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Full text of "Messager des sciences historiques, ou, Archives des arts et de la bibliographie de Belgique"

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MESSAGER 

DES  SCIENCES  HISTORIQUES 

00 

ARCHIVES 

DES  ARTS  ET  DE  LA  BIBLIOGRAPHIE 
DE  BELGIQUE. 


LISTE  DES  COLLABORATEURS. 


MM.    D'  P.  P.  M.  Alberdiivgk  Thijm,  prof,  à  l'Université  de  Louvain. 

Beernaerts,  avocat,  à  Malines. 

R.  Chalon,  membre  de  l'Académie  de  Belgique,  à  Bruxelles. 

C'«  E.  DE  Barthélémy,  membre  du  Cens.  Gén.  de  la  Marne,  à 
Courmelois. 

Emile  de  Borchgrave,  conseiller  de  légation,  à  Berlin, 

LAbbé  Hyacinthe  De  Brcyn  ,  à  Bruxelles. 

Cil""  L.  DE  BcRBDRE,  membre  de  l'Acad.  de  Belgique,  à  Anvers. 

Edm.  De  Bcsscher,  membre  de  l'Académie  de  Belgique,  à  Gand. 

C'«  DE  Glymes,  procureur  du  roi,  à  Gharleroi. 

A.  Dejardiiv,  capitaine  du  génie,  à  Liège. 

L.  Devillers,  conservateur  des  Archives  de  l'État,  à  Mons. 

Alph.  De  Vlamiivck,  archéologue,  à  Termonde. 

A.  Du  Bois,  avocat  et  conseiller  communal,  à  Gand. 

J.  Felsenhart,  docteur  en  philosophie  et  lettres,  à  Bruxelles. 

L.  Galesloot,  chef  de  section  aux  Archives  du  royaume,  à 
Bruxelles. 

P.  Génard,  archiviste  de  la  ville  d'Anvers. 

H.  Helbig,  bibliographe,  à  Liège. 

H.  Hymans,  attaché  à  la  Bibliothèque  royale,  à  Bruxelles. 

Baron  Kervyn  de  Lettenhove,  membre  de  l'Académie  de  Belgi- 
que, à  Bruxelles. 

L'Abbé  J.  B.  Lavact,  archiviste  de  l'évêché,  à  Gand. 

Emm.  Neeffs,  docteur  en  sciences  pol.  et  adm.,  à  Malines. 

F.  Nève,  professeur  à  l'Université  de  Louvain. 

N.  NoLLÉE  de  Nodcwez,  à  Bruxelles. 

Alex.  Pinchart,  chef  de  section  aux  Archives  du  royaume,  à 
Bruxelles. 

J.  J.  E.  Proost,  docteur  en  sciences  pol.  et  adm.,  à  Bruxelles. 

Ce.  Rahlenbeek,  à  Bruxelles. 

Max.  Rooses,  conservateur  du  Musée  Plantin,  à  Anvers. 

A.  SiRET,  membre  de  l'Académie  de  Belgique,  à  Louvain. 

Van  Bastelaer,  président  de  la  Société  archéol.,  à  Gharleroi. 

C.  Van  der  Elst,  archéologue,  à  Roux. 

Edw.  Van  Even,  archiviste  de  la  ville  de  Louvain. 


MESSAGER 


DES 


SCIENCES  HISTORIQUES 


ou 


DES  ARTS  ET  DE  LA  BIBLIOGRAPHIE 

DE  BELGIQUE 

Recueil  publié  par  MM.  le  Baron  Kervyn  de  Volkaersbeke  , 
Membre  de  la  Chambre  des  Représentants ,  etc.  ;  le  Comte 
DE  Limburg-Stirum,  Sénateur,  Docteur  en  droit,  etc.;  Ferdinand 
Vanderhaeghen.  Bibliothécaire  de  l'Université,  etc.;  Bethune- 
d'Ydewalle,  archéologue. 

Emile  Varenbergh,  Membre  de  la  Commission  de  statisti- 
que, etc.,  Secrétaire  du  Comité,  à  Gand. 


ANNEE   1878 


GAND 

IMPRIMERIE  ET  LITHOGR.  DE  EUG.  VANDERHAEGHEN 

rue  des  Champs,  6G 

1878 


J 


$/îlIaert    éliru.  <i    ^cul//^ 


UN  SERVICE  EN  DAMASSÉ  DE  FLANDRE. 


A    Messieurs    les    Directeurs    du    «   Messager    des 
Sciences  historiques.   » 

Messieurs. 

L'une  des  plus  anciennes  légendes  de  la  ville  de 
Gand  mentionne  le  siège  que  sept  rois  mirent 
devant  ses  murailles.  Celui  que  le  duc  de  Marl- 
borougli  renouvela  avec  plus  de  succès,  non  moins 
célèbre  et  placé  parmi  les  souvenirs  plus  récents 
de  notre  histoire ,  a  été  l'objet  d'un  travail  qui  a 
fixé  toute  Tattention  de  vos  lecteurs  sur  cette  pé- 
riode oii  les  malheurs  des  guerres  étrangères  ne 
cessèrent  de  s'appesantir  sur  la  Flandre'. 

Le  dessin  joint  à  ma  lettre  eût  bien  mieux 
figuré  à  côté  de  cette  notice ,  et  si  je  vous  l'offre 
aujourd'hui ,  c'est  afin  de  rappeler  que  les  expé- 
ditions de  INIarlborough  laissèrent  une  trace  dans 
les  habiles  travaux  de  notre  vieille  industrie  fla- 
mande aussi  bien  que  dans  les  annales  de  nos 
cités. 


'  Voyez  dans  le  Messager  1875,  p.  425,  l'excellente  notice  de 
M.  le  baron  Kervyn  de  Volkaeesbeke,  intitulée  :  La  capitulation 
de  Gand  en  1109. 

1 


Il  s'agit  ici  d'un  service  de  table  en  linge  da- 
massé de  Courtrai ,  d'une  élégance  remarquable  , 
où  se  trouvent  retracés  les  principaux  faits  de  la 
campagne  de  1706,  c'est-à-dire  d'abord  l'éclatante 
victoire  de  Ramillies  et  ensuite  la  prise  de  nom- 
breuses villes  qui  ouvrirent ,  presque  aussitôt 
après,  leurs  portes  au  vainqueur. 

Ce  fut  le  23  mai  1706  que  se  livra  la  bataille 
de  Ramillies.  Le  lendemain,  Marlborough  écrivait 
au  grand-pensionnaire  de  Hollande  :  <(  J'ai  été  à 
»  cheval  toute  la  journée  de  dimanche  et  la  nuit 
))  dernière.  Je  souffre  tant  de  la  tête  que  je  ne 
«  puis  vous  écrire  tout  ce  que  je  devrais  vous 
))  dire  de  cette  victoire.  Je  vais  me  coucher  pour 
))  prendre  un  peu  de  repos;  car,  à  mon  avis,  il 
»  convient  que  nous  nous  mettions  de  nouveau 
»  en  marche  cette  nuit.   » 

Lorsque  les  Etats  de  Flandre  reconnurent  l'ar- 
chiduc d'Autriche  sous  le  nom  de  Charles  III,  ils 
déclarèrent  que  c'était  dans  la  confiance  qu'il 
maintiendrait  leurs  privilèges  ,  leurs  coutumes  et 
leurs  usages ,  tant  ecclésiastiques  que  séculiers. 
Marlborough  avait  formellement  promis ,  en  en- 
trant à  Bruxelles ,  qu'il  ne  troublerait  en  rien  les 
habitants  dans  le  libre  exercice  de  leur  religion, 
et  c'était  du  camp  de  Roulers  qu'il  écrivait  le 
28  juin  1706  à  quelques  Bénédictines  anglaises, 
réfugiées  dans  la  principauté  de  Mindelheim  que 
lui  avait  donnée  l'empereur ,  qu'elles  trouveraient 
toujours  en  lui  un  compatriote  et  un  ami  prêt  à 
leur  rendre  service. 

Trois  mois  plus  tard,   quand  un  conseil  d'état 


—     3     — 

fut  établi  par  les  gouvernements  d'Angleterre  et 
de  Hollande,  la  Flandre  obtint  dy  être  repré- 
sentée par  trois  membres ,  «  attendu  qu'elle  était 
»  la  province  la  plus  considérable  des  Pays-Bas , 
M  la  plus  renommée  parmi  les  étrangers  et  celle 
»  qui  chez  eux  faisait  porter  le  nom  à  tout  le 
»  pays.   » 

Il  est  vrai  que  les  États  de  Flandre  ne  ces- 
sèrent de  lutter  contre  les  réquisitions  et  les 
exactions  qui  s'attachaient  au  passage  des  armées 
belligérantes.  Vis-à-vis  de  Marlborough  comme 
vis-à-vis  de  bien  d'autres  généraux,  ils  invo- 
quaient fièrement  leurs  privilèges ,  ce  qui  faisait 
dire  à  Hop ,  dans  une  lettre  adressée  à  Marlbo- 
rough :  «  n  y  a  bien  du  levain  en  Flandre  \  » 
Ce  levain  ,  c'était  le  sentiment  patriotique  qui  se 
faisait  jour  à  travers  la  marche  des  siècles  et  à 
travers  toutes  les  calamités  qui  se  succédaient 
sans  interruption. 

Mais  Marlborough  s'efforçait  de  se  montrer 
doux  et  conciliant.  Il  écrivait  aux  échevins  de 
Gand  que  pour  faire  droit  à  leurs  plaintes ,  il  dé- 
tacherait de  l'armée  le  comte  de  Nassau  :  «  n'y 
))  ayant  rien  qu'il  ne  fist  avec  plaisir  pour  leur 
»  témoigner  sa  considération  et  son  estime '\  »  Et 
comme  il  avait  appris  qu'à  Bruxelles  les  dames 
se  plaignaient  d'être  privées  par  la  guerre  des 
plaisirs  qu'elles  recherchaient  le  plus ,  il  mandait 

•  Lettre  du  8  août  1706.  Vreede,   Corresp.  du  duc  de  Marlbo- 
rough, p.  81. 

*  Lettre  du  14  juillet  1706.  Mueray,  Letters  ofthe  duke  of  Marl- 
borough, t.  Il,  p.  693. 


—    4    — 

à  M.  de  Renswoude  :  «  Les  dames  de  Bruxelles 
»  s'étant  adressées  à  moi  afin  qu'elles  puissent 
))  avoir  le  plaisir  de  la  comédie ,  j'ai  voulu  vous 
))  en  écrire  afin  que  vous  puissiez  faire  votre 
»  cour  à  ces  belles  en  vous  employant  en  leur 
»   faveur  '.    » 

Dans  ces  avances,  dans  ces  concessions  de 
Marlborougli  il  y  avait  une  pensée  sérieuse,  dictée 
par  les  intérêts  de  la  politique  de  l'Angleterre.  Il 
fallait  d'abord ,  sous  le  vain  prétexte  d'assurer  les 
bienfaits  de  la  réciprocité  aux  dentelles  de  Flan- 
dre ,  ouvrir  librement  nos  frontières  à  tous  les 
produits  de  l'industrie  anglaise.  Il  s'agissait  aussi, 
comme  l'atteste  une  lettre  du  grand-trésorier 
Godolplùn ,  de  créer  à  Ostende  un  établissement 
militaire  et  commercial  qui  eût  consolé  l'Angle- 
terre de  la  perte  de  Calais. 

Marlborougli  résida  à  Harlebeke  et  à  Helcliin 
du  G  juillet  au  8  septembre  170G.  C'était  au  mo- 
ment où  l'empereur  voulait  l'investir  du  titre  de 
gouverneur  général  des  Pays-Bas  espagnols ,  et 
nous  placerons ,  sans  hésiter,  l'exécution  du  ser- 
vice de  table  dont  nous  nous  occupons,  à  cette 
époque  où  la  ville  de  Courtrai  eut  à  poursuivre 
de  nombreuses  négociations  avec  le  généralissime 
de  l'armée  confédérée. 

La  nappe ,  faite  la  première ,  reproduit  parmi 
les  villes  conquises  :  Louvain  et  Malines.  Sur  les 
serviettes  les  villes  de  Malines  et  de  Louvain  sont 
remplacées  par  Ath  et  Termonde.  Termonde  capi- 

'  Lettre  du  4  octobre  170G.  Mueray,  t.  TU,  p.  159. 


—     5     — 

tula  le  5  septembre  1706;  Ath  le  2  octobre. 
Nous  pouvons  donc  déterminer  l'époque  précise 
du  travail. 

Ce  service  de  table  fut-il  offert  au  duc  de  INIarl- 
borougli?  Le  trouverait-on  parmi  les  précieuses 
collections  du  château  de  Blenlieim?  Nous  ne 
saurions  résoudre  cette  question  ;  mais  il  ne  sera 
pas  difficile  d'expliquer  comment  il  s'est  conservé, 
avec  de  nombi'eux  documents  originaux  sur  les 
campagnes  de  Marlborougli ,  dans  la  famille  de 
ma  mère. 

Nicolas  de  Heere,  petit-neveu  de  Jacques  de 
Heere  qui  fut  l'un  des  héros  de  Guinegate  et  qui 
mourut  sur  Téchafaud  avec  bien  d'autres  amis  de 
Maximilien ,  avait  été  pendant  deux  ans  gentil- 
homme d'ambassade  en  Angleterre  avec  le  baron 
de  Batte  ville ,  et,  à  ce  titre,  il  avait  pris  part  à  la 
célèbre  affaire  des  carosses  du  comte  d'Estrades. 
En  1665,  il  s'était  attaché  au  duc  de  Veragua , 
mestre-de-camp-général  aux  Pays-Bas  et  capitaine- 
général  de  la  mer  Océane ,  arrière-petit-fils  de 
Christophe  Colomb.  Dans  toutes  ces  circonstances 
Nicolas  de  Heere  avait  montré  une  intelligence 
supérieure  et  un  zèle  infatigable.  Vers  1690, 
l'électeur  de  Bavière  le  nomma  commissaire  au 
quartier-général  des  armées  anglaises,  et  il  paraît 
avoir  été  aidé  par  son  fils  dans  cette  tâche  difficile. 

On  comprend  aisément  l'origine  et  la  transmis- 
sion de  ce  service  de  table. 

Ne  serait-ce  pas  une  chose  utile  que  de  re- 
cueillir, à  côté  des  tapisseries  de  haute-lisse  si 
vivement  recherchées   aujourd'hui ,   ces  produits 


—    6     — 

jadis  non  moins  célèbres  de  nos  tisserands  de 
linge  damassé  ,  où  des  événements  divers  sont 
également  retracés  ?  Cela  ne  serait  pas  tout-à-fait 
indifférent  à  Thistoire,  et  assurément  cela  met- 
trait en  lumière  les  progrès  atteints  par  notre 
industrie. 

Si  ma  communication  pouvait ,  Messieurs  ,  en- 
gager quelques  autres  de  vos  lecteurs  à  entrer 
dans  cette  voie ,  je  vous  remercierais  une  fois  de 
plus  d'avoir  bien  voulu  l'accueillir. 

Agréez,  Messieurs,  l'assurance  de  mes  senti- 
ments bien  dévoués. 

Kekvyn  de  Lettexhove. 


7    — 


LUMMENŒUS    A    MAROA. 


Jacques-Corneille  de  Lummene  de  Marcke,  plus 
connu  sous  son  nom  latin  de  Jacobus  Lummenœus 
à  Marcâ,  naquit  à  Gand  en  1570.  Il  fit  ses  études 
dans  sa  ville  natale,  entra  d'abord  chez  les  Capu- 
cins, puis  devint  moine  bénédictin  à  l'abbaye  de 
Saint-Pierre  au  mont  Blandin.  C'était  un  savant 
humaniste  et  un  bon  poète  latin  ;  aussi  tous  ceux 
qui  parlent  de  lui  ou  de  ses  ouvrages,  sont-ils 
d'accord  pour  le  louer  sur  ce  point.  En  effet,  sa 
latinité  est  belle  et  correcte,  sa  phrase  coulante; 
mais,  Valère  André,  croyons-nous,  va  trop  loin, 
lorsqu'il  déclare  que  Lummenœus  égale,  dépasse 
même,  les  meilleurs  écrivains  du  grand  siècle  de  la 
latinité.  On  peut  parfaitement,  sans  rabaisser  le 
mérite  de  notre  latiniste,  se  contenter  de  lui  assi- 
gner une  place  plus  modeste.  Sanderus  lui  prodigue 
également  des  louanges,  mais  moins  pompeuses 
que  celles  de  Valère  André. 

Ses  principales  œuvres  sont  des  homélies,  dont 
quelques-unes  furent  prononcées  dans  des  cha- 
pitres généraux  de  son  ordre,  des  tragédies  sa- 
crées en  latin,  et  des  poésies. 


—    8     — 

Il  fut  lié  d'amitié  avec  toutes  les  célébrités 
littéraires  de  son  temps ,  Antoine  Sanderus , 
Maximilien  De  Vriendt ,  Jean  Scepperus ,  Justus 
Ryckius ,  Erycius  Puteanus ,  André  Catulle  et 
autres.  Un  grand  nombre  de  princes  de  l'Eglise 
se  déclarèrent  ses  amis  et  ses  protecteurs  ;  citons 
parmi  eux  le  cardinal  Frédéric  Borromée,  archevê- 
que de  Milan,  les  cardinaux  Barberini,  Ludovisi. 

Lummenœus  trouva  dans  la  maison  paternelle 
d'excellents  exemples  d'érudition  dont  il  sut  pro- 
fiter. Son  père,  Charles  de  Lummene  de  Marcke, 
connu  en  latin  sous  le  nom  de  Carolus  à  Marcâ, 
consacra  toute  son  existence  à  l'étude  des  belles 
lettres  anciennes  ;  on  a  de  lui  une  tragédie  en 
grec  :  Judith  ou  la  mort  dlloloplienie,  beaucoup  de 
poésies  légères  en  latin  et  une  élégie  latine  im- 
prùnées  en  tête  de  l'ouvrage  d€  dom  Jean  Garet, 
De  invocatione  sanctorum  (Rouen,  1676,  in-fol.). 
Dans  le  même  ouvrage  de  Jean  Garet,  imprimé  à 
Gand  en  1570  chez  Manilius,  se  trouve  également 
la  tragédie  de  Charles  de  Lummene. 

Une  partie  des  œuvres  de  Lummenœus  a  été 
imprimée  à  Louvain  en  1613,  chez  van  Dormael, 
sous  le  titre  de  Jacobi  Cornelii  a  Marcâ  opéra 
omnia  qua  poetica,  (pxa  oratoria,  qua  historica.  Lo- 
vanii,  typis  Phil.  Dormalii.  L'auteur  offre  ce  recueil 
au  cardinal  Frédéric  Borromée,  archevêque  de 
Milan,  dans  une  dédicace  imprimée  en  tête  du 
volume.  «  Admitte  adfectum  Illustrissime  Prin- 
ceps,  dit-il,  et  lucubrationum  mearum  hic  fructus 
sit,  oculis  tuis  legi,  manibus  revolvi  et  placere; 
omne  punctum  feram  si  ita  indulseris.   ■>•> 


—    9    — 

La  première  pièce  da  recueil  est  la  tragédie 
sacrée  du  mauvais  riclie,  Dives  Epulo,  en  vers,  qui 
est  précédée  d'une  pièce  de  vers  d'Antoine  San- 
derus,  et  d  une  autre  de  Maxœmilianus  Vrientius 
(De  Vriendt),  secrétaire  de  la  ville  de  Gand,  mort 
en  1614  '.  Cette  dernière  se  termine  comme  suit  : 

Cor  Sophoclis,  mens  Eiiripidis,  geniusque  Terenti 
Sal  Plaiiti,  et  Seneca  grande  sonantis  epos 
Quem  capit,  a  Marcam  capiat,  qui  voce  quod  audit, 
Re  probat  et  suadse  vera  medulla  cluit. 

La  tragédie  du  Dives  Epulo  est  en  cinq  actes, 
composé  chacun  d'une  ou  de  deux  scènes  ;  les  per- 
sonnages sont  :  Dives  Epulo,  Voluptas,  Superbia, 
Lazarus,  Desperatio,  Pœnitentia,  Mors,  Anima 
damnata  Epulonis,  Abraliamus  patriarclia,  et  le 
chœur;  d'après  cela  on  conçoit  quelle  doit  être 
la  marche  de  la  pièce.  C'est  la  mise  en  scène  de 
la  parabole  du  mauvais  riche. 

La  seconde  tragédie  de  Lummenœus  est  Carcer 
Babijlonius;  elle  est  également  précédée  d'un  cer- 
tain nombre  de  pièces  diverses  ;  la  première  est  une 
dédicace,  dans  laquelle  Melpomène  est  censée 
offrir  à  l'archiduc  Albert ,  gouverneur  des  Pays- 
Bas  ,  l'œuvre  de  Lummenœus.  Viennent  ensuite 
des  anagrammes  versifiées  sur  le  nom  de  Cornélius 
à  Marcâ,  l'une  par  l'abbé  de  Vlierbeek,  l'autre 
par  le  chanoine  et  archidiacre  de  Saint-Bavon, 
Georges  Chamberlaine ,  qui  devint  évêque  d' Ypres 
en  1627;  puis  deux  pièces  de  vers  sur  la  tragé- 

'  V.  Biogr.  nationale,  t.  V,  p.  870. 


—    10    — 

die,  la  première  par  un  prêtre  de  Gand  du  nom 
de  Simon  Kerkliovius  (de  Kerkhove  ou  van  de 
Kerckhove) ,  la  seconde  de  Max.  De  Yriendt  ; 
dans  toutes  deux  on  trouve  l'éloge  du  talent  de 
Lummenœus.  Ce  n"est  pas  d'aujourd'hui  que  des 
auteurs  en  guise  de  réclame  joignent  à  leurs  ou- 
vrages les  comptes-rendus  élogieux  faits  par  leurs 
amis ,  et  peut-être  avec  moins  de  droit  que  notre 
poète.  Enfin,  avant  d'arriver  à  la  tragédie,  il  y 
a  encore  deux  lettres ,  dont  l'une  est  de  Jean 
Scepperus ,  petit-fils  de  Marcus  van  Yaernewyck , 
poète  et  chroniqueur,  né  à  Gand  vers  1580  et 
mort  à  Leide  en  1620,  dont  Ryckius  composa 
l'épitajohe  '.  Scepperus  j  dit  à  notre  auteur,  qu'il 
a  présenté  la  tragédie  à  son  seigneur ,  le  conné- 
table de  Castille ,  et  que  celui-ci  a  déclaré  n'avoir 
jamais  vu  une  œuvre  aussi  bien  écrite  :  «  Quod 
»  simile  scriptum  vidisse  se  nunquam  diceret,  et 
))  non  œquarem ,  inquit ,  antiquis  solum  scriptis , 
»  sed  etiam  prœferrem.  » 

Cette  œuvre  avait  déjà  eu  une  première  édition 
en  1610,  chez  Manilius,  à  Gand  : 

Carcer  Babylonius.  Tragœd.  sacra  auctore  lacobo 
Cornelio  a  Marca,  Rel.  sacerd.  ad.  D.  Pétri  in  monte 
Blandinio.  Gandavi,  ex  officina  Gualteri  Manilij, 
Typogr.  lurati,  ad  signiim  aïbœ  Colimibœ,  1610, 
in-i'^,  4  ff.  lim.,  40  p.  Les  lim.  renferment  la  dédi- 
cace en  distiques  latins,  à  l'archiduc  Albert,  et 
quelques  petites  pièces  en  vers  latins  en  l'honneur 
de  l'auteur,   par    Godefroid  Lemmens ,  abbé  de 

'  Biogr.  nationale,  t.  Y,  p.  718. 


—     U     — 

Ylierbeek,  par  Georges  Chamberlain,  par  Simon 
Van  Kerkhove  et  Max.  De  Yriendt  '.  On  voit  que 
cette  tragédie  a  été  reproduite  dans  le  recueil  de 
Van  Doormael,  avec  toutes  les  pièces  qui  raccom- 
pagnaient dans  l'édition  gantoise. 

La  tragédie  de  la  captivité  de  Babylone  a  cinq 
actes.  Elle  est  également  en  vers.  Les  personnages 
sont  Nabuchodonosor ,  Nabuzardan ,  chef  de  la 
milice,  le  prophète  Jérémie,  des  Satelhtes ,  Sede- 
cias ,  les  fils  de  Sedecias ,  un  chœur  de  Chal- 
déens,  un  chœur  d'Israélites. 

De  même  que  la  tragédie  du  Dives  Epido, 
celle-ci  est  d'une  latinité  élégante ,  renferme  des 
parties  excellentes,  mais,  tout  comme  les  autres, 
est  j)lutôl  bonne  pour  la  lecture ,  car  elle  serait 
impraticable  sur  la  scène  ;  les  chœurs  y  sont  géné- 
ralement d'une  longueur  démesurée. 

Après  cette  tragédie  en  vient  une  troisième 
intitulée  Jephté  ;  l'auteur  la  dédie  au  palatin 
de  Kiew  : 

Accipe  Hyanthœo  deductum  funere  lessum, 

Indignas  miserœ  virginis  exequias; 

Sunt  lacrymœ  et  teneri  questus ,  sunt  busta  puellaî 

Quse  Pater  invitis  condidit  ipse  focis 

Plura  dolor  prohibe! ,  fortuna  ex  ordine  disces , 

Si  juvat  hœc  oculos  pagina  casta  tuos. 

Ipse  ego ,  si  tenuem  non  dediguare  camsenam , 

Sublimi  feriam  sidéra  remigio. 


•  Bibliographie  gantoise,  par  F.  Vanderhaeghen.  —  Un  grand 
nombre  de  détails  bibliogi-aphiques  que  nous  donnons  dans  cette 
notice  ont  été  empruntés  à  la  Bibliographie  gantoise. 


—    12    — 

La  pièce  est  précédée  d'une  longue  épître  in 
JepJithen  d'Antoine  Sanderus,  terminée  par  ces 
deux  vers  : 

Dum  stabunt  magnse  sublimia  mœnia  Ganclse 
Marca,  vel  invidia  judice,  magniis  eris. 

Jephté  avait  déjà  eu  une  première  édition  chez 
Verdussen,  à  Anvers,  en  1608  : 

Jephte.  Trag.  sacra  aiictor.  Cornelio  à  Marcâ 
Gandensi,  religioso  sacerd.^  etc.  Aniwerpiœ ,  apiid 
Hieronynium  Verdussen,  1608;  offert  à  Max.  De 
Vriendt,  Sur  le  titre  se  trouve  la  dédicace  de  la 
main  de  l'auteur  :  Clariss.  viro  Maximiliano  Vrien- 
tio ,  audor.  Cet  écrit  était  dédié  à  l'abbé  de  Saint- 
Pierre,  Columban  Vrancx. 

La  tragédie  de  Jephté  a  également  cinq  ac- 
tes, mais  est  plus  mouvementée  que  celles  qui 
précèdent  ;  elle  renferme  plusieurs  scènes  fort 
dramatiques.  Nous  nous  permettrons  seulement 
de  trouver  à  redire  à  la  manière  dont  Lumme- 
nœus  y  sacrifie  au  goût  de  l'époque,  en  intro- 
duisant dans  une  tragédie  chrétienne  trop  de  ré- 
miniscences païennes.  Jephté  invoquant  le  Styx, 
et  parlant  de  faire  descendre  sa  fille  au  Tartare, 
ne  laissent  pas  que  de  choquer.  Les  personnages 
sont  Jephté,  Iris,  Hjanthe,  un  messager,  le  vieil- 
lard Josabas,  Cléanthe,  et  le  chœur. 

Outre  ces  tragédies,  Lummenœus  a  composé 
en  vers  des  morceaux  qu'il  intitule  Lamentations 
sacrées,  Lessus  sacri,  et  qu'il  dédie  au  cardinal 
Borromée.  Une  partie  seulement  se  trouve  dans 
le  recueil  imprimé  par  Van  Dormael;   le  reste, 


—     13    — 

ainsi  que  le  dit  le  poëte  dans  son  épître  dédica- 
toire,  lui  a  été  volé. 

Cette  épître  est  suivie  d'abord  d'une  réponse 
extrêmement  aimable  du  cardinal ,  puis  d'une 
lettre  d'Erycius  Puteanus  à  son  ami  Lummenœus , 
remplie  d'invectives  contre  le  voleur  :  «  Nummos 
furari  capital  est ,  »  dit-il ,  «  quid  ergo  ingenii 
labores?  » 

Avant  les  Lamentations  se  trouve  encore  une 
pièce  de  vers  d'André  Catulle  *,  adressée  à  l'auteur. 

Les  Lamentations  imprimées  sont  au  nombre 
de  trois  :  Lessiis  Amaryllidis  sponsœ  deplorantis 
Alexium  fugientem  ;  Lessiis  Agarœ  deploimnlis 
Ismaelem  puetnim  ^  et  Lessus  Admni  et  Evœ, 

A  la  suite  des  Lamentations  le  recueil  contient 
un  certain  nombre  de  pièces  de  vers  sur  divers 
sujets ,  intitulées  :  Miscellanea  ,  et  que  l'auteur 
dédie  à  son  frère  Yigiius  de  Marcke,  conseiller 
syndic  du  Franc.  Une  de  ces  pièces  est  composée 
à  l'occasion  de  la  première  messe  de  Philippe  Wan- 
nemaker,  le  poly graphe  ;  une  autre  est  intitulée  : 
Ode  Sapphica  siib  schemate  legis  et  gratiœ  principi 
sacro  reverendi  et  eruditi  viri  Justi  Hardiiyni ,  ou 
Juste  Harduyn,  poète  gantois,  né  en  1582,  mort 
en  1641 ,  auquel  Blommaert  a  consacré  une 
longue  notice  dans  ses  Nederduitsche  schrijvers  van 
Gent;  une  autre  est  un  hymne  {Pœa7i)  en  l'honneur 
d'Ignace  de  Loyola  ;  l'auteur  le  dédie  à  son  frère 
Louis  de  Marcke ,  religieux  de  la  compagnie 
de  Jésus.  Lummenœus  adresse  plusieurs  de  ces 

'  Voir  sur  ce  personnage  :  Messager  des  Sciences,  18G1  et  18G2. 


—     14     — 

pièces  à  ses  amis  Sanclerus,  Erycius  Puteanus, 
Yernulœus,  Max.  deVriendt,  Simon  Kerkhovius, 
David  Lindaniis,  Justus  Rjckius,  Johamies  Scep- 
perus,  Jacques  van  Zevecote.  A  l'abbé  de  Saint- 
Pierre,  Arsène  Scbayck,  surnommé  le  Grand,  il 
dédia  un  catalogue  ou  liste  cbronologique  des  ab- 
bés de  Saint-Pierre ,  à  commencer  par  saint  Flor- 
bert,  où  il  consacre  à  chacun  d'eux  un  distique. 

Les  homélies  ou  Orationes  sacrœ  qui  terminent 
le  volume  au  nombre  de  huit ,  sont  : 

1.  Oratio  habita  in  festo  Assumptœ  virginis 
apiid  P.  P.  Societatis  Jesu ,  in  sacello  majoris 
sodalitatis . 

2.  Oratio  habita  in  templo  P.  P.  Prœdicatorum 
pro  encomio  sacrœ  virginis  Catharinœ  Senensis,  in 
festo  ejusdem  virginis  natali. 

3.  Oratio  habita  in  templo  divi  Pétri  Blandi- 
niensis  coram  prelatis  et  definitoribus  congt^ega- 
tionis  nostrœ  capitula7''is  exemptée,  cum  jubilœo 
inauguratus  est  ampliss.  Dominus  Cornélius  Colum- 
banus  Vranx,  etc.;  dédiée  à  l'abbé  Yrancx. 

4.  Oratio  habita  in  primitiis  y^everendi  et  docti 
viri  A7itonii  Sanderi;  dédiée  à  son  père  et  à  son 
frère,  nommés  tous  deux  Charles  de  Marcke. 

5.  Oratio  habita  in  festo  conversionis  Paidi  apud 
D.  D.  Flidei^bacenses  Lovanii. 

6.  Atera  oratio  habita  Lovanii  apud  Fleder- 
bacenses,  Dominica  2  post  Pascha  anno  1612  (de 
pastore  bono)  ;  dédiée  à  Pabbé  de  Saint-Waast 
Philippe  de  Caverel. 

7.  Autre  homélie  prononcée  à  rabba3^e  de 
Vlierbeek;  dédiée  à  Godefroi  Lemmens,  abbé  de 
Ylierbeak. 


-     15    — 

8.  0 ratio  Encomiastica  divo  Thomœ  Aquinati 
Angelico  doctori,  ord.  P.  P.  Prœdicat.  dicta; 
dédiée  au  confesseur  de  rarcliiduc  Albert. 

Mais  ce  ne  sont  pas  là  tous  les  écrits  de  Lum- 
menœus  :  outre  le  recueil  imprimé  à  Louvain,  d'au- 
tres œuvres  du  moine  de  Saint-Pierre  sortirent  des 
presses  de  Corneille  Yander  Meeren ,  de  Manilius 
et  de  Van  Kerkliove,  à  Gand,  ainsi  que  de  Jean  de 
Fampoux,  à  Douai;  les  voici  : 

1.  Bustum  Sodomœ.  Tragœdia  sacra,  auctore 
Cornelio  a  Marca.  Gandavi,  apud  Corneliiim  Ma- 
riimi.  CLO.  Loc.  xv,  in-8",  6  fF.  lim.  et  49  p.;  dédié 
à  Antoine  de  Winglie,  abbé  de  Liessies.  Cette  tra- 
gédie fut  réimprimée  plus  tard,  en  1628,  dans  le 
recueil  imprimé  à  Douai,  sous  le  n°  9;  voir  plus  loin. 

2.  Pleias  sacra  sice  VII  Horniliœ  sacrae,  auctore 
Jacohi  Cornelio  Lummenœo  a  Marcâ,  Religioso  sa- 
cerdote  ordinis  S.  Benedicti  in  monte  Blandinio  ad 
Gandavmn.  Gandavi,  apud  Comelium  Marium,  ad 
inter signe  didcissimi  nomini  Jesu  anno  1617 .  In-8'^, 
94  p.  et  1  f.  cont.  l'approb.  du  14  oct.  1616.  Aux 
pages  3  à  7  sont  quelques  vers  latins  à  l'adresse  de 
Lunmienœus,  par  Josse  De  Rycke  et  Jean  Hey- 
linckus,  et  la  dédicace  de  l'auteur  à  la  confrérie  de 
la  Sainte-Croix ,  établie  à  Gand ,  dans  l'église  de 
Saint-Michel.  Les  sept  homélies  sont  dédiées  à 
divers  personnages  :  Fr.  Yander  Burch,  archevê- 
que de  Cambrai,  Ant.  Triest,  évêque  de  Bruges, 
Philippe  De  Caverel,  Jean  Joncquoy,  abbé  de  Mar- 
chiennes,  J.-B.-Max.  d"Enghien,  Jérôme  De  Win- 
ghe,  chanoine  de  Tournai,  et  Ch.  De  Bourgogne, 
baron  de  Wackene.  Ce  recueil  se  rencontre  ra- 
rement. 


—     IG    — 

3.  A^nmon.  Tragœdia  sacra  :  auctore  R^"  Domino 
D.  lacobo  Cornelio  Lummenœo  à  Marcâ.  Gandavi, 
apud  Cornelium  MayHiim ,  ad  intersig.  dulciss.  no- 
mini  lesu.  1617,  petit  in-S",  40  p.  Tragédie  avec 
chœurs ,  dédiée  à  Denis  Villerius ,  chancelier  de 
l'église  de  Tournai.  Cette  tragédie  fut  réimprimée 
en  1628,  chez  Fampoux,  à  Douai,  dans  le  recueil 
cité  plus  loin,  sous  le  n"  9. 

4,  Corona  Virginea,  sive  stellœ  duodecim,  id  est, 
duodecim  Ho7niliœ  sacra,  auctore  R.  P.  Jacobi  Cor- 
nelio Lu7nme7iœo  à  Marcâ,  religios.  sacerd.  ord. 
S.  Benedicti  in  ynonte  Bla7idinio;  Gandavi,  apud 
CorneliuTn  Mariimi  ad  insigne  dulcissi7ni  7iomi7ii 
Jesu,  an7io  1628.  In-8°  de  182  p.  et  1  f. ,  avec  l'ap- 
probation, datée  de  Gand  10  janvier  1618.  Au  titre, 
un  médaillon  gravé  en  taille-douce,  avec  ce  vers 
d'Horace  :  «  Doctarum  ederse  prsemia  frontium.  » 
Les  neuf  premières  pages  renferment  des  épîtres 
de  Lummenœus  au  cardinal  Borghèse  et  au  magis- 
trat du  Franc  de  Bruges,  ainsi  que  des  lettres  adres- 
sées à  l'auteur  par  le  cardinal  Borghèse,  par  Jean, 
évêque  d'Anvers ,  etx3ar  Pierre  Coton,  jésuite.  La 
l'^'^  homélie  fut  prêchée  à  Saint-Michel  en  1617; 
la  2**,  dédiée  à  Guill.  Castilius,  prieur  de  Baude- 
loo,  le  fut  à  l'abbaye  de  Saint-Pierre  en  1613;  la 
3®,  dédiée  à  Henri  Van  der  Heyden,  prieur  du 
monastère  de  Saint-Sauveur,  fut  prêchée  en  1617 
chez  les  jésuites  ;  la  4''  est  dédiée  à  Gilles  Baute- 

rius  ;  la  h^  à  Mailiardus  Vulderius  ;  la  6"^ ; 

la  7^  au  conseiller  Jean-Jacques  de  Brabant;  la 
8^  à  J.-B.  Lautens  ;  la  9*"  à  Jacques  De  Coninck; 
la  10"  à  François  Borluut,  seigneur  de  Boucle  ;  la 


—     17    — 

IP  à  Adrien  Le  Prévost  de  Basserode,  seigneur 
d'Enghien,  et  la  12"  à  Josse  Van  Hiierne.  Cette 
dernière  homélie  fut  prononcée  à  l'église  des 
Dominicains  lors  des  funérailles  de  Max.  De 
Vriendt,  en  1615.  La  page  chiffrée  182  contient 
quelques  vers  latins  en  l'iionneur  de  Lumme- 
nœus,  par  Jacques  Van  Zevecote  et  par  Georges 
Bornaige. 

5.  Said.  Tragœdia  sacra  autore  R.  P.  lacobo 
Cornelio  Lummenœo  à  Marcâ,  Religioso  sacerd. 
ord.  S.  Benedicti  in  monte  Blandinio.  Gandavi , 
apudJoan.  Kerkhoviiwi,  1621.  Petit  in-8°,  4  ff.  lim. 
et  31  p.,  car.  ital.  Au  titre  manque  la  marque  ty- 
pographique. La  dédicace,  au  cardinal  Ludovisi, 
est  suivie  de  quelques  hexamètres  latins  par  Ant. 
Sanderus.  Cette  tragédie  fut  publiée  de  nouveau 
par  Jean  de  Fampoux,  à  Douai  en  1628,  dans  le 
recueil  cité  au  n°  9. 

6.  Lanipas  Virgmea,  sive  oratio  de  Encomio 
Virginis ,  in  festo  Luminwn  dicta.  Imprimé. 

7.  Diarium  sanctoriim  sive  steintnata,  et  flo- 
res, etc.  Vers  iambes.  Duaci,  Joannes  de  Fam- 
poux, 1628,  in-4°,  pp.  118.  Tiré  à  600  exempl. 

8.  Hyas  sacra.  Idem. 

9.  Sept  tragédies  réunies  dans  un  recueil  inti- 
tulé :  Musœ  lacrymantes  seu  Pleias  Tragica.  Duaci, 
Joan.  de  Fampoux,  1628,  in-4''.  Ce  sont  :  1.  Bus- 
tum  Sodomse  et  impurarum  illarum  civitatum 
excidiam.  2.  Abimelech.  3.  Jeplite  (c'est  la  même 
que  celle  imprimée  déjà  chez  Verdussen,  à  Anvers 
en  1608,  et  dans  le  recueil  de  Van  Dormael). 
4.  Sampson.  5.  Saûl.  6.  Annnon  sive  stuprum  so- 


—     18    — 

roris  Tliamar,  ab  Absalone  seri  ultione  percussum. 
7.  Sedecias. 

10,  Duces  Burgimdiœ  iidemque  Flandriœ  comités 
et  res  ab  us  gestœ. 

Nous  connaissons  encore  de  Lnmmenœus  les 
œuvres  suivantes  qui  ont  été  imprimées  :  Une  pièce 
en  vers  latins  à  Antoine  Sanderus,  imprimée  dans  : 
Antonii  Sanderi,  Panegyricus  B.  Mariœ  Virgini. 
Gand,  chez  Manilius,  1618.  —  Une  pièce  en  vers 
latins  à  Justus  Harduyn,  dans  le  livre  de  celui-ci, 
intitulé  :  Goddelicke  Lofsanghen ,  etc.  Ghendt ,  by 
Jan  Van  den  Kerckhove,  1620.  —  Une  pièce  en  vers 
latins,  à  l'éloge  de  Zevecote,  dans  :  Rosimimda , 
Tragœdia,  de  Zevecote,  imprimée  chez  Josse  Booms, 
à  Gand  en  1621.  —  Une  pièce  en  vers  latins  à  An- 
toine Sanderus,  dans  :  Antonii  Sanderi  presbyteri 
Panegyricus  Annunciatœ  Virgini.  Gand,  chez  Ma- 
nilius, 1621.  — Vingt-quatre  hexamètres,  dans  les 
quatre  ff.  liminaires  de  :  Antonii  Sanderi  Poëmata. 
Ganda  apud  Joannem  Lapidanum^  1621.  —  Une 
pièce  en  vers  latins ,  dédiée  à  Charles  de  Bourgo- 
gne, dans  :  Antonii  Sanderi  Poëmafum  Liber  tertius. 
Gandav.  apud  Jean.  Lapidanum.  1621. 

Il  y  a  encore  d'autres  écrits  qui  ne  furent  jamais 
publiés;  des  tragédies,  des  homélies,  des  pièces  de 
vers  que  Sanderus  dit  avoir  eues  sous  les  yeux. 
Valère  André  raconte  que  notre  auteur  lui  pré- 
senta une  pièce  de  vers,  fort  bien  faite,  en  latin, 
pour  célébrer  son  doctorat. 

Luramenœus  ne  passa  pas  toute  sa  vie  dans  sa 
cellule  du  mont  Blandin.  B'après  les  notes  de  l'abbé 
de  Saint-Pierre ,  Gudwald  Seiger,  il  séjournait  à 


-     19    — 

Rome  en  1624,  et  M.  De  Bussclier,  dans  son  ou- 
vrage intitulé  :  L'abbaye  de  Saint-Piey^re  à  Gand , 
dit,  page  58,  que  Lummenœus  fut  autorisé  à  se 
rendre  à  Rome  pour  le  jubilé  solennel  qui  devait 
s'y  célébrer  en  1625.  Ces  données  feraient  sup- 
poser que  notre  religieux  ne  visita  pas  la  ville 
éternelle  avant  1623,  ce  qui  est  une  erreur.  Une 
correspondance  relative  à  son  séjour  à  Rome,  qui 
se  trouve  aux  archives  de  l'État  à  Gand,  où  non  s 
l'avons  copiée  en  reclierchant  les  documents  qui 
concernent  l'abbaye  de  Saint-Pierre,  fait  déjà  men- 
tion de  lui  le  25  janvier  1615  comme  y  étant  depuis 
un  certain  temps.  A  cette  date  le  cardinal  Bar- 
berini  écrit  à  l'abbé  de  Saint-Pierre,  pour  lui  de- 
mander des  secours  pécuniaires  en  faveur  de 
Lummenœus ,  afin  de  faciliter  à  ce  religieux  le 
retour  dans  son  monastère.  Il  faut  donc  croire, 
d'après  cela,  qu'il  séjournait  déjà  à  Rome  depuis 
une  année  ou  même  deux ,  mais  pas  davan- 
tage, car  le  1  mars  1613  il  était  encore  à  Lou- 
vain,  d'où  il  écrivait  au  confesseur  de  l'archiduc 
Albert  pour  lui  offrir  son  homélie  sur  saint 
Thomas   d'Aquin. 

Le  cardinal  obtint  sans  doute  ce  qu'il  désirait 
pour  son  protégé,  et  Lummenœus  rentra  au  mont 
Blandin.  Une  lettre  que  Sanderus  écrivit  à  notre 
poëte  le  30  avril  1620,  prouve  que  celui-ci  était 
alors  à  l'abbaye  ;  il  lui  dit  qu'il  n'a  pas  eu  le  temps 
d'aller  le  voir,  et  lui  donne  quelques  bons  conseils, 
d'après  lesquels  nous  pouvons  supposer  que  le 
cloître  n'avait  pas  beaucoup  de  charmes  pour 
Lummenseus ,  et  qu'il  avait  prié  son  ami  de  s'in- 


—    .20    — 

terposer  à  Bruxelles  auprès  de  certains  person- 
nages influents  pour  lui  obtenir  l'autorisation  d'en 
sortir.  Sanderus  l'engage  entre  autres  à  prendre 
patience,  à  s'efforcer  de  se  plier  aux  exigences  de 
la  vie  monastique,  à  supporter  les  défauts  de  ses 
confrères. 

«(  Ego  sanè,  dit-il,  plurimos  homines  egregie 
cordatos  et  eruditos  audivi  asserere  eam  vitse 
conditionem  in  qua  tu  agis ,  pietati ,  ingeniis , 
elegantibusque  studiis  quam  maxime  conve- 
nii'e.  Scio  paradoxon  hoc  inclamabis,  sed  seculi 

molestias  et  labores  expertus  non  es ;  »  et 

plus  loin,  vers  la  fin  de  sa  longue  épitre  :  «  Itaque 
hoc  te  oro  si  amicus  non  essem  tam  libéra 
consilia  non  suggerem ,  compendiosa  ad  pro- 
motionem  hœc  sunt  média  :  capiti  tuo  inprimis 
iuhsere;  ut  quantum  potes  place,  leges  domesti- 
cas  impie  ;  regnum  cœlorum  vim  patitur,  cum 
omnibus  benignus  esto,  asperos  et  rudes  mores 
fer,  iniurias  et  sanniculas  dissimula  et  ride 
affatim  lauda,  fer  stuporem  et  inscitiam  alio- 
rum  ;  non  omnibus  œquè  pretiosa  talenta  Deus 
dédit,  omnia  et  nos  accepinms,  expunge  passim 
vetera  débita ,  a  novis  abstine ,  non  credas 
quantum  nomini  tuo  famœque  adhsereant  istse 
sordes  débit orum.  Oiouscula  ultro  non  offer, 
a  re  pecuniaria  petenda  ad  typos  aliosve  pre- 
textus  tanquam  ab  angue  cave ,  pluribus  non 
dedica  eadem ,  et  minuta  prœsertim ,  ad  te 
adventantibus  nec  vini  guttam  offer ,  non  ideo 
veniunt,  si  pétant,  indigni  sunt.  Vale;  pridie 
cal.  mai  1620  (30  awil).   » 


21 


n  paraîtrait,  d'après  quelques  paroles  de  cette 
lettre ,  que  Lummenœus  avait  mérité  déjà  le  re- 
proche de  prodigalité  que  Tabbé  lui  adresse  plus 
tard ,  lorsque  le  religieux  se  plaint ,  pendant  son 
voyage  en  Italie,  de  se  trouver  sans  ressources. 
Sanderus  lui  conseille  aussi  de  ne  pas  dédier  à 
plusieurs  la  même  œuvre.  Cet  abus  de  dédicaces 
nous  avait  déjà  frappé  en  lisant  le  volume  im- 
primé à  Louvain ,  et  nous  ne  nous  étonnons  pas 
de  cette  remarque  de  Fauteur  de  la  Flandria 
illustrata.  Le  poëte  comprit-il  la  justesse  de  l'ob- 
servation de  son  ami?  Cela  se  peut  ;  le  fait  est  que 
dans  un  exemplaire  de  la  Corona  Virginœa  existant 
à  la  bibliothèque  de  Gand,  la  plupart  des  dédicaces 
ont  été  enle"'  ées. 

Malgré  les  conseils  de  Sanderus,  Lummenœus 
persista  dans  son  désir  de  quitter  le  Mont  Blandin; 
il  prétexta  Tétat  de  délabrement  de  sa  santé  qui 
exigeait  le  climat  de  l'Italie ,  et  il  obtint  que  le 
cardinal  Borromée ,  qui  s'était  déjà  montré  son 
protecteur  lors  de  son  premier  voyage,  l'appelât 
à  Milan  pour  l'occuper  dans  sa  bibliothèque.  Ce 
cardinal  était  Frédéric  Borromée ,  fils  de  Jules 
César  et  de  Véronique  Trivulce,  successeur  de 
son  cousin  "saint  Charles  Borromée  sur  le  siège 
de  Milan;  c'est  lui  qui  a  fondé  dans  sa  ville 
archiépiscopale  la  célèbre  bibliothèque  ambro- 
sienne  qu'Antoine  Olgati,  auquel  il  en  avait  confié 
le  soin ,  enrichit  de  neuf  mille  manuscrits ,  ainsi 
que  de  la  plus  grande  partie  de  la  bibliothèque  de 
Vincent  Pinelli. 

L'abbé  de  Saint-Pierre  donna  son  consentement 


22    

au  départ  de  Lummenœus  dans  une  pièce  datée 
du  1*""  mars  1622  ;  il  y  engage  les  prélats  de  son 
ordre  à  lui  accorder  aide  et  protection  : 

«  Nos  Joachimus  Arsenius,  Dei  et  apostolicse  sedis  per- 
missione,  Abbas  inonasterii  S.  Pétri  iuxta  Gaiidavmn, 
ordinis  S.  Benedicti,  sedi  apostolicse  immédiate  subiecti,  et 
exemptorum  monasteriorum  eiusdem  ordinis  per  Belgium 
visitator,  concessimus  Domino  Jacobo  Cornelio  Lummensco 
a  Marca,  religioso  presbytero  dicti  nostri  monasterii,  licen- 
tiam  proficiscendi  Mediolanum  ad  lUustrissimum  Domi- 
num  cardinalem  Borromeum  a  se  iam  ssepius  evocato  ac 
invitato.  Quare  universos  et  singiilos,  ac  imprimis  D.  D. 
prelatos  eiusdem  nostri  ordinis  rogamus ,  ut  si  quando  ad 
eos  dictum  nostrum  religiosum  divertere  contigerit,  ipsi 
auxilio  et  consilio  adesse  non  dedignentur.  Idem  huma- 
nitatis  ac  cliaritatis  ofïicium  reciprocè  a  se  commendatis 
(quando  occasio  sese  obtulerit),  semper  prsestare  parati 
sumus.  In  cuius  confirmationem ,  bœc  propria  manu  et  si- 
gillo  munivimus. 

»  Actum  in  dicto  nostro  monasterio  S.  Pétri  ipsis  calen- 
dis  martiis  1622.  » 

Mais  ce  que  l'abbé  ne  dit  pas  dans  son  espèce  de 
sauf-conduit,  et  ce  qu'il  avait  sans  doute  enjoint 
et  posé  comme  condition  dans  un  autre  écrit  à 
Lummenœus ,  c'était  de  ne  pas  quitter  le  cardinal 
Borromée,  ou  de  rester  consigné  dans  le  mo- 
nastère de  Saint-Simplicien  de  Milan.  Une  lettre 
que  nous  verrons  plus  loin  nous  expliquera  ce  l'ait, 

Lummenœus  se  hâta  de  profiter  de  l'autorisa- 
tion de  son  supérieur.  Aussitôt  en  Italie,  il  donna 
de  ses  nouvelles;  le  5  août  il  était  à  Milan  au 
monastère  de  Saint-Simplicien ,  d'où  il  écrivit  à 


—     2 


zo 


l'abbé  Scliajck ,  spécialement  pour  lui  dire  qu'il 
est  dépourvu  de  beaucoup  de  clioses,  «  multa 
mihi  desunt,  »  et  le  prier  d'envoyer  des  lettres 
de  change. 

«  Amplissime  et  reverenclissime  Prsesul. 

»  Genua  tua  amplector,  in  quibus  prassidium  me  reper- 
turum  spero.  Veni  in  Italiam  (ut  iterum  atque  iterum 
scripsisse  memini)  salvus  et  incolumis,  atque  acleo  mollis- 
simi  huius  cœli  beneficio  cotidiè  valentior  fio,  et  cum  tem- 
pore  totam  \aletudinem  recuperare  spero.  Illustrissimus 
cardinalis  Borromseus  bénigne  iuxtà  et  perhonorificè  me 
habet;  interèa  tamen  multa  mihi  desunt,  qua)  mihi  cum 
onere  famuli  (quo  omninô  carere  non  possum)  hîc  degenti , 
tum  etiam  cotidianis  incommodis  sublevandis  perneces- 
saria  sunt,  neque  verô  debeo  (ut  plane  existimo)  ad  sordes 
et  silignas  damnari ,  qui  cum  bonâ  veniâ  R"*  Dominât.  V. 
et  valetudinis  meœ  reparandse  caussâ  in  Italiam  secessi ,  et 
fortasse  aliquâ  substantice  portiuncula  proxime  me  contin- 
git  ex  tantâ  adfluentia,  quœ  per  Ampl.  V.  benè  et  commode 
hactenus  dispensatur.  Et  nunquid  mihi  quoque  ly/oyiav 
aliquam  aut  benedictionis  symbolam  servas  Pater  ?  Imper- 
tire  aliquid  obsecro,  et  si  nihil  hactenus  de  rore  cœli  me- 
reor,  de  pinguedine  terrée  aliquid  condona,  vel  in  gratiam 
Illmorum  Cardiualium  Patronorum  meorum ,  Ludovisii,  Bevi- 
lacqufe,  Burghesii,  Farnesii,  Barberini,  Cobellutii,  qui 
mihi  Ilomse  omnia  pollicentur,  et  adeô  scepiusculè  et  sin- 
gulis  ferè  septimanis ,  humanissimis  suis  litteris  me  inter- 
visunt.  Nimirum  sic  me  honorant  illi  Principes  et  sic 
faciunt,  quia  ita  volunt,  et  fortasse  Reverendiss.  Amplit.  V. 
et  Monasterio  nostro  comraodi  olim  esse  poterunt ,  si  occasio 
ita  ferat.  Vale  amplis,  et  Rev.  domine,  et  si  omuino  digna- 
ris ,  opportune  nunc  me  juva  literas  cambii  dum  omnino 


—    24    — 

eis  mittere  Ampl.  V.  dignabitur,  Mediolaniim  ad  S.  Sim- 
plicium  destinabit. 

»  Mediolani  è  mon.  S.  Simpl.  non.  augusti  an.  1622. 

»  R™'*'  Ampl.  V.  liumillimus  filius 
»  Jacobus  Corn.  Lummenœus  a  Maeca  ,  rel.  sac.  » 

Nous  sommes  tenté  de  croire  que  cette  lettre, 
dans  laquelle  Liunmenœus  expose  les  difficultés  de 
sa  position  ,  n'eût  pas  pour  lui  tout  Teffet  désiré , 
car  il  fut  obligé  d'emprunter  quelques  sommes  à 
des  compatriotes.  C'est  ce  qu'il  raconte  à  l'abbé  le 
1 7  août  de  la  même  année  ;  il  le  remercie  de  ses 
bonnes  intentions  à  son  égard,  le  prie  de  payer  ses 
dettes,  et  dit,  sans  doute  pour  se  le  rendre  plus 
favorable ,  qu'il  a  vanté  ses  vertus  aux  cardinaux 
avec  lesquels  il  est  chaque  jour  en  relation,  et  l'ap- 
pelle l'ornement  de  son  ordre  : 

«  Amplissime  et  Reverendissime  Prsesul.  Jucundum  mihi 
fuit  intelligere  ex  litteris  Joannis  Schoondonck,  lilio  suo, 
famulo  meo  missis ,  Amplit.  V.  bono  erga  me  animo  esse , 
atque  adeo  promptam,  ut  mihi  paterna  solucitudine,  in 
omni  casu  necessitatis  succurrat  dummodo  ei  constet ,  quô 
litteras  suas  certô  deljeat  destinare.  Intérim  in  angustiis 
fui  (sicut  semper  necessarium  aliquid  mihi  occurrere  potest, 
cum  onere  famuli  in  alieuo  solo  degenti)  et  sic  quoque  ultra 
montes  aliquid  potui  suspirare.  Et  vero  inveni  tandem 
mercatorem  Belgam,  ornatissimum  virum.  D.  Adrianum 
Peninage,  qui  mihi  in  urgenti  nécessite  nonaginta  flore- 
nos,  valentes  viginti  assibus  Belgicse  monetse,  numeravit, 
et  sic  mihi ,  et  Reverendissimse  Amplit.  V.  pro  me  sat  agenti 
et  solicitée,  beneficium  se  commodare  existimavit,  quos 
proinde  Révérer'"'*  Amplis.  V.  Generoso  huic  viro,  D.  Phi- 


25    - 


lippo  Baersdorp,  barum  latori  restituere  dignabitur,  et 
exiguum  hoc  nomen  expiingere.  Ego  vero  virtutes  tuas , 
Amplissime  Domine,  pra?dicare  non  desinam  apud  Illmos 
cardinales,  patronos  nieos,  qui  mihi  plures  cotidiè  acce- 
dunt,  et  humanissimis  litteris  suis  continuô  intervisunt. 
Vale  Ill°ie  et  Reverendissime  Prsesul,  ordinis  nostri  singu- 
lare  ornamentum,  Mediolani,  ad.  D.  Simpliciani,  quô  litte- 
ras  Amplit.  Y.  destinari  rogo.  16°  calend.  septembris  anno 
1622.  Amplit.  V.  servus  et  fil.  obed.  Jacobus  Corn.  Lumme- 
NŒUS  A  MARCA ,  relig.  sacerd.  » 

Pressé  par  la  misère  et  ne  voulant  pas  Tavouer 
à  ses  protecteurs,  Lummenœus  se  rendit  à  Rome; 
là  il  ne  réussit  pas  à  trouver  un  asile  chez  les 
religieux  bénédictins  du  mont  Cassin,  qui,  à  ce 
qu'il  dit,  ne  pouvaient  pas  en  vertu  de  leurs  règles, 
héberger  leurs  confrères  d'au-delà  des  monts.  Il 
'écrit  le  16  décembre  1622  à  son  abbé,  l'implorant 
de  venir  à  son  aide  ;  sa  lettre  ressemble  un  peu  aux 
plaintes  de  l'enfant  prodigue  :  «  Traitez-moi,  dit-il, 
comme  un  de  vos  serviteurs  ;  dans  votre  maison  il 
ne  manque  pas  de  pain,  et  les  petits  chiens  mêmes 
sont  nourris  de  la  table  du  maître.  »  Voici  cette 
épître  toute  entière  : 

«  Amplissime  et  Reverendissime  mi  Pater. 

»  Ad  genua  clementise  tuse  me  objicio,  et  quanquam 
nihil  dilapidasse  aut  decoxisse  memini ,  nihilominus  tene- 
rum  illud,  atque  adèo  lacrymis  et  commiseratione  boni 
patris  familias  dignum,  exEvangelio  opploro  :  Pater  pec- 
cavi  in  cœlum  et  coram  te ,  et  si  quidem  non  sum  dignus 
porrô  vocari  filius ,  fac  me  sicut  unum  ex  mercenariis  tuis  ; 
nam  et  illi  in  domo  tuâ  abundant  panibus ,  et  catelli  etiam 


-     26    — 

comedunt  de  mensâ  Dominorum  suorum,  Plura  sentire 
possum,  quam  scribere,  et  mihi  in  Christi  visceribus  beue- 
volentiâ  paternâ  symbolam  condonari  rogo.  Quare  Medio- 
lano ,  post  crebras  litteras  meas  ad  Amplit.  Y.  discesserim , 
et  qiiomodo  alibi  hospitium,  Tel  intercedentibus  S.  R.  T. 
cardinalibus ,  et  inter  eos  S.  etiam  D.  N.  timc  card.  Barbe- 
rino  et  aliis  priucipibus  apud  monachos  institiiti  nostri 
impetrare  non  potuerini  Amplit.  T.  bis,  ter,  qiiater  et 
sœpius  per  me  indicatum  fuisse  scio ,  et  per  proximum  ve- 
redarium  litteras  Abbatum  huius  cougregationis  Cassinensis 
missurus  sum,  quibus  liquidé  constet  per  me  non  stetisse, 
quo  minus  ad  eos  diverterim,  cum  lioc  prseter  consuetudi- 
nem  illorum  sit ,  ultramontanos  monachos  in  contubernium 
suum  admittere,etc.  Plenus  doloris  et  msestitise  nihil  addere 
possum  et  fortunam  meam  iterum  atque  iterum  commendo. 

»  Vale,  Amplissime  Prcesul,  et  me  bénigne  respice. 

»  Ex  Urbe,  I70  calend.  januarii  1623  (16  x^"-"). 

»  R'"*  Amplit. 
»  Humillimus  cliens  et  filius 

»    J.    C.   LUMMENŒUS  A  MaECA. 

»  Relig.  saccerd.  B.  B.  » 

Mais  le  prélat  de  l'abbaye  de  Saint-Pierre  était 
malcontent  de  lui,  malcontent  de  ce  que  Lum- 
menœus  s'était  à  peu  près  de  tout  temps  montré 
plus  ou  moins  rebelle  à  la  discipline  du  cloître, 
malcontent  parce  qu'autorisé  à  se  rendre  à  Milan, 
il  avait  profité  de  cette  licence  pour  visiter  d'au- 
tres villes  d'Italie,  et  s'était  ensuite  rendu  à  Rome, 
malcontent  de  ce  qu'il  n'avait  pu  trouver  moyen 
de  vivre  avec  la  modique  pension  qui  lui  était 
faite.  Les  ennemis  du  moine  n'avaient  pas  laissé 
échapper  cette  occasion  de  le  desservir  auj)rès  de 


—    27    — 

son  supérieur,  et  par  des  accusations  de  toute  sorte, 
aggravant  ses  torts ,  avaient  augmenté  et  attisé  la 
colère  du  prélat.  Celui-ci  exhale  son  courroux  dans 
une  lettre  datée  du  mont  Blandin  le  1 7  féwier  1623, 
et  qui  pourrait  bien  être  adressée  au  cardinal 
Borromée,  cardinal  de  Sainte-Suzanne,  dont  il  y 
est  question  à  la  troisième  personne.  L'abbé  y 
parle  de  son  religieux  dans  des  termes  fort  peu 
mesurés,  et  y  dit  crûment  que  le  cardinal  Tayaut 
fait  venir  à  Milan,  c'était  à  lui  de  pourvoir  à  ses 
besoins.  Tout  en  rendant  hommage  aux  talents  de 
Lummenœus,  «  praeclari  quidam  ingenii,  »  dit-il, 
il  lui  donne  des  qualifications  fort  malsonnantes  ; 
toute  la  lettre  prouve  que  Fintervention  de  cer- 
taines personnes  lui  faisait  regarder  les  fautes  du 
religieux  à  travers  un  verre  grossissant. 

«  IlWe  Dne. 

»  Satis  mirari  nequeo  IIl"i  D.  cardinalem  a  S'»  Susanna 
petere  uti  Patri  Cornelio  a  Marca,  uostro  Religioso,  de  rébus 
necessariis  per  me  provideatur,  postquam  illum  ad  se  Me- 
diolanum  hiuc  evocavit,  ut  in  Bibliothecâ  suâ  eius  uteretur 
opéra,  aut  in  monasterio  S.  Simpliciani  ibidem  collocaret  i 
quod  et  factum  fuit  :  quodsi  bonus  ille  dictus  Pater  neglecto 
tanto  humanitatis  et  liberalitatis  bénéficie  111"™  D.  cardina- 
lem deseruerit  simul  et  monasterium  S.  Simpliciani  contra 
tenorem  litterarum  nostrarum  dimissorialium  (qu£e  solum 
ipsi  Mediolanum  usque  ])roficiscendi  facultatem  faciebant) , 
et  instar  vagabundi  profectus  sit  Yenetias ,  Patavium  et  ad 
alias  ItaUse  urbes,  ibique  prodegerit  quidquid  ipsi  erat  num" 
morum,  ratio  non  postulat  ut  no  vas  ei  pecunias  suppedi- 
tem,  quibus  ulterius  per  orbem  divagetur,  maxime  cum 
iam  didicerim  ipsum  a  quodam  uobili  liuius  patrise  pecu- 


—    28    — 

nias  mutuo  accepisse,  hic  restitiiendas,  qiiod  illi  novuDxnon 
est,  nam  iam  pridem  experientiâ  edoctus,  quod  quoties- 
cumqiie  diversis  in  locis  illum  collocaverim ,  niinquam  nisi 
obœratus  domum  reversas  est;  hic  vero  existens,  segritudi- 
nem  simulavit ,  quo  minus  cum  reliquis  confratribus  fre- 
quentaret  commune  refectorium  ac  capitulum  ad  audiendas 
sanctas  vespertinas  collationes,  sic  ut  ad  biennium  ali- 
quando  noluerit  neque  celebrare,  neque  choro  interesse, 
imo  in  solemnioribus  festis  \ïx  potnerit  ad  confessionem 
compelli ,  adeô  ut  pessimum  hic  prœbuerit  suis  confratri- 
bus exemplum,  posueritque  Lapidem  ad  quem  religiosi 
nostri  quotidie  pedem  offenderent.  Intérim  tamen  ad  hoc 
valebat  optimè  ut  quotidie  ad  se  incorrigibilem ,  socios  et 
congerrones  externes  in  cubicukim  suum  convocaret,  qui- 
buscum  genio,  compotationibus,  ac  abdomini  semper  tan- 
quam  de  grege  porcorum  indulgeret,  spernendo  monitiones 
nostras.  Dolebam  vehementer  me  inter  cseteros  unum  tan- 
tum  habere  religiosum  ab  ordine  etiam  Capucinorum  excu- 
cu\\situ.m ,  prœclari  quidem  inffenii,  sed  claustri  monastici, 
si  verum  dicere  liceat ,  a  multis  iam  annis  impatientem ,  li- 
bertatis  appetentem,  et  ut  unico  dicam  verbo,  instituti 
nostri  omnino  fastidientem.  Habui  hic  litteras  a  quodam 
x''  januarii  ]\Iediolano  scriptas,  illum  iam  in  itinere  esse 
cum  proposito  hùc  redeundi ,  de  quo  miramur,  et  non  de- 
tineri  illum  ab  111"^°  D.  Gard,  a  S*^  Susanna,  cum  ut  eius 
uteretur  opéra  in  bibliothecâ  suà ,  ab  eo  esset  accersitus , 
tune  enim  non  foret  necessarium  illi  provideri  de  necessa- 
riis,  cum  nemo  secuudum  Apostolum  militare  debeat  suis 
stipendiis,  sed  ejus  potius  sumptibus  et  impensis  nutrien- 
dus,  cuius  obsequiis  sese  dedicavit,  prsecipuè  cum  hiuc 
discedens,  se  nunquam  amplius  quidquam  petiturum  a  Mo- 
nasterio  nostro  sanctè  premiserit,  qui  si  hic  nobiscmn  vive- 
ret  secundum  regulam  S^i  P.  Benedicti,  haberet  quoque 
ut  caeteri,  qui  hic degunt.  Ignoscat  itaque  quœso  111'""*  D.  V. 


—    29    — 

si  pecunias  hac  vice  non  transmitto ,  quia  si  sit  in  itinere 
pecijuiœ  ad  eura  pervenire  non  possent;  si  vero  manserit 
in  obsequio  Illn>'  D.  Cardinalis  a  S''»  Susanna,  non  hinc  sibi 
pro-\-idendum ,  sed  ab  eo  cui  insérait ,  ratio  et  sequitas  pos- 
tulant, quia  uti  diximus,  nemo  suis  stipendiis  militare 
tenetur,  neque  etiam  facultates  nobis  sufficiunt  ob  horum 
temporum  calimitatem ,  agrorum  devastationem  et  inunda- 
tioneni ,  tam  per  hostes  quam  nostros  etiam  milites  illatas , 
ut  immorigeros,  incorrigibiles  ac  vagabundos  religiosos  extra 
patriam  tam  sumptuose  alamus.  Si  alia  in  re  humile  ali- 
quod  obsequium  prœstare  valuerimus  111°'*  D.  V.  omnem 
libentissime  impendemus  operam,  cui  me  quam  possum 
humillimè  commendo.  Ex  Abbatiâ  nostrâ  S.  Pétri  in  monte 
Blandinio,  iuxta  Gandavum  17'*  feb.  1623.  » 

Le  4  mars  1623  Lummenœus  adressa  à  son 
abbé  une  nouvelle  demande  de  secours;  cette 
lettre  fort  touchante  n'eut  pas  encore  l'effet  dé- 
sii^é  ;  le .  religieux  s'y  déclare  malade  de  corps  et 
d'âme,  et  réduit  à  la  mendicité. 

«  Reverendissime  Domine.  Eomœ  nunc  sum,  verè  seger 
animi  et  corporis,  et  in  angustiis  rerum  omnium,  nisi 
quod  Illmi  Cardinales  patroni  mei  bénigne  me  respiciunt,  et 
favorem  omnem  pollicentur.  Ego  vero  (ingénue  et  candide 
dico)  mendicare  erubesco ,  neque  in  œre  eorum  esse  volo , 
quamdiu  in  Blandinio  meo  partem  et  tunicam  babere  pos- 
sum. Pro  décrète  mihi  subsidio  aliquo  pecuniario  (sicut  ex 
amicoruni  litteris  intelligo)  gi'atias  Amplit.  T.  refero  et  me 
de  meliore  nota  commendo.  Illi""^  Carrarius ,  Palatinus  pon- 
tificius ,  amicus  et  patronus  mibi  deditissimus ,  ad  S.  D.  N. 
molles  aditus  nunc  mibi  pandit ,  cuius  purpuram  R'*  item 
tuse  nomine  libenter  venerabor.  Yale  Ampliss.  et  Reve™<^ 
mi  Pater,  et  me  porro  magis  tuum  liabe.  Romœ ,  4  non.  mart. 


—    30    — 

amio  1623.  Niliil  hic  novi,  nisi  qiiocl  Tiberis  insolens  et 
tumidus  violentiam  et  inundationem  minatiir.  Révérend™"^ 
Paternit.  T.  observantissimus  filius.  (Signé)  Jacobus  Corn. 
LuiiMENŒUS  A  Maeca.  Relig.  sacerd.  » 

A  la  fin  du  mois  d'avril,  Lummenœns  expédie 
à  son  abbé  le  compte  de  ses  dépenses  à  Rome, 
pendant  les  mois  de  séjour  qu'il  vient  d'y  faire  ; 
il  dit  que  sa  pension  de  quatre  cent  florins  est 
extrêmement  minime ,  mais  que  malgré  cela  il 
tâchera  de  ne  pas  vivre  aux  dépens  d'autrui ,  et 
de  se  passer  d'un  domestique.  Les  religieux  de 
son  ordre  qui  n'ont  pas  l'habitude  d'héberger  des 
étrangers ,  l'ont  congédié  après  lui  avoir  donné 
pendant  quelque  temps  l'hospitalité,  et  ses  illus- 
tres protecteurs  bornent  leur  munificence  à  louer 
ses  ou\T7ages  ,  ce  qui  le  force  à  jeûner;  il  se  plaint 
amèrement  d'être  calomnié  sans  raison  aucune , 
attendu  que  sa  conduite  a  toujours  été  irré- 
prochable. 

«  Amplissime  Domine.  Miror  sane  in  ciijusqiiam  animum 
et  pectus  descendere  posse,  ut  tam  facile  siiorum  possit 
oblivisci.  Annus  iam  evolutus  est,  et  tôt  menses  currunt, 
ex  quibus  post  tôt  litteras  meas,  ne  uno  quidem  nutu  ab 
Amplitudine  T.  mereor  recreari.  Intérim  vivere  debui,  et 
si  per  bonam  veniam  et  gratiam  tuam  mihi  licet,  spirare 
porro  etiam  volo.  Esto ,  Rl'uus  Cardinalis  Borromœus  magis 
honorificè ,  quam  liberaliter  me  habuit  ;  esto,  quod  religiosi 
mei  ordinis  (qui  hic  nullis  ultramontanis  hospitium  com- 
modant)  post  pauculorum  mensium  charitatem  se  excusa- 
verunt,  et  hospitalem  tesseram  mihi  subtraxerunt ;  esto, 
quod  Romse  quoque  (quo  post  multas  cerumnas  denique 


—     ol      — 

me  coiituli,  iit  meliorem  fortiinam  mihi  pararem)  111"^' 
patroui  mei  (apud  quos  mendicare  neque  volo ,  neqiie 
aiideo),  nullam  munificentise  symbolam  in  me  conférant 
eximiè  aliàs  me  et  studia  mea  honorantes,  an  proptereà 
ego  ieiunare  debeo  et  rerum  omnium  mendicabulum  fieri? 
an  proptereà  ad  volutabrum  sedeo ,  et  nemo  meorum  vel 
silignas  milii  sul)ministrat  ?  non  peccavi,  et  in  amaritudi- 
nibus  moratur  ociilus  meus,  multo  tamen  magis  anima 
mea,  et  quare  improbus  aliquis  Giesi  me  a  vestigiis  tuis 
depellat  ?  Et  quid ,  si  in  sinu  S.  D.  N. ,  fortunam  meam  de- 
plorare  cogar,  et  totum  cordolium  excutere?  Qui  me  sane 
lœtis  oculis  et  benigno  nutu  nuper  adspexit,  et  diu  et 
libenter  sermocinantem  audivit,  et  fortassis  aliquid  in 
caussà  meà  prœstare  volet,  si  ita  velim.  Ego  vero  Ampli - 
tudinem  T.  venerari  et  colère  non  desinam,  et  ridere 
eorum  ineptias,  qui  apud  Amplitudinem  T.  famse  mese 
semper  aliquid  deterunt,  inter  quos  Blanquardum  illum 
nominare  possum,  a  quo  proscindi  ineptissimis  calumniis, 
et  quae  ne  speciem  quidem  veri  habere  possunt ,  laudi  im- 
primis  mihi  duco.  Mitto  nunc  computum  expensarum ,  quas 
hic  Romse  feci,  quibus  statim  satis  fieri  supplico;  in  quibus 
duorum  mensium  cibarii  sumptus  graves  et  insolentes  for- 
tasse  videbuntur,  sed  nihil  hic  (ut  in  tota  passim  Italiâ) 
vili  precio  venit,  et  magna  est  caritas ,  ut  videre  poterit  in 
computu  (si  ita  dignabitur  Amplitudo  T.)  generosi  adoles- 
centis  Caroli  Triestii,  hic  degentis,  quem  ad  patruum 
suum,  Toparcham  de  Auweghem  misit,  qui  cum  adhuc 
adolescens  sit,  pro  tenui  satis  mensâ,  tantundem  cum  fa- 
mulo  persolvere  débet.  Ego  propria  quadrâ  deinceps  vivere 
constitui,  et  quantum  feret  valetudo,  sine  famulo,  cui  pro 
annuo  servitio ,  et  quia  querebatur  se  vestes  omnes  suas  in 
obsequiis  meis  detri visse,  quinquaginta  florenos  numerari , 
curavi  a  Mercatore,  cui  (ut  spero)  in  Belgio  modo  satis- 
factum  est,  et  alios,  quinquaginta  privatis  meis  expensu- 


—    32    — 

lis ,  quas  propria  mea  quadra ,  viliori  omnino  precio  dein- 
ceps  facere  decrevi.  Vale,  Amplissime  et  Révérend™'^  Prsesul, 
et  benedictionem  tuam  mihi  mitte  ut  possim  hic  vivere^ 
quadringentorum  florenorum  anniia  pensiuncula ,  vel  certè 
cum  bonesto  viatico  transacta  calida  hac  sestate,  in  Bel- 
gium  reverti.  Ad  genua  Arnplit.  T.  me  advolvo,  et  omnia 
obsequia  mea  addico.  Ex  Urbe  3  Calend.  Maii  16^3. 

»  Amplit.  V. 
»  Observantissimus  filius, 
»  (Signé)  Jacobus  Coen.  Lummenœus  a  Maeca  , 
»  Relig.  sacerdos.  » 

Dans  une  lettre  écrite  à  un  haut  personnage 
qui  s'intéressait  à  lui,  et  dont  nous  n'avons  pu 
trouver  le  nom,  Lummenœus  se  plaint  de  l'aban- 
don où  le  laisse  son  abbé  et  de  la  gêne,  voire 
même  la  misère  où  il  se  trouve.  Cette  pièce  est 
fortement  détériorée ,  mais  ce  qu'il  en  reste  nous 
a  suffi  pour  rétablir  le  sens  de  l'épître  toute 
entière. 

«  Amplissime  et  Perilliistris  Domine. 

»  In  angustiis  sum,  quippe  a  Prœlato  meo  desti tutus, 
qui  sane  parum  cordate  (liceat  mihi  dicere)  et  Christiane 
id  agit,  quod  sic  domesticorum  suorum  curam  gerit.  Et 
quô  tandem  me  abjicere  decrevit,  nisi  forte  ad  siliquas  et 
sordes ,  et  publicum  mendicabulum ,  qui  sic  patientia  mea 
abuti  vult?  Et  revero,  nisi  Deum  cœli  cum  bono  illo  vate 
timerem;  —  sed  motos  prœstat  componere   fluctus.  Ego 

duxerim  et  dilapidavorim  (quod  minime) 

ostendet  quem  apud  me  secus  quare  fieri 

studioriim  meorum,  fructus  lego,  qui  totam  retatem  meam 
atque  adeo  valetudinem  (Evpstj  ev  xpiirot  tou-o)  honestissimis 


—    33    — 

studiis  et  scriptis  detrivi  et  verè,  verè,  ut  vides,  dilapidavi. 
Intérim  quanti  mercenarij  in  domo  Patris  mei  abundant 
panibus,  et  quanti  catelli  uberis  mensse  analectis  se  ingur- 
gitant placentse  reliquias  delinquunt  et  ego  hic  famé  et 
tristitiâ  contabesco.  Nihil  possum  amplius  quia  lacrymse 
me  impediunt,  etc.  Vale  Amplissime  et  perillustris  Domine, 
et  si  qua  potes,  tua  gratia  et  patrocinio  me  juva,  Urbe 
Domina  l^^  maii  1623.  Amplit.  Humillimus  Cliens.  (Signé): 
Jacobus  Corn.  Lummenœus  a  Maeca.  Relig.  sacerd.  » 

Peu  à  peu  quelques  personnes  influentes  com- 
mencèrent à  s'occuper  de  la  position  du  pau- 
vre moine.  Gaspard  Scioppius,  conseiller  aulique, 
écrivit  le  1*'''  mai  à  l'abbé,  en  lui  faisant  parvenir 
la  lettre  de  Lummenœus  du  29  avril  avec  le 
compte  de  ses  dépenses.  Il  dit  à  l'abbé  qu'au  lieu 
de  laisser  un  des  siens  dans  la  misère  ,  il  devrait 
au  contraire  s'enorgueillir  de  posséder  un  tel 
homme  dans  son  ordre. 

«  Perill"^  et  Rev^e  Domine. 

»  Non  lioc  ago ,  ut  R.  P.  Jacobo  Cornelio  Lummenœo  pa- 
ternam  D'^  V.  benevolentiam  conciliem,  quod  id  absurde 
facere  merito  existimari  possim ,  quippe  cum  homo  exter- 
nus  et  ignotus  patri  domesticum  vel  potius  filium  commen- 
dare  studeam.  Potius  ei  gratulor  de  tali  filio  qui  publi- 
candis  ingenii  ac  doctrinse  sufe  monumentis  banc  Ecclesise 
catholicse  navarit  operam ,  ut  occlusiorem  Hœretici  male- 
dicentiam  suam  habere  cogantur  neque  sacerdotes  catho- 
licos  prœcipueque  monachos,  ut  ab  omni  studiorum  hu- 
manitate  ac  politiori  literatura  remotos,  nihilque  nisi 
allium  et  cœpe  olentes,  tanto  supercilio  prse  se  postliac 
possint  contemnere.  Itaque  non  immerito  Amplissimi  Car- 
dinales cum  benevolentia  singulari  complectuntur  dignis- 

3 


—    34    — 

simumqiie  censent,  quem  rev™*  D.  V.  liberaliter  habeat, 
quorum  sententiœ  cum  et  ipse  meuni  subscribam  judicium, 
non  recuso ,  quin  milii  feratur  expensum ,  quicquid  in  euni 
impensarum  fecerit.  Cum  autem  eveniet  occasio ,  ut  in  Urbe 
j5gymœ  j)  Y  eiusque  monasterio  aliquid  operse  nauare 
possim,  rébus  ipsis  declaraturum  me  recipio,  ut  quantum 
ei  nomine  illo  debere  ne  agnoscam,  intelligere  possit, 
neque  eam  vel  mea  causa  in  P.  Lummenœum  benigni- 
tate  maiore  usam  esse  p?eniteat.  Deus  eam  diu  servet  ac 
prosperet.  Romœ  kal.  Mai  1623.  Perills  et  Rev^e  D.  V.  stu- 
diosissimus.  Gaspar  Scioppius  Csesarius  et  regius  consi- 
liarius.  » 

Le  cardinal  Luclovisi  s'interposa  également  et 
demanda  que  l'abbé  envoyât  du  moins  la  somme 
nécessaire  au  pau^a^e  religieux  pour  se  rapatrier. 
Tout  comme  Scioppius,  il  loue  les  talents  de  Lum- 
menœus,  qui  seuls  méritaient  qu'on  le  tirât  de  la 
misère,  et  l'appelle  un  houmie  vertueux  et  pieux. 
Ce  cardinal  Ludovisi  était  un  parent  du  pape 
Grégoire  XV Ludovisi,  élu  en  1621 .  Voici  la  lettre  : 

«  Rev''^  Pater.  Literarum  studia,  quibus  nomini  suo  cla- 
ritudinem  peperit  pater  Jacobus  Cornélius  Lummenœus  à 
j\farca ,  cum  ei  in  Italia  ecclesiasticorum  principum  bene- 
volentiam  conciliarerint ,  non  vulgaria  etiam  habeutur 
istius  monasterii  ornamenta.  Quare  cum  illum  non  satis 
commoda  valetudine  conflictatum  clementioris  aëris  spes  in 
tas  regiones  iampridem  evocaverit ,  par  esse  non  videtur 
eum  Patris  Vestrse  patrocinio ,  et  istius  monasterii  beneficio 
in  prœsentia  spoliari  perende  atque  exulem.  Placet  ergo 
S™°  D.  Nostro  virum  hune  de  religiosa  ista  familia  bene 
semper  mereri  studeutem  istuc  redire ,  eique  longum  hoc 
iter  suscepturo  necessarias  pecunias  a  P^e  Vestra  suppedi- 


—    35    — 

tari.  Id  quidem  dum  prsestabit  virtutem  pietatemque  in  eo 
erudito  sacerdote  colet,  et  voluntatem  meam  arctissime 
sibi  atqiie  ordini  suo  obstringet.  Quod  uberius  ex  R^'o  Do- 
mino arcliiepiscopo  Patracensi  nuntio  apostolico  cognoscet 
P''^  Yestra  cui  beneficiiim  hoc  debere  cupio ,  et  officia  luea 
ex  animo  defero.  Romse  die  6  maii  1G23.  Yestrse  Pat"  stu- 
diosiis.  (Signé)  Gard.  Ludovisius.  » 

Luinmenœus  écrivit  ensuite  à  son  abbé  le  15; 
tout  en  demandant  des  secours,  il  se  défend  d'avoir 
fait  des  dépenses  exagérées  et  lui  recommande  sa 
position;  il  expédia  cette  lettre  deux  joui's  après 
par  son  neveu,  auquel  il  prie  Tabbé  de  faire  bon 
accueil. 

«  Reverendme  Domine. 
»  Negocium  meiim  ex  animo  commendo ,  et  ut  benignum 
unum  oculum  ad  me  advertas  supplice.  Certe  anima  mea  in 
amaritudine  est,  et  quanquam  niliil  dilapidaverim,  ad  vo- 
lutabrum  et  silignas  respicio,  vel  certe  in  augustiis  expiro. 
Prorumpunt  mihi  lacrj^mœ,  et  calamum  implent  cum  tam 
indigne  mecum  agi ,  cum  animo  meo  cogito.  Vale  Piever^e 
Prœsul.  Romse,  1°  id.  Maii  1623.  Révérend""*  Dominât,  v. 
Humillimus  cliens.  (Signé)  :  Jacobus  Corx.  Lumsiexœus  a 
Marca.  Relig.  sacerd.  » 


^o- 


«  Amplissime  et  reverend'"e  Domine.  Genua  tua  amplec- 
tor,  et  omnia  mea  obsequia  addico.  Generosum  hune  juve- 
nem ,  Révérend™'  nostri  nepotem ,  qui  bas  defert ,  bénigne 
ab  Amplit.  T.  respici  et  audiri  rogo.  Lacrymse  me  impe- 
diunt  i^lura  scripturientem,  et  lituras  litteris  indicunt. 
Vale  Reverendnie  Pater,  et  pudori  meo  consule ,  ego  honori 
et  existimationi  tuse.  Ex  Urbe  1°  id.  Maij  1623.  Amplit.  Y. 
observantissimus  Cliens.  (Signé)  :  Jacobus  Corn.  Lumme- 
KŒUS  A  Marca.  Relig.  sacerd.  » 


—    36     — 

C'est  à  la  suite  de  Tintervention  de  Scioppius  et 
de  celle  du  cardinal  Ludovisi,  que  Tabbé  Schayck 
écrivit  une  lettre  que  nous  croyons  être  la  ré- 
ponse à  celle  de  Scioppius  et  devoir  dater  du  milieu 
de  l'été  de  l'année  1623.  Elle  ne  porte  aucune 
suscription  ni  aucune  date,  c'est  une  copie  faisant 
j)artie  du  dossier,  et  portant  au  bas  en  guise  de 
«  certifié  conforme,  »  la  mention  «  hœc  epistola 
scripta  est  ab  111.  Dom.  Arsenio,  abbate  Blandi- 
niensi.  »  L'abbé  y  renouvelle  l'expression  de  son 
mécontentement,  il  accuse  de  nouveau  Lumme- 
nœus,  répétant  à  peu  près  les  mêmes  griefs  que 
dans  sa  lettre  du  17  février  au  cardinal  Borromée, 
et  dit  qu'il  a  envoyé  au  cardinal  Ludovisi  cent 
pièces  d'or  pour  le  viatique  de  son  moine,  afin  de 
l'aider  à  rentrer  en  Belgique.  Cette  espèce  d'au- 
mône que  Tabbé  a  l'air  de  considérer  comme  une 
grâce  insigne,  était  bien  insuffisante,  on  le  conçoit 
facilement  ;  nous  le  verrons  du  reste  plus  loin. 

Voici  la  lettre  de  l'abbé  : 

«  Ornatissime  Domine. 

»  Vidi  memoriale  Dom.  Cornelii  a  Marca  oblatum  S.  D.  N. 
et  a  vobis  mihi  transmissum ,  cui  responderi  nomine  nostro 
poterit,  me  ab  aliquot  mensibus  per  Illustrissimum  nun- 
cium  Belgii ,  ad  Illustrissimum  Dominum  cardinalem  Lu- 
dovisium  misisse  centum  aureos  pro  viatico  redeundi  in 
Belgium,  quos,  ut  intelligo,  in  res  alias  impendit,  et  in- 
super magna  débita  Romse  contraxisse,  pra3ter  alias  adhuc 
pecunias  hic  restitutas ,  quas  a  diversis  Belgis  mutuô  acce- 
perat,  adeô  ut  videatur  omnino  insatiabilis ,  ac  rerum 
omnium  prodigus.  Prœterea  oportetscireillum  liinc(extortâ 
per  importunitatem  licentiâ ,  invitis  etiam  fratribus  et  con- 


37     - 


sanguineis  suis)  discessisse  Mediolaniim  ad  Ill"i"«  D,  cardi- 
iialem  Borromœum ,  a  qiio  evocatus  aliquoties  fiierat ,  qiia- 
tenus  eiiis  opéra  in  bibliotlieca  sua  uteretur,  qui  cum  non 
egeret  eius  subsidio  (uti  apparuit)  eum  in  monasterio 
S.  Simpliciani,  ordinis  nostri,  ibidem  collocavit,  ubi  ma- 
nere  nolens,  deseruit  dictum  monasterium ,  allegando  se 
non  posse  aut  velle  vivere  in  monasteriis  reformatis,  et 
cum  illinc  hùc  in  patriam  redire  debuiS'set  cum  pecuniis , 
quas  liberaliter  dono  accepit  a  iam  dicto  III"^  cardinalo 
Borroma?o ,  csepit  nihilominus  ulterius  peregrinari  et  diva- 
gari  per  Italise  civitates ,  sine  tanien  nostra  obedientia ,  aut 
requisitis  de  novo  dimissorialibus ,  que  solum  ipsi  Mediola- 
num  usque  proficiscendi  facultatem  faciebant.  Quare  cum 
prodegerit  quidquid  ipsi  fuerit  nummorum,  ratio  minime 
postulat  ut  de  novo  ei  pecunias  suppeditem ,  quiljus  ulte- 
rius per  orbem  divagetur  ;  sed  potins  meretur  ergastulum 
quo  ejus  corpus  castigetur,  ne  anima  eius  pereat. 

»  Jam  equidem  ssepius  experientia  edoctus ,  quod  quo- 
tiescumque  diversis  in  locis  illum  collocaverim ,  nunquam 
nisi  oberatus  domum  reversus  est  ;  hic  vero  existens  segri- 
tudinem  simulavit,  quo  minus  cum  reliquis  confratribus 
frequentaret,  commune  refectorium  ac  capitulum  ad  au- 
diendas  sanctas  vespertinas  collationes ,  sic  ut  ad  biennium 
aliquando  noluerit  neque  celebrare ,  neque  choro  interesse , 
imo  in  solemnioribus  festis  vix  potuerit  ad  confessionem 
compelli ,  adeo  ut  pessimum  hic  suis  confratribus  prsebue- 
rit  exemplum,  posueritque  lapidem  ad  quem  religiosi 
nostri  quotidie  pedem  oii'enderent.  Intérim  tamen  ad  hoc 
valebat  optime ,  ut  quotidie  ad  se  incorrigibilem ,  socios  et 
congerrones  in  cubiculum  suum  convocaret,  quibuscum 
genio,  compotationibus  ac  abdomini  semper  tanquam  de 
grege  porcorum  indulgeret  spernendo  monitiones  nostras. 
Dolebam  vehementer  me  inter  cœteros  unum  tantum  ha- 
bere  religiosum  ab  ordine  etiam  Capuciuorum  excuculla- 


—    38    — 

tum,  prseclari  quiclem  ingenii ,  secl  claustri  monasterii 
(si  verum  dicere  liceat)  a  miiltis  iam  annis  impatientem , 
libertatis  appetentem,  et  ut  imico  decam  verbo,  institut! 
nostri  omnino  fastidientem, 

»  Prœterea  non  sufficere  nobis  facultates ,  ob  liorum  tem- 
porum  calamitatem,  agrorum  devastationem  et  inundatio- 
nem ,  tam  per  hostes ,  quam  nostros  etiam  milites  illatas , 
et  immorigeros,  incorrigibiles  ac  vagabundos  religiosos 
extra  patriam  tam  sumptuose  alamus  ;  sed  si  quid  superes- 
set,  impendendum  potius  in  reœdificatione  huius  nostri 
monasterii,  ab  hsereticis  funditùs  eversi,  oui  rei  elapsa 
œstate,  et  superioribus  annis  toti  insudavimus  ac  omnem 
pecuniam  impendimus  et  adhuc  impensuri  sumus  (Deo 
adiuvante)  nisi  hœc  calamitos  a  tempora,  et  continua  in 
Flandria  acerrima  bella,  nobis  obstaculum  prœbeant. 

»  Deinde  quinimo  dicet  prefatum  D.  Cornelium  a  Marca 
nobis  promississe  antequam  discederet  bine,  si  nunquam 
imposterum  petiturum  pecunias ,  aut  molestum  fore  dicto 
nostro  monasterio,  quando  quidem  abundè  sibi  in  Italia 
provisum  iri  sperabat,  ob  scientiam  poesios,  qua  (uti  ve- 
rum omnes  fatemur)  valdè  excellit,  utinam  ad  salutem 
anima). 

»  Expediret  denique  ut  collocaretur  in  aliquo  monasterio 
sive  Cassinensi ,  sive  alibi ,  ubi  posset  confessiones  peregri- 
nantium  excipere,  sive  Flandrorum  aut  Francorum.  Cau- 
sam  illam  D.  V.  valdè  commendo  et  Deum  opt.  Max.  rogo 
diu  servare  incolumen.  » 

Toutes  ces  accusations  étaient  pour  le  moins 
exagérées ,  plusieurs  lettres  de  Lummenœus  sont 
là  pour  le  prouver  ;  en  outre  ,  si  elles  avaient  été 
fondées,  les  personnages  haut  placés  qui  intercédè- 
rent en  faveur  du  moine  se  seraient  bien  gardés  de 
s'occuper  de  lui,  et  à  coup  sûr  ne  lui  auraient  pas 


—    39    — 

prodigué  les  éloges  que  nous  trouvons  dans  leurs 
lettres.  Ces  éloges  sont  une  preuve  des  hautes  re- 
lations que  la  science  du  moine  de  Saint-PieiTe 
lui  avaient  procurées  à  Rome.  Malheureusement, 
ainsi  qu'il  le  dit  dans  une  lettre  précédente ,  ses 
protecteurs  tout  en  louant  ses  écrits  le  laissaient 
mourir  de  faim.  Pendant  ce  temps  sa  position 
devint  de  plus  en  plus  précaire  et  sa  santé  en 
souffrit;  il  s'adressa  de  nouveau  à  son  abbé  le 
15  juillet,  se  plaignant  d'être  comme  abandonné, 
bien  que  pauvre  et  malade. 

«  Reverendme  Pater.  Quod  hacteniis  nihil  paterniim  ab 
Amplit.  T.  percipere  merear  (cum  nulliim  tamen  probi  filii 
officium  erga  R™  t.  neglexisse  meminerim)  a^gre  admodum 
fero,  illud  imprimis,  quod  variis  passim  calumniis  et  dic- 
teriis  famam  meam  apiid  ineos  laborare  intellexi  nimirum 
inter  gyronagos  et  Sarabaitas,  régulée  nostrse  carcinomata 
nunc  (ut  audio)  recenseor,  quia  Mediolauo  sine  expressa 
venia  discessi;  igitur,  dum  Mecliolani  vivere  id  est  bibere 
et  comedere  non  licuit ,  et  quia  bospitii  contubernio  (reli- 
giosis  istius  cœnobii  honeste  in  speciem  se  excusantibus , 
projeter  frequentiam  suorum  hospitum)  exclusus  fui,  et 
quia  Cardinalis  alibi,  id  temporis,  providere  mihi  non 
potuit,  non  potui  fortassis  alio  in  loco  alimoniam  qu£e- 
rere  et  fortunam  teutare,  in  alieno  solo,  a  R*  T.  plané 
destitutus.  Atqui  non  niereor  a  meis  respici,  et  fortassis 
non  sum  sicut  cseteri  homiues,  et  veluti  ignavum  pecus, 
aut  fucus ,  aut  fungus  (ut  clare  nuper  intellexi)  a  prœse- 
pibus  arceor,  quia  per  annos  et  menses  pondus  diei  et 
œstum  cum  cseteris  non  toleravi  ;  ergo  morbus  dirissimque 
et  hypocbondriaca  valetudo  (quse  me  cotidie  fere  in  ex- 
tremis evocat  non  est  pondus,  non  est  œstus,  ergo  tôt. 


—    40    — 

vigiliœ  et  liiciibrationes  mese,  tôt  scripta,  et  honestissi- 
morum  stiidiorum  exercitia,  non  sunt  pondéra,  non  sunt 
sestus,  et  sic  ingenii  sui  viriculas  intendere,  et  sic,  ad 
majorem  Dei  gloriam  totum  se  expendere  et  exliaurire 
(ciim  aliud  per  valetudinem  facere  non  liceat)  non  est 
laborare,  non  est  sudare,  non  est  sestuare.  Ego  vero  pa- 
tientise  nieœ  supplementum  id  esse  volo ,  ut  ciim  nihil  non 
omiserim  pro  virili  mea  servus  inutilis  liabear  et  traducar. 
Testor  illum  oculum,  qui  pernox  et  perdius  speculatur 
omnia ,  et  aurem  illam  zeli ,  quse  omnia  attente  audit ,  quia 
non  mentior  et  fortassis  apud  sequum  illum  judicem  caussa 
olim  cadent ,  qui  nunc  innocentiam  meam  accusant ,  atque 
adeo  œruranis  meis  ludunt.  Prsestolabor  intérim  cum  silen- 
tio  salutare  Dei ,  et  fortassis  aliquis  patronorum  meorum 
Cardinalium,  hoc  vacantiarum  tempore  summum  illud 
ecclesiee  tribunal  ascendet,  qui  me  propius  intueri  volet.  Te 
amo  et  observo  R'"''  mi  pater,  et  benedictionem  tuam  im- 
ploro.  Vale  et  longum  nobis  vive.  Ex  Urbe ,  domina  gen- 
tium,  quse  nunc  ut  vidua  per  mortem.  S.  D.  N.  Gregorii  15, 
suspirat  idib.  jul.  1623. 

»  R™'^  Amplit.  T.  observantissimus  filius, 
»  (Signé)  :  Jacobus  Corn.  Lummenœus  a  Marca. 
»  Relig.  sacerdos.  » 

Au  mois  de  novembre  un  certain  Jean  de  Ro- 
giers ,  Français ,  établi  à  Rome ,  fils  d'un  médecin 
de  Douai,  et  à  ce  qu'il  paraît  médecin  lui-même, 
intercède  auprès  de  l'abbé  en  faveur  de  Lumme- 
nœus, dont  il  raconte  les  malheurs  et  les  pérégri- 
nations ,  et  dit  qu'il  l'a  hébergé  chez  lui  malade 
pendant  deux  ou  trois  mois  ,  ce  qui  a  nécessaire- 
ment occasionné  de  grands  frais  ;  ce  détail  et  un 
semblable   témoignage   suffiraient   pour  prouver 


—    41    — 

que  Lummenœus  ne  s'était  pas  livré  à  de  folles 
'  dépenses,   et  que  Tabbé   Scliayck  avait  été,   en 
partie  du  moins,   trompé  par  de  faux  rapports 
sur  sa  conduite. 

«  Monseigneur  Reverendissime, 

»  Celle  en  date  du  mois  de  septembre  de  l'an  présent 
que  V.  S.  R""^  m'at  pieu  d'escrire  m'a  rendu  perplex, 
attendu  que  l'assistence  que  j'ay  faict  a  son  R''  reli- 
gieux à  Marca,  l'ay  faict  tant  en  regard  de  ses  lettres 
d'obedeience ,  ou  dimissoriales  non  contenantes  limitation 
d'aulcun  lieu  d'Italie,  ou  il  s'y  devoit  mectre  et  arrester, 
qu'aussy  pour  avoir  mon  feu  père  servy  aultre  fois  en 
Douay  le  prédécesseur  de  V.  S.  R™''  en  qualité  de  docteur 
de  médecine.  Que  sont  respectz  relevantz  par  lesquelz, 
pour  ne  laisser  vagabonder  un  tel  religieux,  j'ay  esté 
esmeu  de  le  recevoir  et  assister  en  ma  maison  principale- 
ment, attendu  que  par  faveurs  de  plusieurs  signaments  du 
Pape  présent  lors  quil  estoit  Cardinal  et  de  l'IUm  S.  Cardi 
Ludovisio  ayant  taché  de  luy  faire  avoir  place  icy  au  mo- 
nastère de  St  Paule ,  l'abbé ,  ny  couvent  ne  l'ont  volu  ne 
pouveu  recevoir  pour  nestre  de  leur  congrégation.  Et  par- 
tant pour  avoir  procédé  de  bonne  foy  ad  intention  de  faire 
service  a  V.  S.  R™e^  sachant  qu'il  tiroit  provision  d'icelle 
pour  vivre,  me  confie  que  non  obstant  sa  resolution  prinse 
en  sadite  lettre  me  destituant  de  son  recours  et  secours 
s'en  déportera,  me  remédiant  sur  ses  futures  provisions, 
ou  aultrement  selon  sa  bénigne  libéralité  s'extendera,  tant 
plus  au  regard  que  je  l'ay  tenu  deux  ou  trois  mois  malade 
a  grands  frais  et  despens.  Et  quant  au  300  florins  derniers 
que  V.  S'^  R""'  luy  at  envoyé  pour  retourner,  j'en  ay  receu 
une  partie  pour  ses  alimentz  journaliers  et  continuelz,  et 
pour  en  payer  aulcuns  créditeurs  ausquels  il  devoit.  De 


—    42    — 

manière  que  les  sommes  contenues  en  mes  deux  lettres  de 
changes  ont  demoureez  en  leur  enthier.  Pourquoy  je  supplie 
bien  humblement  V.  S.  R™^  de  me  remédier  en  telle  sorte 
que  je  ne  perde  riens,  car  ce  que  j'ay  faict  l'ay  faict  pour 
causes  susdites,  et  parce  qu'en  ayant  adverti  V,  S.  Ji^^ 
passe  plusieurs  mois  de  Tassistence  que  je  lui  faisois  icelle 
non  me  respondant  me  confiois  que  s'en  contentoit.  Sur- 
quoy  me  recommandant  très  humblement  à  V.  S.  R™®,  je 
prie  Dieu,  Monseigneur,  la  conserver  a  son  abbaye  en 
longue  vie  avecq  santé  et  prospérité.  De  Rome  le  xj  de  no- 
vembre 1623.  De  Y.  S.  U^^  très  humble  serviteur.  (Signé)  : 
Jehan  de  Rogiees.  » 

A  la  même  date  que  Jean  de  Rogiers,  le  11  no- 
vembre, Lummenœus  s'adressa  de  nouveau  à  son 
abbé;  dans  sa  lettre,  qui  témoigne  d'un  profond 
découragement ,  il  se  disculpe  des  calomnies  dont 
il  est  lobjet;  il  dit  qu'il  ne  mérite  pas  les  quali- 
fications, injurieuses  pour  un  religieux,  que  son 
abbé  lui  a  adressées;  il  n'a  rien  fait,  dit-il,  qu'il 
ne  se  crût  autorisé  à  faire;  s'il  a  quitté  le  mo- 
nastère de  Saint-Simplicien,  c'est  qu'il  lui  était 
impossible  d'y  rester;  il  n'est  sorti  de  Milan 
qu'après  en  avoir  informé  l'abbé  jusqu'à  cinq 
fois,  n  prend  Dieu  a  témoin  qu'il  a  toujours 
agi  de  bonne  foi,  et  espère  qu'il  lui  pardonnera 
le  mal  qu'il  peut  avoir  commis  sans  le  vouloir. 
La  fin  de  sa  lettre  même  témoigne  de  l'état  de 
marasme  où  il  était  tombé,  il  signe  :  «  De  votre 
»  Grandeur  l'obéissant  fils,  ou  si  vous  ne  le  vou- 
))  lez  pas  ainsi,  l'humble  client,   w 


-    43    — 

«  Amplissime  Domine. 

»  Quod  Reverentia  Tua  nescio  qua  privata  îcmuLitione 
ne  unum  quidem  verbum  liactenus  ad  me  dignatur  et  nuper 
admodiim  apud  hospitem  meum  tam  enormiter  atque  adeo 
indigue  me  prosciderit  œquo  animo  ferre  non  possum. 
Vocat  me  inobedientem,  vagum,  instabilem,  et  niliil  minus 
quam  fugitivum  et  apostatam ,  et  cui  forte  prseter  liabitum 
et  tonsuram  nihil  monastici  rigoris  et  disciplinée  cordi  sit, 
et  proinde  omui  victu  et  alimonia  mihi  interdicit,  et  te- 
nens  me  suffocat ,  ne  respirare  possim.  Bona  verba  et  bona 
facta ,  qua?so  et  noli  me  inauditum  sic  condemnare.  Nimi- 
rum  litterse  meae  dimissorise  Mediolano  me  includebant,  et 
ego  apud  monachos  ordinis  nostri  ad  D.  Simpliciani  à  card. 
Borromseo  commendatus ,  clausuram  istam  ferre  non  potui , 
et  non  faciebat  ad  genium  meum  ,  sic  coerceri ,  et  proinde 
per  totam  Italiam  vagus  Sarabaïtam  et  gyronagum  egi  et 
libertatis  mese  libidini  sic  insernivi.  Calumnise  merœ  sunt, 
et  nescio  quis  Reventia  T.  id  potuerit  persuadere.  Discessi 
ab  urbe  Mediolano ,  sed  postquam  R.  T.  ter,  quater,  quinies 
per  litteras  monuissem  et  itineris  mei  probam  et  luculen- 
tam  rationem  reddidissem.  Testor  Deum ,  qui  solus  inno- 
centiam  meam  novit ,  et  probat  renés  et  corda ,  quod  illam 
tesseram  hospitalem  non  fregi  apud  monachos  istos ,  atque 
adeo  domicilium  non  mutavi,  nisi  prius  se  excusantibus 
illis  et  prementibus  et  publiée  exprobrantibus  mihi  et  fa- 
mulo  tam  longam  moram  hospitii,  quod  diutius  mihicom- 
modare  non  possent.  Discessi  itaque  sic  coactus  et  prop- 
terea  instabilis  et  gyronagus  audire  mereor,  et  vel  in  hac 
afflictissima  valetudine  meâ  vel  intra  podagrœ  compedes 
Mercurium  in  pedibus  habere.  Ignoscat  illis  Dens,  qui  hoc 
R.  T.  persuadere  conantur,  et  sic  verecundum  Joseph 
innocentiœ  polymitâ  exivent,  et  sic  etiam  ferinum  sangui- 
nem  et  turpes  maculas  vestimento  eius  inspergunt.  Intérim 


—    44    — 

qiiid  hic  milii  faciendum  sit  ignoro ,  nisi  ut  me  apud  S. 
D.  N.  de  calumniis  milii  illatis  purgem,  et  justitiam  fla- 
gitem,  et  fortassis  aliqua  adjiciam,  qiise  falsa  non  erunt, 
atque  adeô  mihi  linguam  et  conscientiam  verberant  assi- 
due, ut  apud  vestigia  illa  deponam.  Nihilominus  lente 
festinare  volo,  ne  me  porrô  prœcipitantise  pœniteat,  et 
vero  tantisper  patienter  agam  donec  jintelligendum,  an 
aliquis  innocentise  mese  locus  apud  gratiam  tuam  relictus 
fuerit.  Nescio  tamen  an  nécessitas  aliud  non  roget ,  quid 
enim  faciam  urgente  me  et  increpante  hospite  meo,  qui 
litteris  R.  T.  irritatus ,  publicum  ergastulum  in  horas  com- 
minatur.  Confugiam  ad  sacrosanctos  pedes  Opt.  Max.  Pon- 
tificis ,  et  genua  illius ,  veluti  aram  quandam  et  ultimam 
anchoram  amplectar ,  qui  me  Mediolani  in  angustiis  ver- 
santem ,  et  monasterio  illi ,  auctoritate  Gard,  veluti  intru- 
sum,  litteris  suis  consolatus  est,  et  bénigne  olim  invisit,  et 
hic  Romse,  cum  in  privatâ  adhuc  purpura  ageret,  honori- 
ficè  habuit ,  et  fortassis  omnium  istorum  oblivisci  non  volet. 
»  Vale  Révérende  admodum  Pater,  et  si  quid  in  te  pec- 
cavi  (cuius  mihi  conscius  non  sum)  Christo  et  misericordise 
eius  visceribus  condona,  atque  adeô  tandem  aliquando  me 
respice,  cui  iam  me  illud  quidem  decoctoris  villici  relic- 
tum  esse  video  :  scio ,  quid  faciam  ;  neque  illud  frugiperdse 
filii  post  siliquas  et  volutabrum  :  vadam  ad  patres,  Iterum 
vale,  scriptum  Româ.  3°  F  novembris  1623°. 

»  Amplit.  V.  obediens  filius  vel  si  non 
admittis  humilis  cliens , 
»  Jacobus  Corn.  Lummenœus  a  Marca, 
»  Relig.  sacerd.  Benedictinus.  » 

(A  continuer). 

Emile  Vaeenbeegh. 


—    45    — 


ÉTUDES 


SUR 


LA   FLANDRE    IMPÉRIALE, 


TROISIÈME    ET    DERNIÈRE    ÉTUDE  ^ 

I. 

Dans  notre  précédente  étude  nous  avons  con- 
testé, à  une  partie  de  la  Flandre,  la  qualité  d'allo- 
diale,  que  les  savants  ont  voulu  lui  attribuer,  et 
indiqué  les  causes  de  l'erreur  dans  laquelle,  d'après 
nous,  ils  sont  tombés.  Nous  nous  proposons,  dans 
ce  travail,  de  soumettre  à  un  nouvel  examen  cri- 
tique les  arguments  qu'ils  ont  produits. 

A  tout  seigneur  tout  lionneur  :  commençons 
donc  par  l'historiographe  de  Termonde. 

Lindanus,  comprenant  que  l'acte  de  1313,  par 
lequel  le  comte  Kobert  de  Béthune  certifie  que  la 
seigneurie  de  Termonde  est  tenue  en  fief  du  comté 
de  Flandre  %  contredit  singulièrement  sa  thèse, 

»  Voir  Messager  des  Sciences  hîstor.,  année  1876,  pp.  149  et  391. 

2  «  Dedimus  prsedicto  patruo  nostro  supra  suam  conscientiam  ut 

veritatem  diceret,  quomodo  et  quod  in  posterum  dicta  terra  de  ïen- 


—    46     — 

s'évertue  à  nous  représenter  la  déclaration  de  ce 
prince  comme  une  manœuvre  adroite  ayant  pour 
but  d'assujétir  Termonde  à  la  Flandre,  et  il  accuse 
Guillaume  de  Néelle  et  Jean  de  Flandre  d'en  avoir 
été  les  complices  conscients  '. 

Cette  explication  est  plus  ingénieuse  que  con- 
cluante, car  rien  ne  prouve  que  les  premiers 
seigneurs  de  Termonde  aient  aspiré  à  l'autorité 
suprême  plus  ouvertement  que  les  autres  grands 
vassaux  de  la  couronne  de  Flandre.  Nous  ne  con- 
naissons pas  un  seul  document  dans  lequel  ils 
prennent  le  titre  de  possesseurs  allodiaux^  ou  ap- 
pellent leur  seigneurie  un  domaine  libre  et  franc. 
Bien  loin  de  se  proclamer  indépendants  et  de  se 
ranger  sous  la  bannière  de  tel  ou  tel  prince,  sui- 
vant les  exigences  de  leur  politique,  on  les  voit 
constamment    agir  en   sujets  fidèles,  en  loyaux 


remoude  deberet  teneri  in  feudum  et  hominium  comitis  Flandriae, 
quia  certius  quam  alius  quisquam  poterat  scire,  quum  valde  diu  eam 
terram  de  Tenremonde  possèdent  in  suum  dominium  antequam 
dictus  noster  do  minus  et  pater  eam  acceperat,  et  ab  ejus  manu  deve- 
nerat  in  manus  prsedicti  domini  et  patris  nostri  (Guillielmi).  Qui 
patruus  noster  prasdictus  suscepit  dictam  veritatem  dicere  supra 
suam  conscientiam ,  et  dixit ,  quod  tota  terra  de  Tenremonde ,  in 
omnibus  suis  locis  et  partibus,  débet  teneri  in  feudum  et  homagium 
a  comité  Flandriœ,  et  quod  ita  ipse  accepit  quando  eam  hereditatem 
accepit  et  tenuit  ab  illustrissimo  et  potentissimo  principe  domino 
Guidone,  bonee  mémorise  olim  comité  Flandrire,  quem  Deus  absol- 
vat,  pâtre  suo  charissimo  et  avo  nostro,  et  quod  ita  semper  dixisset, 
sensisset  et  tenuisset,  quod  cliarissimus  et  amantissimus  dominus 
noster  et  parens  debuisset  récépissé  et  tenuisse  a  se.  »  Acte  du 
26  novembre  1313.  Lindanxjs,  De  Tenerœmonda,  p.  10.  Voir  aussi 
notre  ouvrage  :  De  stad  en  de  heerlijkheid  van  Dendermonde,  t.  VI, 
p.  124. 

•  De  Tenerœmonda,  p.  11, 


—    47    — 

chevaliers  du  comte  de  Flandre  ;  il  les  appelle  ses 
magnats,  ses  barons  et  les  reçoit  à  sa  cour  \ 

Plus  tard,  lorsque  par  suite  du  mariage  de 
Matliilde  II  de  Termonde,  la  seigneurie  passa  dans 
la  maison  de  Dampierre,  ces  relations  ne  changè- 
rent pas  de  nature,  mais  elles  devinrent  moins 
apparentes.  Comme  fils  du  comte,  comme  associés 
au  gouvernement,  Gui  et  Robert  occupaient  un 
rang  qui  laissait  dans  l'ombre  leur  domination 
sur  Termonde  ;  les  devoirs  du  parent  primaient  les 
services  du  vassal  et  les  rejetaient  au  second  plan. 
Il  est  possible  aussi  que  la  situation  particulière 
de  la  seigneurie  vis-à-vis  de  l'empire  fût  un  des 
motifs  de  l'hésitation  que  mit  Guillaume  I  de  Ter- 
monde  à  prêter  le  serment  de  féauté,  réclamé  de 
lui  par  son  frère. 

Faisons  remarquer  en  passant  qu'à  l'époque  dont 
il  s'agit ,  les  prétentions  à  Fallodialité  n'étaient 
pas  rares.  Contrairement  à  l'adage  reçu  en  France  : 
nulle  tertre  sans  seigneur,  les  esprits  portés  vers  les 
idées  d'émancipation  et  d'indépendance  suscitées 
par  les  événements  politiques  des  dernières  an- 
nées, étaient  arrivés  ici  à  considérer  un  grand 
nombre  de  terres  comme  allodiales.  Warnkœnig 
estime  qu'on  y  était  autorisé  jusqu'à  un  certain 
point,  en  ce  qu'il  existait  une  foule  de  petits 
alleux,  notamment  de  ceux  que  les  feudistes  ap- 
pellent des  francs  alleux  roturiers  ^  Beaucoup  de 


'  MiK^US,  t.  I,  p.  151.  —  Iljidem,  t.  IV,  p.  512.  —  Cartulaîre  de 
la  ville  de  Termonde,  pp.  5,  10,  22. 

»  Waenkœnig,  trad.  Gheldolf,  Hist.  de  la  Flandre,  t.  II,  p.  98. 


—    48    — 

biens  d'églises  et  abbayes  ayant  été  dégrevés  de 
toute  charge  onéreuse  lors  de  la  cession,  —  ainsi 
que  nous  en  voyons  un  exemple  dans  l'acte  du 
mois  de  novembre  1230  relatif  à  une  donation  faite 
par  Marguerite  de  Termonde  à  l'abbaye  de  Zwy- 
veke  ^  —  constituaient  ce  qu'on  pourrait  nommer 
des  francs  alleux  nobles.  D'autres,  mais  c'est  le 
petit  nombre,  formaient  déjà  des  alleux  avant  de 
passer  aux  établissements  religieux.  Nos  sources 
indiquent  une  donation  de  cette  espèce  faite  par 
Wautier  I  de  Termonde  à  l'abbaye  d'Afflighem  et 
consistant  dans  la  tierce  part  du  franc  alleu  [libe- 
rum  allodium)  de  Belle  près  d'Esschene  ^  Quelle 
que  soit  l'origine  des  alleux,  nous  croyons  pouvoir 
assurer  qu'ils  n'eurent,  en  Flandre,  qu'une  étendue 
médiocre;  on  les  trouve  communément  sous  la 
forme  d'un  bien  rural,  d'un  manoir,  jamais  sous 
celui  d'un  canton  comprenant  plusieurs  villages. 
Lindanus  se  livre  à  une  supposition  que  nous 
considérons  comme  gratuite.  Si  Robert  de  Bé- 
tliune,  dit-il,  y  avait  songé  plus  tôt,  il  n'eût  assu- 
rément cédé  la  seigneurie  de  Termonde  à  son  frère 
Guillaume  que  sous  réserve  de  vassalité.  Il  nous 
est  impossible  de  partager  cette  manière  de  voir. 
En  effet ,  Guillaume  aurait-il  toléré  qu'on  grevât 
la  part  qui  lui  revenait  dans  l'héritage  paternel 
d'une  charge  nouvelle ,  inconnue  jusqu'alors? 
D'ailleurs,  on  ne  perdra  pas  de  vue  que  la  con- 
vention relative  à  la  succession  paternelle  et  ma- 


*  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Zwyveke  lez-Termonde,  p.  21. 
'  Cartulaire  de  la  ville  de  Termonde,  p.  47. 


—    49    - 

ternelle  fut  conclue  en  1286,  par  conséquent 
longtemps  avant  Taccession  de  Robert  de  Béthune 
au  trône  '. 

Nous  ne  pouvons  deviner  pour  quelles  raisons 
le  seioiieur  de  Termonde  se  serait  déclaré  vassal  de 
la  Flandre  ;  Lindanus  n'en  cite  pas  une  seule  ;  et 
dans  la  supposition  que  ces  raisons  existassent, 
pourquoi  Guillaume  II  devait-il,  dans  sa  lettre  de 
1313,  les  passer  sous  silence?  N'était-il  pas  libre 
d'inféoder  sa  seigneurie  du  consentement  de  son 
frère,  son  plus  proche  héritier,  et  de  le  proclamer 
urbi  et  orhU  Pourquoi  avoir  recours  à  un  misé- 
rable subterfuge? 

Mais,  dit-on,  Robert  de  Béthune  ne  parle  que 
de  son  père  et  n'affirme  pas  que  ses  ancêtres  aient 
tenu  la  seigneurie  en  fief. 

Admettons  que  Robert  ait  voulu  en  imposer;  ne 
pouvait-il  pas  invoquer  aussi  bien  le  témoignage 
de  ses  ancêtres  que  celui  de  son  père?  Evidem- 
ment, mais  la  mention  des  ancêtres  était  super- 
flue, car  si  Robert  avait  reçu  la  seigneurie  en  fief 
de  son  père,  celui-ci  devait  l'avoir  acceptée  au 
même  titre  de  son  prédécesseur.  En  pareille  ma- 
tière la  tradition  faisait  foi.  D'autre  part,  pour- 
quoi supposer  que  le  comte  Robert,  appelé  sur  son 
honneur  et  sa  parole  de  gentilhomme  à  dire  la 
vérité,  l'aurait  celée?  Possède-t-on  un  seul  écrit 
qui  démente  ses  assertions?  De  quel  droit  donc 
prétend-on  les  infirmer? 


•  Jtjles  de  Satnt-Genois,  Inventaire  analyt.  des  chartes  des  com- 
tes de  Flandre,  \iP^  414  et  415,  jj.  125. 

4 


—    50    — 


n. 


Nous  allons  maintenant  rencontrer  les  antres 
arguments  de  nos  antagonistes  clans  la  défense  de 
leur  thèse  relativement  au  prétendu  franc  alleu 
de  Termonde. 

Les  comtes  de  Flandre,  dit-on,  fiers  de  la  pos- 
session d'une  seigneurie  allodiale,  mettaient  une 
certaine  ostentation  à  se  parer  du  titre  de  seigneur 
de  Termonde,  comme  s'ils  eussent  voulu  par  là 
marquer  que  cet  apanage  était  indépendant  de 
leur  monarchie. 

Cette  assertion  est  inexacte;  il  n'existe  pas  un 
seul  acte  dans  lequel  un  comte  de  Flandre  s'in- 
titule seigneur  de  Termonde.  S'il  est  vrai  que 
Gui  de  Dampierre,  dans  plusieurs  diplômes,  em- 
ploie cette  qualification  ',  on  ne  doit  pas  oublier 
qu'à  cette  époque  il  n'était  pas  encore  parvenu  au 
comté,  et  n'était  que  le  remplaçant  ou  l'associé 
de  sa  mère  Marguerite  de  Constantinople.  Le  do- 
maine de  Termonde  lui  appartenait  du  chef  de  sa 
femme,  à  la  mort  de  laquelle  (12G4)  il  passa  à 
leur  fils  Kobert.  Du  reste,  il  prit  aussi  le  titre 
de  seigneur  de  Béthune.  Or,  personne  n'a  jamais 
prétendu  que  Béthune  fût  un  franc  alleu.  Si  les 
ducs  de  Bourgogne  se  nommèrent  plus  d'une  fois 
seigneurs  de  Termonde  et  du  pays  de  Termonde, 
cela  tient  à  des  causes  particulières,  que  nous  exa- 
minerons en  temps  et  lieu. 

'  Cartulriire  de  la  ville  de  Termonde,  pp.  201,  204,  215. 


—     51     — 

Les  habitants  de  Termonde,  ajoiite-t-on ,  s'op- 
posèrent au  paiement  de  l'amende  de  300  li^a'es 
qui  leur  avait  été  imposée  en  1328  par  Louis  de 
Crécy  pour  l'hospitalité  qu'ils  avaient  accordée 
aux  bannis  lors  de  l'insurrection  de  la  Flandre  i. 
Naturellement ,  puisque  la  ville  ne  faisait  pas 
partie  de  la  Flandre  (sous  la  Couronne)  mais  bien 
de  l'Empire.  Leur  protestation,  qui  était  fon- 
dée, eût  dû  être  prise  en  considération,  d'autant 
plus  que  le  roi  de  France,  Charles  le  Bel  lui-même, 
par  ses  lettres  du  8  juin  1323  ,  avait  reconnu  la 
justesse  de  leurs  plaintes ,  lorsqu'il  envoya  à  ses 
officiers  de  justice  l'ordre  de  ne  pas  molester 
ceux  de  Grammont,  d'Alost  et  de  Termonde,  à 
raison  des  sommes  qui  lui  étaient  dues  par  les 
Flamands ,  mais  de  leur  accorder  au  contraire 
partout  aide  et  protection  ^. 

Les  Termondois ,  conjointement  avec  les  habi- 
tants de  la  ville  de  Grammont  %  du  pays  d'Alost, 


*  Meyer  ad  ann.  1328.  —  D'Oudeghekst,  édit.  Lesbeoussaet, 
p.  421.  —  Le  Glay,  Inventaire  sommaire  des  archives  départetnen- 
tales  du  Nord,  t.  I,  p.  105. 

*  De  stad  en  de  heerlijkheid  van  Dendermonde,  t.  VI,  p.  127. 

3  Dans  la  protestation  des  Grammontois ,  adressée  au  comte  de 
Flandre,  on  lit  ce  qui  suit  :  «  Très  chiers  et  redouté  seingneur,  nous 
vous  supplions  comme  a  no  droit  seiugneur  que  vous  ne  voulliés  mie 
soufi'rir  que  vostre  ville  de  Grammont  et  leur  appartenans,  qui  sont 
de  l'empire,  soient  kerkiet  ne  constraint  des  tailles  dou  roy  dessus 
dites,  pour  les  boines  services  qu'il  ont  fait  à  vous  prédécesseurs 
devant  dit,  et  que  vous  ne  veuilles  souiïrir  que  li  empiere  soit  ajoins 
au  royaume,  kar  ce  serait  encontre  Dieu,  encontre  vous  et  encontre 
raison.  »  Archives  de  l'État  à  Gand;  chartes  de  Rupelmonde, 
n^  1661  .Voir  aussi  Jules  de  Saint-Genois,  Inventaire  anal.^  pp.  465, 
467  et  46S. 


—    52    — 

des  Quatre-Métiers ,  et  des  autres  fiefs  allemands , 
ne  s'élevèrent  pas  avec  moins  de  force ,  en  1331 , 
contre  le  versement  de  la  quote-part  exigée  d'eux 
dans  Tamende  de  300,000  li\Tes  tournois  imposée 
à  la  Flandre ,  en  démontrant  que  leur  pays  rele- 
vait de  l'Empire  et  était  par  conséquent  complè- 
tement étranger  à  la  Flandre  sous  la  Couronne  ', 

S'ils  avaient  eu  des  velléités  d'indépendance, 
le  moment  ne  pouvait  être  plus  propice  pour  les 
étaler,  mais  dans  leur  requête  on  ne  trouve  pas  la 
moindre  allusion  à  cette  prétendue  allodialité. 

Le  cas  fut  tout  autre  lors  de  l'amende  imposée , 
en  1349,  par  Louis  de  Maie.  Il  résulte  des  lettres 
de  ce  prince  du  8  juillet  1349  ,  que  les  Termondois 
eux-mêmes  l'avaient  choisi  comme  arbitre  %  et  il 
s'y  nomme  ex^^ressément  souverain  '%  ce  qui  veut 
dire  suzerain ,  à  l'égard  de  Termonde ,  ce  qu'il 
était  en  réalité.  Il  ne  devint  possesseur  immédiat 
(seingneur  sans  moien) ,  en  d'autres  termes  il 
n'obtint  le  domaine  utile  de  la  ville  et  du  pays 
qu'en  1355  K 

Parlerons-nous  de  la  possession  par  la  ville  de 
la  justice  haute  et  basse,  d'une  église  collégiale, 
d'une  abbaye ,  d'un  hôpital ,   d'une  franche  foire 


*  De  stad  en  de  heerlijkheid  van  Dendermonde,  t.  VI,  p.  129  et  130. 

*  Voir  notre  Inventaire  des  archives  de  la  ville  de  Termonde,  dans 
les  Annales  du  cercle  archéologique  de  la  ville  et  de  Vancien  pays  de 
Termonde,  année  1866,  p.  70. 

^  «  Ende  wie  dat  op  andren  mesdade  om  't  vorseide  okisoen,  dat 
ware  moi'daet  ende  zoendincbrake,  correctie  derof  te  doone  bi  haren 
rechten  hère  ende  bi  ons  uls  sovrein.  »  Diplôme  original,  aux  archi- 
ves communales  de  Termonde,  n>^  14. 

*  De  stad  en  de  heerlijkheid  van  Dendermonde,  t.  VI,  p.  140. 


—    53    — 

annuelle,  d'un  marclié  liebclomadaire ,  d\me  en- 
ceinte fortifiée  ,  d'un  château  fort ,  d'un  blason  , 
d'un  tonlieu ,  etc.  ?  Mais  la  plupart  des  villes  de 
Flandre  étaient  dotées  de  privilèges  ou  d'établis- 
sements similaires. 

Le  fait  que  les  seigneurs  de  Termonde  se  sont 
intitulés  pynnces  '  et  qu'ils  ont  octroyé  une  charte 
de  commune  à  leur  ville  ,  n'a  nullement  la  portée 
qu'on  lui  attribue;  car  les  seigneurs  d'Alost,  de 
Béthune  et  bien  d'autres  encore  se  trouvaient 
dans  le  même  cas  ^ 

On  peut  douter,  et  avec  raison ,  que  le  droit 
de  déclarer  la  paix  ou  la  guerre  appartînt  au 
seigneur  de  Termonde  ;  quant  à  nous ,  nous 
sommes  persuadé  du  contraire.  L'article  XXVII 
de  la  keure  d'Audegem,  stipulant  que  les  cen- 
sitaires de  l'église  de  Cambrai,  en  ce  village, 
doivent  suivre  l'armée  du  seigneur  de  Termonde 
jusqu'aux  confins  du  pays  '\  ne  rappelle  que 
l'obligation  ordinaire  du  vassal  vis-à-vis  de  son 
seigneur  foncier  ^  La  lettre  du  mois  de  jan- 
vier 1238   (n.   st.) ,  par  laquelle  Robert ,    avoué 


»  a  Ego  Walterus,  princeps  et  dominus  oppidi  Teneremunden- 
sis.  »  Acte  de  l'année  1176,  Cartulaire  de  la  ville  de  Termonde,  p.  47. 

^  Du  Chesne,  Histoire  généalogique  des  maisons  de  Guines  et  de 
Gand,  pr.,  p.  224.  —  Le  même,  Hist.  gén.  de  la  maison  de  Béthune, 
pr.,pp.  8G,  95,  105,  132. 

^  «  Et  scieudum  quod  hospites  ecclesise  Cameracensis  apud  Oden- 
ghem,  debent  ire  in  exercitum  domini  de  Tenremonde,  quantum 
terra  de  Tenremonde  durabit.  »  Charte  de  Tannée  1245.  Cartulaire 
de  la  ville  de  Termonde,  p.  173. 

*  Warnkœnig,  Flandrische  Staats-  und  Rechtsgeschichte,  t.  III, 
deuxième  partie,  p.  55. 


—    54    — 

d'Arras,  seigneur  de  Bétliune  et  de  Termonde, 
promet  à  saint  Louis ,  roi  de  France ,  de  prendre 
son  parti  contre  Thomas ,  comte  de  Flandre , 
au  cas  où  celui-ci  n'exécuterait  pas  ses  engage- 
ments*, mérite  sans  doute  plus  d'attention.  Nous 
pourrions  faire  remarquer  que  durant  le  moyen 
âge  les  feudataires  déclarèrent  plus  d'une  fois  la 
guerre  à  leur  souverain  légal,  ou  se  liguèrent 
avec  ses  ennemis  ;  les  grandes  communes  fla- 
mandes elles-mêmes  imitèrent  maintes  fois  cet 
exemple ,  et  il  n'était  pas  toujours  au  pouvoir 
du  suzerain  de  les  faire  rentrer  dans  le  devoir. 
Mais  nous  possédons  pour  ce  dernier  cas  une 
explication  toute  naturelle.  A  la  suite  de  la  sen- 
tence rendue  par  les  pairs  de  France,  le  comte 
de  Flandre  Thomas  de  Savoie,  et  Jeanne  de 
Constantinople ,  sa  femme,  s'obhgèrent  sous  ser- 
ment à  observer  fidèlement  les  conditions  du  traité 
de  Melun  et  à  fournir  au  roi  des  lettres  par  les- 
quelles les  chevaliers,  pays  et  villes  de  la  Flandre, 
désignés  par  lui ,  s'engageraient  à  lui  obéir  en  cas 
de  non-exécution  dudit  traité.  L'acte  dont  il  s'agit 
consigne  cet  engagement  "\ 

Lindanus  parle  encore  du  droit  qu'avaient  les 
seigneurs  de  Termonde  de  lever  des  impôts  \  Il 
dit  qu'Enguerrand  d'Amboise  permit  à  la  ville  de 
lever  des  maltôtes  ^  ;  cependant  on  se  rappellera 


'  Cartulaire  de  la  ville  de  Termonde,  p.  153. 

*  Warnkœnig,  trad.  Gheldolf,  Histoire  de  la  Flandre,  t.  I, 
p.  392.  Voir  aussi  Warnkœnig,  Flandrische  StaaU-  und  Rechtsge- 
schichte,  3*  Band,  P  Abth.,  Annexes,  pp.  b'2  et  54. 

'  De  Tenerœnionda,  p.  16. 

*  Inventaire  des  archives  de  la  ville  de  Termonde,  p.  73, 


—    55 


que  ce  même  Engiierrand  avait  donné  son  appro- 
bation aux  lettres  de  Tan  1313,  par  lesquelles  sa 
seigneurie  est  déclarée  fief  de  Flandre ,  et  qu'il  en 
fit  lui-même  hommage  au  comte. 

Plusieurs  savants  ont  prétendu  que  les  seigneurs 
de  Termonde  avaient  dans  leur  manoir  un  atelier 
pour  la  fabrication  de  la  monnaie.  A  l'appui  de 
leur  opinion  ils  citent  P  une  lettre  de  l'année 
1108,  par  laquelle  Odon ,  évêque  de  Cambrai, 
confirme ,  à  la  prière  d'Adelwide ,  veuve  de  Rin- 
gaud  le  Chauve ,  seigneur  de  Termonde ,  Tinsti- 
tution  du  collège  des  chanoines  dans  Téglise  de 
cette  ville ,  sous  la  condition  :  «  ut  eadem  eccle- 
sia,  pro  libertatis  memoria,  très  tenersemundensis 
monetse  solidos  decano  Bruxellensi ,  ad  usus  nos- 
tros  ,  singulis  annis  persolvat  ;  »  2"  quelques 
pièces  de  monnaie  sur  lesquelles  figurent  les  mots 
Moneta  deiwemondensis  ;  3°  une  attestation  de  Lin- 
danus ,  d'où  il  résulte  qu'à  l'époque  de  la  démo- 
lition du  château,  en  1599,  de  nombreux  vestiges 
de  l'ancienne  monnaie  furent  découverts  sous  les 
décombres  < . 

]\Jj\l.  Piot  et  Wjtsman,  le  premier  dans  la 
Revue  numismatique  belge  (3'' série,  t.  I,  p.  269), 
le  second  dans  les  Annales  de  la  Société  royale  des 
beaux-arts  et  de  littérature  de  G  and  (t.  YIII,  18G0), 
se  prévalent  de  ces  témoignages  pour  doter  Ter- 
monde  d'un  ancien  atelier  monétaire  seigneuriale 


*  LiNDAKOS,  De  Tenerœnionda,  p.  3. 

*  Un  atelier  monétaire  fut  établi  à  Termonde  par  les  administra- 
teurs intérimaires  du  comté  de  Flandre,  durant  la  captiv-ité  de  Gui  de 
Dampierre,  mais  rien  ne  prouve  que  les  seigneurs  de  cette  ville  aient 
jamais  fait  battre  monnaie  en  leur  nom. 


—    56    - 

En  admettant  même  que  toutes  les  assertions 
de  ces  écrivains  soient  exactes,  pourrait-on  en 
conclure  que  Termonde  formait  un  franc  alleu? 
Point  du  tout,  car  certains  feudataires,  notam- 
ment, les  seigneurs  de  Béthune  et  d'Alost,  pos- 
sédaient aussi  le  droit  de  battre  monnaie  \  d'au- 
tres se  l'étaient  attribué  d'eux-mêmes.  On  trouve 
même  des  villes  à  qui  les  comtes  de  Flandre 
avaient  accordé  ce  privilège ,  par  exemple  la 
ville  de  Saint-Omer  en  Artois  '. 

Dans  quelques  villes ,  comme  Gand ,  Bruges , 
Ypres,  Courtrai,  Alost,  Axel,  Lille,  Bergues-Saint- 
Winoc,  Bourbourg,  Cassel,  etc.,  on  frappait  une 
monnaie  portant  le  nom  ou  l'emblème  de  la  loca- 
lité. Ce  n'était  pas ,  à  proprement  parler,  une 
monnaie  communale,  moins  encore  une  monnaie 
seigneuriale;  néanmoins  on  peut  admettre  que  le 
comte  avait  permis  à  ces  villes  d'apposer  leur 
marque  en  signe  de  garantie  sur  le  numéraire 
qu'elles  fabriquaient  ^  En  tous  cas,  il  n'est  pas 
exact  de  dire  que  les  seigneuries  allodiales  possé- 
daient seules  un  atelier  monétaire. 

Nos  contradicteurs  ont  voulu  trouver  un  argu- 
ment pour  leur  thèse  en  ce  que  les  seigneurs  de 
Béthune,  au  commencement  du  XIII''  siècle,  aban- 
donnèrent l'antique  blason  de  leurs  pères  qui 
consistait  en  bandes  d'or  sur  chani}!  dazur,  pour 


*  Du  Chesne,  Histoire  de  la  maison  de  BétJume,  p.  71.  —  Serrure, 
Cabinet  du  prince  de  Ligne,  j").  194.  —  Gaillard,  Recherches  sur  les 
monnaies  des  comtes  de  Flandre,  p.  20. 

*  Waenkœnig,  trad.  Gheldolf,  Hist.  de  la  Flandre,  t.  II,  p.  250. 
^  Gaillard,  Recherches,  p.  57. 


—    57     — 

adopter  Técu  di  argent  à  la  fasce  de  gueules.  Voici 
leur  raisonnement  :  lorsque  Robert  de  Béthune, 
fils  de  Guillaume  II,  seigneur  de  Béthune,  et  de 
Matliilde,  dame  de  Termonde,  entra  en  1224  en 
possession  de  Théritage  de  sa  mère,  il  se  hâta  de 
répudier  les  armes  de  sa  famille  pour  les  rempla- 
cer par  celles  de  sa  seigneurie,  qui  dès  lors  devin- 
rent le  signe  héraldique  de  sa  race*.  Wytsman 
explique  comme  suit  les  motifs  de  cette  conduite  : 
«  Comme  seigneur  de  Béthune,  Robert  était  le 
vassal  du  roi  de  France  ;  comme  seigneur  de  Ter- 
monde,  il  ne  devait  hommage  à  personne.  L'un 
apanage  était  un  fief,  lautre  un  franc  alleu;  car 
le  seigneur  de  Termonde  ne  relevait  que  de  Dieu 
et  du  soleil.  On  s'explique  aisément  que  Robert 
ait  ]3référé  les  insignes  de  la  liberté  à  ceux  de  la 
dépendance  ^   » 

Ce  raisonnement  pèche  par  la  base  et  tombe  à 
faux.  Dabord,  Robert  VII  de  Béthune  n'a  jamais 
considéré  sa  seigneurie  de  Termonde  comme  un 
franc  alleu;  ensuite,  ce  n'est  pas  à  la  mort  de  sa 
mère  qu'il  modifia  ses  armoiries,  mais  lorsquil 
obtint  l'avouerie  d'Arras  et  la  seigneurie  de  Bé- 
thune, c'est-à-dii-e  à  la  fin  de  l'année  1227  ^;  enfin, 


'  LiNDANUS,  p.  31.  —  Du  Chesse,  Uist.  de  la  maison  de  Béthune, 
p.  40.  —  Wytsman,  Notice  sur  des  monnaies  frappées  à  Termonde, 
p.  15.  —  Le  même,  Sceaux  com,m.unaux  et  administratifs  de  la  ville 
de  Termonde,  dans  les  Annales  du  cercle  archéologique  de  cette  ville, 
1864,  p.  13. 

*  Sceaux  communaux,  loc.  cit. 

^  Du  Chesne  (p.  198)  fixe  par  erreur  la  date  du  décès  de  Daniel, 
avoué  d'Arras  et  seigneur  de  Béthune,  au  2  octobre  1226,  c'est  2  oc- 
tobre 1227  qu'il  faut  lire, 


—    58    — 

rien  ne  prouve  que  la  famille  de  Termonde  ait 
jamais  porté  à^argent  à  la  fasce  de  gueules. 

En  ce  qui  concerne  le  droit  de  juger  en  dernier 
ressort,  nous  ferons  remarquer  que  les  tribunaux 
scabinaux  de  la  Flandre  exerçaient  en  général  et 
d'ancienne  date  la  juridiction  suprême,  tant  civile 
que  criminelle,  sur  leurs  habitants.  Leurs  juge- 
ments étaient  sans  appel  et  ceux  qui  y  contredi- 
saient étaient  passibles  de  l'amende  comminée  par 
la  keure  '.  Toutefois,  après  l'institution  du  conseil 
de  Flandre,  les  villes  tolérèrent  peu  à  peu  que 
leurs  sentences  fussent  déférées  à  l'appréciation 
de  cette  cour  ^ 

Termonde,  sous  ce  rapport,  ne  se  distingue  pas 
des  autres  localités.  Jusqu'au  règne  de  Philippe  le 
Hardi  on  ne  trouve  aucune  trace  de  recours  intro- 
duit contre  les  sentences  de  ses  échevins,  mais  à 
partir  de  cette  époque  on  rencontre  plusieurs 
écrits  qui  témoignent  que  ses  magistrats,  admet- 
tant la  compétence  du  conseil  de  Flandre,  permet- 
taient à  leurs  administrés  de  s'y  pourvoir  en  appel 
contre  leurs  décisions  ^ 

La  cour  féodale,  dont  les  sentences  étaient  éga- 
lement irrévocables,  suivit  l'exemple  des  grandes 
villes  :  elle  protesta  aussi,  se  refusant  à  recon- 
naître la  supprématie  du  conseil,  mais  plus  heu- 
reuse qu'elles,  elle  réussit  à  conserver  son  auto- 


*  WiELANT,  Antiqidtéz  de  Flandre,  dans  le  Corpus  chronicorum 
Flandriœ,  t.  IV,  p.  106. 

*  WiELANT,  p.  111.  —  Ganser,  Le  Conseil  de  Flandre,  discours 
prononcé  le  19  octobre  1846,  p.  7. 

*  LiNDANUS,  p.  92. 


—    59    — 

nomie,  qui  fut  solennellement  confirmée  par  décret 
de  Jean  sans  Peur  du  3  août  1419  \ 

11  serait  téméraire,  on  en  conviendra,  de  tirer 
de  l'existence  ou  de  Tabsence  du  privilège  de  juger 
en  dernier  ressort,  un  argument  pour  ou  contre 
l'allodialité  dune  contrée.  La  coutmne,  cette 
grande  force  organisatrice  du  moyen-âge,  avait 
consacré  une  foule  d'abus  dont  la  véritable  origine 
est  difficile  à  démêler.  Nest-il  pas  étrange,  par 
exemple,  de  voir  Termonde,  Grammont,  Born- 
hem,  etc.,  subir  la  prééminence  du  conseil  de 
Flandre,  c'est-à-dire  d'une  juridiction  étrangère  à 
l'empire,  tandis  que  le  comté  d'Alost  en  reste 
affranchi  "^?   Comment    expliquer    l'ingérence    du 


'  «  Nottre  dicte  seigneurie  de  Tenremonde,  laquelle  n'est  en  riens 
subgiette  de  Monseigneur  le  Roy,  et  pour  ce  que  nostre  plaisir  et 
voulante  est  de  tenir  et  maintenir  nostre  dicte  terre  et  seigneurie  de 
Tenremonde,  et  noz  hommes  de  fief  dudit  lieu  comme  seigneur  sou- 
verain sans  moyen  et  sans  recongnoissance  d'autruy  et  pour  ce 
franche  et  exempte  de  tout  ressort  en  cas  d'appel  ou  de  souveraineté, 
quand  à  ce  qui  regarde  et  touche  les  jugemens  de  noz  hommes  de 
fief  dudict  lieu,  lesquelz  nous  représentent  immédiatement  et  par 
espécial  exempte  et  exempt  nosditz  hommes  de  nostre  chambre  de 
Gant  et  conté  de  Flandres,  veu  aussi  que  nosditz  hommes  de  fief 
n'ont  point  acostumé  de  ressortir  en  cas  d'appel  par  devant  vous  en 
nostre  dicte  chambre,  et  que  de  la  sentence  ou  jugement  d'iceulx 
nos  hommes,  l'on  n'a  pas  acostumé  d'appeller,  ne  n'y  fut  oncques 
veu  aucun  ajjpellant.  »  Acte  de  1419.  De  stad  en  de  heerlijkheid  van 
JDender monde,  t.  VI,  p.  143. 

2  «  Selon  droict,  ressort  n'est  pas  deu  par  le  vassal,  s'il  n'est  pas 
expressément  conditionné  ou  introduit  par  coustume. 

»  Car  ressort  n'est  pas  de  la  substance  du  fief,  mais  peut  bien  fief 
estre  sans  ressort  et  ressort  sans  fief. 

»  Qu'il  soit  vray  la  conté  d'Alost  est  fief  impérial  sans  ressort, 
aussy  sont  les  duchez  de  Brabant ,  de  Limbourg  et  les  contez  de 
Hollande,  etc. 

»  Et  par  le  contraire  Tenremonde,  Grandmont  et  toutes  les  aul- 


—     60    — 

parlement  de  Paris  et  du  roi  de  France  dans  les 
différends  relatifs  à  la  possession  des  pays  de 
Waes  et  de  Bornliem*?  Ces  anomalies,  ratifiées 
par  la  coutmne,  peuvent,  à  la  vérité,  dérouter  la 
logique  de  l'historien,  mais  elles  ne  sauraient  ser- 
vir de  base  à  une  théorie  sérieuse  et  résistent  à 
toute  déduction  positive. 


m. 

A  partir  du  commencement  du  XV*"  siècle,  une 
transformation  assez  importante  s'opère  dans  la 
situation  politique  de  Termonde.  Cette  seigneurie 
cesse  d'être  envisagée  par  les  savants  comme  un 
fief  et  obtient,  de  la  part  des  souverains  du  pays, 
des  privilèges  qui,  à  certains  égards,  semblent 
légitimer  ses  prétentions  à  l'allodialité.  L'explica- 
tion de  ce  fait  contribuera,  nous  en  avons  la  con- 
viction, à  faire  triompher  notre  cause. 

Dans  un  précédent  chapitre  nous  avons  exposé 
comment  la  seigneurie  de  Termonde,  primitive- 


tres  villes  de  Flandre  (impériale)  doibvent  ressort  en  Flandre  et 
touttesfois  ne  sont  fiefz  de  Flandre,  et  ce  par  coustume.  »  Wielant, 
Antiquités,  dans  le  Corpus  chronicoruni  Flandriœ,  t.  IV,  p.  104. 

