes  par  intérim. 

Après  les  troubles  de  1568,  les  Archives  de  Rupelmonde 
furent  transportées  à  Gand.  On  les  plaça  d'abord  dans 
iuie  des  salles  du  Beffroi,  ensuite  à  l'Hôtel-de-ville.  Nous 
trouvons  dans  les  registres  aux  résolutions  des  Etats  de 
Flandre  (2),  une  résolution  du  19  juin  1581,  portant  que 
les  (piatre  membres  sont  informés  que  les  cliartes,  monu- 
ments etletrages  du  pays,  déposés  auparavant  au  château 
de  Rupelmonde,  sont  maintenant  transportés  à  Gand  sur 
la  demande  des  États ,  et  qu'ils  sont  dans  le  plus  grand 


(1)  U)i(l. ,  iia[î.  16  i?t  17.  —  Gacliard  ,  Inventaires,  I,  203. 

(2)  Connnençaiit  an  22  janvier  et  finissant  au  22  novembre  I5S1. 
Archives  de  la  Fhuulre  orientale. 


(  213  ) 

désordre  par  suite  de  ce  déplacement.  C'est  pounpioi  ils 
décident  de  les  faire  visiter  et  inventorier  au  plus  tôt.  A 
cet  elFet,  ils  adjoignent  maître  Jean  Bellecliiere  à  maître 
Gérolf  van  der  Haghe,  trésorier  dcsdils  Chartres,  lis  auto- 
risent en  même  temps  le  magistrat  de  Gand  de  commettre 
un  ou  plusieurs  autres  pour  les  assister  dans  celte  opéra- 
lion.  D'après  Diericx,  la  translation  des  Archives  de  Rupel- 
mondc  à  Gand  n'eut  lieu  qu'en  1582  ,  par  ordre  du  duc 
d'Alençon,  que  les  mécontents  avaient  appelé  au  comté 
de  Flandre.  Louis  ilcuriblocq  ,  alors  conservateur  de  ce 
dépôt,  fut  chargé  de  les  transporter  ,  conjointement  avec 
le  bailli  van  Pottelsberghe,  Gérolf  van  der  Hage  et  deux 
échevins  de  la  keure  de  Gand. 

Nous  pensons  qu'il  ne  s'agit  ici  que  des  documents 
laissés  à  Kupelmonde  ,  et  dont  lleuribiocq  avait  conserve 
la  garde. 

11  semble  qu'à  cette  époque  beaucoup  de  documents 
importants  avaient  été  enlevés  de  la  trésorerie  des  Char- 
tres. Car  eu  1581  ,  les  communes  du  pays  de  Waes  font 
connaître  aux  Etats  de  Flandre  que  les  privilèges ,  archi- 
ves ,  cartu/aires  et  monuments ,  concernant  celte  partie  de 
la  Flandre,  se  trouvent  à  Anvers  entre  les  mains  de  par- 
ticuliers qui  avaient  été  échc»  ins  dans  le  pays  de  Waes. 
Comme  d'après  les  anciens  privilèges  nationaux,  il  est 
défendu  de  transporter  ou  de  laisser  dans  une  autre  pro- 
vince, les  archives  qui  intéressent  le  comté ,  les  Etats^  par 
leur  résolution  du  12  avril  1581,  décident  qu'ils  se 
joignent  à  ceux  du  pays  de  Waes  et  à  ceux  de  la  ville 
de  Gand,  afm  de  réclamer  les  documents,  pour  la  restitu- 
tion desquels  on  a  déjà  tenté  plusieurs  démarches  sans 
résultats  (1). 

Lorsqu'un  peu  de  tranquillité  eut  été  rendue  à  nos 

(1)  Archives  de  la  ville  de  Gand;  lettres  détachées. 


(  214  ) 

provinces,  si  longtemps  en  proie  aux  horreurs  de  la 
guerre,  le  roi  Philippe  II  commit,  par  acte  du  30  mars 
1594,  Jean  d'Amman,  écuyer  échevin  de  Gand,  pour 
recevoir  des  mains  de  Jean  Stercke,  conseiller  au  conseil 
de  Flandre  et  maître  des  comptes  à  Lille  ,  ainsi  que 
Screvel  van  Driel ,  aussi  conseiller  au  même  conseil ,  tous 
les  registres,  chartes,  inventaires,  etc.,  concernant  la 
Flandre ,  qui  naguères  avaient  fait  partie  du  dépôt  de 
Rupelmoude  et  qui  se  trouvaient  à  cette  époque  encore 
placées,  partie  dans  la  Maison-de- Ville  de  Gand,  partie 
dans  le  Beffroi  et  dans  une  chambre  de  la  cathédrale ,  au- 
dessus  de  celle  du  chapitre.  Un  local,  destiné  à  servir  de 
trésorerie  des  chartes ,  avait  été  disposé  au  château  élevé 
par  Charles-Quint.  C'est  là  que  Jean  d'Amman  fut  chargé 
de  faire  transporter  ces  précieux  documents.  Par  acte  du 
même  jour,  le  roi  Philippe  II  nomma  Jean  Stercke  et 
Jérôme  deBrabant,  son  conseiller  en  Flandre,  pour  re- 
mettre et  délivrer  à  Jean  Richardot,  conseiller  du  conseil 
d'Etat  et  privé,  président  d'Artois,  récemment  nommé  tré- 
sorier ou  archiviste  des  chartes  de  Flandre,  les  archives 
de  Rupelraonde  et  pour  en  dresser  avec  ce  dernier  un 
nouvel  inventaire.  Empêché  de  vaquer  à  ce  travail, 
Jérôme  de  Brabant  est  remplacé  par  Screvel  van  Driel , 
par  acte  du  29  novembre  1595.  Les  procès-verbaux, 
commissions  et  autres  actes  contenant  ces  détails,  sont 
transcrits  dans  l'Inventaire  de  l'an  1600,  dont  nous  parle- 
rons plus  bas. 

Il  semble  cependant  que  le  local  du  nouveau  château  i 
était  peu  propre  à  servir  de  trésorerie  des  Charles  ;  car 
il  fut  ordonné,  en  1595,  au  magistrat  de  Gand  de  faire 
transporter  au  Beffroi  les  chartes  de  Sa  Majesté  \  voici  lai 
lettre  que  M.  Gachard  a  eu  l'obligeance  de  nous  commu- 
niquer à  ce  sujet  : 


(215) 

A  noz  tres-chiers  sires  et  espeaulx  amys  les  eschevms  e( 
conseil  de  la  ville  de  G  and  (1). 

Tres-chiers  sires  etespennlx  amys,  se  trouvans  les  chartres, 
de  sa  majesté  concernans  le  pays  et  conté  de  Flandres  en  lieu 
mal  propre  au  chasteau  de  Gand,  nous  avons  advisé  de  pour  la 
conservation  d'iceulx,  les  en  retirer  et  les  mettre  à  la  tour  du 
Belfroy  de  ladicte  ville,  ou  aussy  entendons  faire  dresser  l'in- 
ventaire desdictes  chartres,  vous  ayans  bien  voulu  faire  ceste 
advertence  ,  afin  que  donnez  ordre  que  ledict  Belfroy  puist 
doresenavant  à  ce  servir,  et  que  les  clefz  soient  délivrez  aux 
commissaires  ayans  charge  dudict  transport  et  inventarisation, 
et  si  daventure  ladicte  inventarisation  ne  se  puist  faire  com- 
modément audict  Belfroy,  par  faulte  de  cheminée  ou  aultre 
incommodité ,  ne  veuillez  délaisser  en  ce  cas  d'accomoder 
lesdicts  commissaires  dune  bonne  chambre  à  la  maison  esche- 
vinale  de  ladicte  ville.  Atant  tres-chiers  sires  et  espeaulx  amys, 
notre  Seignieur  vous  ait  en  sa  saincte  garde.  De  Bruxelles  au 
bureau  des  finances  du  roy,  le  20  de  novembre  159o.  D.  V. 

Les  chief  trésorier  général 
et  commis  desdicfes  fivances , 
Signé ,  Croonendaele. 

Tout  porte  à  croire  qu'il  ne  fut  pas  donné  suite  à  cet 
ordre.  Car  les  chartes  continuèrent  à  rester  déposées  au 
nouveau  château. 

A  dater  de  celte  époque ,  un  voile  épais  couvre  les  des- 
tinées des  archives  de  Rupelmonde.  Il  est  à  supix)ser  que 
classées  et  inventoriées  avec  ordre  dans  le  nouveau  châ- 
teau  de  Gand,  elles  n'ont  plus  eu  de  fonctionnaire  spé- 
cialement chargé  de  veiller  à  leur  conservation. 

Les  Français  s'étaient  emparés,  en  1678,  de  la  citadelle 
de  Gand;  il  parait  que  la  trésorerie  des  chartes  eût 
considérablement  à  souffrir  de  cet  événement.  C'est  ce  que 

(1)  Advertcntien ,  decreten ,  keure  1595. 


(216) 

nous  apprend  une  déclaration  de  Jacques  Staîlns  et  de 
Louis  Spanoghe,  conseillers  au  conseil  de  Flandre.  Nous 
ferons  remarquer  ici  que  J.  Stalins  avait  remplacé  Antoine 
van  der  Piet,  qui  avait  dans  le  principe  été  nommé  avec 
L.  Spanoghe,  pour  ce  travail.  Après  que  l'armée  française 
eut  évacué  la  ville  de  Gand,  en  1679,  ils  furent  commis 
tous  deux  le  19  août  de  la  même  année,  par  le  duc  de  Villa- 
Hermosa,  alors  gouverneur-général  des  Pays-Bas,  pour 
aller  visiter  les  archives  du  nouveau  château.  Ils  y  trou- 
vèrent un  effrayant  désordre  et  des  lacunes  des  plus  déplo- 
rables. Ils  parvinrent  cependant  à  en  reclasser  une  partie 
d'après  l'ancien  inventaire  de  1387,  Ils  eu  firent  une  nou- 
velle copie  et  se  contentèrent  de  placer  un  T  (1)  en  marge 
à  chaque  pièce  qu'ils  avaient  retrouvée. 

En  1716,  il  fut  de  nouveau  question  d'enlever  les  ar- 
chives du  château  de  Gand  et  de  les  placer  dans  un  lieu 
plus  convenable;  nous  publions  ici  les  lettres  adressées 
à  ce  propos  par  le  gouvernement  au  magistrat  de  Gand. 
Nous  en  devons  la  communication  à  l'obligeance  de  M.  Ga- 
chard,  pour  qui  feu  M.  l'archiviste  Parmentier  les  avait 
copiées  aux  archives  de  la  ville. 

Messieurs  , 

Voicy  une  lettre  de  Sa  Majesté  au  sujet  des  archives  qui 
sont  au  château  de  Gand ,  afin  d'avoir  une  autre  place  propre, 
comme  par  ladite  lettre  à  laquelle  je  me  referre ,  et  suis  en 
tout  respect , 

Messsieurs , 

De  Vos  Seigneuries  , 

Très-humble  et  très-obéissant  serviteur , 

Signe  ,  J.  A.  De  la  Tour. 
Bruxelles  le  18  janvier  1716. 

(1)  Ce  qui  signifie  trouvé. 


(217) 

L'Empereur  et  Roy  en  son  conseil  d' Estât. 

Chers  et  bien  amés  ....  Aiant  veu  votre  représentation  du 
14  de  ce  mois  au  sujet  du  transport  des  papiers ,  registres , 
documents  et  archives  en  notre  ville  de  Gand ,  nous  vous 
faisons  cette ,  pour  vous  ordonner  de  nous  sugérer  une  place 
ou  Ion  pourroit  placer  les  papiers  en  question  ,  et  si  notre 
grand  bailly  ou  vous,  avés  eu  cy-devant ,  conjointement  le 
gouverneur  du  château  et  le  président  de  notre  conseil  en 
Flandres,  chacun  une  clef  des  caisses  ou  coffres  ou  lesdits 
papiers  ont  esté  gardés  cy-devant.  A  tant  chers  et  bien  amés , 
notre  Seigneur  vous  ait  en  sa  sainte  garde.  De  Bruxelles  le 
16  de  janvier  1716.  Cor  V. 

Signé,  J.n.LE  Roy. 

Messieurs , 

J'ay  l'honneur  de  remettre  à  Vos  Seigneuries  le  décret  en 
marge  de  la  requête  et  pièces  accusées  au  sujet  des  opérateurs, 
dont  l'official  de  la  secrétairie  s'estoit  mespris,  ra'aiant  dit 
lorsque  la  résolution  fut  prise ,  qu'elle  regardoit  les  archives 
au  château  de  Gand,  c'est  que  je  cru  autant  plus  facillement 
que  je  n'avoit  advertance  ny  de  l'une  ny  l'autre  affaire. 

On  nous  dit  icy  que  nous  sommes  à  la  veille  de  plusieurs 
changemens ,  cependant  tout  va  encore  à  l'ordinaire ,  je  suis 
en  tout  respect, 

Messieurs , 

De  Vos  Seigneuries, 
Très-humble  et  très-obéissant  serviteur, 
Signé  ,  J.  A.  De  r,*  Tocr. 
Bruxelles  le  30  janvier  1716. 


Messieurs, 

En  conséquence  de  celle  qu'il  a  pieu  à  Vos  Seigneuries  me 
faire  le  28  du  pasé ,  j'ay  recommandé  les  deux  encloses  à 
Monsieur  le  conseiller  Van  der  Haghen  au  sujet  des  archives 
enlevez  du  château  de  Gand ,  et  me  rendre  plusieurs  fois  prez 

IS 


(  218  ) 

dudit  seigneur  pour  y  avoir  expédition  ,  ou  du  moins  scavoir 
son  intention  ,  puisque  la  requeste  et  retroactes  à  ce  sujet, 
estoient  resté  sous  luy,  dez  le  tems  du  comte  de  Kinigsegg  , 
comme  je  l'en  ay  fait  resouvenir,  et  luy  donné  explication  de 
ce  qui  s'estoit  pasé  ,  et  qui  cstoit  de  ma  connoissance  ;  de  sorte 
qu'il  s'agist,  que  ledit  seigneur  doit  même  faire  la  recherche 
et  reproduction  desdites  retroactes,  puisqu'il  n'y  a  personne  qui 
se  mesle  de  ses  papiers,  et  c'est  qui  cause  cette  longue  nainerie 
quoy  que  je  fasse ,  au  reste  j'ay  reconnu  par  le  discours  sur  la 
matière ,  que  ce  seigneur  ne  s'empresse  la  dessus ,  et  qu'il 
retombe  sur  son  premier  sentiment,  qui  est  que  pour  décider 
une  affaire  pareille,  qui  est  jusques  à  la,  il  y  deveroit  avoir 
tin  conseil  réglé,  cependant,  il  a  eu  la  bonté  m'assurer  de 
faire  recherche  desdites  papiers ,  et  de  les  examiner  pour 
veoire  si  par  la  joincte  il  y  poura  estre  délibéré,  qui  est  la 
chose,  ou  elle  en  est,  et  à  quoy  je  travaille  :  dont  cette  pour 
gouverne. 

J'ay  l'honneur  d'estre  en  tout  respect. 

Messieurs , 

De  Vos  Seiyneîiries , 
Très-humble  et  très-obéissant  seixitetir, 
Signé ,  J.  A.  De  la.  Tour. 
Bruxelles  le  12  juillet  1717. 

Il  n'y  a  icy  rien  de  particulier. 

Nous  croyons  que  c'est  à  la  suite  de  cette  négocatiou 
que  les  archives  de  l'ancien  château  de  Rupelmonde 
furent  déposées  au  Vieux-Bourg.  Elles  y  furent  placées 
tlans  une  salle  appelée  chambre  fiscale. 

De  1717  à  1765,  il  n'est  plus  fait  mention  de  l'ancienne 
trésorerie  des  chartes.  A  cette  époque  le  comte  de  Neny, 
fils  du  comte  Patrice  de  Neny .  chef  président  du  conseil 
privé ,  fut  chargé  par  l'Impératrice  de  visiter  les  archives 
de  Rupelmonde  et  de  faire  un  rapport  à  ce  sujet.  Mal- 
heureusement ce  rapport .  qui  doit  avoir  été  fort  intéres- 
sant, ne  se  trouve  pas  aux  archives  générales  du  royaume. 
En  1770,  le  célèbre  jurisconsulte  Pfeffel  vint  examiner 


(  219  ) 

ces  litres  au  nom  du  roi  de  France ,  avec  le  conseiller  de 
Wynanls.  Ce  dernier,  autorisé  par  le  gouvernement  autri- 
trichien  ,  délivra  à  Pfefifel,  sous  récépissé,  un  grand  nom- 
bre de  pièces  réclamées  par  la  France.  On  eut  le  bon 
esprit  de  laisser  des  copies  des  documents  transmis. 
Diericx  rapporte  la  liste  dos  chartes  données  au  com- 
missaire du  roi  Louis  XV  (1).  Le  gouvernement  français 
restitua  en  même  temps  quelques  pièces  qui  intéres- 
saient la  Belgique.  Cet  échange  fut  profitable  aux  deux 
pays. 

Les  bâtiments  du  Vieux-Bourg  ayant  été  vendus,  en  1779, 
au  sieur  Brisemaille  pour  en  faire  une  fabrique,  les  char- 
tes de  Rupelmonde  furent  déposées  dans  une  salle  du 
couvent  des  Jésuites,  supprimé  en  1773,  et  devenu 
d'abord  le  siège  du  conseil  de  Flandre  et  ensuite  du 
tribunal  civil.  C'est  là  que  Diericx  les  vit  en  1812. 
«Elles  étaient  dans  un  état  pitoyable,  dit-il,  servant  de 
»  pâture  aux  rats  et  aux  souris.  » 

A  cette  époque  il  fut  question  de  transporter  ces  pièces 
à  l'hôtel  de  la  préfecture.  M.  le  préfet  Faipoult,  qui  fit  tant 
et  de  si  bonnes  choses  pour  le  département  ,  chargea 
IHM.  Hellebaut ,  avocat ,  et  Wallez ,  bibliothécaire  de  la 
ville ,  du  transport  de  ces  archives  à  la  préfecture  et  de  la 
rédaction  d'un  nouvel  inventaire  (2).  Ce  travail  fut  com- 
mencé; mais  nous  ignorons  pourquoi  il  ne  fut  pas  achevé. 
Dans  l'entretemps ,  ce  qui  restait  de  la  trésorerie  de  Rupel- 
monde fut  laissé  au  tribunal  de  première  instance,  enfermé 
sans  ordre  et  sans  soins  dans  un  grand  nombre  de  layettes 
ou  caisses  de  bois  de  chêne  (3),  qui,  la  plupart,  portent 


(1)  Ibid. ,  note  1.  —  WarnliiJnig,  I,  10,  et  note  1. 

(2)  De  Bast ,  Recueil  des  Antiquités  romaines  et  gauloises  trouvées  dans 
la  Flandre,  pag.  459-461. 

(3)  Ibid. 


(  220  ) 

encore  sur  leurs  couvercles  des  suscriplions  de  la  fiu  du 
XIV^  siècle  5  écrites  à  l'encre. 

En  1830 ,  les  derniers  débris  du  précieux  cliartrier  de 
Rupelmonde  furent  remis  à  M.  L.  de  Bast,  alors  archiviste 
de  la  province,  par  M.  Van  Maelsaecke.  greffier  du  tribunal 
de  première  instance  qui  parapha  toutes  les  pièces  délivrées. 
BI.  L.  de  Bast  commença  alors  un  premier  triage  et 
classa  provisoirement  les  chartes  par  ordre  topographique. 
D'après  ce  qui  précède,  on  voit  que  la  trésorerie  des 
Chartres  de  Rupelmonde  fut  soumise  à  bien  des  vicissitudes. 
Les  richesses  qui  la  composaient  ont  diminué  dans  une 
proportion  effrayante,  depuis  1387  jusqu'à  ce  jour.  Le 
chanoine  de  Bast  estimait  à  un  huitième  ce  qui  restait  des 
anciennes  Archives  des  Comtes.  Aujourd'hui  le  nombre 
des  pièces,  encore  conservées  dans  ce  dépôt,  est  de  1936,- 
elles  sont  enfermées  dans  120  cartons.  Nous  avons  classé 
les  chartes  de  Rupelmonde  d'après  l'ordre  chronologique, 
de  1193  à  1560.  Elles  se  répartissent  par  siècles  de  la 
manière  suivante  : 

De  1193  à  1299  —  986 

DelSOO  à  1399  —  620 

De  1400  à  1499  —  230 

De  ISOO  à  1560  —  100 


1936 

Les  986  pièces,  qui  embrassent  l'époque  de  11  93  à  1 299, 
sont  inventoriées,  numérotées  et  analysées. 

Parmi  les  documents  des  XV  et  XVP  siècles  se  trouvent 
tous  les  grands  traités,  accords  et  autres  actes  politiques, 
conclus  par  la  maison  de  Bourgogne  et  Charles-Quint 
avec  les  puissances  étrangères.  En  vain  chercherait-on 
dans  cette  nombreuse  collection  quelques  éclaircissements 
sur  les  deux  Van  Artevelde,  sur  la  guerre  de  Gavre,  sur 
la  captivité  de  Maximilien,  sur  la  réforme  et  les  premiers 
troubles  du  XVF  siècle.  Quant  aux  documents  du  XlIPsiè- 


(  221  ) 

cle,  ils  donnent  des  notions  curieuses  sur  l'état  financier 
4e  la  Flandre,  sur  la  vie  privée  et  politique  des  comtes, 
sur  les  privilèges  accordés  aux  villes,  elc.  On  y  peut 
puiser  de  précieux  renseignements  sur  la  guerre  des  d'A- 
vesnes  et  des  Dampierre. 

Parmi  ces  pièces  se  trouve  encore  une  foule  de  comp" 
les,  d'enquêtes  civiles  et  criminelles,  de  sentences,  etc. 

Outre  les  documents  que  nous  venons  de  décrire,  il 
y  a  aussi  une  collection  de  papiers ,  qui  ont  également  l'ail 
parti  du  dépôt  de  Rupel monde.  Ce  sont  des  minutes  de 
lettres,  des  copies,  des  mémoires,  des  rapports,  etc.,  écrits 
en  flamand,  en  français,  en  lalin,  en  espagnol,  en  italien 
ou  en  allemand,  au  XV^  siècle  et  au  commencement  du 
XVI^.  Le  nombre  de  ces  pièces  peut  s'élever  à  environ  500. 
Dans  cette  collection  il  y  a  plusieurs  lettres  écrites  en 
caractères  de  convention ,  dont  jusqu'ici  nous  n'avons  pas 
encore  pu  trouver  la  clef.  Comme  ces  documents  se  rapport 
lent  au  temps  de  l'élection  de  Charles-Quint,  en  qualité 
d'empereur,  ils  pourraient  bien  être  relatifs  à  ce  grave 
événement.  Depuis  que  les  restes  du  charlrier  de  Rupel^ 
monde  ont  été  transportés  dans  le  local  actuel ,  il  a  encore 
été  acquis  envii'on  100  pièces  qui  appartiennent  nécessai- 
rement à  cette  catégorie. 

Nous  croyons  qu'il  n'est  pas  sans  utilité  de  faire  con- 
naître les  travaux  entrepris  autrefois  pour  le  classement 
du  charlrier  de  Rupelmonde. 

Il  n'existe  pas  de  trace  d'inventaire  des  chartes  de  Flan- 
dre avant  1387.  Cette  même  année,  comme  nous  l'avons 
vu  ,  le  duc  Philippe  chargea  Pierre  Bianchet  et  Thierry 
Gherbode,  gardes  des  chartes,  de  confectionner  un  réper- 
toire de  toutes  les  pièces  confiées  à  leur  surveillance  (1). 
En  1515  il  fut  dressé  un  nouveau  répertoire,  contenant 

(1)  L"originaI  de  cet  inventaire  n'existe  pas  aux  Ai'cliivcs. 


(  222  ) 

24  différents  inventaires.  Ou  en  fit  aussi  en  1524,  1540  et 
1549.  En  1552,  Hermès  de  Wyughene  copia  l'inventaire 
de  1387,  auquel  il  eut  soin  de  joindre  les  différentes  com- 
missions des  gardes-chartresdeRupelmonde.  Le  duc  d'Albe 
ordonna,  en  1569,  de  faire  un  nouveau  répertoire  des 
chartes  de  Flandre. 

Lorsque  la  trésorerie  fut  transportée  au  château  de 
Gand ,  par  les  soins  de  D'Amman  et  de  Richardot ,  on  in- 
ventoria les  pièces  existantes.  Les  titres  retrouvés  furent 
marqués  d'un  T  sur  la  marge  du  registre.  On  fit  la  même 
chose  sur  l'inventaire  de  1679,  dressé  par  Stalins  et  Spa- 
noghe;  ces  deux  derniers  répertoires  ainsi  que  celui  de 
1552,  sont  conservés  en  original  aux  archives.  Une  copie 
de  ces  inventaires  se  trouve  aux  archives  générales  à 
Bruxelles.  L'inventaire  de  1679  (1)  forme  un  vol.  in-folio 
de  405  feuillets,  d'une  belle  écriture.  D'après  les  indica- 
tions placées  en  marge,  on  voit  que  plus  des  3/4  des  char- 
tes ne  furent  pas  retrouvés.  Qu'on  juge  du  désordre  ap- 
porté dans  la  trésorerie  du  nouveau  château  de  Gand! 
Bien  que  depuis  cette  époque  il  y  a  encore  bien  des  pièces 
qui  se  soient  égarées,  nous  en  avons  cependant  retrouvée 
encore  parmi  celles  marquées  d'un  T.  Nous  ferons  remar- 
quer que  beaucoup  de  pièces  enlevées  lors  de  la  conquête 
en  1678,  se  trouvent  maintenant  aux  archives  du  Dépar- 
iemet  du  Nord,  à  Lille. 

En  1769,  il  fut  dressé  un  nouvel  inventaire  des  chartes 
de  Rupelmonde,  qui  étaient  alors  réparties  en  83  layettes 
et  quelques  sacs  (2).  Nous  n'avons  pas  retrouvé  aux  archi- 
ves l'inventaire  de  ces  mêmes  pièces,  entrepris  par  MM.  Hcl- 

(1)  En  voici  le  titre  :  Inventaire  des  Chartres,  titres  et  doctnne?ii 
trouves  en  la  trcsorie  des  Chartres  de  Flandre  au  7iouveau  chûteuu  de 
Gand,  après  l'évacuation  de  ladite  ville  par  les  armées  de  France , 
eu  1679. 

(2)Dicncx,II,  523  en  note. 


(  223  ) 

lebaut  etWalIez,  en  1812,  par  ordre  du  préfet  Faipoull. 
,  M.  Lambin,  arcliivisle  de  la  ville  d'Ypres,  a  publié  dans 
{^Messager  des  Sciences ,  année  1838 ,  t.  VI ,  pag.  256-270, 
deux  extraits  d'inventaires  des  chartes  de  Rupelmonde 
très-curieux  :  le  premier  énumère  les  documents  concer- 
nant la  ville  d'Ypres  qui  reposaient  au  cliâteau  de  Rupel- 
monde; le  second  contient  la  mention  des  copies  des  diffé- 
rentes pièces  levées  par  les  quatre  pensionnaires  Borluut, 
Groole,  Lyndt  et  De  Aula,  députés  de  la  part  des  quatre 
membres  de  Flandre;  ces  extraits  semblent  avoir  été  faits 
l'un  en  1534,  l'autre  en  1552  ou  1569. 

Les  trois  inventaires  anciens  que  nous  possédons,  admet- 
tant une  classification  qu'il  est  impossible  d'adopter  encore, 
ne  nous  ont  été  d'aucune  utilité  dans  V Inventaire  analy- 
tique général  des  chartes  des  Comtes,  du  déjiàt  de  Rupel- 
monde^ que  nous  avons  entrepris;  ils  ne  peuvent  servir 
qu'à  nous  faire  déplorer  davantage  les  grandes  pertes  que 
la  trésorerie  des  chartres  a  éprouvées  depuis  le  XIV°  siècle* 
Gomme  nous  l'avons  dit,  c'étaient  autrefois  les  personnages 
du  plus  haut  rang  qui  étaient  chargés  de  la  garde  des  ar- 
chives. En  acceptant  les  fonctions  de  trésoriers  des  chartes, 
ils  se  faisaient  ordinairement  remettre  par  leurs  prédéces- 
seurs un  inventaire  des  titres  qui  allaient  être  confiés  à  leurs 
soins.  Ils  faisaient  un  recolemeut  sur  cet  inventaire  et 
tenaient  note  des  augmentations,  des  soustractions  et  des 
changements  survenus  dans  le  dépôt  (1). 

Si  nous  nous  sommes  étendus  si  longuement  sur  les  ar- 
chives de  Rupelmonde,  c'est  qu'elles  forment  véritablement 
le  noyau  du  dépôt  d'archives  historiques  qui  est  placé  sous 
notre  garde. 

Jules  De  S-visx-GEyoïs. 
(l)DeJBast,  jbid.  .459. 


(  224  ) 


iio  'cli: 


:3lncien0  ttegistos 


DES 


MONNOIES   DE  BELGIQUE. 


fi<ss«6»e=» 


L'histoire  monétaire  des  différents  pays  a  fait,  dans  les 
derniers  temps ,  des  progrès  immenses  par  la  découverte 
et  la  publication  de  nombreuses  espèces  inconnues  jusqu'à 
ce  jour.  Il  reste  cependant  un  travail  à  faire  qui  pourrait 
dissiper  robscurilé  qui  règne  encore  sur  un  grand  nombre 
de  points  de  cette  partie  de  la  Numismatique.  Ce  ne  sont 
pas,  il  est  vrai,  les  personnes  qui  se  bornent  à  former  des 
collections  et  à  réunir  des  suites,  qui  peuvent  exécuter 
convenablement  un  travail  aussi  important,  il  semble 
plutôt  réservé  à  celles  qui  se  trouvent  à  la  tête  des  dépôts 
d'archives  ou  qui  ont  fait  une  étude  spéciale  de  la  diplo- 
matique et  des  antiquités  du  moyen-âge. 

Nous  voulons  parler  notamment  du  dépouillement  et 
de  la  pubhcation  des  chartes,  diplômes,  comptes  et  autres 
documents  qui  sont  relatifs  aux  monnoies.  La  plupart  de 
ces  pièces  sont  encore  inédites.  Ce  n'est  cependant  qu'en 
les  consultant  que  l'on  peut  connaître  d'une  manière  pré- 
cise, soit  la  valeur,  soit  le  nom  de  telle  ou  telle  pièce.  En 
s'appuyant  sur  des  documents  de  cette  nature,  on  ne  court 
pas  risque  de  se  perdre  dans  des  conjectures  inutiles.  Le 


(  225  ) 

traité  de  Le  Blanc  sur  les  monnoies  de  France,  doit  sans 
doute  une  g.ande  partie  de  l'autorilé  dont  il  jouit,  à 
l'usage  qu'a  lait  l'auteur  de  documents  oilicicls,  surtout 
depuis  la  lin  du  Xill'=  siècle  juscpi'à  l'époque  à  laquelle  il 
s'est  arrêté. 

Si  ceux  qui  s'intéressent  à  l'histoire  monétaire,  voulaient 
se  livrer  au  travail  que  nous  venons  d'indiquer,  on  pour- 
rait, pensons-nous,  le  diviser  de  la  manière  suivante  : 

1°  Il  faudrait  recueillir  et  publier  les  passages  les  plus 
intéressants  de  chartes  et  de  chroniques,  dans  lesquelles  il 
est  lait  mention  de  telle  ou  telle  monnoie.  On  pourrait 
remonter  à  une  époque  très-reculée ,  et  les  diplômes  éma- 
nés des  rois  tant  de  la  première  que  de  la  seconde  race 
fourniraient  des  renseignements  assez  nombreux. 

2°  11  s'agirait  de  faire  imprimer  un  Codex  numisma- 
tico-diplomaticus ,  dans  lequel  on  réunirait  soit  pour  une 
province,  soit  pour  tout  un  pays,  les  chartes,  ordonnan- 
ces, édits,  etc.,  qui  traitent  de  la  fabrication  des  monnoies, 
qui  défendent  la  circulation  de  telle  ou  telle  espèce,  qui 
ordonnent  l'établissement  ou  la  translation  des  hôtels  de 
monnoies,  ou  l'organisation  des  cours  de  monnoies,  etc.. 

En  faisant  des  recherches  dans  les  différents  dépôts  d'ar- 
chives, on  découvrirait  de  nombreux  documents,  à  partir 
du  X®  siècle  jusqu'au  XVI",  qui  répandraient  le  plus  grand 
jour  sur  une  foide  de  points  encore  obscurs  ou  tout-à-iait 
inconnus  jusqu'ici. 

L'auteur  de  cet  article  possède  déjà  un  grand  nombre 
de  chartes  relatives  à  la  monnoie  de  Flandre,  il  se  propose 
de  les  augmenter  encore  et  de  les  livrer  à  la  publicité. 

3°  Enfin  il  faudrait  dépouiller  et  analyser  les  comptes 
de  monnoies. 

C'est  sur  ce  dernier  point  que  nous  voulons  attirer,  pour 
le  moment,  Fallention  des  savants  belges. 

Ce  travail,  nous  l'avouons,  serait  excessivement  long  et 


(  226  ) 

fastidieux,  puisqu'il  faudrait  feuilleter  et  extraire  un  très- 
grand  nombre  de  volumes,  tous  manuscrits,  et  qui  sont  très- 
souvent  d'une  écriture  assez  difficile.  Mais  aussi,  une  fois 
l'analyse  faite,  quelle  satisfaction  déposséder,  en  quelque 
sorte,  une  histoire  monétaire  officielle,  de  pouvoir  dire 
d'une  manière  positive  l'époque  laquelle  ou  a  commencé 
de  fabriquer  telle  monnoie,  de  pouvoir  préciser  non-seule- 
ment les  dates  auxquelles  on  frappa  monnoie  dans  telle  ou 
telle  localité,  mais  de  pouvoir  indiquer  jusqu'au  nombre 
des  pièces  qui  ont  été  frappées  et  de  connaître  toutes  les 
particularités  relatives  à  leur  fabrication.  Il  ne  faudrait 
plus  renouveller  sans  cesse  des  calculs  sur  le  poids  et  la 
valeur  intrinsèque  des  pièces,  émettre  des  conjectures  sur 
leur  nom,  tout  cela  serait  dorénavant  établi  d'une  ma^ 
nière  certaine. 

M.  Gachard,  archiviste-général  du  royaume  de  Belgique, 
a  indiqué  dans  un  rapport  (1)  adressé,  en  1836,  à  M.  le  mi- 
nistre de  l'intérieur,  les  registres  des  monnoies  qui  se  trou- 
vent conservés  aux  archives  du  royaume.  Dans  ce  rapport 
il  s'était  borné  à  dire  que  ces  registres  appartenaient  à 
quinze  villes  des  Pays-Bas,  Il  avait  ajouté  la  remarque  que 
de  ces  quinze  villes,  six  seulement  avaient  été  citées  par 
Ghesquière  comme  ayant  des  hôtels  de  monnoies  (2). 

M.  Gachard ,  n'ayant  pu  s'étendre  dans  son  rapport  sur 
les  registres  qui  nous  intéressent  et  s'étant  borné  simple- 
ment à  indiquer  d'une  manière  très-sommaire  les  villes 
auxquelles  ils  appartiennent,  nous  nous  sommes  adressé 
à  M.  A.  G.  B.  Schayes,  commis  de  première  classe  aux  ar- 


(1)  Ce  rapport  a  été  reproduit  dans  le  Messarjcr  des  Sciences  et  des 
J.r/5,  année  1836,  pag.  230  et  suiv, 

(2)  31.  Gachard  ,  au  lien  de  citer  Ghesquière  /aurait  pu  avoir  recours 
aux  mémoires  de  lleyien  et  de  Groehe,tous  deux  couronnés  par  l'Aca-' 
demie  de  Bruxelles,  dans  lesquels  ou  trouve  une  liste  bien  plus  complète 
que  celle  fournie  par  Ghesquière. 


(  227  ) 

chivcs  du  royaume,  pour  avoir  un  inventaire  de  ces  re- 
gistres. C'est  à  son  obligeance  que  nous  devons  les  ren- 
seignements qui  sui\ent  : 

IlNVEJSTAIRE  DES  CoMPTES  DES  MoîïNOlES ,  CONSERVES  AUX  ARCHIVES 
DU  ROYAUME,  A  BRUXELLES. 

Brahant. 


LODVJ 


Ain 


Six  registres,  comprenant  les  comptes  des  mon- 
noies  frappées  dnns  cette  ville,  pendant  les 
années  1410,  U29  à  U31,  U66  à  147^. 

ViLVORDE.  .   £^?i  rejrù^re  de  l'année  1417, 

Bruxelles.  ,   Vingt-sept  registres,  des  années  1419  à  1421,1434 
à  1437, 1892,  à  lo9g,  1616  à  1695, 1712  à  1713, 
1744  à  1745, 1766  à  1772, 1772  à  1779. 
»  Un  registre  de  l'année  1601,  intitulé  :  «  Etat  et  re- 

levé de  la  première  boëte  de  Cornelis  Van  Lie- 
Leck  ,  maitre  particulier  de  la  raonnoie  de 
Bruges,  de  l'or  et  de  l'argent  qu'il  a  fait  tra- 
vailler et  monnoyer  à  la  monnoie  de  Bruxelles. 

AflVEUs.  .  .  Quarante  registres,  des  nnnéesl-!iO^  à.  l^OQ,  1^1^ 
au  S  juin  1488,  5  janvier  1489  au  26  jan- 
vier 1581,  24  septembre  1584  au  dernier 
mars  1606,  1608,  1609,  1616  au  dernier 
juin  1636, 12  mai  1637  au  16  avril  1642,  1647, 
1648,  1652,  1661  à  1682, 1685  à  1690,  1692  a 
1707, 1711, 1712, 1743  àl746, 1749  a  1753. 
En  1753,  la  raonnoie  fut  supprimée  à  Anvers  et 
transportée  à  Bruxelles. 

M.  Verachter,  archiviste  de  la  ville  d'Anvers,  qui  recueille 
avec  un  soin  particulier  tout  ce  qui  est  relatif  à  l'his- 
toire monétaire  de  sa  ville  natale,  a  eu  le  courage  de  com- 
pulser et  d'analyser  ces  registres.  Ce  travail ,  qui  lui  a  coûté 
plusieurs  mois,  lui  a  iourni  les  notions  les  plus  exactes  sur 
la  monnoie  d'Anvers. 


(  228  ) 

Anvers  et  Brcxelles,  Un  registre,  d'octobre  1376  à  octobre  1378, 

comprenant  la  nionnoie  d'Anvers  et  celle  de 

Bruxelles. 
Mai.ines.  .  .   Un  registre  des  années  1483, 1488  et  1489. 
Bois-LE-Duc.  Cinq  registres,  comptes  de  1381  à  1384,  1389  à 

mars  1394,  mars  1393  à  1604,  1606  à  1609, 

1614  à  1619, 1621  à  1624. 
Zù/ibourg. 

Maestriciit  .  Neuf  registres,  des  années  1418,  1419,  1500  à 
13S3,  1342  àl364, 1366  à  1380, 1382  à  1398, 
1601  à  1621,  1624  à  1629,  1631  à  1632. 

Gueklre. 
NiMÈGUE.  .  .  Un  registre  de  la  raonnoie  battue  au  duché  de 
Gueldre,del474  à  1473. 

Voici  l'inlitulé  de  ce  compte  :  a  Compte  Adrian  de  Lokere , 
maistre  particulier,  de  la  monnoye  d'or  et  d'argent ,  faicte 
et  forgée  aux  nom  et  armes  de  mon  très-redoublé  et  sou- 
verain seigneur,  monseigneur  le  duc  Charles,  duc  de  Bour- 
goigne,  de  Brabant,  de  Lembourg,  de  Luxembourg  et  de 
Glieldres,  etc.,  en  sa  dicte  duchié  de  Gheldres,  selon  et 
ensuivant  l'instruction,  etc.  (du  25  décembre  1474  au  4 
février  1475  (vieux  style). 

Dans  les  lettres  de  commission  jointes  à  ce  compte, 
Adrien  de  Lokere  est  nommé  «  en  l'office  de  maistre  par- 
ticulier de  nostre  dicte  monnoye  de  Gheldres.  »  Thierry 
de  Brakele  est  établi  garde  de  la  monnoie,  et  Huclion  de 
Maubeuge,  contre^garde.  Ces  lettres  sont  datées  du  15^ 
jour  de  novembre  1474. 

On  lit  dans  le  compte ,  à  l'article  Dépenses  :  «  Au  dit 
maistre  particulier  Adrian  de  Lokere ,  lequel  à  l'occasion 
de  ce  que  mou  dit  seigneur  n'a  point  de  monnoye  en  sa 
ville  de  Nymmcghe,  où  il  avoit  ordonné  de  la  tenre,  a  loué 
une  maison  en  icelle  ville  pour  V  liv.  X  s.  gros  par  an.  en 
la  présence  de  ladicle  garde,  etc.  » 


(  229  ) 

NiMÈCE  et  Armiem,  1480  à  i-482j  Arshem ,  NuiÈcnE  et  Z\ctbommel, 

1482  à  1484. 
NiMÈGUE,  1344  à  1S67,  1S69  à  1374,  1383  à  1391. 

Luxembourg . 

Ldxembocrg.  Cinci  registres,  de  1302  à  1304, 1616  à  1617  ,  1632 
à  1644. 

Flandre. 

Bruges.  .  .  Vingt-huit  registres,  com^iesAe^  vaonno\es  àeY\?LX\.- 
dre,  battues  en  la  ville  de  Brug'es,  1434  à  1438, 
1467  àl481, 1483, 1486,  1490  à  1307,  1310  à 
1318,  1320  à  1328,1327  à  1371, 1374  à  1392, 
1600  à  1613,  1618  à  1624,  1627  à  1630, 1632 
à  1663,1663  à  1703, 1709,  1712,1713,  1743, 
1749  à  1733. 

Uainaut. 

Mo:«s.  .  .  .  Deux  registres,  àQ\^^\,  1382,1384  à  1387. 

Tournaisis. 

Tocrî^ai.  .  .  Cinq  registres,  1490  à  1491,  1498  à  1301,  1377  à 
1600,  1604  à  1623, 1628  à  1643, 1643  à  1638. 

Les  comptes  de  l'année  1498  commencent  au  18  juin  et 
vont  jusqu'au  22  mars  1501;  ils  ont  été  rendus  par  Gui 
Lombart,  maître  particulier  de  la  monnoie  de  Tournai. 

Il  y  a  six  comptes  pour  ces  années.  Voici  le  titre  du  pre- 
mier :  «  C'est  le  compte  d'une  boëste  de  la  monoye  de 
Touruay  de  deniers  d'or ,  escuz  au  soleil  à  XXÏI  carats  et 
ung  VHP,  à  ung  VHP  de  carat  de  remède  de  LXX  deniers 
de  poix  au  mare  de  Paris,  qui  ont  cours  pour  XXXVI  sols 
III  deniers  pièce,  fait  en  achat  par  Guy  Dimenche,  dit 
Lombart,  maistre  particulier  de  ladicte  monnoye,  Rasse 
Barat  tenant  le  compte  d'icelle ,  dont  ont  esté  faictes  plu- 
sieurs délivrances  du  XVIIII'^  jour  de  juing  mil  CCCC IIII^^ 
dix-huict,  que  la  première  délivrance  fut  faicte,  jusques  au 
XIP  de  mai  exclud  mil  CCCC  IIII^'^  dix-neuf,  en  laquelle 
boëste  avoit  XXI  deniers  d'or   desdicts  escuz,  qui  sont 


(  230  ) 

IIIl"  IF  d'iceulx  escus  poisent  LX  marcs  d'or  achalé ,  marc 
d'or  fin  VII'^^  X  liv.  III  sols  IIII  deniers.  » 

On  ignorait,  pensons-nous,  que  les  rois  de  France, 
Charles  VIII  et  Louis  XII,  eussent  fait  frapper  monnoie  à 
Tournai.  Il  ne  sera  sans  doute  pas  difficile  de  reconnaître 
les  écus  au  soleil,  qu'ils  ont  fait  battre  dans  cette  ville. 

JSamiir. 

Namur  .  .  .  Un  registre,  1421  à  U26,  U28  à  1433,  avril  1497 
à  avril  1-499,  octobre  loOO  à  juin  1304,  1313  à 
lolo, 1327, 1328. 

Voici  l'indication  de  tous  les  registres  des  comptes  de 
monnoies  conservés  aux  archives  du  royaume.  Nous  igno- 
rons s'il  en  existe  encore  dans  d'autres  dépôts.  Apparem- 
ment que  ceux  de  Liège  sont  conservés  aux  archives  de  celte 
province. 

On  remarquera  l'absence  des  registres  de  Daelhem ,  au 
Limbourg,  où  les  anciens  ducs  de  Brabant  et  ensuite  Marie 
de  Bourgogne,  vers  1480,  firent  battre  monnoie. 

Les  registres  de  Gand  manquent  également  :  toutes  les 
recherches  faites  jusqu'ici,  tant  à  Gand  qu'à  Bruxelles, 
n'en  ont  rien  fait  découvrir-  c'est  une  perte  fâcheuse,  car 
il  a  été  fabriqué  dans  la  capitale  de  la  Flandre  un  très- 
grand  nombre  de  monnoies,  et  cela  à  des  époques  très- 
intéressantes  de  noire  histoire.  Les  amateurs  se  rappelè- 
rent les  pièces  frappées  pendant  la  minorité  de  l'archiduc 
Philippe-le-Bel ,  et  les  démêlés  de  Maximilien  avec  les 
Flamands,  celles  frappées  pendant  et  après  le  règne 
éphémère  du  duc  d'Alençon,  etc. ,  etc. 

C.  P.  Serruse. 


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1183. 


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Si  dans  la  plupart  des  ville?  du  Nord  de  la  France ,  les 
communes  n'ont  été  instituées  ou  légitimées  qu'à  la  suite 
de  violentes  commotions  politiques  ,  et  après  des  luttes 
acharnées  entre  le  peuple  et  le  suzerain,  il  n'est  pas  con- 
stant qu'en  Flandre  elles  doivent  leur  création  aux  mêmes 
secousses.  Les  Comtes  plus  éclairés ,  plus  raisonables  sur  leur 
intérêts  réels,  se  gardèrent  bien  d'anéantir  les  traces  qui 
se  perpétuaient  encore  chez  nos  ancêtres,  de  la  vieille 
démocratie  germanique  :  peut-être  même  augmentèrent- 
ils  de  leur  propre  mouvement  les  privilèges  municipaux , 
pour  échapper  aux  terribles  conséquences  d'une  lutte  de 
principes,  pour  ne  pas  mettre  en  contact  le  droit  divin  et 
le  droit  non  moins  sacré  du  peuple.  D'ailleurs  l'expérience 
leur  avait  appris  que  sous  l'égide  de  la  liberté  ,  l'industrie 
et  le  commerce  prenaient  tous  les  jours  un  essor  plus 
vaste ,  que  le  bien-être  de  leurs  concitoyens  tournait  à 
leur  avantage,  et  qu'ils  trouvaient  chez  eux,  en  maintes 


(  232  ) 

circonstances,  appui  et  assistance.  Nos  annales  fournissent 
des  preuves  irrécusables  que  les  communes  flamandes  ont 
été  les  plus  puissants  auxiliaires  de  leurs  comtes  contre 
les  empiétements  des  rois  de  France ,  et  que  plus  d'une  fois 
les  communes  flamandes  scellèrent  du  sang  le  plus  pur  de 
leurs  enfants,  leur  reconnaissance  pour  les  institutions 
libérales  concédées  par  leurs  comtes,  Les  graves  diflicullés 
qui  se  sont  élevées  quelquefois  entre  ces  princes  et  leurs 
sujets,  ont  eu  moins  pour  objet  le  principe  constitutif  de 
la  commune  en  lui-même,  que  la  violation  du  pacte  fon- 
damental. 

Des  détails  ultérieurs  sur  les  droits  politiques  de  nos 
communes  seraient  oiseux,  quant  au  sujet  que  nous  avons 
à  traiter  ici  :  nous  nous  contenterons  de  constater  une 
seule  des  prérogatives  du  droit  de  commune,  celle  d'éle- 
ver un  monument  en  commémoration  de  l'établissement 
de  leurs  droits  politiques,  en  un  mot,  pour  en  prendre 
acte.  Aucun  écrivain  n'a  contesté  qu'une  des  prérogatives 
les  plus  immédiates  de  l'institution  d'une  commune,  ne 
fàt  le  droit  de  construire  un  Beffroi ,  et  d'y  suspendre  un 
bourdon ,  prêt  à  réunir  les  citoyens  au  moindre  danger. 
C'est  dans  ce  sens  que  plusieurs  édits  des  rois  de  France, 
ont  été  portés  :  lorsqu'en  1331  ,  Philippe  VI  supprima  la 
commune  de  Laon ,  il  fit  mentionner  dans  son  ordonnance 
«  que  les  cloches  qui  furent  de  la  commune  jadis  de  Laon  , 

le  deux  qui  sont  à  la  tour  que  l'on  suelt  dire  le  Beff'roi 

soient  appliquées  à  notre  profit ,  et  défendons  que  ladite 
tour  ne  soit  appelée  Beffroi.  » 

Les  lettres  du  roi  Jean,  données  en  décembre  1363, 
permirent  aux  échevins  et  à  la  commune  de  Dourleus  de 
garder  la  tour  de  Beauval,  pour  y  faire  Beffroi  et  y  tenir 
prison. 

Dans  les  coutumes  d'Amiens  cl  d'Artois ,  on  désigne  par 
Bcilroi  la  tour  où  l'on  met  la  h  an-cloche ,  campana  banalis, 


(  233  ) 

c'est-à-dire ,  la  cloche  destinée  à  convoquer  les  habitants 
d'une  ville.  La  charte  d'affranchissement  de  S'- Valéry, 
octroyée  en  1376,  par  Jean,  comte  d'Artois,  contient  la 
disposition  suivante  :  a  Item,  nous  avons  donné  et  accordé 
eschévinage ,  han-cloche  grande  et  petite,  pilori,  scel  et 
banlieue  aux  maire,  échevins  et  commune  de S'-Valléry.  » 
L'étymologie  du  mot  Beffroi  est  controversée  par  les  lexi- 
cographes :  les  uns  le  font  dériver  de  bèei- ,  regarder , 
et  de  effroi;  les  autres  le  considèrent  comme  un  mot 
corrompu,  et  qu'il  est  simplement  employé  pour  effroi. 
Roquefort  pense  que  ce  mot  a  été  emprunté  par  les 
croisés  aux  Arabes ,  qu'il  doit  être  pris  dans  le  sens  de 
cloche  qui  servait  à  sonner  l'alarme ,  et  que  dans  la  suite 
on  l'appliqua  à  la  tour  même  où  le  bourdon  se  trouvait  : 
cette  dernière  explication  s'adapte  bien  au  but  de  son 
institution. 

»i  Jadis  ces  Beffrois  étaient  assez  nombreux,  chaque  corti" 
mune  était  fière  d'en  posséder  un;  mais  la  manière  ordi- 
naire de  les  bâtir  (souvent  en  bois)  et  l'impatience  de  les 
voir  terminés ,  étaient  cause  de  leur  décadence  prématu- 
rée. Les  Gantois  non  moins  jaloux  de  leurs  privilèges , 
mais  plus  soigneux  et  plus  prévoyants  que  leurs  contem- 
porains ,  voulurent  ériger  un  monument  plus  durable  et 
plus  en  rapport  avec  l'importance  de  leur  cité  et  leurs 
richesses  :  ils  jetèrent  les  fondations  d'un  monument  colos- 
sal ,  qui  pût  annoncer  au  loin  la  puissance  de  leur  com- 
mune et  en  transmettre  le  souvenir  intact  à  leurs  descen- 
dants. Ce  fut  en  1183  qu'ils  se  mirent  à  l'ouvrage.  Siger, 
châtelain  de  Gand ,  en  fit  jeter  les  fondations  :  le  plan 
original  de  ce  monument  se  trouve  encore  aux  archives 
de  la  ville;  autrefois  il  reposait  dans  la  layette  T,  n"  20, 
du  coffre  de  fer. 

Ce  dessin ,  d'un  état  parfait  de  conservation ,  est  tracé  à 
l'encre  de  chine  sur  de  la  peau  de  vélin ,  et  rehaussé  en 

16 


(  234  ) 

quelques  endroits  d'azur  et  de  cinabre  :  il  est  haut  de  2"',20 
et  large  de  0,40  (l). 

On  lit  au  dos  dbeivcerp  van  den  Beelfroete,  et  en  carac- 
tère plus  petit  :  Sigerus  castelamis  Gandensis  me  fondavit 
anno  MCLXXXIII ,  III  kal.  maii. 

Au  premier  abord  on  croirait  que  ce  plan,  qui  fut 
exécuté  à  peu  près  de  point  en  point  jusqu'à  la  corniche ,  se 
trouve  à  l'abri  de  toute  contestation,  que  son  authenticité  ne 
peut  être  mise  en  doute  ;  loin  de  là ,  une  controverse  assez 
acerbe  s'est  élevée  entre  M.  le  chanoine  De  Bast  et  le  che- 
valier Diericx.  De  Bast  fut  le  premier  qui  fit  usage  de  ce 
plan,  comme  pièce  probante;  son  authenticité  lui  parut 
irréfragable.  Diericx,  au  contraire,  blessé  dans  son  amour- 
propre  et  mu  par  des  préventions  purement  politiques, 
qui  souvent  servirent  de  prétexte  aux  contradictions  in- 
cessantes qu'il  opposait  au  chanoine  ,  regarda  cette  pièce 
comme  apocryphe,  parce  qu'elle  n'avait  jamais  été  avouée 
par  les  agents  de  la  commune,  fait  qu'il  déduisait  de  ce 
qu'elle  n'est  ni  signée  ni  paraphée  par  les  magistrats,  et 
ensuite,  il  fondait  son  grand  argument,  sur  ce  que  à 
l'époque  de  1183,  il  n'y  avait  pas  à  Gand  de  châtelain  du 
nom  de  Siger! 

Mais  fallait-il  bien  le  concours  joar  éc7'it  de  la  cojnmune 
dans  la  permission  d'élever  un  monument ,  qui  n'était 
que  la  conséquence  d'une  concession  de  privilèges  oc- 
troyée par  le  comte?  Si  ce  plan  (car  beioeerp  ne  signifie 
autre  chose  que  projet ,  que  plan  soumis  à  une  décision 
quelconque),  venait  de  la  part  du  comte,  il  équivalait, 
seul,  à  la  permission  donnée  par  une  charte;  mais  si 
ce  projet  avait  été  présenté  par  la  commune  même,  où 
est  la  preuve  qu'il  n'ait  pas  été  accompagné  d'une  de- 
mande signée  ? 

(1)  Voyez  le  jS"  1  de  la  plaiiclie. 


(  235  ) 

Et  c'est  celle  deruière  version  qui  est  la  plus  admissible, 
car  le  bewcerp  en  idiome  flamand,  en  regard  avec  le 
Sigerus  castcllanus  Gandcnsis  me  fondcwit ,  ne  me  paraît 
êlre  que  le  consentement  donné  par  le  comte  ou  son  lieu- 
tenant d'élever  un  Beffroi,  sur  la  demande  faite  directe- 
ment par  les  agents  de  la  commune.  Et  est-il  venu  dans 
l'idée  de  quelqu'un  que  les  plans  originaux  de  notre  hôtel- 
de-ville,  d'après  lesquels  la  partie  existante  a  été  exécutée, 
soient  supposés  parce  qu'ils  ne  sont  signés  par  aucun 
éclievin?  je  ne  puis  l'imaginer. 

Maintenant  j'arrive  à  l'argument  de  Diericx,  qui  au  pre- 
mier abord  présente  plus  de  réalité  :  en  1183,  dit-il,  il  n'y 
avait  point  de  châtelain  à  Gand  du  nom  de  Siger,  mais  un 
Roger,  qui  était  en  même  temps  châtelain  de  Courlrai.  Ce 
Roger  épousa  en  secondes  noces  Marguerite,  fille  d'Arnould, 
comte  de  Guines  ,  qui  lui  assura  sa  vie  durant  la  charge 
de  châtelain  de  Gand;  en  1187,  il  la  remplissait  encore. 
La  fille  de  ce  même  Roger,  Pelronille  de  Courlrai,  épousa 
Siger,  fils  d'Arnould,  comte  de  Guines,  qui  reçut  pour 
dot  de  son  beau-père  la  charge  de  châtelain  de  Gand. 
Il  signa  en  cette  qualité,  conjointement  avec  son  beau- 
père  ,  qui  prenait  le  titre  de  châtelain  de  Courlrai ,  un 
diplôme  en  1198,  et  seul,  une  charte  de  1199.  Ces  faits, 
je  les  admets  comme  constants  :  mais  à  quelle  époque  ce 
mariage  eut-il  lieu  ?  C'est-ce  que  Diericx  n'a  pas  prouvé, 
et  il  est  plus  que  probable  que  ce  mariage  fut  célébré 
bien  antérieurement  à  1198,  car  nous  voyons  que 
Siger  signa,  comme  témoin,  avec  son  beau-père  et  ses 
beaux-frères,  plusieurs  chartes  en  faveur  de  l'abbaye  de 
S'-Bavon ,  à  Gand,  dont  une  est  de  1192,  par  laquelle 
Baudouin  IX  fait  cadeau  d'une  petite  rente  à  cette  abbaye, 
et  où  Siger  signe  comme  châtelain  de  Gand.  En  1189, 
dans  une  charte  de  donation  de  Philippe  d'Alsace ,  il 
signe  S.  Sigeri  Ga?idavensis  :  dans  une  charte  du  même 


(  236  ) 

comte  de  1187,  il  s'inlilule  Siger  de  Gant,  et  son  beau- 
père  Roger  y  prend  le  litre  de  châtelain,  sans  plus;  ses  fils 
Àrnould  et  Giselbert  y  apposèrent  aussi  leur  signature. 
Enfin  dans  une  autre  charte  de  Philippe  d'Alsace,  de  1183, 
il  signe  à  côté  de  Roger,  châtelain,  Sigerus  de  Gant.  Ces 
pièces  se  trouvent  aux  archives  de  la  Flandre  orientale,  et 
fournissent  la  preuve  qu'un  châtelain  du  nom  de  Siger, 
existait  à  Gand  à  une  époque  antérieure  à  celle  indiquée 
par  Diericx:  châtelain ,  qui  peut  avoir  jeté  les  fondations 
du  Beffroi,  dont  le  projet  ou  le  plan  lui  avait  été  pré- 
senté par  la  commune  de  Gand. 

Si  ce  plan  eut  été  exécuté  dans  son  entier,  le  Beffroi  de 
Gand  aurait  offert,  par  l'ensemble  et  l'élégance  de  ses  pro- 
portions, un  des  édifices  de  ce  genre,  les  plus  remarquables 
de  l'Europe  :  ses  sveltes  clochetons  ,  entourés  de  légères 
galeries  découpées  à  jour,  lui  auraient  donné  un  aspect 
tout-à-fait  aérien  :  la  grande  fenêtre  trilobée  est  d'une 
richesse  de  composition  peu  commune,  et  ces  animaux 
fantastiques,  qui  devaient  orner  ses  côtés,  auraient  con- 
couru à  en  augmenter  la  légèreté!  Et  que  l'on  veuille  y 
faire  attention,  la  façon  des  ornements,  des  dessins  qui 
découpent  les  galeries  ,  des  pinacles  enjolivés  d'une  ma- 
nière si  déhcate,  dénotent  parfaitement  l'époque  à  laquelle 
il  faut  faire  remonter  ce  dessin,  M.  De  Caumont ,  dans  son 
Cours  d' Antiquités  monumentales  (1),  détermine  les  carac- 
tères du  style  ogival  primitif,  depuis  1 160  environ  jusqu'à 
1 300 ,  en  ces  termes  :  1  °  les  trèfles  à  feuilles  arrondies  ;  la 
première  galerie  en  donne  un  exemple  :  2°  les  quatre-feuil- 
les ,  qui  diffèrent  des  trèfles  en  ce  qu'elles  ont  quatre  lobes 
au  lieu  de  trois  ,  forment  le  dessin  de  la  galerie  supérieure 
et  d'une  partie  de  la  grande  fenêtre;  3"  {es,  fleurons  cruci- 


(l)  V.  cet  ouvrage  4«  partie,  p.  233,  chapitre  9 ,  et  Atlas,  pi.  55, 
frîî.  2  .  3  .  4  .  5. 


(  237  ) 

[ères,  ou  les  qualres  feuilles  k  2)étales  lancéolées,  ornent 
la  toiture  j  4°  les  trèfles  à  feuilles  aiguës  et  lancéolées , 
surmontent  les  meneaux  de  la  grande  fenêtre j  5°  les  joma- 
cles,  espèces  de  pyramides  trop  peu  élevées  pour  pouvoir 
les  confondre  avec  les  clochetons  :  les  quatre  angles  de  la 
corniche  en  soutiennent  de  forme  hexagone,  du  dessin  le 
plus  délicat. 

M.  De  Caumont  a  observé,  et  on  peut  s'en  rapporter  à 
lui ,  qu'à  cette  période  ,  un  changement  remarquable 
s'est  opéré  dans  l'entablement  des  grands  édifices  par 
l'addition  des  balustrades.  On  commença,  au  XIP  siècle,  à 
couronner  les  corniches  de  ramj)es  en  pierre,  et  dès  le 
commencement  du  XIII^,  ces  balustrades  deviennent  l'ac- 
cessoire ordinaire  des  corniches  qui  terminent  les  murs 
principaux  à  l'extérieur.  Les  balustrades  peuvent  aider  à 
reconnaître  l'âge  des  monuments,  à  cause  des  modifications 
successives  de  leurs  formes.  Celles  qui  prédominent  au 
XIU^  siècle ,  sont  portées  sur  des  arcs  ogives  ou  sur  des 
arcs  trilobés ,  tantôt  à  colonnes ,  tantôt  sans  colonnes , 
quelques-unes  sont  ornées  de  trèfles  et  de  quatre  feuil- 
les (1).  Ces  observations  détaillées  sur  la  balustrade  ,  se 
rapportent  littéralement  à  la  première  galerie  du  Beffroi  ; 
de  plus  longs  détails  sont  inutiles. 

Les  fenêtres  sont  étroites  et  allongées  dans  l'architecture 
ogivale  primitive;  comme  elles  ressemblent  en  quelque  sorte 
à  un  fer  de  lance,  les  antiquaires  anglais  leur  ont  donné 
le  nom  de  lancettes  (2).  Les  fenêtres  du  Beffroi  ont  tout-à- 
fail  ce  caractère.  Il  y  a  encore  une  autre  particularité  à 
annoter  sur  les  caractères  généraux  de  cette  architecture 
ogivale  primitive,  c'est  que  presque  toujours  auXIIP  siècle, 
les  tours  ont  été  couronnées  par  des  flèches  octogones , 


(1)  Même  volume ,  p.  247,  248,  pi.  46,  fig.  11.  12  et  14. 

(2)  Ib. ,  p.  251  ,pl.  46,  fig,  16,  18, 


(  238  ) 

tandis  qu'antérieurement  les  tours  de  construction  romane 
étaient  le  plus  souvent  terminées  par  une  pyramide  à 
quatre  pans  ,  comme  le  toit  du  BelTroi. 

Amsi  le  caractère  général  de  l'art,  au  XIl«  siècle,  vient  à 
l'appui  de  l'authenticité  du  plan  de  Siger,  que  deux  autres 
faits  viennent  d'ailleurs  corroborer  ;  d'abord  l'opinion  de 
Sanderus ,  qui  dit  :  Anno  1171  «  Sigero  Vilain  castetlano 
gundavensi  conditam  quorumdam  scriiita  tradunt ,  et  en 
second  lieu  que  c'est  vers  cette  époque  que  la  commune 
de  Gand  reçut  pour  la  première  fois  une  sanction  écrite. 

Toutefois  nos  autres  historiens  se  contrarient  sur  la 
date  de  l'époque  de  la  fondation  du  Beffroi  :  Sanderus, 
qui  adopte  l'opinion  de  Gramaye ,  pense  que  ses  fonda- 
tions furent  jetées  en  1313,  et  qu'il  ne  fut  achevé  qu'en 
1380,  «  fastigio  anno  80  seqiiente  imposito.  »  Vaernewyck 
recule  la  fondation  de  quelques  années  ;  il  pense  qu'il  fut 
bâti  avant  le  XIV^  siècle,  du  temps  des  trente-neuf,  sans 
qu'il  en  connaissse  le  fondateur.  Ces  diverses  opinions  ne 
peuvent  être  regardées  comme  des  contradictions  :  quel- 
ques explications  vont  le  prouver.  Je  ne  pense  pas  qu'il 
puisse  y  avoir  de  doute  sur  la  date  de  la  fondation  du  Bef- 
froi :  il  est  facile  de  comprendre,  quelle  que  fut  la  puissance 
de  la  commune,  qu'un  monument  à  construire  sur  les 
vastes  proportions  que  Siger  avait  projetées,  demanderait 
un  temps  assez  long.  Survinrent  les  débats  sanglants,  qui 
s'élevèrent  dans  la  suite  entre  les  comtes  de  Flandre  et  la 
commune  ;  les  deniers  publics  durent  nécessairement  en 
souffrir  et  les  travaux  traîner  en  longueur.  Ces  travaux  ? 
commencés  et  abandonnés  à  diverses  reprises  ,  peuvent 
avoir  donné  lieu  aux  opinions  divergentes  des  écrivains, 
sur  la  date  précise  de  la  fondation  du  Beffroi.  Et  pour 
m'en  assurer  davantage ,  j'ai  parcouru  les  comptes  de  la 
ville  de  Gand  pendant  le  XIII^  siècle.  Malheureusement 
ces  comptes  ne  commencent  qu'à  l'année  1314  et  finissent 


(  239  ) 

à  1392,  et  leur  continuité  est  souvent  encore  interrom- 
pue; j'en  ai  extrait  ce  qui  regarde  les  travaux  exécutés 
au  Beffroi  :  ces  diverses  annotations  m'ont  semblé  trop 
curieuses  pour  ne  pas  les  mettre  sous  les  yeux  de  mes 
lecteurs  (1). 


(1)  Les  voici  : 

(Les  années  1314  ei  1316  ne  mentionnent  aucune  dépense  relative  à 
ce  sujet  :  les  années  1315,  17,  18  ,  19  et  20  manquent). 

—  An.   1321.  De  cost  van  den  werke  ant  Beelfroet  an  den  drake  te 
brekene  ende  an  den  burneput. 

Item  M'"  Janne  Van  Hacist  die  voer  te  Doornyck  omme  steene  tè 

copene  te  zicnrc  teire  en  van  28  urden  (cliaretccs). 

Item  M'"  Janne  van  650  voete  winkelen  ,  53-10-0. 

Item  van  den  selven  steenen  uten  sccpe  te  doene  ende  te  slepene  vor 
'tBeelfroot,  4-17-8. 

Item  Sente  Claren  van  't  crâne  die  men  daer  coclvt  ende  van  voerne  tôt 
vor  't  Beelfrot,  21-6-0. 

Item  Janne  Versaren  van  12  spcrren  ten  steilingen  en  van  2  gangen 
daer  men  de  steene  mede  uten  watre...  (manque),  7-0-0. 

Item  Gelnote  den  amman  van  ecn  nieuwen  reepe  aen  den  crâne,  10-0-0. 

Item  van  den  selven  steene  uten  scepe  te  doene  en  te  slepene  vor  't 
Beelfrot ,  8-5-0. 

Item  Janne  Kerspeele  van  Anlonien  van  3385  voete  ordunen  ,  271-0-0. 

Item  van  250  voetcn  winkelen  ,  20-0-0. 

Item  van  1  nauve  (  navée)  wercsteene,  10-0-0. 

Item  van  1  halvenauwe  bolisch,  8-0-0. 

Item  van  100  voeten  listen  ,  16-13-4.  v 

Item  van  500  voeten  stapsteene  ,0-9-40. 

Item  Kcrspele  ghelcend  up  veinsterwerk   van  den   Belfroete  7  pond 
groote  ,  maeken  280; pond. 

Item  van  al  desen  steene  uten  scepe  te  doene  en  te  slepene  ant  Bel- 
froit,  46  sch. 

Item  Arnould  van  Roybrouc  van  66  voederen  steenen  talne  in  den 
ouden  spikere  ,  55  sch. 

Item  Segere  van  Everghem  van  45  voederen  van  den  selven ,  37  schll, 
6  den. 

Item  van  Mesine  Spuurs  van  135  mudden  caix,  75-4-0. 
,      Item  Lievine  Sloven  van  280  en  16  1/2  mudden  calx  ,  139-17-0  ende 
12-16-8. 

Item  Balin  van  Eekerghem  van  4  1/2  mudden  cals. 


(  240  ) 

Les  détails  qu'on  vient  de  lire  au  renvoi ,  me  font 
croire  que  les  travaux  du  Beffroi  n'ont  été  repris  que 
vers  1321  :  c'est  à  cet  efifet  qu'on  fit  alors  l'acquisition 
d'une  grue  et  de  cables.  Les  pierres  dont  on  se  servit , 
vinrent  des  carrières  de  Tournay  et  d'Antoing  (couche  de 


Item  van  4  nieuwcn  zaekendaer  men  cale  inné  haelde,  0-13-0. 

Item  Andréas  den  gareelmaker  van  19  gareelen  ,  40-10-0. 

Item  Bertrame  van  sinen  dienste  van  calke  ende  gareelen  tontfane  bin- 
iien  dese  jare  ,  9-13-4. 

Item  Woutre  Pillinc  den  smed  van  smedewerken  an  den  crâne,  an  de 
cupene ,  an  eemers  ,  an  eene  ketine,  au  den  burneput ,  van  pondewerke  , 
van  amasse  van  2  merieu  die  trocken  an  dengien  van  ustalene  ende  slepene 
van  1  yserne  ketene  aen  den  reep  van  den  arethe ,  van  yserinneo  ant- 
boomen  van  steenhaken.... 

Item  van  4  grooten  hankers  die  legen  int  Beelfroit  en  5  yserine  balke 
in  de  veinsterc  van  baken  en  spikingen  (  somme  mise  en  total  avec  d'au- 
tres objets  ). 

Item  van  een  zeem  vate  daermen  2  cupen  afmaecte  van  andren  cupeii, 
eemers  ,  tinen  ,  berien  ,  steenberien  ,  tijnbome,  outine  hamers,  nieuwen 
cordewagene ,  van  bastinen  linen ,  van  leederen  ,  van  een  wielkine  ten 
engiene,  van  twee  sciven  van  smerre  ende  olien  an  den  crâne,  13-14-0. 

Item  van  buren  van  een  engiene  ,  3-5-0. 

Item  en  van  den  huus  te  rumene  dat  rppe  Bcclfret  boven  viel,  4-12-8. 

Item  5  garsoenen  van  savele  te  delvene  in  den  drake  van  onte  ende  ti- 
chelen  scoene  te  makene  ende  te  dragen  uten  den  drake  tote  in  de  halle 
ende  van  den  kelre  in  den  drake  te  rumene  ,  0-42-4. 

Item  van  havcssceden  die  men  dede  den  werklieden  van  den  Belfrote 
ende  Amerkine  die  de  merien  plcght  te  mennene. 

En  résumé  on  ajoute  :  «  'T  gonne  van  dat  d'ontfangcrs  hebbcn  utege- 
geven  van  den  vercke  dat  binnea  dese  jaere  is  gheworcbt  ant  Belfort, 
2161-8-1.  » 

—  Anno   1322.   Après   quelques   mots    effacés   on  lit  :  «  Belfroite 
van  de  drakene  te  brekene  etc. ,  »  et  après  quehjues  annotations  pour 
dépenses  ,  achat  et  transport  de  pierres  ,  on  continue  : 
,   Item  Meester  Van  Haelst  van  sinen  taswerke  van  den  Belfroite  binnen 
scven  maendcnnaer  alfoest,  8-6-6  grote ,  maken  355  pond. 

Item  Meester  J.  Van.  (sic)  94  dagen  die  hy  becft  ghewrocht  ant  Bel- 
Iroit,  elken  dag  3  grote  tornois  dat  comt  47-6-8. 

Item  Meester  J.  Van  Aelst  die  voer  sondag  voor  S.  Picterdagh  en 
S.  Pauwels  te  Vliedcrscle  omme  8  witte  wilde  stcene  de  repsen  af  tema- 


(241  ) 

Basccq)  ;  on  fit  cependant  emploi  de  pierres  de  Vliedersele, 
village  situé  au  pays  d'Alost.  Les  travaux  furent  poussés 
avec  vigueur  en  1322  et  1323 ,  et  deux  années  plus  lard  , 
ils  étaient  assez  avancés  pour  que  l'on  put  placer  sur  la 
tour  la  han-cloche  :  en  1327 ,  on  paya  la  dépense  pour  la 


kenc  van  dcn  verwelve  te  sienre  teere  ende  van  dat  de  steene  costen  ende 
van  bringene  te  Ghend,  8-0-0. 

(Ce  Jean  Van  Aeist,  maitre-ouvrier,  travailla  durant?  mois  au  Beffroi)- 

Item  Kerspecle  van  Antonicn  van  320  vocten  cleenre  ordune  ,  29-10-0. 

Item  van  740  voetengroot  ord une,  59-0-50. 

Item  van  136  winkelen,  10-16-8. 

Item  van  310  V'"  stapsteene,  5-10-0. 

Item  van  50  wildene.... 

Item  van  desen  steene  ute  te  doene  en  's  koningsteene  van  61  naveen  , 
18-6-8. 

(  Les  mêmes  dépenses  ,  pour  livraison  de  matériaux  etc. ,  et  pour  jour- 
nées, se  répètent  pendant  toute  Tannée,  semaine  par  semaine.) 

—  Anno  1323.  (On  a  côté  à  cette  année  les  journées  de  travail ,  la  li- 
vraison de  matériaux,  comme  brigues,  pierres,  fer,  etc. .  pendant  15 
semaines  ,  et  s"clevant  à  3834-0-0). 

—  Anno  1324.  Item  van  den  werke  dat  ghcwroclit  es  binnen  dese 
jare  aen  de  hnnclocke  ant  Beelfort  ende  an  den  zetel  daer  de  banclocke 
hanct,  690-11-6. 

—  Anno  1325.  Item  van  den  werke  ant  Beelfroet,  an  dalle,  an  scepen- 
liuus  van  dcr  keure  en  van  ghedeele,  70-16-7. 

—  Anno  1326.  Nihil. 

—  Anno  1327.  Some  van  den  vverke  dit  ghewrocbt  es  ant  Beellort 
mettren  veinstren,  185-16-1. 

(Dans  un  double  du  compte  de  cette  année,  ces  ouvrages  sont  spécifiés  : 
«  Some  van  de  werke  ant  Beelfort  te  deckene  en  de  veinstren  te  makene, 
185-16-1.  n 

—  Anno  1328.  (  On  a  émargé  pour  le  Beffroi,  y  compris  les  travaux 
exécutés  à  la  halle  et  riiôtelde-ville  ,  255-16-5.  ) 

—  Anno  1329,  30  ,  31  et  32.  Nihil. 

— Anno  1333.  Somme  van  den  werke  antBeelfroit  van  den  craene  afte 
doene,  46-6-1 1. 

—  Anno  1334.  Somme  van  den  werke  datghcwrocht  es  binnen  desen 
jare  an  de  bcrders  te  makene  daer  men  naer  hauwen  sal  steenen  an  de 
molen  van  't  Beelfrot ,  4-5-0. 

—  Anno  1335.  Nihil.  >  »<   "> 


(  242  ) 

couverture  d'une  partie  de  la  toiture,  et  il  paraît  qu'en 
1333  tous  les  grands  travaux  étaient  achevés,  puisque 
l'on  descendît  la  grue.  Les  dépenses  cotées  à  l'année  1334, 
nous  induisent  à  croire  que  les  pierres  de  taille  étaient 
posées   sur   l'ouvrage  à  peu  près  en  brut ,  et  qu'on  les 


—  Anno  ]33G.  Somme  van  dcn  werke  dat  binnen  desen  jareghewrocht 
es  ant  Beelfort  metten  stofTen  van  dcn  steene  diere  ghecocht  sijn  ,  en 
daer  de  roketiers  van  3  roken  vêle  ghelt  up  ebben  ende  die  si  leveren  al  te 
metten  werke 9461-12-9. 

—  Anno  1337.  Somme  van  den  wcrckc  dat  ghcwroclit  es  ant  Beelfort 
mits  dcn  steene  diere  toegliccocht  sijn  en  mits  den  taschwerke  datter 
ghehouwen  es  omme  op  te  settene  van  dcn  avant  pryse  gerrjoelen  dat 
men  lieet  gotieren  ende  manne  diere  staen  en  staen  sullen,  2479-89. 

—  Anno  1338.  Somme  van  den  werckeomt  Beelfroit  ende  berne  camere 
met  dat  hiin  glieleent  es  npleveren  ,  199-17-4. 

,  —  Anno  1339.  Somme  van  den  wercke  an  den  stoel  daer  de  ban-clocke 
in  lianget ,  26-0-0; 

—  Somme  van  den  vvercke  an  de  stoel  daer  scepenc-c\oc\.&  ende  de 
i>ïcercclocke  in  lianglu-n  ,  39-2-9. 

—  Annisl340,  41,  42.  43,44,45^46,47,48,  49,  1352  ,  53,  54,  ne 
mentionnent  aucune  dépense.  Les  années  1350  et  1351  manquent. 

—  Anno  1355.  Somme  ant  Beelfroit,  90-11-1. 

—  Anno  1356.  ISihil. 

-iiv*î^  Anno  1357.  Van  den  vvercke  ant  Beelfroit ,  5-4-5. 

—  Anno  1358,  59,  60,  61  et  62.  Nibil. 

—  Anno  1363.  (On  travailla  long-temps  cette  année  au  Befl'roi  :  mais 
les  travaux  consistèrent  surtout  en  travaux  d'achèvement  et  de  réparation 
pour  la  ferai I le  ,  etc. 

On  y  mentionne  une  dépense  pour  lobjct  suivant  :  «  De  cost  van  dcn 
vvercke  an  de  loegien  daer  de  ^vachters  in  legghen  up  Sinte  Niclaes 
turre.  » 

—  Anno  1364.  Nihil. 

—  Anno  1365.  Van  den  Beciforte  endekamerenuit  wulhuus,  55-5-10. 
(On  ne  spécifie  rien.) 

—  Anno  1 366.  Van  den  wercke  an  de  halle  ant  Beclfoert  en  ant  garen- 
huus,  199-8-7.  (Sans  détails.  ) 

—  Anno  1367,  1368.  Kihil 

—  Anno  1369.  Werckcn  ant  wulhuus  Beelfroit  385-5-7. 

—  Anno  1370  à  1371.  De  cost  van  dcn  clocke  an  Beelfort  ende  huur- 
clocke  in  de  11'"  maend 


(  243  ) 

façonnait  ensuite  :  d'ailleurs  c'était  une  manière  de  Irayaiî- 
1er  adoptée  dès  le  temps  les  plus  reculés.  En  1336  et  1337, 
on  exécuta  encore  des  travaux  considérables ,  surtout 
d'embellissement  pour  les  gargouilles  et  les  statues  qui 
devaient  orner  la  tour. 

En  1339,  on  parle  des  dépenses  faites  pour  la  cloche 
dite  des  échevins,  schepene-clocke.  Durant  les  vingt-quatre 
ans  qui  suivent,  les  travaux  furent  presque  nuls  :  en  1363, 
on  travailla  long-temps  au  Beffroi ,  mais  ce  ne  fut  que 
pour  son  entrelien  ;  je  dois  fixer  l'attention  des  lecteurs 
sur  la  dépense  portée  en  compte  cette  année,  pour  les 
réparations  faites  aux  cabines  des  veilleurs  de  nuit ,  qui  se 
tenaient  à  cette  époque  sur  la  tour  de  S'-Nicolas. 

A  ce  que  je  sache  aucune  pièce  ne  fait  mention,  avant 
1370,  d'une  cloche  intitulée  huur-clocke ,  littéralement 
la  cloche  à  heures  ;  ne  serait-ce  pas  à  cette  année  qu'on 
devrait  rapporter  le  premier  établissement  d'une  horloge 
à  la  tour?  Au  reste,  en  1376  et  1377,  on  dépensa  des 
sommes  considérables ,  pour  ce  temps ,  à  cause  de  cette 
même  cloche  ou  horloge. 

Diericx  ,  au  vol.  2  ,  p.  61  ,  de  ses  Mémoires  sur  la  ville 
de  Gand ,  prétend  que  la  plus  ancienne  pièce  où  il  soit 


....  (La  livraison  de  quelque  sapins  et  d'autres  bois.) 

—  Anno  1372.  Van  der  hallene  cnde  Bcelfroet,  37-7-9^ 

—  Anno  1376.  Van  dcn  Beelfoorte  en  huurcclockc,  9664-0-14. 

—  Anno  1377.  Dit  sijn  de  coste  van  den  vvercke  binnen  dese  jare  ele 
ghesommecrt  op  't  sine. 

Eerst  van  den  Beelforte  ende  liuurclocke,  14394-11-11. 
Van  den  drake  ,  van  den  appelé  ende  van  den  huese  ,  2322-0-0.  (On 
n'entre  dans  aucun  détail.) 

—  Anno  1380.  Item  van  der  huerclocke  ,  0-11-8. 

—  Anno  1381.  Niliil. 

—  Anno  1382.  An  d'huurclocke,  3  sch. 

—  Anno  1386.  89,  90 et  92.  Niliil.  (Les  autres  années  du  XIII<=  siècle 
manquent.). 


(  244  ) 

parlé  du  Beffroi,  est  un  acte  de  l'an  1376.  Le  fait  que  je 
viens  de  citer ,  prouve  que  c'est  une  erreur  :  j'ai  fait  faire 
des  recherches  infinies  aux  archives  de  la  ville  pour  retrou- 
ver cette  pièce,  qui  contient  plusieurs  détails  intéressants, 
mais  dont  quelques  passages  ont  été  mal  copiés  :  elles  ont 
été  infructueuses,  elle  ne  se  trouve  pas  au  registre  indi- 
qué. Au  dire  de  Diericx,  cet  acte  contiendrait  la  soumis- 
sion de  construire  à  neuf  la  partie  supérieure  qui  menaçait 
ruine.  Je  n'y  lis  rien  de  pareil  ;  je  vois  dans  la  copie  qu'il 
en  donne  (vol.  2  de  ses  Mémoires^  p.  61 ,  note  1),  que  cer- 
tains Jean  et  Nicolas  Van  Akerne  s'obligent  vis-à-vis  de  la 
ville  de  Gand  à  suspendre  la  cloche  à  heures ,  et  à  con- 
struire la  toiture  de  la  manière  déterminée  dans  l'acte 
même  ;  <t  aise  van  der  huer-clocken  hanghene  boven  int 
Belfroit ,  ende  eene  cappe  te  maeckene  in  der  manieren 
hier  naer  verclaert.  »  Il  est  vrai  que  plus  loin  on  mentionne 
qu'il  faudra  employer  u  de?i  ouden  stoel  als  soo  verre  als 
profitelic  es,  »  mais  il  n'en  résulte  pas  que  la  partie  supé- 
rieure menaçât  ruine  et  bien  moins  qu'il  existât  un  toit. 
Il  est  facile  de  se  rendre  compte  de  l'erreur  dans  laquelle 
Diericx  est  tombé  ,  si  l'on  considère  qu'il  n'avait  pas  con- 
naissance des  comptes  de  la  ville ,  d'où  il  résulte  évidem- 
ment qu'à  la  date  de  1376  ,  la  tour  du  Beffroi  n'était  pas 
encore  achevée. 

Cet  acte  contient  quelques  explications  sur  la  forme 
de  la  toiture ,  qu'il  est  bon  de  signaler  :  elle  était  divi- 
sée en  deux  parties,  dont  la  plus  élevée  formait  un  tube 
octogone ,  haut  de  28  pieds  et  large  de  21.  Chaque 
pan  du  toit  devait  avoir  une  lucarne  ou  fenêtre ,  et  il 
fallait  que  le  toit  fût  très-large,  car  il  était  exigé  qu'on  le 
construisit  de  manière  à  ce  que  les  eaux  pluviales  pus- 
sent tomber  au-delà  des  murs  extérieurs,  «  ende  cjhehulaet 
waeteren  ten  hutersten  cante  van  den  mure.  »  Pour  la 
main-d'œuvre,  les  frères  Van  Ackerne  n'avaient  demandé 


'{  245  ) 

que  Irente-huit  livres  de  gros.  Selon  le  manuscrit  intitulé 
Boek  van  jnenwrien  der  stad  Gend  (aux  Archives  de  la 
Flandre  orientale),  ce  ne  fut  qu'en  1380  que  la  toiture  du 
Beffroi  fut  achevée.  A  cette  époque  cependant,  tous  les  tra- 
vaux n'étaient  pas  iinis,  car  en  1410  et  141 1 ,  il  fut  fait  un 
accord  avec  Jan  Van  der  Donckt  pour  plusieurs  ouvrages 
de  maçonnerie,  évalués  à  la  somme  de  110  livres  de  gros; 
il  fallut  également  faire  des  échafaudages.  Cette  année, 
plusieurs  sommes  sont  portées  en  compte  pour  la  ferraille, 
la  livraison  de  briques  ,  leur  transport  sur  la  tour,  etc.,  et 
pour  ouvrages  exécutés  à  la  charpente  en  dehors  de  la 
tour.  En  1413,  on  fit  des  réparations  à  l'horloge,  an  't 
orloij  up  't  Beelfroet.  En  1451 ,  les  échevins  acquirent  de 
l'abbé  de  S -Pierre  une  cloche,  pour  le  Beffroi  :  elle  fut 
payée  à  raison  de  trente-deux  escalins  par  cent  livres, 
payables  en  trois  termes.  Celte  cloche  était  celle  dont  on  se 
servait  pour  le  couvre-feu  et  pour  l'appel  à  l'ouvrage. 
Jusqu'à  l'année  1455  ,  les  comptes  ne  parlent  que  de  frais 
d'entretien  ;  on  mentionne ,  cette  année  ,  quelques  frais 
de  réparation  pour  la  demeure  de  l'horloger,  qui  se  trou- 
vait au  Beffroi  (1).  En  1457,  Boudin  Van  Wittevelde  reçut 
dix  escalins  pour  des  écussons  (aux  armes  de  la  ville) 
qu'il  fit  et  plaça  sur  le  toit  au-dessus  du  cadran,  et  l'on 
avança  quelqu'argent  à  Jean  Van  Wechelen  sur  l'entre- 
prise qu'il  avait  faite  de  construire  une  nouvelle  horloge 
et  un  nouveau  cadran  (2).  L'année  suivante,  le  même 
Boudin  Van  Wittevelde,  peintre,  reçut  cinq  escalins  pour 
avoir  peint  en  rouge  la  nouvelle  horloge ,  et  l'on  paya 


(1)  De  cost  up  't  Beelfroit  in  thuus  daer  de  orloymeester  vont 

(2)  —  Anno  1457.  Item  ghegheven  en  betacit  Meester  Janne  Van 
Wechelen,  op  zyn  werc  dat  hy  ghenomen  lieeft  te  makene,  te  wetene,  een 
nieu  orloy  ende  eenen  wysere  ten  orbueie  van  deser  stede ,  van  grooten 
en  dicten  naer  't  begryp  en  verclaers  van  eene  bewerpe  daer  af  zynde  van 
clken  100  ponden  ghewicht.  27  sch.  9  den.  (Comptes  de  la  ville). 


(  246  ) 

Jean  Van  Wcchclen  pour  l'horloge  qu'il  avait  faite  et  qui 
pesait  7822  livres,  sur  le  pied  marqué  dans  la  note,  et 
en  outre  il  reçut  deux  livres  et  demi  pour  un  nouveau 
marteau  qu'il  fit  à  l'usage  de  l'horloge  (1).  Enfin  le  peintre 
Van  der  Meersch  reçut  six  livres  pour  avoir  exécuté  des 
blasons  sur  le  toit,  au-dessus  d'un  des  cadrans,  et  un 
ouvrage  en  peinture  représentant  les  quatre  évangélistes. 
Quoiqu'il  n'entre  pas  ici  dans  mon  sujet  de  parler  du 
dragon  qui  surmonte  la  tour,  nous  ne  pouvons  passer  sous 
silence  quelques  passages  des  comptes  de  la  ville  où  il  est 
parlé  d'un  monument  quelconque,  intitulé  i^rae^e^,  dra- 
gon. On  en  fait  surtout  mention  à  l'année  1321  et  1377  :  si 
l'on  se  tenait  rigoureusement  à  la  signification  du  mot 
dragon,  Draeke ,  si  on  l'isolait,  on  pourrait  supposer  que 
ces  dépenses  ont  été  faites  pour  le  dragon  qui  surmonte 
le  Beffroi.  Mais  si  l'on  ne  fait  pas  abstraction  des  circon- 
stances qui  l'accompagnent ,  il  est  impossible  de  se  mé- 
prendre sur  la  signification  réelle  de  ce  mot  :  or,  on  parle 
de  démolition  du  Draekene ,  du  sable  qu'on  avait  enlevé 
au  Draekene ,  de  tuiles  qu'on  devait  en  extraire  ;  cela 


(1)  —  Ànno  1458.  Item  gliegheven  bî  laste  albovcn  Boudin  Van  Wit- 
ievelde,  schildere,  van  dcn  nicuwen  horloge  deser  voermclde  stede  toebe- 
hoorende,  te  schilderne  root,  van  zynen  dienste  en  werke  aen  dcn  15 
décembre  anno  58,  5  schell. 

Item  ghegheven  ende  betaelt  Meester  Van  Wechelen,  ter  causen  van 
dennleuwen  horloge  ende  cenen  wysere  die  hem  ten  orbiirevan  der  stede 
ghemaekt  van  grootten  en  dictcn  naer  't  begryp  van  cenen  bewerpe  daer 
afzijnde,  weghende  t  voorzcyde  horloge  met  die  er  anclceft  7822 pont.... 

Item  gegeeven  itn  beveclen  van  scepenen  dcn  vornoemden  Meester 
Janne  Van  Wechelen  ,  van  cenen  nieuwcn  hamerc  te  leverrie  om  te  ma- 
Uene  dienen  ter  huereclocke  antBeelfroyt,  Mcghende  245  pont,  te  2  den. 
komt  2  p.  10  den. 

Item  Biaise  Van  der  Meersch.  schilder.  van  drien  schilden  vanwapenen 
te  makcne  up  t  scaelgcdak  an  't  Beeli'royt  boven  den  wysere  ende  van  den 
niakene  de  schildcrie  van  dcn  selve  wyze  metten  vicr  evangelisten  ende 
diener  ancleeft,  in   t  gheclc  6  pond. 


(  247  ) 

peul-il  s'appliquer  au  dragon,  à  ce  monument  fanlaslique? 
Certainement  non  ,  et  la  preuve  évidente  en  est  fournie 
par  ces  mêmes  comptes;  car,  en  l'année  1321 ,  on  paie  les 
intérêts  du  capital  dû  pour  achat  d'une  maison  et  terrain 
nommée  le  Dragon  (1).  Cette  maison  était  située  en  face  de 
la  maison  échevinale,  rue  Haute-Porle. 

Le  même  vague  entoure  donc  toujours  l'origine  de  notre 
dragon,  et  les  pièces  qui  auraient  répandu  quelque  jour 
sur  son  origine,  ont  apparemment  disparu.  La  seule  men- 
tion que  nous  ayons  rencontré  et  qui  se  rapporte  directe- 
ment au  dragon,  est  de  l'année  1445;  la  ville  paya  alors 
à  Nicolas  Van  der  Meersch  la  somme  de  douze  livres  de 
gros  pour  dorer  le  dragon  ;  à  Jean  Borchman ,  dix  livres 
de  gros  pour  réparations  au  Dragon,  van  den  Draeckene 
te  vermakene ,  et  trente-deux  livres  à  Jean  De  Bysere,  et  à 
Nicolas  Butsaert  pour  le  descendre  et  le  remonter  (2), 

Les  comptes  postérieurs  de  la  ville  ne  mentionnent  plus 
que  des  dépenses  pour  entretien  du  Beffroi  :  en  1441  , 
Jean  De  Schepper  fit  plusieurs  projets  pour  élever  sur  le 
BejBfroi  trois  guérites  pour  les  veilleurs,  ivacht-hussekens. 

Ce  mot  ne  peut  êlre  pris  dans  un  autre  sens,  car  à  la  date 
de  1442,  le  receveur  de  la  ville  porte  en  compte  certaine 
somme  pour  la  bâtisse  d'une  nouvelle  chambre  au  Beffroi. 


(1)  —  Anno]321.  Utegegevcn  van  husen  ende  erve  dat  de  stede  liecft 
gliecocht. 

Tecrsten  ghaven  d'ontfangcrs  S.  Symons  Papen  kindren  van  liuse 
ende  erve  dat  nien  hiet  in  den  Drake  ende  van  50  schcll.  parasjse  tjars 
die  de  steden  hemlieden  sculdigh  was  elcs  jars  evelicke  staende.  55  pon- 
den  groote  maken  2200  ponden  (payements). 

(2)  Item  Claes  Van  der  Meersch  van  zynen  taschwercke  van  den  vergnl- 
dene  van  den  vaenkins  ende  draeckc  op  't  Beelfroyt,  van  der  levcringcn 
ende  hanghedade  ,  12  pond  groote. 

Item  Janne  Borchman  van  den  drake  te  vermakene  ,  10  pond  groote. 
Item  Janne  De  Bysere  ende  Clacyse  Butsaert  van  den  selven  draeke  op 
onde  afte  doene .  32  pond  groote. 


(  248  ) 

En  15-43,  les  réparations  qu'on  dut  faire  à  la  toiture  de 
la  campanille,  furent  achevées  :  elle  était  plus  élevée  que 
l'ancienne  et  telle  qu'on  la  voyait  à  l'année  de  la  date  de  la 
confection  du  manuscrit,  où  ce  fait  se  trouve  consigné  (1). 
Ce  même  manuscrit  rapporte  qu'en  1552,  le  carillon  subit 
des  changements  (2). 

En  1684,  le  Beffroi  se  trouvait  dans  un  état  de  dégra- 
dation si  avancé  que  les  magistrats  y  firent  exécuter 
des  travaux  importants.  Liévin  Crul,  prêtre  et  archi- 
tecte, reçut  ordre  de  faire  le  dessin  du  Beffroi,  tel  qu'il 
existait  alors ,  nous  l'avons  reproduit  au  n°  2  de  la 
planche:  la  vue  est  prise  du  côté  qui  fait  face  à  la  place  du 
Lion  d'Or.  On  peut  se  convaincre  par  son  inspection  qu'on 
suivit  le  plan  de  Siger  dans  sa  distribution  extérieure,  à 
une  légère  différence  près,  jusqu'à  la  corniche.  La  partie 
supérieure  est  une  lourde  imitation  du  plan  primitif,  et 
à  l'exception  des  quatre  clochetons,  elle  est  bâtie  en  bois, 
et  n'offre  aucun  caractère  architectural  bien  arrêté  :  il  n'y 
avait  point  de  galerie  au-dessus  de  la  corniche  ni  sous  le 
carillon  ,  et  au  lieu  d'une  flèche,  la  campanille  était  sur- 
montée d'une  poire.  Des  blasons  entouraient  le  cadran  de 
l'horloge ,  qui  était  beaucoup  plus  petit  que  celui  que 
nous  y  voyons  maintenant ,  et  au-dessus  de  ce  cadran  il  y 

(1)  Item  in  ditjaer  enrle  sccpendom  van  Gillis  De  Baenst  was  de  cappe 
van  't  Beelfroet  {jhedaen  ende  hooge  gheresen  gVielijc  mon  die  nu  siet 
ende  de  draeke  al  nieuwe  verghult  ende  weder  op  ghestelt. 

Iteni  in  die  voornoemde  jacr .  was  de  clocke  ghenaemt  Roelandt  op- 
ghewonden  int  nieuwe  werk  op  sente  Baerbelen  dach  ende  "t  nieuwe 
voorslach  dat  sclioene  om  hooren  en  spelende  opt  voornoemde  voorslach 
veele  scone...  liedekens  naer  den  tijd  van  de  jaere. 

(2) Item  in  ditjaer  ende  scependom  voornoemd,  in  de  maent  van  april, 
was  doen  maeken  een  nieuwe  accort  op  de  weckcrs  van  den  huercclocke 
opt  Beelfroet,  ende  in  elcken  weckere  doen  maeken  eenen  clepele,  ende 
was  by  den  selven  scepenen  geordoneert  dat  nicn  teiken  sondaegh  ende 
heiichdagghe  daer  op  beyhaerden  souden  van  den  12  tiucren  tôt  den  een 
hiieren  op  de  noene. 


(  249  ) 

avait  une  ouverture,  dont  les  parois  étaient  découpées  par 
des  colonnes  en  faisceau.  A  cette  époque,  ou  songea  à  bâtir 
la  partie  supérieure  en  pierre;  il  semble  même  que  l'or- 
donnance en  avait  été  portée  le  5  février  1685  :  Crul  fut 
chargé  d'en  faire  un  plan,  qui  se  trouve  aussi  aux  archi- 
ves de  la  ville;  d'après  son  évaluation,  la  main-d'oeuvre 
et  les  matériaux  n'auraient  coûté  que  1780  livres  de  gros. 
Cet  architecte  reçut  cinquante  livres  de  gros  pour  ses 
deux  dessins  et  pour  l'inspection  qu'il  avait  prise  du 
Beffroi  (1).  Le  projet  de  Crul  n'eut  point  de  suite,  quoiqu'à 
cette  époque  nous  rencontrions  un  projet  d'adjudica- 
tion, pour  la  livraison  de  dix  pilastres  en  pierre  de  Ba- 
leghem  ou  de  Hautem;  en  septembre  1689,  on  descendit  le 
dragon. 

Au  XVIII"'  siècle ,  la  charpente  du  Beffroi  se  trouvait 
dans  un  très-mauvais  état:  en  1726,  il  fallut  étabbr  de 
nouveaux  tréteaux  pour  les  bourdons,  et  d'après  l'inscrip- 
tion qui  se  trouve  sur  l'un  des  sommiers ,  cet  ouvrage 
fut  exécuté  par  le  maître  charpentier  Speelman ,  et  coûta 
600  livres.  Mais  ces  réparations  partielles  n'avaient  porté 
qu'un  demi-remède  au  mal;  car,  en  1771,  les  magis- 
trats songèrent  à  faire  au  Beffroi  des  travaux  assez  con- 
sidérables,  pour  que  l'autorité  souveraine  crut  devoir  y 
intervenir.  La  démobtion  de  la  campanille  était  déjà 
entamée  ,  quand  les  magistrats  reçurent  de  la  part  du 
prince  Charles  Alexandre  de  Lorraine  ,  le  14  août  1771, 
une    lettre  par  laquelle  il  leur  demandait  compte   des 

(1)  Comptes  de  la  ville,  1684  à  1G85,  folio  168  v».  Bctaelt  aen  heer 
Livinus  Crul,  pb'':,  de  somme  van  vyftich  pondeii  fji-ootcn  over  syne  de- 
voiren  ende  diensten  ghedaen  infc  visiteeren  van  het  Belfort  ende  het 
maekcn  van  twee  modelien  van  den  selven  torre  ,  cène  (  lacune  )  ende 
dandere  op  de  manière  hoe  den  voornoemden  torre  opghemaekt  soude 
mouten  worden  in  stecn,  volghens  dordorinautic  van  .den  5  ici).  1685  en 
quittantic.... 

(Levcren  en  raaeken,  in  ailes  1780-0-0). 

17 


(  250  ) 

démolitions  qu'on  avait  l'inlenlion  de  faire  au  Beffroi , 
s'enquérant  du  plan  d'après  lequel  la  restauration  serait 
faite  et  de  l'avis  des  différents  architectes  consultés  à  cet 
égard;  entre-temps  le  prince  fit  arrêter  tout  ouvrage  ulté- 
rieur. Par  suite  de  cette  missive,  non-seulement  on  consulta 
les  architectes  de  la  ville  de  Gand.  mais  même  ceux  de  Bru- 
ges et  d'Alost.  Les  architectes  T'Kindt,  Simoens,  Malfeson, 
Maelcamp,  Vispoel,  de  Gand,  De  Wynsdun,  de  Bruges,  et 
d'autres  personnes  de  l'art,  constatèrent  l'état  de  la  tour. 
Ils  crurent  qu'il  fallait  attribuer  les  crevasses  (assez  légères) 
que  l'on  remarque  à  l'une  des  fenêtres,  à  ce  que  l'échafau- 
dage qui  supportait  les  cloches  ,  était  appuyé  avec  ses 
jambes  de  force  sur  des  corbeaux  faisant  corps  avec  les 
murs,  et  que  par  les  efforts  qu'il  fallait  faire  pour  la  mise 
en  branle  des  cloches ,  les  murs  s'étaient  quelque  peu 
disloqués;  ils  constatèrent  en  outre  que  la  maçonnerie  en 
pierres  de  taille,  faite  d'après  l'ancienne  méthode,  était 
excellente  et  le  mortier  de  la  plus  grande  dureté,  mais 
que  le  mauvais  état  de  la  charpente  exigeait  la  démolition 
de  la  campanille.  Ces  experts  s'assurèrent  en  même  temps 
que  la  partie  supérieure  de  la  tour  avait  été  frappée  par 
la  foudre,  et  qu'une  partie  de  la  toiture  sous  le  dragon 
avait  pris  feu. 

