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MÉMOIRES
L'HISTOIRE CIVILE ET ECCLÉSIASTiaill
D'AVXERRE ET DE SON ANCIEN DIOCÈSE
MÉMOIRES
CONCERNANT
L'lMID©Tr@D[^li ©DWOlLi if ll©©LiaOi?\iTi@y
DAUXERRE
ET DE SON ANCIEN DIOCÈSE
Far l'Abké LEBEDF
Ch;ittoine et Soas-Chsntre de réglise cathédrale de la même ville
de l'Aradémie des Inscriptions et Belles-Lettres
CONTINUÉS jusqu'à NOS JOURS
AVEC ADDITION DE NOUVELLES PREUVES ET ANNOTATIONS
PAR
M. CHALLK M. QUANTIN
avorit arckiTisle, corr. àm con • des «rts et aïonaviriiti
TOME DlUXIÈn
AVXERRE
PERRIQUET, ÉDITEUR. IMPRIMEUR-LIBRAIRE
PARIS
DIDRON, LIBRAIRE, PLACE SAINT-ANDRÉ-DES-ARTS, 30
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HISTORIQUES
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LES ÉVÊQUES D'AUXERRE.
QUATRIÈME PARTIE,
Qoi renferme les actions de onze Prélats, qai ont goorerné
TEglise d'Anierre, depuis Fan 1373 jnsqn'à l'an 1513.
CHAPITRE I".
De Nicolas d'Arcics , quatre-vingtième évoque d'Auxerre.
Le prélat, par lequel commence cette continuation de l'Histoire des
Evéques d'Auxerre, eut une attention singulière à faire rédiger [»ar
écrit tout ce qu'on pourroit trouver d'intéressant sur ceux qui l'avoient
précédé depuis quatre-vingt-dix ans ; il ne se trouva cependant per-
sonne après sa mort qui écrivit sa vie , ni celle des autres évéques
qui l'ont suivi durant tout le siècle d'après. J'ai donc été obligé de
chercher dans les archives de l'évéché , dans celles des Chapitres et
monastères , aussi bien que dans les titres du Trésor royal et de la
Chambre des comptes de Paris. De là j'ai tiré des matériaux pour la
II 1
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, ^4 é . yr ^
4 MUtUà^ u\%rAEh^ Ot'ATt£-VUIGTlÈllE ÉVÊQUfi d'aUXERRE.
I/ordre que cet é%équc donna de rédiger par écrit les actions des
kt'îU: prélats ses prédécesseurs immédiats, paroit avoir été des
premier» effets de son attention. Régennes étant le château où il se
plot davantage, il fut plus a portée de connoltre la situation où se
troavoient les clianoines d'.\pf>oigny (1). Voulant les favoriser, il les
it^empta de payer la dime des terres et vignes qu'ils posséduient ou
qu'ils faisoient valoir par leurs mains; il se contenta qu'ils payassent
seulement le vingtième des héritages qu^ils donnoient à cultiver. On a
vu , parmi les titres de cette petite collégiale (2), des lettres qu'il fit
ei|)édier liiHlessus ii Régennes, le 9 mars i373. L'année suivante,
il acquit k Sacy un domaine considérable qui appartcnoit à Jean de
Iteaulieu, citoyen d'Auxerre. Il est certain qu'en i575, le 5 décembre,
il fit condamner par sentence des requêtes, k Paris, un particulier
qui avoit osé enlever du poisson pour dix francs d'or, dans la rivière
d'Yonne au-dessous de son palais épiscopal (3). Dès le mois d'octobre
i574, (Charles V ordonna que s'il décédoit avant que son fils eût
atteint l'Age do quatorze ans, la reine en eût la tutelle, il ajouta qu'elle
prcndroil l'avis de six évéques , du nombre de ces prélats est Tévéque
d'Auxerre. Aussi étoit-il présent au lit de justice où cette ordonnance
fut lue (4), et assista-t-il ensuite au parlement, le vingtième mai , k la
publication de l'édit qui fixoit la majorité des rois à Tàge de quatorze
ans. En septembre, la même année, il fut fait président clerc de la
Chambre des comptes en place de Jean Dangerant (5), et au mois de
février suivant, auquel on comptoit à Rome 137G, le roi lui écrivit
de Paris, pour savoir ce qu*il pensoit touchant la fcte de la Pré-
sontatiou de la sainte Vierge. On croit que ce fut ce prélat qui
permit de célébrer cette féie dans son diocèse, sans en faire un
précepte. Il mourut, h Paris, le ^i septembre suivant; et son corps,
ayant été apporté ii Auxerre, y fut inhumé dans le côté gauche du
cliwur de la cathédrale où il avoit fondé son anniversaire, moyennant
(1^ TVtbMl, (\ipir. .t|X)Ni(ir.
(4) Traité de U miyorilé des rois, p. 544
et OrduD., t. vi, p. 50.
(.M Mémorial de UCIiâBibre des conpiM.
fol.l<«. ^^
GUILLAUME D^ÉTOUTEVILLE , QUATRE VINGT-UNIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 5
dix livres de rente à prendre sur ce qu'il avoit acquis à Sacy (1),
On le trouve aussi fondé dans la cathédrale de Troyes, et peut-
élre fut-ce par les soins de son frère Pierre d'Arcies, qui après avoir
été son vicaire général fut élu.évêque de Troyes en 1577.
De son temps, la charte de la régale accordée à Téglise d'Auxerre ,
par le roi Philippe Auguste, fut tirée des registres de la Chambre des
comptes, et db nouveau insérée dans les lettres de confirmation qu^cn
donna, à Paris, le roi Charles V, au mois de septembre 1375,
dans ces termes exprès : Et ut prœmissa perpétua stàbilUate firmentur.
Je n*ai trouvé qu^un statut notable fait par Te Chapitre d'Auxerre sous
son pontifical (2). Il ordonne de sonner plus longtemps qu'on ne fai-
soit les offices de prime et de none, savoir le premier, jusqu'à l'éléva-
tion de la dernière messe de Notre-Dame-de-la-Cilé, et none jusqu'à
la septième leçon des anniversaires de la même église. Ce statut nous
apprend avec quelle exactitude on célébroit alors l'bRice dans cette
collégiale; il est des chapitres généraux de Sainte-Luce 1375.
1373 à 1376.
CHAPITRE II.
GUILLAUME DÊTOUTE VILLE, LXXX^ ÉVÊQUE D AUXERRE.
Guillaume d'Étouteville , ennuyé de rester dans un pays exposé a
des guerres continuelles et nouvellement ruiné par les Anglois et
Navarrois, se fit transférer bientôt d'Evreux h Auxerre. On ne connoît
point en quel temps il prit possession de Tévéché (3). Il est sûr
qu'il ne différa pas un an entier, puisque dès le mois de juillet 1577
le siège éloit rempli, et l'évêque d'Auxerre présent à Paris. Ce prélat
1376 il 1G6,
(1) On cite un arrêt du Parlement du 21
mars 1379, dans lequel Nicolas d'Arcies est
qualiflé chanceUer du duc d^Orléans. Hist,
d'Auvergne^ Baluz, p. 162.
(2) CoUect. vet, statut.
(5) Il passa rcconnoissance pour le droit
apostolique dû par son prédécesseur le 2
mars 1377.
6 GUILLAUME d'ÉTOUTEVILLE ,
ctoit d'une très-noble famille de Normandie, qui a produit de grands
liommcs. Mais on ne voit pas qu'il ait pris beaucoup h cœur la
' onduile de l'église d'Auxerre. Étant à Paris, vers les commencements
de son épiscopat (1), il officia à la fête de Saint-Louis, dans le collège
de Navarre Tan 1376. Il assista aussi quelquefois au conseil. Il est
nommé comme présent h celui du 4 juillet 1577. Quatre jours après.
Bureau de la Rivière, chambellan de Charles Y, rendit hommage
h Tévéque pour le comté d'Âuxerre au nom de ce prince. L'hommage
pour la baronnie de Donzy ne fut pas rendu si promptement, parce
que Marguerite, comtesse de Flandre, demanda du délai (2). Guillaume
d'Etouteville étant encore à la cour, durant la même année, officia
aux funérailles de Bertrand duGueslio, connétable de France, h Saint*
Denys, en présence du roi. Quelques actes prouvent sa résidence à
Auxerre les deux années suivantes.
La seconde et la troisième année de son épiscopat, s'étoient faites
dans le diocèse quelques fondations auxquelles sans doute il prit
part. Jean Mercier, doyen de la cathédrale, y avoit fondé, en 1378,
une chapelle dans la nef, sous le titre de Sainte-Catherine (a); en
1379, Philippe de Sainte-Croix, évoque de Mâcon, seigneur de
Colanges-lcs-Yineuses, avoit établi un hôpital dans ce même lieu de
Colanges. Guillaume d'EtouXeville fut prié, en 1380, avec le grand
archidiacre et autres (3), d'aller à Paris pour soulager les habitants
d'Auxerre surchargés de gens d'armes (b). Mais l'aiTaire la plus
considérable où son nom paroisse, dans le diocèse d'Auxerre, regarde
la création de quatre sémiprébendés ou chanoines tortriers dans
(I) UisL domun Nav. de Launoy.
(â) Lettres écrites de Saint-Omer, 22 déc.
1380.
(5) Capul.vrbU.
(a) Voy. les PrcuTes^ t. iv, no 322. {Noie des EdiUurs.)
(b) Une lettre de rémission accordée par le roi, en 1381 , à un habitant d'Auxerre
nommé Chantepinot, qui arait tué, sans intention, le curé de Varzy, nous apprend
que les gens du clergé de cette ville avaient alors de violentes querelles avec les
ofTlciers royaux. Ils avaient même battu les sergents et insulté à la justice du roi.
La suite de cet événement est peu connue, mais on en voit les détails dans la
pièce publiée aux Preuves de cette Histoire , t. iv, n9 327. {N, d. E.)
QUATRE-TINOT-UNIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 7
la cathédrale en 1381. Le doyen Jean et le Chapitre avoient représenté
au pape, que les huit anciens tortriers ne suffisoient pas pour porter
les charges des chanoines, etassiter à tout l'office canonial, quo
Fun souvent obligé de célébrer la grand'-messe , Tautre de faire
choriste, quelques-uns étant malades, il en restoit peu pour soulager
le chœur, ils supplioient le souverain pontife de leur donner pouvoir
de créer quatre nouvelles sémiprébendes, et d'y employer le revenu
des deux premiers canonicats qui viendroient à vaquer (1). Clément
YII accorda la demande et enjoignit même de procéder à cette
création, sans la permission de l'évéque. Un chanoine, appelé Hugues
Blandin ou Hugues de la Roche, étant mort sur la fin du mois
d^août 1581, les chanoines de la cathédrale, assemblés à Tissue de
son enterrement , élurent unanimement Robert Motet , ci - devant
Chorier (2) de l'église, pour jouir d'une moitié dç cette prébende ;
l'instituèrent sémiprébendé, et le firent installer dans le chœur. Ils en
dressèrent Pacte, et se regardant comme exécuteurs des ordres
apostoliques, ils enjoignirent à Tabbé de Saint-Père, au prieur de
Saint-Eusèbe et au chantre de Notre-Dame-de-la-Cité, de notifier
le tout à l'évéque, et de lui déclarer qu'ils ne recevroient aucun
titulaire^ la prébende vacante par la mort de Hugues Blandin. Guillaume
d'Etouteville se plaignit à Avignon de l'entreprise faite sur ses droits,
et déclara qu'injustement on le privoit de la collation des deux pré-
bendes de son église. Le pape, sans détruire ce que le Chapitre
d'Âuxerre avoit fait, ordonna, par une bulle du 28 septembre, que
l'évéque confèreroit dans la suite les quatre sémiprébendes à des
sujets contre lesquels le Chapitre n'auroit rien à opposer, et qui
auroient les qualités déjii requises dans les anciens sémiprébendes.
Soit que l'évéque se flattât que le Chapitre destitueroit le nouveau
sémiprébendé, ou qu'il fût pressé par les sollicitations de son
garde-scel ou secrétaire» il lui conféra la prébende de Hugues
Blandin. Cet officier, nommé Raoul Aubery, se présenta en Chapitre
avec ses provisions le 3 octobre; mais les chanoines lui témoignèrent
1376 ^ 1389.
(I) J'ai copie de tous ces actes; leur lon-
gueur in*a empêché de les insérer dans les
Preuves.
(4) ChorariHf.
8 GljlLLAt'ME: hÈWOCnMLLE^ OUATEE-VrNGT-UlflèllE ÉVÊQUE D^U&ERRE.
isji>^ im. 90^ quelque joîe qu'il pussent ressentir de Favoir pour confrère, ils
ne pouvoient Tadmettre, parce que la prébende étoit remplie déjà,
en partie, par Robert Motet. L'on croit que la chose en resta là.
QwH qu'il eu soit, le prélat Guillaume vivoit en bonne intelligence
avee le Chapitre l'année suivante 1582, puisque, se disposant à
aHiraoekir les liabitants de Charbuy , il ne voulut accorder cette
gr&ee que de l'avis et du conseil des chanoines de la cathédrale,
et qu*il fit mettre expressément le sceau du Chapitre à la fin de cet
acte, le 8 juin 1582 (a). Mais il ne fut pas plus porté que son
prédécesseur k augmenter l'élendue du ressort du bailliage d'Auxerre ;
au contraire , il obtint du roi que Tévéque d'Auxerre continueroit
a ressortir k Villeneuve-le-Roi , aussi bien que les habitants de
toutes les terres épiscopales.
Depuis l'an 1582 on ne trouve plus d'actes où Guillaume d'Eioute-
ville paroisse comme évéque d'Auxerre; ainsi, il y a apparence que
vers l'an 1585 il fut transféré à Lisieux. Il gouverna cette église
durant un long espace d'années , n'oubliant pas cependant celle
d'Auxerre où il voulut qu'on priât Dieu pour lui. Il donna au Cha-
pitre une somme de deux cents livres dont on acheta des fonds (1);
et la rente qui en revenoit servit à l'honoraire d'une messe du
Saint-Esprit qu'on chantoit encore à son intention plus de vingt
ans après sa sortie.
(1) RegistcapU. 1401.
(a) L'original de cet acte est aux archives de ITonne et porte la date du 20 juin
1382; il renferme des réflexions fort belles sar le droit qu'ont tous les hommes
d'être libres et sur l'exemple que doit donner l'Eglise à cet égard. — Yoy. Preuves^
t. IV, no 329. (iV. d. E.)
FERRIG CASSINEL , QUATR^VINGT-DEUXIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRC. 9
CHAPITRE III.
FERRIG CASSINEL, LXXXII* ÈVÊQUE D'AUXERRE.
/
L'alliance qui étoit entre la famille d'Etouteville et celle de Cassinel
put contribuer à faire succéder k Guillaume d'Etouteville Ferrie
Cassinel auparavant évéque de Lodève. Il étoit second fils de François
Cassinel, sergent d'armesuiiu roi Jean, dont le frère aine, nommé
Guillaume, seigneur de Pompone proche Paris, sergent d'armes de
Charles Y , avoit épousé Isabeau de Châtillon veuve de Matthieu ,
seigneur de Roye, proche parent de Guillaume d'Etouteville. Cette
famille de Cassinel, originaire d'Italie, sorloit d'un Jean Cassinel,
dont un fils servit le roi Philippe-le-Bel , qui le fit chevalier de son
ordre , et châtelain de Calargues en Languedoc. Il y a apparence que
la branche dont descendoit immédiatement notre évéque, étoit établie
à Paris, parce que son père et ses plus proches parents y ont été
inhumés dans l'église de Sainte-Catherine du Yal-des-Ëcoliers (i).
Ferrie avoit d'abord été archidiacre de Yexin, dans l'église de
Rouen, et secrétaire du roi. Il n'a voit encore que ces deux qualités
en 1371 (2), lorsqu'il assista, avec Gérard de Montaigu, k une assem-
blée où son frère Guillaume fut élu curateur de Marguerite, fille de
Robert Guy, chevalier. Mais, en devenant évéque de Lodève, il
commença à jouir d'une partie de la seigneurie de Calargues, donnée
à ses ancêtres. Charles YI, qui fut le promoteur de sa translation à
Auxerre, le chérit tellement, qu'il le retint presque toujours à sa
cour. Il n'est parvenu jusqu'à nous aucune des circonstances de son
entrée, ni aucun acte de foi et hommage dont les autres prélats ses
prédécesseurs étoient si jaloux. L'on pourroit même dire en très-peu
1389 il 13901
(I) Ex testam. Dertrandi Cassinel. —
Koy. les Preuves, ad an, 1597.
Ci) Le j^^reflicr des registres du Parlement
de Fan 15G8, au 8 août, a écrit ce qui suit :
)> JaUai au clos Branel au commendeinent
» de maître Ferrie Cassinel, jadis mon corn-
» pagnon, qui à ce jour fut fait docteur en
» décret.»
1383 a 1390.
iO FERRIG CASSINEL,
de mots tout ce que Ton sait de la part qu'il prit aux affaires de son
diocèse.
Son frère Bertrand étoit chantre de la cathédrale, soit par rési-
gnation de Denis Lopin, soit par Télection du Chapitre, lorsqu^il le
gratifia d'un petit bénéCce de son diocèse, qui fut sujet par la
suite k de grandes contestations. G'étoit la maîtrise de la Maladerie
de Toucy. Il la conféra h Bertrand contre les prétentions de la
comtesse de Bar, dame en partie de cette petite ville. Ayant trouvé
dans sa cathédrale Tusage de porter une aumuce noire, il eut recours
au pape Clément VII , h Avignon , pour autoriser le changement
qu'il projetoit de concert avec le Chapitre. Le pape, qui étoit bien aise
d'étendre son autorité, lui accorda pour lui et pour ses chanoines
seulement, de pouvoir changer Faumuce noire en aumuce grise (!].
Les moines de Bourads s'adressèrent à lui environ le même temps ,
pour les lettres d'amortissement, au sujet d'un domaine qu'ils avoient
h Varzy sur son territoire, et ils en eurent pleine satisfaction. Les
chanoines réguliers de Saint-Eusèbe, assurés que leur église , quoique
bâtie déjà depuis plus d'un siècle, n'avoit point été dédiée solennel-
lement, le prièrent d'en faire la dédicace (2). Il en fit la cérémonie le
douzième juin de Tan 1584 (3). Les chanoines de la collégiale de
Saint-Laurent de Cône, étant en difficulté avec le chantre, première
dignité de ce Chapitre, obtinrent de lui un règlement h l'amiable, le
jeudi après la Toussaint 1385, qui confirma les statuts qu'avoit faits
Gui de Mello au siècle précédent. Toutes leurs contestations furent
ainsi terminées (4).
On peut mettre parmi les marques de l'attachement de Ferrie au
service du roi , les prêts qu'il lui fit pour subvenir aux nécessités de
l'État. Pour aider k faire la guerre aux Anglois, il avança la somme de
cinq cents livres qui fut remboursée sur la fin de l'année 1385,
(1) BuUedue7aTrUl385.
(2) Ordinar, m$t. abb S, Laurentii,
(3) La môme année le 28 mars, Louis
d*Anjoa, allant de Paris à Ariiaion, fut reçu
dans la cathédrale par le clergé en chappes,
comme il est marque dans le journal de Jean
Fabri, évéque de Chartres, son chancelier
qui étoit du voyage. Cod. Colbert^ 587.
(4) Tabul, conad.
QUATRE-VINGT-DE13XIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. il
par Nicolas de Plancy, notaire du roi et clerc de ses comptes (1).
Après s'être trouvé plusieurs fois au conseil du roi (2), et au
parlement les deux ou trois années suivantes (3), il parut avec éclat
dans Taflaire de Jean de Monteson Arragonois, qui étoit purement
de doctrine. Non content d'avoir assisté à Paris dans la salle de
l'évéché, le 24 août 1587, avec Yves Elie, recteur de l'Université,
et Simon Frérot, sous-chantre de la cathédrale de cette ville , lors-
que Tévéque Pierre d'Orgemont condamna les propositions de cet
Espagnol (4), il entreprit de le poursuivre vivement, et il étendit
son zèle jusques sur ses sectateurs. Monteson, homme subtil et hardi,
enseignoit publiquement que la sainte Vierge avoit été conçue dans le
péché originel. Ferrie employa son éloquence à démontrer le contraire
devant toute la cour (5); il engagea le roi, qui étoit présent, h ordonner
qu'on célébrât la fête de la Conception, et que les partisans de Jean de
Monteson eussent à se rétracter. Du Bouiay (6) fait mention de la
dispute publique, entre notre évéque et Guillaume de Yallan, évéque
d'Evreux , dominicain , touchant plusieurs autres propositions du
docteur arragonois. On y apprend que Ferrie avoit tout pouvoir
sur l'esprit du roi, qu'il l'entretenoit familièrement de toutes ces
matières controversées, et que bien plus, il parvint à faire révoquer ou
expliquer par Tévêque d'Evreux les propositions qu'il avoit soutenues.
Cette révocation se fit au mois de février, en présence de Ferrie
même , de Jean Manson , recteur de l'Université , de quelques
professeurs et des principaux officiers des nations. La même année
1588, ce prélat s'opposa au rétablissement que le doyen de la
cathédrale d'Auxerre voulut faire de sa juridiction, quoiqu'elle parût
un peu appuyée par le prince , ou par les magistrats , puisque le
9 janvier le bailli de Sens et d'Auxerre reçut ordre de s'infor-
mer du lieu où ce doyen avoit son officialilé, de voir si les officiers
1383 b 1990.
(1) Quillance de Ferrie, 25 fév. 1385,
porlcfeuilles Gagniéres.
(2) Conseil, 17 fév. 1386, Prob. hitt.
Paris, l. II, p. 538.
(3) Regist. Parlem., 12 nov. 1388. Item,
à Yernon, en fév. 1 388.
(4) Ex Labb. Alliance Généal., t. ii.
(5) Hisl, latina CaroU VI, ad an. 1388.
(b) SaL Jir/K, p. 633.
* •
< 9
12 VEHRIC CA881NEL,
)3»dk laao. ^toient propres à celle exercice, et d'y commettre un promoteur et un
ap|iariteur s'il étoit besoin.
Je ne dois pas aller plus loin, sans faire ici mention du procès qui
lui fut intenté au parlement de Paris, par Etienne de Mailly, avocat
demeurant h Auxerre, et auparavant officiai d'Autun. Cet avocat avoit
été mis dans les prisons de l'évéque (a)\ et comme le parlement Tavoit
fait élargir (1), ce prélat s'en étoit plaint en termes offensants contre la
Chambre de la Tournelle (2). La Cour procédant contre lui, il alla lui
en marquer son repentir et la supplier de lui pardonner. On délibéra
le il mai 1387, et on prononça que l'on surseoyoit a ordonner
sur les discours qu'il avoit tenus. Guillaume Cassinel, frère de ce
prélat, fut impliqué dans le procès; de manière que le parlement,
par arrêt du 32 juin suivant, auquel l'évéque étoit présent , ajourna
Guillaume h comparollre personnellement , sur peine de cent marcs
d'argent. L'aAaii^e fut plaidée au parlement le 28 janvier. Etienne de
Mailly exposa que l'évéque l'avoit fait enlever violemment de la ville
dWuxerre, et conduire h Régennes, et que là Guillaume Cassinel lui
avoil f^it donner cruellement la gfkentM par deux de ses domestiques,
après avoir fait prendre Tun des compagnons de cet avocat (b); que la
baine du prélat coaire lui procédoit de ee qu^il avoit plaidé au siège
d'Auxerre, pour de bonnes gens qu'il avoit mis en cause injustement,
el surtout parce qu'il avoil occupé pour la publicatioo d*nn excammu-
niêmml que Tévéque de Lodève requéroit eooire Téveque d^ Auxerre ;
^«'e»&i ayant trouvé le moyen de s'évader de Régennes, il s'étoit
(a) Ou peut ^oir fanalys^ de ce proc«s (ians le tome i du Idltcw ér îa Société
des sciences hisU^riques ^i naJur^lks (b C Jotum. L*é«é<|Qie Ferrie y %ure (fane ma-
nière }^tiu bouorable et imligoe de soa cardetère; (|tioû{ttey d^aatre part, ravocat
£lieui>e de Mailly ue parasse pa» wm ptits être bien déikat iévéque racense vi «Hre
lOMosaire et receleur Qt dU c^ue^ daoti t exercice de sa profesMon « il pbàda tantùt
le pour el tantiOt le cooiare. {X 4. E.\
(6) tl y a prebableiseet ici unegrosse erreur ty pograpbiiiue» car le teite du i^gi^ire
du parleineot perle <{Mt'£tie»fie fuA meaé à Eiégeones avec deux omiiNignuns Junt
fuu fut fmadu, — Yid9 ioce eiiaitu, {^x a. s.
QUATRE-VINGT-DEUXIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. i5
pourvu en cour de Rome séant k Avignon; et il y avoil obtenu des 1383^11390.
lettres du pape qui Texemptoient de la juridiction spirituelle d'Auxerre.
Après cet exposé, il concluoit contre l'évéque en huit mill^ livres
d'amende, et contre messire Guillaume Cassinelk une amende honteuse
sans chaperon et k genoux, et à quatre mille livres. L'évéque se
défendit en niant tout ce que Mailly avoit avancé et Taccusa de divers
crimes, représentant qu'il étoit son justiciable , étant clerc non marié.
Le procureur du roi conclut, contre l'évéque, en seize mille livres
d'amende, et contre Mailly à amende honorable et profitable de dix
mille livres, et dit que l'évéque avoit conçu haine contre maître
Etienne, parce qu'il avoit été du conseil des appréhendés pour crime
d'hérésie que l'évéque avoit délivrés pour de l'argent. Le 30 janvier (a),
Mailly se défendit de tout ce que l'évéque avoit allégué contre lui et
avança encore qu'un des motifs de la haine de ce prélat , c'étoit parce
qu'il avoit demandé à son frère, maître Bertrand Cassinel, clianoine
d'Auxerre, l'acte d'une prébende pour le curé de Festigny. L'évéque
répliqua, soutint tout ce qu'il avoit allégué, et qu'il y avoit eu lieu k
la géhenne; le procès fut appointé. Enfin, le 18 mars, auquel on
comptoit encore 1587, le parlement mit au néant toutes les procé-
dures faites k Auxerre , cour de Rome , Sens et ailleurs ; ordonna la
restitution des biens de maître Etienne , pria l'évéque qu'il l'eût en sa
grâce , enjoignit k cet avocat de faire honneur et révérence au prélat, et
déclara qu'il pourroit exercer son office à^Àdvocation.
Ferrie n'excelloit pas seulement dans le droit , il étoit encore habile
prédicateur. A l'issue d'un sermon qu'il prononça le jour de l'Annon-
ciation i588, dans la chaire de Notre-Dame deParis, Jean Thomas,
ci-devant subdélégué de l'inquisiteur, révoqua devant le parvis de cette
église (1), ce qu'il avoit prêché et écrit contre l'immaculée Conception,
et contre l'établissement de la fête. Quelques jours après Pâques, il
officia pontificalement k Saint-Denys , lorsque Charles YI créa chëva-
(1) Hist.univ.Parû.
(o) Le registre du parlement porte le 3 février. {tf. d. B.)
I
1 2 FERRIC CASSINEL ,
2383 ud9o. étoient propres à cette exercice, et d y commettre un promoteur et un
appariteur s'il étoit besoin.
Je ne dois pas aller plus loin, sans faire ici mention du procès qui
lui fut intenté au parlement de Paris, par Etienne de Mail!)', avocat
demeurant à Auxerre, et auparavant officiai d*Autun. Cet avocat avoit
été mis dans les prisons de Tévéque (a)\ et comme le parlement Tavoit
fait élargir (1),ce prélat s'en étoit plaint en termes offensants contre la
Chambre de la Tournelle (2). I^ Cour procédant contre lui, il alla lui
en marquer son repentir et la supplier de lui pardonner. On délil>éra
le il mai 1587, et on prononça que Ton surseoyoit a ordonner
sur les discours qu'il avoit tenus. Guillaume Cassinel, frère de ce
prélat, fut impliqué dans le procès; de manière que le parlement,
par arrêt du 22 juin suivant, auquel Tévéque étoit présent, ajourna
Guillaume \k comparoltre personnellement , sur peine de cent marcs
d'ai|;ent. L^affaire fut plaidée au parlement le 28 janvier. Etienne de
Mailly exposa que l'évéque l'avoit fait enlever violemment de la ville
d'Auxerrc, et conduire à Régennes, et que là Guillaume Cassinel lui
avoit fait donner cruellement la géhenne par deux de ses domestiqoes,
après avoir fait prendre l'un des compagnons de cet avocat (b); que la
haine du prélat contre lui procédoil de ce qu'il avoit plaidé au siège
d'Auxerre, pour de bonnes gens qu'il avoit mis en cause injustement,
et surtout parce qu'il avoit occupé pour la publication d'un excommu»
niement que l'évéque de Lodèvc requéroit contre l'évéque d'Auierre;
qu'enfin ayant trouvé le moyen de s'évader de Régennes, il s*étoil
(I) AnM'lme, édil. 172<>, I. ii, |». r»H. | |ii Ex regist. Parlamenli.
(a) On peut voir l'analyse de ce procès dans le tome i du BtdUtm de la Société
de* sciences historiques et naturelles de l Yonne. L'évéque Ferrie y Ûgure d'une ma-
nière peu honorable et indigne do son caractère; quoique , d'autre part, ravocal
£tienne de Mailly ne paraisse pas non plus être bien délicat. L'évéque raccuse d*élrB
faujsaire et receleur et dit que, dans l'exercice de sa profession, il plaida lautèC
le pour et tantôt le contre. {N. d. E.).
{h) 11 y a probablement ici une grosse erreur typographique, carie texte du
du parlement porte qu'Etienne fut mené à Régennes avec deux compagpMNHI,
luu fut jicndu. — Vide loco citato. [N, d. E»)
i4 PSRRIC GASSINEL ,
138SU390. l>^fs Louis ei Charles d'ÀDJou, ses neveux. Ferrie prêcha aussi (a) le
7 mai, à la messe des obsèques que le même roi fit célébrer dans la
même abbaye, pour Bertrand du Guesclin , connétable, mort depuis
neuf ans (1). Ce prince ayant été conduire k Avignon ses deux neveux
pour faire couronner Fainé roi de Sicile , prit des mesures pour avancer
Ferrie Cassinel et lui procurer de nouveaux honneurs. Ce prélat étoit
de retour k Auxerre k la fin du même mois de mai ; et il se présenta
presqu'aussitôt une nouvelle occasion de signaler sou zèle contre un
Jacobin attaché au sentiment de Jean de Monteson. Ce religieux, nommé
Etienne Gontier, avoit quitté la maison de Paris. S'étant trouvé k
Auxerre, dans la même hôtellerie où logeoit Tévêque de Nevers, celui-
ci Tavoit reconnu et Tavoit fait mettre en prison au château d'Auxerre.
Le prieur de la maison de Tordre ne manqua pas de le revendiquer,
et le prévôt d'Auxerre le lui livra. L'évêque Ferrie , averti de Taflaire,
ordonna qu'on le reconduisit au château, et qu'ensuite le prévôt le lui
amenât, ce qui fut exécuté. Le malheureux comparoissant devant
Tévêque d'Auxerre, fut interrogé, et il déclara qu'il avoit été du senti-
ment d'appeler du jugement de l'Université rendu contre Jean de
Monteson. Ferrie le renvoya, k Paris, aux ofiiciers de l'Université,
revêtu de Thabit qu'il portoit quand il fut arrêté ; il écrivit au recteur
et k l'Université, donnant tout pouvoir de le punir comme hérétique,
excommunié et réaggravé. La lettre est du 31 mai 1389 (2). Elle fait
voir évidemment avec quelle vivacité ce prélat soutenoit un sentiment,
sur lequel il n'y avoit aucune décision des papes ni des conciles. Le
(I) Veteres tcripiores MarUne, <. i, p. 54:2, 54i. | {%) Eisl, unto., t. iv.
(a) Voici comment Guillaume de Quimper, auteur contemporain, rend compte
du sermon de Tévéque, dans un manuscrit de l'église Saint-Aubin d'Angers :
Quant l'offrande si fu passcc Les princes fondoient en larmes
L'evesque d'Aucerre prescha Di^s mois que l'evcsque montroit .
La el mainte larme plorée Car il disoit plorci gens d'armes
Des paroles qu'il recorda ; Bertrant qui tretous vous amoit
Car il conta comment l'espcc On doit regretter les faiz d'armes
Bertrand de Glasquin bien garda Qu'il feist au tcm))s qu'il vivoit
Et comme en bataille rangée Dieu ayt pitié sur toutes aroes
Pour France grant peine endura. De la sienne, car bonne estoit.
[Apld Martene, Tikt9mvru8 Anecdoi.)
[N. rf. E.)
-■-'•, 1-- *'■• Aij ■ . ■ ■ . V. -^;-:.^u -■*• ^jt
i*ï»ija
»«•
QUATRE-VINGT-DEUXIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. i5
lendemain de la date de cette lettre, qui étoit le premier juin , soit
qu'il fut averti de sa prochaine translation k un autre siège, soit qu'il
eût des pressentiments de sa tin , il traita avec le Chapitre de la cathé-
drale pour des prières qu'il souhaita qu'on fit pour lui pendant le reste
de sa vie et après sa mort. Il avoit succombé au parlement sur la pré-
tention qu'il avoit eue de succéder h Nicolas d^Arcies, son prédéces-
seur (1), dans la terre située a Sacy, que cet évéque avoit achetée de
Jean de Beaulieu bourgeois d'Auxerre (2). Elle avoit été adjugée aux
exécuteurs testamentaires de cet évéque, et si Guillaume d'Ëtouteville
en avait joui , ce n'avoit été qu'en leur payant certaines sommes. Ce
domaine n'éloit pas un bien de Tévêché , mais seulement situé dans une
terre épiscopale ; Guillaume Cassinel, chevalier, Tavoit acquis et ensuite
revendu k Ferrie , son frère (3). Ce prélat, touché d'un motif de piété,
et après avoir communiqué son dessein aux chanoines de la cathédrale,
leur légua ce fond à la charge de douze messes par chaque année ; il
en fil dresser et sceller un acte auquel assistèrent le doyen Pierre de
Chissy; le chantre Bertrand Cassinel, frère de l'évéquc ; Guillaume
Infard, archidiacre; Guillaume Nazarie, trésorier; et Marc Gibert,
souchantre ; Guillaume Cassinel, autre frère du prélat, fut aussi présent
avec Philippes des Champs , son bailli. Le quatrième jour du même
mois, cet acte de Ferrie, fut apporté en plein Chapitre, par Guillaume
Cassinel, qui en déclara la substance , et deux notaires lui donnèrent
acte du dépôt.
Peu de temps après , sa translation à l'archevêché de Reims lui fut
annoncée. En qiiittant Auxerre, il laissa l'évêché onéré de 1750 florins
d'or (4) et le logis épiscopal en mauvais état. Ce prélat avoit apparem-
ment aidé beaucoup sa famille. Au moins est-il marqué'que, dès la
première année qu'il fut évéque d'Auxerre, il acheta la terre de
Sorvillier, proche Senlis, de Pétronille de Laistre , et qu'il en fit pré-
sent à Marie Cassinel, sa nièce, qui épousoit Gaucher de Cbastillon,
seigneur de Troissy et de Marigny (5). Acceptant sa translation à
1383 )k 1390.
(1) Quœst. XVI, arrestor. Joan, Le coq,
(â) Tabul. ep. Autiis.
(3; ro/. les Prouves, A Tan ir»89.
(4) Ex lit, nus. in Mich. de Creney, 1595.
(5) Duchéne in histor, CastelUonif.
i6 FERRIC CASSINEL,
i3saài3Go. Tarchevêché de Reims, il entreprit le voyage d'Avignon pour remer-
cier Clément YII, son bienfaiteur, et il continua ensuite son voyage
jusque dans le Languedoc, où il avoit du bien de patrimoine (a).
Mais ayant été empoisonné, il ne put se rendre à Reims, où il
avoit été reçu par procureur, depuis un mois seulement (&). Il
mourut à Nîmes, le ^6 mai 4590, après avoir fait son teslamenl.
Les exécuteurs , Guillaume Cassinel , son frère , Philippe de
Savoisy €t Pierre de Chevreuse, eurent soin de faire conduire son
corps k Âuxerre, et il fut inhumé au côté gauche du grand aulel ,
entre deux piliers du sanctuaire. Jusqu alors, aucun évéque n'avoit
eu sa sépulture si proche du lien où est offert le saint sacrifice. On
a vu que tous les évoques précédents , morts à Auxerre , depuis Gui
leSénonois, étoient inhumés ailleurs qu'à la cathédrale, ou que, si on
les y enterroit, c'étoit dans le chœur, k l'exemple de Gui qui y repose
du cdlé de k grande porte. Mais comme au xiii® et xiv^ siècle, on
s'accoutuma à enterrer nos évéques près du sanctuaire , on leur accorda
eofin la sépulture dans ce lieu sacré. Il est probable que le Chapitre
fut porté k ne pas contredire cette nouveauté, parce que les deux frères
héritiers de Ferrie proposèrent de lui dresser un magnifique mausolée,
qui auroit été mal placé dans le chœur ou qui ne pouvoil y être élevé.
Il fut, en effet, érigé en pierre avec des ornements gothiques très-
délicats. Le défunt y fut représenté couché, e*t revêtu des ornements
archiépiscopaux avec ses armoiries parsemées sur sa chasuble. Qui
pourroit s'imaginer que quatre-vingts ans après on ignoroit si vérita-
(a) Il se rendait dans cette province, par ordre du roi « pour y punir des malver-
sateurs » à ce que dit la chronique latine de Charles VI. — Henri Martin rapporte
qu'il avait été nommé l'un des trois commissaires chargés de la réformation géné-
rale des pays de Languedoc et du duché de Guyenne. — Hisl. de France, t. vi ,
249. (N. d. E.)
{h) La même chronique de Charles YI s'exprime ainsi sur cet événement : « Les
» Jacobins furent généralement soupçonnés de ce crime ; je n'ai point la preuve
» certaine et je ne puis prononcer sur des choses qui se sont passées dans Tombre,
» mais je sais que c'était l'homme qu'ils haïssaient le plus au monde. » — Docum,
médiu sur VHist. de France, traduction de M. BcUaguet, p. 627. — Henri Martin
attribue plutôt sa mort au duc de Berry, qui redoutait, de sa part, la poursuite de
ses malversations en Languedoc. (iV. tf. E.)
QUATRE-VINGT-DEUXIÈME ÉVÊQUB d'aUXERRE. M
blement le corps de Ferrie reposoit sous ce mausolée? Pierre de
Longueil, Tun de ses successeurs, demanda que son corps y fût
renfermé, supposé que ce tombeau se trouvât vide. Cependant , il ne
fani point douter que Ferrie n'eût été déposé dans le lieu où ce
monument est érigé. Effectivement, Pierre de Longueil fut inhumé
de Tautre côté du chœur, proche la chaire de pierre. Une preuve
incontestable que Ferrie fut inhumé dans la cathédrale, est que
Bertrand Cassinel demande, par son testament du 29 septembre
4597, k être enterré proche son frère Ferrie, au dedans du chœur si
faire se pouvoit. On croit que les Huguenots ayant brisé les grilles de
fer qui environnoient le mausolée, ils rouvrirent et le profanèrent.
Au moins , c'est depuis qu'ils l'eurent mutilé qu'on a bâti au-dessus
une partie du mur qui entoure le sanctuaire. Un chanoine du dernier
siècle (i) voulut que ce prélat fût connu en sa qualité de grand
défenseur du sentiment de l'immaculée Conception. Â un autel de
dessous le jubé, il fit représenter, en relief, Nicolas d'Arcies, qui
contribua à l'établissement de la fête de la Présentation de Notre-
Dame, et Ferrie Cassinel, comme très-zélé pour celle de la Concep-
tion; mais il les a défigurés en leur donnant une barbe semblable k celle
des évéques d'Orient, dans un temps où en Fram^e tout le monde étoit
rasé. L'anniversaire de Ferrie ne fut pas fondé seulement dans Téglise
cathédrale d'Auxerre; on le trouve aussi dans l'ancien obituaire de
Saint-Pierre-en-Chàteau, première paroisse de la ville, en ces termes :
Obsequium recolendœ memortœ Domini Ferrici qtjumdam Autissio-
dorensis episcopi e/ deinde archiepiscopi Remensxs^ pro quo nobilis vir
dominus Guillelmus Casstnelli^ ejm frater executor et hœres solvit curcUo
dictœ ecclesiœ 5. Pétri in castro Àutissiodoremis , anno qiu>libet
faciendOf decem francos semel. Anima qus requiescat in pace. On a
lieu d'être surpris que cet obit soit marqué au 17 septembre. Il pourroit
se faire que le 26 mai fût le jour de la date de son testament , qu'on
dit aussi daté d'Avignon , et non celui de sa mort. L'aigle de cuivre
qui est actuellement dans le chœur de la cathédrale d'Auxerre, ne
irW9 il 1300.
(2) Pierre le Yenier.
11
2
18 UICIIKL DF LRENF.Y.
vionl |iuini d*^ lui. quoiqu'on y voie lt}s armos <!•' sa ramillt*. mais de
son frtTP Bertrand, clinnlre tL' la niOmt' rgliM\ (|ni ordonna, par son
lestnmenl , qu'on fil fairo doux aif^lrs [xnir la oailiédralo, dont Pnne
restai à la fhapclle do Sainl-Aloxamlro. i»ii so ohanioitMil alors certains
offices presque chaque jour : elle n'a été |)lacéc au chœur que depuis
la fin dos iruerres des calvinistes. Lo môino ti'st.imont nous apprend
que Ferrie avoit une sœur, appolôo Caihorino, qui >urvécul à ses deux
frères, lovôquo ot le chantre: quo do (luiliauuio Qissinel il avoit un
neveu ap[>el?'* Louis, encore fort jeune on 1587, et qu'un autre de
leurs neveux s'appeioit Gérard do Monlaigu, loquel sans doute éloit
fils de Biolte Gassinel, qui avoit épousô Géranl de Montaigu, garde
des chartos du roi et maître des com[»tos, et par conséquent frère de
Jean do Montaijju, chancolior do Franco ih, mort archevêque de Sens
en i4l5.
J*ai lu, dans les Mômoriaux tU* la cliamhro des comptes de Paris,
deux articles qui nous apprennent quo lo roi avoii donné, a cet cvèque
d'Auxerre, la maison-forte de Marcoussis, et la maison de la Ronce
située en la châtellenie de Montlhéri, en échange de la ville de
Galargue , sise en la baronnie de Lunel, laquelle le roi donna 2i Cathe^
rine de France, comtesse de Monipensior.
CIIAIMTRK IV.
MICHEL DE CRENEY. lAXXIII' ftVfiyi E D'AUXERRE.
:39oaU9o . Quelques écrivains modernes (2) ont imaginé , entre Ferrie
et Michel de Greney , un Guillaume (|u'ils supposent avoir été aupa-
ravant évéque de Lodùve. Ils ont cru qu'y ayant eu, dès 1592, qd
ordre de Charles YI, de faire hommage à Tévéque d'Auierrc pour la
jouissance du comté, et que le môme ordre étant réitéré en 1401 de
Il An»plme hiM. dPtChancelier«- f (it Violr, Noël.
QUATRK-YINGT-TROISIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 19
la part du même prince , Tévêque d'Auxerre, en i592, est différent
de celui qui siégeoît neuf ans après , les hommages ne pouvant s'exiger
qu'à chaque mutation. Cette conséquence tombe d'elle-même, puisque
souvent un prince révoque les ordres précédemment donnés, et quelque-
fois il diffère leur exécution pour certaines raisons.
Après Ferrie Cassinel, Téglise d'Auxerre ne fut pas longtemps sans
pasteur; il y en avoit un dès Tannée 1391 (1). Cétoit Michel de
Creney; sa famille, originaire de Troyes, paroit s'être étendue du
GÔlé de Chaumont-en--Bassigny. Vraisemblablement, son nom de
Creney ne venoit que de ce qu'il étoit né à Creney, village à une lieue
de Troyes vers Torient d'été. Elevé à Paris dans le collège de
Navarre (2), il y prit le degré de maître ès-arts , sous Jean de Chaven-
ges, au mois de février 1566, et deux ans après il fut élu , le premier
juin, procureur de la nation de France. Il devint ensuite maitre de
tous les artistes du même collège de Navarre. Celte qualité lui est
donnée dans Tacte de la dédicace de la chapelle ; la cérémonie s'en
fit le dimanche 16 octobre 1575 « par Pierre de Villiers» évêque de
Nevers. Son mérite le fit connoltre de Charles V qui, en 1578, lui
confia l'éducation de Charles VI alors dauphin; on le voit» dans
ces temps-lk , chanoine de Saint-Quentin (5) , sous-aumônier du roi ,
chanoine de la Sainte-Chapelle de Paris. Charles VI, monté sur le
Irène en 1580, &e tarda pas de donner à son précepteur des
marques d'une estime singulière. En 1582, il le fit son grand
aumônier; il Tétoit en 1585, suivant les comptes et quittances de ce
temps-lk (4). On voit, dans une de ces quittances, qu'en 1586, le
roi se proposa de le mener en Angleterre avec lui; ce qui lui valut
une augmentation d'appointements (5). Ce prince enfin le choisit, en
1588, pour son confesseur, et Pévêché d'Auxerre étant venu k
vaquer , Michel de Creney en fut pourvu sans quitter les fonctions qui
1390 k 1409.
(i) Michel, évéque nommé à Aaxerre,
reconnat, dét le mois dejanyier etdeféTrier
1590, le droit apostolique dû par les trois
derniers de ses prédécesseurs, et le paya en
i^9\, Reg, VatU.
(«) Hist. Uwv, Paris, p. 975.
fS) Hemiré in Augutta Verom., p. t98,
Anselme.
(4) Compte de /ean Chanteprime rece^
Teur gén. des aides pour la guerre, i«' fé-
yrier 1585 et 51 juillet 1586.
(5) Ordre à Nicolas de Plancy, M- de U
Ch. des comptes etquit. du 25 sept. 1585,
portefeuille Gaignièrcs,
I39<) à 1409.
20 MICHEL DE CRENEY,
ratlachoienl à la cour. Son emploi de confesseur du roi rempêcha de
résider dans son diocèse ; on fut plus de dix ans à attendre son entrée
solennelle. Il prit cependant possession, mais sans solennité , et il
confia le spirituel de son diocèse à un vicaire général, nommé Jean du
Pont (i) qui fut aussi son officiai, et qui devint, parla suite, grand
archidiacre. Michel vint aussi, au moins une fois, pour faire Tordina-
nation, mais sans entrer dans la ville. Il avoit indiqué , pour cette céré-
monie, Fabbaye de Saint Marien au delà de la rivière d'Yonne ; ce fat
aux Quatre-Temps du Carême de 1305. Comme c'étoit une pratique
nouvelle à Tégard d'une maison de Tordre de Prémontré, dès le len-
demain de l'ordination il marqua , par écrit , qu'il n'entendoit point
s'acquérir, à lui ni \k ses successeurs, un nouveau droit au préjudice
des religieux, ni qu'eux non plus ne dévoient point se prévaloir de sa
déclaration, ni s'en servir au préjudice de l'église cathédrale et des
évoques d'Âuxerrc (2). Pendant sa longue absence, le Chapitre se
voyant sans évéque , pria quelquefois d'autres prélats qui se trouvoient
dans le pays d'officier dans la cathédrale. L' évéque d'Evreux étant k
Âuxerre à 'la fin d'octobre 1306, fut prié d'officier le jour de la
Toussaint (3). Cet évéque étoit Gaillaume de Yallan, Jacobin du
couvent d'Âuxerre , dont j'ai déjà parlé dans la vie de Ferrie Cassinel.
Pendant que Michel résidoit à Paris, le corps d'un saint Thibaud
confesseur, qui reposoit à deux lieues d'Âuxerre dans le prieuré de
Beaumont, autrement dit Saint-Thibaud-des-Bois, fut levé de son
tombeau et transféré dans l'église de Saint-Germain ; Michel consentit
à cette translation qui lui fut demandée par Tabbé de Saint -Germain
et Philippes Froment , évéque de Nevers , aussi Jacobin du couvent
d'Âuxerre (4) ; on fit la cérémonie le mercredi d'après Pâques de l'an
1400. Michel de Creney, quoique absent de son diocèse, ordonna
qu'on dressât un catalogue où seroient marqués les revenus et les
charges de tous les bénéfices, hdpilaux et léproseries qui y sont situés ;
et il voulut que ce registre fAt gardé dans les archives de l'évéché.
Ce catalogue , qui a formé ce qu'on a depuis appelé du nom de pouillé,
(1) Ex tu. capell 5. Nie. de Seignelay. | (3) Regittr. capUuli.
(2} Tab. S. Mariani {Archiv. de t Tanne.) | (4) Invent, dos titrei de révéché.
QUATRE-VINGT-TROISIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 21
fut commencé vers Paa 1 595. Quoique ces sortes de déclarations le
missent en état de réunir plusieurs petits bénéfices, on voit seulement
que le 25 septembre 1597, il réunit deux chapellenies de la chapelle
du petit Saint-Etienne , située dans le cloître du Chapitre , à celle de
Notre-Dame fondée dans la même chapelle. L'une de ces chapellenies
étoit sous le titre de saint Etienne pape ; Tautre sous celui de
saint Denjs. On croit que les charges avec les revenus des trois
titres furent depuis portées k un autel de la paroisse de Saint*
Regnobert , où , dans le siècle dernier , le culte de saint Etienne pape
et de saint Denys, étoit encore en vigueur. Notre évoque poursuivit,
dans la même année , deux procès commencés par son prédécesseur :
Fun touchant la nomination à la léproserie de Toucy, Tautre sur un
ancien droit du doyenné. Etant informé des revenus modiques de
l'abbaye de Saint-Père , il contribua k lui faire unir pour toujours le
prieuré de Saint-Loup, de Gésy proche Joigny, qui n'y avoit
d'abord été uni que pour la vie de l'abbé Jean. La bulle d'union (1)
est du 28 novembre 1597. Par sa médiation fut aussi conclu le fameux
traité qui règle les charges du trésorier de la cathédrale : il est
appelé la Nazarie^ du nom de celui avec qui le Chapitre transigea en
1598. On peut voir ailleurs la requête qui lui fut présentée à ce sujet
dont le détail contient plusieurs articles (2).
Quant aux affaires temporelles , Michel ne les négligea point.
Obligé, par arrêt du parlement du 5 janvier 1591, de reconnoitre le
bailliage d'Âuxerre (5) au lieu de celui de Villeneuve-le-Roi, il fit
publier, en ce même bailliage, l'année d'après , dans les assises qu'y
tint Colart de Calleville , bailli de Sens et d'Âuxerre , la transaction
que Pierre de Villaines» l'un de ses prédécesseurs, avoit faite avec
Jean de Ghallon, alors comte d'Âuxerre, et le Chapitre, touchant les
limites de la juridiction temporelle (4). Prévoyant, en 1595, la durée
de son éloignement, il obtint du roi des lettres par lesquelles, en
qualité de confesseur du prince , tous ses biens étoient mis en sa garde
et protection. Les héritiers de son prédécesseur dévoient à Tévéché
1330 k 110».
;i) Tabul. S. Pitii. ^3} Ex lit. ni bis AuUss
2) Voy. les Preuve?», t^ iv, n, 337. j (i) Exduph êignif. capitula 6 mailii.
.^. ^., T'.'k) florins; il 4i|iijiii , le iti mars 1j!)5, un robcril du |ia|»«, daté
«r Avignon, ponr qu'ils fusst-nl conliainls tie |i;iver. La njrino année, il
lii un oonronlal avec Talilu* 4I0 Sainl-Salur en Bcrri, a|)|)areninient
surit* prieuro tIe Saini-Aina1rt\ où ri*vêi|ne avoit un droit (l). Il
ongagoa fariUMnont li' roi à pri'tor foi ei hommage pour le comté
«i\\n\orr(\ Di's Tan ITiiM, IMiilippe lir Savoisy liaron <K* SiMgnelay,
Ncnechal ilu roi , fut oliargi' de procuration à cet t^nrd cl Tacle
d'iiomnia};e lut i^tTtvtivt'nuMil riMidu alors (2).
1.0 séjour do notre cvoquo à la cour lui donna occasion do biéger
;iu l'arloniiMU. On l'v trouve nommé comme présent au troisièmo
Jeeemlire iô!^«. Mais il :!ssistoit plus communément au conseil du
roi. Il est compris dans rénuiiiération de ceux qui s\v trouvèrent au
mois de janvier I5î)"2 (5'', lorstpie Ln»i>, duc d'Orléans, frère du roi,
tut nomme i;ou\erni'ur du rovaume ( ii. Il rdt lionnnéii son ranii; parmi
les cinquante é\ê|ues qisi , sehm l'iiixitation du roi, se rendirent au
{ul.Hs. ^ Paris, en ii>!^i le jour de la Puriiiealion, pour conférer sur
les niovens de proeurer la paix à rKv»rise iti\ On ne peut douter qu'il
n'ait pareillement assiste ii celle qui fut indiquée pour le même sujet au
on/umejour d'aoï^i ir>lUi. pui>que le (lliapitre même venvova le doyen
a\ec w'A chauoinv* du corps (G\ Il fut eulin de rassemblée tenue à
Pùr:s le tS ian\ter tôt^T . dan> Kupielle on agita quelque cho8e
touchant le cliàleau de Vmcennes. Deux cérémonies plus augustes,
ai:\queiIo> d parut ru qualité dV\éque m ^ , furent la translation do
oor|«s lie NïT.: 1.oim>. fjue en 1502, dans IVglisi' de Saint-DeuTs- et
•a dédicace de leitîix- d^ > l>!anc>-Manteaux de Paris (8), le 30 no-
^!r.*Sr: l*9T rt
• f s .-. .h •? • li'! ( Ail' li>
:•> Hmtctu ét> : :*. ;^z ."^ t' B<g*»l captt.t Am§ 1856
« EiUi: .-vniifNM l: .^ï: r- «.!;ir.:-« M.\\ ' Hi*t do Pan». Preare
m4DnH «'^Lr àr* ri?<'.i:ruri ir »on s lli«t d<* Pan*. Pitotc^ | . _
t. I. p. Slii<
iY».fT»imr --i" r'.r*''r«» *•; *« r * '■**"? ^'c::c pour «int Edta«. airli^Têoiie de
QUATRE-VINGT-TROISIÈME ÉVÊQUE D*AUXERRK. 25
Les maladies qui commeocèrcDl h régaer dans Paris, Tao i599,
dont on ressentit les effets vers la Saint-Jean, firent résoudre plusieurs
évéques k quitter cette ville (i). Il y en eut environ vingt qui prirent
ce parti ; Michel de Creney fut du nombre. Il ne se rendit point pour
cela dans Auxerre; mais il fit attention, vers ce temps-là, qu'il ne
pouvoit plus différer d'y faire son entrée, et il demanda au roi un
homme de sa part pour aider a le porter dans cette cérémonie. Adam
de Gallomiel, son chambellan, en reçut Tordre au mois de mai 1401,
et eut commission de prêter foi et hommage; mais cet officier s'en
étant déporté, un autre seigneur parut pour le roi. Michel de Creney
arriva à Âuxerre le samedi dcToctave de la Fête-Dieu quatrième juin,
vçrs les dix heures du matin (2). Ayant diné à Tabbaye de Saint-
Germain avec Tabbé du monastère, il y passa le reste de la journée et
y coucha. Le lendemain, sur les neuf heures du matin, assis sur une
chaise de bois couverte d'étoffe de soie, revêtu de chape, la mitre eu
tète et la crosse en main, il fut porté jusqu'à la cathédrale par quatre
écuyers qui avoieat auprès d'eux quatre chevaliers dont chacun tou-
choit un des coins de la chaise. Lorsqu'il fut arrivé au milieu de la
place, devant Téglise de Saint-Etienne, dont la grande porte étoit
fermée, Pierre de Chissy, doyen; Jean du Pont, archidiacre; Guil-
laume Nazarie, trésorier, et quelques chanoines , sortirent par une des
petites portes, accompagnés seulement du diacre et du sous-diacre
avec la croix et l'eau bénite ; ils approchèrent de révéque descendu
de chaise au milieu du parvis , et le doyen lui porta la parole en fran-
çois de ce temps-là : « M«^. , vous venez en votre église pour y faire
> votre entrée ; nous ne savons se vous y venez ainsi que vous devez ,
» c'est à savoir se vous avez avecque vous vos quatre vassals , c'est à
i) savoir, le comte d'Auxerre, le duc de Bar, le seigneur de Sainl-
lasxï a 1100
(1) PreuTef de rhist.d* Auvergne, p. 470. i (:2) Megist, capituU.
Cantorbéry, dont le corps avait été inhumé à Ponligny. Richard II ordonna, en
1396, que la rente de 20 marcs sterlings qui avait été anciennement payée à Tab-
baye, pour Ventretien de quatre cierges ardents autour de la chAssc du saint, serait
rétablie comme avant la guerre. — Voy, Preuves, t. iv, n«> 336. (iV. d. E,),
24 MICHEL DE CRENEY,
1390 à uo». * Veraiu, et le baron de Donzy ou aullres pour eulx ayant dVulx
» espécial mandement, ou se vous avez fait diligence d'eulx avoir : et
i> si vous plaist, respondez-nous sur ce. » Le prélat répondit en même
langage : c J'ay en ce fait bonne diligence et les ay fait citer adjourner
> a cette journée, pour comparoir par devant moy, et faire ce à quoy
1 ils sont tenus; et nonobstant ce, le seigneur de Saint- Verain et
» ledit baron de Donzy ne sont pas venus ne comparus ; mais icy est
» Mess. Dreux de Mello , seigneur de Saint-Bry, pour le comte
h d'Âuxerre, et Mess. Robert de Bonnay, chevaliers, pour le duché
i> de Bar, sont icy présents. » Ces deux seigneurs étoient aux deux
coins du devant de la chaise. L'évêque ajouta que, n'ayant point vu
dans Téglise de Saint-Germain les deux autres vassaux au moment
qu'il s'assit dans la chaise, il les avoit déclarés contumaces, et que sans
préjudice à ses droits, le seigneur de Maligny, pour le baron de
Donzy, et Etienne de Chanteloup, chevalier (I), pour le seigneur de
Saint-Yerain, y suppléoient provisionnelleraeni. Le doyen prit alors,
des mains du sous-diacre, le livre de TEvangile el fit voir à Févéque
la formule du serment. Le prélat baisa d*abord le texte sacré, et, les
deux mains posées sur le livre ouvert, il prononça le serment tel que
les évoques précédents Tavoient prêté. Ensuite il fit Taspersion d'eau
bénite sur le peuple, il baisa la croix qui lui fut mise en main, et fil
des signes de croix sur la multitude ; puis il s'assit et fut encore
porté, comme auparavant, jusqu'à la porte de l'église , où ayant sonné
une petite cloche, on la lui ouvrit. Â ce moment, tout le clei^é
assemblé commença Te Deum , et Hugues Blanchet , archidiacre de
Sens (2), l'introduisit dans l'église. Â la porte du chœur, il descendit
de chaise et alla à pied jusqu'aux cordes du petit clocher. L'archidiacre
de Sens les lui ayant présentées, il les sonna chacune; il alla jusqu'au
grand autel, y fit sa prière à genoux, et déclarant encore contumaces
les deux vassaux absents, il protesta de les poursuivre par les voies de
dioil ; il baisa l'autel el y offrit trois parements de drap d'or. Puis
i\) Apparemment seigneur de Villefar- de la Saintc-ChapeUc de Paris, selon le
ffpau, déjà nommé ci-dessus. ' P. Anselme, lltsi. de» grandn Aumàniers ;
(2) Cet Huguefc étoit aussi alors tréhorier vi il a cotte qualité dans un acte ci-aprés.
QUATKË-VINGT-TROISIÈME ÉVÊQUE u'aUXERRE. 25
l*arcbidiacre de Sens le cooduisit à la chaire de .pierre, à côté de Taulel, y^ ^ 14^9.
(H Vy iostalla. Cette auguste cérémooie achevée, Michel de Crene^
célébra poutificalemenl la graiid'messe. Il donna ensuite à diuer au
Chapitre et à tous ceux qui y avoient assisté (1) ; le tout se passa eu
présence de Guillaume, abbé de Saint-Père d'Auxerie; de Robert,
abbé de Saint-Laurent et autres tant nobles que bourgeois. La com-
munauté des habitants avoit envoyé à Coulanges et a Irancy, afin de
choisir en chaque lieu un muid de vin de pinot dont elle fit présent au
prélat pour la fête do sa nouvelle entrée (2). Si personne ne parut a
cette entrée au nom du baron de Donzy, ce ne fut pas la faute de
Tévéque, qui Tavoit fait sommer dès le 6 mai ; le comte de Nevers
agit en conséquence, et adressa à Hugues de Saint-Aubin un mande-
ment ; mais cette procuration étant arrivée trop tard , Philippe, duc de
Bourgogne, fit excuse à Tévêque, le 20 décembre suivant , comme
ayant la tutelle de Jean, son fils qui, en qualité de comte de Nevers,
étoit baron de Donzy. Le baron de Toucy, plus exact, lui rendit
encore, au bout de deux ans, foi et hommage pour sa portion dans la
seigneurie de Toucy. Ce prélat n'alla point à Sens faire le serment
ordinaire à Téglise métropolitaine et a rarchevéque.
Michel de Creney, dès les premiers jours qui suivirent son entrée,
témoigna de vouloir vivre eu paix avec son Chapitre. Environ cinq ans
auparavant, il avoit commencé à attaquer la juridiction spirituelle de
ce corps (a) , en combattant l'ancienne possession et donnant une
explication arbitraire à la charte de Jean d'Auxois , Tun de ses prédé-
cesseurs. Le parlement avoit commis, en 1596, Jean, abbé de
Pontigny, pour veiller au maintien de la juridiction du Chapitre pen-
'11 Exeod. regùt.
(2) Compte de GaUlaume de Valde Marcy
fol. 27.
(a) Ce ne fat pas la seule circonstance où il essaya de diminuer les charges de
son siège. Il refusa aussi, sous différents prétextes, de payer une rente de 26 liv.
qui était due à l'abbaye Saint-Marien, sur le tonlieu et le salage d'Auxcrre, par
suite d'échanges faits du temps de Tévéque Gui de Mello. Mais après un procès de-
vant les gens tenant Thôtel des requêtes du palais, il fut condamné dans ses pré-
tentions, en mai t397 (iV. rf. £.).
26 MICHEL DE CRENBT ,
1390 1 14». d^Q^ ^3 durée du procès (I); cet abbé ne le pouvant pas lui-même,
s'en étoit déchargé sur le prieur de Saint-Eusèbe (2), le chantre de
Notre-Dame-de-la-Cilé, et sur les curés de Sainl-Pierre-en-Chàteau
et de Saint-RegDobert. Mais, malgré l'arrêt de défense, Jean du Pont,
officiai de Tévéque, n'avoit pas laissé d'agir contre des particuliers
dépendants du Chapitre. L'évéque d'Evreux avoit essayé de pacifier ce
différend. A l'arrivée de Michel de Creney , on vint de part et d'autre
à composition. Le cinquième jour après l'entrée solennelle, fut fait
on accord dont voici les articles (5) :
1® Par le nom latin familiares de la chartre de Jean d'Auxois,
sont entendus les domestiques des chanoines, demeurant avec eux,
nourris k leurs dépens et dans l'enceinte des murs de la cité, sans
fraude ou surprise ;
2® Par les ministres dont il est parlé, s'ils ne sont pas chanoines,
il faut entendre le chambrier, le grenetier, le receveur des anniver-
saires, le notaire daOïapitre, le maître de l'hôpital de Saint-Etienne,
et le portier du Chapitre, lesquels venant à délinqwr, spnt sujets et
justiciables du Chapitre, pourvu qu'ils portent l'habit ecclésiastique
(réservé le portier) , et qu'ils n'aient commis homicide ni rapt. Les
vingt-huit bénéficiers, obligés au service divin, seront seulement
justiciables du Chapitre pour le fait de l'office divin , et tant qu'ils
résideront dans l'église et dans la cité , demeurant sujets à Tévéque
en tous autres cas. Or de ces bénéfices (continue l'acte), il y en a
douze vicaires , savoir : six de Saint-Michel et six de Saint-Jean-le-
Rond, lesquels doivent assister , avec les tortriers , à toutes les heures
de l'office , hors prime et none. Les deux chapelains de Saint-André
sont obligés d'assisjler aux matines , à la grand'messe et aux vêpres. Le
chapelain de Saint-Gervais , à certaines heures; le chapelain de Saint-
Ëloi, h toutes les heures ; le chapelain de la chapelle de Saint-Pierre,
fondée a l'autel de Notre-Dame-des-Reliques, est tenu de porter la
chape du doyen, parer le chœur, coucher en l'église, etc. Les deux
(ï) RfQiit. capit, 24 octob. 1396.
(2) TAUerœ abb. Pontig.
1^) Ces articles sont ainsi dans les col-
! lections mss. du P. Viole et dans ceUe du
sieur Bargedé^ assessenr.
QUATRE-VINGT-TROISIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 27
chapelaius de l'autel de Sainte-Croix soot obligés de coucher daos
Téglise et de parer Tautel, etc. Le chapelain de Tautel de Sainte-
Marie-Magdeleine, près l'entrée du chœur , est obligé de se trouver à
toutes les heures. Le chapelain de Sainte-Catherine proche Tautel de
Saint-Sébastien , est obligé d'assister à toutes les heures , avec les
tortriers. Le chapelain des SS.-Lazare , Marie-Magdeleine et Marthe,
h toutes les heures. Le chapelaÎD de Sainte-Catherine-du-Revesliaire,
est obligé de préparer tout ce qu'il faut pour Tentretien de la lampe
devant le revestiaire , etc. Le luarguillier, clerc du trésorier, est obligé
de sonner et préparer l'autel, allumer et éteindre les cierges, ouvrir et
fermer les portes, etc. Les quatre chanoines de la Trinité sont obligés
d'assister aux matines, etc.
3° Il est accordé que le Chapitre aura un seul oificial, qui exercera,
au nom de la compagnie, la juridiction spirituelle dans un certain lieu
déterminé, soit au Chapitre ou en la maison claustrale du Chapitre,
située devant le portail neuf, en laquelle le bailli de la temporalité du
Chapitre tient son siège auprès du cimetière des clercs du chœur (1).
Lequel officiai pourra connoitre des causes qui regardent la juridiction
spirituelle, et se transporter tant par lui que par autres, aux maisons
situées dans les limites de sa juridiction, pour informer, enquérir et
faire semblables choses, sans lesquelles la juridiction ne se peut com-
modément exercer. Et cependant, la cause principale ne se pourra
décider autre part que dans ledit Chapitre ou maison, sans qu'il soit
besoin de multiplier les officiers. Le Chapitre pourra pareillement
connoitre et déterminer capitulairement des causes commencées ou
non commencées devant ledit officiai , ou bien les lui renvoyer.
4° Le Chapitre aura juridiction spirituelle dans les maisons claus-
trales, tant acquises qu'à acquérir, dans les limites néanmoins du
cloKre ; mais h l'égard des externes ou forains qui viendront à délin-
quer dans icelles maisons, l'évéque aura sur eux toute juridiction,
autant que les bornes de sa justice peuvent s'étendre.
5® Le Chapitre n'aura point juridiction sur les familiers et officiers
de Tévéque, lorsqu'ils ne seront ni chanoines, ni tortriers* ni du
«
(1) Ce cimetière êtoit au midi du chœur, | proche la chapeUe de iï^aint-Michel.
1390 à UU9.
iS MICHEL DE CRENBT ,
^ i^gf^ nombre des «x mioislres ci-de8sas déclarés. Si ces familiers étoieat
chaooioes oa torlriers, ou du nombre des six dont il a élé parlé, et
qu'ils Tinssent à manquer à leur office, le seigneur évéque pourra les
punir et corriger selon Texigeuce des cas, sans néanmoins les détenir
oo emprisonner. Aura aussi le Chapitre puissance sur les vingt-huit
obligés au service divin, en ce qui regarde ledit office seulement, si
tant est qu^ils soient familiers ou officiers de Tévéque.
6^ S'il arrive que les familiers et ministres, ci-devant nommés,
appellent du doyen et Chapitre, Pappellation ne relèvera pas devant
Févéque, non plus que celle des 28 bénéficiers, dans les causes qui
eoneernent Toffice divin auquel ils sont obligés par la fondation de
leur bénéGce.
7^ L'official de l'évéque et Fofficial du Chapitre se donneront mu-
tuellement des lettres, soit pour entendre les témoins ou faire autres
choses quand besoin sera, aux dépens néanmoins des parties.
8® Par cet accord , les parties n'acquièrent rien de nouveau et ne
perdent rien.
9^ La juridiction spirituelle, dans les maisons canoniales et claus-
trales, est ici entendue comme dans la charte de Tévêque Jean.
10^ Le Chapitre pourra faire publier, à l'aigle du chœur, les sen-
tences et autres mandements, comme aussi citer et excommunier les
témoins, ainsi que Tévéque.
il^' L*évéque donnera a l'avenir des dimissoires, conjointement
avec le Chapitre, aux chanoines de l'église d'Auxerre et tortriers pour
recevoir les ordres.
i2« Sur ce que Tévéque avoit formé ses plaintes en nouvelleté de
ce que le Chapitre avoit prié le bailli d'Auxerre d'ajourner certains
témoins pour déposer la vérité en des causes pendantes pardevant eux,
a été accordé que la plainte demeurera comme non faite sans préjudice
des parties. ^
13° Le bailli de l'évêque et celui du Chapitre, informeront et ter-
mineront le différend qui étoit entre l'évêque et les chanoines , tou-
chant la succession des habitants des Bordes qui avoient du bien,
tant îuidil lieu des Bordes, où l'évêque a le droit de main-morte, qu'à
Moiiéieau qui est de la juridiction temporelle du Chapitre.
f*
QUATRE-VINGT-TROISIÈME ÉVÊQUE u'aUXERRE. 29
14<^ Sur ce que le Chapitre prélendoit jouir de la succession de
Robert Roussel, curé de Beauvoir, mort sans héritiers, à cause que
la seigneurie de ce lieu lui appartient, Tévéque la prétendant aussi,
attendu la qualité de curé du défunt, son sujet, a été accordé que le
testament de ce curé sera suivi, ses dettes payées, et le reste de la
succession employé k la réfection du presbytère , sans préjudice des
parties.
15^ Le trésorier fournira les parements et tapisseries du trésor
pour le synode, et les bâtonniers auront soin de les tendre.
16^ Touchant la clôture de la porte de la maison épiscopale, qui re-
garde sur le grand autel de Téglise (a), a été accordé que l'évéque étant
à la cité d'Auxerre , celte porte ne sera point fermée , ni de jour , ni de
nuit. Mais Tévéque étant hors de la ville, elle sera fermée, la nuit, du
côté de réglise, et ouverte depuis le second coup de matines jusqu'à
ce que le service du matin soit fait, et depuis nones jusqu^à la fin
de Toffice.
17^ Pour ce qui est de la basse porte, par laquelle on va de la
maison épiscopale aux grottes de Téglise, elle sera murée « et sera
faite une ouverture dans un autre endroit, par où l'évéque puisse
entrer de sa maison épiscopale en la chapelle de la Trinité qui est
dans ces grottes, tant de jour que de nuit, quand il sera à la ville;
mais pendant son absence de la ville, celte porte sera continuellement
fermée du côté de Téglise.
iS^ Le Chapitre donnera un état des héritages qu'il a à Appoigny,
tant d'ancienne que de nouvelle acquisition, et les deux baillis de
Tévêque et du Chapitre jugeront s'il y a quelque chose qui doive
dime à l'évéque.
19^ D'autant qu'un nommé Jacques de Lorme ayant été trouvé
1390 à 14(t9.
(a) La porte dont il est fait mention dans ce paragraphe , était placée dans le
bas-cAté nord du sanctuaire. On en voit encore la place murée. Elle communiquait,
par un passage, dans le palais épiscopal. Les changements opérés, en 1837, dans la
préfecture, Tunt fait supprimer; et les panneaux de cette porte, qui datent du temps
de révéque J. Baillet, forment l'ornement delà porte principale de ThAtel.
(iV. d. E.).
1390 a 1409.
50 MICHEL DE CREiNEY ,
mort ea Tëglise d*Auxerre , le bailli du Chapitre a visité le cadavre ,
il a été dit qu'en pareil cas Tévéque pourra faire la même chose.
20^ Et sur ce que plusieurs cbaDoines, assemblés au Chapitre
le jour de la Fête des Fous, y avoient créé et nommé des officiers
qui avoient eipédié certaines lettres; ce qui avoit obligé Tévéque
d*întenter procès contre ces chanoines en cour sécidière. d*où ils
auroient interjeté appel h la cour ecclésiastique de Sens , a été accordé
que le tout seroit réputé comme non avenu, sans préjudice des par-
ties.
21^ Pour ce qui est des sceaux de la cour épiscopale d'Âuxerre,
a été accordé, que le corps du Chapitre ne payera jamais rien pour
lesdits sceaux , et que les chanoines, chacun en particulier , les tor-
triers et autres bénéficiers auront le même privilège pour les ordres.
En autre chose, Févéque, qui est de présent, et ses successeurs en
feront comme ils aviseront bon être.
22** Les procès commencés contre les chanoines-curés, en ce
qui regarde le soin des âmes, réduit à néant, sans préjudice des
parties (i).
n fut dit, à la fin Se ce traité, que s'il arrivoit quelque difficulté
pour l'interprétation des articles, on auroit recours à Hugues Blanclict,
trésorier de la Sainte-Chapelle de Paris, maître Jean d'Arcy , et Guil-
laume de Villars, conseiller du roi, et maître Silvestre Baudry. Tous
étoient alors présents , venoient d'assister a Tentrée solennelle de
Michel de Creney , avec Jean Charreton , archidiacre de Rivière on
l'église de Soissôns ; Jean Daguy, chantre de Tournai ; Jean Blanchet
et Jean MoreU chanoine de Sens, lesquels sont aussi nommés témoins
de cet accord fait le 9 juin 140i .
Cette grande affaire fut terminée sans qu*on y fit mention d'abolir
la Fête des Fous. Ceux qui ont cru que l'article vingtième de ce
concordat la proscrivoit se sont trompés. Outre qu'il n'y est point
(1) n y a quelques indices, que l'éréquc
aroit demandé qu'il y eût deux prébendes
unien à la mense épiscopale, et quMl aToit
accordé d*eii unir une à la Cibrique, ou pour
Tentretien des enfants de chœur. Mais on
croit que cela ne fut point arrêté et que
rarchevdque de Sens, de la confirmaUon
duquel on aToit besoin, n*y consentit point.
Ex cartul. Capif,, et rêgiiîrU.
•^•'^i.«*,^r:
-^i^-^
^•^<
''■Té-SS^g^î
QUATRE-YINGT-TROISliME ÉVÉQUB d'aUXERRE. 51
parlé du fond de la fête , mais seulement de Texcès de ceux qui y
créoient capitulairement des officiers, on la vit encore subsister \
Âuxerre, durant tout Tépiscopat de Michel de Creney, malgré le
sermon prêché contre cet usage, Tan 1401, par Tabbé de (1) Pon-*
tigny (2), et nonobstant la parole donnée h l'évéque de faire en sorte
qu'il n'en restât aucun vestige. Tout ce qu'on put obtenir alors, fut
d*en retrancher les choses les plus criantes et les plus grossières. Il
est assez probable que ce fut l'obstination de certains chanoines en
faveur de cette fête abusive, qui obligea le prélat k attaquer de nouveau
la juridiction du Chapitre en 1406; mais cette seconde attaque n'eut
point de suite.
Michel de Creney marqua aussi une grande attention pour la sanc-
tification des fêtes. Informé des profanations qui s'y commettoient , il
en retrancha un grand nombre au rapport de Nicolas de Clamenges, qui
le qualifie, après sa mort, d'évêque it sainte mémoire (5). Ce qui
arriva k l'abbaye de Regny , fait juger que ce prélat entreprit la visite
du diocèse peu de temps après son arrivée dans le pays. Il exigea, en
1402, des religieux de ce monastère, qu'il y fût nourri, lui et les
siens, en passant dans ces quartiers-là, et même il usa de violence
pour maintenir ce droit, s'il en faut croire la collection des statuts
de l'Ordre de Citeaux. Mais la violence ne consista apparemment
qu'en sommations qui firent naître un procès (a). Tous les âbbés et
abbesses de l'ordre, situés dans les diocèses d'Âuxerre et de Sens,
furent taxés pour aider ï cette occasion l'abbaye de Regny (4), et
l'abbé de Ponligny fut commis par le Chapitre général pour faire cette
levée ; l'évéque se conduisit plus doucement envers l'abbaye de Saint-
Marien-lez-Âuxerre. Donnant la bénédiction abbatiale k Richard Colas
1380 k 1409.
(1) Il aToitété commis protecteur de la
jaridicUon spiritaeUe da Chapitre par le
parlement* — Voy, d-deMos.
(2^ RegUt Capit. 2 déc. 4410.
i'^) Lib. de fesUv. novis non instit,
(4) ITies, anecdot.j t. nr, p. 1540.
fa) n est dit dans une assignation donnée aux mf"- >'■ ^^n'ils injurièrent Tévéque
et sa compagnie, quand il se présenta à la porte d^ '^-^^ ^^^y? ;; ^P. Reigny).
/ (N. d. E.).
52 MICHEL DR CRENEY ,
1390 a 1400. ^^^ '^ ''^ ^^ '^ même nnnée 1402, il ]ui fit prononcer celle formule
(l'obéissance : c Ego frater Ricbardus liumilis abbas S. Mariani Autis-
3 siodor. Ordinis Premonslratensis , reverendo in Christo pntri in
» Domino , D. Michaéli divinâ permissione. Âutissiodorensi episcopo
> suisque saccessoribus atque matri ecclesiae Âutissiodorensi debilani
» subjectionem y obedientiam, et reverentiam secundiim instituta
)> sanctorum Patrum ore proroitto et manu confirmo. » Il la fit signer
par cet abbé, la disant tirée des anciens livres de Téglise d'Auxerre.
Mais il donna acte, le 2 avril avant Pâques, comme il n^entendoit point
acquérir de nouveau droit sur ce monastère ni préjudicier a TOrdre (1).
Les ermites de Saint-Augustin surent gagner la bienveillance de
Michel de Creney. 11 se joignit a Jean Agelard, religieux de cet ordre,
pour demander au roi une croix de vermeil doré, d'un pied et demi
de baut, garnie de pierreries, dans laquelle étoit renfermée une portion
de la vraie croix; ce prince fit présent de cette croix. Tan 1401, à
frère Jean de Saens, maître en théologie, pour le couvent d'Amiens (2);
aussi les armoiries de Michel de Creney furent-elles mises sur le pied
de cette croix avec une inscription latine qui marque le fait. C'est
peut-être par reconnoissance que frère Jacques le Grand, religieux du
même institut , lui dédia un livre de morale intitulé Sophologium, qui
fut imprimé à Paris dès le commencement de Tusage des caractères.
Cet auteur nous apprend que Michel de Creney conserva longtemps,
depuis son entrée à Auxerre , le titre de confesseur du roi ; et quand
nous n'aurions pas ce témoignage, la quittance qu'il donna de qua-
torze livres reçues pour cause de cet office à un maître de la chambre
des deniers royaux , le 5 janvier 1407, suffiroit pour le prouver (5).
Peu de temps après avoir achevé la visite de son diocèse, il reprit
son ancien genre de vie, et pour ce qui concernoit l'utilité, soit de
son clergé, soit de son peuple, il le fit à Paris, où il s'en déchargea
sur un vicaire général. Sur les dernières années de sa vie, le
15 janvier 1406, il obtint un arrêt du parlement qui regarde l'usage
de l'absolution des censures. Il y est ordonné, k l'occasion d'une bat-
; I j Tabul. S. Maria h i .
(â) Lettre de M. Vilinan, chanoine
d*Amiens.
(3) PortefenUlet de Gaigniérei».
QUATRE-VINGT-TROISIÈME ÉVÊQCE d'aUXERRE. 55
teric arrivée entre des ecclésiastiques (1) , que quicooque auroit été ^^c^q^ i
interdit ou excommunié pour des violences faites à des gens d'église,
ne seroit relevé de l'excommunication que par l'évêque. Les registres
du parlement font foi qu'il y assista'quelquefois en 1405 et 1407 (2).
Il y éloit encore en 1408 , le 19 février, lorsque Jean Périer,
chanoine de Chartres, avocat du roi , parla contre les lellres que le
cardinal de Pisc , légat en France, avoit écrites en cour de Rome au
déshonneur du roi (5), et quand ce cardinal fit ses excuses en latin.
Il assista aussi quelquefois au conseil du roi ; il en reste une preuve
dans celui qui fut tenu le 26 décembre 1407, où Charles VI ordonna
que les fils aînés de rois seroient appelés rois (4) , et qu'ils se gou-
verneroient par Tavis des reines, de leurs plus proches parents, du
connétable et du chancelier. Au commencement du xv« siècle, on le
trouve dans la célèbre conférence tenue à Paris, où se fit un décret
contre ceux qui, pendant le schisme causé par l'élection de deux
papes, improuveroient la voie de cession ou celle de la soustraction de
l'obéissance (5). En 1409, il assista par procureur au Concile de
Pise. Sébastien Rouillard nous apprend, dans son Histoire de Meluu,
que Charles VI donna commission a notre évoque, avec Pierre d'Ailly,
grand aumônier, de dresser des statuts pour les chanoines de
Notre-Dame de Melun. Alors Michel de Creney résidoit a Paris et
n'avoit pas fait, k Auxerre , son entrée solennelle. Entre les savants
qu'il fit chanoines de son église, fut Renaud de Fontaines, ami intime
de Nicolas de Clamenges ; sur les avis de celui-ci (6j, Renaud fut fait
préférablement à des concurrents, curé de Varzy; il parvint enfin à
Tévéché de Soissons. Le reste de sa notice se voit dans l'Histoire de
l'Université de Paris.
Michel de Creney n'oublia point ceux qui portoient son nom. On
trouve, dans les registres du Chapitre, en 1400, la réception de
Guillaume de Creney , chanoine de Troyes, h la prébende de défunt
Guillaume Mouton : on croit qu'il étoit frère de l'évêque. Il y a aussi,
109.
(1) Mémoire de G. Viole.
(2) Au 12 noY., jour do la rentrée.
(5) G. Viole.
(4) Minorité des Rois.
(5) Preuves de libertés de TÉgl. Gall.
p.37i.
(G) Epist. Clameng.
Il
1109 il 1410.
56 JEAN DE THOIST,
famille des Thoisj-Gipierre, proche Saulieu, lequel avoit été provi-
seur de la maison de Sorbonne et étoit chanoine de Notre-Dame de
Paris (1). Ayant envoyé exprès à Rome deux chanoines, Hugues des
Noës et Etienne Moron, il obtint la confirmation du pape; sa prise de
possession est du 22 janvier 1409 (2). J'en rapporte les circonstances
parce que c'est la première prise de possession par procureur dont
j'aie trouvé le détail. La procuration que le nouvel évéque avoit donnée à
Jean Lanigrel, archidiacre du Grand-Caux, dans l'église de Rouen (5),
étant lue publiquement en présence du Chapitre, par Nicolas Janvier,
notaire, le doyen Pierre de Ghissy, conduisit cet archidiacre à l'église
et l'installa dans la chaire pontificale de pierre (4). Pendant qu'il y
resta assis, on lut la bulle du pape adressée au clergé et au peuple.
Ensuite, ramené dans le Chapitre, on lui mit en main les sceaux de
l'oflicialité. Il fut installé par le même doyen, h la salle de l'oificialité
et dans la grande cour de l'évéché où le doyen lui donna les clefs
du logis et des prisons. La bulle paraissoit trop insister sur l'obéis-
sance due à l'évéque, et menaçoit même d'excommunication ceux qui
refuseroient de lui obéir; le Chapitre protesta que ce seroit sans
préjudicier a ses anciennes libertés, et, avec le consentement du pro-
cureur, on ajouta que l'évéque ne prétendoit pas acquérir par là
un nouveau droit. Environ trois semaines après (5) , le nouvel évéque
se présenta en personne et prit possession , accompagné du doyen
d'Âutun, son frère; mais on ne voit point qu'il y fit aucune rési-
dence. Il laissa , à Auxerrè , pour vicaire général et officiai , Pierre
Gharlet, et il se retira h. Paris dans l'hôtel des évoques d'Auxerre.
Son vicaire général, pendant l'été de 14i0, nomma Henri de
Thoisy à la prébende d'Etienne Blandin, dans l'église cathédrale.
(1) Il peut se faire que celle élccUon fûl
trarenée par ceUe de Pierre de Flisque,
dont U esl fail mention au 10 décembre
1409, dans un registre de Benoit xiii.
(2) Il esl qoaUflé é?éqoe d*Anxerre dans
le registre du Vatican, 13 noTembre 1409,
et le pape Alexandre V lui accorda , selon
les inémes registres, de se faire sacrer par
quel évoque il \oudroit 11 est dit élu
évéque d*Auxerrc , dans les registres de
régûse de Paris, au 15 décembre 1409, à
Toccasion de sa maison : Domus Johannis
de TTioUiaco elecU Àutiss. Licilatio curril,
(3) Ex epUL D. Salmon docl, an» 1729.
(4) Ex regisL capiL Paris, ad 13 dée.
1409.
(5) Comp, Jo. Chach. ibid, fol. 59.
QUATRE-VINGT-QUATRIÈME ËVÉQUE d'aUXERRE. 57
el révoque conféra lui-même, le 8 octobre 1410, k Pierre Torleaul, j^^^ j, j^io
son neveu, clerc du diocèse d*Âutnn, ie canonicat vacant par la mort
de Jean des Clos ; ce sont les seuls actes qui restent de son épis-
copat. Le roi , étant à Paris le 29 juillet, envoya cet évéque avec
d'autres seigneurs, en Auvergne, vers le duc de Berry, son oncle et
son ennemi, pour lui représenter les maux qu'alloient causer les
guerres civiles (1) ; le roi lui accorda douze livres chaque jour, par
ordre adressé h Pierre des Essarts, surintendant des finances des
aides (2).
Le mois d'octobre 1410 n'étoit pas encore écoulé, que le bruit
courut h Âuxerre que ce prélat étoit transféré à Tournai (5). Dès le
22, ou pria, en Chapitre, l'oilicial et le scelleur, de rendre les sceaux
et de ne plus se mêler du gouvernement spirituel et temporel de
révéché (4). A quoi ils répondirent qu'ils avoient ouï parler de cette
translation, mais que, ne sachant pas si Jean de Tboisy Tacceptoit,
ils ne se déporteroient pas sans sa permission. Enfin , la translation
étant constatée le 22 février suivant, auquel on comptoit encore
1410, ils se démirent en rendant les sceaux et les clefs de Tévêché.
Après quoi le doyen, le grand archidiacre, et Pierre Paterne, pour
Tarchidiacre de Puisaye, prirent possession du spirituel dans Tofficia-
lité, où ils furent installés par Renaud de Fontaines qui présidoit alors
au Chapitre, h cause des incommodités survenues au doyen. Et
pour le temporel, le Chapitre commit Hugues des Noës et Gilles
Pavion, chanoines, qui se mirent en possession du logis épiscopal, et
y établirent un gardien.
Jean de Nourry ou de Norry, qui fut d'abord élu évêque d'Auxerre
après la mort de Michel de Creney , étoit chanoine de la même église ;
et selon les apparences, il étoit d'une famille qui tiroit son nom d'un
village situé proche Luzy, en Nivemois. L'acte de sa réception au
canonicat d'Auxerre (5) , qui est de Tan 1407,1e 7 mars, le qualifie
maître des requêtes; il fut, depuis, archevêque de Vienne et ensuite
(1) DanUald. an 1410. ' regist. du Vatican au 17 sept. 1410.
(â) Quittance de cet évdque dans les por- | (4) RegUt. Cap,
tcfeuilles de Gaif^iiéres. (5) Ex régis t. Cap.
(:>) Cette translation est marquée dans les
38
PHILIPPE DES ESSARTS
]409ii 1110 ^^ Besançon. Jean de Tboisy, qui n'avolt fait que passer îk Auxerre,
en résigna l'évêché h Philippe des Essarts , el il fut, le reste de ses
jours, évêque de Tournai. En 1419, il fut fait chancelier du duc de
Bourgogne, et il mourut en 1455 dans la ville de Lille.
CHAPITRE VI.
PHILIPPE DES ESSARTS , LXXXV* ËVÊQUE D'AUXERRE
UIO il 1496.
En même temps que Tëglise d*Auxerre fournit un évêque à
celle de Tournai » Philippe des Essarts , chanoine de Tournai ,
vint remplir le siège épiscopal d*Auxerre. Il étoit fils de Philippe
des Essarts, sieur de Thieux, au diocèse de Meaux, et de Glatigny
an Val de Gallie (1). Quelques écrivains le supposent évêque de
Tournai, lorsqu'on lui proposa de venir k Auxerre, auquel cas il
auroit permuté avec Jean de Thoisy. D'autres écrivent qu'il étoit ba-
chelier en droit, chanoine et grand-chantre de Téglise de Rouen , et
qu'il avoit succédé en ces dignités au cardinal d'Ailly, en 1595. Il est
constant que le roi Tavoit nommé k un canonicat de Tournai , vacant
par permutation de Jacques de Lozon, président aux enquêtes, et
qu'il y fut maintenu par arrêt du parlement (2) du 18 janvier 1409.
Mais il n'est pas également certain qu'il fût déjk évêque de Tournai;
il pouvoit n'être simplement que nommé k cet évêché : et en consé-
quence de cette nomination, Pierre des Essarts , son frère , conseiller
et maître d'hôtel du roi, étant venu en Bourgogne avec Jean de
Thoisy, aura pu lui proposer de permuter ; ce qu'il auroit accepté a
(1 ) Il y a an Val de GaUie dans le parc de
VersaiUes : ce Val de Gallie est on ancien
domaine de Tabbaye de Saintc-Geneviéyo ;
c'est dans ce Val qu'est encore Glatigny,
proche VersaiUes.
(2) Arrêts de Papon in regalia. aritc.
6 ubi kge 1409 et non 1309.
QUATRE-VINGT-CINQUIÈME ÉVÊQUE d'aUXËRRE. 59
l'instance de Jean, duc de Bourgogne, dont il éloit aimé (1). Quoiqu'il
en soit, sa prise de possession suivit de près la translation de Jean de
Thoisy. Dès le dimanche 22 février 1.410 parurent a Âuxerre
maitre Jean Gharton, Mathieu Perroux, curé de Luvigny, et noble
homme Anselme du Bellay, qui présentèrent en Chapitre les bulles de
translation datées du 17 septembre précédent, et leur procuration
datée du i2 février. Le lendemain ils présentèrent , en Chapitre, à
Renaud de Fontaines, président ordinaire k la place du doyen, Tacte
de résignation de Jean de Thoisy, lequel étant lu, Jean Charton y
reçut les sceaux de la cour épiscopale pour marque de la juridiction
spirituelle ; mais on ne put s'empêcher de protester, comme on avoit
fait a Toccasion des bulles du précédent évéque, que Tobéissance
ordonnée dans ces dernières ne pourroit préjudicier aux libertés du
Qiapitre ; et Jean Charton répondit qu'à Tégard de ces libertés, bien
loin de les combattre, le futur évéque avoit intention de les conserver,
et ne prétendoit pas acquérir un nouveau droit contre ces immu-
nités. Â Tinstant il fut conduit à l'église, et installé par le président
dans la chaire de pierre, pendant qu'on chanloit le Gloria in excelsis
de la messe de la chaire de saint Pierre, remise du jour précédent.
Après ce cantique, le secrétaire du Chapitre ayant lu la bulle à haute
voix, le procureur fut installé par le même président k la stalle épisco-
pale du côté droit, au dessus du chantre, puis conduit k l'évêché,
installé dans le siège de Tofficial et investi des clefs du logis , le tout
en présence du bailli de Sens et d' Auxerre , et de Jean Régnier, son
lieutenant. Le même Jean Charton, chargé de la procuration de
Philippe , exerça aussi en son absence les fonctions de vicaire général,
pendant qu'Anselme du Bellay, beau-frère de cet évéque, eut l'inten-
dance du temporel. L'antiquité n'a rien conservé de mémorable durant
les quatorze mois qui s'écoulèrent depuis cette première formalité,
jusqu'k la prise de possession personnelle ; le seul acte qui fasse men^
UIO ï 14;M;
(1) Dom Estiennot nous a laissé dans une
limande incerUtudc, au siyet de Tépoque du
commencement do son épiscopat. Il le dit
tantôt élu le 15 décembre 1410 selon le
registre de Benoit XIII, et tantôt le 17 sep-
tembre 1410 selon celui de Jean XXIIf. Il te
qualifie au même endroit do bachelier-en*
droit et d'archidiacre de Soissons. Ex regUL
Vaticani.
1110 ai 14S6.
40 PHILIPPE DES ESSARTS,
lion (le Fcvcquc irAuxerrc, est la délivrance qu'il fit le 9 mars 1410
à Tabbé cl'Hemiières , au diocèse de Paris, d'un privilège d'Alexandre
V en faveur de l'Ordre de Prcmontré (a).
Au mois de mai 1412, il se rendit h Auxerre pour son entrée
solennelle. II la fit le jeudi de devant la Pentecôte, c'esl-à-Klire le
19 mai, assisté des quatre barons ou de personnes commises par eux.
Robert de Boissay , chevalier , y représenta le roi Cbarles VI ; mais
le baron de Saint-Verain le iK)rta personnellement. C'étoit Guy
d'Aigreville, seigneur en partie de cette terre, h cause d'Isahean , sa
femme, fille de Hugues d'Amboise, chevalier. Ce prélat, fort zélé
pour ses droits, reçut en argent, de l'abbé de Saint-Germain , la
somme évaluée pour le droit de gite, dont il donna quittance le
26 janvier suivant. Quelques jours même après sa réception, il
alla à Toucy , entra dans la tour seigneuriale et jugea h propos d'y
demeurer quelques jours pour conserver l'ancien droit qu'ont les
cvèques d'Auxerre de se la faire livrer quand il leur plaît. L'acte
qu'il en fit dresser est du 23 juin (1) ; il reçut aussi foi et hommage
pour cette tour de Louis, cardinal, duc de Bar, qui en avoit passé la
commission à Guillaume d'Assigny (2), et s'en fit rendre les clefs
Tan 1422. Philippe de Bourgogne, comte de Nevers, le reconnut
pareillement pour la baronnie de Donzy, dans l'église de Montenaison
en Nivernois, en présence de Bureau de la Rivière, son maître
d'hôtel. L'acte est du 5 septembre 1415.
Quoique Tépiscopat de ce prélat ait été de seize ans on environ , il
ne s'en est rien conservé d'éclatant, que les atteintes qu'il essaya de
donner à la juridiction du Chapitre de la cathédrale. Ces contestations
(I) Tabul. Ep. Àuliss. \ (â) In vent, des litres de Toucy.
(a) On trouve ccpt'ndant, dans les archives de Saint-Marien (prcfectarc de
l'Yonne), une sentence des gens tenant les requêtes du palais à Paris, en date du
16 mars 1410 (Hll), qui constate le désistement de Tévéque et de Tabbédece
monastère, au sujet des procès existant entre eux pour Texercicc de la juridiction
ecclésiastique que Tabbé prétendait lui appartenir dans son abbaye à rcxclusion de
l'évéque. ^V- d. E»),
QUATRE-VINGT-CINQUIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 4i
lui suscitèrent d'autres difficultés avec les chanoines; elles furent
terminées par des transactions et par quelques arrêts. Il falloit que
cet évéque eût expliqué de bonne heure ses intentions sur cette ma-
tière, et que déjà il eût agi en conséquence en 1413, puisque dès le
mois de décembre de celte année, le Chapitre crut devoir obliger ceux
qui seroient reçus à prêter serment, de défendre cette juridiction de
toutes leurs forces , et de ne jamais consentir, que quiconque Tauroit
contredite fût admis à un canonicat, ou même à porter les draps de
Téglise (1). Pour entrer dans le détail de ces contestations, il faut
savoir que l'évêque, environ ce temps-lk, fit enfermer dans ses prisons
Pierre Paterne, chanoine, et Etienne Berruier, prêtre-chapelain et
domestique de Jean Vivien, aussi chanoine. De plus, il excommunia
Pierre Michaul, doyen , et le fit déclarer tel par son promoteur ; et
même, Jean Prévostat, son vicaire général, défendit à plusieurs bour-
geois et à des sergents royaux d'avoir aucun commerce avec le doyen,
sous peine d'être eux-mêmes excommuniés, et de payera Tévêque une
amende de cent marcs d'argent. Pour attaquer encore plus ouverte^
ment la juridiction du Chapitre et paroitre la mépriser totalement,
sachant que Pierre Rebrachien , son officiai, avoit été déclaré excom-
munié par le Chapitre , dont il étoit membre en tant que chanoine, il
ramena lui-même à l'église, le troisième février suivant (2), et voyant
qu'à cause de lui on avoit cessé l'office , il le fit continuer par des
étrangers. Malgré l'éclat de ces sortes d'entreprises, le Chapitre s'ima-*
ginant qu'il en demeureroit là, nomma, le 4 mai 1414, Renaud de
Fontaines et Jean Picard, chanoines (5), pour voir s'il n'y avoit pas
moyen de s'accorder ; on proposa à l'évêque de prendre , de son côté,
deux autres personnes qui chercheroient les voies de pacification : il
élf it encore trop tôt. Quelque temps après, le vicaire général, de con-
nivence avec l'évêque, arrêta lui-même Jean Piqueron , chanoine et
pénitencier, et le fit conduire aux prisons épiscopales par une escorte
de gens armés. Ces excès portés en parlement, l'université se joignit
1410 k 14S6,
(1) Vctus coHeclio slalutor. ex reçût, iâ
rftr. 1413.
{t) On comploil toujours en France 1412.
\Ty) Hegist.cap.
42
1410 ^i«B. ^ Cbaptire^ par r^>|M>nà b prolectiM gvnmie q«^elle âemk i
qwIqiiesHuiâ ifeses iwfldbres maltraîlés par cet évèpe. L'o&eiai ci le
iiîcaire giénénl sovliwest atoir «é 4^ le«r droiu Nab en attefldaAt su
plus grand éclairassenesi » ia récréaiiiee kt adja^ aa Chapitre^
eneeptê ks cas de rapi et dlioaiidile ^ n^awienl jamais été de sa
jvilikdaa. Uacréi est da 15 a^ril 1415^ vf^mi PiixpKs; f aCave es
lesla El taot <|«e ^écst le doyen Pierre Xkiiani^ cpK cet évéqw se
eottteata d^aLtaquer sur le droit de porter le rocket. Hngnes des >oês
loi ai^onL âoccédé en 1420^ il semble que b querelle se raUama J;.
Le prélat s'êtant bit rendre par ce doyen le serment de fidélité , le
4 septembre de la même année . reprit peu de temps après Le procès
an SQJet du rochet^ et obdnt^ le 14 juillet 1435, an arrêt qui dé&fr-
doit an doyen de le porter^ excepté certains jovs. Le Chapitre,
mécontent des eatreprises du prélat, fit dresser, en 1421, ui cahier
des demandes qn U aivoit ii lui pniposer et des sujets de plaintes qn*U
afoic contre lui. On se piai^i d^abonl qull n'^avoit pas bit rendre
à TégUiïe le drap d'or qui entonroit la chaise sur laquelle les cheiralieni
-on barons Ta^oieut porté depuis Téglise de Saintr6ermain ; on déclara
qiiil auroit dû. fournir cette pièce d^étoffe, et qn^ainsi Les chevaliers
rayant emportée, il de voit la restituer ou en payer la valeur qui étoii
an moius de quarante écus d'or. On lui demanda la portion qui rêve-
■oit au Chapitre de la veuie des bois de Varzy, savoir : le liers an
moins^ et on lui notifia qnll n avoit pu les vendre sans Le consente-
ment exprès du Chapitre. On le pria d*annnler les exploits de justice
attentés par ses notaires et antres officiels, dans les maisons cano-
nîales de Nicolas Fontenav et de Kchel de Crenev. chanoines, et dans
ceBe do Robert Boudant^ tortrier. On le SÉomma de rétablir la vigne
do IMigraine qn'^îl avoit trouvée en bon état et qu'il laissoit en finehn.»
4i^ k pria do vetUer à ce que la belle maison épiscopale de Gf-
nBvè4|ao> et antres bàtimencs qui menaçoient mine, ne tombassent
MlîàcoiBent: et tenir la main a Tacquit de l'office divin , et d'obliger
llQ^vkam^de r^^lise, les chapelains et autres tenants des bénéfices
{%) M«b On U. y/Ma.
QUATRE-VINGT-CINQUIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 43
de sa Domination, de servir Téglise suivant leur fondation; de uiosiiise.
faire délivrer de meilleur vin aux chanoines résidants, aux grandes
fêtes et selon la mesure accoutumée ; de rendre à la trésorerie les
offrandes qu*il avoit reçues en officiant à Noël et k la saint Etienne;
et enfin de mieux conduire les affaires de son évéché, d'écouter la-
dessus le conseil de son Chapitre, sans suivre Tavis de personnes
qui l'entrainoient mal à propos dans des procès au déshonneur de
sa dignité, de n'avoir avec lui que des gens paisibles et craignant
Dieu; auquel cas le Chapitre lui offroit ses services. Ces articles
lui furent présentés dans sa chapelle épiscopale, le mercredi Si dé-
cembre i421 , par Jean de Molins, chantre; Guillaume-le-Bègue,
lecteur ; Robert de Pierre-Pont , Gilles le Maître et Jean le Fèvre ou
Fabri, chanoines, accompagnés d'Hugues Poitevin, clerc-secrétaire
du Chapitre, en présence de Pierre Rebrachien, son officiai, et Jean
Prévostat, son scelleur. Un autre article moins important, c'est que le
marguillier laïc de Péglise s*étant plaint de ce que, nonobstant son exac-
titude k faire sonner , à Theure du couvre-feu , la grosse cloche appelée
Amatre^ tous les soirs lorsque l'évéque couchoit à la ville , ce prélat
ne le satisfaisoit point de ses salaires^ La remontrance du Chapitre alla
jusqu'à lui exposer qu'il devoit pour cela, chaque fois, k ce marguillier,
un pain de Chapitre et une quarte de vin. On ne se contenta pas alors
d'une simple remontrance au sujet des redevances annuelles de
Tévéque envers le Chapitre, sur lesquelles on Tavoit pressé une
infinité de fois et qu'il refusoit toujours, il fut traduit au parlement et
condamné même avec amende k payer tout ce qui étoit échu, par
arrêt du 8 avril 1421 avant Pâques (1). Vers ce temps-lk on
pratiqua, dans la compagnie, le statut de Tan 1415, qui portoit que
nul du Chapitre ne seroit officier de Tévéque sans son consen-
tement (2), k moins qu'il ne voulût perdre tout son revenu hors
les gros. On ne peut pas assurer s'il avoit été exécuté sur d'autres
que sur Pierre Prévostat, chanoine-secrétaire de l'évéque, et sur
Pierre Rebrachien, son officiai. Il est seulement certain que le
(1) Carrai. CapU. fol, 24». i (2) liegUt. Cap, 1422 18 décembre.
44 PHILIPPE DES ESSARTS,
uio)iu*i ^^ janvier 1421 , ces deux chanoines avoienl remis leurs inté-
rêts entre les mains de Tabbé de Pontigny, arbitre choisi par le
Chapitre; cl que le 18 décembre 1422, on fit grâce à Pierre Rebra-
chien. Malgré tout cela, Tévéque ne resta point en repos qu'il n'eût
fait bifler ce statut, quoiqu'il ne fût pas spécialement pour ses officiers,
et qu'il regardât aussi ceux qui prendroient des offices du doyenné.
Une des demandes de sa part dans la transaction qu'il passa avec le
Chapitre, fut que ce statut seroit ôté. Cette transaction finit les
difficultés qui duroient depuis treize ans ou environ. Elle fut passée
aux requêtes du palais, à Paris, le 8 mai 1425. Le Chapitre, qui
avoit arrêté Robert Chaletret, clerc notaire de la cour spirituelle de
Tévéque, et qui avoit souvent fait citer et même excommunié Pierre
Rebrachieu, son officiai, demeurant dans l'hôtel épiscopal, et son
familier, obtint de Philipi>e des Ëssarts, qu'il se déportât de sa plainte,
moyennant qu'on supprimeroit le statut qui regardoit ses officiers ou
familiers : et le prélat accorda que tous les exploits de justice faits |>ar
les mêmes officiers dans les maisons canoniales , esqueU lieux iceulx de
Okopilre ont toule junsdiciion spiriluelle eî temporelle seuls et powr le
I(mU> seroieut réputés pour non avenus, déclarant par Ik n'avoir acquis
aucun nouveau droit sur le Chapitre {a).
Jusqu'ici le nom de Philippe des Essarts ne paroit que dans des
QBiémoires de procédure ; on le trouve marqué en quelques anciennes
éditions du Missel d'Auxerre (1), ilt l'occasion de h nouvelle fête des
saintes femmes Marte Jacobi et Salomé. Un d'entre les trois chanoines
qui portoient le nom de Jean le Fèvre et qui avoienl été reçus sur b
fia de Tépiscopal de Michel de Creaey, fit ériger, avant l'an 1420,
{1} Aui5
(a) Philippe des Essarts avait voulu eulcver au Chapitre la oominatioo du cha-
pelain de THOtel-Dieu. L'auteur d'ua petit méinoire sur fbistoire de cette maisoD,
rapporte» d'après une note iusérée sur la couverture d^un vieux registre, que Pierre
deti Essarts, prévOt de Paris et frère de Tévôque» avait pri^ si chaudement le parti
de sou frère dans cette all'airc^ (|u il uieuacait partout de faire pendre les chanuines
iHA pieuAief urbre qu'il rcucoittrerait. ^V d. E\
QUATRE-VINGT-CINQUIEME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 45
un autel sous l'invocation de ces saintes, proche celui de Notre-Dame-
des- Vertus, au portail de Féglise. L'ayant doté, il obtint du Chapitre
qu'on y chantât une grand'messe le 25 mai, jour de leur fête ;
ainsi leur culte commença à s'établir dans Auxerre. La gnérison
miraculeuse d'Etienne Moron , chanoine et sous-chanlre , arrivée par
l'intercession de ces mêmes saintes , la veille de leur fête , augmenta
beaucoup la dévotion. Le sous-chantre écrivit leur vie et leur
translation, et composa en leur honneur un office qu'il étendit autant
qu'il lui fut possible* Jean le Fèvre, natif de Tonnerre , restant alors
seul des trois chanoines de ce nom, agit auprès de Philippe des
Ëssarts ; et afin de faire recevoir cette fête dans les paroisses, il obtint
de lui des indulgences pour ceux qui, vraiment pénitents, récite-
roient l'office de ces saintes en public ou en particulier, ou y
assisteroient , savoir : quarante jours pour chaque heure de l'office.
On en fixe la concession à l'an 1424. -
Cet établissement est le seul qu'on sache avoir été fait du temps
de Philippe des Essarts. Pendant son épiscopat , l'édifice du portail
de l'église cathédrale, du côté de l'évêché , fut commencé en
i415 (1), et ensuite continué par les libéralités de Jean de Molins,
chantre et chanoine, et celles des fidèles. Quelques-uns ont cru y
apercevoir les armoiries de Philippe des Essarts , qui sont trois crois-
sants (a) ; mais la part que put avoir cet évêque, fut que le Chapitre
ayant obtenu des indulgences du pape Jean XXIII , datées de Cons-
tance, le 15 mars, pour tous ceux qui y contribueroient, il les
publia en ajoutant celles de quarante jours , par ses lettres données
à Âuxerre le 27 mai 1415. Renaud de Fontaines, dont nous avons
parlé ci-dessus , les avoit obtenues de ce concile où il fut député
par la province de Sens, au mois d'octobre 1414. Ce fut le même
Renaud qui envoya aux chanoines d'Auxerre , ses confrères, la
UIO k 148G.
(1) Regist. Capii,, Ujul. iAiH.
(a) On voit un écu charge de trois écussons, mais il est impossible de le dcchKTrcr
aujourd'hui. (iV. d. E.)
1410 il 1436.
46 PHIUPPE DES ESSART8,
formule suivant laquelle le pape entendoit donner la paix k TÊglise ;
elle fut lue en Chapitre le mardi 26 mars suivant (1), auquel on
comptoit encore en France 1414. Des Mémoires sur ce concile por-
tent que celui qui assista de la part de l'évéque d*Auxerre, opina
comme le reste de la nation gallicane contre les vacances des béné-
fices, et quod provideatur Domino nostro papœ et cardinalibus (2).
Philippe des Essarts eut le chagrin de voir le château de Régennes
ruiné de son temps, ou du moins très endommagé. Trois ans avant sa
mort se donna, proche Grevan, la bataille entre les François et les
Anglois. L'année même (1426) qu'il mourut, il avoit reconcilié à la
Charité-sur-Loire Téglise paroissiale de Notre-Dame , dite Sainte-
Croix , dans laquelle les nommes Guillaume Loiseau et Jean de
Neuchâteau avoient assassiné Pierre Guibelin (3). Avant que de sortir
du prieuré, il y donna acte aux religieux , le 10 mai, comme il
n'avoit point prétendu entreprendre sur leur juridiction ; il mourut
cinq mois après son retour le lundi 14 octobre, k neuf heures du
matin.
Dès le même jour, on établit pour chanoines régalistes Michel du
Bois et Simon Béchu. Ses funérailles furent faites le lendemain par
Hugues des Noës, doyen ; il fut enterré dans le côté droit du chœur,
proche la tombe de Gui de Mello , en tirant un peu vers la stalle du
sous-chantre et vers la tombe de Pierre de Mornay (4) : il n'y eut point
de tombe mise sur lui. Le dix-huitième jour du mois, Jean Prévostat,
alors devenu pénitencier, Grégoire Viteaux et Etienne-le-Bègue , cha-
noines, exécuteurs de son testament, promirent au Chapitre d'en
donner copie et de payer deux draps d'or, l'un qui avoit couvert la
chaise où il fut porté à sa nouvelle entrée , et l'autre qui avoit servi à
mettre sur son corps après sa mort (5). Ils s'engagèrent aussi à donner
dix livres de rente pour fonder son anniversaire, conformément k sa
dernière volonté. Il fut aussi fondé dans la collégiale de Notre-
Dame-de-la-Cité (6), pour la somme de vingt livres, une fois payée.
(1) RegUt. CapiL
(2) Thés, anecd., t. 2, p. 1557.
(3) CartuL CarU., p. 59.
(4) Ex libro svccentor.
(5) Ces deux tapis furent évalués cent
douze Uyres.
(6) Necrol. B. M.
QCATBE-VINCT-CINQIIIÈIIE ÉVËQUE d'aUXERRE. 47
Comme Philippe des Essarls avoit été nommé l'un des exécuteurs j
testamentaires du roi Charles VI par acte du 23 octobre 1422, un
autre fut mis en sa place après sa mort (2) : il avoit conféré, au mois
de janvier 1417, â son frère, Charles des Essarts, une prébende de
l'église d'Auxerre vacaute par le décès de Jean Vivien l'alné (3) ;
mais Charles mourut k Auxerre le 4 juillet 1420, laissant vacante
avec son canonicat la dignité d'archidiacre de Soissons. Selon nos
registres (4), ce Charles des Essarls étoit natif du diocèse de Meaux.
Le lecteur, curieux de quelques particularités peu connues touchant
Philippe des Essarls, les trouvera dans l'histoire des grands officiers
de la couronne, à ^article des grands bouteillers de France, où
Charles des Essarls , dont je viens de parler, est oublié.
m deribbaje île Salnl-Gernain d'Aaum, i
(i) Prenret de l'hial de Farit, (. 9,
p. MT.
(8) fies- Cap. 45 , Jantiar. 1417.
(S) /Md. U30, 3S tnalitt •&}«!.
48
JEAN DE CORDIE ,
CHAPITRE VIL
Des deux évoques, Jean de Corbie el Laurent Pinon, élus pendant les guerres du
roi Charles VII contre les Anglois cl autres.
JEAN DE COHBIE, LXXXVI» ÉVÊQUE D AUXERRE.
1426 k 1439. Le roi d'Angleterre, qui se portoit pour roi de France , averti de
la vacance de l'église d'Auxerre, défendit aux chanoines de la cathé-
drale de procéder à une nouvelle élection sans lui avoir demandé son
consentement. Celte défense, qui étoit du 51 octobre 1426, fut suivie
d'une députation que le Chapitre fit pour obtenir celte permission,
et qui fut en effet accordée a Paris, le second décembre. Il est diffi-
cile de connoitre les brigues faites alors pour l'élection ; on sait
seulement qu'il y eut deux évéques nommés pour Auxerre, Jean de
Corbie , qui succéda véritablement k Philippe des Essarts, et Jean
Vivien élu par les chanoines ses confrères.
Jean de Corbie, dont la nomination eut lieu, éloit fils de Thomas
de Corbie , annobli en 1389, et de Marguerite de Cresequas. Il avoit
été maître des requêtes depuis Tan 1406 jusqu'en 1413 qu'il hérita,
avec Arnault, son frère, des grands biens que le chancelier Arnault
de Corbie avoit laissés à sa mort dans le Beauvoisis. On le trouve
aussi, la même année, dans le rang des chanoines d'Amiens. Quelque
temps après il fut évéque de Mende ; et, sur la foi d'un titre, on
assure qu'il l'étoit dès l'an 1416. Mais il n'est point vrai qu'il ait
quitté cet évêché en 1424 pour venir à Auxerre, comme le marque
le nouveau Gallia Christiana (1), puisque le siège étoit alors rempli.
Ce fut certainement au plus tôt en décembre 1426 qu'il put être élu ou
(1) Gall. Chr.nova in proO. ceci. Mimât., p 27.
QUATRE-VINGT-SIXIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 49
nommé pour Auxerre ou qu'il y fut transféré ; encore est-il plus ^^f^a ui;;
probable qu'il ne fut élu que le 8 novembre 1427 (1). L'époque
de son entrée k Auxerre est marquée vers le milieu du mois de
décembre (le cette année, sans aucun détail (2). Ce qu'on sait de son
épiscopat se réduit presque à rien ; il est peu d*évéques dont il soit
venu jusqu'à nous moins de faits. Pierre de Longueil, son vicaire-
général, le poussa à une tentative sur la juridiction du Chapitre*
Simon Béchu, receveur du temporel de Thôlel-dieu de Mont-Ârtre,
étoit en même temps chanoine. Le vicaire-général l'avoit iait citefr
par devant lui au sujet de ses comptes. Le Chapitre soutint que sa
qualité de chanoine Texemploit de la juridiction épiscopale, et la
vigueur de la compagnie engagea Pierre de Longueil à un accord , par
lequel on convint à Tamiable que le tout seroit réputé comme non
avenu (5). On vécut ensuite en si bonne intelligence avec le vicaire-
général, qu'on lui prêta tous les livres de la bibliothèque du Chapitre
dont il eut besoin (4). Le concurrent de Jean de Corbie à Tévéché
d'Auxerre, sur la fin de la même année 1428, fit ajourner à la cour
de Rome» à la cinquantaine, le Chapitre d'Auxerre avec les deux
chanoines régalistes (S). Il prélendoit apparemment aux revenus échus
durant la vacance. On ne sait ce que devinrent ses prétentions;
Jean de Corbie resta évéque d'Auxerre et coiifirma les indulgences que
son prédécesseur avoit accordées (6) au sujet de la nouvelle fête des
saintes Marie Jacohi et Salomé : c'est tout ce qu'on sait de lui quant
au ministère spirituel. La situation des affaires du royaume et des
siennes propres ne lui permit guère de résider dans une ville qui
ne paroissoit pas tenir le parti auquel sa famille étoit attachée. Il hérita
encore de la portion de son frère Arnault ; mais le roi d'Angleterre
confisqua sur lui, en 1451, les terres de Séchelles et de Cuvilliers,
qui lui étoient venues directement de son oncle le chancelier, et il les
(1) Sa tramUUon, du siège de Mcnde à ^ ^5) Reg. Cap., I4â8.
celui d'Auxerre, est marquée dans les régis- ! (4) Beg. Cap., oOapr. 1429.
très du Valican au 18 aoAt 1427, la diiiémc I ^5) fieg. cap. XI, Marlii \AtS ci 1 Ap}il.
année de Mari in V. ! 1429.
(2) Beg. Cap., 1427. ! (0 9ri.*$aUa Aulifs,
11 4
UM à i4S».
50 JEAM DE COBBIE ,
donna à Jean de Poix(l). Il eut encore un embarras de famille peu
convenable b son état, il s'agissoit de pourvoir à deux fils naturels
nommés Geoflroy et Renaud, qu'il avoit eus d'une damoiselle nommée
Marie de Poilhay, et un autre du fait de son frère Ârnaull dont il
étoit héritier (2). Il fit légitimer les deux premiers par lettres données
îi Chinon au mois d'août 1455, et fit présent, en pur don, au dernier
des seigneuries de Courselles, de Ploûis et du Becquet. Il est vrai-
semblable que la reconnoissance qu'il fit de ces deux bâtards, fut Tune
de ses dernières actions (5). Au moins, il étoit mort au commence-
ment do mois d'octobre de la même année, si le $ede epiicopali vacante
marqué dtns les titres du premier et Ai troisième de ce mois, est une
preuve suflisante de mort ; mais comme le Père Ansdme assure qu'il
vivoit encore en 1455 , i| peut se faire qu'il eût abdiqué l'évécbé
d'Auxerre pour se retirer dans quelque cloilre (4). D'autres écrivains
le font même vivre jusqu'en 1458 (5). On voit, dans les comptes de
la ville d'Auxerre, que ce fut sous son épiscopat que le roi Charles YII
pissa il Auxerre, accompagné de la Pocelle d'Orléans , et que se tint
la fameuse assemblée pour la paix, a laquelle fut envoyé, de la part da
pape, le célèbre chartreux Nicolas Albei^ti, cardinal du titre de
Sainte-Croix-en-Jérusalem. Les lieux circonvoisins ne manquèrent pas
de profiter de la présence d'un homme si respectable pour obtenir les
grftces spirituelles qu'il étoit en son pouvoir de dispenser. Entre autres
indulgences il accorda, en faveur de l'église cathédrale d' Auxerre,
pour l'espace de vingt années (6) , cent jours à chacun des fidèles qui
visiteroient cette église en certaines fêtes avec les dispositions nécessaires,
et y prieroient pour les besoins de l'Etat, ou bien assisteroient aux
processions générales que les chanoines feroient pour la paix et la
prospérité du royaume. La nouvelle fête des Saintes-Femmes n'est pas
oubliée dans le catalogue des fêtes, non plus que celle des reliques de
(t) AoMlflM im CaneU. Voy* tmêi Sao- à loo Mveo Aniiolt, OU natarel du chan-
▼•l,t 5. p. SM
(S) Âo§«im9,4béé.
(3; AMNrfB». U4é. et kéêUifr. tfilMe
(4) 0»eH« Ml «nid* 4tf mm toitoawraf '. (6) tx originalib.
de r M 1 4 V# , k 1 4 «vfll« fm MfMf H
eell«r , let terres de CourceUes , p|
Saioi-liift, elc.
(5/ Moreri de Dupin.
QUATRE-VINGT-SIXIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 51
la même église (1). Ce fut aussi de son temps que se tint le concile ^m » mm.
' de Bâle où le Chapitre d'Auxerre députa Hugues des Noës, chanoine.
Denis Simon, conseiller au présidial de Beauvais, dit, dans son Nobi-
liaire de Beauvoisis, que Jean de Gorbie, évéque d'Auxerre, a fondé
Tobit de sa mère dans l'église collégiale de Saint-Yaast de Beau-
vais (2).
LAURENT PINON , LXXXVII» Ê VÊQUE D'AUXERRE.
Il y avoit plus de deux cent cinquante ans que le siège épiscopal
d'Auxerre n'avoit été occupé par un religieux, lorsque les intérêts du
duc de Bourgogne firent placer sur ce siég*) un Dominicain qui
étoit son confesseur. Une lettre écrite par Eugène lY k Philippe,
duc de Bourgogne » le 15 juillet i435, fait voir que ce pape avoit été
fort pressé par ce duc pour y mettre un évêque qui lui fût agréable,
et qu'en conséquence le pontife avoit donné la préférence à Laurent
Pinon. Une lettre de ce duc, du 26 avril, ne laisse aucun lieu
d'en douter ; il y recommande, aux Pères du concile de Bâle , son
confesseur transféré, dit-il, depuis peu par le pape, de Tévêché de
Bethléem à celui d'Auxerre ; ajoutant que quoique le doyen nommé
Hugues des Noës, concurrent du nouvel évêque, Teùt cité devant
eux, il espéroit qu'ils n'infirmeroient point la disposition du pape,
•
parce qu'autrement cela seroit préjudiciable à la ville qui étoit de son
domaine (3).