«  •  Dans  la  contestation  intervenue  entre  le  comte  de  Flandre  et  la 
dame  de  Saint-Gobain,  relativement  à  la  possession  du  pays  de  Waes, 
le  parlement  de  Paris,  par  arrêt  du  19  février  1323  (n.  st.),  se  pro- 
nonça en  faveur  du  comte  (Archives  départementales  du  Nord,  à 
Lille).  —  Far  lettres  du  30  juin  1331,  le  roi  de  France  ordonne  au 
bailli  d'Amiens  de  citer  le  comte  de  Flandre  devant  le  parlement  de 
Paris,  afin  de  rendre  compte  de  la  prise  de  possession  du  château 
et  du  pays  de  Bornhem,  qui  étaient  la  propriété  de  la  dame  de  Cassai 
et  de  ses  enfants  (Mômes  archives). 


—     61     — 

ment  érigée  en  arrière-fief  de  Fempire  d'Alle- 
magne et  du  royamne  de  France,  se  détacha  insen- 
siblement de  tout  lien  effectif,  bien  qu'en  droit 
strict  elle  restât,  comme  le  pays  de  Bornhem, 
englobée  dans  l'ensemble  des  possessions  pour 
lesquelles  les  comtes  de  Flandre  rendaient  hom- 
mage d'abord  à  l'empereur  et  au  roi,  et  plus  tard 
à  l'empereur  seul.  L'autorité  suzeraine  que  les 
comtes  continuèrent  à  s'arroger,  en  leur  qualité 
de  seigneurs  féodaux  directs,  aurait  du,  dans  Tin- 
tervalle,  donner  Téveil  aux  empereurs  et  leur  re- 
mémorer leurs  droits  antérieurs  et  supérieurs 
imprescriptibles;  mais  à  l'époque  où  ces  monar- 
ques songèrent  à  se  rendre  compte  de  l'étendue  de 
ces  droits,  beaucoup  de  particularités  historiques 
s'étaient  effacées,  soit  par  la  négligence  des  chro- 
niqueurs et  scribes  officiels,  soit  par  la  perte  des 
anciennes  archives,  de  façon  qu'il  leur  eût  été 
bien  plus  difficile  d'étayer  leurs  réclamations  de 
preuves  suffisantes,  qu'aux  comtes  de  Flandre  de 
justifier  de  la  légitimité  de  leur  domination  sur 
Termonde;  car  ceux-ci,  à  défaut  de  titres  écrits, 
pour  établir  l'origine  de  leur  fief,  pouvaient  au 
moins  invoquer  la  possession  réelle,  patente,  inin- 
terrompue. Ajoutons  que  les  empereurs  d'Alle- 
magne ne  suivirent  pas  en  général  à  Tégard  de  la 
Flandre  cette  politique  d'immixtion  tracassière  et 
envieuse  à  laquelle  les  rois  de  France  nous  avaient 
accoutumés  et  qui,  par  suite  de  la  faiblesse  de  nos 
princes  et  parfois  de  leur  complicité,  dégénéra  en 
véritable  tyrannie.  En  somme ,  Termonde  resta 
donc  soumis  à  la  vassalité  de  la  Flandre  seule. 


—    62    — 

Lorsque  Robert  de  Béthune,  fila  de  Gui  de 
Dampierre  et  de  Matliilde  de  Béthune,  ceignit  la 
couronne  comtale  en  1305,  la  seigneurie  de  Ter- 
monde  passa  à  son  frère  Guillaume,  à  qui  elle 
avait  déjà  été  cédée  en  nue  propriété  depuis 
1286'.  Celui-ci  vécut  jusqu'en  1311.  Son  fils 
Guiillamne  dit  de  Nesle  ou  de  Néelles  {Nifjella)  lui 
succéda  et  mourut  sans  enfants  en  1319.  Jean  de 
Flandre,  frère  de  ce  dernier,  entra  alors  en  posses- 
sion de  la  seigneurie  ;  il  fut  tué  dans  une  émeute 
à  Courtrai,  en  1325,  laissant  un  fils,  aussi  appelé 
Jean,  et  deux  filles,  dont  Taînée,  Marie  de  Flandre, 
à  la  mort  de  son  frère,  devint  dame  de  Termonde 
et  de  Néelle,  et  épousa  EngTierrand  (Ingergier), 
seigneur  d'Ambqise.  Les  historiens  racontent  que 
Pliilippe  de  Valois,  roi  de  France,  ayant  acheté,  en 
1347,  les  ville  et  pays  de  Termonde  d'Enguerrand 
et  de  Marie,  en  fit  don  à  Louis  de  Maie,  comte  de 
Flandre  -;  toutefois,  il  paraît  résulter  d'un  acte  de 
Tannée  1355  et  d'autres  documents  vérifiés  par 
nous  que  cette  acquisition  ne  s'effectua  qu'à  cette 
dernière  date,  non  par  Philippe  de  Valois,  mais 
par  son  successeur  le  roi  Jean  dit  le  Bon  ^  A  la 
fin  de  cette  même  année  nous  voyons  Louis  de 
Maie  dans  la  possession  inmiédiate  de  la  seigneurie  \ 

•  Acte  du  1  août  1286.  De  stad  en  de  heerîijkheid  van  Dendermonde, 
t.  VI,  p.  121. 

*  E.  De  Dtnter,  Rijmkronijk  van  Brabant,  publiée  par  De  Ram, 
t.  II,  p.  665.  —  LiNDANus,  p.  49. 

^  De  stad  en  de  heerîijkheid  van  Dendermonde,  t.  VT,  p.  140. 

♦  <'  Wij  Lodewijc,  grave  van  Vlaenderen,  van  Nevers,  ende  van 
Rhetel,  doen  te  wetene  allen  lieden,  omme  dat  wij  nu  nieuwelinghe 
coramen  sijn  ten  heerscepien  ende  te  al  den  rechte  van  der  poort 


—    63    — 

Sa  réunion  au  comté  de  Flandre  eut  pour  con- 
séquence nécessaire  de  modifier  profondément  la 
nature  de  sa  mouvance.  Elle  cessa  d'être  arrière- 
fief  pour  redevenir  entre  les  mains  du  comte  un 
fief  direct  de  l' Allemagne,  avec  cette  différence 
essentielle  que  la  suzeraineté  de  Tempereur  étant 
en  quelque  sorte  oblitérée,  les  comtes  pouvaient 
se  croire  les  possesseurs  allodiaux  de  leur  nou- 
veau domaine. 

n  ne  paraît  pas  toutefois  que  ni  Louis  de  Maie , 
ni  son  beau-fils  Philippe  le  Hardi,  aient  jamais 
fait  valoir  des  revendications  de  ce  genre.  La 
qualification  de  seigneur  sans  moyen,  dont  le 
premier  se  sert  et  dans  laquelle  des  écrivains 
ont  cru  découvrir  une  idée  d'indépendance,  n'a 
d'autre  signification  que  celle  de  seigneur  immé- 
diat, seigneur  direct,  et  l'on  se  tromperait  fort, 
si  l'on  s'imaginait  que  le  comte  usait  de  ce  titre 
pour  Termonde  seuli. 

Dès  le  règne  de  Jean  sans  Peur,  duc  de  Bour- 
gogne ,  les  aspirations  à  Tallodialité  se  font 
jour.  Le  prince  prend  le  titre  de  seigneur  de 
Termonde ,  considère  la  seigneurie  comme  étran- 
gère à  la  Flandre ,  et  dans  ses  lettres  patentes 
laisse  entendre  au  moins  implicitement  qu'il  la 
tient  de  Dieu  seul,  en  pleine  propriété. 

Nous  allons  analyser  ici  les  principaux  actes 
qui  inaugurèrent  cette  nouvelle  phase. 

ende  van  den  lande  van  Denremonde,  met  al  datter  toe  behoort,  als 
heere  sonder  middel.  »  Acte  du  29  décembre  1355,  en  original  aux 
archives  communales  de  Termonde.  Inventaire,  ]).  75. 

'  Jules  de  Saint-Genois,  Inventaire  analytique  des  chartes  des 
comtes  de  Flandre,  n"^  1444  et  1474. 


—    64    — 

Dans    les   premières    années  du  XV^  siècle  le 
conseil  de  Flandre  essaya  d'attirer  à  lui,  comme 
étant  de  sa  compétence ,  les  causes  relatives  aux 
fiefs  qui  jusqu'alors  avaient  été  décidées  en  der- 
nier ressort  jjar  la  cour  féodale  de  Termonde , 
mais  les   magistrats  de    cette    cour  virent  dans 
cette  prétention  un  empiétement  sur  leurs  préro- 
gatives et  mirent  tout  en  œuvre  pour  se  soustraire 
à  la  sujétion.   Ils  s'adressèrent  au  duc  de  Bour- 
gogne, qui  ordonna  une  enquête.  La  ville,  de  son 
côté,  prit  la  chose  à  cœur;  elle  envoya  partout 
des  députés,    dans  les  abbayes  et   chez  les  sa- 
vants ,  pour  s'informer  de  l'origine  de  la  seigneu- 
rie ,    spécialement    dans    ses    rapports    avec    la 
Flandre'.   Après  de   nombreuses  investigations, 
on  arriva  à  cette  conclusion,   que  la  seigneurie 
de  Termonde  ne  faisait  pas  partie  de  la  Flandre , 
qu'elle  ne  se  trouvait  pas  sous  l'autorité  du  roi 
de  France  et  partant  que  la  cour  féodale  ne  res- 
sortissait   pas  au  conseil   de  Flandre.    Des   mé- 
moires dans  ce  sens  furent  transmis  au  duc  qui , 
après  mûre  délibération ,  accorda  le  3  août  1419 
un  octroi ,  par  lequel  il  est  expressément  déclaré 

1  «  Item  reden,  un"  daghe  in  meye,  Pieter  Arents  en  Jan  van  Hof- 
staden  te  Antwerpen,  omme  te  begronden  waer  uut  Denremonde 
ghespruyt  ware  ;  waren  uut  met  mi  perden  ii  daghe.  XII  sch.  gr.  » 
Compte  communal  de  Termonde,  1402. 

«  Item  reden  xis°  daghe  in  meye,  Jan  de  Necker  ende  Pieter  Arents 
te  Edinghen,  omme  daer  te  vernemene  of  Denremonde  uut  Vlaen- 
deren  ghespruyt  ware  of  niet.  »  Ibid. 

«  Item  reden  ,Tan  van  den  Poêle  en  Jan  van  der  Elst  te  Ghent  te 
eint  Baefs  in  't  cloester,  omme  te  vernemene,  mits  dat  in  't  land  van 
Denremonde  etaet,  waer  uute  Denremonde  ghedescendeert  of  ghe- 
spruyt ware.  »  Compte  communal  de  1404. 


—    65    — 

que  la  seigneurie  de  Termonde  ne  relève  pas  du 
roi;  que  le  duc  la  tient  comme  souverain  sans 
moyen  ni  intermédiaire  et  sans  reconnaissance 
d'autrui ,  et  par  conséquent  comme  libre  et 
exempte  de  tout  ressort,  pour  le  cas  dappel  de 
souveraineté,  en  ce  qui  concerne  les  sentences 
prononcées  par  les  hommes  de  fief,  qui  repré- 
sentent ici  immédiatement  le  seigneur,  et  du 
jugement  desquels  il  ne  fut  jamais  appelé,  ni 
près  de  la  cliambre  de  Gand ,  ni  près  des  quatre 
beers  de  Flandre  \ 

Il  règne  dans  cette  pièce  un  ton  d'acrimonie 
si  intense ,  que  l'on  ne  peut  s'empêcher  de  l'at- 
tribuer au  déplaisir  que  ressentit  le  duc  de  ce 
que  son  fils ,  le  comte  de  Charolais ,  avait  épousé 
la  cause  du  conseil  de  Flandre  et  donné  des 
pleins  pouvoirs  pour  l'arrestation  des  fonction- 
naires termondois. 

Ce  même  comte  de  Charolais,  devenu  duc  de 
Bourgogne,  et  mieux  connu  sous  le  nom  de 
Philippe  le  Bon ,  ratifia  à  son  tour  Timmunité  de 
Termonde.  «  Avons ,  dit-il ,  par  bon  et  meur 
advis  et  délibération ,   déclaré  et  déclarons  par 

■'  «  Que  lesdictes  appellacions  avoient  esté  interjectées  par  icelle 
par  devant  les  quatre  bers  de  notre  pays  de  Flandres,  en  quoy  estions 
et  sommes  grandement  grevez  et  nostre  dicte  seigneurie  de  Tenre- 
monde  aussi,  pour  ce  que  de  nosdiz  hommes  l'on  ne  vit  oncques 
appeler  par  devant  lesdiz  quatre  bers....  Nous  vous  mandons,  com- 
mandons, défendons  et  signifions  que  nostre  voulenté  et  playsir  n'est 
pas  ne  ne  fut  oncques  de  nosdiz  hommes  de  fief  faire  ressortier  ne 
estre  ressortissans  en  cas  d'appel  ou  de  souveraineté  en  ce  présent 
cas  ou  autres  semblables  en  nostre  chambre  de  Gand.  »  Acte  du 
3  août  1419.  De  stad  en  de  heerlijkheid  van  Dendermonde,  t.  YI, 
p.  143. 


—    66    — 

ces  présentes  nostre  dessus  dicte  ville  et  seingneu- 
rie  de  Tenremonde  non  estre  ne  oncques  avoir 
esté  de  nostre  conté  de  Flandres,  ne  du  ténement 
d'icelle  nostre  conté ,  ne  aussi  de  la  chastellenie 
de  nostre  dicte  ville  de  Gandt ,  mais  a  tousjours 
esté  et  encoires  est  icelle  nostre  ville  et  seingneu- 
rie  de  Tenremonde  pure  voisine  à  nostre  dicte 
ville  et  chastellenie  de  Gandt  K  » 

La  pièce  la  plus  importante  est  une  lettre  du 
même  prince  datée  du  28  février  1462  et  traitant 
de  la  mutation  des  fiefs.  Pour  en  saisir  la  portée, 
il  convient  de  dire  que  suivant  une  ordonnance 
du  10  novembre  1366,  renouvelée  par  édit  du 
27  août  1460,  toute  vente,  cession  ou  aliénation 
de  fiefs  tenus  directement  du  comte  ou  de  Tune 
de  ses  cours  féodales  en  Flandre  ,  devait  être 
autorisée  par  lettres  patentes  d'octroi  ^.  Cette 
décision  avait  pour  but  de  garantir  les  intérêts 
du  fisc  quant  au  paiement  du  dixième  denier, 
autrement  dit  des  lods  et  ventes.  Après  Tédit  de 
1460,  les  officiers  du  duc  voulurent  en  appliquer 
les  dispositions  aux  fiefs  mouvant  de  la  cour  de 
Termonde.  De  là  vives  contestations.  Les  juris- 
consultes sont  appelés  à  émettre  leur  avis,  et 
après  maint  renvoi  d'une  autorité  à  l'autre,  le 
duc  prend  le  28  février  1462  (n.  st)  une  réso- 
lution entièrement  favorable  aux  réclamations 
des  Termondois.  Dans  leur  requête  ils  avaient 
allégué  que  l'on  n'avait  jamais  payé  de  dixième 


•  De  stad  en  de  heerlijkheid  vati  Dendermonde,  t.  YI,  p.  147. 
~  Placards  de  Flandre,  t.  I,  p.  724  et  725. 


—    G7     — 

denier  ni  autres  charges  analogues  du  chef  des 
fiefs  tenus  de  la  maison  ou  cour  féodale  de  Ter- 
monde,  mais  seulement  10  livres  parisis  pour 
indemnité  de  relief  et  20  deniers  au  bailli  pour 
droit  de  chancellerie ,  ou  la  valeur  de  la  meilleure 
dépouille  des  fruits  de  Tune  des  trois  dernières 
années;  en  outre,  que  jamais  il  n'avait  été  exigé 
des  lettres  d'octroi  pour  l'aliénation  des  fiefs , 
«  veu  que  oncques  lesdits  hommes  de  Tenre- 
monde  n'en  prindrent  aucunes  lectres  d'octroy, 
et  sont  iceulx  hommes  de  ladicte  court  de  Tenre- 
monde  d'autre  nature  et  condicion  que  autres 
courts  de  fiefz,  car  c'est  terre  impériale  et  non 
de  nostre  conté  de  Flandres ,  mais  la  tenons  en 
franc-alleu,  non  jubgète  d'icelle  nostre  conté...., 
si  comme  dient  les  dits  exposans.  »  Reconnais- 
sant le  fondement  des  observations  qui  lui  étaient 
adressées,  le  duc  confirme  les  suppliants  dans 
leurs  anciennes  coutumes  et  franchises,  quand 
bien  même  elles  seraient  contraires  à  ses  règle- 
ments généraux ,  «  considéré ,  dit-il ,  que  les 
ville  et  terroir  dudit  Tenremonde  sont  séparez 
de  nostre  dit  conté  de  Flandres ,  et  que  des  fiefz 
de  ladite  court  l'on  ne  paie  aucun  dixième  de- 
nier, mais  seulement  relief  et  xx  s.  parisis  pour 
chambellan  ».    » 

Le  principe  de  l'allodialité,  qui  trouva  sinon 
sa  source ,  du  moins  une  espèce  de  consécration 
officielle  dans  cet  acte  solennel ,  semble  dès  lors 
avoir  été  généralement  accepté  par  l'administra- 

•  De  stad  en  de  heerlijkheid  van  Dendermonde ,  t.  YI,  p.  148. 


a 


—    68    — 

tion,  par  les  jurisconsultes  et  par  les  historiens. 
Une  lettre  de  Maximilien  d'Autriche  et  de  Marie, 
son  épouse,  en  date  du  14  mars  1477,  contient  à 
cet  égard  cette  plu^ase  significative  :  ((  que  le 
susdit  lieu  de  Termonde  est  une  ville  notable, 
frontière  de  notre  pays  de  Flandre ,  une  seigneu- 
rie à  part,  située  dans  TEmpii'e,  tenue  de  Dieu, 
en  libre  propriété ,  sans  être  en  quoi  que  ce  soit 
du  ténement  de  la  Flandre  '.  » 

Lors  de  l'information  à  laquelle  donna  lieu  en 
1626  rhomologation  des  coutumes  de  la  cour  féo- 
dale de  Termonde ,  la  question  fut  de  nouveau 
exhumée  et  résolue  dans  un  sens  plus  radical  en- 
core -.  Nous  remarquons  que  les  considérations 
invoquées  sont  précisément  celles  exposées  par 
Lindanus  dans  son  ouvrage  de  Tenerœmonda,  ce 
qui  nous  ferait  présumer  que  le  savant  historio- 
graphe n'est  pas  resté  étranger  à  la  rédaction  des 
mémoires  adi'essés  au  roi. 

Était-ce  de  la  part  des  ducs  Jean  et  Philippe  de 
Bonrgogne  une  simple  erreur,  provenant  d'un 
examen  superficiel  de  la  question,  ou  bien  ces 
princes  on1>ils,  de  propos  déhbéré,  voulu  affirmer 


»  «  Dat  de  vomomde  plecke  van  Denremonde  eene  notable  stede 
es,  frontière  van  onsen  lande  van  Ylaenderen,  eene  lieerlichede  iip 
haer  zelven  ligghende,  in  't  kej'serrjcke,  gheliouden  van  Gode  in 
vryen  eighendomme,  zonder  in  eenigher  manieren  't  zjTie  van  den 
tenemente  van  Vlaenderen.  »  Acte  du  14  mars  1-477.  De  stad  en  de 
heerlijkheid  van  Dendermonde,  t.  VI,  p.  153. 

'  «  In  den  eersten,  de  stadt  ende  landt  van  Dendermonde  is  een 
heerlj'cheyt  ende  eygendom  op  sjti  selven,  sonder  middel  ende  van 
niemant  gehouden.  »  Art.  1,  rubr.  I,  des  coutumes  de  la  cour  féo- 
dale de  Termonde,  décrétées  le  9  mai  1628. 


—    69    - 

ralloclialité  de  Termonde ,  afin  de  prévenir  dans 
la  suite  tontes  revendications  éventuelles  du  côté 
des  monarques  allemands? 

L'une  et  l'autre  de  ces  causes  eurent  peut-être 
leur  2^art  d'influence  sur  la  résolution  prise. 

Nous  l'avons  constaté ,  jamais  depins  son  érec- 
tion en  district  particulier ,  le  pays  de  Termonde 
n'avait  été  nominativement  cité  dans  la  formule 
de  prestation  d'hommage  pour  la  Flandre  impé- 
riale;  la  faible  étendue  de  son  territoire,   ainsi 
que  sa  dépendance  des  pajs   d'Alost  et  de  Waas 
suffisent  pour  expliquer  ce  fait.  Depuis  longtemps 
aussi  les  empereurs,  ayant  en  quelque  sorte  laissé 
périmer  leur  suzeraineté ,  les  comtes  de  Flandre 
étaient  seuls  restés  seignem^s  féodaux  reconnus. 
Personne  ne  soutiendra  sans  doute  que  les  ducs 
de  Bourgogne,   contrairement  aux  traditions  de 
leur  politique  constante ,  eussent  dû  agir  autre- 
ment qu'ils  ne  le  firent  et  pousser  les  recherches 
plus  loin  que  leur  propre  intérêt  ne  le  comman- 
dait. Qui  leur  reprochera  d'avoir  accepté  la  situa- 
tion telle  qu'elle  se  présentait,  avec  ses  avantages 
et  bénéfices ,  sans  s'inquiéter  de  son  origine  plus 
ou  moins  légale?  Et  puis,  tout  bien  considéré, 
nous  n'avons  jusqu'ici  découvert  aucune  charte 
dans   laquelle    ils    déclarent   personnellement  et 
d'une    manière    claire    et    catégorique ,    que   la 
seigneurie  de  Termonde   est  leur  domaine  libre 
et  franc ,  et  qu'ils  la  tiennent  de  Dieu  seul.  Ils 
disent  bien  que  cette  seigneurie  ne  ressortit  ni  à 
la  châtellenie  de  Gand ,  ni  au  comté  de  Flandre 
sous  la  Couronne,  mais  ils  reconnaissent  en  même 


—    70    — 

temps  qu'elle  est  située  en  terre  d'Empire ,  et  si 
les  mots  franc  alleu  et  tenu  de  Dieu  seul  figurent 
clans  leurs  écrits,  ils  s'empressent  d'ajouter  :  si 
comme  disent  lesdits  exposans. 

Les  changements  introduits  dans  le  système 
féodal  du  pays  par  l'empereur  Charles  V,  à  la 
suite  du  concordat  conclu,  le  26  juin  1548,  avec 
les  États  d'Allemagne ,  à  Augsbourg ,  n'appar- 
tiennent pas  à  notre  sujet.  Nous  avons  seulement 
voulu  démontrer  que,  aux  siècles  passés ,  Ter- 
monde  ne  constituait  pas  un  bien  allodial ,  ainsi 
qu'on  l'a  prétendu  à  tort,  mais  un  simple  arrière- 
fief  de  l'Allemagne. 


IV. 


La  ville  de  Grammont ,  célèbre  par  son  antique 
charte  ou  heure,  était  jadis  le  chef-lieu  d'un  dis- 
trict ou  terroir  particulier,  comprenant  quarante 
Adllages,  et  qui,  probablement  au  début  du  XlIP 
siècle,  fut  érigé  en  subdivision  du  pays  d'Alost. 
L'origine  de  la  ville  est  connue.  Baudouin  VI,  dit 
de  Mons ,  comte  de  Flandre ,  acquit ,  vers  Tan 
1068,  d'un  noble  nommé  Gérard,  un  bien  patri- 
monial (allodium)  situé  au  village  de  Hunneghem, 
y  établit  une  commune ,  et  octroya  aux  habitants 
le  privilège  d'une  loi  fondamentale.  L'étendue  de 
ce  domaine  étant  trop  restreinte  pour  y  construire 
une  ville ,  il  conclut  avec  le  seigneur  de  Boulare 
un  arrangement  aux  termes  duquel  ce  gentil- 
homme ,    moyennant   l'inféodation   à   son   profit 


—    71     — 

d'une  partie  de  la  contrée ,  céda  plusieurs  terres 
et  prairies  aux  habitants  de  la  nouvelle  commu- 
nauté. Cette  ville  fut  nommée  Gerardi  mons,  en 
flamand  Geeraardshergen,  du  nom  de  l'ancien 
possesseur  du  sol  et  de  la  montagne  sur  le  ver- 
sant de  laquelle  elle  est  assise.  La  translation 
dans  ses  murs,  en  1081,  de  l'antique  abbaye 
de  Dickelvenne  contribua  beaucoup  à  favoriser 
son  développement.  Elle  resta  la  propriété  des 
comtes  de  Flandre,  qui  successivement  la  do- 
tèrent de  divers  beaux  privilèges  ^ . 

Les  commencements  de  Bornliem  nous  sont 
moins  bien  connus.  Ce  village,  à  trois  lieues  en- 
viron de  Termonde,  près  de  Tancien  bras  de 
l'Escaut,  fut  autrefois  le  chef-lieu  d'une  petite 
châtellenie  renfermant  les  villages  de  Hingene, 
Haesdonck ,  Ejck ,  ^Yintham ,  Mariakerke  et  Op- 
dorp  ;  érigée  d'abord  en  baronnie  par  Philippe  U. 
en  faveur  de  Pierre  Coloma,  seigneur  de  Boba- 


•  Voir  pour  l'histoire  de  Grammont  :  Van  "Waesberghe,  Gerardi- 
7nontîum,  Bruxelles,   1627.   —   Gramaye,  Antiquitutes,  p.  40.  — 
Sanderus,  Flandria  illustrata,  t.  III,  p.  166.  —  B.  JouRET,  Grmn- 
mont,  son  origine  et  son  histoire  au  moyen-âge.  —  A.  de  Portemont, 
Recherches  historiques  sur  la  ville  de  Grammont,  en  Flandre,  2  vol.; 
Gaud,  1870.  Tous  ces  écrivains  prétendent  que  Grammont  était  dans 
l'origine  un  franc  alleu  étranger  à  la  Flandre  impériale,  mais  que 
les  parcelles  de  territoire  cédées  par  le  baron  de  Boulare,  feudataire 
du  comte  d'Alost,  et  placées  sous  la  juridiction  médiate  de  celui-ci, 
i'ournircut  un  prétexte  aux  empereurs  pour  annexer  Grammont  aux 
terres  impériales;  enfin,  que  du  temps  de  Louis  de  Crécy,  cette  an- 
nexion était  devenue  un  fait  accomi^li  (De  Portemont,  t.  I,  p.  67). 
Nous  n'avons  jjas  besoin  de  faire  ressortir  la  fragilité  de  cette  argu- 
mentation, qui  ne  repose  que  sur  l'interprétation  abusive  du  mot 
allodinm. 


—    72    — 

dilla,  elle  fut,  en  1658,  élevée  au  rang  de  comté 
au  profit  de  Jean-François  Coloma  ^ . 

La  dénomination  de  Bornhem  dérive  évidem- 
ment de  horrij  source,  et  de  liem  ou  ghem^  de- 
meure, séjour,  et  signifie  par  conséquent  habi- 
tation près  de  la  source.  Folcard ,  châtelain  de 
Gand,  qui  vivait  de  1046  à  1071,  en  est  le  pre- 
mier seigneur  connu  ^.  Le  château  de  Bornhem 
fut  sans  doute  construit  par  Folcard  ou  par  le 
comte  de  Flandre ,  Baudouin  de  Lille ,  pour  la 
défense  de  cette  contrée  conquise  sur  l'empire  en 
1046.  A  la  mort  de  Folcard,  la  seigneurie  de 
Bornhem  passa  à  ses  descendants  et  fut  vendue 
en  1250  par  l'un  d'eux,  Hugues  II,  châtelain  de 
Gand,  à  la  comtesse  Marguerite  de  Constanti- 
nople,  moyennant  la  somme  de  4526  livres  12  sous 
et  7  deniers ,  monnaie  de  Flandre  '\  Nous  verrons 
tout  à  l'heure  comment ,  au  commencement  du 
XIT*"  siècle ,  elle  échut  en  partage  à  Eobert  de 
Cassel  et  depuis  lors  se  transmit  en  diverses 
familles  nobles  K 

Les  liistoriens  de  la  Flandre  ont  prétendu,  sans 


*  Mm^US,  Opéra  diplo^natica,  t.  I,  p.  309. 

^  Du  Chesne,  Histoire  des  maisons  de  Guines  et  de  Gand. 
^  LiNDANUR,  p.  237,  donne  l'acte  de  vente. 

*  Pour  l'histoire  de  Bornhem,  on  peut  consulter  Lindanus,  De 
Tenerœmonda,  lib.  III,  chap.  8.  —  Sanderus,  Flandr'ia  illustrata, 
et  E.  Best,  Bornhem,  sa  cliàtellenie,  son  château,  ses  seigneurs,  dans 
les  Annales  du  cercle  archéologique  du  pays  de  Waes,  t.  VI,  p.  299. 
Nous  avons  été  heureux  de  constater  que  ce  dernier  écrivain  n'est 
pas  éloigné  d'adopter  nos  vues  quant  à  la  non-allodialité  de  Born- 
hem. Il  nous  est  permis  d'espérer  qu'après  avoir  lu  la  présente 
étude  il  se  rangera  entièrement  de  notre  avis. 


70 

toutefois  apporter  aucune  preuve  à  l'appui ,  que 
Grammont  et  Bornhem,  de  même  que  Termonde 
étaient  des  possessions  allodiales.  Nous  avons  en 
vain  tâché  de  découvrir  sur  quelle  base  ils  étayent 
leur  assertion.  On  connaît  seulement  un  acte ,  no- 
tamment une  charte  du  mois  de  mai  1263  ,  qui, 
sous  certains  rapports ,  semble  donner  raison  aux 
partisans  du  système  que  nous  combattons  ;  néan- 
moins, les  circonstances  dans  lesquelles  cet  écrit 
fut  rédigé ,  sont  de  nature  à  inspirer  des  doutes 
sérieux  quant  à  la  valeur  des  termes  y  employés. 
Voici  ce  document  : 

«  Nous  Henris,  par  la  gracie  de  Deu,  éveskes  de  Liège, 
faisons  à  savoir  à  tous  ke  nobles  hom  nos  chiers  foiables 
Guis ,  cuens  de  Flandres ,  a  recuit  Gheraumont  et  les  apen- 
dances  et  Bornehem  et  les  appendances ,  ki  estoient  si  franc 
aloet,  à  tenir  de  nous  et  de  nos  successeurs  éveskes  dou 
Liège  en  fief  ligement,  en  tel  manière,  ke  il  et  si  succes- 
seur conte  u  contesses  de  Flandres  doivent  tenir  perpétue- 
ment  Gheraumont  et  Bornehem  et  les  apendances  devant 
dites,  de  nous  et  de  nos  successeurs  éveskes  dou  Liège  à  un 
fief  ligement,  sauves  les  féauteis  le  roi  de  France,  le  conte 
de  Hayuau ,  le  roi  de  Alemaigne ,  le  roi  d'Engleterre  et  le 
éveske  de  Cambrai,  ne  ne  porra  li  cuens  devant  dit,  ne  si 
hoir,  ne  si  successeur  conte  u  contesses  de  Flandres  mètre 
hors  de  lor  main  ne  deseurer  ces  choses,  parquoi  il  et 
si  hoir  et  si  successeur  conte  u  contesses  de  Flandres  ne 
tiégnent  à  perpètuitée  ces  choses  de  nous  et  de  nos  succes- 
seurs éveskes  dou  Liège.  Et  est  à  savoir  que  se  cuens  u 
contesse  de  Flandres  trespasse  sans  hoir  de  sa  chair,  si  de- 
moerroient  ces  choses  devant  dites  à  son  successeur  conte  u 
contesse  de  Flandres,  ne  ne  les  porriens  mie  nous,  ne  li 


—    74    — 

église  de  Liège,  demander  ne  calengier  pour  ce  ke  il  seroit 
trespasseit  sans  hoir  u  pour  ce  ke  il  n'i  aroit  conté  malle, 
pour  estatut  u  pour  coustume ,  u  pour  loi ,  u  pour  droit ,  u 
pour  usage  ki  contrarie  soient  à  ce  en  l'éveskiet  de  Liège, 
Et  doivent  faire  li  cuens  et  si  hoir  et  si  successeur  conte 
de  Flandres  envers  nous  et  envers  nos  successeurs  éveskes 
dou  Liège  de  ce  fief  si  comme  envers  leurs  boens  seigneurs , 
et  nous  et  no  successeur,  éveske  de  Liège,  lors  devons  wa- 
randir  et  deffendre  ce  fief  contre  tous  homes  comme  boen 
segneur,  et  nous  a  li  cuens  devant  dit  fait  homage  de  ces 
choses  et  ce  fu  ajournei  et  fait  de  l'assens  de  no  chapitle  de 
Liège.  Et  nous  li  chapitles  de  Saint  Lambert  dou  Liège  à 
ceste  chose  mètons  nostre  assens  et  le  loons  et  gréons  et 
approvons.  —  A  toutes  ces  choses  faire  furent  mesire  Wa- 
tiers  Bertaus,  de  Mallines;  mesire  Godefrois  de  Piereweis, 
sire  de  Grimberghes;  mesire  Englebert  de  Isembrouc, 
archedyakes  de  Liège  ;  mesire  Watiers  de  le  Wege  ;  mesire 
Jehan  de  Beaufort.  En  tesmoignage  et  pour  seurté  de  laquel 
chose  nous  Henris,  éveskes  dou  Liège,  avons  mis  nos  seaux 
à  ces  présentes  létres,  ki  furent  douées  en  l'an  de  l'Incar- 
nation nostre  Segneur  Jhesu  Crist  mil  deus  cens  soissante 
et  trois  K  » 

Il  semble  étrange  d'entendre  désigner  Gui  de 
Dampierre  comme  ancien  possesseur  allodial  de 
Grammont  et  de  Bornhem,  alors  que  tous  les 
actes  de  l'époque,  tant  antérieurs  que  postérieurs 
à  1263,  rangent  expressément  ces  localités  parmi 
les  fiefs  impériaux;  ou  bien  les  mots  franc  aloet 
doivent-ils  être  pris  dans  le  sens  de  ces  alleux 
dont  nous  avons  parlé  au  commencement  de  notre 
deuxième  étude,  c'est-à-dire  de  ces  propres  acquis 

'  De  stad  en  de  heerlijkheid  van  Dendermonde,  t.  YI,  p.  119. 


—    75    — 

par  droit  de  succession  ou  par  acquisition,  et 
que  le  seigneur  n'avait  cédés  ni  en  fief  ni  en  cen- 
sive?  Effectivement  Grammont  et  Bornliem  se 
trouvaient  dans  ce  cas. 

Quant  à  nous,  nous  ne  sommes  j)as  éloigné  de 
voir  là  dedans  une  tentative  de  Gui  pour  s'affran- 
chir, au  moins  partiellement,  de  la  suzeraineté 
de  l'empire,  moyennant  de  reconnaître,  pour  quel- 
ques-unes de  ses  possessions,  celle  de  Féglise 
de  Liège,  avec  l'espoir  d'éviter  toute  nouvelle 
confiscation  de  la  part  de  l'empereur.  En  agis- 
sant ainsi,  il  ne  faisait  que  suivre  les  errements 
de  sa  mère  Marguerite  de  Constantinople,  qui,  en 
1254,  ayant  prêté  hommage  au  roi  de  France  pour 
le  pays  de  AVaes  ' ,  voulut  s'appuyer  de  ce  précé- 
dent lorsque  l'empereur  s'empara  de  la  Flandre 
impériale  pour  la  donner  à  Jean  d'Avesnes  -. 

Du  reste,  la  tentative  de  Gui  eut  exactement 
le  même  résultat  que  celle  de  sa  mère  :  elle  lui 
imposa,  pour  un  seul  et  même  domaine,  des  de- 
voirs féodaux  doubles;  il  fut  tout  à  la  fois  le 
vassal  de  l'évêché  de  Liège  et  celui  de  l'empire. 
Aussi,  lorsque  le  comte  Louis  de  Nevers,  en  1333, 
acheta  la  seigneurie  de  Malines,  les  obligations 


*  Voir  l'acte  de  prestation  d'hommage  dans  Galand,  Mémoire 
pour  servir  à  l'histoire  de  Navarre  et  de  Flandre,  Preuves,  p.  148,  et 
dans  De  stad  en  de  heerlijkheid  van  Dendernionde,  t.  VI,  p.  96. 

*  On  peut  voir  dans  Jules  de  Saint-Genois,  Inventaire  analyti- 
que, p.  33,  l'analyse  de  la  bulle  du  pape  Innocent  IV,  du  18  octobre 
1256.  La  comtesse  de  Flandre  avait  exposé  à  S.  S.  qu'elle  ne  devait 
pas  hommage  au  roi  des  Romains  pour  les  pays  de  Waes  et  de  Gram- 
mont, attendu  que  ces  pays  relevaient  non  de  l'empire,  mais  du  roi 
de  France, 


—     76    — 

de  son  arrière-grand-père  lui  furent  rappelées,  et 
il  se  vit  forcé  de  prêter  entre  les  mains  de  l'évê- 
que  Guillaume  de  la  Marck  et  en  présence  du 
chapitre  de  Liège ,  le  serment  de  féauté,  non 
seulement  pour  sa  nouvelle  possession  de  Malines, 
mais  aussi  pour  Grammont,  Bornhem  et  leurs 
appartenances.  On  lui  fit  promettre  en  même 
temps,  que  ni  lui  ni  ses  successeurs  ne  détache- 
raient ces  seigneuries  de  leur  comté  de  Flandre 
sous  l'empire,  ralione  feudi  imperii  *. 

Son  fils  Louis  de  Maie  fit  hommage  —  13  août 
1356  —  pour  les  dits  fiefs  à  l'évêché  de  Liège  et 
renouvela  la  promesse  imposée  ^  ;  elle  fut  encore 
confirmée  le  24  mars  1359  (n.  st.)  par  les  grandes 
villes  de  Flandre,  Gand,  Bruges  et  Ypres  '\ 

V. 

Si  l'acte  de  1263  pouvait  laisser  le  moindre 
doute  quant  à  la  mouvance  de  Grammont  et  de 
Bornhem  comme  fiefs  de  l'empire,  les  détails  qui 
vont  suivre  seront  de  nature  à  convaincre  les 
plus  incrédules. 

La  sentence  arbitrale  du  mois  de  juin  1246  \ 
assurant  aux  enfants  du  premier  lit  de  Mar- 
guerite de  Constantinople  le  comté  de  Flandre , 


•  Acte  du  16  octobre  1333,  dans  Mm^us,  t.  III,  p.  161.  Voir  aussi 
cartulaire  de  Malines,  pièces  17,  8  et  44,  aux  archives  départemen- 
tales du  Nord,  à  Lille. 

2  Lettres  du  13  avril  1356,  aux  archives  départementales  du  Nord. 
'  Lettres  du  24  mars  1359  (n.  st.),  ibid. 

♦  Martène  et  Durand,  Thésaurus  anecdotorum,  t.  I,  p.  1092.  — 
Kluit,  Codex  diplomaticus,  p.  498. 


—     77    ~ 

et  à  ceux  du  second  lit  celui  du  Hainaut ,  donna 
lieu ,  comme  on  le  sait ,  de  la  part  de  Jean 
d'Avesues ,  à  une  action  en  revendication  de 
la  Flandre  impériale  ^ ,  pour  laquelle  Marguerite 
avait  prêté.  Tannée  précédente,  le  serment  de 
féauté.  Nous  avons  raconté  plus  haut  comment 
de  part  et  d'autre  on  courut  aux  armes ,  et  com- 
ment les  Hennujers  s'emparèrent  de  Termonde 
dont  ils  saccagèrent  tous  les  environs  ^ 

C'est  en  parcourant  les  pièces  relatives  à  ces 
célèbres  démêlés  fraternels  qu'on  peut  le  mieux 
se  faire  une  idée  de  ce  qu'on  entendait  alors  par 
l'expression  de  Flandre  impériale. 

Il  résulte  à  l'évidence  des  documents  en 
question  que  la  ville  de  Grammont  et  son  ter- 
ritoire en  faisaient  incontestablement  partie.  Le 
traité  de  paix  du  mois  de  janvier  1249  (n.  st.), 
entre  autres ,  les  y  comprend  d'une  manière 
formelle  3.  Il  est  vrai  que  dans  la  sentence  de 
confiscation  du  11  juillet  1252  *,  ainsi  que  dans 
l'acte  d'investiture  en  faveur  de  Jean  d'Avesnes% 
il  n'en  est  plus  fait  mention  ;  néamoins  on  déduit 
aisément  de  la  lettre  de  l'abbé  de  Fulda ,  qui 
avait  été  chargé  par  le  pape  Innocent  IV  de 
signifier  la  sentence  à  la  comtesse  de  Flandre  , 
que  Grammont  ressortissait   aux  terres   coufis- 

»  Kluit,  Codex,  p.  503.  —  Waenkœnig,  trad.  Gheldolf,  t.  I, 
p.  373. 

2  jSIeyer,  ad.  ann.  1248. 

3  J.  De  Guyse,  lib.  XX,  cap.  123  et  124. 

«  Ibid.,  lib.  XX,  cap.  130  et  131.  —  Kluit,  Codex,  p.  624.  —  Mar- 
TÈNE,  Thescairus,  t.  I,  p.  1164. 
=  Kluit,  Codex,  p.  628. 


—    78    — 

quéesi.  L'accord  signé  le  26  juillet  1254  par  le 
roi  des  Romains  stipule  du  reste  que  le  cardinal 
de  Saint-Georges,  légat  du  pape,  devra  exa- 
miner à  qui,  de  Jean  d'Avesnes  ou  de  Margue- 
rite de  Constantinople ,  ladite  ville  de  Grammont 
sera  remise  pendant  la  susjDension  d'armes  ^.  A 
peu  près  vers  la  même  époque  la  comtesse  adressa 
une  plainte  au  roi  de  France  pour  lui  exposer 
que  l'empereur,  contre  toute  raison  et  équité, 
avait  cédé  au  comte  de  Hainaut  les  jjays  d'Alost, 
de  Grammont ,  de  Waes  et  des  Quatre-Métiers , 
qui  lui  revenaient  de  droit  ^ 

La  paix,  conclue  en  1256,  laissa  Marguerite 
en  possession  de  la  Flandre  impériale  et  notam- 
ment de  Grammont.  Cette  ville  figure  aussi  dans 
les  lettres  des  frères  d'Avesnes  datées  de  Tannée 
suivante,  ainsi  que  dans  la  bulle  papale  du  18  oc- 
tobre 1256  \  La  promesse  d'investiture  faite  par 
le  roi  Richard  de  Cornouailles  « ,  l'acte  d'hom- 
mage du  27  juin  1260^,  et  presque  tous  les  do- 
cuments de  même  nature  se  bornent  à  l'indication 
globale  des  fiefs. 

A  peine  Gui  de  Dampierre  avait-il  succédé  à 
sa  mère  sur  le  trône  comtal  de  Flandre ,  qu'il  se 
vit  dépouillé ,   pour  défaut  d'hommage  endéans 


•  Kluit,  Codex,  p.  646. 

*  Inventaire  analyt.  des  chartes  de  la  chambre  des  comptes  à  Lille, 
2«  partie,  p.  444,  aux  archives  de  l'État,  à  Gand. 

3  Ibid.,  p.  450. 

<  Warnkœnio,  trad.  Gheldolf,  t.  I,  p.  370.  —  Jules  de  Saint- 
Genois,  Inventaire,  p.  33. 
'^  Warnkœnig,  trad.  Gheldolf,  t.  T,  p.  387. 
«  Ibid.,  p.  388. 


—    79    — 

le  délai  prescrit  d'an  et  jour,  de  ses  fiefs  ger- 
maniques, qui  furent  concédés,  par  l'empereur 
Rodolphe  de  Habsbourg ,  à  Jean  II  d'Avesnes 
(6  novembre  1279  ^).  Le  cadre  de  ce  travail  ne 
nous  i)ermet  pas  d'entrer  dans  les  détails  de  ces 
interminables  débats.  Le  seul  point  que  nous 
voudrions  faire  ressortir,  c'est  que  Grammont  est 
de  rechef  compté  parmi  les  contrées  au  sujet 
desquelles  le  conflit  vient  de  surgir.  La  plupart 
des  documents  citent  nominativement  cette  ville. 
Ceux  qui  la  passent  sous  silence  l'identifient  avec 
le  pays  d'Alost,  par  exemple,  la  sentence  de  l'em- 
pereur Rodolphe  du  5  août  1281  2.  Ce  qui  le 
prouve,  c'est  l'ordre  intimé  le  même  jour  par 
le  monarque  allemand  aux  habitants  du  terroir 
d'Alost,  de  la  terre  de  l'Escaut  [teri^a  juxia 
Scaldam),  du  pays  de  Grammont,  de  celui  de 
Waes  et  des  Quatre-Métiers  d'avoir  à  saluer 
Jean  d'Avesnes  comme  leur  seigneur  légitime  \ 
L'évêque  de  Cambrai ,  à  qui  la  mise  à  exécution 
de  la  sentence  avait  été  confiée  ^ ,  se  rendit  en 
personne  à  Alost  et  à  Grammont ,  mais  il  trouva 
les  habitants  d'humeur  peu  accomodante  ,  et 
quoique  prêts  à  le  recevoir  en  qualité  de  leur 
pasteur  spirituel,  ils  se  refusaient  carrément  à 
l'écouter  comme  mandataire  de  l'empereur  \ 


«  Kluit,  Codex,  p.  823. 

*  De  Reiffenberg,  Monuments  pour  servir  à  Vhistoire  des  pro- 
vinces de  Namur,  de  Hainaut  et  de  Luxembourg,  t.  I,  p.  375. 

3  lBiD.,p.  376. 

*  Ibid.,  p.  377  et  378. 

*  Ibid.,  p.  380  et  suiv. 


—    80    — 

Dans  une  diète  tenue  à  Worms  le  15  juin  1282, 
les  droits  de  Jean  d'Avesnes  sur  les  terres  impé- 
riales et  spécialement  sur  Grammont,  furent  donc 
de  nouveau  sanctionnés  \  L'évêque  de  Cambrai 
reçut  avis  de  publier  la  décision  dans  la  partie 
de  la  Flandre  impériale  dépendante  de  son  dio- 
cèse 2.  Selon  son  désir  l'acte  fut  lu  au  prône 
dans  toutes  les  églises  des  pays  d'Alost  et  de 
Grammont  ^  mais  comme  les  habitants  n'en  per- 
sistaient pas  moins  dans  leur  opposition ,  Ro- 
dolphe les  mit  au  ban  de  l'empire ,  prononça  la 
confiscation  de  leurs  biens  et  déclara  leur  pays 
en  état  de  rébellion  et  de  siège  \  Ces  mesures  de 
rigueur  étant  insuffisantes,  il  s'adressa  au  légat 
du  pape  et  en  obtint  un  ordre  par  lequel  Gui 
était  sommé  d'évacuer  les  terres  contestées  sous 
peine  d'interdit  ecclésiastique  ^  La  situation  de- 
venait critique.  Afin  de  détourner  l'orage  sus- 
pendu sur  sa  tête ,  le  comte  de  Flandre  prit  son 
recours  au  pape  lui-même  %  et  fit  publier  sa  pro- 
testation dans  les  principales  communes  des  pays 
d'Alost,  de  Grammont,  de  Waes,  etc.  '. 


*  Kluit,  Codex,  p.  854.  —  De  Reiffenberg,  t.  I,  p.  387. 
«  Ibid.,  p.  859.  —  Ibid.,  p.  387. 

'De  Saint-Genois,  Motimnents  anciens,  p.  259. 

*  De  Saint-Genois,  Monuments  anciens,  p.  260.  —  De  Reiffen- 
berg, pp.  389,  391,  392,  396. 

*  De  Saint-Genois,  Monuments  anciens,  p.  261.  —  Martène, 
Thésaurus,  t.  I,  p.  1208. 

*  De  Saint-Genois,  Monuments  anciens,  p.  746.  —  Jules  de  Saint- 
Genois,  Inventaire  analytique,  pp.  132-133. 

'  De  Saint-Genois,  Monuments  anciens,  p.  746.  —  Jules  de  Saint- 
Genois,  Inventaire,  p.  135. 


—    81     — 

Martin  IV  occupait  alors  le  siège  de  Rome  ,  et 
Gui  trouva  près  de  lui  quelques  consolations 
dans  ses  misères;  les  actes  du  légat  furent  an- 
nulés *.  On  essaya  encore  la  voie  de  l'arbitrage  \ 
Des  conférences  se  tinrent,  et  le  21  mai  1295 
une  sentence  survint  '%  à  laquelle  Jean  d'Avesnes 
refusa  d'apposer  son  sceau. 

Dans  l'entretemps  l'horizon  politique  de  l'Eu- 
rope s'était  fort  rembruni.  Le  comte  de  Hainaut, 
attendant  peu  de  l'attitude  molle  et  indécise  de 
l'empereur  Adolphe  de  Nassau,  rechercha  l'amitié 
du  roi  de  France,  dont  il  espérait  un  concours 
plus  efficace  \  Il  s'ensuivit  un  rapprochement 
entre  l'empereur  et  Gui ,  et  lors  de  la  conclusion 
du  traité  d'alliance  contre  les  Français,  signé  à 
Grammont  le  25  décembre  1296,  notre  comte 
prêta  le  serment  de  vasselage  entre  les  mains 
d'Adolphe  ^  Enfin  le  successeur  de  celui-ci  lui 
accorda,  24  août  1298,  l'investiture  solennelle 
des  fiefs  en  litige  «  et  confirma  le  25  avril  suivant 
le  prononcé  des  arbitres  '. 

Cependant,  les  dissensions  entre  les  maisons 
de  Dampierre  et  d'Avesnes  n'en  continuèrent  pas 


*  De  Saint-Genois,  Monuments  anciens,  p.  754. 

2  Les  habitauts  de  Grammont  se  portèrent  caution  pour  Gui.  Jules 
DE  Saint-Genois,  Inventaire,  p.  139. 

3  De  Saint-Genois,  Monuments  anciens,  p.  837-838.  —  Jules  de 
Saint-Genois,  Inventaire,  j)p.  222-224. 

*  De  Saint-Genois,  Monuments  anciens,  p.  862. 

*  J.  J.  De  Smet,  Corpus  chronicorum  Flandriœ,  t.  I,  p.  305. 

«  Kluit,  Codex,  p.  999.  —  Waenkœnig,  trad.  Gheldolf,  t.  I, 
p.  397. 
'  Kluit,  p.  1006. 

6 


—    82    — 

moins,  jusqu'à  ce  que,  de  commun  accord,  les 
points  suivants  furent  arrêtés  le  17  août  1310  : 
le  comte  de  Hainaut  et  ses  successeurs  tiendront 
en  fief  de  la  Flandre  les  lies  de  la  Zélande  ;  les 
pays  de  Crèvecœur  et  d'Arleux  lui  appartien- 
dront ;  il  renoncera  en  faveur  du  comte  de 
Flandre  à  ceux  d'Alost,  de  Grammont,  de  Waes, 
des  Quatre-Métiers  et  de  Bornliem  ;  le  comte  de 
Flandre ,  de  son  côté ,  lui  payera  une  somme  de 
10,000  livres  parisis;  en  cas  de  non  exécution, 
lesdites  terres  seront  restituées  au  comte  de 
Hainaut  1.  Un  autre  acte,  rédigé  à  cette  occasion, 
dispose  que  Jean  d'Avesnes  remettra  de  ce  chef 
au  comte  de  Flandre  des  lettres  de  reconnais- 
sance confirmées  par  le  roi  de  Germanie  2. 

Tout  ne  devait  pas  se  terminer  là.  Le  comte 
Guillaume  de  Hainaut,  incité  par  le  roi  de  France 
Louis  le  Hutin,  ne  tarda  pas  à  ressusciter  les 
vieilles  prétentions  de  sa  famille,  et  se  fit  recon- 
naître le  1  décembre  1314  à  Cologne  comme 
feudataire  pour  les  villes  d'Alost,  de  Grammont 
et  pour  toute  la  Flandre  impériale  ^  Il  pénétra 
dans  le  pays  de  Waes,  mais  les  Flamands  l'obli- 
gèrent à  se  retirer.  En  conséquence  le  comte  de 
Flandre,  Kobert  de  Béthune,  fut  de  nouveau  reçu 
à  hommage  *. 

Enfin,  en  1323  (n.  st.),  le  6  du  mois  de  mars, 


1  Archives  départementales  du  Nord,  à  Lille. 

2  Mêmes  archives. 

3  Archives  de  Lille. 

<  Acte  du  3  mai  1315.  Kluit,  t.  II,  p.  1028. 


—    83    — 

la  paix  fut  définitivement  scellée  à  Paris.  Une  des 
clauses  porte  que  le  comte  de  Hainaut  renoncera 
pour  l'avenir  à  toute  réclamation  quelconque  sur 
les  pays  d'Alost,  de  Grammont,  de  Waes,  des 
Quatre-Métiers  et  sur  la  gavenne  de  Cambrai  '. 
Cet  accord  fut  approuvé  le  3  mars  1324  par 
lempereur  Louis  V  ^. 

Pendant  ce  temps  Robert  de  Bétliune  étant  resté 
de  fait  en  possession  de  la  Flandre  impériale,  ses 
enfants,  Louis  comte  de  Nevers,  et  Kobert  dit 
de  Cassel,  avaient  pris,  dès  le  27  avril  1309,  en 
vue  de  sa  future  succession  divers  arrangements, 
que  nous  allons  analyser  brièvement.  Le  comté 
de  Flandre  appartiendra  à  Louis  ;  Robert  obtien- 
dra pour  sa  part  un  revenu  annuel  de  10,000 
livres  parisis  affecté  sur  le  comté  d'Alost,  sur 
Grammont  et  attenances,  sur  le  pays  de  Waes, 
sur  les  Quatre-Métiers  et  sur  Bétbune;  les  châ- 
teaux de  Rupelmonde ,  Bornhem ,  Béthune ,  la 
Bassière  et  autres,  situés  dans  ces  pays,  lui  seront 
cédés  et  il  les  tiendra  en  fief  de  son  frère  '\  Ce 
compromis  fut  revêtu,  le  17  février  1315,  de 
l'approbation  du  comte  de  Flandre,  et  le  9  mars 
1317  (n.  st.)  de  celle  de  l'empereur  \  Pour  lui 
donner   plus  de  solennité ,  Robert  de   Béthune 


1  Lettres  du  4  décembre  1322 ,  analysées  dans  Pe.  Van  Duyse, 
Inventaire  anal,  des  chartes  et  documents  de  la  ville  de  Gand,  t.  I, 
p.  104.  Autres  lettres  du  6  mars  1333  (n.  st.),  dans  Kluit,  t.  II, 
p.  1042. 

2  Kluit,  II,  p.  1061. 

3  Archives  de  Lille. 
*  Mêmes  archives. 


—    84    — 

assembla  à  Gand  quarante  des  principaux  vas- 
saux de  la  Flandre  impériale  et  en  leur  présence 
mit  son  fils  Eobert  solennellement  en  possession 
desdites  terres,  qui,  dit  l'acte,  relevaient  de  l'em- 
pire et  du  roi  des  Romains  '. 

Cependant,  peu  de  temps  après  les  deux  frères 
prirent  d'autres  dispositions  par  lesquelles  Robert 
de  Cassel  reçut,  en  échange  des  pays  d'Alost,  de 
Waes  et  des  Quatre-Métiers,  qui  lui  avaient  été 
concédés  en  garantie  de  son  lot,  la  ville  de  Dun- 
kerque  avec  ses  attenances,  la  ville  et  le  pays  de 
Bornhem,  les  baronnies  de  Brogny  en  Cham- 
pagne, d'Arleux  et  de  Montmirail  en  Perche,  les 
château,  ville  et  châtellenie  de  Cassel  avec  les 
terres  de  la  Bourre  et  de  Watou,  les  château  et 
pays  de  Meppe,  les  châteaux,  villes  et  châtelle- 
nies  de  Warnêton  et  de  Pontrohart  (Estaires?),  la 
ville  de  Gravelines  et  les  ville  et  châtellenie  de 
Bourbourg  -.  Ce  nouveau  contrat  ayant  été  agréé 
par  le  comte  de  Flandre,  Robert  prêta,  le  2  juin 
1320,  entre  les  mains  de  ce  prince,  Thommage 
pour  tout  ce  qui  relevait  de  la  Flandre  %  et  pro- 
mit ultérieurement  de  respecter  le  partage  inter- 
venu ^,  Il  est  pourtant  suffisamment  connu  que 
Robert  de  Béthune  était  à  peine  descendu  dans 
la  tombe  (17  septembre  1322),  que  les  discussions 


*  Acte  du  25  novembre  1317.  Archives  de  Lille. 

*  Lettres  du  mois  d'août,  des  5  et  6  septembre  1317,  aux  archives 
de  Lille. 

*  Archives  de  Lille.  Imprimé  dans  Galand,  Mémoire  pour  Vhis- 
toire  de  Navarre  et  de  Flandre,  pr.  p.  123. 

*  Archives  de  Lille. 


—    85    — 

les  plus  véliémentes  surgirent  par  rapport  à  sa 
succession. 

Après  la  mort  de  Robert  de  Cassel,  26  mai 
1331,  nous  voyons  le  comte  Louis  de  Nevers,  en 
dépit  des  protestations  réitérées  de  la  veuve, 
s'emparer  du  château  et  du  pays  de  Bornhem, 
ainsi  que  du  pays  de  Rodes  '.  Ce  fut  seulement 
après  plusieurs  démarches  infructueuses  que 
Jeanne  de  Bretagne,  dame  de  Cassel,  recouvra 
ses  biens  et  fut  admise  à  foi  au  nom  de  ses  enfants 
Jean  et  Yolande  de  Flandre  -. 

Jean  de  Flandre  étant  décédé  jeune,  la  seigneu- 
rie de  Bornhem  passa  à  sa  sœur,  qui,  suivant 
contrat  de  mariage  du  4  février  1337,  épousa 
Henri,  comte  de  Bar\  Elle  vécut  jusqu'en  1395 
et  fournit  cette  année  encore  à  Philippe  le  Hardi, 
duc  de  Bourgogne,  le  dénombrement  des  fiefs 
qu'elle  tenait  de  lui,  notamment  des  château, 
^dlle  et  châtellenie  de  Bornhem  avec  annexes, 
dans  la  Flandre  impériale  ^.  Son  fils  Robert  I, 
duc  de  Bar,  lui  succéda  et  dressa  à  son  tour,  en 
1406,  le  dénombrement  de  ses  biens  en  Flandre, 
parmi  lesquels  il  cite  également  Bornhem  s. 

De  la  famille  de  Bar,  cette  seigneurie  passa  suc- 
cessivement dans  celles  de  Luxembourg  comtes 


1  Lettres  des  27  juillet  1331,  19  et  22  février  1332  (n.  st.),  30  juin 
1332,  etc.,  aux  archives  de  Lille.  —  Jules  de  Saint-Genois,  Inven- 
taire, p.  465. 

*  Lettres  du  1  mai  1332,  datées  d'Ypres.  Archives  de  Lille. 
■''  Archives  de  Lille. 

*  Vredius,  Genealogia  comitum  Flandriœ,  prob.  p.  228. 

^  Vredius,  Genealogia  coniitmn  Flandriœ,  p.  231.  —  Galand, 
Mémoire,  pr.  p.  139. 


—    86    — 

de  Saint-Pol,  de  Bourbon  ducs  de  Vendôme,  de 
Clèves  ducs  de  Nevers ,  de  Gonzague  princes  de 
Mantoue ,  d'Avalos  marquis  del  Vasto  et  de  Pes- 
caire.  Alphonse-Félix  d'Avalos- Aragon  y  Aquino, 
marquis  de  Pescaire,  la  vendit,  en  1586,  à 
Pierre  Coloma,  seigneur  de  Bobadilla.  Sa  des- 
cendante, Marie-Florence  Coloma,  la  porta  dans 
la  lignée  de  Corswarem,  par  suite  de  son  ma- 
riage avec  Jean-Tliéodore  de  Corswarem,  comte 
de  Nyle.  Nous  la  retrouvons  ensuite  dans  la  mai- 
son de  Marbais  et  enfin  dans  celle  des  comtes  de 
Marnix. 

L'exposé  qui  précède,  que  nous  avons  tâché  de 
condenser  autant  que  possible,  afin  de  ne  pas 
donner  à  notre  travail  un  développement  exa- 
géré, mettra,  nous  en  avons  lespoir,  la  situation 
antérieure  féodale  de  Grammont  et  de  Bornhem, 
comme  fiefs  de  la  Flandre  et  arrière-fiefs  de  l'em  • 
pire  d'Allemagne,  hors  de  toute  contestation. 
Originairement  englobées  dans  le  pays  d'Alost, 
c'est-à-dire  dans  le  territoire  conquis  en  lOS-i- 
1 049  par  les  comtes  de  Flandre  sur  la  Lotharin- 
gie, ces  contrées,  de  même  que  Termonde,  res- 
tèrent durant  des  siècles  comprises  à  Tétat  latent, 
si  Ion  peut  s'exprimer  ainsi,  dans  l'hommage 
général  prêté  par  ces  princes  au  roi  de  Germanie. 
Si  dès  le  XIIP  siècle  le  pays  de  Grammont  mérita 
l'honneur  d'une  mention  spéciale  dans  les  actes 
d'investiture,  on  doit  en  attribuer  la  cause  tant  à 
la  préj)ondérance  qu'il  avait  acquise  comme  dis- 
trict administratif  propre,  qu'à  l'importance  de 


—    87    — 

son  chef-lieu  considéré  dès  lors  comme  la  seconde 
ville  de  la  Flandre  impériale. 

L'inféodation  subséquente  de  Grammont  et  de 
Bornliem  à  l'évêclié  de  Liège  ne  modifia  en  rien 
cette  situation  ;  elle  fut  la  conséquence  d'événe- 
ments particuliers  que  nous  avons  indiqués  et 
sur  lesquels  il  serait  oiseux  de  revenir. 


Alph.  de  VlASIEsCK. 


—    88    — 


LOUVAIN 

ET 

SES    PREMIERS    COMTES. 


1.  «  Lorsque  les  villes  doivent  leur  origine  à 
un  village,  elles  sont  placées  ordinairement  près 
d'une  rivière,  dit  Scliayes,  et  ces  premiers  établis- 
sements sont  ordinairement  aussi  situés  dans  les 
endroits  les  moins  larges  de  la  vallée  qui  sert  de 
bassin  à  la  rivière;  là  où  le  passage  est  le  plus  aisé.  » 

Ces  conditions  se  rencontrent  à  Louvain,  qui 
pourtant  n'est  désigné,  sous  la  date  de  884,  que 
par  le  mot  locus^  et  non  villa.  Ce  terme  semble 
indiquer  un  hameau,  sinon  une  bourgade,  une 
simple  agglomération  de  demeures  écartées  d'un 
temple,  d'une  église  ou  d'un  castrum,  voisinage 
qui  eût  amené  la  désignation  de  villa  ou  villare. 

Des  trouvailles  de  monnaies  gauloises  sur  ce 
territoire ,  et  de  poteries  romaines  à  Kessel-loo, 
Heverlee  et  Terdonck  sous  Lovenjoel  manifestent 
la  fréquentation  de  ces  localités  voisines  dès 
l'époque  des  Césars  \ 


•  PiOT,  Statistique  archéologique ,  t.  III  de  Schayes.  —  Van  Even, 
Louvain  monumental. 


—    89    — 

On  se  l'explique  en  remarquant  à  l'est  une 
voie  ancienne  passant  à  Léau,  venant  de  Tongres, 
se  poursuivant  par  Tirlemont  connue  par  ses 
tumulus ,  et  se  continuant  vers  la  Dyle  ;  et  à 
l'ouest  les  découvertes  des  substructions  de  l'épo- 
que romaine  à  Melsbroeck,  où  cette  voie  eût 
abouti  pour  de  là  gagner  Peuthy  *  et  Vilvorde  -. 

En  884,  les  Normans  firent  leur  place  d'armes 
de  cette  localité  et  s'y  retranchèrent  '.  On  croit 
que  leurs  retrancliements  avaient  Wilsele  au  nord; 
touchait  au  Setteken  et  au  Château-César,  et 
avaient  au  sud  la  porte  de  Bruxelles  *.  Ils  en 
furent  dépossédés  en  891,  par  l'éclatante  victoire 
que  l'empereur  Arnulf  remporta  sur  eux.  Dès  lors, 
le  nom  de  Louvain  disparaît  de  l'histoire  jusqu'en 
948,  encore  cette  date  est-elle  aujourd'hui  vive- 
ment contestée,  comme  nous  le  dirons  plus  loin. 

Au  siècle  suivant,  Louvain  donne  son  nom  à 
un  comté.  Mais  l'époque  antérieure  est  celle  oii 
nous  voyons  tous  les  seigneurs  occupant  des 
Châteaux  forts,  investis  en  même  temps  des  fonc- 
tions subalternes  de  Vicarii  ou  Centenarii,  s'attri- 
buer le  titre  de  Comes  ;  c'est  alors  que  nous  trou- 
vons dans  les  chroniques  la  mention  des  comtes 
de  Hui,  de  Clermont,  de  Durbui  et  de  la  Roche. 
Le  territoire  du  comté  de  Louvain  était  constitué 


»  <i  Putian,  »  Mirœiis,  t.  I,  p.  140. 

^  C.  Van  Dessel,  Nouvelles  annotations ,  p.  2.  —  TopograjMe  des 
voies  romaines  de  la  Belgique,  pp.  18  et  19. 

'  «  (Regino  Prumensis)...  in  loco  qui  dicitur  Loven  castrametati 
sunt  in  confinio  ejusdem  regni.  » 

*  C.  PiOT,  Histoire  de  Louvain,  p.  12. 


—    90    — 

d'une  portion  de  la  Hasbanie,  dont  les  limites 
occidentales,  identiques  à  celles  du  diocèse  de 
Liège,  dépassaient  la  Dyle  sur  quelques  points 
seulement,  comme  à  Corbeek-Dyle,  Neer-Yssclie, 
Haeght,  etc.  Au  nord  le  territoire  nous  paraît 
s'être  étendu  jusques  la  Grande-Nètlie,  englobant 
les  villages  de  Testelt,  Vorst,  Eynthout,  Meer- 
bout  et  Olmen;  à  l'est  la  frontière  se  confondait 
avec  celles  de  Deurne,  Scbaffen,  Diest,  Haelen  et 
Beets,  tandis  que  la  limite  méridionale,  s'éten- 
dant  de  Corbeek-Dyle  à  Beets,  longeait  le  comté 
de  Brugeron.  Si  ce  territoire  formait  antérieure- 
ment celui  d'un  des  quatre  comtés  que,  selon 
l'acte  de  partage  de  870 ,  renfermait  la  Has- 
banie, il  ne  portait  point  le  nom  de  Louvain,  qui 
n'avait  alors  aucune  importance.  Aussi  Dewez 
pense-t-il  qu'il  fut  connu  sous  le  nom  de  comté 
de  Diest  '. 

La  limite  nord  que  nous  conjecturons  avoir 
été  celle  du  comté  de  Louvain  empiète  sur  la 
Taxandrie ,  mais  nous  nous  sommes  basé  sur 
l'étendue  de  la  juridiction  postérieure  de  Zichen 
dans  cette  direction. 

En  884,  nous  trouvons  donc  le  nom  écrit 
LovEN  ;  en  1003,  on  lit  déjà  Lovanium,  soit: 
Loven-bem  (Laubenheim).  La  plupart  des  auteurs 
déduisent  ce  nom  de  Loo-ven  «  marais  du  Bois  ». 
Bien  que  le  nom  ait  deux  syllabes,  il  ne  s'exprime 
pas  pourtant  comme  un  mot  composé ,  la  seconde 
syllabe  étant  sourde.  Aussi  préférons-nous  y  voir: 

»  Mm^us,  t.  I,  p.  499. 


—    91     — 

Love,  Loove  S  en  allemand  :  Laiibe,  «  enclos,  ou 
berceau  de  Verdure  »,  à  la  limite  ouest  du  Hae- 
geland  ^ 

2.  Le  traité  de  Verdun  de  843,  avait  attribué 
à  Lothaire  I ,  un  territoire  propre  servant  de  bar- 
rière entre  la  Germanie  et  la  Gaule.  Ce  royaume 
fut  connu  sous  le  nom  de  Lotharingie  et  persista 
intact  jusqu'en  869  ,  lorsqu'à  la  suite  du  décès 
de  Lothaire  II,  Hugues  son  fils  naturel  finit  par 
s'allier  aux  Normans  pour  le  revendiquer.  Leur 
roi  Godefroid ,  ainsi  que  le  Comte  Tliiebault  d'Ar- 
dennes  étaient  beaux  frères  du  prétendant  que 
soutenaient  en  outre  les  Comtes  Robert,  Wibert, 
Albéric  et  les  deux  Etienne.  C'est  là  ce  que  Régi- 
non  nous  apprend  sous  la  date  de  883,  indications 
qui  nous  dévoilent ,  en  quelque  sorte ,  pourquoi 
l'année  suivante  les  Normans  se  retranchèrent  à 
Louvain,  dans  le  centre  du  pays,  et  comment 
sept  ans  plus  tard  Arnulf  y  rencontra  un  si  grand 
nombre  de  combattants.  Ils  n'étaient  pas  tous 
venus  du  dehors  ;  il  y  avait  des  insurgés  indigènes 
parmi  ceux"*,  que  vainquit  le  roi  Arnulf  en  891. 

Lorsqu'on  étudie  ces  événements  et  ceux  qui 
ont  suivi,  on  sent  comme  un  souffle  d'indépen- 
dance agiter  certains  esprits  ;  et  «  l'on  ne  sait , 

*  La  lettre  h,  qui  termine  le  mot,  n'est  point  la  marque  du  plu- 
riel ,  mais  la  forme  spéciale  du  dialecte  brabançon ,  comme  le  fait 
observer  Louis  Toeffs  :  «  Tericijl  de  Vlaming  de  woorden  zoo 
gaarne  door  eene  lisping  eindigt ,  sluit  de  Brabander  liefst  oj)  eenen 
medehlinket^.  »  Antiverpen^s  naamrede,  p.  5. 

'  Conf.  Max  Wirth,  Fondation  des  états  germaniques,  t.  II,  p.  17. 
'  Geraed  ,  Lettre  X,  Revue  trim.,  t.  XXVII ,  p.  217, 

*  Conf.  G.  Verhoeven,  Inleyding,  enz.,  p.  209. 


—    92    — 

»  dit  Emile  de  Borchgrave,  quelles  aspirations 
»  vers  une  existence  nationale  se  font  jour  dans 
»  les  récits  de  nos  chroniqueurs  \  » 

Dès  cette  époque ,  il  y  eut  ici  un  royaume  sans 
roi ,  dont  le  trône  est  toujours  vacant ,  sauf  que 
les  rois  de  France  et  de  Germanie  vinrent  alter- 
nativement s  y  asseoir  à  demi  ^  Ces  conditions 
ambiguës,  firent  écrire  sans  doute  à  des  au- 
teurs anglais  que  la  couronne  de  Lotharingie 
n'était  ni  en  fer  comme  celle  des  Lombards ,  ni 
en  or  comme  celles  de  France,  maisen  argent'. 
Le  vainqueur  des  Normans  dans  la  plaine  de 
Louvain,  Arnulf  était  revêtu  de  la  dignité  im- 
périale. C'est  à  lui  que  nos  commentateurs  at- 
tribuent la  construction  du  Castnun  Cœsaris  de 
Louvain  (Keizersburg?)  et  avec  la  plus  grande 
vraisemblance  quand  on  tient  compte  des  cir- 
constances de  la  lutte  que  nous  avons  précé- 
demment indiquées  *.  En  effet,  une  redoute 
dominant  la  plaine  où  l'ennemi  s'était  si  long- 
temps tenu  et  recruté,  semblait  nécessaire;  et  la 
dénomition  de  château-César  que  la  tradition  nous 
a  léguée  nous  révèle  que  cette  forteresse  de- 
meurait attachée  à  la  couronne  ;  conséquemment 
que  son  châtelain  était  nommé  par  elle  ;  enfin 
lorsque  la  maison  de  Saxe  gouverna  les  deux 
royaumes  de  Germanie  et  de  Lotharingie ,  c'est- 


•  Les  précurseurs  de  la  nationalité  belge,  p.  842.  Bulletin  de  V Aca- 
démie archéologique  de  Belgique,  deuxième  série. 

2  Gérard,  Lettre  VIT,  Revue  trim.,  t.  XIV,  p.  230. 

3  Frankheslie,  m.  Newspaper,  19  january  1867. 

*  Grammaye,  Lovanium,  p.  2. 


—    93    — 

à-dire  à  partir  de  l'an  925,  ces  châtelains  exer- 
cèrent les  fonctions  comtales  sur  les  habitants  de 
la  plaine ,  auxquels  les  retranchements  construits 
par  les  Normans  avaient  laissé  les  éléments  d'une 
future  enceinte. 

A  partir  de  l'an  940,  quand  l'insurrection  con- 
duite par  Giselbert  sous  la  bannière  Carlovin- 
gienne  fut  vaincue,  la  présence  de  l'armée  d'outre- 
Rhin  sur  notre  sol  se  perpétua  pendant  plusieurs 
années;  car  quatre  ans  plus  tard  nous  voyons 
Herman  de  Souabe  triompher  de  nouveau  de 
l'insurrection  '.  Les  troupes  allant  d'Aix-la-Cha- 
pelle où  résidait  Othon  I,  vers  Gand  qu'elles  em- 
portèrent, ont  dû  traverser  la  Dyle  à  Louvain , 
à  différentes  reprises.  Dans  ces  circonstances 
l'armée  royale  dut  ne  point  négliger  la  conserva- 
tion du  Castriim  Cœsaris. 

Dej)uis  Toccupation  normande  toutes  les  clas- 
ses de  la  population  du  pays  étaient  fortement 
éprouvées,  et  les  moines  eux-mêmes  essuyaient 
de  grandes  tribulations.  La  plus  sérieuse  qui  était 
leur  propre  fait  provenait  du  relâchement  sinon 
de  l'abandon  de  la  discipline.  Cette  situation  avait 
frappé  des  esprits  sincères  et  dévoués.  Gérard  de 
Brogne  et  le  Comte  Wibert  entreprirent  la  restau- 
ration des  règles  monastiques,  non  sans  opposi- 
tion cela  se  conçoit;  mais  ce  qui  s'expliquerait 
plus  difficilement  ce  sont  les  entraves  que  ces 
deux  saints,  car  ils  furent  béatifiés,  rencontrèrent 
chez  des  évêques  et  leurs  chapitres  ". 

*  Conf.  A.  VoGEL,  Eatherius  von  Verona,  pp.  111  à  115. 
»  Idem,  Ibid.,  pp.  117  à  119. 


—    94    — 

3.  Les  préalables  à  la  fondation  de  l'abbaye 
de  Gemblûurs  par  les  libéralités  du  comte  Wibert, 
ou  Guibert ,  et  de  ses  parents  remontent  à  Tan 
922.  Selon  Mabillon  l'établissement  de  Tabbaje 
est  postérieur  à  l'an  933,  et  Paquot  le  fixe  à  l'an 
940.  Elle  eut  pour  premier  abbé,  désigné  par  Wi- 
bert  et  élu  par  ses  collègues,  Erluin  qui,  dit-on, 
gouverna  rabba3'e  jusqu  en  987,  ou  tout  au  moins 
986,  soit  46  à  47  ans! 

Ce  fut  sous  son  abbatiat  que  le  monastère  ob- 
tint d'Othon  I ,  le  diplôme  confirmatif  de  sa  fon- 
dation, l'an  948,  comme  nous  lapprend  Sigebert 
de  Gemblours  \  Par  ce  titre  les  moines  sont 
autorisés  à  fortifier  leur  monastère  «  pour  mettre 
))  les  choses  saintes  à  l'abri  des  tentatives  des 
»  faux-chrétiens  et  des  payens  \  w  Le  même 
paragraphe  indique  l'adjonction  d'un  Avoué.  Le 
roi  Othon  I ,  sur  la  demande  du  comte  Wibert  et 
de  l'abbé  Erluin  nomma  par  une  charte  datée  de 
Frankfort  le  29  juin  948  comme  avoué  de  l'abbaye 
de  Gemblours,  Lambert  comte  de  Louvain. 

Ce  comte  Lambert  n'est  connu  que  par  cette 
seule  mention  ;  aussi  des  commentateurs  ten- 
tèrent-ils de  l'identifier  avec  un  homonyme  connu, 
et  prétendirent-ils  voir  en  lui  le  gendre  du  duc 
Charles,   tuée  à  Florennes  en   1015.   En  consé- 


»  MiB^us,  t.  I,  p.  139. 

*  ((  Quibus  concedatur  potestas  faciendi  castellum,  a  falsis  quate- 
nus  cliristianis  vel  paganis,  pignora  sauctoi-um  quœ  iuibi  digna 
conditœ  sunt  honore  servantur.  »  A  cette  époque  il  n'était  plus 
question  de  Normans  et  pas  encore  des  Hongrois;  ces  payens 
étaient-ils  indigènes? 


—    95    — 

quence  ils  prétendaient  lire ,  soit  984,  soit  974, 
en  quel  dernier  cas  Bruxelles  et  non  Frankfort 
devenait  le  lieu  de  l'expédition  du  titre  '.  D'autres 
écrivains  modernes  ne  regardent  pas  seulement 
comme  altéré  le  titre  en  question ,  mais  comme 
faux. 

Ils  se  basent  sur  plusieurs  points  pour  le  récu- 
ser ,  savoir  :  la  formule  introductive ,  la  recon- 
naissance du  droit  de  guerre  privée  et  ses  règles 
imposées  à  l'avoué  ;  mais  surtout ,  sur  ce  que  le 
nom  du  pape  alors  en  fonctions  ne  concordait  pas 
avec  celui  qui  en  984  ^  confirma  réellement  la  fon- 
dation de  l'abbaye  de  Gemblours. 

Voyons  la  portée  de  ces  récusations  : 

Des  diplômes  de  Louis  le  Débonnaire,  et 
d'Othon  II ,  présentent  des  formules  identiques 
sur  des  titres  non  contestés  ';  au  surplus,  des 
titres  émanés  d'Othon  I,  présentent  plusieurs 
exemples  de  variété  à  ce  sujet  ;  la  rédaction 
en  était  laissée  aux  chanceliers  instrumentant , 
et  ce  détail  n'avait  pas  alors  l'importance  qu'il 
acquit  dans  les  temps  modernes. 

Les  guerres  privées  de  seigneur  à  seigneur 
étaient  des  prérogatives  encore  si  généralement 
en  usage  que  le  roi  ne  pouvait  se  dispenser  d'y 
avoir  égard,  surtout  en  ce  qui  regardait  les 
charges  éventuelles  qu'elles  auraient  pu  faire 
tomber  sur  l'abbaye. 


*  S.  Marchal,  Nouveaux  mémoires  de  l'Académie,  t.  VI. 
^  Conf.  la  note  de  la  p.  26.  Histoire  de  Louvain,  1839.  PiOT. 
3  Conf.  Mœ^us,  t.  I,  pp.  17,  18  et  49. 


—    9G    — 

Enfin,  Ton  objecte  qu'un  paragraphe  final  du 
diplôme  nommant  l'avoué  porte  le  nom  du  pape 
Benoît,  celui  qui  rendit  le  bref  de  984,  et  non 
celui  d'Agapet  qui  régnait  en  948  '.  Ceci  surtout 
mérite  examen. 

D'abord,  pour  l'époque  et  ses  circonstances  un 
retard  de  trente  six  ans  pour  cette  confirmation 
n'a  rien  d'insolite ,  quand  on  ne  perd  pas  de  vue 
la  nature  des  relations  qui  existèrent  entre  l'Em- 
pire et  la  curie  romaine  pendant  ce  X^  siècle  -  ce 
dont  nous  n'avons  pas  à  nous  occuper  ici.  Il  est 
probable  que  les  phrases  manquant  au  bas  du 
diplôme  de  fondation  étaient  primitivement  cor- 
rectes, et  que  la  finale  de  la  charte  constituant 
l'avouerie  ne  fut  ajoutée  qu'après  la  confirmation 
pontificale.  Nous  admettons  donc  comme  docu- 
ment la  charte  du  29  juin  948,  ainsi  que  Sigebert 
moine  de  Gemblours  le  fit  lui-même.  La  variante 
nous  semble  avoir  été  introduite  à  la  suite  du 
bref  confirmatif,  obtenu  selon  toute  apparence 
par  l'évêque  de  Liège  Notker  auquel  nous  re- 
viendrons ^. 

La  douzième  année  du   règne   d'Othon  I  est 


*  MiK^us,  t.  I,  p.  42,  et  idem,  p.  507.  —  On  lit  p.  42.  «  Acta 
sunt  hsec  anno  incamationis  Domini  948.  Indictioue  XII,  anno  im- 
perii  nostri  12,  sub  pontificato  Domni  Benedicti,  papae,  qui  rogatus 
a  nobis  huic  nostrse  auctoritati  suam  auctoritatem  superaddit,  etc.  » 
—  Actum  in  Franconefort  mense  junio  in  martyrio  Pétri  et  Pauli. 
Féliciter. 

*  Conf.  R.  VoGEL,  Ratherins,  p.  252. 

^  Conf.  Bouille,  Hist.  de  la  ville  et  principauté  de  Liège,  p.  79, 
tome  I. 


—    97    — 

réellement  948;  mais  où  trouver  une  douzième 
année  à  Otlion  II ,  qui  n'en  régna  que  dix ,  alors 
qu'Otlion  III ,  avec  un  règne  de  quinze  ans ,  eût 
vu  sa  douzième  année  coïncider  avec  995,  et  non 
984? 

La  présomption  de  la  constitution  de  l'avouerie 
en  948,  se  tire  encore  dun  autre  acte  de  956, 
portant  la  cession  à  l'abbaye  de  Gemblours  de  la 
moitié  de  l'église  de  Biettine  faite  à  Erluin  et  à 
son  avoué  \  par  un  noble  homme  nommé  Lam- 
bert en  présence  de  son  fils  Ansfried.  Ce  Lambert 
est  évidemment  différent  de  l'avoué  qui  ne  paraît 
autre  que  celui  de  la  charte ,  dont  la  déli\T.'ance 
à  l'époque  assignée  rentre  tout  à  fait  dans  la 
marche  naturelle  des  choses.  C'était  un  temps  où 
des  esprits  sincèrement  religieux  entreprenaient 
la  ré  formation  des  moines  sous  Finspiration  de 
Saint-Gérard;  son  monastère  de  Brogne  et  celui 
de  Gemblours  devaient  servir  de  modèle  ^;  les 
deux  documents  délivrés  par  le  roi  étaient  des 
mesures  régulières.  Erluin  montrant  le  but  qu'il 
se  proposait  fut  chargé  en  956,  de  réformer  la 
discipline  dans  l'abbaye  de  Lobbes  ;  Folcuiu  nous 
a  transmis  les  épisodes  de  cette  entreprise  in- 
fructueuse 3. 

Nous  trouvons  donc  ici  le  premier  comte  de 
Louvain  connu.    «  Nous   donnons  lavouerie  de 


*  «  Nam  idem  Lambertus,  advocato  eam  tradidit.  »  Paquot,  note 
en  De  Vaddere,  Origine  des  di<cs  de  Brabayit,  p.  277. 
«  A.  VoGEL,  Ratherius,  pp.  118,  219  et  240. 
'  Gesta,  Abhat.  Lobiensiimi. 

7 


—    98    — 

cette  abbaye  de  Gemblours  et  de  ses  frères,  dit 
le  charte  ,  à  Lambert  comte  de  Louvain ,  bomme 
brave  et  guerrier  qui  en  notre  lieu  sera  leur  sou- 
tient et  défenseur  contre  les  attaques  de  tous  »  \ 

X.  De  Ram  voit  dans  les  termes  :  brave  et 
guerrier  un  hommage  rendu  aux  qualités  de 
Lambert,  gendre  du  duc  Charles.  Mais  la  recon- 
r^aissauce  de  ces  qualités  était  applicable  à  une 
foule  de  nos  guerriers  dont  le  courage  et  le  talent 
militaire  avaient  pu  être  appréciés  par  Othon  I, 
soit  dans  la  guerre  qu'il  avait  soutenue  contre  les 
Czeks  5  ses  luttes  avec  les  Danois ,  ou  les  expédi- 
tions faites  en  France. 

4.  j\Iais  qui  était  ce  Lambert,  comte  de  Louvain 
en  948  ?  Ce  que  nous  avons  dit  touchant  la  qualité 
domaniale  du  Castriim  Cesaris,  nous  fait  voir  en 
lui  un  fonctionnaire  amovible,  nommé  par  la 
couronne.  On  l'a  dit  fils  de  Régnier,  duc  bénéfi- 
ciaire, ou  son  petit-fils  par  un  autre  Lambert. 
Mais  il  a  été  établi  par  Ch.  Duvivier  '  que  le  troi- 
sième fils  du  duc  Régnier  se  nommait  Albert  et 
qu'il  remplit  les  fonctions  de  comte  sans  que  l'on 
sache  en  quel  lieu.  Il  ne  paraît  pas  impossible  que 
l'avoué  fût  son  fils,  et  conséquemment  qu'Adèle, 
femme  de  Régnier  III,  fût  sa  fille.  Jusqu'ici  les 
preuves  font  défaut,  bien  que  les  traditions  re- 
gardent l'avoué  Lambert  comme  appartenant  à 
la  famille  des  Régnier. 

*  «  Dedimus  advocatiam  ipsius  abbatiœ  de  Gembloues,  Lamberto 
coraiti  Lovaniensi  viro  forti  et  belliooso,  qui  vice  nostra  contra 
omnium  inquietationem  adjutor  eorum  fit  ac  defensor.  »  Mir^us, 
ibidem. 

*  Pagus  Ilainvensis.  Preuves,  XXIII. 


—    99    — 

On  connaît  les  mouvements  suscités  par  Rég- 
nier III;  on  sait  qu'à  la  suite  de  sa  capture  ses 
biens  furent  confisqués,  et  que  Tannée  suivante 
le  duc  Brunon  fit  promulguer  Tédit  portant  démo- 
lition des  châteaux-forts,  en  même  temps  que 
pour  mettre  un  frein  aux  guerres  privées  des 
seigneurs  il  engageait  les  manants  à  se  donner 
aux  abbayes.  Ces  mesures  provoquèrent  une  in- 
surrection. 

En  958,  Régnier  III  vit  échanger  sa  captivité 
contre  un  exil  en  Bohême  '.  Nous  nous  sommes 
demandé  si  ce  personnage  dans  lequel  Mone  et 
d'autres  auteurs  allemands  veulent  reconnaître  le 
type  de  Reinhard  de  Vos^  avait  quelques  rapports 
légendaires  avec  le  comte  Reinstein,  et  la  cage 
de  fer  conservée  à  Quedlinburg,  dans  laquelle 
Othon  I  lavait  renfermé  -  ? 

Le  mouvement  était  conduit  par  le  comte  Imon 
de  Chèvremont  et  le  comte  Robert  de  Namur, 
que  le  duc  ne  parvint  pas  à  maîtriser  \ 

Robert,  comte  de  Namur,  s'était  allié  person- 
nellement dans  ces  luttes  à  Herebrand,  que  Sige- 
bert  désigne  par  le  titre  Cornes  Pratiis  pantins, 
c'est-à-dire  comte  brabançon.  Cette  désignation 
n'a  pu  se  rapporter  à  Louvain,  dont  le  territoire 
est  situé  en  Hasbanie  ;  elle  n'est  applicable  qu'à 
une  population  habitant  à  l'ouest  de  la  Dyle,  où 
les  territoires  des  cantons  actuels  de  Soignies  et 


»  YoGEL,  Rathenus,  p.  432. 

"  On  trouve  déjà  clans  Frédégaire  une  fable  sur  les  ruses  de  Rein- 
hard de  Vos.  Patrie  belgica,  t.  III,  p.  502. 
=  Conf.  VoGEL,  lib.  cit.,  p.  247. 


—     100    — 

Nivelles  faisaient  partie  du  Pagus  Brachantensis . 
Herebrand  est  peut-être  identique  à  Hildebrand, 
repris  sur  la  liste  des  adhérends  de  Régnier, 
comme  Robert',  avec  lequel  il  envahit  le  comté 
de  Darnau,  pour  s'y  mettre  en  possession  de  terres 
appartenant  à  l'abbaye  de  Gemblours.  Robert 
s'annexa  les  territoires  des  baillages  de  Fleurus 
et  de  Viesville;  Herebrand  celui  de  l'ancienne 
mairie  de  Genappe  et  le  territoire  de  Gemblours. 
Quelle  fut  dans  ces  conflits  la  conduite  de 
l'avoué  Lambert?  On  l'ignore  ;  mais  rien  n'établit 
qu'il  ait  été  privé  de  ses  fonctions  pour  s'être 
joint  aux  insurgés,  comme  on  l'a  prétendu;  et 
l'histoire  de  l'abbaye  pendant  le  X*"  siècle  n'est 
pas  moins  confuse  que  celle  des  populations  de 
notre  pays.  Ces  luttes  ne  se  terminèrent  qu'en 
960  ou  même  961,  alors  qu'Othon  I  convoqua  la 
diète  à  Worms  pour  lui  faire  admettre  comme  roi 
son  fils  Otlion,  à  peine  âgé  de  sept  ans.  Cet  en- 
fant fut  sacré  à  Aix-la-Chapelle  par  les  trois  arche- 
vêques rhénans,  et  à  la  fin  de  l'été,  le  roi  Othon  I 
conduisit  son  armée  en  Italie  où,  appelé  par 
les  mécontents,  il  allait  chercher  la  couronne  im- 
périale ^  En  963,  Godefroid  I,  notre  duc,  lui 
amena  des  renforts.  On  sait  que  la  peste  décima 
cette  armée  et  que  le  duc  en  fut  victime  en  965. 
L'avoué  qui,  en  qualité  de  feudataire,  était  tenu  de 
se  rendre  sous  les  drapeaux,  les  suivit-il  en  Alle- 
magne et  en  Italie?  Cela  présente  autant  d'appa- 


•  Par/lis  Ilainoensis .  Preuves,  XXIVl^'S- 

*  A.  VoGEL,lib.  cit.,  pp.  252-253. 


—    101    — 

rences  que  la  prétendue  confiscation  de  son  béné- 
fice et  de  ses  alleuds. 

5 .  Le  calme  relatif  s'étant  peu  à  peu  rétabli , 
en  968 ,  la  reine  Gerberge  veuve  de  Louis  d'Ou- 
tremer, depuis  954,  se  trouvant  à  Eclit  j  fit  un 
acte  de  donation  en  faveur  de  l'église  de  Reims, 
des  terres  de  Mersen  et  des  domaines  qui  en 
dépendent,  tels  que  Clemen  (près  Fauquemont) 
Littoy  (entre  Nymègue  et  Bois  le  Duc)  Ertrem  et 
Angleur  (près  de  Liège ,  à  l'entremise  de  son 
avoué ,  et  fidèle  Arnulfe ,  et  avec  l'agrément  de 
Gérard  évêque  de  Toul,  et  des  comtes  Imon  et 
Ansfried,  plus  quelques  autres  nobles  hommes. 
Parmi  les  signataires  figurent  Charles,  fils  de  la 
reine ,  Arnulfe  comte ,  Imon  comte  et  Ansfried 
comte,  puis  Isaac  et  Régnier;  le  tout  est  reçu  par 
Hugon ,  abbé  de  S*^''  Marie  de  Chèvremont  et  par 
son  avoué  %  le  comte  Imon  prémentionné. 

Charles  avait  alors  23  à  24  ans  et  non  quinze 
comme  l'écrit  Balderic  ;  Arnulfe  fils  d'Isaac  qui 
figure  comme  témoin  remplissait  les  fonctions  de 
comte  de  A^alenciennes  en  qualité  d'avoué  de  Ger- 
berge à  laquelle  ce  comté  avait  été  attribué  comme 
partie  de  son  douaire  ^  Imon  paraît  avoir  eu  pour 
femme  une  fille  de  Giselbert,  dont  Gerberge  était 
par  conséquent  belle-mère  (novercaj  %  Ansfried 
que  nous  avons  vu  plus  haut  avoir  un  Lambert 


'  MiRiEus,  t.  I,  p.  48. 

*  Gérard,   Notes  pour  servir   à  Vhistoire  de  la  principauté  de 
Liège,  p.  9.  [Retue  de  Belgique,  1869). 

*  Notre  notice  :  Succession  des  princes,  p.  20. 


—    102    — 

pour  père ,  est  dit  neveu  de  Giselbert  ;  enfin 
Régnier  était  le  fils  aîné  de  Régnier  III ,  réfugié 
à  la  cour  de  France.  Aucun  Lambert  ne  figure 
dans  cet  acte  ;  l'avoué  n'existait  plus ,  son  fils 
n'était  qu'un  enfant  ;  mais  à  part  cette  remarque 
les  liens  de  parenté  l'appelaient-ils  à  intervenir  ? 

C'était  à  Ansfried  que  la  reine  Gerberge  nous 
parait  avoir  confié  une  partie  de  ses  intérêts  en 
Belgique.  Elle  possédait  des  alleuds  dans  le  quar- 
tier de  Bruxelles ,  où  l'on  dit  que  son  fils  Charles 
fut  élevé  *  :  et  Sigebert  titre  Ansfried  de  Cornes 
Bratusioantium ,  sans  indiquer  à  quelle  époque  il 
remplit  ces  fonctions  qui  le  rendirent  distingué 
parmi  les  gallicants  ^  Ce  titre  ne  l'attribue  point 
au  comté  de  Louvain  à  l'est  de  la  Dyle  ;  mais  il 
paraît  fort  probable  que  l'administration  lui  en 
fût  aussi  confiée ,  car  Anselme  de  Liège  qui  écri- 
vait en  1056,  le  nomme  Cornes  Lovaniensis.  En 
984,  il  tenait  le  comté  de  Hui,  ce  fut  donc  plu- 
sieurs années  auparavant  qu'il  eût  administré 
Louvain,  peut-être  dès  968-970,  car  l'existence 
de  Gerberge  ne  se  prolongea  guère  au-delà. 

Des  liens  de  parenté  existaient  entre  ce  comte 
et  les  Regniers.  Widukind  le  dit  neveu  de  Gisel- 

'  P.  Div^us,  Rcr.  Brab.  lihri,  p.  67.  «  Feruut  puerum  Bruxellœ 
alitum  fuisse.  » 

-  «  Clarebat  etiam  hoc  tempore  iiiter  Gallos  Ansfridus,  qui  cum 
fuisset  cornes  Bratuspantius  non  minus  justicia  quam  potentia  se- 
culari  fœmosus.  «  —  La  coexistence  des  deux  langues  usitées  en 
Belgique  est  autlientiquement  établie  comme  antérieure  à  l'an  090. 
Patria  Belg.,  t.  III,  p.  390.  —  Selon  Pertz  et  Wilmans,  Lambert, 
père  d'Ansfried,  était  fils  d'un  Tliierri,  issu  de  Wittekind  et  frère  de 
Kuotbert,  évêquc  de  Trêves.  B""  Sloet,  Oorhondoiboek,  etc.,  p.  92, 


—    103    — 

bert,  mais  Fisen  nous  fait  connaître  que  des 
traditions  liégeoises  le  font  fils  de  Simon  comte 
deHui,  et  d'une  fille  dun  comte  de  Louvain  \ 
L'acte  concernant  l'église  de  Biettinne  nous  ap- 
prend que  son  père  se  nommait  Lambert,  noble 
homme  et  non  comte  ;  mais  sa  mère  était-elle  une 
fille  d'Albert,  une  sœur  d'Adèle?  En  ce  cas  il 
eût  commandé  à  Louvain  pendant  la  minorité 
d'un  cousin?  Ou  bien,  était-elle  fille  de  Sym- 
phoriane  '  et  du  comte  de  Lomme  Béranger,  dit 
le  fidèle  à  cause  de  son  dévouement  à  la  cou- 
ronne ,  qualité  que  l'on  constate  également  cliez 
Ansfried ,  en  tout  cas  donc  petit-neveu  de  Gisel- 
bert?  En  cette  circonstance  Loniensis  eût  été 
compris  Lovaniensis. 

Le  fils  de  l'avoué  de  Gemblours  parait  avoir 
remplacé  son  père  vers  980,  c'est  le  personnage 
qu'indique  un  passage  que  nous  donnons  en  note  : 
filium  siii  nominis  produit  par  Pierre  Van  der  Hey- 
den  dit  A-Tliymo.  Cet  écrivain,  né  en  1383,  à  Gierle 
près  Turnhout,  fut  investi  des  fonctions  d'avocat - 
pensionnaire  de  la  ville  de  Bruxelles  ;  il  mourut  à 
Scheut  en  1473.  Contemporain  du  secrétaire  du 
duc  Antoine,  Edmond  Dynterus,  de  Louvain,  il 
n'envisage  pas  les  événements  au  même  point  de 
vue  que  lui,  mais  il  est  tout  aussi  recommandable 
pour  les  données  que  renferme  son  œuvre  '\  Il 


»  Hist.  Icod.,  p.  153,  ad  annum  985. 

'  Fille  du  duc  Régnier. 

'  L'original  de  son  Historia  est  conservé  au  secrétariat  de  la  ville 
de  Bruxelles.  En  1779,  l'Académie  impériale  et  royale  en  fit  pren- 
dre une  copie  afin  d'en  donner  une  édition  (Rombalt,  t.  II,  p.  79). 


—    104    — 

nous  apprend  que  Lambert  II,  étant  mort  en  1011, 
son  cousin  Lambert  à  la  Barbe  recueillit  sa  suc- 
cession, Régnier,  son  frère  aîné,  étant  mort  de- 
puis environ  neuf  ans  * . 

En  972,  un  an  avant  sa  mort,  Otlion  I  avait  fait 
élever  au  siège  épiscopal  de  Liège  Notker  ou 
Notger,  qu'il  avait  jugé  propre  à  réaliser  les  vues 
de  l'archiduc  Brunon  pour  assurer  la  paix  publi- 
que du  Lothier.  Appartenant  à  la  famille  de 
Souabe,  il  passait  encore  pour  apparenté  à  l'em- 
pereur, duquel,  selon  Bouille,  il  eut  été  neveu  par 
sa  mère.  Notker,  après  avoir  puni  les  turbulents 
de  sa  résidence,  crut  nécessaire  à  la  mise  en  prati- 
que des  vues  de  Brunon,  d'accroître  le  pouvoir 
politique  de  son  église.  Othon  II  favorisa  baute- 
nient  ces  tendances.  Ce  fut  en  conséquence  du  but 
poursuivi  qu'en  980  Notker  s'empara  de  Chèvre- 
mont  et  de  son  église,  dont  il  réunit  les  biens  aux 
chapitres  des  églises  de  Liège  ^.  Ce  fut  probable- 
ment à  la  suite  de  cette  conquête  que  l'évêque  alla 


Cette  publication  semble  ne  jamais  avoir  eu  lieu  ;  sauf  qu'en  1830, 
F.  DE  Eeiffenberg  en  publia  un  volume  seulement  sous  le  titre  de  : 
Historia  Brabantiœ  diploniatica,  devenu  rare. 

•  «  Actum  est,  Deo  disponente,  ut  Lambertus  comes  Lovanien- 
sis,  A.  D.  1011,  sine  liberis  moreretur,  et  quia  Reginarius  comes 
Hanoniensis  frater  senior  Lamberti  Bai'bati  prius  obierat,  ipse  Lam- 
bertus cum  barba  comes  Bruxellensis,  tanquam  proximior  hseres  in 
comitatu  Lovaniensi  Lamberto  suo  consobrino  successit.  Genitrix 
Lamberti  comitis  Bruxellensis,  fuit  soror  Lamberti  comitis  Lova- 
niensis,  cui  quondam  Otto  imperator  advocatiam  abbatiee  Gembla- 
censis  concessit  ;  qui  post  se  filium  sui  nominis  reliquit.  Lambertus 
ergo  junior  comes  Bruxellensis  erant  consobrini,  filii  scilicet  fratris 
et  sororis.  » 

'  Bouille,  Histoire  de  la  ville  et  du  •pays  de  Liage,  pp.  73  à  77. 


—    105    — 

visiter  les  localités  ainsi  annexées,  et  parmi  les- 
quelles nous  citerons  Hermalle  en  Hesbaie,  Buel 
en    Campine;    Vilvorde    en    Braband,    Villers, 
Grandreng,  Rignœil  sous  Rouveroy,  Clievennes 
sous   Sars-la-Buissière,  ^Yaudrez   et    Frasnes    en 
Hainaut.  Une  tradition  liégeoise  avance  que  la 
famille  des  Regniers  réclama  par  les  armes,  mais 
vainement,  contre  la  conquête  de  Chèvremont. 
Ces  événements  pourraient  bien  n'être  pas  tout 
à  fait  fictifs,  mais  aj)partenir  à  une  époque  posté- 
rieure de  quatre  à  cinq  ans,  c'est-à-dire   coïnci- 
dant avec  celles  où  le  duc  Charles,  mu  par  une 
sorte    d'esprit    national ,    récusait    la    souverai- 
neté du  jeune  roi  Otlion  III.  Ces  hostilités  donc, 
surgies  en  981,   se  seraient  perpétuées  jusques 
985-86,    époque  où  Ansfried,  embrassant  l'état 
ecclésiastique,   céda  le  comté  de  Hui  à   Saint- 
Lambert.   Dans    Tune   des   rencontres   de    cette 
guerre,  le  comte  de  Hainaut,  prisonnier  de  l'évê- 
que,  n'aurait  obtenu  sa  liberté  que  moyennant  la 
cession  de  la  ville  de  Thuin  ^  La  conclusion  de 
tous  ces   événements    qui   furent    favorables    à 
Notker,  pourrait  bien  être  le  fait  que  Fisen  nous 
fait  connaître  '^  :  «  Le  duc  Charles^  dit-il,  vendit  à 
Notker,  pour  douze  cents  marcs  d'argent  fin,  le 
domaine  utile  du  comté  de  Brugeron,  sous  la  ré- 
serve qu'en  cas  d'extinction  de  la  lignée  du  titu- 
laire, cette  utilité  passerait  à  sa  fille  Ermengarde, 
comtesse  de  Namur.  »  La  captivité  de  Charles  et 


*  Bouille,  t.  I,  p.  74. 
«  Fisen,  p.  152. 


—    106    — 

l'accession  de  son  fils  au  duché  n'auraient  pas 
empêché  la  reprise  de  ces  hostilités.  En  996-998, 
disent  les  annalistes  liégeois,  le  comte  de  Lou- 
vain,  assisté  de  celui  de  Namur,  vint  assiéger 
Hui;  mais  il  fut  repoussé  et  défait  par  Waleram 
de  Waleffe  qui  commandait  les  épiscopaux  ;  Able- 
bert,  comte  de  Namur,  perdit  la  vie  dans  un 
combat  * ,  et  bientôt  Jodoigne  et  Nivelles  furent 
occupées  par  les  troupes  de  Notker.  L'accord  se 
fit  enfin  au  moyen  de  la  restitution  à  Ermengarde 
des  alleuds  qu'elle  réclamait. 

Ces  luttes,  ces  combats  entre  nos  comtes  et 
l'évêque  Notker  ont  certainement  toute  la  vrai- 
semblance historique  pour  appui,  mais  on  ne 
saurait  jusqu'ici  produire  aucune  preuve  de  leur 
véracité. 

Othon  II  étant  mort  en  983,  son  fils  âgé  de 
trois  ans  lui  succéda  sous  la  tutelle  d'Agnès 
sa  mère,  assistée  d'un  conseil  de  régence 
dont  Notker  était  le  membre,  paraît-il,  le  plus 
influent.  Aussi  dès  l'année  suivante  voyons-nous 
les  gratifications  à  l'église  de  Liège  se  multiplier. 
Le  comté  de  Brugeron,  que  plus  tard  l'évêque 
inféoda  au  comté  de  Looz,  lui  fut  attribué,  et 
l'abbaye  de  Gemblours  fut  donnée  à  S'  Lambert  2. 
Ce  fut  alors  que  les  moines  déférèrent  à  l'évêque 
la  qualité  effective  d'avoué,  préférant  être  sujets 
de  Tégiise  de  Liège  plutôt  que  de  recourir  à  lauto- 


•  De  Wez,  Ilist.  part.,  t.  I,  p.  77. 
2  ChAPEA VILLE,  t.  II,  p.  44. 


—    107    — 

rite  royale  ' .  Il  nous  paraît  que  c'est  comme  con- 
séquence de  ces  événements  que  Notker  obtint  le 
bref  pontifical  de  984 ,  confirmant  l'institut  ion  de 
Tabbaye  de  Gemblours  ;  et ,  ce  qui  nous  fait  pré- 
sumer que  la  demande  primitive  était  demeurée 
dans  les  cartons,  c'est  que  ce  bref  déclare  ré- 
pondre à  la  requête  d'Erluin  touchant  l'appro- 
bation de  l'abbaye  réceimnent  (nuper)  fondée. 
Elle  existait  depuis  environ  un  demi-siècle  ! 

La  date  du  décès  d'Erluin  n'est  point  con- 
nue ;  mais  son  frère  Herivard ,  qui  fat  son  suc- 
cesseur et  mourut  en  991 ,  avait  été  fait  abbé 
par  Notker  ",  ce  qui  pourrait  bien  être  antérieur 
à  Fan  984,  et  coïnciderait  avec  les  démarches 
de  l'évêque  pour  obtenir  Gemblours.  L'état  péri- 
clitant où  se  trouvait  alors  l'abbaye  nous  fait 
présumer  qu'Erluin  était  mort  bien  antérieure- 
ment, en  même  temps  que  l'avouerie  ressaissie 
plus  tard  j)ar  les  comtes  de  Louvain ,  était  ré- 
duite à  néant  à  l'époque  de  Notker.  Nous  pen- 
sons en  outre  que  c'est  en  vue  de  concorder  avec 
les  termes  de  Benoit  VIT ,  que  les  commentateurs 
ont  prolongé  la  vie  d'Erluin,  jusqu'en  983-87. 
Les  annales  monastiques  sont  aussi  obscures  pour 

r 
»  «  Monachis  quoque  religioni  sufP  pacem  detitam  et  laboribus 

cousolationem  ita  diligenter  providit,  ùt  Gemblacensis  ecclesia  eum 

in.j)atrem  et  dominum  prse  elegerit,  melius  sibi  judicans  Leodiensi 

ecclesise  subjacere,  propter  accomodatum  praesidium,  quam  ad  re- 

giam  celsitudinem  interpellandum  quee  majoribus  debetur  negotiis 

se  supra  extendere.  Itaque  merito  Ep.  Notgeri  et  autoritate  impe- 

riali,  Gemblacensi  ecclesiœ,  vel  abbatise  Leodiensi  cessit  ecclesiee.  » 

Chape  A  VILE,  t.  I,  p.  206. 

'  Gallia  Christiana,  p.  556.  —  MlR^US,  t.  I,  p.  507. 


—    108    — 

cette  période  que  celles  rapportant  les  événe- 
ments politiques. 

Ansfried ,  paraît-il  avait  été  investi  du  comté 
de  Hui  en  980  ;  si  jusques  là  il  avait  tenu  celui 
de  Louvain,  ne  serait-ce  pas  alors  que  Lambert 
II  y  fut  appelé  ?  On  serait  tenté  de  voir  dans 
ces  arrangements  des  mesures  transactionnelles 
pour  écarter  toute  prétention  d'indemnité  pour  la 
perte  de  Chèvremomt  ^  ;  mesures  parmi  lesquel- 
les il  faudrait  ranger  la  restitution  de  l'avouerie 
à  Lambert  II. 

Le  nom  de  Lambert  comte  de  Louvain  men- 
tionné dans  l'acte  d'oblation  de  Gisèle  de  l'an 
1003,  se  rapporterait  donc  à  Lambert  II,  avec 
lequel  le  Castrimi  Cœsaris  serait  devenu  allodial, 
de  bénéficiaire  qu'il  était  auparavant  !  C'est  au 
même  comte  que  nous  attribuons  les  débuts  de 
la  construction  de  l'église  S*  Pierre  à  Louvain, 
débuts  que  Divœus  fixe  à  l'an  1000  2,  bien  qu'il 
reconnaisse  l'église  S*  Michel  pour  la  première 
qui  fut  édifiée  dans  cette  ville  '"  ;  peut-être  re- 
montait-elle à  l'année  976;  et  sa  construction 
fut-elle  contemporaine  de  celle  des  murs  du 
Castrum  Cœsaris  \  Ces  faits  appartiendraient 
donc  à  l'administration  d' Ansfried. 


*  MiE^US,  t.  I,  p.  254.  In  Notkero. 

Legia  ditatur  per  me,  Caprimons  spoliatur; 

Hic  ruit,  hsec  surgit;  manet  ha?c,  nunquam  ille  resurget. 

*  Conf.  Albeedingk-Thym,  La  civilisation  chrétienne,  p.  18. 

=»  «  Templum  D.  Michaëlis  totius  urbis  vetustissimum.  »  Rerum 
brah.,  p.  80. 

*  A.  Casterman,  Agrandissements  et  fortifications  d'Anvers,  p.  16. 


—     109     — 

Il  en  est  autrement  de  Tattribution  an  comte 
Lambert  de  Louvain  d'une  charte  de  l'an  1008  '. 
qui  concède  et  confirme  le  droit  de  chasse  à 
l'évêque  de  Liège,  Balderic  successeur  de  Notker, 
et  à  un  comte  Balderic  en  qui  on  a  voulu  voir 
Lambert  de  Louvain  gouvernant  à  cette  époque. 
Ce  droit  de  chasse  est  concédé  dans  le  Waver- 
wald,  entre  les  Nèthes  et  la  Dyle,  dans  les  lieux 
nommés  :  Heist,  Heisten,  ac  Bacfrido  necnon  Mach- 
linas,  c'est-à-dire  :  à  Heist-op-den  Berg ,  Chaetsen, 
't  hof  te  Befferen ,  sous  Putte  qui  porta  le  nom 
de  Wavre  S*^  Nicolas,  et  Malines.  Comme  depuis 
980,  Malines  avait  été  confirmée  à  l'église  de 
Liège  par  Othon  II,  ce  Balderic  pourrait  bien  être 
le  comte  qui  commandait  dans  cette  ville  ^ 

7.  Lambert  II,  eût  donc  pour  successeur  son 
cousin  qu'A-Thymo  nomme  Cornes  B^mxellensis, 
ou  Lamhertus  cum  Barba,  et  P.  Divœus  Lambertus 
Monteiîsis ,  jetions  un  regard  sur  ses  antécédents  : 

En  975,  époque  rapprochée  de  la  mort  du  duc 
Godefroid  II,  Othon  II  pacifia  le  pays  en  appelant 
Charles  de  France  à  la  couronne  ducale  et  resti- 
tuant leurs  honneurs  et  leurs  biens  aux  frères 
hennuj^ers  ^  Régnier,  l'aine,  obtint  le  comté  de 
Hainaut ,  mais  nous  ne  découvrons  pas  à  quel 
titre  Lambert  eût  obtenu  alors  le  comté  de  Lou- 
vain comme  le  veulent  nos  critiques  modernes. 
Le  Bénéfice  du  comté  de  Hainaut ,  dont  l'hérédité 

»  Mm^us,  t.  I,  pp.  53  et  348. 
'  MiH^us,  ibid.,  p.  50. 

3  «  Keginarius  et  Lambertus  in  terra  patrum  suorum  relocati 
sunt.  »  Sigeb.  Gemblac. 


-     110    — 

se  constituait  insensiblement  revint  à  l'aîné, 
mais  les  alleuds  furent  partagés  ;  ils  étaient  situés 
principalement  en  Hainaut ,  et  nous  savons  que 
30  manses ,  soit  360  bonniers  gisant  à  Buvrin- 
nes  se  trouvaient  dans  la  part  de  Lambert  \  Il 
n'y  a  aucun  indice  qui  fasse  admettre  Louvain 
dans  les  alleuds  de  Régnier  III. 

Cependant ,  X.  De  Ptam  fait  observer  que  les 
antécédents  de  Lambert  à  la  Barbe  permettent 
de  croire  qu'il  n'aurait  pu  consentir  à  ne  pas 
recevoir  de  récompense  et  encore  moins  à  occu- 
per une  position  dépendante.  Mais  il  nous  semble 
qu'une  position  analogue  à  ses  désirs  lui  était 
faite  sans  y  joindre  le  comté  de  Louvain.'  Il  était 
gendre  du  duc  Charles ,  Gerberge  sa  femme  était 
beaucoup  plus  jeune  que  lui  ^;  elle  lui  apporta 
en  dot  des  alleuds  importants ,  tandis  que  lui  ne 
lui  constitua  pas  de  douaire.  D'un  âge  peu  in- 
férieur à  celui  de  son  beau-père  qu'il  surpassait 
en  activité  il  dut  exercer  une  influence  marquée 
dans  la  famille  ducale.  L'ambition  d'un  cadet  de 
famille,  ruiné  comme  l'était  Lambert  en  976,  eût 
été  satisfaite  à  moins. 

Au  décès  de  son  beau-frère  Otlion  3,  qui  avait 
succédé  à  son  père  Charles,  Lambert  revendiqua 

'  Conf.  Ch.  DuviviER,  Pagus  Hainoensis.  Preui:es  XXXV,  p.  122, 
Avant  1005,  il  en  avait  opéré  l'échange  pour  une  terre  d'Assche  avec 
Herman  d'Eenliam. 

^  Confr.  notre  notice  :  Succession  des  princes,  pp.  32  et  83,  dans 
le  t.  IV,  Documents  et  rapports,  1871. 

^  La  tradition  qui  le  dit  enseveli  à  Ecliternach,  nous  paraît  ré- 
sulter de  ce  qu'il  résidait  à  l'est  de  la  Meuse.  On  sait  que  Charles, 
son  père,  fut  inhumé  à  Macstricht. 


—   111    - 

la  fonction  ducale,  mais  Gérard  de  Florennes, 
alors  chapelain  du  roi  Henri  II,  le  desservit  et  lui 
fit  préférer  Godefroid  d'Eenham.  Lambert  forma 
une  ligue  des  princes  ses  parents,  auxquels  se 
joignit  le  comte  de  Flandre  et  la  guerre  contre 
le  roi  Henri. II  et  son  duc  Godefroid  éclata  dès 
1005-1006.  Elle  n'était  pas  terminée  quand 
Lambert  succéda  au  comté  de  Louvain.  Le  Duc, 
prétendant  que  ce  comté  et  les  alleuds  du  comte 
décédé  sans  enfants  devaient  faire  retour  au  fisc  ' , 
entra  sur  son  territoire  et  vint  mettre  le  siège 
devant  Louvain,  d'où  le  comte  et  les  habitants  le 
repoussèrent.  Appelé  au  S.  E.  par  une  agression, 
il  parvint  à  mettre  dans  ses  intérêts,  par  l'inter- 
vention de  son  frère  Herman,  l'évêque  Balderic, 
successeur  de  Notker.  Ce  prélat  se  laissa  persua- 
der de  garnir  ses  frontières  et  de  fortifier  Hou- 
gaerde. 

Devant  cette  démonstration,  dont  il  devinait  la 
portée,  Lambert  engagea  l'évêque  à  cesser  ses 
travaux.  Mais  celui-ci  persistant  dans  son  entre- 
prise, le  comte  s'allia  à  son  parent  de  Namur, 
avec  lequel  il  marcha  contre  les  épiscopaux,  et  em- 
porta Hougaerde,  où  le  comte  de  Namur  fit  Her- 
man prisonnier.  Retenu  sur  le  Haut-Rhin,  le  duc 
Godefroid  laissa  terminer  le  différend  par  les 
acteurs  principaux  et  la  paix  fut  conclue.  Mais  si 
l'on  peut  se  baser  sur  certains  auteurs,  elle  fut 
sur  le  point  d'être  rompue  cette  même  année. 

Arnold  II,  parent  de  l'évêque  Balderic,  se  trou- 

»  Anciens,  Mém.  de  V Académie,  t.  II,  pp.  604  à  615.  (Deseoches). 


—    112    — 

vant  sans  hoirs,  venait  de  faire  don  à  Saint- 
Lambert,  de  son  comté  de  Looz  et  de  la  tenure 
du  comté  de  Brngeron.  Ces  biens,  originaires  en 
grande  partie  dn  patrimoine  de  Eodolphe,  frère 
de  Régnier  III,  furent  revendiqués  par  son  neveu 
Lambert,  comte  de  Bruxelles  et  de  Louvain. 
Après  une  première  requête,  il  fit  enlever  Lut- 
garde,  femme  du  comte  Arnold,  la  reçut  au  châ- 
teau de  Louvain,  où  il  la  traita  avec  les  plus 
grands  égards  et  réclama  son  intervention  pour 
applanir  le  différent.  Une  transaction  s'en  suivit 
d'après  laquelle  le  comté  de  Looz  demeura  à 
l'église  de  Liège,  mais  celui  de  Brngeron  fut  in- 
féodé au  comté  de  Louvain,  moyennant  1200 
marcs  d'argent  que  Lambert  compta  à  l'évêque  ' . 

Cet  incident  suppose  qu'Arnold  était  mort; 
toutefois  d'autres  chroniques  ne  le  font  périr 
qu'en  1015,  en  même  temps  que  Lambert,  au 
combat  de  Florennes. 

L'année  suivante,  le  duc  ayant  conduit  ses 
troupes  contre  le  Hainaut,  le  comte  de  Louvain 
vola  au  secours  de  son  neveu,  assisté  d'Arnold  de 
Looz  et  de  Robert  de  Namur,  et  rencontra  l'ar- 
mée ducale  à  Floremies.  Celle-ci  fut  victorieuse, 
Arnold  et  Lambert  furent  tués  le  12  septembre 
1015. 

8.  Lambert  à  la  Barbe,  regretté  de  ses  sujets, 
est  peint  sous  les  coideurs  les  moins  flatteuses 
par  les  chroniques  étrangères,  de  même  que  ses 
ancêtres  que  nous  ne  connaissons  que  par  des  con- 

*  Bouille,  Hist.  de  la  ville  de  Liège,  1. 1,  p.  83. 


—    113    — 

temporains  français  et  allemands.  Ils  n'étaient 
mus,  disent-ils,  que  par  des  pensées  d'ambition  per- 
sonnelle; mais  on  oublie  qu'ils  étaient  soutenus  par 
Topinion,  et  que  dès  lors  le  mobile  particulier  im- 
portait peu,  la  généralité  du  pays  pouvant  pro- 
fiter de  leurs  efforts.  Ils  étaient  un  obstacle  à  une 
assimilation  complète  que  caressa  tantôt  la  Neus- 
trie,  tantôt  la  Germanie.  C'était  Topinion  nationale 
qui  avait  soutenu  Régnier  III,  comme  il  en  avait 
été  de  son  oncle  Giselbert  * ,  comme  il  en  était  de 
Lambert,  mari  de  Gerberge  la  Carlo vingienne. 

L'étranger  ne  ménagea  ses  reproches  à  aucun 
d'eux.  L'annaliste  saxon,  vivant  vers  1150,  repré- 
sente Lambert  comme  un  guerrier  féroce  et  un 
homme  cruel  ;  il  termine  son  portrait  en  disant 
qu'enfin  c'est  lui  qui,  assisté  de  son  frère,  tua  les 
comtes  Garnier  et  Renaud. 

Or,  ces  comtes  n'eussent  pas  épargné  davan- 
tage les  frères  bennuyers  s'ils  avaient  eu  la  vic- 
toire. Garnier  et  Renaud  étaient  les  fils  du  duc 
Conrad  ^  le  même  qui  avec  Herman  de  Souabe 
avait  défait  Giselbert  à  Andernacb ,  qui  plus  tard, 


*  H.  Van  Veldeken,  auteur  de  la  légende  de  Saint-Servais,  le 
montre  sous  un  aspect  bien  différent  de  celui  présenté  par  Richer  : 
«  Het  was  ejTi  hertoghe  GLysebrecht 


Ghepresen  in  niengen  dingen, 
Een  lielt  van  synen  ly^-e. 


Hi  was  wellich  't  allen  goede. 
Voyez  aussi  :  Les  précurseurs  de  la  natioyiallté  belge,  p.  845  du 
Bulletin  de  V Académie  d^ archéologie,  deuxième  série. 
*  A.  YoGEL  ,  Ratherius,  p.  432. 

8 


—    114    — 

devenu  duc  de  Lothier,  avait  détruit  des  châ- 
teaux-forts appartenant  à  Régnier  III,  qui,  enfin, 
s'étant  lui-même  insurgé  contre  Otlion  I,  avait 
été  vaincu  par  ce  même  Régnier. 

La  Fehda  existait  donc  entre  les  deux  familles, 
et  il  est  douteux  que  Tannaliste  Saxon  eût  sou- 
ligné le  fait  si  les  victimes  n'avaient  été  ses 
compatriotes. 

D'une  autre  part  les  reproches  que  Balderic, 
chantre  de  Thérouenne,  adresse  à  la  conduite 
personnelle  du  comte  Lambert,  et  l'accusation 
de  duplicité  que  porte  contre  lui  Gérard  de 
Florennes ,  chapelain  du  roi ,  et  plus  tard  évêque 
de  Cambrai,  sont  vraisemblablement  fondés  ;  mais 
reproches  et  accusations  sont  applicables  à  tous 
les  personnages  politiques  de  ce  siècle  à  des  de- 
grés d'une  différence  peu  sensible. 

A  partir  de  la  bataille  de  Fontenai  en  841 , 
l'autorité  avait  marché  en  se  fractionnant  de  plus 
en  plus  ;  la  force  centrifuge  la  commandait.  La 
réunion  qu'opéra  Lambert  des  comtés  de  Bruxel- 
les et  de  Louvain,  l'un  en  Brabant,  l'autre  en 
Hasbanie,  commença  pour  nous  le  mouvement  en 
sens  invers.  La  force  centripète  mise  ainsi  en 
action  préludait  à  la  formation  d'un  nouveau 
germe  qui  devait  produire  le  Brabant ,  province 
centrale  de  notre  territoire,  appelé  dès  lors  à 
substituer  son  influence  à  celle  de  Reims  ou  de 
Cologne. 

Nous  voyons  en  même  temj^s  surgir  ici  la  so- 
ciété féodale  ;  quoiqu'elle  n'amenât  que  la  liberté 


-     115    — 

exclusive  et  privilégiée  d'un  petit  nombre  d'indi- 
vidus ,  c'était  déjà  une  liberté  '.  Aussi  cette  orga- 
nisation fut-elle  relativement  démocratique,  car 
tous  ses  membres  étaient  égaux  ou  croyaient 
l'être  '\  Toutes  réserves  faites  sur  les  abus  de 
cet  ordre  de  choses,  nous  devons  reconnaître 
qu'il  a  servi  de  patron,  et  comme  de  stimulant 
à  l'institution  des  communes. 


C.  Van  dee  Elst. 


'  J.-B.  Blaes,  Influence  exercée  par  Charles-Quint.  Revue  trim., 
t.  XVI,  p.  77. 

'  Chateaubriand,  Analyse  de  Vhîstoire  de  France.  Études,  III, 
p.  287.  —  PiNKERTON,  Etablissements  des  Scytes.  Ann.  XII,  pp.  218- 
221. 


-     116 


VARIETES. 


Inscription  a  la  mémoire  de  Charles-le-Téméraire, 
DUC  DE  Bourgogne,  dans  l'église  de  Saint-Georges 

A  Nancy. 

Carolus  hoc  busto  Burgundsc  gloria  gentis 

Conditur,  Eiiropge  qui  fuit  ante  timor. 
Ganda  rebellatrix  hoc  plebs  domitore,  crematur 

Post  patrise  leges,  perpete  pressa  jugo  est. 
Nec  minus  hune  sensit  tellus  Leodina  cruentum 

Cum  ferro  et  flammis  urbs  populata  fuit. 
Monte  sur  Heritio  Fraucas  cum  Rege  cohortes 

Inpavidam  valido  truserat  ante  fugam  : 
Hostibus  expulsis  Eduardum  in  régna  locavit 

Anglica,  primsevo  restituens  solio. 
Bella  ducum,  regnumque,  et  Cœsaris  omnia  spernens, 

Totus  in  efi'uso  sanguine  Itetus  erat. 
Denique  dum  solitis  fidit  temerarius  armis 

Atque  Lotharingo  cum  duce  bella  niovet: 
Sanguineam  vomuit  média  inter  prœlia  vitam, 

Aureaque  hostili  vellera  liquit  humo. 
Ergo  triumphator  longœva  in  secla  renatus 

Palmam  de  tanto  principe  victor  habet. 
0  tibi,  qui  terras  quîBsisti  Carole,  cœlum 

Det  Deus,  et  spretas  antea  pacis  opes. 


—     117    — 

Nunc  clic  Nanceios  cernens  ex  aethere  muros, 
A  Clémente  ferox  hoste  recondor  ibi. 

Discite  terrenis  quicl  sit  confidere  rébus, 
Hic  totiens  victor  deniqne  victus  adest. 

Au  milieu  du  cimetière  dans  lequel  étaient  enterrés  les 
victimes  de  la  fatale  journée  ou  fut  détruite  l'armée  de 
Charles-le -Téméraire,  Renée  de  Bourbon,  femme  du  duc 
Antoine  de  Lorraine,  avait  fait  élever  une  chapelle  en 
1523  ;  une  inscription  en  vers  français  qu'on  y  avait  placée 
rappelait  le  souvenir  de  cette  bataille  et  de  la  mort  de 
l'impétueux  duc  de  Bourgogne: 

Mil  quatre  cent  soixante  et  seize  advint 

Que  Charles  duc  de  Burgongne  ici  vint, 

Accompaigné  de  soudars  et  gens  d'armes 

Guidant  Kanci  surprendre  à  force  d'armes, 

Veille  de  Roys  qu'on  départ  le  gasteau, 

Il  fust  occis  en  passant  un  roisseau. 

E  la  pluspart  de  ses  hommes  de  guerre 

Furent  occis  et  semés  sur  la  terre, 

Puis  recueillis  par  le  commandement 

Du  preux  René,  qui  vertueusement 

Obtint  sur  eux  glorieuse  victoire, 

Dont  le  corps  sont  ici  gisant  en  mémoire 

De  ce  conflict.  Renée  de  Bourbon, 

Noble  Princesse,  ayant  vouloir  très-bon 

Femme  du  très-illustre  Duc  Antoine 

Fils  de  René  noble  Duc  de  Loraine, 

A  fait  bastir  ce  cemiterie  et  croix, 

L'an  mil  cinq  cens  avecque  vingt  et  trois. 

Priés  à  Dieu,  que  par  sa  saincte  grâce 

Au  trespassés  pardon  et  merci  face. 

L.  S. 


—    118    — 
Passeport  donné  par  l'empereur  Charles-Quint  tour 

TRANSPORTER  AU  ROYAULME  DE  NaPELS  DES  PIÈCES  d' AR- 
TILLERIE ACHETÉES  A  Malines.  —  «  Charles....  A  touz 
noz  lieuxtenauts  admirai,  vis  admirai,  capitaines  routes 
et  compaignons  de  gens  d'armes  et  de  trait,  bailliz,  pre- 
vostz,  majeurs,  escoutettes,  bourgmaistres,  eschevins, 
tolnaires,  fermiers  peagiers,  passaigiers  et  aultres  nos 
justiciers,  officiers  et  subgetz  ausquelz  ces  présentes 
seront  monstrees,  salut  et  dilection.  Comme  notre  bien 
aime  subgect  Grégoire  de  Ayala  nous  a  présentement 
remonstre  qu'il  ayt  fait  faire  et  acheter  en  notre  ville 
de  Malines,  de  feu  Hans  Poppenruyter  trente  sept  pieches 
d'artillerie,  assavoir  une  serpentine,  six  demye  serpen- 
tines, quatre  falconnelz,  dix  hacquebutes,  aultres  dix 
falconnetz  et  six  chambres,  le  tout  pesant  ensemble  vingte- 
huit  mille  livres  ou  environ,  a  intention  de  les  mener  et 
conduire  en  notre  cite  de  Naples,  pour  nostre  service  et 
a  la  fortification  d'icelle  cite  et  aultres  villes  et  places 
de  nostre  royaulme  dudit  Naples ,  ce  que  ledit  suppliant 
n'oseroit  faire,  obstant  la  deffense  au  contraire,  sans 
avoir  noz  lettres  de  congie  et  licence  a  ce  pertinent, 
dont  il  nous  a  instamment  requis.  Savoir  faisons  que 
nous,  ce  considère,  audit  suppliant,  inclinans  favorable- 
ment a  sa  dite  supplication  et  requeste,  avonz  octroyé, 
consenti  et  accorde,  octroyons  consentons  et  accordons, 
en  luy  donnant  congie  et  licence ,  de  grâce  especial ,  par 
ces  présentes,  qu'il  puist  et  pourra  faire  charger  et  mectre 
sur  telz  navieres  que  bon  lui  semblera  les  pieches  d'ar- 
tillerie cy  dessus  spécifiées  et  déclarées,  et  icelles  mener, 
conduire,  vendre  et  distribuer  en  nostre  dit  royaulme  de 
Naples,  pour  nous  en  servir  a  la  fortiffication  de  nostre 
dite  cite  et  royaulme  de  Naples  et  non  ailleurs ,  sanz  pour 
ce  aulcunement  envers  nous  (me  faire),  en  payant  toutes- 
fois  noz  droiz  de  tonlieu  et  aultres  débites  et  impostz 


—    119    — 

accoustumez ,  poiirveu  aussy  que  ledit  suppliant  sera  tenu 
bailler  caution  suffisante  de  faire  mener  et  distribuer 
ladite  artillerie  en  nostre  dite  cite  et  royaulme  de  Naples 
et  non  ailleurs,  et  de  rapporter  bonne  certification  de 
nostre  vice-roy  dudit  Naples  endedenz  place  mois  prochain 
venant  d'avoir  illec  délivre  lesdites  parties  d'artillerie  • 
pour  nostre  dit  service. 

»  Si  vous  mandons  et  enjoingnons  très  expressément  et 
a  chacun  de  vous  endroit  soy,  et  se  comme  a  luy  appar- 
tiendra, que  faictes,  souffrez  et  laisser  passer,  mener  et 
transporter  lesdites  parties  d'artillerie  parmy  les  lieux  de 
voz  destroitz  et  jurisdictions,  sauvement  et  paisiblement, 
sans  audit  suppliant  ne  a  ses  gens,  facteurs,  marronniers 
et  conducteurs  des  navires,  ou  les  dites  parties  seront 
chargées,  faire  ne  souffrir  estre  faict,  mis  ou  donne  aucun 
destourbier  ou  empeschement ,  au  contraire,  car  ainsi 
nous  plaist-il  donne....  »  L.  S. 


L'ÉPOQUE  DE  LA  NAISSANCE  DE  GRÉGOIRE  HOLONIUS. — 

M.  Devillers,  l'honorable  conservateur  des  archives  à 
Mons,  a  donné,  dans  le  volume  1877  du  Messager,  p.  455, 
un  supplément  à  ma  petite  notice  sur  les  Holouius  ou  de 
Hologue  ^ ,  qui  est  à  la  fois  intéressant  et  utile.  Tous  les 
amateurs  de  l'histoire  littéraire  doivent  lui  en  savoir  gré. 
Il  y  fait  connaître,  eutr'autres  particularités,  la  date 
précise  de  la  mort  de  Grégoire  Holonius ,  date  qu'aucun 
de  ses  biographes  n'avait  rapportée,  et  y  communique 
deux  iusciptions  funèbres  consacrées  à  la  mémoire  de  ce 
chanoine. 

«  Messager,  1877,  p.  201-210, 


—     120    - 

La  seconde  de  ces  inscriptions,  sur  une  pierre  tumu- 
laire  que  l'archevêque  Louis  de  Berlaimont  avait  élevée, 
par  reconnaissance,  à  la  mémoire  de  son  ancien  maître, 
n'existe  plus;  ce  qui  est  fort  regrettable.  En  effet,  cette 
inscription,  en  renseignant  l'âge  de  Holonius,  indiquait 
la  date  approximative  de  sa  naissance ,  que  ses  biographes 
ont  également  omis  de  mentionner. 

J'avais  placé  l'époque  de  cette  naissance,  par  conjec- 
ture, vers  l'année  1520.  D'après  l'inscription  précitée, 
j'aurais  été  bien  loin  de  compte.  On  y  aurait  lu  : 

OBIIT  ANNO  DOMINI   1594.   ^TATIS  63. 

Or,  si  Grégoire  de  Hologne  mourut  en  1594  à  l'âge  de 
63  ans,  il  serait  né  en  ou  vers  l'année  1531.  Cette  date, 
cependant,  ne  me  semble  pas  pouvoir  être  acceptée. 

On  peut  bien  admettre  que  Grégoire  Holonius  ait  été 
précoce  dans  ses  études,  son  savoir  et  ses  talents,  bien 
qu'aucun  de  ses  biographes,  assez  nombreux,  n'en  ait  dit 
le  moindre  mot.  Mais  ici  la  précocité  serait  tellement 
extraordinaire  qu'il  est  bien  difficile  d'y  ajouter  foi. 

En  effet,  si  Grégoire  Holonius,  décédé  en  1594,  n'était 
âgé  que  de  63  ans,  il  en  résulte  qu'à  l'âge  de  quinze  à 
seize  ans,  âge  où  d'ordinaire,  on  reçoit,  mais  où  l'on  ne 
donne  pas  des  leçons,  cet  adolescent  aurait  déjà  enseigné 
et  aurait  écrit  trois  tragédies  en  vers  latins,  très  remar- 
quables même  pour  un  homme  fait  *.  Il  en  résulterait  en 
outre  que  le  comte  de  Berlaimont,  cet  illustre  homme 
d'État,  l'aurait  choisi,  avant  qu'il  n'eût  atteint  l'âge  de 


*  Les  trois  tragédies  de  Holonius  ont  été  imprimées  en  1556.  — 
L'auteur  assure  qu'elles  ont  été  écrites  depuis  neuf  ans  (ainsi  en 
1547),  pour  servir  à  l'instruction  des  élèves  de  l'école  de  Saint-Bar- 
thélemi  à  Liège ,  école  oii  d'abord  il  avait  étudié ,  puis  oîi  il  avait 
enseigné  avant  d'être  appelé  à  diriger  l'éducation  des  jeunes  comtes 
de  Berlaimont. 


—    121    — 

vingt  ans,  pour  lui  confier  l'éducation  de  trois  de  ses  fils. 

Je  le  réitère,  il  est  difficile,  à  moins  de  preuves  ulté- 
rieures, d'admettre  des  faits  aussi  extraordinaires  et  je 
pense  qu'il  est  permis  de  supposer  qu'une  erreur  de 
chiffre  s'est  glissée  dans  la  transcription  de  l'épitaphe  en 
question. 

On  y  lisait  probablement  : 

^TATis  73  au  lieu  de  setatis  63. 

Grégoire  de  Hologne,  dans  ce  cas,  serait  né  en  ou  vers 
l'année  1521,  aurait  enseigné  et  écrit  ses  tragédies  vers 
l'âge  de  26  ans ,  et  serait  devenu ,  âgé  de  moins  de  trente 
ans,  le  précepteur  des  trois  jeunes  comtes  de  Berlaimont. 

Peut-être  existe-t-il  plus  d'une  copie  de  l'épitaphe  pré- 
mentionnée; on  pourrait  alors,  en  les  confrontant,  s'as- 
surer peut-être  si  ma  conjecture  est,  ou  n'est  point  fondée. 

H.  Helbig. 


—    122 


CHRONIQUE. 


Histoire  de  la  ville  d'Enghien  '.  —  L'ouvrage  dont  nous 
rendons  compte  a  obtenu  la  médaille  d'or  au  concours  de  la  société 
des  sciences ,  des  arts  et  des  lettres  du  Hainaut.  C'est  dire  qu'il  a 
déjà  passé  par  le  crible  de  la  critique  et  que  celle-ci  lui  a  reconnu 
de  la  valeur.  Cette  valeur  est  réelle  tant  au  point  de  vue  du  tra- 
vail qu'à  celui  du  sujet.  Enghien,  mi  wallon,  mi  flamand,  dont  les 
habitants  «  ne  sont  jamais  si  flamands  que  quand  ils  parlent  le 
français ,  et  si  français  que  quand  ils  parlent  flamand  »  ,  qui  a 
successivement  appartenu  a  plusieurs  illustres  familles,  ancienne 
pairie  du  Hainaut ,  emprunte  aux  événements  dont  il  a  été  le  théâ- 
tre,  une  assez  grande  importance  et  un  attrait  assez  considérable 
pour  avoir  sa  monographie. 

Cet  ouvrage  considérable  est  le  résultat  de  travaux  et  de  recher- 
ches sérieuses  tant  dans  les  archives  de  la  ville  et  de  diverses 
institutions  que  dans  les  dépôts  de  Mons ,  de  Bruxelles  et  de  Lille. 

Voici  comment  l'auteur  a  divisé  son  livre  :  Introduction  :  cette 
partie  comprend  des  données  générales ,  une  étude  sur  le  nom 
et  l'étymologie  d'Enghien,  la  situation  de  la  ville,  son  sol, 
son  hydrographie ,  ses  anciennes  fortifications  et  son  enceinte ,  sa 
topographie,  sa  population ,  etc.  —  Liv.  L  Histoire  et  généalogie. 
Dans  cette  partie,  composée  de  six  chapitres,  M.  Mathieu  traite  de 
l'origine  d'Enghien ,  de  l'histoire  de  ses  seigneurs,  tant  de  la  maison 
d'Enghien  que  de  celles  de  Luxembourg,  Bourbon  et  Aremberg, 

'  Histoire  de  la  ville  d'Enghien,  par  Ernest  Mathieu,  avocat, 
docteur  en  sciences  pol.  et  adm.  804  pp.  Mons  et  Engliien,  1877. 


—    123    — 

puis  du  château  et  du  parc ,  et  passe  en  revue  les  principaux  faits 
historiques.  —  Le  livre  II,  intitulé  :  Organisation  administrative  et 
judiciaire,  est  consacré  aux  anciennes  juridictions  ,  à  l'organisation 
communale,  à  l'organisation  militaire,  aux  gildes ,  compagnies 
bourgeoises  et  corps  de  métiers,  au  commerce  et  à  l'industrie. 
Enghien  posséda  pendant  un  certain  temps  une  manufacture  de 
tapisseries  fort  renommée.  — Dans  le  livre  III ,  Culte  et  bienfaisance, 
nous  trouvons  une  courte  monographie  des  églises,  chapelles  et 
communautés  religieuses,  ainsi  que  des  hôpitaux  et  hospices.  — 
liQ  \\\re  W ,  Institutions  scientifiques  et  littéraires,  fêtes,  biogra- 
phie .nous,  entretient  des  écoles ,  collège ,  écoles  de  dessin,  chambres 
de  rhétorique ,  sociétés  de  musique ,  du  théâtre  du  duc  d'Aremberg 
et  de  quelques  anciens  usages.  Un  certain  nombre  de  gravures 
ornent   le  volume. 

Il  nous  est  impossible  de  donner  ici  une  analyse  détaillée  de  cet 
ouvrage ,  notons  toutefois  que  nous  avons  lu  avec  beaucoup  d'intérêt 
les  deux  premiers  livres  surtout ,  dont  l'importance  est  plus  grande 

à  cause  du  sujet  qu'ils  traitent. 

Emile  V. 

L'Athen.ïium  belge.  —  Nous  remplissons  un  devoir  fort  agréable 
en  signalant  l'apparition  d'un  journal  bimensuel  imprimé  à  Bruxel- 
les, et  qui  s'occupe  spécialement  de  passer  en  revue  les  travaux 
littéraires,  scientifiques  et  artistiques.  U Athenœum  belge  en  est  à 
son  huitième  numéro,  dans  lequel  nous  trouvons  entre  autres  une 
fort  bonne  notice,  signée  T.,  sur  l'ouvrage  de  M.  Wauters  :  les  liber- 
tés comynunales.  Outre  ces  comptes-rendus,  VAthenœumj  sous  la 
rubrique  Notes  et  études,  publie  d'excellents  articles  de  revue  de 
salon,  souvenirs  de  voyages  et  autres  ;  et  sous  le  titre  Bibliogra- 
phie, il  groupe  les  sommaires  des  revues  scientifiques  et  artistiques^ 

et  les  titres  des  ou^Tages  nouvellement  parus. 

Emile  V.... 

DÉcouvEKTES  ARCHÉOLOGIQUES.  —  Quelques  journaux  allemands 
ont  reçu  de  Naples  une  note  que  nous  croyons  devoir  repro- 
duire : 

o  Dans  les  cercles  artistiques  de  cette  ville ,  une  découverte 
archéologique  fait  un  bruit  qui  se  comprend.  Il  s'agit  d'une  ville 


—     124    — 

souterraine ,  d'une  autre  Pompéï ,  qui  a  été  trouvée  tout-à-fait 
inopinément  non  loin  du  mont  Gargano  (dans  la  Fouille),  pendant 
qu'on  curait  un  puits. 

D'abord,  on  rencontra  une  temple  antique  de  Diane,  puis  un 
portique  magnifique,  long  d'environ  vingt  mètres,  avec  des  colonnes 
sans  chapiteaux ,  et  enfin  une  nécropole  souterraine  d'une  super- 
ficie d'environ  quinze  mille  mètres  carrés. 

Un  grand  nombre  d'inscriptions  importantes  ont  été  mises  au 
jour,  et  quelques  unes  sont  déjà  exposées  dans  le  Musée  national 
de  Naples. 

La  ville  découverte  est  l'antique  Sipontum  (près  d'Ai'pinum), 
dont  parlent  à  plusieurs  reprises  Strabon,  Polybe,  Tite-Live  ,  etc. 

Elle  n'a  pas  été  ensevelie  sous  la  cendre,  mais  elle  s'est  engloutie 
à  la  suite  d'un  grand  tremblement  de  terre.  Les  maisons  sont  à 
peu  près  à  vingt  pieds  au-dessous  du  sol  cultivé.  Le  gouvernement 
italien  a  déjà  fait  les  démarches  nécessaires  pour  entreprendre  les 
fouilles  sur  une  grande  échelle.  Il  est  secondé  par  le  gouverneur 
de  Manfredonia  et  par  l'archevêque  de  cette  ville,  laquelle  est 
bâtie  en  partie  au  dessus  de  l'antique  Sipontum. 

Chaque  jour  on  fait  de  nouvelles  découvertes  ;  c'est  ainsi  qu'on 
a  trouvé  un  monument  érigé  par  les  citoyens  de  Sipontum  en 
l'honneur  de  Pompée,  après  la  guerre  contre  les  pirates.  Des  mon- 
naies sipontiennes  ont  également  été  trouvées.  Mais  ce  qui  promet 
le  plus  de  découvertes ,  c'est  l'antique  nécropole  avec  son  immense 
quantité  de  tombeaux.  » 

—  On  a  découvert  aux  Hayettes ,  hameau  d'Etrœung ,  près 
"d'Avesnes,  des  squelettes  et  différents  objets  antiques  remontant 
selon  toute  vraisemblance  à  l'époque  de  la  conquête  de  la  Gaule 
Belgique  par  les  Francs.  Yoici  dans  quelles  circonstances  : 

En  faisant  exécuter  des  travaux  de  nivellement  dans  une  pro- 
priété en  face  des  ruines  du  château  des  Baffes ,  situé  entre  la  route 
d'Etrœung  à  Féron  et  l'Helpe  Mineure  (rive  droite) ,  on  trouva, 
à  une  profondeur  de  70  à  80  centimètres  : 

1»  Seize  squelettes,  dont  les  gros  os ,  crânes ,  fémurs ,  sont  par- 
faitement conservés.  Les  dents  surtout,  qui  paraissent  être  celles 
d'hommes  de  20  à  30  ans,  sont  d'une  force  et  d'une  beauté  remar- 
quables ,  la  plupart  ont  encore  leur  émail  ; 


—    125    — 

2»  Deux  fers  de  lance,  mesurant  en  longueur  11  centimètres  et 
de  2  à  3  centimètres  dans  leur  ijIus  grande  largeur  ; 

3''  Un  scramasax,  dont  la  lame  a  plus  de  35  centimètres  en  lon- 
gueur et  près  de  5  à  sa  base.  Ces  diverses  armes  sont  recouvertes 
d'une  couche  de  rouille  si  épaisse  que  le  fer  disparaît  presque 
entièrement. 

4"  Un  collier  en  terre  émaillée  dont  trois  grains  sont  couleurs 
jaune  paille,  les  autres  rouges  bruns  ;  ces  derniers  sont  ornés  de 
larges  lignes  jaunes  formant  des  dessins   réguliers  ; 

5"  Des  fi'agments  de  vases  en  terre  couleur  gris  cendré.  Peut-être 
pourra-t-onrej)roduire  la  forme  en  réunissant  les  plus  gros  morceaux. 