Le  22  août,  ces  avis  furent  transmis  au  prince  de  Lor- 
raine ,  et  les  magistrats  portèrent  à  sa  connaissance  que 
^ce  ne  fut  que  sur  le  rapport  d'experts  qu'ils  avaient  résolu, 
le  3  août,  de  faire  démolir  la  poire  au  sommet  de  la  tour 
et  d'enlever  le  dragon  ;  que  cette  démolition  était  exécutée 
de  moitié  au  reçu  de  la  lettre  de  S.  A.,  mais  que  cette 
démolition  ne  devait  aller  que  jusqu'à  la  lanterne  où  sont 
suspendues  les  cloches  du  carillon.  Là-dessus  intervint  la 
permission  du  prince  de  faire  les  travaux  nécessaires  pour 
la  conservation  de  la  tour,  sous  la  direction  de  l'archi- 
tecte TRindt. 


(  251  ) 

Depuis  celte  époque  ,  la  forme  de  la  tour  esl  restée  la 
même  ;  en  1815,  on  fut  forcé  de  rebâtir  un  de  ses  angles 
qui  menaçait  ruine.  Ce  fut  l'architecte  Van  de  Capelle  que 
l'on  chargea  de  cette  besogne. 

A  défaut  de  date  précise  de  la  construction  du  Beffroi ,  les 
ornements  qui  entourent  ses  fenêtres  à  lancettes,  révéle- 
raient l'époque  de  leur  construction  et  prouveraient  en 
même  temps  que  l'on  y  employât  un  temps  assez  long  ,  et 
que  sans  perdre  de  vue  le  plan  primitif,  les  architectes  y 
ajoutèrent  les  ornements  adoptés  par  l'art  de  l'époque  où 
ils  vivaient  :  en  effet,  nous  avons  vu  sur  le  plan  primitif 
les  fenêtres  à  lancettes  privées  de  tout  ornement,  tandis 
que  le  Beffroi  offre  ces  mêmes  fenêtres  ornées  de  voussures 
canelées,  et  soutenues  par  des  colonnes  appliquées  sur  les 
parois  des  ouvertures;  caractère  distinctif  des  fenêtres  du 
XIIP  au  XIV^  siècle  (1).  Quelques-unes  de  ces  fenêtres 
existent  encore  du  côté  de  S'-Bavon  et  de  l'hôlel-de-ville  ; 
les  autres  sont  ou  claquemurées  ou  tout-à-fait  défigurées 
par  des  réparations  subséquentes. 

L'aspect  de  cette  tour  est  imposant  par  sa  masse  (2):  la 
maçonnerie  est  en  grand  appareil ,  les  pierres  sont  de  la 
couche  de  Basecq ,  le  ciment  de  la  meilleure  qualité,  et 
aucune  trace  de  décrépitude  n'apparait  encore  sur  ses 
murs  noircis  par  les  siècles.  Quelques  écrivains  prétendent 
que  la  tour  est  plus  large  du  haut  que  du  bas  :  cette 
erreur ,  car  c'en  est  une  ,  provient  d'un  passage  de  Vaer- 
newyck  ,  que  l'on  a  mal  interprété.  Cet  écrivain  ne  pré- 
tend pas  que  le  bâtiment  lui-même  soit  plus  large  du 
haut  que  du  bas  ,  mais  uniquement  que  la  corniche 
dépasse  le  mur  de  trois  pieds  :  ses  termes  sont  explicites  (3). 


(1)  Voyez  De  Caiimont,  4""  partie,  pag.  251  ,  pi.  50-,  n"  18. 

(2)  Voyez  le  n»  3  de  la  planche. 

(3)  Voyez  Varnewyck  ,  Historié  r<m  Beh/is  ,\).  228,  tome  II. 


(  252  ) 

Il  existe  encore  une  des  statues,  qui  ornaient  autre- 
fois les  angles  de  la  tour;  elle  se  trouve  posée  au-dessus 
de  la  corniche  ,  mais  il  est  impossible  d'en  saisir  le 
caractère. 

Le  rez-de-chaussée  qui  a  une  issue  du  côté  de  la  rue  de 
S*-Jean,  est  couvert  d'une  voûte,  ainsi  que  la  salle  qui  est 
au-dessus,  où  l'on  entre  du  côté  opposé;  ces  deux  places 
n'ont  aucune  communication  directe.  La  voûte  de  cette 
dernière  est  portée  par  huit  voussures,  qui  pi'ennent  nais- 
sance à  un  mètre  de  terre ,  et  peuvent  s'élever  de  7  à  8 
mètres;  les  murs  y  sont  de  l'épaisseur  de  2'",20.  C'est  dans 
Tune  de  ces  salles  qu'était  le  secret,  lieu  où  l'on  déposait 
les  chartes  et  privilèges  des  Gantois  (1). 

L'escalier  en  spirale  se  trouve  dans  l'angle  droit ,  qui 
fait  face  au  Marché  au  Beurre ,  il  a  236  marches;  de  là  il 
prend  une  direction  oblique  jusqu'à  la  première  galerie. 
En  somme,  du  bas  à  la  troisième  galerie,  on  compte  386 
marches,  hautes  de  16  centimètres,  ce  qui  fait  à  peu  prés 
62  mètres  d'élévation  ;  et  à  partir  de  ce  point  jusqu'au 
sommet  du  dragon  ,  il  peut  y  avoir  10  mètres,  ce  qui  en 
tout,  donnerait  à  la  tour  une  élévation  de  72  mètres  ou 
242  pieds  de  Gand, 

L'intérieur  de  la  tour  est  divisée  en  plusieurs  étages  ; 
au-dessus  de  la  seconde  salle  voûtée  ,  se  trouve  celle 
nommée  la  forge ,  et  plus  haut  la  chambre  des  sonneurs. 
En  cet  endroit  le  diamètre  de  la  tour,  à  partir  du  Marché 

(1)  Ce  fut  en  1400  quoE  y  transféra  les  chartes  ;  en  1432,  on  en  dressa 
un  nouvel  inventaire  :  à  cet  elfet,  deux  couiniissaires  nommés  par  les  éche- 
vins,  joints  aux  deux  grands  doyens  et  à  un  certain  nombre  des  plus  no- 
tables bourgeois,  s'y  rendirent  le  26  juin.  Cet  inventaire  fut  renouvelé 
le  10  juillet  1525  ,  ainsi  que  le  9  août  1532.  En  1539  ,  les  trois  clefs  du 
secret  furent  remises  entre  les  mains  de  trois  chefs-doyens  de  corpora- 
tions ,  et  le  28  août  de  la  même  année ,  on  mit  à  mort ,  après  une  horrible 
torture,  Liévin  Pien ,  échevin  durant  l'année  1538,  parce  qu"il  avait 
donné  accès  au  secret. 


(  253  ) 

au  Beurre  vers  ia  rue  S»-Jeau,  est  de  l^'^j^O,  et  du  côlc 
de  S'-Iîavon  vers  S'-lNicolas,  il  n'est  de  1 1'",90.  Du  côté  de 

^S'-Bavon,  le  mur  est  le  plus  épais,  il  a  2"',50,  tandis  que 
des  autres  côlés^  il  varie  de  2  mètres  à  2  mètres  12  cen- 
timètres. 

On  voit  que  Tinlention  primitive  des  architectes  était 
de  réunir  les  quatre  clochetons  par  une  voûte  :  huit 
corbeaux  ont  été  placés  dans  les  murs,  où  l'on  a  ma- 
çonné des  rainures  assez  profondes  pour  y  recevoir 
les  voussures  de  la  voûte.  Enfin  les  angles  sont  forte- 
ment liés  entre  eux,  par  les  pierres  qui  donnent  nais- 
sance aux  quatre  clochetons ,  de  manière  que  le  plafond 
présente  une  forme  octogonale.  A  la  chambre  de  Ihor- 
loge  ,  derrière  les  cadrans ,  les  murs  ne  sont  épais  que 
d'un  peu  plus  d'un  mètre,  et  l'on  y  remarque  encore 
parfaitement  l'espèce  de  fenêtre  ,  qui  surmontait  le 
cadran  dans  le  dessin  que  nous  en  a  laissé  l'abbé  Crul. 
Celte  ouverture  est  large  d'un  mètre  trente-huit  centi- 
mètres ;  elle  est  entourée  de  voussures  fortement  entail- 
lées sur  les  parois,  et  qui  forment  une  espèce  d'avant- 
corps.  Le  mur  sur  lequel  les  cadrans  actuels  sont  placés , 
est  de  construction  très-moderne. 

L'état  de  la  charpente  en  général  est  mauvais,  et  exigera 
des  réparations  considérables  d'ici  à  peu  de  temps ,  toute- 
fois sans  qu'il  semble  nécessaire  de  devoir  penser  à  une 
démolition  complète,  comme  le  bruit  en  a  couru  dans 
le  public.  Ce  serait  un  acte  de  vandalisme  gratuit  et 
inutile!  les  frais  énormes  qu'occasionnerait  cette  démo- 

',  lition,  dépasseraient  de  beaucoup  la  somme  qu'exigerait 

i   la    reconstruction  de    la   partie    supérieure   du   Beffroi. 

I  Ces  motifs  doivent  rassurer  les  amis  des  arts  et  des 
anciennes  institutions  de  la  patrie  contre  un  pareil  at- 
tentat, qu'on  ne  pourrait  envisager  aujourd'hui  comme 
un  simple  acte  de  barbarie  indigne  de  notre  époque  , 


(  254  ) 

mais  comme  uïie  stupidité  qui  ne  trouverait  son  pen- 
dant que  dans  la  destruction  de  cette  antique  demeure 
des  seigneurs  d'Utenhove  ,  si  bénévolement  octroyée  , 
et  contre  laquelle  vient  de  protester  la  chùle  de  frêles 
murailles  ,  indignes  qu'elles  se  sentaient  de  remplacer 
des  murs  qui ,  pendant  six  siècles  et  demi  ,  bravèrent 
les  intempéries  de  nos  climats  ! 

A.  V.  L. 


g^'?'^Q-1f'T 


(  255  ) 


^Inalgses  critiques  y(Dut)rage0. 


Biographie  universelle  des  Musiciens  et  Bibliographie  géné- 
rale DE  LA  Musique,  par  F.  J.  Fétis,  maître  de  chapelle 
du  roi  des  Belges,  et  directeur  du  Conservatoire  de 
Bruxelles.  Bruxelles,  Leroux,  libraire-édileur.  t.  I-IV, 


1835-1837,  gr.in-S". 


L'Africain  Marlianus  Capella  que  Grolius  commenta  à 
l'âge  de  quatorze  ans,  et  qu'il  se  garda  bien,  sans  doute, 
de  relire,  une  fois  parvenu  à  l'âge  mur,  a  réservé  à  la  mu- 
sique un  chapitre  où  l'on  a  cru  long-temps  que  toutes  les 
finesses  de  l'art  étaient  encloses ,  mais  qu'un  écolier  qui 
aurait  suivi  seulement  huit  jours  les  leçons  de  M.  Fétis, 
regarderait  en  pitié.  Ce  chapitre,  destiné,  entre  autres, 
à  recommander  le  langage  des  sons  mesurés,  ne  vaut  pas, 
suivant  moi,  ce  qu'en  dit  le  maître  de  M.  Jourdain  -.La 
guerre  ne  vient-elle  pas  d'un  manque  d'union  entre  les 
hommes,  et  si  tous  les  hommes  apprenaient  la  musique^  ne 
serait-ce  pas  le  moyen  de  s'accorder  ensemble  et  de  voir 
dans  le  monde  la  paix  universelle?  Y o'ûà  pourquoi  l'on 
aura  appelé  conservatoires  les  écoles  musicales,  attendu 
qu'elles  sont  des  moyens  de  conservation  et  d'harmonie. 
Si  cela  est,  et  j'incline  aie  croire,  aujourd'hui  que  la  paix 
est  une  nécessité  impérieuse,  absolue,  inexorable,  aujour- 
dhui  (ju'il  n'y  a  que  la  concorde  qui  puisse  nous  sauver. 


(  256  ) 

ô  mes  amis ,  apprenons  tous  la  musique  et ,  pour  lu  bien 
savoir,  courons  vite  chez  M.  Fétis. 

Je  ne  dirai  pas  que  M.  Fétis  est  un  de  nos  habiles  musi- 
ciens, comme  on  dit  de  MM.  tel  et  tel  qu'ils  sont  de  nos 
meilleurs  poètes,  de  nos  savants  les  plus  profonds,  attendu 
que  le  vague  et  la  banalité  de  ces  éloges,  n'expriment  rien 
et  font  mal  au  cœur;  mais  je  ne  craindrai  pas  d'affirmer 
qu'il  n'y  a  pas  en  Europe  d'écrivain  qui  possède  mieux  que 
M.  Fétis  la  littérature  et  la  théorie  de  la  musique  et  qui  en 
ait  mieux  étudié  l'histoire  et  les  moindres  particularités 
curieuses.  Ajoutez  à  cela  que  M.  Fétis  est  un  homme  d'es- 
prit et  de  goût,  jugeant  aussi  bien  d'un  poème  que  d'une 
partition,  d'une  question  de  philosophie  et  d'histoire  que 
d'une  difficulté  de  contre-point,  et  que  grâces  à  son  rare 
talent  d'observation  et  à  son  commerce  journalier  avec  les 
premiers  artistes  et  gens  de  lettres  de  tous  les  pays,  il  s'est 
fait  une  provision  d'aperçus,  de  remarques  et  d'anecdotes, 
capables  de  défrayer  cinq  ou  six  académies. 

Je  voudrais,  pour  moi,  pouvoir  imprimer  la  conversa- 
tion de  M.  Fétis  et  que  ma  mémoire  me  reproduisît  fidèle- 
ment les  traits  heureux  qui  assaisonnent  ses  récits.  Je  serais 
certain  d'en  composer  un  bon  livre  qui  ferait  son  chemin 
dans  le  monde,  sans  lettrines,  lettres  tournures,  fleurons, 
vignettes  ni  autres  illustrations,  parce  que  tout  ce  luxe  me 
semble  un  peu  puérile,  ensuite  parce  que  la  mode  de  ce 
clinquant  littéraire  sera  bientôt  passée;  enfin,  motif  peut- 
être  plus  solide  ,  parce  que  je  serais  tenté  de  crier  à  ceux 
qui  se  font  imprimer  : 

Avant  d'être  illustrés ,  soyez  d'abord  illustres. 

D'ailleurs,  Slonsieur  Racine  et  Monsieur  Despréaux  (ainsi 
parle-t-on  dans  la  Revue  de  Paris)  ont  été  à  la  postérité 
sur  papier  commun ,  dénué  de  culs-de-lampe  et  d'interca- 
lations  gravées,  tandis  que  le  plus  beau  vélin  et  les  plan- 


(  257  ) 

chcs  d'Aliamet  et  de  Longueil  n'ont  pu  préserver  de 
l'obscuiilé  Dorât  et  ses  pareils.  Tony  Johannot  et  Madou 
sauront-ils  mettre  d'autres  médiocrités  à  couvert  des  mé- 
pris de  l'avenir? 

Revenons  à  M,  Fétis  que  de  tels  mépris  n'atteindront 
jamais.  En  lisant  ses  ouvrages,  on  s'aperçoit  qu'il  remonte 
constamment  aux  sources,  qu'il  n'écrit  pas  sur  ouï-dire, 
que  ses  moindres  assertions,  il  va  les  chercher  scrupu- 
leusement dans  les  originaux  et  qu'il  a  voué  un  culte  par- 
ticidier  à  l'érudition  allemande.  L'Allemagne  est,  en  effet, 
la  terre  classique  du  savoir,  et  la  France  commence  à  y 
taire  des  incursions  fréquentes.  Mais  les  Français,  après 
s'être  demandé  jadis  si  un  Allemand  pouvait  être  un  hom- 
me d'esprit  et  avoir  affecté  un  dédain  charmant  pour  tout 
ce  qu'on  pensait  au-delà  du  Rhin,  entraînés  par  une  de 
ces  réactions  si  fréquentes  chez  eux,  semblei;it  donner  dans 
un  excès  contraire,  en  feignant  d'admirer  tout  ce  qui  est 
d'origine  germanique  et  en  offrant  leur  propre  gloire  en 
holocauste  à  leurs  estimables  voisins. 

La  Biofjra'phie  universelle  des  Musiciens  est  un  livre 
qui  tient  à  la  fois  de  l'Allemagne  et  de  la  France  ;  de 
l'Allemagne,  par  l'étendue,  la  solidité,  l'exactitude  des 
recherches;  de  la  France,  par  l'élégance  de  la  forme,  la 
méthode  et  l'économie.  Cet  ouvrage  suppose  une  lecture 
immense  et  une  étonnante  capacité  d'appréciation.  Les 
gens  du  monde  qui,  avant  tout,  veulent  être  amusés,  ap- 
prendront avec  plaisir  qu'un  grand  nombre  des  articles 
qu'il  renferme,  indépendamment  du  mérite  bibliogra- 
phique et  musical,  attachent  par  l'intérêt  des  détails  et  la 
fidélité  des  portraits. 

Quand  M,  Félis  mit  au  jour  son  mémoire  sur  l'ancienne 
musique  belge,  lequel  n'était  qu'un  embryon  de  l'ouvrage 
considérable  qu'il  poursuit  maintenant  avec  tant  de  zèle 
et  au  prix  de  tant  de  sacrifices,  j'eus  l'impertinence  de  lui 


(  258  ) 

adresser  une  lettre  (1)  toute  farcie  de  renseignements  dont 
il  n'avait  pas  cru  devoir  faire  usage.  M.  Fétis,  dans  la 
préface  de  sa  Biographie,  s'est  contenté  de  répondre  poli- 
ment que  je  m'étais  trompé  sur  tous  les  points ,  ce  qu'il 
prouvait  doctement,  en  établissant  que  j'avais  pris  cythara 
pour  une  guitare,  au  lieu  d'un  hit/i  (2). 

M.  Fétis  a  parfaitement  raison  :  cythara  est  bien  décidé- 
ment un  luth,  et  je  ne  sais  où  j'avais  la  tête  en  m'imaginant 
non  pas  lui  apprendre,  mais  lui  rappeler  quelque  chose. 
M.  Fétis  aurait  pu  me  punir  plus  sévèrement,  il  ne  l'a  pas 
pas  fait  et  je  l'en  remercie.  Voyez  pourtant,  son  indul- 
gence m'a  gâté.  Comme  ces  écoliers  que  la  douceur  de  leur 
maître  rend  plus  audacieux,  je  retombe  dans  une  faute 
première,  et  compulsant  mes  notes,  je  vais  essayer  d'ajou- 
ter quelque  chose  à  son  travail. 

Ce  rôle  de  la  mouche  du  coche  me  plaît,  quoique  j'en 
sente  la  nullité.  Si  je  me  trompe  encore,  M.  Fétis  voudra 
bien  m'absoudre;  je  lui  promets  au  surplus,  foi  d'homme 
d'honneur,  de  ne  plus  dire  que  cythara  est  xxwe guitare! 

Je  débute  par  la  Belgique,  rien  de  plus  naturel  :  à  Bel- 
gis  principùmiy  et  je  cherche  dans  la  Biographie  des  Mu- 
siciens les  noms  d'ARsoLo  et  de  Fer:na.nd,  qui  tous  deux 
appartenaient  à  la  Flandre.  Je  ne  les  y  trouve  pas  ,  et 
pour  y  suppléer,  je  consulte  un  manuscrit  de  Custis,  inti- 

(1)  Elle  a  été  insérée  d'abord  dans  le  Recueil  eiicijclopédique  belge,  et 
iirée  à  part  à  une  douzaine  d'exemplaires,  puis  elle  a  reparu  avec  des 
changements  à  la  suite  du  Dimanche.  M-  Delmottc  a  daigne  la  citer 
souvent  dans  sa  Notice  sur  Roland  De  Lattre. 

(2)  Pag.  CCXXIV  de  cette  môme  préface,  M.  Fétis  semble  trouver 
mauvais  que  j'aie  appelé  Erycius  Puteanus  De  Put,  mais  j'ai  tiré  cette 
orthographe  des  manuscrits  originaux  de  l'auteur,  qui  devait  savoir  com- 
ment s'écrivait  son  nom.  C'est  fin  reste  une  véritable  vétille.  Dans  une 
dissertation  sur  V Amour  des  Belges  pour  les  livres,  publiée  par  la 
Société  des  Bibliophiles  de  Belgique  ,  j'ai  redressé  ce  que  j'avais  avancé 
sur  Louis  Van  Walbeke,  quoique  M.  Fétis  se  borne  à  signaler  la  traduc- 
tion vicieuse  de  lylluna. 


(  259  j 

lulé  Fama  Brugensis,  cl  j'y  lis,  au  tome  1,  page  66,  ce 
qui  suit  : 

«  Olaus  Nicasius  Arnoldi  ,  religiosus  cœnohii  Dunensis , 
musicus  fuit  excellons ,  qui  anno  1476  publicavit  opéra 
quœdam  musicalia  8  vocum ,  quœ  Caroli  Pugnaci,  Be/ga- 
rumprincipi  dedicavit.  Obiit  1472,  in  cœnohio  de  Bavens- 
herga,  diœcesis  Andomarensis.  » 

Tome  II,  p.  182  :  »  Joannes  Ferna-Ndi's  ,  Brugensis,  Caroli 
Fernandi  f rater ,poeta  et  musicus  stipendiarius  Caroli  }  III, 
Galloruni  régis,  apud  quam  maximo  in  pretio  fuit,  scrij)sit 
carminé  horas  S.  Crucis  et  cofnpassiom's  beatœ  Virginis, 
Parisiis  excusas;  —  de  S.  Joanne  Baptista  lihrum  unum; 
—  Orationes,  epistolas  et  epigrammata  varia,  teste  Tri- 
themio.  »  Ce  Jean  Fernand  n'avait  pas ,  au  reste ,  été  négligé 
par  A.  Le  Mire  ni  par  Paquot;  celui-ci  mentionne  aussi 
son  frère  Charles  (l). 

M.  Fétis  n'en  est  encore  qu'à  la  fin  de  la  lettre  G;  il 
n'oubliera  pas  que  Sanderus  parle  de  Hugbald  ,  moine  de 
S'-Amand ,  et  de  Philippe  Hertog  ,  dans  ses  Scriptores 
Flandriœ  (2),  et  que  Sweertius  et  Foppens  ont  consacré 
quelques  mots  à  Corneille  Verdo^^gk,  comme  Tombeur  (3) 
a.  Jean  Van  der  Elst,  qui  a  un  article  dans  son  livre. 

Celui  d'Adenez  peut  facilement  se  compléter  mainte- 
nant, grâces  aux  publications  récentes  de  MM.  P.  Paris, 
Francisque  Michel,  Van  Hasselt  et  de  quelqu'un  que  je 
n'oserais  nommer. 

Imperialis  rapporte  que  Juste-Lipse,  auquel  j'aurais  été 
charmé  de  mettre  en  main  un  rebec  ou  une  ilute  douçaine, 
avait  une  si  forte  aversion  pour  la  musique,  que  la  sym- 
phonie lui  causait  une  mécancolie  extrême  (4). 

(1)  MwytiEloyiu,  1».  111  ;  Paquot,  11, 102,  104. 

(2)  Pag.  70  et  140. 

(3)  Prov.  Bclg.  S.  Amjiislini,  p.  144. 

(4)  Vigncul-Marvillc  ,11,  82. 


(  260  ) 

Jean  Van  Loe,  prieur  d'Evergem,  dédia  à  Jacques  Slu- 
TERius ,  d'Herzele ,  son  poème  de  Sainte-Cécile ,  palrone  des 
ménétriers.  Cette  dédicace  se  lit  dans  les  poésies  mêmes 
de  Sluperius  (Anvers,  1575)  avec  quelques  autres  pièces 
en  vers  et  une  lettre  en  prose  (1).  Dans  cette  dernière, 
Sluperius  reçoit  l'honorable  qualification  de  Smmnus  mu- 
sicoru7n  patrojius. 

L'épître  en  vers  contient  ce  passage  : 

Te  duce,  mellifluos  sacra  modulanttir  in  cède 
Et  résonant  cantus  organa  nostra  procut, 

Te  sine  phonascus  nihil  est,  sympltonia  friyet 
Nec  fluil  e  rauco  (jutture  dulce  mclos. 

Un  autre  versificateur  latin ,  Wallius,  dont  les  poésies 
ont  paru  également  à  Anvers  en  1657,  adressa  à  Antoine 
BiESBROEGQ  un  poème  (2)  :  Tenitorii  Cortracensis  summo 
mmjistratui    ah   actis ,    MusiCiE    artis   cultori  ,  sodalith 

S.  ÇtS£X\Am  PR^FEGTO  CREATO. 

Georges  d'Halewin  (sa  grammaire  latine  n'est  pas  une 
chimère,  quoique  M.  Van  Hulthem  fait  présumé)  avait  écrit 
sur  la  musique,  au  rapport  de  Sanderus  (3). 

Dans  le  The  saur  iprincipum...  par  alipoinena  d'Eytzinger, 
auteur  dont  j'ai  fait  le  sujet  d'un  mémoire  pour  l'Acadé- 
mie ,  on  trouve  un  morceau  intitulé  :  In  tabulas  musicas 
Gerardi  Nodiam  Ârnhemiensis  carmina  Eytzingeri ,  Cor- 
nclii  Valerii  Ultraj.  et  Joamits  Vampelli  (4). 

Antoine  Meyer,  neveu  de  rhislorien,  avait,  suivant  Pa- 
quot  (5) ,  laissé  en  manuscrit  :  Responsio  pro  musica,  coram 
natura  judice. 

C'était  un  grand  musicienqu'Albert  do  Louvain ,  soixanle- 

(1)  Pag.  310-315. 

(2)  Pag.  94-96. 

(3)  De  Gandav. ,  p.  46'. 

(4)  Pag.  383-384. 

(5)  Pag.  11,  37. 


(  261  ) 

troisième  évêque  de  Liège ,  dont  Gilles  d'Orval  raconte 
l'histoire  romanesque  (1). 

Si  je  mets  le  pied  en  France ,  je  m'aperçois  que  Desgo- 
TEAUx  a  été  passé  sous  silence.  Et  pourtant  Descotea.ux 
poussa  la  flûte  allemande  au  plus  haul  point  de  perfection, 
ainsi  que  la  prononciation  du  chant ,  suivant  les  règles  de 
la  grammaire  et  la  valeur  des  letti-es.  Ce  musicien,  qui  floris- 
sait  sous  la  Régence,  obtint  cet  éloge  de  Marais  (2)  :  suivant 
la  clef  des  Caractères ,  La  Bruyère  a  voulu  peindre  Des- 
coteaux, en  crayonnant  son  amateur  de  tulipes. 

Pierre  Guedron  ,  plus  favorisé  que  lui ,  a  obtenu 
une  mention  assez  longue  de  M.  Fétis.  Ce  Guedron  est 
nommé  plusieurs  fois  dans  la  Confession  de  Sancy.  Il  pa- 
raît que  ce  n'était  pas  seulement  un  compositeur  et  un 
chanteur,  mais  encore  un  convertisseur.  Nicolas  Rapin, 
dans  son  élégie  sur  la  mort  du  poète  Desportes,  où  il  in- 
troduit à  l'enterrement  de  cet  auteur  tout  ce  qu'il  y  avait 

à  Paris  de  personnes  considérables  dans  les  lettres  et  les 
beaux-arts,  dit: 

Et  cumMalducto,  Gcedro,  cantore  venis  (3) 

Ce  vers  a  de  plus  l'avantage  de  conserver  le  nom  du 
chanteur  Mauduit. 

Guedron  est  cité  dans  la  Confession  avec  Du  Courroy, 
qui  a  une  bonne  notice  dans  le  recueil  de  M.  Fétis. 
Guill.  Du  Peyrot.  auteur  des  Antiquités  de  la  chapelle  et 
oratoire  du  roi  de  France  (4),  dit  qu'il  était  sous-maître  de 
chapelle  du  roi  Henri  IV.  LQPerroniana  le  loue  fort,  ce  qui 
a  donné  occasion  à  l'éditeur  du  Journal  de  Henri  III  (5) 

(1)  Hist.  litt.  de  Ui  France,  XVIII,  434. 

(2)  Journal  dans  la  Revue  rétrospective,  mars  1837,  p.  438. 

(3)  Opéra,  Paris,  1610  ,  in-4»,  pag.  49. 

(4)  Paris,  1645,  I,  483. 

(5)  Cologne  (Bruxelles.  Foppeiis)  ,  II,  296 


(  262  ) 

de  soupçonner  que  Du  Courroy  était  un  des  gens  em- 
ployés par  Du  Perron  à  mettre  en  musique  les  paroles 
qu'il  rimait  pour  en  faire  des  airs  de  cour,  avant  l'an- 
née   1596. 

Clément  Marot  nous  a  transmis  le  nom  de  Michel  Hult, 
joueur  de  flûte  du  cardinal  de  Lorraine.  Je  prends  la  liberté 
de  le  recommander  à  M.  Fétis;  voici  ce  qu'en  écrit  le  poète 
de  Bladame  Marguerite  : 

Lors  ton  Michel  n'a  eu  teste  endormye  , 
Ains  est  couru  veoir  la  solemnité  , 
Et  a  sonné  à  fluste  et  chalemeye , 
Tout  à  ton  loz ,  honneur  et  dignité  ,  etc. 

J'omets  le  reste  du  Chant  pastoral  à  Monseigneur  le  car- 
dinal  de  Lorraine,  qui  ne  pouvait  oiiyr  nouvelles  de  Michel 
iluLT,  Parisien,  son  joueur  de  flustes. 

Si  j'en  avais  le  loisir,  j'extrairais  de  Clément  Marot  quel- 
ques autres  mentions  de  musiciens. 

Marais,  invoqué  tout-à-l'heure,  parle  d'une  famille  de 
musiciens,  du  nom  d'YTiER,  qui  pendant  300  ans  y  exerça 
son  art.  Le  dernier  était  mort  en  1722  et,  selon  Marais,  il 
y  en  avait  un  autre  du  temps  de  Villon  (1).  Il  est  vrai  que 
dans  le  grand  testament,  Villon  laisse  un  legs  a  Maistre 
Ythier ,  Marchant.  Le  Diicliat  est  persuadé  que  Marchant 
est  le  nom  et  non  pas  la  profession  du  personnage ,  et  il 
n'en  fait  pas  un  musicien  (2). 

Ces  notes  décousues  ne  sont  déjà  que  trop  longues. 
Je  les  terminerai  par  une  petite  nouvelle  littéraire,  c'est 
que  parmi  les  acquisitions  que  j'ai  faites  en  octobre 
1829,  à  la  vente  de  la  bibliothèque  de  l'abbaye  du  Parc, 
j'ai  acheté  un  manuscrit  du  XII^  siècle,  contenant  divers 
ouvrages  de  médecine  en  vers  et  en  prose  ;  à  la  fin  est  le 


(1)  Journal,  Revue  retrosjicciivc,  fév.  1837,  p.  314. 

(2)  OEuv.  de  F.  Villon,  La  Haye ,  1742 ,  p.  6  ,  101  ,  180. 


(  263  ) 

traité  de   Ribarctus   do  jjulsihus ,  lequel  est  suivi   d'un 

hymne  : 

E\ja  yaudeal  ccclesia 
Fidelium  nova  mater,  etc. 

lequel  est  accompagné  de  la  musique  en  notation  saxonne. 
Il  est  probable  qu'elle  est  l'ouvrage  d'un  moine  belge.  J'en 
appelle  à  M,  Félis.  Oh!  si  je  n'avais  pas  traduit  cythara  par 
guitare! 

Le  baron  De  Reiffenberg. 


1°  De  Leeuw  van  Vlvenderen,  door  H.  Conscience.  Ant- 

werpen  ,  1839  (3  vol.  in-S"). 
2°  RiGHiLDE  oic  Episodes  de  l'histoire  de  la  Flandre  ,  au 

ONZIÈME  SIÈCLE,  jjf^^'   Coo?na?is ,    aîné.  Gand,    1839  (2 

vol.  in-8°). 

Aucune  production  littéraire  n'est  plus  propre  à  l'illus- 
tration de  l'histoire  que  le  roman  historique.  Et  si  une 
série  d'ouvrages  de  ce  genre  ,  au  style  chaleureux  et  aux 
formes  dramatiques ,  dont  les  sujets  seraient  pris  dans 
les  annales  de  notre  pays,  existait  chez  nous,  ils  contri- 
bueraient singulièrement  à  répandre  la  connaissance  de 
l'histoire  nationale  dans  toutes  les  classes  éclairées  ,  et  à 
entretenir  des  sentiments  de  patriotisme  et  d'indépen- 
dance. 

.  Walter  Scott  releva ,  aux  yeux  de  l'Europe  entière  , 
l'Ecosse  presqu'inconnue  avant  lui.  Sa  patrie  semble  re- 
prendre sous  sa  plume  magique  ,  l'éclat  des  époques 
héroïques,  dont  il  nous  a  laissé  des  tableaux  si  ravissants. 
La  Flandre  compte  déjà  quelques  écrivains ,  qui  ont 
I  traité  des  sujets  nationaux  avec  succès .  et  grâce  à  leurs 


(  264  ) 

écrits,  plusieurs  de  nos  héros  ne  sont  plus  ensevelis  dans 
l'oubli;  déjà  les  noms  de  De  Gouinck,  Artevelde,  Hem- 
byzc.  qui  défendirent  si  courageusement  l'étendard  de  la 
Flandre  ,  font  vibrer  le  cœur  de  tout  Belge. 

Parmi  les  romans  historiques  belges,  le  Lion  de  Flandre, 
de  M.  Conscience ,  occupe  sans  contredit  une  première 
place.  Ses  deux  premiers  ouvrages  (  Het  Wonderjaer  et 
Pliantazy)  lui  avaient  valu  beaucoup  d'honneur,  mais 
le  Lion  de  Flandre  qu'il  vient  de  publier,  l'emporte  de 
loin  en  mérite  sur  ses  productions  antérieures.  Aussi  le 
sujet  est-il  des  plus  beaux.  11  nous  retrace  cette  belle 
époque  où  la  Flandre  surgit  à  la  voix  de  De  Goninck  et 
de  Breydel ,  et  refoule  les  soldats  de  la  France  au-delà 
des  frontières  que  leur  esprit  d'usurpation  leur  faisait 
franchir. 

Le  plan  de  l'ouvrage  est  très-heureux.  Les  faits  histo- 
riques y  sont,  pour  ainsi  dire,  conservés  intacts;  et  l'in- 
trigue amoureuse,  qui  n'est  ici  qu'une  partie  accessoire, 
est  empreinte  d'un  délicieux  parfum  de  poésie.  Le  premier 
volume  contient  le  voyage  du  comte  Gruy,  de  Winen- 
dale  à  Gompiègne,  lorsqu'il  va  réclamer  contre  l'empri- 
sonnement de  sa  fille  Malhilde  ;  le  comte  de  Flandre  et  sa 
suite  y  sont  retenus  prisonniers  ,  et  le  roi  de  France 
s'avance  à  la  tête  d'une  forte  armée  dans  la  Flandre  ;  il 
fait  son  entrée  à  Bruges.  Dans  le  second  volume  sont 
décrites  les  exactions  des  Français  dans  tout  le  pays,  mais 
principalement  à  Bruges ,  où  De  Goninck  et  Breydel  se 
mettent  à  la  tète  du  parti  flamand.  Les  Clauwaerts ,  ou 
partisans  du  comte,  s'emparent  du  château  de  Maie; 
Ghatdlon  sévit  contre  eux  et  veut  se  maintenir  par  la 
force.  Les  Flamands  patriotes  quittent  la  ville  de  Bruges, 
et  s'assemblent  sous  l'étendard  de  Flandre  que  de  De  Go- 
ninck a  planté  à  S^'^-Groix,  où  l'éHte  de  la  nation  se  réunit 
Les  phalanges  flamandes  défont  l'armée  française  et  s'em- 


(  265  ) 

parent  de  la  ville;  Chatillon  échappe  à  peine  aux  dangers 
de  celte  journée.  Le  troisième  voluinc  nous  retrace  la 
levée  de  troupes  du  roi  de  France  ,  dont  l'armée  com- 
mandée par  le  duc  d'Artois,  s'avance  de  nouveau  vers  nos 
i'rontières.  Les  Flamands  marchent  à  sa  rencontre,  et  dans 
le  champ  de  Groeninge,  près  de  Courtrai,  se  livre  cette 
bataille  à  jamais  mémorable  ,  qui  délivra  notre  patrie  du 
joug  étranger. 

L'intrigue  amoureuse  ,  dont  les  chapitres  servent  de 
point  de  repos  entre  les  scènes  de  guerre  et  de  carnage , 
peut  se  résumer  en  ceci  :  Adolphe  de  Nieuwland,  écuyer 
du  comte  Guy ,  est  épris  de  la  jeune  Mathilde ,  fille  de 
Robert  de  Béthune ,  mais  i!  est  loin  d'oser  lui  déclarer  ses 
sentiments,  surtout  dans  les  circonstances  où  la  famille 
de  Dampierre  se  trouve  actuellement.  Dans  une  dispute 
de  Robert  et  de  Chatillon  ,  il  prend  le  parti  du  premier  , 
et  provoque  Gui  de  Saint-Pol  en  combat  singulier.  Adolphe 
reçoit  des  blessures  dangereuses  ;  il  est  transporté  dans  le 
château  de  Winendale,  où  pendant  le  voyage  du  comte  vers 
Compiègne,  il  est  laissé  aux  soins  de  Mathilde,  qui  devient 
à  son  tour  amoureuse  du  chevalier  courageux.  Survien- 
nent diverses  aventures.  Après  avoir  été  faite  prisonnière 
par  les  Français  ,  et  délivrée  dans  la  prise  du  château  de 
Maie  par  Breydel,  Mathilde  se  trouve  à  l'abbaye  de  Groe- 
ninge, lors  de  la  bataille  des  Eperons  d'or,  où  Adolphe  se 
distingua.  Celui-ci  finit  par  recevoir  de  Robert  de  Béthune, 
en  récompense  de  son  héroïsme,  la  main  de  sa  bien-aimée. 

Le  style  de  l'auteur  est  très-soigné,  mais  c'est  surtout 
dans  les  descriptions  qu'il  déploie  ses  plus  grandes  forces. 
Il  peint  admirablement  les  sites  pittoresques,  les  antiques 
châteaux  ,  les  ruines  et  les  vastes  forêts  de  notre  Flandre  ! 
Où  trouver  dans  notre  langue  des  narrations  plus  serrées , 
des  récits  plus  exacts  de  tournois ,  de  chasse  et  de  combats? 
Le  caractère  des  personnages  y  est  conservé  jusqu'à  la  fin: 

18 


(  266  ) 

la  dignité,  la  résignation,  dans  le  vieux  comte  Gui;  le  cou- 
rage et  la  droiture  de  chevalier,  dans  Robert  de  Bétliune; 
l'enthousiasme  du  patriote-guerrier  dans  De  Goninck. 

Soit  qu'il  décrive  ou  mette  ses  personnages  en  scène , 
descriptions  ou  dialogues  étincellent  d'esprit  et  de  force; 
sa  diction  est  toujours  analogue  au  sujet  qu'il  traite,  soit 
que  la  vengeance  l'anime  ou  que  les  sentiments  les  plus 
tendres  du  cœur  l'agitent. 


Le  second  roman,  dont  nous  donnons  le  titre  en  tête 
de  cet  article ,  est  de  M.  Coomans.  Il  retrace  une  époque 
de  notre  histoire,  qui  n'est  pas  moins  intéressante  ([ue 
celle  que  M.  Conscience  a  choisi.  Au  moyen-âge,  deux 
centres  de  mouvements,  deux  peuples  énergiques  habi- 
taient des  pays  limitrophes  sur  les  bords  de  l'Océan,  la 
Flandre  et  la  France.  Ces  deux  provinces  servaient  de  li- 
mites aux  deux  grandes  races  qui  couvrent  l'Europe,  la 
race  germanique  et  la  race  romane,  La  France  menaçait, 
depuis  l'usurpation  d'Hugues  Capet,  les  limites  germani- 
ques; mais  la  Flandre,  les  couvrant  de  son  large  bouclier, 
était  parvenu  à  les  faire  respecter.  Sous  l'époque  romaine,  la 
Belgique  et  la  Germanie  avaient  subi  le  joug  des  Romains; 
sous  les  rois  francs,  la  Gaule  et  l'Italie  courbèrent  le  front. 
Mais  depuis  le  morcellement  de  l'empire  de  Charlemagne, 
les  nations  romanes  voulurent  de  nouveau  s  étendre  vers 
le  Nord.  Ce  fut  au  XI^  siècle,  du  temps  de  Richilde,  que  ce 
froissement  se  fit  d'abord  sentir. 

Richilde,  comtesse  du  Hainaut,  après  la  mort  du  comte 
Baudouin ,  son  époux  ,  voulut,  en  qualité  de  tutrice  de  ses 
enfants,  retenir  les  rênes  du  gouvernement  de  la  Flan- 
dre, malgré  les  dernières  volontés  du  comte,  approuvées 
par  les  états  des  deux  pays,  qui  avaient  choisi  Robert  le 
Frison  pour  gouverner  la  Flandre   pendant  la  minorité 


(  267  ) 

du  jeune  comte  Arnould.  Richilde  employa  tous  les 
moyens  pour  étendre  son  pouvoir ,  envoya  ses  adminis- 
trateurs dans  le  pays  et  ne  respecta  point  la  décision  des 
états.  La  Flandre  se  ligua  contre  son  gouvernemçnt  des- 
potique, et  confia  le  pouvoir  à  Robert  le  Frison.  Richilde 
réunit  ses  feudataires,  et  soutenue  par  l'armée  de  France, 
que  commandait  le  roi  lui-même,  elle  s'avance  vers  les 
frontières  de  Flandre.  Dans  deux  mémorables  combats, 
livrés  les  21  et  22  février  1071,  les  armées  françaises 
furent  défaites ,  et  l'indépendance  de  la  Flandre  assurée. 
Nous  transcrivons  ici  la  page  145  du  second  volume,  oii 
l'auteur  dépeint  avec  l'élégance  du  romancier  et  la  véra- 
cité de  l'historien  les  batailles  de  Bavinchove  et  de  Gassel, 
batailles  aussi  glorieuses  pour  notre  pays,  que  celle  de 
Courtrai,  quoique  les  détails  en  soient  moins  connus,  elles 
héros  de  celte  journée  aient  été  moins  célébrés  :  «  Pendant 
que  Richilde  réussissait  à  entraîner  la  France  tout  entière 
dans  une  lutte  que  sa  tyrannie  avait  rendue  nationale, 
de  personnelle  qu'elle  était  dans  le  principe,  Robert  ne 
restait  pas  inactif.  Il  fortifiait  les  villes,  soulevait  les  cam- 
pagnes, exerçait  et  encourageait  les  troupes,  et  se  retran- 
chait dans  son  quartier-général  de  Gassel ,  où  il  formait 
barrière  contre  l'invasion.  Décidé  à  se  maintenir  sur  ce 
point,  qui  était  comme  les  Thermopyles  de  la  Flandre,  il 
fit  réparer  les  murs  de  la  ville  et  creuser  des  fossés  semi- 
circulaires,  garnis  de  tours  de  distance  en  distance.  Ces 
travaux  bien  défendus  devaient  présenter  à  l'ennemi  des 
obstacles  presqu'insurmonlables.  Mais  Robert  ne  bornait 
pas  ses  soins  à  la  défensive.  Il  savait  que  les  causes  popu- 
laires exigent  des  succès  prompts  et  décisifs  :  il  avait  l'am- 
bition d'attaquer  Fennemi  et  l'espoir  de  le  vaincre.  Les 
>milices,  s'inspirant  de  son  audace,  n'attendaient  que  le 
signal  du  combat.  Tout  ce  que  la  Flandre  comptait  de 
preux  chevaliers,  de  courageux  bourgeois  et  de   braves 


(  268  ) 

paysans  était  réuni  sous  la  bannière  de  ce  prince.  JNous  ne 
ferons  pas  l'énuméralion  des  \illes  et  des  districts  qui 
avaient  fourni  leur  contingent  à  l'armée  nationale,  parce 
qu'il  est  vrai  de  dire  que  le  moindre  hameau  y  comptait 
ses  représentants.  Nous  nous  bornerons  à  conjecturer  avec 
les  chroniqueurs  que  toutes  ces  forces  réunies  montaient  à 
environ  15,000  hommes,  y  compris  les  Anglais  d'Edgard, 
quelques  centaines  de  Hollandais  venus  de  la  Zélaude,  et 
les  Indépendants  de  Ghistelles,  qui,  à  cette  époque,  pou- 
vaient encore  être  regardés  comme  étrangers,  tant  à  cause 
de  leur  origine  danoise  que  de  leurs  mœurs  sauvages.  Un 
capitaine  moins  audacieux  que  Robert  n'aurait  peut-être 
pas  songé  à  opposer  ce  petit  nombre  de  combattants  à  des 
forces  quadruples  :  mais  après  avoir  calculé  toutes  les 
chances,  il  vit,  avec  le  coup-d'œil  du  génie,  que  le 
triomphe  était  possible ,  et  dès-lors  il  résolut  délivrer  ba- 
taille. Il  comprit  comme  par  instinct  que  si  la  gloire  des 
grands  conquérants  pouvait  se  décomposer,  on  y  trouve- 
rait plus  de  bonheur  et  d'audace  que  de  talent  et  de 
prudence. 

»Le  22  février,  avant  le  lever  du  soleil,  les  chefs  fla- 
mands se  réunirent  sous  une  vaste  tente  adossée  aux  mu- 
railles de  la  ville  presqu'au  sommet  du  mont.  Ils  y 
trouvèrent  le  prince,  qui  avait  passé  la  nuit  à  combiner 
ses  moyens  d'attaque,  de  compagnie  avec  Boniface,  Al- 
bert, Herman,  Wulfrid  et  Joseph  de  Knesselaere,  ses  amis 
intimes. 

>•  Les  chefs  électrisés  par  une  courte  allocution  se  sépa- 
rèrent à  la  hâte  pour  exécuter  le  plan  arrêté.  Lambert  de 
Bailleul  et  Baudouin  de  Nevele  se  mirent  à  la  tête  de  la 
cavalerie,  forte  de  800  hommes,  et  allèrent  se  placer  aux 
deux  ailes  du  champ  de  bataille.  Albert^  Henri  de  Loo  et 
Herman,  entourés  de  150  gentilshommes  armés  de  toutes 
pièces,  se  postèrent  au  centre,  en  avant  d'un  corps  de  trois 


(  269  ) 

mille  archers.  Derrière  ceux-ci'  Vinrent"' se'  ranger  2000 
piqiiiers,  soutenus  par  cinquante  cavaliers  nobles,  sous 
la  conduite  de  WuUrid.  Un  corps  de  3000  hallebardiers 
occupa  rextrême  droite,  où  Robert  se  rangea  avec  Joseph 
de  Knesselaere,  Gratien  d'Eecloo  et  Boniface  de  Cassel, 
Les  Indépendants,  conduits  par  Otton,  acceptèrent  volon- 
tiers la  mission  de  commencer  Fatlaque.  Edgard  et  ses  An- 
glais, appuyés  à  la  montagne,  formèrent  une  espèce  de 
corps  de  réserve,  destiné  à  secourir  ceux  qui  faibliraient 
les  premiers.  Ces  préparatifs  achevés,  Robert  cria  d'une 
voix  terrible  :  en  avant!  A  ces  mots  répétés  par  les  chefs, 
les  Flamands  s'ébranlèrent  et  descendirent  la  montagne 
au  pas  de  course.  En  moins  de  cinq  minutes  ils  atteignirent 
l'ennemi. 

»Tous  ces  mouvements  furent  exécutés  avec  une  promp- 
titude si  audacieuse  que  les  Français  n'eurent  pas  le  temps 
de  se  mettre  en  mesure  d'en  empêcher  le  succès.  Eustache 
de  Boulogne  et  Guillaume  d'Osbern,  qui  seuls  regar- 
daient l'expédition  comme  sérieuse,  s'étaient  aperçus  de 
bon  matin  de  l'activité  qui  régnait  dans  le  camp  opposé; 
mais  ils  l'attribuèrent  à  des  projets  de  retraite.  Instruits  des 
faibles  ressources  de  Robert ,  ils  ne  soupçonnèrent  pas  un 
instant  chez  ce  prince  la  résolution  de  présenter  le  combat 
à  une  armée  formidable  qui  comptait  dans  ses  rangs  la 
meilleure  cavalerie  de  l'Europe  et  des  milices  aguerries 
par  des  campagnes  glorieuses  en  Normandie  et  en  Gas- 
cogne. Ils  se  rendirent  auprès  du  roi ,  où  ils  trouvèrent 
Richilde,  l'évêque  de  Paris  et  quelques  seigneurs  de  la 
cour.  Ils  annoncèrent  que  les  Flamands  se  disposaient  à 
se  retirer.  Cette  nouvelle  parut  chagriner  vivement  Phi- 
lippe, qui  allait  reprocher  au  comte  de  Boulogne  de 
n'avoir  pas  attaqué  la  veille,  lorsqu'un  officier  vint  aver- 
tir le  général  que  les  Flamands  avançaient  au  lieu  de 
battre   en  retraite.  L'incrédulité,   puis  le  désordre  et  la 


{  270  ) 

terreur  succédèrent  à  ce  rapport  véritable.  Aussitôt  le 
tambour  bat,  le  clairon  sonne,  on  crie  aux  armes!  Les 
seigneurs  montent  à  cheval  et  parcourent  les  rangs  des 
soldats  étonnés.  Les  uns  s'éveillent  tout  engourdis  de  froid; 
les  autres,  abîmés  de  fatigue ,  s'efforcent  de  se  réunir  dans 
le  tumulte.  Une  partie  de  la  cavalerie  rassemblée  à  la  hâte 
se  précipite  en  avant  du  front  de  bandière;  dOsbern,  de 
Coucy  et  Philippe  d'Arcq  en  tête  soutiennent  le  premier 
choc.  Ces  guerriers  sauvent  l'armée  d'une  déroule  com- 
plète, car  les  sauvages  de  Ghistelles  et  les  archers  d'Albert 
ont  déjà  envahi  le  camp.  Le  choc  est  horrible!  Les  assail- 
lants font  des  prodiges  de  bravoure.  Mais  ils  sont  arrêtés 
devant  le  rempart  d'acier  que  présente  la  cavalerie  fran- 
çaise. En  vain  les  Indépendants  jetant  arcs  et  flèches,  y 
pénètrent-ils  pour  couper  les  jarrets  des  chevaux  ;  en  vain 
les  gentilhommes  flamands  chargent-ils  trois  fois  cet  esca- 
dron immobile  :  d'Osbern  et  les  siens  résistent  à  tant  d'ef- 
forts. Dans  l'entretemps  les  Français  s'arment ,  s'assemblent 
et  font  face  à  leurs  adversaires  ;  mais  ils  ne  peuvent  pro- 
fiter de  l'avantage  du  nombre,  parce  que  les  Flamands, 
serrés  en  épaisses  colonnes,  n'offrent  qu'un  front  étroit. 
Cet  ordre  de  bataille  aurait  été  fatal  à  ces  derniers  si  les 
Français  avaient  pu  les  envelopper  et  les  attaquer  de  flanc 
et  sur  les  derrières.  Il  n'en  arriva  pas  ainsi.  Comme  si  la 
surprise  avait  paralysé  leurs  mouvements,  les  troupes  du 
roi  et  de  Richilde  restèrent  en  place,  se  contentant  de 
combattre  et  de  mourir  avec  courage.  Elles  se  maintin- 
rent trois  heures  sur  la  défensive.  Après  avoir  éprouvé  des 
pertes  immenses ,  elles  firent  un  effort  pour  tourner  l'aile 
droite  des  Flamands.  Robert  qui  combattait  en  cet  endroit, 
se  précipita  avec  quelques  chevaliers  dans  un  vide  que  ce 
mouvement  opéra  sur  la  première  ligne.  Il  renversa  l'in- 
fanterie picarde  et  pénétra  jusqu'à  la  cavalerie  qui  en- 
tourait le  roi.  Edgard  jugea  que  le  succès  de  la  journée 


(271  ) 

ticpcnclait  de  celte  action  hardie  :  il  s'élança  à  la  tête  des 
Anglais  sur  les  pas  de  Robert.  L'attaque  fut  exécutée  avec 
tant  d'à-propos  et  de  vigueur,  que  les  Picards  ébranlés 
entraînèrent  dans  leur  fuite  et  les  troupes  qui   s'étaient 
détachées    du   corps  de  bataille  pour   envelopper  l'aile 
droite,  et  la  garde  de  Philippe.  Ce  prince  ne  songea  pas  à 
résister  plus  long-temps.  Il  tourna  bride;  sans  s'inquiéter 
du  sort  réservé  à  l'élite  de  son  royaume,  que  sa  légèreté 
et  la  cupidité  de  ses  courtisans  avaient  immiscée  dans  une 
querelle  étrangère,  il  prit  la  route  de  S'-Omer.  La  retraite 
honteuse  du  roi  entraîna  celle  de  toute  l'aile  gauche.  Ro- 
bert, vainqueur  de  ce  côté,  pouvait  à  son  tour  cerner  le 
reste  de  l'armée.  Mais  le  lion  de  Flandre  était  moins  heu- 
reux sur  un  autre  point.  Les  cavaliers  de  Lambert  de  Bail- 
leul  avaient  plié  devant  les  Hennuyers,  qui  écrasaient  le 
centre ,  où  les  archers  d'Albert  et  les  piquiers  de  VVulfrid 
perdaient  sans  cesse  du  terrain.  Richilde ,  dOsbern  et  le 
comte  de  Boulogne   inspiraient  à  leurs  troupes  une  ar- 
deur invincible;  le  jeune   Arnould  lui-même  paraissait 
être  devenu  homme  tout-à-coup;   renversé  deux  fois  de 
cheval ,  il  s'était  relevé  deux   fois  pour   se   jeter   au-de- 
vant de  sa  mère.  La  présence  de  Richilde  surtout,  son 
maintien  guerrier,  ses  éloges,   ses  reproches,  les  flèches 
qu'elle  laucait  elle-même,  faisaient  une  loi  aux  moins 
braves  de  ne  pas  fuir  la  mort  quand  une  femme  la  bra- 
vait. La  mêlée  était  générale  en  cet  endroit  ;  enfm,  après 
une  résistance  héroïque ,  Albert ,  son  fidèle  Olton ,  WuUrid, 
Henri  de  Loo,  Lambert  de  Bailleul  et  deux  ou  trois  cents 
autres  braves,  allaient  succomber  au  nombre.  Déjà  les 
Hennuyers  crient  triomphe!  Déjà  les  Flamands  ne  leur 
répondent  plus  que  par  les  imprécations  que  leur  arrache 
la  rage  ou  la  douleur.  Tout-à-coup  le  bailli  de  Cassel  se 
présente  avec  une  partie    de   l'aile   droite   victorieuse  : 
Gare  !  gare  !  Flandre  au  Lion  !  et  il  passe  sur  les  blessés  et 


(  272  ) 

les  cadavres,  se  jette  sur  reimemi ,  rarréle,  l'épouvante, 
le  force  de  reculer.  Les  Flamands,  un  moment   abattus, 
reprennent  courage;  Albert  rallie  ses  amis  et  se  précipite 
à  pied  contre  les  Hennuyers  que  le  bailli  décime  en  face. 
La  bataille  change  subitement  d'aspect  :  les  troupes  de 
Richilde,  assaillies  avec  une  ardeur  inouïe,  lâchent  pied. 
Le  plus  grand  nombre  se  replie  sur  le  camp,  derrière 
Bavinchove;  la  comtesse,  son  époux  et  ses  fils,  soutenus 
par  un  millier  d'hommes ,  prolongent  seuls  la  lutte.   La 
bataille  est  perdue.  D'Osbern  n'en  doute  pas.  Mais  il  a  fait 
son  devoir  :  la  retraite  ne  saurait  le  déshonorer;  il  saisit 
les  brides  des  chevaux  d'Arnould  et  Baudouin  et  ordonne 
aux  siens  de  le  suivre  :  on  obéit.  Richilde  est  entraînée 
par  la  foule ,  tandis  que  les  Flamands  continuent  à  frapper 
sans  quartier.  Cependant  notre  héroïne  crie  aux  siens  de 
rester  :  elle  veut  combattre  encore.  Son  regard  de  feu  se 
promène   avec   indignation  sur  l'armée   française ,  plus 
nombreuse   encore  que  celle  du  vainqueur.  Elle  accuse 
tout  le  monde  de  lâcheté,  le  roi,  Eustache,    de  Goucy, 
d'Osbern,  ses  fils  mêmes  qui  l'abandonnent  !  Alors,  toute 
à  sa  fureur,  elle  déchire  les  flancs  de  son  coursier  et  s'é- 
lance contre  les  cavaliers  de  Boniface  de  Cassel  :  —  Fuyez, 
misérables ,    et  que  ma  mort  soit  pour  vous  une  cause 
éternelle  de  honte  et   de  regrets....  mais  les  armes  sont 
baissées  devant  la  comtesse ,  et  son  coursier,  éventré  par 
le  sauvage  Sigurd,  l'entraîne  dans  sa  chute.  Aussitôt  on 
s'empresse  autour  de  Richilde,  on  lui  arrache  son  poi- 
gnard, on  l'entraîne  dans  les  rangs  et  de  là  dans  la  ville. 
Cette  capture  importante  fit  cesser  le   combat  à    l'aile 
gauche;  au  centre,  les  deux  partis,  comme  par  un  accord 
tacite ,    avaient  reculé   chacun   sur   ses  retranchements. 
Que  se  passait-il  à  l'aile  droite?  Qu'était  devenu  Robert? 
Ce  prince ,  enivré  d'un  premier  succès ,  et  instruit  de  la 
fuite  du  roi ,  s'était  mis  à  sa  poursuite  avec  le  peu  de  ca- 


(  273  ) 

valiers  qui  purent  le  suivre.  Il  marolia  sur  les  traces  de 
Philippe  jusque  sous  les  murs  de  S'-Omcr.  Plusieurs  fois  il 
fut  sur  le  point  de  l'atteindre  et  de  compléter  sa  victoire 
par  la  prise  du  monarque.  Arrivé  aux  portes  de  S'-Omer 
il  se  vit  si  près  de  Philippe  qu'il  lui  cria  :  Arrêtez.  Mais 
les  portes  s'ouvrirent,  et  elles  se  refermèrent  quand  le  roi 
les  eut  franchies.  Au  même  instant  parut  le  comte  de  Bou- 
logne à  la  tête  des  fuyards.  Robert  comprit  alors  toute  la 
gravité  de  son  imprudence  :  il  s'efforça  en  vain  de  la  ré- 
parer. Les  derniers  venus  l'entourèrent  et  le  conduisirent 
dans  la  ville ,  où  il  fut  confié  à  la  garde  des  habitants. 
Philippe  ne  s'arrêta  qu'à  Renti,  à  trois  lieues  de  S'-Omer  et 
à  cinq  de  Cassel.  » 

Le  même  jour  Richilde  fut  échangée  contre  Robert  le 
Frison,  et  le  lendemain  se  livra  la   bataille   de   Cassel, 
décrite  à  la  page  161   :  «  Au  moment  du  Richilde,  ré- 
paraissant au  milieu  de  sa  troupe,  était  portée  en  triom- 
phe sous  la  tente  des  comtes  Arnould  et  Baudouin,   de 
bruyants    vivat  retentissaient   à    l'autre   bout  du  camp. 
C'était  le  roi  Philippe  qui  ramenait  les  fuyards.  A  voir  les 
transports  de  joie  auxquels  se  livrait  l'armée ,  on  eut  dit 
qu'elle  fêtait  le  retour  d'un  monarque  victorieux  !  Per- 
sonne ne  paraissait  se  ressouvenir  des  événements  de  la 
veille ,  dans  lesquels  Philippe  avait  joué  un  rôle  si  peu 
digne  de  son  rang.  Ses  courtisans  poussaient  la  flatterie 
plus  loin  encore  :  caracolant  à  l'euvi  autour  du  roi,  quel- 
ques-uns osaient  le  féliciter  du  courage  qu'il  avait  déployé 
en  se  précipitant  sur  les  pas  des  fuyards  pour  les  recon- 
duire sur  le  champ  de  bataille.  Philippe  était  trop  vani- 
teux pour  mépriser  les  éloges,   et  il  avait  l'esprit    trop 
borné  pour  décerner  l'adulation  de  l'insulte.  Il  sourit  à 
toutes  ces  hypocrites  démonstrations  et  feignit  un  grand 
désir  de  prendre  sa  revanche  contre  les  Flamands,  Cette 
velléité  guerrière  excita  des  applaudissements  plus  sin- 


(  274  ) 

cères.  Les  troupes  crièrent  unanimement  :  Auct;  armes! 
En  ce  moment  Richilde  reparut  sur  son  coursier,  accom- 
pagnée de  ses  fils,  de  son  époux,  et  de  l'élite  des  Hennuyers. 
Elle  joignit  sa  voix  à  celle  de  la  multitude  :  le  roi  ordonna 
la  reprise  des  hostilités.  Ace  signal  les  Français  s'ébranlent 
et  vont  se  ranger  en  ligne  devant  les  retranchements  de 
l'ennemi.  Richilde  et  les  Hennuyers  sollicitent  l'honneur 
d'ouvrir  l'attaque.  Ils  marchent  vers  Cassel,  à  la  droite  de 
Bavinchove;  les  troupes  françaises  s'élancent  sur  la  gauche 
de  ce  hameau  pour  assaillir  les  Flamands  sur  tous  les 
points  à  la  fois.  Le  choc  est  terrible.  Les  Flamands  cèdent 
et  se  replient  sur  la  ville.  Aussitôt  leur  camp  est  envahi 
par  les  archers  de  Guillaume  d'Osbern  ;  Eustache  de 
Boulogne,  Richilde,  de  Coucy,  Hoël  et  Robert  de  Nor- 
mandie le  suivent  avec  les  Français  et  les  Hennuyers 
réunis.  Déjà  s'élèvent  des  cris  de  victoire....  Mais  Robert 
n'est  pas  vaincu.  L'habile  guerrier  a  retenu  l'ardeur  des 
siens  et  les  a  fait  reculer  de  quelques  certaines  de  pas  pour 
attirer  les  assaillants  au  pied  du  mont  Cassel,  où,  serrés 
les  uns  contre  les  autres ,  entre  des  fossés  et  des  ruisseaux 
gonflés  par  l'orage,  ils  ne  peuvent  faire  usage  de  leur  ca- 
valerie redoutable.  Cette  tactique  produit  un  autre  résul- 
tat :  les  bataillons  français  sont  en  désordre  :  les  chevaux 
écrasent  les  fantassins,  qui  se  blessent  et  s'étouffent.... 
Flandre  au  Lion!  s'écrie  alors  Robert,  et  les  Flamands 
faisant  volte-face ,  tombent  sur  les  Français  étonnés  comme 
une  troupe  de  loups,  qui  a  long-temps  guetté  une  cara- 
vane, fond  sur  elle  dans  une  vallée  étroite.  Pas  d'ordre 
dans  l'attaque  ni  dans  la  défense,  pas  de  pitié  chez  les 
uns,  pas  de  merci  pour  les  autres?  Les  Flamands  frappent 
avec  fureur,  leurs  ennemis  expirent  avec  courage!  La 
boucherie  dura  jusqu'au  soir;  le  combat  avait  commencé 
le  matin  à  10  heures.  Enfin,  après  mille  efforts  pour  res- 
saisir l'offensive  ,   après   mille    essais    pour   rompre  les  i 


(  275  ) 

bataillons  flamands  et  enlever  les  relrânchêméiils  de  la 
montagne,  les  Français,  partout  repoussés,  prennent  la 
fuite.  Comme  la  veille,  Philippe  en  donne  le  signal  et  se 
jette  à  bride  abattue  sur  le  chemi|  de  S'-Omer.  Comme 
la  veille  aussi,  les  troupes  de  Richilde  tiennent  le  mieux. 
Elles  s'assemblent  près  de  Bavinchove  et  y  combattent 
encore  deux  heures  après  la  retraite  de  leurs  alliés.  Les 
Flamands  les  entourent,  les  pressent ,  les  exterminent.  La 
victoire  est  complète  :  plus  un  seul  homme  ne  répond 
aux  échos  qui  répètent  au  loin  :  Triomphe  !  Flandre  au 
Lion  !  » 

Ph.  Blommaert. 


— 3=S>Sl^C=>— 


f.« 


(  276  ) 


<  «-jaijj 


B\x[Utx0  B\b[xo^ra\>\)ii]\xe, 


HISTOIRE    BELGIQUE. 

Saggio  storico  e  politico  sulla  rivoluzione  Belgia ,  dei  S"" 
Nothomb.  Terza  editione,  accresointa  di  note  e  susseguita  da 
un'  appendice,  Traduzione  dal  franeese  del  D"  Bald'"  Tirelli, 
daModena.  Liégi,  U.  Desain,  1838  ;  in- 18  de  XVI  et  521  pages. 

Les  Gestes  des  ducs  de  Brabant.  De  Brabantsehe  Yeesten,  of 
Rijmkronijk  van  Braband,  door  Jan  De  Klerk,  uitgegeven 
door  J.  F.  Willems,  lid  der  koninglyke  Académie  van  Brussel. 
Brussel,  M.  Hayez;  1839.  ïn-i%  p.  LXIX  et  901. 

[Cette  publication  est  précédée  d'une  introduction  curieuse  sur  l'au- 
teur et  les  manuscrits  de  cette  chronique  ;  à  la  page  605  se  trouve  le 
Codex  diplomalicus,  contenant  des  chartes  des  ducs  de  Brabant  jus- 
qu'à l'an  1350,  au  nombre  de  200,  toutes  inédites.] 

Cronijcke  van  den  lande  eude  graefseepe  van  "Vlaenderen, 
gemaect  door  J''  Nicolas  Despars,  van  de  jaeren  405  lot  1492; 
VGor  de  eerste  mael  in  het  licht  gegeven  door  J.  De  Jonghe, 
doctor  in  de  letteren  en  wijsbegeerte ,  hoogleeraer  by  het 
Atheneum  te  Brugge,  enz.  Brugge,  1839. 

[Cet  ouvrage  se  publie  par  livraisons:  la  treizième  vient  de  paraître, 
contenant  les  pages  353-512  du  second  volume,  où  il  est  traité  princi- 
palement du  règne  si  agité  de  Louis  de  Maie.] 

Histoire  parlementaire  du  traité  de  paix  du  19  avi*il  1839, 
entre  la  Belgique  et  la  Hollande,  contenant,  sans  exception, 
tous  les  discours  qui  ont  été  prononcés  dans  les  chambres  légis- 
latives belges;  précédée  d'une  introduction,  des  rapports,  do- 
cuments diplomatiques,  etc.,  etc.,  et  suivie  des  pièces  relatives 
à  la  signature  et  aux  ratifications  du  traité.  Bruxelles,  3Iary-  > 
MuUer,  1839;  2  forts  volumes  in-8"  de  700  pages. 


(  277  ) 

Histoire  des  ducs  de  Kourgogne,  par  De  Barante,  augmentée 
d'un  grand  nombre  de  notes,  par  M.  Marchai,  conservateur  des 
manuscrits  de  la  bibliothèque  royale.  Bruxelles,  Grégoir, 
Wouterset  C'',  1839.  (L'ouvrage  aura  dix  volumes  in-8",  ornés 
de  10  gravures). 

[Nous  ne  concevons  pas  cet  engoûment  de  quelques-uns  de  nos  savants 
pour  la  reproduction  répétée  de  cette  œuvre  de  Barante,  qui  fourmille 
d'erreurs  sur  notre  histoire,  qui  tronque  les  noms,  altère  les  caractères 
des  personnages  et  rend  les  faits  méconnaissables  lorsqu'on  les  compare 
avec  les  sources.  En  prenant  les  notes  de  MM.  De  Reiffenberg  etGachard 
et  celles  que  M.  Marchai  joindra  à  son  édition,  on  aurait  reconstruit  une 
histoire  des  ducs  de  Bourgogne  entièrement  neuve.  Pourquoi  toujours 
copier  les  autres.  Faisons  nous-mêmes.  Le  nom  seul  des  éditeurs  susmen- 
tionnés suflit  pour  prouver  que  nous  sommes  capables  de  tenter  l'entre- 
prise.] 

Jean  l'Aveugle,  roi  de  Bohème ,  comte  de  Luxembourg,  mar- 
quis d'Arlon  ;  Esquisses  biographiques,  par  P.  A.  Lenz.  Gand, 
Annoot,  1839;  98  pag.  in-S",  avec  une  lithographie. 

[Nous  devons  des  remerciments  sincères  à  M.  le  professeur  Lenz  pour 
avoir  retracé  la  vie  de  ce  Jean  l'Aveugle  ,  dont  le  nom  eut  naguères  tant 
de  retentissement  et  que  notre  insouciance  d'aujourd'hui  condamne  pres- 
qu'à  l'oubli.  Tous  les  détails  de  cette  intéressante  biographie  reposent  sur 
des  faits  authentiques  :  M.  Lenz  ne  manque  jamais  d'indiquer  ses  sources.] 

Histoire  du  Limbourg,  suivi  de  celles  des  comtés  de  Daelhem 
et  de  Fauquemont,  des  Annales  de  l'abbaye  de  Rolduc,  par 
M.  S.  P.  Ernst,  curé  d'Afden.  Publiée  avec  notes  et  appendices 
et  précédée  de  la  vie  de  l'auteur,  par  Ed.  Lavalleye.  Tomes  I, 
II  et  m.  Liège,  Collardin,  1837-39. 
[Cet  ouvrage  formera  6  volumes.] 

j      Promenades  historiques  dans  le  pays  de  Liège,  par  le  doc- 

I  teur  Bovy.  Liège,  Collardin,  1839;  2  vol.  in-S",  avec  pi. 

I      La  Joyeuse-Entrée  de  Ferdinand  de  Bavière ,  par  M.  L.  Polain. 
Liège,  Jeunehomme,  1839;  2-4  pag.  in-S". 

Ilet  beclaech  van  joncheer  Jan  Van  Hembyze ,  gedicht  der 
XVI®  eeuw,  uitgeg.  door  Ph.  Blommaert.  Gent,  by  D.  J.  Van- 

!  derhaeghen-Hulin  ,  1839.  In-8%  p.  VIII  et  60. 

j      Dagverhael  van  den  oproer  te  Antwerpen,  in  16S9,  uitgeg. 

!  door  C.  P.  Serrure.  Gent,  by  D.  J.  Vanderhaeghen-Hulin,  1839. 

!ln-8%  p.  XIX  et  48. 

I      [Les  deux  ouvrages  qui  précèdent  sont  publiés  par  la  société  des  Biblio- 


(  278  ) 

philes  flamands.  Cette  société ,  qui  vient  d'être  fondée  à  Gand ,  a  pour 
but  la  publication  d'anciens  documents  «n  langue  flamande;  les  ouvra- 
ges qui  paraîtront  successivement,  sont  lo'imc  chronique  de  Flandre, 
d'après  un  manuscrit  du  XV'=  siècle;  2"  la  guerre  deGrimbcrge,  poème 
du  XIV'^  siècle.] 

Recherches  historiques  sur  les  voies  d'écoulement  des  eaux 
des  Flandres,  à  l'occasion  du  projet  de  loi  relatif  à  la  construc- 
tion du  canal  de  Selzate  ^  la  mer  du  Nord,  par  l'abbé  J.  0. 
Andries.  Bruges,  Félix  De  Pachtere,  1839;  in-8^  de  102  pages, 
avec  une  carte. 

[Ce  travail,  aussi  utile  que  curieux,  présente  un  aperçu  très-complet 
sur  l'historique  des  tranchées,  canaux,  écluses,  etc.,  construits  na- 
guères  pour  l'écoulement  des  eaux  de  la  Flandre.  Nous  désirons  que 
cette  importante  brochure  détermine  la  législature  à  faire  creuser  enfin 
le  canal  de  Selzate.] 

LITTÉRATURE. 

Bloemen  myner  lente,  doorC.  Ledeganck.  Gent,  byVander- 
haeghen-Hulin,  1839.  In-8%  p.  IV  et  1S8. 

De  Gentsche  Vaderbeul ,  romance,  aen  welke  de  gouden 
eerepenning  is  toegekcnd  door  de  Maetschapy)y  van  schoone 
Kunsten  te  Gent.  Gent,  by  D.  Vanderhaeghen-Hulin,  1839. 
In-B^p.VIIIet  12. 

La  Voix  d'une  jeune  Ame,  par  Benoit  Quinet.  Bruxelles, 
1839;  122  pag,  in- 12. 

Lofspraek  der  polders,  door  G.  Du  Villers,  pastor  van  Mid- 
delburg ,  in  Vlaenderen.  Gent,  C.  J.  Van  Ryckegem,  1839; 
in-8%  p.  22. 

Robert  de  Vries,  historisch  tafereel  uit  de  XP  eeuw,  door 
J.  B.  C{oortmans).  Gent,  1839;  22  pag.  in-B". 

Keus  van  dicht-  en  prozastukken ,  of  Tael-  en  letterkundige 
Verzameling.  Kortryk,  1839;  in-8°, 

[Deux  livraisons  viennent  de  paraître  et  contiennent  des  pièces  de 
littérature  en  prose  et  en  vers  de  MM.  E.  D'Haene,  P.  J.  Renier  et  Mus- 
seiy-Boudewyn.] 

Poésies  morales  en  français,  en  flamand  et  en  latin;  par 
S.  M.  Coninckx.  S»-Trond  ,  1839;  68  pag,  in-12. 

[L'auteur,  qui  était  d'im  grand  âge,  est  mort  le  14  avril  1839.] 


(  279  ) 

Chronique  des  faits  et  gestes  admirables  de  Maximilien  I", 
durant  son  mariage  avec  Marie  de  Bourgogne,  translatée  du 
flamand  en  français  pour  la  première  fois,  et  augmentée  d'é- 
claircissements historiques  et  de  documents  inédits,  par  Octave 
Delepierre,  archiviste  de  la  Flandre  occidentale,  Bruxelles, 
1839;  pag.  XI  et  480  in-8''. 

Wevers-Almanak  voor  het  jacr  0.  H.  J.  C.  1839.  Uitgegeven 
door  de  vaderlandsche  lijn-maetschappy.  Brussel,  1839. 

Elba  und  Waterloo.  Ein  historischer  Roman  von  Ferdinand 
Stolle.  Leipzig,  bel  Eduard  Meisner,  1838;  3  vol. 

Légende  der  heylige  Waldelrudis,  gravin  van  Ilenegouwen 
en  patroners  der  stad  Bergen.  —  Het  leven  van  Rubens.  — 
Krijgsdaden  der  Belgen.  —  De  monik  Robert  ,  geschiedenis 
der  Xll"  eeuw.  —  Bemint  uwe  vjanden.  —  De  Almoes.  —  Het 
leven  van  Justus-Lipsius.  —  Salviati  of  de  VergifFenis.  —  Be- 
mint elkander.  —  Leven  van  Karel  den  Vijfden.  Brussel , 
Maetsch.  ter  verspreyding  van  goede  boeken  ,  1839;  in-32. 

[Ces  dix  petits  volumes  forment  Ja  2«  série  de  la  Bibliothèque  popu- 
laire en  langue  flamande  ,  publiée  par  la  Société  pour  la  propagation  des 
bons  livres.  ] 

Antoine,  ou  le  Blasphémateur  converti,  épisode  belge,  par 
l'abbé  Th.  Normand.  Bruxelles,  De  Mat,  1839;  in-32. 

Den  kleynen  Telemachus,of  kort  begryp  van  de  lotgevallen 
vanTelemachus,zoon  van  Ulysses.  —  Le  petit  Télémaque,avec 
une  double  traduction,  l'une  conforme  au  génie  de  la  langue 
flamande  avec  le  texte  français  en  regard;  l'autre,  littéraire 
et  interlinéaire,  conforme  au  génie  de  la  langue  française; 
par  l'abbé  Olinger.  Bruxelles,  Deprez-Parent,  1839;  in-12. 

BIBLIOGRAPHIE. 

Bibliotheca  Gandavensis.  Catalogue  méthodique  de  la  biblio- 
thèque de  l'Université  de  Gand;  précédé  d'une  histoire  de  celte 
bibliothèque,  et  suivi  de  tables  de  noms  d'auteurs,  etc.,  pu- 
blié par  le  bibliothécaire  Aug.  Voisin.  —  I"  vol.  Jurisprudence. 
Gand,  C.  Annoot-Braeckman,  imprimeur  de  la  ville,  1839; 
in-B"  de  LXXXII  et  394  pages,  plus  deux  feuillets  non  chiffrés 
pour  le  titre  et  lu  dédicace  et  une  gravure  au  trait. 

[Ce  catalogue  qui  se  trouve  aussi  en  vente  à  Bonn  chez  Marcus ,  et  à 


(  280  ) 

Paris  chez  Techeiîcr.  contient  :  1»  des  rfchfrches  historiques  et  biblio- 
i/mphiques  sur  la  liibliothequt  de  Gand ,  avec  des  renseignements  sur 
Arcnd  De  Keyser,  Simon  De  Coek  et  Judocus  Petnis  De  Halle,  ainsi  que 
sur  Pierre  De  Keyser,  premiers  imprimeurs  de  cette  ville  et  juscpiici  fort 
peu  connus  ,  pag  I-LXXXII.  —  1"  Le  catalogue  des  livres  de  jurispru- 
dence, contenant  4359  numéros,  pag.  1-338.  —  3"  La  table  alphabétique 
des  noms  d'auteurs,  traducteurs  ,  commentateurs  .  etc. ,  pag.  339  -368. 
—  4"  La  table  des  ouvrages  anonymes .  pag.  369-386.  —  La  table  des 
divisions  du  catalogue  méthodique  ,  pag.  387-394. 

Ce  catalogue  qui  sera  utile  aux  hommes  de  science,  s'imprime  aux 
frais  de  la  ville  de  Gand  :  il  est  le  premier  que  publie  une  bibliothèque 
en  Belgique.] 

VOYAGES. 

Voyage  en  Hollande  et  en  Belgique ,  sous  le  rapport  de 
l'instruclion  primaire,  des  établissements  de  bienfaisance  et 
des  prisons  dans  les  deux  pays,  par  Piamon  de  la  Sagra.  Paris, 
impr.  de  M^^Husard,  1838;  2  vol.  iu-8^ 

Le  Yoyage  à  Surinam,  description  des  possessions  néerlan- 
daises dans  la  Guyane,  par  P.  J.  Benoits,  orué  de  cent  dessins 
pris  sur  nature  par  l'auteur,  litliograph.  par  Madou  et  Lautcrs. 
Bruxelles,  Société  des  Beaux-Arts,  18S9;  in-folio,  1""°  livr. 

MÉDECISE. 

Rapport  fait  au  conseil  central  de  salubrité  de  Bruxelles, 
sur  les  révaccinations,  par  SDI.  les  docteurs  Eigot  et  Rieken. 
Bruxelles,  société  typographique  belge,  1839;  broch.  in-S". 

Notice  sur  les  travaux  de  Van  den  Zande,  docteur  en  méde- 
cine, professeur  de  physiologie  et  de  l'art  des  accouchements 
à  l'Ecole  de  médecine ,  médecin  de  l'hôpital  S'^-Elisabeth 
d'Anvers,  etc.,  etc.,  par  C.  Broeckx.  Anvers,  V^  J.  B.  Heirstrae- 
ten,  1839;  in-8°  de  43  pages. 

[Cette  notice  a  été  lue  à  la  quatrième  séance  solennelle  publique  de 
la  Société  de  médecine  d'Anvers,  le  17  décembre  1838,  et  imprimée  par 
ordre  de  cette  société.] 

Dissertation  sur  la  vie  en  général  et  en  particulier  sur  la 
vie  humaine,  par  P.  llaan,  docteur  en  médecine,  chirurgie  et 
accouchements.  Louvain ,  Van  Linthout  et  Van  den  Zande, 
18S9;  100  pag.  in-8". 


I 


(  281  ) 

Considérations  criticfues  sur  la  phrénologie  et  la  cranios- 
copie  ,  par  F.  J.  Mattliyssens.  Cruxcllcs,  Soc.  cncyclogr. ,  1839; 
59  pag.  in-12. 

Précis  élémentaire  de  raédecine  légale,  extrait  des  meilleurs 
ouvrages  généraux  et  spéciaux  de  médecine  légale,  suivi  des 
lois,  arrêtés  et  règlements  de  police  médicale  et  de  police  sa- 
nitaire, par  F.  J.  Matliyssens.  Anvers,  Heirstraeten,  1837  ;  2  vol. 
in-l8,png.  4159  et  610. 

BEAUX-ARTS. 

La  Galerie  Van  den  Schrieck.  Louvain,  Ickx  et  Geets,  1839; 
in-S". 

Anatoniie  appliquée  aux  Beaux-Arts,  à  l'usage  des  académies 
de  dessin,  sculpture  et  peinture,  par  E.  J.  Verhaes,  professeur 
à  l'académie  de  dessin  et  d'architecture  de  Termonde,  en  fran- 
çais et  en  flamand.  Bruxelles,  établissement  géograph. ,  1838; 
in-folio  de  24  pages  non  chiffrées  et  avec  24  planches  lith. 

Description  historique  du  Panthéon  de  Rome ,  par  T.  F.  Suys, 
architecte  des  palais  et  bâtiments  royaux.  Bruxelles,  Hayez, 
1838;  4  pages  de  texte,  à  deux  colonnes,  non  compris  le  titre , 
et  orné  de  23  pi.  lithographiées. 

Les  Délices  de  Spa  et  de  ses  environs,  description  nouvelle, 
illustrée  de  douze  vues,  dessinées  d'après  nature  par  Th.  Four- 
mois.  Bruxelles,  Soc.  des  Beaux- Arts,  1839;  34  pages  in-4°, 
avec  dix  lithographies. 

Bydragen  voor  de  kunstgeschiedenis  en  kunstkennis  der 
oudheid,  door  F.  A.  Spyers,  doctor  in  de  wysbcgecrtc  en  let- 
teren,  leeraer  aen  het  stads  Atheneum  te  Gent,  enz.  Gent , 
D.  J.Vanderhneghen-Hulin,  1839. 

[La  seconde  livraison  vient  de  paraître,  de  p.  33  à  64.] 

Scènes  de  la  vie  des  peintres  de  l'Ecole  flamande  et  hollan- 
daise, par  Madou.  Bruxelles,  Société  des  Beaux- Arts,  1839. 

[Ce  majînifique  ouvrage  paraîtra  par  livraisons;  il  y  en  aura  dix.  Les 
deux  premières  sont  sorties;  les  peintres,  dont  la  vie  a  offert  une  es- 
quisse dans  cette  publication ,  sont  Van  der  Mculen ,  Brouwer,  Craesbeke 
et  Teniers.  Les  notices  sont  écrites  par  MM-  De  Stassart ,  De  Reiffen- 

19 


(  282  ) 

beig ,  Cornelisscn ,  etc.  Sous  le  rapport  du  texte,  de  rcxccution  des 
Ijlanches  et  de  la  typographie,  les  scènes  de  la  Vie  des  Peintres  ne  lais 
sent  rien  à  désirer.] 

MÉM.OIRES  SCIENTIFIQUES. 

Mémoires  couronnés  par  l'Académie  royale  des  Sciences  et 
Belles-Lettres  de  Bruxelles;  tome  XIV,  F"  partie.  Bruxelles, 
Hayez,  18â8;  m-i\ 

[Ce  volume  contient  :  un  mémoire  sur  la  poésie  flamande  en  Belgique, 
par  M.  F.  Snellaert,  pag.  288;  —  de  l'influence  du  règne  de  Charles- 
Quint  sur  la  législation  et  sur  les  institutions  politifjues  de  la  Belgique, 
par  E.  Del  Marmol ,  pag.  69.] 

Mémoires  de  la  Société  de  médecine  d'Anvers,  1837-1838. 
Anvers,  Heirstraeten,  petit  in-4°,  p.  XV  et  67. 

ARITHMÉTIQUE. 

Nieuwe  Verhandcling  overde  tiendeelige  rekenkunst,  zynde 
het  werk  verrykt  met  1-iOO  vraegstukken  om  door  de  Icerlin- 
gen  opgelost  te  worden  naer  het  fransch,  van  J.  C.  en  F.  B.  B., 
door  Willem  Van  West.  Brussel,Nat.  Maetscb.  ter  verspr.  van 
goeden  boeken.  In-8°. 

SCIENCES  JURIDIQUES. 

Manuel  d'histoire  du  droit  romain  ,  par  T.  J.  Smolders.  Lou- 
vain,  Van  Linthout,  1839;  P^  partie,  page  203. 

ÉCRITS  POLITIQUES  ET  PAMPHEETS. 

De  la  politique  du  moment  en  Belgique,  suivie  de  la  ques- 
tion de  la  dette  hollandaise.  Bruxelles,  Soc.  encyclogr.;  1  vol. 
grand  in-8°. 

Adresse  au  peuple  belge.  Bruxelles,  Soc.  nation,  (fév.  1839); 
grand  in-S". 

Quelques  mots  sur  la  question  du  territoire,  par  un  ancien 
député  (19  février  1839).  Bruxelles,  Hayez. 

Les  traîtres  démasqués,  ou  les  turpitudes  des  ministres  et 
hauts  fonctionnaires  de  la  Belgique,  suivi  du  bon  Curé  de  cam- 


(  283  ) 

pagne;  pamphlet  à  roccasion  des  2-4  articles  et  des  roueries 
de  la  banque  hollandaise,  2"  édition.  Bruxelles,  Brismé;  in-B". 

De  la  liberté  de  l'Escaut,  envisagée  dans  ses  rapports  avec 
l'agriculture,  l'industrie  et  le  commerce.  Bruxelles,  ïïayez , 
1839;in-8%  o6  pag. 

Le  général  comte  Belliard.  Bruxelles,  librairie  militaire  de 
J.  B.  Petit;  in-8%  28  pages. 

Un  mot  aux  Belges ,  par  l'honorable  W.  L.  Wellesley. 
Bruxelles,  Méline,  1839;  in-8%  124  pag. 

A  Léopold,  roi  des  Belges.  2''  lettre.  Paris,  imp.  deTerzuoloj 
in-8°  d'une  demi-feuille. 

[Signée  De  Potter  et  datée  du  29  janvier  1839.  La  1'^'=  lettre  remonteà 
sept  ans.] 

De  la  destitution  de  M.  le  baron  de  Stassart,  par  Louis  La- 
barre.  Bruxelles,  Géruzet,  1839. 

De  la  Banque  anglo-belge,  ou  Examen  des  conséquences 
dangereuses  qui  seraient  résultées  de  cet  établissement  pour 
le  commerce  et  l'industrie,  par  P.  H.  Pauw,  de  Gand.  Brux. , 
Masure,  1839;in-8°. 

De  la  question  de  l'Escaut,  ou  Examen  du  droit  de  péage 
stipulé  par  l'article  9  du  traité  des  24  articles,  avec  les  moyens 
d'y  faire  face  sans  achat  ni  imposition  générale  sur  le  pays, 
par  le  même.  Ibid.,  in-12. 

De  la  neutralité  de  la  Belgique  et  de  l'armée,  par  le  major 
du  génie  Laurissard-Fallot.  Bruxelles,  J.  De  Mat,  1839  ;  in-B". 

De  la  liberté  de  l'Escaut,  envisagée  dans  ses  rapports  avec 
l'agriculture,  l'industrie  et  le  commerce.  Bruxelles,  Hayez, 
1839;  in-Q". 

La  Belgique  militaire  et  indépendante.  Bruxelles,  Hayez, 
1839. 

Des  crises  financières  et  de  la  réforme  du  système  monétaire, 
par  Chitti.  Bruxelles,  Méline,  1839;  in-8°  de  140  pag. 

Quelques  considérations  sur  le  péage  de  l'Escaut.  Anvers, 
mail839;in.8°de23pag. 

Esquisses  biographiques  des  principaux  fonctionnaires  tant 
civils  que  militaires  de  la  Belgique,  par  Aug.  Holvoet.  Brux., 
chez  l'auteur,  147  pag.  in-18. 


(  284  ) 

PUBLICATIONS  PÉRIODIQUES. 

Nouvelles  Archives  historiques,  philosophiques  et  littéraires, 
revue  trimestrielle,  publiée  par  MM.  J.  B.  D'IIanc ,  administra- 
teur inspecteur  de  l'Université  de  Gand;  F.  Huet,  P.  A.  Lenz 
et  H.  G.  Moke,  professeurs  à  la  même  université.  Gaud,  Annoot. 
Tome  II,  2^  livraison. 

Annales  de  la  Société  d'Emulation  pour  l'histoire  et  les  an- 
tiquités de  la  Flandre  occidentale,  publiées  par  les  soins  des 
membres  du  comité  directeur.  T.  I,  N"  1.  Bruges,  Van  de  Cas- 
teele-Werbrouck,  1839;  in-S^pag.  XII  et  104. 

[La  société  publiera  quatre  cahiers  par  an.  Le  numéro  I  contient  :  les 
keures  de  Furnes  (1240)  et  du  village  de  Ter  Pieté  (1265),  par  F.  V.  — 
Recherches  historiques  sur  l'origine  et  la  nature  de  la  société  dite  con- 
frérie de  l'Ours  blanc  à  Bruges,  par  F.  V.  —  Charte  de  Marie  de  Bour- 
gogne, de  Tan  147G  (eu  flamand),  par  Octave  D.  —  Notice  sur  les 
anciens  sceaux  de  la  ville  de  Bruges ,  par  Edmond  Veys.  —  Notice  bio- 
graphique sur  le  P.  Ferdinand  Verbiest ,  missionnaire  à  la  Chine,  par 
Fabbé  C] 

Bulletin  de  l'Académie  royale  des  Sciences  et  Belles-Lettres 
de  Bruxelles.  N"'  5  et  6.  Bruxelles,  Hayez;  in-S",  avec  â  pi.  col. 

[Ces  N"  contiennent  entre  autres  des  communications  historiques  de 
]M!\L  De  ReiOFenberg,  Gachard  ,  E.  Cachet;  différents  rapports  sur  les 
mémoires  envoyés  an  concours  de  1839,  etc.] 

Bévue  de  Bruxelles,  publiée  par  MM.  A  Dechamps  et  P.  De 
Decker;  avril  et  mai.  Bruxelles,  De  Mat,  1839,  in-18. 

[Ce  recueil,  auquel  ne  coopèrent  que  des  écrivains  de  notre  pays, 
continue  à  s'occuper  avec  sollicitude  de  la  Belgique.  Voici  les  principaux 
articles  de  la  livraison  davril  :  Coup-d  œil  sur  le  mouvement  religieux  et 
intellectuel  en  Allemagne.  —  La  légende  de  S'-Lambert.  —  Caractères 
des  diverses  époques  sociales. —  Le  Château  de  Maldegem  la  loyale.  — 
Questions  de  politique  extérieure,  etc.  —  La  livraison  de  mai  contient: 
Une  leçon  de  M.  Ahrens  ,  par  Tits.  —  Voyage  du  P.  Bergcron  et  du 
P.  Molinet,  par  Gachard.  —  L'action  sociale  des  papes,  jugée  par  les 
écrivains  protestants ,  par  J.  Moeller.  —  Une  Nuit  blanche,  par  Coomans. 
—  Biographie  de  Ch.  Van  Berghem,  secrétaire  de  l'archevêque  deMaliiies, 
par  F.  V.  Goethals.- — Sous  le  t'die  de  Miscellanées,  se  trouvent  les  nou- 
velles les  plus  importantes  fie  la  religion,  flu  commerce,  de  l'industrie, 
delà  science,  de  l'histoire,  des  arts,  de  la  littérature,  de  l'instruction 
publique.  Des  analyses  critiques ,  une  chronique  politique,  un  bulletin 
bibliographique  terminent  les  livraisons.] 


(  285  ) 

Belgisch  Muséum,  3"  deel,  1*'^  aflevering.  Cent,  Gyselynck , 
1839;  in-8«. 

[Cette  livraison  est  ornée  de  trois  lithofrrapliies.  Elle  contient  des  ar- 
ticles, sur  les  chambres  de  rliétoriqae  de  Courtrai,  par  F.  Snellaert;  — 
sur  l'uniformité'  de  la  prononciation  chez  les  anciens  écrivains  des  Pays- 
Bas  ,  par  J.  David  ;  —  sur  Liéviu  Mehus ,  par  F.  Speyers  ;  —  quelques 
conmiunications  importantes  de  M.  Willems,  etc.] 

Annales  et  bulletins  de  la  Société  de  Médecine  de  Gand , 
année  1839.  Gand,  Gyselynck. 

La  Renaissance.  Bruxelles,  Soc.  des  Beaux-Arts.  In-folio, 
avec  planches  et  vignettes. 

[Cette  publication  se  publie  deux  fois  par  mois  :  6  numéros  ont  paru, 
ornés  de  belles  lithographies;  ils  contiennent  des  articles  sur  le  Beffroi 
de  Gand  ,  sur  Schotel ,  sur  Mindert  Hobbema  ,  sur  la  décadence  de  l'art 
en  Italie,  etc.] 

Annales  de  la  Jurisprudence  belge ,  ou  Recueil  des  arrêts 
de  la  cour  de  cassation  et  des  cours  d'appel  du  royaume,  par 
MM.  Sanfourche,  Laporte  et  Colmant.  Bruxelles,  1839. 

[  Il  parait  une  livraison  tous  les  mois.] 

Journal  historique  et  littéraire.  Liège,  P.  Kersten  ,  1839; 
V,  2«  et  3«  livraisons  du  tome  IV. 

Revue  belge,  publiée  par  l'association  nationale;  5^  année, 
mai.  Liège,  Jeunehomme,  1839. 

[Articles  de  cette  livraison  :  la  Joyeuse-Entrée  de  Ferdinand  de  Ba- 
vière à  Liège  ,  par  M.  L.  Polain.  —  Marguerite  d'Autriche  ,  sa  vie,  sa 
politique  et  sa  cour,  par  J.  J.  Altmeyer. —  Villes,  paysages  allemands , 
par  Eug.  Poulet.—  Everard  T'  Serclaes,  chronique  brabançonne ,  par 
Ph.  L.] 

GRAMMAIRE. 

Dictionnaire  wallon-français,  dans  lequel  on  trouve  la  cor- 
rection de  nos  idiotismes  vicieux  et  de  nos  wallonisnies,  etc., 
par  L.  Remacle.  2^  édition,  augmentée  de  plus  de  cent  mille 
mots.  Liège,  Collardin,  1839;  18  livraisons  in-8''. 

OUVRAGES  DIVERS. 

Manuel  des  Organistes  de  la  campagne,  par  l'abbé  T.  Nor- 
mand, Bruxelles,  De  Mat,  1839. 


(  286  ) 

Grondregels  en  pligten  der  vaders  en  moeders,  door  Claude 
Arvisinet.  Brussel,  Maetschappy  ter  verspreyding  van  goede 
boeken,  18â9. 

Description  des  machines  et  procédés  consignés  dans  les  bre- 
vets d'invention,  de  perfectionnement  et  d'importation,  tom- 
bés dans  le  domaine  public,  Bruxelles,  Deprez-Parent,  1839. 

Essai  d'une  nouvelle  méthode  d'enseignement  simultané 
mutuel,  français-flamand.  Bruxelles,  Soc.  nat.  pour  la  propag. 
des  bons  livres,  18S9;  petit  in-8°. 

Histoire  populaire  de  la  révolution  française,  par  Théodore 
Juste.  Bruxelles,  Jamar,  18S9;  in-18. 

[Avec  une  jolie  lithographie  de  IMadou.] 

Géographie  élémentaire  à  l'usage  des  écoles  primaires  et 
moyennes,  second  cours,  par  Pieterz  et  Mauvy.  Bruxelles, 
Deprez-Parent,  18â9;  in-12. 

Annuaire  de  l'Université  catholique  de  Louvain  pour  l'an- 
née 1 889 ,  orné  de  deux  lithographies  représentant  le  collège 
des  théologiens,  dit  du  Saint-Esprit  et  le  portrait  de  feu  le  pro- 
fesseur P.  Van  Esschen.  Louvain,  Van  Linlhout  et  Van  den 
Zande;  in-18. 


(  287  ) 


DES    SÉANCES    DE    LA    COMMISSION    R  0  Y  A  L  K    u'iIISïOIRE. 


Tome  III.  —  l^"  Bulletin.  Séance  du  15  décembre  1838. 

Il  est  donné  lecture  de  l'arrêté  de  M.  le  ministre  de  l'inté- 
rieur qui  règle  les  travaux  relatifs  à  la  confection  de  la  table 
chronologique  des  chartes  et  diplômes  imprimés,  concernant 
l'histoire  de  la  Belgique,  ordonnée  par  l'arrêté  royal  du 
8  décembre  1837  : 

Art.  1.  Ces  travaux  se  feront  sous  la  direction  de  la  Commis- 
sion royale  d'histoire. 

2.  La  commission  désignera  aux  personnes  qui  y  seront 
employées,  les  ouvrages  dont  chacune  d'elles  aura  à  faire  le 
dépouillement. 

%.  Les  conservateurs  des  différentes  bibliothèques  de  l'état 
seront  invités  par  le  département  de  l'intérieur  à  confier  , 
pour  un  temps  limité  et  sous  reçu  auxdits  employés ,  les  ou- 
vrages dont  le  dépouillement  leur  aura  été  assigné. 

■4.  Ce  dépouillement  se  fera  d'après  les  règles  suivantes  : 

5.  Toutes  chartes,  diplômes,  lettres  patentes,  lettres  missi- 
ves ,  ordonnances,  instructions,  commissions,  règlements  et 
autres  actes  imprimés,  qui  concernent  soit  l'histoire  de  la 
Belgique  en  général,  soit  l'histoire  particulière  de  quelqu'une 
des  provinces,  villes  ou  localités ,  dont  elle  est  actuellement 
composée,  seront  repris  et  analysés. 

6.  L'analyse  de  chaque  pièce,  formera  la  matière  d'un  bul- 
letin séparé,  écrit  sur  une  carte. 

7.  Chaque  analyse  ,  toujours  conçue  en  français,  sera  à  la 
fois  claire,  concise  et  complète,  c'est-à-dire,  qu'elle  contieiv- 
dra  les  noms  des  parties  agissantes  ou  contractantes,  avec 


{  288  ) 

leurs  dignités  essentielles  et  l'objet  qu'elles  se  proposent,  ou 
Lien  le  sujet  principal  de  l'acte,  lorsqu'il  renfermera  plusieurs 
articles  différents.  —  En  tête  sera  indiquée  la  date  de  la  pièce 
dans  la  langue  qui  y  est  employée,  et  avec  toutes  les  circon- 
stances qui  s'y  rapportent.  —  Ce  bulletin  se  terminera  par 
l'indication ,  entre  paranthèses,  de  l'ouvrage  d'où  la  pièce  aura 
été  extraite,  ainsi  que  du  volume  et  de  la  page  où  elle  se 
trouve,  et  enfin  de  l'édition  dont  on  se  sera  servi,  lorsque 
plusieurs  en  seront  connues. 

8.  Les  personnes  employées  au  dépouillement  recevront  une 
indemnité,  fixée  provisoirement  à  quinze  centimes  par  bulle- 
tin. —  La  commission  pourra  proposer ,  en  outre ,  de  leur 
accorder  des  gratifications  supplémentaires,  proportionnées  à 
l'intelligence  et  à  la  capacité  dont  elles  auront  fait  preuve, 
ainsi  qu'à  la  difficulté  du  travail  qu'elles  auront  exécuté. 

9.  Tous  les  trois  mois  chacune  d'elles  remettra  à  la  com- 
mission, rangés  dans  Tordre  chronologique  par  volume,  et 
accompagnés  de  la  liste  détaillée  des  ouvrages  dont  ils  présen- 
teront le  dépouillement ,  les  bulletins  formés  par  elle.  — 
L'indemnité  à  laquelle  elles  auront  droit  à  raison  du  nombre 
de  bulletins  formés  et  remis,  leur  sera  immédiatement  payée. 

10.  Des  dispositions  ultérieures  détermineront  le  mode  et 
les  principes,  d'après  lesquels  tous  les  bulletins  devront  être 
assemblés,  coordonnés  et  révisés,  pour  en  former  la  table 
chronologique  générale,  destinée  à  être  livrée  à  l'impression. 

Le  secrétaire  fait  l'analyse  de  la  correspondance. 

M.  le  comte  De  Montalembert  annonce  qu'il  s'efforcera 
d'introduire  l'usage  d'un  compte  rendu,  semblable  aux  bul- 
letins de  la  commission,  dans  les  comités  créés  à  Paris,  par  le 
gouvernement  français  ,  pour  recueillir  et  mettre  au  jour 
les  monuments  inédits  de  Thistoire  de  France. 

Le  ministre  de  l'intérieur  autorise  la  commission  à  échan- 
ger ses  publications  avec  celles  de  l'Académie  royale  d'histoire 
de  Madrid;  et  à  cette  occasion,  M.  le  chev.  d'Antoine  y  Layas, 
chargé  d'affaires  d'Espagne ,  exprime  son  désir  défavoriser, 
autant  qu'il  est  en  lui,  les  relations  littéraires  de  la  Belgique 
avec  sa  patrie. 

Le  comte  De  Lal.^ing  ,  notre  chargé  d'affaires  à  Madrid, 


(  289  ) 

deinande  une  note  des  manuscrits  et  objets  d'arts  précieux, 
que  l'on  pourrait  réclamer,  comme  ayant  été  jadis  transportés 
de  Belgique  au-delà  des  Pyrénées. 

M.  L.  De  Malastrie,  au  nom  du  directeur  du  Nouvel  Écho  du 
Monde  savant,  demande  l'échange  de  cette  publication  contre 
le  bulletin  de  la  commission  ,  par  qui  cette  proposition  est 
accueillie  avec  plaisir. 