Le Dominicain, si chéri du duc de Bourgogne, avoit autrefois
étudié dans la maison de Saint- Jacques de Paris, d'où il fut envoyé
à Reims pour y être lecteur en théologie. Etant évêque de Beth-
léem vers Pan i420, en même temps que confesseur du duc de Bour-
U33 a U49.
(1) Voy» les Preuves , où est rancien
calalog[ue de ces reliques dressé sous Phi-
lippes des Essirls.
(2) Ex D, Baluze in notis, ad Episc,
Autiii.<, p. 30.
(5,^ CcUc IcUrc csl dans le 8 ' tome de
rAmplissimo Collection du P. Hartene ,
col. 585 ; mais ce Père se trompe lorsqu'il
marque qu'il s'aj^issoit là de Pierre de
Longueil.
L'extrait des rcgibtrcs du Vatican, fait
par dom Etiennot , marque sa translation
52 LAURBirr piton,
1439 ï \m 8^^« '^ publia un Traité de Forigiae des seigneuries et de la division
des états , qui est apparemment celui qu*on dit avoir été -présenté
au duc de Bourgogne par un évéque de Bethléem, sous le titre de
Traité de la puissance temporelle (1 ). Le P. Echard donne à entendre
qu'il ne fit qu'une traduction françoise du traité latin de Durand
de Saint-Pourçain , évéque de Meaux , sur la puissance temporelle
des rois. Soit que le duc de Bourgogne ne fit pas autrement atten-
tion à cet ouvrage, soit que Laurent eût depuis modéré son zèle, le
prince crut qu'on* pouvoit confier k ce religieux la conduite spiri-
rituelle d'une ville qui faisoit la clé de ses états; de sorte qu'après
avoir été évéque d'un titre enclavé dans le diocèse d'Auxerre et
d^une église sans peuple, il devint évéque du diocèse même qui bor-
noit la Bourgogne du côté de la France.
Laurent Pinon, dès le 21 décembre i435, bénit à Dijon une église
succursale de Saint-Nicolas , construite par le bailli de cette ville, et
les titres vus par l'historien de Tabbaye de Saint-Etienne , le quali-
fient dès-lors évéque d'Âuxerre (2) ; cependant, il ne fit sou entrée à
Auxerre que plus d'un an après. Pendant cet espace de temps, le
clergé d'Auxerre , hors d'état de payer certaines exactions nommées
alors demi-dixme ou semi-dixme, c'est-à-dire le vingtième denier,
écrivit au concile de Bàle pour en obtenir la décharge (5) ; la lettre
est du 29 juin 1453. On y représentoit que la guerre avoit rendu tous
les héritages incultes, et que si l'on obligeoit de payer Timposilion,
le service des églises seroit abandonné. La preuve que Laurent
Pinon fit son entrée solennelle à Auxerre vers la fin de 1454, se
tire de l'ordre qu'il donna le 24 février, de signifier cette entrée au
baron de Donzy , et de la commission que le duc Philippe-le-Bon
envoya, au nom de son beau-fils Charles, comte de Nevers, dont
il avoit la tutelle, pour porter l'évéque dans cette cérémonie à cause
de la baronnie de Donzy. La commission fut adressée, le dernier
février 1454, au seigneur de Chastellux et à Gui de Bar, cham-
de Belhlëem à Aaxerre. par Bogëne IT,
tu 31 mai 1432, etsonélecUon aaSSaTril
1433. Ce qai n'est point clair.
(1) in 9f. Seguier in Ml Sangerm.
(2) Prob. hist. S. Steph, Divion, p. 27ô.
(3) PreuTes, t. iv , et Ampliss. Collecl.
Martene, t. S, p. 616.
QUATRE-VINGT-SEPTIÈME ÉVÊQUE d'aUXBRRE. 55
bellan du duc. Il y avoit aussi ordre du 24 février, d'ajourner
à la même cérémonie le duc de Bar pour la seigneurie de Toucy aussi
bien que le seigneur de Saint-Verain ; la signification leur en avoit
été faite les trois et cinquième mars suivant. Les compilateurs de
ces titres (1) n'ayant point eu l'attention de marquer le jour que
l'évéque avoit indiqué , cela nous fait hésiter sur cet article de chro-
nologie : Dom G. Viole a écrit que ce joyeux avènement au trône
épiscopal fut le 14 mars. L'unique circonstance qui en a été con-
servée par un ancien épistolier de la cathédrale , est qu'il prêta entre
les mains du doyen le serment ordinaire de maintenir les droits de
cette église. Quatre ans après , il fit à Sens la profession d'obéissance
en qualité de suffragant ; et comme l'archevêque Louis de Melun étoit
absent , il s'acquitta de ce devoir en présence de ses vicaires généraux.
Pierre de Longueil fut continué dans la fonction de grand-vicaire dont
il avoit été chargé sous son prédécesseur ; le nouvel évêque poovoit
compter sur sa vigilance : éloigné quelquefois de son diocèse , il avoit
besoin d'un tel homme.
Dès Tan 1455^ le duc de Bourgogne mena Laurent Pinon dans les
Pays-Bas , pour assister au traité qui devoit être fait à Ârras. L'évéque
d'Auxerre y étoit le 15 juillet, et, le 22 du même mois, il célébra à
Saint-Yaast la grand'messe de la procession solennelle qui se fit [)ar
la ville, en présence du cardinal de Cypre (2). Après cette mes$e il
prêcha , et ayant pris pour texte de son discours : Fides tua te salvum
fedt ; vade in pace^ il s'étendit à montrer la prééminence des rois de
France sur les autres couronnes et leur stabilité dans la foi ; il fit voir
les biens que les papes Etienne et Adrien avoient reçus de Pépin et de
Charlemagne, d'où il conclut qu'il étoit important qu'un royaume si
catholique et si utile à l'Eglise, conservât la paix dans son sein. Le
8 septembre, il célébra la grand'messe à Saint-Yaast, en présence
du duc de Bourgogne; et enfin, le 21 du même mois, il fit la clôture
de l'assemblée par une prédication sur les avantages de la paix, prenant
pour thème ces paroles du psalmiste : ecce quant bonum^ etc. , il fit à
1483 ï Ut!>
(1) Inventaire m*« do Varzy.
(S) Journal de laPaii d'Arras d'Antoine
de la Taverne. Rel. de S. Vast, imp. eu
1651.
143:) k 144».
54 LACRBirr pinon ,
ce sermon une longue allusion de ce qui se lit dans la Genèse , sur
raccord d*Âbraham et de Loth, avec le traité qui venoit d*étre conclu
et qu'un chanoine d'Ârras publia ensuite dans la même chaire. Par les
articles de ce traité, le duc de Bourgogne obtint de grands avantages
sur le pays Âuxcrrois ; cependant, il ne put y faire des levées sans
opposition. LorsquHl en fit la tentative, Tainée même du traité,
Tévéque d'Auxerre s*y opposa pour ses terres et pour celles du Cha-
pitre ; de sorte que le duc déclara qu'il n'agissoit pas en qualité de
duc de Bourgogne, mais comme jouissant des droits royaux on vertu
du traité d'Arras (1).
Cet évéque fut souvent obligé de résider dans des villes des Pays-
Bas; tantôt à Lille, au cloître Saint-Pierre, et tantôt à Bruges (2).
Dans un de ces voyages en 1459, il apprit que Pierre de Longueil,
son vicaire général, avoit été élu doyen du Chapitre d*Auxerre (5). Sur
cette nouvelle , il adressa , le 9 septembre , une commission à Tabbé
de Saint-Marien , pour qu'il reçût en son nom le serment de fidélité
du nouveau doyen qui lui étoit déjà attaché par l'office de grand-
vicaire. Dans le diocèse, il est peu de collégiales ou monastères où il
ne reste quelque vestige du nom de ce prélat. Outre l'église de Saint-
Martin de Clamecy, dont quelques-uns assurent qu*il fit la dédicace le
10 janvier 1458, il dédia celle de Sainte-Eugénie de Yarzy, le premier
dimanche de TAvent de la même année (4), voulant cependant qu'on
remit a un autre temps l'anniversaire de cette dédicace et y accordant
des indulgences. Il demeuroit assez volontiers dans le château que les
évéques a voient de temps immémorial dans cette ville de Yarzy. Les
habitants d'Auxerre ayant besoin de son secours au mois de juin 1444,
lui dépéchèrent un courrier en ce lieu ; il affectionna beaucoup l'église
collégiale de Sainte-Eugénie (5), et y fonda une chapelle sous le titre
de deux fameux saints de son Ordre, 'saint Pierre, martyr, et saint
Thomas d'Aquin ; il s'y fit représenter à genoux avec l'habit des Do-
minicains. Le 25 août, et apparemment en 1445, il dédia Téglise du
prieure conventuel de Sainte-Geneviève de Marcy, de l'Ordre du Val
(i) Taàul, s. Germ.Àutiis. F. PreuTCS,
t. IV, n.
{i) Echard in Scrip, Dominic.
(3) Viole.
(4) OMtuar. Varziac.
(5) Tatml S. Eugen. Varziac.
^j*'€.*'*t*mm—\.. y^: • •■lJ. . M «.
QUATRE-VINGT-SEPTIÈME ÉVÊQUE D^UXERRE. 55
des Ecoliers (1). S'étanl recommandé aax prières de la petite commu- 1433 ^i U4d.
naoté qui y subsistoit alors,. il fut résolu le 14 octobre de chanter
chaque année, le lendemain de Saint-Laurent, une messe du Saint-
Esprit à l'intention du prélat , tant qu'il vivroit. L*église collégiale de
Notre-Dame de Toucy avoit besoin d'être rebâtie. Le 9 mai 1445,
il accorda des indulgences à ceux qui contribueroient de leurs aumônes
au nouvel édifice qu'on projettoit (a). Faisant la visite de son. dio-
cèse, les années 1446 et 1447 , il dressa des règlements pour les cha-
noines de Saint-Etienne de Gien. En 1458, il fit, à l'autel matu*
tinal du prieuré de la Charités une ordination de quelques moines
acolytes (2); mais Pierre le Duc, sous-prieur et vicaire-général du
prieur, lui demanda une déclaration, comme c'étoit du consentement
de la communauté, aux libertés de laquelle il n'entendoit préjudicier et
sur laquelle il n'a voit aucune juridiction, ce qu'il accorda le 27 janvier
1458. En 1445, étant à Varzy le 4 septembre, il permit de quêter
par son diocèse avec une croix et un reliquaire, pour aider au
bâtiment de l'église de Bethléem , nouvellement ruinée par les guerres,
que l'évéque Ârnoul rebâtissoit. Il accorda même des indulgences aux
bienfaiteurs.
Les évéques, tirés du corps religieux, laissent ordinairement
beaucoup de marques d'affection envers les maisons de leur Ordre,
situées dans leur diocèse. Laurent Pinon ne se distingua pas de
ce côté-lâ; et il ne paroit en relation avec ses confrères de la
maison d'Auxerre qu'en deux occasions : premièrement en 1440,
lorsqu'ils tinrent chez eux le Chapitre provincial de l'Ordre auquel
il assista, et en 1445, au sujet d'une dévotion qui tendoit au
soulagement des âmes du purgatoire. Le motif de cet établissement
vint de ce qu'étant mort un nombre considérable de fidèles pendant
(1.) Obiiuar. Marciac. \ (i) CartuL Caril., p. 60.
(a) L'évéque rapporte dans la lettre qu'il donna pour cet objet que les Anglais
Favaient brûlée. Cet événement était arrivé dans les guerres civiles du commence-
ment du siècle, en 1423, lorsque les Anglais «'étaient emparés de Toucy.—
V. Preuves, t. iv, n. (,Y. d. E.).
1433 a 1448.
56 LAUftENV PIMOM ,
le% guerres précédentes, sans avoir eu la sépulture ecclésiastique, il
parut nécessaire d'y suppléer en quelque manière. Les Frères Prê-
cheurs d'Âuxerre proposèrent doné une confrairie qui feroit célébrer
tous les jours de Tannée une messe dans leur église, à Tintenlion de
tous ces défunts, et chaque semaine, une fois les vigiles des morts,
excepté les semaines des grandes fêtes. Barthélémy Tiiier, associa par
avance tous les confrères de la future confrairie aux suffrages de
rOrdre; il falloit munir le tout de l'autorité épiscopale (1). Laurent
Pinon , non content d'approuver cette confrairie, dite des Trépassés,
accorda les indulgences ordinaires à tous ceux et celles qui s'y enrôle-
roient, et ordonna de bien recevoir les Dominicains d'Auxerre qui
les publieroient. Ces lettres, signées h Auxerre le vendredi après la
Saint-Martin d'été 1445, furent suivies l'année d'après d'une augmen-
tation d'indulgences que Pierre du Mont, évéque de Bresce et nonce
du pape Eugène lY, accorda à Bourges le 8 octv>bre« à tous ceux qui
feroient quelques aumônes ou legs à la même confrairie : tout cela re-
gardoit une dévotion particulière. Quant a l'office public, tel qu'il se
chantoit alors dans le diocèse, ce prélat n'y toucha nullement; il laissa
le calendrier comme il l'avoit trouvé, sans y faire insérer saint Domi-
nique ni aucun autre saint de son Ordre, et sans augmenter le grade
de la fête de saint Laurent, se contentant de faire écrire dans les pon-
tificaux la bénédiction épiscopale selon le rit gallican, pour les années
qu'il officieroit pontificalement chez les Jacobins le jour de saint
Dominique.
Il ne parolt proprement qu'un seul acte d'hommage rendu de son
temps a l'église d'Auxerre : c'est celui de Charles, comte de Nevers,
pour la baronnie de Donzy (2). Il fut rendu à la manière accoutumée
par le comte , ayant les mains jointes en manière de suppliant et rece-
vant le baiser de paix de l'évéque ; la cérémonie se fit à son retour de
Cosne, dans la chapelle du château de Donzy, le 9 juin 1445 ; il fit
marquer expressément dans l'acte, que par grâce il recevoit à Donzy
cet hommage qui auroit dû lui être rendu à Auxerre, à quoi le comte
acquiesça en présence d'un grand nombre de ses officiers et amis,
(1) LeUres de Lyon, ?7 mai 1445.
/ (2) Voy. Preuves, adan. 1445.
rLi^- . - _
;.5U^1BI
OHBHtt
kbdOI
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QUATRE-VINGT-SEPTIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 57
savoir : Milon de Paillars, chevalier , bailli de Nivernois el de Donzy; j^ j, j^
Gui de Jaocour, seigneur de Villarnoui et de Marrault, son premier
chambellan ; Jean de la Rivière, seigneur de Ghampleroi; maître Pierre
de Longueil, doyen de l'église d'Auxerre ; frère Jean du Doyer, domi-
nicain, et plusieurs écuyers. Jean de Salazar, qui avoil acquis, des
héritiers du cardinal de Bar, la terre de Toucy, devoit pareillement lui
en rendre hommage dès Tan 4445; mais ce prélat lui donna des
lettres de répit ou de souffrance jusqu'au mois de février i448. Cepen-
dant, on lit dans l'inventaire des titres de Toucy, une saisie de la tour
de Toucy, faite au nom de l'évéque par faute de foi et hommage, le
i8 mai 1446. En la même année, 1445, il affranchit grand nombre
des habitants de l'un et l'autre sexe, de la seigneurie d'Hodan, proche
Yarzy. Ce qui confirme que Yarzy fut le lieu de son diocèse où il se
plut davantage après Âuxerre.
Nous ne savons pas où il mourut, ni même positivement quel
jour arriva son décès, sinon que les comptes d'anniversaire de la
cathédrale le marquant vers la fin du mois de mars, il y a assez
d'apparence qu'il mourut pendant le cours de ce mois, l'an 1448.
Le lieu de' la sépulture a paru également incertain ;* quelques mo-
dernes l'ont cru inhumé dans la nef de la cathédrale , devant le
crucifix (1) ; ils pensoient que la tombe noire qu'on y voyoit, il y a
soixante ans , étoit la sienne ; mais d'autres, plus instruits, ont écrit (2)-
que Laurent Pinon a été inhumé chez les religieux de son Ordre, a
Auxerre, où la sépulture se voyoit au côté gauche du grand autel, jus-
qu'à ce que les huguenots eussent entièrement détruit son tombeau et
dissipé ses ossements.
Outre la traduction du Traité de la puissance temporelle qu'il avoit
faite étant évêque de Bethléem , il reste de lui un catalogue des illus-
tres de son Ordre que l'on montre manuscrit à Saint-Victor à Paris (5).
Il fit rédiger en 1455 un Pontifical à son usage; c'est un petit in-4®
conservé parmi les manuscrits de la bibliothèque Colbert (4). On y
voit, au bas de la première page, ses armoiries qui sont (rots pommes
(1) Bargedé, assesseur. | (5) Num^ 650. antiquo-
(2) Noël, chanoine. I ^4) iViim 5984.
58 PIERRE DE LOHGDBIL ,
1433 k 141» "^ P*" **'"'' '^'" "" c^an^ d'axur. Les mêmes armoiries s'aperçoi-
vent eocore dans la satle basse de l'évéché, an manteau d'une ancienne
cheminée.
Smu mcrI dn convenl de Saint-Gcniuiit d'Aaiem, 13S3.
CHAPITRE VIII.
PIERRE DE LONGUEIL, LXXXVIll' ÈVÊQUE D'AUXERRE (b).
Depuis longtemps on n'avoit vu d'évëque gouverner l'église d'Au*
xerre et y résider si grand nombre d'années que Pierre de Longuell.
Sou cpiscopat fournit beaucoup de faits remarquables, Pierre deLon-
gueil, parut vériiablement né pour l'église d'Auxerre, ayant été vicaire
général de Jean de Corbie, il continua la même fonction sous Laurent
Pinon. Il devint alors chanoine de la cathédrale et enfin doyen; selon
[a] C'est par erreur que le (graveur a mis tigitlvm au lieu de teerelvm.
(b) l.c 4 décembre liBti, l'éTèquc donna des staliils k la collégiale Sainte-
EuBénie de Varzï. (N.d.E.).
QUATRE-VINGT-HUITIÈME ÉVÊQUE D*AUXERRE. 59
les apparences , il ne songeoit pas à être évêque d'Âuxerre , puisque
étant doyen , la pensée de la mort lui fit fonder son obit. Cepen-
dant la providence l'appela à celte dignité après la mort de Laurent
Pinon.
Il nous apprend lui-même qu'il étoil originaire d'Âuxerre , du côté
d'Adam Chanteprime , trésorier de France , qui en étoit natif.
Il ajoute même que son père et sa mère y avoient été mariés , et
que l'un de ses frères y étoit né sur la paroisse de Saint -
Mamerl (1). Il naquit à Paris en i597 sur la paroisse de Saint-
Benoit (2) , de Jean de Longueil , président au parlement , et de
Jeanne de Bouju, dame du Rancher, inhumés Tun et l'autre chez les
Cordeliers. L'historien de l'Université de Paris (5) le fait naître sept
ans plus tôt ; si du Boulay s'est trompé pour cette date, il a pu dire
vrai lorsqu'il ajoute que Pierre de Longueil passa maître ès-arts en
1415. Il fut chanoine de Notre-Dame de Paris et de Gontances,
selon qu'il le marque dans son testament, et peut-être est-il aussi
le Pierre de Longueil qualifié trésorier de Beauvais, dans un ma-
nuscrit de Dijon , à l'an 1455 (4). Mais il s'attacha par préférence
à l'église d'Auxerre ; on croit que des alliances entre les Chante-
prime et les Corbie y avoient donné occasion , de sorte que Jean
de Corbie, évêque d'Auxerre, s'étoit déterminé en 1427, à l'éta-
blir son vicaire-général. On a pu observer ci-dessus quelques effets
de son zèle pour Tétendue de la juridiction épiscopale; pendant
qu'il exérçoit cet office , il fut quelquefois député par la ville vers le
duc de Bourgogne, Philippe-le-Bon, pour les intérêts du. pays, et
surtout en 1451 , 1452 et 1455. Etant devenu chanoine d'Auxerre,
puis doyen, il continua à faire connoitre l'étendue de son génie. La
communauté des habitants dont il fut gouverneur de la part du
1449 ^ 1473.
(1) Ceci est tiré d*on mémoire que cet
éTéque présenta aux gouverneurs de la
TiUe, lors de son procès sur Tassislanco à
la messe de paroisse.
(2) Ex ejus testamento.
(5) Du Boulay, Sœc. XV, p. 915.
;4) Il peut aussi se faire qn*il soit le
^émo Pierre de Lonjrueil qui avoit pris
possession d*un canonicat de Sons, auquel
il prctendoit encore avoir droit en 1442.
Il est au Feci de Sens de cette année-là.
Dom Denis de Sainte-Marthe marque qu'il
étoit devenu chanoine de Paris par permu-
tation pour un canonicat de l'église de
Beauvais.
1449 ^ 1473.
60 PIERRE DE LONGUEIL,
clergé (1), ne pouvoit que se louer de ses services. Dix ans aprës^
il prenoil le titre de conseiller et maître des requêtes de rtiôlel de
monseigneur le duc, particulièrement en 1445; et en 1448 on le
qualilioit conseiller au parlement de Paris. Tous ces titres ne furent
qu'un acheminement à Tépiscopat.
Ayant été nommé à l'évéché d'Auxerre en 1449 (2) , on vit bien-
tôt les préparatifs de sa prise de possession. Il donna , le 21 février
de cette année, quatre mandements dont le premier fut sigiiiiié au
comte d*AuxerreY dans le château de la ville , le 25 du même mois (5) ;
le second, au duc de Bar, à Toucy, le 24; le troisième, au seigneur
de Saint-Yerain , le 25 ; et le dernier , le 26 , à Donzy , au baron de
cette seigneurie ou h ses officiers, pour qu'ils eussent a assister à son
entrée et à le porter (4). Le 25 de février, le Chapitre de la cathé-
drale consentit par écrit qu'il pût venir dans la ville avant que de
faire son entrée k Tabbaye de Saint-Germain ; et comme il ne vou-
loit point nuire k ses successeurs, ni abolir la louable coutume, il
donna le même jour, k l'abbé et au couvent (5), quittance du
marc d'argent pour son droit de réception en ce monastère comme
si réellement il l'eût reçu , quoiqu'il en eût fait la remise et qu'il
n'y eût point logé; il fit expédier pour le Chapitre un autre acte
par lequel il déclaroit qu'il ne prétendoit point abolir l'ancienne
coutume de n'entrer dans la cité d'Auxerre qu'après avoir couché
une nuit k Saint-Germain. Comme sa présence étoit nécessaire k
Auxerre k cause des partis qui couroient autour de la ville, il se
retira dans le prieuré de Notre-Dame-la-d'Hors de l'Ordre de Pré-
montré et y resta seize jours avant son entrée solennelle ; ne vou-
lant point paroitre innover, il donna aux religieux une déclaration
comme en cela il n'avoit point entendu préjudicier aux immunités
de l'abbaye de Saint-Marien (6). Il choisit pour le jour de son
entrée solennelle, le dimanche Lœtare^ 15 mars, et le fit signi-
(1) Compte de la %iUe d'Auxerre.
(2) Le 28 mai selon les registres du
Vatican.
(5) Ces formules étoienl toujours scion
le style aucicu, quoiqu'il n'y eût plus de
comte à Auxene.
(4) Inventaire des titre» de Vany.
(5) Archives do saint Germain.
(«) Tod. S. lUariani» Arch. de 1 Yonne.
QUATRE-VINGT-HUITIÈMB ÉVÉQUB d'aUXERRE. 61
fier à l'abbé de Saint-Germaiû , afin que lui et ses religieux le
reçussent dans leur église. Le jour de celle grande cérémonie, k
S heures du malin, il ne se trouva h Saint-Germain de dépu-
tation convenable de la part des barons que celle du comte de
Nevers. Il avoit commis, pour porter cet évoque en son nom, Jean
de la Rivière , chevalier et bailli du Nivernois et s'étoit excusé de
ce qu^il ne venoit pas lui-même, sur ce qu'il étoit occupé nu service
du roi pour le recouvrement du duché de Normandie. Jean de
Salazar , écuyer, possesseur de la tour de Toucy, avoit commis Guil-
laume de Prades, son officier, parce qu'il devoit se rendre auprès du
dauphin Viennois. Artaud Trousseau, seigneur de Saint -Yerain en
partie, s'étoit contenté d'envoyer un homme chargé de sa procuration.
 l'égard du duc de Bourgogne, il ne comparut ni en personne, ni
par procureur ; ces défauls obligèrent Tévéque à les faire proclamer à
haute voix, l'un après l'autre, jusqu'à quatre fois par Torgane de
Jocelin Gourtjarret, son bailli, et à ne pas se servir du ministère de
Jean de la Rivière , parce que les trois autres n*étoient point chevaliers
comme lui. Il fut donc porté depuis le chœur de l'église de Saint-
Germain jusqu'à la cathédrale, par quatre bourgeois forts de corps et
d'honnêtes familles, qui étoienl Jean Ferroul, Pierre Qualre-Langues,
Guillaume Marillier et Jean Bureau, accompagnés du sieur de la
Rivière , qui posoit la main sur la chaise. Â l'instant qu'il arriva dans
la place , devant la grande porte de l'église qui étoit fermée , les cha-
noines sortirent tous en chapes avec les croix et Teau bénite par les
portes collatérales et vinrent au devant de lui. Jean Mauvoisin , tréso-
rier, qui présidoit pour l'absence du doyen , le pria, au nom du corps,
de faire le serment accoutumé. Il y consentit , prit des mains du tré-
sorier le livre où étoit écrite la formule, et la main droite posée sur la
poitrine , il prononça, le Promittimu$ ordinaire , après quoi il sonna
une petite cloche attachée proche la grande porte ; et aussitôt cette
porte étant ouverte, les quatre bourgeois le portèrent jusqu'au grand
autel , le peuple criant Noël ! Noël 1 Etant descendu de la chaise , il
fit sa prière à genoux et dit une collecte de saint Etienne ; ensuite,
Jean du Breuil , chanoine d'Âùxerre , chargé de la procuration de Jean
deNailly, archidiacre de Sens, fil la cérémonie de l'installation ac-
1449 > 1473.
62 PIERRE DE LOMGUEIL>
compagne de Jacques Odoari, officiai, et d'Etienne Broneau , chanoines
de Sens. Sur quoi Jean Mauvoisin fit les protestations au nom du
Chapitre, disant que ce seroit sans préjudicier à ses droits et à ceux
de l'église d'Auxerre. Plusieurs personnes de distinction assistèrent à
la cérémonie, savoir : l'abbé de Pontigny, Pierre, abbé de Saint-
Marien; Jean, abbé de Saint-Père; Simon Coignet, secrétaire du roi ;
Jacques de la Rivière, bailli de Donzy. Geoffroy Chantereau, prieur de
Saint-Eusèbe , y est nommé parmi les notables du clergé d'Auxerre,
et parmi les citoyens Pierre Chacheré, Martin du Breuii, Biaise
Tribolé , licencié ès-lois ; Etienne Gontier, Germain Vivien et Jean
Darthe (1). L'archevêque de Sens, Louis de Melun, ne fut témoin que
de ce qui se passa dans l'église de Saint-Etienne. Quelques-uns veu-
lent que Pierre de Longueil ne différa pas d'aller à Sens prêter
serment d'obéissance à cet archevêque ; mais comme la formule
qu'on prétend être la sienne porte en termes formels et futuro ponti-
fici Senanensi^ il est difficile de décider en quel temps ce serment fut
prêté, ni même si véritablement il est de lui , puisque Louis de Melun
fut archevêque de Sens depuis i454 jusqu'en i474, et qu'il n'y eut
par conséquent aucune vacance de l'archevêché durant tout l'épiscopai
de Pierre de Longueil. C'est une chose beaucoup plus certaine , qu'il
paya à l'archidiacre de Sens le marc d'or accoutumé ; on a vu la quit-
tance datée du 51 mars 1449.
Ce prélat, dès le commencement de son épiscopat, ne parut pas
d'humeur k négliger ses droits, ni a se relâcher des soumissions qui
lui étoient dues. Il se fit rendre, dès le 25 avril suivant, le serment
d'obéissance dû par le doyen. Louis Raguier , nouvellement pourvu de
cette dignité, né pouvoit venir en personne à Auxerre, à cause des
occupations qui le retenoient au parlement dont il étoit conseiller ; il
donna commission à Jean Mauvoisin, trésorier, de prêter le serment
pour lui, et en effet, ce chanoine s'en acquitta dans la chapelle du châ ■■
teau de Régennes. La suite montra bien que Pierre de Longueil avoii
ce serment fort à cœur» puisque Thomas la Plotte, successeur de Louis
Raguier, ayant refusé de le prêter , cela occasionna un procès dont on
(1) Ex Proc. verb, Quid. PrévostaL
QUATRE-VINGT-HUITIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 65
verra les conséquences. Le premier acte d'importance qui suivit celui i^ ^ ^473.
de Louis de Raguier, concerne encore les droits honorifiques de la
dignité épiscopale. Ce fut Tbommage que Charles, comte de Nevers
et de Réthel, rendit comme baron de Donzy ; ce seigneur avoit obéi
très exactement aux ordres de Tévéque pour ce qui regardoit la pre-
mière entrée; son député fut admis et ceux des autres rejetés. Le
nouveau prélat voulant témoignei' à ce seigneur combien il étoit satis-
fait de lui, n'eut pas plutôt appris qu'il étoit de retour du service du
roi après la recouvrance faite de la Normandie, qu'il alla le trouver en
l'hôtel de Bethléem, proche Clamecy : cette visite ne fut pas de pure
civilité , le prélat engagea le comte à lui rendre le devoir féodal. L'acte
porte que ce devoir auroit dû se rendre au ohàteau de Varzy, duquel
est mouvante la baronnie de Donzy : le comte se reconnut homme et
vassal de Tévéché d'Auxerre en baisant. Tévéque à la bouche (1), et
recevant de lui injonction de fournir un dénombrement de sa terre.
 cette courte cérémonie, faite le 21 de septembre 1450, assistèrent
Arnoul, évéque de Bethléem ; Claude de Beauvoir , seigneur de Chas-
tellux; Jean delà Rivière, seigneur deChamlemi, bailli de Nivernois*
chevalier; Pierre des Barres, écuyer, conseiller et chambellan du
comte ; Pierre Garnier, sou secrétaire ; Guy Bourgoin, son maître
d'hôtel , et de la part deTévéque, Biaise Tribolé^ d'Auxerre, licencié-
es-lois. Jean, comte de Nevers, ayant succédé à Charles , rendit
aussi foi ei hommage à notre évêque dans une conjoncture à peu près
semblable. Allant prendre possession de ce comté à lui échu par la
mort de son frère, et passant par Auxerre, le 24 mai 1464, l'évéque
vint le saluer dans l'hôtel de Jean Gontier où il étoit logé. Ils s'accor-
dèrent sur cet hommage, par des protestations respectives de ne point
préjudicier aux prétentions de Tun et de l'autre, à celles de l'évéque
qui déclara n'avoir dû recevoir cet hommage qu'au château de Yarzy,
et celles du comte qui ne se désistoit point du procès pendant sur les
chàtellenies de Mez-le-Conite, Monceaux, Chftteauneuf et Clamecy,
que son frère avoit soutenu être mouvantes du comté de Nevers et non
de Donzy. L'assemblée ne fut par moins nombreuse à cet hommage
(1) L'ancienne manière de baiser.
1449 i U73.
64 PIERRE DE LONGUEIL,
qu'elle Favoit été à l'hommage précédent; plusieurs chevaliers de dis-
tinction s'y trouvèrent, savoir : Filbert de Jaucourt, seigneur de
Villarnoul ; Philippe de Savoisy, seigneur de Seillenay ; Claude de
Beauvoir, écuyer, seigneur de Courson; Jean des Dîmes, écuyer,
seigneur de la Maison-Fort; Jean d'Armes, docteur-è.^-lois ; Jean
Régnier, Tainé, bailli d'Auxerre ; Jean Thiard, écuyer, seigneur du
Mont-Saint-Sulpice ; et Biaise Tribolé, licencié-ès-lois. Pierre de
Longueil pressa souvent Jean de Ghallon , seigneur de Vitteaux et de
risle-soe»-Montréal , de lui rendre . les devoirs féodaux pour la terre
de Lorme, en Morvan. Les délais qu'apporta ce seigneur, obligèrent
l'évéque, qui étoit à Yarzy le 7 janvier 1459» d'enjoindre à Etienne
Lemuet, seigneur de Corbelin , lieutenant du bailli de Varzy, de faire
mettre brandons ou autre enseignement sur la tour , chàtel , ville, justice
et seigneurie de ce lieu , et d'en faire gouverner les revenus par un
commissaire. L'affaire de celte saisie féodale se trouva jointe à celle
que le même évéque eut contre les comtes de Nevers pour un sem-
blable sujet ; l'une et l'autre duroient encore en 1471, que Thomas de
la Lande en fut désigné le rapporteur. Pierre de Beffroymont , comte
de Charny, sénéchal de Bourgogne, tenoit aussi de l'évéque plusieurs
terres à Qiâteau-Censoir et aux environs, dont il avoit différé de
rendre hommage. Pierre de Longueil s'étant cru obligé d'en faire la
saisie avec commissaires, le comte vint à raison. Il fit expédier, étant
à Conhey ou Corchey, le 16 juillet 1464, une procuration h Antoine
de Montaignerot , écuyer , capitaine du Mont-Saint-Jean, et à Guillaume
Labbe, stm conseiller, pour reprendre des mains de l'évéque d'Auxerre
ses seigneuries saisies et lui en rendre foi et hommage. Ces terres
étoient Montbutois, Pierrefille, Arcy, près de Pierrefitte (l). L'évéque
voulut bien , par considération pour le duc de Bourgogne dont ce
comte étoit chambellan , se contenter d'un hommage rendu par procu-
reur, protestant que cela ne pourroit lui porter préjudice. Antoine de
Montaignerot s'étant donc mis à genoux et ayant les mains jointes,
(1) Ajoutez le bois du même Arcy ou appartenu à llugucs de Charny etBIabUlc
Moulin des Planches au lieu de Tingy, et les i son épouse.
Censiyes de VeriUy, qui auparavant avoiont i
QUATBG-YINGT-HUITIÈME ÉVÊQUE d'aUXEIIRE. ()5
baisa le prélat à la bouche et fit le serment et les devoirs en tels cas
accoutumés ; ceci se passa dans la grande salle de révêclié, le 25
juillet 1464. Le comte de Charny ayant vendu, Tannée d*a|)rès, une
partie des terres ci-dessus nommées a Jean de Ferrières, écnyer,
seigneur de Ferrières, Praëles et Champlenats, l'acquéreur se mil en
disposition de rendre au seigneur suzerain les mêmes devoirs ; mais
ne pouvant venir en personne, à cause qu'il étoit occupé aux affaires
du duc de Bourbon, dont il étoit bailli pour le Beaujolois, il commit
pour cela Guillaume d'Orgiëres, Jean de Nusillet et Jean Matliey,
écuyers, par procuration passée à Clamecy le 5 octobre 1470. Deux
jours après , le premier des trois se rendit à Yarzy oii étoit alors le
seigneur évéque, qui , après quelques paroles et remontrances au sujet
du duc de Bourbon, reçut par grâce cet écuyer chargé de procuration,
pour amour d'icelui Ferrières et de feu son père. Ce sont les termes de
l'acte.
Pierre de Longueil connoissant les besoins de son diocèse , regarda
comme son premier devoir d'y tenir régulièrement le synode , afin
d'obvier au mal ; ses règlements étoient quelquefois un peu outrés,
aussi fut-il obligé d'y apporter de la modération. On voit , par un frag-
ment (1) de ceux qu'il rédigea en i45l, Torigine ou au moins une
suite de l'établissement des prières que l'on fait encore après Pâques
dans les villes , bourgs et villages du diocèse , pour la conservation
des biens de la terre. Il statua que tous les curés feroient des procès^
sions a ce sujet deux fois par semaine, depuis le premier avril jusqu'au
dernier jour de mai , et ordonna qu'au moins une personne de chaque
maison y assistât. Il vouloit que les curés indiquassent, le dimanche,
quels saints on honoroit dans la semaine, même ceux qui n'avoient
pas de fête chômée; qu'ils exhortassent le peuple à venir entendre la
messe ces jours-là avant le travail. Quant aux fêtes chômées qui étoient
quelquefois transférées, il statua que pour éclaircir les doutes , un mois
auparavant les fêtes, les curés vinssent ou envoyassent vers l'official ou
Tarchiprêtre d'Auxerre, qui les adresseroit au sous-^hantre de la
m*» .. ur;«.
(1} Je possède ce fragment.
II
CG PIERRE DE LONGUeiL,
\u9 à M73 cathédrale , pour voir Tordinaire de Téglise, en tirer copie et avertir
ensuite leurs paroissiens des jours auxquels le travail manuel seroit
défendu. Ne pouvant souffrir qu^on ignorât TOraison dominicale, le
Symbole et la Salutation angélique, il ordonna aux curés non-seulement
de prononcer ces trois formules au prône dans Tordre qu'elles sont
ici nommées, mais encore d'avertir qu'il pnniroit ceux et celles qui ne
les sauroient pas dans un an , et déclara que pour cela il vouloit qu'ils
lui en apportassent les noms au synode suivant. Dans les statuts qu'il
dressa en 1456, il oblige les curés d'avoir un livre françois intitulé :
Les avertissements de la religion chrétienne et les dix préceptes de la 2ot\
afin de s'en servir dans leurs prônes ; il réprime l'abus des absolu-
tions frauduleuses. Non content de la menace d'excommunication » il
impose une amende pécuniaire appliquable à son aumônerie contre les
fidèles adonnés aux jeux de hasard, contre ceux qui n'assisteroient
pas entièrement ^ la messe dans leur paroisse les dimanches et fêtes
d'obligation, et contre les blasphémateurs; il fixa même l'amende
contre ces derniers h vingt sols tournois. Les bourgeois d'Âuxerre
tinrent a ce sujet de fréquentes assemblées (1) , consultèrent à Sens et
ailleurs, députèrent h Ganes, en Auvergne, vers le roi, mais le prince
ne décida rien. Il y eut appel comme d'abus , la cause fut plaidée à
Yilleneuve-le-Roi, puis renvoyée aux requêtes à Paris , à la sollicitation
de l'évêque ; appel ensuite au parlement signifié au prélat résidant
alors à Yarzy. Simon le Moine , licencié ès-lois, fut député k Paris
par les habitants, afin de poursuivre l'affaire ; mais on ignore quelle
en fut l'issue , et on n'a pu recouvrer aucun mémoire qui en ins-
truise.
Ce prélat, si ardent pour le bon ordre de son diocèse, ne se laissa
taxer d'aucune négligence dans la visite des bénéfices ; il n'eut point
de difficultés h essuyer dans les cures, mais seulement dans les prieurés.
Pierre d'Orouer, prieur de Saint-Gervais-lez-Auxerre , prétendit être
exempt de sa visite, et par conséquent de la procuration et de tout
autre subside caritatif, disant que ce prieuré, membre de l'abbaye de
(1) Compies de la Ville de ur>7
QUATRE-VINGT-HUITIÈME ÉVÊQUE D*AUXERRE. G7
Moléme , avoit éié exempté en 1157, parFévéque Hugaes de Maçon,
de tontes exactions des évéque , doyen et .arcliidiacre , comme n'ayant
aucune charge d'àmes ; révéqae, au contraire, soutint que ses prédé-
cesseurs y avoient fait visite et reçu tous les droits ordinaires. Ces
différentes prétentions formèrent un'procès qui étoit pendant devant le
bailli d*Âuxerre, lorsque les parties firent un compromis entre les
mains d'Albert de la Châsse, abbé de Vézelay , à la fin de janvier
1455 (1). Cet abbé étant à Âuxerre l'été suivant, y décida en faveur
de l'évéque, déclara qu'il avoit pu visiter une fois par an le prieuré
de Saint-Gcrvais, sans recevoir d'autre droit que celui de la procuration,
et que cependant le prieur pourra être imposé au subside caritatif de la
joyeuse venue des ëvéques ; ensuite il condamna h cent sols le prieur,
pour tout ce que l'évéque pouvoit alors demander, à quoi il fut
acquiescé de part et d'autre .le 26 juin 1454. Jean de Chaluz, prieur
du prieuré d'Ândrie dépendant de la Chaise-Dieu, osa disputer à ce
même évéque un droit bien plus évident : c'étoit celui par lequel
il étoit tenu, à l'issue de la visite que l'évéque faisoit de l'élise pa-
roissiale située dans son prieuré, à lui fournir la procuration, soit en
argent, soit en repas, comme jouissant de la plus grande portion des
dîmes de la paroisse et autres droits curiaux ; mais il fut condamné
aux requêtes du palais et ensuite au parlement qui confirma la sen-
tence des requêtes, le 8 mars 1465. Ce prieur avoit été le seul à
contester ce droit, qu'une enquête de 1484 prouve avoir été payé
exactement à Pierre de Longueil par tous les autres supérieurs des
maisons de l'Ordre de saint Benoit , pour les cures de leurs dépen-
dances , et même à Jean de Molins, archidiacre de Puysaie. Ces deux
procès marquent le zèle de l'évéque pour les visites et son attention
sur les paroisses et autres églises. Il créa, en 1469, trois procureurs
fabriciens pour la paroisse de Gouaix dont le bien temporel dépé-
rissoit* L'année suivante, il permit à la paroisse de Saint-Eusèbe
d'Âuxerre t^) , d'imposer une taille sur tous les habitants, même ec*
clésiastiques , pour réparer les bâtiments de l'église et la fournir '
U19 ï 1473.
(1) V. Les Preuves, à l'an U54. ! (2} Tab, S. Euseb.
144'> J UTtl.
08 PIRftRK DE tO?(Gl}£IL,
d'orDemcnis , permissioD qu*il étendit eu même temps k dix autres
l)aroisses. Il visita , au commencement de Télé 1 466 , T^lise parois-
siale de Saints-en-Pnysaie, et, en présence de Jean Robinean, curé, il
y fit la translation des reliques innombrables des compagnons de saint
Prix dont il apporta quelques ossements à Auxerre (1). Dix ans aupa-
ravant il avoit réuni le revenu de Féglise paroissiale de Neuvoy à la
Gibrique de Féglise collégiale de Gien ; le consentement des chanoines
de la cathédrale (2), demandé sur cette réunion , fut accordé le 3 no-
vembre de la même année, avec Fapposition du sceau du Chapitre (5).
La collégiale d'Âppoigny se ressentit aussi des bontés de Tévéque (4).
Les chanoines lui ayant spécifié le nombre d'héritages qu^on leur avoit
légués à charge de prières, ou qu'ils avoienl acquis dans sa justice,
demandèrent des lettres d'amortissement ; il les accorda gracieusement
à Auxerre, le 9 juillet 1458 (5), s'cngageant pour lui et ses successeurs
à ne l(Mir jamais rien exiger pour ces biens sortis des familles des
boui^eois. Ceux de Cône étoient en difficulté avec Pierre Vaillant , dit
Guelis, leur chantre. Pierre de Longueil approuva la sentence arbitrale
que Jocelin Courtjarret et Biaise Tribolé, licencié-ès-lois avoient
prononcée ; ses lettres sont datées d'Auxerre, le 16 mai 1454. Son
nom est conservé d'une manière encore plus particulière dans les
archives de Saint-Fargeau. L'an 1466, Antoine de Chabannes, comte
de Dammartin , baron de Puysaie et seigneur de Saint-Fargeau, conçut
le pieux dessein de fonder dans l'église paroissiale de ce lieu six cha-
noines, dont le premier seroit curé de la paroisse et chantre du Cha-
pitre, k condition que la présentation de ces six ecclésiastiques appar-
tiendroit an seigneur et- à ses successeurs. Pierre de Longueil en fit
délivrer la concession k Auxerre, le 15 juin, sous condition que les
paroissiens ne seroient pas desservis moins exactement dans les fonc-
tions du ministère curial , et sauf les droits de Tévéque , de l'archidiacre
et de Farchiprétre ; mais cet acte, quoiqu'en bonne forme , n'eut point
lieu. La fondation n'eut son entier eflet qu'en 1472 ; au lieu du titre
(I) CartuL FF. Prœ. dio. Auiist., fol 40.
(3) Reg. Cap, Autiss., 5jaiii1466.
(3) Cette fomalité du sceaa coitU dii
ëcusaax chanoiDes de Gicn.
(4) Reg Cap. Auiiss., 1446.
(5) V. Les PreoTet, à l*aii 1458.
QUATRE-VINGT-HUITIÈME ÉYÊQUE D^UXERRE. 69
dcchanlre, on donna au premier du chapitre la qualité de doyen.
Ailleurs j'en parlerai plus au long; il suffit de dire que Tévcque confirma
le projet touchant ralternative de la présentation à la cure avec Tabbé
de Saint-Germain (1); qu'il annexa h ce nouveau chapitre Thôpital de
la ville avec sou revenu « par une charte donnée en son château de
Varzy, le 20 avril 1472; et qu'enfin , le 24 du même mois , étant au
même lieu , il leur donna un cahier de statuts.
Le Chapitre de la cathédrale avec lequel il eut de fameuses contes-
tations, ne fut pas exempt de ses faveurs. On lui représenta en 1455,
que Guy de Mello ayant établi douze chapelains, savoir : six dans la
chapelle de Saint-Michel , six dans la chapelle de Saint-Jean-le-Rond ;
ces ecclésiastiques n'avoient presque plus de revenu depuis les der-
nières guerres, et que les deux bénéficiers d'ancienne fondation dans
chacune de ces deux chapelles étoient réduits h la même extrémité.
Ainsi, les seize places ou vicairies destinées k des prêtres étoient rem-
plies par un petit nombre de simples tonsurés qui ne pouvoient faire
les poursuites nécessaires pour récupérer leurs biens. On remontroit
donc qu'il falloit réunir le tout h la mense capitulaire, en chargeant le
Chapitre de faire dire les messes h proportion du revenu , et de sup-
pléer par d'autres sujets à l'assistance que ces seize chapelains
dévoient à tout l'office canonial. L'évéque entra volontiers dans les
vues de la compagnie, et fit la réunion par lettres datées d'Auterre, le
9 août 1455 (2), se dépouillant du droit qu'il avoit de pourvoir à ces
seize vicairies ou chapellenies, prescrivant un supplément aux anciennes
fondations de l'office quotidien de saint Michel et de saint Jean, re-
commandant au Chapitre de faire les processions ordinaires dans ces
deux chapelles, et d'entretenir dans le bas-chœur an clergé qui les
représentât. La charte de réunion fut présentée l'année suivante à
Louis de Melun , archevêque de Sens, qui, en qualité de métropolitain,
y donna sa confirmation, le 12 mai 1456. Dès la troisième année de
son épiscopat, Pierre de Longueil avoit plaidé contre le nouveau doyen
Thomas la Flotte, au sujet du serment de fidélité; pendant cette con-
1440 ^ h
(\) Tab. S. Germant. | (2) V. Les Preuvet,à Tau 1455.
Mr)^ ira
70 PIBRRE DK L01<IGLE1L,
teslaiioo, uon-seulement le doyen essuya un violent orage, mais tout
le Chapitre en souffrit. Le doyen avoit reçu une défense d'officier aux
fêles annuelles ou solennelles , soit que Tévéque fut présent ou absent.
Thomas la Flotte s'en plaignit en Chapitre le 28 juin (1) ; il y ajouta
que le prélat le privoit aussi de ses distributions de vin du cellier
épiseopal aux six fêtes annuelles. Le Chapitre qui consentit de le tenir
présent pour la poursuite de son procès, s'en ressentit peu après à
Toceasion d*une levée de décimes. Le duc de Boui^ogne ayant résolu
de faire la guerre au Turc (2), avoit obtenu permission du pape d'en
imposer sur le clergé de son duché. Le Chapitre d'Âuxerre avoit payé
en 1457, par les soins du doyen, trente-cinq écus d'or aux commis-
saires» avec la précaution de retenir un écrit qui garantissoit que la
même somme ne seroit point exigée. A peine les trente-cinq écus
tosebés, les commissaires du l^t d'Avignon arrivèrent et deman-
dèrent au Chapitre, de la part du roi, une certaine somme pour la
même fin. On leur fit refus. Ces commissaires, Martin du Brenil,
ebanoîiie de Bourges, et en ecclésiastique du Berri, nommé Martin de
Vaux, vicaire du légat, agirent aussitôt contre le Chapitre. Nicolas
àm Crot et Guillaume de Cray, chanoines, se prêtèrent à leurs de-
mandes et furent établis subdélégués des commissaires. On vit, le
30 juin , un interdit jeté sur l'église et une sentence d*excommunica-
ticMi fulminée contre Thomas la Plolte, doyen ; GuiUaame Pion, pénn
tencier; Simon Béchu, sous-chantre, et dix-huit autres chanoines.
Lt Chapitre manda les absents afin de leur communiquer celte sen-
tence en présence dn conseil ordinaire et de tons les conseillers du roi.
Après une mire déOkération , il fut conclnt h h pluralité que l'interdit
seroit observé, et Iss lortriers furent chargés de célébrer Tofice cano-
nial k Notre-Pima df h Cité> Les chanoines exconminniés firent
serment de ne demander leur absolution qu'en corps et tous ensemble.
(1) L^kirtMeéecMflésèiéftcilikéeéet | (3) rai ▼« la lettra é» coatocaliMi de
Begislre» du Chapitre. Je se la doaae qu'en • réréqae d'Auxerre» aox Etats imline^ A
partie daes les Freiif es. On pourra voir le Dtjoa par ce duc au 5 février 1463, au so{et
surplus transcrit autrefois pur an chanoine ' de cette guerre. Elle est du 31 déceadliru
notaire apostolique > dans les cahiers que je
déposerai à ta BiMîoIhéque du noi .
signée et Moènmes.
QUATRE- VINGT-UUITIÈMB ÉVÊQUK d'aUXERRE. 71
Antoine Thîart, chanoine d'Auxerrc el de Chalon , qui avoit reçu les ^^j, j, ,^^3
trente-cinq écus d'or pour la décime du duc, fut sommé de les rendre
ou de garantir de nouveau ; mais, ne pouvant exécuter ses promesses,
il rendit Pargent le second jour d'août. L'anniversaire de la dédicace
de Téglise, qui tomboit au mois de juillet , fut remis \k cause de l'in-
terdit. Le vendredi 12® jour d'août , le Chapitre défendit unanimement
h tous chanoines ou tortriers d'aller manger chez Tévéque, excepté les
jours qu'il convient y aller pour la conservation des droits d^la cathé-
drale et de ceux de Notre-Dame-de-la-Cité ; la défense étoit sous peine
d'être réputé parjure , et de perdre les distributions d'un mois, jusqu'à
ce que ces mouvements causés par la levée des décimes fussent entière-
ment apaisés. On déclara , outre cela , que dans le Chapitre on ne
prépareroit plus de siège pour l'évéqpe; qu'on ne donneroit aucunes
distributions à quiconque des mêmes chanoines ou tortriers ( le péni-
tencier non compris) serviroient de ministres lorsqu'il officieroit; et
que si des externes se présentoient pour cela , on leur refuseroit les
ornements de l'église. Les chanoines, courroucés contre l'évêque,
étoient persuadés qu'il avoit été cause non-seulement de l'interdit et
de l'excommunication, mais aussi du procès qu'on avoit h Dijon. Le
dernier août, le Chapitre enjoignit à Guillaume de Cray, chanoine
grand chambrier, de retirer de l'évêque la crosse et les ornements
pontificaux qu'on lui avoit prêtés, et de lui demander ceux qu'il devoit
au Chapitre. On ne trouve point en quel temps l'interdit de l'église fut
levé ; il l'étoit au mois d'octobre, puisqu'on résolut, le vendredi 14 de
ce mois, de célébrer le dimanche suivant l'anniversaire de la dédicace
que rinterdit avoit fait remettre. Cette levée des censures ecclésiasti-
ques ne rétablit pas tout h fait la paix dans l'église d'Auxerre. Le
duc de Bourgogne et le comte d'Etampes furent obligés de s'en
mêler.
L'abbé de Saint-Germain étoit aussi en difficulté avec le prélat à
l'occasion des mêmes décimes ; tous les chanoines étant assemblés en
Chapitre, le lundi 26 novembre, avec M. de Villarnoul, capitaine
d'Auxerre ; Guillaume de Clugny, archidiacre d'Avallon dans l'église
d'Autun ; Jean Baudot, bailli de Châtcau-Chinon , envoyés du duc de
Bourgogne et du comte d'Ktampes ; Hugues de Thiard , ahbc de
U19 i 14T8
72 PIEIIRK DE LONGUEIL ,
Saint-Germain , y étanl pareillement , ils convinrent d'aller tous en-
semble trouver Févéque. L'arcliidiacre d^Autun, portant la parole au
prélat, lui dit en abrégé que le sujet de la querelle consistoit , d'un
cdté , en ce que l'ahbé et le Chapitre souliaitoient récupérer ce
qu'ils a voient dépensé pour le procès actuellement pendant à Dijon,
devant les conseillers du duc, au sujet des décimes; et de Tautre, en
ce que Tévéque souhaitoit qu'on répar&t les injures qu'on lui avoit
faites et les mauvais traitements dont on avait usé envers lui, mais qu'il
falloit tout mettre d'accord en n'exigeant rien de part ni d'autre, ni
restitution d'argent, ni satisfaction. Ce parti étant accepté, l'évéque
fit apporter du vin, on but mutuellement à la santé les uns des autres
en signe de paix et de concorde. Les trois envoyés du duc dirent
ensuite aux chanoines que le prélat leur avoit promis qu'il feroit beau-
coup de bien h l'église d'Auxerre, qu'il confirmeroit et même augmeo-
teroit l'étendue de leur juridiction avant la fête de la Purification, ce
qu'on crut lui avoir été insinué par l'abbé de Saint-Germain.
Au reste, ceci n'eut rien de commun avec l'ancienne difficulté du
doyen, touchant le serment de fidélité ; ce doyen ne voulant point le
prêter, restoil interdit pour l'office des grandes fêtes. Le Chapitre con-
sentit, le 14 décembre suivant, qu'il obtint, au nom de la compagnie^
un arrêt de défense en vertu duquel il pût officier ces jours-là. Le
prélat qui, dès letc 1458, avoit déclaré n'avoir plus aucuns procès
avec son Chapitre , et que tout étoit d'accord , voulut se mettre en
règle par écrit. Il choisit le temps de l'absence du doyen au commen-
cement de novembre, et vint dans le Chapitre demander qu'on mo-
dérât pendant sa vie la redevance annuelle de cent-quatorze livres dont
Tévêque éloit tenu envers l'église. Il exposa les diminutions de ses
revenus causées par les guerres, et promit qu'en reconnaissance il
n'exigeroit aucun droit de procuration pour la visite des cures possé-
dées par les chanoines. On lui accorda qu'il ne seroit plus tenu qu'an
paiement de 95 liv. Le traité fait sur cet article, par devant Biaise
Moirotte , clerc tabellion juré en la prévôté d'Auxerre , parle de deux
<lifficultés réglées en même temps : l'une consisioit en ce que Guillaume
Chevalier, chanoine, ayant été arrêté pour délit commis sur la justice
du monastère de Saint -Germain et mis dans les prisons de l'abbaye ,
QUATRE-VINGT-HUITIÈME ÉVÊQUE D*AUXEIiRE. 75
Févèque Favoît revendiqué comme son domestique et, femilier, pendant ^^^ ^ 14^3
que le Chapitre, de son côté, prétendoit qu'il fût rendu a ses officiers.
On convint de part et d'autre que tes réquisitoires seroient censés nuls
et non avenus : Tautre difficulté regardoit la succession de Pierre
Oribon, curé de Lindry, mort nouvellement sans héritiers. L'évéque
soutenoit qu'en ce cas il devoit succéder à tous les curés de son dio-
cèse ; le Chapitre soutint que cette aubaine étant dans sa justice, devoit
lui apppartenir. Le prélat en fit cession, et par ce moyen les derniers
obstacles à la pais furent levés le 8 novembre 1458; la succession du
curé fut vendue, par le Chapitre, la somme de 20 liv. (1). La même
année, Thomas la Flotte, doyen, qui ayoit tant différé, consentit k
prêter le serment de fidélité, par une sentence d'acquiescement qui fut
confirmée par arrêt du parlement.
Quatre ans étoient h peine écoulés que Pierre de Longueil s'éleva de
nouveau contre la juridiction du Chapitre. Gui le Cuiotier, chanoine,
propriétaire d'une maison claustrale, y avoit fait arrêter prisonnier an
mois de novembre 1462^ Albert Dauvron, prêtre, notaire de la cour
spirituelle de Tévêché , qui y recevoit le testament d'un clerc marié
logé dans ta même maison. Cet emprisonnement porta le prélat à atta-
quer la juridiction quant au fond ; mais le Chapitre fit valoir les exem-
ples assez récents de Texercice de cette juridiction, aussi bien que les
sentences obtenues du temps de Michel de Creney et Philippe des
Ëssarts ; il prouva si clairement que les notaires de la cour épiscopale
ne pouvoient instrumenter dans les maisons canoniales, pour quelque
cause que ce fut, que la récréance lui fut adjugée aux requêtes du
Palais, le 2 juillet 1465; cela dégoûta Tévêque de rien entreprendre
davantage sur cette matière. Il avoit apparemment senti le foible de la
cause, puisqu'un an auparavant il avoit envoyé au Chapitre (2) maître
Guillaume de Verdun, son secrétaire, pour déclarer aux chanoines
qu'afin d'éviter les frais de la procédure, ils eussent h jeter les yeux
sur un accord qu'il disoit passé depuis environ soixante ans, entre
l'évéque et leurs prédécesseurs, par lequel ceux-ci étoient convenus
ne pouvoir adresser leurs lettres citatoires et rogatoires h aucun
(I) Utq. Cap. 1i f€br. 1458. * (i; Hcg, Cap. ,ô(t Juin 1464.
74 PIERRE DE LONGUEIL,
14» h 1A3. ^^^^^« P^^^ ^^^^ comparoUrc devant eux ceux du coirps qui éloieot
absents. Depuis peu le Chapitre d'Âuxerre avoit envoyé des lettres de
cette espèce k rofficial d'Âutun, qui, à la prière de la compaguie, les
avoit fait mettre à exécution contre un nommé Quillaud , prêtre, cha-
noine tortrier , leur sujet et justiciable , demeurant k Beaune. Lie
prélat fit remarquer qu'en cela le Chapitre avoit été contre cet accord ,
mais le titre allégué étoit inconnu dans les archives du Chapitre, et il
ne put être produit d'aucun endroit.
L'évêque d'Âuxerre , bien résolu de ne plus porter atteinte aux droits
da Chapitre, se souvint des biens qu'il avoit promis de faire. 11 com-
mença , 60 1466 , par un don considérable de reliques qu'il avoit appor-
tées de Saints-en-Puisaye. C'étoit plusieurs ossements des compagnons
de saint Prix qu'il fit présenter en Chapitre, le 5 juin, par Jean
HaoToisin (1). On les reçut avec respect et on les enferma dans le
trésor. Le G mai 1469, il vint lui-même en Chapitre, où , après avoir
■ttrqué le désir qu'il avoit de faire du bien k l'église d'Auxerre son
épouse» et déclaré que ses facultés étoient inférieures à sa bonne
volonté, il présenta un grand reliquaire d'argent consistant en une
inu^é de saint Pierre qui soutenoit une petite boite enrichie d'or et
de perles précieuses dans laquelle étoit renfermé , à ce qu'il disoit, un
morceau d'os du bras du prince des apôtres. On croit que cette relique
loi venoit de Richard Olivier de Longueil, cardinal d'Âuge, son parent;
il fit ensuite ressouvenir les chanoines qu'il avoit souvent cbangé de
dessein sur le lien de sa sépulture ; mais que le tombeau que Ferrie
Cassinel s'étoit fait ériger étant vide, parce qu'il étoit mort archevêque
de Reims, il prioit qu'on lui accordât cette place après sa mort. On en
opina lorsqu'il fut retiré, et on lui accorda sa demande ; ce qui lui fut
notifié par Guillaume de Longueil, grand archidiacre, et Jean-le-Roux,
chanoine, qui en même temps le remercièrent des présents qu'il venoit
de (aire. Il revint encore au Chapitre, le 22 décembre, présenter une
ehapelle d'ornements blancs de grand prix ; elle consistoit en quatre
chapes, la chasuble, dalmatique et tunique, et parements d'autel. Il y avoit
I) Rcg. Captl.,14Gt>.
QUATRE-VINGT-HUITIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRB. 75
oalre cela les parements d'étoffe on plagules pour trois aubes ^ suivant ^^ ^ 1473.
Tancien usage, et une autre pièce d'étoffe pour parer la chaire épiscopale.
A cette occasion, il exhorta les chanoines k s'entre-pardonner, pour
pouvoir honorer dignement le mystère de la naissance de Jésus-Christ
dont on alloit célébrer la mémoire : ce n'étoit pas sans raison quMl parla
de paix et de concorde. Il étoit arrivé , durant l'été précédent, le plus
grand scandale qu'on eût peut-être vu depuis plusieurs siècles. Le soir
du jour de saint Pierre, 29 juin, un sémiprébendé ou chanoine tortrier
appelé Jean Chambéry, se battit avec son frère Laurent, aussi tortrier,
commensal du grand archidiacre ; Jean avoit pour adjoints et prolec-
teurs le doyen de la cathédrale , Thomas la Plolte, avec un de ses
domestiques, et Pierre Tenon, chanoine. Selon les informations,
Laurent Chambéry avoit passé par l'église, sur les six heures du soir,
armé d'un bracmar, espèce d'ancienne épée , dont il avoit tâché de
frapper son frère Jean ; sur cela , les trois ci-dessus nommés voulu-
rent le désarmer et le conduire dans les prisons du Chapitre , mais
en se défendant , il avoit blessé Pierre Tenon au genou , et
cependant lui-même avoit été renversé par terre d'un coup que lui
porta ce chanoine, et avoit reçu k la main une blessure plus considé-
rable ; on ajoutoit qu'h la vérité le doyen n'avoit donné aucuns coups,
mais que tout ce qu'on avoit fait contre Laurent Chambéry avoit été
par son ordre. Ce scandale ne put être caché ; l'évêque fit d'abord
informer par son oificial, et ayant pris l'avis des avocats de la ville , il
résolut de réconcilier l'église. Il vint en personne dans le Chapitre , le
5 juillet, déclarer son dessein à la compagnie, en l'exhortant de faire
justice et offrant de lui communiquer les charges et informations. Le
prélat étant retiré , on nomma Jean-le-Roux , promoteur ; Philippe
Cotet, sous-chantre; et Etienne Naudet, chanoine, pour vérifier celte
information, ou la recommencer de nouveau s'il étoit besoin. Jean
Chambéry fut cité pour comparoitre en Chapitre le 21 du mois ; mais
il y fit défaut , étant en chemin pour Rome, où il alloit demander l'ab-
solution. Le 21 , on tint un Chapitre extraordinaire où le doyen ne se
trouva pas , et sur le rapport du promoteur , Téglise fut déclarée vérila-
blement pollue par effusion de sang ; on conclut qu'elle étoit dans le
cas d'être réconciliée, et que l'office ne s'y feroit plus jusqu'à ce qu'elle
1449 k 1473
76 PIERRE DE LONGUI^IL ,
Teût été ; cela fui publié au chœur après compiles, et, dès le lende-
main , Pierre de Longueil fit ta cérémonie. Le mercredi 26, Laurent
Chambéry reçut Tabsolution en Chapitre et paya Tamende, assurant
toujours qu'il n'avoit blessé personne jusqu'à effusion de sang. On
conclut que si le doyen venoit au Chapitre, le président lui diroit que
la compagnie ne pouvoit plus le fréquenter, parce qu'il avoit encouru
Texcommunication majeure ; que s'il le nioit , le promoteur requerre-
roit qu'il subit l'interrogatoire en plein Chapitre avec son domestique.
Thomas la Flotte ne se présenta point, mais il envoya Jean Pichard,
curé de Seignelay, son commensal et agent , chargé d'un billet par
lequel il avouoit le fait, afin d'en obtenir l'absolution. La déclaration
lue, on conclut de l'insérer dans l'acte d'absolution qu'on lui donna.
Jean Chambéry, retourné de Rome, présenta au Chapitre , le 9 oc-
tobre , des lettres d'absolution de la part du grand-pénitencier du pape.
Interrogé par le grand*archidiacre, il expliqua les circonstances du
délit , et chargea surtout le doyen ; on lui promit que si ces lettres
d'absolution étoient trouvées bonnes , on le rétabliroit dans ses distri-
butions , du jour qu'il les avoit présentées ; mais comme on souhai-
toit connoitre de plus en plus la vérité, il fut cité de nouveau. Au lieu
de répondre, il présenta par écrit l'histoire du fait et un aveu de sa
faute , signé de sa main , demandant qu'on lui Ot grâce en vue des
peines et des dépenses de son voyage de Rome. Le Chapitre se con-
tenta de le condamner k vingt livres d'amende pour être employées
en pieux usages, et en vingt livres de cire envers la fabrique : Chambéry
s'y soumit; il ne restoit plus que le doyen à mettre entièrement en
règle. Etant venu en Chapitre le lendemain que l'évéque avoit fait
l'exhortation sur le pardon des injures, il y demanda humblement qu'on
fit cesser les poursuites du promoteur , il rapporta le fait de la batterie
tel qu'il étoit, et représenta les blessures comme légères ; sur quoi,
après qu'il eut réitéré les offres de satisfaire a la partie lésée, il reçut
l'absolution ; le grand archidiacre , Guillaume de Longueil , prononça
la formule. Dans cette affaire, la juridiction du Chapitre fut pleine-
ment reconnue par l'évéque qui, néanmoins, ne sympathisa pas beau-
coup davantage avec le doyen. Le |>ré!at revint , le 27 juin 1470, en
Chapitre où ce doyen prcsidoit; et là, en présence de la compagnie
QUATRE-VINGT-HUITIÈME ÉVÊQUE D AUXERRE. 77
qu'il regardoit comme juge de ce premier dignitaire, ainsi que s'en uioàUTa.
expriment les registres , il requit de lui une satisfaction publique; te
doyen répondit à ces plaintes par des récriminations , et ne parut point
effrayé. Pierre de Longueil, qui sentoit approcher sa fin et qui souhai-
toit faire prier Dieu pour lui après sa mort, donna le même jour aux
chanoines un revenu pour cet.effet. Comme il avoit acquis, étant doyen,
en 4448, plusieurs héritages situés li Crevan, Charentenay, Val-de-
Marcy et autres lieux du voisinage d'Âuxerre (1), de Jean Périer, cha-
noine régulier de Saint- Victor de Paris et abbé de Clairefontaine , au
diocèse de Chartres , il en avoit dès lors destiné une partie pour son
anniversaire (2); ce jour même il y a ajouta plusieurs biens qu'il avoit
achetés à Âccolay.
On a déjà vu plus haut que certains statuts du synode qu'il tint en
1456 furent attaqués par la communauté des habitants d'Âuxerre.
Mais , dès lors , entre lui et les mêmes habitants subsistoit un procès où
les droits du doyen étoient mêlés ; cela contribuoii à fomenter la
mésintelligence qui dura presque toujours entre Tévêque et le doyen.
Je ne répéterai point ici les efforts des bourgeois , pour soutenir qu'ils
pouvoient décliner la juridiction de Tévêque , et demander leur renvoi
en la cour du doyen et qu'ils étoient en possession. Je dirai seule-
ment que Pierre de Longueil ayant excommunié deux bourgeois et
refusant de les absoudre, son temporel fut saisi par le prévôt de Sens,
en 1459, en vertu d'un ordre du roi (5). Leduc de Bourgogne avoit
commis le seigneur de Villarnoul et Guillaume de Clugny, archidiacre
d'Âvallon, pour calmer ce différend et prévenir les suites ; ils ne purent
réussir, et l'affaire, poussée en parlement, Tévêque y gagna sa cause ;
les habitants furent condamnés aux dépens (4) , quoique dans ce procès
ils eussent suivi précisément l'avis de célèbres jurisconsultes de Paris,
savoir : Jean Simon , avocat du roi , et Pierre de Toucy , substitut du
procureur du roi. L'évêque fut remboursé des dépens en 1462; mais
la même année, les gouverneurs de l'hôtel-de-ville obtinrent un arrêt de
(1) Viole.
(2) Reg, Cap., ^ijuinUlO,
(5; Comptes de la Villc^ 1455 jusqu'en
1462.
(4) Quiltanee de levéque du â1 février
140â
78 PIERRE DE LONGUBIL ,
1410 h 1473. '^ cour des aides contre lui et contre ses fermiers » touchant quelques
droits que le roi avoit accordés aux habitants d'Âuxerre sur le sel et
autres choses (4).
Le différend de Pierre de Longueil avec les Dominicains fit encore
plus d'éclat ; les inquisiteurs tirés de cet Ordre entreprirent de faire
le procès à un prédicateur approuvé par Févéque et l'accusoient d'hé-
résie. C'éloit Louis Quarrier, de l'Ordre des JErmites de Saint-
Augustin , qui prêcha dans la catliédrale le mercredi d'après P&ques
4463, au retour d'une procession générale. Dans la chaleur du dis*
cours , il lui échappa quelques propositions qui ne plurent pas aux
Jacobins ; ceux-ci le reprirent publiquement en présence du Chapitre
et d'un nombreux auditoire, ce qui causa un grand scandale et déplut
fort aux chanoines. Le prélat, jusqu'alors ami des Frères-Prêcheurs,
usa contre eux de son autorité ; il leur avoit permis de publier l'asso-
ciation accordée par leur général k la confrérie des Trépassés. En
14S4, onze prêtres de la maison d'Âuxerre avoient été approuvés ; on
gagnoit quarante jours d'indulgences en assistant h leurs sermons;
Févéque révoqua ces grâces. Quinze jours après il défendit en plein
synode à tous ses curés d'admettre dans leur église aucun jacobin
pour la prédication ou la confession , et de leur permettre aucunes
quêtes jusqu'à ce qu'ils lui eussent fait réparation ; la défense étoit
sous peine d'excommunication et de dix livres d'amende. Il fil encore
publier aux prônes des messes paroissiales, que ceux et celles qui
étoient de la confrérie des Trépassés établie chez eux , eussent k n*y
rien donner, et s'en retirassent sous peine d'être excommuniés. Frère
Laurent de Bonny, vicaire de l'inquisiteur au diocèse d'Âuxerre,
qui avoit fait citer pardevant lui l'ermite de Saint-Augustin, vint
trouver ensuite l'évéque accompagné d'un autre jacobin. Le prélat,
connoissant que ce compagnon étoit Jacques Proteau , qui avoit fait la
citation, le fit enfermer dans ses prisons, et appela au parlement de
tout ce que le vicaire pourroit décréter contre l'augustin. Jacques
Chevecin, prieur du couvent d'Auxerre , venu quelque temps après
pour adoucir l'esprit de l'évéque, subit le même sort : les religieux
(1) Viole.
QUATRE-VINGT-HUITIÈME ÉVÊQUE D*AUXERRE. 79
curent beau redemander leur prieur, Tévéque ne voulut point le 1419 ^
rendre. Mais informé que Pierre de Longueil n'avoit point relevé son
appel, ils représentèrent h la cour que leur communauté périssoit
n'ayant plus de supérieur pour la conduire, ni d'aumônes pour vivre.
La cour, touchée de leur situation, ordonna au bailli d'Âuxerre de faire
sortir le prieur des prisons de l'officialité, s*il étoit en voie d'élargis-
sement, sinon qu'il fût conduit à Paris en celles de la Conciergerie,
avec les charges et informations , pour être ensuite remis k ses supé-
rieurs. Quelques jours après , Laurent Gervais , prieur du couvent de
Paris, vicaire général de l'inquisiteur pour tout le royaume, prit la voie
la plus sûre ; il alla trouver Pierre de Longueil à Varzy, le 25 septembre,
et lui demanda son amitié et sa protection pour les religieux du couvent
d*Âuxerre. L'évéque témoigna qu'il étoit prêt de les remettre dans l'état
où ils étoient auparavant, pourvu qu'ils lui fissent satisfaction, c Les
c propositions qui leur ont déplu (reprit l'évoque) sont véritables : je
c suis disposé à en prendre la défense , les soumettant cependant au
« jugement de TÉglise. x> Après de longues discussions, on convint
qu'un jacobin de la maison d'Auxerre, rétabli dans ses pouvoirs, et prê-
chant au premier jour dans la cathédrale, y liroit un billet qui contien-
droit le fait tel qu'il étoit arrivé le mercredi d'après Pâques, ajoutant an
bont, qu'ayant su que le révérend père en Dieu évêque d'Auxerre, ses
vicaires et le Chapitre avoient été scandalisés de l'entreprise des Jaco-
bins auteurs du tumulte , ils déclaroient en être fâchés, et deitiandoient
qu'on oubliât le tout et qu'on leur pardonnât ; et quau regard despro^
positions préchées et reprises^ le révérend père en Dieu s^en rapportoit à
la détermination de notremire sainte Église. Le prélat, pour cette répa-
ration, désigna Ambroise Chantereau, qui, dès Tan 1454, étoit l'ancien
de la maison. Le prieur de Paris ne prétendit point pour cela mettre
fin aux poursuites contre l'augustin ; il pria même l'évéque de se joindre
à lui ; mais Pierre de Longueil le renvoya à ce que son officiai lui en
diroit. L'évéque ne vouloit point rétablir les Jacobins, k moins que les
chanoines n'agréassent la manière dont l'acte de réparation étoit conçu.
Le prieur de Paris vint de sa part les trouver en Chapitre, leur en com-
muniqua la teneur, et se chargea du reste. Cette satisfaction fut faite
avant le 10 octobre, puisque ce jour les vicaires généraux de l'évéque
1
{
1 iid h 1 17:^
80 PIERRE DE LONGUEIL ,
donuèreot aux Jacobins des lettres adressées h tous les curés, qui dé-
claroient qu'en vertu de la réconciliation, on devoit les regarder comme
rétablis dans les mêmes pouvoirs qu'ils avoient auparavant. Quoique
cette affaire ait été poussée avec vigueur, ainsi qu'on vient de le voir,
on ne marque point sur quelles matières rouloient les propositions qui
choquèrent les Dominicains (1). Cependant, comme le zèle de Pierre
de Longueil approchoit de celui de Ferrie Cassinel, l'un de ses prédé-
cesseurs, sur l'immaculée conception de la sainte Vierge , il pourroit se
faire que les propositions de raugustin eussent été relatives ii cette ques-
tion. Quelques-uns l'ont cru ; mais, outre qu'il n'y a aucune apparence
que les Jacobins se fussent élevés publiquement contre des louanges
données à la Sainte-Vierge, quand même elles auroient été opposées à
leur sentiment, les mémoires de cette procédure apprennent qu'on avoit
donné par écrit au prédicateur ce qu'il auroit à dire ; et les archives des
Jacobins d'Âuxerre découvrent qu'il s'agissoit du sens du canon du
concile de Latran Omnis utriusque sexus ; ce qui convenoit au temps
auquel le sermon fut débité. Les Dominicains avoient exposé dans leur
requête h Louis XI , que le prédicateur qui causa ces troubles étoit un
faux augustin qui avoit pris l'habit de l'Ordre dans une hôtellerie de la
ville de Crevan, et qui l'avoit ensuite quitté au même lieu. Mais ce fait
incident ne fut point éclairci , et la réparation prononcée par le père
Âmbroise fit oublier tout le passé (2). L'évêqueles reçut si parfaitement à
réconciliation, que peu de temps après il leur accorda des indulgences
pour une nouvelle chapelle qu'ils avoient fait construire en mémoire de
la Passion et de la Sépulture de Notre-Seigneur.
Cet évêque fut bien éloigné de laisser périr son droit sur l'hôpital de
Clamecy, dit Bethléem. La dispute excitée au treizième siècle, touchant
le diocèse dont devoit être cet hôpital, fut réveillée vers l'an 1464 (a).
(1) G. Yjole. i {t) Arck, Dom. Auliu. 27 jun, 146*7.
(a) Le débat commença même dès 1442 , sous Laurent Pinoo. L'évoque de Beth*
léem, conseiUer et confesseur du comte de Nevers , étant soutenu par son maître ,
éle?a de nouveUes prétentions contre les droits de ré?équc d'Auxerre. Pierre de
Longueil, ne se sentant pas assez fort pour résister ouvertement au comte, se con-
tenta de protester contre lc<i envahissements. Il déclare par ses lettres datées dn
• . V
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QUATRE-VINGT-HUITIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 81
Le cardinal Rollin , évêque d'Aulun , sollicité par quelques religieux 1449 ^ 1473.
demeurant avec un ancien évêque de Bethléem, avait nouvellement con-
féré le titré de cette Maison-Dieu à Antoine Buisson, carme, contre le
droit de Tévêque d'Auxerre, Pierre de Longueil, bien instruit de la dé-
cision rendue en 1211, soutint que cet hôpital étoit de son diocèse et
non de celui d^Autun ; et cela étoit si constant , que Tévêque même ,
actuellement titulaire, avoit payé la taxe ou décime apostolique au re-
ceveur du diocèse d*Auxerre. Il y eut des dispositifs pour une enquête
nouvelle : Jean Chevalier fut choisi de la part de Tévêque d'Auxerre ,
Gui de Montagu de la part de celui d'Autun, et Fabbé de Vézelay de-
voit être l'arbitre de la décision. On étoit même convenu que tant que
dureroit le compromis, les deux évéques contendants pourroient célé-
brer les Ordres dans la chapelle de cet hôpital. Cette affaire ne fut point
poussée, le temps éclaircit les choses, et on découvrit de la falsification,
soit dans les provisions, soit dans la prise de possession du précédent
évêque de Bethléem, à qui la maîtrise de cet hôpital passoit pour avoir
été conférée par Tévêque d'Autun. Gui de Chacy, religieux et familier
d'Antoine Buisson, évêque de Bethléem, passa pour auteur de la four-
berie. Cette accusation, jointe h d'autres délits, fut cause que notre évêque
l'entreprit et le cita par devant lui. N'ayant pas comparu. Il fut déclaré
excommunié par sentence prononcée en l'église paroissiale de Clamecy.
II appela de la sentence ; sur quoi Tévêque obtint de la cour des lettres
du 17 mai 1466, par lesquelles il étoit défendu de traduire cette affaire
hors du royaume. Ces lettres furent signifiées à Févêque de Bethléem
etk ce religieux le 28 du même mois. Le religieux demanda des lettres
apostolos à l'évêque d'Auxerre qui les refusa. Etienne Belli, profès du
même institut (1) que l'évêque de Bethléem, et demeurant avec lui au
(1) Ce reU^ienx étoit vena d*iine maison du Carmel de Savoye dite Rupecula.
27 no?embre 1453, que Pévéque de Bethléem s'était ingéré depuis quatre ans en ça
de conférer les Ordres dans sa chapelle près Clamecy , et que le comte de Nevers ,
ayant appris qnMl voulait s'opposer à ces entreprises , lui avait adressé des lettres
pleines de menaces, écrites et signées de sa propre main. (Archives de l'Yonne;
Fonds de l'évêché d'Auxerre). {N. d. E.)
Il 6
S
144f à 1«».
82 PIERRE DE L0N6UBIL ,
fauboori; de Clamecy, s'ÎDgéra d'administrer les sacrements dans la cha-
pelle de Bethléem. Il Alt pareillement cité à Âuxerre, et, faute de com*
paroitre, excommunié. Sur Tappel de la sentence d'excommunication,
il loi fut expédié un acte qui déclaroit les causes de refus des lettres
tfosioloi; l'acte est signé par Jean Briant, notaire, trésorier de Cosne,
le 18 juillet 1468. Etienne Belly et Guy de Chacy obtinrent du cardinal
R4^in, éyéque d'Âutun, une absolution ad caufelom au mois de janvier
sairant, et sans doute disparurent. Pierre de Longueil avoit en vue prin-
cipalement d'empêcher Tévéque de Bethléem de donner les Ordres dans
la chapelle de l'hôpital ou dans l'intérieur de son hospice , si ce n'est
18X religieux qui demeureroient ordinairement avec lui, et de faire cesser
le mamraîs usage d'annoncer les ordinations générales que cet évéque
indiqiioit par affiches sur les portes de son hôpital. Le clergé de France
y a eiiia lemédié (1).
Les diflerents traits de Fhistoire de Pierre de Longueil prouvent suf-
fismmeot sa fenneté et son zèle pour la conservation du bon ordre.
D eai encore occasion d*en donner des preuves dans le concile provincial
qM Louis de Jfelnn^ archevêque de Sens, assembla en 1460, au corn-
■enceiDent de mars, puisqu'il fut principalement convoqué pour adopter
les canons du concile de Bàle (2). Le Chapitre d'Âuxerre pria le 15
fënier Thomas la PloUe, doyen, Jacques Hodouart, Louis de Meluo et
Piare des Portes, d'y agir en son nom. Le premier fut député pour y
soutenir les droits du Chapitre en cas de litige ; il représentoit le Cha-
pitre d'Auxerre d'une manière plus particulière. Les deux suivants,
outre leur prébende de l'église d'Auxerre, en avoient chacun une dans
celle de Sens où ils résidoient, et le dernier, étant secrétaire de l'évèqne,
devoit l'accompagner naturellement h ce concile. Les Chapitres de Paris,
Chartres et Meaux, choqués de ce qu'on les avoit appelés h ce concile
comme par une espèce de lettre de jussion, n'y envoyèrent personne et
se plaignirent sur le ton dont on les avoit mandés. Les envoyés d'Orléans,
d'Auxerre, Nevers et Troyes appuyèrent les plaintes des absents, et pré-
tendirent comparoitre , non comme cités , mais invités. L'archevèqne
sentit qu'il s'étoit trop avancé , et quelques jours après l'ouverture du
(I) Voy. les Mëm. da Clergé. | (2) SpicU. T, v., p. 584.
$
QUATRE-VINGT-HUITIÈME ÉVÊQUB D^UXERRE. 85
concile, il déclara que si la formule de couYocation étoit un peu forie, mo ■, 147.1.
il ne Tavoit pas employée pour s'acquérir un nouveau droit, et qu'il
avoit seulement pensé à inviter les Chapitres de cathédrales. Thomas
la Flotte se fit délivrer une copie authentique de cette déclaration, dont
cinq évéques furent témoins, entre autres celui d'Âuxerre. Guillaume
Pion, pénitencier, mort en 1464, n'ayant été remplacé que plus de deux
ans après, Pierre des Portes» maître ès-arts, bachelier ès-lois, son suc^
cesseur, ne se pressa pas de prendre possession. Ce délai obligea Pierre
de Longueil à pourvoir k la rectorerie des écoles de la ville» qui vaquoit
par le décès de Pierre Vivien. Il en fit donc expédier les provisions à
Renaud-le-Moine, maître ès-arts et licencié en décret, le 22 juillet I4664
y marquant que l'institution de cette charge appartient au pénitencier^
et qu'il n'y pourvoit que par dévolution de droit, h cause de la vacance
de la dignité.
Ce prélat qui avoit pris en affection le lieu de Yarzy, voulut y faire sa
résidence la plus ordinaire sur la fin de sa vie; peut être fut-ce k cause
des troubles qui agitoient 'je pays auxerrois attaché au duc de Bour-
gogne. On voit, par différents actes, qu'il y demeura fort souvent en
1 470, 147 1 et les deux années suivantes. J'en ai déjkrapporté quelques^
uns, entre autres la fondation du Chapitre de Saint-Fargeau. Étant k
Yarzy en 1471, il pardonna aux habitants du. lieu la faute qu'ils recon-*
nurent avoir faite, en voulant, établir un capitaine malgré lui, et il les
chargea de payer six livres de cire par forme d'amende k la collégiale
et k la paroisse. Son testament qu'il dressa en latin au mois d'août 1475,
âgé de 75 ans, est sans désignation de lieu (1); mais ce fut k Yarzy qu'il
le ratifia, et le déposa entre les mains de Jean Garnier, bachelier en
décret, notaire apostolique, le 14 février de la même année (2). Aucun
écrivain n'indique de quelle maladie fut atteint ce prélat; on sait seule-»
ment qu'il mourut le 16 février 1475, k dix heures du matin, dans le
château de Yarzy, alors situé derrière l'église de Sainte-Eugénie.
Il y a différents sentiments sur le lieu de sa sépulture ; les uns le
(1) Voyez parmi les Preuves.
(S) En présence de Louis Baillard , licen-
cié en médecine, de Jean Bolemeau , (réto-
rier de l'église collégiale de SainUËtienne
de Gien , et Guillaume Reboorseau , prêtre
chanoine de Cône.
«I^* h liTS.
84 PIERRE DE LONGUEIL ,
Mipi>oscnt enterré dans la collégiale de Sainte-Eugénie de Varzy, parce
<|a'il avait marqué qu'on Tinhumit dans cette église, au cas qu'il mourût
dans cette petite ville ; d'autres prétendent que ce fut à Auxerre. Il y
a moyen d'accorder ces deux traditions, en disant qu'il eut d'abord la
sépulture h Yarzy, et que par la suite son corps fut porté à Âuxerre. Le
testament de Pierre de Longueil ouvre cette voie de conciliation ; il y
désigne d'abord sa sépulture dans le tombeau de Ferrie Gassinel, sup-
posé qu'il fut trouvé vide , sinon proche la chaire de pierre , dans le
sanctuaire de la cathédrale ; et après avoir détaillé ses fondations dans
la même église, il ajoute expressément qu'il n'entend point que sa sé-
pulture et ses fondations en cette église aient lieu, à moins que la ville
ne soit alors réduite sous l'obéissance du roi , ou de son consentement,
et non autrement ; et , dans le cas qu'il se fût écoulé un grand nombre
d'années sans apparence à cette réduction , il prioit ses exécuteurs tes-
tamentaires de convertir ses fondations en d'autres œuvres de piété.
Gomme Âuxerre fut encore environ trois ans sans se remettre sous
l'obéissance de Louis XI , le corps de cet évéque reçut d'abord la
sépulture à Sainte-Eugénie de Yarzy. En effet, on lit dans les registres
du Chapitre d'Âuxerre au 26 février, qu'il fut inhumé dans la collégiale
de cette ville le 17 du même mois, lendemain de sa mort. Quelques
années après , lorsque les chemins furent plus sûrs , il fut apporté à
Âuxerre et inhumé au côté droit du sanctuaire. On mettoit là le drap
mortuaire le jour de son anniversaire (1), avant que l'on eût embarrassé
cet endroit par une crédence perpétuelle. Si on ne trouve point d'acte de
la translation des ossements de cet évéque, c'est parce que depuis sa
mort les registres capitulaires manquent pour le reste de ce siècle. En
un mot , il est évident, par le testament de Pierre de Longueil, qu'il
n'avoit demandé k être à Yarzy ou h Gosne qu'en dépôt, jusqu'h ce qu'on
|)ût en sûreté le porter à Âuxerre. Parmi les legs qu'il fit , il destina
cent sols à chacune des deux églises cathédrales où il avoit été chanoine,
savoir : Notre-Dame de Paris et Goutances , et même somme k celle de
• • •
Saint-Benoit-le-Bien-Tourné, paroisse de Paris où il avoit été baptisé.
Il nous apprend par le même testament que son père , sa mère , ses
(1) Lib. vêler. Succetilnrum.
QUATRE-VINGT-HUITIÈME ÉVÉQUB D*AU.\ERRE. 85
frères et plusieurs autres de sa famille éloient inhumés dans la chapelle mo -^ \4;jx
de Saint-Jean-rÉvangéliste des Cordeliers de la même ville. On y re-
connoil que Pierre des Portes, chanoine qui lui servit longtemps de
secrétaire, et qu'il fit pénitencier puis son exécuteur testamentaire avec
Guillaume de Gorhie, président du parlement, étoit son cousin (1).
Parmi les autres parents ecclésiastiques, le plus proche fut Guillaume
de Longueil, son frère, bachelier en médecine et procureur de la nation
de France en 1429, puis docteur en médecine et doyen de cette faculté
en 1 436 (2). Pendant son décanat, le baccalauréat de médecine commença
h être réputé entre les grades, comme celui des autres Facultés. Pierre
de Longueil lui conféra, l'année 1449 , qui étoit la première de son
épiscopat , une prébende de son église, et cinq ans après le grand ar-
chidiaconé. Â la mort de son frère il jouissoit encore de ces bénéfices,
aussi bien que de l'office de grand-vicaire pour le spirituel et le tempo-
rel (3). Il fut aussi couché dans le testament de Tévéque ]>our une portion
sur l'éminage d'Auxerre que ce prélat avoit acquise de Pierre Duval,
mari de sa nièce Guillemette de Longueil. Philippe, autre frère de notre
évêque , fut prévôt de l'église de Reims , et décéda avant lui. Il est
nommé incidemment dans son testament. Un troisième frère appelé Jean
n'y est aussi que par rapport à Marie, son épouse, a qui il laisse une
somme à prendre sur le comte de Nevers et sur son châtelain de Donzy,
pour des dépens de procès auxquels le parlement les avoit condamnés.
Entre plusieurs neveux dont l'évéque parle dans son testament, le plus
notable est Pierre de Longueil qu'il appelle son filleul. Il l'avoit fait
chanoine d'Auxerre le 31 mars 1463, lorsqu'il n'étoit encore que clerc
et bachelier en décret. En 1465, le 24 octobre, il lui conféra l'archi-
diaconé de Puisaye vacant par la résignation d'Etienne Gerbaud, auquel
temps et même un an après il n'étoit que sous-diacre. Les deux autres
neveux de son nom mentionnés dans le testament sont Antoine et Nicolas
de Longueil. Guillaume de Gorbie, neveu du côté maternel, est pareil-
(1) Le 8ieiir L*Hôte, qui a publié la Cou-
tume de LorriSy voulant enrichir de noies
historiques les marges du procés-yerbal, a
fait de ce Pierre des Portes un évéque d\\u-
\prre, à cause qu'il avoit trouvé ?on nom au
bas de l'acte de la fondation du Chapitre Ho
Saint-Fergeau.
(2) msl. univ. Par. Sœc, xv, p. 880.
{Ty) Rrg. Cap xv. Mars 1 175.
-'.i^-y^,
\U» i 1473.
86 ENGUERRAND 8IGNART ,
lemenl nommé daos le testament. Ce Guillaume paroil être père de
Philippe de Corbie, clerc parisien, pourvu au mois d*août 1467 d^un
canonicat d'Auxerre , dans les provisions duquel Tévéque Pierre de
LoDgueil le qualifie son petit-neveu (1). Martin du Brneil , clianoine de
Boui^es , nommé ci-dessus au sujet de la décime de la part du légat
d'Avignon, étoil aussi neveu du côté maternel. Un article singulier du
testament de Pierre de Longueil, c'est la note qu'il y insère (2), savoir :
que promu à Tévéché, il n'avoit reçu des héritiers de son prédécesseur
que six-vingts livres pour les réparations des bâtiments , quoiqu'elles
fussent taxées k quatre mille ; qu'ainsi il avait été obligé d'y suppléer
par de grosses sommes. Cependant, Pierre de Longueil , pour lever le»
difficultés et afin que son successeur tint ses héritiers quittes de toutes
réparations, lai légua ses mitres, sa crosse, ses deux anneaux, ses deux
pontificaux, et la plupart de ses habits avec une bonne partie des meiH
blés de la maison épiscopale.
CHAPITRE IX.
ENGUERRAND SIGNART, LXXXIX* ËVÊQUE D'AUXERRE.
1473 ^ 1477. Quoique le Chapitre d'Auxerre n'eût ni intention, ni intérêt de laisser
le siège épiscopal vacant , il ne s'assembla néanmoins pour le remplir
que le 14 mars, environ un mois après le décès de Pierre de Longueil ;
et le 21 du même mois fut indiqué pour procéder ^ nouvelle élection.
Ce jour, qui tomboit un lundi de la quatrième semaine de carême, on
chanta une messe solennelle du Saint-Esprit, le doyen y officia. On slb
ensuite au Chapitre où Gérard Rotier, chanoine et ancien professeur en
théologie, fit un discours en présence de tout le peuple ; après l'hymne
(I) Heg. Cap. 13. Àug. 1467. | Bethkemiê.
(i) Tab, Fp. Auliss. in Salvat. de ecci |
QUATRE-VINGT-NEUVIÈME ÉVÊQUfi d'aUXERRE. 87
Veni Creator, le doyen ayant proposé Enguerrand Signart, confesseur 1473 ^ 1477.
de Charles-Ie- Hardi, duc de Bourgogne, déjà évéque m partibus (1),
tous les chanoines, tant ceux qui étoient présents que ceux qui étoient
chargés de la procuration du chantre absent et d'un autre, le choisirent
unanimement et conclurent à le demander au duc. Comme ce prince
jouissoit non-seulement du comté d*Auxerre, mais même des droits
royaux dans toute son étendue, par accord fait entre Charles YII et
Philippe-Ie-Bon , les chanoines profitèrent de Toccasion pour rentrer
dans leur ancienne liberté d'élire, et, afin de n*y pas être troublés, firent
le choix dont je viens de parler. Le duc accorda la demande, et leur
écrivit là-dessus des lettres dont le parlement de Paris prit depuis con-
noissance en 1479 (2).
L'évêque élu étoit natif d*un petit lieu appelé Condé-sur-Noireau,
diocèse de Bayeux. Il avoit pris Thabit de TOrdre de Saint-Dominique,
dans le couvent de Caen» et avoit poussé ses études jusqu'à être docteur
en théologie. Charles-le -Hardi, duc de Bourgogne, le choisit pour sou
confesseur, et ce fut apparemment ce prince, encore simplement comte
de Charollois, ou le duc Philippe, qui lui procurèrent une abbaye dans
les Pays-Bas ; au moins le nouveau Gallia Christiana marque, en 1466,
un Enguerrand Signart parmi les abbés d'Haumont, diocèse de Cambrai.
L'élection faite par le Chapitre d'Auxerre ne fut confirmée à Rome
qu'au bout d'un an, par la bulle de Sixte IV» savoir, le 15 mars 1474 (3),
auquel on comptoit en Italie 1475. Jusqu'à ce qu'elle eût été reconnue,
le Chapitre eut soin de faire célébrer les ordinations par quelques évo-
ques m partibus, et de conférer les bénéfices (4). Guillaume, évêque
d'Ëuron, conféra la tonsure, le mercredi 21 février 1475, et reconnut
que c'étoit avec la permission du Chapitre sed^ vacante (5). Gomme on
étoit dans le plus fort des guerres de Louis XI contre le duc de Bour-
gogne, et que dans l'Auxerrois les uns tenoient pour le roi, les autres
pour le duc, le nouveau prélat ne se pressa point de faire son entrée.
(1) Salubriensis.
(2) RegUl, Parlam.
(3) Voyex les Preuves.
(4)En 1474, le 17 août, le Chapitre admit la
résignation d'an canonicat de Ciamecy. Viole.
(5) Cet évéque se retrouva encore à Àu^
xerre, le 9 mars 1477, auquel temps le
Chapitre lui fit les accueils qu'on faisoit or-
dinairement aux personnes de distinction.
90 JEAN BAILLET,
U73 3 1477. d'Engiierrand,lelOdejuillel,unemesseduSaint-Esprii,elaprèssamort,
celle de Requiem. Selon sa demande, deux jacobins, prêtres du couvent
d'Âuxerre, furent admis à ce service et à y avoir chacun la distribution
manuelle d*un chanoine. On croit qu'ayant quitté Tévéché d'Auxerre,
il demeura à Paris, où il avoit traité avec Jean Baillet ; au moins, il y
a apparence qu'il y mourut le 22 mars 1485. Il fut inhumé au milieu de
la nef du grand couvent de la rue Saint-Jacques. Sa tombe, autrefois
couverte d'une statue couchée qui le représentoit, a été depuis mise à
côté ; on la voit contigue au mur proche la chaire du prédicateur; on y
lit encore cette épitaphe : « Hic jacet reverendus in Ghristo pater et
9 Dominus» frater Inguerrandus Signart de conventu Cadomensi,
» doctor in theologia et episcopus Âutissiodorensis, atque confessor
x> illustrissimi principis Caroli Burgundiae ducis. Obiit anno Domini
» .1485, die 22 mensismartii; cujus anima iu pace requiéscat. Âmeu. »
Les ornements qu'il avoit donnés subsistoient encore dans le trésor de
la cathédrale, quand les huguenots surprirent Âuxerre. On lit dans
l'inventaire fait un peu auparavant, l'article qui suit : c Trois draps de
1 taffetas et un priant en forme de jacobin crosse, mitre, avec les
» armes de feu M. de Maïorque, évêque d'Âuxerre. »
CHAPITRE X.
JEAN BAILLET, LXXXX» ÈVÊQUE D'AUXERRE.
1477 h 1513. Jean Baillet, avec qui Enguerrand avoit traité pour une pension sur
l'évéché d'Auxerre, ne perdit pas un moment de temps pour prendre
possession; il l'avoit prise au moins dès la Saint-Jean 1478 (1). Il
(1) Il est nommé dans le registre des paie- 1 Sa promesse, pour ce paiement, est du 4 du
menlsdu droit apostolique, au 15 mai 1478. ; même mois.
QUATRE-VINGT-NEUVIÈME ÉVÊQUE DAUXEHRE. 89
Étant au prieuré de Nolre-Dame-de-la-d'Hors, le 14 du même mois, 1,73», 1477
il accorda quarante jours d'indulgences b ceux qui visiteroient les reliques
de saint Vigile et feroient quelques aumônes pour le rétablissement de
cette église qui menaçoit ruine. Il avoit accordé , dès le 24 avril , de
semblables indulgences b ceux qui fourniroient b l'entretien de la cé-
lèbre confrérie des Trépassés, qui éloit encore dans sa grande vigueur
chez les Jacobins d'Auxerre. Comme cela ne suffisoit pas, il approuva
pour la prédication, le 24 septembre suivant, seize religieux, prêtres de
la même maison, et le prieur Jacques de Brie, b la tête, accordant qua-
rante jours d'indulgences b ceux qui vraiment contrits et pénitents
assisteroient b leurs sermons, outre les cent jours accordés pour le même
sujet par le cardinal Rollin, évêque d'Âutun ; il ne leur épargna pas
plusieurs autres grâces semblables : le tout daté du palais épiscopal
d'Auxerre, selon l'expression introduite du temps de son prédécesseur.
Ce sont les seuls actes qui paroissent sous son nom. Avan; la fin de cette
année, il avoit résigné son évêché b Jean Baillet, chanoine de Saint-
Merry, b Paris, et prieur d'Andrie, diocèse d'Auxerre, se réservant
pension. Dans le temps que cette abdication se projetoit, Gôme Guymier,
célèbre jurisconsulte, fut reçu chanoine d'Auxerre (1).
Enguerrand , quoique dépouillé du titre d'évéque d'Auxerre, ne cessa
point d'exercer les fonctions épiscopalcs, puisqu'au sortir d'Auxerre il
fut transféré b Maïorque^ au moins pour le titre. Il n'oublia pas Téglise
d'Auxerre, et envoya, au mois de mai 1482, trois parements de soie
pour la décoration du grand-autel, avec une somme pour fonder son
anniversaire. Thomas Herri, professeur de théologie de son Ordre, en fut
le porteur et s'acquitta de la commission le vendredi 24 de ce mois. Le
Chapitre , auquel présidoit le chantre pour l'absence du doyen , reçut
le tout et promit par acte (2) de chanter tous les ans, durant la vie
(I] Ex Comp. CaL Maii 1478. | (2j Voy. les Preuves, à Fan 148!2.
« que les moines lui ont fait cette remise à cause de la pauvreté de Tevcsché arrivée
» au moyen des guerres qui darrenierement ont eu cours en ce pays d'Aucerrois, et
» aussi aux grants interestz et despens que avons euz et faiz à la poursuilte de nostre
» confirmacion et entrée audit evesché. » (Archiv. de TYonne. Fonds Saint-Marien,
titres de la rente due par Tévêché.) (iV. d. E.)
93 JEAN BAILLET,
ur: » 15Î3 * cerlaÎDs articles qui seront baillez par ladite cour audit commissaire,
» et leur déposition ou confession jointe au procez principal d'entre
» les parties, pour sur ce en ordonner ainsi qu'il appartiendra, despens
» réservez en diffinitive. > Voilà tout ce qu'on sait de ce procès ;
comme les registres du Chapitre manquent pour ces années-là, sans
qu'il en paroisse aucuns extraits sur cette matière, il n'y a pas lieu
d'espérer de plus grands éclaircissements. Le procès ayant obligé Jean
Baillet de rester à Paris durant Tannée i479> il n'est pas étonnant
qu'on le voie à la rentrée du Parlement au 12 novembre : mais on
peut être surpris qu'il ait fait un concordat avec le Chapitre de la
cathédrale avant le gain de son procès. Ce traité est du 5 janvier 1478,
environ quatre mois après son entrée : il se transporta dans la salle du
Chapitre, et y représenta que le revenu de l'évêché étoit beaucoup di-
minué par les dernières guerres du duc de Bourgogne contre le roi de
France ; que le château de Régennes avoit été détruit, et quantité de
maisons de cette terre réduites en cendres ou inhabitées; qu'il se trou-
voit chargé d'une pension envers Enguerrand Signart,son prédécesseur;
et il conclut à ce qu'on lui accordât diminution sur la somme de cent
quatorze livres que l'évêché devoit annuellement au Chapitre. Les
chanoines, dont les terres n'avoient pas été moins maltraitées, et qui
connoisfoient qu'il y avoit déjà un terme de six mois échu à la fête de
Noël, modérèrent cette somme à quatre-vingts livres par chaque année,
pour six ans, avec la restriction qu'au cas qu'Enguerrand Signart vint
à mourir avant les six ans, cette grâce n'auroit plus lieu. Il falloit que
la somme de trente-quatre livres fût encore alors un objet considé-
rable, puisque, pour en obtenir la remise, le prélat accorda aux chanoi-
nes des faveurs singulières (a). 1° Que tous ceux d'entre eux qui
avoient des cures, ne seroient point tenus d'y résider, et ne paie-
roient aucun droit de non résidence , mais qu'ils pourroient placer
des vicaires pour gouverner ces paroisses, et que les officiers de l'évê*
que ne pourroient exiger de ces vicaires que cinq sols par an à chaque
(a) Ce ne dut pas être seulement à cause de l'importance de celts somme que
révoque se montra si généreux , car au pouvoir actuel de l'argent, ces 34 livres no
vaudraient pas plus de 178 francs. (JV. d. E.)
QUATRE-VhNGT-DIXIÈME ÉVÉQUE d'aUXËRRE. 95
renouvellement d'approbation ; 2^ que l'évéque visitant les cures dont
les chanoines seroient titulaires, n'exigeroit aucun droit de procuration,
et que le Chapitre ne payeroit aucun droit pour héritages situés dans
la censive et justice de l'évéque h Appoigny. Ces clauses paroissent
empruntées d'un autre traité dont j'ai parlé ci-dessus. Jean Baillet
avoit exercé les pouvoirs spirituels de son ministère avant la contesta-
tion de Jacques Juin. Etant h Varzy le i9 décembre, il y accorda aux
Dominicains d'Auxerre des indulgences semblables h celles que ses
trois prédécesseurs avoient données pour la confrérie des Trépassés
accréditée par les guerres. Jean Baillet, dans ces lettres, se qualifie évé-
que d'Auxerre Deiet sanctœ Sedis apostolicœ gratta; c'est le premier de
nos évéques qui ait employé ce langage ; encore ne s'en servit-il que
dans les actes latins. Le notaire qui dressa la transaction du 5 janvier
suivant, continua toujours dans l'ancien style : a Révérend Père en
» Dieu, par la permission divine évesque d'Auxerre. »
Jean Baillet se fit rendre exactement les hommages dus. Il s'en
trouve deux actes pour la terre de Toucy. Celui du 15 janvier 1479
ou 1480 fut rendu par Antoine de Chabannes comte de Dammarlin ;
l'autre fut rendu le 13 août 1495, par Jean de Courtenay chevalier
seigneur de Bléneau, au nom d'Haimar de Prie comte de Dammarlin,
et d'Avoye de Chabanne son épouse. Il reçut en 1482 de Charles de
Lamoignon, les hommages pour le fief de la Rivière; en 1484 celui de
Château-Censoir et les dépendances (1), que lui rendit, à Varzy, Jean
de Ferrières chevalier seigneur de Champlenas et de Presle; en 1490
celui de la baronnie de Donzy, par Marie d'Albret, veuve de Charles
comte de Nevers, et celui de la terre de Beauche, par Jean duc de
Brabant. Le Chapitre de la cathédrale , auquel il avoit accordé les privi
léges dont je viens de parler, conclut par reconnoissance, le 26 février
1486, de le traiter sur l'article de ses redevances comme il avoit fait
à Pierre deLongueil; ce qui revenoit à la modération qu'on lui avoit
accordée au commencement de son épiscopat, et dont il continua de
jouir comme d'une grâce singulière. Le prélat rendit à l'église beaucoup
au delà des remises que le Chapitrelui avoit faites : on eut de lui de beaux
(1} Voy. les PrcuTes à Tan 1484.
il77 à 1513.
94 JEAN BAILLBT,
U77 il 1513. ornements et de magnifiques tapisseries (a); il contribua notablement
pour achever le portail septentrional de la croisée de l'église, et pour
avancer la tour méridionaledu grand portail, qtii est restée imparfaite (6)
On voit ses armoiries en l'un et l'autre endroit. La communauté des
habitants ne lui fut pas moins redevable : il empêcha, par le crédit de
ses parents, que la donation du comté d'Âuxerre, faite en 1490 par
Charles VIII à Engilbert de Clèves, n'eût lieu, parce qu'elle étoit préju-
diciable à leurs privilèges. Par le même moyen il affermit l'étendue du
ressort de la juridiction du bailliage d'Auxerre que plusieurs seigneurs
contestoient. Il se soumit sans difficulté k la rédaction de la coutume
d'Auxerre en 1 507« Crespin Prévôt» son officiai, y comparut au nom de
Févéque. Les habitants de Yarzy firent des remontrances sur leurs cou-
tomes locales ordonnées par ses prédécesseurs ; Jean Baillet ne s'y
opposa pas (i).
Il fut le premier qui rendit utile à l'église d'Auxerre la nouvelle in-
vention de l'imprimerie; il fit imprimer le Missel et le Bréviaire à
Tosage do diocèse. L'édition du Missel ne marque ni l'année, ni le lieu
de l'impression; mais elle peut avoir précédé l'an 1485, parce qu'on
y trouve la fête de saint François élevée au degré des fêtes doubles,
article statué dans le synode de cette année, où se publièrent des indul-
gences accordées par Sixte lY à ceux qui célèbreroient cette fête sous
ce rit. Pour ce qui est do Bréviaire d'Aoxerre, il s'imprima k Chablis
en 1445; la fête de saint François n'y est que par supplément, avec la
remarque dont je viens de faire mention. On prétend que Jean Baillet
établit dans son diocèse la coutume de sonner le soir V Angélus k l'heure
(i) Procés-Terbal.
(a) Ces tapiseries furent vendues, au milieu du dernier siècle, par le Chapitre k
PHôtel-Dieu d*Aoxerre qui les possède encore. Ces tissus sont aussi magniflques que
le dît Tabbé Lebeuf, et représentent fort en détail l'histoire de saint Etienne. Deux
morceaux ont été distraits de cet ensemble dans un temps déjà ancien, et après
avoir passé en plusieurs mains sont maintenant à Paris. (iV. d, E.)
{h) Les travaux de construction des tours da grand portail avaient recommencé
en Fan 1500. Le Chapitre s'était imposé du sixième de son revenu pour faire avancer
rœuvre. — Voy. Preuves, t. iv, n® 418.^ On lit sur la cage de l'escalier de la tour du
nord, h des hauteurs différentes, les dates de 1525, 1530. (iV. d. E.)
ez
QUATRE-VINGT-DIXIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 95
(lu Cduvre-fea, et même le matin an point du jour, en assignant du ^477 ^ ^^^^
revenu pour cela, quoiqu'il y ait apparence que ces coutumes sont plus
anciennes. Du moins, il étendit cet usage et le fit pratiquer avec dis-
tinction la veille de la fête de rAnnonciation, à Pheure \k laquelle on
croit pieusement que l'ange Gabriel vint saluer la Sainte-Vierge. Il
donna pour cela, en i502, à la cathédrale, la terre de Cbivre proche
Yarzy, qui produisoit soixante livres de rente, ajoutant que ce revenu
seroit aussi appliqué pour son anniversaire. Cetle prière fut nommée
le Missus; c'est le premier mot du répons qui la commence; elle fut
depuis appelée Salut^ et peut passer pour le premier des Saints fondés.
Par la suite, on établit d'autres prières sur le même plan; elles eurent
le même nom, quoique le motif qui faisoit agir Jean Baillet n'ait point
lieu dans les autres fêtes. Ainsi, le Missus des matines du mercredi des
quatre-temps de TAvent n'est pas ce dont il s'agit dans la fondation
de Jean Baillet. Cette solennité pour la lecture de l'évangile Missus se
pratiquoit dans la cathédrale d'Auxerre, au moins dès le xiii* siècle (i),
et la messe, célébrée ensuite par le prêtre qui a lu cet évangile, n'est que
depuis l'an 1619 (a). Les confréries se multipliant avec le temps, il
s'en établit une ii Auxerre, dans toutes les paroisses, en l'honneur de
la Trinité. Hugues de Boulangiers, abbé de Saint-Père, fut le prin-
cipal auteur de cette nouvelle dévotion. Il sollicita les statuts de la
confrérie, et les fit rédiger et approuver par Jean Baillet, en 1501.
Depuis ce temps les différentes révolutions avoient réduit cette confrérie k
la seule église de Saint-Pierre-en-Château» première paroisse de la ville;
et enfin, de nos jours, on en a vu la fin, quoiqu'elle ne fût composée
que d'ecclésiastiques et surtout de curés de la ville et du voisinage.
Jean Baillet contribua, autant que Pierre de Longueil, à faire revivre
(1) Ex obUuar. xiij Sœc.
(a) Sous le gouvernement de Jean Baillet, le Chapitre cathédral obtint de-
Louis XI la confirmation de plusieurs privilèges. Ce prince lui accorda de ne
plaider que devant les gens des Requêtes du Palais à Paris , s'il lui plaisait. 11
exempta ce corps du logement des gens de guerre dans les maisons du clottre
(Trésor des Chartes, reg. 212, i» 4«, an. 1484). (iV. d. E.)
1 r: il 1513.
96 JEAN BAILLET ,
dans le diocèse la mémoire des martyrs de TAuxerrois du temps
d'Aurélien. Oo les connoissoil sous le nom de saint Prix , et ses com-
pagnons, sans faire beaucoup de mention de saint Col, qui s'étoit
détaché de la troupe et emportant avec lui la tète de saint Prix, avoit
été martyrisé sur la route d'Auxerre à Ghalon. Ce saint n^étoit connu
quk Saint-Bris, lieu de sa sépulture. Depuis la découverte de son corps
par saint Didier, évéque d'Auxerre au vii« siècle, ses ossements étoient
restés dans un tombeau de pierre derrière le grand autel. Ils ne parois-
soient point assez précieusement renfermés à quelques bourgeois de la
ville de Saint-Bris, témoins de guérisons miraculeuses opérées par sou
intercession. Etienne Regnauldin, Tun des notables du lieu, supplia le
prélat nouvellement venu de les tirer de ce tombeau et de les renfermer
dans une châsse de bois doré. Il s*y rendit, le 19 novembre i480, avec
Hugues de Thiard, abbé de Saint-Germain, Jean Bourgeois, abbé de
Saint-Marien, et Jean de Baugis, abbé de Saint-Père. Là , s^étant fait
lire rinscription ancienne qui étoit sur le mur voisin, conçue en ces
termes gravés sur une pierre : a Hic requiescit sanctus Cottus, qui cum
D capite sancti Prisci martyris suscepit martyrium », il iSt ouvrir le
tombeau, et ramassa pieusement la tête (1) et le reste des ossements
qu'il renferma dans la nouvelle châsse, en présence des trois abbés ci-
dessus nommés, d'Etienne Naudet, chanoine de la cathédrale d'Auxerre
et curé du lieu, Jean Odry, son officiai et d'Edme Boileau, «ussi prêtres
et chanoines d'Auxerre. Cela rendit le nom de saint Cot plus célèbre
qu'il n'avoit été auparavant (2) et servit par occasion à étendre le culte
de saint Prix et de ses autres compagnons.
Après la petite ville de Saint-Bris, il ne s'en trouve point où la
présence et le nom de Jean Baillet ait paru avec tant d'éclat que dans
celle de Gien. De nouveaux établissements y donnèrent occasion. Anne
de France, sœur de Charles VIII, dame de cette ville, y fit deux fonda-
tions considérables. Elle y établit les Minimes, du vivant même de
(1) Par la visite faite de ces ossements en
1751 , le 2 septembre , lorsqu'ils furent
transférés dans une châsse nouvelle, il pa-
rut que M. Baillet s'étoit défié d'un ou deux
ossements qui pourroienf avoir été glissés
dans le tombeau par quelques fentes , les-
quels, bertainement, ne provenoient pas
du même corps.
{V Bolland ad 26 Maii.
QUàTRB-VINGT-DIII&ME évêque d auxerrb^ 97
saint François-de*Paule , leur instituteur, et quelques années après ^^ ^ i^,,
des religieuses de Sainte-Claire, sous la réforme de Sainte-Colette.
L'évêque d'Auxerre appelé en 1494, fit la dédicace de Téglise des
Minimes, sous rinvocation de Sainte-Hélène, le 28 octobre. En 1497,
il dédia une chapelle de leur cloître, sons l'invocation de sainte Suzanne.
Quant à rétablissement des Clarisses, il n'y fut point sitôt parlé d'église
ni de dédicace. Mais cet évêque étant à Cosne, en 1500, y reçut les
bulles d'Alexandre YI concernant cette nouvelle maison , et il leur
donna toute l'authenticité nécessaire, en convoquant ceux qui y étoicnt
intéressés. De la ville de Gien y assistèrent ceux qui porloient les pro-
curations de la fondatrice et de Pierre de Bourbon, duc de Bourbonnois
et d'Auvergne, son époux, les députés du Chapitre de la collégiale,
avec les procureurs de Frère Louis d'Arfueille, prieur , et de Jean
Secretin, bachelier en décrets , curé de Gien-le-Yieil , comme partie»
qui dévoient connoitre de ce nouvel établissement (a). L'église collé-
giale de Saint-Etienne, dont je viens de parler, fut également l'objet
des attentions du nouvel évêque. Le projet de l'union de la cure de
Gien-le-Yieil â ce Chapitre, étant resté sans exécution, parce que l'abbé
de Saint-Benoit-sur-Loire avoit refusé d'y consentir, il y annexa celle
de Saint-Laurent de la ville même, l'an 1485. Le bâtiment de cette
collégiale éloit devenu si caduc , par l'effet de son exposition et par
vétusté, que l'on ne ponvoit plus y faire l'office, surtout pendant l'hiver.
Les chanoines exposèrent en 1485, au pape Innocent YIII, le louable
dessein que le roi Charles YIII et Anne sa sœur, dame de leur ville ,
avoient de la rebâtir à neuf. Ce pape accorda une espèce de jubilé pour
les trois premiers jours de la Semaine-Sainte de Tannée 148G et des
deux suivantes , afin d'engager les fidèles k y contribuer , les aumônes
ayant cessé avec le jubilé, Jean Baillet y suppléa par les indulgences
épiscopales, le 6 août i486. Il annonce dans ses lettres, comme la
bulle du pape le marquoit, que cette église étoit dépositaire du corps
de sainte Félicule, vierge. Quoique la vieille église fût abattue avant
(a) En 1727, les Clarisses étaient ao nombre de 40 religieuses, dont 14 sœurs
converses. Elles avaient 3,400 liv. de revenu et estimaient ce qui leur manquait à
VOO liv. — Ârch. de V Yonne, ^ (N. d. E.)
Il 7
98 I IBAN BAILLR,
UT7 1 15)3. '^ fi° ^" ^î^'^ ®^ rebfttie au moins en partie par les soins de la princesse
Anne, il ne paroit pas qn*il y ait eu de nouvelle dédicace ; Tévéque en
auroit pu faire commodément la cérémonie, lorsqu^il visita ce Chapitre
en 1509 et qu'il y fit des règlements touchant les chapelains. L'audi-
tion des comptes des marguilliers de Gien-le-Yieil et du maître de
THôtel-Dieu de Gien, lui avoit été contestée par le seigneur de la ville^
qui avoit appelé d'une sentence de Tarcbidiacre de Puisaye. Quoique
ce seigneur fût en possession d'entendre ces comptes par ses officiers,
le parlement jugea, le 5(1 juillet 1495, qu'ils dévoient être rendus par-
devant l'évêquc ou ses officiers et commis, en appelant toutefois les
officiers de la juridiction temporelle du lieu pour y assister si bon leur
sembloit. De son temps, la dispute se renouvela entre le chantre de
Cosne et le Chapitre du même lieu ; mais le prélat ne semble pas s'y
être beaucoup intéressé. On voit seulement qu'afin de favoriser les
chanoines qui avoient fait un compromit entre les mains de Guillaume
Ragoneau, archidiacre de Puisaye, et de Jean Odry, officiai, il rendit à
Varzy une ordonnance expresse le 5 octobre 1490, pour qu'on eût ï
les aider des titres et statuts de leur église qui restoient cachés. Ses
armoiries sont placées en plusieurs endroits de la belle chapelle de
Notre-Dame-de-Galle située au milieu de la même ville, savoir au-
dessus du grand portail et à plusieurs vitrages ; cela porte k croire avec
assez de fondement qa'il a contribué à la bâtir; effectivement, Tédifice
est dans le goût dont on b&tissoit alors. Le Chapitre de Saint-Caradeu
de Donzy, a sujet de se ressouvenir particulièrement de cet évéque. Le
29 septembre 1496, il y renouvella les anciens statuts et en ajouta de
nouveaux. L'église collégiale de Sainte-Eugénie de Varzy se trouve
presque dans le même cas que la chapelle de Cosne dont je viens de
parler. Ses armoiries, en différents endroits, marquent évidemment les
biens et les augmentations qu'il y fit (a). On a déjk vu, par plusieurs
(a) Voici encore d'autres actes qui prouvent sa sollicitude pour cet établissement.
En 147S, il unit au Chapitre la cure de Saint-Pierre-du-Mont et Marcilly. Six ans
après, il lui donna le tiers des revenus de Thôpital. En 1487, ce fut le tour de la cure
de Breugnon. Le Pape Clément VIII confirma ces réunions en 1593. — Areh, de
l'Yonne, ?^ (N. d. E.)
17
QUATRE-VINGT-DIXIÈME ÉVÊQUE D^AUXERRE. 99
actes, qne pendant les visites de son diocèse, il se retiroil quelquefois
dans le château situé proche cette église. Le 18 juillet 1495, il y con-
firma la fondation qui venoit d'être faite d'un autel de Saint-Edme,
dans Téglise ^paroissiale de Saint-Pierre de la même ville, par Bernard
Galloys, nouvellement décédé (1). On présume aussi quMl a donné à
Téglise de Sainte-Eugénie la portion considérable qu'on y voit du
crâne de saint Cot, martyr. Exact, selon les devoirs, à visiter les cures
de la campagne, il ne négligea point le droit de procuration attaché k
cette visite; s'il s'en étoit déporté à Tégard des paroisses dont les curés
étoient chanoines de la cathédrale, il n'en fit pas de même envers les
cures dépendantes des abbayes. Il l'exigea du prieur de la Charité,
pour les trois curés de la ville de ce nom, de ceux d'Andrie, de Gien-
le-Vieil, de Saint-Sauveur et de celui de Bonny, après une enquête du
6 janvier 1484 par laquelle il apparut que Pierre de Longueil en
avoit ainsi usé (2). En 1497, le 19 septembre, l'abbé de Saint-Laurent
s'obligea, tant pour lui que pour ses successeurs, de payer ii ce prélat
et aux futurs évéques d'Âuxerre, quatre écus d'or, de trois ans en trois
ans après la visite (5) ; ce qui semble n'être foudé que sur le droit de
la procuration des cures dépendantes de cette abbaye, qui sont en assez
grand nombre dans le diocèse. Une espèce de tribut, qui étoit plus
rare, et qu'il aida à lever, fut celui que le concile de Pise, transféré â
Lyon, imposa sur tout le clergé de France, pour la défense des églises
du royaume et pour les frais même du concile. Jean Baillet se décla-
rant commissaire de ce concile, en cette partie, nomma, par des lettres
expresses du 11 août 1512, Robert Pourcin, chanoine de la cathé-
drale, et Guillaume Grail, archiprêtre de Varzy, pour avertir tous les
bénéficiers de satisfaire à leur cote , sous peine de suspense avant la
huitaine (4). Ainsi traitoit-on alors ces sortes d'aflaires. Le diocèse n'y
fut compris que pour deux mille quatre cents livres. Le pape chargea
Tévêque d'une autre ^commission moins désagréable que la précédente :
ce fut de recevoir le serment de fidélité de Claude de Barsey, abbé de
U77 il 1513.