6»  Plusieurs  fibules  en  bronze  et  une  pièce  de  monnaie  romaine 
du  même  métal ,  trop  fruste  pour  qu'il  soit  possible  d'en  préciser 
sûrement  l'époque. 

Tout  nous  annonce,  à  n'en  pas  douter,  une  sépulture  mérovin- 
gienne. La  pièce  romaine  ne  saurait  à  elle  seule  exclure  cette  con- 
clusion ,  attendu  qu'il  est  avéré  que  les  premiers  Francs ,  conqué- 
rants des  Gaules,  ne  dédaignaient  nullement  ces  monnaies  romaines. 

Chablemagne  a  Gébone.  —  La  Acade^nia,  qui  continue  active- 
ment la  publication  de  ses  belles  livraisons,  donne  dans  un  de  ses 
derniers  numéros,  un  curieux  article  intitulé  :  Charlemagne  à  Gérone. 
D'après  une  vieille  tradition,  le  grand  empereur  aurait  chassé  les 
Mores  de  cette  ville,  et  en  aurait  reconstruit  la  cathédrale.  Cette 
tradition  eut  beau  être  contestée  par  la  science,  Charlemagne  resta 
populaire  à  Gérone,  et,  comme  saint,  y  fut  l'objet  d'honneurs  par- 
ticuliers. La  canonisation  de  Charles  émanait  toutefois  de  l'antipape 
PaulIII;  comme  telle,  elle  resta  sans  valeur  réelle,  mais  pourtant 
admise  en  Allemagne,  et  en  Finance  par  Louis  XL  A  Gérone,  le  culte 
de  Charlemagne  dura  jusqu'en  1484,  époque  oii  le  pape  Sixte  Vf  le 
défendit.  On  voit  encore  dans  cette  ville,  et  la  Academia  nous  en 
donne  la  gravure,  une  statue  de  Charlemagne  que  l'on  exposait  dans 
la  cathédrale  le  jour  de  sa  fête.  Au  coromencement  de  ce  siècle,  le 
second  dimanche  de  carême,  on  prononçait  encore  à  Gérone  le 
panégjTique  de  l'illustre  empereur. 

[Polybiblion). 


—    126    — 

Vente  de  ctjeieux  autogeaphes.  —  On  vient  de  faire  à  Paris 
une  vente  de  curieux  autographes,  au  nombre  de  199,  qui  avaient 
été  collectionnés,  par  un  ancien  auteiir  dramatique.  Cette  collection 
contenait,  entre  autres,  une  lettre  de  M.  Tliiers,  adressée  à  un 
diplomate  russe  et  qui  prophétisait ,  pour  ainsi  dire ,  les  malheurs 
qui  ont  assailli  la  France,  la  guerre  et  ses  suites.  Cette  lettre  a 
été  vendue  190  francs. 

Une  très  curieuse  lettre  de  François  I*"'  à  Charles  Quint  a  été 
adjugée  200  francs.  Dans  cette  pièce  historique,  le  roi  de  France 
demande  la  délivrance  de  ses  enfants  que  Charles  Quint  retient  en 
otages.  Il  l'engage  à  considérer  combien  la  paix  universelle  est 
utile  à  la  chrétienté,  si  affligée  par  les  guerres  et  les  divisions 
«  quyl  nest  possible  de  plus.  » 

Il  ajoute  :  «  Je  ne  fays  nulle  doubte  que  de  votre  bonté  comme 
prynce  dhonneur,  de  vertu  et  très  catholycque  que  je  vous  estyme 
et  repute,  que  vous  ne  acceptez  les  dytes  offres.  »  (Cette  lettre 
était  l'ultimatum  de  François  le"".  Le  22  janvier  1528,  il  déclarait 
la  guerre  à  l'empereur,  de  concert  avec  Henri  VIII.) 

Une  lettre  de  Guez  de  Balsac,  écrivain  du  dix  septième  siècle, 
si  oublié  de  nos  jours ,  a  été  vendue  280  fr.  C'est  une  apologie  du 
cardinal  de  Richelieu. 

Une  lettre  du  maréchal  de  Bassompierre  au  comte  de  Chavigny 
a  été  vendue  310  fr.  Cette  lettre  est  touchante  :  il  prie  son  ami  de 
s'employer  pour  faire  cesser  la  longue  détention  qu'il  subit  depuis 
douze  ans  à  la  Bastille;  Richelieu  qui  l'y  avait  fait  enfermer, 
venait  de  mourir. 

Ce  long  emprisonnement  nous  rappelle  une  anecdote,  qui  montre 
que  de  Bassompierre  était  aussi  bon  courtisan  que  vaillant  soldat. 

Quand  Louis  XIII  revit  le  maréchal  après  sa  mise  en  liberté ,  il 
lui  demanda  l'âge  qu'il  avait. 

«  —  Sire,  j'ai  cinquante  ans.  » 

Et  comme  le  roi ,  qui  savait  Bassompierre  bien  plus  âgé,  manifes- 
tait son  étonnement. 

«  —  Sire,  je  retranche  les  années  passées  à  la  Bastille,  parce 
que  je  n'ai  pu  les  employer  à  vous  servir.  » 

Vente  d'Hane-Steenhuyse  ,  A  Gand.  —  La  vente  de  la  biblio- 
thèque de  M.  le  comte  d'Hane-Steenhuyse ,  qui  a  eu  lieu  12-15 


—    127    — 

février  chez  le  libraire  Vyt  de  notre  ville ,  avait  attiré  plusieurs 
amateurs  étrangers  ;  les  beaux  livi-es  y  ont  été  vivement  disputés  ; 
nous  citerons  entre  autres ,  les  n«'  suivants  du  catalogue  :  n«  2 ,  la 
Bible  de  Marillier ,  avec  les  gravures  avant  la  lettre ,  adjugée  1725  fr .  ; 
n»  207 ,  V Herbier  général  de  Vamateur,  par  Mordant  de  Launay, 
230  fr.  ;  n»  219,  VHerbier  de  la  France,  par  BuUiard,  330  fr.; 
n»  255,  Jardins  anglais,  par  Lerouge,  290  fr.  ;  n«  299,  Planches 
coloriées  d'oiseaux,  par  Temminck,  480  fr.  ;  n»  383,  Galerie  du 
Palais  Royal,  par  Couché,  710  fr.  ;  n«  385,  Galerie  de  Florence, 
895  fr.  ;  n»  750,  Grand  Théâtre  sacré  et  profane  du  Brabant ,  par 
Le  Eoy,  230  fr.  ;  n«  763,  Flandria  illustrata,  par  Sanderus,  éd.  de 
Cologne,  240  fr.;  n°  851,  Tableaux  de  la  Révolution  Française, 
475  fr.  ;  n°  884,  Pertz ,  monumenta  Germaniae  historica,  1825  fr.  ; 
n°  916,  Histoire  généalog.  de  la  maison  royale  de  France,  par  le  P. 
Anselme,  522  fr.;  n»  931,  V Antiquité  expliquée,  par  Bern.  de 
Montfaucon ,  297  fr.  ;  n"  932 ,  Monuments  de  la  monarchie  Fran- 
çaise, par  le  même,  362  fr.;  n»  934,  Buck's  antiquities,  280  fr.  On 
voit  par  ces  chiffres  que  la  bibliophilie  compte  encore  de  fervents 
adeptes. 

Le  mobilier  et  les  objets  d'art  ont  été  vendus  le  4  avril;  voici  un 
aperçu  de  quelques  prix:  n^^  1,  2  vases  porphyre  et  bronze  doré, 
16,000  fr.,  M.  De  Buyser,  à  Gand;  no^  2 ,  3 ,  48  et  49  ,  4  candélabres 
et  trépieds,  12,900  fr.,  M.  Cools,  à  Bruxelles  ;  n°  4,  2  vases  forme 
Médicis,  1,225  fr. ,  M.  Van  Loo-Bracq  ,  à  Gand;  n°  7 ,  2  candélabres 
en  bronze,  3,100  fr. ,  M.  Josejîh,  à  Londres;  n°  15,  pendule  en 
marbre,  bronze  doré ,  2,000  fr.,  au  même  ;  n"  17,  pendule  marbre  et 
bronze  doré,  1,100  fr.,  M.  Motte,  à  Roubaix;  n»  24,  2  chenets 
bronze  doré,  310  fr.,  M.  De  Buyser,  à  Gand;no  26,  2  chenets 
bronze  doré,  1,100  fr.,  au  même;  n^  34,  pendule  (boule),  8,700  fr., 
M.  "Werner  Van  Pottelsberghe  de  la  Potterie  ,  à  Gand  ;  n"  36 ,  pen- 
dule en  vernis  de  Martin,  1,500  fr.,  M.  V^^^^  de  Clerque  Wissocq 
de  Sousberghe ,  à  Gand  ;  n"  37 ,  lustre  en  cristal ,  1,850  fr.,  M.  Van 
den  Hecke  de  Lembeke  ,  à  Gand  ;  n°  47 ,  2  tables  consoles ,  6,800  fr. , 
la  liste  civile  ;  n^^  54  et  66 ,  ameublement  en  damas  vert ,  4,900  fr., 
M.  le  baron  Van  der  Bruggen  ;  no^  55  et  67 ,  ameublement  en  damas 
bleu,  1,400  fr.,  la  liste  civile;  n°  58,  lit  à  Baldaquin,  1,400  fr., 
M.  de  Salverte,  à  Paris  ;  n^^  62  et  63 ,  six  panneaux  et  paravants  en 
tapisserie  ancienne,  8,600  fr.,  M.  De  Buyser,  à  Gand;  n^  65,  Ten- 


—    128    — 

ture  en  tapisserie,  1,300  fr.,  M.  Samson,à  Paris;  n°  91  et  92, 
2  bas  reliefs  en  argent  repoussé ,  1225  fr.,  M.  Honorez,  à  Lille  ;  n°  93, 
1  bas  relief  en  argent  repoussé,  925  fr.,  M.  Delaunay  à  Boulogne  sur 
mer;  n"  1,  tableau  de  Breughel  de  Velours,  5,200  fr.,  M.  Haritoff, 
à  Bruxelles;  n"  2,  tableau  de  Breughel,  3,100  fr.,  M.  Bedessem, 
à  Bruxelles. 

Tableaux.  —  A  la  vente  de  la  galerie  provenant  de  M.  Schuer- 
mans,  qui  a  eu  lieu  à  Anvers  au  mois  de  février,  sous  la  direction  de 
M.  Jean  Diricks,  on  a  vendu  : 

N»  16,  P.  Fourbus,  340  fr,  ;  n"  24,  Vanderweyden ,  535  fr.  ; 
n»  39,  J.  Patenier,  400  fr.  ;  n»  41,  J.  Gossaert,  1600  fr.;  n°  43, 
J.  De  Gand,  520  fr.  ;  n°  64,  A.  Brauwer,  1050  fr.  ;  n»  85,  Droog- 
sloot,  520  fr.  ;  n»  96,  F.  Franck,  2100  fr.;  n»  103 ,  Huysmans  de 
Malines,  3600  fr.  ;  n"  136,  Roetaert,  1500  fr.;  n»  137,  id.,  1500  fr.; 
n»  138,  id.,  1000  fr.;no  139,  id.,  1000  fr.;  n»  157,  A.  Van  Ostade, 
550  fr.;  n»  158,  id.,  400  fr.;  n"  166,  S"  Vranck,  500  fr.  ;  n»  175, 
Van  Beerstraeten,  2000  fr.  ;  n»  176,  id. ,  2000  fr.  ;  n"  183, 
"Weinincx,  440  fr. 


PL.Yn. 


J.Jo.Xavaut  dd!' 


'P/llaert  ^adj)^ 


129 


QUELQUES  SCEAUX 

DU    DIOCÈSE  DE    GAND '. 


Abbaye  de  Satnte-Marie  a  Teokchiennes  .  — 
Fondée  vers  630  par  saint  Amand  avec  le  concours 
du  pieux  Basin,  la  communauté  religieuse  de 
Tronchiennes  forma  d'abord  un  collège  de  cha- 
noines ou  clercs  réguliers,  dispersé  par  les  Nor- 
mands en  851,  mais  rétabli  en  884  par  Baudouin 
le  Chauve.  A  cette  époque  le  supérieur  de  l'éta- 
blissement s'appelait  prévôt.  Le  6  mai  1138,  le 
dernier  titulaire  se  démit  de  ses  fonctions  et  la 
maison  fut  soumise  à  la  réforme  de  Prémontré 
commencée  en  1120  iiar  saint  Norbert,  d'après  la 
règle  de  saint  Augustin.  Dès  lors  le  chef  de  la 
communauté  prit  le  titre  d'abbé. 

Le  sceau  conventuel,  d'une  exécution  vio-ou- 
reuse,  nous  semble  dater  du  commencement  du 
XIIP  siècle.  Le  champ  est  occupé  par  deux  niches 
trilobées  et  superposées.  Celle  du  bas  est  flanquée 
de  deux  contreforts  percés  de  baies  et  surmontés 
de  clochetons.  La  niche  supérieure,  à  double  bor- 

(')  Suite.  —  Voir  année  1877,  p.  257etsuiv. 


—    130    — 

dure  coupée  à  la  naissance  des  lobes  par  un  tailloir, 
est  couronnée  par  un  dais  fleuronné  s'appuyant 
sur  deux  clochetons  ajourés.  Cette  niche  abrite  la 
Vierge-Mère  couronnée,  assise  sur  un  faldesteuil 
sans  draperies,  à  bras  fleuronnés.  Marie  tient  de 
la  main  droite  un  lis,  symbole  de  la  virginité,  et 
de  la  gauche  le  divin  enfant  au  nimbe  crucifère, 
bénissant  de  la  main  droite  et  portant  dans  la 
gauche  le  globe,  insigne  de  sa  toutepuissance.  Au 
pied  du  faldesteuil,  vers  la  gauche,  se  déroule  un 
feuillage. 

Dans  la  niche  inférieure,  un  vieillard,  un  homme 
fait  et  un  enfant  portant  le  costume  rehgieux,  à 
genoux,  les  mains  jointes  et  la  tête  fortement  re- 
levée, invoquent  la  protectrice  de  l'abbaye.  La 
légende  porte  en  caractères  majuscules  :  sigill' 
CONVEN...  TEVNGHiNiENSis.  Le modulc  du  sceau  est 
de  0"\058  sur  0'",038. 

L'empreinte  que  nous  reproduisons  (PI.  VII, 
fig.  1),  est  appendue  à  deux  chartes  datant  l'une  du 
mercredi  de  Pâques  1359  (v.  s.),  l'autre  du  14  août 
1493.  Dans  le  premier  acte,  l'abbé  Siger  de  Hamme 
et  toute  la  communauté ,  après  une  délibération 
mûre  et  diligente,  échangent  avec  les  Chartreux 
du  Val-Royal  lez-Gand,  une  prairie  d'une  conte- 
nance de  1056  verges,  sise  à  Tronchiennes  le  long 
de  l'ancienne  Lys  ou  Auden  voerd,  au  sud  de  la 
Chartreuse,  pour  une  prairie  de  918  verges,  située 
dans  la  même  paroisse  à  l'endroit  dit  in  de  bile 
hute7i  winkele  '. 

'    Archives  de  lu  cuthédrule,  [oiids  des  (.'harircux ,  earl.  2,  u"  78. 


—    131    — 

Le  second  document  est  un  instrument  notarial 
dressé  par  le  tabellion  Léon  de  Paeu  ou  Pavonis 
et  légalisé  après  sa  mort  par  les  notaires  Corneille 
Voet,  doyen  de  Sainte-Pharaïlde,  et  Hubert  de 
Crytsclie,  prêtre  du  diocèse  de  Tournai.  Cette 
pièce  contient  en  tête  la  délibération  par  laquelle 
du  consentement  de  Martin,  abbé  de  Laon  et  supé- 
rieur général  des  Prémontrés,  l'abbé  de  Tron- 
chiennes,  Guillaume,  le  prieur  Jean  de  Gavere,  le 
sous-prieur  Pioland  Sanders,  frère  Florent  vander 
Gracht,  maître  N. . . .  van  Hulsterloe  et  frère  Hector 
Tacquon,  curé  de  Hincxdyck,  tous  prêtres  con- 
ventuels profès,  acceptent  des  Chartreux  la  ré- 
demption de  deux  rentes  de  seigle,  grevant  deux 
biens  du  Yal-Royal,  situés  l'un  dans  VOest garer, 
l'autre  hors  de  la  Waelpoerte  by  der  sieckelieden . 
Cette  aliénation  a  pour  causes,  les  frais  imprévus 
causés  par  la  promotion  de  divers  prélats  de 
l'ordre,  les  longues  et  diverses  guerres  de  la 
Flandre,  les  pertes  et  les  dégâts  occasionnés  par 
les  inondations  et  la  restauration  des  digues  et 
des  écluses  ^ , 

Le  scel  abbatial  diffère  essentiellement  de  tons 
les  sceaux  d'abbés  que  nous  avons  décrits  jus- 
qu'ici. D'abord  il  n'a  pas  le  caractère  personnel 
qui  distingue  généralement  les  instruments  sigil- 
laires  employés  par  les  dignitaires  tant  civils 
qu'ecclésiastiques.  Le  nom  du  titulaire  n'est  pas 
exprhné  et  le  sceau  put  rester  le  même  pour 
différentes  personnes.  C'est  ainsi  que  nous  trou- 

'  Archives  de  la  catliédrtde,  fonds  des  Chartreucc,  cart.  14,  n"244. 


—    132    ~ 

vons  la  même  matrice  employée  de  1359  à  1493. 
Elle  nous  apparaît  la  première  fois  à  Tacte  de 
Tabbé  Siger  cité  plus  haut.  Une  empreinte  sem- 
blable munit  une  charte  par  laquelle,  le  12  dé- 
cembre 1455,  l'abbé  Jean  vidime  l'accord  que  du 
consentement  de  Jean  de  Bourgogne,  évêque  de 
Cambrai,  les  Chartreux  du  Val-Roval  conclurent 
avec  Pierre  de  Monte,  curé  de  Meire,  au  sujet  des 
dîmes  de  sa  paroisse  k  Enfin,  à  l'instrument  nota- 
rial de  Léon  de  Paeu,  le  même  scel  abbatial  repa- 
rait, mais  chargé  au  revers  du  contre-sceau  de 
l'abbé  Guillaume,  portant  dans  un  champ  ovale 
bordé  d'un  grénetis ,  la  crosse  abatiale  en  pal 
derrière  un  écu  à  trois  annelets  posés  2  et  1 .  Ces 
armoiries  seraient-elles  l'expression  parlante  du 
nom  patronymique  Rings,  que  jusqu'ici  on  a  con- 
fondu avec  Hiiys  ou  Hungs? 

Un  second  détail  à  signaler  est  l'emploi  du 
terme  Ecclesia  pour  désigner  la  communauté. 
Rappelons  à  ce  sujet  ce  que  nous  avons  observé 
au  commencement  de  notre  travail.  Le  mot  Con- 
ventus,  si  fréquemment  employé  dans  la  souscrip- 
tion des  chartes  dressées  au  nom  des  abbayes  et 
dans  la  légende  des  sceaux,  signifie  assemblée, 
réunion,  et  non  couvent  ou  monastèy^e.  Toutefois,  le 
terme  propre  Ecclesia ,  dans  ce  dernier  sens ,  ap- 
paraît bien  rarement  dans  les  légendes  sigillaires 
de  notre  diocèse. 

L'exécution  du  sceau  qui  nous  occupe  accuse 
le  commencement  du  XI V"  siècle.  Sous  un  dais 

'  Mètite  fonds ^  carton  9,  ii"  IKJ. 


—    133    — 

trilobé,  flanqué  de  contreforts  à  baies  géminées, 
est  représenté  Tabbé,  la  tête  nue,  en  habits  ponti- 
ficaux, tenant  un  livre  fermé  dans  la  main  gauche 
et  de  la  droite  la  crosse  à  volute  tournée  à  l'exté- 
rieur. La  console  à  trois  bandes  porte  dans  la 
partie  supérieure  une  rangée  d'étoiles.  La  légende, 
en  caractères  majuscules,  contient  entre  deux 
filets  les  mots  :  s.  abbatis  ecglesi  (beat)b  makie 
TEONCHiNiEN.  Le  uiodule  est  de  0'",058  sur  0'",038  ; 
mais  le  contre-scel  ne  mesure  que  0'",016  sur 
0'",014  (Figg.  2  et  3). 

(A  continuer). 

L'abbé  J.-B.  La  vaut. 


—     134    — 


LUMMENŒUS    A    MARCA 


Mais  ni  ces  prières ,  ni  rintervention  des  amis 
de  Lummenœus  ne  parvenaient  à  toucher  Tabbé  ; 
peu  après  le  malheureux  moine  tenta  encore  un 
effort;  le  13  novembre  il  écrivit  une  nouvelle 
lettre,  dont  malheureusement  il  ne  nous  reste 
que  des  fragments;  il  dit  que  le  viatique  envoyé 
pour  son  voyage,  a  été  immédiatement  saisi  par 
son  hôte  et  créancier,  qui  était  Jean  de  Rogiers, 
ainsi  que  nous  l'avons  vu  plus  haut,  et  n'a  pu 
payer  ce  qu'avait  coûté  sa  maladie.  11  parle  plus 
loin  d'un  prince,  un  cardinal  sans  doute,  qui 
l'avait  consolé  dans  ses  douleurs ,  et  termine  en 
implorant  de  nouveau  la  commisération  de  son 
inflexible  supérieur. 

«  Reverencl»"^  Domine.  Quod  tara  factidiose  me  abjicis, 
atque  adeo  ad  voliitabrum  et  siliqnas  me  compellis  qui 
nihil  decoxisse  vel  dilapidasse  memini,  pra?ier  meritum 
meum ,  et  clementiam  benigni  Patris  familias  fieri  existimo, 
et  mecum  opinantur  omnes,  qui  me  norunt,  et  candorem 
meum   perspectum  habeut.  Misisti  iiuper  viaticum  (quod 

'  Suite.  —  Voir  p.  7. 


—     135    — 

hospes  et  creditor  meus  statim  involavit),  at  uon  expensas 
sumptuuni,  <iuos  in  morl)o,  in  vestimentis  et  victii  coti- 
fliano  cuni  onere  famuli  (quo  ex  conscientia  qiioque  am- 
plit.  T.  carere  niuKpiani  potui)  hic  juste  contraxi,  ut  me 
omnibus  impedimentis  extricarera.  Quin  immo  sic  me  R"  T. 
apud  hospitem  meum  alienis  plane  coloribus  depinxit,  ut 
me  sub  illo  penicillo  non  agnoscam  et  hospes  item  meus, 
nihil  mihi  porro  credere  velit ,  atque  adeo  publicum  ergas- 

tulum  cotidic  mihi  commin 

amplit.  V.  (liceat  hoc  mih 

semuhiri  mi  hi  visa  est 

Evangelio  qui  ulceroso 

et  misereri  non  vellet • 

Et....  tandem  me 

qui....  mi  hi  suave 

vascuhim,  radendo  ni 

directe  contra  regulœ 

objicis  mutationem  hos (ut  scribis)   prœ- 

sumpserim.  ...  et  justam  ratiouem  facti  .... 
habes.  Ctinam  niterim  me  .  ,  .  .  .  circumventum , 
accisa  omni  re  .  .  .  .  une  oculo  me  erigit,  qui  nuper 
admodum  commoda  et  honores,  etiam  mihi  addixit,  ubi 
]n-ima  opportunitas  erit.  Amavit  me  semper  bonus  ille 
princeps,  et  fortasse  brevi  mihi  benefacere  volet,  et  serum- 
nas  meas  consolari.  In  intérim  vive  et  vale  mi  Révérend'"*' 
Pater,  et  si  aliquid  porro  sentis,  quod  in  Christo  Jesu  et 
Divinse  misericordiœ  visceribus  abundat,  me  alumnum  et 
tilium  tuum,  ut  volueris  etiam  prodigum  et  discolum 
(quanquam  illa  conscientia  me  non  remordet)  in  morbo, 
in  sere  alieno,  in  summis  angustiis  destitutum,  si  omnino 
dignaris,  proxime  consolare.  Ex  urbe.  l'^  Id.  Decemb.  1623. 
Amplit.  V.  Révérend™'^'  lilius  et  cliens.  (Signé)  :  Jacobus 
CoEN.  LuMMEN^us  A  Maeca.  Relig.  sacerd.  Benedict.  » 


—    136    — 

Le  23  décembre ,  Tabbé  Schayck  répond  à  la 
lettre  de  Jean  de  Rogiers,  et  indique  clairement 
son  intention  de  ne  plus  s'occuper  de  Lummenœus. 

«  Monsieur, 

»  Je  suis  bien  ayse  d'entendre  de  la  votre  que  ma  der- 
nière du  mois  de  7'''''  passe  vous  a  si  bien  expliqué  mes 
intentions  au  regard  du  faict  de  notre  religieux  à  j\farca, 
auquel  me  mandez  avoir  tesmoigné  tant  de  courtoisies 
soubs  la  couleur  de  ces  lettres  dimissoriales ,  qui  estoient 
sans  aucune  restriction  d'estendue  de  lieu,  aussy  pour 
pitié  qu'aviez  de  voir  un  homme  de  sa  sorte  ainsy  errer 
vagabond,  pensent  par  ce  moyen  me  faire  service.  Je  vous 
ay  en  mes  dernières  amplement  discouru  sur  le  premier 
point,  assavoir  que  ses  lettres  d'obédience  avoient  leur 
limites  à  Milan  au  logis  de  Mons''  le  cardinal  Boromée,  et 
ne  s'estendoient  point  outre;  que  s'il  vous  eût  à  monstre 
(Vautres  sans  aucunes  bornes ,  ie  vous  declaire  qu'elles  sont 
supposées  et  adultérines  :  davantage  si  vous  l'avez  logé 
par  compassion  de  voir  tel  personnage  sans  retraitte ,  cela 
n'a  peu  estre  pour  me  faire  service ,  puis  qu'un  tel  bien 
faict  se  termine  en  la  personne  de  celuy  qui  le  reçoit.  Au 
reste  que  vous  dites  que  scaviez  qu'il  tiroit  provision  de 
moy  pour  vivre,  cest  un  abus ,  car  je  n'ay  jamais  eu  chose 
plus  à  contre  cœur  que  ceste  desbordée  liberté  de  rouler 
ainsy  de  ville  à  ville ,  et  pour  l'en  retirer  ie  luy  ay  envoyé  à 
l'instance  de  Monseigi"  l'Illustrissime  Cardinal  Ludovisio,  et 
de  Monseig^'  rill'"«  Nonce  les  derniers  trois  cents  florins ,  à 
quoy  ie  n'estois  aucunement  tenu  par  ma  bonne  volonté, 
m'ayant  à  vive  force  arraché  la  licence  de  se  retirer  à  Milan 
sous  promesse  qu'il  m'avait  faicte  de  n'estre  oncques  plus 
importun  a  nostre  maison  de  manière  quelconque ,  disant 
que  sa  doctrine  et  poésie  luy  fourniroient  des  moyens  bastans 


-     137    — 

pour  reutrctenir,ce  qu'il  m'avoit  auss}'  sainctemeiit  promis, 
luy  ayant  accordé  la  licence  de  se  retirer  à  jNIilan  sous 
condition  de  n'estre  oncques  plus  importun  à  nostre  maison 
en  manière  quelconque.  Que  s'il  a  maintenant  resoulu  de 
faire  plus  long  séjour  à  Rome,  qu'il  songe  en  temps  pour  son 
entretien,  ou  d'estre  colloque  par  la  faveur  de  N.  S.  P.  en 
quelque  bon  monastère,  car  je  ne  trouve  point  nouveau 
que  l'abbé  de  S.  Paul  l'ayt  refusé ,  puisque  vous  mêmes  m'en 
rendez  la  raison ,  scavoir  qu'il  n'est  de  leur  congrégation , 
car  eux  sont  reformez ,  et  luy  libertin ,  il  faut  premièrement 
qu'il  retranche  son  humeur  et  après  on  ne  fera  point  de 
ditficulté  de  l'admettre,  aussy  bien  que  plusieurs  autres 
flammans  y  ont  esté  receus,  mesme  faits  Abbez,  entre  autres 
un  nommé  Floribertus  Stalins ,  profes  de  notre  maison  de 
S.  Pierre.  Finalement  à  ce  qu'escrivez  de  m'avoir  plusieurs 
mois  auparavant  adverty  de  l'assistence  faicte  à  l'endroit  de 
nostre  religieux,  et  que  je  ne  vous  ay  respondu,  j'avois 
donné  charge  à  Mons""  Delà  Ptivière  vous  rescrire  ladessus  et 
declairer  mes  volontez ,  ce  qu'il  m'a  dit  avoir  ûiict.  Atant 
ceste  servant  pour  confirmation  de  mes  resolutions  prinses 
en  ma  précédente,  je  me  diray  à  Rome  le  23  décem- 
bre 1623.^  » 

De  grands  personnages  continuèrent ,  mais  en 
vain ,  à  implorer  en  faveur  de  notre  écrivain  la 
grâce  de  l'irascible  abbé;  le  cardinal  Barberini 
chargea  le  nonce  apostolique  à  Bruxelles ,  arche- 
vêque de  Saint -Pierre,  d'écrire  à  ce  sujet.  Celui-ci 
adressa  une  lettre  à  l'abbé  le  6  septembre  1624; 
Scliayck  répondit  qu'il  aiderait  Lummenœus ,  et 
le  30  septembre  le  nonce  lui  écrivit  pour  le  remer- 
cier.Voici  ces  deux  lettres  du  nonce  : 

«  Admodum  rev.  Pater  et  Domine.  Cum  D.  Cornélius 


—     138    — 

Liimmena?iis  à  ]\Iarca  istius  vostri  monasterii  religiosiis 
professus,  modo  Romse  existons,  ob  infirmitatem  aliasque 
miserias,  cli versa  débita  contraxerit,  ita  ut  extrema  rerum 
necessariarum  penuria  prematiir.  Ill'""^  caixP'^  Barberinus 
suis  litteris  3  aug*  datis.  Eumdem  D.  Jacobum  pietati  et 
beniguitati  R''"-  P.  Vestrœ,  per  me,  quod  facio,  commen- 
dari  voluit  :  Ut  tam  in  exstinctione  debitorum  quam  in 
prsesentibus  angustiis,  R'^»  P.  Vestra  ei  succurrere  digne- 
tur.  Ad  quem  fugiat,  nisi  ad  Patrem  filius?  Accipiatergo 
j^da  p^  Vestra  preces  filii  sui  cum  serumnis  conflictantis ,  et 
benignam  Dianum  ei  porrigat.  Deus  0.  M.  servet  R''-""  P. 
Vestram  in  multos  anuos  incolumem.  Bruxellse  8  id.  sept, 
M.  DC.  XXIV.  Admodum  R''*  P.  et  D.  Vestra3. 

))  Stud"»'% 
»  (Signé)  :  AKCHiEr.PETRACENS.  » 

«  Admodura  R^^^  Pater  et  Domine.  Accepi  litteras  R'^«- 
P.  Vestrse  28  sept,  ad  me  datas,  (]uibus  rationes  quasdam 
deducjt  in  negocio  P.  Corn.  Lumminœi  quas  omnino  im- 
probare  non  babeo,  quocirca  111""^  cardinali  Barberino 
eusdem  referam.  Cseterum,  ago  grates  quod  succurrere 
niliilominus  prsedicto  P.  Cornelio  \oluerit,  nomine  quidem 
ipsius  D.Cornelii,  sed  vel  maxime,  intuitu  litterarum  quas 
Ill'""«  card.  Barberinus  ad  me  conscripserat.  Vincor  iterum 
novo  beneficio  à  R*  P.  Vestra,  cuius  mihi  animus  perspectus 
probatusque  est  in  hoc  nove  miinusculo,  quod  mihi  non 
potuit  non  esse  gratissimum.  Deus.  0.  M.  servet  R.  P.  V. 
in  multos  annos.  Bruxcllœ,  Prid.  kal.  octobris  MDCXXIV. 
Admodum  R.  P.  et  Domine  Vestrœ. 

»  Studiosissimus, 
»  AiicHiEPisc.  Petracens.  » 

Il   faut  croire   que  le  secours  promis  n'arriva 
pas,  ou  bien  qu'il  fut  d'une  importance  tellement 


—    139    — 

minime  qu'il  servit  à  x^eii  de  chose.  Le  cardinal 
Barberini,  voyant  sans  doute  le  peu  de  résultat 
de  son  intervention  personnelle  et  de  celle  des  per- 
sonnes qu'il  avait  chargées  de  s'adresser  à  l'abbé, 
écrivit  lui-même  le  22  janvier  1625.  Il  s'étonne 
que ,  dans  la  triste  position  où  se  trouve  Lumme- 
nœus,  il  soit  obligé  d'écrire  si  souvent;  il  disculpe 
le  religieux  des  reproches  que  l'abbé  lui  a  adres- 
sés ;  il  dit  que  c'est  un  homme  qu'il  aime  à  cause 
de  ses  vertus  et  de  ses  mérites ,  que  les  dépenses 
qu'il  a  faites  étaient  indispensables ,  et  que  son 
supérieur  l'abandonne  au  moment  où  il  a  le  plus 
besoin  de  secours ,  le  cardinal  termine  en  deman- 
dant à  l'abbé  de  fournir  à  Lummeuœus  le  moyen 
de  retourner  à  l'abbaye. 

«  Aclmodum  Rev.  Pr.  Niinquam  equidem  fore  putabam, 
iiti  de  an;2fustiis ,  quibus  Pater  Jac.  Cornélius  Lummeuœus 
premitur,  toties  ad  P.  V*^"  dandsc  milii  esseut  litterœ.  Sed 
quia  nec  dum  lenito  ipsam  animo  video ,  nec  viro  déesse 
possum  optime  de  ordine  vestro ,  deque  re  litteraria  me- 
rito ,  prsetermittere  id  otïicii  nequa(piam  debui.  Haud  ecjui- 
dem  negaverim ,  patrem  liunc  a  me  non  mediocriter  amari , 
quse  virtutum  ejus  acmeritorum  vis  est,  quas tamen  partes 
nunc  suscepi ,  nolim  P.  Y"  existimet ,  gratise  me  liominis 
dare ,  ac  benevolentise  ullius  ne  precibus  fuisse  compulsum. 
Ultro  provinciam  hanc  milii  sumpsi ,  P.  V*^  signiticandi , 
segre  mihi  esse  bonisque  omnibus  quod  inclementer  adeo 
cum  Pâtre  isto  agatur,  ut  derelictus  eo  tempore  videri 
possit  quo  tempore  ope  vestra  magis  indiget,  iisque  com- 
modis  quibus  vestrum  istud  monasterium  large  atHuit.  In 
diuturno,  atque  adeo  pcrtinaci,  quo  is  vexatur,  morbo 
oblectabat  se  olim  (quoad  poterat)  bonarum  studiis  littera- 


—    140    — 

rum,  nunc  vero  hoc  quoqiie  solatio  destitutiis  est,  qiiis  enini 
operam  dare  litteris  qiieat  bine  adversa,  valetudine  afflic- 
tatus,  illinc  mserore  confectus,  quod  se  sere  oppressiim 
alieno,  iisque  prsesidiis  carere  videat,  quibus  reverti  istuc 
possit?  Quœ  ille  itinera  in  varia  ItaHse  loca  suscepit  non 
aliud  certe  spectarunt,  quam  sauitatis  adeptionem,  qui 
secus  existimat ,  errât  prociil  dubio ,  quos  vero  fecit  sump- 
tus,  necessary  omnio  fuerunt,  eorumque  nobis  constat  ratio. 
P''  etiam  V.  siquando  libuerit ,  constitura.  Hsec  cum  vera 
sint  (ut  sunt  profecto)  quamvis  satis  esse  crediderim ,  illa 
a  me  indicari,  ut  P.  V^  sinum  quodammodo  pietatis  in 
nionacbum  suum  laxet,  qui  quidem  et  benevolentia,  et  pa- 
triocinio  suo  dignus  apprime  censetur,  aperienda  tamen 
mihi  est  S"^  D.  N.  ea  in  re  voluntas  ut  alacriorem  P,  V^ 
in  illa  exequenda  sse  prœbeat.  Itaque  S''^  S.  oui  penitus 
Imjusce  causse  patet  œquitas,  ea  mens  est,  uti  P.  V^'nulla 
interposita  mora  pecunias  curet,  quibus  Pr.  Jacobus  et 
nomina,  quse  contraxit,  omnia  expungat,  et  viatico  uti 
commodo  possit ,  quo  ad  suum  istud  monasterium  se  reci- 
piat.  Si  pontificiœ  voluntati  (ut  par  est)  primo  quoque  tem- 
pore  P.  V'^  morem  gessevit,  nec  locus  erit  asperiora  perqui- 
rendi  remédia,  et  mihi  in  primis  rem  gratissimam  faciet,  ut 
pote  qui  cohortationis  hujusce  meae  rationem  a  se  habitam 
cognovero.  Valeat  P.  V''  cui  bona  omnia  a  Deo  precor. 
Romœ,  die  xxn  january  M.  D.  CXXV. 
»  P.  V* .  »  Studiosus 

»  Gard,  Baebeiiinus.  » 

L'abbé  de  Saint-Paul  hors  des  murs  écrivit  le 
23  janvier  1625  à  l'évoque  de  Gand,  pour  le  prier 
de  venir  en  aide  à  Lummenœus  ;  il  lui  mande  que 
le  religieux  est  un  homme  d'une  conduite  exem- 
plaire ,  que  sa  moralité  et  ses  vertus  lui  ont  con- 


—     141     — 

cilié  ramitio  de  tous  ses  moines ,  que  jamais  il  n'a 
médit  du  prélat  de  Saint-Pierre,  que  même  au  mi- 
lieu de  ses  peines  il  n'a  cessé  de  parler  de  lui  d'une 
manière  tout-à-fait  élogieuse.  L'abbé  de  Saint -Paul 
l'aurait  gardé  plus  longtemps  dans  son  couvent, 
dit-il,  si  la  règle  du  mont  Cassin  ne  fût  opposée  à 
ce  qu'un  religieux  d'une  autre  congrégation  séjour- 
nât dans  sa  maison,  n'importe  pour  quelle  raison. 

Copia  literarum  quas  A  hbas  Sancti  Pauli  prope  et  extra 
mœnia  iirbis  dédit  ad  R"'"  D.  episcopum  Gandavensem 
23jan.  1625. 

«  Ptever'"e  et  perillustris  Domine. 

»  Christiana  et  religiosa  pietas,  quara  nobis  benigiius 
Deus  passim  commendat  calcar  mihi  addiJit,  ut  hfec  scribe- 
rem.  Movit  milii  niiper  animum  R''"'^  Pater  Jacobus  Corn. 
Lummenœus  a  Marca  :  Rêver'»*  D.  T.  [ut  intelligo],  notus 
et  cliarus,  dum  nuper  apud  me  calamitatem  suam  deplora- 
ret;  quem  ego  virum  ut  plurimi  semper  feci,  ita  meliore  for- 
tuna  dignissimum  semper  esse  judicavi  :  nam  ut  omittam 
varias  ejus  lucubrationes ,  quibus  universum  ordinem  nos- 
trum  non  parum  illustravit,  non  potui  satis  unquam  mirari 
talem  animi  requitatem  in  tantis  angustjis,  qualem  in  illo 
semper  notavi,ut  qui  tôt  molestijs  lacessitus,  nunquam  nisi 
bene  senserit  et  locutus  fuerit  de  prœlato  suo ,  et  voluerit 
semper  injuriam  sibi  hactenus  abillo  factam  mitius  inter- 
pretari.  Quid  autem  faciunt  monasteriorum  Patres  cum  talia 
ingénia  sic  irritant  et  ludificant?  quœ  utique  tanto  magis 
injuriam  sentiunt,  quanto  perspicacius  viam  vident,  et  sub- 
tilius  viam  apprahendunt.  Ego  sane  taies  viros  melius  liaberi 
velim,  et  non  possum  excusare  religiosorum  prassides,  qui 
secus  faciunt ,  quibus  Christi  patrimonium  sic  commissum 
est,  et  sic  conceduntur  regum  Eleemosyna ,  ut  suam  quoque 


—    142    — 

partem  subditis  servent,  ijs  prœsertim,  qui  honestis  studijs, 
et  dignis  ingenij  sui  monumentis ,  in  Ecclesise  spécula  prœ- 
lucent,  et  sic  duplici  ferculo  supra  alios  merentur  hono- 
rari.  Yolueram  ego  semper  Kev^"™  Lummenœum  nos- 
trum  apud  me  fovere  nisi  décréta  congregationis  nostrse 
Cassinensis  obstitissent,  quibus  exacte  cavetur  ne  religiosi 
alterius  congregationis  diutius  apud  nos  hospitentur,  quse 
causa  fuit,  quod  idem  religiosus  longius  apud  nos  Medio- 
lani  commorari  non  potuerit ,  cum  omnibus  nostris  propter 
vitse  honestatem,  et  commodos  mores,  venerabilis  juxta,  et 
carus  esset ,  intérim  hic  et  alibi  in  Italià  ab  Abbate  suo 
destitutus,  indigne  habetur,  qui  id  suà  virtute,  etscientise 
prœrogativa  apud  omnes  assecutus  est,  ut  plerique  in  bac 
aulà  vices  ejus  doleant,  atque  adeo  S.  D.  N.  Urbanus  Octa- 
vus,  peculiari  cura  tuendum  eum  susceperit,  qui  olim 
quoque  cum  adhuc  Cardinalis  esset ,  libentissime  semper 
eum  vidit ,  et  Eomam  ad  se  venientem  bénigne  complexus 
est,  et  nuper  admodum  in  prœsentià  mea,  accersito  nepote 
suo  Gard.  Barberino  vivge  vocis  oraculo  mandavit,  ut  ad 
Abbatem  ejus  cum  omni  instantia  scriberet,  absolutissimam 
eam  mentem  suam  esse,  ut  omnia  ejus  débita  quamprimum 
expurgantur,  alioquin  censuras  Apostolicas  in  foribus  esse, 
ut  qui  indignissime  accipiat,  se  ab  Abbate  immédiate  sibi 
subjecto,  vel  tantillum  in  causa  sequissima  extorquere  non 
posse.  Viderit  sane  ille ,  quisquis  est ,  quomodo  se  excusare 
possit ,  et  an  expectare  velit  tanti  principis  justam  indigna- 
tionem,  qui  post  levem  adhortationis  pluviam,  ubi  nihil  se 
promovere  intelligit,  fulminare  etiam  potest.  Si  R™''  et 
rerillustris  D.  T.  intérim  adlaborare  dignabitur ,  ut  R'^"'" 
Patrera  Lummenœum  a  Marca  cum  Abbate  suo  conciliet 
magnara  profecto  inibit  gratiam  apud  bonos  et  eruditos 
omnes  et  S.  D.  N,  proculdubio  libentissime  intelliget,  in  causa 
omnium  a?quissimà  fuisse  sibi  obtemperatum ,  vale  R'"«  et 
Perillustris  Domine ,  et  si  qua  potes  Lummenœum  nostrum 


—    143    — 

juva  Romœ  ex  Palatio  nostro  sancti  Callisti  23  januarij 
1G25.  —  Subscriptum  erat  R"'^  et  Perillustris  Dominationis 
turc  omni  studio  et  cultu  deditissimus.  Subsignatiim  D. 
Angélus  Grillens,  Abbas  Sancti  Paiili  prope  et  extra 
mœnia  urbis.  » 

Un  dignitaire  de  l'Eglise  du  nom  de  J.  B.  Laurin, 
écrivit  également  de  Eome  à  Tévêque  de  Gand; 
il  invoque  dans  sa  missive  Famitié  qui  les  unit  et 
l'autorité  que  Févêque  peut  avoir  sur  l'abbé  de 
Saint-Pierre  pour  engager  ce  dernier  à  venir  au 
secours  du  pauvre  Lummenœus. 

«  Alia  copia  Perillustri  ac  i?™°  D.  D.  Episcopo  Gandavensi 
Jo.  Baptista  Laurin  servus  s.  d. 

»  Qimm  iisus  mihi  cum  P.  Jacobo  Corn.  Lummenœo  a 
Marca,  maxiuiiis  ac  siiavissimus  intercedit,  tum  quod  hic 
jamdiu  percrebiiit  de  pra?stanti  viri  doctrina,  atque  inte- 
gritate  judicium  plane  me  impellimt,  ut  de  eo  ad  te,  Pra?sul 
ornatissime  dare  litteras  non  diibitem.  Enimvero  haud 
ignoro  quantum  ipsi  tua  apud  cœnobiarcham  S*'  Pétri  pro- 
futura  autlioritas  sit,  qui  nimis  sane  angustiis  Lummenœi 
rationibus  hacteniis  difficilem  se  prsebuit ,  cum  ex  quo  de- 
seruit  patriam,  diutissime  segrotavit,  et  de  reditu  cogitare, 
omni  preesidio  a  quo  minus  par  fuerat  destitutus ,  non  va- 
luerit.  Quemadmodum  autem  111"^"^  card.  Barberinus,  non 
modo  sua  sponte,  sed  etiam  S.  D.  N.  jussu,  officii  sui 
Antistitem  Benedictinum  serio  admonere  statuit,  ita  in 
patrocinio  tuo  ipse  plurimum  Lummenœum  ponit  egoque 
pro  nostrse  amicitiœ  jure  facere  non  possum,  quin  opem 
tuam  in  id  evixe  postulem.  Rem  profecto  prœstiteris  pietate 
atque  humanitate  tua  dignam,  pro  quà  tibi  perpetuo  de- 
biturus  sum,  et  oui  immortales  gratias  bonse   habebunt 


—     144    — 

artes,  quas  ille  pro  virili  juvare  nimquam  destitit,  et  qua- 
rum  suffragio  ad  amplissimorum  viroriim  notitiam  féli- 
citer adrepsit.  Vale  Romse.  23  januarii  M.  D.  C.  XXV.  » 

Il  est  à  supposer  que  lïnexorable  prélat  se 
laissa  toucher  par  les  prières  de  tant  de  person- 
nages haut  placés ,  ou  bien  que  quelques-uns 
d'entre  eux,  en  présence  des  refus  réitérés  de 
l'abbé  finirent  par  faire  quelques  avancés  à  Lum- 
menœus ,  pour  laider  à  retourner  dans  son  mo- 
nastère, car  au  commencement  de  l'année  1628 
nous  le  trouvons  en  route  pour  Gand,  faisant 
imprimer  à  Douai  chez  Fampoux  son  Diarium 
sanctorum. 

Comme  il  dit  dans  une  de  ses  lettres  que  cet 
ouvrage  a  été  imprimé  «  sub  auspiciis  »  de  l'abbé 
du  mont  Blandin ,  il  est  à  croire  que  notre  reli- 
gieux était  plus  ou  moins  rentré  en  grâce.  Dans 
une  lettre  datée  du  18  mai,  il  écrit  à  l'abbé 
qu'il  lui  envoie  un  exemplaire  du  Diarium  et  qu'il 
en  a  envoyé  également  à  un  certain  nombre  de 
cardinaux  qui  lui  avaient  accordé  leur  protec- 
tion ;  il  espère  aussi  que  la  vente  de  l'ouvrage  en 
paiera  largement  les  frais. 

«  Reverendissime  Domine! 

»  Epliemerides  sacras,  sive  Diarium  sanctorum  sub  aus- 
piciis Amplit.  T.  in  lucem  datum ,  ex  typographeio  Fanpou- 
siano  transmitto.  Misi  cum  opportunitate  oblatâ  exem- 
plaria  Ptomam  in  primis  ad  S.  D.  N.  et  Cardinales,  mei 
studiosiores  patronos,  Barberinura,  Borromseum,  Farne- 
sium,  Millinum,  Lantes,  S.  Onufrii,  Bentivolum,  Burghe- 


—     145    — 

sium  et  alios  cubicularios  pontificios  mihi  addictos,  qui 
omnes,utspero,  proximis  litteris  gratias  agent  Reverend"'« 
Amplit.  T.  Typograplio,  ad  auspicia  tjqjograpliica  centum 
florenos  numeravi ,  restant  ci  pro  sedecim  foliis  ad  nume- 
rum  GOO  impressis  in  optimâ  cbartâ,  ex  pacto  inito ,  188  flo- 
reni,  quos  velim  per  proximum  tabellionem  mitti,  ut 
alacrius  pergat ,  in  tragicis  meis  excudendis  ,  quorum  iam 
notabilem  partem  absolvit.  Non  dubito  fore,  ut  ex  distrac- 
tione  exemplarium  (quœ ,  ut  spero ,  plurimum  emptorem 
invenient)  maxima  pars  sumptuum ,  immo  intotum  omnes 
sumptus  brevi  restituantur. 

»  Vale,  Ampl.  et  Reverendiss.  Domine,  et  œqui,  bonique 
adfectum  et  observantiam  meam  consule,  quâ  omnia  inge- 
nii  mei  monumenta ,  R"*®  Amplit.  T.  (ut  par  est)  ex  animo 
transcribo. 

»  Duaci,  130  calend.  junii  1G28". 

»  Reverendiss.  Amplit.  T. 
»  Observantissimus  cliens  et  filius , 
»  J.  C.  LuMMENŒUS  A  Makca  ,  Rel.  B.  » 

Le  23  août  il  écrivit  de  nouveau  à  l'abbé,  lui 
disant  que  la  publication  de  ses  ouvrages  va  à  sa 
fin ,  et  qu'il  compte  bien  rentrer  en  Belgique , 
aussitôt  qu'il  le  pourra  ;  il  s'excuse  des  retards  que 
pourrait  subir  son  retour,  dit  qu'il  ne  cherche  pas 
à  gagner  du  temps,  et  qu'il  travaille  assidûment; 
il  se  plaint  encore  à  la  fin  de  sa  lettre  du  dénû- 
ment  dans  lequel  il  se  trouve. 

«  Reverendissime  Domine. 

»  Non  possum  satis  mirari,  quod  ad  binas  vel  ternas 
litteras  nullum  bactenus  responsum  mereor,  prsesertim  in 

10 


—    146    — 

caussa  Domiui  Heylinc,  quem  hactenus  hic  apud  me  re- 
tineo,  ne  forte  destitutus  ab  omnibus,  impatientiâ  suadâ, 
ad  prava  consilia  defiuat ,  unde  facile  revocari  non  possit. 
Conimiinicavi  consilium  id  meum  cum  Domino  Priore  Ve- 
dastino,  bicme,ex  parte  reverendissimi  visitons,  inter- 
visente,  qui  illud  ut  utile  et  lionestum  mecum  compro- 
bavit.  Nam  quse  circà  infirmum  fratrem  agenda  sint,  ex 
régula  item  satis  docemur.  Intérim  tragica  mea  hic  fineni 
habent,  et  pathetica,  sive  homiliâ  Christo  passo  dicta, 
coronidem  brevi  admodum  exspectant.  Omnia  sub  auspiciis 
Révérend"*  Amplit.  T.  ;  ut  ad  cœlestem  illam  cincturam , 
vêla  mea  hactenus  dirigo ,  et  volupè  mihi  est  sic  velificari. 
Unum  tamen  me  mordet,  quod  litteris  Amplit.  T.,  reve- 
rendissimo  visitatori  suggestum  fuisse  intelligo,  me  hic 
j)rœter  voluntatem  et  indulgentiam  Révérend"^*  Amplit.  T. 
diutius  hœrere ,  et  moram  ex  morâ  intricare.  Certè  nihil 
de  reditu  meo  mihi  imperatum  esse  scio,  nisi  forte  hoc, 
ut  maturarem  hic  negocium ,  et  typographicos  labores 
(quantum  in  me  esset)  expedirem  ;  quod  an  ulli  mortalium 
alteri,  quàm  mihi,  magis  in  votis  sit,  testatur  assiduus 
labor  et  continuata  opéra,  quam  hactenus  apud  types  infa- 
tigabiliter  desudavi.  Brevi  admodum  reditum  paro ,  et  ex 
pistrino  isto  libenter  me  emancipabo,  ubi  viaticum  acce- 
pero,  et  pauculas  pecunias  ad  reliquum  temporis  transi- 
gendum  quod  hic,  ad  brève  intervallum  apud  opéras 
typographicas  mihi  restât.  Centum  florenis,  ad  reliques 
sumptus  mensales,  et  viatici  expensas,  mihi  satisfiet,  quos 
per  proximum  tabellionem  (nam  nécessitas  premit  et  loculi 
plané  exhausti  mihi  sunt)  à  paternâ  manu  Révérend"'* 
Amplit.  V.  expectare  certo  audebo.  Accepta  et  expensâ  pe- 
cunifi  ab  ultimo  computu,  exactam  rationem  dabo,cum 
Gandavum  rediero;  nam  modo,  festinante  nuncio,  agere 
possum,  —  Vale,  Ampliss.   et  révérend.  Domine,  et  (si 


—     147    — 

omnino  dignaris)  sine  iiUâ  morâ,  necessitatem  et  ponuriam 
meam  leva. 
»  Duaci  0  calend.  septemb.  1G28  (23  août). 

»  Ampliss.  et  reverendissinige  paternitatis 
observantiss.  filius 
»  Jacobus  Corn.  Lummenœus  a  j\Iarca. 
»  Eelig.   sacerdos.  » 

Cette  lettre  est  la  dernière  que  nous  a3^ons  trou- 
vée de  Lummenœus;  la  misère,  le  chagrin,  les 
travaux,  avaient  considérablement  altéré  sa  santé, 
déjà  fort  chancelante  depuis  plusieurs  années;  et 
peu  après  le  moment  où  il  annonçait  son  retour 
au  mont  Blandin,  la  maladie  l'être ignit  plus  vio- 
lemment et  remporta  au  commencement  de  1629. 
n  avait  reçu  asile  à  son  passage  à  Douai,  chez  ses 
confrères  les  Bénédictins  anglais,  et  c'est  dans 
leur  église  qu'il  fut  enterré. 

Ainsi,  contrairement  à  ce  que  l'on  a  cru  jus- 
qu'ici, Lummenœus  ne  se  rendit  pas  à  Rome  avec 
Tautorisation  de  ses  supérieurs  pour  assister  au 
jubilé  de  1625;  il  ne  représenta  pas  son  ordre  à 
cette  solennité ,  attendu  qu'il  était  à  Rome  en 
dépit  des  instructions  de  son  abbé,  qui  ne  lui  avait 
donné  de  licence  que  pour  Milan,  et  qui,  poussant 
la  rigueur  à  l'extrême ,  refusa  tout  secours  à  ce 
pauvre  religieux,  dont  la  maladie  mina  la  santé 
pendant  sept  ans. 

Le  nom  de  Jacques  Corneille  de  Lummene  ne 
se  rattache  pas  seulement  à  l'histoire  littéraire  de 
notre  pays  par  les  œuvres  latines  réellement  rc- 


—     148    — 

inar(}uables  qu'il  publia,  mais  aussi  à  l'histoire  de 
l'art  par  la  part  que,  d'après  plusieurs  écrivains,  il 
eut  dans  l'érection  de  l'oratoire  de  l'abbaye  de 
Saint-Pierre.  Dans  les  Remarques  inédites  (1781) 
de  l'abbé  Gudwald  Seiger,  nous  lisons  ceci  : 

«  Il  est  fort  étonnant  qu'après  bien  des  recher- 
»  ches  on  ignore  quel  est  l'architecte  qui  composa 
»  le  plan  de  l'oratoire,  et  qu'on  ne  retrouve  même 
))  nulle  part  le  moindre  fragment  de  ce  précieux 
»  plan 

»  Quoi  qu'il  en  soit,  il  est  certain  que  ce  fut  le 
))  grand  abbé  Schayck  qui  en  forma  le  projet,  et 
»  qui  ne  s'avisant  point  de  consulter  les  archi- 
»  tectes  des  Pays-Bas,  où  le  goût  gothique  était 
»  alors  à  la  mode,  à  toute  apparence  en  fit  faire 
»  le  plan  à  Kome  par  un  des  meilleurs  artistes  et 
)>  par  l'intervention  de  son  savant  religieux  Cor- 
))  nelius  a  Marcâ,  qui  en  1624  séjournait  à  Rome 
))  et  y  avait  beaucoup  de  crédit.   » 

Il  s'agirait  de  s'entendre  ici  sur  la  signification 
du  mot  «  crédit.  »  Le  fait  est  Que  Lummenœus 

JL 

avait  à  Eome  les  plus  belles  relations,  et  il  n'est 
nullement  impossible  que  l'abbé  Seiger  n'ait  rai- 
son dans  sa  supposition. 

Un  certain  nombre  d'auteurs  se  sont  occupé  de 
la  question,  et,  faute  de  preuves,  ont  fini,  d'induc- 
tion en  induction,  par  s'arrêter  à  l'idée  émise  par 
Tabbé  Seiger,  attribuant  le  plan  de  l'église  à  un 
architecte  italien,  ami  de  Lummenœus. 

Nous  ne  voulons  pas  faire  entendre  une  voix 
discordante  dans  ce  concert,  en  contestant  la  con- 
ception de  cet  ouvrage  à  une  célébrité  romaine,  et 


—     149      - 

en  déniant  à  l'iiomme  dont  nous  nous  occupons 
dans  cette  notice,  la  part  que  Ton  se  plaît  à  lui 
accorder.  Mais  comme  on  n'a  jusqu'ici  pu  s'étayer 
que  de  suppositions,  nous  nous  permettrons  d'en 
faire  une  à  notre  tour. 

M.  De  Busscher,  dans  son  ouvrage  sur  l'abbaye 
de  Saint-Pierre,  p.  73,  parle  d'un  certain  maître 
Pierre  Huyssens,  auquel  l'abbé  Schayck  confia  la 
construction  de  l'oratoire  de  1629  à  1635.  Il  cite 
des  extraits  de  comptes ,  que  nous  possédons 
également. 

Dans  ces  comptes  généraux  de  l'abbaye  à  l'an- 
née 1627,  p.  138  V",  nous  lisons  : 

«  Item,  betaelt  aen  M^'  Pieter  Huyssens,  ingeniair,  over 
reysghelt  ter  cause  van  dien,  met  voyagien  by  hem  ghedaen 
in  de  affairen  van  de  voorsc.  kercke ,  blyckende  by  seven 
quitantien ,  de  somme  van  XL  vu  Ib.  vi  s.  viii  gr.  » 

Quel  était  donc  ce  Pierre  Huyssens? 

Pierre  Huyssens  ou  Huussens,  car  c'est  ainsi 
qu'il  écrivait,  traduisant  par  écrit  la  prononcia- 
tion brugeoise  de  son  nom,  naquit  à  Bruges  en 
1577,  et  mourut  le  6  juin  1637.  Son  père  était 
maître  maçon.  Il  entra  dans  l'ordre  des  Jésuites 
en  1596;  ses  supérieurs  voyant  en  lui  des  dispo- 
sitions innées  pour  rarcliitecture,  le  laissèrent  se 
livrer  entièrement  à  ses  études,  et  en  quelques 
années  Huyssens  prit  rang  parmi  les  meilleurs 
architectes  du  pays.  Il  dut  à  son  talent  d'être  en- 
voyé en  Italie  par  les  Archiducs,  chargé  d'une 
mission  spéciale  et  avec  le  titre  de  frère  coadju- 
teur.  Il  profita  de  son  séjour  sur  la  terre  classique 


—     150     - 

de  l'art  pour  étudier  les  anciens  monuments,  et  de 
retour  dans  sa  patrie  mit  ses  souvenirs  à  profit 
pour  élever  des  églises  à  Bruxelles,  à  Maastricht, 
à  Namur  ;  la  façade  de  l'église  des  Jésuites  à  An- 
vers fut  construite  par  lui  sur  les  données  de 
Rubens  ;  il  avait  fait  le  projet  d'une  église  pour  le 
couvent  des  Jésuites  à  Bruges  quand  la  mort  le 
surprit. 

Dans  les  comptes  de  l'abbaye  de  Saint-Pierre 
pour  quelques  années  postérieures  nous  trouvons  : 

«  Ghetelt  aeii  Mer  Pieter  Huyssens,  ingeniair,  van  't  glie- 
»  bou  van  de  nieuwe  keercke,  c  Ib.  gr.  om  te  coopen  een 
»  partye  avenue  steen.  Ontfanglien  op  clen  v"  aiigusti  1630. 

»  Betaelt  aen  Mci-  Pieter  Iluyssens  over  leverynghe  van 
»  iiii"  Ivii  voeten  bimster  steen  :  xc  Ib.  xix  s.  iiii  gr.  ix  d.  par. 

»  Betaelt  aen  lieer  Paulus  Vilain,  proost,  over  het  voyage 
»  met  lieer  Pieter  Huyssens,  ingeniair,  naer  clen  Coecamer 
»  bosch,  vi Ib. 

Serait-il  impossible  que  ce  Pierre  Huyssens,  qui 
avait  fait  des  études  sérieuses  en  Italie ,  que  les 
comptes  appellent  ingénieur,  n'ait  pas  conçu,  et 
réalisé  ensuite  le  plan  de  l'oratoire,  au  lieu  d'avoir 
été  simplement  le  directeur  des  travaux.  Nous 
sommes  d'autant  plus  porté  à  le  croire  que  nulle 
part  il  n'est  question  du  nom  de  l'architecte  de 
ce  monument,  sinon  dans  la  note  de  l'abbé  Seiger, 
qui  formule  une  supposition,  mais  que  l'on  parle 
de  Huyssens ,  en  le  qualifiant  de  «  ingeniair  van 
't  ghebou  van  de  nieuwe  keercke  ;  »  a  défaut  de 
toute  autre  indication,  à  défaut  de  tout  autre  nom, 
celui-ci   se   présente  à  nous    comme    celui   d'un 


—    151     — 

homme  capable  d'avoir  conçu  le  plan  d'un  édifice 
de  ce  genre ,  d'une  homme  qui  a  fait  ses  preuves 
en  d'autres  occasions. 

Quant  au  plan  dont  on  n'a  pu  trouver  nulle  part 
de  traces ,  il  se  peut  que  Huyssens  l'ait  emporté , 
que  ce  plan  soit  resté  au  milieu  des  pa})iers  ap- 
partenant aux  jésuites ,  et  ait  disparu  comme 
beaucoup  d'autres  pièces. 

Charles  de  Lummene ,  outre  Jacques-Corneille , 
eut  plusieurs  enfants  :  Viglius  a  Marcâ,  qui  de- 
vint échevin  du  Franc  ;  un  autre ,  nommé  Charles 
comme  son  père;  un  troisième,  Louis,  qui  devint 
prêtre  de  la  compagnie  de  Jésus. 

La  famille  de  Lummene  n'était  pas  tout  à  fait 
la  première  venue;  outre  qu'elle  occupait  un 
rang  distingué ,  les  Lummene  étant  seigneurs  de 
Marcke  et  autres  lieux.  On  compte  parmi  ses 
membres ,  indépendamment  de  celui  qui  nous 
occupe ,  des  magistats ,  des  écrivains ,  des  ab- 
besses ,  de  saints  religieux. 

Les  Lummene  étaient  originaires  d'Audenarde , 
mais  il  est  peu  probable  que  le  père  de  notre  écri- 
vain naquit  dans  cette  ville  plutôt  qu'à  Gand, 
ainsi  que  certains  le  croient  ;  plusieurs  Lummene 
occupèrent  des  postes  importants  dans  la  magis^ 
trature  audenardaise. 

Sanderus,  au  XYIP  siècle,  cite  les  van  Marcke 
parmi  les  familles  nobles  de  Gand. 

Un  Lummene  épousa  une  fille  de  la  maison 
d'Escornaix,  dont  il  eut  un  fils  nommé  Guillaume, 
mort  le  28  août  1451  ;  ce  Guillaume  avait  épousé 


—     152    — 

d'abord  Agnès  Serranen,  morte  en  1442,  et  en 
secondes  noces  Claire  Vander  jNIorten ,  inhumée  à 
Audenarde. 

Le  fils  de  Guillaume ,  nonmié  Jacques ,  épousa 
une  personne  du  nom  de  Vander  Heyden ,  dont  il 
eut  un  fils  également  nommé  Jacques,  et  une 
fille ,  Gertrude ,  qui  épousa  Guillaume  Yander 
Meeren,  fils  de  Jean  et  de  Marguerite  Cabiliau, 

Dans  Téglise  de  Sainte-Walburge  à  Audenarde 
se  trouve  sur  une  plaque  de  cuivre  l'épitaphe  de 
ce  Jacques  de  Lunmiene,  mort  le  8  juillet  1548  : 

«  Hier  light  begraven  edele  ende  werde  Jacop  van  Lum- 
»  mené  fs  Jacops ,  \Yillems  zone ,  die  overleet  deser  werelt 
»  den  8''"  dach  van  Hoyemaent  1548.  Bid  voor  de  ziele.  » 

Jacques,  fils  de  Jacques,  petit-fils  de  Guillaume, 
doit  être  le  père  de  Charles,  par  conséquent  le 
gTand-père  de  Jacques-Corneille.  Herckenrode,  il 
est  vrai,  croit  que  Jacques  mourut  sans  postérité, 
mais  nous  n"avons  pas  trouvé  la  preuve  de  ce  fait. 

Un  Aimold  de  Lummene,  mort  en  1429,  épousa 
Béatrix  van  Heule ,  morte  le  24  octobre  1428  ; 
tous  deux  furent  enterrés  dans  l'église  des  Récol- 
lets à  Audenarde. 

Pendant  les  troubles  d' Audenarde  en  1539  on 
cite  deux  membres  de  cette  famille,  Georges  et 
Gilles,  qui  à  la  tête  d'une  troupe  armée  furent 
chargés  de  maintenir  l'ordre. 

En  1526  un  Jacques  de  Lummene  fut  choisi 
parmi  les  conseillers  pour  vérifier  les  comptes  de 
la  ville. 

La  famille  de  Lunmiene  de  Marcke  posséda  la 
seigneurie  de  Baveghem  sous  Moen. 


—    153     - 

Un  de  Lummene  avait  épousé  une  dame  Van 
der  Meere,  fille  d'André  et  de  Claire  de  la  Ha- 
inaide ,  dont  il  eut  :  Georges ,  qui  épousa  une 
dame  Boccaert.  Le  fils  de  Georges,  François  de 
Lummene,  seigneur  de  Gysegem,  Wielsbeke,  et 
capitaine  des  archers  de  la  gouvernante  des  Pays- 
Bas,  Marguerite  d'Autriche,  mourut  sans  alliance 
le  10  a\T:*il  1537;  il  fut  enterré  près  du  maître- 
autel  de  l'église  Sainte-Walburge  à  Audenarde. 

Georges  de  Lummene,  mort  le  2  octobre  1553, 
avait  épousé  Catherine  Illoris,  morte  le  23  mai 
1523  ,  fille  de  Daniel  et  de  Marguerite  Yander 
Brugghe,  petite-fille  de  Roger  et  de  Catherine  de  la 
Motte.  Ils  eurent  deux  enfants  :  François  qui  suit, 
et  Daniel,  mort  le  13  décembre  1555  sans  posté- 
rité, après  avoir  été  marié  deux  fois;  la  première 
à  Anne  Clessenaere,  dame  de  Bruaen,  fille  de  Jean, 
et  la  seconde  à  Catherine  Yander  Meere. 

François  de  Lummene ,  fils  de  Georges ,  écuyer, 
seigneur  de  Hemsrode ,  Gyseghem ,  Triest ,  Ba- 
veghem,  mourut  le  11  décembre  1580  et  fut  en- 
terré à  Saint-Bavon  à  Gand ,  en  face  de  l'autel  de 
Saint-Jean-Baptiste ,  pom*  lequel  il  avait  fait  don 
à  l'église  d'un  tableau  de  Gaspard  De  Crayer, 
représentant  la  décollation  de  saint  Jean-Baptiste. 
Le  monument  de  François  a  été  depuis  transféré 
dans  la  crypte,  et  figure  dans  la  cinquième  cha- 
pelle ;  le  défunt  y  est  représenté  à  genoux  devant 
le  Christ  en  croix  ;  l'inscription  porte  : 

ASPICE    MORTALIS ,    PRO    TE    DATUR    HOSTIA    TALIS 

CUR     NON     MIRARIS,      MORIOR     UT     NON     MORIARIS  : 

TESTES    SUNT    CLAVI,    PER    QUOS    TUA   CRIMINA   LAVI, 

MORTEM    MORTE,    DOMO  ,    NE   MORIATUTi   HOMO. 

11 


—     154    — 


Et  l'épitaplie 


HIER  LIGHT  BEGRAVEN  JONCHEER  FRANCHOIS  VAN 
LUMMENE,  GHEZEYT  VAN  MARCKE,  F®  JOORIS ,  SCHILT- 
CNAPE  ,  IN  ZINEN  LEVEN  HEERE  VAN  HEMSRODE  , 
GHYSEGHEM,  BAVEGHEM ,  TRIST  ,  ETC.,  DIE  OVERLEET 
DESER  WEERELT  DEN  Xl''"  DECEMBRIS  1580,  ENDE 
JONCVRAUWE  JOANNE  VAN  WAERGHEM ,  F*  YDROPS , 
GHESELNEDE  VAN  JONCHEERE  JAN  VAN  HEMBYZE , 
ZYNE  SCHOONMOEDER,  DIE  OVERLEET  DEN  XVIII^"  JULY 
1579.  BIDT  GODT  ALMACHTICH  VOOR  HAERLIEDER 
ENDE  ALLE   GHELOOVIGHE   ZIELEN. 

Les  quartiers  sont  :  Lummene,  Boccaert,  Meere, 
Bosch ,  Illoris ,  Briigghe ,  Motte ,  Brade  * . 

Ce  François  de  Lummene  avait  épousé  en  pre- 
mières noces  Marie  de  Warigny,  dame  de  Ran- 
quières ,  fille  de  Jacques  et  de  Marguerite  de  la 
Motte ,  et  en  secondes  noces  Catherine ,  fille  du 
fameux  démagogue  gantois  Jean  de  Hembyze, 
surnommé  «  joncker  Jan.  »  Du  chef  de  sa  femme, 
Marie  de  Warigny,  François  était  seigneur  de 
Crombrugghe  sous  Merelbeke  ;  son  fils  Gérard  dé- 
membra plus  tard  cette  seigneurie. 

Jean ,  le  fils  de  François ,  fut  grand-bailli  du 
pays  d'Escornaix,  seigneur  de  Baveghem,  etc.; 
il  mourut  sans  enfants  en  1618;  il  possédait  aussi 
la  seigneurie  d'Oudenhove  sous  Vynckt,  du  chef 
de  sa  mère  Catherine  Hembyze. 

Gérard ,  second  fils  de  François ,  chevalier , 
seigneur  de  Tressy,  mort  le  27  mai  1G20,  devint 

'  Kervyn  de  Volkaersbeke  ,  les  Églises  de  Gand,t.  I,pp.  22, 

187,  1«8. 


-     155    — 

seigneur  de  Baveghem  et  autres  lieux  après  la 
mort  de  son  frère  aîné  Jean;  il  avait  épousé 
Jeanne  de  Vremde,  fille  de  François,  chevalier, 
seigneur  de  Burglit  et  de  Catherine  Lecocq ,  dont 
il  eut  François,  décédé  sans  enfants  à  Tâge  de 
vingt-et-un  ans  le  16  juillet  1621,  dernier  héritier 
mâle  de  cette  branche,  et  dont  Tépitaphe  se  trouve 
dans  l'église  de  Sainte- Walbm^ge  à  Audenarde. 

Outre  Jean  et  Gérard,  François  eut  encore  : 
François,  qui  se  fit  capucin,  Jacqueline  qui  de- 
vint chanoinesse  à  Andenne,  Marguerite,  abbesse 
du  Nouveau  Bois  (Nonnenbossche) ,  qui  mourut 
dans  son  couvent  en  1627  et  fut  enterrée  auprès 
de  son  frère  Jean. 

De  1370  à  1392  Agnès  de  Lummene  de  Marche 
était  à  la  tête  de  l'abbaye  de  Maegdendale  ;  elle 
était  la  dixième  abbesse.  La  douzième  fut  Marie 
de  Lummene  de  Marche  en  1397,  jusqu'en  1416  ; 
celle  qui  suivit  se  nommait  Catherine  de  Lum- 
mene de  Marche  qui  gouverna  l'abbaye  jusqu'en 
1423. 

Nous  lisons  dans  un  registre  de  Téchevinage  de 
Gand ,  qu'un  Arnold  de  Lunmiene  de  Marche  avait 
épousé  Marguerite  de  Munte. 

Antoine  de  Bourgogne ,  troisième  du  nom , 
mort  en  1573,  chevalier,  seigneur  de  Wachen , 
Catthem ,  etc.  ,  vice-amiral  de  Zélande  après 
Adolphe  son  frère,  avait  épousé  Anne  de  Lum- 
mene de  Marche,  fille  de  Louis  de  Luromene  de 
Marche ,  seigneur  de  Wevelgem ,  et  de  Jeanne  de 
Culembourg;  il  en  eut  quatre  enfants. 

Dans  la  bibliothèque  Chigi  à  Rome  se  trouve 


—    156    — 

un  manuscrit  in-quarto ,  catalogué  comme  suit  : 
«  Marca  (Petrus  de)  Gandavi  natus  vi  kal.  febr. 
«  1594  :  de  singulari  prùnaiu  Pétri  exercitatio  V  « 
Les  Lununene  de  Marcke  portaient  de  gueules 
au  lion  d'argent  couronné  et  lampassé  d'or. 


Emile  Vaeenbergh. 


•  Bidl.  de  la  Comm.  d'Hist.,  3^  série,  IX,  269. 


\'o7 


IJNE  EXCURSION  A  THV-LE-BAUDHUIN 

(PROVINCE    DE    NAMUR). 


En  l'an  de  grâce  1875,  deux  graves  person- 
nages appartenant  à  cette  société  que  certains 
béotiens  de  Charleroi  ont  appelée  ;  les  vieux  Cail- 
loux, se  décidèrent ,  à  quitter  leur  bonne  ville  et, 
comme  des  conquérants,  à  faire  une  incursion  sur 
les  terrains  voisins  de  celui  de  leurs  recherches 
habituelles.  Qui  dit  :  voisin,  dit  :  ennemi.  Aussi 
est-ce  bien  avec  des  pensées  dignes  de  la  guerre, 
que  nos  amateurs  d'antiquités  abandonnaient  le 
sol  fertile  de  Gerpinnes  pour  passer  la  frontière 
de  la  province  limitrophe.  Il  espéraient  rapporter 
du  butin  ;  et ,  en  généraux  plus  prudents  que 
certains  autres  inutiles  à  nommer,  ils  avaient  un 
objectif  déterminé  ;  c'était  :  T liy-le-Baudhuin . 

On  sait  qu'à  Gerpinnes  reposent  les  restes  vé- 
nérés de  sainte  Rolende,  fille  de  Didier,  roi  des 
Lombards,  qui  fut  faite  prisonnière  avec  son  père 
lorsque  celui-ci  eut  déclaré  la  guerre  à  Charle- 
magne  et  fut  vaincu.  Karle  voulait  une  postérité; 


—     158    — 

Hermingarde,  fille  de  Didier,  qu'il  avait  épousée, 
ne  lui  en  donnait  point.  Aussi,  montrant  la  voie  à 
son  émule  dans  les  temps  modernes,  Karle  répu- 
dia-t-il  Hermingarde  pour  confier  les  destinées  de 
son  vaste  empire  à  un  dépôt  moins  stérile.  Didier 
ne  fut  point  satisfait;  il  déclara  la  guerre  à  Karle, 
et  envahit  les  domaines  du  pape  Etienne  qui 
n'était  pourtant,  en  bonne  justice,  pour  rien  dans 
cette  affaire.  Mal  lui  en  prit  ;  linfatigable  Karle 
repasse  les  Alpes,  bat  son  beau-père,  et  emmène 
toute  la  famille  en  captivité.  Kolende  était  au 
nombre  des  captives  ;  elle  fut ,  ainsi  que  son  père, 
internée  à  Liège  et  confiée  à  la  garde  d'Agilfride, 
évêque  de  cette  ville  '.  Elle  était  d'une  grande 
beauté  et  d'une  vertu  plus  grande  encore.  Aussi 
Oger,  prince  Écossais,  en  devint-il  éperdùment 
amoureux  et  la  poursuivit-il  de  ses  obsessions 
pour  la  décider  à  Tépouser.  Rolende  n'y  consentit 
point,  et  s'enfuit  pour  se  réfugier  à  l'abbaye  de 
Lobbes,  dont,  en  l'an  800,  un  de  ses  parents  était 
abbé  "",  et  pour  s'y  mettre  sous  la  protection  de 


*  Agilfride,  évêque  de  Liège  en  765. 

^  En  800  l'abbé  de  Lobbes  était  le  B.  Auson,  qui  fut  en  même 
temps  un  hagiographe  célèbre  et  un  modèle  de  vertus.  On  ignore 
son.  origine,  mais  on  croit  qu'il  était  Luxembourgeois.  Il  mourut 
dans  le  cours  de  cette  même  année  et  fut  remplacé  par  le  chanoine 
Hildéric,  usur^jateur  de  la  dignité  abbatiale,  selon  Folcuin  et  autres 
chroniqueurs,  légitimement  élu  selon  d'autres.  Dans  tous  les  cas,  il 
fut  loin  de  marcher  sur  les  traces  de  son  prédécesseur,  et  mourut 
en  814  Sous  la  protection  duquel  des  deux,  Rolende  voulait-elle  se 
réfugier?  on  ne  le  sait;  il  est  néanmoins  proljable  que  ce  fut  auprès 
d' Auson. 

A  Hildéric  succéda  Rcincric,  toujours  usurpateur,  d'après  Folcuin 
parce  que  lui-même  était  abbé-moine  eu  même  temps  que  clironi- 


—    159    — 

l'Église.  Si  tôt  sa  fuite  connue,  Oger  se  lança  à  sa 
poursuite  ;  mais  il  l'atteignit  trop  tard  ;  il  n'arriva 
à  Villers-Potteries  que  pour  y  contempler  une 
dernière  fois  celle  qu'il  aimait ,  et  qui  avait  rendu 
son  âme  à  Dieu.  Oger,  inconsolable  comme  on 
Tétait  en  ces  temps  où  vivaient  Amadis  des  Gau- 
les, l'amoureux  Roland,  et  tous  les  Paladins  de  la 
Table  ronde,  ne  voulut  point  quitter  le  lieu  où 
reposait  celle  dont  il  vénérait  le  pur  souvenir 
autant  qu'il  en  avait  aimé  la  beauté.  Il  bâtit  un 
ermitage  pour  y  vivre  en  solitaire,  loin  des 
pompes  et  des  œuvres  de  satan.  Il  choisit  à  cette 
fin  un  lieu  élevé ,  au  territoire  d'Hansinnes  ;  et, 
de  son  ermitage,  il  pouvait  chaque  jour,  en  éle- 
vant ses  pensées  vers  le  Dieu  qui  bénit  l'union 
des  âmes,  jeter  un  regard  de  regret  sur  la  tombe 
de  celle  qu'il  avait  choisie  et  que  le  Seigneur  lui 
avait  reprise.  Ces  désespoirs  sans  consolation 
étaient  alors  fréquents.  En  effet,  on  sait  que, 
suivant  la  tradition,  Hildegarde  ayant  appris  par 
des  pèlerins  que  Roland,  son  fiancé  ,  était  mort 
à  Roncevaux,  avait  pris  le  voile,  et  enseveli  son 
deuil  dans  le  couvent  de  Nonnenwerth,  sur  les 
bords  du  Rhin ,  entre  Bonn  et  Coblence.  Roland 
qu'on  avait   dit   mort ,    revint ,    et   sa   première 


queur,  et  n'avait  pu  parvenir  à  se  faire  élire;  Reineric  mourut 
en  819. 

Il  eut  pour  successeur  Fulrade  le  Pieux,  cousin  de  Charlemagne. 
N'est-ce  pas  là  le  parent  de  Rolende  ?  La  mort  de  celle-ci  ne  doit- 
elle  pas  être  reportée  à  cette  date  ? 

Nous  soumettons  ces  questions  aux  PP.  Bollandistes. 

Voir  BoLLAND.,  Acta  Sanctorum  Aprilis ,  Auson.  —  Voir  aussi 
Lobbes,  son  abbaye,  son  chapitre,  jjar  l'abljé  Vos. 


—    160    — 

pensée  fut  de  courir  revoir  celle  qu'il  aimait.  La 
trouvant  vouée  au  Seigneur  et  perdue  pour  lui, 
il  s'établit  à  Rolandseck,  vis-à-vis  de  Nonnen- 
wertli  où  languissait  Hildegarde.  Un  jour  le 
chant  des  Nonnes  monta  jusqu'à  son  ermitage  ; 
il  reconnut  la  voix  d'Hildegarde.  Ces  accents 
plaintifs  le  touchèrent  tellement  que  son  cœur 
se  remplit  de  douleur  et  qu'il  expira.  C'est  cette 
légende  que  Schiller  a  chantée  sous  le  nom  de 
Chevalier  de  Toggenbourg.  *• 

Si  cette  légende  récelait  un  fait  historique,  con- 
trairement au  récit  d'Éginhard ,  contrairement 
aussi  aux  poèmes  et  aux  chansons  de  gestes,  Ro- 
land n'est  pas  mort  à  Roncevaux  ;  le  Paladin  est 
mort  en  Allemagne  et  non  en  France  ;  celle-  ci 
s'enorgueillit  à  tort  de  son  trépas  héroïque;  et, 
nous  même  qui  écrivons  ces  lignes,  nous  avons  été 
bien  naïfs  de  gravir  —  mais  pas  à  genoux  comme 
les  pèlerins  —  les  deux  cents  marches  d'un  esca- 
lier creusé  dans  le  rocher,  pour  aller  contem- 
pler, avec  respect,  dans  l'église  de  Rocamadour 
(France,  Lot),  Diirandal ,  la  grande  épée  de  Ro- 
land, et  Olifant ,  son  cor  d'ivoire  \ 


*  La  Durnndal  est  une  épée  à  deux  mains  qui  s'est  quel(}ue  peu 
émoussée,  quand  Roland  tailla  dans  les  Pyrénées  la  fameuse  brèche 
qui  porte  son  nom.  Cette  brèche  est  une  tranchée,  laite  d'un  seul 
coup,  dans  le  roc  vif  du  mont  Marboré,  au-dessus  de  Gavarnie,  à 
droite  du  Cirque.  On  n'y  arrive  qu'avec  beaucoup  de  peine  et  de 
fatigue,  en  traversant  les  héritages  escarpés  CCEls  Sarradets,  esca- 
ladant le  glacier,  puis  franchissant  la  bcrghsrund,  une  crevasse  qui 
fait  frémir.  La  brèche  elle-même  est  à  3000  mètres  d'altitude;  elle 
a  environ  40  mètres  à  sa  base,  60  mètres  au  tiers  de  la  hauteur, 
700  à  800  mètres  de  longueur  ;  les  deux  murailles  de  ses  parois  ont 
100  mètres,  au  moins  d'élévation.  Un  maître  coup  d'épée  comme  on 


—     161 


Revenons  en  Belgique,  où  nos  promeneurs  re- 
portèrent leurs  pensées  sur  Oger,  Tamoureux 
fidèle  et  inconsolable,  qui,  suivant  la  tradition, 
mourut,  lui  aussi,  en  odeur  de  sainteté,  et  fut  in- 
humé dans  la  chapelle  de  son  ermitage.  C'est 
cette  chapelle,  seul  reste  de  l'ermitage,  que  nos 
antiquaires  rencontrèrent  en  sortant  d'Hansinnes 
pour  prendre  le  chemin  de  Thy-le-Baudhuin.  Ils 
ne  purent  s'empêcher  d  observer  qu'en  ce  temps- 
#à,  comme  toujours,  les  ermites  et  les  moines 
choisissaient  pour  établir  leurs  demeures,  pauvres 
ou  opulentes,  les  plus  beaux  sites  des  pays  où  ils 
se  décidaient  à  résider.  De  l'ermitage  d'Oger  le 
paysage  est  splendide.  A  droite,  Hansinnes,  puis 
le  vallon  de  la  Biesmes,  Immiée  et  les  sombres 
forêts  ;  à  gauche  Tarciennes  et  les  plaines  ;  vis-à- 
vis,  Gerpinnes,  déjà  populeuse  bourgage  au  temps 
de  l'Ermite,  et,  derrière  elle,  Villers-Potteries  et 
un  horison  sans  limites. 

Bien  qu'Oger  ait  été  canonisé ,  dit-on  dans  le 
pays,  on  ne  parle  guère  de  miracles  opérés  par 
son  intercession.  Cependant  la  voix  publique  pré- 
tend que,  chaque  année,  quand  la  procession  qui 
porte  la  châsse  dans  laquelle  sont  déposées  les 
reliques  de  sainte  Rolande,  passe,  le  16  juin,  à 
Hansinnes,  et  que  la  châsse  qui  renferme  celles 
de  saint  Oger  se  joint  au  cortège,  on  entend  les 


le  voit  !  La  récompense  conquise  pour  avoir  pris  la  peine  de  grimper 
jusque-là,  c'est  qu'on  y  est  arrivé...  et  puis  c'est  tout;  sauf  qu'il  faut 
redescendre.  C'est  toujours  ainsi  quand  on  s'élève. 

\j  Olifant  est  un  huchet  d'ivoire,  assez  semblable  à  celui  qu'on 
montre  à  Saint-Hubert. 


—     162    — 

ossements  du  Paladin  s'agiter  dans  la  bière.  La 
chronique  le  raconte  ainsi,  et  les  graves  auteurs 
du  rapport  sur  la  villa  belgo-romaine  de  Ger- 
pinnes  ont  accueilli  ce  racontar  \  L'un  de  nos 
touristes,  d'habitude  aussi  incrédule  que  saint 
Thomas,  aurait  bien  mis  la  chose  en  doute  ;  mais 
son  compagnon,  digne  et  respectable  maycur, 
incapable  de  plaisanter  en  matières  aussi  sé- 
rieuses, affirma  avoir  entendu,  de  ses  propres 
oreilles,  le  bruit  dont  parle  le  vulgaire  et  dès  lor^ 
la  question  était  décidée. 

En  entrant  dans  la  plaine,  nos  excursionnistes 
aperçurent  au  loin  un  homme  grand ,  tout  de  noir 
habillé,  parcourant  à  pas  lents,  comme  un  fan- 
tôme, des  décombres  fraîchement  remués.  Ses 
yeux  étaient  fixés  vers  la  terre,  et,  parfois,  il  ra- 
massait l'une  ou  l'autre  chose  et  l'examinait  avec 
soin.  Ce  n'était  pas  le  génie  des  ruines,  mais  bien 
un  de  ces  Prêtres  qui,  relégués  dans  les  com- 
munes rurales,  pensent,  avec  raison,  qu'il  est  bon 
d'employer  à  l'étude  les  loisirs  que  laisse  l'exé- 
cution, même  la  plus  dévouée,  des  devoirs  pasto- 
raux. Les  décombres  scrutés  par  lui  provenaient 
d'un  cimetière  romain  au  lieu  dit  :  Bonncnvaux, 
et  des  ruines  d'une  villa  belgo-romaine,  que 
fouillaient,  en  ce  moment,  des  savants  de  la  ca- 
pitale. Il  espérait  y  glaner  après  eux  et  avoir  le 
bonheur  de  leur  offrir  quelque  objet  curieux, 
échappé    à    leurs    investigations.    Le   cimetière 

»  Documents  et  rapports  de  la  Société  archéologique  et  paléoyitolo- 
gique  de  Charleroi,  VU,  pag.  cxiv  et  suiv. 


--    163     - 

comme  la  villa  étaient  admirablement  posés  au- 
dessus  d'une  colline ,  et ,  chose  remarquable  , 
l'orientation  des  bâtiments  était  conforme  à  celle 
de  la  villa  de  Gerpinnes.  De  l'autre  côté  du  ravin, 
dans  la  direction  de  Thy-le-Château,  se  trouve  le 
Berlhauinont,  où  l'on  a  exhumé  cinq  tombes  fran- 
ques  alignées  et  faisant  partie  d'un  cimetière  ^ . 

Après  une  cordiale  poignée  de  mains  confra- 
ternelles, on  se  remit  en  route  pour  arriver 
bientôt  à  Thy-le-Baudhuin. 

On  perd  à  ne  pas  connaître  cette  minuscule 
commune?  Jamais  on  n'a  vu  village  dont  le  clo- 
cher et  le  centre  soient  mieux  groupés  au  fond 
d'un  entonnoir,  et  dont  les  chaumières  soient 
plus  pittoresquement  accrochées  aux  flancs  escar- 
pés des  collines ,  au  milieu  desquelles  serpente  la 
Thyria,  petite  rivière  aux  eaux  cristallines  quand 
le  lavage  du  minerai  de  fer  ne  les  salit  point. 
Seulement,  pour  arriver  en  voiture  à  Thy-le- 
Baudhuin,  il  ne  s'agit  pas  de  se  faire  bercer  dans 
un  huit  i'esso?'ts  de  Jones  ou  de  Bender,  il  faut  se 
faire  cahotter  dans  le  modeste  tapec...  des  Arden- 
nes,  et  même  il  en  faut  un  solide:  pour  le  piéton, 
il  doit  être  chaussé  de  gros  souliers  de  chasse. 
Il  y  a  réellement  à  croire  qu'on  ignore  à  Thy-le- 


*  Si  cette  partie  de  notre  pays  rentrait  dans  le  cercle  de  nos  re- 
cherches, combien  nous  aurions  de  plaisir  à  retrouver  l'origine  et 
l'étymologie  de  tous  ces  noms  :  la  Tlnjria,  Thy-le-Bandludn,  Thy-le- 
Châteaii,  Bonnenimux,  Berthaïunont  et  autres.  Mais,  nous  devons 
respecter  le  domaine  de  nos  collègues  de  Namur,  et  nous  ne  pou- 
vons qu'émettre  le  vœu  de  les  voir  jeter  un  regard  vers  les  lieux  par- 
courus par  nous. 


—     104    — 

Baudliuin  ce  que  c'est  que  rabattre  les  aspérités 
des  pierres  d'un  cliemin  pour  y  établir  une  ap- 
parence de  régularité  et  pour  l'aplanir  un  peu. 
Après  tout,  puisque  les  autorités  communales  et 
les  habitants  sont  contents  ainsi,  de  quel  droit 
serions-nous  plus  difficiles?  A  Tliy -le -Baudliuin, 
du  reste ,  les  naturels  sont  des  plus  primitifs ,  et 
l'arrivée  d'un  étranger  produit  autant  d'émotion 
que  le  débarquement  de  navigateurs  dans  une  île 
de  la  Polynésie.  Mais,  comme  souvent  dans  nos 
campagnes,  on  y  trouve  un  Curé  instruit,  parfai- 
tement hospitalier,  bon  compagnon,  bon  ami, 
excellent  prêtre;  hors  lui,  il  n'est  pas  possible  de 
trouver  à  qui  causer  d  autre  chose  que  de  bétail 
et  de  fumier. 

La  voix  publique  racontait  quïl  existait  à  Thy- 
le-Baudhuin  plusieurs  restes  précieux  de  l'anti- 
quité ;  un  oppidum ,  des  substructions  remontant 
à  la  période  de  l'occupation  romaine ,  et  même 
un  tneuidr,  rara  avis  sur  notre  territoire.  Voir  et 
reconnaître  tout  cela  était  le  but  de  nos  pro- 
meneurs. 

A  l'occasion  de  ce  menhir  et  tout  en  chemi- 
nant, la  conversation  avait  roulé  sur  la  question 
souvent  posée  de  savoir  à  quel  peu2)le,  à  quelle 
période  de  la  civilisation,  ces  monuments  gros- 
siers doivent  être  rapportés.  En  Europe  on  en 
trouve  partout  parce  qu'ils  ont  été  plus  étudiés  ; 
ainsi  en  Belgique  et  en  France,  et  notamment 
en  Bretagne ,  dans  le  Calvados  et  le  Finisterre  ; 
on  en  signale  en  Ecosse,  en  Irlande,  en  Russie, 
en  Suède,  dans  les  Pays-Bas.  Alexandre  le  Grand 


—    1G5    — 

les  regardait  avec  étouiiement  chez  les  Scythes , 
au-delà  de  Flaxartes  (aujourd'hui  Si-liotm  ou 
Si-Daria)  '.  Atkinson  en  retrouve  presque  aux 
mêmes  lieux ,  en  Sibérie ,  au  pied  des  monts 
Alas-Tau ,  dans  les  steppes  parcourrues  par  les 
Kirghiz  -.  Le  général  Faidherbe  les  décrit  en 
Afrique,  et  madame  Ida  Pfeiffer,  Tun  des  rares 
voyageurs  qui  aient  visité  l'intérieur  de  Mada- 
gascar, mentionne  ces  rochers  isolés ,  là  où  le 
sol  ne  se  compose  partout  que  de  terrains  n'of- 
rant  pas  la  moindre  trace  de  pierres  ^  La  célè- 
bre voyageuse  autrichienne  dit  expressément  : 
«  Déjà  en  plusieurs  endroits  j'avais  remarqué 
»  des  grosses  pierres  tout  droites ,  et  toujours 
»  placées  à  quelques  milles  des  villages.  Les 
«unes  servent,  me  dit-on,  de  monumpnts  funé- 
»  raires ,  et  les  autres  marquent  les  lieux  où  se 
))  tiennent  aujourd'hui  les  marchés  hebdoma- 
»  daires  K   » 


»  QuixTE  CuBCE,  VII,  38.  —  Pline,  Hist.  nat.,  VI,  16,  18,  en  font 
des  autels  consacrés  à  Hercule  et  à  Bacchus. 

*  Oriental  and  Western  Siberia.  London,  1858.  Travels  in  tlie 
région  of  tlie  upper  and  lover  Amoor. 

Les  monts  Alas-Tau  ou  lyihtou  (monts  de  Dieu)  font  partie  du 
groupe  du  petit  Altaï  ou  Altai  russe;  ils  en  sont  le  point  culminant 
d'après  M.  de  Humbold. 

*  Voyage  à  Madagascar,  chap.  IX,  in  fine. 

*  Voyage  à  Madagascar,  cliap.  X. 

Il  nous  a  été  donné  de  voir  une  vue  photographique  de  ces  rochers, 
rapportée  par  M.  le  Comte  de  C,  l'un  de  nos  parents,  qui  a  long- 
temps habité  Mayotte,  et  qui  a  fait  des  excursions  à  Madagascar.  Il 
est  évident  que  ces  blocs  de  rochers,  que  l'on  trouve  plantés  près 
de  Marambotre  sur  le  chemin  de  ïamatave  à  Tananarive,  sont,  si  pas 
un  cromlech  régulier,  tout  au  moins  une  série  de  menhirs. 


—    166    — 

Un  seul  peuple  a-t-il  pu  dresser  tous  ces  men- 
hirs ,  poser  tous  ces  dolmens,  ranger  tous  ces 
cromlechs  ?  —  Au  lieu  d'une  coutume  spéciale  à 
un  peuple  déterminé ,  n'est-ce  pas  plutôt  l'ex- 
pression d'une  idée  générale  à  l'homme  primitif, 
rudiment  de  celle  qui  a  fait,  plus  tard,  élever 
les  pyramides ,  tombeau  des  Pharaons  d'Egypte  ; 
les  pagodes  qui  abritent  les  restes  des  rajahs  de 
l'Inde,  ou  le  tombeau  des  empereurs  de  la  Chine  ; 
les  mosquées  et  leur  minarets  qui  recouvrent  la 
dépouille  des  sultans  ;  les  églises  et  leurs  tours 
majestueuses  ou  élancées ,  dans  lesquelles  les  rois 
et  les  grands  ont  voulu  placer  le  lieu  de  leur 
repos,  autour  desquelles  le  pauvre  aime  à  dormir 
son  dernier  sommeil. 

Arrivés  à  Thy-le-Baudhuin ,  la  première  visite 
fut  pour  V oppidum ,  à  l'existence  duquel  nos  ex- 
cursionnistes ne  croyaient  pas  beaucoup.  Et 
pourtant ,  il  faut  bien  reconnaître  que  tout  sem- 
ble se  réunir  pour  amener  à  admettre  que ,  dans 
le  lieu  signalé ,  les  anciennes  peuplades  qui  ha- 
bitaient notre  pays  ont  établi  un  campement.  En 
effet,  après  avoir  remonté  la  côte  qui  forme  paroi 
à  l'entonnoir  au  fond  duquel  se  trouve  Thy-le- 
Baudhuin  ,  en  amont  de  la  Thyria ,  on  arrive  sur 
un  plateau  étroit  et  pierreux  qui,  se  rétrécissant 
rapidement ,  devient  bientôt  une  véritable  arrête 
aux  flancs  escarpés,  et  se  termine  brusquement 
en  pointe  arrondie  là  où  les  matières  en  fusion 
dans  les  temps  primitifs,  ont  émergé  ou  rencon- 
tré les  eaux  et  se  sont,  par  le  refroidissement, 
constituées    en    roches.    Ce    lieu    porte    encore 


—     167     — 

aujourd'hui  le  nom  de  fvhesselet  (polit  château 
fort).  Toute  cette  montagne  est  abrupte,  et  il 
est  évident  qu'un  petit  nombre  de  défenseurs 
pouvait  rendre  le  plateau  inaccessible  avant  Fin- 
vention  des  armes  à  feu.  Les  armes  de  jet ,  en 
effet,  lancées  du  haut  de  l'escarpement,  devaient 
être  presque  infailliblement  meurtrières ,  leur 
force  d'impulsion  étant  augmentée  par  la  chute 
et  par  le  poids  ;  tandis  que  celles  parties  d'en 
bas  devaient  s'arrêter  avant  d'avoir  atteint  la 
crête  sur  laquelle  se  trouvaient  les  défenseurs, 
ou  n'y  arrivaient  que  privées  de  vigueur,  tehnu. 
imbelle,  sine  ictn ,  comme  dit  Virgile.  Cette  for- 
teresse naturelle  n'avait  qu'un  côté  accessible , 
c'était  vers  la  plaine  où  l'arrête  se  développe 
et  s'élargit  ;  ce  côté  avait  besoin  d'être  dé- 
fendu ;  aussi  était-elle  protégée  par  une  triple 
ligne  de  fossés  creusés  'à  vif  dans  le  roc  , 
et  qu'on  reconnaît  encore  parfaitement  de  nos 
jours.  Au  pied  du  point  culminant  de  Voppiduni 
verdit  une  étroite  prairie  dont  le  sol ,  comme  il 
est  aisé  de  s'en  assurer,  n'est  formé  que  d'allu- 
vions  à  peine  asséchées  et  qui  a  dû  former ,  aux 
temps  anciens,  un  infranchissable  marais  dans 
lequel  s'épendaient  les  eaux  de  la  Thyria.  Ce  qui 
prouve  avec  quelle  intelligence  ce  lieu  avait  été 
choisi  par  nos  pères  pour  y  réfugier  leurs  per- 
sonnes, leurs  familles  et  leurs  biens,  c'est  qu'à 
mi-côte  des  flancs  de  la  montagne  sourd,  cachée 
par  un  rocher,  une  fontaine  dont  l'eau,  d'une 
incomparable  limpidité ,  est  tellement  abondante 
qu'elle  peut  fournir ,  sans  tarir  jamais ,  à  tous  les 


-     1G8    — 

besoins  d'une  grande  agglomération  d'hommes  et 
d'animaux.  Un  paysan  du  village  surnommé  li  vi 
t'clmf  {le  vieux  chat)  a  trouvé  dans  cet  oppidum 
des  fers  de  lances ,  des  pointes  de  flèches  et  des 
carreaux  de  javelots.  Nos  curieux  auraient  bien 
désiré  se  procurer  quelques  échantillons  de  ces 
trouvailles;  mais  à  Thy-le-Baudhuin,  le  maréchal 
du  lieu  transforme  les  armes  historiques,  échan- 
gées comme  vieux  fer,  en  crampons  ou  en  clous. 
C'est  tout  le  cas  qu'en  fait  l'ignorance.  On  a 
aussi  trouvé  dans  l'enceinte  fortifiée  quelques- 
unes  de  ces  pierres  travaillées  et  polies  par 
l'homme  primitif  pour  servir  de  haches  ou  pour 
en  faire  ces  couteaux,  dont  Dieu  lui-même,  au 
témoignage  de  la  Bible,  avait  indiqué  l'emploi , 
en  ordonnant  à  Josuë  de  s'en  servir  pour  prati- 
quer une  seconde  fois  l'opération  délicate  qui 
faisait  reconnaître  les  juifs  des  Gentils  i.  Encore 
de  ces  objets  qu'on  retrouve  parmi  les  vestiges 
qu'ont  laissés  après  eux  tous  les  peuples  du  monde, 
et  qui  sont  restés  en  usage  encore  aujourd'hui  dans 
les  peuplades  demeurées  stationnaires  qui  habi- 

*  Eo  tempore  ait  Dominus  ad  Josuë  :  fac  tibi  cultros  lapideos  et 
circumcide  secundo  filios  Israël.  (Josue,  V,  II).  Conf.  p.  584.  Bulle- 
tin de  V Académie  d^ archéologie  de  Belgique,  deuxième  série). 

Les  commentateurs  de  la  Bible,  qui  ont  écrit  antérieurement  aux 
découvertes  des  antiquaires  modernes,  ont  été  singulièrement  am- 
barrassés  par  ces  mots  :  Cultros  lapideos,  qui,  pour  eux,  ne  repré- 
sentaient aucun  objet  connu.  Une  figure  de  rhétorique  est  venue, 
comme  le  Deus  ex  machina,  les  tirer  de  peine.  Ils  ont  pensé  qu'il 
s'agissait  de  couteaux  aiguisés  sur  la  pierre  ;  de  là  la  traduction  : 
couteaux  tranchants.  Aujourd'hui,  on  sait  ce  (jue  sont  les  couteaux 
de  pierre,  et  chaque  collection  en  possède  qui  sont  plus  ou  moins 
bien  conservés. 


—     109     — 

tent  les  îles  de  la  Polynésie  et  la  Nouvelle-Zélande. 
Quel  argument  en  faveur  do  Tunité  d'origine  de 
la  race  humaine  î  et  comment  expliquer  que  cer- 
tains des  singes,  nos  premiers  pères,  selon  quel- 
ques disciples  français  de  Darwin  dont  ils  ont 
amplifié  la  thèse ,  n'aient  pas  continué  à  dresser 
des  pierres  pour  marquer  la  place  de  leurs  tom- 
beaux, à  tailler,  puis  polir  le  silex  ou  le  basalte, 
à  bâtir  des  édifices  et  des. villes,  à  travailler  les 
métaux ,  ainsi  que  l'ont  fait ,  selon  eux ,  leurs 
congénères  qui  se  transformaient  peu  à  peu  en 
hommes?  Pourquoi  certains  de  ces  singes  auraient- 
ils,  en  cela  seulement,  oublié  Tinstinct  d'imitation 
qui  caractérise  leur  race  '  ? 

Revenons  encore  une  fois  à  Thy-le-Baudhuin, 
et  signalons  qu'aujourd'hui  l'attention  des  indi- 
gènes est  appelée  sur  les  découvertes  que  Ion 
peut  faire  sur  leur  sol.  En  effet,  sur  le  plateau 
qui  couronne  la  berge  de  la  rive  gauche  de  la 
Thjn-ia ,  vis-à-vis  de  Vop]Mvm ,  à  environ  quinze 
cents  mètres  de  la  chaussée  romaine,  qui  part, 
comme  embranchement ,  de  Givrj,  et  passe  à 
Strée,  Chastrès,  Laneffe,  Morialmé,  Florennes, 
Flavion  ,  Anthée ,  pour  traverser  la  Meuse  à 
Hastières,  M.  Van  Hollebeke  a  découvert  un  ci- 

*  D'après  un  très-savant  étymologiste ,  un  oppidum  doit  aussi 
exister  à  Gourdinnes,  non  loin  de  Thy-le-Baudhuin.  En  effet,  dit-il, 
Gourdhines  vient  de  Gor-Dunmn,  arx  alta,  forteresse  élevée.  Donc 
la  forteresse  doit  exister.  Le  raisonnement  est  concluant....  pour  les 
étymologistes.  Seulement,  nous  connaissons  Gourdinnes,  et  nous  y 
avons,  en  vain,  cherché  l'oppidum.  Nous  conseillons  beaucoup  aux 
amateurs  qui  voudraient  le  retrouver,  de  bien  chercher,  et  nous  les 
prions  de  nous  en  indiquer  ensuite  l'emplacement. 

12 


~     170     - 

metière  romain  qui  lui  a  donné  beaucoup  d'ob- 
jets précieux,  et  notamment  des  médailles  De- 
puis que  les  paysans  ont  vu  que  l'on  faisait  des 
frais  de  fouilles  pour  retirer  de  la  terre  des  vieux 
pots  gris ,  pour  y  ramasser  des  ferrailles  rongées 
par  la  rouille  ,  et  des  sous  oxydés  qui  n'ont  pas 
cours  au  cabaret,  ils  se  sont  promis  de  conserver 
tous  les  objets  qu'ils  rencontreront  pour  les  re- 
vendre aux  amateurs  ,  que  ,  dans  le  fond  de  leur 
conscience ,  ils  estiment  comme  des  échappés  de 
Glieel.  Il  y  aura  donc  récolte  à  faire  pour  ceux 
qui  viendront  dans  l'avenir  ;  mais  il  faudra  se 
méfier  des  vieux  liards  de  Lwge,  qu'on  ne  man- 
quera pas  de  leur  offrir,  comme  on  l'a  déjà  fait 
à  nous-mêmes. 

En  redescendant  à  Thy-le-Baudlmin  et  remon- 
tant la  colline  opposée,  on  rencontre  la  terre  aux 
tilias  (terre  aux  tuileaux) ,  où  chaque  année  la 
charrue  ramène  au  jour  des  monceaux  de  tessons 
ou  de  morceaux  dCimbrices  et  de  fegulœ;  où,  par- 
fois, le  soc  se  brise  contre  des  substructions  que 
le  laboureur  se  hâte  de  démolir.  Sans  nul  doute 
il  y  eut  encore  là  une  villa  dépendant  du  groupe 
d'habitations,  dont  M.  Van  Hollebeke  a  exhumé 
l'une ,  un  peu  plus  loin .  au  territoire  d'Han- 
sinnes  et  que  nous  avons  déjà  mentionnée.  Cette 
dernière  a  été  complètement  explorée ,  et  on  y 
mit  au  jour  une  chambre  souterraine  décorée  de 
cinq  niches.  —  Serait-ce  encore  un  lararium*  ? 

•  Voir  Documents  et  rapports  de  la  Société  archéologique  et  aléon- 
tuloyiquc  de  Cluo'lcroi,  vol.  VII,  I,  p.  nxiv  et  suiv. 


—     171     — 

Sur  cette  même  colline  se  trouvait  le  menhir; 
nous  disons  :  se  Irouvait,  car  il  n'existe,  hélas! 
plus.  Pour  savoir  ce  qu'il  était  devenu,  et  si  quel- 
que légende  ne  se  rattachait  pas  à  son  existence 
passée ,  ou  à  sa  disparition ,  nos  promeneurs 
s'adressèrent  à  bonne  source.  Ils  avaient  remisé 
leur  véhicule  chez  un  cultivateur  surnommé  :  le 
notaire,  et  y  avaient  rencontré  une  Grand'mère  bien 
digne  de  figurer  au  sabbat  avec  les  sorcières  de 
Macbeth.  Quatre-vingts  ans,  la  taille  courbée,  vi- 
goureuse ménagère  encore,  une  figure  dans  la- 
quelle un  nez  en  bec  de  corbin  essayait  de  donner 
l'accolade  à  un  menton  velu  comme  celui  d'une 
vieille  chèvre,  une  épaisse  moustache  grise,  des 
yeux  pétillants  de  malice,  un  type,  hac/ied  fl\il- 
loon  face,  disent  les  Anglais.  Cette  vieille  de- 
vait savoir  quelque  chose  ;  mais ,  comme  tous 
les  paysans,  elle  était  défiante,  et  point  n'était 
facile  de  la  faire  causer.  L'offre  d'un  petit  verre 
lui  délia  la  langue,  et  elle  osa,  après  s'être  nar- 
quoisement  signée,  parler  d'el  pire  iVou  diale  (de 
la  pierre  du  diable),  comme  on  appelait  le  men- 
hir quand  il  était  encore  debout. 

«  Oh!  mes  fils,  dit-elle  (en  wallon,  bien  en- 
»  tendu),  c'était  une  bien  grosse  pierre,  allez! 
»  aussi  haute  que  le  clocher  de  l'église  et  aussi 
»  grosse  qu'une  meule  de  grain!  Il  n'y  a  pas, 
))  dans  notre  pays,  de  pierre  pareille.  Seulement, 
»  quand  nous  allons  au  tribunal  à  Dinant,  on 
))  nous  mène  voir  li  rolche  à  Bayau  (la  roche  à 
»  Bayard),  sur  laquelle  on  nous  montre  encore  le 
»  pas  du  cheval  de  ce  gendarme  du  vieux  temps. 


—    172    — 

»  Notre  pierre  était  tout  aussi  droitement  plantée 
»  que  celle-là;  mais  elle  n'était  pas  de  la  môme 
•»  couleur.  Elle  était  si  dure,  qu'il  y  a  bien  des  an- 
»  nées,  l'an  que  j'ai  été  ki'cr  Joseph  ^,  le  fils  de 
»  ma  fille,  on  est  venu  la  renverser,  et  qu'on  a 
»  transporté  les  morceaux  à  Cliarleroi.  On  nous 
»  a  dit  que  ces  morceaux  avaient  servi  à  con- 
))  struire  un  fourneau  pour  fondre  le  fer,  comme 
»  à  Thy-le-Cliâteau  ;  et  ce  n'est  pas  étonnant 
»  qu'elle  put  supporter  le  feu ,  puisqu'elle  venait 
»  de  l'enfer  et  que  c'était  le  diable  qui  l'avait 
»   apportée  -.   » 

—  «  Il  a  dû  se  donner  bien  de  la  peine  pour 
»  l'apporter  et  la  planter  là  !   » 

—  «  Probable  qu'il  a  bouté  un  rude  coup, 
»  puisque  la  pierre  portait  encore  la  trace  de  ses 
»  griffes;  et  comme  il  l'avait  apportée  encore 
-»  toute  chaude,  en  l'appuyant  sur  sa  tête,  on  y 
»  voyait  l'empreinte  qu'y  avait  laissée  la  floche 
«   de  sa  harette.  » 

—  «  Oh  !  oh  !  fit  l'un  de  nous  ,  mais  est-ce  que 
»  le  diable  ne  hantait  pas  cette  pierre  à  certains 
»  jours?  et  les  sorcières  du  pays  ne  s'y  réunis- 
»  saient-elles  pas  le  samedi  à  minuit?  » 


*  Lever  un  enfant,  le  conduire  au  baptême,  c'est  le  levure  pue 
rum,  resté  chez  nous  depuis  les  Romains.  On  sait,  qu'à  Rome,  quand 
un  enfant  naissait,  on  le  déposait  à  terre.  Le  père  devait  le  relever 
pour  le  déclarer  sien,  et  l'accepter  dans  la  famille.    (Séneque  de 
Benef.  III,  ch.  2.) 

^  Les  morceaux  du  menhir,  ou  été  débités  en  moellons ,  et  ont 
servi  au  revêtement  intérieur  du  premier  fourneau  dans  lequel  on 
ait  fait  usa^e  du  coke,  dans  le  bassin  de  Cliarleroi.  Ce  fourneau  était 
celui  des  Ilauchios,  à  Marciuelle,  et  avait  été  étalili,  vers  1825,  par 
M.  Iluart-Cliapel.  Il  est  complètement  disparu  aujoui-d'hui. 


—    1  Tr;    — 

—  «  Ça,,  je  lai  entendu  dire,  mais  je  ne  l'ai 
»  pas  vu.  Quand  j'ai  vu  le  diable,  dans  ma  jeu- 
»  nesse,  ce  n était  point  là!   » 

—  «  On  devait  pourtant  avoir  peur  d  aller  se 
»  reposer  près  de  cette  pierre  venue  de  l'enfer?  » 

—  ((  Ma  foi,  pas  trop;  puisque,  chaque  année, 
»  en  revenant  du  pèlerinage  à  Notre-Dame  de 
»  Walcourt,  les  jeunes  hommes  et  les  jeunes  filles 
»  y  formaient  une  ronde  et  dansaient  tout  autour  ; 

»  puis » 

—  Substituons  notre  récit  à  celui  de  la  vieille, 
que  les  savants,  pudibonds  comme  Faust  avant  sa 
métamorphose,  ne  pouraient  lire  sans  rougir  sous 
leurs  lunettes  —  puis,  pour  témoigner  leur  mépris 
au  diable,  ils  souillaient  la  pierre  d'une  façon  si 
étrange,  que  le  souvenir  de  cette  scène  fit  encore 
rire  notre  grave  majeur,  qui  se  rappelait  avoir, 
dans  sa  jeunesse,  fait  partie  de  la  bande  joyeuse. 


Comte  DE  Glymes. 


174 


LES    BLASONS 


DES 


CHEVALIERS  DE  L'ORDRE  DE  LA  TOISON  D^OR, 


CONSERVES 


DANS  l'Église  de  saint-eombaut  ,  a  maldsES. 


L'église  métropolitaine  de  Saint-Rombaut  à  Ma- 
lines  renferme  une  série  de  peintures  à  lliuile, 
représentant  les  blasons  des  chevaliers  de  la  Toison 
d'or,  qui  figurèrent  en  personne  ou  nominative- 
ment au  cliaj^itre  de  l'ordre ,  tenu  sous  la  prési- 
dence de  Philippe  le  Beau,  le  24  mai  1491,  dans 
le  chœur  du  temple. 

L'exécution  de  ces  panneaux  héraldiques,  hauts 
chacun  de  0'",87  sur  0'",55  de  large,  est  si  remar- 
quable que  ceux-ci  constituent  de  vrais  tableaux  : 
le  dessin,  le  coloris,  la  distribution  des  clairs  et 
des  ombres ,  la  manière  dont  les  lambrequins  et 
les  décorations  sont  traités,  la  finesse  de  la  touche 
trahissent  la  main  d'un  maître  très-habile.  —  Bien 
que  nous  n'ayons  aucun  motif,  appuyé  de  preuves, 
pour  en  désigner  l'auteur,  nous  soupçonnons  que 


—     175    — 

ces  œuvres  poiuTaient  être  attribuées  au  pein- 
tre Baudouin  van  Battel,  alias  vander  Wyck,  qui 
florissait  à  Malines  à  la  fin  du  XV''  siècle.  Cet  ar- 
tiste, qui  était  peintre  en  titre  de  la  ville,  cultivait 
avec  succès  la  peinture  de  chevalet  et  la  peinture 
murale  aussi  bien  que  la  peinture  décorative.  En 
effet,  les  comptes  communaux  de  Malines  rappor- 
tent que  ce  fut  lui  qui  ordonna  et  qui  dirigea  les 
Ommegang  annuels  depuis  1466  jusqu'en  1503  — 
qu'à  diverses  reprises  il  polycliroma  des  statues  — ■ 
qu'il  décora  des  appartements  au  Parlement  et  à 
l'hôtel  de  ville  —  qu'il  exécuta  les  blasons  qui 
servirent  à  la  joyeuse  entrée  de  Marie  de  Bour- 
gogne —  qu'il  acheva  un  tableau  pour  l'autel  de 
la  Vierschaer  —  qu'il  peignit  dans  le  salon  de  la 
même  chambre  la  grande  scène  du  jugement  der- 
nier, et  dans  le  vestibule,  conduisant  à  cette  pièce, 
une  image  de  la  Sainte- Vierge  —  qu'il  orna  le 
palais  d'Autriche  de  trois  tableaux,  dont  les  sujets 
nous  sont  inconnus  —  enfin  qu'il  entreprit  une 
foule  d'autres  œuvres,  moins  importantes  '. 

Malheureusement  ces  blasons  de  la  Toison  d'or, 
intéressants  spécimens  de  l'art  héraldique  du  XV- 
siècle,  sont  aujourd'hui  dans  un  état  déplorable 
de  conservation  ;  en  plusieurs  endroits  se  manifes- 
tent les  soufflures  et  les  écaillures,  précurseurs 
peu  douteux  d'une  destruction  prochaine. 

Toutefois  s'il   est  temps  encore  de  porter  re- 


'  Em.  Neeffs,  Histoire  de  la  peinture  et  de  la  sculjiture  à  Malines , 
t.  I,  pp.  132  et  suiv. 


—    176    — 

mècle  au  mal,  il  conviendrait  de  ne  point  tarder, 
car  les  soulèvements  de  la  couleur  augmentant, 
l'œuvre  de  la  restauration  deviendrait  d'autant 
plus  difficile,  que  les  encadrements  des  tableaux 
étant  cloués  sur  les  panneaux  mêmes,  l'on  risque- 
rait en  détachant  les  cadres  de  faire  tomber  la 
couleur  qui  est  déjà  dans  une  situation  si  précaire. 

En  1838,  par  les  soins  du  comte  A.  de  Beauf- 
fort ,  les  blasons  de  la  Toison  d'or  subirent  une 
première  restauration  ;  mais  nous  ne  pensons  pas 
que  c'est  alors  que  l'on  s'est  permis  de  repeindre 
quelques  parties  des  tableaux  ;  les  couches  de  cou- 
leurs qui  y  sont  surappliquées  paraissent  d'une 
date  plus  ancienne. 

Les  blasons  sont  au  nombre  de  trente-deux , 
plus  trois  panneaux  de  texte  dont  deux  portent 
des  jugements  rendus  contre  des  membres  de 
l'ordre.  La  phipart  des  peintures  semblent  être  de 
la  même  main,  cependant  quelques-unes  d'entre 
elles  pourraient  avoir  été  exécutées  par  un  ar- 
tiste ou  par  un  élève  moins  exercé  que  l'auteur 
principal. 

Actuellement  les  armoiries  sont  appendues , 
sans  ordre ,  dans  deux  chapelles  du  pourtour  ; 
mais  jusqu'en  1810  elles  occupaient  dans  le  chœur 
leur  place  primitive  ;  après  cette  époque ,  elles 
disparurent  et  elles  furent  reléguées  dans  les 
combles  de  la  cathédrale  où  elles  demeurèrent 
jusqu'en  1838. 

Chaque  tableau  porte  sur  les  parties  supérieure 
et  inférieure  du  panneau  la  désignation  et  les 
titres  du  chevalier.  Ces  inscriptions  se  détachent 


—     177    — 

en  caractères  d'or,  fort  ornés  et  fort  gracieux,  sur 
fond  noir  ;  les  écussons  sont  reproduits  avec  leurs 
émaux  et  leurs  métaux  respectifs. 

Corneille  Van  Gestel ,  Ilistoria  sacra  et  profana 
arehiepiscopatus  Mechliniensis  ^  1725,  et  l'auteur 
de  l'ouvrage  :  Provincie,  stadt,  ende  dislrict  van 
Mechelen  opgeheldert ,  1770,  rapportent  que  de 
leurs  temps  les  blasons  des  confrères  de  l'ordre 
de  la  Toison  d'or  occupaient  encore  leurs  places 
et  rano's  séculaires  dans  les  stalles  du  chœur. 
D'après  ces  auteurs ,  du  côté  du  midi  étaient  pla- 
cées les  armoiries  suivantes  : 

Maximilien ,  roi  des  Romains  —  Philippe  d'Au- 
triche ,  comte  de  Charolais  —  Jean ,  roi  d'Ar- 
ragon  et  de  Navarre  —  Ferdinand  ,  roi  de  Naples 
et  de  Sicile  —  Jean  de  Melun  —  Louis  de  Bruges 

—  Philippe  de  Savoye  —  Philippe  de  Croy  — 
Pierre  de  Luxembourg.  —  L'écusson  de  Jacques 
de  Savoye  était  remplacé  par  une  inscription  que 
nous  citerons  plus  loin.  —  Claude  de  Toulonjon 

—  Pierre  de  Hennin  —  Jean  de  Ligne  —  Bau- 
douin de  Lannoy  —  Guillaume  de  la  Baume  — 
Jean  de  Berghes  —  Philippe  d'Autriche ,  comte 
de  Charolais. 

Du  côté  du  nord  figuraient  les  blasons  por- 
tés par  : 

L'archiduc  Philippe  —  Philippe ,  comte  de  Cha- 
rolais —  Ferdinand ,  roi  de  Castille  et  d'Arragon 

—  Edouard,  roi  d'Angleterre  —  Jean,  duc  d'Alen- 
çon  —  Jean  de  Lannoy  —  Jean,  duc  de  Clèves 

—  Antoine,  bâtard  de  Bourgogne.  —  Adolj^he 
de  Clèves  —  Engelbert  de  Nassau  —  Guillaume 


—    178    — 

d'Egmond  —  Philippe  de  Bourgogne  de  Bevre  — 
Josse  de  Lalaing  —  Jacques  de  Luxembourg  — 
Bertremy  de  Lichtenstein  —  Martin  de  Polheim. 
—  Les  armoiries  de  Philippe  Pot  étaient  rempla- 
cées par  une  sentence  dont  le  texte  suivra. 

Ni  van  Gestel,  ni  van  den  Eynde,  qui  est  l'auteur 
du  livre  :  Provincie,  stadt  ende  district  van  Mechelen 
oiigeheldert ,  ni  Les  inscriptions  monumentales  et 
funéraires  de  la  province  d'Anvers ,  ne  rapportant 
d'une  façon  exacte  les  inscriptions  marquées  sur 
les  panneaux  blasonnés,  nous  donnerons  ces  der- 
nières telles  que  nous  les  avons  levées  sur  les  ori- 
ginaux qui  existent  encore.  La  premier  panneau, 
sans  armoiries,  porte  : 

L  Anno  Dni  millesim.  CCCC"  XCI 

1491 
La  ni-e  Seigii  mil.  CCCC<^  XCI. 

Sur  les  autres  blasons,  on  lit  : 

2.  Maxim"  par  la  g.  de  Dieu  duc  d'Aus.  de  Bourgo.  de  L. 
o.  Très  hault,  très  puissât  Prince  môseig.  Phë  d'Aus- 
triche  côte  de  Charoloys. 

4.  Tr.  ht  tr.  ex  Prince  don  Jeâ  roy  d'Ar.  et  de  Navâe. 

IP  du  N.  (Jean  roi  d'Arragon  et  de  Navarre.  IP  du 
nom.) 

5.  Très  hault  et  très  excell.  don  Ferdinand  roy  de  Naples. 

6.  Jehan  de  Melhun,  seig.  d'Anthoing,  trespasse. 

7.  Louis  de  Bruges,  s'"  de  Gruythuyse ,  prce. 

8.  rhô  de  Savoye,  côte  de  Baugey,  s' de  Bresse  (Philippe 
de  Savoye,  comte  de  Baugé). 

9.  Phë  de  Croy  Rent.  de  Chimay  tjjass. 

10.  Pierre  de  Luxeml).  côte  de  S.  Piiol  tî'pass.  (Pierre  de 
Luxembourg,  comte  de  S.  Pol). 


—    179    — 

11.  Au  lieu  et  place  des  insignes  de  Jacques  de 
Savoie,  comte  de  Romont,  baron  de  Vaux,  lequel, 
abandonnant  la  cause  du  duc  de  Bourgogne,  s'était 
retiré  en  France  «  avec  très-grande  perte  de  sa 
»  fortune,  honneur  et  réputation  %  »  se  trouve  la 
sentence  : 

Pour  ce  que  Mess.  Jacques  de  Savoye,  conte  de  Ramond 
adjourné  par  lettres  du  très  hault,  excellent  et  très  puis- 
sant Maximilien,  par  la  grâce  de  Dieu  roy  des  Romains, 
touiours  auguste.  Mons"'  Philippe  par  la  mesme  grâce 
archiduc  d'Autriche,  duc  de  Bourgoigne,  de  Lothier,  de 
Brabant,  etc.,  chief  et  souverain  dudit  ordre,  il  s'est  armé 
et  de  son  auctorité  privé  porté  contre  le  roy  et  son  dit  fils, 
leur  a  fait  guerre  et  commis  plusieurs  aultres  cas  délicts 
reprouchables  —  dignes  de  châtiment  —  et  a  vengence  de 
à  Dieu.  Fait  a  chapitre  gênerai  dudit  ordre  tenu  a  INIalines 
le  XXIV  jour  de  May  Fan  MCCCC  quatre-vingts  et  onze. 
Glaude  de  Toulonion,  seign.  de  la  Bastie,  d'Aultray,  de 
Champlite,  baron  de  Bourbonlieux  et  de  Sandrey,  Pierre 
de  Hennin,  seign.  de  Bossu,  trépasse,  Jehan,  baron  de 
Ligne,  seign.  de  Bailleul,  trépasse,  Baudouin  de  Lannoy, 
seign.  de  Molenbos  et  Solre,  Guillaume  de  Baulme,  seign. 
d'irlains,  Jehan  de  Berghes,  seign.  de  Walhain,  très  puis- 
sant prince  Monseign.  Philippe  d'Autriche,  conte  de 
Charloys. 

Nous  ferons  observer  que  le  baron  de  Reiffen- 
berg,  dans  son  Histoire  de  l ordre  de  la  Toison  dor, 
(p.  198),  rapporte  le  jugement  contre  Jacques  de, 
Savoye,  d'après  Molinet,  en  cP autres  termes  que 


'  Le  blason  des  armoiries  de  tous  les  chevaliers  de  l'ordre  de  la 
Toison  d'or,  par  J.  B.  Maurice.  La  Haye,  1667,  p.  05. 


—     ISO    — 

ceux  que  nous  transcrivons  ici.  Suivant  le  même 
Molinet,  M.  de  Reiffenbergh  fait  connaître  la  sen- 
tence prononcée  contre  Philippe  de  Crèvecœur, 
seigneur  d'Esquerdes  ;  mais  celle-ci  n'existe  pas  à 
Saint-liombaut  ^ 

12.  Glaude  de  Toulonio  de  la  Bastie,  d'Aultray,  de 
Cliâplite,  barô  de  Bourboulies  de  Sandrey. 

13.  Pierre  de  Hennin,  seign""  de  Bossa,  trespasse. 

14.  Jeba,  barô  de  Ligue,  s' de  Bailleul,  trespasse. 

15.  Baudouin  de  Lannoy,  s""  de  Mulëboys  de  Solre. 

16.  Mess.  Guil.  de  la  Baume,  s''  d'irlain.  Mt.  s.  S.A.  ctm. 

17.  Jean  de  Berghes,  seig*"  de  Walhain. 

18.  Tr.  bault  et  tr  ex.  tr.  puiss.  Priée  don  Fernand  roy 
d'Aragon,  de  Castil. 

19.  Edouard  roy  d'Angleterre,  dlrlande. 

20.  Jehan,  duc  d'Alenson,  conte  du  Perches,  trespasse. 

21.  Mess.  Jan,  seigneur  de  Lannoy. 

22.  Jehan  duc  de  Clèves,  trespasse. 

23.  Anthoyne,  bastard  de  Bourgoigne. 

24.  Adolf  de  Clèves,  seig.  de  Ravestayn. 

25.  Engl.  cote  de  Nass.  et  de  Vianden,  h.  de  Breda. 
S.  U.  (Engelbert  de  Nassau). 

26.  Guilhiurae,  seigneur  d'Egmôde,  trespasse  (Guillaume 
d'Egmond). 

27.  Phë  de  Bourgoigne,  seign.  de  Bevre. 

28.  Josse  de  Lalaing  s^"  de  Montigny,  trespasse. 

29.  Jaques  de  Luxemb.,  seig.  de  Fiennes,  trespasse. 

2  «  Pour  ce  que  vous  Messire  Philippe  de  Crèvecœur,  soigneur  de 
Querdcs,  ja  soit  ce  qu'il  vous  ait  esté  suffisamment  signifié  que  par 
sentence  de  ccstuy  très  noble  ordre  le  roy,  j^ère  et  chef,  monseigneur 
son  fils,  chef  et  souverain,  et  messeigneurs  de  l'ordre  vous  déclarent 
avoir  commis  crime  de  parjuremcnt.  Fait  au  ciiapitre  gênerai  dudict 
ordre  àMalines  le  XXIIII  jour  de  May  de  l'an  MCCCC  quatre  vingts 
et  onze.  » 


—    181     — 

30.  Bertreniy,  s.  de  Lichtestaiii. 

31.  Martin,  seign.  de  Polliaim. 

32.  Les  armoiries  de  Philipi^e  Pot  étaient  remiilacées 
par  le  jugement  suivant  : 

«  Puisque  vous  Philippe  Pot,  seign'"  de  la  Roche,  de 
Nolay,  que  jea  soit  ce  qu'il  ait  esté  souffisament  signitiae 
que  par  sentence  de  cettui  très  nohle  ordre  de  la  Thoison 
d'or  en  estes  duement  privé  et  pour  ce  vous  ait  esté  ja  par 
deux  fois  express,  enjoiuct  de  renvoyer  le  collier  dudit 
ordre  que  soliez  porter  5  intimation  que  se  ne  le  faisiez 
l'on  procederoit  contre  vous  selon  les  statuts  dudict  ordre 
et  aultrement  comme  il  appartiendroit  et  néanmoins  en 
enfraignent  le  serment  que  vous  avez  à  l'ordre,  ne  l'avez 
renvoie  comme  vous  deviez,  ne  sur  ce  baillie  excuse  souf5fi- 
saute,  le  roy  V  chef  M^'  son  fils  et  souverain,  etc.  Messers 
les  chevaliers  dudict  ordre  vous  déclarent  avoir  commis 
crime  de  perjurement.  Fait  à  chapitre  gênerai  dudict 
ordre  tenu  k  Malines  le  xxnii  jour  de  may  MCCCC  quatre 
vingts  et  onze.  » 

Ce  chevalier  fut  exclu  de  Tordre  parce  qu'il 
avait  embrassé  la  cause  du  roi  de  France,  trahis- 
sant ainsi  la  fidélité  qu'il  devait  à  la  maison  de 
Bourgogne ' . 

Le  chapitre  de  la  Toison  d'or,  tenu  à  Malines  le 
24  mai  1491,  fut  présidé  par  l'archiduc  Philippe 
le  Beau,  âgé  alors  de  treize  ans;  ce  prince  rem- 
plaça son  père  qui  était  retenu  en  Allemagne. 

Le  baron  de  Reiffenberg  fournit  les  renseigne- 
ments qui  suivent  sur  la  23""'  fête  de  l'ordre, 
célébrée  à  Malines  l'an  1491.  Nous  détachons  de 
son  récit  les  faits  principaux  ^ 

*  J.  B.  Maurice,  ouvrage  cité,  p.  64. 

*  Histoire  de  l'ordre  de  la  Toison  d'or,  1S30,  p.  198, 


—    182    — 

Le  22  janvier  1490  (v.  s.)  : 

((  Le  roi  des  Romains  écrivit  de  Linz  à  Fabbé 
de  Saint-Bertin ,  chancelier  de  l'ordre ,  que  le 
chapitre  de  la  Toison  d'or  se  réunirait  le  2  mai 
prochain  soit  à  Namur ,  soit  dans  une  autre  ville 
où  le  duc  Philippe,  son  fils,  serait  en  sûreté.  L'on 
préféra  la  ville  de  Malines,  parce  que  les  envi- 
rons de  Namur  étaient  occupés  par  des  troupes 
qu'avait  attirées  la  guerre  qui  désolait  le  pays  de 
Liège.  Mais  Philippe  et  les  chevaliers  de  l'ordre 
décidèrent  ensuite  que  la  fête  serait  remise  au 
23  mai ,  lendemain  de  la  Pentecôte ,  bien  que  les 
convocations  eussent  été  lancées  pour  le  2  du 
même  mois.  Cette  remise  fut  publiée  à  Malines 
par  un  officier  d'armes. 

Tous  les  prélats  du  pays  furent  invités  à  la 
solennité  par  lettres  particulières  dépêchées  au 
nom  de  l'archiduc  Philippe. 

Dès  le  19  mai  arrivèrent  à  Malines  les  seigneurs 
de  Lannoy,  de  Nassau,  de  Bevres,  de  la  Bastie, 
de  Molembaix  et  de  Walhain.  —  Ces  chevaliers, 
accompagnés  de  quatre  officiers  de  l'ordre,  allè- 
rent le  même  jour  présenter  leurs  hommages  au 
jeune  Philippe ,  qui  était  descendu  en  son  palais 
de  la  rue  de  l'Empereur. 

Dès  le  lendemain  20  mai ,  eut  lieu  une  réunion 
préparatoire  chez  M.  Jean  de  Lannoy,  qui  était 
muni  dune  procuration  royale.  L'on  y  entendit 
M.  de  la  Gruuthuse,    accusé  de  divers  méfaits. 

Le  21  mai,  veille  de  la  Pentecôte,  il  n'y  eut 
point  d'assemblée.  Le  jour  de  la  Pentecôte,  l'ar- 
chiduc, accompagné  des  membres  et  des  suppôts 


—    183     - 

de  Tordre,  se  rendirent  à  cheval  et  revêtus  de 
leurs  robes  et  manteaux  de  cérémonie  à  Féglise 
de  Saint-Rombaut ,  où  furent  chantées  les  vêpres. 
Les  prélats,  en  habits  pontificaux,  et  tout  le 
clergé ,  en  chape ,  reçurent  le  cortège  au  portail 
du  temple;  l'évêque  de  Salubrie,  officiant,  pré- 
senta Teau  bénite  au  duc.  Après  les  vêpres ,  les 
chevaliers  retournèrent  à  Thôtel  du  prince. 

Le  23  mai,  jour  de  la  fête,  Philippe  le  Beau, 
les  chevaliers  et  les  officiers  de  l'ordre  se  ren- 
dirent de  nouveau  dans  le  même  appareil  que  la 
veille  à  Tégiise  de  Saint-Rombaut.  Ils  y  assistèrent 
à  la  grand'  messe  célébrée  par  l'évêque  de  Salu- 
brie. Après  l'office.  Ton  revint  à  Thôtel  de  Bour- 
gogne, où  était  préparé  un  magnifique  festin. 
Dans  l'après-midi ,  tous  les  dignitaires  de  l'ordre 
se  rendirent  de  nouveau  à  Saint-Rombaut  pour  y 
assister  aux  vêpres  et  aux  vigiles  des  morts ,  et  le 
lendemain  24 ,  avec  le  même  cérémonial  que  pré- 
cédemment ,  ils  ouïrent  la  messe  chantée  pour  le 
repos  éternel  des  chevaliers  trépassés. 

Après  l'offrande,  Charles  Soillot,  doyen  de  Mid- 
delbourg,  secrétaire  du  roi  et  du  duc  Philij)pe, 
fesant  les  fonctions  de  greffier  à  la  place  de  Martin 
Steenberch,  accablé  d'âge  et  d'infirmités,  prononça 
une  oraison  funèbre,  qui  plut  tant  aux  assistants 
qu'ils  décidèrent  de  la  transcrire  dans  les  registres 
de  la  Toison  d'or.  Le  même  jour,  dans  l'après- 
midi,  les  chevaliers  examinèrent,  sous  la  prési- 
dence de  Philippe,  les  lettres  d'excuses  et  les  pro- 
curations des  membres  absents ,  ainsi  que  la  liste 
des  candidats  nouveaux. 


—    184    — 

Le  25,  avant  la  messe  de  Notre-Dame,  les  che- 
valiers tinrent  chapitre.  Pais  ils  allèrent  à  la  messe 
dans  l'ordre  suivi  les  jours  précédents  ;  à  l'issue  de 
l'office,  ils  rentrèrent  en  séance  capitulaire. 

Le  26  mai ,  il  y  eut ,  encore  à  Saint-Rombaut, 
une  messe  solennelle  du  Saint-Esprit,  à  laquelle 
assistaient,  outre  l'archiduc,  les  chevaliers  pré- 
sents aux  cérémonies  des  jours  précédents;  après 
l'offrande ,  le  roi  d'armes  se  plaçant  devant  les 
écussons  de  Jacques  de  Savoye,  comte  de  Romond, 
et  de  Wolffart  de  Borssele,  lut  les  déclarations  en 
vertu  desquelles  lesdits  chevaliers  étaient  tenus 
pour  morts;  les  armoiries  du  comte  de  Romond 
seraient  enlevées  de  l'église  et  remplacées  par  une 
inscription  portant  copie  de  l'acte  qui  le  concer- 
nait. Quant  à  Borssele,  l'assemblée  se  réserva  de 
disposer  ultérieurement  de  son  affaire  en  atten- 
dant que  les  causes  de  MM.  de  Ravenstein  et  de  la 
Gruthuse  eussent  été  terminées. 

Messieurs  de  Cordes  (Crèvecœur)  et  de  la  Roche- 
Nolay  (Philippe  Pot),  qui  en  1481  avaient  été 
exclus  ,  n'ayant  depuis  renvoyé  leurs  colliers,  fu- 
rent déclarés  parjures  et  l'on  ordonna  que  cette 
sentence  fut  affichée  par  écrit  aux  piliers  du  chœur 
de  l'église  où  la  fête  avait  été  célébrée.  Dans 
l'après-midi  de  la  même  journée ,  il  fut  procédé  à 
l'élection  de  nouveaux  chevaliers  :  treize  décès 
ayant  eu  lieu  et  la  place  que  Philippe  avait  occupé 
en  qualité  de  comte  de  Charolais,  étant  devenue 
vacante,  en  outre  deux  sièges  étaient  vacants  de- 
puis plus  longtemps. 

Le   28,   cinq  nouveaux  chevaliers  élus  furent 


—     135    — 

revêtus  des  insignes  de  leur  nouvelle  dignité.  Le 
lendemain  l'assemblée  tint  une  dernière  réunion 
cliapitrale,  puis  les  chevaliers  se  séparèrent.   » 

Telles  furent,  en  résumé,  les  circonstances  de 
la  vingt-troisième  fête  de  l'ordre  de  la  Toison  d'or, 
célébrée  à  Malines.  Le  détail  des  choses  qui  furent 
traitées  durant  ce  chapitre  ne  rentrant  point  dans 
le  cadre  de  cet  article,  nous  croyons  pouvoir  les 
passer  sous  silence  et  renvoyer  au  besoin  à  Vllis- 
toire  de  Tordre  de  la  Toison  dor,  du  baron  de 
Reiffenbers:. 


&• 


Emmanuel  Neeffs. 


13 


186    — 


L'ART    BELGE    EN    1878 


SUIVI     D  UN 


APPENDICE    LITTERAIRE. 


Sommaire  :  Les  sanctuaires  de  Vart.  La  maison  Le}s  à  Anvers.  Les 
fresques  de  la  salle  à  mang-er.  Les  cartons  du  vestibule.  L'atelier. 
Le  salon  rouge.  —  Deux  portraits  qui  ne  seront  point  exposés  : 
Louise  Lateau,  la  stigmatisée;  et  Pie  IX.  —  Société  royale  des 
aquarellistes  lielges.  Exposition  de  1878.  —  Cercle  artistique  et 
littéraire  de  Braxelles.  Septième  exposition  annuelle  (1878).  — 
Lacunes  qui  n'en  sont  point.  —  Appendice  littéraire.  Le  livre  se 
meurt ,  le  livre  est  mort  !  —  L'idolâtrie  de  la  provenance.  —  Les 
albums.  -  Y  a-t-il  une  littérature  écossaise  contemporaine? 
L'homme  au  monde  qui  reçoit  le  plus  d'autographes. 

Les  sanctuaires  de  Vart  sont  surtout  les  maisons 
des  artistes  et  leurs  ateliers.  Sous  ce  titre  j'ai 
publié  autrefois  clans  une  des  revues  artistiques 
de  l'Angleterre  une  série  d'articles  sur  Landseer, 
Delaroclie ,  Vernet,  Delacroix,  etc.,  etc....,  qui 
furent  acceuillis  avec  bienveillance.  Il  m'a  pris 
plusiem^s  fois  l'envie  de  continuer  !  et  je  me  suis 
arrêté  en  me  disant  que  rien  n'est  capricieux 
comme  le  succès!...  presqu'autant  qu'une  jolie 
fennne  !  Le  public  veut  qu'on  lui  serve  le  mets  dont 
il  s'est  épris  et  pas  (Vautre  :  il  traite  les  auteurs 


—    187    - 

comme  des  restaurateurs.  Il  exige  son  plat...  le 
plat  du  jour.  S'il  ne  retrouve  pas  le  goût  particu- 
lier que  convoite  son  palais ,  il  renvoyé  la  por- 
tion... brutalement.  Heureux  les  auteurs  qui  sui- 
vent les  caprices  de  la  mode,  composent  en  maîtres 
la  sauce  du  moment  et  parviennent  à  resservir 
même  les  antiquités  sous  des  noms  nouveaux.  La 
fortune  appartient  aux  écrivains  qui  possèdent 
Tart  consommé  à^ accommoder  les  restes. 

Il  y  a  vingt  ans  à  peine  que  j'écrivais  ces 
études  sur  les  célébrités  d'alors,  et  presque  toutes 
sont  descendues  dans  la  tombe. 

Un  des  premiers  qui  s'en  sont  allés  c'est  ce 
regretté  et  channant   sir  Edwin   Landseer ,    cet 

adorable  peintre  de  l'aristocratie des  animaux. 

Je  le  vois  encore ,  me  paraît-il ,  cet  enfant  gâté 
des  salons  de  l'Angleterre ,  drapé  dans  cette 
misanthropie  silencieuse  qu'il  dépouillait  brus- 
quement parfois  pour  tirer  un  feu  d'artifice  de 
bons  mots. 

Voici  une  anecdote  inédite  sur  son  compte. 

Un  jour,  chez  la  belle  duchesse  de  D.,  pendant 
qu'on  prenait  le  thé  sur  la  terrasse  du  château , 
Landseer  paria  qu'il  finirait  un  grand  dessin  à 
l'encre  avant  que  lord  R...  eût  parcouru  douze 
fois  à  cheval  la  grande  avenue  (au  trot!)  :  une 
affaire  d'un  quart  d'heure  environ  ! 

Landseer  n'avait  matériellement  pas  le  temps 
de  faille  les  hachures  des  ombres.  Comment  s'y 
prit-il  pour  accomplir  son  tour  de  force?  Voici. 

Il  renversa  l'encrier  sur  son  large  papier,  et 
travaillant  du  doigt  et  de  la  plume,  il  arriva  à 


—     183    — 

finir  son  œuvre  avant  la  minute  fatale.  La  grande 
tache  noire  formait  Toreille  profilaire  d'une  tête 
d'épagneul.  Comme  il  n'avait  pas  le  temps  de 
puiser  de  Fencre  dans  Tencrier,  il  trempait  sa 
plume  dans  Fencre  qui  devait  former  Foreille  du 
chien. 

Vous  pouvez  vous  imaginer  les  hourrah  qui 
saluèrent  le  vainqueur. 

L'article  si  intéressant  qu'a  publié  le  Messager 
sur  la  Maison  Planiin  et  qui  est  dû  à  la  plmne 
savante  de  M.  Ferdinand  Vanderhaeghen ,  m'a 
donné  l'idée  de  consacrer  quelques  pages  à  la 
Maison  Leys  ^  située  à  Anvers  également.  C'est 
chez  lui  qu'il  faut  étudier  Fartiste  !  On  l'y  trouve 
en  robe  de  chambre  comme  en  habit  de  gala  :  la 
toile ,  mais  aussi  le  carton  et  l'esquisse.  C'est  au 
salon,  dans  Fateher,  dans  l'album,  qu'on,  voit 
comme  j)oindre  le  tableau  d'abord ,  puis  se  déve- 
lopper, se  compléter  et  arriver  insensiblement  à 
l'œuvre  arrêtée.  On  refait  l'histoire  de  la  pensée 
artistique  depuis  le  premier  jet  jusqu'à  la  compo- 
sition la  plus  détaillée.  Ensuite  on  trouve  de  ces 
toiles  que  l'artiste  a  peint  pour  lui  ou  pour  les 
siens,  con  amore ,  à  loisir,  aux  heures  d'inspira- 
tion et  dont  il  n'a  pu  se  séparer,  tant  il  y  avait 
mis  de  son  âme  elle-même  ! 

La  maison  Leys,  située  rue  Leys  (Anvers  a 
donné  le  nom  du  célèbre  peintre  à  la  rue  où  il 
habitait),  est  occupée  par  le  fils  du  grand  homme. 
M.  le  baron  Leys ,  qui  a  laissé  les  plus  sympathi- 
ques souvenirs  dans  la  diplomatie,  a  bien  voulu 


—    189    — 

faire  les  lionneiirs  de  son  liôtel  à  un  ancien  col- 
lègue, enthousiaste  d'art  comme  lui. 