MM.  Gabriel  Peignot  et  Du  Sommerard  s'empresseront  de 
fournir  à  la  commission  tous  les  renseignements  qui  seront  en 
leur  pouvoir,  le  premier  pour  l'histoire  de  Bourgogne,  le 
second  pour  celle  des  arts  en  général. 

Deux  lettres  écrites  de  Gorcum  par  M.  G.  G.  Vreede,  qui  s'oc- 
cupe de  l'histoire  diplomatique  des  Pays-Bas ,  ont  pour  but 
d'obtenir  des  renseignements  sur  l'implacable  ennemi  de  Bar- 
neveld,  l'ambassadeur  de  Hollande  à  la  cour  de  France,  Fran- 
çois VaiiAerssen,  fds  du  greffier  des  États-généraux,  Corneille 
Van  Aerssen,  autrefois  pensionnaire  de  la  ville  de  Bruxelles. 

M.  Vreede  voudrait  avoir  des  détails  précis  sur  la  naissance 
et  les  premières  années  de  Van  Aerssen,  afin  de  pouvoir  juger 
à  fond  de  la  position  où  cet  homme  d'état  s'est  vu  placé  dès 
sa  jeunesse.  On  s'éclairerait  jusqu'à  un  certain  point  sur  cette 
recherche  ,  en  remarquant  que  sa  famille  tenait  à  celles 
d'isselingen,  Estourneel,  Wielandt,  etc.,  qui  appartiennent  à 
la  Belgique. 

«  Il  y  a,  dit  M.  Vreede,  nombre  d'autres  Belges  qui  ont  con- 
»  sacré  leurs  talents  à  la  cause  des  Provinces-unies,  et  dont  le 
»  nom  vivra  à  jamais  dans  l'histoire  de  la  diplomatie  ;  tels  sont 
«Jacques  Van  Maldere,  Noël  De  Caron ,  seigneur  de  Schoone- 
»wale,  Liévin  Calvart,  Marnix,  etc.   En  Belgique  comme  en 

•  Hollande,  on  pourrait  de  part  et  d'autre  se  communiquer 
»  tout  ce  que  les  bibliothèques  ,  archives  et  collections  privées 
«contiennent  d'intéressant,  et  cette  réprocité  bienveillante  ne 

•  serait  peut-être  pas  un  des  moyens  les  moins  puissants  pour 

•  applanir  les  difficultés  que  la  politique  a  fait  naître,  etc.  » 

M.  Du  Faitelle  fait  parvenir  à  la  commission  un  numéro  de 
V Industriel  Calaisicn,  du  10  novembre  1838.  On  y  lit  que  ce 
littérateur  a  apporté  un  grand  nombre  de  preuves  en  faveur 
de  la  relation  que  fait  Froissard  de  la  prise  de  Calais,  par 


(  290  ) 

Edouard  III,  et  du  dévouement  d'Eustache  de  S'-Pierre, 
révoqué  en  doute  par  Bréquigny  et  par  M.  Clovis  Bolard  , 
dont  la  Société  des  Antiquaires  de  la  Morinie  a  couronné  le 
mémoire. 

M.  X.  lieuschlinjj  met  sous  les  yeux  de  la  commission  plu- 
sieurs extraits  des  Mémoires  inédits  sur  l'histoire  du  Luxem- 
bourg, par  l'abbé  Tillot,  mort  en  17o0,  et  le  père  Bonaventure, 
capucin  :  ces  extraits  seront  examinés,  et,  s'il  y  a  lieu,  on  y 
reviendra  dans  le  bulletin. 

M.  Serrure  vient  de  faire  une  découverte  qui  n'est  pas  sans 
importance  pour  la  littérature  du  Nord  en  général,  et  pour 
celle  de  la  Flandre  en  particulier  :  c'est  un  second  fragment 
d'un  texte  des  Blibeîungen ,  qui  renferme  la  plus  grande  partie 
de  la  17"  aventure  :  Comment  Siegfried  fut  pleitré  et  mis  au 
tomheau. 

L'écriture  de  ce  fragment  est  de  la  fin  du  XIIP  siècle  (vers 
1280),  et  a  appartenu  au  volume  dont  M.  Serrure  possédait 
déjà  un  feuillet,  qui  a  été  publié  dans  les  Anzeiger  de  M.  Mone 
à  Carlsrube ,  ensuite  dans  le  journal  pour  la  littérature  alle- 
mande de  M.  Van  der  Ilagben  ,  à  Berlin,  et  tout  récemment  par 
M.  Meyer  ,  à  Groningue. 

BI.  Em.  Gachet  qui,  pour  un  recueil  que  l'on  forme  en  An- 
gleterre, a  extrait  des  arcbives  du  royaume  diverses  pièces 
relatives  à  Marie  Stuart,  adresse  à  la  commission  les  documents 
suivants,  qui  concernent  les  Anglais  réfugiés  en  Belgique,  vers 
l'année  1S70  : 

Lettre  du  duc  d'Albe  au  roy,  toucbant  les  Anglais  réfugiés 
par  deçà.  D'Anvers  le  1-4"  de  février  1370. 

Dans  cette  lettre  (que  le  bulletin  copie  en  entier)  le  duc 
d'Albe  rend  compte  au  roi,  d'après  la  charge  que  Sa  Majesté 
lui  avait  donnée  d'assister  les  seigneurs  et  gentilshommes 
anglais  réfugiés  par  deçà  ,  pour  le  fait  de  la  religion  catho- 
lique ,  de  la  manière  dont  il  a  jugé  le  plus  convenable  de 
régler  ces  secours,  qu'il  a  assignés  sur  la  recette  des  confisca- 
tions ,  etc. 

Suit  une  copie  de  l'ordonnance  (que  le  bulletin  donne  aussi 
textuellement),  par  laquelle  il  est  enjoint  à  Martin  Van  den 
Berghc,  trésorier  de  l'épargne  du  roy,  et  commis  à  la  recette 


{  291  ) 

générale  des  confiscations,  de  payer  et  distribuer  par  mois  sur 
la  recette  desdites  confiscations  aux  seigneurs,  gentilshommes 
et  pensionnaires  d'Angleterre  ci-dessous  dénommés,  réfugiés 
par  deçà  pour  le  fait  de  la  religion  catholique,  la  somme  de 
700  livres  du  prix  de  40  gros,  monnaie  de  Flandres,  la  livre. 
Savoir  : 

A  la  comtesse  de  Noorthumberland  ,         100  écus  par  mois. 
A  Charles  Nevell,  comte  de  Westmeland,    SO  —- 

A  Milord  d'Ailes,  SO  — 

A  Chrisloffle  et  Cutbert  Nevell,  40  — 

A  Agremond  Ratelif ,  iO  — 

A  Richard  Norton ,  l'ancien,  18  — 

A  Frances  Norton,  son  fils  aine,  18  — 

A  Sampton  Norton,  son  autre  fils,  10  — 

A  Thomas  Jlarckinfild,  chevalier,  8  — 

A  George  Chamberlayne,  6  — 

Fait  ensemble         SBO      écus  de  40 
patars  pièce. 

Fait  à  Anvers  le  5  febvrier  1570. 

M.  De  Sraet  fait  la  communication  qui  suit  : 

«  Le  parchemin  était  souvent  rare  au  moyen-âge  et  toujours 
assez  cher  ,  les  religieux  qui  s'occupaient  à  transcrire  des 
livres  ou  à  composer  des  chroniques,  en  usaient  avec  beau- 
coup d'économie,  et,  comme  chacun  sait,  ils  se  servaient  de 
plusieurs  moyens  à  cet  effet.  Effacer  les  caractères  des  manus- 
crits, quelquefois  plus  utiles  que  ce  qu'ils  allaient  y  substituer, 
et  préparer  ainsi  un  travail  pénible  à  ceux  qui  nous  révèlent 
les  mystères  des  Palimpsestes ,  n'était  pas  à  la  vérité  la  mé- 
thode la  plus  ordinaire  ;  mais  le  plus  souvent  ils  avaient 
recours  aux  marges,  aux  interlignes  et  même  aux  feuillets 
de  garde  d'ouvrages  plus  anciens,  et  mainte  chronique  im- 
portante a  été  trouvée  là. 

»  Je  n'ai  donc  pas  eu  lieu  d'être  surpris  en  découvrant  des 
notes  chronologiques  dans  une  Bible  manuscrite  in  memhranis, 
qui  a  appartenu  à  la  bibliothèque  de  l'abbaye  de  Floreffe,  et 
qui  maintenant  fait  partie  de  celle  de  M.  F.  Vergauwen  ,  à 
Gand.  Ce  précieux  ouvrage  en  deux  vol.,  gr.  in-fol.,  est  enrichi 


(  292  ) 

de  miniatures  exécutées  avec  autant  de  soin  que  de  goût ,  et 
passait  à  FlorefFe  pour  avoir  été  fait  au  XI®  siècle  ;  on  assure 
même  qu'un  feuillet  de  garde,  arraclié  du  livre  lors  de  la 
destruction  de  l'abbaye,  indiquait  le  nom  du  peintre  qui  avait 
illustré  l'ouvrage  à  cette  époque.  Malgré  cette  tradition,  nous 
avons  raison  de  croire  que  les  deux  volumes  n'ont  été  termi- 
nés qu'à  la  fin  du  Xll"  siècle,  ou  même  au  commencement  du 
XllP.  Le  caractère  de  l'écriture  et  le  terme  où  s'arrêtent  les 
notes  écrites  de  la  même  main,  nous  semblent  des  preuves  assez 
solides  pour  rejeter  la  prétention  à  une  plus  baute  antiquité. 

»Le  texte  même  de  la  bible  et  des  prologues  ordinaires  de 
S'-Jérôme,  est  précédé  par  différentes  tables  cbronologiques 
et  généalogiques;  c'est  sur  les  marges  des  premières  que  se 
trouvent  des  notes,  dont  on  pourrait  former  une  chronique, 
Malbcureusement  l'auteur  ne  se  borne  pas  aux  événements  du 
pays,  et  ne  donne  presqu'aucun  détail;  cependant  il  fournit 
quelques  faits  relatifs  à  l'histoire  du  pays  de  Liège  et  de 
Namur,  et  en  les  confrontant  avec  Sigebert  de  Gembloux  et 
les  auteurs  publiés  par  Chapeauville,  je  me  suis  convaincu 
qu'il   ne  les  a  point  copiés. 

»  J'ai  cru  qu'il  était  utile  d'en  insérer  ici  un  fragment,  etc. 
(  ce  fragment  occupe  -4  pages  dans  le  bulletin ,  et  en  voici 
quelques  exemples  :  ) 

An.  MC.  Godefridus  dux  moritur  in  Jérusalem.  Guibertus 
papa  ohit,  Rainerus  Qui  est  Pascalis  ,  suecedit. 

MCIX.  Comètes  apparnit. 

MCXXVII.  Carolus  co}?ies  Morinoruvi ,  Brugias  antc  altare, 
et  eadem  die  Guilielinus ,  cornes  Scdernensium ,  interfîciuntur, 

MCXLVII.  Famés  valida  et  eclipsis  solis. 

MCLXXX.  Terra  motus  jior  Coca,  etc.,  etc. 

M.  le  comte  Cughen  écrit  au  président,  en  date  du  \h  dé- 
cembre, que,  conformément  à  l'intention  qu'il  avait  déjà 
manifestée  ,  il  mot  à  la  disposition  de  la  commission  une 
somme  de  2000  francs,  à  décerner  en  prix  à  l'auteur  du 
meilleur  travail  historique,  en  réponse  à  une  question  dont 
le  donateur  laisse  le  choix  à  la  commission. 

Celle-ci  arrêtera  dans  la  prochaine  séance  le  programme 
du  concours. 


(  29S  ) 

S,  De  &erl*cbe  domne  lecture  d'un  nouvean  rapport  de 
I.  G»chard ,  dâlc  de  Paris  le  1 1  décembre  18S8.  En  Toici 
re\trîiîl  : 

«  ûepais  moa  retour  dans  cette  capitale,  j'ai  repris  les 
traraux  que  j'avais  commencés  cet  été  dans  les  archives  âe^ 
affaire:»  étrâng^eres  et  à  la  bibliotbcqpQe  du  Roi.  -Tai  visité  aosâ 
le*  "  eques  de  l'Arsenal ,  de  l'Institut ,  de  S'-Génevieve 

«t  îi  i   ;.iie. 

•  Je  von<  donnerai  d'abord  quelques  détails  sur  les  dernier? 
établissements  dont  je  n'ai  pas  eu  encore  l'occasion  de  vous 
parler  : 

f  La  bLbîiotbèqne  der.Vrsenaî.  par  le  nombre  et  rimportance 
des  ouvrages  manuscrits  qu'elle  renferme ,  tient  le  premier 
rang  après  U  bibliothèque  rovale.  Ainsi  pour  ne  citer  que  les 
livres  qui  ont  rapport  à  la  Belgique .  on  trouve  a  l'Arsenal  : 

'  La  chronique  riroée  de  Philippe  Moostes.  que  X.  De  Reif- 
fenber^  a  éditée,  d'après  un  te\te  plus  ancien. 

-     re  de  Gilles  De  Chin  de  Berlavinont,  en  vers,  et  le 
lyâudovn,  conte  de  Flandre,  et  de  Ferrant,  fils  du  roi 
...    .      iu^-a!,  qui  ont  déjà  été  si^ales  â  la  commission  par 
E,  De  Halâstrie, 

»  Le  chevalier  délibère,  poème  d'Olivier  De  la  Marche,  oa  il 
raconte  la  funeste  hatail]e  de  Xancy  :  il  en  eïi«e  des  éditions 
feites  à  Seudan  et  à  Paris,  mais  elles  fourmillent  de  fautes. 

j  T-  -   _  . ^g  Georges  Chastelain,  intitule  :  Lemeitfe  a  la 

Tî.  ^ .,.  -j.  est  pas  cite  au  iiombre  des  prodoctioas  de  cet 

ecrir.îln  d^ns  rarticle  que  lui  a  consacre  la  Biographie  uni- 
verselle. 

'  Une  histoire  très^uriettse  «  du  vaillant  chevalier  monsei- 

•  gneur  Jehan  D'Avenues,  conte  de  PontTen,  de  son  fils  le 

•  ooQtc  Jehan,  de  soa  biau-filc  Th:^-  ^:    le  Dommert  et  du 
»  pren  et  vaillant  tarcq  le  Souldan  i ^.n  ,  qui  d'eulx  et  de 

•  leur  lij^ie  desioeodv,  >  composée  par  Jean  Daquesne. 

>La  coUeetioB  de  docomeats  historiques  que  possède  la 
bibtâMbéque  de  l'Arsenal,  n'est  pas  d'ailleurs  sans  importance, 
laème  p>our  ce  qiii  concerne  notre  pays.  Sans  parler  des  chro- 
nîqnes  et  recueils  dont  il  ex.tste  ailleurs  plus  d'ane  copie  ,  j  y 
ail 


(  294  ) 
I 
»Une  chronique  de  France,  de  Flandres  et  d'Angleterre, 

commençant  en  1296  et  finissant  en  1370,  «  mise  au  net  par 
«David  Aubert ,  clerc  ,  l'an  de  grâce  1439,  par  le  commande- 
BUient  de  très-hault ,  très-excellent  et  très-puissant  prince 
«Philippe,  par  la  grâce  de  Dieu,  duc  de  Bourgoingne,  etc.  » 

«Une  chronique  de  France  et  de  Hainaut,  écrite  en  langue 
rouchi ; 

«Une  chronique  du  Hainaut,  commençant  à  la  fondation  de 
Trêves,  1230  ans  avant  la  fondation  de  Rome  ; 

»  Le  journal  des  voyages  de  Charles-Quint ,  par  Van  den  Esse, 
qui  est  déjà  connu  de  la  commission  ; 

«Des  mémoires  pour  servir  à  l'histoire  des  ducs  de  Bour- 
gogne de  la  V°  et  de  la  2^  race; 

«Une  excellente  copie  du  discours  de  Gaspard  De  Colligny, 
sur  ce  qui  se  passa,  durant  le  siège  de  Saint-Quentin,  par 
l'armée  Hispano-Beige,  en  13o7; 

«Enfin  un  recueil  des  pièces  concernant  le  cartel  et  le  défi, 
adressés  par  François  I  à  Charles- Quint,  copiées  en  17-46,  sur 
les  originaux  qui  reposaient  à  cette  époque  aux  archives  de 
l'état  à  Bruxelles. 

»La  bibliothèque  Mazarine  contient  un  millier  de  manus- 
crits; mais  rien  qui  soit  de  quelque  intérêt  pour  nous,  autant 
que  j'ai  pu  en  juger  par  un  examen  rapide,  fait  avec  un  des 
conservateurs,  car  il  n'y  en  a  pas  de  catalogue. 

»  A  la  bibliothèque  de  S'^-Geneviève ,  le  récit  d'un  voyage 
fait  en  Belgique,  en  lGo2,  par  le  père  Dumolinet,  de  Tordre 
des  Ecoliers  du  Val,  est  presque  le  seul  manuscrit  qui  ait  fixé' 
mon  attention  :  on  y  lit  des  particularités  sur  les  mœurs  du 
temps  qvii  m'ont  paru  mériter  d'être  recueillies. 

»  La  bibliothè({ue  de  l'Institut  possède,  outre  les  manuscrite 
de  Godefroy  ,  au  nombre  de  330  volumes  environ  ,  des  docu- 
ments historiques  parmi  lesquels  j'ai  remarqué  : 

•  Une  chronique  de  Hainaut,  depuis  la  destruction  de  Troie 
jusqu'à  l'année  1-467,  où  elle  paraît  avoir  été  écrite; 

»  La  chronique  métrique  composée  par  Martin  Cottignies, 
contenant  les  événements  arrivés  en  France  et  en  Flandres,' 
depuis  l'an  lâ90  jusqu'à  l'an  1-4-40. 

Des  mémoires  et  remarques  sur  l'histoire  des  ducs  de  Bour- 


(  295  ) 

gogne,  tirés  des  actes  de  la  chambre  des  comptes  de  Dijon,  par 
le  maître  des  comptes,  Bauyn; 

«Une  belle  copie  faite  au  XV^  siècle,  de  l'ouvrage  de  Guil- 
laume Pilastre,  sur  la  Toison  d'or; 

«Une  relation  de  la  retraite  de  monsieur  duc  d'Orléans,  en 
Flandre,  en  1632,  où  j'ai  puisé  quelques  notions  intéressantes 
sur  l'état  de  la  Belgi(|ue  à  cette  époque. 

»  Il  me  serait  impossible  ,  M.  le  président ,  à  moins  d'entrer 
dans  des  détails  qui  me  mèneraient  trop  loin,  de  vous  donner 
même  un  aperçu  des  résultats  des  recherches  auxquelles  je 
me  suis  livré  à  la  bibliothèque  du  Roi;  je  dois  me  contenter 
de  vous  dire  que,  à  l'heure  qu'il  est,  j'y  ai  parcouru,  dépouillé 
et  analysé  au-delà  de  200  manuscrits  ,  contenant  des  chroni- 
ques, des  mémoires,  des  chartes,  des  lettres,  des  relations  et 
des  négociations  diplomatiques  ,  enfin  des  documents  de  toute 
sorte ,  relatifs  à  notre  histoire  nationale.  Au  milieu  de  cette 
masse  de  matériaux  historiques  ,  l'époque  sur  laquelle  j'ai 
recueilli  surtout  des  choses  neuves  et  curieuses,  est  celle  où 
brillèrent  nos  deux  illustres  ducs  Philippe-le-Bon  et  Charles- 
le-Hardy,  et  c'est  aussi  l'époque  la  plus  dramatique  et  la  plus 
glorieuse  peut-être  des  annales  de  la  Belgique,  Je  vous  annon- 
çais, dans  ma  première  lettre,  la  découverte  d'une  série  de 
documents,  inédits  sur  l'insurrection  des  Gantois,  à  laquelle 
put  seule  mettre  fin  la  défaite  de  Gavre,  ainsi  que  de  lettres 
des  habitants  de  Liège  à  Louis  XI ,  écrites  dans  le  temps  de 
leurs  démêlés  avec  les  princes  de  Bourgogne;  depuis,  j'ai 
trouvé  bien  d'autres  pièces  qui  répandent  du  jour  sur  ces 
mêmes  événements. 

»  J'ai  vainement  cherché  à  la  bibiothèque  du  Roi,  des  docu- 
ments qui  auraient  jeté  de  vives  lumières  sur  les  causes  , 
l'origine  et  le  développement  de  nos  troubles  civils  et  reli- 
gieux au  XVI®  siècle. 

«J'ai  eu  l'honneur  de  vous  dire  que  les  correspondances 
des  envoyés  de  France  à  Bruxelles ,  conservées  au  dépôt  des 
affaires  étrangères,  formaient  environ  200  volumes.  Toute 
cette  collection  mériterait  d'être  compulsée  et  dépouillée  , 
mais  pour  l'analyser  ,  il  faudrait  pouvoir  disposer  de  cinq 
à  six  mois.  Obligé,  comme  je  l'étais,  par  les  occupations 


(  296  ) 

variées,  entre  lesquelles  devaient  se  partager  ici  mes  mo- 
ments ,  de  restreindre  mon  examen  à  quelques  parties  de 
cette  volumineuse  collection  ,  j'ai  cru  devoir  donner  la 
préférence  d'abord  aux  lettres  des  années  1780  à  1790  , 
qui  comprennent  le  règne  si  agité  de  Joseph  lî  ,  et  la 
révolution  brabançonne  ;  depuis  j'ai  parcouru  les  corres- 
])ondances  de  plusieurs  autres  années  ,  notamment  celles  de 
1626  à  16â2,  où  je  me  flattais  de  trouver  d'amples  éclair- 
cissements sur  la  conjuration  qui  fut  formée  sous  Philippe  IV, 
pour  soustraire  la  Belgique  au  joug  de  l'Espagne.  Mes  re- 
cherches pour  cet  objet  n'ont  pas   été  heureuses  (1). 

»  Dans  le  cours  de  ces  dernières  recherches,  j'ai  recueilli 
des  particularités  à  la  fois  intéressantes  et  neuves  sur  les 
dégoûts  que  la  cour  de  Madrid  suscita  à  l'infante  Isabelle, 
pour  déterminer  cette  princesse,  si  justement  chérie  des 
Belges ,  à  résigner  le  gouvernement  des  Pays-Bas  ,  qu'elle 
conserva  néanmoins  jusqu'à  sa  mort.  D'autres  ])articularités 
non  moins  curieuses,  sont  celles  qui  ont  trait  à  la  part  que 
prit  Rubens  aux  négociations  de  la  paix  entre  l'Espagne 
et  l'Angleterre.  La  réunion  de  ces  documents  à  ceux  dont 
je  vous  ai  précédemment  entretenu ,  formera  un  ensemble 
de  matériaux  ,  dont  pourra  tirer  parti  celui  qui  voudra 
refaire  la  vie  du  plus  célèbre  de   nos  peintres. 

«Je  pourrais  vous  parler  encore  de  plusieurs  manuscrits 
contenant  des  pièces  diverses  que  j'ai  examinées  au  dépôt 
des  atïaires  étrangères  ;  mais  cette  lettre  est  déjà  bien 
longue  :  je   la   terminerai    donc ,    etc.  » 

Le  baron  Jules  de  S'-Genois  adresse  à  la  commission  une 
lettre  relative  aux  comptes  de  Guy  de  Dampierre,  dont  il 
lui  a  soumis  des  extraits,  il  y  a  quelques  mois,  en  émet- 
tant l'opinion  qxiAdam  le  Ménestrel  devait  être  sans  doute 
le  fameux  Adenez  Le  Roi  ,  protégé  en  titre  du  duc  de 
Brabant  ;   mais   une   lettre   de  M.   Paulin    Paris ,   semblant 

(1)  M.  Gachaifl  a  trouvé  depuis  dans  un  des  vohimcs  de  la  correspon- 
dance de  Bruxelles ,  qu'il  n'avait  pas  encore  parcouru  à  lépoque  où  H 
écrivait  ce  rapport,  des  documents  du  plus  haut  intérêt  sur  la  conjura- 
tion de  1632. 


(  297  ) 

prouver  d  une  manière  irrécusable  qu'il  s'agit  dans  les 
extraits  publiés,  non  pas  d'AcIenez  Le  Roi,  mais  bien  d'Adam 
De  la  Halle ,  plus  connu  sous  le  nom  caractéristique  du 
Bossu  d'Arras,  M.  De  S'-Genois  s'estime  heureux  de  pouvoir 
se  ranger  à  l'avis  de  [M.  P.  'Paris ,  et  il  espère  que  la  commis- 
sion voudra  bien  accueillir  cette  rectification  dans  l'intérêt 
de   la   vérité    historique. 

M.  De  ReifFenberg  fait  quelques  remarques  verbales  : 

«  Les  rapports  de  notre  collègue  M.  Gachard,  dit-il,  nous 
ont  fait  connaître  les  travaux  commencés  à  Besançon,  pour 
la  publication  d'une  partie  des  papiers  du  cardinal  de  Grand- 
velle.  Tandis  que  M.  Gachard  ne  pouvait  avoir  accès  à  ces 
archives,  qu'il  était  chargé  de  consulter  pour  recueillir  des 
notions  purcMuent  relatives  à  la  Belgique,  nous  nous  empres- 
sions de  fournir  des  éléments  au  travail  de  nos  voisins. 

«En  1833  et  18â6,  le  département  de  l'Instruction  pu- 
blique en  France,  outre  divers  documents  tirés  des  archives 
du  royaume ,  emprunta  à  notre  bibliothèque  royale ,  les 
deux  porte-feuilles  que  nous  avons  indiqués  dans  le  volume 
précédent  et  qui  n'ont  pas  encore  été  restitués. 

»0n  vient  encore  d'envoyer  à  M,  De  Salvandy,  un  manus- 
crit in-folio  de  12B  feuillets,  formé  de  lettres  originales 
adressées  au  cardinal  de  Grandvelle,  par  plusieurs  personnes. 
A  ces  lettres  il  faut  joindre  des  instructions  du  -4  juin  1574  , 
pour  Don  Pedro  de  Avila  ,  marquis  de  Las  Navas,  ambassadeur 
de  Rome,  signées  Yo  el.rey ,  et  contre-signées  Vargas;  comme 
ce  volume  sera  sans  doute  dépouillé ,  je  m'abstiens  d'en 
faire  l'analyse  et  ne  le  signale  ici  que  pour  mémoire.  » 

M.  De  Reiffenberg  ajoute  qu'il  a  entre  les  mains  la  copie 
de  la  chronique  d'Anchin  ,  dont  M.  De  Malastrie  a  bien 
voulu  se  charger.  Les  23  pages  du  commencement  et  les 
55  dernières  du  manuscrit  de  Paris,  sont  inédites,  ainsi  qu'on 
l'a  dit.  Les  Monumenta  Hannoniœ  contiendront  de  plus 
toutes  les  variantes  de  quelque  valeur  ,  qui  se  trouvent 
entre  le  manuscrit  et  le  texte  imprimé  d'Aubert  Le  Mire, 
avec  un  assez  bon  nombre  d'additions ,  dont  quelques-unes 
sont  longues  et  intéressantes.  Il  est  à  remarquer  que  la  chro- 
nologie des  deux  textes  diffère  beaucoup. 

20 


(  298  ) 

La  commission  décide  qu'elle  demandera  au  ministre 
communication  des  rapports  de  M.  Kreglinger  ,  que  ,  par 
une  mesure  digne  de  sa  sollicitude  pour  les  lettres ,  il  a 
envoyé  en  Allemagne  ,  afin  d'y  visiter  les  bibliothèques  et 
dépôts  d'archives,  et  d'y  rechercher  les  documents  relatifs 
au   pays. 

Une  lettre  de  Paris  de  M.  l'abhé  Lacordaire,  donne  avis 
que  monseigneur  l'archevêque  de  Paris,  voulant  seconder  les 
Bollandistes  Belges  dans  leurs  efforts  pour  la  publication  de 
la  fin  des  Acta  Sanctorum,  vient  de  nommer  une  commis- 
sion ,  chargée  de  recueillir  tous  les  documents  propres  à 
cette   vaste  entreprise. 

Suite  des  Inventaires  de  Manuscrits  relatifs  à  la  Belgique.  — 

Publications  récentes,  —  Ventes  publiques. 

(Communiqué  par  le  baron  De  Reiffenborg.) 

A  Vienne ,  en  18S6,  on  a  entrepris  un  catalogue  des  ma- 
nuscrits de  la  bibliothèque  impériale.  Le  savant  E.  Endlichir 
s'est  chargé  des  Codices  Philologici  Latini ,  la  seule  partie 
qui  ait  encore  paru,  Vindobonœ ,  1836,  in-4°,  de  X  et  iOl 
pages ,  avec  3  planches. 

Comme  il  arrive  qu'un  manuscrit  contient  plusieurs  pièces 
souvent  très-disparates  ,  cette  division  peut  être  consultée 
avec  fruit ,  même  par  les  personnes  qui  se  livrent  à  l'étude 
de  l'histoire  du  moyen -âge. 

A  Leipsig  ,  M.  E.  G.  Neumann,  bibliothécaire  de  la  ville, 
a  commencé  en  1837,  et  continue  en  ce  moment  le  cata- 
logue des  manuscrits  conservés  dans  le  dépôt  commis  à 
sa  garde.  Ce  travail  n'est  encore  arrivé  qu'à  sa  3®  livraison  ; 
en  voici  le  titre  :  Catalogus  librorum  inanuscriptarum  biblio- 
thecœ  senatoriœ  civitatis  Lipsiensis,  in 4",  2  col.,  I-III  livr., 
pp.  1-278,  9  pi.  lithogr. 

Aux  pages  52,  107,  138  et  \A\  ,  se  trouvent  quelques 
articles   qui  peuvent  concerner  la  Belgique. 

A  Dresde,  M.  Ch.  Falkenstein  ,  premier  bibliothécaire  du 
roi  de  Saxe,  vient  de  publier  avec  antidate,  un  livre  intitulé  ; 
lieschreihung  der  kœniglichen  offentlichcn  Bibliothek  zu  Dres- 
den.  Dresden  ,1839,  in-8°  de  IV  et  887  pp. 


{  299  ) 

La  section  réservée  aux  manuscrits  a  beaucoup  d'étendue; 
mais  il  s'y  trouve  peu  de  choses  qui  soient  de  nature  à 
intéresser  nos  provinces. 

A  Paris,  le  docteur  A.  Marsand  a  fait  imprimer  en  18SS, 
à  l'imprimerie  royale,  un  catalogue  raisonné  des  manuscrits 
italiens  de  la  bibliothèque  du  Roi.  BI.  Guizot  ayant  exhorté 
l'auteur  à  poursuivre  des  explorations  dans  les  autres  biblio- 
thèques de  Paris  ,  M.  Marsand  a  donné,  en  1838,  un  second 
tome;  l'ouvrage  complet  est  intitulé  :  /  manoscritti  italiani 
dele  rcgie  Bihliotheche  di  Parigi. 

A  Dijon,  dans  les  archives  du  Grand- Hôpital ,  se  trouve 
un  manuscrit  in-folio,  relatif  à  la  fondation  des  hôpitaux 
du  S'-Esprit  dans  cette  ville,  ainsi  qu'à  Rome.  M.  G.  Peignot 
vient  de  donner  une  description  détaillée  et  très-curieuse  de 
ce  manuscrit,  exécuté  vers  les  années  1460-63  ,  et  composé 
en  tout  de  60  feuillets  de  parchemin  ,  dont  22  sont  couverts 
de  miniatures  ,  où  figurent  Philippe-le-Bon  et  la  duchesse 
sa   femme. 

Pour  les  publications  récentes,  voir  les  bulletins  bibliogra- 
phiques du  Messager  des  Sciences  et  des  Arts. 

Sous  le  titre  le  titre  de  Ventes  publiques ,  le  bulletin  indique 
le  catalogue  des  vieux  livres  et  manuscrits ,  délaissés  par 
BI.  Ph.  Parmentier,  archiviste  de  la  ville  de  Gand  ,  et  en 
signale  particulièrement  quelques  articles. 

Post-scriptum.  Au  moment  où  s'achève  l'impression  du 
bulletin ,  BI.  Le  Glay  ,  archiviste  du  département  du  Nord  , 
fait  parvenir  à  la  commission  un  volume  intitulé  :  Ânalectes 
historiques  ou  Documents  inédits  pour  servir  à  l'histoire  des 
faits,  des  mœurs  et  de  la  littérature,  Paris  et  Lille,  1838; 
in-S",   de  268  pages. 

Cet  intéressant  volume  est  la  réalisation  du  projet  que 
nous  avions  annoncé.  Il  se  divise  en  trois  parties  :  Histoire 
littéraire ,  Histoire  des  mœurs ,  Histoire  civile.  La  première 
contient  des  lettres  de  J.  Le  Blaire,  de  J.  F.  Foppens ,  etc. ; 
la  seconde ,  des  documents  neufs  sur  les  gages  et  appels  de 
bataille;  la  troisième,  une  lettre  importante  de  Charles-Quint, 
à  propos  de  la  captivité  de  François  I,  etc. 


{  300  ) 


€l)roniqixe  ti^a  $cunc($  et  ^xi$,  U  \)aïiàc$. 


Pierre  sépclcrale  a  Postel.  —  Dans  une  excursion  que  nous 
fîmes  dans  la  Canipine,  il  y  a  quelque  temps,  nous  fûmes  frap- 
pés de  la  beauté  d'un  monument  sépulcral  qui  se  voit  encore 
aujourd'hui  dans  l'ancienne  abbaye  de  Postel,  située  à  l'extré- 
mité de  la  Campine  et  aux  confins  de  la  mairie  de  Bois-le- 
Duc  (1).  Cette  pierre,  dont  nous  donnons  la  lithographie  ci- 
jointe, est  un  morceau  d'art  d'une  exécution  très-remarquable, 
et  c'est  sans  doute  à  ce  titre  qu'il  a  échappé  à  la  destruction. 

Ce  monument,  de  marbre  bleu  et  blanc,  a  228  centimèti'es 
de  longueur  sur  128  de  largeur. 

Il  a  été  élevé  à  l'honneur  du  septième  abbé  de  Postel,  Jérôme 
de  Raveschot.  Ce  prélat,  qui  appartenait  à  une  des  plus  an- 
ciennes familles  de  la  ville  de  Gand ,  et  qui  était  allié  aux 
familles  les  plus  illustres  de  la  Flandre,  était  fils  de  messire 
Robert  de  Raveschot,  seigneur  de  Yoorde  et  de  dame  Marie 
Catherine  Standaert  (2).  Après  avoir  été  curé  de  Luycx-Ghestel 


(1)  On  peut  voir  sur  l'abbaye  de  Postel,  Foppens  historia  episco- 
jxitus  Sylvœducensis,  pag.  235.  mais  surtout  i/ey/e?«,  historische  Ver- 
hrtiidcliiKjen  over  de  Kempen,  page  48,  ainsi  que  les  ouvrages  cités  par 
cet  auteur. 

(2)  Là  famille  Standaert  a  produit  un  grand  nombre  de  personnages 
«listingués.  Voici  quelques  extraits  de  la  gcnéalogic  îles  Standaert  : 

Léonard  Standaert,  capitaine  intrépide,  au  service  de  la  république 
de  Hollande  {fiénëalogie  de  la  famille  Van  der  Nooi,  par  Azévédo). 

Maximilien  Antoine  Standaert,  membre  du  magistrat  sénatorial  de 
Louvain  (Divœi,  Rcrum  Loraniensinm,  p.  12 ,  39  et  87  ;  Item  Appen- 
dice, ^.\\Q  et  U\). 

Pierre  Standaert ,  soixante-neuvième  abbé  de  la  célèbre  abbaye  de 


'   It.WKM'lllM)'!' 


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Ri'AEl'iKVplS  ADM.AC  AMl'LISSlMl'S  DDMINTS 

DltMINTS  nnUSONIMUS  lUVESniOOT  l)E  l'AI'l'J.LE 

BliJUS  (ŒNOBIl  ABAS  SEl'TLMl'S 

lîTvns  ANNo  on 

COAD.lUTORl.E  SIMIL  AC  l'JLEE  ATI  R.E'24 

Alll  XOBILISAC  lUMIElS 

KCCLESIAM  J)E  LlTrEXOESTEL ANXIS  17 

nONrSPASTOR  HEXIT. 

(  IIAS  INCEKTIS  ('.ECI.VIT 

HOUIE  CEUTUM  ADIIT 

TOTIM  SE  KUATUnU  S  liMTENDIT 

ILIil  RErENDANT 

I'L\S.\DJ)Elu\lPr.ErES 

UT 
lUiyi  lESCAT  IN  l'ACK 

oniiT 7" I'EBIhaiui  i7'j{i. 


iii)i;rc)i' 


ioo-> 


L       Al'SAHn 


r.;f 


Lm'ii().\ii;ki;i;n; 


[_DUK£ 


j.xiirEKi;A-NnJ 


>s  ii  iy.. 


(  301  ) 

pendant  dix-sept  ans,  il  devint,  en  1703,  coadjuteur  de  l'abbé 
de  Postel,  Grégoire  Sichmans,  auquel  il  succéda  l'année  sui- 
vante (1), 

Nous  ferons  observer  en  passant  que  c'est  par  erreur  que. 
ce  prélat  est  appelé  Jean  de  Ravesehot  dans  le  Grand  Théâtre 
sacré  du  Brahant  (t.  Il,  p,  108). 

Il  est  réellement  fâcheux  qu'il  n'existe  pas  de  Musée  central 
dans  lequel  on  puisse  réunir  les  débris  de  nos  anciennes  égli- 
ses, de  nos  anciens  couvents,  qui  ont  quelque  mérite  sous  le 
rapport  de  l'art.  La  révolution  française  a  sans  doute  porté  un 
coup  terrible  à  tous  nos  monuments  religieux,  mais  la  géné- 
ration actuelle  n'est  pas  assez  soigneuse  pour  recueillir  les 
restes,  qui  se  trouvent  çà  et  là  et  qui  tous  les  Jours  courent 
risque  de  se  perdre  ou  d'être  détruits. 


CONTIKUATIO    CnRONICI     CONTRACTI     ECCLESI^E      PARCDENSIS.     NouS 

devons  à  l'obligeance  de  M.  Th.  De  Jonghe,  de  Bruxelles,  la 
communication  de  la  pièce  suivante.  C'est  une  continuation 
de  la  chronique  abrégée  de  l'abbaye  de  Parc  (2).  Elle  est 
du  savant  professeur  de  l'ancienne  université  de  Louvain, 
J.  B.  Van  de  Velde. 


S'-Pierre-lez-Gand,  primat  de  Flandre,  prince  de  Camphin,  etc.,  mort 
le  !<='  décembre  1759. 

Jacques  Bernard  Standaert ,  gouverneur  de  la  chambre  des  pauvres 
de  la  ville  de  Gand ,  Tun  des  fondateurs  de  la  maison  de  Force  et  de  l'hos- 
pice de  S'- Antoine  dans  la  même  ville,  mort  le  18  août  1799. 

(1)  Hellin,  dans  le  Supplément  à  l'histoire  de  l  église  de  S^-Buvon, 
p.  257,  parle  de  cet  abbé;  mais  il  se  trompe,  pensons-nous,  en  disant 
qu'il  ne  fut  curé  de  Luycx-Ghestel  que  pendant  sept  ans ,  puisque  Tépita- 
phe  porte  dix-sept.  Hellin  nomme  au  nombre  des  seize  quartiers  Sallaert, 
Hatisart,  Engnere7i,  au  lieu  de  Sallaiit,  Ausard,  Enyuerrand. 

On  remarquera  que  sur  la  planche  ci-jointe,  par  une  distraction  du 
lithographe ,  le  mot  ahbas  a  été  écrit  abas. 

(2)  Chronicon  coniractum  insifjnis  ecclesice  Parchensis  ordinis 
prœmonstratensis  juxta  miiros  Lovanienses.  Lovanii,  apud  Petrum 
Attg.  Dcnique  prope  Academiani:  1726,  jjp.  21  in  ociavo,  auctore 
R.  D.  Hieronymo  de  Waersegghcre ,  35  abbale  hiijus  monasterii. 


(  302  ) 

Rev.  adm.  ac  ampl.  Dom.  Alexander  Slootnians,  S.  F.  D.  F. 
trigesimus  sextus  abbas  illi  (1)  canonicd  electione  stibrogaius 
est,  vir  non  dignitafe  tantum,  sed  onini  etiam  virtutiim  con- 
spicuus.  Nafus  in  pago  de  JVilryck,  diocesis  Antverpiensis , 
primo  in  ahbatiaFloreffiensi  S.  T.  lector  postulatus  fuit,  deinde 
Lovanii  prioris  vacantiorum  (2)  officio  decoratus,  mox  cathe- 
drœ  theologicœ  in  inonasterio  admottis  est.  Postea  per  annos  XII 
saceîlani  regii  niunere  in  Fura  Ducis  functiis,  exinde  prœpositus 
sanctinionialium  vallis  S.  Catharinœ  projye  Bredam  eligitur  ac 
mortuo  siquidem  duobus  post  annis  Rev.  adm.  Dom.  Hieronytno 
de  iVaersegghere,  a  serenissimd  Belgii  gubernatrice  Maria  Eli- 
zabetha  ad  abbatialem  dignitateni  nominatus  anno  1730,  et 
8  maii  subséquente  eâdem  exornatur  :  tum  ab  Eminentissimo 
Domino  Thomâ  Philippe,  cardinale  de  Alsafiâ,  archiepiscopo 
Mechliniensi  [a  quo  sacris  infulis  decoratus  fuerai)  constituitur 
archidioccsis  Mechliniensis  judcx  synodalis,  deinde  circariarimi 
Brabantiœ  et  Frisiœ  vicarius  generalis  creatur,  demum  statuum 
Brabantiœ  deputatus,  raro  exemplo  octodecim  annis  munere  illo 
invicto  animi  fortitudine  et  constantid  perfunctus  est,  tandem 
hydropisi  correptus,  vitani  cum  morte  commutavit  anno  17S6, 
ociava  maii,  œtatis  76,  regiminis  26.  Eique  sticcessit : 

Rev.  adm.  ac  ampl.  Dom.  Ferdinandus  de  Loyers,  ex  pastore 
de  Corbeeck-over-Loo,  trigesimus  scptimus  abbas  Parchensis , 
natus  in  Castro  de  Chaltain,  diocesis  Namurcensis,  qtd  primum. 
vicarius  in  fVackerzeele ,  ac  dein  in  TVerchter,  tum  cellarius, 
et postmodum  abbatiœ  provisor  constituitur,  tandem  fato  functo 
rev.  adtn.  Domino  Alexandre  Slootmanno,  a  suis  omnium  votis 
in  abbatem  electus ,  et  ad  eam  dignitatem  ab  Augustissimà  et 


(1)  R.  D.  Hieronymo  de  Waersegyhere ,  mortuo  die  3  martii  1730. 
(L'auteur  de  la  chroniciuc  abrégée.) 

(2)  On  appelait  à  l'Université  deLouvain  Vacantiarum  priores ,  cenx 
d'entre  les  bacheliers  qui  proposaient  les  premiers  arguments  contre  les 
thèses  du  baccalauréat.  Ils  étaient  ordinairement  au  nombre  de  trois 
ou  quatre,  et  leurs  fonctions  duraient  un  an.  V.  Paquot,  Mémoires 
pour  servir  à  l'histoire  littéraire  des  dix-sept  provinces  des  Pays- 
Bas,  de  la  principauté  de  Liège  et  de  quelques  contrées  voisines. 
Louvain,  1765,  in-folio,  I,  p.  179,  en  note. 


(  303  ) 

Apostoiicd  Impératrice  Regind  Maria-Theresia  nominatus  anno 
17ii6.  Nominatum  die  13  septembris  ejusdeni  anni  installavit 
rcv.  ac  ampl.  Dum.  Joannes  Baptista  Sophie,  ahbas  Grinibcr- 
(jcnsis  ac  Brahantiœ  ac  Frisiœ  circariœ  vicarius  gcneralis ,  sa- 
crisque  infulis  decoravit  die  26  ejusdem  mensis  Eminentissimus 
Dom.  Thomas  Philippus,  S.  R.  E.  cardinalis  de  Alsatiâ,  archi- 
episcopus  3Iechliniensis.  Fuit  discipUnœ  recjularis  quam  maxi- 
mus  zelator,  ecclesiam  viagiii/iccntissimis  decoravit  ornavientis, 
variasque  ctiam  domus  œdificavit  pastorales.  Tandem  post  regi- 
luen  sex  annorum  vivere  dcsiit  anno  1762,  mensis  fehruarii 
die  13,  œtatis  56.  Eique  suff'ectus  fuit: 

Rev.  adm.  ac  ampl.  Dom.  Franciscus  Généré,  Lovaniensis 
S.  T.  J.  anno  1721  nntus,  ex  administratore  bonorum  nobilis- 
siîiiœ  abbatiœ  Magni  BigardU  Blonialium,  ordinis  S.  Benedicti, 
propre  Bruxellas,  trigesimus  sex  tus  ahbas  Parcensis  ab  Augus- 
tissimd  Impératrice  Regind  Marid-Theresid  die  ^  junii  1762 
nominatus,  die  10  augusti  ejusdem  anni  ab  Eminentissvmo 
archiepiscopo  Mechliniensi  sacris  infulis  decoratus  est.  Mox 
statuum  Brabantiœ  deputatus  per  octo  circiter  annos  muncre 
illo  non  minima  cum  laude  perfunctus  est.  Plures  ab  ahbatiâ 
Parcensi  depcndentes  œdificavit  aut  restauravit  ecclesias,  non- 
nulisque  tahulis  monasterii  sui  teniphim  decoravit.  BruxeUis 
diem  obiit  supretnum  12  septembris  1770,  œtatis  67,  religiosm 
professionis  38,  sacerdotii  34,  regiminis  vero  17.  Successif  in 
locum  defuncti  : 

Rev.  adm.  et  ampl.  Dom.  Simon  Wouters,  S.  Th.  B.  F.,  natus 
inpago  de  Wcrchter,  trigesimus  nonus  abbas  Parcensis. 

Les  renseignements  qui  suivent  sont  de  M.  Th.  De  Jonghe  : 

Le  dernier  abbé  du  Parc  fut  Simon  Wouters,  bachelier 
formé  en  théologie.  Il  avait  été  auparavant  lecteur  en  théo- 
logie dans  son  abbaye,  puis  administrateur  spirituel  de  l'ab- 
baye du  Grand  Bigard,  près  de  Bruxelles.  11  fut  installé  le 
14  mars  1779,  et  reçut  la  mitre  des  mains  de  l'archevêque  de 
Malines  le  21  du  même  mois.  Il  entra  aux  États  de  Brabant, 
en  qualité  d'abbé  du  Parc,  le  20  avril  suivant.  11  fut  nommé 
député  desdits  États,  au  mois  de  mai  1784.  11  s'y  distingua 
par  la  violence  de  son  opposition  aux  réformes  de  Joseph  II, 


(  304  ) 

qui  supprima  l'abbaye  du  Parc,  en  mars  1789  (1).  Ce  prélat 
mourut  le  23  novembre  1792  (2). 

31elchior  Nysmans  lui  succéda  la  même  année.  Il  gouverna 
l'abbaye  du  Parc  jusqu'à  l'époque  de  l'entrée  de  l'armée 
française  dans  les  Pays-Bas.  Il  se  retira  alors  eu  Allemagne , 
et  accompagna  le  cardinal  de  Frankenberg  à  Emmericli  et  à 
Bocholt.  Après  avoir  émigré  pendant  plusieurs  années  ,  il 
rentra  dans  sa  patrie  en  1802,  après  le  concordat.  Ce  prélat 
mourut  le  17  décembre  1810. 


(1)  Son  portrait  a  été  gravé  par  J.  Chevillet,  en  1790.  dans  le  Recueil 
des  portraits  de  nos  seigneurs  les  États  de  Brabunt  qui  ont  assisté 
à  V assemblée  générale,  tenue  à  Bruxelles  depuis  le  17  avril  1787 
jusqu'au  5  décembre  de  la  même  année ,  avec  tin  appendice  conte- 
nant les  jjortraits  de  MM.  les  abbés  des  abbayes  pour  lors  vacantes, 
ainsi  que  de  MM.  les  chefs  du  troisième  membre  du  tiers-état  de 
Van  1789,  etc.,  gravés  d'après  les  dessins  originatix  d' André  Bernard 
de  Quertcnmont,  jyeintre  et  directeur  de  l'Académie  beUjique  des 
Beaux-Arts  à  Anvers,  et  membre  ordinaire  de  V  Académie  électorale 
de  Dussetdorf.  Anvers  ,  1790  ,  aux  dépens  de  l'autear. 

V.  les  brochures  intitulées  : 

1.  Het  redit  van  den  natuer  vati  de  volkereti  van  de  H.  Roomsche 
kerk  ende  van  de  civiele  wetthen,  geschondeti  door  de  actuele  af- 
schafpnge  van  de  abdije  van  Perck  vy  Loven,  enz.  1789,  p.  42. 

2.  Relaes  van  het  tyrranig  gedrag  en  wilkeurige  bestiering  vari  den 
zeer  Eerweerden  Heer  Simon  Wouters ,  geweeze?i  prelaet  van  de 
afgeschafte  abdye  van  Perck,  ten  opzigten  van  zyne  onderhoorige 
religieusen.  1789,  in  octavo,  p.  18. 

3.  Requeste  met  ses  stukken  annex  door  de  heeren  religieusen  der 
abdye  van  's  Heeren  Perck  by  Loven,  geprcsenteerd  aen  die  seer  eer- 
weerden edele  Heeren  Staeten  van  den  laîide  en  heitogdomme  van 
Brabant,  in  hunne  générale  vergaderinge  gehouden  te  Brussel,  op 
den  18  dag  dermaendjunii  1789.  Gedrukt  in  Brabant,  by  JanBaptist 
Van  Werchter,  vaderlandschen  drukker,  p.  31,  in  octavo. 

Nysmans  avait  été  curé  à  Notre  Dame-au-Bois  {Jésus  Eyk),  près  de 
Bruxelles,  cnre  qui  dépendait  de  Tabbaye  du  Parc. 

(2)  Il  y  avait  à  cette  époque  à  l'abbaye  du  Parc,  outre  l'abbé,  47  reli- 
gieux, dont  27  étaient  employés  hors  du  monastère  ,  dans  les  cures  qui 
eu  dépendaient.  Les  dignitaires  étaient  labbé,  le  prieur,  le  circator, 
le  sous-prieur,  le  prévôt,  le  camerier  (camerarius) .  le  lecteur  et  le 
proviseur. 


(  305  ) 

Dans  l'église  du  Parc  ,  on  voit  encore  aujourd'hui  le  tom- 
beau des  abbés,  construit  au  commencement  du  XVIII"  siècle 
par  l'abbé  Alexandre  Slootmans.  La  Mort,  en  marbre  blanc, 
sortant  d'un  sarcophage  de  marbre  noir,  soutient  une  table 
de  marbre  noir  où  sont  inscrits  les  noms  des  abbés  qui  ont 
successivement  régi  ce  monastère.  La  Foi  et  l'Espérance,  de 
grandeur  naturelle,  accompagnent  ce  tombeau.  Trois  petits 
génies  ailés,  dont  un  représente  la  Charité,  et  les  deux  autres 
portent  la  mitre  et  les  ornements  pontificaux,  voltigent  au- 
dessus  de  la  Mort.  Au  centre,  le  Temps  déroule  une  chaîne 
d'écussons  où  sont  les  armoiries  de  tous  les  abbés.  On  y  lit 
l'inscription  suivante  : 

D.  0.  M. 

MEMonia 

AD3IODC3I  RR.  AC  AJIPLL.  DD.   ABBATCM 
HLJtS    MONASTERII 

I.  Simon  pr/bfuit  10  anms  ob.  1142.  27  feb. 

II.  PiiiLippns  PRjiFmT  23  asn.  resigsavit  1165. 

III.  Thomas  .  etc. 

XXXVI.  Alexasder  Slootmans.  p.  26.  ob.  1756.  8  maii. 

XXXVII.  Ferd.  de  Loyers  pr^f.  5.  ob.   1762.   15  febkuarii. 

XXXVIII.  Fra>c  Généré  pr^f.  16.  ob.  1788.  12  sept. 

XXXIX.  Simon  Wouters  prjîf.  14.  ob.  1792.  23  nov. 
XL.  Melchior  Nysmass  pr^.  18.  ob.  27  dec.  1810. 

R.  L  P. 

L'écusson  des  deux  derniers  abbés  est  vide.  D'après  un  ta- 
bleau conservé  encore  aujourd'hui  dans  l'ancienne  salle  du 
chapitre,  ils  doivent  être  :  1°  Simon  Wouters,  d'azur  au  che- 
vron d'or,  accompagné  en  pointe  d'une  étoile  d'argent; 
IP  Melchior  Nysman,  d'azur  à  trois  étoiles  d'argent,  chargé 
en  abime  d'un  écusson  d'argent,  à  cinq  fleurs  de  lys  de 
gueules. 

Particularités  sdr  la  ville  de  Bruxelles.  —  A  l'occasion  de  la 
construction  projetée  du  passage  S'-Hubert  à  Bruxelles,  nous 
ferons  remarquer  que  d'après  les  plans  adoptés,  une  partie 
de  la  maison  du  ci-devant  métier  des  Orfèvres  doit  être 
sacrifiée;  cette  maison  nommée  le  Miroir,  n'étant  pas  sans 
quelque  intérêt  historique,   nous  pensons  qu'il  ne  sera   pas 


(  306  ) 

hors  de  propos  d'en  faire  mention  ici.  Elle  fut  élevée  vers 
l'an  1696,  par  ordre  de  la  corporation  des  orfèvres;  mais 
ceux-ci ,  n'ayant  pu  subvenir  aux  frais  de  construction,  furent 
obligés  de  former  une  loterie,  et  distribuèrent  le  bas  de  leur 
bâtiment  en  cinq  habitations  différentes,  qui  étaient  les  cinq 
premiers  prix;  elles  existent  encore  aujourd'hui. 

Le  métier  des  orfèvres  était  l'un  des  plus  anciens  de  la  ville 
de  Bruxelles,  on  ignore  même  son  origine;  toutefois  il  est 
certain  que  vers  l'an  1200  il  demeurait  un  membre  de  cette 
corporation  au  lieu  dit  Cantersteen;  leurs  privilèges  furent 
souvent  renouvelés  et  confirmés  par  les  souverains  du  pays. 
Leurs  armoiries  ou  marques  distinctives  étaient  trois  coupes 
d'or,  sur  fond  d'azur;  on  les  voit  encore  sur  le  fronton  du 
bâtiment,  de  même  que  leur  devise  :  Omnibus  Omnia,  et  la 
date  de  sa  construction  ,  M.  DC.  XCYL 

Cette  maison  était  surmontée  autrefois  de  statues  et  autres 
ornements,  qui  n'existent  plus  aujourd'hui. 

Un  membre  de  cette  corporation,  Jean  Jacobs,  fonda  un  col- 
lège à  Bologne,  vers  l'an  16o0,  en  faveur  de  jeunes  Bruxellois 
dont  les  parents  exerçaient  la  profession  d'orfèvre  (1). 

La  tour  du  Miroir,  ancien  bâtiment  qui  renfermait  les  pri- 
vilèges des  bourgeois  et  les  archives  de  la  nation  de  Notre- 
Dame,  était  adossée  à  la  maison  des  orfèvres,  et  en  faisait 
partie;  cette  tour,  ayant  été  fortement  endommagée  par  le 
bombardement  de  l'armée  française  en  169o,  tomba  le  7  no- 
vembre 1696,  vers  trois  heures  de  l'après-midi,  et  entraîna 
dans  sa  chute  deux  autres  maisons  voisines. 

On  trouva  dans  ses  ruines  plusieurs  coffres  renfermant  les 
privilèges  et  franchises  accordés  aux  habitans  par  le  gouver- 
neurs du  pays.  Les  bourgeois  ayant  eu  connaissance  de  cette 
découverte,  il  se  fit  une  fermentation,  qui  occasionna  l'émeute 
connue  sous  la  dénomination  de  Spiccjelgasten,  c'est-à-dire, 
compères  du  miroir. 

Les  neuf  nations  formant  le  corps  de  la  bourgeoisie  de  cette 


(l)  On  peut  voif  sur  la  l'omlatio»  Jacobs  à  Bologne  .  le  Messatjer  des 
Avis  de  1834,  p.  41-49. 

{Soie  de  la  Rédaction.) 


(  307  ) 

ville,  assemblées,  ordonnèrent  que  ces  pièces  fussent  imprimées 
et  publiées  en  un  recueil,  sous  le  titre  de  :  den  Lmjster  ende 
Gloire  van  het  Hertoghdom  van  Brahand,  etc.  Ils  allouèrent 
3000  florins  pour  les  frais  d'impression;  2000  florins  furent 
remis  au  sieur  Van  de  Putten  pour  les  avances  qu'il  avait 
faites  (1). 

Ce  recueil  qui  contient  trois  titres,  français,  cspafjnol  et 
flamand,  fut  dédié  et  présenté  au  roi  d'Espagne  Charles  II, 
par  les  doyens  Pierre  Van  den  Putten,  Antoine  du  Pré,  et 
François  't  Kindt.  Le  compilateur  en  fut  Jean-Baptiste  Ansems, 
d'une  ancienne  famille  praticienne  de  cette  ville  (2),  prêtre, 
protonataire  apostolique,  notaire  royal,  et  recteur  de  la 
chapelle  S'^-Anne,  rue  de  la  Montagne.  Il  avait  une  si  belle 
voix  que  l'électeur  de  Bavière  passant  un  jour  devant  cette 
chapelle,  pendant  qu'il  chantait,  l'ayant  entendu,  en  fut  si 
émerveillé  qu'il  le  fit  venir  à  sa  cour,  et  le  fit  son  aumônier; 
mais  il  fut  bientôt  renvoyé  à  cause  de  sa  mauvaise  conduite. 
Il  était  aussi  très-grand  partisan  des  privilèges  du  pays;  on 
rapporte  qu'un  jour  les  doyens  des  nations,  ayant  été  invités 
à  un  dîner  au  Mouïin  de  S^ -Michel ,  au  Canal,  Ansems  se 
rendit  déguisé  à  la  rue  Haute,  y  arrêta  un  petit  garçon  qui 
allait,  portant  au  bout  d'un  bâton,  les  attributs  de  son  métier, 
à  S'-Gilles;  il  lui  dit  qu'il  avait  quelque  chose  de  mieux  à  y 
placer  et  y  ajouta  l'écrit  suivant,  se  retira  et  changea  de 
costume,  afin  de  n'être  pas  reconnu  : 

Onse  dekens  syn  uyf.  schikken, 
Om  beter  te  connen  knikhen; 
Op  den  Molen  van  S.  M'chiel , 
Terwyl  ik  tjaen  naer  S.  Giel. 

(1)  M.  Gacharcl  a  donné  quelques  détails  intéressants  sur  le  Liiyster 
vanBrahant,  dans  ses  Documents  inédits  co7icerna7it  les  Troubles  de 
la  Belgique.  Bruxelles,  1838,  p.  LVII. 

{Note  de  la  Rédaction.) 

(2)  Dans  un  manuscrit  relatif  aux  anciens  magistrats  de  Bruxelles, 
qui  m'appartient,  on  trouve  un  Henri  Ansems  ,  éclicvin  vers  l'année  1263 
et  suivantes  ,  de  la  tribu  de  Caudenberg.  Il  portait  d'or  au  lion  naissant 
de  gueules ,  à  la  face  d'azur,  accompagnée  de  deux  tours  d'argent. 


(  308  ) 

Tout  le  monde  lut  cet  écrit;  le  garçon  fut  arrêté,  mais  ne 
put  indiquer  l'auteur. 

Le  Luyster  van  Braband  fut  supprimé  avant  son  entier 
achèvement,  par  ordre  du  conseil  de  Brabant,  et  Ansems  fut 
enfermé  au  Treurenberg  (1).  Mais  l'avocat  fiscal  de  Brabant, 
Ringler,  en  avait  enlevé  quelques  exemplaires;  il  en  donna  à 
ses  amis.  On  imprima  secrètement  ce  qui  manquait,  à  savoir  ce 
qui  est  en  caractères  plus  petits,  à  la  fin  de  chacune  des  trois 
parties.  Les  exemplaires  de  ce  recueil  se  trouvent  facilement, 
mais  sont  rarement  complets. 

Sources  :  1°  Le  manuscrit  des  magistrats  de  Bruxelles, 
2°  Fragments  manuscrits  inédits  du  conseiller  de  Brabant, 
Del  Marmol,  etc.,  etc. 

J.  Gautier. 

Nécrologie.  —  Joseph  Paelinck.  —  Joseph  Paelinck  naquit  le 
20  mars  1781,  à  Oostacker,  petit  village  situé  sur  la  rive 
droite  ducanalqui  conduit  de  Gandà  Terneuzen.  Son  goût  pour 
la  peinture  se  manifesta  de  bonne  heure;  de  même  que  tous 
les  grands  artistes,  il  sut  vaincre  les  difficultés  que  lui  offrait 
sa  position  pour  embrasser  une  carrière  conforme  à  ses  pen- 
chants. Ses  parents,  quoique  simples  cultivateurs,  s'aperçurent 
bientôt  du  génie  de  leur  enfant  ;  on  résolut  de  l'envoj'cr  à 
l'Académie  de  peinture  à  Gand.Les  progrès  rapides  que  fit  en 
peu  de  temps  le  jeune  Paelinck,  lui  attirèrent  bientôt  des  pro- 
tecteurs zélés  et  puissants.  Il  quitta  l'Académie  de  Gand  pour 
se  rendre  à  Paris,  où  il  entra  à  l'école  de  David. 

Les  ouvrages  de  Joseph  Paelinck  se  ressentirent  toujours 
des  excellentes  leçons  de  ce  grand  maitre  ;  la  plupart  de  ses 
tableaux  se  distinguent  par  une  grande  correction  de  dessin, 
par  le  charme  de  la  composition  ,  et  par  une  rigoureuse  ap- 
plication des  traditions  historiques.  Paelinck  remporta  le  pre- 
mier prix  de  peinture,  lorsque  l'Académie  de  Gand  mit  au 
concours    le  Jugement  de  Paris.  Ce  succès  fut  suivi  de  beau- 

(1)  Prison  de  Bruxelles  qui  n'existe  plus  depuis  1760,  elle  servait  à 
renfermer  les  détenus  pour  dettes;  on  peut  en  voir  le  dessin  dans 
Butkcns ,  Trophées  du  Brabant. 


(  309    ) 

coup  d'autres   qui  rendirent   bientôt   le   nom   de  Paelinck 
célèbre  à  l'étranger. 

Il  pei^^nit  peu  de  temps  après  pour  l'église  cathédrale  de 
S'-Bavon  :  Sainte  Colette  recerant  des  mains  du  magistrat  de 
Gand,  le  diplôme  pour  l'etablissetiient  de  son  couvent.  Paelinck 
fit  également  à  Paris  le  portrait  de  l'impératrice  Joséphine 
qui  se  trouve  probablement  encore  au  salon  de  la  Société  des 
Heaux-Arts;  plusieurs  commandes  de  ce  genre  lui  furent 
faites  immédiatement  après  qu'il  eût  achevé  ce  portrait; 
Paelinck  remplissait  les  fonctions  de  professeur  à  l'Académie 
de  Gand,  lorsqu'il  éprouva  le  désir  de  voir  l'Italie;  la  ville 
lui  accorda  une  pension  de  trois  ans,  afin  de  subvenir  aux  frais 
de  ce  vovage. 

C'est  à  Rome  que  Paelinck  paraît  avoir  peint  les  tableaux 
les  plus  remarquables;  ce  fut  en  cette  ville  qu'il  acheva,  pour 
le  palais  Qairinal ,  les  Embellissements  de  Raine  par  Auguste, 
et  qu'il  peignit  son  admirable  tableau  de  l' Invention  de  la 
Sainte-Croix.  Le  peintre  a  saisi  dans  cette  composition  le  mo- 
ment où  Saint-Macaire,  afin  de  reconnaître  la  vraie  croix  de 
celles  qui  avaient  été  trouvées  à  Jérusalem  par  l'impératrice 
Hélène,  les  présente  4  une  mourante  qui  se  ranime  au  contact 
de  la  véritable.  Un  grand  nombre  de  figures  ornent  ce  ta- 
bleau; on  y  voit  la  mère  de  la  malade,  et  plusieurs  autres 
'personnes  dont  la  physionomie  indique  bien  l'étonnement 
qu'elles  éprouvent  à  la  vue  de  ce  miracle.  V Invention  de  la 
Sainte-Croix  se  trouve  encore  dans  l'église  de  S'-Michel  à 
Gand. 

Paelinck  a  fait  hommage  à  l'église  d'Oostacker  d'wn  Christ  À 
la  croix,  en  présence  de  la  S'°- Vierge,  de  S'-Jean,  et  de  la 
Magdelaine. 

On  doit  encore  à  ce  peintre  un  grand  nombre  de  tableaux, 
dont  les  principaux  sont:  une  sainte  Famille,  une  Madone; 
un  Vieillard  romain ,  qu'il  fit  pour  sa  réception  à  la  Société 
royale  des  Beaux-Arts  :  à  son  retour  d'Italie  il  peignit  à  Gand 
une  Siizane  au  bain,  qui  fut  envoyée  à  Londres. 

Les  portraits  que  fit  Paelinck  de  la  ftimille  de  Nassau,  lui 
valurent  la  protection  du  roi  des  Pays-Bas,  qui  lui  accorda  de 
grands  honneurs. 


(  310  ) 

On  ranjje  encore  parmi  les  tableaux  les  plus  remarquables 
(le  Paelinck  :  la  Belle  Anthia,  des  Ephesiaques ,  de  Xénophon, 
pour  lequel  l'Académie  de  peinture  de  Gand  lui  décerna  le 
grand  prix  et  une  médaille  d'honneur. 

Son  tableau  :  les  Disciples  d'Emaùs,  est  éfaleraent  con- 
sidéré comme  un  des  excellents  ouvrages  de  ce  peintre. 

La  préférence  que  le  public  semble  avoir  accordée  depuis 
18B0  à  la  nouvelle  école  de  peinture,  qui  se  signale  toutefois 
en  Belgique  par  quelques  belles  œuvres,  parait  avoir  influé 
d'une  manière  fâcheuse  sur  la  santé  de  Paelinck.  Admirateur 
passioné  des  anciens  maîtres,  il  ne  put  voir  sans  chagrin  le 
peu  de  cas  que  le  public  sembla  faire  de  leurs  partisans. 

Le  roi  Léopold  se  chargea  de  réparer  cette  injustice,  en 
nommant  Paelinck  chevalier  de  son  ordre.  Cette  distinction 
honorable  ne  parvint  point  cependant  à  adoucir  entièrement 
son  chagrin. 

Il  se  renferma  en  lui-même  et  ne  lutta  que  faiblement  con- 
tre les  envahissements  de  la  nouvelle  école. 

Les  funérailles  du  peintre  d'Oostacker  ont  eut  lieu  dans  la 
petite  église  d'ixelles.  Les  professeurs  de  l'Académie  de  pein- 
ture de  Bruxelles  ont  rendu  les  derniers  devoirs  à  leur  col- 
lègue; plusieurs  artistes  distingués  de  la  capitale  figuraient 
dans  le  cortège. 

M.  Alvin,  secrétaire  de  l'Académie ,  a  rappelé  en  peu  de 
mots  la  belle  carrière  fournie  par  Paelinck  ,  et  ses  titres  à  la 
gloire. 

Ce  discours  a  fortement  ému  les  assistants  ;  chacun  d'eux 
en  se  retirant  se  souvenait  du  malheureux  Gros,  qui,  par 
suite  d'un  chagrin  semblable  à  celui  de  Paelinck  ,  se  donna  la 
mort. 

Concours  de  l'Académie  de  Bruxelles.  —  Voici  pour  la  classe 
des  lettres,  le  programme  des  questions  proposées  pour  le  con- 
cours de  18-iO,  par  l'Académie  royale  des  sciences  et  belles- 
lettres  de  Bruxelles. 

Première  question.  Quels  fui'enf  les  changements  apportés 
par  le  prince  Maximilien-Kenri  de  Bavière  (en  1684)  à  l'an- 
cienne constitution  liégeoise;  et  quels  furent  les  résultats  de  ces 


•     (  311  ) 

changements  sur  l'état  social  du  pays  de  Liège,  jusqu'à  l'épo- 
que de  s%  réunion  à  la  France  9 

L'Académie  désire  que  cet  exposé  soit  précédé ,  par  forme 
d'introduction,  d'un  tableau  succinct,  historique  et  critique 
de  l'ancien  gouvernement  liégeois,  sans  toutefois  que  l'au- 
teur soit  tenu  de  remonter  au-delà  du  règne  d'Albert  de  Cuick. 
Deuxième  question.  Quelles  ont  été,  jusqu'à  la  fin  du  règne 
de  Charles- Quint,  les  relations  politiques,  commerciales  et 
littéraires  des  Belges  avec  les  peuples  habitant  les  bords  de  la 
Mer  Baltique? 

Troisième  question.  Quel  a  été  l'état  de  la  population,  des 
fabriques,  des  manufactures  et  du  commerce  dans  les  provinces 
des  Pays-Bas,  depuis  Albert  et  Isabelle  jusqu'à  la  fin  du  siècle 
dernier? 

Quatrième  question.  Vers  quel  temps  l'architecture  ogivale, 
appelée  improprement  gothique ,  a-t-eUe  fait  son  apparition  en 
Belgique?  quel  caractère  spécial  cette  architecture  y  a-t-elle 
pris  aux  différentes  époques  ?  quels  sont  les  artistes  les  plus  cé- 
lèbres qui  l'ont  employée ,  les  monuments  les  plus  remarquables 
qu'ils  ont  élevés? 

Cinquième  question.  Les  anciens  Pays-Bas  autrichiens  ont 
produit  des  jurisconsultes  distingués,  qui  ont  publié  des  trai- 
tés sur  l'ancien  droit  belgique,  mais  qui  sont,  pour  la  plupart, 
peu  connus  ou  négligés.  Ces  traités  sont  non-seulement  pré- 
cieux pour  l'histoire  de  l'ancienne  législation  nationale,  mais 
contiennent  encore  des  notions  intéressantes  sur  notre  ancien 
droit  politique;  et,  sous  ce  double  rapport,  le  jurisconsulte 
et  le  publiciste  y  trouveront  des  documents  utiles  à  l'histoire 
nationale. 

L'Académie  demande  donc  qu'on  lui  présente  une  analyse 
raisonnée  et  substantielle ,  par  ordre  chronologique  et  de  ma- 
tières, de  ce  que  ces  divers  ouvrages  renferment  de  plus  remar- 
quable jmur  l'ancien  droit  civil  et  politique  de  la  Belgique. 

L'Académie  propose,  dès  à  présent,  pour  le  concours  de 
1841,  les  questions  suivantes  ; 

Première  question.  Quel  était  l'état  des  écoles  et  autres  éta- 
blissements d'instruction  publique  en  Belgique ,  depuis  Charle- 
magne  jusqu'à  la  fin   du   XVII''  siècle?  Quelles    étaient  les 


(  312  ) 

matières  qu'on  y  enseignait,  les  méthodes  qu'on  y  suivait,  les 
livres  élémentaires  qto'on  y  employait,  et  quels  professeurs  s'y 
distinguèrent  le  plus  aux  différentes  époques  ? 

Deuxième  question.  Faire  l'histoire  de  l'état  militaire  en 
Belgique,  sous  les  trois  périodes  hourguignone ,  espagnole  et 
autrichienne ,  jusqu'en  1794,  en  donnant  des  détails  sur  les 
diverses  parties  de  l' administration  de  l'armée,  en  temps  de 
guerre  et  en  temps  de  paix. 

L'Académie  désire  que  le  mémoire  soit  précédé,  par  forme 
d'introduction,  d'un  exposé  succinct  de  l'état  militaire  en 
Belgique  dans  les  temps  antérieurs,  jusqu'à  la  maison  de 
Bourgogne. 

Le  prix  de  chacune  de  ces  questions  sera  une  médaille  d'or 
de  la  valeur  de  six  cents  francs.  Les  mémoires  doivent  être 
écrits  lisiblement  en  latin,  français  ou  flamand,  et  seront 
adressés,  franc  de  port,  avant  le  \"  février  18-40,  à  M.  Que- 
telet,  secrétaire  perpétuel. 

L'Académie  exige  la  plus  grande  exactitude  dans  les  cita- 
tions; à  cet  effet,  les  auteurs  auront  soin  d'indiquer  les 
éditions  et  les  pages  des  ouvrages  qu'ils  citeront 

Les  auteurs  ne  mettront  point  leurs  noms  à  leurs  ouvrages, 
mais  seulement  une  devise,  qu'ils  répéteront  dans  un  billet 
cacheté,  renfermant  leur  nom  et  leur  adresse.  Ceux  qui  se 
feront  connaître  de  quelque  manière  que  ce  soit,  ainsi  que 
ceux  dont  les  mémoires  seront  remis  après  le  terme  prescrit, 
.seront  absolument  exclus  du  concours. 

L'Académie  croit  devoir  rappeler  aux  concurrents  que,  dès 
que  les  mémoires  ont  été  soumis  à  son  jugement,  ils  sont  dé- 
posés dans  ses  archives,  comme  étant  devenus  sa  propriété, 
sauf  aux  intéressés  à  en  faire  tirer  des  copies  à  leurs  frais, 
s'ils  le  trouvent  convenable,  en  s'adressant  à  cet  effet  au  se- 
crétaire perpétuel. 

Fait  à  Bruxelles,  dans  la  séance  du  7  mai  1839. 

Pour  l'Académie  : 
Le  secrétaire  perpétuel, 

QDETEr,ET. 


{  313) 


Uotitt 

SUR 

LA  BIBLIOTHÈQUE  DE  BOURGOGNE, 

A  BRUXELLES. 


«  ....  La  plus  riche  et  noble  librairie  du  monde....  » 
David  Aubert  ,  1443. 

L'origine  de  ce  vaste  dépôt  de  manuscrits,  si  précieux 
pour  riiistoire  et  la  littérature  de  la  Belgique,  remonte  à 
la  fin  du  XIV^  siècle.  C'est  Philippe-le-Hardi ,  duc  de  Bour- 
gogne, qui  doit  en  être  regardé  comme  le  véritable  fon- 
dateur. Ce  prince  aifable  et  généreux  à  l'excès,  grand 
protecteur  des  lettres  et  des  arts,  était  instruit  et  curieux 
de  bons  livres,  pour  l'acquisition  desquels  il  fit  des  dépen- 
ses très-considérables  :  il  appela  à  sa  cour,  grands  clercs j 
orateurs,  translateurs ,  indiciaires ,  escripvains ,  comme 
on  disait  alors ,  pour  satisfaire  son  goût  et  enrichir  sa 
librairie  (1). 

M.  Peignot,  dans  son  intéressant  opuscule  où  il  publie  les 
divers  inventaires  de  Bourgogne ,  rapporte  que  Philippe 
conclut  un  marché  avec  les  frères  Manuels,  à  vingt  sols  (2) 

(1)  C'est  ainsi  qu'elle  se  trouve  désignée  dans  les  anciens  inventaires 
de  Bourgogne. 

(2)  Le  marc  d'argent  flottait  dans  ce  temps-là  entre  5  livres  16  sols 
et  6  livres  8  sols.  Ainsi  les  20  sols  par  jour  équivalaient  à  9  fr.  de  notre 
monnaie  actuelle ,  et  les  600  livres  données  à  Durand ,  à  5,400  fr.  Les 
400  écus  d'or,  dont  il  est  question  plus  loin ,  valaient  à  peu  près  6000  fr., 
€tles600écus,  9000  fr. 

21 


(  3ia  ) 

par  jour,  pendant  quatre  fins , -pour  jxir faire  les  ystoires  (1) 
crune  très-belle  et  très-notahle  bible  par  iceulx  commencé; 
et  six  cents  livres  furent  données  à  maistre  Jehan  Dura^id, 
son  physicien  (médecin) /jowr  employer  es  escriptures  et 
2)erfection  d'icelle  bible. 

Paul  Donnedieu,  Dyne  et  Jacques  Pvaponde,  libraires 
lombards,  établis  à  Paris,  vendirent  au  duc  plusieurs 
livres.  Donnedieu  fit,  à  sa  demande,  deux  grands  ^/«^Z- 
phoniers  enlumhier  et  florir  d'azur  et  de  vermillon ^  pour 
la  somme  de  fr.  990-90  c. 

Dyne  Raponde  lui  céda,  en  1399',  un  Tite-Live  enluminé 
de  lettres  d'or  etd'imaiyes ,  pour  le  prix  de  500  livres.  Un 
livre  de  la  Propriété  des  choses ,  lui  coûta  400  écus  d'or. 
Il  eut  de  Jacques  Raponde ,  moyennant  600  écus  (9000  fr.) 
une  bible  française  très-bien  ystoriée  ^  armoriée  de  ses 
armes ,  garnie  de  gros  fei^meaux  d'argent  dorés.  Le  même 
Raponde  lui  bailla,  en  1400.  un  livre  appelé  la  Légende 
dorée ,  pour  500  écus  d'or  (7,500  fr.  ),  ystoriée  de  belles 
ystoires  à  chascun  son  ystoire ,  armoyé  aux  armes  de 
Philippe ,  et  couvert  de  veluiau  en  veinieil  teint  en  graines 
et  ung  belestui  garny  d' une  tresse  de  soye  à  deux  mordans, 
armoyés  aux  armes  du  duc. 

C'est  aussi  par  les  ordres  du  duc  Philippe-le-ÏIardi,  que 
la  très-savante  Christine  de  Pisan  (2)  composa  l'histoire 

(1)  Ce  dernier  mot  signifie  ici  dessins,  images. 

(2)  Cette  femme  poète  ,  née  à  Venise  ,  était  fille  de  Thomas  de  Pisan, 
natif  de  Bologne ,  qui  sétait  acquis  une  grande  réputation  par  son 
savoir  dans  l'astrologie.  Christine  suivit  son  père  à  Paris,  en  1368,  où 
le  roi  Charles  Y  Pavait  fait  venir;  elle  épousa  dans  cette  même  ville,  à 
l'âge  de  15  ans,  Etienne  Castel.  Mais  s'étant  trouvée  veuve  à  25  ans  et 
chargée  de  trois  enfants  en  bas-àge,  elle  trouva  au  milieu  de  sa  douleur, 
sa  consolation  dans  les  lettres,  ayant  composé  un  grand  nombre  d'ou- 
vrages en  prose  et  en  vers. 

On  trouve  le  portrait  de  Christine  de  Pisan  ,  dans  son  livre  de  la  Cité 
des  Dames ,  qui  repose  à  la  Bibliothèque  de  Bourgogne.  Elle  est  assise 
sous  un  dais ,  la  tête  penchée  sur  la  main  gauche ,  et  le  coude  appuyé 


(  815  ) 

de  Charles  V  (roi  de  France),  comme  elle  le  dit  elle-même 
dans  le  premier  chapitre  de  cette  histoire. 

Voici  ses  propres  expressions  ,  qui  donneront  une  idée 
du  style  français  (1)  dans  ce  siècle  où  l'aurore  de  la  litté- 
rature commençait  à  poindre. 

«...  Pour  ce  moy  Christine,  femme  souhz  les  ténèbres 
d'ignorance  au  regard  du  clerc  entendement ,  mais  douée 
de  don  de  Dieu  et  nature,  en  tant  camtne  désir  se  peut 
estendre  en  amour  destude  suivant  le  stilc  des  prime- 
rains  (anciens)  et  devanciers  nos  edifieurs  en  meurs  rede- 
vables à  présent  par  grâce  de  Dieu  et  sollicitude  de  pensée, 
emprons  (entreprends)  nouvelle  compillation  en  stile prosal 
et  hors  le  commun  ordre  de  mes  autres  jjassés ,  à  ce  meue , 
par  prince  monseigneur  le  duc  de  Bourgogne  Philippe ,  filz 
de  Jehan ,  jiar  la  grâce  de  Dieu  roy  de  France ,  jicir  lequel 
commandement  ceste  euvre  ay  emprise  {2),  suppliant  sa 

sur  un  bureau.  Elle  a  le  visage  rond  ,  les  traits  réguliers ,  le  teint  déli- 
cat et  assez  d'embonpoint  ;  ses  yeux  sont  fermés,  et  elle  parait  sommeil- 
ler. UI^e  robe  bleue,  brodée  d'or  par  le  bas.  et  doublée  de  feuille  morte, 
s'ouvre  sur  le  sein  et  laisse  entrevoir  un  corset  pourpre  brodé  d'or. 

(1)  Maître  Brunetto  Latini,  de  Florence,  qui  vivait,  selon  M.  Legrand 
d'Aussy,  vers  1260,  rend  bommage  à  la  langue  française  en  disant  au 
commencement  de  son  livre  du  Trésors  qui  parle  de  la  naissance  de  toutes 
choses,  et  se  trouve  coté  n»  11, 100  à  l'inventaire  de  la  Bibl.  de  Bourgogne. 

«  ...  Et  se  aucuns  demandoit por coy  chis  livre  est  escris  en  romains 
solonc  le  langaifje  de  France  puisque  nos  sûmes  yialieyi.  Je  déroie 
que  cite  est  par  deux  raisons.  L'une  que  nos  somes  en  France.  L'autre 
por  che  que  li  parleir  franchois  est  plus  delitable  et  plus  commune 
à  tous  langaiges...  »  (C'est-à-dire  répandue  chez   plus  de  nations). 

Ainsi  long -temps  avant  le  Dante,  qui  est  réputé  pour  le  père  de  la 
littérature  italienne, notre  langue  (car  nous  parlons  comme  les  Français, 
le  même  langage  des  vastes  contrées  des  Gaules),  était  celle  des  hommes 
placés  aux  sommités  de  la  grande  société  européenne. 

(2)  M.  DeLaserna  s'est  trompé,  en  disant  dans  son  Mémoire  historique 
sur  la  Bibliothèque  de  Bourgogne  (Brux.  1809),  que  la  Vie  de  Charles  V 
avait  été  composée  pour  Phiiippe-ie-Bon.  Il  est  évident  que  Christine  de 
Pisan  désigne  dans  cette  dédicace,  le  duc  Philippe-le-Hardi ,  fils  de 
Jcan-lc-Bon ,  roi  de  France,  et  non  son  petit-fds,  le  ducPhilippe-lc-Bon. 


(  316  ) 

digne  et  vertueux  humilité  que  le  défaut  de  la  faiblesse 
de  mon  sçavoir  soys  suppleye,  visant  moy  non  instruite  de 
science...  » 

Plusieurs  autres  ouvrages  commandés  par  le  duc  de 
Bourgogne,  attestaient  son  goût,  et  le  désir  de  ne  composer 
sa  librairie  que  de  bons  livres.  Elle  fut  encore  augmentée 
des  livres  assez  nombreux  qu'il  eut  de  la  succession  de 
Louis  de  Maie ,  comte  de  Flandre ,  mort  en  1384,  et  dont 
il  avait  épousé  la  fille.  Celle-ci  était  selon  le  témoignage 
d'un  auteur  contemporain,  «  ...  la  jjlus  noble  dame  alors 
vivant  et  la  plus  riche  jeulle  possesseresse  de  crestienté. 
Elle  venait  directement  par  femme  de  la  lignée  Charle- 

maine...  (1).  » 

M.  Peignot,  a  publié  l'inventaire  de  la  librairie  de  Bour- 
gogne, fait  après  la  mort  de  Philippe-le-Hardi,  en  1404. 
Il  a  pour  titre  :  Inventoire  des  livres  et  roumans  de  feu 
monseigneur  (Philippe-le-Hardi),  à  qui  Bien  pardonne , 
que  maistre  Richart  le  Conte ,  barbier  de  feu  mon  dict 
seigneur,  a  euz  en  garde ,  et  iceux  ont  été  baillés  à  Fran- 
chequin  de  Blandelze  (2).  Cet  inventaire  renferme  les 
titres  de  59  volumes.  Mais  nous  ferons  remarquer  que 
dans  un  autre  inventaire  qui  fait  suite  au  précédent  et 
rédigé  en  1405,  le  nombre  de  volumes  est  beaucoup  plus 
considérable;  le  récolement  s'élève  dans  celui-ci  à  1 17  ma- 
nuscrits; il  est  question  dans  cet  inventaire,  il  est  vrai, 
des  livres  de  la  duchesse  Marguerite  de  Flandre,  veuve 
de  Philippe-le-Hardi ,  morte  à  Arras ,  le  16  mars  1405. 

Jean-sans-Peur,  en  héritant,  en  1404,  des  riches  posses- 
sions de  Phihppe-le-Hardi,  hérita  aussi  de  son  goût  pour 


(  I  )  Voir  le  MS.  n»  9949  ,  de  linventairc  de  la  Bibliothèque  de  Bourgogne. 

(2)  Ce  Francliequin  a  été  préposé,  par  ordre  de  Jean-sans-Peur.  fils 
et  héritier  de  Philippc-lc-Hardi ,  à  la  garde  de  tous  les  biens-meubles 
portés  dans  l'inventaire. 


(  317  ) 

les  lettres,  mais  sa  vie  orageuse  (1)  ne  lui  permit  pas 
de  donner  autant  de  soin  que  son  père  à  raugmentalion  de 
sa  librairie.  Cependant  on  y  trouvait  plusieurs  livres  qui 
portaient  son  nom,  soit  dans  le  prologue  ou  dédicace, 
soit  comme  lui  ayant  été  donnés  eu  présent,  ou  exécutés 
par  ses  ordres  :  il  acheta  de  Pierre  Linl'ol,  libraire  de  l'uni- 
versil^de  Paris,  pour  150  écus  d'or  (2,250  ir.)  un  livre  en 
français,  nommé  Jalêre-le-Grand. 

Mais  il  était  réservé  à  Philippe-le-Bon,  successeur  de 
Jean-sans-Peur,  en  1419,  de  surpasser  son  père  et  son 
aïeul  et  tous  les  princes  de  son  siècle,  par  son  goût  pour 
les  lettres  et  son  amour  pour  les  livres,  malgré  les  terribles 
catastrophes  qui  signalèrent  une  trop  grande  partie  de  sa 
carrière. 

Ce  prince,  durant  son  long  règne,  quitta  rarement 
l'heureuse  Flandre,  où  tous  les  genres  de  talents  et  d'indus- 
trie étaient  encouragés;  il  augmenta  constamment  une  col- 
lection prolypographique  destinée  à  dépasser  par  sa  riches- 
se, les  limites  que  le  siècle  semblait  avoir  posées. 

C'est  ici  que  commence  une  ère  nouvelle  pour  la  biblio- 
thèque de  Bourgogne ,  car  ce  n'est  qu'à  partir  du  règne 
de  Philippe-le-Bon,  qu'elle  prit  véritablement  un  essor 
remarquable. 

Du  premier  abord,  nous  voyons  ce  grand  prince  recher- 


(1)  Ce  prince  qui  fut  assassiné  sur  le  pont  de  Montereau  ,  le  10  sep- 
teinpre  1419,  par  ordre  du  Dauphin  (Charles  Vil),  était ,  selon  l'auteur 
du  MS.  n°  9949.  «  ...  Moult  honnourant  les  sayes  et  vertueux,  grant 
justicier,  homme  apte  à  la  guerre,  amcmt  les  povres  et  les  riches , 
gardant  de  oppression.  Icellmj  entre  ses  autres  frères  vainquit  en 
bataille  les  Lyegois  en  leur  pays ,  et  moult  ama  et  soustint  la  cou~ 
ronne  de  France ,  dont  et  par  envie  de  la  diligence  qu'il  en  fit.  Il  fut 
soubz  umhre  de  paix  et  amour  mande  à  Monstreau  (Montereau),  où 
il  fut  le  hoir  de  lu  couronne  présent,  viurdriercment  occis  après  qu'il 
avoit  régenté  ses  pays  dont  les  subjectz  lamoient  chiercment  lespace 
de  quinze  ans.  m 


(  318  }j 

cher  les  livres  avec  passion;  rien  ne  lui  coulait  pour 
satisfaire  ce  goût.  Aussi  avait-il  pris  pour  principe  cette 
maxime  :  L'éducation  du  souverain  est  la  source  du  bon- 
heur d'une  nation. 

Guidé  par  cette  noble  émulation  du  génie,  il  reconnait 
l'indispensable  nécessité  de  transmettre  à  ses  enfants  le 
goût  des  sciences  (1). 

Véritable  fondateur  de  la  monarchie  des  Pays-Bas,  il 
fut  in<:ontestablement  le  plus  grand  prince  de  son  siècle , 
le  rival  et  peut-être  même  le  supérieur  du  roi  de  France, 
son  suzerain.  —  On  n'a  pas  oublié  que  Guillaume  Para- 
din  fait  dire  à  Philippe-le-Bon ,  dans  une  grande  assem- 
blée :  «  ...  Je  vueil  bien  que  chacun  sçache,  que  si  j'eusse 
voulu,  Je  fusse  roy  (2).  » 

//  était  homme  de  belle  stature ,  s'écrie  un  auteur  con- 
temporain ,  liault  et  droit,  aiant  face  assurée  coinme  un 
lyon  et  Joieuse  en  toute  modération.  Oncques  homme  à 
son  honneur  ne  toucha  quil  ne  s'en  vengast  (3). 

Arrière-petit-fils  de  la  branche  de  Valois,  il  avait  hérité 
de  l'amour  des  lettres,  qui  illustra  les  rois  Jean-le-Bon  et 
Charles-le-Sage  et  les  ducs  Philippe-le-Hardi  et  Jean-sans- 
Peur,  ses  ascendants.  Mais  il  contribua  beaucoup  plus 
qu'eux  à  la  renaissance  des  lettres,  en  rallumant  le  flam- 
beau des  arts  dans  nos  belles  provinces,  en  prodiguant 
l'or,  l'outremer  et  les  plus  parfaites  miniatures  pour  leur 
embellissement ,  et  en  ordonnant  la  traduction  en  langue 
française  des  meilleurs  classiques. 


(1)  On  sait  que  le  nombre  des  bâtards  reconnus  par  Philippe-le-Bon , 
était  de  dix-neuf  (et  non  de  dix-sept,  comme  le  disent  la  plupart  des 
Généalogistes).  Ils  tenaient  un  rang  à  sa  cour. 

(2)  Annales  de  Bourgogne ,  édition  de  Lyon  ,  1566  ,  pag.  883. 

(3)  Ce  passage  est  extrait  d'une  généalogie  inédite ,  faite  pour  Phi- 
lippe-le-Bon. Cotée  n»  9949  de  l'inventaire  de  la  Bibliothèque  de  Bour- 
gogne ;  ainsi  que  nous  venons  de  limliquer  plus  haut. 


(  319  ) 

La  plupart  de  ces  manuscrils  qu'on  admire  encore 
aujourd'hui  dans  la  bibliollièque  de  Bourgogne,  sont 
presque  tous  sur  vélin;  la  beauté  de  leur  écriture  et  la 
quantité  d'ornements  dont  ils  sont  décorés,  les  rendent 
infiniment  précieux;  leurs  anciennes  reliures,  à  en  juger 
par  celles  que  l'on  voit  encore,  étaient  généralement  en 
velours  de  diverses  couleurs,  garnies  de  coins,  de  clous 
et  de  fermoirs  d'argent  doré  (1);  tout  ce  luxe  d'ornements 
nous  semble  indiquer,  que  rien  de  ce  qui  pouvait  rendre 
un  livre  précieux,  n'avait  été  épargné  par  le  duc  Philippe- 
le-Bon. 

C'est  à  ce  prince  que  la  Belgique  est  redevable  de  ses 
premières  collections  scientifiques,  d'où  jaillirent  les  lu- 
mières des  connaissances  humaines,  qui  avec  celles  parties 
d'Italie  après  la  prise  de  Conslantinople ,  en  1453,  de- 
vaient au  XV^  siècle,  éclairer  la  civilisation. 

Après  avoir  bien  organisé  sa  librairie ,  il  établit  à 
Bruxelles  un  atelier  de  calligraphie,  et  il  nomma  directeur 
de  cette  école  des  beaux-arts,  le  savant  David  Aubert,  de 
Hesdin.  Cette  nouvelle  institution  eut,  dès  son  origine, 
un  parfait  succès;  les  nombreux  chefs-d'œuvre  qu'elle 
produisit  sont  admirés  avec  enthousiasme  par  nos  érudits 
du  XIX^  siècle  :  les  Belges  peuvent,  à  juste  titre,  reven- 
diquer l'honneur  de  ces  productions  nationales. 

Le  duc  Philippe-le-Bon ,  pour  avoir  dans  sa  librairie  des 
ouvrages  de  toutes  les  sciences  ,  appela  à  sa  cour,  des  mé- 
decins ,  des  mathématiciens,  des- jurisconsultes,  des  théo- 
logiens ,  des  poètes ,  des  romanciers ,  des  chrysographes  et 
des  tachygraphes,  qu'il  récompensa  généreusement,  et 
qu'il  encouragea  noblement  par  son  estime,  valeur  plus 
précieuse  que  l'or  et  l'argent.  «  Oui  !  nous  dit  Olivier  de  la 

(1)  Les  miniatures  pagiriales  des  manuscrits  n<"  9235  et  11129  ,^cor- 
roborent  entièrement  cette  allégation.  On  y  voit  des  volumes  reliés  dans 
ce  genre. 


(  320  ) 

Marche ,  «  ...  Nul  ne  s  en  allait  de  luy  qu'il  ne  fut  bien 
recampensé  (l).  » 

L'histoire  littéraire  du  raoyen-âge  nous  a  conservé  les 
souvenirs  des  grands  écrivains  qui  s'illustrèrent  dans  la 
carrière  des  belles  lettres  :  n'est-ce  pas  alors  que  Georges 
Chastelain,  Martin-le-Franc ,  Monstrelet,  la  Marche,  Phi- 
lippe de  Comines  et  tant  d'autres ,  marchèrent  en  avant 
dajis  la  Httérature  de  cette  époque? 

Philippe-le-Bon,  après  la  réunion  de  toutes  les  provinces 
belgiques  sous  sa  domination,  concentra  au  palais  de 
Bruxelles,  les  librairies  des  comtes  de  Flandre  et  des  ducs 
de  Brabant,  ses  prédécesseurs  (2). 

(1)  Liv.  I ,  pag.  494. 

(2)  M.  Barrois  ,  de  Lille ,  dans  son  excellent  ouvrage  sur  les  librairies 
protypograpliiques ,  des  fils  du  roi  Jean  (  impr.  à  Paris,  en  1830), 
signale  l'existence  aux  archives  de  Dijon ,  de  trois  inventaires  des 
bibliothèques  de  Bourgogne. 

Je  dis,  bibliothèques,  car  il  est  notoire  que  le  duc  Philippe-le-Bon , 
avait,  vers  1430,  trois  dépôts  littéraires  en  Belgique,  un  à  Bruges .  un  à 
Gand  et  un  à  Bruxelles. 

Le  premier  de  ces  dépôts,  selon  l'inventaire  cité  par  ce  savant,  renfer- 
mait déjà  en  Tannée  1467 1037  MSS. 

Celui  de  Gand  était  moins  considérable  ,  et  ne  dépassait 
pas,  selon  l'inventaire  fait  en  1485,  le  nombre  de 21       )) 

Le  dépôt  de  Bruxelles  ,  dont  l'inventaire  fut  confectionné 
deux  années  plus  tard  que  le  précédent,  constatait  la  pré- 
sence de 746       » 

Si  nous  additionnons  le  nombre  de  volumes  de  ces  trois 

librairies,  nous  trouvons 1804  3ISS» 

Ce  chiffre  est  considérable  et  pouvait  constituer  une  riche  librairie. 
Eh  ,  bien  !  ces  trois  librairies  du  duc  Philippe -le-Bon  furent  centralisées 
au  palais  de  Bruxelles,  antérieurement  à  l'année  1443,  puisque  David 
Aubert,  écrivain  contemporain,  affirme  (jue  la  librairie  de  Bourgogne, 
en  cette  même  année  1443,  était  la  plus  riche  du  monde.  Cet  auteur, 
comme  on  voit,  ne  parle  ici  que  d'un  seul  et  unique  dépôt  littéraire 
existant. 

Les  dates  postérieures  de  la  rédaction  de  ces  inventaires  (à  la  mort  de 
Philippc-lc-Bon)  font  présumer  que  ces  diverses  librairies,  après  leur 


(  321  ) 

Ces  anciens  princes  avait  également  aimé  les  lettres,  et 
ils  composèrent  même  des  poésies,  tandis  que  les  autres 
monarques  de  l'Europe  ne  se  livraient  guères  alors  qu'à 
des  projets  de  bataille  et  de  destruction. 

Ces  librairies  étaient  assez  considérables,  et  ne  prouvent 
pas ,  comme  les  autres  dépôts  littéraires,  la  pénurie  des 
manuscrits  à  cette  époque. 

La  maison  de  Bourgogne,  selon  le  témoignage  des 
auteurs  contemporains,  s'était  élevée  à  un  si  haut  degré 
de  splendeur  qu'elle  faisait  ombrage  à  toutes  les  cours  de 
l'Europe  et  en  était  l'admiration. 

Philippe-le-Bon ,  au  dire  d'Olivier  de  la  Marche,  était 

le  j)lus  riche  prince  de  son  tons , il  fut  si  renommé  que 

to7it  le  monde  en  disait  bien  (liv.  I ,  pag,  494). 

On  se  formera  une  idée  exacte  de  cette  splendeur,  lors- 
qu'on saura  que  le  duc  Philippe  entretenait  à  sa  cour  sept 
cent  quatre-vingt-douze  serviteurs;  ce  nombre  paraîtra 
peut-être  exagéré,  mais  nous  nous  rapportons  à  des  do- 
cuments authentiques  qui  se  trouvent  à  la  chambre  des 
comptes  à  Lille,  et  qui  sont  cités  dans  un  manuscrit  de  la 
bibliothèque  de  Bourgogne. 

On  peut  croire  qu'à  partir  de  cette  époque,  si  brillante 
pour  notre  pays ,  la  Belgique  devait  être  placée  au  pre- 
mier rang  parmi  les  grands  états  européens. 

En  effet,  il  est  démontré  de  la  manière  la  plus  incon- 
testable, qu'elle  était,  eu  égard  au  temps,  supérieure  à 

jonction  à  la  cour  de  Bruxelles,  ne  cessèrent  de  former  des  collections 
séparées  et  sous  les  noms  de  leur  séjour  primitif. 

M.  Barrois  a  transcrit,  avec  une  religieuse  fidélité,  le  texte  de  ces 
inventaires  en  faisant  imprimer  en  belles  lettres  gothiques  les  Commen- 
cemens  et  difjinimcns  de  chacun  d'icculx  volumes.  Nous  aurions  désiré 
qu'il  se  fût  montré  moins  avare  de  notes ,  et  qu'autant  qu'il  lui  eût  été  pos- 
sible, il  eût  désigné  les  manuscrits  qui  subsistent ,  ainsi  que  l'endroit  où 
on  les  conserve  ,  quoiqu'ils  soient  eu  majeure  partie  dans  la  bibliothèque 
de  Bourgogne. 


(  322  ) 

l'empire  Britannique  actuel,  comparé  au  reste  de  l'Eu- 
rope (1). 

La  bibliothèque  de  Bourgogne,  dès  celte  élévation  du 
duc  Philippe-le-Bon, s'accrut  d'une  manière  remarquable; 
car  alors .  le  chemin  du  progrès  lui  fut  largement  ouvert 
par  l'impulsion  donnée  aux  études,  et  on  peut  dire  qu'à 
partir  de  cette  période,  elle  tint  le  premier  rang  parmi  les 
belles  collections  littéraires.  C'est  alors  aussi,  que  des  hom- 
mes éclairés  se  firent  un  devoir  de  transmettre  à  la  posté- 
rité l'état  de  splendeur  de  cette  bibliothèque. 

Si  nous  nous  rapportons  au  témoignage  d'un  écrivain 
contemporain,  c'était  la  plus  riche  bibliothèque  du  monde. 
Voici  ce  que  dit  David  Aubert.  dans  sa  Chronique  abrégée 
des  Empereurs,  reposant  à  la  bibliothèque  de  Bourgogne. 
«  ...  Très-renoimné  et  très-vertueux  prince  Vhilippe ,  duc 
de  Bourg otjne ,  a  dès  long-temps  accoutumé  de  journelle- 
ment faire  devant  luy  lire  les  anciennes  histoires  j  et  pour 
estre  garny  d'une  librairie  noti  pareille  à  toutes  autres ,  il 
a  dès  son  Jeune  eaige  eu  à  ses  g  aiges  plusieurs  translateurs, 
grands  clercs ,  experts ,  orateurs,  historiens  et  escripvains, 
et  en  diverses  contrées  en  gros  nombre  diligemmeiit  labou- 
rans  tant  que  aujourdliui ,  c'est  le  prince  de  la  chrestien- 
neté ,  sans  réservation  aucune ,  qui  est  le  mieux  garny  de 

(1)  La  Bourgogne,  lArtois  .  les  comtés  de  Rétliel  et  de  Nevers  étaient 
alors  réunis  à  nos  provinces. 

Le  roi  de  France ,  Jean-le-Bon  ,  après  la  fameuse  bataille  de  Poitiers, 
en  1356,  fut  conduit  à  Londres  comme  prisonnier  du  roi  d'Angleterre., 
Son  (ils,  qui  est  notre  Philippe-le-Hardi  (on  sait  qu'il  reçut  ce  surnom 
à  la  même  bataille  de  Poitiers,  n'étant  âgé  de  13  ans:  sa  conduite  fut  digne 
d'admiration),  l'accompagna  dans  sa  captivité:  c'est  en  récompense  de 
cette  bienveillance  que  son  père  lui  donna  le  duché  de  Bourgogne  et  le 
titre  de  premier  pair  de  France.  L'union  de  Philippe  avec  la  comtesse 
Marguerite  de  Flandre  .  devint  la  base  du  premier  fondement  de  la 
maison  de  Bourgogne ,  destinée  à  réunir  sous  sa  domination  jtoutes  les 
provinces  belgiques.  C'est  sous  Philippe-le-Bon,  comme  on  sait,  que 
cette  agglomération  eut  lieu. 