(1) Exautogr. apud D. Leclerc.
(2) Voy. lesPreureg à Tan 1484.
(5) G. Viole in Baillet,
(4) Ex Lia, mss.
1 00 JEAN BAILLET ,
1477 \i isid. Saint-Seine. Il le reçnt h Âuxerre, le 20 février 1506^ sans qu*on voie
pourquoi le souverain Pontife lui avoit adressé cette commission qui
paroissoit dévolue h l'évéque de Langrcs (1). Laurent le Routier,
nouveau doyen d*Âuxerre, prêta serment à Jean Baillet, 1^1 décembre
i510 ; cela étoit du ressort de Tévéque. Ce sont les deux seuls
serments faits entre ses mains. L'Ordre du Val*des-Choux, formé dans
le diocèse de Langres, s'est peu soustrait de la juridiction des Ordi-
naires. Celui d'Âuxerre a trois maisons de cet institut : celle de TEpau,
proche Donzy, la plus célèbre des trois, perdit en i506 son prieur
commendataire, Pierre de la Fin , abbé de Pontigny. Les religieux,
souhaitant choisir un prieur qui fût de leur maison, en demandèrent
la permission à notre évéque qui, en l'accordant au mois de janvier
de la même année i506, commit Pierre de Piles, prêtre, pour présider
à l'élection (2). L'évéque diocésain fut ainsi reconnu par ces solitaires.
Agnan Cochet, trésorier de Donzy, vint de leur part lui notifier qu'ils
avoient élu frère Jean Mignard pour leur prieur, et lui demander la
confirmation de leur choix ; ce qu'il leur accorda.
Le prélat assista en i485 au Concile provincial que Tristand, ar-
chevêque de Sens, avoit indiqué au 28 juin, et il confirma, avec les
autres suffraganls, celui qui s'étoit tenu vingt-cinq ans auparavant sous
Louis de Melun pour la réception des canons du concile général de
Bâle (3). Les députés du diocèse d'Auxerre, pour ce concile provincial de
1485, furent le chantre de Nolre-Dame-de-la-Cité et le trésorier de
Cosne. Jean Baillet fut l'un des six prélats qui assistèrent aux funé-
railles du roi Charles VIII, célébrées à Saint-Denis le premier mai
i 498. Peut-être se donnoit-il dès lors du mouvement au sujet d'un procès
contre les mariniers d'Auxerre ou voituriers par eau qui refusoientcle
payer les droits dus au passage du pertuis de Régennes. Jean Régnier,
Jbailli d'Âuxerre, avoit déjà condamné un de ces voituriers par sentence
du 50 avril 4494, au profit de Pierre de Longueil. Ils crurent qu'en
se joignant tous ensemble au prévôt des marchands de Paris, ils réus-
(I) Viole^
{%) Ex Proceti- vtrb.iHianuseripo.
(3) Qmeil Labb.
QUATRE-VINGT-DIXIÈME ÉVÉQUE D*AUXERRE. iOl
siroient à se libérer de ce tribut; mais ils succombèrent ^ et après une i^.. ^ ^^^^
enquête faite par François Boucher , lieutenant-général du bailli de
Sens , ils furent condamnés au nombre de vingt-trois particuliers ,
par arrêt du «parlement du 21 juillet iSOl , et Tévêque maintenu en
possession de percevoir Tancien droit tant sur les petits bateaux que
sur les grands. Cet arrêt est des plus considérables tilres que ce
prélat ait obtenus pour assurer les revenus de l'évêché (1). Il acquit,
en 1499, tout ce que Jean de Chabannes, comte de Dammartin, baron
de Toucy, possédoit dans la seigneurie de la Chapelle-de-Saint-Ândré,
proche Varzy; mais il fit cet achat comme personne privée, et ces biens
retournèrent à sa famillle après sa mort. Il eut aussi sur les dernières
années de sa vie, un arrêt du parlement contre les bourgeois de
Varzy (a) qui avoient arraché des mains d'un de ses domestiques les
clefs de leur ville. Les habitants furent condamnés aux dépens et a une
amende, le 16 avril 1511.
Il mourut à Àuxerre, dans son palais épiscopal, le dixième novembre
1515 (6), et fut inhumé derrière le chœur de la cathédrale, dans la
chapelle de Saint-Àlexandre, où Pierre Baillât, écuyer, son parent, étoit
enterré. Il avoit choisi pour exécuteurs de son testament, Thibaud
Baillet, son frère, président au parlement de Paris et Jean Henne-
quin , grand-archidiacre de son église (2). Le Chapitre contesta avec
Thibaud pour des réparations auxquelles le défunt évéque s'étoil obligé;
mais le différend fut accommodé peu de temps après par Blanchet
David, lieutenant-général, en vertu de la procuration que ce prcsi-
(1) Ex aulographo.
(2) Ex Process. verb. Ressort. Bailliv.
i
Autis
(a) L'évéque J. Baillet était souvent en discusssion avec les habitants de Varzy,
Un compromis qu'il passa avec eux, en ltf09, nous apprend qu'ils n^avaient pas
moins de sept procès à vider ; les uns pour refus de lods et ventes, un autre pour le
droit de han-vin, d'autres pour le 20* du pain étranger vendu dans la ville, pour le
droit de nommer le capitaine de la ville, etc. Voy. Pr. t. iv, n*" 415. ^iV. d. E,)
{b) Voyez des détails sur la mort de J. Baillet, dans le BuUeUn de la Société des
sciences de PTotme, t. ii, p. 458. (iV. d. E.)
lit
irr
iik;o €î lioi>fr-. TiiiiMPas: . cooBeiUfr au piriemai:. in: cnTcrpêraii. Gt
II*: iat oiK 1* P mai ISSI» . qw i^xn ftentteqiiîi] rewii au ChxpitFe
hii>eati Histtei sauEcri: \a que* VertqiK' aroi: kouf a Vc^riiK. OHoiqae
sattv4 aBmi'' ées maiBs d^ ira^niaiots . i! esi resti* natik ckpois
1 «Stf)^ <k TimpresMOL. ii cause de son uotds énorme, ht comoif de
dè^vcai^^ de ki «ooninDiaoïé d«s liabiiants d'Anxerre pour ] » J-iST,
4émpÊt au SI arril qvehfves parent^ de cet ërâfiie. qoi Vtuni tcbos
TiMier. rentrent ie& pn»enib de h yUit . entre antres fioliert TiiUionst
ti-<i«s«is BoomK. arocat du roi eo parlement . maître Jacqiiei> Bmtel .
ei V^jMmiè^ de maître Pierre l'Orferre. qualifiée «bot de ce prélai.Bans
i«s comptes du Cùapître ou l^ récepiioss des chanoines^ sont marquées.
m! danoiae de ces fnniiieB u'y paroll. I>e> {iarent«^ de cet «féque
MOUS Be TOTODS que les anirantf* qui s appeloient HeiNiflgititi. Jeau
ttenoequiu . dont je Tiens de parler . aroit été reçu eu iA?n ix nu ca-
uoijica: et «1 kl dignité de grauci-^rckidiacre: seiou certains actes, il
eioit uercu de Tlitbaud liiaiilei. On ne sait eu quel temps (hiard
Ii«fiifef{uiu. ircre de Jean, fut reçu archidiacre de Ihiisave: sa réception
précvua le deces de Jeau Baîllet . puisque cet évcque Tovant que le
notrrel arciiidiacre ne se pressoit pas de lui prêter serment de iidëliié.
mique! il etoit lenu suivant sa ibudatiou. fit saisir les revenus de son
arcliidiacoiié M.. Il v a apparence qu'uu Nlcola^ Bennefpiin. mon
eiianoiiie eu 151 (S. avoit aussi été pourvu de sou canonicai par k* même
évéqvi.
L'évêque Jeau Kailiet esi l'un des princi])au3: fondateurs des messes
liasses qu*uu célèiire dans la clia]»eUe de Saint-Âlcxandre. Pierre
iiaiiiei. sou parent . y a aussi contribué; ceiuH-ci oii%ea les entants
craubes 3; de chanter ciiaque join* flans la caliiedrale une antienne en
M; £ac cmi. mm. fvrmuUai . Stweêarii
Mrettitirva pmmi.
(^ On «inieloit
i 1» CBlm» dN»
«I 11 litAil an treior de Li cathcdrak. et se tronrc aiijourd*luii à la bibliotlièquc dr
la ville d'Anerre. {F à. m.\
QUITHE-VINGT-DIXIÈHB ÉTËQOB d'aUXERBB. 105
l'honneur de la Saiote-Vierge , moyennant quoi il donna au Chapitre itn k isis.
une certaine somme qui entre aujourd'hui dans la dépense de leurs
habits d'église.
Sceau dcJ'abN da FonUiiqr, in t3K. -(inhim ds iraitu.)
FIN DB LA QUATRIÈME PARTIE.
MÉMOIRES
HISTORIQUES
. SUR
LES ÉVÊQUES DIUXERRE.
CINQUIÈME PARTIE,
Qoi contient les actions de onze Evèqnes qui ont siégé depnis
l'an 1514 josqo'à Tan 1676.
CHAPITRE I.
De deax évéques tirés successivement de la maison de Dinteville. ,j^
FRANÇOIS DE DINTEVILLE, !•'. DU NOM, XCI. ÉVÊQUE D'AUXERRE.
On a vu, dans la quatrième partie de cet ouvrage , onze évéques qui isis ï xsao.
ont gouverné Téglise d'Àuxerre environ cent quarante ans. JVn ai
parlé uniquement sur des mémoires répandus de côté et d'autre dans
les archives où sont des registres, des comptes et semblables enseigne-
ments. Il s'en présente maintenant deux de suite, dont la vie a été
écrite peu de temps après leur mort, et qui pour cette raison fournissent
une matière assez abondante, le second principalement, dont Tépis-
copat a été plus long et plus rempli d'événements. Ce sont les deux
François de Dinteville 'oncle et neveu, qui tiroient leur nom d'une terre
106 FRANÇOIS DE BiNTEVILLE, PREMIER DC NOM,
1518 ï 1530. située dans la Champagne, et possédée anciennement par les Jaucourt.
Les actions du premier ont été écrites par un chanoine attaché h lui^
appelé le Marchand (a), à qui il est échappé peu de faits importants,
quoiqu'il n'en ait touché plusieurs qu'en général.
François de Dinteville, premier du nom, étoit fds de Claude de
Dinteville, seigneur Commarin en Bourgogne, d'Eschenetz, Polisy, etc.,
et de Jeanne de la Baulme, fille du seigneur de Mont-Saint-Sorlin ,
descendante des comtes de Mont-Revel, riche et puissante famille.
Claude de Dinteville avoit été élevé à la cour des derniers ducs de
Bourgogne; étant leur conseiller et surintendant de leurs finances, il fut
tué à la bataille de Nancy avec Charles-le-Hardi à Fâge de 64 ans (1).
Il eut quatorze enfants de son mariage , savoir quatre filles (2)
et dix garçons; le dernier fut notre évéque. La jeunesse de François de
Dinteville fut soigneusement cultivée. Après avoir étudié à Dijon et à
Âutun, où il fit voir combien on devoit attendre de lui, il fut envoyé à
Pavie en Italie, ou plutôt à Padoue, pour y étudier le droit. Y ayant été
reçu docteur en l'un et l'autre droit, au bout de cinq ans, il retourna en
France après la fin des guerres du duc de Bourgogne. Â peine y fut-il
arrivé, que Georges d'Amboise, archevêque de Rouen, admirant les qua-
lités de corps et d'esprit du jeune François, le prit en affection et l'attira
auprès de lui. Cet archevêque, devenu cardinal et ambassadeur, continua
de le garder dans sa maison. Les parents de François n'oublièrent rien
alors pour le faire connoitre à Louis XII et lui mériter sa bienveillance.
*^uelques-uns ajoutent que Claude de Dinteville, abbé de Régny, puis
de la Ferté-sur-Grosne, fut la principale cause de sa fortune. Cet abbé
peut avoir contribué h son avancement dans les sciences; mais François
put être plus utilement protégé par Guillaume Pot, évéque de Toumay,
son oncle. Il avoit déjà deux frères revêtus d'offices importants ; ainsi il
(1) Anselme, Grands- Veneurs, i abbesse de MaaboissoD.
(t2) De ces quatre fiUes fut Antoinette, 1
(a) Ce chanoine, appelé François Mercator ou Marchand, écrivit la vie de Tévèque
par ordre de son neveu, en 1548.— Fo^. le Ms. original du Gesia Ponlif,
(N. d. B.)
QUATRE-VINGT-ONZIÈME ÉVÊQUB d'aUXERRE. 107
ne lui fut pas difficile d'obtenir des bénéfices. Gaucher de Dinleville, le
plus âgé de ces deux frères, et qui continua la postérité, étoit maître
d'hôtel du roi et chevalier de ses Ordres; il fut depuis lieutenant de la
ville de Sienne pendant les guerres d'Italie, et gouverneur de François,
Dauphin de France. Jacques, un peu plus jeune que Gaucher, fut
grand-veneur de France. Avec de telles recommandations, François de
Dinteville, leur frère cadet, ne manqua point de revenus ecclésiastiques. Il
ajouta à la cure de Ricey, diocèse de Langres, et au prieuré de Choisy,
diocèse de Meaux , outre des canonicats dans les églises d'Âutun , de
Beaune et de Dijon, Tabbaye de Chàtillon- sur -Seine et celle de
Montier-en-Der , dont il jouissoit au moins dès Tan i507. Il fut fait
évéque de Sisteron en i508. Deux ans après, le siège d'Âutun étant
venu à vaquer, le Chapitre le demanda pour prélat. Mais Louis XII
le pria de céder son droit à Jacques Hurault; ce qu'il accorda très-
volontiers. Il n'en fut pas de même pour l'évêché d'Àuxerre. Jean
Baillet ayant laissé le siège épiscopal vacant au mois de novembre i515,
les chanoines, assemblés le 5 décembre suivant, indiquèrent le
lundi 50 janvier pour l'élection , et en donnèrent avis par Philippe
Gaveau, curé de Levis, aux confrères absents, qui étoient au nombre de
plus de vingt. On ignore si tous se rendirent au jour désigné; mais le
choix de l'assemblée tomba sur l'évéque de Sisteron (1). Ce fut la der-
nière élection. Le règne de François I®', qui suivit de près, apporta du
changement dans la manière de créer les évoques du royaume (a). Cela
(1) Il est oommé dons les registres da Vatican aa 6 mars 1513.
(a) Le changement s'étendit aussi au régime des monastères qui furent donnés en
commande h des fils de grandes maisons, au lieu d'être, suivant les règles canoni -
ques, gouvernés par des abbés élus par les moines.
Les abbayes du diocèse d'Auxerre subirent le sort commun. Les plus illustres,
comme celles de Saint-Germain d'Auxerre et de Pontigny échurent à des cardinaux,
h des évéques; les autres furent données à titre de bénéfice aux aumôniers du roi,
ou à d*autres ecclésiastiques qui ne résidaient pas la plupart du temps dans
leur monastère.
Il advint de là que les moines étaient gouvernés par un prieur qu'ils élisaient*
L'abbé payait aux moines une pension proportionnée à leur nombre, et souvent son
fermier ou son procureur faisait languir les pauvres frères. De là dos débats, des
1513 k 1580.
i08 FBANÇOIS DE DIlfTBVILLE, PREMIEa DU NOM,
1513 ï r>3o. ^^ ^^^ aacuD changemeot dans la manière de gouverner les retenus
de Tévéché^ le si^e vacant. Dans celle-ci, le Chapitre fut encore
maintenu à les régir, et Tévéché d'Âuxerre déclaré exempt de la régale
par arrêt du parlement du 25 mars 1515.
François de Dinteville, acceptant sa nomination h Tévéché d'Âuxerre
qui étoit d'un revenu considérable, ne conserva, de tous ses bénéfices,
que l'abbaye de Montier-en-Der. Il fit toute la diligence possible pour
se rendre au plus lot à Auxerre, parce qu'il fut informé que sa présence
étoit nécessaire , pour empêcher les gens de guerre d'endommager les
biens de l'évêché. Au commencement du printemps il vint demeurer à
Auxerre , sans y faire d'abord son entrée solennelle. Louis XII avoit
écrit au Chapitre, qu'on trouvât bon qu'il demeurât dans son palais
épiscopal avant cette cérémonie; et le 5 mai i 51 4 il donna lui même
acte comme il ne prétendoit point déroger à la louable et ancienne
coutume, selon laquelle les nouveaux évêques ne peuvent demeurer à
la ville avant la veille de leur joyeuse réception, reconnoissant que par
grâce les chanoines le dispensoient de cette loi , sans tirer â consé-
quence. L'année cependant ne s'écoula point sans la cérémonie
accoutumée. Le 17 décembre 1514, il fut reçu â l'abbaye de Saint-
Germain par l'abbé François de Beaujeu; et le lendemain il fit son entrée
solennelle dans la cathédrale, assisté de François de la Rivière bailli
du Donzios, comme représentant Françoise d'Albret , duchesse de
Brabant, obligée, sous deux chefs, â porter l'évêque, savoir pour la
baronnie de Donzy et pour celle de Saint-Verain. A l'égard du serment
dû â l'église de Sens, il s'en étoit acquitté dès le cinquième du même
mois entre les maïus du vicaire-général de l'archevêque Tristan de
Salazar, alors absent.
Il n'est pas parvenu jusqu'à nous beaucoup d'actes concernant la
police extérieure du diocèse. Nous savons seulement que, dès le troisième
avril suivant, il donna une ordonnance contre l'abbesse et les religieuses
procès interminables. Pour y couper court, les biens des monastères furent par-
tagés en manse abbatiale et en manse conventuelle, et chaque partie les administra
à sa guise.
Il est à remarquer que les abbayes de femmes ne furent pas soumises à la com-
mande, quoique les titulaires fussent aussi nommées par le roi. (N. d. E.)
QUATRE-VINGT-ONZIÈME ÉVÊQUE d'aUXBRRE. 109
de Saiot-Julien-lès-Âuxerre (1), par laquelle il leur eojoigDoit non-
seulement de ne point sortir de leur clôture sans permission , mais de
n'admettre dans l'intérieur de leur maison que leur médecin, et de
veiller mieux qu'elles ne faisoient sur leur temporel (a). Je ne marquerai
pas les réparations faites par François de Dinteville dans Tabbaye de
Montier-en-Der où les guerres avoieut tout détruit, et dans le château
de Sommevoire qu'il rendit semblable à une forteresse ; je passe égale-
ment sous silence celles qu'il fit dans l'abbaye de Chàtillon- sur-Seine
qu'il avoit eu en 1495 par résignation de Guillaume du Bois, abbé
régulier, moyennant une pension assignée sur le domaine de Chaumes.
Dans l'auteur de sa vie, on peut voir ce détail, qui ne regarde point
son église. Il nous suffit de rapporter ce qu'il fit pour le bien de son
évéché. Il songea donc d'abord a réparer entièrement les maisons épis-
copales de Varzy et de Régennes. Il éleva , dans cette dernière , une
tour considérable et rebâtit à neuf le corps du logis avec une galerie
magnifique. C'est avec raison qu'on a vanté les ornements que François
de Dinteville donna à son église cathédrale. Ils éclatoient en or et en
pierreries, et certainement aucune église de France n'en avoit alors
de plus beaux (2). Ils furent depuis la proie des calvinistes (5). Les
orgues qu'il fit construire proche la grande porte de Téglise coûtèrent
1518 k 1580.
(1) Ex autographo in SchcedU S. Martini
a Campis,
(2^ Si ce D'est peut-être la Sainte-Cha-
pelle de Boarges.
(5) Les hagnenota s'emparèrent du tré-
sor de la cathédrale eu 1567; on fat assez
heureux pour racheter de leurs mains Tun
des somptueux parements d*autol qu*il avoit
donné avec quelques unes de ses chapes et
dalmatiques ; mais on n'a pas eu l'ayantage
de conserver ce parement inestimable; il
fut dérobé dans le dernier siècle; et les
chapes avec quelques dalmatiques ayant
paru à quelques chanoines hors d'usage,
ont élé vendues de notre temps à des Jtiiis
malgré les remontrances dequelques autres.
((f) Il arriva vers Tan 1622, dans cette abbaye, un événement extraordinaire que
nous a conservé une enquête de Tan 1580, relative au droit de justice de l'abbesse
dans le faubourg de Saint-Julien. L'abbesse, qui s'appelait Marguerite de Saigny,
fut chassée du monastère par M. de Dinteville^ aux ordonnances duquel elle avait
refusé d'obéir, et le prélat fit abattre Técusson de ses armes qu'on voyait auprès du
moulin de Saint-Martin. Mais bientôt après, six mois environ, l'abbesse fut ramenée
à Auxerre par 40 ou 80 Suisses, ses compatriotes, à la tête desquels était le corps
de justice de la ville.— Plusieurs des plus notables babitants étaient allés au-devant
jusqu'à Annay-la-Côte — Àrch. de V Tanne, fonds Saint-Julien. {N, d. E-)
110 nuaçois de DurreriLui, feexier du hom,
ua a uj». t»eaocoop. Les bogaeoots profiièreot depuis des tajaax et n'y lais-
sèrent qoe le boffet qui subsiste. Pour ce qui est du jubé, l'écrivain
de sa Tie n*a pas été si bieo fondé à le préconiser ; le goût de la
Doorelle slructore de ce temps-là ne mérite pas d'être suivi; outre ce
défaut doot on ne pouvoit pas répondre alors, il pèche essentiellement
en ce qu'il traverse toute la face du chœur (a). Il n*y avoit auparavant
qoe deux pupitres ou tribunes : Tun du côté gauche pour les épitres ,
leçons et répons*graduels^ et l'autre du côté droit pour l'évangile ;
cela n'offusquoit pas la vue. Pour soutenir la masse prodigieuse du
nouveau jubé, il fallut jeter de nouveaux fondements sur les deux
descentes qui conduisoient au chœur souterrain ; par la ont disparu
entièrement ces descentes qui étoient un des ornements de Féglise. On
croit que le jubé fut commencé en 1523 et qu'il fut continué en 1524,
selon le chiffre qui se voit à quelques colonnes pyramidales. Le portail
, de l'église du côté du septentrion, commencé cent ans auparavant
sous Philippe des Essarts et achevé sous M. Baillet, n'a voit plus besoin
que du vitrage» Le chantre, Tarchidiacre de Puisaye et deux autres
chanoines furent députés à la fin de Tannée 1527, le 6 avril (1), pour
en conférer avec l'évéque, et ayant réussi dans leur conférence, on
commença à y travailler au mois de mai suivant que Ton comptoit
1528. Ses armoiries, qui s'y voient en plusieurs endroits, sont une
preuve de sa libéralité. Sa sentence favorite étoit : Virtutis fartuna cornes ;
faisant connoltre par la, que s'il étoit riche, il essayoit de ne point mal
user de ses biens, et de ne chercher querelle à personne, mais à être
utile à tout le monde. On remarqua, en effet, que durant les quinze à
seize années de son épiscopat, il n'eut aucune contestation ni même la
moindre ombre de difficulté avec le Chapitre, ni avec aucun des cha*
(I) RegUt. Capil. 6. Apr, 1526 ; 8 mai 15i8.
(a) L'abbé Lebeuf apprécie avec le goût d'an vrai archéologue la disposition ma
lencontrcuse de ce jubé. On ne doit pas être étonne si ses confrères l'ont fuit dispa-
raître. — Le bon chanoine, auteur de la vie derévêquc, regardait ce jubé comme le
plus beau de France, et ajoutait : « Miro lapidum labulatA, raro artificioclegantique
VLL..U (N.d.N.)
QUATRE-YINGT-ONZIÈHE ÉVÊQUE d'aUXERRE. 111
noines eo particulier.il aima aussi beaucoup les citoyens, et se les attacha is^s ^ isao.
par le soin qu'il prit pour leurs intérêts. Il demeura plus d'un an à Paris
pour recommander au président Baillet, à Robert Thiboust et autres
conseillers de la cour, la cause des Â^uxerrois pour le bailliage transféré
à Villeneuve-le-Roi pendant que les ducs de Bourgogne jouissoient do
comté d'Âuxerre; et son crédit aida à procurer Tarrét de Tan 1525,
qui adjugea au bailliage d'Auxerre les pays d'entre les rivières d'Yonne
et de Loire, comme Donzy, Glamecy et les environs. Il se donna beau-
coup de mouvement en 1526 pour obtenir des foires à la ville (1), aussi
bien que le recouvrement de ce qui revenoit anciennement aux habitants
sur la vente du sel. Il fut aumônier ordinaire de Louis XII et de Fran-
çois I^'; ces deux rois le chérirent et le considérèrent. Pendant les
trois ou quatre mois qu'il passoit en cour, il avoit un Irain superbe, et
faisoit une dépense proportionnée à sa qualité; ce qui lui gagna Famitié
des princes, des seigneurs, et de tous les courtisans. Malgré ses
absences, l'hérésie de Luther qui vint à s'élever, ne trouva aucune entrée
dans son diocèse. Il assista exactement aux assemblées et aux conciles
provinciaux que tinrent les archevêques de Sens, Etienne Poncher
et Antoine Duprat. Il fut commis par le pape Léon X avec les évéques
de Paris et de Grenoble pour faire l'information de la vie et sainteté
de saint François de Paule (2). Presque toujours, un évêque inpartibu$
le soulagea dans les fonctions épiscopales. En 1520, c'étoit Philippe
Brunet, docteur en théologie, lequel fil le 10 mai de la même année la
dédicace de l'église de Saint-Bris. Deux ans après, c'étoit Jean, évêque
de Simm... qui dédia celle de Saint-Pierre de Toucy, le 15 juillet
1522, et en 1525, Pierre, évêque d'Ebron le suppléoit dans le minis-
tère épiscopal (5). Il eut pour vicaire-général et oiBcial, Guillaume
Chausson, licencié-ès-lois qu'il fit chanoine en 1525 et lecteur en
1528 (4). L'autre vicaire-général fut Pierre de Montjot aussi licencié-
es-lois et chanoine. Entre les personnes de marque qu'il fit chanoines
de son église, l'un des plus célèbres est le savant auxerrois Germain
(t) Compte de Laarent Barault, fol. 23.
(2) Prooés-yerlMl du 11 août 1557..
(5) Reg, u. JuL 1527.
(4) 15 maH 1538.
112 FRANÇOIS DE DUCTBVILtBf FftCMlEa DU NOM,
;8 % 1530. de Brie, plus connu sous le nom de Germanui Brixiui^ reçu en 151 5 (1).
La même année 1520 il donna à son neveu François de Dinteville (2)
une prébende qui vaquoit par la mort de Vincent Souef ; (5) et en
1527 une antre à Philippe de Courtenai , sousdiacre, bachelier en
droit (4). Sou neveu ne resta pas simple chanoine, il parvint à la dignité
de doyen; et, dès Tan 1527» il fut fait évèque de Riez où il ne résida
point ; il resta auprès de son oncle dont il étoit le conseil, et qui enfin
lui résigna son évéché. Dans Tun des voyages que notre évêque fit en
1526, François I*' l'admit à être présent au contrat de mariage d'Anne
de Montmorency et de Magdeleine de Savoie, fille de René de Savoie.
Dans une autre occasion, le même roi lui avoit donné la commission de
recevoir de sa part la somme de 50,000 livres que les Etats de*
Boui^ogne, comtés de Maconois, Âuxerrois, Chàtellenies de Bar-sur-
Seine et de Noyers , comté d'Auxonne, etc. lui avoient accordée pour
les francs fiefs et nouveaux acquêts de tous ces pays-là, de laquelle
somme les Âuxerrois dévoient payer 1,700 livres. On a tout lien
de croire que ce fut par ses sollicitations que François I*' , deman-
dant au clergé de Bourgogne des droits d'amortissement, h l'occasion
de la guerre contre le roi d'Angleterre, se contenta, pour tous les biens
ecclésiastiques du diocèse d'Auxerre , de la somme de 5,500 livres
par lettres domiées à Saint - Germain - en - Liaye, au mois d'octobre
1522 (5). Au reste, ce prélat, quoique souvent en cour, et faisant
grosse dépense , augmenta les revenus de son évéché. La douceur
qui lui étoit naturelle, et ses différentes occupations , ne lui firent pas
n^liger ses intérêts temporels. Ayant appris que l'ancienne tour et la
maison seignenriale de Toucy avoient été démolies par Aymar de Prie,
baron de ce lieu, pour y«bàtir un nouveau château, il fit comparoitre
par devant lui, à Auxerre, ce seigneur, afin de lui faire reconnoltre qu'il
tenoit ce château nouvellement édifié, aux mêmes conditions et charges
que ses prédécesseurs avoient tenu la grosse tour et le vieux château ,
c'est-à-dire, en fief de l'évêcbé d'Auxerre, et pour me servir des termes
(1) 19 Aug. 15^.
(3) Ex Computis Capit.
(3) Il résigna sa prébendo en 15S0 à
Jacques Joce. clerc.
(4) Reg. Cap. 1527., 27 Vanr.
(5) Voy. l(»8 Preuves, t iv. à Tan 1522,
i.
QUATRE-YINGT-ONZliMB ÉVÉQUE d'aUXERRB. 115
da droit, qu'il éioii juràble et rendableii Tévéque quand bon lui sembloit. ^^^3 ^ ^^po.
Cet acte du 20 juillet 1525 contient le reste des engagements des
barons de Toucy envers Tévêque qu'il seroit ennuyant de rapporter (1 )•
Aymar survécut peu à cet aveu ; mais Tévêque ayant exigé un pareil
acte de foi et hommage des enfants qui lui survécurent, il ne put refuser
le délai ou souffrance que demanda Marc de la Baulme, leur tuteur, et il
accorda du retard par acte du 1 4 mars 1 527 (a) .
Cet évêque à 66 ans fut atteint d'un dévoiement qui, par sa durée, le
conduisit au tombeau. Il sentit approcher sa fin le dimanche 24 avril
1550. Il s'y prépara ce jour-là par une confession générale de toute sa
vie, et par la réception de la sainte Eucharistie à la fin de la messe. Le "
mardi suivant, il réitéra la confession et la communion ; ensuite il fit
venir Louis Bride, son secrétaire, qui étoit notaire apostolique, Guil-
laume Chausson, son officiai, Jean le Foui, chanoine tortrier, son con-
fesseur, et il écrivit son testament qu'il fit signer par le notaire aposto-
lique. Il y demanda d'être inhumé sous le jubé de la cathédrale proche
l'autel de la Magdeleine, ou dans le chœur; ce qui prouve qu'il n'y avoit
point de caveau sous ce jubé, et qu'il fut construit depuis. Il demanda,
en second lieu, pour le repos de son âme, chaque année, douze services
k vigiles et grand'messe; il légua pour cela douze livres payables à
chacun de ces services, par son frère, Gauthier de Dinteville, seigneur
(1) Voy. les Preuves, t. iv, à Tan 15â3.
(a) Un compte de Tan 1817 nous révèle quelques usages de Téglise d'Auxerre que
nous allons rapporter, parce que cette pièce est l'unique de ce genre qui existe, aux
archives de F Yonne, sur révéché d^Auxerre. On y apprend que l'évéque faisait faire
quatre sermons par an, savoir : le jour des Gendres, au chœur de la cathédrale; le
dimanche des Rameaux, au cimetière de la Madeleine ; le Jeudi-Saint, dans le Cha-
pitre ; et le mardi 28 avril, jour du Synode, au chœur. Il payait cinq sous pour
chaque sermon aux Frères-Mendiants.
Le 30 avril, veille de la fête de Saint-Amatre, le Chapitre allait en procession dans
Péglise de ce saint, et en revenant de la cérémonie, au retour des matines, Tévéque
avait coutume de donner aux chanoines des gaUeUts pour la collation que faisait le
Ghaipitre, et six setiers de vin tant blanc que rouge.
A cette époque, le sucre était rare et cher. Il n*y en avait pas chei Tapothicaire
de révéque, et on en alla chercher 4 livres chei M. Charmoy, que l'on paya 4 gros
la livre, soit 26» 8*. [N. d. E.) * *
8 .. •:
- •
•
1513 ï 1530.
114 FRANÇOIS DE OINTEYILLB 1®' DC NOM,
de Polizy,6on seul et universel héritier. Il Tavoit établi exécuteur de ce
testament, avec son fils , François de Dinteville, qui devoit lui succéder
dans révêché (1). Ce prélat avoit gardé un certain nombre d'ornements
précieux, qu*il réservoit peut-être pour le besoin, au cas qu'il fût arrivé
quelque famine ou quelqu*autre adversité. Il l^ua alors le tout à sa
cathédrale, savoir : quatre chapes et le reste d'une pièce de drap d'or
pour un parement d'autel; il y ajouta sa chasuble, dalmatique« et tunique
de drap d'or; de plus deux tables ou parements d'autel de fin or en l'un
desquels étoit représenté 1 arbre de Jessé et en l'autre les saints
patriarches ; et il ne laissa k son successeur que l'ai^enterie de sa
' chapelle et ses ornements ordinaires (2). Le jeudi 28 du mois, il de*
manda l'extréme-onction ; mais on remit au lendemain matin. Son
neveu, le doyen, ne put lui conférer ce sacrement à cause de la douleur
dont il étoit saisi ; le chantre l'administra au malade, qui le reçut avec
une pleine et entière connoissance , répondant lui-même aux psaumes
et aux versets. Demandant alors pardon aux chanoines assemblés qui
fondoient en larmes, il leur dit adieu et se recommanda à leurs prières.
Depuis ce moment, il resta toujours dans l'attente de l'heure du Seigneur
et lui rendit son âme le même jour 29 avril, un peu avant quatre heures
du soir. Son neveu prit le soin des funérailles qui furent magnifiques.
Il fut inhumé sous le jubé k l'endroit qu'il avoit désigné. Il y avoit dix-
huit ans qu'il reposoit en ce lieu, lorsque ce neveu, songeant à sa propre
sépulture, crut devoir faire lever les os de son oncle, et construire en cet
endroit un caveau pour les mettre et y être inhumé un jour auprès de
lai. Il fit dresser dans l'enfoncement sous le jubé un très-beau mausolée
de marbre blanc (a) , qui représentoit le défunt couché et revêtu d'habits
pontificaux, avec ces deux vers :
Nobilitas, virtus, et magnificentia tecam
Hic, Francisée, jacent; hœc cœlo munia digna.
MDXLVm.
.•
(1) Bx e/M UstamenÊo.
{%) Par oe tettameot» Il ordonna dot an-
mônes poor tes lacobiof Cordelien, bôpi-
taox de la Ifagdeleiaa et de Saint^Pierre.
(a) Le texte du Gesla ne dit pas tout-à-fait ce que rapporte Tabbé Lebeof, au sujet
de ce tombeau : « Nobile mansolcom marmorea ejus effigie venustatum, magna om-
« ninm admiratione scuipi, flngi, pingi jussit. » [N. d. E.)
'«
* '.
QUATRE-VINGT- ONZIÈME ÉVÉQCE D*AUXERRE. 115
Lorsqu'on ouvrit ce caveau, le 16 septembre 1730, pour y placer le 1513 ^ i.,3o.
corps de M. deBrpc, évêque, et celui de sa sœur, on y trouva les osse-
ments de ces deux évêques ramassés tout au fond en un las avec deux
planches dressées à côté. On croit que leurs ossements avoient été mis
ainli, sans ordre, lorsque la ville étant délivrée des huguenots on
reboucha toutes les ouvertures qu'ils avoient faites, ou vers Tan 1690
lorsqu'on renouvelant le pavé de la nef, il fallut fortifier l'entrée de ce
caveau. Y étant descendu, j'y reconnus les ossements de deux corps dif-
férents! et de deux différentes couleurs. Comme le corps de celui dont
je viens de parler avoit été dans la terre pendant dix-huit ans, ses osse-
ments étoient de couleur jaune pâle et passée ; mais ceux du neveu paru-
rent d'un jaune plus foncé et tirant sur le brun. Je ne crois pas qu'il
soit besoin de faire remarquer que le buste où l'oncle est représenté
vers l'angle du jubé, entre la figure de saint Aunaire et celle de saint
Vigile, ne peut être de ce temps, ni d'une sculpture que le neveu eût
ordonnée ; sans doute, c'est une figure substituée à celle que les calvi-
nistes avoient rompue ou mutilée. C'est lui ou son neveu que l'on voit
représenté dans un vitrage de la collégiale de Montmorency au diocèse
de Paris, dans l'aile gauche. Apparemment que les Dinteville firent du
bien à cette église.
Le fameux Rabelais a fait entrer dans sa satyre le prélat son con-
temporain (1), dont je viens de rapporter les actions; et après avoir
dit de ce noble pontife qu'il aimoit le bon vin, il avance des paradoxes
contre toute vraisemblance. Il ne seroit point étonnant que ce prélat
voulant plaisanter sur la simplicité des paysans, eût dit k Paris ou
ailleurs, où il faisoit boire libéralement de son excellent vin de Migraine,
que si l'on vouloit croire les vignerons, il faudroit transférer entre Noël
et l'Epiphanie les fêtes de saint Georges, saint Marc, etc. où les vignes
«sont souvent gelées, et mettre en leur place sur la fin d'avril, et au
commencement de mai celles de saint GhristO[^e, saint Laurent, l'As-
somption. Mais jamais on ne pourra persuader que cet évéque ait eu
sérieusement intention de parler de la sorte. Aussi l'auteur des notes
sur l'édition de 1711 , qui voudroitnous le faire accroire, se trompe-t-il
(1) Tome lu, p. 180, édit. 1711.
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110 f-ÈèSCMii 2€ ycrrv'JLUi :i ftr son
d**l/e ^^/rtsiÀ . !♦ fi 'li' w T'otoitu». '^ni 4'Kpi(iiani^ ; r^U n'est
p>rirt vr«j. f^'^ ^i«t *A ^ ^!tKi !IM> fr:ïn^'>iA f i^nt 4e Thef^phnnia, terme
Ml^ ^«^ ^^ afu»4MA .i'-reu .iinr;;:qae4 'le Fraoee ; 2** Il «appose, saos
pre««>« c%e !e p^no"^ « '^( utn «^«inie ^ eetie Tifhame^ et qoe notre
préi»! %'i **t \«'mo^. Mmm«» e j)<»nple. « Tant ^loit hakil , dit-il , on
* hh^, ^44 pAivrant. su-iiini imlMimafienr â home p^ior le rof Fran-
9 */À\ y^x^^^. » lî «(«wiei^ .iii-mArme visiUement dans Terreor, lorsque
pMPf t^ fMky^jfer 'tamnti^ «1^. ia prétendue ignorance de François de
iM^^jie , /. 4i€ ^M fut amtiaiHadeiir à Itome (Kiur François I^, ce
^ eu imt. ^JM *A wh fur point Ini, mais son neveu ; et ce nevea ne
mmnf. y^jtA a fcwiw ni wi* U, régne de François !•', mais à Régenoes
firv^ km^TSK t^Mw 1* r'S'gn^, de Henri II. En sorte qu'on peat dire
^%K -se:* «u arnrtMi^. «me ignorance grr>ssière k un prébt recomman-
4^>t. W M^-^i^iM nr/MH an quatre liévues insupportables en deux ou
trvn 'iéfM^ ^ .
ijsrni ^ witoir^rnnt d'amples instructions sur les Dinleville, peu-
%éM \ftH *A q»>n raçporfe le P. Anselme au Cha|Mlre des grands
f%kMjin% m rir^RviLLE ii« du Ntm« \ah èvêque dauxerre.
irA$ vM. On nail d^ja ee que François A^ Uiiil«»villt\ second du nom, étoit à
r^rd do premier qui a porti^ lo mMt^ nom (!)• Celui-ci l'avoit fait
^a, fht f.//mpr#rnd PindignuMoH (ti« VikUh^ l.ohfuf contre Rabelais; mais le curé de
Meoil/^^ ttmU^poTMin de IYti^i|HH \\^ IMiitoville» devait saToir quelque chose de ce
qu'il «V4nc»it. ^ Si Ton pouvAll u^MAidiir une note prise dans Tunique compte de
Vé^wHhé qne Von possède ri ^\\\ ««■! «!«* VtiW i5t7» comme Tenant à Tappui de cette
p//fA(«, nom Mpportiinons qui» Uvil^(|Uo aohota alors doute muids de Tin dlrancy au
eefler i^ d^ Hï»int-rf^rm«ln, i*l i|ii*ll ^^* ^^^ conduire i sa maison de Paris aTec 46
«ol/«s m«f44 ^é fin dont U i|UkIIIi^ u'c>>( P** «p<kill^. Et tandis qu'il payait le Tîn
^Unntj 7 rftf^fi \t muid, Il niI««*UII Aw tIh de Variy pour les rcdeTancos des se-
m/m^^9 dAf f l^«nAin«!S. Il rnviili> itUul ii Itt^grmics 7 rcuillcttct de vin dWuxerrc et
d Unntj Auk. 4$ t Vo»iiiii, r|^|«|l« lililor. {S. d. E)
QUATRE-VINGT-DOUZIÈME ÉVÉQUB d'aUXBRRE. 117
chanoine de la cathédrale d'Âuxerre , lorsqu'il n'étoit encore âgé que ^^ ^ ^^^
de 22 ans, s'il est vrai» comme le P. Anselme l'assure, qu'il fût né le
26 juillet 1498. Il n*y a pas d'apparence qu'il eût alors fini ses études ;
car l'aitteur de sa vie qui nous apprend qu'il étoit fils de Gaucher de
Dinteville, bailli de Troyes, et d*Ânne du Plessis qu'il lui plait d'appeler
en latin a placida sede, marque qu'après des études de grammaire dans
la ville ée Troyes, on l'envoya à Paris au collège de Navarre pour con-
tinuer se» classes; qu'ensuite à Poitiers et à Padoue, il apprit le droit
civil et canon, et que, retourné en France avec des témoignages de
bonne conduite , il fut si bien venu auprès de Louise de Savoie» mère
de François P', qu'elle le choisit pour son chapelain et son aumônier.
Il possédoit, avec ce poste honorable, trois bénéfices, dont deux avoieat
déjà été tenus par son oncle, savoir : la cure de Ricey et le prieuré de
Ghoisy. La princesse lui procura de plus la trésorerie de Poitiers, dignité
très-considérable. L'évôché de Riez étant venu à vaquer en 1526 , le
roi l'y nomma. Le pape, qui vouloit en gratifier un autre, différa de
confirmer cette nomination, mais le roi persista et écrivit au comte de
Gharny, son ambassadeur, de faire expédier des bulles pour François de
Dinteville, trésorier de Poitiers. Il est resté une minute de lettre où le
roi se plaint de ce que le pape alloit contre le concordat (1). François
de Dinteville prit possession de l'évôché de Riez le 7 juillet 1 527, suivant
un catalogue latin des évéques de ce siège, imprimé à Marseille en
1728. Gependant, les auteurs du nouveau Gcdlia Christiana écrivent que
le 5 août de l'an 1527, il n'est qualifié qu'élu évéque de Riez. Quoiqu'il
en soit, il n'étoit pas encore doyen d'Auxerre comme sembleroit l'insi-
nuer le Gallia Christiana. Jean Sauljot, doyen de cette église, étant
mort en 1528, il résolut, en acceptant ce bénéfice, de le desservir
plutôt que l'évéché de Riez qu'il laissa administrer par des vicaires-
généraux , afin de rester auprès de son oncle , et de Taider dans les
fonctions pastorales en qualité de suffragant. Gela engagea l'oncle à se
démettre entièrement de l'évéché en sa faveur quelque temps avant sa
mort, et à lui résigner l'abbaye de Montier-en-Der. A peine eut-il cette
(I) Cod, Beihun. Bibf. reg. 85G3, fol. 8.
118 FRANÇOIS DE DINTE VILLE II DU NOM,
(530 à 1554. ûbbaye, qu'il y fit venir de bons religieux pour la réformer. Mais comme
le revenu en étoit considérable , les ennemis qui lui furent suscités
Tobligèrent de s^en défaire après quelques années , et de la permuter
pour celles de Moutier-Ramé et de Moutier-la-^lle proche Troyes.
François de Dinteville, après la mort de son onne, resta peu à Auxerre.
Le roi François I^', connoissant la capacité et la probité du nouvel
évéque (1), l'envoya k Rome vers Clément YII, enqualitéd'ambaisadeur,
de sorte qu'il ne put faire son entrée solennelle qu'au retour de cette
ambassade qui dura environ trois ans (2). Il ne partit cependant qu'au
mois de juillet 1551, après avoir terminé une afiaire où sa réputation
avoit été intéressée (5). Mais quoiqu'il ne fût pas encore sur la route
de Rome en 1550 au mois d'octobre , il étoit absent de son diocèse.
Cela se prouve par deux commissions que Guillaume Chausson, vicaire-
général, donna k Philibert deBeaujeu, évéque de Bethléem, l'une, le
27 septembre, pour réconcilier l'église de Saint-Eusèbe d' Auxerre
pollue par effusion de sang (4), avec le pouvoir d'y conférer la prêtrise
à deux diacres étrangers : l'autre, le 2 octobre, pour réconcilier le cime-
tière de l'église de Bréteau, qui avoit été pollue de la même manière (5).
n n'y avoit qu'un mois au plus qu'il étoit arrivé à Rome, lorsque sa vilU
épiscopale fut affligée de peste. L'évéque de Bethléem lui en donna avis
par une lettre du 14 septembre, et lui offrit ses services (6). François
de Dinteville avoit mené avec lui, dans son ambassade, Pierre Chaste-
]ain, que quelques-uns appellent CasteUan on du Châtel, en qualité de
son homme de lettres (7), et il s'en servit pendant quelque temps. On
peut voir dans les Mélanges historiques recueillis par Nicolas Camuzat,
chanoine de Troyes, et imprimé en 1609, de combien d'affaires diffé-
rentes notre évéque fut chargé. Ce volume contient les lettres que le
roi, les prélats et seigneurs, les ambassadeurs de Venise et de l'empereur
lui écrivirent en 1551 et 1552, avec quelques-unes des réponses qu'i^
leur fit ou qu'il écrivit à d'autres. Il se trouve de ces pièces à la Biblio-
(1) 11 a cette qualité dans les registres do
YaUcan , aa 4 mai 1 530.
(S) Mém. de Camuzat, part, ii, fol. 34.
(3)M>deM Dupuj, coté 702.
(4) Ex ttter. Manuali Bretel
(6) Ex autvifrapho.
(7) Bayles verbo CasUUan, ex vUà P. Coi-
Ullani per Gallandiitm»
QUATRE-VINGT-DOUZIÈME ÉVÊQUE d'aUXBRRE. 119
thèqae du roi parmi les manuscrits de Béthune. Le chanoine, auteur de ^ao >, 1354.
sa vie, fait valoir particulièrement le traité de mariage quMl fit du
dauphin Henri, fils de François I®', avec Catherine de Médicis, nièce du
pape ; et il ajoute oette circonstance honorable, qu'un jour comme
notre prélat demandoli au pape le chapeau de cardinal pour quelques
François, le pape, admirant son éloquence, sa modestie et sa candeur,
lui dit, c qu'il lui convenoit bien plutôt de le demander pour lui-même
c qui étoit connu, que pour des absents que Ton ne connoissoit pas;
o à quoi il répondit : qu'il n'étoit pas venu pour ses propres affaires,
€ mais pour celles de son prince ; qu'en qualité d'ambassadeur il ne
€ se regarde! t pas comme personne privée, mais comme personne
a publique, et qu'il n'ambitionnok pour soi aucun des honneurs qu'il
« demandoit pour les autres. » On peut compter parmi les négociations
importantes qu'il eut à finir à Rome (1), la sécularisation de l'abbaye de
Yézelay qu'il obtint sous prétexte qu'on alloit y ériger un évéché ;
Texécution du concordat fai^^ ^us Léon X ; le renvoi de l'affaire du
mariage du roi d'Angleterre Henri YIU hors de la cour de Rome (2);
et la demande qu'il fut chargé de faire au nom du roi, pour qu'il fÙt
permis à Louis de Husson, évèquede Poitiers, sous-diacre (5), de se
marier afin de soutenir sa famille. Parmi les minutes des lettres que le
roi lui écrivit en 1551 (4), il y en a une écrite de la MeiUeraye, le
25 janvier, qui montre que cet évéque se comportoit k la cour de Rome
en bon François, et qu'il étoit bien instruit jusqu'où s'étendent les pou-
voirs de la puissance ecclésiastique. François I®' le loue d'avoir trouvé
mauvais qu'on eût excommunié Jean, roi de Hongrie; et de ce que,
sans l'avoir ouï ni donné audience à ses gens» il eût été en plein con-
sistoire privé de son royaume, excominunié et chassé de l'église^
c ce qui est, dit le roi, une injure et fortfait si grand et si éloigné de
« raison, qu^l n'y a prince sous le ciel, de quelque qualité qu'il soit,
c qui sçeut ne voulsist souffrir cela. » Un an après, il reçut une lettre
de M. de Montmorency, grand-maltre, et de M. du Bellay, évéque de
(1) Mém. de Gamuzat, fol. 35. | (3) GaU. ch, nova in Bp. Pictav.
(2) IM. fol. 63 et 172. I (4) Cod. Beihun. 8616.
ihm M iit4
^t^i ¥Hhni)iiîik un iifNTKviixic ii bu nom,
HiijfdfirM» (I), ofi 011 lui ififtrqiioii i\\n\ irauroil |mii Au laiiicr passer l'am-
|ifi««rt(loiir ili« rimliniiiHl, roi do» Hofiiuiii» avant luh quoique le i)ape eût
i^oMiMiNiMlit II oDl amliHuaailour do prtirOdor colui do Franco. On y ajoute
i|Mo « ni lo |ia|io vout onooro fuiro oollo lionte au roy, il lui fora reaaentir
■ do lollo t^\}m , qu*il lumnollra qu'un pape n*o»t pour donner loix
a MO ftili'o lioMlo h un roy do Franco ; u niaia qu'lioureuaemont le roi
M*M |iaa M Informai do ool liviinouiont. Il ^ a ap|uircnoe que ces dernières
loili'o» 110 hiroMi point onvoy^oa h Franvoia do Dintovillo; dàs le mois
do Jiuivlori lo hd revoit rappoli^^ ol avoit ortlonnd k deux cardinaux de
loaloi h \\\\\m on aa plaoo« C/oat co qu'on apprt^nd de la lettre que
(lIOMiont Vil liorUil do IUiuKi)ino h François l*% lo 8 ASvrier lf(55 selon
lo otilouldo UoniOi ol \K^t aolon colui do France (2). Lo pape y
001 tlllo au H\\ quM a toujours reconnu dans son açj^asadeur qui re-
toumoi un tr^a (irand lèlo pour le service de la Fraiiiê. Mais François
do Diotovillo avoit 6{A desservi auprès du prince, ainsi que la suite le
fora voir. ; *
Mon diooèiio Tattondoit avec empressement. Les chanoines de la ca-
thédrale ayant su qu'il devoit faire son entrée le dimanche quatrième
mai (5), et quMI apportoit un jubilé, remirent leur chapitre général an
huitième du mois. Ils transférèrent pour la même raison la fête de sainte
Hélène , qui alors se faisoit le 4 mai de rit double. Malheureusement
personne n'écrivit les circonstances de cette cintrée; on ne s'étoit pas trompé
dans Tattente d*on jubilé. Le vendredi 50 mai, Louis Bride, chanoine,
son secrétaire, apporta la bulle de ce jubilé (4) et d'autres indulgences
qu'il avoit obtenues du pape, pour la veille et le jour de TAssomption
et qui dévoient durer ces deux jours pendant la vie de Tévèque ; des
chanoines furent députés» au mois de janvier suivant, pour le remercier
à Régennes. Il doit paroitre extraordinaire qu'on eût tant attendu. Mais
certains Mémoires , restés autrefois dans le château de Yarzy, nous ont
appris qu'il fut en difiBculté avec le Chapitre, peu de temps après son
arrivée , en ce qu'il voulut officier et qu'effectivement il officia sans
(t) Cod. BethUH> 9368, fol. 3S. Lettres de
Dieppe, da i7 Janv. et 9 fé? . 153Î.
(t) Foy. les Preofei.
(3) 1533.
(4) Hig. Cap,, 30 maU i533 et ^Zj<mMar.
a
ÛUATRB-YINGT-DOUZIÈME ÉVÊQUB D*AUXERRB. 121
avoir de bulles. Cette diiSculté terminée, il communiqua au Chapitre, i^i 1554.
le mois suivant , le dessein qu'il avoit de réparer ses maisons épisco-
pales, tani celle de Paris que celle d*Auxerre, et le château de Régen-
nés ; il requit la compagnie, par l'organe de son secrétaire ci-dessus
nommé, de le gratifier de quelques arpents de bois. Les chanoines lui
accordèrent d'en faire couper trois dans leur forêt de Merry , en quel
endroit îKvoudroit (1); et pour marque d'une paix entière, ils s'en rap-
portèrent à lui, après Pâques, sur les difficultés qu'ils avoient avec le
trésorier. Il en survint une assez nouvelle , lorsqu'il fallut donner un
successeur à Jean le Roi, chantre, mort le il janvier 1554 (2). Il y
eut dès le 5 février de si grandes difficultés sur l'élection du nouveau
chantre, que le Chapitre résolut de les communiquer au prélat, et même
ii son conseil. L'embarras, venoit de ce que le roi , en vertu des induits
à lui accordés par le pape , avoit nommé Jean Coqueré autrement dit
Baron. Les droits de Tévêque et du Chapitre y étant lésés , on ne se
pressa point d'entrer dans Itl. vues du prince ; Tévêque en reçut une
lettre de reproches , datée de Saint-Germain-en-Laye, le 26 février
1554. Il la communiqua au Chapitre le 10 mars. La compagnie en
avoit reçu de pareilles qui tendoient à faire élire ce chanoine appelé
Baron, en cas d'élection. Le lundi 5 avril, lendemain de la Quasimodo,
indiqué pour l'élection, on conclut de remettre la nomination entre les
mains de l'évêque, avec protestation de continuer dans le droit qu'on
avoit d'élire, toutes les autres fois que le cas y écherroit. Tous les cha-
noines furent de cet avis, excepté Laurent Bretel qui crut qu'il valoit
mieux renvoyer la nomination, pour cette fois, au cardinal-légat Antoine
Duprat, archevêque de Sens. Il n'a pas été possible de découvrir quel
train prit cette épineuse affaire, sinon que Jean Baron qui éloit vicaire-
général, et Louis Bride, avoient chacun des provisions, et que le pre-
mier permuta avec Ârnoul Gonthier, chanoine, déjà pourvu de plusieurs
autres bénéfices ; en vertu de quoi Ârnoul Gonthier fut reçu à la dignité
de chantre, le 10 janvier 1555, nonobstant les oppositions de Pierre
Magnen et d'Innocent le Caron, chanoines. Le nouvel évêque d'Âuxerre
différa beaucoup, et peut-être plus qu'aucun de ses prédécesseurs, à
(I) Reg. Cap.; 23 febr. 1533. 1 {% Bcg 1554, 9 apr. et 15 molî.
uao \ is&L
124 FRANÇOIS DB DINTBYILLB II DU ROM,
ritalien eût fait à Lyon amende honorable pour cette fausse accusation,
on conserfa de fâcheux soupçons contre Gaucher de Dinteville, sod
autre frère, seigneur de Vanlay. François, qui avoil des ennemis à la
cour, se vit enveloppé dans la disgrâce de ce frère le plus jeune ; v
crut devoir quitter le royaume un peu après lui, au commencement de
Tannée i 559, et se retira en Italie, où il s*étoit formé des connoissaoces
pendant son ambassade. Les trois frères se trouvèrent ainsi réunis en
Italie , mais ils ne purent être admis à rester dans les terres qu'y avoit
l'empereur, ni chez les Vénitiens, non plus que dans les duchéi? de
Hantoue et de Ferrare, quoique Tévèque eût des amis parmi les Vé-
nitiens. Ils furent donc obligés de se retirer sur les terres du pa|)e (1) ,
que le roi n'avoit pas intéressé dans cette affaire. L*évéque y fut bieo
reçu. Le pape Paul III lui donna audience en présence de Tainbassa-
deur de France. L'évéque exposa les motifs de son voyage de manière
à se justifier. On n'eut garde d'en faire rapport au roi, de crainte de
le brouiller avec le pape. Mais enfin ce prince connut la vérité. Il fat
informé non-seulement que Tévéque d'Auxerre avoit été favorablement
reçu du pape et de plusieurs cardinaux; il apprit aussi, avec le temps^
que ce prélat étoit innocent. Cependant aussitôt après le départ de
cet évéque , on avoit saisi tout son temporel y ses meubles et ses
fonds, tant ecclésiastiques que patrimoniaux ; des commissaires avoient
été nommés pour la régie du revenu de ses bénéfices (2). Pierre de
Hareuil» autrement dit de Montmoreau, évèque de Lavaur, déclaré admi*
nistrateur de Tévéché d'Âuxerre, expédia en cette qualité des provisioos
de bénéfices (3). François de Dinteville, rappelé par ordre du roi, revint
en France pendant l'été de Tan 1542. Il se rendit d'abord en Cham-
pagne pour voir ses deux abbayes de Moutier-la-Celle et Moutier-Ramé.
Informé que l'évéque de Lavaur ne vouloit point lui rendre la jouis*
sance de l'évéché d'Auxerre, ni ces deux abbayes, a moins qu*il ne
lui cédât l'abbaye de Moutier-la-Celle, il fit,à Joinville, Ie2G juin, une
protestation, pardevant deux notaires, contre cet évéque, par continua-
(1) Lettre de M. Gri^nac, amb. da roi à
Rome, aa conoélable, du SI oclob. 1539.
Mém. de Ribier, t i, p. 479.
(2) Reg. CapU. 15G4, in Recept. Martini
fiouiseau, archid.
[%) Reg. Cap. i^¥), 1511.
QUATRE-V1NGT>-D0UZIÈME ÉVÊQUE d' AUX ERRE. 125
lion d/^ celles quMl avoit déjà faites sur le même sujet en partant (1).
M. Bouchard, maître des requêtes, et le trésorier de Bretagne (2), se-
crétaire de Tamiral, s*étoient chargés de traiter cette affaire. Il déclara
que s'il consentoit à un accord, c'étoit comme forcé et contraint, et
pour obtenir la main-levée de ses bénéfices. Quelques jours après il eut
main-levée de tout son temporel (5). Le roi adressa Ik-dessus des
lettres aux baillis d'Âuxerreet de Troyes, datées de Monstier-sur-Saulx,
le 28 juin, par lesquelles ce prince le recevoit dans ses bonnes grâces,
et déclaroit vouloir en donner des preuves : « espérant, dit le roi, qu'il
1» fera pour par cy-après nous faire d'aussi bons services , qu'il nous a
» fait par le passé es lieux et endroits où nous Tavons employé (4). >
Le clergé et le peuple attendoient son retour avec impatience. Lorsque les
chanoines de la cathédrale furent avertis qu'il avoit dessein de rentrer
à Auxerre, ils conclurent, le samedi huitième juillet, de faire une pro-
cession générale pour remercier Dieu de ce que l'innocence du prélat
avoit été pleinement reconnue. Il ne voulut cependant pas rentrer avec
éclat ; et pour éviter les acclamations , il n'arriva à la ville que sur les
dix heures du soir, le dimanche 16 juillet, après trois ans et demi on
environ d'un exil volontaire. Le lendemain, durant tonte la journée, il
reçut les compliments. Les chanoines célébrèrent ce jour comme celui
ir.30 \ 1554.
(1) Promptuar. Tricass., foU 25.
(2) Palamédes GonUer.
(3) On Toit par les plaidoyers de cette
affaire, parmi les Mu de M. Dupuy, Cod.
702, qu*eUe n'étoit pas encore terminée en
1547 (a).
(4) Jbid. fol 26.
(a) Les plaintes de Févêqne d' Auxerre contre celui de Lavaur montrent que ce
dernier n*avait pas tenu la conduite que lui commandait son caractère, lors de la
•Saisie du temporel de M. de DinteviUe. On voit dans un Mémoire en réintégraiide
de Fan 1547 (M» Dupuy, f<» 124), où Tévéque récuse des témoins, «que M>^<' d'£s-
» tampes a eu part au butin, comme le porte une lettre au procès. Elle a heu partye
» de la chapelle dudit demandeur qu'elle retient encores, assavoir ung reliquaire
» d*OT garni de pierres précieuses, ung aultre d'argent doré garni de semblables
M pierres, ung aultre reliquaire d'argent esmaillé de bleu, auquel y a une longue et
» grande pierre appelée lapis-lazzuli, entaillé des mystères de la Passion. »
En 1548, le procès continue pour la restitution de Tabbaye de Moutier-la-Celle,
extorquée parVéTèque de Lavaur, ainsi que pour les revenusde révéché. {N. d.S.)
122 FRANÇOIS DB DINTETILLB II DU MOM,
1580 ï 1554. prêter le serment à Téglise de Sens ; encore n'alla-t-ii pas en personne
rendre ce devoir. Il chargea de sa procuration Florent de la Barre,
doyen, le même jour que Louis de Bourbon se fit recevoir à Sens, en
place du cardinal Duprat, le 22 janvier 1555, suivant le calcul de
France. Le doyen, délégué , se rendit a Sens , et fit la soumission au
délégué de l'archevêque Tan 1556.
François de Dinteville tint ses synodes régulièrement , il y fit des
statuts dont le recueil, publié sur la fin de ses jours, a été très estimé ;
il dressa des règlements, en particulier l'an 1556, pour la collégiale de
Saint-Martin de Glamecy. La même année on imprima à Paris le Ma-
nuel d^t prêtres^ selon l'usage de l'église d'Âuxerre. Ce livre contient
l'administration des sacrements qui sont de la compétence des prêtres,
les bénédictions qui sont de leur ministère, la formule des inhumations
et autres semblables usages des Chapitres ou des paroisses ; c'est la
première édition de ce manuel (1). Ces sortes de livres ont aujourd'hui
le nom de rituel. L'année suivante fut imprimé le processionnel ; on
croit qu'il parut pour la première fois k une célèbre procession générale,
qui se fit au commencement «de mai par tout le clergé en chapes, le
prélat à la tête. Dans la chaleur de ces éditions se fit celle du Missel
d'Auxerre, la plus belle qu'on eût vue jusqu'alors : le calendrier contient
des fêtes inconnues dans la cathédrale avant l'an 1555. On lit dans
les registres du Chapitre, que le prélat en fit présent le 28 février 1558.
11 avoit établi dès l'an 1 551 , lors de son ambassade k Rome , Filbert
de Beaujeu, évêque de Bethléem, pour son sufiragant quant aux fonc-
tions épiscopales. Cet évêque vice-gérant avoit visité les paroisses de
la ville, et fait les ordinations suivant le besoin. On croit qu'il lui con-
tinua les mêmes pouvoirs depuis son retour de Rome, au moins pendant
quelques années; cela est d'autant plus vraisemblable, qu'il fut obligé
de faire plusieurs voyages, à l'occasion d'un bâtiment qu'il entreprit à
Tonnerre, en 1555, et qu'il fut détourné de ses fonctions par une autre
(i) Il porte pour titre : Manuale seu OUi'
ciarium êocerdoium seeundum tiitim ec-
cletiœcathedralit AntUsiodorensU. Il sert
merveilleasement à prou?er combien on a
iunové dans le siècle dernier, surtout eu fait
de suppressions de prières. Les éditeurs, par
une fausse application de la langue grecque,
changèrent alors l'ancien mot Autisiiodo-
rutn en celui d'Aniissiodorum.
QUATRE-VINGT-DOUZIÈME ÉVÉQUE d'aUXERRE. 127
SOUS de Fendroit où l'on voit encore les armoiries de sa famille. Certai-
nement il donna, en 1547, le vase de porphyre que Ton voit sous une
petite voûte qui soutient la statue de saint Christophe. L'inscription
qui se lit au pied de ce vase oblong, marque avec quels sentiments de
piété il souhaitoit que les fidèles prissent de Teau bénite en entrant dans
la maison de Dieu. Il fit aussi orner la chapelle de Saint-Germain,
sttuée au-dessous de celle du revestiaire , de peintures à fresque fort
délicates qui représentent les principales actions et miracles de ce saint
évéque ; et vraisemblablement la clôture de cuivre de cette chapelle est
un effet de sa magnificence (a). Les évéques d'Âuxerre dont on fait
l'office ou qui passent pour bienheureux, furent représentés par son
ordre sur les murs de la chapelle de Saint-Sébastien (6) . Il est encore
probable que le haut des peintures de la rose du grand portail est de
son temps et fait à ses frais. Quelques-uns même ont cru l'y voir re-
présenté au-dessus de l'image saint Jacques. Pour ce qui est de ses
ornements, il différa jusqu'à l'an 1554 ; et on verra ci-après qu'on ne
les reçut que peu de jours avant sa mort.
Quoique cet évéque aimât beaucoup à décorer les temples matériels,
on peut dire qu'il s'attacha encore davantage à former les temples spi-
rituels. Les luthériens avoient profité de son absence pour s'insinuer
dans son diocèse, principalement dans les lieux qui sont au centre du
royaume, sur la route de Paris à Lyon, le long du rivage de la Loire. Il
entreprit de connoltre en peu de temps le mal qu'ils pouvoient avoir
causé ; et pour en faire plus vite la perquisition , il s'associa l'évéque
d'Ebron de l'ordre de Saint-Domique, qui fit les visites dans un canton
du diocèse, pendant que, de son' côté, il les faisoit dans un autre. L'an
1545 ils visitèrent à ce dessein différentes paroisses (1). L'évéque
d'Ebron étoit le 25 novembre à Cravan, où il accorda des indulgences
à ceux qui contribueroient à l'avancement de Téglise qu'on bâtissoit
1530 k 1554.
(1) Bx autographo.
(d) Tous ces objets d'art sont détruits aujourd'hui. {N- d. E.)
(h) Ces fresques existent encore en partie. iN*'d, E.)
128 nU5Ç0IS DC DCTTBTILLB U DC !I01,
k 15&L ^^^ W ^ ^ FniKois de DînteTÎIIe aax Qoalre-Temps de décembre fil
rordinatîoo de Vanj. La TÎIIe de Cosne-sor-Loire paroit aïoir été la
première où il s^aperçat que lliérésie aToit pris quelques racines. Pour
les arracher eotièremeot, il j retooma aa mois d^octobre 1545, em-
menaot avec lai Tarchidiicre de Paisaje (1). Ce fat dans le coars des
visites de celle année-1^, qoe le droit de procuration lui avant été refusé
par Fabbé de Saint-Germain, pour la visite de la cure de Moutiers, sans
avoir égard qu*eD 1545 Févéque d*Ebron a voit été logé au prieuré, il
crut devoir pousser cQlafEiire en parlement (2). C*est peut-être pour
ceh qu'on ne trouva lioi de lui en 1546. Etant à Gien en 1547, il fut
averti que plusieurs habitants de cette ville, aussi bien que de Briare,
Bout , Neuvj, G>sne, Pouillv et La Charité se dispensoient du devoir
pascal ; il ordonna aux curés de £ûre des exhortations sur cette matière
le dimanche des Rameaux* el de tenir un registre de ceux qui s'ap-
procheroient des sacraiients« pour Tapporter au synode après la quin-
xaine de P^ues. D^autres aflaires l'avant appelé à Paris en 1549 (5),
il chargea Jacques de Mootracé, cordelier, évèque de Russion, de faire
dans tout le diocèse les (onctions épiscopales , el de Teiller par des
visites à b conservation de b foi. La discipline éloil encore alors très-
exacte pour Tobservalion du Carême, el Ton n*avoit garde d\ faire de
brèche, dans un temps où rabslinence éloil combattue à découvert (4).
Aussi les pieux catholiques du diocèse s*abslenoient encore alors de
Tus^ du beurre el du finomage pendant le carême , et ceux qui vou-
loient en user demandoieni b permission à Févéque. Ten ai lu un
exemple (5) dans b personne de Françoise de Clermoot, femme de
Charies de Rochechooard , se^nenr de Saint-Âmand (6). Parmi les
prédicateurs qu'il avoil approuvés, il j en eut qui favorisèrent la nouvelle
;l) Met. Cap.
{% ibf . Epûc. Sipmt. D«cUf>.
(3, Jltf .
{4) ibf . l>«chié.
^S Eccveil et fonnoles de soa teaip«.
(6; rof. k« Preafes, 1550.
(c) Le cbcnir et la tour de cet édifice sont de ce temps et de style Renaissance .
On lit sur un cartouche de la tour : « De may le 3S, Faa 1551 a esté fondée cette
» tour, priex Dieu poor tons en cobbub. » (AT. d £.)
quàtre-yingt-douzième évêque d'auxerre. i29
réforme ; il leur ôta aussitôt ses pouvoirs, el les obligea de quitter son
diocèse, entre autres, un nommé Ghaponneau qui avoit scandalisé par
ses sermons tout le peuple de Gien (1). L'année même qu'il fit publier
la convocation du concile de Trente (2) , en conséquence de Tavis du
cardinal de Bourbon, archevêque de Sens, un prêtre de Gien fut assez
hardi pour se marier à une jeune veuve de Cosne. Ge prêtre arrêté et
convaincu en septembre 1551, fut condamné au feu après avoir été dé-
gradé (5). François de Dinteville ôta quelquefois aux officiaux particu-
liers du diocèse la connaissance de certaines affaires, les évoquant k
Âuxerre, afin qu'elles y fussent jugées avec plus de maturité (4) L*usage
du bras séculier ne fut pas la seule voie qui vint au secours pour arrêter
les progrès de l'hérésie (a). L'évêque d'Auxerre embrassa comme les
autres prélats tous les moyens généraux, tels que la prière, les jubilés,
et les confréries. Dans ces temps nébuleux parut fort à propos la con-
frérie du Saint-Sacrement. Dès-lors, elle passa jusqu'aux églises de la
campagne (5). Vers le même temps commencèrent en certaines églises
des saints pour la paix de l'Eglise; ceux qui yassistoient gagnoient des
indulgences. Les prières que le roi avoit demandées en i555, contre le
progrès de l'hérésie prévinrent la publication du jubilé que Jules III
avoit accordé. Notre évêque, conformément à la volonté du roi, ayant
ordonné en 1555 des prières pour obtenir l'extinction de l'hérésie (6),
I5;)0 à I5Ô1.
(1) HisU de la prise d'Aaierre, pièces
Jost., p. 5.
(^) yoy. Preuves, an. 1551.
(3) Reg, Dachië, 1551, 21 sept.
(4) Rey, Dachié, 2 ocl. 1551.
(5) Reg. Dochié, 27 mars 1554. Fond, à
Saint-Mamert d'Auxerre, par Marie Bonnet,
femme de Germain Chein.
(6) Hist. de la prise d*Àuxerre, pièces
Jnst., p. 5.
(a) En 1542, les luthériens de Gien âevenaient nombreux. L'étèque chargea
M. de LoDgueil, chanoine de Gien, de recevoir les révélations des hérétiques qui
devaient les faire sous peine d'excommunication. Mais le procureur du roi et celui
des habitants de la ville protestèrent et déclarèrent vouloir s'en tenir à la sentence
de la cour de parlement qui ordonnait que les révélations seraient reçues par les
curés des paroisses assistés d'un marguillier. Aussi, le 17 août, le bailli de Gien
rendit une sentence portant défense à M. de Longueil de passer outre à peine de
60 livres d'amende et de prison, « d*afutant que ledit de Longueil est suspect et s est
» vanté qu'il luy cousteroît son bien ou qu'il auroit raison des luthériens de Gien. »
— Areh. de V Yonne, Documents historiques. (iV. d. E,)
11 9
i50 FRANÇOIS DE DINTEVILLB II DU ROM,
1530 » r.64 ^"^'^"^ ^® nouveau jubilé accordé par le pape, La lettre qu'il écrivit à
ce sujet au clergé de son diocèse (1), porte expressément qu'on ne permit
à aucun des ecclésiastiques qui s'érigeoient en quêteurs d'aumônes, de
monter en chaire ni de parler en public à l'occasien de ce jubilé ; de
crainte que, sous prétexte d'exhorter à Taumône, ils n'avançassent quel-
ques propositions luthériennes ou antres condamnées par l'Eglise. Re-
mettant ainsi souvent devant les yeux des curés , certains articles des
ordonnances qu'il avoit publiées dans le synode du 5 mai 1552, il
éloigna quantité de faux docteurs qui cherchoient à pervertir la foi des
peuples. La publication de ces statuts synodaux, fut un des moyens les
plus efficaces, dont il usa pour prévenir la corruption générale (a). Par-
lant d'après ses prédécesseurs , qui lui avoient transmis le dépôt de la
foi et la pureté des canons, il s'étoit contenté d'en résumer tous les
règlements, qu'il fit rédiger dans une latinité pure et exacte : il en ajouta
de nouveaux qu'il avoi tété obligé de dresser depuis les tentatives des
disciples de Luther et autres sur la/oi et la morale ancienne.
Le reste des actes émanés de son secrétariat ne regarde que la disci-
pline ordinaire du diocèse selon les difierents cas qui se présentoient ,
et il n'y a de remarquable que quelques établissements d'églises succur-
sales et quelques visites de maisons religieuses. Les habitants de Beau-
mont proche Chemilly l'avoient supplié, dès les premières annéejs de
(I) MaDd. da 15 dot. 1553.
(a) A cette époque, le clergé, en général, n^avait pas cette gravité de mœars que
nous sommes habitués à lui voir de notre temps. Par un article des statuts du sy-
node de 1552, révoque ordonna aux ecclésiastiques de porter des vêtements noirs
ou approchant du noir. Il voulait restreindre par là le luxe du clergé qui ne se dis-
tinguait plus des laïques. Par un reste d'habitudes du moyen-âge, les choses mon-
daines l'occupaient trop souvent. Le Chapitre cathédral d'Auxcrre, remplissant
Tofiice d'administrateur de Févêché, le siège vacant, en 1555, défend aux ecclésias-
tiques le blasphème, le concubinage, le port de costumes indécents, etc. On voit
plusieurs fois, dans le registre capitulaire d'où nous tirons ces notes, que des cha-
noines, oubliant la retenue que leur impose leur habit, ont frappé des gens qui leur
disaient des injures ou leur causaient des désagréments; pour quoi ils ont obtenu
du Chapitre absolution, sauf les droits des tiers. — Arch. de r Yonne, Fonds du
Chapitre d'Auxerre. (iV. d. E.)
QUATRE-VINGT-DOUZIÈME ÉTÊQUE d'aUXBRRE. 151
son épiscopat, d*ériger leur chapelle en paroisse ; mais les dépotés que 1530 1 1551.
le Chapitre de la cathédrale, intéressé dans cet établissement, lui en-
voya , n'eurent pas de peine à le rendre sensible au tort que cette
érection alloit faire à la compagnie. Ainsi la proposition fut rejetée dès-
l'an 1558 ; ce fut la même année qu'il fit la dédicace de Téglise de
Gourson (1 ).Les deux églises succursales dont il se présente quelque chose
k dire, sont Ghampoulet et Vergers. Frère Rolland de Givarlay , curé
de Batilly, et Charles de Givarlay, seigneur de Ghampoulet, présentèrent
requête à Tévêque , à ce qu'il leur fût permis de bâtir une chapelle h
Ghampoulet, et de Tériger en succursale de Batilly. Le clergé de Batilly
composé de deux prêtres y ayant consenti, aussi bien que damoiselle
Guy de Prie veuve de Jean de Givarlay, et les habitants de Batilly au
nombre de trente-huit, la permission fut accordée le 21 décembre 1549,
à conditioq de construire sur le lieu un presbytère pour le curé de
Batilly ou pour son vicaire. Il y avoit en 1552 procès à roflicialité
de Sens, entre Charles Darrnes , seigneur de Yei^ers et les habitants
d'une part , et Pierre du Broc , curé de Sully d'autre part , touchant
la desserte de Vergers. Ils firent un compromis entre les mains
de Tévêque diocésain, qui statua le 22 mars, que les habitants de
Vergers et de Ghassaigne feroient b&tir un presbytère k Vergers, qu'ils
entretiendroient l'église généralement* de tout, avec une lampe ardente
jour et nuit devant le Saint-Sacrement, et qu'ils donneroient un fonds
d'héritage au curé de Sully ; et qu'à l'égard de ce curé, il viendroit de*
meurer à Vergers, ou qu'il y mettroit un vicaire pour y chanter les
messes et les vêpres et complies, non-seulement les jours de fêtes, mais
encore tous les samedis et veilles des fêtes commandées. Ceci nous
apprend l'ancienne obligation de tous les curés , de chanter vêpres les
veilles de fêtes et les samedis. On connolt dans la campagne quatre
chapelles dont les fondateurs eurent recours k l'autorité de François de
Dinteville (2). Il permit par lettres expédiées à Régennes, le 24 juin
1549, k Etienne Janneau, marchand bourgeois d'Âuxerre, de faire dire
la messe dans la chapelle par lui bâtie à Monéteau, pourvu que ce fût
(1) Beg. Oap.f 4 nov. 1558 e( 7 felnr, | (S) Regist. Ducbiô.
132 nu3ÇMS is Msrirrmu ■ BC
^^ « .js4^ sam iùmmtr^ saas tkami et aaas aw^tcalm de pcsple: car 3 êloit très*
juestif â FoUiptimi qà'mt Us fidèles d'asâîstcr â h mtsèe de paroisse.
et 3 tte petsetMMt poist q« m dît de neacs la»» aiant b gnnd'-
■ease 1 . Ddosaapenû«oo,le20j«3ktsahaBt,à Astoiseda Bo«r^
de étWÊtmti pmcfe b ckifclle de Saimle-Ceacfiève-lès-AMerre^ et
d'y aeaer b vie d'cnûte <? « ee ^ a losjows été très-nre dass le dkK
ccse. Aauwie SoveOe et MicM le Be«f . riches kabitants de la pa-
riîfse de Sawt-Tcni>-des-Boi§ , l« araat rcfircseslé ea 1530. q«*a
case des ekeaûs s— fe»t nipraiicaliles, ib me povroicBt venir exacte-
aept a b prMse, 3 lear peint (3) de bitir, so«s FiaTc^ation da
Saîat Esprit et de saisie Aane, mmt dapeBe daas lev terre appelée
Jétwuiem^ et d^v fâtt tâAnt b Besie aix coodîtîoBS d-dessas mar-
^■ées, et saas être dîipewés d*assîster a b sesse paroissiale, lorsque
le teflips le peraetlroît. Nicolas RateioL, prêtre cfaapebÎD de b chapelle
da mam de Saial-lloré sitoée s« les limites des paroisses de Saint-
More et d'Artj, hi reprëseota le maivais état oi les gaerres et le mal-
kear des tesps avoteat rédait le bitiaieaLp qai avoit aatrefois été coo-
aidéraUe ; et qaH vieadroit à boat de le rétablir, ea j érigeant une
caafrérie paar les parotmes da voisinage. Sa demande lai fat accordée
h B^eaaes (k) le 22 janvier 1532. (5). D j eat pendant les dernières
de son épîscopatde (réqaenU dcnombremenls des bénéfices. Le
Il Ceaâ n «tkie ée tci SUIali fy- i «•a""--^""" "• i"imf f^oacroyott
. ««■* m: ■ . >■ cas. a cawe ëes conflits
\ «frréi CB ce Htm éam le t«sf« 4»
J j^g * t.tMHS :«■. FObcft ée acaajeo. érèqve de
'4 Ex €wfofTwM^ ■Hfclît^, St, par son ordir. la même cmr-
'!V Je M parle poM ée éemK iteameSH»' « mmmt «■ ri^tifrf 4e J««t ca IS4*. Le
;îcre fm"A St lai léMe ea u . ««iiie éréfi», par otMaBUftioa <ia 3 oo-
ic^>Mr ra»l55l,»ar€ir:cthû*e Ve«oy, [ vcakre ie la aéflie aance, dédia rédige
poil* parcffMM4>H^,Heel>i i parMÛle de Sai»?-lc»^«is.
'/i;D eusUftdau ce dsetièreaDe chapelle oabasOiqoe de StMkMqiii était dêji
fort andeane an xfi* «ècle. EDc deriot le relage des Confrères de b Mbéncord^.
après U destmctioo, en 15S7, de Tc^ue Saiot-AmatreoàOs sasseonbUient aopara
Tant Déjà, eo ISTT, M. de DioterîDe arait approoré leurs statuts qui furent bomo-
losoés par le parlement en 174t. — Ârd^- de T Foaaf, Fonds Saint-Amatre.
(X. d. £
QUATRE-VIMGT-DOUZIÈMB ÉVÊQUE D*AUXERRB. 153
9 mai 1550, il tint, dans le palais épiscopal, une assemblée générale de i^qq ^ ^554
tout son clergé, au sujet des nouvelles acquisitions qui pouvoient avoir
été faites par chaque bénéficier. Le roi ayant aussi demandé un état de
Targenterie, des charges et des revenus de chaque église, il enjoignit à
ses archidiacres, le 18 avril 1552, de faire cet inventaire, chacun dans
leur détroit (1); mais on ne voit pas que cela fût si ponctuellement
exécuté que l'imposition sur les bénéfices, faite pour le roi Henri II, en
15S1, après la tenue du synode, et celle qui fut mise sur chaque clocher,
en 1552, par forme d'emprunt accordé au même prince.
Quelques-uns des monastères de son diocèse étoient un peu dans le
dérangement. On se plaignoit surtout de celui de Saint-Laurent , de
l'Ordre des chanoines réguliers. Un arrêt donné en parlement, k la re-
quête du procureur du roi le 14 avril 1548, portoit que les religieux de
cette abbaye seroient réformés. Le prélat à qui il fut signifié, nomma
au mois d'octobre suivant (2j deux chanoines réguliers du même Ordre
pour y introduire la réforme, savoir Laurent Petitfou, abbé de Saint-
Père d'Auxerre, et Jacques du Coin, religieux de Saint-Martin de
Nevers. Il les établit ses vicaires-généraux, à cet eflet, avec pouvoir de
faire toutes les informations et perquisitions nécessaires, punir les dé-
linquants et les réfractaires, et rétablir le bon ordre. Il avoit trouvé
l'abbaye de Saint-Julien d'Auxerre, dans un état encore plus déplorable.
Selon quelques mémoires du temps (5) ce ne fut que par ses visites
en 1554 et en 1542 au retour d'Italie, qu'il y put remettre la régula-
rité. Pour l'y maintenir, il fit encore une visite très-exacte le lundi 16
octobre 1555. L'abbesse étoit Marie de Fontaines, et la prieure Guille-
mette de Saigny. L'évêque reçu avec solennité par les religieuses à la
porte de l'église (a), assista à la messe du Saint-Esprit ; après l'Evangile
il y eut prédication par un jacobin, confesseur de la maison; la messe
(1) Reg, Duchié, 16.
(2) Beg. Duchié, 16 ocl. 1548.
(5) Mémoires de Pierre Magnen, pr(H
moteur, et de Joseph de Thou, greffier.
(a) L'abbesse avait une velléité de refuser rentrée du monastère à Tévéque, et
eUe avait consulté, à cet effet, Tévéque de Nevers, qui, sur le vu des titres qu'elle lui
soumit. J'en dissuada. — Ârch, de V Yonne, Fonds Saint-Julien. (iV. d. E.)
1530 ) ISM.
154 FRANÇOIS DB DlNTfiVILLB II DU KOM,
finie, il entra dans i*intérieur du monastère, et trouva tout en bon ordre.
Il se contenta d'ordonner qu'on reiàt les règlements, qu'il avoit faits
dans ses deux visites précédentes. En voici un article curieux : c'est
celui par lequel il leur fut défendu de sortir du monastère, pour tenir des
enfants sur les fonts de baptême, et d'aller par la campagne, k oioins
que ce ne fût pour les aflaires du monastère et avec permission. Ce
règlement fait voir que la clôture n'étoit point alors si étroite qu'elle l'est
devenue depuis. On vit aussi de son temps un religieux d'une abbaye
célèbre de son diocèse réclamer contre ses vœux, C'étoit un cistercien
du monastère de Pontigny, appelé Jacques de la Rivière, Noble Adrien
de la Rivière, seigneur de Ghamplemy, s'opposoit à cette sortie. Il fut
dit, par un arrêt du parlement du 9 janvier 15S5 (1), que le procès
seroit mis en état par deux conseillers-clercs du parlement, auxquels
l'évêque d'Âuxerre donneroit des lettres de grand-vicariat; et le prélat
adressa ces lettres k MM. de Montmiral et du Val, avec pouvoir de
connoltre de cette affaire jusqu'à la définitive. Entre les bénéfices régu-
liers que François de Dinteville conféra jure devo/ufo, par l'inattention
des présentateurs, il s'en trouve deux assez considérables. Le prieuré
simple de Notre-Dame-du-Pré, proche Donzy, qu'il conféra à Jean
Moreau, clerc du diocèse de Meaux, en 1550, et la cure de Notre-Dame-
la-d'Hors, dans la ville d'Auxerre, de l'Ordre de Prémontré (2), dont
il fit expédier les provisions à Jean Guérin, prêtre de l'Ordre et gradué,
au refus de l'abbé de Saint-Marien. Le doyenné de la cathédrale fut
dans le même cas^ après la mort de Florent de la Barre (5). Le registre
du secrétariat prouve combien de fois différentes il en pourvut un
chanoine, appelé Nicolas Blanchard, dans les années 1551 et 1552 (4)^
Il usa aussi en 1555 du droit qu'a l'évêque de confirmer l'élection
du chantre de la cathédrale. Les deux archidiacres étant allés, le pre-
mier jour d'août, avec l'élu, nommé Laurent Robert, lui en parler k
Régennes, il assigna le lundi 7 du mois pour donner celte confirmation,
ordonnant d'afiicher l'acte d'élection où il étoit nécessaire. Et comme
il ne se trouva aucune opposition, pas même dans l'enquête du vice-
(1) Voy. le» Preuve», 1553.
(S) Beg. Ducfaié. 50jttUii550.
(3) Hfid, 12 sept. 1554.
(4) On ne sait ce que signifloient ce» réité-
ratiom de proTisioiis enfen an môme sujet.
QUATRE-VINGT-DOUZIÈME ÉVÊQUE d'aUZERRE. 155
gèrent de l'officialité, chargé de s'informer de la vie et des mœurs de
Télu , h prélat fit expédier l'acte de confirmation et lui conféra la
dignité de chantre, en présence de noble Claude du Plessis, curé de
Saint-Privé, et Joachim de Dinteville, prieur de Viviers, au diocèse de
Langres, ses parents. Laurent Robert avoit été son secrétaire. Entre
ceux qu'il plaça dans le Chapitre les vingt premières années de son
épiscopat, se trouve, en 1557, Louis de Dinteville qui, dans quelques
actes où il parott comme témoin , est qualifié cousin de notre évéque.
Il pourvut en 1544 d'une prébende d'Âuxerre, Germain Vaillant de
Guélis, clerc Orléanais, qui fut depuis évéque d'Orléans ; en 1545
Mathieu de Longuejoue (1) etScipion de Popincourt. On croit que le
dernier étoit de ses parents; k l'^rd de l'autre, il était clerc du diocèse
d'Orléans, et parent, sans doute de l'évêque de Soissons de ce nom,
qui fut garde-des-sceaux. L'année d'après, il conféra un canonicat de
son église k Jean Marafin, d'une noble famille du pays de Donziois, et
en 1549, le 26 novembre, à Jacques de la Halle, docteur de Paris (2)|
qui devint célèbre dans le temps des troubles des huguenots. La
même année, il donna à Almaric de Talon , docteur en droit canon, des
provisions d'olBcial (5).
Quoique cet évéque eût fait beaucoup de voyages à Paris , on ne l'y
voit présider k aucune cérémonie, si ce n'est à la bénédiction de
Fabbesse de Montmartre qu'il fit le 11 août 1549; c'ctoit Catherine
de Glermont (4). Il eut pour assistants en cette cérémonie Philippe le
Bel, abbé de Sainte-Geneviève, et Antoine de Melphes, abbé de
Saint- Victor (5).
De son temps et de son consentement, fut instituée à Auxerre, au
14 janvier, la fête du Saint-Nom de Jésus, à la sollicitation d'un
cordelier de la maison d'Auxerre (6), lequel, non content d'avoir fait
bâtir une grande chapelle à côté de l'église de son couvent pour y
1580 I 1661,
(1) Ce Matiiiea pouToit bien être ÛIb de
réyéqne, garde-des-sceaax, qui, ayant son
épiscopat, avoit été marié et laissa des
enfants. Le garde des sceaux étoit neyea de
révéquo Jean Baillet.
(â) Begist. CapU.
(3) Cet Almaric seroit-il le même qn'Audo-
marus Talon, qui fat recteur de rUniyersité
et curé à Paris ?
(4) Foy. Preuves, 1549.
(5) Regist. Duchié.
(6) Il se nommoit Bonaventure Dubiez ; il
étoit natif de Qievannes, a deux lieues
d'Auxerre.
r-!s«eii5c^.^^,.
i 56 FRANÇOIS DE DIMTEVILLB 11 DU NOS ,
1580 1 1S&4. ^lenniser cette nouvelle fête , persuada à un particulier de l'établir &
la cathédrale et obtint de l'évéque qu^elle fût chômée. Gomme on
admit trop facilement le système qui distinguoit cette fête de la solen-
nité du huitième jour d'après Noël, auquel le nom de Jésus avoit été
imposé au Sauveur du monde, la nouvelle fête fut supprimée, quant k
la cessation du travail, dès le siècle suivant, et en 1726 l'office en a été
remis au 1^' janvier son jour véritable et naturel. Si cet établisse-
ment fut favorisé par François de Dinteville, on doit croire qu*il
contribua aussi k Tabolissement du jeu de la Pelotte, qui se prati-
quait Faprès-midi du jour de Pâques, dans la nef de la cathé*
drale(l)» et auquel un arrêt du parlement, obtenu par Laurent Bretel, qui
chanoine, mit Gn pour toujours Fan 1558. Je passerai sous silence ce
restoit encore alors de vestige de la fête des Fous, aussi bien que l'usage
des tragédies de piété qu*on représentoit encore Tan 1551, avec des
ornements de Téglise dans la place devant l'église cathédrale (a).
Dans la même année 1551 Tévêque d'Âuxerre voyant l'entrée du
palais épiscopal en mauvais état, en rétablit le portique : il y fit élever
un pavillon autant magnifique que la place put le permettre , et Toma
d'inscriptions sententieuses suivant le goût de son siècle ; l'une touchant
l'accès de sa maison qu'il déclaroit librement ouverte k tous les gens
de bien, l'autre par rapport k l'officialité dont la salle est contigué (b).
(!) Voyez le Af erctir« de Francf, mal 1726, p. 911 (c).
(a) Ces représentations, qu'on appelait (2«t mystères, étaient assez fréquentes et se
donnaient ordinairement au grand cimetière de la Madeleine. On y jouait le plus
souvent le Mystère de la Passion, et la pièce durait souvent plusieurs jours. En
1508y elle eut lieu pendant six jours, avec accompagnement de fanfares. (Voy> les
Preuves, t.iv, no414.) En 1520, onéonnales Jeux de sainte Brigitte. En 1551 ou 1552,
on joua le Mystère de la Passion pendant environ 28 jours, et il se passa des faits
scandaleux qui amenèrent Finterdiclion du cimetière. — (Rcgist. capitulaires, ^Irc^.
de V Yonne. (N. d.'E.)
{h) Ce pavillon, construit dans le style renaissance, existe encore dans la rue du
Département ; il ne manque pas de pureté. Les inscriptions dont parle Lebeuf ont
disparu. La première portait : Porta patens esto * nulli claudaris honesto. {N. d. E.)
(c) Le jeu de la pelote ou de la balle, dégénéré d'un vieil usage grave, d*un hom-
mage symbolique rendu au Chapitre par le chanoine nouvellement élu, avait Gn
par transformer, le jour où il se célébrait, la nef de la cathédrale en une sorte de
jeu de paume. (iV. d. iV.)
QUATRE-YINGT-DOUZIÈMB ÉVÊQUB d'aUXERRB. 157
L'année suivante, c^est-à-dire 1552, il reçut k foi et hommage pour 1530 > 1554.
la baronnie de Donzy, Pierre de Mazengarbe , au nom de François de
Glèves , duc de Nevers. G'étoit pour la seconde fois qu'il reçut alors
les devoirs féodaux dus pour cette baronnie ; cardes le l^** novembre
1548, Charles de Luxembourg et Claude de Foix , son épouse , Tavoient
fait rendre par Jean de Buxières, leur prévôt de Donziois, tant pour
Donzy, que pour Saint-Verain et pour la châlellenie deBeauche (1) Il
ne reste plus à parler que des ornemeiits qu'il fit présenter au Chapitre
au commencement du mois de septembre 1554, ils consistoient en
trois chapes à fond d'argent parsemées de fleurs rouges et violettes ,
dont les orfrois étoient chargés de ses armoiries , avec les vêtements
des ministres sacrés et les parements nécessaires à l'autel (a). Les
chanoines ayant égard à ce présent, ordonnèrent qu'en reconnoissance
on chanteroit, le mardi suivant, une messe du Saint-Esprit de rit double
à son intention, et que tous les jours, jusqu'à la Toussaint, les
enfants de chœur chanteroient, dans la chapelle de Notre-Dame-des-
Vertus, une antienne et un salut pour sa santé et sa prospérité (2) .On de le
croyoit pas alors si proche de finir sa carrière. Les prières ordonnées
pour sa conservation ne purent être continuées que jusqu'à la fin du
mois. Etant retiré au château de R^ennes, sa demeure ordinaire,
il y fut atteint d'une maladie qui n*a pas été spécifiée , et il y mourut
au bout de quelques jours sur le milieu de la nuit du mercredi au
jeudi 27 septembre. Le Chapitre n'apprit d'abord cette triste nouvelle,
que par Jean de Marafin, seigneur de Guerchy, abbé commendataire de
Bellevaux, qui la tenoit des sieurs de Polizy et d'Eschenetz, frères du
prélat; mais le vendredi 28, le même abbé, accompagné de Philippe
de Chastellux, seigneur de Bazarne, allié du défunt, et de Jean
Duchié (5), curé de Monéieau, son secrétaire, vinrent certifier à la
compagnie la vérité du fait. Le corps du défunt fut amené le même
(i) viole. I (3) On écrîYoit alors Duchié pour Duché.
(2) Reg. Cap., sept. 1554. )
(a) Il légua aussi au Chapitre un magnifique évangelier décoré de lames d'argent.
Mais le Chapitre ne put le recouvrer de ses héritiers qu'après un procès en 15M.
— Reg. capit, Àrch. de V Yonne. (N. d, E.)
158 FRANÇOIS DB DINTEVILLE 11 DU NOM,
1530 k 1554. jour \k Auxerre, et inhumé dans le caveau qu'il avoit fait pratiquer six
ans auparavant ^ sous un coin du jubé de la cathédrale , et où son
oocle étoit déjà enterré. Outre de magnifiques funérailles, il y eut un
quarantain célébré solennellement le 6 novembre avec convocation
des gens du roi. Sa famille se remettant sur les soins de Jean Thienot,
chanoine de Troyes, qui avoit été son grand vicaire pour ses deux
abbayes, envoya de Troyes dans le même mois un poêle de velours
noir, chargé de ses armoiries, pour couvrir sa sépulture (1). On ne
trouva point de testament après sa mort ; mais on sut qu'il avoit pris
des mesures pour faire tomber ses abbayes entre les mains de quelques-
uns de ses parents. On réunit son nom à celui de son oncle , dans les
douze obils qu'on célébroit pour lui chaque année (2). Cette réunion
commença à avoir lieu le 25 mars 1555 (a).
Ce prélat a été extrêmement loué dans l'abrégé de sa vie écrit par un
chanoine de son temps. Cet auteur y touche en général sa libéralité
envers les églises, ses aumônes envers les hôpitaux et les pauvres
communautés. François de Dinteville mangeoit peu, buvoit fort rare-
ment, ne dormoit guère, travailloit continuellement, étudioit sans
reliche, et vivoit comme ;in vrai philosophe. Outre les arts libéraux ,
il se connoissoit aussi dans la mécanique ; aimant surtout la peinture ,
il y avoit toujours chez lui quelque peintre (b). Il étoit ennemi déclare
de l'oisiveté, et rappeloit souvent à ceux de sa compagnie l'adage
d'Âppelles ; s'il faisoit accueil aux gens studieux , laborieux et
(1) Reg. Cap,, 17 nov. \ (2) Beg. Cap., 1555.
(a) Les parents de Tévéque fondèrent son anniversaire par un acte de Tan 1555 et
y attribuèrent 144 livres de rentes. — Le paiement de cette rente ne se faisait pas
régulièrement, et le Chapitre fut obligé d'assigner les débiteurs aux requêtes du
Palais, à Paris. Un acte du 16 avril 1567 amena le remboursement de cette fondation
par mesdames Louise de Rochechouard et Louise de Coligny, veuves, Tune de Guil-
laume de DinteviUe, Tautre de Gaucher de Dinteville, neveux de Tévêque. Marin de
Dinteville, abbé de Saint-Michel de Tonnerre et seigneur de Saint-Bris, leur neveu,
fut chargé de cette affaire. — Àrch. de V Yonne, Fonds des minutes de Notaires.
[N. d. E.)
{b) Cesi sans doute à un de ces peintres quMl faut attribuer deux tableaux qui
sont placés dans le chœur de Téglisc de Saint-Bris, et qui Ggurent saint Etienne et
v^-.^.-.ttfti. jA<:.
ÛCATREp-VIHGT-DOUZIÈIIB évêqub d'àuxerhb. 159
vigilants, s'il les aimoit et les honoroit , il avoit aussi en horreur les irao ^^ 1554.
lâches , les fainéants , les gens oisifs et paresseux : il éloit d'une très-
foible santé, tantôt atlaqué de fièvre ou dyssenlerie, tantôt des douleurs
de la gravelle et de la goutte. Au milieu de ces infirmités, il se réjouis*
soit de souffrir en ce monde, pour arriver dans le lieu de rafraîchis-
sement. C'est par où Tauteur anonyme finit sa relation, à laquelle j'ai
été obligé d'ajouter plus de la moitié des faits qu'il n'a pas rapportés
comme étant alors trop nouveaux, et d'une espèce que j'avoue n'être
devenue intéressante , que depuis l'éloignement des temps. On peut
reconnoitre quelques tableaux faits sous son épiscopat et par ses amis, k
la représentation de son visage que les peintres se plaisoient à introduire
dans le rang des spectateurs. Ainsi est-il tiré dans le tableau de la
lapidation de saint Etienne, conservé sur l'autel de la chapelle de Saint*
Alexandre au fond de l'église cathédrale, et dans celui du martyre de sainte
Eugénie à Varzy, au retable du grand autel de l'église collégiale. Ces
deux tableaux passent pour être de la façon de Félix Chrétien, chanoine,
qui transcrivit l'abrégé de sa vie dans le livre manuscrit des évêques
conservé au trésor littéral du Chapitre. L'élise de Saint-Eugénie de
Varzy, dont je viens de parler, eut grande part à ses libéralités. Il l'en-*
richit de plusieurs ornements; en 1557 il y fit construire les orgues,
le grand autel avec ses accompagnements, et la voûte qui est au-dessus.
On attribue k l'auteur des tableaux les quatre distiques qui suivent,
lesquels paroissent dans quelques manuscrits :
Is Prœsul cajus Uber hic dat splendida gesta
Immeriti pœnas pertulit exilii.
Vidit eum insontem testisque comesque laborum.
Félix a Christi nomine Domen habens.
Vidit, et est ipsum casu comitatus in omni
Mœstitiœque cornes, lœtitiœque cornes.
Cui cum non posset majora rependere dona
Istud scriptura nobilitavit ogus (1).
(i) Ex Mi, D. Boohier, prœM, divion.
saint Germain. Ces deux tableaux^ qui ont senri de bannières, portent les armoiries
de M. de Dintefille ; ils sont médiocres, mais cependant intéressants pour les cos-
tumes. (iV. d. E.)
1530 Si 1554.
140 FRANÇOIS DE DINTEVILLB 11 DU NOM, XCU® ÉVÉQUfi d'aUXERRB.
Cet écrivain de l'éloge de François de Dinteville avoit commencé
par être enfant de chœur dans la cathédrale, ainsi que j'ai vu par les
registres ; et il avoit tellement gagné la bienveillance du prélat par la
délicatesse de sa main dans Pécriture et la peinture, qu'il parvint h
être chanoine. On apprend, par ces vers, qu'il avoit été son com-
mensal, et que, s'il n'étoit pas auteur de la vie de François de Dinte-
ville, au moins il en étoit le copiste (a).
Malgré tout ce que j'ai dit après l'auteur à la louange de cet évéque,
je me crois obligé, pour ne rien taire, de rapporter ce qu'en dit Pierre
de Saint-Julien. Cet historien le blâme de ce qu'étant le principal élu
aux états de Bourgogne, auxquels présidoit Claude de Lorraine, duc
de Guise, gouverneur pour le roi en cette province du temps
de Henri II, et qu'étant chargé de porter la parole et de répondre que
la Bourgogne consentoit de payer sa part du taillon que le roi vouloit
lever sur toute la France, k raison du trentième denier, il ne suivit pas
cette résolution des trois Etats, et que sachant qu'il avoit été résolu
au conseil privé que la Bourgogne payeroit le seizième denier, il
répondit que les Etats s'ysouroettoient. Gela ne fut pas plus tôt venu k
la counoissance des autres députés, qu'ils conclurent de lui faire signi-
fier un désaveu ; mais il étoit déjà sorti de Dijon avec le gouverneur de
la province. Sa réponse fut cause, dit-on , que depuis ce temps-lh la
Bourgogne fut cotisée sur ce pied du seizième denier ; et l'on en eut
un tel ressentiment dans la province que, quoique les évéques
d'Âuxerre envoyassent aux Etats de leur part, on ne voulut plus rece-
voir leur député. Guillaume Paradin , parlant d'Auxerre dans son livre
de antîquo statu Burgundiœ de l'an 1542, qualifie François de Dinte-
ville, alors vivant, d'évéque très-pieux. On a des preuves qu'il exer-
çoit une grande sévérité envers ceux qu'il trouvoit occupés à détruire
(a) Il nous semble que rien ne s* oppose à ce qu'on regarde Félix Chrétien comme
l'auteur de la vie de Tcvêque Fr. de Dinteville. Ce personnage, artiste-peintre et
capable de faire des vers (On lit^ en tête de ceux que rapporte Lcbeuf : Felic'^
Chrittiani ad leclorem carmen.) a bien pu composer la vie de son maître. — On lit
sur le manuscrit du GesUif au bas de celte biographie : Touêjours feray Félix
ChresOên 15<y«. {N. d. E.)
ROBERT DE LENONCOURT, XCIU^ ÉVÊQOfi D*AUXERRE. 141
ce qui lui apparlenoit ; l'absolution qu'il obtint du pape Fan 1545,
suppose qu'il avoit usé d'une punition excessive (1), et qu'il se repen-
loit de s'élre laissé trop emporter à la colère (a).
1530 }| 1534.
CHAPITRE III.
Des deux évéques d'Auxerre tirés de la maison de Lcnoncourl.
ROBERT DE LENONCOURT, XCIIIÈVÊQUE D'AUXERRE.
La vacance du siège épiscopal d'Auxerre ayant commencé à la fin ^^ * ^^^
de septembre 1554, le Chapitre qui a de droit l'administration du
( i) Yoy, les Preayes des Ub. de lEgl. gaU. p. 16 5 et 164.
(a) Le fait dont parle Lebeuf est probablement relatif à on nommé Thomas
Godon, qui est mentionné dans les pièces d'un procès entre Bf. de Dinteville et Té-
véque de Lavaur (M> Dupuy, Bibl. nat.) Ce Godon était un garde-chasse que
M. de Dinteville avait fait inhumainement crucifier^ pour avoir vendu à son insu
quelques oiseaux de fauconnerie. (Ste-Palaye, Mém. histor. sur la chasse note 5.)
L'évéque veut que les lettres qu'on lui a accordées soient de déclaration et non
d'abolition ; ce mot est trop mal sonnant pour sa dignité, et il se plaint de l'évoque
de Lavaur dans cette affaire.
— C'est sous répiscopat des évéques du nom de Dinteville que furent recons-
truites un grand nombre d'églises des paroisses du diocèse. Les grands travaux de la
cathédrale avaient amené dans le pays des maitres-des-cBUvres, des sculpteurs^ des
maçons, qui répandirent leurs œuvres de tous côtés. On remarque surtout au sud-
ouest d'Auxerre une suite d'églises qui semblent coulées dans le même moule, à la
richesse près. C'est le style ogival flamboyant complet. Les dais, les clochetons, les
feuillages contournés, les moulures prismatiques annoncent la première moitié du
xvie siècle, en même temps que la*décadence et la fin de ce style d'architecture qui
devait fleurir avec le moyen -âge et mourir avec lui.
Nous citerons quelques-uns de ces édifices : le sanctuaire et le chœur de Saint-
Eusèbe d'Auxerre (1530); la tour de Saint-Père de la même ville (fondée en 1536);
Chevannes, Ouannes, Moléme, Thury (riche portail de 1521, dont le marché est
aux Preuves, t. iv); Lainsecq, Perreuse, Sainte-Colombe, Etais, Treigny (sur-
nommée la cathédrale de la Puisaye), ete. Dans le Nivernais, Surgy, Colmery (1536);
Saissy-les-Bois (1548) Ciez, Bitry, Dampierre, Cosne, etc. {N. d. E.)
142
ROBERT DE LBNONGOURT
1554 }i 1500. temporel et du spirituel (a) , aussitôt après la mort de Tévéque, créa des
officiers (1). Les archidiacres soutinrent que c'étoit à eux k instituer
des officiaux chacun dans leur délroit; cependant le Chapitre nomma,
en attendant, pour officiai principal » Almaric de Talon, chanoine, et le
doyen Florent de la Barre, qui en avoit alors un pour la banlieue
d'Auxerre, se choisit Germain de Gharmoy. La régie du temporel de
Tévêché ne se passa point si tranquillement, non plus que la collation
des prébendes. On essaya d*introduire pour le roi, dans l'église d*Au-
xerre, le droit de régale, dont Philippe-Auguste Tavoit affranchie ; ce
qui lui avoit été tant de fois confirmé, et nouvellement encore par un
arrêt du parlement du 25 mars 1515. Le Ghapitre se donna tous les
mouvements nécessaires pour soutenir le droit ecclésiastique ; il em-
ploya même le crédit du cardinal de Plaisance, légat en France ; et
le parlement, informé de la possession du Ghapitre d'Auxerre» ne tarda
pas k Ty maintenir par un nouvel arrêt (2). Deux contendants se dispu-
tèrent une prébende de la cathédrale : Tun nommé Jean Sonnoys éloit
aux droits de Michel TEnfant, secrétaire du roi, pourvu par Henri II
en 1S54, et l'autre nommé Jacques Boucher, pourvu par le Ghapitre ,
le parlement adjugea la prébende k ce dernier, le 25 mars 1559 avant
Pâques (5). Deux évêques m partibus suppléèrent aux fonctions du
minisière épiscopal, saFoir : Filbertde Beaujeu, évéque de Bethléem,
(1) Biç. Cap., 28 sep., S et 5 oct.
(t) Reg. Cap., 24 avril 15S(>.
(5; RegUt partout. Reg. Cap.,, 155i, 2i
noy.; 1 déc. 1556, Juia 5, 12 et 35.
(a) Pendant la vacance du sîégc épiscopal, le Ghapitre prit des décisions sur divers
objets qui sont devenus des faits historiques.
Le 11 mai 1555, on permet la publication des indulgences des moines de Morignj
dont le monastère venait d*étre ruiné, ainsi que cette ville. Les chanoines de Té-
rouanne obtiennent la même faveur; mais les quêteurs ultramontains sont repoussés
par ordre formel du roi, à moins que les bulles qui les autorisent ne soient visées à
Paris.
La peste sévissait à l'hôpital de la Madeleine au mois de juin 1555. Le Ghapitre
décide que, pour empêcher autant qu*il est en son pouvoir aux pauvres et aux ma-
lades de vaguer dans les rues, il donnera 100 sous par semaine d'aumône. — Le
chapelain de Vhôpital s'ctant enfui, il en nomma un autre.
m
QUATRE-VINGT-TREIZIÈME ÉYÊQUE D*AUXERRE. i45
pour les ordinations en 1554, el Frère Philippe (1), évêqoe de Phi- 15541 isw.
ladelphie, pour les visites du diocèse en 1556, avec Jacques de la
Halle, chanoine, docteur; le nouveau doyen, François de la Barre,
fut commis le lendemain delà réception pour présider, la même année,
au synode du diocèse, ayant à ses côtés les deux, archidiacres. Le délai
de celui qui éloit pourvu de Tévéché, donna occasion au Chapitre
d'entamer, la même année, une affaire qui étoit de la compétence
épîscopale. G'étoit l'examen d'une épine, apportée depuis peu de la
Brie au village de Courgis sous le nom de sainte épine de la couronne
de Notre-Seigneur. Jacques de la Halle, docteur officiai , et le chanoine
Jean Sevin, curé de cette paroisse, furent députés pour l'examiner sur
les lieux ; mais malgré les miracles qu'on rapporta y avoir été opérés,
comme elle avoit été exposée par le vicaire sans la participation du
Chapitre (2), Tofficial ordonna qu'en attendant le jugement du futur
évéque, elle seroit séquestrée.
Pendant que le Chapitre prenoit soin du spirituel et du temporel de
Tévêché, il fut quelquefois trompé dans les espérances quil avoit d'en
être bientôt déchargé. On crut, dès le mois d'octobre 1554, avoir
pour évéque Jean de la Rochefoucauld, que l'on qualifioit abbé de
Saint-Âmand ; et le 21 de ce mois , lorsqu'il passa par la ville avec
Charles de Lorraine, on députa les dignités et les anciens pour lui faire
un présent et lui parler du droit de la régale (5). Au mois de mai 1556,
le Chapitre reçut des lettres de cet abbé où il se qualifioit nommé à
Vévêché d'Auxerre. Les chanoines envoyèrent k Fontainebleau quel-
ques-uns de leur corps pour traiter avec lui. Il persistoit k prendre le
titre de nommé k cet évêché dans des lettres postérieures, et on
compta même de certaines sommes avec ses receveurs (4). Mais cet évé-
que, quoique véritablement nommé, manqua encore kTéglise d'Auxerre;
aussi, dansr le bail qu'il fit, pour six années, du revenu de son évêché
k Etienne Janneau, marchand d'Auxerre, en 1555, il apposa la clause
(1; Ce Frère Philippe éloit, k ce que je
pense, Mhthurin ; il est enterré aux Mathu-
rins de Paris.
(2) Beg. Cap., 15oG, 22 et 20 mati, 1 juntt,
'îGjunii. syii/iï.
(3) Beg. Cap., 1554, iSoctob.
(4j Du Peyrat, en ses Antiq. de la Chapelle
du roi, p. 48, semhle distinguer l'éTéque
d'Auxerre d'avec l'abbé de Saint-Aniand.
î#
144
ROBERT DE LEMOKCOURT
1554 il 1560.
condilionoelle, si tant est quil soit évêque et non autrement. Il est cer-
tain qu'il loucha des revenus de i'évêché d'Auxerre (1) puisqu'en
décembre 157Gle Chapitre lui demanda les ornements qu'il devoit à
l'église (2). Tous ces délais ne servirent qu'à transmettre l'évéché
d'Auxerre dans une famille alliée aux Dinteville. Le cardinal Robert de
Lenoncourt , qui avoit été évêque de Ghâlons et qui alors étoit arche-
vêque d'Embrun, fut nommé pour remplir le siège épiscopal de notre
ville (5) . Il étoit fils de Thierry de Lenoncourt, seigneur de Vignory et
neveu d'un célèbre abbé de Saint-Remi de Reims, dont il portoit le
nom. Je ne doute point que Louis de Lenoncourt, qui avoit épousé
Jeanne de Dinteville , nièce du défunt évêque, ne fût de ses parents.
Le premier acte où il soit mention de lui, est un endroit des regib-
très capitulaires do 7 décembre 1556. On voit qu'il écrivit au Cha-
pitre pour avoir copie de tous les règlements faits au sujet de la prise
de possession des évêques d'Auxerre et de leur entrée solennelle. Il
n'est cependant resté aucun vestige de la manière dont ces cérémonies
se passèrent a son égard, sinon que Gaspard Damy, son officiai, s'étant
présenté en Chapitre, le 15 mars suivant auquel on comptoit encore
1556 en France , avec les bulles de sa translation à Auxerre, datées
du 30 octobre précédent, il prit ensuite possession pendant l'office par
l'installation dans la chaire de pierre dii côté droit du sanctuaire et dans
la stalle du chœur, après quoi il prit aussi possession du palais épis-
copal et de l'officialité (4). Il se trouve aujourd'hui fort peu d'actes qui
prouvent la résidence de cet évêque h Auxerre. Presque tous sont
datés deRégennes ou de La Charité-sur-Loire ou bien de Paris (5).
(1) On apprend, par les registres de Saint-
MarUn-de-Toors, qoe ce Jean de la Roclic-
foucanld permota l'éTéché d'Auxerre pour
l'Abbaye de Cormery, que possédoit Robert
de Lenoncourt. Il fut reçu en cette qualité
d'abbé par procureur, au Chapitre de Saint-
Martin-de-Tours, le 18 décembre 1557.
(S) Beg. Cap., 24 déc, 1576.
(3) Selon le registre de son secrétariat
que j'ai trouyé à Paris, dans l'abbaye de
Saint-Germain, il preuoit encore le Utre
d'archeyéquo d^Embrun, le 5 féyrier 1556,
mais, le 4 mars suivant, il prenoit le titre
d'éyéque d'Auxerre dans les proyisions qu'il
fit expédier i Paris du canonicat de Jean
Bouche! , chanoine de la cathédrale, mort
pendant la yacance du siège, en fayeur de
Michel Lenfant, clerc sénonois, avec la
clause du droit à lui appartenant par titre de
Philippe -Auguste. Dans des provisions du
28 mai 1557, il est dit abbé de Notre-Daiiie«
de-Chehery, Ordre de Glteaai,an diocèse de
Reims.
(4) Ex autographe.
(5) Ex actis dispens. anni 1557 et provU.
canonic. Beg, Cap., 5 febr. 1557.
j?
K
t
QUATRE-VINGT-TREIZIÈME ÉVÊQUfi d'aUXERRB. 145
Tel est celui do 13 joio 15S7, daté de Régennes, par lequel s'exco- lôsik iseo.
sant de ce qu*il ne peut faire sa résidence dans le diocèse , il revêt de
la qualité et du pouvoir de vicaire-général, Gaspard Damy , prêtre Ghà-
lonnois, qu'il avoit continué son officiai (1), de même qu'il Tétoit k
Metz. Il eut encore un autre vicaire-général appelé Etienne Deschamps,
: et un troisième pour Gien et pour le voisinage, savoir , Jean de Lon-
gueil, chanoine de la collégiale. Le 22 avril 1557, après Pâques» il
constitua Jean de Lenoncourt, son neveu, abbé d'Essomes, [)ourle
représenter aux états de Bourgogne, et au mois d'octobre de la même
année, pareille commission de sa part à Gérenger Hérault. Dans le
registre des actes de son temps conservé k Saint-Germain-des-Prés,
on remarque en 1557 une poursuite contre Aymar de Prie, pour
rhommage de la baronnie de Toucy ; un aveu qui lui fut fait par Etienne
^.« V le Muet, chanoine et pénitencier d'Auxerre , pour des biens situés k
.* Varzy ; procuration de sa part, pour passer accord avec Guillaume de
2 Dinteville, seigneur des Ghenets, et Gharlotte, dame de la Motte-
Tilly, héritiers de son prédécesseur, où il eut soin de faire insérer que
Tédifice du portail du château de Varzy, par lui commencé, seroit achevé
aux dépens de la succession. Les endroits du même registre, qui indi-
quent de sa part l'acquit de quelques fonctions spirituelles de l'épis-
copat, se réduisent k la tonsure qu'il donna k Varzy, dans la chapelle
du château, le 2 janvier 1557, et le 6 juin précédent, k Pontigny, où
il étoit souvent.
Le Ghapitre lui députa k Régennes, le onzième jour d'aoàt, trois
dignités pour le remercier de lui avoir procuré la permission d'une
coupe de deux cents arpents de bois dans la forêt de Merry (a). On lui
.^^ (i) R^g- Cap., 11 aug, 1559 et 23 êept.
(a) Cette coupe servit aux travaux de la tour de la cathédrale.
Le Ghapitre publia en 1556 une pancarte contenant Ténumération de toutes les
indulgences accordées par les papes et par les évéques d'Auxerre, pour l'achève-
ment de la cathédrale. 11 la fit suivre de l'approbation de Mgr de Lenoncourt ; c'était
le moyen usité alors pour la construction de ces vastes et admirables basiliques.
-^ Voy. Preuves, t. iv, n. 438. {If, d. E.)
Il 10
&
iseo.
ir-t k i:4Xï.
1
14G ROBERT DE LE^OMCOI'IIT ,
réitéra les mêmes remerciements au mois Je soplcmbre samuit, kl
qu*il éloil à son prieuré de La Cliariit''-sur*Ixiire« d'où soot dallées I
provisions lie prchenJes de l.i calliéiirale, du mois Je septenbre c(i
oclohre. Il resta un temps considéralde dans ce monastère et i Vn
avec le dessein d'aller hientôi plus loin et de faire le Tojage de Rm
C'est ce que Ton apprend par Pacte de la seconde réception da chaM
h qui il avoit conféré une préhonde, le iT^ octobre 1557. Son nos A
Antoine Boitel ; il étoit prêtre du dloc«-se dWmiens et son e
Cet ecclésiastique se présenta, en [»ersonne, le 1 1 février I£i58,
quinze mois après la notification de ses lettres de commensalilé;
il ne put paroitre en Chapitre sans avoir au[»aravaDl obtena la
sion de conserver sa harhe : il alléizua qu*il étoit oblige de h lui
croître ù cause du voyage de Rome, auquel le cardinal, évêqoe d*Anaf
Tavoit engagé, et on lui permit de se Tiire installer avec sa longue bah
sans tirer à conséquence pour la >uite. Ce cardinal faisoil sa dents
tantôt dans Tun de ses bénéfioos et tantôt dans Taulre, el méaie
Moutier-en -Argon ne, abhaye possédée i»ar son nevea Philippe; de
sont datées, le 7 décembre 1-%ij8, des provisions qsMI donna k Je
Pajdet, Cliâlonnois, d*une prél»ende de Notre-Dame-de-la-Ghé. Li
février suivant qu*on coroptoit encore 1«>58 en France, le dofCB
Pierre du Broc, chanoine, lui exposèrent au nom du Chapitre TiniCBlî
qu'avoit la compagnie de bâtir a neuf la chapelle de Noire-Dane-de
Vertus, à côté de la basse tour vers le midi de Téglise cathédrale, d
prièrent d'obtenir a Rome des indulgences en forme de jobilé* sa
blaldes à celles que son prédécesseur en avoit apportées. Les déMiés
même temps, lui parlèrent de la rente due à T^^lise ponr la bmi
épiscopale, et le prièrent d'en passer reconnoissance. Le cardiad
Lenoncourt étoit alors dans son diocèse cette même année ; il it rtai
foi et hommage de la baronnie de Toucy. par Aymar de Prie (1>. Cch
ci, dès Tan précédent, avoit exhibé au prélat Tarrét qai IqI ^l^m
cette terre. Pendant son voyage de Rome, il ne se passa rien de cm
dérabic concernant son diocèse , sinon reiamen qae Gaspard Dm
Tun de ses vicaires-généraux . fit d' la sainte Épine de
.1 Viole.