Et  maintenant,  cher  lecteur,  comme  je  ne  suis 
pas  égoïste,  je  vous  prierai  d'entrer  avec  moi,  et 
nous  allons  parcourir  ensemble  cette  maison 
qu'Anvers  achètera  un  jour  inévitablement  (aussi 
tard  peut-être  !)  comme  la  maison  Plantin, 

Le  rez-de-chaussée  se  compose  d'un  salon, 
d'une  antichambre,  de  la  salle  à  manger,  d'une 
serre,  d'un  cabinet  d'étude  et  enfin  de  l'atelier. 

La  salle  à  manger  contient  six  panneaux  peints 
à  fresques,  savoir  : 

1"  Les  invités  se  rendent  à  une  fête; 

2"  Ils  entrent  en  ville; 

3"'  Ils  sonnent  à  la  porte; 

4  "  Ils  sont  reçus  par  les  maîtres  de  la  maison  ; 

5  "  Le  banquet  préparé  ; 

6""  Saint  Luc  patron  des  artistes  peintres. 

Ces  six  sujets  sont  traités  dans  la  plus  belle 
manière  du  peintre  :  ils  résument  l'apogée  de  son 
talent.  Impossible  de  trouver  dans  l'œuvre  de 
Leys  quelque  chose  de  plus  parfait  comme  con- 
ception et  exécution.  Dans  le  panneau  qui  touche 
à  la  serre  il  y  a  une  jeune  femme  qui  est  toute 
une  révélation  par  la  rare  beauté  du  type  et  la 
grâce  et  la  distinction  de  l'attitude.  La  salle  à 
manger  est  dans  l'œuvre  de  hejs  ce  qu'est  la  cha- 
pelle des  Médicis  pour  Michel- Ange.  Le  grand 
maître  anversois  a  consacré  six  années  à  l'exécu- 
tion de  ces  six  fresques  (1857  à  18Go). 

Nous  trouvons  dans  Fatelier  deux  tableaux  ;  les 
derniers  qui  sont  sortis  du  pinceau  de  Leys  : 


—    190    — 

1''  Une  scène  des  troubles  d'Anvers  :  Margue- 
rite de  Parme  remettant  les  clefs  de  la  ville  d'An- 
vers aux  magistrats.  Cette  peinture  est  datée  1869. 

2"  La  famille  Pallavicini  demandant  le  droit  de 
bourgeoisie  à  Anvers.  Peinture  de  1867. 

Ces  deux  toiles  sont  conformes  aux  mêmes  sujets 
traités  en  fresques  à  lliôtel-de-ville  d'Anvers. 

L'atelier  contient  encore  douze  études  d'après 
divers  vieux  monuments  d'Anvers,  et  notamment 
l'antique  chapelle  de  Sainte-Biaise,  rue  Rouge. 
Ce  bijou  architectural  est  inachevé  :  le  pinceau 
est  tombé  des  mains  mourantes  de  l'immortel 
peintre  pendant  qu'il  y  travaillait. 

L'atelier  est  resté  tel  que  Leys  l'a  laissé.  On 
croirait  que  le  peintre  n'est  qu'absent  et  qu'il  va 
rentrer.  Palettes,  brosses,  pinceaux,  couleurs,  tout 
est  encore  là.  Le  fils  de  M.  Leys  a  le  culte  de  la 
mémoire  de  son  père;  chez  lui  le  cœur  est  à  la 
hauteur  de  l'intelligence. 

Montons  au  premier  étage. 

Voici  d'abord  le  vestibule.  Sur  ses  murailles 
s'étalent  : 

1"  Le  carton  de  la  Toison  d'or. 

2"  Six  portraits  historiques  reproduits  à  riiôtel- 
de- ville.  Les  figures  sont  de  grandeur  naturelle. 

Du  vestibule  on  entre  directement  dans  la  ofa- 
lerie.  Notons  y  deux  toiles  : 

1"  La  messe  avant  l'évangile. 

2"  Une  première  idée  du  tableau  représentant 
la  famille  Pallavicini  recevant  le  droit  de  bour- 
geoisie. 

Le  salon  rouge  qui  donne  sur  la  rue  Leys,  reu- 


—    191     - 

ferme  deux  joyaux  :  les  portraits  de  j\I.  et  de 
Mad.  Leys.  Le  portrait  de  Leys  peint  par  lui- 
même  est  une  merveille.  Ce  n'est  plus  de  la  res- 
semblance; c'est  la  nature  même.  On  retrouve 
bien  là  sur  cette  toile  le  penseur  austère  et  pro- 
fond qui  a  mis  au  monde  de  si  maies  cliefs- 
d'œuvres.  Leys  avait  une  de  ces  belles  têtes 
flamandes  pleines  d'énergie  concentrée ,  dont 
Piubens  et  Van  Dyck  ont  perpétué  le  souvenir  : 
grand  front ,  traits  régidiers ,  l'œil  à  la  fois  vif 
et  serein, 

La  revue  des  portefeuilles  et  des  dessins  sé- 
parés me  mènerait  trop  loin  aujourd'hui. 

Maintenant  permettez-moi ,  cher  lecteur ,  de 
vous  parler  de  deux  tableaux  qui  n'ont  jamais 
été  exposés  et  qui  ne  le  seront  peut-être  jamais. 
L'un  est  un  portrait  de  Pie  IX  (le  dernier  qui  ait 
été  fait),  l'autre  est  un  portrait  de  Louise  Lateau, 
la  stigmatisée.  Comme  il  s'agit  d'un  personnage 
historique,  et  d'une  personne  qui  a  vivement 
excité  la  curiosité  publique ,  j'ai  cru  ne  pas  pou- 
voir passer  sous  silence  les  toiles  fort  étudiées 
qui  les  représentent.  Les  deux  portraits  sont  de 
M,  Thomas. 

Le  portrait  de  Pie  IX  est  fait  un  an  avant  sa 
mort.  Le  pontife  est  assis  dans  son  fauteuil  légen- 
daire :  meuble  du  premier  empire  d'un  style  raide 
et  disgracieux ,  sur  lequel  on  ne  pouvait  être  à 
Taise  que...  par  habitude.  L'auguste  vieillard  a 
le  coude  appuyé  sur  un  des  bras  du  fauteuil  : 
la  figure  repose  sur  la  main  gauche.  Le  visage 
est  de  face  :  souriant ,  doux ,  bienveillant ,  quoi- 


—    192    — 

que  inséparable  de  cette  finesse  diplomatique- 
ment ironique  —  qui  est  un  des  traits  distinc- 
tifs  de  la  race  italienne.  L'œil  a  perdu  ce  feu  vif 
et  ardent  qui  caractérisait  encore  le  comte  Mastaï 
quelques  années  auparavant  :  le  corps  a  pris  de 
Fobésité ,  le  visage  s'est  bouf&.  La  mort  qui 
s'avance  a  laissé  Tâme  sur  la  face  :  et  cette  âme 
jette  un  voile  de  grandeur  sur  les  affaissements 
inséparables  de  la  décrépitude. 

C'est  cette  âme  que  le  grand  artiste  a  saisie 
toute  entière,  et  c'est  ce  qui  fait  de  son  œuvre  un 
des  plus  purs  spécimens  de  Tart. 

M.  Thomas  a  triomphé  des  blancs  nombreux 
qui  devaient  surcharger  sa  palette,  car  Pie  IX 
est  revêtu  de  sa  soutane  blanche ,  une  calotte 
blanche  couvre  la  tête  où  brillent  avec  des  tons 
métalliques  des  cheveux  blancs;  et  une  écharpe 
moirée  blanche  ceint  les  reins  du  pontife. 

Pie  ÎX.  n'a  />a5  posé  dans  le  vrai  sens  du  mot 
pour  M.  Thomas.  Sa  santé  ne  le  lui  permettait 
plus.  Mais  M.  Thomas  avait  sa  toile  au  Vatican. 
Il  allait  voir  le  pape  le  plus  souvent  possible  et 
assistait  à  toutes  les  audiences,  de  façon  qu'il  a 
jwssédé  son  modèle. 

Vers  la  fin  de  sa  vie,  Pie  IX  n'était  plus  que 
l'ombre  de  ce  qu'il  avait  été  pour  ceux  qui  l'avaient 
vu  à  l'œuvre  durant  les  grands  jours  de  la  défense 
du  pouvoir  temporel.  Alors  il  y  avait  du  Sixte- 
Quint  en  lui  :  vigueur  et  énergie  incomparables. 
Son  indomptable  courage  avait  passé  dans  les  vei- 
nes des  combattants  de  Castelfidardo,  de  Mentana 
et  de  Rome ,  qui  avaient  renouvelé  sous  Lamori- 


—    193    — 

cière  et  Pimodan  les  exploits  des  compagnons  du 
héros  de  Jérusalem.  A  cette  époque  le  pape  avait 
sur  le  visage,  éclaii^é  par  les  yeux  les  plus  éclatants 
que  j'ai  connus,  toutes  les  fiertés  d'un  souverain 
qui  défend  pied  à  pied  son  territoire  tout-puissam- 
ment envahi.  J"entends  encore,  me  paraît-il,  la 
voix  brève  et  puissante  de  l'ancien  souverain  des 
États-pontificaux. 

On  venait  de  signer  la  convention  de  septem- 
bre 1864,  stipulant  l'évacuation  de  Rome  par  les 
troupes  françaises. 

—  Qu "en  dites-vous?  demanda  brusquement  le 
Saint-Père. 

—  La  descendance  de  Machiavel  n'est  pas  prête 
de  finir  ! 

Le  Saint-Père  secoua  la  tête,  et  après  une  pause 
d'un  instant,  il  me  dit  :  <(  Machiavel  n'était  qu'un 
enfant  à  côté  des  politiques  modernes.  » 

Jusques  vers  18(57  Pie  IX  avait  conservé  l'allure 
vive  et  la  verdeur  d'esprit  de  la  plus  belle  vieillesse. 
La  pensée  illuminait  ce  noble  front  qui,  s'avançant 
un  peu  au-dessus  des  yeux,  donnait  au  regard  une 
profondeiu'  particulière.  Sa  verve  était  intarissa- 
ble et  trouvait  toujours  le  mot  juste,  gai,  gra- 
cieux... surtout  le  mot  du  cœur!  De  là  une  mobi- 
lité, un  mouvement  dans  le  visage  qui  lui  faisaient 
une  physionomie  à  part,  et  désespéraient  tous  les 
pinceaux.  Tous  les  portraits  de  Pie  IX  lui  ressem- 
blent :  aucun  ne  le  rend  tout-à-fait.  C'était  irréa- 
lisable ! 

Une  grande  sensibilité  caractérisait  le  pape 
Mastaï.  M.  Thomas  a  merveilleusement  jeté  sur  sa 


—     194    — 

toile  ce  rayon  de  bienveillance,  de  sollicitude,  de 
tendresse  toute  paternelle  qui  éclairait  le  visage 
du  saint  pontife.  Voulez-vous  un  exemple  entre 
mille  de  la  pénétrante  charité  de  Pie  IX  ? 

A  une  audience  le  Saint-Père  vint  à  passer  de- 
vant la  marquise  de  R...  Celle-ci  lui  présenta  son 
enfant.  Comme  le  pape  passait  outre ,  la  mère 
s'écrie  :  «  Saint-Père!  il  est  aveugle.  »  Pie  IX 
revint  sur  ses  pas,  il  bénit  l'enfant  les  larmes  aux 
yeux  et  lui  dit  :  «  Dieu  t'a  privé  de  la  lumière  du 
soleil,  c'est  ^Ti'ai,  et  je  t'en  plains  ;  mais  il  a  dérobé 
à  ta  vue  le  spectacle  de  nos  malheurs  !  » 

M.  Thomas  a  fait  le  portrait  de  Louise  Lateau 
pour  Tévêque  de  Tournay.  Ce  portrait  est  intéres- 
sant comme  œuvre  d'art  et  à  cause  du  modèle  qui 
a  acquis  une  certaine  célébrité,  La  question  de  la 
stigmatisation  n'est  pas  du  ressort  de  ce  recueil, 
aussi  je  n'y  toucherai  même  pas.  Je  me  bornerai  à 
citer  quelques  détails  que  je  tiens  du  peintre  lui- 
même,  et  qui  sont  nécessaires  pour  expliquer  le 
tableau. 

Louise  Lateau  est  étendue  sur  un  lit  recouvert 
d'une  couverture  à  carreaux  blancs  et  rouges. 
C'est  une  jeune  femme  de  vingt-six  ans ,  avec  de 
beaux  grands  yeux  bleus.  Ses  cheveux  chatain- 
clair  sont  en  partie  enfermés  dans  un  petit  bonnet 
blanc.  Le  visage  est  maigre,  pâle,  fatigué.  Un 
châle  gris  recouvre  les  épaules  de  la  malade. 
Louise  tient  en  main  un  chapelet  et  sur  cette  main 
on  voit  une  plaie  d'où  s'échappe  un  peu  de  sang. 

M.  Thomas  n'a  voulu  faire  qu'un  portrait  : 
aussi  a-t-il  peint  avec  une  vérité  photographique. 


—     195    — 

Lateau  est  une  paysanne  et  M.  Thomas  Fa  laissée 
paysanne.  La  chambre  est  une  chambre  rustique 
aux  murailles  blanches  et  nues,  et  n'a  d'autre  or- 
nement qu'un  chapelet  de  Lourdes  attaché  à  un 
clou . 

Lateau  a  dit  à  M.  Thomas  qu'elle  n'avait  ni  bu 
ni  mangé  depuis  la  mort  de  sa  mère  :  deux  an- 
nées !  M.  Thomas  cite  un  fait  qui  semblerait  prou- 
ver que  la  nature  a  cessé  toutes  ses  fonctions. 
Quand  il  peignait  l'oreiller  il  pria  Louise  de  ne 
pas  bouger  à  cause  de  la  disposition  des  plis  du 
linQ:e.  C'était  à  huit  heures  du  matin.  Quand 
M.  Thomas  quitta  la  chambre  à  trois  heures  de 
l'après-midi,  Louise  avait  conservé  la  plus  parfaite 
immobilité.  Quand  je  revins  le  lendemain,  me  dit 
M.  Thomas,  je  remarquai  à  ma  grande  stupéfac- 
tion que  les  plis  étaient  demeurés  les  mêmes.  Je 
demandai  à  Louise  comment  cela  se  faisait.  Elle 
me  répondit  qu'elle  n'avait  pas  bougé,  ne  voulant 
pas  nuire  à  mon  travail.  Louise  Lateau  n'avait 
donc  pas  fait  un  mouvement  depuis  vingt-quatre 
heurtes. 

M.  Thomas  vante  beaucoup  la  distinction  native 
de  son  modèle  et  surtout  sa  rare  délicatesse  de 
sentiment.  Un  jour  que  M.  Thomas  partait  pour 
Bruxelles,  Louise  prit  trois  fleurs  et  le  pria  de  les 
remettre  à  Mesdemoiselles  ses  filles. 

Un  jour  qu'on  parlait  de  la  mort,  Louise  se 
tourna  vers  M.  Thomas  et  lui  dit  :  «  Mourir  est  la 
seule  chose  au  monde  que  je  désire  !  » 

Lateau  a  horreur  des  curieux.  Aussi  la  pauvre 
stigmatisée  défend-elle  sa  porte  autant  qu'elle  le 


—     196    — 

peut.  On  n'est  admis  qu'avec  des  recommandations 
spéciales  ;  quelquefois  en  insistant  beaucoup. 
Quand  on  offre  de  largent  pour  entrer,  on  est 
toujours  éconduit. 

Le  tableau  de  M.  Thomas  est  le  seul  portrait  de 
Louise  Lateau.  Il  n'aurait  que  ce  seul  mérite  qu'il 
piquerait  déjà  vivement  la  curiosité.  Hâtons-nous 
d'ajouter  que  la  composition  est  noble  et  grande 
dans  sa  simplicité  presqu'antique,  et  que  la  pein- 
ture est  de  la  meilleure  manière  de  M.  Thomas. 

La  Société  des  aquarellistes  belges  forme  une 
petite  réunion  intime,  une  aristocratie  d'art.  Elle 
renouvelle  peu  son  personnel. . .  comme  l'Académie 
française!  Le  mérite  de  chacun  de  ses  membres 
est  connu  :  tous  sont  des  artistes  arrivés  :  la  cri- 
tique a  donc  peu  de  chose  à  dire  pour  ne  point  se 
répéter  d'une  année  à  l'autre;  elle  n'a  d'autre 
champ  de  glanage  que  les  envois  de  l'étranger.  La 
Hollande  est  représentée  par  MM.  Artz,  Blom- 
mers.  Maris  (Willem)  et  Maris  (J.),  Mesdag,  Neu- 
huys  qui  expose  un  charmant  tableau  de  genre  : 
une  petite  fille  jouant  des  ciseaux;  et  Ten  Kate. 

L'Allemagne  est  royalement  représentée  par 
une  œuvre  di  primo  cartello  :  Tintérieur  de  l'église 
du  couvent  d'Erthal,  par  M.  Menzel  (Adolphe)  de 
Berlin.  C'est  un  chef-d'œuvre  de  patience  et  de 
loyale  exécution.  Cette  nature...  morte?...  est 
animée  par  un  sacristain-frère  de  la  plus  belle 
venue.  M.  Menzel  a  un  grand  succès  outre-Rhin, 
et  pour  cause.  Un  autre  berlinois,  M.  Graeb 
expose  une  bonne  vue  de  Prague. 


—    107    — 

L'Italie  est  toujours  la  reine  de  la  grâce...  et 
peut-être  trop  du...  cliic  (Le  mot  est  français  : 
voyez  Littré!).  Fort  vivantes  les  jeunes  filles  que 
M.  da  Itios  (de  Venise)  place  auprès  des  puits  de 
San  iNIarco. 

N  oublions  pas  M.  Simeoni  et  son  Ferentino, 
ainsi  que  son  éblouissant  costume  de  TEmpire  ;  ni 
M.  Martens  et  sa  jolie  femme  jouant  de  la  prunelle 
sur  un  balcon  romain;  ni  M.  Maccari  et  sa  pupille 
recevant  des  conseils  d'un  grave  monsignore  : 
composition  charmante  d'esprit,  de  grâce,  de 
finesse,  d'observation.  M.  Joris  a  bien  enlevé  une 
femme  assise  vue  de  face.  Il  Taj^pelle  :  une  grisette! 
Soit!  Je  ne  vois  pas  trop  pourquoi?...  heureuse- 
ment ! 

Un  mot  des  belges,  quoique  nous  les  connais- 
sions de  longue  date  et  que  nous  ayons  soiwent 
parlé  d'eux.  Mentionnons  l'avant  le  lever  du  so- 
leil de  M.  Gabriel.  M.  Clays  envoie  la  plus  puis- 
sante aquarelle  qu'il  ait  jamais  faite  :  c'est  peint 
avec  des  tons  enlevés  à  la  nature  même, 

A  Vexposition  du  Cercle  artistique  tout  se  passe 
en  famille  :  pas  une  seule  œuvre  exotique  !  S'il 
n'y  a  pas  de  toile  à  sensation,  en  revanche  on  n'y 
rencontre  que  peu  de  tableaux  dépourvus  d'in- 
térêt. Le  talent  est  la  règle  générale.  Toutefois 
l'exécution  d'un  certain  nombre  d'œuvres  a  été 
trop  rapide,  semble-t-il  :  elles  sentent  trop  l'é- 
bauche ;  on  dirait  qu'elles  ont  été  arrêtées  au  mo- 
ment où  la  difficulté  commençait,  c'est-à-dire  à  la 
minute  juste  où  il  fallait  préciser  la  pensée.   Le 


-     198    — 

vague  est  un  signe  de  faiblesse,  soit  qu'il  pro- 
vienne d'études  insuffisantes,  ou  d'une  conception 
trop  précipitée. 

N'envoie-t-on  pas  quelquefois  trop  légèrement 
au  cercle?  Les  toiles,  par  exemple,  qu'on  ne  juge- 
rait pas  assez...  complètes  pour  figurer  avec  hon- 
neur à  une  exposition  triennale?  N'y-a-t-il  pas 
par  ci  par  là  quelques  tableaux...  en  robes  de 
chambre?  L'artiste  ne  doit-il  point  éviter  avec  le 
plus  grand  soin  de  se  présenter  devant  le  public 
dans  des  conditions  défavorables?  Une  mauvaise 
impression  reste,  même  dans  les  esprits  impar- 
tiaux. Et  puis  il  y  a  là  une  sorte  de  laisser-aller, 
de  négligence,  qui  finit  par  envelopper  tout  l'ar- 
tiste paresseux.  La  nonchalance  finit  par  envahir 
la  composition,  le  coloris,  le  dessin,  toute  l'œuvre 
enfin. 

Un  grand  écrivain  disait  à  son  fils  :  n'écris 
jamais  une  ligne  avec  négligence.  Que  le  moindre 
mot(fût-il  adressé  à  un  fournisseur  !)  soit  correct, 
clair  et  en  excellent  français.  Je  sais  bien  que  les 
billets  ne  vont  pas  à  la  postérité,  mais  ils  servent 
d'exercice  !  Si  tu  soignes  ton  style  une  fois  et  si 
tu  ne  le  soignes  pas  une  autre,  ton  style  sera  iné- 
gal Qt  jamais  tiaturel,  parce  que  quand  tu  voudras 
être  élégant,  tu  devras  faire  un  efî'ort,  et  tu  pa- 
raîtras endimanché.   » 

Ce  conseil  s'applique  à  la  peinture  comme  à  la 
littérature. 

M.  AssELBEEGS.  Vuo  pleine  de  lumière  dans  la 
forêt  de  Fontainebleau.  Faire  large.  Caractère 
bien  saisi. 


-     199    — 

M.  BiNjÉ.  Effet  de  pluie  parfaitement  mouillé. 
C'est  la  note  juste. 

M.  CouRTExs.  —  L'aube  sur  l'Escaut.  —  Pro- 
fond sentiment  de  la  nature  et  couleur  intéres- 
sante. Soleil  perçant  le  brouillard  très-réussi.  Une 
des  meilleures  peintures  du  salon. 

M.  DE  Vriendt  (Albrecht).  L'angelus  sonné 
par  une  ravissante  religieuse  qui  est  toute  à  sa 
pieuse  besogne.  Toile  de  choix  achetée  par  S.  M. 

M.  Hagemaks.  Peinture  nerveuse,  ferme  et  sûre. 

M"*"  Heger  a  fait  de  très-grands  progrès.  Sa  vue 
de  Campine  est  excellente.  Elle  a  trouvé  sa  voie  : 
une  belle  carrière  à  parcourir  ! 

M.  Hbymans.  Lever  de  lune.  Demi-obscurité 
qui  laisse  seulement  deviner  les  objets.  Consta- 
tons le  succès  mérité  de  cette  toile. 

M.  Hermans.  Il  y  a  beaucoup  du  Watteau  et  du 
Fraoronard  dans  la  manière  de  M.  Hermans.  La 
tête  de  jeune  fille  est  charmante  et  d'une  exécution 
des  plus  séduisantes.  Ses  accessoires  auraient  pu 
être  plus  indiqués  :  ils  frisent  l'énigme  ;  Téventail 
surtout!  Les  grands  maîtres  n'ont  jamais  fait  fi  de 
l'accessoire  :  pour  s'en  persuader  il  ne  faut  pas 
aller  plus  loin  que  le  Musée  de  Bruxelles,  qui  nous 
ofPre  un  portrait  de  femme  de  Rubens —  en 
grande  toilette  avec  tous  les  bijoux  ! 

M.  Kruseman.  Comme  M.  Hagemans,  il  est  dans 
une  excellente  voie.  Sa  Cour  de  ferme  contient  des 
détails  parfaitement  étudiés.  Il  y  a  de  Tair.  Le 
pénombre  de  la  cour  est  plein  de  transparence. 


—    200    — 

M.  Mellery.  Palette  riche  ;  couleur  plantureuse. 

M.  De  Smet  nous  promène  très-agréablement  à 
Tervueren.  Constatons  ses  progrès  constants. 

M.  RoFFiAN  est  un  des  plus  habiles  interprètes 
des  lointains  helvétiques.  On  a  rarement  peint  les 
glaciers  comme  lui.  Espérons  qu'il  nous  rendra 
bientôt  une  de  ces  grandes  toiles  où  son  talent  se 
trouve  si  à  l'aise. 

M.  T'ScHARKER.  Poète  jusqu'au  bout  des  ongles! 
Ses  paysages  sont  autant  de  méditations,  qui  nous 
entrainent  au  beau  pays  des  rêves  à  mille  lieux  des 
exhalaisons  malsaines  de  la  réalité.  Hugo  et  La- 
martine n'ont  pas  plus  de  sentiment  dans  leurs 
chants  élégiaques  qui  ont  fait  pleurer  deux  géné- 
rations. 

M.  PiOSSEELS.  Nature  d'artiste  dans  la  vraie 
acception  du  mot.  Ses  deux  paysages  ont  la  grâce, 
la  couleur,  la  délicatesse  de  la  nature  prise  sur  le 
fait. 

M.  Sacré.  Jeune  femme  assez  crânement  posée 
et  riant  aux  éclats.  Beaucoup  de  naturel. 

M.  Van  der  HEcnt  (H.).  Sa  Ferme  de  La  Hulpe 
est  une  des  meilleures  toiles  du  salon.  Dessin 
vigoureux  et  classique  ;  bonne  couleur.  Beaucoup 
de  sûreté  d'exécution. 

M.  Van  der  Vm.  Bon  chevaux  de  halage  bien 
étudiés,  bien  peints,  bien  posés  :  excellent  tableau. 
Il  sait  le  cheval. 

M.  WiLSON.  Tête  qui  a  des  qualités  de  modelé 
incontestables. 


-      201     — 

Une  réflexion  à  propos  des  vues  d'Italie.  Je 
pense  que  les  peintres  doivent  renoncer  à  traduire 
les  mers,  les  lacs  et  les  ciels  du  Midi.  Le  bleu  est 
lumineux  dans  la  nature  :  il  ne  Fest  pas  sur  la 
palette.  Tous  les  efibrts  que  l'art  fera  dans  cette 
voie  aboutiront  à  l'impuissance.  Inutile  donc  de 
cliercher  à  rendre  Naples,  Gênes,  Constantinople  ! 
On  pourra  certes  faire  de  belles  vues  de  ces  villes, 
fort  correctes,  fort  élégantes  —  mais  quant  à  les 
placer  dans  leur  bleu  (leur  air  et  leurs  eaux)  — 
jamais!  Je  ne  vois  trop  ce  que  ces  reines  de  la 
Méditerrannée  et  du  Bosphore  auraient  à  gagner  à 
être  représentées  dans  une  atmosphère  pluvieuse  : 
leur  caractère  oriental  dispai'aîtrait  avec  les  rayon- 
nements qui  fascinent  le  spectateur  et  font  toute 
leur  gloire. 

Un  mot  pour  finir.  Cher  lecteur,  ne  m'accusez 
pas  trop  légèrement  de  lacunes  ou  d'omissions. 
Le  cadre  de  mes  articles  ne  me  permet  que  de 
signaler  les  talents  qui  pointent  à  l'horison,  et 
de  ne  m'occuper  des  peintres  connus  que  pour 
autant  qu'ils  ont  modifié...  avantageusement  leur 
manière. 

La  collection  Baldwin,  de  Dalton-in-Furness, 
vendue  le  19  mai  1878,  contenait  89  peintures 
modernes.  J'en  dis  deux  mots  pour  prouver  que 
nos  peintres  maintiennent  bien  leurs  prix  à  l'étran- 
ger. Ces  ventes  sont  comme  des  vacations  de 
Bourse  :  elles  cotent.  —  Vue  du  Zuyderzée  par 
Koekkoek,  1300  francs.  —  L'Escaut  par  un  calme 
plat  par  P.  J.  Clays,  6025  francs.  —  Un  marché. 

14 


—    202     — 

Clair  de  lune,  par  Van  Scliendel,  3275  francs.  — 
Moutons,  par  Verboeckhoven,  5000  francs. 

La  vente  des  dessins  du  vieux  Cruiksliank  a 
rapporté  25,000  francs  (^  1010).  Son  alphabet 
comique  a  été  vendu  h  ^  h.  —  Huit  petits  dessins 
(illustrations  pour  Peter  Sclilemil),  38  jB'.  —  Les 
dessins  originaux  pour  la  vie  de  sir  John  Falstaff 
ont  monté  jusque  32  <^. 

Le  livre  se  meurt  :  le  li^^e  est  mort.  On  ne  lit 
plus  de  livres,  et  Ton  en  fait  plus  que  jamais. 
Chaque  auteur  se  flatte  qu'il  sera  lu  et  lance  son 
volume  presque  malgré  les  éditeurs!  Que  de- 
viennent ces  innombrables  tomes  qui  restent  pour 
compte?  la  moitié  de  l'édition  en  moyenne?  —  Ils 
retournent  au  pilon. 

On  écrit  plus  que  jamais  des  livres  :  l'Allemagne 
a  publié  à  elle  seule  12,000  ouvrages  nouveaux  en 
1877'.  Comme  la  moyenne  des  tirages  est  de 
2000  exemplaires,  il  s'en  suit  que  2,400,000 
exemplaires  ont  vu  le  jour  en  ces  douze  mois. 
Pourtant,  hélas  !  les  lecteurs  de  livres  ne  comptent 
que  pour  2  p.  cent  de  la  population! 

On  achète  peu  de  li^^^es,  parce  que  chacun  reste 
aujourd'hui  dans  sa  spécialité.  On  ne  fait  plus  de 
bibliothèques  encyclopédiques  comme  autrefois, 
on  n'achète  plus  que  ce  qui  a  rapport  à  la  branche 
que  l'on  cultive.  On  rencontre  des  bibliothèques 
spéciales  en  gi^and  nombre,  et  plusieurs  sont  fort 
remarquables. 

'  Le  comité  tle  Vincorne  tax  n'accuse  que  5095  ouvrages  nouveaux 
en  1877  pour  l'Angleterre. 


—    203     — 

On  ne  lit  plus  guère  les  livres,  parce  que  la 
Revue  et  le  Journal  ont  remplacé  le  li^Te.  Le 
livre  vient  trop  tard!  Le  XIX"  siècle  marche 
comme  un  courant  électrique.  Il  lui  faut  la  dé- 
couverte du  jour  même,  de  l'iieure,  de  Tinstant. 
Le  moindre  retard  l'obsède,  Texaspère. 

La  revue  mensuelle  ou  bi-mensuelle  offre  un 
aliment  à  cette  livreuse,  dévorante  et  insatiable 
activité.  Elle-même  se  trouve  menacée  par  le  jour- 
nal quotidien.  Les  grandes  feuilles  anglaises  don- 
nent aujourd'hui  de  leading  m^tides,  qui  sont  de 
véritables  traités  improvisés  sur  toutes  les  ques- 
tions à  Tordre  du  jour. 

Un  peu  de  statistique  viendra  appuyer  ma  thèse. 
Je  vais  la  chercher  Outre-Rhin ,  puisqu'elle  y  est 
en  pleine  floraison.  L  allemand  traite  le  chiffre  avec 
le  respect  qui  lui  est  dû  :  il  ne  le  dénature  jamais, 
s'il  ne  s'en  sert  pas  toujours  selon  toutes  les  règles 
de  l'art. 

On  compte  en  Allemagne  1,120  journaux  pério- 
diques ,  possédant  ensemble  3,560,000  souscrip- 
teurs. 

Journaux  t-t  revues.  Nombre  des  sonscript. 

50  journaux  littéraires 1,400,000 

20  —  comiques 190,000 

25  —  critiques 80,000 

8  —  artistiques 15,000 

15  —  musicaux 20,000 

8  —  archéologiques.  .  .  .  8,000 

2  —  philosophiques.  .  .  .  700 

70  —  protestants 170,000 

60  —  cathoHques 350,000 

15  —  juifs 25,000 

80  —  juridiques 120,000 


—     204     — 

Journaiix  et  revues.  Kombre  des  sonscript. 

8  journaux  mathématiques  .  .  .  4,800 

65  —        médecine 85,000 

150  —        agricoles 220,000 

120  —        industriels 190,000 

50  — ■        commerciaux 110,000 

25  —        militaires 45,000 

3  —        maçoniques 3,000 

Etc.,  etc. 

La  Re\aie  hebdomadaire  d'Angsbourg  (catholi- 
que) a  36,000  abonnés;  la  Semaine  catholique  de 
Mayence,  40,000. 

Les  journaux  périodiques  allemands  impriment 
1,000,000,000  de  pages  par  an.  Cela  donne  une 
dépense  de  papier  de  25,600,000  marcs  (le  marc 
à  fr.  1-25).  Cette  somme  répartie  sur  toute  la  po- 
pulation donne  un  coût  de  2  marcs  (fr.  2-50)  par 
tête  par  an. 

Notons  en  passant  un  nouveau  délire  de  la 
bibliomanie  :  Y  idolâtrie  de  la  provenance.  Parce 
qu'un  ouvrage  de  dixième  ordre  aura  appartenu 
à  tel  ou  tel  grand  personnage ,  parce  qu'il  por- 
tera son  chiffre  ou  ses  armes,  il  atteindra  à  une 
valeur  fabuleuse.  Je  comprends  que  l'on  pour- 
suive des  ouvrages  qui  ont  appartenu  à  une 
bibliothèque  de  famille  !  J'admets  que  Mgr.  le 
duc  d'Aumale  achète  à  hauts  prix  des  volumes 
portant  les  armes  des  d'Orléans,  mais  que  MM.  de 
R...,  ou  de  B...,  ou  de  X...  les  lui  disj)utent,  eux 
qui  n'ont  rien  à  démêler  avec  les  fleurs  de  lys , 
cela  passe  les  limites  du  raisonnable  !  Qu'est-ce 
que  cela  prouve,  si  ce  n'est  que  le  luxe  ne  sait 
y)lns  sur  quoi  se  ]~)orter  !   Oh  !   parlez-moi  d'exem- 


—    205    — 

plaires  munis  à' hommages  cV auteurs,  surtout  quand 
ces  auteurs  s'appellent  Racine,  Montesquieu,  Cor- 
neille,  Massillon  ,  Fénélon,  Lacorclaire ,  Thiers, 
Guizot,  Lamartine,  c'est  une  autre  question! 
Payez  alors  six,  sept,  huit  fois  la  valeur  de 
l'exemplaire  vierge,  personne  n'y  trouvera  à  re- 
dire !  Toutefois  là  encore  ne  faut-il  s'avancer 
qu'avec  les  plus  grandes  précautions,  car,  comme 
le  pain  et  le  vin,  le  XIX-  siècle  a  falsifié  auda- 
cieusement  l'autographe.  Tels  et  tels  escrocs  sont 
passés  maîtres  dans  Fart  de  reproduire  les  écri- 
tures. (Comme  les  tableaux  !  Rousseau  a  trouvé 
en  Allemagne  un  de  ses  tableaux  qu'il  n'avait 
jamais  peint  !) 

Plus  précieux  encore  le  livre  qui  porte  autre 
chose  qu'un  simple  hommage  d'auteur  :  un  sou- 
hait ,  une  pensée ,  un  sentiment  ! 

Les  albums  presque  seuls  possèdent  ce  pri- 
vilège. 

L'album  Hamilton  a  été  disputé  au  point  d  at- 
teindre 600  guinées.  Il  faut  dire  que  toutes  les 
célébrités  de  l'Angleterre  et  du  continent  s'étaient 
exécutées  sur  ce  vélin  aux  marges  illustrées  par 
les  plus  grands  artistes  :  Pitt,  Fox,  Bonaparte, 
AVellington,  Nelson,  Chateaubriand,  La  Mennais, 
Lamartine  ,  Peel ,  Palmerston ,  d'Iraëli ,  Louis- 
Philippe,  Vernet,  Delaroche,  Rousseau,  etc.. 
L'acquéreur  est  un  Américain,  auteur  de  quel- 
ques relations  de  voyage. 

A  une  soirée  chez  Mad.  W....  (une  des  étoiles 
de  Portland  place  il  y  a  vingt  ans),  le  spirituel 
auteur  de  Pendennis  et  des  Snobs,  M.  Thackeray, 


—    206    — 

voulut  bien  prendre  la  plume  pour  écrire  quel- 
ques mots  sur  mon  album.  Les  voici  : 

«  Quand  on  ne  se  repent  que  sept  fois  par 
jour  de  s'être  marié ,  on  a  fait  un  bien  bon 
parti  !   » 

Chacun  de  se  récrier  !  Moi  surtout  qui  étais 
dans  cette  assemblée  le  Benjamin....  même  pour 
Texpérience  ! 

—  Qu'est-ce  qui  vous  choque  dans  cette  pen- 
sée ,  me  dit  Thackeray  :  elle  n'est  pas  galante , 
c'est  possible  !   mais  si  c'est  la  vérité  ? 

—  Est-ce  la  vérité  ?  Ne  faites-vous  pas  retom- 
ber sur  une  situation  le  vice  de  l'existence  elle- 
même  ? 

—  C'est-à-dire  que  l'on  pourrait  changer  ainsi  : 
Si  Ton  ne  se  repent  de  vivre  que  sept  fois  par  jour, 
on  doit  être  fier  de  son  existence?  Tenez,  voici 
mes  tablettes,  donnez-moi  votre  réponse...  en 
vers  ,  puisqu'ils  vous  rongent  ! . . .  et  qu'ils  nous 
rongeront  tous,  hélas  !  un  jour. 

J'écrivis  les  vers  suivants  : 

Eien  ne  peut  ici  bas  contenter  notre  envie , 
Et  les  plus  longs  bonheurs  ne  durent  qu'un  instant! 
Ah  !  s'il  fallait  payer  pour  entrer  dans  la  vie  , 
On  redemanderait  son  argent  en  sortant  ! 

Ij'homme  au  monde  qui  reçoit  le  })lus  d'auto- 
graphes (?),  c'est  le  Président  des  États-Unis  : 
chaque  poste  lui  apporte  de  grands  sacs  de  lettres 
à  lui  adressées.  Elles  contiennent  des  invitations, 
des  critiques,  des  théories  de  gouvernement,  des 
demandes  de  secours,  des  conseils,  des  demandes 


—    207    - 

cVemplois,  etc.,  etc.  Un  des  correspondants  du 
Président  est  un  édimhourgeois  qui  prie  le  Prési- 
dent de  faire  punir  de  la  peine  de  mort  ceux  qui 
maltraitent  les  oiseaux,  les  cliiens,  même  ceux 
qui  prennent  les  souris  {sic).  Un  kentuckien  en- 
voie sa  photographie  au  Président.  Dans  une  se- 
conde lettre  il  redemande  sa  photographie,  an- 
nonçant une  nouvelle  épreuve  où  les  yeux  sont 
mieux  sortis.  Un  louisianais  prie  de  le  loger  chez 
lui  à  Washington  pendant  un  petit  séjour  ;  il  ne 
peut  supporter  les  hôtels,  une  aversion  insur- 
montable! Il  écrit  :  je  viendrai  seul,  hélas!  mais 
dans  votre  famille  je  me  croirai  at  home!!! 

L'activité  littéraire  est  remarquable  en  Ecosse, 
tant  au  point  de  vue  des  consommateurs  que  des 
producteurs  :  mais  la  littérature  strictement  écos- 
saise n'y  participe  que  pour  une  infime  part.  La 
littérature  écossaise  est  en  quelque  sorte  tombée 
dans  le  domaine  de  l'histoire  passée  Les  efforts 
de  quelques  bardes  contemporains  sont  rarement 
récompensés.  Et  cependant  le  succès  de  l'ancienne 
littérature  de  TÉcosse  progresse  tous  les  jours. 
Les  collections  de  chants  écossais  anciens  sont 
constamment  demandées.  On  fait  sans  cesse  de 
nouvelles  éditions  de  Scott  et  de  Burns.  Les 
poésies  de  ce  dernier  sont  à  leur  400™°  édition 
depuis  1786.  Les  œuvres  de  James  Hogg  et  de 
Allan  Cunningham  restent  populaires;  et  les 
noms  de  Michel  Bruce  et  de  James  Grahame 
circulent  encore  sur  toutes  les  lèvres.  Mais  aucun 
ouvrage  de  ce  genre  ne  paraît  plus.  L"Écosse  a 
encore  ses  lois,  son  église,  son  art,  mais  elle  n'a 


—     208    — 

plus  sa  littérature  à  elle.  La  littérature  écossaise 
de  nos  jours  est  tout  bonnement  de  la  prose  ou 
de  la  poésie  anglaises  produites  par  des  Écossais. 
Chose  à  noter  ;  V Encyclopédie  Britannique  (nou- 
velle édition),  dont  le  8"  volume  vient  de  paraître, 
est  une  œuvre  écossaise-anglaise.  Publiée  par 
une  maison  écossaise  et  éditée  par  un  professeur 
écossais,  elle  récolte  ses  collaborateurs  dans  toute 
rétendue  de  Tempire  britannique.  En  somme 
donc,  pour  ce  qui  regarde  la  littérature,  il  n'y  a 
plus  de  frontière  entre  l'Angleterre  et  TÉcosse. 
Edimbourg  à  présent  est  le  quartier-général  de 
trois  grandes  encyclopédies.  En  tète  marche 
Y  Encyclopédie  britannique,  qui  en  est  à  sa  O*'  édi- 
tion, si  remaniée  qu'elle  devient  un  nouvel  ou- 
vrage. Elle  comprendra  21  volumes.  A  côté  vient 
la  Chanibers  Encyclop)édie ,  en  10  volumes,  qui 
vaut  le  Conversations-Lexicon  des  Allemands. 
Enfin,  il  y  a  la  Globe  encyclopédie ,  qui  est  plus 
succinte  que  celle  de  Chamber  et  fort  bien  faite. 
Elle  aura  6  volumes  :  4  ont  paru.  Le  grand 
nombre  de  matières  qu'elle  contient  la  fait  fort 
rechercher  aux  États-Unis. 

Jules  Nollée  de  Noduwez. 


—    209     — 


DIPLOME 

DE 

THIERRY   III,    ROI    DE    FRANCE. 

(VIP    SIÈCLE). 


Le  diplôme  mérovingien,  qui  fait  Tobjet  de  ces 
lignes,  est  conservé  à  la  Bibliothèque  de  l'Univer- 
sité de  Gand,  où  il  a  été  trouvé  récemment,  dans 
un  paquet  de  vieux  imprimés  et  de  pièces  diver- 
ses, ancien  rebut  provenant  des  greniers  d'une 
imprimerie. 

La  pièce  est  en  bon  état ,  sauf  une  très-petite 
partie  détruite  à  l'intersection  de  deux  plis,  au 
milieu  du  parchemin  ;  on  pourrait  supposer , 
d'après  d'autres  plis,  qu'elle  a  servi  de  couverture 
à  l'un  de  ces  cahiers  oblongs  dont  on  faisait  usage 
pour  recueillir  des  annotations  de  dépenses  ou 
de  recettes  journalières. 

Le  fac-similé,  joint  à  cet  article,  nous  dispense 
d'entrer  dans  une  description  détaillée  de  la 
charte  ;  il  nous  reste  cependant  à  en  faire  con- 
naître quelques  caractères  matériels  :  le  parche- 


210 


min,  d épaisseur  moyenne,  est  d'une  blancheur 
terne  et  mate  du  côté  qui  porte  l'écriture ,  quel- 
ques traces  de  poli  paraissent  çà  et  là,  notam- 
ment près  des  bords  de  la  feuille  ;  le  revers ,  qui 
est  jaunâtre ,  ne  porte  aucune  note  ,  marque  ou 
indication  ;  l'encre ,  uniformément  de  couleur 
brune,  parait  délayée;  on  croirait,  à  l'aspect  des 
traits  de  l'écriture,  qu'une  partie  de  la  matière 
colorante  de  l'encre  a  été  emportée  par  un  lavage  ; 
quelques  parcelles  de  cire  collées  au  parchemin, 
autour  d'un  petit  trou,  sur  une  surface  d'un  pouce 
de  diamètre  environ ,  indiquent  la  place  occupée 
par  le  sceau ,  qui  est  perdu  ;  les  découpures  qui , 
repliées  dans  la  cire,  devaient  servir  d'attache  au 
sceau ,  ne  sont  pas  bien  nettement  accusées  ;  le 
parchemin  parait  avoir  été  plutôt  troué  à  la 
pointe  qu'entaillé. 

Le  texte  de  ce  diplôme,  dont  nous  avons  essayé 
de  faire  la  transcription,  relate  un  acte  de  libéra- 
lité, souscrit  à  Compiègne  le  23  octobre  682,  par 
Thierry  III,  tils  de  ClovisII,  roi  de  France,  au 
profit  de  l'abbaye  de  Saint-Bertin  ;  le  roi  affran- 
chit l'abbaye  de  toutes  redevances  et  de  tous 
services  publics  pour  les  fonds  de  terre  qu'elle  a 
acquis  ou  acquerra  à  l'avenir  dans  l'étendue  du 
domaine  royal  d'Attigny  ',  sauf  en  ce  qui  concerne 
les  fermes  soumises  aux  corvées  de  charroi. 


'  D'après  le  Dictionn.  géngraph.  joint  au  cartidnire  de  Saint- 
Bertin,  publié  par  Guérard,  Attiniacum,  Attinium,  serait  Attin. 
(Pas-de-Calais,  près  de  Mou  treuil-sur-Seine).  C'est,  nous  senible-t-il, 
une  opinion  peu  admissiljle. 


—    211    — 

«  (J.  C.  S.)  Theudericus  rex  francorum  vir  iuluster  '. 

»  Si  aliquid  ad  loca  sanctorum  pro  adjuvamen  servo- 
rum  dei  concediraus  lioc  nobis  ad  laudem  vel  âeterne  ^  retri- 
butionis  pertinere  confidimus,  igitur  cognoscat  magnetudo  ' 
seu  utilitas  vestra  quod  nos  venerabili  s  *  viro  bertiiio 
abbati  de  monasterio  sitdiu  ^,  taie  beneticium  coiicessimus 
ut  quod  infra  mero  attiniacense  de  fisco  nostro  compara- 
tum  babebat  aut  inantea  ad  comparandum  invenire  potiie- 
rit  prœter  illos  mansos  unde  opéras  carrarias  "  exeunt  lioc 
habeant  '  concessum  et  nullo  redditu  *  terrée  nec  nullas 
functiones  publicas  eisdem  ob  lioc  exigere  nec  requirere 
non  debeatur  %  qua  propter  per  hoc  preeceptum  spécial! us 
decernimus  ordinandum  quod  in  perpetuo  volumus  ....  '" 
mansuruni  ut  neque  vos  neque  juniores  seu  successores 
vestri  nec  quislibet  de  judiciaria  potestate  adcinctus  de 
ipsas  terras  ^  '  quod  infra  mero  attiniacense  infra  ipso  fisco 
nostro  memoratus  abbas  '^  comparatum  habet  aut  dein- 
ceps  ipse  vel  successores  sui  aut  pars  ipsius  monasterii 


»  GuÉRARD,  la  suscription  n'est  pas  reproduite. 

*  Idem,     œternœ. 

3  GuÉRARD  et  Mabillon,  magnitudo. 

*  Idem,  s.  [sacerdoti]  a  été  omis. 
5  GuÉRARD,  sithiu. 

«  Opéra  carraria,  corvées  de  charroi.  Capital.,  liv.  I,  chap.  75. 
«  Et  tria  carraria  opéra  licet  fieri  in  die  dominico,  id  est,  liostilia 
»  carra,  vel  victualia  vel  si  forte  necesse  erit  corpus  cujuslibet  duci 
>.  ad  sepulchrura.  »  —  «  Carrum  »  est  pris  ici  dans  le  sens  même 
d'«  opus  carrarium.  »  L'emploi  de  «  carpenta  »  est  identique  dans  la 
deuxième  partie  de  la  charte.  Il  est  superflu  de  dire  que  «  opéras  car- 
rarias .)  «  carpentas  »  sont  des  barbarismes  doublés  de  solécismes. 

'  GuÉRARD  et  Mabillon,  habeat. 

*  GuÉRARD,  reddita. 

»  GuÉRARD  et  Mabillon,  debeatis. 
»"  Idem,  esse. 

"  GuÉRARD,  ijysis  terris. 
*"^  GuÉRARD  et  Mabillon,  aMa, 


-     212     — 

comparare  potiierint  praeter  illos  mansos  imde  carpentas  ' 
exeimt  nullas  ^  redditus  terra?  nec  nuUas  f  unctiones  eisdem 
non  requiratis  nec  exactetis,  nisi  quicquid  ''  exinde  ipse 
abba  vel  pars  monasterii  fuit  ('r')  *  sitdiu  aut  successores  sui 
vel  ^  quod  fiscus  noster  percipere  potuerit  ex  iiostro  mu- 
nere  largitatis  hoc  babeat  concessura  atque  indultum  et  ut 
hœc  prfleceptio  firmior  habeatur  et  per  tempora  melius 
conservetur  manus  nostrse  subscriptionibus  eam  decrevi- 
mus  roborare. 

»  J,  C.  N.  t  Signum  gloriosi  régis  Theudericus  rex  sub- 
scripsi  S.  (monogramme)  **. 

»  Data  sub  die  X'"'^  kalend.  novembris,  anno  rcgui  nos- 
tri  X,  compendio  palatio  in  dei  nomine  féliciter.  » 

Ce  document  '  est  inséré  dans  le  Chariularium 
Sithiense ,  composé  par  le  moine  Folcuin  vers  le 
milieu  du  X''  siècle  et  publié,  d'après  une  copie  du 
XIP  siècle,  dans  la  collection  des  documents  iné- 
dits sur  l'histoire  de  France  **. 

Dans  son  traité  Dé  re  diplomatica ,  Mabillon  »  fait 
connaître  le  texte  de  cette  charte  et  de  plusieurs 
autres ,  qu'il  afhrme  avoir  choisies  et  copiées  sur 


«  Voy.  notée,  p.  211. 

*  GuÉKABD  et  Mabillon,  vidlos. 
'  Mabillon,  quidquid. 

*  GuÉRARD  et  Mabillon,  sui. 
s  GuÉRARD,  vel  est  omis. 

*  GrÉRARD  et  Mabillon,  «  Signum  gloriosi  rrgis  Theuderici.  « 

■^  Voyez  pour  les  ouvrages  dans  lesquels  cette  charte  a  été  publiée  : 
Wauters  ,  Table  des  chartes  et  diplômes  de  Vhistoire  de  Belgique, 
t.  I,  p.  53. 

*  Documents  inédits  sur  Vhistoire  de  France.  Collection  des  cartn- 
laires  de  France.  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Saint-Bertin,  publié  par 

GuÉRARD. 

'■•  Mabillon,  De  re  diplom.,  j^ag.  605  et  606. 


—    213     — 

le  manuscrit  original  de  Folcnin  ;  le  célèbre  béné- 
dictin observe  que  la  souscription  «  signum  glo- 
riosi  régis  Theuderici,  »  rapportée  dans  le  Car- 
tulaire,  doit  être  une  transcription  fautive  de 
Folcuin,  parce  que  Thierry  III  avait  adopté,  pour 
cette  formule,  un  style  qui  lui  était  particulier, 
en  ce  qu'il  y  ajoutait  une  invocation  exprimée  en 
toutes  lettres  :  «  f  In  Christi  nomine  Tlieudericus 
rex  subscripsi  ' .  »  Cependant  notre  diplôme  ne 
porte  pas  Tinvocation  écrite  en  toutes  lettres ,  et 
s'il  est  vrai  que  l'on  découvre  les  lettres  J.  C.  N., 
qu'il  faut  lire  «  in  Christi  nomine  ,  »  dans  le 
monogramme  tracé  immédiatement  devant  la 
croix,  la  souscription,  comprenant  les  mots  «  si- 
gnum gloriosi  régis,  ^)  n'en  est  pas  moins  diffé- 
rente de  celle  que  l'on  a  constamment  attribuée 
à  Thierry  III  et  que  l'on  signalait  même  comme 
exceptionnelle. 

Folcuin  fixe  la  date  du  diplôme  en  676,  mais, 
d'après  Mabillon,  on  ne  peut  guère  compter  sur 
l'exactitude  de  la  concordance  que  l'auteur  du 
ChartulmHum  Sithiense  avait  établie  entre  les  dates 
des  documents  et  les  années  de  l'incarnation.  Les 
auteurs  qui  ont  cité  cette  charte  la  placent  géné- 
ralement au  23  octobre  682;  il  faudrait  toutefois 
reculer  de  trois  ans,  si  l'on  suivait  l'opinion  des 
rédacteurs  de  l'Art  de  vérifier  les  dates;  d'après 
ceux-ci ,  Thierry  III  compte  les  années  de  son 
règne  du  jour  de  la  mort  de  son  frère  Clothaire  III, 
décédé  en  670.  La  différence  de  dates  résulte  d'une 

•  Mabillon,  De  re  diplo7n.,  p.  109. 


—    214    — 

interruption  clans  le  règne  de  ce  roi.  Peu  de  temps 
après  avoir  été  élevé  sur  le  trône ,  Thierry  fut 
renversé  par  une  faction  et  enfermé  au  monastère 
de  Saint-Denis;  on  lui  rendit  la  couronne  en  673 
et  c'est  en  comptant  son  règne  à  partir  de  cette 
année  que  l'on  peut  placer  l'acte  en  682. 

Nous  nous  abstenons  de  discuter  ce  que  le  di- 
plôme a  de  caractéristique,  car  la  rareté  des  char- 
tes de  cette  époque  nous  a  interdit  toute  étude  de 
comparaison  avec  d'autres  documents  originaux. 
Cet  article  n'a  du  reste  pour  but  que  de  signa- 
ler aux  savants  un  monument  digne  de  leur 
attention. 


—  215  — 


LES  AROHIVES  DES  ÉTATS  DE  FEANDRE 

SAirV^ÉES  EN  1794. 


Les  anciens  États  de  Flandre  représentaient 
avant  1794  ce  qne  nous  appelons  anjourdliui  le 
Conseil  provincial,  à  la  différence  que  cette  pre- 
mière assemblée  se  composait  des  députés  des 
deux  Flandres.  Les  quatre  membres,  Gand,  Bru- 
ges, Ypres  et  le  Franc,  y  étaient  représentés;  et 
il  fut  un  temps  oii  ces  États  siégeaient  alternati- 
vement au  clief-lieu  de  chacun  de  ces  membres. 

Outre  le  président,  ce  corps  avait  comme  digni- 
taire un  pensionnaire-actuaire,  qui  remplissait  les- 
fonctions  de  secrétaire  ou  greffier  de  rassemblée 
et  avait  la  garde  des  archives.  Les  États  siégeant 
à  Gand,  tenaient  leurs  séances  à  Thôtel-de-ville. 

Quand  les  Français  envahirent  le  pays  en  1794, 
ils  bouleversèrent  complètement  l'ancien  ordre 
des  choses,  supprimèrent  les  États  et  voulurent 
s'emparer  de  leurs  archives.  C'est  alors  que  le 
dernier  pensionnaire-actuaire,  François- Antoine 
Varenbergh,  le  gardien  par  conséquent  des  ar- 
chives, d'accord  avec  le  fils  de  l'ancien  président 
des  États,  le  comte  Dellafaille  d'xlssenede,  entre- 


—    216    — 

prit  de  sauver  ces  documents;  ils  s'entendirent 
tous  deux  avec  Du  Breucq,  directeur  des  droits 
des  États,  et  chargèrent  le  batelier  Bernard 
Boone,  maître  éclusier,  de  les  transporter  à 
Bruxelles.  Les  archives,  composées  d'un  grand 
nombre  de  registres  et  de  liasses,  furent  mises 
dans  dix-neuf  caisses,  déposées  dans  le  bateau  de 
Boone,  voguèrent  vers  Bruxelles,  à  travers  les 
circuits  des  rivières  et  des  canaux,  et  furent  peu 
après  ramenées  à  Gand,  où  Boone  les  cacha  dans 
son  magasin  pendant  huit  ans  et  demi.  Après  ce 
laps  de  temps ,  François-Antoine  Varenbergh 
donna  ordre  à  Boone  de  transporter  les  caisses 
chez  le  comte  Dellafaille,  qui  demeurait  rue  de  la 
Vallée  près  de  l'église  de  Saint-Michel,  dans  l'an- 
cien hôtel  de  Ravestein,  occupé  aujourd'hui  par 
le  comte  de  Loen  d'Enschede;  toutefois  l'une 
d'elles  fut  portée  chez  un  négociant  de  la  ville 
nommé  Nuytens.  Ce  sauvetage  fut  pour  le  ci- 
devant  pensionnaire-actuaire  des  États  la  source 
d'un  grand  nombre  de  tracasseries  ;  le  gouverne- 
ment français  dirigea  des  poursuites  contre  lui. 
Quant  à  Boone,  il  j  perdit  peu  après  sa  place 
d'éclusier  qu'il  avait  obtenue  des  États,  à  l'inter- 
vention du  pensionnaire-actuaire  pour  services 
antérieurs  '.  La  misère,  quelques  années  plus  tard, 
étant  venue  frapper  à  sa  porte,  il  s'adressa  à  son 
ancien  protecteur,  devenu  président  du  tribunal 


'  Boone  pei'dit  sa  place  d'énlusior  à  la  Pêcherie  en  l'an  IV. 
Après  1830,  il  eut  le  privilège  du  balage  sur  le  canal  de  Bruges,  et 
demeurait  hors  de  la  ci-devant  porte  de  Bruges. 


—    217    -    . 

civil  à  Gand ,  qui  se  chargea  de  faire  parvenir  au 
gouverneur  de  la  province,  baron  de  Keverberg, 
une  pétition  pour  faire  obtenir  au  batelier  le  prix 
du  sauvetage  des  archives  de  Flandre.  On  lui  ac- 
corda 950  florins. 

Tous  ces  détails  étaient  ignorés  jusqu'ici  ;  nous 
n'en  aurions  nous  même  sans  doute  jamais  eu 
connaissance,  si,  en  cherchant  dans  des  papiers 
qui  ont  pour  nous  un  intérêt  tout  particulier, 
nous  n'eussions  découvert  la  pétition  du  batelier 
Boone,  écrite  de  la  main  même  du  ci-devant  pen- 
sionnaire-actuaire. 

D'autres  pièces  ayant  trait  à  ce  sauvetage  se 
trouvaient  jointes  à  ce  document,  que  nous  re- 
produisons ici. 

«  A  son  Excellence  le  baron  de  Keverberg  de 
Kessel,  gouverneur  de  là  Flandre  orienlale,  che- 
valier de  V ordre  du  Lion  Belgique. 

»  Monseigneur, 

»  Le  soussigné  Bernard  Boone,  batelier,  de- 
meurant a  Gand,  a  l'honneur  de  vous  exposer 
qu'il  fut  chargé  dans  le  temps  par  Monsieur  le 
comte  Dellafaille,  fils  aîné  du  Président  des  ci- 
devant  États  de  Flandre,  par  Monsieur  Yaren- 
bergh,  pensionnaire,  et  par  Monsieur  Du  Breucq, 
directeur  des  droits  des  dits  États,  de  la  conser- 
vation des  principales  archives  de  la  province  de 
Flandre. 

»  Qu'à  cet  effet  il  s'est  transporté  à  Bruxelles 
pour  chercher  à  mettre  en  sûreté  les  dites  ar- 
chives et  autres  objets  renfermés  dans  dix- neuf 


—    218    — 

caisses  qui  ont  été  transportées  par  ses  soins  sur 
son  bateau ,  et  après  un  grand  trajet  et  des  diffi- 
cultés presque  insurmontables,  ramenées  à  Gand, 
où  elles  ont  restées  déposées  pendant  huit  ans  et 
demi  dans  les  magasins  du  soussigné. 

»  Dix-huit  de  ces  caisses  ont  ensuite  été  re- 
mises à  M.  le  comte  Dellafaille  et  la  dix-neuvième 
a  été  conduite  d'après  ses  ordres  chez  M.  Nuy- 
tens.  Ces  faits  sont  constatés  par  le  certificat 
ci-joint  sous  le  n°  1  qui  a  été  délivré  par  MM.  le 
comte  Dellafaille  d'Assenede ,  Varenbergh  et 
Dubreucq. 

»  Il  revient  au  pétitionnaire  1"  une  somme  de 
sept  cent  cinquante-trois  florins  seize  sols  pour 
ses  frais  de  voyage,  débours,  transport  et  emma- 
gasinage des  dits  objets  ;  2''  celle  de  cent  quatre- 
vingt-dix  florins,  pour  dix-neuf  jours  qu'il  a  em- 
ployé à  cette  opération  délicate,  en  tout,  neuf 
cent  quarante-trois  florins  seize  sols,  suivant  le 
compte  ci-joint  sous  le  n*'  2 ,  approuvé  et  certifié 
véritable  par  MM.  Dellafaille  d'Assenede,  Varen- 
bergh et  Dubreucq. 

»  Le  pétitionnaire  étant  père  de  famille  avec 
huit  enfans ,  et  ayant  perdu  toute  sa  fortune  tant 
par  l'eftet  de  la  privation  de  l'emploi  d'éclusier 
qui  lui  avait  été  donnée  par  les  États  de  Flandre, 
que  par  l'effet  des  réquisitions  dont  il  fut  frappé 
sous  le  gouvernement  français,  prend  la  liberté 
de  recourir  à  la  justice  de  Votre  Excellence  pour 
obtenir  d'elle  le  payement  de  la  dite  somme  de 
neuf  cent  quarante-trois  florins  seize  sols  qui  lui 
revient  suivîuit  son  état  duement  certifié. 


—    219    — 

»  Il  prie  Votre  Excellence  d'observer  que  les 
objets  qu'il  est  parvenu  à  sauver  même  au  dé- 
pends de  sa  vie,  appartenaient  à  la  province  ,  et 
qui  lui  ont  été  restitués ,  que  conséquemment  la 
dépense  faite  pour  leur  conservation  paraît  de- 
voir être  acquitée  sur  les  fonds  destinés  aux  dé- 
penses imprévues  ou  d'urgence,  ou  enfin  sur  ceux 
à  qui  il  plaira  à  Votre  Excellence  de  les  assigner. 

»  Le  suppliant  se  trouve  dans  la  plus  grande 
détresse,  et  il  a  un  besoin  urgent  de  recevoir 
promptement  la  somme  qu'il  réclame,  et  qui  ne 
peut  lui  être  contestée,  puisque  sa  demande  est 
fondée  sur  des  titres  authentiques  qui  pourraient 
lui  suffire  en  justice  pour  exercer  son  recours 
contre  qui  de  droit. 

»  Mais  le  suppliant  ayant  agi  de  bonne  foi  et 
en  vertu  d'ordre  de  personnes  en  place  dont  il 
avait  mérité  la  confiance  qu'il  était  jaloux  de 
justifier,  croit  devoir  s'adresser  à  Votre  Excel- 
lence en  solicitant  la  grâce  d'obtenir  prompte- 
ment une  décision  favorable  sur  l'objet  de  sa 
réclamation, 

»  Il  prie  Votre  Excellence  de  daigner  agréer 
l'hommage  de  son  profond  respect. 
»  Gand ,  le  3  novembre  1818. 

»   B.  BOONE.    » 

Les  papiers  sauvés  n'étaient  que  les  plus  pré- 
cieux, quant  aux  autres  ils  durent  être  livrés  aux 
Français  pour  ne  pas  tout  perdre.  C'est  ce  que 
nous  apprend  une  auto-biographie  du  pension- 
naire actuaire  Varenbergh ,  écrite  en  flamand  et 


—    220    — 

intitulée  :  Korte  verhandelinge  van  myne  stucUen 
en  van  aile  de  amhten  die  ik  gedurende  iiieer  dan 
vyfiig  jaeren  heh  hedient.  »  Voici  le  passage  où 
il  parle  des  archives  et  de  la  façon  dont,  grâce 
à  sa  position,  il  put  parvenir  à  les  mettre  en 
sûreté.  Ce  passage,  il  est  vrai,  est  peu  explicite 
et  il  fallait  la  découverte  de  la  requête  du  bate- 
lier Boone  et  de  quelques  autres  papiers  pour 
nous  renseigner  complètement  : 

«  Pendant  cette  triste  période  (les  premiers 
temps  de  l'occupation  française),  je  me  tins  à 
l'écart  et  refusai  tout  emploi.  Malgré  cela,  et  en 
dépit  de  mon  opposition,  on  m'obligea,  en  em- 
ployant même  la  force  militaire  {ben  ik  door  de 
magt  gedwongen  en  zelfs  militairelyk  geexecuteert) 
à  occuper  le  poste  de  secrétaire  de  la  municipa- 
lité de  la  ville  de  Gand.  Dans  cette  position 
j'éprouvai  de  nombreux  désagréments,  mais  j'eus 
aussi  l'occasion  de  faire  quelque  bien ,  en  défen- 
dant le  bon  droit,  et  particulièrement  en  four- 
nissant des  passeports  aux  émigrés ,  auxquels 
l'effroi  avait  fait  quitter  le  pays,  et  leur  permet- 
tant ainsi  de  rentrer  dans  leurs  foyers. 

»  A  la  même  époque,  je  fus  l'objet  de  diverses 
poursuites,  au  sujet  des  archives  des  États  de 
Flandre  que  le  gouvernement  voulut  me  forcer 
à  livrer.  Cependant  à  force  de  peines  et  d'adresse, 
je  parvins  à  les  sauver  en  cédant  celles  de  peu 
de  valeur,  et  en  faisant  transporter  les  j^lus  pré- 
cieuses, renfermées  dans  des  coffres, chez  le  fils  de 
M.  Dellafaille,  président  des  États  de  Flandre.   » 

Lorsque  la  tranquillité  fut  rétablie,  les  archives 


—     221     — 

furent  déposées  àl'liôtel-de-ville,  et  ensuite  trans- 
férées à  Fancien  couvent  des  jésuites,  rue  des 
Foulons,  ou  se  trouvaient  les  archives  du  Conseil 
de  Flandre,  depuis  que  ce  corps  avait  eu  1778 
quitté  le  Vieux-Bourg ,  ainsi  que  le  chartrier  de 
Ivupelmonde  et  d  autres  documents  précieux  pour 
notre  histoire.  A  la  suite  d'une  visite  que  YanWyn, 
archiviste  de  la  Piépublique  batave ,  chargé  d'ex- 
plorer les  divers  dépôts  de  la  ci-devant  Belgique, 
fit  en  1806  aux  papiers  déposés  au  local  des 
jésuites ,  le  préfet  Faitpoult  fit  transporter  les 
archives  de  Rupelmonde  ,  autrement  dites  des 
comtes  de  Flandre,  ainsi  que  celles  des  États  de 
Flandre,  à  Thôtel  de  la  préfecture.  Puis,  à  la 
suite  de  la  séparation  des  archives  anciennes 
d'avec  les  modernes,  on  transféra  en  1874  les 
premières,  place  de  FÉvêché,  au  ci-devant  orphe- 
linat, transformé  en  dépôt  des  archives  de  l'État 
à  Gand,  ♦ 

Les  archives  des  ci-devants  États  de  Flandre 
sont  fort  nombreuses  ;  un  inventaire  en  avait  été 
commencé  par  Hendrickx;  il  fut  continué  par 
Van  der  Meersch,  et  aujourdliui  par  le  conserva- 
teur actuel  M.  Dhoop.  Le  relevé  est  fait  pour  tous 
les  registres  aux  décisions,  les  rétroactes  et  une 
grande  jiartie  des  comptes. 

Emile  V... 


—      900      


VARIETES. 


Épitaphes  de  Belges  a  Bale  ,  a  Cologne  ,  etc.  —  Un 
recueil  d'épitaplies ,  publié  à  Bâle  au  Wll'^  siècle  sous  le 
titre  de  :  Basilea  sepidta  retecta  continuata  /  Basileœ. 
Typis  et  impensis  Emanuelis  Kônig  et  Fil.  anno  M.  DC.  LXI, 
par  Jean  Grossius  et  continué  par  Jean  Tonjola,  contient 
les  inscriptions  funéraires  de  quelques  Belges  morts  à 
Bâle  ;  la  plupart  avaient  émigré  à  la  suite  des  malheureux 
événements  du  XVI^  siècle.  L'appendice  de  ce  volume  qui 
porte  le  titre  de  :  Selectissimorum  orbis  monument  or  um 
appendix,  contient  également  les  épitaphes  de  quelques- 
uns  de  nos  compatriotes;  plusieurs  ayant  été  publiées  dans 
les  recueils  de  Sweertius  et  d'autres,  sont  trop  connues 
pour  être  reproduites ,  mais  il  y  en  a  d'autres  qui  le  sont 
moins  et  qu'il  est  intéressant  de  relever. 

Dans  la  cathédrale  de  Bâle,  on  lit  l'épitaphe  d'un  im- 
primeur bien  connu,  auquel  M.  Lecouvet  a  consacré,  en 
1846,  un  article  dans  ce  recueil. 

Viatori  S. 

Michaeli  Isingrino, 

Civi  Basil,  egregio ,  ac  pio , 

Typographo 

industrio,  doctissimo. 

Anno  M.  D.  LVII.  Mart.  lU.  .Etat,  suse  LVU. 


—    223     - 

Elizabethœ  Linderœ 
conjugi  lectiss. 
Anno  M.  D.  LXXIIX.  7.  Cal.  Nov.  set.  LXXV. 
Diem  functis 
Parentibus  optimis  : 
Thomœ  Gvariiio 
Belgœ, 
Tornaco  Patria,  ob  pietatem 
profugo , 
marito  dilectissimo , 
Mo  artis  Soceri  iinitatori , 
geternœque  felicit.  illius  invido , 
Anno  M.  D.  XCII.  6.  Maii  setat.  suse  LXIIL 
è  teuebris,  in  liiceni  seternam 
migrant! , 
Elizabetha  Isingrina  m.  f. 
Conjugalis  fidei  ac  sortis 
observantiss.  mœstiss. 
P.C. 
En  Socerum,  Socrum,  Generum  lapis  obtegituum, 
Quos  vivos  Christo  junxerat  una  fides. 
Quidnisperemiis,  qiiin  rursus  Christus  eosdem 

Jungat  in  setherea  luce,  simulqiie  beet?     (P.  17). 

Dans  l'église  paroissiale  de  Saint-Pierre  : 

Marco  Perezio 

Christi  causa 

exuli  : 

Qui  volente,  jubente, 

S.  P.  Q.  Ant. 
fidem  suam  in  graviss. 

Relig.  dissidio , 

Deo,  Patrise,  bonisque 

comprobavit  omnib. 


—    224    — 

Ursula  Lapezia  ^ 

marito  incomparab. 
C.  an.  sal.  CD.  13.  LXXII. 

œtat.  XLV.  (P.  124) 

Dans  l'église  paroissiale  de  Saint-Léonard  : 

Epitaphium 
Hier  ruhet  die  Ehren-und  Tugendreiche  Fraw  Anna 
Hertsogin,  herren  Samuel  Marschallen,  Kayserlichen 
Notarii,  Musici  in  der  Universiteil  und  organists  in  Basel, 
gewesene  Eheliche  Hausfraw.  Starb  seliglich  den  19  Junii 
Anno  1627,  ilires  alters  im  70  jahr. 

Sous  cette  inscription  on  lisait  la  suivante  : 

Samuel  Marescliallus 

Tornacensis  Fland.  n. 

Musicus  et  organ.  Bas.  per 

Ann.  obiit.  ann.  D. 

^t.  (P.  200) 

(Visitur  in  area  ad  latera  superioris  ambitus). 

An.  1564.  26  april,  Starb  die  Edle  Fraw  Francina  von 
Bomberg  bey  Antoff  /  herren  Balthasar  Ravalasci  von  Mey- 
land  Burgers  zu  Basel  Ehegemahel.  (P.  182) 

Bans  l'église  des  Dominicains  se  lisaient  deux  épitaphes, 
qui  se  rapportent  apparemment  à  des  perso  unes  d'origine 
belge  : 

L'an  M.  DC.  XXXVL  le  xii  de  Décembre 

le  sieur 

Gedeon  Sarazin 

Marchand  honorable 

ayant  hereusement 

parachevé  sa  Course 


—    225     — 

L'an  LXIV.  de  son  aage 
a  esté  appelé  au 

repos  éternel 

Suivi  de  sa  femme 

Ester  Lernou 

Le  XVI  du  mesme  Moy 

desquels  les  os  re^iosent  icy, 

attendans  la  bienhereuse 

rersurrection.  (P.  286) 

Dans  l'appendice  à  ce  travail  intitulée  :  Selectissimorum 
orhis  monumentorum  appendix,  Tonjola  a  réuni  les  épi- 
taphes  d'un  grand  nombre  de  personnages  belges;  il  en  a 
recueilli  plusieurs  à  Anvers,  qui  ont  paru  dans  la  collection 
publiée  à  Anvers,  entre  autres  celles  se  rapportant  à  la 
famille  de  WesembeJie;  d'autres  épitaplies  sont  reproduites 
sans  que  l'auteur  ait  indiqué  l'endroit  où  il  les  a  copiées; 
celle  de  Burdingo  a  sans  doute  été  prise  à  Copenhague, 
dont  le  nom  latin  est  Hafnia.  C'est  dans  cette  ville  qu'il 
mourut. 

D.  0.  M.  S. 

Dn.  Jacobo  Bordingo ,  Antverpiano ,  viro  in  omni  Philo- 
logia  et  Philosophia  benè  et  eleganter  versato  ;  et  propterea 
Sadoleti  quoq.  aliorumque  exterorum  doctiss.  monumentis 
publicè  celebrato,  primum  Patrise,  dein  Duce.  MegajDp.  et 
Sereniss.  Daniœ  Piegg.  Christiani  III  et  Frederici  II  Ar- 
chiatro  :  Academiarum  Kostochianaî  et  Hafniensis  orna- 
mento  :  ob  verae  pietatis,  eruditionis,  sapientise,  et  omnium 
virtutum  laudem,  memoriam  perennem  jam  pridem  adepto  : 
gi'ati  hoc  animi  memoraculum  Patri  optimo,  sibique,  et 
omnibus  bonis  desideratiss.  in  beatse  reparationis  spem, 
Jacobus  Bordingus  F.  I.  V.  Doctor,  Professer  et  Cancella- 
rius  Megapol.  P.  C. 

Pié  obiit  Hafnise  anno  Christi  1560,  sept.  5 
horâ  4  vesp.  anno  aîtat.  50.  (P.  42.) 


—    226    — 

Charles  Uutenliove,  le  Gantois  bien  connu,  avait  lui- 
même  composé  son  épitaphe,  qui  a  été  reproduite  par 
Ryckius  et  ailleurs;  il  y  a  lieu  de  douter  qu'elle  ait  été 
gravée  sur  son  tombeau,  car  à  Cologne,  où  il  mourut,  une 
pierre  tombale  due  aux  soins  de  G.  F.  Hildanus,  portait 
l'inscription  suivante  : 

Gendt 

Ohn  endt 

Bey  iederman 

Dess  lob  wirdt  han  / 
Dass  sie  erst  bracht  auff  dise  Welt 
Den  Utenliovium  ausserwohlt 
Von  Gott  /  dass  er  der  Christen  gmein 
Ein  Perlin  kostlicli  wer  und  rein. 
Der  Gottes  forcht  /  Holdseligkeit 
Ein  Spiegel  war  zu  aller  zeit. 

Wilt  /  gutig  /  frey 

War  auch  darbey. 

Der  Musen  Schar 

Ein  Zierd  er  war. 

Im  Hebraisch 

Hat  kaum  seins  gleich  / 

Griechiscli  /  Latein 

War  ihm  gemein. 
Darumb  bey  Keysern  /  Fursten  /  Herren 
Gehalten  ward  im  grossen  Ehren 
Biss  an  sein  End.  Sein  Fleisch  /  Gebein 
Allliie  schlafi't  under  disem  Stein 
Sein  Seel  in  frewd  Gott  bey  sich  helt. 
Sein  Nam  lebt  ewig  in  der  Welt. 

Guilh.  Fabricius  Hildanus. 

Cum  marmorc  et  lachrymis  L.  M.  Q.  P. 


—     227     — 

A  l'entour  de  la  pierre  on  lisait  l'inscription  suivante  qui 
formait  chronogramme  : 

Vtenlioff  gar  aLt  zV  CoLLn  stirbt , 
Den  Letsten  aVgst  :  ein  GVt  erVVIrbt  / 
VVeLChs  nlCht  VerDIrbt. 
Deo  reLIglosè  VlXIt  annos  seXaginta  qVatVor,  Menses 

[qVatVor. 

(P.  67.) 

Dans  la  cathédrale  d'Anvers  on  lisait  l'inscription  sui- 
vante en  mémoire  de  l'empereur  Charles-Quint. 

D.  0.  M. 
D.  Carolo  V.  Imp.  Aug.  P.  P.  Qui  cum  ann.  XXXIX  summa 

cum  laude  rerum  gubernacula  tenuisset,  tandem 

maximis  terra,  manque  partis  victoriis,  post  abdicatum 

Imperium  setatis  anno  LVIII ,  in  divos  relatus  est  die 

XXI  sept.  Anno  Christi  M.  D.  XXXVIII.  S.  P.  Q.  A. 

Honorificentiss.  heic  persolutis  justis 

bene  merito  gratitudinis  ergô 

Die.  (P.  58.) 

L.  St. 


Jacques  Cats  et  l'abbaye  de  Saint-Piekee.  —  Le 
poète  populaire  Jacob  Cats,  grand  pensionnaire  des  Etats 
de  Hollande,  était  aussi  grand  propriétaire.  Il  possédait 
avec  sa  famille  de  grands  biens  en  Zélande,  Il  prit  aussi 
en  location  de  l'abbaye  de  Saint-Pierre  au  mont  Blandin 
à  Gand,  des  dîmes,  des  terres  et  spécula  sur  l'endigue- 
ment  des  polders.  Mais  qui  terre  a,  guerre  a,  dit  le  pro- 
verbe, et  ce  fut  bien  ici  le  cas  tant  pour  l'abbaye  que  pour 


—    228     — 

Jacob  Cats.  Nous  avons  trouvé  clans  les  archives  provenant 
do  l'abbaye  de  Saint-Pierre  de  nombreuses  pièces  qui  ont 
rapport  à  ces  difficultés ,  qui  survécurent  à  Cats  et  ne  ces- 
sèrent que  par  la  suppression  de  l'abbaye.  Il  y  aurait  de 
quoi  faire  tout  un  travail,  fort  curieux  sur  les  nombreuses 
contestations  entre  les  parties.  Ce  travail  serait  extrême- 
ment intéressant  au  point  de  vue  tant  de  l'histoire  des 
polders  que  de  celle  de  l'abbaye  et  du  poète.  Comme  le 
temps  nous  fait  défaut  pour  traiter  ce  sujet,  nous  nous 
contenterons  de  reproduire  quelques-unes  des  plus  an- 
ciennes   pièces  où   sont    exposées    les    origines    de    ces 

contestations.  t?  „    \t 

Emile  V... 

1611  à  1615.  Exposé  succinct  des  difficultés  intervenues 
avec  Jacques  Cats,  au  sujet  des  baux,  échanges  et  alié- 
nations passés  depuis  1611. 

«  Eerst  wort  bevonden  dat  M^  Jacob  Cats,  met  syne 
consoorten ,  in  pachte  en  amodiatie  ghenomen  hebben  ver- 
scheyde  thienden ,  en  ghekocht  eenige  partyen  van  landen 
toebehoorende  de  selve  abdye,  ghelyck  int  corte  verliaelt 
word  in  de  rekeninge  van  Joos  de  Brune  van  den  jaere 
IGIG,  ghedaen  den  12  maerte  1618,  fol.  81  et  seqq.,  alwaer 
f.  84  staet  ontfaen  te  zyne  van  den  voorn.  Cats  en  consoor- 
ten de  somme  van  3016  ponden  13  schellingen  4  grooten, 
in  minderynge  van  de  somme  van  5000  ponden  groote ,  zoo 
veel  bedroeg  den  loop ,  zoo  ghannoteert  es  in  den  resolutie- 
boeck  den  25  october  1612.  En  is  het  contract  daervan 
ghemaect  int  registre  ofte  schepenenboeck  van  S^"^  Pieters 
fol.  300. 

(En  marge)  : 

»  Sy  ghesicn  d'origincle  brieven  van  permutatie  van  de  voorseyde 
landen  ende  de  gone  van  declaratie  daerop  ghevolglit  waeruyt  blyckt 
dat  de  zclvo  permutatie  maer  ghcsimulcert  en  is  gheweest  om  do 


—    229    - 

vercoopinghe  van  rie  voorn.  landen  te  bedecken  als  synde  beyde 
gheschiet  op  eenen  dach. 

»  En  alzoo  men  verstaet  dat  denzelven  coop  gliemaeckt 
is  gheweest  op  conditie  dat  de  penninghen ,  danof  proce- 
derende,  zoudcn  worden  gheremployeert  in  den  coop  van 
andere  landen  tôt  behouf  van  de  voornomde  abdye ,  twelke 
niet  en  beeft  connen  gheschieden  deur  faulte  van  non 
betaelinghe ,  sal  in  deliberatie  gesteit  worden  of  het  voor- 
nomde clooster  niet  en  is  ghefondeert  bem  te  doen  rele- 
veren  van  tvoors.  contract,  ten  opsiene  dat  het  selve  niet 
en  is  gbeapprobeert  by  Syne  Heylicheyt  zoo  tgbecondi- 
tionneert  is  gbeweest.  Ten  minsten  of  tzelve  clooster  niet 
gberecbt  en  is  wederom  te  beesscben  soo  veel  tbienden 
en  landen  mette  vrucbten  van  dien,  als  bedraecbt  de 
somme,  die  niet  betaelt  en  is  gbeweest,  mits  den  zelven 
coop  gbescbiet  is  tenden  maete  tenden  gbelde  ,  et  sub  spe 
paratœ  solutionis  ita  ut  dici  non  possit  per  illam  venditio- 
nem  translatum  fuisse  dominium  partium  non  solutarum , 
quando  quidem  venditor  intentionein  non  hahuerit  aliquod 
dominium  transferendi  nisi  soluto  pretio.  Ten  lesten  sy 
ondersoect  of  daer  gbeene  materie  en  is  van  te  rescinderen 
tzelve  contract.  Ex  cap.  L.  2  C.  de  rescind.  vendit. 

{En  marge)  : 

»  N^.  dat  men  bevindt  dat  o])  den  21  october  1612  ghecedeert 
te  syne  ande  voornomde  Catsen  de  thiende  over  de  landen  bedycken 
by  myn  heere  Charles  Van  der  Noot  ande  noortsyde  van  de  geule 
van  Nieuwerhaven  voor  xx  s.  gr.  elck  ghemet. 

»  S^^  Gheertruyt  Polder.  —  Item  wort  bevonden  in  den 
zelven  resolutie  bouck  op  den  24  novembre  1612,  de  voors. 
heeren  Cats  in  pachte  eii  amodiatie  glienomen  tbebben 
deene  belft  van  de  tbiende  in  S^f*  Gheertruyts  polder,  en 
in  de  andere  twee  cleyne  polderkens  voor  20  jaeren,  op 
conditie  dat  naer  d'expiratie  van  den  trefuis  zyl.  zouden 
betaelen  6  pond,  groote  sjaers  de  voornomde  20  jaeren 


—    230    — 

gheduerende ,  en  alzoo  dezelve  lanck  glieexpireert  zyn ,  zy 
ondersoclit  of  zy  verpacht  zyn  ofte  by  wie  zy  aenghe- 
trocken  worden.  —  Het  contract  van  desen  polder  is  van 
datum  31  augusti  1612. 

»  Eylayidehen  van  Biervhet.  —  De  zelve  Catsen  hebben 
(naer  de  notitie  gliestelt  1"  martii  1613)  ghekocht  de 
thiende  toebehoorende  dese  abdye  int  Eylandeken  Bier- 
vliet,  ghelyckt  doen  was  ligghende  binnen  dycke,  synde 
ghereserveert  tôt  proffyte  van  de  zelve  abdye  den  anwas, 
welcke  men  verstaet  zeer  groot  te  syn  eii  werden  de 
thienden  van  die  aenghetrocken  by  de  zelve  Catsen,  up 
pretext  dat  die  zoiiden  toecommen  tcapittel  van  S*  Baefs , 
twelke  men  noclitans  meynt  daertoe  gheen  recht  te  hebben , 

eii  dat  by  sententie  van  * de  zelve  aenghewesen 

zyn  gheweest  aen  dese  abdye ,  en  zyn  verpacht  gheweest 
by  de  heeren  administrateurs  aen  M'  Anths.  Copal,  eri 
heeft  hier  te  Ghendt  ghearresteert  gheweest  Pieter  Ramons 
tôt  betaelinghe  van  de  zelve  thiende  als  groote  ghelande 
en  zelve  aenwas.  Nemaer  zyn  de  stucken  van  tproces  int 
onghereet  bedegen  zonder  te  weten  wie  dat  int  procès 
ghedient  heeft  als  procureur,  ende  daerom  sy  devoir  ghe- 
daen  om  naer  de  zelve  te  zoecken  in  de  comptoiren  van 
de  procureurs  Jonckeere  ofte  Caesemaeckere  voor  welk 
arrest  hem  zeker  ghestelt  heeft  den  heere  capitain  Beyne. 

{En  marge)  : 

»  Prima  martii  1613  hebben  de  selven  Catsen  aenghenomen  ter 
releveren  tappel  voor  de  heeren  Stateu  generael  van  de  sententie 
ghewesen  by  den  ghecommitteerden  raed  van  Zeelandt  tôt  nadeel 
van  het  recht  van  de  thienden  van  den  Cauwen  ende  Loven  polder 
int  quaertier  van  Ter  Neusen  ende  tselve  appel  te  vervolghen  thaer- 
lieder  coste  ende  pericle  op  conditie  dat  indien  sylieden  daerin 
quamen  te  obtineren  dat  de  zelve  thiende  haer  in  eyghendomme 

'  En  blanc  dans  le  manuscrit. 


—    231     — 

zouJe  toecommen  voor  de  somme  van   v<=  Ib.  gr.  contant  binnen 
Ghendt. 

»  N«.  dat  de  hoirs  van  Jan  van  Roosl)eeck  pretenderen  in  admo- 
diatie  ghenomen  te  hebben  dese  thiende  by  contract  ghepasseert 
voor  mannen  van  leene  van  S*  Pieters,  21  feb.  1614. 

»  Thienden  in  Oostburch  en  Ysendycke  amhacht.  —  Den 
IP"  van  junius  1611  hebben  de  voorn.  lieeren  Catsen  in 
amodiatie  ghenomen  aile  de  thienden  van  der  lande  be- 
vloeyt  leggende  in  Oostburg  en  Ysendycke  ambachten  voor 
den  termyn  van  dry  mael  9  jaren,  deerste  9  jaeren  voor 
4  groote,  de  tweede  9  jaeren  6  groote,  ende  de  resterende 
9  jaeren  voor  elck  ghemet  hemelsche  breedde  12  grooten, 
boven  een  quarteel  ofte  oxhooft  wyns,  op  conditie  dat 
de  bedyckinghe  van  de  zelve  landen  niet  voleynt  en  waere 
binnen  tjaer  1613,  dat  de  voornomde  admodiatie  zoude 
nul  en  extinct  zyn,  eh  dat  de  zelve  admodiatie  ingang 
moeste  nemen  int  jaer  1612  en  verschenen  1613,  tzy  dat 
de  voor.  dycaige  eh  ververschynghe  volbracht  wierde 
ofte  niet. 

»  Eh  alzoo  by  tzelve  contract  besproken  was  dat  de 
voors.  heeren  Catsen  zouden  ghehauden  syn  te  betaelen 
aile  lasten  die  men  zoude  connen  heesschen  op  de  voors. 
thienden,  zoo  vande  restauratie  van  de  kercke  eh  andere, 
en  dat  hetzelve  uutghelaeten  was  in  de  brieven  van  passe- 
ringhe,  zoo  hebben  de  voors.  Catsen  by  bysonder  hand- 
teecken  verclaert  dat  zy  dies  nietteghenstaende  verobli- 
geert  bîyven  tôt  betaelynghe  van  de  zelve  lasten,  zoo 
ghenoteert  op  den  IP"  van  junius  1611. 

»  Item  onder  de  notitie  van  den  17  may  1611  staet  dat 
de  voornomde  Catsen  in  admodiatie  vercreghen  hadden 
voor  20  jaeren ,  843  gemeten  in  Oostburch  voor  4  schel- 
linghen  grooten  elck  ghemet,  dat  bedyckt  zoude  syn  int 
jaer  1612,  bly vende  de  gone  die  niet  bedyckt  souden 
worden  ter  vryer  dispositie  van  myn  Eerw.  Heere   den 


-     232    — 

Prelaet ,  ende  tselve  contract  nul  by  zoo  verre  int  voorn. 
jaer  ir)l"2  gheene  bedyckingbe  en  ghescbiedde. 

»  In  de  notitie  van  den  IP"  juny  1614  staet  tnaer- 
volgende  :  «  Den  adv*  Cats  is  den  17  april  1614  gheac- 
cordeert  dat  angaende  den  pacbt  van  de  thienden  van 
den  Joncvrawpolder  den  termyn  eii  jaerlicxscbe  prestatie 
zal  wesen  ghelyck  als  den  gonen  van  Passegeulepolder,  en 
danof  teerste  jaer  vallen  zal  naer  d'eerste  note,  en  voorts 
dat  bem  Cats  zal  volgben  in  eygbendom  d'actie  myn 
Eerw.  Heere  competerende  lotte  6  gemeten  216  roeden  in 
S*^  Annapolder,  nu  gbepossesseert  by  Jan  Boele,  die  de 
zelve  vercregben  beeft  nefïeus  P.  Adriaensens  Pierman 
Van  Pr. ,  Bruno  Cornelissens  die  daeran  gbecomen  was  by 
coope  van  den  fisque  voor  7  pondt  10  scbell.  grooten  elck 
ghemet  eii  eenen  gulden  van  tgbemet  jaerlyks  in  cheynse. 
Item  4  gbemeten  in  den  Soutten  polder  op  de  baven  van 
Axele,  nu  gbebruyckt  by  P.  Adriaensens  Pierman,  die 
neffens  den  voorn.  Jan  Boele  de  zelve  gbekogt  beeft  van 
wegben  den  fisque  alsvooren  voor  5  ponden  grooten 
tgbemet,  eii  1  gulden  voor  elck  gbemet  jaerlyckx  in 
cbeynse,  eii  daermede  zal  bet  contract  van  bet  tbiendeken 
van  Biervliet  blyven  als  tzelve  is  luydende,  zonder  eenicb 
garrant  desbalven  te  mogben  pretenderen, 

»  Lammerthieyiden  in  Oostburch,  en  Ysendycke  am- 
bachtcn.  —  De  zelve  Catsen  bebben  ooc  in  buere  gbeno- 
men  de  Lammertbiende  van  de  scborren  in  Oostburg  en 
Ysendycke  ambacbten,  onder  tgbebiedt  van  de  Staeten 
van  Zeeland  gbeduerende  den  tyd  van  de  trefuis  ofte  tôt 
verversingbe  en  bedyckingbe  van  de  zelve,  midts  jaerlicx 
betaelende  zeker  quantiteyt  van  lammeren ,  viscb  ofte  spe- 
cerye  naer  baerl.  discretie,  waer  onder  nocbtans  niet  be- 
grepen  en  waeren  de  partyen  van  zekere  landen  gbenaerat 
Elmare.  Dese  tbiende  staet  int  voornomde  contract  van 
datum  lesten  aug*  1612. 


—    233    — 

Polder  over  de  zuytsyde  van  tcanael.  —  Insglielycx  de 
polders  gheleghen  over  de  zuytsyde  van  tcanael,  in  welck 
regard  de  voorwaerde  by  de  voorn.  Catsen  ghenomen  den 
ri*""  juny  IGll  nioest  blyven  in  vigeur,  te  weten  dat  in  ghe- 
valle  de  bedyckinghe  niet  voleynt  en  waere  in  het  jaer 
1012,  den  voors.  pacht  zoude  extinct  zyn  indient  mynheere 
den  Prelaet  gheliefde ,  ofte  wel  dat  de  bedyckers  zouden 
ghestaen  midts  jaerlyckx  betaeleude  10  stuyvers,  ghelyckt 
by  voorwaerde  besproken  was,  blyvende  de  thiende  van 
den  Passegeule  op  7  stuyvers  tghemet  tjaers,  en  insglielycx 
van  den  Joncvrau-wpolder,  voor  den  termyn  van  10  jaren; 
achtervolghende  de  voors.  notitie  6  ghemeteu  21 G  roeden 
landts  in  Ste  Annapolder,  en  4  ghemeten  in  den  Soeten 
polder  op  de  haven  van  Axel. 

»  Op  den  IP*''"  juny  1614  staet  ghenoteert  dat  op  den 
17'''"'  april  1614  was  gheaccordeert  over  de  voors.  Passe- 
geule en  Joncvrauw  polders,  dat  .d'een  jaer  van  den  paclit 
van  den  adv*  Cats  zoude  vallen  naer  deerste  note  ende  dan 
volghen  in  eygendomme  dactie  van  6  ghemeten  216  roeden 
conipeterende  dese  abdye  in  S^e  Annepoldre.  Item,  4  ghe- 
meten in  den  Zoetenpolder  op  de  Haven  van  Axel. 

»  Twee  hondert  vyftig  ghemeten  in  Oostburch  ambacht. 

»  Den  16  january  1615  staet  gheteekent  dat  d'heeren 
Cornelis  en  M^r  Jacob  Cats  ghecocht  hadden  van  dese 
abdye  outrent  de  250  ghemeten,  schorren  in  de  vleck,  die 
zy  uytghcdyckt  hebben,  gheleghen  in  Oostburch  ambacht, 
zoo  in  de  Waterynghe  van  de  onde  yevene,  als  van  den 
Groede  en  in  de  Prochie  van  Gaternesse.  » 

«  1 1  juny  1611.  —  W  Jacob  Cats  met  consoorten  in  mey- 
uinghe  zynde  te  bedycken  aile  de  landen  jeghenwoordich 
ligghcnde  in  Oostburg  ende  Ysendycke  ambachten  over  de 
noortsyde  vaut  canael  zyn  gheaccordeert  aile  de  thienden 
den  voorn.  clooster  toebehoorende  den  termyn  van  27  jaeren 


—    234    — 

iimegaeiide  Kerst  1612,  deerste  neghen  jaeren  voor  vier 
grooten  tghemet,  de  2^  neghen  jaren  zes  grooten  ende  de 
leste  neghen  jaeren  twaelf  grooten  vry  ghelt  boven  een 
quarteel  wyns,  wel  verstaende  dat  zoo  verre  de  voors.  be- 
dyckinglie  niet  volbracht  en  sy  binnen  den  jaren  1613,  dat 
dit  accord  zal  wesen  niet  ten  regarde  van  de  landen  alsdan 
niet  bedyckt  wesende  imo  tsedert  gheseyt  binnen  den  jaere 
1615.  Volgens  de  briefven  ghepasseert  in  den  Raedt  op  den 
17  april  1612.  » 

(En  marge)  : 

«  Beede  de  C'ats  hebben  voor  Myneheei^en  van  den  Raede  in 
"Maenderen  verkent  in  pachte  glienomen  tliebben  treclit  van  de 
thienden  in  Oostburgh  ende  Yseudycke  ambaclit  over  de  noortsyde 
van  de  vaert,  den  termyn  van  drymael  9  jaren  en  dit  over  de  zuyt- 
zyde  van  de  zelfde  vaert  voor  eenen  termyn  van  thien  jaeren  vol- 
gliende  de  voorwaerden  danof  zynde  by  beede  partj'en  onderteekent 
ende  als  heden  int  hof  herkent,  ende  dat  zy  heml.  verobligeert 
hebben  de  jaerelycksche  prestatie  daerby  beloofd  te  betaelen  vry, 
suver  ende  onbelast  van  aile  commeren  ende  lasten  in  de  voorn. 
voorwaerden  ghespecifieert,  maer  over  zlilcke  als  van  weglien  de 
heeren  Staeten  ofte  imandt  anders  tôt  laste  van  de  voors.  thienden 
ofte  cloostere  houden  moghen  gheheescht  ofte  ghequierelleert 
worden  ter  causen  van  de  restauratie  ende  onderhaudt  van  de  kercke 
mitsgaeders  alimentatie  van  s'kercken  ministers  ende  dienaers  ende 
dierghelycke,  al  ist  dat  zy  by  de  selve  voorwaerde  niet  expresselyck 
verclaert  en  syn.  » 

«  13<^  juny  1611.  Den  voornomde  Cats  heeft  ghepaclit 
aile  de  thienden  van  de  voorn.  cloostere  in  de  polders  van 
de  Passegeule ,  Joncvrauwen  ende  van  S*"^  Catheleyne  over 
tcanael  als  nu  bevloyende,  den  termyn  van  thien  jaeren 
ingaende  Kerss.  1612,  tsy  de  bedyckinghe  voleint  sy  ofte 
niet,  elck  jaer  voor  7  stiicks  elck  bedyckt  ghemet  wel  ver- 
staende dat  soo  verre  de  bedyckynghen  binnen  voors.  jaer 
1613  niet  voleyndt  en  sy,  dat  dit  accord  zal  wesen  nul  ende 
dat  de  bedyck(M-s  sulloii  moglion  ghestaen  midts  betaelende 


—    235    — 

thien  stuyvers  van  yder  ghemet  boven  eenen  kelcler,  koffer 
ende  een  pype  secqiien,  een  half  quarteel  -vvyns  ende  een 
quaerte  figuratifve  van  de  bedyckinghe  blyvende  als  dan 
de  landen  onbedyckt  Avesende  ter  libre  dispositie  van  myn 
Eerw.  heere. 

»  7  july  1612,  De  voornomde  Cats  hebben  ghelmert  de 
tliieuden  van  Biervliet  neglien  jaren,  teersten  kerss.  1612 
omme  twee  tonnen  goeden  zoiiten  visch  ende  sekere  qunn- 
titeyt  van  specerye  ter  discretie  daer  uaer  24  9'"'^  1612  is 
dese  liueringbe  gbeannuleert. 

»  25  S"""*  1612.  Alsoo  dheer  Cornelis  Cats  Adriaen,  aiult 
burgemeester  van  Brauwershaven  ende  M^^  Jacob  Cats 
gbepacht  hadden  ende  gbenomen  te  bedycken  aile  de 
landen  van  desen  cloostere  tôt  850  gbemeten  int  qnartier 
van  Oostbuggh,  Ysendycke  ende  Groede,  emmers  zoovele 
als  sy  binnen  denjaere  1612  ende  1613  zouden  conen  be- 
verschen  met  vrydom  van  tliienden  zoo  sy  van  ghelycken 
in  paclite  hadden  gbenomen  aile  de  tienden  op  aile  de 
landen  van  den  zelven  quartiere  ende  dat  nochtans  uut 
naerder  consideratie  bequamer  ende  oirboorelycker  bevon- 
den  is  in  de  selve  thienden  ende  landen  emmers  eenighe 
partyen  van  dien  te  veralieren  by  permutatie  jeghens 
andere  landen  in  vaste  ende  verzekerde  quartieren ,  zoo  is 
bemlieden  by  nieuweu  accorde  ghecedeert  eerst  300  gbe- 
meten bevloeyt  landt  gbeleghen  aen  de  noortsyde  van  de 
selve  van  Nieuwerbaven  in  de  Waterjmgbe  van  de  Groede 
ende  annexen  polders  met  den  vryen  thienden  over  deselve 
300  gbemeten,  bovendien  trecht  van  de  thiende  over  de 
zelve  4000  gbemeten  landts  in  de  zelve  quartieren  ooc  mede 
gbelyck  recht  van  thienden  van  800  gbemeten  lands  in  de 
jaeren  1609  ende  1610,  bedyckt  by  Bogaert  met  consoorten 
met  reserve  nochtans  dat  de  zelve  Cats  int  ghebruyck  niet 


-    23G    — 

en  suUen  commen  voor  clexpiratie  van  de  termyn  van  den 
voornoemden  Bogaert. 

»  Item ,  nocli  de  helft  van  de  thienden  van  Triniteyt. 

»  Item,  ten  lesten  thuys  in  Oostburgli  waer  jegliens  de 
zelve  Cats  zullen  opdraghen  zekere  partyen  als  de  meyerie 
van  Lede  ende  andere  ende  dienvolghende  is  dit  accord 
alzoo  wettelyck  gliepasseert  voor  de  weth  van  S*<^  Pieters 
1  7"^"  1612. 

»  Ende  ten  naerdere  verstaude  van  den  bovenschrevenen 
contracte  van  permutatie  is  voor  de  voorn.  schepenen  zeker 
ander  contract  in  datum  als  boven  gliepasseert,  daerby  de 
voornomde  Cats  in  de  plaetse  van  de  voornomde  partyen 
van  Lede  ende  andere  belooft  liebben  te  betaelen  de  somme 
van  vyf  dusent  ponden  grooten  vlaemsch,  te  betaelen  bin- 
nen  Gbendt,  te  weten  een  dusent  ponden  grooten  binnen 
een  maent  ende  zelve  somme  binnen  ses  weken  daernaer, 
ende  de  restercnde  penninghen  naer  tsluyten  van  de  dycaige 
nu  staende  te  geschieden ,  ende  naerdien  dat  men  de  zelve 
zal  liebben  pertinentelyck  afgliemeten  beliaudens  indien 
de  landen  ofte  thienden  in  de  voornomde  dycaige  begrepen 
nieerder  ofte  minder  bevonden  wierden  dat  de  vergoe- 
dynglie  dienaengaende  gbedaen  sal  worden,  te  weten  van 
300  ghemeten  mutuellyck  naer  advenant  van  tliien  schel. 
elck  ghemet  ende  van  4000  gliemeten  thienden  ten  adve- 
nante  van  twintich  schell.  elck  ghemet. 

»  Ende  indien  de  partyen  van  Bogaert  by  rechte  me- 
tinghe  meerder  ofte  minder  bevonden  wort  dan  800  ghe- 
meten, zo  zal  de  vergoedynghe  gheschieden  ten  16  guldeus 
elck  ghemet,  ailes  hcinclsche  breedde,  dan  in  cas  die  van 
tcappittele  van  Doornicke  daeraf  eenighe  partyen  consten 
ontvinden  zullen  zy  Cats  daeraf  moeten  scheeden  en  voor 
zoo  vêle  van  dit  contract  desisteren  midts  heml.  de  falsatie 
doende  van  twaelf  guidons  van  elck  ghemet. 

»  Naerder  handt  van  de  voorn.  contracte  is  hier  in  de 


—    237     — 

verstaen  dat  de  tliienden  over  de  landen  bedyckt  by  dea 
heere  vander  Noot  aen  de  noortsyde  van  de  Guele  van 
Mieuwerhaven  in  eyglicndorame  zullen  volglien  de  voorn. 
Cats,  beneffens  de  voorgaende  gliecontracteerde  partyen 
van  tliienden  ende  landen  ende  dat  ten  20*^"  gr.  elck  glieniet 
teynde  maete  teynde  gelde,  ende  in  cas  die  van  S^^Baefs 
ofte  Doornicke  daerinne  mochte  competeren,  zoo  zal  de 
vergoedinghe  lialf  ghcdeelt  worden  met  ghelycke  20  groot. 
elck  ghemet.  Ende  en  sullen  de  zelve  Cats  dien  aengaende 
gheen  garand  ten  anderen  hebben. 

»  24  9''"  1612.  Ten  lesten  de  voorn.  Cats  bebben  in  pachte 
de  thienden  van  Terneusen ,  te  weten  deen  heift  alleene- 
lyck  in  S^^  Geertruyde  poblere,  ende  de  gbelieele  tbiende 
in  dander  twee  cleene  polderkens  den  termyn  van  20  jae- 
ren  midts  eene  erkentenisse  'den  tydt  van  den  tegbenwoor- 
diglien  trefuis  gbeduerende  aile  jaere  eenigbe  specerye 
tbaerl.  discretie  ende  naer  d'expiratie  "van  den  zelven  tre- 
fuis 6  ponden  grooten  tjaers  totten  expireren  van  den 
voors.  20  jaren. 

»  Den  27  martii  1G14.  Corneliss  Janssens  ende  Steven 
Jan  Symons,  gbezworen  landnieters,  verclaeren  dat  in  de 
nieuwe  d^ycaige  van  de  Groede  glielyck  de  zelve  gbelegben 
is  tusschen  bet  gat  van  den  nieuwe  liavene  ende  bet  Zwarte 
gat  beslotcn  tusscben  de  dycken  van  Cadsant,  Breskinssant 
ende  Bresande,  in  ailes  groot  bevonden  te  bebben  over 
dusent  een  bonderd  19  gliemcten  242  roeden  hemelscbe 
breedde  ende  gbelick  die  te  dycken  gbecontribueert  bebben. 

»  De  zelve  verstaen  gbevonden  tbebben  te  staene  up  den 
naeme  van  den  abt  van  S^^  Pieters  in  de  onde  ommeloopers 
van  sbeer  Gbeeraerds  de  Moor  der  Groede  Nieukerke 
ende  oudde  gène  wateringbe  wesende  ailes  noes  in  de 
nieuwe  dyckaige  van  de  Groede  217  gbemeten. 


238    — 


CHRONIQUE. 


Geschiedenis  van  de  gemeenten  derprovincie  Oostvlaanderen. 
—  MM.  De  Potter  et  Broeckaert  viennent  d'aborder  la  troisième 
série  de  leur  histoire  des  communes  de  Flandre,  destinée  à  l'arron- 
dissement de  Saint-Nicolas  ;  les  deux  volumes  qui  ont  été  distribués 
récemment  contiennent  les  monographies  de  Bazel,  Belcele,  Beve- 
ren,  Burcht ,  Dacknam ,  Doel,  Éverzele,  Exaarde,  Saint-Gilles. 
L'importante  commune  de  Beveren  occupe  198  pages.  Le  riche 
arrondissement  que  les  auteurs  des  communes  ont  commencé  à  dé- 
crire comprend  l'ancien  pays  de  Waas,  qui  formait  ci-devant  une 
circonscription  séparée  et  qui  a  son  histoire  à  elle,  que  M.  Ad.  Siret 
avait  déjà  esquissée  il  y  a  quelques  années. 

Les  sources  ne  leur  ont  pas  manqué  :  indépendamment  des  archi- 
ves de  l'État  à  Gand,  des  archives  du  royaume  à  Bruxelles,  ils  ont 
consulté  celles  de  l'évêché  de  Tournai,  du  département  du  Nord  à 
hi\hi,  (lu  Cercle  archéologique  du  Pays  de  Waas  à  Saint-Nicolas,  de 
la  famille  Vilain  XIIII,  du  chevalier  Schoutheete  de  Tervarent,  du 
baron  de  Neve,  de  M.  de  Maere,  des  paroisses  et  communes,  et  de 
la  ci-devant  abbaye  de  Rozenberg  à  Waasmunster. 

La  publication  de  MM.  De  Potter  et  Broeckaert  est  déjà  une 
véritable  collection.  La  première  série  compte  huit  volumes,  la 
seconde  trois,  la  troisième  en  a  déjà  doux,  sans  parler  de  l'histoire 
d'Alost  en  quatre  volumes. 

L'histoire  des  communes-  est  une  œuvre  de  longue  haleine  et  de 
patience ,  aussi  félicitons-nous  les  auteurs  de  posséder  à  un  si  haut 
point  cette  dernière  qualité,  indispensable  dans  le  travail  auquel  ils 

se  livrent. 

Emile  V... 


—    239     — 

Fn  nouveau  Rubens  au  Musée  de  Bruxelles.  —  Rubens  était 
largement  et  magnifiquement  représenté  au  Musée  de  Bruxelles  ;  à 
son  riche  conlingent  vient  de  s'ajouter  un  portrait  d'homme,  qui, 
pour  la  qualité  de  la  peinture,  ne  le  cède  à  aucune  autre  de  ses 
(Tuvres.  C'est  d'Angleterre  que  vient  ce  joyau  qui  brille  d'un  vif 
éclat  dans  l'écrin  du  maître  des  maîtres.  Le  personnage  n'est  pas 
esthétiquement  beau,  mais  sa  physionomie  est  pleine  de  caractère; 
ce  qui  est  beau  ,  c'est  la  finesse  et  la  transparence  des  chairs ,  c'est 
la  vie  qui  anime  les  regards  ,  c'est  la  légèreté  des  cheveux  et  la  fac- 
ture de  l'ajustement,  d'une  collerette  surtout,  plissée  et  brossée 
avec  une  maestrie  étonnante.  On  serait  tenté  de  demander  son  nom 
à  ce  cavalier  dont  l'eiïigie  est  si  vivante.  C'est  toujours  une  satisfac- 
tion de  connaître  le  personnage  dont  la  main  d'un  maître  a  retracé 
l'image;  mais  quand  la  valeur  d'un  portrait  s'élève  à  un  tel  degré, 
la  personnalité  du  peintre  absorbe  celle  du  modèle  ;  on  est  en  pré- 
sence d'un  tableau.  Le  nouveau  portrait  de  Rubens  dont  vient  de 
s'enrichir  le  Musée  de  Bruxelles  ne  pâlit  pas  à  côté  des  deux  pages 
superbes  provenant  de  la  famille  de  Beauffort,  et  dans  lesquelles  on 
jugeait  que  le  maître  s'était  surpassé  comme  portraitiste.  Cet  éloge 
suffît. 

{^Athenœuni  belge). 

I 

Portrait  de  Gœthe.  —  Un  portrait  de  Gœthe,  pris  après  sa  mort 
par  le  peintre  paysagiste  Fr.  Preller,  vient  d'être  publié,  après  être 
resté  pendant  tout  ce  temps  en  possession  de  l'artiste.  Gœthe  avait 
défendu  qu'on  reproduisît  ses  traits  par  le  dessin  ou  le  moulage 
après  sa  mort.  Mais  Preller  aj-ant  pu  pénétrer  dans  la  chambre 
mortuaire,  esquissa  sur  un  feuillet  de  son  carnet  la  figure  du  grand 
poète,  telle  qu'elle  est  décrite  par  Eckerniann.  Cette  esquisse, 
Preller  l'a  toujours  soigneusement  gardée,  et,  d'accord  avec  la  fa- 
mille, il  a  autorisé  les  photographes  Rômmler  et  Jonas,  de  Dresde, 
à  les  reproduire.  La  photographie  se  vend  au  profit  d'une  institution 
charitable  allemande. 

{Ici.). 

La  Cosoiission  royale  d'histoire  de  Belgique.  —  La  Commis- 
sion royale  d'histoire  de  Belgique,  qui  a  pour  président  M.  Kervyn 
de  Lettenhove,  et  pour  secrétaire  M.    Gachard,  a  fait  paraître, 


—    240    — 

en  1877,  trois  volumes  m-4°.  —  I.  La  bibliotliéque  nationale  de  Paris. 
Notices  et  extraits  des  mamiscrits  qui  concernent  l'histoire  de  Belgi- 
que, tome  II,  par  M.  Gachard.  Ce  volume,  de  vi  et  612  pages,  con- 
tient l'analyse  de  quatre-vingt-six  manuscrits,   rangés  sous  trois 
sections  :  Conférences  diplomatiques,  Tz-aités,  Dépêches  des  ambas- 
sadeurs. La  dernière  forme  la  plus  grande  partie  du  volume.  Elle 
comprend  les  correspondances  de  trois  ambassadeurs   de  France 
envoyés  à  Charles-Quint,  de  cinq  ambassadeurs  qui  représentèrent 
le  même  pays  à  la  cour  de  Philippe  II,  et  de  trois  diplomates  que 
Charles  IX  entretint  à  Bruxelles  auprès  du  duc  d'Albe.  —  II.  Table 
chronologique  des  chartes  et  diplômes  imprimés  concernant  l'histoire 
de  Belgique,  tome  V,  par  M.  Alphonse  Wauteurs.  Ce  tome  n'a  pas 
moins  de  x  et  817  pages;  il  s'étend  de  l'année  1251  à  l'année  1279. 
L'époque  qu'il  embrasse  est  celle  de  la  guerre  des  d'Avesnes  et  des 
Dampierre;  celle  qui  vit  mourir  le  roi  des  Romains,  Guillaume  de 
Hollande,  le  principal  protecteur  des  d'Avesnes,  et  saint  Louis,  le 
médiateur  entre  ceux-ci  et  les  Dampierre  ;  qui  vit  commencer  et 
finir  l'interrègne  dans  l'empire  d'Allemagne  et  se  terminer ,  par 
l'expédition  de  Tunis  ,  la  période  des  Croisades.  Après  Marguerite 
de  Constautinople ,  que  l'âge  condamne  enfin  au  repos  ;  après  le  duc 
Henri  III  de  Brabant ,  le  protecteur  des  lettres  ;  après  i'évêque  de 
de  Liège  Henri  de  Gueldre,  dont  l'influence  fut  longtemps  prépon- 
dérante dans  la  Basse-Lotharingie,  apjjaraissent  Guy  de  Dampierre, 
son  neveu  Jean  d'Avesnes  et  Jean  1^',  dont  la  personnalité  s'affirme 
plus  que  celle  des  autres  princes  de  son  temps.  Le  tome  V  de  la 
Table  contient  les  analyses  d'un  nombre  énorme  de  documents  qui 
se  rapportent,  soit  aux  personnages  dont  nous  venons  de  parler,  soit 
aux  seigneurs,  aux  ecclésiastiques,  aux  lettrés  ayant  été  en  relation 
avec  eux,  soit  aux  ^copulations  et  aux  communautés  de  tout  genre 
sur  lesquelles  s'étendait  leur  autorité.  Des  tables  très-détaillées  des 
noms  des  personnes  et  des  lieux  y  rendent  les  recherches  faciles. 
Dans  l'introduction,  M.  Wauters,  s'appuyant  des  faits  qui  ressorteut 
de  tous  les  documents  dont  il  donne  l'énumération,  montre  de  quelle 
importance  est  le  secours  que  la  diplomatique  peut  apporter  à  l'his- 
toire. —  III.  Chronique  de  Liège  de  Jean  de  Prêts,  dit  d'Outremeuse, 
t.  IV,  éditeur  M.  Stanislas  Bormans.  Ce  volume  de  824  pages  com- 
prend :  le  complément  du  livre  II  de  la  chronique  commençant  à 
l'année  873  et  finissant  à  la  prise  de  Jérusalem  par  l'empereur  Bau- 


—    241     — 

douin,  1207;  La  Geste  de  Liège  correspondante  à  ce  complément  ;  Un 
glossaire  où  l'éditeur  explique  les  mots  de  l'ancien  langage  wallon 
qui  ne  figurent  pas  dans  les  lexiques  connus.  Une  table  chronologi- 
que des  matières. 

[PolrjhibUon). 

Vente  Didot.  —  La  vente  d'une  faible  partie  de  la  bibliothèque 
do  M.  Ambroise  Firmin-Didot  vient  de  se  terminer.  Comprenant 
700  numéros  seulement,  elle  a  produit  850,000  francs.  La  dernière 
vacation  seule  a  donné  341,000  francs  avec  71  articles.  C'est  la 
plus  forte  vacation  de  livres  ou  manuscrits  qui  ait  jamais  été  faite, 
et  cette  vente  est  celle  qui  a  produit  la  somme  la  plus  élevée.  La 
moyenne  des  adjudications  de  toute  la  vente  a  été  de  1200  francs 
par  article,  celle  des  71  numéros  du  dernier  jour  est  d'environ 
5000  francs.  Citons  entre  autres  :  Firmin  Le  Ver,  Dictionnaire 
latin-français,  suivi  d'un  grammaire,  Ms.  daté  de  1440,  9000  fr.  — 
Guillaxime  de  Lorri$  et  Jean  de  Meung,  le  Ro?nan  de  la  Rose,  Ms.  du 
X1V«  siècle  ayant  appartenu  à  Jean  Marot,  9,600  fr.  —  Etienne 
Parchier,  les  Trois  âges,  Ms.  ayant  appartenu  à  Louis  XI,  8000  fr. 

—  Margicerite  reine  de  Navarre;  La  coche  ou  le  départ  d'' amour  ;  à 
la  vente  de  la  bibliothèque  du  baron  Pichon,  ce  Ms.  avait  été  adjugé 
au  prix  de  8,220  fr.  ;  cette  fois  il  a  atteint  20,000  fr.  —  Chroniques 
abrégées  des  anciens  rois  et  ducs  de  Bourgogne,  acquis  en  1865  j)ar 
M.  Didot  pour  10,000  fr.,  adjugé  20,000  fr.  —  Les  Funérailles 
d'Anne  de  Bretagne,  Ms.  ayant  appartenu  au  grand  Condé,  puis  au 
chancelier  d'Agnesseau,  13,100  fr.  ;  le  même  ouvrage,  édition  un  peu 
inférieure  à  la  précédente,  10,000  fr.  —  Le  Roman  de  la  Rose,  l'édi- 
tion connue  5,500  fr.  ;  un  autre  exemplaire  du  même  ouvrage,  édi- 
tion très-rare,  a  été  vendu  8,000  fr.  —  Martin  Franc,  Lestrif  de 
fortune,  payé  autrefois  7,080  fr.,  adjugé  21,500  fr.  —  Saint-Graal, 
premier  livre  de  la  Table-Ronde,  7,000  fr.  —  Lancelot  du  Lac,  édi- 
tion fort  rare,  7,800  fr.  —  Cleradion  et  Melindice,  exemplaire  unique, 
acquis  en  1867  par  M.  Didot  au  prix  de  10,000  fr.,  adjugé  19,100 fr. 

—  Olivier  de  Castille,  exemplaire  unique,  20,000  fr.  —  Monstrelet, 
exemplaire  de  la  seconde  édition  de  ses  œuvres,  acheté  18,000  fr. 
en  1862,  adjugé  30,500  fr.  —  Chronique  de  Normandie,  admirable 
manuscrit  du  XV«  siècle,  adjugé,  aux  applaudissements  de  l'assis- 
tance, à  un  représentant  de  la  ville  de  Rouen,  51,000  fr. 

[Chronique  du  journal  général  de  Vimprinierie 
et  de  la  librairie). 


—     242     

Vente  de  livres  curieux.  —  Une  curieuse  collection  de  livres, 
provenant  de  M.  J.-T.  Payne  a  été  vendue  à  Londres  le  10  avril. 
Elle  contenait  des  spécimens  d'un  grand  nombre  de  bibliothèques 
fameuses,  notamment  du  XVP  siècle,  de  François  P"",  Henri  III, 
Grolier,De  Thou,  comte  Hoym,  Longepierre,  Lamoignon,  Renouard, 
Ch.  Nodier,  etc.,  des  Elzevirs  rares  ou  uniques,  des  éditions  des 
Aides,  des  manuscrits,  des  reliures  de  Du  Seuil,  d'Angerran,  De- 
rome,  Padeloup,  Roger  Payne.  Cette  collection  choisie  comprenait 
117  numéros  seulement,  qui  ont  atteint  des  prix  très-élevés.   Le 
Boccace  de  1665  (Elzevir)  s'est  vendu  47  livres  ;  l'Exposition  de  la 
doctrine  de  l'Église,  de  Bossuet,  provenant  de  Longepierre  et  No- 
dier, 127  liv.;  les  Mémoires  de  Commiues,  1648  (Elzevir),  reliure  de 
Derome,  48  liv.  ;  4  ouvrages  de  Dibdin,  117  liv.  ;  un  Molière  de 
Bret,  1773,  56  liv.;  Diego  de  Stella,  Méditations,  1586,  provenant 
de  Henri  III,  100  liv.  ;  Virgile,  1626  (Elzevir),  reliure  de  Derome, 
50  liv.  ;  un  Office  de  la  Vierge,  manuscrit  du  XV«  siècle,  225  liv.  ; 
une  miniature  de  Girolamo  dei  Libri,  215  liv.  ;  deux  autres  datant 
de  1440  environ  et  exécutées  pour  le  Bâtard  d'Orléans,  205  liv.; 
une  miniatiire  italienne,  qui  représente  J.  Fichet,  docteur  de  Sor- 
Ijonne  et  fondateur  de  la  typographie  parisienne,  offrant  son  livre  de 
la  Rhétorique  à  Sixte  IV,  235  livr.  Les  117  numéros  se  sont  vendus 

2830  livres. 

[Atlienœwm  belge). 

Vente  de  tapisseries.  —  Dernièrement  ont  été  vendues  à  Paris, 
à  l'Hôtel  Drouot,  cinq  tapisseries  que  le  catalogue  annonçait  comme 
étant  des  Gobelins,  mais  qui  doivent  avoir  été  tissées  au  XVII«  siècle 
dans  les  Pays-Bas.  Ces  tapisseries  provenaient  du  château  d'Oiron, 
qui  a  appartenu  à  M™"^  de  Montespan.  Elles  ont  été  adjugées  à 
7,550  francs.  Une  tapisserie  de  Flandre,  sujet  mji>hologique,  com- 
posé de  sept  figures  dans  un  parc  avec  des  cascades  et  monuments, 
a  été  vendue  1,750  francs. 

{id.y 

Vente  de  la  Bibliothèque  de  M.  Robert  S.  Turner.  —  Le 
thermomètre  de  la  bibliomanie  monte,  monte  sans  cesse  ;  il  a  atteint 
une  hauteur  que  personne  n'aurait  osé  prévoir  ;  c'est  avec  une  ardeur 
sans  exemple  que  d'opulents  amateurs  se  disputent  des  livres  d'une 
extrême  rareté,  des  volumes  ayant  appartenu  à   des  personnages 


—     243     — 

célèbres ,  d'anciennes  et  somptueuses  reliures  ;  cette  faveur  ne  se 
porte  d'ailleurs  que  sur  ce  qui  est  d'une  rareté  exceptionnelle,  d'une 
beauté  parfaite  ;  les  livres  ordinaires,  en  condition  médiocre,  n'y  ont 
aucune  part. 

Un  riche  Anglais ,  M.  Robert  Turner,  s'était  proposé  de  réunir 
les  monuments  les  plus  précieux,  les  pièces  les  plus  rares  des  diver- 
ses littératures  d'Europe  ;  il  s'est  trouvé  en  face  de  l'encombrement 
et  il  a  pris  le  parti  de  livrer  aux  enchères  parisiennes  ce  qu'il  pos- 
sédait de  mieux  en  livres  français,  en  y  joignant  quelques  ouvrages 
latins. 

La  vente  a  eu  lieu  le  12  mars  et  les  quatre  jours  suivants.  Le  cata- 
logue a  été  rédigé  par  un  libraire  fort  instruit,  M.  Adolphe  Labitte, 
en  possession  de  procéder  à  ces  ventes  ;  ce  catalogue  comprend 
774  numéros  ;  et  il  renferme  quelques  notes  offrant  sur  certains 
ouvrages  rares  des  détails  noviveaux  et  intéressants  [voir  n°^  361, 
439,  611,  etc.).  Plus  de  60  articles  ont  dépassé  le  prix  de  1,000  fr. 
Nous  allons  indiquer  les  plus  remarquables  de  ces  adjudications,  en 
mentionnant  parfois  les  prix  auxquels  ces  mêmes  exemplaires  avaient 
été  cédés  dans  des  ventes  précédentes  :  rien  n'atteste  mieux  la  hausse 
énorme  qui  s'est  produite  sur  les  livres  précieux. 

Biblia  sacra.  Parisiis.  1666,  in-4",  riche  reliure  ancienne,  5,600  fr. 
—  Psautier  de  David.  Paris,  1586,  in-4°.  Exemplaire,  richement  re- 
lié, d'un  de  ces  livres  que  Henri  III  faisait  imprimer  pour  sa  cha- 
pelle et  pour  l'usage  de  sa  cour,  6,000  fr.  —  Le  Nouveau  Testament. 
Mons,  1667, 2  vol.  in-S»  (impression  elzévirienne),  1,430  fr.  —  Histo- 
riarum  veteris  instrumenti  icônes.  Lugduni,  1538,  in-4°  (volume 
recherché  à  cause  des  92  gravures  d"Holbein),  3,000  fr.  —  Annota- 
tiones  Jacobi  Lopidis  contra  Erasmwn.  1519,  in-fol.  Exempl.  de 
Grolier,  le  plus  célèbre  des  bibliophiles  du  XVI«  siècle,  3,000  fr.  — 
Response  au  livre  publié  par  l'évesq7ie  d'Evreux.  Saumur,  1602,  in-4°. 
Exempl.  de  l'auteur  Duplessis-Mornay,  avec  huit  vers  autographes, 
2,000  fr.  —  Dialogues  de  Bernardin  Ochin  touchant  le  purgatoire 
(Genève),  1559,  in-S^,  1,500  fr.  Exempl.  adjugé  à  16  fr.,  vente  Mac 
Carthy,  en  1816,  et  142  fr.  Solar,  en  1861.  —  Essais  de  Montaigne. 
Bourdeaux,  1580.  Edition  originale,  1,500  fr. —  Politique  tirée  des 
propres  paroles  de  V Écriture  sainte,  par  Bossuet.  Paris,  1709,  in-4. 
Très-bel  exempl.  aux  armes  du  duc  du  Maine,  2,300  fr.  —  De  gli 
habiti  antichi  et  >nuderni...  fatti  da  Cesare  Vecellio.  Yenetia,  1590, 


—    244    — 

in-S",  2,480  fr.  —  Suite  d'esta".npes  pour  serinr  à  Vliistoire  des  mœurs 
et  des  costumes  des  Français.  Paris,  1776-1789,  in-fol.  (38  estampes  : 
12  par  Frendenberg,  26  parMoreau),  3,300  fr.  —  Horatius.  Londini, 
1733-1737,  2  vol.  m-8°.  Très-belle  reliure  de  Derome,  5,000  fr.  — 
Le  Romxin  de  la  Rose,  s.  l.  ni  d.  (Lyon,  vers  1485j.  In-fol.,  2,800  fr. 
Exempl.  d'Heber,  8  1.  st.  en  1836,  mais  relié  depuis;  un  exempl.  de 
cette  édition  n'avait  pas  dépassé  7  fr.  20  en  1784  ;  un  autre,  relié  en 
mar.,  170  fr.,  vente  Cailhava.  —  Le  Roman  de  la  Rose.  Paris,  1529, 
pet.  in-8°,  1,000  fr.  Exempl.  Giraud,  299  fr.,  et  Solar,  355  fr.  — 
Œuvres  de  Guillaume  Coquillart.  Paris,  1529.  pet.  in-8°,  5,450  fr.;  ce 
même  exemp.,  18  fr.,  La  Vallière,  en  1784,  et  510  fr.,  Renouard,  en 
1853,  prix  qui  avait  alors  paru  fort  élevé.  —  Le  Champion.des  daines 
(par  Martin  Franc),  s.  l.  nid.  (Lyon,  vers  1485),  in-fol.,  2,900  fr. 
(Poëme  fort  ennuyeux  à  la  louange  des  femmes).  —  Le  Temple 
Jeluin  Boccace,  de  la  ruine  d'aulcuns  nobles  malheureux,  Paris, 
1517,  in-fol.,  4,000  fr.  —  Les  premières  œuvres  de  Philippe  des 
Portes.  Paris,  1600,  in-8°,  très-belle  reliure.  Exempl.  de  l'auteur  et 
à  son  chifire,  3,505  fr.  —  Fables  de  la  Fontaine.  Paris,  1677-1694, 
5  vol.  in-12  (la  sei4e  édition  complète  publiée  par  l'immortel  fabu- 
liste). Fort  bel  exempl.,  11,950  fr.  [Onze  mille  neuf  cent  cinquante!) 

—  Recueil  des  plus  beaux  airs,  accompagnés  de  chansons  à  danser. 
Caen,  1615,  pet.  in-12.  3,000  fr.  Le  Manuel  dit  libraire  cite  deux 
adjudications  de  ce  recueil  complet,  70  et  201  fr.  —  Orlando  furioso. 
Birmingham,  1778, 4  vol.  in-4'^,  2,700  fr.  —  Oronte  gigante.  Vinegia, 
1531,  in-4''.  Édition  unique  de  cette  épopée  chevaleresque.  Exempl. 
de  Henri  U  et  de  Diane  de  Poitiers,  4,400  fr.  —  Plautus.  Lugd. 
Batav.,  1664,  2  vol.  in-8.  Exempl.  avec  la  Toison  d'or,  emblème 
adopté  par  Longepierre,  auteur  d'une  tragédie  de  Médée,  fort  ou- 
bliée de  nos  jours,  2,500  fr.  —  Le  Mystère  des  Actes  des  Apostres. 
Paris,  1537,  in-fol.,  3,000  fr.  —  Œuvres  de  Molière.  Paris,  1739. 
8  vol.  in-12,  5,000  fr.  Une  jolie  reliure  de  Derome,  en  maroquin  vert, 
est  le  motif  de  ce  prix  énorme.  Ce  même  exempl.  avait  été  adjugé 
181  fr.,  vente  Duriez,  1826,  et  169  fr.,  Pixerécourt,  en  1839.  — 
Daphnis  et  Chloé.  1718,  pet.  in-S",  2,150  fr.  —  Méliadus  de  Leon- 
noys.  Paris,  1539,  in-fol.,  2,000  fr.  (payé  600  fr.  à  la  vente  Giraud'. 

—  Faits  et  prouesses  du  noble  chevalier  Jason  (sans  lieu  ni  date), 
in-fol.,  7,600  fr.  (On  ne  connaît  que  trois  autres  exempl.  de  ce  vo- 
lume. Voir  la  note  n°  339  du  catalogue).  —  Œuvres  de  Rabelais. 


—    245    — 

Paris,  1553,  in-16  (la  première  édition  qui  comprend  les  quatre 
livres),  3,000  fr.  Le  Manuel  n'indique  aucune  adjudication.  — 
Nouvelles  récréations  de  Bonaventure  Despériers .  Paris,  1558,  pet. 
)n-4",  3,000  fr.  Un  exempl.  relié  en  maroquin  avait  été  payé  260  fr., 
Solar,  en  1861.  —  Ciceronis  opéra.  Amstelodami,  apud  Elzevirios, 
1661,  2  vol.  in-é".  Très-bel  exempl.,  3,900  fr.  (à  cause  de  la  reliure). 
—  Le  Livre  appelé  Mandeville.  Lyon,  1480,  in-fol.,  6,250  fr.  (Voir 
la  note  du  catalogue,  n»  611).  Cet  exempl.  avait  été  adjugé  à  36  fr. 
à  la  vente  du  duc  de  La  Vallière,  en  1783,  mais  il  avait  reçu  depnis 
une  riche  reliui-e.  —  La  Mer  des  histoires.  Paris,  1588,  in-fol.,  2,800 
fr.  —  Discours  sur  Vhistoire  naturelle,  par  Bossuet,  1680,  in-é". 
Édition  originale;  très-bel  exempl.  aux  armes  du  chancelier  Le  Tel- 
lier,  6,400  fr.  —  Histoire  des  variations,  par  Bossuet,  1688,  2  vol. 
in-4",  1,850  fr.  —  Chroniques  de  Monstrelet.  Paris,  s.  d.,2  vol.  in-fol., 
3,250  fr.  Cet  exempl.  avait  deux  fois  été  adjugé  à  Londi-es,  8  1.  st.; 
12,  Roxburghe  en  1812  ;  22  1.  st.  10,  Heber  en  1836.  —  La  Chronique 
du  roy  Louis  unziesme.  Paris,  1558,  in-8",  2,650  fr.  (Exempl.  du 
président  de  Thou) .  —  Recueil  des  portraits  et  éloges,  par  M''^  de 
Montpensier.  Paris,  1659.  Exempl.  aux  armes  de  Mademoiselle  ;  an- 
cienne reliure,  14,000  fr.  [Quatorze  mille  francs!) 

Fouilles  a  Feanchtmont.  —  Des  fouilles  importantes  sont  faites 
à  Franchimont  depuis  le  mois  d'octobre  de  l'année  dernière. 

Franchimont  est  un  petit  village  du  canton  de  Florennes,  que  l'on 
rencontre  à  une  demi-lieu  de  Villers-le-Gambon. 

La  place  publique,  située  à  l'entrée  du  village  en  venant  de 
Villers-le-Gambon,  est  assez  remarquable  par  sa  position,  et  elle 
l'est  maintenant  tout-à-fait  par  les  richesses  archéologiques  que  l'on 
y  découvre  en  une  abondance  extraordinaire. 

Cette  place,  située  sur  un  monticule  et  escarpée  de  trois  côtés, 
présente  cette  particularité  qu'à  certains  endroits  l'herbe  y  pousse 
comme  dans  une  prairie,  tandis  qu'à  d'autres  endroits  le  sol  est  à 
peu  près  stérile. 

L'ouvrier  qui,  depuis  plusieurs  années,  exécute  les  fouilles  pour 
le  compte  de  la  Société  archéologique  de  Namur,  Godelainé,  homme 
intelligent,  très-observateur,  et  qui  possède  de  véritables  connais- 
sances en  fait  d'antiquités,  fut  frappé  de  ces  liizarreries  de  végéta- 
tion, et  il  se  dit  qu'il  devait  y  avoir  là  queb^ue  chose,  d'autant  plus 


—    24G     — 

que  la  place  s'appelle  les  Tombais.  Il  donna  donc  un  coup  de  pioche , 
et  il  eut  la  chance  d'ouvrir  une  tomlie.  C'était  à  la  fin  d'octobre  ou 
au  commencement  de  novembre  de  l'année  dernière.  Il  se  mit 
aussitôt  à  l'œuvre,  et  il  fut  bientôt  évident  qu'il  avait  découvert  un 
cimetière  franc. 

Les  fouilles  ont  continué  jusqu'au  mois  de  décembre,  et  elles  ont 
repris  aussitôt  que  le  temps  l'a  permis. 

Un  grand  nombre  de  tombes,  situées  à  30  et  40  centimètres,  et 
quelquefois  moins  bas,  ont  été  ouvertes,  et  l'on  a  recueilli  un  grand 
nombre  d'objets  divers,  des  vases  en  verre,  des  boucles  en  fer,  des 
boucles  en  bronze,  des  stylets  à  écrire,  des  scramasax,  des  fers  de 
lance,  des  grains  de  collier,  des  boucles  on  argent  damasquinées, 
des  boucles  en  or  émaillées  de  verrotteries,  des  ossements,  etc.,  etc. 

Un  objet  tout-à-fait  remarquable  et  qui  attirera  certainement  l'at- 
tention du  monde  savant,  a  été  ramassé.  C'est  une  bague  portant 
un  chaton  avec  monogramme  surmonté  d'une  croix.  Cette  croix 
serait-elle  un  ornement  de  hasard,  ou  bien  aurait-on  rencontré  le 
cimetière  d'une  colonie  chrétienne?  Peut-être  de  nouvelles  décou- 
vertes apporteront-elles  de  nouveaux  éclaircissements.  En  tous  cas, 
cette  bague  est  certainement  des  plus  curieuses. 

Parmi  les  tombes  que  l'on  a  fouillées,  il  en  est  une  qui  contenait 
le  squelette  d'une  petite  fille  dont  la  seconde  dentition  n'était  point 
faite;  les  secondes  incisives  commençaient  seulement  à  pousser. 

Ce  cimetière  de  Franchimont  est  certainement  un  des  j^lus  inté- 
ressants que  l'on  ait  trouvés  dans  l'Entre-Sambre  et  Meuse,  si  riche 
en  antiquités  romaines  et  franques. 

Société  des  Sciknces,  des  Aets  et  des  Lettbes  du  Hainaut.  — 
Concours  de  1878. 

Littérature.  —  I.  —  Une  pièce  de  cent  vers  au  moins  sur  un  sujet 
puisé  dans  l'histoire  de  Belgique. 

II.  —  Une  ou  plusieurs  pièces  comprenant  au  moins  cent  vers 
sur  un  ou  plusieurs  sujets  laissés  au  choix  de  l'auteur. 

III.  —  Une  nouvelle  en  prose. 

Biographie.  —  IV.  —  Biographie  d'un  homme  remarquable  par 
ses  talents  ou  par  les  services  qu'il  a  rendus  et  appartenant  au 
Hainaut. 

Beaux-Arts.  —  V-  —  Étudier  l'architecture  dans  les  monuments 


—    247    — 

et  les  maisons  particulières  de  la  ville  de  Mous  jusqu'à  la  fin  du 
XV1II«  siècle. 

VI.  —  Une  statuette,  avec  piédestal,  pouvant  sei'vir  de  modèle 
pour  un  monument  à  élever  à  Jacques  Du  Bi'œucq,  le  vieux,  né  à 
Mons. 

VII.  —  Écrire  l'histoire  des  arts  du  dessin  dans  le  Ilainaut 
depuis  le  règne  de  Marie-Thérèse  jusqu'à  nos  jours. 

Histoire.  —  VIII.  —  Établir  au  moyeu  de  pi'euves  la  chronologie 
des  comtes  de  Haiuaut. 

IX.  —  Écrire  l'histoire  d'une  des  anciennes  villes  du  Hainaut, 
excepté  Soignies,  Péruwelz,  Saint-Ghislain,  Enghien,  Beaumont  et 
Fontaine-l'Évêque. 

X.  —  Faire  l'histoire  de  l'art  typographique  dans  le  Ilainaut. 
Enseignenieyit.  —  XI.  —  Examen  critique  de  nos  lois  et  de  nos 

règlements  sur  l'enseignement  primaire. 

XII.  —  Même  question  en  ce  qui  concerne  l'enseignement  moyen. 

XIII.  —  Même  question  en  ce  qui  concerne  l'enseignement  su- 
périeur. 

XIV.  —  De  l'opportunité  d'établir  des  crèches  et  des  écoles 
gardiennes,  et  comment  elles  doivent  être  organisées  en  Belgique 
pour  répondre  aux  besoins  des  populations  ouvrières. 

Sciences.  —  XV.  —  Faire  la  description  géologique  et  paléonto- 
logique  des  terrains  tertiaires  du  Hainaut. 

XVI.  —  Exposer  les  différentes  méthodes  de  transformation  des 
figures  géométriques. 

XVII.  —  Discuter  les  différents  nombres  qui  ont  été  proposés 
pour  représenter  l'équivalent  mécanique  de  la  chaleur. 

Médecine  et  hygiène.  —  XVIII.  —  Quels  sont  au  point  de  vue 
du  traitement  des  malades,  les  avantages  et  les  inconvénients  des 
hôpitaux  permanents. 

Agynculture  et  horticulture.  —  XIX.  —  Rechercher  les  causes 
naturelles  ou  physiques  de  la  dégénérescence  des  graines  dans  les 
végétaux  cultivés. 

XX.  —  Faire  l'historique  de  l'agriculture  dans  la  province  de 
Hainaut,  depuis  les  temps  anciens. 

Sciences  sociales.  —  XXI.  —  Rechercher  pour  le  Hainaut ,  si  la 
proportion  relative  des  crimes,  dans  les  différents  groupes  agricoles 
et  industriels  de  la  province  s'est  modifiée  depuis  1830  jusqu'à  nos 
jours  et,  le  cas  échéant,  en  indiquer  les  causes. 


—     248    — 

Questions  proposées  :  a.  Par  le  Gouvernement. 

XXII.  —  Discuter  à  fond  la  question  de  la  translation  (descente 
et  remonte)  des  ouvriers  dans  les  mines  profondes.  Dans  quelles 
conditions  doit-elles  se  faire  pour  sauvegarder  la  vie  des  ouvriers? 

XXIII.  —  Certaines  discordances  que  l'on  remarque  souvent 
dans  les  plans  de  mines  levés  à  la  boussole,  lorsque  l'on  veut  rac- 
corder entre  eux  les  plans  des  différents  étages,  autorisent  à  penser 
que  les  instruments  magnétiques  subissent  dans  l'intérieur  de  la 
terre,  soit  des  déviations  locales,  soit  des  déviations  qui  sont  fonc- 
tion de  la  profondeur. 

On  demande  de  décrire  un  procédé,  à  la  fois  pratique  et  sûr  pour 
déterminer  à  un  même  moment,  les  directions  relatives  de  l'aiguille 
aimantée  à  la  surface  de  la  terre  et  à  une  profondeur  donnée  dans 
un  puits  de  mine. 

b.  Par  la  Députation  permanente  du  Conseil  provincial. 

XXIV.  —  Indiquer  et  décrire,  d'une  manière  générale,  le  gise- 
ment, les  caractères  et  les  traitements  des  divers  minerais  de  fer 
exploités  dans  la  province  de  Hainaut. 

Énumérer  les  caractères  géognostiques  qui  doivent  servir  de 
guide  dans  la  recherclie  des  gîtes  de  minerais  de  fer  qui  peuvent 
exister  dans  la  province  de  Hainaut,  et  discuter  leur  valeur. 

XXV.  —  Indiquer  et  décrire  les  réactifs  chimiques  les  moins 
coûteux  et  les  manipulations  les  plus  simples  pour  précipiter  tous 
les  corps  dissous  dans  les  eaux  sortant  des  fabriques  de  sucre,  de 
noir  animal,  des  divers  produits  chimiques  et  des  teintureries,  de 
manière  qu'il  suffise  de  filtrer  les  eaux  ainsi  traitées,  pour  les  obte- 
nir limpides  et  ne  contenant  aucune  matière  organique  ou  inorga- 
nique en  dissolution. 

Le  prix  pour  chacun  de  ces  sujets  est  une  médaille  d'or. 


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Vue  uu  village  de  Laeken, en  17(54 


249 


L'ANCIENNE 

IIEPTARCniE  DE  LAEREN-XOTRE-DAME, 

AUJOURD'HUI  RÉSIDENCE  ROYALE. 

NOTICE  HISTORIQUE  ACCOMPAGNÉE   DE   PIÈCES   JUSTIFICATIVES  ET  SUIVIE  DU  TEXTE  INÉDIT 
D'UNE  COUTUME  DE  CETTE  LOCALITÉ  K 


Septem  Larenses  vetcri  ditione  toparchœ 
Et  sera  tltulos  posteritate  gerunt. 

(Eeycius  Puteanxs.) 


La  notice  qu'on  va  lire  n'est  pas  en  elle-même 
d'une  bien  grande  importance.  Mais,  envisagée  sous 
le  rapport  des  institutions  si  variées  et  parfois  si 
bizarres  du  moyen-âge ,  elle  présentera ,  je  crois , 
quelque  intérêt.  Elle  contribuera  à  éclaircir  l'his- 
toire locale  de  Laeken,  à  laquelle  plus  d'un  auteur 
a  consacré  ses  recherches.  Tel  est,  de  nos  jours, 
M.  A.  Wauters,  le  savant  archiviste  de  la  ville  de 
Bruxelles,  qui  a  apprécié  et  utilisé  les  travaux  de 
ses  devanciers,  en  indiquant  soigneusement  le 
titre  des  publications  dues  à  leur  plume  respec- 
tive. En  outre,  cet  essai  jettera  du  jour  sur  un  point 
assez  obscur  des  institutions  précitées.  Je  veux 

*  Cette  coutume  a  été  traduite  et  annotée  par  M.  Charles  Stal- 
laert.  (Voir  l'appendice.) 

17 


—    250    — 

parler  de  ces  justices  foncières ,  représentées  par 
des  cours  censales,  où  siégeaient  ordinairement 
quatre  ou  sept  tenanciers,  que  présidait  un  majeur, 
officier  de  police  chargé,  en  même  temps,  de  veiller 
à  la  tranquillité  publique. 

Parmi  les  vieux  auteurs  auxquels  je  viens  de 
faire  allusion,  il  en  est  qui,  songeant,  sans  doute, 
à  riieptarcliie  Angio- Saxonne  fondée  dans  la 
Grande-Bretagne,  au  V*^  et  au  VP  siècle,  ont  donné 
ce  même  nom  d'heptarchie  au  village  de  Laeken- 
Notre-Dame  ' ,  parce  que  l'autorité  seigneuriale  y 
était  partagée  entre  sept  personnes. 

«  L'heptarchie  ou  les  sept  seigneuries  de  Lae- 
ken,  dit  M.  Wauters  %  ont  été  le  sujet  de  maint 
conte  ;  on  a  dit  que  leurs  possesseurs  descendaient 
des  anciens  maîtres  du  village,  et  qu'en  passant 
de  génération  en  génération,  elles  s'étaient  frac- 
tionnées.  )) 

En  effet,   Sanderus  ^  suppose  que  le  chevalier 


•  L'origine  de  cette  commune  se  perd  dans  la  nuit  des  temps, 
puisqu'on  a  découvert  sur  son  territoire ,  non  loin  de  l'église ,  les 
substructions  d'une  villa  de  l'époque  romaine.  L'auteur  du  présent 
article  les  a  explorées  avec  soin  et  a  rendu  compte  du  résultat  des 
f(juilles  dans  les  Bulletins  de  l'Académie  royale,  en  1855  et  en  1877. 

^  Voy.  sa  notice  sur  Laeken  dans  VHistoire  des  enviro7is  de 
Bruxelles,  t.  II,  pp.  343-388.  La  vue  du  village  de  Laeken ,  placée 
au  commencement  de  cette  notice  et  reproduite  par  la  photolitho- 
grapliie,  est  du  graveur  Ilarrewyn,  qui  l'exécuta  pour  en  orner  l'ou- 
vrage du  l)aron  Le  Roy  :  Le  Grand  théâtre  sacré  du  duché  de  Bra- 
bant.  Harrewyn  a  copié,  à  quelques  modifications  près,  la  planclie 
que  J.  Troyen  grava  pour  la  monographie  de  Sanderus,  publiée  en 
1G59.  {Voy.  plus  loin.) 