(  323  ) 

authe?itique  et  riche  librairie  ^  corne  tout  se  peut pleitiement 
apparoir  :  et  combien  que  au  regard  de  sa  très-excellente 
mac/ H i fie e ne e,  ce  soit  petite  chose,  toutes  fois  en  doit-il  eslre 
perpétuelle  mémoire,  à  celle  fin  que  tout  se  mirent  en  ses 
hautes  vertus.  " 

Ou  peut  consulter  aussi  la  Chronique  de  Naples,  par  le 
même  David  Aubert ,  faite  en  1443,  et  qui  se  trouve  ac- 
tuellement à  la  Bibliothèque  du  roi,  à  Paris,  dont  le  pas- 
sage analogue  a  été  rapporté  par  M.  De  Laserna ,  dans  son 
Mémoire  historique  sur  la  Bibliothèque  de  Bourgogne. 

Nous  pourrions  encore  ajouter  à  la  louange  de  Philippe- 
le-Bon  et  au  passage  véridique  de  David  Aubert,  dont  le 
témoignage  est  ici  d'une  autorité  prépondérante,  les  pa- 
roles d'Olivier  de  la  Marche  lorsqu'il  s'exprime  à  propos 
du  trépas  du  duc  Phihppe. 

Il  mourut,  dit-il  (liv.  I,  pag.  494),  le  plus  riche  prince 
de  son  tems,  il  laissa  quatre  cens  mille  escus  d'or  comptans, 
soixante  mille  marcs  d' argent  en  vaisselle  courant ,  sans 
les  riches  tapisseries ,  les  bagues,  la  vaisselle  d'or  garnie 
de  pierreries  et  sa  librairie  moulte  grande  et  moulte  bien 
estofjfée  (fournie)  etptour  conclusion  il  mourut  riche  de  deux 
millions  d'or  en  meubles  seulement ,  et  pour  la  seconde 
extime ,  il  mourut  le  plus  large  et  le  plus  libéral  duc  de 
son  teins... 

Phihppe-le-Bon,  après  avoir  été  le  protecteur  des  scien- 
ces pendant  un  règne  glorieux  de  trente-sept  ans  sur  toute 
la  Belgique,  mourut  à  Bruges,  en  1467. 

Charles-le-Téméraire,  son  fils  légitime,  lui  succéda  dans 
ses  vastes  états  ;  ce  prince,  de  même  que  son  père,  avait  le 
goût  des  sciences,  et  il  attira  à  sa  cour  les  gens  de  lettres 
elles  personnes  distinguées  par  leur  savoir,  qu'il  encoura- 
gea d'une  manière  très-libérale  :  c'est  sous  son  règne,  que 
l'imprimerie  fut  apportée  à  Alost,  en  1473,  à  Louvain,- 
en  1474,  et  à  Bruges,  Anvers  et  Bruxelles,  en  1476. 


(  324  ) 

11  lit  transcrire  ,  pour  son  usage  particulier,  la  Cyropédie 
de  Xénopbon.  On  prétend  que  c'est  la  lecture  de  ce  même 
livre  qui  le  rendit  si  entreprenant  dans  les  guerres. 
Quoiqu'il  en  soit ,  nous  aimons  à  le  croire  par  les  paroles 
de  Philippe  de  Comines,  lorsqu'il  dit  dans  son  édition 
d'Elzévir,  à  la  page  361.  «  Il  désiroit  grande  gloire ,  qui 
estait  ce  qui  plus  le  mettoit  en  ses  guerres  que  nul  autre 
chose  et  eust  bien  voulu  ressembler  à  ces  anciens  j>rinces , 
dont  il  a  esté  tant  parlé  après  leur  mort..,  »  Eh,  bien  !  le 
héros  de  l'ancienne  Grèce,  dont  parle  Xénophon,  était 
propre  à  enflammer  le  cœur  du  duc  Charles;  Vasque  de 
Lucène,  traducteur  de  la  Cyropédie,  semble  aussi  nous 
dire  que  ce  prince  bourguignon  prit  pour  modèle  le  grand 
Cyrus ,  voici  ce  qu'il  rapporte  :  «  Quand  aulcuns  orront 
lire  ceste  histoire  du  premier  Cyrus  translatée  par  r)ioy  de 
latin  en  français.  Ensemble  quand  ils  regarderont  la  très 
grande  similitude  de  sa  vie,  tueurs  et  conditiotis  auxvostres, 
je  me  doute  qu'ils  ne  pensent  que  je  ne  laie  point  transla^ 
tée ,  mais  faicte  et  co?nposée  pour  deux  choses.  La  pre^ 
mière  adfui  de  vous  complaire  en  approuvant  tous  vos  fais 
et  vos  affections  jiarceque  de  tout  poins  ressemblez  ceulx 
de  Cyrus  qui  certes  fut  roy  très  glorieux  et  de  grant  renom. 
— La  seconde  adfui  de  faire  apparoir  que  les  statuts  et  or- 
donnances dudit  Cyrus  estoient  de  plus  grant  rigueur  et 
austérité  que  ne  sont  les  vostres. . .  tout  ainsi  quant  vous  vous 
mirerez  en  ce  livre  et  vous  vous  y  verrez  face  en  face  (avec 
Cyrus)«7zJo?/s  doitestre  eniyrisetenjoye  inestimable,..  (1)  » 

Le  duc  Charles-le-Téméraire,   à  l'exemple  de    Scipion 

(1)  Ce  texte,  nous  l'avons  transcrit  fulèlcment  d'après  roriginal  qui  se 
trouve  à  la  bibliothèque  de  Bourgogne,  n»  1 1703.  —  M-  Marchai ,  dans  un 
bulletin  de  l'Académie  de  Bruxelles  (12  octobre  1833),  donne  quelques 
détails  sur  cette  Cyropédie  qui  est  traduite  sur  le  texte  latin  du  Pogge , 
par  Vasque  de  Lucène. 

Ce  savant  académicien  fait  aussi  comparaison  des  deu.\  textes  ,  du 
Pogge  et  de  Philclfc. 


(  325  ) 

l'Africain  et  de  LucuUus(l),  n'avait  jamais  quitté  sa  Cyro- 
pédie;  il  est  très-probable  qu'il  l'avait  avec  lui  dans  ses 
bagages  lorsqu'il  fut  défait  à  Morat.  Ce  précieux  ma- 
nuscrit que  l'on  croyait  perdu  et  dont  M.  De  Laserna 
regrettait  vivement  la  perte,  vient  d'être  réintégré  dans  le 
précieux  dépôt  d'où  il  était  primitivement  sorti. 

C'est  S.  M.  la  reine,  qui  après  l'avoir  fait  acquérir  dans 
une  vente  publique  à  Paris,  en  a  fait  don  à  la  bibliothèque 
de  Bourgogne. 

Après  la  mort  tragique  de  Charles-le-Téméraire ,  arrivée 
sous  les  murs  de  Nancy  en  1477,  les  rênes  de  l'état  tom- 
bèrent dans  les  mains  d'une  jeune  personne  de  vingt  ans, 
Marie  de  Bourgogne. 

Il  fut  facile  à  Louis  XI,  qui  depuis  long-temps  cherchait 
le  moment  favorable  pour  anéantir  la  Maison  de  Bour- 
gogne, dont  la  puissance  lui  faisait  ombrage,  de  s'emparer 
de  l'Artois,  de  la  Boui-gogne  et  des  autres  apanages  qui 
avaient  été  cédés  par  son  bisaïeul  à  Philippe-le-Hardi. 
Une  chose  assez  singulière  et  qui  mérite  d'être  rapportée 
ici,  c'est  que  ce  roi  ignorait,  dans  le  principe,  que  le 
duché  de  Bourgogne  fût  réversible  à  la  couronne  de 
France,  à  défaut  d'héritiers  mâles.  Louis  XI,  en  appre- 
nant la  mort  du  duc  Charles,  éprouva  une  telle  joie  que 
son  caractère  dissimulé  ne  lui  permit  pas  même  d'en  cacher 
les  transports.  Après  s'être  emparé  de  la  Bourgogne,  il  y 
nomma  pour  gouverneur-général,  Georges  de  la  Tré- 
mouille,  seigneur  de  Craon,  son  premier  chambellan,  et 
dans  l'ivresse  de  sa  joie,  lui  donna  tous  les  meubles  et 
joyaux  du  feu  duc,  qui  étaient  en  la  maison  de  Dijon  (2j. 

(1)  Voyez  De  la  Mothe  Levayer.  —  Historiens  grecs  et  latins. 

(2)  ÎJQÎ.  Peigiiot  et  Barrois  ont  également  pubîié  !a  liste  des  livres , 
compris  dans  linventaire  du  16  mars  1477,  rédigé  par  ordre  de  Louis  XI 
à  Dijon,  après  la  mort  de  Cliarles-le-Témeiaire. 

Mais  il  est  à  remarquer  que  ces  deux  savants  bibliopliiles  français  sont 
ici  en  contradiction  :  M.  Peignot  désigne  les  titres  de  quatre-vingt-un 


(  326  ) 

Mais  parlons  de  l'époux  de  l'iiérilière  de  Bourgogne,  qui 
fut  Maximilien,  archiduc  d'abord,  ensuite  empereur,  et 
voyons  quelle  face  prend  la  bibliothèque  de  Bourgogne 
sous  son  gouvernement. 

Le  règne  de  ce  prince  fut  funeste  à  ce  riche  dépôt  litté- 
raire, qui  éprouva  des  pertes  considérables.  Ce  monarque 
mesquin  et  mauvais  financier,  engagea  et  même  abandonna 
quelquefois  à  des  Lombards  et  à  des  Juifs,  les  pierres  pré- 
cieuses des  couvertures  de  manuscrits,  et  les  volumes  eux- 
mêmes  :  pour  comprendre  cela ,  il  faut  se  ressouvenir 
qu'autrefois  les  livres  se  posaient  à  plat  sur  des  pupitres 
et  des  lutrins,  ils  y  étaient  souvent  enchaînés. 

C'est  de  cette  époque  que  proviennent  les  livres  de  Bour- 
gogne, qui  sont  dans  les  bibliothèques  en  Allemagne,  en 
France  et  en  Suède  (1). 

L'archiduc  Philippe-le-Beau,  et  surtout  sa  sœur  Margue- 
rite d'Autriche,  née  à  Bruxelles  le  10  janvier  1480,  eurent 
dès  leur  enfance  un  goût  décidé  pour  l'étude.  Us  rétablirent 
les  désordres  qu'avait  causés  leur  père  à  la  bibliothèque  de 
Bourgogne,  en  acquérant  la  plupart  des  manuscrits  de 
cette  riche  librairie  qui  se  trouvaient  éparpillés  et  en  y 
ajoutant  les  plus  précieuses  éditions  princeps  qui  parais- 
saient alors.  On  peut  dire ,  que  Marguerite  d'Autriche  fut 
pour  la  Belgique,  ce  que  François  P"  fut  pour  la  France, 

Cette  princesse ,  si  célèbre  dans  le  monde  littéraire  du 
XYP  siècle,  gouverna  nos  provinces  sous  la  minorité  de 

volumes  ,  et  M.  Bairois  en  parlant  du  même  inventaire  ,  n'en  signale  que 
vingt-huit  :  cette  diflerence  est  notable,  et  lune  des  deux  listes  est  fau- 
tive, bien  qu'elles  paraissent  être  rédigées  toutes  les  deux  d'après  l'inven- 
taire original. 

(1)  La  bibliothèque  de  Stockholm  possède  un  magnifique  manuscrit  de 
la  Cyropédie  de  Xénophon ,  provenant  de  l'ancienne  bibliothèque  de 
Bourgogne.  Celle  <.le  Lyon  renferme  également  celui  de  la  Répartition 
tJu  Pécheur.  Voyez  le  n»  1105  du  catalogue  MS.  de  cette  bibliothèque, 
par  M.  Delandinc. 


(  327  ) 

son  neveu  Gharics-Quint.  Elle  était  remarquable,  pour  me 
servir  ici  de  l'expression  de  M.  De  Laserna,  par  son  esprit, 
sa  gaieté  et  ses  malheurs;  la  musique  fut,  sous  son  gouver- 
nement, portée  à  un  degré  de  perfection  j  usqu'alors  inconnu. 

Simple  régente  de  quelques  provinces,  ajoute  le  même 
savant,  elle  fit  plus  par  son  zèle  et  par  son  amour  pour  les 
progrès  des  arts,  que  de  grands  monarques  malgré  l'éten- 
due de  leurs  moyens. 

Plusieurs  savants  d'une  haute  réputation  s'attachèrent  à 
elle,  on  compte  le  célèbre  Erasme  de  Rotterdam ,  Corneille 
Agrippa,  Jean-le-Maire  des  Be'ges,  Remacîe  de  Floreiniesj 
Pierre  de  la  Rue,  Josquin  de  Prés  et  Jean  Molinet  :  ce 
dernier  fut  son  bibliothécaire. 

On  voit  encore  aujourd'hui  à  la  bibliothèque  de  Bour- 
gogne trois  livres  de  musique,  dans  lesquels  on  trouve 
quelques  chansons  composées  par  Marguerite  d'Autriche: 
souvent  elle  s'amusait  à  faire  des  rimes  et  des  vers  où  l'on 
remarque  de  la  naïveté  et  des  saillies  d'esprit;  c'est  ainsi 
qu'on  trouve  dans  le  troisième  volume  de  la  Fleur  des  His- 
toires, n°  9258,  qui  a  servi  à  son  éducation,  ces  deux 
lignes  rimées  écrites  de  sa  main  : 

Penses  à  moi,  7na  cousine, 
C'est  Maryot  qui  fit  la  rime. 

On  peut  croire  que  sous  la  régence  d'une  princesse 
aussi  amie  des  belles-lettres  qu'elle  le  fut,  la  bibliothèque 
de  Bourgogne  ne  devait  rien  laisser  à  désirer.  Aussi, 
s"accrut-t-elle  considérablement  à  cette  époque,  tant  par 
des  imprimés  que  par  des  manuscrits  :  parmi  les  manus- 
crits qu'elle  légua  à  ce  riche  dépôt,  nous  citerons  celui 
qui  renferme  les  basses-danses  uolées  en  musique,  que 
l'on  dansait  à  la  cour  brillante  de  cette  princesse. 

La  complainte  qu'elle  fit  à  la  cour  de  France  pour 
Maximilien  son  père,  à  l'époque  où  elle  était  fiancée  au 
Dauphin  (Charles  VIII ).  est  connue  de  nos  littérateurs. 


(  328  ) 

Néanmoins,  nous  eu  extrayons  quelques  vers,   afin  de 

donner  à  juger  à  nos  lecteurs  de  la  littérature  de  cette 

époque. 

I. 

Moy  Marguerite,  de  toutes  fleurs  le  chois, 
Ay  esté  myse  an  yrand  veryier  franchois... 
Pour  demourer  croisti'e,  et  chaiiter  ai7ichois 
Que  fusse  yratide,  empres  la  fleur  de  lis. 
Là  ay  receu  tous  biens,  et  tout  esbanois, 
Là  ay  veujoustes,  danses  et  tournois; 
Que  ces  yrandz  biens  me  sont  prins  et  fallis, 
Pas  n'en  doivent  les  miens  estre  jolis. 

II. 

Je  yay  esté  noblement  arousée. 
Plus  de  dix  atis  de  très  noble  rosée. 
Guidant  estre  royne,  et  espousee 
Au  Roy  Charte,  et  corone  j>ortée. 
Mais  bien  parchoy  que  m,e  suis  abusée, 
Par  quoy  doy  estre,  en  mon  cuer  dolorée, 
Car  de  par  luy,  ay  esté  refusée. 
Et  sy  ma  fait,  hors  du  veryier  osier, 
Pour  une  aultre  en  mon  lieu  bouter. 

III. 

O  vous,  dames,  damoiselles  et  pucelles, 
Vous  bourgeoises,  gentile  damoiselles. 
Vous  marchandes  riches,  et  toutes  celles 
A  marier,  pre7iez  cy  exemplaire; 
Mirez  vous-y  et  lisez  mes  libelles. 
N'alliez  pas  vos  faces  qui  sont  belles, 
A  hommes  nulz,  qui  vous  soient  rebelles; 
Comme  de  moy  est  fait,  dont  me  doit  desplaire. 
Mais  puisque  à  Dieu  plaist  j)ar  raison  me  doit  plaire. 

Après  la  mort  de  Marguerite  d'Autriche  la  (/ente  de- 
moiselle (1),  arrivée  à  Malines  en  1530.  Charles-Quint 

(1)  Chacun  sait  que  cette  princesse  fut  fiancée,  pour  la  troisième  fois, 
à  Jean,  fils  de  Ferdinand ,  roi  de  Castiile  et  d'Aragon.  Le  vaisseau  sur 
lequel  elle  était  pour  passer  en  Espagne,  fallit  périr  par  la  violence  de 
la  tempête.  On  dit  que  ce  fut  dans  cette  occasion  qu'elle  composa  son 
cpitaphe  en  ces  termes  : 

Ci  gist  Margot  la  génie  demoiselle , 
Qu'eut  deu.r  maris,  et  si  mourut  pucelle. 


(  329  ) 

accablé  du  poids  de  sa  vaste  domination,  donna  pour 
gouvernante  aux  Belges,  Marie  d'Autriche,  sa  sœur,  reine 
douairière  de  Hongrie.  Cette  princesse  était  digne  de  mar- 
cher sur  les  traces  de  Marguerite,  sa  tante;  comme  elle, 
elle  eut  soin  d'augmenter  la  bibliothèque  de  Bourgogne, 
en  faisant  apporter  de  Hongrie  plusieurs  manuscrits,  dont 
deux  extrêmement  précieux,  quelle  avait  hérités  de  feu 
son  mari  Louis  H ,  mort  à  la  bataille  de  Mohatz  contre 
les  Turcs, 

Ces  manuscrits  avaient  été  confectionnés  pour  le  célèbre 
Mathias  Gorvin,  roi  de  Hongrie  (1),  auquel  avait  succédé 
LadislasVI,roideHongrieetde  Bohème  etpèredu  dit  Louis. 

Le  premier  de  ces  deux  manuscrits  est  un  Missel ,  écrit 
sur  vélin;  c'est  un  chef-d'oeuvre  de  calligraphie.  M.  le  con- 
servateur nous  a  fait  connaître  l'histoire  de  ce  magnifique 
manuscrit  :  il  nous  sera  permis  en  profilant  de  cette  bien- 
veillante communication,  de  lui  exprimer  ici  tous  nos 
remercîmenls  :  M.  Marchai  réunit  deux  qualités  également 
essentielles  dans  un  bibliothécaire,  t  obligeance  et  l'instruc- 
tion. 

Ce  livre  fui  fait  par  ordre  de  Mathias  Corvin ,  à  Florence, 
en  1485,  comme  l'atteste  la  suscription  du  titre  :  Acta- 
ventes  de  Actaventibus  de  Florentia ,  hoc  opus  illuîninavit 
A.  B.  M.  CCGG  LXXXV. 

Leporlraitduroiet  deBéatrixd'Arragon,  sa  femme,  sont 
en  style  numismatique  d'or,  au  bas  du  verso  du  feuil- 
let 411.  A  la  partie  supérieure  du  texte  et  dans  d'autres 
endroits  çà  et  là  en  ce  volume,  sont  les  insignes  de  la 
Maison  de  Bourgogne  et  de  la  Toison  d'or. 

Il  y  a  au  commencement  du  texte  deux  pages  en  regard , 

(1)  Ce  monarque  avait  à  Bude  un  très-belle  bibîioUièqiie,  qu'il  enrichit 
des  ouvrages  les  plus  curieui  et  des  MSS.  les  plus  rares  ;  on  dit  qu'il  sa- 
vait presque  toutes  les  langues  de  l'Europe  :  sa  cour  était  te  rendez-vous 
des  plus  excellents  peintres  d'Italie. 

22 


(  330  ) 

lie  la  plus  grande  magnificence;  dans  le  lointain  et  en 
perspective,  on  découvre  la  ville  de  Bude;  on  y  lit  sur 
pourpre  :  Incipit  orclo  Missalis  secundum  consuetudineni 
Ro?)ianœ  Curiœ. 

Au  canon,  il  y  a  deux  autres  pages  aussi  en  regard,  dont 
l'une  représente  le  Calvaire.  On  reconnaît  que  Rubens 
s'est  inspiré  sur  ce  livre  pour  composer  un  de  ses  plus 
précieux  tableaux  :  il  y  a  par  entourage ,  au  milieu  de 
l'or  et  des  plus  riches  arabesques,  toute  l'histoire  du  Nou- 
veau Testament  et  le  Jugement  dernier. 

Selon  l'usage  pour  les  Missels ,  il  y  a  deux  autres  grandes 
miniatures;  l'une  commence  le  proprium  sanctnrum  et 
représente  le  Christ  appelant  S'-Pierre  et  son  compagnon 
au  lac  de  Gapharnaiim ,  pour  les  faire  pécheurs  d'hom- 
mes; l'autre,  à  la  Toussaint,  représente  les  Elus  dans  la 
gloire  céleste. 

Depuis  Charles-Quint,  ce  livre  servait  aux  inaugura- 
tions des  ducs  de  Brabant;  on  voit  aux  deux  pages  des 
miniatures  du  canon,  l'empreinte  bien  reconnaissable  de 
la  main  d'Albert  et  de  celle  d'Isabelle  qui  firent  serment 
sur  ce  volume,  le  26  novembre  1599.  La  cérémonie  avait 
lieu  en  plein  air,  par  un  temps  neigeux,  ces  pages  et 
quelques  autres  endroits  portent  les  marques  du  décalque 
de  la  peinture  occasionné  par  l'humidité.  C'est  sans  doute 
un  souvenir,  le  bibliothécaire  Miraeus  l'a  attesté  sur  une 
des  pages  du  volume  :  super  his  Evangelys  seu  missali 
A/hertus  et  Isahella ,  B el(/ a r uni  principes ,  suum  jura- 
mentum  solemniter  fecerunt  1599, 

Auprès  de  cette  attestation,  il  va  celles  des  inaugurations 
de  Philippe  V,  le 21  février  17  ;  du  marquis  de  Prié,  pour 
Charles  VI;  de  Marie-Thèrese,  le  20  avril  1744;  de  Jo- 
seph II,  le  17  juillet  1781.  Plusieurs  de  nos  contempo- 
rains ont  vu  la  dernière  cérémonie,  qui  était  celle  de 
François  11 ,  en  personne,  le  23  avril  1794. 


(  331  ) 

Ce  manuscrit  lui  enrichi  en  Belgi([ue  par  de  nouvelles 
miniatures,  entre  autres  d'une  quantité  de  portraits  qu'on 
regrette  de  ne  pas  connaître  ;  l'école  flamande  voulut  lutter 
dans  ce  beau  livre  avec  l'école  italienne,  l'on  ne  sait  à 
laquelle  des  deux  on  doit  donner  la  préférence;  car  la 
richesse  des  arabesques,  des  caraayeux,  des  insignes  est 
variée  avec  un  art  tellement  admirable,  que  nos  peintres 
d'aujourd'hui  tenteraient  en  vain  de  l'imiter. 

Tels  sont  les  détails  que  l'on  peut  donner  succinctement 
sur  ce  manuscrit  très-connu. 

Une  notice  sur  ce  Missel  se  trouve  rapportée  par  M.  l'abbé 
Chevalier,  dans  l'ancien  recueil  des  Mémoires  de  l'Acadé- 
mie de  Bruxelles,  tom.  4,  pag.  493  et  suiv. 

L'autre  manuscrit  de  Marie  d'Autriche,  qui  était  en 
cpjelque  sorte  la  contre-partie  de  celui-ci ,  est  à  la  biblio- 
thèque de  l'Escurial,  à  Madrid;  c'est  un  magnifique  Evan- 
géliaire  à  lettres  d'or  et  appelé  par  cette  raison ,  le  Livre 
d' Or.  Il  fut  donné  à  Philippe  II,  par  Marié,  sa  tante. 

En  compensation  de  cette  perte  ,  il  existe  à  la  biblio- 
thèque de  Bourgogne,  un  manuscrit,  qui  peut  servir  de 
comparaison  à  celui  de  l'Escurial.  Comme  celui-là,  il 
mérite  à  juste  titre  d'être  appelé  le  Livre  d' Or.  C'est  un 
Psautier,  petit  in-folio,  sur  parchemin,  d'un  exécution 
vraiment  magnifique,  écrit  en  lettres  d'or  et  bleu  dit 
outremer  ^  la  confection  de  ce  beau  MS.  a  dû  coûter  une 
somme  immense.  Il  est  d'une  belle  conservation,  el  l'or 
des  caractères,  quoique  saillant,  n'a  rien  perdu  de  sa  fraî- 
cheur. Ce  livre  est  orné  d'un  grand  nombre  de  miniatures 
croisées  en  colombier,  sur  fond  d'or,  d'azur  ou  de  pourpre, 
ces  deux  derniers  fonds  sont  fleurs  de  lis  d'or;  elles  parais- 
sent être  du  Xllï^  siècle  et  ne  se  rapportent  point  au  texte 
des  psaumes  :  on  peut  en  conclure  qu'elles  sont  tirées  d'un 
autre  ouvrage  et  qu'à  cause  de  leur  bonté,  et  du  prix 
de  l'or  et  de  l'outremer,  on  les  a  intercalées  dans  le  Psautier. 


(  332  ) 

L'écriture  est  sur  deux  justifications,  alternalivement 
d'or  et  d'outremer.  Les  armoiries  de  Flandre  et  de  Nevers, 
qui  sont  apposées  aux  nombreux  iconismes  de  ce  livre, 
sont  la  preuve  irréfragable  qu'il  appartenait  au  comte 
Louis  de  Maie  ;  les  armoiries  d'Artois,  de  Bourgogne- 
Flandre  ,  démontrent  qu'il  a  été  ensuite  la  propriété  du 
duc  Philippe-le-Hardi ,  son  gendre.  Ce  précieux  manuscrit 
forme  aujourd'hui  le  n"  9961  de  l'inventaire  de  la  biblio- 
thèque de  Bourgogne. 

Charles-Quint,  dans  une  grande  assemblée  des  Etats- 
Généraux,  tenue  à  Bruxelles  le  25  décembre  1555,  remit 
à  son  fils  ,  Philippe  II ,  toutes  les  provinces  belgiques. 

Il  ne  nous  appartient  point  de  juger  ici  le  règne  de  ce 
prince  (qui  était  d'ailleurs  né  et  élevé  au  cabinet  de 
Madrid,  parmi  les  Espagnols),  par  les  atrocités  qu'il  fit 
commettre  sur  nos  ancêtres  (l),  mais  par  le  goût  héri- 
ditaire  des  sciences  et  du  travail  qui,  depuis  deux  siècles, 
avait  élevé  si  haut  nos  princes  bourguignons. 

Pendant  les  quatre  années  qu'il  résida  aux  Pays-Bas, 
il  prit  un  soin  particulier  de  sa  librairie;  il  fil  rassembler 
tous  les  manuscrits  épars  qui  se  trouvaient  dans  plusieurs 
villes  ,  pour  enrichir  sa  bibliothèque  à  la  cour  de  Bruxel- 
les. C'est  alors  que  Viglius  fut  nommé,  par  une  patente 
du  roi,  le  12  avril  1559.  trésorier  et  garde  de  la  dite 
bibliothèque.  Ce  citoyen  vertueux  et  savant,  qui  se  con- 
cilia l'estime  des  deux  partis  pendant  les  troubles  du 
règne  de  Philippe  II,  fit  rédiger  l'inventaire  de  ce  riche 
dépôt  pendant  les  années  de  1577  à  1579  (2)  ;  nous  devons 

(1)  Dans  une  notice  sur  les  Gueux  à  l'Hôtel  de  Ctilembourg,  imprimée 
en  1838,  j'ai  fait  connaître  le  caractère  de  Philippe  II ,  à  l'égard  des 
Belges. 

(2)  M.  Voisin  s'est  donc  trompé  dans  sa  notice  sur  la  bibliothèque  de 
Bourgogne  {Revue  de  Bnix elles,  juin  1839),  lorsqu'il  fait  remonter  la  ré- 
daction de  cet  inventaire ,  à  l'époque  de  la  mort  de  Charies-le-Téméraire. 


(  333  ) 

justifier  le  mérite  intrinsèque  de  cet  inventaire,  parce 
qu'il  fait  connaître  à  la  République  des  lettres,  la  richesse 
de  l'ancienne  librairie  de  Bourgogne  à  celte  même  époque. 

Elle  renlermait  aloi-s 958  MSS. 

Et 683  imprimés. 

Ce  qui  formait  un  total  de 1641   volumes, 

nombre  assez  considérable;  mais  l'on  doit  remarquer 
qu'elle  avait  été  plus  nombreuse  sous  le  duc  Philippe- 
le-Bon. 

Cet  inventaire  est  encore  inédit:  un  employé  de  cet  éta- 
blissement, M.  Van  Beveren,  en  fait  la  transcription.  Nous 
avons  lieu  d'espérer  que  l'impression  n'en  sera  pas  indé- 
finiment ajournée. 

La  bibliothèque  de  Bourgogne  s'accrut  considérable- 
ment sous  Philippe  II,  mais  pendant  les  troubles  et  les 
guerres  intestines  ,  ce  dépôt  fut  presque  stationnaire. 
Il  reprit  pourtant  son  antique  splendeur  sous  le  règne 
réparateur  de  nos  bons  archiducs  Albert  et  Isabelle,  en 
1598.  On  doit  dire  avec  justice,  que  leur  règne  fut  pour 
la  Belgique,  ce  que  le  siècle  de  Philippe  et  d'Alexandre  fut 
pour  la  Grèce,  et  celui  d'Auguste  pour  Rome. 

Le  savant  Bruxellois,  Aubert  Le  Mire,  appelle  Mirœus 
selon  la  mode  de  son  temps,  fut  leur  bibliothécaire.  C'était 
un  digne  successeur  de  David  Aubert  et  de  Viglius  ;  il 
jouissait  de  toute  la  confiance  des  archiducs;  il  fit  un  in- 
ventaire vers  l'an  1612  :  cette  pièce,  transportée  à  Paris 
en  1794,  n'a  pas  encore  été  restituée. 

Les  règnes  du  cardinal-infant,  de  Léopold  et  de  l'élec- 
teur de  Bavière,  furent  également  favorables  à  la  biblio- 
thèque de  Bourgogne. 

Pendant  le  cours  de  cette  période ,  un  édit  de  l'an  1595 , 
renouvelé  en  1684,  ordonna  aux  libraires  de  déposer  à  la 
Bibliothèque  royale  deux  exemplaires ,  bien  reliés  en  cuir, 
de  tous  les  ouvrages  qu'ils  feraient  paraître,  afin  d'obtenir 


(  334  ) 

le  privilège.  Ces  édils,  rappelés  de  nouveau  en  1755  ^ 
furent  abrogés  par  la  loi  française  de  1793,  au  délrimeut 
de  la  bibliothèque  de  Bruxelles  et  au  bénéfice  de  celle  de 
Paris.  En  l'année  1817,  une  nouvelle  loi  des  étals-généraux 
unis  fut  également  préjudiciable  aux  Belges;  car  sur  cinq 
des  exemplaires  dont  le  dépôt  était  prescrit  au  ministère, 
il  y  en  avait  deux  pour  la  bibliothèque  de  La  Haye  et  rien 
pour  Bruxelles  :  mais  aujourd'hui  qu'une  nouvelle  biblio- 
thèque royale  des  imprimés  est  fondée,  nous  devons  récla- 
mer toute  la  bienveillance  du  ministère  pour  la  remise  en 
vigeur  de  ces  anciens  édits. 

Revenons  à  l'époque  de  l'incendie  de  la  cour  en  1731  ; 
il  fut  funeste  à  la  bibliothèque  de  Bourgogne;  plusieurs 
manuscrits  devinrent  la  proie  des  flammes,  les  autres  fu- 
rent relégués  dans  les  souterrains  de  la  chapelle  du  palais, 
où  ils  restèrent,  pour  ainsi  dire  oubliés  jusqu'en  1746» 

La  richesse  manuscrite  était  réduite,  par  celte'  catas- 
trophe, à  527  volumes  (1). 

L'incendie  avait  été  si  violent  pendant  une  semaine 
entière,  que  selon  le  rapport  de  Foppens,  dans  ses  Annales 
de  Bruxelles,  les  brandons  s'élançaient  jusqu'auprès  de 
l'église  du  Sablon  :  c'est  aussi  dans  cet  incendie  que  furent 
brûlées  les  archives  de  Bourgogne. 

Le  maréchal  de  Saxe ,  commandant  supérieur  de  l'armée 
française,  s  étant  rendu  maître  de  Bruxelles  en  1746, 
trouva  dans  les  souterrains  de  la  chapelle  du  palais,  le 
dépôt  des  manuscrits  de  la  bibliothèque  de  Bourgogne, 
dont  le  lieu  de  cachette  était  même  ignoré  de  la  plupart 
des  habitants  de  Bruxelles.  Il  fit  enlever  un  grand  nom- 
bre de  ces  manuscrits  que  l'on  transporta  à  Paris. 

La  faible  partie  des  volumes  qui  restait  encore,  fut 
transportée  à  son  tour  de  la  Vieille  Cour  en  1754,  à  la 

(1)  Fraiicqucn,  catalogue  inédit  de  la  Bibliothèque  de  Bourgogne,  1731. 


(  335  ) 

grande  salle  carrée  (bàlie  en  1625  par  ordre  de  l'infanle) 
dans  la  rue  d'Isabelle ,  et  mise  sous  la  garde  de  Woulers , 
chanoine  de  Lierre. 

Cet  édifice  occupait  l'emplacement  de  l'escalier  de  la 
bibliothèque  et  une  partie  de  la  rue. 

Jusqu'en  1772,  la  bibliothèque  de  Bourgogne  servait 
uniquement  à  l'instruction  et  au  délassement  du  gouver- 
neur-général ;  mais  le  bon  prince  Charles  de  Lorraine, 
dont  la  mémoire  sera  éternellement  chère  aux  Belges,  la 
fit  ouvrir  au  public.  Alors  elle  prit  un  nouvel  essor  lit- 
téraire par  les  dons  qu'on  y  faisait  et  par  les  achats  de 
manuscrits  précieux. 

Le  prince  Charles  avait  pour  ministre  le  savant  Cobeulzl, 
qui  le  seconda  parfaitement,  qui  fut  le  créateur  de  l'Aca- 
démie des  Sciences  et  qui  mit  à  la  disposition  de  ce  corps 
littéraire  la  bibliothè(iue  de  Bourgogne,  pour  travailler  à 
l'histoire  nationale. 

Une  mort  presque  subite  emporta  Cobenlzl  avant  d'a- 
voir vu  l'ouverture  de  la  bibliothèque  au  public. 

Le  prince  de  Starhemberg ,  successeur  du  comte  de 
Cobentzl,  continua  le  même  système,  mais  avec  moins 
de  zèle. 

Elle  eut  encore  à  souffrir  une  seconde  invasion  fran- 
çaise, qui  vint  la  spolier  de  nouveau  en  1794  (les  ma- 
nuscrits enlevés  par  le  maréchal  de  Saxe,  avaienf  été 
restitués  en  1770)  ;  des  commissaires  firent  transporter  à 
Paris  presque  tous  les  manuscrits,  sans  laisser  aucun  récé- 
pissé. Mais  le  gouvernement  français  les  restitua  en  1815  : 
la  plupart  de  ces  volumes  revinrent  de  la  capitale  du 
monde  civilisé ,  avec  une  riche  reliure  en  maroquin  rouge, 
marquée  au  chiffre  de  Napoléon. 

La  bibliothèque  de  Bourgogne  éprouva  des  pertes  no- 
tables pendant  les  deux  translations  opérées  par  la  France 
eii  1746  et  1794. 


(  336  ) 

On  s'est  peu  ressenti  des  suites  de  la  première  trans- 
lation, qui  avait  été  faite  avec  exactitude  par  le  savant 
Godefroi  ;  quelques  volumes  seulement  furent  oubliés 
involontairement ,  et  la  restitution  en  eut  lieu  en  vertu 
du  traité  du  16  mai  1769. 

Mais  le  second  enlèvement  sous  la  république  française, 
fut  plus  nuisible;  il  donna  lieu  à  des  plaintes,  les  com- 
missaires français  se  refusèrent  de  dresser  l'inventaire  des 
objets,  qu'ils  appelaient  les  conquêtes  de  la  victoire. 

Le  22  novembre  1815,  le  gouvernement  des  Pays-Bas 
envoya  à  Paris  des  Belges,  délégués  pour  recueillir  les 
manuscrits  et  les  autres  monuments  littéraires  et  scienti- 
fiques enlevés  en  Belgique. 

Cette  mission  délicate  présentait  d'autant  plus  de  diffi- 
cultés, qu'il  fallait  choisir  les  manuscrits  de  Belgique  et 
sans  inventaire,  parmi  les  100,000  volumes  manuscrits  qui 
existaient  alors  dans  la  bibliothèque  nationale  à  Paris. 

On  peut  croire  que  dans  une  telle  confusion  de  richesses 
littéraires,  plusieurs  manuscrits  auront  échappé  à  la  révi- 
sion faite  par  les  préposés  belges.  En  effet,  ceux  qui  ont 
■visité  la  bibliothèque  royale  à  Paris,  ont  dû  remarquer  un 
Froissart  magnifique,  comme  aussi  un  Quinte-Curce,  la 
Grandeur  de  Marie,  le  Flavius- Joseph,  et  plusieurs  autres 
beaux  maimscrits  enlevés  à  la  Belgique  sous  la  république 
française. 

Il  nous  semble  qu'une  demande  émanée  de  la  part  du 
gouvernement  belge,  au  cabinet  des  Tuileries,  suffirait  pour 
réclamer  ces  volumes;  car,  en  toute  justice,  ces  manuscrits 
appartiennent  à  la  Belgique,  puisqu'ils  ont  été  enlevés  par 
ordre  des  représentants  de  la  république  française. 

Belges,  faisons  valoir  nos  droits,  et  espérons  que  le  gou- 
vernement français  daignera  satisfaire  à  cet  acte  d'éviction. 

Pendant  la  réunion  à  la  France  sous  le  Directoire  exé- 
cutif,  des   commissaires   venaient  souvent   inspecter   les 


(  337  ) 

dépôts  de  la  Belgique;  comme  Ton  craignait  de  nouvelles 
translations,  M.  le  conservateur  De  Laserna  s'entendit  avec 
M.  Gérard,  archiviste  de  la  chambre  des  comptes,  pour 
soustraire  à  leur  rapacité  le  peu  de  manuscrits  qui  étaient 
restés.  On  les  cacha  dans  les  tardes  de  la  chambre  des 
comptes,  ce  qui  se  fit  pendant  la  nuit  et  avec  facilité,  parce 
que  la  bibliothèque  avait  été  replacée  dans  l'hôte!  actuel 
des  Travaux  piibUcs,  après  la  démolition  de  la  salle  de  la 
rue  d'Isabelle ,  en  1795;  la  chambre  des  comptes  était  à 
l'hôtel  actuel  des  Finances,  bâti  exprès  pour  les  archives, 
et  que  l'on  détourna  de  sa  destination  en  1821 ,  je  ne  sais 
pour  quelle  raison. 

Après  la  spoliation  de  la  bibliothèque  de  Bourgogne , 
en  1794,  le  savant  M.  De  Laserna  rétablit  une  autre  biblio- 
thèque, par  le  soin  qu'il  prit  de  faire  déposer  dans  le  bâti- 
ment de  l'ancienne  Cour  à  Bruxelles,  tous  les  livres,  qui 
provenaient  de  la  suppression  des  maisons  religieuses.  Cette 
bibliothèque  devint  celle  de  l'Ecole  centrale,  qui  depuis 
cette  époque  se  trouve  placée  dans  les  mêmes  locaux. 

L'ancienne  bibliothèque  de  l'Ecole  centrale  a  été  partagée 
en  1810  :  les  livres  imprimés  furent  donnés  par  l'empereur 
Napoléon  à  la  ville  de  Bruxelles;  les  manuscrits,  avec  ceux 
qui  revinrent  de  Paris  en  1815,  restèrent  à  l'Etat.  Ce  der- 
nier dépôt  forme  aujourd'hui  la  véritable  bibliothèque  de 
Bourgogne. 

C'est  ainsi  que  se  séparèrent  les  manuscrits  de  Bour- 
gogne des  impressions ,  qui  devinrent  la  propriété  com- 
munale de  cette  ville  :  cette  mesure  déchargeait  le  trésor 
impérial,  sans  préjudicier  à  l'utilité  publique;  c'était  fort 
bien  aussi  long-temps  que  la  ville  n'était  qu'un  chef-lieu 
de  département,  mais  aujourd'hui  qu'elle  est  la  capitale 
d'un  royaume,  il  y  aurait  peut-être  de  l'équité  à  revenir 
sur  cette  mesure,  en  prenant  des  arrangements  libres  et 
volontaires  avec  la  ville;  est-il  juste  qu'elle  soit  chargée 


(  338  ) 

d'une  espèce  de  servitude,  en  fournissant  la  communica- 
tion de  ses  livres  au  gouvernement?  A-l-elle  les  moyens 
de  faire  des  acquisitions  pour  s'élever  au  niveau  de  la 
bibliothèque  royale  actuelle?  Je  parle  uniquement  dans 
l'intérêt  de  l'utilité  publique  et  de  la  splendeur  nationale. 

M.  van  Hulthem  (1),  dès  l'année  1813,  avait  succédé 
à  M.  De  Laserna,  lorsqu'au  mois  de  mars  1827,  un  incen- 
die, provenant  de  la  négligence  des  ardoisiers,  faillit  dé- 
truire en  entier  le  palais  du  Musée.  Le  feu  se  manifesta 
pendant  qu'ils  étaient  allés  dîner.  M.  Van  Hulthem  était 
alors  à  Gand,  il  avait  emporté  les  clefs  avec  lui,  il  fallut 
briser  les  portes  des  armoires  pour  jeter  les  manuscrits 
par  les  fenêtres. 

C'est  après  cette  catastrophe  que  M.  Van  de  Weyer, 
bibliothécaire  de  la  ville,  fut  nommé  conservateur  de 
la  biblollîèque  de  Bourgogne. 

Au  mois  de  février  1830  ,  l'emploi  de  conservateur  de 
la  bibliothèque  de  Bourgogne  fut  supprimé. 

M.  Lorlye,  secrétaire  archiviste  de  l'état  à  Bruxelles, 
et  M.  Marchai,  employé  provisoire  aux  dites  archives, 
eurent  ordre  de  reprendre  ce  dépôt  et  de  le  réunir  aux 
archives  de  l'état  :  ainsi  les  Saints-Pères^  les  Bibles  et  les 
Lihri  precum ,  SiWài&aX  faire  partie  des  actes  diplomati- 
ques ? 

Ces  messieurs  lardèrent  à  remplir  cette  mission  désagra- 
ble,  jusqu'à  cequ'aumois  de  juillet  suivant,  le  prince  royal 
de  Wurtemberg  étant  h  Bruxelles  avec  le  prince  d'Orange, 
M.  le  bourgmestre  de  Wellens  informa  M.  Marchai,  que 
ces  hauts  personnages  voulaient  visiter  la  bibliothèque  de 
Bourgogne.  MM.  Lortye  et  Marchai  renvoyèrent  cet  avis 
à  31.  Van  de  Weyer  qui  en  avait  encore  le  dépôt. 

(1)  Ce  riche  particulier,  mort  à  Gand ,  en  1832  ,  a  laissé  aux  amis  des 
sciences,  nnc  belle  et  nonibrcnsebibliodièciuc  .  qui  a  été  acquise  ,  comme 
on  sait,  par  le  gouvernement. 


{  339  ) 

Une  missive  d'improbalion  pour  avoir  lardé  d'exéculcr 
l'arrêlé  de  reprise,  leur  fui  envoyée  par  l'adminishaleur 
Van  Ewyrk,  el  dès  lors  celle  reprise  cul  lieu  le  19  du 
même  mois.  La  révolution,  donl  les  résullals  lurenl  la 
séparation  de  la  Belgique  de  la  Hollande ,  éclala  peu  de 
temps  après. 

Après  un  intervalle  de  dix  mois,  la  bibliothèque  de 
Bourgogne  fui  réorganisée  par  un  arrêté  du  régent, 
M.  le  baron  Surlel  de  Chokier,  du  24  avril  1831  ;  elle  était 
destinée,  par  cet  arrêté,  à  devenir  la  base  d'un  Musée 
historique,  à  renfermer  des  livres,  des  médailles,  etc.,  etc. 

M.  Blarchal ,  intendant-général  des  provinces  lilirien- 
nes  sous  l'empire,  fui  nommé  conservateur  par  ce  même 
arrêté.  Cet  estimable  compatriote  qui  tient  un  rang  distin- 
gué parmi  les  savants,  trouva  en  entrant  en  fonction,  tous 
les  manuscrits  gisant  pêle-mêle  par  terre,  dans  la  salle  du 
dépôt.  Il  eut  le  courage  de  les  reclasser  et  de  les  déposer 
dans  des  armoires  convenablement  appropriées  à  cet  effet. 
Il  fit  la  réouverture  de  la  bibliothèque  de  Bourgogne  au 
public,  le  jour  même  de  l'arrivée  du  roi  Léopold  en  Bel- 
gique. 

M.  Marchai  met  en  ce  moment  la  dernière  main  à  la 
rédaction  du  catalogue  de  ces  précieux  manuscrits.  Ce 
grand  ouvrage  de  plusieurs  mille  lignes  d'impression  ne 
peut  manquer  d'attirer  l'attention  et  mériter  à  son  modeste 
auteur,  l'estime  et  la  reconnaissance  de  tous  les  bibliogra- 
phes éclairés  ;  car  il  sera  en  quelque  sorte  l'étalage  d'un 
proême  de  toutes  les  connaissances  humaines,  que  dis-je? 
il  fera  connaître  à  la  face  des  nations  nos  richesses  litté- 
raires (1). 

(1)   La  confection  dun  catalogue  des   manuscrits  cîTre  plus  d'une 
I     difficulté  ,  celle  de  la  bibliothèque  Harieiennc .  des  UISS.  en  Angleterre, 
a  demandé  dix  années  de  travail  à  ses  infatigables  collaborateurs:  cette 
<li(riculté,  consiste,  non-seulement  dans  l'écriture  et  ses  nomI)reuscs 


(  340  ) 

La  nalion  peut  être  fière  de  posséder  dans  sa  capi- 
tale, la  bibliothèque  de  Bourgogne;  ce  riche  dépôt  ren- 
ferme actuellement  20,000  ouvrages  distincts  (exclusive- 
ment manuscrits)  (1).  Plusieurs  de  ces  précieux  ouvrages 
sont  encore  inédits.  Nous  citerons  entre  autres  la  fa- 
meuse collection  des  Âcta  Sanctorum,  du  16  octobre  au 
31  décembre.  C'est  sans  contredit,  la  plus  précieuse  col- 
lection agiographique  de  l'Europe.  Il  ne  s'agit  pas  seule- 
ment ici  des  miracles  de  la  Vie  des  Saints,  mais  d'une 
foule  de  découvertes  historiques  et  archéologiques,  qui 
font  de  cette  collection  une  mine  inépuisable  de  trésors 
pour  notre  histoire  nationale. 

On  avait  réuni  à  celte  bibliothèque  ,  avant  notre 
révolution  de  1830,  par  les  soins  de  M.  Dugniole,  alors 
grand  référendaire  au  ministère  de  l'intérieur,  ce  recueil 
immense  et  précieux  des  Bollandistés  de  l'abbaye  de  Ton- 


gerloo. 


Nous  sommes  heureux  de  pouvoir  annoncer  aux  savants 
agiographes,  que  le  gouvernement,  dont  les  vues  d'en- 


abréviations ,  mais  dans  la  grande  diversité  de  matières  que  chaque 
MS.  renferme:  on  est  donc  obligé  de  repasser  tous  les  MSS.  feuillet  par 
feuillet  :  ce  travail  aussi  long  que  fastidieux  ,  est  cependant  indispensa- 
ble pour  la  classification  du  catalogue  par  ordre  de  matières. 

Oui!  a  (lit  M.  Beuchot ,  on  ne  connaît  pas  assez  les  difficultés  que 
présente  Ibistoirc  littéraire  de  la  bibliographie  à  ceux  qui  la  cultivent. 
Les  travaux  de  ce  genre  sont  pénibles,  minutieux,  sans  éclat,  sans 
gloire,  sans  profit  aujourd'hui.  Ils  sont  cependant  utiles,  et  l'on  doit 
tenir  compte  à  leurs  autiurs  des  veilles  nombreuses  et  des  recherches 
immenses  que  leur  coûtent  souvent  ces  ouvrages. 

(1)  Je  dis  vingt  mille  ouvrages  distincts,  car  la  chose  la  plus  remar- 
quable d'un  manuscrit,  cest  la  nature  de  son  contenu:  une  bible  par 
exemple,  renferme  quelquefois  des  documents  historiques,  contemporains 
de  l'écrivain  ;  de  simples  Heures  contiennent  souvent  des  aventures  che- 
valeresques ou  des  pièces  satyriques  ,  tandis  quimc  chronique  commen- 
çant à  la  création  du  monde  se  termine  quelquefois  par  un  journal  d'é- 
troite localité. 


(  341  ) 

couragcment  sont  si  justement  appréciées  par  les  amis  des 
sciences,  a  déjà  donné  un  subside  à  la  nouvelle  société 
des  Bollandistes  de  Bruxelles,  pour  la  continuation  de 
l'impression  de  cet  ouvrage. 

Ce  riche  dépôt  littéraire  renferme  également  d'excellents 
classiques  grecs  et  latins,  dont  quelques-uns  ont  échappé 
au  sac  de  Constantinople  en  1453  ;  on  voit  sur  l'un  de  ces 
BISS.  ,  la  signature  du  fameux  Chalchodplis.  Il  y  a  aussi 
quelques  livres  arabes,  hébreux,  turcs,  persans  et  irlan- 
dais. 

Le  plus  ancien  que  nous  ayons  remarqué,  est  un  Sancti 
Cœsarii  opéra;  c'est  un  traité  ascétique,  comme  l'indique 
son  titre  ,  par  conséquent  peu  intéressant  pour  la  science. 
Mais  sous  le  rapport  de  son  ancienneté,  il  est  extrêmement 
précieux,  et  il  paraît  remonter  au  milieu  du  VIP  siècle, 
sous  le  règne  du  roi  Dagobert  I". 

Dans  plusieurs  autres  anciens  manuscrits,  on  remarque 
des  Palimpsestes  antérieurs  à  cette  époque. 

Nous  ne  prétendons  pas  entrer  ici  dans  des  détails  sur 
l'importance  d'un  grand  nombre  de  ces  manuscrits,  nous 
aimons  mieux  laisser  au  jugement  des  connaisseurs,  le 
soin  d'en  apprécier  le  mérite. 

Un  véritable  honneur  à  rendre  à  nos  productions  lit- 
téraires, ce  serait  d'encourager  les  écrivains  à  faire  dépo- 
ser leurs  minutes  dans  la  bibliothèque  de  Bourgogne. 
Mais  il  faudrait  régler  par  des  dispositions  quels  seraient 
les  ouvrages  dignes  d'y  être  admis,  et  donner  l'assurance 
aux  auteurs  que ,  pendant  leur  vie  entière ,  la  bibliothè- 
que se  considérerait  uniquement  comme  consignataire  de 
leurs  écrits,  qu'ils  pourront  à  leur  gré  les  retirer,  pour 
les  modifier ,  les  améliorer ,  pour  les  faire  copier  ou 
imprimer  en  tout  on  en  partie. 

La  bibliothèque  de  Bourgogne  surpasse  tous  les  autres 
dépôts  littéraires  pour  la  beauté,  et  nous  osons  le  dire,  la 


(  342  ) 

profusion  des  miniatures;  leur  belle  exéculion  rappelé  le 
pinceau  de  Van  Eyck  et  de  Hemling  et  donne  une  haute 
idée  du  talent  des  miniatores  du  moyen-âge  :  leurs  pein- 
tures, d'une  délicatesse  extrême,  présentent  une  foule  de 
détails  touchés  avec  esprit,  des  draperies  bien  jetées,  dont 
les  étoffes  décèlent  une  finesse  et  une  fermeté  de  pinceau 
admirable;  des  intérieurs  habilement  ménagés,  une  mer- 
veilleuse multitude  de  figures,  dont  les  expressions  sont  aussi 
naturelles  que  variées,  et  même,  ce  qui  est  plus  rare,  des 
preuves  de  l'entente  de  la  perspective.  Quant  au  costume,  il 
est  plein  d'anachronismes;  on  voit  que  le  peintre  a  constam- 
ment substitué  son  siècle  à  ceux  qui  l'avaient  précédé,  et 
qu'il  a  reproduit  ce  qu'il  avait  sous  les  yeux ,  au  lieu  de  s'en 
rapporter  à  la  tradition  ou  à  son  imagination.  Le  catalogue 
de  la  bibliothèque  de  Bourgogne,  par  M.  Marchai,  offrira 
à  ses  lecteurs  des  copies  fidèles  de  plusieurs  de  ces  belles 
miniatures  (1).  Une  observation  inspirée  par  l'inspec- 
tion de  toutes  les  figures,  c'est  que  lorsqu'elles  ont  été 
dessinées,  la  barbe  n'était  de  mise  ni  parmi  les  séculiers, 
ni  parmi  le  clergé  (2)  et  que  les  femmes  relevaient  leurs 
cheveux  de  manière  à  les  cacher  entièrement  sous  le  bon- 
net pointu ,  recouvert  d'une  large  gaze  empesée,  de  forme 
carrée  ou  triangulaire ,  dont  leur  tête  était  parée.  La  pou- 
laine  (3)  revient  partout,  et  l'affection  de  pousser  le  ventre 
en  avant  paraît  avoir  été  une  des  grâces  à  la  mode  parmi 
le  sexe. 


(1)  La  confection  de  ces  vignettes  est  confiée  à  M.  Debrou ,  artiste  dont 
le  talent  et  l'habileté  nons  font  espérer  le  plus  heureux  résultat. 

(2)  Histoire  des  révolutions  de  la  barbe  des  Français.  Paris  ,  Ponthieu, 
1826,  pag.  25. 

(3)  Souliers  fort  pointus  ,  et  dont  la  pointe  s'allongeait  en  proportion 
de  la  qualité  de  la  personne  qui  les  portait  ;  cette  pointe  était  longue  de 
six  pouces  pour  les  particuliers  ,  d'un  pied  pour  les  gens  riches  et  de 
deux  pieds  pour  les  princes.  (Yoyez  Roquefort,  Gloss.de  la  lang.  rom.,  2.) 


(  343  ) 

La  célèbre  bibliolhcque  de  Bourgogne,  dont  nous  ve- 
nons de  retracer  toutes  les  vicissitudes,  est  actuellement 
située  au  palais  de  l'ancienne  Cour.  Le  local  se  compose 
de  deux  belles  et  grandes  salles,  dans  lesquelles  se  trou- 
vent les  armoires  fermées  à  ciels ,  contenant  les  manuscrits. 

La  première  salle  en  entrant,  qui  fait  face  à  la  porte 
d'entrée  de  la  galerie  des  tableaux,  est  celle  de  la  Reine 
Louise.  C'est  de  là  que  l'on  jouit  sur  la  ville  et  la  cam- 
pagne, d'une  des  plus  belles  vues  que  l'on  puisse  imaginer. 

On  remarque  dans  cette  même  salle,  une  inscription 
dans  laquelle  l'histoire  de  cette  bibliothèque  est  contenue 
succintement,  mais  clairement;  la  voici  : 

CETTE  AMIQCE  BIBLIOTHÈQUE  ROYALE, 

FORMÉE  DES  LIBRAIRIES  QUE  LES  DUCS  DE  BOURGOGNE   AVAIENT  CRÉÉES, 

POUR  l'instruction  ET   LE  DÉLASSEMENT  DES  PRINCES  DE  LEUR  SANG. 

AUGMENTÉE  PAR  CHARLES-QUINT,  PAR  ALBERT  ET  ISABELLE, 

RENFERMANT  DES  MANUSCRITS  PRÉCIEUX  DE  DOUZE  SIÈCLES, 

TRANSPORTÉE  EN  PARTIE   A  PARIS  EN  17-46,  RESTITUÉE  EN  1770. 

ENLEVÉE  DE  NOUVEAU   EN  1794  ,  RENDUE  EN  181J5; 

RÉDUITE  AUX  MSS.  ;  RÉUNIE   AUX  ARCHIVES  EN  1830  PAR  LE  ROI  DES  P.-BAS. 

REORGANISÉE  ET  RÉOUVERTE  AU  PUBLIC  ,  EN  1  83  1 ,  ELLE  s'eST  TRÈS  AUGMENTÉE  : 

ELLE  EST  RÉUNIE  A  LA   BIBLIOTHÈQUE  ROYALE,  CRÉÉE  EN  1  8â7. 

Mais  c'est  dans  l'autre  salle,  celle  de  Marie-Thérèse,  que 
l'on  doit  admirer  les  vitraux  peints,  qui  font  face  à  la  cour 
du  Musée.  Le  plus  grand .  celui  qui  se  trouve  superposé  à 
îa  partie  supérieure  de  la  fenêtre,  représente  l'imitation 
jd'une  inscription  tumulaire  à  la  mémoire  de  nos  meilleurs 
Jjrinces;  aux  quatre  coins,  sont  les  armoiries  du  royaume 
de  Belgique,  de  Bourgogne,  d'Autriche  et  d'Espagne,  en 
Souvenir  de  ces  diverses  dynasties  qui  régnèrent  sur  nos 
provinces. 

j  A  la  partie  inférieure  de  la  même  fenêtre,  sont  deux 
[nédaillons  en  ovale,  aux  armoiries  de  Bourgogne  et  au 
ihilFre  du  roi  régnant;  ils  sont  mis  dans  un  encadrement 


(  344  ) 

à  ogives,  afin  que  la  fenêtre  soit  en  harmonie  avec  la 
srrande  verrière  et  les  médaillons. 

Ces  beaux  vitraux  ont  été  confectionnés  par  M.  Capro- 
nier,  en  1832. 

C'est  dans  cette  même  salle  que  l'on  voyait  jadis  les 
portraits  des  ducs  de  Bourgogne ,  enchâssés  dans  de  som- 
bres boiseries.  Cette  chronologie  artistique  se  composait 
des  portraits  suivants  : 

1"  Louis  de  Maie,  comte  de  Flandre,  qui  régna  de  1346 
à  1384;  —  2°  Marguerite  de  Brabant,  de  1347  à  1368;  — 
3«  Philippe-le-Hardi,  de  1384  à  1404;  ~  4°  Jean-sans- 
Peur,  de  1404  à  1419;  ~  5°  Philippe-le-Bon,  de  1419  à 
1467;  —  6°  Charles-le-Téméraire,  de  1467  à  1477;  — 
T  Marie  de  Bourgogne,  de  1477  à  1482;  —8°  Maximilien, 
de  1477  à  1482;  —  9-  Philippe-le-Beau,  de  1482  à  1506; 

—  10"  Charles-Quint,  de  1506  à  1555;  —  IT  Philippe  II, 
de  1 555  à  1 598  ;  —  1 2°  l'archiduc  Albert ,  de  1 598  à  1 62 1  ; 

—  13"  l'infante  Isabelle,  de  1598  à  1633;  —  14"  le  prince 
Charles,  de  1744  à  1780;  -  15"  Marie-Thérèse,  de  1740 
à  1780;  —  1 6"  Cobenzl ,  ministre  en  1770;  —  17"  Joseph  II, 
de  1780  à  1790. 

11  y  a  lacune,  comme  on  voit,  dans  cette  série  chrono- 
logique. Neuf  de  ces  portraits  sont  anciens;  les  modernes 
sont  dûs  aux  pinceaux  habiles  et  exercés  de  nos  jeunes 
artistes  :  MM.  Diez,  Storm,  Van  Hyck,  Delvigne,  Phiiip- 
pekin  et  M"^  Fanny  Corr. 

Ces  tableaux  sont  actuellement  placés  dans  la  salle 
supérieure  de  ce  dépôt. 

La  bibliothèque  de  Bourgogne  s'est  enrichie  considéra- 
blement sous  le  gouvernement  actuel  ;  les  achats  des 
manuscrits  qui  se  font  chaque  jour,  ont  augmenté  ce 
dépôt  à  un  tel  maximum  que  les  armoires  sont  presque 
devenues  insuffisantes. 

Pour  suppléer  à  ce  défaut  d'emplacement,  on  étabht 


(  345  ) 

au-dessus  des  armoires  cl  dans  les  deux  salles  une  galerie , 
dont  l'éléganle  simplicité  répondra  à  la  niajeslé  du  dépôt. 

Nous  ajouterons  que  cette  bibliothèque  n'a  jamais  été 
si  florissante  que  depuis  la  révolution  de  1830. 

On  ne  peut  contester  que  cette  antique  librairie  de  nos 
anciens  princes  bourguignons,  ne  soit  aujourd'hui  l'un  des 
ornements  de  la  capitale.  Elle  transmettra  à  la  postérité 
l'amour  des  Belges  pour  la  culture  des  sciences. 

Les  régnicoles  et  surtout  les  étrangers  y  viennent  puiser, 
chaque  jour ,  des  renseignements  précieux  sur  toutes  les 
branches  des  connaissances  humaines. 

Parmi  les  augustes  personnages  qui  l'ont  honorée  de  leur 
visite,  nous  citerons:  LL.  MM.  les  reines  des  Français  et 
des  Belges,  LL.  AA.  RR.  les  ducs  d'Orléans,  de  Nemours  et 
le  prince  de  Joinville. 

En  terminant  ici  notre  narration  sur  la  bibliothèque  des 
ducs  de  Bourgogne ,  nous  devons  féliciter  le  gouverne- 
ment d'avoir  l'ait,  en  1836,  l'acquisition  de  la  précieuse 
collection  de  livres  du  savant  bibliophile  Van  Hulthem. 

Cette  heureuse  acquisition,  devenue  le  corollaire  du 
précieux  dépôt  des  manuscrits  de  Bourgogne,  est  destinée 
à  former  dans  la  capitale  du  royaume ,  une  bibliothèque 
digne  de  la  nation,  à  l'instar  des  autres  établissements  de 
ce  genre  qui  existent  dans  les  principales  capitales  de 
l'Europe. 

C'est  en  posant  le  fondement  de  ce  nouvel  édifice  lit- 
téraire, que  les  Belges  seront  appelés  à  ouvrir  de  nouveau, 
à  la  face  des  nations ,  les  belles  et  fécondes  pages  de  leurs 
annales. 

La  Belgique,  cette  terre  classique  des  beaux-arts,  vivra 
désormais  en  état  libre  et  indépendant,  au  milieu  de  l'Eu- 
rope, sous  l'égide  du  bonheur,  fruit  de  la  paixj  si  utile  aux 
nations. 

Nous  ne  remplirions  pas  exactement  la  tâche  que  nous 


(  346  ) 

nous  sommes  imposée,  si  nous  passions  sous  silence  la  col- 
lection elhnographiquej  composée  de  costumes,  d'arcs, 
de  flèches,  de  carquois,  de  berceaux,  de  pirogues,  de  san- 
dales et  de  chevaux  empaillés,  qui  ne  se  recommande  pas 
moins  à  l'attention  de  l'archéologue. 

Cette  collection  ethnographique,  qui  faisait  autrefois  par- 
tie du  Musée  de  Bruxelles,  se  trouve  aujourd'hui  reléguée 
dans  une  salle  supérieure  delà  bibliothèque  de  Bourgogne. 

Nos  lecteurs  nous  sauront  gré,  sans  doute,  de  leur  don- 
ner ici  une  description  succincte  de  chacun  de  ces  objets. 

\°  Un  habit  de  cour,  ayant  appartenu  au  roi  d'Angle- 
terre, Charles  II. 

On  sait  que  ce  malheureux  prince,  après  la  mort  tra- 
gique de  son  père  Charles  F*^,  fut  poursuivi  par  Cronwel, 
l'usurpateur  du  gouvernement. 

Le  jeune  Charles  II,  pour  échapper  à  ses  mains  san- 
guinaires, vint  se  réfugier  sur  notre  continent  :  Paris  et 
Bruxelles  devinrent  les  séjours  favoris  de  ce  noble  et  in- 
fortuné monarque,  qui  devait,  après  onze  années  de  ca- 
lamités passées  sur  une  terre  étrangère,  remonter  sur  le 
trône  de  ses  prédécesseurs. 

2"  Le  manteau  de  Montézuma,  empereur  du  Mexique , 
entièrement  confectionné  en  plumes  rouges  :  ces  plumes 
remarquables  sont  superposées  les  unes  aux  autres. 

3"  L'arc  et  les  flèches  empoisonnées,  renfermées  dans 
un  carquois,  à  l'usage  des  Esquimaux.  L'arc  surtout  est 
supérieurement  bien  travaillé, 

4"  Le  berceau  de  l'empereur  Char  le  s- Quint.  Ce  berceau 
est  sans  contredit  l'un  des  objets  les  plus  précieux  de  nos 
antiquités  nationales  :  une  preuve  irréfragable  qu'il  a  ap- 
partenu à  Charles-Quint,  c'est  qu'on  y  aperçoit  encore  les 
traces  des  armoiries  de  cet  empereur. 

5°  JJne inrogue  en  cuir.  Elle  provient,  selon  la  tradition 
la  plus  commune,  des  sauvages  du  Mexique;  sa  longueur 


(  347  ) 

mesure  5  mëlres  et  56  centimèlrcs.  Elle  est  remarquable 
surtout  en  ce  qu'elle  ne  peut  contenir  qu'un  seul  homme. 

C'est  au  moyen  de  ce  batelet  que  les  naturels  détruisent 
les  vaisseaux  marchands,  en  plongeant  dans  la  mer  et  en 
faisant  filtrer  l'eau  dans  la  cale  du  vaisseau,  à  l'aide  d'un 
instrument  tranchant. 

6°  Une  paire  de  sandales  et  un  bouclier  en  bois,  parfai- 
tement conservés. 

7°  Le  cheval  empaillé  de  l'infante  Isabelle,  lorsqu'elle 
fit  son  entrée  à  Bruxelles,  lequel  elle  monta  aussi  au  siège 
d'Ostende  en  1604.  Il  est  de  race  andalouse  et  le  même 
qui,  par  sa  nuance,  a  donné  le  nom  à  la  couleur  Isabelle  : 
ce  cheval  a  porté  une  selle  de  200,000  florins,  garni  de 
diamants  et  de  rubis. 

8°  Le  cheval  e7?ipaillé  de  l'archiduc  Albert,  qui  lui  sauva 
la  vie  au  long  siège  d'Ostende,  de  1601  à  1604,  où  il  reçut 
une  balle  dans  le  poitrail. 

Ce  cheval  morave  est  remarquable  par  sa  petite  taille- 
il  conserve  encore  aux  pieds  ses  fers  primitifs. 

Nous  n'entrerons  pas  ici  dans  des  détails  sur  le  mauvais 
état  de  conservation  de  ces  objets;  leur  existence  seule  nous 
rappelle  une  foule  de  souvenirs  historiques. 

Un  cabinet  d'objets  d'antiquités  existait  déjà  à  Bruxelles 
dès  le  règne  de  Marguerite  d'Autriche;  car  Albert  Durer, 
contemporain  de  cette  princesse ,  raconte  dans  son  Voyage 
en  Belgique  (1) ,  qu'il  a  vu  à  la  cour  de  Madame  Blarguerite 
deux  chambres  toutes  remplies  d'objets  provenant  du  pays 
d'or  (Amérique). 

Parmi  ces  objets,  figuraient  certainement  le  manteau  de 
Montèzuma  et  la  pirogue  que  nous  venons  de  mentionner. 

« 

(1)  M.  Van  Hasselt  a  donné  l'analyse  et  la  traduction  du  Voyage  d'Al- 
bert Durer  en  Belgique  '.Revue  de  Bruxelles,  mois  de  décembre  1838  et 
janvier  1839. 


(  348  ) 

La  Revue  encyclo2Jédique ,  qui  s'imprimait  à  Bruxelles 
il  y  a  quelques  années,  a  inséré  dans  un  de  ses  derniers 
N"'  (si  ma  mémoire  est  fidèle)  une  liste  des  objets  d'anti- 
quités que  l'on  conservait  dans  la  grande  écurie  du  palais 
à  Bruxelles.  Cette  liste  ne  fait  point  mention  des  objets 
que  nous  venons  de  rapporter,  à  l'exception  cependant 
des  deux  chevaux. 

Une  autre  revue  périodique,  l'^r^/s/e^ avait  adressé  dans 
le  temps,  à  l'autorité  chargée  de  la  direction  des  beaux- 
arts,  quelques  questions  relativement  aux  objets  d'anti- 
quités que  devait  posséder  le  Musée  de  cette  ville. 

Les  objets  d'antiquités  dont  parle  YArtiste,  sont  précisé- 
ment ceux  qui  se  trouvent  aujourd'hui  à  la  bibliothèque 
de  Bourgogne  (1). 

Cette  revue  réclamait  avec  raison ,  contre  l'insouciance 
marquée  que  l'on  montre  pour  ces  richesses  historiques, 
dont  les  autres  nations  sont  si  fières  et  à  la  conservation 
desquelles  elles  consacrent  des  fonds  considérables. 

Florian  Frocheur. 


(1)  Nous  devons  dire  que  la  présente  rédaction  était  déjà  achevée , 
lorsque  nous  apprîmes  que  ces  objets  avaient  été  réunis  à  ceux  du 
Musée  d'Antiquités. 


(  349  ) 


iîtanuBcrtts  aut0grapl)c 


0 


!>E 


M.  LAMBIN, 


AnClUVISTE     DE     LX     VILLE     D  Y  P  H  E  S. 


Après  M.  Gyseleers-Thys,  archiviste  de  la  ville  de 
Malines ,  M.  Lambin  peut  être  regardé  comme  le  INesloi 
des  archivistes  de  la  Belgique.  Il  a  consacré  toute  sa 
vie  à  recueillir  des  documents  sur  l'histoire  nationale  ,  et 
principalement  sur  celle  de  la  ville  d'Ypres,  son  lieu 
natal.  Le  nombre  des  renseignements  qu'il  a  réunis  est 
immense.  On  jugera  de  l'activité  de  ce  savant  aussi  con- 
sciencieux que  modeste,  lorsqu'on  saura  qu'il  a  com- 
posé trente-deux  manuscrits,  qui  formeraient  plus  de  cin- 
quante volumes  in-S",  et  qu'il  a  écrit  de  sa  main  environ 
quatre-vingt  volumes  de  toutes  dimensions.  Les  archives 
municipales,  auxquelles  il  est  préposé  depuis  tant  d'an- 
nées, ont  été  explorées  par  lui  dans  les  moindres  détails. 
On  sait  que  ce  dépôt  est  un  de  ceux  qui  sont  classés  avec 
le  plus  de  soin ,  d'ordre  et  de  méthode ,  et  pour  être 
fidèles  à  la  vérité,  il  faut  le  dire,  tout  Thonneur  en  revient 


(  350  ) 

à  M.  Lambin  ,  qui  depuis  quarante  ans,  s'est  eu  quelque 
sorte  cloîtré  dans  ses  occupations  archéologiques. 

M.  Lambin  a  bien  voulu  nous  communiquer  la  liste 
des  différents  ouvrages  qui  forment  son  précieux  fond  de 
bibliothèque  manuscrite.  Nous  ne  pensons  pas  blesser  sa 
modestie  en  la  publiant  dans  notre  recueil  ;  nous  croyons 
d'autre  part  que  ce  sera  rendre  un  service  véritable  à  nos 
lecteurs  en  leur  faisant  connaître  quels  précieux  travaux 
nous  laissera  M.  Lambin  après  sa  mort.  Puisse-t-il  dès  à 
présent  en  avoir  assuré  la  conservation.  La  ville  d'Ypres 
qui  vient  d'ériger  une  bibliothèque,  déjà  même  reconnue 
par  le  gouvernement,  sera  probablement,  nous  le  pensons 
du  moins,  instituée  légataire  des  nombreux  MSS.  dont  nous 
nous  occupons. 

Ouvrages  et  Recueils  de  sa  cof/iposition. 

N"  1. 

Armoiries  décrites  d'un  grand  nombre  de  familles, 
principalement  de  la  province  de  Flandre,  extraites  de 
quelques  manuscrits  inédits  et  de  plusieurs  ouvrages  esti- 
més. Ce  recueil  contient  220  pages  grand  in-8°. 

N''2. 
Additions  à  la  Notice  historique  des  ancietines  institu- 
tions littéraires  de  la  Belgique ,  connues  sous  le  nom  de 
Chambres  de  Rhétorique ,  insérée  au  Mémoire  historique 
sur  la  bibliothèque  de  Bourgogne,  de  M.  Laserna-San- 
lander,  imprimé  à  Bruxelles,  en  1809,  Ces  additions 
classées  dans  l'ordre  alphabétique,  sont  pour  la  plupart 
extraites  des  archives  de  l'ancienne  chambre  dite  d'Alpha 
et  Oméga,  à  Ypres,  et  contiennent  en  deux  volumes, 
à  peu  près  300  pages  in-S". 

N°3. 
Additions  à  la  notice  intitulée  :  Etat  des  villes  de  la 


(  351   ) 

Gaule  helgiqiie,  avant  le  douzième  siècle ,  avec  des  re- 
cherches étymologiques  sur  l'origine  de  leurs  noms,  de 
M.  F.  Grigny,  médecin  (d'Ypres).  Ces  additions  faites, 
surtout  sous  ce  dernier  rapport,  en  ce  qui  concerne  la 
plupart  des  villages  de  la  Flandre  occidentale,  sont  sus- 
ceptibles d'augmentations.  In-8°  de  173  pages. 

Extraits  d'un  registre  en  parchemin,  relié  en  bois  et 
couvert  en  cuir,  intitulé  :  Chest  li  livres  de  toutes  les 
heures  de  le  vile  dJppre.  Ces  extraits  sont  composés  des 
plus  anciens  statuts  du  magistrat  d'Ypres,  tels  que  de 
1206,  1213,  1278,  1286,  1287,  1288,  1291,  1294, 
1295,  et  contiennent  44  pages  in-S". 

N°5. 

Tafel  van  aile  de  familienaemen  der  personen  die  meer 
of  min,  regtstreeks  of  anderzins,  uitgeschenen  hebben 
geduerende  de  staetsomwenleling  van  Vlaenderen,  ten 
jaere  1789,  begrepen  in  het  v^erk  getiteld  :  Dits  die  ex- 
cellente Print-cronike  van  Vlaenderen,  41  bladzyden 
in-12.  —  (Table  alphabétique  des  noms  de  famille  de 
ceux  qui,  plus  ou  moins,  directement  ou  indirectement, 
se  sont  distingués  pendant  la  révolution  de  1789,  extraits 
de  l'ouvrage  intitulé  :  Dits  die  excellente  Print-cronike 
van  Vlaenderen ,  41  pages  in- 12°. 

Chartes  émanées  des  rois  d'Angleterre,  déposées  aux 
archives  d'Ypres,  et  qui  concernent  les  anciennes  relations 
commerciales  entre  ce  royaume  et  la  Flandre,  et  dont 
M.  Lambin  a  formé  des  copies  littérales  et  authentiques 
pour  la  commission  des  Records,  à  Londres,  qui  s'occupe 
de  la  recherche  des  actes  relatifs  à  l'histoire  d'Angleterre, 
de  48  pages  in-8°. 


(  352  ) 

Verzaemeling  vaii  de  gralschrifien  die  ten  jaeren  1798 
en  1799,  nog  in  wezen  Avaeren  in  de  prochiekerken,  kloos- 
ters,  kapellen,  godshuizen  en  op  de  kerkhoven  binnen 
Ypre,  waeronder  verscheidene  die  in  oude  lyden  aldaer 
en  in  de  kerken  van  de  voorsteden  gevonden  wierden, 
met  afbeeldingen  van  de  wapenschiklen ,  en  verrykt  met 
alphabelische  tafels  der  familienaemen,  4  vol.  in-4°,  in- 
houdende  ontreut  2000  bladz.  —  (Recueil  des  épilaphes 
qui  existaient  encore  à  Ypres  en  1798  et  1799,  et  parmi 
lesquels  il  en  est  plusieurs  qui  se  trouvaient  jadis  dans  les 
églises  des  anciens  faubourgs  de  ladite  ville ,  avec  beau- 
coup d'armoiries  faites  à  la  plume,  des  annotations  généa- 
logiques et  des  tables  alphabétiques  des  noms  des  familles, 
4  vol.  in-4°,  contenant  à-peu-près  2000  pages. 

Verzaemeling  /an  de  voornaemste  vryheden  en  voor- 
regten ,  vergund  door  de  graven  van  Vlaenderen  en  an- 
dere  vorsten  aen  de  imvooners  van  Ypre ,  sedert  het  begin 
der  12"  eeuw^ ,  4  deelen  in-4°,  inhoudcnde  te  zamen,  met 
de  alphabetische  en  jaerv^yzende  tafels,  496  bladz.  Zeer 
aenbelangend  voor  de  plaetselj  ke  geschiedenis  der  mid- 
deleeuwen.  —  (Extraits  des  cartulaires  de  la  ville  d'Ypres, 
ou  recueil  des  documents  les  plus  importants,  contenant 
les  concessions  de  privilèges  et  franchises  faites  aux  habi- 
tants d'Ypres  par  les  comtes  de  Flandre  et  d'autres  souve- 
rains, à  compter  du  12°  siècle,  4  vol.  in-quarto,  contenant 
ensemble,  avec  les  tables  alphabétiques  et  chronologi- 
ques, 496  pages.  Très-intéressant  pour  l'histoire  locale  du 
moyen-âge. 

N°9. 

Vernieuwingen  van  de  wethouders  en  raeden  der  stad 
Ypre,  van  1366  tôt  1791  ,  met  het  vervolg  tôt  heden,  en 


(  353  j 

voorgcgaen  door  de  naemlyst  van  de  schcpenendcr  zelfde 
stad  van  1196  tôt  1365,  met  eene  verliandeling  over  de 
cerste  instelliug  dezer  magislralen  en  de  vcranderingen  in 
de  wyze  van  vernieuwing  ingevoerd,  3  declen  in-^",  in- 
houdende  entrent  800  bladeren.  —  (Renouvellements  des 
magistrats  et  conseillers  d'Ypres,  de  1366  à  1791,  avec 
la  suite  jusqu'à  ce  jour,  précédés  d'une  liste  nominative 
des  échevins  de  ladite  ville,  de  1 196  à  1365,  et  d'une  no- 
tice sur  l'institution  de  ces  magistrats  et  les  changements 
introduits  dans  le  mode  de  leur  élection  ,  3  vol  in-d"*,  grand 
format,  contenant  à-peu-près  800  pages. 

N°  10. 

Tydrekenkundige  en  alphabetische  naemlyst  van  aile 
de  l'amilien  begrepen  in  de  twee  eerste  deelen  van  het 
handschrift  onmiddelyk  hiervooren,  m-à° ,  grool  formaet, 
van  98  bladz.  —  (Table  alphabétique  et  chronologique 
des  noms  de  famille  contenus  dans  les  deux  premiers  vo- 
lumes de  la  collection  indiquée  immédiatement  ci-dessus, 
in-4" ,  grand  format ,  de  98  pages. 

N°ll. 

Proevc  van  onderzoekingen  op  de  aloude  aenstelling, 

het  gezag  en  de  voorregten  van  de  kasteleinen  en  burg- 

graven  van  Ypre,  verrykt  met  eene  geslacht-  en  geschied- 

kundige  lyst  van  degenen  die  met  deze  "waerdigheid  zyn 

bekleedgcTveest,  enmeteenige  onuitgegevene  bescheeden, 

in-4°  van  250  bladz,  (Essai  de  recherches  sur  l'institution, 

l'autorité  et  les  prérogatives  des  châtelains  et  des  vicomtes 

■11  d'Ypres ,  enrichi  de  la  liste  généalogique  et  historique  de 

îr|  ces  dignitaires  et  de  plusieurs  documents,  la  plupart  iné- 

il  dits.  En  portefeuille,  250  pages  in-4:°,  grand  format. 

i  N"  12. 

!      Aenbelangende  bescheeden  raekende  de  kerken ,  kloos- 
il  lers,  godshuizcn,  kapcllen,  scholen  en  andere  slichtingen 


I 


(  354  ) 

binneii  Ypre,  met  aeiiteekeningen  die  de  voornaemsle 
historische  gebeurtenissen  der  zelt'de  slad  kunnen  ophel- 
deren,  en  ook  met  alphabetische  lafels,  2  deelen  in-^", 
het  eerste  inhoudende  lOl  bladz. ,  het  tweede  niet  vol- 
trokken.  —  (Documents  intéressants  relatifs  aux  églises, 
couvents,  hôpitaux,  chapelles,  écoles  et  autres  établisse- 
ments en  la  ville  d'Ypres,  avec  des  annotations  qui  peuvent 
servir  d'éclaircissements  à  quelques  événements  historiques 
de  la  localité  et  des  tables  alphabétiques  des  matières, 
2  vol.  in-4°,  le  premier  contenant  101  pages,  le  2®  non 
achevé. 

N°  13. 

Geschiedkundige  onderzoekingen  op  de  aloude  aen- 
stelling  van  den  voogd  en  de  schepenen  en  raeden  der 
stad  Ypre,  en  de  opgevolgde  veranderingen  in  de  jaer- 
lyksche  vernieuwing  ingevoerd ,  verrykt  met  geloofweer- 
dige  bescheeden  en  de  wetten  der  Yprelingen,  bevestigd 
door  Phihps  van  Elsatien,  in  1171  of  1174,  en  met  eene 
lyst  van  de  voogden  van  1366  tôt  1791,  in-4° ,  van  68 
bladzyden,  ten  jaere  I8l4  in  druk  uitgegeven.  —  (Recher- 
ches historiques  sur  l'institution  de  l'avoué  (bourgmestre), 
des  échevins  et  des  conseillers  de  la  ville  d'Ypres,  enrichies 
de  quelques  documents  inédits;  avec  un  détail  des  chan- 
gements introduits  dans  le  renouvellement  annuel  de  ces 
magistrats,  les  lois  et  coutumes  des  Yprois,  confirmées  par 
Philippe  d'Alsace,  en  1171  ou  1174,  et  une  liste  des 
avoués  de  1366  à  1791.  Cet  opuscule  de  68  pages  in-4'', 
a  été  publié  en  1814. 

N°  14. 

Un  volume  contenant  :  1"  Un  coup-d'œil  historique  sur 
les  émeutes  et  troubles  qui  jadis  ont  eu  lieu  à  Ypres;  2°  une 
dissertation  sur  les  monuments  consacrés  à  la  mémoire 
de  nos  aïeux;  3°  l'origine,  le  progrès  et  la  décadence  de 


(  355  ) 

la  manufacture  de  draps  à  Ypres,  en  tout  72  pages  in-4°. 

N"  15. 

Verzaemeling  vau  grafschriften  in  de  kerken  van  eenige 
sleden  en  dorpen  van  het  Nederland  le  vinden ,  met  ge- 
leekende  wapenschilden  en  eene  tafel  der  familienaemen, 
91  bladz.  in-4".  —  (Recueil  d'épitaphes  qui  existaient 
jadis  dans  les  Pays-Bas,  enrichi  d'armoiries  faites  à  la 
plume  et  d'une  table  alphabétique  des  noms  de  famille, 
de  91  pages  in-4°. 

N°  16. 

Lyst  van  een  aenmerkelyk  gelai  boeken  van  aile  slach 
en  formaten,  binnen  Ypre  gedrukt  sedert  het  jaer  1546, 
tydstip  van  het  invoeren  der  drukkery  aldaer,  en  voor- 
gegaen  door  de  naemrol  der  genen  die  er  het  beroep  van 
drukker  hebben  uitgeoefend;  in-4°.  Niet  vollrokken.  — 
(Catalogue  d'un  grand  nombre  de  livres  en  tout  genre  et 
format,  publiés  à  Ypres,  depuis  l'an  1546,  époque  de 
l'établissement  de  la  première  imprimerie  en  cette  ville , 
précédé  d'une  liste  de  tous  ceux  qui  y  ont  exercé  la  typo- 
graphie; in-4°.  Non  achevé. 

N°  17. 

Coup-d'œil  historique  et  critique  sur  les  privilèges  et 
franchises  concédés  par  nos  anciens  comtes,  aux  princi- 
pales villes  de  la  Flandre,  suivi  de  quelques  annotations 
sur  les  chambres  de  rhétorique  en  général  et  sur  l'origine 
et  la  décadence  de  celles  qui  ont  existé  à  Ypres,  de  61 
pages  in-4".  Ce  coup-d'œil  a  été  inséré  dans  les  Annales 
belgiques  des  Sciences,  Arts  et  Littérature,  livraison  du  der- 
nier trimestre  de  1817. 

N"  18. 

Verzaemeling  van  verscheidene  bescheeden  raekende 
de  stad  Ypre  en  haere  inwooners,  gelrokken  uit  de  ar- 


(  358  ) 

chiveu,  en  inhoudeude,  onder  aiider,  Ivvee  oorspronke- 
lyke  opene  brieven  van  Gui  van  Dampierre,  van  1297  en 
1298,  by  welke  gezien  wordl  dat  er  alsdan  te  Ypre  geld 
gcmunt  is  geweest;  de  deelneming  der  Yprelingen  in  de 
unie  van  Utrecht ,  in  1579  ;  de  overgave  van  Ypre,  aen 
den  hertog  van  Parma,  in  1584. enz.  49  b.  in-4'',  boven 
den  index,  —  (Recueil  de  plusieurs  litres  relatifs  à  la  ville 
d'Ypres  et  à  ses  habitants,  extraits  des  archives  de  ladite 
ville,  et  contenant,  entre  autres,  deux  lettres  patentes  de 
Gui  de  Dampierre ,  de  1297  et  1298 ,  qui  prouvent  qu'alors 
il  a  été  fabriqué  de  la  monnoie  à  Ypres;  l'adhésion  des 
Yprois  à  l'union  d'Utrecht,  en  1579;  la  reddition  de  la 
ville  d'Ypres  au  prince  de  Parme,  en  1584,  etc.,  de  49 
pages  in-4°,  non  compris  la  table  chronologique  des 
matières. 

N»  19. 
Annotatien  getrokken  uit  de  registers  van  résolu  tien 
van  het  magislraet  van  Ypre,  of  memoriael  van  geschie- 
denissen  en  aenleekeningen  raekende  de  koninklyke  en 
prinselyke  gilden,  en  slukken  van  verscheiden  aert,  ge- 
trokken uit  de  staetsschriften  der  zelfde  stad,  met  eene 
inleiding  en  eene  alphabelische  tafel,  in-4'' ,  van  57  blad- 
zyden.  —  (Annotations  extraites  des  registres  aux  résolu- 
tions des  magistrats  d'Ypres.  ou  Mémorial  d'événements 
historiques;  on  y  a  ajouté  tout  ce  qu'on  a  découvert  d'in- 
téressant sur  les  confréries  royales  et  autres ,  ainsi  que 
plusieurs  documents  inédits  concernant  l'histoire  locale, 
avec  une  introduction  et  une  table  des  matières.  57  pages 
in-4°. 

N°  20. 

Nieuwe  vrucht  van  ledige  uren,  of  bundel  van  ver- 
scheidene  slukken  en  aenleekeningen  die  kunnen  dienen 
tôt  opheldering  van  ecuige  punten  van  geschiedenis ,  ge- 
trokken uit  de  archiven  van  Ypre  :  onder  deze  slukken 


(  357  ) 

bevindeu  er  zich  die  van  veel  belang  xijn.  In-4:°  van  98 
bladzyden,  onbegrepen  de  alphabelische  tafel.  —  (Recueil 
de  plusieurs  documents  et  d'annotations  qui  peuvent  être 
utiles  pour  l'éclaircissement  de  quelques  points  de  l'his- 
toire de  la  ville  d'Ypres  et  qui  ont  été  extraits  de  ses  ar- 
chives :  parmi  ces  documents  il  s'en  trouve  qui  sont  d'un 
intérêt  majeur.  In-4''  de  98  pages,  plus  une  table  alpha- 
bétique des  matières. 

N"  21. 
Diplômes  inédits  concernant  les  affaires  de  la  ligue 
hanséatique  en  Flandre,  qui  se  trouvent  dans  les  archives 
de  la  ville  d'Ypres ,  enrichis  d'un  précis  historique  de  ces 
documents  qui  sert  de  table,  136  pages  in-^". 

N°  22. 
Revue  succincte  des  annales  de  la  ville  d'Ypres,  de  805 
à  1827,  en  feuillets,  in-4°. 

N"  23. 
Mémoire  en  réponse  aux  questions  proposées  par  la 
société  des  Antiquaires  de  la  Morinie ,  à  Sainl-Omer,  sur  la 
halle  aux  draps  et  l'église  de  Saiul-Martin ,  à  Ypres,  cou- 
ronné en  1833,  enrichi  d'un  grand  nombre  de  notes, 
d'additions  et  des  plans  de  ces  deux  monuments  antiques, 
in-4°  de  72  pages. 

N°  24. 

Vervolg  van  de  geschrevene  jaerboeken  van  Ypre, 
verzaemeld  door  Pieter-Martinus  Ramaut,  in  8  deelen 
kleen  in-folio.  Dit  vervolg  beginnende  met  het  jaer  1781, 
en  loopende  tôt  heden,  2  deelen  zelfde  formaet,  inhou- 
dende  te  zaemen  562  bladz.  —  (Continuation  des  annales 
manuscrites  d'Ypres,  recueillies  par  Pierre-Martin  Ramaut, 
en  8  volumes  petit  in-folio.  Cette  continuation  date  du 
mois  de  juin  1781,  jusqu'à  présent;  2  volumes  même 
format,  contenant  ensemble  562  pages. 


(  358  ) 

N"  25. 

De  stad  Yprc  verheerlykt  door  haere  hoogbaillius,  of 
geslacht-  en  geschiedkundige  lyst  van  de  ridders  en 
edellieden  die  met  deze  waerdigheid  bekleed  zijn  ge*' 
weest,  van  't  jaer  1096  lot  in  1794,  verrykt  met  eene 
historische  inleiding  en  eene  alphabetische  tafel  der  fa- 
milic  naemen  ,  en  versierd  met  de  geteekende  wapen- 
schilden  derzelfde  hoogbaillius.  In  groot  folio,  62  bladz. 
—  (La  ville  d'Ypres  illustrée  par  ses  grands-baillis,  ou 
liste  généalogique  et  historique  des  personnes  qui  ont  été 
revêtues  de  cette  dignité,  depuis  l'an  1096  jusq^i'en  1794, 
grand  in-folio  de  62  pages,  enrichie  d'une  introduction 
historique,  des  armoiries  des  grand-baillis,  faites  à  la 
plume,  et  d'une  table  alphabétique  des  noms  de  famille. 

N°  26. 
Extraclen  getrokken  uit  de  registers  van  publicatien 
gedaen  van  wege  het  magislraet  van  Ipre,  van  1524 
lot  1610,  en  inhoudende,  onder  meer  ander,  inlichingen 
op  de  prysfeesten  der  rederykers  die  aldaer  gegeven  zyn 
geweest,  en  ook  op  de  vergaederingen  en  predikatien  der 
herdoopers,  enz.,  58  bladz.  in-folio.  — ■  (Annotations  his- 
toriques sur  plusieurs  points  de  l'histoire  locale  d'Ypres, 
extraites  des  registres  de  publication  des  ordonnances  des 
magistrats  de  la  dite  ville,  de  1524  à  1610.  contenant, 
entre  autres  ,  des  renseignements  importants  sur  les  con- 
cours des  chambres  de  rhétorique  qui  ont  eu  lieu  à  Ypres; 
les  prêches  des  anabapistes,  etc.,  etc.,  in-folio,  58  pages. 

N"  27. 
Beeldstormery  binneu  Yprc,  in  1566,  of  aenteekenin- 
gen  getrokken  uit  Iwee  registers  van  information  en 
interrogatien  gedaen  door  den  voogd  en  de  schepenen, 
aengaende  het  prediken  der  herdoopers,  de  beeldstor- 
mery, enz.,  in-foHo,  44  bladz.  Zeer  aenbelaugend  voor 


(  359  ) 

de  plaelselyke  geschiedenis.  —  (Notions  relatives  aux 
excès  commis  à  Ypres  et  dans  les  environs,  en  1566  , 
par  les  iconoclastes  ;  extraites  de  deux  registres  d'infor- 
mations et  d'interrogatoires  faits  par  le  magistrat,  de 
44  pages  in-folio.  Intéressant  pour  l'histoire  locale. 

N°  28. 
De  kasteleiny  van  Ypre  verheerlykt  door  haere  baillius, 
of  geslacht-  en  geschiedkundige  lyst  van  de  ridders  en 
edellieden  die  met  deze  waerdigheid  bekleed  zyn  ge- 
weest,  van  't  jaer  1367  tôt  in  1794,  verrykt  met  eene 
korte  beschryving  van  dezelfde  kasteleiny,  en  eene  tafel 
der  familie-naemen,  en  versierd  met  de  geteekende  wa- 
penschilden  derzelfde  baillius  ,  49  bladz.  in-folio. 
—  (La  chàtellenie  d'Ypres  illustrée  par  ses  baillis,  ou 
liste  généalogique  et  historique  des  personnes  qui  ont  été 
revêtues  de  cette  dignité,  depuis  l'an  1367  jusqu'en  1794, 
in-folio,  de  49  pages ,  avec  une  courte  description  de  cette 
chàtellenie,  les  armoiries  des  baillis,  faites  à  la  plume,  et 
une  table  des  noms  de  famille. 

N"  29. 

Curiosités  de  la  ville  d'Ypres,  en  français  et  en  flamand, 
extraites  des  annotations  historiques  déposées  aux  archives 
de  celte  ville ,  contenant  un  détail  de  tout  ce  que  l'histoire 
de  la  localité  offre  de  plus  intéressant;  cahier  de  16  pages 
in-folio.  On  présume  que  ces  annotations  ont  été  recueil- 
lies par  Sanderus,  auteur  de  l'ouvrage  intitulé  Flandria 
illustrata. 

N°  30. 

Extraits  des  comptes  des  trésoriers  de  la  ville  d'Ypres , 
des  années  1280  à  1402,  en  ce  qui  concerne  l'histoire 
locale  et  générale,  les  usages  et  les  coutumes  alors  en 
vigueur,  etc.  Ces  extraits,  composant  un  volume  de  326 
pages  in-folio,  non  compris  la  table  des  matières,  ren- 


(  360  ) 

ferment  des  détails  intéressants  que  l'on  chercherait  vai- 
nement ailleurs.  Une  partie  des  mêmes  extraits  a  été 
insérée  au  Messager  des  Sciences  et  Arts  de  la  Belgique, 
1836,  pag.  181  et  suiv. 

N'»  31. 
Tableau  historique  des  chartes  et  autres  documents  les 
plus  importants  concernant  la  ville  d'Ypres ,  et  qui  sont 
déposés  dans  les  archives  de  la  régence,  divisé  eu  deux 
séries,  la  première  contenant  ceux  émanés  depuis  les  temps 
les  plus  anciens  jusqu'à  la  mort  de  Gui  de  Dampierre, 
en  1305 ,  et  la  seconde  composée  de  ceux  qui  datent 
depuis  cette  dernière  année  jusqu'au  règne  de  Charles  11, 
en  1467,  contenant  tout  ce  qui  peut  contribuer  à  éclaircir 
quelques  points  de  l'histoire  locale. 

N"  32. 

Glossarium  van  menigvuldige  verouderde  waelsche, 
fransche  en  vlaemsche  woorden ,  voorkomende  in  hand- 
schriften  en  bescheeden  van  de  12",  13^,  14",  15"  en  16" 
eeuwen,  rustende  onder  de  archiven  van  Ypre,  in-folio, 
van  312  bladz.  —  (Glossaire  contenant  une  multitude 
d'anciens  mots  wallons,  français  et  flamands,  que  l'on 
rencontre  dans  des  manuscrits  et  documents  des  12®,  13®, 
14",  15®  et  16"  siècles,  déposés  aux  archives  d'Ypres,  de 
312  pages  in-folio.  Il  serait  inutile  de  faire  remarquer 
que  ce  glossaire  ,  fruit  de  plusieurs  années  de  recherches, 
peut  être  utile. 

S  II. 

Copies   faites  jjar    M.  Lambin    de  manuscrits    d'autres 
auteurs  et  de  documents  historiques  et  inédits. 

N"  33. 

Geusianismus  Flandriae  Occidenlalis,  auclore  rev.  pâtre 
Carolo  Wvnckio,  s.  theol.  licent.  ord.  lî.  Prœdicatorum 


(  361  ) 

priore  conv.  Yprensis.  Extrait  seulement  ce  qui  est  arrivé 
de  plus  intéressant  à  Ypres  et  dans  ses  environs,  du  ma- 
nuscrit appartenant  à  M.  Goelhals-Vercruysse,  de  Gour- 
tray,  32  pages  in-8". 

N"  34. 

Relation  du  siège  de  la  ville  d'Ypres,  par  les  Anglais  et 
les  Gantois,  en  1383,  extraite  d'un  fragment  du  manuscrit 
de  la  chronique  de  Froissard,  qui,  en  1584,  appartenait 
au  duc  d'Arschot,  et  en  1618,  à  Jean  De  Lichtervelde ,  et 
qui  traite  des  événements  de  1379  à  1389.  Celte  relation 
contient  24  pages  in-S". 

N°  35. 

Cort  verliael  van  't  ghonne  binnen  de  stadt  van  Ypre  eu 
daer  omirent  ghepasseert  es  de  religie  angaende  tzydert 
juny  1566  lot  outrent  half  ougsl  1567,  confirmerende  in 
eenighe  pointen  den  heesch  van  den  procureur-gene- 
rael  jeghens  den  grave  Egmondt,  door  een  onbekende 
scliryver,  95  bladz. ,  in-8°.  —  (Relation  succincte  de  tout 
ce  qui  est  arrivé  à  Ypres  et  dans  ses  environs,  et  qui  a 
rapport  à  la  réformation,  depuis  le  mois  de  juin  1566 
jusques  vers  la  mi-août  1567,  et  confirmant,  en  quelque 
manière,  les  conclusions  prises  par  le  procureur-général 
à  charge  du  comte  d'Egmont,  par  un  auteur  inconnu, 
in-S"  de  95  pages. 

N°  36. 

Note  secrète  sur  le  bombardement  d'Ypres,  en  1793, 
par  M.  Jean-Boniface  Rabaut,  copiée  sur  la  noie  autographe 
de  l'auteur,  19  pages  in-8"'. 

N°  37. 

Conspiration  arrivée  à  Ypres,  du  tem.ps  de  Jacques 
Van  Artevelde  et  en  après ,  ou  articles  de  l'accusation 
portée  contre   Piclre   Le   Vroede ,    Clays    De    Ketelare , 

24 


(  362  } 

Alard  Lodebuc  et  Jehan  Pinc,  prévenus  de  complicité 
dans  l'assassinat  du  grand-bailli  De  Persenare  ou  Pryse- 
nare,  en  1363.  Ces  articles  copiés  du  document  original 
déposé  dans  les  archives  de  ladite  ville,  avec  un  avis 
servant  d'introduction  et  une  table  alphabétique ,  in-8° 
de  22  pages. 

N°  38. 

Diplômes  et  autres  documents  anciens  déposés  en  la 
chambre  des  comptes  à  Lille  et  qui  intéressent  ou  la  ville 
d'Ypres  ou  ses  habitants;  extraits  de  l'ouvrage  intitulé 
Monuments  anciens  de  M,  le  comte  de  Saint-Génois, 
53  pages  in-4'',  compris  la  table  des  principales  matières. 

N"  39. 

Geschiedenissen  voorgevallen  zoo  wel  in  Vlaenderen 
als  elders,  en  naemelyk  binnen  Ypre  ,  van  het  jaer  1366 
tôt  1443,  naer  het  oorspronkelyk  handschrift  (van  Olivier 
van  Dixmude),  en  inhoudende  ook  eenige  byzondere 
aenteekeningen  die  er  naderhand  bygevoegd  en  aen  het 
einde  van  dit  afschrift  gesteld  zijn;  verrykt  met  eene 
voorrede ,  waer  in  den  naem  van  den  auteur  van  het 
oorspronkelyk  handschrift  wordt  bekend  gemaekt;  eene 
Ivst  van  de  verouderde  woorden;  en  ook  met  eene 
alphabetische  tafel  der  voornaemste  voorvallen,  in-4°  van 
312bladz.  Dit  handschrift  is,  ten  jaere  1835,  in  hetlicht 
gegeven  onder  den  tilel  van  Merkwaerdige  Gebeurtenis- 
sen,  enz.  —  (Evénements  qui  ont  eu  lieu  tant  en  Flandre 
qu'ailleurs,  et  nommément  à  Ypres ,  depuis  l'an  1366 
jusqu'à  l'an  1443,  copiés  d'après  le  manuscrit  (d'Olivier 
van  Dixmude),  qui  contient  aussi  quelques  annotations 
historiques  qui  y  oni  été  ajoutées  plus  tard,  et  qui  sont 
portées  à  la  suite  de  cette  copie,  qui  est  enrichie  d'une 
préface,  dans  laquelle  il  est  prouvé  que  van  Dixmude  est 
l'auteur  du  manuscrit,  ainsi  que  d'une  table  alphabétique 


(  363  ) 

des  principaux  événements;  in-4°  de  312  pages.  M.  Lambin 
a  publié,  en  1835,  le  dit  manuscrit  de  Van  Dixmude, 
sous  le  titre  de  Merkivaerdige  Gebeurtenissen ,  enz. 