QUATRE-VINGT-TREIZIÈME CVÊQUE d'aUXERRE. 147
Tapprobation qu*il lai doona. On prétend qu'avant son départ il avoit i^ai^ i^eo,
donné ordre qu'on transportât des prisons de la ville de Metz dans celles
d'Âuxerre, un nouvel hérétique nommé Guillaume Palisseau (1). Il est
néanmoins certain que dès ce temps-lk il avoit résigné Tévéché
d'Âuxerrc à son neveu Philippe de Lenoncourt, lequel, en attendant
ses bulles, fit l'office de vicaire-général (2). Au moins conféra-t-il en
cette qualité, le 18 juin 1559, une prébende de la cathédrale, et visita,
le 14 juillet, Tabbaye de Crisenon. Ce qu'il y eut de singulier dans
cette résignation faite en cour de Rome, en faveur de Philippe de Le-
noncourt nommé par le roi, fut que le pape Paul lY fit expédier des
lettres motu proprio et sans aucune demande précédente, par lesquelles
tl pennettoit à Robert de Lenoncourt de recevoir le revenu des terres
de Régennes, Yarzy et Cône, pour mieux soutenir sa qualité de cardinal
et celle d'archevêque d'Arles qu'il venoit de lui conférer (5) , outre les
abbayes et les prieurés qu'il avoit et dix mille livres de pension sur
l'évéché de Metz. En même temps, le souverain pontife lui donnoit
pouvoir de conférer les bénéfices du diocèse d'Auxerre, comme s'il en
eût été encore évêque. Ces bulles sont du 7 février 1559, et selon le
calcul de France 1558, avant que Robert eût fait le voyage de Rome.
EHes furent adressées au grand archidiacre de Ghàlons et à Pierre
Mariao, chanoine de Paris, qui eurent ordre de le maintenir dans tous
les droits qui y étoient énoncés. Il en usa : on voit que le 7 juillet
1560, demeurant it Paris, dans la maison des évéquesde Ghàlons (4), il
y conféra une prébende de la cathédrale, requise par un mandataire, sur
l'évéché d'Auxerre (5), et cependant en d'autres provisions données
quelques jours après à un résignataire (6), il prend la qualité de prince
et archevêque d'Arles (7). Je n'ai point marqué le nom des abbayes
(1) Hist. de Metz de Meurisse, p. 134.
(2) Les lettres par lesquelles il l'établit son
vicaire-gëDéral , portent ces mots : Nuper
epUcopo CatalawMMi. Elles sont datées de
Régennes, le 29 mars 1558, aoquel on comp-
toit à Rome 1559. Dés le 10 du même mois,
il avoit fait expédier les mêmes pouvoirs à
révéque de Philadelphie : Dilecti in ChrUto
fratri noslri epUcopi Philadelpheiuis.
(3) Totticeci est Uré du registre de Salnt-
Germaln-des-Prés.
(4) È regione cemetmi 5. Nicolai à Cam-
pis. Begist.septemb. 1560.
(5) Begist^ Cap.,iijuliii^&),
(6) Ibid,, iijulii.
(7) Dans son rei^stre, il commence k
prendre le titre d''epi$copus Sabinensis et
Aulissiodorensis , le 3 avril 1559 avant
Pâques, et à la fln du même mois, auquel
on eomptoit 1560, il se qualifie archevêque
d^ Arles, oonfoe comme epi$eopus Saèinentii
me nuper epiuopm AuHssioiiorentii*.. Petro
148 pmLippB DB uDrancouBT 9
1560 & 1563. ^*^' posfiéib en même temps on soccesuireoMiil ; cela n'est pMl de
mon histoire. J^ajonterai seulement qn'écut éréqne de IWeti* il se disoit
cardinal dn titre de SaintrApoUinaire , et depab qn'il fat éréqne
d'Ânzerre, il prit poor son titre celai de Saînte-Céeile ; des actes ori-
ginaux signés de sa main en font foi. Il aliéna noabre de biens dépen»
dant dn prienré de La Charité (1) et fit cooper la forêt de Bertrange, (pn
étoit de haute futaie ; cette dernière circonstance a donné occasion de
dire que le jugement mÛTersel deroit se tenir dans cette fimoèt, parce
ipK le cardinal y avoit Uôssé assec de troncs on fansses billes pour j
aneoir les ressuscitants.
On Toit ses armoiries an portique dn ciiftteni de Béyemwis» sons le-
qnel on passe pour entrer dansbi première conr; et cequiparoitmoins
ancien dans ce premier corps de logis passe pour être de son temps (a).
pmunB DE LEEI019GDUBT, XaV^ iYÊQUE IFAUXEBBfi.
Dttis un acte dn S octobre 1538, Philippe de Lenoacourt [vend la
qualité d^éréque d' Anzerre ; c'est une reeonMNSBance donnée à Gaspard
DiBT, chanoine, ricaire-général, et a Etîene Deschamps, chantre et
efanoine de la cité, comme c'est pour lui fiôre plaisîr qu*îls se sont
ohUgés à de grosses sommes en?ars Chaurles Grillet, fha»oinr et »dii-
diacre de Poisaje, et François le Prince, marchand bourgems d'Auxerre.
L'acteest dans une forme trop authentique pour être révoqué en doute;
cependant Robert de Lenoncourt donna des proriâons de bénéfices
pour le diocèse d*Âuxcrre, jusque bien avant dans Tannée 1560. Des
(«)
ffirt. d^ U CfaKilé. p. 5S.
ûm^mHtiËÊà. SsB cmp.
dslanlr.
le
1
derésKs», fat
fir. éL B.)
QUATRE-VINGT-QUATORZIÈME ÉVÉQUB D*AUXERRE. 149
lails si contraires se coDcilient en disant que l'oncle avoit traité avec le |r^ ^ 1553,
neveu, dès Tan 1558, mais que ce traité ne fut connu que par les per-
sonnes nommées dans Facte en question, et qu'il n'eut son effet que
lorsque Robert, retourné de Rome, fut archevêque d'Arles (I). Robert
étoit apparemment assuré de la bonne intention du roi pour tout ce qui
le regardoit, et en particulier de la nomination de son neveu Philippe à
l'évéché d'Âuxerre. Rouvier, auteur de la vie de Philippe (2), croit que
ce qui influa le plus à donner cette espérance à Robert, fut en ce que
ce prince lui avoit obligation de ce que, quelques années auparavant, la
ville de Metz, dont il étoit évéque, étoit retournée sous sa domination.
Philippe ne fut donc que très-peu de temps évéque de Ghàlons après
son oncle ^ son inclination le porta h se rapprocher d*Auxerre, dont il
savoit que la chaire épiscopale lui étoit assurée. Il étoit né en 1527, au
château de Goupvray, entre Meaux et Lagnj, de Henri de Lenoncourt,
seigneur de ce lieu et de Baudricourt, baron de Vignory, chevalier de
rOrdre du roi, gouverneur de Valois, bailli de Vitry, etc., et de Mar-
guerite de Broyés, dame de Nanteuil, Pacy et autres lieux. Son père
qui avoit les bonnes grâces d'Antoine de Bourbon, duc de Vendôme,
depuis roi de Navarre, le produisit auprès de ce prince (5). Il fut ensuite
à Rome, où les Italiens le trouvèrent le plus beau chevalier françois
qu'ils eussent vu depuis longtemps. Au retour, il embrassa l'état ecclé-
siastique et tint quelques abbayes en commande. Certains auteurs, qui
lui en donnent trois ou quatre, oublient celle d^Ëpernay qu'il posséda au
moins dès l'âge de vingt et un ans. Ce fut apparemment la première abbaye
dont il jouit, puisque Léger du Chêne, résidant â Toulouse, lui dédiant
en 1548 son ouvrage sur la piété des fils envers leurs pères, le qualifie
simplement abbé d'Épernay. Nonobstant tous ces bénéfices, il prit
possession de Tévêché d*Auxerre en 1560. La description de la céré-
monie fut rédigée alors fort au long à la réquisition d'Ëdme Vincent,
son bailli, pour tenir lieu de celles des précédents évêq.ues, ou qui
avoient manqué des solennités ordinaires ou qui n'avoient pas été écrites.
Comme le laps du tem[)s introduit du changement, on y apercevra
(1) 11 ett dit évéque d*Aaxerre dani les
regittret do Vatican, au 7 février 1560.
(2) Reomaus, cap, â.
(3) Bouvier in Beomaus.
150 PHIUPPB DB LENOlfCOURT,
iMo k 1563. cerlains usages que les précédentes récepUons ne marquoient pas, do
moins h Tégard des fonctions de Farchidiacre de Sens.
L'après-midi du dimanche 8 décembre i560, le prélat partit de
Régennes. Antoine de Melpbes, évêque de Troyes, Jean de Lenon-
court, abbé d'Essomes, Laurent Petitfou, abbé de Saint-Père d'Âuxerre,
François de la Barre, doyen de la cathédrale, Jean de Marafin, abbé
de Bellevaux, Henri de Lenoncourt, son frère, Jean de la Rivière, sei-
gneur de Seignelay, François de Marafin, sieur d'Â vigneau, Georges de
Lenfernat, seigneur de Pruniers, et plusieurs autres ecclésiastiques de
distinction et gentilshommes l'accompagnoient tous à cheval. Les offi-
ciers de sa cour ecclésiastique vinrent les premiers au devant. Germain
deCharmoy, vice -gérant de Tofficial, porta la parole; parurent ensuite
les officiers de la justice séculière qui parlèrent par l'organe de Guil-
laume du Broc, sieur des Granges, bailli de Varzy, Sacy et Gy-KEvê-
que. Vers Tendroit des Chesnées, arrivèrent les magistrats de la ville
et les élus avec une multitude de citoyens, représentant le corps de
ville, au nom duquel Jacques Qialmeaux, prévôt, le complimenta. Pro-
che la chapelle Saint-Siméon, se présentèrent les curés et les vicaires
venus en procession, revêtus de chapes, avec les Jacobins et les Cor-
deliers. En ce lieu on lui offrit la croix it baiser, il descendit de sa mule,
entra dans la chapelle de Saint-Siifnéon, se revêtit de son rocbet et
bonnet rond, et continua sa route. Il trouva proche la chapelle Notre-
Dame-de-Lorette, le présidial avec grand nombre d'avocats. Girard
Rémond, ancien des conseillers, en Tabsence des lieutenants-généraux
harangua h prélat. La porte de Saint-Siméon étoit ornée de ses armoi-
ries avec cette sentence : Benedictui qui venU in namine Damini. Entré
dans la ville, il fut \k Saint-Germain, où les religieux, revêtus de cha-
pes^ le reçurent. Le prieur, nommé Pierre Passelière, lui fit un com*
pliment en lalin , et le prélat répondit de même. Mais ce prieur l'ayant
requis de toucher un livre, et de jurer dessus qu'il conserveroit l'abbaye
dans ses privilèges, il répondit qu'aucun de ses prédécesseurs n'avoit
fait ce serment, et ne le fit point; cependant il fut introduit au chant du
Te Deum jusque devant le grand autel, où il fitsa prière ; de là, conduit
au logis abbatial. On y disputa sur le droit de procuration, les religieux
prétendant en avoir été exemptés ppr Urbain V ; l'évéque et ses officiers
QUATRE-VlMGT-QUATOaZlÈMB ÉVÉQUE d'aUXERRB. 151
souteDant qu'ils le dévoient, ou quMls étoieot tenas de payer uu marc y^ ^ j^^,
d'argent. Les religieux produisireut une sentence arbitrale d*un abbé
de Vézelay, qui les déclaroit n'être obligés qu'à le recevoir en chapes
à l'entrée de l'église : mais elle fut rejetée n'étant pas signée ; l'examen
du surplus fut remis à un autre temps. Le lendemain, fêle de la Con-
ception de la Sainte-Viei^e, remise du jour précédent, les députés du
comte d'Âuxerre et des trois barons, ayant comparu au palais épiscopal,
se rendirent ensuite au sanctuaire de l'église de Saint-Germain, ^savoir :
Girard Rémond, doyen des conseillers au bailliage d'Àuxerre, et CSaude
d'Heu, procureur du roi, pour et au nom du roi François II, comme
jouissant du comté d'Auxerre ; Jean de Chelles, écuyer, seigneur du
Renard, maitre-d'hôtel du duc de Nevers, baron de Donzy, avec pro-
testation que son acte de comparution ne pût préjudicier au droit du
duc de Nevers sur le comté d'Auxerre, René de Pernay, écuyer, sieur
de Pernay et de la Bretauche, pour ledit duc de Nevers, en tant que
baron de Saint-Verain, René de Prie, au nom d'Aymar de Prie, son
père, baron de Toucy, avec protestation de ne point préjudicier au
procès pendant aux requêtes, au sujet du droit de retenue que l'évêque
prétendoit sur cette baronnie. Le nouveau prélat les voyant disposés à
le porter dans sa chaise, se contenta de la soumission, déclarant que
ce seroit sans tirer à conséquence. Il alla à pied jusqu'à l'église cathé^
drale par la grande rue, précédé de tout le clergé séculier et régulier,
accompagné à droite et à gauche des députés des quatre vassaux. Proche
d'eux étoit portée, par quatre hommes robustes, la chaise élevée et or-
née, pour marque de l'ancien droit, et il ne^s'assit dessus que lorsqu'on
fut arrivé proche la cathédrale, auquel temps il se fit porter pendant un
certain espace de chemin. Ce relâchement sur l'ancien usage en ce
point parut compensé par une autre cérémonie, qu'on n'avoit point
encore vue dans les précédentes entrées des évêques (1). Toussaint du
Mont, chanoine de Sens, commis par Nicolas Gardinau, grand-archi-
diacre de Sens, crut que l'installation commençoit dès le moment que
le nouvel évêque s'asseyoit à Saint-Germain dans le fauteuil portatif;
et il l'y installa même avec des paroles choisies dans l'Écriture-Sainte,
(1) Procés-Terbal de Tarchidiacre de Sens.
ISOJ k ISG3.
152 PHILIPPE DE LENO:<COORT,
quoique Tévéque D*cût pas intention de se servir alors de ce faoteail.
Le Chapitre en chapes reçut le pontife à la grande porte de l'église qui
étoit fermée, et le doyen l'ayant harangué, lui fit prêter le serment ac-
coutumé ; après quoi le délégué de l'archidiacre le fit entrer, disant :
Ingredere igitur benedicie Dei, et on chanta le Veni Creator. Étant arrivé
au chœur, il lui présenta une des cordes du petit clocher, avec une for-
mule aussi nouvelle que la présentation de cette corde (i). Le même
vice-gérant de l'archidiacre lui fit baiser l'autel, et l'installa à la chaire
de pierre au côté droit du sanctuaire, usant en tout cela de formules choi-
sies ; après quoi Torgue et le chœur chantèrent le Te Deum, Et le nou-
veau pontife donna ensuite la bénédiction au peuple et officia à la grand'-
messe. Depuis longtemps cette cérémonie ne s'étoit faite d'une manière
si complète. Elle fut suivie d'un magnifique repas, auquel assista tout
le clergé de la cathédrale.
Le lendemain de cette réception, le Chapitre députa deux dignités
et deux chanoines pour prier le nouvel évêque et celui de Troyes, qui
Tavoit accompagné, de renfermer dans une nouvelle châsse d'argent
les reliques de saint Chrysanthe(2). Si Philippe de Lenoncourt fit cette
cérémonie (ce qu'on ignore) c'est peut-être le seul acte important et mé-
morable concernant l'église cathédrale, qu'il ait fait durant deux années
et demie de son épiscopat. Un procès contre le duc de Guise l'occupa
considérablement. Le roi de Navarre, qu'il aida de ses conseils, lui em-
porta aussi beaucoup de temps. Dans ces embarras, il eut pour vicaire-
général Gaspard Damy, que son oncle, le cardinal de Lenoncourt, avoit
amené de Châlons, et le diocèse ne fut pas moins soigné que si l'évêque
avoit veillé immédiatement. D'ailleurs, au commencement des troubles
causés par les calvinistes, le Chapitre de la cathédrale partagea une
partie de la sollicitude pastorale, comme on peut voir dans l'histoire de
ces troubles imprimée en 1723. Le duc de Guise avoit acheté de Mar-
guerite de Broyés, mère de Philippe de Lenoncourt, la terre de Nan-
teuiMe-Haudoin, au diocèse de Meaux. Philippe voulut rentrer dans
(1) Selon les anciens procés-Terbanx,
cVtoit une corde de sonnette que Tëvéque
liroit à la grande porte de Féglise pour la
faire ouTrir. 11 faut oliserver ici que les
cordes du petit clocher de la cathédrale
d*Auxerre abouUssent à Taigle du chœor,
comme dans la cathédrale de Chartres.
v3) Rfg. Cap,, 10 dff . 15^.
QUATRE-VINGT-QUATORZIÈME ÉVÊQUB d'aUXERRB. i53
ce bien. Son crédit auprès da roi de Navarre, peu ami da dac de Guise, i^^ ^ jses.
ne fut pas inutile dans cette aflaire. Il servit aussi h empêcher, par le
moyen de ce prince, la tenue d*un concile national qui avoit été demandé
par le chancelier de France après le colloque de Poissj. Le pape, qui
appréhendoit ce concile, fit agir le roi d'Espagne auprès du roi de Na-
varre, qui étoit lieutenant-général du royaume sous Charles IX. Le car-
dinal de Ferrare et les Guises songèrent à amuser le roi de Navarre, et,
par la voie du maréchal de Saint- André, ils firent entendre aux deux
plus grands confidents de ce prince, qui étoient Tévéque d'Âuxerre et
François d'Escars, que s'il répudioit Jeanne d'Âlbret, sa femme, hu-
guenote, il pourroit devenir roi d'Angleterre et d'Ecosse. Un historien
judicieux (1) rend, à cette occasion, un témoignage qui marque la
droiture de notre prélat, et qui le disculpe suffisamment, c Philippe de
» Lenoncourt, dit-il, ayant Tàme aussi noble que la naissance, mais
» l'esprit un peu facile, et d'ailleurs enivré de cette vanité courtisane,
» pouvoit être plus aisément trompé que corrompu. > Lorsque le roi
Charles IX eut quitté Fontainebleau pour venir demeurer à Paris con-
formément au désir du parti catholique, Tévéque d'Àuxerre fut admis
au conseil en considération de la faveur où il étoit auprès du roi de Na-
varre, et il porta ensuite ce prince à s'unir au duc de Guise et au con-
nétable Anne de Montmorency, plutôt qu'au prince de Condé, son frère.
De \\k l'origine des calomnies dont les huguenots essayèrent de noircir
la réputation de Philippe de Lenoncourt. En conséquence d'une lettre
qu'il écrivit aux chanoines d'Àuxerre, ils firent, en 1561, le mercredi
d'après Pâques, des prières pour les besoins de TËiat, et commencèrent
par une procession solennelle ; son absence du pays l'empêcha d'y as-
sister. On le trouve présent à la procession faite h Paris, le 14 juin
1562, pour réparer les outrages que les huguenots avoient commis
dans l'église de Saint-Médard. Prévoyant la longueur de son absence,
et ne voulant pas que son diocèse fût frustré dans des temps si péril-
leux, des avantages de la visite d'un évéque, il constitua son vicaire-
général \k cet égard, François Menjart, évêque de Négrepont. Ses pou-
voirs sont datés de Paris, le 27 mai 1562, jour auquel Philippe de
(1) Grand Mézeray, sur Charles IX, p. 68
^miÊsm'^m
i54 PHILIPPE DE LENOMGOURT, XGIV^ ÉVÊQUE d'aUXERRE.
1500 ^ 1663. Lenoncouri établit Gaspard Damj, son vicairc-géoéral, pour ce qui re-
gardoii son prieuré de La Gbari té-sur-Loire, qu'il avoit eu de son oncle,
en lui cédant celui de Nanteuil. Ce même chanoine est nommé dans
le procès-verbal de la coutume d'Âuxerre, comme chargé de le repré-
senter dans rassemblée des trois États de TÂuxerrois, qui se tint,
pour en faire la rédaction, au mois de juin de Tan i561.
Ce fut au plus tard pendant l'automne de Tannée 1562, un peu
avant la mort du roi de Navarre (1), que Philippe i^e voyant obligé de
rester en cour, quitta Tévéché d'Aoxerre. On en juge par la date des
bulles de son successeur qui sont du 10 décembre de la même année.
Il traita de cet évéché avec le cardinal de la Bourdaisière, qui lui
donna Tabbaje de Rebais, se retenant sur ce bénéfice une pension de
mille livres. Depuis ce temps aucun monument de l'église d'Auxerre
ne fit mention des Lenoncourt , qui ne la gouvernèrent que comme en
passant. Philippe vécut encore trente ans après. Il fut chancelier de
l'Ordre des chevaliers du Saint-Esprit et mourut archevêque de Reims.
Il ne resta dans Àuxerre de souvenir de ces deux Lenoncourt, que par
le procès^ verbal de la réception du second, dont il fut distribué alors
un grand nombre de copies pour l'instruction de la postérité, et par la
résidence qu'y fit jusqu'à la fin de ses jours un nommé Charles Thiot,
soi-disant parent du premier qui l'avoit attiré d'Italie et i'avoit pourvu
d'un canonicat de la cathédrale. Les armoiries de Lenoncourt se voient
au vitrage de la grande salle de l'évéché d'Auxerre, et on lit au bas ce
chiffre : 1560.
(I) Co roi fut lue au siège de Rouen, en novembre 1 502.
FILBERT BABOU, QUATRE-VINGT-QUINZIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 4S5
CHAPITRE IV.
Filbert (valgairement écrit Philbert) Babou, dit autrement
LE CARDINAL DE LA BOURDAISIÈRE, XCV* ÉVÊQUE D AUXERRE.
Le cardinal de la Bourdaisière résida encore moins dans le diocèse ^^ ^ ^^^o.
que Robert et Philippe de Lenoncourt (a), et Ton ne peat produire
ancane preuve qu'il y est même passé, si ce n*est peut-être en allant de
Paris à Rome, ou durant son séjour en France, en 1566 (1). Quel-
ques-uns ont écrit que sa famille étoit originaire d'Italie, et que le
nom de Babou fut celui que choisirent les cadets de la famille des
Naldi dans le pays des Faventins. Ils prétendent qu'une de ces bran-
ches passa en France et s'établit à Bourges ou aux environs ; c'est
dont d'autres doutent. Un historien de Touraine dit qu'il étoit né k la
Bourdaisière, entre Tours et Âmboise. Au moins, selon Ghaumeau, un
Filbert Babou, chevalier et trésorier de France, possédoit, dans le Berri,
vers le règne de François I®' (2), la châtellenie de Voullon, et cet historien
ajoute qu'il étoit de Bourges. C'est ce qui fait croire que le cai^dinal
de même nom en étoit aussi natif ou bien des environs. Ce Filbert, sei-
gneur de Voullon, ayant épousé, en 1510, Marie Gaudin , dame de la
Bourdaisière et de Thuisseau (6), communiqua à ses enfants le surnom
(1) Reg. Cap.y Gjulii 1566. | (9) Ilist. du Berry, p. 269.
(a) Ce défaut de résidence dans le diocèse par les évéques^ depuis les Dînteville^
est regardé par le président Chardon, comme Tune des causes qui ont facilité Tin^
troduction du calvinisme dans la Yille capitale. Il remarque avec raison que le
gouvernement épiscopal, confié à des vicaires-généraux, devait manquer de la sol-
licitude qui n'appartient qu'au pasteur du troupeau. (iV. d. E.)
(p) Cette dame fut la maîtresse de François l«r et ce fut là la source de la fortune
de sa famille. Voy. Chalmel; Hist. de Touraine, t. m. {N, d, E.)
156 FlLBfiRT BABOU ,
1563 il 1570. ^^ '^ Bourdaisière , et surtout à Tainé nommé Jean, qui, outre plu-
sieurs emplois considérables dont il fut honoré , fut gouverneur et
bailli de Gien (1). Notre évéque fut aussi plus communément connu
sous ce nom , etTévéché d'Âuxerre fut le dernier bénéfice qu'il posséda.
Après avoir étudié à Paris sous les plus habiles maîtres, il avoit été fait
évéque d'Angouléme dès Tan 1552, n'étant âgé que de vingt ans. Il
fut maître des requêtes en 1557, doyen de Saint*Mariin de Tours en
1559, abbé du Jard, proche de Melun, en 1560, et cardinal du titre
de saint Sixte , le 4 mars 1561 . Quelques-uns ajoutent qu'il avoit été
trésorier de la Sainte-Chapelle de Paris. Il fut aussi ambassadeur ordi-
naire des rois de France à Rome, et s'étant dignement acquitté de
cette fonction sons Henri II et François II , le roi Charles IX lui con-
tinua le même emploi. Mais les grandes dépenses dans lesquelles sa
dignité de cardinal le jeta, engagèrent le pape Pie IV, qui l'avoit élevé
il la pourpre , de le transférer à un évéché d'un revenu plus considé-
rable que celui d'Àngouléme. Cette raison est assez clairement insinuée
dans la bulle de translation {i). Elle fut présentée au Chapitre d'Âu-
xerre, le 18 juin 1565, par Mathieu de Macheco, archidiacre de
Passy en l'église de Langres , qu'il avoit chargé de sa procuration spé-
ciale, le 28 avril précédent. Les chanoines, après avoir témoigné leur
joie d'avoir un cardinal pour évéque, ne purent dissimuler son obliga-
tion indispensable de résider dans le diocèse. On ignore quelle fut la
réponse à cette remontrance ; mais on nomma aussitôt deux dignités et
deux chanoines pour examiner ses bulles » et lorsqu'on eut vu les lettres
du roi datées de Vincennes, par lesquelles il ordonnoit au bailli d'An-
xerre ou à son lieutenant de le faire recevoir, attendu que dans le
conseil privé on n'avoit rien trouvé à redire à ces mêmes bulles , on
mit en possession de l'évéché l'archidiacre de Langres, en lui faisant
prêter le serment ordinaire des évêques k leur joyeux avènement. Le
mois ne fut pas écoulé qu'on reçut du cardinal même un abrégé des
raisons qui le retenoient , et qui dévoient le retenir encore longtemps
éloigné de son diocèse. Par ces lettres il établissoit pour ses vicaires-
(1) Anselme sur les grands-mâttres d*ar-
UUerie.
(i) Il eil quaUflé élu évéque d'Auxerre
dans les registres du Vatican, au IGdécembre
1560.
QUATRE-VlNGT*QUmZIÈME ÉVÊQUE D*AUXERRE. 1S7
généraux Mathieu de Macbeco ci-dessus nommé, et Gaspard Damy, déjà
officiai, accoutumé à exercer la même fonction sous les deux derniers
évéques. Elles avoieni été expédiées à Rome le 10 mai, en présence de
Nicolas Breton , dojen de Noyon , secrétaire du cardinal de Lorraine,
et de Pierre Barat, clerc du diocèse de Langres, chanoine d'Auxerre.
Un défaut qui y fut remarqué obligea Tévèque k en renvoyer d'autres
au mois d'avril suivant. Pendant cet intervalle, l'archidiacre de Langres,
qu'on nommoit plus communément \k Âuxerre du nom de Passy ou
Pacy son archidiaconé , devint chanoine de notre église, et prit posses-
sion de sa prébende le 20 septembre. Gomme il étoit aussi chanoine
de Notre-Dame de Paris, il y fit sa résidence la plus ordinaire , et ex-
cepté quelques provisions de bénéfices qu'il y expédia pour le diocèse
d' Auxerre, il n'exerça guère son grand^vicariat qu'à l'égard du tem-
porel de l'évéque. Ge fut par sa médiation que le cardinal se voyant
pressé de payer sa cote de deniers de subvention accordés k
Gharles IX, vendit et aliéna, le i2 décembre, en vertu d'une bulle du
pape, pour la somme de seize cents livres, l'hôtel épiscopal d'Auxerre,
situé à Paris, proche la porte de Saint-Michel, à Guillaume Manault,
conseiller au Ghàtelet. II se démit depuis de sa prébende d'Auxerre,
en faveur de Palamèdes Foudriat, clerc auxerrois, étudiant à Paris en
1565, qui mourut abbé de Ghalivoy en 1626 (1). L'autre vicaire-
général, résidante Auxerre, donna aussi quelques soins au temporel.
II défendit aux fourniers de Varzy, principale terre de Tévéché , de
couper dans la forêt d'autres bois que ceux qui leur seroient marqués
par les officiers de l'évéque. Il y eut , en 1565, un acte de foi et hom-
mage rendu pour la baronnie de Donzy à la tour de ce chef-lien
nommée la tour d'Isoar, par Filbert de Mazengarbe et Etienne Goulon,
au nom de Louis de Gonzagues , duc de Nevers ; et deux ans après, un
autre hommage fut aussi rendu à Auxerre au nom du même duc de
Nevers, pour la châtellenie de Beauche (2). On présume que Gaspard
Damy les reçut suivant son pouvoir général ; agissant conséquem-
ment , il assembla , en décembre 1 565 , le clergé de la ville pour
traiter des affaires excitées au sujet de la religion et qui commençoient
(I) Nova GalL Christ. \ («) Talml, Corn. Nivem,
1563 i 1570.
1309 i 1570.
158 PILBERT BABOU,
à devenir sérieuses (i ). Et comme d*an autre eôté il avoit les intérêts du
Chapitre à conserver, parce qu'il étoit du corps, il témoigna à ses con-
frères, assemblés le premier jour de mars suivant (2), que quoiqu'il fut
officiai de l'évéque, il ne vouloit faire aucun exercice de sa juri-
diction sur les ecclésiastiques et autres sujets de la juridiction capito-
laire ; ce qu'il déclaroit sans cependant préjudicier à celle de Tévéque.
Au commencement de la même année, dix jours après Pâques
(car on ne s' étoit pas encore conformé , dans Anxerre, au nouvel édit
de Charles IX, qui ordonnoit de commencer l'année au premier jan-
vier), les chanoines de la cathédrale voyant qne la misère du temps ang-
mentoit de jour en jour avec les guerres civiles, concertèrent d'écrire
an prélat (5) pour lui représenter qu'il seroit expédient de supprimer
quelques prébendes de l'église , et en même temps pour lui remontrer
respectueusement que sa présence devenoit nécessairer, afin de
pourvoir aux besoins de la religion. Le prélat ne se hâta pas beaucoup
de répondre « ce qui obligea le doyen d'inviter l'évêqne de Nevers et de
l'amener à Anxerre pour quelques affiaiires pressantes (4). On attendoit
le roi qui devoit passer par Auxerre denx mois après. Le palais épis-
copal fut tenu prêt pour l'y recevoir le 18 avril. J'ai rapporté ailleurs
les circonstances de ce passée (5), à la réserve de celle qui regarde
les prébendes de la cathédrale, auxquelles nos rois peuvent nommer à
la première vacance, après leur entrée dans la ville épiscopale. Jean
Henault, aumônier du duc de Guise, obtint le brevet du roi pour la
prébende de la cathédrale d'Auxerre. Le roi et le duc d'Aumale écri-
virent même en sa faveur au mois de septembre 1567, et en consé-
quence de ces lettres, le Chapitre intervint à la sommation qui fut faîte
à Gaspard Ilamy, vieaîre-général, d'y satisfaire (6). Le cardinal de la
Boordaisière n'envoya sa réponse aux instances qu^on lui faisoit de venir
% que bien avant dans l'année 1566 (7). Mathieu deMacheco, sou
(I) Reg. Cap., i3 iét.
(S) Rtg. CapU. , 1 martii 1565.
(3) Reg. Capit,, S mai t565.
(4) Reg. CapU., ihfeb. 1565.
(5) Hist. de la Priie d*Ainem. p. 105.
(6) Reg. CapU., 22 sepu 1567.
(7) On lit dans le journal mannacrit de
[. Bnilart^ chanofae de Notn-Dame de
Paris, oontenré i Dgoo es b bUiUoIhéqne
de M. le président Bonhicr :
«LesaBedi21....1S<5, le caidinal de
• la Boordaisière reœnt nooTelle de la
• mort do pape, par fordre qne le roy loi fit
» départir plutost qoe faire se poona» et
• d*aUer k Rome pov Tâection d'an no«-
• veao pape. •
QUATRE-VINGT-QUINZIÈME ÉVÉQUE d'aUXBRRE. 459
vicaire-général forain , apporta le 4 novembre , en plein Chapitre, des ise^ ^ 1570.
lettres du roi qui servoient d'excuse à cet évéque. C'est pourquoi on
prit la résolution de n'en plus parler. L'année i567 ne fut point ré-
volue, qu'on s'aperçut que les chanoines avoient eu grande raison de ^
l'inviter de se rendre au pays. Peut-être que sa présence eût intimidé
le parti huguenot, qui alloit toujours en augmentant. Mais enfin le ser-
vice du roi l'emporta sur celui du diocèse , ainsi la ville devint en proie
pendant son absence , depuis le 27 septembre i567 jusqu'au mois de
mars suivant (a). Le dégât fut si grand dans les maisons canoniales, qu'on
fut obligé de demander à ce prélat et k ses vicaires-généraux la permis-
sion de loger dans le palais épiscopal , en attendant qu'elles fussent
rétablies (1). Le sieur de Passy, principal grand-vicaire, fut aussi prié
de l'engager à contribuer aux réparations de l'église qui venoit d'être
pillée et ruinée entièrement. Mais l'antiquité n'a transmis jusqu'à
nous aucun monument de sa libéralité ; et Ton ne voit en toute l'église
ses armoiries que dans un petit vitrage de la chapelle où les évéques
s'habillent lorsqu'ils officient ; encore fut-ce Gaspard Damy, son vi-
caire-général, qui les y fit mettre après l'avoir réparée en 1568 et
l'avoir ornée du tableau qu'on y voit encore.
Environ deux ans après l'on apprit sa mort, et elle fut rendue .
publique en Chapitre, le 20 février 1570. Il étoit mort subitement,
à Rome , le 26 du mois précédent , âgé de 57 ans , dont il en avoit
passé sept avec le titre d'évéque d'Auxerre, que ses neveux héritiers
oublièrent dans l'épitaphe qu'ils lui firent dresser dans l'église de
Saint-Louis, au bout de la nef, vis-à-vis le portail. En voici la teneur :
D. 0. M.
PhILIBERTO NaRDIO BuRDESIO, s. R. E. CARDINALI, TRIUH GALLIiE
Regum Henrici II Francisci II Caroli IX apud Paulum rV et
(1} Reg. Capit., 22 et 25 april 1568.
(a) La ville fut surprise par les protestants dans la nuit du 27 au 28 septembre 1567.
Ils s*en emparèrent et l'occupèrent pendant six mofs, durant lesquels les églises,
les couvents et les maisons du Chapitre subirent d'alTrcuscs dévastations. Voyez au
tome 3 les mémoires sar l'Iiistoire civile. ( iV. d, E,)
ISej k 1570.
160 filbert babou ,
plum iv pomtifiges maximos legatione perpetua egregie fumcto ,
Maria Godina mater, Philibertus et Fabricius nepotes posuere.
YixiT kmos LVII. oBiiT VII cal. februarii anno DoMiNi M. D. LXX.
Il paroit que pendant qu*\\ fut évéque d'Âuxerre, il vint au moins
une fois de Rome à Paris ; il y éioit en 1566 le 7 juin, jour auquel
il conféra un canonicat d'Auxerre à Jean des Roches, clerc du diocèse
de Tours, qui avoit été son secrétaire à Rome. Elles sont datées de
l'abbaye de Saint-Victor. On trouve encore Tévéque d'Auxerre présent
il Paris avec d'autres prélats en Tannée 1568, savoir, \k la clôture de
redit de Saint-Maur-des-Fossés du mois de septembre, qui défend
Texercice de toute autre religion que la catholique (1) , et k une pro-
cession du 2 juillet 1569 contre les huguenots. Mais vraisemblablement
il s'agit de Philippe de Lenoncourt, ancien évéque d'Auxerre. G'étoit
son dernier titre épiscopal; il n'en avoit point eu d'autre depuis.
Philippe de Lenoncourt conserva ce nom d*autant plus aisément que
le véritable titulaire de l'évêché d'Auxerre étoit appelé cardinal de la
Bourdaisière. Ce cardinal laissa en mourant l'abbaye de Moutier-Saint-
Jean vacante, qui fut ensuite conférée à son prédécesseur dans Tévêché
d'Auxerre (2). On voit quelques ouvrages dédiés k M. de la Bourdaisière,
lorsqu'il étoit évéque d'Angouléme, comme les Axiomes de droit de
Jean Gillot, en 1558, et la Poésie peinte de Barthélemi Lanneau, natif
de Bourges, en 1552 (5). L'historien des jésuites (4) parle de l'évéque
d'Auxerre, à l'an 1565. Ce prélat, dit-il, n'aimoit point les jésuites;
mais la démarche que fit la société, en 1565, d'envoyer Antoine Possevin
vers le roi Charles IX , qui étoit \k Bayonne , produisit de très-bons
effets. Ce célèbre et savant jésuite s'y comporta de telle manière, qu'il
concilia k tout l'Ordre, Tamitié de l'évéque d'Auxerre. Le lecteur
appliquera ce trait auquel des deux prélats il jugera k propos , k Lenon-
court ou k la Bourdaisière ; mais suivant ce que j'ai avancé ci-dessus,
je croirois plutôt que c'est de Philippe de Lenoncourt, ancien évéque
d'Auxerre, que cet historien a voulu parler, parce qu'il étoit conseiller
(1) Reg. Parlamenti.
(S) Il laissa aussi en moarant un bâtard
qui réclama sa succes.«ion, sur quoi procès à
Rome.
(3) Roufier in Aeomaûf.
(4) Part 3, It6. i, n. 84.
/
4
JACQUES AMYOT, QUATRE-VINGT-SEIZIÈME ÉVÊQUE D*AUXBRRE. IGI
d'État, et que vraisemblablement il suivoit la cour. Il ne paroU pas
que le cardinal de la Bourdaisière eût conféré beaucoup de prébendes
d'Âuxerre à ses parents; et je trouve seulement Jean-Alphonse Naldi,
clerc parisien, reçu le 2 juin i568 k la prébende de Germain Fauchot.
Il n'y a jamais eu de vestige qu'il eût ordonné un anniversaire h Âuxerre;
ce qui peut provenir de ce qu'il n'eut point le loisir de faire un testa-
ment. Mais le Chapitre qui connoissoit les obligations de ce prélat,
poursuivit ses héritiers (1), et obtint, en vertu d'un arrêt du parlement,
une somme considérable de madame de la Bourdaisière.
\!m ï 1070.
CHAPITRE V
JACQUES AMYOT, XCVIe ÊVÊQUE D'AUXERRE.
La vacance du si^e ëpiscopal d'Auxerre, qui commença le 20 1570 à i->93.
février 1570, et qui dura un peu plus d'un an, ne changea presque
rien (a). Le Chapitre continua les pouvoirs de vicaire général à
Gaspard Damy, qui l'avoit déjà été sous troit évéques d'Auxerre
consécutivement, sauf les protestations que le doyen et l'archidiacre
firent pour la conservation de leurs droits (2). La seule innovation à
laquelle cette vacance donna occasion, est, que le Chapitre qui a voit
toujours nommé et conféré en corps les bénéfices pendant les vacances
du siège, statua, le 10 février i571, que chaque chanoine nommeroit ou
présenteroit à son tour par semaine, en commençant par le doyen.
(1) Reg. Cap., 31 jatmar, 1576 H 4 junii Ci) Reg. Capit. 1570, 10 feb:
1575.
1 »
t •
j
(a) Cette année le seyne ou synode âonucl du clergé diocésain eut Heu^ans le choeur
de la cathjj^rale. La collation que donna le Chapitre se composa de 400 gâteaux et
de Tin ronge et blanc— Compte de la Régale. ) (iV; d. B.)
*
. * ^
162 JAGÇUBS AMYOT,
1570 il 1503. jusqu'à ce que le siège épi^copal fût rempli , et qu'h la vacance suivante
on reprendroit le tour où Ton en seroit resté. Mais cette conclusion
ne put avoir lieu cette fois-la , puisque dès le commencemcntr du mois
de mars, Jacques Amyol , successeur du cardinal de la Bourdaisière ,
prit possession de Tévêché par procureur.
Plusieurs historiens ont écrit certaines particularités de la vie de
Jacques Amyot sur des ouï-dire , et sans avoir devant les yeux des
mémoires fidèles. Tels sont Yarillas« Brantôme, Sainl-Réal, et même
M. de Thou. Comme ils ont été déjii réfutés par un critique célèbre (i),
on trouvera bon que je me dispense de rapporter les circonstances
qu'ils ont marquées de sa jeunesse , sans cependant passer sous silence
ce que j'ai appris par les écrits de ceux qui ont souvent parlé h ses
amis les plus intimes, et auxquels il ne cacboit rien, quand l'occasion
se présentoit de dévoiler ses plus grands secrets. On ne peut mieux
être informé des commencements de sa vie , que par le mémoire qu'il
en dressa lui-même, et qu'il confia h Renaud Martin, Tun de ses com-
mensaux, pour l'achever après sa mort. Lii-dessus Rouillard a rédigé
ce qu'il en dit dans son Histoire de Melun , et en cela il aura toujours
la préférence parmi les critiques. Ce mémoire ayant été inséré à la fin
du livre manuscrit de la cathédrale d'Auxerre, qu'on appelle Gesta
Pontificum^ a été rendu public par le P. Labbe , jésuite , au bout de
cette collection sur les évêques d'Auxerre. C'est ce que Bayle parolt
avoir ignoré, lorsqu'il a remarqué que cette vie latine n'a pas été
imprimée. Jacques Amyot y dit de lui-même qu'il étoit né à Melun ,
le 50 octobre 4515, de parents plus avantagés du côté de la vertu que
de celui de la fortune. Il ne déclare point la profession dont étoit son
père Nicolas Amyot ; mais ses commensaux le tenoient pour le fils d'un
{)etit marchand de mercerie ; ce qui s'accorde avec Rouillard qui dit
que ce marchand vendoit des bourses et des aiguillettes. Lorsqu'il eut
appris les premiers rudiments à Melun, il alla à Paris où il continua
ses études de grammaire , servant de domestique à quelques écoliers
d'un collège qu'il n'a jamais nommé; sa mère, Marguerite d'Amours ou
des Amours, avoit soin de lui envoyer exactement chaque semaine un
(1) Bayle dani son DictioDMiro.
.4
QUATRE-VINGT-SEIZIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 165
paio par les bateliers de Melun. L'avidité d'apprendre le poursuivant ^-70 à iro:
jusque dans la nuit , il avoit recours à la lumière que pouvoient fournir
quelques charbons embrasés, et il s'en servoit au lieu de chandelle ou
d'huile, tant étoit grande alors son indigence ; avec ces foibles secours
pour les premiers commencements , il ne laissa pas d'atteindre les
classes supérieures. Il apprit la langue grecque au collège du cardinal
le Moine, sous Jean Evagre rémois, qui tenoit une classe exprès
pour cette langue. Il étudia la poésie sous Jacques de Tusan, professeur
royal , l'éloquence et la philosophie sous Pierre Danès (1) , et les
mathématiques sous Oronce Finée , tous trois professeurs royaux
établis nouvellement par François I**^. S'étant fait passer maître ès-arts à
dix- neuf ans (2), il alla à Bourges pour y étudier le droit civil avec un
jeune homme qui fut depuis célèbre avocat en parlement (5). Y étant
arrivé, Jacques Collin, lecteur ordinaire du roi et abbé deSaint-Ambroise,
le fit précepteur de ses neveux, et l'engagea ii accepter une chaire de
professeur d»^s langues latine et grecque dans l'université de B«)urges,
qu'il lui obtint par le moyen de Marguerite , sœur unique du roi de
Navarre 9 duchesse de Berri. Après avoir eu soin pendant quelque
temps des neveux de l'abbé de Saint-Ambroise, M. de Morvilliers,
lieutenant-général au bailliage de cette ville, étant informé de son
mérite, le donna h M. Bochetel, seigneur de Sacy, secrétaire du roi,
qui étoit son beau-frère, pour veiller sur les études et sur l'éducation de
ses enfants. Pendant les dix k douze années qu'il fut professeur et pré-
cepteur h Bourges, il commença 2i traduire quelques ouvrages grecs en
langue française , et il avoua depuis à ses amis , que ce temps-là avoit
été le meilleur et le plus tranquille de toute sa vie. Il travailla d'abord
à la traduction de l'histoire de Théagène et Chariclée , et se mit ensuite
à traduire quelques vies des hommes illustres de Plutarque. Cette der-
nière traduction dédiée k François I®^, fit tellement connoitrc la
(I) Ce p. Danés lui fit apprendre quelques
oraisons de Cicéron.
(S) Il y avoit déjà ea un Pierre Aniyot ,
niattre ès-arts , qui assista poar rUniTersilé
de Paris au concile de Gonsiance , et qai,
dans la délibëraUon que fit la nation de
France sur les annates, opina contre. Thés,
anecdot. t. ii,;). 155G.
(3) Il est faa% qu'Aniyot se fit religieux
dans Tabbaye de Saint-AmbroisCt comme
quelques-uns l'ont avancé, entre autres le
sieur fiuUart, en ses illustres historiens.
iGi JACQUES AMYOT,
ir.7o il 1593. péDciraiioD (l'Am)oi dans la langue grecque, que le prince lui ordonna
de continuer le reste de Touvrage, et lui donna pour récompense
l'abbaye de Bellozane, qui venoit de vaquer par la mort de Yatable.
Ce fut le dernier bénéfice consistorial auquel ce roi nomma. Amjot ne
croyant pas devoir attendre une plus grande fortune en France, prit le
parti d'aller en Italie pour perfectionner sa traduction de Plutarque
par le moyen des manuscrits, et par les conférences avec les savants de
ce pays-lii. C'étoit vers l'an i546. M. de Morvilliers de Bourges,
ambassadeur à Venise, le mena avec lui en Italie, où il fit toutes les
recherches nécessaires. Un peu après le retour de cet ambassadeur, Âmyot
fut chargé par Odes de Selve, son successeur dans l'ambassade, et par
le cardinal de Tournon , alors résidant à Rome, de présenter au concile
assemblé de nouveau, à Trente, le i^' septembre! 551, les lettres du roi
Henri second avec ses protestations; il s'acquitta d'une commission si
difficile avec toute la satisfaction possible , ainsi qu'on peut voir par la
lettre qu'il écrivit le 8 du même mois à M. de Morvilliers (1). Le désir
ardent de se perfectionner dans les auteurs grecs par la connoissance
des manuscrits, lui inspira d'aller de Venise à Rome. Jean le Doux,
évéque de Mirepoix, l'y retint près de deux ans. Le cardinal de Tournon
convaincu de l'habileté d'Amyot dans toutes les affaires, et même celles
qui regardoient la couronne, voulut l'avoir pour compagnon de voyage
a son retour de Rome, avec Denis Lambin, qui fut depuis professeur
royal de langue grecque à Paris. Ce cardinal arrivé k la cour , apprit
que le roi souhaitoit un précepteur pour les ducs d'Orléans et d'Anjou.
Il présenta Amyot a Henri II, qui lui donna cette charge dont il jouit le
reste de son règne et sous celui de François II (2). Pendant qu'il fut
précepteur des princes, il acheva sa traduction des hommes illustres de
Plutarque, et la dédia à Henri II. Ensuite il eotreprit celle des œuvres
morales du même auteur qu'il acheva sous le règne de Charles IX, à
qui il la dédia. Ce prince, auparavant connu sous le nom de duc
d'Orléans, étant parvenu à la couronne l'an 1560, se souvint de son
(1) EUe est dans les mémoires d'Alphonse
Yargas , pubUés en 1700 , et dans d'autres
imprimés pins anciennement.
^i) J*ai vu les Yersious qu'Amyot faisoit
faire par Charles , duc d'Orléans, de Torai-
son de Cicéron pro Marco Marcello , écrites
de la main de ce prince , qui régna depuis
sous le nom de Charles IX.
QCATRE-VINGT-SEIZIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 165
précepteur, et dès le lendemain de son avénemenl, 6 décembre, il le 1370 à isos.
fit son grand-aumônier, son conseiller d'Élal, et conservateur de l'Uni-
versité de Paris (1). Il lui donna encore depuis Tabbaye de Roches au
diocèse d'Auxerre, et celle de Saint-Corneille de Compiègne. Le jeune
roi Tappeloit son maître, lorsqu'il vouloit lui parler familièrement (2) ;
mais il lui fit aussi quelquefois des reproches, par exemple sur sa trop
grande frugalité, en ce que pouvant faire bonne chère, il se contentoit
souvent de manger des langues de bœuf. Trois ou quatre ans après,
il fut doyen de la cathédrale d'Orléans, sans qu'on sache de quelle
manière, sinon qu'on croit que l'évéque Jean de Morvilliers y contribua.
L'évéché d'Auxerre étant venu à vaquer par la mort du cardinal de la
Bourdaisière, arrivée en cour de Rome, le pape Pie V pourvut a tous les
bénéfices de ce cardinal plenojurSy et nomma h Févêché d'Auxerre un
particulier dont le nom n'est point venu h notre connoissance ; ce qui
causa une grande dispute entre le roi et le pape. Cette circonstance ,
quoique combattue par l'historiographe Renaud Martin , se trouve
alléguée dans des écritures du Chapitre d'Auxerre de l'an 159^(5), où il
est marqué que les chanoines avoient été fort sollicités par celui qui
avoit des provisions du pape, de le recevoir, et de lui délivrer les
revenus échus ^pendant la vacance, et qu'ils n'en voulurent rien faire.
Le pape obligé de condescendre aux volontés du roi, et informé d'ail*
leurs des qualités extraordinaires d'Amyot, le nomma ^ cet évéché, et
Henri III qui désiroit ardemment Pavancement de son maître (c'est le
nom qu'il lui donnoit toujours), sut bon gré au Saint-Père d'avoir confirmé
son choix. Amyot ayant accepté, et s'étant fait sacrer h Paris, envoya
sa procuration h Laurent Petitfou , archidiacre d'Auxerre. Celui-ci la
présenta avec les bulles le 5 mars 1571 et prit possession. Le même
jour, François de la Barre fut reconnu vicaire général, et Jean
Amyot, auditeur des comptes, promit par écrit sur le registre, au nom
du nouvel évéque, son frère , une chapelle d'ornements. La disette
où se trouvoit l'église d'Auxerre par sa spoliation totale arrivée trois
ans auparavant, aussi bien que les difficultés qu'on venoit d'essuver
(1 ) De Thou, m rtto sua. I Dupay. coté 81 .
('{) Vie latine do Chartes IX , ms. de I Ci) Voy. Preaves, 1592. t. iv.
166 JACQUES AMYOT,
1Ù70 à iô9û. ^upr^'^ ^^s héritiers du cardinal de la Bourdaisière , eogagèreut les
chanoines à user de celte précaution inouïe jusqu'alors. Dans l'année
même, il obtint du roi la permission de quitter la cour et devenir
à Âuxerre. Il s'arrêta à Sens , le 24 mai , jour de l'Ascension ,
et y prêta le serment ordinaire de soumission et d'obéissance (1) ,
qu'il signa sur le grand autel en présence du cardinal de Pellevé,
archevêque , et fit le présent accoutumé d'une chape au trésor de la
métropolitaine. Il avoit fait ajourner an mardi 29 mai les quatre
vassaux ordinaires, pour le porter depuis l'église de Saint-Germain
jusqu'à la cathédrale. Les trois derniers ne firent aucune difficulté,
et pourvurent à cette fonction; mais Jean Girard, avocat du roi au
bailliage d'Âuxerre, chargé de la procuration de Charles IX , repré-
senta qu'il ne convenoit pas que ce prince fût sujet ii cette soumission,
et soutint (quoique faussement) que cela ne s'éloit aucunement pratiqué
depuis que les rois avoient succédé aux comtes d'Auxerre dans la pro-
priété du comté. Le nouvel évéque, à qui ces représentations furent
réitérées dans l'église de Saint-Germain , allégua plusieurs passages
et histoires propres à faire connoitre que ce n'étoit pas h sa personne
privée, ni aux évêques même en particulier, que cet honneur éloit
rendu , mais à Dieu. Se contentant cependant de la soumission que
firent jusqu'au bout de l'église de Saint-Germain , René de Pernay ,
seigneur de la Bertauche, et son fils, pour le duc de Nevers en tant que
baron de Donzy et de Saint-Yerain, et de celle de Guillaume de la
Bussière , seigneur de la Bruère , pour le baron de Toucy , il déclara
qu'il ne vouloit pas se servir de son droit, et qu'il feroit le reste du
chemin à pied sans préjudicier à ses successeurs ; comme , en effet , il
le fit de l'église de Saint-Germàin à la cathédrale, précédé par le clergé
séculier et régulier, accompagné des quatre personnes qui représen-
toient les quatre barons; et la chaise où il auroit dû être porté, fut
soutenue élevée proche de lui, durant tout le chemin, par quatre bour-
geois de la ville au nom des mêmes barons ; ce qui revenoit assez au
cérémonial pratiqué h l'entrée de Philippe de Lenoncourt, onze ans
auparavant.
1 ) £x tMS. Senon,
QUATRE-VIMGT-SEIZIÈMB ÉVÊQUE d'aUXERRE. 1G7
Jacques Âmyol étoit âgé de cinquante-huit ans lorsqu'il prit posses- 1570 ^ v:da
sion de l'évéchë d'Auxerre ; il avoua lui-même en arrivant qu'il n*étoit
ni théologien, ni prédicateur , n'ayant presque étudié que des auteurs
profanes. Il commença h se faire une occupation journalière de la lec-
ture de TEcriture-Sainte, des saints Pères grecs et latins. En attendant
qu'il fût en état de prêcher devant son peuple, il chargea de cette fonc-
tion Pierre Viel, docteur en théologie, qu'il avoit amené avec lui, et
qui prêcha en effet en sa présence plusieurs sermons dans la cathé-
drale. Ce théologien eut aussi avec lui de fréquentes conférences sur
les endroits les plus remarquables de TEcriture-Sainte , touchant les
points dogmatiques controversés et sur les questions de Técole.
Lorsque Amyot eut commencé à lire la somme de saint Thomas, il
s'y appliqua de telle manière qu'il la posséda presque en entier. On lui
persuada de se hasarder de parler en public ; et quoiqu'il se défiât
beaucoup de ses forces et que la foiblesse de sa voix ne lui inspirât
pas beaucoup de courage, il prêcha d'abord les jours solennels , mais
dans un style si clair et si châtié et en même temps si enrichi de sen-
tences , que les savants sortoient de la prédication bien plus éclairés
qu'ils n'y éloient arrivés, et les iguorants n'en revenoient point sans
être instruits de leurs devoirs et rendus meilleurs qu'auparavant. Des.
commencements si heureux l'encouragèrent â prêcher plus souvent, il
ne laissa passer aucune des grandes fêtes sans officier et prêcher tant
qu'il résida à Auxerre. On prétend qu'il se tenoit en chaire d'une ma-
nière singulière. Ayant fait faire à neuf la chaire de bois que l'on voit
encore (a) , en place de celle que les huguenots avoient brûlée , il
vouloit qu'on en tournât l'ouverture du côté de l'auditoire et s'y tenoit
assis dans un fauteuil. Quoiqu'il débitât ses sermons en françois, il les
composoit cependant en latin, et l'on eu a conservé longtemps les mi-
nutes.
Voici le régime de vie qu'il observa pour devenir théologien et pré^
dicateur depuis son avènement à l'épiscopat : levé h cinq heures du
matin en toutes saisons, il récitoit son office de la nuit, puis il se te«
noit enfermé dans son cabinet jusqu'à l'heure de la grand'messe, étn-
(a) Cette chaire n'existe plus. (JV. d. £.)
1C8 JACQUES AMYOT ,
1570)11093. ^^^^^ '^^ livres dont j'ai parlé. Après la grand'messe il relenoit le
célébrant et quelques dignités ou chanoines à diner. Pendant le repas
on ne s'entretenoitque de matières de littérature ou de choses honnêtes,
en sorte que sa table pouvoit passer pour une véritable école de piété
ou de science, d'où Ton ne se retiroit point sans être devenu plus
savant ou plus pieux. La conversation, après le repas, duroit l'espace
d'une heure; il retournoit ensuite h sa bibliothèque et coutinuoit jus-
qu'au soir les études commencées le matin. C'est ainsi qu'il s'arran-
geoit les jours ordinaires, excepté que l'Âvent et le Carême il célébroit
la messe en particulier avant que d'aller à la graiid'messe des chanoines.
Les dimanches et fêtes, il assistoit aux premières cl secondes vêpres
et à matines, et disoit aussi une messe basse. Les jours de grandes
fêles auxquels il devoit prêcher vers l'heure du midi, il remettoit au
soir le repas ordinaire des officiers du chœur. Lorsqu'il alloit par la
ville , il étoit habillé en grand-aumônier, dit son historien. Dans son
palais épiscopal il se tenoit vêtu en évêque. A l'église, si c'étoit l'été,
il étoit en rochet et surplis, bonnet carré et aumusse ; en hiver, il étoit
comme les chanoines, excepté que sur l'habit long il ne portoit point
l'aumusse ronde, c'est-à-dire le petit capuchon (1).
On peut se ressouvenir ici de la description que j'ai faite ailleurs de
la triste situation où se trou voit l'église d'Auxerre, lorsque le cardinal
de la Bourdaisière fut remplacé par Jacques Amyot (2). Tout ce que
{\) Ex aetis Capit, Àutiss. pro Capit. | (^ Ilist. de la Prise d'Aaierre (a^
BeUov. 1620, fig. Huot. |
(a) L'abbé Lebeuf passelégèrement ici sur les ^erres de religion qui dévastèrent
rAuxcrroiSy pour ne pas répéter ce qu'il a dit dans sa Prise d^Auxerre, On voit par
les documents généraux du temps jusqu'à quel point la dévastation des monastères
et des églises avait eu lieu.
En 1572, un rôle des bénéfices du diocèse, occupés par les Rebelles et abandonnés
par leurs possesseurs, nous apprend que les pays des bords de la Loire étaient par-
ticulièrement maltraités. On cite dans cette liste les abbayes de Saint-Laurent, de
Bouras (brûlées), la Chartreuse de Basseville (ruinée) , les prieurés de La Charité, de
Saissy, du Pré, de TEpau ; ces deux derniers brûlés; ceux de Revillon , d'Entrains,
de Ratilly, de Plain-Marchais, ruinés. (Arch. de ITonne, documents historiques).
(iV. d. E.)
QUATRE-VINGT-SEIZIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 169
les chanoines avoienl pu faire durant les années i568 , i569 et 4570, 1570 ^ 1593.
se réduisoit au plus nécessaire. L'église ayant besoin d'être bénie de
nouveau à cause des profanations horribles que les huguenots y avoient
commises, le nouveau prélat commença par Ik aussitôt après son
arrivée, et il en fit la bénédiction le vendredi 22 juin i571. Le 27 du
même mois il rebénit celle des Cordeliers, dans laquelle avoit été le
prêche des calvinistes. De Ih il se transporta à Varzy, ville principale
de son temporel ; il y étoit le 5 juillet, suivant les lettres d'institution
d^official qu'il y fit expédier. En venant se faire recevoir à Âuxerre , il
avoit apporté pour la cathédrale des ornements de drap d'or, où le
Chapitre ne trouva à redire que dans le nombre des chapes , parce
qu'il n'y en avoit point pour ceux qui chantent les répons, et que les
nappes d'autel y manquoient ; ce que les chanoines disoient avoir cou-
tume d'être donné (1). Le prélat y suppléa depuis par le moyen d'un
autre ornement de soie de couleur blanche qu'il fit donner par le sieur
du Halde, dont il n'avoit point voulu prendre les profits du quint de-
nier pour l'acquisition de la terre de Beauche (2). Après avoir un peu
garni la sacristie, il n'épargna rien pour rendre au chœur son ancien
lustre; il fit refaire k neuf, en i575, les chaires des chanoines, tant
basses que hautes (5). Le trône épiscopal qu'on voit aujourd'hui à
gauche, est aussi de son temps ; il l'avoit fait mettre h droite et dans
la place même où étoit Tancienne chaire de pierre que les huguenots
n'avoient point gâtée, k cause de la simplicité dont elle étoit. Il donna
les sept colonnes de cuivre qui accompagnent le grand autel ; celle du
milieu finit eu crosse et soutient la suspense du Saint-Sacrement (a).
La table de marbre dont il fit refaire l'autel, est une ancienne tombe
qui provenoit de la sépulture de quelque personne considérable ; on
(1) Mémoire de 1 592 contre lai.
i% Ibid.
(5) Ex irueriptione ad introU. Charù
(a) Llnscription qui rappelait ces restaurations était ainsi conçue : « Jacobos
» Amyotns Antissiodori episcopus^ cum à perduellibus hœreticis fœde laceralum,
» direptum, ornamentisque omnibus spoliatum reperisset hoc templum, exedram
» istam divinis laudibus concinnendis accomodatam ad Dei Opt. Max. gloriam ,
» domusquc ojus dccorem de integro inslaurandam curavit. 1573. a» (N, d. E.)
t
<
.4
170 JACQUES AMTOT,
1570 ï 1993, 3 prétendu que c^étoit elle qui couvroit le tombeau du saint évéqae
Bernard de Sulljr» inhumé au milieu du chœur. Il fit la consécration
de ce nouvel autel, le 15 juillet 1576, quelque temps après avoir reçu
de Rome un os du bras de saint Saturnin, célèbre martyr de la même
ville, que le cardinal de Pellevé , archevêque de Sens , avoit tiré de son
titre de saint Jean et saint Paul, relique très-avérée (1). La donation
du cardinal est datée de Rome, le 2 janvier i576. Ce fut aussi aux
dépens du nouvel évéque que le sanctuaire fut fermé de murs ; les gril-
lages de fer qui le fermoient auparavant avoient été rompus ou empor-
tés. En même temps que les ouvrages dont je viens de parler se fîrent
en bois, en cuivre, en pierre, Tévéque Amyot songea à la construction
d*an nouveau jeu d'orgues qu'il avoit dessein de placer au coin du
chœur. Il fit venir, pour la confection des tuyaux , le frère Hilaire,
religieux de Notre-Dame-en-risIc , à Troyes, de l'Ordre du Val-des-
Ecoliers, qui passoU pour très-eipérimenté. Le bas des vitrages du
tour du chœur, qui avoit été cassé par les calvinistes , fut refait h ses
dépens en meilleure partie» l'an 1573. On y voit ses armoiries dans le
fond , aussi bien que celles du Chapitre et du doyen François de la
Barre. Il en eut fait autant h celles de la nef, si le maître de fabrique
de l'église se fût un peu prêté k cette bonne œuvre. Comme on ne
voyoit pas bien clair sur le grand autel, à cause de l'épaisseur des
vitrages des bas-côtés , il fit ôter une verrière entière du côté droit,
placée sur la porte qui conduit au Chapitre, et y fit substituer du verre
blanc avec une simple image de saint Jacques , son patron. Voulant
qu'on se ressentit aussi de ses libéralités en argenterie , il donna, en
1585, deux chandeliers d'argent et un bénitier de même matière (2).
Sa vie latine ajoute qu'il y joignit deux encensoirs avec leurs navettes
pareillement d'argent. Les bréviaires et autres livres rédigés à l'usage
du diocèse d'Âuxerre, n'avoient jusqu'alors été imprimés qu'en lettres
gothiques. Il conçut, en 1578, le dessein de faire réimprimer, en lettres
romaines, les bréviaires, missel, manuel et psautiers, et l'on nomma
quatre chanoines pour revoir ce qu'il y auroit h corriger (5), Mais de
(1) Voy. Preuves, 1576.
(2) Reg, Capit., \9 febr. 138r>.
(3) Reg. Capit..T juUi.iHl
QUATRE-VINGT-SEIZIÈME ÉVÉQUE D*AUXERRE. 171
tous CCS projets, celui du bréviaire fat seul exécuté. L'impression s'en
fit h Sens en 1580; l'ouvrage ne fut point revu d'une manière qui
répondit h la réputation d'un si grand prélat ; la distribution des lectures
paroit un peu mieux ordonnée que dans les éditions précédentes; mais
la poésie est aussi pitoyable qu'auparavant. La déférence que l'on eut
pour l'étymologie qu'il attribuoit au nom latin d'Âuxerre, fit qu'on
laissa imprimer partout Antissiodorum au lieu d^ Autissiodarum , per-
sonne n'osant alors contredire. Il avoit déjk destiné une préface latine
pour le missel» au cas qu'il eàt été réimprimé (1), mais l'ouvrage ne
fut point mis en état de paroitre. Les conférences que l'on eut avec ce
prélat à Foccasion du bréviaire, procurèrent au Chapitre une décharge
d^oifice. Jusqu^alors on n'avoit célébré de vigiles des morts qu'à neuf
leçons et neuf répons, mais aussi les chantoit-on très-mal, surtout
depuis quelques années. Le prélat consentit qu'on réduisit chacune de
ces vigiles h un seul nocturne (2), à condition qu'on en chanteroit les
antiennes et les répons sans précipitation ni confusion , selon le chant
grégorien et non pas syllabiquement comme on s'éloit avisé de faire en
quelques églises. Le Chapitre avoit aussi ôté longtemps auparavant, par
déférence pour l'évéque, certains usages qui pouvoient lui déplaire.
Chaque chanoine , a son tour , devoit faire l'office de chantre au chœur
le jour de Noël et de Saint-Etienne, revêtu d'une dalmatique, la mitre
en tète et la crosse en main. On statua, le 22 décembre 1572, que
dans la suite celui qui feroit cet office de chantre n'auroit ni mitre, ni
dalmatique, et qu'il porteroit un bâton cantoral (3). Il étoit resté jus-
qu'à son temps un vestige de la vie commune parmi les chanoines
d'Âuxerre. Tous les jours de jeûne du carême ils entcndoient une
lecture de piété, en Chapitre, avant complies, et pendant cette lecture
on buvoit quelques coups de vin tiré de la cave commune du Cha-
pitre (4). Cela pouvoit s'appeler véritablement collation. Au sortir de
là on rentroit à l'église en récitant le Miserere et autres suffrages pour
1570 il 1!^93.
(1) Celte préface ou leltre pattorale que
je peitédois écrite de >« main , a élé perdue
avec beaucoup d'antres papiers mêlés parmi
ceux que j'arois prêtés au P. le Brun de
rOratoire, mort k Paris en 1719.
(î) Reg. CapU,, 28 maii IS80.
(3) On croit que la ? Icille crosse de cuivre,
dont le haut est conserré dans le Trésor, a
servi à cet usage.
(4) Voy. les IVagments de rites tirés d*utt
ms. du XIII* siècle, aux Preuve», t. iv.
k
I
I I
1
172 JACQl'BS AMYOT,
1570 21 1593. I^ morts (1), après quoi oq cbantoit compiles. Sur ce que le petit
rafraîchissement pris en cette occasion , ne fut pas regardé par certains
chanoines, comme suffisant pour finir la journée, et que quelques-uns
y suppléoient de nouveau, ou abrogea la coutume d'aller boire un
coup en Chapitre , et en même temps celle d'y aller entendre une lec-
ture d'homélie ou d'autres matières pieuses. Cet usage fut supprimé le
28 novembre i586, et Ton croit que les commensaux et les amis de
l'évéque influèrent le plus dans ce changement. Il y avoit dès-lors des
gens qui combattoient mal h propos des choses dont ils ne savoient pas
l'origine ; et il falloit contenter ceux qui trouvoient les compiles trop
bien placées au coucher du soleil. Certains auteurs mal instruits (2) ont
parlé du procès des chanoines d^Auxerre, touchant les bords du camaii,
comme s'il avoit été commencé sous ce prélat et qu'il y cùi pris quelque
part. Il est vrai que le nom d'Amyot fut célèbre dans ce triste procès ;
mais ces auteurs auroient dA savoir qu'il n'est pas question de l'évéque,
mort cinquante ans auparavant; Edme Amyot, doyen de la cathédrale,
fut auteur de ces troubles vers l'an iG42.
Quoique l'évéque Amyot prêchât , il ne laissa pas d'attirer dans son
diocèse de savants personnages qui pussent remplir dignemeul la chaire
de la cathédrale. Après la mort de Jacques de la Halle, célèbre docteur,
chanoine théologal et pénitencier, arrivée en 1575, voyant la foible
santé de son successeur, il retint a Auierre un de ses compatriotes
appelé Denis Perronnet. C'étoit un docteur qui avoil fait profession
chez les Carmes, mais qui étoit sorti de cet Ordre avec permission du
pape Pie V. Il fut, en efl*et, reçu à la prébende théologale et a la péni-
tencerie, le 6 septembre 1577, en produisant un certificat d'Arnaud,
évéque de Bazas, touchant la canonicilé de sa sortie. A peine avoit-il
commencé son stage rigoureux , qu'on lui permit d^accompugner
(1) Comme personne n*a pu trouver l'ori-
gine de ce Misereret je croirois que c'est un
reste des anciennes prières qui se fai^oicut
uniqaement dans le carême à Âuxerre.pour
le chanoine dernier mort dans le cours de
l'année précédente. La vie de l'évéque
Robert m'a fourni cette pensée. Gomme
nous iomm'.'s dans un temps où l'on fait
main-basse sur tout ce qui ne parott pas de
l'office canonial, on peut craindre de voir
supprimer cela au premier jour, aQu que
complies qui s'en trouvent un peu retardées
par \k soient encore dites plus tôt.
(2) Lo Diction, univ. de la France.
Pouillc de Beauuier. Tiganiol de la Force.
QUATRE-VINGT-SEIZIÈME ÉYÉQUE D*AUXEIIRE. 175
révéqae dans la visite du diocèse, afin d*y annoncer la parole de Dieu. ^^^ ^ ^^
On peut se convaincre parle grand nombre de sermons imprimés de ce
théologien, avec quelle assiduité il s^acquitta du devoir de la prédication.
Ce pénitencier obtint du prélat, Tannée suivante, une confirmation de
la réunion, que Pierre de Belle-Perche avoit faite de la chapelle de
Saint-Germain & la pénilencerie. La ville de Gien, où il restoit quelques
hérétiques , fut une de celles où Tévéque fut plus attentif h n'envoyer
que de savants prédicateurs. Il conféra , outre cela , la chantrerie de la
collégiale de cette ville, à un ecclésiastique pieux, docte et prudent,
capable de faire beaucoup de bien. De statuts synodaux qu'ait faits
Amyot, nous connoissons uniquement ceux qn*il publia au synode du
i®' mai i582, lesquels regardent toute la matière du mariage; et
comme malgré les soins qu*il se donnoit, les mariages en degrés pro-
hibés ou clandestins se multiplioient, Laurent Petitfou, son officiai,
accorda monitoire en 4585, pour avoir des révélations sur les personnes
qui éloient ainsi mariées. Touchant la même matière, il reçut et exé-
cuta, en i584, un bref de Grégoire XIII, qui donnoit absolution et
validoit le mariage de nobles personnes François de la Rivière et
d'Anne de Yeilhan, lesquels, sans être informés des décrets du concile
qui n'étoient pas encore publiés en France, s'étoient mariés en degré
prohibé. Huit ans auparavant , le même pape avoit adressé k ce prélat
le jubilé qu'il Tavoit supplié d'accorder à ses diocésains , à Toccasion
de Tannée sainte arrivée en 1575; ce qui paroit prouver que ces
jubilés n'étoient point envoyés qu'ils n'eussent été demandés par les
évéques , chacun pour leur diocèse. Âmyot fut d'une grande exactitude
sur le port des cheveux courts. Il est marqué dans des mémoires de
son temps , qu'ayant aperçu des curés au synode , avec des cheveux
longs , il les fit approcher et leur rendit la chevelure aussi courte que
l'étoit la sienne, laquelle, comme il paroit par son mausolée, étoit
très-régulière (a). Sur la requête que les habitants de Clamecy lui présen-
tèrent, en 1582, touchant l'office divin du Chapitre et de la paroisse.
(a) On vit quelquefois au xvi« siècle des actes singuliers à propos du port des
cheveux et de la barbe. En 1548, le Chapitre de Sens refusa au serinent de Gdélitc
révéquc suffragant de Nevers, parce qu^il avait une longue barbe. (iV. d. B.)
l^liè A \99dk
174 JACQUES AIITOT,
il fil iMi r^ement, en 1586, pour la décence du culte de Dieu en
TéglUe lie Saint-Martin. Celui qu'il entreprit de donner, en i573, aux
chanoines réguliers de l'abbaye de Saint-Père , n'avoit pas eu un succès
si prompt. Son promoteur rinforma dans la visite qu'il ; fit le second
jour d'août, que ces religieux ne conservoient presque plus de marques
de la cléricature : on ne les voyoit le plus souvent que dans l'habit le plus
éloigné de leur état, celui qu'ils portoient à l'église leur devenoit odieux,
et ils se disposoient à s'habiller comme les chanoines de la cathédrale,
se disant chanoines comme eux. Le prélat leur enjoignit le port du
rochet, outre la grande tonsure , etc. Ils en appelèrent a Sens et de là
à Lyon, et partout ils furent condamnés k se soumettre aux règlements
salutaires de leur évéque. On ne voit point d'éclat semblable dans au-
cune autre des églises de la ville qu'il visita dès le commencement de
son épiscopat. Le second dimanche d'après Pâques, i572 ou i575, il
fit la réconciliation, pour ne pas dire une véritable dédicace de l'église
de Saint-Regnobert. Etienne Panserot, religieux de Sainl-Marien, curé
de Notre-Dame-la-d'Hors , l'ayant averti que les catholiques avoient
ramassé plusieurs ossements du corps de saint Vigile au moment que la
châsse de ce saint fut profanée par les calvinistes, Laurent Pelitfou,
grand archidiacre et officiai , fut commis pour s'informer juridiquement
sur ces reliques ; ce qui étant fait, Amyot se transporta dans l'église
paroissiale, le 10 juillet i 588, et les enferma dans une nouvelle châsse,
déclarant que c'étoit véritablement des reliques du saint évéque
d'Âuxerre, fondateur de cette église (1). La peste qui régna dans le
pays durant quelques années de son épiscopat , l'engagea k accorder
permission d*ériger, dans toutes les paroisses de la ville, une confrérie
sous l'invocation de Saint-Roch, par ses lettres datées de Paris , le
22 juin 1585. Les maladies contagieuses ayant recommencé dans un
autre temps , il entra encore davantage dans la dévotion des citoyens,
et bénit la nouvelle chapelle qu'ils avoient fait bâtir sous l'invocation
de ce même saint, proche le bâtiment destiné aux pestiférés. Ayant
appris le besoin où la ville éloit d'avoir une maison assurée pour les
grandes écoles , il acquit un certain canton de la grande rue Saint-
(i) Voy. les Preuf et, t. IT. n» 448.
QUATRE-VINGT-SEIZIÈME ÉVÊQUE d'aUXBRRE. 175
Germaio et y fil constraire ud corps de logis considérable. Il avoit eu ^^^ ^ ^j^
dessein d*y niettre les PP. Jésuites ; mais ils n'y furent pas introduits
de son vivant par la faute du P. Pigenat « qui alla trop lentement dans
la conduite de cette affaire et ne prit pas soin de la conclure avant le
temps des (roubles qui suivirent la tenue des étals de Blois.
L'application que donna Tévéque Amyot aux besoins spirituels et
temporels de son diocèse (a) , et surtout de sa ville épiscopale, ne l'em-
pêcha pas de vaquer soigneusement à son temporel. Le château de
R^ennes avoit été très-endommagé pendant les guerres civiles de la
religion ; cependant les évéques rhabitoient volontiers à cause de sa
situation. Il fit relever les ruines causées par le feu et le rendit logeable.
En 1572, il se fit donner un dénombrement de la terre et seigneurie
de Beauche, par le duc et la duchesse de Nivernois. Deux ans après, il
reçut une pareille déclaration de Françoise des Colons , veuve du sei-
gneur d'Ougny et de Seponse, en Nivernois, pour les fiefs qu'ils
tenoient de lui. En 1585 il reçut Olivier Foudriat, lieutenant particu-
lier du bailliage d'Âuxerre, à foi et hommage pour les fiefs des Soyarts
et de Champ-le-Roi , assis en la paroisse de Lalande , qu'il venoit
d'acquérir de noble Jacques de Lenfernat, seigneur de Prunier, fils de
Georges de Lenfernat, et le quitta des droits de quint et requint et profits
féodaux. L'année suivante, le 22 juillet, René de Prye, chevalier des
Ordres du roi, seigneur de Prye, Montpopon, Testmilon et baron de
Toucy, lui donna aveu et dénombrement de cette baronnie, en commen-
çant par le château même de Toucy. L'énumération n'avoit pas été trou-
vée exacte, elle fut réitérée, le 51 janvier 1587, et on procéda, le premier
mai suivant, k une vérification et renouvellement des limites de la seigneu-
rie, contiguës à la portion seigneuriale de Tévéque seigneur suzerain.
Le prélat fit de temps à autre des voyages k la cour ob sa dignité de
grand-aumônicr l'appeloit. Ce fut principalement sous Henri III , qui
commença a régner au mois de juin 1574. Dans le temps que ce
(a)L*évéquen'oubKa pas notamment le grand hôpital de la Madeleine d*Auxerre,
et ût, pour celte maison, un règlement très-remarquable et empreint d'une grande
charité. — Voy. celte pièce aux Preuves , t. iv, n. 446, et le fcLe-similê de récriinre
de Vévèque, tire de celte même pièce. (iV. d. S.)
170 aCUilE» AMYOT.
unk 15». prince relournuil tle Pologne en France ei qu*il passoit par la Savoie,
la ciuche&âe, qui éloit sa ianle, fit auprès de lui de si grandes instances
pour qu'il couiervàl noire évdque dans sa charge de grand-aumdnier,
qu'il lui promit de n'en pas nommer d'autre. Le roi dont il avoit été
autrefois précepteur voulut lui en porter lui-même la nouvelle ^ son
arrivée , lui recommanda d'être aussi fidèle à son service qa*il Tavoit
été h celui de Charles IX, Quelques années après établissant l'Ordre des
chevalière du Sainl-Ësprit , il en fitAm^rot commandeur-né par sa
qualité de premier aumdnier, el voulut que ses successeurs jonisseot du
même hoaneur, sans être tenus de &ire preuve de noblesse. Le roi prêta
W serment de l'Ordre entre les mains de ce prélat, qui lui mit au co( te
grand collier te 51 décembre 1 578, dans l'église des Augustîns de Psiris.
Sehm duSaussa^ ()), quelques courtisans murmurèrent sur Télévatioii
d'un bomaie de si basse naissance à un si iiaut point d'honneur ; mais
Heari Ul leur ferma ta bouche par deux paroles. Ce toit ce même cvéque
qui avoit dressé les statuts de cet Ordre (2)^ et qui prescrivit aux che*-
valiei*s certaines prières en forme d'office divin. li étott si bien venu
auprès de Henri Ul, qu'on entendoit souvent ce prince ù Texemple
de Charles IX l'appeler son maître. En effist Amvot se plut à lui
remettre alors de temps en temps quelques principes de latinité ; ce qui
dt>nua occasion de composer ce distique : Grammalicam dUcii média
r^ûo noUif in oula; bi$ nx qui fiêêrtU , fU modo grammatieui (5). Mais
une autre chose plus importante qu'il suggéra au roi, en 1575, fut de
destiner de grosses sommes pour former une bibliothèque (4). Ainsi fut
commencée cette collection de manuscrits tant grées que latins, qui
montent aujourd'hui à tant de milliers, et qui sont d'une si grande
utilité pour toute sorte de sciences. Amyot s'en servit le premier pour
perfectionner ses traductions> auxquelles il travailla à Paris et dans son
diocèse^ jusqu'à ce que la tranquillité de son esprit fftt troublée par les
émotions populaires (5). On lit qu'un jour il fit au roi un présent assez
bizaire. C'étoit celui d'un chou qu'on lui avoit envoyé de sa terre
(I) Uetcrip* eccL. n, 5â.
(9) IM.
(3} llMlMfclMt4eP»Hiiier.
(4) Exscfipi, co4tm*»
(3) Ex comme gartplor.
QUATRE-VINGT-SEIZIÈME ÉVÊQUE D*AUXERRB. i77
d'Âppoigny proche Auxerre, autrement dite Régennes; ce chou étoit ^^j^^ 1593^
d'uoe telle grosseur, qu'il falloit deux hommes pour le porter. Le roi
qui savoit THistoire-Sainte, porta k l'iostant le même jugement du pays
d^où il venoit, que les Israélites avoient porté de la terre promise d*où '
deux hommes leur avoient apporté en pompe une grappe de raisin. La
demeure d'Âmyot dans Paris, étoit dans Penclos de Thôpiial des
Quinze-Vingts, où il avoit un logis que les administrateurs lui avoient
cédé , en considération de sa dignité de grand-aumônier. Etant dans
cette ville en différentes années, il assista k quelques sacres d'évèques :
à celui de Jacques. Fourré, évéque de Cbàlon-sur-Saône , le i8 avril
1575 , chez les Jacobins de la rue Saint-Jacques (1). En 1578, il sacra
dans Téglise de Sainte-Geneviève , Arnaud de Sorbin , évéque de
Nevers , avec Pierre de Gondi , évéque de Paris, et Nicolas Fumée ,
évéque de Beauvais. Il fut présent à Saint-Denys, au mois de juin 1584,
aux obsèques de François, duc d'Anjou , frère du roi Henri III (2). Ce
fut pendant qu'il étoit à Paris, Fan 1588, que se voyant arrivé à l'âge
de 75 ans, il rédigea son testament le 15 mai; ce qu'il fit certifier le
lendemain par un acte de deux notaires au Chàtelet. Ce grand homme
parut avoir prévu ce qui pourroit arriver, si certaine faction prenoit le
dessus dans le royaume. Il étoit à Blois lorsque les Guise y furent
assassinés. La nouvelle de ce meurtre étant parvenue k Auxerre, Claude
Trahy, gardien des Cordeliers (a) publia partout et même jusque
dans la chaire , que Tévéque étant du conseil du roi , l'avoit conseillé
et su; qu'il étoit impossible que cela ne fût ainsi, puisqu'il gouver-
noit le roi , et que de plus il en avoit donné à ce prince l'absolution
sacramentelle; que pour ces causes il étoit indigne d'entrer dans
l'église, et que s'il y entroit, il feroit sonner la cloche du sermon
(1) Nova Gall, chr. in ep, Cabilon,
(2) PreoTes des hiit. de Paris, t. m, p.
442.
(3) Voy. les Preuves, 1. it, an 1588.
(a) Ce moine fameux s'appelait Paul et noa pas Claude, quoiqu'il fût ordinairement
désigné par ce dernier prénom. L'é?éque Amyoten faisait grand cas a?ant les troubles
de la Ligue. Il ra?ait chargé de l'importante mission d'absoudre les hérétiques
de Gien, de tous les cas même réservés. — Voy* Pr., t. iv, n 444. (iV. d. E,)
11 i2
I
I
178 JACQUBS AMTOT,
15T0 ^ 1593. pour assembler les habitaals , à qaelqae heure que ce fût , et les
exciter k courir sur lui; le Gordelier ajouloit hardiment , que quiconque
eoteociroit la messe d'Amyot seroit excommunié. De tels discours
ne manquèrent pas de faire dans Tesprit de la populace l'effet
qu*en attendoit ce Gordelier , qui éloit jaloux de la destination qu' Amyot
aToit faite de son collège pour les Jésuites. Il présenta ses odieuses
imputations par écrit, en plein Chapitre, et au bureau de la ^ille, essayant
d'y prouver que la feuille imprimée et reçue à Auxerre comme ailleurs,
où il étoit porté que ce meurtre avoit été fait justement, ne pouvoit
être venue que de Tévéque , qui haissoit souverainement les Guises.
Cependant Amyot avoit ignoré absolument que ce meurtre dût être
commis , et le roi n'en avoit £ût confidence qu'à ceux qui dévoient
l'exécuter. L'évéque d' Auxerre déclara aussitôt \ Blois, que le cas
étoit si énorme, qull n'y avoit que le pape seul qui en pouvoit absoudre.
Il le dit expressément à Jean Droguin, chapelain ordinaire, qui avoil
coutume de confesser le roi , en sorte que ce prince ne fut pas
confessé le jour de Noél. Le fait fut attesté par H. de Saint-Germain,
abbé de Chaalis , alors théologien du roi , avec lequel Amyot en
avoil conféré; et Sébastien le Royer, doyen d' Auxerre, en convint
à son retour de Blois. Aussi le roi ne s'adressa pas à Amyot pour
l'absolntion. Il la reçut le dernier jour de l'an de Jacques Coulomb,
chanoine théologal de Saint-Sauveur de Blois, ancien docteur de la Fa-
culté de Paris, en vertu d'un bref du pape qui donnoit pouvoir à
Henri de choisir tel confesseur qu'il lui plairoit, avec toute faculté k ce
confesseur, ainsi choisi, de l'absoudre de tous cas réservés au sainl-
si^, même ceux de la bulle m (ktma Dowùm (l). C'est pourquoi le
roi ayant cru pouvoir communier le premier jour de Fan de la main de
l'évéque de Langres, Amyot l'assista en cette cérémonie, le servit en
toute la messe, et dit l'oflke et les heures avec lui en qualité de grand-
aumônier, outre qu'en qualité de commandeor de l'Ordre du Saint-
Esprit, il étoit aussi tenu d'assister personnellement k toutes les heures
du service ce jour-là, qui étoit celui de la cérémonie des chevaliers *
r Ex acH d^so/. cmrd, Caietam.
QUATRE-VINGT-SBIZIÈME ÉYÊQUE d'aUILERRE. 179
ei enfin il dina avec lui le même jour et dit les grâces après le repas (1).
Le mois de janvier 1589 ne fut pas écoulé que Tévèque d'Âuxerre
apprit ce qu'on disoit de lui dans sa ville épiscopale. Il fut informé
qu'on avoit juré de ne plus reconnoitre le roi et qu'on faisoit des
prières extraordinaires pour la prospérité de ses ennemis ; c'est pour-
quoi il prit des sûretés afin d'avoir des preuves de ces choses , et il ne
se pressa pas de se rendre à Auxerre , espérant qu'après le premier feu
les esprits s'adouciroient. Il écrivit au doyen que s'il ne revenoit pas au
pays c'étoit de crainte d'être suspect au roi, qui pensoit que la nouvelle
démarche des habitants étoit un acte de félonie et un crime de lèse-
majesté ; que lui, évêque, croyoit, conformément à la doctrine de
saint Paul, qu'on ne devoit pas laisser de reconnoitre Henri pour roi ;
que ceux qui assuroient en chaire le contraire , étoient de ces prophètes
inspirés par l'esprit de mensonge. L'évéque eut d'autant plus de sujet
d'être attristé du procédé des Auxerrois, qu'il avoit promis au roi que
cette ville ne remueroit pas, en considération de ce que douze ou seize
ans auparavant il avoit empêché qu'on n'y envoyât gouverneur et gar-
nison pour commander, et que, parla, il avoit obvié aux instantes pour-
suites de quelques gentilshommes du voisinage qui auroient beaucoup
fatigué la ville par leur résidence. Pendant ce retard , le cardinal de
Vendôme fit tenir chez lui une assemblée de prélats et d'ecclésias-
tiques, pour savoir ce qu'il conviendroit faire au sujet de la détermina*
tion des théologiens de Paris, à l'occasion de l'assassinat des Guise.
Amyot s'y trouva comme les autres , et il nous apprend qu'on n'y con-
clut rien, sinon qu'il falloit envoyer vers le pape pour empêcher
qu'il ne fût prévenu de quelque mauvaise impression; il ajoute
que si cette assemblée fut nombreuse en gens d'église du second
ordre, c'étoit parce que le roi avoit défendu qu'on sortit de
Blois sans son congé. La permission étant accordée, l'évéque de
Langres prit le chemin de son diocèse quelques jours avant le carême.
G)mmeon sutk Auxerre qu'il venoit de Blois et qu'il étoit du conseil
d'Etat, il y eut des ligueurs de cette ville qui, le voyant passer, cou-
rurent sur lui, et l'auroient arrêté s'il ne se fût sauvé promptement k
(1) Ex abtolutione ejut m reg. capituli Autits,
1570 il 15UJ.
^a«F
180 JACQUES AUTOT,
1570 à ]503. Chablis, qui est de son diocèse. Le temps du carême étant venu,
fournit an prédicateur cordelier une vaste carrière pour déclamer contre
Tévéque. Ce prélat avoit envoyé Tun de ses gens pour savoir s'il étoit
vrai que la furie du peuple fôt telle qu'on la lui avoit rapportée. Le
bruit ne fut pas plus tôt répandu qu'un domestique de Tévêque étoit logé
au faubourg de Saint-Amatre, que plusieurs petits marchands y accou-
rurent à dessein de faire insulte à Tévéque quils croyoient y trouver.
D'autres domestiques du prélat étant depuis entrés dans la ville, on les
siffla et on les courut par toutes les rues. II y eut même des gens du
quartier des bateliers qui concertèrent de faire sortir le concierge du
palais épiscopal afin de le piller k leur aise. Amyot crut cependant ne
pas devoir laisser passer les fêtes deTâques sans se rendre k son trou-
peau. Il se mit en route un peu avant le carême et se rendit en son
château de Varzy. Rouillard dit qu'il fut volé k moitié chemin, mais il
ne marque pas la somme qu'on lui prit, comme l'ont fait depuis quel-
ques écrivains sans en apporter la preuve. Le pénitencier de la cathé-
drale, qui étoit son compatriote et qu'il avoit placé k Auxerre , Tétant
venu visiter au château de Yarzy, connut, dès le premier abord, que le
prélat avoit été informé des discours qu'il avoit tenus sur le même ton
que le gardien des Gordeliers ; Amyot ne balança pas de lui dire que
a le roi les feroit pendre tous les deux pour les prédications diaboliques
9 qu'ils avoient faites. » G'étoit, en effet, ces deux hommes-lk, qui,
tout d'un coup , avoient rendu la ville d' Auxerre ligueuse. Le prélat
arrivant k Auxerre, le 29 mars, jour du mercredi-saint, manqua d'être
tué en deux endroits ; d'abord k l'entrée de la ville par le sieur Ferroul
d'Egriselle , chef de la jeunesse qui donnoit dans le parti de la Ligue ;
ensuite devant l'église cathédrale, par Claude le Prince, chanoine. Il
assure lui-même, dans son apologie (1), que c la pistole lui fut pré-
x> sentée k l'estomac par plusieurs fois, et qu'il y. eut plusieurs coups
1» d'arquebuse tirés, de sorte qu'il fut obligé, pour se sauvqr la vie,
» d'entrer promptement dans la maison d'un chanoine , et de passer de
i> celle-lk en une autre pour faire perdre sa trace k ceux qui le poursui-
> voient. » Sa crainte étoit d'autant mieux fondée qu'il aperçut , sur
(I) Voy. les Preuves t. iv, où cette apologie se trouve.
QUATRE-VINGT-SEIZIÈME ÉVÊQUB d'aUXBRRE. 181
la place de Saint-Etienne, an émissaire du gardien des Gordeliers, qui, 1570 ^ 1393.
tenant une hallebarde , crioit à pleine gorge : c Courage, soudars,
B messire Jacques Amyot est un méchant homme, pire que Henri de
» Valois. Il a menacé de faire pendre notre maître Trahy, mais il lui
» cuira. >
Le prélat reconnut bientôt que le prêtre et le peuple étoient également
envenimés contre lui. Fatigué de son voyage et effrayé de la réception
qu'il venoit d'essuyer, il n'officia point le jeudi--saint et ne vint pas
même à Téglise. Il avoit dessein de célébrer les fêtes de Pâques avec
son clergé, mais le maître Trahy sut bien Ten empêcher. Le jeudi-
saint ce cordelier mit entre les mains de Guillaume Girard , conseiller
au présidial et échevin, un mémoire qui tendoit à prouver que l'évêque
étoit excommunié et par conséquent suspens à dimnis. Le maire et les
échevins, ayant eu communication du mémoire , firent prier le doyen de
la cathédrale de se trouver au conseil de la ville pour en conférer. Ce
doyen assembla le Chapitre le vendredi-saint , déclara qu'il lui parois-
soit que Tévêque ne pouvoit assister à l'office divin sans scandale , et
que ceux qui lui serviroient d'officiers pourroient encourir la même
sentence d'excommunication à canone latœ sententiœ ; si quis suadente
diabolo. Le résultat fut qu'on feroit entendre au prélat que, non-seule-
ment pour les cas que lui attribuoit le maître Trahy, mais encore pour
éviter le scandale de la part du peuple qui le croyoit excommunié, il lui
plût de ne pas assister à Toifice. Le doyen , le grand-archidiacre, le
chantre, et Jean Paydet, chanoine , s' étant chargés de la proposition,
et lui ayant objecté ce dont le cordelier le chargeoit, il répondit qu'il
prenoit en bonne part l'avis et la prière du Chapitre et qu'il s'abslien-
droit de venir à l'office les fêles prochaines. Le lendemain de Quasi--
modo , 10 avril , on présenta au Chapitre un certificat du 6 du même
mois, signé de Laurent Petitfou , son officiai, et du sieur Villon, qui
attestoient que cet évêque avoit été absous ad cautelam pour avoir com-
muniqué avec le roi le premier jour de l'an et avoir mangé avec lui,
quoique ce fût après l'absolution qu'un chanoine de Blois avoit donnée
à ce prince, fondé sur un bref du pape. Mais on étoit si rempli des idées
dn cordelier qui avoit chargé Tévêque de bien d'autres faits, qu'on ne
voulut rien finir sans en conférer auparavant avec Gilles Thierriat,
k IS».
V
JACQUES AMTOT9
préfôt ; les sieurs Legeron, conseiller ; Nicolas Tribolé , maire , el Jean
Cooet, avocat, et même avec le cordelier, tool partie qull étoit
Quoique le conseil fût d'avis que Fabsolotion étoit bonne snivant le
Chapitre Eo$. de $eni. excomm.^ le gardien soutint le contraire , parce
que, disoit-il , outre les cas avoués par l'évêque , il en restoit d'autres
dont il avoit la preuve par écrit. Lorsqu'on en fut venu k cette preuve
en plein Chapitre, il se trouva que tout se réduisoit k une lettre que
Tévéqne avoit écrite au théologal Perrooet, où il lui marqnoit de dire a«
maître Trahj « qu'il se comportât plus modestement en ses prédicaticos
de peur qu'il ne lui en arrivât mal et aux siens. » Voilk ce qu'il 7 avoil
d'écrit. Le prélat vouloit lui faire comprendre qu'il lui 6teroit el à ses
religieux, les pouvoirs de prêcher et de confesser ; mais ce fautiqiie
crut en effet que l'évêque le menaçoit de la vie lui et les siens, parce
que le théol<^l lui avoit rapporté le mécontentement où le roi étoit
de ses sermons et l'assurance que lui en avoit donnée le prélat. Ce loi
ainsi que la voie de la paix fut fermée â l'évêque d'Auxerre par les in-
trigues d'un religieux mendiant trop aveuglément estimé dans le ptjs.
On aura de la peine k croire que le Chapitre ait fait refus de recevoir
aux prébendes vacantes ceux qu'il en pourvut alors (!)• Le prélai cnil,
au bout de six mois , devoir présenter en Chapitre sa justification el
ses griefs contre le cordelier. Outre ce que j'ai rapporté de ces desx
écrits, k mesure que la suite de l'histoire l'a demandé, on j voit une
conspiration faite ouvertement par les marchands, mariniers el Taille-
rons de la ville, sur la vie de leur évêque. Ils déclaroient publiqnemoil
qu'il ialloit couper la gorge à Jacques Amyot, et faire maître Trahy
évêque en sa place. Un jeune cordelier étranger, produit par le gardien
d'Auxerre , prêcha dans la cathédrale le jour de la Toussaint. Il enl la
témérité de commencer sa paraphrase sur ce passage des psaumes :
m Heureux ceux qui demeurent en votre maison. Seigneur, » par les ex-
pressions suivantes : «Oui, les excommuniés sont hors de celle maison»
» comme M. l'éyêque, qui , au lien de venir pieds nus el léle nne
» k l'entrée de l'église, supplier qu'on intercédât pour eux, demenr^al
» obstinés, etc. » Ce qui révolta les gens de bien et leur fil dire tout
l; Rrgist. 1580,20 xrpf.. 2 oct.. 10 et 25 fia nor.
QUATRE-VINGT-SEIZIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. i85
haul : <c voilà qui vient de la boutique de Traby et qui ne vaut rien. » 1570 ^ n
Un autre sujet de cbagrin pour ce prélat, fut qu'il perdit encore k Sens,
dans l'action qu'il avoit intentée au Cbapitre en matière de nouvêU
leU(l). Jacques Taveau, avocat du Cbapitre d'Auxerre à Sens, le fit
même condamner aux dépens. Ce fut peut-être le retard de l'absolution
en forme qu'il avoit demandée qui lui causa cette déroute ; mais la
difficulté des cbemins , surtout depuis la mort du roi Henri III, arrivée
le 1®^ août, ne permettoit guère de confier à toute sorte de personnes
des affaires de cette conséquence. Âmyot, cependant, voulant remplir
toute justice, en fit venir une d'Henri Cajetan, cardinal du titre de
sainte Prudencienne, légat en France (2), par laquelle on voit que sur
l'exposé des faits tels qu'ils ont été rapportés ci-dessus , il eut pleine
absolution , avec défense au Cbapitre et au frère Traby de le molester
désormais. Ces lettres, datées de Paris, le 6 février 1589, furent ob-
tenues par Jean de Bourneaux son neveu, à qui il avoit résigné son ab-
baye de Rocbes. Le seul fait qu'il avoit ajouté pour se justifier, et qui n*est
point dans l'apologie communiquée au Cbapitre, est que, peut-être plus
de vingt jours auparavant le meurtre des Guise, il avoit été détenu de
la goutte ; ce qui l'avoit empêcbé de voir le roi , ni de conférer avec
qui que ce soit de son conseil. Cette absolution fut accompagnée d'une
lettre de ce cardinal à l'évêque, datée du 25 février 1590 (5). Le légat
y marquoit à Âmyot qu'il faisoit savoir au Cbapitre d'Auxerre et au
Cordelier, que rien ne devoit plus les empêcber de lui rendre obéis-
sance et bonneur, et qu'il espéroit que, par son zèle à défendre la foi
catbolique , il effaceroit ses fautes précédentes. Cette formule d'abso*
lution ayant été trouvée bonne par les cbanoines de la catbédnle, le
samedi 5 mars 1590, ils députèrent trois dignités et deux cbanoines
pour aller féliciter ce prélat de ce qu'il étoit réintégré dans ses fonc-
tions. Les cinq députés, Laurent Petitfou, grand arcbidia($re ; Jacques
Magnen, cbantre ; Pierre Tbion, arcbidiacre de Puisaye ; Denis de la
Vaul et Droin Cbaucuard, sous-cbantres, rapportèrent qu'il avoit été
très-réjoui de cette visite et qu'il en remercioit la compagnie. Les
(1) Reg, Capit. il janv. 1590.
(2) Voy, les Preuves, an 1589.
(3) Ibid.
1570 II 1S99.
i 84 JACQUES AMYOT ,
mauvais traiteiueols qu'Âmyot essuya eo arrivant dans son diocèse lui
furent extrêmement sensibles ; à cela près , il se fit dorénavant un
plaisir de résider. Il avoit déclaré à l'un de ses secrétaires que depuis
longtemps son intention étoit de se retirer peu à peu de la cour, pour
mieux s^acquilter de son devoir épiscopal, et il se vit, en 1589, en-
tièrement délivré du lien qui Ty avoit retenu.
I! commença donc à ne plus s'occuper que des fonctions spirituel-
les ; et dès le 7 mars, jour des Gendres, il reprit son ancien usage de
prêcher, sans paroltre déconcerté ni ému par tout ce qui étoit arrivé
depuis un an, sans employer les invectives ni les déclamations contre
personne : ce qui parut digne d^admiration à ceux qui ne le connois-
soient pas encore parfaitement. Mais son secrétaire, continuateur de
sa vie, dit que quoiqu'il se mit aisément en colère, cependant il se re-
tenoit facilement ; il n'étoit aucunement vindicatif, et ne savoit ce que
c'étoit que de reprocher h personne les anciennes fautes. Il passoit pour
mélancolique, sévère, et d'un abord difficile ; mais il ne paroissoit tel
qu'à ceux qui le voyoient rarement. Il étoit franc, candide, ingénu, ou-
vert, parloit librement et sans flatterie, ne déguisoit point aux grands ni
aux princes leurs propres défauts. Loin de conniver aux mauvais des-
seins qu'ils auroient eu, il leur déclaroit franchement qu'il ne consen-
tiroit jamais à ce qui seroit contre l'honneur et la justice. Gomme ceux
qui demeuroient avec lui le connoissoient de cette humeur, ils se don-
uoient bien de garde de lui rien proposer ou demander qui parût sujet
il soupçon, sinon ils essuyoient un refus accompagné de sévères répri-
mandes. Aimant la paix, il haïssoit les procès, et surtout il évitoit d'en
avoir avec son Ghapitre. Je ne sais si, en ce dernier chef, l'écrivain ac-
cuse juste. On verra ci-après qu'il eut des difficultés avec les chanoines
pour des droits temporels, même avant le temps de son appauvrissement.
Quelques auteurs disent qu'on lui vola, à son retour de Blois, la somme
de deux cent mille écus. Gela paroit exagéré, mais on ne peut discon-
venir que ses pertes, dans le tumulte de la Ligue naissante, n'allassent
bien li cinquante mille livres. Il le mande lui-même au duc de Nevers,
le 9 août 1589 (1). Et comme dans cette lettre, où il avoit toute oc-
0 M'* (If Béihuiie, A9i5, à U Bibl. du roi.
QCàTRB-VIKGT-SBIZIÈMR évêqub d*auxerre. 185
casion d'expliquer son malheur, il ne dit point qu'on lui eût rien pris 1570 \ 1593.
sur la route de Blois à Auxerre, je ne sais d'où Rouillard a appris
qu'Amyot avoit été volé à moitié chemin {a) . La teneur de cette lettre
au duc de Nevers est curieuse. On venoit de le sommer de la part de
ce duc, d'unir toutes ses terres épiscopales au gouvernement de Niver-
nois. Il écrivit au duc que ses gens ont toujours appartenu au gouver-
nement de Bourgogne ; et, prenant occasion de leur souhaiter une par-
faite tranquillité, il reconnoit avoir besoin d'eux pour vivre : a Me trou-
» vaut, dit-il, pour le présent, le plus affligé, détruit, et ruiné pauvre
» prêtre, qui soit comme je crois en France. » Il fait ensuite monter
toutes ses pertes à la somme de cinquante mille livres, c Outre le dan-
> ger de ma personne, ajoute-t-il, m'ayani esté la pistole plusieurs fois
> présentée sur Testomach, et les ordinaires indignités et oppressions
> que je reçois journellement de ceux d'Auxerre , le tout pour avoir
> été officier et serviteur du roi ; étant demeuré nud et dépouillé de
> tous moyens, de manière que je ne sçai plus de quel bois (comme
» Ton dit) faire flèche, ayant vendu jusqu'à mes chevaux pour vivre ;
> et, pour accomplissement de tout malheur, cette prodigieuse et
» monstrueuse mort étant survenue, me fait avoir regret à ma vie (6). »
On reconnoit aisément qu'il veut parler de la mort du roi Henri III,
son bienfaiteur, arrivée huit jours auparavant (1). Par une lettre du 17
du mois, il paroissoit fort en peine de savoir si ce prince avoit été ré-
concilié à rÊglise par confession et absolution sacramentale. Il dit qu'il
s'en étoit informé à l'évéque de Senlis ; mais que les nouvelles venoient
(1) M* de Bélhune, même Tolame, fol. 13i.
(a) L'exactitude de ce toI est constatée par une déposition de maître Regoaod
Martin, qui a?ait été secrétaire de Téféque, et qui raconte que le fait a eu lieu près
d'Aubigny. — Vay. aux Preuves, t. iv, n^ 460, la déposition de M* Martin. (iV. d. E.)
{b) La situation de J. Amyot était devenue fort périlleuse dans sa ville épisco-
pale, les menaces et les violences le forcèrent de se tenir enfermé dans son palais
jusqu'à la fln de sa vie. — Voy. Preuves, t. iv, n» 460.
Quelques auteurs regardent les plaintes qu'il fait là, sur son état malheureux,
comme hypocrites, et prétendent qu'il avait encore deux cent mille livres à sa mort,
mais on verra plus bas que c'était une erreur. (iV. d. E.)
186 JACQUES AMYOT,
1570 k 1690. difficilement, sortout c daos un lien, dit-il, où c^est un grand crime de
> parler du roy, sinon en détestation, et où Ton calomnie et prend en
» mauvaise part tous mes propos et toutes mes actions, pour avoir eu
> accès auprès de lui. > J*ai cru devoir rapporter ces pensées d'A-
myot, pour réfuter, par ses propres termes, ceux qui l'ont accusé d*in-
fidélité envers Henri III (1). Ce prélat n'avoit pasTesprit ligueur, et, s'il
a fait quelques démarches qui ont paru favoriser le parti de la Ligue, ce
n'a nullement été du vivant de Henri IIL Pour ce qui est des deux der-
nières années de sa vie, il faut avouer que la misère où il se trouva ré-
duit, l'obligea de condescendre en quelque chose aux idées de son
peuple, n auroit souhaité que le cardinal de Bourbon eût été roi, et il
appréhendoit la ruine de la catholicité en France « s'il n*y eût été
» pourvu par la bonté et miséricorde de Dieu. L'espérance, ajoule-t-il
» (2), qui nous commençoit à rire par la déclaration de Monseigneur le
» cardinal de Bourbon nous a bientôt destituez, puisqu'ainsi est qu'il
9 ait été emmené & La Rochelle ; car il est certain que nous ne le verrons
» jamais. » Ce fut donc pour implorer le secours du ciel sur le royaume,
qu'il consentit k toutes ces prières, qu'on appella dans la suite « les
9 oratoires et les processions de la Sainte-Union, » et qu'il traça même
de sa main le plan de quelques-unes (5) .
En 1590 il fit le sermon de l'ouverture du carême, et continua de
prêcher les dimanches du même carême (4), à cause du grand jubilé
accordé pour la réunion des princes chrétiens, lequel commença le second
dimanche. Il fit aussi, le jeudi-saint , la bénédiction des saintes-huiles
avec deux dignitaires concélébrants que le Chapitre nomma selon l'an-
cienne coutume, et il continua les années suivantes (5). Il avoit tou-
jours aimé les anciens rites, et s'il y eût eu, de son temps, une nouvelle
édition du missel , il eût été attentif à les faire conserver , surtout ceux
qu'il croyoit venir des Grecs et être passés de chez eux dans l'église
gallicane, tel que l'apport solennel des vases sacrés de la sacristie (que
les Grecs appellent la prothèse) au grand autel ; aussi bien que la re-
présentation et confixion du pain, sous les yeux du prêtre, pendant
(1) DeThoa.
(2) Même lettre ci-deMOs, da 17 août.
(5) Voy. les Preufes, 1. iv.
(4) Mémoire de J.Félix.
(5) Reg. Capit. 18 opr. 1590.
QUATRE-VINGT-SEIZIÈME ÉVÉQUE d'aUXEKRB. 187
qoe le vin est versé dans le calice, en sorte que la sentence de UUere
Daminij etc. convienne à l'action ; c'est ce que j'ai su d'un curé très-
âgé, d'auprès de Melun , qui avoit connu les neveux de quelques amis
de ce prélat. On voit par les registres du Chapitre qu'alors on n'atten-
doit point pour faire des prières extraordinaires que Tévéque les eût
indiquées ; le Chapitre les ordonnoit, choisissoit le jour, et envoyoit en-
suite deux ou trois chanoines vers le prélat, pour l'en avertir, afin
qu'il y assistât, s'il le jugeoit à propos. On ne peut dire si Jacques
Âmyot , qui fit sa résidence à Âuxerre durant le fort de la Ligue, se
trouva â toutes celles que le Chapitre indiqua. Au moins en fut-il tou-
jours averti; ce qui est si véritable, qu'une procession générale ayant été
indiquée le vendredi 21 août 1592 pour le dimanche suivant, sans
qu'on en eût fait part k l'évéque, il en porta ses plaintes; on lui déclara,
le 5 octobre (1), que cette omission involontaire ne venoit d'aucun
mépris de sa personne, de son autorité et dignité épiscopale qu'on
révéroitet honoroit ; on ajoutoit qu'un tel oubli étoit d'autant plus par-
donnable, qu'alors tous les chanoines faisoient la garde aux portes de
la ville. Ce même mois d'octobre, ce prélat eut aussi raison des pro-
visions qu'il avoit données h Martial Delinotte , d'une prébende d'Âu-
xerre pendant sa prétendue excommunication ; le parlement de Paris
lui donna gain de cause. Le secrétaire d*Amyot , qui a écrit sa vie , le
représente comme très-pai^ifique à l'yard de son Chapitre. Cepen-
dant, Amyot disputa, en 1587, le droit que les chanoines ont de
prendre du vin chez l'évéque aux grandes fêtes ; on l'appeloit le vin des
semonces (2). Il né tarda pas k se rendre sur cet article. Depuis les
chagrins qu'on lui causa, il attaqua la juridiction du Chapitre, et les
chanoines, de leur côté , le sommèrent de contribuer aux réparations
de l'église plus qu'il n'avoit fait. Il dressa donc un état de tout ce qu'il
avoit fourni à la cathédrale depuis son entrée à l'épiscopat, soit en
ornements , soit en autres dépenses, et il paroit qu'il n'avoit rien ajouté
aux anciens présents (a). Il transigea seulement avec le Chapitre sur
^1) Reg, Cap. 5 oeU | (3) Reg, 5 déc,
{«) Voy. les Preuves, t. iv, n" 449.
1570 ï 1598.
ts?t^ ism.
188 UCQICES AXTOr.
b jnîdktion . et b recoiuiot aa mois de septembre I3î^ 'à]. Les b-
évités de l*éTéqiie étoient extrêmement diminoées , comme je Faî déjà
dh ; 0 se pbignoît à ses amis que b prifalion de ses biens lai ôtoit
tMt le pbi&ir de Tétode. Les aflaires temporelles da Chapitre étoient
a»si trèfr-emkarrassées. Dès Fan i588, oo aToit songé de demandera
réréqne b soppression d^one vingtaine de prébendes, mais ce projet
éloit resté sans cxécntion. Dans nne pareille disette d^aïf ent, de part
et d'antre, les diScnltés forent bcilement aplanies et b paix mise
Cfltre les parties. L^aoteor de b Tie de notre éréqne n*a pas oublié de
marqper qoe ce prébt aimoit b mosiqne , et qu'étant dans son palais
^Mcopal il ne ro^iîssoit point de chanter sa partie avec des mosi-
ôeas. D ajoale qœ son amour pour le chant lui bisoit témoigner plus
d'amitié à ceux d*entre les chanoines qui alloient Tolontiers à Fa^e
pour j chanter, et il estimoit pareillement tous les tortriers, chantres,
wmis et autres gagistes qui aToient bdie Toix et qui saToient leur
métier, pourra qu^ik fassent de bonnes mceurs. D se pbisoit même à
jouer des instruments ; et sourent, afunt le diner, il toucboit d^un cb-
vcein, pour se mettre à lable Fcsprit plus dégagé après ses études
sérieuses. L^estime qu*Q témoigiia pour les musiciens les enhardit à
faire main-bosse sur le système de psalmodie des anciens aniiphoniers
de b cathédrale, dont b modubtion étoit usitée au moins depuis le
siède de Charlenugne. On coupa, trancha, supprima tout ce qui
ne conienoit pas à leurs oouieaux principes d*aecords « en rendant
fitffiu4 ce qui auparavant étoit doux ; on introduisit donc alors une
(e; La Iransactûu qn eut lieo le 28 septembre f 9fl fat rédwe fur les hues
des andcunes ckaites qni ctahiwwieiit les droits des parties. L'êrètine M recousu
haut juiticier dans les rues et places da cMtre Saiat-EtîeaBe, poar tons dâits qaî
j seiaieat eoanis par des gens éinagers aax fhiaoiaci, et le Chapitre coascrra
droits de juilice dans les mMoas ranflaiaiw et kan dépendances, qaeb qa'ea
les kabitaats, exccplè dans les cas d'homicide et de rapt dont b coaaais-
saace flîBt rèserrce à r^èWfqae. Et ooaime plaïkais des auisons canoniales sitaées
près de la graade place Saiat-EtieBse et ea d'antres endrnis da dottrt. araieal
été dimoKei lors de la prise de la ville par les liagutaoti ea iSU7 et acCaieal pas
encore relilties,oaitmesarerlear riiliiimial aindecon«nu les droits de
justice du ChapHie, en cas deretahlmmial aa aitumuiL^ Artiu delT^
Vwds des minâtes de Roune^ a«taire i Aaxctre. (.V. d. f>
>»-rt-^*-.- .-.'>•" . ■
QUATRB-VINGT-8BIZ1ÈMB ÉVÉQCE d'aUXBRRE. 189
barbarie et une disette étonnaote, capables d'inspirer du mépris pour le 1570 ^ 1593.
plaio-chant (1). Mais ce qoi dut consoler les personnes zélées pour le
chant gr^orien et les antres chants anciens, est que , dans le temps
même de ces entreprises, un chanoine commensal de notre évéque et
son économe , inventa une machine capable de donner un nouveau
mérite au chant grégorien. Ce chanoine , nommé Edme Guillaume,
trouva le secret de tourner un cornet en forme de serpent , vers Fan
1590 (a). On s'en servit pour les concerts qu'on exécuta chez lui, et cet
instrument ayant été perfectionné est devenu commun dans les grandes
églises. Âmyot, qui témoigna toujours de l'inclination pour la musique,
en eut besoin plus que jamais, pour chasser la mélancolie qui s*empara
de lui, depuis son retour des Etats de Blois, et surtout depuis l'an 1591,
qu'il ne fut plus grand-aumdnier, ne pouvant pas même, en ce temps-là,
aller se délassera Régennes, parce que ce château éioit rempli d'une gar-
nison, sous la conduite d'un chanoine que le Chapitre y commettoit (2).
Quoique son corps fût fait au froid et au chaud, et qu'il fût d'une
bonne constitution , il se trouva enfin attaqué d'une fièvre lente qui lui
dessécha les poumons. Sentant sa fin approcher, il eut recours aux
sacrements de l'Eglise, et les ayant tous reçus , il mourut le 6 février
1595, dans sa quatre-vingtième année. Denis Perronet^ pénitencier et
théologal, Gilbert le Comte , Renaud Martin , et Victor Camus, cha-
noines, reçurentses derniers soupirs (6). LeChapitre,quinevoyoit arriver
aucun des parents de l'évêque pendant sa maladie, avoit député le 5 du
mois trois autres chanoines, outre Victor Camus son chapelaia et
commensal, pour lui tenir compagnie et empêcher la distraction des
effets ; cette précaution n'empêcha pas qu'il n'y eût des meubles dé-
(1) Il y a en des chanoines assez hardis
pour dire qae des livres ainsi défigurés sons
répiscopat de M. Âmyot, sont le vrai et an-
cien chant de Téglise d'Àuxerre, et il s'en
est trouvé d'assez simples pour les croire,
quoique tout réclame contre ce préjugé.
(S; Reg. Capituli.
(a) Cependant, si Ton en croit un compte de la fabrique de la cathédrale de Sens de
Fan 1463 , le serpent était déjà connu à cette époque, car on y lit : « Ressoudé le
» serpent de FégUse et mis à point un lien de laiton qui tient le Uvre. » {N. d. S,)
(&) L'évêque mourut à deux heures après midi et en présence d'un grand nombre
de personnes ecclésiastiques et laïques. — (iV. d, B,)
36 .
i90 JACQUES AMYOT,
1670k 1588. tournés; le Chapitre donna là-dessus des monitoires. Son corps fut
inhumé, ainsi qu'il avoit demandé par son testament (i) , vis-à-vis le
milieu du grand autel de la cathédrale, à côté du trône pontifical (2).
Il n'y avoit rien autre chose dans ce testament qui concernât cette
église ; mais, depuis ce temps-là, il y eut quatre services fondés pour
lui par chaque année , au nom des maire et échevins , en reconnois-
sance de ce que le bâtiment qu'il avoit fait construire pour servir de
collège, fut adjugé à la ville, par arrêt du parlement, et non à ses
héritiers (a). On lit même dans les registres du Chapitre (5), qu'avant
le procès les héritiers avoient demandé pour lui douze services par an»
(1) Voy. ce testament daas les Preaves.
(2) Bullard, en ses Illustres Historiens, dit
que quand on voulut faiiv sa fosse, on trou-
va on cercueil de pierre qu^on Jugea, par
quelques indices, avoir servi à une com-
tesse d'Àuxerre, morte trois cents ans au-
paravant , et nommée Mathilde ; et qu'on
inhuma ee prélat dans le même tombeau où
étoient les cendres de cette dame. Je ne sais
s'il a eu de bons garants de ce faiit.
(3) Reg. Cap. 28 Àug. 1596.
(a) L'évéque Amjot en construisant le collège le destina à I*înstracUon de la jeu-
nease et y fit placer cette inscription qai fut remplacée en 1777 par une autre re-
latant lérection du collège en école militaire :
(( Christo sbrvàtori Opt. Max. S.
RbLIQIONIS YBRITAS, MOBYM PROBITàS, BT BONARYM ARTini POLITTRÀ , HIC PROMBR-
CALB8 HABBMTURi MON iBRR, 6BD 8TTDI0, PIBTATE BT LABORB : PlOINDB TVRPB8, Uf-
Fll; BT I«NAVA SSaNITIB DBQBNBEBS, AB ISTIS PORDVS PBOCVL PACBSSITTB.
Son secrétaire ajouta au-dessous, pour que Fauteur en fût bien connu :
« JaCOBVS AmTOTVS BPISCOPVS AnTISSIODOR. HVIC QTMNASIO QVOD EXTBVBNDUlf
CVBAVIT, BANC HfSCRIPTIONBM APPONI VOLVIT 1595. »
En dressant Tiaventaire de ses livres et papiers, on trouva dans un Vieux-
Testament grec une feuille de papier, en forme de testament écrit de la main de
révéque, mais déchiré en denx. L'évéqae était bien près de mourir quand il fit ce
projet de testament» car il y règne un ton de tristesse solennelle bien diffèrent de
celui de l'acte de 1588. Il y proteste de sa catholicité, et vent être inhumé dans
réglis4 Saioft-Ëtisone devant le grand autel « du côté du siège épiscopal H y fait
différents legs, notamment aux hôpitaux de la Madelaine d'Auxerre et de Gompiègne,
et destine formellement les bâtiments qu'il fait construire pour l'utiUté du peuple
du diocèse, à un collège des Pères J^uites, et en donne la propriété à la ville
d'Aoxerra , à oondition que cette destination ne sera jamais changée.
Ob ne voit pas que» dans les procès que la ville a soutenus contre les héritiers
de réféquOi elle se soit servi de cette pièce qui resta probablement cachée dans le
|Nroeà»*verhal eu elle fut transcrile. L'état de lacération dans lequel elle avait été
trouvée la rendaiti d'ailleurs, sans valeur judiciaire. {N. d. B,)
»3rw!?
QUATRE- V1NGT-8BIZ1ÈMB ÉVÊQUE d'aUIERRE. 491
Selon sa disposition testamentaire du i5 mai 1588, il partagea son bien
en cinq lots. Il établit Nicolas Amyot, son neveu, fils de défunt son frère
Philippe» son premier et son principal héritier , c'est-k-dire pour deux
portions; sa sœur unique, Jeanne Âmyot, aussi pour deux portions,
et son frère, Jean Amyot , pour une seule. Il légua au grand hôpital
d'Auxerre, cinq cents livres ; aux Jacobins, cent livres ; aux Gordeliers,
autant, se recommandant ii leurs prières ; à chacun de ses domestiques,
dix écus d^orsol, outre leurs gages, et un habit noir; a son valet de
pied, trente écus d*or pour lui faire apprendre un métier ; à Jean de
Bourneaux , fils de sa sœur, ses ornements épiscopaux et les parements
de sa chapelle. Ce testament ne contient aucun autre article. On est
donc surpris de lire dans certains auteurs qu'il eût l^é à Thôpital
d'Orléans une somme de seize cents livres, par reconnoissance de ce
qu'après y avoir logé à F&ge de dix ans, on lui avoit donné seize sols
pour sa conduite. Ce trait et quantité d'autres doivent être mis au nombre
des fables (1). Je ne crois pas non plus que le proverbe qu'on citoit
dans l'avant-dernier siècle en ces termes : « En . mangeant l'appétit
x> vient , comme dit Tévêque d'Àuxerre , > doive son origine à Jacques
Amyot; on peut l'attribuer plus vraisemblablement à Philippe de
Lenoncourt, qui fut longtemps appelé en cour l'évéque d'Auxerre,
depuis la résignation qu'il avoit faite de cette prélature, et qui accumula
grand nombre de bénéfices. Amyot ne conserva , avec son évéché, que
l'abbaye de Saint-Corneille de' Compiègne, s'étant défait de bonne
heure de celle de Bellozane et de celle de Roches, au moins dès l'an
1590, en faveur de son neveu. Il n'est resté dans le pays aucun mé-
moire qui prouve qu'on eût trouvé beaucoup d'argent à cet évéque
après sa mort. La Popelinière est le premier qui le fasse riche de deux
cent mille écus. Il est fâcheux que d'habiles critiques aient pu le
suivre sans demander des preuves de ce qu'il avançoit (a).