3  Chorographia  sacra  Brabantiœ.  Laça  parthenia.  Cette  mono- 
graphie est  divisée  en  ti-ente  paragraphes.  L'auteur  a  largement 
puisé  dans  une  histoire  de  Laeken  par  J.-A.  Gurnez,  curé  de  la  com- 


-     251     — 

Rembald  de  Laeken,  qui  vivait  dans  la  seconde 
moitié  du  XIP  siècle  et  au  commencement  du 
siècle  suivant',  étant  décédé  sans  postérité,  fut 
remplacé  dans  son  domaine  par  sept  seigneurs, 
soit  que  tous  fassent  ses  héritiers,  ou  que,  dans 
le  nombre,  il  y  en  eût  qui  acquirent  des  fractions 
de  ce  domaine. 

Selon  Puteanus,  que  cite  le  même  auteur,  l'iiep- 
tarcliie  de  Laeken  ne  serait  autre  qu'une  imita- 
tion des  sept  lignages  institués  à  Bruxelles. 

Voici  l'opinion  qu'exprime  le  baron  Le  Roy. 

«  Laken  est  un  des  villages  qui  jouit  du  droit 
de  bourgeoisie  ;  il  y  a  sept  seigneuries  dans  son 
territoire ,  et  les  sept  familles  patriciennes  sem- 
blent avoir  tiré  leur  origine  de  ces  sept  seigneu- 
ries ^.   » 

Sanderus ,  cet  écrivain  fécond ,  s'est  évidem- 


mune.  Le  greffier  Jacques  Van  Humbeek  lui  communiqua,  de  son 
côté,  des  documents.  Malgré  son  étendue,  je  mets  sous  les  yeux  du 
lecteur  le  titre  complet  de  l'écrit  de  Sandeinis  : 

Laça  parthenia,  Mariani  cidUis  antiquitate  et  miraculorùm  gloria 
illustris,  quam  e  inajoribus  ejusdem  argumenti  commentariis  nuper 
editis  Joannis-Antonii  à  Gurnez ,  presbyteri  oratoriani,  hic  brevio- 
retn,  alibi  auctant,  et  imaginibus  œneis  ornatani,  rursus  in  lucem 
educit  Antonius  Sanderus ,  presbyter,  Iprensis  ecclesiœ  canonicus, 
yiuper  et  pœnitentiarius.  Bruxellœ,  apitd  Philippum  Yleugartiian , 
1659.  Ce  titre  est  orné  d'une  belle  gravure  représentant  l'image  de 
la  Vierge,  placée  sur  un  autel.  Au  pied,  le  Christ  tenant  un  gou- 
pillon et  bénissant  l'église  de  Laeken  ;  derrière  lui,  sa  mère  portant 
un  livre  et  un  petit  sceau.  Elle  est  suivie  de  deux  anges.  La  mono- 
graphie de  Sanderus,  grand  in-fol.,  est  dédiée  à  l'archiduc  Léopold, 
gouverneur  général  des  Pays-Bas.  (Voy.  son  épître  dédicatoire.) 

•  Il  intervint  comme  témoin  dans  une  charte  de  donation  de 
Léon,  châtelain  de  Bruxelles,  de  l'an  1207.  [Ibid.) 

»  Loc.  cit.,  t.  I,  p.  323. 


-     252    — 

ment  trompé  lorsqu'il  avance  que  le  chevalier 
Reinhalcl  fut  le  dernier  rejeton  de  son  antique 
lignée.  Ainsi  que  le  fait  remarquer  M.  Wauters,  à 
cette  lignée  appartenait  Nicolas  de  Laeken,  qui 
vivait  en  1312.  a  Les  anciens  diplômes,  lisons- 
nous  dans  son  ouvrage,  mentionnent  une  famille 
noble  de  Laeken  dont  on  perd  les  traces  au 
XIV®  siècle.  En  1080,  vivait  Gilbert  de  Laça,  en 
1099,  Godescalc  de  Laça  et  son  frère  Walter  ;  en 
1251  et  en  1257,  le  chevalier  Lidekin,  vassal  des 
seigneurs  de  Grimberghe;  en  1312,  Nicolas,  fils  de 
sire  Lidekin,  et  en  1361,  Helewige,  fille  de  Nico- 
las, qui  épousa  Guillaume  de  Kesterbeke,  le  jeune, 
et  Jean  Boxhorens.  On  prétend  que  l'église  dut  à 
cette  lignée  sa  seigneurie  censale...  » 

D'après  Sanderus,  qui  doit  avoir  eu  des  docu- 
ments sous  les  yeux,  le  chevalier  Reinbald  dota 
généreusement  la  cure  de  Laeken  et  Tabbaye  de 
Grand-Bigard,  et  ce  fut  de  ce  chef  que  cette  riche 
communauté  religieuse  posséda  une  des  sept 
seigneuries  du  village  qui  nous  occupe.  Malgré 
d'autres  dotations,  il  resta  à  Tancienne  souche  de 
Laeken  des  biens  considérables.  La  coutume,  dont 
le  texte  se  trouve  à  l'appendice,  fait  encore  men- 
tion de  ceux  de  Nicolas  de  Laeken  * .  On  y  voit 
que  ces  biens  passèrent  à  sa  fille,  épouse  de 
Guillaume  de  Kesterbeke,  issu  lui-même  d'une 
très-ancienne  famille  brabançonne. 

Malgré  l'assertion  de  Sanderus,  je  n'ai  pas  vu 
figurer  le  chevalier  Reinbald  parmi  les  bienfai- 

'  Probablement  le  dernier  rejeton  mâle  de  sa  famille. 


—    253    — 

teiirs  de  l'abbaye  de  Grand-Bigard,  dans  les  deux 
cartulaires  de  ce  monastère  conservés  aux  Archives 
du  royaume  ^  Par  contre,  Nicolas  de  Laeken  y 
est  inscrit.  Ce  descendant  de  Reinbald  et  fils  de 
Lidikin  prouva  ses  sympathies  pour  Tabbaye  par 
un  don  de  quatre  bonniers  de  terre.  La  charte  de 
cession  est  datée  du  8  mai  1287  '\  D'après  un  acte 
des  proviseurs  des  pauvres  de  Laeken,  Helwige, 
sa  fille,  paraît  avoir  constitué  une  rente  annuelle 
de  10  livres  au  profit  des  religieuses.  Il  est  daté 
du  dimanche  après  l'Assomption,  1362.  C'est  le 
plus  ancien  que  j'aie  rencontré  où  il  est  question 
des  Erfheeren,  outre  qu'il  indique  le  seigneur  du 
bien  hypothéqué,  Gossuin  de  Mol.  A  ce  compte,  il 
mérite  d'être  publié  '\ 

Les  bienfaiteurs  par  excellence  du  monastère 
furent  les  sires  de  Bigard,  dont  parlent  des  diplô- 
mes remontant  au  haut  moyen-âge  ^.  Leurs  noms, 
liés  à  l'histoire  du  duché  ^,  tiennent  une  large 
place  dans  les  deux  cartulau^es.  Mais,  sans  fran- 

*  Le  premier,  grand  in-4°,  fut  écrit  en  1465, par  Henri  Cruypelant, 
prévôt  de  l'abbaye,  le  second,  in-fol.,  fait  en  1741-1743,  est  dû  à 
Henri  Van  Eesbeeck,  religieux  de  l'abbaye  de  Dilighem  et  receveur 
de  celle  de  Graud-Bigard.  Ces  deux  précieux  registres  ont  été  dé- 
couverts dans  les  archives  du  conseil  de  Brabant,  en  1859. 

*  Annexes,  n"  VIII. 
^  Annexes,  n°  X. 

*  Voy.  A.  Wauters,  loc   cit.,  1. 1,  p.  352. 

5  Bernard  de  Bigard  reçut  l'accolade  de  chevalier  de  la  main  de 
Jean  I,  à  la  liataille  de  Woeringen.  Il  fut  inhumé  avec  sa  femme  dans 
l'église  de  Tabbaye.  Leur  testament  est  transcrit  dans  les  deux  car- 
tulaii-es  ci-dessus.  On  me  saura  gré,  je  pense,  d'en  faire  connaître  la 
teneur  (Annexes,  n°  VII).  11  en  sera  de  même  quant  au  testament 
d'Arnoul  de  Bigard,  autre  document  fort  curieux  de  l'époque  (An- 
nexes, n"  VI). 


—    254    — 

cliir  les  limites  de  la  localité  qui  nous  occupe  ',  je 
me  bornerai  à  signaler  Béatrix,  fille  de  sire  Walter, 
Elle  gratifia,  d'un  trait  de  plume,  l'abbaye  de 
vingt-cinq  bonniers.  Six  étaient  situés  à  Laeken. 
Henri,  duc  de  Brabant,  confirma  cette  importante 
donation.  Bien  plus,  elle  se  fit  en  sa  présence  et 
devant  un  grand  nombre  de  ses  hommes-liges  2. 
Voilà  une  preuve,  et  il  y  en  a  bien  d'autres,  de 
rintimité  qui  régnait  alors  entre  le  chef  de  l'Etat 
et  ses  sujets,  puisqu'il  intervient  ici  dans  un  acte 
d'un  caractère  si  essentiellement  privé.  Il  est  vrai 
que  la  donatrice  était  d'un  rang  élevé  et  que  les 
ducs  de  Brabant  montrèrent  beaucoup  de  bien- 
veillance pour  l'abbaye  en  question  \ 

Guillaume  de  Bigard,  archidiacre  de  Tournai, 
surpassa  Béatrix  en  générosité  :  il  abandonna  à 
l'abbaye  tous  les  biens  quïl  avait  à  Laeken  \  sans 

'  Je  ferai  une  exception  en  faveur  d'un  acte  de  donation  de  l'ar- 
chidiacre Guillaume  de  Bigard.  Cet  acte  ofl're  ceci  de  remarquable 
qu'il  fut  passé  sous  un  chêne  {sub  quercu),  en  1244,  en  présence  de 
plusieurs  chevaliers,  hommes-liges  du  duc  Henri  de  Brabant,  et 
d'hommes-liges  d'Helwige,  dame  de  Bigard  (Annexes,  n"  II).  Celle-ci 
confirma  cette  donation  le  même  jour  (Annexes,  n°  III).  Ce  chêne 
rappelle  celui  de  Vinceunes,  sous  lequel,  à  la  même  époque,  saint 
Louis  rendait  la  justice. 

*  Charte  de  l'année  1224  (Annexes,  n°  I). 

^  Godefroid  le  Barbu  sanctionna  la  fondation  de  l'abbaye  par  un 
diplôme  de  l'année  1133  et  enrichit  celle-ci  de  i:)lusieurs  domaines. 
Le  monastère  doit  son  origine  à  une  dame  noble  de  la  Flandre, 
nommée  Wivine,  canonisée  depuis.  Il  était  situé  tout  près  de  la  sta- 
tion de  Dilbeek,  sur  la  ligne  de  Bruxelles  à  Alost.  C'est  aujourd'hui 
une  belle  maison  de  campagne  (Foy.,  entre  autres,  M.  A.  Wauters, 
loc.  cit.,  1. 1,  p.  3G8. 

♦  Charte  du  samedi  après  la  Saint-Nicolas  1244  (Annexes,  n°  IV). 
Je  soupçonne  fort  que,  parmi  ces  biens,  se  trouvait  le  livre  censal 
qui  valut  à  l'abljaye  une  seigneurie  à  Laeken.  Cette  donation  fut 
confirmée  par  Henri  II,  duc  de  Brabant,  en  1248  (Annexes,  n°  V). 


—    255    — 

parler  de  ses  autres  largesses  consignées  dans  les 
deux  cartulaires  '.  Enfin,  Ida  de  Plateâ  (Vander 
Straeten),  béguine,  à  Bruxelles,  se  signale  égale- 
ment par  un  acte  généreux.  Elle  donne  à  la  com- 
munauté un  demi-bonnier  de  prairie.  Le  document 
qui  émane  d'elle  a  de  Fintérèt  pour  nous,  en 
ce  qu'il  désigne  Arnoul,  curé  de  Laeken,  comme 
seigneur  du  fonds  [dominus  fundi).  Cet  ecclésiasti- 
que préside  à  la  donation,  assisté  de  ses  quatre 
mansiomimni  (tenanciers,  juges-censaux).  Or,  les 
curés  de  Laeken  ayant  fait  partie  de  Flieptarchie, 
ne  peut-on  pas  raisonnablement  inférer  du  même 
document  qu'en  ce  temps,  c'est-à-dire  en  1298, 
elle  était  déjà  constituée? 

Quoi  qu'il  en  soit  de  son  origine,  il  est  cer- 
tain que  les  seigneurs  héréditaii'es  ou  fonciers 
dans  Laeken^,  ainsi  qu'ils  se  qualifiaient,  jouis- 
saient de  ce  titre  '"  et  des  prérogatives  qui  y 
étaient  attachées,  du  clief  de  certaines  redevances 
annuelles  qu'ils  prélevaient  sur  des  fonds  bâtis  et 


•  Arnoul  de  Bigard,  chanoine,  à  Tournai,  fit  don  de  ses  biens 
situés  à  Zellick  et  à  Grand-Bigard  (charte  du  mois  de  mars  1266 
(n.  st.),  confirmée  par  le  duc  Jean  I,  au  mois  de  mars  de  l'année  sui- 
vante .  Je  me  reprocherais  de  passer  sous  silence  Robert,  chevalier 
de  Bigard  (R.,  miles  de  Bi/gardis],  qui  légua  à  l'abbaye  une  somme 
de  50  livres  et  une  rente  annuelle  de  100  sols  (charte  du  mois  de 
mars  1266.  Voir  aux  Annexes,  n"  XIII). 

*  On  trouve  l'une  et  l'autre  expression  dans  les  actes  passés  en 
français  devant  les  échevins  de  Laeken,  vers  1780  et  années  sui- 
vantes. Pour  désigner  le  corps  entier  des  échevins,  le  greffier,  chargé 
de  transcrire  les  actes,  se  servait  parfois  du  terme  de  la  loi  foncière. 

^  Erfheer  in  Onse-Lieve-Vrotiwe  Laken;  en  latin  Domicdlus  et 
aussi  Tûparcha  in  Laken.  Laeken  selon  l'orthographe  du  siècle  der- 
nier et  du  nôtre. 


—    256     — 


non  bâtis,  tels  que  terres  et  prairies.  Les  fonds 
grevés  de  la  sorte  ^  et  sans  retour  -  étaient  dissé- 
minés dans  toute  la  commune ,  sauf  à  son  extré- 
mité nord-ouest  ^  Quant  aux  redevances  ou  cens, 


'  Biens  censaux  (cheynsgoedeti), -par  opposition  aux  aU.Q([[aux{eygen 
goeden),  qui  étaient  exemi:)ts  de  redevances,  et  aux  féodaux  ou  fiefs 
(leeugoeden),  assujettis,  à  chaque  mutation,  soit  par  héritage  ou  par 
achat,  aux  droits  de  reliefs  [hergeweyde]. 

^  «  De  droit  commun,  le  cens  est  imprescriptible  entre  le  sei- 
gneur et  le  sujet.  Telle  est  la  disposition  de  la  coutume  de  Paris...  » 
(Traité  des  fiefs,  liv.  VI,  ch.  l",  s''"  11,  Des  cens  et  rentes,  par 
M.  Claude  Pocquet  de  Livqnière,  conseiller  au  présidial  d'An- 
gers et  ancien  professeur  du  droit  français  en  la  même  université. 
Paris,  1771,  in-4'',  5*  édition).  Ce  grand  nombre  d'éditions  montre 
l'estime  dont  cet  ouvrage  a  joui  eu  son  temjjs.  L'auteur  était  un  sa- 
vant jurisconsulte.  Il  mourut  le  21  mai  1726. 

*  Là  existaient  et  existent  encore,  par  une  rare  exception,  vu  leur 
proximité  de  Bruxelles,  deux  grandes  fermes,  aj'ant  été  jadis  des  biens 
ailodiaux  ;  l'une  s'appelle  Osseghem  (la  Bouverie)  ;  l'autre,  Vereghem, 
mot  que  M.  Wauters  traduit  par  celui  de  PorcheHe.  Près  de  cette 
ferme,  il  y  a  un  tilleul  remarquable.  Il  a  été  signalé  un  jour  dans 
VÊcho  du  parleme>it  par  l'un  ou  l'autre  promeneur,  qui  en  parla  en 
ces  termes  : 

«  La  tempête  du  12  n»ars  (1876)  n'a  pas  dit  son  dernier  mot.  On 
a  signalé  ses  ravages  dans  les  campagnes,  où  elle  a  renversé  des 
milliers  d'arbres.  Passe  jjour  la  multitude,  mais  elle  a  aussi  exercé 
sa  fureur,  non  loin  de  la  capitale,  sur  un  tilleul  aux  proportions 
extraordinaires  et  bien  connu  des  excursionistes.  Il  s'élève  sur  le 
point  culminant  de  la  commune  de  Laeken,  contre  un  large  et  an- 
tique chemin  qui  sillonne  ces  hauteurs.  On  l'appelle  vulgairement 
Vereghem  ou  Veregatlinde ,  du  nom  d'une  belle  et  grande  ferme 
située  à  ses  pieds,  dans  un  ravin. 

»  Il  est  en  vénération  dans  la  contrée ,  car  c'est  un  de  ces  arbres 
consacrés,  tels  qu'on  en  voit  souvent  aux  abords  des  chemins  vi- 
cinaux et  au  milieu  des  carrefours.  A  une  dizaine  de  pieds  du  sol, 
son  tronc  colossal  se  partageait  en  trois  énormes  branches,  qui,  avant 
l'ouragan  lui  formaient  une  superbe  et  vaste  couronne. 

»  L'une  d'elle  a  été  littéralement  arrachée  et  le  géant  n'est  j^lus, 
hélas!  que  l'ombre  de  lui-même.  Peu  s'en  est  fallu  qu'il  ne  cédât 


—    257    — 

ils  consistaient  surtout  en  orge  '  et  en  avoine^  en 
œufs,  en  chapons,  etc.,  et  en  deniers  comptants, 
monnaie  de  Louvain  ^ 

Chaque  seigneur  possédait  un  rôle  (livre  cen- 
sal)  3,  où  ses  tributaires  étaient  inscrits,  de  même 
que  leurs  propriétés  soumises  aux  cens,  avec  le  dé- 
tail de  ceux-ci  et  Tindication  précise  de  la  situa- 
tion, de  la  contenance  (pour  les  terres  et  prairies) 
et  des  tenants  et  aboutissants.  Trois  de  ces  regis- 
tres se  trouvent  aux  Archives  du  royaume.  Ils 
y  ont  été  déposés  avec  le  reste  des  archives  éche- 
vinales  de  la  commune  \  Comme  ils  constituaient 

tout  entier,  comme  le  chêne  de  la  fable,  aux  éléments  déchaînés 
qu'il  brave  depuis  des  siècles. 

»  Feu  le  roi  Léopold  se  promenait  souvent  dans  ces  jjarages  et 
faisait  un  cas  tout  particulier  de  ce  tilleul  remarquable.  Un  jour  le 
fermier  de  Vereghem  en  ayant  élagué  les  branches  inférieures  et  le 
Roi  s'en  étant  aperçu,  il  lui  fit  exjjrimer  son  mécontentement  par  le 
chasseur  qui  le  suivait  :  Que  dirait-il  aujourd'hui  !  ! 

»  A  une  faible  distance  de  là,  la  tempête  a  abattu  un  autre  arbre 
légendaire,  mais  de  bien  moindres  dimensions.  Il  portait  le  nom  de 
Bererlinde.  » 

Ajoutons  que  tout  près  du  palais  royal  on  voit  un  tilleul  non 
moins  digne  d'attention.  Il  a  été  chanté  en  1854  par  feu  le  profes- 
seur Lebermuth,  dans  une  pièce  de  vers  intitulée  :  Kayserslinde. 

'  Meygerst.  > 

*  Un  curieux  petit  livre  est  celui  qui  a  été  réimprimé  plusieurs 
fois,  sous  le  titre  de  :  Den  scliat  der  cheynsen  innelioudende  de  weerde 
ende  evaluatie  van  vêle  onde  niimteii  en  cheynseyi  die  hi  de  cheyns- 
boeken  staen,  als  mede  verscheyde  heerelyke  rechten,  keuren,  boeten, 
diensten  en  servituten,  recognitien,  usantien  ende  soo  voorts.  «  Seer 
»  noodig,  lit-on  sous  ce  titre,  ende  curieus  voor  aile  de  welke  eenige 
»  cheynsen  hetiénde  ofte  geldende  zyn,  ofte  iets  dieu  aengaende 
»  trachten  te  weten.  » 

^  Chynsboeh. 

*  Elles  se  composent,  savoir  :  de  douze  registres  aux  actes  passés 
devant  les  échevins,  de  1491-1795,  de  six  liasses  de  minutes  de  ces 
actes,  1559-1699 ,  de  deux  liasses  de  conditions  de  ventes  et  autres 


—    258     - 

une  propriété  purement  privée,  je  ne  m'explique 
pas  trop  ce  dépôt  et  je  me  demande  pourquoi  ils 
ne  sont  pas  demeurés  au  pouvoir  des  familles  qui 
jadis  en  héritèrent.  Mais  passons  outre. 

Le  premier  de  ces  registres  est  intitulé  le  Grand 
livre  de  mai\  Il  provient  d"un  gentilhomme  nommé 
Louis  van  Hamme,  qui  le  renouvela  en  1571, 
d'après  une  matricule  qui  remontait  à  1528. 

Le  second  registre  dit  de  Noël  -  constituait  le 
titre  de  François  Doelman,  gi^ef&er  du  conseil  des 
finances.  On  lit  à  Tentête  quil  avait  été  renouvelé 
antérieurement  par  Henri  Hujoel,  greffier  du 
conseil  de  Brabant,  et  ses  cohéritiers,  en  vertu 
de  lettres  de  terrier  de  TEmpereur,  du  mois  d'août 
1550'. 

Le  troisième  registre,  portant  la  même  déno- 
mination que  le  précédent,  appartint  à  Folcard 

actes,  1756-1786,  de  trois  livres  censaux ,  de  neuf  comptes  des  cens, 
1629-1752,  d'une  liasse  d'actes  aux  saisies,  1665-1795,  de  quatorze 
cahiers  du  rôle  des  échevius,  1624-1785,  et  d'un  registre  aux  sen- 
tences, de  1636-1785. 

»  Grootmeyboek.  Les  actes  mentionnent  aussi  le  Petit  livre  de  mai. 
L'un  et  l'autre  étaient,  en  dernier  lieu,  la  propriété  de  la  famille  des 
barons  d'Olmen  de  Poederlé. 

2  Kersmisboek.  Les  cens  qui  y  sont  annotés  échéaient  à  la  Noël. 

^  Les  lettres  patentes  de  cette  espèce  autorisaient  celui  qui  les 
obtenait  à  faire  un  nouveau  dénombrement  des  biens  sur  lesquels  il 
était  en  droit  de  percevoir  un  cens,  ainsi  que  des  personnes  qui  en 
étaient  les  propriétaii'es.  Elles  servaient  aussi  au  dénomljrement  des 
fiefs  relevant  d'une  seigneurie,  et  qu'on  nommait  en  Bralmnt  arrière- 
fiefs  (achterleenen).  Les  lettres  citées  dans  le  texte  furent  publiées  à 
l'hôtel  de  ville ,  à  Bruxelles,  le  8  août  1550,  et  le  lendemain  à  l'église 
de  Laeken.  De  cette  manière  elles  devenaient  des  actes  publics,  et 
les  rôles  dressés  avaient  un  caractère  d'incontestable  authenticité, 
puisque  chacun  était  prévenu  de  leur  formation  et  pouvait  les  con- 
trôler en  ce  qui  le  concernait. 


—    259     - 

Van  Aclielen,  conseiller  et  maître  des  requêtes  au 
conseil  privé.  Ce  rôle,  renouvelé  d'après  un  plus 
ancien,  fut  dressé  par  le  notaire  Jean  Van  Huni- 
beek,  résidant  à  Bruxelles,  ensuite  de  lettres  de 
terrier  du  6  mars  1627. 

L'auteur  du  présent  article  se  souvient  d'en 
avoir  vu  un  quatrième  entre  les  mains  de  feu  le 
baron  Ferdinand  van  Reynegom  de  Buzet  et 
d'Herenthout,  dont  les  ancêtres  avaient  aussi  été 
seigneurs  à  Laeken  \  où  ils  possédaient  le  joli  ma- 
noir de  Coensborch'^,  qu'acquit  Corneille  van  Rey- 
negom, chevalier,  greffier  du  conseil  des  finances  '. 
Rebâti  en  1810  par  un  membre  de  cette  famille, 
il  vient  d'être  démoli,  par  suite  de  la  création  d'un 
parc  public,  entreprise  des  plus  considérables  et 
qui  est  en  bonne  voie  d'exécution.  Seulement,  il  est 
fâcheux  pour  les  amateurs  d'antiquités  que  les  im- 
menses travaux  accomplis,  depuis  1830,  à  Bruxel- 
les et  aux  environs,  aient  fait  disparaître  une  foule 
de  vieux  édifices  auxquels  se  rattachaient  d'inté- 


*  Le  Chynsboeck  van  Coensborch.  Tl  ne  comportait  que  treize  im- 
meubles, dont  six,  en  1723,  n'étaient  plus  connus.  Aussi,  ne  rappor- 
tait-il alors  annuellement  que  5  florins.  Cela  n'empêcha  pas  que, 
dans  un  acte  de  partage  de  la  famille  Van  Reynegom,  de  l'année 
susdite ,  il  fut  évalué  à  la  valeur  de  400  florins,  en  y  comprenant 
la  cour  censale  de  Coensborch.  C'est  qu'il  ne  s'agissait  pas  ici  d'une 
question  d'argent,  mais  d'un  titre  honorifique. 

2  II  est  représenté  sur  la  vignette  jointe  à  cet  article,  et  se  trouve 
parallèlement  au  ruiseau  qui  alimente  un  moulin  à  eau.  Lût.  F  de 
la  légende  qui  le  désigne ,  avec  un  autre  château ,  sous  le  titre  de 
^des  nobilium  quoromdam  virorum. 

3  II  fut  revêtu  de  ces  fonctions  par  lettres  patentes  du  roi  Phi- 
lippe IV,  du  4  juin  1658.  Charles  II,  fils  de  Philippe,  le  créa  cheva- 
lier, par  lettres  patentes  du  11  septembre  1068. 


—     2G0     - 

ressants  souvenirs  *.  Feu  Victor  Joly,  le  spirituel 
rédacteur  du  Sancho,  disait  un  jour  dans  son  jour- 
nal qu'à  dater  de  cette  année  mémorable,  la  capi- 
tale avait  fait  peau  neuve.  Rien  n'est  plus  vrai. 

Je  reviens  à  mon  sujet. 

Il  résulte  donc  de  ce  qui  précède,  et  ceci  est  un 
point  essentiel  à  noter,  qu'il  suffisait  de  posséder 
une  des  matricules  en  question  pour  être  seigneur 
à  Laeken  '\  (Je  demande  pardon  au  lecteur  de 
devoir  me  répéter  si  souvent.)  Ces  matricules 
se  transmettaient  par  héritage.  On  pouvait  aussi 
les  acquérir,  ce  qui  arriva  fréquemment  dans  le 
cours  des  siècles  ^  L'abbaye  de  Grand-Bigard, 
par  exemple,  vendit  la  sienne,  en  1585,  à  Josse 
Usselincx,  brasseur,  à  Bruxelles  \  Cet  industriel 

'  C'est  surtout  le  cas  pour  la  commune  de  Laeken. 

2  C'était,  du  reste,  la  règle  générale  pour  les  seigneuries  de  l'es- 
pèce. On  remarque  fréquemment,  lorsqu'on  consulte  d'anciens 
documents,  les  noms  de  personnes  qualifiées  de  seigneur  dans  telle 
ou  telle  terre,  ce  qui  n'avait  rien  que  de  légal.  Il  en  eût  été  auti-e- 
ment  si  on  avait  pris  le  titre  de  seigneur  de,  lequel  était  réservé  au 
possesseur  de  la  terre,  à  celui  qui  avait  la  justice  haute,  moyenne  et 
basse,  et  tout  ce  qui  en  dépendait. 

3  Lorsque  la  France  supprima  nos  institutions  séculaires  (1795), 
il  n'y  avait  plus  aucun  membre  de  l'heptarcliie  qui  descendît  des 
anciens  seigneurs,  sauf  les  d'Olmen  de  Poederlé,  héritiers  des  Van 
Achelen.  {Voy.  plus  loin.) 

*  Un  exemple  plus  ancien  que  j'ai  pu  constater,  est  la  vente,  à  la 
chambre  échevinale  d'Uccle,  le  29  novemljre  1564,  du  rôle  annexé  à 
un  manoir  a^ipelé  ''Tlioffte  Droetbeke,  et  qui  appartenait  à  la  famille 
des  Van  Zeebroeck.  Il  était  situé  aux  environs  du  pont  de  Laeken. 
{Voy.  plus  loin  la  liste  chronologique.  Il  y  est  fait  mention  d'une 
vente  remontant  à  1414.) 

Sanderus  semble  blâmer  l'aliénation  faite  par  les  religieuses  de 
Grand-Bigard.  «  Apparet  Reinbaldum,  militera  de  Laça,  ultimum 
et  improlem,  fundos,  feudaque  quiedam  sua,  cum  in  Bigardias  Ma- 
j  oris  sanctimoniales ,  tum  in  parochum,  elcëmosynse  intuitu  insigni- 


—    261     — 

devint  donc  in  illo  tempore  et  de  par  son  achat, 
un  des  membres  de  Tlieptarchie  lakoise.  Mais  ce 
titre  honorifique  ne  lui  enleva  point  la  tache  de 
roture.  Tout  marchand  enrichi  avait  la  faculté 
d'acquérir  des  fiefs,  fût-ce  même  d'miportantes 
seigneuries.  Néanmoins,  cette  possession  ne  lui 
conférait  en  aucune  façon  la  noblesse.  Elle  auto- 
risait seulement  à  ajouter  au  nom  de  famille  la 
qualification  de  seigneur  de...,  et  permettait,  à  la 
vérité,  de  jouir  des  prérogatives  qui  y  étaient  atta- 
chées ainsi  que  des  bénéfices  réels  de  la  seigneu- 
rie \  Cette  thèse  du  non-anoblissement  fut  con- 
stamment soutenue  par  les  hérauts  d'armes  dans 
les  procès  qu'ils  intentaient  à  ceux  qui  contreve- 
naient aux  ordonnances  héraldiques.  Elle  le  fut 

qne  beneficentiâ  transfudisse.  Quarum  illae,  ab  sevo  memoriam 
superante ,  toparchiam  iu  Laken  unam  cseteris  penè  lautiorem  in- 
demptse,  bellorum  calamitatibus  ac  necessitatis  gravi  telo  adactas, 
haud  ita  pridem  ,  id  est,  ab  annis  circiter  quadraginta  alienarunt. 
Oblitge  sive  incuriee  hodiè  per  quem  possederint,  cum  et  chartarum 
naufiagium.  bellico  turbine  istic  acciderit.  » 

*  Cela  est  si  vrai,  que  la  femme  d'un  roturier,  possesseur  d'une 
seigneurie,  pouvait  bien  se  qualifier  de  Dame  de....  [Vrouive  van....); 
mais  non  de  Madame  ou  Mevrouw  tout  court.  Cette  dernière  quali- 
fication était  réservée  aux  femmes  des  nobles.  Et  encore,  les  hérauts 
d'armes  la  disputaient  aux  simples  gentilshommes  (le  mari  était 
responsable  pour  l'épouse).  Pour  pouvoir  assumer  cette  qualifica- 
tion, il  fallait  que  le  mari  fût  chevalier,  au  moins.  Dans  leur  subti- 
lité ,  les  hérauts  d'armes  faisaient  une  distinction  entre  heer  et 
d'heer.  Selon  eux,  le  premier  mot  répondait  à  celui  de  messire  ;  le 
second  à  celui  de  sieur,  permis  aux  roturiers.  Et  l'on  vit  mainte 
fois  les  cours  de  justice  supérieures,  qui  seules  connaissaient  des 
procès  de  l'espèce,  donner  sur  ce  point  gain  de  cause  aux  hérauts. 
On  n'en  finirait  pas  s'il  fallait  entrer  dans  le  détail  de  toutes  les 
singularités  auxquelles  les  procès  héraldiques  donnèrent  lieu.  Comme 
étude  des  mœurs,  elles  ont  leur  mérite. 


—     2G2     — 

également  par  le  jurisconsulte  J.-B.  Christyn, 
Tauteur  du  célèbre  traité  Jurispi^udentia  hey^oica. 
Dans  le  même  ordre  d'idées,  un  roturier  qui  ache- 
tait une  terre  érigée  en  baronnie,  en  comté,  etc., 
devait  bien  se  garder  d'assumer  ces  titres,  je  veux 
dire  ceux  de  baron,  de  comte,  car  les  rois  d'armes 
l'eussent  immédiatement  poursuivi.  On  sait  que 
de  pareils  titres  s'éteignaient  avec  les  familles  en 
faveur  desquelles  ils  avaient  été  créés.  Mais  un 
acquéreur  d'extraction  noble  pouvait  les  faire 
revivre  en  obtenant  une  nouvelle  concession  du 
souverain,  ce  qui  n'était  pas  toujours  facile.  Il 
était  aussi  permis  de  les  relever  par  le  mariage 
avec  une  héritière  d'une  terre  de  l'espèce,  sauf 
toutefois  à  y  être  autorisé  par  lettres  patentes  du 
prince. 

Chaque  année,  au  mois  de  mai,  le  premier  lundi 
après  la  Saint-Servais  \  les  censitaires  étaient 
convoqués  dans  l'église  paroissiale,  au  son  de  la 
grosse  cloche,  pour  y  acquitter  le  montant  de 
leurs  cens  ^  La  convocation  se  faisait  à  huit  heures 
précises  du  matin.  Le  mayeur  du  village  en  don- 
nait préalablement  avis  aux  seigneurs  et  aux 
échevins,  et  tous  étaient  obligés  de  comparaître, 
à  part  la  faculté  qu'avaient  les  premiers  de  se 
faire  remplacer  \  La  première  séance  était  suivie 

•  D'après  le  livre  censal  de  Louis  Van  Hamme.  Sanderus  varie 
Bur  ce  point.  [Voy.  à  la  note  suivante.) 

'  Dans  les  derniers  temps  tout  se  payait  en  espèces,  après  taxation 
préalable  par  les  échevins. 

'  «  Ne  vilescant  »  fait  remarquer  Sanderus,  qui  donne  sur  cette 
coutume  les  explications  que  voici  : 

«  Adhcec  quotannis,  mense  maio,  die  lunse  ferias  S.  Servatij  sub- 


—    263    — 

de  deux  autres,  à  quatorze  jours  d'intervalle  entre 
chacune  * .  Le  censitaire  en  retard  ou  en  défaut 
payait  une  amende  qui  consistait  d'abord  en  un 
certain  nombre  de  gâteaux,  puis  en  une  légère 
somme.  On  finissait  par  saisir  Timmeuble  du  cen- 
sitaire qui  négligeait  entièrement  d'acquitter  ce 
qu'il  devait.  La  saisie  se  faisait  en  vertu  d'un  ju- 
gement des  éclievins  ".  La  dernière  séance  étant 
levée,  les  seigneurs,  à  tour  de  rôle  et  par  année, 
offraient  un  repas  aux  éclievins.  Aucun  d'eux  ne 
pouvait  se  dispenser  de  cette  petite  largesse. 

Originairement,  les  seigneurs  avaient  chacun 
un  mayeur  par  lequel  ils  se  faisaient  représenter 
quand  ils  le  jugeaient  convenable.  Ainsi  le  mayeur 
intervenait  aux  ventes  des  fonds  sur  lesquels  son 
maître  avait  des  cens.  Selon  la  formule  ordinaire, 
le  vendeur  et  l'acquéreur  comparaissaient  devant 


sequente,  pro  colligendis  toparchorum  redditibus,  nummis,  pullis, 
sestimando  liordeo,  etc.,  coëunt,  insigni  vel  potiùs  solemni  lioc  usi 
prEeludio.  A  prtetore  admoniti,  Domini  et  scabini,  ter  quidem  statis 
diebus  (sunt  hi  ferise  secundse  S.  Servatij  festo  succedentes)  in  eccle- 
siam  Lacensem  manè  conveniunt  (toparchis,  ne  vilescant,  alios  vice 
suâ  delegare  fas  est)  ;  atqiie  liorâ  preecisè  octavà,  manum  campanse 
majoris  funibus  admoventes,  pulsatione  ad  vectigalia  luenda  signum 
edunt,  accensorum  veteri  munere,  qui,  ut  Varroni  placet,  quôd  ad 
censura  soliti  essent  populum  vocare ,  nomen  babuerunt.  Quisquis 
absens,  vel  tardé  accesserit,  olim  placentulas,  nunc  pecuniolam  ero- 
gare  cogitur  :  tuncque  pro  opella  pra^stita,  et  triduo  in  census  locato 
congerendos,  dominorum  aliquis,  ordine  suo,  convivium  instruit, 
hoc  onere  ad  singulos  septenniis  quibusque  récurrente.  » 

'  Ou  plutôt  à  quatorze  nuits,  selon  la  manière  de  compter  des  an- 
ciens Germains. 

*  Voy.  à  cet  égard  les  dispositions  de  la  coutume,  art.  8.  (Ap- 
pendice.) Un  de  ces  jugements  se  trouve  aux  Annexes,  n"  XII.  Il  est 
publié  à  titre  de  renseignement. 


—     264    — 

les  éclievins,  qui  transmettaient  symboliquement 
le  fonds  entre  les  mains  du  mayeur  au  profit  de 
l'acquéreur  *. 

Il  y  avait  sept  éclievins  à  Laeken.  Ils  étaient 
élus  par  les  seigneurs  ou  par  leurs  mayeurs.  Un 
des  seigneurs  jouissait  d'un  double  suffrage  et  il 
interjDellait  les  éclievins  afin  qu'ils  prêtassent  le 
serment  auquel  ils  étaient  tenus. 

Voici  la  formule  de  ce  serment,  telle  qu'elle 
figure  en  tête  du  registre  aux  actes  scabinaux 
commençant  à  rannée  1491.  Je  la  traduis  littéra- 
lement du  flamand  et  aussi  fidèlement  que  pos- 
sible. 

«  Je  promets  fermement  et  je  jure  en  bon 
chrétien  que,  comme  échevin  de  Notre-Dame- 
de  Laeken,  lez-Bruxelles,  charge  à  laquelle  je 
viens  d'être  nommé,  j'aiderai  à  maintenir  le 
droit  de  Dieu  et  de  la  Sainte-Église,  celui  de 
notre  clément  seigneur  le  duc  de  Brabant,  celui 
des  seigneurs  fonciers  de  Laeken,  celui  de  la 
veuve  et  de  l'orphelin,  du  pauvre  et  du  riche. 
Et  je  ferai  à  chacun,  les  parties  entendues,  droit 
et  justice,  selon  mon  jugement.  Je  témoignerai 
en  faveur  de  la  vérité  et  je  garderai  le  secret 
sur  ce  qui  doit  rester  secret.  Je  ferai  tout  ce 
qu'un  échevin  des  seigneurs  fonciers  de  Notre- 
Dame  de  Laeken  est  tenu  de  faire  selon  Dieu  et 
la  justice,  sans  épargner  personne,  ni  noble,  ni 
non  noble,  ni  grand,  ni  petit,  ni  riche,  ni 
pauvre,  en  aucune  manière.  Ainsi  m'aident 
Dieu  et  tous  ses  saints.  « 

'   Voy.,  comme  exemple,  un  acte  aux  Annexes,  n"  XI. 


—    2C5    — 

On  ne  dirait  pas  mieux  dans  notre  siècle  de 
lumières. 

Les  échevins  connaissaient  des  causes  civiles 
dans  l'étendue  de  leur  ressort  ' ,  à  l'exception  de 
celles  qui,  par  leur  nature,  étaient  de  la  compé- 
tence du  conseil  de  Brabant  ou  d'autres  tribunaux. 
Les  causes  étant  instruites,  ils  soumettaient  les 
dossiers  aux  échevins  de  la  chambre  d'Uccle,  la 
plupart  licenciés  en  droit,  et  qui  leur  dictaient  le 
dispositif  des  sentences  à  prononcer  ^  Les  causes 
criminelles  et  correctionnelles  étaient  poursuivies 
par  Famman  de  Bruxelles  devant  le  tribunal 
échevinal  de  cette  ville,  dont  Laeken  et  les  autres 
faubourgs  formaient,  sous  certains  rapports,  une 
dépendance  '\ 

Les  échevins  avaient  un  clerc  ou  greffier,  nommé 
anciennement  par  un  des  seigneurs.  On  remarque, 
par  exemple,  que  le  9  août  1-493,  Simon  Vander 
Bauwetten  obtint  cet  emploi  de  Henri  de  Witthem, 
seigneur  de  Beersel,  chevalier  de  la  Toison  d'or, 
conseiller  et  chambellan  de  Philippe  le  Beau,  entre 


'  Us  tinrent,  constamment  leurs  audiences  (plaids;  dans  l'un  ou 
l'autre  estaminet.  Ce  n'était  pas  seulement  à  Laeken  que  cet  usage 
existait;  il  était  répandu  dans  les  campagnes. 

^  C'est  ce  qu'on  a[ipelait  aller  à  chef  de  sens  [hooftleerhig] ,  en 
d'autres  termes,  recourir  au  savoir  du  juge  supérieur.  Les  éche\nns 
de  Laeken  se  contentaient  souvent  de  jirendre  l'avis  de  quelque  bon 
avocat  avant  de  formuler  leurs  décisions.  Parfois  le  conseil  de  Bra- 
Lant  indiquait  les  jurisconsultes  à  consulter. 

'  En  lool,  le  duc  Jean  III  réunit  le  village  à  la  ville;  ce  qui  fut 
confirmé,  le  21  mars  1390-1391,  par  sa  fille,  la  duchesse  Jeanne. 
M.  Wauters  a  pidilié  en  note  le  texte  de  cette  charte  de  confirma- 
tion. {Ibid.,  t.  II,  p.  365.) 

18 


—    266    — 

les  mains  duquel  il  prêta  serment  '.  Les  autres 
seigneurs  ratifièrent  cette  nomination. 

Notons,  en  passant,  que  celui  dont  je  viens  de 
parler ,  le  sire  de  Beersel ,  alors  le  principal 
membre  de  l'heptarcliie ,  j  possédait  de  grands 
biens  provenus  de  la  famille  patricienne  bruxelloise 
des  Clutinck,  En  1375,  Marie  de  Stalle,  dame  de 
Beersel,  les  apporta  en  mariage  à  Jean  de  Wit- 
tliem,  seigneur  d"Yssclie,  sénéclial  de  Brabant, 
bisaïeul  de  Henri.  Un  vieux  château  féodal  ajoutait 
à  l'importance  de  ces  biens.  Connu  sous  le  nom  de 
H  Groot  hof,  il  était  assis  au  pied  du  Dommelberg  ^, 
aujourd'hui  route  provinciale  qui  longe  le  parc 
et  passe  devant  le  palais  royal.  «  Il  formait,  dit 
M.  Wauters,  un  carré  de  bâtiments  entourés  d'eau, 
quatre  tourelles  de  forme  ronde  et  une  cinquième 
un  peu  plus  haute  et  carrée  lui  donnaient  l'appa- 
rence dune  forteresse.  »  Sanderus  nous  en  a 
transmis  une  vue.  Elle  est  de  J.  Troyen,  graveur 
assez  médiocre  ^  Plus  de  cent  bonniers  de  terre 
dépendaient  du  château.  Les  habitants  de  ce 
petit  domaine  étaient  non  seulement  assujettis  au 
payement  de  cens,  mais  ils  devaient,  au  décès  des 
chefs  de  famille,  le  droit  de  morte-main  ou  de 
meilleur  catel  \  En  1635,  le  château  faillit  être 


*  En  1518,  Charles-Quiut,  alors  roi  de  Castille,  conféra  à  Simon 
Van  der  Bauwetten  la  place  de  greffier  du  tribunal  de  la  vénerie  du 
duché  de  Brabant  (Placards  de  Brabant,  t.  111,  p.  504). 

2  Ou  Bongelberg,  aujourd'hui  Bonderberg ,  par  corruption.  Il  ne 
tardera  pas  à  être  supprimé  et  incorporé  au  parc  royal. 

^  Voir  la  reproduction  ci-contre  par  le  procédé  photolithogra- 
phique. 

*  Ce  droit  est  renseigné  dans  les  comptes  de  recettes  et  de  dé- 


ITORIUM    OENIEROSI,  PRANOBlLlSCiL'F.  VrPJ 

D.  PETRI  VAN  ACHLEN 

TOP/sRCH/ï.    IN    LAÇA.  DE   OR/J^'D  1-*ANII.    tTC 
Pf(/Ç,NOBlLlS(illE,  D  HEUENA  DE  WALINEZ 
r.ONJUGlS     EjDS 


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Le  château  des  sires  de  Beersel.àLaeken 


—    2G7     - 

saccagé  par  des  troupes  françaises  et  hollandaises 
campées  à  Laeken.  Il  fut  préservé  du  pillage  par 
l'énergique  intervention  du  receveur  de  la  dame 
Van  Achelen,  à  qui  il  appartenait  alors  et  qui  s'était 
réfugiée  à  Gand.  Jean  Van  Humbeek,  ainsi  se 
nommait  le  receveur,  courut  à  plusieurs  reprises  à 
Bruxelles  pour  obtenir  des  lettres  de  sauvegarde. 
Il  prit  avec  lui  un  page  de  la  cour  qui  avait  le 
mot  d'ordre  pour  passer  à  travers  les  lignes  enne- 
mies. Bref,  il  raconte  lui-même  que  ce  fut  au  péril 
de  sa  vie  qu'il  sauva  le  château  de  sa  maîtresse. 
L'existence  de  l'édifice  devait  encore  se  prolonger 
pendant  un  siècle  et  demi.  En  1781,  il  était  la 
propriété  de  M.  Joseph-Antoine  de  Wautier, 
seigneur  de  Beren,  et  de  dame  Thérèse-Sophie 
Veranneman,  son  épouse*,  lorsque  l'archiduchesse 

penses  de  la  clame  Van  Achelen ,  propriétaire  du  cliâteau ,  pour  les 
années  1644  et  suivantes.  L'entête  du  chapitre  qui  le  concei-ne , 
mérite,  me  semble-t-il,  d'être  reproduit  :  »  Anderen  ontfanck  van  de 
partyen  oft  saten  van  de  goeden  van  Onser-Liever-Vrouv^^en-Lakeu 
competerende  nievrouwe  Van  Achelen ,  over  welcke  partyen  die 
proprietarissen  naer  de  doot  van  den  sterffman  schuldich  syn  te 
gevene  de  voors.  vrouwe  dat  beste  qtœc  dat  zy  hebben  naest  den 
besten,  ende  en  hel)ben  zy  egeen  quec,  hun  beste  bedde  oft  cleet,  oft 
vyffschellingen  Lovens,  indyen  daer  egeen  quec,  noch  bedde  oft  cleet 
en  is.   » 

Par  qiiec  il  faut  entendre  tête  de  bétail.  Les  personnes  qui  de- 
vaient acquitter  ce  droit  odieux  transigeaient  pour  une  somme  d'ar- 
gent avec  le  receveur  chargé  de  le  toucher.  Une  sentence  d'une  cour 
censale  à  Laeken  (elle  n'est  pas  autrement  désignée)  rendue  par 
défaut,  le  3  avril  1756,  autorise  le  mayeur  à  saisir  un  bien  (sate)  dont 
le  propriétaire  était  redevable  du  droit  dont  il  s'agit  ici.  Voilà  qui 
prouve  que  cette  servitude  était  encore  en  pleine  vigueur  alors . 

•  Ils  l'avaient  acheté,  le  20  mars  1764,  à  Pierre-Jacques  Meulen- 
bergh,  qui  en  fit  l'acquisition  en  vente  publique,  le  7  juillet  1757, 
de  Philippe-Eugène-Joseph  d'Olmen,  baron  de  Poederlé.  Celui-ci 
l'avait  hérité.  {Voy.  ijIus  loin.) 


—     2GS    — 

Marie- Christine  et  son  époux,  le  duc  Albert  de 
Saxe-Tessclien,  gouverneurs  généraux  des  Pays- 
Bas,  en  firent  l'acquisition  pour  la  création  du 
parc  du  palais  de  Laeken  qu'ils  faisaient  con- 
struire. Le  château  et  toutes  les  constructions 
qui  en  dépendaient  furent  alors  rasés. 

n  résulte  d'une  note  écrite  au  commencement 
du  registre  précité  de  1491,  que  six  des  seigneurs 
se  servaient  d'un  sceau  commun  pour  sceller  les 
actes  ou  œuvres  de  loi  qu'on  passait  devant  les 
échevins.  Le  septième,  Jacques  Hujoel  \  avait  un 
sceau  particulier  et  une  cour  censale  distincte  du 
banc  échevinal.  C'était  devant  elle  que  les  parties 
contractantes  comparaissaient  p)Our  la  vente  de 
biens  grevés  de  cens  dus  à  ce  seigneur  '\ 


*■  Il  était  issu  d'une  ancienne  famille  de  robe,  mais  noble. 

'  Voici  le  texte  de  la  note  :  «  Dese  sesse  erfheei'en  erven  ende 
gueden  met  scepenen ,  onder  eenen  gemeynen  segel.  »  Parlant 
d'Hujoel  :  «  Dese  guedt  met  laten.  »  Ce  qui  veut  dire  que  les  pre- 
miers adbéritaient  devant  les  échevins,  et  le  septième  devant  des 
hommes  censaux.  «  La  justice  basse  avait  pour  fonctions  principales 
l'accomplissement  des  œuvres  de  loi  ou  formalités  du  nantissement 
requises  jjour  opérer  le  transport  des  droits  réels,  ce  qui  lui  avait 
fait  donner  le  nom  de  justice  foncière.  La  magistrature  qui  n'exerçait 
que  les  prérogatives  du  seigneur  bas-justicier  se  nommait,  suivant 
les  lieux,  cour  basse,  cour  foncière,  cour  censale,  hommes  cottiers , 
quelquefois,  à  Liège,  cour  des  tenants  ou  co7<r  de  masicire  ;  daus  les 
coutumes  flamandes,  laethof,  lactbanch,  laeten  ou  lathe>i  :  son  pou- 
voir allait  ordinairement  jusqu'à  saisir,  pour  défaut  de  payement, 
les  biens  chargés  de  rentes  dues  au  seigneur;  mais  il  était  rare 
qu'elle  possédât  une  juridiction  contentieuse ,  toujours  restreinte 
d'ailleurs  dans  des  limites  fort  étroites.  »  (Ancien  droit  Belgique  ou 
précis  analytique  des  lois  et  coutumes  observées  en  Belgique  avant  le 
code  civil,  par  feu  M.  le  premier  président  De  Facqz,  t.  I,  p.  42.) 

«  Quant  à  la  censive  (cheynsgoed),  que  l'on  appelait  aussi  héré- 
dité [erfelyck  goed),  elle  n'était  ordinairement  grevée  que  d'un  cens, 


260 


Le  seigneur  foncier  avait  une  place  réservée  à 
l'église  paroissiale  et  aux  processions.  Il  jouissait 


qui  se  payait  (loul)le  à  la  mort  de  l'occupant.  Quand  un  bien  de 
cette  nature  passait  à  une  maison  religieuse,  tombait  par  conséquent 
en  mainmorte,  on  obligeait  l'acquéreur  à  constituer  un  mandataii'e, 
appelé  tenancier  mourant  [sterffelyck  late,  niortalis  mansionnarius 
sire  hospes) ,  à  la  mort  duquel  on  jîrélevait  le  droit  de  mutation , 
comme  lorsque  le  bien  aj^parteuait  à  des  laïques.  Les  censitaires 
d'une  seigneurie ,  à  moins  que  celle-ci  n'eût  un  tribunal  supérieur 
des  éclievins,  étaient  seuls  compétents  jjour  décider  les  contestations 
qui  s'élevaient  au  sujet  des  biens  tenus  à  cens.  Ils  constituaient 
alors,  sous  la  présidence  d'un  maire  [villicus),  et  se  qualifiaient  eux- 
mêmes  de  tenanciers  héréditaires  ou  jurés  {erffelycke  ou  gezworene 
laeten).  »  (A.  Wauteks,  loc.  cit.,  Introduction.) 

Disons  à  ce  propos  qu'eu  1633 ,  Marguerite  Bogaerts ,  veuve  du 
conseiller  au  conseil  privé  Folcart  Van  Acbelen ,  intenta  un  procès 
devant  les  échevins  de  Laeken  à  Michel  de  Muylder,  chapelain  de  la 
chaf)elleuie  de  Notre-Dame,  fondée  dans  cette  commune,  pour  le 
contraindre  à  constituer  un  tenancier  mourant  {sterffelycken  laeth). 
Le  chapeilain  avait  une  pièce  de  terre  relevant  de  la  cour  censale  de 
cette  dame.  Celle-ci  prétendait  qu'au  décès  de  ce  tenancier,  qui  alors 
devait  être  remplacé  par  un  autre,  elle  avait  droit  à  un  demi  pond- 
penninck,  soit  le  quarantième  de  la  valeur  de  la  terre.  Le  défendeui- 
soutenait  que  les  ecclésiastiques  n'étaient  pas  soumis  à  cette  règle. 
Selon  lui,  la  demanderesse  cherchait  à  introduire  un  usage  nouveau. 
La  dame  Van  Achelen  lui  opposa  deux  jugements  :  l'un  de  la  cour 
censale  du  chapitre  de  Saint-Pierre,  à  Anderlecht,  rendu  en  faveur 
du  receveur  de  ce  chapitre  contre  la  fondation  de  Saint-Éloy,  à 
Bruxelles  (15  mars  lG21:j;  l'autre  de  la  cour  censale  d'Alexandre  de 
Longin,  seigneur  de  Grand-Bigard ,  lui-même  en  cause  contre  les 
maml)0urs  et  proviseurs  de  la  Maison-Dieu  de  Brusseghem,  con- 
damnés. La  partialité  des  juges  ne  pouvait  guère  être  à  l'abri  des 
soupçons  dans  ces  deux  cas. 

Pour  les  fiefs  l'usage  du  sterftnan  existait  sans  contestation.  Par 
exemple,  si  une  abbaye  tenait  un  fief  de  la  souveraine  cour  féodale 
de  Brabant,  elle  désignait  un  religieux,  à  la  mort  duquel  elle  payait 
les  droits  de  relief.  Chaque  fois  un  autre  religieux  remplaçait  le 
défunt. 

Pocquet  de  Livonière,  dont  j'ai  cité  l'ouvrage,  s'explique  claire- 
ment au  sujet  des  cens. 

0  Le  cens ,  dit-il ,  emporte  et  dénote  la  seigneurie  directe  ;  c'est 


—    270    — 

du  droit  de  chasse  et  de  pêche  '.  Quant  aux  avan- 
tages pécuniaires,  il  touchait  sur  le  montant  de 
toute  vente  d'immeubles  portés  à  son  rôle  et  sur 
le  capital  des  rentes  constituées,  soit  le  vingtième 
denier,  soit  un  tantième  par  lix^re,  nommé  en  ûâ- 
rudindi  pondgeld  Qt  pondpenninck ,  en  français  droit 
de  congé  ou  de  lods  et  ventes.  Il  était  à  la  fois  lucratif 
pour  le  seigneur  et  fort  onéreux  pour  l'acquéreur. 
Qu'on  me  permette  d'en  citer  un  seul  exemple  : 
en  1727,  M.  J.-D.  de  Villegas  acheta  un  moulin, 
bien  censal,  pour  la  somme  de  8500  florins.  Il  paya 
celle  de  338  florins  pour  le  droit  de  congé. 

A  la  fin  du  XV*"  siècle  et  au  commencement  du 
siècle  suivant,  on  ne  scellait  pas  les  grosses  des 
actes  au  fur  et  à  mesure  qu'elles  étaient  écrites; 


une  reconnoissance  de  l'obéissance  et  de  la  sujétion  du  censitaire  et 
de  la  supériorité  du  seigneur.  Xotre  coutume  d'Anjou,  en  l'art.  179, 
et  celle  du  Maine,  en  l'art.  197,  disent  en  termes  formels  que  le  cens 
dénote  seigneurie  de  fief. 

»  Dans  la  coutume  de  Paris ,  il  y  a  deux  sortes  de  seigneuries  : 
l'une  féodale,  l'autre  foncière,  censière  ou  censive,  et  deux  sortes  de 
seigneurs.  Les  uns  sont  seigneurs  féodaux ,  qui  ont  sous  eux  des 
vassaux  relevant  à  foi  et  hommage  ;  les  autres  sont  seigneurs  cen- 
siers,  qui  ont  sous  eux  les  sujets  ou  tenanciers  qui  en  relèvent  cen- 
sivement.  C'est  jjourquoi  le  premier  titre  de  la  coutume  de  Paris  est 
intitulé  Des  fiefs,  c'est-à-dire  des  seigneuries  féodales,  et  le  second 
Des  censives,  c'est-à-dire  des  seigneuries  censières. 

»  Dans  nos  coutumes  d'Anjou  et  du  Maine,  nous  ne  reconnoissons 
qu'une  sorte  de  seigneurie,  qui  est  la  féodale  ;  mais  il  j  a  deux  sortes 
de  mouvance  ou  de  manières  de  relever  les  terres  et  domaines  des 
seigneurs,  car  d'un  même  seigneur,  les  uns  relèvent  à  foi  et  hom- 
mage, les  autres  relèvent  censivement.  «  (Liv.  Yl,  chap.  1,  Des 
censives.) 

*  «  Hi  (les  seigneurs)  ut  paucis  omnia  dicam,  venatus  sub  cornu 
proprio,  et  aucupii  piscatûsque  jus  commune  obtiuent.  »  (Sande- 
RUS,  loc.  cit.) 


—    271    — 

on  attendait  qu'il  y  en  eût  un  certain  nombre. 
Cette  opération,  soumise  à  une  taxe  payable  par 
les  intéressés,  était  suivie  d'un  repas  que  le  greffier 
donnait  aux  échevins.  J'ajouterai,  à  propos  de  ces 
agapes,  qu'outre  le  repas  dû  après  la  recette  an- 
nuelle des  cens,  au  mois  de  mai,  les  seigneurs  en 
devaient  un  second  le  jour  des  Rois,  alors  qu'on 
acquittait  les  cens  échus  à  la  Xoël.  C'était  là  une 
double  rémunération  pour  les  éclievins,  chargés 
de  taxer  les  cens  en  espèces,  notamment  l'orge  et 
l'avoine.  Aussi  pouvaient-ils  refuser  leur  service  à 
celui  des  seigneurs  qui  ne  se  serait  X5as  conformé 
à  cet  usage.  En  retour,  on  y  gratifiait  les  derniers 
de  gâteaux  dits  pleckoecken.  Louis  Yan  Hamme, 
que  le  lecteur  connaît  déjà,  déclare  au  prologue 
de  son  livre  censal  qu'il  lui  revient  quatre  de  ces 
gâteaux  et  une  couple  à  ses  collègues.  Au  jour 
fixé  pour  le  payement  des  redevances,  poursuit-il, 
les  seigneurs  ou  leurs  mayeurs  sont  tenus  de  se 
trouver  à  huit  heures  du  matin,  au  plus  tard, 
à  l'église,  pour  y  fan^e  sonner  la  cloche,  à  peine 
d'une  amende  consistant  en  une  douzaine  des 
mêmes  gâteaux. 

On  conviendra  que  des  coutumes  aussi  singuliè- 
res accusent  des  mœurs  bien  primitives  et  que  la 
bonne  chère  tint  une  place  importante  dans  le 
petit  ménage  de  notre  heptarchie.  Ils  banquetaient 
volontiers  ces  gentilshommes  campagnards,  et  tel 
grand  seigneur,  comme  le  sire  de  Beersel,  qui 
joua  un  rôle  remarquable  dans  les  troubles  qui 
éclatèrent  sous  la  régence  de  Maximilien,  ne  dé- 
daignait pas  de  prendre  place  à  côté  de  convives 
d'un  rang  infiniment  moindre  que  le  sien. 


272     

J'aurais  dû  dire  plus  tôt  que  le  sceau  communal 
était  déposé  dans  un  coffre  dont  deux  échevins 
avaient  chacun  une  clef.  Le  sceau  ayant  été  égaré 
au  décès  du  greffier  Josse  Der  Weduwe,  en  1556,  on 
en  fit  confectionner  un  nouveau.  Il  portait  pour 
légende  :  Segel  van  den  scepenen  der  erjlieeren  in 
Laken  Onser  Lieve  Vrouive*.  Le  jour  qu'il  fut  livré 
le  greffier  le  montra  au  public  assemblé  sur  le  ci- 
metière, en  présence  des  seigneurs  ou  de  leurs  dé- 
légués. Il  en  prit  des  empreintes  et  les  fit  circuler. 
Le  procès-verbal  de  cette  formalité  constate  que 
François  Van  Zeebroeck,  un  des  seigneurs,  saisit 
cette  occasion  pour  remettre  au  greffier  une  pro- 
testation par  écrit.  Sans  désigner  personne,  si  ce 
n'est  indirectement  Antoine  de  Witthem,  seigneur 
d'Yssclie,  il  contesta  à  tels  de  ses  collègues  leur 
qualité  de  seigneur,  faute  d'être  pourvus  de  titres 
suffisants.  Il  fit  à  cet  égard  ses'  réserves,  qui  por- 
tèrent également  sur  le  sceau  qu'on  venait  de  pro- 
duire à  rassemblée. 

Quoique  sensiblement  modifiée  dans  son  organi- 
sation primitive,  riieptarcliie  de  Laeken  subsista 
jusqu'à  la  chute  des  institutions  du  pays,  sous  la 
république  française.  Un  acte  du  27  décembre 
1794  mentionne  encore,  avec  la  qualification  de 
dame  foncière,  la  demoiselle  d'Olmen  de  Poederlé, 


*  M.  A.  Wauters  a  inséré  dans  son  ouvrage  le  dessin  du  sceau 
de  Laeken,  mais  d'après  une  empreinte  bien  plus  ancienne.  «  Au 
XIV*  siècle,  dit-il,  les  échevins  de  Laeken  commencèrent  à  se 
qualifier  à'échevins  des  seigneurs  censaux  de  Laeken  [scepenen  der 
erfheeren  van  Laken,  J3G1,  1432).  On  voyait  dans  leur  sceau,  la 
Vierge  avec  l'enfant  Jésus  et  la  légende  de  :  s.  beat^  mari^  de 

LAKEN  (t.  II,  p.  368). 


—    273 


et  les  éclievins  s'intitulent,  comme  au  moyen-âge, 
à'échevins  des  sept  seig^ieurs  fonciers  clans  un  acte 
du  18  juin  suivant,  à  la  veille,  conséquemment, 
de  la  nouvelle  organisation  municipale ,  dont  les 
Français  dotèrent  nos  provinces  qu'ils  venaient  de 
conquérir. 

Je  ferai  suivre  cette  notice  de  la  liste  chronolo- 
gique des  seigneurs  de  Laeken,  telle  que  j'ai  pu  la 
former  à  Taide  des  actes  éclievinaux.  Elle  présente 
de  grandes  lacunes,  parce  que  les  greffiers,  au  lieu 
de  citer  régulièrement  les  seigneurs  en  vie,  se 
contentaient  de  mentionner  leurs  prédécesseurs, 
décédés  parfois  depuis  un  grand  nombre  d'années. 
Il  arrive  très-fréquemment  que  le  nom  de  familles 
depuis  longtemps  éteintes  et  oubliées  leur  revient 
sous  la  plume  par  pure  tradition.  Pour  qu'un  acte 
fût  en  règle,  il  importait  de  désigner  clairement  le 
particulier  à  qui  Tacquéreur  devait  payer  les  cens 
dont  le  fonds  aliéné  était  chargé.  Mais  «  au  bon 
vieux  temps  »  on  n'y  regardait  pas  de  si  près. 

En  tête  du  registre  commençant  à  Tannée  1491 , 
figurent  les  noms  suivants  : 

Henri  de  Witthem ,  seigneur  de  Beersel ,  che- 
valier de  la  Toison  d'or,  conseiller  et  chambellan 
de  l'archiduc  d'Autriche. 

L'abbaye  de  Grand  Bigard. 

Guillaume  Van  Blitterswyck  ^ . 

'  La  famille  Van  Blitterswyck  est  une  des  plus  anciennes  que 
l'on  trouve  comme  ayant  fait  partie  de  l'heptarcliie.  Le  31  août  1414, 
Guillaume  Van  Blitterswyck,  fils  d'Henri,  acquit  le  livre  censal  de 
Rutger  Boote,  échevin  de  Bruxelles,  lequel  Boote  avait  été  adopté 


—    274    — 

Maître  Éoide  Van  Zeebroeck  ^ 

Roland  de  Weert  -. 

Guillaume  Van  Cattenbroeck  '. 

Jacques  Hujoel,  secrétaire  et  greffier  du  conseil 
de  Brabant. 

1502.  Jean  Van  Cattenbroeck,  curé  [erfpro- 
chiaen)  de  Laeken,  non  cité  en  1491,  préside  en 
personne,  le  13  avril  de  cette  année,  à  une  vente 
passée  devant  les  quatre  juges-tenanciers  jurés 
de  sa  cour  censale  :  Jean  de  Munteneer,  prêtre, 
Jean  Haeckman,  Henri  Van  Ginderacliter  dit 
Boschverken  *  et  Pierre  de  Loose.  (Il  me  paraît 
inutile  de  mentionner  les  noms  des  successeurs  du 
curé  Van  Cattenbroeck.) 

1506.  Philippe  Van  Zeebroeck,  avocat  au  con- 
seil de  Brabant. 


par  Henri  de  Meerbeek,  dit  Van  der  Zenne.  Guillaume  Van  Blitters- 
wyck  avait  épousé  Marie  de  Coudenberg,  dit  T'Serhuygs,  du  lignage 
de  ce  nom. 

'  Il  descendait  d'une  famille  seigneuriale  qui  est  mentionnée  an- 
térieurement à  celle  de  Van  Blitterswyck.  On  a  vu  plus  haut  qu'elle 
possédait  le  manoir  de  Droetbeek.  Or  celui-ci  échut,  par  un  acte  de 
partage  du  23  juillet  1407,  à  Catherine  de  Leeuw,  éx^ouse  de  Jean 
Van  Zeebroeck  (A.  Wauters,  loc.  cit.,  t.  II,  p.  372). 

2  Roland  de  "Weert  faisait  partie  du  lignage  de  Sweerts,  à 
Bruxelles.  Il  était  propriétaire  du  manoir  de  Coensborch  et  de  ses 
dépendances.  M.  Wauters  présume  que  cette  demeure  fut  bâtie  par 
Jean  Van  Coensborch,  époux  de  Catherine  de  Weert.  De  là  le  nom 
qu'elle  portait. 

^  Cette  famille  possédait  la  maison  seigneuriale  {]ieerlyck  lmy&)  de 
Couwegom  et  une  dîme  qui  en  dépendait.  Elle  était  située,  croyons- 
nous,  au  hameau  dit  Leest. 

*  Il  était  propriétaire  d'un  petit  château  qui  conserva  jusque  dans 
ces  derniers  temps  le  nom  de  Boschverken,  quoiqu'il  eût  changé  bien 
de  fois  de  mains.  Il  était  situé  dans  le  village,  sur  la  route  provin- 
ciale de  Bruxelles  à  Termonde. 


—    275    — 

1510.  Les  héritiers  de  Guillaume  Van  Blit- 
terswj^ck. 

1516.  Joncher  *  Philippe  de  Witthem,  dit  de 
Beersel. 

151  G.  Nicolas  Van  Cattenbroeck. 

1517.  Georges  de  Witthem,  dit  de  Beersel, 
seigneur  d'Yssche ,  fils  du  précédent. 

1525.  Guillaume  Van  Blitterswyck ,  fils  de 
Guillamne. 

1526.  Roland  de  Weert,  fils  de  Roland. 

1526.  Henri  Hujoel,  secrétaire  et  greffier  du 
conseil  de  Brabant. 

1526.  Barthélémi  Van  Cattenbroeck. 

1535.  Antoine  de  Witthem,  seigneur  d'Yssche  , 
fils  de  Georges,  cité  plus  haut  ^ 

1544.  François  Van  Zeebroeck,  chanoine  de 
l'église  de  Saint-Paul,  à  Liège,  fils  de  Philippe. 

1552.  Roland  de  Weert,  fils  de  Pierre. 

1553.  Madeleine  De  Deken ,  veuve  de  Barthé- 
lémi Van  Cattenbroeck  ^ 

Par  acte  du  8  juillet  1558,  passé  devant  les 
échevins  de  Bruxelles ,  les  enfants  de  Mathieu 
Hujoel,    sécrétante   du   conseil   de   Brabant^   et 

'  En  français  damoiseau  et  non  messire,  comme  on  pourrait  le 
croire. 

*  Après  lui,  les  de  Witthem  disparaissent  de  riieptarchie.  Ils  furent 
remplacés,  croyons-nous,  par  les  Hujoel,  qui  en  faisaient  déjà  partie. 

^  Elle  était  en  possession  du  livre  censal  de  Couwegom  et  du  ma- 
noir du  même  nom. 

*  Ces  enfants  étaient  Luc  Hujoel,  avocat  au  conseil  de  Brabant, 
Gertrude,  veuve  de  Mathieu  Strick,  secrétaire  du  conseil  privé, 
Amelberge,  épouse  de  Jean  Blyleven,  greffier  du  conseil  de  Bra- 
bant, et  Marie,  épouse  de  Jacques  Van  Dongelberghe.  La  famille 
des  Hujoel,  qui  appartenait  à  la  petite  noblesse,  était  établie  d'an- 


—    276    — 

seigneur  à  Laeken,  vendirent  leur  Kvre  censal, 
ainsi  que  le  château  f  Groothof,  à  François  Doel- 
man,  greffier  du  conseil  des  finances,  et  à  Ger- 
trude  Van  Hertsbeke  ,  conjoints. 

1559.  François  Doelman,  greffier  du  conseil 
des  finances.  Il  était  seigneur  à  double  titre,  ayant 
succédé  aux  de  Witthem  et  aux  Hujoel. 

1559.  François  Van  Zeebroeck,  fils  de  Philippe. 

1565.  Gérard  Casens,  avocat  au  conseil  de 
Brabant  ^ . 

1567.  Louis  Van  Hamme ,  jeune,  en  qualité 
d'époux  de  Gertrude  Van  Hertsbeke,  veuve  du 
greffier  François  Doelman ,  cité  plus  haut  '^ 

cienne  date  à  Laeken.  Nous  avons  trouvé  une  sentence  du  conseil 
de  Brahant,  du  14  mai  1487,  en  faveur  de  Jacques  Hujoel ,  cité  en 
tête  de  cette  liste  chronologique.  On  y  voit  qu'il  était  propriétaire 
d'un  château. 

I  II  possédait  le  livre  censal  dépendant  du  château  de  Droetbeek. 
Il  l'acheta  le  29  novemljre  1564  à  la  chambre  échevinale  d'Uccle,  d'un 
Van  Zeebroeck,  si  je  ne  me  trompe. 

^  Elle  fut  inhumée  dans  le  chœur  de  l'église  de  Laeken.  Son 
épithaphe,  depuis  longtemps  détruite,  est  imprimée  dans  l'ouvrage 
du  baron  Le  Roy.  Elle  était  ainsi  conçue  : 

Hier  light  begraeven  jouffer  Geertruyt  Van  Hertsbeke,  huysvrouwe 
van  Louis  Van  Hamme,  in  haer  levene  erfvrouwe  in  Laken  fOnser 
Lieve  Vrouwe  buyten  Brussel  *. 

II  se  peut  fort  bien  que  la  famille  chevaleureuse  des  Van  den  Ileet- 
velde  ait  fait  partie,  au  XIV«  siècle,  de  l'heptarchie,  car  devant  le 
grand  autel  de  l'église,  sous  une  large  dalle  de  pierre  Ideue,  rei^o- 
sait...  Ida  Heetvelde ,  dochter  tvylen  W^illems  Van  den  Heetvclde , 
ridder,  die  sterft  int  jaer  0ns  Heeren  m  cccc  ende  iiii,  xxx  daeghe 
in...  **. 

Cette  famille  est  fréquemment  citée  dans  les  vieux  actes  de  la 
commune. 

Louis  Van  Hamme  épousa  en  secondes  noces  Anne  Ladron  de 
Guevara.  Il  avait  un  caveau  de  famille  dans  la  même  église. 

*  Le  grand  théâtre  sacré,  etc.,  t.  I,  p.  324. 
**  Ibid. 


—     277    — 

15G8  (9  octobre).  Guillaume  Van  Blitterswyck 
cède  à  Jean ,  son  fils  aîné ,  son  sens  seigneurial  à 
Laeken  ^ . 

Il  résulte  dun  acte  éclievinal  du  2  juin  1583, 
qu'on  comptait  alors  comme  seigneurs  ^  : 

Louis  Van  Hamme. 

Pierre  Doelman,  son  beau-fils. 

L'abbaye  de  Grand-Bigard. 

La  veuve  de  Barthélémi  Van  Cattenbroeck  ■\ 

Les  héritiers  de  l'avocat  Gérard  Caesens. 

Jean  Van  Blitterswyck. 

Le  septième,  le  curé,  sans  doute,  n'est  pas 
nommé. 

1585.  Corneille  Wellemans,  conseiller  au  con- 
seil de  Brabant  et  avant  greffier  des  états  de 
Brabant.  Son  nom  est  mêlé  aux  troubles  du 
XVP  siècle.  Il  avait  épousé  Catherine  Van  Cat- 
tenbroeck, fille  de  Barthélémi,  je  crois,  et  ce 
fut  de  ce  chef  qu'il  fit  partie  de  l'heptarchie. 

1585.  Josse  Usselincx ,  brasseur,  à  Bruxelles , 
succède  à  Fabbaye  de  Grand-Bigard. 


•  «  Heerlycken  chyns,  die  hy,  comparant,  lit-on  dans  l'acte,  als 
»  een  van  den  erflieeren  in  Laken  lieeft  op  diversche  goeden  gele- 
»  gen  in  de  voers.  prochie  van  Laken  ende  daer  omtreut.  » 

2  Quelques-uns  d'entre  eux  avaient  demandé  aux  éclievins,  selon 
l'ancien  usage,  l'adjudication  définitive  de  biens-fonds  qu'ils  avaient 
saisis  pour  arrérages  de  cens  qui  leur  étaient  dus.  Avant  de  consen- 
tir à  cette  mesure,  les  échevins  exigèrent  la  remise  d'un  état  indi- 
quant exactement  les  biens  en  question,  le  nom  des  propriétaires, 
les  cens  dus  et  les  années  d'arrérages.  Ils  demandèrent,  de  plus,  que 
chacun  leur  communiquât  son  livre  censal.  C'est  ce  qui  donna  lieu 
à  l'acte  cité  dans  le  texte.  Nous  donnons  ce  détail  comme  un  ren- 
seignement supplémentaire  sur  l'organisation  de  l'heptarchie. 

^  Citée  plus  haut. 


—     278    — 

1594.  Jean  Richardot,  conseiller  au  conseil 
d'État  et  président  du  conseil  d'Artois.  Il  succéda 
aux  héritiers  de  Tavocat  Caesens. 

1596.  Les  héritiers  du  conseiller  Wellemans. 

1597.  Philippe  de  Le  Samme ,  seigneur  de 
Quièverchin,  conseiller  pensionnaire  de  la  ville 
de  Mous ,  du  chef  d'Hélène  Doehnan ,  fille  du 
greffier  Doelman,   son   épouse. 

Ensuite  d'un  décret  du  conseil  de  Brabant, 
du  27  juin  1601,  les  biens  que  Louis  Van  Hamme 
avait  à  Laeken  furent  judiciairement  vendus  pour 
payer  ses  créanciers.  Le  conseiller  pensionnaire 
de  Le  Sainme,  dont  le  nom  précède ,  en  devint 
l'acquéreur. 

1601.  Balthasar  Tax ,  du  chef  de  sa  femme, 
Marguerite  de  Bailly,  fille  de  J*"""  Charles  de 
Bailly  et  de  Democreta  Sweerts  ou  de  "Weert ,  qui 
descendait  de  Roland.  A  Balthasar  Tax ,  pro- 
priétaire de  Coensborch ,  succéda  une  famille  du 
nom  de  Dellafaille. 

Par  acte  du  10  décembre  1604,  Philippe  de 
Le  Samme  {l'oy.  ci-dessus)  vendit  son  château 
(7  Groothof)  et  ses  dépendances ,  ainsi  que  son 
livre  censal  à  Jean  Drenckwaert ,  vicomte  de 
Dormael ,  trésorier  général  des  finances ,  époux 
de  Marguerite  Bogaert ,  fille  de  Jacques  Bogaert, 
président  du  grand  conseil  de  Malines  \ 

1615.  Guillaume  Richardot,  baron  de  Lembeek. 


•  Gertrude  Van  Hamme,  fille  de  Louis  et  de  Gertrude  Van  Herts- 
beke,  et  veuve  d'Aruoul  jMotmans,  est  mentionnée  comme  veude- 
resse  également. 


—    279    — 

161  G.  J"'"  Gaspar  Roeloffs,  membre  des  ligna- 
ges ,  à  Louvain ,  en  qualité  d'époux  de  Margue- 
rite Wellemans,  fille  du  conseiller  Wellemans. 

1623.  Jean  Yan  Blitterswyck ,  jeune. 

1624.  Folcart  Yan  Aclielen,  conseiller  au  con- 
seil de  Brabant  et  ensuite  au  conseil  privé,  époux 
de  Marie  Bogaert,  sœur  de  Marguerite,  citée  plus 
liant.  Il  acquit  une  des  deux  seigneuries  de  Phi- 
lippe de  Le  Samnie  :  celle  provenant  des  sires  de 
Witthem. 

1627.  Les  héritiers  de  P""  Gaspar  Roeloffs ,  cité 
plus  haut. 

Un  acte  du  16  septembre  1629  mentionne 
comme  ayant  succédé  à  Guillaume  Richardot, 
baron  de  Lembeek ,  l'avocat  Hartius.  Il  s'agit 
probablement  d'Otton  Hartius,  avocat  au  grand 
conseil  de  Malines,  fils  d'Otton,  conseiller  audit 
conseil.  Ce  savant  magistrat  était  un  parent  de 
Juste  Lipse ,  avec  lequel  il  entretint  une  cor- 
respondance suivie,  qui  a  été  publiée'. 

Les  actes  postérieurs  signalent  comme  succes- 
seur du  baron  de  Lembeek ,  Jean-Paul  Guidebon 
Pissini ,  conseiller ,  maître  à  la  chambre  des 
comptes,  à  Lille,  auquel,  selon  M.  Wauters,  suc- 
céda par  mariage  l'avocat  Schrieck  ^ 

1630.  WaLrave  Meeus,  avocat  au  conseil  de 
Brabant,  successeur  de  la  famille  de  Dellafaille 
dans  la  possession  du  manoir  de  Coensborch. 


*  Dans  les  œuvres  complètes  de  Juste  Lipse. 

*  Peut-être  Waller au d  Van  der  Schrieck,  reçu  comme  avocat  au 
conseil  de  Brabant,  le  IG  septembre  1624. 


—    280    — 

1631.  Guillaume  de  Wint,  greffier  de  la  terre 
de  Grimberglie ,  en  qualité  d'époux  de  Guillel- 
mine  Van  Blitterswyck ,  fille  de  Jean  Van  Blit- 
terswyck ,  lignée  à  laquelle  il  succéda. 

1633.  Marie  Bogaert ,  veuve  du  conseiller 
Folcard  Van  Achelen. 

1642.  Par  indivis  les  enfants  du  même  con- 
seiller ' . 

1651.  Les  héritiers  de  J"*"  Gaspar  Roeloffs. 

1653.  Pierre  Van  Achelen,  secrétaire  du  con- 
seil privé ,  fils  du  précédent.  Pierre  Van  Achelen 
entra  successivement  en  possession  de  trois 
seigneuries ,  ayant  hérité  par  sa  mère  de  la  sœur 
de  celle-ci  Marguerite  Bogaert,  épouse  de  Jean 
Drenckwaert.  De  là  vient  que  Sanderus  dit  que 
Pierre  Van  Achelen  avait  à  Laeken  une  triarchie. 
Elle  se  composait  des  trois  seigneuries  ayant  ap- 
partenu anciennement  et  respectivement  aux 
sires  de  Witthem,  aux  Hujoel,  auxquels  succéda 
le  greffier  Doelman ,  et  à  l'abbaye  de  Grand- 
Bigard.  Outre  ces  biens ,  le  secrétaire  Van 
Achelen  était  possesseur  du  château  Y  Groothof^^ 
ainsi  que  du  château  de  Ter  Plast,  dont  Sanderus 
a  également  donné  une  vue  dans  son  ouvrage  ^ 

1656.  Guillaume  Van  Cattenbroeck. 


*  C'étaient  :  Pierre  Van  Achelen,  secrétaire  du  conseil  privé,  Clé- 
mence, épouse  de  Charles-François  Musaert,  chevalier,  seigneur 
d'Oulteren,  Marie,  veuve  de  Philipjie  Prats,  chevalier,  seigneur  de 
Saint-Albert,  secrétaire  dudit  conseil  privé,  et  Catherine,  épouse  de 
Jean-Jacques  de  Put,  chevalier,  conseiller  au  consail  de  guerre. 

*  Voy.  ci-dcssus. 

^  Pour  l'histoire  de  ce  fief,  voij.  A.  Wautees,  loc.  cit.,  t.  II,  p.  373. 


—    281     - 

1666.  Elisabeth  A^an  Uffel,  veuve  du  docteur 
en  médecine  Jean  Thol,  lequel  avait  succédé  à 
Pissini,  mentionné  ci-dessus. 

1671.  Marie  de  Wint,  fille  du  greffier  Guillaume 
de  Wint,  dont  le  nom  figure  plus  haut. 

1675.  Corneille  Van  Reynegom,  seigneur  de 
Buzet  et  plus  tard  d'Herenthout ,  chevalier,  gref- 
fier du  conseil  des  finances.  Il  succéda  aux  héri- 
tiers de  Walrave  Meeus ,  cité  plus  haut. 

1678.  J'""  Joseph- Alexandre  Roelofî's ,  conseiller 
communal  à  Louvain ,  fils  de  Gaspar,  cité  plus 
haut,  et  de  Barbe  de  Zoete. 

1679.  La  veuve  et  les  enfants  de  Pierre  Van 
Achelen.  Cette  veuve  était  Hélène-Piobertine  Van 
Maele,  dit  de  Malinez,  mariée  en  premières  noces 
avec  Jean-Aurélien  Servais ,  seigneur  de  Saintes , 
Liberchies,  etc.,  capitaine  de  cavalerie,  tué  de- 
vant Valenciennes.  Van  Achelen  en  eut  deux 
filles  :  Catherine-Philippe,  qui  épousa  Urbain  Van 
der  Borcht ,  commis  des  domaines  et  finances ,  et 
Marie-Françoise,  qui  devint  la  femme  de  Jean- 
Érard  de  Steenhuys,  baron  de  Poederlé. 

Par  acte  du  25  janvier  1683,  Jean-WaUerand 
Diertins,  adjudant-fourrier,  major  de  cavalerie, 
vendit,  en  qualité  d'héritier  de  son  père,  à  Jérôme 
Baecken,  bourgeois  et  maître  tonnelier,  à  Bruxel- 
les, le  livre  censal  seigneurial  nommé  la  Dîme  des 
grains  de  Couweghem  %  avec  faculté,  dit  l'instru- 

»  Ailleurs  Coitwegom.  Cette  matricule  provenait  de  l'ancienne 
famille  Van  Catten])roeck.  Le  manoir  de  Couwegom,  sans  le  livre 
censal,  fut  vendu  en  1689  par  Marguerite  Van  der  Glioten,  veuve  de 
J"""  Georges  de  Megliem,  capitaine  des  gardes  bourgeoises,  à  Bruxel- 

19 


—    282    — 

ment  ,  de  constituer  un  majeur  et  des  juges- 
tenanciers  {laeLen).  Le  prix  de  la  vente  était  de 
240  florins  du  Rhin. 

1685.  Les  héritiers  du  docteur  Thol  et  d'Éhsa- 
beth  A^an  Uffel,  sa  femme.  Ces  époux  n'eurent 
qu'une  fille  nommée  Elisabeth. 

1G99.  J'"'  Thierry-François  Van  Reynegom  re- 
présentant sa  mère  dame  Isabelle  Maillaerts , 
veuve  de  messire  Corneille  Van  Reynegom  {voy. 
plus  haut). 

1700.  Les  héritiers  de  Gaspar  Roeloffs. 

1701  (7  septembre).  Acte  de  partage  passé 
entre  les  héritiers  d'Elisabeth  Thol.  Le  château 
de  Droetbeek  avec  son  livre  censal,  échut  à  la 
famille  Van  Uffel,  qui  vendit  ce  livre  à  la  famille 
Van  Turnhout  *. 

1705.  Jacomo- Joseph  Sirejacob,  conseiller  au 
Mont-de-Piété,  à  Bruxelles.  Il  succéda  aux  descen- 
dants du  greffier  de  AVint  {l'oy.  plus  haut)  et 
acquit  de  Balthasar  Le  Mire,  secrétaire  du  conseil 
de  Brabant,  le  manoir  de  Stuyvenberg ,  situé  non 
loin  du  palais  royal,  dont  il  est  devenu  une  dé- 
pendance. Au  XVP  siècle  il  appartenait  à  Louis 
Van  Beughem,  architecte  de  Charles-Quint,  Tau- 


les, et  Claire  Van  der  Gboten,  sœurs,  à  Catherine-Thérèse  Auderlan, 
héritière  d'Anne  Van  Pede,  veuve  de  J"""  Bernard  Van  der  Ghoten, 
pour  3200  florins  du  Rhin. 

1  D'après  l'acte  de  partage ,  le  montant  du  pi-oduit  des  cens 
inscrits  dans  le  registre  consistait  en  55  rasières  d'orge,  20  rasières 
d'avoine,  27  escalins  et  7  '/j  deniers,  plus  un  pain  (bt^oot)  de  Louvain, 
7  chapons  et  25  œufs.  Le  registre  fut  vendu,  d'a2:)rès  la  même  éva- 
luation, à  la  chambre  éehevinale  d'Uccle,  le  29  novembre  1564. 


—    283    — 

teur  des  plans  de  divers  beaux  monuments  <.  A 
Louis  Van  Beugliem,  ou  du  moins  à  ses  enfants, 
succéda  Etienne  Van  Craesbeek,  conseiller  au 
conseil  de  Brabant,  qui  acquit,  en  outre,  le  châ- 
teau de  Ter  Plast. 

1706.  J'"'  Adrien-Philippe  Van  Reynegom  et  ses 
cohéritiers . 

1708.  Jean-Guillaume  Robrechts,  licencié  en 
droit,  à  Louvain,  ensuite  d'une  sentence  du  con- 
seil de  Brabant,  du  22  mai  1703,  prononcée  en  sa 
faveur  contre  J'""  Joseph- Alexandre  Roeloffs, 
seigneur  de  Geest-Gerompont,  mayeur  de  Louvain. 

1709.  La  dame  Catherine  Van  Achelen,  veuve 
du  conseiller  et  commis  Vander  Borcht  {voy.  ci- 
dessus). 

Par  acte  du  19  octobre  1715,  Jean-Guillaume 
Robrechts  vendit  pour  100  ducats  à  Antoine- 
Boniface  Perremans,  avocat  au  conseil  de  Bra- 
bant ,  à  Bruxelles ,  le  livre  censal  seigneurial  qui 
lui  appartenait  en  qualité  d'héritier  de  Thérèse 
Van  Couwegom,  sa  femme  -.  Le  livre  n'est  pas  au- 
trement désigné  dans  Tacte. 

Notons  ici,  en  passant,  qu'en  1737  l'avocat  Per- 
remans  fut  poursuivi  par  le  roi  d'armes  Liser, 

*  Entre  autres  de  l'église  de  Brou,  à  Bourg  en  Bresse,  départe- 
ment de  l'Ain.  M.  Alexandre  Pinchart,  chef  de  section  aux  Arclii- 
ves  du  royaume,  a  constaté  par  la  signature  que  le  vrai  nom  de 
Van  Beugliem  est  Van  Boghem.  La  demeure  de  cet  architecte ,  à 
Laeken,  se  voit  sur  la  première  planche  qui  accompagne  cette  notice. 
C'est  celle  qu'on  remarque,  à  gauche,  sur  la  hauteur,  près  de  la 
chapelle. 

"  n  avait  dû  en  disputer  la  possession  à  J.-A.  Roeloffs.  [Voy.  ci- 
dessus.) 


—    284    — 

parce  qu'il  portait  l'épée,  prérogative  réservée 
aux  nobles  et  aux  personnes  revêtues  de  hautes 
fonctions.  Voilà  une  preuve  de  plus  que  la  seigneu- 
rie à  Laeken  ne  conférait  aucune  qualité  nobi- 
liaire. Aussi,  en  se  défendant  contre  le  héraut, 
Perremans  se  prévalut  de  son  extraction,  noble, 
selon  lui.  Il  produisit  une  généalogie  remontant  à 
la  première  moitié  du  XVP  siècle,  etc. 

1718.  Marie  Scheltiens,  veuve  d'Égide  Van 
Turnhout,  lequel  avait  acquis  le  livre  censal  ayant 
aj)partenu  au  docteur  Thol. 

1721.  Marie- Joseph  Vander  Borcht,  douairière 
de  don  Félix  d'Acuna,  heutenant-colonel  au  ser- 
vice de  l'Empereur,  dame  de  Saintes  et  dans 
Laeken. 

1721.  Catherine-Ferdinande  Vander  Borcht  de 
Leenhove,  sœur  de  la  précédente.  Elle  avait  eu 
en  partage  le  petit  registre  de  mai. 

1723.  Jacques  Van  Turnhout,  fils  du  précédent. 

1735.  Ladite  demoiselle  Vander  Borcht,  dame 
de  Saintes,  pour  elle-même  et  comme  héritière  de 
sa  sœur  précitée. 

1753.  Les  héritiers  de  cette  personne.  Ils  eurent 
trois  registres  censaux  :  le  grand  et  le  petit  regis- 
tre de  mai  et  un  de  Noël. 

1757.  J°''  Norbert-Philippe-Maxunilien-Joseph 
Van  Reynegom,  seigneur  de  Coensborch.  Il  fut  le 
dernier  membre  de  Theptarchie  de  sa  famille, 
étant  décédé  le  2  avril  1805. 

1763.  Phili^^pe-Eugène- Joseph  d'Olmen,  baron 
de  Poederlé. 

1770.  Lambert-Martin  baron  de  Renette,  sel- 


gneur  de  Logenhage,  succéda  aux  héritiers  d'An- 
toine Perremans,  ayant  épousé  Jeanne-Catherine 
Perremans. 

1783.  Marie- Anne- Jacqueline  Sirejacob,  fille 
unique  de  Joachim-Joseph  et  épouse  de  Jérôme- 
Balthasar,  vicomte  de  Roest  d'Alkinade.  Nous 
avons  vu  que  M.  Sirejacob  acheta  le  bien  de  Stuy- 
venberg. 

1790.  La  demoiselle  Thérèse  d"Ohnen  de  Poe- 
derlé,  une  des  héritières  de  Catherine-Ferdinande 
Vander  Borcht,  dame  de  Saintes  {v^oy.  ci-dessus). 

1792.  Les  héritiers  du  baron  de  Eenette  '. 

1793.  La  dame  douairière  vicomtesse  de  Roest 
d'Alkmade. 

Ne  quittons  pas  le  territoire  de  la  commune  de 
Laeken ,  sans  ajouter  quelques  renseignements  à 
ceux  que  M.  A.  Wauters  a  fournis  sur  le  palais 
royal.  Il  s'agit  du  beau  parc  qui  Tentoure  et  que 
le  Roi,  complétant  Toeuvre  de  ses  prédécesseurs, 
va  considérablement  agrandir.  M.  Wauters  rap- 
pelle que  lorsque  rarchiduchesse  Marie -Christine 
et  son  époux  le  duc  Albert  de  Saxe-Tesschen , 
gouverneurs  généraux  de  nos  provinces,  eurent 
résolu  de  se  faire  construu^e  une  somptueuse  rési- 
dence d'été,  ils  achetèrent  à  M.  de  Wautier  le 
domaine  de  Schoonenberg ,  dont  la  partie  princi- 
pale consistait  en  un  beau  château,  une  ferme,  un 
étang,  une  plaine  ou  terrasse,  un  jardin,  des  fossés 

*  Les  registres  de  la  commune  citent  Jeanne-Catherine  de  Eenette. 


—    386    — 

et  des  digues,  etc.  '.  Les  deux  illustres  acquéreurs 
réunirent  à  cette  propriété  presque  tous  les  ter- 
rains compris  entre  la  chaussée  d'Anvers,  la 
Petite-Senne  et  le  chemin  dit  la  Rue  verte,  de  ma- 
nière à  former  un  immense  triangle  dont  la  base 
longeait  la  Petite-Senne  et  dont  le  sommet  se  trou- 
vait à  l'extrémité  supérieure  du  Dongelberg. 
J'ajouterai  que,  pour  parvenir  à  leur  but,  les 
gouverneurs  généraux  durent  traiter  avec  plus  de 
cinquante  propriétaires ,  tant  particuliers,  qu'ab- 
bayes, fabriques  d'églises,  pauvres  et  autres  fon- 
dations. Les  gouverneurs  étaient  représentés  pour 
faire  ces  achats  par  Paul  Cantineau,  leur  secrétaire 
d'intendance  ^  Les  actes  de  vente  furent  passés 
devant  le  notaire  Pierre- Joseph  Vanden  Berghe, 
à  Bruxelles  (1781-1784),  dont  les  protocoles  sont 
conservés  aux  Archives  du  royaume  ^  D'après  un 
calcul  que  j'ai  fait,  le  montant  des  sommes  payées 
par  M.  Cantineau,  au  nom  de  ses  maîtres,  pour 
l'acquisition  de  tous  ces  terrains,  s'éleva  à  environ 
225,000  florins,  somme  considérable,  si  l'on  tient 
compte  de  la  dépréciation  que  l'argent  a  subie 
depuis. 

Un  registre  aux  actes  échevinaux  remontant  à 
l'année  1491  et  qui  m'a  été  fort  utile,  renferme, 
ad  calcem,  le  texte  flamand  d'une  coutume  inédite 


'  Il  s'agit  du  château  dont  nous  avons  parlé  ci-dessus. 

*  Il  mourut  en  1815;  sa  dalle  funéraire  se  voit  encore  au  cimetière 
de  Laeken. 

'  Voir  les  protocoles  portant  les  n°s  7393-7396  de  l'Inventaire 
imprimé  du  Notariat  général  de  Brabant. 


—    287    — 

de  Laeken.  Je  crus  utile  de  signaler  cette  coutume 
à  M.  Charles  Stallaert,  le  traducteur  de  la  Com- 
mission royale  chargée  de  publier  les  ancien- 
nes lois  et  les  coutumes  du  pays.  M.  Stallaert  en 
ayant  pris  connaissance ,  jugea  que  le  document 
méritait  à  tous  égards  d'être  publié.  En  consé- 
quence ,  il  Ta  transcrit  et  accompagné  d'une  tra- 
duction française,  enrichie  de  ses  remarques.  On 
trouvera  l'un  et  l'autre  plus  loin,  àTappendice. 

L.  G. 


ANNEXES , 

SIVE    PARVULUS    CODEX    DIPLOMATICUS. 


I. 

Henri,  duc  de  Brabant,  déclare  que  Béatrix,  fille  de  Walter, 
chevalier  de  Bigard,  a  fait  don  à  l'abbaye  de  Bigard  de 
vingt-cinq  bonniers  de  terre. 

(La  6e  férié  avant  la  Samt-Micliel  1224.) 

Henricus,  Dei  gratia  dux  Lotharingie,  omnibus,  tam 
presentibus  qiiam  futuris  in  perpetuum.  Quiim  ea  que  me- 
moria  digna  sunt  htteris  expedit  eternari,  ideo  presenti 
scripto  ad  noticiam  omnium  cupimus  pervenire  quod  Bea- 
trix,  fiha  quondam  Walteri,  militis  de  Bggardis,  in  nostra 
presentia,  sub  frequentia  bomiuum  nostrorum  constituta, 
viginti  quinque  bonaria  terre  ipsam  de  paterna  beredi- 
tate,  secundum  ordinationem  amicorum  suorum  coutin- 
gentia,in  mauus  nostras  ad  opus  cenobii  Bygardensis  hbere 


—    288    — 

et  absolute,  de  consensu  Arnoldi  de  Bygardis,  sui  avun- 
culi,  resignavit.  Hujus  autem  terre  jacent  decem  bonaria 
apud  Ymde  et  sex  apud  Laken  et  novem  apud  Bygardis , 
in  silva  Berthe,  Hanc  autem  terram  prefato  cenobio  in 
elemosinam,  tanquam  nostrum  allodium  porreximus  et 
concessimus. 

In  hujus  facti  nostri  testimonium  dedimus  bas  litteras, 
nostro  sigillo  et  testium  nominibus  corroboratas. 

Testes  L.[eo],  castellanus  Bruxellensis ,  A.  de  Walin 
G.  de  Saventem,  Gregorius  ammaunus,  Willelmus,  archi- 
diaconus,  Tbeodericus  de  Anderlecht,  F.  Bole,  G.  de 
Overlis,  J.,  notarius,  hujus  carte  conscripto. 

Datum  Bruxellis,  anno  Doraini  millesimo  00°  vicesimo 
quarto,  feria  sexta  ante  Michaelis  ^ 

II. 

Ouillaume  de  Bigard,  archidiacre  de  Tournai,  donne  à 
Vabbaye  de  Grand-Bigard  quatorze  honniers  et  demi  de 
terre  et  de  prairies.  {Cette  donation  fut  faite  à  Bigard, 
sous  un  chêne.) 

(La  5«  férié  après  la  fête  de  Saint-Nicolas  1244.) 

Universis  presens  scriptum  visuris  W.[illelraus]  de  By- 
gardis, Tornacensis  ecclesie  Flandrensis  archydyaconus , 
salutem  et  noscere  veritatem. 

Noverint,  tam  présentes  quam  posteri,  quod  nos  resigna- 
vimus  in  manus  domine  nostre  Heylegundis  de  Bygardis 
quatuordecim  bonaria  terre  et  dimidium,  tam  in  pratis, 
tam  in  terris  arabilibus,  quam  in  mausuris,  quorum  sep- 
tem  bonaria  jacent  supra  Ham,  quatuor  supra  Rochout, 
bonarium   et  dimidium   apud  Hamieidam,  in  mansuris, 

•  La  charte  existait  en  original  dans  les  archives  de  l'abbaye. 


—    289    — 

bonarium  et  dimidiuni  iu  prato  apud  Bous  fort,  proximo 
jacente,  juxta  viam  et  pratum  quod  habuimus  apud 
Cobbenghem  et  in  Flotbemt.  Que  quatuordecim  bonaria  pre- 
dicta  et  dimidium  iu  feodum  ab  eadem  domina  tenebamus. 

Et  ipsa  domina,  de  consensu  nostro,  ad  preces  nostras, 
contulit  priorisse  et  conventui  de  Bygardis  in  elemosinam 
nostra  sepedicta  quatuordecim  bonaria  et  dimidium,  sub 
annuo  censu  quatuordecim  denariorum  de  quolibet  bona- 
rio,  in  festo  beati  Stephani  annuatim  jam  dicte  domine 
solvendorum. 

Hec  autem  facta  sunt  Bygardis,  sub  Quercu,  in  presentia, 
AValteri  de  Sottenghem,  Walteri  de  Wemliues ',  Walteri 
de  Cockelberghe  ",  Gosuini  de  Erpa,  Rasonis  de  Busco  '% 
militum  ;  Rasonis  Beier,  Franconis  de  Borchstat,  Joliannis 
Proidum  (V),  Arnoldi  Chot,  Heurici  Beier,  Joliannis  Her- 
man,  Willelmi,  fratris  domine  de  Bygardis  *. 

In  cujus  rei  testimonium  présentes  litteras  nostro 
munimine  duximus  roborandas.  Actum  anno  Domini 
m»  ce»  quadragesimo  quarto,  feria  quinta  post  festum 
beati  Nycholay. 

m. 

Helicige,  dame  de  Bigard,  ratifie  la  donation  qui  'précède. 

(Même  date.) 

Universis  présentes  litteras  visuris,  Helwigis,  domina  de 
Bygardis,  salutem  et  noscere  veritatem. 

Notum  facimus  universitati  vestre  quod  nos  recepimus 
de  manu   magistri  Willelmi  de   B3'gardis,    archidiaconi 


*  De  Wemmel,  commune  limitrophe  de  celle  de  Laeken. 

*  Tous  hommes-liges  du  duc  de  Brabant. 

'  Il  appartenait  à  une  branche  de  la  maison  de  Bigard. 

*  Hommes-liges  de  cette  dame. 


—    290    — 

Tornacensis  in  Flaudria,  ad  opus  domus  sanctimonialium 
de  Bygardis,  per  judicium  hominum  nostrorum  feodalium, 
videlicet  :  Rasonis  de  Busco,  militis,  Henrici  de  Capella, 
Franconis  de  Fonte,  Willelmi,  fratris  nostri,  Johannis  Her- 
man,  Henrici  Beier,  Walteri  de  Wachnengliem  et  Abrahe, 
quatiiordecini  bonaria  terre  et  dimidium,  tiim  in  terra  ara- 
bili,  tum  in  pratis,  tiira  in  mansuris  :  que  omnia  dictus  ma- 
gister  a  nobis  tytulo  feodi  detinebat,  eandem  terram  a  jure 
feodali  penitus  absolventes,  et  ad  opus  dicte  domus  in 
hereditatem  commutantes,  Quo  facto,  dictam  terram  dicte 
domui  contulimus  in  hereditatem,  sub  annuo  ceusu  qua- 
tuor denariorum  de  quolibet  bonario,  nobis  et  successori- 
bus  nostris,  in  festo  beati  Stephani  a  dicta  domo  annua- 
tim  solvendorum.  Sepedicte  domui  donationem  dicte 
hereditatis  per  judicium  illorum  qui  tenent  hereditatem  a 
nobis,  videlicet  :  Rasonis  Beier,  Willelmi,  fratris  nostri, 
Henrici  Beier,  Arnoldi  Coc  ',  Johannis  Proidum,  Johannis 
Herman  et  Stephani  de  Gumpem  et  aliorum  plurium,  cou- 
fererentes  in  perpetuum  possideude.  Predicta  vero  judicia, 
tam  hominum  feodalium,  quam  heredum,  dicta  fuerunt  de 
concilio  hominum  domini  ducis,  videlicet  :  Walteri  de  Sot- 
teughem,  Walteri  de  Wamblines  et  Walteri  de  Cockel- 
bergha,  militum,  et  aliorum  plurium. 

Ne  autem  dicte  collationes  et  judicia  processu  temporis 
oblivioni  tradantur  et  dicta  domus  aliquam  molestiam 
patiatur,  presentem  paginam  dicte  domui  contulimus  tes- 
timonialem.  Et  quia  proprium  sigillum  ad  presens  non 
habemus,  sigillum  capituli  Anderlechtensis  postulavimus 
presentibus  apponi. 

Datum  anno  Domini  m"  ce»  quadragesimo  quarto,  feria 
quinta  post  festum  beati  Nycholai. 


Plus  haut  Chot. 


291    — 


IV. 


L'archidiacre  Guillaume  de  Bigard  donne  tous  ses  biens, 

situés  à  Laeken,  à  l'abbaye  de  Bigard. 

(Le  samedi  après  la  Saint-Nicolas  12-i4.) 

W.fillelmus]  cleBygardis,  Tornacensis  ecclesie  Flandreu- 
sis  archidiaconus,  dilectis  in  Christo  scabinis  de  Laken  et 
aliis,  tam  viris,  quam  mulieribus  ejiisdem  parochie,  salu- 
tem  in  Domino. 

Noveritis  quod  nos  totum  jus  quod  habuimus  apud 
Laken,  in  terris,  pratis,  redditibus  et  aliis  rébus  quibus- 
cumque,  contulimus  priorisse  et  conventui  de  Bygardis,  in 
puram  elemosynam  perpetuo  possedendam,  in  presentia 
ducis  et  plurimorum,  et  ibidem  festucavimus  omue  jus 
per  nostrum  predictum  ad  opus  predictorum. 

Inde  est  quod  nos  volumus  quod  quicumque  aliquid 
tenebat  ibidem  ex  parte  nostra,  de  cetero  recipiat  et  teneat 
de  priorissa  et  conventu  predictis  et  ipsis  integraliter 
respondeat. 

Datuni  anno  Domini  m»  ce»  quadragesimo  quarto,  sab- 
bato  post  festum  beati  Nicliolai. 

V. 

Henri,  duc  de  Brabant,  approuve  la  donation  qui  précède. 

(1248.) 

H.[enricus] ,  Dei  gratia  dux  Lotharingie ,  uuiversis  pre- 
sens  scriptum  visuris,  salutem  in  Domino. 

Noverint,  tam  présentes  quam  posteri,  quod  elemosinam 
quam  dilectus  noster,  W.  de  Bygardis,  Tornacensis  eccle- 
sie archidiaconus  in  Flandria,  in  pratis,  terris  arabilibus 
et  mansis,  necnon  et  redditibus  contulit  sanctimonialibus 


—    292    — 

in  Bygardis,  proiit  in  litteris  ejusdem  archicliaconi  super 
hoc  confectis,  planius  et  plenius  est  expressum,  laudamus, 
approbamus  et  sigilli  nostri  hoc  scripto  appenso  muni- 
mine  confirmamus. 
Datum  anno  Domini  m9  cco  xl^'  octave. 

VI. 

Testament  cfA  rnoul  de  Bigard,  fait  du  consentement 

d'Helwige,  sa  mère. 

(Juillet  1257.; 

Universis  presens  scriptum  visuris,  He.[lwigis],  domina 
de  Bygardis,  salutem  et  noscere  veritatem. 

Noverit  universitas  vestra  quod  Arnoklus,  filius  meus,  sui 
compos  mentis  et  oris,  me  consentiente  et  coram  me  et 
aliis  pluribus,  tam  viris,  quam  mulieribus,  taie  legavit 
testamentum. 

Scilicet  decem  et  quinque  libras  Bruxellenses  super  uno 
bonario  terre  sito  super  Béate  Buscum  {sic),  dimidietatem  in 
anniversario  suo  conventui  Bygardiensi,  et  aliam  dimidie- 
tatem dicti  bonarii  in  anniversario  meo  dicto  conventui 
in  elemosinam  contulit,  libère  in  perpetuum  possidendas. 

Contulit  etiam  in  elemosinam  decem  et  sex  libras 
Bruxellenses  super  uno  bonario  sito  sub  Longo  puteo. 

E.,  filie  sue  scilicet,  et  Katerine,  filie  fratris  sui,  contulit 
in  elemosinam  decem  et  octo  libras  Bruxellenses  super 
uno  bonario  terre  sito  in  campo  qui  dicitur  Campus  aurets. 

Preterea,  contulit  in  elemosinam,  ad  portam  monasterii 
Bygardiensis  octo  libras  Bruxellenses  ad  sotulares  *  paupe- 
ribus  distribuendas,  super  dimidio  bonario  terre  sito  juxta 
Gudenlenbroc,  dummodo  dicta  porta  persolverit  Ausilie,  so- 
rori  sue  annuatim,  quoad  vixerit ,  unum  modium  siliginis, 

»  Sotulares,  souliers. 


-     293    — 

qua  defuncta,  dictum  modium  siliginis  ad  dictam  portam 
libère  et  absolute  remanebit.  Item,  contulit  octo  libras 
Bruxellenses  super  dimidio  bonario  terre,  scilicet  sito  jiixta 
Gudenlenbroc ,  distribuendas  in  hune  modum ,  videlicet  : 
fabrice  ecclesie  parocbialis  de  Bygardis  quadraginta  solides 
Bruxellenses ,  ad  lampadem  ardentem  in  eadem  ecclesia , 
ante  corpus  Christi,  très  libras,  plebano  decem  solidos,  ca- 
pellano  quinque  solidos,  pauperibus  vero  in  eadem  parochia 
XX  solidos,  per  consilium  plebani  et  capellani  predictorum 
conferendos;  hospitali  vero  beati  Johannis  in  Bruxella 
quinque  solidos,  fratribus  minoribus  in  Bruxella  quinque 
solidos,  inôrmarie  Beginarum  in  Vinea  quinque  solidos, 
monialibus  béate  Katerine,  juxta  Bruxellam,  quinque  soli- 
dos, monialibus  apud  Bygardis  quinque  solidos. 

Testes  qui  interfuerunt  dicte  collationi  fuerunt  :  prio- 
rissa  de  Bygardis,  P.,  presbyter  de  Bygardis,  R.,  capella- 
nus,  W.,  capellanus.  G.,  capellanus  Bygardienses. 

Ego  vero  He.[lwigis],  domina  de  Bygardis,  cum  proprium 
sigillum  non  habeo,  utor  sigillo  decani  Christianitatis  in 
Bruxella. 

Datum  anno  Domini  mo  ce»  1^  septimo,  mense  julii. 

VII. 

Testament  conjonetif  de  Bernard,  seigneur  de  Bigard,  et 

de  Marie,  sa  femme. 

(Le  jour  de  sainte  Marie -Madeleine  1283.) 

Universis  presens  scriptum  visuris,  Bernardus,  dominus 
de  Bygardis,  et  Maria,  ejus  uxor,  salutem  in  Domino  sem- 
piternam. 

Quod  geritur  a  modernis  débet  testimonio  litterarum 
confirmari,  quoniam  gesta  hominum  in  statu  stabili  persé- 
vérant, que  non  erant  sine  litteris  valitura.  Notum  sit  uni- 
versis, in  nomine  Patris  et  Filii  et  Spiritus  Saucti,  quod 


—    294    — 

nos,  Beriiardus  et  Maria  predicti,  animarum  nostrarum  sa- 
luti  providere  cupientes,  sane  mentis  et  compotes,  nostruni 
condimus  testaraentum  et  ordonavimus  in  hune  modum. 
Assignavimus ,  de  proborum  consilio,  in  monasterio  de 
Bygardis  ibi  ambo  nostram  eligimus  sepulturam,  salvo 
jure  cujuslibet,  vin  solidos  Bruxelleuses  in  anniversario 
cujuslibet  persolvendos,  Ecclesie  vero  parochiali  in  Bygar- 
dis ad  fabricam,  in  anniversario  cujuslibet  ii  solidos,  pres- 
bitero  vero  curato  in  cujuslibet  anniversario  ii  solidos , 
capellauo  vero  ibidem  curie  in  cujuslibet  anniversario 
xii  denarios,  custodi  vero  ibidem  vi  denarios  in  cujuslibet 
anniversario,  pauperibus  vero  in  villa  de  Bygardis  ad  sotu- 
lares  v  solidos  annuatim  pro  anima  cujuslibet,  ita  quod 
qui  post  alium  vixerit  v  sol.  dabit  ad  sotulares;  quura 
vero  ambo  viam  universe  caruis  sunt  ingressi,  hères  qui 
post  ipsos  remanserit,  x  solid.  dabit  ad  sotulares,  quos 
convertet  et  distribuet  pauperibus,  in  villa  predicta,  se- 
cundum  ordiuationem  presbiteri  curati.  Item,  apud  Bi- 
ghem,  ad  fabricam  xii  den.  annuatim.  In  anniversario  vero 
cujuslibet  presbitero  in  Berghem  xii  den,,  et  in  eorum  an- 
niversario custodi  ibidem  iii  denar. 

Ista  vero  omnia  et  singula  legavimus  et  assignavimus 
super  duo  bonaria  terre  jaceutia  apud  Berghem,  in  feodo 
quod  ego  Maria,  uxor  Bernardi,  domini  de  Bygardis,  pre- 
dicti, teneo  de  magna  sorore  mea.  Predicta  omnia  assignata 
secundum  prudencium  valentia  discretionem  {sic).  Item, 
sciendum  est  quod  hec  sunt  facta  de  voluntate  magne 
domine  feodi  predicti  et  Nicholai,  ejus  légitime  tutoris. 

Et  ut  hec  omnia  in  perpetuum  permaneant  et  persévè- 
rent, présentes  litteras  cum  sigillo  Nicholai,  predicti  tu- 
toris magne  predicte,  que  sigillo  caret,  cum  sigillo  meo 
Bernardi  et  cum  sigillo  presbiteri,  curati  de  Bygardis, 
fecimus  roborari. 

Datum  anno  Domini  m»  ce»  Ixxx  tertio,  in  festo  Marie 
Magdalene. 


—    295    — 


YIII. 


Nicolas  de  Lahen  fait  don  à  Vabhaye  de  Grand-Bigard  de 
quatre  bonniers  de  terre  situés  à  Bever  ^ 

(8  mai  1287.) 

Noverint  iiniversi  quod  Nicolaus,  filius  quondam  Lide- 
kini  de  Laken,  militis,  cum  débita  renuntiatione  contulit 
fratri  Heurico,  ad  opus  monasterii  de  Bigarden,  quatuor 
bonaria  terre,  parum  plus  vel  minus,  prout  jacent  apud 
Beverne,  pro  allodio,  promittendo  ei  inde  rectarn  wa- 
randiam. 

Inde  sunt  testes  Henricus  Hemcart  et  Godefridus 
Boyken,  scabini  Bruxellenses,  quorum  sigilla  presentibus 
sunt  appensa. 

Datum  anno  Domini  m»  cqo  octogesimo  septimo,  feria 
sexta  post  luventionem  Sancte  Crucis. 

IX. 

Ida  de  Plat ea  {Vander  Straeten)^  béguine,  donne  à  l'ab- 
baye de  Grand-Bigard  un  demi-bonnier  de  prairie. 

(Eu  mai  1298.) 

Notum  sit  universis  presens  scriptum  visuris,  quod  do- 
micella  Ida,  dicta  de  Platea,  begina  in  Vinea  -,  personaliter 
constituta,  in  presentia  Domini  fundi,  videlicet  Domini 
Arnoldi,  curati  ecclesie  de  Lahen,  et  suorum  mansionario- 
rum,  contulit  conventui  de  Bygardis  dimidium  bonarium 

1  Hameau  de  la  commune  de  Strombeek,  limitrophe  de  celle  de 
Laeken. 

*  A  Bruxelles. 


—    296    — 

prati,  prout  situm  est  apud  Laken,  in  loco  clicto  Bushemt. 
Quod  pratum  dicta  Ida  supportavit  et  eflestiicando  resigna- 
vit.  Ipsaque  Ida  per  juris  ordinem  iude  exposita  et  abjii- 
dicata,  impositus  est  jure  bereditario  Sigerus,  clericus 
priorisse  de  Bygardis  ad  opus  dicti  conventus  de  Bygardis, 
de  consensu  domini  fundi  prefati,  et  per  senteutiam  suo- 
rum  mausionariorum. 

Acta  sunt  hec  de  consensu  virorum  discretorum,  scili- 
cet  :  elemosinarii  de  Haffligemo,  et  Theoderici,  receptoris 
reddituum  Brabantie. 

Et  quia  dictum  pratum  tenetur  ab  ecclesia  de  Laken, 
sub  annuo  censu  duorum  denariorum,  parve  monete,  con- 
dictum  est  et  à  prefato  clerico,  nomine  dicti  monasterii  et 
conventus  de  Bygardis  promissum,  quod  si  aliqua  bona  ad 
quanti tatem  seu  valorem  predicti  prati  ad  opus  dicte 
ecclesie  de  Laken  emerentur  vel  alias  acquirerentur  que 
similiter  à  monasterio  de  Bygardis  supradicto  bereditario 
jure  tenerentur,  deberet  ipsum  monasterium  seu  conventus 
de  Bjgardis  super  eo  suum  adbibere  consensum,  ut  dicta 
ecclesia  de  Laken,  in  bonis  sic  emptis  vel  acquisitis,  pote- 
rit,  secundum  juris  ordinem,  investiri  et  imponi. 

Testes  :  Henricus  dictus  Esselen,  Ingelbertus  Faber, 
Henricus  dictus  Mouwe,  Henricus  de  Decbellstraten,  man- 
siouarii  predicti. 

In  cujus  rei  testimonium  et  munimen  sigillum  prefati 
curati  de  Laken,  domini  fundi,  litteris  presentibus  est 
appensum.  Datum  anno  Domini  m''  ce"  nonagesimo  octavo, 
mense  mayo. 

Cet  acte  de  donation  est  suivi  de  lettres  d'Ida,  prieure 
du  monastère  en  question,  du  mois  de  mars  1299  (n.  st.), 
par  lesquelles  elle  abandonne  l'usufruit  de  ce  demi- 
bonnier  de  pré  à  la  donatrice.  Celle-ci  y  manifeste  le  désir 
qu'après  sa  mort  le  revenu  soit  employé  à  pourvoir  aux 
nécessités  de  Catherine,  fille  de  feu  Guillaume  de  Coninck 


—    29' 


{Régis),  chevalier  '.  Catherine  étant  décédée,  20  sous  seront 
employés  pour  la  pitance  de  vin  des  religieuses  au  jour  de 
l'anniversaire  dudit  chevalier.  Le  surplus  sera  distribué 
aux  mendiants  qui  se  présenteront  k  la  porte  du  couvent. 


Les  -proviseurs  des  pauvres  de  Laeken  reconnaissent  devoir 
à  Vabbaye  de  Grand-Bigard  une  rente  annuelle  de 
10  livres. 

(Le  dimanche  après  l'Assomption  1302.) 

Dat  zy  cont  allcn  den  ghenen  die  dese  letteren  seleu  zien 
of  hoeren  lesen,  dat  wy,  Wouter  de  Vos  ende  Mathys  Claes 
van  Osseghem,  mombore  ende  provisuers  van  den  huusar- 
men  van  der  prochien  van  Laken,  hebben  ontfaen  eenen 
scepenen  brief,  beseghelt  metten  scepenen  van  Bruessele, 
van  lier  Machiele  Van  den  Vorde,  van  Scharenbeke, 
welke  brief  hem  quam  van  Joffroiace  Heylemceghen  van 
Laken,  lier  Claes  dochter  van  Laken  wilen  was.  De  welke 
brief  sprect  van  tliien  ponden  tsiaers  erfelec,  ende  die 
ghecreghen  waren  teghen  Janne  die  men  heet  Henten  den 
Vleeschouwer  :  deen  heeliclit  vallende  te  sente  Jansmesse, 
in  den  somer  leyt,  ende  dander  heelicht  te  Kersavonde, 
alsulcs  ghelts  aise  ten  voirs.  tyden  in  borse  gheet.  Ende 
daer  voer  heeft  hy  bewyst  ende  beset  teenen  gerechten 
pande  eene  hofstad,  metten  huusinghen  daer  op  staeude, 
die  ghelegheu  in  den  steenwech  es,  iegen  Peter  Smords, 
dwers  over,  neven  tcleyne  streetken,  gelyc  datse  daer  gele- 
gen  es,  ende  mense  houdende  es  van  Goesene  den  Mol,  die 
men  heet  Goely  de  Mol,  aise  heer  van  den  gronde.  Overmits 
welken  brief  wy  bekennen  dat  wy  sculdich  zyn  den  goids- 
huyse  van  den  Groeten  Bygarden,  te  petancien  den  con- 


'  Il  était  échevin  de  Bruxelles  en  1285. 

20 


—    298    — 

vente  te  ghevene  twintich  schellinglie  tsiaers  erfelec  ende 
emmerraeer  te  ghevene  ende  te  gheldene  met  alsulcke 
paymente  aise  altoes  te  voirseiden  tyde  in  borse  glieet, 
ochte  degene  die  na  ons  comen  selen  huusarmeesters  te 
sine,  met  alsiilker  voerwairden  :  ware  dat  zake  dat  de 
voirs.  pant  yet  afname  oclite  argherde,  soe  dat  men  den 
voirs.  cheys  niet  wel  gliecrigheu  en  conste,  soe  souden  ende 
moesten  aile  diere  op  hebben  die  scade  ende  dien  cost 
draglien ,  elc  na  sine  ghelande  dat  hire  aene  heeft.  Ende 
ten  naestvolgende  Kersavonde  den  yersteu  cheys,  ende 
alsoe  vortane  van  jaer  tejaer  erfelike,  ende  emmermeer 
duerende. 

Ende  omme  dat  wy  provisuers  ende  momboren  van  den 
huusarmen  van  Lakenvoirgh.  ghenen  gemeynen  zeghel  en 
hebben,  soe  hebben  wy  w^sen  ende  beschedene  lieden  heer 
Michiele  den  Leu,  van  Bruessel,  ende  Adame  Van  Hingene, 
scepene  der  erfheeren  van  Laken,  dat  si  dit  bezeghelen  wil- 
len  met  haren  propere  zeghelen. 

Ende  wy  her  Michiel  ende  Adaem  voirg.,  overmits  beden 
wille  der  goeden  liede  ende  der  huusarmeesters  vander 
prochien  van  Laken ,  ende  omme  dat  wy  willen  ende  be- 
gheeren  dat  aile  dese  voirs.  voerweerden  wel  ende  vast 
ghehouden  bliven,  soe  hebben  wy  dit  in  kennissen  ende  in 
orconscapen  der  waerheyt  beseghelt  met  onsen  properen 
zegele.  Dit  was  ghedaen  int  jaer  Ons  Heeren  alsmen  screef 
dusentich  drie  hondert  ende  twee  ende  tsestich,  tsondachs 
na  Onze  Vrouwen  dat  men  heet  Assumptio. 

XI. 

Formule  d'un  acte  de  vente. 
(12  juin  1504.) 

Wy,  scepenen  der  erfheeren  van  Onse-Lieve-Vrouwe 
Laken  buyten  Bruessel,  gemeynlick  doen  cont  eenyegelikeu 


—    299    — 

dat  opten  dach  van  heden ,  voer  ons  ende  voere  Peeteren 
Van  Niverssele ,  rentmeester  onser  genedigen  heeren  van 
Overzenne  ende  meyer  der  iceduioe  ende  erfgenamen  loylen 
meester  Gielys  Van  Zeehroeck,  erfieeren  in  Laken  voirsc, 
comen  es  in  properen  persoen  joncker  Charles  Van  Poi- 
tiers, lieer  van  Dormans,  Oultre,  Houchies,  etc.,  soen 
wylen  heeren  Charles  Van  Poitiers,  heeren  doen  hy  leefde 
van  Dormans,  Oultre,  Houchies,  etc.,  ridders,  dien  hyhadde 
van  wylen  vrouwen  Dhorotheen  van  Osy,  geheeten  Van 
Zantberghe,  syne  geselinnen,  eyide  heeft  opgedragen  met 
xoettige  verthienissen  in  de  handen  der  voir  s.  Peter  s  Van 
Niverssele,  meyers,  ende  van  iceegen  der  voirs.  iceduioe 
ende  erfgenamemcylen  meester  Gielys  Van  Zeebroeck,  hee- 
ren van  den  gronden,  daer  over  staende ,  tôt  behoef  Jans 
Vander  Straten ,  soen  wylen  Jans  Vander  Straeten ,  een 
bunder  lants,  etc.  (suit  l'indication  de  la  situation,  des  te- 
nants et  aboutissants).  L'acte  ajoute  :  op  den  commer  van 
vier  vaten  meygersten  ende  ticintich  'penningheyi  lovens , 
den  voirs.  heeren  van  den  gronde  jaerlicx  ende  erffelicx 
vutgaende  ende  te  betalenen.  Bekeuuende,  etc.  La  suite  de 
lacté,  fait  d'après  la  formule  usitée,  a  été  abrégé.  La  date 
est  de  12  juin  1504. 

xn. 

Jugement  rendu  par  les  échevins  et  tenanciers  de  Laeken, 
dans  une  cause  pour  défaut  de  payement  de  cens. 

(19  novembre  1785.) 

Vonnis  in  contuniacium. 

Joannes-Franciscus  Van  Cools,  in  qualiteyt  van  ontfan- 
ger  van  den  Eerw.  Heere  pastoor  van  Laken,  als  erfheer 
in  't  selve  Laken,  claegere, 

Tegens 
François  Le  Grand,  inwoonder  van  Brussel,  als  besitter 


—    300    — 

van  het  perceel  gronds  genaemt  tien  Abeelen  hof,  etc.  (Suit 
rindication  de  la  situation.) 

Gesien  by  ons,  schepenen  ende  erflaeten  der  erfheeren 
in  Laeken ,  buyten  de  stadt  Brussele,  de  acten  gehoudeu 
ter  rolle  van  den  tweeden  july  1785  ende  volgende  genecht 
dagen,  tôt  ende  met  den  gène  van  den  5"^^"  november  lestle- 
den  ;  den  clieynsboeck  overgeleyt  ende  beroepen  ten  ver- 
baele  van  den  2'*''"  dito  julii  ;  de  relaesen  van  den  gereclits- 
dienaer,  waer  by  hy  relateerde  de  condbrieven  aen  den 
becondigden  te  hebben  gëinsinueert ,  respective  den  4'*'"', 
IS'^*'"  july  en  8''""  augusti  lestleden,  met  de  relative  inthi- 
matien  ende  affixie  der  exploiten  op  de  kerck  deure  van 
Laeken,  wy,  schepenen  ende  erflaeten  voornoemt,  ter  ma- 
nissen  des  officiers,  loco  des  meyers,  naer  voorgaende  advies 
van  rechtsgeleerde ,  hier  toe  als  adviseurs  benoemt  by  den 
seer  edelen  ende  eervreerdigen  heere  cancelier  van  Bra- 
bant,  decreteren  de  pêne  aen  den  becondigden  by  appoiu- 
tement  van  den  8''*""  en  22"""  october  lestleden  gecommi- 
neert,  ende  iyi  contumacium  recht  doende,  decreteren  de 
clacMe  ofte  procédure  ten  gronde  door  den  claegere  gëin- 
teuteert,  adjudiceren  den  selven  den  beclaegden  pand,  om 
by  publieke  vercoopinge,  servatis  servandis,  daer  aen  te 
verhaelen  den  achterstel  van  tliien  jaeren  cbeyns  van  eenen 
cappuyn  en  tbien  penningen  Lovens  jaerelycks,  item  de 
pontpenningen  vervallen  by  de  leste  veralienering ,  à  rato 
van  het  bedrag  van  't  taxaet  van  den  beclaegden  pand  door 
ons  gedaen,  op  den  30"""  der  maend  julii  lestleden,  met  de 
costen  t'onser  behoorelycke  taxatie  ende  moderatie. 

Aldus  geprononciëert  in  gewoonelycke  vergaederinge 
van  ons,  schepenen  ende  erflaeten,  J.-B.  Vander  Borglit, 
J.-B.  Vanden  Branden,  J.-B.  Vander  Hasselt,  H.  Van  Be- 
neden  ende  M.  De  Vleeschouwer,  aldaer  présent,  den 
jgsten  november  1785. 


—    301 


XIII. 


Robert^  chevalier  de  Bigard,  donne  à  l'ahhaye  de  Bigard 
une  somme  de  50  livres  de  Louvain  et  lui  fait  une  rente 
annuelle  de  iOO  sols  *. 

(En  mars  1266.) 

In  nomine  Sancte  et  Individue  Trinitatis,  amen. 

Noverint  universi,  tam  présentes  quara  posteri,  quod 
ego,  Robertus,  miles  de  Bygardis,  contuli  in  veram  elemo- 
sinam  priorisse  et  conventui  de  Bygardis  quinquaginta 
libras  Lovanienses,  monete  legalis  et  pagabilis.  Pro  quibus 
quinquaginta  libris  obligavi,  tytulo  pignoris,  tria  bonaria 
terre  arabilis  sita  in  agro  qui  dicitur  Wardecoutere,  prout 
tenentur  in  feodum  a  domino  Johanne  de  Bygardis,  de 
consensu  domini  J...  et  in  presentia  hominum  suorum, 
videlicet:  domini  Abrahe,  militis,  dicti  de  Molendino,  Hen- 
rici  de  Asuthert,  Joannis  de  Hameide,  Rasonis  de  Gavera 
et  aliorum  multorum  fide  dignorum.  Ita  quod  licebit  micLi 
vel  meis  successoribus  redimere  dictam  terram  in  festo 
Omnium  Sanctorum.  Volo  eciam  quod  dicta  priorissa  et 
nominatus  conventus  fructus  dicte  terre  in  suos  usus  libère 
convertant  quo  adusque  prenominata  surama  pecunie  sit 
eisdem  plenarie  persoluta.  Quos  quidem  fructus  in  puram 
elemosinam  contuli  et  legavi.  Insuper  assignavi  dictis 
monialibus  centum  solidos  annui  reditus  super  allodio 
meo  sito  in  loco  qui  dicitur  Deutelegoem.  Quos  centum 
solidos  dicte  moniales  percipient  et  habebunt  donec  de 
aliis  quinquaginta  libris  sit  sepedictis  monialibus  satisfac- 
tum.  Nec  licebit  miclii  dictos  redditus  redimere,  nisi  in 
festo  Omnium  Sanctorum. 

In  cujus  rei  testimonium  présentes  litteras  ipsis  contuli 

'  Cette  pièce  aurait  dû  former  la  septième  annexe. 


—    302     — 

sigilli  mei  ac  sigillorum  virorum  venerabilium  investiti  de 
Dielbeke  et  investiti  de  Bygardis  munimine  roboratas. 

Datum  et  actum  anno  Domini  m°  cc°  lx°  vi°,  mense 
martio. 

XIV. 

Exemple  de  la  vente  publique  d'un  livre  censal. 

(20  octobre  1676.) 

[Extrait.) 

Conditien ,  ordonnantien  ende  voorweerden  daer  op  dat 
joncker  Nicokius-Franciscus  Coradin,  met  vuytganck  der 
berrender  keerse,  sal  vercoopen  de  schoone  heerleyckheyt 
van  Steen,  haer  extenderende  onder  de  Prochie  van  Uccle, 
Droogenhosch,  Beersel,  Alsembergh,  Dioorp  (Tourneppe), 
Linkenbeek ,  Stalle,  etc.,  consisterende  in  een  leenhoiï,  met 
syne  achterleenen  ende  verheffen,  daertoe  stellende  stadt- 
hoiider,  leenmannen  ende  greffier.  Item,  eenen  schoonen 
chegnsboeck ,  hestaenàe  in  haver,  cappuynen,  hinnen,  eye- 
ren  ende  andere  specien  van  scliellingen  ende  penningen 
lovens,  etc.,  behelsende  in  de  negentich  items  oft  posten, 
jaerlycx  vuytbrengende  entrent  de  tachentich  guklens, 
met  oock  ket  reckt  van  te  stellen  meyer,  laeten,  greffier 
ende  pretere,  dienende  tôt  'terven  ende  onterven  van  de 
goederen  daer  onder  ckeyns  geklende,  ende  de  gront  pro- 
ceduere  van  de  leengoederen  der  selver  keerlyckkeyt... 

Suivent  les  conditions  de  la  vente.  Le  procès-verbal 
constate  que  la  seigneurie  de  Steen  et  le  livre  censal  de- 
meurèrent à  M.  Corneille  Van  Reynegom,  greffier  du  con- 
seil des  finances,  dernier  enckérisseur,  pour  la  somme  de 
17,400  florins. 


—    303    — 


APPENDICE, 


l'ancienne  coutume  de  laekbn,  traduite  et  annotée  par 
M.  CHARLES  STALLAERT. 

Dits  doude  heerhringhen  van  der  vryheyt  van  Laken , 

by  Brussel. 

1.  In  den  iersten,  soe  wat  goecle  dat  binnen  Laken  gele- 
gen  es,  ende  dat  glieeft  van  den  dachwande  v  deniers  nuwe 
ende  een  vat  gheersten  oft  een  vat  evene ,  dat  es  pontgelt 
sculdiclî,  dats  te  verstaene  van  elcken  ponde,  xii  d. 

2.  Item,  soe  waer  inen  Ij^ftocht  op  dit  voirscreve  goet 
vercochte,  dat  is  halff  pontgelt  sculdich. 

3.  Item,  van  dat  men  verzimct  *  van  dooder  liandt,  daer 
geeftmen  aff,  vanden  dachwande,  m  deniers  borseghelts, 
ende  alzoe  voirt ,  gelande  gelyck ,  nae  dat  tsgoets  vêle  es. 

4.  Item ,  van  goede  dair  cleyn  scbout  ^  op  steet  ende  vet- 
glielt  ',  daer  geeftmen  af,  alst  men  vercoopt,  elck  van  hen 
diet  vercoopt  ende  ontfaet ,  xxxii  d.  borseghelts  ;  ende  dit 
hoort  ten  Uckelschen  redite. 

5.  Item ,  aise  hier  de  scepenen  overstaen  als  ment  ver- 
wandelt,  soe  hebben  zy  Yii  d.  nuwe,  ocht,  daerment  be- 
commert,  van  alzoe  menigher  manisseu  als  daeroppe 
gevalt,  zoe  es  men  sculdich  vu  d.  nuwe. 

6.  Item,  van  dat  men  verzuyct  ^  van  dooder  haut,  van 
goede  daer  cleyne  schout  ^  ontgheet  ' ,  dair  ^  daer  gheeft- 
men  aff  xxxn  d.  borseghelts. 

*  Nous  croyons  qu'il  faut  lire  :  vercrycht. 

*  Nous  croyons  qu'il  faut  lire  :  cleyn  schot. 
'  Lisez  iiutgheet. 

*  Le  mot  dair  est  ici  de  trop. 


—    304     - 

7.  Item,  soe  moet  men  desen  paclit  ende  chys  betalen 
altoes  tsmaendaigs  nae  Sinter  Servaes  dacli,  die  in  den 
mey  valt;  ende  dese  glieerste  ochle  evene  en  macli  men 
niet  verdinghen ,  en  zy  datse  de  scepenen  gepresen  liebben , 
hoe  goet  dat  zy  sy  op  dien  dach. 

8.  Item,  soe  wair  men  dan  ierst  '  den  heere  zynen  pacht 
ende  zynen  cheyns  niet  en  betaelde  ten  voirschreven  dai- 
ghe,  soe  mach  die  heer  drie  genechten  doen,  dan  bem 
totten  goede  -  daermen  den  chys  aiï  gheeft,  ende  den  laet  te 
weten  doen  met  oirconscape,  oie  ende  '  by  zynen  chys  be- 
talen*; ende  en  betaelt  men  bem  binnen  dien  tyde  dan 
niet,  soe  sal  die  heer  boeten  nemen  telcken  geneechte ,  ende 
van  elcker  boeten  lu  s.  nuwe ,  haltï  den  heere  ende  halff 
den  scepenen.  Ende  ten  vierden  genechte ,  soe  sahnen  den 
heere  wysen  zyne  handen  te  slane  aen  dat  voirschreve  goet , 
ende  vroement  ende  ontvroement,  totter  tyt  dat  men  hem 
zynen  principalen  pacht  ende  cheins  betaelt  hadde ,  ende 
daertoe  al  zyn  costen  ende  scaden  die  hy  dairop  gedaen 
hadde.  Ende  als  de  heer  tenegen  goeden  doet  daighen ,  soe 
moet  die  heere  met  twee  scepenen,  ten  minsten,  zitten 
inde  kercke  te  Laken,  ende  verbeyden  daer  totter  tyt  dat 
de  clocke  geluydt  es  van  der  noenen  ;  ende  en  quame  die 
gliene  die  tgoet  ane  hoorde  daerenbinnen  niet,  ende  dade 
den  heere  genoech  van  dat  hy  hem  sculdich  waer,  soe  soude 
hem  die  heer  met  dien  twee  scepenen  doen ,  nader  noenen , 
te  dien  goede,  ende  ten  anderen  genechte  desgelycx  zoude 
hy  oick  doen,  ende  met  twee  andere  scepenen,  ende  ten 
derden  oie  alzoe ,  ende  ten  vierden  soude  men  hem  wysen 
dat  hy  zyn  handen  ane  dat  voirschreve  goet  slaen  soude , 
gelyck  dat  voirschreve  es. 

'  Au  lieu  de  :  soe  wair  tnen  dan  ierst,  lisez  :  soe  wat  men  dan. 
'  Lisez  :  soe  mach  die  heer,  met  drie  genechten,  hem  doen  doen  tot- 
ten goede. 

*  Au  lieu  de  :  oie  ende,  lisez  :  ten  ende. 

*  Au  lieu  de  :  betalen,  lisez  :  betale. 


—    305     - 

9.  Item,  soe  wie  saten  heeft  binnen  Laken,  eucle  alser 
een  sterft  van  dieu  die  zaten  houden ,  zoe  sal  die  ghene  die 
de  saten  heeft  liebben  de  beste  beeste  die  daer  bl3'ft ,  sonder 
eene,  vuytgescheyden  peerden,  daer  en  es  meu  niet  aff 
sculdich  met  reclite.  Ende  en  zyn  daer  egheen  beesten,  soe 
macii  hy  nemen  het  dbeste  schoenheyt  dat  daer  blyft ,  son- 
der een;  ende  wairen  zy  zoo  arm,  dat  zy  beesten  nocli 
schoenheden  en  hadden,  soe  soiiden  zy  geven  v  st.  bor- 
segelts. 

10.  Yoirts  es  te  wetene  :  wair  eenicli  goet  versterft ,  van 
dien  dat  voirg.  es ,  op  kinden  daer  brudren  ende  zusteren 
zyn,  daer  en  hebben  de  zusteren  niet  aen,  het  blyft  al  op 
de  broederen;  maer  men  es  sculdich  altoes,  nae  bancrecht, 
de  zusteren  te  versiene  ende  te  goedene  by  raide  van  hae- 
ren  gemeynen  vrienden.  Ende  waer  dbedde  scheet  ende 
daer  goet  blyft  van  dien  dat  hier  voer  es  geseeght,  soe  sal 
de  ghene  die  lancxst  leeft,  van  vader  ende  moeder,  dat 
goet  halff  behouden  tôt  zynre  tocht,  ende  de  kinder  dander 
heelicht.  Ende  zoe  Avanneer  die  lanxstlevende  dan  sterft, 
soe  gheet  dat  goet,  dat  hy  t'synre  tocht  hielt,  dair  '  scul- 
dich es  te  gaen  nae  zyn  doot. 

11.  Item,  soe  waer  van  desen  goeden  ygerincx  van  den 
zyden  versterft,  dat  blyft  al  op  de  broedere;  ende  daer  zoe 
en  hebben  de  zusteren  niet  daerane,  het  en  waer  datter 
egheen  bruederen  en  waeren ,  soe  bleeft  op  de  zuster  oft  op 
haere  kinderen. 

12.  Item,  waert  dat  eene  sate  verstorve  op  hen  ni*^",  oft 
op  hen  mr",  oft  op  hoe  meneghen  dat  ware ,  storven  van 
dien  die  de  sate  hielden,  soe  soude  hebben  die  heere 
daeraff  ghelande  gelyck  nae  '^ 

•  Lisez  dairt. 

"  Il  faut  probablement  ajouter  ici  :  dat  tsgoets  vêle  es ,  comme  à 
l'art.  3. 


—    306    — 

13.  Item,  soe  wanneer  die  heere  den  sate  betimmert  be- 
geert  te  hebben ,  soe  moet  die  gène  die  de  zate  houdt , 
bynnen  eenen  jaer  nae  dat  men  hem  met  orconscapen  voer 
scepenen  verzuect ,  die  sate  betymmeren ,  ende  dair  mach 
hy  dan  ecn  liuys  op  setten ,  dat  drie  pont  Loevensche  weert 
zy;  ende  daer  met  moet  hem  die  heer  laten  genueghen; 
ende  dat  huys  moet  men  metten  scepenen  ende  met  tym- 
meluden  *  doen  prysen ,  oft  weert  es  gelyck  dat  scuhlich  is 
te  zyne;  ende  betymmert  hyt  binnen  den  tyde  niet  gelyck 
dat  voirsch.  is,  soe  mach  de  heere  zyne  handen  slaen  aen 
tgoet  dat  de  zate  scuklich  es ,  ende  vroement  ende  ontvroe- 
ment,  totter  tyt  toe  dat  hy  hebbe  dat  hy  scuklich  es  te 
hebbende  [hebbene]. 

14.  Item,  waer  een  zate  versterft,  soe  selen  die  ghene, 
daer  se  op  versterft,  deylen  bruederlyc,  susterlyc,  even 
ghelyck  in  de  zate. 

15.  Item,  de  heeren  van  Laken  hebben  tsjaers  twee  gou- 
daighen,  den  eenen  sdyssendaighs  naest  tsmaendaighs  nae 
sinte  Servaesdach,  als  zy  hueren  cheins  ontfaen  hebben, 
ende  den  anderen  tsmaendaighs  nae  dertiendach ,  ende  dan 
es  men  schuldich  tsondaighs  te  voren  te  gebiedende  [te 
ghebiedene]  in  de  kercke  der  scepenen  van  Laken  -,  die  bin- 
nen der  prochien  van  Laken  woenen ,  dat  zy  te  dien  daighe 
comen,  ende  den  scepenen  van  Laken  ',  die  buyten  der 
voirschreve  prochien  woenen,  eest  men  scuklich  te  laten 
weeten  tôt  hueren  huyse,  met  oirconscapen  ;  ende  en  qua- 
men  zy  daer  niet,  alst  hen  ontboden  ware,  [als]  in  de 
kercke,  oft  tôt  hueren  huyse,  de  weete  gedaen  waer,  soe 
soude  de  gène  zyn ,  die  daer  niet  en  quame ,  op  ii  st.  nuwen , 
den  heeren  gemeynlyck  te  deylen. 


*  Lisez  :  tymnierluden. 

*  Nous  croyons  qu'il  faut  supprimer  ici  les  mots  :  der  scepenen. 

'  Au  lieu  de  :  den  scepenen  van  Lahen,  nous  croyons  qu'il  faut 
lire  :  den  laten  van  Laken. 


—    307    — 

16.  Item ,  es  men  sculdicli  den  scepenen  van  Laken  tsjaers 
twee  eteutyde  te  Bruessel  te  geven  ;  den  eenen  es  men  scul- 
dich  te  geven  her  Henricli  van  Wittham ,  op  de  goede  dat 
compt  van  zynre  dochter  weghen. 

17.  Item ,  den  anderen  etentyt  zyn  hen  sculdich  de  andere 
heeren  van  Laken ,  onder  lien  gemeyniyck  te  gevene ,  den 
scepenen  elck  heere. 

18.  Item,  als  de  scepenen  van  Laken  dese  etentyde  ver- 
soclit  hebben  ende  mense  hen  niet  en  gave ,  elck  nae  zyne 
gelande  gelyck,  dan  souden  de  scepenen  van  Laken  dien 
heere ,  daer  de  faute  inné  waer ,  eglieeu  vonnisse  wysen  dat 
hun  stade  doen  mochte ,  totter  tyt  dat  hem  daeraff  genoech 
gedaen  ware. 

19.  Item,  tgoet  dat  men  van  Clase  van  Laken  hieit  ende 
dat  comen  es  op  Willems  wyf  van  Ketterbeke,  ende  dat 
boven  vi  d.  nuwe  gheeft  van  den  dachwande ,  dat  es  pont- 
gelt  sculdich  als  men  [t]vercoopt,  dats  te  verstaene  van 
elcken  ponde  xii  d.  ;  ende  daermen  lyftochte  op  alsulcken 
goet  vercoopt,  dats  sculdich  van  den  ponde  vi  d.,  ende 
daermen  ontfaet  van  dooder  handt,  soe  gheeft  men  m  d. 
borseghelts  van  den  dachwande. 


TRADUCTION. 

DBOITS  ET  JURIDICTION  DES  SEPT   SEIGNEURS   FONCIERS    DE   LAKEN- 
NOTRE-DAME,   PRÈS   BRUXELLES. 

Anciennes  traditions  de  la  franchise  de  Laken,  près  Bruxelles. 

1 .  Premièrement ,  tout  bien  situé  sous  Laken ,  donnant , 
par  journal,  5  deniers  nouveaux  et  un  boisseau  d'orge,  ou 
un  boisseau  d'avoine,  doit  payer  les  droits  de  lods  et 
ventes,  c'est-à-dire  douze  deniers  de  chaque  livre, 


—    308    — 

2.  Item ,  lorsqu'on  vend  une  pension  viagère  sur  ledit 
bien,  on  est  tenu  d'en  payer  un  demi-droit  de  lods  et 
ventes. 