N°  40. 

Geschiedenissen  voorgevallen  zoo  wel  in  Vlaenderen  als 
elders  en  naemelyk  binnen  Yprc,  van  lict  jaer  1443  loi 
1479,  en  kunnende  dienen  lot  vervolg  van  bel  voor- 
gaende  bandschrifl ,  getrokken  uii  betgene  van  Pieter 
van  de  Letuwe,  in  zynen  lyd  scbepen  en  raed  van 
kamer  derzelfde  stad;  verrykt  met  eene  voorrede  en  met 
eene  alphabeliscbe  tafel  der  byzonderste  gebeurtenissen 
daer  in  verbandeld,  142  bladz.  in-4".  (Evénements  qui 
ont  eu  lieu  tant  en  Flandre  qu'ailleurs  et  principalement  à 
Ypres,  depuis  l'an  1443  jusqu'à  l'an  1479,  manuscrit  qui 
peut  servir  de  suite  à  celui  immédiatement  ci-dessus. 
Extrait  de  celui  de  Pierre  van  de  Letuwe ,  en  son  vivant 
échevin  et  conseiller  de  ladite  ville,  enrichi  d'une  préface 
et  d'une  table  alphabétique  de  ce  qui  est  arrivé  de  plus 
intéressant.  in-4°  de  142  pages.  C'est  de  ce  volume  que 
M.  Lambin  a  extrait,  en  1813,  les  lettres  patentes  et  mis- 
sives de  Charles-le-Témeraire ,  qui  forment  le  manuscrit 
qui  suit,  et  qui  ont  été  publiées,  en  partie,  par  5L  Gachard, 
quelques  années  plus  tard. 

N^  41. 

Lettres  patentes  et  missives  de  Charles-le-Téméraire,  duc 
de  Bourgogne  et  comte  de  Flandre,  extraites  du  manus- 
crit immédiatement  ci-dessus,  enrichies  d'une  table  chro- 
nologique de  ces  documents,  dont  les  originaux  n'existent 
point ,  au  moins  ,  dans  les  archives  d'Ypres,  et  d'un  index 
alphabétique  des  matières,  in-4''  de  77  pages,  sans  les 
tables. 

N".  42. 

Wethouders  van  Veurne-Ambachl,  van  1491  tôt  1585, 


(  364  ) 

en  vau  de  stad  en  kasleleiny  van  Veurne .  van  1586  tôt 
1653,  verrykt  met  eene  alphabetische  tafel  van  aile  de 
familie-naemen  daer  in  voorkomende,  150  bladz.  in-4°. 
—  (Magistrats  de  Furne-Ambacht,  de  1491  à  1585,  et  de  la 
ville  et  châlellenie  de  Furnes,  de  1586  à  1653,  collection 
de  158  pages  in-4°,  enrichie  d'une  table  alphabétique  des 
noms  de  famille. 

N"  43. 
De  Groonike  van  Vlaender,  inhoudende  het  leven  van 
aile  de  forestiers  ende  graven ,  hoe  zy  gheregiert  hebben 
het  lant  ende  hoe  zy  ghestorven  zyn  en  waer  zy  begraven 
zyn  ,  in  corte  verhaeld,  beghinnende  met  Liederyck  de 
Buck  tôt  Philippus  ons  gheduchticli  heere,  1563.  Voor 
dezen  tilel  staet  :  deesen  naervolghende  bouck  ofle  Groo- 
nike was  ghemaect  by  Augustyn  van  Hernighem ,  int  jaer 
ons  Heeren  duust  vyf  hondert  ende  vier  en  tseslich,  1564. 
In-4"van  116  bladz.  — (Chronique  de  Flandre,  contenant 
la  vie  de  tous  les  forestiers  et  comtes,  leur  règne,  leurs 
décès  et  les  lieux  où  ils  ont  été  inhumés,  par  forme  d'a- 
brégé, commençant  à  Lideric  de  Bue  et  fmissant  au  règne 
de  Philippe,  notre  souverain  seigneur,  1563.  Avant  le 
titre  on  lit  :  le  présent  livre  et  chronique  a  été  composé 
par  Augustin  van  Hernighem,  en  l'an  de  notre  Seigneur 
mil  cinq  cent  et  soixante  quatre.  In-4"  de  116  pages. 

N°  44. 

Cy  comence  listoire  de  la  destruction  du  bon  roy 
Richart  dEugleterre,  jadis  filzdu  prince  de  Galles,  depuis 
Inn  mil  iij"  iiij^^  et  xvj,  jusquez  a  l'an  mil  iij"  iiij''*  xix; 
copié  sur  le  manuscrit  déposé  aux  archives  d'Ypres,  en 
caractères  du  14"=  siècle.  67  pages  in-4°. 

.,   N"  45. 

Sy  après  sensieut  le  veage  que  a  fait  Charles  de  Luxem- 
bourg, Sr.  de  Beaufremez,  capitein  des  villes  et  grant 


(  365  ) 

château  de  Lesciuse,  soux  inonsr.  le  comte  de  Gavres 
Sr.  de  Fiennes  ,  par  charge  el  nu  nom  de  mon  dict  Sr.,  au 
conté  de  Bourgogne,  aulx  obsèques  et  funérailles  de  feu 
très  noble  et  de  recommandée  mémoire  très  liault  prince 
Philberl  de  Chalon,  prince  dOrenge,  etc.,  qui  rendit 
lame  a  Dieu  le  tiers-jours  daoust  mil  v'  trente  ,  d'après  le 
manuscrit  incomplet,  91  pages  in-4''. 

N"  4G. 

Abrégé  chronologique  de  l'histoire  de  la  ville  d'Ypres, 
copié  d'après  le  manuscrit  autographe  de  M.  le  chanoine 
Le  Couvreur,  qui  paraît  en  être  l'auteur,  136  pages  in-4°, 
enrichi  par  le  copiste  d'une  table  alphabétique  des  prin- 
cipales matières,  contenant  29  pages,  en  tout  165.  Cet 
ouvrage  n'est  point  aussi  exact  qu'on  aurait  pu  le  désirer; 
il  renferme  aussi  des  répétitions  inutiles  et  des  contradic- 
tions que  l'auteur  aurait  pu  éviter  s'il  y  eut  porté  plus 
d'attention,    • 

N°  47. 

Uittrek  van  een  handschrift  van  Augustin  van  Herni- 
ghera,  in  1590,  te  Ypre,  warandeerder  van  het  koorn . 
behelzende  eenige  aenbelangende  geschiedenissen,  welke 
in  Vlaenderen,  en  byzonderlyk  le  Ypre,  van  1572  tôt 
1591,  hebben  plaets  gehad,  i53  bladz.  in-4".  M.  Malle- 
brancke,  pastor  van  Loo,  en  eenen  van  de  geleerdste  oud- 
heidkundigen  van  het  Nederland,  bezat  vyf  boekdeelen 
der  handschriflen  van  onzen  historieschryver.  —  (Extrait 
d'un  manuscrit  d'Augustin  van  Hernighem,  en  1590, 
égard  des  grains,  à  Ypres,  et  qui  contient  quelques  évé- 
nements importants  qui  ont  eu  lieu  en  Flandre,  et  parti- 
culièrement à  Ypres,  de  1572  à  1591  ,  in-4''  de  153  pages. 
M.  Mallebrancke ,  curé  de  Loo,  et  un  des  antiquaires  les 
plus  érudils  des  Pays-Bas  ,  possédait  jadis  cinq  volumes  en 
manuscrits  de  Van  liernighem. 


(  366  > 

N°  48. 

Stichling  van  de  abdy  van  Voormezeele ,  by  Ypre ,  met 
de  levens  en  daeden  van  haere  abten ,  van  't  jaer  1068, 
tôt  haere  afschaffing,  in  1796,  en  eene  korle  opgave  van 
de  voorregten  aen  deze  abdy  verleend  door  de  pausen 
en  de  graven  van  Vlaenderen,  enz, ,  getrokken  uit  haere 
overgeblevene  en  onuitgegevene  archiven,  56  bladz.  m-A°. 
—  (Fondation  de  l'abbaye  de  Voormezeele,  lezYpres,  avec 
la  vie  et  les  gestes  des  abbés,  de  l'an  1068  jusqu'en  1796, 
époque  de  sa  suppression,  et  une  courte  notice  des  pri- 
vilèges accordés  à  cette  abbaye  ,  par  les  papes  et  les  comtes- 
de  Flandre,  etc.  Extrait  de  ses  archives  inédites,  in-4:°  de 
56  pag. 

N"  49. 

Liste  des  présidents  et  conseillers  du  grand  conseil,, 
depuis  sa  résidence  à  Malines,  ordonnée  par  Philippe 
d'Autriche,  surnommé  le  Beau,  roi  d'Espagne,  le  22  jan- 
vier 1503,  Copiée  d'après  celle  rédigée  en  1787,  par 
M.  Philippe-Jacques  van  Provyn  de  Pollinchove ,  alors 
secrétaire  de  sa  majesté  audit  grand  conseil,  et  enrichie 
d'une  table  alphabétique  des  noms  desdits  présidents  et 
conseillers;  de  la  liste  des  capitaines  de  cercle  aux  Pays- 
Bas  et  des  noms  des  membres  du  comité  ecclésiastique, 
institué  par  l'empereur  Joseph  II,  en  1786,  116  pages 
in-4°. 

N"  50. 

Liste  de  tous  les  documents,  de  quelque  nature  qu'ils 
soient  d'une  date  antérieure  à  la  deuxième  moitié  du 
XUI^  siècle,  écrits  en  français,  et  qui  existent  dans  les 
archives  de  la  ville  d'Ypres ,  suivie  d'une  autre  liste  des 
diplômes,  lettres  et  autres  actes  des  rois  de  France,  ainsi 
que  des  documents  semblables  émanés  d'autres  princes  et 
personnages,  mais  concernant  des  événements  relatifs  à 


(  367  ) 

l'histoire  de  France,  et  qui  se  Irouvenl  dans  les  mêmes 
archives;  in-4°  de  23  pages. 

N°  51'. 

Extraits  des  trois  volumes  des  Généalogies  des  familles 
les  plus  notables  de  la  province  de  Flandre,  dressées  et 
écrites  par  messire  Jean-Louis  De  Joigny  de  Pamele, 
prêtre,  chanoine  gradué  du  membre  de  Térouane,  en  la 
cathédrale  d'Ypres  (mort  le  21  novembre  1 697),  260  pag. 
in-folio,  grand  format.  Le  manuscrit  de  M.  De  Joigny  ap- 
partenait, en  1814,  à  M.  le  comte  DePeellaert,  à  Bruges. 
Il  est  enrichi  des  armoiries  peintes  en  couleurs  et  contient 
des  renseignements  très-précieux,  pour  l'histoire  des  fa- 
milles. 

N"  52. 

Register  van  de  Leenen  gehouden  van  het  burggraef- 
schap  van  Ypre,  vernieuwd  door  M.  Pieter-Philippus  Car- 
dinael ,  greffier  van  dit  leenhof  en  intendent  van  Z-,  E.  den 
marschalk-prins  van  Iseghem,  burggrave  van  Ypre,  met 
eene  opgevolgde  curieuse  beschryving  van  de  toUen  toe- 
behoorende  aen  dit  burggraefschap,  84  bladz,  in-folio,  — 
(Registre  des  fiefs  relevant  de  la  cour  féodale  de  la  vicomte 
d'Ypres,  renouvelle  par  M.  Pierre-Phihppe  Cardinal, 
grefîier  de  ladite  cour  féodale  et  intendant  de  S.  E.  le 
maréchal  prince  d'Isenghien,  vicomte  d'Ypres,  avec  une 
description  curieuse  de  tous  les  tonlieux  appartenant  à 
cette  vicomte.  In-folio  de  84  pages. 

N"  53. 
Table  générale  des  Recherches  des  antiquités  et  noblesse 
de  Flandres  ,  par  Philippe  De  L'Espinoy,  écuyer,  seigneur 
de  Térouane  (imprimées  à  Douay,  chez  la  veuve  de  Marc 
Wyon,  1632),  précédée  de  l'indication  des  erreurs  et 
omissions  commises  dans  l'impression  de  l'ouvrage , 
29  pages  in-folio. 


(  368  ) 

Nous  avons  été  admis  à  voir  les  manuscrits  autographes 
qu'on  vient  de  citer,  et  nous  pouvous  assurer  qu'il  est  im- 
possible de  mettre  à  de  tels  travaux  plus  de  correction 
et  d'exactitude.  Chaque  manuscrit  est  prêt  à  être  mis  sous 
presse.  Déjà  quelques-uns  comme  X  Olivier  van  Dixmude , 
ont  vu  la  lumière.  Nous  souhaitons  de  grand  cœur  que 
les  recherches  historiques  de  M.  Lambin  soient  un  jour 
publiées. 

Parmi  toutes  ces  élucubrations  scientifiques,  il  en  est  peu 
qui  présentent  autant  d'intérêt  que  le  n°  32.  Ce  glossaire 
de  vieux  mois  français,  flamands  et  wallons  serait  d'une 
grande  utilité.  Le  soin,  la  patience,  l'esprit  de  critique 
qui  ont  présidé  à  ce  minutieux  travail  sont  une  garantie 
de  l'importance  qu'offrirait  cette  publication:  nous  enga- 
geons fortement  l'auteur  à  le  faire  imprimer.  Nous  ne  nous 
étendrons  pas  davantage  sur  le  mérite  du  catalogue  que 
nous  publions;  il  suffira  de  jeter  un  coup-d'œil  sur  le 
litre  de  chacun  des  ouvrages  qu'il  fait  connaître. 


n. 


(  369  ) 


Inflxuucc  ic  la  Hcformc 


A  LOLVAIN. 


S'il  est  vrai,  comme  le  dit  Montesquieu,  clans  son  Esprit 
des  lois,  que  la  religion  exerce  de  l'influence  sur  les  lois , 
et  par  conséquent  sur  la  civilisation,  il  faut  aussi  que  les 
lois  et  la  civilisation  exercent,  à  leur  tour,  une  influence 
bien  prononcée  sur  la  religion.  Cette  vérité  nous  est  dé- 
montrée à  l'évidence  par  l'histoire  et  par  l'expérience 
journalière. 

Le  catholicisme  ,  dont  les  cérémonies  les  plus  pompeu- 
ses, les  plus  imposantes,  étaient  nées  pendant  le  moyen- 
âge,  s'adaptait  parfaitement  bien  aux  esprits  de  l'époque; 
c'est  alors  que  cette  religion  donna  l'élan  à  la  civilisation; 
c'est  alors  que  le  catholicisme  fut  le  foyer  des  arts  :  ses 
temples  majestueux,  ses  nombreuses  et  augustes  cérémonies 
devaient  nécessairement  appeler  à  leur  secours  la  poésie 
et  les  arts  (1). 

Léon  X,  ce  grand  protecteur  des  arts,  avait  bien 
compris    l'esprit   du    catholicisme ,    mais   il   n'avait   pas 


(l)  »  Moïse  et  Homère,  le  Lyban  et  le  Cytliéron  .  Solyrne  et  Rome, 
Babyloiie  et  Athènes  ont  laissé  leurs  dépouilles  à  nos  autels.  »  (Cliatcau- 
briand,  Esp,  du  Cluistianismc.  pay.  5  cliap.  2). 


(  370  ) 

saisi  l'esprit  de  son  siècle  (1).  Poêle,  il  comprit  la  poésie, 
il  encouragea  les  beaux-arts,  mais  ne  se  laissa  pas  entraî- 
ner par  les  idées  qui  se  développaient  dans  le  Nord  de 
l'Europe,  depuis  la  renaissance  des  lettres  et  l'invention 
de  l'imprimerie  (2).  La  Belgique  se  ressentit  également  de 
cette  influence,  et  Louvain,  qui  avait  embrassé  avec  en- 
thousiasme la  doctrine  de  Tanchelin  (3) ,  suivit  également 
le  mouvement  général  imprimé  par  Luther  (4).  D'ailleurs 
les  Louvanistes  paraissaient  avoir  eu  à  se  plaindre  des 
évêques  de  Liège,  dans  le  diocèse  desquels  leur  ville  était 
comprise:»  Leodiensis  episcopi  jugum ,  quod  extra  omnem 
rationis  orhitam  premeret,  sœpius  excutere  conati  sunt  Lo- 
vanienses  (5).» 

On  connaît  l'anecdote  piquante  rapportée  par  M.  De  Reif- 
fenberg,  au  sujet  de  l'auto-da-fé  des  écrits  de  Luther, 
dressé  au  Grand-3Iarché ,  vers  1521  (6).  Cela  seul  prouve 
quelle  effervescence  devait  régner  dans  les  esprits  à  cette 
époque.  Charles-Quint,  outre  ses  édits  sévères  contre  la  doc- 
trine des  hérétiques,  en  publia  un  spécialement  pour  la 
ville  de  Louvain.  Celte  pièce  importante  et  qui  voit  ici  le 
jour  pour  la  première  lois,  nous  montre,  à  l'évidence, 
que  la  réforme  exerçait  à  Louvain  une  influence  bien 
grande.  Voici  cette  pièce  : 

Carie  by  der  (jratien  Gots  Roo?nsch  keyser,  etc.,  onsen 
en  yeminden  den  borymeestren,  schepenen  ende  raedt  onser 

(1)  Voir  à  ce  sujet  Varillas.  Anecdotes  de  Florence,  I.  6,  p.  253;  et 
Jovis  in  Vita  Leonis  X  ,  1.  3.  p.  188. 

(2)  Voir  au  sujet  de  sa  poésie  :  Paul  Jove  Elog.  cap.  82,  p.  191  :  la 
Sage  de  Spelte:  David  Blondel ,  etc. 

(3)  Année  1113. 

(4)  Divœus  Annal.  Lov.,  1.   1,  p.   5.  «  Awno  1115,  Andovcrpos  ac 
Lovanienses  potissimnm  infecerat.  » 

(5)  Divœus  ,  Reruni  Lov.-  l.  1  .  cap.  fi. 

(6)  Rcid'enberg,  Archives  philolojj.,  I.  1 ,  p.  44. 


(  371   ) 

stadt  van  Locen ,  salut.  Alsoo  icy  bij  aiidere  onse  bn'evcn- 

van  placcaerf.e    van  do  date   vyftien  dayen  in  octoher, 

in  t'jaer  1529^  op  ende  aengaende  de  extirpatie ,  piinitie 

ende  correctie  van  de  secten  Luterianen  ende  andere  ge- 

prohiheerde  ende  hérétique  secten,  allomine  gepuhticeert, 

de  hennisse  ende  judicature  van  de  genen  die  bevonden 

souden  worden  contrarie  onsen  verhoden  ende  placcaerle 

gedaen,  of't  eenige  quaede  oft  vatsche  opinion  en  doctrinen 

tegens  onse  Heilige  Kerken geloove  ende  tegend' ordonnantie 

van  Onse  Moeder  de  Heylige  kerk  geleert ,  gesustineert, 

oft  andersins  gesproken ,  of't  vuyt  gegeven  hehbende ,  ge~ 

cmnmiteerthebhcn  gehadt  seeckeren  commissen  vuyt  onsen 

Raede   van  Brahant ,   om    daer  inné  somjnierelijck   ende 

sonder  langen  train  van  processe  te  procederene.    Ende 

loant  t'onser  kennissen  gecomen  is ,  dat  onsen  meyer  van 

Loven  onder  syne  bedrieve  ende  officie  geapprehendeert 

ende  aengestast  heef't   eenige  poorteren  ende    ingesetene 

onseï'  voornoe7nde  stadt  van  Loven ,  als  seer  besmet  wesende 

van  de  secten  Lutherianen^  ende  tegen  onse  voornoeinde 

verboden  ende  placcaerten  gedaen  hebbende ,  ende  alsoo 

gevallen  in  de  penen  in  de  selve  o?ise  brieven  van placcaerte 

begrepen ,  daer  tegen  ivy  onsen  voornoemden  meyer  belast 

ende  bevolen  hebben  met  aider diligentie ,  navolgende  onscr 

voornoeinde  brieven  van  j}laccaerte ,  te  jjrocederen.   Wy 

desen  aengesien ,  betroutuende  volcomentlijck  uicer  ivijs- 

heyt  en  stichtheyt  ende  discretien ,  ende  overmits  dat  don 

voornoemden  onser  commissen,  mits   andere  occupation , 

niet  gelegen  en  is  tôt  t'geene  des  voornoemd  is ,  te  ver- 

staene ,  V  ende  elcker  gerichte  besundere  hebben  gecom- 

mitteert,   ende   comitteron   by    desen    de    kennisse  ende 

judicature  van  de  saecken  van  de  voornoemde  ende  andere 

tutheriaensche   ende   suspecte    heriiique    persoonen,    die 

onsen  voornoemden  meyere  van  Loven ,  binnen  onser  voor- 

uoemde  stadt  van  L^ovene ,  of't  efdcrs  bintien  synen  bedrivo 


(  372  ) 

bevinden.  ende  aentasten  sal,  nyettegenstaende  dut  wy  de 
hennisse  ende  judicature  van  de  voornoemdc  ende  gclycken 
saecken  hy  onse  brieve  van  placcaerte  den  voo/'noemden 
onse  coniissen  hebben  gecommitteert  gehad;  V  daeromme 
ordinerende  ende  seer  ernstelijck  bevelende  by  desen , 
dat  gy  ter  instantie  ende  gevolge  van  den  voornoeiiiden 
ineyere  inder  voornoemde  ende  andere  gelycken  saeckeîi 
sominierlijck  ende  sonder  ordinaris  oft  langer  treyn  van 
processe  [in  andere  saecken  voor  V geobserveert)  proce- 
deert  en  doet  procederen ,  ende  partycn  daerinne  cort , 
onverthogeîi  redit  ende  expeditie  van  justicien  adminis- 
treert,  alsoo  gy  naervolgende  onser  voornoemde  brieven 
van  placcaerten  ende  in  goeds  justicien ,  tôt  conservatie 
van  onsen  Heiligen  Korsten  Geloove  suit  bevinden  behoo- 
rende  aider  vuegen  ende  manieren ,  alsoo  onsen  voornoemde 
placcaerte  mogen  ende  behooren  te  doen  .  nyettegenstaende 
eenïgen  costumen  onder  t'dexele  van  de  poirterien  onser 
voornoemde  stadt  van  Loven.  souden  willen  oft  mogen 
alléger  en,  oft  prctenderen  ter  contrarien,  ende  sonder 
prejuditie  van  de  seine  costumen  ende  stadt  rechten  i7i 
andere  saecken,  ende  dit  al  tôt  onsen  wederroepen,  ende 
van  des  te  doene ,  eti  des  daer  ofgependeert  wy  V  volcomen 
macht.  authoriteyt  ende  sunderlijck  bevel  geven  by  desen. 
0?itbieden  voorts  ende  bevelen  allen  anderen  onsen,  ende 
onsen  vasallen  oft  der  smalre  liée r en,  rechten,  justicieren 
etide  ofjicieren  e?ide  dieneren  binnen  onser  meyereye  van 
Loven  gesetcn  ,  dat  sy  V  dit  doende  erstelijch  terstaen 
ende  obedieren,  ende  den  voornoemden  onsen  meyer  van 
Lovene  in  t'a])prekendeie?i  ende  aentasten  van  de  voor- 
noemde  he?eticquen  ende  lulherianschc persoonen  aile  hulpe 
ende  assislentie  duen,  soo  verre  sy  des  van  hem  versocht 
worden.  JVunt  ons  alsoo  gelieft.  Gegeven  in  onser  stadt 
van  Brussele ,  XVI daeg lien  in  meerte,  in  t'jaer  Ons  Ileeren 
15.34,  9iae  costume  ons  shnfl's  van  Brahanl  ende  van  on- 


(  373  ) 

ser  keyserrycke   t'  XV,    ende  van    Castilien   t'  XIX  (1). 

Je  ne  dirai  rien  de  l'illégalité  de  cet  acte,  qui  violait 
les  privilèges  et  coutumes  de  la  ville;  mais  cela  importait 
peu  à  Charles  :  il  devait  poursuivre  ses  plans  de  politique. 
Charles  était  d'autant  plus  intéressé  à  en  agir  de  la  sorte 
envers  Louvain,  qu'il  devait  soustraire  l'université  à  la 
contagion  générale  :  l'exemple  des  bourgeois  aurait  pu 
devenir  funeste  aux  étudiants. 

C'est  ainsi  que  déjà  ,  en  J526  .  on  avait  sévi  rigoureuse- 
ment envers  quelques  bourgeois  :  «  Anno  1526  den  à  ja- 
miary,  soo  stojîden  te  Lovene  op  't  sckavot  ses  mans  ende 
ticee  vrouioen  die  onder  hun  lieden .  gelijck  kun  voorhouders 
îDel over  tac/itichjare?i gehouden  hadden  een  kettery^dat  sy 
lieden  gheen  iverck  en  inueckten  van  het  lleylich  Sacrament^ 
maer  aen  hun  lieden  lijff  en  heeft  men  niet  gedaen ,  7naer 
sy  lieden  sijn  verhonden  in  groote  dingen  op  hun  lijff{^).  n 

La  première  effervescence  passée,  Louvain  devint  tran- 
quille, et  même  celte  ville  fut  regardée  comme  la  plus 
catholique  des  Pays-Bas.  Cela  n'avait  rien  d'étonnant  ; 
Louvain  se  trouvait  dans  la  misère  (3),  et  ses  habitants  dé- 
pendaient entièrement  des  nombreux  couvents  que  celte 
ville  renfermait  et  de  son  université,  que  le  gouvernement 
avait  su  s'attacher.  Car,  lorsque  Jean  Molanus  proposa 
à  l'université,  réunie  au  chapitre  de  S'-Pierre,  de  recevoir 
comme  sur-intendant  de  la  garde  de  la  ville  Maximilien 
de  Colereau,  seigneur  de  Glabbcke,  elle  déclina  sa  com- 
pétence. Ensuite  il  lui  proposa  de  prêter  le  serment  de 
fidéHlé   au  prince  d'Orange  et  de  le  reconnaître  comme 

(1)  Archives  de  la  ville  de  Louvain  ,  Chartes  litt..  N"  35. 

(2)  Antw.  Chron. 

(3)  Daas  Tac  te  que  le  magistrat  adressa,  eu  1523.  à  Charles-Quint, 
pour  obtenir  lautorisatiou  nécessaire  pour  canaliser  la  Dyle,  il  est  dit 
que  c'est  la  seule  planche  de  salut  poiu-  une  ville ,  dont  les  habitans 
devaient  éniigrer.  poussés  jiar  la  misère. 


(374) 

gouverneur  du  Brabanl;  elle  refusa  nettement.  Dans  une 
nouvelle  assemblée,  le  sire  de  Cotereau  proposa  de  recevoir 
une  garnison  étrangère  dans  la  ville;  l'université  déclara 
que  cela  ne  la  regardait  pas ,  et  pria  le  magistrat  de  laisser 
partir  ceux  de  l'université  dans  le  cas  où  Louvain  receve- 
rait  une  garnison  (1). 

Malgré  cette  réponse,  deux  compagnies  d'Ecossais  vin- 
rent à  Louvain  pour  y  garder  les  remparts.  Celte  entrée 
était  favorisée  par  Cotereau,  les  deux  frères  chevaliers 
Van  den  Tempele,  et  par  quelques  autres  bourgeois  par- 
tisans du  prince  dOrange.  Cependant  la  majeure  partie 
des  bourgeois,  qui  avaient  repoussé  le  prince  d'Orange 
lorsqu'il  se  présenta  devant  la  ville,  en  1572  (2) ,  fut  très- 
mécontente  de  ce  changement.  Aussi  lorsque  les  Ecossais 
apprirent  la  victoire  de  Don  Juan,  ils  quittèrent  tranquil- 
lement la  ville,  de  crainte  d'être  attaqués  par  les  bourgeois. 
Don  Juan  remercia  aussi  les  Louvanisles  de  leur  fidélité,  et 
leur  promit  les  bonnes  grâces  du  roi.  Louvain  fut  dès  lors 
favorisé  :  un  nouveau  conseil  du  Brabant  y  fut  établi,  ainsi 
qu'un  conseil  d'état  et  une  cour  féodale.  Les  Jésuites  et  les 
Récollets,  chassés  d'Anvers  parce  qu'ils  n'avaient  pas  voulu 
prêter  le  serment  de  fidélité  au  prince  d Orange,  furent 
envoyés  par  Don  Juan  à  Louvain.  Arrivés  aux  portes  de 
la  ville,  ils  y  furent  reçus  par  le  gouverneur  avec  une 
escorte  de  400  cavaliers  et  fantassins  (3). 


(1)  Les  parents  en  général  n'aimaient  pas  le  voisinage  des  soldats  pour 
leurs  enfants  qui  étudiaient  à  l'université  de  Louvain  ;  ils  les  retiraient 
tous,  bien  que  la  garnison  fut  espagnole  :  u  Lovanii  vero  cum  essem , 
undique  ad  me  de  prœsidio  hispanico  querelœ  allatœ  sunt,  et  sane 
non  parum  inde  Academia  Lovaniensis  jacturam  patitur,  cum  Uberos 
senos  parentes,  ob  mil/tum  consortium  inde  avocenf.  ))(Epist.  Viglii  ad 
Hopperum  ;  épis.  88,  6  sept.  1569). 

(2)  V.  Gramaye,  Lovanium  ,  p.  4. 

(3)  Tassis ,  Cornent,  de  tumult.  Belg.  L  4 ,  S  34  ;  De  Thou,  I.  69. 


(  375  ) 

L'université,  à  laquelle  l'exislence  de  la  ville  était  si 
intimement  liée,  fit  plus  que  tout  le  reste  (1)  :a  Sembla- 
»bles  roberies  et  destructions  se  firent  en  la  ville  de  Gand , 
»  Malines  et  a  l'entour  d'icelles  ;  et  desoient  les  rebelles 
K  qu'ils  feroient  le  mesme  a  Louvain  et  a  Bruxelles  a  la  veue 
»  de  son  alteze  ;  mais  la  bonne  provision  que  fut  mise  par 
»son  alteze  a  Bruxelles,  où  elle  feit  capitaine  le  comte  de 
«Mansfelt  et  a  Louvain  par  les  docteurs  de  l université  et 
«gouverneur  de  la  ville  qui  empêcheirent  qu'ils  ne  purent 
»leur  intention  (2).  »  Philippe  II  eut  soin  aussi  de  pur- 
ger la  bibliothèque  de  l'université.  Il  commanda  au  frère 
Barth.  Carr.  De  Miranda,  de  passer  dans  les  Pays-Bas  pour 
y  visiter  les  bibliothèques  et  particulièrement  celle  de 
Louvain  (3). 

Depuis  lors  Louvain  devint  la  ville  la  plus  catholique  , 
Albert  et  Isabelle  la  dotèrent  d'un  grand  nombre  de 
couvents  pour  stimuler  le  zèle  et  la  piété  de  ses  habitants  ; 
aussi  ce  n'est  pas  sans  motif  que  Parival,  dans  sa  Descrip- 
tion de  Louvain  ,  fait  un  éloge  pompeux  de  la  piété , 
honte  et  dévotion  des  Louvanistes. 


C.  PioT,  avocat. 


(1)  Je  traiterai  particulièrement  de  l'innucnce  de  ces  nouvelles  doctri- 
nes sur  l'université. 

(2)  J.  Hopperus ,  Recueil  et  Mém.  des  troubles  des  P.-B.  du  roy, 
4"^  partie,  c. 3,  despMerics ,  feux etdpsfrucfio/i , etc.  Hoyiick, t.  II, p.  2. 

(3)  Rec.  des  act.  et  par.  mem.  de  pliil.  t,  j).  105, 


(  376  ) 


SLR 


CucaiS  îrcCcybc  etCl)ri6t0pl)c  îreColognc. 


'«'^'rS5i'^3»= 


Un  des  peintres  les  plus  distingués  de  notre  pays  est 
Lucas  de  Leyde,  né  dans  la  ville  dont  il  porte  le  nom,  en 
1494  et  mort  en  1533;  son  père  s'appelait  Huitjeiis  Jacobs- 
zoon.  Il  était  aussi  graveur,  et  Vasari  en  dit  :  Sono  le  corn- 
positioni  délie  storie  di  Luca  piii  osservati  seconda  l'ordine 
delarte  che  quelle  d' Alberto  (Albert  Durer).  Cet  éloge  d'un 
étranger,  qui  avait  sous  les  yeux  tout  ce  que  l'Italie  avait 
produit  de  mieux,  et  la  comparaison  avec  les  productions 
si  belles  du  chef  de  l'Ecole  allemande,  nous  donnent  la 
mesure  du  mérite  réel  de  Lucas  de  Leyde.  Cependant  ses 
ouvrages  en  peinture  sont  tellement  rares  que  nous  aurions 
peine  à  en  citer  dans  notre  pays  dont  l'authenticité  fût  hors 
de  contestation.  En  offrant  de  temps  en  temps  à  nos  lec- 
teurs les  traces  de  quelques  tableaux  de  notre  ancienne 
Ecole,  nous  nous  attacherons  surtout  à  faire  choix  de  ceux 
qui  peuvent  offrir  un  type  ou  point  certain  de  comparaison. 
Le  tableau  de  Lucas  de  Leyde,  dont  on  voit  le  dessin  ci-con- 
tre, se  trouve  à  Cologne  et  porte  le  monogramme  connu 
du  peintre,  qui  est  la  première  lettre  de  son  nom.  Il  est 
d'une  parfaite  conservation;  le  dessin  en  est  correct,  au- 
cunement tourmenté,  et  la  couleur,  suave,  manque  cepen- 
dant un  peu  de  vivacité;  mais  elle  a  bien  ce  ton  ivoire  et 


4^<i^^i 


(  377   ) 

la  Iransparence  purliculicre  à  Lucas  de  Lcyde  :  les  drape- 
ries, largement  jelécs  ,  ont  plus  de   prolondeur  dans  les 
plis  qu'on  n'en  remarque  dans  d'autres  ouvrages  du  même 
maître.  Combien  n'est-il  pas  à  regretter  que  le  tableau  qui 
se  trouve  à  l'hôtel-de-ville  de  Leyde,   représentant  le  Ju- 
gement   dernier,    ait    subi ,  dès  1 604 ,    une  restauration 
maladroite,  à  laquelle  il  faut  attribuer  le  peu  de  relief  des 
ligures ,  dont  presque  partout  les  glacis  ont  disparu;  cepen- 
dant, comme  l'authenticité  de  ce  tableau  est  constatée  pai- 
Van  Mander,  il  est  bon  à  étudier  pour  connaître  la  manière 
du  peintre,  très-rcconnaissable  à  ses  ombres,  souvent  si 
claires  qu'elles  semblent  une  ébauche,  et  aux  touches  plattes 
et  larges  de  ses  lumières  principales.  Cette  grande  compo- 
sition offre  une  multitude  de  groupes  où  l'on  ne  retrouve 
pas  ces  altitudes  forcées  des  temps  gothiques,  et  majo^ré 
l'opinion  rapportée  plus  haut,  il  nous  semble  que  sous  le 
rapport  de  la  composition,  Lucas  de  Leyde  reste  non-seule- 
ment au-dessous  d'Albert  Durer,  mais  qu'il  est  surpassé 
même  par  Quentin  Matsys,  mort  avant  lui,  et  par  Jean 
de  Maubeuge,  son  contemporain,  qui  avaient  tous  deux 
plus  de  fermeté  dans  le  pinceau  et  dessinaient  avec  non 
moins  de  correction  que  le  peintre  de  Leyde. 

Les  Allemands  ont  sur  notre  peintre  une  opinion  toute 
différente  de  la  nôtre,  et  croient  reconnaître  ses  ouvra- 
ges dans  quelques  tableaux  qui  ne  ressemblent  en  aucune 
façon  à  ceux  que  nous  venons  de  citer.  Il  y  en  a  plusieurs 
dans  les  galeries  du  roi  de  Bavière,  tous  attribués  à  ce 
peintre,  à  cause  de  leur  parfaite  analogie  avec  deux  ta- 
bleaux faisant  partie  du  cabinet  de  feu  M.  Lievenberg,  à 
Cologne,  et  à  l'égard  desquels  M.  Fochem  avait  recueilli 
une  tradition  qui  les  attribuait  à  Lucas  de  Leyde.  Mais 
l'un  de  ces  tableaux  avait  été  donné  à  l'éailise  des  Chartreux 
de  cette  ville,  en  1501;  il  ne  pouvait  donc  être  de  notre 
peintre,  à  peine  âgé  alors  de  sept  ou  huit  ans.  Ces  tableaux 


23 


(  378  ) 

sont  très-beaux  j  tant  pour  le  dessin  que  par  la  manière  de 
traiter  les  couleurs.  Il  suffit  cependant  d'un  léger  examen 
pour  leur  trouver  un  ton  plus  sec,  une  couleur  moins  ivoire 
qu'aux  tableaux  avec  lesquels  nous  les  comparons  :  les 
physionomies  des  personnages  du  peintre  de  Cologne  sont 
oblongues,  celles  de  Lucas  de  Leyde  sont  toujours  rondes; 
les  chairs  sont  décolorées  chez  l'un,  surtout  dans  les  ta- 
bleaux de  petite  dimension,  et  au  contraire  très-animées 
dans  les  tableaux  du  cabinet  Lievenberg,  dont  l'auteur 
fondait  toutes  ses  teintes  avec  un  soin  que  n'employait  pas 
Lucas  de  Leyde.  Mais  notre  peintre  l'emportait  sur  celui-ci 
dans  l'art  de  la  composition  ;  il  groupait  parfaitement  ses 
figures,  et  l'artiste  de  Cologne  suivait  encore  la  raideur  du 
style  bizantin,  plaçant  ses  figures  devant  une  draperie,  ce 
(jui  caractérise  tout-à-fait  l'époque  des  Van  Eyck.  Cela  seul 
eût  suffi  pour  les  classer  dans  une  époque  beaucoup  anté- 
rieure au  temps  où  vécut  Lucas  de  Leyde,  si  on  n'avait 
persisté  à  vouloir  y  reconnaître  ce  peintre,  à  défaut  de 
savoir  à  qui  attribuer  ces  tableaux. 

Un  hasard  heureux  a  confirmé  notre  jugement,  en  nous 
apprenant  le  nom  du  peintre  des  ouvrages  faussement 
attribués  à  notre  école. 

Nous  avons  dit  que  ces  tableaux  ,  représentant  l'un 
S'-André  et  S^^-Catherine ,  et  l'autre  S'-Thomas  à  Rome, 
avaient  été  donnés  à  l'égUse  des  Chartreux  de  Cologne, 
en  1501;  ce  fut  par  un  nommé  Binch,  qui  mourut  le 
8  juin  de  cette  année,  suivant  une  ancienne  chronique , 
qui  nous  apprend  que  ces  tableaux  étaient  ceux  des  autels. 
Ils  ornaient  effectivement  les  autels  qui  étaient  sous  l'or- 
chestre, et  une  autre  chronique  dit  qu'en  1485,  un  frère- 
lai,  nommé  Jean,  paya  105  pièces  d'or  pour  les  tableaux 
(le  ces  autels  :  cela  ne  nous  apprend  pas  encore  le  nom  du 
y)einlre;  maisen  1471  ,toujourssiiivantlamêmechronique, 
je  tableau  de  l'autel  des  Saints-Anges  avait  été  peint  par 


1-  •  (  379  ) 

Mai// c  Christophe ,  et  même  antérieurement,  le  24  sep- 
tembre 1443,  un  certain  De  Goch  avait  fondé  l'autel  de  la 
Passion  et  payé  280  marcs  d'argent  pour  ce  tableau, 

Blalheureusement  le  tableau  des  Sainls-Anges  n'existe 
plus,  mais  on  connaît  le  nom  du  peintre  colonais  qui  vé- 
cut à  l'époque  où  les  tableaux  furent  donnés,  et  qui  peignit 
pour  les  Chartreux,  chez  qui  ils  se  sont  trouvés.  Si  ce  n'est 
là  une  preuve  irrécusable,  c'est  du  moins  une  grande 
probabilité,  et  elle  a  paru  suffisante  aux  hommes  les  plus 
instruits,  à  Cologne,  pour  abandonner  l'opinion  ancienne 
et  inscrire  dans  leurs  catalogues  le  nom  d'un  artiste  re- 
marquable, ignoré  jusqu'ici  de  ses  compatriotes. 

Nous  sommes  redevables  de  ces  renseignements  sur  ces  ta- 
bleaux de  Cologne  à  notre  estimable  ami,  M.  Du  Noël,  con- 
servateur du  Musée  de  Cologne ,  et  nous  y  attachons  d'autant 
plusdcprixqu'ilestdu  petitnombre  d'hommes  dont  les  con- 
naissances ne  se  croient  point  affranchies  des  règles  d'une 
saine  critique,  dès  qu'il  s'agit  d'apprécier  des  objets  d'arts 
appartenant  chez  nous  au  temps  de  la  Renaissance,  Parent 
du  propriétaire  de  ce  beau  cabinet,  que  tous  les  souverains 
ont  admiré  à  Cologne,  et  que  la  mort  vient  d'enlever,  nous 
déplorerons  avec  lui  une  perte  que  les  arts  sentiront  vive- 
ment. M.  de  Lievenberg  avait  élevé  dans  sa  collection  un 
monument  aux  arts  de  sa  patrie;  nous  avons  eu  occasion 
de  faire  remarquer,  dans  d'autres  articles,  combien  étaient 
intimes  les  rapports  de  caractères  entre  l'école  de  Cologne 
et  celle  de  notre  pays,  jusqu'au  temps  des  Van  Eyck,  Dans 
les  ouvrages  de  Christophe,  contemporain  des  peintres  de 
Bruges,  nous  voyons  quelle  marche  suivit  celle-ci  lorsque 
nous  prîmes  une  autre  route,  qui  devait  nous  conduire 
plus  tôt  à  l'imitation  de  la  nature  :  autant  par  ce  motif  que 
parce  que  le  peintre  colonois  a  été  confondu  avec  Lucas 
de  Leyde,  nous  avons  cru  pouvoir  présenter  à  nos  lecteurs 
un  Irait  du  tableau  de  chacun  des  deux  peintres. 


(  S80  ) 


Wtnx  ïlois  it  Svmxtt 


E:<    MEME   TEMPS. 


Charles  IV,  dit  le  Bel,  mourul  le  31  janvier  1328. 
Edouard  III,  roi  d'Angleterre,  petit-fils,  par  sa  mère  Isa- 
belle, du  roi  Philippe-le-Bel,  prétendait  à  la  couronne  de 
France.  Il  avait  pour  concurrent  Philippe  de  Valois,  au- 
quel il  causa  beaucoup  d'embarras.  Celui-ci  nétait  que  ne- 
veu de  Philippe-le-Bel,  et  son  droit  fut  cependant  jugé  le 
meilleur  parles  pairs  et  les  barons  du  royaume,  parce 
qu'il  était  du  sang  de  France  par  les  mâles  ;  d'ailleurs  de  tous 
temps  les  femmes  étaient  exclues  de  la  couronne,  aussi 
bien  que  ceux  qui  n'y  pouvaient  prétendre  que  par  elles  ; 
comme  il  était  arrivé  à  la  mort  de  Philippe-le-Bel,  qui  laissa 
trois  fils,  Louis  Hutin,  Philippe-le-Long,  Charles-le-Bel, 
et  Isabelle,  épouse  d'Edouard  II.  Louis  Hutin  succéda  à 
son  père  et  mourut  après  un  règne  très-court,  laissant  une 
fille  et  la  reine  enceinte  ;  elle  accoucha  d'un  garçon  qui 
ne  vécut  que  quatre  jours,  et  Philippe-le-Long,  frère  de 
Louis  Hutin,  monta  sur  le  trône,  à  l'exclusion  de  Jeanne, 
fille  de  son  prédécesseur. 

Ainsi  Edouard  ne  pouvait  faire  valoir  ses  prétentions  à 
la  couronne  de  France ,  attendu  que  la  loi  salique  s'y  op- 
posait formellement,   mais  il  ne  conserva  pas  moins  le 


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•'^  'c^  ûi^<ir^<y  . 


(  3yi  ) 

désir,  ou  plutôt  l'iuiibitioa  de  faire  revivre  ses  prétendus 
droits. 

Excité  par  Robert  d'Artois,  qui  avait  été  banni  pour 
une  fourberie  criminelle,  ets'élant  attaché  tous  les  princes 
belges,  à  l'exception  du  comte  de  Luxembourg  et  de  Louis 
de  Gréci,  qui  restait  toujours  uni  à  la  France,  Edouard 
entreprit,  en  1337,  la  guerre  pour  parvenir  à  son  but. 
Deux  années  plus  tard  (1),  par  le  conseil  de  Jacques 
Van  Artevelde,  chef  des  Gantois,  ou  plutôt  protecteur  de 
la  Flandre,  et  qui  peu  après  fut  victime  de  la  haine  de 
la  populace  de  Gand  ,  il  prend ,  pour  engager  les  Flamands 
dans  son  parti,  le  titre  de  roi  de  France,  et  marque  Fan 
1339  comme  le  premier  de  son  règne,  tandis  que  Phi- 
lippe VI  occupait  le  trône.  Mais  il  ne  se  borna  point  à 
s'arroger  ce  titre  chimérique ,  et  à  écarleler  les  armes  de 
France  avec  celles  d'Angleterre;  il  fit  plus,  car,  après 
avoir  engagé  les  Flamands  à  se  déclarer  contre  la  France 
(ce  qu'ils  firent  d'autant  plus  volontiers  qu'ils  se  rappe- 
laient avec  peine  le  démembrement  de  la  Flandre  wal- 
lonne et  la  cession  qu'ils  avaient  été  contraints  de  faire, 
en  1312,  des  villes  de  Lille,  Douay,  Béthune,  et  de  quel- 
ques autres  places),  il  agissait  en  souverain  de  ce  vaste 
empire,  et  en  exerçait  le  pouvoir  comme  s'il  y  eût  porté 
le  sceptre. 

En  effet,  Edouard,  ayant  égard  à  la  loyauté,  à  l'obéissance 
et  aux  services  qui  lui  avaient   déjà  été  rendus  par  les 

(1)  Ce  fut  vers  ce  temps ,  et  pendant  que  les  armées  des  deux  rois  ne 
négligaient  rien  pour  se  nuire  réciproquement,  que  les  Anglais  et  les 
Flamands  pillèrent  la  petite  ville  d'Armenticres  ,  mais  ils  furent  inconti- 
nent défaits  près  de  Marquette.  Dans  cette  rencontre,  les  comtes  de  Suf- 
folck  et  de  Salisbury  furent  faits  prisonniers  par  les  Français,  comme 
aussi  le  premier  éclievin  et  le  châtelain  d'Ypres  .  qui  avaient  assisté  à 
ce  pillage  .  avec  beaucoup  d'habitants  armés  de  cette  ville  :  il  y  eut  un 
grand  nombre  de  Flamands  (pii  y  furent  tues  ou  blessés.  Annales  tiiti- 
iiiiscr.  (l'Vjtns. 


(  382  ) 

habitants  des  bonnes  villes  de  Gand,  Bruges  et  Ypres  et 
par  le  commun  pays  de  Flandre,  et  aux  promesses  de  fidé- 
lité qu'ils  lui  avaient  faites,  comme  roi  de  France  et  leur 
légitime  souverain  et  seigneur,  affranchit  le  comte  de 
Flandre,  ainsi  que  ses  sujets  (qui  cependant  ne  parta- 
geaient point  les  sympathies  de  leur  prince) ,  de  tous  liens , 
soumissions  et  obligations  envers  le  pape,  ainsi  que  de 
toutes  sentences  d'excommunication,  de  suspension  et  d'in- 
terdit, et  de  toutes  peines  et  servitudes  que  ledit  comte, 
ses  héritiers  et  successeurs,  les  nobles,  les  habitants,  les 
villes,  terres,  lieux,  châtellenies et  communes  devaient  au 
chef  de  l'église;  il  ordonna  que  les  forteresses  qui  existaient 
en  Flandre,  seraient  maintenues,  sans  pouvoir  les  démolir 
en  aucun  temps;  il  rendit  au  comte,  pour  être  réunies  à 
ses  domaines,  les  villes  de  Lille,  Douay,  Bélhune,  Orchies 
et  leurs  châtellenies,  ainsi  que  le  comté  d'Artois  qui,  de 
toute  ancienneté,  appartenait  au  comte  de  Flandre;  et  re- 
nonça à  tous  droits  de  possession  que  lui  et  ses  prédéces- 
seurs, rois  de  France,  y  avaient;  il  abandonna  encore  ,  au 
comte  de  Flandre,  la  ville  et  la  châlellenie  de  Tournay, 
avec  les  seigneuries,  émoluments  et  profits  qui  en  dépen- 
daient ,  pour  les  tenir  en  fief  et  hommage  du  roi  de  France , 
comme  seigneur  suzerain;  il  confirma  tous  les  privilèges, 
franchises  et  libertés  dont  les  villes  et  les  châtellenies  de 
Flandre  étaient  en  possession,  et  tels  qu'elles  en  jouissaient 
du  temps  de  Robert  de  Béthune;  il  promit  que  lui  et  ses 
successeurs,  rois  de  France,  n'imposeraient  jamais  de  tail- 
les ni  de  contributions  sur  les  Flamands  ni  sur  le  pays  de 
Flandre  ;  il  promit  encore  de  faire  forger,  dans  son  royaume 
de  France,  ainsi  que  dans  le  Brabant  et  la  Flandre,  une 
monnaie  commune  d'or  et  d'argent,  qui  aurait  cours  dans 
les  deux  royaumes  de  France  et  d'Angleterre ,  et  dans  la 
Flandre  clleBriibant,  cette  monnaie  devait  être  équivalente 
à  celle  que  fil  frapper  Philippe-lc-Bel;  Edouard  III  prit 


(  383  ) 

aussi  sous  sa  protection  el  sauvegarde,  dans  loule  l'élciiduc 
de  SCS  étals  de  France,  les  Flamands  et  les  Brabançons, 
et  il  voulut  que  jamais  ils  ne  pussent  y  être  arrêtés  pour 
dettes  anciennes  ou  communes  des  villes  et.  chàtellenies 
de  la  province  de  Flandre ,  sauf  dans  le  cas  où  les  per- 
sonnes arrêtées  se  seraient  obligées  personnellement  au 
paiement  de  ces  dettes.  Le  roi  d'Angleterre  ne  se  borna 
point  à  faire  jouir  les  Flamands  de  tous  les  avantages 
qu'ils  auraient  pu  attendre  de  sa  munificence,  il  répandit 
aussi  ses  largesses  sur  les  Aquitains,  car  aussitôt  qu'il  eût 
pris  le  titre  de  roi  de  France,  ceux-ci  s'en  allarmèrent, 
parce  que  la  décadence  rapide  des  communes  de  Langue- 
doc devait  nécessairement  occasioinier  la  ruine  de  toute 
liberté  municipale;  mais  pour  leur  ôter  tout  sujet  de 
crainte,  il  leur  promit  que,  malgré  sa  prise  de  possession 
du  royaume  de  France  qui,  disait-iî,  lui  appartenait,  il 
ne  leur  ôterait  ni  leurs  libertés,  privilèges  et  coutumes, 
ni  leurs  autres  droits  quelconques  (1). 

Les  auteurs  que  nous  avons  consultés  n'étant  point  en- 
trés dans  le  détail  de  toutes  les  concessions  faites  par 
Edouard  III  au  comte  de  Flandre  et  à  ses  sujets,  pour  les 
engager  à  épouser  sa  querelle  avec  Philippe  de  Valois, 
nous  avons  cru  qu'il  ne  serait  pas  indifférent  aux  ama- 
teurs de  notre  histoire  nationale  de  les  connaître  :  l'analyse 
qui  précède  a  été  extraite  d'un  document  original  et  iné- 
dit, qui  porte  la  date  du  mercredi  après  la  mi-carême  de 
l'an  1340,  et  qui  se  trouve  déposé  dans  les  archives  de  la 
ville  d'Ypres. 

La  guerre  entre  Edouard  III  et  Phillippe  VI  durait  en- 
core en  1350,  année  en  laquelle  ce  dernier  mourut. 

Lambiîv. 

(1)  TlùciTy  ,  Hist.  de  ia  cojjquête  'le  l'Anyletcnc  par  les  Normands  , 
tom.lV..  pag.  103. 


(  384  ) 


2i:i:)mbeau  U  §envi  be  toittl)em. 


A    BEERSELE.    PKES    DE    Br.UXEI.LES. 


— ^^«'©«c 


Ce  débris  curieux  du  moyen-âge,  qui  va  nous  Qccuper 
un  instant,  se  trouve  dans  l'église  du  village  de  Beersele? 
à  deux  lieues  de  Bruxelles,  endroit  devenu  célèbre  à  cause 
de  son  ancien  château.  Il  fut  épargné  dans  les  guerres  ci- 
viles et  les  troubles  religieux  qui  désolèrent  le  pays  au  sei- 
zième siècle ,  mais  il  n'a  pu  échapper  au  vandalisme  des 
iconoclastes  destructeurs  du  dix-neuvième,  qui  l'ont  réduit 
à  l'état  où  il  est  aujourd'hui.  Ce  mausolée,  dont  il  n'existe 
plus  que  deux  statues  à  demi-mutilées ,  a  été  placé  dans 
une  niche  contre  la  muraille,  à  gauche,  en  entrant  dans 
l'église;  il  est  fait  d'une  pierre  grise,  imitant  assez  bien 
le  marbre  et  artistement  exécuté  pour  l'époque:  les  deux 
petites  niches,  placées  au-dessous  des  têtes,  sont  d'un  tra- 
vail gothique  délicat  et  curieux.  Le  lion  et  le  chien  que 
l'on  voit  dans  presque  tous  les  anciens  tombeaux ,  ont  été 
mutilés  à  tel  point  qu'on  a  peine  à  les  reconnaître.  Ces 
statues  étaient  couchées  autrefois  sur  une  tombe,  mainte- 
nant détruite,  élevée  de  quelques  pieds  au-dessus  du  sol. 
et  presque  semblable  à  celle  de  Josse  de  Joigny,  baron  de 
Pamele  ,  dans  leglise  de  Pamelc.  à  Audenardc. 

Le  cro(£uis  que  nous  donnons  ci-joint  et  (pii  a  été  exac- 


/^' ^-^^/<;,i.^  .->.- 


(  385  ) 

Icmeiil  dessillé  sur  les  lieux,  par  M.  Boussurd  lils,  de 
Bruxelles,  jeune  paysagiste  et  dessinateur  de  beaucoup 
d'espérance,  sufRra  pour  donner  une  juste  idée  de  la 
situation  actuelle  du  monument. 

Les  armoiries  ou  quartiers,  qui  n'étaient  pas  l'un  des 
moindres  ornements  de  ce  tombeaii,  ont  été  incrustés  dans 
le  mur  au-dessous  (l).  On  n'y  trouve  aucune  inscription 
ni  épitaphe;  nous  pensons  qu'il  n'en  a  jamais  existé  :  du 
moins  aucun  auteur ^  à  noire  connaissance,  n'en  fait 
mention. 

Henri  de  Wilthem,  sire  de  Beersele,  Braine-Laleud, 
Ruysbrouck,  Plancenoit,  etc.,  à  la  mémoire  duquel  ce 
tombeau  a  été  élevé,  était  arrière-petit-fils  de  Jean  de 
Corselaer  ou  Cosselaere,  sire  de  Witthem  (2),  Wailwilre 
et  Machelen,  fils  naturel  de  Jean  II,  duc  de  Brabant  et  de 
Lothier,  et  de  Catherine  de  Cosselaere.  Il  était  fils  de  Henri 
de  Witthem,  chevalier,  sire  de  Beersele,  mort  en  1444, qui 
avait  été  élu  échevin  de  Bruxelles,  comme  membre  de  la 
famille  patricienne  de  Sweerts,  en  1402;  il  eut  deux  fem- 
mes: l'une,  Catherine  de  Berchem,dame  de  Routs,  mourut 
sans  lui  donner  postérité;  il  épousa  en  secondes  noces, 
en  1406 .  Blareuerite  d'En^hien  de  Havre,  dame  de  Braine- 
Laleud  et  Plancenoit,  veuve  de  Godefroid ,  sire  de  Som- 
breffe,  morte  le  27  janvier  1445;  fille  de  Jacques,  sire  de 
Fagneules,  mort  le  12  décembre  1427,  et  de  Marie,  com- 
tesse de  Coucv,  morte  en  1416.  Ils  sont  tous  trois  inhumés 
dans  l'église  de  Beersele,  mais  leur  tombeau  n'existe  plus. 

(1)  Plusieurs  membres  de  la  même  famille  ayant  été  inhumés  dans 
cette  église,  ces  armoiries  sont  les  seuls  indices,  qui  nous  ont  servi  à 
reconnaître  exactement  les  noms  des   personnages  qui  nous  occupent. 

(2)  Le  château  de  Witthem,  situé  dans  le  duché  de  Limbourg, 
fut  assiégé  sans  succès,  en  1285,  par  le  comte  de  Gucldre  ,  les  sires 
de  Wesemacl  et  de  Walhain.  Voy.  Butkcns,  Trophées  du  Brahant, 
loni.  I".  308. 


(  3SG  ) 

Henri  de  Witthem ,  qui  fait  le  sujet  de  la  cette  no- 
tice, épousa,  en  1438,  Jacqueline  de  Glymes,  fille  de 
Jean,  sire  de  Glymes  (1) ,  et  de  Jeanne  ,  dame  de  Berges 
et  de  Grimberghe;  il  mourut  en  1454,  elle  en  1462; 
laissant  quatre  enfants,  parmi  lesquels,  l'aîné,  nommé 
Henri  (2) ,  fut  créé  Amman  de  Bruxelles,  en  1492  ,  et  che- 
valier de  la  Toison  d'or  en  1491.  Il  était  chambellan  de 
Philippe-le-Beau  et  gouverneur  de  ses  enfants.  En  1488. 
il  fit  la  guerre  aux  Bruxellois  qui  s'étaient  révoltés,  pilla  et 
saccagea  le  pays;  mais  ceux-ci  ayant  réuni  leurs  forces, 
allèrent  mettre  le  siège  devant  le  château  deBeersele,  qui, 
après  une  vigoureuse  résistance,  fut  contraint  de  se  ren- 
dre; les  vainqueurs  y  mirent  le  feu,  ils  incendièrent  éga- 
lement celui  de  Braine-l'Aleud ,  et  sa  maison  de  Bruxelles. 
Il  avait  épousé  lsal>eau  Desponts,  dame  d'Arquennes  et 
Petit-Rœulx;  il  mourut  le  17  septembre  1515,  elle  le 
3  juin  1503.  Ils  gisent  à  Beersele.  On  trouve  une  longue 
épilaphe  en  vers  sur  ce  seigneur  dans  le  Théâtre  sacré  du 
Brahant ,  par  le  baron  Le  Roy.  Cette  épitaphe  est  aujour- 
d'hui détruite,  mais  il  en  existe  une  autre,  que  nous  avons 
découverte,  devant  le  petit  autel;  c'est  une  simple  pierre 
sépulcrale.  Nous  la  transcrivons,  ici,  fidèlement  : 

HIC  JACET 
UE.'SaiCCS  DE  WITTHEM  ,  DOMIMJS 

DE  BEERSELE  ,  AUREl  \ELLERIS 

£01ES.  OBIÎT  XVII  SEPT.  MDXV. 

ET 

ISABELLA  DESPOMTS,  EJOS 

i  xoR  ,  OBIIT  III  jusn  MDIII. 
R.  I.  p. 


(1)  Aussi  arrière-petit-fils  de  Jean  de  Cordekeiii ,  (ils  naturel  de 
Jean  II ,  duc  de  Brabant ,  et  de  Isabeau  de  Cordekein. 

(2)  C'est  le  inénic  Henri  de  Witthem  que  tjous  voyons  parmi  les  com- 
missaires nommés  par  la  princesse  Marie,  en  1476,  pour  juyer  Hu^joact 
et  Himbercoiirt,  \oy.  Mcssutjcr  des  Sciences  j  1839;  pa{}.  364. 


(  387  ) 

Une  parlicularité  singulière  dans  les  armoiiu-s  de  Wil- 
Uicm,  cest  l'absence  de  la  oolice  de  gueules,  manjuc 
dislinclive  des  bâtards  de  Brabant,  quoique  cette  iamille 
ait  eu  la  même  origine  que  celles  de  Dongelberghee,  Brouls 
ou  Van  Brecht ,  Van  den  Tyniplc,  Van  Mcchclcn,,  etc.,  elc. 


J.  Gavtiepw 


«*f/5-S'Ç^K-4 


(  388  ) 


3.ual£!5e0  critiques  îï'®ut)rcage5. 


Mengelpoezy  vmi  F.  J.  Blieck,  lid  der  Maetschappy  van 
Rhetorica  te  Wervick.  Kortryk,  by  Jaspin.  In-8",  p.  140. 

Bloejien  myker  Lente,  door  Ch.  Ledeganck.  Gent,  by  Vaii- 
derhaeghen-Hulin.  In-8°.  p.  156. 


Les  progrès  que  noire  pays  a  faits,  depuis  trente  ans, 
dans  le  champ  autrefois  si  inculte  des  arts,  sont  très-sensi- 
bles. Le  XVIII^  siècle  ne  produisit  aucun  peintre  de  renom, 
aucun  poète  dont  les  mélodies  patriotiques  relevassent 
l'esprit  abattu  des  Flamands;  pleins  d'admiration  pour  les 
œuvres  littéraires  d'une  nation  voisine,  ils  semblaient 
avoir  oublié  leur  gloire  passée  Ci  se  soucier  peu  de  l'a- 
venir. ^ 

Maintenant  un  changement  total  s'est  opéré  dans  l'esprit 
des  Belges.  L'amour  de  la  patrie  s'est  retrempé  dans  l'en- 
thousiasme, que  produisit  la  victoire  de  Waterloo.  Nous 
avons  jeté  les  yeux  sur  nos  propres  annales,  et  les  faits 
héroïques  de  nos  ancêtres  ont  trouvé  des  historiens  pour 
les  répandre,  des  peintres  pour  les  reproduire  et  des  poètes 
poiu'  les  célébrer. 

Ce  sont  surtout  les  peintres  et  les  poètes  qui  agissent 
avec  le  plus  de  force  sur  l'esprit  d'une  nation,  qui  répan- 
dent dans  tous  les  rangs  les  mêmes  désirs,  les  mêmes  sen- 


(  389  ) 

tinients  d'indépemlance.  si  néfcssaires  à  un  peuple, 
ïurtout  quand  ce  peuple  se  relève  et  secoue  l'influence 
OtJili-nalionale  (jui  le  retint  long-temps  enchaîné.  Aussi 
grâce  aux  pinceaux  de  Palinck,  Van  Bree,  Wappers,  De 
K:eyzer,Wouters,Verbouckhoven,  Gallail  et  de  tant  d'autres 
maîtres  illustres.  l'école  flamande  de  peinture  reprendra 
bientôt  lu  place  où  Rubens  et  Van  Dyck  l'avaient  élevée. 
La  littérature  ressuscita  en  même  temps,  et  déjà  des  écri- 
vains du  premier  ordre  se  sont  lait  connaître  :  leurs 
productions  ne  se  recommandent  pas  moins  par  l'élé- 
gance et  la  force  de  la  diction,  que  par  la  marche  des 
idées  et  les  sentiments  qui  y  sont  répandus.  Si  nous  je- 
tons les  regards  sur  les  ouvrages  que  cette  année  a  vu 
paraître,  nous  citerons  avec  orgueil  les  deux  poèmes  de 
M.  P. Van  i)uyse,dont  l'un,  De  Gentsche  \ aderbeul,  nous 
retrace  un  récit  populaire  de  la  ville  de  Gand;  l'autre, 
De  doocl  van  (jraef  Egmont  (la  mort  du  comte  d'Egmont  ) 
en  quatre  chants,  ne  remet  pas  seulement  en  scène  la 
mort  de  ce  héros,  que  le  sanguinaire  duc  d'Albe  sacrifia  à 
sa  jalousie;  mais  toute  cette  époque  des  troubles,  si  désas- 
treuse pour  le  pays,  y  est  résumée  en  épisodes  remarquables. 
M.  Conscience  nous  a  donné  son  roman  De  Leeuw  van 
Vlaenderen  (Le  Lion  de  Flandre),  dont  nous  avons  fait 
connaître  la  tendance  et  le  contenu  dans  la  livraison  précé- 
dente de  ce  recueil.  M.  C.  Duvilliers,  deMiddelburg,  a  publié 
un  poème  descriptif  sur  les  poldres,  intitulé  Lofspraek 
der  Polders ,  où  il  peint  ce  pays  conquis  sur  l'Océan  avec 
ses  digues,  ses  étangs  et  ses  riches  moissons;  il  rend  sous 
leurs  véritables  couleurs  les  sites  pittoresques  de  celte 
contrée,  les  occupations  du  cultivateur  et  les  agréments  de 
la  chasse.  Si  sa  phrase  n'est  pas  toujours  concise,  son  vers 
est  au  moins  mélodieux  et  suave.  M.  F.  Rens  a  placé  dans 
le  Musée  belge  [Iiet  Belgisch  31useiwi)  une  belle  romance 
contenant  la  fin  malheureuse  du  comte  de  Flandre  Charles- 


(  390  ) 

Îe-Bon ,  massacré  à  Bruges.  Il  fera  paraître  sous  peu  une 
édition  complète  de  ses  œuvres.  Enfin  les  poésies  de 
MM.  Blieck  et  Ledeganck  sur  lesquelles  nous  attirons  par- 
ticulièrement l'attention  du  lecteur,  forment  deux  volu-  | 
mes,  qui  se  distinguent  autant  par  la  vivacité  du  réc.i 
que  par  le  choix  des  sujets,  puisés  généralement  dans  les 
chroniques  flamandes. 

Le  premier  volume  contient  un  beau  poème  sur  les 
Belges,  considérés  sous  le  point  de  vue  de  la  culture  des 
sciences  et  des  arts.  Il  rehausse  d'abord  la  gloire  qu'ils 
ont  obtenue  comme  poètes,  passe  rapidement  du  siècle  de 
Van  Maerlant  au  XVll''  siècle,  admire  les  œuvres  de  Poir- 
iers et  de  De  Swaen,  mais  s'arrête  plus  long-temps  à  l'épo- 
que actuelle.  De  la  poésie  il  passe  à  la  peinture ,  célèbre 
Van  Eyck,  Rubens  et  l'école  moderne.  Puis  il  passe  en 
revue  les  musiciens  de  renom ,  les  grands  mathématiciens 
et  astronomes;  il  admire  les  produits  de  l'industrie  belge, 
les  tapis  de  Bruxelles,  les  toiles  de  Gourtrai  et  les  dentel- 
les de  Malines.  Parmi  les  grandes  pièces  de  poésies,  nous 
avons  distingué  une  ode  sur  la  mort  du  poète  J.  B.  Hof- 
raan,  mort  à  Courtrai,  le  2  août  1835,  et  une  autre  sur 
l'indépendance  et  l'avenir  de  notre  patrie.  Mais  les  mor- 
ceaux les  plus  agréalîles  à  la  lecture  et  les  mieux  achevés, 
.sont  sans  doute  les  ballades  et  les  romances  histcfriques, 
parmi  lesquelles  nous  avons  remarqué  le  juge  Herkenbald 
à  Bruxelles,  en  1020  {Uerkenhalds  vonnis)  ;  la  sainte 
Dymphne,  patronne  de  Gheel;  Edouard  et  Berthe;  le 
Jugement  de  Dieu;  la  Roche  du  Maudit;  le  médecin  de 
Cosme,  etc.  Toutes  ces  pièces  sont  écrites  avec  grand  soin, 
et  le  poète  y  exprime  avec  une  aisance  peu  commune  les 
idées  les  plus  élevées.  Il  rend  ces  dernières  avec  d'autant 
plus  de  naturel,  qu'il  appiopie  le  rythme  aux  sentiments 
qu'il  veut  rendre.  Essayons  de  traduire  ici  quelques  stro- 
phes de  l'élégie ,  Mes  adieux  à  Ada  ; 


(  391  ) 

a  Chère  amie,  les  lieus,  qui  unirent  si  élroitement  nos 
iimes,  sont  donc  rompus  pour  jamais;  oublions  le  bon- 
heur de  ces  instants,  où  je  me  jetais  dans  vos  bras,  où 
un  baiser  imprimé  sur  vos  lèvres,  vous  faisait  connaître 
tout  mou  amour.  Alors  nos  ravissements  étaient  tels, 
qu'aucune  langue  ne  pourrait  les  dépeindre;  nos  joies 
Ti'élaient  point  de  ce  monde,  le  poète  les  sent,  mais  ses 
accords  sont  impuissants  pour  les  redire. 

1»  Malheur  à  moi,  Ada,  dont  le  cœur  brûla  d'une  flamme 
véritable ,  et  qui  vis,  malgré  l'espoir  le  mieux  fondé ,  mon 
bonheur  s'évanouir  comme  un  songe  et  se  changer  en  un 
chagrin  amer.  —  J'avais  erré  long-temps  de  malheur 
en  malheur,  ne  trouvant  personne  dont  le  sourire  portât 
la  consolation  dans  mon  cœur;  je  vous  vis  et  me  sentis 
revivre,  mais,  hélas!  pour  tomber  dans  de  plus  profonds 
regrets.  Car  après  un  court  espace ,  malgré  vos  pro- 
messes, je  vous  vis  passer  dans  les  bras  d'un  amant  plus 
heureux. 

»  lion  Dieu!  comment  puis-je  encore  soutenir  cette  vie? 
Les  sentiers  où  je  me  traîne  ne  sont  plus  parsemés  de  fleurs, 
et  les  doux  songes  qui  voltigeaient  autour  de  ma  couche,  ont 
fui,  ils  ont  fait  place  aux  noirs  soucis.  N'essayez  pas  de  me 
consoler;  toute  ma  vie,  j'errerai  seul ,  loin  devons,  j'éviterai 
vos  regards,  car  si  mes  yeux  en  pleurs  rencontraient  les 
vôtres,  mon  cœur  se  briserait  et  je  croirais  sentir  la  froide 
lame  du  poignard  me  percer  le  sein.  » 

Les  poésies  de  M.  Ledeganck  ne  sont  ni  moins  soignées  , 
ni  moins  polies.  Les  pièces  qui  se  recommandent  le  plus, 
par  le  fini  et  la  force  du  coloris,  sont  celles  qui  portent 
pour  titres  :  L'avenir  de  la  patrie  ;  Sur  la  mort  de  mon  père; 
Baudouin  de  Constantinople  ;  Frédéricet  Mathilde  ;  Le  piano 
{lîet  Klavier).  Tâchons  de  rendre  quelques  passages  de  ce 
dernier  morceau:  l'harmonie  du  vers  et  du  rythme  sur- 


(  392  ) 

passe  peut-être  en  beautés  les  sentiments  qu'il  y  a  expri- 
més (l). 

«  Quand  vos  doigts ,  divin  artiste .  errent  sur  les  touches 
harmonieuses  du  piano,  et  mêlent  avec  élégance  des  sons, 
qui  se  succèdent  et  changent  rapidement ,  savez-vous  que 
ces  accords,  semblables  à  des  paroles  magiques,  portent  le 
trouble  dans  mon  ame  et  l'entrainent  loin  de  la  terre? 

»  Souvent  aux  beaux  jours  du  printemps,  quand  le 
soleil  couchant  jette  ses  derniers  reflets,  je  parcours  les 
plaines  fleuries  de  nos  bords;  là ,  j'entends  le  murmure 
gazouillant  du  ruisseau,  qui  s'échappe  à  travers  les  vertes 
prairies;  mais  bientôt  le  vent  du  soir  s'empare  de  l'atmos- 
phère et  le  feuillage  ému  se  balance  et  laisse  échapper  des 
sons  plaintifs,  comme  de  long  soupirs. 

»  Ou,  j'entends,  dans  le  lointain,  le  tintement  de  la 
sonnette  et  le  mugissement  des  troupeaux;  ou  les  soupirs 


(i)Knnstenacr!  wanneer  uwvingren,     Of  de  haisbcl ,  in  de  verte, 
Zwevende  over  'tglad  klavier,  Klinkt,  by  "t  loeyen  van  liet  vee, 

Toonen  door  elkandreri  slingren  ,         Of  de  tortcl  klaegt  van  smerte  , 
In  verwisselcnden  zwier  ;  En  met  liaer  klaegt  de  écho  meô. 

Weetgy  dat  in  iiwe  accoorden  Of ,  gelijk  een  levcnd  orgel , 

Als  in  wondre  tooverwoorden  ,  Zingt,  met  onvermoeibren  gorgel , 

Dan  een  tael  zicli  liooren  laet.  Philomecl  de  vooglen  voor, 

Die  ons  hevig  kan  oiitroeren  Die  met  haer  Iict  bosch  bewooncn  , 

Endengeest  aen  de  aerdcontvoeren,  En  de  vloed  van  hare  toonen 
Maer  die  't liait  alleen  verstaet?  Stroomt  de  brecde  vonden  door! 

'k  Wandel,  in  de  lentedagen  .  By  die  duizend  maetklankwyzen  . 

Dikwijis  langs  het  open  veld  ,  By  die  stemmen  der  natuer, 

Als  de  gouden  zonnewagcn  Die  uit  dank  ten  hemel  ryzen  , 

Naer  hetkoele  westen  snelt.  Als  de  smook  van  'tontervucr, 

Langs  de  groenbcvvassem  zoonicn  Trclt  me  een  zalig  zielsverrukken  , 
Hoorik'tmurmlendbeekjenstroomen  Door  geen  wooiden  uittedrukken  : 
Dat  al  kabblend  hencn  vingt;  En  wat  my  alsdan  vervoert , 

En  by  'tsomber  avondnaedren  Wat  mein  hogcrkringdoet  zweven, 

lluischt  de  vpestwinddoor  deblaedren,  Voel  ik,  kunstenaer,  weér  herleven, 
Trcurig ,  als  een  diep  gczucht.  Aïs  iiw  hand  de  snaren  rocrt  ! 


(  393  ) 

de  la  tourterelle,  que  l'écho  ne  rend  pas:  ou  les  doux 
refrains  du  rossignol  infatigable,  qui  fait  retentir  de  ses 
chants  la  forêt  entière. 

D  A  entendre  ces  voix  si  variées  de  la  nature,  qui 
montent  aux  cieux,  en  signe  de  reconnaissance,  comme 
l'encens  du  feu  sacré,  je  me  sens  l'ame  émue,  et  je  me 
crois  transporté  dans  les  régions  célestes;  le  même  trouble 
me  saisit,  artiste,  quand  vos  doigts  font  vibrer  les  cordes 
sonores  de  votre  intrument. 

»  Oui,  quand  vos  mains  agiles  errent  sur  les  touches 
harmonieuses  du  piano,  et  marient  des  sons  avec  une  élé- 
gance sans  cesse  changeante,  alors  vos  accords,  comme 
des  paroles  magiques  me  révèlent  des  images,  tantôt  ten- 
dres ,  tantôt  sombres  et  effrayantes. 

»  Les  notes  légères  ,  les  tons  gais  nous  peignent  la  folle 
jeune.ss;',  la  marche  guerrière  des  héros  et  le  bruit  de  la  joie. 


Ja,  wannccr  u\v  vlugge  vingren  ,       Dikwijls  als  de  galmen  stroomen , 

Zwevende  over  't  glad  klavier,  Ongekunsteld  ,  lief  en  teêr, 

Toonen  door  elkandren  slingren  ,  Zie  ik  ,  als  in  zachte  droonien  , 

In  verwisselendcn  zw  ier,  Lang  verleden  dagen  weêr. 

Dan  ontstaen  uit  uwe  accoorden  ,  Hoop  en  vrees  van  vroeger  leveu 

Als  uit  de  wondre  toovemvoorden,  Konien  voor  myne  oogen  zweven  : 

Beelden  ,  nu  eens  overschoon  ,  Soms  lioudt  my  de  vrcugd  geboeid; 

Dan  eens  somber  of  ontzettcnd ,  5Iaer  meest  voei  ik  op  niijn  wangen 

Of  vertroostend ,  of  verplettend  ,  Eenen  traen  van  \s  ecmoed  hangen 

Naer  de  wending  van  uw  toon  !  Die  voor  vroeger  rampen  vloeit  ! 


Ligte  noten,  blyde  toonen  Zeg  ray,  kunstnaer,Mat'sderedcu 

Scliildren  'thupplen  van  de  jeugd  ,     Van  de  kracht  dier  mclody  ? 
Of  den  marsch  van  heidenzoneu,        Kunt  gy  het  gelieim  outleden  , 
Of  liet  schertsen  van  de  vreugd.  Van  uw  kunst ,  uw  melody? 

Trager  maetzang ,  angstig  stenend ,  Neen  —  natuerlijk  is  uw  spelen  , 
Schetsteenhart  datzuclitcnd,weenend,Als  de  zang  dcr  Philomeleu  . 
Kermt  om  een  ellendig  lot  ;  By  het  ryzen  van  de  zon  . 

Ofeen  teérderklankeninenglen  Als  het  suizcn  der  Zephieren  . 

Leert  ans  deeeuviige  tael  iler  engicn.  Door  de  kruin  der  populiercn  , 
Eenc  viiiM'ge  beA  tôt  (rod  !  Als  het  nintmlcn  vnn  de  brou  ! 

2G 


(  394  ) 

Une  mesure  plus  lente,  plus  pénible  rend  les  gémissements 
d'une  ame,  qui  se  lamente  de  son  sort:  des  accords  plus 
doux  nous  apprennent  le  chant  des  anges,  une  prière  fer- 
vente qui  s'élève  vers  Dieu. 

»  Souvent  quant  l'instrument  bourdonne  sans  art,  et 
laisse  échapper  des  thèmes  nouveaux,  alors  je  revois, 
comme  en  songe,  mes  beaux  jours  qui  ont  fui,  l'espérance 
et  les  craintes  de  ma  jeunesse.  Parfois  des  idées  riantes  me 
tiennent  enchaîné ,  mais  plus  souvent  je  sens  une  larme 
mouiller  mes  joues,  témoignage  de  mes  malheurs  passés. 

»  Dites-moi,  artiste,  où  vos  mélodies  puisent-elles  celle 
puissance  et  celle  force?  savez-vous  découvrir  le  secret  de 
votre  art?  Non!  —  Tel  que  le  chant  du  rossignol,  le  bruis- 
sement du  ruisseau ,  ou  le  murmure  des  zéphyrs ,  qui  se 
jouent  dans  le  feuillage  du  peuplier,  votre  art  vous  a  été 
donné  par  la  nature.  » 

Ph.  Blomiviaf.rt. 


{  395  ) 


Ou  lie  tin  6ibli00rapl)ii|«c. 


HISTOIRE    DE  BELGIQUE. 

La  bataille  de  Woeringcn,  récit  historique,  par  A.  Voisin, 
avec  le  dessin  du  tableau  de  N.  De  Keyzer,  gravé  par  II.  Brown. 
Bruxelles,  Soc.  des  Beaux-Arts,  1839;  in-8°,  pag.  40. 

rSotice  sur  les  archives  des  comtes,  déposées  au  château  de 
Rupelmonde,  par  J.  D,  S.  G.  Gand,  Ilebbelynck,  1839  ;  in-8% 
pag.  14. 

[Extrait  du  Messager  des  Sciences,  1"=  liv.  1839] 

Particularités  curieuses  sur  Jacqueline  de  Bavière,  pu- 
bliées par  la  Soc.  des  Bibliophiles  de  Mons.  Bruxelles,  lib.  po- 
Ivtechn. ,  1839;  in-8". 

Mélanges  historiques  et  littéraires  par  M.  L.  Polain,  conser- 
vateur des  archives  de  la  province  de  Liège.  Liège  ,  Jeune- 
homme,  1839;  in-12,  pag.  â39. 

Trouvères,  jongleurs  et  ménestrels  du  Nord  de  la  France  et 
du  Midi  de  la  Belgique,  par  M.  Arthur  Dinaux  (Trouvères  de 
la  Flandre  et  du  Tournaisis).  Paris,  Techener,  1839;  in-S", 
pag.  374. 

Mémoire  sur  la  part  que  les  Flamands  et  d'aulres  Belges 
ont  prise  à  la  conquête  de  l'Angleterre,  par  les  Normands, 
par  J.  Gantrel.  Gand,  Annoot-Braeckman,  1839;  pag.  83. 

Vlaemsche  Kronijk,  of  Dagregister  van  al  het  gène  gcdenk- 
weerdig  vuorgevallen  is,  binnen  de  stad  Gent,  sedert  den 
lo  july  lo66  tôt  15  juny  1583;  onderhouden  in  't  latijn  door 
Ph.  De  Kempenare,  overgezet  door  J.  P.  Van  Maie,  pastor  van 
Bovekcrke,    thans    vnor    de    eerste    mael    uitgegeven,    door 


(  396  ) 

rii.  D{lomiiiaert).  Gent,  by  L.  Hebbelynck;  in-S",  j)ag.  373. 
Chronique  de  l'abbsîve  de  S'-André,  d'après  un  niaïuiscrit 
inédit;  suivie  de  mélanges  historiques  et  littéraires  sur  Bruges, 
par  0.  Delepierre,  avocat,  archiviste  de  la  Flandre  occid. 
Bruges,  in-8";  pag.  SiO. 

I  Ce  volume  contient  les  12  premiers  cliapitres  de  la  ciironiqne  de  Tab- 
b.iyc  de  S'-André-lez-Biuges ,  jusquàlau  1240:  suivent  (juelques  char- 
tes accordées  à  cette  abbaye  et  des  mélanges  sin  Bruges.  ] 

LITTÉRATIRE. 

Feeslkransvoorden  weledelen  heer  Emmanuel-Bruno  Qnaet- 
fasleni  (door  P.  Van  Duyse).  Gent,  18S9,  Van  der  Haeghen- 
Hulin;  in-8°,  pag.  8. 

L'Ecuelle  et  la  Besace,  scènes  historiques  de  XVI®  siècle^ 
par  E.  Buschmann.  Bruxelles,  lib.  polytechn.,  1839;  in-8°,  de 
X  et  2S4  pag.,  avec  une  litlntgraphie. 

Le  Vœu  du  Héron,  poème  publié  d'après  un  MS.  de  la 
biblioth,  de  Bourgogne,  par  la  Soc.  des  bibli()j)hiles  de  Mons. 
Bruxelles,  lib.  poljtechn.,  1839;  in-8°. 

Digt- en  proza-stukken  ,  uytgegeven  door  het  tael- en  letter- 
lievend  genootschap  der  katholyke  hoogeschool  te  Leuven. 
Leuven,Van  Linthout  et  Van  den  Zande,  1839;  X  et  13opag. 
in-12. 

[Vingt-six  membres  .  tant  honoraires  qu'ordinaires  ,  ont  concouru  à  la 
rédaction  de  ce  recueil.  ] 

Mengelpoëzy  van  F.  J.  Biieck,  lid  der  maetschappy  van 
Rhethorica  te  Wervik.  Kortryk,  Jaspiu;  in-8",  pag.  1-40. 

Mitraille.  Poésies,  par  Eugène  Gaussoin.  Bruxelles,  Hauman  ; 
in-18,  pag.  220. 

Nuées  blanches,  par  Antonin  Roques  et  F.  Bogaerts.  Anvers, 
Jacobs,  1839;  pag.  2\6. 

Keus  van  dicht-  en  proza-stukken,  of  tael- en  lelterkuudige 
yerzanieling  voor  alleu.  Kortryk,  Gernaey-Hassaerf. 

[La  '.i'  livraison  vient  de  paraître  et  contient  des  pièces  de  poésie  de 
MM.  J.  F.  Willems  .  Dhacne  ,  Mussely  et  d'autres.] 

Jules  Vanard.  Liège,  Leroux,  1839;  in-12,  2  vol. 


(  397  ) 

Breydel.  le  bouclior  de  l>ruj>es,  ou  la  balaillc  de  Courtrai 
roman  liistorique,  pnr  Jaspin  aine.  Courtrai,  Jaspin,  18^9; 
!i  beaux  vol.,  gr.  iii-lo,  avec  six  gravures. 

[Cet  ouvrage  est  la  traduction  du  itramatiquc  et  remaniual>lc  roriian 
(lamand  de  M.  H.  Conscience,  intitulé  :  De  leeuw  van  Vlacndcien]. 

Notice  biographique  sur  AYinand^'uyeu,  peintre  hollandais, 
par  Félix  Bogaerts.  Bruxelles,  Soc.  des  Beaux-Arts,  1839; 
in-'à". 

Souvenirs  d'un  voyage  en  l'honneur  de  Schiller,  par  le 
baron  de  Reiffenberg.  Bruxelles,  3Iuquardt,  1839;  in-S". 

[Avec  une  planche]. 

SCIENCES  -MATnÉîIATIQUES. 

Oeuvres  complètes  de  L.  Euler,  publiées  par  MM.  Du  Bois  et 
Drapiez,  Moreau ,  Weiler  et  Steichen  et  Philippe  Van  der  Mae- 
len,  accompagnées  de  figures  exécutés  par  M.  Madou.  Bruxel- 
les, 1839  ,  établiss.  géograpli;  3  vol.  in-8°,  de  XLIV  ,  347,  498 
et  474.  pag. 

Meetkunde,  inhoudende  de  manier  om  begank- en  onbe- 
gankelyke  landen,  bosschen ,  weilanden,  vyvers  en  anderc 
voorwerpen  te  meten  en  te  verdeelen;  tevensde  dryhoekme- 
ting,  doorde  sinus  en  logarithnius,  door  P.  F.  Verbockhaven, 
oud  gezworen  landmeter.  Brussel,  B.  Landrien,  1839;  in-12, 
pag.  260. 

BIBLIOGRAPHIE. 

Seconde  partie  du  catalogue  des  livres  et  manuscrits  rares 
et  précieux  de  la  bibliothèque  de  feu  M.  P.-P.-C.  Lammens, 
Gand,  Vanderhaeghen-Hulin,  1839;  in-S",  pag.  42S. 

[Ce  second  volume  contient  pour  les  livres  imprimes  6397  numéros , 
pour  les  manuscrits  152.  ] 

,  MÉDECINE. 

Autoplaslie  après  Famputation  des  cancers,  par  Ch.  Philips, 
de  Liège.  Bruxelles,  Soc.  encycl.,  18§9;  [»ag.  oi. 


(  398  ) 

De  lu  partujition  des  principales  femelles  domestir|ues,  par 
L.  V.  Dehvart,  méd.  vétér.  de  T"  cl.,  prof,  à  l'école  vétér.  et 
d'agriculture  de  l'État,  à  Cureghem-lez-Bru\eIles.  Bruxelles  , 
Soe%ncycl.,  1839  ;  pag.  186. 

Traité  de  chirurgie  vétérinaire  par  A.  J.  Brogniez,  orné  de 
planches,  exécutées  par  D.  Meulenbergh.  Bruxelles,  Soc. 
encyclogr.,  1839;  in-8". 

[Première  livraison  avec  planches  coloriées.] 

PHILOSOPHIE. 

Ethnicœ  seu  philosophiœ  moralis  elenienta ,  secunda  edit. , 
auctore  N.  J.  De  Cock.  Lovanii,  Van  Linthout,  1839;  in  8°. 

INDUSTRIE  ET  COiVniERCE. 

Description  de  la  fabrication  des  bouches  à  feu  en  fonte  de 
fer  et  des  projectiles  à  la  fonderie  de  Liège,  par  le  général 
Huguenin,  ex-directeur  de  la  fonderie  de  Liège,  traduit  du 
hollandais,  par  le  cap.  d'artillerie  Ncuens.  Liège,  A.  Le  Roux 
et  coinp",  1839;  pag.  290. 

Guide  du  commerçant,  ou  conseils  aux  personnes  qui  veu- 
lent s'adonner  au  négoce,  publié  par  l'association  nationale 
pour  le  progrès  de  l'industrie  linière.  Bruxelles,  1839;  in-12, 
pag.  188. 

La  tenue  des  livres  à  parties  doubles.  Cours  pratique  en  dix 
leçons,  par  E.  X.  Renaudière,  prof,  à  l'école  centrale  de  com- 
merce et  d'industrie  à  Bruxelles.  Bruxelles,  J.  Jamar;  in-o", 
pag.  136. 

Des  courbes  des  chemins  de  fer,  par  Aug.  Xav.  Van  der 
Elst,  géomètre,  ingénieur  civil;  sjstème  breveté  en  Belgique; 
suivi  du  calcul  et  du  tracé  des  courbes  sur  le  terrain. 
Bruxelles,  Deprez-Parent,  1839;  in-B". 

Industrie  des  chemins  de  fer,  ou  dessins«et  descriptions  des 
principales  machines  locomotives,  des  tenders ,  waggons  de 
transports  et  de  terrassements,  voitures,  diligences,  rails,  sup- 
ports, plateformes   mobiles,  aiguilles,  machines  accessoires, 


(  399  ) 

en  usage  sur  les  routes  en  ter  (ie  France,  d'Angleterre,  d'Alle- 
magne, de  Belgique,  ete.,  publié  sous  les  auspices  du  mijiistre 
des  travaux  publics.  Liège,  A.  Le  Uoux,  1839;  6  livr.  in-folio 
de  planches  et  autant  de  texte. 

I'lIBHGATIO>S  PÉRIODIQUES. 

Revue  des  revues  de  droit.  Recueil  trimestriel,  tome  I ,  pre- 
mière livraison.  Bruxelles,  Ad.  Walilen,  1839. 

Revue  de  Bruxelles,  publiée  par  MM.  A.  Deschamps  et 
P.  De  Decker.  Juin ,  juillet  et  août.  Bruxelles,  De  Wasme  et 
Laurent,  1839;  in-18. 

[Principaux  articles  :  De  la  politique  et  des  intérêts  de  l'Allemagne  en 
Beigi((iic  .  par  \V.  Menzel.  —  Notice  sur  la  bihiioth.  de  Bourgojjne,  par 
A.  Voisin.  —  La  Gaule  à  la  lin  du  IV"  siècle  ,  par  J.  Kervyn.  —  Le 
cbapitre  et  l'église  de  S"=-Waudrii ,  par  A.  G.  B.  Schayes.  —  État  de  la 
pIiilosoi)hie  moderne  en  Allemagne,  par  N.  Mœller.  — Le  comte  d'Eg- 
niont.  —  Légendes.  —  Sur  un  MS-  <le  J.  de  Winghe.  —  Les  Romances 
espagnoles,  par  L.  Bcllefroid.  — Quehpies  anecdotes  sur  Charles-Quint. 
Nous  remarquons  avec  plaisir  que  depuis  le  moisdejuillct,  (pii  commence 
la  troisième  année,  il  y  a  une  amélioration  sensible  dans  la  partie  typo- 
graphique de  ce  recueil.  Chaque  livraison  aura  dorénavant  une  lithogra- 
phie. Déjà  les  portraits  du  comte  d'Egmont  et  de  Charles-Quint  ont 
paru. ] 

Magasin  belge  universel  et  pittoresque.  Recueil  de  bonnes 
lectures.  2"  année.  Bruxelles,  Soc.  des  Beaux-Arts,  1839  (jan- 
vier à  août).  Avec  vignettes. 

La  Renaissance,  n"'  IX,  X  et  XI.  Bruxelles,  De  Wasme,  in-f". 
18B9. 

[Cliaque  livraison  a  une  lithographie.] 

Revue  belge,  publ.  par  l'assQC  nat.,  6°  année,  juin  et  juillet  ; 
Liège,  Jeunehomme,  1839. 

[Ces  livraisons  contiennent  entre  autres  :  1»  Quelques  journées  de  la 
révolution  belge. à  Louvain.  —  Compte  rendu  des  travaux  de  la  conunis- 
sion  d'histoire ,  par  A.  Van  Hasselt.  —  Evcrard  T'  Serclaes  (suite  et  (in  ) , 
par  Ph.  Lesbroussart.  —  Analyse  criti([ue  de  Richilde,  de  M.  Coomans, 
par  J.  De  Saint-Génois.  —  Au  trou  du  Han  ,  par  l'aider.  —  Sur  (juclqucs 
localités  du  duché  ilo  Luxembourg,  par  1).  Mariin.] 


(  400  ) 

Revue  nationale  de  Belgique,  1"  livr.  Bruxelles,  libr.  poij- 
technique,  1839;  in-8°,  pog.  U4. 

[Ce  recueil  périodique  nouveau  ,  dont  jusqu'ici  les  articles  ne  portent 
j)oint  de  signatures  ,  paraîtra  dix  ou  douze  fois  par  an.  La  première  li- 
vraison contient  :  1°  Introduction.  2°  Du  caractcr<;  de  quelques  événe- 
ments et  des  hommes  de  la  révolution  du  XVI' siècle.  Dans  ce  travail  rédigé 
avec  impartialité  ,  l'auteur  présente  sous  un  jour,  neuf  pour  le  public  , 
les  causes  premières  delà  haine  des  Espagnols  contre  les  Flamands.  Cet 
aperçu  historique  nous  semble  fort  remarquable  :  les  positions  de  Charles- 
Quint  et  de  son  fds  Philippe  II  y  sont  bien  dessinées.  3°  De  l'avenir  de  la 
littérature  en  Belgique.  4°  Politique  étrangère.  France  :  de  la  dernière 
situation.] 

Journal  historique  et  littéraire,  6-4^  et  6o^  iiv. ,  annnée  18â9. 
Liège,  Kersten. 

Bulletin  de  l'Académie  des  Sciences  et  Belles-Lettres  de 
Bruxelles,  N°»  7  et  8.  Bruxelles,  Hayez,  1839;  in-8°. 

[Pour  rHistoirc,  ces  bulletins  contiennent,  le  !'='•  :  Le  supplice  d'Hu- 
gonet  et  d"Himbercourt ,  par  le  chan.  De  Smet;  le  2<=  sur  la  bataille  de 
Noville,  par  le  même:  sur  la  population  de  quelques-unes  de  nos  villes 
au  moyen-âge,  par  Willcms  :  sur  la  découverte  des  iles  flamandes  ,  par 
Voisin:  sur  la  compétence  de  la  juridiction  à  laquelle  furent  soumis  Hu- 
gonet  et  Himbercourt,  par  J.  De  Saint-Génois:  quelques  documents 
communiqués  contradictoirement  sur  ce  dernier  point  d'histoire,  par 
Gachard.] 

GRAMMAIRE. 

Nederduitsche  spraekkunst,  door  Willem  Van  West.  Eerste 
en  tweede  deel.  St-Truiden ,  Van  West-Pluymers,  1839;  in-S", 
pag.  136. 

Nouvelle  grammaire  française,  à  l'usage  des  écoles  belges, 
avec  l'application  des  règles  à  l'histoire  de  la  Belgique,  par 
R.  Willequet  et  A.  F.  Guillerez.  Gand,  Lebrun-Devigne,  1839; 
in-12,pag.  436. 

Recueil  de  thèmes,  d'exercices  et  de  versions  pour  faciliter 
l'étude  de  la  langue  flamande,  par  11.  Soraershausen ,  docteur 
en  philosophie,  etc.  Bruxelles,  Hauman,  1839;  3  vol.  in-12. 

NouveauDictionnaire  flamand-français  et  français-flamand, 
parl'ahbé  Olingrr,2«  édit.,  revue,  corrigée  et  augm.  par  l'au- 
teur. Matines,  P.  J.  Hanicq,  1839;  2  vol.  gr.  in-8°. 


(  40J   ) 

Suite  de  l'Alphabet  français,  ou  second  livre  de  Iccliirc, 
d'après  la  méthode  de  non-épeHation,  à  l'usa^je  de  mes  jeunes 
élèves,  par  A.  F.  Van  den  Driessche.  Bruxelles,  Soc.  nat.,  1839; 
in-32. 

Le  même  ouvrage,  par  le  même,  pour  le  flamand.  Ibid. 

BOTANIQUE, 

Observations  sur  la  fleur  du  Blarica  Corulea  et  sur  la  cir- 
eulation  des  sucs  dans  ses  poils,  par  Ch.  Morren.  Bruxelles, 
Muquardt,  in-8",  1839. 

Recherches  sur  les  hydrophiles  de  la  Belgique,  par  le 
même.  Ibid. ,  in-4°. 

Recherches  sur  les  mouvements  et  l'anatomie  du  style  des 
Goldfussia  anisojjfiijlla,  par  le  même.  Ibid.,  in-i". 

Recherches  sur  le  mouvement  et  l'anatomie  du  Stylidiuvi 
gramini  solium,  par  le  même.  Ibid. ,  in-4°. 

[  Chacun  de  ces  opuscules  est  accompagné  de  planches]. 

Mémoire  sur  la  formation  de  l'indigo  dans  les  feuilles  du 
Polygonum  Tinctorium  ou  renouée  tinctoriale,  par  Ch.  Morren. 
Bruxelles,  1839  ;in4''. 

ARCHITECTURE. 

Histoire  de  l'architecture  de  Th.  Ilope,  traduite  de  l'anglais 
par  A.  Baron.  Bruxelles,  lib.  poljtech.,  1839;  2  vol.,  dont  un 
de  planches,  in-8°. 

De  l'existence  de  l'ogive  dans  les  monuments  des  temps  les 
plus  reculés,  par  A.  V.  L.  Gand,  Hebbelynck,  1839;  in-B^jpag.  29, 

[Extrait  du  Messager  des  Sciences ,  1"  liv.  1839.] 

SCIENCES  JURIDIQUES. 

Supplément  au  manuel  de  justice  militaire,  par  P.  A.  F.  Gé- 
rard. Bruxelles,  Hauman,  1839;  in-18,pag.  48-4. 

Archives  de  droit  et  de  législation,  tom  1 ,  3^  liv.  Bru.xelles , 
Hauman,  1839;  ia-18,  pag.  241. 


(  40:2  ) 

Loi  du  21  ni;irs  1839  sur  le  timbre,  annotée  par  L.  Guil- 
liaume,  1^''  commis  ù  la  direction  de  l'enregistrement  de  la 
province  de  Luxembourg'.  Arlon,  P:  ^  Bruck,  1839. 

POLITIQUE. 

Recueil  des  traités  politiques  territoriaux  et  de  commerce, 
concernant  le  royaume  des  Pays-Bas,  de  1814  à  1830.  Bruxel- 
les, lib.  polytecli.,  1839;  l"  vol..in-l8. 

OUVRAGES    DIVERS. 

Notice  sur  l'aveugle  sourde-muette,  élève  de  l'institut  des 
soui'ds-muets  et  des  aveugles  de  Bruges,  par  l'abbé  C.  Carton. 
Bruges,  Van  deCasteelc,  1839;  in- 8",  pag.  80. 

[Cette  notice,  aussi  curieuse  qu'instructive,  témoigne  des  soins  que 
M.  Carton  ne  cesse  de  donner  à  cette  classe  de  malheureux  ,  à  qui  la  na- 
ture a  refusé  la  vue,  Fouie  et  la  parole.  Elle  est  accompagnée  du  por- 
trait d'Anne Timmermans,  qui  fait  lobjet  de  cet  opuscule.] 

Rapport  sur  les  travaux  de  la  commission  administrative  de 
l'institut  royal  des  sourds-muets  et  des  aveugles  de  Liège,  de 
18S0  à  1838.  Liège  ,  Dessain,  1839;  in-8",  pag.  SI 

Répertoire  administratif  du  llainaut,  par  J.  B.  Bivort,  pré- 
cédé d'une  introduction,  par  C.  11.  Delecourt.  Bruxelles,  libr. 
polytechn.,  1839;  in-8". 

Carte  topographique  de  la  province  du  Limbourg,  par 
M.  Groetaers,  ingénieur  des  ponts  et  chaussées,  Bruxelles, 
établ.  géogr. ,  1839;  2  feuilles  grand-aigle. 


(  403  j 


€l)r0niiîue  î)ea  5inencc9  et  ^rtïî,  et  Davictc;?. 


Musée  d'Antiquités  de  Bruxelles.  —  La  ci-devant  chapelle  de 
INassau-Orauge,  fondée  en  lâ-40,  supprimée  au  siècle  dernier 
et  convertie  depuis  en  magasin  de  Lierres,  va  bientôt  recevoir 
une  plus  noble  destinatioii.  Cet  antique  oratoire  du  palais 
des  Nassau  et  des  gouverneurs-généraux  des  Pays-Bas  autri- 
eliiens,  sera  entièrement  restauré  pour  servir  de  local  au  nou- 
veau cabinet  d'antiquités. 

Les  armures  de  nos  vieux  paladins  et  nos  antiquités  na- 
tionales seront  bien  mieux  placées  sous  ces  voûtes  gothiques 
({ue  dans  une  salle  basse  et  rétrécie  du  palais  de  l'industrie. 
La  chapelle  de  Nassau,  d'un  style  d'architecture  tout  particu- 
lier, sera  eile-mènie  un  petit  monument  fort  curieux, 
lorsqu'on  aura  fait  disparaître  les  nombreuses  dégradations 
qu'elle  a  éprouvées  depuis  cinquante  ans,  lorsque  sa  voûte 
offrira  un  ciel  azuré,  parsemé  d'étoiles  d'or,  et  que  ses  gran- 
des fenêtres  en  ogive,  aujourd'hui  muraillées,  reparaîtront 
ornées  de  magnifiques  vitraux  peints  (1). 