1570 il
(1) Ce même testament, tout court qu'il
est , prouve encore éyidemment que le P.
Anselme s'est trompé lorsqu'il dit à l'article
des grands-aumôniers que Amyot étoit fils
unique.
(a) Il ressort en effet de l'inventaire fait après le décès de l'évéque qu'on ne trouva,
dans deux bahuts placés aux pieds de son lit, que 700 écus au soleil et 141 pistoles;
102 JAC<ICES moT,
Comme notre ëvéqne o'étoit pas de famille à aroir des annoirici
fat le premier de sod oom qui s'en fabriqua comme il loi plnt. E
eoQSÎstolent en an chefroa brisé , sormonté de deux trèfles oa ayl
de boarses liées et renversées , et une molette d'éperon an-deMi
Peat-^re n'ent-il antre ioteotion que de se rappeler la profeisio* i
avoit été soa père. C'est par errenr qae sur sa tombe , an choesr é
cathédrale d'Aaxerre (a) , on a grafé nne étoile aa lien de la mol
d^éperoD qui se trouve dans ions les onira(;es qu'il a fait bire ds
Titant. Edme Amjrot, doyen d'Aoxerre, vers 1642, s'apj
.ï
ctdeplulinKiitioade 109 écni qu'an senitenraTaitprisleiiMtÎD même d« la ■
Djafaitinuiqwl^ei bijoux et de la vaiueltc d'arfenL Cependaat la mnoa
dericbesM dn TÎeas préUl était bic:i établie, car le procès-Turlul comiiMnce ^
« Et attenda h répolation que le detTunct s'eit acquis d'avoir de grandi deaj
menblei prccieox el moyens. ■ [N. à. B.)
{à, La tomtw de Tèvique Amyol qui était placée en face dn gnnd anld
esleTée au milieu du deruicr lié.'lc, lorsque le Chapitre fil daDer à ncof le 4
toaire. L'épitapbe était connue en ces termes :
ne JiCXT D. JACosTi aKTOT D*a a vivis iourr imuioMi «rucoFTs vt fksj
Hisifis ■i.nao«:iiB»s, qti omit ti rsaiv. lSi3.
Mais SCI béritiers Toolant houttrer davantage ta mémoire, lui firent éle«4|
RHmamcat en marbre dont nous donnons le dessin. J. Amjut j al figuré
corps, dans TatUlnde de la prière. t>lle sculpture fut placée dans l'm^ <ltt|
dn sanctuaire, du c6té de l'ETangile, où elle est encore.
On 7 lit les deni insaiptious suivantes :
CT Boavs UT urnsn n ■■ritsi.iTiTio» ni msn» jacqtd amtot
■TDQTi DAnmi , sauiD atuiosniu ni riiiici sotu les non «t*»!,»
■T m n ■Kni it xt con*' ra livu co:<hili n'urar n raivt,
l'oiskb dt sT-uran, t»t db st-cosiiil db compik?» . qti tuspima lb au
•• lOTi iM roTBtKK 1593, n nrruat sotbi u TvaH pi nuiai mou vo^te'
Tua* caa:m ami. ■■ asn Mami, tA^TW-i-i imtm MTt Fanaatco— wi
Kl L'ao!i>En IT Kar*TTULt ntMOiaa PTPlcr saissivi ktvsqtb naa lia ii liai
nunu iiKM BB BonuKavLK . ta» au loonu , cHÀTioi^ta dk puu> , amamt
n avnontn saaTisT atsaicn bois, nkpvbv avan ni sBismna ""lay ug
UTOT, DT COSTt DK rsTK IUA!<n UITOT SA lOBTB THIQTX.
IV««rtti »r« rî^ Àmioti orycata. tiafor ,
Ixx )Ml (1 nttraMH fatrim, friiM wtor^iolim
CoMÎIiù, terip6i onuril ri artr tm^iidi;
Jtifm aUtr pkaNix f anrfi Hfmriei^ pivrMN-
l«IO.
XCVI^ LVLUOt OAUXERRL
V'iUir Pciii daprtskD^enfloiyjJC
PsTOajK,l. ,til!j3i\ îlVjaKKt
i
QUATRB-VINGT-SBIZiàllB ÉTÉQUE D*AUXERRB. 495
armoiries de cet évéque, quoiqu'il n'en (Ùt aucunement parent. C'est avec ^^^o ^ 1599.
raison que l'on a repris les éditeurs du Dictionnaire de Moréri d'avoir
écrit son nom AmioL Notre évéque signoit avec une y, et mettoit ainsi
Amyot. Sa représentation , qui est à gauche du sanctuaire , ne fut faite
que dix-sept ans après sa mort, aux dépens de son neveu Jean de Bour-
neaux, qui étoit alors chanoine de Paris. Il avoit été fait chanoine
d'Auxerre et archidiacre de Puisaye après la mort d'André d'Assigni.
Son acte de réception le qualifie sénonois (1). Dès l'an 1579 il avoit
permuté avec François Pestelé, prêtre du diocèse de Noyon, pour le
prieuré du château de Merle au diocèse de Laon. Il fut aussi prieur de
Saint-Samson d'Orléans. Ce fut lui qui, avec Jeanne Fougerest, femn^e
de Nicolas Amyot, donna quittance ii Renaud Martin, leift^ars 1593,
de tous les meubles dudétunt évéque portés dans l'inventafre (a) fait après
sa mort ; et le trentième du même mois, il déchargea le même chanoine
(1) Reg. Cap. 15 sept. 157d.
ff
(a) Cet inventaire que nous avons lu en entier offre quelques particularités inté-
ressantes. Le Chapitre et le procureur du roi se rencontrèrent comme toujours
pour la défense de leurs prérogatives. Le Chapitre, après maints pourparlers qui
commencèrent même pendant Tagonie de Tévéque , finit par maintenir son droit de
régale et apposa les scellés après avoir fait enlever ceux du roi. Les officiers du roi
donnaient pour motifs principaux de leurs prétentions « qu*il y avoit des papiers de
conséquence dans les coffres, car le deffunt a testé, par lequel testament il a fait
plusieurs legs soyt au corps de cette ville que aux charitex. »
La liste du mobilier qui garnissait Tévéché n'indique pas que le prélat aimH
beaucoup les ameublements somptueux Les grains sont en grande quantité, maàr
on trouve peu de vins. La bibliothèque de l'évèque n* était pas digne de la célébrité
littéraire de son possesseur.
On trouva aux écuries un coche à quatre roues couvert de cuir sans doublure de-
dans, estimé six écus; il n'y avait point de chevaux.
Les héritiers de Tévéque ordonnèrent une distribution en aumône de 2,872
petits pains aux pauvres, à raison de 60 par bichet.
Parmi les papiers on trouva les absolutions obtenues par le défunt, « tant de
Mgr le légat que de M. le grand archidiacre et officiai d'Auxerre. m
« Un livret faisant mention de Pacquisition faite par le défunt de la maison de
saint Sixte pour 2,400 liv. t.; cinq mémoires des (rais faits par le défunt pour la
construction des bâtiments du collège des Jésuites. »
Parmi les bâtiments de Tévéché on mentionne une petite galerie peinte ; nous
ignorops où elle pouvait être. — Arch. de l'Yonne. 2 G {N. d. E.)
11 45
194 JACQUES AMTOT,
1570 k \sM. ^^ '^ gestion de ses affaires : dans cette décharge il nous apprend qu^il
avoit autrefois joui du prieuré de FËpau. J'ai aussi trouvé qu'un Louis
de Bourneaux avoit été pendant quelque temps chanoine d'Auxerre (i).
Parmi les chanoines lés plus remarquables que Févèque Amyot plaça
dans sa cathédrale, doit être compté Jean Liordereaux, auxerrois, reçu
le i 9 septembre i 573 ; ce chanoine devint par la suite très-fameux ,
ainsi qu'on verra ci-après. Il faut y ajouter Droin Chaucuard du diocèse
d'Àuxerre, qu'il fit sous-chantre en 1580, lequel lui fut toujours très-
attaché, et servit utilement le Chapitre, même dans le temporel (2). U
eut sois de la confection de son effigie, et les quatre vers latins qui sont
au bas passent pour être de lui ou de Gaspard Damy, lecteur. Simon de
la Croix, auxBrrois, qui avoit eu de grands emplois dans l'Université de
Paris, s'étoit feit recevoir docteur en médecine et ensuite principal du
collège d'Auxerre ; il fut installé chanoine en 1585. Louis Damy, clerc
du diocèse de Châlons, fut reçu le 24 mars 1590. C'est par le moyen
de ce dernier que nous avons été informés de certaines particularités
plus avérées que celles qui ont été publiées par Tabbé de Saint-Réal,
d'autant qu'il étoit frère de Gaspard Damy, lecteur, que ce prélat estima
et aima toute sa vie , qu'il avoit fait son secrétaire extraordinaire en
1583| et promoteur en son officialité l'an 1584. Ce qui a servi k nous
les transmettre, est que ce Louis Damy fit part de tout ce qu'il put savoir
à un de ses neveux qui a vécu jusqu'en l'an 1686, et qui a laissé par
écrit tout ce qu'il avoit appris de ses oncles. Je ne dois pas oublier
Renaud Martin, natif de Larré , diocèse de Langres, qui fut pourvu d'un
àinonicat en 1580, n'étant encore que clerc (5). Il fut son commensal
et son secrétaire ordinaire au moins depuis l'an 1585 ; et le prélat lui
conféra l'archidiaconé de Puisaye au mois de février 1592 (4). La yie
d' Amyot, imprimée dans le recueil du P. Labbe, fait voir que ce fut son
fidèle et plus intime. Après qu'il l'eut rédigée sur les mémoires du défont
évoque, il la communiqua k Frédéric Morel, professeur royal à Paris,
qui la mit en latin, et ensuite il l'écrivit lui-même à la fin du volame de
(1) Reg.iT$ept. 1579.
(9) Il dressa un inventaire des titres qae
j*ai vu.
(3) Reg» Cap. 17 nov.
(4) Reg, Capit.
QUATRE-VINGT-SEIZIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRB. 195
la cathédrale où sont conservées en manuscrit les vies des autres
évéques.
Je ne parle point des écrits d*àmyot, étant inutile de répéter ce qui
a été dit jusquMci par tant d'auteurs, et en dernier lieu par le P. Nicéron,
barnabite. Jo ne pourrois ajouter à la liste de ses ouvrages que de
foibles opuscules venus à ma connoissance , tels que la Préface do
Missel d'Auxerre projeté, une traduction qu'il fit eq 1572 de l'Ëpitre
congraiulatoire de Jérémie, patriarche de Gonstantinople, au roi. Un
compliment latin qu'il prépara pour Alexandre de Médicis , nonce du
pape, s'il eût passé par Auxerre (i), et un Epieediutn in obitu Caroli IX
remarqué par M. Baluze (2). Gomme il n'avoit plus tant de loisir depuis
qu'il fut évéque, il prit du secours pour les traductions qu'il faisoit de
grec en françois. Un avocat de Tonnerre nommé Luit, bon grammairien
grec, lui rendit ce service (5). Il eût éié^ souhaiter qu'au lieu des
traductions de quelques romans , il eût donné k l'Ëglise celle de quel-
ques saints pères grecs , parce qu'on sait que Héliodore , auteur de
l'Histoire éthiopique , avoit été déposé pour cet ouvrage. Mais il faut
remarquer qu'Amyot n'étoit que simple clerc lorsqu'il en donna la tra-
duction , et qu'il put s'autoriser de l'exemple d'Octavien de Saint-
Gelais , évéque d'Angouléme , qui cent ans ou environ auparavant en
avoit donné une traduction en vers françois.
Baluze fait mention d'Amyot dans sa préface aux Capitulaires, comme
ayant envoyé aux anciens éditeurs un supplément qu'il avoit trouvé dans
la bibliothèque de l'église de Beauvais. Get évéque aimant k aider les
savans, envoya aussi k Grégoire XIII la profession de foi qu'Hugues
de Màcon son prédécesseur avoit rapportée du concile de Reims. tenu
l'an 1148, afin que Baronius pût l'employer dans ses Annales. Amyot
est nommé dans un panégyrique d*Henri III , comme ayant produit
auprès de ce prince Martin Akakia parisien (4), médecin, fils du médecin
sans malice, et lui avoir fait donner, en 1574, la charge de premier
lecteur et professeur royal en chirurgie. Denis Perronet , oénitencier
1S70 i 1593.
(1) Genebrard m $hronicon.
(S) Dans un manuscrit de N. D. de Paris
cotté N. 5. tn foliOt est un opuscule ainsi in-
titulé m Vir^finem matrem decanus Aurelnu
rediens à monasterio prindpis et dicato. Àrs
ehori decu$ etc.
(S) Ea script, cocno
il) Bayle au moi Akakia.
IfMt FRANÇOIS DR MNADIRU,
tiMu d'Attx«rre, danii son Êplire dédicaloire d'Arnold de Bonneval au car-
diual du Perron de Tan iOOO, dit d*Âmyot : Doctissimus Jacobus
Amyotui,.,. eujuê laudeê et mérita nunfjuam digne celebrabuntur.
Au reste Dieu permit que ses ennemis ne prospérèrent pas. Des deux
qui lui avoient mis sueeessivement le pistolet sous la gorge, Tun fut tué
malheureusement , Tautre mourut fou et enragé. Il fut de notoriété
publique dans ee temps-là , que le second étoit d'une humeur très-
violente. Possédant la cure de P.... au diocèse de Sens, il se crut si
injurié, un certain jour, de la part d*un homme qui avoit froissé son
surplis dans Téglise, qu'il le battit dans le même lieu jusqu'à effusion
de sang; ee qui obligea Tarchevéque de la rebénir.
L-j;--]f«yt-<»-i«««ii«*BCrH*'''**"*^""*"" ' T"'" i-^im^^mwm'^.mi'.m ■ ■ l ^ i . _>■-■■ ■ ■ . -n— —
CHAPITRE VI.
FRANÇOIS DE IK)NADIEU, XCVI1« ÊVÊQUE D'AUXERRE,
El de II longue tacance du ûége qui précéda son épUcopat
158S n 16». Ce qui accéléra la mort de FéTéque Amjol fut aussi cause que
f^ise d'Âuxerre resu sans pasteur pendant sept à huit ans. Je veux
prier des guerres civiles connues sous le nom de la Ligue, dont le but
avoit été de détrdner Henri III , et dont toute la force se tourna ensuite
pour empêcher Henri de Bonribon d^étre élevé sur le trône de France (a).
(a) L'écrivain royaliate de la vie de M. de Donadieu parie ainn des événements
de ce temps i « Luctoosis hisce temporibus Gallia bellorum civiUom tempestatibos
«(uatiebatur, et tune nimis eiperti sunt omnium ordinum cives quantum non reli-
gio sed rdigionis obtentos potoerit suadere malorom.f
» Plures catholici nomine gloriantes quin imo abutentes vel ceca superstitione
ductiy vel suc ambitîoni serventes fataU se fcsdere devînerunt, quod, eheu ! sanc-
tam sodelatem vodlabaDt » {N. i. B.]
QUATRE-YINGT-DIX-SEPTIÈME ÉVÊQUB d'aUXERRE. 197
L'idée que la cour romaine avoit conçue de ce prince empéchoit d^un ^^ ^ |^
côté qu'on expédiât des bulles à ceux qu'il nommoit aux évéchés, et de
l'autre part il se trouvoit peu de sujets qui voulussent accepter le gou*
vernement d'une ville où tout étoit en combustion , se charger d'un
bénéGce dont les principaux bâtiments avoient été détruits pendant les
guerres précédentes, dont l'église cathédrale se ressentoit encore beau-
coup du pillage des calvinistes, sans compter que pour entrer en jouis-
sance de ce bénéfice, il falloit payer à la cour de Rome une annate
considérable. Les mémoires dressés dans le pays en ce temps-là portent
qu'Henri IV avoit nommé a l'évéché d'Âuxerre , dès l'an 1594, un
conseiller clerc du parlement de Paris, nommé Pelletier; qu'ensuite
il y nomma le plus jeune des fils de Jean de Donadieu , gentilhomme
gascon, qui étoit abbé de Saint-Hilaire du diocèse de Carcassonne ; que
le brevet de l'évéché fut ensuite cédé, vers Fan i 597, à Jean Lordereaux,
abbé de Saint-Marien d'Auxerre ; mais que cet abbé étant mort de
poison en revenant de Pans, ceux qui s'intéressoient pour les Donadieu
firent consentir un autre fils de Jean de Donadieu de se faire d'église et
d'accepter cette nomination. Cependant les bulles ne purent être expé-
diées que bien avant dans l'année 1599. Pendant cette longue vacance,
le Chapitre qui avoit nommé deux chanoines économes du temporel de
Tévéché, ne souffrit qu'à regret Gabriel Remon, prévôt de Léré, dans
l'église de Saint-Martin de Tours, se mêler de cet économat. Mais
comme c'étoit dans des temps de troubles que le roi l'avoit nommé, cet
exemple ne tira point à conséquence pour l'établissement de la régale,
qui n'a jamais eu lieu en l'église d'Auxerre depuis le commencement
du y\u^ siècle; et ce commissaire fut révoqué par Tordonnance
qu'Henri IV donna au camp devant La Fère en Picardie, le i" mai
1596. De sorte que le Chapitre qui avoit toujours conféré les
prébendes vacantes en pareil cas, se maintint inviolablement dans son
privilège. La collation des cures fut aussi faite par le Chapitre en com-
mun, sans avoir égard à ce qui avoit été arrêté en 1570 à ce sujet-là ;
et on ne s'avisa de la mettre à tour de rôle, selon l'antiquité des chanoines^
qu'en 1599 (1); et même dès le 21 juillet 1595, on avoit cru qu'il
(1) Reg, Capit, 13 martii 1590,
198 FRANÇOIS Dl DONADIIU ,
u» Il 1696. ^^i^ plo^ ^ propos d*exaniiner en plein Chapitre ceux qui se présente-
roient ponr les bénéfices, qae de s'en rapportera Tarchidiacre de Puisaye
et ao pénitencier. La capacité qn'on avoit reconnue dans les officiers de
h conr ecclésiastique que M. Âmyot avoit choisie, engagea le Chapitre
k les continuer dès le commencement de la vacance du siège. Ainsi
Laurent P^titfou , grand archidiacre et abbé de Saint-Père , fut officiai
du diocèse jnsqu*k sa mort arrivée le 3 février 4595, auquel temps
rdbbéde Saint-Marien lui fut substitué : Jacques Magnen, chantre de
k cathédrale, fut son vice-gérant jusqu*k Tan 1597, auquel temps s'en
*iluild^rté, Gaspard Damy, lecteur, lui succéda (i). L'abbé de Saint-
Htrien l'est point diflTérent de Jean Lordertauz, it qui H. Amyot
avilit conféré une prébende de la cathédrale en 1573, ainsi que j'ai déjli
dit, et qui fut trésorier pendant quelque temps. Ce fut lui que le Cha-
pitre nomma, en 1595, ponr présider au synode des curés de tout le
diocèse (2), qui se tint l'onzième jour d*avril : peut-être étoit-on déjà
informé qu*il a^iroit k l'évéché. Il essaya de jouir de la préséance aux
assemblées du clergé ; mais ce fut en vain, parce que le Chapitre adjugea
cette préséance et la présidence en même temps au doyen (3) . On ne
vit point, tant que dura cette vacance , d'évéque. m paritbus employé
au fonctions du ministère. Arnauld Sori)in, évéque de Nevers, fut prié
par le Chapitre de faire quelques consécrations d'églises , entre autres
eelle de la paroisse de Chamlemi, que le seigneur François de la Rivière
vont de rebitir en un autre lieu. Ce seigneur représenta que Tévéque
Amiyot» s'excusant sur son &ge, avoit commis le même prélat pour cette
, asssi bien que pour bénir deux chapelles nouvellement
MM ckteaa. Afio que l'acte en fât plus solennel, et que les
idcles %em vmvmmeat |Ih longtemps, le Chapitre permit \k Févêque de
!(eicfs ^4famer!biiatfwe€i b confirmation dans la nouvelle église (4).
Ce fuli fil k S wgEitemftfv^ jov de la fête patronale de saint Maurice.
En 1S99. 4enûèi¥ année de b vacance du si^e , le Chapitre pria le
nénie évëqne ie Tenir ofider a b Pentecôte, et de faire Tordination (5) .
(1) Rtf. Capii. 10 «or. 15ff7. j (4) Es actis original.
(i) A«f . Cc^Nf. 7 op. 1595. | (^ Reg* CapiL 30 ajpr. 1509.
i^ Reg. CppiU 30 Mpf . I
QUAtRE-VIMGT-DIX-SEPTlÈME ÉVÊQUE D^AUXERRE. 199
Les aulres fonctions qui peuvent être déléguées furent faites pendant la 1599 ^ less.
vacance par des dignitaires de Téglise cathédrale (1*. En 1594, le
cimetière de Notre-Dame-la-d*Hors fut rebéni par le pénitencier ; en
1598, Téglise de Bessy rebénie par le même, et en 1599, celle de
Pourein par l'archidiacre de Puisaye. Le Chapitre en corps tâcha, pen«
daot cette vacance, de faire l'avantage de la fabrique de Téglise cathé-
drale, en y unissant une prébende. On en avoit parlé au défunt évêque
un peu avant sa mort, et sur ce qu'on lui avoit représenté que la dépense
ezcédoit de huit fois la recette , attendu les aliénations et autres pertes
causées par le malheur des temps , il y avoit donné consentement de
vive voix. On destina pour cette union la prébende qui vaqua par la
mort de Simon de la Croix, le 4 mars 1594 (2). Il n'étoit plus question
que d'observer les formalités nécessaires ; et c'est de quoi on ne trouve
aucun vestige. On fit en 1599 un acte tout opposé. C'est la désunion
de l'administration spirituelle de Thôtel-Dieu d'Auxerre, qui auparavant
appartenoit au curé de Saint-Georges et étoit unie à son bénéfice. Cette
désunion fut faite à la requête des habitants du village , ennuyés que
leur curé ne résidât point. Mais elle n'eut pas de suite, puisque trente
ans après, la même personne occupoit l'un et Tautre poste. Je ne dois
pas taire ici un ancien vestige de la soumission que les Bénédictins
avoient envers le siège épiscopal ou envers ceux qui le représentoient.
Pierre Pesselière, grand-prieur de l'abbaye de Saint-Germain, demanda
permission d'user d'oeufs et de viande pendant le Carême de l'an 1595,
à cause de ses infirmités. C'est ce qu'on lui accorda en Chapitre sur
l'attestation d'un médecin ; et cela fut réitéré l'année suivante. Ce prieur
étoit alors au moins octogénaire; dès l'an 1542, il étoit au rang des
auteurs (5). Je ne passerai point non plus sous silence la religion de
nos prédécesseurs envers les jours de fêtes commandées. Eu 1598, on
fut obligé de vendanger à Âuxerre le 29 septembre , jour de saint
Michel; et en 1599, le même besoin se retrouva le jour de saint
Mathieu. Le Chapitre n'accorda la permission, qu'à condition que
(1) Reg. Capit. 20 dec. 1593. 24 nov. 1598.
27 fyiatt 1599.
(2) Reg, Capit. 5 mars 1594.
(3) Il a publié la vie de saint Germain,
composée par Héric, etc.
200 FtANÇOIS DB DOBUOIBU,
^ icB. ehaqœ iamille paieroit cinq sois ^ rhôtel-Diea. Je rapporte, dans l*Hift-
loire Gvile d^Aoxerre, lont ce qai se passa ao sujet de TobéissaDce que
h rille rendit k Henri lY, en 4594, et les prières que Ton fit pour être
présenré de la peste qui coomt vers ces temps-Ui. Il n*y a rien à ajoaler
i ce que j'en dis , sinon que Tasage étoit alors de faire une célébrité
particulière, cinq vendredis consécutife, et d'honorer dans chacune
une des Têtes de la Sainte Vie^e (i). Cette dévotion étoit nouvelle et
n'est plus en usage.
Enfin , Tévécbé d'Auxerre tomba dans la famille des Donadieu. EHe
en fut redevable it Pierre de Donadieu, plus connu sous le nom de
Picheri ou de Pnchairie, lequel obtint cet évéché du roi Henri IV»
pour un de ses frères , en reconnoissance des services qu'il lui iToit
rendus. Il suffit d'ouvrir le grand Mézeray, pour j lire que c rincorrup-
» tible fidélité de Pierre Donadieu sauva la ville d'Angers des mains
» des ligueurs, par le moyen do château dont le roi l'avoit fait gouver-
» neur. Le comte de Brissac s'étoit jeté dans cette ville pour la faire
> révolter; mais il ne put gagner Picheri, quoiqu'il lui promit cent
» mille écus, l'entretenement d'un régiment, et un riche parti, 8*il
» vouloit se marier. Lies habitants prirent les armes contre le châtean.
» Mais Picheri vint ^ bout de les réduire et eut la continuation de son
> gouvernement. > On peut ajouter, à ce que dit ici Mézeray, que
ce gentilhomme avoit d'abord été admis dans le nombre des quarante-
cinq gardes de la personne du roi Henri III, et que ce même prince
Pavoit fait gouverneur de la ville et château d'Angers, lorsqu'il l'eut
retirée des mains de ses ennemis (2). I^es deux frères plus jeunes que lui,
portoient tous les deux également le même nom de François de Dona-
dieu. Le plus jeune des deux embrassa le premier l'état ecclésias-
tique, et eut d'abord en commande l'abbaye de Saint-Hilaire au diocèse
de Carcassonne. On dit de lui qu'il refusa l'évéché d'Âuxerre, à cause
que son frère, le gouverneur, vouloit se retenir sur ce bénéfice une
pension de quatre mille livres, avec l'agrément du roi, et parce qu'il
fut informé des réparations énormes qu'il y avoit k faire aux châteaux
ri) Reg. Capit. 11 febr. et 22 juL 1507. | (2) Ex ejus epitaphio.
]
QUATRE-VINGT-DIX-SEPTIÈME ÉVÊQUfi D*AUXERRE. 201
de Varzy et de Régennes. Cependant j^ai vu une lettre d'un Donadieu iqqq ^ i^g^.
au Chapitre d'Auxerre (i), datée de Paris, le 17 juillet 1596, qui
remercie le Chapitre de Tavoir félicité sur sa nomination. Il y dit qu'il
a envie de venir voir son Chapitre, mais que le voyage de son frère en
Normandie, Ten empêche, et qu'il se rendra \ Âuxerre à son retour.
Picheri ou pour mieux dire Puchairie avoit trouvé dans Jean Lorde-
reaux, abbé de Saint-Marien, une personne de facile composition pour
la pension qu'il avoit en vue ; mais par malheur cet abbé avoit été et
éloit peut-être encore attaché au duc de Mayenne, ce qui ne pouvoit
convenir au roi. François de Donadieu, le plus âgé des deux du même
nom, parut moins effrayé que son frère du peu qui lui reviendroit du
temporel de cet évéché. Il se fit tonsurer à l'âge d'environ 55 ou
56 ans , et aussitôt il se vit nommé par le roi à l'abbaye de Belle-
branche, de l'ordre de Ctteaux et k cet évêché. Il étoit alors à Angers,
auprès de son frère le gouverneur. Il y demeuroit depuis l'an 1588,
que les guerres civiles l'avoient obligé de quitter Paris où il avoit étudié
en philosophie, et où il avoit pris en ihéologie les leçons du célèbre
Maldonat, jésuite. Ses études précédentes avoient été faites k Toulouse,
dont l'université étoit la plus voisine du diocèse de Mirepoix, où il étoit
né. Sa nomination \ l'évêché d'Auxerre, qui étoit du 12 février 1598,
ne lui fut pas plus tôt connue qu'il fit dresser les informations néces-
saires de sa vie et mœurs ; et afin qu'il souffrit encore moins de délai
du côté de Rome par rapport aux bulles , le Chapitre d'Auxerre fit la
démarche de le demander avec instance au pape Clément VIII pour son
évêque. On exposa au saint-père, dans une lettre du 18 décembre 1598,
la triste situation où se trouvoit la ville et le diocèse d'Auxerre depuis
les guerres de la religion ; que ces guerres avoient été cause des alié-
nations des biens d'église, et de l'abandon des domaine^ dans la cam-
pagne ; que les impôts étoient plus hauts que jamais , en sorte que le
clergé ne touchoit pas la sixième partie de son revenu ; que le château
de Régennes, quoique rétabli par l'évéque Amyot, étoit retombé dans
sa première désolation , que celui de Varzy menaçoit ruine ; et qu'ainsi
il étoit nécessaire que sa sainteté pourvût incessamment l'église
«
{\)Ex autographo»
tmhvm.
202 FRANÇOIS DE DONAMBU ,
d'Auxerre d'un bon pasteur ; et que celai qui avoit obtenu le brevet de
nomination du roi étant pieux, savant et très-zélé pour la maison de
Dieu, il méritoit qu'on lui fit quelque remise du droit d*annates. Muni
de ces recommandations, qui pouvoient, en cette rencontre, tenir lieu de
la formalité des anciennes élections, il partit jpour Rome, dans la com-
pagnie du cardinal de Joyeuse, archevêque de Toulouse, et mena avec
lui un docteur natif du diocèse de Gouserans, nommé Jean Dassier. A
Rome, il prit le bonnet de docteur au collège de Sapience ; et vit réussir
tout en sa faveur, autant qu'il pouvoit le souhaiter. Le pape lui accorda
gratis les bulles de Tévéché d' Auxerre et celles de l'abbaye de Belle-
branche. Celles de Tévéché, qui sont du.... juin 1599, ne lui donnent
que la qualité de simple clerc du diocèse de Mirepoix. Il n'étoit, en
effet, encore alors que tonsuré. Mais le souverain pontife lui permit de
recevoir tous les Ordres sacrés extra tempora^ k commencer par les
quatre moindres. Il fut ordonné par le cardinal de Joyeuse, et ensuite
sacré évéque par le même, le premier août, dans Téglise de Saint-
Pierre-ès-Liens. Le jour que ses bulles lui furent accordées, le pape
en donna avis au Chapitre d'Auxerre par une lettre qu'il lui écrivit, afin
qne les chanoines disposassent les esprits ii le reconnoitre pour leur
légitime pasteur. Le nouvel évêqoe, de son cêté, chargea, dès le
13 juillet, de sa procuration générale, son frère Pierre, chevalier des
Ordres du roi, conseiller d*état, sénéchal et lieutenant du roi en Anjou.
Celui-ci subrogea Gaspard Damy, chanoine et lecteur d'Auxerre , que
le sieur Dassier lui avoit indiqué à son retour de Rome, pour prendre
possession de Tévêché au nom de son frère ; il fit reconnoitre atf conseil
du roi, le premier mars suivant, les bulles comme bonnes et conformes
anx concordats, et obtint ordre de les mettre ii exécution. En consé-
quence, Gaspard Damy se présenta au Chapitre le 14 juin; et, après
la lecture des bulles, il fut mis en possession, pendant la grand'messe,
par Guillaume de Rigny, doyen , avec la cérémonie du baiser du grand
autel, et celle de l'installation dans la chaire épiscopale, à droite du
sanctuaire et dans 1 a stalle du chœur où Tévêque a coutume de s'as-
seoir.
François de Donadieu se voyant, après son sacre , si proche de
l'année séculaire ne voulut point partir de Rome sans gagner le jubilé
quàtre-viiigt-dix-sbptièmb évèque d\uxbrrb. 205
attaché à cette année. Pendant ce temps-Ik il se forma dans les céré- im ^ lex.
monies ; il adopta plusieurs de celles qu'il vit pratiquer k Rome. U eut
aussi la dévotion de faire le pèlerinage de Notre-Dame-de-Lorette ;
mais, peu accoutumé aux chaleurs du pays , il fut attaqué d*une mala-
die qui le retint le reste de l'année k Rome. Il fit alors connoissance
avec les cardinaux Baronius et Bellarmin , dont il envoya les ouvrages
en France. Quoique son diocèse ne le possédât pas , il n'en étoit pas
moins bien réglé , parce que Jean Dassier fut un vicaire-général à la
vigilance duquel il n'échappoit rien. On a conservé jusqu^ici une feuille
imprimée en latin d'ordonnances très-sages qu'il répandit dans le dio-
cèse, vers le mois de février 1600, pour Tinstruction des curés et de
ceux qui viendroient demander des dimissoires.
Le nouvel évêque étant rétabli en parfaite santé, prit la route de
France et passa par Milan, qui avoit alors pour archevêque le neveu de
saint Charles. Il y célébra la messe avec les ornements du saint arche-
vêque défunt (i) ; et, le même jour, la curiosité le porta à aller en-
tendre à vêpres, dans un monastère de filles, la voix d'une religieuse
que saint François de Sales dit avoir admirée (2). Il arriva à Âuxerre
le mercredi-saint , 18 avril ; il y fit son entrée monté sur une mule, et
il coucha à l'abbaye de Saint-Germain. Il avoit choisi le lendemain,
jour du jeudi-saint, pour se faire recevoir k la cathédrale. Cette se*
conde entrée se fit en forme. Les quatre barons y avoient été convo-
qués; mais, comme le procès-verbal a été perdu, on n'a connoissance
d'aucune autre circonstance , sinon que Filbert de la Chassaigne , baron
de Givry, grand-maitre des eaux-et-forêts du Nivernois et Donziois, y
assista au nom dUenriette de Clèves, veuve de Louis de Gonzague,
comme baronne de Saint-Verain, et que Pierre de Puichairie, frère du
prélat, fit tous les honneurs de la cérémonie ; en sorte que la dépense
de ce jour, tant à régaler le clergé et la noblesse, qu'k faire des au-
mdnes, monta k trois mille livres, somme très-considérable en lOOl".
Une suite de sa prise de possession personnelle étoit le serment de
soumission envers l'église de Sens; il s'en acquitta le 17 septembre
Mémoire da temps. | {%) Livre de Tamoar de Dieu.
miÊB^^mm^mmmmkm
Mil
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isfi k le».
204 F1UKÇ018 DE DOIIADIBU,
1602 , eotre les mains de Renaud de Beaone, son mélropolitain (1).
Cenx qni ont connu le caractère de ce prélat, nons Tont représenté
unanimement , quant à l'esprit , comme un véritable Nathanaël sans
dol ni sans malice, d'un accès facile, d*un caractère naturellement li-
béral , joyeux et agréable dans la conversation. Quant au corps , il étoit
d'une taille médiocre, il avoit les yeux brillants, le visage sec, et por-
toit une longue barbe. La première chose qu'il r^arda comme très-
pressante dans son diocèse , fut la visite des paroisses, tant pour pro-
céder à la réforme des mœurs des ecclésiastiques, que pour y adminis-
trer le sacrement de confirmation. Il alla, en 1605, du côté de la
Loire, où il étoit resté davantage de vestiges du calvinisme. Â Gien, il
donna la confirmation à plus de trois mille personnes , siûvant qu'il
l'écrit à Gaspard Damy, son officiai , auquel il marque c qu'il ne pou-
» voit représenter la ferveur qu'il avoit reconnue parmi les peuples,
» et qu'il louoit Dieu de ce qu'il lui avoit plu augmenter sa grâce , oà
» les ennemis de notre religion s'efforçoient de la diminuer (2). »
Une tenue exacte des synodes vint au secours pour le rétablissement
de la discipline. Sur la fin de son épiscopat , parut une collection ioH
primée des statuts qui avoient été rédigés de son temps.
Quoiqu'un caractère doux et paisible empêche souvent une vive
attention sur les affaires temporelles, on trouve cependant, dis les
premières années de son épiscopat, plusieurs aveux et hommages ren-
dus à sa dignité pour des terres qui en relevoient. En 1602, Attlobe
de Chastellux, chevalier, seigneur de Bazarne, lui passa nouvelle
reconnoissance pour les moulins des Planches, situés en la paroisse de
Lengny, au nom et comme tuteur de Pierre, Jacques et Diane, enfants
de Léon de Moulins et de Marie de Crux , du chef de laquelle ces biens
appartenoient a ces trois pupilles. L'année suivante, François d'Agen,
chevalier seigneur de Briaque en Saintonge, et Jeanne du Ghesnoy , sa
ffimme , lui payèrent les droits seigneuriaux de la terre de Saint-Sau-
veur qu'ils avoient achetée d'Henriette de Clèves , duchesse de Nevers,
par contrat du 15 avril IGOO. En 1606, le nouveau duc de Nevers
(1) Kn in(N>. Joan-Baptisto du Val lui
li^lla In tradurilon qu'il fît du Hommairedes
IMiitiin roiiirftv<*ni<*ii dan» la rcliRion, dt des-
sus le latin de Coster, jésuite.
(3) Lettre de Briare, 13dov. 1603.
QUATBE-VINGT-DIX-SBPTIÈME ÉVÊQUB D^UXBRRE. 205
obtint de lui le pouvoir de retirer, en son Dom, le domaine d'AIIigny, ^^^ ^ i„^
distrait de la baronnie de Saint- Verain, et aliéné par Charles de Gon-
zague à Filbert Gillot, avocat en parlement, et k Anne Chevalier, sa
femme, et il reçut pour cette permission plus de quatre mille livres.
Ce duc lui rendit, six ans après, hommage pour cette baronnie et pour
celle de Donzy. Vers la même année, 1606, qui fut la sixième de son
épiscopat, Aymar, René, François et Charlotte de Prie, tons enfants de
défunt René de Prie, lui firent hommage pour la baronnie de Toucy.
Jamais Tenvie de thésauriser ne l'engagea à aucune démarche ; il étoit
si peu obsédé de cette passion, qu'il ne voulut jamais consentir à au-
cune coupe de bois de Tévéché, quoiqu^il ne manquât pas de raisons ni
d*autorité pour le faire ; mais il aima mieux réserver ses forêts, et il
employa, pour réparer le château de Régennes, celui de Yarzy et sa
maison épiscopale d'Âuxerre, le revenu de son patrimoine, particulière-
ment de la vicomte de Domfront, à lui échue par la mort du sieur de
Pnchairie, son frère, arrivée en 1604 aux eaux de Pougues (1). Il ne
voulut non plus jamais permettre que ses secrétaires prissent aucune
chose pour le sceau épiscopal, pas même pour les provisions d'aucun
office ou charge temporelle. Il conféroil tout gratis et ne levoit aucun
droit pour ses visites. Son désintéressement parut encore plus sensible-
ment dans les députations qu'il accepta pour assister aux assemblées du
clergé ; il y alla toujours et y demeura à ses propres frais, sans de-
mander aucune taxe, et remettant à son clergé celles qu'on lui attri-
buoit. Ce qui fut remarqué particulièrement en 1606, qu'on lui avoit
taxé la somme de six mille neuf cent quatre-vingt-onze livres, pour
huit mois de séjour, et en 1615, cinq mille six cents livres pour six
mois. Mais quoiqu'il fût fort généreux de ce côté-lk, il ne négligeoit
point ce qui étoit de son devoir, soit comme seigneur , soit comme
évêque (2). En qualité de seigneur, il fit dresser un terrier général ; il
acquit et réunit, au domaine épiscopal, un fief situé à Appoigny qui . .
(1) Il mourut âgé de 50 ans d'une pefte de
sang» causée par l'ouverture de la veine
dans laquelle le chirurgien avoit enfoncé
trop avant la lancette. Il fut inhumé dans
une chapelle des Jacobins d'Angers, où Ton
voit son épithaphe en style magnifique, gra-
vée sur le marbre par les soins de Féréque »!
d'Auxerre.
(2) Mémoires de Blanchonnet.
I;
.1 t
t
206 FRAIIÇ0I8 DE DOMÀDIBU ,
uw k leas. venoit des le Briois. Il fit aossi quelques échanges avec le Chapitre. Le
ch&teao de R^ennes qu'il veuoit de réparer, ayant élé surpris en i615
par le prince de Condé, il fut contraint de donner, pour le racheter,
trois cents pistoles au capitaine de Saint-Georges ; et sans se rebuter de
cette rançon, ni des dépenses qu'il fallut faire pour l'entretien de la
garnison de trente-six hommes pendant trois mois, et pour les fournir
d'armes, il fit encore tous les frais qui furent nécessaires pour remettre
en état les fontaines minérales d'Âppoigny, peu éloignées de ce chàteao.
Tout cela ne* Tempécha pas d'exercer à Âuxerre l'hospitalité d'ane
manière convenable à son rang. Il reçut tous les grands seigneurs qoi
7 passèrent, entr'autres les cardinaux de Joyeuse et du Perron , le dac
de Nevers , etc. Durant les 24 ou 25 années de son épiscopat, aocan
des habitants de la ville ni de ses terres , n'eut sujet de se plaindre de
ses domestiques. Quelques habitants d'Âuxerre ayant tué et partagé
entr'eux un cerf domestique qu'il nourrissoit, il voulut d'abord en tirer
raison (i) ; mais les ayant fait venir devant lui à la prière de son offi*
cial, il se contenta de les reprendre paternellement et leur pardonna.
Ce qu'il observa, k l'égard de ces deux laïques, étoit sa pratique ordi*
naire envers les ecclésiastiques délinquants. Quoiqu'ennemi des vices,
il ne pouvoit presque se résoudre à les châtier autrement que de pa-
roles ; et aussitôt qu'il voyoit un prêtre lui demander pardon et plearcr
en sa présence, il se sentoit touché de compassion et lui pardonnoit
peut-être avec trop de facilité. Cependant , il ne put se dispenser, dès
l'an 1604, de montrer du courage, lorsqu'il fut question de soutenir
les droits de sa dignité et la gloire de Dieu. Ceux qui ont lu le Traité de
l'Abus, par Fevret, comprendront ce que je veux dire quant aux droits
et honneurs de l'épiscopat. Â l'égard de ce qui est dû à Dieu, on ne
peut nier qu'il ne fût bien fondé h marquer son zèle contre les per*
sonnes qui se promenoient dans l'église cathédrale pendant l'office, de
quelque 'qualité qu'elles fussent , ou qui y paroissoient d'une manière
indécente. Non-seulement il se fit exactement prêter serment d'obéis-
sance par ceux qui furent élevés k la dignité de doyen, mais encore il
(1) Mém. d<^ 1609.
QUATRE-VINGT-DIX-SEPTIÈME ÉVÊQUB d'aUXERRE. 207
voulut examiner les voies par lesquelles ils y éloient parvenus. Ainsi i^^ {| i^k.
se vit-il obligé de refuser Pierre le Clerc, quoique malgré lui. Il voulut
aussi, sur la fin de son épiscopat, obliger les chanoines, qui étoient
curés, à résider dans leurs cures principalement les jours de fêtes ;
mais, sachant que le Chapitre prendroit fait et cause pour ceux qui
seroient inquiétés, il se désista de son entreprise (1). Informé du
mauvais ordre observé dans l'oi&cialité, il fit assembler, en son palais
épiscopal, en sa présence, le 18 juillet 1605, Gaspard Damy, cha-
noine et lecteur, officiai, Edme Guillaume, aussi chanoine vice-gérant,
Jean Chardon, prêtre promoteur, avec Claude Boussu, greffier, et les
procureurs, au nombre de sept. Tous concoururent à former nn règle-
ment composé de trente-quatre articles, avec Taide des lumières de
Claude du Yoigne, docteur en théologie, vicaire-général, de Jean
Dassier, très-versé dans le droit, et Nicolas Du val, avocat en parle-
ment. Il n'y fut point résolu de supprimer les trois officialités rurales
de Yarzy, Cône et La Charité, mais d'examiner les titres de leur créa-
tion et de s'instruire sur les abus qui s*y commettoient. Dans une autre
assemblée y tenue chez lui, le 17 avril 1615, fut examiné le droit des
archiprétres , par quatre curés que le syuode avoit choisis , savoir :
Gaspard Bargedé , chantre de l'église cathédrale et curé de Monéteau ;
Jean Jurain, chantre de Varzy, curé de La Chapelle Saint -André;
Caradeu Gaudry, curé de Moutiers; et Guillaume-le-Grand, curé de
Saint-Regnobert. Le résultat de Texamen se trouvant favorable aux
archiprétres , Tévéque les confirma dans le droit du lit du curé défunt
et de la desserte de la cure vacante, par acte du même jour, de l'avis
de Jean Dassier, son vicaire-général , et de Gaspard Damy, son
officiai.
Obligé de donner k la cathédrale sa chapelle d'ornements, il les fit
présenter au Chapitre, le 25 décembre 1606, savoir : cinq chapes, les
ornements de l'autel et ceux des ministres sacrés, le tout d'une toile
d'or et d'argent k deux fils frisés à poil. I^ même année, il paya la fonte
de la seconde cloche de la tour, et huit ans après, celle de la grosse
(1) Reg, CapiU apriL 1621
I
I
»
ISM k 105.
208 FRANÇOIS DE DONADIEU,
cloche (a). Il donna aux églises d^Appoigny, Cbarbuy et Gy-rEvèqne
doDl il éioit seigneur, un ornement complet. Il &t b&tir le jubé d'Âp-
poigny, et à Gy-FEvéque la voûte du chœur. Il établit des Capucins
aux portes d'Âuxerre (1); il donna d^abord, à leur arrivée, pour ache-
ter la place où ils sont et avoir les matériaux , la somme de deux mille
quatre cents livres ; il planta lui-même la croix à Tendroit où Téglise a
été b&tie, le 27 septembre iCOG , en présence du clei^é et du peuple ;
il ajouta encore douze cents livres à ses premiers dons, et continua, tant
qu*il fut ^ Âuxerre, de leur donner par an la valeur de cent livres ; et,
i TtB 1614, il dédia leur église. Les Jésuites furent, après les Capucins,
€e«x k qui il fut d*un plus grand secours , en ce qu^il fit réussir ^ leur
aviDlage ce qui avoit échoué sous son prédécesseur. D*abord il con-
tribu , par son crédit et ses sollicitations , ^ empêcher que le bâtiment
élevé des deniers de Jacques Amyot ne retournât â ses héritiers , et il
obtint Tarrèt qui Fadjugea â la ville en 1607. Ensuite, ayant laissé
éeovlar on intervalle de temps depuis la mort d'Henri IV, il consentit
k kor établissement; et, â leur arrivée, en 1622, il leur donni
1600 livres. Dès Fan 1606 , il avoit remis son abbaye de Bellebranche
pow être perpétoellement unie au collège des Jésuites de La Flèche.
Oolre la somme d^argent qu*il donnoit régulièrement pr an aux Jaco-
bÎBS ei aux Cordeliers d*Auxerre , il y avoit deux muids de vin assurés
pow chacune de ces deux communautés. Il aida beaucoup les premiers
dus la dépense qa*ils firent, en 1620, pour la tenue de leur CImi-*
pilie provincial k Auxerre, estimant singulièrement le prieur nommé
fl X«m. de BteMètDiiel
(a) Void rinscriptko de la plus grosse de ces deux dociMS,q^ est rapportée dans
nn Rfbire capîtnlaire de ITM.
HjBC HB SACmA WMTS FBCITf MUBCLQCK miFVCIT,
NcmDc KT AMio HBD rsETsaia àsnm tO!co.
fkAxciscrs Bc DnHUMsr bhsc actiss. hoc Tvmpâxni
Pwc»o \. M.« mmsis c4Fnru fumo co!«STâTrs, coxrmACTrm
SciS SXFCQ» M«0 KKFia CCElTIT. AH 1614.
La seciMMie.doat le poids n'est pas conno. poftait les armes de M. de IK>nadieQ el
ladatedeieML .V 4. £
QUATRE-VINGT-DIX-SEPTIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 209
Yaaguier pour sa vertu , et h cause du soin qu'il avoit pris de rétablir i^ ^ i^,
le couveut ruioé par les hérétiques. Par la même raison , il aflectiouna
aussi très-particulièrement Jean Chapelle » gardien des Cordeliers, et
le fit Tun de ses grands-vicaires en 1617 ({). Il partagea, entre ces
deux communautés , les douze cents écus qu'il avoit reçus du duc de
Nevers , pour des terres dans la possession desquelles il étoit rentré , et
il leur fit distribuer, h condition qu'ils les employeroient aux besoins
de leur église. A Tégard de THôtel-Dieu , tous les ans il y faisoit
donner la somme de cent livres (a).
Dès Tan 1617 furent établies les Ursulineh^ ; François de Donadieu
leur donna des constitutions Tan 1625, avec Tavis et les conseils de
Jean Boutroux , curé de Saint-Pierre-en-Château , promoteur de cet
établissement. II approuva celui des Augustins de la réforme de Bourges
fait dans ville de Gosne, en 1616, aussi bien que celui des Récollets,
qui furent établis de son temps et sous ses auspices, à Glamecy (b) et
à La Gharité-sur-Loire. Les Jacobins et les Garmélites songèrent pa-
reillement à s'introduire à Auxerre; mais ces projets furent sans
exécution (2). L'établissement des Bénédictines dans la ville de La
Charité-sur-Loire , projeté vers la fin de son épiscopat, eut plus de
succès (c). Il prit un soin particulier des religieuses de l'abbaye de Saint-
Julien , qui étoient retirées k leur maison de Gharentenay depuis les
dernières guerres de la Ligue; et par le moyen d'une visite pour laquelle
(I) Reg. CajntuU. \ (2) Reg. CapU. et Urbis 162S, 1625.
(a) L'hôtel-dieu de Varzy fut de sa part, en 1620, l'objet d'un jugement qui inter-
dit aux procureurs du fait commun de la ville de s'immiscer à l'avenir dans son ad-
ministration. — (Archives de ITonne) SG (^, d.E.)
7.
{h) Les Récollets furent établis parla protection de la duchesse de Nevers en 1620.
Un P. de Mouchy fut leur fondateur. Leur église était au-dessus du faubourg de
Beuvron. Arch. de l'Yonne SQ {N. d, E.)
12.
(c) Elles furent fondées en 1624 sous le nom de Bénédictines du Mont-de-Piété.
Leurs fondateurs sont noble Pierre du Broc dit du Nozet et Edmée de Thibaut sa
femme. Ellesfurent soumises au Val-de-GrAce, en 1626. J G_ (^y. j. j^.)
17.
II i4
I
^
i
210 FRANÇOIS DE DONAD|Et\
1699 è 16%. ^ commit Gaspard Damy son oflicial, la |)aix fut remise clans ce monas-
tère, et les séculiers dont elles avoient formé olles-mômos (le grosses
plaintes furent éloignés. La pénitencerie étant une dignité spécialement
établie pour le soulagement des évoques, il entra dans tout ce qui poo-
Toit être utile au temporel de cette dignité ; il approuva la désunion qui
fut faite de la cure de Saint-Âmand , pour y unir en place celle de
Treigny, beaucoup mieux rentée, et cela du consentement du Chapitre
de la cathédrale, qui fut sollicité par Denis Perronnet, alors péniten-
cier. Il confirma aussi, en iClO, Tunion faite ci-devant de la chapelle
de Saint-Germain à Técolâtrerie , depuis incorporée h la péniten-
cerie (1). Ce fut, par sa permission accordée en 161!), que le sieur de
Salles, seigoeur du Couidret, proche Bléneau (2), rebùtit a neuf un
peu au-dessus du pont de ce lieu, une chapelle en Thonneur de sain!
Posen (3). C*est celle dont on voit les ruines en montant à droite sni
le chemin d'Ouzoir. On dit qu'elle avoit été d'abord dans un autre en-'
droit. Ce prélat avoit pris, dès Tan 1610, d'excellentes mesures pooi
la conservation de toutes les chapelles de son diocèse et même des re-
venus de tous les bénéfices. Tous les titulaires dévoient déposer, aux
archives de Tévêché, des copies collaiionnées de leurs principaux
titres (i). Mais l'exécution en parut diflicilo, quoique conclue sur les
suffrages du synode. Des difticullés considérables arrivèrent de son
temps dans quelques petites villes du diocèse; à Gien, il accorda les
chanoines de la collégiale avec leurs subalternes, c'est-h-dire les cha-
pelains ; un règlement de l'an 1609 pourvut a tout. Â Clamecv, il y
eut une entreprise formée par les élus, touchant l'audition des comptes
de fabrique de la paroisse, contre le droit du grand-archidiacre ; mais
cette affaire fut réglée en faveur de l'archidiacre, par un arrêt du 5 jan-
vier 1615. Au faubourg de Clamecy est une chapelle très-célèbre,
nommée Bethléem , laquelle a toujours été de la dépendance de TéTèane
d'Âuxerre. Louis de Clèves, prieur de La Charité et évéque de Bethléem
s'étoit imaginé qu'on le croiroit sur sa parole, lorsqu'il assureroit que
(1)Hfg. Cap. i60i, 22i>'or.
\t) Ex Rcg. Srcrct signato Cochon. 3 sej»t,
16:9.
(3) S, Posmnusd\kherT\,
tus.
[A Regist. Franc. PeUé Setrei. EpUtopa-
QUATRE-VINGT-DIX-SEPTIÈME ÉVÊQUB D^UXERRE. 211
celle chapelle étoit unie à son évéché. Il voulut eu produire des preuves; 1599 j^ |^,
mais comme ce qui pouvoit avoir élé fait n'ëtoit point muni du consen-
tement d'aucun des évéques d^Auxerre, François de Donadieu y fit
former opposition par Germain Cochon, avocat, le 19 mai 1606 (a).
Il seroit inutile de s'étendre ici sur les statuts qui furent formés dans
les synodes tenus de son temps , si la compilation qui en fut imprimée
en 1622, n*étoit devenue fort rare. Les curieux y liront avec plaisir,
dans le mandement préliminaire , cette maxime sur le besoin de tenir
des assemblées de quelque nom qu'on les appelle, qu'il déclare néces-
saires dans l'Église, pour remédier aux doutes^ di/JiculUs et désordres
qui s'y peuvent glisser. Entre ces règles promulguées de son autorité,
il y en a une qui défend , comme une cérémonie indécente et non con-
forme aux saints décrets , d'enchérir les l^tons des confréries durant
le cantique Magnificat {l) ^ ei d'appliquer les versets «lapo^uit et stiscepitii
la délivrance de cesb&tons. Il avoit réglé dès l'an 1609, qu'il n'y au-
roit plus qu'un parrain et une marraine à chaque baptême, et qu'on re-
trancheroit la coutume par laquelle il y avoit un assistant outre le
parrain , si c'étoit un garçon qui fût k baptiser, ou une assistante si
c'étoit une fille (2); et il enjoignit d'avertir les peuples qu'un seul parrain
et une seule marraine suffisoient, suivant le concile de Trente (5). Il fut
(1) Page 12.
(3) Page 19.
(3) Page "^9.
(a) En 1612 , Tévéque voulant contribuer à Tentretien du collège destiné à l'ins-
truction de la ville et chàtellenie de Gosne, donna à bail perpétuel aux habitants
de Cosne, deux lies situées sur le Noain au faubourg Saint -Agnan, et plusieurs autres
héritages, moyennant 30 sous de rente, et 2 sous 6 deu. de cens, à condition
d'employer le revenu de ces biens à Fentretien spécial du principal et du régent du
collège de Cosne. La destination primitive a été conservée jusque vers la fin du
xrm* siècle. — (Arch. de l'Yonne, Instruction publique).
Le collège de Yarzy fut aussi Tobjet de ses soins. En 1619, il termina les diffi-
cultés qui s'étaient élevées entre le Chapitre et la ville pour l'élection d'un maître ,
et décida, suivant les titres du Chapitre, que ce corps présenterait dorénavant le
principal ou précepteur et l'instituerait dans le cas où il serait trouvé capable, ce
qui eut lieu jusqu'en 1755. L'enseignement des humanités allait jusqu'à la rhétori^
que et était gratuit. —Arch. de TYonne. ^G ,^r ^ ^s
T
2i2 FRANÇOIS DE DONADIEl',
1590 ï 1695. ordonne aux prôtrcs qui administreroient la communion, noo de retran-
clier l'usage où ils ctoient de présenter ou faire présenter du vin et de
Teau aux laïques qui venoient de communier , mais de se servir pour
cela <!*un verre ou autre vase, et non pas d'un calice, de crainte
qu*ils ne crussent communier sous les deux es[K>ces. Cet asage de
boire du vin après la communion étoit en effet si commun parmi le
peuple d'Âuxerrc, encore à la fin du xvi* siècle, que je trouve dans le
nécrologc d'une des paroisses les plus pauvres de la ville (1), qu'un par-
ticulier donna vers ce temps-lk une vigne à cette église pour fournir le
vin de la communion du jour de Pâques ; et cet usage n'a cessé que de
nos jours, parce que les coupes d'argent qui y étoient destinées se
trouvèrent usées de vétusté, en sorte qu'il n'y a que la cathédrale où il
s'est conservé après la communion générale des quatre fêtes ordinaires
de l'année. François de Donadieu ordonna encore que, dans les églises
paroissiales où l'on trouveroit deux seigneurs disputer entr'euz les
honneurs et prérogatives, les curés ou vicaires ne nommeroient aucun
des conlendants dans les prières , et qu'on laisseroit leur part du pain
béni sur le banc des fabricicns (2). Il défendit a tous prêtres de remarier
les personnes qui l'avoient été ; c'est-a-dirc de réitérer les cérémonies
matrimoniales avec la messe pro sponso et spansa en faveur de ceux qui
disoient qu'on avoit usé de ligature à dessein de leur nuire (5). Il trouva
quelquefois, dans ses visites, des abus dont les curés ne s'étoient point
plaints aux synodes; il tâcha d'y remédier. C'étoit, par exemple, Tusage
en plusieurs lieux de la campagne que le jour du mariage on fit chanter
vêpres par le curé, ou qu'on assistât à celles du Chapitre, si c'étoit dans
un pays où il y eût une collégiale. Il n'y avoit rien que de louable, si on
se fût borné h dire ces vêpres suivant les règles reçues et approuvées;
mais le bizarre étoit qu'il falloit que le BenedicamuSj qui termine ces
vêpres, fût chanté par les parents du mari et autres assistants , k gorge
déployée , ce qui n'éloit pas propre à exciter la dévotion. Le prélat vi-
gilant défendit celle pratique et ordonna que les enfants chantassent
ce verset comme c'est l'ordinaire dans le diocèse. Il défendit aussi
(1) Obituar. S. Pcregrini ad 27 martii.
(2, Page 4*.
'3) Page !»:3.
/
/
QUATRE-VINGT-DIX-SEPTIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 215
de laisser parollre k la procession de la Fête-Dieu des hommes y^^ ^ ^^^
vêtus en apôtres, avec des fausses barbes et perruques, et des habits
faits exprès , couronnés d'espèces d'auréoles ou faux diadèmes. Il
ordonna, qu'au lieu de cela, on portât avec respect des cierges allumés.
C'est ce que j'ai tiré des registres de visites qu'il fit dans Tété de l'an
16229 après la publication de ses ordonnances synodales.
G)mme ce prélat avoit conçu à Rome une haute idée du rit qu'on y
voyoit communément pratiquer, sans faire attention que le Chapitre de
Saint-Pierre, au milieu de cette grande ville, n'observe pas les nouveaux
usages romains dans l'office canonial, il essaya d'en introduire ce
qu'il put. Il avoit voulu, dès le commencement de son épiscopat, pa-
roitre au chœur autrement habillé que ses prédécesseurs. Mais, en
décembre i602, il fut condamné, aux requêtes du palais, h porter,
depuis la Toussaint jusqu'il Pâques , la grande chape noire, le capu-
chon et camail comme les chanoines, ce que le Chapitre avoil certifié
s'être pratiqué par les deux derniers évêques résidants, Lenoncourt et
Âmyot. Le règlement ajouta même que, depuis Pâques jusqu'à la Tous-
saint , l'évêque assisteroit k l'oflice en rocliet et surplis par-dessus. On
ne savoit alors à Âuxerre cequec'étoitquela mozette qui est venue de-
puis. Vers le milieu de son épiscopat, plusieurs des anciens chanoines
étant morts, on laissa introduire quelques rubriques prises d'ailleurs (1).
Néanmoins, dans les visites des paroisses , il ordonnoit qu'on achetât
le Missel d'Âuxerre préférablement au romain , et ne permettoit ce
dernier qu'au défaut du diocésain, qui commençoit à devenir rare«
Regnaud Martin, archidiacre, fit aussi, de son temps, l'essai d'une cor^
rection du Bréviaire d'Auxerre. Elle n'étoit point achevée l'an 1620 (2},
et il ne parut aucun ouvrage concernant l'office divin sous l'épiscopat
de François de Donadieu. Selon l'ancien usage , l'évêque fournis-
soit chez lui, aux chanoines, chaque année ^ au retour des vigiles chan-
tées dans le chœur de Saint-Àmatre, le 50 avril , des gâteaux et trois
sortes de vin, par forme de rafraîchissement oud'agape ; cela fut changé
de son temps. On consentit, en 1607 , que ce petit repas fût évalué h
une somme d'argent ; elle se paie toujours depuis h ceux qui assistent
(1) jRf^. Capit. 1608, 1609. | fi] Reg, Capit. 18 dec. 1620.
I 214 nU5Ç0fS DC D0!IADISL* ,
]\ ttw 4 :«s. ^ ^<rt oflke, leqod est qq reste des aocieDDes veilles qu'on célébroit
ihiis chjqiie pays, au tombeaa^des saints tutclaires à Tapproche de lev
Onoiqve depais près d*on siècle Téglise dWnxerre nVôt point en de
pastevr attaché si scrapalensement ^ la résidence , il nVn lant point
coDclore qu'il ne sortit jamais de son diocèse. Il s*en ^igna quelqi
fott : mais ce fat presque toujours pour des sujets de piété et de
tÎM. 11 alb« en i601, à Orléans* gagner le jubilé que le pape accorda
pov la coatinuation du bâtiment de Téglise cathédrale dont Henri IV
mil h première pierre « et son exemple fut sui\i |ar quelques dm-
noines. On le TÎt quelquefois ci^brer ^ Paris la messe de TouTertue
du parlement. Non-seulement il étoit en grande réputation auprès éts
ma^gîstnts de cette cour et du conseil « mats encore i! étoit parfaitement
bien dans Tesprit du roi Henri IV et do la reice. Aux obsèques de ee
-| grand prince, il conduisit Tambassadenr de Savoie à S^int-benvs, fit
ensuite diacn^ , et chanta TcTangile ^ b messe des funénilles. L'assis-
tance qu*il de^t aux assemblées du clergé de la prx^rince , ToUigen
anssi à quelques vovages. On voit son nom au Kis de h condamnatioa
du livT^ d*Ednh>nd Richer de eccUsiasiM poffUau. fiite en 101 i« le
15 Bur^. par les évoques de la province de Secs, Il dédia l'egUse
des Capucins Je Jo^v« diocèse de Sens . a la prière do cardinal de
liondv, fondateur de cette maison. Il eut. {vendant quelque temps, ponr
snCn^fsant. un («nnnontr^ nomme Nicolas Lagrene. abbé de Saint-Jenn
dWmieK et evéqne d*Ebri>n « lequel . étant à Auxerre. fiisoit sa ncsi-
denof cbei V» chanoines rv^Iiers de son Onire. Un voyage qn*fl fit
à I^ins . Tenleva pour toujours au diocèse dWuxerrtf . et lui occasiomsa
tt [^rsautatîon quM y fit . au mots de juillet Ilï25. A^ son évéché aTec
iti!V«s de S^vivnr e«f\)ue de G>mmiag^ : celui-ci vint à bout de pcr-
>aiief à FriDCxHs de IK>ttaJieu qu'il devoit se repfrvciM' de son pnjs
<i «Se s^m frère . Tevèque de Saiut-Papoul. Franc\^ de Dooadîev fut
MkNMent el^Mu de cette pnsi^Xksiiîon qu'il n examin pas senlemest si
! ic^fvui iv\K qui il iraitoh et es: r>fviHu de fvav\xrk t>n de^xMirrit depdb
^ne if S3e«r ^:e VenîeftK. sca homo:^ (i'lâ^n^^, ivoîi eie gapnê {^Mnr
^e£^c>^'^r i Ji ;vr,i:*-:iu:z. L*: T ÛKit-r à* lii It>i4. n^;r>? pc^t
\ -uat: retvirac i Tari. :x:\ >^*i U* i^h:: f4r\?eviz: notiêres. à h pers«a-
i
[
quatre-viugt-dix-septième éyéqub d'auxerre. 215
sioD de Jean de Montereul , avocat en |)arlement , et fit signifier sa ^^^ ^ ^^
révocation h Gilles de Souvré, le 17 mars suivant ; mais il étoit appa-
remment trop tard , comme la suite le fit voir. Il tomba malade, peu de
temps après » de chagrin de cette affaire. Son neveu , Barthélémy de
Griet, lui conseilla de se recommander à la vénérable Marie de l'Incar-
nation, décédée depuis peu , en odeur de sainteté , chez les Carmélites
de Pontoise; il lui appliqua quelques reliques de cette religieuse, et sa
santé revint peu à peu. François de Donadieu crut que Dieu demandoit
qu'il résignât à un autre l'évéché de Comminges , qui lui étoit échu
sans le vouloir. Il engagea son neveu, qui étoit ecclésiastique, k l'ac-
cepter. Ce neveu est celui-là même à qui , lui et son frère, Févéque de
Sainl-Papoul, avoient fait perler le nom de Donadieu en vertu de lettres-
royaux obtenues depuis la mort du sieur de Puchairie, dernier mâle de la
famille. Il se soumit aux intentions de son oncle, et il en justifia le
choix par la vie sainte qu'il mena et qu'on dit même avoir été accom-
pagnée et suivie dt^ miracles. Sa préconisation à Tépiscopat est du
6 octobre 1625. Il y est qualifié prêtre du diocèse de Rieux ; ces lettres
lui permettent de retenir en commande l'abbaye de Saint-Hilaire » du
diocèse de Carcassonne, de payer, sur les revenus de l'évéché de Com-
minges, trois mille livres h Gilles de Lusignan de Saint-Gelais , clerc
du diocèse de Tours, et huit mille livres de pension h François de
Donadieu, ci-devant évêque d'Âuxerre; et de le laisser jouir, sa vie
durant , du château d'Âlan , et des revenus de cette terre dépendante
de la mense épiscopale de Comminges.
François de Donadieu , confiné dans ce dii>cèse, n'oublia point son
ancien troupeau qu'il n'avoit quitté qu'à regret. Tous les jours il offroi^
le saint-sacrifice pour le diocèse d'Auxerre, et assuroità ses amis qti'il
s'y croyoit obligé. Il récitoit même , en son particulier, l'office en
l'honneur de tous les saints d'Âuxerre, chaque jour qu'il en trouvoit
dans le calendrier du diocèse dont il avoit un exemplaire. Je rappor-
terai , sous l'article suivant, les égards qu'il eut pour la mémoire de son
successeur, et sans m'étendre sur le bien spirituel et temporel qu'il
procura au diocèse de Comminges et à Saint-Bertrand où est la cathé-
drale, il suffira de dire ici , qu'étant d'une santé beaucoup plus forte que
l'évêque de Comminges , il y exerça presque . toujours la plupart des
216 nURÇOIS DK OONADIED, XCVU* ÉTÊQCS d'âCXEREE.
^ iw k ittî. fonctions épiscopales ; qu*il vit monrir ce saint neveu en 1637, et qae
! loi avant sanrécu de trois ans, il mourut dans le cliàieau d'Alan , aa
mois de février 1640, &gé de quatre-vingts ans. On croit que son corps
ou au moins son cœur fut porté ^ Puchairie,Ie lieu de la sépulture de ses
ancêtres, et où il avoit fait bâtir une belle chapelle. Mais il est probable
qo*on ne Taura pas séparé de son neveu, dont il admira toujours la
haute vertu.
Aucun de ses historiens n'a marqué qu*il eût fait un testament , ni
qa^l eût demandé des prières dans la cathédrale «IWuxerre. Un de ses
oiBciers nous a seulement informé que lorsqu'il eut été remboursé de
la vicomte do Domfront, qu'il ienoit par engagement pour b somme de
cinquante mille écus , il prtagea les trois quarts de cette somme entre
tous ses héritiers présomptifs , et qu'il employa le reste en aumônes et
j; ^Nvres |iies. On voit aussi , |^r les ri^istros du Chapitre dWuxerre (1),
que les chanoines de cette église ayant appris son décès, lui firent un
service solennel auquel les coqis de la ville furent in%ités. Cet évèqoe
avoit para affectionner beaucoup un jeune homme appelé Hector de
Pucbairie : il lui fournit même une pension considérable pendant les
études qu'il fit à Toulouse ; mais on ignore à quel degré il lui étoît pa-
rant et ce qu'il devint apK's la mort de son protecteur. On trouve, dans
le$ bibliothèques, deux ouvrages qui ont été dédiés à Fran^^ois de
Donadieu ior^qa'il étoit évéque d'Auxerre . savoir : un volume de ser*
mous de Denis Perronet, |H>nitencier de ceHe église, en 1601 . et b
chnwique de Robert, religieux de Saint-Marien d'Auxerre, publiée à
Tr\\\e$. l'an I(i08, |>ar Nicolis C^muiat, chanoine de Troyes.
I^ |4us grande )>artie des faits que j'ai rapportés dans l'histoire de cet
evéqne, sont tirés des mémoires du sieur Antoine Mathieu Blan*
ckonnet, natif de ios^rogne , k\]uel, apK^s aïoir ete son maître d'hôtel,
devint ensuite conm^leur dos donior^ du diocèse, de ceux de Germain
Har>)olat, clutto:ue d'Auxenrv tt\ comme aussi des collections fonmies
4
««If i&jir^sj^'r.: ^' M 1Uri;Ui. oc«$<rie â«\ Arvài^^ i< t Yw-«»e. est
»t otnrttosuil c:a^w<4 iv CikA^uv iHi > ivmAi^r^ W mm eiMse «
i
V- y^
GILLES DB SOUVRÉ 9 ICVlll^ ÉVÊQUB d'aUXERRE. 217
par Gaspard Damy, son officiai, et des remarques en original du sieur ^5^9 ^ |^^
C. Bogne de Yarzy, qui avoit été son officier pendant plus de ^ingt ans.
CHAPITRE Vil
GILLES DE SOUVRË , XGVIII* ËVÊQUE D'AUXERRE.
François de Donadieu n'oublia rien pour empêcher que son traité leae ï leai.
avec Tévêque de Gomminges n*eAt lieu. Il avoit fait signifier sa révoca-
tion non-seulement à ce prélat, mais encore au Ghapitre d'Auxerre, au
lieutenant-général du bailliage et au procureur du roi (1). Il alléguoit
qu'un de ses domestiques, gagné par argent, Tavoit surpris; que, par
le traité passé d'abord k Régennes, le 15 mai 1625, on lui avoit donné
Tévéché de Gomminges franc et déchargé de toutes pensions; que, par
un second, du 7 juillet, on lechargeoit de six mille livres de pension
au profit du sieur de Lansac , et qu'enfin la personne qui avoit fait le
traité k Paris , an nom de Gilles de Souvré , n'avoit de lui aucune pro-
curation. Mais comme par le premier traité il étoit dit que les deux per-
mutants jouiroient de leurs bénéfices, à compter depuis la Saint-Jean
1625, et qu'ils en percevroient les fruits, quoiqu'ils résidassent dans
leur ancien bénéfice jusqu'à ce qu'ils eussent obtenu leurs bulles , un
nommé Merlet , dit du Jardin, procureur de l'évéque Souvré, lui per-
suada d'envoyer au plus tôt un économe à Auxerre. Get officier vint se
(1) Mémoire imprimé sur cette alTaire.
autrefois les corporations de tout genre de faire respecter leurs prérogatives les plus
minutieuses, les usages d'étiquette, etc. Le bon chanoine nous révèle les suscep-
tibilités de ses confrères, leur jalousie et la sienne propre, leur esprit ombrageux et
toujours redoutant les empiétements. (iV. d. £.)
i€M ^ lai.
218 GILLES DE SOCVEÉ,
présenter; maisleCbapi tre, loin de le reconnoitre, nomma trois cba-
noines, le 19 mars, poor s'opposer à son économat. II réroqoa même,
le 15 afriK la conclusion do 6 octobre 1625 , qui portoit ooTertnre de
ce qu'on appelle ailleurs la r^ale , laqnelle a¥oit été (aite nonobstant la
répugnance de quelques chanoines. On passa arrêt à M. de Donadieu ;
el un particulier, qui a¥oit été pourvu d'un canonicat comme si le
siège eut été Tacant, fut débouté et déclaré non-recevable. Ce ne fut
donc qu'en 1625, le 17 janvier, que le Chapitre connut que véritable-
ment M. de Donadieu n'étoit plus son évéque, et lorsqu'il eut connu
que M. de Souvré avoit été nommé par le roi. La durée de cette va»
cance ayant été plus longue qu'on ne Favoit espéré , on changea sou-
vent, dans le Chapitre , Tordre de conférer les bénéfices vacants, ou
plutôt on varia sur le nombre des jours que chacun resteroit intabulé
pour cela (1). II ne se passa cependant rien de fort considérable
pendant les vingt et un mob qu'elle dura , sinon que le cardinal Bar-
berin , neveu d'Urbain YIII, légat du pape , tut reçu à Anierre, en 1625,
avec de grandes solennités. Les ordres du roi , du 25 avril , qui furent
communiqués au Chapitre, portoient que la bourgeoisie iroit en armes
au-devant de lui avec les magistrats , jusqu'à Fendroit qui seroit indiqué
par le duc de Bellegarde ; qu'on lui offriroit les clés de la ville ; qu'on
lui présenteroit un dais de couleur rouge et qu'on tapisseroit les rues
jnsqu'à son logis. Cette entrée se fit au commencement du mois de
mai. Ce légat étoit accompagné de Pamphile, dataire , qui fut depuis
pape , sous le nom dinnocent X^ et il célébra la messe an grand autel
de h cathédrale.
Gilles de Souvré, résoin de prendre possession, chargea de sa pro-
curation Henri de Lambert, abbé de Hautefontaine et de Saint-Père
d*Auxerre, qui présenta les bulles le 25 septembre 1626 (2) . Le prélat
écrivit en même temps aux vicaires-généraux nommés par le Chapitre,
qu'il les prioit de continuer leurs soins jusqu'à ce qu'il fut présent en
personne, excepté la collation des prébendes et les stations des prédi-
cateurs qu'il se réservoit. Il ne différa pas un mois entier depuis sa prise
(t) Rtg^ C9fit^ IS/ofw. 12 OMtt et 9 om^. | :3 £«7. C(^, 25 S9pi. t<>S6-
QUATRE-VINGT-DIX-HUITIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 219
de possession. II se rendit à Auxerre incognito^ k sept heures du soir, i^g^^ ^ ^^i
le 15 octobre, et sans aller à Tabbaye de Saint-Germain, il logea d'a-
bord au palais épiscopal. Le lendemain il se présenta k la grande porte
de Téglise, où il fut reçu par le Chapitre et installé par le sieur de
Manjan , grand-archidiacre de Sens. On ne sait pour quelle raison il fit
celte entrée avec tant de simplicité.
Il étoit né, en 1596 , de Gilles de Souvré, marquis de Gourtenvault,
maréchal de France , gouverneur de Louis XIII lorsqu'il n'étoit que
dauphin, chevalier de ses Ordres, gouverneur et lieutenant du roi en
Touraine, et de Françoise de Bailleul de Renouart. Il posséda, encore
tout jeune, plusieurs abbayes (1) ; il eut d'abord celle de Saint-Genou,
au diocèse de Bourges ; ensuite, celles de Saint-Florent de Saumur
en Anjou et de Saint-Galais lui ayant été données, il fit tomber celle
de Saint-Genou k François Chastelain, qu'il avoit eu, en 1614, pour
professeur de philosophie, k Paris, au collège de Navarre. S'étant as-
socié, en 1616, au célèbre Gassendi (2), ils se firent enseigner en-
semble la langue hébraïque , par un juif d'Avignon nouvellement con-
verti. Ce fut vers ce temps-lk qu'il commença k connoitre le mérite des
gens de lettres. Le sien étant aussi très-connu dès l'âge de 22 ans,
il fut nommé à l'évéché de Comminges, alla h Rome recevoir tous les
ordres par dispense du pape , se fit sacrer évéque h Ravenne (3) et
gouverna avec sagesse le diocèse de Comminges depuis l'an 1618.
Ceux qui l'ont connu, écrivent qu'il étoit de haute stature, d'un naturel
vif et gai, qu'il fut chéri de la noblesse pour sa bonté et sa franchise,
respecté des pauvres et des riches , comme le père commun de tout le
troupeau , et estimé des ecclésiastiques pour sa science et sa piété, qu'il
aima les gens de lettres et les curieux ; en sorte qu'il parolt que ce
prélat auroit mérité de vivre dans un temps plus éclairé.
Après avoir fait revivre la discipline dans le diocèse de Comminges
(1) Je trouve dans le catalogue des doyens
de la métropolitaine de Tours de M. Maan,
p. 257, Hist. EccL Turon, Egidius de Souvré
electus, non receptus 1606. Helias de Concert
per resignationem 1606; mais notre Gilles de
Souvré étoit alors trop jeune.
(2) Epist. Gassendi ad Lud. Noël Canoni-
cum Àutis,
(3) On ajoute que quelque temps après, il
fût fait trésorier de la Sainte-Chapelle de
Paris.
220 GILLBS DE SOUVRÉ,
lesG \ 1681. P^^ ^^ exemples et sa doctrioe, il en fit autant dans celui d'Auxerre.
Il avoit entendu déclamer, deux jours après son arrivée, une oraison
latine par le professeur de réthorique du nouveau collège, sur la sain-
teté et la dignité de l'église d'Auxerre. Il fit aussitôt ses efforts pour ne
point dégénérer du zèle de tant d'illustres évéques des premiers temps ;
la réforme qu'il essaya d'introduire dans le troupeau dont il avoit re-
cherché la conduite, en fut la preuve. Pour commencer par le clergé, il
obligea les curés, par un mandement de Tan 1627, h résider dans
leurs paroisses ; et , afin de fournir par la suite au diocèse de bons
prêtres, il songea en même temps à l'établissement d'un séminaire. II
tint k ce sujet plusieurs assemblées chez lui, où il convoqua les cha-
noines les plus éclairés. Le premier dessein fut de le placer où est la
salle du Chapitre et autres anciens édifices de la mense commune des
chanoines , puis d'en confier la conduite à quatre ou cinq de leur
corps ; les séminaristes auroient fait Toifice à la paroisse de Saint-
Pierre-en-Ghàteau , et il y auroit eu communication d'un quartier k
l'autre par moyen d'une arcade. Le projet n'ayant pas été du goût de
M.Bourdoise de Saint-NicoIas-du-Ghardonnet, k cause qu'il n'y trou-
Toit point d'exercice des fonctions curiales, on songea k le placer à
l'abbaye de Saint-Père, et à en ôter les religieux qui servoienl mal la
paroisse. Mais l'abbé ayant différé de donner son consentement, on ne
put consommer l'affaire. L'évéque, cependant, écrivant au pape, lui
marqua l'empressement avec lequel il travailloit à cet établissement.
Il se plaignit à sa sainteté de ce que quantité de cures étoient unies
et incorporées à des Chapitres , qui se contentoient d'y mettre des des-
servants ou des vicaires tels qu'ils pouvoient les trouver, et que cela
étoit cause que les paroisses étoient mal gouvernées. Il porta aussi ses
plaintes de ce qu'il y avoit des cures qui ne pouvoient être conférées
qu'à des chanoines réguliers, et que ces réguliers étant eux-mêmes
d'une mauvaise conduite , ils ne pouvoient pas conduire saintement les
peuples qui leur étoient confiés. II pressa le souverain-pontife de casser
toutes les unions de cures aux collégiales et aux communautés, et d'éta-
blir des curés fixes et permanents dans toutes les paroisses ; de per-
mettre aux patrons des abbayes de présenter des séculiers aux cures
de leur dépendance , et de lui accorder le pouvoir de supprimer les
QUATRE-VINGT-DIX-HUITIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 221
abbayes de Saint-Père et de Saint-Laurent, pour en appliquer les revenus
h la fondation d'un séminaire, suivant les décrets du concile de Trente.
C'est ce que j'ai trouvé dans la minute de sa lettre à Urbain VIII. L'es-
time qu'il fit des prêtres séculiers qui éloient en bien plus grand
nombre dans le diocèse que les autres ecclésiastiques, le porta à ne
rien conclure dans ses synodes sans avoir ramassé les voix de tous les
curés (i). Ayant appris qu'en 1652, les prêtres de la Puisaye
avoient Formé entre eux une confrérie sous le titre de l'Assomption de
la Sainte-Vierge, il leur accorda le pouvoir de la continuer, à condition
de n'y admettre aucun laïque, et que le repas du jour de la fête fût
frugal. Des prêtres, il passa à la réforme des peuples. La profanation
des dimanches et fêtes excita son zèle ; le 22 octobre 1628, il fit un
mandement pour défendre de voiturer le bois sur la rivière ou par terre
les dimanches et fêtes d'apôtres, avec inhibitions aux meuniers et tous
autres ayant charge des ponts, pertuis et chemins, d'en laisser passer
par eau ou par terre les mêmes jours ; il fit même de cette transgression
un cas réservé , menaçant d'excommunication les voituriers qui contre-
viendroient. Sa charité pastorale seconda sa vigilance. Environ deux
ans après qu'il fut arrivé à Auxerre, on essaya de lever un nouvel im-
pôt sur le vin des habitants. Gomme la ville se regardoit enclavée dans
la Bourgogne, et que les citoyens, aussi bien que les vignerons, ont
toujours eu présentes les promesses que les rois lui ont faites, et
enlr'autres Louis XI, de la conserver dans ses franchises, il ne manqua
pas de se former une émeute éclatante à la première exaction que les
1686 k 1681.
(1) Sous son épiscopat, quatre ou cinq ec-
clésiastiques, les uns chanoines, et les au-
tres simples prêtres de la Tille d^ Auxerre,
après ayoir vécu quelque temps en leur par-
ticulier ayec beaucoup d'édification, poussés
du désir d'une plus grande perfection, réso-
lurent en 1626 de demeurer ensemble, et de
former une communauté. Ils en dressèrent
le plan et le communiquèrent à leur évéque
qui loua leur dessein, promit de les proté-
ger, et de leur donner une maison quand il ^
auroient pris ieurdernière résolution. Ayant
de conclure, ces ecclésiastiques Toulurent
savoir le sentiment de M. Bourdoise. Ils lui
écrivirent pour cela au commencement de
Tannée 1627, et lui envoyèrent un plan de
leur dessein avec les règlements de leur so-
ciété, lui témoignant beaucoup de confiance
et le priant d'y ajouter ou d'en retrancher ce
qu'il jugeroit à propos. « Notre prélat, di-
» sent-ils, vous en doit parler sitdt qu'il
» sera arrivé à Paris ; nous vous prions de
» l'entretenir dans la bonne volonté qu'il
» nous a témoignée, et de l'exhorter à nous
» aider de son crédit et de son bien, afin que
» nous puissions surmonter les diflBcultés
» qui s'opposent à notre dessein. » On ne
sait si ce projet fût exécuté ; un article des
statuts du Chapitre y paroissoit contraire.
16S8 Si 16al.
222 GILLES DE SODTRÉ,
étrangers voulurent faire de ce tribut. Le pasteur accourut au bruit
pour tâcher de calmer les esprits ; sa présence ni celle du bailli et du
lieutenant-général , ne put rien arrêter. La populace, persuadée que le
prince ne pouvoit manquer k sa parole, instruite de plus que le roi
Henri IV s'étoit même engagé de nouveau, trente-quatre ans aupara-
vant, de conserver les mêmes franchises, ne put être susceptible des
raisons qu'on lui alléguoit. Malgré toutes les promesses qu'on put faire
aux vignerons, que ce nouveau tribut seroit supprimé comme ne pou-
vant être de la connoissance du roi , ils en vinrent aux mains, poursui-
virent Texacteur jusques dans l'église des Jacobins où il y eut effusion
de sang. L'élise fut réconciliée par ce prélat, et la ville répara le dom-
mage que rirruption populaire y avoit causé (1). Cette émeute étoit la
seconde qui arriva sous son épiscopat dans le même quartier. Dès le
29 mars 1626, il en étoit arrivé une autre qui ne fit pas moins d'éclat ;
peu s'en fallut que les derniers du peuple ne devinssent maîtres de
rHôteUe-Ville (2).
Ce fut pendant Tannée 1629 qu'il entreprit la visite de son diocèse
pour reconnoitre, par lui-même , l'état de chaque église et y ordonner ce
qui seroit utile et convenable. On apprend, par les procès-verbaux,
qu'alors encore, dans le plus grand nombre des églises , le Saint-Sacre-
ment étoit conservé k une suspense, comme dans l'église cathédrale,
et que si , dans quelques-unes, il y avoit des tabernacles destinés pour
cela, ils étoient k côté du sanctuaire, de même qu'on en voit en
Flandre ; que la coutume commune des églises de la campagne étoit,
que les pères de famille laissoient à l'église, en mourant, leur meil-
leur habit, ce qui , quelques siècles auparavant, se pratiquoit aussi à la
ville , comme on lit dans des testaments de ce temps-là ; on ne voit pas
que Gilles de Souvré ait improuvé ces usagés. Il statua en certaines
églises que la délivranee de l'image du saint patron des confréries se-
roit criée au banc de l'œuvre par les fabriciens, et que néanmoins le
curé iroit prendre processionnellement cette image k la maison où elle
a) Re§iH.urbisie99.
(1) Ce qui en esinpportédaas les registres
^ It viUe, se rapporte assez h ce qu'on lit
dans une collection de lettres de ce temps-
là, imprimées en 1654 par les soins du P.
Pintereau Jésuite.
QUATRE-VINGT-DIX-HUITIÈME ÉVÉQUE d'aUXERRE. 223
étoit conservée. 11 ordonna des amendes pécuniaires contre ceux qui y^Q ^ j^^,
n'assisteroient pas aux processions ordinaires pour la conservation des
fruits de la terre , ou qui ne les reconduiroient pas jusqu'à Féglise ; il
fit défense à quelques religieux établis depuis peu à Auxerre, d'aller
confesser des malades dans les maisons sans la permission du curé. Il
projeta de réunir la paroisse de Saint-Pierre-en-Ghàteau d'Auxerre, à
celle de Saint-Regnobert ; mais cela ne réussit pas , par la raison que
les habitants de la première exigeoient que leur église fût réputée
Téglise matrice. Les chanoines de Clamecy avoient fait, quelques jours
après son arrivée à Auxerre, un compromis entre ses mains, touchant
leurs difficultés avec le curé de la paroisse. La sentence arbitrale qu'il
donna le 5 janvier suivant, assisté de son nombreux conseil, comprend
dix-huit articles, dont il n'y en a point qui puisse intéresser la curiosité
du lecteur, que le onzième, par lequel on apprend que toutes les fêtes
solennelles, la coutume étoit encore à Clamecy que les fidèles offroient
du pain et du vin à la grand'messe. L'évéque confirma ce pieux et an-
cien usage f en adjugeant au curé les deux premières offrandes de cette
espèce. En i651 , le promoteur, dans les officialités de Yarzy, Gosne et
La Charité, se trouvoit être un laïque; il ordonna que dans la suite ce
seroit un homme d'église à l'exemple de la cour principale d'Auxerre.
Il procura, en 1628, à la nouvelle communauté des Bénédictines de
La Charité , les constitutions du Yal-de-Gràce que Marguerite d'Ar-
bouze, abbesse, y apporta à sa sollicitation. L'année d'après, Tabbaye
de Saint-Germain de la ville d'Auxerre , embrassa la réforme de la
Congrégation de Saint-Maur, par les soins de l'abbé Octave de Belle-
garde ; mais le tumulte qui arriva ce temps-Ik dans cette église, k une
procession de la cathédrale où le prélat assista, fut un spectacle éton-
nant pour lui et qu'il fit en sorte de ne pas voir une seconde fois. Les
religieuses de Sainte-Marie, autrement de la Visitation, demandèrent,
en 1650, à être reçues dans Auxerre (1). Il y avoit trop peu de temps
qu'on avoit refusé les Jacobines et les Carmélites ; ces dernières subi-
rent le même sort.
La relation que Gilles de Souvré avoit avec le pape Urbain VIII ne
(!) Reg. urbts 1G30, 2i aug.
224 GILLES DE SOUVRÉ,
ie96 ï 1631. ^^^ P^s I^ s^ul effet da voyage qu'il a voit fait a Rome. Il avoit rapporté
de l'Italie une grande estime des usages ecclésiastiques de cette pro-
vince. Il essaya d'en introduire quelque chose dans son diocèse, avec
le manuel qu'il fit imprimer k l'usage des curés. Mais la brièveté de
son épiscopat empêcha que les principes ultramontains qui auroient pu
s'insinuer par ce moyen , ne fissent impression dans le clergé ; et tous
les ecclésiastiques séculiers» qui étoit la plus grande et la plus saine
partie de sou diocèse, eurent la prudence de supprimer ce qui auroit pu
réveiller les anciennes querelles, à l'occasion d'une pièce que l'impri-
meur y avoit insérée. Le projet qu'il conçut de réformer les livres ecclé-
siastiques resta sans exécution. Il avoit établi chez lui une espèce de
congrégation de rites, à l'exemple de celle de Rome. Dès les premiers
jours de son arrivée, il demanda au Chapitre des commissaires pour
la révision du Bréviaire (1). On voit , par les registres du Chapitre, que
son intention étoit que tout ce qu'on chantoit fût tiré des livres romains
réformés sous le pontificat de Pie V(2); mais les chanoines ne voyant
point que le concile de Trente eût ordonné l'usage de ces livres, ainsi
qu'on vouloit leur persuader, déclarèrent que quoique observateurs
exacts des décrets du concile reçu en France, ils ne suivroient point
léchant de ces livres, et qu'ils s'en tiendroient aux anciennes céré-
monies de l'église (a). Deux ans après, le chantre Gaspard Bargedé, se
montrant le plus zélé pour seconder le prélat, fut établi chef du projet
de la réformation. On présumoit qu'en vertu de sa dignité il ne consen-
tiroit à aucune innovation qui ne fût un rétablissement de la saine anti-
quité, ni k aucune suppression , sinon de celle de quelques cérémonies
puériles qui avoient eu leur origine dans des siècles peu éclairés. Ce-
pendant, toutes ces assemblées n'aboutirent à rien, parce que la matière
(1) Reg. CapU. 3 nor. ieî6. | (2) Ibid, ^juL 1626.
(a) Le Chapitre cathédral était, comme le dit Fanteor de la vie manuscrite de
M. de Donadieu « anUquorum rituum eccleiiœ Àutissiod. servatorum tenacet, » aassi
élcYa-t-il ici les mêmes résistances aux réformes liturgiques que sous ce prélat, qui
ne put faire accepter dans son église les livres et les cérémonies romaines.
(iV. d. E.)
QUATRE-VINGT-DIX-HUITIÈME ÉVÊQUE d'aUXEKRE. 225
des rites n'avoit pas encore été éclaircie comme elle Ta été depuis. ^^^ ^ ^^^
Les réviseurs procédoient, dans cette affaire, assez lentement , et le
prélat fut enlevé de ce monde avant qu'on eût rien arrêté. Le Chapitre,
qui avoit aussi espéré de cet évêque une suppression de prébendes et
d'anniversaires resta, par la même raison, dans son état précédent (a).
Pour ce qui est des honneurs dûs à sa dignité, Gilles de Souvré n'en
laissa perdre aucuns qui fussent de sa connoissance , et Ton peut dire
qu'il alla même quelquefois à l'excès. C'est ce qui parut k l'égard de
Glaifde Lemuet, élu doyen le 15 décembre 1627, après la mort de
François dfe Lauzon. S'étant fait prêter, par ce nouveau doyen, le ser-
ment de fidélité, il ordonna d'insérer dans la formule une extension de
cette fidélité, obéissance et révérence, jusqu'envers ses officiers ae
eUam officiariii vestris. Le Chapitre, surpris de cette nouveauté, pria
le prélat d*ôter cette clause, sans quoi le doyen n'auroit pas été
reçu (1). Charles de Gonzague, duc de Nevers, lui rendit aussi hom-
mage pour les baronnies de Donzy et de Saint-Verain ; il commit, pour
cet effet, Scipion Maréchal , premier président de la chambre des
comptes de Nevers, le 14 mai 1629. La même année, le 4 novembre,
Charles de Courbon ou de Courlon , chevalier, seigneur de Briague en
Saintonge, et Gabrielle d'Âgen , sa femme , lui rendirent le même de-
voir pour la vicomte de Saint-Sauveur. La chàtellenie de Beauche ayant
été acquise de son temps par Antoine Ruzé, maréchal de France,
(i) Reg. Capit.
(a) A cette époque, il étail encore ordinaire de faire des processions aux lieux où
étaient conservées des reliques de saints renommés : à Saint-Bris près d'Auxerre, à
SaintEdme de Ponligny. C'était tantôt pour obtenir de la pluie, tantôt au contraire
pour la faire cesser. Ces processions étaient quelquefois très-considérables, tout le
clergé de la ville s'y trouvait, le Chapitre cathédral en tète. Le chanoine Bardolat
ne voyait pas toujours ces cérémonies avec satisfaction. Il se plaint du désordre et
de la confusion qui les accompagnent, et du peu de recueillement qu'on y apporte.
La procession du 30 juin 1630, à Pontigny, fut une des plus nombreuses. La chaleur
était extrême et les pèlerins arrivés à Ponttgny exténués, s'occupèrent plutôt de
boire et démanger que du but de leur voyage. Le 9 juillet suivant les Cordeliers fi-
rent une procession particulière à Saint-Bris peur le même objet. Il y eut encore
du désordre. (iV. d, E.)
11 i5
2^0 GILLES DB SOUVRÉ ,
}(fxï 1631. DQarquis d'Effial, il en fit faire la saisie, jasqu'à ce qu'il eût satisfait
aux droits féodaux, ainsi qu'il parolt par le délai de six mois qu'il ac-
corda, le 17 mars IGSK II avoit eu occasion de marquer de la vigilaoce
sur son temporel dès le temps même qu'il eut ses bulles. Comme il
passa k Paris Tannée 1625 et une grande partie de la suivante, le grand
jubilé de l'année sainte lui procura la restitution de plusieurs titres qui
concernoient Thâtel épiscopal d'Âuxerre, autrefois aliéné par le car^
dinal de la Bourdaisière ; et il prit la résolution de rentrer dans ce
bien (1). Ce fut pendant la même année 1626, le 14 mars, qu*il sacra
évêque d'Aire, Gilles Boutault, son filleul. Il fit cette cérémonie dans
la Sainte-Chapelle dont il étoit trésorier. En 1627, il fut l'un des con-
sécratenrs d'Henri de Barada, évéque de Noyon. Il ne paroit pas qae
depuis sa prise de possession de l'évècbé d'Auxerre, il se fût beaucoup
éloigné de son diocèse , jusqu'à l'an 1631 qu'il entreprit le procès pour
rentrer dans Thôtel épiscopal dont je viens de parler. On sait seo!e^
ment qu'en 1651 il sacra Jean Guérin, évéque de Grasse (2). Eln
1631, Gaston d'Orléans, frère unique du roi Louis XIII, ayant passé
le 15 mars à Toucy et de Ui à Cravan, prit la route de Bourgogne dans
le dessein de se la soumettre ; ce qui obligea Louis XIII d'aller k sa
suite. Ce prince écrivit d'Etampes, le 14 mars, aux magistrats d'Âuxerre,
de veiller sur la conservation de leur ville ; il y arriva au bout de hait
jours, c'est-à-dire le 21, et après avoir été reçu avec toute la magnifi-
cence possible, il logea chez l' évéque, et le cardinal de Richelieu à Tab-
baye de Saint-Germain. Il y avoit alors environ quatre ans et demi qne
Gilles de Souvré travailloit à affermir le bon ordre dans son diocèse.
C'étoit en vain qu'il avoit tâché plusieurs fois d'entrer dans le monastère
de Cbarentenay pour y visiter la maison. Les religieuses de Saint-
Jnlien d'Auxerre, retirées en ce lieu depuis les guerres de la Ligue , lui
avoient toujours refusé la porte. Ses tentatives n'avoient servi qu*à
l'obliger de leur passer recoonoissance pour une certaine censtve sur
sa maison épiscopale et autres redevances à Gy-l'Evêque. Quoiqu^il eût
obtenu, en 1629, un arrêt pour les soumettre à sa visite, il n'avoit pu
encore le mettre à exécution. Il s'étoit trouvé à Paris le 10 février 1651 .
(1 j II étoit proche la porte Saint-Michel. | lâ) Nov. Gall. chr.
QUATRE-VINGT-DIX-HUITIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 2i7
et il y avoit signé la lettre circulaire des évéques contre les proposi-
tions de quelques nouveaux livres. Il y retourna pendant Tété pour
suivre l'affaire des Bénédictines de Charentenay et celle de Thôtel épis-
copaU Durantlc séjour qu'il y fit, il fut l'un des trois prélats k qui Sébas-
tien Zamet, évéque de Langres, et André Fréroyot, abbé de Saint-
Etienne de Dijon, s'en rapportèrent sur la juridiction. L'abbé fut main-
tenu dans celle dont il jouissoit, par jugement du 15 juin. Gilles de
Souvré fut aussi, le 24 d'août, l'un des deux évéques assistants au
sacre de Gaspard de Daillon , évéque d'Âlbi, fait par François de Gondi,
archevêque de Paris, dans l'église des Jésuites. Mais ce fut la dernière
cérémonie solennelle où on le vit paroitre. Il se donna tant de mou-
vement pour la réussite de son procès sur l'hôtel d'Auxerre, qu'il con-
tracta une grande fièvre, et après avoir fort regretté de se voir éloigné
de son troupeau et de son église, il mourut le vendredi i9 septembre,
dans la vigueur de son âge.
Ses entrailles furent enterrées dans l'église qui est sous la Sainte-
Chapelle de Paris, son cœur porté a Courtenvault, au^ diocèse du Mans,
et le corps transféré à Auxerre. I^ ville députa les sieurs Edme Bou-
cherat et Edme Jodon, avocats, pour aller au devant du convoi jusqu'à
Régennes, avec grand luminaire ; de sorte qu'il fut vrai de dire que sa
rentrée dans la ville, après sa mort, fut plus solennelle que n'avoit été
celle qu'il y fit, lorsqu'il vint prendre possession. Il fut inhumé devant
le grand autel de la cathédrale, à côté gauche de M. Amyot, le 28 du
même mois^ en présence du clergé et du peuple. Son oraison funèbre
fut prononcée en françois , le lendemain , dans le chœur, après l'évan-
gile, par Nicolas Le Cointre, bénédictin de Saint-Florent de Saumur (1).
Paul Gara, jacobin, natif de Toulouse, que ce prélat avoit connu à
Comminges, et qu'il avoit attiré à Auxerre pour y prêcher et enseigner
la philosophie , composa depuis une autre oraison funèbre dans laquelle
il fait un détail de quelques ouvrages de Gilles de Souvré, qui ne sont
point venus k notre connoissance (2). Il est facile de se persuader que
(i) Ce religieux pril pour texte un passage , Pontifex sancîus, innocens, impolluhu.
de saint Paul qu'on feroit scrupule, de nos . (2; Ex Catal, Lud. Joeoh. Carmeliti. Ca-
jours, d'employer pour faire reloge d'un ' bilon.
éTéquo canonisé. Talis decehat ut nohis etset ;
1696 b l&M.
228 GILLES DE SOUVRÉ , XCVIII^ ÉVÉQUB D AUXERRE.
ic96b i6âi. ce prélat, qui aimoit Tétude et les ecclésiastiques studieux» s'occupoit
à quelques ouvrages digues de lui. Mais c'est sans preuve q\ie quelques*
uns firent courir le bruit qu'il souffroit chez lui qu'on approfondit les
secrets de la chimie, et que c'est ce qui lui fut fatal. On sait seulement
qu'on ecclésiastique appelé Maurice , qui avoit d'abord servi Urbain de
Saint-Gelaiâ de Lansac, évéque de Gomminges, en qualité de médecin
et d'herboriste , composa un livre herbier magnifique, qu'après la mort
d'Urbain de Saint-Gelais, cet ecclésiastique s'attacha à Gilles de Souvré
qui se plaisoit avec les gens curieux, et le suivit k Âuxerre. Tel a été le
fondement de ce bruit que la malice des hommes exagéra au désavan-
tage de ce prélat. Il est bien plus certain que Gilles de Souvré aima et
protégea beaucoup Luc Holstein, protestant d'Hambourg, nouvelle-
ment converti ; qu'il le retint longtemps dans son palais épiscopal à
Âuxerre (1); qu'il le présenta au cardinal Barberin, qui l'emmena k
Rome où il devint dans la suite bibliothécaire du Vatican et chanoine
de Saint-Pierre. Le plus célèbre personnage qu'il employa à Auxerre,
pour le spirituel, fut Germain Bardolat, natif d'Entrains, au même
diocèse, qui étoit déjà chanoine et lecteur dans la cathédrale, aussi
bien qu'oflScial avant son épiscopat; il l'établit son vicaire-général.
L'oificial de La Charité fut François Rapine, prieur de Saint-Pierre-le-
Moutier, homme d'une grande sévérité. Son bailli, à Auxerre, fut Jean
Nandet, avocat d'une grande intégrité. Il ne se trouva aucune preuve
que cet évéque eût demandé un anniversaire ni qu'il eût fait de fonda-
tion. On lit seulement qu'il avoit chargé , en 1629, les Âugustins de
Cosne de célébrer son obit à perpétuité, en reconnoissance de ce qu'il
ne prit aucuns droits seigneuriaux pour les places qu'ils acquirent à
Cosne peu de temps après leur établissement. François de Donadieu,
ancien évéque d' Auxerre, étant informé de sa mort à Comminges, y
fit célébrer un service où il voulut officier. On pourroit joindre aux
illustres bénéficiers du diocèse d'Auxerre, sous son épiscopat, le fa-
meux Edmond Richer , professeur de Sorbonne, qui eut le prieuré de
Saissy-les-Bois , s'il n'étoit notoire que la ville d'Auxerre s'opposa à
(1) Lettres orig. de Luc Hostein, et Mémoires de ceux qui Tout vu b Auxerre.
DOMINIQUE SÉGUIER, XOIX*" ÉVÊQUE DAUXERRE. 229
ce qu'il possédât ce bénéfice (1). Une autre personne assez célèbre, xese^ i63i.
dont le clergé d'Auxerre lui eut obligation , fut André Percberon , du
diocèse du Mans , docteur de la maison de Navarre, qu'il fit chanoine
et grand-archidiacre. Ce fut lui qui, impatient de ce que la famille de
Souvré n*érigeoit pas de monument à la mémoire de son bienfaiteur,
composa une épitaphe qu'il fit graver sur sa tombe et qu'on y lit encore
aujourd'hui. Gilles de Souvré avoit aussi pourvu, en 1629 , d'un cano-
nicat de la même église, François Hennequin, clerc parisien (2) ; mais
cet ecclésiastique ne garda pas le bénéfice. La maison de Souvré donna
à la cathédrale d'Auxerre, quelques années après la mort du prélat , un
ornement de damas vert ; cet évêque avoit payé, durant tout le temps
de son épiscopat, deux mille livres de pension à son frère, chevalier de
Malte.
CHAPITRE VIII.
DOMINIQUE SËGUIER, XGIX« ËVÊQUE D'AUXERRE.
Dominique Séguier, qui eut le brevet de nomination de Louis XIII ^^^ ^ 1^37.
pour remplir le siège d'Auxerre après la mort de Gilles de Souvré, Àoit
seulement prêtre, mais il possédoit plusieurs dignités, et avoit déjà re-
fusé plusieurs évéchés et même un archevêché. Il étoit né a Saint-
Denys-en-France, l'an 1593, le second jour d'août, de Jean Séguier,
lieutenant civil de Paris, fils de Pierre, président en la cour, et de
Marie Tudert, fille de Claude, seigue^ur de la Bournalière et de Nicole
Hennequin. Il eut le nom de Dominique au baptême, parce qu'il étoit
venu au monde après un vœu fait à saint Dominique ; et même en con-
séquence on lui en avoit fait porter l'habit pendant les six premières
années de sa vie. Il fut envoyé à l'ftge de onze ans, à Dijon, avec Pierre,
son frère aine, chez M. Brulart, conseiller au parlement ; il y fit ses
premières éludes chez les Jésuites, pendant les années 1004, 1605 et
(I) Reg. urbiSj ± nov. 1629. | {2i Reg. Capit.
250 DOMINIQUE SÉGUIËR,
i(i3i il 1637. ^(>06. Il coiiliiiua les trois années suivantes à Paris, au collège du
cardinal Le Moine, et fut fait alors cbanoine de Notre-Dame de Paris.
Il alla ensuite étudier en philosophie au collège de La Flèche, d'où, étant
de retour à Paris, il fréquenta les écoles de théologie et celles de droit
jusqu'en 1616, qu'il fut reçu conseiller-clerc au parlement de Paris.
Le doyenné .de la cathédrale du Mans ayant vaqué, en i621, les cha-
noines envoyèrent à Paris pour le lui présenter. Il ne garda cette di-
gnité que jusqu'à Tan 1625 , auquel le Chapitre de Paris le choisit pa-
reillement pour doyen ; et en même temps qu'il cessa de l'être au Mans,
il eut dans le même pays une abbaye de l'Ordre de Saint-Augustin. Il
eut aussi, environ dans ce même temps, le prieuré d' Anneau. Les in6r-
mités et affaires de l'archevêque de Paris ne lui ayant pas permis d'offi-
cier k toutes les cérémonies extraordinaires, le doyen s'en acquitta avec
tant de grâce et de majesté, que Louis XIII Padmira en plusieurs oc-
casions; et lorsqu'en 1651 il fut fait son premier aumônier, le prince
consentit en sa faveur que, dans la suite, le premier aumônier pût exer-
cer son office en quelque temps que ce fût. Le même prince obtint pour
lui, du pape Urbain YIII, le titre d'archevêque de Gorinthe, et le des-
tina ensuite k l'évêché de Boulogne , vacant pai la promotion de Victor
Bouteiller à l'arclievêché de Tours(l). Maiscomme celui d'Auxerre vaqua
presque dans le même temps, il lui fut donné le 6 octobre 1051 , avant
même qu'il eût reçu ses bulles de l'archevêché de Gorinthe. Quoiqu'il
pût, après l'arrivée de ces bulles, se faire sacrer archevêque pour avoir
le pas sur les évéqqes , il aima mieux attendre l'expédition de celles de
l'évêché d'Auxerre, et ne se faire sacrer qu'en qualité d'évêque. Il le
fut, en 1652, par l'archevêque de Paris assisté des évêques de Châlons
et d'Orléans. Ce sacre fut fait dans l'église des Carmélites , à cause que
sa mère s'étoit retirée dans cette maison. On varie sur le jour ; les uns
marquant que ce fut le 18 janvier, d'autres le :25 juin. Quoiqu'il en
soit, il vint k Sens le troisième jour d'août pour y faire sa profession
de foi entre les mains de l'archevêque s suivant la teneur de ses bulles ,
(1/ En 1631 , le sieur A., du Fousleau lui
dédia les Singularités de France, in-12. II
le qualifie doyen de Paris, premier aumônier
de sa majesté , nomnié à révéché de Bou-
logne,
QUATRE-VINGT-DIX-NEUVIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 251
et il prêta en même temps le serment ordinaire de soumission et obéis- ^^^^ ^ ^^;.
sance. Pendant le même mois, iS fit savoir aux quatre barons qu*ils
eussent à se trouver à son entrée solennelle au mois de septembre.
Cependant, lorsque le jour assigné fut venu, il ne fit point exécuter
l'ancien cérémonial , pour ne pas se compromettre avec le procureur-
général , et il ne garda d*autre forme d*entrée sinon que le lendemain
de son arrivée, qui étoit le jeudi i6 septembre , il alla, sur les neuf
heures, du palais épiscopal à NoIre-Dame-de-la-Cité, où il se revêtit
de ses habits pontificaux, et il fut ensuite conduit de cette église h la
cathédrale, par André Percheron , grand-archidiacre d'Auxerre, Edme
Berault et Etienne de la Paye , chanoines de la même église, chargés
de la procuration de Charles Prévôt, grand-archidiacre de Sens. Etant
arrivé à la grande porte de la cathédrale qui étoit fermée , il y prêta le
serment accoutumé entre les mains du même archidiacre d'Auxerre,
représentant alors le doyen, et étant ensuite introduit dans Téglise, le
même dignitaire lui fit une harangue latine » le conduisit au chœur, le
mit en possession avec toutes les cérémonies que les archidiacres de
Sens ont coutume d'observer. Après le Te Deum il donna la bénédic-
tion; et, s^étant déshabillé, il revint entendre la messe du chœur dans
sa stalle : le même jour, il donna un repas h tout le Chapitre , tant cha-
noines que tortiers el chapelains, et quelques jours après à tous les
corps de la ville successivement.
Tous ces témoignages de joie inséparables de sa nouvelle réception,
ne l'occupèrent point de telle sorte qu'il ne se livrât aussitôt h Texer-
cice des fonctions épiscopales. Le samedi suivant , qui étoil celui des
Qnatre-Temps, il conféra les Ordres. Le mardi d'après, vingt et un jour
de septembre, étant au couvent des Cordeliers, il y fit la bénédiclion
solennelle de la pyramide élevée au milieu du préau du grand cloître (1).
Il eut, dans le mois suivant, un sujet d'affliction. Il avoit amené, à
sa prise de possession , sa sœur Charlotte Séguier, femme de Jean de
Ligny, maître des requêtes, avec sa fille , nouvellement mariée k M. de
Brandon. Celte jeune dame mourut à Auxerre le i8 octobre. Cette
perte fut fort sensible à Dominique Séguier, qui fit déposer son corps
0
(1) NecroL Franciscanor. Àutiss.
1631 b learr.
232 DOMINIQUE SÉGUIER,
dans la crypte située sous la chapelle épiscopale , oii elle fut conservée
dans un cercueil de plomb jusqu'au mois d'octobre i657, que M. de
Brandon envoya deux prêtres pour l'amener et la conduire dans le tom-
beau de ses ancêtres (1). Ce fut à cette occasion que le Chapitre eut
de la famille des Séguier un ornement noir, connu depuis sous le nom
de la dame de Brandon , qui fut comme une préparation à tous les pré-
sents dont Dominique Séguier devoit combler son église (a). Je crois
pouvoir commencer son éloge par cet article, parce qu'en effet il forme
un article essentiel de l'histoire de ce prélat, et qu'il est d'autant plus
digne de remarque qu'il succédoit à un autre, lequel, pour avoir trop
tardé k donner son ornement, fut prévenu par la mort. M. Séguier
commença par un ciboire considérable d'argent doré, pour mettre sous
le pavillon du grand autel, une croix de même matière et deux grandes
burettes qu'il fit présenter, le 2i mars i655 (2). Quatre mois après, il
envoya un ornement complet de velours cramoisi, parsemé de fleurs
d'or avec les courtines de damas rouge , pour mettre entre les colonnes
de cuivre du sanctuaire. Le surcroit de chapes fit aussitôt rétablir
l'anciennô coutume par laquelle les dignités et chanoines invités de
chanter les répons et les alléluia des grandes fêles , alloient se revêtir
auparavant de chapes à la sacristie, ce qui avoit été interrompu depuis
que les calvinistes avoient emporté les chapes (5). Ayant appris, dès
sa jeunesse que la ville de Saint-Denys possédoit dans l'église de l'ab-
baye la plus grande partie du corps de saint Pèlerin, premier évêque
d'Âuxerre, et que son église cathédrale n'en avoit plus aucune relique,
il en demanda au P. Cyprien, le Clerc prieur du monastère, et h toute
la communauté. Sa demande lui fut facilement accordée , non-seule-
(1) Reg. Capit. 19 oct. 1631, 1 e( 5 aug.
(2) Reg, Cap. 1633^ 1 et 5 aug.
(3) Il donna aussi un instrument de paix
très-magnifique, mais ce fut en échange d'une
conque précieuse, qui venoit de François de
Dinteville.
(a) L'évéque partitalors pour Paris, et envoya de cette ville un ordre de destitution
pour les officiers de ses terres. Les officianx de Cosne et de La Charité furent éga-
lement révoqués et personne ne réclama. L'office de bailli et juge-gra jer de Yarzy
fut donné à M. André Dupin, avocat à Auxerre. — Mémorial de Bardola^ Arch. de
FYonne {N. d. ^0
QUATRE-VINGT-DIX-NEUViÊME ÉYÉQUE D*àUXBRRE. 255
ment parce qu'il étoit successeur de ce saint, mais encore parce qu'il ^^j ^ ^g„^
avoit été Tun des commissaires que le roi avoit nommés, en 1655, pour
introduire dans cette illustre maison la réforme de la congrégation de
Saint-Maur. Ayant donc obtenu, le 27 mars 1654, enyiron la moitié
d'un des os fémur de Tapôtre d'Âuxerre , il fit faire un reliquaire d'ar-
gent doré , de la valeur de deux mille livres , oii cet ossement fut en-
fermé (1), le fit déposer dans la chapelle de Notre-Dame-de-Lorette,
proche sa ville épiscopale , d*oà il fut apporté processionnellement à la
cathédrale par le clergé de toute la ville et faubourgs , le mardi de
Pâques de l'an 1656 (2). Il officia pontificalement à cette cérémonie, et
renferma dans la châsse Tacte de la donation qu'il faisoit delà relique,
signé à Paris, le 12 février précédent. La dévotion qu'il avoit envers les
reliques des saints du pays, le porta à ne pas soufi'rir que les débris des
châsses que les calvinistes avoient pillées en 1567, restassent plus long-
temps renfermés dans le trésor de la cathédrale, sans être exposés h la
vénération des fidèles. Il les déposa dans une grande châsse de bois
doré (5) dont il fit présent à l'église, le 26 du mois d'octobre 1656.
Les principales de ces reliques étoient la tète de saint Amatre et quel-
ques ossements principaux de son corps, quelques fragments de la
tête de saint Just, enfant martyr, les habits de saint Germain (4). Il y
joignit l'os du bras du saint Saturnin, célèbre martyr de Rome, que le
cardinal Pellevé avoit envoyé à l'évêque Amyot, qui étoit resté dans un
tuyau de fer blanc sans être enchâssé, une mâchoire de saint Julien,
martyr, que Pierre Séguier, son frère, nouvellement fait chancelier,
lui avoit donnée avec d'autres reliques moins connues. On continua, du
temps de cet évéque, la révision du Bréviaire commencée sous son pré-
décesseur, mais elle resta encore imparfaite. L'utilité qui revint au
Chapitre, des conférences que l'on tint k ce sujet, fut la réduction des
anniversaires qu'il accorda par acte du 5 juillet 1654 (a). Il approuva
(1) Voy. les Preuves, an 1634, t. iv.
(2) C'est en mémoire de cette réception
qu'on continue tous les ans» le mardi de Pâ-
ques, de iK>rter ce reliquaire en procession.
(5) Reg, Capit. 24 oct. 1636.
(4) Fôff. les Preuves, an 4656.
(a) Les anniversaires étaient devenus trop considérables, on les rédaisit à un par
semaine. (iV. d. E.)
236 DOMINIQUE 8ÉGUIBR,
i«i Si 1887. ^^^ s^ulc ^^^^ ^^ pierre sous laquelle on avoit laissé une espèce de
tombeau pour y renfermer une petite capse de reliques de martyrs (1).
Deux mois avant cette cérémonie, notre prélat avoit été à Nevers, où il
avoit sacré Rustacbe de Ghéry, chanoine trésorier de Nevers, en qualité
d'évéque de Philadelphie, pour servir de coadjuteur k son oncle, évéque
du lieu. Ce que Dominique Séguier fit à Âuxerre, dans l'église de
Saint-Germain, les années 1654 et 1656, fut bien aussi solennel
qu'une dédicace et qu'une consécration d'évêque ; je veux parler de
l'ouverture de tous les tombeaux de cette église, que dom Georges
Viole, prieur du monastère, le pria de faire, afin de confirmer l'opi-
nion où le public étoit dans Auxerre, que les huguenots n'avoient point
ôté les ossements des tombeaux de pierre, qu'ils ne les avoient pas
profanés , mais qu'ils s'étoient contentés de jeter par terre ceux des
saints qui étoient enchâssés précieusement pour emporter le métal des
châsses. Gomme le procès-verbal de cette visite a été imprimé en
1714, au bout de l'histoire des cryptes de celte église, je n'en dirai
rien davantage. On peut y voir les distractions qu'il fit alors de quel-
ques ossements de ces saints. Aussi zélé pour la réforme des maisons
religieuses que pour la régularité des ecclésiastiques séculiers de son
diocèse, il introduisit, l'an 1655, la réforme des chanoines réguliers
de Sainte-Geneviève dans l'abbaye de Saint-Père d'Auxerre (a) , et il
transféra, suivant l'intention du Concile de Trente, les religieuses Gis-
(1) Les choses étoient ainsi selon les an-
ciennes règles, et persistèrent d*y être jus-
qu'en Tan 1710, qu'un missionnaire, plus
pieux qu'éclaire, changea la fqrme de cet
autel, fît ôtcr la capse de plomb, et substitua
au-dessus de la véritable table de l'autel
une petite table portative.
(a) Depuis les guerres civUes, l'état des monastères avait été en décadence de
plus en plus. Une réforme profonde y était devenue nécessaire. L'abbaye de Saint-
Germain , dont la réputation était très-compromise, reçut la réforme des Bénédictins
de Saint-Maur par les soins de son abbé 0. de Bellegarde, en 1629. Celle de Saint-
Père où restait un très*petit nombre do moines dissolus, fut restaurée comme le
rapporte Lebeuf. Un auteur manuscrit , probablement moine à Saint-Père, raconte
en gémissant que Ton y commettait des excès si effroyables et des crimes si énor-
mes, que les cheveux se hérissaient à y penser seulement. (iV. d, E.)
QCÀTRE-VINGT-DIX-NEUVIÈIfB ÉVÉQUE D*AUXERRE. 237
tcrcicnnes de l'abbaye des Iles, dans la ville, le 25 août 1636 (a). Il ^^ ^ j^.
auroil bien soobaité faire revenir les Bénédictines de Saint-Julien dans
leur ancien monastère du faubourg d'Auxerre ; mais comme cette maison
n'étoit pas encore remise en état depuis les dernières guerres civiles,
il se contenta de visiter leur maison de Gharentenay, où elles étoient
retirées, et il y confirma les règlements de François de Donadieu, son
prédécesseur. L^ communauté des Ursulines, instituée dans Auxerre
du temps du même prélat , alloit toujours en augmentant sous l'épis-
copat de Dominique Séguier. Le plan ayant été arrêté pour leur bâtir
une église, il y fit mettre la première pierre par André Percheron , son
vicaire-général, le 4 mars 1636. Voulant inspirer de l'émulation dans
le nouveau collège établi depuis douze à treize ans , il ne refusa pas
d'assister h une tragédie de saint Manrille d'Angers , qui y fut repré-
sentée l'an 1635, le 4 septembre , et le même jour il fit lui même la
distribution des prix. C'est ainsi que cet évêquîe se prêtoit k tout. Il ne
se fit aucun nouvel établissement de religieux mendiants sous son épis-
copat. On sait seulement qu'il avoit résolu d'établir des Jacobins k
Briare; mais sa translation, kMeaux, renversa ce dessein. Parmi les col-
légiales de son diocèse , aucune ne produit de règlements faits de son
autorité, que celle de Gien dont il éteignit les sept chapellenies, qui
étoient presque toutes abandonnées , pour les réunir k perpétuité k la
mense capitulaire, k condition que le Chapitre en accompliroit les
charges , et que le revenu seroit appliqué k l'entretien d'un maître des
enfants de chœur. On a vu ci-dessus (1) que , pour une semblable union
de bénéfices, faite en 1456 k la même collégiale, il fut besoin du con-
sentement du Chapitre de la cathédrale. Ici il ne parut qu'une simple
requête des chanoines de Gien et une enquête signée par le curé de
(i) Page 6S.
(a) Les religieuses de Gien, établies en 1629, obtinrent en 1636 des lettres-patentes
do confirmation. — Arch. de TYonne. -r^-
16.
A partir de cette époque le couvent prit une importance réelle. Il y avait 28 reli-
gieuses en 1644 quoique les bâtiments ne fussent pas achevés. Le couvent sortait de
celui d' Auxerre et Tévèque en était le supérieur. (JV. d. B.)
258 DOMINIQUE SÉGUIER ,
1681 k 1687. Gien-Ie-Viel, et, en conséquence de ces deux pièces, le prélat fît la sup-
pression le 15 avril 1655. Etant allé Tannée suivante visiter la même
église collégiale , il y fit quelques statuts par lesquels on apprend
entr'autres que Tusage de Téglise cathédrale étoit alors de ne prendre
les habits d'hiver qu'aux matines du second jour de novembre. On y
voit aussi qu'il y avoit eu des fonts baptismaux dans la «même église
collégiale jusqu'à l'an 1561 ou environ, que les calvinistes les détrui-
sirent. Ces règlements sont du 15 septembre 1654.