3.  Item ,  celui  qui  acquiert  un  bien  mainmortable  paie 

trois  deniers  argent  courant  par  journal,  et  ainsi  de  suite 
à  raison  de  la  quantité. 

4.  Item,  lorsqu'on  vend  un  bien  qui  paie  le  petit  cens, 
celui  qui  le  vend  et  celui  qui  l'achète  paient  chacun  trente- 
deux  deniers  argent  courant.  Et  ceci  est  au  droit  d'Uccle. 

5.  Item,  lorsque  les  échevins  assistent  à  une  mutation 
de  biens  ou  à  une  impignoration,  ils  reçoivent  sept  deniers 
nouveaux,  et  de  chaque  semonce  faite  au  sujet  d'un  bien 
ils  ont  sept  deniers  nouveaux. 

6.  Item,  lorsqu'on  acquiert  un  bien  mainmortable  qui 
paie  le  petit  cens,  on  en  donne  trente-deux  deniers  ar- 
gent courant. 

7.  Item,  ces  fermage  et  cens  doivent  toujours  être  payés 
le  lundi  après  la  Saint-Servais ,  au  mois  de  mai ,  et  cette 
orge  ou  ce  froment  ne  peuvent  être  rachetés  sans  que 
les  échevins  ne  les  aient  estimés  au  prix  du  jour. 

8.  Item,  si  quelqu'un  ne  payait  pas  son  fermage  et  son 
cens  audit  jour,  le  seigneur  peut  se  faire  mettre  eu  pos- 
session du  bien  dont  on  paie  le  cens,  par  trois  plaids,  en 
faisant  l'intimation  au  tenancier ,  avec  des  témoins ,  pour 
qu'il  paye  le  cens;  et  si  on  ne  le  paie  pas  endéans  ce 
terme ,  le  seigneur  prendra  une  amende  à  chaque  plaid , 
chacune  de  trois  sous  nouveaux,  moitié  pour  le  seigneur, 
moitié  pour  les  échevins.  Au  quatrième  plaid,  on  sen- 
tenciera  que  le  seigneur  peut  mettre  la  main  sur  ledit 
bien  et  le  défructuer  jusqu'à  ce  qu'on  lui  ait  payé  son  fer- 
mage et  cens ,  en  principal ,  avec  frais  et  dommages.  Et 
lorsque  le  seigneur  exerce  des  poursuites  sur  un  bien,  il 
doit  siéger  dans  l'église  de  Laken  avec  deux  échevins  au 
moins ,  et  y  attendre  que  la  cloche  de  midi  ait  sonné. 


—    309    — 

Et  si  le  propriétaire  du  bien  ne  se  présentait  pas  dans 
l'entretemps ,  et  ne  contentait  pas  le  seigneur  de  ce  qu'il 
lui  doit,  celui-ci  pourrp^it,  Taprès-midi ,  se  rendre,  avec 
ces  deux  éclievins,  sur  le  bien;  il  ferait  de  même  au 
second  plaid  avec  deux  autres  échevins  ;  de  même  encore 
au  troisième  plaid,  et  au  quatrième  on  sentencierait  qu'il 
peut  mettre  la  main  sur  le  bien,  comme  il  est  dit  ci-dessus. 

9.  Item,  quiconque  a,  dans  Laken,  des  semeures  ^  aura, 
lorsqu'un  de  ceux  qui  tiennent  ces  semeures  vient  à  mou- 
rir, la  meilleure  bête  après  la  meilleure.  Quant  aux  che- 
vaux, on  n'est  pas  obligé  d'en  rien  donner.  Et  s'il  n'y 
a  pas  de  bêtes ,  il  peut  prendre  la  plus  belle  parure  qui  y 
reste ,  après  la  meilleure.  Et  s'ils  étaient  si  pau\Tes  qu'ils 
n'eussent  ni  bêtes  ni  parures,  ils  donneraient  cinq  sous 
argent  courant. 

10.  Est  à  savoir  ensuite,  lorsqu'un  des  biens  susdits 
échoit  par  succession  à  des  enfants,  et  qu'il  y  a  des 
frères  et  des  sœurs,  les  sœurs  n'y  ont  aucun  droit,  le 
tout  reste  aux  frères;  mais  on  est  toujours  obligé,  d'après 
le  droit  local ,  à  pourvoir  et  doter  les  sœurs ,  avec  l'avis 
de  leur  parenté  commune. 

Lorsque,  à  la  dissolution  d'un  mariage,  il  y  a  des  biens 
de  la  nature  de  ceux  susdits ,  l'époux  survivant  conservera 
la  moitié  pour  son  usufruit,  et  les  enfants  l'autre  moitié. 
Et  après  la  mort  du  survivant  le  bien  qu'il  tenait  en  usu- 
fruit ira  du  côté  qu'il  doit  aller. 

11.  Item,  si  un  de  ces  biens  échéait  par  succession  en 
ligne  collatérale ,  le  tout  resterait  aux  frères ,  et  les  sœurs 
n'y  ont  aucun  droit;  à  moins  qu'il  n'y  eût  pas  de  frère, 
en  ce  cas  le  bien  écherrait  à  la  sœur  ou  à  ses  enfants. 

12.  Item,  si  une  semeure  échéait  par  décès  à  eux  trois, 
ou  à  eux  quatre,  ou  à  quelque  nombre  [d'enfants]  que  ce 

•  Voir  les  annotations. 


—    310    — 

fût,  et  qu'il  en  mourût  de  ceux  qui  tiennent  la  semeurs, 
le  seigneur  percevrait  son  droit  à  l'avenant. 

13.  Item,  lorsque  le  seigneur  requiert  qu'il  soit  construit 
une  maison  sur  la  semeure ,  celui  qui  tient  la  semeure  doit 
y  construire  une  maison ,  endéans  l'année  qu'il  en  a  été 
requis  devant  éclievins  et  par  témoins;  il  peut  alors  y 
bâtir  une  maison  qui  vaille  trois  livres  louvanois,  et  le 
seigneur  doit  s'en  contenter.  Et  l'on  doit  faire  priser  cette 
maison  par  les  éclievins  et  par  des  charpentiers,  pour 
qu'on  sache  si  elle  vaut  ce  qu'elle  doit  valoir.  Et  s'il  [le 
mansionnaire]  n'y  construit  pas  de  maison  endéans  le 
terme  susdit,  le  seigneur  peut  mettre  la  main  sur  le 
bien  qui  doit  la  semeure,  et  l'exploiter  jusqu'à  ce  qu'il 
ait  son  dû. 

14.  Item,  lorsqu'une  succession  de  semeure  est  ouverte, 
ceux  à  qui  elle  échoit  la  partageront  fraternellement  et 
sororialement  d'une  manière  égale, 

15.  Item,  les  seigneurs  de  Laken  ont  annuellement  deux 
plaids  généraux,  l'un  le  mardi  qui  suit  le  lundi  après  la 
Saint-Servais,  lorsqu'ils  ont  perçu  leur  cens,  et  l'autre  le 
lundi  après  les  Rois.  On  est  obligé  de  publier  le  dimanche 
précédent ,  en  l'église  de  Laken ,  que  ceux  [les  mansion- 
naires]  qui  demeurent  dans  la  paroisse  de  Laken  doivent 
venir  ce  jour-là;  et  à  ceux  qui  demeurent  hors  de  ladite 
paroisse,  on  est  obligé  de  le  notifier  à  leur  maison  et 
avec  témoins.  Ceux  qui  ne  comparaîtraient  pas  lorsqu'il 
leur  a  été  ordonné  à  l'église ,  ou  qu'il  leur  a  été  notifié  à 
leur  maison ,  encourraient  une  amende  de  deux  sous  nou- 
veaux, à  partager  en  commun  par  les  seigneurs. 

16.  Item,  on  est  obligé  de  donner  annuellement  aux 
échevins  de  Laken  deux  repas;  l'un  doit  leur  être  donné 
par  messire  Henri  de  Witham,  sur  les  biens  qui  lui 
viennent  de  la  part  de  sa  fille. 

17.  Item,  l'autre  repas  doit  leur  être  donné  par  les 
autres  seigneurs  de  Laken,  entre  eux  en  commun. 


—    311     — 

18.  Item,  s'il  arrivait  que  les  écbevins  de  Laken  avaient 
requis  le  repas  et  qu'il  ne  leur  fût  pas  donné  [par  les 
seigneurs],  chacun  pour  sa  quote-part,  les  échevins  ne 
in'ononceraient  plus  de  sentence  qui  pût  être  profitable 
à  celui  qui  serait  en  défaut,  jusqu'à  ce  qu'il  eût  été 
contenté  [dudit  repas]. 

19.  Item,  le  bien  que  l'on  tenait  de  Nicolas  de  Laken, 
qui  est  échu  à  la  femme  de  Guillaume  Van  Kesterbeke ,  et 
qui  donne  [au-delà  de]  six  deniers  nouveaux  le  journal, 
doit  payer  lods  et  ventes  quand  on  le  vend ,  c'est-à-dire 
douze  deniers  par  livre;  et  lorsqu'on  vend  une  rente  via- 
gère sur  pareil  bien,  on  en  doit  payer  six  deniers  par 
livre;  et  lorsqu'on  le  reçoit  de  mortemain,  on  donne 
trois  deniers  argent  courant  par  journal. 


ANNOTATIONS. 

La  coutume  de  Laken,  mise  au  jour  par  M.  Galesloot,  comble  une 
lacune  parmi  les  publications  de  la  commission  royale  des  anciennes 
lois  et  coutumes  ;  elle  n'a  été  découverte  par  lui  que  postérieurement 
à  la  publication  des  coutumes  du  Brabant.  Indépendamment  de 
cette  utilité ,  elle  offre  un  intérêt  tout  particulier,  en  révélant  des 
usages  relatifs  à  la  condition  des  personnes  qui  remontent  à  une 
époque  assez  reculée,  peut-être  très-reculée  du  moyen-âge.  Elle  doit 
avoir  été  mise  par  écrit  vers  la  fin  du  XIII''  ou  au  commencement 
du  XIV«  siècle,  comme  la  coutume  ancienne  d'Uccle,  et  présente, 
par  conséquent,  un  intérêt  tout  particulier  au  point  de  vue  du  droit, 
comme  au  point  de  vue  de  la  linguistique.  En  nous  efforçant  de  tra- 
duire cette  coutume  aussi  fidèlement  que  possible,  nous  avons  saisi 
l'occasion  d'en  relever  quelques  traits  remarquables,  en  même  temps 
qu'un  terme  obscur  que  nous  n'avons  rencontré  nulle  part. 

Art.  8.  Très-nombreux  sont,  dans  le  cours  du  moj'en-âge,  les 
exemples  d'actes  passés  dans  les  églises  et  sur  les  cimetières  ;  mé- 
lange curieux  du  sacré  et  du  profane  à  une  époque  où  les  individus 
et  les  corps  n'étaient  pas  moins  jaloux  de  leurs  droits  et  de  leurs 


—     312    — 

privilèges  que  nos  contemporains  ne  le  sont  de  leurs  droits ,  voire 
parfois  encore  aussi  de  leurs  privilèges.  Ces  séances  judiciaires 
tenues  dans  l'église  de  Laken  par  les  seigneurs  et  les  échevins  de 
l'heptarchie,  sont  un  trait  de  mœurs  et  un  usage  plus  accentués 
encore,  et  qui  nous  semlAent  mériter  d'être  relevés. 

Art.  9.  C'est  la  première  fois  que  ce  mot  se  présente  à  nous  dans 
cette  acception,  soit  sous  la  forme  prolongée  de  sate,  zate,  ou  simple 
de  saet,  zaet.  De  longues  recherches  nous  ont  fixé  sur  sa  significa- 
tion, et  prouvé  que  nous  avons  affaire  à  un  dérivé  de  zaaien,  semer 
(d'où  zaad,  semence),  et  non  de  zitten,  zat,  gezeten,  être  assis,  étal)li. 
Le  Leccicon  manuale  ad  scriptores  niediœ  et  infimœ  latinitatis  de 
Maigne  d'Arnis  donne  les  mots  :  semenatura  et  seminatio,  et  expli- 
que ainsi  le  premier  :  terra  arabilis  et  seminabilis ,  seu  quœ  seri 
potest,  ten^e  labourable  ou  rpii  est  propre  à  recevoir  la  semence; 
olim  terre  semeure  (Ch.  ap.  Steph.)  ;  le  second  :  terra  seminatioiiis, 
seminalis,  que  seri  consuevit  ;  terre  que  Von  ensemence  habituelle- 
ment,  qui  est  propre  à  recevoir  la  setnence,  olim  semeure  (a"  1192). 
Nous  trouvons  le  mot  sous  la  forme  latine  dans  le  Livre  des  feuda- 
taire^  de  Jean  III,  duc  de  Brabant ,  de  M.  L.  Galesloot,  page  82  : 
GoDEFRiDUS,  Nycholaus  et  Henricus,  liberi  quondaih  Henrici  de 
Tilia  (Van  der  Lynden),  resignaverunt  in  manus  ducis  quoddam 
feodum  situm  apud  Pellemherch,  valens  vu  solidos ,  iiii  denarios 
annuatim.  Inde  sunt  homines  féodales  :  Willelmus,  custos  de  Pellem- 
herch, tenens  in  feodum  unam  satam  continentem  unum  jornale  et 
iiii  jornalia  cuni  dimidio  terre  ;  item,  idem,  1  jornale  prati;  Leonius 
dictus  Amman  ;  etc.  Un  grand  nombre  d'exemples,  contenus  dans  ce 
précieux  ouvrage,  ne  laisse  aucun  doute  sur  l'équivalence  des  mots 
sate  et  semeure  :  page  20  :  Arnoldus  dictus  Tymmerman,  de  Bladel, 
tantum  terre  arabilis  apud  Bladel,  supra  quam  seminari  possunt  an- 
nuatim XX  lopen  seminis  (Kiliaen  :  lupe ,  lup-saed ,  loop-saed,  lup- 
saed,  campin.j  50  roeden  lands)  ;  p.  33  :  Daniel  de  Aj'gere...  un  mo- 
diatas  terre...  ;  et  en  note  :  lisez,  selon  le  Stootboeck  :  land  iiii  mudde 
saeds  op  te  sayene  ;  (page  ISG  :  Johannes,  Johannis  Spikermans , 
iiii  mudssaets  terre...)  ;  page-93  :  Henricus  de  Beyre,  terram  pro 
m  modiis  seminis...  ;  page  111  :  Heylwigis,  filia  Reinoldi  de  Inde, 
de  Beke,  tantum  terre  supra  quam  seminatur  1  Lopen  siliginis  seu 
seminis...  ;  page  117  :  Henricus  de  Broke,  de  Rixstel,  quandam  ter- 
ram arahilem  jacentem  apud  Rixstel,  supra  quam  seminari  possunt 


—    313    — 

annuatim  un  modii  siliglnis  vel  circiter;  p.  112  :  Henhicus  Sne- 
PAERTS,  sone,  de  Straten,  ii  agros  terre...  supra  qvios  seminantur 
Il  modii  seminis....;  unum  pratum   dictum   de  Breempt   ende  de 
Breemt,  acker  lants  up  te  sayene  1  mudde  saeds...;  page  130  :  Ja- 
COBUS  DE  LivE  tenet  vu  modios  seminis  et  rai  bonaria  prati  et  man- 
sionem  apud  Oesterwyc;  page  178  :  Joannes,  Jans  jonglien  sone,  de 
Heusdenne,  tantum  terre  supra  quam  seminantur  vu  modii  seminis, 
iiii  bonaria  prati,  1  mansionem,  1  mansionarium  apud  Oesterwj-c. .., 
et  page  184  :  Johannes,  filius  Hereberti;  p.  226  :  Petrus  Poels,  et 
p.  263  :  Theodericus  de  Valgate,  feudataires  dont  nous  pouvons, 
brevitatis  causa,  supprimer  les  postes.  Citons  encore,  avant  de  dé- 
poser Le  livre  des  feudataires,  p.  133,  note  4,  la  forme  gesate  :  Claes 
Van  der  Dussen...  Item,  M  noch  syn  huis  ende  syn  gesate  ter  Dussen , 
met  II  hoven  lants  daeraen  gelegen,  etc.  —  Un  petit  manuel,  espèce 
de  tarif,  intitulé  :  Den  schat  der  cheynsen,  réimprimé  à  Bruxelles  et 
augmenté  par  J.-B.  de  Leeneer,  en  1704,  mais  qui  malheureusement 
fourmille  de  fautes  typographiques,  renferme,  au  sujet  du  mot  sate, 
un  renseignement  curieux  ;  il  y  est  encore  écrit  zaet,  zade,  zate  et 
saet;  le  mot  y  est  employé  dans  le  sens  de  redevance,  mais  le  sens 
primitif  du  mot  y  est  assez  transparent,  vu  qu'on  ne  bâtit  pas  sur 
une  redevance,  et  qui  est  peut-être  bien  applicable  à  l'art.  13  de 
notre   coutume.   Sous  la  rubrique  Binsten  ende  servituten  buyten 
Loven ,  on  lit  p.  37  :  Een  zaet  dat  men  treckt  op  eenen  gro7it  daer 
een  huys  op  staet,  0.  0.  0.  1.  6.  Baer  geen  op  en  staet,  00.  1.2.  12. 
Een  zaet  onder  Lubbeeck,  ^  0.  0.  0.  15.  Onder  Corbeke  over  Loy... 
—  Een  zade,  0  0.  1.  0.  0.  —  Een  zate  {sic),  ^  0.  0.  0.  15.  —  Coesa- 
tere  (sic)  oft  coysaet,  elck  is  ^  0.  1.  0.  12.  Enfin  :  Een  zaet  cappuyn, 
op  welcken  gront  dien  uytgaet,  indien  daer  geen  huys  op  en  staet, 
m,oet  daervoor  jaerlycx  geven  eenen  cappuyn  in  specie,  gelyck  een 
ander  cappuyn  ;  maer  indien  den  proptrietaris  daer  een  huys  op  stelt, 
soo  moet  hij  het  soo  hoogh  stellen  dat  den  gront-heer  ende  syn  knech- 
ten,  sittende  te  peerde  met  een  lancie  gericht,  can  staen  ende  schnylen, 
en  is  niet  gehouden  den  saet  cappuyn  noch  in  specie,  noch  in  gelde  te 
betaelen;  maer  indien  het  huys  soo  hoogh  niet  en  is ,  moet  hy  den 
cappuyn   in  specie  blyven   betalen ,   blyvende  den   gy^ont   oltyt  sub- 
ject,  etc.  Voici  la  traduction  de  ce  dernier  passage  :  Le  débirentier 
d'une  redevance  (zaet)  d'un  chapon  (il  faudrait  cappiiyn-zaet?)  dont 
le  fonds  est  grevé  de  cette  charge  et  sur  lequel  il  ne  se  trouve  pas  de 
maison,  doit  donner  annuellement,  de  ce  chef,  un  chapon  en  nature, 


—    314    — 

comme  un  autre  chapon  >  ;  mais  si  le  propriétaire  (c'est-à-dire  le 
délnr entier)  construit  une  maison  sur  ce  fonds,  il  doit  la  construire 
si  haut  que  le  seigneur  foncier  et  ses  valets  (knechten,  écuyers?)  assis 
à  cheval,  avec  une  lance  dressée,  puissent  se  tenir  sous  le  toit  et  s'y 
abriter,  il  ne  doit  plus  servir  le  chapon,  ni  en  nature  ni  en  argent  ; 
mais  si  la  maison  n'est  pas  si  haute,  il  doit  continuer  à  donner  le 
chapon  en  nature,  le  fonds  restant  toujours  sujet,  etc. 

Le  mot  sate  ou  saet  a  une  autre  origine  et  une  autre  signification 
dans  les  mots  modernes,  onderzaet,  sujet,  et  landzaet,  indigène,  ainsi 
que  dans  le  vieux  mot  historique  kossaet  [kot-saet ,  de  kot ,  casa), 
(dans  Kiliaen  kossate,  merssenier  [lisez  meyssenier\ ,  vêtus.  Cliens 
ducis  Brabantiee),  que  l'on  a  tort,  d'autant  plus  tort  de  traduire  par 
H  journalier,  »  dans  le  vieux  langage,  que  le  mot  est  encore  en 
pleine  vigueur  aujourd'hui  en  Brabant  et  signifie  un  cultivateur  qui 
a  deux  ou  trois  vaches  ;  en  bas-allemand  Kotsete,  der  auf  einer  Kote 
sitzt,  Bewohner  einer  Kote,  homo  casatus.  Kossathe  (Schiller  et 
Lùbben).  Ici  nous  avons  bien  devant  nous  la  racine  zitten,  sedeo, 
resideo,  à  laquelle  se  rattachent  aussi  les  landzaten,  hovemans,  zaten 
ou  havezaten,  dans  les  Nederduitsche  regtsoudheden  de  Noordewier, 
page  87. 

Art.  16.  Nous  lisons  dans  Le  livre  des  feudataires  de  Jean  III, 
p.  117  :  Henricus,  dictus  Braes,...  Item,  xv  solidos...;  item,  unura 
prandium  in  bonis  de  Vellinghen.  M.  Galesloot  ajoute,  à  la  note  4  : 
JEnde  een  etentyt,  also  hi  seeght,  sjaers,  die  hem  die  late  gheven,  also 
men  hier  voirtyts  gedaen  heeft  ende  geplogen.  «  Et  annuellement  un 
repas,  à  ce  qu'il  dit,  que  lui  donnent  les  mansionnaires,  comme  de 
coutume.  »  Nos  échevins  de  Laken  avaient  aussi  leur  repas  annuel, 
comme  on  le  voit.  Nous  croyons  pouvoir  faire  remarquer,  à  ce  sujet, 
contrairement  à  ce  qui  fut  avancé  l'an  dernier  dans  un  journal  sérieux, 
à  propos  des  honoraires  alloués  récemment  à  des  échevins,  que  les 
échevins  nos  ancêtres  n'avaient  pas  seulement  des  repas  ou  des  fes- 
tins de  deux  et  trois  jours,  mais  que,  indépendamment  de  leur  drap 
annuel,  ils  jouissaient  des  frais  de  justice,  ainsi  que  des  honoraires 
des  actes  aujourd'hui  réservés  aux  notaires,  dont  on  peut  voir  le 
détail  dans  la  plupart  des  coutumes,  et  que,  par  conséquent,  leurs 
fonctions  n'étaient  pas  aussi  gratuites  qu'on  paraît  le  croire.  Bien 
au  contraire. 

1  C'est-à-dire,  sans  doute,  de  grandeur  moyenne. 


315     - 


U  CORPORATION  DES  PEINTRES 

DE    BRUXELLES  •• 


1644. 

M.  Guillaume  Van  den  Schoor  (fils  d'Etienne),  de  Bruxel- 
les, bourgeois.  16  janvier. 

François  Mossens  (fils  aîné  de  François),  de  Bruxel- 
les, bourgeois.  16  janvier. 

Jean  Van  der  Sanden  (fils  de  Jean),  de  Bruxelles. 
18  juin. 

André  Goteman  (fils  de  Jean),  de  Bruxelles,  bour- 
geois. 18  juin. 

Simon  Lemmens  (fils  de  Jean),  de  Bruxelles,  bour- 
geois. 22  août. 

Jean  Arys  (fils  de  Pierre) ,  de  Bruxelles  ;  élève  d'An- 
toine Salaert.  17  novembre. 

Jean-Baptiste  SALAERTs(fil3  d'Antoine),  de  Bruxelles; 
élève  de  son  père.  22  décembre. 

A .  François  Van  Niverseel  (fils  de  Jérôme) ,  de  Bruxelles , 
bourgeois;  chez  Jean-Baptiste  Van  Heil.  16  janvier. 

Pierre  Adriaensens;  chez  Nicolas  Schinkels.  15  juin. 

Nicolas  Van  der  Malen  (fils  d'Antoine);  chez  Jean 
Van  Dalen.  18  juin. 

»  Suite.  —  Voir  année  1877,  S^  livr.,  p.  289. 


o 


16 


Albert  Van  Loos'vtilden  (fils  de  Moraut)  ;  chez  Pierre 
de  Backere.  21  juin. 

Jacques  Wylixgen  (fils  de  Renier) ,  né  à  Haren  ;  chez 
Daniel  Van  Schoor.  22  août. 

Simon  Lemmexs  (fils  de  Jean) ,  de  Bruxelles ,  bourgeois. 
22  août. 

Thomas  de  Vos;  chez  Pierre  Guset,  orfèvre.  Il  avait 
été  convenu  qu'il  apprendrait  la  peinture.  22  août. 

Henri  Van  Leeu  ;  chez  Antoine  Sallaert.  22  août. 

Jean  Ballais  (fils  de  Gilles),  de  Bruxelles,  bourgeois; 
chez  Pierre  Van  der  Borcht.  14  novembre. 

Gilles  Classens  (fils  de  Jacques) ,  de  Bruxelles ,  bour- 
geois; chez  Paul  Van  der  Elst.  15  novembre. 

1645. 

M.  Daniel  Lentees  (fils  de  Gilles,  maître).,  de  Bruxelles. 
12  juin. 

Nicolas  de  Smet  (fils  de  François),  de  Bruxelles, 
élève  de  Pierre  Van  de  Plassche.  12  juin. 

Charles- Alexandre  Van  Geel  (fils  de  François) ,  de 
Bruxelles;  élève  de  Jean  Van  Velthove.  12  juin. 

Salomon  Novelliers  (fils  de  David,  maître),  de 
Bruxelles.  12  juin. 

Jacques  de  Meester  (fils  de  Jacques) ,  de  Bruxelles. 
12  juin. 

Pierre  Van  Gindertalen  (fils  de  Jacques) ,  de  Bruxel- 
les; élève  de  David  Novelliers.  22  juin. 

A .    Guillaume  Van  der  Biest  (fils  de  Pierre) ,  de  Meer- 
hout ,  dans  la  Campine  ;  chez  Guillaume  Lesterbos. 
24  février. 
Jacques  de  Peutter  (fils  d'Hubert),  de  Bruxelles; 
cliez  Corneille  Kerckjans.  11  mars. 


—    317    — 

Jean  de  Sanghere  (fils  de  Daniel) ,  de  Bruxelles , 

bourgeois;  chez  Jacques  de  Backer.  10  mai. 
Jean  Van  Vollesom  (fils  de  Paul),  de  Bruxelles;  chez 

Pierre  Van  de  Plas.  10  mai. 
Jean-Coeneille   de    Ridder  (fils  de  Jacques),  de 

Bruxelles;  chez  Jacques  Arto.ys.  19  juin. 
Georges  de  Loeys  (fils  de  Georges) ,  de  Bruxelles  ;  chez 

Jean  Van  Bronckorst.  19  juin. 
Jean  Van  den  Daele  (fils  de  Pierre),  de  Bruxelles; 

chez  Richard  Van  Orly.  3  juillet. 


1646. 

M.   Pierre  Van  den  Berghe  (fils  d'Antoine),  d'Anvers, 
bourgeois.  29  mai. 

A.    Jean-Baptiste   Fabri    (fils    de    Jean-Baptiste),    de 

Bruxelles;  chez  Jacques  Artois.  14  mars. 
Adam-François  Van  der  Meulen  (fils  de  Pierre),  de 

Bruxelles;  chez  Pierre  Snaers.  18  mai. 
Gilles  de  Geldo  (fils  de  Martin),  de  Bruxelles;  chez 

Daniel  Van  Heil.  18  mai. 
Henri  Ingels,  alias  Inghels  (fils  de  Gérard),  de 

Bruxelles;  chez  Nicolas  Van  der  Oost.  18  mai. 
Jacques  Wauters  (fils  de  feu  Jean),  de  Bruxelles, 

bourgeois;  chez  Antoine  Van  Bever.  13  novembre. 
Jacques  Corremans  (fils  de  Jacques),  de  Bruxelles; 

chez  Pierre  Meert.  13  novembre. 
Corneille  Goosens  (fils  de  Jean) ,  de  Bruxelles  ;  chez 

Antoine  Van  Opstal.  1 3  novembre. 
Guillaume  de  Kempeneer,  orfèvre;  chez  Léon  Van 

Heel.  20  novembre. 
JÉRÔME  Ballais  (fils  de  Gilles),  de  Bruxelles;  chez 

Pierre  Van  der  Borcht.  28  novembre. 


318 


1647. 

M.   Henri  Finet  (fils  de  Jean),  de  Bruxelles;  élève  de 

Daniel  Van  Heel.  18  février. 
PiEREE  Segees   (fils    de  Dominique),  de   Bruxelles. 

18  février. 
Christophe  Merlyn,  de  Bruxelles,  bourgeois;  élève 

de  Pierre  de  Veuster.  2  mai. 
Christophe  Goffin  ,  de  Bruxelles.  2  mai. 
Jacques  Bosdonck  ,  d'Anvers.  7  décembre. 

A .  Jean-Baptiste  de  Carrion  (fils  de  Corneille ,  procu- 
reur et  notaire  du  conseil  de  Brabant),  de  Bruxelles; 
chez  Philippe  Van  der  Elst.  4  janvier. 

Charles  de  Croy  (fils  de  Charles),  de  Bruxelles,  bour- 
geois ;  chez  Gaspar  de  Crayer.  1 1  février. 

Jean-Baptiste  Berseer,  de  Bruxelles;  chez  Jacques 
de  Backer.  l^r  août. 

Louis  le  Ceohar  ,  de  Bruxelles  ;  chez  Jacques 
Fayd'erbe.  17  novembre. 

1G48. 

M.   PiOBERt    Dandelot  (fils  de   Pierre),   de    Bruxelles, 
bourgeois;  élève  d'Antoine  Sallarts.  23  juin. 
Adrien  Van  den  Broeck  (fils  d'Adrien),  de  Bruxelles, 
bourgeois;  élève  de  Gaspar  de  Crayer.  5  août. 

A.    GÉRARD  DE  PtUEL,   de  Bruxelles;  chez   Daniel  Van 
Heil.  20  avril. 
Nicolas  de  Lagrené;  chez  Jean  Van  Daelen.  30  juin. 
Albert  Firens  ;  chez  Pierre  Gindertael. 
François  Dispo;  chez  Léon  Van  Heil.  30  juin. 
Abraham  Van  Ayent;  chez  Nicolas  Artois.  5  août. 


—    310 


1G49. 


M.  Jean  Schoreils  (fils  d'Antoine) ,  de  Bruxelles ,  bour- 
geois, l*^''  avril, 

Philippe  Van  der  Baeen  (fils  de  feu  François),  de 
Bruxelles.  21  avril. 

Antoine  Britseels  (fils  de  Philippe),  de  Bruxelles. 
21  avril. 

Antoine  Symons  (fils  de  Michel),  de  Bruxelles.  21  avril. 

A.    Martin  Laerelinckel;  chez  Jean  Wouters.  15  juin. 
Antoine    Van   den    Hecke    (fils    de  François),   de 

Bruxelles;  chez SnaejTs.  10  juillet. 

^  Jean  Van  den  Steen  (fils  de  Charles)  ;  chez  Antoine 
Sallart.  25  juillet. 
Phipippe  Bolognino  (fils  de  François) ,  bourgeois  ;  chez 

Antoine  Van  Opstal.  27  octobre. 
Jacques-Philippe   Offhuys  (fils  de  Philippe);  chez 
Antoine  Van  Bevere.  16  décembre. 


1650. 

M.    Charles  Nore  (fils  de  Gérard),  de  Bruxelles.  1 5  janvier. 
Bauduin  Bedet  (fils  de  Pierre),  de  Bruges,  bourgeois. 

15  janvier. 
François  Coppens (fils  de  Pierre,  maître),  de  Bruxelles. 

15  janvier. 
François  Martinès  (fils  de  François),  de  Bruxelles. 

15  janvier. 
Philippe   Schallie   (fils  de   Pierre),   de  Bruxelles. 

13  mai. 
Jean  Van  Opstal  (fils  d'Antoine ,  maître),  de  Bruxelles. 

26  mai. 
Jean  de  Haese  (fils  de  Jean) ,  de  Bruxelles.  26  mai. 


—    320    — 

jMartin  Van  der  Venne   (fils  de  Martin,  maître), 
bourgeois.  15  septembre. 

A .    Lancelot  Voldees  (fils  de  Georges)  ;  chez  Pierre  Van 

Gindertaelen.  8  avril. 
François  Brokin,  alias  Beockin  (fils  de  Valentin),  de 

Bruxelles;  chez  Gérard  Van  Hoogstadt.  l^i"  mai. 
Jean  Vranx  (fils  de  François)  ;  chez  Lambert  de  Plins. 

1er  mai. 
Claude  (  Gelaudé)  Fige  (fils  de  Claude)  ;  chez  Antoine 

Sallart.  4  mai. 
Pierre  de  Werremon  (fils  de  Jacques);  chez  Gilles 

Van  Waeyenberck.  30  août. 
Florentin  le  Febure  (fils   de  Jacques);  chez  Jean 

Van  Vethove  {sic).  30  août. 

1651. 

M.  Pierre  Achtschellincx  (fils  de  Jean) ,  de  Bruxelles , 

bourgeois;  élève  de  Philippe  Van  der  Elste.  29  jan- 
vier. 
Laurent  de  Wemer  (fils  de  Laurent) ,  de  Bruxelles , 

bourgeois;  élève  de  Gérard  Van  Hooghstadt.  l^^  mars. 
Érasme   Kroocx,  alias  Kroockx  (fils  de  Jean),  de 

Bruxelles ,  bourgeois  ;  élève  de  Léonard  Naghels. 

l^"^^  mars. 
Daniel  Valiant  (fils  de  Jean,  maître),  de  Bruxelles, 

bourgeois;  élève  de  Gérard  Hooghstadt.  5  mars. 
Jean-Baptiste  Cleysens,  alias  Clysens  (fils  de  Gilles, 

maître) ,  de  Bruxelles ,  bourgeois.  5  mars. 
Louis  de  Vleeshal^er  i^fils  de  Gaspar),  de  Bruxelles); 

bourgeois;  élève  de  Daniel  Van  Heil.  5  mars. 
François  Van  der  Meulen  (fils  de  Pierre  ,  maître) ,  de 

Bruxelles ,   bourgeois  ;   élève   de   Pierre  Snaeyers. 

5  mars. 


-    321    — 

JossE  Van  Kbaesbeick.  Il  avait  fait  son  apprentis- 
sage à  Anvers,  devenu  bourgeois  de  Bruxelles. 
5  mars  K 

Jacques  Wauters  (fils  de  Jean) ,  de  Bruxelles ,  bour- 
geois; élève  d'Antoine  Van  Bevere.  12  mars. 

Wauti  ,  de  Mons.  Il  avait  fait  son  apprentis- 
sage hors  des  Pays-Bas.  14  mars. 

Lambert  de  Blondel  ,  de  Bruxelles ,  bourgeois.  17  dé- 
cembre. 

A.  Guillaume  Klaret  (fils  de  Marc);  chez  Jacques 
de  Backer.  13  février. 

Jean-Baptiste  de  Deschamps  -  (fils  de  Jean-Baptiste), 
de  Bruxelles;  chez  Gérard  Van  Hooghstadt.  29  sep- 
tembre. 

Jean  Marssche  ,  de  Bruxelles  ;  chez  Jean-Baptiste 
Van  Heeil.  3  octobre. 

Jacques  ]\Iahi  (fils  de  Jean),  de  Bruxelles;  chez  Jean- 
Baptiste  Van  Heil.  20  décembre. 

1652. 

A.  Antoine  Carpentier;  chez  Pierre  Van  Ghendertaele. 
18  janvier. 

Jean  Bastuynne  ,  alias  de  Bastuyxne  (fils  de  Fran- 
çois); chez  Michel  Benoeyt.  24  janvier. 

Gilles  Donkerwolck  (fils  de  Jérôme);  chez  Pierre 
Meirt.  25  janvier. 

Thomas  Cortinck  (fils  de  Jean-Baptiste),  bourgeois; 
chez  Antoine  Van  Opstal.  5  juin. 


'  A  propos  de  son  inscription  comme  maître,  il  est  dit  qu'il  a 
fait  pour  les  receveurs  de  la  ville  un  tableau  estimé  200  florins. 
*  Le  scribe  a  écrit  Deschmps,  sans  a. 


322    — 


Antoine  Daems  (fils  de  Jean) ,  bourgeois  ;  chez  Alexan- 
dre-Charles Van  Geeil.  15  juillet. 

Ame  (Amatis)  Billaert  (lils  de  Louis) ,  de  Bruxelles , 
pauvre  orphelin  ;  chez  Michel  Everenbroeyt. 

1653. 

M.   François  Van  Nyversel,  de  Bruxelles.  9  mars. 
Alexandre  Van  Avent,  de  Bruxelles.  9  mars. 
François  de  Smet,  de  Bruxelles,  bourgeois.  29  juin. 
Henri  Van  Bronkost  (fils  de  feu  Jean,  maître),  de 
Bruxelles.  29  juin. 

A.   Jean  Leenaert  (fils  de  feu  Jean),  de  Bruxelles;  chez 

M^"  Kraeer.  5  février. 
Adrien  Roombauts  (fils  de  feu  Martin),  de  Bruxelles; 

chez  M""  Kraesebeck.  10  février. 
Josse  Diericks,  de  Bruxelles;  chez  Nicolas  Artoos. 

10  octobre. 
Henri  Huysmans;  chez  Jean-Baptiste  Saelaerts. 
César  Herremans,  de  Bruxelles;  chez  Guillaume  Van 

Schoer.  12  août. 
Pierre  Van  Waetom,  de  Bruxelles;  chez  M»'  Artoos. 

12  août. 
Pierre-Philippe  Kavelleer,  de  Bruxelles  ;  chez  Go- 

defroid  Aalaert  [sic).  12  août. 
Philippe   Boellon,   de  Bruxelles;  chez  Pierre   de 

Backer.  12  août. 
Jean  Gillet,  de  Bruxelles;  chez  Jean  Van  Opstal. 

14  août. 
Pierre  Van  der  Meulen,  de  Bruxelles;  chez  François 

Van  der  Meulen.  1 5  août. 
Philippe  Reenters,  de  Bruxelles;  chez  Matthias  Van 

den  Steene.  15  août. 


—    323    — 

Andké  {Andries)  DE  Brauwer  (fils  d'Antoine),  do 

Bruxellos;  chez  Guillaume  Van  Sclioer  ^ 
Pierre  Hellinck  (fils  de  Pierre),  de  Bruxelles;  chez 

Daniel  Van  Heil. 
Jérôme  de  Vadder  (fils  de  feu  Hubert),  de  Bruxelles; 

chez  Pierre  Van  Ghindertael. 
GÉRARD  Mysens  (fils  do  Simon),  de  Bruxelles;  après 

avoir  travaillé  pendant  quatre  ans  chez  son  frère 

Jean,  il  entre  chez  Pierre  Meert, en  1653. 
Luc  ViTERS  (fils  de  Jacques),  de  Bruxelles;  chez  Josse 

Van  Craesbeck. 
Thomas  Monnorino  (fils  de  feu  Hubert),  de  Bruxelles; 

chez  Charles  Wautirs. 
Ignace  Van  den  Stock   (fils  de   feu   Antoine),  de 

Bruxelles  ;  chez  Louis  de  Vadder. 
Pierre  la  Coert,  de  Bruxelles;  chez  Jean-Baptiste 

Sallarts  \ 
Jean  Denens  (fils  de  feu  Bernard),  de  Bruxelles;  chez 

Pierre  Miert. 
Louis-Ernest  (ffemese)  Janvier,  de  Bruxelles;  chez 

François  Martini. 
Jacques  PtUBBENS  (fils  de  feu  Martin),  de  Bruxelles; 

chez  ]\P"  Snayers. 
Guillaume  de  Gyn  (fils  de  feu  Jean)  ;  chez  Guillaume 

Van  Schoer. 
Antoine  Stroobant  (fils  de  Pierre),  de  Bruxelles; 

chez  Alexandre  Van  Avent. 
Etienne  Gilis  (fils  de  Pierre),  de  Bruxelles;  chez 

Antoine  Van  Opstal  '. 


*  Ce  nom  et  les  suivants  ne  sont  accompagnés  d'aucune  date  :  plu- 
sieurs doivent  dater  évidemment  de  1654. 

2  II  est  dit  qu'il  n'a  payé  que  le  demi-droit  en  qualité  de  graveur 
{plaets7iyer). 

*  Il  n'a  payé  que  le  demi-droit. 


—    324 


1654. 


M. Van  den  Bemden,  devenu  bourgeois.  Juillet. 

Gilles  Tilborch,  devenu  bourgeois.  26  mars. 
Pierre  Van  den  Winckel  (fils  de  Josse ,  maître) ,  de 

Bruxelles ,  bourgeois. 
Guillaume  Van  Schoer  ,  de  Bruxelles ,  bourgeois. 
Jean  Van  der  Vinnen  ,  de  Bruxelles ,  bourgeois. 

A.   François  Van  den  Beividen  (fils  de  feu  Adrien),  de 

Bruxelles;  chez  François  In  den  Vyl  {sic). 
Jean  Van  der  Bussche  ,  de  Bruxelles ,  bourgeois  ;  chez 

Engelbert  Van  den  Bossche. 
Jean  Van  der  Bussche,  de  Bruxelles,  bourgeois;  chez 

Léon  Van  Heel. 
Thomas  Laquointe;  chez  Léon  Van  Heel  K 

Jean-Baptiste  Rosinoiet;  chez  Martin 

Philippe    Van    Dapelb,    de    Bruxelles,    bourgeois; 

chez  Jacques  Artoies  ^. 

1655. 

M.   Gérard  Meyssens  ,  de  Bruxelles. 

Roland  Van  der  Schempt,  de  Bruxelles. 

A.    Jean  Volsom;  chez  Pierre  Van  Gindertaelen. 

1656. 

A.    François  Monna ville  (fils   d'Ernest);  chez  Gaspar 
de  Crayer. 
JÉRÔME  Zeti  (fils  d'Adrien),  bourgeois;  chez  Gilles 
Tilborch. 


'  Il  n'a  payé  que  le  demi-droit. 

*  Plusieurs  des  noms  qui   ne  sont  accompagnés   d'aucune  date 
peuvent  aj^ijarteuir  au  premier  semestre  de  l'année  1655. 


—    325     — 

Jean-Baptiste  Van  den  Beugge,  bourgeois;  chez 

Jean  de  Loes. 
Renier  Meganck  (fils  de  bourgeois)  ;  chez  Léon  Van 

Heil. 
François  Toussaint  (fils  de  bourgeois);  chez  Pierre 

Van  Gindertaele. 
Jean  Vastenavent  (fils  de  bourgeois);  chez 

Snayers. 

1657. 

M.  Henri  de  Hemelaer  ,  de  Malines.  27  janvier. 
Jean  Verschueken,  de  Malines.  27  janvier, 
Guillaume  Lambillot,  bourgeois,  l^r  mars. 
François  Van  Froenhoeven  ,  bourgeois.  3  mars. 
Jean  d'Artois  (fils  de  Jacques,  maître).  26  avril. 
Pierre  Hellinck  (fils  de  feu  Pierre) ,  de  Bruxelles  ; 

élève  de  Daniel  Van  Heel. 
Luc  Achtschellincx  (fils  de  feu  Jean) ,  de  Bruxelles  ; 

élève  de  Pierre  Van  der  Beurght.  1 7  décembre. 
Jacques  Van  den  Deies  (fils  de  feu  Gérard),  de 

Bruxelles;  élève  de  Jean  Van  Dalen.  17  décembre. 
Jean  Jacop  (fils  de  Jacques). 
Lancelot  Voldees  (fils  de  feu  Georges) ,  de  Bruxelles; 

élève  de  Pierre  Van  Gindertalen. 
Gaspar  Van  Eycke. 

Van  Uffel. 

Jacques  de  Potter. 
François  de  Fossé. 

A.   Jean-Baptiste  Borremans  (fils  de  feu  Gérard),  de 
Bruxelles;  chez  Michel  Swerts. 
François  Paradis  (fils  de  Jean),  de  Bruxelles;  chez 
Jean  Van  Opstal. 


—     326    — 

Jean  la  Couet  (fils  de  Guillaume),  de  Bruxelles;  chez 

Gilles  Tilborcht. 
Pierre  Viviée  (fils  de  feu  Pierre)  ;  chez Wau- 

tiers. 
Guillaume  Ruto  ;  chez  M^  Duschatel. 

1658. 

M.  Alexandre  Van  Hersen  (fils  de  feu  Alexandre),  de 
Bruxelles. 
Jean  Van  Pale  (fils  de  feu  Pierre) ,  de  Bruxelles. 
Dayid  Wauweemans  (fils  de  feu  Léonard),  de  Bruxelles. 

A .  LÉONARD  Uytenhoeven  (fils  de  Guillaume) ,  de  Bruxel- 
les ;  chez  M^  de  Crayer. 

Robert  de  Longé  (fils  de  feu  Martin) ,  de  Bruxelles  ; 
chez  Jacques  de  Potiers. 

Pierre  Van  Es  (fils  d'Adrien) ,  de  Bruxelles  *  ;  chez 
Pierre  Meert. 

Pierre  Kerckhove  (fils  de  feu  Philippe- Jean) ,  de 
Bruxelles  ;  chez  Jean-Baptiste  Van  Heel. 

Jean  Vinckx  (fils  de  Louis),  de  Bruxelles;  chez  Gilles 
Tilborcht. 

Guillaume  Robyns  (fils  de  Guillaume),  de  Bruxelles; 
chez  Pierre  de  Backer. 

1659. 

A .   Christophe  Lotin;  chez  Luc  Achschiellin. 

Jacques-François  Tacke  (fils  de  Georges);  chez  Jean 
Van  Opstal. 

1660. 

M.   Michel  Van  Nerye,  né  en  Hollande. 

»  Il  était  muet. 


—    327     — 

Jean-Baptiste  Deschamps  (fils  de  Jean) ,  de  Bruxelles. 
.  Ignace  Van  der  Stock  ,  de  Bruxelles. 
François  Yogelsianck. 

A.   Henri-Exgelbert  Lerotjes  (fils  de  feu  Charles);  chez 

François  Coppens. 
Michel  Fortitjen  (fils  de  Jacques) ,  de  BriLxelles  ;  chez 

Jean  de  Loos. 
Gilles  Van  der  Neeuwerstadt  (fils  de  Pierre),  de 

Bruxelles;  chez  Pierre  Van  Gindertalen.  12  mai. 
Maxeviilien  Van  Liewe  ,  de  Looz  (Loon)  ;  chez  Fran- 
çois Coppens. 

Adrien  Hernandus;  chez Loosvelt. 

Jean  Fraeyenborch  (fils  de  Simon)  ;  chez  Gilles  Tiel- 

borch. 
Gilles  Van  Auwerkerck  (fils  de  Jean) ,  de  Bruxelles  ; 

chez  Daniel  Van  Hiel. 
Pierre   Hykens   (fils  de  Jean),  de  Bruxelles;  chez 

Pierre  de  Backer. 
Henri  Wavers  ;  chez  Alexandre  Van  Geel. 
Edouard  Sanderlin,  de  Malines;  chez  M""  Snyders. 

13  novembre. 

1661. 

M.    Pierre  Van  Orley  (fils  de  François ,  maître).  1 3  février. 
Ml"  Primo,  20  juin, 
Daniel  de  Beet,  bourgeois.  11  octobre. 

A.    Clalt)E  Cannaut  (fils  de  Nicolas);  chez  Ignace  Van 

der  Stock,  10  janvier. 
François  Van  Elewyck  ;  chez  Pierre  Van  der  Borcht. 
Thomas  le  FÈVERE"(fils  de  Ptomain);  chez  Gaspar  de 

Crayer.  18  juin. 
Ambroise ;  chez  Charles  Wautier.  6  juillet. 


—     328    — 

PiEREE  Capuyns  (fils  de  Gaspar);  chez  Pierre  Mert. 

6  juillet. 
Andbé-Pieree    du    Bael;    chez   Luc    Achscellinge. 

8  juillet. 
Thomas  Piens  (fils  de  Thomas),  de  Bruxelles;  chez 

François  Van  der  Meulen.  3  octobre. 

1662. 

M.   GÉRARD  Van  Bemel,  bourgeois.  13  mars. 
Gilles  Doncker,  bourgeois.  2  juin. 
Corneille  Van  Impel;   élève   de   Jacques  Arthois. 

13  octobre. 
Gilles  Donckerwolck,  bourgeois.  2  juin. 

A.   Henri-Charles  Van  Daele  (fils  de  François);  chez 

Van  der  Borcht.  26  mai. 

Christophe  Huygens  (fils  de  Gilles),  bourgeois;  chez 

]\P  Primo.  28  mai. 
Charles-Ignace  Van  Eefberch  (fils  de  Roland)  ;  chez 

Pierre  Van  Gindertael.  30  mai. 
Jean  Van  der  Bruggen  (fils  de  Gérard),  bourgeois; 

chez  Gilles  Tilborcht.  5  juin. 
Pierre-Balthazae   du    Bal  ,    de    Bruxelles  ;    chez 

M'  Ducatel  {sic).  18  juin. 

1663. 

M.   Gabriel  de  Bruyn  (fils  de  maître).  20  mai. 

Michel  de  Prins  (fils  de  maître).  Il  est  inscrit  comme 

maître  à  la  date  du  20  mai ,  mais  n'est  pas  admis  à 

prêter  serment,  n'étant  pas  encore  majeur.  Il  n'a 

prêté  serment  que  le  27  juin  1674. 
Jean  de  Peutter  (fils  de  maître),  17  août. 
Jean-Charles  Van  Brems  ,  devenu  bourgeois.  Il  avait 

fait  son  apprentissage  à  Anvers.  4  octobre. 


—     329    — 

A.   François  Thierlincx  (fils  de  Pierre),  bourgeois;  chez 

Laiicelot  Volders.  6  février. 
Ignace   de   Backer;  chez  Jean-Baptiste  Van  Heel. 

10  février. 
ToBiE  ScHOONEMAJsrs,  né  à  De  venter  (fils  de  Conrad); 

chez  jNI'"  Primo.  1 5  mai. 

1664. 

31.   Balthazar  Leshayeer  (?).  27  mai. 
VoLSOM.  Octol)re. 

A.    Jacques  Van  der  Porten,  né  à  Heyghem;  chez  Michel 

Prins.  1  mars. 
François  Volsom  (fils  de  Nicolas),  bourgeois;  chez 

Ml'  Wautiers.  14  août. 
François  Lepies,  de  Bruxelles,  bourgeois;  chez  Gilles 

Tilborch. 
François  Volders,   de  Bruxelles;  chez  Luc  Acht- 

schellinck. 

1665. 

M.   .....  Bonnecroy. 

Jean-Baptiste  Van  den  Broeck,  né  bourgeois; 
26  octobre. 

Adrien-François  Boudewtns,  de  Bruxelles,  bour- 
geois; élève  dlgnace  Van  der  Stock.  22  novembre. 

A.   Jean  Marines;  chez  Gilles  Tilborch,  peintre  de  la 
ville.  8  juillet. 
Adrien-François  Boudewyns. 

1666. 

M.   Jean  Denens,  bourgeois.  22  juin. 

22 


—     330    — 

Claude  Aber  (fils  de  Claude),  bourgeois.  22  septembre. 

RiLLAERT ,  bourgeois.  26  septembre. 

Gilles  de  Backer,  bourgeois.  18  octobre. 
Fraxçois  Eyckens,  bourgeois.  15  décembre. 

A.    Gabriel  de  Baxst;   chez  Jean-Baptiste  Yan  Heel. 

25  août. 
André-Igxace  Cosyns  ;  chez  M""  Volsom.  22  septembre. 
François  Eydams    (fils  d'Henri);  chez  Jean  Arys. 

10  noYembre. 


1667. 

M.   Michel  Fortin;  élève  de  M»"  de  Loos.  15  février. 
Degyn. 

1668. 
31.   Théodore  Van  Heil  (fils  de  Daniel).  21  juin. 

1669. 

M.   Philippe  Van  Dapels  (fils  de  Pierre.  12  mai). 
Jean-Baptiste  Van  Geel  (fils  de  maître).  12  mai. 

1670. 

M. de  Champ aigne. 

Thomas  Pients,  de  Bruxelles.  28  septembre. 

A.   JossE  Lambert;  chez  Jean  de  Loos.  24  octobre. 


1671. 

M.  Jean-Baptiste  de  Backer  (fils  de  maître). 
PlERRE-JoSSE  (Jauce)  Balt)t. 


9  0. 


81 


1672. 
M.  Jean  de  Meiîlin.  17  février. 

1673. 

M.   Martin  de  la  Court,  l^i- juillet. 

Pierre  Herrebos  ifils  de  Jean),  de  Bruxelles. 
Jean  Leonardis,  de  Bruxelles.  19  septembre. 
Jean  Van  den  Bruggen,  de  Bruxelles.  22  septerûbre. 
François  Toussyn,  de  Bruxelles.  28  septembre. 

A.   Ferdinand  Collyens;  chez  Gaspar  Van  Eyck.  20  jan- 
vier. 
Jean  Van  Avent  ;  chez  Pierre  Segers. 

1674. 
M.  Mathieu  Helmont.  16  septembre. 

A.  Pierre  Bedet,  chez  Luc  Achtschellincx.  16  septembre. 

1675. 

M HuYSMANS.  13  janvier. 

Henri-Charles  Van  Dale.  16  juin. 
David  Teniers,  le  Jeune.  28  juillet. 
Jean  Van  Avont.  18  octobre. 

A.   Jean-Baptiste  Van  Dist,  chez    David    Teniers,  le 

Jeune.  28  juillet. 
Salomon  Daurecour;  chez  David  Teniers,  le  Jeune. 

28  juillet. 
Claude  Daurecour  ;  chez  David  Teniers ,  le  Jeune. 
Victor  Janssens  ;  chez  Lancelot  Volders.  2  septembre. 


—    332     — 


1676. 


M.   Pierre  Leremans.  28  avril. 

Gilles  Van  Auwerkercken  ,  de  Bruxelles,  l^i"  juillet. 

Abbé.  13  juillet. 

Jean-Baptiste  Rossinoll  ,  de  Bruxelles  (fils  de  bour- 
geois). 22  août. 

A.  Lambert   Sangers;   chez   Jean-Baptiste   Van    Heil. 

22  mai. 
Simon  Bijean;  chez  Luc  Achtschellincx.  2  juin. 
Charles  Lottemberch;  chez  Guillaume  Van  Schoor. 

10  juin. 
Charles  Van  Bakergom,  alias  Van  Baeciœrgom,  de 

Bruxelles,  fils  de  bourgeois;  chez  Thomas  Pints. 

10  juin. 

(Pour  être  C07itinué). 

Alex.  Pinchaet. 


333     - 


L'ŒUVRE  DE  CHARLES  ONGHENA. 


—  —aagoog 


Dans  les  premiers  mois  de  l'année  1824,  ^^ 
direction  du  Messager  des  sciences  et  des  arts,  alors 
publié  par  la  Société  royale  des  beaux-arts  et  de 
littérature,  confia  à  Charles  Onghena  l'exécution, 
à  titre  d'encouragement,  de  trois  planches  au  trait. 
Cet  essai  qui  surprit  vivement  la  direction ,  attira 
sur  l'artiste  l'attention  et  la  sympathie  des  ama- 
teurs. D'après  les  conseils  de  Liévin  De  Bast,  de 
Ch'  Van  Hulthem  et  de  Norbert  Cornelissen ,  il 
fut  résolu  que  la  commission  directrice  s'adresse- 
rait désormais  au  jeune  graveur  pour  la  repro- 
duction des  tableaux ,  dessins  et  objets  d'art 
destinés  à  figurer  dans  la  Revue.  On  ne  pouvait 
faire  un  meilleur  choix.  Nul  en  Belgique,  à  cette 
époque,  ne  travaillait  d'une  manière  plus  sûre, 
plus  élégante  même ,  et  ne  rendait  plus  fidèle- 
ment le  caractère  des  œuvres  qu'il  s'agissait  de 
reproduire. 

A  partir  de  cette  année ,  Onghena  n'a  cessé  de 
collaborer  au  Messager,  pour  lequel  il  a  gravé  au 
delà  de  300  planches. 


—      oo4      — 

La  direction  de  notre  Revue  voulant  rendre 
aujourd'hui  un  juste  homraage  à  cet  excellent  et 
vaillant  artiste,  m'a  chargé  de  recueillir  ses  œuvres 
et  d'en  faire  la  description.  Je  m'aquitte  de  ma 
mission, 

Charles  Onghena,  fils  de  François,  orfèvre,  et 
de  dame  Isabelle  Dierens  ,  est  né  à  Gand  le 
6  juin  1806.  Il  a  donc  72  ans  accomplis. 

A  peine  âgé  de  12  ans,  il  maniait  déjà  le  burin. 
Son  premier  essai  date  de  1818. 

En  1826  il  obtint,  à  l'académie  de  Gand,  le 
i^''  prix  pour  le  dessin  d'après  la  figure  antique. 

Au  concours  de  1832,  à  l'occasion  de  l'exposi- 
tion triennale  des  beaux-arts,  le  jury  lui  décerna, 
à  l'unanimité ,  la  i''^  médaille  pour  la  gravure  au 
trait  et  la  i""^  médaille  pour  la  gravure  sur  bois. 

Nous  nous  bornerons  à  passer  rapidement  en 
revue  son  œuvre  qui  est  considérable,  —  il  compte 
au  delà  de  mille  pièces,  —  notre  intention  étant 
de  reprendre  plus  tard  ce  travail  et  d'étudier  de 
plus  près  le  caractère  et  la  valeur  des  principales 
productions  de  Ch.  Onghena. 


1818. 

I.  Médaille.  Emblème  de  la  science.  Légende  : 
p"  PRIX  d'honneur  pour  l'arithmétique. 

Diam.  0,047  niill. 
Premier  essai  de  gravure  de  Charles  Onghena.  Il  ne  s'en 
est  conservé  qu'une  seule  épreuve,  laquelle  fait  partie  de  la 
collection  de  l'artiste. 


OOÔ 


I819. 

2.  Paysage.  Un  château  fort;  fond  monta- 
gneux; petites  ligg.  sur  l'avant-plan.  Inscription  : 
Par  Ch'.  Onghena  le  V  Avril  m.  d.  c.  c.  g.  xix. 

H.  0,065.  L.  0,117. 
Exemplaire  unique  dans  la  collection  de  l'auteur. 

3.  Le  sacré  cœur.  Un  cœur  entouré  d'une  cou- 
ronne d'épines  surmonté  d'une  croix.  Autour  du 
cœur  des  rayons  et  des  anges.  Forme  ovale.  Aux 

quatre  coins  un  fleuron. 

H.  0,104.  L.  0,078. 

La  bibliothèque  de  l'université  de  Gand  en  possède  un 
exemplaire  tiré  sur  satin.  Un  autre  sur  papier  se  trouve  dans 
la  collection  de  l'auteur.  Nous  ne  connaissons  que  ces  deux 
exemplaires. 

4.  Encadrement  de  carte  :  guirlande  entourée 

de  quarts  de  cercle. 

H.  0,058.  L.  0,080. 

1820. 

5.  Saint  Paul.  Le  saint  est  debout,  la  main 
droite  appuyée  sur  une  épée.  Inscription  en  deux 
lignes  :  st.  paul  Apôtre  des  Gentils. 

H.  0,079.  L.  0,056. 
(Sans  l'inscription). 

6.  Écu  surmonté  d'une  lyre  et  de  branches  de 
laurier;  à  droite  et  à  gauche  des  arbres,  autour 


—    33  G    — 

desquels  voltigent  des  oiseaux;  sur  l'avant-plan 

deux  cygnes. 

H.  o,o6i.  L.  0,098. 

Nous  ne  connaissons  que  deux  épreuves  de  cette  pièce  et 
de  la  précédente. 

7.  Un  amour  déposant  une  couronne  de  lau- 
rier sur  un  vase  à  fleurs;  à  côté  un  saule  pleureur; 
à  droite  l'emblème  du  dessin.  Inscription  :  Pré- 
senté a  ma  chère  mère  la  veille  de  sa  fête  S^^  Jsabelle, 

le  30  août  1820. 

H.  0,075.  L.  0,106. 

Planche  tirée  à  six  exemplaires.  Un  seul  a  été  conservé. 

r 

8.  Buste  de  guerrier,  avec  armure.  Etude. 

H.  o,ogi.  L.  0,064. 
Tiré  à  six  exemplaires.  Il  en  existe  encore  deux. 

g.  Lettre  de  change.  Ecusson  ovale  surmonte 
d'un  caducée  ;  au  bas  deux  branches  de  laurier, 
une  ancre  et  des  ballots  de  marchandises. 

H.  0,077. 

10.  Lettre  de  change.  Le  commerce  représenté 
par  une  femme  debout ,  tenant  une  ancre  et  s'ap- 
puyant  sur  des  ballots  de  marchandises  ;  à  ses 
pieds  un  lion  couché;  navires  dans  le  fond. 

1821. 

11.  Le  buveur,  buste.  D'après  un  petit  tableau 
attribué  à  D.  Teniers,  appartenant  à  la  collection 
de  l'avocat  L.-F.  Lebegue.  Etude. 

H.  0,110.  L.  0,078. 


no-T 
OOI 


12.  Enfants  traînant  leur  mère  sur  un  char.  A 
côté  d'elle  se  trouve  assis  le  plus  jeune;  elle  tient 
à  la  main  une  branche  fleurie.  Sur  un  piédestal 
les  emblèmes  de  l'amour.  Inscription  :  Dédié  à 
Ma  Très  Chère  Mère  Reçu  a  la  Veille  de  sa  Fête  Par 
son  Très  humble  Fils  Ch.^  Onghena  MDCCCXXI. 

H.  o,ii6.  L.  0,135. 
Il  n'a  été  tiré  que  six  épreuves  de  cette  planche.  Une  seule 
a  été  conservée. 

13.  Une  pensée.  Le  contour  des  feuilles  forme 
le  profil  de  5  portraits  :  Louis  XVI  et  sa  famille. 
Inscription  :  Ils  sont  tous  dans  ma  pensée. 

H.  0,090. 

14.  Cartouche  :  écusson  entouré  des  emblèmes 

du  commerce. 

H.  0,056.  L.  0,085. 

15.  Cartouche,  forme  écusson.  Une  ancre  et 
une  corne  d'abondance,  etc. ,  emblèmes  du  com- 
merce. 

H.  0,056.  L.  0,085. 

1822. 

16.  Etiquettes  (sept  variétés)  pour  G.  Vande 
Velde-Van  Hencxthoven,  pharmacien. 

17.  Tête  de  Cérès;  médaillon,  d'après  un  des- 
sin de  F.  Braemt,  graveur  de  médailles.  Légende: 

soc.  REG.  AGRICULT.   ET  BOTAN.   GAND. 

Diam.  0,067. 


OOO       — 


i8.   Tête  de  Cérès,  médaillon. 

H,  0,086.  L.  0,082. 

Reproduction  de  la  planche  piécédente  avec  fond  à  traits 
horizontaux.  Même  légende, 

19.  Jeune  transtévérine  assise  sur  les  bords  du 

Tibre,  filant  sa  quenouille.  D'après  le  tableau  de 

P.  Van  Hanselaere. 

H.  0,101.  L.  0,080. 

Ce  tableau  de  Van  Hanselaere  fut  exposé  au  Salon  de 
Gand  en  1820  (no  437  du  catalogue). 

20.  Eucharis  et  Télémaque,  d'après  le  tableau 

de  L.  David. 

H.  o,ogi.  L.  0,117. 

Ce  tableau,  exposé  à  l'hôtel-de-ville  de  Gand  en  1820, 
fut  acquis  par  le  c'^  de  Schoenborn  ,  vice-président  de  la 
chambre  des  états-généraux  de  Bavière. 

La  planche  d'Onghena  est  une  copie  en  contre-partie  de 
celle  de  C.  Normand  ,  insérée  dans  les  Annales  du  salon 
de  Gand  de  1820.  Gand,  1823,  p.  34,  planche  14. 

N.  Cornelissen  a  publié  une  notice  sur  le  tableau  de 
David  dans  les  Annales  belgiques,  181 8,  I ,  pp.  383-39,  et 
II,  pp.  23-32,  et  séparément  sous  le  titre  :  Eucharis  et  Télé- 
maque par  M.  David.  Gand,  J.-N.  Houdin,  1818.  8°,  31  pp. 

A  l'occasion  de  l'exposition  de  son  tableau  ,  il  fut  offert  à 
David,  par  la  société  des  beaux-arts  de  Gand ,  un  médaillon 
en  or  sur  lequel  ledit  tableau  fut  reproduit  au  trait ,  par 
L.  De  Bast. 

21.  Tenants  des  armes  d'Angleterre  avec  la 
devise  :  Dieu  et  mon  droit.  Carte  d'adresse  de 
F.  De  Smedt  Af  Chapelier  Rue  des  Champs  à  Gand. 

H.  0,123.  L.  0,130. 


—    339    — 

22.  Formule  de  quittance  pour  Louis  Van 
Bosterhout.   Deux  variétés. 

23.  Carte  d'adresse  de  F.  Onghena  :  Au  Vieux 

Balon.   (Petit  balon  entouré  de  nuages).  F.  On- 

gheua  Orfèvre,  Bijoutier,  et  Joaillier  à  Gand  Rue 

des  Champs  N.  14.  Trois  variétés  de  dimensions 

différentes. 

Diam.  0,034,  o>045  et  0,058. 

24.  Idem  de  forme  ovale. 

H.  0,070. 

1823. 

25.  Un  Mercure  volant.  Plaque  en  ovale. 
Inscription  :  onderneming  van  g.™^  bidart.  aalst. 

H.  0,063.  L.  0,045. 

26.  Id.  contre-partie. 

C^s  deux  pièces  ont  été  gravées  sur  plaque  d'argent  pour 
Bidart ,  entrepreneur  de  messageries. 
Il  n'en  existe  qu'une  seule  épreuve. 

27.  Saint  François  de  Paule.  Buste  médaillon. 
De  la  main  droite  il  tient  un  rouleau  portant  ces 
mots  :  Door  Lie/de;  la  main  gauche  est  placée 
sur  sa  poitrine.  Inscription  :  h  .-  franciscus  de 
PAULA.  Instelder  van  'torder  der  Minimen. 

H.  o,ogo.  L.  0,071 
(Sans  l'inscription). 

Pièce  gravée  pour  Gobert ,  d'apris  un  dessin  à  la  plume 
de  Ridderbosch. 


-     340     — 

28.  Cartes  de  visite  pour  L.  Ryckaert,  L.  Van 
Bosterhout,  Bruylant-Van  Aerde,  etc.  7  pièces. 

1824. 

29.  Le  Christ  rendant  la  vue  aux  aveugles  de 
Jéricho.  D'après  le  tableau  de  J.  De  Cauwer. 

H.  0,250.   L.  0,118. 

Planche  gravée  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts , 
1824,  p.  413. 
Le  tableau  est  placé  dans  l'église  Saint-Michel,  à  Gand. 

30.  La  Vierge  et   l'enfant  Jésus.    D'après   le 

tableau  de  P.  Van   Hanselaere  peint   à  Naples 

en  1822. 

H.  0,122.  L.  0,089. 

Le  tableau  appartient  à  la  Société  royale  des  beaux-arts 
et  de  littérature  de  Gand. 

Cette  planche  a  été  gravée  pour  le  Messager  des  sciences 
et  des  arts,  1824,  p.  320. 

31.  Le    chrétien    réfugié    dans     une    grotte. 

D'après  le  tableau  de  P.  Van  Hanselaere  peint 

à  Naples  en  1822. 

H.  0,123.  L.  0,085. 

Planche  gravée  pour  le  Messager  des  sciences  et  des 
arts ,  1824  ,  p.  321. 

Le  tableau  appartient  à  la  société  royale  des  beaux-arts 
et  de  littérature  de  Gand.  Il  a  été  exposé  au  salon  de  Gand 
en  1826  (n°  62  du  catalogue). 

32.  Médailles  des  empereurs  Postumus,  Con- 
stance et  Gordien. 

Copie  de  trois  médailles  qui    appartenaient   à   l'avocat 


-     341     — 

L.-F.  Lebegue.  Essai  pour  la  gravure  des  médailles  desti- 
nées à  l'ouvrage  de  Vanden  Bogaerde  sur  le  pays  de  Waes. 

33.  Médaille.   Sarbacanes    en    sautoir  nouées 

par   une    branche    de   Laurier.    Une   banderolle 

porte  l'inscription  :  honneur. 

Diam.  0,036. 

34.  Médaillon  ovale.  Le  portrait  de  Napo- 
léon I"  (la  tête).  Au  bas  une  étoile  avec  la  lettre  N. 
Inscription  :  c.  a.  van  ryckeghem.  m.  de  clercq. 

H.  0,024. 

35.  6  cartes  de  visite  pour  la  famille  Le  Bègue 
à  Gand.  —  Id.  de  Van  Bosterhout-Gobert. 

1825. 

36.  Le  bienheureux  Alphonse  Rodriguez,  jé- 
suite, en  prière;  dans  le  fond  à  droite  la  Vierge 
écrasant  la  tête  du  serpent.  Inscription  :  B.  Al- 

phonsiis  Rodriguez  Coadjittor  temporalis  Soc.  Jesu. 
Pietate  in  Deitm,  et  in  Virginem  sine  labe  concep- 
tam  :  orandi  studio ,  et  miraculis  clams.  Obiit  Majo- 
ricae  2,1  Oct.  i6iy  aetatis  siiae  8y .  beatificatus.  1825. 

H.  0,117.  L.  0,093. 

Planche  gravée  pour  Gobert  et  distribuée  par  lui  dans 
divers  couvents  à  Gand. 

37.  Portrait  de  la  béguine  Colette  De  Groote. 
Aqua-tinta.  Forme  ovale.  Inscription  :  coleta  de 
groote.  h.  0,082.  L.  0,062. 

(Sans  l'inscription). 
Ce  portrait  a  été  gravé  en  plus  grande  dimension  par  le 
même  artiste,  en  1826. 


—    342     — 

38.  Portrait  de  la  femme  de  Jean  Van  Eyck. 
Buste.  Sur  le  bord  supérieur  :  côivx  ms  iohës  me 
OPLEVIT  ANO.  143g.  II.  iVNij.  et  sur  le  bord  inférieur  : 

ETAS  MEA  TRIGINTA  TRIV  ANORV.  AVE.  IXH.  XAN. 

H.  0,160.  L.  0,12g. 
Gravé  pour  le  Messager  des  sciences,  1825,  p.  115, 
d'après  un  dessin  de  l'architecte  Rudd.  Le  tableau  se  trou- 
vait autrefois  dans  la  chapelle  de  Saint-Luc  et  de  Saint-Éloi 
de  la  corporation  des  peintres  et  selliers ,  aujourd'hui  la 
chapelle  des  sœurs  de  Saint-Joseph.  Il  fait  actuellement 
partie  du  musée  de  l'académie  de  Bruges,  auquel  il  a  été 
donné  par  Pierre  Van  Lede ,  ainsi  que  le  prouve  l'inscrip- 
tion :  D.  D.  PeP.  Van  Lede.  1808.  Voir  J.  Weale,  cat.  du 
musée  de  V académie  de  Bruges,  1861  ,  pp.  17-18, 

39.  L'invention  de  la  croix.  D'après  Justus  van 
Gent  ou  Josse  de  Gand,  élève  de  Hubert  Van 
Eyck.  Les  trois  croix  trouvées  à  Jérusalem  et 
mises  à  l'épreuve  en  présence  de  Samte  Hélène, 
de  sa  suite  et  du  patriarche  de  Jérusalem. 

H.  0,125.  L.  0,107. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences,   1825,  p.   155. 

Le  tableau  de  Josse  de  Gand  (haut.  68  centim.  et  larg. 
48  centim.)  appartenait  à  la  collection  J.  D'Huyvetter.  Il 
porte  dans  le  catal.  de  la  vente  de  cet  amateur  le  n°  658, 
où  il  a  été  adjugé  460  fr. 

40.  Fac-similé  de  la  fin  d'une  lettre  du  peintre 
Louis  David. 

Lithographie  pour  le  Messager  des  sciences,  1825,  p.  480. 

Par  cette  lettre  datée  de  Bruxelles,  g  juin  1818,  et  adressée 

à  N,  Cornelissen ,    David  remercie  chaleureusement  la  so- 


—    343     — 

ciété  des  beaux-arts  de  Gand  au  sujet  du  succès  qu'il  a 
obtenu  par  l'exposition  de  son  tableau  Eucharis  et  Télé- 
maque.  > 

41.  Fac-similé  de  la  fin  d'une  lettre  du  sculp- 
teur Ant.  Canova. 

Lithographie  pour  le  Messager  des  sciences,  1825  , 
p.  484. 

Lettre  datée  de  Rome,  ig  sept.  1814,  et  adressée  au 
secrétaire  de  la  société  des  beaux-arts  de  Gand  ,  pour  la 
remercier  de  sa  nomination  comme  membre  honoraire  de 
cette  société. 

42.  Carte  du  pays  de  Waes,  par  A.  Roothaese  : 

Nieuwe  Plaatsbeschrij f  hindi ge  Kaart  van  hetDistrikt 
S^  Nikolaas  voorheen  Land  van  Waas  Provincie 
Oostvlaandercn  Uytgegeven  onder  toezigt  van  den 
heer  A.  J.  L.  V.  D.  B....  1825. 

H.  0,313.   L.  0,430. 
Carte  gravée  pour  l'ouvrage  :  Het  distrikt  St.  Nikolaas, 
voorheen  land  van  Waes,  door  A.-J.-L.  Vanden  Bogaerde. 
St.  Nikolaas,  1825,  vol.  I,  p.  i. 

43.  Inauguration    de    l'archiduc    Philippe-le- 

Beau ,    roi  d'Espagne ,   au   moment  où  il  fait  le 

serment,  comme  seigneur  du  pays  de  Waes,  de 

maintenir  les  privilèges    et   coutumes    du   pays 

(7  juin  1497).  D'après  le  tableau  de,E.-J.  Smeyers 

peint  en  1739. 

H.  0,163.  L.  0,230, 

Planche  gravée  pour  l'ouvrage  de  Vanden  Bogaerde  :  het 
distrikt  St.  Nikolaas  voorheen  land  van  Waas.  St.  Niko- 
laas,  1825  ,  I,  p.  345. 


—     344     — 

Le  tableau  de  Smeyers  se  trouve  à  l'hôtel-de-ville  de 
St.  Nicolas.  Il  a  été  restauré  et  presque  entièrement  repeint 
par  B.  De  Loose  vers  1835.  Cette  planche  a  été  reproduite 
dans  le  Messager  des  sciences ,  1825  ,  p.  436. 

44.  Médailles  et  monnaies  romaines  et  gau- 
loises ,  et  antiquités  trouvées  à  Moerbeke  ,  Dack- 

nam ,  etc. 

H.  0,160.  L.  0,104. 

Gravées  pour  l'ouvrage  de  Vanden  Bogaerde,  II,  p.  11. 

Cette  planche ,  qui  a  été  reproduite  dans  le  Messager  des 
sciences,  1826,  p.  210,  comprend  14  sujets.  Le  vase 
marqué  XI  est  déposé  au  musée  de  la  ville  de  Gand.  Il 
appartenait  autrefois  à  Cardo-De  Grave,  à  St.  Nicolas. 

45.  Médailles,  monnaies  et  antiquités  trouvées 

dans  le  pays  de  Waes. 

H.  0,160.   L.  0,104. 

Gravées  pour  l'ouvrage  de  Vanden  Bogaerde,  II,  p.  13. 
Comprend   12  sujets. 

Planche  reproduite  dans  le  Messager  des  sciences ,  1826, 
P-  363- 

46.  Médailles  et   antiquités  trouvées   dans  le 

pays  de  Waes. 

H.  0,15g.  L.  0,104. 

Planche  gravée  pour  l'ouvrage  de  Vanden  Bogaerde  ,  II, 
p.  15.  Comprend  10  sujets.  Le  vase  marqué  II  et  le  fer  de 
lance  marqué  IV  appartiennent  au  musée  de  la  ville  de  Gand. 
Un  nouveau  tirage  de  cette  planche  fut  fait  pour  le  Mes- 
sager dess  ciences,  1827,  p.  88. 

47.  Médailles,  fibules,  vases  et  antiquités  trou- 
vés dans  le  pays  de  Waes. 

H.  0,162.  L.  0,103. 


H;: 


1/  ' 


—    345      - 

Planche  gravée  pour  l'ouvrage  de  Vanden  Bogaerde  ,  II, 
p.  17.  Comprend  10  sujets. 

Les  divers  objets  figurés  sur  cette  planche  et  les  trois  pré- 
cédentes sont  décrits  par  Vanden  Bogaerde,  II,  pp.  11-33, 
et  dans  le  Messager  des  sciences,  1827,  pp.  167-170. 

48.  Charte   de    Philippe-le-Hardi.    Fac-similé 

avec  scel  et  contre-scel. 

H.  0,185.  L.  0,270. 

Gravée  pour  l'ouvrage  de  Vanden  Bogaerde,  II,  p.  95. 
Charte  du  23  oct.  1397,  concernant  le  payement  de  1000 
nobles  d'or. 

49.  Façade  de  l'église  paroissiale  de  Lokeren  : 
Groote  kevk  te  Lokeren.  D'après  un  dessin  de 
B.  De  Loose.  Aqua-tinta. 

H.  0,140.  L.  0,092. 
(Sans  l'adresse). 
Gravée  pour  l'ouvrage  de  Vanden  Bogaerde  ,  III ,  p.  So. 

50.  Jardin  du  château  de  Wissekerk,  à  Basel. 
Sur  l'avant-plan  un  pont  suspendu.  Eau-forte 
d'après  un  dessin  de  A.-J.-L.  Vanden  Bogaerde. 

H.  0,080,  L.  0,133. 
Planche    gravée   pour  l'ouvrage    de    Vanden   Bogaerde , 
III,  p.  98;  et  reproduite  dans  le  Messager  des  sciences, 
1826 ,  p.  18. 

51.  Dalle  tumulaire  d'Adolphe  de  Bourgogne, 
seigneur  de  Beveren,  mort  en  1540. 

H.  0,102.  L.  0,064  Va- 
Cette  dalle  en  cuivre  se  trouve  dans  le  chœur  de  l'église 

23 


—     34G     — 

de  Beveren.  Gravée  pour  l'ouvrage  de  Vanden  Bogaerde  , 
III,  p.  121.  Voir  F.  De  Potter,  geschiedenis  der  gemeenten 
der provincie  Oost-Vlaanderen.  Beveren,  p.  119. 

52.  Dalle  tumulaire  de  Jean  Vanden  Coutere. 

H.  0,100.  L.  0,046. 
Gravée  pour  l'ouvrage  de  Vanden  Bogaerde,  III,  p.  121. 
La  dalle  de  Vanden  Coutere  se  trouvait  encore  dans  l'église 
de  Beveren  (Waes)  en  1841.  Elle  aura  probablement  été 
enlevée  lors  du  placement  du  nouveau  pavement  en  1862. 
On  ignore  ce  qu'elle  est  devenue. 

53.  Tombeau  de  Roland  Lefebvre,  chevalier 
de  la  Toison  d'or,  trésorier  de  l'empereur  Maxi- 
milien  et  seigneur  de  Tamise. 

H.  0,130..  L.  o,o8g  72- 
Gravé  pour  l'ouvrage  de  Vanden  Bogaerde,  III,  p.  295. 
La  tombe  de   Roland   Lefebvre   existe  dans  l'église  de 
Tamise. 

54.  Le  grand  béguinage  à  Gand.  Vue  générale 
à  vol  d'oiseau  prise  de  la  plaine  Sainte-Elisabeth. 

H.  0,246.  L.  0,327. 
Copie ,  avec  quelques  modifications ,  du  plan  gravé  par 
P.  Wouters  en  1781,  pour  compte  des  PP.  Dominicains,  à 
l'occasion  de  la  visite  faite  à  cet  établissement  par  l'empe- 
reur Joseph  II. 

Il  existe  de  la  planche  d'Onghena  trois  états  : 
1°  Au  trait  (essai).   Nous  n'en   connaissons  qu'un   seul 
exemplaire.  Il  fait  partie  de  l'atlas  topographique  et  histo- 
rique de  la  ville  de  Gand,  déposé  à  la  bibliothèque  de  l'uni- 
versité. 


—    347    — 

2°  A  l'aqua-tinta  avec  l'inscription  :  Nieuwe  Kaart  Groot 
Beggyn-Hof  te  Ge\d,  Gegunt  door  Juff.  M.  C.  Dauwe 
1825. 

3°  A  l'aqua-tinta.  Il  a  en  plus  la  légende  et  l'inscription  : 
Nouveau  plan  du  grand  Béguinage  à  Gand  fondé  en  1234. 

Ce  plan  a  été  copié  en  lithographie  en  183g  ;  des  réduc- 
tions en  ont  été  faites,  aussi  en  lithographie,  par  Ed.  Manche 
en  1836,  pour  les  Vues  pittoresques  des  principaux  monu- 
ments de  Gand,  par  A.  Voisin,  et  par  H.  Borremans  en 
1843.  Cette  dernière  a  été  publiée  par  Tessaro,  à  l'occasion 
de  la  visite  de  la  reine  Victoria. 

1826. 

55.  Les  litanies  de  la  Vierge. 

H.  0,122.  L.  0,075. 

56.  Médaille  frappée  à  l'occasion  de  l'achève- 
ment de  la  maison  centrale  de  détention  à  Gand. 
Vue  à  vol  d'oiseau  de  la  prison  :  Légende  :  son- 

TIBUS     OPERVM    EXERCITIO    EMENDANDIS.     ExcrgUC   : 
OPUS  COEPTUM  A.  MDCCLXXII.  EXACTUM  A.  MDCCCXXVI. 

BRAEMT  F. 

H.  0,133.   L.  0,131. 

Gravée    pour  le  Messager  des  sciences,   1826,  p.    187. 

Des  huit  corps  de  bâtiment  dont  devait  se  composer  la 
maison  de  détention  fondée  en  1772  ,  il  en  restait  encore  , 
en  1825  ,  trois  à  construire.  L'architecte  L.  Roelandt  fut 
chargé  par  le  gouvernement  de  compléter  l'édifice,  lequ  1 
fut  achevé  en   1826. 

Ch.  Onghena  grava  de  nouveau  cette  planche  en  1841, 
pour  le  Mémoire  sur  les  moyens  de  corriger  les  malfaiteurs, 
par  Jean-Ph.  Vilain  XIIII.  Brux.,  1841. 


—     348    — 
57-  Maison  de  détention.  Vue  à  vol  d'oiseau  : 

MAISON    CENTRALE   DE  DÉTENTION  A  GAND. 

H.  0,092  72.  L.  0,103, 
Un  nouveau  tirage  de  cette  planche  à  été  fait  pour  le 
Guide  des  voyageurs  dans  la  ville  de  Gand ,  de  A.  Voisin, 
2^  édit.,  Gand,  1831,  p.  254.  Elle  a  été  copiée  par  B.  Ber- 
naert  et  lithographiée  par  Kierdorff,  pour  la  Description  de 
la  maison  de  force  de  Gand,  imprimée  par  Stéven,  en  1828. 

58.  Canope  égyptienne.  La  partie  supérieure 
est  une  tête  d'épervier.  Sur  la  panse  une  inscrip- 
tion en  écriture  hiéroglyphique. 

H.  0,156.  L.  0,072. 

Gravée  ^onv  \q  Messager  des  sciences,   1826,  p.  12g. 

Cette  canope  avait  appartenu  à  la  collection  d'antiquités 
égyptiennes  de  De  Lescluze  de  Bruges  vendue  à  Anvers 
vers    1826. 

5g.  Le  bon  Samaritain,  D'après  le  tableau  de 

J,  Maes.  Le  Samaritain,  un  vieillard,  relève  le 

voyageur  blessé  et  le  met  sur  son  cheval.  Dans 

le  fond  un  palmier. 

H,  0,143.  L,  0,105. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences,  1826,  p.   144. 
Ce  tableau  de  Maes  a  figuré  à  l'exposition  de  Gand  en 
1826,   sous  le  n°  53  du  catalogue. 

60.  La  Frascatane.  D'après  le  tableau  de 
J.  Maes.  Jeune  fille  remplissant  d'eau  un  vase 
à  la  fontaine.  Figure  à  mi-corps.  Dans  le  fond  le 
dôme  de  l'église  de  Saint-Pierre  de  Rome. 

H,  0,118,  L.  0,090. 
Gravée  pour  le  Messager  des  sciences,  1826  ,  p.  144. 


—    349    — 

Ce  tableau  appartenait  en  1826  à  la  collection  Vrancken, 
à  Lokeren.  Il  avait  été  exposé  au  salon  de  Gand  en  1826, 
sous  le  n°  54  du  catalogue. 

61.  Ornithorhynque  de  la  famille  des  mono- 

trèmes  :   ornithorhynchus  rufus  ex  dono  Dom. 

Th.  Beale.  Macao  1826. 

H.  0,114.  L.  0,209. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1826, 
p.  256. 

Sir  Thomas  Beale,  à  Macao,  fit  don  de  cet  ornitho- 
rhynque à  l'université  de  Gand,  en  1826. 

62.  Ornithorhynque.    Squelette    de    l'ornitho- 

rhynque. 

H.  0,114.  L.  0,210. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences ,  1826,  p.  256. 

63.  Plan  du  jardin  de  la  société  d'horticulture 

à  Chiswick.  Mars  1826. 

H.  0,178.  L.  0,205. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences,  1826,  p.  383,  (Article 
de  J.-B.  Delbecq). 

64.  Portrait  de  Colette  De  Groote  :  coleta  de 
GROOTE  Overste  van  het  nieuw  Couvent  in  't  klyn 
beggynhof  M  Gent ,  Stierf  30  Ongst  1816  ond 
2SJaeren  en  half.  Médaillon. 

H.  0,120.  L.  0,093 
(Sans  l'inscription). 

f  , 

65.  Ex-libris  de  P.  Versturme.  Ecusson  :  trois 
chevaux  galopant  sur  champ  d'or.  Devise  :  presto 
MA  prude,  suivie  du  nom   Versturme. 

H.  0,066.  L.  0,041, 


—    350    — 
65.  Façade  du  palais  de  l'université  de  Gand  : 

VOORGEVEL  VAN  HET  PALEIS  DER  HOOGE  SCHOOL  ,   TE 
GENT.     PÉRISTYLE    DU    PALAIS     DE     l'uNIVERSITÉ  ,     A 

GAND.   D'après  le  plan  de  L.  Roelandt. 

H,  o,o8g.    L.  o,ii8 
(Sans  l'inscription). 

Gravée  pour  la  Description  historique  du  palais  de  V uni- 
versité, à  Gand ,  par  Amand  De  Bast.  Brux.  ,  1826. 

Cette  même  planche,  avec  une  nouvelle  inscription  ,  en 
français  seul ,  fut  employée  dans  le  Guide  des  voyageurs 
dans  la  ville  de  Gand,  par  A.  Voisin,  2^  édit,  Gand,  1831. 

67.  Coupe  du  palais  de  l'université  de  Gand. 
Vestibule,  escalier  et  rotonde.  D'après  les  plans 
de  L.  Roelandt.  H.  0,120.  L.  0,300. 

Gravée  pour  la  Description  historique  du  palais  de  Vimi- 
versité  à  Gand,  par  Amand  De  Bast.  Brux.,  1826. 

Cette  planche  ,  avec  une  nouvelle  inscription  en  lettres 
plus  petites ,  se  trouve  dans  le  Guide  des  voyageurs  dans 
la  ville  de  Gand,  par  A.  Voisin,  2^  édit.  Gand,  1831. 

La  pose  de  la  première  pierre  de  l'université  eut  lieu  le 
4  août  i8ig. 

68.  Plans  du  palais  de  l'université  de  Gand. 
1°  Rez-de-chaussée.  2°  Étage.  D'après  les  dessins 
de  L.  Roelandt. 

Un  nouveau  tirage  de  ces  plans  à  été  fait  pour  le  Guide 
de  Gand  de  A.  Voisin.  1831. 

69.  Vue  générale  de  la  ville  de  Gand,  à  vol 
d'oiseau  :  ganda  gallie  belgice  civitas  maxima. 
1534-  H.  0,440,  L.  0,604. 

La  vue  est  prise  du  côté  de  la  porte  de  Termonde  et  de 


—    351     — 

la  porte  de  l'hôpital  (démolie  en  1541).  Sur  l'avant-plan 
l'abbaye  de  Saint-Bavon.  Ce  plan  fut  publié  par  souscrip- 
tion au  prix  de  10  florins  (colorié).  La  planche  servit  ensuite 
pour  la  dernière  édition  de  V Historié  van  Belgis  de  Marcus 
Van  Vaernewyck,  impr.  en  182g.  Il  en  existe  une  assez 
médiocre  copie  faite  par  J.  Hemeleer,  pour  le  Jacob  van  Ar- 
tevelde  de  H.  Conscience,  impr.  à  Anvers,  en  184g. 

L'original  de  ce  plan,  peint  à  l'huile  (H.  i  m.  33  c. 
L.  I  m.  71  c),  appartenait  à  l'architecte  P.-J.  Goetghebuer. 
Celui-ci  le  tenait  du  prieur  du  couvent  des  Augustins  à  Gand. 
En  1876,  les  héritiers  Goetghebuer  cédèrent  le  tableau  (avec 
deux  autres  vues  de  ville)  à  l'administration  communale  de 
Gand,  au  prix  de  4000  fr. 

70.  Bataille  de  Waterloo  :  le  prince  d'Orange 
blessé.  D'après  le  tableau  de  J.-W.  Pieneman. 

H.  0,161.  L.  0,230. 

Ce  tableau  a  été  exposé  à  l'hôtel-de-ville  de  Gand,  dans 
la  salle  de  l'Arsenal,  en  1826  ;  il  figure  dans  le  catalogue  de 
l'exposition  des  beaux-arts  de  Gand,  en  1826,  sous  le  n°  367. 
Il  fut  acquis  par  le  roi  Guillaume  I'^'',  au  prix  de  40,000  flo- 
rins (84,656  francs). 

1827. 

71.  Diverses  cartes  de  visite  pour  les  familles 
Van  Bosterhout,  De  Smedt,  etc. 

72.  La  mort  de  Phocion ,  d'après  Joseph- 
Denis  Odevaere. 

H.  0,132.  L.  0,183. 

73.  Missolonghi.  Les   derniers   défenseurs  de 


—    352     ~ 

Missolonghi  préférant   la   mort   à   la   servitude. 

D'après  J.  Odevaere. 

H.  0,142.  L.  0,215. 

Ce  tableau  fut  d'abord  exposé  au  salon  de  Gand ,  en  1826 
(n°  48  du  catalogue),  puis  à  Bruxelles  en  1827  (n°  105  du 
catalogue). 

74.  La  dispute  du  corps  de  Patrocle.  D'après 

J.  Odevaere. 

H.  0,192.  L.  0,297. 

Joseph-Denis  Odevaere,  se  trouvant  à  Rome,  en  181 1, 
fut  chargé  de  l'exécution  de  diverses  fresques  pour  le  palais 
du  Quirinal.  Les  événements  politiques  ne  permirent  pas  de 
donner  suite  à  ce  projet.  Une  de  ces  fresques  représente  les 
Grecs  et  les  Troyens  se  disputant  le  corps  de  Patrocle. 

75.  Apollon  et  les  muses.  D'après  J.  Odevaere. 

Diam.  0,198. 

Le  peintre  Odevaere  ayant  formé  le  projet  de  faire  repro- 
duire ,  par  la  gravure  au  trait ,  ses  principales  œuvres  ,  en 
confia  l'exécution  à  Ch.  Onghena.  Quatre  planches  seule- 
ment furent  terminées.  (N°^  72-75). 

76.  Instrument  pour  déterminer  la  résistance 

de  différents  bois. 

H.  0,072.  L.  0,151. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1827, 
p.  12.  (Article  de  Maertens,  à  Ypres). 

77.  Le  chanoine  Triest  et  Ch.-J.  Kervyn  de 
Volkaersbeke ,  échevin  de  la  ville  de  Gand,  remet- 
tant au  roi  Guillaume  I  une  requête  en  faveur  des 


-    353    — 

béguinages,    d'après    le    tableau   de   Pierre   Van 

Huffel. 

H.  0,134  V^-  L.  0,098. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts ,  1827, 
p.  68.  Ce  tableau  se  trouve  actuellement  dans  l'hab'tation  de 
la  grande  dame,  au  nouveau  béguinage  à  Mont-Saint-Amand. 
Voir  Kervynde  Volkaersbeke,  les  églises  de  Gand,  II,  p,  324. 

78.  Le  grand  canon  dit  Marguerite  l'enragée 
[de  didle  Griete),  placé  au  Wannekens-aerd. 

H.  0,061.  L.  0,012  Ys- 
Gravé  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  année 
1827,  p.  loi.  A  été  aussi  employé  pour  le  Guide  de  Gand 
de  A.  Voisin  ,  édit.  de  1831. 

79.  Mausolée  élevé  à  la  mémoire  de  l'anato- 

miste  Jean  Palfyn,  d'après  le  sculpteur  C.  Van 

Poucke. 

H.  0,203,  L.  0,060. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1827, 
p.  131  (Article  de  A.  Voisin  sur  J.  Palfyn).  Ce  monument 
funéraire ,  placé  dans  l'église  Saint-Jacques  près  de  la  chaire 
de  vérité,  contre  l'un  des  piliers  qui  soutiennent  la  tour,  fut 
inauguré  en  1784.  L'inscription  porte  :  d;  o.  m.  et  immor- 

TALI    PALFINI    GENIO    CURA   COLLEGII  MEDICI  HUIUS  URBIS  .ERE 
ET  MUNIFICENTIA  PLURIUM  BONARUM  ARTIUM  RENUMERATORUM 

ERECTUM  ANNO  1784.   Voir  Kcrvyn    de  Volkaersbeke ,    les 
églises  de  Gand,  II,  pp.  27-28. 

80.  Façade  d'une  maison  située  rue  du  Vieux- 
bourg  ,  au  coin  de  la  rue  du  Roitelet. 

H.  0,107.  L.  0,036. 
Gravée  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1827, 


—    354    — 

p.  150,  Cette  maison,  portant  pour  enseigne  :  den  vlie- 
GHENDEN  HERT ,  S.  été  Construite  en  1669.  La  façade  est 
ornée  de  six  bas-reliefs.  Le  pignon  est  surmonté  d'un  groupe 
représentant  la  Charité  ;  plus  bas  les  statues  de  la  Foi  et  de 
l'Espérance  ;  sur  le  fronton  un  médaillon  contient ,  en  haut- 
relief ,  un  joueur  de  flûte. 

Les  bas-reliefs ,  en  terre  cuite ,  sont  l'œuvre  de  Van 
Hoorebeke. 

On  a  dit ,  par  erreur ,  que  cette  maison  ,  dont  la  façade 
est  si  intéressante ,  avait  autrefois  été  la  demeure  de  l'ana- 
tomiste  Palfyn.  Au  XVIII^  siècle  elle  était  habitée  par 
l'orfèvre  Duprez  et  après  lui  par  son  fils. 

Il  existe  une  autre  reproduction  de  cette  façade  lithogra- 
phiée  par  C.  't  Felt  pour  Het  boek  der  vermaerde  uithang- 
horden ,  de  Fr.  De  Potter,  publié  en  1861,  p.  42. 

M.  J.  De  Waele  a  fait,  en  1877,  un  dessin  très-exact 
de  la  façade  de  cette  maison  ,  dont  il  a  généreusement  fait 
don  à  la  bibliothèque  de  l'université  de  Gand.  Ce  dessin 
mesure  i  m.  43  c.  de  hauteur. 

81.  Le  Christ  mort,  étendu  sur  un  linceuil. 
D'après  Philippe  de  Champagne. 

H.  0,059.  L.  0,133. 
Copie  de  la  gravure  au  trait  de  C.  Normand  qui  se  trouve 
dans  les  Annales  du  musée  de  C.-P.  Landon,  vol.  XI  (1806), 
pi.  68,  p.  141. 

82.  Structure  des  tissus  des  orchidées  :  bour- 
geons,  tiges  et  feuilles.  D'après  un  dessin  de 
Ch.  Morren. 

H.  0,284.  L.  0,228. 

Planche  IV  des  mémoires  de  Ch.-F.-A.  Morren  en  réponse 
à  cette  Question  :  Quœriiur  Orchidis  latifoliae  descriptio 


—    355    — 

botanica  et  anatomica.  Mémoire  inséré  dans  les  linnales 
academiae  Gandavensis ,  1826-27. 

83.  Télescope  de  Rienks,  d'après  les  dessins 
de  Ed.  Coppens. 

Suite  de  trois  planches  gravées  pour  les  Annales  acade- 
miae Gandavensis ,  1826-27.  {Car.  Hauff,  oratio  de  scien- 
tiarum  amore  platonico...  Adjecta  est  telescopii  Rienksiani 
descriptio). 

84.  Système  cérébro-spinal  de  l'homme. 

H.  0,397.  L.  0,152. 

Gravé  pour  les  Annales  academiae  Gandavensis,  1826-27. 
(Mémoire  de  Jos.  Mouremans). 

85.  La  porte  de  Courtrai.  —  L'église  parois- 
siale de  N.-D.  Saint-Pierre. 

H.  0,100.  L.  0,071. 

Ces  deux  gravures  sur  une  seule  planche  ont  été  faites 
pour  le  Guide  de  Gand  d'A.  Voisin,  Il  en  existe  six  épreuves 
d'essai  au  trait. 

86.  Place  Sainte-Ph  raïlde  à  Gand  :  à  droite  la 
façade  du  marché  aux  poissons ,  dans  le  fond 
l'hospice  Saint-Laurent ,  à  gauche  l'entrée  du 
château  des  comtes  de  Flandre. 

H.  0,062.  L.  0,095. 
Il  existe  de  cette  planche  six  épreuves  d'essai  au  trait. 
Gravé  piour  le  Guide  de  Gand  de  Aug.  Voisin. 

87.  L'église  Saint-Nicolas.  Vue  prise  à  l'en- 


—    356    — 

trée  de  la  rue  de  la  Catalogne  ;  dans  le  fond  le 
Beffroi  et  l'église  Saint-Bavon. 

H.  0,062.  L.  0,092  72. 

Gravé  pour  le  Guide  de  Gand  de  Voisin  ,  édit.  de  1831. 

Cette  planche  et  les  deux  précédentes,  d'abord  destinées 
à  la  i''^  édition  du  Guide  de  Gand,  n'ayant  pas  été  terminées 
en  temps  utile  ,  n'ont  pu  figurer  que  dans  la  2^  édition  , 
impr,  en  1831. 

88.  Saint-Médard  (Saint-Liénard  ou  Saint- 
Léonard).  D'après  un  tableau  d'un  maître  in- 
connu de  l'école  de  Cologne.  XIIP  siècle. 

H.  0,142.  L.  0,047. 

Ce  tableau,  acquis  en  1827,  à  Cologne,  par  le  chevalier 
Florent  Van  Ertborn  ,  se  trouve  actuellement  au  musée 
d'Anvers.  (Catal.  n°  16.) 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences,  1827-28  ,  p.  344. 

Ch^  Onghena  avait  conçu  le  projet  de  dessiner  et  de  re- 
produire ,  par  la  gravure  au  trait ,  tous  les  tableaux  du  mu- 
sée Van  Ertborn.  Le  peintre  G.  Wappers  usa  de  toute  son 
influence  peur  en  empêcher  l'exécution.  Nous  ne  sommes 
pas  parvenu  à  connaître  le  motif  de  cette  opposition. 

89.  La  Vierge  présente  l'enfant  Jésus  à  Sainte 
Anne.  D'après  le  tableau  de  J.-B.  Maes. 

H.  0,140.  L.  0,102. 

Gravée  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1827- 
28,  p.  392. 

Ce  tableau  ,  peint  à  Rome  en  1827,  se  trouve  actuellement 
à  l'église  de  Saint-Michel ,  à  la  chapelle  de  Jésus ,  Marie  , 
Anne.  Voir  Kervyn  de  Volkaersbeke ,  les  églises  de  Gand, 
II,  p.  79. 


—    357    — 

go.  La  Sainte  Famille  :  la  Vierge,  Saint  Jean 
et  l'enfant  Jésus.  D'après  le  tableau  de  J.-B.  Maes. 

H.  0,98.  L.  0,085. 

Gravée  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts ,  1827- 
28,  p.  393.  Ce  tableau  se  trouve  à  l'église  de  Saint-Nicolas, 
à  Gand.  (Chapelle  des  fonts-baptismaux.) 

91.  La  résurrection  de  Lazare.  D'après  un  ta- 
bleau attribué  à  Otto  Vaenius,  qui  se  trouve  à 
l'église  cathédrale  de  Saint-Bavon. 

H.  0,115  72-  L-  0,094. 
Cette  planche  exécutée ,  à  titre  d'étude  ,  n'a  été  tirée  qu'à 
un  nombre  très-restreint  d'exemplaires  que  l'artiste  a  distri- 
bué à  ses  amis. 

92.  Armoiries  de  la  ville  de  Gand.  Ecusson  de 

sable    au    lion    d'argent    armé    et    lampassé    de 

gueules,  couronné  d'or. 

H.  0,046.  L.  0,048. 

Premier  essai  de  gravure  sur  bois  fait  par  Ch.  Onghena. 

93.  Cartes  de  visite  diverses  pour  Ch'Morren, 
le  docteur  De  Block,  la  famille  Van  Boster- 
hout,  etc. 

94.  Révolte  de  Madrid.  D'après  un  dessin  de 

Jean-Baptiste  Madou. 

H.  0,493.  L.  0,647. 

Eau-forte  préparée  pour  l'aqua-tinta.  Inscription  :  révolte 
DE  Madrid. 

95.  Vue  de  Charing-Cross  à  Londres. 

H.  0,501  72.  L.  0,773. 
Eau-forte.  Inscription  :  vue  de  charug  crosse  (sic)  à  Lon- 


—    358    — 

dres.  Le  30  Janv.  1641  Charles  I^  qui  ne  fut  jugé  ni  par  l'ar- 
mée, ni  par  le  parlement,  ni  par  la  patrie,  mais  par  la  faction 
de  ses  ennemis ,  eut  la  tête  tranchée  par  la  main  du  bourreau. 
La  vue  a  été  prise  en  1828.  Rien  dans  cette  planche  ne 
rappelle  l'exécution  de  Charies  I,  qui  eut  lieu  sur  cette  place. 

96.  Eglise  de  Notre-Dame  à  Paris. 

H.  0,494.  L.  0,760. 
Eau-forte.  Inscription  :  notre  dame  de  paris. 

97.  La  cathédrale  de  Milan. 

H.  0,495.  L.  0,763. 
Eau-forte. 

98.  Palais  du  Lord-Maire  à  Londres. 

H.  0,505.  L.  0,775. 
Eau-forte. 

Cette  planche  et  les  quatre  précédentes  remarquables 
eaux-fortes,  les  plus  importantes  comme  dimension  de 
l'œuvre  d'Onghena ,  ont  été  exécutées  pour  compte  de 
P.-J.  Van  Bever.  Elles  devaient  être  publiées  à  l'aqua-tinta  ; 
mais  dans  cet  état  je  n'en  ai  vu  aucun  exemplaire.  Les  épreu- 
ves de  ces  eaux-fortes  sont  d'une  excessive  rareté.  On  n'en 
connaît  guère  plus  que  3  ou  4.  Nous  ignorons  ce  que  sont 
devenus  les  cuivres. 

99.  Formule  de  quittance  pour  Van  Bosterhout. 

1829. 

100.  Diverses  variétés  de  lombrics  terrestres  , 
leurs  organes ,  leur  anatomie ,  etc.  Série  de 
31  planches  dont  la  dernière  représente  l'anato- 
mie  de  la  sangsue. 

Ces  planches  ont  été  gravées  de  1826  à   1829  pour  l'ou- 


—    359    — 

vrage  de  Ch.-F.-A.  Morren  :  De  liimhrici  terresiris  historia 
naturalinecnonanatomia  tradatus.  BruxeUis,Taylier,  182g. 

De  la  7^  planche  :  Dissectio  generalis  seu  totius  corporis 
ut  appareat  relatio  organoruni ,  il  existe  deux  épreuves  ;  la 
première  ne  contient  que  2  figures,  la  seconde  en  con- 
tient II. 

Les  dessins  originaux  de  Morren  ,  en  couleur ,  ont  été 
donnés  par  l'auteur  à  la  bibliothèque  de  l'université  de  Gand. 

loi.  Le   Sauveur    du    monde.    D'après    Jean 

Memlinc. 

H.  0,192.  L.  0,090. 

Tableau  décrit   dans  le   catalogue  du   musée  d'Anvers , 

1857,  p.  33,  no  40.  Il  provient  de  l'abbaye  des  Dunes,  dont 

le  dernier  abbé,  Nie.  De  Roovere,  le  céda  à  Van  Ertborn. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1829-30, 

p.  61. 

102.  Coupe  du  bassin  houiller  de  St.  Gilles, 
près  de  Liège. 

H.  0,083.    L.  0,173  Va- 

Gravée  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1829-30, 
p.  207.  (Article  de  A.-C.  Wellekens  et  C.  Davreux.) 

103.  L'adoration  des  Mages.  D'après  Jean  Van 

Eyck. 

H.  0,128.  L.  0,103. 

Le  graveur  Ch.  Onghena  ayant  été  envoyé  par  De  Bast 
chez  le  docteur  Van  Rotterdam  pour  faire  le  dessin  de  ce 
tableau,  afin  de  le  graver  ensuite,  fut  éconduit,  sous  prétexte 
que  l'artiste  n'aurait  pu  être  capable  d'en  faire  un  bon  dessin. 
Peu  de  temps  après,  De  Bast  se  rendit  auprès  de  Van  Rot- 
terdam pour  le  détromper,  sans  parvenir  toutefois  à  le  con- 
vaincre. 


--     3G0    — 

Onghena  alla  alors  de  nouveau  chez  le  docteur,  qui  était 
sur  le  point  de  quitter  la  ville.  A  son  retour,  dans  la  soirée 
du  même  jour,  le  dessin  était  terminé.  Van  Rotterdam  en 
fut  émerveillé. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1829-30, 

P-  331- 

Ce  tableau  fut  exposé  en  vente,  le  6  juillet  1835  (cata- 
logue Van  Rotterdam,  n°  i),  et  retenu  au  prix  de  10,000  fr. 
Il  fut  cédé  en  1848,  au  prix  de  12,000  fr.,  au  musée  royal 
de  Bruxelles.  (Catalogue  du  musée,  n°  14.) 

104.  Le  départ  de  Tobie.  D'après  J.  Maes. 

H.  0,128.  L.  0,104. 

Ce  tableau,  exposé  au  salon  de  Gand  de  182g  (n°  144  du 
catalogue) ,  se  trouve  actuellement  dans  l'église  Saint-Jac- 
ques, chapelle  des  âmes  du  purgatoire. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1829-30, 

P-  334- 

Au  concours  de  1829,   Ch.  Onghena  obtint  pour  cette 

planche  le  prix  pour  la  gravure. 

105.  Médaille  du  canal  de  Terneuzen.  D'après 
Braemt.  Face  et  revers. 

H.  0,072  72-  L-  o>i32. 
Gravée  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1829-30, 
P-  337- 

106.  Vue  de  Tivoli.  D'après  un  tableau  de 
Paul  Surmont. 

H.  0,099.  L.  0,128. 

Gravée  pour  le  Messager  des  sciences  ei  des  arts,  1829-30, 

P-  339- 

Un  exemplaire  avant  la  lettre  est  déposé  à  la  bibliothèque 
de  l'université  de  Gand. 


—    3C1     — 

107-  Cérès,  buste.  D'après  J. -P.  Braemt. 

H.  0,070.  L.  0,067  72- 
Sous  forme  de  médaillon,  entouré  d'une  guirlande  de  fleurs 
et  de  fruits,  d'après  un  dessin  de  F. -T.  Suys.  Inscription  : 

EX    LIBRIS  C.   VAN    HULTHEM  SOC.    REG.    AGRICULT.    ET    BOTAN. 

GAND.  PRAESiDis.  C'est  le  quatrième  des  ex-libris  gravé  pour 
Ch.  Van  Hulthem.  Les  autres  sont  décrits  par  A.  Voisin, 
dans  sa  notice  sur  Van  Hulthem,  pp.  lxiii-lxiv. 

Quelques   épreuves  ont    été  tirées  sur  papier  de  Chine, 
avant  la  lettre. 

108.  L'entrevue  de  Théodose-le-Grand  et  du 
patriarche  d'Antioche,  l'évêque  Flavien.  Inscrip- 
tion :  Zïe  nu  eene  gelegenheid  om  gestorvenen  op  te 

wekken. 

H.  0,141  72.  L.  0,099  7^' 
(Sans  l'inscription). 
Gravée  pour  :  het  Oproer  te  Antiochie,  door  J.-M.  Schrant. 
Gend,  Snoeck,  1829,  p.  57. 

log.  Intérieur  de  cabaret.  Eau-forte. 

H.  0,070.  L.  0,120. 
Gravé  sur  le  couvercle  d'une  boîte  à  tabac.  De  cette  gra- 
vure il  n'a  éta  tiré  que  six  épreuves. 

iio.  Façade  et  jubé  de  l'église  Saint-Sauveur 
à  Gand,  renouvelés  en  181 1. 

Gravé  pour  l'architecte  Pierre-Jean  De  Broe. 

III.  Portrait    de  dame   Cannaert.    D'après  le 

tableau  de  J.  Paelinck. 

H.  0,078.  L.  0,65  72. 

Ce  portrait  appartient  à  M^,  Év.  Cannaert,  à  Gand. 

24 


^     362     — 

112.  Portrait  de  Marc  Van  Vaernewyck. 

H.  0,103.  L.  0,082  Yz 
(Sans  l'inscription). 
Gravé  pour  l'Historié  van  Belgis  de  Marc  Van  Vaerne- 
wyck,   impr.  en   1829.  Inscription  :  Marcus  Van  Vaerne- 
ivyck,  Geboren  den  21  december  15 18.  [Armoiries.]  Over- 
leden  den  20  february  1568. 

113.  Vase  en  grès,  sphéroïde  allongée. 

H.  0,168. 
Reproduction  du  vase  le  plus  grand  et  le  plus  beau  de  la 
splendide  collection  de  J.  D'Huyvetter.  Il  mesurait  73  cen- 
timètres en  hauteur  (n^  104  du  catal.).  Bénoni  Veihelst 
l'acheta  au  prix  de  1900  fr.  Il  le  vendit  à  son  tour  au  prix 
de  3000  fr.  à  Gambard.  Vers  1870,  il  fut  détruit  dans  un 
incendie. 

114.  Trois  cruches  (n°'  37,  72  et  73  du  cata- 
logue J.  D'Huyvetter). 

Planche  II  des  Zeldzamheden  vevzameld  en  uitgegeven 
door  Joan.  D'Huyvetter,  1829. 

115.  Trois  aiguières  (n°'  74,  70  et  71  du  cata- 
logue D'Huyvetter). 

Planche  III  des  Zeldzamheden  de  J,  D'Huyvetter. 

116.  Buires  et  cruches  (n"'22,  21,  102,  197  et 
103  du  catalogue  D'Huyvetter). 

Planche  IV  des  Zeldzamheden. 

117.  Six  aiguières  (n°^  76,  77,  80,  106,  105  et 
107  du  catalogue  D'Huyvetter). 

Planche  V  des  Zeldzamheden. 


-     363     — 

ii8.  Buires,  aiguières,  etc.  (n"^g7,  2g,  98,  gg, 
8g  et  100  du  catalogue  D'Huyvetter). 

Planche  VI  des  Zcldzamheden. 

iig.  Snelles  et  autres  vases  (n°^  ig8,  igg,  5, 
200  et  4  du  catalogue  D'Huyvetter). 

VXdLnchQVll  Aes  Zeldzamheden ,  reproduite  dans  le  Mes- 
sager des  sciences  et  des  arts ,  1835,  p.  189,  avec  une  no- 
tice sur  Jean  D'Huyvetter  et  sur  les  collections  rassemblées 
par  cet  archéologue. 

120.  Neuf  cruches  (n°'  112,  18,  113,  114,  36, 
115,  116,  117  et  118  du  catalogue  D'Huyvetter). 

Planche  VIII  des  Zeldzamheden. 

121.  Aiguières,  snelles  et  cruches  (n°^  g2,  162, 
108,  34,  158,  35,  i65,  iig  et  165  du  catalogue 
D'Huyvetter). 

Planche  IX  des  Zeldzamheden. 

122.  Aiguières,  salières,  bouquetiers ,  etc. 
(n"'  83,  250,  81,  igo,  27,  26,  212,  loi,  15  et  igi 
du  catalogue  D'Huyvetter). 

Planche  X  des  Zeldzamheden. 

123.  Snelles  et  buires  (n°^  10,  11,  g,  ig,  12,  20, 
I,  7,  6  et  2  du  catalogue  D'Huyvetter). 

Planche  XI  des  Zeldzamheden. 

124.  Canettes,  aiguières  et  cruches  (n°'  203, 
15g,  202,  120,  201,  121,  122,  164  et  123  du  cata- 
logue D'Huyvetter). 

Planche  XII  des  Zeldzamheden. 


-     364    — 

125-  Aiguières,  snelles  et  cruches  (n°^  86,  87, 
31,  40,  82,  30,  79  et  78  du  catalogue  d'Huyvetter. 
Les  figures  I,  IV,  VIII  et  XI  ne  sont  pas  citées 
dans  le  catalogue  D'Huyvetter). 

Planche  XIII  des  Zeldzamheden. 

126.  Cruches,  aiguières,  buires,  etc.  (n°'  187, 
173,  124,  174,  95,  125,  196,  126,  50,  49  et  186 
du  catalogue  D'Huyvetter.  Les  figures  III,  V, 
XIV  et  XV  ne  sont  pas  désignées  dans  le  cata- 
logue). 

Planche  XIV  des  Zeldzamheden. 

127.  Saucières,  plats,  corbeilles  et  plateaux, 
faïence  de  Bernard  Palissy  (n°'  252,  237,  249, 
227,  228,  244,  251,  245,  255,  239  et  260  du  cata- 
logue D'Huyvetter). 

Planche  XV  des  Zeldzamheden. 

128.  Plats  et  corbeille,  faïence  de  Bernard 
Palissy  (n°'  264,  236,  262,  256,  247,  259,  263  et 
240  du  catalogue  D'Huyvetter.  Le  n°  VII  n'est 
pas  désigné). 

Planche  XVI  des  Zeldzamheden. 

12g.  Sonnettes ,  lampe  et  mortier  (n°^  703,  704, 
705,  710,  706,  707  et  708  du  catalogue  D'Huy- 
vetter. Le  mortier  n°  VII  ne  se  trouvait  pas  dans  la 
vente). 

Planche  XVII  des  Zeldzamheden. 

130.  Verres  de  Venise  :  buires,  gobelets,  cor- 


—    3G5    — 

beille ,    verres  ciaquelés,   bouteille    et   aiguières 
(n°^  385,  406,  401,  367,  463,  482,  396,  512,  360, 

348,  489,  506,  376,    295   et  415  du   catalogue 
D'Huyvetter). 

Planche  XVIII  des  Zeldzaniheden. 

131.  Verres  de  Venise  et  autres  :  gobelets, 
calices ,  verres  à  Champagne  et  bouquetiers 
(n°^459,  342,  368,  281,  451,  322,  509,  566,  507, 
318,  351  >  344»  371  et  454  du  catalogue  D'Huy- 
vetter. La  figure  n°  XIII  n'est  pas  désignée). 

Planche  XIX  des  Z eldzamheden . 

132.  Verres  de  Venise  :  calices ,  clochette ,  cou- 
pes, gobelet  et  plateau  (n°'  513,  287,  370,  405, 
481,  486,  478,  285,  503,  326,  282,  284,  333,  397 
et  571  du  catalogue  D'Huyvetter). 

Planche  XX  des  Zeldzaniheden. 

133.  Verres  de  Venise  et  autres  :  coupes,  vi- 
drecome,  flacons,  verres  à  Champagne,  gobelets 
et  calices  (n°"  269,  487,  366,  304  (?),  386,  277, 

349.  377,  332,  276,  510,  505,  533,  338  et  519  du 
catalogue  D'Huyvetter). 

Planche  XXI  des  Zeldzaniheden, 

134.  Verrière  à  six  compartiments  (n°'  591  à 
596  du  catalogue  D'Huyvetter). 

H.  0,231.  L.  0,114. 
Planche   XXII  des  Zeldzaniheden.  Les  divers  comparti- 
ments composant  cette  verrière  furent  acquis  séparément  par 
Feid.  Lousbergs,  Norb.  D'Huyvetter  et  Bénoni  Verhelst. 


—    36G    - 

La  majeure  partie  des  vitraux  montés  sur  châssis ,  qui 
étaient  les  plus  remarquables  de  la  collection ,  furent  adju- 
gés à  Ferd,  Lousbergs.  Ils  sont  aujourd'hui  la  propriété  du 
c'e  Jos.  De  Hemptinne.  Les  autres  vitraux  furent  achetés 
par  MMi^s.  Eug.  Lippens ,  Minard  ,  Et.  Leroi,  etc. 

Les  planches  (n°s  1 13-134)  ont  été  gravées,  en  1826  et 
1827,  pour  Jean  D'Huyvetter,  qui  voulait  donner  à  ses  amis 
une  idée  des  collections  qu'il  avait  rassemblées.  En  1829,  il 
en  fit  faire  un  recueil,  en  y  ajoutant  une  préface,  qui  parut 
sous  le  titre  suivant  :  Zddzaamheden  verzameld  en  ttit- 
gegeven  door  Joan.  D'Huyvetter ,  lid  van  het  hcstuur 
der  koninktijke  académie  van  teeken- ,  schilder-  en  bouw- 
kunde...  in  het  koper  gesneden  door  Ch.  Onghena.  Gent, 
P. -F.  De  Goesin-Verhaeghe ,  182g.  Quelques  exemplaires 
de  cette  publication  portent  un  titre  et  une  préface  en  fran- 
çais :  Objets  rares  recneillis  et  publiés  par  Joan.  D'Huy- 
vetter... gravés  sur  cuivre  par  Ch.  Onghena  de  Gand.  Ces 
recueils  ,  tirés  in-4°  et  in-folio  (ceux-ci  avec  les  planches  sur 
Chine) ,  ne  furent  pas  mis  dans  le  commerce. 

Le  musée  D'Huyvetter  fondé  dans  d'excellentes  condi- 
tions au  commencement  de  ce  siècle  ,  contenait  la  plus  pré- 
cieuse et  la  plus  nombreuse  collection  de  produits  cérami- 
ques des  XVI^  et  XVIP  siècles  et  de  verres  de  Venise  qui 
se  soit  jamais  formée  en  Belgique.  Il  renfermait  aussi  une 
admirable  série  de  verres  peints  et  de  fai-nces  de  Bernard 
Palissy,  quelques  émaux  ,  des  tableaux  et  des  dessins  de 
prix.  En  185 1  ,  le  20  octobre,  la  collection  D'Huyvetter  fut 
vendue  en  détail  et  ne  rapporta  que  la  modeste  somme  de 
52,257  fr.  Un  petit  nombre  d'exemplaires  du  catalogue  de 
vente,  rédigé  par  Bénoni  Verhelst,  a  été  tiré  m-\°  avec  ce 
titre  :  Description  des  antiquités  et  objets  d'art ,  qui  compo- 
sent le  cabinet  de  feu  M^  Joan.  D'Huyvetter,  à  Gand.  Pour 
ces  exemplaires  il  fut  fait  un  nouveau  tirage  des  22  planches 
d'Onghena. 


—     367    — 

135-   Église    cathédrale    de   Saint-Bavon.  Vue 

intérieure,  d'après  un   dessin  de  P.-J.   Goetghe- 

buer. 

H.  0,297.  L.  0,391. 

Les  figg.  et  ornements  de  cette  planche  ont  seuls  été 
gravés  par  Ch.  Onghena.  Tout  ce  qui  est  architecture  est 
l'œuvre  de  P.-J.  Goetghebuer. 

Les  premières  épreuves  de  cette  planche  sont  au  trait. 
Les  autres  sont  à  l'aqua-tinta.  Cette  planche  a  été  repro- 
duite ,  avec  quelques  modifications  par  C.  Eckerlin  pour 
l'ouvrage  :  Églises  principales  de  l' Europe,  publié  à  Milan 
(livr.  X,  année  183 1). 

136.  Modèles     d'écriture    :    Verzameling     van 
fraaije  schrifteii,  door  J.  Odeyn,  onderwyzer  te  Gent. 

Série  de  12  planches  in-4°  obi.,  numérotés  i,  2,  3,  5,  6, 
7>  9.  10.  13»  14»  15  et  19. 

Cet  ouvrage  ne  fut  point  terminé. 

137.  Une  feuille  d'orme  portant  le  nom  de 
Van  Lerberghe  fils  (horticulteur  à  Courtrai). 

H.  0,034.  L.  0,075. 

138.  Carte  d'adresse   de  Bousse-De  Cooman, 

potier  à  Gand. 

H.  o,ogi.   L.  0,053. 

Bousse,  potier  à  Gand,  ayant  demeuré  rue  Saint-Georges, 
avait  réuni  une  collection  de  32,000  boutons.  Cette  collec- 
tion unique  en  son  genre  fut  vendue  le  15  avril  1S50  et 
acquise  par  le  duc  d'Arenberg.  Sur  le  catalogue  le  nom  de 
Bousse  est  orthographié  par  erreur  Boiisens. 

13g.  Plusieurs  cartes  de  visite  portant  les  noms 


—     SG8    — 

de  Pilloy,   Jacobsen,  Van    Bosterhout,   Haeck, 
Versturme,  etc. 

Ch,  Onghena,  à  partir  de  1829  jusque  vers  1850,  a  gravé 
un  nombre  considérable  de  cartes  de  visite.  Nous  ne  citerons 
désormais  que  celles  qui  contiennent  autre  chose  qu'un  nom 
isolé. 

1830. 

140.  Pierre  sépulcrale  de  Saint  Flobert,  abbé 
de  l'abbaye  de  Saint-Bavon,  mort  en  661. 

H.  0,232.  L.  0,182, 

La  gravure  est  de  la  dimension  de  la  dalle.  Cette  pierre 
sépulcrale  de  Saint  Flobert,  en  marbre  blanc,  a  été  conservée 
parmi  les  reliques  de  la  cathédrale  de  Gand  ,  jusqu'en  1822  , 
époque  où  elle  fut  donnée  par  le  chanoine  Lebègue  à  Liévin 
De  Bast.  Aujourd'hui  elle  appartient  à  la  ville  de  Gand  et 
est  déposée  dans  le  cabinet  de  l'université.  Une  repro- 
duction en  marbre  exécutée  par  les  soins  de  la  Commission 
des  monuments  est  incrustée  dans  le  mur  de  la  chapelle  de 
Saint-Machaire  aux  ruines  de  l'abbaye  de  Saint-Bavon. 
Voyez  Messager  des  sciences,  182g,  p.  i  (article  de 
J.  Raepsaet)  ;  Histoire  de  l'architecture,  par  Schayes,  I, 
p.  281.  Ce  dernier  auteur  dit  que  la  pierre  sépulcrale  de 
Saint  Flobert  est  la  plus  ancienne  inscription  tumulaire 
chrétienne   qui    existe    en    Belgique.    L'inscription   porte  : 

HIC    II    REQVIESCIT.     FLOR    ||    BERTVS.     ABBA...|    \\    GANDENSIS. 
CM  II  NOBII    ]    OBIIT.  VllL  ||  ID.  OCTB.  || 

En  tête  de  la  notice  de  J.  Raepsaet  se  trouve  une  autre 
copie  de  cette  pierre  ,  gravée  par  Constant  Onghena,  frère 
de  Charles.  Une  copie  réduite  figure  dans  l'ouvrage  de 
Van  Lokeren  :  Histoire  de  l'abbaye  de  Saint-Bavon. 


o 


GO 


141.  Bactrelle  fil.  (Vibrion  lamellinaire). 

H.  0,183.  L.  0,137. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1829-30, 
p.  341  (Article  de  C.  Morren). 

142.  Médaille  :  une  fileuse  et  son  rouet  entouré 

de  deux  cornes  d'abondance. 

Diam.  0,047. 

Gravée  pour  P.  Dobbelaere. 

143.  Sceau  :  légende  en  caractères  gothiques  : 
S.  Hambochts  van  de  viilders  van  West  Eeclo. 

Diam.  0,033. 
Gravé  en  relief  sur  cuivre. 

144.  Le  calvaire.  Le  Christ  en  croix;  à  droite 
la  Vierge,   à   gauche    Saint  Jean.   Inscription  : 

PEINTURE  DU  XIV^  SIÈCLE. 

H.  0,117.  L.  0,096. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts ,  1829-30. 
Ce  tableau,  dont  l'auteur  est  inconnu,  fait  partie  du  musée 
d'Anvers,  collection  Van  Ertborn  (Catal.  du  musée,  n°  14). 

145.  Guillaume  Beukels.  Peinture  sur  verre  à 
Biervliet. 

H.  0,159  72.    L.  0,093  Va- 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1829-30, 
p.  411.  En  1816,  J.-J.  Raepsaet  avait  publié  :  Note  sur  la 
découverte  de  caquer  le  hareng,  faite  par  Gnill.  Beukels, 
pilote  de  Biervliet  en  Flandre.  Cet  opuscule  n'a  pas  été 
reproduit  dans  les  œuvres  complètes  de  Raepsaet.  En  1826, 
J.-B.-G.  Camberlyn  composa  un  poëme  en  l'honneur  de 
Beukels  :  Bukelingi  genio,  réimprimé,  avec  variantes,  dans 
ses  Miscellanea.  Gandae,  De  Goesin,  1828,  pp.  132-139. 


o 


70 


146.  Portrait  de  Théodore-Victor  Van  Berckel, 

célèbre  graveur. 

H.  0,055  72.  L.  0,038. 

Gravé  pour  le  Messager  des  sciences  et  des  arts,  1829-30, 
p.  452. 

147.  Cheval  prenant  le  mors  aux  dents.  Eau- 
forte. 

H.  0,106.  L.  0,060. 

Gravé  sur  le  couvercle  d'une  boîte  à  tabac.  Il  n'y  a  eu 
que  huit  épreuves  de  cette  gravure. 

148.  Singe  sur  une  branche  d'arbre.  D'après 
une  eau-forte  de  Eug.  Verboeckhoven. 

H.   0,068  7,.    L.   0,056  Va. 

14g.  Plan  de  Gand  :  panorama  de  la  ville  de 

GAND  1830. 

H.  0,13g.  L.  o,i6g. 
Gravé  pour  le  Guide  des  voyageurs  dans  la  ville  de  Gand, 
par  Aug.  Voisin.  Gand,  1831. 

150.  Portrait  de  Tacite. 

H.  0,138.  L.  0,096. 

Gravé  pour  J.-M.  Schrant.  Ce  portrait  n'a  été  publié  qu'en 
1855  pour  la  Germania  de  Schrant,  imprimée  à  Leiden.  Il  a 
été  tiré  de  cette  planche  des  épreuves,  en  fort  petit  nombre, 
avant  la  lettre  sur  papier  de  Chine. 

151.  Médaille  de  T.  Van  Berckel.  Face  et  re- 
vers; fond  à  lignes  horizontales. 

H.  0,063.  L.  0,116. 
Cette  médaille,  frappée  pendant  la  révolution  de  1787  par 
les  patriotes  d'Utrecht,  est  la  plus  rare  de  l'œuvre  de  Van 


—    371     — 

Berckel.   Presque  tous  les  exemplaires  en  ont  été  détruits 
par  les  Prussiens. 

Gravée  pour  Geelhand,  numismate  à  Anvers,  qui  possé- 
dait cette  médaille. 

152.  Médailles  du  cabinet  de  J.  De  Nayere. 

H.  0,253.  L.  0,202. 
Cette  planche  reproduit   13  médailles  du  règne  de  Napo- 
léon I.  Inscription  :  médailles  faisant  partie  du  cabinet 

DE  J.   p.   DE  NAYERE  A  GAND. 

Quatre  exemplaires  ont  été  tirés  avant  la  lettre. 

153.  Scheveningue.  Vue    prise    de    la   plage. 

Titre  :  bains  a  scheveningue.  D'après  un  dessin 

de  P.-J.  Goetghebuer. 

H,  0,140.  L.  0,214. 

Il  existe  de  cette  planche  un  i^^""  état  au  trait,  avant  la 
lettre. 

154.  Entrepôt  à  Anvers.  D'après  un  dessin  de 
L.  Roelandt.  Inscription  :  entrepôt  de  commerce 

EN  CONSTRUCTION  A  ANVERS  183O. 

H.  0,125.  L.  0,213  1/2. 
Il  existe  de  cette  planche  gravée  pour  L.   Roelandt  un 
premier  état  au  trait,  dont  on  n'a  conservé  que  six  épreuves. 

155.  Le  château  d'Orange.  D'après  un  tableau 
du  général  hollandais  P.  Groenia.  Sur  l'avant- 
plan  des  rochers,  un  cours  d'eau,  des  arbres,  etc. 
Une  troupe  de  chevaliers  sort  du  château.  Ins- 
cription :  DEPART  DE  GUILLAUME  dit  AU  CORNET. 

H.  0,102.  L.  0,123. 
Les  épreuves  de  cette  planche  n'ont  pas  été  distribuées. 
Un  seul  exemplaire  a  été  tiré  avant  l'inscription. 


ÔIJ, 


156.  Médailles  de  la  révolution  brabançonne 
de  Van  Berckel  (2  médailles,  face  et  revers). 

H.  0,137  1/2.  L.  0,110. 
Gravé  pour  Geelhand,  numismate,  à  Anvers. 

157.  Le  chasseur  et  ses  chiens  mis  en  juge- 
ment par  les  animaux,  puis  condamnés  et  exécu- 
tés. Inscription  :  allé  te  strenge  heeren  ,  doen 

HAER  GUNST  IN  HAET  VERKEEREN. 

H.  0,242.  L.  0,293. 

Gravure  faite  pour  l'abbé  Kervyn  qui  en  distribua  les 
exemplaires  à  ses  amis.  Six  épreuves  furent  tirées  avant  la 
lettre. 

Les  collections  de  l'abbé  Kervyn  (livres,  gravures,  anti- 
quités et  objets  d'histoire  naturelle)  furent  vendues  à  Gand 
en   1857. 

158.  Lettre  d'Eug.  Verboeckhoven  à  Rommel. 

Fac-similé. 

H.  0,136,   L.  0,110. 

15g.   Carte  d'adresse  de  Ch.  Onghena  :  Ch.^  On- 

ghena  Dessinât'  et  Graveur  à  Gand.  Rue  des  Champs, 

N°  14. 

H.  0,037.  L.  0,072. 


(A  continuer). 

Ferd.  Vanderhaeghen. 


—     373 


VARIÉTÉS. 


Les  oeigines  de  l'oefévreeie  cloisonîcée.  Recheeches 

SUE  LES  DIVEES  GEKEES  d'iNCEUSTATION  ,  LA  JOAILLEEIE 
ET  l'aET   DES  MÉTAUX  PEÉCIEUX,  PAE  Ch^^LES  DE  LiNAS. 

T.  II,  gr.  in-S",  510  pp.  —  Le  second  volume  de  ce  remar- 
quable ouvrage  a  paru  '.  M.  de  Linas  est  un  vrai  savant; 
un  archéologue  iafatiguable  que  l'amour  de  la  science 
n'abandonne  jamais ,  qui  ne  se  décourage  point  même 
devant  les  questions  les  plus  ardues  et  les  moins  intéres- 
santes en  apparence.  Son  œil  investigateur  ne  laisse  rien 
dans  l'oubli,  et  quand  il  a  vu,  il  a  bien  vu  tout  ce  qu'on 
pouvait  voir.  Il  décrit  exactement  et  en  détail,  trop  minu- 
tieusement peut-être,  l'objet  dont  il  s'est  emparé. 

On  comprendra  qu'il  n'est  guère  possible  de  consacrer  à 
un  travail  aussi  important  le  compte-rendu  qu'il  mérite  ; 
l'espace  et  le  temps  nous  manquent;  mais,  disons  de  suite 
qu'il  a  sa  place  marquée  dans  toute  bibliothèque  composée 
d'ouvrages  d'histoire  et  d'archéologie,  entre  de  Caumont,  le 
comte  de  la  Borde,  Viollet-le-Duc  et  tant  d'autres  savants 
dont  la  France  s'honore, 

A  défaut  d'une  analyse  plus  étendue,  jetons  les  yeux  sur 
les  chapitres  de  ce  deuxième  volume  qui  sera  suivi  d'un 
troisième  sur  l'histoire  de  l'orfèvrerie  cloisonnée. 

»  V.  Messager  des  Sciences,  an.  1877,  p.  244. 


—     374    — 

Ce  volume  commence  au  chapitre  VI  qui  traite  des 
barbares,  que  les  écrivains  grecs  et  latins  peignent  sous 
l'aspect  de  tribus  grossières,  belliqueuses  et  farouches, 
éloignées  de  la  civilisation  de  cette  époque.  M.  de  Linas 
démontre  que  les  fouilles  pratiquées  en  Suède  et  en  Dane- 
marck  prouvent  que  ces  barbares  «  avaient  une  civilisa - 
»  tion  dont  les  débris  accusent  des  aptitudes  artistiques 
»  très-développées.  » 

Dans  ce  chapitre,  l'histoire  de  la  métallurgie  artistique 
des  peuples  de  l'Asie  est  traitée  avec  soin  et  une  parfaite 
connaissance  de  la  matière.  Toutes  les  peuplades  qui  com- 
posent le  vaste  empire  des  Czars  y  ont  leur  histoire  depuis 
la  Crimée  jusqu'aux  contins  de  la  Sibérie.  La  Russie  chré- 
tienne termine  le  livre. 

A  chaque  pas  il  faudrait  s'arrêter  aux  divers  objets  que 
l'auteur  décrit,  mais  cet  examen  nous  entraînerait  bien 
au-delà  des  bornes  qui  nous  sont  imposées.  Cependant, 
signalons  à  l'attention  des  lecteurs  du  Messager^  quelques 
pages  où  il  est  parlé  du  trésor  de  Maëstricht  tant  de  fois 
cité  dans  ce  recueil. 

Le  trésor  de  Maëstricht  renferme  une  tapisserie  d'une 
haute  valeur  archéologique  et  artistique.  «  C'est  un  ad- 
»  mirable  holosericum  sigillatiim,  fond  cramoisi,  dit  l'au- 
»  teur,  dont  les  médaillons  circulaires  encadrent  deux 
»  cavaliers  galopant  en  sens  inverse  et  perçant  à  coups  de 
»  flèche  les  lions  qui  rampent  à  leurs  pieds.  La  palmette 
»  d'amortissement,  le  bouquet  feuillu  compris  entre  les 
»  cercles,  la  bordure  —  une  guirlande  retenue  par  des  ban- 
»  delettes  en  hélice  —  sont  jolis,  mais  lourds  et  accusant  le 
»  style  romain  de  la  décadence.  Les  personnages,  nu-tête, 
»  ont  une  chevelure  bouclée  ;  leur  tunique  étroite,  desçen- 
»  dant  jusqu'au  genoux,  et  leur  chiamyde  flottante,  sont 
»  diaprées  ;  un  cothurne,  laissant  les  orteils  à  découvert, 
»  les  chausse.  L'Orient  n'a  rien  à  faire  ici,  l'Occident  y 


—    375    — 

»  domine  en  maître.  Évidemment  contemporains  de  la 
»  chasLi])le  de  Saint-Servais  (sacrifice  aux  Dioscures),  les 
»  cavaliers  de  Maëstricht  peuvent  dater  du  IV''  siècle'.  » 

«  Que  l'étoife  soit  une  réplique,  dit  plus  loin  M.  de  Linas, 
»  je  veux  bien  le  concéder,  mais  le  carton  original  date 
»  certainement  du  IV"  siècle;  Fart  byzantin  n'imprima 
»  plus  aux  figures  le  mouvement  énergique  qui  fait  ici 
»  vivre  en  quelque  sorte  les  personnages  et  les  animaux 
»  éclos  sous  la  navette  du  tisserand  -.  » 

L'auteur  termine  son  excursion  sur  le  domaine  de  Vars 
textrina  en  s'excusant  de  s'être  écarté  de  l'orfèvrerie  cloi- 
sonnée. 

Nous  n'éprouvons  nullement  le  regret  de  l'avoir  suivi.  Sa 
dissertation  sur  l'origine  de  ces  étoffes  précieuses  nous  a 
d'autant  plus  intéressé,  que  par  leur  nature  elles  sont 
exposées  à  une  destruction  plus  rapide.  Chaque  fois  qu'une 
vérification  du  trésor  a  lieu,  l'air  en  y  pénétrant  doit  accé- 
lérer la  décomposition  des  objets  textiles  qui  s'y  trouvent. 
Quelque  temps  encore,  et  il  ne  restera  plus  de  ces  précieux 
tissus  qu'une  poussière  qu'un  peu  de  vent  fera  disparaître. 

M.  de  Linas  s'occupe  ensuite  des  bijoux  sibériens.  Cette 
partie  est  pleine  de  détails  curieux  sur  la  bijouterie  et 
l'orfèvrerie  de  ces  peuples  que  l'on  qualifie  assez  prompte- 
ment  de  harhares^  mais  qui  prouvent  par  leurs  travaux 
artistiques  que  ce  terme  ne  leur  est  pas  plus  applicable 
qu'aux  peuples  de  l'Europe.  «  Les  monuments  antiques  de 
»  la  Russie,  que  nous  venons  de  passer  en  revue,  dit-il,  sont 
»  d'abord  grecs,  romains,  byzantins,  perses,  orientaux, 
»  c'est-à-dire  étrangers.  D'autres,  paraissant  fabriqués 
»  dans  le  pays  même,  diffèrent   entre  eux  suivant   les 


*  P.  236.  Sur  le  trésor  de  Maëstricht  voj'ez  Retjssens,  Éléments 
(C archéologie  chrétienne,  t.  I,  p.  233,  et  le  Beffroi,  t.  I,  p.  353. 

*  P. 241. 


—    376    — 

»  tribus  barbares  qui  les  produisirent  :  ces  derniers,  bien 
»  qu'offrant  certains  rapports  dans  leurs  caractères  géné- 
»  raux,  manquent  de  Tunité,  condition  essentielle  d'un 
»  art  national.  Il  appartenait  au  christianisme,  suprême 
»  fondateur  des  nationalités  modernes,  de  coordonner  les 
»  éléments  épars,  venus  de  points  divers,  et  d'imprimer  à 
»  leur  ensemble  la  tournure  particulière,  le  cachet  spécial, 
»  qui  font  reconnaître  au  premier  coup-d'œil  qu'un  objet 
»  provient  de  tel  ou  tel  peuple  '.  » 

Ce  chapitre  n'est  pas  le  moins  intéressant  de  l'ouvrage. 
L'auteur  y  prend  résolument  la  défense  de  l'art  russe  éclos 
au  XIP  siècle  et  dont  la  marche  progressive,  constante, 
manifeste  jusqu'au  XVIP  siècle  a  été  reconnue,  mais  plus 
souvent  méconnue. 

L'appendice  contient  des  notes  et  des  dissertations 
instructives  et  des  appréciations  importantes  sur  certains 
objets  traités  précédemment.  Ainsi,  la  note  qui  se  rapporte 
aux  étoffes  historiées  antiques  sera  lue  avec  plaisir  par  les 
archéologues  belges.  Le  trésor  de  Saint-Servais  à  Maës- 
tricht,  en  fait  en  grande  partie  les  frais  et  Vholosericum 
dont  nous  avons  parlé,  y  est  de  nouveau  mis  en  lumière. 

Il  y  aurait  peut-être  des  critiques  à  faire.  Peut-être 
faudrait-il  modifier  quelques  affirmations  trop  prompte- 
ment  acceptées.  Mais,  pour  cela  il  faudrait  étudier  l'ouvrage 
au  lieu  de  le  lire.  M.  de  Linas  serait  le  premier  à  recon- 
naître son  erreur  si  elle  lui  était  démontrée.  N'en  cherchons 
la  preuve  que  dans  l'ouvrage  qui  nous  occupe,  où  il  avoue 
avec  beaucoup  de  loyauté  et  de  franchise,  qu'il  a  attribué 
un  jour  à  un  automédon  Lybien  du  cirque  les  grâces  d'une 
impératrice  de  Rome  "^ 

L'ouvrage  que  nous  venons  d'analyser  curente  calamo,  et 


»  P.  207. 
«  P.  237. 


—     377    — 

qui  demanderait  plus  d'études  pour  l'apprécier  selon  son 
im])ortarjce,  est  sans  contredit  et  malgré  certaines  lacunes 
inévitables,  l'un  des  meilleurs  sur  cette  matière.  On  ne 
doit  pas  se  dissimuler  les  difficultés  qu'un  tel  travail  ren- 
contre dans  sa  marche.  Il  faut  beaucoup  de  savoir,  un 
flair  que  l'archéologue  passionné  seul  possède,  et  un  tact 
dans  le  choix  des  éléments,  qui  ne  s'acquiert  que  par  une 
longue  expérience,  pour  conduire  une  entreprise  délicate 
où  les  erreurs  sont  faciles  à  commettre. 

En  terminant,  nous  dirons  que  les  gravures  sont  digues 
de  l'ouvrage  et  que  les  meilleures  sont  dessinées  par  M.  de 
Linas  lui-même. 

Le  troisième  et  dernier  volume  est  sous  presse. 

B^"  K.  DE  V. 


Le  pétrole  sue  la  place  d'Anatîes  en  1ô47.  —  Le 
savant  archiviste  M.  J.  Jos.  van  den  Branden,  a  eu  Tobli- 
geance  de  nous  communiquer  la  pièce  suivante  qu'il  a 
trouvée  dans  les  archives  de  la  ville  d'Anvers  : 

Eodem  Primo  die  Sej)tembris  1547. 
Gillis  Moermeester  apoticaire  demeurant  en  la  ville  Dan- 
vers  confesse  avoir  achapté  de  Francisco  Villado  marchant 
Italien,  la  quantité  de  unze  casses  qui  font  vingt  et  deux 
flasquons  de  pietreole,  pesantz  en  tout  environ  unze  ou 
douze  livres,  chescune  livre  a  quinze  pattars  monnoye  de 
Flandres.  Laquelle  quantité  de  pietreole  letlict  Villado 
pourra  livrer  audict  Moermeester,  à  toute  heure  quand  il 
luy  plaira,  et  ledict  Gillis  sera  tenu  de  la  recepvoir  et 
estant  livré  quant  a  quant  sera  tenu  de  payer  deus  casses 
desdicts  unze  casses  lesquelz  il  luy  consignera  presente- 

25 


—     378    — 

ment,  par  tout  le  mois  de  jenvier,  proucLain  venant,  et  la 
reste  en  dixhuyt  mois  après  ensnyvantz,  scavoir  de  quattre 
mois  en  quattre  mois  deux  casses,  et  une  casse  en  deux 
mois  ensnyvantz,  qui  font  ensemble  dixhuyt  mois,  tout 
lequel  ledit  Gillis  promect  ainsi  comme  dict  est  accomplir 
et  achever,  soulz  obligation  de  sa  personne  et  biens  pré- 
sents et  avenir.  Et  renuntiation  de  toutes  exceptions,  et 
defences  faisantz  au  contraire  de  cestes.  Consentant  et 
requérant  ledict  Gillis  de  ce  estre  faictz  instrumens  pu- 
blicque  en  forme  meilleure.  Faict  an  Anvers,  présents 
Adrien  sHertoghen,  notaire  et  Estienne  du  Faict,  tes- 
moings,  etc. 

[Protocolles  du  notaire  Siyer  sHertoghen  1544-47). 


379 


CHRONIQUE. 


Cromcque  contenant  l'estat  ancien  et  moderne  du  pays  et 

CONTÉ  DE  jSTaMUR,  LA  VIE  ET  GESTES  DES  SEIGNEURS,  CONTES  ET  MAR- 
QUIS d'icelluy,  par  Paul  de  Croonendael,  greffier  des  finances 
DU  Rot.  —  Publiée  intégralement  pour  la  première  fois  et  annotée 
par  le  comte  de  Limminghe.  —  Première  partie,  comprenant  depuis 
les  origines  jusqu'à  la  mort  de  Philippe  le  Noble,  1212.  —  Un  vo- 
lume in-â",  v-ix  avant-propos,  xi-xvi  introduction,  361  pp.  avec 
33  blasons  ou  sceaux  coloriés,  et  2  en  noir.  —  Bruxelles,  chez 
Fr.-J.  Olivier,  libraire,  1878.  —  Fr.  Gobbaerts,  imprimeur  du  Roi, 
Bruxelles,  21,  rue  de  la  Limite. 