Le  cabinet  d'antiquités,  dont  la  création  date  à  peine  de  deux 
ans,  contient  déjà  bon  nombre  d'objets  remarquables,  tels 
que  plusieurs  armures  du  moyen-àge  et  des  armes  à  feu  des 
XV^jW!"  et  XVIP  siècles,  d'un  très-beau  travail;  des  armes  de 
sauvages  de  l'Amérique  ;  le  berceau  de  Charles-Quint  ;  les 
chevaux  que  montaient  les  archiducs  Albert  et  Isabelle;  les 
fonts  baptismaux,  dont  nous  avons  donné  la  description  dans 

(1)  Au  moment  où  nous  publions  cetnrticlc.  !o  Hiustc  d'Aiitiiiuitcs 
vient  (l'ètie  ouvert  au  public  ,  qui  peut  admirer  les  changements  apportés 
à  celte  ciiapellc. 


(  404  ) 

le  Messager  des  Sciences  et  des  Arts ,  1 8i58  ;  tin  grjind  bassin  rie 
bronze,  orné  d'un  magnifique  bas-relief,  représentant  une 
marche  guerrière,  etc.  En  antiquités  romaines,  le  nouveau 
musée  est  très-pauvre  encore;  le  seul  objet  de  cette  époque 
qu'on  y  voie  jusqu'ici,  est  une  grande  amphore  en  terre,  trou- 
vée près  de  Tournai.  Lorsque  le  nouveau  local  sera  arrangé 
on  y  transférera  sans  doute  les  autres  antiquités  romaines  (1); 
la  pierre  sépulcrale  de^  Juste-Lipse ,  'enlevée  par  les  Français 
à  l'ancienne  église  des  Recollets  à  Louvain  ;  les  débris  de  la 
fontaine  de  la  porte  de  Hal,  qui  datait  du  règne  de  Charles- 
Quint,  et  le  tombeau  en  pierres  bleues  qui  existait  autrefois 
dans  la  chapelle  de  Nassau ,  le  tout  presqu'abandonné  aujour- 
d'hui dans  la  cour  du  musée  de  Bruxelles. 

Nouvel  Hôpital  civil  de  Lodvais.  —  Dans  la  notice  sur  l'hôpi- 
tal civil  de  Louvian,  par  M.  Piot  [Messager  des  Sciences ,  1838), 
il  est  parlé  du  projet  de  rebâtir  cet  édifice.  Ce  projet 
étant  aujourd'hui  en  pleine  exécution,  nous  allons  donner, 
comme  complément  de  la  notice  de  M.  Piot,  la  description  des 
nouvelles  constructions  qui  feront  de  l'hôpital  de  Louvain,  un 
des  établissements  de  ce  genre  les  plus  beaux  et  les  plus 
étendus  de  la  Belgique. 

Le  nouvel  hôpital  de  Louvain  ne  s'élèvera  point  sur  l'em- 
placement même  de  l'ancien ,  mais  à  côté  de  celui-ci ,  et  à  cet 
eiîet  on  s'est  vu  dans  la  nécessité  de  détourner  le  cours 
de  la  Dyle,  et  de  démolir  un  assez  grand  nombre  de  maisons, 

(I)  Ces  antiquités  consistent  en  plusieurs  inscriptions  sépulcrales  et  en 
deux  petits  monuments  votifs  de  la  déesse  gauloise  ou  germanique  Neha- 
leunia ,  trouvés  avec  plusieurs  monuments  semblables  à  Dombourg , 
dans  lile  de  Walcheren.  Sur  l'un  des  deux  premiers  ,  donnés  au  siècle 
dernier  à  l'Académie  royale  des  Sciences  et  Belles-Lettres  de  Bruxelles, 
par  un  M.  Van  der  Perre,  de  Zélande,  la  déesse  Nehalennia,  qui  parait 
avoir  été  une  divinité  protectrice  du  commerce  et  de  la  navigation,  est 
représentée  assise,  une  corbeille  de  fruits  sur  les  genoux  et  un  cliicn  a  ses 
côtés.  Au-dessous  on  lit  :  Dcœ  Nchdllcnniw  S.  Calvius  sectmdinus  oh 
meliores  actus.  (Schayes,  les  Pays-Bas  avant  et  durant  la  dom.  rom., 
tom.  2,  pag.  269). 


(  405  ) 

;>ppartena-nl  nux  hospices,  et  donnant  sur  la  rue  de  Bruxelles, 
à  laquelle  l'édifice  neuf  fera  face.  De  l'ancien  hôpital  on  lais- 
sera subsister  l'église  et  la  jjrande  salle  des  malades,  qui  sera 
convertie  en  oratoire ,  derrière  lesquel  se  trouveront  les  cui- 
sines, qui  couimuniqueront  avec  les  bâtiments  principaux  de 
l'établissement,  au  moyen  de  galeriescouvertes.  Alasuite  del'o- 
ratoire,on  placera  le  bâtiment  des  bains  qui  aura  au  centre  une 
cour,  et  dont  la  façade,  sur  la  rue,  offrira  un  soubassement  ou 
rez-de-chaussée  rustique,  surmonté  d'un  étage  à  fenêtres  cin- 
trées. A  droite  du  bâtiment  des  bains,  une  longue  grille  en  fer 
séparera  de  la  rue  une  cour,  en  forme  de  trapèze,  à  gauche 
de  laquelle  on  trouvera  la  pharmacie,  à  droite  les  bureaux  de 
l'administration,  et  au  centre  une  salle  de  consultations  gra- 
tuites, et  la  salle  destinée  aux  malades  entrant  à  l'hôpital. 

Les  bâtiments  qui  borderont  trois  faces  de  cette  cour,  se 
composeront  d'un  rez-de-chaussée,  d'un  entresol,  destiné  aux 
élèves  internes  et  d'un  étage  éclairé  de  croisées  cintrées.  La 
façade  du  bâtiment  central  sera  ornée  d'un  avant-corps,  per- 
cée d'une  porte  cintrée,  flanquée  de  quatre  colonnes  isolées, 
de  l'ordre  dorique  grec,  qui  s'élèveront  jusqu'à  l'imposte  ou 
prendra  naissance  l'archivolte  de  la  porte.  Les  tympans  du 
cintre  de  la  porte  seront  décorés  de  deux  bustes,  placés  dans 
des  encadrements  ronds.  Au-dessus  de  cette  partie  régnera  un 
balcon,  auquel  communiqueront  les  croisées  de  l'étage  ,  cou- 
ronnées de  corniches;  le  tout  sera  terminé  par  un  fronton.  Aux 
quatre  coins  de  la  cour,  seront  quatre  pavillons,  par  lesquels 
on  entrera  aux  salles  des  malades,  au  nombre  de  quatre,  et 
séparées  chacune  par  un  préau,  destiné  aux  promenades  des 
convalescents. 

Derrière  cette  cour  se  trouvera  une  seconde  cour ,  dont  les 
bâtiments  latéraux  formeront  avant-corps  sur  la  première. 
Les  bâtiments  de  cette  cour  auront  un  rez-de-chaussée  et 
un  étage  à  fenêtres  cintrées.  La  façade  centrale  aura  un  avant  » 
corps,  composé  de  trois  arcades,  surmonté  d'un  étage  à  fe- 
nêtres cintrées  et  couronné  par  un  fronton.  Ces  bâtiments 
serviront  à  la  clinique  et  au  traitement  des  ophthalmiques- 
Ou  y  établira  un  amphithéâtre  de  dissection  et  uu  oratoire 
pour  les  convalescents. 


(  406  ) 

Toutes  les  constructions  nouvelles  couvriront  une  surfiice 
de  96  mètres  de  longueur  sur  90  de  largueur  :  il  y  aura  place 
])0nr  230  malades.  Les  distributions  intérieures  sont  arran- 
gées on  ne  peut  plus  commodément.  Les  malades  auront  des 
salles  aérées  de  quatre  côtés;  leurs  lits  seront  placés  de  ma- 
nière à  permettre  une  libre  circulation  autour  de  chacun 
d'eux. 

C'est  M.  Van  Aerenberg,  de  Louvain,  architecte  de  beaucoup 
de  mérite  et  professeur  à  l'Académie  de  cette  ville,  qui  a 
donné  les  plans  du  nouvel  hôpital  et  qui  est  chargé  de  la 
direction  des  travaux. 

Statue  en  bronze  be  Rcbens.  —  M.  Buckens .  professeur  de 
sculpture  et  de  ciselure  à  l'Académie  de  peinture  de  Liège , 
chargé  du  moulage  et  de  la  fonte  de  la  statue  colossale  de 
Rubens  pour  la  ville  d'Anvers,  vient  de  couler  à  la  fonderie 
de  canons  de  Liège,  en  présence  du  directeur  et  des  officiers 
de  cet  établissement,  les  principales  parties  de  cette  statue. 
Cet  habile  artiste  a  jeté  en  moule,  de  la  manière  la  plus  heu- 
reuse, les  parties  les  plus  difficiles  de  l'œuvre  de  Geefs. 

Bientôt  la  ville  d'Anvers  pourra  montrer  avec  d'autant 
plus  d'orgueil  un  monument  digne  du  grand  peintre,  à  la 
gloire  duquel  il  aura  été  élevé  ,que  ce  monument  sera  exécuté 
par  deux  Anversois ,  élèves  de  son  Académie. 

M.  Buckens,  statuaire,  ciseleur  et  fondeur,  qui,  avant  d'ar- 
river à  Liège,  était  attaché  à  la  fonderie  rovale  de  Munich, 
où  il  a  exécuté  plusieurs  ouvrages  en  bronze  remarquables, 
entre  autres  le  magnifique  monument  colossal  du  roi  Maxi- 
milien,  promet  à  la  Belgique  un  artiste  digne  de  marcher  sur 
les  traces  des  Relier,  des  Bouchardon  et  de;?  Girardon. 

M.  Buckens  doit  aussi  couler,  à  la  fonderie  de  canons,  la 
statue  colossale  en  bronze  de  Grétrv. 

A.  S. 

Bibliograpiue.  —  Un  nouveau  journal  périodique,  ayant 
pour  but  la  connaissance  des  livres,  vient  d'être  fondé  à 
Paris,  sous  le  titre  de  Revue  Bihliograjihique ,  dirigé  par  le 
savantM.Querard;  cette  revue  est  destinée  sur  ton  ta  faire  connaî- 


(  407  ) 

tre  tout  ce  qui  se  public  en  lauo,ue  française  en  Europe.  Nous 
voyons  avec  plaisir  que  la  Belgique  n'y  est  point  négligée,  et 
que  la  plupart  de  nos  nouveaux  livres  de  science  y  sont  men- 
tionnés. Nous  ferons  remarquer  que  les  directeurs  de  ce  recuei  1 
tirent  principalement  leurs  notes  bibliographiques  du  il/es- 
sager  des  Sciences  historiques  et  de  la  Revue  de  Bruxelles. 

—  M.  Hennebert,  archiviste  de  la  ville  de  Tournai,  connu 
par  plusieurs  publications  intéressantes,  a  aussi  fait  paraître 
le  l"  numéro  d'un  recueil  bibliographique,  intitulé  le  Bihlio- 
logue  de  la  Belgique  et  dit,  ]\ord  de  la  France.  Il  se  propose  d'v 
insérer  des  notices  sur  les  livres  rares,  A  cet  effet,  il  demande 
la  collaboration  de  tous  ceux  qui  s'occupent  de  bibliographie 
ou  de  bibliologie.  Nous  désirerions  que  cette  entreprise  réus- 
sit :  jamais  on  a  autant  senti  l'utilité  de  cette  science  toute 
neuve,  qui  a  pour  but  la  connaissance  des  livres. 

Diplôme  de  Charles-le-Gros.  — Il  e\is(e  au  greffe  du  tribunal 
de  première  instance  de  Namur,  une  pièce  fort  curieuse, que 
nous  croyons  inédite  jusqu'aujourd'hui.  Charles-le-Gros,  qui 
obtint  l'Empire  en  881  et  fut  déposé  en  887,  confirme  le  5  des 
kalendes,  de  novembre  (26  octobre)  de  cette  dernière  année 
une  donnation  faite  à  Sanction  ,  père  de  S'-Gérard  ,  et  qualifié 
dans  l'acte  de  Vir  vitœ  vencrnhilcs.  Cette  charte  est  parfaite- 
ment conservée  ,  seulement  le  sceau  qui  était  plaqué  sur  le 
parchemin,  est  détruit.  C'est  une  des  pièces  les  plus  anciennes 
qui  renferment  nos  dépôts  d'Archives, 

Décoi VERTES  siiMisMATiQUES.  —  Oii  a  fait,  daus  les  premiers 
jours  du  mois  de  juillet  dernier,  dans  un  village  du  Brabant 
septentrional,  aux  confins  de  la  province  d'Anvers,  une  trou- 
vaille numismatique  qui  n'est  pas  sans  intérêt.  Elle  consiste 
en  118  anciennes  monnoies  belgiques,  toutes  en  argent.  Ce 
petit  trésor,  après  avoir  été  vendu  à  Bruxelles,  a  été  apporté 
ensuite  a  Gand. 

Voici  l'indication  des  pièces  qui  le  composaient  : 
1  Double  patard  (ou  iloublc  sol)  de  Plii!ippe-ie-Bon,  connu 
sous     le  nom  de  I  io.rlnndcr ,  frappé  pour  le   Brabant,   Cette 


(  408  ) 

pièce  était  très-usée  et  la  moins  bien  conservée  de  toutes. 

1  Demi-patard  de  Maximilien  etPliilippe,  frappé  à  Anvers, 
en  U90. 

2  Toisons  de  Philippe-le-Beau,  de  l'année  1498. 

1  Double  patard,  frappé  à  Malines  pendant  la  minorité  du 
même  prince  (connu  sous  le  nom  de  double  Malinois). 

l  Vieryzer  du.  même  pour  la  Gueldre,  de  1492. 

37  Doubles  patards  du  même  Philippe-le-Beau,  dont  10 
pour  la  Flandre,  sans  indication  de  millésime;  3  pourNamur, 
dont  un  de  1499  et  deux  de  1303;  8  pour  la  Hollande,  de 
1499,  dont  quelques-uns  avec  co  noL,  les  autres  avec  ro  no; 
21  pour  le  Brabant ,  dont  4  de  1496,2  de  1498,  6  de  1500, 
3  de  1303,  et  un  frappé  à  Maestricht,  en  1303  (  Trajecti  in 
Vrohof). 

93  Doubles  patards ,  frappés  pendant  la  minorité  de  Char- 
les, dont  2  de  1307,  2  de  1312,  1  de  1313,  4  dont  le  millé- 
sime était  plus  lisible.  Enfin 

12  Patards,  dont  six  frappés  pour  le  Brabant,  4  pendant  le 
règne  de  Philippe-le-Beau,  et  deux  sous  celui  de  Charles- 
Quint;  1  pour  Maestricht,  de  1313;  2  pour  la  Hollande,  l'un 
de  Philippe  et  l'autre  de  Charles;  1  pour  la  Flandre,  de  Phi- 
lippe; 2  pourNamur,  de  1499. 

21  Réaux  de  Charles-Quint,  tous  frappés  à  Anvers. 

8  Demi-réaux  du  même,  dont  3  frappés  à  Anvers,  4  en 
Hollande  et  1  en  Flandre. 

4  Patards  du  même,  dont  3  frappés  en  Hollande  et  1  à 
Anvers. 

21  Pièces  de  quatre  patards  (  Vierstiiiverspenningen  ou 
VUegers),  de  Charles-Quint;  6  de  l'année  1336  (1),  dont  4 
frappés  à  Anvers  et  2  en  Flandre;  3  de  l'année  1339,  dont  3 
frappées  à  Anvers,  1  en  Flandre  et  1  en  Hollande;  10  de 
l'année  1340,  tous  frappées  à  Anvers. 

Enfin  2  exemplaires  de  la  monnoie  de  l'évêque  de  Liège, 
Erard  de  la  Mark,  semblable  à  celle  qui  se  trouve  représentée 
dans  l'ouvrage  de  M.  le  comte  De  Renesse,  PI.  21  ,  N"  6. 

(1)  C'est  la  première  armée  que  l'on  a  frappé  cette  espère  de  monnoie. 


(  409  ) 

Toutes  ces  pièces  élaient  fortement  oxidées,  à  l'exception 
toutefois  des  toisons  de  Pliilippc-le-Beau  et  des  reaux  de 
Charles-Quint,  dont  l'argent,  étant  d'un  meilleur  aioi,  n'avait 
nullement  souffert  d'un  long  enterrement. 

On  remarquera  ([ue  les  plus  récentes  des  pièces  trouTécp, 
sont  de  l'année  loiO;  ainsi  c'est  apparemment  vers  cet  te  époque 
que  ce  petit  trésor  a  été  perdu  ou  enterré. 

C.  P.  S. 

Sociétés  de  littérature  flamande.  —  La  société  de  littérature 
flamande  de  Gand  [Bc  tael  is  ganisck  hetvolk)  vient  d'ouvrir 
un  concours  et  demande  un  mémoire  en  prose  sur  le  règne 
de  Marie  de  Bourgogne  (1476-1482);  une  pièce  de  poésie, 
contenant  l'éloge  de  Jacques  d'Artevelde,  ruwart  de  Flandre. 
Une  médaille,  de  la  valeur  de  800  francs,  sera  décernée  à 
l'auteur  dont  le  mémoire  en  prose  aura  été  satisfaisante;  une 
médaille  de  la  valeur  de  loO  francs  à  celui  du  poème.  Les 
réponses  doivent  être  envoyées,  avant  le  l"  mars  1841,  au 
secrétaire  de  la  société. 

La  société  de  littér.  ture  à  Nieuport,  portant  pour  devise  ; 
Van  vroeschepe  dinne,  a  célébré,  le  18  du  mois  d'août,  le  ju- 
bilé de  la  S30°  année  de  son  institution.  A  cette  occasion  la 
société  a  donné  un  représentation  théâtrale  en  langue  fla- 
mande :  De  Landsoldat  (le  Soldat),  opéra  en  3  actes,  dont  la 
musique  était  composée  par  M.  P.  Van  den  Bussche,  de  la  même 
ville.  Le  président,  M.  De  Jagher,  a  prononcé  un  discours  en 
vers,  dans  lequel  il  a  fait  ressortir  l'utilité  et  l'influence  ci- 
vilisatrice des  chambres  de  rhétorique. 

Orthographe  FLAMANDE.  —  Réunion  de  la  commission  instituée  en 
exécution  de  l'arrêté  royal  du,  6  septembre  1836,  pour  juger 
des  mémoires  adressés  au  gouvernement  au  sujet  des  différend  a 
existants  par  rapport  à  l'orthographe  et  aux  déclinaisons  de 
la  langue  flamande. 

Présents  les  membres  dont  les  noms  suivent  : 
M.  Willems,  membre  de  l'Académie  à  Bruxelles,  membre 
de  l'Institut  roval  néerlandais  (ucdorlandsch,  etc.),  président; 

27 


(  410  ) 

31.  J. -H.  Boniiaiis,  professeur  à  l'université  de  Liège,  secrétaire 
rapporteur; 

Le  révérend  M.  le  chanoine  J.  David  .professeur  à  l'univer- 
sité de  Louvnin,  etc.  ; 

Le  révérend  3L  le  chanoine  J.-J.  De  Smet ,  membre  de  l'Aca- 
démie royale  de  Bruxelles,  etc.  ; 

M.  L.  d'Hulster,  professeur  à  l'Athenée  de  Gand; 

M.  J.-F.-C.  Verspreeuwen ,  professeur  à  l'Athénée  d'Auver.=. 

La  commission  étant  convoquée  par  dépèche  de  M.  le  ministre 
de  l'intérieur  et  des  affaires  étrangères,  du  13  de  ce  mois,  à 
l'effet  d'entendre  la  lecture  d'un  rapport  sur  les  mémoires, 
qui  ont  concouru  pour  le  prix  d'honneur,  prend  connaissance 
de  ce  rapport  général  et  raisonné ,  présen  té  par  M.  le  secrétaire 
rapporteur,  émet  le  vœu  qu'il  soit  aussitôt  que  possible  publié 
par  la  voie  de  l'impression ,  et  communiqué  à  tous  les  membres 
de  la  société  pour  le  progrès  de  la  langue  et  de  la  littérature 
flamandes. 

Dans  l'entretemps,  et  pour  que  le  gouvernement  et  le  public 
instruit  ne  restent  pas  plus  long-temps  dans  le  doute  relati- 
vement à  l'opinion  particulière  de  la  commission,  au  sujet  des 
différends  existants,  elle  déclare  (y  étant  expressément  invitée) 
qu'elle  propose  et  recomande  l'adoption  des  principes  suivants 
de  langue  et  d'orthograpVie,  comme  déjà  légitimés  par  l'au- 
torité des  meilleurs  écrivains  et  conformes  à  l'usage  très-an- 
cien de  nos  ancêtres,  et  comme  étant  en  même  temps  le  moyen 
le  plus  propre  pour  parvenir  à  l'unité  dansl'orthographe  de  la 
langue  flamande  : 

1°  La  simple  épellation  vocale  dans  toutes  les  syllabes  où  la 
voyelle  est  la  lettre  finale,  à  l'exception  de  l'e  et  de  i'o  longs 
aigus  (scherplange). 

2"  L'omission  des  accents,  à  l'exception  de  ceux  de  ces  signes 
qui  sont  en  usage  pour  donner  plus  de  force  dans  les  expres- 
sions ou  contractions. 

3"  La  formation  des  deux  vovelles  ei  et  7<i  avec  le  simple?, 
ainsi  que  dans  les  diphtongues  telles  que  vlein,  schreien , 
knicn,  luinerd. 

Dans  les  deux  voyelles  ooy  el  mj  ou  ney ,  \  y  est  néccs.saire 


(  411  ) 

et  l'a  s'allonge  quand  l'y  n'est  pas  suivi  d'une  voyelle  , 
comme  strooy,  strooyen,  gestooyd ,   drayen,  draey,  gedraeyd. 

4"  L'usage  du  c/t  avant  la  lettre  t,  partout  où  le  g  n'est  pas 
radical. 

5° L'usage  des  arti<'Ies  de  et  een  dans  le  premier  cas  masculin 
singulier,  en  omettant  l'îi  ouen  dans  les  adjectii's,  qui  cepen- 
dant prennent  l'n  au  pluriel  quand  ils  sont  employés  substanti- 
vement. 

6°  Le  maintien  du  dt  dans  la  conjugaison  des  verbes  qui  se 
terminent  en  dcn,  comme  gy  tcordt,  hiiidt;  hondt,  hy  wordi, 
vindt 

7°  Le  maintien  de  Vn  dans  les  adjectifs  composés, 
8°  Ecrire  paerd  ou  peerd,  waerd  ou  weerd,  etc. ,  indistincte- 
ment. 

La  commission  espère  que  ces  règles  de  langue  et  d'orthogra- 
pbe,  qui  sont  presque  toutes  déjà  admises  par  les  écrivains 
les  plus  renommés  de  la  Belgique,  seront  suivies  par  tous,  et 
peuvent  être  partout  introduites  dans  les  écoles,  à  l'effet  de  ré- 
tablir ainsi  l'unité  et  de  la  conserver  dorénavant  dans  la  langue 
écrite  de  toutes  les  contrées  des  Pays-Bas. 

Fait  à  Bruxelles,  en  l'hôtel  de  M.  le  ministre  de  l'intérieur  et 
des  affaires  étrangères,  le  8  août  1839. 

J.-F.  WiLLEms,  président;  J.-J.  De  Smet,  chanoine; 
J.  Dwm  ,  professeur;  J. -F.-C.  Verspreecwes  ; 
L.  d'Hdlster,  J.-H.  BoRJiviNS,  secrétaire  rapp. 

L'écriture  ci-dessus  est  approuvée  dans  toutes  ses  parties, 
par  le  soussigné  membre  de  la  commission  qui  n'a  pu  être  pré- 
sent à  l'assemblée 

Gand,  le  ^1  août  1839.  C.  Ledeganck. 

Immédiatement  après  le  prononcé  de  la  décision  relatée 
plus  haut,  toutes  les  règles  qui  y  sont  proposées  pour  la  lan- 
gue et  l'orthographe,  ont  été  admises  par  les  18  révérends 
professeurs  de  la  première  division  du  séminaire  archiépis- 
copal de  3Ialines,  pour  y  être  introduites,  ainsi  que  dans  tous 
les  collèges  et  écoles  alliés  à  cette  institution.  Déjà  tout  un 
système  de  livres  classiques,  conforme  à  cetlc  décision  ,  est 
sous  presse  pour  paraître  dans  peu  de  semaines  avec  approba- 
tion de  l'autorité  ecclésiastique. 


(^12  ) 

Le  rapport  de  M.  le  professeur  Bormans  sera  livré  au  pre- 
mier jour  à  l'impression  et  formera  un  gros  volume  in-o°.  On 
y  traite  des  points  moins  importants  que  la  commission  a  lais- 
sés intacts  comme  étant  d'un  intérêt  secondaire.  Entretemps 
un  extrait  de  ce  rapport  sera  inséré  dans  le  Belcjisch  Bluseum, 
pour  éclairer  le  système  par  rapport  à  la  formation  des  diphton- 
gues ei,  ou,  oey ,  aey ,  etc.  Nous  pouvons  toutefois  annoncer, 
dès  à  présent ,  que  MM.  les  membres  de  la  commission  consi- 
dérant \'y  dans  cette  dernière  consonnance  comme  le  w  dans 
les  mots,  vrouw,  trouw,  schaduw,  etc.,  et  que  l'e  long  disparaît 
des  mots  de  même  nature  ayant  plusieurs  syllabes,  afin  de 
simplifier  l'épeliation  vocale,  de  manière  qu'on  ne  dit  pas 
draeyen,  mais  drayen. 

Ecrire  ei ,  ni  et  de  m  an  (au  lieu  de  den  man),  ne  peut  pas 
être  considéré  comme  une  innovation,  ou  comme  un  emprunt 
fiiit  aux  Hollandais,  puisque  cette  règle  est  déjà  admise  par  les 
meilleurs  écrivains  de  notre  pays ,  surtout  par  les  poètes,  à 
l'exemple  des  temps  antérieurs  et  d'après  l'opinion  des  révé- 
rends pères  G.  Smits  et  P.  van  lIove,dans  leur  traduction  de  la 
S*°-Ecriture,  imprimée  à  Anvers  de  1744  à  1777,  en  22  vol. 
in-8°. 

Rdines  de  SAiNT-Bwoiy ,  a  G.vnd.  — Les  derniers  vestiges  de 
l'antique  abbaye  de  Saint-Bavon,  fondée  en  618,  enfermées 
maintenant  dans  l'enceinte  de  la  Vieille  Citadelle,  sont  aujour- 
d'hui visitées  par  tous  les  amateurs  d'archéologie.  La  chapelle 
octogone  de  S'-Macaire,  bâtie  au  XP  siècle,  y  est  entièrement 
conservée.  On  a  eu  soin  de  la  restaurer  sans  rien  changer  au 
caractère  primitif  de  l'édifice.  Une  partie  de  l'antique  crypte 
de  S'^-Marie  est  pavée  d'une  mosaïque  fort  curieuse,  mais  qui 
se  détériore  de  jour  en  jour.  Parmi  ces  ruines  il  y  a  des  con- 
structions qui  remontent  aux  premiers  siècles  du  christianisme. 
On  reconnait  dans  les  7nurailles  encore  existantes  des  traces 
d'architecture  de  toutes  les  époques  du  moyen-âge;  le  style 
roman  ,  le  plein-cintre,  l'ogive,  le  gothique  fleuri  y  sont  réu- 
nis de  la  manière  la  plus  bizarre.  On  pourrait  faire  un  cours 
complet  d'architecture  religieuse  en  allant  visiter  ces  derniers 
débris  d'une  autre  époque. 


(  413) 

ïlutncs 

L'ÉGLISE  DE  SAINT-NICOLAS.  EN  GLAIN. 


Parmi  les  restes  d'architecture  lombarde  qui  sont 
encore  debout  dans  les  environs  de  la  vieille  cité  lié- 
geoise, l'un  des  plus  curieux,  sans  contredit,  sous  le 
rapport  de  l'art  à  celte  époque  reculée,  est  celui  dont 
nous  offrons  ici  la  reproduction  fidèle.  Située  dans  un 
des  sites  les  plus  pittoresques,  cette  ruine  couronne  un 
immense  vallon  ,  dont  la  Meuse  baigne  les  pieds  ,  et  vient 
donner  plus  de  poésie  encore  à  ce  paysage  si  remarqua- 
ble par  les  nombreux  accidents  de  terrain  qu'il  présente. 

Le  prieuré  de  S'-Nicolas  en  Glain,  auquel  appartien- 
nent les  ruines  qui  font  l'objet  de  cet  article ,  paraît 
remonter  à  un  temps  assez  loin  de  nous  ;  au  moins 
le  père  Fisen ,  dans  son  Historia  ecclesiœ  leodiensis , 
part.  I,  pag.  241,  rapporte-t-il  sa  fondation  à  l'année 
1147,  l'attribuant  à  deux  frères,  de  la  famille  de  War- 
fusée,  appelés  Conrad  et  Antoine." 

L'historien  de  l'abbaye  de  S^  -  Laurent ,  dont  le 
savant  Martène  a  inséré  l'ouvrage  dans  le  quatrième 
volume  de  YAmplissima  collectio,  dit  à  la  page  1088. 

28 


(  àU  ) 

J  45,   que   l'église  fut  consacrée,    le   22  juillet   1151, 
par   l'évéque    de    Liège    Henri    II  ;    qu'en    mémoire    de 
cette  consécration  ,  Gozelon  de  Hambrug  et  Emma ,  son 
épouse ,    affeclèrent    à  l'autel   principal    de   cette    église 
deux  bonniers   de    terre,   en   retour    de   quoi   l'abbé   et 
le  couvent  de   S^-Laurent  les   firent   participer   à  leurs 
bonnes  œuvres ,  ce  qui  fut  confirmé  par  l'évéque.  Selon 
ce    même    écrivain,     ce    furent    deux    frères    nommés 
Gérard  et  Antoine,  chevaliers,  appartenant  à  la  famille 
de  Bolzeez,  qui  firent  bâtir  cette  église  et  qui  y  furent 
enterrés;  il  avoue    cependant   que   les   archives    de    sa 
maison,    ne    lui    ont    offert    aucun    document  qui   pût 
constater  d'une  manière  précise  et  absolue  la   date   de 
la  foïidation  de  ce  monument.  D'un  autre  côté,  le  père 
Martène    a    publié    dans    le    volume    que  je  viens  de 
citer,  pag.  1181-1183,  trois  chartes  relatives  au  prieuré 
de  S'  -  Nicolas   en  Glain ,  et   se   fondant    sur  ces   docu- 
ments,  M.  Ernst,  dans  son  Tableau  historique  et  chrono- 
logique des  suffragants  ou  co-écêques  de  Liège,  p.  291, 
émet  l'opinion  que  la  première    des  chartes   imprimées 
par  D.  Martène,  pourrait  peut-être' donner  la  date  de  la 
fondation   du   monument   qui    nous   occupe,-   il   appuie 
cette    assertion   sur  ce  que   la    ressemblance    des   noms, 
énoncés  dans  la  charte  de  1203,   avec   ceux  des  fonda- 
teurs de  l'église,  aurait  induit  en  erreur   l'historien   de 
l'abbaye  de  S'-Laurent.  Je  ne  peux   admettre  celle  con- 
jecture du  savant  chanoine  de  Rolduc.  et  je  pense,  au 
contraire,    que    la   charte   vient    confirmer   la   date    de 
1151,   donnée   par  l'auteur  cité.   Celle   charte   de    1203 
nous     fait     connaître    qu'un    nommé    Bauduin    donne 
à    l'église    de   S^- Nicolas    en   Glain,    soixante   bonniers 
de    terre    situés  à  Atis ,    Bolezeies ,    Montegneies ;    que 
par    cette   donation   confirmée    par   Gui ,   cardinal  évê- 
que    de    Paleslrine    et   légat    du    Saint  -  Siège ,    il    est 


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(  415  ) 

relevé  du  vœu  qu'il  avait  fait  d'aller  en  Terre-Sainte, 
vœu  que  des  empêchements  légitimes  et  des  souf- 
frances corporelles  l'avaient  forcé  de  ne  pas  accomplir 
jusqu'alors.  Le  prélat  ajoute  ensuite  :  Ita  guod  quid- 
qiiid  possidebat  extra  civitatem  leodienscm ,  nomi- 
natini  sexaginta  bonnaria  tenœ ,  vel  plura  in  Ans, 
in  Bolezeies,  in  Montegneies  jaccntia  ecclesiœ  beati 
Nicolay    in    Glano ,    qu.e    prius    paupercul.v    extiterat, 

AD   RELEVAISDAM    EA.M   ET   SUSTENTANDOS    MONAGHOS  in     CU    DoO 

servientes ,  erogavit ut    ita  prœdictœ   jiaupercidœ 

ecclesiœ  per  ipsum  Balduinum  subveniretur ,  et  Deo 
honeste  ibi  serviretur.  Ce  passage  prouve  certaine- 
ment que  l'église  existait  alors,  et  que  de  plus  elle 
était  dans  un  tel  état  de  délabrement  et  de  misère , 
si  je  puis  m'exprimer  ainsi,  que  la  donation  de  Bau- 
duin  arrivait  fort  à  propos  pour  la  sauver  d'une  ruine 
complète.  Il  demeure  donc  bien  établi ,  je  pense ,  que 
ces  restes  datent  au  moins  de  1147;  le  caractère  de 
l'architecture  semble  même  lui  donner  une  existence 
plus  reculée  encore,  car  elle  appartient  essentiellement 
à  la  même  époque  que  l'église  S'^-Croix  ,  à  Liège ,  qui 
fut  bâtie  dans  le  commencement  du  onzième  siècle;  et 
l'église  de  S' -Nicolas  qui  nous  occupe  ici,  pourrait 
bien  être  de  ce  temps,  car  selon  la  plupart  des  his- 
toriens et  des  chroniqueurs  qu'il  serait  trop  long  de 
citer  ici,  c'était  à  cette  époque  que  l'architecture  lom- 
barde florissait  dans  l'ancien   pays   de   Liège. 

Ce  monument  religieux  resta  dans  la  possession 
de  l'abbaye  de  S^-Laurent  jusqu'à  la  réunion  du  pays 
de  Liège  à  la  France;  deux  prêtres  y  célébraient  le 
service  divin  et  y  remplissaient  les  fonctions  pastorales. 
Quand  la  vente  des  biens  des  monastères  l'ut  décrélèe , 
l'église  de  S'-Nicolas  passa  dans  des  mains  particu- 
lières; son  inutilité  instantanée  et  le  peu  de  soins  qu'on 


(416  ) 

apportait  à  cette  époque  a  la  conservation  des  monu- 
ments,  et  surtout  des  monuments  chrétiens,  furent  la 
cause  première  de  l'état  dans  lequel  se  trouve  aujour- 
d'hui  ces  restes  précieux. 

L'édifice,  dans  sa  plus  grande  hauteur,  a  50  pieds; 
l'élévation  du  pourtour  de  l'abside  ,  est  de  40  pieds. 
La   muraille   du    côté    droit    renferme    un    escalier    de 

2  1/2  pieds  de  largeur  sur  une  hauteur  de  5  1/2 
pieds,  conduisant  à  la  galerie  qui  couronne  l'abside,- 
cette   galerie ,    qui    est   d'une    hauteur    de   7   pieds   sur 

3  de  largeur,  est  formée  de  colonnettes  de  3  pieds 
de  hauteur  sur  3  1/2  pouces  de  diamètre,  qui  sup- 
portent des  petites  voûtes  à  plein -cintre  ;  chaque  co- 
lonnette  est  couronnée  alternativement  des  chapiteaux 
que  nous  reproduisons  ici.  Les  fenêtres  ouvertes  à  la 
même  hauteur  que  les  colonnettes  de  l'abside,  sont  en 
plein-cintre ,  supportées  par  deux  colonnettes  de  chaque 
côté,  et  reposent  sur  une  corniche  figurée  litt.  B. 

Sept  fenêtres  de  grande  dimension  forment  l'abside; 
trois  d'entr'elles  ont  seules  été  ouvertes,  les  quatre 
autres  n'ont  été  qu'indiquées;  elles  sont  séparées  par  de 
grands  pilastres  plats,  qui  se  lient  entre  eux  par  de 
fausses  voûtes ,  figurées  au-dessus  des  fenêtres.  Ce  genre 
de  construction,  en  ménageant  un  jour  plus  favorable 
et  plus  en  harmonie  avec  la  sainteté  du  lieu ,  doime 
à  l'extérieur  plus  de  grâce  et  de  légèreté;  celles  qui 
ont  été  ouvertes  sojit  fermées  aujourd'hui  par  une  ma- 
çonage  de  briques. 

L'intérieur  a  été  tout  aussi  maltraité  que  la  partie 
exposée  immédiatement  à  l'action  destructive  de  l'air 
et  du  temps;  le  pavé  du  temple,  qui  contenait  peut- 
être  quelques  pierres  tumulaires  curieuses ,  a  été  dé- 
truit; une  seule  de  ces  pierres  ,  d'une  assez  grande 
étendue .    existe    encore  ;    mais    elle   est    enterrée    sous 


{  417  ) 

une  telle  quantité  de  marchandises  dont  l'église  est 
remplie  ,  qu'il  nous  a  été  impossible  d'en  aperce- 
voir une  seule  lettre.  M.  Grisard,  à  qui  appartien- 
nent ces  débris,  a  bien  voulu  nous  promettre  de 
nous  faire  savoir  quand  celte  pierre,  qu'il  croit  avoir 
été  consacrée  à  la  mémoire  d'un  abbé  de  S'-Laurent, 
serait  dégagée  des  entraves  qui  la  cachent  et  nous 
mettre  ainsi  dans  la  possibilité  de  la  lire.  Les  murs 
latéraux  ont  été  replâtrés  vers  le  milieu  du  siècle 
dernier;  ils  ont  subi  une  transformation  telle,  que  le 
caractère  architectural  primitif  a  complètement  disparu. 

Telles  sont  les  données  que  nous  avons  pu  recueillir 
sur  ces  vieux  fragments,  si  curieux  à  tant  d'égards,  sur- 
tout pour  l'histoire  de  l'art  dans  notre  pays. 

Le  propriétaire  actuel,  M.  Grisard,  à  ce  que  l'on 
nous  assure,  a  l'intention  de  faire  réparer  ces  ruines 
précieuses  ;  nous  formons  des  vœux  sincères  pour  que 
l'exécution  de  cette  pensée  louable  soit  réalisée  le 
plus  tôt  possible,  car  nous  pensons  que  si  l'on  tardait 
quelque  temps  encore,  ce  monument  serait  complète- 
ment perdu.  JXous  ne  terminerons  pas  ces  lignes  sans 
remercier  M.  Grisard  de  la  bonté  qu'il  a  eue  de  nous 
laisser  visiter  sa  propriété  aussi  longuement  que  nous 
l'avons  voulu ,  et  nous  le  prions  d'agréer  ici  l'hommage 
public  de  notre   gratitude. 

Ed.  L.  L.  L. 


(418) 


<!Iau0ej5  it  la  guerre  (i) 


DES 


GANTOIS  CONTRE  LE  DUC  DE  BOURGOGNE. 


U50— U58. 


Quand  le  syslème  féodal  vint  à  crouler  en  Flandre , 
vers  la  fin  du  XllP  siècle,  les  villes  s'élevèrent  sur  ses 
ruines  et  parvinrent  à  un  haut  degré  de  puissance.  Egales 
aux  villes  libres  de  l'Allemagne,  elles  formaient,  pour  ainsi 
dire,  avec  leur  ressort, des  étals  indépendants,  qui  avaient 
le  droit  de  traiter  avec  d'autres  étals. 

Ce  fut  à  cette  époque  que  se  consolida  la  division  de  la 
Flandre  en  trois  membres.  Gand  ,  Bruges  et  Ypres  en 
étaient  les  chefs-lieu.  L'échevinage  de  ces  villes  avaient 
réuni  dans  ses  mains  toutes  les  branches  de  l'administra- 
tion et  de  la  judicature,  et  servait  de  ressort  aux  moindres 
villes  de  leur  membre  respectif.  Les  échevins  réunis  de 
Gand,  Bruges  et  Ypres  formaient  la  cour  supérieure  et 
bien  souvent  la  représentation  nationale  de  ce  pays. 


(1)  Cette  guerre  est  connue  clans  nos  annales  sous  le  nom  dcGitetre 
de  Gavre. 


(  419  > 

Dès  l'avènement  de  la  maison  de  Bourgogne  au  comté 
de  Flandre,  celle-ci  lâcha  de  changer  la  forme  administra- 
tive établie,  afin  d'étendre  son  pouvoir.  Durant  de  longues 
années  elle  persista  dans  ce  syslème,  et  parvint  enfin  à 
son  but  quand  la  Flandre ,  exténuée  par  des  guerres  sans 
cesse  renaissantes,  avait  perdu  ses  relations  commerciales 
et  en  même  temps  ses  richesses. 

A  peine  Philippe  le  Hardi  avait-il  élé  reconnu  comte, 
après  la  mort  de  Louis  de  Maie,  qu'il  s'empressa  d  établir 
un  conseil  permanent  à  Lille,  à  l'instar  de  celui  établi  en 
Bourgogne.  Cette  institution  fut  la  première  atteinte  portée 
à  l'ancienne  constitution  du  pays,  elle  bouleversait  toute 
la  hiérarchie  des  tribunaux.  En  vain  les  Étals  de  Flandre 
firent-ils  des  démarches  à  ce  sujet,  le  conseil  fut  maintenu. 

La  seconde  atteinte  fut  l'érection  du  quatrième  membre 
de  Flandre  (le  Franc  de  Bruges),  et  les  changements  ap- 
portés dans  l'administration  de  la  ville  de  Bruges,  en  1439. 

Jusqu'alors  les  ducs  de  Bourgogne  avaient  dû  respecter 
l'ancienne  constitution  de  Gand;  mais  vers  le  milieu  du 
XV^  siècle,  quand  le  duc  Philippe,  qui  possédait  déjà  la 
Picardie  et  l'Artois,  eut  réuni  à  ses  possessions  le  Ilainaut, 
le  Brabant  et  la  Hollande,  il  résolut  d'abattre,  à  quelque 
prix  que  ce  fut,  ce  dernier  boulevard  des  libertés  du  pays. 

A  l'occasion  d'une  gabelle  que  le  duc  voulut  établir  sur 
le  sel  et  que  les  Etats  de  Flandre  refusèrent,  Philippe  se 
brouilla  avec  la  ville  de  Gand,  croyant  que  c'était  par  l'in- 
fluence du  membre  de  Gand ,  que  le  subside  avait  été  re- 
jeté (1447),  et  afin  de  diminuer  le  pouvoir  des  Gantois, 
il  résolut  de  changer  le  mode  de  choisir  les  échevins  et 
prétendit  que  la  charte  oclroyée  par  Philippe  le  Bel,  en 
1301,  fut  exécutée  à  la  lettre,  sans  égard  aux  changements 
introduits  depuis  des  siècles  et  reconnus  par  les  comtes 
ses  devanciers. 

Selon  la  charte  de  1301,  l'échevinage  de  Gand  devait 


(  420  ) 

être  annuellement  renouvelé.  Le  comte ,  ou  des  commis- 
saires délégués  par  lui,  choisissaient  quatre  électeurs,  et 
les  échevins  en  nommaient  également  quatre  au  nom  de  la 
ville.  Si  le  comte  n'envoyait  point  ses  commissaires  en 
temps  utile,  les  échevins  avaient  droit  de  nommer  les  huit 
électeurs.  Ces  derniers  choisissaient  les  vingt-six  échevins, 
divisés  en  deux  Bancs,  les  échevins  de  la  Keure  et  les  éche- 
vins des  Parchons. 

Mais  de  grands  changements  s'étaient  introduits  dans 
l'administration  de  la  ville  de  Gand  et  de  toute  la  Flandre 
sous  la  régence  de  Jacques  Van  Artevelde.  A  cette  époque, 
Gand  se  composait  de  trois  membres  :  le  membre  des  bour- 
geois, celui  des  cinquante-deux  métiers  et  celui  des  tisse- 
rands. Chaque  membre  avait  à  sa  tête  un  doyen,  et  ces 
représentants  des  corporations  jouissaient  du  même  pou- 
voir que  les  échevins;  ils  siégeaient  avec  eux.  Le  membre 
des  bourgeois  avait  droit  d'élire  trois  échevins  pour  cha- 
que banc;  le  membre  des  métiers,  ainsi  que  celui  des 
tisserands,  en  choisissaient  cinq,  et  ces  candidats  étaient 
présentés  aux  électeurs  par  les  doyens  de  chaque  membre. 

Les  tribunaux  des  villes  d'Audenarde ,  de  Courtrai , 
d'Alost,  du  pays  de  Waes,  des  quatre  Métiers,  de  Biervliet 
et  de  Termonde  avaient  pour  ressort  l'échevinage  de  la 
Keure,  de  Gand;  les  bourgeois  forains  [haechpoorters) 
étaient  pareillement  placés  sous  leur  jurisdiction. 

Les  bourgeois  forains  étaient  des  habitants  de  la  cam- 
pagne qui,  inscrits  dans  l'une  ou  l'autre  corporation  de 
Gand,  choisissaient  Gand  pour  domicile  et  n'étaient  justi- 
ciables que  du  magistrat  de  celte  ville.  Un  grand  nombre 
de  ces  bourgeois  étaient  disséminés  par  tout  le  pays. 

Les  échevins  de  Gand  entretenaient  un  corps  d'oiiîciers, 
appelés  Chaperons  blancs  (1)  [witte  caproenen) ,  pour  exé- 
cuter leurs  jugements  et  maintenir  la  police. 

(1)  A  cause  de  leur  costume. 


(  421  ) 

Ce  fut  cette  organisation  que  le  duc  làclia  de  changer. 
Il  voulut  avoir  une  intluence  directe  sur  la  nomination 
des  échevins,  et  prélendit  que  le  conseil  de  Flandre,  qui 
émanait  directement  de  lui,  servit  de  ressort  à  toute  la 
Flandre. 

Pour  parvenir  à  son  but,  il  commença  par  contester  le 
mode  établi  d'élire  les  échevins  et  soutint  par  ses  commis- 
saires que  la  loi  de  1301  fut  remise  en  vigueur,  A  ce  sujet 
ilyeuldegrandesdiscusions,  à  la  mi-août  (i)de  1449,  entre 
les  électeurs  du  comte  et  ceux  de  la  ville.  L'assemblée  pour  le 
choix  des  échevins,  dura  trois  jours.  Cependant  l'élection  fut 
faite  selon  les  coutumes  en  usage  depuis  un  temps  immé- 
morial. Le  duc,  fâché  de  se  voir  déchu  de  ses  prétentions, 
retira  ses  baillis  et  autres  olîiciers  de  la  ville  de  Gand. 
Mais  les  Etats  de  Flandre  intervinrent,  et  dans  la  session 
qui  eut  lieu  à  Malines,  il  fut  convenu  entre  la  ville  de 
Gand  et  le  duc,  qu'une  nouvelle  élection  aurait  lieu  à  la 
mi-carême  (1450,  nouv.  s\.j\c),par  manière  de  provision  • 
il  y  fut  décidé  que  les  huit  éliseurs  ,  sans  que  les  deux 
grands  doyens,  ni  autre  jiersmine  quelconque  s'en  doye  ni 
devra  mesler  ou  e^itremettre ,  choisiraient  les  échevins,  et 
pour  ce  que  les  ditz  de  Gand  dient  et  maintiennent  que 
par  ci-devant  de  tîès-loîig  et  ancien  temps  les  éliseurs  qui 
ont  été ,  ont  fait  leur  élection  des  ditz  vingt-six  personnes 
hors  des  trois  membres  de  la  ville  de  Gand ,  assavoir  les 
six  du  membre  de  la  bourgeoisie,  dix  du  membre  des  mes- 
tiers  et  les  autres  dix  du  membre  des  tisserans ,  nonob- 
staîit  que  ou  devant  dit  privilège  de  V électioïi ,  ce  ne  soit 
expressé  ni  contenu.  A  quoy  par  le  procureur  de  mon  dit 
seigneur  a  été  respondu  entre  autres  choses,  que  si  la  dite 
élection  a  été  ainsi  faite  par  ci-devant ,  ce  a  été  de  la 
franche  volonté  et  liberté  des  esliseurs,  et  sans  auctme 

(1)  Époque  du  renouvellement  annuel  du  magistrat. 


(  422  ) 

contrainte  nécessité  ;  encore  2ictr  manière  de  provision  et 
sans  préjudice  du  droit  des  parties  et  sans  déroguer  au 
privilège  cotnme  dessus  est  dit,  iceulx  huit  éliseurs  ou  la 
cjreigneur  partie  d'eulx  aussi  de  leur  franc  vouloir  et  sans 
aucune  contrainte ,  pourront  eslire  et  éliront  pour  cette  fois 
les  ditz  vingt-six  jjersonnes  hors  des  ditz  trois  membres , 
assavoir  six  du  membre  de  la  bourgeoisie ,  dix  du  membre 
des  métiers  et  autres  dix  du  membre  des  tisser  ans ,  sans 
ce  toutefois  que  par  ce  soit  aucun  nouveau  droit  pétitoire 
ou  jiossessoire  acquis  ni  con  ferré  à  l'une  ni  à  l'autre  partie. 

L'élection  des  échevins  de  la  rni-août  1450,  eut  lieu 
selon  cet  appointement  et  transaction.  Mais  le  duc  voulut 
encore  enlever  tout  pouvoir  aux  doyens,  et  soumettre  le 
tribunal  des  échevins  de  la  Keure  au  ressort  du  conseil 
établi  par  lui. 

D'abord  il  tâcha  de  perdre  les  trois  doyens,  Daniel  Ser- 
sanders,  Liévin  Sneevoet  et  Lié  vin  De  Potter,  dans  la  con- 
fiance que  les  corporations  avaient  en  eux,  et  à  cette  fin 
il  envoya  à  Gand  quatre  commissaires,  Pierre  Tyncke, 
Louis  D'Hamere,  Loy  Coolbrant  et  Liévin  Wic^e,  munis 
de  lettres  patentes,  par  lesquelles  le  duc  déclarait  que 
les  trois  doyens  étaient  cause  de  toutes  les  difficultés  sur- 
venues entre  lui  et  la  ville  de  Gand.  Le  9  juin  1451,  un  des 
députés,  Liévin  Wicke,  produisit  ces  lettres  patentes  en 
plaine  chambre  des  échevins  ;  ces  lettres  contenaient  entre 
autres  (1)  : 

«  De  voorseide  Daniel  Sersanders,  Lieveii  de  Potter,  lÂeven 
Sneevoet  ende  de  hicere ,  hehhen  gheloepen  ende  doen  loepen, 

(1)  Les  susnommés  Daniel  Sersanders  ,  Liévin  De  Potter,  Liévin  Snee- 
voet et  leurs  adhérents  se  sont  mêlés  ,  eux  ,  leurs  gens  et  alliés ,  le  jour 
et  la  nuit ,  parmi  le  peu])Ie:  lui  ont  donné  avis  et  renseignements  contre 
nous,  dans  le  sens  de  leurs  mauvais  désirs  et  coupables  prétentions, 
leur  assurant  que  nous  voulons  et  désirons  leur  infliger  des  peines  par 
bannissemeut  on  autrement  ,  parce  qu'ils  refusèrent  de  consentir  à  la 
gabelle  sur  le  sel ,  que  nous  demandions  ,  il  y  a  quatre  ans  environ.  Ils 


(  423  ) 

hy  hueren  lieden  ende  geallieerden  ,  hy  dagho  ende  by 
nachtc  ,  onder  'tgheniecne  vole,  ende  hebben  't  gheadverteert 
ende  ondenvesen ,  ende  doen  adverferen  ende  onderwysen  al  ter 
conirarien  van  ons  ende  tôt  hnren  quadcn  teille  ende  verdomy- 
der  meeninghen ,  zegghcnde  ende  doende  stroyen  onder  't  ghe- 
meene,  dat  icy  se  willen  hebben  ende  begheren  te  hebben  ghe- 
corrigeert  ende  ghepugniert  by  banne  oft  andersins  ,  omme  dat 
zy  ons  icederstonden  ende  wederseidcn  de  settinghe  of  bede  van 
den  soute,  die  icy  begheerden ,  dies  es  nu  vier  jaer  of  daer 
ontrent'  oec  segghende  dat  icy  de  correctie  ende  pugnitie  wel 
ghedaen  willen  hebben  up  henilieden ,  maer  die  ons  consentcrcn 
wilden  de  voorseiden  beden  van  den  soute ,  ende  die  onse  voor- 
seide  stede  van  Ghend  ghestelt  hebben  in  onser  onghenaden , 
alsoe  zy  segghen ,  die  draghen  ende  onderhouden  tcy;  ende  en 
tvillen  niet  ghedoeghen  datter  correxie  of  pugnitie  afghesciede, 

répandent  aussi  que  nous  désirerions  bien  les  punir,  mais  que  nous  sou- 
tenons et  défendons  ceux  qui  auraient  voulu  consentir  à  ce  droit  sur  le  sel , 
lesquels  seraient  cause  que  la  ville  de  Gand  a  encouru  notre  disgrâce , 
et  que  nous  ne  voulons  pas  ,  qu'on  leur  inilige  les  peines  qu'ils  ont  mé- 
rité. Ils  font  aussi  courir  le  bruit  que  je  suis  un  prince  injuste  et  mauvais 
justicier.  Ils  agissent  de  cette  manière,  afin  que  le  peuple  leur  soit  sou- 
mis et  les  soutienne,  comme  Seigneurs  et  Maîtres  de  notre  ville,  et  afin 
qu'ils  se  maintiennent  dans  leur  gouvernement,  à  notre  préjudice  et 
contre  notre  volonté.  Ils  disposent  souverainement  des  offices  de  notre 
ville  ,  à  leur  profit ,  contrairement  aux  droits  de  notre  seigneurie  et  pri- 
vilèges de  notre  ville.  De  cette  manière  ils  possèdent  la  ville  de  Gand, 
contre  notre  volonté,  et  agissent  comme  s'ils  en  étaient  les  seigneurs, 
et  commandent  au  peuple  comme  s'il  leur  appartenait  :  c'est ,  pour  ces 
causes ,  que  nous  n'avons  pas  tenu  notre  résidence ,  ni  ne  la  tenons 
actuellement  dans  la  dite  ville ,  et  surtout  parce  qu'ils  disent  et  ré- 
pandent que  nous  ne  voulons  pas  faire  justice ,  ni  permettre  qu'on  la 
fasse  et  qu'on  punisse  ceiix  ,  qui  sont  cause  que  la  ville  de  Gand  est  en 
désaccord  avec  nous  ,  et  que  nous  les  prenons  sous  notre  protection 
contre  toute  justice;  cependant  dans  toute  la  cbrétienté  nous  sonmics 
réputé  pour  un  prince  juste....  Nous  avons  ordonné  et  ordonnons  à  nos 
aimés  sujets  Pierre  Tyncke,  Louis  D'Hamerc  ,  Eîoi  Cowibrant  et  Liévin 
Wicke,  de  déclarer,  et  de  faire  connaître  ,  de  répandre  en  notre  nom, 
partout  où  besoin  sera,  et  aussi  bien  ,  en  plaine  séance  des  échevius 
qu'ailleurs,  le  véritable  état  des  affaires,  afin  que  le  peuple  voie  la  vérité, 
et  sente  combien  on  l'a  trompé  et  séduit  jusqu'à  présent. 


(  424  ) 

alsoe  als  icy  se  willen  hebben  up  hemlieden ,  segghende  voort, 
alsoe  ons  anhrocht  es  ,  daticy  prince  van  ongherechter  justicien 
zjin....  Endo  dit  doen  zy  omme  te  hliven  hebbende  ende  t'on- 
derhoudene  onse  voorseide  ghemeene  vole  te  hueren  willen  ende 
in  huer  sithgectie  ,  als  Hecren  ende  Mecsters  van  onser  stede  , 
ende  te  blivene  by  huercr  etinghe,  siate  ende  gouvernemente , 
al  ter  contrarien  van  ons  ende  t'onsen  oniville  ende  ondanke , 
alsoe  voorseit  es.,..  Dat  zy  van  den  ofjicien  van  onser  stede 
ghedaen  hebben,  t' hueren  iville  ende  ghelieften,  omme  heur 
ghesinguleerde  profijt  ende  jeghen  ende  ter  contrarien  van  onser 
heerlijcheit  ende  van  den  privilegien  van  onser  voorseide  stede;... 
ende  jeghen  onsen  danc  ende  loille  so  houden  zy  besitten  ende 
ghebruken  onse  voorseide  stede  van  Ghend,  ende  draghen  hem- 
lieden als  Heeren  van  diere ,  ende  niisleeden  ende  bedrieghen 
ons  aernie  vole,  ghelijc  als  oft  hemlieden  al  toebehoerde ,  oni 
dwelke  uy  ghelaten  hebben  ende  alnoch  laten  te  commen  in  ons 
voorseide  stede  van  Ghend  ;  ende  ten  surpluse  daer  zy  segghen 
ende  stroyen  dat.  uy  niet  en  corrighieren  noch  pugnieren  en, 
willen ,  noch  ghedoeghen  dat  men  corrigiere  of  pugniere  de 
ghuene ,  die  't  wel  verdient  hebben,  ende  die  onse  voorseide 
stede  van  Ghend  ghestelt  hebben  in  onser  onghenaden ,  alsoe  zy 
segghen,  ende  dat  wy  die  draghen  ende  bescudden  jeghen  rechf, 
wy  en  hebben  tôt  noch  toe ,  in  aile  de  regione  van  kerstenhede 
anders  niet  vermaert  gheweest,  dan  over  eenen  prince,  recht- 

verdich  ende  van  goeder  justicien Hebben  ghelast  ende  gheor- 

dineert  onsen  gheminden  ondersaten  Pietren  Tijnke ,  Lodewijc 
Dhamere ,  Loy  Coolbrant  ende  Lieven  Wicke  ,  dat  zy  allomme 
ende  overal  daer  des  noot  wesen  soude  ,  ende  alsoe  wel  in  de 
vulle  caniere  van  der  wet,  als  eldre  in  onse  voorseide  stede  van 
Ghend,  segghen ,  openbaren  ende  verclaren  souden  van  onsen 
weghe  de  waerheit  van  allen  voorscreven  zaken  ,  tcn  ende  dat 
onsen  voorseide  ghemeene  vole  van  als  onderwijst  worde  ende 
daer  af  weet  die  gherechte  waerheit ,  ende  hoe  dat  tôt  noch  toe 
hedroghen  ende  misleit  is  gheweest...  » 

En  second  lieu,  il  cila,  le  26  juillet  1451  .  devant  son 
conseil ,  lesdils  doyens  et  les  treize  échevins  de  la  Reurc 
de  l'année  précédente  (1450).  Les  doyens  et  échevins  pro- 


(^25  ) 

ieslèrent  d'abord  ,  soutenant  que  ces  citations  étaient 
contre  les  privilèges  de  la  ville  de  Gand,  et  que  le  conseil 
du  duc  était  incompétent  pour  les  juger,  que  leurs  juges 
naturels  étaient  leurs  pairs,  l'échevinage  des  deux  autres 
membres  de  Flandre  : 

a  Quœque  etiam  hujiismodi  litterae  et  adjournamcnta  essent 
ci  foretit  contra  privilégia ,  libertates,  usiis  etconsuetiidines  ejus- 
dem  oppidi  Gandensis,  hacte nus  etiam  laudahiliter  observata , 
imde  per  illas  et  illa  ut  sic  ac  aliis  multis  modis  suis,  loco  et 
tempore  expriinendis,  sentienfes  se  fore  et  esse  oppressas  et  gra- 
vatos,  ac  in  dies  plus  posse  opprimi  atqiie  gravari ,  ideoque  à 
litteris  predictis ,  necnon  potestate  prefatis  servienti  etjanitori 
per  eas  qiwmodolibet  tradita,  citationihtsque  et  adjournamentis 
tnenioratis,  ex  certis  scientiis  et  aliis  omnibus  melioribus  modo, 
via,  jure  et  forma,  quibus  potuerunt,  provocarunt  et  appella- 
runt,  ac  quilibet  ipsorum  provocavit  et  appellavit,  ^protestantes 
expresse  de  hujusmodi  eorum  provocatione  et  appellatione  insi- 
nuanda,  intimanda,  notificanda  et  etiam  proseqiienda,  prouttihi 
et  quando  fuerit  ac  erit  oportunum  et  aliis  prout  esse  moris  at- 
que  stili.  » 

Cependant  comme  le  duc  présidait  en  personne  son 
conseil ,  ils  comparurent  à  la  troisième  citation.  Les  éche- 
vins  furent  accusés  d'avoir,  sans  droit,  banni  Pierre  Beys, 
Pierre  Heuribloc,  Liévin  Van  den  Pale  et  Gillis  Ilugart, 
officiers  du  duc;  ce  jugement  fut  annulé,  et  chacun  d'eux 
fut  condanmé  à  un  bannissement  de  vingt  ans  ;  mais  par 
l'intercession  des  échevins  qui  gouvernaient  alors  la  ville 
de  Gand,  le  duc  ne  fit  pas  exécuter  la  sentence ,  qui  est 
conçue  en  ces  termes  : 

«  ....  Savoir  faisons,  que  nous  oyés  et  consltlerces  toutes 
choses  dessus  déclarées  les  confessions  et  recogaoissances 
desdiz  Ectorde  Vuerhoute,  Liévin  Van  der  Stiche'.en.  Rohrccht 
van  Merendré,  Pieter  Sersyraoens,  Rog'ier  Everwyn,  Jehan 
De  Coninc,  Roland  de  Wedergrate,  Jehan  Van  den  Bossche , 
Liévin  Utendale,  Gillis  Tant,  Loy  De  Pottelsherghe ,  Jt-han  De 
Cupere  et  Jehan  De  Yriese  par  eulx  et  chacun  d'eulx  faites , 


(  426  ) 

confessées  et  recognues  sur  les  impétracion  et  demande  de 
nostre  dit  procureur-général  en  ceste  partie  et  ainsi  et  par 
la  manière  que  dit  est.  Nous  voulons  nostre  droit  et  seigneurie 
en  ce  garder  comme  raison  est,  et  tenuz  y  sommes,  a  nous 
de  notre  autorité,  seigneurie  et  puissance  le  ban  par  eulx 
fait  et  prononcé  sur  et  à  l'encontre  desdiz  Pierre  Beys,  Pieter 
Ileuribloc ,  Lievin  Van  der  Pale  et  Gillis  Hugart  et  de  chacun 
d'eulx  ,  ainsi  que  dit  est,  déclare  et  déclarons  par  ces  présen- 
tes nul  et  de  nulle  valeur,  et  pour  tel  et  comme  fait  par  non 
juge  et  qui  n'avoient  auctorité,  ne  puissance  de  ce  faire, 
l'avons  miz  et  mettons  du  tout  au  néant  par  ces  dites  présen- 
tes. Et  en  résumant ,  ce  avons  déclaré  et  déclarons  comme 
dessus,  les  diz  Pierre  Beys,  Piètre  llueribloc ,  Liévin  Van  den 
Pale  et  Gillis  Hugart  et  chacun  d'eulx,  quant  à  ce  estre  hom- 
mes francs  et  liges  en  et  partout  nostre  dit  pays  et  conté  de 
Flandres  et  partout  ailleurs,  ainsi  qu'ils  étoient  par  avant 
la  publication  dudit  desraisonnable  ban  ,  en  ordonnant  et 
commandant  aux  diz  six  échevins  de  Gand  illecques  présens, 
pour  eulx  et  leurs  compagnons  en  loy  absens,  que  le  dit  ban 
et  les  diz  Pierre  Beys,  Pierre  llueribloc,  Liévin  Van  den  Pale 
et  Gillis  Hugart,  ainsi  nullement  et  à  tort  banniz,  ilz  facent 
trader  et  ester  hors  des  registres  de  nostre  dit  ville  de  Gand. 
Et  en  oultre  veue  et  considérée  la  repentance  et  grande  hu- 
milité des  dessus  nommez  Ector  de  Vuerhoute  et  de  tous  Icsdiz 
autres  ses  consors  en  ceste  partie,  en  faveur  et  contemplacion 
aussi  desdiz  delà  loy  présente  et  de  nostre  dite  ville  de  Gand, 
qui  moult  humblement  nous  en  ont  supplié  et  requiz.  Et  par 
espécial  pour  honneur  et  révérence  de  Dieu  nostre  benoit 
créateur  et  voulans  en  ceste  partie  extendre  nostre  grâce  et 
miséricorde  et  la  préférer  à  rigueur  de  justice,  aux  dessus' 
nommez  Ector  de  Vuerhoute,  Liévin  Van  der  Stichelen, 
Robrecht  Van  Merendré,  Pierre  Sersymoens,  Rogier  Everwyn, 
Jehan  De  Coninc,  Roland  De  Wedergrate,  Jehan  Van  den 
Bossche,  Liévin  Utendale,  Gillis  Tant,  Loy  Pottelsberghe, 
Jehan  De  Cupere  et  Jehan  De  Vriese,  et  a  chacun  d'eulx,  en 
inclinant  favorablement  aux  supplicacions  que  dessus,  a  nous 
quitié  et  pardonné  et  de  nostre  grâce  espécial ,  quitons  et  par- 
donnons par  ces  présentes  les  cas,  offenses,  meffais  et  delictz 


(  427  ) 

dessus  déclarez,  par  eulx  commis  et  perpétrez  à  l'encontre  de 
nous  et  de  nostre  liaulteur  et  seijjneurie ,  Ijoniio  famé  et  re- 
nommée et  à  leurs  biens  non  confisquiez  sancuns  en  y  a 
ainsi  qu'ilz  estoient  par  avant,  en  imposant  sur  ce  silence 
perpétuel  à  nostre  dit  procureur-général  et  autres  noz  officiers 
quelconques,  satisfaction  toutevoies  faite  a  partie  première- 
ment. B 

Mais  le  jugement  qui  condamnait  les  trois  doyens  au 
bannissement ,  fut  maintenu ,  malgré  les  promesses  con- 
traires du  duc;  et  cet  acte  de  sévérité  causa  un  grand 
mécontentement  dans  la  ville  de  Gand. 

Dans  l'entrelemps,  les  députés  du  duc,  Tyncke  et  DHa- 
mere,  continuaient  leurs  machinations,  provoquaient  des 
émeutes  et  tâchaient  de  dominer  les  élections  par  la  terreur. 
Les  Gantois  envoyèrent  une  dépulation  au  duc,  pour  lui 
faire  des  rémonslrances  sur  les  troubles  que  ses  envoyés 
excitaient,  et  le  prier  de  les  éloigner  de  la  ville;  le  duc 
n'accéda  point  à  leur  demande,  mais  les  maintint ,  ce  qui 
les  rendit  plus  turbulents.  Et  quand  éclala  la  conspiration , 
que  Tyncke  et  D'Hamere  avaient  ourdie,  pour  massacrer 
les  principaux  défenseurs  des  droits  de  la  cité ,  les  échevins 
firent  en  vain  des  démarches  pour  que  le  bailli  du  duc 
mit  ses  officiers  en  accusation.  Le  magistrat  de  Gand,  envi- 
sageant ce  refus  comme  un  déni  de  justice ,  traduisit  les 
deux  criminels  devant  l'échevinage  de  la  ville,  qui  les  con- 
damna à  mort  et  les  fit  exécuter  le  12  novembre  1451. 

Le  bailli  et  les  autres  employés  du  duc  quittèrent  de 
nouveau  la  ville ,  et  Philippe  se  prépara  à  la  guerre.  Il  se 
hâta  de  mettre  des  garnisons  dans  les  villes  du  ressort  de 
Gand  :  à  Audenarde,  Alost,  Termonde  et  Gourlrai.  Les 
Gantois,  de  leur  côté ,  fortifièrent  leur  ville,  construisirent 
des  remparts  en  plusieurs  endroits,  le  long  de  l'Escaut, 
dans  le  pays  de  Waes,  et  occupèrent  les  châteaux-forts  qui 
avoisinaient  les  villes  possédées  par  le  duc.  Ils  portèrent 
aussi  à  la  connaissance  des  États  de  Flandre  le  sujet  qui 


(  428  ) 

les  forçait  de  recourir  aux  armes  pour  se  défendre  con- 
tre l'agression  imminente,  et  demandaient  son  interven- 
tion; ils  envoyèrent  des  meseages  pour  demander  appui  et 
secours  aux  états  voisins,  à  la  ville  de  Liège  ,  aux  villes  de 
Hollande  ,  aux  gouvernements  anglais  et  français.  Nous 
insérons  ici  la  lettre  qu'ils  transmirent  au  roi  de  France, 
parce  qu'elle  contient  en  partie  les  causes  de  cette  guerre, 
et  donne  un  tableau  fidèle  du  gouvernement  arbitraire  de 
ce  duc,  que  les  écrivains  serviles,  aux  gages  de  la  cour  de 
Bourgogne,  n'eurent  pas  honte  de  surnommer  le  Bon  (1)  : 

a  Très-excellent,  très-haut  et  très-puissant  prince,  notre 
très-cher  sire  et  souverain  seigneur  nous  nous  recomman- 
dons à  votre  royale  Blajesté ,  tant  et  si  très-humblement  que 
selon  nature  pouvons  et  vous  signifions,  très-excellent,  très- 
hault  et  très-puissant  prince,  notre  très-cher  sire  et  souverain 
seigneur  qui  sur  touts  aultres  devez  être  véritablement  et 
pleinement  informé  du  gouvernement  de  ce  pays  de  Flandres, 
ensemble  de  Testât,  affaires  et  dispositions  de  cette  ville, 
comment  nous  et  les  autres  inhabitans  d'icelui  pays  de  Flan- 
dres, avons  longuement  été  grevés  et  chargés  en  plusieurs 
divers  manières,  à  scavoir  par  vendition  et  prestz  de  baillages 
et  autres  ofiB.ces,  lesquels  pour  ce  ont  été  mis  ez  mains  des 
plus  ofFrans,  sans  avoir  eu  regard  aux  personnes  y  commis 
ne  au  bien  de  justice,  icelle  justice  ausssi  dissoulant  et  mettant 
arrière.  Après  ce,  par  augmentation  de  viels  toulieux  et  insti- 
tution de  nouveaux  et  les  tenir,  faire  cueillir  et  recevoir  outre 
les  termes  consenties  et  accordées  et  contre  la  promesse  et 
scellé  de  notre  très-redoubté  seigneur  et  prince  Monsgr.  le 
due  de  Bourgogne,  comte  de  Flandres,  aussi  par  tailles  que 
au  commencement  les  a  par  doulceur  et  amiableté  obtenus, 
et  depuis  par  subtilité,  fraude  et  malice,  et  enfin  mis  force  de 
les  obtenir  violentement  et  par  rigueur;  avec  ce  par  malvaix 


(1)  Nous  sommes  tentés  de  croire  que  le  surnom  de  ^on  a  été  donné 
par  ironie  à  ce  Philippe  de  Bourgogne,  dont  le  règne  est  inscrit  en 
{ettres  de  sang  dans  l'histoire  de  Liège  et  dans  celle  de  la  Flandre. 


(  429  ) 

gouverneurs  de  \oy  on  cette  dite  ville ,  usaiis  noloirenieat  et 
publiquement  de  voulenté  ,  haine  et  avarice  ,  donnant  et  dis- 
cernant d'une  seule  manière ,  rendre  en  ses  sentences  abusives 
et  contrariant  l'un  l'autre  devant  deux  parties,  dont  l'une 
matière  ne  puet  (juc  l'une  d'icclle  avoir  droit,  vendans  les 
petits  offices  en  cette  dite  ville  ,  et  prenant  arf^^ent  beaucoup 
de  fois  des  deux  ])arties  qui  avoient  à  faire  devers  eulx  à  loj-, 
rapinant  et  pillant  par  l'autorité  de  leur  gouvernement  de 
toutes  parts  ce  qu'ils  ont  peu;  tant  les  biens  de  cette  ville  , 
comme  aultrement,  sans   rien    espagner   et  sans  honte,  ne 
ceulx  qui  étoient  povres  à  l'entrée  de  leur  gouvernement  su- 
bitement ainsi  enrichans,  et  délaissant  les  droits,  privilèges, 
franchises  et  liberté  ou  très-grand  grief  et  cession  de  justice 
de  nous  tous,  et  de  plusieurs  autres  dudit  pays  (de  Flandres),  et 
malvaix  gouvernement  et  griefs,  charges  et  plusieurs  autres, 
desquels   l'en  fera  bien  répétition   en    temps  et  lieu   quant 
besoing  sera ,  par  nous  longuement  endurées  et  souffertes  et 
trouve  moyen  que  tels  malvaix  gouvernemens  aient  été  dc- 
bourse/v  et  privez  dudit  gouvernement,  il  a  pieu  à  notre  dit 
très-redouté  seigneur  et  prince,  eulx  et  leurs  adhérans,  rece- 
voir devers  lui  et  les  faire  nommer  en  une  générale  congréga- 
tion de  ses  trois  Etats  dudit  son  pays  de  Flandres,  mandés 
devers  lui  en  sa  ville  de  Malines  ses  espéciaulx  amis,  et  nous 
remontrer  son  indignation,  et  par  leur  advertissement  ester 
ses  baillis  et  aultres  officiers  ,  nous  délaissant  et  abandonnant 
sans  justice  sept  mois  ou  environ,  et  sans  nous  vouloir  rece- 
voir en  sa  grâce  ne  à  une  excusation,  quelques  humbles  su- 
plications,  prières  et  requestes  que  lui  avons  sur  ce  faites  et 
fait  faire  par  plusieurs  et  diverses  fois,  et  ne  pusmcs  oncques 
aultres  choses  obtenir  que  seulement  lesdits  baillis  et  officiers 
qui  nous  furent  renvoyés  par  provision.  Et  quant  nous  cuisda- 
mes  iceluy  justice  estre  faite  et  administrée  à  ung  chacun 
sans  exception  de  personnes,  ainsi  qu'il  appartcnoit,  et  qu'ils 
par  nous  requis  ils  le  refusèrent  par  charge  limitée  qu'ils  se 
dirent  avoir  de   notre  dit  très-redoubté  seigneur  et  prince 
de   non  procéder  au   préjudice    de    son    gouverneur.  Ainsi 
n'étoit-ce  que  une  fiction  et  umbre  de  justice  pour  contenter 
le  monde,  que  plus  est.  très-excellent,  très-haultet  très-puis- 

29 


(  430  ) 

sant  prince,  notre  très-cher  sire  et  souverain  seigneur,  les 
malvaix.  gouverneurs  et  leurs  adhérons,  ayant  grant  cré- 
dence  devers  notre  très-redoubté  seigneur  et  prince,  ont  de- 
puis tout  ce  envoyé  en  cette  dite  ville  quatre  nialvaix  garçons, 

et  les  telement qu'ils  avoienl  en  propnst  de  y  faire  de  nuit 

ung  crypar  eulx  advisé  pour  tuer  leurs  adversaires ,  et  obtin- 
rent lesdits  nialvaix  gouverneurs  de  notre  dit  très-redoubté 
seigneur  et  prince  que  iceulx  malvaix  garçons  eubrent  ses 
lettres  patentes  sous  son  scel  de  secret,  contenant  saulvegarde 
de  leurs  personnes  ,  et  charge  de  dire   et  proposer  devant 
son  peuple  certaines  choses  au  préjudice  de  notables  person- 
nes de  ceste  diste  ville,  ce  qu'ils  feirent  en  générale  congré- 
gation de  peuple   que  nous  appelions   collace,  et  se  advan- 
cèrent  de  jour  et  de  nuit  en  ce  et  en  plusieurs  autres  choses 
de  émouvuir   ledit  peuple  et  détruire  ceste  dite  ville  se  ils 
eussent  peu  et  sceu  leur  perverse  inique  et  malverse  voulenté 
de  faire  le  mal  dont  dessus  est  touchié.  Les  deux  des  quatre 
furent  prins  et  par  l'absence  desdits  baillis  et  officiers  qui  ne 
vouloyent  entendre  à  l'exécution  d'iceulx,  mais  se  partirent 
pour  ce  de  ceste  ville  (de  Gand),  examinez,  et  depuis  publi- 
quement  recognoissans    leurs    mauvaisetiez   et    dénommant 
ceulx  qui   leurs  en  avoient  donné  la  charge,  décapitez,  et 
lesdits  baillis  et  officiers  se  sont  depuis  continuellement  tenuz 
absens ,  et  notre  très-redoubté  seigneur  et  prince  nous  a  dé- 
laissiez sans  justice  et  de  tout  abandonnez,  auquel  étatsommes 
encore.  Jaçois  ce  que  depuis  nous  avons  envoyé  notables  am- 
bassades des  trois  Etats  de  son  dit  pays  de  Flandres ,  et  aultres 
devers  lui  pour  être  mis  en  sa  grâce  et  en  justice,  à  laquelle 
cause  à  la  fin  de  éviter  les  desroys ,  roberies ,  grilleries,  en- 
sorcemens  de  femmes  et  aultres  malvaises  opérations  deshor- 
données,  qui  sans  crainte  eussent  peu  sourdre  et  multiplier 
en  ceste  dite  ville  ,  veu  que  multitude  de  peuple  ne  puet  être 
conduite  ne  gouvernée  sans  justice  ,  ou  au  moins  sans  crainte. 
Il  nous  a  convenu  par  grande  nécessité  pour  être  en  crainte  et 
gouverné  eslire  chievetaignes,  lesquels  prenans  les  tenues  de 
justice  au  plus  droiturcement  qu'ils  ont  peu  ,  et  selon  leurs 
consciences,  ont  conduit  et  encore  conduisent  ledit  peuple,  et 
ont  fait  et  font  toutes  manières  d'exécutions  corporelles  et 


(  431  ) 

autres.  ¥a  combien  que  toutes  extorsions,  forces,  violences, 
griefs  et  exactions,  nous  avons  patiament  souffertes,  cuidans 
par  ce  convaincre,  il  a  enfin  pieu  à  notre  dit  très-redoubté 
seijl^neur  et  prince,  pour  nous  totalement  détruire,  faire  pu- 
blier ses  mandemcMis  de  guerre,  assembler  son  peuple...  mettre 
garnison  en  plusieurs  de  ses  villes  en  son  dit  pars  de  Flandres 
et  clore  les  passages  pareaue,  par  lesquels  nous  sont  accoutu- 
més estre  menés  bleds  et  aultres  vivres ,  et  ainsi  sommes  en 
plaine  guerre  et  nostre  dit  très-redoubté  seigneur  et  prince , 
nous  y)ar  lesdits  malvaix  gouverneurs  et  leurs  adliérans,  la- 
quelle guerre  jncoit  ce  quelle  nous  est  moult  dure  griefve 
et  desplaisant,  plus  que  quelconque  aultres  que  pourviesmet 
avoir  comme  raison  est.  Car  tous  vrajs  naturelz  sujets  doivens 
sur  toutes  choses  bien  comprendre  et  doloir  la  rigueur  et  in- 
dignation de  leur  naturel  prince,  nous  avons  entention,  par 
l'aide  et  grâce  de  Dieu,  soutenir,  puisque  par  nécessite  et  les 
raisonsdessus  touchées,  le  nous  convient  faire  à  la  conservation 
de  notre  dit  souverain  seigneur,  estes  gardien  et  conservateur 
au  mieux  que  pour  vous,  et  nous  à  ce  appliquer  de  corps, 
chevance  et  de  tout  notre  pouvoir,  en  vous  suppliant,  très- 
excellent,  très-hault  et  puissant  prince,  notre  très-cher  sire 
et  souverain  seigneur  en  toute  humilité,  que  de  votre  très- 
noble  et  bénigne  grâce  vous  plaise  en  ceste  matière  que  vous 
signiflfions,  ainsy  que  naturellement  tenus  et  obligez  y  som- 
mes, et  laquelle  vous  eussions  despiecha  signiffiée,  se  n'eussions 
épn reigné  de  faire  complainte  de  notre  dit  très-redoublé  sei- 
gneur et  prince,  et  espère  qu'il  se  deust  avoir  ravist  de  nous 
conduire  en  justice  et  recevoir  en  sa  grâce  remédier  gardant 
votre  haulteur  et  souveraineté,  ainsi  que  à  vous  et  votre  très- 
noble  conseil  semblera  pertinent  et  expédient,  et  nous  par  ce 
porteur  sur  ce  signifier  votre  très-noble  responsce,  et  icelui 
porteur  brief  expédier,  veu  que  le  cas  requiert  célérité  ,  afin 
que  nous  sceu  par  icelle  votre  réponce  ce  qu'il  vous  en  plaira 
faire,  nous  puissions  conduire  et  ordonner  selon  que  besoin 
nous  sera.  Au  surplus,  très-excellent,  très-hault,  très-puissant 
prince,  nostre  très-cher  sire  et  souverain  seigneur,  vous  ren- 
drons très-humblement  de  la  bonne,  franche  amour  à  nous 
remonstrée  par  ceux  de  votre  cité  de  Tournay  en  cditz  par 


(  432  ) 

eulx  publiez,  à  notre  proufit,  contenant  défence  que  nul  de 
votre  dit  cité,  né  du  Tournesis,  ne  nous  fasse  griefs  ni  guerre 
en  aulcune  manière,  pareillement  de  leurs  très-amiables  let- 
tres depuis  à  nous  envoyées,  et  se  chose  vous  plaist  nous  com- 
mander, nous  nous  offrons  prêts  et  appeiller  de  l'accomplir  de 
bon  loyal  cuer  à  notre  pouvoir,  ainsy  que  vrays  sujets  doivent 
et  sont  tenus  de  faire.  Ce  le  Saint-Esprit  qui  votre  très-excel- 
lente, très-haute  et  très-noble  personne  ait  en  sa  sainte  garde, 
et  vousdoint  bonne,  victorieuse  vie  et  longue,  et  accomplis- 
sement de  tous  vos  bons  et  très-nobles  désirs.  Écript  en  la 
ville  de  Gand,  le  S-i'""  jour  du  moys  de  may ,  l'an  52. 
Soussigné  vos  très-humbles  et  obéissans  sujets  les  chévetaines, 
échevins  des  deux  bans  ,  deux  doyens-conseillers  et  toute  la 
communauté  de  la  ville  de  Gand.  » 

Nous  avons  voulu  donner  dans  cet  article  la  mesure  du 
régime  arbitraire  d'un  prince  qui ,  étranger  à  nos  mœurs, 
à  notre  esprit  d'indépendance,  à  tout  ce  qui  nous  était 
cher,  inspira  aux  Flamands  une  si  juste  et  profonde  aver- 
sion pour  cette  domination  des  ducs  de  Bourgogne,  qui 
détruisit  chez  nous  privilèges,  libertés  publiques  et  lan- 
gage ,  qui  faussa  le  caractère  national ,  et  nous  rendit  bâ- 
tards au  milieu  d'un  pays  où  les  populations  avaient  tou- 
jours conservé  leur  cachet  d'originalité. 

Les  élections  communales  de  Gand  ,  de  1449  sont,  pour 
ainsi  dire,  le  premier  acte  de  ce  drame  sanglant  qui  ne 
finit  qu'à  la  mort  d'Hugonet  et  d'Humbercourt,  personni- 
fication véritable  du  régime  du  bon  plaisir  des  ducs  de 
Bourgogne. 

Ph.  Blommaert. 


(  433  ) 


SUR    LE    PEINTRE  VERIIAGIIEN. 


—'-■BQi-)^itOts~~ 


Une  négligence,  qu'on  pourrait  peut-être  qualifier 
d'impardonnable,  a  lait  oublier  un  peintre,  dont  notre 
patrie  peut  s'enorgueillir  à  juste  titre;  mais  cela  s'ex- 
pli(jue  facilement  :  Verhaghen  florissait  malheureuse- 
ment à  une  époque  où  tout  ce  qui  était  national  était 
reprouvé  ;  et  notre  vieille  Ecole  flamande  ,  au  coloris 
brillant  et  suave,  fut  oubliée  pour  la  couleur  pâle  de 
l'école  française  de  David;  nos  gracieuses  compositions 
durent  alors  céder  le  pas  aux  dessins  roides  et  froids  du 
protégé  de  l'Empereur.  Tout  ce  qui  n'était  pas  de  David, 
tout  ce  qui  n'était  pas  grec  ou  romain  ,  paraissait  à 
peine  digne  d'attention. 

Verhaghen,  dont  le  pinceau  original  et  fécond  ,  s'était 
acquis  une  réputation  méritée  sous  le  gouvernement  autri- 
chien, fut  entièrement  négligé  après  l'invasion  française.  Ce- 
lui qui  aurait  admiré  Verhaghen,  lui, si  partisan  de  l'Ecole 
flamande,  aurait  été  digne  de  figurer  parmi  les  Pékins  <^.\. 
les  têtes  yothiques;  car  son  genre  facile  et  léger  ne  pou- 
vait imiter  la  raideur  exigée  par  la  mode,  et  son  pinceau 
gothique  rappelait  trop  notre  vieille  École.  Verhaghen 
était  tellement  négligé,  que  sa  mort  même  passa  inaper- 


(  434  ) 

çue.  Je  lâcherai  de  relever  la  mémoire  de  cel  artiste 
distingué;  peut-être  lui  assignera-l-on  une  place  honora- 
ble dans  la  galerie  de  nos  peintres. 

Pierre-Joseph  Verhaghen  naquit  à  Aerschot,  le  19  mars 
1728.  Son  père  Guillaume,  qui  était  receveur  de  cette 
ville,  lui  donna  une  éducation,  assez  soignée  pour  cette 
époque.  Après  avoir  appris  les  premiers  éléments  de  la 
langue  latine,  il  quitta  son  école  à  làge  de  12  ans,  et 
s'adonna  à  la  peinture  par  un  hasard  singulier.  Un  pein- 
tre, nommé  Van  den  Kerkhoven,  ayant  été  appelé  à  Aer- 
schot pour  y  nettoyer  les  tableaux  de  l'église  de  Notre-Dame, 
remarqua  le  jeune  Verhaghen,  qui  suivjiit  constamment 
ses  travaux  avec  une  attention  toute  particulière.  Après 
avoir  examiné  quelques-uns  des  dessins  que  Verhaghen 
avait  exécutés  sans  guide  ni  conseil,  Van  den  Kerkhoven 
crut  qu'il  pourrait  en  faire  un  excellent  artiste,  propre  à 
nettoyer  les  tableaux.  Il  lui  donna  d'abord  quelques  des- 
sins à  copier,  et  se  l'attacha  ensuite  comme  élève  ou  plutôt 
comme  apprenti.  Verhaghen  suivit  son  maître  à  Ihôpital 
d'Aerschot,  où  il  nettoya  quelques  tableaux  ;  de  là  il  se 
rendit  au  couvent  de  Parc-les-Dames,  ensuite  à  Thestel  et 
à  Everbode,  pour  y  peindre  une  maison,  appartenant  à 
l'abbaje.  Revenu  à  Aerschot,  toujours  en  compagnie  de 
son  maître,  il  le  quitta  finalement,  parce  que  les  affaires 
de  Van  den  Kerkhoven  le  conduisaient  trop  loin. 

Les  progrès  de  Verhaghen ,  firent  songer  ses  parents  à 
l'envoyer  à  l'Académie  d'Anvers,  alors  dirigée  par  Beschey. 
Il  s'y  rendit  effectivement  le  21  octobre,  1741. 

Après  avoir  quitté  cette  école,  il  se  fixa  à  Louvain,  où 
il  épousa,  le  28  janvier  1753,  une  demoiselle  de  cette  ville, 
nommée  Jeanne  Hensmans,  qui  le  rendit  père  de  sept 
enfants,  dont  quatre  garçons. 

Travailleur  infatigable,  Verhaghen  produisit  une  masse 
de  tableaux,  qui  se  distinguaientpar  un  coloris  particulier. 


(  435  ) 

Sa  répulation  parvint  enfin  jusqu'au  prince  Charles  de 
Lorraine,  qui  le  décora  du  lilrc  de  son  peintre  ordinaire, 
le  13  mai  1771.  Dès  lors  sa  fortune  parut  assurée.  L'impéra- 
trice Marie-Thérèse,  qui  savait  si  bien  encourager  et  pro- 
téger les  arls,  résolut  de  le  faire  voyager  aux  frais  du 
gouvernement. 

Il  partit  donc  pour  l'Italie,  avec  sou  fils  aîné,  le  16 
mai  1771;  il  visita  la  France,  la  Sardaigne,  toute lllalie 
et  les  pays  soumis  à  la  domination  de  f impératrice.  Ver- 
haghen  avait  laissé  de  son  voyage  une  description  exacte 
et  intéressante,  rédigée  par  son  fils;  mais  mallieureusement 
elle  est  perdue.  Tout  ce  que  j'en  connais  m'a  été  commu- 
niqué par  son  petit-fils,  M.  Quirini,  de  Louvain,  d'après 
les  renseignements  tirés  des  lettres  que  notre  peintre 
écrivit  à  son  épouse 

Arrivé  à  Paris,  il  y  vit  les  principaux  artistes  de  celte 
capitale,  entr'autres  Pierre,  premier  peintre  du  roi;  Well, 
son  premier  graveur  ,  et  Chocin,  son  premier  dessinateur 
et  architecte.  Ces  artistes  l'engagèrent  avec  instance  à 
peindre  l'un  ou  l'autre  sujet;  mais  Verhaghen  s'y  refusa, 
alléguant  que  fimpéralrice  ne  l'avait  pas  fait  voyager 
pour  rester  en  France.  11  se  rendit  donc  directement  à 
Lyon,  et  le  15  juin  il  écrivait  à  sa  femme  :  «  Qu'il  avait  vu 
sur  la  route  de  très -beaux  paysages;  qu'il  n'en  avait 
jamais  rencontré  de  semblables,  ni  sur  les  tableaux,  ni 
sur  les  estampes;  qu'il  avait  trouvé  dans  la  voilure  un 
monsieur  du  Canada,  resté  sauvage  jusqu'à  l'âge  de  qua- 
torze ans,  et  devenu  maintenant  l'homme  le  plus  poli 
du  monde.  »  Il  se  vantait  surtout  des  politesses  et  des 
prévenances  dont  il  avait  été  l'objet  pendant  toute  la 
route. 

Ayant  quitté  Lyon  le  18  juin,  il  commença  deux  jours 
après,  à  parcourir  les  Alpes,  dont  il  donne  une  description 
simple  et  naïve.  Enfin,  il  arriva  à  Rome  le  T'aoùl  et  y  reçut 


(  436  ) 

(le  Denoot  la  lettre  suivante  (l)  :  Ik  heb  bei/do  Ul.  hrieven, 
deti  eersten  uyt  Milaenen  en  den  tweeden  uyt  Bologne ,  wel 
ontfangen ,  uyt  welktrs  inhout  d'heer  Méan  een  înemorie 
heeft  ojjgesteld  en  behandigt  aenZ.  U.  denprins  Stahren- 
berg  ,  die  my  [cdsoo  JJl.  mentie  maekt  ue.  eenige  historien 
voor  te  stelle?i  om  voor  de  M.  te  schilderen  en  welkers  com- 
positie  ghy  in  Italie  synde  soud  konnen  studeren)  belast 
heeft  hem  sommige  op  te  geven.  Il  a  donc  cherché  un 
sujet  dans  la  mythologie,  le  Testament  et  l'histoire  an- 
cienne, et  il  s'est  finalement  arrêté  à  Joas ,  mis  sur  le 
trône  en  présence  d'Athalie,  ou  bien  au  sacrifice  d'I- 
phigénie.  Denoot  engage  Verhaghen  à  bien  étudier  et 
à  se  pénétrer  des  chefs-d'œuvre  qu'il  rencontrera  dans 
l'Italie;  et,  afin  qu'il  ne  paraisse  pas  être  oisif,  il  lui 
conseille  de  peindre  quelque  petit  sujet  ,  comme  une 
Madone  avec  S'-Jean  et  S'^-Thérèse,  ou  quelqu'autre 
composition  de  ce  genre. 

Il  peignit  effectivement  un  Christ  sur  la  croix,  tour- 
menté par  les  douleurs;  cette  petite  composition  fit  déjà 
du  bruit  dans  le  monde  artistique  de  Rome;  mais  ce  fut 
surtout  son  Christ  à  Emaûs  qui  obtint  un  véritable  suc- 
cès :  les  Italiens  ne  voulaient  ou  plutôt  ne  pouvaient 
croire  que  ce  tableau  fut  de  Verhaghen  :  ils  durent  s'en 
assurer  de  leurs  propres  yeux.  Rome  fut  tellement  charmée 
de  son  coloris,  que  sa  réputation  parvint  jusqu'au  pape 
Clément  XIV,  qui  voulut  connaître  notre  peintre.  Après 
l'audience,  le  saint-père  lui  accorda  indulgence  plénière, 
à  l'heure  de  la  mort,  pour  lui,  ses  parents  et  alliés  jus- 


(1)  Traduction:  J'ai  reçu  vos  deux  lettres,  l'une  datée  de  Milan  ^ 
l'autre  de  Bologne.  M.  Méan  a  rédigé  un  mémoire ,  d'après  leur  con- 
tenu .  et  l'a  envoyé  à  S.  A.  le  prince  Stahrenberg .  qui  m'a  chargé 
de  vous  indiquer  quelques  sujets.  De  cette  manière,  vons  serez  à  même 
de  peindre  pour  S.  M.  l'un  et  l'autre  sujet  historique,  dont  vous  pourrez 
étudier  les  modèles  en  Italie. 


(  437  ) 

qu'au  troisième  degré  et  pour  trente  autres  personnes  à 
son  choix ,  et  il  lui  donna  en  outre  deu\  médailles 
en  or. 

Les  églises  de  S'-Norbert  et  des  Récollels  belges,  à 
Rome,  voulurent  posséder  un  de  ses  tableaux;  la  pre- 
mière eut  le  Christ  à  Emaûs,  et  pour  la  seconde  il  exé- 
cuta  un  S'^-Pierre, 

Muni  de  bonnes  lettres  de  recommandation,  il  vit  à 
Rome  et  dans  ses  environs  tout  ce  qu'il  y  avait  de  plus 
remarquable  et  de  plus  curieux.  Il  y  lit  quelques  acquisi- 
tions en  tableaux,  ligures,  estampes,  dessins  d'architec- 
ture, reliques,  etc.  Quelquefois  en  parlant  d'un  tableau 
qu'il  a  vu,  il  se  hasarde  dans  les  lettres,  qu'il  écrivait  à  sa 
femme,  de  donner  ses  opinions  sur  l'École  italienne.  C'est 
ainsi  que  j'ai  remarqué  une  lettre  du  11  juillet  1772, 
dans  laquelle  il  dit  :  Hoc  langer  hoc  meer  verwnnder  ik 
my  over  die  schoone  en  corecte  sckilderinge  van  de  ita- 
liaensche  meesters ,  bezonder  Raphaël  is  wonder  aenge- 
nacvi.  Hadden  se  de  kloeke  ordoiinantie  gehad  van  onzen 
Rubhens,  dat  had  loonderhjk geweest'^  ieder  figuer  is  tvon-- 
derlyk  geteekend  en  ook  zoo  schoon  en  corekl geschildert; 

ik  zal  't  mondelinkx  heter  expliceren (1).  Un  peu  plus 

loin  dans  la  même  lettre ,  il  parle  de  l'impression  que  son 
tableau  a  produit  à  Rome  :  Mijn  stuk  is  volmackt  en  bevalt 
ieder  zeer  iconderlyk;  't  is  nog  tocl  dat  ik  het  nu  maerlaten 
toonen  heh,  nu  ik  o/j  het  vertrekken  staen  (2).  Car,  con- 


(1)  Traduction:  Plus  j'examine  les  tableaux,  pins  j'admire  la  manière 
correcte  et  belle  des  peintres  italiens.  C'est  surtout  Raphaël  (jui  est  admi- 
rable. Si  ces  maitres  avaient  produit  des  compositions  aussi  vigoureuses 
que  celles  de  notre  Rubens ,  leurs  tableaux  seraient  atlmirables  ;  le 
dessin  de  chaque  ligurc  est  supérieurement  bien  soigne  :  je  l'cxplicpierai 
mieux  de  vive  voix. 

(2)  Mon  œuvre  est  achevée  et  plait  singulièrement  à  chacun  :  c'est 
encore  bien  que  je  ne  l'ai  exposée  que  maintenant  ,  au  moment  de  mou 
départ. 


(  438  ) 

tinue-l-il,  si  les  Italiens  m'avaient  connu  plutôt,  j'aurais 
eu  trop  de  commandes;  »  et  il  n'aurait  pas  pu  songer 
à  son  retour,  que  sa  femme  pressait  ardemment.  Car 
chaque  lettre  qu'elle  lui  envoyait  était  écrite  dans  ce  but; 
et  Verhaghen,  de  son  côté,  faisait  toujours  des  promesses 
qu'il  ne  tenait  pas,  parce  qu'il  lui  était  impossible  de 
quitter  ce  pays  enchanté.  Pour  ne  pas  trop  la  mécon- 
tenter, il  lui  donne  de  temps  à  autre  une  description 
naïve  de  tout  ce  qu'il  rencontre,  et  il  n'oublie  pas  de  lui 
rapporter  ces  cérémonies  et  ces  spectacles  pompeux,  qu'on 
ne  rencontre  que  sous  le  beau  ciel  de  l'Italie. 

Après  avoir  été  reçu  de  nouveau  par  le  pape,  qui  lui 
accorda  des  indulgences  plénières,  il  quitta  enfin  Rome, 
le  24  avril  1773.  Ensuite  il  visita  toutes  les  autres  villes 
de  l'Italie,  et  arriva  finalement  à  Vienne,  où  l'impératrice 
le  reçut.  Il  lui  présenta  son  Christ  à  Emaûs ,  et  un  autre 
tableau,  représentant  un  trait  de  la  vie  de  S^® -Thérèse, 
patrone  de  l'impératrice;  elle  le  trouva  si  beau,  qu'elle 
le  fit  mettre  dans  sa  chambre  à  coucher.  Son  Christ  fut 
placé  dans  la  chapelle  du  palais,  et  un  troisième  tableau 
figura  dans  la  galerie  impériale,  où  son  S'-Etienne  brillait 
déjà  avec  tant  d'éclat. 

L'impératrice  le  nomma  son  premier  peintre  et  lui 
donna  une  tabatière  en  or,  avec  le  portrait  en  émail  de 
Marie-Christine.  Elle  voulut  le  retenir  à  sa  cour,  et  lui  pro- 
mit même  d'y  faire  venir  toute  sa  famille  ;  mais  il  aima 
mieux  retourner  dans  sa  patrie. 

Il  arriva  finalement  à  Louvain,  le  24  octobre  1773. 
Tant  de  monde  alla  à  sa  rencontre,  qu'il  n'y  eut  plus 
moyen  de  trouver  en  ville,  ni  chevaux,  ni  voitures.  Un 
de  ses  amis,  le  peintre  Van  Dorne ,  composa  un  poème  à 
l'occasion  de  son  retour. 

Sa  nouvelle  fortune  ne  fil  qu'augmenter  son  courage;  il 
produisit  encore  une  masse  de  tableaux.  Enfin,  il  mourut 


(  439  ) 

à  Louvain  le  3  avril  1811,  et  fut  inhumé  à  Willzel. 
Il  élail  honnête  homme,  artiste  vertueux,  ami  des 
mœurs,  bon  chrétien,  simple  et  naïf  dans  sa  manière  de 
■vivre,  et,  ce  qui  était  rare  pour  un  artiste  de  cette  époque, 
il  était-trés-inslruil. 


Je  me  permettrai  maintenant  d'ajouter  quelques  obser- 
vations sur  les  tableaux  de  Verhaghen  et  sur  son  faire. 

Ses  premiers  essais,  quoique  très-faibles,  commencent 
déjà  à  se  distinguer  par  un  coloris  tout  particulier  , 
dont  lui  seul  connaissait  le  secret;  car  tous  ses  imita- 
teurs ont  élé  malheureux  sous  ce  rapport.  A  côté  d'une 
couleur  foncée,  il  aimait  à  placer  son  blanc,  qu'il  savait 
rendre  d'une  manière  si  vive  et  si  éclatante,  que  l'on  a 
cru  long-lemps  que  Verhaghen  possédait  un  secret  parti- 
culitr  pour  préparer  cette  couleur;  mais  son  seul  secret 
consistait  à  employer  son  blanc  à  propos. 

De  même  que  Rubens  aimait  à  jeter  le  rouge  avec  pro- 
fusion sur  ses  toiles,  de  même  Verhaghen  y  répandait  lar- 
gement l'oulre-mer.  Son  coloris  devint  encore  plus  bril- 
lant et  plus  clair,  lorsqu'il  fut  de  retour  de  l'Italie.  11  sut 
alors  mêler  à  la  couleur  de  chair  une  teinte  bleuâtre,  qui 
donnait  à  ses  figures  un  air  de  santé  et  de  fraîcheur,  qu'il 
aurait  élé  difficile  d'imiter  autrement.  Pour  ce  qui  regarde 
les  draperies,  les  broderies,  les  habits  pontificaux,  les 
tapis  et  tous  les  métaux  en  général,  il  savait  peindre  ces 
objets  avec  tant  de  naturel  qu'il  serait  impossible  de  l'imi- 
ter. Sous  ce  rapport,  il  pourrait  être  d'une  grande  utilité 
à  nos  jeunes  artistes. 

En  général ,  son  coloris  était  toujours  poussé  au  bleu 
clair,  et  je  ne  me  ressouviens  que  de  quelques  rares  ta- 
bleaux dans  lesquels  il  a  employé  le  rouge;  le  jaune  ne  fut 
appliqué  qu'aux  métaux.  Les  ciels  de  ses  tableaux  étaient 


(  440  ) 

le  plus  souvent  lourds,  compacts  et  poussés  au  gris;  car 
s'il  y  avait  mis  du  bleu,  les  couleurs  bleuâtres  de  ses  com- 
positions n'auraient  pas  produit  d'effet. 