Dans le peu de temps qu'il posséda l'évéché d'Auxerre, il ne laissa
pas d^y faire quelques changements dans les bâtiments qui en dépen-
dent. Outre son palais épiscopal d*Âuxerre, il voulut toujours avoir deux
châteaux en état de le loger, savoir : Régennes et Varzy. Tout étoii
chez lui d'une pro|)reté qu'on n'avoit point encore vue sous les évéques
précédents ; et pour l'entretenir, il se donnoit la peine de visiter chaque
jour tout son palais épiscopal. Son château de Varzy ne lui fut pas plus
indifférent qu'un autre ; il alla y résider quelque temps en Tan 1655, et
il conféra les Ordres dans l'église du lieu. Cette terre lui produisit, la
même année, une somme très-considérable, par la vente qu'il fit d'un
bois de haute-futaie (1) ; mais comme il avoit suivi en ce point un nou-
veau plan , et que non-seulement il n'en avoit point donné avis h ceux
avec qui les anciens évéques conféroient en pareil cas , mais même que
cette vente avoit été faite par un de ses domestiques à l'insu des offi-
ciers du roi , il fut obligé , neuf ans après , à rendre une partie des
profits à son successeur. Il aima cependant Régennes plus que tous les
autres endroits de son évéché ; il y renouvela et augmenta les allées
d'arbres que son prédécesseur avoit plantées , fit élargir le fossé de
l'entrée , fit faire les passages de communication des chambres basses
au jardin , et remettre en bon état l'appartement qu'avoit bâli le car-
dinal de Lenoncourt. La première réparation qu'il ordonna dans son
palais épiscopal d'Auxerre, fut blâmée avec raison. A la persuasion
d'un chanoine, il fit détruire, en 1655, la chapelle du titre de Saint-
Nicolas , que Gui de Mello avoit fait bâtir près de quatre cents ans
(i) Cette vente fit dire alors en commun
proverbe : que l'évéque d'Auxerre entendoit
fort bien à jouer du haut-bois.
QUATRE- VINGT^DIX-NEUVIÈMB ÉVÊQUE D*AUXERRE. 239
auparavanl (i ) , et il fit praliquer, aa dedans de cette chapelle, différentes
cliambreb et cabinets. Mais la seconde réparation fut généralement ap-
prouvée. Il aimoit les fleurs jusqu'à vouloir avoir des roses de dix-huit
façons. Le jardin de Tévéché étoit trop petit ; il songea k l'agrandir, et
il fit faire à neuf les terrasses en 1656. Ayant eu besoin pour cela d'a-
cheter quelques maisons , le Chapitre lui en céda une pour plusieurs
arpents de prés situés proche Auxerre , qu'il donna en échange. La
même année , il reçut à foi et hommage Jeanne Chevalier, pour le fief
d'Alligny. C'est le seul acte de celte nature qui soit venu a ma connois-
sance. Il jouissoit alors de l'abbaye de Saint-Jean d'Amiens, que le
roi lui avoit conférée après la mort d'Antoine Séguier, conseiller au
parlement de Paris, son cousin germain, arrivée le 17 août 1655.
mais quoiqu'il eût rendu le palais épiscopal d'Auxerre très-agréable,
deux ans après , il se détacha de cette demeure , comme on verra ci-
dessous.
Tout le commencement de l'année 1657 se passa avec des démons-
trations de son attachement ordinaire pour le clergé et le peuple
d' Auxerre. Dès le mois d'octobre 1656, il avoit résolu de faire
élever un trône pontifical dans le côté gauche du sanctuaire de la ca-
thédrale (2), k l'opposite de l'ancienne chaire renouvelée par Jacques
Amyot. Mais comme le Chapitre laissa le tout à sa disposition , au lieu
d'ériger ce nouveau trône, il fit transporter, en 1657, celui de l'évéque
Amyot, du côté droit au côté gauche , se contentant qu'on l'élevftt un
peu plus qu'il n'étoit, et qu'on en ôtàt la balustrade ; et depuis qu'il
eût fait cette translation du trône, ce prélat ne monta pas'une seule fois
dedans. C'étoit de son temps qu'on avoit orné de nouvelles statues et
autres sculptures la chapelle de Notre-Dame-des- Vertus , proche la ca-
thédrale ; et il y avoit contribué considérablement. Après avoir favorisé
l'établissement d'une confrérie dans cette chapelle, par les indulgences
qu'il obtint d'Urbain VIII , en 1655, et par la publication qu'il en or-
donna dans tout son diocèse , il consentit à la suppression de celle de
1631 k 1687.
(1) On peut juger qu'elle étoit trés-belie
et trés-éclairée par le reste gothique des
pierres sculptées qui soutenoient le^itrage
qu'on voit encore du côté de Torient , à côté
de la grande salle.
(«) Reg. Capit, 17 oet. 1636.
Idl 9i 1617.
240 DOMINIQUE SÉGUIER,
saint Alexandre, qui étoit établie depuis quelques siècles dans la cha-
pelle du fond de la même église. Il ordonna, au mois de mars 1657,
que cette dernière confrérie ne subsisteroit plus que dans les seuls en-
fants de chœur (1). Il témoigna à cette occasion le désir qu'il avoit
d'augmenter le nombre de ces enfants (2), et il offrit même pour cela
une rente annuelle outre leur habillement. Ce fut aussi peu de temps
après (5) qu'il donna un dais à Téglise, et qu'il témoigna le dessein qu'il
avoit de faire une dépense considérable au grand autel. Toutes ces
marques d'affection envers le Chapitre achevèrent en ce temps-lk de lui
en gagner la confiance ; de sorte qu'au mois de mai on le prit pour ar-
bitre de plusieurs procès que le corps avoit contre quelques particuliers.
Un chanoine très-zélé pour le rétablissement de la bibliothèque du
Chapitre, entièrement dissipée par les calvinistes , avoit obtenu, l'année
précédente, permission d'employer la salle du petit chapitre à ce réta-
blissement (4), et il se flattoit d'être secondé du crédit du prélat auprès
du chancelier, son frère , grand amateur des livres et des savants.
Peut-être même que la bibliothèque de l'évêque, qui contenoit déjà
beaucoup de volumes de celle du chancelier, auroit été un jour réunie
à celle-lk, et que le petit chapitre se trouvant bientôt trop étroit pour
contenir les livres , on auroit cédé la grande salle qui auroit formé un
vaisseau de bibliothèque magnifique. Mais tous ces beaux desseins
s'évanouirent dès la fin de Tété 1657. Le bruit se répandit au commen-
cement du mois de septembre, que le roi tiroit Dominique Séguier de
l'église d'Âuxerre pour le transférer à Meaux. Il en donna lui-même
avis au Chapitre par sa lettre datée de Paris le 4 septembre, ajoutant
qu'il ignoroit quel seroii son successeur. Comme il resta alors à Paris,
il y assista au sacre d'Alain de Solminihac^ évéque de Cahors (5) , fait
ï Sainte-Geneviève, le 27 septembre ; et il fut l'un des coopérateurs.
On ne sait pas si sa translation à Meaux avoit été fort de son goût; mais
il parut, par la suite, qu'il n'en étoit pas trop content. Il lui fut facile de
se consoler par le voisinage de Paris, par celui de la cour où sa qualité
(t) Reg, Capit, 9 martii 1637.
(2) Ibid 27 febr, et 6 martii.
(3) Ibid. 15 mail.
(4) Reg. Cap. 1636, 26 sept — Voy. les
Preuves, t. iv.
(5) Gall. Chr, nova.
QUATRE-VINGT-DIX-NEUVIÈME ÉVÊQUE d'aUXERKE. 241
de premier aumômer le demandoil souvent» et par Thooneur qu'il lesi h 1057.
avoit de voir facilement le roi au château de Monceaux , k deux lieues de
Meaux. Quoiqu'il en soit de la cause de cette translation à laquelle il
donna peut-être lui-même occasion, la lettre qu'il écrivit au Chapitre
d'Auxerre portoit expressément que le changement d'église ne chan-
geroit jamais son affection envers la compagnie. En effet, il aima tou'^
jours Téglise d'Âuxerre quoiqu'il en fût éloigne , et il imiia en ce point
M. de Donadieu.
Il quitta donc Âuxerre au grand regret du clergé et des habitants,
et principalement de ceux qu^il avoit mis en place. Le plus considé-
rable fut Pierre le Venier, prêlre du diocèse du Mans^ qui avoit été fait
pénitencier de son temps, et qui depuis composa son cpitaphe telle
qu'on la lit dans la cathédrale de Meaux. Quelques-uns ont aussi cru
qu'il avoit eu beaucoup de part à attirer k Âuxerre Edme Amyot , doc-
teur de Sorbonne, qui fut reçu doyen en 1652 et chanoine en 1655.
Mais c'est une chose douteuse. Il est certain qu'il estima ce doyen, qui
vécut d'une manière paisible sous son épiscopat. Comme Dominique
Séguier ainooit les cérémonies d'église, il en avoit chaîné spécialement
un nommé Martin Marinel, prêtre du diocèse de Coutances, ci-devant
aumônier de François de Gondi , archevêque de Paris , qu'il fit cha-
noine de Notre-Dame-de-la-Cité , puis de la cathédrale. Ce fut lui qui
procura l'édition do pontifical romain pour les ordinations sans aucun
renvoi. Cependant, le prélat ne négligea point le pontifical auxerrois de
François de Dinteville, dans les cérémonies publiques, ni dans celles où
le Chapitre assistoit.
On peut lire, dans la nouvelle Histoire de l'Ëglise de Meaux, ce qu'il
fit pendant les vingt-deux années qu'il en tint le siège épiscopal. Ce
fut en cette ville qu'il signa, en 1 642 , le 29 avril , le procès-verbal de
la visite qu'il avoit. faite des tombeaux et des reliques de l'abbaye de
Saint-Germain.
Il mourut à Paris , l'an 1659, le seizième mai, jour de la fête du
premier évêque d'Auxerre, auquel il avoit toujours eu une singulière
dévotion aussi bien qu'à sain! Germain. Les chanoines d'Auxerre, in-
formés de sa mort, conclurent , le 25 du même mois, de faire un ser-
vice magnifique pour le repos de son àme , et il fut célébré au mois
II 16
?cn.»
jcM» n icn
212
ée pâm wf^m (iL^anee cmmcstÎM des CKMffr <t «ooîmm <— Hw^ qp»
fin DrMoocéip foir Doa Gabriel SoBm« m««r de TMaxt At Soûl-
CHAPITRE IX.
MEERE DE nOC. O Ê^^ÊQUE ITAmXBE
Le cardonl de Bicbefies ■'eol pu f4«s tôt Jffpttt «Ami Lnê XIII.
^^3 vesoft de doomer réféclié de lle»a à Ddiniiiiff Se||ùer« q«e
Wfaal Tétédié d^Aaserre Tacaat^ fl firia le roi d^w Miifi- Pîem de
Bnc « akn omum soh le Bon d^abbé de Sûntr-Has^ iofwicftoii jIoi^
il Kkhdkm. Celle aoaûmîoo aTaot été Cûte swut le Aésir dm car-
dinl q/m soskailoil rffimipenftef cel abbé, le cler^ et h iSe d^Auerre
tm fmtmi asttddl iaSaoBé^ Le Chapitre créa, le 5 odkekn^ sesoSders
pOTT le teaips de b lacaace de siège , sar Tans ci le tmuxmiBmfM de
réféqw précédem, ei b TiDe dépota Nicobs Tribolé, BeMCMM crt-
■iael ei aaire, pov FaHer saloer eo qualité d'éTéqae Boamé (2).
Mab m les «bs, ni les astres n^eoml point FavaDia^ de k wir sîidt
a Aaiene, poisqv'il D'obtiot ses balles qo^ao mob de jaD^ier 1659.
QBoiqae b si^ épiscopal fit Tacaol assez laDgteaips, il se se passa^
dans k dioeèse, aKoa acte concemaDt k spiriiael qui Bénie d^étre
remanpié^ si ce o^esi k BandeaieDl qœ les licaires-géiiénax don-
■èreol, k 8 décembre 1657 , powbire daos le prôoe des prières pour
h paix demndées par k roi, ei bo aoire pour en bire k jobt de TAs-
aoaupiioo^ qoe k Bléflie prÎBce avoil deoundées par ses klties do
10 février 1658. Ds doBBèroil, de pfas, on ordre de biie des prières
coBtre les nubdies coBlajgeBSCs qoi coororeot peadanl Télé soiTant, et
(I) ■«! . dfMr. I :r- mog. et b lille, is stpi.
1^
CENTIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 245
publièrent un mandement pour remercier Dieu de la naissance du dau- ^^^ ^ ,^,,
phin. On peut ajouter h cela le projet d'établissement des religieuses
Urbanistes dans l'bôpital d'Entrains^ en vertu du consentement des
habitants, donné le 5 avril 1658, de la permission des duchesses de
Nivernois, dames temporelles du lieu» du 12 juin, et celle des vicaires-
généraux du diocèse (a) ; celui des hospitalières de La Charité-sur-
Loire, qui est de Fan 1659; l'empêchement qu'on apporta à celui que
les Augustins ptétendoient faire à Saint-Fargeau sans l'autorité du
Chapitre (1)^ et enfin la citation solennelle des curés de la ville et fau-
bourgs par devant l'official, pour n'avoir pas assisté à des processions
générales (2). A l'égard du temporel de l'évéché et des droits honori*
fiques dévolus au Chapitre le siège vacant , on trouve entr'autres actes
celui de foi et hommage qu'im particulier d'Auxerre vint rendre au
Chapitre, le 10 mai 1658, d'un fief et autres biens situés \k Appoigûy,
comme relevant de l'évéché ; on lit aussi que le corps de ville pria
le Chapitre (5) de nommer un d'entre eux pour mettre le feu à l'artifice
que la ville fit préparer au sujet de la naissance du dauphin (6).
Plusieurs se sont trompés sur le lieu de la naissance de Pierre de
Broc. Quelques-uns ont assuré qu'il étoit né au diocèse d'Angers , et
d'autres qu'il étoit du diocèse de Tours, Mais ses bulles, qui sont la
première pièce authentique de son épiscopat , le qualifient prêtre du
(1) Reg. Capit. % mai 1639.
(2) Reg, Capit 3 juin 1639.
(3) Reg. CàpiL
(a) Cette communauté, autorisée par lettres-patentes, en 1642, prit possession
de rhôpital qui était appauvri et sans valeur. On projeta aussi d'y joindre le
prieuré de Saint-Nicolas de Réveillon et Téglise Saint-Solpicc d*£ntrains. Mais ces
deux bâtiments étaient complètement ruinés. Cette maison ne prospéra guère -, en
1078^ il lui était défendu de recevoir des novices^ et, dix ans après^ elle fut réunie
à Fabbayedes Iles d'Auxerre. — Yoy- Arcb. do FYônne. (N. d. E,)
(b) Il faut ajouter les procès-verbaux faits contre les Bénédictins de Saint-Ger-
main, en mai et juin 1699. Ces Pères étaient sortis en procession de leur monastère,
l'officiant portant le bonnet carré, des gants aux mains, et un bâton cantoral au
baut duquel il y avait un évêque ; deux religieux Taccompai^aient , et tons trois
étaient revêtus de chapes et d'aubes, et assistés des prêtres de Téglise paroissiale
244 PIERRE DB BROC ,
1610 ï 1C71. diocèso de Cliartres et docteur es-lois. Il étoil fil 8 de François de Broc,
baron de Saint-Mars de la Pile, de Lizardière et Chemiré ; el sa mère
étoil Françoise de Montmorency de Fosseux , fille de Pierre de Mont-
morency, premier du nom, marquis de Tury, et de Jacqueline d'Avau-
gour. Il étudia les humanités au collège de La Flèche , et la philosophie
à Orléans. Le premier bénéfice quMI eut à simple tonsure, fut le prieuré
de la Magdeleine de Broc en Anjou , k une lieue de Lude, qui est une
dépendance de Tabbaye de Saint-Aubin d'Angers. Il eut ensuite Fab-
baye de Ressens, au diocèse de Rouen, Ordre de Prémontré, et celle
de Fontenelle, Ordre de Saint-Augustin, au diocèse de Luçon. Cette
dernière abbaye lui fut donnée à la recommandation du cardinal de
Richelieu, dont il étoit camérier avec le sieur de Beauyau. Il ne fut pas
longtemps sans devenir maître de chambre de ce cardinal, et agent du
clei^ de France. Ce fut ce dernier emploi qui Tempécha de se rendre
k son église d'Auxerre, aussitôt après la réception de ses bulles qui lui
avoient été expédiées gratis. Au bout d'un an , il se fit sacrer dans
l'église des Bernardins de Paris, le second dimanche de carême, qui
étoit le 4 mars en Tannée 1640, par Léonore d'Etampes, évéque de
Chartres, assisté de Dominique Séguier , évéque de Meaux , et de
Léonore de Matignon, évéque de Coutances. Tous les évéques de France,
présents a Paris, s'y trouvèrent au nombre de dix-huit, sans compter
les abbés de considération qui y étoient encore en plus grand nombre.
Quatre jours après , il prêta le serment de fidélité au roi , dans la cha-
pelle du vieux château de Saint-Germain-en-Laye, dont l'évéque de
Meaux, premier aumônier, lui donna le certificat ordinaire. Avant la
fin du carême il fit son entrée à Auxerre ; mais au lieu de prendre pour
cela un jour de joie tels que sont les dimanches , il choisit Taprès-midi
du jeudi-saint. L'ancien cérémonial y fut observé en partie. Il alla à
de Saint-Loup. Le Chapitre regarda cela comme une entreprise manifeste contre
les droits de révéque et les siens. Dans le même temps, le Chapitre jugea encore à
propos de dresser un procès-verbal contre les mêmes religieux qui, étant à la pro-
cession du Saint-Sacrement, entrèrent dans le chœur de leur église pendant que le
Chapitre y chantait la dernière antienne et s'emparèrent du pupitre, ce qui obligea
le Chapitre de sortir du chœur.— Arch. de ITonne, Invent. des droits honorif. du
Chapitre, p. 273. (JV. d. E.)
V-
CENTIÈME ÉVÊQUE D*AUXERRE. 245
Tabbaye de Saint-Germain et y resta environ une heure. Après quoi les
personnes chargées de la procuration du roi et des trois anciens ba-
rons, raccompagnèrent depuis celle église jusqu'en la cathédrale, por-
tant proche lui la chaise sur laquelle il auroit dû être assis. Il fut reçu et
complimenté par le doyen, k Tentrée de la cathédrale, au son de la
grosse cloche; et, après les cérémonies ordinaires, il entra dans
Téglise, revêtu de ses habits pontificaux, tenant la crosse k la main.
L'archidiacre de Sens le conduisit k Tautel. La cérémonie finit par le
Te Detim, après lequel s'étant déshabillé, il rentra au chœur, assista à
TofiBce de la nuit du vendredi appelé TéfUbreSy et le finit par Toraison
Respici.
L'année de la prise de possession ne fut pas celle dans laquelle il fut
le plus occupé des fonctions de son ministère. Dès le mois d'avril » il
fut bien aise de se mettre au fait du privilège qu'a le Chapitre de gou-
verner le temporel comme le spirituel de Tévéché, pendant la vacance
du siège. Il venoit de ressentir les avantages de ce gouvernement sin-
gulier, par le moyen des sommes que les économes lui avoient remises.
Ce revenu inespéré servit k augmenter sa reconnoissance envers le roi
qui Tavoit no.mmé k une église revêtue d'une si considérable préroga-
tive. Il se comporta, en effet, dès la même année, comme un évêque
qui est persuadé que l'Eglise fait partie de l'Etat; et il alla de grand
cœur rendre ses services au roi pour le siège de la ville d'Arras. Il y fut
envoyç en qualité de garde du trésor royal ; ce qui marque l'extrême
confiance qu'avoit en lui le cardinal de Richelieu. Son âge, qui étoit de
cinquante ans ou environ, pouvoit imprimer du respect, aussi bien que
tout son extérieur qui étoit de belle apparence (a). Tout cela joint k
l'expérience qu'il avoil eue dans le service du cardinal, paroissoit sup-
poser en lui l'aptitude nécessaire pour veiller de près sur les intérêts
du roi. Ainsi, pendant que revêtu de la cuirasse sous le manteau, il
gardoit avec deux ecclésiastiques le trésor qui lui avoit été confié, il
faisoit part au cardinal de tout ce qui se passoit; il recevoit ensuite de
lui les ordres nécessaires qu'il communiquoit aux maréchaux Chastillon
(a) Bargedé dit de lui que c'était le prélat de sou temps qui avait la meilleure
mine et la plus belle prestance de France. (iV. d. E,)
1640 k 1071.
216 MEEKE ftC BaOC,
ciCidMtiMMi ; lie âone qae âaos blesser persosae m éire blessé
yicfca q«e les iroopes aaiilaires da dac de Lorraine , lensas pow &îfe
leter le siège, n'approebattseal de b fîBe. Cette pbce ëiMt prise an
Mûîs d'ao&t, il se innsporta ansildl à b catbédrale, et refcta de ses
<ytteiettts pooiîficau, il j entoM» le Je Hlim. Etaat aiiiH occapé
au aCûres du roi, il ne pot aller b niéiBe aDoée a Sens po«r le ser-
ottBt d'obâssance : mais il s'acq«itta de ce devoir le 28 jaDvier 16ii .
et s^na b formole ordinaire en présente d*OclaTe de BeDefarde. ar-
dttièipe nkétropoblain (a).
Pendant qne les afaires dn rofaoBie prospérotent , celles dn Cbapîtie
d*Anerre commencèrent à se broniller. Une cooclnsîott qne le
domn, qni étoit TÎcaîre-général de Féréqne, fit bire le 29 octobre
1640, (nt FoccasîoB de tons ces tronUes. Elle portoit fne im» les
noîncs cesseroient d^aroir «ne bordure de petit grk a b tête dn
Et ce qni ne paroîssoit qn*nne b^atelle dans les uu— iiifets . e«t
par b snîle des eonséqfnences infinies (h). Qoelqnes-nns imptêrent
anssi â b foiblease dn nonvd éréqne ce qni se potasi as prêjndice dn
clergé, da» rassemblée de Manies de Tan 1641 . dw faipele fl ne
emt pas povroir se dispenser d*exécnter ce q[ni Id était ptiescrît de b
paît de son bienfailenr <l). Etant sorti de cette du^pe. 1 rei^M. Tannée
suivante, ordre dn roi et do minisire de conduire les iwuyM 4ms les
Etau do duc de Ijorraine et jusqu'auprès de Nanc^. ■ y attaqui Dieuse,
I<« T4«r dkM nôsAoirr BkBucriie de oroe- '
(«; A cette ë|M^ne, le SS avril leiO, pfaifiean cliioftioci de Sùat-fitame se
léonircnt en cwimoiiaufr pour Cure cuire eux leurs dévotiaos, par opposftîan k la
cnugrtgalîon qn sVfaiblitMil ckei les P. Jéfoiles. Mais, à son arrivée, 1 <^^èi|oe,
prévenu par le dojeo Amyot, «ofeglil mal cette oouuuunaulé (V. Mémorial de
Baidolat). {^. é. E.)
(») Celle albir^ 4|ut Lcbeaf qroritfe avec raissD de kaplde, devîat tr^^
Suivant le MêmMÎal da chaniéiie BanMal , le doyen Aaiyot ooauieiiça , en f OS^
de proposer la wypwjiiou da bcnd de (aanurt do camail, puce que cela écbaolEùl
lriplilè>e.leicK>noingt aiff.îilîwiil d'abord cctiieidéeeu pliwwhiol,ctrajoor>
iièreut{ mais le doyen perûsla cl <«bliat aœ condosiou pour la snppressioo de ce
CENTIÈME ÉVÊQUE d'aUXERKE. 247
qui étoit une place appartcuanl à ce duc (1) ; mais les digues des étangs ^^ ^ l„^^
de Lindre et du lac voisin ayant été rompues par ordre de ce prince, la
petite ville se trouva entourée d'eau si promptement , que Pierre de
Broc fut obligé de se retirer bien vite de ce lieu avec tousses équipages.
Il revint donc dans son diocèse, dont il ne s'éloigna plus pour de sem-
blables affaires , parce que le cardinal-ministre ne survécut pas de
beaucoup à cet événement.
Les premières démarches , dans le temps qu'il commença k résider
et à gouverner par lui-même son diocèse , parurent un peu hasardées
et donnèrent à connoitre qu'il n'étoit pas encore au fait sur le pouvoir
qu'ont les Chapitres de cathédrales lorsque le siège épiscopal est va-
cant (a). Dans d'autres matières, il procéda avec plus de maturité.
Dans les premières années de son épiscopat, il tint les synodes très-
exactement au jour accoutumé , c'est-k-dire le mardi après le second
dimanche du temps pascal ; et môme l'une des années que ce jour
tomba le 2 mai , entre deux fêtes commandées , il fit un mandement ex-
près (2) pour en ordonner la translation k un autre temps, sans inter-
rompre pour cela l'usage par lequel les curés dévoient en personne
venir prendre les saintes-huiles k Âuxerre; car il leur enjoignit de le
faire sous peine d'une amende applicable k la fabrique de la cathédrale
et k l'Hôtel-Dieu d' Auxerre. Quoique dans sa jeunesse il n'eût point
eu d'occasion d'annoncer la parole de Dieu , il ne laissa pas de pro-
noncer un discours k l'assemblée des curés dans la salle épiscopale , et
(]) On peat voir poui* la description de ce
•lieu le livre du Briquetage de MarsaL
(2) Mandement imprimé du 13 avril 1645.
bord qui était en pelil-gris. Les anciens s*y étaient opposés vivement, eni639; mais
Tannée suivante, aux grandes assemblées d'octobre, la majorité se rangea déflni-
tivemeiit du côté du doyen. Alors quinze chanoines en appelèrent au parlement.
Le procès , après avoir duré de longues années, entre les bordés et les débordés, et
avoir coûté 80,000 livres , fut jugé en faveur de ces derniers. (N> d. E,)
(a) Le Chapitre refusa d'approuver son projet d'union d'une prébende à la tré-
sorerie, les uns, dit Bardolat, élanl mécontents de ce que Tévéque avait demandé
prébende entière pour ses deux commensaux ; les autres parce qu'il n'avait pas voulu
sanctionner l'établissement de la communauté des chanoines. {N. d. E.)
liMOà ]ff71.
248 PIERRE DE BROC ,
il préclia aussi quelquefois son peuple dans la chaire de la cathédrale^
Hais il suivit, dans la tenue du synode, le plan de son prédécesseur,
et non celui de Gilles de Souvré qui demandoit les suffrages des pré-
sents. II publia quelques ordonnances dans celui qu*il tint Tan 1642 ,
le sixième jour de mai. Dans un article, il commande aui curés de se
bervir, pour Texplication de Poraison dominicale , etc., du catbéchisme
composé par le cardinal de Richelieu , lorsqu^il étoit évêque de Luçon.
Dans un autre slatut , il défend la chasse aux ecclésiastiques. On voit,
par le sixième article , que Tusage des calices d'étain, pour le saint-
sacrifice , étoit encore permis : ce qui marque la pauvreté de certaines
églises. Le quinzième nous apprend qu'à la vérité on avoit aboli Tusage
de délivrer les bâtons des confrairies pendant les vêpres, \k certains
versets du Magnificat ^ mais qu'en remettant la cérémonie après ToiBce,
on recommençoit de nouveau le Magnificat ^ pour ôter le bâton des
mains de Tancien possesseur au verset Depotuity et le donner à un
autre au verset Suscepit. Le prélat condamna cet usage et ordonna de
chanter en place quelque antienne en Thonneur du saint de la confrérie.
Les visites qu'il fit dans le diocèse nous remettent aussi certaines pra-?
tiques qui doivent leur origine à la simplicité de^ gens de la cam-
pagne ; une entr'autres, par laquelle les pères et mères faisoient tourner
les enfants par-dessous les autels , et mettoient au tour des arbres de
la paille trempée dans l'eau bénite (i). Il empêcha, en certaines pa-<
roisses de la ville , les cris que faisoient les enfants du mot Noël^ en-
tremêlé de paroles profanes, au sortir de l'ofiBce, depuis le commence-
ment de l'Avent jusqu'au Carême. Il défendit de célébrer des messes
de confréries, avec eau bénite et pain bénit, les jours de dimanches,
dans les chapelles de commanderie et autres. Comme il ne visita pas
toutes les églises de son diocèse, il fit faire des missions, sur la fin de
son épiscopat» dans les paroisses qu'il n'avoit pu visiter. De ce nombre
furent celles qui é^oient k la nomination du prieur de La Charité, pour
laquelle il employa les Pères de TOratoire à l'instance de Nicolas
Colbert, prieur de ce monastère (2). Quelques années après, d'autres
missionnaires, du nombre desquels étoit l'évêque d'Héliopolis, procu-
(l; Ordon. à Chcvannes, 10 juin 1665. | (2) En 1667.
CENTIÈME ÉVEQUE d'àUXERRE. 249
rèrenl le même bien dans un autre canton du diocèse, aux dépens du i^ ^ i^^,
marquis de Seignelay. Il réussit , en 1644, au sujet de trois cures unies
au Chapitre de Yarzy , dans Tentreprise que François de Dinteville,
premier du nom , avoit tentée en vain ; c'est-k-dire qu'il désunit de la
mense de ce Chapitre les cures de Saint-Pierre de Yarzy, de Saint-
Pierre du Mont, et celle de Brugnon et diminua en même temps le
nombre des chanoines de cette collégiale. Il augmenta le nombre des
cures de son diocèse par l'érection qu'il fit de la chapelle de Pont-
chevron (1) en église paroissiale, à la sollicitation du seigneur de ce
lieu, malgré l'opposition du curé d'Ouzoir dans le territoire duquel elle
étoit située. Il disposa des archiprétrés, comme s'ils eussent été amo-
vibles. Il supprima les trois ofiBcialités de Varzy, La Charité et Cosne,
h l'instance d'Edme Amyot, oiBcial d'Âuxerre, et de Germain de la
Paye, chanoine promoteur (2). Il donna les mains k plusieurs nouveaux
établissements de religieux et de religieuses, et Ton peut dire que ja-
mais on n'en avoit vu un si grand nombre durant la vie d'un seul
évéque. Il consomma, dès la seconde année, celui des Cordelières Ur-
banistes à Entrains; il voulut qu'elles fussent soumises k sa juridiction
et non k celle des Cordeliers, et que le visiteuf qu'elles choisiroient tons
les trois ans fût approuvé par lui ; ce que le pape Innocent X confirma
par une bulle du mois de février de l'an 1648. Ce fut aussi la seconde
aonëe de son épiscopat qu'il permit aux Augustins de la province de
Bbui;ge8de s'établir k Saint-Fargeau, k l'instance de Roger de Belle-
fîtgiTdt^ gouverneur de Bourgogne, alors retiré dans la Puisaye, et du
K< André Boullenger, religieux de cet Ordre ; et en 1649, il introduisit
des religieuses Bénédictines dans Thôpiial de la même ville. Il permit,
l'an 1644, le 8 avril, k une colonie d'Ursulines du couvent d'A vallon,
de venir s'établir dans la ville de Crevan (a) . Sollicité par le seigneur
de Guerchy, il consentit k la vente que la communauté des habitants de
Donzy fit du bâtiment de l'hôpital , pour y placer une communauté des
(1) 1665 ou 1066. I (S) En 1641
(a) Il leur donna un règlement en ise4. {ff. d. E,)
250 PIERRE t)E BROC ,
leio k wi. religieuses de la congrégation du P. de Malincour, donl les premières
furent tirées de la maison du même Ordre, établie h Laon , en Picar-
die ; alors Thôpital fut transféré dans un bâtiment voisin (a). Il confirma,
on i646, l'introduction des religieuses bospitalières de TOrdre de
Saint-Âugustin , dans la ville de La Charité, et dix ans après il ap-
prouva qu'elles s'établissent dans l'hôpital de Gien. Il donna, Tan 1654,
permission \k Joachim de Saint-Denis, religieux brigittin, de former
une communauté de son Ordre , dans un lieu de la paroisse de Ciez ,
nommé Le Plessis (6). Dans la ville d'Âuxerre seule on compte jusqu'à
quatre nouveaux établissements faits de son temps et par ses soins ;
premièrement, celui des chanoines réguliers de la congrégation de
Sainte-Geneviève, dans le prieuré de Saint-Eusèbe, l'an 1654 ; secon-
dement, l'introduction des religieuses hospitalières de l'Ordre de
Saint-Âugustin, dans l'Hôtel-Dieu, en 1657 (c); et rétablissement
des religieuses delà Visitation, en 1659. Ce prélat voulut même offi-
cier en personne dans la nouvelle chapelle de ces dernières. Elles
étoient alors en la paroisse de Saint-Eùsèbe. Ce ne fut que l'année sui-
vante que le sieur Jacques Desloges, son neveu, les conduisit proces-
sionnellement dans le territoire de la paroisse de Notre-Dame*la-
d'Hors, où elles sont restées (d). Enfin furent reçus & Âuxerre, avec
sa permission, les Âugustins déchaussés, l'an 1662. On les logea
aussi d'abord sur le territoire de Saint-Eusèbe. et de là dans celui où
[a) En 1661 , sa veuve, dame Lucie de Brichanteau, fut déclarée fondatrice de
rétablissement. — La même année, M. de Broc suspendit rétablissement que les
RécoHcts de La Charité voulaient faire à Donzy, jusqu'à ce qu'il eût reçu TadhésîftD
des écbevins. — Reg. de Tcvâcbé. — En 1666, il avait approuvé la translation de
TofTice paroissial dans l'église du Chapitre de Saint-Caradeu , vu Téloignement de
Tcglise mère du Pré , ce qui fut cause de beaucoup de procès entre le Chapitre et
le curé. [N. d. E.)
(5) Cette maison fut suppriiçéc par arrêt du parlement en 1689, à raison de la
conduite des Pères. {N. d. E.)
(«;) Ce prélat leur donna des statuts le 30 janvier 1664. — Archives de TYonne,
Rcg. de Tcvèché. {N. d. E.) •
[d) Ces religieuses venaient de la maison de Montargis, qui s'engagea à donner
20,000 liv. pour leur établissement. Les bâtiments qu'elles occupaient appartien-
nent aujourd'hui au séminaire. Ils furent construits, en 1664, par le sieur Delestre,
archilccle, moyennant 2«,000 liv. — Archives dt l'Yonne. — Visitand. {S. d. E.)
CENTIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 251
on les voit a présent (a). Â Fégard des Bénédictines, il ne les intro- ^^-^ ^^^
duisit point à Âuxerre ; mais, les ayant fait revenir, en 1649, de Cha-
rentenay, leur maison de campagne où elles étoient depuis les guerres
de la Ligue , il les engagea de prendre la réforme du Yal-de-Grâce en
même temps qu'elles rentrèrent dans leur monastère de St.-Julien(l),
qui venoit d'être rebâti à neuf et auquel il avoit mis la première pierre
le 8 mai 1647 (6). Une des religieuses, qui avoit le plus contribué à
cette réforme, établit peu de temps après une communauté soumise à
la même règle , au faubourg de Cosne, sous les auspices du prélat.
Vers Tau 1653, il soumit à sa juridiction les religieuses de l'abbaye
des Iles qui , auparavant ne connoissoient que celle de Tabbé de
Citeaux. Il obtint aussi par arrêt, en 1654, que les religieuses de
(l) Voyez le livre imprimé in-12 sur cette 1 (2) En 1658.
réforme. l
(a) Us durent leur première dotation à un bourgeois de Paris nommé Etienne
Arthos, qui leur donna 8,000 liv. pour acheter une maison à Auxerre, en 1662. Mais
ils ne purent s'établir qu'avec le consentement des écbevins de la ville , et même
lorsqu'ils flrent entériner au parlement les lettres-patentes que le roi leur avait
accordées, les trois autres ordres mendiants, déjà existants à Auxerre , formèrent
opposition, mais le parlement passa outre. (iV. d. E.)
(è) On trouve dans la conduite de labbesse des Bénédictines, Gabrielle de la Mag-
4elaine, vis-à-vis de Févéque , un caractère d'indépendance singulier. Ainsi , au
mois de novembre 1644, M. de Broc , frappé de rirrègularité de la vie des reli-
gieuses q^i observaient peu la clôture à Charentenay depuis longtemps , avait or-
dOQBéiiue Tabbesse se retirerait dans six mois à Auxerre. Le conseil privé sanc-
tionim cette décision , mais lorsque les officiers du baiUiage d'Auxerre se présen-
tèrent à Charentenay pour la contraindre à obéir , ils éprouvèrent le refus le plus
net. Cependant, les religieuses réformées de La Fermeté s'étaient installées à
Auxerre dès 1645 (Voy. Preuves, t. iv, no 470), et elles amenèrent Pabbesse à une
transaction et rétablirent la régularité à Auxerre. MaisM"^« de la Magdelaine, avec
trois vieiUes sœurs, demeurèrent à Charentenay. L'abbesse ne céda pas volontiers
à tous les projets de l'évéque; car, en mars 1651, M. de Broc, dans sa visite à Cha-
rentenay, ayant voulu l'obliger à signer une procuration par laquelle elle devait
laisser à la communauté d'Auxerre tous les biens situés au comté de Joigny, elle
s'y refusa; et comme Tévèque la menaça de la faire enlever de sa maison et de la
mettre en lieu étroit en la ville de Paris, elle protesta devant notaire. L'cvèquc ,
lassé de ces tracasseries, finit par la laisser terminer sa vieillesse en repos.
(iV. d. E,)
25i
PIERRE DE BROC
1640 il 1671.
Tabbaye de CrisenoD fussent sujettes à sa juridiction (a). C'est ainsi
qu'il se soumit toutes les communautés de filles de son diocèse.
Voulant vivre en paix avec le Chapitre de la cathédrale, conformé-
ment au serment qu'il avoit fait à sa réception, il n'en attaqua jamais
la juridiction. Il avoit reconnu, dès Pan 1642, l'erreur de ceux qui
avoient voulu lui persuader de faire une défense générale aux curés
d'admettre aucun prêtre à dire la messe sans son approbation ou
celle de ses vicaires-généraux et il tomba d'accord que les chanoines
de la cathédrale peuvent dire la messe partout le diocèse , au moins
par dévotion. Il ne refusa le paiement d'aucuns des droits dus par
l'évêqnek la cathédrale , mais les dépenses de sa maison l'obligèrent
d'apporter quelques délais à l'acquit de ce devoir. La chapelle d'orne-
ments qu'il avoit promise de vive voix à sa prise de possession et dont
il ratifia par écrit la promesse cinq ans après, fut apportée l'an iG51 ,
le sixième jour d'octobre. C'étoit un velours vert à fleurs pailletées
d'argent qui conserve encore assez son premier éclat. Etant informé
que l'archevêque de Sens avoit été condamné, par arrêt, à augmenter
considérablement la contribution annuelle pour l'entretien du bâtiment
de l'église métropolitaine, il consentit pareillement à une augmentation
du droit annuel envers la fabrique de la cathédrale d'Âuxcrre, par tran-
saction de l'an i665. II donna aussi alors une bonne partie de ce qui
fut nécessaire pour refaire à neuf le pavé du chœur, dont les tombes
épiscopales avoient été défigurées et brisées dans les guerres de la reli-
gion. Les distributions de vin que le Chapitre avoit droit de recevoir
dans le cellier épiscopal, aux cinq des principales fêtes de l'année,
s'étant trouvées sujettes 2i plusieurs inconvénients, il consentit à l'éva-
luation que le Chapitre en fit en argent; et depuis ce temps-la cette
commutation a toujours eu lieu. Le Chapitre, de son côté, lui laissa
introduire certaines nouveautés (1 ) qui neblessoienl en rien les droits de
(1) Quelques mémoires du temps marquent
qu'il y eut en 1643 des thèses publiques et
imprimées où il fut qualifié comte d'Auxerre.
On ajoute aussi que ce fut lui qui fit le pre-
mier porter sa crosse par un ecclésiastique
en surplis.
(a) En 1664 , il rendit une ordonnance pour rétablir la discipline qui était fort
peu régulière dans celte noiaison. — Arch. de l'Yonne, Reg. de l'évôchc. (iV. d. E).
CENTIÈME ÉVÊQUB d'aUXERRE. 255
la compagnie. Mais il n'en fut pas de même lorsqu'il voulut changer
quelque chose dans le cérémonial, sur la bénédiction épiscopale. Au
reste, la bonne intelligence dans laquelle on vouloit vivre avec lui avoit
été marquée, dès les premières années de son épiscopat, tant par les
prières solennelles que le Chapitre fit en i641, après la mort de sa
mère, que par la facilité qu'on lui donna, au mois de décembre 1642,
pour faire faire célébrer avec magnificence le service du cardinal de
Richelieu, son bienfaiteur (1). Dans l'intervalle de temps qui se trouva
entre ces deux cérémonies , le même corps lui porta des plaintes du
P. André Boullenger, augustin, qu'il avoit choisi pour prêcher le ca-
rême (2) , et il fut conclu qu'il en seroit dressé procès- verbal pour le
maintien de la dignité de la chaire. Gomme le caractère de ce prédica-
teur a été (rès-connu dans le royaume, il n'est pas besoin de prouver
ici que le prélat n'avoit aucune part à ce qui parut repréhensible dans
ses discours (a). Pierre de Broc rendit, vers le milieu de son épiscopat,
d'importants services au Chapitre de la cathédrale (5); il imita aussi
son prédécesseur dans le don qu'il fit k la même église, de quelques
reliques des saints du pays. Sachant qu'il y avoit dans l'église du viU
lage de Saints-rCn-Puisaye plusieurs châsses de bois pleines des osse-
ments des compagnons de saint Prix, il résolut d'en donner une partie
à la reine Anne d'Autriche, pour l'église du Yal-de-Grâce, qu'elle fai-
soit bâtir et qu'elle vouloit enrichir du plus grand nombre qu'elle
{l)Reg. Capit. 1641, 21 déc; 1642, 12 déc.
(2) Ihid, 24 mars, 28 avril, 26 sept.
(3) Reg. Cap. 1653,
(a) 11 arrivait quelquefois de singuliers événements à propos de prédicateurs. En
1607, au mois de décembre, un P. Jésuite, nommé Marlot, ayant été autorisé par
révéque à prêcher à Clamecy , avait commencé TAvent lorsqu'une foule de peuple
s'opposa violemment à ce qu'il continuât et voulut qu'il cédât la chaire à un P. Ja-
cobin. Celui-ci, au dire du Chapitre, aurait cabale parmi les gens du peuple, flot-
teurs, etc., et une véritable émeute eut lieu au pied de la chaire. Les échevins
avaient pris parti pour le P. Jacobin et appuyaient les mécontents , se plaignant de
ce qu'au mépris d'un compromis passé avec le Chapitre, en attendant que Ton sût
lequel des deux prédicateurs devait être autorisé par Tévéque , le P. Jésuite conti-
nuait seul à prêcher. Le peuple avait été consulté U-dessus en assemblée générale.
— Arch. de l'Yonne ^-^ /mr j «y >
»-« {Pi. a. i».;
1640 il 1671.
354 PlÉARE DE BROC ,
iM* à ICI. pojUToit de reliqaes. Les aDcieDDes châsses commeDçaoi k être cada-
ques, madame d*Orléaiis, docbesse de Monipensier el de Saînt-Fargeao,
eo fouraii one noaTelle, et les paroissiens oDe aotre dans lesquelles
l'éTéqoc fil la iraoslation le dimaDche 5 DOTembre 1662 (1). El comme
les ossements ne purent être contenus dans les nooTelles châsses , il
en retint pour lui, pour la reine, pour la docl^sse de Montpensier,
pour Téglise cathédrale et pour celle de Saint-Germain. Le procès-
Yerbal marque qu'il célébra la grand^messe en cette cérémonie et qn*il
j prêcha. L'ossement tibial, qu'il destina pour h cathédrale, fut déposé
dans Téglise de Sainl-Âmatre, et transieré processîonnellement le di-
manche suiTant, 12 noTembre, de cette ^lise du £»bouig en cdie
de Saint-Etienne, en présence du même préhi, accompagné de Fran-
çois Fouquet , archeféque de Xarbonne, alors retiré à Aoxerre. Celte
relique bit ensuite enfermée dans h châsse de Terre où Ton afoit mb,
en 4650, celles que Nicolas Housset , chanoine et sous-chantre, avoit
apportées à son retour de Rome. Il eniichit aussi deux des églises pa-
roissiales d^Auxerre des ossements de saints qull tira du trésor de
Sainle-Engénie de Vanr. Faisant la râite de cette coUégiale le 5 juin
1642, il tira de la diâsse d'argent de saint Regpdiert, éréque de
Bajeux, im os de h jambe de ce saint, qu'il il déposer au fiiubourg
d*Asxerre, dans h même église de Saint-Amalre, d*oà la relique,
après aToir été enchâssée par k prélal, fut potlce processionneUement,
le dimanche 19 ami 1645, par tout le cleq^de b cathédrale et de la
Tille, en Téglise paroissiale de Sûit-Regnobeit.. oà il célébra la messe
pontificalement. Il tira encore du trésor de b méine coDégîale,
le 25 février 1654, à b prière du clergé et des hahilanlsde b paroisse
de Saint-Ensèbe . im ossement du nom de saint PiMd, n du nom de
saint Eusèbe, et un fragment du crâne de saint Cot, martyr^ q|ui furei^t
depuis déposés à Auxerre , dans b même église. Ce fut lui qui com-
ment, en 1645, b Térificatioo du chef de saint Pèlerin, treuré à
Bonj aTce quelques xerlèbies du col. Comme on étoil persuadé que
CCI TCftèbres procèdoieni du mëuw coqis que le chef, il les porta à
Fabbaje de Saint-DeoTs; le 15 jmllet 16(7« el par le procès-rerbal
CENTIÈME ÉVÊQUE U*AUXERKË. 255
qu'il fit dresser de la comparaison de ces ossements avec ceux de la
châsse, en présence des religieux et d'un habile médecin, il enseigna
h la postérité que le peuple de Bouy avoit été bien fondé à croire qu'il
y avoit des reliques de ce saint sous Tautel de la paroisse. Quelques-
uns ont aussi assuré que Pierre de Broc avoit visité le dedans des
tombeaux de Tabbaye de Saint-Germain , mais seulement en secret et
sans en dresser de procès-verbal.
Dans quelques actes cet évéque est qualifié baron de Nully, en
Champagne. Il avoit acquis cette seigneurie la seconde année de son
épiscopat; mais il ne la réunit point à Tévêché d'Âuxerre, et il en fit
un échange au bout de quelques années. Il reçut aussi , la seconde
année depuis sa prise de possession , la foi et hommage que lui prêta
Pierre Camus, bailli d'Auxerre , pour les fiefs de Cervan, Montifault ,
La Yillote et Beauche, en partie détachés du comté d'Àuxerre, et le
14 décembre, Jean Jacob, écuyer, pour les fiefs d'Ougny et Ceponse
en Nivernois. La vente de la baronnie de Toucy, faite par décret en
1645 , lui produisit les droits de quint et de requint. Il fit des décou-
vertes notables sur les dépendances de la baronnie de Donzy , par la
communication qu'il eut, en i649, des terriers et lettres de comptes
qui restoient négligés à Varzy, et nonobstant la levée de la saisie féo-
dale ordonnée en i650, par arrêt du parlement en faveur du duc de
Nevers, il fut reconnu seigneur suzerain , en i65i, d'une manière au-
thentique et qui lui fut utile. Il ajouta aussi au domaine épiscopal de
Varzy, beaucoup de biens situés dans le voisinage de cette terre. Quoi-
qu'il allât quelquefois la visiter, sa résidence la plus ordinaire lorsqu'il
n'étoit point h Paris fut k Régennes, où il fit mettre ses armoiries dans
les endroits les plus apparents, aussi bien que celles du cardinal de
Richelieu. Il donna k l'église du lieu , ç'est-h-dire Âppoigny, un orne-
ment de drap d'or (1).
Il acheta une maison à Cosne pour s'y retirer aussi quelquefois, et
jouir des agréments du rivage de la Loire. Mais il ne réunit point ce
1040 îi 1671.
(1) Quelques personnes, qui se disent bien
informées, prétendent que cet ornement
aToit été acheté d'une somme qu*un prince
avoit chargé ce prélat de restituer aux ha-
bitants de cette paroisse par un article de
son testament.
xud k w\. ^^^^^ ^^^ domaine do Tovikhi^ non plus qu^il d ; fit point revenir Thôtel
<^pi$ro|>al ciWuxerrc, .situé Si Paris ^ quoiqu^il se le fût proposé. Il avoii
plus fait que M. de $ouvré« qui mourut en poursuivant cette prétention.
Il voulut on savoir le produit par lui-même en rendant visite au P.
Bernard, dit Upautre préîrt^ qui logeoit dans un appartement de cette
maison ; mais étant informé de la manière dont le cardinal de la Bonr*
daisièro avoit fait la vente, et du nom des |>ersonnes intéressées, il se
désista de ses |>oursuites, content de retirer ses frais* Cette maison a
depuis été changée de nature (1). Il s'en talloit beaucoup qu'il eût au-
tant fait de démarches pour la reconvrance de la terre de Gien. Il sou-
haita seulement évtù éclairci sur b liaison qu^avoit la mouvance de celle
se^ltieiine avec le droit de rég:ale. Le Qiapitr^ n^éunt pas moins
attentif que lui sur cet ancien iief de Téglise d^Aoxerre ^ à cause du
ciei|çe de cent livres dont cette terre est chargée envers la trésorerie^
nenonxvla de son temps ses oppositions à la v«te.
n possédoii ^ qnand il fat nommé évèqne ^ les ahbayes de Ressons
<i de Fonienelles ; mais il permuta la dernière dès Fan 1 645, pour
TahKavti de Tonssaints d'Angers ; et il en prit possession ai personne
an mois de mai 1646^ se retenant mille livres de peiision sur fantre.
ftans le même temps, il fil quelques tentatives pour une pret^ende de la
cathôâra)e ^e Saint-Maurice d'Angers : il ne pot cqi«»dam y réussir h
cause des difficultés ^i se ptrêsentèrent an sujet de la stalle qu*il occu-
ferait au cbomr ei de la place qu'il auroit en Qiapiire. Les dummues
deâMit-Maniu de Tours ayant uu cérémoimi réglé pcmr cr!ux d'ettre
kts é^^ues qni «tout chanoines honoraires de lenr «|ffeie « Padmimm uu
<^<r«r comme leur eonfrcuT^ lorsqn^il les eni sahiés en •qnaîihé d^cvèquf
d^AuteiTC , et mdme rec^ront de lui la liénédiction à la fin de la mease^
Outre les èimx utàiaj^es ci-dessns nomimées qn^il possédoiu il es|ièr&
on \uin avoir coHe de Ijinne^' on Benuvoisis. njirès la mon de J'abiiè
de Honrmoronr^^ arrivée on I6S0. Il fit à Paris deux eérémcmies fo-
nohres on IfUd et 1^1 : la pi*omirire Fm ronicrremeni de madame Ai
HommomncA^ qn'W inhuma . pnr ordre do prince de CnnAê, dans le
oimMiore des rnliffionsrs i^turméiiies de Nntre-^»me-A*-^ihOTnj»i. La
.1 tSllt'^«lli lii:|ilii^HrS Vislwl
CENTIÈME ÉYÊQUE d'aUXEBUE. i57
seconde fut le service que les prélats de rassemblée du clergé tirent
célébrer dansTéglise des Âugustins, pour Léonore d'Estampes, arche-
vêque de Reims. Il fut l'un des évéques qui sacrèrent li Paris, dans
Téglise des Jésuiteë, Jean de Lingendes, évéque de Sarlat. Dès les
premières années de son épiscopat , Urbain YIII Tavoit chargé d'une
commission au sujet de l'Ordre de Citeaux, avec l'archevêque de Sens
et Tévéque d^Uzez. Dans cette négociation il fut favorable à Claude
Vaussin, religieux de Clairvaux, prieur de Fontenet, contre les conven-
tuels que le cardinal de Richelieu avoit réformés. Enfin, on lit qu'il
présida à quelques séances de l'assemblée du clergé, Tan 1661, et
qu*il tâcha d'y maintenir tout en paix.
Il reçut deux fois à Âuxerre le roi Louis XIV dans son palais épis-
copal. Premièrement, Tan i650, lorsqu'il y arriva le onzième jour de
mars avec la reine sa mère, le duc d'Anjou et le cardinal Mazarin ; la
seconde fois fut Tan 166i . Deux ans après , le roi lui donna une marque
sensible de sa protection. Le présidial d'Âuxerre se rendant aux re-
montrances du procureur du roi, touchant la résidence des évêques,
marquée par les ordonnances du prince, et voyant qu'il étoit de noto-
riété publique, que Tévéque d'Âuxerre n'y satisfaisoit point, et que les
pauvres crioient contre lui, avoit ordonné, le ^.vingtième jour de mai
1665, que ce prélat seroit averti et invité de résider dans un mois et
de faire l'aumône, sous peine de saisie de son temporel, et que Tor-
donnance seroit signifiée à ses vicaires-généraux afin qu'il en eût con-
noiasance. Le prélat, qui ne savoit pas que c'étoit son neveu,. doyen
du Chapitre, qui avoit fait naitre la querelle , se pourvut aussitôt au
conseil privé , où par arrêt il fut dit que cette ordonnance seroit biffée
des registres comme injurieuse, et que l'arrêt seroit publié dans
Âuxerre à son de trompe. Ce qui fut exécuté par un huissier de la
chaîne envoyé exprès de Paris (a).
1640 i l<ri.
(a) L^abbé Lebeuf a omis de parler des mesures prises par M. de Broc pour faire
exécuter la décision de rassemblée générale du clergé de France de 1657, au sujet
de la signature du formulaire , prescrite par les constitutions des papes
Alexandre VII en 1653, et Innocent XI en 1656. On sait que ce formulaire con-
damnait les erreurs contenues dans cinq propositions du docteur Jansénius. Le
16 juillet 1664, M. de Broc ordonna , par un mandement, à tout son clergé , sécu-
u 17
2-^8 PIERRE DE BROC,
\m à 1671. Pierre de Broc, qui ne se croyoit |)a8 un profond théologien, main-
tint assez la paix dans son diocèse, par Fasage où il fut d'avoir des
vicaires-généraux au gré de tout le monde. Il consentit volontiers en
faisant travailler à une nouvelle édition du bréviaire d'Auxerre, que ce
fussent les plus habiles du Chapitre dans la connoissance de Tantiquité
qui y missent la main; et comme alors on n*avoit pas devant soi les beaux
modèles qui ont paru depuis, il fut publié Tan iG70, plutôt sous le
nom modeste d'eisat, que comme un bréviaire véritablement exact et
^ Tabri de la critique (1). Il vit de son temps la cérémonie de Tannée
séculaire depuis la délivrance d*Âuxerre de la main des Calvinistes,
qui fut Tan 16G8, c'est-à-dire la célèbre procession en mémoire de
ce bienfait (a). Commençant alors k résider plus exactement, et témoi-
gnant de plus en plus son amitié aux chanoines de son église , il se
(1) Voyce la lettre pastorale.
lier et régulier , et aux régents, professeurs et maîtres d'école, de souscrire le for-
mulaire dans un mois, à partir de ce jour, à peine de poursuites. Il donna lui-même
Texemple en le signant sur le registre de Tévèché. Un sergent royal alla ensuite
notifier Tordonnance dans tout le diocèse et Ht son rapport. Le 4 novembre , sur
la requête du promoteur, il fut constaté que 40 curés ou prieurs, les abbés de
Saint-Marien, Saint-Germain, Reigny et ses moines, Saint' Laurent de Cosne, les
Bénédictins de La Charité, les chanoines et les moines de Gien, l'abbc de Roches,
les Gordeliers d'Auxcrre et un maître d*écolc de cette ville avaient négligé ou re-
fusé de signer le formulaire. — On ne voit pas quelle suite eut cette première
affaire. (iV. d. E.)
(«) Le pape Clément IX accorda , à l'occasion de rétablissement de cet anniver-
saire> une bulle d'indulgences du 28 février 1668. Bargedé, dans son histoire manus-
crite, fait une description pompeuse de cette cérémonie à laquelle assistèrent les
nombreuses communautés religieuses de la ville et tous les corps constitués. Il en
fut si émerveillé qu'il s'écrie : « Le matin de cette célèbre journée, le soleil se ca-
cha dans les nuées, honteux qu'il estoit de se voir surmonté par de si superbes ap-
pareils.... et plus loin, cent noneltes marchoient sur les pas des bannières, vêtues
de blanc, marque de leur chasteté, et avec une telle modestie et gravité, que si les
anges avoient eu des corps ils seseroient trompés à leur Ogure, n'y remarquant
rien d'humain. »
On devait ériger, en mémoire de l'expulsion des Huguenots, une pyramide de
bronze; mais les dépenses d'un tel projet le firent ajourner indéfiniment.
(N, d. E.)
/ CENTIÈME ÉVÊQUE D AUXERRE. 251)
trouva avec eux au Chapiire les deraîères années de sa vie, à la céré- xqm ii icti
moDÎe du soir du jeudi-saint, où Tévéque est tenu de fournir le vin de
la cène , landis que les chanoines réguliers de Saint-Eusèbe servent de
leur côlé des pains azymes à tous ceux du corps , tant chanoines que
tortiers. Ou. remarque que sous son épiscopat, le Chapitre, loin de se
relâcher sur rattachement qu'il avoit pour l'antiquité, Gt au contraire
plusieurs règlements pour rétablir dans leur premier état des rits
cliangés assez légèrement sous les trois épiscopats précédents* On en
fut redevable a Tattention qu'eurent quelques chanoines de consulter
les anciens monuments. Mais ces chanoines ne purent réussir en tout.
On peut juger de la connoissance qu'avoient de la saine antiquité ceux
qui se méloient de proposer les changements par le mémoire qu'ils en-
voyèrent, en i670» a M. de Sainte-Beuve, et que ce docteur réfuta
solidement par sa délibération du 17 août (1). Il étoit question d'in-
troduire, h la fin des grand'messes, la bénédiction par le célébrant
avant de quitter Tautel. On ne voyoit encore, au commencement de
son épiscopal, que deux ou trois chanoines porter la perruque, dont
le plus ancien étoit Germain Bardolat, qui la prit par nécessité. Cette
nouvelle mode prit tellement cours malgré la soumission qu'on étoit
obligé de faire au Chapitre pour en obtenir la permission, que vers
l'an 1670 il n'y avoit plus qu'un ou deux chanoines qui continuoient
de paroitre au chœur avec leurs cheveux.
Pierre de Broc plaça dans le clergé de la cathédrale quelques-uns
de ses neveux. Le premier fut Pierre Fricour de Fénouillet, natif du
diocèse de Tours, prieur de Juvigny , à qui il conféra le canonicat et
la trésorerie, dont Claude Leclerc , depuis archidiacre, s'étoit démis
en 1640. Il n'étoit encore alors que simple clerc. Le second fut Jacques
des Loges, fils de Catherine de Broc, né en la paroisse des Loges, au
diocèse du Mans, en 1627, qui fut fait chanoine en 1659, et fut de-
puis prieur de Saint-Melaine et de Saint-Yenerand, et chanoine du
cimetière de Laval. Le troisième, Charles Testu de Pierre-Basse du
diocèse d'Angers, fils d'Antoinette de Broc, sa sœur jumelle, qui n'étant
encore que sous-diacre et chanoine depuis quinze jours , fut élu doyen
(1) Cas de conscience, tome i, cas 9 el 10.
n-
2G0 PIERRE DE BROC, CENTIÈME ÉVÊQUE D*AUXERRE.
1640 a lun le 17 octobre 1661 . Ce neveu fui ordonné diacre et prêtre extra tempara
par son oncle, qu'il soulagea dans les dernières années de son épis-
copat en qualité de vicaire-général. H lui succéda aussi dans l'abbaye
de Toussaints d*Ângers. Pierre de Broc, averti vers ce temps-là qu'il
avoit contracté beaucoup de dettes, forma une sincère résolution de les
acquitter. Il retrancha pour cela les deux tiers de sa dépense ; et il
seroit venu à bout de les acquitter toutes si la mort ne l'avoit pré-
venu (a). Etant tombé malade au château de Régennes les premiers
jours de juillet de Tannée 1671, le doyen d'Âuxerre lui administra le
saint viatique; le curé de la paroisse lui conféra le sacrement de
Textréme-onction, et il mourut le septième jour du même mois. Son
corps, apporté à Âuxerre, fut placé, après les obsèques, dans une
chapelle des grottes de la cathédrale, auprès de celui de sa sœur
Antoinette, épouse de M. de Pierre-Basse, qui y reposoil depuis huit
ans. Un Jacobin, nommé Gauthier, fit son oraison funèbre le trentième
jour après celui de sa mort, en présence de tous les corps de la ville.
On ne sait pour quelle raison le Chapitre différa jusqu'au mois de no-
vembre à ordonner à chaque collégiale, monastère, communautés et
curés, qu'ils fissent un service pour le repos de son âme. Le mande-^
ment qui fut signé du doyen au nom de la compagnie, est du 18 de
ce mois, et donne au défunt évéque les épithètes c de bon , bienfaisant
et dont la mémoire sera â jamais chère dans le diocèse. » On célébra
encore dans la cathédrale , au bout de Tan , un service solennel auquel
son successeur officia pontificalemen t.
Comme son corps et celui de sa sœur étoient restés simplement dans
des cercueils de plomb élevés sur des tréteaux sans être renfermés en
terre; ils furent tirés de ce lieu le samedi 16 septembre 1750, après
complies , et portés dans la nef de l'église où on les descendit dans le
caveau de MM. de Dinteville, dont les corps occupoient très-peu d'es-
(a) Les grandes dépenses queU. de Broc avait faites lorsqu'il était au service du
roi , dan^ la poursuite de plusieurs procès de son église et pour l'entretien de sa
maison, avaient gravement compromis sa fortune. Il fut obligé, en 1669, d'a-
bandonner à ses créanciers tout son revenu , moyennant 15,000 liv. qu'on lui laissa
par an. (iV. d. E.)
n
NICOLAS COLBERT, CENT-UNIÈME ÉVÊQUE d'aUXEBRE. 261
pace. Celui de Tévéque fui mis à droite, et celui de sa sœur à leiosiieri
gauche.
Il reste quelques exemplaires d'un petit livre dédié à Pierre de Broc,
qui a été imprimé à Auxerre, chez Jacques Bouquet, in<*12, Tan 1643,
intitulé : l'Entretien des Musiciens, par le sieur Gantez, prieur de la
Magdeleine en Provence, chanoine sémiprébendé et maître des enfants
de chœur et de la musique de l'église cathédrale d*Âuxerre. L'épltre
dédicatoire et tout Touvrage prouvent combien ce prélat étoit bon et
facile. L'auteur reconnoit que c'étoit de lui qu'il tenoit sa sémipré-
bendé, et il lui en fait hommage dans l'année même. On trouve , en
effet, dans les registres du Chapitre, au 27 juin 1643, la réception
d'Annibal Gantez, prêtre du diocèse de Marseille. L'écrivain ne ba-
lance point de dire à Tévéque qu'il lui a semblé ne pouvoir rencontrer
un meilleur protecteur de son livre, ci parce que, dit-il, voQ8a?ez un
û grand amour pour les musiciens, que presque toute votre maison en
est composée.» Au moins, il est certain que ce prélat avoit été si charmé
de l'organiste qui avoit touché au Te Deum^ entonné par lui dans la
cathédrale d'Ârras, après la prise de la ville, qu'il Temmena avec lui, le
présenta an cardinal ministre, et le fit ensuite venir à Âuxerre pour
demeurer chez lui. Il se nommoit Antoine Doresmieux (1).
CHAPITRE X.
NICOLAS COLBERT, Cl^ ËVÊQUE D'AUXERKC
L'évêché d' Auxerre ne fut |>as plus lot vacant par la mort de Pierre im a lere.
de Broc, que Jean-Baptiste Colbert , ministre d'Etal, qui avoit une
terre considérable proche cetie ville , sachant que l'air de celle de Luçon
(1) On lui dédia pendant son épiscopat un
volume in-12 qui étoit la traduction d'un
Traité du Président d*Espagnet, fameux
chercheur de la pierre philosophalc.
Ce fut aussi sous son épiscopat, en 1664, que
plusieurs chanoines et autres firent entre eux
une association pour tenir par chaque se-
maine une conférence spirituelle. Ces cha-
262 NICeLAS COLBBRT,
io7ia \ci6, é^oii contraire à la saoté de son frère, qai en éloil évùque, obtint du
roi Louis XIV, sa nomination à cet évéché. Mais ce prélat , bien instruit
des canons qui défendent les translations , différa longtemps à accepter
celte nomination. Pendant ces délais, le Chapitre entra en possession
du gouvernement spirituel et temporel. Ayant fait mettre le scellé an
palais épiscopal et au château de Régennes , il gouverna le temporel de
Tévêque futur par trois économes , et il exerça en corps ce qui concer-
noit Tautorité spirituelle. L^évéque de Luçon, qui se nommoit Nicolas
Colbert, se détermina pendant ce temps-li sur les raisons que le Père
de Sainte-Marthe, général de l'Oratoire, lui allégua. On lui représenta
les besoins du diocèse d'Âuxerre , que son frère avoil connu par les
missions qu'il y avoil fait faire* On lui promit que le roi lui donneroit un
successeur ii Luçon, riche et charitable , qui enchériroit sur le bien
qu'il jAeit procuré (1). Ces raisons le portèrent à croire qu il y avoit de
Futilité il espérer, s'il recommençoit de nouveau les travaux de Tépis-
copat • et il se soumit à accepter un bénéfice qu'il n*avoit ni demandé
ni désiré. Le célèbre casuiste, M. de Sainte-Beuve, fut informé des
premiers que Nicolas Colbert s*étoit déterminé malgré lui à cette trans-
lation et qu'on ne lui avoit pas donné le temps d*attendrc sa décision
sur ce cas; mais, quoiqu^il ne fût pas dans la disposition d'autoriser
ces sortes de translations, il ne put s'empêcher d'en apprendre avec
joie la nouvelle à des citoyens d'Âuxerre qui étoienl venus lui apporter
une consultation, et il leur dit que a pour le coup ils avoient un
évéque. » Ce n'est pas qu'il voulût leur apprendre simplement que le
siège épiscopal cloit rempli , mais son dessein éloit de leur faire en-
tendre qu'il étoit rempli par un prélat en qui se réunissoicnt toutes les
cminentes qualités qui forment un véritable évoque. La nouvelle nomi-
nation faite par le roi avoit déjà réjoui universellement le diocèse
d'Auxerre; mais le jugement porté par M. de Sainte-Beuve étant
noines n*étoient d*abord qae quatre, savoir :
Gervais Housset, chantre, chez qui elle se
tenoit; Nicolas Hous8et,soas-chantre; Claude
Barrault, et Edmede Rigny, tous prêtres.
Ils admirent depuis quatre autres chanoines
qui éloient, Nicolas Berault, Melchior Bru-
net, Claude Brunet, et Guy Foreslier. Ces
assemblées dont plusieurs furent publi(]ucs
et ouvertes à tout le monde , ne cessèrent
que vers l'an 1680.
(1) L*auteur d'un livre qui traite de la
ville de Luçon, et qui fut composé pendant
qu'il en étoit évéque, assure qu'il a été ablM*
de Saint-Sauveur-de-Vertus.
CENT -UNIEME ÉVÉQUE D*ÀUXERRE. 265
bientôi répandu dans le public , y augmenta encore davantage la joie j^^ ^i i^^^,
des ecclésiastiques et des fidèles. Il y auroit eu de quoi former un va*
lume par quiconque auroit entrepris d'écrire au long la vie que le prélat
mena, tant a Luçon qu'à Âuxerre. Mais comme il a fallu me borner
dans cette collection, je me contenterai de produire ici ce qui m'a été
fourni par plusieurs pieux et savants personnages qui Font connu par**
ticulièrement , et par d'autres qui Vont vu en différentes occasions, k
quoi j'ai ajouté ce que j'ai trouvé par mes recherches particulières.
La patrie de ce prélat étoit la ville de Reims. Il y étoit né Tan 4628.
Il y avoit commencé ses études, les avoit continuées à Paris , où il
avoit reçu le bonnet de docteur au sortir de la licence dont il avoit été
prieur; ensuite de quoi, étant bibliothécaire du roi (1), il avoit été
élevé, Tan 1661 , à l'évéché de Luçon , où il avoit fait des bien$ infinis.
Ayant donc succombé aux instances de sa famille , qui cniig|oit pour
sa santé, il se disposa à subir le nouveau fardeau qui alloit lai être im*
posé. Use retira à Reims, où sa principale occupation après la prière,
la lecture et ses lettres écrites, fut de visiter les lieux de piété et les
sanctuaires de la ville. Â la prière du Chapitre , il officia pontificalement
aux grandes fêtes qui se rencontrèrent pendant le reste de l'année 1671.
Il fit plusieurs fonctions épiscopales à la réquisition des vicaires-géné-
raux du cardinal Antoine Barberin , archevêque ; il anima à l'étude et
à la piété quantité déjeunes ecclésiastiques, et montra partout une mo-
destie et un recueillement que tous les fidèles admirèrent et firent
remarquer k leurs enfants, afin que la mémoire s'en perpétuât.
Les bulles de sa translation étant arrivées, il prit congé de sa famille
et se bâta de se rendre à Âuxerre , où l'on étoit prévenu avec justice
en sa faveur et plein d'espérance d'avoir en lui un pasteur selon le cœur
de Dieu et un prolecteur en cour. Le Chapitre de la cathédrale députa
six du corps pour aller jusqu'à Joigny au devant de lui et raccompagner
jusqu'à Âuxerre ; il fut reçu dans la ville le 27 janvier, comme on au-
roit reçu le roi ou le gouverneur de la province; c'est-à-dire que le
maire et les cchevins, avec toute la bourgeoisie en armes, étoicut allés
(1) L'histoire de la Bibliothèque du roi dit
qu'il fut bibliothécaire det)uis Tan 165G
jusqu'à sa morl.
264 NIC0L4S COLBBRT,
10:9^ 167e. bien loin hors de la ville au devant de lui, où ceux (]ui représcnloienl
la coromunaulé des habitants lui ûrent leur harangue. Mais comme il
ne fut point curieux de se faire porter par les quatre barons, depuis
Téglise de Saint-Germain jusqu'à la cathédrale, il se rendit droit au
palais épiscopal, où il se prépara pendant deux jours de recueillement
à sa prise de possession. Le 29, il passa de son palais à la cathédrale
par la porte de communication, qui est derrière le chœur, et alla dans
la chapelle de Notre-Dame-des- Vertus, située à côté du grand portail;
là, s'étant habillé pontificalement, il se présenta à la grande porte de
relise pour y être reçu. Le doyen, à la tête des chanoines, tous re-
vêtus des plus belles chapes, lui ayant fait un discours, lui présenta
le livre des évangiles pour prêter le serment suivant la formule ancienne
qui y esi.écrite. Comme ce serment fait mention des droits et immu-
nités deji'église d'Âuxerre , il fit réponse qu'il s'y conformeroit lors-
qu'il les auroit vus, et de là il avança au chœur qui étoit orné de tapis-
series nouvelles, et il y fut intronisé à la manière accoutumée. Le
Chapitre lui fitensuite'les présents ordinaires de pain et de vin pour
sa nouvelle venue, et dès le même jour ou le lendemain il offrit à
la cathédrale quelques-uns de ses ornements pontificaux. Mais il ne
donna aucun repas, réservant tout ce qu'il avoit d'argent pour les pau-
vres qu'il savoit être en grand nombre et dans un grand besoin (1).
A peine étoit-il en possession et avoit-il reçu les harangues des dif-
férents corps de la ville, qu'ayant appris qu'il n'y avoit point encore de
séminaire érigé pour l'instruction des jeunes ecclésiastiques, et que son
prédécesseur n'avoit point fait d'attention à cet article des bulles, il
prit les moyens d'en établir un sans aucun délai. Il destina d'abord
pour cela tout le bas du palais épiscopal où il lit faire de petites cham-
bres. Il donna un mandement le 5 mai, par lequel il faisoit savoir que
ceux qui se disposoient aux ordres pourroient se présenter des le 18
du même mois; et, après avoir réuni un nombre d'ecclésiastiques des
plus vertueux, il leur donna pour supérieur Louis Habert, docteur de
(1) J'ai vu une lettre en original du P.
Duneau, jésuite francois, résidant à Rome,
du 19 avril 167*2, à un chanoine d'Auxerro,
qui contient cet cloge de Nicolas Colbcrl :
« Je commencerai en me conjoùissant avec
» vous et avec toute la ville d'Auxerre, ri'a-
> voir un évéque si pieux et si homme de
>■ bien qu'est le votre. >
CENT-UNIÈME É\ÊQUB d'aUXERRE. 265
SorboDoe, natif de Blois. L'année d'après il acheta pour la même fin ^^^i, 1.76
un grand corps de logis situé dans la paroisse de Saint-Loup, qui avoit
appartenu à M. Pierre Camus, bailli d'Auxerre. Depuis ce temps-là
on Vy vit souvent aller pour y prendre ses repas, y donner des avis
salutaires et y pratiquer Thumililé. Persuadé que la réforme d'un dio-
cèse dépend des nouveaux prêtres qu'on y met en place , il prit dès
lors toutes, les précautions possibles pour n'imposer les mains qu'à de
bons sujets et bien éprouvés ; et, afin de n'y être pas trompé, il se pré-
para à chaque ordination par un jour de retraite au tombeau de saint
Germain ; il s'y rendoit le vendredi, h sept heures du matin, restoit ou
h genoux dans les grottes 1 ou debout dans le chœur , chantant Tofiice
avec les religieux, et vers les sept heures du soir, quelques domestiques
revenoient vers lui pour l'accompagner lorsqu'il retourneroit à Té-
vêché où on lui servoit à manger pour la première et uniqueJbis de ce
jour-là.
Il fjpt aisé de reconnoitre, à ce premier trait, que ce prélat étoit 00
homme de prières et de mortification. Mais ce qu'on lui vit faire à
Auxerre étoit ce qu'il avoit pratiqué à Luçon pendant dix ans. Dans
toute sa conduite, son régime de vie et son domestique, il n'innova
rien en passant d'une église à l'autre, que sur un seul article ; encore
le fit-il à la sollicitation de sa famille. Ce fut qu'au lieu que jusqu'alors il
n'avoil point eu de vaisselle d'argent, mais seulement d'étain, il commença
à en avoir d'argent à Auxerre , à cause que la ville est située sur une
route où passent souvent des personnes du premier rang. Il se levoit à
cinq heures et ne se retiroit qu'après neuf heures du soir. Loin de
mener une vie de fantaisie, de caprice, et sans règles, il récitoit l'oflice
divin, autant qu'il le pouvoit, aux heures de l'église. Il assistoit à l'of-
fice entier de la cathédrale les dimanches et fêtes chômées. Chaque
dimanche, après matines, il passoit derrière le grand autel; là on lui
ôtoit sou camail, il quittoit son rochet, et aussitôt il se mcttoit à genoux
et se confessoit à la vue de tout le monde ; ensuite il célébroit la messe.
Il s'assHJettissoit chez lui à une suite uniforme d'occupations, à moins
qu'une affaire extraordinaire ou quelque bien supérieur ne l'obligeât
de s'en écarter. Ainsi , s'il donnoit ses audiences à des heures réglées,
c'cloit sans s'y astreindre nécessairement. Quoique son abord fût un
'jtn * m:«. P^* ^'^ * ^ recef ait ■■ ekann at^ec vb wap^ égal , <H ■■ air lie
i|w ÎBsptfoît de b amSamct^ tosjovrs cepcadail ai«r ke^ iikiiaclÎQB»
qsi soBi da». C««x ifm sortoîesl de soa awiîeace m 3» B*êloîcBt ex-
ilés qvVs ireabbiit, éloieal cbatiaés des doacews de sa chaitfé* et
fJdioigDt pr lo«l qvlk lesoieat de prier à ■■ saîsL Ses Ai
êloîeAl d n prix wêdiocre et des plw sôifiles ; s» ■eafcWu B^av^
rmqvî frapiâl les je«x <m q«i fftl a&clé. Oi w serioîtàsa laUe^à
diser, ^wès b Mspe, qs^'aae esirée et le bMS aice qadqMS finûls , à
■oÎK i|«^ b\ eéi me perwue de d»lÎMtM ; dwaal Mit le ref»^ «■
biâoâ b leetve. Ei ■■ mal Umi éloil ckz hi coiMe le pcKiii le
qsatrieae ir— riW deCanka^e, et b n^pbfilê j éloi
lîliB gel3h>— e ehoiwr soa pbKêpficefal par j
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CENT-UNIÈME ÉVÊQIJB d'aUXERRE. 367
expéditions d'actes se faisoient gratuitement h l'évéclic. Il vouloit que 1679^ ,^5.
ses domestiques fussent exempts de tout soupçon d'avarice ; il n'en
auroit souflert aucun qui eût été convaincu d'avoir reçu quelque présent.
Il donnoit aussi gratis toutes les charges de ses terres , et seulement à la
considération du mérite ; jamais il ne se qualifia évêque à la tête des
actes publics, autrement que par la permission divine.
Son amour pour la prière ne se bornoit point à réciter Toffice divin
ou a y assisterai se levoit encore la nuit, donnant ordre deTéveiller s'il
ne Tétoit pas ; et il passoit un long espace de temps à prier ou au pied
de son crucifix, dans sa chambre, ou dans l'église cathédrale dont il
gardoit une clé. Ceux qui ont été témoins des prières qu'il y faisoit le
jour devant le saint-sacrement, ont assuré que la ferveur de son oraison
et la modestie qu'il y observoit, touchoient les cœurs des plus grands
libertins et les portoienta la dévotion. Il s'y tenoit deux heures entières,
la tête nue et sans remuer en aucune manière, tant l'âme éloit absorbée
en Dieu. Quoique la modestie fût naturellement peinte sur son visage,
elle éclaloit encore plus singulièrement pendant les oflices divins ; en
sorte qu'il portoit tous ceux qui le regardoient à la révérence envers les
saints mystères; et lorsqu'il célébroit lui même le sacrifice, son recueil-
lement et sa gravité ordinaires augmentoient encore davantage ; il étoit
tellement pénétré de la grandeur du mystère et de la majesté divine,
qu'il souiïroit plutôt les piqûres les plus violentes des insectes que de
lever la main pour les chasser. La prière publique ne lui étoit pas
moins chère que l'oraison mentale. Outre qu'il assistoit a tout roffice,
tant de nuit que de jour, les dimanches et fêtes , il ne se dispensoil
d'aucune des prières qui ont été instituées pour les nécessités publi-
ques, et il assistoit même aux trois processions des Rogations, qui sont
les plus longues de toute l'année , surtout le troisième jour, où le Cha-
pitre partant à six heures ne revient que vers le midi, et cela a jeun,
sans avoir pris aucune nourriture. Comme il tàchoit d'être dans le
chœur un modèle parfait h tout le clergé, et qu'il ne s'y occupoit que
de l'office qu'on célébroit actuellement, il ne permettoit pas que les
chanoines se comportassent d'une autre manière, ni qu'ils récitassent
l'oOice en particulier au lieu de chanter ; bien moins encore qu'ils pré-
vinssent Toflice public par des récitations particulières du même office,
368 51C0LAS COLBSET ,
ic? « icre. ''^ nnéinc qu'oD lût des lÎTres de piété pendant la messe. Il fit dire an
jour an Chapitre , par an chanoine , qne s^il se troufoit des [lartscaliers
qui Tiolassent ces r^;les fondées sur les saints canons, on ne troniât
ps maoTais qu'il enTojât son aomônier pour a? ertir ces personnes de
fermer leurs livres on leur bréviaire et de s'nnir an cbœnr. L^^îse de
la Tille, où sa dévotion Fattiroit davantage après l'^Use cathédrale,
fat celle de Saint-Germain, an tombeau duquel il alloit, an moins ane
fois par semaine, célébrer les saints mystères ; il ne revenoit jamais de
ce saint lien qu*il ne sentit son zèle enflammé de nouveau.
A|Mès Téublissement du séminaire, Nicolas Cotbert |^t toutes
les autres voies nécessaires pour (aire fleurir Tancienne discipline dans
le clergé de son diocèse (à\ Visites des églises, synodes , conférences,
rien ne fut oublié. Ne trouvant point , dans le commencement de son
épiscopal, dcÀ sujets du diocèse assez formés pour élre employés, il
attira dVxceilents prêtres d^ailleurs pour remplir les cures qui vaquoient.
Il recueillit , à Texemple de deux autres évéques , quelques sujets de
mérite qui , par respect et obéissance pour Tautorité épiscopale , quit-
tèrent la congr^tjon de la Doctrine chrétienne, afin de se donner tout
entier au service de ses peuples. Il publia , dans son synode de Tan
1674, quelques statuts; mais de crainte d^eflrayer les anciens curés
par ridée d'un nouveau joug, il fit remarquer à §on clei^é que, |«our
ce qui regardoit b conduite, ce n^étoit pas de nouvelles ordonnances
qu'il présentoit et qu^il ne Eaiisoit que suivre les anciennes. En eflet, il
n j prescrivoit rien sur ce qui concerne les mœurs des t^ésiastiques,
qui ne fût dans les canons ou dans les ordonnances des évéques précé-
dénis ; et comme dans le petit volume qu^il fil imprimer il ne pouvoit
leur prescrire tout ce qui parut nécessaire pour Kadministration du
sacrement de pénitence, il fit distribuer séfarémem les avis de saint
Charles aux confesseurs, enjoignant, pr un article spécial de ses
ordonnances, à tous les confesseurs du diocèse de les avoir, de les lire
et de les mettre en pratique. Le dpd ayant été oublié parmi les cas
(«) Le correcteur des MinioMS de Gicn ayant refuse de subir no rumen sor sa
capndlé, it inlerdîl à la oonuMmanté de faire des prêdicalions mq\ fidèles fnsqn à
obéJKMicff, - Areh. de I ToMe, -^ (.V. 4 £.;
CENT-UNIÈME ÉVÊQUE d\\UXERRE. 269
réservés imprimés à la tète du bréviaire qui paroissoil depuis l'an 1670, 1^79 }| i^^.
il l'y fit ajouter (1).
Les deux autres docteurs qu'il avoit amenés k Âuxerre, outre
M. Habert, étoient M. Barré et M. François Louis (2). 11 fit le premier
des deux officiai du diocèse ; il retint le second auprès de lui et parut
lui donner sa plus intime confiance. Tous les trois étoient parfaitement
au fait du gouvernement d'un diocèse ; ils venoient de celui de Luçoo
où ils avoient travaillé sous ses ordres. Mais quoiqu'il fût bien persuadé
de la science profonde de ces trois personnages, jamais on ne l'accusa
de se laisser gouverner. Il avoit tout le discernement nécessaire pour ne
pas prendre, dans les délibérations de son conseil, l'apparent pour le
vrai, l'incertain pour le certain. Quand il lui restoit quelques diffi-
cultés, il avoit recours h ceux qu'il connoissoit les plus éclairés à Paris.
Il avoit de grandes liaisons avec M. de Gondrin , son métropolitain.
Cependant, il ne crut pas que le diocèse d'Âuxenrefût en état d'ad-
mettre le règlement que ce prélat lui conseilloit d'y faire ; et il parolt,
par un des articles de ses ordonnances concernant les ecclésiastiques,
qu'il ne s'astreignit point à suivre la décision que M. de Sainte-Beuve
avoit faite sur cette matière (5). Il étoit inexorable pour les grâces qu'on
lui demandoit , quand les sujets n'avoient pas les dispositions. C'étoit
une maxime générale dont il ne se départit pas même à l'égard de ceux
qui appartenoient h ses principaux officiers. La crainte de succomber
ne l'empéchoit point d'entreprendre ce qui étoit nécessaire pour cor-
riger un pécheur ; les embarras ne lui inspiroienl point de timidité,
la dépense ne l'arrétoit pas. Il étoit éloigné de ces foiblesses, parce
qu'il avoit un vrai zèle pour le salut de ses diocésains. Il étoit, au reste,
bien persuadé que l'élévation des évéques au-dessus des prêtres , n'est
pas à la manière de la domination séculière qui commande despotique-
ment. Méditant souvent le commandement de J.-^C. sur l'humilité, il
ne souflrit jamais qu'on lui fit des harangues dans les sermons, et, il
ne laissa jamais un prêtre découvert en sa présence. Il parloit à tous
(1) Ordonnances Syn. pag. 2.
(2) Ce dernier étoit da diocèse de Roaen,
et avoit été reçu chanoine d'Auxerre le
1 février 1672.
(3) Tome 1, cas 199.
I
270 MCOLAS COLBCRT,
i«7^ ^ i<T« ceux qui éloienl revêtus du sacerdoce avec toule ratrabiliië |K>ssibie.
Quand il désiroil quelque chose d'eux, il s'expliquoil en termes si
humbles el eu même temps si pressants , qu'il falloit être hien rebelle
pour ne pas obéir à ses volontés. Il n'abusa point de son crétlit pour
réduire |ar des voies de fait les curés ou autres bénéficiers, coupables
ou incapables, à abandonna* leurs postes. Il ne s*arrétoit pas non plus
aux premières plaintes; il sus|>endoit son jugement jusqu'à ce qu'il eût
tout approfondi. Il considéroit de qui on lui parloit, qui étoit celui qui
se plaignoit, examinoit si ce n'étoit point par vengeance ou pr oppo-
sition à la discipline de TÉglise; et quand même il connoissoit avec
ceitiliide les défauts de quelques {^steurs« il nes'armoit point aussitôt
pour les châtier, mais il usoit de charitables remontrances pour les
porter a changer de vie; il les menaçoit ensuite, s'il en étoit besoin,
et il ne faisoit commencer leur procès que lorsqu'il y avoit absolument
nécessité , et c'étoit toujours de manière li n'être pas obligé de l'achever,
tant il avoit soin que ces ecclésiastiques déréglés se convainquissent
eux-mêmes du tort qu'ils avoient et qu'une résistance opiniâtre leur
seroit inutile. Souvent on en a vu qui venoient le trouver et lui avouoieol
iogéoument leurs fautes; il pardonnoit à ceux-là, leur disant : « Mon
frère, allez, travaillez, il ne iaut plus penser au passé , mais à mieux
vivre dans la suite et k faire des fruits dignes de pénitence. » A Fégard
de ceux qui vouloient entrer dans des cures par présentations de patron
ou {lar provisions de cour de Rome , il les examinoit lui-même, et son
secrétaire présent rédigeoit le procès-verbal de ses demandes et de leurs
réponses, sur lequel, après l'avis de son conseil et quelques délais
accordés, s*il étoit convenable , il les déterminoit d'ordinaire avec an-
tant de force que de douceur, à renoncer à des droits dont ils n'étoienl
pas d^nes. Sa fermeté, en ces occasions, lui attira des injures el
même des menaces ; mais sa religion le faisoit mettre au-dessus de
tout ce qui échappoit it ces ecclésiastiques qui lui paroissoieni mal
appelés ou peu propres au ministère. Quoiqu'il fiikt d'un tempérament
sec et chaud , bien loin de défendre sa réputation au préjudice de celle
des autres, il lexposoit souvent pour cacher leurs fautes. Il lui auroil
été facile dVmpêcher la censure qu'on faisoit quelquefois de ses aciions
et d'obvier aux murmures : il suflisoit pour ceb qu^on en dii les
CENT-UNIÈME ÉVÊQUB d'aUXERRE. 271
raisons; mais parce qu'il ne le pouvoit faire sans donner atleinle h la repu- i^^ ^ ^^j^
talion des coupables, il aimoit mieux garder un secrei impénélrable en
leur faveur, et souffrir avec humilité que le blâme quMls avoient mérité
retombât sur lui.
Mais si ce prélat souffroit avec une grande patieuce les injures qui
étoient faites à sa personne et même les médisances , il avoit un grand
zèle pour punir celles qui étoienl faites aux curés, surtout si c'étoit
dans les exercices de leur ministère. Il ne pouvoit souffrir qu'on parlât
mal en public de ceux qui étoient en place, mais il aimoit au contraire
h en entendre dire tout le bien possible, pourvu que ce ne fAt pas en
leur présence. Un jour qu'un des premiers de la cathédrale loua haute-
ment un curé présent qui avoit prêché devant lui, il garda un profond
silence, corrigeant par là celui qui louoit excessivement, et préser-
vant celui qui étoit loué du péché de vaine gloire. Les bons prêtres
étoient reçus chez lui avec honneur et il les admettoit à sa table. 11 les
aidoit même de son argent lorsqu'il étoit informé que le revenu de leur
cure ne suffisoit pas pour les faire subsister selon leur condition. Il y
en eut un d'auprès de Coulanges-sur-Yonne qu'il trouva mal vêtu lors-
qu'il vint le voir à Auxerre, le bon prélat se dépouilla h l'instant de ses
proprés habits et lui en fit présent. Il donna souvent à d'autres des
chemises de toile commune, telles qu'il les portoit.
Assistant de ses biens les pauvres ecclésiastiques, il n'eut pas moins
d'attention envers le reste du troupeau qui pouvoit être dans la misère;
il prit soin des pauvres honteux et de tous les autres misérables. Avant
qu'il fût venu à bout d'établir un hôpital, il ordonna qu'on distribuât
du pain trois ou quatre fois la semaine dans son palais épiscopal ; et
avant cette distribution, un de ses aumôniers faisoit aux pauvres as--
semblés un petit discours de piété. L'hôpital étant établi en consé-
quence d'une assemblée de ville tenue à Tévêché et avec la participation
de l'intendant, il fit confirmer cet établissement par des lettres-patentes
du mois de mars de l'an 1675 (1). Tous les mardis, quittant ses em-
plois les plus sérieux , il se trouvoit aux assemblées qui se tenoient
(l) Cet hôpilal fut d*abord dans la paroisse
de Saint'Père m Heu oti étoit rMtvIkrif
da Panier- verd k la porte du Pont, et poria
le nom de Saint-Nicolas.
I
I
-
167? à IC7C-
NICOLAS COLBERT,
chez lui avec hoil admioislrateurs, lanl ecclésiastiques que laïques,
dont il avoit fait clioii. Ce u'ctoit pas assez qu'il eût trouvé un corps
de logis pour placer les pauvres, il entretenoit cette maison de blé, de
vin, de bois ; et comme cet hôpital étoit uniquement pour les pauvres
de la ville et des faubourgs , s*il en faisoit entrer qui fussent de quel-
ques-unes des terres du temporel de Tévëché, il donnoit pour eux une
somme d'argent réglée. Bien souvent il alla visiter les pauvres de ce
lieu pour conuoitre Tétat de la maison. Il rie dédaigna pas de servir à
manger aux infirmes de FIlôtel-Dieu. On le vit, sans répugnance, ex-*
horter un agonisant, le visage penché contre celui du moribond.
Mais comme il remarqua qu*à cause de ces visites de THôtcl-Dieu on
avoit conçu une haute estime de sa charité, il s'abstint d'y aller davan**
tage; et même longtemps après , comme un de ses docteurs lui repré*
sentoit les besoins spirituels qui manquoient dans les prisons, il dit
qu'il s'abstenoit d'aller dans ces sortes de lieux* parce qu'il craignoit
d'acheter la réputation de saint à trop bon marché. Un hiver ayant été
Hkcheux, il fit acheter de la viande que l'on distribuoit trois fois la se-
maine a Auxerre, îi Régennes et dans ses autres terres. Les pauvres
honteux ne recevoient pas moins de secours de sa bonté paternelle, et
toujours avec prudence. Il y avoit dans Auxerre un certain nombre de
familles qu'il entretenoit de ses charités, les faisant par lui-même, sui-
vant la connoissance qu'il avoit de leurs besoins. Il alloit à pied dans
ces maisons , accompagné seulement d'un jeune clerc qui portoit la
bourse, et suivi d'un ou deux domestiques. Mais lorsqu'il approchoii
le coin de la rue, il ordonuoit îi ses gens de ne point passer outre, afin
qu'ils ne vissent pas chez qui il entroit. Il obsenoit, même étant dans
la rue, de s'arrêter auprès de quelques personnes auxquelles on ne
l^ouvoit pas soupçonner qu'il eût à faire l'aumône, et lorsqu'il s^aper-
cevoit qu'on ne le regardoit plus, il entroit promptement dans ces
maisons, et le jeune ecclésiastique lui remettoit sa bourse dont il faisoit
usage en |)eu de temps (i). Sachant un jour qu'un notable bourgeois
peu accommodé avoit des filles qui n'osoient sortir à cause qu^elIes
êtoient mal vêtues, il envoya un habit qui convenoit au |>ère, mais dont
r J ai su «f fait d'un des chanoîDes qui avnii porté quelquefois fetie hoarse.
CKNT-CNIÈHE ÉVÊQUK d'aUXERRE. 275
les poches contenoient une somme d'argent destinée pour l'usage le
plus pressant de celte famille. Il nourrit et entretint , durant son épis-
copat, la maison d'un gentilhomme de son diocèse qui avoit perdu
tout son bien, dans la vue d'empêcher que ses filles ne tombassent en
quelque malheur. Outre les aumônes qu'il faisoit par lui-même, il y
avoit quatre personnes de la ville chargées d'en faire aux pauvres hon-
teux de leur connoissance, savoir : deux chanoines, un avocat (1) et
la supérieure d'une communauté non cloitrée (2); et, non content de
faire d'abondantes aumônes dans son diocèse ^ il faisoit encore tenir,
par an, trois mille livres aux missionnaires qui étoient dans les pays
étrangers. II arriva de son temps que la ville de Coulanges-la-Vineuse
fut presque réduite en cendres, et l'église même se ressentit de l'in-
cendie (a). Cette triste nouvelle lui ayant été mandée à Paris, il y fit
une quête, revint ensuite promptement à son diocèse, alla visiter le
mal qu'il trouva bien plus grand qu'on ne lui avoit écrit, et ajiuta, à
ce qu'il avoit trouvé à Paris, tout ce qui lui restoit alors d'argent pour
soulager plus promptement les habitants de cette petite ville. La com-
munauté des Ursulines de Crevan étant dans un grand besoin , se res-
sentît aussi très-particulièrement de ses libéralités. Il leur faisoit tenir
tous les ans six cents livres, outre le blé, le sel, etc., qu'il leur four-
nissoit. On ne peut compter les sommes qu'il fit distribuer h la cam-
pagnedans chaque paroisse qu'il visitoit.
Après le soin des pauvres, l'instruction des gens de la campagne
fut une des choses qui exercèrent le plus sa vigilance. Ce fut pour
1672 b ÎC7«.
(1) Jacques Ricber. | (2) De la Providenre.
(a) L'incendie prit le malin du 17 mai 1676, et se propagea rapidement par Tim-
pétuositc du vent, si bien que le feu éclata en même temp;» en plus de dit endroits
à la fois. 11 j eut plus de 170 maisons brûlées, 22 pressoirs et une grande partie
de réglise. Les habitants perdirent tout leur mobilier et furent réduits à la misère.
Trente personnes furent atteintes par le feu et plus ou moins maltraitées. San*
Tassistance de M>"« de Villefranche, dame de Coutanges, qui fit défoncer et jeter
sur te feu trente feuillettes de vin, le reste du pays brûlait. On sait qu^il n*y avait pas
k cette époque de fontaines à Goulanges. — Procès-verbal de l'incendie, Arch.
de ITonne, pièces historiques. {N. d. E,)
Il 18
1
274 NICOLAS COLBERT,
1679 à 1676. pf^odre connoissaDcc de leurs besoins spirituels qu'il entreprit la visite
générale de son diocèse presque aussitôt qu'il fut arrivé ; mais il ne s'ac-
quitta pas de ce devoir avec rapidité ni superficiellement. Il ne visitoil
qu'une paroisse en un jour, et il yemployoil tout le temps nécessaire ;
si elle étoit peu éloignée de son château de Varzy ou de quelque autre
lieu de sa résidence, il s'y transportoit à pied. Le matin, après les céré-
monies ordinaires, il célébroit la messe où il y avoit souvent une com-
munion générale , puis se faisoit la prédication h laquelle il vonloit
toujours assister, afin d'y mieux rassembler le peuple et de l'y tenir
plus attentif. Il visitoit les fonts baptismaux, soit avant , soit après la
prédication ; il y parloit longtemps sur la sainteté du baptême et sur
la manière de Tadministrer. Âpres le diner on faisoit une instrueiioQ
pour préparer au sacrement de confirmation h laquelle il n'assistoit pas.
Elle duroit jusqu'à ce qu'il retournât h l'église, où il prenoit connois-
sance de l'état de la paroisse, et autant qu'il y avoit de sujets de plainte
sur les défauts que le curé remarquoit dans sa paroisse, c'étoit matière
à autant de discours que l'évêque prononçoit avec zèle. Il usoit d*nn
expédient très-utile pour augmenter la confiance des peuples dans leur
curé. Comme les habitants de certains lieux étoient sujets hmarmorer
contre leur pasteur sans en avoir occasion et uniquement par habitude ,
il engagea les curés qui avoieut de la sincérité et de l'amoar poor le
bien à prévenir ces plaintes. Ainsi, lorsque l'évêque se présentoit pour
entendre les paroissiens, les curés représentoient eux-mêmes publique-
ment que les paroissiens retenus par trop de considération » s' étoient
abstenus de parler de telle et telle chose qui les choquoit dans sa con-
duite; que cela étoit vrai, mais qu'ils étoient prêts de s'en corriger, si
l'évêque y trouvoit à redire. Cela suflisoit pour donner occasion au
prélat de confirmer le bien que les curés tâchoient d'établir ; et cela
rendoit les paroissiens plus soumis a leurs pasteurs , en leur faisatnt en-
tendre qu'ils seroient blâmables s*ils se conduisoient autrement. L*en-
quéte faite, on lisoit les ordonnances, et la visite finissoit par l'adminis-
tration du sacrement de confirmation ; après quoi il faisoit distribuer
aux pauvres les aumônes dont j'ai parlé. Et comme souvent les curés
n'ont pas soin de faire exécuter les ordonnances de visite, et que quel-
quefois môme ils ne les lisent pas , on les avertissoit par des lettres-
CCNT-UNIÈME ÉVÊQUE D^ALXEKRE. 275
circulaires, d'envoyer àrévéclié des copies de ces ordonnances, avec j^^^ i^^.
des apostilles aux articles exécutés ou non exécutés ; ce qui faisoit que
les curés s'eupressoient de faire exécuter ce qui ne l'étoit pas, afin
d'éviter le blâme de leur évéque. Si quelque curé étoii négligent sur
ce point, on envoyoit une copie où Ton ne voyoit presque rien d'exé-
cuté ; celui qui éloit chargé de la recevoir, la lui renvoyoit , lui mar-
quant qu'il n'avoit pas voulu la communiquer au prélat, afin de lui
épargner la confusion d'une telle négligence et de lui donner le temps
de la réparer. Ainsi changeoit peu à peu la face du diocèse par le moyen
des visites ; de sorte que l'évéque étoit assuré qu'en visitant une pa-
roisse pour la seconde fois, il y trouveroit tout en bon ordre. Quand il
prévoyoit qu'il y avoit de grandes plaintes à entendre contre un curé, il
ne permettoit pas qu'on les lui fit publiquement ; il se retiroit dans sa
sacristie ou dans un autre lieu commode, et y entendoit séparément les
témoins; mais comme il vouloit aussi que le curé connût son tort, il
ne logeoil point chez lui et n'y faisoit point porter ce qu'il avoit à
manger, mais chez les juges du lieu ou à l'auberge, telle qu'elle se
trouvoit. S'il lui arrivoit d'interrompre le cours de ses visites un jour
ou deux , ce n'étoit pas pour demeurer oisif; c'étoit seulement un chan-
gement d'occupation pour le service de sou troupeau. Il donnoit au-
dience à toutes les heures qu'on se présenloit sans faire attendre per-
sonne, surtout les curés qui venoient de loin ; et il recevoil les ecclé-
siastiques avec une cordialité et une tendresse paternelle. Tous, grands
et petits, avoientia consolation de parler k leur évéque quand ils vou-
loient, et s'en reïournoient charmés de sa charité. Il ne se plaignoit
que des visites inutiles et de pure civilité , que lui rendoient quelques
gentilshommes, parce qu'elles étoient quelquefois trop longues. S'il
recevoit des visites dans le lieu de sa station , il en rendoit aussi ; mais
c'étoit aux malades, h ceux qui étoient dans l'affliction, qu'il avoit soin
de consoler et de soulager; il réconcilioit ceux qui étoient en inimitié
et accommodoit les procès le plus qu'il pouvoit. Comme il étoit un jour
à Saint-Fargeau , on y amena trois criminels arrêtés dans les bois de
Varzy, qu'on conduisoit aux prisons d'une autre ville ; il en fut informé,
les alla visiter, et leur ayant dit quelques paroles de consolation , il
recommanda aux conducteurs d'avoir pour çux de l'humanité, disant :
•^ *
ilG NICOLAS COLBERT,
167^ à io7ti. ^ ^ ^^^^ "^^ frères, et ils peuvent^ élre associés à celui qui fut jus-
ticié eu croix, s'ils prennent en patience ce qui leur arrive. > Ayant
trouvé en quelque paroisse qu'on faisoit souvent des exorcismes sur des
prétendues possédées , il se réserva le droit de le permettre ; et quand
ces femmes lui demandoient la permission de se faire exorciser, il leur
répondoit qu'il falloit qu'elles allassent auparavant passer un mois ou
deux dans l'hôpital-général d'Âuxerre, au pain et à l'eau, et qu'il y
auroit peine afflictive pour elles au cas qu'elles fussent rebelles. Ces
dernières paroles, répétées trois ou quatre fois dans les différents lieux
où ces femmes se présentèrent a lui , chassèrent plus de démons en six
mois que n'avoient fait tous les exorcismes. peimis par son prédéces-
seur, pendant quarante ans.
Il étoil convenu , avec M. l'évéque d'Autun , d'entretenir ensemble
une compagnie de missionnaires tirés de Lyon, qu*on appelle les
prêtres de Saint- Joseph , pour travailler alternativement dans leurs dio-
cèses. Ces missionnaires commencèrent la première année dans le dio-
cèse d'Auxerre ; ils y firent tant de fruit qu'il prit la résolution de ne
les en pas laisser sortir, et il les retint entièrement pour son diocèse.
Il se transportoît dans les lieux où ils étoient , pour les autoriser de sa
présence, suppléer par ses exhortations , et il administroit le sacrement
de confirmation à ceux qu'ils avoient instruits et disposés ; et afin qu'on
fût plus fidèle à conserver le bien qu'ils y avoient opéré, un mission-
naire ou deux retournoient de temps en temps dans la paroisse où la
mission s'étoit faite, et y restoient encore pendant quelques mois.
La visite qu'il fit des communautés de filles, fut toujours avec une
discrétion et une patience qui ne peuvent s'exprimer, mais qui étoient
propres à faire respecter sa fermeté, particulièrement sur l'article de la
clôture et sur la désappropriation (a). Il y avoit deux de ces couvents
où la régularité ëtoit beaucoup affoiblie; comme il ne trouva point de
(a) 11 ne réussissait pas toujours à se faire obéir. En février 1674, les Clarissesde
Gten, averties de la visite épiscopale, s*y refusèrent formellement, aUéguant qu'elles
tie devaient obéissance qu^aux sup'J^rieurs de leur ordre. M. de Colbcrt les somma
à trois reprises de lui obéir, les menaçant, à la fin, de rexcommunication. Elles
mandèrent un notaire et lui firent dresser procès-verbal des motifs de leur refus,
en disant quelles s^exposeraient à être punies par leurs supérieurs, comme elles
CENT-UNIÈME ÉYÊQUE d'aUXERRE. 277
sujets capables de la rétablir, il en fit venir de Paris ; il ne regardoit ^^^ ï \m.
point h la dépense, quand elle étoit nécessaire pour procurer le salut
des âmes. Ce fut de Saint-Denis qu'il tira celles qu'il plaça dans la
maison des Ursulines de Crevan ; ce furent aussi celles qu*il visita le
plus souvent et qu*il soulagea d'aumônes plus abondantes. Il fit aussi
fermer de hautes murailles le monastère des Bénédictines de Cône, et
leur envoya de temps en temps de quoi les faire subsister. Il établit à
Auxerre une communauté de filles de la Providence, de même qu'il
a voit fait à Luçon (a). Dans le temps qu'on attendoit son arrivée k
Auxerre, trois ou quatre religieuses d'une abbaye de son diocèse,
trompées par le bruit qui s'étoit répandu que Nicolas Colbert étoit un
prélat rigide et sans miséricorde envers les coupables, crurent avoir
une occasion favorable d'exécuter le mauvais dessein qu'elles avoient
contre leurabbesse dont elles ne pouvoient supporter la régularité, et
l'accusèrent auprès de lui de crimes très-honteux. Le prélat tint l'accu-
sation secrète et prit des mesures si sages et si sûres pour éclaircir le
fait, que les accusatrices prévoyant que leur calomnie seroit décou*
verte, prévinrent le jugement et se jetèrent aux pieds de leur abbesse
pour lui demander pardon (6).
Il n'est pas étonnant qu'un prélat si attaché à faire Taumône, n'eût
fait aucune acquisition temporelle pour hon évéché. Mais si, de ce côté-
ravaient été déjà pour avoir permis à M. de Broc, qui visitait leur maison, d*y
faire une petite exhortation. Elles en appelèrent à Dieu, au pape et au roi, de la
vexation que l'évéque leur faisait éprouver. L*évéque fut obligé de céder, et il leur
accorda jusqu'à Pâques pour consulter leur^ supérieurs. Le grand Colbert se donna
la peine de dire son avis à son frère sur cette question, et lui signala l'embarras
dans lequel le texte du concile de Trente mettait les évéques en France. Le Père
gardien des Cordeliers de la ville, confesseur des Glarisses cl qui les appuyait dans
leur résistance, ayant été tancé par le prélat, lui répondit par une lettre fort hardie
qui dut bien le contrarier. On présume que Taffatrc n'a pas tourné au proflt de.
révêque. — Arch. de l'Yonne, -^,f - (iV. d. E.)
16«
(a) Les Bénédictines de La Charité étaient retâchées depuis quelque temps. En 1((74
il remit en vigueur les statuts du Val-de-Grâce qui étaient tombés en désuétude. —
Arch. de l'Yonne, -^ {N. d. E.)
(b) En 1673 il donna son approbation à l'établissement des Bénédictines de Saint-
Fargcau déjà fondées depuis 1651. {N. cf. E.)
278 NICOLAS COLBERT,
i«7î à 167C. ^^ il ne fut d*auciiDC utilité à ses successeurs , c'est a lui qu'ils ont
ToMigation de ce qu'ils peuvent rentrer aux Etals de Bourgogne.
Nicolas Colbert se servit, dès le commencement de son épiscopat , de
la protection du ministre, son frère, pour rétablir les évoques d'Auxerre
dans la possession de ce droit , qui avoit été interrompue depuis plus
de cent ans. Il obtint, parle même moyen, une décharge considérable
des impôts dont les Âuxerrois étoient accablés; mais il ne la sollicita
qu^après en avoir mûrement délibéré avec son conseil, et avoir reconnu
qu'il le pouvoit ^ Pexemple de saint Grégoire, pape, et de saint Ger-
main , le plus illustre de ses prédécesseurs ; cependant , pour être plus
sûr de ne rien faire contre les règles de la justice , il demanda aux Etats
un commissaire qui vint faire la visite. Il procura un semblable soula-
gement à la ville de Varzj, qui étoit aussi surchargée et accablée. Il
n'entreprit aucun procès, soit pour faire revivre des droits douteux,
soit pour réformer des abus. Il étoit ennemi delà procédure; et loin de
songer à former des contestations ou difficultés , il travailloit h accom-
moder les personnes qui en avoient les unes contre les autres.
Quand Louis XIV passa par Âuxerre pour aller commander le siège
de Besançon, le prélat reçut un accueil très-favorable de ce grand
prince , qui lui dit en Tabordant : « Monsieur d'Auxerre, il faut bien
vous venir voir, puisqu'on ne vous voit point à la cour. » Lui, de son
côté, n'épargna rien pour faire au roi une réception digne de sa per-
sonne, et il se conforma a tout le cérémonial requis en pareil cas. Il
n'oublia point cependant, en cette occasion, qu'il étoit évéque, et en
voici la preuve. Sortant de l'appartement du roi, après s'être trouvé à
son lever parmi ses courtisans, lorsqu'il passoit dans la cour de Tévê-
ché pour retourner à la maison du bourgeois où il s'étoit retiré, il se
trouva dans une circonstance très-dclicate et embarrassante. On ne
sait pas positivement s'il conféra alors avec son frère, le ministre, sur
ce qui étoit arrivé. On présume seulement que ce fut ce qui donna lien
à ce ministre de lui conseiller de s'absenter, lorsqu'on sut que le roi
devoit repasser par Auxerre et loger encore chez lui. Quand ce temps-
là fut venu , il prit la route d'Orléans, et alla visiter le prieuré qu'il
avoit a Nogent-le-Rotrou, au diocèse de Chartres. 11 reçut aussi, une
autre fois , M, le prince de Condé, qu'il traita d'une manière si splen-
»ifc.' ■ tC '^mmmjmm i k_ji
CENT-UNIÈME ÉVÊQUE DAUXERRE. 279
diile, qu'on s'aperçut qu'il étoil aussi maguîGque dans les occasions i^rs ii 1070.
extraordinaires, qu'il éloit économe et frugal dans sa dépense courante.
Il ne pouvoit cependant s'empêcher de témoigner h ses amis qu'il au-
roit mieux aimé voir employer, aux besoins des pauvres, les sommes
que lui coulèrent ces passages ; et il proféroit à cette occasion cette
sentence d'un psaume : De necessitatibus mets eripeme^ Domine.
Le prieuré de Nogent, dont je viens de parler, fut le seul bénéfice
qu'il garda avec son évéché ; mais il n'en retiroit rien, parce que tout
le revenu étoit employé à relever les bâtimenls ; et il faut savoir qu'il
ne s'étoit réservé aucun bien de patrimoine. Il s'étoit défait du prieuré
de La Charilé-sur-Loire en faveur de l'abbé Colbert, son neveu ; et il
y avait longtemps qu'il nepossédoit plus l'abbaye de Landais, en Berri,
ni celle de Saint-Sauveur de Vertus, en Champagne. Le voyage qu'il
fit au prieuré de Nogent , et celui de Paris, h l'assemblée du clergé à
laquelle il fut envoyé par la province de Sens, l'an 1675, et un autre
qu'il fit sur la fin du printemps de l'an 1676, sont les seules fois qu'il
s'absenta de son diocèse pendant qu'il en fut évéque. Mais comme il
avoit des vicaires-généraux très-vigilanls, le diocèse ne soufirit aucune-
ment de ces absences.
Entre les abus qu'il fit cesser durant son épiscopat, on doit compter
la déserlion générale où étoient les paroisses de la ville (a). Dès que le
prélat eut parlé, on commença à fréquenter les églises paroissiales,
non-seulement pendant la quinzaine de Pâques, mais encore pendant
le reste de l'année. Il défendit les processions nocturnes et celles qui
se faisoient dans des endroits éloignés de plus d'une lieue (1) de celui
d'où l'on partoit, aussi bien que Tusage de sonner dans les églises du-
rant toute la nuit, la veille de saint Jean et celle des Trépassés. On
(1) Ordon. Synod. 1674, pag. 28, 29.
(à) La cause de cet abandon des églises paroissiales venait des nombreuses con-
fréries établies dans les communautés religieuses et de ce que les moines disaient
des messes les dimanches et fêtes. Une note du temps, d'abus à corriger, qui existe
dans les papiers de Tévéché , nous révèle ce fait. L'auteur ajoute sur un autre
point : « Un deuxième abus est la dévotion aisée et de fantaisie. Cest un genre de
^0 NICOLAS COLBBRT,
1679 il i(j7c doit encore mettre dans le rang des choses qu*il abolit sagement , la
coutume par laquelle ou souffroit à Auxerre, le dimanche de Quasimodo,
une multitude innombrable de jeunes filles de douze à quinze anst
habillées en religieuses ou nonces , qui précédoient la procession so-
lennelle de ce jour, en chantant des cantiques de toute espèce. Etant
informé de Tabus qui s'étoit glissé dans cet usage, il le retrancha en-
tièrement. Il fit déclarer une guerre ouverte à Tusure qu'il avoit trouvée
trop communément tolérée dans son diocèse. Caihérinot de Bourges
fait mention, dans sou Traité du prêt gratuit imprimé en 1679 (1), des
brouilleries que cette matière causa dans le diocèse d'Auxerre. Cepen-
dant, on apprend, par une des décisions de M. de Sainte-Beuve (2),
qu'il y eut certain cas où les missionnaires qu'il avoit employés,
D*étoient pas outrés et qu'ils excusoient quelquefois les péniteiiis. Après
les articles de foi, il ne croyoit aucun sentiment plus certain que celui
qui enseigne que les chrétiens sont obligés de rapporter à Dieu toutes
leurs actions par quelque mouvement de son amour. Il en étoit de
même de la nécessité de Famour de Dieu dans le sacrement de péni-
tence. Il refusoit ses pouvoirs à tous ceux qui croyoient i'attrilion
purement servile et sans amour de Dieu , suffisante pour convertir le
pécheur et le réconcilier dans le sacrement. On a encore les informa-
tions qu'il fit faire contre un prédicateur qui osa débiter dans la cathé-
drale, en 1673, une doctrine relâchée sur cette matière. Sur la fin de
sa vie, il fit un mandement contre les serments exécrables que les char-
bonniers, bûcherons , fendeurs de bois et mineurs, faisoient entre eux
pour empêcher que leur profession ne devint commune (a). Il n'y eut
(1) Pag. 88. I (2) Tome 2, cas 219.
vie du sexe féminin qui, pour se nourrir dans son humeur, passe une grande partie
des matinées dans les églises pour éviter le travail quotidien... La cause vient que
la plupart des réguliers estans ennuiez dans leur chambre, ou d'humeur à deviser
avec le sexe, le nourrit dans cet esprit, sans faire qu'il le corrige d'une imperfeclion
en dix ans. » A", d. E.]
(a) Les ouvriers travaillant dans les forêts étaient autrefois unis entre eux par
des associations secrètes analogues au compagnonnage qui lie encore aujour-
d'hui les ouvriers d*art des villes, mais dont le caractère mystérieux devenait
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CENT-UNIÈBIE ÉVÊQUE D*AUXERRE. 281
qu'une seule chose à laquelle il ne put apporter de remède durant les x^% 1 1^76.
quatre années de son épiscopat , savoir : les causeries et immodesties
dans les églises. Il songea toujours aux moyens de les empêcher ; il en
conféra même avec les curés dans le dernier synode qu'il tint ; mais
quelque expédient qu'il eût pris , Dieu se contenta de sa bonne
volonté.
Il avoit résolu de changer les chanoines réguliers de deux commu-
nautés d'Âuxerre , quoiqu'il y en eût une des deux dont la réforme
étoit toute récente. Mais voyant les obstacles qui se présentèrent à
quelques pieuses tentatives, il laissa le reste à la providence divine.
Ayant appris que sur la fin de Tépiscopat de Pierre de Broc , le ma-
gistrat séculier s'étoit ingéré de connoitre du fait des comptes de
fabrique d'une des paroisses de la ville, il fit présenter, par le promo-
teur de son oiBcialité , une requête au conseil privé du roi , qui cassa
et annula le jugement du lieutenant-général d'Âuxerre du 2 septembre
i670, et ordonna que les comptes des fabriques de tout le diocèse
seroient examinés, clos et arrêtés par l'évêque ou par ses vicaires-géné-
redoutable par Visoleraent de leur genre de vie et la situation écartée des lieux où
ils travaillaient. Ils pouvaient, par le moyen de leur coalition, faire la loi aux pro-
priétaires et aux marchands, commettre impunément des délits dans les bois, et
assurer le secret le plus absolu à tous leurs méfaits. Ils avaient pour cimenter leur
association des serments retoutables qu'un des adeptes n'eût pas violés sans punition
exemplaire; des signaux et des cris de ralliement à l'émission desquels cbaqun
d'eux devait marcher. Encore aujourd'hui il reste quelque chose de ces associations
mystérieuses dans les grandes forôts, comme celles de Villert-Goterets et de Fon^
tainebleau. Les bûcherons y ont encore une manière de frapper sur une douve de
bois, de façon à se faire entendre de leurs frères la nuit à la distance d'une lieue,
et à ce bruit tous accourent comme au tocsin. La trace de ces sociétés parait être
perdue dans notre département \ cependant la tradition en existe encore dans
quelques communes de la Puysaie. Les associations secrètes que la politique a
formée depuis trente ans en Italie et France sous le nom de charbonnerie avaient
emprunté aux associations de bûcherons non-seulement leur nom, mais aussi leurs
serments mystérieux et terribles et leur redoutable organisation.
Il faut remarquer sur le texte du mandement de Nicolas Golbert qui s'adresse
aux mineurs comme aux autres ouvriers desforéls, qu*à cette époque (1673) sub-
sistait encore dans le diocèse l'industrie métallurgique qui a laissé tant de ferriers
dans nos bois et qui est aujourd'hui presque complètement éteinte dans cette
contrée. (.V. d. E.)
282 NICOLAS COLBERT ,
1679 k 1676. r^u^i archidiacres, officiai ou autres ecclésiasliques, avec défenses à
tous juges royaux d'eu connoilre, conformément aux déclarations de
Charles IX, Henri III, Henri lY et Louis XIII.
Quoiqu*il eût visilé une grande partie des reliques du diocèse, et par-
ticulièrement le trésor de l'église collégiale de Yarzy qui en est riche-
ment fournie, on ne voit point qu'il en ait fait aucune translation d'une
église en une autre, ni aucune distraction ; il laissoit les ossements des
saints dans Tétat où il les trouvoit, se contentant de les honorer, de
les invoquer, et d'imiter leurs vertus autant qu'il pouvoit, réservant son
revenu plutôt pour fournir des habits aux pauvres, que pour couvrir
de feuilles d'argent ou autre matière précieuse les ossements qu'il trou-
voit assez décemment renfermés. On sait que, bien loin d'avoir fait
sortir hors du diocèse des reliques des saints tutélaires, il y en a ap*
porté d'ailleurs, et qu'il employa dans les autels portatifs qu'il bénit en
grand nombre les reliques des martyrs de Reims, dont on lui avoit fait
présent lorsqu'il alla en celte ville sur la fin de l'an 1671. S'il ne fit
distribution d'aucunes reliques des saints du diocèse d'Auxerre, qui
soit venue à notre connoissance , il n'en supprima aussi aucune de celles
qu'on lui présenta enchâssées avec décence, dans les églises où subsis-
toient encore les tombeaux des saints ou quelque autre titre de cette
nature ; et il étoit trop instruit pour exiger des procès-verbaux ou autres
attestations juridiques à l'égard des siècles où la coutume n'étoit pas
encore d'en dresser.
Lorsqu'il arriva h Auxerre, il n'y avoit qu'un an que le diocèse étoit
pourvu d'un nouveau bréviaire qu'on avoit été près de trente ans à
composer. Il ordonna, par un des articles de ses statuts synodaux,
qu'on s'en servit et que l'on se conformât au chant et cérémonies de la
cathédrale, autant que faire se pourroit. Il avoit commencé à travailler
lui-même a l'édition du missel qu'il se proposoit de publier ; et pour
cet effet, il recherchoit îi son temps de loisir Torigine des différences
du missel d'Auxerre d'avec le romain, recherche nécessaire pour ne
pas prendre le change. Il médita aussi une collection de statuts synodaux
du diocèse, qui auroit paru sous le nom de SynodicoUy en commençant
par ceux de saint Aunaire et continuant jusqu'à son temps. Mais sa
mauvaise santé et ses occupations ne lui permirent pas d'avancer extré-
CENT-UNIÈME ÉVÊQUE n*AUXERRE. 285
mement ces sortes d'ouvrages. Un chanoine sous-diacre, qui étoit en
possession de prêcher et à qui le prélat avoit fait défense de continuer,
a moins qu'il ne prit le diaconat, crut devoir s'éclaircir vers M. de
Sainte-Beuve, touchant le droit qu'ont les diacres de prêcher au-dessus
des sous-diacres, et en même temps il lui demanda ce qu'il pensoit
d'une des cérémonies de la cathédrale d'Auxerre. Le docteur consulté,
évita de donner une solution satisfaisante sur la cérémonie ; mais il
approuva entièrement la démarche du prélat contre le sous-diacre (1).