Parmi  les  nombreux  objets  d'études  qui  sollicitent  et  occupent 
l'activité  intellectuelle  de  notre  époque,  les  recherches  historiques 
tiennent  sans  contredit  une  place  très  importante.  Je  ne  sais  qui  a 
dit  que  le  XIX"  siècle  serait  le  siècle  de  l'histoire  ;  toujours  est-il 
que  les  illustres  travaux  publiés  en  Allemagne,  en  Angleterre  et  en 
France,  semblent  prouver  la  justesse  de  cette  assertion.  Ce  qui  est 
certain,  en  tout  cas,  c'est  qu'ils  ont  exercé  une  influence  considé- 
rable, non  seulement  par  leur  haute  valeur  scientifique  et  littéraire, 
mais  aussi  par  la  nouvelle  et  féconde  direction  qu'ils  ont  imprimée 
à  l'étude  de  l'histoire.  Le  temps  n'est  plus  oîi  l'écrivain  cherchait 
surtout  à  intéresser  son  lecteur  j)ar  les  agréments  du  style,  par  des 
descriptions  et  des  récits  souvent  plus  élégants  que  fidèles,  par  de 
pompeux  et  solennels  discours  qu'il  prétait  gratuitement  à  ses 
personnages.  Ce  que  l'on  veut  aujourd'hui,  c'est  la  peinture  exacte 
des  choses,  dans  l'ensemble  et  dans  les  détails,  une  appréciation 


—    3S0    — 

saine  et  éclairée  des  caractères,  l'étude  attentive  et  raisonnée  des 
causes  et  des  effets  ;  en  un  mot,  le  tableau  vivant  et  harmonique  de 
l'époque  qu'on  veut  faire  revivre.  Mais  ce  besoin  d'avoir  et  de  taire 
de  Vhistoire  vraie  ne  peut  être  satisfait  qu'à  la  condition  de  se  livrer 
à  un  examen  assidu  et  laborieux  des  sources,  des  monuments,  des 
récits  ou  des  documents  contemporains,  qui  constituent,  en  quelque 
sorte,  des  témoins  vivants  des  hommes  et  des  choses  qui  ne  sont  plus. 
Aussi,  dans  presque  tous  les  pays  de  l'Europe,  on  a  entrepris  avec 
passion  l'étude  des  sources  et  des  anciens  documents  historiques  : 
légendes  des  saints,  vieilles  chroniques,  comptes  de  villes  ou  de 
corporations,  livres  de  fief  et  de  cens,  obituaires,  tombes  et  monu- 
ments funéraires,  lois,  ordonnances  et  règlements,  tout  est  exploré 
avec  soin  par  une  foule  de  chercheurs,  aussi  infatigable  que  savants, 
qui  rassemblent  patiemment,  et  souvent  au  prix  de  rudes  labeurs, 
les  matériaux  épars  dont  un  génie  créateur  construira  quelque  jour 
un  monument  durable.  Sous  ce  rapport,  notre  pays,  toute  proportion 
gardée,  n'est  pas  plus  resté  en  arrière  que  sur  le  terrain  de  l'acti- 
vité commerciale  et  industrielle.  L'Académie,  la  Commission  royale 
d'histoire,  la  Commission  instituée  pour  la  publication  des  anciennes 
lois  et  ordonnances  de  la  Belgique,  diverses  sociétés  particulières, 
des  institutions  provinciales  ou  locales  rivalisent  de  zèle  et  d'efforts 
pour  tirer  de  la  poussière   des  archives  et  des  bibliothèques  les 
documents  qui  peuvent  jeter  quelque  jour  sur  l'histoire  et  les  insti- 
tutions du  passé;  beaucoup  de  particuliers  même  consacrent  à  de 
semblables  travaux  leur  temps  et  leur  argent.  Le  nombre  de  ceux-ci 
augmente  tous  les  jours,  et  voici  M.  le  comte  de  Limminghe  qui 
vient,  à  son  tour,  prendre  parmi  eux  une  place  des  plus  honora- 
bles en  publiant  la  chronique  de  Paul  de  Crooneudael,  dont  il  nous 
livre  la  première  partie  en  un  magnititiue  volume  in— 4°,  sorti  des 
ateliers  de  M.  Fr.  Gobbaerts,  imprimeur  du  Roi  à  Bruxelles. 

L'ouvrage  de  Croonendael ,  bien  que  resté  inédit ,  n'avait  pas 
échappé  à  l'attention  des  érudits  qui  se  sont  occupés  de  notre  his- 
toire. Sweertius ,  Valère'André,  Miraeus,  Gratnaye,  Sanderus,  Fop- 
pens,  Paquot  l'ont  tour  à  tour  signalé  dans  leurs  ouvrages.  M.  de 
Reiffénberg,  qui  a  tant  fait  pour  la  publication  de  nos  anciens  écri- 
vains nationaux,  a  imprimé,  en  tête  de  ses  Monuments  pour  servir  à 
Vhistoire  des  provinces  de  Naniur,  de  Luxembourg  et  de  Hainaut, 
quelques  fragments  de  notre  chroniqueur  naraurois.  M.  Borgnet, 


-    381    — 

dans  la  préface  de  son  Histoire  de  Namur  ;  M.  Bormans,  dans  son  in- 
troduction au  cartulaire  de  Namur,  ont  également  fait  ressortir  les 
mérites  de  Croonendael.  M.  de  Limminghe  a  donc  rempli  une  vé- 
ritable lacune  en  publiant  cette  chronique  ,  d'autant  plus  que  le 
nombre  des  ouvrages  spéciaux,  anciens  et  modernes,  concernant 
la  province  de  Xamur  est  passablement  restreint. 

Les  renseignements  n'abondent  guère  non  plus  sur  la  vie  et  la 
carrière  de  Paul  de  Croonendael,  seigneur  de  Vlieringhe  en  Hainaut  ; 
c'est  que,  au  milieu  des  événements  si  agités  de  l'époque,  il  ne  joua 
sans  doute  qu'un  rôle  modeste  et  effacé.  Resté  fidèle  au  gouverne- 
ment du  Roi,  il  assista  en  1568  au  sanglant  combat  de  Heyligerlée  ; 
mais,  soit  qu'il  eût  peu  de  goût  pour  les  hasards  sanglants  de  la 
guerre,  soit  qu'il  lui  répugnât  de  combattre  des  compatriotes,  il 
quitta  bientôt  le  service  militaire  et  entra  au  Conseil  des  finances, 
oîi  il  remplit  successivement  les  places  de  greffier  et  de  commis  ou 
conseiller.  Il  occupa  les  loisirs  que  lui  laissait  son  emploi  à  compo- 
ser sa  chronique.  Sa  réputation  de  lettré  devait  être  assez  bien  éta- 
blie, puisque  nous  voyons  les  Archiducs  le  charger  en  1614,  con- 
jointement avec  Philippe  Sterckx,  de  faire  un  nouvel  inventaire  de 
la  bibliothèque  de  Bourgogne.  D'ailleurs  Gramaye  appelle  son  livre  : 
historiam  liiculenter  et  fuse  scriptatn. 

Il  est  à  croire  que  si  Croonendael  avait  pu  pousser  son  travail 
jusqu'à  l'époque  même  où  il  vivait,  il  aurait  pu,  grâce  à  ses  relations 
et  à  la  position  qu'il  occupait,  jeter  de  nouvelles  lumières  sur  les 
hommes  et  les  choses  de  la  révolution  des  Pays-Bas  au  XVP  siècle. 
En  tout  cas,  son  livre  y  eût  gagné  en  intérêt;  on  n'y  trouve  pas  en 
effet  ce  charme  pénétrant  qui  se  dégage  de  la  belle  chronique  de 
Marcus  van  Vaei'newyck,  récemment  pultliée  par  M.  le  bibliothécaire 
Ferd.  Vanderhaeghen  :  livi-e  admirable,  où  l'auteur  raconte,  avec  une 
réalité  saisissante,  les  événements  dont  la  ville  de  Gand  et  ses  envi- 
rons étaient  alors  le  théâtre,  et  où,  malgré  sa  bonhomie  naïve  et 
bourgeoise,  il  s'élève  parfois,  à  force  d'émotion,  aux  accents  d'une 
généreuse  éloquence.  Malheureusement,  le  chroniqueur  namurois 
termine  son  ouvrage  au  moment  où  le  marquisat  passe  à  la  maison 
de  Bourgogne.  Il  semble  toutefois  avoir  eu  l'intention  d'aller  plus 
loin,  et  il  témoigne  en  quelque  sorte  le  regret  de  laisser  son  livre 
inachevé,  car  il  le  termine  en  disant  qu'  «  un  jour  il  fera  mieux  sans 
doute.  » 


—    3S2    — 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  chronique  de  Croonendael  présente  un  inté- 
rêt réel  pour  l'histoire  du  paj's  de  Namur.  Le  tome  premier,  le  seul 
publié  aujourd'hui,  ne  s'étend  que  jusqu'à  la  mort  de  Philippe  le 
Noble  (1212).  Après  avoir  traité,  dans  un  premier  article,  des  ori- 
gines anciennes  du  comté,  l'auteur  nous  donne  un  exposé  assez  dé- 
taillé de  l'état  du  pays,  tel  qu'il  était  à  son  époque.  C'est  peut-être 
la  partie  la  plus  intéressante  de  la  chronique,  et  M.  de  Reiffenberg 
paraît  en  avoir  jugé  ainsi,  puisque  c'est  le  seul  fragment  qu'il  ait 
jugé  utile  d'imprimer.  Après  une  description  topographique  vrai- 
ment curieuse,  Croonendael  énumère  soigneusement  les  richesses 
naturelles  du  comté,  et  passe  ensuite  à  la  population  elle-même 
avec  ses  trois  grandes  divisions  d'alors  :  le  clergé,  la  noblesse  et  les 
«  comuns.  «  Gentilhomme  lui-même  et  fonctionnaire,  il  revient 
alors  avec  complaisance  à  son  ordre,  dont  il  cite  les  plus  illustres 
familles,  donnant  sur  celles-ci  des  détails  généalogiques  très-spé- 
ciaux et  importants  pour  l'histoire  locale.  Enfin,  il  consacre  le  der- 
nier article  de  son  exposé  à  l'administration  de  la  justice  et  aux 
oiËciers  à  qui  elle  incombait. 

De  la  description  du  pays,  Croonendael  passe  alors  à  son  histoire. 
Il  la  commence  «  dès  le  temps  que  Charlemaigne  donna  le  pays  de 
Namur  au  colonel  Najone  » ,  non  toutefois  sans  avoir  au  préalable 
rapporté  «  aucunes  choses  dignes  de  mémoire  advenues  et  faictes 
"  en  icelluy  avant  ledict  temps.  »  Nous  ne  le  suivrons  pas  dans 
tous  les  développements  de  son  récit.  Il  raconte,  en  suivant  l'ordre 
de  succession,  les  règnes  des  princes,  s'attachant  principalement  à 
leurs  faits  et  gestes  militaires,  à  leurs  acquisitions,  à  leui-s  libérali- 
tés et  fondations  religieuses. 

Croonendael  est  un  chroniqueur  et  non  un  historien.  Cependant  il 
ne  manque  ni  de  critique  ni  de  sagacité.  Ce  qu'il  aime  surtout,  c'est 
d'éclaircir  les  difficultés  généalogiques  ;  il  discute  les  questions  con- 
troversées et  appuie  ses  assertions  sur  de  longs  tableaux  de  familles, 
de  nombreux  extraits  de  chartes  et  des  éi^itaplies.  Dans  le  second 
volume,  nous  le  verrons  aussi  utiliser  les  comptes  de  la  ville  de 
Namur.  Cette  manière  de  procéder  accuse  chez  lui  des  tendances 
sérieuses  et  un.  amour  de  la  vérité,  qui  lui  font  le  plus  grand 
honneur. 

D'autre  part,  le  chroniqueur  namurois,  dans  tout  le  cours  de  son 
ouvrage,  fait    preuve  de  lectui'es  aussi  étendues  que  variées.  Le 


—    383    — • 

nombre  d'auteurs,  tant  anciens  que  modernes,  dont  il  invoque  ou 
combat  tour  à  tour  l'autorité,  est  vraiment  prodigieux.  Il  met  même 
une  certaine  coquetterie  naïve  à  faire  étalage  de  son  érudition  ; 
comme,  par  exemple,  lorsque,  à  propos  du  comte  Henri  l'Aveugle, 
il  cite  une  longue  liste  d'aveugles  qui,  à  commencer  parTiresias» 
Polj'phême  et  Samson,  ont,  dans  tous  les  pays  et  dans  tous  le  s 
temps,  acquis  un  titre  quelconque  à  la  célébrité.  C'est  là  un  trait  de 
caractère  qui  lui  est  commun  avec  van  Vaernewyck  ;  comme  celui-ci 
encore,  il  aime  à  couper  parfois  son  récit  de  digressions  morales  et 
pliilosopliiques.  Tels  sont  les  passages  intitulés  :  «  Que  tous  royaul- 
»  mes  doibvent  estre  policiez  de  quelques  loix  auxquelles  le  i^rince 
»  se  conforme  »  (p.  137)  ;  —  «  Que  la  convoitise  des  biens  d'aul- 
»  truy  n'a  souvent  le  succès  imaginé  >i  (p.  236).  —  «  Que  l'on  ne 
»  doibt  négliger  l'antiquité  i  de  son  pays  »  (p.  330).  —  Passages 
charmants  de  naïveté  et  de  bon  sens,  qui  reposent  agréablement 
d'une  lecture  quelque  peu  fatigante,  et  qu'on  regrette  de  ne  pas 
rencontrer  plus  souvent. 

Dans  une  publication  comme  celle  qui  nous  occupe  ici,  la  première 
préoccupation  de  l'éditeur  doit  être  de  fournir  un  texte  aussi  fidèle 
et  aussi  complet  que  possible.  M.  de  Limminghe  n'a  pas  négligé  ce 
point,  parfois  aussi  malaisé  qu'important.  Déjà,  en  etïet,  dans  une 
lettre  adressée  en  1767  à  l'abbé  Micbiels,  vice-pléban  de  l'église  Notre- 
Dame  d'Anvers,  Paquot  déclarait  qu'il  considérait  l'impression  de  la 
chronique  de  Croonendael  comme  une  chose  utile,  mais  le  prévenait 
qu'elle  serait  difficile  à  cause  des  leçons  variées,  des  passages  incom- 
plets et  des  documents  douteux  qui  se  rencontraient  dans  le  texte. 
Dans  une  introduction  placée  en  tête  de  l'ouvrage,  M.  de  Limminghe 
expose  que  des  deux  manuscrits  existant  à  la  bibliothèque  de  Bour- 
gogne, il  a  choisi  celui  qui  provenait  de  la  collecton  de  Van 
Hulthem,  comme  étant,  à  ses  yeux,  le  texte  original  et  même  auto- 
graphe de  Croonendael.  Il  rend  également  compte  des  soins  qu'il  a 
pris  pour  fournir  à  ses  lecteurs  le  texte  intégral  du  chroniqueur. 
Enfin,  il  a  enrichi  l'ouvrage  de  nombreuses  mais  courtes  notes  indi- 
catives ou  explicatives,  ces  dernières  destinées  le  plus  souvent  à  rec- 
tifier des  erreurs  historiques  ainsi  que  l'ortographe  vieillie  ou 
fautive  de  noms  de  lieux  et  de  personnes. 

*  C'est-à-dire  l'histoire. 


—    384    — 

Il  ne  nous  reste  donc,  en  finissant  ce  compte-rendu,  qu'à  féliciter 
M.  de  Limminghe  du  service  qu'il  vient  de  rendre  aux  lettres  et  à  la 
science  historique  belges.  Son  œuvre  est  de  celles  qui,  par  leur 
nature  même,  ne  comportent  guère  les  suffrages  de  la  foule  ;  elle 
lui  assurera  du  moins  l'estime  et  la  considération  des  hommes 
d'étude  et  de  savoir.  Ce  sera  la  récompense  méritée  de  ses  tra- 
vaux. Il  est  à  souhaiter  que  son  exemple  trouve  de  nombreux  imita- 
teurs, et  qu'il  serve  à  propager  de  plus  en  plus  le  goût  des  patientes 
et  laborieuses  recherches,  si  éminemment  utiles  à  la  connaissance 
approfondie  de  notre  histoire  nationale. 

Ajoutons  enfin  que  l'ouvrage,  magnifiquement  imprimé  sur  grand 
papier  et  orné  de  dessins  exécutés  et  coloriés  avec  soin,  fait  hon- 
neur à  la  typographie  belge. 

P.  J.  W. 


—    385 


UNE    PIÈCE    INEDITE 


RELATIVE 


A  LA  RÉVOLTE  DES  GANTOIS  SOUS  CHARLES-QUINT. 


Peuple ,  méflez-vous  de  trilmns  factieux 
Qui  voudraient  briser  vos  entraves  : 
Bientôt  de  ces  ambitieux, 
Si  les  rois  succombaient ,   vous  seriez  les  esclaves. 
Baron  de  Stisrart.  Fables. 


I. 

L'histoire  de  la  révolte  des  Gantois  vers  le  mi- 
lieu du  XVP  siècle,  dont  les  conséquences  furent  si 
terribles  pour  la  capitale  de  la  Flandre,  la  ville 
«  la  plus  puissante  et  ample  de  la  crestienneté  ',  » 
prend  sa  source  dans  cette  longue  suite  de  luttes 
que  les  Flamands,  mais  surtout  les  Gantois,  sou- 
tinrent pour  la  défense  de  leurs  privilèges  et 
de  leurs  libertés. 

Au  XIIP  siècle  ils  s'étaient  révoltés  contre  Guy 
de  Dampierre,  qui  voulait  s'arroger  le  droit  de 
s'immiscer  dans  l'administration  de  la  commune 


'  Gachabd.  Relation  des  troubles  sous  Cha7^les-Quint ,  p.  72. 

26 


t) 


—    386    — 

gantoise,  que  le  génie  de  Jacques  van  Artevelde 
devait  élever,  un  siècle  plus  tard,  au  plus  haut 
degré  de  puissance  et  de  prospérité  qu'une  insti- 
tution politique  puisse  atteindre. 

Sous  les  ducs  de  Bourgogne  cette  lutte  inces- 
sante de  la  liberté  contre  le  pouvoir  se  renouvela 
plusieurs  fois.  Philippe  le  Bon  eut  à  combattre 
les  Gantois  dans  les  plaines  de  Gavre,  sur  l'Escaut, 
où  il  leur  infligea  une  sanglante  et  douloureuse 
défaite ,  dont  le  récit  nous  est  conservé  par 
Georges  Chastelain  et  Olivier  de  la  Marche ,  les 
deux  célèbres  chroniqueurs  de  ce  temps. 

Charles  le  Téméraire,  Maximilien  et  Marie  de 
Bourgogne  eurent  aussi  de  sanglants  démêlés 
avec  leurs  indomptables  sujets.  Il  était  réservé  à 
Charles-Qnint  de  clore  cette  série  de  combats  du 
pouvoir  communal  contre  l'autorité  du  souverain 
légitime. 

La  puissante  organisation  de  la  commune,  son 
amour  de  la  liberté  et  surtout  la  constitution 
guerrière  des  métiers,  contribuaient  largement  à 
développer  cette  tendance  à  la  révolte  chez  un 
peuple  turbulent  et  fier  de  son  glorieux  passé. 

Nous  ne  raconterons  pas  l'histoire  du  soulève- 
ment des  Gantois  contre  Charles-Quint.  Des  écri- 
vains consciencieux  l'ont  traitée  avec  toute  l'au- 
torité qui  s'attache  à  leurs  écrits. 

Ho3aick  van  Papendrecht,  dans  ses  Analecta  Bel- 
gica,  ou  plutôt  l'auteur  anonyme  dont  le  chanoine 
Jean  d'Hollander  a  pris  la  place  \  en  a  parlé  le 

*  M.  Gachard  est  d'avis  que  cet  écrit  ne  doit  pas  être  attribué  à 


—    387     - 

premier  dans  ses  Mémoires  sur  la  révolte  des  Gan- 
thois  en  Van  1539  contre  Charles  V  empereur  des 
Romains  et  Monarche  des  Espagnes,  leur  légitime 
Seigneur,  écrit  Tan  1547 . 

Vient  ensuite  M.  Charles  Steur  qui  a  traité  la 
question  avec  beaucoup  de  talent,  dans  son  remar- 
quable mémoire  intitulé  :  Insurrection  des  Gantois 
sous  Charles-Quint ,  et  enfin  M.  Gacbard  en  pu- 
bliant un  manuscrit  anonyme  dans  la  collection 
des  chroniques  belges  inédites,  sous  le  titre  de  : 
Relation  des  troubles  de  Gand  sous  Charles-Quint. 

Ces  trois  sources  sont  indispensables  pour  se 
rendre  compte  des  faits,  pour  les  apprécier  et  en 
tirer  des  conclusions  exactes  et  conformes  à  la 
vérité  historique. 

D'autres  documents  contemporains  ont  été  pu- 
bliés dans  divers  recueils,  et  tous  jettent  un  rayon 
de  lumière  sur  cette  époque  si  profondément  trou- 
blée; celui  que  nous  allons  communiquer  n'inspi- 
rera pas  moins  d'intérêt. 

Sans  doute  après  avoir  lu  ce  que  Hoynck  van 
Papendrecht,  Steur  et  Gachard  ont  dit,  il  reste 
peu  de  choses  à  y  ajouter.  Le  procès  est  suffisam- 
ment instruit  pour  faciliter  la  tâche  de  l'historien 
et  l'autoriser  à  se  prononcer  en  connaissance  de 
cause. 

Néanmoins,  notre  document  a  un  cachet  du 
temps  qui  lui  donne    une    incontestable   valeur 


d'HoUander,  »  personnage  assez  insignifiant,  »  mais  qu'il  doit  avoir 
été  rédigé  dans  les  chancelleries  même  du  gouvernement  pour  l'in- 
formation de  l'Empereur.  Rel.  des  troubles^  p.  xxxi. 


—    388    — 

liistorique  et  Ton  nous  saura  gré  de  le  mettre  en 
lumière;  mais,  avant  de  produire  cette  pièce  iné- 
dite, disons  un  mot  de  la  situation  politique  des 
Gantois  en  Tan  1539. 

Reconnaissons  tout  d'abord ,  que  l'empereur  se 
serait  montré  moins  sévère ,  si  la  populace  sans 
cesse  excitée  par  des  meneurs  intéressés  à  semer 
le  désordre  et  la  crainte,  ne  s'était  emparée  de  la 
direction  du  mouvement.  Les  excès  de  toute 
espèce,  les  assassinats  juridiques  et  autres,  et  les 
spoliations  qui  se  pratiquaient  sur  une  grande 
échelle,  irritèrent  le  souverain  et  le  disposèrent  à 
agir  avec  la  dernière  rigueur. 

La  révolte  avait  pris  de  vastes  proportions.  Le 
magistrat  de  1536  avait  été  chassé  et  plusieurs 
de  ses  membres  jetés  en  prison  et  exécutés  après 
avoir  subi  la  torture.  D'autres  avaient  pris  la 
fuite.  De  ce  nombre  était  Philippe  de  la  Kethulle, 
premier  échevin  de  la  Keure.  La  pièce  que  nous 
publions  émane  de  lui  et  de  ceux  de  ses  collègues 
qui  eurent  le  bonheur  de  ne  pas  tomber  entre  les 
mains  des  factieux. 

Ce  n'étaient  plus  seulement  les  privilèges  qu'on 
revendiquait,  on  en  voulait  à  la  vie,  et  surtout  aux 
biens  des  citoyens  les  plus  dévoués  à  la  com- 
mune. «  Passez  oultre!  criait-on,  passez  oultre  ! 
»  Le  temps  viendra  de  brief  que  possesserons  de 
»  vos  richesses  à  noster  tour,  car  vous  en  avez 
»  assés  possessés ,  et  vous  possesserés  de  nos  po- 
»  vretez  à  vos  tours  ;  si  sçaurés  que  c'est  d'icelles, 
))  et  nous  sçaurons  que  c'est  de  vos  richesses ,  et 
»  porterons  vos  belles  robbes,  et  vous  porterez 


--    389    — 

»  les  nostres,  qui  sont  bien  laides  et  de  petite 
))  valleur  ' .  » 

Ce  langage  menaçant  est  de  toutes  les  époques. 
Depuis  celle  des  creessers  ^  qui  s'étaient  emparés 
du  pouvoir  communal,  et  bien  longtemps  avant 
eux,  mais  surtout  après  eux,  on  a  entendu  ces 
sinistres  imprécations  contre  ceux  qui  possèdent 
et  dont  plusieurs  oublient  qu'ils  ont  des  devoirs 
à  remplir.  Le  prolétaire ,  comme  on  l'appelle  au- 
iourd'hui,  creesser  ou  socialiste,  ne  cesse  de  con- 
voiter  le  bien  d'autrui  et,  comme  il  renie  le 
Décalogue,  il  vole  et  assassine  ceux  qui  sont 
favorisés  de  la  fortune.  C'est  sa  raison  d'être  ;  il 
n'en  a  pas  d'autre.  Les  plurases  ronilantes  dont  il 
compose  ses  discours,  sont  toujours  les  mêmes  et 
produisent  toujours  le  même  effet  sur  la  foule 
aveugle  et  surexcitée  jusqu'au  délire. 

Les  forfaits  des  creesers  étaient  tels  que  lorsque 
les  bourgeois  de  Gand  «  veirent  que  les  affaires  se 
portoient  sy  très-mal,  et  qu'elles  estoient  venues  à 
telle  fin,  ilz  se  repentoient  bien  fort  d'avoir  ainsy 
mis  ledit  peuple  et  commun  en  Testât  ouquel  ilz 
étoient  lors ,  et  les  eussent  voullentiers  retirez , 
s'ilz  eussent  sceu ,  par  aucun  moyen  ;  mais  pour 
riieure  il  estoit  trop  tard  '\  » 


•  Gachabd  ,    Relation  des   troubles,    p.   37. 

^  Creesser,  signifie  creyser  ou  creyscher,  j)leureur  mutin.  M.  Steur 
donne  à  la  fin  de  son  Mémoire  une  longue  et  intéressante  note  sur 
cette  dénomination,  et  le  Messager  des  sciences,  t.  1829-1830,  p.  153, 
contient  un  important  article  sur  la  faction  des  creessers.  Ceux-ci 
reçurent  ce  sobriquet  dans  une  des  nombreuses  réunions  tumultueu- 
ses du  mois  de  novembre  1539.  V.  le  Mémorieboek  ,  t.  II,  p.  161. 

^  Gachakd,  Rp,lation  des  troubles,  p.  37, 


—    390    — 

En  effet,  il  était  trop  tard.  Des  meneurs  déma- 
gogues de  la  pire  espèce ,  «  perdus  de  dettes 
et  couverts  d'infamie  ',  »  étaient  au  pouvoir.  Ils 
firent  main-basse  sur  tout  ce  qu'ils  purent  attein- 
dre. Ils  fouillèrent  dans  l'histoire  pour  y  cher- 
cher des  motifs  de  confiscation.  Ils  poursuivirent 
d'une  haine  implacable  les  hommes  les  plus  ho- 
norables dont  ils  volèrent  les  propriétés.  Leur 
despotisme  était  tel  que  plusieurs  bourgeois  sau- 
vèrent «  leurs  meilleurs  biens  meubles  portatifz 
et  leurs  lettriaiges  liores  de  la  ville  de  Gand , 
au  mieulx  qu'ilz  peurent,  mais  ce  fut  a  bien 
grant  peine  et  dangier  de  tout  perdere ,  et  meis- 
mement  se  mectoient  en  dangiers  de  leurs  vyes. 
Les  bourgois  démourans  hors  sur  leurs  maisons  de 
plaisance ,  au  villaige ,  estoient  appelles  de  reve- 
nir en  la  ville,  et  y  rapporter  tous  leurs  biens  \  » 
Il  fallait  réagir  contre  la  tyrannie  de  cette  foule 
de  gens  sans  aveu,  arrivés  de  toutes  les  parties 
du  pays ,  flibustiers  étrangers  qui  souillaient  la 
cause  de  la  commune  par  des  crimes  et  dont  le 
nombre  était  si  considérable  qu'en  1541,  nonob- 
stant les  édits  impériaux,  le  comte  de  Rœulx  s'en 
plaignit  à  la  reine-régente.  Les  nombreux  coquins 
qui  se  trouvaient  à  Gand  et  au  plat  pays,  man- 
dait-il, «  lesquelz  disent  plusieurs  propos  tendant 
à  sédition,  avec  plusieurs  blasphèmes,  tant  de 
l'empereur,  que  de  ceulx  qui  le  servent  et  s'en- 
hardissent journellement  de  plus  en  plus  qu'il  est 


»  Steur,  p.  84. 

*  Gachard  ,  Relation  dex  troubles,  p.  38. 


—    891    — 

besoing  d'y  mectre  remède  ' .  »  Il  fallait  repousser 
cette  foule  séditieuse  par  la  force;  on  ne  le  fit  pas, 
et  Tagitation  devint  l'état  normal  du  peuple  ;  elle 
dura  jusqu'à  l'arrivée  de  l'empereur. 

Avant  d'aller  plus  loin ,  remontons  à  Torigine 
des  troubles  et  disons  en  peu  de  mots  comment 
la  lie  du  peuple  de  Gand  avait  usurpé  le  pouvoir 
et  était  devenue  l'arbitre  des  destinées  de  la  puis- 
sante commune  flamande  et  d'une  grande  partie 
de  la  Plandre. 


IL 


Lorsque  François  F'',  au  mépris  du  traité  de  Cam- 
brai, et  profitant  de  l'absence  de  Cliarles-Quint , 
envahit  à  la  fois  l'Italie  et  les  Pays-Bas ,  la  reine 
Marie  de  Hongrie ,  sans  armée  et  sans  ressour- 
ces pour  repousser  l'envahisseur,  demanda  aux 
États  des  provinces  un  subside  extraordinaire  de 
1,200,000  Carolus  d'or. 

Les  États  de  Flandre,  composés  des  quatre 
membres ,  Gand ,  Bruges ,  Ypres ,  et  le  franc  de 
Bruges,  votèrent  les  400,000  Carolus  qui  leur  in- 
combaient dans  ce  subside ,  mais  Gand  refusa  de 
fournir  sa  quote-part  de  56,400  florins  d'or. 

La  bourgeoisie,  les  cinquante-trois  métiers  et 
la  corporation  des  tisserands ,  tout  en  reconnais- 
sant la  nécessité  de  venir  en  aide  au  souverain 
dans  cette  circonstance  critique ,  rejetèrent  la  de- 
mande de  la  régente ,  mais  ils  reconnurent  cepen- 


*  Gachard,  Relation  des  troubles,  p.  449. 


—    392    — 

dant  qu'il  fallait  repousser  vigoureusement  les 
armées  de  TagTesseur  qui  s'était  déjà  emparé  de 
plusieurs  places-frontières.  Pour  satisfaire  à  cette 
obligation  ils  offrirent,  par  une  délibération  prise 
en  Collace  le  29  avril  1537,  un  contingent  d'hom- 
mes. «  Les  trois  membres  de  la  ville  entendoient 
M  ce  faire  par  le  grand  estandart  et  par  gens  du 
»  pays  comme  autrefois.   » 

La  régente  refusa  d'accepter  une  proposition 
dont  elle  redoutait  avec  raison  les  funestes  consé- 
quences. De  nouvelles  négociations  s'ou^Tirent. 
Les  Gantois ,  se  fondant  sur  leurs  privilèges , 
adressèrent  un  acte  cVappel  à  lempereur,  auquel 
le  Grand- Conseil  de  Malines  fut  chargé  de  ré- 
pondre par  un  manifeste.  Les  Gantois  y  étaient 
condamnés  à  joajer  leur  quote-part  dans  le  sub- 
side qui  leur  était  demandé ,  sans  pouvoir  j  sub- 
stituer le  contingent  d'hommes  qu'ils  avaient 
offert. 

Dans  ce  manifeste  on  ne  tint  aucun  compte  des 
prétendus  droits  de  la  commune.  Les  anciens  pri- 
vilèges garantissant  aux  Gantois  qu'aucun  impôt 
ne  pouvait  être  levé  sans  leur  consentement ,  fu- 
rent combattus,  contestés  ou  niés.  Les  plus  formels 
furent  considérés  comme  ayant  été  arrachés  par  la 
force  aux  prédécesseurs  de  Sa  Majesté. 

L'imj)ôt  fut  d'abord  perçu  avec  une  rigueur  ex- 
trême, mais  non  sans  conflits,  dans  les  localités  les 
plus  éloignées  de  Gand  devenu  le  foyer  de  l'insur- 
rection. Les  esprits  surexcités  par  des  agents 
provocateurs  d'émeutes,  n'attendaient  que  le  signal 
d'une  explosion  générale.  L'horizon  politique  de 


—    393    - 

cette  grande  et  belle  cité,  chargé  de  nombreux 
orages,  s'assombrissait  de  jour  en  jour.  Le  peuple 
devint  de  plus  en  plus  menaçant.  La  misère  et 
parfois  la  faim  le  poussaient  à  tous  les  crimes. 
Une  colère  sourde  grondait  au  sein  de  ces  masses 
indisciplinées  et  composées  de  tant  d'éléments 
divers. 

Le  magistrat  ne  trouvant  plus  d'appui  dans  les 
corporations  qui  maintinrent  inébranlablement 
leur  résolution  de  fournir  un  contingent  en 
liommes  au  lieu  d'écus ,  ne  sut  à  quel  parti  s'ar- 
rêter. Son  indécision,  toujours  mauvaise  con- 
seillère en  pareil  cas,  lui  suggéra  l'idée  de  choisir 
celui  qui  lui  convenait  le  moins,  celui  qu'il  aurait 
dû  éviter  à  tout  prix.  En  effet,  après  une  délibé- 
ration tumultueuse  à  Thôtel-de- ville ,  il  prononça 
c(  rappel  au  peuple  »  et  se  livra  du  même  coup  à 
la  merci  de  la  démagogie  la  plus  effrénée. 

Le  refus  de  l'impôt  fut  décrété  sur  l'heure,  et 
pour  justifier  une  mesure  aussi  violente  on  revint 
sur  ce  qui  avait  été  contesté  ou  nié  par  le  Grand 
Conseil  de  Malines. 

On  était  assez  embarrassé  de  produire  ces  fa- 
meux privilèges  qu'on  demandait  à  cor  et  à  cri, 
et  surtout  la  charte  de  Vachat  de  Flandre ,  lors- 
qu'un individu  perdu  dans  la  foule,  s'écria  qu'on 
avait  peut-être  violé  le  secret  de  la  ville,  et  enlevé 
l'acte  authentique  qui  garantissait  aux  Flamands 
le  droit  de  refuser  le  paiement  de  tout  impôt 
qu'ils  n'auraient  pas  consenti.  Il  n'en  fallut  pas 
davantage  pour  exciter  la  colère  du  peuple.  Son 
imagination,  exaltée  par  des  récits  fantastiques 


-    394    — 

et  absurdes,  ne  connut  plus  de  bornes.  On  avait 
pénétré  nuitamment  et  avec  le  plus  grand  mystère 
dans  le  Beffroi ,  et  on  avait  enlevé  du  coffre  de  fer, 
où  les  précieuses  chartes  étaient  conservées  avec 
des  précautions  extraordinaires ,  celles  que  Ton 
cherchait  pour  les  détruire.  Ce  redoutable  secret, 
qui  renfermait  toutes  les  libertés  de  la  commune, 
avait  été  violé  !  On  cria  qa'il  fallait  produire  la 
charte  de  rachat  de  Flandre  ou  punir  ceux  qui 
l'avaient  soustraite.  L'exaltation  s'emparant  des 
esprits ,  on  racontait  toutes  les  circonstances  de 
ce  vol  sacrilège.  Un  ancien  échevin  déclara  que 
par  une  nuit  sombre  et  brumeuse  passant  devant 
Tantique  tour  communale,  il  avait  vu  briller  une 
éclatante  lumière  dans  la  chambre  du  secret  et  qu'il 
avait  entendu  le  bruit  sourd  des  coups  de  mar- 
teau ' .  La  crainte  seule  lui  avait  fermé  la  bouche 
et  empêché  de  dévoiler  ce  qu'il  avait  vu  pendant 
cette  horrible  nuit.  Ces  propos  excitèrent  encore 
davantage  ce  peuple  crédule  et  impressionnable  à 
l'excès.  Le  magistrat  de  1536  fut  accusé  d'avoir 
perpétré  un  crime  de  lèse  nation  et  incontinent  on 
décida  de  livrer  tous  ses  membres  à  la  justice  de 
la  commune  révolutionnaire. 

Tel  fut  le  premier  résultat  de  «  l'appel  au 
peuple.  »  Le  magistrat,  qu'on  appelait  le  7nagis- 
trat  des  creessers,  ne  pouvant  vaincre  l'obstination 
des  corporations ,  s'était  jeté  dans  les  bras  d'un 
ennemi  beaucoup  plus  dangereux.  «  Cependant, 
dit  M.  Steur,  il  ne  balança  point  à  s'exposer  aux 

•  Memorieboek  der  stad  Gent,  II,  p.  130-lGG. 


395 


plus  cruels  reproches  ;  et  quelle  qu'ait  été  depuis 
sa  conduite,  il  ny  a  qu'une  injuste  prévention  qui 
puisse  l'accuser  d'avoir  manqué  à  ses  devoirs  '.  )> 

Ce  jugement  nous  parait  marqué  au  coin  d'une 
indulgence  excessive.  Lorsque  l'autorité  qui  a  le 
prestige  du  droit  et  la  force  pour  le  faire  respec- 
ter, se  jette  dans  les  bras  d'une  populace  surexcitée 
et  égarée,  elle  y  périt.  C'est  une  faute  capitale 
qui  ne  peut  engendrer  que  les  plus  grandes  cala- 
mités publiques.  Quand  le  pouvoir  légal  perd 
son  auréole  de  respect ,  il  perd  aussitôt  sa  force , 
succombe  dans  la  lutte  ou  devient  le  complice  des 
agitateurs  et  des  meneurs  de  bas  étages  que  les 
sentines  du  pays  et  de  l'étranger  vomissent  lorsque 
la  révolution  lève  la  tête.  Le  vrai  peuple,  celui  qui 
travaille  prie  et  élève  sa  famille  chrétiennement, 
ne  doit  pas  être  confondu  avec  cette  tourbe  que 
le  pillage  allèche  et  qui  ne  se  montre  qu'aux  plus 
mauvais  jours  des  tempêtes  révolutionnaires.  Veut- 
on  connaître  la  physionomie  de  la  capitale  de  la 
Flandre  en  1539  lorsqu'on  apprit  la  prétendue 
violation  du  dépôt  des  chartes?  Écoutons  M.  Steur. 

«  Partout  où  les  factions  dominent,  dit- il,  on 
»  voit  la  perfidie  et  la  trahison  en  honneur.  Le 
»  secret  fut  à  peine  divulgué  que  le  peuple  s'at- 
))  troupa,  les  métiers  prirent  les  armes,  on  garda 
»  les  portes  de  la  ville,  les  prisons,  les  carrefours; 
»  on  fit  suspendre  les  fonctionnaires  suspects , 
»  surveiller  les  bourgeois,  décréter  les  saisies, 
»  l'emprisonnement,  la  confiscation,  et  l'on  n'en- 

'  Steur,  p. 47. 


—     396    — 

)  tendait  retentir  partout  que  ces  cris  sinistres  : 
Aux  traitres  !  à  la  trahison  !  Dès  le  commence- 
ment des  discussions ,  une  foule  d'étrangers 
sans  aveu  étaient  accourus  de  toutes  les  parties 
de  la  province.  Quelques-uns  pour  se  soustraire 
aux  poursuites;  le  plus  grand  nombre  pour 
chercher  fortune  dans  les  troubles  ;  ceux  qui 
avaient  quelques  ressources  les  eurent  bientôt 
épuisées.  Assaillis  par  les  besoins,  ils  mendièrent 
d'abord  des  secours;  bientôt,  s'affiliant  à  quelque 
club  de  démagogues  et,  liés  par  des  serments 
solennels,  on  vit  cette  troupe  d'aventuriers  or- 
ganiser avec  la  populace  de  la  ville  un  système 
de  terreiu^  tel  qu'en  offrent  tous  les  États  où 
régnent  les  commotions  politiques.  Aussi  long- 
temps qu'il  y  eut  quelqu'ordre  dans  les  assem- 
blées de  la  commune ,  ces  agens  de  troubles 
durent  rester  à  l'écart,  mais  lorsque  les  passions 
eurent  enflammé  l'esprit  du  peuple  et  poussé 
loin  de  leurs  devoù's  quelques  ambitieux,  alors 
épiant  l'instant  où  leur  intervention  pouvait 
passer  inaperçue,  ils  se  glissèrent  parmi  les 
membres  de  la  commune  et  mêlèrent  leurs 
suffrages  à  ceux  de  la  bourgeoisie  '.  » 
On  ne  saurait  mieux  dépeindre  l'anarchie  ré- 
gnant à  Gand  sous  la  domination  des  creessers  qui 
s'étaient  emparés  de  l'hôtel-de-ville  où  ils  avaient 
décrété  au  milieu  de  la  confusion  et  le  tmnulte,  le 
refus  de  payer  l'impôt  dû  par  le  premier  membre 
politique  des  États  de  Flandre. 

'  Steoi,  page  47. 


—    397    — 

Il  est  vrai  que  les  fautes  commises  par  les  mi- 
nistres de  la  régente ,  leur  faiblesse  et  parfois 
leurs  rigueurs  contribuèrent  pour  une  large  part 
à  gTandir  l'insurrection,  dont  le  flot  tumultueux 
ne  cessait  de  monter. 

Il  ne  peut  nous  convenir  d'entrer  dans  de 
longs  développements  sur  ce  mouvement  révolu- 
tionnaire, que  les  circonstances  et  les  excès  des 
démagogues  et  de  la  populace,  réunis  à  quelques 
corporations  mutinées,  grossirent.  La  bourgeoisie 
honnête  s'effrayait  de  la  prépondérance  que  cette 
foule  en  délire  avait  acquise,  répandant  la  terreur 
dans  toutes  les  classes  et  principalement  dans  celle 
des  riches  qu'on  pillait  et  dont  la  vie  était  con- 
stamment menacée.  L'industrie,  alors  si  prospère, 
était  arrêtée  dans  son  essor.  Tout  travail  avait 
cessé  et  la  misère  montrait  ses  haillons  dans  les 
rues  qu'une  foule  inquiète  et  toujours  armée  par- 
courait sans  cesse.  C'est  dans  ces  circonstances 
que  l'empereur  arriva  à  Gand. 

Charles-Quint  fut  sévère,  dur  et  cruel  envers  la 
ville  qui  l'avait  vu  naître  ;  aucun  historien  ne 
saurait  le  nier  ;  mais ,  si  la  punition  qu'il  lui 
infligea  fut  terrible,  faut-il  en  conclure  qu'elle  fut 
injuste?  Assurément  non.  L'empereur,  convaincu 
de  son  droit,  usa  de  sa  puissance  pour  couper 
dans  lem^s  racines  ces  tendances  perpétuelles  à  la 
révolte  qui  depuis  tant  de  siècles  troublaient  la 
paix  publique  et  compromettaient  la  sécurité  et 
rintégrité  de  ses  États.  Les  documents  publiés 
attestent  que  ces  craintes  n'étaient  que  trop 
fondées  et  parmi  les  nombreuses  pièces  qui  en 


—    398    — 

témoignent  celles  que  notre  archiviste  général, 
j\I.  Gacliard,  a  publiées ,  ne  laissent  plus  le  moin- 
dre doute  à  cet  égard.  Il  ne  serait  pas  difficile 
d'en  trouver,  où  le  but  des  chefs  de  Tinsurrec- 
tion  est  bien  clairement  déterminé.  <(  Un  fait 
d'une  haute  gravité  a  été  reproché  aux  Gantois , 
dit  cet  auteur.  On  les  a  accusés  d'avoir  envoyé 
des  députés  à  François  P^  pour  lui  offrir  la  sou- 
veraineté de  la  Flandre;  et  ce  qui  a  donné  du 
poids  à  cette  accusation ,  c'est  qu'elle  reposait 
sur  le  témoignage  d'historiens  contemporains, 
ordinairement  bien  informés  ^  »  Et  parmi  ces 
témoignages  il  cite  celui  de  Du  Bellay.  Hélas  ! 
on  en  trouverait  d'autres  qu'il  serait  peut-être 
rûoins  facile  de  récuser. 

Malgré  les  affirmations  imposantes  de  l'histoire, 
M.  Steur  n'admet  pas  qu'un  semblable  projet  ait 
existé.  ((  Je  défie  qui  que  ce  soit ,  dit-il ,  de  trou- 
ver dans  les  volumineuses  enquêtes  judiciaires 
tenues  à  Gand,  et  dont  les  originaux  existent 
encore  dans  les  archives  de  la  ville,  un  seul  in- 
terrogatoii^e ,  une  seule  réponse  qui  se  rapporte, 
même  indirectement,  à  l'existence  d'un  aussi 
infâme  complot.  » 

Nonobstant  cette  dénégation  formelle  pleine  de 
patriotisme,  nous  affirmons  que  cet  a  infâme  com- 
plot »  a  existé.  Les  documents  découverts  par 
M.  Gachard  douze  ans  après  la  publication  du 
Mémoire  de  M.  Steur,  en  font  foi. 


'  Gachard,  Introduction  à  la  relation  des  troubles  sous  Charles- 
Quint,  p.  xxni. 


399    — 


Hâtons-lions  de  tourner  cette  triste  page  de 
notre  histoire  et  disons  bien  haut  que  ceux  qui 
proposèrent  de  vendre  leur  pays  à  rétranger 
furent  des  hommes  tarés ,  méprisés ,  et  indignes 
de  porter  le  nom  de  citoyen  flamand. 


m. 


Abordons  maintenaint  le  document  dont  nous 
avons  parlé. 

Plusieurs  membres  de  la  magistrature  de  1536, 
décrétés  de  prise  de  coi^ps ,  avaient  réussi  à  se 
soustraire  par  la  fuite  au  sort  qui  les  attendait. 
En  eftét,  quelques-uns,  et  parmi  eux  le  grand- 
doyen  Liévin  Pin,  hôtelier  de  l'hôtelerie  :  la  Cloche, 
furent  mis  en  état  d'arrestation ,  soumis  à  la  tor- 
ture avec  une  cruauté  inouie ,  et  payèrent  de  leur 
vie  une  confiance  trop  absolue  dans  la  justice  de 
leur  cause  et  dans  Téquité  de  leurs  juges. 

Quand  Charles-Quint  eut  châtié  les  creessers 
et  que  les  têtes  de  leims  chefs,  tombées  sur  l'écha- 
faud,  furent  exposées  sur  la  porte  de  \di>Muide,  et 
que  la  justice  impériale  fut  apaisée,  les  magistrats 
fugitifs  s'adressèrent  au  monarque  pour  obtenir 
la  restitution  de  leurs  biens  confisqués  par  la 
commune  révolutionnaire. 

Cette  intéressante  requête  ne  se  trouve  pas 
parmi  les  pièces  qui  ont  été  publiées.  On  y  re- 
marque une  description  exacte  et  sans  contredit 
plus   complète ,    que    celles  qu'on  a  données  du 


—    400    — 

fameux  secret  de   la  ville ,   principale    cause   de 

la  révolte  et  des  malheurs  qui  en  furent  la  suite. 

Voici  ce  document  précédé  d'un  sommaire. 

Les  suppliants  sont  accusés  d'avoir  faussement  rapporté  à  la 
reine-régente  la  mission  dont  la  ville  de  Gand  les  avait  chargés. 
Cette  accusation  a  été  reconnue  dénuée  de  fondement.  — 
D'être  entrés  secrètement  dans  le  Beffroi  et  y  avoir  soustrait 
plusieurs  privilèges  et  notamment  Vachat  de  Flandre.  —  Des- 
cription du  secret  de  la  ville  et  du  coffre  de  fer.  —  Ordre  d'ar- 
rêter les  suppliants  est  donné  au  grand-bailly  de  Gand.  —  Liévin 
Pin ,  grand-doyen ,  est  saisi ,  jeté  en  prison ,  livré  à  la  torture  et 
exécuté.  —  Les  suppliants  ont  pu  se  sauver.  Leurs  têtes  sont 
mises  à  prix  et  leurs  biens  confisqués.  —  La  commune  de  Gand 
a  cassé  les  ordonnances  et  les  édits  de  l'empereur.  —  Les  sup- 
pliants prient  Charles-Quint  de  leur  faire  restituer  leurs  biens 
et  de  les  recompenser  des  peiues  et  des  outrages  qu'ils  ont  souffert. 

«  A  l'Empereur, 

»  Remonstrent  en  toute  humilité  et  révérence  Philippe 
de  Kethule,  Jacques  van  Melle  avecq  leurs  consors  esche- 
vins  de  la  Kuere  de  la  ville  de  Gand  pour  lannée  commen- 
chant  a  my  aougst  XV''  XXXVI  et  finissant  a  my  aougst 
XXXVII,  tant  pour  eulx  comme  collège  des  eschevins  de 
la  Kuere,  que  deux  doyens  et  pensionnaires  servans  audict 
tamps.  Comme  iceulx  supplians  par  commission  de  Vos- 
tre  Imp.  Majesté  sont  esté  commis  ,  esleuz  et  establis 
eschevins  et  doyens  pour  administrer  la  dicte  ville  et 
affaires  dicelle  pour  leclict  temps  et  année  ;  et  lesdicts  pen- 
sionaires  par  eulx  prins  ou  continuez  pour  en  ce  leur  assis- 
ter. Lesquels  estatz  ils  et  chacun  deulx  en  son  endroict, 
ont  bien  loyaulment  et  deuement  exercez  sans  avoir  faict 
ou  commis  chose  quelconque  contre  Vostre  Ma^^  leur  sou- 
verain seigneur,  ne  aussy  contre  ne  au  préjudice  des  droits, 
priveleges  ou  préhemmence  de  Vostre  ville  de  Gand  ne 
communaulté  dicelle.  Toute  fois  ladicte  communaulté  cher- 
cant  coideur  et  pretext  de  povoir  effectuer  la  commotion  de 


I 


—    401    — 

longue  main,  comme  il  est  à  craindre,  conceue  et  emprise, 
a  voulu  chercer  lesdicts  supplians  et  principallement  de 
deux  poinctz,  assavoir,  que  sur  la  demande  des  IIIP  M 
florins  faicte  par  la  Ma*^  de  la  Roynne  douaigiere  dHongrie 
Régente  et  Gouvernante  en  labsence  de  Vostre  Ma*^  des 
pays  de  pardeca,  Vostre  bonne  soeur,  pour  résister  aux 
ennemis  lors  estans  aux  pays,  ils  auroient  porté  et  donné 
aultre  responce  que  la  résolution  de  la  Collace  contenoyt, 
dont  le  contraire  appert  et  apperra  plus  amplement  se 
besoing  soit  par  la  collation  et  conférence  des  prétendues 
responces  de  la  dicte  Collace  a  celle  baillée  à  la  Ma*^  de  la 
Pioyne  fut  ung  peu  plus  civillement  et  reverentement  cou- 
chée pour  la  reraonstrer  à  la  princesse,  que  celle  de  ladicte 
commuuaulté.  Et  se  demonstre  bien  que  par  les  supplians 
en  baillant  icelle  responce  riens  na  esté  faict  que  a  bonne 
foy  et  intention  et  sans  malice  quelconcque  pour  ce  que 
incontinent  après  la  responce  et  présentation  dassister 
Vostre  Ma*^  de  gens  de  guerre  par  les  députés  dudict  Gand, 
faicte  selon  la  charge  et  instruction  quils  en  avoient  et  par 
la  Ma*^  de  la  Roynne  acceptée,  et  déclaire  quelle  feroit 
sonner  le  tambourin  pour  enroller  tous  ceulx  qui  en  voul- 
droient  servir.  Iceulx  députés  retournés  et  ayans  faict  bon 
et  léal  rapport  de  leur  besoiugne,  lesdicts  supplians  ont 
derechef  faict  assambler  ladicte  communaulté  et  remon- 
stré  de  mot  a  aultre  la  susdicte  responce  et  acceptation 
de  Sa  Ma*^  ,  requerans  de  vouloir  adviser  quelque  moyen 
pour  recouvrer  argent  pour  payer  les  gens  de  guerre  par 
eulx  présentés  au  service  de  Sa  Ma'^  ,  ou  à  tout  le  moins 
approuver  les  moyens  par  lesdicts  supplians  mis  en  avant 
et  proposés.  Sur  quoy  par  ladicte  communaulté  veullant 
recuUer  comme  il  sembloit,  de  leur  première  présentation, 
a  esté  déclairé  quils  entendoient  avoir  faict  ledict  offre  et 
présentation  avecq  le  grand  estandart,  démonstrans  par  ce 
quilz  ne  cliercoient  que  commotion,  pillaige  et  gastement 

27 


—    402    — 

dung  pays,  sans  pour  lors  aucunement  chargier  lesdicts 
suppliants  davoir  mal  ou  aultrement  quil  appartenoit, 
versé  ou  porté  là  susdicte  responce,  ce  quils  eussent  faict 
sils  eussent  eu  cause  ou  occasion.  Et  depuys  les  supplians 
entendans  que  aulcuns  mauvaix  esperitz  deux  ou  trois 
ans  après  ladicte  responce  les  vouluerent  encoulper  de 
lavoir  aultrement  faicte  quil  appartenoit,  se  sont  trouvez 
en  leschevinaige  finissant  à  my  aougst  XXXIX,  vers  les 
eschevins  requerans  auctorité  et  povoir  de  poursuivre  ung 
Jacques  van  Quickelberghe  '  demourant  à  Audenarde.  Le- 
quel ilz  entendent  avoir  esté  la  source  et  aucteur  de  ladicte 
contreuvée  famé  et  renommée  et  tous  aultres  quils  eussent 
daulcune  chose  ou  malversation,  voulu  encoulper  adfin  de 
ce  estre  purgies.  Ce  que  lesdicts  eschevins  leur  accordèrent 
mesmes  aux  despens  de  ladicte  ville,  declairans  en  oultre 
par  exprès  que  les  supplians  ne  furent  aulcunement  en  ce 
coulpahles.  Et  a  icelle  déclaration  depuis  esté  retirée  par 
les  eschevins  modernes  et  absolvant  aulcuns  desdicts  sup- 
plians et  eschevins  des  parsone  dicelle  année  XXXVI. 
Lesquels  à  la  cause  que  dessus  sont  esté  longuement  dete- 
nuz  prisonniers,  comme  le  tout  appert  par  actes  sur  ce 
despeschiés  ^. 

»  Secondement  ladicte  communaulté  a  volu  chargier 
lesdicts  supplians  davoir  esté  au  Belfroit  et  secret  de 
ladicte  ville  et  prins,  vendu  ou  bruslé  leurs  prétenduz 


»  Jacques  van  Quickelberghe  était  échevin  d' Audenarde.  Il  fut  en- 
voyé à  Bruxelles  pour  délibérer  avec  les  envoyés  des  villes  de 
Flandre  sur  la  demande  du  subside  de  400,000  carolus  d'or.  Le 
Supplément  de  la  Relation  des  troubles  sons  Charles-Quhit  contient 
plusieurs  pièces  concernant  ce  personnage  et  le  fait  dont  il  s'agit 

*  Il  est  évident  que  l'on  accusait  de  mauvaise  foi  les  délégués 
envoyés  par  la  commune  à  la  régente,  qui  ne  voulait  accepter  à 
aucun  prix  la  proposition  dangereuse  de  fournir  le  contingent  par 
le  moyen  du  grand  étendard,  racolant  les  gens  les  plus  mal  famés  , 
indisciplinés,  mutins  et  pillards. 


-    403    — 

privilèges  et  mesmes  certain  achapt  de  Flandres  par  eulx 
songé  et  par  vraye  malice  excogité  soubz  umbre  comme  les- 
dicts  supplians  présument  et  audict  an  XXXVI  en  certain 
procès  que  ladicte  ville  avoit  pendant  au  Grand  Conseil 
de  Vostre  Ma^^  contre  Vostre  procureur  général  avoient  k 
exhiber  copie  autenticque  de  certain  privilège  du  conte 
Guy  reposant  audict  secret  trouvans  par  le  trespas  daul- 
cuns  doyens  ayans  en  garde  les  clefz  de  la  salette  dedens  la 
tour  de  Belfroit  où  les  gens  se  rassemblent  quand  on  va  au 
secret  desdicts  privilèges,  aulcunnes  desdictes  clefz  estre 
demainez  firent  par  M*'"  serrurier  et  ouvriers  jurez  de  la- 
dicte ville  ouvrir  la  serrure,  dont  les  clefz  estoient  par- 
dues,  bien  saichans  que  eust  esté  comme  il  seroit  eucoires 
impossible,  ils  eussent  peu  ou  scheu  mal  user  quand  audict 
secret  ou  les  privilèges  reposent  massonnees  au  mur  dudict 
Belfroit  et  cloz  par  trois  divers  huys  dont  le  premier  est 
barré  et  couvert  de  fer,  le  second  sont  pierres  blanches 
aussy  barrés  de  fer  et  le  tiers  de  bois  et  chacun  diceulx 
huys  serres  a  plusieurs  serrures,  dont  les  clefz  reposent  en 
une  traille  de  fer  forte  et  massive  à  la  maison  de  la  ville  de 
laquelle  traille  les  eschevins  ont  les  clefz  en  garde.  Et  icelle 
sallette  ou  poterne  par  les  ouvriers  ouverte  sans  que  par- 
sonne  du  monde  y  a  entré  que  eulx,  comme  il  appert  bien 
par  leur  tesmoingnaige  sur  ce  faicte  pardevant  lesdicts 
eschevins  et  la  serrure  refaicte,  les  supplians  allèrent  au- 
dict secret  portans  publicquement  les  clefz  et  observans 
les  solempnités  danchienneté  observez,  faisans  collationner 
par  les  commissaires  ad  ce  commis  ;  ce  dont  ils  avoient  be- 
soing  sans  plus  avant  toucher  audicts  privilèges.  Et  com- 
bien que  par  les  eschevins  de  lannée  finissant  XXXIX 
publicquement  en  la  ouverture  de  certaine  Collace  a  esté 
dict  et  déclairé  et  remonstré,  la  dessusdicte  commuuaulté 
que  les  supplians  nestoient  aulcunement  coulpables  des  sus- 
dicts  pointz,  mais  ils  se  avoient  bien  et  loyaulment  acquic- 


—    404    — 

téz  en  leurs  estatz  et  services,  et  que  à  tort  et  sans  cause 
par  aucuns  malveullans  estoit  après  eulx  semée  ladicte 
mauvaise  famé,  bruyt  et  renommée  aussy  que  les  inven- 
toires  des  privilèges  reposans  tant  audict  secret  que  en  la 
maison  de  la  ville,  estoient  visités  et  trouvés  fourniz  en  tous 
leurs  poincts  et  articles  '.  Toutteflois,  ladicte  communaulté 
de  ce  non  contente  et  continuant  en  son  maulvais  propos 
seflforcans  deffectuer  leur  emprise,  ont  dune  fureur  tyran- 
nicque,  requis  au  grand  bailly  de  Vostre  ville  de  Gand"^  de 


*  Il  n'est  pas  sans  intérêt  de  recueillir  les  bniits  qi;i  circulaient 
dans  le  peuple  au  sujet  de  la  violation  du  secret  de  la  ville.  Voici 
d'après  une  chronique  inédite ,  intitulée  Cronycke  van  Gendt  ende 
Rupelmonde ,  ce  qtii  se  disait.:  «  Op  den  dysendagh  en  wilden  vau 
ghelycken  glieen  neiringhen  verkiesen,  maer  de  deken  met  hun 
gheswoorne  vonden  liunlieder  t'saemen  en  vergaederde  S*  Michiels, 
daer  naer  Fimns  rander  Grcicht,  heere  van  Schardau ,  hooglibailliu 
van  Gliendt,  met  eeniglie  scliepenen  die  by  hunlieden  quaemen. 
Daer  was  by  den  deken  uyt  last  van  de  voornoemde  neiringhen  den 
hooghbailliu  gheseyut,  dat  hy  vanghen  saude  de  gène  die  f  lant 
belast  hadden  sonder  H  consent  van  de  3  leden  ,  en  oock  de  gone  die 
int  secreet  gheiveest  hadden  by  nnghte  en  by  snhtielhede ,  daer  uyt 
ghenomen  dat  hun  lieden  belieft  hadde.  Den  hooghbailleu  hoorende 
liun  verstoordheyt  van  t'  gemeente ,  en  dorste  niet  laeten ,  maer 
begherde  dat  sy  heurlieder  last  schrit'telyck  stellen  sauden  ;  t'  welck 
aldaer  ghedaen  was.  Soo  is  den  voernoemden  hooghballeu  van  daer 
vertrocken  naer  schepenhuys  en  te  Putte  comeude ,  heeft  daer 
ghevonden  Lievin  Pin ,  werdt  in  d'ostelerye  ghenaempt  :  «  de 
Clocke,  »  en  heeft  hem  aldaer  ghevanghen  ghenomen,  en  den 
selven  dagh  noch  ghevanghen  Ja>i  van  Waesberghe  ;  en  dat  hoo- 
rende Minier  van  Huffelghem ,  tweede  schepenen  van  der  Keure , 
Jacob  van  M  elle ,  Jan  De  Backer,  P  Bartho.,  Lievin  Myteenàe  Joos 
De  Graeve ,  vyfde  schepenen  van  der  Keure ,  hebben  hunlieden  al 
gheabsenteert  en  s}ti  ghevlught  uyt  de  stadt.  » 

Ce  manuscrit  inédit  nous  appartient  ;  il  renferme  des  détails  très- 
intéressants  qu'on  ne  trouve  pas  dans  le  Memorieboek. 

*  Ce  grand  l)ail]i  était  François  vander  Gracht,  chevalier,  seigneur 
de  Schardau.  Il  quitta  la  ville  le  18  octobre  1539  et  n'y  revint  que 
le  4  février  1540.  Ce  personnage  dit  dans  une  lettre  qu'il  adresse 
au  magistrat  de  Gand  et  qui  fut  lue  publiquement  en  séance  de  la 


—    405    — 

prendre  aux  corps  et  constituer  prisonniers  tous  les  esche- 
vins  de  la  kuere,  pensionnaires  et  grands  doyens  aians 
servy  audict  an  XXXVI.  dont  ung  nommé  Lievin  Pien,  lors 
grand  doyen,  a  esté  appréhendé  et  contre  tout  ordre  de 
droit  et  justice  si  inhumainement  et  tyrannicquement 
traicté  par  diverses  et  itératives  torture  et  que  pis  est  mis 
à  lextreme  supplice  que  cest  ungne  horreur  de  le  reciter  ' . 
Et  aulcuns  aultres  ont  esté  constitués  prisonniers  et  jehen- 
néz,  à  lappetit  du  peuple,  tellement  que  ung  diceulx  est 
mort  en  prison.  Et  pour  ce  que  les  supplians  craindans  la 
fureur  dudict  peuple  sestoient  absentés,  a  par  ladicte  com- 
munaulté  esté-  advisé  et  conclu  par  son  de  trompet  de  car- 
fours  en  carfours  de  ladicte  ville,  que  tous  ceulx  quy  avie- 
seroient  illecq  aucuns  lesdicts  supplians  et  absentés  au- 
roient  pour  leurs  gaiges  et  salaires  cent  Karolus  dor.  Et 
depuis  apperchevans  que  par  ce  moyeu  ne  sceurent  effectuer 
leur  maulvaise  et  tirannicque  emprise,  augmentèrent  icelle 
somme  jusques  a  six  cens  florins,  ordonnans  que  les  noms 
et  surnoms  diceulx  seroieut  placquiéz  aux  portes  de  toutes 
les  villes  de  Flandres  et  pays  circomvoisins,  baillans  plu- 
sieurs bannis  et  mauvais  garnemens  povoir  et  commission 
sur  le  seau  de  ladicte  ville,  de  prendre  au  corps  et  amener 

Colace ,  qu'il  a  quitté  la  ville  pour  se  soustraire  aux  menaces  dont  il 
était  l'objet  de  la  part  du  peuple  ou  pour  mieux  dire  :  des  creessers  ; 
menaces  tellement  terribles ,  pa7-aît-il ,  quïl  laissa  la  responsabilité 
de  ses  fonctions  au  sous-bailli.  L'AppENmcE  contient  un  extrait  du 
Memorieboek ,  indiquant  sommairement  les  termes  de  cette  lettre.  Il 
est  certain  que  le  grand-bailli  eut  mieux  fait  de  rester  à  son  poste. 
Son  hôtel  existe  encore  Rue  basse  (Onderstraat).  Le  Messager  des 
sciences,  année  1855,  pp.  304  et  309,  a  donné  deux  gravures  de 
cette  construction  au  XIV"  siècle  et  au  XYll".  La  porte  d'entrée  en 
ogive  porte  encore  l'écu  des  vander  Gracht ,  qui  est  d'argent  au  che- 
vron de  gueule  accompagné  de  trois  merlettes  de  sable. 

'  Les  chroniques  de  l'époque  et  les  historiens  sont  d'accord  sur 
ce  point.  Les  supplices  que  Lievin  Pin  eut  à  subir  dépassent 
l'imagination. 


—    406    — 

lesdicts  absentés  au  nombre  de XXV  ', dont  aulcuns  ont  esté 
pourchassés  jusques  à  la  ville  de  Bruxelles  et  les  aultres 
gectés  sur  les  chemins  et  cherciés  es  lieux  tant  ecclesiastic- 
ques  que  prophanes,  nonobstant  que  aulcuns  furent  ja  pier- 
cha  estes  au  service  de  Vostre  Ma*^  tant  en  vostre  grand 
conseil  que  en  vostre  conseil  en  Flandres  et  parainsy  nulle- 
ment pardevant  eulx  justiciables  ;  les  ainsy  blasmans  et 
scandalisans  si  avant  que  en  eulx  estoit  comme  sils  fussent 
esté  meurdriers,  boutefeus,  hereticques  ou  convaincus 
daulcuns  grandes  exhorbitans  délicts.  De  ce  non  assouffis, 
les  appellerent  fugitifs,  traîtres  et  larrons,  faisans  sur  et  es 
maisons  daulcuns  diceulx  forces  et  violences,  concluans  en 
leur  Collace  quon  mectrait  en  leurs  maisons  gardemaneurs 
vendroit  leurs  biens  au  prouffit  de  la  ville  comme  sils  eus- 
sent esté  confisqués  directement  contre  le  privilège  de  la- 
dicte  ville  de  lexemption  de  confiscation  dont  aulcuns 
desdicts  supplians  eulx  mesans  de  negotiacions  et  mar- 
chandises aultres  aians  quelques  estatz,  ofiices  ou  pratic- 
que,  sont  griefvement  esté  intéressés,  adommaigés  et  des- 
truicts.  Et  par  dessus  ce  que  dict  est  ladicte  communaulté 
postposant  Ihonneur,  révérence  et  obeyssance  quilz  doivent 
à  Vostre  Ma*^,  leur  souverain  seigneur,  se  sont  avanchés  de 
casser  les  actes  par  Vostre  Ma*^  despeschiés  non  se  veullans 
régler  selon  la  paix  de  Cassant  statue  et  ordonne  sur  les 
affaires  de  Vostre  pays  des  Flandres  comme  sils  fussent 
esté  supérieurs,  comme  les  supplians  espèrent  que  Vostre 
Ma*^  est  a  plain  informée;  ce  que  nest  à  tollerer  ne  à 
souffrir  en  ung  pays  de  justice.  A  raison  de  quoy  lesdicts 
supplians  comme  bons  et  loiaulx  subiects  de  Vostre  Ma*^, 
leur  naturel  et  souverain  seigneur,  fontaine  de  justice, 
prendent  leurs  recours  en  toute  humilité  et  révérence  vers 


»  Leurs  noms  sont  cités  dans  le  Memorieboek,  t.  II,  p.  144,  et  dans 
les  ouvrages  qui  traitent  de  l'histoire  de  Gand  à  cette  époque. 


—    407     — 

icelle  leur  seul  refuge.  Prians  et  supplians  que  le  nol)le 
plaisir  de  Vostre  Ma*^  soit  de  les  prendre  en  Vostre  pro- 
tection et  saulvegarde ,  dy  mectre  ordre  et  soumirement 
pourveoir  que  iceulx  supplians  sans  rostre  ....  désolés, 
puissent  estre  reparrés  des  injures,  blasmes,  forces  et  vio- 
lences par  eulx  inférés  et  aussi  récompensés  des  pertes, 
dommaiges  et  intérêts  par  chacun  deulx  en  son  regard 
soufïertz  et  pourroient  ancoires  souffrir  comme  cy  après 
en  tamps  et  heure  les  affaires  estans  ad  ce  disposés.  De- 
claireront  et  veriffieront  comme  il  appartiendra  oîi  en  tout 
le  moins  les  faire  ouyr  et  traicter  en  justice  ordinaire 
contre  ceulx  de  Gand  pardevant  ceulx  de  Vostre  grand 
conseil.  Et  ferez  bien.  » 

Sur  le  dos  était  écrit  : 

«  Copie  vander  supplicatien  by  schepen  vander  Keure  die 
aenquamen  talf  oigst  XV'"  XXXVI  eyndende  XXXVII,  mits- 
gaders  beede  dekenen  ende  pensionnarissen  vanden  zelven 
jaere,  als  fugitiven  der  K.  Ma*^  overgegeven  binnen  der 
stadt  van  Bruessele  den  xi''"  february  XV'  XXXIX.  » 

La  réponse  de  l'empereur  à  cette  requête  fait 
défaut. 

Cependant,  il  serait  difficile  d'admettre  que  les 
magistrats  de  1536,  qui  furent  les  premières  vic- 
times de  l'insurrection,  aient  été  éconduits.  De 
nombreuses  réhabilitations  furent  accordées  et  il 
n'est  pas  probable  que  Philippe  de  la  KethuUe , 
premier  échevin  de  la  Keure  ,  ainsi  que  ses  collè- 
gues n'aient  pas  été  entendus.  Il  faut  que  le  dossier 
qui  les  concerne  soit  perdu ,  ou  qu'il  ait  échappé 
aux  investigations  les  mieux  dirigées  \ 

*  Le  Memorieboek,  t.  II,   p.  178,  rapporte:  «  Item  ten  selven 


—    408    — 

Les  conséquences  de  la  j^unition  impériale  se 
firent  bientôt  sentir.  Quand  les  gens  sans  aveu 
eurent  quitté  la  ville ,  les  gens  de  bien  reprirent 
courage.  La  sécurité  publique  reparut  peu  à  peu. 
Le  commerce  et  l'industrie ,  si  florissants  autre- 
fois ,  reçurent  une  impulsion  vigoureuse  en  re- 
prenant un  nouvel  essor.  La  population  gantoise 
active  et  laborieuse  se  livra  de  nouveau  avec 
ardeur  à  ses  travaux,  sous  la  protection  de  la 
concession  Caroline,  œuvre  remarquable  de  légis- 
lation que  Tempeureur  venait  de  lui  donner.  La 
prospérité  et  la  richesse  qu'un  jour  de  domina- 
tion d'une  faction  démagogique  avait  fait  dispa- 
raître, reparurent  à  l'horizon  politique  de  l'an- 
tique cité  flamande  ,  qui  avait  chassé  tous  les 
creessers  et  autres  brouillons  étrangers ,  fauteurs 
de  troubles  et  de  désordres. 

Huit  ans  après  ce  grand  drame ,  Tempereur, 
vainqueur  à  Mulhberg ,  fit  son  entrée  triomphale 
dans  sa  bonne  ville  de  Gand,  qui  le  reçut  avec 
des  démonstrations  d'une  sincère  allégresse,  dont 
le  souvenir  est  resté  dans  la  mémoire  du  peuple  ' . 

B"°  Kervyn  de  Yolkaersbeke. 


rlaghe  (24^"  sporkele  —  februaii)  was  by  trompetslaghe  gheboden 
achter  Ghent,  van  weghe  der  M.,  als  dat  de  selve  zjiie  M.  ontlaste 
aile  de  fugitycen  van  zes  hondert  keysersguldea,  daer  op  dat  se  die 
van  Ghent  ghestelt  hadden,  ende  dat  elc  van  den  fugitiven  binnen 
der  stede  van  Ghent  commen  saude  binnen  acht  daghen  naer  publi- 
catie,  ende  hemlieden  deffenderen  van  't  ghuent  dat  men  hem- 
lieden  ansegghen  wilde  voor  eeneghe  personagien  daer  toe  ghe- 
denomeert,  ende  daer  toe  ghecommitteert  van  weghe  der  K.  M.  » 
'  Nous  avons  publié  cette  brillante  entrée  dans  le  Messager  des 
sciences ,  année  1874,  p.  343,  sous  le  titre  :  la  Victoire  de  MuUiberg. 


—    409    — 

APPENDICE. 

Extraits  du  Memoeieboeck  der  stadt  Ghent. 

«  Item,  den  (xxiiii)  in  Hoeymaent  was  't  wederomme 
colatie,  maer  de  assysen  en  wierden  niet  gbeconsenteert  te 
verpachten  voor  dat  correxie  ghedaen  zyn  zoude  van  de 
ghene  die  dloot  besicst  hadden  leyten  den  sloote  van  cola- 
tien,  ende  ooc  die  men  ten  laste  legde  van  eeneghe  'preve- 
legien,  die  by  hemlieden  ontvremt  zyn  zauden,  mits  dat 
eenen  Pieter  De  Voocht,  filius  meester  Andries,  der  stede 
smet,  te  kennen  gaf  als  dat  hy  in  't  jaer  XXXVI  uut  laste 
ende  by  bevele  van  meester  Philips  van  de  Ketidle,  in  dien 
tyt  voorscbepene  van  der  Kuere,  een  slot  ofsecreet  van  den 
secrète  in  't  Belfroot. 

»  Item,  den  xxvni  in  Hoeymant  ginc  men  wederomme 
in  V  secret^  ende  men  baelde  ute  de  lote  met  der  A,  ende 
brachtse  op  den  colatiesoldere,  ende  men  begonste  te  lesen 
ende  uut  te  scryvene  de  privilegien,  ten  bysyne  altyds 
van  eenigbe  dekenen  ende  aile  andere  die  't  geliefde  te 
commene. 

»  Item,  van  ghelycken  dat  men  't  goet  van  de  fugityven 
toesegbele,  ende  in  de  buesdatie  wel  doe  bewaren,  ten 
minsten  in  de  buus  met  souffisanten  mannen  in  vorme  van 
wettebodeu  (Id.,p.  130). 

»  Item,  begheeren  ooc  te  zien  den  coop  van  den  lande 
(Id.,  131). 

»  Item,  dat  men  drye  sleutels  van  den  secrète  gheve  drye 
Dehens,  ende  altyds  van  j are  te  jare  verandere  (Id.,  131). 

»  Item ,  op  Sente  Luucxdach  den  xvni  october  (S*-Luc) 
des  morgbens,  trac  de  hooghbailliu  uut  Ghent  naer  Mecbe- 
len,  ende  liet  also  de  stede  van  Gbent,  "waeromme  dat 
groote  murmuratie  quam  onder't  vole  (Id,,  153). 


—    410    — 

Item,  dat  de  onderhailliu  de  officie  bedienen  saude  alle- 
leens  of  de  lioochbailliu  in  stede  ware,  daer  toe  dat  men 
hem  presenteerde  XII  hallebaerdiers  fsynder  assestentie 
ter  stede  coste  (Id.,  154). 

»  Item,  ten  voorseiden  daghe  was  op  den  Colatiesoldere 
eenen  brief  gbelesen  die  de  lioochbailliu  ghescreven  hadde 
aen  scepenenvaii  Ghent,  inhaiidende  als  datter  lieden  bin- 
nen  Ghent  waren  die  daghelicx  in  't  scepenhuiis  ende  ooc 
achter  straten  maecten  veel  segghinghe  van  der  privilegien, 
ende  waren  nochtaus  de  gheue  die  daghelicx  ghemeeuscip 
maecten  met  eeneghe  fugityven  cleser  stede,  ten  anderen 
als  dat  hy  hem  niet  vericonderen  en  mochte  van  synen  ver- 
trecken,  want  hy  seer  corts  voor  syyi  vertrechen^  icas  van 
eenighe  persoonen  soo  toeghesproken  als  dat  hy  niet  en 
saude  icillen  ont  half  syn  goet  noch  eens  in  sulcke  vreesen 
syn;  screef  ooc  overe  als  dat  hy  ter  stede  van  Ghent,  in  't 
hof  synde,  meer  profyts  doen  soude  dan  oft  hy  binneu  der 
stede  van  Ghent  bleven  ware  (Id.,  p.  155). 

»  Item,  up  den  vierden  dach  van  sporkele  quam  binnen 
der  stede  van  Ghent  minheere  van  Rues  ende  minheere  de 
hoochbailliu  van  Ghent,  îcelke  uut  Ghent  gheioeest  hadde 
van  sinte  Lucx-daghe,  den  xviif^  october  lestleden  ende 
waren  inghehaelt  met  den  goeden  mannen  van  der  stede 
te  wetene  :  de  ghedeputeerde  die  te  Valenchiene  gheweest 
liadden  ende  andere  goetwilleghe,  die  't  believden  te  rydene 
cm  der  stede  van  Ghent  eere  te  doene  (Id.,  173).  » 

EXTEAIT  DE  LA  CHEONYCH  VAN  GhENDT  EN  RUPELMONDE 

{Manuscrit). 

«  Den  17  septeraber  vrough  vont  hem  groote  menichte 
van  elcker  neiringhe  in  de  donderstraete  ten  huyse  van  den 
hoochbailliu  en  daer  was  den  roup  weer  ghevanghen  t'heb- 
ben  Jan  van  Waesberghe  en  Lieven  Lamins  ende  sommighe 


—    411    — 

van  de  scepenen  eu  terstoudt  wirdt  glievanglien  Lieven 
Donaes  en  Joos  Seys  d'oude,  beede  iegliemvoordiglie  sche- 
penen  van  der  Keure.  En  Jan  van  Waesberghe  meenende 
Lun  t'absenteren  ghecleet  in  vrouwe  cleederen  met  een 
faille  en  acliter  hem  een  camenist,  weer  sy  worden  by  den 
polder  bekent  van  de  drooghscheirders  die  welcke  hilden  in 
hunlieder  huys.  En  t'  selve  vernemende  volgliden  den  voor- 
noemden  Jan  in  t'huys  van  Jacob  Parmantier  daer  hy 
vloot  en  over  een  muer  clom  tôt  in  de  byvanck  van  Symoen 
Borluyt  daer  hy  ghevanghen  wirdt,  soo  van  ghelycken 
ghevanghen  wirdt  Lieven  Lamins.  En  doe  wasser  een  nieu 
vergaederinghe  van  aile  de  neiringhen  eude  de  wevers  in 
huerlieder  huysen  en  hunlieden  was  ghevraeght  van  weghen 
schepeuen  wat  men  de  ghevanghenen  doen  saude,  maer  en 
hadden  gheen  antwoorde  of  ten  was  wel  12  hueren  in  den 
naght,  en  sanderdaeghs  was  Jan  van  Waesberghe  ter  exa- 
men broght  naer  noen,  présent  dekenen  en  gheswoorne  van 
de  wevers  insghelyks  eenighe  notable  van  de  poorters 
vergadert  van  ten  2  tôt  den  6  (p.  ccl). 

»  Den  4  february  kwam  binnen  Ghent  den  graeve  de 
Reux  en  M""  her  Frans  van  der  Gracht^  heere  van  Schardan 
en  hooghbailliu  binnen  Ghendt  den  welcken  uyttrock  op 
S*  Lucx  en  wirdt  inghehaelt  van  sommeghe  poorters  en 
insetene  deser  stede  (cclxii).  » 


—    412    — 


ESQUISSE    HISTOEIQUE 


DU 


COURS  ET  DES  EMBOUCHURES  DE  L'ESCAUT. 


L'Ardenne  est  rextrémité  ouest  des  monts  Her- 
cyniens, qui  partant  de  la  Bohême  atteignent 
Boulogne,  se  poursuivent  sous  la  Manche  et  re- 
paraissent dans  le  Devonshire,  pajs  des  anciens 
Silures  <. 

Sur  le  continent  les  hautes  vallées  voisines  de 
la  Meuse  présentent  plusieurs  plateaux  ombragés 
par  les  forêts  ardennaises.  On  trouve  parmi  ceux 
s'étendant  de  la  rive  gauche  de  cette  rivière, 
celui  voisin  de  Nouvion,  renfermant  la  source  de 
la  Sambre  à  Ualtitude  d'au  moins  200  mètres. 
Cette  rivière,  coulant  vers  le  N.-E.,  porte  à  la 
Meuse  le  tribut  de  ses  eaux. 

A  25  kilomètres  au  couchant  de  cette  source, 
mais  à  un  niveau  qui  n'atteint  pas  90  mètres 
d'altitude,  on  rencontre  près  de  Bohain  l'Escaut, 

'  C'est  en  mémoire  de  ceci  que  les  géologues  anglais  ont  donné 
le  nom  de  silurien  à  ce  système  de  roches. 


—    413    — 

qui,  ijoursuivant  sa  marche  au  travers  d'une  plaine 
inclinant  O.-N.-O.,  se  rend  à  la  mer. 

Les  limites  de  cet  ancien  Océan  ne  sont  bien 
appréciables  qu'à  partir  du  Mont-Saint-Aubert, 
Mouscron ,  Mont-Cassel ,  qui  sont  autant  de  té- 
moins de  la  direction  de  ses  côtes.  Cette  chaîne 
de  montagnes  tertiaires  passe  à  Renaix,  à  Lae- 
ken,  à  Kessel-loo.  Il  est  évident  que  la  zone 
sablonneuse  de  la  Basse-Belgique  depuis  Bou- 
logne, est  le  produit  de  soulèvements  lents  et 
successifs  de  la  croûte  terrestre  *. 

L'Escaut,  nommé  originairement  Scai(t  =  Scalt, 
ne  signifierait,  selon  Alting  %  rien  de  plus  que 
leniter  declinans,  serpentant  légèrement  à  travers 
les  couches  des  terrains. 

César  écrivit  ce  nom  :  Scaldis.  En  thïois  il  se 
dit  :  Schelde,  Schelle,  Schel,  et  vers  son  embou- 
chure :  Schouio  '%  d'où  Schouiven ,  lancien  pagus 
Scaldensis.  En  roman  le  mot  Bscaiit  se  présente 
comme  issu  de  Scaut,  qui  était  probablement  cel- 
tique; r^  préalable  est  un  résultat  de  la  pros- 
thèse  très-fréquente  en  wallon,  comme  dans  les 
mots  épinettes,  aspirail  ^  Aujourd'hui  Ton  remar- 
que que  dans  diverses  localités  du  Haut-Escaut, 
ce  n'est  pas  VE  initial  que  supprime  le  vulgaire, 
mais  bien  le  s  qui  le  suit;  c'est  ainsi  qu'il  pro- 


'  Confr.  Smeysters,  Mouvements  du  sol,  p.  18. 

*  Notitia  germaniœ  inferioris,  in  voce,  p.  116. 

^  Alting,  Lib.  citât.,  t.  II,  p.  155.  —  Le  mot  schomv  =  ponton, 
pourrait  bien  provenir  des  embarcations  anciennement  spéciales  au 
Bas-Escaut. 

*  D""  SiGAET,  Essai  d'une  phojiétoniie,  p.  9. 


_    414    — 

nonce  Ecaillon,  Ecaut-pont,  Ecaut-d 'œuvre,   etc. 

D'abord  simple  ruisseau,  FEscaut  prend  l'as- 
pect d'une  rivière  après  avoir  reçu  sur  sa  rive 
gauche  les  eaux  de  la  Sanset,  aspect  qui  s'aggran- 
dit  par  la  réception  de  la  Seille  et  de  l'Escaillon 
sur  sa  rive  droite,  puis  de  la  Rouelle,  de  la  Haine, 
et  enfin  de  la  Scarpe  sur  la  rive  gauche,  préludant 
à  la  formation  du  fleuve  qui,  parvenu  à  la  hauteur 
de  Vaux  près  Tournai,  s'est  creusé  un  lit  par 
l'érosion  du  calcaire  carbonifère,  le  seul  point  de 
son  cours  oii  il  ait  rencontré  une  roche  de  quelque 
résistance. 

Parcourant  la  zone  argilo-sablonneuse  de  la 
moyenne  Belgique,  il  dut  trouver  son  terme  pri- 
mitif à  la  limite  nord  de  cette  zone,  où  l'Océan 
recevait  ses  eaux,  entre  quelques  îlots  qui  sem- 
blent nous  révéler  l'existence  d'anciennes  dunes  ' , 
par  les  noms  modernes  de  Lemberg,  Blandyns- 
berg,  Ledeberg,  Desselberg,  etc.  (Table  I). 

Semblable  à  la  croissance  paisible  de  l'enfant 
grandissant  au  foyer  de»  la  famille,  l'Escaut  a 
conduit  doucement  jusques  là  sa  course  vers  le 
Nord  ;  mais  des  circonstances  nouvelles  devaient 
imprimer  une  direction  différente  à  la  marche 
qu'il  allait  suivre  dans  la  Basse-Belgique.  Les 
dunes  qui  contournent  Gand  le  firent  dévier  pour 
suivre  sa  voie  dans  la  zone  sablonneuse  de  préfé- 
rence à  la  zone  argilo-sablonneuse.  Le  fleuve  se 
creusa  donc  un  lit  prolongé  qui  pourrait  bien 
avoir  eu  un  parcours  de  15  kilomètres  pour  at- 

*  VI AZNKŒmQ,  Histoire  de  la  Flandre,  t.  II,  p.  32. 


MOYENNE     BELGIQUE, 
Cours  de  T.Escaut, 


O  C  E  AN 


TABEE  E 


I 


i 


oc  E  AN 


DiATMe- 


MOYENNE  ET  BASSE  BELGIQUE, 

Zone   campmienne, 
Cours  de  l'Escaut, 


TABLE  H, 


—    415    - 

teindre  la  mer  ' ,  et  y  constituer  un  golfe  vers  les 
lieux  voisins  du  Sas  de  Gand,  là  où  Kœrius  en 
1608  dessine  celui  qu'il  nomme  Dullaert  -,  et  qu'il 
fait  communiquer  avec  l'Océan  par  le  Sloe. 

L'Escaut  ayant  englobé  les  eaux  de  la  Lys ,  le 
fleuve  obéit  à  cette  impulsion  venue  du  Couchant 
et,  contrarié  par  le  flux,  se  creusa  un  lit  obli- 
quant vers  le  Levant,  serpentant  le  long  de  la 
limite  nord  de  la  zone  sablonneuse  et  se  condui- 
sant d'après  la  nature  des  terrains  qu'il  baignait. 

Rencontrant  le  Deudre  sur  la  rive  droite  et 
suivant  à  peu  près  le  cours  de  cette  rivière,  de- 
puis son  confluent,  son  cours  est  devenu  actuelle- 
ment artificiel  par  suite  des  endiguements.  La 
Dendre  donnant  plus  d'ampleur  au  volume  des 
eaux  fluviales,  les  force  de  suivre  l'inclinaison 
générale  qui  leur  impose  la  direction  du  Nord.  Le 
fleuve  la  suit  après  qu'il  a  reçu  le  Rupel  sur  la 
rive  droite,  puis  la  Durme  ou  Neder-Senne  -  sur  la 
rive  gauche,  jusqu'à  ce  qu'au  terme  de  la  zone 
sablonneuse,  il  se  trouva  aussi  au  terme  de  sa 
course,  à  la  mer.  Les  limites  de  cette  zone  dans 
le  voisinage  du  Bas-Escaut  nous  indiquent  où  dut 
se  trouver  la  plage.  Nous  signalerons  sur  la  rive 
droite  Basele,  Cruybeke,  Burght,  Zwyndrecht, 
Melsele,  Vracene  et  Saint-Gilles-AYaes  (Table  II). 

*  Confr.  Des  Roches,  Hist.  ancienne  des  Pays-Bas,  t.  I,  p.  154. 
—  ScHAEYS,  La  Belgique,  t.  II,  p.  176.  Depuis  que  ces  lignes  sont 
écrites,  le  travail  de  M.  Verstraete  redresse  et  complète  notre  pen- 
sée. {Bulletin  géog.,  1878,  n°  4.) 

Germania  inferior,  pp.  37-38  et  67-68.  — D""  J.Van  Raemdonck, 
Recherches  sur  la  course  de  VEscajit,  p.  104.  Bulletin  de  1818  de  la 
Société  de  géographie. 

"^  M.  Vaernewyck,  Hist.  van  Belgis,  lib.  IV,  cb.  36. 


—    416    — 

Il  y  avait  donc  là  un  vrai  bras  de  mer  où 
l'Escaut  venait  se  jeter  et  cessait  en  quelque  sorte 
d'exister'.  Mais  plus  au  couchant,  vers  Vracene 
et  Saint-Gilles,  la  contrée  se  présentait  sillonnée 
de  cours  d'eau  étendus,  de  criques  nombreuses 
qui  même  pendant  le  reflux  demeuraient  cou- 
vertes d'eau.  Cette  vaste  plaine  fut  nommée  : 
Huant,  Hvant,  c'est-à-dire  plaine  liquide,  flaque?. 
Ces  terres  sont  aujourd'hui  émergées;  mais  nous 
retrouverons  plus  loin  le  nom  sous  lequel  cet 
espace  a  été  désigné.  La  limite  nord  de  la  région 
sablonneuse  fut  la  seconde  étappe  de  notre  fleuve. 

Aujourd'hui  cette  région  confine  à  la  zone  pol- 
dérienne  qui  est  un  produit  des  alluvions  et  du 
mouvement  des  marais.  A  la  suite  des  grandes 
pluies,  les  rivières  attaquent  le  pied  des  collines 
qu'elles  baignent,  et  emportent  quelques  débris 
sur  les  terrains  bas  qu'elles  inondent  et  que 
chaque  inondation  élève  peu  à  la  fois.  Lorsqu'el- 
les parviennent  à  la  mer  et  que  la  rapidité  qui 
entraînait  les  parcelles  de  limon  vient  à  cesser 
tout-à-fait,  ces  parcelles  sont  déposées  aux  côtés 
de  l'embouchure  et  finissent  par  former  des  ter- 
rains qui  prolongent  la  côte.  Les  parties  du  litto- 
ral baignées  par  le  flot  et  découvertes  par  le  reflux 
se  nomment  salines  sur  les  côtes  de  France,  et 
schorren  en  Belgique.  On  sait  que  lorsque  leur 
croissance  a  amené  leur  maturité,  on  les  endigue 


*  KuMMER,  Polders  du  Bas-Escaut,  p.  7,  et  la  planche  II  dans  les 
Annales  des  travaux  publics,  t.  Il,  p.  844. 

*  L.  JoossENS,  Bïdlet'm  de  la  Société  géographique,  1877,  pp.  24G 
et  253.  —  Voir  aussi  Van  Raemdonck,  même  publication. 


—    417    — 

et  on  les  transforme  en  j^olders ,  lesquels  se  cou- 
vrent de  graminées  et  deviennent  propres  au 
pâturage  '. 

Par  le  mouvement  du  reflux,  l'alluvion  se  trouve 
peu  à  peu  entraînée ,  sur  les  hauts-fonds  sur  les 
bancs  de  sable  de  la  mer,  qui  finissent  par  deve- 
nir des  îles.  Car  il  est  reconnu  que  la  mer  ramène 
une  grande  partie  de  ce  qu'elle  a  pris  à  la  terre  ; 
en  d'autres  termes,  que  le  flot  apporte  plus  que 
le  jusant  n'enlève  ^ 

C'était  donc  dans  ces  alluvions  que  l'Escaut 
avait  à  se  tracer  sa  voie,  mais  comme  dans  cet 
estuaire  il  avait  à  lutter  contre  les  marées  et  que 
la  masse  de  ses  eaux  était  considérable,  il  se 
divisa  en  diverses  branches  et  fit  suivre  à  une 
partie  de  ses  eaux  la  limite  de  la  zone  sablon- 
neuse, la  séparant  du  Huant,  qui  est  devenu  la 
zone  poldérienne.  Ainsi,  les  écoulements  de  l'est 
à  l'ouest  sous  l'action  des  hautes  marées,  ren- 
voyaient, lors  du  reflux,  une  partie  des  eaux  dans 
le  lit  principal  du  fleuve;  et  par  la  suite  des 
temps,  toutes  les  dérivations  furent  successive- 
ment ensablées  et  abandonnées  parla  navigation  '". 

Mais  si  une  portion  notable  des  eaux  rentrait  à 
la  marée  basse  dans  le  lit  principal  du  fleuve, 
son  action  propre  conservait  sa  direction  géné- 
rale vers  le  nord,  serjDentant  entre  les  hauts -fonds 
jusqu'à  ce  que  ses  eaux  se  trouvassent  en  face 

»  Chaubart,  Élémens  de  géologie,  p.  336.  —  Ch.  Cuviee,  Eev. 
du  G. 

^  L.  Lambot,  ses  Annotations,  29  avril  1878. 
=<?.£.:  Tort  de  Ilulst  j  et  le  Zwin. 

28 


—    418    — 

d  une  surélévation  devenue  le  noyau  de  l'île  de 
Schouwen.  Là,  à  l'Océan,  la  puissance  du  flux 
refoula  les  eaux  de  l'Escaut  à  l'Orient,  où,  ne 
trouvant  qu'un  fond  de  vase  formée  par  les  allu- 
vions  de  la  Meuse,  elles  le  traversèrent  et  se  mê- 
lèrent aux  eaux  de  cette  rivière.  Cette  branche 
est  représentée  aujourd'hui  par  le  Keete  et  le 
Yosvliet.  La  branche  nommée  Eendragt  n'avait 
pas  l'importance  de  celle-ci  qui  dans  la  suite  fut 
la  limite  ouest  du  diocèse  de  Tongres  * . 

La  branche  qui  arrose  le  midi  de  l'Ile  de 
Schouwen  est  l'artère  principale  ;  c'est  l'Escaut, 
auquel  nous  avons  accolé  l'épithète  d'oriental.  Tel 
est  le  sentiment  de  tous  les  riverains ,  et  comme 
me  l'affirma  mon  ami  le  capitaine  Auguste  Stes- 
sels  :  «  Ce  que  nous  nommons  Escaut  occidental 
ne  porte  que  le  nom  de  Hoxt,  et  l'importance  de 
son  cours  date  d'une  époque  bien  postérieure  ^  » 
(Table  III) . 

2.  Si  nous  abordons  les  faits  qui  constituent 
l'iiistoire,  nous  annoterons  que  dès  l'origine  l'Es- 
caut servit  de  limite  entre  des  populations  di- 
verses :  le  2^6ulvan  qui  s'élève  sur  sa  rive  droite 
entre  Hollain  et  Rongy  semble  en  porter  té- 
moignage ^  «  Toute  la  côte  de  la  mer  jusqu'au 
fleuve  Escaut  est  habitée  par  des  nations  germa- 
niques, »  dit  Pline  \  Ce  fut  jusqu'à  sa  rive  droite 


*  Confr.  Barthels  ,  Limites,  etc. ,  dans  la  Revue  et  archéologie , 
t.  I,  p.  380. 

*  Le  27  août  1867,  lors  d'une  excursion  faite  sur  l'Hydrographe 
avec  ma  fille  Emilie,  qui  mourut  dix  ans  plus  tard! 

'  ScHATES,  La  Belgique,  etc.,  t.  I,  p,  103. 

*  Hist.  net.,  lib.  IV,  c.  13. 


MOYENNE    ET    BASSE    BELGIQUE. 

Zones  argilo- sablonneuse,  campimenne  et  poldérienne. 

Cours   de  l'Escaut. 


TABLE  IIL 


—    419    — 

que  les  Germains  s'étaient  d'abord  établis;  au 
midi  du  confluent  du  E,upel  les  Nerviens.  au  nord 
les  Éburons.  Plus  tard,  les  Ménapiens,  d'abord 
riverains  de  la  Basse-Meuse,  s'étendirent  tout  le 
long  de  sa  rive  gauche  et  s'adossèrent  à  l'Océan. 

Dans  la  di^^ision  des  Gaules  que  fit  César- 
Auguste,  il  étendit  la  Gaule-Belgique  de  la  mer  à 
la  Dyle,  mais  Chlodion  ayant  conquis  le  territoire 
nervien,  l'Escaut  servit  de  nouveau  de  limite  occi- 
dentale de  l'Austrasie  d  abord,  de  la  Lotharingie 
ensuite. 

La  période  romaine  nous  fait  connaître  plu- 
sieurs localités  situées  sur  ses  rives.  Cambrai, 
Escautpont,  Tournai,  figurent  sur  la  Table  de 
Peutinger.  Valenciennes,  mentionnée  d'abord  en 
692,  aurait,  non  donné,  mais  reçu  son  nom  des 
Valentinianses ,  pour  lesquels  elle  eut  été  un  cas- 
trmn  vers  395,  sous  Valentinien  II.  Condate , 
Condé ,  dénonce  une  origine  celtique;  ce  nom 
signifie  confluent.  Audenarde  appartient  au  temps 
de  l'Empire,  comme  le  révèlent  les  substructions 
découvertes  dans  ses  environs.  Il  en  est  de  même 
de  Gand,  de  Heusden,  de  Termonde,  de  Bornhem, 
de  Tamise  et  d'Anvers. 

Des  traces  de  l'occupation  romaine  se  rencon- 
trent en  outre  le  long  de  la  Durme,  entre  autres 
à  Thielrode,  Hamme,  Waesmunster,  Lokeren  et 
Zeveneeken. 

Si  tous  ces  faits  témoignent  que  de  sa  source 
jusqu'au-dessous  d'Anvers,  la  vallée  de  l'Escaut 
était  habitée  il  y  a  près  de  vingt  siècles,  on  peut 
douter  qu'il  en  était  de  même  du  territoire  en 


—    420     - 

aval.  Cornélius  Battus,  écrivain  du  XVP  siècle, 
n'hésite  pas  à  aifirmer  que  peu  d'années  avant 
notre  ère  la  multitude  d'îlots,  qui  s'étant  peu  à 
peu  agglomérés  constituaient  la  Zélande  que  nous 
connaissons,  étaient  stériles  et  inhabités.  Cette 
assertion  est  évidemment  trop  absolue.  Jules 
César,  relatant  la  dispersion  qu'il  infligea  aux 
Éburons  en —  53,  ajoute  qu'une  partie  des  fugitifs 
chercha  un  asile  dans  les  îles  que  constituait  le 
flux  ' .  On  peut  induire  de  ces  paroles  que  si  ces 
îles  n'étaient  habitées,  elles  étaient  habitables  et 
fréquentées ,  et  recevaient  temporairement  des 
habitants  sur  les  ierpeii  ou  élévations  naturelles 
ou  sur  les  werven ,  barrages  élevés  de  main 
dliomme  pour  s  assurer  un  refuge.  Au  surplus, 
les  plus  anciens  monuments  découverts  dans  le 
Delta  de  l'Escaut  sont  les  autels  votifs  de  Dom- 
burg,  qui  ne  sont  guère  antérieurs  à  la  fin  du  IP 
siècle,  c'est-à-dire  qui  remonteraient  à  dix-huit 
siècles  environ. 

A  cette  époque  donc  Walcheren  était  habitée, 
et  il  dut  en  être  de  même  de  Goerée,  où  à  marée 
basse  Ton  a  découvert  les  substructions  d'un 
établissement  important  dans  lesquelles  se  trou- 
vaient des  médailles  d'Antonin  ^  L'île  de  Schou- 
wen  semble  avoir  eu  des  habitants  à  la  même 
époque;  Hamstede,  Renesse,  Mormont  et  Zierick- 
zee  remonteraient  aux  temps  des  Romains,  selon 
les  traditions  locales. 


'  «  Qui  proximi  Oceani  fuerunt,  hi  insulis  sese  occultaverunt  quas 
œstus  efficere  consuerunt.  »  B.  Gal,  lib.  YI,  c.  31. 
'  Des  Roches,  Mémoires  couronnés,  1769. 


—    421     — 

Tout  ce  territoire  clu  Delta  de  TEscaut  était 
toutefois  bien  loin  encore  d'offrir  la  consistance 
que  les  derniers  temps  historiques  lui  reconnais- 
sent. C'est  de  lui  que  parle  Lucain,  vivant  Tan  58, 
quand  il  dit  dans  la  Pliarsale  : 

«  Quaqiie  jacet  littus  diibium  quod  terra,  freturaqiie 
»  Vindicat  altemis  vicibus.  » 

et  que  Pline  disait  un  peu  plus  tard  :  «  Duhium 
terra  sit  an  ^mrs  maris.  »  Enfin  Eumène,  célé- 
brant la  campagne  qu'en  293  Constance- Chlore 
conduisit  contre  les  Franks,  dit  encore  :  «  Ut 
cum  verhis  pericido  loqiiar,  terra  non  est.   » 

Ptolemée,  qui  vivait  en  134,  donne  à  l'embou- 
chure d'une  de  nos  rivières  le  nom  de  Tabuda. 
S'appuyant  sur  les  distances  fournies  par  ce  cos- 
mographe, Alting  y  voit  la  petite  rivière  Aa.  — 
A-mude  '.  Mais  on  sait  aujourd'hui  qu'on  ne  peut 
tirer  grand  parti  des  chiffres  fournis  par  l'auteur 
égyptiens.  En  outre,  il  lui  est  arrivé  de  se  servir 
du  nom  d'une  localité  pour  désigner  une  rivière. 
C'est  ainsi  que  le  nom  à' Ober-Rheingau  devient 
pour  lui  Obrinca  et  s'adapte  à  la  Moselle;  que 
celui  de  Froise.^  village  voisin  de  l'embouchure  de 
la  Somme,  lui  a  fait  donner  à  cette  rivière  le 
nom  de  Phrudis,  comme  l'a  remarqué  Gosselin. 
Peut-être  y  a-t-il  ici  quelqu'analogie  du  même 
genre. 

D'après  Ptolemée,  15'  séparent  l'embouchure 
de  la  Somme  du  cap  Itius,  au  nord  duquel  il  place 

'  Alting,  in  voce. 

'  Confr.  ]\Ialte-Beun,  Géogr.  unit-.,  liv.  XIV,  t.  I,  p.  124. 


—    422    — 

Boulogne  à  0,45'  et  la  bouche  du  Tabuda  à 
45'  plus  loin.  Le  cap  Itius  se  trouve  ici  transposé, 
car  il  est  généralement  admis  que  ce  nom  repré- 
sente le  cap  Grisnez  qui  est  au  nord  de  Boulogne, 
d'où  la  présomption  que  cette  ville  a  été  placée 
par  l'égyptien  à  l'endroit  de  Vltius  portus  de 
César,  de  Wissand,  d'où  à  la  distance  de  45',  soit 
environ  15  lieues,  on  trouve  le  Zwine,  bras  de 
mer  qui  a  dû  recevoir  une  branclie  de  l'Escaut. 
Or,  nous  apprenons  que  proche  du  Zwine,  et  dans 
la  banlieue  d'Aardenburg,  s'est  trouvé  une  loca- 
lité du  nom  de  Trabeten,  qui  fut  submergée  par 
l'inondation  de  l'an  1477  \  Les  antécédents  que 
nous  avons  signalés  nous  permettent  de  voir  ici 
encore  une  analogie. 

Tabuda  ne  fut  pas  le  seul  nom  étrange  que  des 
anciens  donnèrent  à  l'Escaut,  ou  au  moins  à  l'une 
de  ses  branches.  Comme  celle  de  l'est  limitait, 
dans  sa  partie  basse,  la  cité,  ensuite  le  diocèse  de 
Tongres,  Sidoine  Apollinaire  lui  donne  ce  der- 
nier nom. 

Tu  Tiingrum  et  Vaclialim ,  Visurgim ,  Albim 

Francorum  et  pœnitissimas  paludes 

Intrares  venerantibus  Sigambris 

Solis  moribus  inter  arma  tutus  (Carmen,  XXIII). 

Mais  ici  il  ne  faut  pas  oublier  que  la  licence 
poétique  a  pris  son  essor  ;  et  rien  ne  nous  montre 
que  dans  le  langage  officiel  ou  même  populaire, 
le  Bas-Escaut  ait  jamais  été  désigné  par  le  nom 
de  Tunger. 

«  M.  Vaeknewyck,  Hist.  van  Belgis,  liv.  IV,  cap.  35. 


—    423    — 

La  situation  de  cette  contrée  maritime  avait 
toutefois  une  grande  importance ,  Carausius 
l'avait  concédée  aux  Franks  ^  ;  et  Constance  était 
venu  la  leur  ravir  en  transportant  en  Gaule  les 
prisonniers  qu'il  fit  sur  eux,  et  les  j  fixant  en 
qualité  de  Lœti.  Un  siècle  plus  tard,  à  l'époque 
où  les  Franks,  commandés  par  Marcomir  et 
Sunnon  ,  attaquèrent  les  Romains  ,  les  Frisons , 
leurs  alliés,  attaquèrent  l'Empire  avec  eux,  et 
s'étendirent  le  long  des  rives  de  l'Escaut,  jusqu'à 
celle  de  VOude-Watergang.  Les  légendes  attri- 
buent cette  extension  à  leurs  rois  Dikbald  et 
Ricliold.  La  côte  de  Flandre,  et  spécialement  de 
l'Aa  à  Westende ,  était  occupée  par  les  Saxons , 
leurs  congénères  et  alliés,  qui  se  trouvaient  désor- 
mais maîtres  de  la  mer  %  et  ne  les  inquiétèrent 
point  dans  leurs  nouvelles  possessions.  Dès  lors 
la  limite  sud  de  la  domination  frisonne  fut  ce 
Watergang  de  l'Escaut  partant  de  Ketenisse,  pas- 
sant à  Hulst  qui  portait  encore  le  nom  de  Saxha- 
ven  au  XIIP  siècle  et  se  dirigeant  sur  Biervliet. 

Le  Zwine,  avec  lequel  cette  dérivation  commu- 
niquait, répond-il  au  Sincfala  mentionné  comme 
limite  dans  les  loix  frisonnes  ?  Nous  ne  le  croyons 
pas.  Cette  rivière  est  indiquée  comme  bornant  à 
l'occident  la  juridiction  frisonne  Azagadom,  Azig- 
dom,  et  servant  de  séparation  à  celle  des  capitu- 
laires ,  Schependom ,  qui  était  en  vigueur  dans  le 
Comté  de  Frise,  nommé  plus  tard  Hollande.  Ce 


•  SiGONitrs,  lib.  I,  p.  12. 

*  Debo,  Westvlaamsch  idiotikon.  Brugge,  1873. 


—    424    — 

comté  était  séparé  de  Tétat  frison  du  moyen-âge 
par  la  Sena,  Sana,  aujourd'hui  la  Zaan.  C'est  là 
le  Sincfala  selon  le  D"  Van  Phelsum.  qui  rectifie 
Alting  sur  ce  point  * . 

L'expédition  du  danois  Godleik  en  515,  dont  la 
flotte  vint  attaquer  l'Austrasie  en  remontant  les 
rivières ,  dut  tirer  le  meilleur  parti  des  voies  na- 
vigables entre  les  îles  de  l'Escaut,  dont  la  confor- 
mation subit  tant  de  changements  notables  dans 
les  siècles  suivants.  La  population  s'était  déjà 
développée  à  Walcheren,  car  nous  voyons  que 
vers  673 ,  saint  Willebrord  y  aborda  et  y  trouva 
un  temple  de  Mercure  qu'il  renversa  ;  l'existence 
de  ce  temple  est  l'indice  d'une  population  relati- 
vement importante. 

La  tradition  rapporte  que  peu  de  temps  après 


*  Voici  cette  note  que  nous  reproduisons  en  entier  :  <•  Non  quando 
amplissima  fuit  Frisia,  quuni  Sincfalse  mentio  potissime  occurrit  ubi 
Frisiorura  nomeu  jam  non  VII  Zelandis  integris  proprium  visum 
fuit  ;  ex  legilius  Frisiorum  liquet  Frisiam  istorum  temporum  ter- 
minatam  fuisse  inter  flumina  Wisaram  et  Sincfalam,  et  tripartitam 
solummodo  fluminibus  Fleho  et  Laubaclio.  Si  vero  tune  tempori 
Frisia  amplissima  fuisset  Scaldis  et  Egidora,  vel  ad  minimum  Albis 
Frisife  termini  adpellandi  essent  ;  neque  omissum  Rhenum  saltem 
semel  injectum  ejus  mentionem,  suspicari  vix  possum.  Alise  preterea 
rationes  me  movent  sincfalam  pro  fluvio  Kinemarinum  et  Marsa- 
ciorum  agros  alluente  agnoscere.  M.  S.  » 

Alting,  citant  Melis  Stoke.  dit  : 

Die  Scheit  was  dat  west  en  de   Sine 
Alzo  aïs  si  valt  in  de  zee. 

Le  Dr  remarque  :  »  Miror  Altingium  hoc  tertiam  personam  pres- 
sentis temporis  indicativi  verbi  vallen  pro  parte  nominis  proprii 
accepisse  :  Stokius  hoc  loco  de  sine,  seyne,  hodie,  het  zu-in  (Scaldis) 
ostia  maxima  occidentale),  cogitasse,  minime  inde  sequitur  sine  vel 
sei/ne  Stockii,  idem  esse  liumen  cum  Sincfala  aliorum.  »  Idem. 


5 
2 


—    425    — 

un  ouragan  terrible,  accompagné  d'un  tremble- 
ment de  terre,  amena  des  ravages  considérables 
sur  toute  la  côte  de  la  mer  du  Nord  '.  Toutefois, 
Walclieren  ne  cessa  de  se  développer  principale- 
ment entre  les  années  820  et  840,  époque  où  une 
société  de  marchands  faisait  un  commerce  étendu, 
et,  sous  la  protection  de  l'empereur  Louis,  au- 
quel elle  rendait  annuellement  ses  comptes 
jouissait  de  Tusage  des  navires  de  la  couronne 
En  827,  le  prince  danois  Hemming,  avait  reçu  lile 
en  bénéfice  de  Tempereur  qui  lui  avait  adjoint  le 
comte  Eggiliard .  Mais  dix  ans  plus  tard ,  des 
danois  du  parti  advers  y  abordèrent  et  s'empa- 
rèrent de  Walcheren  après  avoir  tué  Hemming 
et  Eggiliard,  et  portèrent  leurs  ravages  sur  les 
rives  de  l'Escaut  jusqu'à  Gand  et  Anvers. 

S'il  fallait  s'en  rapporter  aux  paroles  de  Louis 
le  Débonnaire  que  Ton  nous  cite ,  la  popula- 
tion de  cette  île  vivait  dans  les  dérèglements  les 
plus  barbares  qui  Tassimilaient  aux  tribus  irlan- 
daises ^ 

Les  chroniques  signalent  des  perturbations 
atmosphériques  qui  produisirent  de  nombreux 
désastres  en  820,  8-40  et  860.  En  tenant  compte 
pour  des  phénomènes  de  ce  genre  de  la  périodi- 
cité qui  pourrait  résulter  au  cycle  de  Méton,  à  la 
différence  d'une  année,  ces  chiffres  sont  accepta- 


*  L'histoire,  pour  l'Orient  de  l'Europe,  signale  un  tremblement 
(le  terre  en  740. 

*  Velly  et  les  cinq  époques  du  Brabant,  p.  28. 

'  Het  oude  goudsche  Chronykxken,  p.  13.  —  Beka,  Hist.  ejnscop. 
Ultrajectensi.  Frederico,  octavo  episcopo,  p.  130. 


—    426     — 

blés.  Ce  dut  être  l'époque  où  on  commença  les  en- 
diguements  :  c'est  entre  840  et  860  que  disparut 
dans  rOcéan  VArx  hritannica ,  alors  que  l'embou- 
chure du  Rhin  à  Katwyk  fut  ensablée  :  et  que  dans 
la  Baltique  Vineta  s'enfonça  dans  les  flots. 

La  nature  des  terres  d'alluvion  qui  constituent 
le  delta  de  l'Escaut,  conservait  toute  facilité  pour 
modifier  les  formes  du  territoire  sous  Faction 
des  phénomènes  météorologiques  que  nous  signa- 
lons. En  effet,  les  couches  successives  de  vase  que 
le  fleuve  avait  déposé  sur  ses  rives  et  sur  les  hauts 
fonds,  étaient  douées  de  pesanteurs  et  de  densité 
variables,  de  telle  sorte  que  les  couches  inférieu- 
res cédant  à  la  pression  des  eaux  courantes ,  pu- 
rent être  emportées  par  le  reflux,  être  ainsi  cause 
d'effondrements  subits  et  donner  lieu  à  des  im- 
mersions considérables,  faits  qui  se  sont  repro- 
duits dans  les  siècles  suivants.  Nous  apercevons 
donc  ici  Télargissement  obtenu  par  d'anciennes 
branches  du  fleuve ,  au  détriment  d  autres  bran- 
ches qui,  tout  en  conservant  leur,  profondeur  se 
sont  rétrécies.  Ainsi  en  fut-il  du  Huant  que  des 
alluvions  et  des  ensablements  successifs  avaient 
reculé  plus  au  nord,  et  qui  sous  le  nom  connu  de 
Hond,  s'était  tracé  un  cours  presque  parallèle  à 
l'ouDE-WATEEGANG.  Jusqu'à  l'cudroit  d'Ossenisse, 
ce  nom  de  Hond  prévalut,  plus  bas,  on  l'appelait 
Diepenee  (eau  profonde) ,  jusque  vers  Terneuse  ; 
puis  Kille  ou  passe  entre  les  hauts-fonds ,  qui  ve- 
nait se  mêler  à  ce  qui  fut  plus  tard  nommé  le 
Dullaert,  au  midi  de  Biervliet,  d'où  diverses  bran- 
ches allaient  baigner  Rodenburg  et  Bruges,  pour 
se  réunir  à  l'Océan  par  le  Zwine. 


—    427    — 

En  face  de  ce  dernier  estuaire  se  présentait  Tîle 
de  Scliooneveld ,  séparée  de  Walclieren  par  le 
Heijdenzee,  c'est-à-dire  la  mer  des  payens,  dési- 
gnation qui  rappelle  les  Normans ,  dont  les  pira- 
teries infestaient  les  côtes  voisines. 

Ce  même  nom  de  Heydenzee  a  été  appliqué 
aussi,  et  probablement  pour  le  même  motif  au 
bras  de  mer  qui  sépare  l'île  de  Texel  de  celle  de 
Wieringen.  A  propos  de  la  comtesse  Ada,  Melis 
Stocke  écrit  : 

«  Willem  liaer  oem  heeft  verworven 
't  Land  van  by  Oesten  Keydenzee 
Tôt  Laveke  voert  mie.  » 

Les  Normans  demeurèrent  en  possession  de 
Walcheren,  des  ilôts  voisins  et  des  rives  de  l'Es- 
caut jusqu'au-dessus  d'Anvers.  Ce  fut  au  début 
de  leur  domination  que  les  endiguements  furent 
entrepris.  On  rapporte  celui  de  Walcheren  à 
Tannée  836  et  même  à  833  ,  ainsi  que  ceux  de 
Scliouwen  et  de  Borselen  ;  les  autres  îles  n'ont 
été  endiguées  qu'en  850'.  C'est  en  conséquence 
qu'Ejmdius  écrit  que  ce  fut  entre  les  années  840 
et  850  que  Walcheren,  Beveland  et  Schouwen 
furent  assurés  par  des  digues  ^ 

Le  partage  de  l'an  870,  attribuait  à  Charles  le 
Chauve,  la  troisième  partie  de  là  Frise,  et  ce  lot 
est  généralement  considéré,  avec  raison,  pensons- 
nous,  comme  composé  des  îles  de  l'Escaut  et  de 
la  lisière   méridionale   de   l'ancien   état    frison. 


•  KuMMER,  Polders  du  Bas-Escaut,  p.  10. 

*  Eyndius,  lib.  I,  cap.  15. 


—     428     — 

Charles  le  Chauve  concéda  au  prince  norman  God- 
fried,  les  emplacements  nécessaires  aux  ancrages 
de  sa  flotte,  sur  les  rives  de  l'Escaut  *.  La  Zélande 
devait  présenter  bien  des  lieux  propres  à  des 
stations  navales,  surtout  depuis  les  travaux  d'en- 
diguements  d'une  part  et  de  déversements  de 
l'autre.  Il  est  vraisemblable  que  tout  ce  territoire 
demeura  au  pouvoir  des  Normans  durant  un 
temps  relativement  long,  même  après  la  victoire 
que  l'empereur  Arnoulf  remporta  sur  eux,  aux 
rives  de  la  Dyle.  C'est  aux  Normans  que  bien  des 
familles  nobles  de  la  Zélande  rapportent  leur 
origine  ". 

Enfin,  sous  la  domination  des  rois  saxons  de 
Germanie  et  de  Lotharingie,  nous  remarquons 
que  par  acte  du  14  août  974 ,  Othon  II  con- 
céda AYalcheren  à  sa  femme  Théophanie,  à  titre 
de  douaire  ou  morgengabe'\  Un  diplôme  de  la 
même  année  fait  mention  de  Schouwen  ;  un  autre 
de  Beveland,  île  appartenant  à  l'abbaye  de  Saint- 
Bavon,  d'où  lui  est  venue  sa  dénomination  \ 

3.  Les  endiguements  opérés  dans  la  seconde 
moitié  du  IX"  siècle  eurent  pour  un  de  leurs 
résultats  immédiats,  le  changement  de  direction 
des  différentes  branches  du  fleuve,  en  même 
temps  que  la  destination  d'un  système  de  barrage 
contre  les  attaques  de  l'Océan.  C'est  ce  qui  res- 


<  FoLCtriN,  De  gestis  abb.  Lobbens,  cap.  16. 

2  J.-F.  Lepetit,  Nederlandsche  rejuiblyche,  1615,  p.   193. 
'  Alp.  De  Vlaminck,  Études  sia^  la  Flandre  impériale.  Messager 
des  Sciences  hisioriques,  1876,  p.  189. 

<  Alting,  Lib.  citât.,  p.  197. 


—    429    — 

sort   du    dicton    traditionel  transmis  par  Melis 
Stoke  : 

«  Al  Zeeland  verdrenck  zekerlike 
Sonder  Walcheren  en  Wolfaertdike.    » 

A  côté  des  écoulements  formés  par  les  lois 
naturelles,  il  j  en  eût  d'autres  qui  étaient  le  fait 
du  travail  de  l'homme.  Bien  que  leurs  traces 
soient  effacées  en  plusieurs  endroits,  leur  exis- 
tence probable  ressort  d'une  tradition  remontant 
au  X^  siècle.  Elle  se  rapporte  aux  travaux  exécu- 
tés par  le  roi  Otlion. 

En  936,  Otlion  I,  dit  le  Grand,  était  monté  sur 
le  trône  ;  il  mourut  à  Memleben  le  7  mai  973.  Son 
fils  Otlion  II  lui  succéda,  et  c'est  à  lui  que  la  tra- 
dition attribue  des  travaux  hydrauliques  à  l'em- 
bouchure du  fleuve,  tandis  que  les  chroniques 
rapportent  à  son  père  le  creusement  d'un  canal 
ou  fossé,  Fossatiim,  de  Gand  jusqu'à  la  mer.  Jean 
de  Thielrode,  moine  de  l'abbaye  de  Saint- Bavon, 
mort  vers  l'an  1300,  écrit  dans  sa  chronique, 
après  avoir  relaté  les  faits  des  années  936  et  941, 
ce  qui  va  suivre  : 

«  L'empereur  Otlion  appela  de  son  nom,  Ot- 
tingue^  un  fossé  passant  devant  le  pont  de  Saint 
Jacques  et  s'étendant  jusqu'à  la  mer,  par  lequel  il 
fixa  les  frontières  du  ro3''aume  des  Franks  et  de 
l'empire  d'Austrasie.  Avant  Othon,  le  château  qui 
est  situé  sur  les  rives  de  la  Lys  avait  été  construit, 
non  par  le  roi  de  France,  ni  par  les  comtes  de 
Flandre,  mais  par  les  empereurs  dans  la  propriété 


—     430    — 

libre  ^  de  Saint-Bavon,  près  de  la  séparation  du 
royaume  et  de  l'empire  ;  et  de  ce  chef  les  comtes 
ont  payé  longtemps  un  cens  de  5  sous  à  Saint- 
Bavon.  Le  commandement  de  ce  château  n'appar- 
tenait pas  à  des  châtelains ,  mais  à  des  comtes 
auxquels  étaient  soumis  les  Quatre-Métiers  avec 
leurs  dépendances,  savoir  :  Assenede,  Bouchant, 
Axel,  Hulst,  avec  tout  le  pays  de  Waes  ".    » 

\jOttogracht  à  Gand  avait  en  face  de  lui  le 
Schipgracht^  se  prolongeant  au  nord  de  la  ville 
dans  la  direction  d'Ertvelde,  où  on  le  nomme 
Burggravestroom.  De  là  jusqu'au  territoire  de 
Caprycke,  la  limite  entre  Oost-Eekloo  et  Lem- 
beke  est  formée  d'un  fossé  qui  le  continue.  Il  est 
creusé  avec  soin,  dit  AYarnkœnig,  et  comme  il  est 
tracé,  même  sur  les  hauteurs  sablonneuses,  il  ne 
peut  avoir  eu  la  destination  de  canal  de  dégorge- 
ment, mais  il  a  nécessairement  toujours  servi  de 
ligne  de  démarcation  '\  On  ne  peut  le  suivre  plus 
au  nord,  où  il  aboutissait  à  une  localité  nommée 
Vulmonde. 

La  direction  que  suit  cette  limite  appelle  notre 
attention  sur  un  autre  genre  de  travaux  publics, 
partant  du  même  point  pour  aboutir  au  même 
terme.  C'est  la  chaussée  ancienne  relevée  par 
M.  Van  der  Rit  *,  conduisant  de  Gand  à  Ertvelde 
par  Oostakker,  et  de  là  par  Cluysen  sur  Asse- 

'  C'était  un  alleud. 

2  Waenkœnig,  La  Flandre  et  ses  institutions,  t.  II,  p.  23. 
^  Waknkœxig,  loc.  cit.,  p.  31. 

<  Chaussée  de  Vempire,  etc.,  p.  9.  — Van  Dessel,  Top.  des  voies 
romaines,  p.  13. 


m 


nede  et  Boucliaut,  que  M.  Van  der  Rit  tient  pour 
le  Portus  Œpatiaci  de  la  notice  *,  peut-être  à 
cause  de  sa  proximité  de  l'Yvendyk,  auquel  nous 
reviendrons. 

A  la  suite  du  passage  de  la  chronique  que 
nous  avons  cité,  Thielrode  aborde  les  événements 
de  947,  d'où  naquit  la  divergence  entre  les  histo- 
riens ultérieurs  quant  à  la  date  des  travaux 
d^Othon  I,  indiquant  936,  941,  94G  et  même  949. 
Une  dissertation  fort  remarquable  sur  la  Flandre 
impériale  ",  due  à  la  plume  savante  et  lumineuse 
de  M.  Alp.  de  Vlaminck,  reporte  même  ces  tra- 
vaux à  la  période  de  1208  à  1218,  attribuant 
lassertion  de  Thielrode  à  Othon  lY,  bien  que  cet 
auteur  n'appuie  jusqu'ici  cette  alïïrmation  sur 
aucun  témoignage,  ni  par  aucun  document.  Il  est 
vrai  que  Tobjectif  de  son  travail  est  d'établir  que 
le  pays  de  Waes  ne  fit  point  originairement  par- 
tie de  la  Flandre  impériale,  et  qu'il  releva  tou- 
jours légalement  de  la  couronne  de  France,  but 
qu'il  nous  parait  avoir  atteint  \ 

La  circonstance  que  Thielrode  en  se  servant  du 
nom  d'Othon  sans  y  joindre  d'épithète,  entendait 
parler  d'Othon  IV,  presque  son  contemporain, 

»  La  notice  porte  : 

«  Sut)  dispositione  viri  spectabilis  ducis  Belgicse  II. 
Equités  Dalmatœ  ,  Marcis  in  littore  Saxonico , 
Prîefectus  classis  Sambricae  in  loco  Quartensi  et  Hornensi 
TribuEUS  militura  Nerviorum,  portu  jïlpatiaci.  » 

'  Messager  des  Sciences  historiques,  1876,  p.  149.  —  Conférer 
E.  Varenbergh,  La  Flandre  et  V Empire  de  V Allemagne.  Annales 
de  V Académie  d'' archéologie,  1872,  p.  676.  —  Voyez  aussi  Louis 
ToRFFS,  Annales,  1869.  Anvers  au  X'  siècle,  p.  27  et  l'Appendice. 

3  Ibidem,  pp.  170,  171  et  173. 


—    432     — 

n'est  pas  concluante,  en  présence  de  l'opinion  tra- 
ditionnelle qui  y  voit  Othon  le  Graxd,  ce  que  la 
place  qu  occupe  le  fait  dans  le  texte  dn  chroni- 
queur autorise  à  admettre.  Mais  dans  ces  con- 
ditions quelle  date  convient-il  dassigner  à  ces 
travaux  de  délimitation? 

Dewez,  comme  Meyerus,  donne  Tannée  949, 
parce  que,  dit-il,  c  la  haine  entre  l'empereur  et 
le  comte  Arnould  n'éclata  qu'en  946,  à  la  suite 
du  siège  de  Rouen  «.   » 

En  admettant  cette  mésintelligence  à  l'époque 
indiquée,  nous  ne  voyons  rien  dans  les  circon- 
stances parallèles  qui  puisse  appuyer  l'expédition 
contre  Gand  en  949  ;  époque  où  elle  eût  été  con- 
duite par  le  duc  Conrad.  Un  rapide  coup-d'œil 
sur  les  événements  du  règne  d'Othon  I  nous 
signale  une  autre  époque  bien  antérieure. 

A  peine  couronné  à  Aix-la-Chapelle  en  936, 
ce  roi  eut  à  combattre  l'insurrection  des  Lotha- 
ringiens,  conduits  par  Henri,  son  propre  frère. 
Réunissant  des  forces  considérables,  il  marcha 
contre  eux  et  remporta  une  victoire  signalée  à 
Burick,  près  de  Xanten,  dans  le  courant  de  937. 
Le  duc  Gislebert,  l'âme  de  l'insurrection,  avait 
cherché  un  refuge  à  Chèvremont,  où  Othon  vint 
l'assiéger  pendant  que  ses  partisans  allaient  offrir 
la  couronne  à  Louis  d'Outremer,  roi  de  France, 
issu  du  sang  de  Charlemagne.  Celui-ci,  après 
quelqu'hésitation,  se  laissa  entraîner.  Ce  dut  être 
alors  qu'Othon,  disposant  encore  des  forces  qu'il 

*  Histoire  particulière,  t.  I,  p.  229. 


—    433    — 

avait  amenées  d'Outre-Rhin,  et  instruit  des  me- 
nées des  mécontents,  dut  songer  à  mettre  ses 
frontières  en  sûreté,  et  en  conséquence  de  neu- 
traliser rintervention  éventuelle  d'Arnould  de 
Flandre,  lun  des  plus  puissants  vassaux  de  Louis. 
Dans  cette  conjoncture  il  marcha  sur  Gand  et 
traça  la  limite  qui  nous  occupe. 

Les  auteurs  allemands  nous  apprennent  que  : 
lorsque  Louis  d"Outremer  se  rendit  en  Lotharin- 
gie, Othon  sut  isoler  cette  exj)édition,  en  convo- 
quant devant  sa  personne  les  quatre  grands  vas- 
saux de  Louis  :  Hugues,  Heribert,  Arnoidd  et 
Guillaume,  et  qu'il  reçut  leurs  serments  de  ne 
point  prendre  part  à  cette  guerre  ' .  La  puissance 
d'Arnould,  voisin  limitrophe  des  états  du  roi,  lui 
commandait  surtout  de  lui  ôter  les  moyens  de 
soutenii^  Louis  ;  et  il  nous  semble  que  l'expédition 
préalable  contre  Gand  dut  amener  le  comte  à 
cette  négociation. 

En  938,  Hugues  épousa  Edwige,  sœur  d'Othon, 
à  la  suite  de  la  réunion  que  nous  venons  de  men- 
tionner ;  ce  serait  donc  entre  la  bataille  de  Burick 
et  ce  mariage  qu'il  faut  placer  Texpédition  si 
controversée,  qui  aboutit  à  la  délimitation  tracée 
de  Gand  à  la  mer.  Louis  d'Outremer,  désormais 
réconcilié  avec  Othon  I  et  ayant  épousé  sa  sœur 
Gerberge  en  941,  ne  protesta  pas  contre  cette 
emprise,  à  laquelle  du  reste  la  couronne  de  France 
n'avait  pas  consenti.  Aussi,  son  fils,  le  roi  Lothaire, 
profitant  de  leloignement  d'Othon  qui  se  trou- 

*  VoGEL,  Ratherius  von  Verona,  p.  112. 

29 


—    434    — 

vait  en  Italie,  investit-il  en  968  le  comte  Thierri 
du  pays  de  Waes.  Forestum  Wasda  '. 

Mais  la  tradition  se  rapportant  à  l'année  980 
mérite  aussi  quelqu'attention.  Une  vieille  carte  de 
Flandre  attribuée  à  Tannée  1274,  porte  Tinscrip- 
tion  suivante  entre  Walcheren  et  la  Flandre  : 
((  En  l'année  980,  l'empereur  Othon  creusa  à  tra- 
vers les  dunes  entre  la  Flandre  et  la  Zélande,  ce 
que  l'on  nomme  les  AYielingen,  et  ce  qui  avait 
nom  Fossé  d'Othon  ^  »  Vaernewyk  qui  écrivait 
en  1563,  parle  dans  le  même  sens'  et  explique 
Wielingen,  tournans,  tourbillons,  par  roues  d'éclu- 
ses! Cette  dénomination  du  reste  est  encore  en 
usage  et  désigne  la  passe  entre  le  banc  de  Kipt 
et  celui  de  Scbooneveld  ;  cette  passe  n'est  nulle- 
ment le  produit  du  travail  humain. 

Cette  année  980  nous  reporte  au  règne  d'Othon  II 
qui,  six  ans  auparavant,  avait  fait  don  de  Walche- 
ren  à  sa  femme  Théoj^lianie.  Dès  lors  des  soins 
plus  assidus  de  conservation  et  d'entretien  furent 
donnés  à  cette  île.  Sans  admettre  ni  le  percement 
des  dunes  où  il  est  mentionné,  ni  l'existence  d'une 
écluse  qui  put  retenir  les  eaux  du  Hont,  nous 
pensons  que  certains  travaux  destinés  à  l'écoule- 
ment ont  pu  être  faits  à  Walcheren,  afin  de  maî- 

•  «  Datum  perintegre  Theodorico  comiti  forestum  Wasda ,  in 
eodem  comitatu,  cum  pratis,  aquis,  terrisque  aratoriis,  exitibus  et 
regressibus.  »  Altins:  et  Vossius  attribuent  Wasda  à  toute  la  Zé- 
lande ,  à  laquelle  le  mot  forestum  n'a  pu  convenir.  Mais  Douza,  et 
après  lui  Scriverius,  y  voient  le  pays  de  Waes.  Toetsteen  op  de  goud- 
sche  Chron.,  p.  222. 

*  Warnkœnig,  La  Flandre,  etc.,  t.  II,  JJ.  26. 
^  Historié  van  Belgis,  liv.  IV,  cap.  24. 


—    435    — 

iriser  les  eaux  traversant  Tîle  même,  du  nord  au 
midi'.  M.  l'ingénieur  Masuy  m'affirma  que  pen- 
dant le  premier. quart  du  présent  siècle  ayant  dû, 
en  sa  qualité  de  conducteur,  accompagner  son  chef 
de  service  pour  Texécution  de  travaux  réclamés  à 
Flessingue,  on  lui  montra  au  fond  dune  tranchée 
conduite  sur  la  plage  les  substructions  d'une  an- 
cienne écluse,  que  les  traditions  du  peuple  reliaient 
à  celle  d'OthonlI.  La  confusion  entre  ces  traditions 
et  le  récit  de  Jean  de  Thielrode  a  causé  l'erreur 
du  docte  Menso  Alting,  qui  tient  pour  le  Fossé 
d'Othon  la  bouche  occidentale  actuelle  de  TEscaut. 
4.  Rien  n'est  plus  difficile  que  de  fixer  les  limi- 
tes nord  du  continent  de  la  Flandre  à  une  époque 
donnée ,  les  eaux  ayant  tour  à  tour  laissé  et  re- 
pris leurs  alluvions  selon  la  remarque  de  Warn- 
kœnig.  C'est  ainsi  que  le  déversement  de  l'Escaut 
allant  de  Gand  vers  le  nord  se  combla  de  très- 
bonne  heure ,  comme  tous  les  indices  nous  le  ré- 
vèlent. Les  investigations  locales  de  M.  Van  der 
Rit  font  connaître,  qu'à  Bouchant  toute  la  partie 
aujourd'hui  endiguée  avait  été  couverte  par  les 
eaux  ;  ce  vaste  havre  pénétrait  dans  les  terres 
actuelles  à  plus  de  14  kilomètres.  Si  la  navigation 
avait  à  Torigine  utilisé  ces  voies  de  transport  en 
faveur  du  commerce,  celui-ci  une  fois  développé, 
était  forcé  de  maintenir  ses  communications  ;  c'est 
ce  que  nous  laissent  entrevoir  quelques  informa- 
tions touchant  la   période  romaine.   D'une  part 

'  Voyez  la  carte  de  l'ancien  Escaut,  jointe  au  travail  Le  Péage  de 
l'Escaut,  par  E.  Gkangaignage,  1868. 


—    436    — 

Domburg  et  Westcapelle ,  en  Walcheren ,  étaient 
des  lieux  de  débarquement,  où  l'importante  mai- 
son Secundiui,  de  Trêves,  entre  autres,  recevait 
des  chargements  qui  destinés  à  l'intérieur  du  pays 
se  dirigeaient  vers  le  havre  de  Bouchante  et  de  là 
vers  l'intérieur.  Mais  l'ensablement  de  la  branche 
fluviale  ne  permettant  pas  aux  navires  de  remon- 
ter jusqu'à  la  Lys  à  son  embouchure,  les  Romains 
construisirent  une  chaussée,  dont  M.  Van  der  Rit 
constata  l'existence  depuis  Gand,  sur  une  belle 
largeur  jusqu'à  la  digue  de  Bouchante.  Mais  si 
les  ensablements  se  perpétuent  lentement  et  sans 
véritables  interruptions,  des  inondations  considé- 
rables sont  venues  à  diverses  reprises  modifier 
l'état  des  lieux ,  en  rompant  des  digues,  il  en  fut 
ainsi  en  1014,  1042,  1087,  1100,  1106,  1109, 
1129,  1135,  1164,  1170  et  1177.  On  conçoit  sans 
peine  que  dans  de  pareilles  circonstances,  on  s'oc- 
cupa constamment  à  défendre  par  des  digues 
les  endroits  habités.  C'est  à  l'envahissement  des 
eaux  de  1177  que  l'on  attribue  l'établissement  de 
la  forte  digue  qui  s'étend  du  Zwine  vers  Damme, 
Biervliet  jusqu'à  Saftingen  et  que  l'on  nomme 
Yvendyk. 

En  1180,  une  partie  s'en  rompit,  et  des  ou- 
vriers, au  nombre  de  1000,  dit-on,  furent  appelés 
de  la  Zélande  et  de  la  Hollande  pour  la  recon- 
struire et  l'affermir.  Leurs  travaux  furent  dési- 
gnés par  le  nom  de  Hontsdam ,  digue  du  Hont,  et 
les  cabanes  qu'ils  occupaient  ont  été  le  germe  de 

1  Les  grandes  chaussées  de  l'Empire,  R.,  p.  9. 


—    437    — 

la  ville  de  Damme ,  qui  ne  tarda  pas  à  devenir 
prospère  par  son  vaste  port  aujourd'hui  comblé. 

Le  XIIP  siècle  amena  sept  inondations,  dont  la 
dernière,  celle  de  1288  ,  fut  suivie  de  TefFondre- 
ment  de  l'île  de  Scliooneveld ,  et ,  dit-on ,  de  la 
destruction  des  travaux  d'Othon  II.  Le  XIV''  siècle 
eût  également  sept  inondations ,  mais  le  XV®  et 
XVP  n'en  comptèrent  chacun  que  quatre  ;  le  XVIP 
cinq  et  le  XVIIP  onze  '.  Enfin  notre  XIX®  siècle 
vit  encore  les  eaux  déborder  sur  nos  rivages  en 
1808,  1820  et  1825. 

On  peut  apprécier  par  ces  péripéties  les  rava- 
ges que  la  mer  a  départis  à  ces  contrées  pendant 
six  siècles.  «  Quel  devait  être  leur  état,  se  de- 
mande un  écrivain  du  XVP  siècle,  alors  que  la 
population  y  était  rare,  que  les  terres  n'étaient 
pas  protégées  par  des  digues,  et  que  la  mer  pous- 
sait ses  flots  selon  son  caprice  ^  » 

Nous  avons  dit  que  le  flot  apporte  plus  à  la 
terre  que  le  jusant  n  en  enlève  ;  les  ensablements 
perpétués  en  sont  la  preuve.  Lorsque  l'on  porte 
les  yeux  sur  l'emplacement  du  port  de  Damme, 
on  ne  voit  que  d'immenses  prairies  qui  avaient  été 
les  marais  de  la  Sueghe,   comme   Tindiquent  de 


»  XIII.  —  1212,  1230,  1235,  1245,  1271,  1285,  1288. 
XIV.  —  1324,  1356,  1357,  1361,  1372,  1376,  1395. 
XV.  —  1414,  1422,  1468,  1477. 
XVI.  —  1525,  1530,  1570,  1585. 
X'VII.  —  1613,  1651,  1662,  1675,  1680. 
XVIII.  —  1703,  1714,  1717,  1729,  1733,  1737,  1740,  1746, 

1750,  1775,  1784,  1794. 
*  VAEENEii\-YCK,  Historié  van  Belgis,  lib.  IV,  cap.  85.  (Th.  Schel- 
LINCK,  II,  p.  145.) 


—    438    — 

vieux  documents.  En  suivant  les  indications  des 
légers  mouvements  du  terrain  de  cette  plaine,  on 
retrouve  le  contour  du  port ,  et  l'on  reconnaît 
qu'un  lit  assez  large  et  profond  faisait  communi- 
quer ce  bassin  avec  le  bras  de  mer  nommé  le 
Zivine,  qui  depuis  forma  le  port  de  l'Écluse.  Ce 
dernier  jDort  est  aujourd'hui  comblé ,  après  qu'il 
eût  joui  longtemps  de  la  célibrité  que  Damme 
avait  perdue,  et  avoir  en  conséquence,  passé  aux 
yeux  de  Chifflet  pour  le  Portus  Iccius  de  César  *  !  » 

On  ne  saurait  mieux  retracer  la  direction  de  ce 
canal,  dit  Des  Roches,  qu'en  montrant  que  la 
nature  l'avait  creusé  entre  l'Écluse  et  Anna-ter- 
Muide  ;  entre  les  dérivations  de  Houcke  et  Lap- 
schuere,  pour  s'approcher  de  Damme  entre  Oost- 
kerke  et  Vlienderhage  ;  ainsi ,  continue-t-il ,  le 
canal  construit  postérieurement  de  Bruges  à 
l'Écluse  en  suit  la  direction  -.  Il  cite  à  l'appui  une 
carte  appartenant  aux  archives  du  Franc  et 
attribuée  à  l'an  1188,  sur  laquelle  on  voit  dis- 
tinctement l'entrée  de  l'ancien  canal  se  dirigeant 
vers  Damme,  et  sur  l'un  et  l'autre  bord  les  ensa- 
blements qui  en  avaient  déjà  envahi  les  deux 
tiers;  ensablements  qui  finirent  par  combler  ce 
célèbre  port  de  Damme. 

Avant  l'inondation  de  l'an  1324,  la  branche  du 
Hont,  entre  Walcheren  et  Oostburg,  avait  été  fort 
rétrécie  par  les  digues  élevées  au  nord  d'Oost- 
burg  pour  dessécher  les  alluvions  qui  s'y  étaient 


*  Aurei  Velleris  Encomium,  1689,  in  fine. 

*  Hist.  an.  des  Pays-Bas  autrichiens,  t.  I,  p.  152. 


-    439    — 

formées.  Les  inondations  subséquentes  l'ont  élar- 
gie au  point  où  nous  voyons  aujourd'hui  l'em- 
bouchure du  Hont  dans  TOcéan  * .  Cependant  pen- 
dant longtemps  encore  tout  ce  bras  de  l'Escaut 
n'était  pas  navigable  et  le  commerce  n'en  tirait 
aucune  utilité.  La  désignation  de  Diepenee,  eau 
profonde,  et  de  Kille  ou  passe,  trahissent  des  con- 
ditions que  divers  documents  ont  confirmées, 
entre  autres  un  acte  de  l'an  1469,  établissant  que 
la  navigation  d'Anvers  vers  la  mer  s'opérait  à 
travers  des  îles  de  Zélande,  les  eaux  du  Hont 
n  étant  pas  navigables  pour  les  navires  de  haut- 
bord".  C'est  depuis  le  XV®  siècle  que  le  vieil 
Escaut  et  ses  dérivations  se  sont  toujours  resser- 
rées davantage  sur  divers  points  et  que  le  Hont, 
devenu  plus  large  et  plus  profond,  a  hérité  de 
son  nom  et  de  ses  avantages. 

Quelle  quait  été  la  configuration  topographi- 
que de  la  région  que  le  cours  oblique  de  l'Escaut 
partage  sur  tant  de  points  %  les  ensablements  qui 
ont,  sans  s'arrêter,  contrarié  la  marche  d'une 
navigation  régulière,  ont  fini  par  être  utilisés 
pour  s'assurer  des  moyens  de  transport  plus  rapi- 
des. Le  sol  s'étant  raffermi,  un  solide  pilotage  a 
permis  qu'un  raihvay,  traversant  l'Escaut  en  face 
deWoensdrecht,  touchât  Goes,  traversât  le  Sloe,  et 
atteignit  Flessingue  en  passant  par  Middelbourg. 
Le  barrage  qu'avait  nécessité  cette  construction 


•  Warnkœxig,  La  Flandre  et  ses  institutions,  t.  II,  p.  10. 

*  Grasgaignage,  Le  péage  de  V Escaut,  p.  2. 

'  «  Regio  qua  obliquis  meatibus  Scaldis  interfluit.  »  (Eumène). 


—    440    — 

suscita,  en  1866  des  inquiétudes  pour  la  naviga- 
tion qui  constatait  des  envasements  nouveaux 
dans  les  passes  de  l'Escaut  en  amont.  Bien  qu'il 
fût  reconnu  que  ces  travaux  n'en  étaient  pas  la 
cause ,  des  mesures  furent  prises  de  commun 
accord  entre  la  Belgique  et  les  Pays-Bas  pour 
obvier  aux  inconvénients  éventuels  qui  pourraient 
se  présenter  dans  la  suite  '.   » 

Si  depuis  un  demi-siècle  l'invasion  des  eaux  de 
l'Océan  ne  s'est  plus  présentée,  il  en  est  une 
autre  qui  agit  insensiblement  et  contre  laquelle 
les  riverains  de  l'Escaut  songent  à  se  prémunir, 
c'est  celle  de  l'ensablement  des  voies  navigables. 

Nous  avons  signalé  plus  haut  quelques  dériva- 
tions qui  se  sont  successivement  comblées;  la 
tradition  mentionne  l'existence  d'une  communi- 
cation de  Gand  vers  le  Sas-de-Gand  -,  qui  eut  été 
un  résidu  du  Huant  primitif. 

Si  son  existence  est  réelle,  son  ensablement  ne 
dut  guère  contrarier  les  transports  vers  la  mer, 
qui  depuis  1257  se  sont  effectués  par  la  Lieve  sur 
l'Écluse,  dite  alors  Lammensvliet,  en  touchant  à 
Kodenburg  (Aardenburg).  Trois  siècles  plus  tard, 
cette  voie  étant  devenue  impropre  aux  navires 
de  haut  bord,  les  Gantois  décidèrent  le  creuse- 
ment d'un  canal  sur  le  Sas-de-Gand.  Il  fut  livré  à 
la  navigation  au  début  de  l'an  1562;  près  de  six 
mois  après  que  celui  de  Bruxelles  à  Willebroek 
eût  porté  les  premiers  vaisseaux  venant  d'Anvers. 

•  G.  Delcourt,  Notice  sur  Aug.  Stessels,  p.   9. 
»  Vaernewyck,  Uist.,  etc.,  lib.  IV,  cap.  26.  (Th.  Schellinck,  II, 
p.  116.) 