Ses  compositions  sont  en  général  bien  groupées,  les 
plans  bien  distribués;  son  pinceau  léger  et  flexibe  animait 
toutes  ses  figures,  mais  malheureusement  les  têtes  ne  di- 
saient jamais  rien  :  on  n'y  trouve  aucune  expression  (1). 
On  peut  seulement  deviner  les  passions  de  ses  figures  par 
la  pose  qu'il  leur  a  donnée,  et  surtout  par  les  flexions  im- 
primées aux  curieux,  qu'il  aimait  toujours  à  placer  sur 
ses  toiles  depuis  son  retour  de  l'Italie.  Ses  têtes  de  femmes 
avaient  toutes  un  air  de  famille  et  de  consanguinité  qui 
finit  par  ennuyer;  mais  il  n'en  était  pas  de  même  de  celles 
de  ses  vieillards ,  il  savait  leur  donner  une  noblesse  et 
une  dignité  que  peu  d'artistes  parvenaient  à  obtenir. 

La  fécondité  du  pinceau  de  Verhaghen  lui  faisait 
négliger  très  -  souvent  le  dessin  et  le  fini  de  ses  ta- 
bleaux. 

Au  reste,  je  pense  que  le  faire  de  Verhaghen  n'est  pas  à 
dédaigner  ;  il  a  suivi  dans  son  coloris  une  route  toute  dif- 
férente de  celle  de  ses  devanciers ,  et  si  on  ne  trouve  pas 
dans  ses  compositions  un  haut  degré  de  perfection,  on  ne 
contestera  pas  du  moins  qu'elles  ne  soient  remplies  de 
génie.  D'ailleurs  Verhaghen  était  le  seul  peintre  d'histoire 
qui,  à  la  fin  du  siècle  passé,  soutint  la  vieille  réputation 
delÉcole  flamande.  «  La  patrie  des  VanDyck,  des  Kubens 
et  des  Crayer,  dit  le  voyageur  dans  les  Pays-Bas,  en  1782, 
peut  à  peine  nommer  deux  peintres  d'histoire,  qui  puis- 
sent espérer  d'être  comptés  parmis  les  grands  hommes  qui 
ont  rendu  l'École  flamande  une  des  plus  célèbres  de  l'Eu- 


(1)  Verhaghen  était  aussi  uu  malheureux  peintre  en  portraits;  il  ne 
savaifc'jamais  saisir  nne  ph}sionomic. 


{  441  ) 

rope.  L'un  de  ces  peintres  se  nomme  Verhaghen  (1).  »  Ne 
serait-il  donc  pas  juste  d'assigner  à  Verhaghen  une  place 
parmi  les  peintres  de  notre  brillante  Ecole  flamande  ? 

Pour  faire  connaître  la  fécondité  de  Verhaghen  ,  je 
me  permettrai  de  donner  ici ,  d'après  le  poème  de  Van- 
dorne,  une  liste  des  tableaux  qu'il  peignit  avant  son  dé- 
part pour  l'Italie  : 

Au  collège  de  Berg  à  Louvain,  la  Naissance  du  Christ, 
l'Adoration  des  Blages,  l'offrande  de  Siméon,  la  Samari- 
taine ,  le  Christ  nourissant  5000  personnes ,  le  Christ  avec 
S*-Pierre  près  de  la  mer,  le  Christ  sur  le  mont  Thabor, 
la  Cène,  la  Résurrection,  l'apparition  à  la  Madelaine,  la 
descente  du  S'-Esprit;  dans  l'église  de  Tourine,  la  Madelaine 
dans  la  maison  du  Pharisien;  au  petit  collège  à  Louvain, 
l'offrande  disaac  ;  dans  l'église  des  Sœurs-Noires  à  Lou- 
vain.  l'Adoration  des  Mages;  au  collège  Baius  à  Louvain, 
l'Assomption  et  une  autre  au  collège  S'-Michel;  chez 
M.  Franzen,  une  allégorie  sur  l'hiver;  au  collège  Pels,  un 
tableau  de  fleurs  avec  le  Christ  et  S'-Jean;  au  collège 
Viglius,  la  séparation  d'Abraham  et  de  Loth,  la  mort 
d'Abel;  à  Etegem  dans  l'église,  la  Naissance  du  Christ,  les 
Liens  de  S'-Pierre:  dans  l'abbaye  de  Parc,  deux  épisodes 
tirés  de  la  vie  de  S'-Norbert  (2);  dans  l'église  de  Lenninck , 
le  Christ  à  Emaûs,  S'-Pierre  recevant  les  clefs;  dans  l'église 
de  S'-Quintin  à  Louvain,  un  purgatoire,  qui  appartient 
à  ses  premiers  ouvrages,  deux  tableaux  d'après  Crayer 
représentant  le  Calvaire  (3)  et  le  martyre  de  S'-Quintin , 
le  Christ  au  jardin  des  Oliviers  (4)  ;  dans  l'église  de  Lan- 


(1)  Le  Voyageur  ,  tom.  I.  ,  pag.  163. 

(2)  Après  son  retour  de  l'Italie  ,  il  a  peint  une  foule  de  tableaux  pour 
cette  abbaye. 

(3)  Il  se  trouve  aujourd'hui  dans  l'église  des  Béguines  à  Louvain. 

(4)  Dans  la  suite  il  y  ajouta  cinq  autres  tableaux  .  dont  les  sujets  sont 
tirés  delà  Passion. 


(  442  ) 

den,  un  Calvaire,  qui  est  un  de  ses  meilleurs  tableaux; 
chez  les  Frères-Mineurs,  à  Diesl,  huit  tableaux,  représen- 
tant des  saints  de  cet  ordre;  à  Louvain  chez  les  Frères- 
Mineurs.  1 3  tableaux  dans  le  même  genre,  et  un  Christ  sur 
la  croix,  et  dans  leur  église,  la  mort  de  S'-François  et  celle 
de  S'-Antoine;  à  Terbank,  près  de  Louvain,  un  Christ  et 
un  portrait  de  la  supérieure;  dans  l'église  d'Aerschot,  le 
lavement  des  pieds;  au  collège  Vandael,  11  tableaux,  tirés 
de  la  vie  de  S'-Pierre,  Pierre  conduit  par  André  chez  le 
Christ,  sa  vocation  ,  Pierre  chez  le  Christ ,  près  de  la  mer, 
reçoit  les  cle!'s,  coupe  l'oreille  de  Malchus,  renie  le  Christ, 
sa  pénitence,  la  Pèche,  la  mort  d'Ananie  ,  la  guérison  des 
boiteux,  son  martyre;  chez  M.  De  Bruyn  à  Louvain,  une 
Assomption;  dans  l'église  des  Dominicains  à  Louvain,  une 
Annonciation,  la  Visitation,  la  Naissance  du  Christ ,  l'of- 
frande de  Siméon,  nn  Calvaire,  une  Ascension,  une  Assomp- 
tion; au  collège  hollandais,  à  Louvain,  la  Présentation, 
l'Annonciation,  la  Visitation,  la  Vierge  se  reposant  en 
chemin  avec  Jésus  et  Joseph,  l'Assomption. 

Dans  l'église  de  S'-Pierre  à  Louvain,  cinq  tableaux, 
dont  les  sujets  sont  tirés  de  la  vie  de  S'<^-31arguerite;  dans 
la  chapelle  de  S«-Job  à  Louvain,  un  S'-Job  (1);  dans  l'église 


(1)  Voici  ce  que  le  Voyage-ir  des  Pays-Bas  en  dit  :  «  Dans  la  chapelle 
qu'on  nomme  ici  S'-Job,  j'ai  vu  avec  beaucoup  de  plaisir  un  tableau  de 
Verhaghen  :  il  est  composé  avec  esprit  :  il  représente  Job,  assis  sur  une 
pierre,  au  milieu  d'un  fumier;  rien  de  i)lus  naturel  que  l'attitude  du 
saint  :  le  peintre  n'a  pas  chargé  sa  composition:  elle  est  simple  :  on  n'y 
voit  point,  comme  le  font  ordinairement  ceux  qui  traitent  ce  sujet ,  une 
foule  d'esprits  infernaux  acharnés  à  tourmenter  Job  :  un  seul  de  ces  es- 
prits parait  dans  les  airs.  On  regarde  ici  ce  tableau  comme  un  des  meil- 
leurs qu'ait  fait  Verhaghen.  L'on  m'a  dit  que  M.  Josse,  de  Bruxelles,  en 
possédait  deux  du  même  maître  qui  représentaient  la  continence  de 
Scipion  et  celle  d'Alexandre  ;  que  M.  d'Aguilar,  pensionnaire  des  États, 
possédait  aussi  un  beau  tableau  de  Verhaghen,  qui  représentait  Abraham 
renvoyant  Agar ,  et  que    ce  peintre  considérait  ce  morceau  comme 


(  443  ) 

des  Récollels  à  Halle,  un  S»-François  et  un  S'-Antuine; 
chez  le  consellierVan  den  Brandon,  à  Bruxelles,  un  Christ 
à  Emaûs;  le  même  sujet  se  trouve  dans  l'église  de  ïurn- 
hout;  dans  l'église  de  Cosen,  un  Calvaire:  à  Auwaert,  une 
Trinité;  dans  l'abbaye  d'Averbode,  diflérenles  toiles  très- 
grandes  et  qui  sont  très-eslimées;  les  romj)ositions  en  sont 
pleines  de  vie,  mais  les  ciels  méritent  {jueUjucs  rej)roches: 
à  Gand  chez  les  Dominicains,  l'offrande  de  Siméon;  à 
Hinsbergen,  la  Trinité  couronnant  la  Vierge  ;  dans  la  ga- 
lerie de  Vienne,  un  S'-Etienne  qu'on  fait  passer  comme  le 
plus  remarquable  de  ses  tableaux,  et  pour  lequel  l'impé- 
ratrice lui  envoya  cinq  médailles  en  or,  en  témoignage  de 
sa  satisfaction;  la  continence  de  Scipion,  envoyé  à  l'im- 
pératrice à  Vienne:  les  filles  de  Loth,  dont  je  viens  de 
parler  dans  la  note;  Virgile,  lisant  ses  poésies  devant  Au- 
guste, fut  envoyé  en  Angleterre;  une  3ladelaine  aux  pieds 
du  Christ  dans  l'abbaye  de  S'^-Gerlrude  à  Louvain.  Tous 
ces  tableaux,  que  j'ai  donnés  à  peu  près  dans  l'ordre  dans 
lequel  ils  furent  peints,  ont  été  achevés  depuis  1754  jus- 
qu'en 1771. 

Depuis  son  retour  de  l'Italie,  il  peignit  une  foule  de  ta- 
bleaux qu'il  serait  presqu'impossible  d'énumérer  ;  on  en 
voit  un  dans  l'église  de  S'-Rombaut  à  Malines,  plusieurs 
autres  dans  l'église  des  Frères-Celliles  à  Louvain,  où  on 
remarquera  surtout  le  Christ,  expliquant  la  loi  nouvelle, 
qui  est  d'un  effet  surprenant.  Chez  son  fils,  M.  le  curé 
Verhaghen,  à  VVakkerzeel ,  on  admire  un  Dieu  le  Père, 
dont  les  habits  pontificaux  sont  un  véritable  chef-d'œuvre. 


un  des  meilleurs  qu'il  eut  fait  :  quand  je  retournerai  à  Bruxelles,  j'irai 
voir  s'il  mérite  l'éloge  qu'il  en  fait.  Je  verrai  aussi  Loth  et  ses  filles  qui  est 
dans  riiôtel  d'Arenberg ,  dont  plusieurs  personnes  ici  m"ont  parlé  avan- 
tageusement (  le  Voyageur ,  tom.  II ,  pag.  287  ).  » 


(  444  ) 


Verhaghen  eut  un  frère,  nommé  Jean  Joseph,  et  qu'on 
désigne  vulgairement  par  le  nom  de  Pottekens-Verhaghen. 
Il  s'attacha  surtout  à  peindre  des  pots  et  autres  ustensils 
de  ménage,  qu'il  savait  rendre  avec  une  vérité  frappante; 
il  avait  aussi  un  talent  supérieur  pour  peindre  les  métaux. 
Quelquefois  il  se  hasardait  à  peindre  un  intérieur  d'une 
maison  villageoise  avec  quelques  figures,  d'une  assez  bonne 
exécution  ;  mais  les  pots  étaient  la  principale  partie  de  son 
tableau.  On  en  trouve  deux  ou  trois  d'une  exécution  supé- 
rieure chez  M.  l'avocat  Quirini ,  à  Louvain  ,  et  quelques- 
uns,  mais  moins  bons,  dans  les  serres  de  M.  Plaschart  à 
Wespelaer.  On  en  rencontre  très-souvent  des  copies,  et  il 
faut  être  sur  ses  gardes  pour  ne  pas  se  laisser  tromper.  Il 
en  est  de  même  des  tableaux  de  son  frère. 

G.  PiOT,  Avocat. 


{  445  ) 


toatcant 

(note  pour  servir  a  bne  biographie  toursaisienne  ). 


Nicolas-Philippe  Watcanl,  chanoine  de  Tournai,  vivait 
au  commencement  du  XVIIP  siècle.  C'était  un  homme 
très-leltré  ;  il  entretenait  des  relations  avec  plusieurs  éru- 
dits  de  l'époque,  entre  autres  avec  Jacques  Lenfant,  Ba- 
luze,  le  P,  Lelong,  etc.  Sa  bibliothèque  était  riche  en  ma- 
nuscrits et  en  curiosités  littéraires.  Lié  d'amitié  avec  Jean 
Godefroy,  il  lui  procura  plusieurs  lettres  originales  de 
Louis  XII,  de  Marguerite  d'Autriche,  de  Charles-Quint  et 
de  Marguerite  de  Parme,  que  celui-ci  a  insérées  dans  son 
ouvrage  intitulé  :  Lettres  du  roy  Louis  XIL  et  du  cardinal 
d'Amboise,  etc.,  4  vol.  in-12,  Bruxelles,  Foppens,  1712. 
Jean  Godefroy,  qui  préparait  une  édition  de  la  chronique 
de  Jean  Molinet,  reçut  de  l'abbé  Watcant  jusqu'à  six  MSS. 
différents  de  cet  ouvrage  (  ). 

Le  7  décembre  1711 ,  il  lui  mandait  :  a  Enfin  je  trouve 
«à  propos  de  travailler  sur  les  lettres  ô^Estienne  de 
^Tournai;  il  écrivoit  en  1191,  première  année  de  son 


(1)  Parmi  ces  six  manuscrits  ,  il  s'en  trouvait  deux  complets  :  l'un  en 
un  seul  gros  volume  in-folio,  l'autre  provenant  de  N.  Dulief  avait  trois 
tomes.  Les  autres  exemplaires  étaient  des  volumes  séparés. 

30 


f  448  ) 

sépiscopat,  et  il  est  mort  en  1203,  au  mois  d'octobre. 
)) Voyez,  je  vous  prie,  si  vous  n'avez  rien  qui  puisse 
»élre  de  nature  à  y  entrer.  C'étoit  un  homme  hardi;  il 
»a  fait  du  fracas  en  Flandre;  j'ai  envie  de  donner  tout 
»  ce  qu'il  a  fait,  soit  fondation,  soit  donation,  même  les 
»  actes  où  il  est  intervenu.  » 

Ailleurs ,  il  dit  que  ce  recueil  des  lettres  et  actes 
d'Etienne  de  Tournai  formera  deux  volumes  in-kP.  L'abbé 
Bignon,  bibliothécaire  du  roi,  le  pressait  vivement  de 
le  publier  et  voulait  l'aboucher  avec  Baluze,  qui  avait 
entre  les  mains  trente  lettres  inédites  d'Etienne. 

Au  mois  d'avril  1712  ,  l'ouvrage  était  sous  presse; 
le  titre,  dont  il  existe  des  épreuves,  était  ainsi  conçu  : 
Epistolœ  Stephani  Tornacensis  episcojn ,  ex  antiquissimis 
codicibus  31SS.  auctiores  et  notis  illustratœ  tertio  pro- 
deunt ,  disciplinam  ecclesiasticam,  historiam  et  politiam 
civitatis  Tornacensis,  temporum  illius  prœsulis  certâ 
fide  exponentes  ,  maxime  ah  anno  MCXCII  usquè  ad 
MCCIV.  Quitus  etiain  adjecta  est  appendix  actorum  ve- 
terum  quorum  in  notis  facta  mentio  est.  Ope?'â  et  studio 
Nicolai  Philippi  Watcant. 

Dans  une  lettre  à  M.  Godefroy,  en  date  du  5  février, 
l'abbé  Watcant  commence  à  craindre  de  s'être  trop  aven- 
turé dans  son  travail  :  «  Je  suis  d'avis,  dit-il,  que  mon 
T)Ustienne  sera,  imparfait  tant  que  je  n'aurai  point  examiné 
"trois  ou  quatre  MSS.  des  lettres  de  ce  prélat,  qui  sont  à 
»  Paris.  Cependant,  je  ne  négligerai  rien  de  ce  que  je 
«pourrai  déterrer  ici.  » 

Voilà  les  seules  notions  que  j'ai  pu  recueillir  sur  ce  pro- 
jet de  publication.  A-t-il  été  effectué?  Non,  sans  doute^ 
puisqu'il  n'en  reste  pas  de  trace. 

Je  trouve  encore  le  titre  imprimé  d'un  autre  ouvrage 
de  l'abbé  W^atcant;  il  est  de  format  in-folio  et  conçu  en  ces 
termes  :  Prœcepta  ïïilperici,  Francorum  régis ,  cum  épis- 


(  447  ) 

told  CCXXXIX  Stcphani  Toi-naccnsis  episcopi  pro  eccle- 
siâ  cathedrali  tornacensi ,  quitus  suprema  illius  ccclesiœ 
juridictio  stabiliter  confirmatur  et  illustratur  :  adnota- 
tiones  adjecit  Nicolaus  Philippus  Watcant^  illius  ecclesiœ 
canonicus.  Tornaci ,  è  typog raphia  Jacohi  Vincent ,  sub 
signo  S.  Âugustini.  3IDCCXII. 

L'abbé  Walcai^t  avait  découvert  une  préface  inédite 
de  l'histoii-e  de  l'église  de  Reims,  par  Flodoard.  Je  pos, 
sède  cette  préface  que  je  ferai  imprimer  sans  doute  dans 
mes  Analectes  historiques. 

Puissent  ce  peu  d'indications  mettre  quelqu'un  sur  la 
voie  pour  faire  mieux  connaître  les  titres  littéraires  de 
Watcant ,  dont  aucun  biographe  n'a  parlé  jusqu'ici. 

J'ai  à  la  vérité  entre  les  mains  plusieurs  lettres  adressées 
par  l'abbé  Watcant  au  libraire  Foppens,  de  Bruxelles,  et  à 
Jean  Godefroy;  mais  elles  n'ajoutent  rien  aux  renseigne- 
ments ci-dessus.  Toutefois,  j'en  citerai  une,  ne  fut-ce  que 
pour  donner  une  idée  du  style  et  du  genre  d'érudition 
de  ce  chanoine.  Elle  est  adressée  au  même  Godefroy,  garde 
des  chartes  de  la  chambre  des  comptes  de  Lille  : 

1712,  25  août.  Tournai. 
«  Monsieur, 

»  En  faisant  quelques  recherches  concernant  mon  ^s^^en- 
«we^j'ai  remarqué  que  Guillaume  Hugonet,  chancelier  de 
«Marie  de  Bourgogne,  étoit  frère  de  Philibert  Hugonet, 
»  évêque  de  Mâcon  en  1484,  et  tous  deux  neveux  d'Etienne 
»  Hugonet,  évêque  de  Mâcon  en  1450.  Voici  ce  qu'en  dit 
«  Jacob  Severt,  in  Chronologiâ  historicà  successionis  hierar- 
»  chicœ  antistitum  Lugdunensis  archiepiscopatiis  Galliarum 
y>primatûs  et  suffraganearum  diocesiu7n,  Part.  2.  de  matis^ 
ticonens.  episc.  fol.  214,  n"  60  ;  —  Stephaniis  II,  cogno- 
•oniento  Hugonetus ,  etc.,  duos  ncpotes  ad  virtutem  opti~ 
1)  masque  scientias  direxit ,  quorum  aller  Guillelmus  major 


(  448  ) 

8  natu ,  causidicus  primùm  Matisconi ,  tandein  effectus 
T)  est  cancellarius  ducis  Burgundiœ  :  pro  fidâ  cujus  defen-' 
!»  sione  incolœ  civitatis  Gandavensis  inVlandrià  ipsum  necî 
•A  tradiderunt.  Et  passant  à  son  successeur  dans  le  n°  62,  il 
«dit  :  Philibertus  Uugonetus  Stephani  antistitis  nepos  suo 
»  tempore  clarus  ac  eruditus ,  adeôque  creatus  cardinalis 
nS.  R.  E.  dimi  pur  pur  citas  proficisceretur  sununo  pontifici 
n grattas  exhibiturus ,  ibi  natiirœ  satisfecit,  ultimo  kal. 
Tioctobris  anni  1484. 

»  J'ai  cru  devoir  vous  communiquer  cette  petite  décou- 
»  verte  par  rapport  à  Molinet. 

sMarchantius,  in  Fland.  descript.  lib.  III,  fol.  308  et 
Bsuiv.,  parle  du  chancelier.  Si  je  découvre  autre  chose,  je 
»vous  l'envoirai  d'abord, 

)^At  nunc  ista  tibt  quœ  tradimus,  accipe  lœto 
ïtlntereà  vultu,  et  prœsentibus  annue  cœptis. 

»Je  vous  prie  de  me  communiquer  votre  exemplaire 
«d'Eâlienne;  je  vous  le  renverrai  demain. 

»  Je  suis  très  sincèrement  et  sans  aucune  réserve , 

Monsieur, 

Votre  très-humble  et  très-obèissatit  serviteur , 

Watgaist.  1» 

La  petite  découverte  dont  Watcant  se  prévaut  ici,  n'ap- 
prit sans  doute  rien  de  nouveau  à  son  érudit  correspon- 
dant. On  sait  depuis  long-temps  que  Guillaume  Hugonet 
était  bourguignon,  neveu  et  frère  des  évêques  de  Màcon, 
Etienne  et  Philibert  Hugonet.  Les  auteurs  de  laGallia  chris- 
tiana  parlent  avec  détail  de  cette  parenté,  IV,  1091,  et 
ne  la  donnent  pas  comme  un  fait  nouvellement  constaté. 
D'ailleurs,  il  n'y  avait  pas  grand  mérite  à  découvrir  une 
assertion  consignée  dans  un  livre  connu. 


(  449  ) 

Enfin,  il  faut  dire  que  le  passage  de  Severl,  cilé  par 
Watcant,  est  erroné  pour  ce  qui  touche  le  voyage  de 
Philibert  Hugonet  à  Rome.  Ce  ne  fut  pas  précisément  pour 
remercier  le  pape  de  lui  avoir  donné  le  chapeau  de  cardi- 
nal que  l'évêque  de  Màcon  se  rendit  en  Italie.  Le  véritable 
motif  que  le  détermina  à  quitter  la  France  et  à  accepter 
le  titre  de  légat  de  Vilerbe,  fut  la  mort  de  son  frère  le 
chancelier,  décapité  avec  Humbercourt  par  les  Gantois 
sous  les  yeux  mêmes  de  Marie  de  Bourgogne,  après  avoir 
été  mis  en  jugement  suivant  un  ordre  exprès  de  cette  prin- 
cesse, découvert  tout  récemment  (1). 

Nicolas-Philippe  Watcant  est  mort  à  Tournai  ,  le  5 
août  1751. 

Le  Glay. 


{l)Le Messager  des  Sciences, année  1838,  p.  364  ,  rapporte  un  acte 
authentique  du  28  mars  1476  (  v.  st.  )  par  lequel  Marie  de  Bourgogne 
ordonne  une  instruction  en  forme  sur  les  faits  et  griefs  imputés  à  Guil- 
laume Hugonet  et  à  Humbercourt.  On  doit  la  découverte  de  cette  com- 
mission importante  à  M.  Van  Duysc  .  archiviste  de  la  ville  de  Garni. 


(  450  ) 


^ibittouô  et  ûorrectioujs 

AUX  LISTES  CHRONOLOGIQUES 

DES    ANCIENNES    IMPRESSIONS   DE    MAYENGE    AVEC   DATE, 
QUI  OST  ÉTÉ  PUBLIÉES  JUSQU'A  CE  JOUR. 


Déjà  le  savant  ff^urclttoem  irnhlm  une  liste  chronologique 
des  premières  impressions  mayençaises  avec  date ,  depuis 
l'invention  de  l'imprimerie  jusqu'à  l'année  1558,  dans  sa 
Bibliotheca  moguntina  (Auguslae  Vindelicorum,  1787  ou 
1789,  et  Ulmae,  1787,  in-d"  (1).  M.  Schaab,  dans  celle  qui 
se  trouve  dans  l'histoire  de  l'imprimerie  (en  allemand, 
Mayence,  1830-31 ,  3  vol.  in-8'',  tome  1",  p.  329  à  621), 
y  fit  plusieurs  corrections  et  l'augmenta  de  quatre-vingts 
articles.  Cependant  son  travail  n'est  pas  encore  exempt 
d'erreurs  et  d'omissions,  et  le  but  du  présent  article  est  de 
les  indiquer. 

U59. 

Durandi   (  Guliehni  )   Rationale   dwinormn  officiorum 
6  octob.,  in-folio  goth. 

M.  Schaab  indique  quarante-trois  exemplaires  sur  par- 


(l)  M.  de  Servais,  bibliographe  belge  distingué,  a  aussi  laissé  un 
traité  manuscrit  sur  ce  sujet,  sous  \c  \Jdrc  <\e'.  Annales  Ujpofjiaphici 
Moguntini,  in-folio.  Yoycz  le  catalogue  de  ses  livres.  Malines,  1808,  in- 
8",  p.  413,  n''5639. 


(451   ) 

chemin  de  cet  ouvrage  (1).  Il  faut  y  ajouter  un  quarante- 
quatrième,  qui  est  celui  de  M.  Kloss,  de  Francfort.  Mal- 
heureusement il  manque  à  cet  exemplaire  trente-deux 
feuillets  à  la  fin  (2). 

1460. 

Joannis  Balbi  de  Janua  Calholicon,  in-folio  goth. 

Parmi  les  dix  exemplaires  sur  parchemin  connus  du 
Catholicon  imprimé  par  Gutenherg ,  M.  Schaab  compte 
en  premier  lieu  celui  de  la  bibliothèque  impériale  de 
Vienne  (3);  c'est  une  erreur  :  la  bibliothèque  de  Vienne 
possède  bien  un  exemplaire  sur  parchemin  de  cet  ouvrage, 
de  l'édition  que  Gunther  Zeiner  imprima  à  Augsbourg 
en  1489,  mais  elle  ne  possède  l'édition  de  Mayence  que  sur 
papier  (4).  On  ne  connait  donc  que  neuf  exemplaires  sur 
parchemin  du  Catholicon  de  Gutenberg.  D'un  autre  côté, 
il  faut  compter  quatorze  exemplaires  connus  sur  papier, 
au  lieu  des  douze  qu'indicjue  M.  Schaab,  le  treizième 
étant  celui  de  la  bibliothèque  de  Vienne,  et  le  quator- 
zième ,  celui  de  M.  Lammens ,  de  Gand ,  qui  a  été  vendu 
au  mois  d'avril  dernier.  Cet  exemplaire  provenait  du 
prieuré  de  S'-Martin  à  Louvain.  Les  initiales  en  sont 
ornées  d'arabesques  en  couleurs  et  en  or;  il  est  partagé  en 
deux  volumes  (5). 

1462. 

Biblia  sacra  latina  vulgatae  editionis  ',  Moguntinae ,  Joh. 
Fust  et  Petr.  Schoejfer ,  14  aug.  ;  2  vol  in-folio  goth. 

(1)  Hist.  de  linvent.  de  l'imprimerie  ,  t.  I,  p.  374. 

(2)  Catalogue  of  the  library  of  D'  Kloss  of  Francfort  a/M.  Londoii , 
1835  ,  in-8°,  p.  94  ,  n«  1315.  — M.  Kloss  vendit  en  Angleterre  ,  en  1835 , 
/;«;•  spéculation,  sa  belle  et  précieuse  colleetion  de  livres  imprimés,  qu'il 
avait  rassemblée  avec  tant  de  soins  depuis  sa  tendre  jeunesse. 

(3)  Loc.  cit. ,  p.  395. 

(4)  Gescbicbte  der  kaiscrl.  ka-nigi.  nofbibliotlicU  zu  Wieu  ,  \on  Ijj.  l'r. 
Eclen  von  Mosel;  Wien  ,  1835,  in-8'',  p.  330. 

(5)  Première  partie  des  livres  rares  et  itrécieux  de  feu  P.  P.  C.  Lam- 
mens :  Gand,  1839.  in-8",  p.  4  .  n"  24. 


(  452  ) 

Aux  dix  exemplaires  complets  et  incomplets,  imprimés 
sur  papier,  de  cette  bible,  dont  M.  Schaab  nomme  les 
anciens  possesseurs,  (on  ignore  ce  que  ces  exemplaires  sont 
devenus,)  (1),  il  faut  ajouter  le  premier  volume  que  possé- 
dait M.  de  Servais^  à  la  vente  des  livres  ce  dernier,  le  li- 
braire Collaer  acheta  ce  volume  pour  la  somme  de  276 
francs  (2). 

1474. 

Herp  (Bcnricus)  Spéculum  aureum  decem  preceptorum 
Dei,  4  id.  sept.;  in-folio  goth. 

Outre  l'exemplaire  de  cet  ouvrage  sur  parchemin  que 
possède  la  bibliothèque  royale  de  Paris,  il  s'en  trouve  un 
second  très-beau  à  la  bibliothèque  du  grand-duc ,  à 
Darmstadt. 

1489. 

Legenda  et  Miracula  sancti  Goaris  édita  per  Mandal- 
hertum ,  diacommi  ad  illustrem  virum  Marquardum  ahba- 
tem  monasterii  Prumie  •  petit  in-4°  goth. 

Ce  petit  imprimé,  qui  est  d'une  grande  rareté,  était 
resté  inconnu  à  M.  JJ  urdtwein  •  M.  Schaab  en  indique  à 
peine  le  titre;  il  mérite  cependant  bien  une  description 
un  peu  détaillée. 

Cet  opuscule  n'a  quevingl-huit  feuillets,  avec  les  signa- 
tures a.  b.  c.  d.  Il  est  certainement  sorti  des  presses  de 
Jean  Schoeffer:  le  titre  est  imprimé  avec  les  grands  ca- 
ractères du  Psautier,  et  le  texte  avec  ceux  du  Diirandi 
Rational,  de  1459.  Les  lettres  des  sommaires  ressemblent 
pour  la  forme  à  celles  du  titre,  mais  elles  sont  plus  petites 
de  moitié.  La  vie  du  saint  se  termine  par  la  souscription 
suivante  : 

Imjiensis  Johannis  gisen  de  Nasteden ,  artium  Uberalium  magis- 

(1)L.  C,  p.  395. 

(2)  Catalogue  des  livres  de  la  bibliotlièque  de  feu  M.  G.  F.  de  Servais 
Malincs  :  in-S" .  p.  3 ,  n»  20. 


(  453  ) 

tri,  Legenda  diui  Gouris  confessoris  eximij ,  est  impressa  Moguncie, 
anno  Domini  MCCCCLXXXIX  (1). 

1497. 

{Joannis  abbatis  Bursfield)  Liber  de  triplici  regione 
claustralium  et  spiriluali  exercitio  monachorum  omnibus 
religiosis  non  minus  utilis  quam  necessarius ,  Joanne  Vri- 
temio ,  abbate  Spanheimense  emendante  opusculum;  petit 
in-4°  golh. 

Celte  première  édition  de  cet  ouvrage  est  resiée  incon- 
nue à  Wurdtwein,  à  Panzer,  à  Schaab  et  à  tous  les  biblio- 
graphes. Elle  est  imprimée,  ainsi  que  la  seconde  qui 
parut  l'année  suivante  et  qui  a  91  feuillets,  par  Pierre 
Friedberg.  M.  le  docteur /i/o^s  les  possédait  toutes  deux  (2); 
malheureusement  son  catalogue  ne  donne  pas  de  descrip- 
tion ultérieure  de  celte  rare  impression  (3).  M.  Schaab, 
en  donnant  le  titre  de  l'édition  de  1498,  nomme  par  er- 
reur l'abbé  Trithème  comme  l'auteur  et  en  même  temps 
comme  le  correcteur  de  cet  ouvrage  (4),-  il  ne  fut  que  le 
dernier. 

1503. 

Mercurius  Trismegistus ,  de  potestate  ac  sapientia  Bei, 
in  vigilia psalmorum  •  in-4°  golh. 

M.  le  docteur  Kloss  possédait  le  seul  exemplaire  connu 
de  cet  ouvrage,  sorti  des  presses  de  Jean  SchoefTer,  qui 
fut  imprimé  sur  parchemin:  mais  il  y  manquait  la  feuille 
B.  8.  3.) 


(1)  Voyez  le  catalogue  de  livres  du  duc  de  la  Vallièrc ,  par  Guillaume 
de  Bure,  fds  aine  ;  Paris,  1783 ,  t.  3 ,  p.  101,  n»  4752,  et  Fr.  Xav.  Laire  , 
Index  libroruin  ab  inventa  typographia  ad  annum  1500;  Senonis,  1791, 
t.  2  ,  p.  125,  n»  10. 

(2)  Calalogue  of  D-  Kloss,  p.  154,  n»»  2122  et  2123. 

(3)  Il  est  à  regretter  que  dans  ce  catalogue,  qui  aurait  pu  être  si  utile 
aux  bibliographes  et  qui  est  d'une  si  jolie  exécution  typographique, 
les  ouvrages  soient  si  mal  classés  et  qu'il  soit  rédigé  avec  si  peu  de  soins. 

(4)  Catalogue  of  D-^  RIoss ,  p.  182,  n"  2540. 


(  454  ) 

1 520. 

*  Missale  Moguntinum;  iii-folio. 

Ouvrage  qui  est  probablement  imprimé  par  Jean 
Schoeffer  (1). 

1527. 

*  De  reformanda  Ecclesia;  in-4°  (2). 

Je  panse  que  Jean  Schoeffer  est  encore  l'imprimeur  de 
cet  opuscule. 

1534. 

*  Bauren  compas.  Zu  nutz  und  gut,  ail  den  jenen  so- 
sich  auff  den  compas  nit  vorstehn,  oder  den  iiit  aile  zeyt 
hey  jnen  haben ,  ist  dise  son  urh  in  des  menschen  lincken 
handt  clerlich  beschreiben  und  angezeygt  leychtlich  zu 
gebrauchen;  petit  in-4°,  avec  grav.  sur  bois. 

Cet  imprimé  n'est  composé  que  de  huit  feuillets;  Jacques 
Koebel ,  secrétaire  de  la  ville  d'Oppenheim  ,  se  fait  connaî- 
tre dans  la  préface  comme  l'auteur  de  ce  petit  ouvrage  (3). 

Le  titre  est  orné  d'une  gravure  sur  bois,  représentant 
trois  paysans  et  une  paysanne;  au-dessus  de  cette  gravure, 
il  y  a  des  vers  en  langue  allemande,  et  au-dessous  on  lit  ; 
Getruckt  zu  Meintz  bey  Peter  Jordan  ^ewy«;MDXXXIIII. 

Sur  le  dernier  feuillet,  se  trouvent  les  armes  ou  mar- 
ques d'imprimeur  de  Pierre  Jordan,  qui  consistent  en  un 
sablier  posé  sur  une  boule  garnie  d'ailes  ;  au-dessus  de  ce 
sablier  se  trouvent  deux  mains,  qui  tiennent  une  pierre 
pour  la  briser  (4). 

(1)  Catalogus  librorum  Fr.  Jos  Bodmann  ;  Moguntiae,  1823,in-12, 
p.  5  ,  n°  55.  —  Pour  éTïter  des  répétitions ,  toutes  les  impressions  incon- 
nues à  MM.  Wurdhvein  et  Schaab  sont  marquées  d'un  astérisque. 

(2)  Catalogue  ofD-^  Kloss,  p.  170  ,  n»  2356. 

(3)  Un  nommé  Jacques  Koebet  imprimait  à  Oppenheim  (ancienne  ville 
du  Palatinafc,  à  quatre  lieues  de  Mayence) ,  au  commencement  du  XVI-^ 
siècle.  Si  c'est  le  même  que  notre  auteur,  il  devait  alors  avoir  cédé  son 
imprimerie. 

(4)  La  description  que  M.  Schaab  (I.  c..  p.  586)  donne  de  ces  armes 
n'est  pas  très-exacte. 


(  455  ) 
Sous  la  boule,  on  lit  le  dicton  suivant  : 

Das  flu-ijende  Gliick 
Lest  nicht  seyn  cliick. 

Au-dessus  de  ces  armes,  il  y  a  les  vers  allemands  qui 
suivent  : 

Fraeflicher  Gewall  steht ,  doch  sein  zeit, 
Solanij  der  Herr  dasselhitj  leyd.    ' 
Weiin  dan7i  des  strnidlein  ist  verloff'en, 
Thut  Gotl  den  fraefelzwifach  straffen. 

Je  possède  le  seul  exemplaire  connu  de  cet  opuscule, 
dont  la  rareté  s'explique  par  le  petit  nombre  de  feuillets 
dont  il  est  composé ,  et  par  la  raison  qu'il  se  trouvait  prin- 
cipalement entre  les  mains  des  gens  de  la  campagne,  pour 
lesquelles  il  était  spécialement  destiné.  Il  doit  avoir  été 
lort  goûlé  et  avoir  trouvé  un  grand  débit,  car  il  en  parut 
dans  la  même  année  une  autre  édition  (que  je  crois  être  la 
seconde),  sous  le  titre  suivant  : 

Ein  neio  erfunden  Sonnen  uhr  durch  den  schatten  des 
menschen,  die  gleychen  stunde  des  tags  sajnjJt  den  ungley- 
chen  stunden  der  planeten  on  cojnpas  zu  erfaren.  —  Ilctn 
ein  son  uhr  in  einesjeden  menschen  linken  handt.  Ailes 
durch  Jacob  KoEEELE  beschreiben,  31ainz  ,V%x^k  Jordajs, 
MDXXXIllI ,  in-8°,  avec  gravure  sur  bois  (1). 

La  bibliothèque  de  la  ville  de  Francfort  possède  un 
exemplaire  de  cette  édition ,  la  seule  dont  les  bibliographes 
aient  fait  mention. 

Geomantia.  Kûnstlicher  und  rechtschaffner  ghebrauch 
der  alten  kleynen  geomancey,  mit  icelcher  durch  Ililffder 
Rechmmg  ^  und  des  menschen  Tauffnamens^  sampt  der 
Planeten  wirkung ,  injren  stunden,  allen  Adamskinderen , 
kûnfftiger zufall  des guttemmd boesen  eroeffnet  wird,  etc.; 
petit  in-4°,  avec  grav.  sur  bois. 

Sous  le  long  titre  de  cet  opuscule  on  lit  :  Getruckt  zu 

(l)\Vurdt\vcin,  Bibl.  Moguiit.,  p.  167.  et  Schaab  .  1.  c  ,  ii.  591. 


(  456  ) 

Mayntz  hey  Peter  Joudan  MCCCCGXXXIIII.  Ce  litre  est 
orné  d'une  gravure  sur  bois,  représentant  un  homme  assis 
à  une  table  et  occupé  de  calculs  de  géomancie,  et  deux 
paysans.  Ce  petit  imprimé  qui  est  d'une  grande  rareté, 
car  il  est  demeuré  inconnu  à  tous  les  bibliographes,  n'a 
en  tout  que  vingt-quatre  feuillets.  J'en  possède  un  exem- 
plaire, auquel  il  manque  malheureusement  2  feuillets ,  B  2 
et  3.  Je  soupçonne  que  l'auteur  anonyme  de  cet  ouvrage 
pourrait  bien  être  également  Jacques  Koebel ,  qui  fit  paraî- 
tre, deux  années  auparavant,  un  ouvrage  latin  chez  le  même 
imprimeur,  et  qui  est  écrit  dans  le  même  goût  que  celui  qui 
nous  occupe  (1).  La  préface  est  remarquable;  l'auteur 
prétend  y  prouver,  par  l'apocalypse  deS'-Jean ,  que  l'usage 
de  son  art  n'est  point  diabolique  ni  impie,  mais  que  l'on 
peut  s'en  servir  en  bon  chrétien  comme  de  tous  les  autres 
aris.  —  Les  prophéties  sont  en  vers ,  qui  sont  ornés  d'en- 
cadrements et  d'arabesques. 

Cet  ouvrage  parait  également  avoir  eu  deux  éditions, 
car  je  trouve  dans  le  catalogue  de  M.  Kloss  un  ouvrage 
qui  porte  le  titre  suivant  : 

Geomantica  :  ein  kunstdesioarsagenSyMainz,Vm^^  Jor- 
dan; sans  date,  in-4°  (2). 

1537. 

*  Hessi  [Helii  Eobani  )  Ludus  de  podagra ,  e  vulgari 
Germano  in  latiniwi  carmen  coactus,  excud.  Ivo  Schoeffer: 
in-4°  (3). 


(1)  Voici  le  titre  de  cet  ouvrage  :  Astrolabii  declaratio,  ejusdem  usus 
mircjuciindus,  non  modo  astrologis,  medicis  ,  geograpliis,  caeterisque 
literarnm  cultoribus  :  multum  utilis  et  necessarius.  Mogunt. ,  1532, 
excud.  Pelr.  Jordan,  avec  grav.  sur  bois.  Voyez  Schaab.  1.  c,  p.  586? 
et  Paufjcr,  Annales  tjpogr.,  t.  VII,  p.  420. 

(2)^Catalogue  of  D'^  Kloss  ,  p.  293,  n°  4094. 

(3)Ibid.  .  p.  138.  n"1914. 


(  457  ) 

1538. 

'  De  chyromantia  libri  très  authoris  cujiisdam  vetus- 
tissimi por  Joanncm  Dryandrum  reslituti  Marpuryi ,  anno 
1538.  Mogimtiae  excudehat  Ivo  Schoeffer^  anno  1538^ 
7nense  septembris;  in-8°,  con  fig. 

Cet  imprimé  rarissime  fut  vendu  chez  le  duc  de  la 
Vallière  pour  le  prix  modique  d'une  livre  10  sols  (1). 

*  Titi  Livii  Roemische  Historien ,  jegundt  mit  gangem 
Fleiss  herichtigt ,  gebessert  und gemehrt ,  gedruckt  durch 
Ivonem  Schoeffer ,  in-folio  avec  grav,  sur  bois. 

C'est  la  cinquième  édition  de  la  version  allemande  de 
Tite  Live ,  et  la  seconde  de  celles  ou  se  trouvent  les  cinq 
livres  de  la  cinquième  décade.  La  bibliothèque  royale  de 
Dresde  en  possède  un  exemplaire  (2). 

Wurdtwein  et  Schaab  n'indiquent  aucune  impression 
sous  cette  année  1538  ;  il  n'était  cependant  pas  probable 
que  les  différentes  presses  qui  existaient  alors  à  Mayence 
fussent  restées  oisives  pendant  une  année  entière. 

1541. 

*  De  vera  Christi  ecclesia  quaestio  necessaria  [Joan 
Cochlaei)  ad  Caes.  Majestatem  ut  Ratisponae  in  conventu 
imperiali  discutiatur.  Moguntiae  ad  divum  Victor em  [excud. 
Franciscus  Behem),  1541;  in-S"  (3). 

Bergellannus  [Joannes  Arnoldus).  De  chalcographiae 
inventione  po'èma  encomiasticum.  Moguntiae  ad  Div.  Vic- 
torem  excusum  a  Franscisco  Behe?n,  anno  MDXLl,  in -4°. 

Il  est   singulier  que  Joannis  (4) ,   Wurdtwein  (5)   et 

(1)  De  Bure,  Catalogue  du  duc  de  la  Vallière  ,1.  1" ,  p.  531 ,  n»  1832, 
et  les  prix  à  la  fin  du  tome  3,  p.  16 

(2)  Ebert,  Allgem.  Bibliograpli.  Lexicon  ;  Leipzig,  1821-30,  in- 4»,  1. 1, 
p. 1003. 

(3)  Catalogue  de  Servais,  p.  36 ,  n"  415. 

(4)  Scriptores  rcrurn  Mognnt.  Francof.  ,  1722-27;  in-fofio ,  t.  3, 
p.  421-28. 

(5)  Bibliotheca  Moguntina,  p.  175. 


(  458  ) 

Schaah  (l)  aient  tous  trois  oublié  d'indiquer  le  format 
de  cet  ouvrage,  mais  il  est  plus  singulier  encore  que  ni 
Brunet  ni  Ebert  ne  l'aient  admis  dans  leurs  ouvrages  bi- 
bliographiques,  tandis  que  l'on  peut  hardiment  classer 
cet  ouvrage  parmi  les  plus  rares  et  en  même  temps  parmi 
les  plus  remarquables  par  leur  contenu. 

On  trouve  des  renseignements  sur  ce  poème,  qui  a  été 
réimprimé  dans  plusieurs  ouvrages,  et  sur  son  auteur, 
dans  Joannis,  Script,  rerum  Mogunt.,  tome.  3,  p.  423-28, 
—  Prosper  Marchand^  Histoire  de  l'imprimerie,  p.  11-17, 
et  Schaah,  Hist.  de  l'wipr.,  t.  1,  p.  88,  89  et  102. 

1546. 

"^  Statuta  et  Décréta  synodi  Dioces.  Arcjentorat.  Mo- 
guntiae  Fr.  Behem,  1546;  in-folio  (2). 

*  De  autoritate  et  jiolestatc  generalis  Concilii  Testimo- 
nia  XXX  solida  ac  merito  irrefragabilia.  Per  Joan.  Cocfi- 
laeum,  Mogunt.  ad  D.  Vic.impr.  p>er  Franc.  Behem,  1546, 
petit  in-8°  (3). 

1548. 

"^  Joannis  Calvini  in  acta  synodi  Tridentinae  censura  et 
ejusdem  brevis  confutatio  per  Joan.  Cochlaeum.  ApiidD.  Vie. 
prope  Mogunt.,  1548,  petit  in-8"  (4). 

1549. 

"^  De  intérim  brevis  responsio  Joan.  Cochlaei  ad  pro- 
lixum  convictiorum  et  calumniaru?n  librum  Joannis  Cal- 
vini. AapudD.  Vict. prope  Mogunt.exe.  aFr.  Behem,  1549  ; 
in-8°  (5). 

(1)  Hist.  de  Pimpr.,  t.  I ,  p.  601. 

(2)  Catalogus  Biblioth.  Guill.  Baronis  de  Crassier  :  Leodii ,  Evcrardus 
Kints,  1754,  in-8°,  p.  18  ,  n»  144. 

(3)  Catalogne  de  Servais, .  p.  37  ,  n«  433. 

(4)  Ibid. ,  p.  38  ,  II"  443. 
(5)Ibid.,  p.  38-39,  ii"  453. 


(  459  ) 

1550. 

D.  Conrndi  Bruni  de  seditionibus  libri  sex,  rationihus 
et  exemplis  ex  omni  doctrinarum  et  authnrum  (jenere  lo- 
cuplctati  cura  Joonnis  Cochlaei  in  publicum  cditi.  Sequi- 
tur  EJusdeni  do  seditiosis  ajypendix  triplex  contra  quosdam 
rebelles  hujus  temporis.  Moguntiae  apud.  S.  Vict.  ex  offi- 
cin.  Fr.Beliem  typogruph.^  1550;  in-folio. 

JVurdtwein  et  Schaab  donnent  Cochlaeus  comme  l'au- 
teurdecetouvrage,  tandis  qu'il  n'en  est  que  rédileur;mais  il 
est  l'auteur  de  l'appendix-IIs  ne  mentionnent  ^om\Brunus. 

1557. 

*  Titi  Livii  des  aller  Redsprechsten  und  hochberûmp- 
testen  Geschichtscheibers  Roemischc  Historien ,  jetzundt 
mit  gantzem  Fleiss  besic/itigt,  gebessert  und  gemehrt,  etc. 
Getruckt  in  der  churfurstlichen  Statt  Meyntz  durch  loonis 
Schocffers  sclige  Erben  MDLVII;  in-folio,  avec  grav.  sur 
bois. 

Ce  titre  est  imprimé  avec  des  lettres  rouges  et  noires  et 
orné  d'une  gravure  sur  bois  représentant  des  guerriers. 
Sur  le  second  feuillet  se  trouve  la  fameuse  dédicace  à  l'em- 
pereur Maximilien  I,  que  Jean  Schoeffer  avait  ajoutée  à  sa 
première  édition  de  la  version  allemande  de  Tite  Live,  de 
l'année  1505.  On  lit  sur  le  recto  du  dernier  feuillet  :  Ge- 
druckt  in  der  loeblichcn  und  churfurstlichen  Statt  Meyntz, 
durch  Iconis  Schoeffers  seligen  Erben,  vollendet  ani  neun- 
ten  tag  des  mertzen,  als  man  zalt  nach  der  geburt  unsers 
lieben  Herrn  Jesu  Christi  MDL\  II.  Sur  le  verso  du  même 
feuillet  se  trouvent  les  armes  des  SclioeffL-r. 

L'ouvrage  a  en  tout  558  feuillelscomme  l'édition  de  1541, 
et  paraît  être  conforme  en  tout  à  cette  dernière  (1). 


(l)On  trouve  la  description  de  cette  édilion  dans  Schaab.  Hist.  de 
riini.r. .  t.  I .  p.  599 


(  460  ) 

Je  possède  un  exemplaire  de  l'édition  de  1557,  dont 
M.  Schaab  nie  l'existence  (2). 

II  existe  donc  neuf  éditions  mayençaises  de  la  version 
allemande  de  Ti te  live,  au  lieu  de  sept  que  compte  M.  Schaab. 
—  Jean  Schoeffer  imprima  les  trois  premières,  dans  les 
années  1505,  1514  et  1523;  Ivo  Schoeffer,  cinq  autres, 
dans  les  années  1533,  1538,  1541,  1546  et  1551  ,  et  les 
héritiers  d'Ivo  Schoeffer,  la  dernière  en  1557. 

H.  Helbig. 


(i)  L.  c. ,  p.  619,  note  4.  et  p.  620,  ainsi  que  dans  les  additions  et 
«■orrections  du  tome  I".  dans  le  tome  3  .  pag-  464. 


(  461   ) 


SUR   LES 


iîtonnoics  frappcc5  à  Uummcn, 


SlPrLEMEST. 


Peu  de  mois  se  sonl  écoulés  depuis  la  publication  de 
notre  notice  sur  les  monuoies  frappées  à  Rummen,  par 
Jean  II  de  Wesemael,  et  déjà  nous  pouvons  faire  paraître 
un  supplément  assez  important  à  notre  premier  travail. 

Le  champ  de  la  numismatique  du  moyen-âge  est  tel- 
lement vaste,  et  il  a  été  si  peu  exploité  jusqu'ici,  qu'on  est 
sûr  d'y  rencontrer  du  neuf  à  chaque  pas;  mais  à  peine 
a-t-on  signalé  une  nouveauté,  que  cette  nouveauté 
devient  partout  une  chose  connue.  Les  pièces  qui  étaient 
regardées  naguères  comme  uniques ,  se  trouvent  bientôt 
dans  plusieurs  collections;  les  localités  auxquelles  on  n'a- 
vait pu  attribuer  aucune  monnoie ,  offrent  bientôt  une 
suite  monétaire  nombreuse  et  variée. 

Tel  a  été  le  cas  pour  les  raonnoies  frappées  à  Rummen. 
Cette  seigneurie,  dont  il  y  a  peu  de  temps  encore  les  mon- 
noies  étaient  inconnues,  doit  figurer  dorénavant  parmi  les 
baronnies  de  Belgique  qui,  au  moyen-âge,  ont  eu  un  hôtel 
de  monnoie  en  grande  activité. 

Dans  notre  première  notice,  nous  avons  attribué  deux 
pièces  frappées  à  Rummen  à  Arnoul  d'Oreille,  et  douze 
autres  à  Jean  II,  seigneur  de  Wesemael;  aujourd'hui  nous 
avons  déjà  plusieurs  autres  monnoies  à  faire  connaître,  et 
ce  qu'il  y  a  d'intéressant,  c'est  que  ces  nouvelles  décou- 
vertes remplissent  en  partie  la  lacune  qui  existe  dans 


(  462  ) 

la  suite  des  seigneurs  de  Rummen  depuis  Arnoul  d'Oreille 
jusqu'à  Jean  de  Wesemael. 

Différentes  personnes  nous  ont  aidé  de  leurs  lumières, 
soit  en  nous  adressant  des  observations  sur  ce  que  nous 
avions  écrit  précédemment,  soit  en  nous  faisant  connaître 
des  pièces  inédiles.  C'est  grâce  à  leurs  bienveillantes  com- 
munications que  nons  pouvons  compléter  notre  premier 
travail. 

Nous  citons  les  amateurs  qui  ont  bien  voulu  nous  don- 
ner des  renseignements  et  nous  leur  témoignons  ici  notre 
reconnaissance. 

Ajoutons  d'abord  quelques  mots  à  différents  passages  de 
notre  première  publication. 

M.  Groebe,  d'Amsterdam  (1),  nous  a  fait  observer  que  la 
monnoie  de  Rummen  était  mentionnée  ,  non-seulement 
dans  les  deux  chartes  publiées  par  Van  Mieris,  mais  encore 
dans  une  troisième,  éditée  par  ce  même  auteur,  et  notam- 
ment dans  un  acte,  en  date  du  12  décembre  1423,  émané 
de  Jean  de  Bavière.  Cette  pièce  porte  défense  de  recevoir 
\q^  florins  d'or  de  Rummen.  a  On  introduit,  y  est-il  dit,  ou 
»  on  répand  dans  nos  états  les  florins  forgés  à  Fauquemont , 
»  à  Rummen,  ainsi  que  ceux  fabriqués  à  Namur,  dont 
"les  deux  ne  valent  guères  plus  qu'une  couronne  de 
«France  (2).  » 

Ce  passage  vient  encore  à  l'appui  de  ceux  que  nous 
avons  déjà  cités  pour  mettre  hors  de  doute  l'existence  de 
la  monnoie  d'or  de  Rummen. 

(1)M.  Groebe  est  connu  par  une  intéressante  dissertation  sur  Ictat 
(les  inonnoies  en  Belgique,  depuis  l'année  1500  jusqu'à  1621  ,  ainsi  que 
par  différentes  publications  sur  la  numismatique.  Ce  mémoire  a  été  cou- 
ronné par  l'Académie  de  Bruxelles. 

(2)  Dat  bij  sominifjen  personcn  tu  onsen  lande  fjehracht,  endc  ondev 
de  Iwjden  (jeslroeijt  en  gestekcn  werden  (julden,  die  men  te  Valken- 
hnrch  ende  Rummen  slaet,  cnde  die  Namenschc  giddcns  dler  vêle  niet 
f/eh'f  vu  sijn  dan  die  twee  een  franc  ois  en  civnc. 


(  463  ) 

La  découver  le,  laite  par  M.  De  Gosier,  d'un  troisième 
exemplaire  du  gros  d'Arnoul  d'Oreille,  rcprésenlé  sur  notre 
première  planche  sous  le  n"  8,  a  fait  adopter  définitive- 
ment la  lecture  de  f  MONETA.  FilAN.  D. 

Sur  l'exemplaire  qui  a  servi  à  la  gravure,  il  n'était  pas 
possible  de  distinguer  un  petit  lion  qui  se  trouve  dans  la 
bordure  au-dessus  de  la  croix ,  à  la  place  d'un  fleuron.  On 
sait  que  sur  les  gros  de  Flandre,  la  bordure  est  également 
disposée  de  cette  manière. 

En  parlant  du  Kromsteert  de  Jean  de  Wesemael ,  figuré 
sur  la  pi,  I,  sous  le  n°  3  ,  nous  avons  dit  que  ce  seigneur 
avait  copié  pour  ce  type  la  monnoie  des  grands  seigneurs 
de  Belgiqiie.  Notre  honorable  confrère  M.  Chalon ,  nous  a 
fait  observer  que  pour  cette  pièce  on  ne  s'était  pas  contenté 
d'imiter  la  monnoie  de  Philippe-le-Bon,  mais  qu'on  l'a- 
vait copiée  delà  manière  la  plus  servile,  en  disposant  même 
la  légende  d'une  manière  contraire  à  l'usage  général.  En 
effet ,  l'inscription ,  ne  commence  pas  ici  au  haut  de  la 
pièce,  au-dessus  de  la  tête  du  lion.  On  a  eu  soin  de  la  re- 
culer un  peu,  afin  de  faire  correspondre  les  mots  Z  PHAL, 
avec  ceux  de  f  PHS ,  qui  se  trouvent  sur  la  monnoie  de 
Philippe-le-Bon. 

C'est  le  même  motif  sans  doute  qui  a  fait  adopter  ici 
l'orthographe  de  PHAL  [Phalesium)  Fallais,  par  /j/«^  tandis 
que  le  même  mot  entre  les  bras  de  la  croix,  est  écrit  par  f. 
^khe^ium.  Mais  ici  il  devait  correspondre  aux  lettres 
F.  L.  A.  D.  que  portent  la  monnoie  de  Flandre. 

Tous  les  moyens  étaient  bons  aux  barons  pour  faire 
confondre  leur  monnoie  avec  celles  des  grands  seigneurs. 
Dans  leur  imitation  du  type,  ils  allaient,  pour  ainsi  dire, 
jusqu'à  la  supercherie. 

Voici  maintenant  les  pièces  nouvelles  que  nous  avons  à 
faire  connaître  et  que  nous  avons  fait  graver  sur  une  se- 
conde planche  : 


(  464  ) 

I.  Une  troisième  monnoie  d'argent  d'Arnoul  d'Oreille. 
A  l'avers,  f  ARNLD  :  DNS  :  -•  QAECBEHE. 

Ce  qui  veut  dire,  Arnoldus  dominus  de  Quaecbehe. 

II  faudra  donc  lire  Quaecbehe  ou  Quaecheke ,  au  lieu  de 
Quaetheke ,  comme  nous  l'avions  écrit  précédemment.  Au 
reste,  cette  inscription  prouve  que  nous  avions  bien  expli- 
qué les  letlresQVC,  qui  se  trouvent  sur  le  gros  représenté 
sur  la  première  planche  sous  le  N°  7. 

Au  milieu,  croix  palée,  reposant  sur  quatre  globules. 

Dans  les  quatre  angles  de  la  croix,  il  y  a  eu  quatre  let- 
tres, dont  une  seule  R  est  encore  visible.  Peut-être  y  a-t-il 
eu  RVME. 

Au  revers,  t  MONETA  :|:  NOVA  tRVM-NCIS. 

Au  milieu  ,  écusson  dont  il  n'est  plus  possible  de  distin- 
guer les  armoiries. 

L'état  un  peu  fruste  de  cette  pièce  nous  empêche  de  pou- 
voir la  décrire  entièrement. 

L'exempîairequia  servi  àla  gravure  appartient  à  la  riche 
collection  de  M.  Van  der  Meer,  à  Tongres,  qui  a  bien  voulu 
nous  envoyer  un  dessin  très-soigné  de  cette  pièce,  ainsi  que 
des  n°'  3,  4  et  5  de  la  planche. 

Cette  monnoie  est  évidemment  une  imitation  de  celle 
que  la  duchesse  Jeanne  de  Brabant  a  fait  frapper  à  Vilvorde 
et  dont  il  existe  trois  dimensions  différentes.  Il  est  donc 
probable  que  Arnoul  d'Oreille  ne  se  sera  pas  borné  à  frap- 
per la  seule  pièce  que  nous  publions. 

II.  HENRIC  :  DNS  :  DE  :  RIVIA  ■.  Z  :  RVM. 
C'est-à-dire,  Henri  seigneur  de  Rivière  et  de  Rummen. 
Trois  fleurs  de  lys,  surmontées  d'une  couronne. 

Au  revers,  SIT  :  NOME  :  DNl  :  BENEDICTV. 

Au  milieu,  croix  fleurdelisée. 

Cette  pièce  a  une  ressemblance  frappante  avec  celles  des 
rois  de  France,  ce  sont  les  dernières  qui  ont  sans  doute 
servi  de  modèle. 


(  465  ) 

Celle  inléressante  pièce  lail  aujourdhui  parlic  de  ma 
colleclion.  Je  la  dois  à  l'extrême  obligeance  de  M.  H.  De 
Sains,  de  Saint-Quentin,  qui  en  a  fait  le  sacrifice  pour 
compléter  ma  série  des  seigneurs  de  Rummen. 

Voilà  donc  que  la  lerre  de  Rummen .  dont  nous  ne  con- 
naissions jusqu'ici  que  deux  seigneurs.  Arnoul  d'Oreille  et 
Jean  de  Wesemaele,  a  appartenu  à  Henri  de  Rivière. 

Bulkens  (1)  fournit  quelques  renseignements  sur  ce 
nouveau  seigneur  de  Rummen. 

On  remarque  dans  la  généalogie  de  la  maison  de 
Stalle  ,  descendant  de  celle  d'Aerschot  : 

Henri  de  Diest,  sire  de  Stalle,  Rivière,  etc.  (2),  qui 
épousa,  le  10  janvier  1410,  Jeanne  de  Wesemael.  Elle 
mourut  le  24  juillet  1474,  et  a  été  enterrée  à  l'église  de 
Saint-Pierre  à  Louvain. 

Bulkens ,  tout  en  citant  ce  seigneur,  ne  compte  pas 
parmi  ses  titres  celui  de  seigneur  de  Rummen,  C'est  une 
lacune  que  la  découverte  de  la  monnoie  nous  permet  de 
remplir. 

Mais  il  nous  reste  toujours  une  difficulté  à  résoudre  : 
c'est  de  savoir  quels  ont  été  les  sires  de  Rummen  depuis 
Arnoul  d'Oreille  jusqu'à  Henri  de  Rivière,  et  comment  ce 
dernier  en  est  venu  en  possession. 

Les  armoiries  de  ce  seigneur  s'expliquent  d'elles-mêmes. 

Henri  de  Rivière  n'a  pas  laissé  d'enfants  mâles,  et  sa 
fille  unique  précéda  sa  mère  au  tombeau. 

Cela  servira  à  expliquer  les  pièces  suivantes. 

m.  Avers ,  lOHANNA  :  DE  WESE3IA  : 

Au  milieu,  armoirées  écartelées  de  deux  lions  et  de 
deux  fleurs  de  lys,  avec  un  lion  sur  le  tout. 

Revers,  MONETA  :  NOVA  :  DE  RVM. 

(1)  Trophées  du  Brahant ,  t.  I,  pag.  38  et  127. 

(2)  Rivière  est  un  village  très-connu  situé  sur  le  Dcuicr ,  dont  il  tire 
son  nom.  Il  est  à  peu  de  distance  de  celui  de  Wcsemacl. 


(  466  ) 

Croix  pâtée,  au  milieu  fleur  de  lys.  Voyez  planche  11^ 
n"  3. 

Celte  Jeanne  de  Wesemael  est  évidemment  la  femme 
de  Henri  de  Rivière,  dont  nous  venons  de  parler.  Elle 
était  sœur  de  Jean  II  de  Wesemael,  celui  qui  nous  a  pres- 
qu'exclusivement  occupé  dans  notre  première  notice. 

A  quelle  époque  a-t-elle  frappé  monnoie?  à  quelle 
époque  a-t-elle  cédé  la  terre  de  Ruramen  à  son  frère  ? 
Tout  cela  n'est  pas  encore  établi  jusqu'ici. 

Il  est  probable  cependant  que  Henri  de  Rivière  aura 
précédé  sa  femme  au  tombeau ,  que  celle-ci  aura  continué 
à  frapper  monnoie  après  sa  mort ,  et  qu'ensuite  elle  aura 
vendu  Rummen  à  son  frère. 

Cet  pièce  qui  est  de  cuivre,  appartient  à  la  collection 
de  M.  Van  der  Meer. 

Il  en  existe  des  variétés  qui  ne  dijffèrent  que  par  l'inscrip- 
tion. 

IV.  L'une  porte  d'un  côté  : 
lOHANNÀ-  DE-  WESEMAL, 

et  de  l'autre  : 

MONETA-  NOVA-  DE-  RVM. 

V.  Sur  une  autre  ,  on  lit  : 
lOHANNA-  DE-  WESEM, 

et 

MONETA-  NOVA-  RVMMEN. 

Nous  devons  la  connaissance  de  ces  deux  pièces  à  l'obli- 
geance de  M.  Lelewel. 

VI.  M.  Van  der  Meer  possède  encore  le  cuivre  repré- 
senté sous  le  n"  4  de  la  planche  II. 

Avers,  f  lOHANNA  :  DE  :  WESMA  (1). 
Armes  écartelées  à  quatre  lions. 


(1)  La   gravure  des  lettres  finales  du  mot  Wesma  ne  répond  pas 
exactement  au  dessin  que  nous  avait  communiqué  M-  Van  der  Meer. 


(  461  ) 

Nous  ne  saurions  expliquer  pourquoi  les  armoiries  de 
celte  pièce  diffèrent  de  celles  qui  précèdent. 
Revers,  f  MONETA  :  NOVA  :  RVM. 
Croix  pâtée,  au  milieu  lion, 

VII.  Il  existe  une  variété  de  cette  pièce  avec  : 
lOHANNA  :  DE  :  WESM. 

sur  l'avers. 

C'est  encore  M.  Lelew^el  qui  nous  a  signalé  celte  pièce. 

VIII.  Le  beau  double  gros  de  Jean  II  de  Wesemael, 
gravé  sur  notre  planche  II ,  sous  le  n"  5,  appartient  à 
M.  Van  der  Meer. 

Celte  pièce  pèse  37  décigrammes  (1). 

Avers,tIOHANNES  :  DEI  :  GKA  :  DNS  :WESEMA-  Z-  RVM. 

Au  milieu,  deux  écussons  surmontés  d'un  heaume  re- 
présentant un  oiseau  à  ailes  déployées.  Dans  le  premier 
écusson ,  les  armes  écarlelées  de  deux  lions  et  de  deux  fleurs 
de  lys;  dans  le  deuxième,  un  lion  debout. 

Revers,  f  SIT.-.  NOMEN.-.  DOMINI.-.  BENEDIGTVM. 

Croix  pâtée ,  cantonnée  de  deux  fleurs  de  lys  et  de  deux 
lions  couronnés. 

On  connaît  des  gros ,  au  même  type  que  celui-ci  ,  de 
Jean  IV,  duc  de  Brabant  (1415-1427);  de  Jean-sans-Peur, 
comte  de  Flandre  (1405-1419),  et  de  Philippe-le-Bon, 
avant  qu'il  eut  hérité  le  duché  de  Brabant  (1419-1430). 

C'est  évidemment  l'une  ou  l'autre  de  ces  mounoies  qui 
a  servi  de  modèle  à  Jean  de  Wesemael. 

Il  est  à  remarquer  que  ce  seigneur  a  adopté  un  heaume 
plus  orné  que  ceux  que  l'on  voit  sur  les  monnoies  dont 
nous  venons  de  parler;  il  a  également  surmonté  de  cou- 
ronnes les  lions  qui  sont  placés  dans  les  angles  de  la  croix. 

(l)Voici  le  poids  en  décigrammes  des  deux  gros  au  lion  d'Arnoul  d'Oreil- 
le, représentés  surla  planche  I  :  le  H"  7  pèse  23  décigraïunics ,  et  le  n"  8, 
31  décigrammes. 


(  468  ) 

Ce  qui  n'avait  pas  été  fait  ni  par  Jean-sans-Peur,  ni  par 
Philippe-le-Bon. 

Cette  monnoie  est  peut-être  la  seule  sur  laquelle  un 
baron  belge,  à  une  époque  si  reculée,  ait  pris  le  titre  de 
Dei  gratia. 

Ce  double  gros  a  eu  sans  doute  des  sous-divisions, 
qu'un  heureux  hasard  fera  découvrir  l'un  ou  l'autre  jour. 

IX.  Enfin,  M.  Van  der  Meer  possède  un  cuivre  de  Jean 
de  Wesemael  semblable  à  celui  figuré  sous  le  n°  5,  pi.  I, 
mais  avec  un  lion  sur  le  tout  au  lieu  d'une  fleur  de  lys. 

Cette  pièce,  est  au  reste,  semblable  à  ce  n°  5,  et  comme 
elle  est  assez  fruste,  on  n'y  lit  plus  d'un  côté  que  le  mot 
WESEMA  et  de  l'autre  MONETA. 

Depuis  l'impression  de  notre  première  notice,  dans  la- 
quelle nous  avons  indiqué  (p.  11)  l'année  1464  comme  celle 
de  la  mort  de  Jean  II  de  Wesemael,  nous  avons  trouvé 
le  jour  précis  de  son  décès  ,  c'est  le  26  septembre  1 464. 
Dewez  ,  dans  son  Histoire  de  la  Belgique  (l),  cite  un 
document  officiel  qui  le  prouve  (2).  Mais  cet  auteur  s'est 
trompé  en  plaçant  la  mort  de  Jean  de  Wesemael  en  1463; 
son  erreur  provient  de  ce  qu'il  n'a  pas  tenu  compte  que 
l'année  1464  ne  finissait  quau  31  mars. 

Voilà  ce  que  nous  avions  à  ajouter  à  notre  premier  tra- 
vail. Depuis  lors  on  a  découvert  non  -  seulement  des 
pièces  inédites,  mais  on  nous  a  signalé  de  nouveaux 
exemplaires    de    celles    qui    étaient  déjà   décrites  ;  c'est 

(1)  Tome  IV,  p.  400. 

(2)  En  voici  le  texte  :  Na  den  doot  wilen  jonkeren  Jans,  in  synen 
iyd  heer  tôt  Wesemale ,  mynheer  den  hertoge  van  Bourgognien  ende 
van  Brabant  in  synen  handen  heeft  doe?i  nemen  als  haer  toebehoo- 
reîide  tant  van  Mechelen...  also  geschiet  synde  tôt  den  sterfdage  toe 
jonkeren  Jans ,  welk  was  den  XXF/"<^°  dach  der  muent  van  sejilem- 

ber  laesileden. 

Gedaefi  en  gesloten  op  den  F/'«"  dach  van  meert ,  (ni  jaer  XIIIJ' 
LXIIII. 


(  469  ) 

ainsi  que  M.  Van  der  Mcer  nous  a  informé  qu'il  possédait 
encore  les  n"'  2,4,  7  et  8  de  notre  première  planche;  et 
que  nous  avons  vu  entre  les  mains  de  31.  Ducas,  de  Lille, 
un  deuxième  exemplaire  du  n"  I  de  la  même  planclie. 

En  résumé ,  nous  connaissons  déjà  quatre  seigneurs  de 
Rummen  : 

1"  Arnoul  d'Oreille,  1331-1365. 

2"  Henri  de  Diest ,  1410(1). 

3"  Jeanne  de  Wesemael,  vers  1415. 

4°  Jean  II,  seigneur  de  Wesemael  depuis  1415  (?)  jus- 
qu'au 26  septembre  1464. 

A  ces  quatre  seigneurs  nous  pouvons  attribuer  vingt- 
deux  pièces ,  en  y  comprenant  à  la  vérité  quelques-unes 
qui  n'offrent  que  de  légères  variétés. 

Ce  nombre  sera  porté  bien  plus  haut  par  les  découver- 
tes ultérieures  soit  de  pièces  à  d'autres  types,  soit  de  sous- 
divisions  de  monnoies  déjà  connues,  telles  que  celles  qui 
figurent  sur  notre  planche  II,  sous  les  n"'  1  et  5. 

G.  P.  Serrure. 


(1)  La  plupart  de  ces  dates  ne  sont  qu'approximalivcs.  Des  découver- 
tes ultérieures  permettront  de  les  établir  plus  positivement. 


(  470  ) 


^nal20e0  critiques  V^mxûQts. 


Oi.LA-PODRioA, jwar  M.  Mathieu.  Mons,  1839  ;  in- 18,  290  p. 

Sous  ce  litre  singulier,  l'auteur  des  Passe-temps  poéti- 
ques ,  Monsieur  Mathieu,  de  Mons^  vient  de  publier  un 
recueil  de  poésies,  qui  constitue  en  effet,  comme  le  dit 
le  nom,  un  véritable  pot-pourri,  où  sont  réunis  le  sé- 
rieux ,  le  badin ,  l'acerbe  ,  le  burlesque. 

Quelques-unes  des  pièces,  imprimées  dans  ce  volume, 
ont  déjà  été  livrées  au  public  sous  forme  d'opuscules  et 
de  brochures.  Le  morceau  capital  du  livre  est  le  poème  sur 
Roland  de  Lattre ,  dans  lequel  des  beautés  du  premier 
ordre  s'allient  à  une  versification  riche  et  facile.  Monsieur 
Mathieu  y  a  joint  une  curieuse  notice  biographique  du 
célèbre  musicien  montois.  Nous  félicitons  l'auteur  d'avoir 
pris  pour  sujet  une  illustration  belge ,  qu'on  avait  trop 
long- temps  reléguée  dans  l'ombre  chez  nous.  11  y  a  beau- 
coup d'entraînement  et  de  force  dans  cette  belle  pièce,  qui 
a  toute  l'élévation  de  l'ode,  toute  la  vigueur  du  dithy- 
rambe. 

Roland  de  Lattre  est  suivi  de  quelques  élégies,  et  de  quel- 
ques poésies  légères.  Un  Suicide,  le  mont  Panisel,  la  Neige, 
à  Sainte-Beuve ,  à  M.  le  comte  de  Glymes ,  Byron  et  la 
Liberté  sont  autant  d'inspirations  chaleureuses,  qui  attes- 
tent uue  imagination  puissante  et  fortement  colorée.  Voilà 
de  la  bonne  et  vraie  poésie.  Nous  ne  dirons  pas  la  même 


(  471  ) 

chose  de  quelques  pièces  de  circonstances,  qui  déparent 
vraiment  ce  recueil.  Les  personnalités ,  dont  Monsieur 
Mathieu  a  rempli  son  adresse  à  la  Régence  de  la  ville  de 
Mons^  déplairont  à  la  plupart  des  lecteurs,  surtout  à  ceux 
pour  qui  la  lutte  électorale,  entre  les  partis  de  Mons  à 
l'occasion  du  renouvellement  des  magistrats  municipaux, 
n'a  guères  d'intérêt. 

Cette  pasquinade  un  peu  hargneuse  fait  tache  :  elle  est 
indigne  du  beau  talent  de  Monsieur  Mathieu.  3Ioins  encore 
aimons-nous  les  notes  explicatives  de  cette  pièce  de  vers  ;  par 
respect  pour  le  lecteur,  il  aurait  dû  en  bannir  certaines 
particularités  locales  qu'on  tolérerait  à  peine  dans  un  rap- 
port communal.  U Industriel  es,{  encore  une  sorte  de  satyre 
du  même  genre.  Si  l'auteur  a  inséré  ces  choses  dans  l' Olla- 
podrida  pour  grossir  son  volume  ,  il  a  eu  tort,  à  coup  sûr  : 
ce  n'est  pas  la  quantité,  mais  la  qualité  qu'il  faut,  dit  la 
sagesse  des  nations.  Si  nous  nous  permettons  ces  observa- 
lions,  un  peu  crues  peut-être  ,  c'est  que  nous  voyons  avec 
regret  la  fausse  route  où  le  poète  montois  s'élance.  Cela  est 
d'autant  plus  fâcheux  que  le  talent,  le  génie,  l'esprit,  grâ- 
ces à  Dieu!  n'existent  pas  eu  embryons  chez  lui ,  mais  bien 
en  réalité.  Déjà  les  Vasse-temps  poétiques  et  d'autres  pro- 
ductions l'ont  suffisamment  prouvé.  M.  Mathieu  joint  une 
diction  pure  et  incisive  à  une  imagination  pleine  de  viva- 
cité et  d'originalité  piquante. 

Le  Lumçon  est  une  bluelte,  un  à  propos  d'intérêt  local, 
dont  le  style  n'est  guères  relevé  et  les  idées  encore  moins. 

Le  volume  se  termine  par  un  vaudeville  en  vers,  inti- 
tulé :  Deux  mariages  pour  un.  De  la  verve,  de  l'esprit, 
beaucoup  d'animation,  une  rime  aisée,  mais  ça  et  là  des 
pensées  un  peu  triviales,  voilà  ce  que  nous  rencontrons 
dans  cette  petite  pièce  dramatique,  qui  méritait  certes 
d'avoir  plus  de  letenlisseraent  qu'elle  ne  semble  en  avoir 
obtenu. 


(  ^72  ) 

En  somme  ï  Olla-podrida,  le  livre  lie  portàt-il  même 
pas  ce  tilre  bizarre,  est  une  production  digne  d'être  lue  et 
relue;  des  qualités  véritables  en  rachètent  largement  les 
défauts  et  les  imperfections;  cent  pages  de  moins,  et 
Monsieur  Mathieu  eut  composé  un  ouvrage  qui  aurait 
plu  davantage  et  qui  bien  certainement  lui  eût  attiré 
plus  de  bienveillance. 


Gloires  et  Misères,  par  Adolphe  Siret.  Bruxelles,  Hau- 
man,  1839;  2  vol.  in- 18. 

M.  Adolphe  Siret  a  débuté  chez  nous,  l'an  dernier,  dans 
le  monde  littéraire  par  un  recueil  de  poésies,  dont  une 
versification  quelquefois  facile,  de  suaves  pensées^  certaine 
élévation  dans  l'expression  constituaient  le  principal  mé- 
rite. 

Les  Genêts  furent  suivis  d'un  fragment  dramatique, 
intitulé  :  Le  dernier  Jour  du  Christ,  sujet  grandiose  qui 
eut  dû  être  traité  d'une  manière  plus  complète. 

Gloires  et  Misères  est  le  nouvel  ouvrage  que  le  jeune 
auteur  offre  au  public.  Ce  livre  est  un  mélange  de  nou- 
velles en  prose  et  de  pièces  de  vers,  où  nous  avons  trouvé 
de  l'imagination,  une  tournure  de  phrase  en  général 
incisive  ^  mordante  ,  pleine  d'effet ,  et  ce  qui  est  une  qua- 
lité devenu  rare  aujourd'hui,  du  naturel  véritable  en  plu- 
sieurs endroits. 

Le  but  de  l'écrivain  a  été  de  s'emparer  de  quelques 
grands  noms  historiques ,  hommes  ,  qui ,  nés  avec  une  in- 
telligence hors  de  ligne  ou  avec  une  puissance  de  volonté 
inaltérable,  se  sont  vus  repoussés  ici  bas  par  le  sort  et  mal 
compris  par  le  monde,  et  n'ont  trouvé  à  reposer  leur  tête 


(  473  ) 

que  dans  un  hôpital  ou  sur  la  terre  d'exil.  Les  noms  d'Elisa 
Mercœur,d'Hégesippe  Moreau,  de  Vésale,  de  Clément  Marot, 
du  Gamoëns,  de  Mozart  devaient  nalurellement  se  glisser  ici 
sous  la  plume  de  M.  Siret;  aussi  a-t-il  fait  d'Elisa  Mercœur 
une  histoire  aussi  touchante  que  vraie.  SurHegesippe  Mo- 
reau ,  sa  verve  poétique  a  exhalé  une  iambe ,  qui  nous  sem- 
ble un  peu  pâle  de  pensée  et  d'expression.  Les  infortunes  de 
l'anatomiste  belge  ont  été  dépeintes  avec  une  désespérante 
probabilité.  La  vie  de  Camoëns  est  un  drame  où  l'élégance 
de  la  forme  s'unit  à  l'intérêt  du  récit;  le  poète  portugais 
vous  fait  pleurer.  Mozart  est  encore  un  épisode  remar- 
quable par  le  ton  de  profonde  sensibilité  qui  le  caractérise. 
Nous  avons  été  étonnés  de  ne  pas  voir  dans  cette  série 
d'hommes  malheureux  et  Chatterton,  et  Gilbert,  et  Gold- 
smith,  et  Kotzebue,  et  le  Tasse,  et  tant  d'autres  célébrités 
acquises  dans  les  larmes  et  les  douleurs. 

Nous  ferons  cependant  ici  à  l'auteur  une  observation 
essentielle.  Nous  espérons,  pour  l'humanité,  qu'il  s'est  mé- 
pris en  supposant  que  les  hautes  intelligences  soient,  dès 
leur  berceau,  vouées  au  malheur.  Sous  ce  rapport,  son 
livre  est  une  erreur  grave,  où  nous  regrettons  que  M.  Siret 
soit  tombé.  Aussi  ne  serait-il  guèrcs  difficile  d'écrire  la 
contre-partie  de  Gloires  et  Misères.  Il  est  plus  d'un  grand 
génie  à  qui  toutes  les  joies  matérielles  de  ce  monde  étaient 
échues  en  partage  et  qui  n'en  ont  pas  moins  été  de  grands 
génies  !  S'il  fallait  croire  sans  réserve  au  titre  du  livre  que 
nous  analysons,  on  consacrerait  une  immoralité  qui,  par 
bonheur,  n'existe  pas  dans  la  réalité  des  choses  d'ici-bas. 

Tout  le  monde  connait  l'horrible  anecdote  de  la  révolu- 
tion française,  dont  M"«  de  Sombreuil  est  l'héroïne.  M.  Siret 
a  raconté  cette  histoire  en  vers  pleins  de  force  et  d'en- 
traînement. Nous  lui  savons  gré  de  nous  en  avoir  épargné 
les  hideux  détails. 

Pauline  ou  la  Boîte  de  fer  nous  retrace  la   vie  d'une 


(  474  ) 

sœur  ignorée  de  Van  Dyck.  Ici  encore  il  y  a  imagination 
et  intérêt,  quoiqu'assez  peu  de  vraisemblance.  —  L'histoire 
des  haines  sanglantes,  (jui  divisaient  les  ducs  de  Carrare 
et  leurs  ennemis,  est  détaillée  dans  une  Maiso?i  malheu- 
reuse. 

Mais  voici  un  fragment  dramatique,  où  le  poète  a  déve- 
loppé une  verve  d'une  grande  puissance.  Le  Fils  d'un  em- 
liereur  met  en  présence  dans  le  monastère  de  S'-Just 
Gharles-Qiiint  et  ses  deux  fils  Philippe  et  Don  Carlos.  On 
conçoit  qu'il  y  a  là  matière  à  produire  de  l'effet.  Aussi, 
sauf  un  peu  d'exagératioii,  lisons-nous  dans  cette  pièce  des 
tirades  où  félévation  de  fidée  se  trouve  unie  à  une  facture 
de  vers,  moins  négligée  qu'ailleurs.  Nous  aimons  moins  son 
fragment  d'un  poème  biblique,  intitulé  Jacob;  cette  pièce 
estraide  et  inanimée;  peut-être  est-ce  à  cause  de  la  sévé- 
rité du  sujet.  \)an'&  Pauvre  fille ,  lettres  d'une  pauvre  en- 
fant séduite,  qui  écrit  à  sa  mère  qu'elle  croit  irritée  ,  il  y  a 
je  ne  sais  quoi  de  naturel,  d'entraînant  qui  vous  attache, 
malgré  vous ,  à  cette  Gabrielle  que  le  poète  laisse  cepen- 
dant dans  le  vague,  sans  doute  pour  nous  intéresser 
davantage  à  elle.  Quand  on  a  lu  cette  correspondance, 
qu'on  dirait  écrite  avec  des  larmes,  on  se  sent  tout  ému. 

Parmi  les  pièces  de  vers  que  M.  Siret  a  insérées  dans 
Gloires  et  Misères ^  nous  avons  remarqué  surtout  les  sui- 
vantes que  nous  recommandons  à  tous  ceux  qui  aiment  à 
lire  de  la  bonne  poésie ,  non  de  mots  ,  mais  de  sentiments  : 
Mélodie j  1839  Pictura ,  la  Pauvreté  honteuse. 

Nous  engageons  maintenant  M.  Siret  à  s'essayer  sur  une 
plus  grande  échelle.  Les  morceaux  de  prose  qu'il  vient  de 
donner  au  public  sont  des  bluettes,  sur  lesquelles  on  ne 
peut  guères  juger  un  écrivain  ,  mais  qui  servent  au  moins 
à  constater  qu'il  y  a  chez  lui  de  l'avenir  et  de  l'imagination. 

Plus  d'expérience  de  la  langue,  du  rythme^  de  la  versifi- 
cation, plus  de  soin  apporté  dans  la  conlexture  des  phrases, 


(  475  ) 

plus  de  cohésion  dans  l'ensemble  de  ses  productions,  et  Tau- 
leur  des  Genêts  et  de  Gloires  et  Misères  deviendra  un  écri- 
vain dont  notre  pays  pourra  s'enorgueillir. 

Ce  qui  nous  semble  manquer  un  peu  à  M.  Siret,  ce  sont 
des  connaissances  de  fond,  que  jeune  et  laborieux  comme 
il  est,  il  lui  sera  facile  au  reste  d'acquérir.  Qu'il  le  sache 
bien,  les  publications,  entièrement  légères,  ne  sont  pas 
appelées  chez  nous  à  former  à  un  écrivain  une  réputation 
durable.  On  est  un  peu  sérieux  en  Belgique ,  et  peut-être 
n'a-t-on  pas  tort. 

Gloires  et  Misères  plaira,  nous  en  sommes  sur,  à  tout 
ceux  qui  lisent  plus  par  le  cœur  que  par  les  yeux;  Gloires 
et  Misères  est  une  pierre  angulaire  sur  laquelle  peut  s'édi- 
fier un  avenir  d'écrivain.  Courage  donc  et  marchez!... 


Nouvelle  GRAîniAiKE  Française  ,  à  Fusage  des  Écoles  belges, 
parA.F.  Guillerez.Gdind,  Lebrun-Devigne,  1839;  in-12, 
pag.  VIII  et  436. 

Si  nous  voyons  encore  publier  tous  les  jours  des  livres 
qui  ont  pour  objet  l'enseignement  des  éléments  de  la  lan- 
gue française,  c'est  qu'en  effet,  comme  toute  chose  en  ce 
monde ,  la  grammaire  subit  des  changements  et  des  amé- 
liorations, qu'il  faut  consigner  dans  des  écrits.  De  tous  les 
idiomes  qui  se  parlent  en  Europe,  peu  présentent  autant 
de  bizarreries,  de  caprices  et  de  difiicullés  que  la  langue 
de  nos  voisins  du  midi.  Voltaire  lui-même  avouait,  au  lit 
de  mort,  qu'il  ne  la  connaissait  pas  toute  entière. 

M.  Guillerez  vient  de  publier  une  nouvelle  grammaire 
à  l'usage  des  écoles  belges,  qui,  nous  semble-l-il,  doit  faci- 
liter extrêmement  aux  élèves  la  connaissance  du  français. 


(  476  ) 

Nous  n'entrerons  pas  ici  dans  les  détails  de  son  ouvrage, 
les  bornes  de  notre  recueil  ne  nous  le  permettent  point. 
I!  suffira  de  dire  que  nous  y  avons  remarqué  autant  de 
méthode  que  de  clarié,  deux  qualités  qui  ne  sauraient 
être  trop  appréciées  et  des  instituteurs  et  de  ceux  qui  sui- 
vent leurs  cours. 

Une  heureuse  innovation  dislingue  le  livre  de  M.  Guil- 
lerez;  tous  ses  exemples  concernent  la  Belgique.  Dans  un 
moment  où  le  sens  national  cherche  à  se  développer  de 
toutes  façons,  c'est  une  idée  dont  tout  le  monde  saura  gré 
à  l'auteur. 

Toutes  les  règles  sont  appuyées  de  phrases  qui ,  réunies 
ensemble,  forment  une  véritable  histoire  de  notre  pays. 
Celte  manière  d'instruire  les  élèves  est  aussi  agréable 
qu'utile;  elle  ranime  l'amour  de  la  patrie,  chose  qui  a  été 
trop  long-temps  négligée  chez  nous.  Ce  que  nous  nous 
permettrons  cependant  de  reprocher  à  Bl  Guilierez,  c'est 
d'avoir  donné,  sous  forme  d'exemples  grammaticaux, 
un  encens,  souvent  immérité  ,  et  à  coup  sûr  toujours  dé- 
placé, a  des  noms  contemporains,  qui  viennent  à  peine 
de  surgir  en  Belgique.  Nous  n'aimons  pas  cette  exploitation 
de  la  vanité!  C'est  dommage  qu'une  semblable  tache  dé- 
pare un  livre,  estimable  au  reste  sous  d'autres  rapports. 

Quelque  soit  le  mérite  des  poètes  belges  que  M.  Guilierez 
a  cités  dans  son  chapitre  de  la  versification ,  nous  pensons 
qu'il  eut  mieux  fait  en  empruntant  aux  grands  noms  de 
la  France  des  citations  qui  auraient  à  la  fois  plus  d'auto- 
rité et  d  importance.  Je  sais  bien  que  donner  de  la  cou- 
leur nationale  à  son  ouvrage,  telle  a  été  l'honorable  but 
de  l'auteur;  mais  aux  yeux  de  critiques  sévères,  il  paraîtra 
toujours  plus  rationnel  de  puiser  des  exemples  de  langue 
dans  les  écrits  qui  ont  obienu  le  plus  de  renom  et  qui 
peuvent  être  proposés  comme  modèles  dans  tous  les  gen- 
res de  lilléralure. 


(  477  ) 

Des  exercices  orthographiques,  appliqués  à  l'histoire 
des  Belges,  terminent  le  volume.  Nous  répéterions  encore 
volontiers  ici  la  réflexion  que  nous  avons  faite  par  rap- 
port à  la  versification ,  mais  les  fragments  ,  cités  par 
M.  Guillerez,  renferment  tous  des  parties  de  l'histoire  de 
la  Belgique,  et  comme  le  livre  est  écrit  pour  nous,  on  lui 
pardonnera,  en  faveur  de  sa  bonne  intention,  de  n'avoir 
point  cité  plutôt  Montesquieu,  Chateaubriand  ou  Sand, 

Nous  finirons  cet  aperçu,  malheureusement  trop  in- 
complet pour  une  publication  de  ce  genre,  en  émettant  le 
vœu  que  la  Nouvelle  granunaire  de  M.  Guillerez  obtienne 
tout  le  succès  que  mérite  une  œuvre  où  l'esprit  de  nationa- 
lité marche  en  compagnie  d'une  instruction  solide. 


L'Inquisiteur  ,  histoire  liégeoise  du  XVI^  siècle  .  par 
Alphonse  Polain.  Liège,  Jeunehomme,  1839;  in-S", 
96  pag. 

Sous  ce  titre  sombre  et  terrible,  qui  rappelle  si  bien 
les  auto-da-fés  et  la  torture,  M.  A.  Polain,  connu  déjà  par 
sa  collobaration  à  la  Revue  belge  ^  vient  de  publier  une 
nouvelle  historique  qui  se  distingue  par  de  la  verve,  de  la 
chaleur,  une  sage  correction  de  style,  une  imagination 
forte  et  inventive. 

Toute  la  scène  se  passe  au  temps  de  Tévêque  Erard  de  la 
Marck,  vers  1538.  Jamolet  est  un  moine  dominicain,  de 
la  plus  hideuse  trempe  ,  qui  est  à  la  tête  d'une  sorte  de  tri- 
bunal inquisitorial ,  devant  lequel  sont  cités  sans  pitié  tous 
individus  soupçonnés  d hérésie.  Henri,  comte  de  Jem- 
meppe,  est  un  de  ces  jeunes  hommes,  à  l'ame  ardente,  au 
courage  d'airain,  à  la  volonté  inébranlable,  tel  qu'il  en 

32 


(  478  ) 

faut  aux  époques  de  commotions  politiques  en  général  et 
aux  romans  historiques  en  particulier.  Il  aime  Marguerite 
de  Bierset,  pour  qui  Jamolet  brûle  de  son  côté  d'un  amour 
délirant.  Malhonet,  le  doyen  des  Febvres  ,  est  un  créature 
flexible  comme  de  la  cire,  intriguante  comme  un  homme 
de  rien.  Ce  qu'il  veut ,  c'est  être  bourgmestre.  Il  fait  cause 
commune  avec  Jamolet  pour  arriver  à  son  but.  Mais  la 
vieille  commune  liégeoise  s'émeut  contre  l'évêque  et  la 
tyrannie  du  tribunal  inquisitorial.  Henri,  déjà  chef  des 
Rivageois,  espèce  de  troupes  vagabondes,  qui  avaient  ar- 
boré la  bannière  du  mécontentement,  se  met  à  la  tête  du 
peuple,  mais  il  désigne  bientôt  pour  le  remplacer  un 
bourgeois ,  appelé  Meunier.  Dans  l'entretemps,  l'infâme 
Jamolet  a  su  s'emparer  de  Marguerite  et  de  sa  vieille  tante 
au  château  de  Bierset, 

Heureusement  qu'un  certain  André,  guidé  par  un  es- 
prit de  vengeance  et  aidé  du  domestique  de  Henri  et  quel- 
ques autres  finit,  par  pénétrer  dans  l'habitation  où  le 
moine  est  prêt  à  triompher  par  la  violence  de  la  résistance 
de  la  jeune  comtesse.  Henri  survient.  Le  peuple  furieux 
conduit  Jamolet  et  son  complice,  Mathonet,  au  supplice, 
le  comte  de  Jemeppe  épouse  son  amante  au  lit  de  mort  de 
sa  tante ,  la  comtesse  de  Bierset. 

Telle  est  la  charpente  de  ce  drame ,  où  Ton  remarque 
une  action  qui  ne  laisse  pas  se  ralentir  un  instant  la  cu- 
riosité du  lecteur.  C'est  en  faveur  de  l'intérêt  qu'il  a  ré- 
pandu sur  son  sujet,  qu'il  faut  pardonner  à  M,  A,  Polain 
d'avoir  outré  avec  tant  d'exagération  le  caractère  du  do- 
minicain, d'avoir  esquissé  à  peine  quelques  caractères, 
dont  il  eut  pu  tirer  le  parti  le  plus  favorable ,  d'être  un 
peu  cru  dans  les  détails  des  cruautés  de  Jamolet.  11  y  a  de 
ces  choses  qu'il  faut  laisser  deviner  au  lecteur. 

Le  passage  ,  sans  contredit ,  le  plus  remarquable  de  ce 
livre  ,  c'est  la  scène  où  l'évêque  est  mort,  où  le  peuple  a 


(  479  ) 

envahi  le  palais,  où  les  torches  et  les  llambcaux  éclairent 
l'émeute  populaire.  Ce  speclaclc  ferait  le  sujet  d'un 
magnifique  tableau.  Si  nous  avions  un  vœu  à  émettre  , 
nous  voudrions  que  M,  A.  Polain  s'emparât  d'une  de  ces 
grandes  et  terribles  épisodes  de  l'histoire  de  Liège  pour  en 
faire  un  roiuan  historique.  Le  Sanglier  des  Ardetmes  ou 
Jeaîi  sans  piété  sont  des  sujets  bien  beaux  à  traiter  .' 

J.  S. 


Histoire  de  la  Belgique,  ^jar  G.  H.  Moke.  Première  partie. 
Un  volume  in-S",  de  236  pages. 

M.  Moke  n'est  pas  nouveau-venu  dans  la  carrière  des 
lettres.  Il  y  est  entré,  passé  douze  à  treize  ans  ,  par  le  jour- 
nalisme, qui,  en  ces  temps  de  préoccupations  politiques, 
semble  devoir  servir  d'apprentissage  aux  jeunes  talents.  Il 
ne  tarda  pas  à  trouver  les  colonnes  d'un  journal  trop 
étroites  pour  son  imagination  vive,  et  trop  légères  pour 
ses  études  sérieuses.  Il  écrivit  des  romans  historiques ,  dont 
on  a  gardé  souvenir.  Bientôt  après  il  se  borna  à  l'histoire, 
et  nous  livra  des  travaux  qui,  pour  être  empreints  de 
quelques  idées  systématiques,  n'en  donnaient  pas  moins 
de  grandes  espérances.  Ensuite,  il  se  voua  à  l'enseignement 
moyen  et  universitaire,  qui  forme  aujourd'hui  la  base  de 
ses  occupations.  Nous  ne  sommes  pas  de  ceux  qui  pensent 
que  la  variété  des  études  nuise  à  leur  succès.  Une  intelli- 
gence bien  conformée  gagne  à  étendre  son  horizon  ,  s'en- 
richit de  tout  ce  qu'elle  voit,  et  trouve  des  forces  nouvelles 
dans  chaque  fait  qu'elle  recueille ,  dans  chaque  pensée 
que  fait  jaillir  la  méditation.  Les  idées  fausses,  les  élucu- 
brations  systématiques  (résultats  synonymes,  la  plupart 
du  temps),  contre  lesquelles  les  meilleurs  esprits  ne  peu- 


(  480  ) 

vent  assez  se  prémunir  ,  sont  le  produit  net  des  considéra^ 
tiens  étroites  qu'inspire  l'étude  d'une  seule  des  faces  du 
mystérieux  et  sombre  édifice  des  connaissances  humaines. 
Bien  savoir,  c'est  beaucoup  savoir,  n'en  déplaise  aux  illus- 
trations en  us ,  qui,  par  prudence  personnelle  sans  doute, 
professent  la  maxime  contraire.  Inutile  d'établir  celte 
restriction  que  les  diverses  branches  que  l'esprit  cultive, 
doivent  correspondre  au  tronc  auquel  elles  servent  d'orne- 
ment. Nous  ne  prétendons  pas  en  effet  que  des  études, 
pour  ainsi  dire  opposées  et  sans  liaison  sensible,  puissent 
se  prêter  un  secours  efficace.  A  parler  absolumement,  cette 
dernière  proposition  est  loin  d'être  insoutenable  j  mais 
dans  l'état  présent  des  sciences  et  des  relations  sociales, 
une  universalité  trop  prononcée  serait  dangereuse,  et  il  pa- 
raîtrait difficile  d'en  apprécier  les  résultats.  —  Qu'il  nous 
soit  permis  de  croire  que  l'application  sérieuse  de  M.  3Ioke 
au  journalisme,  à  la  littérature  d'imagination,  à  l'histoire 
et  à  l'enseignement  lui  a  valu  la  rectitude  de  jugement  et 
la  puissance  de  style  qui  dominent  les  autres  qualités  de 
son  dernier  ouvrage. 

Puisque  nous  voilà  revenu  ,  d'assez  loin,  à  X Histoire  de 
la  Belgique ,  ne  quittons  plus  ce  livre  ,  et  disons  sommai- 
rement au  lecteur  ce  que  nous  en  pensons. 

On  s'aperçoit  tout  d'abord  que  BI.  Moke  s'est  placé  à  un 
autre  point  de  vue  que  ses  devanciers.  Au  lieu  d'écrire 
l'histoire  spéciale  des  diverses  principautés  dont  la  réunion 
a  formé  la  Belgique  actuelle;  de  se  montrer  tantôt  fla- 
mand, tantôt  brabançon,  tantôt  encore  liégeois;  de  suivre 
Tordre  des  faits  et  de  sacrifier  l'ordre  chronologique,  il  se 
pose  au  centre  des  provinces,  et,  adoptant  la  méthode 
synchronistique ,  il  efface  les  limites  des  petits  états  belges, 
les  confond  comme  en  un  seul  royaume,  et  fait  passer 
sous  nos  yeux  les  événements  importants  sans  distinc- 
tion   de  sceptre  ni  de  nationalité.  Cette  méthode  offre  des 


{  48t  ) 

avantages,   mais    elle    est  exposée   à  des  inconvénients. 

Les  avantages  sont  que  le  lecteur  peu  exercé  ne  confond 
pas  les  dates;  que  les  événements  se  déroulent  clairs  et 
rapides,  que  les  enseignements,  qui  en  découlent,  sont 
mieux  compris.  Les  inconvénients  consistent  en  ce  que 
l'auteur  s'expose  à  rapproclier  des  événements  sans  liaison, 
à  effacer  des  oppositions,  à  laisser  dans  l'ombre  des  par- 
ticularités qui ,  pour  être  d'un  intérêt  secondaire ,  n'en  ont 
pas  moins  du  prix  aux  yeux  de  l'historien.  Celle  espèce  de 
compensation  a  servi  de  prétexte  aux  esprits  étroits  pour 
suivre  presque  généralement  la  méthode  qu'on  pourrait 
nommer  analytique,  en  opposition  avec  celle  que  nous 
appellerions  synthétique,  si  ces  qualifications  ne  peignaient 
sous  des  couleurs  trop  opposées  des  manières  qu'il  est  dé- 
sirable, si  non  facile  d'harmonier.  Hàtons-nous  de  dire 
que  des  avantages  et  des  inconvénients  signalés  plus  haut, 
M.  Moke  a  su  s'approprier  les  uns  et  éviter  les  autres.  Il 
saisit  habilement  les  situations  culminantes,  autour  des- 
quelles il  groupe  avec  tact  les  faits  secondaires;  les  causes 
sont  bien  posées,  les  effets  heureusement  déduits  ;  le  récit 
est  concis  et  clair;  le  style  est  souvent  élégant,  parfois 
élevé,  toujours  correct.  Cet  éloge  général  est  flatteur , 
mais,  nous  le  disons  en  conscience,  il  n'est  pas  exagéré. 
Nous  croyons  notamment  que  M.  Moke  a  expliqué  avec 
beaucoup  de  talent  les  grandes  révolutions  sociales  et  dy- 
nastiques, qui  ont  agité  nos  provinces  lors  de  l'invasion 
des  Romains,  de  la  conquête  des  Francs,  de  la  formation 
de  la  Lotharingie  ,  et  de  l'établissement  des  principautés 
féodales  qui  se  sont  réunies,  au  XV«  siècle,  sous  le  sceptre 
des  ducs  de  Bourgogne.  Dans  plusieurs  endroits  de  sou 
livre,  M.  Moke  a  présenté  les  événements  sous  un  jour  si 
heureux,  que  des  lecteurs,  rompus  aux  difficultés  histori- 
ques, lui  sauront  gré  de  ses  efforts. 