Il y eut aussi, de son temps, quelques chanoines qui essayèrent d'in-
troduire des nouveautés dans les cérémonies de Toffice, et tentèrent
pour cela le suffrage du même docteur ; mais ce fut inutilement, on
étoit alors très-attaché à l'observation des usages louables ; et si l'on
ne pouvoit réformer les pratiques nouvelles introduites sous les trois
ou quatre évêques précédents , on ne vit rien proposer de sa part qui
fût de cette espèce. Son séminaire étant sur le pied des anciennes com-
munautés , aucun des sujets qui en sortoit , n'étoit porté h introduire le
changement dans les églises où il étoit bénéficier ; et l'on ne vit de son
temps, ni supprimer les offices attachés aux bénéfices, ni placer aucunes
parties de l'office canonial à des heures indues.
Voyant, en 1676, que depuis quatre ans qu'il étoit évêque, il
n avoit pas encore visité toutes les paroisses du diocèse d'Auxerre (a),
qui ne montent qu'au nombre de deux cent dix ou douze, il résolut,
après P&ques, d'avancer cette année-lh l'œuvre de Dieu et de le mettre
à sa perfection. Le carême qu'il avoit fait h l'ordinaire (2) l'avoit telle-
(1) Cas de conscience, t, 3, cas 141, Il août
1672.
(2) Quelques-uns ajoutent ici la circons-
tance de la violence qu'il fut obligé de se
faire au sujet d'un curé qui le quitta en le
menaçant.
(a) L'évéque visitant à cette époque (1675) l'abbaye Sain(-Laurcnl-lez-Cosnc, la
trouva dans un étal complet de décadence. Quatre religieux la composaient, ils
savaient à peine la règle de saint Augustin sous laquelle ils vivaient, et ne pratiquaient
plus la cominunauté. L'église était en mauvais état, la nef et les deux ailes étant
entièrement ruinées; ce que les moines attribuaient aux guerres du temps de
Charles VIL Labbé commandataire, M. de Phelipeaux, s'étant plaint au prélat de
leurs dérèglements, avait enfin obtenu qu'ils seraient obligés à l'obscrTancc de leur
règle; mais ce fut encore sans succès. — Arch. de TYonne, "-^' (*V. d. E.)
1678 h 167C
284 NICOLAS COLBERT,
ie7s i IC76. ™^^^ échauffé qu'il lui reveooit de temps en temps une hémorrbagie
par le nez. On eut beau à lui représenter que ses forces diminuoient
et que les chaleurs de Tété Fincommoderoient encore plus qu'il ne
Tétoit, s'il entreprenoit la pénible fonction qu'il s'étoit proposée, il ré-
pondit qu'il étoit évéque et qu'il fallait persévérer dans le travail jusqu'à
la fin ; de sorte que ses ecclésiastiques se virent obligés de seconder
son zèle, et dire comme on lit dans les actes : c Cum ei suadere non
possemus , quievimus dicentes : Domini voluntas fiât. » Il se ressentit
de ses incommodités plus fortement qu^à Tordinaire, dans un petit
voyage qu'il fit à Paris, immédiatement après Pâques. En étant de
retour, il ne se donna pas le loisir de reprendre ses forces, et il partit
aussitôt pour ses visites. Une des premières fut celle de la ville de
CouIanges-la-Yineuse , dont j*ai déjà parlé, où il distribua ce qui loi
étoit resté d'argent. II avoit eu un érésipèle à la tête dont il n'étoit
pas encore entièrement guéri ; mais les besoins de son diocèse l'appe-
lant du côté de La Charité~sur-Loire, il y fit renaître son mal par la
fatigue qu'il essuya dans le voyage. Après qu'il eut passé les plus grandes
chaleurs de l'été dans les fonctions apostoliques, la Providence divine
le conduisit à Yarzy pour s'y reposer et essayer d'y guérir son érési-
pèle. Il travailla d'abord h y établir un collège (a), et une communauté
de filles pour l'éducation de la jeunesse. Pendant ce temps-là, l'insomnie
augmenta, et il sentit que ses forces diminuoient de plus en plus. Un
de ses curés l'étant venu voir alors, l'évéque se jeta à ses pieds, lui
demanda d'être écouté en confession, alla ensuite lui chercher un siège,
un surplis, et il commença, dès-lors, à se préparer au sacrifice de sa
vie, quoique toutes ses actions précédentes eussent été autant de pré-
parations à ce terrible passage. Les dames de Yarzy souhaitèrent
ardemment de s'employer tout entières au soulagement de leur pas-
teur et seigneur ; mais il refusa cette assistance pour mourir en l'unique
(a) On ignore sur quoi Lebeuf base ce qu'il avance de rétablissement d*un collège
à Varzy par M. Golbert. On a tq, à la vie de M. de Donadieu, que cette institution
existait déjà. — Une lettre de M. Ghaseraj, de Van 1674, montre que l'cvéque pro-
jetait alors une semblable institution pour la ville de Gien.— Archives de TYonne,
-^ no 2. (.Y. d. E.)
CENT-UNIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 285
présence de Dieu. Une fièvre violente étant survenue , il fit sa dernière i^^ ^ leye.
confession h deux d^entre les docteurs de Sorbonne qn*il avoit avec lui,
qu'il pria de l'interroger parce qu'ils le connoissoient assez et qu*ils
savoient ses devoirs, et il usa de cette voie à cause que la douleur de
la tête Fempéchoit de s'appliquer autant qu'il auroit souhaité ; il les
pria de ne le point épargner et voulut qu'ils lui déclarassent toutes les
choses dans lesquelles il pouvoit avoir manqué pendant sa vie aux de-
voirs de son ministère. Après une telle revue de sa conscience ,
M. Louis, Tun des deux , qui étoit son confesseur ordinaire, lui donna
l'absolution , et aussitôt il ébaucha un testament par lequel il léguoit à
riiôpital-général d*Âuxerre les deux tiers de sa vaisselle d'argent, et
Tautre tiers à l'hôpital des malades, et tous ses autres meubles à ses
domestiques. Ensuite , voulant garder la bienséance sans affectation,
il déclara de vive voix qu'h l'égard de sa sépulture il ne vouloit rien de
trop simple ni rien de superflu ; mais il ne put achever ni ligner ce tes-
tament. Son frère, le ministre , envoya un médecin de Paris qui ne
put arriver assez tôt pour prévenir la suite de la maladie. Le médecin
du pays assurant que le moment étoit précieux pour lui donner un re-
mède , et que c'étoit l'abandonner que de différer, on ne put lui admi-
nistrer le saint viatique. Le danger paroissant ensuite sans ressources
et la guérison désespérée, ses domestiques entrèrent dans sa chambre,
et s'étant mis h genoux autour de son lit , ils le prièrent de leur donner
sla bénédiction , h quoi il répondit avec les sentiments les plus vifs d'hu-
milité : « Gomment oserai-je donner la bénédiction qu'on me demande,
moi qui suis sur le point de subir le terrible jugement de Dieu, où je
suis en danger de recevoir sa malédiction. » Un des^ chanoines , député
du Chapitre de la cathédrale, pour lui témoigner la part que la com-
pagnie pîenoit à sa maladie, s'étant servi, dans son compliment, de
termes tirés de l'histoire de la vie de saint Martin et attribués à ce
prélat agonisant, il releva modestement la comparaison dont usoit ce
député : <K Monsieur, répondit-il , a Dieu ne plaise que j'ose me com-
parer à un si grand évéque , il faut être saint Martin pour parler comme
lui. » On ne différa point de lui administrer le sacrement de l'extréme-
onction. pendant qu'il avoit encore une pleine connoissance. Il déclara,
au commencement de cette cérémonie, que s'il avoit su sa fin si proche.
286 NICOLAS COLBERT ,
167S ^ iff76. îl S6 seroit bien mieux disposé h la consommer dans l'amour de Dieu ;
et ii ne pouvoit s'empêcher d'avoir toujours des reproches k se faire,
disant qu'il est écrit : « Que celui qui est saint se sanctifie encore. »
Après la réception du sacrement des infirmes, les convulsions survin-
rent, ses forces diminuèrent plus visiblement; mais son visage ne fit
rien paroi tre de chagrin pendant ses douleurs, on ne vit aucun mou-
vement déréglé pendant ses convulsions , et il proféra encore quelques
paroles qui marquoient sa patience extrême et sa sagesse. Son agonie
dura pendant près de douze heures, sans qu'on aperçût aucune posture ni
aucun geste qui sentit l'impatience , et il mourut ainsi comme un autre
Moïse dans le baiser du Seigneur , le samedi, cinquième jour de sep-
tembre, à neuf heures du matin , a l'âge de 48 ans.
Ce qu'on lui trouva d'argent à sa mort, n'alloit qu'à cent ou deux
cents livres. Au lieu d'une somme plus considérable , on trouva dans
son cabinet plusieurs instruments de pénitence. Alors, les personnes
qu'il avoit obligées au secret, commencèrent à parler et à raconter ses
aumônes secrètes et les différents genres de mortification dont il usoit.
La ville d'Auxerre fut dans la consternation lorsqu'elle eut appris sa
mort, et elle ne trouva matière de consolation qu'en ce qu'elle apprit
que son corps seroit rapporté dans son enceinte comme avoit été celui
de saint Germain. Le clergé alla processionnellement au devant du
convoi jusqu'à la porte de la ville. Le charriot ayant été déchargé à
l'entrée de l'église, il fut porté par les chanoines tortriers, chapelains
et sacristains. II fut inhumé, le 11 du mois, aux pieds des deux tombes
qui sont au milieu du sanctuaire. On sent assez quelle perte ce fut pour
l'Eglise, et quelle affliction pour son diocèse qu'une mort arrivée
sitôt; et ce fut avec bien de la raison que le docteur de Paris, qui fit
son oraison funèbre le jour de son enterrement, appliqua au peuple
d'Auxerre ce que saint Grégoire , pape, avèit dit de la ville de Syra-
cuse : « Infelix plebs, quse tanlum paslorem diu habere non meruit. »
Il y eut encore une seconde oraison funèbre, prononcée le 22 octobre
suivant, dans la cathédrale, par le trésorier de la même église, et jamais
on ne vit tant d'affluence qu'il y en eut pour entendre le panégyrique
de ce saint prélat. On ne voit point de tombe sur sa sépulture ; mais,
en 1713 , M. Colbert, marquis de Torcy, son neveu , fit ériger le mau-
«
t
CENT-UNIÈME ÉVÉQUE D*AUXERRE. 287
solée qui est au côté droit du sanctuaire, et l'a orné de Tépitaplie 1^73 >, 1^76.
suivante :
a JETERNM MEMORISE
» Nicolai Colberli Âutissiodorensis episcopi pastoris optimi et vigi-
> lantissimi. Is a pueritia Ecclesise dicatus , posl humanarum litterarum
9 sludia scientiam sanctorum unice coluit. Inter delegatos cleri galli*
» cani, curam, industriam, peritiam suam omnibus probavit. Biblio-
» thecse Regia3 custos, eam primus in meb'orem formam reduxit. Ad
» episcopatuoi Lucionensem vocatus, aula} , urbi , faniilise, amicis
> renuntiavit; sola pastorali soUicitudine occupalus, forma gregis
» factus, clerum et plebem exemplo, et verbi divini dispensatione, ad
1» christianam vitam informavit; ad ecclesiam Autissiodorensem reluc-
» tans translatus , sui semper similis, non mundo, non suis, non sibi,
M sed Ecclesise et pauperibus vixit. Omnibus carus , in flore aetatis
» raptus, magnum sui desiderium gregi sibi commisse rarum sancti-
» moniae episcopalis exemplum posteris reliquit. Obiit anno salutis
r> MDCLXXYI. Y. mensis septembris anno aetatis XLIX.
» Joannes-Baptista Golbertus , marchio Torciaci et Sabolii , régi a
» sanctioribus consiliis, aclis etepistolis, ordinis Sancti-Spirilus can-
» larius, publici cursus magister, ex Carolo fratre nepos, patruo
> optimo et desideratissimo.
» P. C. »
FIN DE LA CINQUIEME PARTIE,
i
I
i
/
*'
MÉMOIRES
HISTORIQUES
SUR
LES ÉVËQUES D'AUXERRE.
SIXIÈME ET SEPTIÈME PARTIES.
Il 19
AVANT-PROPOS DES EDITEURS.
Le Gesta Pontificum , cette mine précieuse de l'Histoire
ecclésiastique du diocèse d'Auxerre^ s'est arrêté à la yie de
M. Nicolas Golbert. L'abbé Lebeuf , par des raisons particu-
lières, n'a pas écrit la vie du successeur de ce prélat. Les
chanoines qui continuaient , à la mort de chaque évéque j la
série chronologique des biographies d'après le Gesta^ avaient
aussi cessé d'y travailler. Ce n'est qu'en 1772 que M. Potel,
docte chanoine de la cathédrale^ écrivit la vie de messire André
Golbert. M. de Gaylus , dont l'épiscopat se passa presqu'en
entier à combattre pour le jansénisme , reçut, après sa mort,
l'honneur d'une histoire en deux volumes (1). L'épiscopat de
M. de Gondorcet fut raconté y en 1770, par un anonyme. Ges
travaux nous ont servi de base. L'esprit dont ils sont imbus
est évidemment partial ; cependant les faits qu'ils renferment
n'en sont pas moins intéressants. En y appliquant une critique
impartiale dég^agée de toute préoccupation des querelles qui ont
tant divisé nos pères, nous avons pu^ nous l'espérons, en extraire
tout ce qu'ils contenaient de vrai et d'intéressant (2).
(1) Par M. l'abbé Dettey.
(2) Les chanoines ne perdaient pas de vue le projet de continuer le Gâta,
on en parla notamment en 1702 et en 1772.
En septembre 1789, M. Frappier qui avait rédigé les biographies de
MM. A. Golbert et de Caylus, remit, h six commissaires du Chapitre, parmi
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MÉMOIRES
IIISTORiaiJES
SUR
LES ÉVÊQUES D'AUXERRE.
SIXIÈME PARTIE,
Qui contient les actions des quatre derniers Évèqnes d'Aoxerre,
qui siégèrent depuis l'an 1 676 jasqn'en 1 801 .
CHAPITRK ^^
ANDHÊ COLBERT, CII« ÉVÊQUE DAUXERRE.
Peu de jours après la mort de Nicolas Colbert, on apprit que cet ig76 à iroi.
illustre prélat avait pour successeur M. André Colbert.
André Colbert était fils de Charles Colbert, président au présidial
de Reims, et de Marguerite de Mévilliers. Il était né dans cette ville en
i647. Dès Tâge de sept ans, ses parents voyant ses goûts pieux , lui
firent embrasser la carrière ecclésiastique. En i665 il fut pourvu d'un
canonicat dans Téglise de Reims. Après avoir fait de brillantes études ii
Paris, il fut reçu docteur en Sorbonne, le 5 novembre iGOO.
294 ANDRÉ COLBERT,
1076 9 1704. L'évoque Nicolas Colbert , dont il était parent, Tappeia auprès dé
lui et lui conféra une prébende dans la collégiale d'Appoigny. Nomme
ensuite archidiacre d'Auxerre, il se distingua par ses prédications dans
les paroFsses de Moléme et de Treigny. Le clergé du diocèse l'ayant
élu pour son représentant h rassemblée provinciale de Sens, en i675,
il y fut nommé député k l'assemblée générale du clergé.
Le diocèse ayant perdu son premier pasteur, Tabbé de Pierre-
Basse, neveu de Tévèque P. de Broc, se mit sur les rangs pour lui
succéder. Mais la réputation de savoir que s^élait acquise l'abbé
Colbert, jointe à l'appui du grand ministre du même nom, lui valut le
siège d'Auxerre, et le roi l'y nomma le 15 septembre 1676. Les évé-
chés étaient alors une ressource dans la main des rois. Louis XIY,* en
donnant celui d'Auxerre h M. Colbert, le greva de plusieurs pensions
et particulièrement d'une de 1,500 livres pour le docte abbé Baluze,
qui était conservateur de la bibliothèque Colbertine (1).
A la mort de Nicolas Colbert, le Chapitre cathédral avait voulu
exercer son droit d'administration pendant la vacance, en vertu de
l'exemption de la régale.
Il avait pourvu aux services temporels et spirituels du diocèse, et,
à cet effet, il avait nommé trois économes. Les dispositions prises par
le Chapitre déplurent au nouvel évéque. Il fit signifier h la compagnie
que le roi l'avait gratifié de l'économat. Le Chapitre fit des remon-
trances. Cependant l'évéque avait ordonné k M® Panier, son homme
d'affaires, de ne pas faire d'actes qui fussent trop hostiles au Chapitre.
Mais la résistance de ce corps le mécontenta, et il obtint deux lettres
de cachet pour trancher les difficultés. M^ Panier fut adjoint aux éco-
nomes du Chapitre.
M. Colbert demeura jusqu'au mois de juillet 1678 à attendre ses
bulles pour prendre possession. Pendant ce temps, les vicaires-géné-
raux du Chapitre gouvernèrent le diocèse. Le 7 août 1677, ils lancè-
rent un monitoire k la requête des maire et échevins d'Auxerre, contre
(1) L'abbé touchait encore cette pension en 1703, suivant la mention qui est
faite « d*une traite de 833 liv. au profit de Tabbé Baluze» dans Finventaire après
décès de M. de Colbert. — Archives de TYonne. ' ^
86.
CENT DEUXIÈME ÉVÊQUE D^UXERRE. 295
certains malfaiteurs qui, depuis quelques années et notamment celle-lh, i^^ i^ i-o^.
commettaient des désordres dans la ville , couraient les rues pendant
la nuit , escaladaient les jardins, brisaient les arbres et volaient les
fruits et les fleurs.
Les bulles de M. André Colbert étant enûn arrivées de Rome , il fut
sacré dans la chapelle de la Sorbonne, où il demeurait depuis deux
ans, par M. de Harlay, archevêque de Paris, le 18 juillet 1678 (1).
Le 5 septembre suivant, on annonça à Auxerre Tarrivée du prélat.
Il n'avait pas négligé les cérémonies ordinaires de prise de possession.
Les quatre barons avaient été assignés pour faire foi et hommage, et
pour porter Tévèque depuis l'église Saint-Germain jusqu'à la cathédrale.
M. Louis de Boulainvilliers, chargé de la procuration de madame
la maréchale de la Mothe, née Marie-Louise de Prie, se présenta pour
prêter foi et hommage de la baronnie de Toucy. Il fut dispensé du
portage. Le comte d'Auxerre , le baron de Saint-Verain , et M. de
Colbert, baron de Seignelay, n'ayant comparu ni en personne ni par pro-
cureur, l'évêque fit toutes protestations pardevant notaires , pour la
conservation de ses droits.
Malgré la prière faite par M. Colbert aux habitants d'Auxerre , de
ne point le recevoir avec solennité, la milice bourgeoise, au nombre
de li2 à 1,500 hommes, s'était mise sous les armes et formait la haie
hors delà ville depuis la porte deSaint-Siméon. Les magistrats et le corps
de ville reçurent le prélat en dehors des barrières. On remarquait à
cette cérémonie le comte César-Philippe de Chastellux, qui , en sa
qualité de chanoine héréditaire de la cathédrale, avait revêtu son costume
historique (2).
A peine M. Colbert fut-il installé dans son siège épiscopal , qu'il
voulut continuer Toeuvre de son prédécesseur pour la réforme des
graves abus qui s'étaient introduits dans le diocèse. Le 15 décembre
1678, il adressa au clergé un mandement où il déclarait qu'il voulait
connaître la capacité de tous ceux qui seraient employés dans le
saint ministère. Il prescrivit, en conséquence, à tous les prêtres
(1) 11 no prêta serment de Gdéliié au métropolitain que le 25 septembre 1679.
(2) 5 et 6 sept. 1678.
29C ANDIIÉ COLBERT ,
1G7C à 1704. àe se présenter devant lui pour recetoir ses ordres , révoquant en
même temps toutes les permissions de prêcher et de confesser qu'ils
avaient pu obtenir jusque-là. Dans un synode ouvert le 18 avril 1679
il renouvela les ordonnances de son prédécesseur, et on y arrêia les
bases d'un règlement sur l'administration des sacrements.
Cette assemblée élut alors M. Chrétien, grand-vicaire de Tévêque,
en qualité de député à la chambre ecclésiastique (1), et M. Marpon,
prieur-curé de Saint-Âmatre, comme syndic du clei^é.
Peu de temps après, M. Colbert confirma l'élection, qu'avait faite le
Chapitre, de M. Toussaint Leclerc, chanoine-diacre, à la dignité de
chantre de Téglise cathédrale.
Les états de Bourgogne ayant été convoqués le 14 août 1G99,
M. Colbert y fut choisi pour l'élu do clergé.
C'est pendant la tenue de cette assemblée que l'évéquc d'Âutun fit
exécuter l'arrêt du Conseil du 8 avril i658, qui l'avait maintenu dans
le droit de présider les Etats et d'y précéder tous (es évéques qui y
avaient entrée, quoique plus anciens en sacre. Nicolas Colbert avait
bien protesté, mais cette fois Tévêque d'Autun fit observer que Tarrét
avait été exécuté pendant plus de vingt ans sans réclamations. M. André
Colbert garda le silence, et la prérogative des évêques d'Autun fut con-
sacrée jusqu'à la révolution.
M. Colbert, nommé élu du clergé dans l'assemblée générale tenue à
Saint-Germain-en-Laye, au mois de mai 1680, fut chargé de faire, à
Louis XIY, des représentations sur l'état des affaires religieuses. On
était alors vivement divisé sur les questions du jansénisme et des
I libertés gallicanes. Le prélat, après avoir assuré le roi du dévouemenl
du clergé, lui parla de la nécessité des conciles provinciaux pour l«i
réforme de la discipline et des mœurs. Il lui rappela encore qu'il était
le bras de l'Eglise, l'instrument temporel de la volonté divine.
P
^ (1) M. Chrétien , qui avait obtenu par son mérite toute la confiance de Tévéque
et était devenu archidiacre de Puisayc, encourut plus tard sa disgrâce et fut exilé
à Tréguier par lettre de cachet. M. Potel dit que cet exil fut pour M. Chrétien
une espèce de triomphe. D*un autre côté, le Chapitre protesta en refusant de sup-
pléer Tofiice d'archidiacre lorsque Pévéque officiait.
I
».
CENT DEUXIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 297
Louis XIV, alors lout puissaol, avait déclaré que le droit de régale ,^76^ 1704.
lui appartenait dans tous les évéchés du royaume. Un petit nombre
d^évêques réclamèrent. Ils furent soutenus vigoureusement par le pape
qui accusa le roi de violer les droits de TEglise. L'assemblée du clergé
de i682, à qui l'affaire avait été renvoyée, s'empressa de proclamer les
droits du roi et consentit à Textinction de la régale partout. L'évêque
d'Âuxerre céda alors, sans réclamer, une des plus belles prérogatives
de son église.
Les dispositions, si favorables aux intentions du roi , de l'assemblée
du clergé de i682, se révélèrent encore mieux par la fameuse décla-
ration des quatre articles devenus célèbres dans l'histoire. M. Colbert y
donna son adhésion entière.
Il ne parait pas avoir pris une part active aux affaires géné-
rales après l'assemblée de 1682. Il se concentra dans les soins de
l'administration de son diocèse et s y dévoua tout à fait. La suite de
rhistoire de son épiscopat est tout entière dans les mesures qu'il ne
cessa de prendre pour l'amélioration de ses ouailles et la discipline de
son clergé.
Esprit fin et délicat , M. Colbert avait une connaissance solide de
l'histoire, et l'auteur de sa vie (i) nous le dépeint comme un amateur
éclairé des lettres et des beaux-arts. Il goûtait surtout la mu-
sique (2). Il était somptueux et magnifique dans l'occasion, quoique
vivant ordinairement d'une fdçon fort réglée. Ses manières dis-
tinguées donnaient à sa réception le meilleur air. Son goût pour la
bâtisse le porta à embellir son palais épiscopal et son château de
Régennes (3).
Lorsque Louis XIV passa à Âuxerre, le dimanche 50 mai 1685,
(1) L'abbé Potel.
(2) Santeuil était souvent reçu dans son palais.
(3) On voit par Finventaire dressé à sa mort, en 1704 , que le palais épiscopal
était richement meublé et décoré de tapisseries. 11 y avait dans les écuries six che-
vaux de carosse et trois de selle -, et dans les remises deux caresses garnis. Le jardin
était orné, entr'autres arbustes, de 26 caisses de lauriers blancs et roses, et de
33 orangers. — Archives fie l'Yonne
lOtàlTM.
296 ATfDEB COLBIRT,
pour aller au camp de la Saùoe, M. Gilbert troava Toccasioa de mon-
trer sa maguificence^ et le roi lai en fit eompliment. Il reçut le prince
avee tonte sa suite ; parmi les dames qui accompagnaient la mue . on
▼oyait mesdames de Montespan et de Maintenon. Pendant la réception
laite an rai et à laquelle assistait le Chapitre, ce prince fut frappé dn
costume singnlkr que portait Ton des chanoines, M. de Chasteilux,
revêtu de son costume mi-parti militaire et eccléaastiqne. Les courti-
sans« comme le roi lui-même, étaiait fort intrigués de ce qulls voyaient.
Louis XIV s*étant fait expliquer la raison de cet usage, apprit que
c'était un souvenir de la concession d'un canonicat accordé par le
Chapitre a Qande de Beauvoir, en l-IS, Iorsqu*U eut raidu à Tégiise
d^Auxerre la ville de Cravan quH avait reprise pour le duc de Bour-
gogne et défiendue ensuite dans un long siège contre les troupes de
Charies Vil.
On rapporte que Louis XTV complimenta M. de Chastellux sur bi
prérogative dont il jonùsait^ et quli rendit aux courtisans qui pfan-
sautaient : c Ne badinez pas, Xessienrs, il n j a aucun de vous qui ne
B dût se fiure honnenr d'un pareil titre. »
Le lendemain le roi quitta Auxerre après avoir aiUaidn b messe dans
bi cathédrale.
Peu de mois après, bi mort vint frapper cruellement deux des
hôtes qu'avait reçus M. Colbert. La reine mourut le 30 juillet, après
trois jours de maladie. Le grand Colbert succomba également le
6 septmnbre , à l'âige de Mans. Des s»vices solenneb finrcnt célébrés
en IHionnenr des illustres morts. L'abbesse des Bernardines, sœur de
M. de Colbert , fut bi pranière à lui paver le tribut de sa douleur et de
son affection^ par un service auquel assistèrent toutes les autorités^ le
10 et 1 1 septembre.
?lons avons dit que ML André Colbert avait ccmsacré sa vie à
Tamélioration de ses diocésains. Ses nombcenses viates des paroisses
et des monastères nous apprennent Tétat dn diocèse à cette époque.
Parmi les usages supentitîenx qui subsîsiaœnt ocore, Tabbé Pdlel
parie de la vénératkm qn^on atiachait dans certains Ceux à cbs
vases de cuivre conservés dsus les «élises comme des reliquaires. On
Icou^k MB» y du» ({adi|ues paroisses , des pintes d^étain et des
CENT DEUXIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 299
verres qui servaient aux ablutions des communiants. Les mariages i^e^iiTOi.
étaient souvent Tobjet de cérémonies burlesques. Les invités allaient
oflrir des présents k la mariée qui les recevait dans un fauteuil , tenant
un ciei^e à la main ; et tout se terminait par un salut que chacun lui faisait
aux dépens de la pudeur.
Les funérailles étaient aussi Toccasion de pratiques étranges et con-
traires à Tesprit de TEglise. Les sorciers étaient encore l'objet de la
croyance populaire. En i696, deux hommes et trois femmes de Mon-
tigny, accusés de sorcellerie par leurs concitoyens, se soumirent k
Téprcuve de Teau pour se purger de cette imputation. Acte fut dressé
pardevant notaire , en présence de plus de deux cents personnes des
villages voisins. On plongea les accusés dans le Serain , au-dessus du
gué du Bas-des-Pierres, près de l'abbaye de Pontigny, les mains et
les pieds liés. Trois d'entre eux enfoncèrent dans l'eau et les deux
autres surnagèrent; ce qui fut gravement constaté par le notaire (i).
M. Colbert proscrivit, par zèle pieux, toutes les statues de saint
Martin et de saint Georges k cheval et les fit remplacer par un tableau
de la résurrection. Cette tendance anti-archéologique , qui se développa
de plus en plus pendant le xviii® siècle, causa la destruction de beau-
coup d'antiquités curieuses. L'intention morale qui dictait ces proscrip-
tions était bonne sans doute, mais ou doit en regretter les excès.
Les fêtes et les processions servaient de prétexte k des scènes qui rap-
pelaient le moyen-âge. Â Clamecy, les individus qui avaient fait le
voyage de Saint-Jacques-de-Compostelle assistaient k la procession de
la Fête-Dieu en habit de pèlerin avec le roquet et le bourdon.
 Varzy, on voyait encore dans cette même fêle les douze apôtres
que figuraient autant de personnages revêtus d'aubes et d'ornements
d'église (2).
M. Colbert supprima ces usages ridicules, et donna une meilleure
direction k la piété des populations.
Il savait que plus le peuple est éclairé, mieux il comprend
(1) Voy. aux Preuves de ces Mémoires, t. iv, n» 476.
(2) Cet usage qui remontait au moyen-Age était très-répandu dans les paroisses.
500 ANDRÉ GOLBERT ,
1676 k 1704. 1^ respect dû aux choses saintes. Dans le synode de 1685, il recom-
manda particulièrement à son clergé l'instruction de la jeunesse et
surtout celle des pauvres et des bergers, qu'il exhortait les curés d'aller
chercher dans les champs s'ils négligeaient de se rendre aux leçons.
Beaucoup de paroisses de la campagne manquaient de maîtres d'école ;
il mit tous ses soins à en augmenter le nombre (i). Les ordonnances pu-
bliées dans le synode de iG89 sont empreintes d*un grand esprit de
sagesse. L'évéque y prescrit des règles pour la célébration des mariages,
l'emploi des deniers des fabriques, l'observation du dimanche , l'ins-
truction religieuse à donner par les curés. Il leur recommande la
réserve dans les fêtes paroissiales. Il proscrit certains abus supersti-
tieux comme de porter le saint-sacrement aux incendies, de donner le
baptême aux enfants morts-nés. Dans l'assemblée du clergé de i095,^
furent arrêtées définitivement les ordonnances synodales préparées
dans les réunions antérieures. Elles ont été observées jusqu'à celles que
fit M. de Caylus en 1758.
Le roi voulait faire disparaître toute trace du calvinisme dans ses
états : poussé dans cette voie par madame de Maintenon, il ordonna,
par une déclaration du i5 décembre 1698, qu'il serait établi partout
des maîtres d'école catholiques. Le questionnaire adressé à ce sujet par
l'évêque aux curés nous révèle l'état peu avancé du diocèse sous ce
rapport. Sur 67 paroisses, 50 seulement sont pourvues d'institu-
teurs (2).
Le zèle de M. Colbert pour la conversion des réformés n'avait pas
attendu les ordres officiels du roi. Dès Tannée 1679, il consultait, à
Paris, un M. Peu sur ce projet. Celui-ci lui répond très-sagement :
c que c'est un ouvrage de Dieu des plus difficiles ; pour y réussir, il
> faut que la réputation soit bien établie pour la piété et l'érudition et
2> beaucoup de charité. » Il conseille à l'évêque d'aller résider lui-même
sur les lieux et d'y appeler des ouvriers sages et doctes ; et quoique
(1) On voit qu'à cette époque il était défcnda de tenir des écoles privées ou pu-
bliques sans la permission de Tévéque. — Arch. de TYonne ^ ^
(2) Les réponses des curés ne sont pas toules parvenues h révéché, puisque sur
210 paroisses 67 seulement figurent dans le dossier.
«^"^^«■^■^■■liBlBVV
CENT DEUXIÈME ÉVÊQLE D*AUXERRE. 501
l'opiniâtreté paraisse fort grande , il attirera la bénédiction de Dieu j^^^ ^ n,.!.
sur ses travaux (i).
Dès ce moment, la conversion des protestants des villes de la Loire
fut la préoccupation de M. Colbert. Au mois de septembre 1685, il
adressa , par ordre du roi , à ceux de La Charité , Favertisse-
ment pastoral fait par rassemblée générale du clergé. Les réformés
étaient réunis au Grot-Guillot où se tenait le consistoire (2). Le mi-
nistre Boju reçut poliment les envoyés parmi lesquels étaient le prieur
de Tabbaye Saint-Père d'Âuxerre, le curé de Sainte-Croix de La Cha-
rité^ l'intendant d'Orléans et deux notaires. La lecture de Tavertisse-
ment pastoral fut écoutée en silence, après que le ministre eut protesté
de son profond respect pour le roi, et de Tinjustice des persécutions
^ont les réformés étaient Tobjet. Le ministre répondit ensuite : « Ce
» que nous avons a dire maintenant, c'est que les conversions sont
> l'ouvrage du Saint-Esprit , c'est du ciel qu'il faut les attendre, nous
» espérons de la bonté du roi qu'il ne nous obligera jamais h des choses
» contre notre conscience. »
Après la révocation de l'édit de Nantes, en 1685, les mesures prises
pour la conversion des réformés , affectèrent une forme officielle et
administrative qui était loin de la charité évangélique (5). En vertu
de l'édit, on démolit les temples, l'exercice de la religion réformée fut
xléfendu ; les^prédicants refusant d'abjurer furent exilés. Les écoles
des réformés furent abolies et leurs enfants baptisés et élevés dans
l'église romaine. On voulut bien leur permettre encore la liberté de
<;onscience jusqu'à ce qu'il plût à Dieu de les éclairer.
Cependant, il ne parait pas que M* Colbert ait usé de la rigueur
qu'on reproche avec raison au gouvernement de Louis XIV. Les
(1) Arch. de T Yonne, pièces sur les réformés.
(2) Suivant un mémoire du xtii« siècle , le Crot-Guillot , situé k une lieue de
La Charité, sur la terre de Passy , n'aurait commencé à servir de prêche qu'après
redit de Nantes. Les réformés s'assemblèrent d^abord sous un arbre, puis dans une
grange, et ils ne firent bâtir leur temple qu*en 1653.
(3) En 1687, l'intendant d'Orléans payait les missionnaires aux frais du roi, mais
d'une manière si mesquine que quelques-uns n'avaient que 20 sous par jour. —
Arch. de l'Yonne ?-^- ,
L.6, n. I.
302 ANDRÉ COLBBRT,
ie76 à 1704. mesures qu'il avait prises dès avant Fédît royal l'en dispensèrent.
L'histoire de sa vie nous apprend qu'il travaillait lui-même ^ ramener
les réformés dans le sein de l'Ëglise. Des familles entières abjoraient. Les
villes de Cosne, Gien, La Charité, n'oublieront jamais qu'elles sont rede-
vables à H. Colbert delà réunion de la plupart de leurs ciloyens (i).
Piaurtni ses coopérateurs les plus dévoués, on cite MM. Harie^son grand-
vicaire, pénitencier de la cathédrale (2), et Tabbé Jegou de Kervilio, qui
fut depuis évéque de Quimper.
Cependant, on voit bien par la physionomie des rapports faits à
l'évéque sur Tétat des esprits, que les nowoeaux converîiSj comme on
appelait les réformés qui avaient abjuré, n'avaient pas tonjours renoncé
du fond du cœur à leur foi première. Quelques-uns disent même
c que leur abjuration n'a pas été volontaire et qu^ik la considèrent
> comme un grand péché. > Ceux de Gien ne pratiquaient pas leurs
avoirs religieux et conservaient des rapports avec les réformés émi-
grés.
M. Colbert ne négligeait pas» d'un autre côté, b surveillance des
monastères ou des églises collégiales de son diocèse. Ses nombreuses
Tisites étaient marquées par des mesures d'ordre et des améliorations
que réclamait l'état des maisons religieuses, régulières ou séculières.
Son Chapitre lui offrit tout particulièrement l'occasion de se pro-
noncer sur une question importante. Il existait, depois b fin du
xn* siècle (5), une institution de douxe prêtres qu'on appelait chanoines
torlners et dont les fonctions étaient de suppléer les grands dianobes,
soit au chœur, soit à la lecture des leçons. Les prérogatives de ces chan
Boines étai^at bien moindres que celles des autres. Ils devaient résider
continuellement et ne pouvaient s'absenter plus d'un mois sans h per^
mission du Chapitre. Us n'avaient aucime part aux délibérations capitu-
laires. Ils n'accompagnaient pas le Chapitre fors des visites aux princes
et antres personnes de considération. Leur part, dans les distributions,
était de moitié moindre que celle des grands chanoines , etc.
(I) L'abbé Potel, p. 44.
(1) M. Marte proBonca ^ daas la cathédrale , loriisoii fimèbre de b reine Marie-
Ibeite d'Autriche, le S octobre i€83 (M» bibl. d'Attxerre, a. 7S).
(^ Foy* Cft-dessus à la vie de G. d'EsCoateville, p. 7.
CBiNT DEUXIÈME ÉVOQUE d'aUXERRE. 505
Cependant, en 1649, un sieur Filey, semi-prébendé , éleva des pré- i^^ j^ 17(^4.
tentions contraires au sujet de Tobligation de la desserte , et demanda
la réunion des douze semi-prébendes en six , attendu la médiocrité des
revenus de son canonicat. D'incidents en incidents, le procès porté
au parlement dura jusqu'en i686; alors Tévéque nommé com-
missaire pour prononcer en dernier ressort, condamna le sieur Filey
sur tous les points, et maintint le Chapitre dans tous ses droits , con-
formément a la bulle du pape Clément VII, de Tan 1581 (1).
En 168:2, il régla les différends qui existaient depuis longtemps
entre les chanoines de Gien et le curé de Saint-Laurent de la même
ville, au sujet de la portion congrue et de Tautorité du Chapitre. Les
droits des chanoines furent maintenus , mais ils durent payer la portion
congrue au curé et à son vicaire, attendu que les biens de la cure
avaient été réunis au Chapitre en 1669. Les collégiales de Donzy (1685)
et de Clamecy (1684), reçurent également de nouveaux statuts dans un
article desquels il leur était recommandé de se conformer aux usages
de la calliédrale. Il en donna à celle de Gien en 1699.
La collégiale de Saint-Laurent de Cosne jouissait d'un revenu mo-
dique. Déjà, en 1640, M. de Broc avait réduit de 12 à 10 le nombre
des prébendes, et en 1655 lui avait donné des statuts nouveaux.
M. Colbert supprima encore deux prébendes le 1®^ juillet 1685. Il
visita alors le couvent des Bénédictines de Cosne. A la demande des
directeurs du canal de Briare , il érigea, la mOme année, en cure,
Féglise de Champoulet, en faisant distraction à cet effet d'une partie de
la paroisse de Batilly.
Les chanoines de Varzy tenaient une conduite peu édifiante et tracas-
saient le curé. M. Colbert fit une information contre eux en 1684. L'ab-
baye de Crisenon n'avait pas non plus, à la fin du xvii® siècle, une ré-
(1) Mém. sur Torigine des scmi- prébendes, par M. Viart. ^ ^ — On voit encore
quUl était défendu aux semi-prébendés de porter des aumusses grises , et que
les leurs devaient être d'un gris plus uni et plus marque de roux. Le côte blanc
hermine devait être barré et mêlé de pointes de petit gris de 0 à 10 pouces de long
sur 4 de large. Ils ne devaient point avoir de bandes de velours ou d'autres étoffes
sur le devant de leurs chapes d^hivcr, non plus qu'en aucun temps la soutane
violeltc.
504 ANDHK COLBERT ,
i«76 il i7(vi. pulation bien exemplaire. L*abbessc, M™^ de Romainval, avec une reli-
gieuse bénédictine de Nantes nommée M*"® d'Hairval, menaient la vie
la plus scandaleuse. Les plaintes adressées à Févéque par de vieilles
religieuses désolées de ces désordres, nous révèlent des mœurs bon-
leuses (1). Les Urbanistes d'Entrains, qui n'étaient plus que qualre,
furent supprimées en i688,et leur maison fut réunie a Tabbaye des Isles.
Les institutions de charité prenaient à cette époque un développe-
ment plus considérable que jamais. M. Colbert favorisa de tout son
pouvoir ces tendances dans son diocèse. Il institua ou approuva .'es
coofréries des dames de charité dont le but était le soulagement dos
pau\res et des malades, notamment à Qamecy J684) , La Cbarité et
DoDiy (1688), Gien (1693), La |)aroisse de Saint-Père dWuierrc quo
le coté dépeint comme la retraite ordinaire des indigents et comme
renfermant un grand nombre de puvres gens « souffrant de grandes
disettes, pour ne pas dire qu'ils meurent quasi de faim faute de se-
conrs » (2), ref nt anssi sous son épiscopat cette utile création.Ces con-
fréries, qui remplaçaient plus utilement d'autres associations de
métiers dites des bàUms (3) , étaient devenoes nécessaires dans ces
temps malheoreux où Texcès des tailles avait ruiné les (>opulations. La
religion prenait sous son patronage ces pieuses fondations qui s*accom-
plissaient par des dames Tenves ou des demoiselles âgées |K>ur lesquelles
c'était une espèce de profession religieuse.
Les hôtels-ilien et les maladeries avaient éprouvé, en l6Ti« une
grave atteinte dans leur existence. Le roi étant informé quun iK^s-
grand nombre de ces maisons étaient mal gérées et servaient | \\iivi ;i
fair^ vivre des parasites quli subvenir aux besoins des pau\res et des
malades, les mmit à TOrdre de Notre-Dame du Mont-Qrmel. qui
devait être chargé de le«ir administration. De nombreuses reoian..uion>
;i: Arcfc. lie rYo«K ^ ^
:2 Awk. «le rTwK /-^
3l La sUtae <l« sùéI foln» était da»» k Bovea ^. poftee aa bv.^ct d un bùtcQ
«tte BicW offBcr. Cesl w qw il «ktaaer à ces 2s$ocùtior> î^ >urrL:^ j:^
OoL m^j^i^ciMt tes bAlJMj ami cacfcèrts > k jo^r de li >è<e du >>xir: . ce ^i.
CENT DEUXIÈME ÉVÊQUB d'aUXERRE. 505
s'élevèrenl contre cette mesure qui nuisait aux hôpitaux et aux pauvres ; ^^^ ^ J704
enfin, en 1695, un édit modifia cet état de choses.
Dans chaque intendance, des fermiers furent provisoirement chargés
de la gestion des biens. En ce qui concerne le diocèse d'Auxerre, la
réorganisation du service de charité eut lieu peu après (1). Une décla-
ration du roi , du 12 décembre 1698, avait prescrit la formation dans
chaque hôtel*dieu, d'un bureau de direction qui devait être composé
des premières autorités judiciaires et municipales; le curé en faisait
partie de droit. Les habitants élisaient aussi un certain nombre de
membres tous les trois ans. L'évoque étant k La Charité, le 17 juillet
1699, fit procéder, par rassemblée générale des habitants, au choix
des membres éligibles du bureau de Thôtel-dieu. Le 25 novembre
suivant, il opéra de même à Varzy. L'hôtel-dieu de cette ville avait
été rétabli par édit du 10 septembre 1695, avec union des maladeries
de Yarzy et d*Entrains. L'hôpital de Clamecy fut alors restauré, dans le
faubourg de Bethléem, par les habitants et le Chapitre delà ville. Cette
maison avait plus de six cents ans d'existence. On y réunit, en 1695
les maladeries de Clamecy, de Druyes et de Corvol. L'hôtei-dieu de
La Charité fut aussi , en 1690, transféré dans les nouveaux bâtiments
construits aux frais des habitants. L'ancien était au-dessus du grenier
il sel et ne se composait que d'une seule salle où les malades étaient
plusieurs dans chaque lit.
L'hôpital de Coulanges-les-Vineuses fut rétabli par arrêt du conseil
privé du 4 mai 1697. On y réunit les biens des maladeries de Mailly-le*
Château, Mailly-la-Ville, Cravan et Saint-Cyr. L'évêque avait fait un
travail pour proposer la réunion des maladeries et léproseries devenues
inutiles aux hôpitaux les plus voisins. Cette mesure fut exécutée en grande
partie. Les hôtels-dieu étaient obligés de recevoir les malades des
lieux ou il y avait des maladeries, à proportion des revenus de ces éta-
blissements (2). En 1690, M. Colbert autorisa la dédicace de la cha-
(1) Cette mesure ne tarda pas à être très-nécessaire, car la misère devint si
grande dans la campagne au printemps de 1699, que les paysans étaient réduits à
vivre de racines et de son. ~ Reg. du Chapitre d*Auxerre, mélanges divers,
11,84.
(2) Voy, Preuves, t. iv, no 475.
H 20
]«>:6 il 1704.
500 ANDRÉ COLBERT,
pelle (lu nouvel botel-dieu de La Charité. Cette maison venait d'être
reconstruite par les habitants.
L'organisation complète deThôpitai général d'Auxerre fut nne œuvre
qui occupa beaucoup la sollicitude de M. Colbert. Fondé par son pré-
décesseur avec le concours de la ville qui l'avait prié d'en prendre l'ad-
ministration , cet établissement, ouvert en 1673, n'était pas dans un
lien convenable (1). L'évéque, qui assistait très-souvent aux réunions
du bureau d'administration tenues dans son palais , fit tous ses efforts
pour obtenir sa translation sur un emplacement plus spacieux. Des ter-
rains voisins de la chapelle Notre-Oame-de-Lorette, située hors de la
porte Saint-Siméon, furent achetés. Les bâtiments furent construits
en deux années et coûtèrent 16,200 liv. Le 25 juin 4686, M. Colbert
fit la bénédiction solennelle du nouvel hôpital dans lequel les pauvres
avaient été transférés la veille. Le prélat, qui avait fait bâtir à ses frais
le portail de la maison, désirait y placer les armes du roi et celles de
la ville. Sur le bruit de ce projet, le maire d'Auxerre , M. Billard, pro-
voqua une délibération du corps municipal, pour faire mettre aussi une
inscription portant ces mots : Hôpital général fondé par la ville
d'Auxerre. L'évèque et le bureau d'administration s'y opposèrent. L'af-
faire prit des proportions considérables ; le duc d'Enghien , gouverneur
de Bourgogne, à qui on avait demandé la permission de placer aussi ses
armes sur le portail, et qui écoutait volontiers M. Billard, penchait pour
son projet. Enfin, après de longs pourparlers, il fut décidé qu'on pla-
cerait au milieu du portail les armes du roi, celles de la ville au-dessous ,
et sur une plaque de marbre qui existe encore, les mots hôpital général.
Les armes du duc furent mises sur les deux côtés du portail, et, un peu
au-dessous, celles des deux évoques dn nom de Colbert (2). M. André
Colbert, quand il mourut, donna encore une nouvelle marque de son
intérêt pour cet établissement, en lui léguant une somme de 8,000 liv.
(1) Il occupait une maison dans la rue du Pont. Les pauvres , entassés dans des
chambres mal aérées, avaient contracté le scorbut en 1679. On avait voulu envoyer
les malades dans une maison du faubourg Saint-Julien. Alors les habitants du
quartier s'ameutèrent et jetèrent violemment les meubles dehors. Il fallut Tinterven-
tion du bailliage pour rétablir Tordre.
(2) Arch. de l'Yonne, Reg. de Thôpital général.
CENT DEUXIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 507
Le séminaire diocésain fondé par M. Nicolas Golbert et qui fui dirigé i676à i7ci
jusqu'en 1682 par M. HîLni , docteur en Sorbonne, reçut une
nouvelle institution. Les Pères de la Mission en furent chargés et
Tévéque leur donna la maison où était le séminaire, dans la paroisse de
Saint-Loup. Le clergé du diocèse contribuait alors annuellement pour
5,000 liv. aux dépenses du séminaire.
Les registres des ordonnances épiscopales nous apprennent encore
plusieurs faits d'administration qu'il ne faut pas passer sous silence.
Pendant la visite de Tannée 1695, M. Golbert fit h Gien la dédicace de
la nouvelle église paroissiale de Saint-Louis, construite par les habitants»
partie avec les matériaux du temple des protestants démoli après la révo-
cation de Tédit de Nantes, et partie avec l'argent provenant des revenus
du consistoire de Gien. Il réserva, cependant, à Tancienne église de
Saint-Pierre, son titre de primauté , et voulut que le curé de Saint-
Louis y célébrât a certains jours Toffice divin. Il fit aussi, dans cette
même année, le jour de l'Ascension, la dédicace de l'église de Saint-
Pierre-en-Yailée d'Auxerre. Ge monument , bâti aux frais des habi-
tants de la paroisse , quoique achevé du temps du cardinal Richelieu ,
n'avait pas encore reçu la consécration.
Les reliques de saint Prix, conservées dans relise de Saints-en-
Puisaye, furent Tobjet de plusieurs ordonnances. Après une translation
faite le 9 juin 1686, l'évéque approuva la distraction de quelques
portions d'ossements en faveur de Frères-Mineurs de Paris, (juin 1687)
et du curé de Fontainebleau, (50 janvier 1688).
Le i^^ août 1688, l'évéque se transporta à Pontigny pour bénir le
nouvel abbé , frère Oronce Fine de Brianville. Le 25 septembre de
Tannée suivante, il consacra sa sœur Hélène Golbert en qualité d'ab-
besse de Tabbaye des Isles. Les Providenciennes d'Auxerre, d'abord
appelées Filles de l'Union, dont Torigine remontait a 1655 (1), ob-
tinrent sous M. Golbert des lettres-patentes. Elles étaient vouées à
(1) Deux dames pieuses , Anne Petit et Marie Gautier, se vouèrent alors à re-
cueillir les pauvres Glles d'Auxerre, pour les sauver de Toisiveté et les former à la
piété. Elles agrandirent peu à peu leur maison et reçurent des demoiselles pauvres
et orphelines, puis elles formèrent une école pour les enfants de la ville. Leur but
308 a:idié colbert,
>T«)iTM l^insiraciion dos jeones filles. M. Colbat leur doDoa un rè^ement
fort étendo.
Le Qapitre catbédral, ce corps antique et poissant, gardien né des
traditions de Téglise dWnxerre, aTait eu aTec M. Colbert, au com-
mencement de son épiscopat, des difficultés pour T exercice de ses
droits de légale. En 1687 , Tomission, dans un nundement, de la for-
mule après fR aroîir cùmfiré attt nos rtmérabUs confrères^ avait failli
amener une grave perturbation dans les bons rapports qui régnaient
entre le prélat et le Chapitre. Les représentations du Chapitre écbî-
rèient réréque sur Tirrégubrité de sa prétention et Tomission fat
nêpaièe. L*annëe suivante, autre obstacle à propos d'une cérémonie
dans la cathédrale « où Tévèque fut encore obligé de céder aux vieux
usages. On peut supposer toutefois, sans aller trop loin, que M. Colbert
avait gardé souvenir de ces discussions, lorsqu'en 1695 il obtint, do
conseil d'Etat « un arrêt qui interdisait au Chapitre d*ordonner aucune
cérémonie religieuse sans Tassentiment de Tévéque ou de ses grands-
vkaàres. De pl«s , le Chapitre fut condamné à lui bire des excuses ,
par une dépulation de doue de ses membres, de ce qu*il avait prescrit
piosîeuis processions sans Peu informer.
Celte aibire jett de la froideur entre Tévéque et le Chapitre. L*aii-
leur de sa vve« chanoine de b cathédrale, blâme, bien entenda, U
conduite de M. Colbert. Il accuse s<m entourage de Tavoir pousse h
porter atteinte aux «âges et à b juridiction du Cha[*itre . et met sur le
compte de sa vivacité b persistance quM montra dans ces afftires. Ses
(mîets de composer un nouveau brévaire et un mLssseK furent « [or
suite de ses rebtions avec le Chapitre, indéfiniment ajournes. Ce corp&
rvnferuMÎt alors des hommes êminents. car les Pères Conleliers,
tenant leur Chapitre p»éral à Auxerre. en 1690 « lui demandèrent U
l^ffmîssion de lui dédier une thèse qui serait soutenue par un de leurs
dodeufs. ce qu*il accepta. Et . pour reconnaître cette i)élef>HKe « le
Chapitre env^^va cent livres aux frères mendiants i\ Le
M Hu^iUij. rcuwigmnut fr.ftKaàt L» M»^l» mmniàmM dMMnrrOf ciuMt
liu fct<j*> à V«ffmM%M . « Chmwy, à Cnintu.
,t J^rrà éf f T^nue. Itrc 4f ii^ws rK«fd» <iu CWfiferr. tiv t<^
CENT DEUXIÈME ÉVÊQUE d'aLXERRE. 509
fit enregistrer à la chancellerie royale (1697) ses armoiries qui sont im^nioi.
d'azur à trois cailloux d'argent (i). Elles existaient déjà sous cette
forme au seizième siècle, et sont figurées sur la tour sud de la cathé-
drale.
«
M. de Golbcrt visita pour la dernière fois son diocèse pendant Tannée
1699. Il donna alors de nouveaux statuts aux religieux du monastère
de Saint-Laurent-lez-Cosne, qui étaient réduits à quatre. La discipline y
était tout à fait perdue et les mœurs des moines étaient très-déréglées (2).
L'évéque, étant à Paris Tannée suivante, tomba dangereusement ma-
lade et ne se rétablit jamais entièrement. Il languit encore pendant
plusieurs années et perdit peu à peu ses forces. Les derniers actes
qu'il signa furent une approbation de reliques envoyées de Rome au
curé de Seignelay, (5 avril 1704), et la provision d'un canonicat de
Clamecy, le 7 juillet suivant. Il mourut le 19 du même mois.
Son testament, daté du 7 mai 1704, respire la piété la plus vive
et la plus noble. Il déclare mourir dans des sentiments tout à fait con-
formes à ceux de TÉglise catholique, apostolique et romaine. H
demande pardon des sujets de [)lainte qu'il a pu donner et pardonne
lui-même à tous ceux dont il a pu recevoir quelque déplaisir ou
quelques injures.
Ses dispositions testamentaires sont marquées air coin de la libéra-
lité. Après avoir rendu h sa famille les 50 mille livres qu'il en avait
reçues, il répartit le reste de ses biens entre les pauvres et les établisse*-
ments religieux et charitables. Son Chapitre reçut, outre divers orne-
ments , la somme de 12,000 liv.; l'hôtel-dieu d'Auxerre, 4,000 liv. ;
l'hôpital-général , 8,000 liv. ; les Jésuites, 5,000 liv.; les charités des
paroisses, 1 ,200 liv. Les pauvres des seigneuries épiscopales ne furent
pas non plus oubliés. Après avoir employé en legs la plus grande
partie de sa fortune , il disposa du reste en faveur de son séminaire ;
il donna ainsi plus de 70,000 livres.
Le Chapitre cathédral, malgré les déclarations du roi, se mit en
(1) Rcg de divers Kecueiis; 1. ii.
(2) Arch. de T Yonne i* G.
510 M. DE GAYLUS,
1670 i 1704. possession d'exercer son antique droit de régale à la mort de M. Col-
bcrt. Il nomma trois chanoines-économes pour régir le temporel de
l'évéché et trois autres en qualité de grands-vicaires. Il ne parait pas
que ces mesures aient souffert de difficulté et que les officiers du bail-
liage s'y soient opposés.
m^^^*^^^^^^^m^i^^^^^^^*^%^^^*^^^^^*^^^^t0^^m0^^^0m^^0%^t^m^^^^0m^^^^0^0^^^0^^^^*^^f^^^^*^^0^^^^*^*'^*^m^»^ ^^m»^^^^^^»*m'^^^ ^^0^f^0^0^^^0^0^^^0^0^^0^^^^m^^0^^^^^^^0'^f^
mfii^
CHAPITRE II.
M. DE CAYLLS, CIII« ÉVÊQUE D'AlXERRE.
17(^1 h 1754. M. de Caylus a joué pendant si longtemps un rôle considérable dans
l'église de France et dans les querelles jansénistes, que sa vie est am-
plement connue. Ses ouvrages, ses mandements forment une suite de
dix volumes. L'abbé Dettey, chanoine d'Âuxerre, a écrit sa vie ou
plutôt son panégyrique en 2 vol. in*12 (i). Les matériaux ne man-
quent donc pas pour composer la suite des Mémoires sur le diocèse
pendant la première moitié du xviii® siècle (2) ; mais la difficulté gît
dans le choix ï faire et dans une saine appréciation. Le parli janscuisle
a peint M. de Caylus comme un grand prélat et comme un saint ; tous
ses actes sont marqués au coin de la plus pure doctrine ; c'était en un
mot le modèle des évéques.
(1) Cet ouvrage a été imprimé sans nom d'auteur k Amsterdam en 1765. Il fut
composé sur les papiers de l'évéque qu'on avait été obligé de cacher. — Ces pa-
piers n'existent plus. M. Pierre-Jacques Dettey était prêtre du diocèse d*Autun.
En 1734, il obtint le prieuré simple de Baulches et devint commensal de revécue
l'année suivante. Il fut ensuite prieur de Bois-d'Arcy.
(2) Il y a cependant une lacune singulière dans les documents historiques ; on
remarque, aui archives de la préfecture de FYonne, que les registres des délibéra-
tions du Chapitre catbédral manquent complètement pendant tout répiscopal de
M. de Caylus.
CENT TROISIÈME ÉVÊQUE DAUXERRE. 31 I
Ses adversaires, et il d'cd manqua pas , contredisent un peu ces 1704 à 1754.
éloges. M. Languet, archevêque de Sens , son supérieur, a longtemps
combattu ses opinions ; son successeur n'épargna guère sa mémoire ni
sa personne (1) ; le Saint-Siège Ta condamné plus d'une fois. Quoique
noire but soit moins d'entrer dans de longs détails sur les querelles
religieuses du dernier siècle que de tracer l'histoire diocésaine, nous
ne pouvons cependant nous dispenser de parler de quelques-uns des
faits généraux du temps , auxquels M. de Caylus prit une si grande
part. Nous tâcherons , au milieu de ce dédale , d'être exacts et
véridiques. Les tendances jansénistes ont été réprouvées par FËglise
catholique ; vouloir les réhabiliter dans un ouvrage de notre temps
serait folie. Les faits parleront et le lecteur en déduira les conséquences
naturelles.
Daniel-Charles-Gabriel de Thubières de Cajius était fils de messire
de Thubières de Grirooard, de Pestel, de Lévy, marquis de Cajius, et
de dame Claude de Fabert, fille du maréchal de ce nom. Il appartenait
donc à une des plus grandes familles de France. Il naquit le 20 avril
1669. Ses premières années d'études se passèrent chez les Pères Jé-
suites, au collège Louis-le-Grand. Il devait singulièrement payer plus
tard cette dette de l'enfance. Sorti des Jésuites, il fit sa philosophie au
collège du Plessis, entra au séminaire de Saint-Sulpice et y reçut les
ordres jusqu'au diaconat. Il ne négligea pas non plus d'obtenir ses
grades et les couronna par le titre de docteur en théologie. On lui
donna alors la charge d'aumônier du roi. Ses relations avec Bossuet,
évêque de Meaux, développèrent son esprit et son jugement. Louis XIV
avait pour M. de Caylus une bienveillance marquée et aimait beaucoup
(1) M. de Caylus avait une Ggure noble et enjouée, comme le montrent ses por-
traits gravés ; mais il parait qu'il était disgracié de la nature. M. de Condorcet, qui
plaisanta un jour sur cette inGrmité, s'attira ces vers qu'on trouve dans le recueil
manuscrit du chanoine Blonde.
D'où sais-tu CondorCet , que Caylus fut bossu ,
Oses- tu te vanter de Tavoir jamais vu ?
Après mille combats et blanchi de victoires ,
Les armes à la main il mourut plein de gloire.
11 faisoit face à tout ; cet illustre héros ,
Jamais aux ennemis ne découvrit son dos.
1
512 AI. DE CAYLUS ,
1704 il 1751. ^ i^ questionner, lorsque son service d^aumônier l'appelait auprès de lui.
M. de Noailles, archevêque de Paris, en fil son grand- vicaire et lui
confia la direction du collège des Hibernais^ appelé les Lombards. C'est
en accompagnant son supérieur dans ses visites diocésaines qu'il prit
ce goût des recherches et des détails d'administration qu'on remarque
dans ses registres diocésains. En 1704, les évéchés de Meaux et de
Toul lui furent successivement destinés, et il en fut écarté pour diffé-
rentes raisons. Enfin , celui d'Âuxerre étant venu à vaquer par la mort
de M. André Colbert, M. de Caylus y fut nommé par le roi le 18 août de
la même année. Sa consécration eut lieu à Paris, le 1*' mars 1705, après
qu'il eut obtenu du pape des bulles exemptes de presque tous les droits,
attendu sa parenté avec Guillaume de Grimoard, pape, en 15G2, sous
le nom d'Urbain V (1). Le 22 du même mois, il prit solennellement
possession de son siège épiscopal avec les cérémonies d'usage. Une
compagnie de jeunes gens \k cheval alla au devant de lui jusqu'à Ré-
gennes. Mais il ne voulut pas exercer le droit de portage dû par les
quatre barons du diocèse. Il se rappelait sans doute les plaisanteries
qu'on avait faites à la cour sur son prédécesseur, au sujet de Mme de
Ventadour (2). Les deux derniers évéques d'Auxerre laissèrent aussi
tomber cet usage féodal en désuétude. Le 28 avril suivant, il prêta
serment d'obéisbance à son métropolitain , sur le grand pontifical de
Sens.
M. de Ca^lus modifia , a son entrée en fonctions, la coutume de sus-
pendre tous les pouvoirs donnés par le Chapitre pendant la vacance.
Il était, à plus forte raison, loin de vouloir étendre cette interdiction
aux autres prêtres, comme l'avaient fait plusieurs de ses prédécesseurs.
Cependant , deux ans après, l'union qui régnait entre le prélat et son
Chapitre faillit être détruite par la conduite du doyen qui , lui ayant
promis de renvoyer un sieur Lalouat, confesseur du Chapitre, ne le fit pas.
M. de Caylus, qui vit dans cet acte une atteinte à la discipline, ré-
solut de révoquer les douze confesseurs que le Chapitre était dans
(1) Il était de règle, à Rome , que les évéques qui avaient eu quelque parent
pape fussent exempts de payer les droits de bulles.
(2) Cette dame se plaignit au roi que M. Colbert voulait qu'elle le portât
L «
'^m^mt^^^mmf^fw^^^^'mfm^mm^f'W^^
CENT TROISIÈME ÉVÉQUE d'aUXERRE. 513
l'usage de se nommer, indépendamment de Tévéque, chaque année, le ^^^^-^ j^^
jeudi-sainl.
Les chanoines, redoutant la suite des ordres du prélat, firent en
corps une démarche auprès de lui, mais en vain. Les choses en étaient
arrivées k ce point qu'on allait plaider, lorsqu'enfin il y eut un accom-
modement verbal portant qu'à l'avenir Tévêque approuverait, la veille
du jeudi-saint , un certain nombre de confesseurs parmi lesquels le
Chapitre se choisirait les siens. L'année suivante, les chanoines, à l'ins-
tigation du sieur Herson, chantre, essayèrent de décliner rengagement
pris, mais M. de la Yrillière ministre d'Ëtat les invita nettement k
obéir et l'affaire s'assoupit.
Le gouvernement du diocèse attira tout d'abord l'attention de M. de
Caylus; il résolut d'en visiter successivement toutes les paroisses. Com-
prenant toute l'importance de cette opération, il fit dresser un registre
imprimé en forme de questionnaire , destiné k recevoir des réponses
succinctes mais précises sur l'état de l'église paroissiale, les vases
sacrés, autels et ornements , sur le service divin, les fêtes et confré-
ries, l'état des bâtiments, des presbytère et cimetière, des chapelles
isolées , la conservation des titres des fabriques , etc. Sa sollicitude
se porta particulièrement sur les prêtres ou les vicaires de la paroisse,
sur les maîtres et les maîtresses d'école et les sages-femmes , enfin sur
le nombre des communiants.
Il commença sa visite, le 29 novembre i705, par la ville d'Auxerre ;
mais, détourué de temps en temps de ce travail par d'autres occupations,
il ne l'acheva qu'en 1712. L'état du diocèse, sous le rapport de l'ins-
truction primaire, était encore bien peu satisfaisant. Il n'y avait de
maîtres d'école que dans trente-sept gros boui^ ou petites villes (1),
et plusieurs d'entr'eux n'étaient pas approuvés de l'évêché. Dans qua-
torze de ces paroisses on fait mention de maîtresses d'école pour les
filles. Il faut compter dans ce nombre quelques congrégations de sœurs
de la Providence. Dans la plupart des lieux ce sont les femmes ou les
filles des instituteurs qui remplissent ces fonctions. L'évêque redou-
(1) Il n'y en avait que frenle sous M. A. Colbcrt. La déclaration du roi; de 1698,
ne parait pas avoir été cxcculéc bien sérieusement.
1704 ï 1754.
514 M. DE CAYLUS ,
tanl le danger de la réunion des deux sexes dans Fécole, répète sou-
vent la défense de les enseigner colleeûvement. Il ciborte en vain les
habitants des nombreuses paroisses privées de maîtres d'école , à
faire les fonds pour s'en pourvoir. La misère des temps en empêchait
souvent, et plusieurs fois des instituteurs oni été obligés de quitter
leurs paroisses qui ne pouvaient plus les nourrir. Le curé ou son vicaire
devaient suppléera Tabsence de l'instituteur ; l'évéqueleur recommande
surtout d'instruire les enfants, qui paraissent souvent peu éclairés sur
les vérités de la religion.
Les ordonnances qui terminent la visite de chaque paroisse révèlent
l'administrateur ferme et sage. M. de Caylus ne traduisait plus publi-
quement devant lui le curé de la paroisse, afin de recevoir de ses
ouailles les plaintes qu'elles auraient à faire contre lui. Ce moyen en*
traînait trop souvent des débats scandaleux. Mais il recevait les plaintes
en particulier et n'hésitait pas à punir lorsque le curé avait manqué
gravement. Une retraite de quelques mois au séminaire était le moyen
ordinaire employé pour rappeler le coupable dans le droit chemin.
Le cruel hiver de 1709, qui fit tant de victimes et détruisit tout
espoir de récoltes , exerça noblement la charité de M. de Caylus, et
son clergé ne demeura pas indifférent dans cette circonstance. Le bu-
reau de la chambre ecclésiastique s'assembla au palais épiscopal et
dressa le rôle des pauvres de la ville auxquels le clergé devait fournir
du pain pendant la deuxième quinzaine de janvier. L'évéque fut taxé
a 75 pauvres par jour, son Chapitre à 50, l'abbaye Saint-Julien à 45,
etc. ; en somme, il y avait alors 528 personnes à nourrir ; au mois de
juin on en comptait encore 544 (1). Les ressources de H. de Caylus
étant épuisées, il vendit sa vaisselle d'argent pour continuer à secourir
ses malheureux diocésains, et depuis ce temps, dit l'abbé Dettey, il
n'eut plus sur sa table que des assiettes et des plats de terre (2).
L'évéque ne se contentait pas de faire l'aumône aux malheureux : par
ses exhortations et ses mandements il redoublait d'instances auprès
(1) Un Reg. d'éphéméridcs de Tabbayc Saint Germain porte à 3,000 le nombre
des pauvres de la viUc d'Auxcrre.
(2) Vie de M. de Caylus, i, p. 32.
CENT TROISIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 5i5
de ses diocésains, a Ouvrez vos cœurs, leur disait-il , \k la misère des
» pauvres. Tout ce qui n'est pas nécessaire h votre subsistance leur est
» dû ; ce n'est pas une grâce que vous leur faites, c'est une dette que
» vous acquittez. > (i).
Le diocèse était, comme le reste de la France , décimé par la famine.
Partout on ne rencontrait sur les chemins que des mourants ou des
morts. L*évéque souffrait profondément de tant de misère. On rap-
porte qu*k Gien surtout il fut frappé de la multitude de pauvres qui
entouraient sa voiture à son départ. Ces malheureux ne venaient plus
demander Taumône, mais remercier le prélat qui , touché de celte dé-
monstration, enparlait souvent (2). Des ecclésiastiques étrangers, M. de
Pardiac et un autre , vinrent offrir à M. de Caylus leur concours et leur
bourse dans cette crise. Il les accueillit avec empressement et les en-
voya à Yermanton et à Cravan pour y distribuer des potages. Les
Jésuites d*Auxerre virent, k ce qu'il parait, avec défiance les allures de
ces personnages qu'ils accusèrent de jansénisme. M. de Caylus, crai-
gnant de les perdre , en écrivit à Mme de Maintenon dont la réponse
mérite d'être transcrite littéralement : « Si le diable, avec ses sept
(1) Mandement du 23 juin 1709. Etant à VinceUcs le 5 octobre 1709, il s'exprime
ainsi dans son ordonnance de visite : « Exhortons le sieur curé et les officiers de
justice de se conformer aux arrêts du parlement rendus en faveur des pauvres....
et leur déclarons que faute par eux d'avoir satisfait à des règlements si pleins de
sagesse et d'équité , ils seront responsables devant Dieu et les hommes de ceux
qui périront par le défaut des secours qu'ils leur doivent procurer. »
Le fléau de la famine décima alors la population d'une manière épouvaïitable.
Pour ne citer qu'un fait on lit dans un relevé des morts de la paroisse de Cbichery
pendant Tannée 1709 que le nombre s'en est élevé à 78, tandis que les naissances
de l'année avaient été de 18 ! La population de cette paroisse ne produisait dans ce
temps-là que 350 communiants.
(2) Les habitants de Clamecy reconnaissants de la fervente charité de M. de
Caylus, lui Grentce compliment dans sa visite pastorale du mois de novembre 1709:
Quel doute me vient en pensée !
Croyant voir aujourd'hui Caylus ,
Ne serait-ce point Barromée ?
Oui , c'est lui , je n'en doute plus :
J'en convalncrois toute la terre.
Je n'aurois pour cela qu'à montrer les vertus
[>c Charles do Milan et de Charles d'Auxerrc.
1704 il 1754.
5i6 M. DE CAYLUS,
1704 i 1754. ^ cornes, venait dans votre diocèse pour y distribuer des potages et
» des nouveaux testaments, vous devriez, Monsieur, aller au devant
» de lui avec la croix et la bannière (i). >
La conversion des réformés qui était une des grandes préoccupations
de Louis XIV, prit sur la fin de son règne une allure nouvelle. La
résistance des Camisards dans les Cévennes poussa aux mesures extrê-
mes, et Ton vil, chose inouïe, appuyer par la force la prédication
d'une religion de charité. Le diocèse d'Auxerre ne fut pas le théâtre
d'événements aussi terribles , mais les poursuites , les détentions des
nouveaux convertis ou soupçonnés coupables de rechute eurent lieu
en grand nombre. Les villes de la Loire furent surtout Tobjet de
cette persécution. On convertissait alors administrativement. La cor-
respondance du gouvernement avec M. de Caylus, pendant les douze
premières années de son épiscopat, apprend comment on jetait en exil
à Auxerre, à Saint-Fargeau ou ailleurs, sur une lettre de cachet , les
parents qui n'envoyaient pas leurs enfants au cathéchisme. Les
femmes étaient détenues dans les couvents. Les Visitandines d'Auxerre,
les Clarisses de Gien entr*autres servaient à cet usage. La détention
ou l'exil duraient plus ou moins longtemps, selon les dispositions
que montrait le suspect ; c'était au moins pendant deux ou trois mois.
L'inquisition administrative et religieuse de ce gouvernement qui avait
si longtemps bravé les foudres du Vatican a quelque chose d'étrange. Il
semblait qu'il voulût faire oublier sa conduite passée par l'exagé-
ration de son zèle.
Le 5 juin 1707, M. dePontchartrain écrit k Tévèque que les femmes
qui refusent de se convertir « seront enfermées dans quelqu'hôpilal ou
> autre lieu pour être oubliées. » Le cruel exécuteur des volontés
royales, félicitant M. de Caylus du zèlequ*il déployait pour ramener les
nouveaux catholiques de La Charité à leur devoir, par ses fréquentes
exhortations depuis qu'il était dans cette ville, ne trouvait pas encore que
le prélat employât tous les moyens nécessaires, car il ajoute : « Mais
» supposé que cela ne produisit pas tout Teffet que vous devez en
» attendre, il faudra alors les exciter à faire leur devoir par la crainte
(1) Vie de M. de Caylus, par l'abbé Detlcy, t. l.
CENT TROISIÈME ÉVÊQUB D*AUXERRE. 517
)> de Teiil. » Voilà où en était arrivé le ministre ; il voulait enseigner ^^q,^ ^ ^754
aux évéques le moyen de convertir les hérétiques par l'intimidation et
la violence.
En 1 7i2, on dità Févéque d'envoyer les noms des habitants de Gien
et de La Charité qu'il croit qu'on doit renfermer. Une veuve Duchemin
de Gien, soupçonnée de vouloir sortir du royaume, est conduite chez
les Providenciennes d'Âuxerre, où elle reste trois mois. On recherche
les mauvais livres chez les nouveaux convertis ; on les empêche de
se marier entre eux; (1714). Cette inquisition finit enfin à la mort
de Louis XIY.
M. de Caylus désirant être utile aux habitants de la ville de La Cha-
rité leur avait proposé pendant une de ses visites paroissiales, en
1712, de fonder avec leur concours un collège où l'on enseignerait
gratuitement les humanités jusqu'à la philosophie. Trois prêtres cha-
noines réguliers de Saint-Âugustin devaient prendre la maison du
maître d'école et jouir d'un traitement de 800 liv. Celte offre, très-favo-
rable à l'éducation des enfants du pays, fut accueillie avec empresse-
ment par les principaux habitants. On ne voit pas dans les documents
la suite de ce projet.
Le Chapitre cathédral avait fait naître de nouveau, vers ce temps, des
causes de mésintelligence avec son évéque. En 1711 et 1712, le doyen
nommé Moreau avait eu de vives contestations, pour la présidence du
bureau d'administration de l'hôtel-Dieu d'Auxerre, avec M. Baudesson,
maire de la ville. Le Chapitre avait soutenu son doyen et l'avait réélu
membre du bureau, malgré les règlements qui empêchaient que le même
chanoine fût plus de deux fois en charge sans interruption , mais l'évé-
que reconnaissant l'injusiice de ces prétentions , voulut arrêter celte
affaire qui prit des proportions considérables. Le bailliage ayant donné
gain de cause au corps municipal, le Chapitre en référa au parlement
qui ratifia la sentence et condamna l'abbé Moreau aux dépens; (3 août
1715). M. de Caylus s'était plaint à M. de la Vrillière, de la con-
duite du doyen et du Chapitre. L'abbé Moreau, averti, fit des ex-
cuses à l'évêque et le Chapitre suivit cet exemple quelque temps après
(octobre 1713).
li'année 1714 fut consacrée, par M. de Caylus, ^ la visite du dio-
4
■ •*
)
.1
I
518 M. DE CAYLU6,
1704 \ 1754. cèse. Il avait publié , par 8on mandemeol du 28 mars , la constitution
Vnigmiius àonné^ par le pape Clément XI, pour condamner le livre
des Réflexions morales du P. Quesnel qui tendait à justifier les cinq
propositions du Jansénisme. On verra, plus loin, comment il fut amené
à protester ensuite contre cette bulle et à changer complètement de
conduite.
Les religieuses de la Visitation d^Auxerre firent terminer, dans cette
même année, la construction de la jolie chapelle qui sert aujourd'hui
d'oratoire au séminaire. C'est le seul édifice religieux moderne de
quelque valeur qui subsiste encore h Auxerre avec la chapelle du col-
lège, autrefois le séminaire. Elle leur coûta plus de cinquante mille
écus et fut consacrée , en 17i5, par M. de Caylns.
Ce prélat ^voulant prévenir le retour de la misère, ou au moins la
rendre plus supportable, créa en 1715 une institution qu'il désigna
sous le nom d'Aumône générale et qui avait pour but de régulariser
pour les indigents la distribution des dons et aumônes destinés au
soulagement des pauvres. Le bureau d'administration fut composé de
chanoines de la cathédrale , de curés , d'officiers du bailliage et de
l'hôtel-de-ville ; il s'assemblait à l'évéché plusieurs fois par mois. Des
quêtes alimentaient la caisse. Cette institution subsista jusqu'en 1790 (1),
et fut rétablie après le concordat.
Nous placerons encore ici, avant de parler des grandes affaires du
jansénisme, la reconnaissance de Tauthenticité des reliques de saint
Pèlerin , le premier apôtre du diocèse, trouvées sous le grand autel de
l'église de Bouhy , le 25 novembre 1645. Elles se composaient de la
(1) L'auteur de la vie de M. de Cayltis nous apprend comment se faisait la distri-
bution des secours. — « L'objet du bureau est de procurer du pain aux pauvres de
la ville, dont chaque curé donne un état détaillé pour sa paroisse. Les pauvres
compris dans Tétat se trouvent tous les dimanches dans une chapelle près la cathé-
drale, où le chanoine préposé leur dit la messe , leur fait une instruction et leur
distribue la quantité de pain ûxée par le bureau; onleur donne du bois en hiver, m
La quête avait lieu quatre fois par an. Les pauvres honteux y avait une part ré~
servée. Outre Taumône générale, chaque paroisse de la ville avait sa charité , dont
l'objet était de secourir les femmes en couches et les petits enfants. Des dames
dites de cAari(^ étaient chargées de cette mission.
/
CENT TROISIÈMB ÉVÉQUE d'aUXERRE. 519
téie et des vertèbres ; le reste du corps ayant été emporté à Saint- no4 îi mt
Denys au vii^ ou viii^ siècle. M. de Caylus, accompagné de ses archi-
diacres et de Tabbé Lebeuf , déjk connu dans le monde savant , de
M. Houssct, médecin, et de plusieurs autres personnes, se rendit à
Bouhy le i^'mai 1716. On reconnut, comme Favait déjk fait M. de
Broc, que la tête avait été séparée du tronc avec violence et que les
traces du martyre étaient évidentes. M. de Caylus déclara alors la re-
lique authentique et digne de la vénération des fidèles (1) .
Nous sommes arrivés à l'époque où éclate dans le diocèse d'Auxerre
la division due au parti janséniste, division que la puissance et la haute
réputation de piété de M. de Caylus firent durer si longtemps. Le
prélat avait d'abord accepté pleinement la bulle du pape Pie Y contre
Baïus, puisqu'il avait publié en 1711 une lettre pastorale contre une
thèse soutenue par un des bénédictins de La Charité, qui renouvelait
les erreurs censurées par cette bulle. Il se félicitait alors grandement de
l'union qui régnait dans son diocèse, où le nom même de parti était
inconnu. Il avait ensuite persisté énergiquement dans cette voie , par
son remarquable mandement du 26 mars 1714.
Les menées et les intrigues que cette affaire avait fait naître k la cour,
la résistance de la Sorbonne et d'un certain nombre d'évéques à Taccep-
tation de la bulle, et surtout les rapports intimes qui le liaient avec
M. de Noailles, archevêque de Paris, le chef des appelants, l'ébran-
lèrent. Il suivit ce prélat, demanda d'abord comme lui des explications
h la bulle, et déclara, dans une requête présentée au régent en 1716,
et signée par seize évêques , que l'intention de l'assemblée de 1714
avait été de lier l'acceptation de la bulle avec les explications contenues
dans l'instruction pastorale ; voyant enfin que ces conditions étaient
repoussées à Rome et que plusieurs évêques prétendaient qu'on n'avait
pas entendu l'acceptation de cette manière, il résolut de suspendre l'effet
de cet acte et de la publication de la Constitution dans son diocèse.
(1) Il avait au préalable consulté les Bollaodistes dont la science agiographique
faisait déjà autorité. — Ona conservé à Bouhy une tradition qui attribue à la terre
du trou qu'on regarde comme le lieu du martyre de saint Pèlerin, la vertu de guérir
certaines maladies, de chasser les serpents des maisons où cette terre est répandue,
etc. Cette superstition a son origine dans la légende de saint Pèlerin.
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390 ■• DE €ATUJS,
i7#i k 17S4. C'est aa nom de la charité et de FaDioo qu'il prit cette mesure au mots
d'aTril 1717. Il y aTait été |oiissé aussi par uo coup hardi du doven
do Chapitre, Fabbé Moreau , et de quelques chaooioes qui , de con-
cert aTcc les Jésuites du collège d'Auierre , aTaieut publié une leltre-
drcdhire, soos le nom de Téglise d'Auxerre, adressée à tous les Cha-
pitres do rojaBme, et aonoiiçaot que leur Chapitre avait accepté la
buUe. Il n'eu était neo , puisque, lors de TaDoonce de la lecture de 1^
bulle, la plus grande partie des chanoines s'était retirée. Le procureur-
général fit saisir les exemplaires de la lettre.
Enfin, le 24 mai 1717, M. de Cajius interjeta appel de la Consti-
tution Unigeniius^ au pape mieux informé et au futur concile. Cette
déclaration ne vit le jour qu'au mois d'octobre de l'année suivante ;
elle fut solennellement enregistrée à l'officialité.
\ l«^ La rupture était définitive avec le souverain pontife, et cependant
I • voici comment l'évéque justifiait sa conduite : « C^esl pour la décharge
de sa conscience qu'il a appelé; pour rétablir, autant qu'il est en lui, la
paix et la tranquillité de PEglise; dans la seule vue de conserver sans
altération les maximes du royaume, les libertés de l'église gallicane,
les droits sacrés de l'épiscopat, les règles de la discipline et de la mo-
rale, le langage de la tradition , etc. » (1). En entrant dans cette voie,
fft ' M. de Caylus allait avoir à engager bien des luttes, et bien des combats
I à livrer chaque jour pour ce qu'il r^rdait comme la véritable doctrine.
u': Le gouvernement, qui était alors le bras droit de l'Eglise, se mêlait
j forcément à tous ces débats. Le régent, effrayé des proportions que
i ' prenait la querelle, fit rendre par le roi une déclaration pour imposer
; silence sur la Constitution (7 octobre 1717). Des actes de ce genre se
• renouvelèrent plusieurs fois , mais sans succès.
. ^ Plus tard, le roi, mécontent de l'agitation qu'entretenait le jansé-
j>^ nismedans le royaume, et ne pouvant obtenir du parlement des arrêts
^ pour condamner les mandements des évéques appelants, les faisait inter-
dire par son conseil privé.
L'exemple de M. de Caylus fut suivi aussitôt dans son diocèse par
un certain nombre de communautés et de prêtres. L'abbé Lebeuf
[i) Vie do M. de Caylus, i, ICI.
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CENT TROISIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 321
joua un grand rôle dans celle affaire (1). Un acte d'appel collectif fut 1704 ji nsf.
signé par vingt chanoines de la cathédrale, et déposé au greffe de Toffi-
cialilé le 16 novembre 1718. Où remarque parmi les adhérents
MM. Delagoute, grand-archidiacre; Deschaœps, trésorier; Créthé;
Mignot, depuis grand-chantre; Grasset; Lebeuf ; Leclerc, etc. L'abbé
Lebeuf mil au service des appelants toute son érudition* Il dressa de
sa main la minute de l'appel des religieux Bénédictins de Saini-Ger-
main et des chanoines réguliers de Saint-Eusèbe. Aux premiers, il fait
dire : « Enfants du grand saint Germain , élèves de Técole qu'il a
fondée, disciples d'un si grand maître, pourrions-nous, sans nous rendre
prévaricateurs et décheoir de la noblesse de notre origine, voir dans
quelque danger la grâce de J.-C. qu'il a défendue, et ne pas faire tous
nos efforts pour la soutenir. Ce saint docteur, devenu l'organe de
l'Eglise, revêtu de toute l'autorité qu'un concile étoit capable de lui
donner , animé de tout le zèle que demandoit une importante com-
mission, passe les mers, s'expose à une infinité de dangers, combat
l'ennemi jusque dans ses derniers retranchements , et arrache, s'il
avoit été possible, du champ de l'Ëglise jusques aux racines, une
hérésie qui ne tendoit à rien moins qu'à nous enlever tout d'un coup
le mérite du sang et de la mort de J.-C. » (2).
Il continue pendant quatorze pages à exposer de cette manière les
doctrines des saints et des savants docteurs Auxerrois, de Rémi,
d'Héric (5), de R. Glaber, et finit en protestant de son respect au sain l-siége
et au pape ; reconnaissant néanmoins avec Raoul Glaber c que quoique
l'évéque de l'église de Rome soit plus respectable que chacun de ceux
qui sont répandus dans le monde à cause de la dignité du siège apos-
tolique, il ne lui est cependant pas permis , dans aucun cas, d'aller
au-delà des bornes qui ont été marquées et fixées par les canons
(Glaber, 1. 11 , cap. 4).... Pourquoi le prieur de Saint-Germain réitère
(t) Voy, des recueils manuscrits de pièces sur les affaires ecclésiastiques au
xvin* siècle. — Arch, deTYonne.
(2) Lebeuf fait allusion à la lutte de saint Germain contre les Pélasgiens.
(3) 11 fait aussi mention d'un Ebrard, moine de Saint-Germain au ix" siècle, qui
rédigea alors un ^oméliaire dans lequel il puise plusieurs arguments en faveur des
propositions, condamnée*.
II 21
522 V. DE CATLCS,
nm A 1754. Fappel qae sa commnnaoté a interjeté ao fator concile de la Constito-
tioD Unigenùtu (1). >
Le prieur de Saiot-Easèbe s'appuie sur des textes de Hugues de
Saint-Victor, pour justifier son appel.
Les religieux de Fabbaje de Saint-Père , les chanoines de Saint-
Fai|;ean et de Toncy , et les Dominicains d'Auxerre , déposèrent aussi
leurs actes d'appel. Plusieurs curés de Tarchidiaconé de Puisaje appelè-
rent également de la bulle , mais ils furent peu nombreux dans le
diocèse. Le clei|;é j était encore soumis à Téglise romaine. Cet état
de choses amena une scission profonde à Anxerre comme ailleurs. Les
pamphlets et les mémoires se multipliaient pour et contre l'acceptation
de la Constitution. M. de Cajius redoubla d'activité pour la défense de
l'appel et pour réfuter ses adversaires. On remarqua surtout parmi eux
Févéque d*Agde , qui lui reprocha d'avoir accepté, en 1715, une balle
qu'il rejetait en 171 8. M. de CajIus lui répondit fort longuement, mais,
malgré l'adresse avec laquelle il colore son changement d'opinion,
la contradiction ne peut être e£Esicée. M. Chardon , qui fait cette re-
nuffque, ajoute que les uns y virent une preuve de légèreté , les autres
un acte de conscience et de courage produit par de mûres réflexions.
Cependant M. de Caylus ne tarda pas ii être abandonné par M. de
Noailles. Ce prélat fit son accommodement avec le pape, h, la demande
du régent qui avait , dans toute cette afiaire, des vues politiques et
qui avait fait rédiger par des docteurs compétents un corps de doc-
trine explicatif de l'acceptation de la bulle qui devait lever tous
les scrupules des appelants. En efiet, cent évéques y adhérèrent;
Févéque d'Auxerre résista et avec lui un petit nombre des appelants (2).
(1) Le 10 avril 1717, le prieur et les religieux, an nombre de quinxe, exhortés
par le P. Général à recevoir la Constitution, s'y étaient refusés unanimement Cette
conduite les mit en suspicion pendant longtemps, et ils furent exclus, par ordre du
roi, du droit d'envoyer des députés à la diète provinciale. D. Vidai , Tauteur des
fameuses lettres contre les reliques de saint Germain , était an nombre des appe-
lants.
(2} n aima mieux quitter Paris sans prendre congé du cardinal de Noailles que de
céder; et il lui adressa une lettre où ildécUre que, sMl eùtsoivi^n exemple, c*eùt
été par complaisance et non par convictioa.
CENT TROISIÈME ÉVÊQUE D*AUXERRE. 525
Il n'en demeura pas moins ferme dans sa ligne et attentif h tout ce noi 1 1754.
que publiaient lesévêques soumis à la bulle. M. de Soissons, qui devait
plus tard , comme son supérieur j lui causer bien des inquiétudes , fut
un des premiers avec lequel il jouta, dès 1721 , et quelquefois avec
succès.
De retour dans son diocèse , après Téclatant changement de M. de
Noailles, Tévéque d'Auxerre voulut faire' payer aux Jésuites du collège
Féchec qu'il éprouvait. Leur adhésion entière et sans restriction au
saint-siége lui parut un obstacle au développement des doctrines des
appelants. Il projetait dès-lors de changer complètement Tesprit de
son elergé. Il résolut d^établir, près de son palais, un petit séminaire
qui serait iout-à-fait animé de son esprit. Les pères de famille furent
invités k y amener leurs enfants. Soit crainte , soit conviction , le sémi-
naire eut bientôt les trois quarts des écoliers (1).
En 1725, M. de Caylus saisit une occasion de frapper les Jésuites
d'une manière considérable et la mit à profit. Des propositions avan'r
cées par le P. Lemoine, régent de philosophie au collège d'Auxerre',
lui parurent, ainsi qu'à ses théologiens, contraires à la doctrine chré-
tienne (2). Il voulut en obtenir rétractation. Sur le refus formel du
régent , il retira à tous les Jésuites d'Auxerre le pouvoir de prêcher et .
de confesser dans son diocèse. Cette proscription dura jusqu'à sa
mort. Non content de cela, il lança une ordonnance contre les Pères
(1) Le régent, à qui il avait demandé son approbation, lui avait fait répondre qu*il
rîDvitait à différer cet établissement; mais il passa outre. ^-^
(2) Voici quelques-unes des propositions attaquées par M. de Caylus :
c< Un chrétien agissant délibérément n*est pas toujours obligé d*agir pour une fin
surnaturelle ; donc un homme agissant délibérément n*est pas toujours obligé
d*agir pour une fin honnête.
» Afin qu'une action soit volontaire et libre, il faut qu'elle soit faite avec la con-
naissance de toutes les choses qui détoomerqient de la faire.
» La loi naturelle , il est vrai , enseigne qu*U ne faut point mentir ; mais cette
même loi ordonne de suivre la conscience qui , par une ignorance invincible , peut
enseigner qu*on peut mentir.»)— D*où le professeur conclut qu'un homme qui croH
que le mensonge officieux est permis on même ordonné, obéit en le commettant à
la loi naturelle et est exempt de péché.
524 M. DK CATLCS,
1704 a 17SA. ^^i Iqî altin (leax répliques fort vives devant lesquelles, selon son ha-
bitude , il ne demeura pas court*
L'influence de M. de Caylus, sur soa Chapitre, se révéla aussi d'une
manière positive. Dans une séance du jeudi-saint de Tannée 1723, la
discussion étant tombée sur les affaires du temps , Tabbé Monnet
s'écria qu'il ne reconnaissait pour bons catholiques que ceux qui se
soumettaient aux décisions de TEgiise. Ces paroles soulevèrent dans
rassemblée une vive rumeur à la suite de laquelle Tabbé fut con--
damné à se rétracter sinon à être exclus du Chapitre pendant on
an. Le doyen, M. Moreau, dont la vivacité était bien connue, parta-
geait Topinion de Fabbé Monnot. Voulant empêcher qu'on ne consignât
par écrit la sentence portée contre ce dernier, il s'empara du registre;
on le lui arracha bientôt : alors il prit Tencrier et Temporta ; mais cette
malice n'empêcha pas l'exécution de l'affaire. Le Chapitre se plaignit aa
ministre qui ne répondit pas, et le chanoine, cause de tout ce brait ,
ht obligé de se démettre de son canonicat (I).
La longue suite des années de Tépiscopat de M. de Caylus yz
s'écouler ainsi dans des luttes continuelles , avec des alternatives de
snccès et de revers. Battu à Paris par le conseil-privé , et condamné
à Borne par le pape, il était soutenu par le parlement, dont il représen-
tait pleinement les doctrines gallicanes (2), et il demeura le maître dans
son diocèse, où il ne trouva plus que quelques curés comme ceux de
Gien, de Charentenay, de Bessy, qui résistèrent à son autorité.
Le Conseil de conscience, qui avait alors la haute direction des
affiiires religieuses , était devenu très-sèvère sur les actes suspects de
(1) Ce fîit dans cette année, 1723, que M. de Caylus accmt le nombre des reli*
gieuses de rhôtel-Diea d*Aaxerre, et de douze qu'il était depuis M. de Broc, le
porta à qnatone. Les administrateurs bâtirent alors une saUe destinée à contenir
30 lits pour les honunes. Auparavant, rhùlel-Dieu ne contenait pas plus de 15 lits
pour chaque sexe. On recevait alors une vingtaine d'enfants-trouvés. — En 1761 ,
M. Potel rapporte qu'il j en avait iB|l
(2) Lors de la canonisation du naâ& Grégoire VII, en 1723, il lança le premier
un mandement contre Toffice du Sai qu'il défendit dans son diocèse, comme at-
tentatoire aux droits du roi et aux quatre articles de la déclaration de 1682. Le
pape foudroya le nundemenl par un bref qui fut imprimé. M. de Caylus essaya,
mais sans succès^ d'intéresser le roi et rassemblée dn dei^ à cette affidre.
CENT TROISIÈME ÉVÊQUE d'aUXËRRE. 325
jansénisme. Les lettres de cachel n^ se faisaient pas attendre. En no4 i hsa.
1723, le juge de Clanaecy fut exilé à Nevers pour avoir rendu une or-
donnance par laquelle il était défendu aux Récollets et a tous autres
d'enseigner la jeunesse sans la permission de Tévéque. La sœur Daiilne,
supérieure de Thôpilal de Clamecy, qui avait reçu de l'évêque Tordre
de se retirer dans son couvent de Gien, s'y refusa. Elle était soutenue
parle curé, qui menaça les administrateurs de lettres de cachet, s'iUse
prêtaient à l'exécution de cet ordre. Ceux-ci ne purent que dresser
procès-verbal et l'envoyèrent à M. deCaylus, mais ce fut sans succès.
Un maître d'école du même lieu en fut expulsé, avec défense d'y pro-
fesser désormais, ainsi qu'en aucun autre endroit du royaume, pour avoir
enseigné à ses écoliers la nécessité de l'amoar de Dieu. Des habitants
de Gien s'étant plaints que M. de Caylus leur envoyait des prêtres ap-
pelants, M de Maurepas l'invita à y mettre sérieusement ordre
(5 octobre 1726).
Après la mort du régent, le diocèse d'Âuxerre fut assez calme sous
le ministère du duc de Bourbon. Ce fut cependant k cette époque qu'eut
lieu la saisie du livre de la Prise d'Auxerre de l'abbé Lebeuf, épisode
que nous avons raconté dans sa^biographie. *
Au milieu de ses préoccupations, M. de Caylus ne perdait pas de
vue les projets qu'il méditait pour le succès du jansénisme. La.^^-^
réforme des livres liturgiques était un des plus décisifs. H com-* IP^
mença par la publication d'un nouveau bréviaire qui était presque la
reproduction de celui de Sens. L'abbé Dettey nous apprend que les
Saintes-Ecritures en font toute la substance, et que c'est un des
ouvrages de ce genre les mieux exécutés. 11 ne reproche au prélat que
d'avoir adopté presque toutes les homélies du bréviaire romain (1726).
Deux ans après il voulut publier un rituel plus complet que les an-
ciens, mais il éprouva un refus formel du garde-des-sceaux, lorsqu'il
demanda la permission de l'imprimer. Cette mesure, qui n'était que
la conséquence de l'état de dépendance où se trouvait l'église de
France vis-k-vis du pouvoir politique, le révolta. Après de longue^ ré-
clamations, il fut obligé de se passer de la permission. Quelques années
après (1752), ce fut le tour du nouveau missel. Le cardinal Fleury,
k qui M. de Caylus l'avait personnellement confié, voulut bien l'oxa-
••
526 M. DE CATLC8,
1704 ï 1754. miner lui-même eo détail. Sa critique porta surtout sur ce qu'il s'éloi-
goait trop du romain » priocipalemeot par les collectes, les épitres et
les évangiles. Après de longs pourparlers, l'autorisation fut refusée.
On reprit cependant la négociation sur «n autre terrain. Le garde-des-
sceaux , à qui un censeur fut demandé par un chanoine d'Âuxerre
qui était alors à Paris, désigna M. Thierry, chancelier de Notre-Dame,
et l'approbation fut enfin accordée. L'ouvrage parut, en 1757, au grand
contentement du Chapitre.
Il faut dire que M. de Caylus était alors tout à fait mal en coor. Il
avait attaqué la décision du concile d'Embrun , qui avait suspendu de
ses fonctions l'évéque de Senez , M. Soanen, à cause d'un écrit intitulé :
Teiiament ipirituel^ dans lequel il réfutait les dispositions de la bulle ;
cela valut à M. de Caylus Texil dans son diocèse (!)• Il avait fait de son
palais un séminaire spécial, où il avait emmené tous les élèves du grand
séminaire et les faisait enseigner par des professeurs de son choix,
attendu que ceux de cet établissement étaient opposés à ses opinions.
Il avait entrepris de nouveau les Jésuites, d'abord en s'opposant, par re-*
quête au parlement (2 août 1726), à l'enregistrement des lettres-^
patentes obtenues par les échevins de Clamecy, pour l'établissement
des frères de la compagnie de Jésus dans les écoles chrétiennes. Les
.^rtisans des Jésuites étaient alors très-^nombreux à Âuxerre (i728).
^ii^^jpes Pères enlevaient aux curés de la ville la plupart de leurs ouailles
et formaient des associations, non-seulement d'écoliers, mais encore des
personnes les plus considérables , de sorte que les instructions parois-
siales restaient sans auditeurs. L'évéque voulut empêcher ces congre-^
gâtions, et faire exécuter rigoureusement ses défenses au sujet de la
pratique de la confession , mais il fut menacé d'une lettre de cachet et
s'arrêta.
(1) M. de Maorepai lui écrivit alors une lettre très-verte dans laquelle on re-
marque les passages suivants : u S. M. ne pent que blâmer une association d*évé-
ques faite à son insu et sans sa permission ; et elle a été d'autant plus surprise du
parti que vous avez pris, que, dans Ta fîaire dont s'agit, vous avez préféré les plaintes
d'un seul évéque accusé au jugement de quatorze ou quinze prélats qui l'ont unanime*
ment condamné. — Arch. de TYonne. ,-->
1Q*4«
CENT TROISIÈME ÉVÊQUE D*AUXERRE. 527
C'est }k M. de Caylus qu'on doit aussi rétablissement des écoles gra- noi ^ nu.
tuites d'Auxerre, dites de Saint-Charles. Il fit venir, en 1729, de la
maison des Frères Saint-Charles de Paris , un maître qui fut payé et
entretenu par lui. En 1746, les écoles avaient pris un tel déve-
loppement, qu'il y fallait quatre Frères.
M. de Caylus avait étéinviié, en 1750,^ à assister aux éiats de
Bourgogne; mais on lui avait fait dire en même temps que l'intention
du roi était qu'il ne s'y rendit pas. Il saisit cette occasion pour achever
de gagner l'abbé Moreau, doyen de sa cathédrale, en le faisant nommer
élu du clergé dans celte assemblée. Il mit à sa disposition ses officiers
pour la réception qu'il était tenu de faire }k Dijon ; il l'aida même k
composer les discours qu'il aurait à prononcer. Le doyen, charmé, finit
par céder et devînt un des amis les plus dévoués du prélat, d'adver-
saire passjQjiné qu'il était auparavant.
Dans une visite que l'évéque fit à La Charité, le 26 novembre 1750,.
il consacra l'église des Bénédictines du Mont-de-Piété, dont la cons-
truction avait été autorisée par M. Colbert, en 1702.
La mort de M. de Chavigny, archevêque de Sens, et la nomination
de M. Languet à sa place (1), furent deux coups forts sensibles à
M. de Caylus. Il perdait un ami at trouvait dans son nouveau supérieur
un antagoniste avec lequel il avait iléjà soutenu plus d'un débat. '^Les
instructions pastorales, les mandements, furent pendant longtemps li
moyens de correspondance employés entreies deux prélats. M. Langue^^v^
dont le zèle anti-jansénibte était connu, devint le protecteur-né des
curés du diocèse d'Âuxerre qui refusaient de suivre leur évéque. Ils
étaient restés peu nombreux , mais la petite troupe tenait bon. Une
Lettre de plusieurs chanoines^ curés ^ etc., dudiocès^ ((^J^jtxerre à MM. lô$
chanoines^ curis^ etc., du diocèse de Sens^ commença'la guerre. M. Lan-
guet l'envoya à M. de Caylus, à Noël 1752, en lui disant qu'il y avait
trouvé la réfutation la plus complète de\s^ Lettre past/fràle ei qu'il se dis-
penserait d'y répondre lui-même. La pièce n'était pas signée. M. ie
Caylus, stupéfait, chercha partout les coupables. Il recueilliélde presque
tous les membres de son clergé la déclaration qu'ils ne connaissaient pas la
(1) 1730.
328 M. DE GAYLUS,
i7(>4 a 1751. P'^^^ ^^ queslioD et parut répondre victorieusement h M. Languet (1).
Mais ce succès fut bientôt mêlé de revers. Un certain nombre de curés
désirèrent connaître la fameuse lettre, et après Tavoir lue, ils écrivirent
à M. de Caylus qu'ils partageaient entièrement Topinion de Tauteur.
Ceci résulte de pièces trouvées dans les papiers de M. Languet et qui
montrent la part qu'il prenait aux affaires du diocèse (2). Le recteur
du collège des Jésuites lui servait d'intermédiaire dans toutes ces que-
relles. Il était Pauleur de la lettre.
De nouveaux désagréments allaient naître. Le monde janséniste était
agité par les miracles du diacre Paris, mort ii-f^aris en 1727 et inhumé
dans le petit cimetière de Saint-Médard. Les dévéls du parti se livraient
aux excentricités les plus singulières. Une fille de Sejgnelay, atteinte
de paralysie, invoqua Dieu par l'intercession du bienhc6reux Paris, et
Ton raconta qu'elle avait obtenu sa guérison après une neuvahte pendant
laquelle on lui frottait les yeux, les bras et les jambes d'une eau dans
laquelle était délayée de la terre du tombeau du diacre Paris et de la
sciure du bois de son lit. M. de Caylus eut la faiblesse de croire à
cette prétendue guérison miraculeuse et se transporta à Seignelay
pour rendre grâce k Dieu d'un événement si consolant. Il publia
ensuite sur cette aifaire un mandem'ent où il fit le panégyrique de
[. Paris (1755). Les libelles anonymes accueillirent le mandement
|1 fut condamné par le pape* Trois curés en appelèrent à l'arche-
' véque de Sens ainsi que dti miracle (5). Mais M. Languet redou-
tait, de la part de M. d'Auxerre, un appel au parlement , qui aurait
peut-être soutenu le miracle, comme il le fit en interdisant la publica-
tion de la sentence du pape. Il se fit donc inviter par M. de Maurepas
éê
à suspendre la (rroofidure de l'appel des trois curés, jusqu'à ce que le
(1) Il parait cependai^t que Tévéque éprouva un refus complet auprès des cha-
noines de Cosoe et du curé d'Ouanne.
(2) Arch. d^' Yonne.
(3) C'étaient les sieurs Paintandre, curé de Montigny ; Germon , curé de Cuncy-
lès-Varzy; et Graillot, curé de Saint-Laurent de Gien. Ce dernier, prêtre cmincnt,
très-attaché à la Constitution, eut souvent maille à partir avec M. de Caylus. Il
venait de sortir du séminaire où il avait fait un séjour de deux mois en punition
de sa résistance. Son retour à Gien fut célébré comme un triomphe.
CENT TROISIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 529
roi fût informé de cette affaire. M. de Gajius reçut également l'avis ^j^^ ^ ^^^
d'interrompre toute poursuite.
<c Au moyen de cet arrangement de prudence, dit M. Languet,
TOUS n'aurez aucun démêlé avec le parlement et rieu ne pourra être
traduit devant lui. Cependant, l'instance liée par devant moi sera tou-
jours un commencement d'échec donnée la publication du miracle, et
d'autres circonstances viendront qui nous faciliteront d'en manifester
la fausseté sans risques. » (i). L'aflaire fut ainsi étouffée (2).
Après ce débat il en surgit un autre. M. de Caylus venait de publier
un nouveau catéchisme en 1755. Cinq curés et un prêtre lui adres-
sèrent de très-humbles remontrances qui portaient surtout sur certains
points de doctrine, tels que celui de la définition de l'Eglise où le caté-
chisme disait que c'est l'assemblée des fidèles placés sous la conduite
des pasteurs légitimes, et qui ne font qu'un seul corps dont J.-G. est
le chef. Ils lui reprochèrent d'avoir effacé le nom du pape, le chef
visible, dont parlaient ses catéchismes précédents.
M. de Caylus fut très-irrité de cette nouvelle attaque et voulut en
poursuivre les auteurs. Mais ceux-ci se pourvurent encore devant l'ar-
chevêque de Sens. Le roi demanda à examiner l'affaire ; et, au milieu de
ce débat, il survint un arrêt du conseil qui supprima le catéchisme et
les remontrances des curés (5).
C'était ainsi que le gouvernement terminait alors les questions eair,
barrassantes.
Après une autre querelle, M. Languet laissa M. de Caylus eu repos
jusqu'en 1750. Il y eut même entre eux échange de courtoisies, et
M. de Caylus, passant à Sens en 1742, lui rendit vibite au grand éton-
(1) Arch. de ITonne.
(2) On essaya encore de trouver du miracle dans la guérison d'une femme de
VermantoD, atteinte d'un cancer au sein, et qui aurait obtenu une guérison presque
complète par l'invocation du diacre Paris. M. Belin des Tournelles écrivit à
Auxerre pour qu'on fit constater le miracle. — Rec de divers mém. du Chapitre,
t. m, tflO, an 1729.
(3) Cet arrêt reçut à Saint-Privé une singulière exécution. Un particulier brûla
publiquement le catéchisme, disant que c'était de la part du roi, et qu'il fallialt
brûler ainsi, souif peine d'ôtre pendu , tous les catéchismes qui n'étaient pas ap-
prouvés du roi.
350 M. DE CAYLUS,
1701 h 1754. nement de l'archevêque qui s'empressa de lui faire le plus bel
accueil (i).
En 1757, M. de Caylus avait résolu de réunir son clergé en synode
pour renouveler les ordonnances diocésaines. Le mini&tre lui en avait
accordé la permission; le jour était fixé, lorsqu'il arriva un contre-ordre
du cardinal Fleury. Ce fut en vain que M. de Caylus lui remontra
Timpossibilité où il était de prévenir les curés des paroisses éloignées
d'Auxerre ; il fut obligé de renvoyer chez eux plus des trois quarts des
prêtres qui s'étaient rendus k sa convocation. Il fut-^plus heureux
Tannée suivante, et l'assemblée du clergé rédigea les nouvelle» ordon-
nances qui devaient régir le diocèse. Elles furent homologuées en par-
lement le 5 mai 174i (2).
M. de Caylus avait entrepris , en 1754, de soumettre les Ursulines
d'Auxerre à son influence. Cette maison était considérable et comptait
soixante religieuses. La division éclata parmi elles, mais bientôt après
un ordre du roi expulsa le confesseur qu'y avait mis Tévéque, et la su-
périeure écrivit à celui-ci fort irrévérencieusement. Le prieur des À ugus-
tins fut ensuite nommé confesseur, mais l'interdiction de tout son couvent
prononcée par M. de Caylus, pour un sermon du P. Hyacinthe sur l'Im-
maculée Conception, où Baius était fort maltraité, exposa encore les
religieuses à tomber dans le Jansénisme. C'est dans ce sens que l'ar-
ehevéque de Sens était informé de l'afilaire dont on ignore la suite.
La vie de M. de Caylus se passait ainsi dans une activité continuelle.
Son séjour le plus ordinaire était le château de Régennes, qu'on nom-
mait Vlk enchantée^ à cause de sa situation charmante dans une pres-
qu'île formée par la rivière d'Yonne. M. de Caylus y recevait ses hôtes
(1) On rapporte que cette visite fut amenée par lopinion favorable que
M. Languet exprima un jour devant le marquis de Guerchy sur M. de Caylus; et,
comme ce seigneur s'empressa d'en faire part à l'évéque d'Auxerre, celui-ci ne
voulut pas demeurer en reste avec son supérieur.
(2) M. de Caylus eut encore de longues discussions au sujet du couvent des
Filles-du-Calvaire dont il était un des supérieurs ; lorsque le pape Clément XII
nomma de nouveaux chefs h cette congrégation, il la soutint dans sa résistance
et ne voulut pas lui-même céder au bref qui le révoquait (1739). La dispersion des
religieuses mit lin à cette opposition.
CENT TROISIÈME ÉVÊQUE D AUXERRE. 351
avec une grâce qui augmentait encore le charme de ce séjour. Il obtint, ^^^ ^ ^^^
en 1740, la permission d'aller à Paris consulter pour sa santé. On lui
fit la réception la plus honorable. Il visita alors le cardinal Fleury qui
était fort âgé , et en reçut les plus belles protestations de bienveillance.
Le vieux ministre l'entreprit au sujet de la bulle, mais sans succès. Il
renouvela tout aussi infructueusemept ses instances les années suivantes,
ainsi que plusieurs autres prélats. M. de Caylus resta inflexible ,
ayant devant les yeux l'exemple de l'évéque de Senez qui venait de
mourir dans la persévérance de ses convictions jansénistes.
Cependant, sa résistance le laissait dans un isolement déplorable.
Les anciens appelants étaient morts successivement et il se trouvait le
dernier évéque qui eût persisté dans son. appel. Au cardinal de Fleury
avait succédé, pour le département des affaires ecclésiastiques, l'ancien
évéque de Mirepoix, qui redoubla d'ardeur contre les jansénistes et
contre M. de Caylus en particulier. On le frappait dans ses coopérateurs,
puisqu'on ne pouvait l'atteindre lui-même.
La ville de Gien était divisée en deux partis, et le curé de Saint-
Laurent qui était bien soutenu en cour se jouait des ordres de l'évéque.
M. Terrasson , curé de Treigny, qui était détenu ii Yincennes depuis
neuf ans, donna sa démission en 1745, renonça à l'appel et fut mis en
liberté. Son compagnon de captivité, M. Fleury, 'curé de Ronchères,
résista mieux et préféra rester en prison plutôt que d'obtenir sa liberté
par sa démission. Il ne sortit de Yincennes qu'en 1758 (1).
M. de Caylus avait, depuis longues années, peuplé son diocèse de
prêtres de talent, mais tous appelants et repoussés par les autres évê-
ques. Il accueillait aussi les plus célèbres prédicateurs qui étaient inter-
(1) Les curés de Treigny et de Ronchères avaient été emprisonnés à raison de ce
qu'ils avaient imprimé clandestinement un journal janséniste sous le titre de :
Nouvelles eeeléiiattiques. Ce journal se publiait d'abord à Auxerre, où la police
parvint bientôt à le dépister. Alors on transporta une imprimerie dans les forêts delà
Puysaie et on Vy établit dans une loge de charbonnier, sur la paroisse de Ronchères.
C'est de là que pendant plus d'un an partit cette feuille qui faisait une rude guerre
aux partisans de la bulle et au ministère qui la soutenait. I^ police battit longtemps
en tous sens le diocèse d'Auxerre sans pouvoir rien découvrir. Nous avons entendu
raconter à des vieillards que le lieutenant de police étant venu en personne à
532 M. DE CATLUS,
1704 il 1754. dî^s ailleurs. Cest ce que l'abbé Deltey appelle profiter des dépouilles
des autres églises (1). En 1747, M. de Mirepoix défendit à tous les
supérieurs ou généraux d'ordres ou de congrégations , de laisser venir
dans le diocèse d'Auxerre aucun de leurs subordonnés. M. de Gaylus
s'empressa de parer à la privation que ce coup portait aux prédications.
Huit cbanoines se partagèrent entre eux les stations de TAvent et du
Carême, et cela dura pendant cinq années de suite. La mort du doyen
du Chapitre, en i746, fut encore une occasion pour N. de Mirepoix,
d'entraver M. de Caylus. Il fit expédier un ordre du roi portant défense
de lui donner un successeur. Le Chapitre obéit. Le P. Sirugue, jaco-
bin, confesseur de Tévéque depuis trente ans, quoique non appelant,
fut aussi frappé et envoyé dans le couvent de Mâcon.
La sévérité déployée contre les Jansénistes afleclait amèrement
M. de Caylus , qur avançait en âge et approchait de 82 ans. M. Ar-
chambauld, archidiacre de Puisaye, qui s'était retiré près de Paris,
mourut appelant, et le curé de Rueil lui refusa les sacrements. M. de
Caylus redoubla de zèle contre cette recrudescence de sévérité. En
1750, il vit supprimer son mandement du carême, qui maltraitait un
peu trop les Jésuites, et où il rappelait encore sa fameuse querelle de
1725, contre le P. Lemoine. Ce mandement est écrit avec un ton de
conviction inébranlSt^te et dignedu prélat qui, depuis plus de trente ans,
combattait pour le Jansénisme. A le lire , on croirait que jamais il ne
s'était séparé de l'Eglise. Il assure que le schisme n'a point pénétré dans
son diocèse et que la paix y règne entièrement. Il recommença alors
à se brouiller avec M. Languet, que le mandement avait indigné. Les
Jésuites , qui avaient toujours lutte contre ses tendances, se sentaient
plus forts de jour en jour. Ne pouvant agir ouvertement dans le dio-
Treigny, dirigea de la des recherches en pure perle dans tous les environs, et
qu'au moment où il revenait harassé et furieux de l'inutilité de ses courses, il trouva
dans sa voiture une édition tout entière de la gazette sortant des presses et encore
tout humide. Cette bravade perdit les auteurs de la publication. Car le magistrat
partit en laissant des agents secrets qui firent tant qu'enûn la cachette fut dé-
couverte, et les deux curés de Treigny et de Ronchcrcs furent arrêtés comme cou-
pables de ce délit.
(1) T. 11, 281.
CENT TROISIÈME ÉVÊQUË d'aUXERRE. 555
cèse d'Auxerre , ils élablirenl des missions lout autour des frontières
et notamment dans les paroisses du diocèse d'Âutun voisines de
Clamccy ; ce qui donna beaucoup dMnquiétude à M. de Ga}lus, parce
que le peuple de cette ville s'y rendait en foule. Le jour de la fêle-
Dieu de Tan 1751, il se fit un grand tumulte, à propos d'une statue delà
sainte Vierge, que Ton empêcha de porter à la procession dans cette ville.
Les suites furent assez graves pour que le subdélégué qui avait favorisé
cette démonstration fût exilé à Orléans, les officiers municipaux changés
et quelques tapageurs mis eu prison pour plusieurs jours.
La publication du Martyrologe auxerrois eut lieu en 1751 parles
soins de M. de Caylus ; il avait chargé de sa composition MM. Mignot,
Grasset et Potel. L'abbé Lebeuf, qui avait quitté Auxerre depuis 1755,
avait révisé le travail de ses trois anciens confrères. Cet ouvrage est
très-remarquable dans toutes ses parties; on s'accorde k juste titre k le
considérer comme un chef-d'œuvre de discernement et d'érudition.
L*abbé Lebeuf poursuivait depuis vingt ans le projet de faire recon-
naître, pour appartenir k saint Germain, les reliques qu'il avait trouvées
dans la bibliothèque de l'abbaye Saint-Marien , en 1718 (1). Les
Bollandistes auxquels il avait adressé, en 1728, un long mémoire
à l'appui de sou opinion, mémoire qu'ils ont inséré dans le t. vu do
mois de juillet de leur collection, n'avaient pas adopté ses conclusioiM
et en avaient même fait une critique assez sévère.
Cependant le docte abbé ne perdit pas courage. En 1751 il se fit
adresser par M. Buffard, chanoine de Bayeux, une lettre où la ques-
tion était reprise très-sérieusement. M. de Caylus, frappé peut-être des
raisons qu'on y exposait, ordonna alors qu'une commission examine-
rait les ossements découverts par l'abbé Lebeuf, et vérifierait juridique-
ment les preuves sur lesquelles on se basait pour assurer que c'étaient
les véritables reliques de saint Germain, que la tradition croyait avoir
été brûlées par les Huguenots. L'enquête suivit son cours, mais il
s'éleva bientôt des contradictions. Les moines de Saint-Germain, qui
ne pouvaient souffrir qu'on crût que les reliques de leur saint patron
1704 il 1754.
(1) Voy. le l«r volume de ces Mémoires, p. 83.
554 M. DE CATLU8 ,
1704^1754. eussent été ainsi abandonnées par eux pendant deux cents ans (i),
résolurent de réfuter les lettres écrites en faveur du projet de Lebeuf.
Dom Vidal fut, pour le savant abbé, un rude adversaire (2). Il repro-
cha à Lebeuf de l'ingratitude envers l'Ordre de Saint-Benoit en gé-
néral , et l'abbaye de Saint-Germain en particulier, parce que, disait-
il, c*était dans les manuscrits de D. Viole , qu'il avait puisé la plupart
des documents de ses Hémoires sur le diocèse d'Auxerre. Sa critique ,
qui nous révèle une fois de plus l'antagonisme de la cathédrale et de
Saint-Germain, s'appuyait sur des faits si péremptoires , le débat lais-
sait les opinions si incertaines, que M. de Caylus suspendit son juge-
ment, ella mort Tempécha de se prononcer. Ses successeurs ont aussi
hésité, et la question en est restée là.
A cette époque le clergé auxerrois comptait dans ses rangs bon
nombre d'hommes amis des lettres. Quatre chanoines, MM. Potel,
Mignot, Horeau et Dulérains, résolurent, au mois d'avril 1749, de
concert avec cinq laïques, MM. Berryat, médecin ; Robinet de la Coudre,
conseiller ; Lepère , directeur de la poste aux lettres ; Silvestre de Sacy,
bourgeois; et Mérat, apothicaire, de fonder une Société des sciences
et Mles-lettres. M. de Caylus approuva de tout son concours leurs
intentions. La Société tint sa première séance publique au mois de
janvier 1750 (5).
Les derniers actes importants qui signalèrent l'épiscopat de M. de
Caylus, sont consignés dans les registres d'administration diocé-
saine. Il supprima, par décret du 25 janvier 1749, les Ursulines
de Cravan ruinées par leur mauvaise gestion économique, et ordonna
que les biens qui resteraient libres de dettes serviraient à l'en-
tretien de deux filles régentes chargées de l'instruction des jeunes
(1) Les défenseurs des reliques, et Lebeuf le premier, expliquaient leur trans-
lation dans l'abbaye de Saint-Marien, par cela qu'à la fia du xvi« siècle les mœurs
scandaleuses des moines de Saint- Germain avaient éloigné les personnes pieuses
qui en étaient dépositaires, de les exposer à une nouvelle profanation en les remet-
tant aux Bénédictins. Inde irœ.
(2) Les critiques ont été jusqu^à avancer que les ossements étaient ceux d'une
femme.
(3) Elle avait été autorisée par une lettre du ministre du 11 juillet 1749.
r.ij-ji^tijr, 'iL.r^^,
CENT TROISIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 555
filles et du soin des pauvres malades. Le 16 novembre 1749, il con- 1704 ^ nsi.
sacra solennellement le nouveau maitre-autel de Tabbaye (fe Pontigny,
et procéda à la translation des reliques du corps de saiitt Edme, dont
la situation fut décrite minutieusement. L'année suivante il donna des
constitutions aux Bénédictines de Gosne qui étaient au nombre de dix-
huit sœurs de chœur et cinq converses. Dès 1691, elles avaient prié
M. Colbert de leur donner des statuts. La même année, une ordon-
nance épiscopale du 11 juin, supprima les Ursulines de Gien et réunit
leurs biens k la communauté des Hospitalières. Il y avait déjà huit ans
qu'on n'y recevait plus de novices par ordre du roi. Les Bénédictines de
Saint-Fargeau reçurent, en 1751, des constitutions qui résumèrent les
règles du couvent depuis sa fondation.
L'évéque adressa, au mois de septembre 1751, à l'abbesse des
Bernardines des Isles d'Auxerre , une lettre sévère dans laquelle il
se plaint de la légèreté avec laquelle on y communiquait au dehors.
Il prescrit , au contraire , la clôture la plus rigoureuse et ne permet
l'entrée du monastère qu'aux médecins , aux confesseurs et aux
ouvriers de la maison. Les Bénédictines de Saint-Julien de la même
ville avaient aussi éprouvé son autorité , au sujet des mariages
de leurs domestiques que l'abbesse laissait faire dans son église ,
malgré les droits du curé de la paroisse. Le prélat avait été fort rude
dans son blâme ; mais lorsque l'abbesse lui eut justifié des droits an-
ciens de sou monastère, il se radoucit et écrivit, en 1746, une lettre
très-convenable. Il résultait, en effet, d'une charte de 1269, qu'à quatre
fêtes de Tannée, le curé de Saint-Martin devait conduire ses parois-
siens à la messe de l'église de Saint-Julien, alors de Notre-Dame, et
en outre que si les serviteurs du couvent prenaient femmes , la béné-
diction nuptiale avait lieu dans cette église. M. de Caylus , qui n'avait
aucune autorité sur les Visitandines d'Âuxerre, voulut cependant, par
respect pour le pape Benoit XIV, célébrer solennellement dans leur
église la béatification de leur fondatrice sainte Chantai. Il fit cette céré-
monie an mois de juillet 1752, par une chaleur excessive, malgré ses
85 ans. Le mandement du carême de 1755, sur la mort et celui de
janvier 1754, sur le bonheur des saints dans le ctel, furent les adieux
de M. de Caylus à ses ouailles. Il voulut encore aller à Auxerre le
556 M. DE CAYLUS ,
1704 ï 1754. samedi de la Passion de cette aDoée, pour faire l'ordination comme il
avait coutume. Le froid qu'il éprouva en route et pendant la cérémonie
l'indisposa gravement et il mourut peu de jours après, le 5 avril, dans
son château de Rcgennes. Son corps, transporté àÂuxerre, fut exposé
^ la vénération publique, dans le palais épiscopal, jusqu'au 9, jour où
son Chapitre célébra ses obsèques avec la plus grande solennité. Un
mandement capitulaire annonça aux fidèles la mort de leur pasteur.