'^  —    441     — 

Les  désastres  postérieurs,  ayant  ou  des  causes 
naturelles  ou  des  causes  intentionnelles,  consé- 
quences de  la  guerre,  qui  exigeaient  le  percement 
des  digues,  amenèrent  l'encombrement  du  canal 
du  Sas,  qui  dut  être  approfondi  sous  le  régime 
autricliien.  «  Le  nouveau  canal,  écrivait  Des 
Roches  en  1787,  parlant  de  celui  de  Gand  au  Sas, 
dans  lequel  les  bateaux  touchent  au  fond  pendant 
les  mois  les  plus  secs,  ne  prouvent  que  trop  en 
quelle  quantité  les  sables  se  charrient  ^  »  On  dut 
y  travailler  souvent  depuis  lors.  En  1825  on  l'ap- 
profondit de  nouveau,  mais  en  même  temps  on  le 
poursuivit  jusqu'à  Terneuzen,  d'où  le  2  décembre 
1827,  un  navire,  parti  de  Bordeaux,  était  arrivé 
à  Gand.  Cette  voie  était  acquise  à  la  navigation. 

Cependant,  l'envasement  s'est  représenté,  et 
aujourd'hui  l'ensablement,  rappelant  celui  de 
1787,  réclame  de  nouveaux  travaux. 

Ce  n'est  pas  seulement  contre  Tinondation  des 
flots  de  la  mer,  qui  pourrait  se  reproduire  "",  que 
l'industrie  humaine  doit  rester  en  éveil,  mais 
encore  contre  l'envasement  des  voies  navigables  ; 
tâche  qui  réclame  peut-être  des  études  toutes 
nouvelles.  Ces  obstacles  vaincus,  il  nous  sera 
permis  de  dire  avec  Corn.  Graphaeus  ^  :  «  Gloire 
à  ScALDis,  qui  depuis  sa  source  jusqu'à  son  embou- 
chure nous  apporte  toutes  sortes  de  biens.   » 

C.  Van  dee  Elst. 


*  Histoire  ancienne  des  Pays-Bas,  t.  I,  p.  155. 

'  «  Daer  komt  wel  water  daer  water  gewsest  is.  »  J,  Cats. 

^  Le  triumphe  d'Anvers,  p.  26  verso. 


—    442    — 


UNE  LEGENDE 


DU 


DIABLE  AU  PAYS  DE  CHIMAY. 

LA  PIERRE-QUl-TOURNE, 

ENTRE    FROIDCHÂPELLE    ET    SIYEY. 


Le  pays  de  Chimay  a  conservé  sa  réputation  de 
pays  des  loups  ;  mais ,  comme  toute  contrée  aux 
grandes  forêts ,  aux  grands  terrains  déserts ,  aux 
immenses  campagnes  peu  habitées ,  c'est  la  patrie 
des  superstitions ,  des  légendes  et  du  merveilleux. 
Ces  localités  ont  conservé  un  arrière  goût  du 
moyen-âge  et  de  ses  croyances  naïves.  Certains 
taillis  sont  hantés ,  certaines  forêts  sont  maudites , 
certaines  côtes  sont  des  escaliers  du  diable ,  cer- 
taines prairies  entourées  de  bois  servent  au  sahbat, 
certaines  ruines  cachent  la  gâde  d'or,  ou  des  cof- 
fres de  richesses  enchantées  qui  s'évanouissent 
aussitôt  que  la  pioche  touche  la  cassette. 

Les  roches  d'aspect  un  peu  extraordinaire  n'ont 
pas  manqué  d'attirer  Tattention  et  on  y  a  attaché 
une  part  de  sorcellerie. 


—    443    — 

Il  y  a  dans  cette  contrée  plus  d'un  point  de  res- 
semblance avec  les  Ardennes.  Comme  ces  der- 
nières le  pays  de  Chimay  fut  habité  depuis  les 
temps  les  plus  anciens. 

Aussi ,  comme  toujours  du  reste ,  ces  supersti- 
tions ,  ces  croyances  locales  se  rapportent-elles 
souvent  à  une  vague  réminiscence  archéologique , 
travestie  par  le  peuple  pendant  la  succession  des 
siècles.  Ici  l'emplacement  dune  sépulture,  d'un 
cimetière  antique ,  est  nommé  le  pàchy  des  morts  ; 
là  les  restes  d'une  villa  romaine,  cachées  sous  les 
arbres  de  la  forêt ,  sont  devenus  les  villes  de  l'ab- 
bye  ;  là  un  crime,  commis  dans  un  passage  écarté 
et  dangereux  livré  aux  agissements  des  malfai- 
teurs, en  a  fait  un  heu  hanté  par  le  diable;  plus 
loin  enfin  des  roches,  des  monohthes,  des  amas  de 
pierres  ayant  servi  à  un  culte  oublié  sont  attri- 
bués à  un  travail  diabolique. 

Ainsi  jnet^re-qui-toume ,  pierre-qiù-bique  ^  pierre 
qui-branle,  voilà  toutes  appellations  qui  sentent 
d'une  lieue  le  culte  druidique  et  ses  monuments , 
ou  mieux  encore  l'époque  mégalithique  ou  cel- 
tique pour  employer  une  expression  plus  juste, 
quoique  non  moins  obscure. 

Ces  derniers  monuments  sont  très-rares  chez 
nous.  On  en  citait  deux  en  Belgique,  d'abord  la 
Pierre-du-diable  à  Jambes  près  de  Namur  ;  mais  il 
est  prouvé  aujourd'hui  qu'on  en  avait  parlé  sans  la 
connaître,  et  que  ce  n'était  pas  une  pierre-bran- 
lante ,  mais  seulement  un  dolmen  » . 


•  V.  Mémoires  de  la  Société  des  Sciences  du  Hainaut.  Série   2, 
tome  X,  p.  XXV. 


—    444    — 

Ensuite  la  Pierre-qui-tourne ,  dans  un  bois  à 
Spy ,  village  de  la  même  province  de  Namur , 
pierre  ronde ,  de  nature  sablonneuse ,  paraissant 
être  le  produit  naturel  et  non  travaillé  du  sol , 
mesurant  environ  six  j)ieds  de  diamètre  et  trois 
ou  quatre  de  haut ,  qui  tournait  à  midi ,  préten- 
dait-on, et  qui  fut  détruite  sous  Tempire  français 
pour  réparer  la  chaussée  de  Bruxelles  \ 

Nous  pensons  qu'il  est  urgent  de  tirer  de  Foubli 
tout  ce  qui  se  rapporte  à  ces  époques  peu  connues 
et  dont  les  souvenirs  et  les  traditions  sont  aujour- 
d'hui si  rares,  si  vagues,  si  éteints. 

C'est  ce  devoir  d'un  archéologue  désirant  mettre 
sa  pierre  à  l'œuvre  commune ,  que  je  viens  rem- 
plir en  parlant  d'un  monument  mégalithique 
aujourd'hui  passé  à  l'état  de  légende  et  qui  se 
trouvait  dans  un  bois  de  Froidchapelle  ^ ,  près  de 
Chimay.  Il  avait  nom  :  Pierre-qui-tourne .  C'était 
encore  dans  le  premier  tiers  de  ce  siècle,  le  centre 
où  convergeait  l'intérêt  et  l'action  de  toutes  les 
légendes ,  de  toutes  les  sorcelleries ,  de  tous  les 
fait  surnaturels  des  environs. 

Pour  aller  à  minuit,  seul,  par  un  ciel  sombre, 
au  carrefour  où  se  dressait  la  Pierre-qui-tourne, 
il  fallait  avoir  du  courage  et  de  la  volonté,  car  on 
risquait  son  salut.  On  y  pouvait  gagner  la  for- 
tune ,  mais  il  fallait  vendre  son  âme  au  démon , 
après  l'avoir  évoqué  à  trois  reprises  différentes  et 
à  haute  voix  et  Tavoir  vu  surgir  du  milieu  du 


*  V.  Annales  de  la  Société  archéologique  de  Namur,  t.  IX,  p.  427. 

*  Ce  nom  vient  de  Froaldi  ca^nlla,  chapelle  de  Froalde, 


—    445    — 

bois  avec  d'affreuses  grimaces,  une  figure  rouge 
et  des  pieds  fourchus  !  Brrr  !  Ça  faisait  froid  au 
cœur,  rien  que  d'y  penser,  et  chacun  frémissait  à 
l'idée  de  cette  apparition,  de  la  conversation  et 
du  marché  qui  s'ensuivait.  Aussi  en  passant  sur  le 
chemin  qui  longeait  le  bois ,  se  signait-on  de 
frayeur,  en  détournant  la  tête  et  pressant  le  pas. 

Maints  esprits  forts,  qui  avaient  voulu  tenter 
l'aventure ,  s'en  étaient  raccouru  haletants  et 
tremblants  au  moment  de  consommer  la  céré- 
monie de  l'évocation ,  avec  les  gestes  et  les  signes 
cabalistiques  qui  leur  avaient  été  indiqués  par 
l'une  ou  l'autre  vieille  sorcière  initiée  aux  mystè- 
res du  carrefour  de  la  Pierre-qui-tourne. 

A  peine  en  citait-on  un  ou  deux  qui  eussent  la 
réputation  d'avoir  conversé  avec  satan.  Encore 
s'étaient-ils  montrés  moins  malins  que  ce  voleur 
des  âmes,  disait-on,  et  avaient-ils  perdu  leur 
salut  éternel  sans  avoir  pu  forcer  Lucifer  à  lâcher 
son  trésor  et  à  leur  donner  la  fortune  en  retour. 
Ils  s'étaient  enfui  du  village  en  but  à  la  réproba- 
tion générale. 

Vers  1835  la  Pierre-qiii-toume  conservait  encore 
l'amas  de  richesses  qu'elle  recouvrait  et  sur  lequel 
le  démon  l'avait  déposée,  après  l'avoir  été  cher- 
cher en  pays  étranger  au  prix  des  plus  grands 
efforts  et  des  plus  grandes  fatigues. 

C'était  en  effet  une  pierre  étrangère ,  un  bloc 
énorme  de  grès  fin  gris-jaunâtre,  tandis  que  la 
roche  des  terrains  d'alentour  est  du  calcaire  bleu. 

Personne  donc,  jusqu'en  1835  ,  n'était  parvenu 
à  forcer  le  diable  à  lâcher  son  trésor,  ni  à  ren- 


—    446    — 

verser  la  pierre  pour  s'en  emparer;  elle  conser- 
vait ses  richesses  cachées.  Le  monolithe  majes- 
tueux et  puissant  restait  dressé  immobile  sur  sa 
base  oscillante.  Seulement  une  fois  par  jour,  au 
lever  de  l'aurore,  au  moment  où  le  coq  chantait, 
la  pierre  faisait  un  tour  sur  elle-même  et  tout 
était  fini  jusqu'au  lendemain  à  pareille  heure. 

Cependant   on    était   au    XIX*"  siècle ,   époque 
éminemment  sceptique,  oii  l'autorité  et  la  force 
publique  doivent  avoir  raison  de  tout  obstacle, 
qu'il  vienne  de  Dieu  ou  du  diable.  La  commune 
de  Froidchapelle  avait  besoin  d'argent,  les  admi- 
nistrateurs étaient  des  esprits  forts ,  convaincus 
de  leur  puissance  et  de  leur  droit  ;  ils  prirent  une 
grande   résolution   et   décidèrent   de   vaincre   le 
Malin  et  de  lui  enlever  son  trésor  au  profit  de  la 
commune  ;  de  méchantes  langues  disent  même  à 
leur  profit  personnel.   On  arma  une  compagnie 
d'ouvriers  de  tous  les  outils  nécessaires  à  l'expé- 
dition, tous  suèrent  sang  et  eau  pendant  plusieurs 
jours,  et  enfin  l'imposante  autorité  eut  raison  de 
la  pierre  enchantée  ;  celle-ci  s'abattit  avec  fracas 
et  vint  se  briser  sur  le  sol.  Le  charme  fut  rompu 
et  l'on  entendit  au  même  moment  dans  l'atmos- 
phère le  bruit  formidable  de  puissantes  ailes  qui 
battaient  avec  vigueur  l'air  du  voisinage.  Les  uns 
y  virent  la  preuve  de  la  fuite  des  démons  chassés 
de  leur  gite  favori  ;   mais    en  conscience ,   nous 
devons  ajouter  que  jusqu'à  sa  mort,  arrivée  quel- 
ques années   après,  le  garde-champêtre,  ancien 
soldat  de  Napoléon ,  prétendit  avoir  vu  distincte- 
ment une  nuée  de  corbeaux  chassés  au  loin  par  le 


—    417    — 

fracas  du  rocher  renversé.  Quoiqu'il  en  soit  les 
puissances  infernales  et  les  sorcières  du  bois  fu- 
rent vaincus.  Quant  au  trésor,  il  s'était  évanoui, 
le  diable  l'avait  sans  doute  emporté  avec  lui. 

Un  hôtelier  philosophe  de  Chimay,  chez  qui 
nous  logeâmes  le  soir  de  notre  excursion,  nous 
dit  en  ricanant  :  le  seul  trésor  qu'il  y  avait  sous 
la  Pierre-qui-tourne  et  qu'y  avaient  cherché  et 
trouvé  les  gardiens  de  la  caisse  communale,  obé- 
rée par  le  budget  des  chemins  vicinaux ,  était  la 
pierre  elle-même,  qui  fut  distribuée  en  pavés  uti- 
lisés ensuite  pour  le  service  de  la  voierie.  Cette 
catégorie  d'industriels  est  le  sceptisme  et  le  maté- 
rialisme personnifiés  ;  ils  ne  croyent  pas  au  diable  ! 

Il  y  a  un  mois  que  nous  avons  vu  les  restes  du 
colosse  gisant  le  long  de  la  route  de  Beaumont  à 
Froidchapelle,  non  loin  du  cabaret  enseigné  :  A  la 
Pierre-qui-tourne . 

Ce  que  nous  avons  écrit ,  nous  a  été  dicté  par 
la  bonne  vieille  grand'mère  du  cabaretier  actuel  ; 
personnification  assez  intéressante  qui  appela  no- 
tre attention ,  et  qui  placée  dans  le  cadre  où  nous 
l'avons  rencontrée  et  étudiée,  dans  les  dispositions 
d'esprit  où  nous  nous  trouvions,  se  prêtait  mer- 
veilleusement à  être  gratifiée  par  notre  imagina- 
tion d'une  auréole  de  puissance  occulte. 

Nous  laissons  à  cette  vieille  toute  la  responsa- 
bilité de  notre  narration.  Nous  devons  même 
avertir  nos  lecteurs  que  nous  croyons  avoir  re- 
marqué qu'elle  y  mettait  une  pointe  de  malice  à 
l'adresse  des  vandales  qu'elle  accusait.  Mais  nous 
n'avons  pu  démêler  s'il  s'agissait  d'un  mélanco- 


—    448    — 

lique  regret  de  la  puissance  de  sorcellerie  chassée 
de  la  forêt  et  d'une  rancune  contre  l'autorité  vic- 
torieuse; ou  s'il  s'agissait  seulement  d'une  mo- 
querie et  d'une  ironie  mordante  à  l'adresse  des 
destructeurs  d'un  souvenir  populaire  et  des  stupi- 
des  et  crédules  chercheurs  de  trésors  surnaturels. 

La  figure  intelligente  et  malicieuse  de  la  vieille 
pouvait  en  effet  laisser  du  doute  sur  l'intention 
qui  l'animait  et  sur  le  point  de  savoir  si  elle  dé- 
fendait le  siècle  passé  et  la  sorcellerie  ou  le  siècle 
moderne  et  l'archéologie. 

Nous  croyons  utile  en  finissant  de  faire  remar- 
quer au  lecteur  que,  malgré  la  forme  un  peu 
légendaire  de  cet  article  en  ce  qui  regarde  la  pré- 
sentation du  sujet,  tout  ce  qui  est  de  fait  et  tout 
ce  qui  touche  à  l'archéologie  est  scrupuleuse- 
ment vrai  et  doit  entrer  dans  le  cadre  des  obser- 
vations relatives  à  l'histoire  de  l'arrondissement 
de  Charleroi. 

Charleroi,  ce  10  février  1878. 

D.  A.  Van  Bastelaee, 

Président  de  la  Société  archéologique  de 
l'arrondissement  de  Charleroi. 


—    449    — 


UNE    LETTRE 


DE 


HENRI  DU  TOUR,  LE  JEUNE. 


A  M.  Ferdinand  Vanderhaeghen ,  bibliothécaire  de 
V  Université  de  Gand. 

«  Mon  très  cher  Collègue, 

))  Lors  de  votre  dernière  visite  au  Musée 
Plantin-Moretus,  je  Vous  fis  voir  les  lettres  de 
Henri  du  Tour  le  jeune,  que  nos  archives  renfer- 
ment. Une  d'elles  excita  plus  spécialement  votre 
attention  et  Vous  me  fîtes  Thonneur  de  nie  de- 
mander de  la  publier  dans  le  Messager  des  Sciences 
historiques.  Je  Vous  promis  de  le  faire  et  remplis 
aujourd'hui  cette  promesse,  en  ajoutant  au  docu- 
ment en  question  quelques  éclaircissements,  tirés 
également  de  nos  archives. 

))  Voici  donc  la  lettre  et  ses  commentaires. 

»  Votre  tout  dévoué, 

»  Max.  Rooses, 

»  Couservateiu-  du  Musée  Plantin-Moretus.  » 

30 


—    450    — 

«  Au  sieur  Christoffle  Plantin,  chef  imprimeur  du  Roy 
en  son  imjprimerye  derrière  le  marché  de  Vendredy, 
à  Anvers. 

»  Trèsclier  compère. 

»  J'ay  receu  voz  lectres  avec  les  chartes  et  figures  des 
villes  et  provinces  du  Pais-Bas ,  desquelles  je  feray  mon 
debvoir  pour  avoir  aussi  le  pourtraict  de  la  ville  de  Gand, 
au  plustost  qu'il  me  sera  possible.  Car  je  m'ay  blessé  en 
ma  jambe  {dans  la  marge  :  op  de  scbene)  que  je  ne  puis 
encore  aller  par  les  rues ,  qu'il  me  fauldra  par  ce  moyen 
attendre  encore  quelque  3  ou  4  jours  que  la  jambe  soit 
reguarye,  s'il  plaict  à  Dieu.  Et  me  semble  sans  besoin  d'en- 
voyer vostre  copie  originele  de  vostre  privilège ,  mais  qu'il 
suffira  d'en  envoyer  une  copie  signée  par  quelque  notaire , 
et  j'en  feray  mon  debvoir  selon  mon  pouvoir  pour  en  avoir 
le  congié  ou  absolute  responce  et  resolution. 

»  Sy  le  prince  de  Condé  est  arrivé  en  Anvers  le  vendredi 
au  soir,  il  a  faict  bon  voyage ,  car  il  estoit  icy  jusques  aux 
10  heures  du  matin,  à  cause  de  la  seconde  foulle  et  trouble 
de  mauvais  bruict  des  malconteuts,  car  comme  il  estoit 
sorty  la  porte  d'Anvers  et  oyoit  l'alarme  des  tambourins  , 
il  est  retourné  en  la  ville,  jusques  à  ce  que  les  troubles 
cessèrent,  lesquelles  commencoyent  d'un  mauvais  bruict 
de  villageois  lesquelz  s'enfuyoyeut  en  la  ville  en  apportant 
le  bruict  que  les  malcontents  estoyent  derrière  eulx ,  dond 
il  n'en  estoit  rien  ou  bien  peu.  Mais  il  nous  fault  bien 
confesser  et  doner  la  gloire  à  Dieu  que  s'il  n'eust  veillé 
pour  nous  le  jour  précédent,  et  leur  envoyé  sur  le  col  une 
pluye  sy  excessive  qu'ilz  ne  pouvoyent  tenir  feu  eu  leur 
mesches,  que  nous  fussions  trestouts  perduz  et  massacrez. 
Car  ils  ont  esté  jusques  au  dessus  des  remparts,  et 
n'avoyent  nulle  eaue  à  passer,  et  n'y  estoyent  que  7  soldats 


—    451    — 

des  nostres  sur  le  rampart ,  donc!  les  4  n'avoyent  point  de 
pouldre  et  s'enfuyoyent  et  il  estoit  bien  long  temps  devant 
que  les  bourgeois  estoyent  prests ,  oultre  tout  cecy,  avec  la 
venue  et  entrée  du  prince  de  Condé  par  la  mesrae  porte, 
on  avoit  descbargé  et  tiré  toutes  les  pièces  d'artillerye 
dudict  costé ,  lesquelles  estoyent  encore  vuydes ,  et  n'y 
avoyent  ny  boulles,  ny  pouldre  tellement  que  pour  le  pre- 
mier coup  de  canon  les  bourgeois  versoyent  leur  pouldre 
en  un  chapeau ,  dond  ils  tiroyeut  un  coup  avec  le  tappon. 
Et  cependant  l'ennemy  n'osoit  entreprendre  l'assault, 
voyant  le  nombre  des  bourgeois  accroistre  et  par  ainsy  ilz 
se  reculèrent  eu  pillant  et  chassant  devant  eulx  touts  les 
chevaulx,  vaches  et  brebis  qu'ils  pouvoyent  rencontrer 
jusques  à  Courtray. 

»  Nous  fondons  les  imperfections  de  l'Augustine  alle- 
mande, lesquelles,  corne  il  me  semble,  montent  sy  hault 
qu'il  ne  me  semble  besoin  d'en  fondre  la  seconde  foute , 
puisque  je  pense  que  vous  avez  délibéré  de  faire  parfournir 
la  première  fonte  avec  les  imperfections.  S'il  ne  vous  dis- 
commode et  que  ne  l'oubliez ,  je  vouldi'oy  bien  veoir  une 
espreuve  de  l'Herbaire, 

»  Je  me  trouve  en  telle  charge  avec  la  maison  mortuaire 
de  mon  père  que  je  ne  voy  moyen  de  me  pouvoir  mectre  en 
ma  besoigne  et  soigner  de  mes  affaires ,  encore  en  dedans 
4  ou  5  sepmaines,  et  ne  scay  aussy  après  toute  la  ruse  et 
travail  si  je  prouficteray  chose  d'importance  ou  non ,  telle- 
ment qu'il  m'ennuye  grandement  et  ne  fust  la  compassion 
des  5  petits  enfants  du  dernier  lict,  je  feroy  peu  de  compte 
de  quicter  le  tout. 

»  Et  sur  ce  me  recommandant  a  vostre  bonne  grâce,  de 
la  dame  de  voz  biens  et  le  reste  de  vostre  famille ,  je  prye 
Dieu  estre  vostre  garde. 

»  De  Gand,  ce  11  juillet  1580. 

»  Vostre  compère  et  serviteur  à  commandement, 
»  Heney  du  Touk.  » 


—    452    — 

En  reprenant  successivement  chaque  alinéa  de 
cette  lettre,  nous  voyons  par  le  premier  que  Plantin 
avait  demandé  à  Henri  du  Tour  de  s'entremettre 
pour  faire  dresser  le  plan  de  la  ville  de  Gand. 
L'ouvrage  dans  lequel  ce  plan  devait  figurer  et 
dont  Plantin  proposait  de  lui  envoyer  le  privilège, 
est  évidemment  la  Description  des  Pays-Bas ,  par 
Guichardin. 

Nous  savions  par  l'excellente  étude  bibliogra- 
phique de  M.  Boele  van  Hensbroeck,  que  Guillaume 
Silvius,  qui  avait  fourni  la  première  édition  de 
Guicciardini  en  1567,  préparait,  vers  1580,  une 
seconde  édition  de  cet  important  ouvrage.  Déjà  il 
s'était  adressé  à  quelques  villes  pour  obtenir  des 
subsides,  qui  le  missent  à  même  de  faire  dresser 
de  nouveaux  plans,  et  celle  d'Utrecht  lui  avait 
accordé  de  ce  chef  une  somme  de  30  livres. 

Cependant  ce  ne  fut  pas  lui,  mais  Plantin  qui, 
comme  on  sait,  publia  l'édition  de  1581.  L'archi- 
typographe  anversois  s'adressa  également ,  en 
1580,  aux  différentes  communes  du  pays  et,  comme 
il  l'atteste  dans  la  préface  du  livre  de  Guichardin, 
il  fit  tailler  les  cartes  des  provinces  et  des  villes 
((  selon  les  patrons  qu'il  a  pieu  à  quelques  ungs 
des  magistrats,  d'aucunes  d'icelles  villes  nous  en- 
voyer libéralement.  »  La  ville  de  Leiden  paya  le 
22  août  1580  «  aan  Jan  Liefrinx  40  gl.,  van 
»  40  gr.  't  stuck,  voor  het  teekenen  van  de  stadt 
»  op  platte  forme  en  op  't  perspectief,  om  naer 
n  Antwerpen  gesonden  te  worden  aen  Christoffel 
))  Plantijn,  eertijdts  drucker,  ende  gestelt  te  wor- 
))  den  in  het  boeck  van  Guiardyn,  volgens  be- 


—    453    — 

»  lofte  van  de  stadtswegen  aen  Plantijn  gedaen  ' .  » 

La  demande  de  Aantin  à  Henri  du  Tour  a  donc 
probablement  pour  objet  de  faire  dresser  par  l'in- 
tervention et  aux  frais  de  la  commune  un  plan  de 
la  ville  de  Gand.  Il  serait  intéressant  de  savoir  si 
la  démarche  du  fondeur  gantois  a  été  couronné 
de  quelque  succès.  Peut-être  sa  mort,  arrivée  peu 
de  temps  après,  Ta-t-elle  empêché  de  servir  effi- 
cacement son  compère,  et  Plantin  a-t-il  été  obligé 
de  faire  dresser  à  ses  frais,  par  un  dessinateur 
envoyé  d'Anvers,  le  plan  qu'il  avait  demandé  à 
du  Tour. 

Notons  en  passant  que  la  carte  de  Gand  de  1581 
diflère  sensiblement  de  celle  de  1567;  et  que  la 
plus  récente  comj^rend,  entre  autres  changements, 
ceux  qui ,  dans  Tintervalle ,  furent  apportés  aux 
fortifications  de  la  ville. 

Par  les  comptes  de  l'imprimerie  Plantinienne, 
conservés  au  Musée  Plantin-Moretus,  nous  appre- 
nons que  l'éditeur  fit  dessiner  à  ses  frais  et  sur  les 
lieux  le  plan  d'une  des  villes  figurant  dans  la  Des- 
cription  des  Pays-Bas.  Le  4  décembre  1581,  Plantin 
paya  à  Pierre  le  Mesureur  4  livres  «  pour  le  pro- 
taict  de  Cab.,  »  ou  comme  il  dit  plus  explicite- 
ment ailleurs  :  «  pour  la  ville  de  Cabray  qu'il  a 
baillé  et  portraicturé  pr  le  livre  de  Guicciardin.  » 

Mais  celui  qui  fit  le  gros  de  l'ouvrage  fut, 
comme  Plantin  nous  l'apprend  dans  l'importante 


*  Voir  la  bibliographie  de  L.  Guicciardini,  Descrittione  di  tutte  i 
paesi  bassi,  par  P.  A.  M.  Boele  van  Hensbroeck.  Utrecht,  Bijdra- 
gen  en  tnededeelingen  van  hct  Historisch  Genootschap. 


-    454    - 

lettre  que  nous  faisons  suivre  ici,  le  grand  géo- 
graphe Abraham  Ortélius. 

En  date  du  16  févTier   1580,  Plantin  écrit  à 
Guillaume  Sylvius,  demeurant  à  Leide  : 

«  A  u  signeur  M'  Guillaume  Silvius. 

»  Mon  compère.  Geste  est  pour  accompagner  la  lectre 
du  seigneur  Louis  Guichardin,  par  laquelle  il  vous  adver- 
tist  comment  à  l'instance  de  plusieurs  personnages  tant  de 
la  part  de  Sou  Altesse  que  de  Messeigneurs  des  Estats  et 
Conseil  Privé  et  de  Brabaut,  j'ay  accordé  suivant  le  pri- 
vilège qu'ils  m'en  ont  envoyé  en  toutes  langues ,  de  faire 
pourtraire  et  tailler  les  cartes  générale  et  particulières  de 
ces  Pais-Bas  et  les  villes  principales  d'iceux  en  platte  forme, 
le  tout  en  cuivre ,  a  quoy  le  signeur  Ortélius  avec  quelques 
excellents  painctres  et  quatre  tailleurs  sont  en  besougne 
passé  jà  quelque  temps ,  et  advancent  fort  ledict  ouvrage 
pour  incontinent  les  imprimer  au  livre  dudict  signeur 
Guichardin  contenant  la  description  desdicts  Païs-Bas , 
qu'il  a  augmenté  grandement  tant  de  son  industrie  que 
de  plusieurs  particularités,  qui  en  l'honneur  desdicts  pais 
et  nostre  faveur  luy  ont  este  suppéditées  par  (juelques 
ungs  d'entre  les  plus  doctes  et  accords  '  desdicts  seigneurs, 
qui  m'ont  solicité  de  vouloir  entreprendre  lesdicts  ouvrages 
et  impression.  Et  d'autant  que  c'est  chose  arrestée  et  réso- 
lue qu'il  me  convient  poursuivre  eu  diligence  les  choses 
susdictes,  je  n'ay  voulu  pour  l'ancienneté,  cognoissance  et 
familiarité  de  vous  en  advertir  et  offrir  le  payement  de 
telles  figures  que  pouvés  avoir  soit  en  bois ,  soit  en  cuivre 
(encores  que  je  ne  m'en  veuille  servir  veu  que  je  fays  faire 
le  tout  en  cuivre  en  autres  grandeurs  que  les  vostres),  et 

•  Accort  :  (Ital.  accorto.)  Ingeniosus. 


—    455    — 

pareillement  de  tous  pourtraicts ,  versions  et  autres  des- 
penses que  voudrés  présentement  délivrer.  Lequel  paye- 
ment de  ce  qu'aurés  déboursé  j'offre  pour  milleure  com- 
modité vostre  de  faire  en  argent  comptant,  ou  bien  en 
autant  d'exemplaires  dudict  livre  au  prix  du  coust  de 
l'impression  que  pourra  monter  vostredict  déboursement 
par  cy  devant  faict,  ainsi  que  de  bouche  je  l'ay  déclaré  au 
sign""  André  Verscliaut ,  porteur  de  la  présente  et  donné 
commission  d'en  traicter  et  parler  plus  amplement  avec 
vous,  et  de  m'envoyer  incontinent  vostre  response  absolue, 
devant  que  je  commence  à  imprimer  l'œuvre  eu  italian  (ce 
que  j'espère  faire  devant  15  jours)  et  à  la  faire  traduire  eu 
latin,  frauçois,  flameng,  allemand  et  autres  langues  que 
trouverons  propre.  Cependant  je  me  rec"^*  à  vostre  bonne 
grâce  et  de  ma  commère  vostre  partie  et  reste  de  vostre 
famille.  D'Anvers,  ce  W  jour  de  febvrier  1580.  » 

Nous  ne  connaissons  point  la  réponse  de  Si!  vins 
à  cette  lettre;  mais  il  faut  bien  qu'il  se  soit  mis 
craccord  avec  Plantin  pour  céder  les  planches  que 
celui-ci  désirait  acquérir ,  puisque  nous  avons 
trouvé  les  bois  et  les  cuivres  du  Guicliardin  de 
Silvius  dans  la  collection  des  planches  de  la  mai- 
son Plantin-Moretus. 

Quant  aux  quatre  tailleurs  qui  ont  exécuté  les 
cartes  de  Guichardin,  les  comptes  de  Plantin  ne 
les  nomment  point,  mais  il  est  permis  de  croire 
que  ce  furent  les  Hogenberch,  de  Cologne,  et  leurs 
aides.  En  effet,  de  nombreux  paiements  furent 
faits  en  1579  et  1580  par  Plantin  à  Ortélius  pour 
fourniture  d'Atlas  et  pour  un  contrat  conclu  avec 
lui,  contrat  se  rapportant  probablement  à  Touvrage 
de  Guichardin.  Mais,  en  dehors  de  ces  sommes, 


—    456    — 

nous  en  trouvons  mentionné  d'autres  qui  furent 
payées  «  à  Ortelius  pour  Hogenbercli  de  Cologne 
et  fils.  ))  Le  24  mars  1580  cent  florins  furent  ainsi 
déboursés  ;  le  3  septembre  de  la  même  année 
90  florins  furent  portés  en  compte  du  même  chef. 

En  nous  rappelant  que  François  Hogenberch, 
Ferdinand  et  Ambroise  Arsenius  furent  les  gra- 
veurs des  Atlas  d'Ortélius,  et  que  la  taille  des 
planches  de  la  Description  des  Pays-Bas  et  de 
celles  du  Théâtre  du  moîide  présente  de  frappantes 
analogies,  il  est  permis  de  croire  que  ce  furent 
encore  François  Hogenbercli  et  son  fils,  assistés 
de  ses  deux  compagnons,  qui  gravèrent  les  cartes 
du  Hvre  de  Guichardin. 

Nous  pouvons  être  bref  dans  nos  observations 
touchant  le  second  alinéa  de  la  lettre  de  Henri  du 
Tour.  L'événement  dont  il  y  est  question  peut  se 
résumer,  d'après  les  annotations  de  de  Kempe- 
naere,  de  la  façon  suivante. 

Le  5  juillet  le  prince  de  Condé,  fils  du  prince 
de  Condé  tué  à  Cognac,  pendant  la  guerre  qu'il 
faisait  à  Charles  IX,  comme  chef  des  Huguenots, 
fit  son  entrée  solennelle  à  Gand.  Ryhove  avec  ses 
cavaliers  et  d'autres  bourgeois  notables  allèrent  à 
sa  rencontre  ;  il  logea  chez  l'amman  Joos  Stalins. 
Le  jour  suivant  il  inspecta  les  fortifications;  le 
lendemain  il  y  eut  une  alarme  causée  par  les  mal- 
contents ,  qui  s'étaient  avancés  jusqu'auprès  des 
portes  de  Bruges  et  de  Muide  et  furent  repoussés 
par  les  bourgeois.  Le  surlendemain,  8  juillet,  il  y 
eut  une  seconde  panique  causée  par  le  bruit  d'une 
nouvelle  attaque   des  Wallons.   «  Le  .prince    de 


—    457    — 

Condé,  qui  était  sur  le  point  de  partir  pour  Ter- 
monde,  parcourut  à  cheval  les  remparts,  l'épée  au 
clair,  et  encouragea  les  bourgeois  à  bien  défendre 
la  ville  contre  Tennemi.  Mais  s'étant  aperçu  que 
l'alarme  était  fausse,  il  partit.  Pendant  ce  temps 
les  boutiques  restèrent  fermées  et  tout  le  monde 
était  à  son  poste.   » 

Ce  dernier  accident  est  raconté  plus  au  long 
dans  la  lettre  de  Henri  du  Tour. 

Il  sera  nécessaire  d'être  un  peu  plus  explicite 
quant  au  dernier  alinéa  de  la  lettre. 

La  famille  de  van  den  Keere,  ou  du  Tour,  ou 
Chaerius  s'occupait  des  choses  de  l'imprimerie  au 
moins  depuis  1556,  date  que  portent  les  plus 
anciennes  publications  de  Henri  van  den  Keere 
Taîné.  Le  père  de  celui-ci,  Pierre  van  den  Keere, 
acheta  en  1553  la  maison  et  le  matériel  de  Josse 
Lambrecht,  mais  ne  paraît  point  avoir  publié 
d'omT:-age  sous  son  nom  \  Le  fils  de  Henri  van 
den  Keere  l'aîné  fut  notre  Henri  le  jeune,  qui 
s'adonna  à  la  fonderie  de  caractères. 

M.  Ferd.  Vanderhaeghen  ne  décrit  aucun  ou- 
vrage portant  son  nom,  et  comme  nous  le  verrons 
plus  loin,  sa  mort  suivit  de  si  près  celle  de  son 
père,  qu'en  supposant  même  qu'il  eût  eu  l'intention 
de  continuer  l'imprimerie  de  celui-ci,  le  temps  lui 
manqua  pour  mettre  ce  dessein  à  exécution. 

Les  archives  du  Musée  Plantin-Moretus  ont 
conservé  des  comptes  nombreux  et  importants  du 


»  Voir  sur  les  van  den  Keere  F.  Vanderhaeghen,  Bibliographie 
gantoise,  I,  p.  153. 


—    45S    — 

matériel  fourni  par  Henri  du  Tour  à  Plantin.  Le 
premier  en  date  commence  le  29  juillet  1570.  Le 
dernier,  écrit  après  la  mort  de  Henri  du  Tour  le 
jeune,  va  jusqu'au  27  juin  1581. 

Pour  donner  une  idée  de  l'importance  de  la 
fourniture  de  ce  poinsons,  matrices  et  lectres  fon- 
dues, »  annotons  que  le  compte  du  10  juin  1571 
jusqu'au  19  décembre  suivant,  monte  à  fl.  592 
pat.  3;  celui  du  3  mai  1572  jusqu'à  Pâques  1573, 
est  de  fl.  1018  pat.  14;  celui  de  Pâques  1573  jus- 
qu'au 27  septembre  de  la  même  année  est  de 
fl.  503  pat.  9;  celui  du  11  septembre  1574  jus- 
qu'au 16  avril  1575,  est  de  fl.  1480  et  14  patars. 

Nous  voyons  par  la  lettre  de  Henri  du  Tour  que 
son  père  vient  de  mourir  et  que  les  soins  de  la 
mortuaire  l'absorbent  entièrement  ;  nous  y  voyons 
également  que  lui-même  était  souffrant  par  suite 
d'une  blessure  à  la  jambe.  Son  mal  doit  avoir 
gravement  et  rapidement  empiré,  car  un  autre 
document  que  nous  allons  transcrire  prouve  que 
trois  mois  après  avoir  expédié  sa  lettre  à  Plantin 
il  n'était  plus. 

Sa  veuve  écrit  le  4  octobre  1580  à  l'imprimeur 
anversois  pour  lui  proposer  d'acheter  les  poin- 
çons, matrices  et  instruments  de  feu  son  mari. 
Voici  cette  lettre  : 

«  Eersamen,  discreten  S'  Cliristoffle  Plantin,  mynen 
lieven  ende  seer  goetjonstiglien  compère.  UL.  sal  believen 
te  weten  onser  aller  gesontlieyt,  God  sy  lof;  so  ic  hope 
dat  met  UL.  ooc  is.  Ic  sende  UL.  defecten  vande  cleen 
augustyne  ende  vande  hoochduytsche  ende  spacikens  van 
thebreus. 


—    459    — 

»  Voorts,  beminden  compère,  ic  sende  UL.  hier  mede  een 
register  van  al  myn  smans,  saleger  memorie,  poinsoenen 
ende  matrysen  ende  instrumenteu.  Maer  ic  bid  UL.,  com- 
père, ofte  UL.  goedt  dunct,  dat  ic  UL.  sende  aile  de 
proefven  van  de  letteren  daer  proefven  op  ghemaect  syn  , 
want  hier  syn  veel  afslaghen  onghejusteert  daer  af  en  can 
men  gheen  proefven  ghetooghen.  Daerom  bid  ic  u,  lieve 
compère ,  schrift  my  daer  van  UL.  advis.  Groet  my  seere 
UL.  huusvrauwe.  Niet  meer  op  dit  pas,  dan  blyft  den 
almachtigen  God  bevolen,  welcken  God  ende  Heere  UL. 
gheve  een  lancksaligh  leven.  Amen. 

»  Uut  Ghendt,  den  4"  octob.  1580. 

»  By  my  U  dienaresse  ende  ghevaerkev , 
»  Elysabet  vaîî  Keeee.  » 

Le  marclié  proposé  par  la  veuve  de  Henri  du 
Tour  fut  conclu.  Nous  trouvons  en  effet  dans  les 
minutes  de  lettres  de  Plantin  les  annotations  sui- 
vantes : 

«  Je  Christophle  Plantin  cognois  et  confesse  debvoir 
aux  héritiers  de  feu  Henrick  vanden  Keere ,  en  son  vivant 
demeurant  à  Gand,  tailleur  et  fondeur  de  lectres  pour 
Timprimerie,  la  somme  de  treze  cents  florins  et  ce  pour 
vingt  sortes  diverses  de  poinsons  ,  de  lectres  et  notes  et 
douze  diverses  sortes  de  matrices  de  lectres  que  j'ay 
achaptés  d'eux.  Laquelle  somme  de  treze  cents  florins  je 
leur  promects  payer  ou  au  porteur  de  la  présente  en  deux 
termes  esgaux ,  à  scavoir  six  cents  et  cinquante  florins  de 
ce  jourdhui  en  six  mois  et  les  autres  six  cents  cinquante 
florins  de  ce  jourdhuy  en  an.  A  condition  toutesfois  qu'au 
cas  qu'il  ne  me  vint  à  commodité  de  payer  les  dictes 
sommes  audict  terme  que  je  leur  en  payeray  la  rente  à  six 


—    460    — 

et  ung  quart  pour  cent  par  chaicun  an,  jusques  au  jour 
que  je  leur  feray  ledict  payement. 

»  En  temoing  de  quoy  j'ai  escrit  et  soussigné  la  présente 
de  ma  propre  main  et  signe  manuel.  Cy  faict  en  Anvers  le 
15"  jour  de  febvrier  15S1.  » 

Et  immédiatement  après  vient  Tannotation  sui- 
vante : 

«  Je  Christopble  Plantin  promects  à  ma  commère  Ely- 
sabeth,  veufve  de  feu  Henrick  vanden  Keere,  que  en  cas  que 
l'un  de  ses  enfants  et  de  sond.  défunct  mari,  ou  bien  leur 
serviteur  Tbomas  vande  Yecbter  et  non  autres  voulussent 
cy  après  racbapter  pour  s'en  servir,  mais  non  livrer  à  autre 
quique  se  fust ,  les  poinsons  et  matrices  que  j'ay  acbaptées 
ce  jourdbuy  d'elle,  soubs  le  nom  des  héritiers  dudict  dé- 
funct vanden  Keere,  que  les  ayant  alors  sans  les  avoir 
aliénés  je  les  delivreray  au  mesmes  prix  quïl  m'auront 
cousté  ,  sans  quelque  augmentation  de  prix  par  dessus  le- 
dict coust  et  payements,  alors  faicts  pour  lesdicts  poinsons 
et  matrices.  En  tesmoins  de  quoy  j'ay  escrit  et  soussigné  la 
présente  de  ma  propre  main  et  signe  manuel  cy  mis  le 
quinziesme  jour  de  febvrier  1531. 

La  reconnaissance,  signée  par  Plantin  et  cance- 
lée  après  Tacquittement,  se  trouve  également  dans 
ses  papiers.  La  première  moitié  de  la  somme  fut 
payée  le  dernier  février  1582. 

Nous  avons  vu  que  le  dernier  compte  de  du 
Tour  à  Plantin  va  jusqu'au  27  juin  1581.  Nous 
trouvons  ensuite  des  factures  de  Thomas  de  Yech- 
ter,  prouvant  que  Tancien  serviteur  des  du  Tour 
avait  continué,  pour  son  propre  compte,  la  fonde- 
rie de  son  maître. 


—    461     — 

Nous  possédons  de  lui  une  lettre  adressée  à 
Plantin,  sous  la  date  du  4  janvier  1581,  par  la- 
quelle il  annonce  à  celui-ci  l'envoi  des  poinçons 
et  matrices ,  appartenant  depuis  longtemps  en 
propre  à  Plantin  et  se  trouvant  à  cette  époque 
dans  la  fonderie  gantoise.  Il  finit  cette  lettre  par 
la  recommandation  suivante  : 

«  Voorts,  beminden  vriendt,  ic  recommandeere  my 
altyt  in  uwe  goede  gratie,  UL.  biddende  om  UL.  dienaar 
te  wesen  so  langhe  UL.  de  gieterye  van  doene  hebt,  ghelyc 
ic  hope  dat  UL.  ooc  my  niet  ontsegghen  en  suit.  » 

Le  premier  compte  de  Thomas  de  Vechter  à 
Plantin  porte  en  tête  les  mots  : 

«  Dit  is  het  weerck  dat  ic  gbegoten  heb  voor  s^  Chris- 
toffle  Plantin,  sichteut  den  10°  septemb.  1581,  tôt  Ghendt.  » 

Le  compte  court  jusqu'au  14  décembre  suivant 
et  monte  à  44  fl.  6  sols. 

Le  second  compte  porte  comme  en-tête  : 

«  Dit  navolgbende  is  al  het  weerck,  dat  ic  gedaen  hebbe 
voor  s^Christoffle  Plantin,  sichtent  den  5*°  januarius  1582, 
in  Antwerpen.  » 

Ce  second  compte  est  important,  il  s'étend  jus- 
qu'au 14  avril  1583  et  monte  à  526  fl.  19  '/s  sols. 
L'entête  nous  montre  que  le  fondeur  gantois  avait 
transporté  son  atelier  à  Anvers. 

Ce  fait  est  confirmé  par  une  troisième  pièce 
intitulée  : 

«  Dit  is  den  ontfanck  van  haude  letteren,  ende  het  loot, 


—    462    — 

ende  de  stoffen  die  ic  ghelevert  hebbe  om  te  verghieten, 
siclitent  den  5°  january  1582,  binnen  Antwerpen.  » 

Thomas  de  Vechter  changea  une  seconde  fois 
de  domicile.  En  effet  le  Musée  Plantin-Moretus 
possède  de  lui  deux  lettres ,  datées  du  3  novem- 
bre et  du  10  décembre  1592,  écrites  toutes  deux 
de  Leiden.  La  seconde  porte  l'adresse  exacte  du 
fondeur  : 

«  Thomas  de  Vecliter,  lettergieter,  in  de  Vrouwestege 
aen  de  Breestraet.  In  Leyden.  » 

Par  ces  lettres  nous  voyons  que  Jean  Moretus  I 
faisait  encore  fondre  chez  de  Vechter,  après  le 
départ  de  celui-ci  pour  sa  nouvelle  patrie. 


Max.  Kooses. 


—    4G3    — 


LES  TROIS  PREMIERS  TYPOGRAPHES 

DE    STRASBOURG. 


Il  nous  manque  encore  un  bon  travail  sur  les 
premiers  temps  de  la  typographie  strasbour- 
geoise.  Cela  est  d'autant  plus  regrettable  que, 
depuis  le  funeste  bombardement  de  1870 ,  la 
riche  bibliothèque  de  la  capitale  de  l'Alsace  et 
ses  archives  tout  aussi  riches,  ont  péri.  Depuis 
lors,  un  semblable  travail  est  devenu  presque 
impossible. 

Ce  n'est  pas  que  l'Alsace  en  général  et  la  ville 
de  Strasbourg  en  particulier,  aient  jamais  manqué 
d'hommes  savants.  Mais,  par  malheur,  les  per- 
sonnes qui  se  sont  occupées  de  ITiistoire  de  l'im- 
primerie de  cette  ville ,  mues  par  l'esprit  de  clo- 
cher, ont  moins  cherché  à  découvrir  la  vérité 
qu'à  inventer  des  fables  qui  pouvaient  flatter  cet 
esprit  de  clocher.  Et  à  ces  nombreuses  fables 
qu'elles  nous  ont  débitées ,  on  ne  peut  même  pas 
appliquer  le  proverbe  italien  si  connu  :  Se  non  e 
vero,  e  ben  trovato. 

Je  n'ai  aucunement  la  prétention  de  remplir  la 


—    464    — 

lacune  que  je  viens  de  signaler.  Je  veux  seule- 
ment offrir  aux  amateurs  de  la  vieille  typographie 
le  résultat  de  quelques  petites  recherches  sur  les 
premiers  temps  de  l'imprimerie  à  Strasbourg  et 
sur  ses  trois  plus  anciens  typographes. 

Il  ne  sera  pas  question  ici  des  premières  tenta- 
tives de  Gutenberg  à  Strasbourg.  Ces  tentatives , 
on  le  sait,  ont  d'ailleurs  été  contestées.  En  tout 
cas,  il  est  certain  qu'elles  n'ont  pas  abouti  en 
cette  ville  et  que  rien  n'y  a  été  produit  alors  en 
fait  d'impressions. 

Nous  savons  par  contre ,  que  Strasbourg  fut 
l'une  des  premières  villes  de  l'Europe  à  recevoir 
les  bienfaits  de  l'imprimerie.  Suivant  le  récit 
consigné  par  l'abbé  Trithème  dans  ses  Annales 
dHirschau ,  c'est  d'abord  à  Strasbourg  que  les 
ouvriers  mayençais  importèrent  l'art  typogra- 
phique. Selon  la  chronique  de  Cologne,  c'est 
cette  ville  qui  eut  la  priorité  et  Strasbourg  vint 
ensuite.  Il  est  connu  maintenant  que  Bamberg 
devança  ces  deux  villes.  C'est  certainement  la 
seule  cité ,  à  l'exception  de  Mayence ,  qui  puisse 
fournir  des  preuves  qu'on  y  a  imprimé  avant 
1462.  Si  ce  fait  a  été  si  longtemps  ignoré,  s'il  l'a 
même  été  des  contemporains ,  c'est  que  Bamberg 
n'a  produit  que  pendant  un  très-petit  nombre 
d'années  quelques  impressions  assez  insigni- 
fiantes. Si  la  célèbre  Bible  de  36  lignes  y  eut  été 
imprimée,  comme  on  l'a  cru  longtemps,  et  comme 
quelques-uns   semblent  le  croire    encore  ^ ,   cette 

1  Entre  autres,  et  je  m'en  étonne,  le  savant  bibliothécaire  de 


—    465    — 

ignorance  n  eut  été  rien  moins  que  merveilleuse. 

Tout  le  monde  sait  que  Cologne  reçut  l'impri- 
merie, un  peu  après  1462,  par  le  fameux  Ulric 
Zell.  Elle  semble  avoir  été  importée  à  Strasbourg 
vers  la  même  époque,  mais  par  qui? 

On  a  cru  longtemps  que  Jean  Mentel,  ou 
plutôt  ,  comme  il  écrivait  lui-même  son  nom, 
Mentelin,  devait  être  considérée  comme  le  plus 
ancien  typographe  de  Strasbourg.  Or,  ceci  est 
loin  d  être  prouvé  ,  et  il  serait  difficile  d'assigner 
le  premier  rang  à  l'un  de  ces  trois  hommes  qui 
vont  suivre  ;  c'est-à-dire  à  : 

Henri  Eggestein  ou  plutôt  Eckstein , 
Jean  Mentelin  et 

Adolphe  Rausch  ou  de  Rauschenburg ,  d'Ing- 
weiler. 

Il  est  non  seulement  possible ,  mais  il  est  même 
fort  probable  que  ces  trois  typographes ,  après  la 
catastrophe  qui  frappa  Mayence  en  octobre  1462, 
quittèrent  cette  ville  pour  s'établir  à  Strasbourg 
vers  la  même  époque.  Certains  bibliographes  ont 
bien  dit  ou  répété  que  les  caractères  employés 
anciennement  à  Strasbourg ,  n'avaient  aucune 
ressemblance  avec  ceux  mis  en  œuvre  à  Mayence. 
Mais  cette  assertion  n'est  pas  exacte.  On  n'aura 
pas  bien  examiné  et  pas  remarqué  par  consé- 
quent ,  que  les  types  des  trois  plus  anciens  t}^o- 


rUniversité  de  Gancl,  M.  Ferdinand  Vanderliaeghen  ;  voir  le  Messa- 
ger, année  1875 ,  p.  285.  -^  Je  me  propose  d'essayer  bientôt  de 
démontrer  que  cette  Bible  célèbre  n'a  rien  de  commun  avec  Albert 
Pfister. 

31 


—    466    — 

graphes  de  Strasbourg  indiquent  l'influence  exer- 
cée par  leur  maître  à  tous  trois,  qui  n'est  autre , 
selon  moi,  que  Gutenberg.  On  y  voit,  en  effet, 
une  imitation,  non  pas  bien  stricte,  mais  évidente 
cependant,  des  caractères  du  fameux  Catholicon 
de  1460.  Cette  circonstance,  réunie  à  d'autres 
inductions,  favorise  l'opinion  que  Mentelin,  Egge- 
stein  et  Rauscli  étaient  trois  élèves  de  Gutenberg 
et  vinrent  s'établir  à  Strasbourg  après  la  publica- 
tion du  Catholicon,  et  sans  doute  aussi  après  le 
sac  de  Mayence  en  1462.  Des  trois  typographes 
cités,  deux  au  moins  étaient  de  noble  extrac- 
tion, et  devaient  préférer  faire  leur  apprentis- 
sage chez  Gutenberg ,  plutôt  que  dans  les  ateliers 
de  Faust  et  Schœffer.  Ils  avaient  d'ailleurs  peut- 
être  connu  Gutenberg  lors  de  son  long  séjour  à 
Strasbourg. 

Plusieurs  auteurs,  depuis  quelque  temps,  croient 
à  deux  émigrations  successives  des  ouvriers  typo- 
graphes de  Mayence ,  la  première  après  le  procès 
de  1455 ,  la  seconde  après  la  surprise  et  le  sac  de 
la  ville  en  1462.  Mais,  sauf  pour  Bamberg,  nous 
n'avons  pas  la  moindre  preuve  de  la  jjremière 
émigration  à  laquelle  je  n'ai  jamais  pu  ajouter  foi. 
Ce  n'est  pas  que  le  fait  ne  soit  possible ,  ni  même 
assez  probable.  Mais  l'histoire  doit  s'appuyer,  non 
pas  sur  des  possibilités ,  mais  sur  des  faits ,  sur 
des  preuves. 

On  n'a  commencé  à  dater  les  impressions  à 
Strasbourg  qu'en  1471.  On  a  toutefois  un  grand 
nombre  d'anciens  imprimés  qui  portent  des  dates 
manuscrites  que  l'on  peut   regarder  comme  au- 


—    467    — 

thentiques  et  probantes,  surtout  parce  qu'elles  se 
contrôlent  lune  par  Tautre.  Eh  bien,  de  ces  nom- 
breuses souscriptions  manuscrites ,  aucune  ne  re- 
monte au-delà  de  l'année  1466  ',  et  je  pense  que 
pour  Strasbourg  comme  pour  Cologne,  on  doit 
fixer  répoque  des  premières  impressions  vers  1463 
ou  plutôt  vers  1464. 

Je  vais  maintenant  dire  quelques  mots  des  trois 
premiers  typographes  Strasbourgeois ,  en  com- 
mençant par 

Henri  Ecksteix  ou  Eggestein. 

Je  ne  prétends  pas  que  celui-ci  devança  ses 
deux  concurrents ,  mais  il  est  celui  des  trois  qui 
peut  s'appuyer  sur  les  plus  anciens  documents 
authentiques.  Ce  fut  lui  aussi  qui  data  le  premier 
ses  impressions,  ce  qui  eut  lieu  en  1471.  Quant 
aux  souscriptions  manuscrites ,  il  partage  avec 
Mentelin  la  date  de  1466. 

11  existe  cependant  sur  Eggestein  un  autre  do- 
cument très-intéressant ,  mais  fort  peu  connu 
encore,  bien  qu'il  ait  été  reproduit  à  différentes 
reprises  dans   des   publications   en   langue   alle- 

»  Je  crois  cependant  me  rappeler  que,  il  y  a  quelques  années  de 
cela,  M.  Olivier,  libraire  bien  connu  à  Bruxelles,  m'assura  avoir  vu 
une  Bible  latine  de  Mentelin,  qui  aurait  porté  la  date  manuscrite 
de  1459.  Je  ne  mets  pas  en  doute,  le  moins  du  monde,  l'assertion  de 
l'honorable  libraire  ;  mais  aura-t-il  bien  lu  cette  date,  ou  bien  cette 
date,  comme  tant  d'autres,  n'était-elle  pas  erronée?  En  tout  cas  il 
y  aurait  certainement  à  appliquer  l'adage  juridique  :  «  Un  témoin, 
point  de  témoins.  »  L'annoteur  aura  écrit  1459  au  lieu  de  1469. 
D'autres  exemplaires  de  cette  Bible  portent  les  dates  manuscrites 
de  UGG  et  1468. 


—    468    — 

mande.  Il  s'agit  d'un  passeport  ou  sauf-conduit, 
daté  de  Heidelberg  le  lundi  après  la  fête  des  Ra- 
meaux (30  avril)  1466,  par  Frédéric  I,  comte  pala- 
tin du  Rliin  et  duc  de  Bavière,  accordé  à  Henri 
Eckstein,  imprimeur,  et  à  ses  ouvriers.  Cette  pièce 
constate  que  le  même  j)rince  lui  avait  déjà  déli- 
vré des  sauf-conduits  semblables  depuis  nombre 
d'années  '.  —  Est-ce  en  qualité  de  typographe  que 
ces  passeports  antérieurs  avaient  été  délivrés  à 
Eckstein? —  Cest  possible;  toutefois,  le  docu- 
ment n'est  pas  explicite  sur  ce  point.  Dès  1471 
d'ailleurs,  Eckstein  assure  dans  Tune  de  ses  sous- 
criptions, qu'il  avait  déjà  imprimé  d'innombrables 
volumes,  innumerata  volumiiia. 

Henri  Eggestein  était  de  famille  noble;  il  por- 
tait dans  ses  armoiries  un  chevron  sous  lequel  se 
trouve  une  rose  à  cinq  feuilles.  Un  sceau  à  ces 
armoiries  se  conservait  encore  naguère  à  Stras- 
bourg. Il  acquit  en  cette  ville  le  droit  de  citoyen 
dès  l'an  1442.  Il  portait  le  titre  de  maître  es  arts 
et  es  philosophie ,  et  devint  chancelier  épiscopal 
de  la  cour  de  Strasbourg.  Plusieurs  chartes  qui 
ont  été  publiées  ou  simplement  mentionnées,  prou- 
vent assez  qu'il  jouissait  de  beaucoup  de  crédit  et 
de  considération.  Je  ne  parlerai  pas  de  ses  nom- 
breuses et  importantes  impressions,  qui  sont  assez 
connues,  me  bornant  à  rappeler  qu'il  vivait  et 


*  On  peut  lire  ce  document  dans  Touvrage  intitulé  :  Zum  Ge- 
duchtniss  der  vierten  Sàcularfeier  der  Erfiad^mg  der  Buchdrucker- 
kunst.  Heidelberg,  1840,  in-8°,  p.  76,  et  dans  Umrreit,  Die  Erfin- 
dung  der  BucMruckerkunst ,  etc.  Leipzig,  1843,  in-S",  pp.  136-137. 


—    469    — 

imprimait  encore  en  1478.  L'époque  de  sa  mort 
n  est  point  connue.  D'après  Gebweiler,  Eckstein  se 
serait  associé ,  à  une  époque  indéterminée  ,  avec 
Mentelin.  Rien  ne  confirme  cette  assertion,  qui 
me  parait  erronée.  Gebweiler  d'ailleurs,  est  un  au- 
teur qui,  en  fait  d'erreur,  est  coutumier  du  fait. 
Passons  donc  à 

Jean  Mentelin. 

On  s'est  assez  et  même  trop  occupé  de  ce  typo- 
graplie  célèbre,  pour  qu'il  soit  nécessaire  de 
s'étendre  sur  son  compte.  Je  rappellerai  seulement 
que,  né  à  Schlestadt,  d'une  famille  consulaire,  il 
fio-ure  à  Strasbouro^  comme  écrivain  en  or,  dès 
1447,  et  y  acquit  les  droits  de  bourgeoisie  la  même 
année.  Ce  ne  fut  qu'en  1473  qu'il  se  nomma  et 
qu'il  pourvut  d'une  date  l'une  de  ses  impres- 
sions '.  Il  est  constaté  qu'il  fit  fortune  comme 
typographe,  à  l'aide  de  publications  importantes, 
parfaitement  appropriées  à  l'esprit  du  temps. 
Mentelin  mourut  le  12  décembre  1478. 

Jean  Mentelin  fat  un  typographe  habile  et  labo- 
rieux, rien  de  plus.  On  a  trouvé  bon  de  lui  donner 
une  importance  beaucoup  plus  grande  que  celle 
qui  lui  revient.  On  a  débité  sur  son  compte  les 
fables  les  plus  absurdes  ;  on  lui  a  même  attribué 
l'invention  de  l'imprimerie,  et  il  compte  encore, 


'  Et  uon  en  1469,  comme  le  dit  par  erreur  feu  Ambeoise  Fiemin 
DiDOT,  Essai  sur  la  typographie ,  dans  {'Encyclopédie  moderne, 
t.  XXVI,  col.  628.  Il  a  pris  pour  une  souscription  imprimée,  ce  qui 
n'est  qu'une  souscription  manuscrite. 


—    470    — 

sous  ce  rapport,  des  partisans  en  Alsace.  Tout 
cela  a  déjà  été  suffisamment  refuté;  je  ne  m'en 
occuperai  donc  plus.  Ce  serait  vouloir  perdre  mon 
temps  et  celui  du  lecteur. 

Mais  les  bibliographes  ont  encore  trouvé  bon 
de  l'avantager  au  détriment  de  son  concurrent 
qui  va  suivre,  en  lui  attribuant  toutes  les  nom- 
breuses et  importantes  impressions  de  celui-ci. 
C'était  induement  doubler  le  nombre  déjà  consi- 
dérable de  celles  qu^il  a  réellement  produit. 

Le  nom  de  ce  concurrent  est 

Adolphe  Rausch. 

Ce  typographe  ancien,  fort  habile  et  très-fécond, 
était  resté  presqu'inconnu.  Il  appartient  plutôt 
à  la  légende  qu'à  Thistoire.  —  C'est  que  son  nom 
ne  paraît  sur  aucun  des  très-nombreux  livres  qu'il 
a  imprhné.  L'histoire  de  Timprimerie  était  à  peu 
près  muette  sur  son  compte  ;  une  légende  alsa- 
cienne ,  par  contre ,  rapporte  que  Timprimerie 
aurait  été  inventée  dans  le  château  de  Rauschen- 
burg,  près  d'Ingweiler,  lieu  de  sa  naissance  et 
dont  il  était  seigneur. 

Dans  le  Messager  de  1868,  pp.  367-373,  j'ai 
essayé  de  faire  connaître  Adolphe  Rausch ,  ce  ty- 
pographe si  remarquable,  et  sur  lequel  on  n'avait 
que  quelques  données,  presque  toutes  inexactes. 
—  Cet  article  a  reçu  partout  un  accueil  très- 
bienveillant.  Il  fut  traduit  immédiatement  en 
allemand  par  feu  le  docteur  F.-L.  Hoffmann ,  de 
regrettée  mémoire,  et  inséré  dans  le  Serapeurd.  En 


—    471     — 

France  aussi  ma  dissertation  fut  très-bien  accueil- 
lie et  mon  essai  de  démonstration  que  Rauscli 
n  était  autre  que  le  fameux  im^Drimeur  à  la  lettre 
R  fut  adopté  sans  aucune  contestation.  Je  ne 
répéterai  point  ce  que  j'ai  dit  dans  cette  notice,  à 
laquelle  je  me  réfère.  Mais ,  par  suite  d'études 
ultérieures,  j'ai  différentes  choses  à  y  ajouter. 

Je  n'ai  pu  voir  et  examiner  qu'un  très-petit 
nombre  des  impressions  qui  appartiennent  à  Adol- 
phe Rausch  et  que  l'on  a  toutes  ou  presque  toutes 
attribuées  induement  à  Jean  Mentelin.  Ainsi  je 
n'ai  pu  parvenir  à  voir  ni  l'édition  célèbre  de 
Yalère-Maxime,  ni  celle  de  Térence;  mais  j'ai  lu 
et  comparé  soigneusement  les  descriptions  de 
ces  impressions  faites  par  divers  bibliographes. 
Cet  examen  m'a  donné  la  conviction  qu'il  faut 
retii^er  à  Mentehn  un  très-grand  nombre  d'édi- 
tions très-importantes  et  précieuses,  —  souvent 
des  éditions  originales  des  classiques  et  des  Pères 
de  l'Église  dont  on  Tavait  gratifié  bien  à  tort. 

Les  caractères  du  texte  des  éditions  qu'Adolphe 
Rausch  a  fait  paraître  jusque  vers  1480,  offrent 
sans  doute  une  certaine  ressemblance  avec  ceux 
de  Jean  Mentelin.  Mais  il  n'en  est  pas  ainsi  des 
lettres  majuscules  ou  initiales  que  d'ailleurs 
Rausch  semble  avoir  renouvelées  à  diverses  re- 
prises, et  qui  chez  lui  étaient  assez  variées.  Les 
caractères  du  texte  sont  d'ailleurs  sensiblement 
plus  forts  chez  Mentel ,  et  leur  forme  est  un  peu 
moins  gothique  ou  un  peu  plus  romaine.  Quant  à 
la  fameuse  initiale  R,  je  crois,  d'après  les  obser- 
vations que  j'ai  faites ,    que   Rausch  ne    l'a  pas 


—    472    — 

employée   dans  ses  éditions  les  plus  anciennes , 
mais  seulement  à  partir  de  1470  au  plus  tôt. 

On  peut  comparer  les  caractères  de  Mentelin  et 
ceux  de  Eauscli  en  ouvrant  le  catalogue  du  doc- 
teur Kloss  (Londres,  1835),  vis-à-vis  de  la  page  281 , 
où  se  trouve  un  très-bon  fac-similé  de  ces  carac- 
tères ,  tant  des  initiales  que  des  textes. 

Adolphe  Rauscli,  bien  qu'il  ne  mît  jamais  son 
nom  à  ses  productions,  était  déjà  un  typographe 
célèbre  dès  1470.  On  peut  donc  admettre  qu'il 
commença  à  exercer  son  art  à  Strasbourg ,  à  peu 
près  en  même  temps  que  ses  deux  concurrents, 
Eckstein  et  Mentelin. 

Il  est  a  regretter  que  Ton  ne  possède  que  fort 
peu  de  renseignements  sur  la  vie  de  cet  homme 
remarquable.  Adolphe  Eausch,  issu  de  l'une  des 
plus  nobles  et  des  plus  anciennes  familles  de 
l'Alsace ,  était  seigneur  et  possesseur  du  château 
de  Rauschenburg  ;  il  est  donc  à  supposer  que  c'est 
par  goût  pour  les  lettres ,  bien  plus  que  par 
Famour  du  gain,  qu'il  se  voua,  pendant  une  car- 
rière assez  longue,  à  la  profession  de  typographe. 
On  ne  peut  lui  refuser  une  grande  habileté  dans 
l'exercice  de  son  art,  et  il  faut  admirer  l'excellent 
choix  qui  présida  à  la  plupart  de  ses  publications. 
Ce  n'est  pas  Mentelin ,  c'est  lui  qui  précéda ,  non 
seulement  l'Italie,  mais  le  monde  entier  par  les 
éditions  princeps  de  plusieurs  des  principaux 
Pères  de  l'Église  et  d'un  certain  nombre  des  clas- 
siques latins  les  plus  célèbres. 

C'est  encore  à  Rausch ,  et  non  à  Mentelin ,  qu'il 
faut  attribuer  le  premier  catalogue  imprimé  qui 


—    473    — 

soit  connu ,  et  dont  un  exemjilaire  est  conservé 
à  la  bibliothèque  nationale  à  Paris  ' . 

On  avait  uniquement  attribué  ce  catalogue  à 
Mentelin ,  parce  que  l'on  avait  déjà  accordé 
erronément  à  ce  typographe  les  ouvrages  qui  j 
sont  dénommés.  Mais,  de  même  que  le  catalogue, 
les  impressions  y  désignées ,  appartiennent  à 
Rausch.  Elles  valent  certes  la  peine  d'être  reven- 
diquées. Ce  sont  : 

*S.  Aurelii  Augustini ,  epistolœ. 

Ejusdem ,  confessiones . 

Fortalicium  fidei. 

Beati  Hieronimi  epistolœ. 

Josephus ,  de  Antiquitatibus  et  Bello  Judaieo. 

Scrutinimn  Scripturarum . 

Terentius. 

Valerius  Maximùs. 

Virgilius. 

Toutes  ces  éditions  sont  sans  lieu  ni  date  et  de 
format  in-folio  ,  toutes  ou  presque  toutes  passent 
pour  être  les  éditions  originales  de  ces  oeuvres 
importantes  ;  toutes  encore  paraissent  être  impri- 
mées avant  1470,  date  que  l'on  suppose  être 
celle  du  Catalogue  ;  peut-être  même  faudrait-il  lui 
assigner  celle  de  1469.  —  Ce  Catalogue  est  en- 
core appuyé  par  le  sauf-conduit  accordé  en  1466 


*  Voir  Bernard,  Be  l'origine  de  V im primer ie ,  t.  II,  pp.  85-86. 
Feu  Brcnet,  l'auteur  du  Manuel,  a  déjà  émis  quelques  doutes  au 
sujet  de  l'attribution  de  ce  catalogue,  attribution  qui  avait  cepen- 
dant été  faite  par  la  plupart  des  bibliographes.  Dibolin  a  donné  le 
fac-similé  de  ce  catalogue  dans  ses  JSdes  Althorp.,  t.  II,  p.  131. 


—    474    — 

à  Raiiscli  et  à  ses  ouvriers ,  qui  faisaient  de  fré- 
quents voyages  pour  placer  leurs  productions 
typographiques . 

Une  liste,  aussi  complète  que  possible,  des 
nombreuses  impressions  que  Ton  doit  attribuer 
et  restituer  à  Rausch,  tant  celles  sans  la  lettre 
R  que  celles  qui  ont  cette  initiale  caractéristique, 
serait  sans  doute  utile,  et  même  d'un  haut  in- 
térêt. Mais  ce  n'est  pas  ici  le  lieu  de  l'entrepren- 
dre; il  serait  d'ailleurs  bon,  sinon  indispensable, 
que  la  personne  compétente  qui  voudrait  se  char- 
ger de  cette  nomenclature  passablement  longue 
et  difficile ,  ait  soigneusement  examiné ,  non  pas 
tout,  ce  serait  trop  exiger,  mais  du  moins  les  pro- 
ductions les  plus  importantes  d'Adolphe  Rausch 
dlngweiler,  seigneur  de  Rauschenburg  *. 

H.   Helbig. 


•  Il  faut  compter,  parmi  ces  impressions,  une  ou  même  plusieurs 
éditions  fort  anciennes  de  la  Bible  latine,  ainsi  qu'une  Bible  latine 
vers  1480,  la  première  do  toutes  avec  commentaires. 


475    — 


L4  CORPORATION  DES  PEINTRES 

DE    BRUXELLES     • 


1677. 

M.  Michel  Allaert  (fils  de  maître) ,  de  Bruxelles.  29  mai. 

A .  Jean  de  Reyff  (fils  de  bourgeois) ,  de  Bruxelles  ;  chez 
Lancelot  Volders.  1 6  août. 
Henei  de  Vos  (fils  de  Marc),  de  Bruxelles;  chez  Lan- 
celot Volders.  22  septembre. 

1678. 

M.  Louis  Van  Schooe  (fils  de  maître) ,  de  Bruxelles.  1 1  fé- 
vrier. 
Nicolas  Van  Geel  ,  de  Bruxelles.  1 5  mai. 

DuBAL.  24  août. 

Jean-François  Coppens  (fils  de  maître),  l^r  septembre. 
LAjyiBERT  DE  HoNDT,  de  ^lalines.  15  novembre. 

A.  André  Broeckman  (fils  de  Jean),  de  Bruxelles;  chez 
Thomas  Pins.  5  mai. 
Jacques  Neys;  chez  Bombant  Cortkens. 
Lottenbercht  ;  chez  Louis  Van  Schoor. 

«  Suite.  —  Voir  3«  livr.,  p.  315. 


—     476 


1679. 


M.  Jacques  Van  der  Hyden  ,  crArnhem.  10  mars. 
JossE  Mo3EMs(?)  (fils  de  maître).  14  juin. 

1680. 

M.  François  Tielens. 

Josse-Lambert  Tudesem.  1 1  février. 
SÉBASTIEN  Mottemont.  26  mars. 
Gérard-Antoine  Van  Reykel  ,  bourgeois. 
(Gore?/n)  Van  NuTEL,  bourgeois.  17  juillet. 

1681. 

31.  Jean-Baptiste  de  Mediena. 
JÉRôîHE  Galle. 
Jacqlt:s  Huysmans  '. 
Jacques  de  Bruits  (fils  de  maître).  10  août. 

A.  Pierre  Hendrickx;  chez  Luc  Achtscbellinckx.  4  mai. 

1682. 

M.  François  Reps.  1 5  mars. 

Jacques  Van  Waegherbergh.  2  mai. 
Jean-François  Lefils.  4  mai. 
Thomas  Van  Geuils  (?).  13  juillet. 
de  Vocht.  13  juillet. 

A.  Jean-Baptiste  Tel;  chez  Charles  Wateer.  15  février. 
Pierre  Van  der  Bellen;  chez Waeter.  15  fé- 
vrier. 

»  L'inscription  de  ces  trois  noms  est  faite  à  titre  d'autorisation  de 
pouvoir  peindre  {om  te  mogen  schilderen).  Ces  personnes  n'ont  pas 
dû  prêter  serment. 


—    477    — 

André  Meulebeck;  chez  Adrien  BauJuin.  28  mai. 
Mathieu  Schoevaet   {sic)  ;  chez    Adrien   Bauduin. 
25  juin. 

1683. 

A .  Jacques  Van  der  Meeken  ;   chez  Jacques  Yan  der 
Haeyden.  20  juin. 
Gaspard  Yan  Haettem  ;  chez  Luc  Achtschelincks. 
12  juillet. 

1684. 

A.   JossE  DU  Prenne;  chez Yan  der  Hy  de.  16  juin. 

LÉON  Van  Kerckhoye  ;  chez  Jean-Baptiste  Van  Heil. 
Jean  de  Willer;  chez  .....  AUart.  17  septembre. 

1685. 
M.   André  Van  der  Plancken  ,  de  Bruxelles. 

1686". 

A.    Thibaud  Micheau;  chez  Luc  Achtschellincx.  29  juin. 

Pierre ;  chez  Adrien  Bauduin.  13  juillet  ^ 

Jean-Baptiste  Van  Bochaudt;  chez  Jean-Baptiste 

Van  Heil.  16  juillet. 
Gilles-François  Capiae;   chez Lacoerdt. 

18  juillet. 
Liévin-IllewardYan  Achter;  chez Van  der 

Heyden. 

Gilles  Wauters  ;  chez Wautiers. 

Antoine  de  Vorster,  de  Bruxelles,  bourgeois;  chez 

Leremans. 

'  Ce  nom  a  été  bifîë. 


—    478    — 

Cotina;  chez Lacourt. 

Van  dek  Borcht;  chez de  Hondt^ 


1688. 

A.   Antoike  de  Vuster,  de   Bruxelles;    chez 

Lermans  ^ 

Adrien  Franckien  ,  de  Bruxelles  ;  chez Her- 

rebos. 

1689. 

M.   Ferdinand  Coleyns. 

Victor  Janssens,  bourgeois.  12  août. 

1690. 

M.   Jean  Mareen,  de  Bruxelles.  7  juin. 

LÉON  Van  Heul  (fils  de  maître) ,  de  Bruxelles ,  bour- 
geois. 3  juillet. 

Henri  Heretibaudt,  de  Bruxelles,  bourgeois.  3  juillet. 

Mathieu  Schouyaerts  ,  de  Bruxelles ,  bourgeois. 
28  septembre. 

Gilles  Numants,  de  Bruxelles,  bourgeois.  28  sep- 
tembre. 

A HoRiCK;chez Vander  Heyden.  3juin. 

1691. 
M. Willemoth. 

A.   Joseph  Labureur;   chez Van   der   Heyden. 

5  janvier. 

'  Plusieurs  de  ces  noms  peuvent  appartenir  à  l'année  1687. 
*  Ce    nom   doit   être  le    même    que  celui  qui  est  inscrit  sous 
l'année  168G. 


—    479 


1692. 


M.   Jean  Pletinx,  de  Bruxelles,  bourgeois. 
François  de  Bargas.  8  octobre. 

A.  Jacques  Marchant  (fils  de  bourgeois);  chez   Pierre 
Van  Orley.  9  novembre. 

1693. 

M.   Jacques  Huysmans.  14  janvier. 
Gilles  Basavechia.  2  novembre. 

A.   Antoine  Podevin;  chez  j\Iathieu  Schoevaerts.  23  avril. 
Gaspard  Van  Noy  ;  chez  Pierre  Van  Orley.  4  août. 

1694. 

M.   Mathieu  Rombauts.  26  février. 
Jean-Baptiste  Van  Dist.  10  avril. 

A.    Adrien  Van  de  Wyns  (fils  de  François);  chez  Adrien 
Baudewyns.  10  mars. 
Thomas  Van  der  Schilde;  chez Lamberti. 

1695. 

M.   Charles  Van  Gelé. 

Lefelz  '. 

JÉRÔME  Beughel  {sic).  Il  ne  prêta  serment  que  le 
18  octobre  1718. 

A .    Jean  Vale  ,  aliàs  Vaelen  ;  chez Janssens  *. 


»  Comme  il  n'y  a  pas  de  date,  ils  peuvent  avoir  été  admis  en  1694. 
*  On  trouve  le  même  nom  inscrit  une  seconde  fois  comme  apprenti 
chez  le  même  maître  sous  l'année  1698. 


—    480    — 

1696. 

M.    Adrien  de  Bie.  Il  prêta  serment  en  juin  1703. 

Ignace  de  Bie.  Il  ne  prêta  serment  que  le  19  octo- 
bre 1718. 

A.   Jean- Joseph  Rottenbuech;  chez  ......  Collyns. 

Guillaume  Blommart  ;  chez  Pierre  Van  Orley. 

1698. 

M.   Augustin  Kooppens. 
Pierre  Bettens. 
Thibaud  jMichu. 
Pierre  Lacort. 
Pierre  Lebron. 
François  Van  Bremt  (?). 

Boelie. 

Roemart. 

LiÉviN  Van  Achter. 
Jean  Foarge. 

A.   Jean  Vaele,  bourgeois;  chez Janssens  '. 

1699. 

M. de  Nef,  d'Anvers. 

jMichel  Van  Couchoem. 
Paul  Bruyghel. 
Jacques  Van  der  Bought  {sic). 
Antoine-Wenceslas  Raymon  ^ 
Jacques  Happrons. 

'  Il  est  déjà  inscrit  sous  l'année  1G95. 

^  Dans  le  registre  on  l'avait  inscrit  sous  le  nom  à'Hutonue  Rai- 
mer  ;  c'est  probablement  lui-même  qui  a  écrit  au-dessous  :  Anthonus 
Wenseslaus  Raymon. 


—    481     — 

Henri  Van  den  Houten. 
Innocent  {Innocies)  de  Oudt. 

MiESCOE. 

A.    JossE  Groenins  (?);  chez Tielborgh. 


1700. 

M.    Jacques  Van  der  Heyden, 
François  Van  Schoer, 
André  Van  der  Elst. 
François  Jacqmin. 
Jean-Baptiste  Morel. 

A .   Jean  Van  der  Heyden  ;  chez Van  Oerley. 

1701. 

M.   Adam  Van  Divoet. 
David  de  Konningh. 
Jean-Charles  Van  Dynen. 

Van  der  Cappen. 

Pierre  Janssens.  Il  ne  prêta  serment  que  le  19  octo- 
bre 1718. 

A .    Luc  Stock  ;  chez Lamberty. 

Snagels;  chez Collyns. 

1702. 

M.    Herman  Pilemans. 
François  Quebaut. 

Van  der  Marcken. 

Elisabeth  Celdrin. 
Catherine  Van  Stichel. 

32 


—    482    — 

1703. 

M.   Antoine  Baebiers. 
Reysbracht. 

A.   Adrien  Pouwels;  chez Van  Orly, 

1704. 
M.  François  Scoevaerts.  8  décembre. 

1705. 

M.  Denis  Lemoen.  9  juin. 

Jean  Van  Helmont.  29  septembre. 
Pierre  Snyers.  29  septembre. 
Pierre  Eickens.  8  octobre. 

Verheul. 

.....  Laboreu. 

1706. 

M.  Charles  Jacops. 

Daniel-Louis  Planchon. 

1707. 

M.  Bernard  Van  Hamme. 

Corneille-Antoine  Cortens. 
JossE  de  Silva. 

Nicolas  Simon.  Il  ne  prêta  serment  que  le  14  fé- 
vrier 1738. 
Philippe  jMaillaert. 
François  Maillaert. 

A.  Corneille  Carluy;  chez  Victor  Janssens. 

1708. 
M.  Philippe  de  Hont. 


—    483    — 

A.  Jean-Feaxçois  Van  der  Borcht;  chez Van 

Orley  '. 

1710. 

M.  Jean  Van  Orley  (fils  de  maître).  24  juin. 
Honoré  Lacordt.  25  juin. 

Jean-Baptiste  Van  Gheel  (fils  de  maître).  25  juin. 
GÉRARD  Werys. 
Henri  Moors. 

1711. 

31.  Corneille  Corllt.  15  juillet. 
Pierre  Eyeraert. 
Albert  Pirée. 
Luc  Sterckx.  2  octobre. 

A.  JossE  Colboeet;  chez  Adrien  Caron. 

1712. 

M.   Michel  Van  Cutsem. 

Jean  Van  der  Eyden.  4  février. 
Siger-Jacques  Van  Elmont. 

A.   Pierre  Proest;  chez Jansens. 

Jean-Baptiste  Sadelee  ;  chez Ertibaoudt. 

François-Luc  Caus^tlle;  chez Van  Orley. 

Jean  Van  der  Velden;  chez Jansens. 

Jacques  Van  Nattom;  chez  Jean  \an  der  Eyden. 
David  Basavecia;  chez  Gilles  Basavecia. 

»  Il  ne  paya  que  la  moitié  du  droit,  parce  qu'il  exerçait  l'état  de 
tapissier. 


—    484    — 

1713. 

M.  Jean-Baptiste  de  Sadelere.  12  janvier. 
David  Basavechia.  2  juin, 
Henri  Van  Wel.  10  juin. 
Philippe-Joseph  Terinau. 
Jean- Joseph  Rodenberch.  21  octobre. 

CORTENS. 

1715. 
M.  Louis  Grange.  21  octobre. 

Pierre  Van  Attom.  21  octobre. 
Gaspard  Van  Turrenhoudt.  21  octobre. 
Duplesci. 

A.   Jean-Baptiste  Mille;  chez  Philippe  de  Hont. 
François  Corluy;  chez  Jean  Van  Orley. 

1716. 

M.   Luc  Van  der  Stock.  29  mai. 
François  Reps.  29  mai. 

1717. 

M,  Jean-Baptiste  de  Neille. 
Pierre  Horto. 
Pierre  Duval. 

A .   André-Joseph  Zelhorst  ;  chez  Jacques  Helmont. 
François  Mossens;  chez  Corneille  Corluy. 
Alexandre  Collart;  chez  Henri  Van  Welle. 
Nicolas  DE  H AEN  ;  chez  Jacques  Helmont. 

1718. 

M.   Antoine  Wereneer.  19  octobre. 
Pierre-Ferdinand  Collyns. 


485 


1719. 

M.   Pierre  Herdibout  (fils  de  maître).  25  février. 
Jean  de  Potter.  28  février. 
Jean-Baptiste-Guellaume  Van  Diest.  18  février. 
Charles  Eyckens. 
François  Rèctem. 
Théodore  Winckeleer. 
Jean  Sinckeleer. 
Barthélemi  de  Wit. 

A.    François  Pickery;  chez  Adrien  de  Carron. 

Georges- Joseph  Van   der    Steen;    chez    Corneille 

Corluy. 
Jean  Tibout;  chez  Charles  Eyckens. 

1720. 
M.  François  Baudewyxs  (fils  de  maître).  27  novembre. 

1721. 

M.  François  Van  Auwerckercke.  12  août. 
André  de  Martien. 

Van  der  j\Iyn. 

Dominique  Allar.  12  août. 
Antoine  de  Donckers.  26  décembre. 
Mathieu  Collar.  26  décembre. 

A.    Roland  Peemans;  chez  Jacques  Van  Helmont. 
Barthélemi  Conincksloy;  chez  Henri  Van  Wel. 
Jacques  François  ;  chez  Adrien  de  Caron. 
Jean  Au^tenhoye;  chez  Luc  Stercke. 
Lambert  Straeti^ians  ;  chez  Henri  Van  Wel. 


—    486    — 

1722. 
M.   Andeé  Zelhoest.  4  octobre. 

1724. 
M.   GÉRARD  Sevin.  3  mars. 

Jean-Charles  le  Trotteur.  23  juin. 
Barthélemi  Conkcxloy.  19  juillet. 
Nicolas  Billet.  12  octobre. 

A .    Sébastien  Losché;  cliez  Louis  Grange. 
Jérôme  Bruneau;  chez  Jérôme  Breugel. 

1725. 

M.    Pierre  Hofmans.  26  avril. 
Jacques  Yan  Hattem.  26  avril. 
Charles  Baillieu.  15  octobre. 
Louis  Geron.  16  octobre. 
Ignace-Robert  Tummermans.  16  octobre. 
Nicolas  de  Haen.  17  octobre. 
Henri  Bascour.  19  octobre. 

A.    Gérard  Rascqen;  chez  Jérôme  Breugel. 

Jacques  Van  dee  Velden;  chez  Barthélemi  Yan  Con- 

nincxloo. 
Jean  Blondel  ;  chez  Pierre  Hofmans. 
François  Moiserol  ;  chez  Jacques  Yan  Helmont. 

1726. 

M.    P.  HuLSBOSCH.  19  juillet. 
Roland  Peemans.  25  juillet. 

A.  Louis  Yan  den  Beande;  chez  N.  Geron. 
François  Jacobs  ;  chez  Henri  Yan  Wel. 
Maximiliende  Haes;  chez de  Honclt. 


—    487    — 

1727. 

M.   Jean  Audenhage.  5  juin. 
Corneille  Breughel. 

1728. 
M.   André  I\Ieulebeeck. 

A .   Joseph  Labignau  ;  chez  Louis  Grange. 

1729. 

M.   Martin  Hullet.  Il  ne  prêta  serment  que  le  23  juin 
1733. 

1730. 
M.   Louis  Van  den  Branden.  9  octobre. 

A.   Nicolas  de  Péri. 

1731. 

M.   Jean  Mille.  Il  ne  prêta  serment  que  le  12  juin  1734. 
Michel  Breugel.  22  juin. 
Pierre  Schoevaerts.  8  octobre. 
Jean-Bernard  Thibaut.  8  octobre. 

A.   Benoît  de  Noose;  chez  Philippe  de  Hondt. 

1732. 
M.  Guillaume-Joseph  Bigé. 

A.  Jean-Baptiste  Van  KERCHO^^;N;  chez Elle- 

mondt. 
Guillaume-Pierre  Mensaert;  chez  Victor  Jansens. 


—     488    — 


1733. 


M.  François-Louis  Greyner,  Il  ne  prêta  serment  que  le 
20  juin  1739. 
François  Schalck. 
Frédéric  Dumesnil, 

A.   Gilles  Wageîians;  chez  Michel  Breugel. 

1734. 

M.  Julien  Disbecq. 
François  Eisen. 
-  Pierre  Lacourt  ;  né  muet. 
Jean  le  Brou. 
Lambert  Straetmans. 

A.   François  Deltombre;  chez  Henri  Yan  Wel. 
Julien  Disbecq  ;  chez  Jacques  Van  Helmont. 
Horace  Sneps  ;  chez  Jean  le  Brou. 

1735. 

M.   Charles  de  Witte. 

Jean-Baptiste  Château. 
Nicolas-Emmanuel  de  Pery. 

A.    Thomas  de  Jongh;  chez Yan  Wel. 

Michel  Erie  ;  chez Troteur. 

1737. 

M. Sauvage. 

Anne-Marie  Blendeff, 

Antoine  Leclercq.  Il  ne  prêta  serment  que  le  12  juin 
1751. 


—    489    — 

A.   Charles  de  Reux;  chez  Frédéric  Diimesnil. 
GÉRARD  Vadder  ;  chez  Philippe  de  Hondt. 
Jean  Jacobs  ;  chez  François  Schalck. 
Marie-Catherine  Juppin  ;  chez  Louis  Grange. 
Charles  de  Backer  ;  chez  Lambert  Straetmans. 
Jacques- Albert  Fairon;  chez  Jean-Joseph  Rotten- 

burgh. 
Antoine  Matthieu  ;  chez  Charles  Baillieu. 
François-Joseph  Delmot. 

Guillaume  de  Broe  ;  chez  Jean- Baptiste  Château. 
Pierre  Van  der  Haeghen  ;  chez  Philippe  de  Hondt. 
Charles -Joseph    Pigace;   chez    Nicolas-Emmanuel 

Pery. 
Jacques  Bisback;  chez  Julien  Disbeck. 
Gérard  de  Vadder;  chez   Louis  Van  den  Brande. 

1738. 

M.  Jean- Albert  Rottenbourg.  18  mars. 
Joseph  Lamberti.  10  décembre, 

1739. 

M.  Thomas  Duion.  29  juin 
Lambert  Panne,  l^i-  juillet. 
Pierre  Van  der  Haeghen. 

Chrétien  Baillieu.  Il  prête  serment  le  25  janvier  1741. 
Georges-Charles  de  Witte. 

A .    Nicolas  Kerckheer  ;  chez  Lambert  Straetmans. 
Nicolas  Hansems  ;  chez Van  Diest. 

1740. 
M.  Charles  de  Backer.  7  février. 


—    490    — 

G.-P.  Mensaert.  23  juin. 
Gilles  Allart,  23  juin. 

JossE  DE  Mulder;  chez  Antoine  Barbiers. 
Pierre  Van  der  Haege;  chez  Pliilippe  de  Hondt. 

Pierre  Engelbert  ;  chez Hulet. 

Pierre  Prié;  chez  Louis  Greyner. 
Pierre  Luygens  ;  chez  Lambert  Panne. 


(Pour  être  continué). 

Alex.  Pinchakt. 


491     — 


VARIÉTÉS. 


Yperiana.  —  Notices,  études,  notes  et  documents 
SUR  Ypres,  par  Alphonse  Vandenpeereboom  ,  t.  I,  les 
Halles  d' Ypres,  pp.  xn  et  402,  pi.  —  Cet  ouvrage,  imprimé 
avec  soin  et  enrichi  de  nombreuses  gravures  à  Teau  forte , 
est ,  comme  l'auteur  le  dit  lui-même  dans  la  préface ,  un 
«  recueil  »  de  notices,  de  faits,  de  documents  et  de  détails 
laborieusement  réunis,  analysés  et  classés  à  l'usage  du 
futur  historien  de  la  ville  d' Ypres,  qui  les  utilisera  ou  les 
négligera  selon  son  bon  plaisir. 

11  est  certain  que  lorsque  M.  Vandenpeereboom  aura 
complété  son  travail  et  que  toutes  les  parties  qu'il  se  pro- 
pose de  traiter  y  auront  été  exposées  avec  le  soin  qu'il  a 
mis  à  ce  premier  volume,  il  aura  mérité  les  éloges  que  l'on 
décernerait  à  l'historien. 

Celui  qui  a  couronné  une  vie  bien  remplie ,  par  de  lon- 
gues, patientes  et  pénibles  investigations  dans  le  domaine 
du  passé ,  qui  en  a  coordonné  les  fruits  avec  méthode ,  a 
certainement  bien  mérité  des  sciences  historiques.  L'ar- 
chéologie doit  avoir  sa  part  d'éloges  aussi  large  que  possi- 
ble ,  car  elle  est  la  source  principale  où  l'histoire  puise  ses 
meilleurs  renseignements. 

Les  Yperiana  où  les  événements  sont  minutieusement 
rapportés,  disons  même  avec  une  certaine  bonhomie  qui 
ne  manque  pas  de  charme  dans  quelques  endroits,  les 
Yperiana  seront  lues  avec  bonheur  par  les  citoyens  de 
l'antique  cité  flamande  qui  en  garderont  le  plus  précieux 


—    492    — 

souvenir.  Ils  y  trouveront  leur  histoire  narrée  à  la  manière 
de  Sanderus  et  de  Marc  de  Vaernewyck ,  les  plus  populai- 
res de  nos  écrivains  d'autrefois. 

M.  Vandenpeereboom  a  suivi  le  même  procédé.  Il  com- 
mence son  livre  par  la  description  des  Halles  et  du  Beifroi 
de  sa  ville  natale.  C'était  en  effet  pour  l'histoire  de  cette 
vieille  tour  communale,  dont  la  cloche  à  la  voix  puissante 
appelait  nos  aïeux  au  combat  pour  la  défense  de  leurs 
libertés  publiques ,  qu'il  fallait  commencer  un  livre  où  le 
patriotisme  et  l'amour  du  home  se  reflètent  depuis  la  pre- 
mière page  jusqu'à  la  dernière. 

Ce  volume  est  donc  consacré  aux  Halles ,  c'est-à-dire  à 
la  commune ,  à  son  ancienne  splendeur  et  à  sa  décadence. 
Il  renferme  des  chapitres  intéressants  sur  Ypres,  sur  sa 
richesse ,  et  la  puissance  de  ses  corporations  commerciales 
au  moyen-âge.  Toute  cette  partie  est  bien  faite,  mais  il 
n'en  est  pas  de  même  d'autres  où  l'auteur  n'a  pas  suffisam- 
ment étudié  son  sujet.  Ainsi  dans  le  chapitre  VIII,  où  il 
s'occupe  des  cloches  et  du  carillon,  il  nous  dit  que  les  tra- 
vaux de  restauration  exécutés  l'année  dernière  au  campa- 
nile, et  les  échafaudages  qu'on  a  élevés,  ont  permis  d'exa- 
miner les  cloches  de  près,  d'en  faire  copier  les  inscriptions, 
d'en  mesurer  la  circonférence  et  d'en  surmouler  les  orne- 
ments. Puis,  il  ajoute  que  plusieurs  parties  de  ces  orne- 
ments sont  remarquables,  notamment  celles  de  la  cloche 
no  VIL  Or ,  la  gravure  qu'il  en  donne  représente  une  danse 
macabre  que  nous  connaissons  depuis  très-longtemps.  Elle 
figure  dans  nos  Églises  de  Gand  ^  et  a  été  moulée  'poior  la 
'première  fois  sur  la  grande  cloche  du  carillon  qui  couron- 
nait l'une  des  belles  tours  de  l'église  de  Saint-Jacques  à 
Gand ,  pour  servir  à  un  rapport  que  nous  avons  présenté  à 
la  Commission  des  monuments  et  publié  dans  le  Messager  ^. 

*  Églises  de  Gand,  t.  II,  p.  30. 

*  Messager  des  Sciences,  1851,  p.  464. 


—    493    — 

La  description  du  sujet  par  Tauteur  des  Yperiana  n'est 
pas  tout-à-fait  exacte.  Ces  sortes  de  dessins  expriment  pres- 
que toujours  une  pensée  religieuse  sous  une  forme  allégo- 
rique. Ainsi,  le  bas-relief  d'Ypres,  exécuté  évidemment 
d'après  celui  de  Gand ,  puisqu'une  différence  d'âge ,  qu'on 
nous  passe  cette  expression,  le  démontre  par  un  écart  de 
quarante-cinq  années,  le  bas-relief  d'Ypres,  disons-nous, 
comme  «  son  aîné  »  de  Gand ,  signifie  qu'à  toute  heure  la 
mort  frappe  indistinctement  les  jeunes  et  les  vieux. 

Cependant,  M.  Vandenpeereboom  se  demande  si  cette 
«  espèce  de  danse  macabre,  »  représentant  «  un  magis- 
trat en  robe  ou  parure,  peut-être  un  prêtre  et  un  noble 
homme  en  justaucorps,  »  se  tenant  par  la  main,  «  un 
squelette  armé  d'une  longue  pique  qui  semble  entraîner 
doucement  ces  grands  personnages ,  »  ne  rappellerait  pas 
aux  «  grands  et  puissants,  menant  bonne  vie  ici  bas, 
qu'eux  aussi,  entraînés  par  la  mort,  devront  quitter  un 
jour  leur  ville,  comme  les  étrangers  quittaient  la  cité 
quand  sonnait  la  cloche  des  portes.  » 

Cette  interprétation ,  un  peu  trop  empreinte  de  l'amour  du 
clocher,  ne  nous  paraît  pas  exacte,  surtout  quand  on  sait 
que  le  bas-relief  n'a  pas  été  fait  pour  Ypres.  L'artiste  qui 
l'a  conçu  n'a  pas  voulu  désigner  les  hautes  classes  de  la 
société  à  l'arrêt  inexorable  de  la  ]\Iort,  mais  l'humanité 
tout  entière ,  jeunes  et  vieux,  riches  et  pauvres.  Cette  pen- 
sée est  infiniment  plus  large ,  plus  digne  et  plus  conforme 
à  l'esprit  chrétien  inspiré  par  la  charité,  l'une  des  trois 
vertus  théologales. 

Si  ce  livre  ne  s'occupe  que  des  Halles,  en  décrit  l'archi- 
tecture et  rappelle  la  richesse  des  siècles  passés ,  ainsi  que 
les  noms  des  artistes,  architectes,  sculpteurs  et  peintres 
qui  les  ont  élevées  et  embellies ,  d'autres  parties  non  moins 
précieuses  de  l'histoire  d'Ypres  ont  droit  aux  mêmes  études 
et  aux  mêmes  honneurs. 


—    494    — 

Les  monuments  religieux ,  ceux  que  la  charité  a  fondés , 
que  les  corporations  si  puissantes  et  si  guerrières  au 
moyen-âge  nous  ont  laissés ,  réclament  leur  place  dans  ces 
Yperiana,  où  tout  ce  qui  intéresse  l'histoire  de  l'antique  et 
opulente  ville  flamande  a  été  réuni  avec  soin,  con  amore 
par  l'un  de  ses  meilleurs  et  de  ses  plus  dévoués  citoyens. 

B°°  K.  DE  V. 


Lettke  de  SrBRECHT  Waterloos,  graveur  des  sceaux 
DU  Conseil  de  Flandre,  en  1617. 

«  Myne  heeren, 

»  Ik  heb  uwe  eerw.  groote  obligatie  van  de  courtoisie 
van  xxxm  gulden  die  de  selve  belieft  heeft  my  te  schenken 
voor  een  grativiteyt  ende  myn  reyse  ende  costen  vant  over- 
brengen  van  den  nieuwe  zegelen,  daeraff  ick  nochtans 
noch  niet  en  heb  ontfangen  van  de  explociten  van  uwe 
eerw.  raede,  op  myn  quitantie,  dy  ick  voir  goet  houde;  dan 
en  heb  die  tôt  noch  toe  niet  willen  presenteren,  deur  de 
swaericheyt  die  my  gemaeckt  wordt  deur  het  scryven  van 
uwe  eerw.  greffier,  die  alhier  gescreven  heeft  aen  den  heere 
greffier  Kinschot  my  van  ailes  satisfactie  gegeveu  te  hebben, 
daer  over  my  obstaeckel  gedaen  wordt  int  betaelen,  zœ  van 
myn  fatsoen  als  zilver  in  vuegen,  zœ  ick  verstaen  dat  myn 
heeren  van  de  finantien  daerover  hebben  doen  scryven  aen 
uwe  Eerw.;  dan  zœ  ick  vreese  dat  tselve  allenlyck  sal 
geschiedt  zyn  aen  den  voorn.  greffier ,  die  ick  twyfele  myn 
onwetens  de  faulte  heeft  gedaen  heb  goettgevonden  u 
Eerw.  daerover  te  scryven,  zeer  oitmoedelyck  biddende  dat 
de  selve  gelieven  de  heeren  van  den  finantien  soe  informe- 
ren,  dat  de  mercede  my  by  uwe  Eerw.  geschiet  niet  en 


—    495    — 

streckt  tôt  nacleel ,  want  ick  anders  van  den  voirs,  heeren 
van  finantien  eglieene  vacatien  en  pretendere  voir  myn 
reyse.  Waerop  my  betrouwende  sal  uwe  Eerw.  den  lieere- 
bevelen  gebiedende  my  zeer  oitmoedelyck  aen  der  selver 
goede  gratie  bly vende, 
»  ]\Iyne  Heeren,  »  Eerw. 

»  Seer  oitmoedick  dienaer; 
»  Sybeecht  Waterloos. 
»  Uuyt  Brussel  den  xvi  december  1617.  » 

«  Messeigneurs.  —  Maître  Sibrecht  Waterloos ,  tailleur 
des  seaulx  et  coings  de  Son  Altesse,  ayant  achevé  les  seaulx, 
tant  grands  que  petits,  pour  le  conseil  de  Flandres ,  a  désire 
venir  par  delà  avecq  permission  de  Messeigneurs  des  finan- 
ces, pour  les  délivrer  en  vos  mains.  Auquel  effect  il  a 
requis  d'estre  accompagne  de  ce  mot  de  lettre.  Il  vous 
plaira  délivrer  en  ses  mains  les  vieulx  et  usez  pour  les 
remettre  en  finances  et  estre  cassez. 

»  Sur  ce  me  recommandant  bien  humblement  a  voz 
bonnes  grâces,  je  demeure 

»  Monsieur ,  votre  très  affectionne  serviteur, 

»   KiNSCHOT.  » 

{Correspondance  du  conseil  de  Flandre,  n^  85). 


RUBENS   DIPLOMATE  ET  HOMME    POLITIQUE  \   —   Tout  le 

monde  connaît  le  grand  artiste  qui  a  donné  son  nom  à  une 
école  justement  célèbre  et  dont  les  tableaux  font  l'envie  et 
la  gloire  des  amateurs.  Nous  n'avons  point  à  parler  ici  de 
Ptubens  peintre.  Mais  nos  lecteurs  éprouveront-ils  quelque 

♦  Histoire  politique  et  diplomatique  de  Pierre-Paul  Ruhens,  par 
M.  Gachaed,  1  vol.  in-8°.  Bruxelles,  O^ce  de  publicité,  1877. 


—    49G    — 

surprise  en  apprenant  que  Rubens  a  été  aussi  un  homme 
politique  de  valeur  et  un  diplomate  distingué.  Il  apparte- 
nait à  un  historien ,  dont  la  Belgique  est  fière  à  bon  droit , 
de  faire  connaître  ce  côté  à  peu  près  ignoré  de  l'existence 
de  rhomme  qui  est  certainement  une  de  ses  plus  grandes 
illustrations.  C'est  à  M.  Gachard  que  revient  en  grande 
partie  cette  importante  découverte  :  il  y  a  une  quaran- 
taine d'années,  en  parcourant,  aux  archives  des  affaires 
étrangères  de  France,  la  correspondance  des  envoyés  de 
Louis  XIII  à  Bruxelles,  à  la  Haye,  à  Londres,  il  y  trouva 
la  trace  positive  des  missions  diplomatiques  de  Rubens,  puis 
en  poursuivant  ses  recherches,  des  renseignements  authen- 
tiques et  détaillés.  M.  Gachard  publia  immédiatement  ces 
documents,  et  depuis  cette  époque  il  n'a  pas  cessé  ses 
investigations  et  c'est  à  elles  que  nous  devons  le  volume 
récemment  paru  et  qui  ne  laisse  plus  rien  à  apprendre.  Ce 
travail  démontre  que  Rubens  avait  une  véritable  aptitude 
pour  la  politique  et  pour  la  diplomatie.  M.  Noël  Sanisburg, 
qui  a  puissamment  aidé  M.  Gachard ,  dit  :  «  Les  lettres  de 
Rubens  fournissent  la  plus  vivante  peinture  de  son  carac- 
tère. Un  ton  élevé  et  noble ,  de  la  dignité  et  de  la  fermeté , 
de  la  finesse  unie  d'une  manière  exquise  à  la  politesse 
la  plus  délicate ,  une  composition  élégante ,  un  sentiment 
élevé,  tout  montre  à  la  fois  l'éducation  d'un  gentleman 
et  le  génie  de  l'homme.  » 

C'est  vers  1621  que  Rubens  commença  sa  carrière  poli- 
tique, car  les  lettres  de  noblesse  qu'il  obtint  en  1624, 
constatent  que  cette  faveur  lui  fut  accordée  à  cause  de 
«  services  rendus  au  roi  »  avant  cette  époque.  Nous  ne 
prétendons  pas  raconter  ici,  après  i\I.  Gachard,  l'historique 
des  négociations  auxquelles  le  grand  peintre  fut  active- 
ment mêlé.  Il  fut  envoyé  en  Angleterre  pour  ménager  un 
rapprochement  entre  l'Angleterre  et  l'Espagne  en  1626  :  il 
déploya  une  activité  infatigable,  ne  se  rebutant  jamais, 


—    497    — 

poursuivant  avec  habileté  et  finesse  le  but  qui  lui  était 
imposé.  Il  se  rendit  ensuite  en  France  et  vint  même  jus- 
qu'à la  Rochelle  pendant  le  célèl)re  siège  de  cette  ville, 
^lais  il  ne  fit  que  passer  et  gagna  rapidement  Ma- 
drid, où  il  acquit  une  grande  influence  auprès  du  roi,  qui 
avait  commencé  par  blâmer  l'emploi  d'un  peinti'e  dans  une 
mission  diplomatique;  il  le  nomma  même  secrétaire  du 
conseil  privé.  De  là  il  revint  en  Angleterre  et  reprit  plus 
vivement  que  jamais  la  poursuite  de  l'arrangement  qu'il 
souhaitait.  Sa  conduite  mérita  une  complète  approbation  : 
les  ministres  anglais  et  l'ambassadeur  d'Espagne  à  Paris 
insistèrent  sur  les  services  rendus  par  Rubeus;  la  Junte 
d'Espagne  fit  publiquement  son  éloge  et  Olivarès  lui  adressa 
de  chaleureux  remerciements.  Quant  à  l'Infante  Isabelle, 
elle  triomphait  du  succès  de  celui  qu'elle  avait  constam- 
ment protégé  et  qui  avait  su  lui  inspirer  une  constante 
confiance.  La  paix  fut  conclue  à  la  satisfaction  des  deux 
paj^s  et  Rubens  fut  créé  chevalier  par  le  roi  Charles ,  qui 
ajouta  à  ses  armoiries  des  pièces  empruntées  à  son  propre 
blason.  Plus  tard,  Rubens  fut  envoyé  auprès  de  Marie  de 
Médicis  après  sa  fuite ,  pour  servir  d'intermédiaire  entre  la 
reine  et  les  ministres  espagnols.  L'Infante  le  chargea  encore 
de  négocier  avec  les  Hollandais,  quand  la  guerre  éclata 
entre  l'Espagne  et  les  Provinces-Unies.  Mais  les  envoyés 
de  France  et  de  Venise  s'opposèrent  à  sa  réception.  Ce  fut 
la  fin  de  sa  carrière  diplomatique.  Rubens  y  fait  allusion 
en  écrivant  le  16  mars  1636,  à  son  ami  Peirose  :  «  Je  suis 
demain  contre  mon  goût  quelques  jours  à  Bruxelles  pour 
quelque  affaire  me  concernant.  Ne  croyez  pas  que  ce  sera 
pour  cet  emploi  que  vous  soupçonnez  (je  parle  de  bonne 
foi  et  vous  pouvez  me  croire  entièrement).  J'avoue,  il  est 
vrai,  que  dans  le  principe  je  fus  invité  à  m'employer  dans 
cette  affaire;  mais,  comme  à  mon  goût,  elle  ne  me  fournis- 
sait pas  suffisamment  de  matière,  mon  passeport  m'ayant 

33 


—    498     - 

fait  éprouver  quelques  difficultés,  ayant  de  mon  côté  fait 
naître  quelque  retard  volontaire ,  et  comme  il  ne  manquait 
de  gens  extrêmement  avides  de  tel  emploi,  je  me  suis  con- 
servé le  repos  domestique,  et,  avec  la  grâce  de  Dieu,  je 
suis  demeuré  tranquille  dans  ma  maison.  »  Et  il  ajoutait, 
faut-il  le  croire?  —  «  J'ai  en  horreur  le  séjour  des  cours.  » 
Un  mois  après,  le  cardinal-infant  conféra  à  Rubens  le 
titre  de  peintre  de  son  hôtel ,  en  le  gratifiant  de  la  même 
pension  dont  il  avait  joui  du  vivant  des  archiducs  Albert 
et  Isabelle.  Lorsqu'au  mois  de  mai  de  l'année  précédente 
il  avait,  comme  gouverneur-général,  fait  sa  première  visite 
en  la  ville  d'Anvers,  il  était  allé  voir  le  grand  artiste,  que 
la  goutte  retenait  au  lit  en  ce  moment,  lui  donnant  pu- 
bliquement toutes  les  marques  d'estime  et  de  considération 
qui  étaient  dues  à  son  génie  et  à  ses  travaux.  Eubens  mou- 
rut le  30  mai  1640,  succombant  à  une  de  ces  fréquentes 
attaques  de  goutte. 

0*6  DE  Baethélemt. 


--    499 


CHRONIQUE. 


Des  Yiglitts  van  Zuichem  Tagebuch  des  Schmalkalldischen 

DOKAUKKIEGS.  NaCH  DEN  AuTOGRAPH  DES  BrÛSSELER  StAATSARCHIVS 
HERAtîSGEGEBEN  UND  ERLAUTEET  VON  AtTGUST  VON  DrTJFFEL.  272  pp. 

Jamais  on  n'a  publié  plus  de  documents  historiques  que  de  nos 
jours,  et  aucune  époque  n'a  été  mieux  étudiée  que  le  XVI^  siècle. 
Mais,  aussi,  quelle  abondance  de  richesses  il  a  léguées  aux  historiens 
de  notre  temps  !  Si  les  investigateurs  sont  nombreux  et  répandus 
dans  tous  les  Etats  de  l'Europe,  leurs  publications  attestent  qu'ils 
travaillent  assidûment  à  répandre  la  lumière  par  leurs  publications 
sur  toutes  les  parties  de  l'histoire. 

L'auteur  de  l'ouvrage  que  nous  venons  ,de  citer,  M.  August  von 
Druffel,  mérite  à  juste  titre  d'être  classé  parmi  les  plus  dévoués. 
Son  livre  inspire  d'autant  plus  d'intérêt,  qu'il  éclaire  l'une  des 
figures  les  plus  considérables  du  siècle  de  Charles-Quint,  le  Prési- 
dent Viglius  ab  Aytta  de  Zwichem,  dont  le  Messager  des  sciences 
s'est  occupé  à  diverses  reprises  '. 

M.  von  Druffel  a  pris  son  sujet  dans  les  archives  de  l'État  à 
Bruxelles.  Il  y  a  trouvé  le  journal  où  Yiglius  annotait  succintement, 
jour  par  jour,  les  événements  dont  il  était  témoin  et  parfois  l'un  des 
acteurs,  et  qui  se  passaient  en  1546,  pendant  la  guerre  de  la  ligue 
protestante  de  Smalcalde  contre  la  puissance  impériale. 

Dans  ce  journal,  Viglius  observe  soigneusement  tout  ce  qui  se 
passe  dans  le  camp  de  son  maître;  mais  il  se  contente  d'indiquer 
très-brièvement ,  par  quelques  mots  seulement ,  le  fait  dont  il  veut 

*  Messager.  Pensions  et  émoluments  de  Viglius,  année  1877,  p.  28, 


-     500    — 

conserver  le  souvenir.  Le  manuscrit,  écrit  de  sa  main,  doit  être 
considéié  comme  un  ensemble  de  jalons  et  de  points  de  repère 
destinés  à  le  guider  plus  tard  dans  la  rédaction  d'une  relation 
complète  de  la  guerre  et  de  la  dissolution  de  la  ligue  de  Smalcalde. 

On  comprendra  que  nous  ne  pouvons  analyser  ce  volume  dans 
toutes  ses  parties  et  en  détail.  D'ailleurs,  les  annotations  sommaires 
faites  par  Viglius  seraient  trop  peu  intéressantes  si  l'auteur  n'y 
avait  joint  des  notes  pleines  d'érudition,  et  s'il  ne  les  avait  fait  pré- 
céder d'une  introduction  qui  leur  donne  une  incontestable  valeur 
historique. 

Le  journal  de  Viglius  finit  au  8  janvier  1547,  c'est-à-dire  à  l'épo- 
que oh.  la  fameuse  ligue  des  princes  protestants  allemands  de  Smal- 
calde fut  dispersée  par  les  armées  victorieuses  de  Charles-Quint. 

«  Cette  ligue,  dit  un  auteur  protestant,  dont  la  puissance  mena- 
çait d'ébranler  le  trône  impérial  même,  fut  dispersée  et  détruite  en 
peu  de  semaines.  Presque  aucun  des  confédérés  ne  resta  sous  les 
armes,  excepté  l'électeur  et  le  landgrave,  que  l'empereur  ne  se  mit 
pas  eu  peine  de  ramener,  les  ayant  dès  le  commencement  dévoués  à 
ses  vengeances.  Mais  ceux  mêmes  qui  se  soumirent  n'obtinrent  pas 
un  pardon  généreux  et  sans  conditions.  Charles  abusa  de  sa  supério- 
rité pour  les  traiter  avec  hauteur  et  sans  ménagement.  Tous  les 
princes  et  les  députés  des  villes  se  virent  forcés  d'implorer  sa  clé- 
mence dans  la  posture  humiliante  de  suppliants  K  ,;>  C'est-à-dire 
qu'ils  furent  tenus  de  se  jeter  à  genoux  devant  l'empereur,  sans  être 
assurés  que  sa  clémence  les  relèverait. 

L'année  suivante  Charles-Quint  porta  le  dernier  coup  aux  princes 
protestants  de  l'Allemagne  par  la  célèbre  bataille  de  Muhlberg  dont 
ce  recueil  a  publié  la  relation  ^. 

A  la  fin  du  volume  l'auteur  a  réuni  quelques  pièces  justificatives, 
parmi  lesquelles  «  l'ordre  de  bataille  »  de  l'armée  impériale. 

L'ouvrage  est  imprimé  avec  soin  et  prendra  la  place  qui  lui  ap- 
partient dans  les  collections  déjà  si  volumineuses,  des  documents 
historiques  que  les  savants  ont  rendus  à  la  lumière. 

B""  K.  DE  V. 


'    ROBERTSON. 

*  Messager,  année  1874,  p.  348. 


—    501    — 

Donations  aux  établissements  scientifiques  et  littéraihe. 
—  Dans  la  chronique  du  Librar  y -Journal,  de  New-York,  nous 
relevons  les  renseignements  suivants  sur  des  donations  faites  ré- 
cemment à  des  établissements  scientifiques  ou  littéraires  aux 
États-Unis.  L'honorable  M.  Asa  Packer  a  donné  à  l'Université  de 
Bethléem  (Penss)  sa  collection  de  livres,  estimée  100,000  dollars  ou 
500,000  francs. 

En  même  temps  un  citoyen  de  Philadelphie  a  fait  cadeau  aux 
habitants  de  Long-P.ranch  d'un  édifice  pour  y  loger  la  bibliothèque 
publique  et  le  musée. 

A  Chicago,  l'administration  municipale  sera  bientôt  en  possession 
d'un  legs  qui  lui  a  été  fait  par  feu  Newberry,  legs  se  montant  à 
2,000,000  de  dollars  ou  10,000,000  de  francs. 

Cette  dernière  somme  doit  être  consacrée  à  l'érection  et  à  l'entre- 
tien d'une  bibliothèque  publique  pour  la  ville.  Des  contestations 
judiciaires  ont  seules  empêché  jusqu'ici  que  la  municipalité  fût 
mise  en  possession  de  ce  legs,  qui  permettra  de  créer  1  une  des 
plus  belles  et  des  plus  riches  bibliothèques  municipales  d'Amérique. 

Le  même  journal  nous  apprend  que  les  femmes  aux  États-Unis 
remplissent  les  fonctions  de  bibliothécaires.  Ainsi  la  bibliothèciue 
administrative  de  l'État  d'Iowa  a  pour  bibliothécaire  une  femme. 
Celle-ci  ayant  résigné  ses  fonctions,  vient  d'être  remplacée  par  une 
autre  personne  du  même  sexe. 

La  première  avait  une  si  grande  habitude  et  une  si  longue  expé- 
rience des  livres  et  publications  de  jurisprudence,  qu'elle  est  con- 
servée pour  faire,  à  l'occasion,  les  recherches  qu'auraient  à  faire  des 
personnes  appartenant  à  l'Etat  d'Iowa,  mais  qui,  n'étant  pas  de  la 
ville,  ne  peuvent  les  j^oui-suivre  par  elles-mêmes.  En  effet,  quelques 
bibliothèques  des  États-Unis  ont  à  présent  des  agents  attitrés  qui, 
moyennant  une  certaine  rétribution,  se  chargent  des  recherches 
pour  les  personnes  qui  ne  sont  pas  sur  les  lieux  :  ce  qui  est  une 
grande  facilité  et  commodité  offerte  aux  gens  habitant  loin  des 
villes  et  des  centres,  ou,  comme  on  dirait  en  Europe,  habitant  la 
province. 

Les  Archives  de  la  ville  de  Thielt.  —  Il  n'y  a  pas  beaucoup 
de  villes  de  troisième  rang  en  Belgique  qui  possèdent  tant  de  docu- 
ments remarquables  que  la  petite  ville  de  Thielt.  Nous  voulons  en 


—    502     ~ 

donner  une  idée  en  publia7it  la  notice  suivante  sur  ce  dépôt,  digne 
de  l'attention  de  tous  ceux  qui  s'occupent  de  l'étude  de  notre  his- 
toire nationale.  Cette  liste  n'est  pas  méthodique,  pour  le  simple 
motif  qu'il  n'existe  pas  encore  d'inventaire,  et  que  le  classement 
de  ces  archives  est  encore  à  faire. 

1.  Une  grande  quantité  de  chartes  (privilèges,  octrois,  etc.),  dont 
la  plus  ancienne  date  de  1275). 

2.  Collection  de  keuren ,  «  ordonnances  politiques  »  [voorghebo- 
den)  et  statuts,  depuis  l'année  1415. 

3.  Les  comptes  de  la  ville.  Le  plus  ancien  n'est  que  de  1431  ;  il 
y  a,  malheureusement,  quelques  lacunes  aux  XV«,  XVI«  et  XVII" 
siècles  '.  La  collection  est  cependant  très-intéressante  pour  l'his- 
toire de  la  ville  et  des  beaux-arts.  M.  Alphonse  De  Vlaminck  y  a 
beaucoup  puisé  pour  son  histoire  de  la  chambre  de  rhétorique  de 
Thielt. 

4.  Registres  d'impositions,  comptes  des  pointmghen,  etc.,  depuis 
1635. 

5.  Livre  terrier  de  Thielt-binnen,  copie  faite  en  1635,  par  De  Mol, 
avec  cartes;  copie  du  terrier  de  1732,  sans  cartes. 

6.  Deux  copies  du  terrier  Thielt-buiten ,  l'une  de  1651  et  l'autre 
de  1729  (cette  dernière  en  deux  volumes). 

7.  Registre  des  dîmes  (affermage,  etc.),  de  1644,  1650  et  1655. 

8.  Livres  manuels  de  Jean  van  Zantvoorde,  relatifs  aux  députa- 
tions  de  la  commune,  frais  de  guerre,  etc.  (1620-1640). 

9.  Registres  des  bourgeois  (poorteiy)  de  Thielt,  commençant  en 
1558  et  renouvelés  en  1700  et  1745. 

10.  Registres  aux  résolutions  du  magistrat,  depuis  1671.  — Re- 
gistres aux  ordonnances,  de  1693  jusqu'à  la  fin  du  XVIII<'  siècle. 

11.  Registres  de  la  cour  féodale  de  Thielt,  depuis  1700.  —  Ferie 
de  la  cour  féodale,  de  1760. 

12.  Registre  aux  sentences  criminelles,  de  1620  à  1685.  —  En- 
quêtes et  informations  criminelles,  faites  par  les  hommes  de  fief  de 
la  cour  féodale  de  Thielt. 


*  Aux  archives  de  l'État,  à  Bruxelles,  on  conserve,  si  nous  avons 
bonne  mémoire,  quelques  comptes  de  la  ville  de  Thielt  de  la  fin  du 
XIV"  et  du  commencement  du  XV"  siècle. 


—    503    — 

13.  Lettres  missives  du  conseil  de  Flandre  aux  magistrats  de  la 
ville. 

14.  Lettres  missives  des  hauts-échevins  de  la  châtellenie  de 
Courtrai  (XVII»  et  XVIII«  siècles). 

15.  Collection  d'édits,  décrets,  etc.  (XVII»  etXVIIP  siècles). 

16.  Lettres  de  plusieurs  villes  et  autres  administrations  pu- 
bliques. 

17.  Lettres  particulières  touchant  les  affaires  de  la  ville  de 
Thielt. 

18.  Documents  relatifs  au  passage  des  gens  de  guerre,  loge- 
ments militaires,  etc. 

19.  Papiers  concernant  les  chaussées  aux  environs  de  Thielt. 

20.  Actes  et  autres  documents  touchant  les  affaires  administrati- 
ves de  la  ville,  parmi  lesquels  on  rencontre  beaucoup  de  pièces 
concernant  la  halle,  le  carillon,  la  prison,  les  écoles,  etc. 

21.  Accoorden  van  issuioe;  dixième  denier  sur  les  propriétés  ven- 
dues, etc.  (Registres  et  liasses.) 

22.  Affermage  des  accises  de  la  ville,  depuis  1540  (Registres  et 
fardes). 

23.  Procédures  devant  la  vierschare  des  échevins,  depuis  l'an- 
née 1658. 

24.  Enquêtes,  plaidoiries,  avis  et  autres  pièces  de  procédure. 

25.  Procès  intentés  par  ou  contre  la  ville  devant  le  conseil  de 
Flandre. 

26.  Documents  relatifs  au  projet  de  canalisation  de  la  petite 
rivière,  dite  C alêne  ou  Pouquesbeke. 

27.  Comptes  de  l'église  paroissiale  de  Thielt,  depuis  1572.  (Ce 
sont  les  doubles  des  comptes  déposés  aux  archives  de  l'église). 

28.  Compte  de  l'administration  des  biens  des  pauvres.  1580  et 
années  suivantes. 

29.  Registres  aux  états  de  biens,  i)assés  devant  les  échevins  de  la 
ville  ;  idem  des  curatelles.  Le  plus  ancien  registre  de  cette  série  date 
de  1472. 

30.  États  des  mortuaires  ;  comptes  des  biens  des  mineurs,  depuis 
le  commencement  du  XVIe  siècle. 

31.  Registres  aux  œuvres  de  loi,  depuis  1620. 

32.  Actes  de  vente  des  maisons,  terres,  prairies,  etc.,  de  la  ville 
de  Thielt  (XVJe,  XVII«  et  XVIII"  siècles). 


—    504    — 

33.  CËuvres  de  loi  passés  devant  les  éclievins  des  seigneuries  de 
Willecomme,  Gruuthuuse,  Hulswalle,  'i  Roosebeeksche ,  Tomme, 
Haghe  des  Hauwcelsche  et  autres,  enclavées  dans  la  ville  de  Thielt. 

34.  Pièces  justificatives  pour  les  comptes  communaux.  (XVIP  et 
XVIIP  siècles). 

35.  Actes  et  contrats  (sur  parchemin)  passés  devant  les  éclievins 
de  la  ville  et  des  seigneuries  susnommées.  Du  XIV«  jusqu'au  XVII* 
siècle. 

36.  Documents  relatifs  à  l'église,  le  cimetière,  les  cloches,  etc. 

37.  Registres  aux  résolutions  des  Pointers  et  Zettcrs  de  Tliielt- 
Buiten  (XVIP  et  XVIIP  siècle). 

38.  Comptes  de  la  cliâtellenie  de  Courtrai,  depuis  1682. 

39.  Documents  relatifs  à  la  cliâtellenie  de  Courtrai. 

40.  Résolutions  prises  par  les  députés  de  la  commune  composant 
la  Verge  de  Thielt  (Roecle  van  Thielt).  XVII«  et  XVIII«  siècles. 

41.  Comptes  des  messagers  de  la  ville. 

42.  Comptes  de  la  recette  des  marchands  étrangers  à  Thielt, 
depuis  1705. 

43.  Affermage  du  moulin  de  la  ville  de  1588  à  1769. 

44.  Sentences  relatives  aux  privilèges  de  la  ville  (XVP,  XVII»  et 
XVIIIe  siècles). 

45.  Livres  de  recette  des  trésoriers  de  la  ville. 

46.  Documents  relatifs  au  couvent  des  Récollets,  la  maison  des 
orphelins,  au  Collège  latin,  les  bourses  d'études,  etc.,  etc. 

Comme  on  le  voit,  le  dépôt  des  archives  de  Thielt  est  important. 
Il  est  à  regretter  toutefois  que  pendant  de  longues  années  il  ait  été 
laissé  dans  un  abandon  complet,  ce  qui  est  cause  que  beaucoup  de 
documents  intéressants  sont  devenus  introuvables 

Nous  avons  indiqué  les  lacunes  dans  la  série  des  comptes  commu- 
naux ;  n'est-il  pas  à  regretter  aussi  que  les  registres  aux  œuvres  de 
loi,  avant  l'année  16 iO,  manquent  également? 

Plusieurs  registres  du  dépôt  de  Thielt  portent  un  titre  particulier, 
donné  par  les  anciens  greffiers  pour  la  facilité  des  recherches.  C'est 
ainsi  qu'on  y  voit  les  registres  intitulés  :  de  Dry  Sleuters,  de  Leeuw, 
de  Zandlooper,  de  Slnper,  de  Nieuwe  Slaper,  de  Ligger,  de  Nieaive 
Ligger,  de  Gulden  Spatie,  de  Polyver,  etc. 

Nous  avons  dit  plus  haut  qu'il  n'e.xiste  pas  encore  de  classement 
des  archives  de  Thielt;  cependant  l'administration  communale  a 


—    505    — 

décidé,  il  y  a  quelques  mois,  de  faire  mettre  en  ordre  et  inventorier 
les  chartes,  registres  et  liasses,  formant  le  dépôt.  Elle  a  chargé  de  ce 
travail  M.  D.  de  Soneviele,  littérateur  flamand,  qui,  nous  en  avons  la 
conviction,  s'acquittera  de  cette  tâche  avec  beaucoup  de  zèle  et 
d'intelligence. 

Fe.  de  Potier, 

Académie  royale  des  Sciences,  des  Lettres  et  des  Beaux- 
Arts  DE  Belgique.  —  Classe  des  Lettres  et  des  Sciences  morales  et 
politiques   —  Programme  de  concours  pour  1880. 

Première  question.  —  «  Esquisser  à  grands  traits  l'histoire  litté- 
raire de  l'ancien  comté  de  Hainaut.  » 

Les  concurrents  s'attacheront  spécialement  aux  écrivains  de  pre- 
mier ordre  ;  ils  apprécieront  leur  influence  sur  le  développement  de 
la  langue  française,  et  feront  ressortir  le  caractère  et  le  mérite  de 
leurs  travaux. 

Deuxième  question.  —  «  On  demande  une  étude  sur  l'organisation 
des  institutions  charitables  en  Belgique,  au  moyen  âge,  jusqu'au 
commencement  du  XVI'>  siècle.  On  adoptera  pour  point  de  départ 
les  modifications  introduites  dans  la  société  à  l'époque  de  l'abolition 
presque  générale  du  servage,  au  XII^  et  au  XlIIe  siècle.  » 

Les  auteurs  des  mémoires  feront  précéder  leur  travail  d'une  in- 
troduction traitant  sommairement  l'organisation  de  la  charité  dans 
les  temps  antérieurs. 

Troisième  question.  —  «  Faire  connaître  les  règles  de  la  poétique 
et  de  la  versification  suivies  par  les  Rederykers  au  XV«  et  au 
XVP  siècle.  » 

Quatrième  question.  —  «  Ecrire  l'histoire  de  la  réunion  aux  Pays- 
Bas  des  provinces  de  Gueldre,  d'Utrecht,  de  Frise  et  de  Groningue.  » 

Cinquième  question.  —  «  Faire  l'histoire  des  classes  rurales  en 
Belgique  jusqu'à  la  fin  du  XVIII«  siècle. 

«  Etudier  leur  manière  de  vivre  et  déterminer  quelle  était,  dans 
les  campagnes,  la  constitution  de  la  famille  et  de  la  propriété.  » 

Le  prix  de  \?i  preinière  et  \?i  deuxième  question  sera  une  médaille 
d'or  de  la  valeur  de  600  francs;  ce  prix  est  porté  à  1000  francs  pour 
la  troisième,  la  quatrième  et  la  cinquièm.e  question. 

Les  mémoires  devront  être  écrits  lisiblement  et  pourront  être 
rédigés  en  français,  en  flamand  ou  en  latin  ;  ils  devront  être  adressés, 


—    506    — 

francs  de  port,  avant  le  1  février  1880,  à  M.  J.  Liagre,  secrétaire 
perpétuel,  au  Palais  des  Académies. 

L'Académie  exige  la  plus  grande  exactitude  dans  les  citations,  et 
demande,  à  cet  effet,  que  les  auteurs  indiquent  les  éditions  et  les 
pages  des  livres  qu'ils  citeront. 

On  n'admettra  que  des  planches  manuscrites. 

Les  auteurs  ne  mettront  point  leur  nom  à  leur  ouvrage;  ils  y 
inscriront  seulement  une  devise,  qu'ils  reproduiront  dans  un  billet 
cacheté  renfermant  leur  nom  et  leur  adresse.  Faute  par  eux  de  sa- 
tisfaire à  cette  formalité,  le  prix  ne  pourra  leur  être  accordé. 


—    507 


NÉCROLOGIE. 


Charles  Gkandgagnage  ,  sénateur,  président  de  la  Société  lié- 
geoise de  littérature  wallonne  et  de  l'Institut  archéologique  liégeois, 
est  décédé  le  7  janvier  à  Liège.  Il  naquit  en  1812  et  était  le  neveu 
du  président  Grandgagnage  qui  a  écrit  sous  le  pseudonyme  d'Alfred 
Nicolas.  Ses  principaux  travaux  sont  :  Dictionnaire  étymologique  de 
la  langue  wallonne  ;  —  Mémoire  sur  les  anciens  noms  de  lieux  de  la 
Belgique  orientale  ;  —  Vocabulaire  des  noms  wallons  d'anim,aux ,  de 
plantes,  et  de  ininéraux ;  —  Vocabulaire  des  anciens  noms  de  lieux 
de  la  Belgique  orientale;  —  De  V origine  des  Wallons. 

Joseph-Emmanuel-Ghislain  Roulez  ,  né  à  Nivelles  le  6  fé- 
vrier 1806,  est  mort  à  Gand  le  16  mars.  En  1825  il  devint  profes- 
seur au  collège  de  Mons ,  puis  professeur  de  littérature  grecque  à 
l'athénée  de  Gand  en  1832,  professeur  d'archéologie  et  d'antiquités 
romaines  à  l'université  de  Gand  de  1831  à  1873;  il  fut  nommé  deux 
fois  recteur  de  l'université,  de  1846  à  1847,  de  1857  à  1864,  et  de- 
vint administrateur-inspecteur  de  la  même  université  en  1863  et 
conserva  ce  poste  jusqu'en  1873.  Il  fut  élu  en  1837  membre  de 
l'Académie  royale  de  Belgique ,  fut  nommé  correspondant  de 
l'Institut  de  France  en  1850,  et  était  membre  d'un  grand  nombre 
d'académies  et  de  sociétés  scientifiques.  En  1834  il  publia  à  Leipzig 
une  édition  de  Ptolémée  Hepliarition ,  mythographe  grec,  qu'il 
dédia  à  son  maître  et  ami  le  professeur  Bekker  ;  on  a  encore  de  lui 
un  Cours  d'antiqidtés  rom.aines ,  publié  à  Bruxelles  en  1849  ;  Choix 
de  vases  peints  du  musée  d'antiquités  de  Leyde,  Gand  ,  1854,  in-folio 
avec  planches  en  couleur  ;  il  a  donné  une  traduction  des  Manuels  dg 


—    50S    — 

Vhistoire  de  la  littérature  greccpie  et  de  la  littérature  latine  de 
Schoell,  le  premier  en  1837  à  Bruxelles,  le  second  à  Louvain  en 
1838,  et  publié  un  grand  nombre  d'articles  sur  l'archéologie,  la 
géograj)liie  ancienne,  l'épigrapliie,  dans  les  Mémoires  de  l'Académie 
royale,  dans  les  Bulletins ,  ainsi  que  dans  les  Mémoires  de  l'Institut 
archéologique  de  Rome.  Il  collabora  au  Messager  des  sciences. 

Thomas  Wright,  antiquaire  et  archéologue  anglais,  est  mort  au 
mois  de  décembre  1877,  à  l'âge  de  soixante-sept  ans.  Il  est  surtout 
connu  comme  éditeur  d'ouvrages  anglais  anciens ,  bien  qu'il  écrivît 
aussi  des  ouvrages  originaux;  il  est  le  fondateur  de  la  Ca^nden 
Society. 

Chaeles-Ernest  Vinet  ,  bibliothécaire  de  l'École  des  beaux-arts 
de  Paris  ,  est  mort  le  10  féviner.  Il  se  fit  surtout  connaître  par  ses 
critiques  sur  l'art  et  l'archéologie.  Il  collabora  activement  à  la  Revue 
archéologique ,  à  la  Revue  numismatique  de  France,  à  la  Revue  des 
Deux-Mondes ,  à  la  Revue  européenne  et  à  la  Revue  nationale. 

Henri  Léo,  historien  allemand,  né  à  Rudolstadt  en  1799,  est 
mort  au  mois  de  mai.  Successivement  professeur  à  léna ,  employé  à 
la  bibliothèque  de  Berlin,  puis  professeur  à  Halle ,  il  fut  nommé  en 
1863  membre  de  la  Chambre  des  seigneurs.  Il  a  consacré  plusieurs 
ouvrages  à  l'histoire  des  États  italiens  et  des  villes  lombardes ,  ainsi 
qu'à  l'histoire  de  l'Allemagne  au  moyen-âge. 

L'abbé  Louis  Bourgeois  ,  savant  archéologue  et  géologue ,  né  en 
1819 ,  est  mort  le  20  juin  à  Pontlevoy  ;  il  a  publié  de  nombreux  tra- 
vaux, spécialement  sur  les  départements  de  Loir  et  Cher  et  des 
Charcutes. 

Le  président  Taillard  (Eugène-François-Joseph),  né  à  Douai 
en  1803 ,  est  mort  dans  la  même  ville  le  6  juillet.  Ses  ouvrages 
historiques  sur  les  origines  communales ,  la  féodalité  et  l'histoire 
des  Gaules  lui  ont  fait  un  nom  parmi  les  savants. 

Garcin  de  Tassy,  président  de  la  Société  asiatique  de  France, 
très-savant  orientaliste,  né  en  1794,  est  mort  dans  le  courant 
de  l'été. 


—    509    — 

Auguste  Renouard  ,  sénateur,  membre  de  l'Institut  de  France , 
président  de  la  Société  d'économie  politique ,  né  à  Paris  le  22  octo- 
bre 1794,  est  mort  au  château  de  Stors  près  de  Paris  le  17  août. 
Après  avoir  débuté  par  l'enseignement ,  il  aborda  le  barreau ,  devint 
conseiller  d'État ,  secrétaire  général  du  Ministère  de  la  justice , 
député  ,  conseiller  à  la  Cour  de  cassation,  pair  de  France,  procureur 
général  près  la  Cour  de  cassation,  et  en  1877  sénateur  inamovible. 
Outre  les  ouvrages  qu'il  a  publiés ,  il  a  collaboré  à  la  Revue  ency- 
clopédique, au  Globe,  à  la  Revue  de  législation,  au  Journal  des 
économistes ,  etc. 

Joseph  Naudet,  né  Paris  en  1786,  est  mort  au  mois  d'août. 
Historien  et  humaniste,  membre  de  l'Institut  de  France ,  il  a  écrit 
entre  autres  :  Histoire  de  rétablissement,  des  progrès  et  de  la  déca- 
dence de  la  monarchie  des  Gotlis  en  Italie  (1811);  —  Bes  change- 
gements  opérés  dans  l administration  de  Vempire  romain  depuis 
Dioclétien  jusqu'à  Julien  (1817)  ;  —  plusieurs  mémoires  remarqua- 
l;les  imprimés  dans  les  recueils  de  l'Académie,  des  éditions  de 
Tacite  et  de  Catulle ,  des  traductions  d'Horace  et  de  Plante. 

Le  géographe  Jules-Henri  Petermann,  né  en  1822  à  Breiderod, 
est  mort  le  26  septembre  à  Gotha.  Il  fit  ses  études  à  l'institut  géo- 
graphique de  Potsdam,  fondé  par  Berghaus  ;  il  aida  à  Londres 
Milner  à  publier  V Atlas  de  géographie  physique,  collabora  à  la  nou- 
velle édition  de  V Encyclopédie  britannique,  et  fonda  la  célèbre 
revue  géographique  les  Mittheilungen ,  éditée  chez  Justus  Perthes 
à  Gotha. 

M.  DuPANLOUP,  évêque  d'Orléans  et  sénateur  français,  né  en 
Savoie  en  1802 ,  est  mort  à  Lancey  près  de  Grenoble.  Orateur  et 
écrivain,  il  laisse  un  grand  nombre  d'ouvrages  et  de  brochures 
politiques  et  religieuses. 


510    — 


TABLE   DES   MATIÈRES. 


ANNEE   1878. 


NOTICES  ET  DISSERTATIONS. 
Un  service  en  damassé  de  Flandre.  Par  le  B°°  Keevyn  de  Let- 

TENHOVE       1 

Lummenœus  à  Marcâ.  Par  Emile  Varenbergh  ....  7,  134 
Études  sur  la  Flandre  impériale.  —  Ti'oisième   et  dernière 

étude.  Par  Alph.  de  Vlaminck 45 

Louvain  et  ses  premiers  comtes.  Par  C.  Van  dek  Elst  ...  88 
Quelques  sceaux  du  diocèse  de  Gand.  Par  l'abbé  J.-B.  Lavaux.  129 
Une  excursion  à  Thy-le-Baudliuin  (province  de  Namur).  Par 

le  Comte  de  Glymes 157 

Les  blasons  des  chevaliers  de  l'Ordre  de  la  Toison  d'Or,  con- 
servés dans  l'église  de  Saint-Rombaut,  à  Malines.  Par  Emma- 
nuel Neeffs • 174 

L'art  belge  en  1878,  suivi  d'un  appendice  littéraire.  Par  Jules 

NoLLÉE  de  Noduwez 186 

Diplôme  de  Thierry  III,  roi  de  France.  (VIP  siècle).  Par  V.     .     209 
Les  Archives  des  États  de  Flandi-e  sauvées  en  1794.  Par  ÉmileV.  . .    215 
L'ancienne  heptarchie  de  Laeken-Notre-Dame ,  aujourd'hui 
résidence  royale.  Notice  historique  accompagnée  de  pièces 
justificatives  et  suivie  du  texte  inédit  d'une  coutume  de  cette 

localité.  Par  L.  G 249 

La  corporation  des  peintres  de  Bruxelles.  Par  A.  Pinchart.  315,  475 
L'œuvre  de  Charles  Onghena.  Par  Ferd.  Vanderhaeghen.     .     333 
Une  pièce  inédite  relative  à  la  révolte  des  Gantois  sous  Charles- 
Quint.  Par  le  B""  Kervyn  de  Volkaersbeke 385 

Esquisse  historique  du  cours  et  des  embouchures  de  l'Escaut. 

Par  C.  Van  der  Elst 412 

Une  légende  du  diable  au  pays  de  Chimay.  La  Pierre-qui-tourne, 

entre  Froidchapelle  et  Sivry.  Par  D.  A.  Van  Bastelaer.  .  442 
Une  lettre  de  Henri  du  Tour,  le  Jeune.  Par  Max.  Kooses  .  .  449 
Les  trois  premiers  typographes  de  Strasbourg.  Par  H.  Helbig.    463 


511     — 


VARIETES. 

Inscription  à  la  mémoire  de  Charles-le-Téméraire,  duc  de 

Bourgogne,  dans  l'église  de  Saint-Georges  à  Nancy.  Par  L.  S.     116 
Passeport  donné  par  l'empereur  Charles-Quint  pour  transpor- 
ter au  roj'aume  de  Naples  des  pièces  d'artillerie  achetées  à 

Malines.ParL.  S 118 

L'éj^oque  de  la  naissance  de  Grégoire  Holonius.  Par  H.  Helbig.     119 
Épitaphes  de  Belges  à  Bâle,  à  Cologne,  etc.  Par  L.  St.     .     .     222 

Jacques  Cats  et  l'abbaye  de  Saint-Pierre  Par  Emile  V 227 

Les  origines  de  l'orfèvrerie  cloisonnée.  Recherches  sur  les  di- 
vers genres  d'incrustation,  la  joaillerie  et  l'art  des  métaux 
précieux,  par  Charles  de  Linas.  Par  le  B»"  K.  de  V.     .     .     373 

Le  pétrole  sur  la  place  d'Anvers  en  1547 377 

Yperiana.  Notices,  études,  notes  et  documents  sur  Ypres,  par 

Alphonse  Vandenpeereboom.  Par  le  B°"  K.  de  V.     .     .     .     491 
Lettre  de  Sibrecht  Waterloos,  graveur  des  sceaux  du  Conseil 

de  Flandre,  en  1617 494 

Rubens  diplomate  et  homme  politique.  Par  le  C*'^  de  Baethé- 
LEBIY 495 

CHRONIQUE. 

Histoire  de  la  ville  d'Enghien.  —  Emile  V 122 

L'Athenseum  belge.  —  Idem 123 

Découvertes  archéologiques 123 

Charlemagne  à  Gérone.  —  Polybiblion 125 

Vente  de  curieux  autographes 126 

Vente  d'Hane-Steenhuyse,  à  Gand.     . 126 

Tableaux 128 

Geschiedenis  van  de  gemeenten  der  provincie  Oost-Vlaanderen. 

—  Emile  V 238 

Un  nouveau  Rubens  au  Musée  de  Bruxelles.  —  Athenœum 

belge 239 

Portrait  de  Gœthe.  —  Idem 239 

La  Commission  royale  d'histoire  de  Belgique.  —  Polybiblion  .  239 

Vente  Didot 241 

Vente  de  livres  curieux 242 

Vente  de  tapisseries 242 

Vente  de  la  Bibliothèque  de  M.  Robert  S.  Turner 242 

Fouilles  à  Franchimont 245 

Cronicque  contenant  l'estat  ancien  et  moderne  du  pays  et  conté 
de  Namur,  la  vie  et  gestes  des  seigneurs,  contes  et  marquis 
d'icelluy,  par  Paul  de  Croonendael,  greffier  des  finances  du 

Roy.  — P.J.  W 379 


—    512    — 

Des  Viglius  von  Zuiclaem  Tagebuch  des  Schmalkalldischen 
Donaukriegs.  Nacli  den  Autograpli  des  Brûsseler  Staatsar- 
chivs  herausgegeben  und  erlâutert  von  August  von  Druffel. 

—  B°"  K.  DE  V 499 

Donations  aux  établissements  scientifiques  et  littéraires     .     .  501 

Les  Archives  de  la  ville  de  Thielt. — Fe.DePotter.     .     .     .  504 
Société  des  Sciences,  des  Arts  et  des  Lettres  du  Hainaut.  — 

Concours  de  1878 246 

Académie  royale  des  Sciences,  des  Lettres  et  des  Beaux-Arts 
de  Belgique.  —  Classe  des  Lettres  et  des  Sciences  morales  et 

j)olitiques.  —  Programme  de  concours  pour  1880   ....  505 

NÉCKOLOGIE. 

Charles  Grandgagnage 507 

Joseph-Emmanuel-Ghislain  Roulez 507 

Thomas  Wright 508 

Charles-Ernest  Vinet ' 508 

Henri  Léo 508 

Louis  Bourgeois 508 

Eugène-François-Joseph  Taillard 508 

Garcin  de  Tassy 508 

Auguste  Renouard 509 

Joseph  Naudet 509 

Jules-Henri  Petermann 509 

M.  Dupanloup 509 


Flanelles. 

1.  Un  service  en  damassé  de  Flandre 1 

2.  Sceaux  du  diocèse  de  Gand. —PI.  VH 129 

3.  Diplôme  de  Thierry  HI,  roi  de  Finance 209 

4.  Armoiries  de  Philippe  d'Autriche 174^*3*^^ 

5.  Portrait  du  peintre  Leys IBd'  2  W 

G.  Vue  du  village  de  Laeken,  en  1734 249 

7.  Le  château  des  sires  de  Beersel,  à  Laeken 266 

8.  Moyenne  Belgique.  Cours  de  l'Escaut.  Table  I    .     .     .     .  414 

9.  Moyenne  et  liasse  Belgique.  Zone  campinienne.  Cours  de 

l'Escaut.  Taljle  H 415 

10.  Moyenne  et  basse   Belgique.    Zones  argilo-sablonneuse , 

campinienne  et  poldérienne.  Cours  de  l'Escaut.  Table  HL  418 


ETTY  CFNTER  LINRARY