Cependant,  ce  compte  rendu  étant  sincère,  nous  croyons 


(  482  ) 

devoir,  pour  notre  satisfaction  propre  et  pour  celle  de 
M.  Moke,  formuler  ici  quelques  remarques  critiques  sur 
lesquelles  il  nous  est  impossible  de  passer  condamnation. 
Libre  à  chacun  ensuite  d'en  juger  autrement  que  nous. 

L'auteur  parle  constamment  des  Belges  et  de  la  Bel- 
gique ,  comme  si  ces  mots  avaient  eu  quelque  valeur  de- 
puis les  Francs  jusqu'à  l'avènement  de  Philippe  de  Bour- 
gogne, dit  le  Bon.  Il  suppose,  que  dans  cet  immense 
intervalle,  nos  provinces  formaient  un  tout  plus  ou  moins 
complet,  qui  eût  un  nom  général,  un  caractère  com- 
mun. Or  il  n'en  est  rien ,  et  M.  Moke  le  sait  mieux  que 
nous.  Au  moyen-âge,  il  n'y  avait  ni  Belges  ni  Belgique, 
pas  plus  que  de  Hollande,  de  Prusse  ,  etc.  La  Belgique 
actuelle  ne  comptait  que  des  Flamands,  des  Hennuyers , 
des  Brabançons,  des  Liégeois  ,  des  Namurois  et  des  Luxem- 
bourgeois. Le  mot  de  Belge  était  même  inconnu  à  nos  an- 
cêtres. Il  nous  semble  donc  faux  de  leur  donner  une  qua- 
lification commune,  en  dehors  de  leurs  mœurs  et  de  leurs 
connaissances.  On  s'expose  ainsi  à  donner  au  lecteur  une 
idée  fausse  du  véritable  état  des  choses.  Nous  savons  bien 
que  M,  Moke  destine  son  livre  aux  écoles,  et  qu'il  lui  a 
peut-être  paru  convenable  d'imprimer  un  caractère  na- 
tional à  son  récit.  Il  aura  craint  que  l'étranger  ne  nous 
reproche  de  ne  pas  avoir  eu  de  patrie  pendant  mille  ans. 
Nous  n'acceptons  pas  cette  explication  :  d'abord  en  histoire, 
il  faut  être  vrai  avant  tout  ;  ensuite,  les  noms  flamands, 
brabançons  et  liégeois  sont  aussi  glorieux,  aussi  honorables 
que  le  nom  belge.  Nos  ancêtres  ont  possédé  assez  de  ver- 
tus pour  ennoblir  plusieurs  noms.  La  France  serait-elle 
désespérée  de  savoir  qu'elle  n'est  France  que  depuis  neuf 
siècles?  Qu'était  la  France  sous  les  premiers  successeurs  de 
Charlemagne?  Ne  formait-elle  pas,  comme  la  Belgique,  un 
cahos  de  provinces  sans  cohésion,  indépendantes  les  unes 
des  autres,  et  ciiacune  fière  d'elle-même?  Il  est  bon  sans 


(  483  ) 

doute  d'aider  au  patriotisme,  de  llatler  les  croyances  ho- 
norables, mais  quand  on  a  l'iionneur  d'écrire  au  nom  de 
la  vérité,  c'est  envers  elle  seule  qu'il  faut  garder  des  mé- 
nagements. 

M.  Moke  a  glissé  par-ci  par-là  quelques  assertions,  qu'il 
n'a  pas  vérifiées  avec  sa  conscience  habituelle.  Les  remar- 
ques que  nous  pourrions  faire  à  ce  propos,  sembleraient 
futiles  à  bien  de  personnes,  et  elles  sont  en  effet  peu  im- 
portantes pour  le  commun  des  lecteurs.  Cependant,  nous 
en  dirons  une ,  qui  prouvera  du  moins  que  nous  avons  lu 
M.  Moke  avec  une  scrupuleuse  attention. 

A  la  page  64,  il  est  dit  que  les  Normands  cessèrent, 
vers  l'an  900,  d'attaquer  nos  provinces.  Ce  fait  est  exact, 
mais  la  raison  qu'en  donne  l'auteur  ne  l'est  point.  En  ef- 
fet, M.  Moke  pense  que  les  Normands  n'osaient  plus  re- 
paraître sur  nos  côtes.  La  vérité  est  qu'Un  y  avait  plus  de 
Normands  conquérants.  La  soif  du  pillage,  la  beauté  des 
sites  de  l'Europe  méridionale,  l'usage  adopté  par  les  ca- 
dets de  famille  de  la  basse  Germanie,  du  Danemarc  et  de 
la  Suède  de  chercher  fortune  par  terre  ou  par  mer,  les 
armes  à  la  main,  avaient,  pendant  plusieurs  siècles,  poussé 
des  armées  de  brigands  vers  la  Méditerannéej  plus  tard 
à  la  suite  des  conquêtes  de  Charlemagne  en  Germanie, 
le  fanatisme  religieux  des  habitants  du  nord  de  l'Europe 
les  porta  à  continuer  leurs  excursions.  A  la  cupidité 
était  venu  se  joindre  le  mobile  non  moins  puissant  de  la 
vengeance.  Nous  croyons  fermement  que  les  invasions  des 
barbares  dans  nos  provinces  ,  pendant  le  neuvième  siècle , 
n'ont  pas  eu  d'autre  cause  que  la  haine  vouée  par  eux 
aux  Chrétiens.  Nous  pourrions,  au  besoin,  appuyer  cette 
opinion  de  faits  remarquables.  Qu'arriva-t-il  à  la  mort 
de  Charlemagne  ?  Les  sanglantes  conquêtes  du  grand 
homme  furent  continuées  d'une  manière  plus  douce  et 
plus  fructueuse  par  les  prédicateurs  chrétiens.  Les  Nor- 


(  484  ) 

mands  se  converlirenl....  Cet  événement  grave ,  qui  se 
compléta  à  la  fin  du  neuvième  siècle,  explique  naturel- 
lement pourquoi  les  barbares  cessèrent  d'épouvanter  l'Eu- 
rope civilisée.  Ce  serait  une  grande  erreur  de  croire  que 
les  exploits  guerriers  des  Francs ,  des  Flamands  et  des 
Brabançons  eussent  arrêté  les  Normands.  Ceux-ci  n'avaient 
pas  moins  de  courage  que  ceux-là,  et,  vraiment,  nos 
pères  de  l'an  900  n'étaient  pas  plus  redoutables  que  leurs 
prédécesseurs.  Reconnaissons  que  le  christianisme  seul  a 
mis  un  terme  aux  massacres  qui  ont  fait,  pendant  plu- 
sieurs siècles,  une  horrible  boucherie  de  la  brillante  Eu- 
rope de  nos  jours. 

Voilà  bien  des  lignes  sur  une  seule  ligne  de  M.  Moke. 
Mais,  ainsi  que  nous  l'avons  dit,  quand  nous  critiquons 
un  ouvrage,  nous  tenons  à  montrer  que  nous  l'avons  lu. 
Encore  un  mot  dans  la  même  intention. 

M.  Moke  a  eu  le  bon  esprit  d'appeler  nos  pères  des  noms 
qu'on  leur  connait;  pour  lui,  Gharlemagne  reste  Charle- 
magne,  Clovis  Glovis,  etc.  Nous  l'en  félicitons.  Les  termi- 
naisons barbares  doivent  être  reléguées  dans  les  mémoires 
scientifiques.  Mais  pourquoi  a-t-il  fait  exception  à  l'égard 
de  Caries  Martel  f  C'est  une  faute  d'impression,  à  n'en  pas 
douter.  Nous  en  dirons  autant  de  la  date  de  913,  assignée 
à  la  bataille  d'Hougarde.  Il  faut  lire  1014.  A  propos  de 
fautes  d'impression ,  nous  recommandons  la  seconde  édi- 
tion de  Y  Histoire  de  la  Belgique  à  l'attention  particulière 
de  M.  Moke.  L'exemplaire,  que  nous  possédons,  laisse  à 
désirer  sous  ce  rapport. 

Nous  avons  fini  avec  la  critique,  et  nous  en  sommes 
charmé.  Ce  n'est  pas  sans  peine  que  nous  nous  éteadons 
sur  des  points  accessoires,  alors  qu'au  total  le  livre  est 
excellent.  Nous  résumerons  brièvement  notre  opinion  en 
disant  qu'à  notre  avis,  l'histoire  de  M.  Moke  est  su- 
périeure,   sous   bien  des  rapports ,    à    toutes  celles   que 


(  485  ) 

possède  notre  littérature.  Celte  déclaration  a  d'autant 
plus  de  poids,  on  nous  permettra  de  le  dire,  que  nous 
avons  nous  même  écrit  une  Histoire  de  la  Belgique,  et  que 
cette  histoire,  ainsi  que  nous  avons  l'honneur  de  le  rap- 
peler au  lecteur,  date  de  1836.  Nous  sommes  très-intime- 
ment convaincu  que  notre  livre  n'est  qu'un  exercice  caco- 
graphique  auprès  de  celui  de  M.  Mokc. 

Avis  aux  maisons  d'éducation  qui  ont  bien  voulu 
adopter  provisoirement  notre  ouvrage...  Mais  avis  inutile, 
car  le  travail  de  M.  Moke  sera  bientôt  dans  toutes  les 
mains. 

COOMANS  AÎWÉ, 


(  486  ) 


6uUctin  i3ibii0grapl)iiïue. 


HISTOIRE  DE  BELGIQUE, 

Dits  de  cronike  ende  genealopfie  van  den  prinsen  ende  gra- 
ven  van  den  foreeste  van  Bue,  dat  heet  Vlaenderen  ,  van  863 
tôt  1436,  gevolgd  naer  het  oorspronkelyk  handsehrift  van 
Jan  van  Dixmude;  uitgegeven  door  J,  J.  Lambin.  Ypre,  1839  , 
Lambin;  gr.  in-S",  pp.  XXXV  et  393. 

[Cette  chronique  de  Flandre ,  publiée  avec  ce  soin  minutieux  auquel 
M-  Lambin  nous  a  habitués  depuis  long-temps,  est  précédée  d'une  préface 
sur  l'économie  même  de  l'ouvrage,  et  suivie  d'un  dictionnaire  géographi- 
que ,  d'un  glossaire  de  vieux  mots  flamands  et  d'une  excellente  table  al- 
phabéticpie  des  matières.] 

Betoog  dat  er  uit  de  Commentani  de  Bello  Gaîlico  van  Julius 
Cœsar  volstrekt  geen  bewys  kan  worden  getrokken,  als  ofdie 
veldheer  of  zyne  krygsoversten  in  Noord-Nederland  oorlog 
zouden  hebben  gevoerd.  Hertoghenbosch  ,  by  de  Meline,  1839. 

Beau  traité  de  la  diversité  des  natures  des  fiefs  en  Flandre. 
Gand,  Annoot,  1839;  gr.  in-8°,  III  et  9-i  pag. 

[Cet  opuscule  est  publié  avec  soin  par  >!.  Jules  Ketele,  d'Audenarde. 
d'après  un  MS.  qui  est  en  la  possession  de  M.  le  comte  Vandermeere  ,  de 
Cruyshaiithcni.] 

Précis  de  l'bistoire  de  la  Belgique,  à  l'usage  des  écoles  pri- 
maires, tiré  des  meilleurs  auteurs,  par  H.  Thaon.  Bruxelles, 
Deprez-Pareiit,  1839. 

La  Belgique  illustrée  parles  sciences, les  arts  et  les  lettres, 
par  Octave  Delepierre.  Bruxelles,  Wablen,  1840;  gr.  in-12, 
pag.  208. 

[Cet  ouvrage  est  imprimé  avec  un  luxe,  un  soin  typograpliique ,  une 
élégance  de  formes  auxquels   nos  imprimeurs  n'ont  gucres  habitué  les 


(  487  ) 

.'iiitcurs  belges.  M.  Wahlen  na  rien  lait  sortir  de  ses  presses  qui  soit  plus 
beau.  L"ouvra{je  publié  est  la  reproiliiction  de  VApenu  des  di-ioit- 
vertes  et  inventions  des  Belges,  livré  à  riaiprcssion  .  il  y  a  quatre  ans. 
Quelqu"intéressantesque  soient  déjà  les  notes  de  M.  Delcpierrc,  nous  eus- 
sions voulu  les  voir  plus  complètes.] 

Histoire  du  royaume  des  Pays-Ba.s  depuis  181-4  jusqu'en  1830, 
précédée  d'un  coup-d'œil  sur  notre  ancien  régime  communal, 
sur  les  révolutions  belges  des  XVP  et  XVIP  siècles  et  suivie 
d'une  esquisse  de  l'histoire  du  royaume  de  Belgique  depuis  la 
révolution  de  1830  jusqu'aujourd'hui;  accompagnée  de  dis- 
cours parlementaires,  de  notes  et  de  pièces  justificatives , 
par  E.  C.  De  Gerlache.  Bruxelles,  Rayez,  1839;  2  vol.  in-8°, 
de  XXXIX  et  362  et  311  pag. 

[Le  2«  volume  ne  contient  que  des  documents.  L'aperçu  historique  de 
Tautcur  sur  la  révolution  brabançonne  de  1789,  est  un  des  plus  beaux 
morceaux  que  Ton  ait  écrit  sur  notre  histoire.  Josej)h  II  y  est  jugé  avec 
un  coup-d'œil  aussi  sage  que  profond.] 

Histoire  du  Limbourg,  suivie  de  celle  des  comtés  de  Daelhem 
et  de  Fauquemont,  des  annales  de  l'abbaye  de  Rolduc,  par 
M.  S.  P.  Ernst;  publiée  par  M.  E.  Lavalleye,  tom.  IV.  Liège, 
Collardin,  1839;  in-8'',  pag.  o8-i. 

[Des  notes  aussi  savantes  que  curieuses  de  l'éditeur  accompagnent  en- 
core ce  4":  volume  des  œuvres  historiques  du  curé  d'Afden.] 

Particularités  curieuses  sur  Jacqueline  de  Bavière ,  comtesse 
de  Hainaut.  Première  partie.  Mons,  Em.  Hoyois,  1839;  in-8° 
de  XXVII  et  î7o  pages,  avec  3  fac-similé. 

[C'est  le  N»  7  des  publications  de  la  Société  des  Bibliophiles  de  Mons  ; 
elle  est  due  à  M.  De  Courtray.] 

Pieimkronyk  von  Flandern,  nach  einer  altniederlândschen 
HandschriftmitAnmerkungenzuni  crsten  Mahl  herausgegeben 
von  Eduard  Kausler,  konigl.  Wûrtembergischen  Arcbivrath  zu 
Stuttgart. Tûbingen,L.  F,  Fues,  18i0;  in- 8°,  pag.  711. 

Belgium  historical  and  pictoresque  from  french  of  A.  Fcr- 
rier.  Bruxelles,  Hauman,  1839. 

Cronica  monasterii  de  Dunis,  per  fratrem  Adrianum  But. 
Brugis,  1839;typis  Van  deCasteele-Werbrouck,  in-i°,  pag.  181. 

[Cette  chronique  .  écrite  vers  la  fin  du  XV«  siècle,  est  le  premier  vo- 
lume du  recueil  des  documents  concernant  l'histoire  et  les  antiquités  de 
la  Flandre  occidentale ,  publié  par  la  Société  dénuilation  de  Bruges.  La 
biographie  dAdrien  De  Budt  précède  la  chronique,  et  4.5  chartes  de 
l'an  1128  à  1481  servent  de  pièces  justificatives] 


(  488  ) 

Seconde  lettre  sur  Jacques  de  Gnyse,  annaliste  du  Hainaut, 
à  M.  le  baron  de  Stassart,  par  A.  A.ubenas.  Paris,  1839;  in-8°. 

Histoire  de  la  Belgique,  par  II.  G.  Moke.  Gand,  Bivort-Cro- 
wie,  1839;in-8°,  pp.  23G. 

Révolution  belge,  1828  ta  1829.  Souvenirs  personnels  avec 
pièces  à  l'appui,  par  De  Potter,  Bruxelles,  Meline,  1839;  2  vol. 
10-8°  et  post-scriptum,  371 ,  323  et  S3. 

OEuvres  complètes  de  J.  J.  Raepsnet,  revues,  corrigées  et 
considérablement  augmentées  par  l'auteur,  suivies  de  ses 
œuvres  posthumes.  Gand,  C.  Annoot-Braeckman,  1839. 

[Le  quatrième  volume  vient  de  paraître.] 

Cronijcke  van  den  lande  ende  graefscepe  van  Vlaenderen, 
gemaect  door  J,  Nicolaes  Despars,  van  -40b  tôt  1492.  Voor  de 
eerste  mael  in  het  licht  gegeven  door  J.  De  Jonghe.  Brugge, 

1839. 

[La  15^  livraison  est  publiée  ,  elle  contient  le  règne  de  Louis  de  Maie  , 
de  l'année  1382  à  1384.] 

Tableau  historique  et  pittoresque  de  Courtrai,  par  J.  L.  P, 
Bruxelles,  Hauman,  in-18;  1839. 

Histoire  de  la  ville  de  Tournai,  par  J.  B.  Flamine.  Tournai , 
Massart,  1839;  in -8". 

LITTÉRATURE. 

Gedichten  van  F.  Rens.  Gent,  Vandcrhaghen-Hulin ,  1839; 
in-8°,  p.  161. 

MyneGevangenissen.  GedenkschriftenvanSilvio  Pellico  van 
Saluzzo;  uit  het  italiaensch  vertaeld  door  A.  D.  Wouters.  Brus- 
sel,  Desprez-Parent,  1839;  in-18,  pp.  387. 

Hermann  dcDronkaert,  tooneelspel  in  een  bedrvf,  vrye  na- 
volging,door  Era.  Rosseels.  Antwerpen  ,  P.  Van  Bouwel,  1839; 
in-8'',  pp.  46. 

L'Inquisiteur,  histoire  liégeoise  du  XVP  siècle ,  par  Alphonse 
Polain.  Liège,  Jeunehomme  ,  1839;  in-8°,  pp.  96. 

Olla-Podrida,  par  Adolphe  Mathieu.  Mons,  Pierart,  1839; 
in-18,  pp.  286. 

Reinaert  de  Vos,   naer  de   oudste  beryraing,  ingerigt  tôt 


(  489  ) 

schoolgebruik ,  door  J.  F.  Willems.  Mcchclen,  Ilanicq,  1839; 
in-12,pp.VIetl30. 

Gloires  et  Misères,  par  Adolphe  Siret.  Bruxelles  ,  llauman  , 
1840;  2  vol.  iiî-18  ,de  *252  et  236  pajy. 

[Recueil  <le  nouvelles  en  prose  et  de  pièces  île  poésie.] 

Vaderlandsciie  Poëzy,  door  Pr.  Viin  Diiyse.  Gent,  L.  llebbe- 
lynck,  1839;  3  vol.  in-18. 

[Le  1' '  volume  vient  de  paraître.] 

Rameaux  :  Odes,  élégies  et  satyres,  par  Ernest  Busehnian. 
Anvers ,  De  Corte ,  1 840. 

Le  Faux  Baudouin  (Flandre  etllainaut),  1225,  par  le  baron 
Jules  de  Saint-Génois.  Bruxelles,  Meline  et  Decq,  1840;  2  vol. 
in-18  de  Vm,  §00  et  302  pp. 

Sidronii  Hosscbii,  e  societate  Jesu ,  Elegiarum  libri  sex; 
Guillielmi  Becani ,  ex  eadem  societate,  Idyllia  et  Elegiœ. 
Bruxelles,  Soc.  nat.  pour  la  prop.  des  bons  liv. ,  1839;  in-8°. 

Dichtstukken  voor  de  Jeugd,  door  Van  Keur.  Bruxelles  ,  Soc. 
nat.,  1839;  in-8°. 

ARCHÉOLOGIE. 

Een  woord  over  een  der  oudste  kanonnen  in  Europa  ,  door 
F.  De  Vigne-Avé.  Gent,  Vanderhaeghen-Hulin ,   1839;  in-18, 

pp.  10. 

[Avec  une  gravure  sur  bois.] 

Essai  sur  la  peinture  sur  verre  aux  Pays-Bas,  par  le  baron 
De  Reiffenberg.  Bruxelles,  Hajez,  in^",  1839. 

NUMISMATIQUE. 

Beschrijving  en  afbeeldingen  van  uederlandsche  gedenk- 
penningen ,  welke  sedert  181o  tôt  1838  aan  s'  rijks  munt  tôt 
ÎJtrecht  werden  geslagen.  Bruxelles ,  Muquardt,  1839;  in-4°, 
avec  planches. 

VOYAGES. 

De  Bruxelles  à  Constantinople,  par  un  touriste  flamand  (René 
Spitaels).  Bruxelles,  1840,  3  vol.  in-18;  libr.  polytechnique. 
[  Avec  un  frontispice  gravé.  ] 


{  490  ) 

Sclietsen  uit  de  Nederlanden,  door  Louis  Lax.  (Uithethoog- 
duitsch.)  Inhoudeiide  :  ])c  spoorweg.  Hct  matigheids-genoot- 
schap.  De  toonkunstenaer  van  Amsterdam.  Vervallen  groofheid. 
Luik.  Van  Luik  naar  Brussel.  Brusseî.  Antwerpen.  Genl.  Oos- 
tende.  Nymegen.  Arnhem.  Utrecht.  Hollundsche  lettcrkunde. 
Amsterdam.  Het  hollandsche  karachter.  De  Amsterdamsche  ker- 
mis ,  enz.   Dordrecht,  Van  lloestyne  en  Breduis  ,  18â9;  in-8°. 

Beurmans  Brussel  und  Paris.  Cassel ,  Th.  Fischer;  3  vol. 
in -8°. 

HYGIÈNE. 

Instruction  populaire  sur  les  soins  que  l'on  doit  donner  à 
l'enfant  nouveau-né  et  sur  les  soins  hygiéniques  que  récla- 
ment la  grossesse  et  l'accouchement;  par  F.  J.  Matthyssens. 
Anvers,  L.  J.  De  Corte,  1839;  37  pag. 

[Avec  une  planche.] 

ANATOMIE. 

Tableau  névrologique  du  corps  humain,  par  Borreraans , 
ouvrage  pnblié  sous  la  direction  particulière  de  M.  Cartel,  pro- 
fesseur d'anatomie  à  l'école  de  médecine  de  Bruxelles.  Bruxel- 
les, Soc.  des  beaux-arts,  1839  ;  in-8<',  p.  32. 

[Avec  Atlas  contenant  4  planches  in  piano.] 

GÉOLOGIE. 

Eléments  de  géologie  ,  ou  seconde  partie  des  éléments 
d'inorganomie  particulière ,  par  J.  J.  D'Oraalius  d'Halloy  ; 
3«  éd.  Paris,  1839;  in -8°. 

Division  de  la  terre  en  régions  géographiques,  d'après  les 
éléments  de  géologie  du  même.  Paris,  1839;  in-S". 

[Avec  un  Atlas.] 

CHIMIE. 

Faits  et  vues  détachés  sur  certains  points  de  théorie  chimi- 
que, par  Van  Mons.  Bruxelles. 


(491  ) 

MATHÉMATIQIÎES. 

Introduction  à  l'arithmétique  commerciale,  à  rnsafje  de 
l'enseignement  moyen,  par  A.Dujardin,  professeur  à  l'Athenée 
rojal  de  Bruxelles.  Bruxelles, Deprez-Parent,  1839;  première 
partie,  in-8°. 

Arithmétique  commerciale,  par  le  même.  Ibid.,  1839;  in-8°. 
Eléments  de  trigonométrie  rectiligne  et  sphérique,parGuil- 
lery.  Ibid.,  in-S",  avec  planches. 

Algèbre  élémentaire,  par  J.  L.  Wezel.  Louvaiu,  1839;  in-S", 
Van  Linthout  et  Van  de  Zande. 

GÉOGRAPHIE. 

Handboek  tôt  het  leeren  der  aerdrykskunde  in  de  lagere 
scholen  ,  door  L.  Rjsheuvels,  onderwyzer.  Antwerpen  ,  J.  Rys- 
heuvels;  in-18,  bl.  IX  en  2U. 

GRAaiMAIRE. 

Eerste  beginselen  der  nederduitsche  spraekkunst  ten  ge- 
bruike  van  lagere  en  middelbare  scholen ,  door  J.  Pietersz  , 
hoofdonderwyzer  der  lagere  modelschool  te  Erussel.  Brussel, 
Deprez-Parent,  1839  ;  in-12  ,  p.  176. 

[Cette  grammaire  est  écrite  d'après  les  règles  fixées  par  la  commission 
royale.] 

Manuel  de  la  conversation  ou  de  la  pureté  du  langage  , 
recueil  complet  des  locutions  vicieuses  les  plus  usitées  en  Bel- 
gique avec  leurs  corrections  ,  et  suivi  des  locutions  latines  et 
italiennes  habituellement  employées,  avec  leur  traduction 
française.  2°  éd.,  Bruxelles,  Deprez-Parenl,  1839;  in-18. 

Un  mot  sur  la  question  d'ortographe  flamande,  par  Mich. 
Van  der  Voort,  instituteur,  membre  de  plusieurs  sociétés  de 
littérature,  auteur  du  Coup-d'œi!  sur  la  langue  et  la  litté- 
rature flamande  en  Belgique.  Anvers,  J.  Jacobs,  1839;  in-8°, 
pp.  11 

Nouvelles  remarques  sur  les  patois  romans  usités  en  Belgi- 


(  492  ) 

que,  par  le  baron  De  Reiffenberg.  Bruxelles,  1839;  in-S", 
Hayez. 

Beslissing  van  de  koninjïlyke  tael-comraissie.  Bruxelles,  1 8S9. 

Woordenlyst  voor  spelling  en  uitspraek  ,  door  L.  D'Hulsten 
leeraer  aen  het  Athenaeum  van  Gent,  Gent ,  G.  Annoot-Braeck- 
man,  18^9;  in-8%  bl.  136. 

[Sous  ce  titre,  M.  D'Hnlstcr  donne  un  petit  dictionnaire  où  tous  les 
noms  non  composés  de  notre  langue  se  trouvent  indiqués  d'après  le  sys- 
tème orthographique  adopté  par  la  commission  royale.  Il  a  eu  soin  de 
marquer  le  genre  des  substantifs,  le  passé  et  participe  des  verbes  ,  ainsi 
que  l'accentuation  des  noms-propres  étrangers.] 

BIOGRAPHIE. 

Notice  biographique  sur  le  père  Ferdinand  Verbiest,  mis- 
sionnaire à  la  Chine ,  par  l'abbé  G.  Garton  ,  chev.  de  l'ordre 
de  Léopold,  directeur  de  l'institut  des  sourds-rauets  et  des 
aveugles  de  Bruges,  etc.  Bruges,  Van  de  Casteele-Werbrouck, 
1839  ;  in-8°,  p.  76  et  4  planches. 

OUVRAGES  PÉRIODIQUES, 

Annales  de  la  Société  d'Émulation  pour  l'histoire  et  les  an- 
tiquités de  la  Flandre  occidentale,  2^  livrais.  Bruges,  Van  de 
Gasteele,in-8°,  1839. 

[Cette  2"=  livraison  de  l'intéressant  recueil  que  les  membres  de  la  Société 
d'Émulation  ont  fondé  à  Bruges .  renferme  :  1°  la  suite  du  travail  exact 
et  circonstancié  de  l'abbé  Carton  sur  le  missionnaire  Verbiest;  2°  une  no- 
tice sur  les  archives  d'Ypres ,  par  Lambin  ;  idem  sur  les  archives  de  la 
Flandre  occidentale  ,  par  0.  Delepierre  ;  sur  Jean  Brandon  ,  le  chroni- 
queur, par  l'abbé  Carton  ,  etc.] 

Journal  historique  et  littéraire,  octobre  et  novembre.  Liège, 
Kersten,  1839;  in-8«. 

Compte-rendu  de  la  Commission  royale  d'histoire,  tome  III, 
2«  bulletin.  Bruxelles,  Hayez,  1839;  in  8^ 

[Ce  bulletin  contient  plusieurs  communications  historiques  intéres- 
santes ,  entre  aulres  :  1°  sur  la  guerre  de  Grimberghe,  par  M.  De  Ram  ; 
2"  sur  le  Rapiarium  d'Adrien  De  But,  parE.  Gachct;  3°  sur  les XXXI  rois 
de  Tournai,  par  le  même;  enfm  un  bulletin  bibliographique  termine  le 
cahier.] 


(  493  ) 

Bulletin  de  l'Académie  des  sciences  et  belles -lettres  de 
Bruxelles,  10  et  11"  bulletins.  Bruxelles,  llayez,  18S9. 

Archives  historiques  et  littéraires  du  Nord  de  la  France  et 
du  Midi  de  la  Belgique,  t.  II,  2<^  livrais.  Valenciennes ,  1839; 
in-B". 

[Ce  recueil  se  soutient  toujours  à  la  hauteur  où  Pont  porté  les  travaux 
des  directeurs  MM.  A.  Le  Roy  et  A.  Dinaux  et  de  leurs  savants  collabo- 
rateurs. Nous  voyons  avec  plaisir  que  la  Belgique  n'y  est  point  négligée. 
C'est  une  des  rares  publications  périodiques  de  France  qui  veuille  un  peu 
s'occuper  sérieusement  de  notre  pays.] 

Belgisch  Muséum,  S«  deel,  8"  en  A"  aflev.  Gent,  1839, 
Gyselynck. 

[Ces  livraisonscontiennent:  NcderlandscheSagen,  door  Ph.  Blommaert  ; 
—  Overzicht  van  ecn  oud  handscluift ,  bevattende  bybelsclie  tafercclen  , 
door  Lambin;  — Beslissing  cler  koninglyke  tael-commissie;  — Een  woord 
ovcr  de  protestaticn  tegen  de  taelcommissie ,  door  . J  F.  Willems  ;  —  over 
Zevecotius ,  door  Bodel  Nycnhuis  :  —  ovcr  de  vlaenische  banniercn,  door 
F.  De  Vigne-Avé  ;  —  W.  Beca;uis  ,  door  P.  Van  Dnysc;  plusieurs  plan- 
ches curieuses  servent  d'illustrations  à  quelques  articles.  ] 

Nouvelles  Archives  historiques,  philosophiques  et  littérai- 
res, etc.,  3"  livr.,  2^  année.  Gand ,  Annoot,  1839. 

[Ce  cahier  contient  un  mémoire  historique  fort  remarquable  sur  la  part 
que  les  Flamands  et  d'autres  Belges  ont  prise  à  la  conquête  de  l'Angle- 
terre, par  les  Normands  ;  l'auteur  est  M.  Gantrel.  —  Un  prospectas  d'une 
nouvelle  histoire  de  la  Belgique,  par  H.  G.  Molic  ,  et  un  travail  philoso- 
phique sur  Bacon,  par  Fr.  Huet,  complètent  cette  livraison.] 

Les  Belges  peints  par  eux-mêmes.  Bruxelles  ,  Raabé,  1839  ; 
S"  liv.  in-B". 

[Ce  recueil,  qui  contiendra  des  aperçus  piquants  sur  nos  vieux  types 
flamands  et  wallons,  parait  toutes  les  semaines  par  livraisons.  Les  noms 
de  V.  JoUy,  F.Bogacrts.Labarre,  Alfred  Nicolas,  De  RcifTeubcrg.  Siret, 
Van  Hasselt .  qne  nous  rencontrons  parmi  les  collaborateur? ,  promettent 
un  véritable  succès  à  cette  publication.  De  Keyser.  Madon ,  Huart , 
Coomans  ,  Baugniet.  chargés  d'illustrer  les  textes  ,  rendront  encore  plus 
intéressant  chacun  des  cahiers  qui  sont  promis  aux  souscripteurs.] 

Revue  belge.  Août,  septembre,  octobre  et  novembre.  Liège, 
Jeunehomme,  1839. 

[Voici  les  principaux  articles  de  ces  livraisons  :  Marguerite  d'Autriche, 
3"=  et  4"  articles,  par  Altmeyer;  —  une  Soirée  en  ville;  —  l'Inquisiteur, 
par  A.  Polain;  —  un  Carbonaro  ,  par  A.  Pirotte;  —Plan  d'organisation 

33 


'  (  494  ) 

d'une  nouvelle  prison  à  Liège,  par  A.  Visschers  ;  —  Poésie,  par  R.  Ma- 
réchal; • —  Idriel  et  Notger,  par  M.  Polain  ;  — Littérature,  Voyages,  par 
Ph.  Lesbroussart,  etc.  ] 

Annales  et  bulletins  de  la  Société  de  Médecine  de  Gand. 
Gand,18a9,  in-8°. 

[Cinquième  volume,  7* ,  8*^  et  9«  livraisons.] 

Annales  de  la  Société  des  sciences  naturelles  de  Bruges  , 
année  1839.  Bruges.  Premier  volume. 

Le  Magnétophile,  4°  et  5°  livr.  Bruxelles,  18S9;  in-4°. 

L'Abeille  et  l'Observateur  médical  réunis.  Annales  de  méde- 
cine belge  et  étrangère,  par  J.  E.  Lequime.  Bruxelles,  Société 
encyclog.,  1839. 

Encyclographie  des  sciences  médicales,  publiée  sous  la  di- 
rection d'une  Société  de  médecine.  Bruxelles,  Soc.  encycl. 

[Douze  volumes  par  an.] 

La  Renaissance,  17",  18",  19"  et  20"  livr.  Bruxelles ,  Soc.  des 
beaux-arts,  1839;  in-.i''. 

Revue  nationale,  2"  et  S»  livr.  Bruxelles,  1839  ;  lib.  poly- 
tych.  In-8°. 

Annales  d'occulistique  ,  dirigées  par  Florian  Cunier,  méde- 
cin militaire.  Namur,  1839;  2"  livr. 

[Vingt-quatre  livraisons  par  an.] 

STATISTIQUE,  ÉCONOMIE  POLITIQUE. 

De  l'industrie  en  Belgique,  cause  de  décadence  et  de  pros- 
périté, sa  situation  actuelle,  par  M.  N.  Briavoinne;  tome  IL 
Bruxelles,  Eug.  Dubois,  1839;  in-8%pag.  570. 

État  de  la  marine  belge  marchande  au  31  décembre  1838, 
publiée  par  le  Précurseur d' A.nyeTS.  Anvers  ,  tabl.  in-fol. 

Traité  général  des  emprunts  contractés  par  toutes  les  puis- 
sances de  l'Europe,  et  négociés  dans  toutes  les  bourses  et 
places  de  commerce,  par  Trioen.  Bruxelles,  1839;  in-18, 
chez  l'auteur. 

The  economist's  neu  Brussels  guide,  contening  à  short 
account  of  Antwerp,  Matines,  etc.  Bruxelles,  Todd  et  Muquardt , 
1839;  in-18. 

Delà  Banque  de  Belgique,  par  un  actionnaire.  Bruxelles, 
Certhot,  1839. 


(  495  ) 

Traité  d'économie  politique,  par  0.  I\au,  professeur  de 
l'université  de  Heidelberg,  traduit  de  l'allemand,  pnr  Fred. 
De  Kemmeter,  professeur  de  l'université  de  Gand.  Bruxelles, 
1840;in-«°,  pp.  410. 

Exposé  de  la  situation  de  la  province  de  la  Flandre  Orien- 
tale pour  l'année  18â9.  Gand ,  Van  llycke{jem  ,  1839;  in-8'', 
108  et  CXXXVIII  pp. 

Rapport  sur  l'aflministration  et  la  situation  des  affaires  de 
la  ville  de  Gand,  lu  en  séance  publique  du  conseil  communal, 
le  U  oct.  1839.  Gand;  in-8°,  pp.  32. 

Loi  organique  et  règlement  des  universités  de  l'état,  suivis 
de  quelques  instructions  de  M.  le  ministre  de  l'intérieur  et  des 
règlements  des  administrations  provinciale  et  communiale 
concernant  la  collation  des  bourses.  Gand,  Van  der  Ilaghen- 
Hulin,  1839;  in-S",  p.  35. 

De  l'organisation  de  l'enseignement  primaire  en  Belgique , 
dans  ses  rapports  avec  l'enseignement  mo)'en  et  supérieur, 
par  C.  J.  Van  Nerum.  Gand,  Annoot,  1839;  in-8%  IV  et 
126  pag. 

[C'est  la  seconde  partie  de  rintéressatit  travail  de  M.  Van  Nerum  sur 
cette  importante  matière.] 

Quelques  mots  sur  l'état  actuel  de  l'instruction  primaire 
en  Belgique  et  sur  la  nécessité  de  l'améliorer,  par  Ed.  Ducpe- 
tiaux.  Bruxelles,  De  Weissenbruch,  1839;  in-8°,  p.  24. 

BIBLIOGRAPHIE. 

Souvenirs  de  la  Bibliothèque  des  princes  de  Ligne  à  Belœil; 
recueillis  par  A.  Voisin.  Seconde  édition,  plus  ample  que  la 
première.  Gand,  Annoot-Braeckman ,   1839;  in-8°,  de  IV  et 

24  pages. 

[Imprimé  à  100  exemplaires ,  dont  20  sur  double  papier  velin.  Cet 
opuscule  bibliographique  n'est  pas  dans  le  commerce.  La  première  édition 
fait  partie  de  VUistoire  des  Bibliothèques  de  la  Belgique ,  par  M.  Voi- 
sin ,  volume  in-8°  d'environ  400  pages  et  qui  doit  paraître  chez  le  même 
imprimeur,  dans  le  mois  de  janvier  1840.] 

Catalogue  de  la  bibliothèque  de  la  chambre  des  représen- 
tants. Bruxelles ,  H.  Rémi  ;  in-B",  p.  77. 


(  496  ) 

OUVRAGES    DIVERS. 

La  lumière  sur  la  crise  politique,  commercinle  et  indus- 
trielle de  la  Belgique,  par  Pauw,  1839. 
[Pamphlet  sans  nom  dimprimeur  ou  de  lieu.] 

Epitre  aux  hommes  de  lettres  de  Belgique,   par  M.  S 

avocat.  Anvers,  Janssens,  1839. 

Règlement  de  la  Société  des  sciences  naturelles  de  Bruges. 
Bruges,  1839;  in -8°. 

Discours  prononcé  à  la  salle  des  promotions,  le  22  mars 
1839,  par  P.  L.  R.  De  Ram  ,  recteur  de  l'université  de  Lou- 
vain,  à  l'occasion  de  la  mort  de  Ch.  J.  Windischraann,  profes- 
seur d'anatomie.  Lonvain,  Van  Linthout,  1839;  in -8",  pp.  22. 

Centième  et  dernier  coup-d'œil  sur  le  salon  d'exposition 
par  Louis  Labarre.  Bruxelles,  Raabé ,  1839;  in-8o,  pp.  22. 

[Cet  opuscule,  adressé  sous  forme  de  lettre,  au  Feuilletoniste  de  l'In- 
dépendant, pétille  d'esprit  et  de  verve.  C'est  une  bonne  satyre  en  prose, 
dirigée  contre  certains  aristarques  étrangers,  qui  prétendent  porter  le  scal- 
pel de  la  critique  sur  toutes  choses,  même  sur  celles  qu'ils  ne  connaissent 
pas.] 

Considérations  sur  le  théâtre  en  Belgique  et  sur  les  difficul- 
tés et  les  moyens  d'y  créer  une  scène  nationale,  par  A.  Th. 
Van  Hecke.  Bruxelles,  1839;  in-B",  p.  69. 

Verhandeling  over  de  opvoeding  der  dochters  en  voorgegaen 
van  een  uittreksel  van  den  bevelbrief  van  Z.  H.  den  aerts- 
bisschop  van  Mechelen.  Brussel;  in-32.  Soc.  Nation.,  1839. 

Quelques  vues  sur  l'émission  d'une  nouvelle  monnoie  d'or 
en  Belgique ,  par  M,  Aug.  Hennau.  Bruxelles,  Eug.  Dubois, 
1839;in-8'',p.  49. 

Les  ordonnances  royales  et  ministérielles  des  S  avril  et  24 
juin  1839,  sur  la  police  et  la  surveillance  des  machines  à 
vapeur  en  Belgique,  considérées  dans  les  dangers  et  les  vices 
que  leurs  prescriptions  présentent  sous  le  rapport  de  la  sûreté 
publique  et  privée,  sous  celui  de  l'intérêt  privé  des  indus- 
triels, et  sous  le  point  de  vue  des  progrès  et  du  développement 
de  la  machine  à  vapeur  dans  le  pays,  par  Désiré  Tack  ,  ingé- 
nieur-mécanicien à  Gand.  Bruxelles,  1839;  in-8°,  avec  une 
planche. 


i 


(  4Î>7  ) 


Statbtiqiie  6ibli00rapl)i{ïue. 


ANNÉE  1839. 


Certains  journaux  de  nos  voisins  du  midi  ne  cessent  de  nous 
accuser  d'être  des  pirates  littéraires,  de  nous  livrer  exclusi- 
vement à  la  contrefaçon  de  publications,  étrangères  à  notre 
pays.  Partant  de  cette  assertion,  ils  nous  proclament  incapa- 
bles de  rien  produire  en  Belgique,  font  peser  sur  quatre  mil- 
lions d'individus  le  reproche  qu'ils  ne  devraient  adresser  qu'à 
certains  grands  libraires  et  faljricants  de  livres  de  Bruxelles, 
et  nous  délivrent,  sans  plus  d'examen ,  un  brevet  de  Béotiens. 
Cependant  si  nous  ne  sommes  pas  aussi  féconds  que  d'autres 
nations,  si  le  goût  d'écrire  n'a  pas  encore  obtenu  chez  nous 
un  droit  de  bourgeoisie  aussi  général  qu'en  France,  il  est  faux 
de  dire  que  nous  ne  produisions  rien  d'original,  de  national, 
de  belge  en  fait  d'écrits  nouveaux. 

Nous  pensons  donc  faire  plaisir  à  nos  lecteurs  en  donnant 
dorénavant,  à  la  fin  de  chaque  volume,  un  tableau  statisti- 
que des  productions  nouvelles  qui  auront  paru  en  Belgique 
pendant  l'année.  Ce  travail  sera  facile  à  mettre  à  exécu- 
tion au  moyen  du  BiiUetin  hihliographique,  que  nous  avons 
tâché  de  donner  aussi  complètement  que  possible  dans  le 
Messager  des  Sciences.  Nous  craignons  cependant  que  tous  les 
ouvrages  ,  surtout  les  livres  d'éducation  en  flamand,  ne  soient 
point  cités  dans  notre  travail.  Nous  n'établissons  donc  nos  cal- 
culs que  sur  le  bulletin  dont  nous  venons  de  parler. 

Le  nombre  des  différents  écrits  originaux,  qui  ont  paru  en 
Belgique  du  1"  janvier  1839  ,  est  de  290  ,  ainsi  repartis  par 
langue  : 


(  498  ) 

En  fiauçais 1 92 

En  flamand 8'i 

En  latin 4 

En  allemand 5 

En  anglais 5 

En  italien 1 

Voici  les  différentes  branches  des  connaissances  humaines, 
dont  traitent  ces  publications  : 

Histoire  de  Belgique     47 

Littérature 69 

Voyages 7 

Bibliographie 6 

Grammaire  et  lexicographie 30 

Archéologie 2 

Médecine,  chirurgie  et  anatomie 11 

Chimie  et  botanique 6 

Économie  politique  et  statistique 10 

Écrits  politiques  et  pamphlets 32 

Recueils  périodiques 18 

Géographie 5 

Sciences  mathématiques 4 

Sciences  juridiques 7 

Numismatique 1 

Biographie  . 2 

Hygiène  et  géologie 3 

Architecture 5 

Ascétique 4 

Stratégie 1 

Beaux-Arts 5 

Philosophie 1 

Industrie  et  sciences  commerciales 5 

Mémoires  scientifiques 3 

Ouvrages  divers IG 


Total.  ...     290 

On  remarquera  que  l'histoire  de  Belgique  occupe  une 
grande  place  dans  cette  statistique.  En  effet,  tout  le  monde 
sait  que  c'est  dans  notre  passé  qu'il  faut  surtout  chercher  des 
éléments  de  nationalité.  Le  chiffre  des  écrits  purement  litté- 
raires est  encore    plus  élevé.  Car  c'est  le  genre  où   il  est 


(  499  ) 

le  plus  facile  de  s'exercer.  Celui  des  écrits  politiques  s'explique 
par  la  position  exceptionnelle  où  la  Beljjique  s'est  trouvée  cette 
année,  —  Le  nombre  des  écrits  sur  la  grammaire  est  assez  re- 
marquable; les  discussions  auxquelles  donnent  lieu  depuis 
quelque  temps  les  principes  de  grammatologie  flamande  prou- 
vent l'intérêt  que  l'on  porte  à  la  langue,  que  l'on  parle  dans 
les  deux  Flandres,  les  provinces  d'Anvers,  de  Brabant  et  de 
Limbourg.  Encore  n'avons-nous  pu  nous  procurer  la  liste 
d'opuscules  flamands  ,  qui  se  publient  chaque  année  en  p-rand 
nombre,  à  Roulers,  Courtrai ,  S'-Nicolas  et  Malines. 

En  comparant  le  relevé  de  cette  année  avec  celui  des  deux 
années  précédentes,  nous  trouvons  une  diff'érence  qui  est  tout 
en  faveur  de  1 839. 

En  effet,  en  1837,  il  a  été  publié  180  écrits; 
et  en  1838,  .  210      . 

On  voit  que  nous  avons  toujours  marché  progressivement. 
On  annonce  pour  l'année  18-40  la  publication  de  cinq  nou- 
veaux recueils  périodiques,  scientifiques  ou  littéraires,  dont 
trois  en  français  et  deux  en  flamand. 

J.  D.  S.  G. 


(  500  ) 


2m[^$c  bes  bulletins 


DES    SEAICCES    DE    LA    COMMISSION    KOYALE    D    HI  S  T  0  I  R  E. 


Tome  3,  2''  Bulletin.  —  Séance  du  3  août  1839. 

M.  Dumortier,  nommé  membre  de  la  commission,  est  in- 
stallé en  cette  qualité. 

Le  compte  de  la  recette  et  de  la  dépense  de  la  commission 
pour  l'exercice  1838  est  approuvé  et  sera  transmis  au  dépar- 
tement de  l'intérieur. 

La  commission  arrête  ensuite  l'ordre  de  ses  publications. 

Il  est  décidé  qu'on  achèvera  immédiatement  l'impression 
du  second  volume  des  chroniques  de  Flandre,  dont  M.  DeSmet 
est  l'éditeur,  et  que  M.  De  Ram  pourra  mettre  sous  presse  un 
volume  relatif  à  l'histoire  du  pays  de  Liège,  contenant  : 

1°  La  chronique  de  Jean  de  Looz; 

2°  Celle  de  Théodoricus  Pauli,  De  cladihus  Leodiensium ; 

3°  Celle  de  Henricus  de  Merica,  Compendiosa  Historia  de 
cladihus  Leodiensium. 

4°  Un  poème  en  vieux  français,  tiré  d'un  manuscrit  de 
M.  le  professeur  Serrure,  et  intitulé  :  La  Correxion  des 
Liégeois  ; 

En  même  temps  M.  Gachard  procédera  à  la  publication 
d'une  relation  des  troubles  de  Gand  sous  Charles-Quint,  rela- 
tion qu'il  a  fait  suffisamment  connaître  dans  les  bulletins 
précédents. 

Ces  impressions  achevées,  il  sera  loisible  à  M.  Willems  de 
mettre  au  jour  le  second  volume  de  la  clironique  flamande 
rimée  de  De  Klerk  et  à  M.  De  Reilfeuberg,  les  monuments 
historiques  du  Hainaut  et  de  Kaniur. 

M.  De  Ram  a  déjà  préparé  le  De  Dynter,  qui  sera  livré  inces- 
samment au  public. 

M.  Dumortier  propose  la  publication  des  mémoires  de  Renon 


(  501  ) 

(le  France,  président  d'Artois,  sur  la  révolution  des  Pays-Bas 
au  XVI"  siècle. 

Il  est  invité  à  faire  un  rapport  sur  ces  mémoires,  sur  l'in- 
térêt qu'ils  offrent  et  les  faits  nouveaux  qu'ils  contiennent. 

Dans  tous  les  cas,  les  publications  antérieurement  arrêtées, 
devront  être  épuisées  avant  que  l'on  passe  à  une  nouvelle 
série. 

La  commission  s'est  empressée  d'accueillir  l'offre  de  M.  le 
comte  J.  Coghen  ,  d'une  somme  de  2000  francs  à  donner  en 
prix  dans  un  concours  ouvert  par  elle. 

Elle  propose  en  conséquence ,  au  nom  de  M.  le  comte  J.  Co- 
ghen,  un  prix  de  2000  francs  à  l'auteur  d'un  ouvrage,  qui 
réunira  au  mérite  du  fond  celui  de  la  forme,  et  où  sera  trai- 
tée d'une  manière  satisfaisante  :  * 
«  L'histoire  générale  de  la  Belgique  sous  le  gouvernement 
»  de  la  maison  d'Autriche,  depuis  le  mariage  de  Maximilien 
«avec  Marie  de  Bourgogne  ,  jusqu'à  l'abdication  de  Charles- 
»  Quint.  » 

La  commission  ne  demande  pas  une  histoire  complète  des 
princes  de  la  maison  d'Autriche  pendant  cette  période;  mais 
elle  désire  qu'on  envisage  uniquement  le  sujet  dans  ses  rap- 
ports avec  la  Belgique. 

Les  réponses  rédigées  soit  en  français,  soit  en  flamand,  et 
dont  l'étendue  sera  au  moins  d'un  fort  volume  in-B" ,  devront 
être  envoyées,  franches  de  port,  avant  le  1"' juillet  18-41,  au 
secrétaire  de  la  commission. 

Les  auteurs  ne  mettront  point  leur  nom  à  leur  travail ,  mais 
simplement  une  devise,  répétée  dans  un  billet  cacheté  avec 
ce  nom  et  leur  adresse. 

Ceux  qui  se  feront  connaître  de  quelque  manière  que  ce 
soit,  ainsi  que  ceux  dont  le  manuscrit  aura  été  remis  après 
le  terme  fatal,  seront  irrévocablement  exclus  du  concours. 

Le  secrétaire  donne  lecture  d'un  arrêté  qu^cha^ge  MM.  Emile 
Gachet,  attaché  à  la  commission,  et  Kreglinger,  archiviste  de 
la  province  d'Anvers,  de  concourrir  à  la  rédaction  de  la  table 
chronologique  des  chartes  et  diplômes  relatifs  à  l'histoire  de 
la  Belgique,  et  de  se  conformer  à  cet  effet  aux  dispositions  de 
l'arrêté  du  16  novembre  18â8. 


{  502  ) 

M.  le  ministre  a  approuvé  un  mémoire  qui  lui  a  été  soumis 
par  le  conservateur  de  la  bibliothèque  royale  et  en  vertu  du- 
quel une  partie  des  ouvrages  littéraires  et  historiques,  impri- 
més aux  frais  de  l'état,  sera  employée  à  établir  des  relations 
et  des  cartels  d'échange  ,  avec  les  corps  savnnts  et  les  univer- 
sités du  continent  et  des  contrées  transinarines.  Jusqu'à  présent 
il  se  distribue  103  exemplaires  des  chroniques,  tant  dans  le 
pays  qu'à  l'extérieur. 

Correspondance. 

Le  secrétaire  du  cabinet  annonce  que  le  roi  a  daigné  agréer 
l'hommage  du  premier  volume  de  la  chronique  de  De  Klerli. 
Divers  remercîments  pour  l'envoi  de  ce  volume  sont  adressés 
à  la  commission. 

M.  le  major  Geoffroy  qui  a  eu  l'obligeance  de  confier  à  la 
commission  l'original  du  Cantatorium  de  S'-Hubert,  lequel  est 
encore  entre  les  mains  de  M.  De  ReifFenberg,  annonce  qu'on 
lui  a  fait  des  offres  très-considérables  de  l'étranger  pour  l'ac- 
quisition de  ce  précieux  monument,  mais  qu'il  aime  mieux 
en  assurer  la  propriété  à  la  Belgique.  —  Ses  propositions  seront 
l'objet  d'un  examen  particulier. 

Le  bulletin  donne  ensuite  des  extraits  d'une  lettre  de 
M.  G.  G.  Vreede,  de  Gorcum ,  relative  à  plusieurs  particularités 
historiques,  concernant  les  Pays-Bas  et  notamment  aux  négo- 
ciations de  Henry  ,  comte  deBerg,  et  du  comte  de  Warfusée, 
de  la  maison  de  Renesse,  à  La  Haye  au  commencement  de  l'an* 
née  1632,  etc. 

Communications  et  Lectures. 

M.  Gachard  présente  à  la  commission  plusieurs  cahiers 
d'un  recueil,  formé  par  M.  Lacroix,  archiviste  à  Mons,  des 
particularités  les  plus  curieuses  consignées  dans  la  collection 
des  registres  aux  résolutions  du  conseil  de  cette  ville ,  laquelle 
remonte  à  l'année  1404. 

La  commission  émet  le  vœu  que  les  archivistes  de  nos  prin- 
cipales villes  se  livrent,  à  l'exemple  de  M.  Lacroix,  au  dé- 
pouillement des  registres  aux  résolutions  du  magistrat  et  des 
corps  qui ,  sous  différentes  dénominations ,  y  représentaient 
la  commune.  Ces  documents  abondent  en  détails  ignorés  et 


(  503  ) 

qui  n'intéressent  pas  seulement  l'histoire  locale,  mais  aussi 
quelquefois  l'histoire  du  royaume,  comme  le  prouvent  les 
extraits  tirés  des  retristrcs  du  conseil  de  ville  de  Mons. 


M.  De  Rnm  présente  la  justification  de  Tilly  par  rapport  à 
l'incendie  de  Magdebourg,  en  1631  ;  il  cite  nn  article  ])ubliè 
dernièrement  dans  le  troisième  volume  du  recueil,  intitulé  : 
Historisch-Poliiische  Blattre  fur  dus  katkolische  Deutschland. 
Cet  article  renferme  plusieurs  témoignages,  qui  justifient  en- 
tièrement ce  célèbre  général,  que  la  Belgique  compte  avec  gloire 
parmi  ses  enfants,  des  accusations  portées  contre  lui  par  la 
]>lupart  des  historiens  modernes,  qui  prétendent  qu'il  fit 
mettre  le  feu  à  la  ville  de  Magdebourg  après  l'avoir  prise,  et 
qu'il  encouragea  des  soldats  au  meurtre  et  au  pillage. 

Plusieurs  rapports  oflSciels  et  quelques  récits  d'historiens 
contemporains,  relativement  à  ces  malheureux  événements, 
font  partie  de  la  justification  présentée,  et  à  ces  témoignages 
d'auteurs  catholiques,  M.  De  Ram  en  ajoute  d'autres  de  plu- 
sieurs protestants  qui  les  confirment  et  qui  doivent  contri- 
buer à  efïÎTcer  enfin  de  nos  histoires  modernes,  les  accusations 
injustes  contre  Tilly  et  le  blâme  dont  on  flétrit  encore 
son  nom. 

Sur  la  guerre  de  Grimherghe ,  par  M.  De  Ram. 

Un  des  plus  anciens  monuments  de  notre  littérature  na- 
tionale, c'est  la  chronique  rimée  de  la  guerre  de  Grim- 
herghe composée  en  partie  par  un  écrivain  vivant  au  XIll' 
siècle;  l'autre  partie  est  l'ouvrage  d'un  continuateur,  qui 
vivait  vers   1400,  comme  il  le  dit  lui-même. 

La  plupart  des  historiens  modernes  ont  consulté  cette 
chronique  et  tous  s'accordent  à  dire  qu'elle  renferme  une 
foule  d'erreurs ,  de  détails  fabuleux  et  d'anachronisraes;  mais 
l'un  d'eux,  le  savant  auteur  des  Trophées  du  Brahant,  est  allé 
beaucoup  plus  loin,  et  a  relégué  parmi  les  fables  l'histoire 
tout  entière  de  cette  longue  guerre. 

Quoiqu'il  soit  seul,  ou  à  peu  près  seul  de  son  avis,  on  est 
cependant  forcé  d'avouer  qu'il  le  fonde  sur  des  preuves  de 


(  504  ) 

plus  d'un  genre,  qui  ne  laissent  pas  que  d'être  fort  embar- 
rassantes. Il  ne  paraît  pas  que  ce  point  ait  été  bien  éclairci, 
et  que  jusqu'à  présent  on  ait  pris  soin  de  répondre  à  tous  les 
arguments  de  Butkens. 

M.  De  Ram  discute  et  démontre  ensuite  les  erreurs  princi- 
pales qui  se  trouvent  dans  la  chronique  dont  il  s'agit;  mais  il 
fournit  en  même  temps  des  preuves  d'après  lesquelles  il 
est  impossible  de  douter  de  la  réalité  de  la  guerre  de 
Grimberghe  :  il  en  conclut  que  cette  chronique  mérite 
confiance  et  que  Butkens  n'a  pas  montré  une  bonne  criti- 
que, en  rangeant  cette  guerre  parmi  les  fables. 

M.  Bormans,  professeur  à  l'université  de  Liège,  donne 
communication  d'un  vieux  fragement  d'un  poème  moderne , 
en  français  du  XIIP  siècle.  (C'est  une  demi-feuille  de  par- 
chemin, détachée  d'une  couverture,  que  le  relieur  a  coupée 
en  quatre  morceaux  ;  on  a  pu  les  réunir  et  y  lire  160  vers 
qui  se  trouvent  au  bulletin  ). 

Sur   le    Rapiarium    d'Adrien    De   But ,    de    Saeftinghe ,    par 

M.  Em.   Gâche  t. 

C'est  au  hasard  que  je  dois  la  connaissance  du  nouveau 
MS.  d'Adrien  De  But,  que  je  signale  à  la  commission  d'his- 
toire. Caché  dans  le  catalogue  des  MSS.  sous  l'indication  sui- 
vante :  Aegidii  de  Roy  a,  Brandi,  Tabula  decennalis,  peu  de 
personnes  auraient  eu  la  fantaisie  d'aller  chercher  dans  ce 
volume  tout  ce  que  j'y  ai  trouvé,  tant  il  paraissait  lourd, 
indigeste,  obscur  et  d'une  lecture  difi&cile.  Le  nom  de  Brand 
ou  Brandon  me  séduisit.  Tout  le  monde  sait  que  le  seul  MS. 
connu  de  Brandon,  fait  partie  de  la  bibliothèque  de  M.  Lam- 
mens  (1).  Je  conçus  l'idée  que  le  MS.  que  nous  possédons,  pour- 
rait peut-être  nous  en  tenir  lieu.  J'allai  donc  a  la  décou- 
verte dans  ce  volume,  dont  j'entrevoyais  vaguement  les  auteurs 
et  dont  il  me  fallait  étudier  le  contenu  :  mais  il  est  bon  que 
je  le  fasse  mieux  connaître. 

(1)  Il  a  été  acheté  à  la  vente  de  cette  bibliothèque  pour  compte  de  la 
bibliothèque  royale  de  Bruxelles  ,  au  prix  de  1760  francs. 


(  505  ) 

Coté  sous  les  N»»  7978-79,  ce  MS.  forme  un  gros  volume 
petit  format,  in-folio;  les  premières  feuilles  sont  en  parche- 
min, le  reste  est  en  papier.  Il  a  encore  ses  couvertures  ou  ais 
de  bois;  mais  on  a  été  obligé  de  lui  remettre  un  dos  de  bazane. 
Si  nous  nous  en  rapportons  à  une  note,  placée  en  tête  du 
premier  feuillet  contre  la  couverture,  il  proviendrait  de 
l'abbaye  des  Willelmites  de  Bruges,  à  qui  un  abbé  des  Dunes 
l'aurait  donné.  Un  peu  plus  bas  on  lit  :  Tu  quicuinque  es  chro- 
nicorum  ignarus,  lege  cautc  qtiœ  in  marginihus  in  hoc  volumine 
scrihuntur.  Ces  notes  marginales  sont  de  la  propre  main 
d'Adrien  De  But,  et  il  lésa  même  souvent  signées  de  son  nom 
dans  les  termes  suivants:  ita  est  But.  11  y  ajoute  quelquefois 
la  figure  du  poisson  qui  porte  en  flamand  son  nom. 

Ce  MS.  contient  cinq  grandes  divisions;  mais  la  partie  sur 
laquelle  il  faut  surtout  porter  l'attention,  c'est  la  chronique 
proprement  dite. 

M.  E.  Gachet  l'examine  en  détail ,  et  cite  les  notes  d'Adrien 
De  But  les  plus  importantes.  D'après  une  de  ces  notes,  il  ne 
peut  plus  rester  de  doutes  à  personne,  touchant  la  chronique 
publiée  sous  son  nom  dans  le  Corpus  chronicorum  Flandriœ; 
elle  est  bien  évidemment  de  lui. 

Sous  l'année  1453,  se  trouve  le  Confessionnale  d'Adrien 
De  But;  c'est  le  récit  de  toutes  les  incertitudes  qu'il  éprouva 
avant  de  prendre  l'habit  ecclésiastique.  Il  y  entre  dans  d'assez 
grands  détails  sur  sa  famille.  Tous  ces  extraits,  dit  en  termi- 
nant M.  E.  Gachet,  paraîtront  sans  doute  suffisants  pour  carac- 
tériser les  notes  d'Adrien  De  But,  et  pourront  abréger  les 
recherches  de  M.  le  chanoine  De  Smet ,  qui  prépare  actuelle- 
ment le  manuscrit  d'une  autre  chronique  de  ce  même  auteur 
pour  le  second  volume  des  chroniques  de  Flandre,  et  qui  ne 
peut  manquer  de  la  faire  précéder  d'une  introduction  sur  la 
vie  et  les  ouvrages  du  frère  Adrien  de  Saeftinghe. 

Les  XXXI  rois  de  Tournay,  par  le  même. 

L'an  18S0,  les  plus  notables  bourgeois  de  Tournay  résolu- 
rent de  célébrer  une  belle  et  noble  fête  de  XXXI  rois.  Elle 
fut  fixée  à  l'année  suivante,  le  lundi  après  la  fête  du  S'-Sa- 
crement.  Pendant  toute  l'espace  qui  la  précéda,  voici  ce  qui 


(  506  ) 

fut  établi.  Les  compagnons  de  la  fête  se  réunissaient  chaque 
dimanche  dans  un  souper  ou  un  dîner  qu'ils  donnaient  cha- 
cun à  leur  tour.  Ils  avaient  fait  une  bannière  et  des  pennons 
de  trompe  de  leurs  armes,  et  chaque  fois  qu'ils  dînaient  ou 
soupaient  ensemble,  la  bannière  était  déployée  et  en  même 
temps  résonnaient  trompes,  muses  et  callemeilles.  Ils  avaient 
avec  eux.  un  héraut  et  un  ménestrel,  costumés  d'une  mèrtiefiicon. 

Le  plus  souvent  le  jour  du  dîner  ou  du  souper,  on  goûtait 
en  ville  ou  à  la  campagne,  et  il  n'arrivait  pas  à  Tournay  un 
étranger  de  distinction  qu'on  ne  s'empressât  de  l'inviter  à  faire 
partie  du  banquet.  S'il  lui  plaisait  même  de  jouter  avec  les 
compagnons,  on  l'armait  et  on  le  montait  aux  frais  delà  com- 
pagnie. 

On  peut  se  figurer  les  immenses  préparatifs  qui  furent  faits 
dans  la  ville  à  l'approche  du  terme  fixé  :  bien  long-temps 
avant  le  A  juin  1S331  ,  les  bourgeois  s'étaient  mis  à  l'oeuvre. 
Ils  avaient  fait  faire  un  enclos  sur  la  place  du  marché  pour  la 
célébration  de  la  joute  solemnelle,  le  tout  à  leurs  dépens,  et 
l'on  avait  surtout  remarqué  parmi  ceux  qui  prenaient  le 
plus  à  cœur  l'organisation  de  la  fête,  le  sieur  Jacques  De  Cor- 
bry  ,  l'un  des  plus  riches  bourgeois  de  la  ville.  Il  n'y  épargnait 
ni  son  temps,  ni  sa  peine,  ni  ses  deniers  :  c'était  à  lui  sans 
doute  que  l'on  devait  l'idée  de  cette  fête,  car  personne  n'en- 
courageait les  travailleurs  plus  vivement  que  lui,  et  on  le 
voyait  même  au  besoin  mettre  la  main  à  l'œuvre. 

Tous  ces  motifs  engagèrent  les  compagnons  à  lui  décerner 
le  nom  du  principal  roi  de  la  fête.  On  le  nomme  le  roi  Ghalot, 
qui  jadis  conquit  trente  rois,  comme  l'ajoute  le  chroniqueur 
à  qui  ces  détails  sont  empruntés. 

On  s'aperçoit  déjà  que  cette  fête  des  XXXI  rois  n'était 
qu'une  variante  des  Tables  rondes,  qui  étaient  depuis  long- 
temps en  usage.  La  chronique  de  Gilles  Li  Muisis,  que  M.  le 
chanoine  Le  Smet  imprime  actuellement  ,  fait  mention  de 
plusieurs  fêtes  du  même  genre  qui  eurent  lieu  à  Tournay ,  dans 
les  années  1282  et  1290. 

Le  bulletin  donne  au  surplus  les  noms  de  ces  XXXI  rois, 
dans  l'ordre  où  ils  furent  adoj)tés  par  les  compagnons  tournai- 
iens,  avec  les  noms  des  bourgeois  qui  ont  joué  un  rôle  dans 


(  507  ) 

cette  fête  et  il  y  joint  inèiue  les  blasons  de  chacun,  selon  la 
nomenclature  fournie  par  le  chroniqueur. 

Le  lundi  et  le  mardi  après  la  fête  du  S'-Sacrement  de  l'an- 
née 1331,  la  ville  de  Tournay  put  donc  jouir  du  spectacle  de 
cette  solemnelle  passe  d'armes.  Il  s'y  était  rendu  des  com- 
pagnons et  des  bourgeois  de  quatorze  villes  différentes  pour 
prendre  part  à  la  joute,  et  comme  c'étaient  tous  nobles  hom- 
mes et  riches  bourgeois,  les  marchands  en  tirèrent  grand 
profit.  On  vit  des  cavaliers  accourir  en  bien  grand  nombre  de 
Lille  ,  de  Valenciennes  et  de  Bruges  surtout.  Il  y  en  eut  aussi 
de  Paris,  de  Senlis,de  S'-Quentin  ,  d'Amiens,  de  S'-Omer,  de 
Compiègne,  d'Arras  ,  de  Doulens,d'Ardenbourg  et  de  l'Écluse 
et  l'on  compta  qu'il  y  avait  en  tout  cent  seize  cavaliers  courants. 

Tous  ces  détails  sont  tirés  d'une  chronique  sans  nom  d'au- 
teur, qui  fait  partie  des  manuscrits  de  l'État,  et  qui  me  semble, 
par  son  contenu,  devoir  trouver  sa  place  dans  le  recueil  des 
Chroniques  de  Flandres  que  publie  M.  le  chanoine  De  Smet. 


M.  X.  Heuschling  avait  communiqué  à  la  commission  un 
extrait  d'un  manuscrit ,  appartenant  au  père  Bûchen  ,  prêtre, 
demeurant  à  Kylbourg,  grand  duché  du  Luxembourg,  et  rela- 
tif à  l'histoire  de  cette  province.  La  commission  ayant  désiré 
en  connaitre  le  contenu,  voici  le  sommaire  des  trois  volumes 
tel  qu'il  a  été  présenté  par  M.  De  ReifFenberg  : 

Tome  1".  Double  mémoire  sur  la  succession  des  souverains 
du  Luxembourg ,  leurs  naissances,  leurs  familles,  etc;  mé- 
moire sur  le  château,  la  ville  et  le  parc  de  Luxembourg  ;  liste 
de  tous  les  gouverneurs,  présidents,  etc.  Liste  des  événements 
considérables,  concernant  le  Luxembourg  jusqu'en  17o0,  etc. 

Tome  IP  :  Il  traite  du  Luxembourg  ecclésiastique ,  c'est-^- 
dire  des  quatre  paroisses  et  de  ses  établissements  religieux. 

Tome  IIP  :  Il  regarde  la  province  du  Luxembourg  en  géné- 
ral,  son  étendue,  sa  situation,  ses  domaines,  son  gouverne- 
ment, son  commerce,  etc.  Cette  partie  est  brièvement  traitée 
et  composée  de  mémoires  de  diflFérentes  mains. 


M.  Auguste  Beaucourt,  avocat  à  Bruges,  a  fait  parvenir  à 
M.  De  Reiffenherg  le  deuxième  volume  d'un  ouvrage  manus- 


(  508  ) 

crit  (le  son  ancêtre  ,  Beaucourt  de  Noortvelde,  dont  on  a  plu- 
sieurs ouvrages  imprimés. 

Ce  manuscrit  est  intitulé  : 

«Tableau  fidèle  des  troubles  et  révolutions  arrivées  en  Flan- 
«dre  et  dans  ses  environs,  depuis  Charles,  dit  le  Bon ,  XIII" 
«comte  et  souverain  de  la  susdite  ci-devant  province,  jusqu'à 
»  l'an  1384.  E{)oque  de  la  réconciliation  avec  Philippe  11,  roi 
«d'Espagne,  XXXI"  comte  de  Flandre,  ouvrage  en  deux  vo- 
»  lûmes,  qui  peut  servir  d'introduction  aux  mémoires  du 
»  révérend  père  Strada  sur  les  révolutions  dans  le  XVP  et  le 
»  XVII"  siècle.  »  Ce  travail  porte  la  date  de  1792, 

M.  De  ReifFenberg  met  encore  sous  les  yeux  de  la  commis- 
sion vingt  cahiers  in-folio  et  manuscrits,  renfermant  les  Blé- 
moires  historiques  et  politiques  de  Charles  Emmanuel ,  comte 
d' Auxy-Neuville. 

M.  le  comte  d'Auxy  s'occupe  principalement  du  Hainaut  et 
de  ce  qui  lui  est  personnel.  Sa  narration  tient  moins  de  place 
que  les  pièces  justificatives,  dont  plusieurs  ont  été  publiées. 
Cependant  ces  mémoires  contiennent  quelques  faits  entière- 
ment neufs. 

Le  bulletin,  comme  les  précédents,  est  terminé  par  la  suite 
des  notices  sur  des  manuscrits  relatifs  à  la  Belgique  conservés, 
soit  dans  les  dépôts  publics,  soit  par  des  particuliers;  et  l'indi- 
cation de  publications  récentes,  relatives  aux  travaux  de  la 
commission,  par  M.  De  ReifFenberg. 

Ces  dernières  publications  sont  au  nombre  de  vingt-huit, 
et  parmi  les  manuscrits  cités  des  bibliothèques  royales  de 
Bruxelles  et  de  Paris,  de  la  bibliothèque  impériale  de  Vienne  , 
de  la Bihlioteca  hrancatiana  de  Naples  et  de  celles  deStuttgard 
et  de  Bruges,  il  en  est  un  (à  Paris)  qui  contient  deux  pièces 
relatives  à  l'histoire  deTournay;  un  autre  (à  Vienne)  qui  con- 
tient des  privilèges  de  Bruges  et  de  nombreux  documents 
pour  la  connaissance  de  l'ancien  droit  flamand,  et  enfin  un 
troisième  (à  Stuttgard)  qui  contient  une  chronique  rimée  de 
Flandre  depuis  Lideric  de  Buck  jusqu'en  1-404,  dont  M.  Mone 
donne  nne  idée  dans  son  livre  sur  la  littérature  flamande 
populaire,  et  que  M.  Kausler  se  propose  de  mettre  au  jour. 


(  509  ) 


€l)roniqiîe  bes  Sciences  et  ^xt$,  et  Variétés. 


— -■— i®9g&s« 


BiBLiOTHÈQCE  HISTORIQUE  DE  BELGIQUE.  —  Un  dc  nos  abonncs  de 
Bruges,  dans  une  lettre  adressée  à  l'un  des  rédacteurs  du 
Messager  des  Sciences  historiques,  se  plaint  de  l'inexactitude 
qu'avait  commise  ce  journal  en  annonçant  (1)  la  Bibliothèque 
historique  de  Belgique,  par  M,  De  Reiffenberg,  comme  étant 
déjà  sous  presse. 

Le  Messager,  en  parlant  de  cet  ouvrage  ,  n'a  fait  que  copier 
ce  qui  se  trouve  sur  la  couverture  des  Bulletins  de  la  commis- 
sion d'histoire ,  dont  M.  De  ReifFenberg  est  le  rédacteur.  Or 
l'annonce  de  la  Bibliothèque  historique  se  lit  encore  en  toutes 
lettres  sur  le  dernier  de  ces  Bulletins,  qui  a  paru  en  sep- 
tembre 1839. 

L'inexactitude  ne  viendrait  donc  pas  de  la  rédaction  du 
Messager. 

Mais  nous  pouvons  assurer  en  outre  qu'une  ou  deux  feuilles 
d'épreuves  de  cet  ouvrage  ont  été  réellement  tirées,  il  y  a 
plus  d'un  an. 

Au  reste,  nous  partageons  l'impatience  de  notre  abonné, 
nous  désirons  aussi  vivement  que  lui  la  prompte  publication 
de  \n  Bibliothèque  historique,  que  personne  n'est  plus  à 
même  de  donner  au  public  que  M.  De  Reiffenberg. 

C.  P.  S. 

Antverpia  Christo  nascens  et  crescens.  —  Tous  ceux  qui  s'oc- 
cupent chez  nous  d'études  historiques,  connaissent  l'ouvrage 
publié  au  siècle  dernier  par  J.  C.  Diercxsens ,  curé  de  l'hôpi- 

(1) Vol.  6  de  1838,  pag.  108. 

34 


(  510  ) 

tal  (le  S^^-Élisabeth,  à  Anvers,  sous  Je  titre  de  Antverpia  Christo 
Nascens  et  Crescens,  seu  Acta  ecclesiam  Antverpiensein  ejusque 
episcopos  ac  viros  jnetate  et  doctrina  conspicuos,  concernentia. 
L'auteur,  tout  en  se  proposant  de  ne  faire  qu'une  histoire  ecclé- 
siastique d'Anvers,  a  cependant  mêlé  à  son  récit  une  foule  de 
détails  relatifs  aux  événements  dont  cette  ville  avait  été  le 
théâtre,  et  aux  hommes  qui  s'y  sont  distingués  par  leur  savoir, 
leurs  talents  ou  leurs  vertus.  Par  là  son  livre  est  resté  jus- 
qu'ici le  meilleur  que  nous  ayons  sur  l'histoire  d'Anvers. 
Diercxsens  s'est  arrêté  au  commencement  du  XYIII^  siècle. 
Aujourd'hui  M.  l'abbé  J.  SchaefFer,  professeur  d'histoire  et 
de  philosophie  au  séminaire  de  Malines  et  archiviste  de  l'ar- 
chevêché, se  propose  de  continuer  l'ouvrage  de  Diercxsens  et 
de  le  conduire  jusqu'au  XIX"  siècle.  M.  SchaefFer  a  fait  depuis 
de  longues  années  une  étude  toute  spéciale  de  l'histoire  ecclé- 
siastique d'Anvers,  et  le  poste  qu'il  occupe,  l'a  mis  à  même 
de  connaître  cette  partie  mieux  que  tout  autre. 

Le  public  verra  donc  paraître  avec  plaisir  une  continuation 
de  l'ouvrage  de  Diercxsens.  Ce  livre  renfermera  l'histoire  de 
l'épiscopat  de  huit  prélats,  parmi  lesquels  les  évêques  Wellens 
et  De  Nelis  occupent  une  place  si  honorable.  En  outre,  on  y 
trouvera  des  détails  sur  les  fondations  pieuses  du  XVIll^  siècle. 
Viendra  ensuite  la  suppression  d'un  grand  nombre  de  cou- 
vents sous  Joseph  II.  Enfin,  l'auteur  racontera  tout  ce  qui  est 
relatif  à  la  révolution  française,  à  cette  grande  catastrophe, 
qui  renversa  en  peu  de  mois  ces  nombreuses  institutions 
pieuses  que  nos  ancêtres  avaient  élevées  pendant  une  longue 
suite  de  siècles. 

Cette  dernière  partie  de  l'ouvrage  ne  sera  pas  la  moins  in- 
téressante, car,  quoique  ces  temps  ne  soient  pas  très-reculés 
encore ,  nous  sommes  loin  cependant  de  les  connaître  d'une 
manière  complète.  L'ouvrage  de  M.  Schaeffer  ne  formera 
qu'un  volume,  dont  le  prix  sera  fixé  d'après  le  nombre  des 
souscripteurs. 

L'auteur  fait  un  appel  à  tous  ceux  qui  auraient  quelques 
documents  inédits,  relatifs  à  la  période  qu'il  se  propose  de 
traiter. 

C.  P.  S. 


(  511  ) 

LiTTÉiuTURK  FLAMANDE.  —  Oii  remarque  en  ce  moment  un  in- 
croyable mouAcment  dans  la  littérature  flamande.  De  toutes 
parts  on  rivalise  d'efForts  pour  la  remettre  en  honneur  et  en 
rendre  le  goût  populaire.  Aussi  croyons-nous  (jue  toutes  ces 
tentatives  seront  couronnées  d'un  succès  mérité.  Car,  ne  l'ou- 
blions pas,  dans  la  langue  que  parlaient  nos  ancêtres,  gît  un 
puissant  élément  de  nationalité.  A  dater  du  1'"'  janvier  pro- 
chain, paraîtra  à  Gand  tous  les  quinze  jours  un  journal  litté- 
raire, y)ortant  pour  titre  Kiinst-  en  Letlcrhlad.  M.  Snellaert, 
déjà  connu  dans  le  monde  intellectuel  par  son  excellent  mé- 
moire sur  la  poésie  flamande,  sera  le  directeur  de  cette 
nouvelle  publication.  Il  sera  assisté  dans  cette  entreprise  de 
MM.  Willems,  Van  Duyse  ,  Rens  et  de  quelques  autres.  Dans 
le  même  temps,  un  autre  recueil  périodique  fera  son  appari- 
tion à  Anvers,  il  portera  le  nom  de  Noord-Star  et  aura  pour 
collaborateurs  MM.  Conscience,  De  Laet,  Van  Uyswyck.  Le 
grand  nombre  de  souscripteurs,  qui  se  sont  déjà  abonnés  à 
ces  revues  ,  prouve  suffisamment  l'intérêt  qu'elles  inspirent 
d'avance. 

—  La  société  de  littérature  flamande,  qui  s'est  établie  a 
l'université  catholique  de  Louvain,  promet  de  ne  pas  rester 
inactive.  Déjà  elle  a  jtublié  un  charmant  recueil  de  poésie, 
dont  tout  le  monde  a  approuvé  l'excellente  tendance.  Elle 
vient  de  mettre  maintenant  au  concours  un  poème  sur  l'inva- 
sion des  Normands  en  Belgique,  en  880.  Le  lauréat  obtiendra 
une  médaille  et  les  honneurs  de  l'impression.  L'œuvre  doit 
être  envoyée  au  secrétaire  de  la  société,  avant  le  l*"^  juin  18-'»0. 

—  La  société  de  littérature  d'Anvers  de  Olyftak ,  ayant 
pour  devise  Lnbore  et  Constantia ,  a  décidé,  dans  sa  séance 
du  17  de  ce  mois,  qu'à  l'occasion  de  l'inauguration  de  la 
statue  de  Rubens,  elle  décernera  : 

1"  Une  médaille  en  or  de  la  valeur  de  deux  cents  francs,  à 
l'auteur  de  la  meilleui-e  pièce  en  vers  sur  :  Anticerpcn  ver  ■ 
heerlykt  door  de  groote  mannen  die  het  heeft  voortgebracht; 

2°  Une  médaille  de  la  même  valeur  ,  à  l'auteur  du  meil- 
leur morceau  en  prose,  ayant  pour  sujet  :  Lofrede  op  P.  P 
Rubens. 

J.  D.  S.  G. 


(  512  ) 

Portrait  db  Pater  De  Jonghe.  —  La  commission  ])Our  la  con- 
servation des  monuments  de  la  ville  de  Gand  a  acquis  der- 
nièrement, dans  une  vente  publique,  un  beau  portrait  du 
dominicain  De  Jongbe  ,  plus  connu  sous  le  nom  de  Pater 
De  Jonglie ,  auteur  d'une  cbronique  épbémeride  de  Gand, 
nommée  Gendsche  Geschiedenis.  C'est  le  seul  portrait  que  l'on 
possède  de  cet  écrivain  gantois,  mort  vers  1740. 

Nécrologie.  B.  J.  De  Bruyn.  —  Un  des  bibliophiles  les  plus 
zélés  de  la  Belgique,  M.  Bernard-Joseph  De  Bruyn  ,  né  en  1778, 
est  mort  le  26  septembre  1839,  à  Malines.  Il  avait  passé  toute 
sa  vie  à  réunir  des  livres,  des  manuscrits  et  des  curiosités  ar- 
chéologiques. Bien  que  peu  d'ordre  régnât  dans  sa  volumi- 
neuse bibliothèque,  l'amateur  de  bibliographie  était  toujours 
sûr  de  s'amuser  pendant  des  heures  entières  parmi  les  livres, 
sans  nombre ,  qu'il  permettait  à  l'acheteur  de  visiter  à  son 
aise.  Il  avait  de  grandes  connaissances  en  bibliographie,  et 
recherchait  constamment  la  conversation  de  gens  instruits 
dans  cette  partie.  Doué  d'une  originalité  de  caractère,  dont  le 
type  se  trouve  raremant,  il  était  bon,  plein  de  complaisance, 
et  se  fut  mis  en  quatre  pour  obliger.  Une  des  gravures,  données 
par  la  Renaissance,  le  N°  4,  intitulé  le  Bibliomane,  reproduit 
la  ressemblance  parfaite  de  cet  excellent  vieillard. 

Monument  a  élever  a  Maerlant.  —  Nous  avons  vu  avec  infini- 
ment de  plaisir,  que  dans  la  dernière  session  des  états-pro- 
vinciaux de  la  Flandre  occidentale,  M.  le  gouverneur  a  pro- 
posé de  porter  annuellement  au  budget  une  certaine  somme, 
destinée  à  élever  des  monuments  aux  hommes  qui  ont  illustré 
cette  province  dans  l'histoire.  La  proposition  a  été  admise,  et 
sur  la  demande  de  M.  l'abbé  Carton  ,  la  Société  d'émulation  a 
obtenu  l'autorisation  de  faire  des  fouilles  sous  la  tour  de 
l'église  de  Damme,  afin  de  rechercher  la  pierre  sépulcrale  du 
tombeau  de  Jacques  Van  Maerlant,  le  père  de  la  poésie  fla- 
mande. Malheureusement  ces  fouilles  n'ont  pas  eu  le  résultat 
désiré.  La  pierre  tumulaire  que  l'on  croyait  trouver,  a  été 
vendue  il  y  a  quelques  années,  coupée  en  deux,  retaillée  et 


(  513  ) 

j)lacee  comme  chapiteaux  à  l'entrée  du  cimetière  de  l'église 
de  la  ville  de  l'Écluse  (Zélande)  (1). 

Nous  saisissons  cette  occasion  pour  exprimer  le  désir  que 
le  gouvernenKMit  donne  à  une  de  nos  locomotives  le  nom  de 
Jacques  Van  3laerlant.  Ce  sera  un  premier  témoignage  de  re- 
connaissance, donné  à  la  mémoire  de  cette  célébrité  na- 
tionale qui  eut  un  si  grand  renom. 

Tombeau  du  comte  de  Horjïe,  a  Weert.  —  Le  tombeau  du  comte 
de  Borne  (Philippe  de  Montmorency),  décapité  à  Bruxelles,  le 
5  juin  1368,  vient  d'être  découvert  le  8  de  ce  mois,  dans 
l'église  de  S'-Martin,  à  Wecrt.  On  a  trouvé  le  caveau  conte- 
nant les  dépouilles  mortelles  du  comte.  Le  cercueil,  construit 
en  planches,  était  délabré  par  vétusté.  Le  squelette  était  in- 
tact :  le  crâne  se  trouvait  placé  sur  la  poitrine.  A  gauche  du 
squelette  et  à  côté  du  cercueil ,  était  déposé  une  urne  en  étaiii 
hérmétiquent  fermée. 

Sur  le  couvercle  on  lisait  ces  mots  : 

Heer  en  Grave  van  Iloorne.... ,  Wjuny  1368.  Le  reste  de 
l'inscription  était  indéchiffrable. 

Le  couvercle  de  l'urne  a  été,  en  présence  de  quelques 
notabilités  de  la  ville  de  Weert,  scié  à  l'effet  de  s'assurer  de 
son  contenu  :  un  sable  aromatique,  répandant  une  forte 
odeur,  s'est  offert  aux  yeux  des  assistants.  Après  en  avoir  ôté 
les  premières  couches,  on  a  découvert  le  cœur  du  comte  ,  in- 
tact, avec  sa  forme  et  sa  couleur  primitive  ,  mais  se  réduisant 
en  poudre  au  toucher. 

Un  demi- siècle  avant  nous,  la  pierre  sépulcrale  existait 
encore  devant  le  maître  autel  de  ladite  église.  Mais  par  suite 
de  changements  survenus  ,  ladite  pierre  a  disparu. 

C'est  à  la  sollicitation  et  sur  les  instances  de  MM.  les  com- 
missaires hollandais  que  ces  recherches  ont  eu  lieu. 

Le  roi  Guillaume  est  dans  l'intention  de  faire  élever  un 
monument  au  compagnon  du  Taciturne;  il  en  a  donné  une 
assurance  formelle  à  la  ville  de  Weert. 

(1)  V.  lintcressant  rapport  fait  sur  ces  fouille?,  par  Tabbc  Carton. 
Bruges,  1839  ,  in-S". 


(  514  ) 

Il  est  à  regreter  que  le  gouvernement  belge  n'ait  pas  pris 
l'initiative  de  l'honneur  à  rendre  aux  mânes  d'un  des  pre- 
miers martvrs  de  nos  libertés. 

4 

Il  parait  que  le  prince  de  Chiraay,  allié  à  la  famille  du 
comte,  dispute  au  roi  Guillaume  l'honneur  de  contribuer  aux 
frais  du  monument. 

L'ouverture  solennelle  aura  lieu  incessamment. 

Ea  attendant  le  tout  a  été  remis  dans  son  état  primitif,  et 
l'urne  soudée,  a  été  triplement  cachetée. 

Trois  procès-verbaux  ont  été  dressés:  1"  pour  les  archiTes  de 
l'église;  2°  pour  les  archives  de  la  commune;  â^pour  l'évéque. 

Un  mot  SDR  LES  GEOLIERS  —  Il  parait  que  de  tout  temps  ceux 
qui  ont  eu  la  garde  des  prisonniers,  se  sont  montrés  durs  et 
impitoyables,  et  que  ce  n'est  pas  gratuitement  que  l'épithète 
de  Geôliers  est  devenue  une  sorte  d  injure.  Aux  Xl\™*  et  X\™" 
siècles,  l'on  rencontre  plusieurs  documents,  constatant  que 
des  mesures  ont  du  être  employées  pour  réprimer  la  rapacité 
des  Cipiers ,  comme  l'on  disait  alors.  Nous  avons  sous  les  yeux 
des  lettres  patentes  du  duc  Philippe  de  Bourgogne,  par  les- 
quelles est  réglé  ce  qu'on  peut  exiger  des  prisonniers  pour 
salaire,  afin  de  mettre  un  terme  au  grand  et  excessif  salaire 
qu'exigent  les  châtelains  et  chepiers  et  autres  officiers,  ayant 
garde  des  prisons  au  pays  de  Flandre. 

Les  prisonniers  pauvres  paieront  trois  sols  six  deniers  pari- 
sis  ,  monnoie  de  Flandre,  pour  chaque  jour  naturel,  de  la- 
quelle somme  le  châtelain  aura  deux  sols,  et  sera  tenu  de 
délivrer  aux  prisonniers  jonù; .  potage  et  cervoise  :  les  autres 
dix-huit  deniers  appartiendront  au  chepier  on  garde  des  pri- 
sons pour  le  lit  et  les  appartenances.  Les  prisonniers  qui  ne 
seront  pas  détenus  aux  dépens  du  prince,  et  qui  auront  de 
quoi  payer,  donneront  six  sols  parisis  par  jour.  Ils  pourront 
en  outre  avoir  un  demi-lot  de  vin  par  jour  pour  deux  sols. 
Cet  acte  est  de  1401. 

Redeva:«ces  de  ville  \  ville.  —  Au  moyen-âge,  quantité  de 
villes  étaient  tributrices  d'autres  villes  plus  importantes  ,  pour 
certains  objets  en  nature.  C'était  comme  une  sorte  d'hommage 


(  515  ) 

féoflal,  qui  servait  à  rapjtoler  les  ol)li|ïations  auxquelles  l'une 
était  tenue  vis-à-vis  de  l'autre,  en  temps  do  guerre  ou  en 
d'autres  circonstances  ,  établies  très-souvent  par  des  chartes 
ou  privilèges.  Il  paraît  que  de  ce  cliel'  Bruges  recevait  an- 
nuellement une  certaine  quantité  de  vin  de  la  ville  de 
l'Ecluse.  Une  ordonnance  du  roi  catholique  de  Léon,  de  Gre- 
nade, archiduc  d'Autriche  etc.,  de  l'année  1519,  statue  que 
ceux  de  Bruges  recevront  immédiatement  de  ceux  de  l'Ecluse, 
la  quantité  de  vin  qu'ils  ont  de  toute  anchienncté  accousttwié 
avoir,  prendre  et  lever  sur  la  ville  de  Lescluze ,  en  la  fourme  et 
manière  que  fait  a  esté  le  temps  passé. 

AitOLiTiON  DE  LA  CONFISCATION  EN  1^10.  —  Bien  souveut  lorsquc 
les  comtes  de  Flandre  accordaient  des  immunités  ou  privi- 
lèges aux  villes,  c'était  dans  leur  propre  intérêt  plutôt  que 
dans  celui  du  bien-être  des  habitants.  L'on  sait  que  le  duc 
Jean,  en  1-410,  affranchit  les  habitants  du  Franc,  de  qucl- 
qu'état  ou  condition  qu'ils  fussent,  de  la  confiscation  de  leurs 
biens,  tant  fiefs  et  héritages  que  meubles  ,  pour  quelque  fait  ou 
délit  criminel  qu'ils  fassent  ou  conuncttent,  excepté  pour 
méfait,  qui  serait  perpétré  et  commis  en  et  sur  la  personne 
du  comte,  de  sa  femme  et  de  ses  enfants  légitimes.  Mais  ce 
que  l'on  ne  sait  pas  aussi  généralement,  c'est  que  pour  recon- 
naître cette  faveur,  les  bourgmestres  et  échevins  du  Franc 
accordèrent  au  duc,  du  gré  et  consentement  des  habitants: 
1°  Dix  mille  écus  d'or,  appelés  couronnes  de  France,  payés 
argent  comptant;  2°  remise  de  deux  mille  nobles,  dûs  par  feu 
le  père  du  duc,  à  ceux  du  Franc,  pour  cause  de  certain  prêt 
à  lui  fait;  W  une  rente  perpétuelle  de  cinq  cents  livres parisis 
par  an.  Et  afin  que  ces  clauses  fussent  plus  fermement  obser- 
vées et  accomplies,  Jean,  abbé  de  S'-André  lès-Bruges,  y  a 
opposé  son  scel  avec  celui  des  bourgmestres  et  échevins,  ainsi 
que  le  Franc  avait  coutume  d'en  user  au  temjjs passé  enplusieurs 
cas,  touchant  obligations  et  choses  perpétuelles. 

Octave  Delepierre. 


(  516  ) 


(BxxnxxB  et  ïlectiftcations. 


Année  1839,  pag.  403. 

Nous  avons  dit  que  la  chapelle  de  Nassau  était  affectée  au 
Musée  d'artillerie.  Nous  nous  empressons  de  rectifier  cette  as- 
sertion. Ce  local  renferme  les  sculptures  de  Kessels. 

Pag.  407. 

Le  diplôme  de  Charles-le-Gros  a  été  publié  dans  le  bulletin 
de  l'Académie  des  Sciences  et  Belles-Lettres  de  Bruxelles,  par 
suite  de  la  communication  que  lui  en  a  faite  M.  le  professeur 
Borgnet,  à  Liège,  par  qui  cette  pièce  a  été  découverte.  Nous 
renvoyons,  au  reste,  nos  lecteurs  aux  bulletins  de  l'Académie. 


ERRATA. 

Page  384,  ligne  13,  au  lieu  de  au-dessous,  ?«*e2 .■  au-dessus. 

385,  7,         »           au-dessous,  »  au-dessus. 
»               21 ,         »           Routs ,  »  Ranst. 

»  27 ,         »  Coucy ,  »  Roucy. 

386,  23,         »           hic  jacet,  »  hiejacent. 
»         au  bas ,        »           Cordekein,  »  Cordekeni. 

387 ,  ligne    2 ,         »           colice ,  »  cotice. 
390 ,           29 ,         »            Cosme ,  »  Côme. 

487 ,  26 ,         »  Découvertes ,  »  Trouvailles. 


(  517  ) 


TABLE  DES  MATIÈUES. 


ANNEE  1839. 


notices  et  Dissertations. 

Pag, 
Sur  les  Monnoies  frappées  à  Runamen,  par  Jean  II,  sire  de 

Weseraael,  de  14 lo  à  1-462;  par  C.  P.  Serrure 1 

De  la  Peinture  en  verre,  par  £***** 21 

Recherches  littéraires  et  bibliographiques  sur  quelques 
anciennes  impressions  des  Pays-Bas;  par  A.  Voisin  ...     -41 

Tableau  par  Memling 57 

La  Confédération  de  Termonde,  ou  le  -4  octobre  IS66,  par 

Pr.  Van  Duyse S9 

Notice  historique  sur  le  Notariat  belge,  par  H,  Du  Trieu.     70 
Variétés  historiques  sur  la  domination  française  en  Bel- 
gique; par  A.  Schayes 78 

Utenhovensteen,  par  Ph  Blommaert 153 

Bibliothèque  manuscrite  de  la  ville  de  Bruges,  par  Octave 

Delepierre 161 

De  l'existence  de  l'Ogive  dans  les  monuments  des  temps 

les  plus  reculés,  par  A.  V.  L 171 

Notice  sur   la   bibliothèque    de    la   ville  d'Anvers,   par 

A.  Voisin 196 

Le  Fils  bourreau  de  son  père,  par  Pr.  Van  Duyse 20-4 

Notice  sur  les  Archives  du  château  de  Rupelmonde,  par 

J.  De  Saint-Génois 210 

Anciens  registres  des  monnoies  de  Belgique,  par  C.  P.  Ser- 
rure   224 

Tour  communale  de  la  ville  de  Gand  ,  par  A.  V.  L.  .  .  .  231 

3o 


(  518  ) 

Notice  sur  la  bibliothèque  de  Bourgogne,  à  Bruxelles, 

par  Florian  Frocheur 313 

Manuscrits  autographes  de  M.  Lambin ,  archiviste  de  la 

ville  d'Ypres 349 

Influence  de  la  réforme  à  Louvain,  par  C.  Piot 369 

Sur  Lucas  de  Leyde  et  Christophe  de  Cologne 376 

Deux  rois  de  France  en  même  temps;  par  Lambin  ....  380 
Tombeau  de  Henri  de  Witthem,   à   Beersele,    près   de 

Bruxelles,  par  J.  Gautier 38-4 

Ruines  de  l'église  de  Saint-Nicolas,  en  Glain,  par  Ed. 

L.  L.  L 413 

Causes  de  la  guerre  des  Gantois  contre  le  duc  de  Bour- 
gogne (U50-US3) ,  par  Ph.  Blomraaert  -418 

Notice  biographique  sur  le  peintre  Yerhaghen,  par  C.  Piot, 

avocat -43^ 

Watcant,  par  Le  Glay -445 

Additions  et  corrections  aux  listes  chronologiques  des  an- 
ciennes impressions  de  Mayence  avec  date ,  qui  ont  été 

publiées  jusqu'à  ce  jour,  par  H.  Helbig 430 

Sur  les  Monnoies  frappées  à  Rummen  ,  par  C.  P,  Serrure.  461 

7imi^$t$  critiques. 

Verhandeling  over  de  NederlandscheDichtkunstin  Belgie, 
sedert  hare  eerste  opkorast  tôt  aen  de  dood  van  Albert 
en  Isabella,  door  F.  A.  Snellaert,  doctor  in  de  genees- 
kunde.  Par  Ph.  Blommaert 100 

OudvlaemscheGedichten  der  XIP,  XIIP  en  XIV  eeuwen, 
uitgegeven  door  jonkheer  Ph.  Blommaert.  Par  J.  De 
Saint-Génois 108 

Biographie universelledesMusicienset Bibliographie  géné- 
rale de  la  musique,  par  F.  J.  Fétis,  maître  de  chapelle 
du  roi  des  Belges,  et  directeur  du  Conservatoire  de 
Bruxelles.  Par  le  baron  De  ReifFenberg 253 

De  Leeuw  van  Vlaenderen ,  door  H.  Conscience,  —  Richilde 
ou  Episodes  de  l'histoire  de  la  Flandre,  au  XP  siècle, 
par  Coomans  aîné.  Par  Ph.  Blommaert 263 

Mengelpoezy  van  F.  J.  Blieck,  lid  der  Maetschappy  van 


{  519  ) 

rhetorica   te  Wervick.  Bloeinen   iiiyner   Icnlc  ,  duor 

Ch.  Ledeganck.  Par  Ph.  Blonimaert êii'à 

011a  Podrida,  par  M.  Mathieu 470 

Gloires  et  Misères,  par  Adolphe  Siret -472 

Nouvelle  Grammaire  française,  à  l'usage  des  écoles  hcl- 

ges,par  A.  F.  Guillerez 475 

L'Inquisiteur  ,  histoire  liégeoise  du  XVI^  siècle,  par  A.  Po- 

lain. 477 

Histoire  de  la  Belgique,  par  H.  G.  Mokc.  Par  Coomans  aîné.  479 

bulletin  bibliûgrapliiqu^. 

Histoire  et  géographie  de  Belgique.  .  .  .  114,  276,  395,  486 

Voyages 280,  489 

Biographie 116,  492 

Littérature 116,  278,  396,  486 

Bibliographie 279,  397,  495 

Beaux-Arts 281 

Médecine,  hygiène,  anatoraie 120,280,397,  490 

Philosophie 398 

Botanique 401 

Architecture 120,  401 

Mémoires  scientifiques 282 

Sciences  juridiques 282 

Ascétique 121 

Arithmétique,  mathématiques 282,  397,491 

Grammaire 121,  213,  491 

Statistique,  Économie  politique 121,  398,  494 

Publications  périodiques 118,284,  399,  399,  492 

Écrits  politiques  et  pamphlets 119,  282,  402 

Ouvrages  divers 122,  285,  402,  496 

Statistique  bibliographique  (année  1839) 497 

Commission  royale  î)'l)i5toire. 

Analyse  du  bulletin  de  la  séance  du  3  novembre  1838  .   123 

15  décembre  1838  .  287 
3  août  1 839  ...  .  500 


(  520  ) 

€l)r0ntr{uc  bes  Sciences  et  bes  ^Tt9. 

Fonts  baptismaux  de  Saint-Germain,  à  Tirleraont lâO 

Société  d'Émulation  ,  à  Bruges 141 

Poème  de  Foppens  sur  Anderlecht 143 

Bague  du  XIIl"  siècle 146 

Antiquités  romaines ,  à  Audenarde 147 

Passage  Leraonnier  à  Liège 148 

Galerie  vitrée,   à  Bruxelles ib. 

Passeport  de  l'année  1349  (  1350) 149 

Association  pour  favoriser  les  arts  en  Belgique 150 

Land)ert  Massart,  à  Paris 151 

Beffroi  de  Gand ib. 

Épitaplies  anciennes 152 

Pierre  sépulcrale  à  Postel 300 

Continuatio  chronici  contracti  ecclesiœ  Parchensis 301 

Particularités  sur  la  ville  de  Bruxelles 305 

Nécrologie.  —  Joseph  Paelinck 308 

.  B.  J.  De  Bruyu 512 

Concours  de  l'Académie  de  Bruxelles 310 

Musée  d'Antiquités  de  Bruxelles 403 

Nouvel  hôpital  civil  de  Louvain 404 

Statue  en  bronze  de  Rubens 406 

Bibliographie ib. 

Diplôme  de  Charles-le-Gros 407 

Découvertes  numismatiques ib. 

Sociétés  de  littérature  flamande 409 

Orthographe  flamande ib. 

Ruines  de  S'-Bavon  ,  à  Gand 412 

Bibliothèque  historique  de  Belgique 509 

Anlverpia  Christo  Nascens   et   Crescens ib. 

Littérature  flamande 511 

Portrait  de  Pater  De  Jonghe 512 

Monument  à  élever  à  Jacques  Van  Maerlant ib. 

Découverte  du  tombeau  du  comte  de  Hoorn,  à  Weert  .   .    513 

Un  mot  sur  les  geôliers 514 

Redevances  de  ville    à  ville ib. 

Abolition  de  la  confiscation  en  1410 513 


'        GETTY  CENTER  L'NRAJ^,^ 


^  ^125  00676  5495