Cette pièce, qui est un panégyrique de M. de Caylus, le qualifie d'ange
tutélaire du diocèse (1). On devait prononcer Foraison funèbre du défunt
dans le service qui fut célébré le 5 septembre, mais des défenses ve-
nues de la cour en empêchèrent. Le Chapitre se contenta de faire dans
son mandement Téloge le plus magnifique du prélat défunt.
M. de Caylus mort, Topinion janséniste perdait son plus ferme ap-
pui dans le diocèse. Ses successeurs ne furent pas choisis de manière
à la relever. Cependant elle avait poussé de si profondes racines dans
le pays, qu'elle ne devait pas céder le terrain sans de grands combats.
Toute la préoccupation des évêques sera, jusqu'à la révolution , de
l'amoindrir et de la neutraliser. Leurs rapports avec le grand Chapitre
seront difliciles et susciteront, surtout à M. de Condorcet, de violents
orages.
Avant d'entrer dans cette nouvelle phase, reprenons quelques faits
que la rapidité du récit nous a forcés de négliger.
Le grand Chapitre cathédral, dont l'influence était si considérable
dans le diocèse, s'est montré, pendant le cours de Tépiscopat de M. de
Caylus, k la hauteur de son passé. Sa sollicitude pour ses vassaux de
Cravan se révèle, en 1710, par une ordonnance sur la vente du pain.
Il fit défense aux officiers de police de la même ville de mettre aucune
entrave k ce que les boulangers forains y vinssent vendre du pain en
payant les droits. Il voulut aussi que les boulangers réduisissent leurs
prix au niveau de ceux des forains, car la misère du peuple était grande
alors.
(1) Cétait lechaDoine Moreau qui l'avait composé. Un M. Millelot, des académies
d'Auxerre et d'Orléans, s'exerça sur ce sujet, en 1755; dans une longue pièce de
vers fort insipides.— Arch. de l'Yonne, Recueil de divers écrits, chap. d'Auxcrre,
t. III.
• _
CENT TROISIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 557
En 1729, le P. gardien des Cordeliers d'Auxerre proféra dans un i-j(^ ^ 17^^^
sermon des paroles injurieuses contre le Chapitre qui porta aussitôt
plainte h l'évéque. Le prélat prit l'affaire à cœur et donna au Chapitre
des témoignages non équivoques de sa haute estime. Il obligea en
définitive le P. gardien à rétractation.
On avait, au Chapitre, négligé de porter la soutane violette dans
les fêtes solennelles. Sur l'invitation de M. de Caylus , ce corps
décida, par une délibération du i2 décembre 1724, que tout
nouveau chanoine prendrait possession en soutane de cette couleur et
serait tenu d'en avoir une k lui trois mois après. Ce règlement fut con-
firmé par conclusions de 1757 et 1746. M. de Caylus reconnut, au
mois de mai 1759, le droit de semonce dû au Chapitre et qui consis-
tait, dans Torigine, en une certaine quantité de vin, laquelle avait été
convertie, en 1705, en une somme de 554 liv. 10 s.
Le Chapitre suivait à la lettre ses statuts en matière d'amendes
comme on le voit envers l'abbé Lebeuf qui, s'étant absenté au-delà des
délais, en 1755 , fut privé des revenus éventuels de l'année. Cela lui
parut dur, d'autant plus que son voyage n'avait été que de 15 jours et
avait eu pour but d'aller à Soissons recevoir le prix que l'académie de
cette ville lui avait décerné pour son ouvrage sur le Soissonnois. Il
le fit sentir, dans une lettre de remerciement adressée au Chapitre
pour l'intérêt que la compagnie lui avait témoigné au sujet de ce
livre; « d'autant, ajoute-t-il , que la cause m'avoit paru, et à
beaucoup d'autres personnes , bien favorable et assez singulière pour
surmonter la rigueur de la discipline ; et la seule attention qu'il n'y va
en cela que d'un intérêt personnel, me fait accepter cette légère dis-
grâce avec résignation.»
M. Mignot, grand-chantre, qui était dans le même cas que l'abbé
Lebeuf, voulait en appeler au parlement. On ne voit pas ce qu'est de-
venue cette affaire.
M. Moreau, doyen, étant mort en 1746, le Chapitre reçut de la
cour l'ordre ne pas procéder à l'élection de son successeur. On vou-
lait punir par là ce corps dont l'union avec M. de Caylus rendait la
résistance de ce prélat si durable.
En 1729, le 4 juin, eut lieu à Âuxerre le baptême d'un jeune siu-
Il 22
» TUA
.A»5 M. BC coywmcrx .
1:1^ wmmt et b LMisune pir k sieor Goenot. seigneur de Tréfon-
tkÎD»^. D s^ippciaîu dît-OD. PalîmÎDgo: et éuîi fils d'uo cbcf des
QÔTÎBirkts. (c«s h XovTelle-OriéaBS. Le fwé de Notre-Dime-la-
dBcvs it «M ttstraclîoii relîpeBse et rcTèqee le lopùsi soleDoelle-
»aiL D flKMTit tixMs ans après l'.
Le» êrêqves de Bethléem, depvîs |»rès d*iin siècle, araieoi respecté
la skoûos q«e le«r arait faite rassemblée in clenré i : mab
tm 179 le possesseur de ce sié^, profi*»aot de b sitUÀiioD difficile on
éiah filacé !i. de Cajiiis, Toalot empiéter ssr ses (*rêrL^aiiiies. 11
pmssa sMcessirement les Récollets de ClamecT et le curé dWrmes,
sam vîcaire-féocral. à exercer les drats cnnau dans le faubourg de
Bethléoi. Ce dernier alla même fort loin, an diie des fanîsans de
rêrêqpe d*Anem, et commit des excentricités, par exemple en faxsaDi
eaaduie, le jonr de b Féle-Dien, la procession ao son des \ iolons ei des
tamiwrs. La TÎle était IrèsHiÎTisée : les nns pn^iaieni prti fiour leor
érêfse. les antres déiesdaient Fantorîté de M. de Cjitns. Une requête
fA néresw an conseil dn rcH. en 1 752. par M. Lonis LeM. ev^oe de
BelUéem. fiov iaire établir sa jnridiction. Le conseil, for; emtairasse.
ren«^«n Fafam an knreaa ecdésîasliqne qni b communiqua k M. de
Cai4ns. On ne voix p^s qn'on t sit apporté de solaiion sons ce pnelat,
qne r^n mnah en bant ben à voir ectonré de diffccliés.
- .ad A ZTm:.
CHAPITRE m.
M. DE COSDQKJEJ. OT^ É\"È<ll"E P^rXERRE.
À b mort de M. de Canins le CStaf iire nomma, en Teitn de son
Ht de répie et snîiant b disf^isition des saints canons, six rîcaires-
MIL ^ baies Hneu (mnd-arcbidîacie : Jean-Andie MicBot.
et TrviAt. n. ns. En ITSS M. 4e Cayins luftîsi M^leikwlicmfst «n
alerte tS i^^ €■ Asr, |«r M. 3e Lmuciy.
?S T«y. d 4ums a 11 w ér M. Sépaer. p. SU.
\
CENT QUATRIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 359
chantre ; Jean-BapUste Albéric Chevalier, pénitencier; Fr. Grasset (1), nsi à neo.
Etienne Housset et Robert Viel, prêtres et chanoines. Cependant, le
conseil d'Etat avait ordonné, par |)rovision, que les scellés seraient ap-
posés par le lieutenant-général du bailliage. Le Chapitre forma oppo-
sition , mais le procès ne se vida que sous M. de Cicé.
Pendant la vacance, le Chapitre prit différentes mesures d'adminis-
tration. Il pourvut à Tentretien des écoles gratuites de plusieurs lieux, et
principalement de celles de la ville d'Auxorre, fondées par M. deCaylus.
Sa sévérité s'effraya de l'apparition d'une troupe de comédiens dans la
ville épiscopale, et il lança contre eux un mandement menaçant qu'ils
avaient provoqué un peu,^du reste, en apposant leurs affiches jusque
sur les portes de la cathédrale. Il ordonna aux religieuses hospitalières
de Gien qui avaient été depuis peu transférées dans la maison Jes
Ursulines, et qui n'avaient pas tardé de l'abandonner à cause de son
insalubrité» de rentrer dans cette même maison en y transportant les
malades et les meubles de Thôtel-dieu. Les sœurs réclamèrent avec
instance et les médecins attestèrent la vérité de leurs dires. Cependant,
en 1770, sur de nouvelles enquêtes, la translation fut ordonnée par
M. de Cicé.
Le roi , las des tiraillements intérieurs que les querelles religieuses
causaient à son gouvernement, résolut d'y couper court une fois pour
toutes. Le clergé de Paris refusait aux jansénistes malades les derniers
sacrements s'ils ne présentaient pas de billets de confession. Et comme
pour en obtenir des curés il fallait adhérer à la bulle , grand était
l'embarras pour les appelants. Le parlement, chose étrange à notre
point de vue, fit emprisonner un curé qui avait cru devoir refuser Tex-
(1) La famille Grasset est fort ancienne dans le diocèse d'Auxerre. On la trouve
à Auxerre dès le commencement du xiu * siècle ; mais à coup sûr à partir de
1523, suivant la coutume de cette ville. M. £saii Grasset était alors seigneur de
Corbelain, en Nivernais. Ses descendants, très-nombreux, ont occupé des fonctions
judiciaires et ecclésiastiques dans le diocèse et le comté d*Auxerre> jusqu'à la fin du
deniier siècle. M. François Grasset, chanoine de la cathédrale et Tun des vicaires-
généraux chargés de régir le diocèse après la mort de M. de Caylus, était né en
1690. Il prit une grande part à h composition des livres liturgiques ordonnée par
M. de Caylus, et se signala aussi par son dévouement comme administrateur de
lh(Uel-dieu. Il estmort en 1761.
I
I
II
■■ I
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) 1
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•
1754 b 1760.
540 M. DE CONDORCRT,
irême-onction ; on vit d'aulres fois les exempls escorter le saint-sacre-
meot qa'oD portait par arrêt aux malades. La résistance de ce corps,
aox ordres daroi sur ce point/ causa son exil. Cependant, Louis XV
i espérant le ramener par la douceur , consentit a son rappel et donna, en
même temps, le 2 septembre 1754 , une déclaration qui devint célèbre
et par laquelle il annula toutes les poursuites commencées au sujet de
la bulle. Le bailliage d'Âuxerre enregistra cet acte le 12 du même
mois et le fit afficher dans la^ville.
M. Jacques-Marie de Caritat de Condorcet, évêque de Gap, ancien
officier de cavalerie, neveu de M. d*Yse de Saléon , évêque de Rhodez,
I [ fut choisi par l'ancien évêque de Mirepoix pour succéder h M. de Caylus.
G*était tout l'opposé de ce dernier. M. de Condorcet, d*un commerce
fort agréable et d'une exquise politesse dans les relations ordinaires,
aimant un peu trop l'apparat, selon un historien (1), était connu par son
obéissance, militaire pour ainsi dire, h la bulle. Son zèle était ardent
et ne connaissait point d*obstacles. Mais le clergé de son nouveau dio-
cèse allait lui en créer de sérieux.
Nommé k Tévéché d'Âuxerre au mois de juin 1754, il reçut du
Chapitre une lettre pleine de déférence où ce corps rassurait qu'il
avait confiance que Dieu lui donnerait, eu sa personne, un évêque selon
son cœur. M. de Condorcet répondit de manière k satisfaire le Cha-
pitre. Ce ne fut cependant que plus de six mois après, le 28 janvier
1755, que le Chapitre reçut avis de l'arrivée du prélat. Il annonçait
qu'il envoyait l'abbé de l'isle pour prendre possession de l'église
d'Aoxerre en son nom. En effet , le lendemain l'abbé présenta au Cha-
pitre les bulles de translation de M. de Condorcet, de Tévêché de
Gap à celui d'Auxerre , et prit possession à l'issue de vêpres. Deux
heures après, M. de Condorcet descendait k Tévêché. Le Chapitre,
informé de son arrivée et conduit par M. Huet, grand archidiacre, à dé-
faut d*un doyen, dont il était privé depuis 1746, se rendit au palais le
50. La réception fut assez embarrassée : aux protestations de dévoue-
ment du Chapitre, l'évéque répondit assez froidement, tout en assurant
de ses bonnes intentions et de ses désirs de bonne harmonie. La céré-
(I) Mémoires sur Gap.
CENT QUATRIÈME ÉVÊQUË d\uXERRB. 541
moDie d'inlronisalioD eut lieu le dimanche suivant, 2 février, par 1754 „ ^go.
M. de Yillebreuil, grand-archidiacre de Sens, accompagné de deux
chanoines de la métropole. Le 8 avril, M. deCondorcet prêta en per-
sonne serment d'obéissance à son métropolitain. Le premier soin de
M. de Condorcet avait été de se débarrasser des soucis de la régie et des
détails de l'administration de son temporel. Dans cette vue, il avait fait
un bail général des revenus de l'évéché, le 20 janvier 1 755, lorsqu'il était
encore à Paris.
On ne tarda pas à pressentir les dispositions religieuses du nouvel
évéque. Il refusa d'abord , sous prétexte qu'il n'avait pas encore d'ha-
bit de chœur, c'est-à-dire la chape et le camail, d'assister à l'office de
la Purification dans la cathédrale. Il passa le carême et les fêtes de
Pâques à Auxorre sans entrer dans son église, affectant d'être malade
le jour de cette dernière solennité. Les prétextes pour ne pas commu-
niquer avec ses chanoines, qu'il regardait tous, à l'exception de deux
ou trois, comme hérétiques à cause de leur appel de la Constitution,
n'étaient pas difficiles à trouver. Il se retrancha surtout sur ce que le
Chapitre ne lui communiquait pas le cérémonial qu'il devait observer
à son égard. Cet état de choses devait empirer de plus en plus.
M. de Condorcet se voyant entouré de toutes parts d'un clergé jan-
séniste et dans un diocèse qu'on appelait le refuge des pécheurs (1),
s'irrita et ne sut pas toujours garder de mesure dans ses actes. La résis-
tance qu'il rencontra redoubla encore son impatience et le poussa à
des efforts qui marquaient plus de zèle que de prudence.
L'abbé de l'isle, abbé de Cloissone au diocèse de Gap, et doyen de
la cathédrale de cette ville, nommé son vicaire-général dès le surlen-
demain de son arrivée, servit activement &es projets. L'historien de
Fépiscopat de M. de Condorcet, le dépeini sous des couleurs fort
noires et l'accuse d'être d'un caractère dur et inflexible, voulant tout
faire plier sous sa domination. L*établissement d'un registre pour la
souscription du Formulaire^ parut au nouvel évêque une des premières
choses à faire pour empêcher les progrès du jansénisme dans le clergé.
(1) Les prêtres exilés ou qui abandonnaient les diocèses où le Jausénismc était
persécuté, s'étaient retirés en grand nombre dans celui d'Auxerre.
I
I ■
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542 M. DE CONDOHCET,
17:4 il i76(). Mais, comme on le pense bien, les chanoines, pas plus que les curés de
la ville, ne vinrent y apposer leur signature. Les Jansénistes, renom-
més par la pureté de leurs mœurs et la sévérité de leurs principes,
étaient loin d'être disposés à céder à un prélat qui voulait détruire
tout d'un coup l'œuvre de son prédécesseur qu'ils avaient appris a vé-
i nérer pendant un demi-siècle. Leur entêtement d'ailleurs était d'autant
plus grand qu'ils étaient plus comprimés.
Il y avait en exil, à Âuxerre , douze vieux prêtres jansénistes qu'il
reçut fort mal lorsqu'ils vinrent lui rendre visite , et il voulut les faire
1 partir de son diocèse. Ils obtinrent cependant du ministre la permission
de rester dans cette ville.
Il tenta d'éloigner ' son Chapitre de l'office annuel de l'Aumône
générale, institution charitable et pieuse, fondée, comme nous Tavons
vu, par M. de Caylus. L'office se faisait alternativement un dimanche
dans l'église Notre- Dame-la-d'Hors, et le dimanche suivant dans celle
de Saint-Eusèbe, en présence du bureau de l'aumône générale. C'était
alors le tour de l'église Notre-Dame; M. de Condorcet fit célébrer
l'office par l'abbé de l'Isle, assisté de prêtres et de clercs de son sémi-
naire, ce qui scandalisa beaucoup. L'année suivante on rétablit l'ancien
usage, mais l'évêque n'y parut pas.
Après cela ce fut le tour des curés des paroisses d'être mis à
l'index. L'évêque fit annoncer des catéchismes dans la chapelle du sé-
minaire, qui devaient être suivis de communions. Les curés, qui se
voyaient enlever un de leurs plus beaux droits, en appelèrent comme
d'abus et obtinrent un arrêt favorable (1 ).
La révocation, dans le délaide deux mois, des pouvoirs de confesser
donnés par M. de Condorcet à des prêtres du diocèse d'Àuxerre, bou-
leversa surtout les paroisses de la ville. Les PP. Jésuites et des moines
d'Ordres mendiants remplacèrent les confesseurs ordinaires. Cette me-
sure est l'objet de longues lamentations de la part de l'auteur de la
vie du prélat qui y est tout à fait opposé. Les chanoines qu'elle attei-
gnait le plus directement firent part à l'évêque des plaintes des fidèles.
(J) Les curés de la ville publièrent, à ce su[et, des remontrances à l'évêque où
leur résistance est nettement caractérisée.
I
1 f
I
CENT QUATRIÈME ÉVÊQUE D^UXERRE. 545
Il voulut voir les confesseurs ; « car, disait-il avec raison , on ue doit 1754 ii noo.
pas trouver mauvais que je connaisse ceux que je dois approuver. »
Deux de ces chanoines s'élant rendus avec assez de peine àTévéché,
la conférence ne fut pas longue , le prélat leur demanda s*ils voulaient
démentir la Gazette de Hollande qui avait dit que tous les chanoines de
la cathédrale d'Âuierre étaient appelants a l'exception de trois seule-
ment. Gomme ils refusèrent pour leur compte, révêque ouvrit brus-
quement la porte et les congédia.
Nous ne reproduirons pas tous les procès que suscita Tesprit réfor-
mateur de M. de Gondorcet et de Tabbé de Tlsle. Leur objet a bien
diminué d'importance pour nous. Ils révèlent cependant dans le corps
du bailliage et dans les hautes classes de la société la présence d'un
parti opposé au Jansénisme qui va s'accroître peu à peu, de manière à
diviser plus tard la ville d'Âuxerre en deux camps presque égaux.
Un fait de ce genre montrera encore l'espèce de relations qui exis-
tait entre l'évéque et son Ghapitre. On venait de publier, sans nom
d'auteur, les œuvres de M. de Gaylus, qui étaient une protestation
contre les actes de son successeur. Aussitôt après parut un volume
intitulé Supplément aux œuvres de M. de Caylus. On y avait réuni tout
ce que le prélat avait composé dans le commencement de son épisco-
pat, en faveur de l'adhésion à la bulle Unigenitus. On y trouvait aussi
la conclusion attribuée au Ghapitre sur le même sujet, en 1717.
G'était une rude réponse. Aussitôt le Ghapitre porta plainte au bailliage
contre la publication de la conclusion qui semblait émaner du corps
entier, tandis qu'il avait été reconnu dans le temps que c'était Tœuvre
d'un petit nombre de chanoines. Le bailliage prenant la chose au grand
sérieux, ordonna, le 2G mai 1755, la suppression de la pièce et qu'il
serait informé contre ses auteurs, c attendu qu'il s'agit de délit contre
» l'ordre public et de contravention à la déclaration du 2 septembre
» 1754. »
De plus , sept conseillers durent se transporter, séance tenante , au
Ghapitre pour faire enregistrer la susdite déclaration.
Voici un échantillon des aménités qui s'échangeaient entre l'évéque
et le Ghapitre. M. d'Aymard ayant été nommé pénitencier en 1755,
le Ghapitre dut insérer ses provisions dans son registre, le 25 juillet,
544 M. DE CONDORCET ,
1754 il 1760. Q^^îs il eut soin d'y ajouter qu'il proleslait contre les clauses insolites
qui y étaient contenues et qui concernaient le serment prêté au formu-
laire d'Alexandre YI, etc. Les protestations sont écrites de la main
de M. Frappier et signées Potel, Mignot, Leroy, Jodon et autres.
L'appel fut donc suivi, mais bientôt après un arrêt du conseil du
21 août, transcrit sur le registre par l'huissier Vassal, ordonna que
ces protestations seraient biffées.
Un mandement pour le carême de 1756 amena de nouveau la guerre
entre l'évêque et son clergé. M. de Condorcet y disait aux fidèles :
€ Gardez l'unité , demeurez inviolablement attachés aux successeurs
D de Pierre et au corps des premiers pasteurs, en ce qui concerne la
» religion n'écoulez que leur voix, d Les curés, pasteurs du second
ordre , se regardèrent comme offensés du silence que l'évêque affectait
à leur égard. Ils refusèrent de publier le mandement et présentèrent
requête au bailliage qui leur donna acte de leur appel comme d'abus.
Le parlement, k qui l'affaire fut déférée, déclara le mandement abusif
et ordonna que son arrêt serait aiBché dans tout le diocèse; ce qui fut
exécuté.
L'appel comme d'abus avait lieu à chaque affaire où le Chapitre et
l'évêque se trouvaient en présence. C'est ce qu'on vit encore à propos
des prières publiques demandées parla ville d'Auxerre pour obtenir un
temps favorable aux biens de la terre. L'évêque n'avait pas, comme il
était d'usage, consulté son Chapitre avant de donner son consentement.
Il fallut de longs pourparlers avant d'obtenir une solution.
M. de Condorcet essaya aussi de réformer la manière de dire la
secrète et le canon de la messe que plusieurs prêtres lisaient assez
haut pour être entendus des fidèles assis dans le chœur. Le Chapitre
vit dans cette ordonnance une atteinte aux rubriques du missel auxer-
rois et la repoussa : nouvel arrêt intervint qui condamna les prétentions
épiscopales.
L'évêque entreprit alors de supprimer le catéchisme de M. de
Caylus qui était en usage depuis 50 ans. Nouvelle résistance du clergé
qui porta plainte contre les PP. jésuites, dont M. de Condorcet favorisait
les missions de tout son pouvoir, pour contrebalancer l'influence des
prêtres jansénistes dont la sévérité éloignait des sacrements. Les appels
CENT QUATRIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 545
comme d^abas surgissaient de tous côtés , le bailliage et le parlement yj^ ^ y^^
retentissaient sans cesse des plaintes du clergé auxerrois. L'historien jan-
séniste de Tépiscopat de M. de Condorcet lui reproche la destruction
du collège de Yarzy qui, dit-il, était florissant sous la direction des
professeurs qu'y avait mis M. de Caylus et comptait plus de 50 pen-
sionnaires. Peu de temps après l'intronisation de M, de Condoreet, ce
changement de professeurs fut exécuté, et le collège tomba bientôt à
rien.
M. de Condorcet persistait à ne pas avoir de rapports avec son Cha-
pitre lorsqu'une lettre du roi, du mois de juillet 1756, l'invitant à célé-
brer un Te Deum d'actions de grâces de la prise du Port-Mahon , le
jeta dans un grand embarras. Il ne s'en tira qu'en partant brusquement
de Régennes pour Montélimart, d'où il ne revint que le 26 octobre
suivant.
A son retour, le Chapitre alla en corps le complimenter, et M. Mignot
porta la parole pour lui présenter l'oiBce de la Toussaint. Son discours
roula surtout sur le bonheur qu'aurait le Chapitre de recevoir son
évéque dans son église et sur l'ardent désir qu'il avait de voir l'union
régner entre eux. M. de Condorcet accueillit très-bien les députés,
mais il ne céda pas. Cependant, le jour de l'octave de la fête, il an-
nonça qu'il assisterait à l'office et qu'il voulait prononcer le sermon. La
foule accourut aussitôt. Après un exorde sur les principes de la foi et
la soumission due à l'Eglise, il attaqua vivement a la conduite des par-
lements qui envahissent le sanctuaire et portent la témérité jusqu'à faire
donner les sacrements aux réfractaires. > Il blâma amèrement ceux qui
avaient recours aux tribunaux séculiers pour se faire administrer les
sacrements ; enfin il conclut par une excommunication ipso facto contre
ceux qui composeraient ou liraient des écrits contraires à la soumission
due à la bulle , contre les magistrats qui rendraient des jugements
pour faire donner les sacrements, et contre ceux qui auraient recours à
cette voie pour les obtenir (1).
Nos principes de liberté des cultes nous font juger aujourd'hui que
(1) Procès-verbal des notaires Duplessis et Heuvrard, du 7 novembre.
S46 M. DE CONDOBCBT ,
1751 à 1760. 1^ droit était là da côté de Févéque. Mais en 4756 on ne voyait pas par-
tout de même. Le Chapitre scandalisé se retira et protesta contre le
mandement épiscopal. Il en appela an bailliage tout en protestant de
son respect pour son évéque. Le bailliage défendit absolument Fimpres-
sion du mandement, et sa publication n'eut pas lieu. Le parlement,
informé, reçut Fappel comme d'abus, et le Chapitre, de son côté,
écrivit au ministre d'Etat, M. de Saint-Florentin (1).
Le gouvernement voulait bien que les Jansénistes fussent retenus
dans leurs écarts, mais il n*aimait ni le bruit , ni Téclat. Les procès
continuels que M. de Condorcet soulevait à chaque pas lui valurent
une lettre de cachet avec invitation de se rendre à Tabbaye de Vaului-
sant. Il j fut conduit par un exempt de la prévôté de THôtel. La poli-
tesse obligeait le Chapitre de lui Lire ses compliments de condoléance,
le prélat les reçut pour ce qu^ils \alaient.
L*eiil de M. de Condorcet laissa au clergé du diocèse un peu de
repos. L'abbé de Tlsle, son grand vicaire, n'osait plus prendre sur lui
des mesures qui auraient amené de nouveaux débats. Quelques discus-
sions, à propos d'un sermon contre la prédestination du P. Âubert,
jésuite, principal du collée, occupèrent Tannée 1757. Après une année
d'exil environ, M. d^ Condorcet revint à Auxerre (6 décembre). Le
Chapitre , ponctuel dans Tobservaiion des formes , alla lui rendre
visite et le complimenter. Après vint le bailliage auquel il devait une
(1} Les qocreHes; sans nombre, de FéTèqoe avec son Chapitre , donnèrent lien k
une foole de pamphlets. Il v en aTait on fort long en Ters, sur le maoTais ménage
de Jacques (allusion an prénom de M. de Condorcet ) et de sa femme. L'aateur y
exposait Fobjet des débats et finissAÎt, comme de raison, par donner tort k
Jacques qui , disait-on , Knttait sa femme. Il finissait par cette strophe :
Il a menti le faiseur d'èpigramme.
Quand il nous dit que Jacques bat sa femme ;
Il ne se peut , en loici b raison :
C'est que pour battre il faut <^tre en présence ,
Et celui-ci , depuis son alliance,
N'est point entré dans la maison ;
Ils font grand bruit , mais ce n'esl pas merreille.
La cause . au Trai , s'en découTre en un mot :
Ici réponse è son ménage veille , .
Tandis qu'an loin monsieur mange sa doc.
CENT QUATRIÈME ÉYÊQUE d'aUXERRE. 547
bonne part de son exil. Il fallut de part et d'autre, dit avec raison 1754 k neo.
M. Chardon (1), toutes les ressources du bon ton et de la politesse pour
dissimuler TembarraH dans lequel on se trouvait.
La conférence avec le ( hapitre n'amena aucun résultat, chacun res-
tant sur son terrain. Le Chapitre essaya encore, la veille de Noël, de
déterminer Tévéque à venir dans son église. Mais, après une nouvelle
audience ou M. de Condorcet s'exprima avec sévérité sur la conduite du
Chapitre et surtout contre la mémoire de M. de Caylus, c^ qui souleva
de la part des chanoines un murmure général , le Chapitre se retira sans
plus de succès que la première fois (2).
Le reste de Tépiscopat de 'M. di; Condorcet se passa dans un
état de lutte sourde, mais continuelle. Les PP. Jésuites travaillaient
avec ardeur, mais non sans obstacles , dans certaines parties du dio-
cèse, à ramener les fidèles dans la voie de l'Eglise (5). Les Jansénistes
leur reprochaient leur grande indulgence approuvée par l'évéque lui-
même (4), et les cérémonies populaires par lesquelles ils frappaient l'es-
prit des habitants des campagnes. La ville de Gien , où le curé de
Saint- Laurent les accueillait favorablement , fut surtout agitée par leurs
(1) Hist. d'Auxerrc.
(2) y. Recueil de Lettres du Chapitre à Mgr Tévéque d'Aiixerre, in-12, Bibliot.
d'Auxerre, n. 3032.
(3) A Etais et dans d'autres villages de la Puysaie. En 1756, les curés d*Entrains,
deTreigny, Lainsecq, etc., les assignèrent au bailliage comme ayant entrepris sur
les droits des curés, en faisant faire des premières communions. Il parut en cette
année des tetlret à un ami, au sujet du mandement de Tévêque pour les missions
dans son diocèse. L'auteur y traite les travaux des jésuites de scandaleux, et voit
un grand danger dans leur propagation.
(4) On Gt, au sujet de la facilité avec laquelle on prétendait que M. de Condorcet
accordait les ordres, pourvu qu'on signât le formulaire, les mauvais vers suivants:
Heureuse église , Auxerre , lieu charmant ,
De ton prélat Tadresse peu commune ,
Rendra bientôt ton pays florissant.
Il ne faut plus , pour y fSkire fortune ,
Que deux outils , la plume et le rasoir ,
En griffonnant sa simple signature ,
Tout aspirant y prouve son savoir
Et les barbiers y donnent la tonsure.
*- (V. M> du chanoine Blonde).
548 JÊ. BC C09MMICCT, CE3IT Qt'AniDn ÉTÉQCK d'aCIEBBE.
^ ij^ prédications. La majorité des chanoines de la collégiale étant opposée
aox Jésuites . il éclata nne dirision déplorable. La Tille de Donzr, qui
Tenait de perdre son cnré, fot également exposée ao scandale. On TÎt
on nooTeaa pasteor refuser les sacrements à ooe dame. Le bailliage
d^Âoxerre j décréta de prise de corps un Ticaire; le même Eut ent lien
à VarzT.
En 4760, M. de Condorcet fit b Tisite des paroisses de son dio-
cèse. Il essaja encore de déraciner Fesprit janséniste si bien implanté
par M. de Cajins. Mais les curés Ini opposèrent nne force d^inertie io-
TÎncible. On rapporte qn^étant à Gien etTisitant Féglise Saint-Lonîs, il
reçnt^ de la part de quelques habitants, des plaintes contre leur curé.
Les partisans de celui-ci Toulurent le défendre. De tk grand brait qui
obligea l'éTéque à se retirer touteffrajé du tumulte.
Le chanoine Blonde, dans son recueil resté manuscrit, raconte fort
en détail h réception que fil le prélat aux curés de Fouronnes et de
FontenaiDes, lorsqu'ils conduisirent à G>orson, pour être confirmées,
quelquesHines de leurs ouailles seulement , tandis que le curé de
Courson en amena plus de 300. c Voyons ce petit nombre d*élus de
Fontenailles » , dit ironiquement TéTéque. D continua dans cette dis*
position à interroger les néophytes, et tança Tertement le curé de
Fouronnes, qui soutenait selon lui des erreurs condamnées par l'Eglise.
A Yermanton ce fut encore pis. Le curé , qui était zélé janséniste, fut
rudement mené, ainsi que le maître et la maîtresse d'école.
Cette tournée fut h Tisite d'adieu de M. de G>ndorcet. Dése^>érant
de faire aucim bien dans le diocèse, il songea à quitter Auxerre pour le
siège de Lisieux. Cette affaire fut traitée dans le plus grand secret. Le
l"* décembre 1760, un arrangement fut signé entre lui et M. de Gcé,
éTéque de Trojes, qui dcTait lui succéder. Le ministre j donna son ap-
probation. Ce ne fut toutefois qu'au mois de mars suÎTant que le chan-
gement fut connu. On Terra dans le chapitre suiTant comment son
successeur fut installé.
Il se passa diins le diocèse, pendant le court épiscopat de M. de
Condorcet , peu de faits intéressants concernant les communautés reli*
gieuses. Le 50 juillet 4757, le Chapitre cathédral députa quatre cha-
MÎMS pour »8Îster k b pose de b première pierre du pont de CraTan.
M. DE GICÉ, CENT CINQUIÈME ÉVÉQUE d'aUXERRE. 549
Les frais de cetle cérémonie coûtèrent 505 liv. Ce corps, qui ne 1754 ^ n^o.
perdait de vue aucun de ses droits, fit encore respecter sa juridiction dans
le clottre , lorsqu'en 1759 les oiBciers municipaux voulurent y exercer
la leur. Ce fut dans cette même année qu'eut lieu la pose de la pre-
mière pierre de la nouvelle église du monastère de Reigny. Il y avait
déjà longtemps que l'ancienne avait été ruinée par les reilres du duc
de Bouillon. On y avait fait quelques réparations depuis, mais l'infiltra-
tion des eaux de la Cure Tavait complètement dégradée.
CHAPITRE IV.
M. DE aCÊ , CVe ÉVÊQUE D'AUXERRE. *
Jean-Bapliste-Marie Champion de Cicé, né à Rennes, le 10 février lîeosi isoi.
1725, était fils d*un membre du parlement de Bretagne. Destiné à la
carrière ecclésiastique, il fit ses études à Paris, où il prit ses grades
successifs jusqu'à celui de docteur en théologie. Le cardinal de La
Rochefoucaud le choisit ensuite pour son vicaire-général. En 1758 il
obtint du roi Févéché de Troyes.
On a vu, dans le chapitre précédent, comment M. de Condorcet
quitta le siège d'Auxerre , d'accord avec M. de Cicé. Le pape, par une
bulle du 14 des calendes de mars 1760, avait nommé M. de Cicé à
Auxerre. Il prit possession le 2 mars 1761. Le Chapitre cathédral
n'avait été prévenu de rien. Lorsqu'on apprit que le nouvel évêque
était arrivé vers midi, au palais épiscopal, accompagné du grand archi-
diacre de Sens, de plusieurs chanoines de cette église, de l'abbé
d'Osmond et d'un notaire, l'émoi fut grand. Cependant, le grand-
archidiacre convoqua le Chapitre pour entendre la lecture de la bulle
qui préconisait M. de Cicé en qualité d'évéque d'Auxerre.- La manière
bienveillante avec laquelle l'abbé d'Osmond s'exprima envers le Cha-
pitre fit une impression favorable. Après que l'abbé se fut retiré, on
délibéra longtemps. Les vieux chanoines jansénistes se révoltaient des
550 M. DE CICÉ,
1700 il 1801. {>rooédës qu'on avait mis daos cette affaire; mais c'était la suite de
l'état de suspicion dans lequel le Chapitre était k la cour depuis loog-
teraps. Cependant M. de Cicé était en règle et paraissait disposé à faire
constater le refus qu'on pourrait lui opposer. Les plus tenaces voulaient
on ajournement, à cause du manque d'une bulle particulière que les
papes étaient dans Tusage d'adresser aui Chapitres, pour leur annoncer
la préconisation d'un nouvel évéque. M. de Cicé promettait cependant
de s'en pourvoir ultérieurement. Enfin, le Chapitre se résolut, sur les
instances de M. Clément, trésorier, à l'obéissance aux ordres du roi
et du pape. L'intronisation^eut lieu avec les cérémonies usitées (1). Le
serment d'obéissance dû à l'archevêque, comme métropolitain, fut
prêté par M. de Cicé, le 29® du mois même de son installation ; il
paya 400 livres pour le droit de chapes (2).
Le clergé du diocèse, formé avec amour par M. de Caylus dans
l'esprit janséniste, avait été fort attaqué par M. de Condorcet
qui avait fini par renoncer à la lutte. M. de Cicé va s'y prendre plus
adroitement pour arriver à désunir et à amoindrir ce corps compact et
puissant dont le Chapitre était la tête. Doué de beaucoup d'esprit et
de finesse, M. de Cicé agissait toujours avec la plus grande prudence.
L'histoire des principales mesures prises sous son épiscopat en est la
preuve. Il savait se faire des partisans par son affabilité et ne tarda pas
ainsi k pouvoir lutter d'influence avec le parti janséniste.
Les vieux jansénistes qui étaient sur leurs gardes s'aperçurent de ce
changement de manœuvre et n'en furent pas dupes. Il courût alors
(1) Chardon, t. n, ttOO.
(8) Voici le texte du «erment prêté par l'évêqne et écrit de sa main sur le pré-
cieux pontifical métropolitain qui servait à cet usage depuis le xm" siècle :
« Ego N. Deo et sanctœ matri ecclesiae Senon. et tibi E. ac R. P. Paulo d'Al-
bert de Luynes, S. R. E. cardinalis Senonensis archicpiscopo , tuisque successo-
ribus debitam subjcctionem et obedientiam , ore promitto et manu propria con-
firme. Actum Senonis super altare maiusejusdem ecclesiae^annoDomini 1761, die
vero mensis martii 29.
» J. B. Episc. Autiss. »
Ce manuscrit, qui se trouvait en 1849 dans la collection Tarbé, a été acheté par
M. de Salis de Metz et emporté du pays sans qu'on ait fait d^efTorts pour Tac-
qucrir.
CENT CINQUIÈME ÉVÊQUE d'aUXERHE. 351
one certaine fable des deux chats^ dédiée au Chapitre d'Auxerre, qui 17^0 k m».
peignait bien les procédés sans ménagement et aussi infructueux de
M. de Condorcet, auxquels avaient succédé les avances doucereuses
de M. de Gicé, qui menaçaient bien davantage Tindépendancedu clergé.
La morale de la fable était ainsi conçue :
Gecy s'adresse à vous, prêtres peu clairvoyans,
De Condorcet Thumeur atrabilaire
Vous rendit circonspects, sages et prévoyans :
Mais de Gicé la douceur mensongère
Vous charme y vous enchante et vous asservira.
Ge que dans sa fureur le premier n*a pu faire.
En vous flattant le second le fera (1).
Cependant , dès le commencement de son épiscopat , il perdit dans
la communauté des Jésuites, un levier bien puissant sur les populations.
Ce corps , qui luttait depuis un siècle, avec des alternatives de succès
et de défaites, contre les parlements et les jansénistes leurs protégés,
fut atteint dans son existence par deux arrêts du G aoât 1762, de ma-
nière à ne pouvoir s'en relever. La passion exalta ses ennemis » et l'on
est surpris, lorsqu'on lit les considérants qui précèdent sa proscription,
de l'étrangeté de quelques-uns des motifs donnés pour le condamner.
Quoiqu'il en soit, on exécuta & Âuxerre l'arrêt du parlement qui ex-
pulsait les Jésuites des maisons d'édtication. Mais il surgit de cette
question une cause de discorde, entre Tévêque et le parti janséniste, qui
dura plus de douze années. La commission chargée de rendre compte
au corps municipal de l'état du collège , conclut en demandant la
réunion de tous les biens des Jésuites à cet établissement nouveau
attendu que les Pères ayant fait vœu de pauvreté, n'avaient pu acquérir
que pour la maison. Les revenus étaient estimés à 7,669 liv. Le mé-
moire critique sévèrement le mode d'enseigner des Jésuites qui, dit-on,
en sont encore aux rêveries d'Âristole pour la philosophie. Leurs prin-
cipes d'obéissance absolue à l'église romaine, sont l'objet de réflexions
pea favorables, et l'on reconnaît, dans cette pièce, que ses auteurs
étaient de fervents élèves de M. de Caylus. La commission conclut à ce
que le collège soit remis entre les mains de professeurs séculiers , ce
(1) Extr. du Recueil du chanoine Blonde.
352 M. DE CICÉ ,
176D ï 1801. quî fat adopté. Le parlement aatorisa , par arrêt du 26 février, le corps
monicipal 2i traiter en conséquence. Peu de temps après, le 5 avril,
Tabbé Magne, ancien oratorien, prit possession du collège avec le titre
de principal. Il avait avec lui un sons «principal et six professeurs de
son choix et qui étaient soumis à l'agrément du corps municipal. Leur
traitement s'élevait k 5,450 liv. par an.
Toute cette affaire s'était traitée en l'absence de Tévéque dont on
craignait l'opposition, déj2i manifestée par des remontrances de son
vicaire-général, l'abbé de Cicé.
Lorsque le prélat fut arrivé, il jugea de suite qu'il aurait affaire à
forte partie. Il offrit de faire diriger le collège par les Oratoriens ou par
les Doctrinaires, auxquels il donnerait six prébendes, si le Chapitre y
consentait.
Mais le corps municipal repoussa ses propositions, maintint le con*
cordât fait avec l'abbé Magne et en fit ordonner l'exécution provisoire par
le bailliage, le 20 avril. Il arrêta, en outre , qu'à Tavenir , tous les
professeurs et le principal lui-même, seraient pris parmi les maitres-ès-
arts de toutes les universités du royaume.
M« de Cicé ne se tint pas pour battu et tourna les difficultés qu'il
rencontrait, en obtenant d'abord du roi un édit du mois de février 1763,
qui réglait l'administration des collèges. L'article 6 qui s'appliquait k
Auxerre et aux autres villes où il n'existait pas de parlement, portait
que les collèges dirigés par des séculiers seraient administrés par un
bureau composé de l'évéque président, du premier officier de la justice
royale , du procureur du roi, de deux officiers municipaux, de deux
notables et du principal du collège. Le nouveau bureau, après examen
du concordat passé avec l'abbé Magne, l'approuva malgré les efforts de
M. de Cicé et l'adressa au procureur-général. Les lettres-patentes , du
iO novembre suivant, qui confirmaient le nouvel établissement du col-
lège, montrèrent par leurs dispositions que l'influence de M. de Cicé les
avait dictées. En effet, en vertu de l'article 10, le principal et les pro-
fesseurs devaient être maitres-es-arts de l'Université de Paris. Celte
condition sapait par sa base le concordat qui régissait le collège, car il
n'y avait que le principal qui eût le grade exigé. Mais le parlement,
bien renseigné sur le but qu'on se proposait, ayant refusé l'enregistre-
mtiamt^tt l'ji ry^'r^i
CENT CINQUIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 555
ment, il fallut en référer au roi qui, ayant appris les motifs du refus, y,^ ^ ^^^^
les approuva et ordonna que les lettres-patentes ne seraient appliquées,
dans la clause relative aux grades, qu'à mesure des extinctions.
Le séminaire, qui était devenu entre les mains de M. de ('aylus une
pépinière janséniste , fut rétabli comme il était dans son origine, et la
direction fut rendue aux Lazaristes. L'évéque complétait ainsi les me-
sures qu'il prenait sans bruit contre le clergé janséniste.
L'année 4762 vit M. de Cicé participer à plusieurs actes intéres-
sants (1). Il consacra solennellement la chapelle du collège de Clamecy.
Il témoigna de sa sollicitude pour le bien des pauvres en faisant ac-
corder à l'hôpital-général d'Âuxerre une somme de 4,800 liv., sur le
revenu annuel de la fondation de M. le président Cochet de Saint-
Yalier, pour les diocèses du royaume et pour Tobjet le plus utile. Il
(il affecter ce don au paiement des travaux de l'église qui s'élevait sur
l'emplacement de la chapelle de Notre-Dame-de-Lorette et qui fut
consacrée le 28 jjuillet 17G4. La Société des Sciences d'Auxerre tenait
souvent des séances dans son palais et en sa présence. Pendant l'une
de ces réunions, Tévéque annonça l'intention de faire reconstruire le
palais épiscopal et d'en affecter une partie à l'usage de la Société.
Mais le projet ne fut pas exécuté (2).
Il avait promis, dès la première visite que lui fit la compagnie, de
la faire ériger en académie royale ; mais les divisions qui s'élevèrent
entre lui et les principaux membres, MM. Mignot, Potel, Moreau et
autres, tous anciens partisans de M. de Caylus, lui firent ajourner in-
définiment sa promesse. La Société, qui s'était adjoint comme mem-
bre correspondant M. de Livry, premier commis du ministère de la
(1) L'année précédente, il dvait sévèrement réprimandé la supérieure des Béné-
dictines de Saint-Fargeau, pour sa désobéissance au sujet d'un confesseur qu'il avait
retiré à sa communauté et qu'il avait remplacé par M. Brûlé , duycn de Saint-
Fargeau. Après une admonestation solennelle où les sœurs sollicitèrent à genoux
le pardon de leur supérieure , il accorda la gr&ce de cette dernière. -* Arch. de
l'Yonne 1761.
(2) M. de Cicé fit reconstruire , au commencement de son épiscopat, le château
de Régennes dont il ne reste plus de vestiges. C'était un vaste bâtiment flanqué de
deux ailes. — Voy* l'Annuaire de l'Vonne de 1840.
II 25
354 M. DB CIۃ,
17G0 i 1801. maison du roi, comptait sur sa protection pour obtenir le titre qu^elle
sollicitait ; mais le crédit de M. deCicé empêcha le succès, et au com-
roencement de 4772, la Société, au milieu des grands débats que sus-
cita dans la ville l'édit du 51 mai 1765, sur Toi^anisation des muni-
cipalités, se vit frappée de suspension par ordre du roi. Ses séances
n^ont pas été reprises.
I La division la plus grande régnait alors dans la ville d*Auxerre.
j Les querelles religieuses entre les jansénistes et les partisans des
jésoiles s'étaient transportées sur le terrain civil. Les premiers, défen-
seurs des doctrines de M. de Caylus et soutiens du parlement , avaient
encore une grande majorité dans le corps municipal et dans le bail-
! liage ; ils avaient reçu le surnom de Latins. Les autres , gagnés par
M. de Cicé , suivaient les ordres de la cour dans sa lutte contre les
parlementaires; on les avait surnommés les Grecs. L'occasion leur
parut belle lors du changement de la loi qui réglementait les munici-
palités, pour expulser leurs adversaires de Tbôtel-de-ville ou ils irô-
j naient depuis longtemps.
- On verra, dans l'histoire civile, le récit de ces débals auxquels
M. de Cicé dut prendre une grande part, sous peine de voir Tantique
autorité de Tévèque disparaître dans sa ville capitale.
En 1765, le sieur Crespin, prédicateur du sermon du lundi de
Pâques , dans la cathédrale , fut la cause d'un débat entre Tévéque et
son Chapitre. Il s'agissait d'opinions émises sur la nécessité de la fré-
quente communion. Le Chapitre n'y entendait pas raillerie. L'évéque
soutint son prédicateur, poussa le Chapitre et se plaignit , dans une
visite que lui firent des députés, de la conduite de leurs confrères. Il
voulut qu'ils lui laissassent par écrit ce qu'ils étaient chargés de lui
dire; mais ils s'y refusèrent. L'évêque donna à M. Crespin un certi-
ficat sur l'orthodoxie de son sermon. Celui-ci en demanda Tinseriion
dans les registres du Chapitre qui s'y opposa ; mais il résulte, des dis-
cussions que cette affaire souleva, que l'évêque avait acquis dans ce
corps un certain nombre de partisans.
L'affaire de la régale, reprise et abandonnée tour à tour par les oiTi-
ciers du roi , qui ne perdaient pas volontiers de leurs prérogatives,
avait été l'objet de nouvelles instances à la mort de M. de Caylus.
\
CENT CINQUIÈME ÉVÊQUE d'aUXERUE. 355
Malgré les arrêts du 23 mars 1513 ci du 16 jai^vier 1555, qui nooji isoi.
établissaient le droit du Chapitre, le parlement avait reçu , le 18 fé*
vrier 1762, l'opposition du procureur-général. L'évéque et le Chapitre,
appuyés sur une consultation de six avocats célèbres du parlement, se
pourvoient en cassaiion. Alors le conseil d'état, par arrêt du 21 mars
1763 , ordonne, sans avoir égard aux procédures, que les parties plai-
deront directement à la grande-chambre comme avant l'arrêt. L'ins-
tance continua ainsi jusqu'en 1766, où, après plusieurs remises, l'af-
faire fut enfin retirée du rôle, et l'église d'Anxerre est demeurée en
possession de son droit qui était jadis très-important, mais dont l'exer-
cice ne devait plus avoir lieu.
Le 15 janvier 1766, M. de Cicé célébra un service solennel pour le
dauphin, auquel il invita tous les corps constitués. Les frais de cette cé-
rémonie furent supportés par la ville, ainsi que cela avait déjà eu lieu ,
en 171 1 , pour le grand-dauphin, et en 1715 pour Louis XIV (1). Le
13 novembre de la même année, il consacra M™^ Henriette de Thyard,
en qualité d'abbesse des Bernardines des Iles.
Le Chapitre, qui venait de faire faire, avec sept médailles d'or lé-
guées par l'abbé Lebeuf , une châsse pour les reliques de saint Germain,
avait appris avec un vif intérêt l'intention où était M. de Cicé , de faire
procéder à la vérification des reliques du saint qui étaient toujours
sous les scellés. Sept commissaires, parmi lesquels étaient MM. Clément
et Potel f furent députés auprès de l'évéque , pour lui témoigner du
grand désir du Chapitre sur cet objet (1767). On ne voit pas que cela
ait abouti à une solution quelconque , soit que Févêque ait hésité de
crainte d'erreur, soit autrement.
Il a été question plusieurs fois, dans le cours de ces Mémoires, des
tentatives«d*usurpation de pouvoirs, faites parles évêques de Bethléem.
En 1769, M. de Quélen , alors titulaire de cet évêché inpartibus , en-
treprit, après quatorze années d'épiscopat, de ressusciter les anciennes
prétentions à la juridiction ecclésiastique dans la chapelle et le bourg
de Pantenor ou de Bethléem \k Clamecy. Il s'y rendit au mois de mai,
accompagné de cinq ecclésiastiques, en institua un grand-archidiacre et
(1) Reg. du Chapitre, 17G6.
556 M. DE CICÉ,
1760 i 18*1. vîcaire-géDéral cl on autre secrétaire de son évficlié. Il fil ensuite deux
ordinations et annonça qn'il viendrait l'année suivante ordincr ceux
qui se présenteraient régulièrement. L'évëque d*Auxerrc ne pouvait
laisser passer cet empiétement sans protester. Ce fut Tobjct d*une ins-
tance dont la suite ne nous est pas connue (1).
M. de Cicé avait compté avec raison sur le temps pour triompher
du parti janséniste. A mesure que la mort le délivrait des principaux
chefs du Chapitre, il renouvelait par des éléments anti-jansénistes ce corps
puissant par ses lumières et ses richesses. M. Mignol, grnnd-chanlre,
mourut le 11 mai 1770. C'était un des plus marquants des chanoines
et des collaborateurs de M. de Caylus. Il légua au Chapitre sa biblio-
thèque» composée de 3,000 volumes. Le choix de son successeur
souleva des diflBcultés sans nombre. L'abbé Letellier, élu, ne voulut
signer le formulaire qu'avec des réserves subtiles, et en promettant
seulement une soumission de respect et de discipline par rapport au
fait de l'attribution des cinq propositions au livre de Jansénius. De
là refus de l'évéque d'approuver l'élection. Douze chanoines avaient
même protesté contre ce choix (2). M. de Cicé nomme de son chef
M. Gaudet h la dignité de chantre. Le Chapitre refuse de rinstaller.
Deux notaires y suppléent et le parlement Maupeou Vy maintient par
arrêt , malgré les protestations du Chapitre.
M. Vaultier avait été pourvu du lectorat, en 1769, après la mort de
M. Créthé. M. Lorieux remplaça M. Carrouge, sous-cliantre, en 1771 .
L'archidiacre dePujsaie, M. Dettey, le panégyriste de M. de Caylus,
mourut en 1775 , et M. Huet , grand-archidiacre, en 1779. Il y avait
toujours un point grave qui demeurait depuis 1746 sans solution,
c'était l'élection du doyen. A la prise de possession de M. de Cicé, le
Chapitre avait fait des instances auprès de lui pour qu'il sollicitât la
levée de Tinterdit porté par la cour. Dans les premières années du règne
de Louis XVI , la question fut remise sur le tapis. En 1778, M. Frap-
pier proposa d*adresser un mémoire au ministre. Le Chapitre ajourna
ce projet qui fut repris en 1780. Il faisait valoir, auprès de M. Amelot
(!) Arch de r Yonne. —* évêchéde Bethléem.
(2) M. Frappier fit h ce sujet un discours qui fut imprimé.
wr-rT».MC
CENT CINQUIÈMB ÉVÉQUE d'aUXERRE. 557
et de M. de Maurepas^ les ioeonvéoients de l'état de choses où il se trou- neo k isoi.
vait et la nécessité où il était d'avoir un chef stable , le C hapitre étant
composé de six dignitaires et de cinquante-deux chanoines. M. de Cicé
appuya la requête, et la défense d'élire un doyen fut enfin levée. L'élec-
tion de ce chef du Chapitre était une grande affaire ; elle dura trois
jours, et M. de Robien , chanoine d^Âuxerre et prêtre breton , rem-
porta enfin sur M. Delard , son concurrent. L'évéque ayant mis dans
l'acte de confirmation quelques mots qui déplurent au Chapitre , on y
fit des réserves.
Les vicissitudes que la politique et les intrigues locales apportaient
dans le personnel du corps municipal d'Auxerre, devaient se refléter sin-
gulièrement sur le bureau d'administration du collège qui était à sa
nomination. En 1772, les Grecs ayant triomphé dans la municipalité,
changèrent le bureau et atteignirent cinq des professeurs que la décla-
ration du parlement de 1764 avait protégés jusque-1^. Ils eurent le
sort des Jésuites et furent évincés avec une mince indemnité. Ne pou-
vant expulser les autres maîtres et notamment l'abbé Leroi , principal,
on résolut de s'en défaire par un procès criminel. Leur esprit janséniste
fut la cause principale de leur proscription. On les accusa de faire lire
à leurs élèves de mauvais livres , tels que l'histoire de Port-Royal, la
vie du diacre Paris , les Nouvelles eclésiastiques , etc. On ajouta qu'ils
tenaient des assemblées nocturnes et avaient introduit des femmes dans
le collège. Le bailliage, renouvelé depuis peu, après la création du
parlement Maupeou, accueillit avec passion les dénonciations ano-
nymes portées contre ces professeurs. Deux d'entre eux , les sieurs
Hautefage, sous-principal, et Lefranc, maître de quartier, furent dé-
crétés de prise de corps, et le principal» l'abbé Leroi , assigné pour
être ouï. Le parlement, renchérit sur ces préliminaires, décréta tous
les accusés de prise de corps et y comprit encore deux des professeurs
renvoyés par le bureau précédent.
Les accusés prirent la fuite, et la procédure suivie contre eux fut
poussée activement. Le 14 août 1772, il intervint une sentence du
bailliage qui déclara tous les accusés c véhémentement suspects d'avoir,
» par une association criminelle, combiné un plan d'éducation
» dangereuse et pernicieuse , tendant a former ^ dans la jeunesse con-
17(30 h 1801.
358 M. DB CICÉ,
» fiée à leurs soins, un esprit d'insubordination et de révolte contre
» toole aotorité ; » et en conséquence, et après Ténoncé des crimes im-
putés particulièrement à chacun, condamna les sieurs Haulefage et
Lefranc au fouet, h la marque et aux galères h perpétuité, et Tabbé
Leroi au bannissement perpétuel et à la confiscation de ses biens. Trois
autres professeurs furent Clément atteints plus ou moins gravement
par la sentence. L'exécution eut lieu en effigie, par la main du bour-
reau qui attacha la sentence sur un écriteau planté au milieu de la place
des Fontaines , et les sergents la publièrent dans tout le ressort du
bailliage.
Un contemporain de cet événement rapporte qu'à cette nouvelle la
consternation fut générale. En effet, la vengeance du parti grec était
atroce et rien ne peut la justifier. M. Chardon essaie d'en atténuer la
cruauté en expliquant la situation des juges qui condamnaient des con-
tumaces et qui étaient à cette époque trop servilement attachés a Taxiôme
des criminalistes : fuga fugimlem eondemnat. Mais ce moyen ne peut
être accepté quand on connaît l'esprit de parti qui dirigeait le bailliage
dans cette affaire. M. de Cicé ne fui nécessairement pas étranger à la
poursuite des professeurs du collège. Il avait la présidence du bureau
d'administration , et les coups qui leur étaient portés n'auraient eu
aucune force sans Tavis de ce corps.
Le changement des professeurs ne se restreignit pas à Auxerre
seulement. M. de Cicé profita de la circonstance pour remplacer ceux
des petits collèges de Varzy, Clamecy et La Charité. Il prit aussi h cette
époque des mesures pour la surveillance des écoles primaires. Une
sentence du bailliage d'Âuxerre, du 14 août 1773, homologua un
règlement sur cet objet. Il fut défendu à toutes personnes d'enseigner
sans approbation et sans en avoir justifié devant les officiers de justice.
Le parlement confirma d'abord cette sentence le 25 février 1774, puis
l'annula le 15 janvier 1776.
L'heure de la réparation ne tarda pas k sonner pour les victimes de
la vengeance du bailliage et du parti grec. Deux des professeurs,
MM. Ricard et Gendrot, les moins maltraités, avaient déjà obtenu
leur acquittement du parlement Maupeou. Lorsqu'à la mort de
Louis XV, au mois de novembre 1774, ce corps fut renversé et l'an-
-IR»^-»». ■■Jt^J,--i^JLlJM!M{li
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CENT CINQUIÈME ÉVÉQUB D*AUXERRE. 559
cieo parlemcni rétabli, les autres professeurs purgèrent leur coolamace
cl obtinrent, le 20 juillet 1775, une sentence du bailliage du palais
qui déclara fausses et calomnieuses les accusations portées contre eux.
Le parlement confirma ce jugement le 28 janvier suivant et autorisa
les accusés a prendre à partie M. Marie de Saint-Georges, procureur
du roi, pour avoir donné les conclusions adoptées dans la sentence de
1775, ainsi que les sept juges qui Pavaient signée; MM. Leroi eiNavier
furent rétablis dans leurs fonctions; et tout ce qui avait été fait au collège,
fut regardé comme nul.
Le Chapitre, qui n*avait pas vu d'un bon œil toutes ces persécutions,
rendit à MM. Leroi , prébende , et Hautefage , semi-prébendé , les
fruits de leurs bénéfices. L'abbé Leroi reprit aussi possession du collée.
Cependant le triomphe du parti latin ne fut pas de longue durée.
M. de Gicé , n'ayant pu se rendre maître de la direction du collège,
obtint du ministre un changement considérable dans sa destination.
Au moment de la rentrée des classes de l'année 1776, parut une dé-
claration du roi qui l'érigeait en école royale militaire, et peu de jours
après line deuxième déclaration en confia la direction aux Bénédictins
de la congrégation de Saint-Maur, à compter du 1®^ décembre 1777.
Ces Pères firent revivre les antiques écoles de Saint-Germain et orgat--
nisèrent des cours complets d'études. Soixante élèves y étaient entre-
tenus aux frais du trésor royal , et sous leur administration il se forma
des sujets qui devaient être un jour la gloire de leur pays (1).
La nécessité du récit nous a obligés de négliger plusieurs faits d'admi-
nistration épiscopale que nous allons réunir ici.
En 1768 fut célébré solennellement l'anniversaire séculaire de l'ex-
pulsion des Huguenots de la ville d'Âuxerre. Le journal de Verdun, du
mois de mars 1769, rapporte qu'après la procession il y eut h rbôte'
de ville un souper de 40 couverts , auquel assista M. le comte de
Sparre, maréchal de camp, qui fixait sa résidence dans cette ville (2)«
(1) Fourier, secrétaire perpétuel de 1* Académie des sciences, Da vous t , prince
d'Ekmutil, ont fait leurs études à l'école militaire.
(2) C'est lui qui fit construire | en 1761 , dans le faubourg Saint-Gervais, la jolie
maison qui porte son nom.
1700 il 1801.
360 M. DE CICÉ ,
rm » 1891. I^ Chapitre fit distribuer 800 livres de pin aax pavres. Il y Tint an
cooeonrs înimense des pjs Toisins , et Foo porta à ^,000 le Booibre
des assstants k la cérémooie.
M. de Cicé nomma, en 1779 , M. Fabbé de Poiignac, cbanoine de
h caihédnde, son vicaire-général (Il devint évéqne de Meau en 1779).
La transbtion dn titre dn priearé de Saint-Nicolas de ReveiBon , pa-
roisse de Saint-Cjr-lès-Entrains, dans féglise proissiale de cette ville,
ent lien b même année.
Les registres de Tévèché noos apprennent qae M. Vaoltier, vicaire-
général, fit, le 5 janvier 1777, b trandation des reliqoes de saint
Marien el des antres saints renfermés dans les crjptes de Tégiise Saint-
Germain. Le procès- verbal du 50 joillet 1665, qoi s*j trouva, serrit
de gnide. Le 20 avril suivant , il visita la ch&sse de saint Vigile qni
était intacte. Il j avait alors 19 ossements. En 1779,M. deGcé
ajant obtenu de h libéralité dn roi h commande de Tabbaje de Mo-
lesme, le Chapitre loi envova faire compliment. Le 2 novembre 1781,
b chapelle de Bois-d'Arcj fut ér^ée en snccnrsale snr h demande des
habitants trop élo^nés d'Arcj, leur paroisse primitive. Cette ménw
année, H. de Cicé avait chargé le cnré de Breugnon de s'entendre
avec les autorités de h ville de Chmecj pour remédier aux abus des
processions. Mab ce dernier répondit qu^il différait cette réforme, à
cause de h discorde qui régnait dans b ville (1). La transbtion du
titre du prieuré de Saint-Sauveur eut lieu pr M. de Cicé , en b chn-
pelle de b Vierge de l'église puroissiale, le 26 août 1 7S5. L*éiat
malsain et humide de Fancienne é^isedu prieuré avait forcé D. Rosmau,
abbé de Saint-Germain, k demander ce changement* On interdit b
^pelle de Duenne Tannée suivante.
Les rebtioBs de Tévéque arec son Chapitre avaient toujours quelque
dMMe de froid et de contraint. M. de Cicé n'assistait pas souvent aux
oBces de b cathédrale pendant les grandes fêtes. Son absence de h
ftle de Noël 1781 détermina le Chapitre k Finviter très-instamment,
très-respectueusement k s*j rendre a TaTcnir. il ne donna qu^en
■MMkMHHitfMàétfSUMMMii
CENT CINQUIÈME ÉVÊQUE D^AUXERUE. 561
1784 l'ornement complet qu*il devait à son ^lise, et après de longs yj^^ isoi.
pourparlers.
Pendant les premières années de Tépiscopat de M. de Cicé, le Cha-
pitre catbédral occupa Tactiviié de ses principaux membres à des choses
plus utiles et plus durables que les misérables querelles qui l'agitaient
sous M. de Condorcet. On dressa alors la quatrième collection des
Statuts capilulaires, qui résumait les précédentes, et qui fut homologuée
par le parlement le 15 février 17GG.
Dès 1744, frappé des difformités considérables que les constructions
parasites causaient dans sou église, le Chapitre avait fait abattre le grand
jubé qui coupait la vue du chœur, et Tavait remplacé par deux petits
ambons placés de chaque côté des piliers d'angle. Le projet de décorer
le sanctuaire de la cathédrale dans le goût moderne, était depuis long-
temps dans Tesprit des chanoines. M. de Cicé, consulté, y avait donné
son approbation. Après de mûres délibérations , on adopta un plan
général de décorations fait par M. Ledoux^ architecte. Tout en détrui-
sant plusieurs monuments d'antiquité regrettables ( 1 ) , et notamment
plusieurs tombeaux, nous devons louer le Chapitre de la sobriété et de
la simplicité qui présida aux travaux exécutés de 1767 à 1772. On
éleva alors les belles grilles du chœur et des bas-côtés, le maitre-autel
et l'autel des fériés qui est derrière. Les anges qui portent les candé-
labres du maitre-autel furent l'objet de longs et vifs débats. M. Clé-
ment, trésorier, qui résidait à Paris , s'employa longtemps auprès des
artistes chargés des sculptures. M. de Cicé consacra solennellement le
maltre-autel et celui des fériés, le 21 avril 1772.11 plaça dans le premier
une partie du devant de la tête de S. Jacques-le-Mineur, que J. Amyoty
avait mise en 1576, et dans le second, qu'il dédia à S. Pèlerin, une
parcelle de la tète de ce saint, rapportée de Bouhy en 1716.
Les chapelles des transepts furent également restaurées , et on y
(1) On Tendit en 1776 les magnifiques tapisseries données au seizième siècle par
révéque Baillet, et que Louis XIV avait admirées. Elles ne servaient plus depuis
les nouvelles dispositions du chœur. Elles furent achetées par TIIôtel-Dieu qui les
possède encore. #
%
*■
4
362 M. DE CICÉ,
x7» » mi. P^ àtQi tableau, de S. Michel el de S. Jcao-Bapitsle, qa od y foii
encore (1).
Le Cbapîire araîl fait démolir aussi, eo 1768, réoonne slalnc de
S. Cbristophe qoî s'élcTait à reotrée de h nef. Toos ces graods iravaux
■^aiaieoi po s'exécuter qu\ 1 aide de ressources extraordinaires. On j
dépensa 160,000 livres produites par la rente des coupes de h forêt
deMenj-Vanx.
Tandis que le Chapitre faisait ainsi travailler dans sa cathédrale,
r^isede Saint-Germain tombait en ruines. Le 9 mai 1770, le portail
qui formait une masse considérable, s^écroula par suite*de Taflaissement
de h voAte intérieure. On rc|tara assez mal ce domm^. Sept ans
) après, les moines firent reconstruire le bas-côté nord de la nef par
1 M. Albespejre.
Les écoles de Saint-Charles d^Auxerre n^avaient pas la sympathie
de M. de Cicé ; mais le Chapitre, et notamment son trésorier et plusieurs
carés jansénistes , les soutenaient pr des sacrifices personnels et ^
Taide des souscriptions de cette association que dès lors la malignité
publique avait désignée sous le nom de la 6oiCe à Perreîte. En 1765,
j ces écoles s^étaient étendues dans les divers quartiers ; elles formaient
t trois classes dirigées par huit frères, et recevaient -100 enfants. Elles
; se soutinrent de cette manière jusqu*a h révolution, pendant laquelle
l elles forent supprimées.
I Eo 1771, le Chapitre trouvant Toccasion de témoigner de la sym-
l pathie au pariemeot, envoya MM. Frappicr et Moreau visiter deu\
conseillers, MM. d'Outremoot et Dupuis exilés, Tun ^ Cravan, el Tautre
il Sainl-Bris.
ê* Trois ans après, b situation équivoque ou demeuraient bon nombre
des chanoines leur valut un compliment a double sens de la part de
^ 1 archevêque de Sens , que le Chapitre en corps avait été visiter à
i^évêché, le 19 avril 1714. Le prélat exhorta la compagnie à la paix et
k la soumission envers TÊglise. Les chanoines entachés de jansénisme
se récrièrent comme on le pense bien. M. Frappier surtout alla loin.
Cependant, après beaucoup de paroles, et sur l'attestation de
^f ) Le second tableau est de M. Lagrence jeune -* Aegbt. Cap , année 1787.
CENT CINQUIÈMB ÉVÊQUE d'aUXERRE. 365
M. Vaultier, vicaire général de M. do Cicé, que son snpérieur, quoique ^^ ^ ^^^^
présent, avait été étranger à la réponse, le Chapitre se calma.
Différents symptômes montraient de temps en temps que si les jan-
sénistes avaient perdu du terrain au Chapitre, ils y avaient encore de
l'autorité. Si d*un côté M. Ducreuz adressait de la part de M. Hautefage
l'édition nouvelle qu'il venait de faire des Œuvres complètes d'Arnaud
« que le Chapitre acceptait avec reconnaissance (1782) > M. Poitevin,
chanoine, donnait pour Ta bibliothèque la deuxième partie de l'histoire
du peuple de Dieu du P. Berruyer, à quoi M. Frappier répondait par les
instructions de Mgr Tévéque de Soissons et par le bref du pape Clément
XIII, qui condamnent ce livre. A celte époque la bibliothèque du
Chapitre, formée dès le temps de Lebeuf, enrichie successivement par
les dons de MM. Potel, Huet et autres chanoines, avait pris un grand
développement. Un chanoine était spécialement préposé à sa conser-
vation et au prêt des livres (1).
Mais d'un autre côté» Tesprit de désordre s'était glissé dans le Cha-
pitre. Le sieur Parisot, sous-chantre, entré dans les ordres malgré lui,
se livrait à des écarts fâcheux pour la discipline (2). Plusieurs autres
jeunes chanoines suivaient cet exemple. Un semi-prébendé, nommé
Monteix, originaire d'Auvergne, après quelques années d'exercice,
renouvelant les vieilles prétentions de quelques-uns de ses devanciers,
s'avisa d'attaquer les privilèges et prérogatives des hauts chanoines, et
publia en 1786 un mémoire virulent contre ce qu'il appelait leucs
usurpations. Après un long procès le bailliage et le parlement lui
donnèrent gain de cause. Ces contrariétés occupèrent sérieusement le
Chapitre. Mais l'orage, qui grondait depuis longtemps sur la société
ancienne, allait bientôt faire disparaître tous ces petits débats dans un
danger commun. L'ordre religieux, ébranlé par l'esprit du siècle, avait
contribué lui-même à sa ruine. Malgré les efforts de quelques prêtres,
animés du véritable esprit catholique , on voyait s'étendre dans les
(1) Elle était de plus de 6,000 volumes.
(2) 11 racheta plus tard ce que sa conduite avait eu de regrettable dans sa jeunesse.
L'exil le retrempa. 11 mourut dans une tempête sur les côtes d'Irlande, en reve-
nant en France sous le Ifiactoire.
1700^ 1801.
564 M. DB CICÉ,
corps religieux ce mouvemeol de décadence, indice é?ideol d'un mai
profond.
Le clei^é du diocèse d'Âuxerre n*y étail pas étranger ; nous venons
de le Toir par le grand Chapitre. Le clergé régulier était également
frappé de celte maladie. Depuis deux siècles que la plupart des abbayes
d^hommes étaient données en commande, et servaient de dotation aux
cadets des grandes familles entrés dans les ordres, le nombre des
moines diminuait, la règle s'y affaiblissait. Pontigny était devenu
célèbre ï la fin du dix-huitième siècle par Télégance, la galanterie et les
prodigalités de son avant-dernier abbé, D. Chanlatte, qui mourut en
1788, en laissant le monastère endetté de 400,000 livres. Le zèle reli-
gieux était bien refroidi, et le temps était loin où Ton comptait les
moines de Pontigny parmi les plus savants des enfants de S. Bernard.
Le noviciat ne donnait plus qu'un petit nombre de candidats, même
dans les plus grands monastères. Un édit du mois de mars 1768,
réglementaire des ordres religieux, entreprit leur réforme matérielle.
Les maisons durent être composées dorénavant de quinzo religieux au
moins pour les monastères non réunis en congrégations , et de huit
pour les autres. Il fut interdit au môme Ordre de conserver plus d'un
monastère dans chaque ville (u bourg, à moins que toutes les maisons
de l'Ordre ne fussent au complet, ou que ce ne fût parla permission du
roi* L'édit, provoqué h cet effet par M. Loménie de Brienne, archevêque
de Toulouse, puis de Sens, amena peu de résultats. Les réformes admi-
nistratives, en matière religieuse, n*ont jamais rien produit.
Les principales maisons religieuses du diocèse suivaient, comme
nous Tavons dit, le courant de la décadence. On ne comptait, de 1780
â 1790, à Pontigny, que douze à quinze moines, le même nombre
St-Germain, à Reigny sept, h Saint-Laurent deux; les Ordres mendiants
étaient aussi peu nombreux.
L'abbaye Saint-Germain avait seule montré un peu de distinction
dans cet abaissement. Le cours de philosophie créé en 1695 |)our
douze novices, s'était augmenté, dix ans après, de Tétude delà théologie.
Des jeunes gens de la ville, qui voulaient s'initier à cette haute science,
s'y faisaient inscrire. C'était comme un souvenir lointain des anciennes
écoles de Saint-Germain. -D. Viole, D. Fouruier,P. Bastide, D. Vidal
CENT CINQUIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 565
marquèrent pendant les deux derniers siècles parmi leurs confrères. 17^0 ^ isoi.
Ils furent suivis par les professeurs de Técole militaire, \k la tète desquels
fut placé le digne D. Rosman. Quelques collégiales n'étaient pas
non plus dans un état financier très prospère. Dès 1779, M. de Cicé
projetait de réunir au séminaire celle de Cosne , qui n'avait plus que
2,000 liv. de revenus, c*qui ne pouvait suffire aux chanoines. La
pauvreté du Chapitre de la Cité d'Auxerre ne lui permettait pas de re-
lever son église; ses chanoines voulaient transférer leur office dans la
chapelle de Notre-Dame-des-Yertus , ruinée en 1780, mais que le
grand Chapitre devait faire rebâtir. Ce projet ne fut pas exécuté, non
plus que celui de M. de Cicé, qui voulait les loger sous la voûte de
rentrée du palais épiscopal. Les chanoines de Gien , tombés, par suite
de nombreux procès, dans un état de gêne irrémédiable, étaient me-
nacés d'une saisie générale de leurs revenus. L^évéque étant à Paris,
les autorisa à emprunter 15,000 liv. pour faire face à leurs dettes.
Les grandes abbayes de femmes se soutenaient mieux. En 1 780 Saint-
Julien comptait 25 religieuses, les Bernardines des Isles 19, Crise-
non 15, les Clarisses de Gien 29. Les communautés, fondées depuis le
xvu® siècle avec un but d'ulililé sociale déterminé , étaient remplies de
ferveur. Dans les unes on se livrait à l'éducation des filles pauvres et
au soulagement des malades; dans les autres, on recevait les demoi-
selles de grandes maisons. A Auxerre , les Ursulines , les Visitandines
comptaient chacune plus de 50 religieuses; les Providenciennes, 12;
les Bénédictines de Saint-Fargeau étaient encore 15.
Néanmoins, il régnait dans plusieurs de ces maisons un défaut
d'ordre matériel qui tendait peu à peu à amener leur ruine. Les supé-
rieures dépensaient, à Fenvi de leurs devancières , les ressources du
couvent. Les recettes étaient toujours dépassées ; les travaux de bâtisse
étaient le défaut favori de ces dames. La chambre générale du clergé
avait reconnu le mal et voulait y porter remède en supprimant certaines
maisons pour en relever d'autres plus utiles. C'est ainsi que celle de
Crisenon fut très-menacée, en 1776, par M. de Cicé qui voulait (1) la
(1) On rapporte que lors de la visite de Tévêquc à Crisenon dans laquelle il in-
terdit de recevoir des novkcs, une des anciennes, la sœur Thérèse, se jeta à ses pieds
366 M. DE CICÉ ,
1760 il 1801. réonir k câlle des Iles dont la gêne était graode. La dernière ab-
beftse , H"^ du Mouchet , parvint à la restaurer.
La situation financière des corporations religieuses du' diocèse pré-
sente, au moment de la révolution, un chiffre instructif. Le pouillé de
1781 , formé d'après les déclarations gég^alement amoindries ou
déjà un peu anciennes des établissements^î) , porte les revenus à
572,000 liv. , sur quoi il y a 109,000 liv. de chaires. On peut croire
ce dernier chiffre exact. Mettons le premier au double : ce sera donc
un million de rente que possédaient les corps religieux des deux sexes,
dans le diocèse, à la fin du dernier siècle. Il faudrait y ajouter le revenu
de rOrdre de Malte, qui n^avait qu'un commandeur à Âuxerre, et
celui des 210 curés pour avoir un aperçu du total des revenus du
clergé. Le don gratuit et autres impositions prélevé sur tout le clei^é,
n'avait pas varié depuis un siècle et s'élevait , en 1780, à 59,560 liv.,
suivant le compte-rendu de l'évéque au bureau de la chambre ecclé-
siastique (2).
Les dernières années de Tépiscopat réel de M. de Cicé furent mar-
quées par plusieurs faits importants , indices des grandes réformes qu'il
voulait opérer. En 1783, sur la demande du Chapitre, il réduisit le
nombre des fondations qui était considérable et sans proportion avec
les revenus qui y étaient attribués. En 1634, M. S^ier les avait déjh
et lui dit : « Mgr vous ne nous quitterez pas sans nous dire comme Dieu à nos pre-
mier parents : ereicUe et mulliplieamini.n Je m'en garderai bien, ma chère sœur!
s^écria M. de Cicé.
(1) Nous avons comparé les états de revenus présentés aux districts en 1790, pour
servir à dresser les pensions des religieuses, avec Tcstimation du pouillé, et nous
avons reconnu que certaines maisons n'avaient pas déguisé le chiffre de leurs reve-
nus en 1781; pour d'autres il y a différence d*un tiers ou de moitié : ce qui tient
peut-être, comme nousTavons dit, à la date déjà ancienne des déclarations.
(3) Une remarque qu'on n'a pas assez faite à l'égard des richesses des commu-
nautés religieuses, c'est que leurs rentes en argent ont toujours été en diminuant
de valeur à mesure qu'on se rapprochait des temps modernes, et que par là leurs
ressources se sont réduites à proportion. Ainsi, beaucoup de communautés avaient,
auxiv» et au xv« siècle, donné leurs biens à rentes, perpétuelles, souvent, dans les
villes, à charge d'y bâtir. Or, la valeur de l'argent ayant successivement diminue
d'une manière sensible, une livre de rente qui, au pouvoir de l'argent valait 400
francs au uv* siècle, ne représentait plus que deux francs an xvnr.
CENT CINOUIÈMB ÉV&QUB d'aUXERRE. 367
dimiouées et les avait réglées à une seule par semaine non empêchée 17eo.i1 isoi.
et à une messe basse. En 1762, il y avait 57 anniversaires. Le tablean
de réduction n*en porte plus que 59 parmi lesquels on en reconnaît de
fort anciens, tels que ceux de Robert Âbolanz, de la maison de Cour-
(enay, de Bargedé et de plusieurs évéques.
Le Chapitre de Gien séplignant aussi de ses fondations, M. Ârrault,
chanoine, fut chargé d*examiner sa réclamation (1786).
Un acte d'administration publique auquel M* de Gicé contribua
efficacement , fut Tinlerdiction des anciens cimetières de la ville
d^Âuxerre. Le 7 décembre 1784, il ordonna la suppression immédiate
de ceux des paroisses Notre-Dame-la-d*Hors , Saint-Loup et Saint-
Pélerin; ceux de Saint-Pierre-en-Château, Saint-Eusèbe et Saint-
Pierre-en-Vallée, durent servir encore jusqu'au 1*^ janvier 1786.
L'insuffisance de ces cimetières était reconnue depuis longtemps.
Pendant le cours de sa visite pastorale, au mois d'août 1785,
Tévêque ordonna , sur la demande du Chapitre Sainte-Eugénie et des
oflBciers municipaux de Yarzy, que la treizième prébende de cette col-
légiale, vacante par la mort du titulaire, serait attribuée au principal du
collège, conformément à l'ordonnance d'Orléans. Jusque-là, par un
abus toléré mal-à-propos, le principal ne jouissait pas de cette pré-
bende ; seulement, les treize chanoines s'imposaienjt de manière à lui
faire un équivalent. En 1787, pour pourvoir au traitement du curé et
des vicaires perpétuels qui desservaient la paroisse depuis 1644, le
Chapitre de Yarzy, vu la modicité de son revenu, obtint de Tévéque
Textinction de la trésorerie devenue vacante et l'union de la moitié des
revenus à la cure.
— Cette loi inévitable s'est encore fait sentir aussi directement sur les dotations
en rentes en argent, faites au xii« et au xin« siècle, par les nobles qui plaçaient leurs
filles dans les monastères, ou qui y fondaient leur anniversaire.
Telle rente de 5 liv. qui représentait 800 fr. au mv siècle ne comptait plus que
poursa valeur nominale en 1780. Les censives ont suivi le même décrobsement.
Les guerres civiles du xvi« siècle ont aussi appauvri beaucoup do maisons. Il n*y
a donc que celles qui, comme Pontigny, Saint-Germain, le grand Chapitre, avaient
leurs dotations en biens-fonds considérables, qui ont vu grandir leurs richesses en
raison même du progrès des temps; de manière que ce qu'elles, perdaient d'un côté
elles le retrouvaient de Pautre.
r
»
I
4
368 a. DE ace,
n« 1 i»i. I^ Qupiire calfaëdral, qui éprooTait Jepois quelques aoDées des
tncasseries de b |iart dos semi-prébeDdés, lesquels s'absenuieDl soo-
▼ent et faisaieot mal leor serfice, araii résolu de les remplacer par des
prêtres habitués. On décida h coDversioo du titre de semi-prébeodé
eu commissions simples et réTocables. Ce changement considérable,
eséajé en 1784 et auquel M. de Cicé étaA très-disposé , ne fol pas
définitiTcment réalisé.
M. le comte de Chastellui devait , à b Toussaint de Tannée 1 786 ,
prendre possession de son canonicat. L'évêque en avait été préveDo et
le Chapitre préparait le cérémonial accoutumé, lorsqu'on apprit que la
mdadie de M"* de Civrac , sa belle-mère , lui faisait ajourner soo
projet.
Une aflaire de peu d^intérét en apparence , mais qui révèle la silua-
lion des partis religieux, se passa en 1787. M. Villetard, chanoine
résignataire de la trésorerie du grand Chapitre, de la part de M. Clé-
ment, dernier titulaire, n'avait pu obtenir à Rome ses provisions, ii
cause de son refus de signer le formulaire. H en appela comme d'abos
an parlement qui ordonna à Févéque de lui délivrer ses titres. Refus
de M. Closet, vicaire-général. Deux notaires constatèrent le fait et ont
conservé les dires de M. Villetard, c qui s\Uonne qu'on veuille encore
lui £iire donner une signature non exigée, même pour rex|iédition des
brevets des bénéfices \ la nomination du roi ; » mais ce fut en Tain
quil réclama, Tévéque n'était pas disposé à céder devant Tentêtement
du parti I).
An mois d'avril 1788, la mort de M. Salomon* curé de Saint*
Renobert , qui était regardé comme un saint par les jansénistes ^ leur
f; Les JanséDistes aTaicnt encore de Gdèles sooliens; voici un exemple qui proa->
▼cra jnsqo^à quel point des hommes sensés poussaient U ténacité et h conviciîon.
L*abl>é Dupuj, qui mourut directeur de rhôpital général en 1791. Gt son teslanent
en 1766 à Tâge de 83 ans, et n'v changea pas on mol depuis. Il y proleste ao nom
de Dieu «coolre le monstrueux décrel surpris au premier de ses vicaires, le 8 septem
bre I7f 3.* fl déclare en avoir appelé au conseil œcuménique. Il confesse Icsmirades
du diacre Paris, de pinsieurs desquels il assure avoir élé Inî-méme lémoin et il fiait
en témoignant de son dévouement an Saint>Siége. ~ Archiv . de FIlîMel-Dien
d'Auxcrre, $ U, L. 2.
CENT CINQUIÈMB ÉVÊQUE d'aUXERRE. 569
donna occasion de faire ce qu'on appelle aujourd'hui une démonstra- 17(10 ^ 1801.
lion. On porta le corps en procession dans Tenceinte de sa paroisse et
il fut ensuite conduit au grand cimetière.
L'administration du diocèse était ainsi exposée de temps en temps à
des débats, lorsque la réqiiion dQ3 ^tats-généraux vint ouvrir une
nouvelle ère.
Le clei^é du diocèse s'émut diversement dans cette circonstance. Le
règlement du 24 janvier 1789, en accordant aux simples bénéficiers le
droit de suffrage personnel , tandis que les chanoines des églises cathé-
drales et collégiales, et les religieux n'étaient représentés que par un sur
dix ou sur vingt, souleva les réclamations du Chapitre de la cathédrale
qui, tout en s'y soumettant, crut devoir adresser des remontrances au
roi.
Mais les curés jansénistes , hostiles à Tévéque , saisirent avec empres-
sement cette circonstance pour organiser l'opposition qu'ils voulaient
lui faire à l'élection. Dans l'assemblée des trois Ordres, ils attaquèrent
les chanoines qui se présentaient en qualité de titulaires de bénéfices
et firent réduire le nombre des délégués du grand Chapitre. Le bailli
d'Âuxerre eut fort k faire pour concilier leurs prétentions. Ils agirent
de même à l'égard des titulaires des prieurés. On vit aussi M. Yilletard,
chanoine, proposer k la chambre du clergé d'insérer dans son cahier
la demande de la résidence des évéques , afin d'empêcher la validité de
l'élection de M. de Cicé. Celle-ci sentit le piège et refusa. M. de Cicé
était désigné comme le candidat du clergé du bailliage ; les curés lui
opposèrent M. Marcellot, curé de Saint-Gervais d'Âuxerre. Après
toutes les éliminations , l'assemblée se trouva composée de 234 élec-
teurs. La majorité fut acquise à M. de Cicé, mais h un petit nombre
de voix. M. de Robien, doyen, fut nommé député-adjoint, et
le Trésorier -curé de la collégiale de Toucy, suppléant. Cette opéra-
tion eut lieu le 7 avril et jours suivants. Les pamphlets les plus vio-
lents furent publiés contre le Chapitre cathédral après l'élection.
MM. Pasquier, curé de Saint-Âmatre , et Carré, curé de Sainte-
Pallaye, se signalèrent dans cette circonstance et maltraitèrent ce corps
impitoyablement, lui reprochant son orgueil et ses prétentions ambi-
tieuses.
11 24
« '
370 M. DE CICÉ ,
1760 îi 1801. M. de Cicé, en partant pour se rendre h rassemblée nationale,
nomma M. Viart son vicaire-général (1). Ce chanoine lui était très-
dévoué et devint son correspondant lorsqu'il fut contraint de
s'exiler (2).
Cependant la révolution marchait rapidement et sapait par sa hase
l'antique société française déjà si caduque. Le décret du- 15 février
1790, sur la suppression des Ordres religieux, ahattait une des colonnes
de Téglise catholique. Il fut exécuté sans obstacle dans le diocèse pen-
dant Tannée. Le petit nombre des moines qui habitaient les monastères
se dispersèrent de divers côtés, emportant à peine de leur humble cel-
lule les quelques meubles qu'elle renfermait. On fut môme sévère pour
ceux dé Pontigny, à qui l'on refusa le couvert d'argent qu'ils avaient
apporté dans la maison (3). Quelques-uns devinrent curés de paroisses
après la promulgation de la constitution civile du clergé, d'autres au-
môniers des bataillons de volontaires.
En s'eroparant des biens des moines, l'assemblée nationale voulut
au moins assurer leur existence. Une pension modeste, proportionnée
aux revenus du couvent, leur fut accordée. Ils la touchèrent tant bien
que mal. Les religieuses, rendues au monde qu'elles avaient oublié,
se retirèrent humblement dans leurs familles ; la plupart demeu-
rèrent fidèles à leurs vœux et vécurent obscurément. On cite cepen-
dant quelques apostasies ; mais leur petit nombre fit ressortir davan-
tage la conduite de la majorité.
Nous venons de palrler de la constitution civile du clergé qui jeta une
perturbation profonde dans l'Eglise de France. OËuvre de Camus et des
autres membres du comité ecclésiastique de l'assemblée nationale, animés
de l'esprit janséniste, la constitution avait pour but de rendre le clergé
français indépendant du saint-siége. On bouleversa de fond en comble
l'organisation de l'Eglise de France, pour l'accommoder aux nouvelles
(1) M. Viart est né à Auxcrre en 1750.
(3) Le dernier acte signé par M. de Cicé sur les registres diocésains est du 17
avril 1789. Cest la nomination de M. Yallcray, en qualité d archiprêlrc de Yarzy.
Les vicaires généraux continuèrent encore de signer quelques actes jusqu'au 15
août suivant. S'il y eut un registre postérieur il a disparu.
(3) Arrêté du département du 0 septembre au soir.
<^
CENT CINQUIÈMB ÉVÊQUB D*AUÏERItE. 571
divisions territoriales. Chaque département devint le centre d*on cvôché nco ^ i8,.i
dont il prit le nom et qui fut formé en modifiant les anciennes limites
des diocèses, sans avoir aucunement égard aux traditions. Toute la partie
du diocèse d'Auxerre comprise dans les archiprétrés de Saint-Bris et
d'Auxerre et une portion de celui de Puisaye, furent englobées dans la
nouvelle circonscription qui se composait en même temps d*un démem-
brement du diocèse de Sens. L'archiprétré de Varzy et presque tout
le reste de celui de Puisaye, échurent à Tévéque de Nevers, M. Tollet,
curé de Vandenesse, sacré en 1 791 , et qui donna sa démission en 180i •
La circonscription des départements entraînait celle des diocèses, de
même qu'aux temps primitifs les cités romaines devinrent les chefs-lieux
des nouveaux centres ecclésiastiques; à celte différence près, cependant,
qu'au lu® et au rv® siècle c'était le pouvoir spirituel qui marquait» sur la
carte des Gaules, l'emplacement et l'étendue des églises, tandis qu'en
1790 c'était le pouvoir temporel.
Le spirituel ne futjpas plus respecté que le temporel. La constitution
interdit de reconnaître l'autorité d'aucun évêque ou d'aucun métropo-
litain étranger. Les rapports entre les évêques et le pape na furent plus
que de simple communion , sans reconnaissance de suprématie, l'ins-
titution canonique devant avoir lieu par le métropolitain ou par le plus
ancien évêque de la province. Les Chapitres des cathédrales et des
collégiales furent supprimés ; l' évêque n'eut plus qu'un conseil formé
des vicaires de la paroisse principale de sa ville épiscopale dont il était
lui-même le curé. L'élection des évêques et des curés fut confiée aox
citoyens, et les curés purent choisir eux-mêmes leurs vicaires parmi les
prêtres du diocèse, sans avoir besoin de la confirmation épisco|)ale.
Le roi, après de longues hésitations, avait fini par donner son appro-
bation à la constitution civile du clergé ; mais bientôt une réprobation so-
lennelle, lancée par le pape Pie VI, vint avertir les catholiques du danger
que courait leur foi. Trente évêques de la Constituante publièrent une
Exposition desprincipes dans laquelle les règles traditionnelles de l'Eglise
furent mises au jour, pour servir de guide dans l'embarras où se trouvait
placé le clergé. Beaucoup d'évêquesy adhérèrent; M. de Cicé ne fut
pas des derniers.
L'heure de la destruction définitive de l'église d'Auxerre avait sonné.
1760 i 1S01.
572 M« DE CICÉ ,
On allail briser da même coup le grand pouvoir du Chapilre calliédral
comme celui de la plus mince collégiale. Au mois de septembre 1789,
les chanoines, soit prévision du sort qui leur était réservé, soit aa
contraire profonde sécurité, avaient ordonné de rédiger la biographie
de M. de Condorcet, pour, après approbation, être insérée à la suite
du Gesla Poniificum. M. Frappier venait de leur soumettre celles
de MM. André Colbert et de Caylus, qui furent renvoyées h Texamen
de six commissaires, parmi lesquels étaient MM. Vaultier et Arrault.
Les cérémonies religieuses, que demandaient de temps à autre les
citoyens, ne soulevaient plus dans le Chapitre des questions de préro-
gatives menacées, de droits violés ; on les leur accordait avec empresse-
ment. C'était, un jour, une messe solennelle pour la fédération, an
autre, la bénédiction des drapeaux de la légion auxerroise ou des
arquebusiers.
Un fait singulier, qui ne doit cependant étonner qu'à demi, c'est
qu'en 1790 les députés de la ville vinrent encore au Chapitre demander,
selon l'usage, une procession générale pour célébrer l'anniversaire de
la délivrance des huguenots.
Les électeurs du département, réunis à Auxerre, le 12 avril 1790,
ayant résolu de tenir leur assemblée dans la cathédrale, parce qu'ils
étaient trop à l'étroit dans la nef de Saint-Germain, le Chapitre s'émut
de la longue interruption que cela allait apporter dans ses cérémonies.
Il résolut de faire des représentations ; puis, ayant appris indirectement
que, malgré tout, l'assemblée persistait à se rassembler dans la cathé-
drale, il se résigna, changea seulement ses heures d'offices, et la
grande grille du chœur fut fermée.
Lorsque l'administration du district d'Auxerre fut installée aux
Jacobins, au mois de juin 1790, le Chapitre lui envoya une députation
pour la complimenter. M. Viart portait la parole ; il essaya de para-
phraser quelques-unes des idées à l'ordre du jour sur les réformes et
les travaux de l'assemblée ; mais on voyait qu'il ne parlait que du bout
des lèvres.
L'administration du département commença, le 15 novembre 1790,
à mettre h exécution définitive la constitution civile du clergé, en an-
nonçant officiellement aux municipalités que le département ne formait
CENT CINQUIÈME ÉVÊQUE d'aUXBRRE. 575
plus qu'uQ seul diocèse dont Tévêque siégeail k Sens. Elle défendit en ^^^ ^ j^j ^ y
même temps à ses administrés de s'adresser k tout autre évêque, et
décida que le nouveau titulaire serait invité à procéder incessamment k
l'organisation de son clergé et k l'établissement d'un séminaire, suivant
le mode déterminé par la loi.
Le 26 novembre eut lieu la dernière assemblée légale du Chapitre
cathédraL II acceptait, avec résignation, depuis le commencement de la
révolution, tous les coups que Ton portait à l'antique hiérarchie.
Cependant, il avait eu, un instant, au mois de mai 1790, l'intention
d'envoyer une adhésion k la déclaration d'une partie de l'assemblée na-
tionale, au sujet de la religion. Puis il fut décidé qu'on attendrait une
occasion favorable de a manifester les vrais principes qui animaient le
» Chapitre sur ce qui se passe relativement k l'état actuel de la religion
p catholique, apostolique et romaine (1). »
Le département, continuant d'exécuter la loi nouvelle, résolut de
faire fermer tous les chapitres et collégiales du département qui atten-
daient de jour en jour leur sort. Un arrêté du 29 novembre, signifié au
Chapitre cathédral le lendemain par MM. Bourasset et Martin, adminis-
trateurs du district, et Soufllot, procureur-syndic, mit fin k son exis-
tence. M. Vaultier, qui présidait les chanoines en l'absence du doyen,
reçut les députés et leur répondit par ces nobles paroles :
« Messieurs,
< Quoique les ordres qui nous sont intimés soient très-aflligeants
» pour nous, nous ne perdrons cependant jamais de vue que les minis-
» très des saints autels doivent l'exemple de la soumission.
» Chargés par état des augustes fonctions de la prière publique,
» du précieux dépôt de la tradition de cette ancienne église, conseillers-
9 nés des pontifes, et exerçant leur juridiction pendant la vacance du
p siège, nous ne cesserons de satisfaire k ce concours d'obligations que
» par l'impossibilité où nous allons être réduits de les remplir.
» Si, cependant, il jiouvait nous être permis de vaquer k la prière
(1) Kcg. de délibérations. — Archives de rYoïinc.
574 M. DE CICÉ,
*^-' 1760 ï 1801 ^ publique, nous cootiDuerions ce saint exercice en vue de la gloire de
» Dieu, du bonheur de TEtat, de la sanctification des peuples, et pour
9 notre propre consolation.
» Nous vous prions de vouloir bien consigner notre vœu, à cet
» égard, dans votre procès-verbal, comme un monument de notre atia-
» cbement le plus fidèle k nos devoirs, et de notre reconnaissance
B envers les fondateurs de cette église.
» Nous vous prions encore d'y faire mention de la déclaration so-
it lennelle que nous faisons tous, aujourd'hui, de professer jusqu'au
• » dernier soupir la foi catholique, apostolique et romaine, et d'être
» inviolablement attachés k l'Eglise, h ses principes, à ses pasteurs et h
n son chef. »
Cette profession de foi , qui termine l'histoire du Chapitre, montre
que ce corps pensait bien différemment alors qu'en 1750.
Ainsi finit le Chapitre cathédral de Saint-Etienne d'Âuxerre, et avec lui
l'élise de ce diocèse. Fondée au iii^ siècle, elle avait vécu quinze cents
ans et fourni k la France un grand nombre de prélats distingués qui
par leurs travaux et leurs services ont acquis des droits éternels à la
reconnaissance du pays.
Les mêmes scènes se répétèrent à Toucy, k Saint-Fargeau, h Varzy,
à Gien, à Clamecy. Toutes les collégiales furent fermées et le diocèse
d'Àuxerre fut effacé de la carte officielle de la France ecclésiastique.
Un décret du 27 novembre venait de donner le dernier coup à ce
qui restait encore d'anciennes institutions religieuses, en ordonnant que
tous les évéques et curés qui, dans la huitaine, n'auraient pas fait le ser-
ment de fidélité k la constitution civile du clergé , seraient regardés
comme démissionnaires.
M. de Cicé qui, k l'Assemblée nationale, était dans le parti de l'op-
position, ne pouvait prêter les mains à ce décret; il fut donc déchu de
fait de son autorité épiscopaie ; mais son clergé, du moins pour la grande
majorité, ne le suivit pas dans sa résistance et prêta serment. Il apprit
cette conduite aux eaux d'Ems où il s'était rendu, en vertu d'un congé
qu'il avait obtenu le 14 mai i790. En lisant le Moniteur du 22 février
1791, il put voir notamment ce que M. Lcpelelier annonçait a rAssera-
CENT CINQUIEME ÉVÉQUE d'aUXBRRE. 575
Liée ualioualc, que tous les ecclésiastiques foDCtionoaires du dislrict ^^^q >^ ig^^^. -^^
de Saini-Fargeau avait prêté le serment(l) .
A Auxerre, le serment fut demandé au clergé avec appareil et céré-
monie. Le maire et les officiers municipaux, escortés de gardes natio-
naux, se transportèrent h cet effet chez les curés. Très-peu d'entre eux
le refusèrent. Leur exemple fut suivi par les Bénédictins professeurs du
collège (2).
A la nouvelle de ces coups répétés dont était frappée TEglise de
France, le pape Pie VI fulmina, le 10 mars et le 15 avril 1791, deux
brefs adressés, le premier aux évéques de l'Assemblée constituante, le
deuxième h tout le rlergé et aux catholiques de France. Il y signalait
tous les vices de la constitution civile du clergé et flétrissait les nou-
velles élections des évéques qu'il déclarait illégitimes et schismatiques,
et il ordonnait h tous les ecclésiastiques qui avaient prêté le serment, de
le rétracter dans les quarante jours sous peine d'être suspens de
l'exercice de tous Ordres.
M. de Cicé attendait ces actes du souverain pontife pour s'opposer
publiquement, dans son diocèse, h l'empiétement commis par M. de Lo-
ménie, qui avait été élu évêque dans le département de l'Yonne.
II envoya à ses ouailles une ordonnance datée des eaux d'Aix-la-
Chapelle, le 4 juin 1791, dans laquelle il reproduit les brefs du pape
et déclare les accepter entièrement ; et en conséquence « il rappelle k
» l'obéissance les ecclésiastiques de son diocèse qui ont eu le malheur
» de consentir une prestation pure et simple du serment, et ceux qui,
9 ne se bornant pas à cette première contradiction, se seraient ingérés
» dans la charge desûmcs, sans une mission expresse des dépositaires de
» de l'autorité spirituelle. »
M. Viart reçut cette ordonnance et la distribua de son mieux dans les
(1) II eu fut de même dans le Donziuis, où la plupart des curés se soumirent à la
Constitution.
(2) Il se passa alors à Saint-Fargcau un fait qui montre dans quelle disposition
d'esprit étaient beaucoup de gens sur les questions religieuses. Les Bénédictines
devant procéder à l'élection d'une supérieure et d'une économe, ce fut un odicier
municipal qui présida l'opération et qui déclara canoniqiiement élues les nouvelles
dignitaires. (28 mars 1701. — Archives de TYonnc. Relig. Bénédictines.)
576 M. DE CICÉ ,
1700 il 1801. paroisses. Elle fit rétracter quelques prêtres de bonne foi. Cependant
onze curés du district d'Auxerre, avaient refusé le serment ou étaient dé-
missionnaires. Six l'avaient prêté avec réserves, G6 purement et simple-
ment, ainsi que 15 vicaires. L'administration du district, en signalant
cette situation le 31 mars 1791, décide que les défaillants seront in-
vités par les maires à se mettre en règle, sous peine de destitution, et
que les curés démissionnaires seront remplacés. Un arrêté du dépar-
tement du 20 janvier précédent avait suspendu le paiement du trai-
tement des prêtres non assermentés. L'Assemblée constituante avait
voulu, en faisant élire les prêtres des paroisses par les citoyens, en re-
venir^laprimitiveéglise;mais l'imitation ne réussit pas: ily avait trop peu
de foi dans les hautes classes, et le mode nouveau paraissait entaché de
simonie, puisque l'autorité spirituelle au nom de laquelle on disait agir
protestait de tout son pouvoir.
Il est temps de prier du nouvel évêque du département, M. Lo-
ménie de Brienne , né à Paris en 1727, successivement évéqne de
Condom (1761), archevêque de Toulouse (1763), et enfin archevêque
de Sens (1788) , et cardinal. Il s'était montré très-partisan des idées
nouvelles. En 1787 étant entré au ministère, il présenta Tédit qui accor-
dait l'état civil aux protestants. Il adhéra, lui quatrième des évêqnesde
France, à la constitution civile du clergé, et fut élu évêque du départe-
ment de l'Yonne par les citoyens, vers la fin de 1790.
Il changea alors son ancien litre (1). En prenant la direction de ce
nouveau diocèse, il désigna pour son vicaire général, à Auxerre, un gé-
novéfin dont nous avons parlé plus haut, M. Pasquier, prieur de Saint-
/\ maire, qui avait fait beaucoup de bruit dans le pays, en 1786» par ses
prétentions à percevoir la dime sur les vignes de sa paroisse. Les douze
paroisses de la ville avaient clé réduites à quatre : celles de Saint-
Etienne, de Saint-Père, de Sainl-Eusèbe et de Nolre-Dame-la-d*Hors.
(1} M. de Lomcnie, en conséquence des principes qu'il venait d'adopter, avait, le
28 avril 1790, prêté le serment civique entre les mains des officiers municipaux de
Sens. Il proGta de cette occasion pour faire connaître ses sentiments qui, dit-il, sont
tous inspirés par la soumission à la puissance publique, l'amour de la paix et le
(Qainticn de Tordre et de la tranquillité.
CBMT CINQUIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 577
Les trois premières subsistent encore aujourd'hui (l). M. Julien, curé i7eo i isol
de Saint-Loup, fut élu par 57 citoyens pour curé de la paroisse de Saint-
Etienne, ci-devant cathédrale (15 mai 1791). Les autres églises, dont
les pasteurs avaient refusé le serment, furent pourvues de la même ma-
nière. L'autorité administrative proclamait les noms des élus et un Te
Deum chanté k la suite de l'élection leur servait de consécration (2).
L'évéque avait, au mois de février 1 791 , recommandé au nom de la cha-
rité l'acceptation de la constitution. Il essaya au mois d'avril d'oi^niser
un séminaire diocésain. Il en soumit le plan \k l'administration départe-
mentale qui arrêta la création d'un vicaire supérieur et de trois vicaires
directeurs de la maison, pour la conduite et l'instruction des élèves.
Trois mille livres furent votées pour cet établissement.
Le pape, en apprenant la conduite de M. de Loménie, n'avait pas
tardé k le blâmer sévèrement par un bref qu'il lui adressa et dont des
copies coururent la ville de Sens dans le mois de mars 1791. En lui
reprochant son adhésion à la constitution civile du clergé, Pie YI lui
dit qu'il était la honte de la dignité archiépiscopale et du cardinalat,
que son immixtion dans le gouvernement d'un diocèse étranger sur la
simple autorisation de la loi civile, était un crime détestable qui devait
être expié ou par une prompte rétractation ou par une dégradation
éclatante (5). Le prélat, cruellement mortifié, abdiqua avec éclat le
cardinalat, persista tout k fait dans la voie où il était entré, et ren-
voya au pape le chapeau , marque de sa dignité.
Cependant, l'administration civile continuait k pratiquer officielle-
ment le culte catholique, et l'on ne peut révoquer en doute la bonne foi
des administrateurs qui étaient alors k la tête du district d'Âuxerre et du
département. Le district d'Auxerre décida, au mois de juillet 1791 ,
qu'une messe solennelle serait célébrée a l'église Saint-Etienne^ pour
(1) Par arrêté du département du 28 brumaire an ii, les trois dernières paroisses
furent supprimées et réunies à celle de Saint-Etienne qui fut maintenue provi-
soirement.
(2) Il ne fallait quelquefois qu*un bien petit nombre d* électeurs pour choisir le
curé. Celui de Lalandc fut élu par 23 suflragcs dans une assemblée présidée par M.
de La Bergerie, h Saint-Fargeau.— Archives de ITonnc. Elections. .
(3) Bref du Pape.
^ te
580 M. DK CICÉ,
1700 il 1801. tataire$'{i) qai, demcaraol sar les lieax, avaient un parti prêt à lutter
contre le nouveau titulaire. C'est surtout la pénurie de sujets qui préoc-
cupe M. de Loménie ; il annonce que le séminaire en fournira très-peu
et que la disette va devenir de plus en plus grande. L'administration ne
vit pas plus de moyens d*y pourvoir que lui ; et, préoccupée de questions
instantes, elle ne tarda pas à perdre celle-là de vue (2). Néanmoins elle
opéra un bien dont il faut lui savoir gré dans l'inlérét des sciences et des
lettres. Lorsque le docte P. Laire (3), que la révolution surprenait au
milieu de ses livres, offrit au conseil-général du département, présidé
par M. LepeletierdeSaint-Fargeau, ses services pour la conservation et
la classification des ouvrages provenant des maisons religieuses, il fut bien
accueilli, et on le chargea de la formation des catalogues de toutes les
bibliothèques qui étaient déjà entassées dans les chefs-lieux des districts.
C'est à lui qu'on dut, plus tard, la réunion à Auxerre d'une grande partie
des richesses bibliographiques du département.
La situation déplorable dans laquelle était placée la foi religieuse,
faisait naître chaque jour des agitations nouvelles qui poussèrent ras-
semblée législative à décréter la déportation des prêtres non asser-
mentés. Louis XVI mit son ve(oà cette mesure, ce qui amena la journée
du 20 juin 1792. L'administration du département, qui jusque-là n'avait
pas pris chaudement parti contre les prêtres réfractaires, et n'avait sévi
que comme à regret» et sur les plaintes des sociétés populaires, l'admi-
nistration entra dans une phase de rigueurs contre cette classe de pros-
crits. Par un arrêté du 18 juillet, signé Lepelelier, Maure aine et Foa-
cier, elle ordonna aux municipalités de signaler aux districts les prêtres
réfractaires, de les priver de leur traitement, de surveiller leur conduite
de juillet 1702, était bien désillusionne. Il se plaint de la défiance qui s'élève contre
les prêtres et la religion chrétienne, que des esprits exaltés et ennemis du calme
veulent proscrire, avec les abus dont on demandait depuis des siècles la réforme.
Les prêtres, dit-il, s'interdisent même entre eux toutes visites de bienséance ou
d'amitié, pour éloigner tout ombrage.
(l)Mot créé pour la circonstance.
(2) Archives de l'Yonne, administration ecclésiastique.
(3) M. Laire, un des plus savants bibliophiles du dernier siècle, se trouvait bibliu
thécaire de M. de Loménie, è Sens, au moment de la révolution.
'«r.
CENT CINQUIÈME ÉVÊQUE d'aUXERRE. 381
et de dénoncer leurs manœuvres qui tendaient h provoquer des troubles, ^qq >, 1901.
Les citoyens furent également invités k dénoncer les actes séditieux que
les prêtres pourraient commettre. On voulut bien, toutefois, rappeler
encore le respect qui leur était dû comme citoyens, et que Ton ne de-
vait menacer ni leur liberté ni leur sécurité (1).
Jusque-là la répression n'atteignait les réfractaires que dans leurs
ressources, mais les événements se pressaient. Le décret du 26 août
ordonna leur sortie du royaume sous quinzaine^ sous peine d*étre dé-
portés à la Guyane. Les moines, prêtres ou non, furent compris dans
cette mesure. Les sexagénaires et les infirmes en furent seuls exempts ;
on les réunit dans des maisons de réclusion. Le décret ne fut pas
tout d'abord exécuté à la lettre ; mais, après la mort de Louis XYI,
les autorités du département ayant été renouvelées, on sévit rigoureuse-
ment. An mois d'avril 1795, sur des plaintes survenues cqntre les
menées des prêtres réfractaires, qu^ils appellent des fanatiques et des
êtres malfaisants , les commissaires de la Convention , Garnier et
Turreau, prescrivent la stricte exécution de la loi du 26 août. Les visites
domiciliaires chez les prêtres furent ordonnées (2) et des maisons de
réclusion furent établies dans tous les lieux un peu importants.
Trente-sept prêtres furent mis à la fois en réclusion à Auxerre, dans
la maison des Visilandines , (aujourd'hui le séminaire). Parmi eux
étaient les chanoines Viart, Bobée, Digard et Delart, que leurs relations
avec M. de Cicé rendaient plus suspects. Ils restèrent en prison jusqu'au
21 juillet et furent mis en liberté, sauf à être gardés dans leur domicile
jusqu'à la fête de la fédération du 10 août ; ce qui eut lieu eu effet.
 mesure que la révolution devenait plus violente, le clergé était ex-
posé à de nouvelles persécutions. Les prêtres détenus au séminaire
d' Auxerre ne pouvaient recevoir de lettres sans qu*un membre du
(1) Reg. du conseil général du département.
(2) L'hôpital général d'Auxerre^ que dirigeait Tabbé Duplessis, servit d'asile à
Tun d'eux, et Ton assure que le culte catholique y fut toujours pratique malgré la
Terreur. L'abbé célébrait extérieurement dans la maison les fêtes décadaires, mais«
en dépit des menaces, il ouvrait en secret aux fldèles la chapelle, dont la nef était
remplie de foin, et qui cachait Tautel aux yeux des malveillants. * '
*H
ii.
5S4 X. DE C1CÉ«
i7«o I idDi. Cqiendaot onc telle anarchie morale ne pouvait durer. Déjà une pre-
mière réaclîon s'éiail opérée, lorsque Robespierre eût écrasé Cbaumetie
et le parti des matérialistes dans la Convention. La liberté des cultes fut
de nouveau reconnue dans la loi. Quoique cette déclaration fût à peu
près illusoire, elle devint néanmoins dans les provinces un frein légal
contre les démagogues.
Au commencement de Tan m (1795), on vit reparaître Tabbé Viart
et ses fid^es compagnons, dont Tactivité savait profiter de toutes les
ciitODSlanees favorables. Le décret du 50 mai 1795, qui autorisait
les habitants des paroisses à reprendre pour Texercice de leur culte
les ^isesqui n'avaient pas été aliénées, en permit le réublissemeot.
La cathédrale d'Auxerre fut nettoyée, et le 27 juin on rendit grâces à
Dien, par nne messe solennelle, de la liberté dont on recommençait k
jour.
Maïs cette liberté ne fut pas de longue durée : dès le mois de janvier
1796, la persécntîon recommença rigoureusement, et la réclusion fut de
décrétée contre les prêtres réfractaires. On vit alors dans les
!s qnd contraste régnait entre Tesprit des autorités et celui des
popnbtioBS. Les piemiènes, inspirées par le paganisme du Directoire,
ce'léhraient grareaent les fêles de la Jeunesse, de rAgriculture, des
£|MMX et de la Vieillesse^ lisant aux jours des décades les lois et les
instTKliotts dn gonvemement, tandis que le peuple, qui ne comprenait
rien au wiatiotts continnelles qu'il avait sous les yeux, restait étranger
à ces cérémonies et se reportait avec ardeur vers le cuite de ses itères.
A dëbnt de prêtre « nn ancien chantre lisait les psaumes dans
révise ; les cloches étaient-elles enlevées, on hatuit le tambour dans
les raes dn village [tonr convoquer les fidèles. L^autoriiê fai^ait-<^lle
fanner les portes de T^iiHse « on arracLait la serrure : la résistance
répondait à h persecntion.
L^eipérience des bits montrait chaque jour combien Tosprit des
rim|n^ni i était demearé rdigienx an milieu des saturnales du temps.
Lorsde laproam^tîon de la loi de Fan m qui rêublissait h lil^erié des
cdles^ les prêtres constitntionnels. remplissant les formalités voulues,
avaient repris Texerôce de la rri^iion. et les habiunts avant e^Iemen;
bit le«r dôrlaniion de s*assemhler 3i TefTet de i^ratiquer le cxûxo c^ihc* .
CENT CINQUIÈME ÉVÊQUE D*AUXERRE. 585
lique, il avaii bien fallu les tolérer. Cela avait eu lieu à Coursonoù une 17^0^ isoi.
émeute de femmes menaçait Tagent national ; h Diges où les habitants pri-
vés de curé faisaient néanmoins ToiSee c à Tex-manière >», dit l'agent ; k
Mailly*Cbâteau où l'on avait en vain scellé les portes de Tégliseavcc des
crampons de fer ; k Saint-Bris où le peuple s'opposait vivement à la fer-
meture de Téglise, et n'assistait pas aux décades. En l'an iv, les prêtres
du canton de Saint-Fargeau, constitutionnels ou non, s'étaient tous mis
en r^le pour reprendre leurs fonctions. Il en fut de même dans tout
le canton de Toucy et dans celui de Vermanton.
Mais bientôt, comme nous venons de le dire tout k l'heure, le gou-
vernement inquiet, du mouvement des esprits et de l'abandon des fêtes
décadaires, remit en vigueur les lois sur la déportation des prêtres et la
suppression des signes extérieurs du culte. Les croix des églises et des
champs, qui étaient restées debout pendant la Terreur, furent abattues
en détail. L'administration du département mit un soin particulier k
faire exécuter sur ce dernier objet, non sans de graves résistances en
plus d'un lieu, la loi du 7 vendémiaire an iv (sept. 1795). La vente
des presbytères devint aussi le motif de vives agitations. A Sacy, en
l'an V, les femmes du village arrachèrent les portes et les croisées de la
maison ; k Lain il fallut des gendarmes pour mettre l'acquéreur en pos-
session. Le pays ne se soumettait pas du tout, en matière de culte, au
régime qu'on voulait lui imposer. L'administration du département se
plaignait au commencement de fructidor an iv, que les lois sur la police
des cultes étaient mal exécutées, que les émeutes k l'occasion des prêtres
réfraclaires « qui travaillent sourdement contre l'État x> se renouvelaient
de plus en plus.
Cette situation étrange d'un gouvernement tout au moins sceptique,
persécutant la religion de la majorité des citoyens, dura de l'an vi k
l'an VIII. La maison de réclusion d'Auxerre reçut de nouveaux prêtres
prisonniers, dont plusieurs prirent le chemin de l'exil (1). Parmi les
victimes de cette réaction on cite M. Hilarion, curé de Saint-Bris, qui
(1) Ccst par suite de Icsprit tracassicr qui animait alors le Directoire, qu'on vit
arriver à Auxcrre, à la On de Tan vu, trente-quatre prêtres de TAIsace. Ils étaient
en réclusion ou en surveillance, et accusés d'avoir provoqué à la rébellion et à la
II 25
386 M. DE CICÉ ,
17C0 i 1801. ^^'t caché les reliques de saiol Prix , et qui fut conduit à Sinnamary.
D'autres furent emmenés à Tile de Rhé.
En 1799, la persécution devint encore plus active; il semblait que
le Directoire redoublait d'autant plus d'eflbrts qu'il se sentait plus près
de sa chute. Bon nombre d'églises furent encore fermées comme en
95. Champs, Commis, Courson, Héry, Mailly-Ghàteau, Saint-Bris, etc.,
se signalent par leur résistance au fanatisme persécuteur.
C'était surtout, comme le disaient les agents nationaux, les jours de
fêtes patronales qui soulevaient les populations. On employa en vain la
force armée k Chevannes, en Tan vi, pour empêcher la célébration de
la fête de saint Pierre, le jour où elle tombait dans l'ancien calendrier.
A Irancy, même chose arriva le jour de Saint-Germain ; à Héry , Tannée
suivante , l'agent municipal demanda des gendarmes pour empêcher la
fête de saint Loup. Les agents nationaux eux-mêmes, accusés de
violer les lois sur l'observation des fêtes décadaires ou de laisser célé-
brer les anciennes fêtes on apports, étaient frappés de suspensions.
En même temps les théophilanthropes, protégés par un des membres
du gouvernement directorial, ambitionnaient la succession catholique.
Ils professaient une sorte de déisme mitigé qui eut à Auxerre quelques
rares sectateurs, dont les réunions se tenaient dans l'église Saint-Eusèhe.
Il y en avait aussi à Saint-Fai^eau et k Migé (1).
Les débris de l'église constitutionnelle avaient entrepris de se relever
en 1795. Un concile fut assemblé à Paris au mois d'août. M. Frappier,
ancien chanoine d'Auxerre, y assistait. On connaît l'inutilité des efforts
de cette espèce de concile pour la restauration de l'église natio-
nale (2). Elle fut dissoute par le fait de l'accord du premier consul
avec le pape Pie VII.
contre- révolution dans leur pays. Os forent détenus jusqu'au mois de floréal an vin
époqoe où le premier consul les fit mettre en liberté. Ils étaient tous plus que sexa-
génaires, et quelques-uns même octogénaires.
(1) En Fan toi, les théophilanthropes d* Auxerre donnèrent beaucoup d'embarras
au préfet par leurs mauTais procédés envers les catholiques y dans Tcglise Saint-
Eusèbe. Ils s'étaient emparés de l'autel de ces derniers et occupaient une place
démesurée dans réglise.
(2) Il circula dans les campagnes, en germinal an ti, une brochure imprimée des
CENT CINQUIÈME ÉVÊQUB d'aUXERRE. 587
Le concordat enlre le gouvernement français et le souverain-pontife ^^ | ^^^^
fut signé le 15 juillet 1801. Ce fut le commencement de la rénovation
du culte catholique en France. Les églises se rouvrirent, les prêtres
exilés rentrèrent et retrouvèrent leurs ouailles heureuses de leur retour.
Le département de ITonne était demeuré sans évêque depuis la
mort de M. de Loménie, car on ne peut donner ce nom k un
M. Ponsignon, qui parut en cette qualité au concile de 1801 et qui se
fit mettre sur la liste des évéques démissionnaires. M. de Cicé ha-
bitait toujours à Halberstadt, oii il achevait tristement sa carrière,
qu'un hasard fâcheux vint encore tourmenter. Sa sœur Adélaïde fut
impliquée dans le procès de la machine infernale par suite de quel-
ques rapports indifférents qu'elle avait eus avec Limoelan, Tun des
conspirateurs. On trouva chez elle des lettres de son frère, du moment
même de l'événement; elles concernaient les affaires de son diocèse,
mais elles étaient conçues dans une forme vague et déguisée qui pou-
vait faire naître des soupçons.
Le nom du petit P.François Y. s'y rencontrait avec éloge et comme
le facteur le plus aaidu et Vagent princ^àl de la boutique. Ce fut une
cause d'erreur pour la justice qui cruty reconnaître le préparateur de la
machine infernale qu'on nommait le petit François. Ce rapprochement
de noms tout fortuit en lui-même, car l'évêque parlait de François
Yiart, son zélé vicaire-général , devint un grave motif d'accusation
contre M"^de Cicé. Cependant, grâce à M. Bellart, son éloquent dé-
fenseur, elle fut reconnue innocente.
Lorsque le pape demanda aux évêques leur démission pour pouvoir
organiser Icb nouveaux diocèses avec le premier consul , M. de Cicé,
qui était très-âgé , ne voulut pas abandonner son titre (1). Cependant,
il ne fit aucune opposition, et concéda aux évêques que le pape mit en
constitutionnels d'Auxerre , annonçant le rétablissement du culte et ayant pour
titre : LeUre patlarale du presbytère iAuxerre à Urne les curés , vicaires, etc., et à
tous les fidèles du département. — Archives, pièces sur la révolution.
(1) Il paraît que des tentatives avaient eu lieu par M. Viart, dans le diocèse,
pour demander sa radiation de la liste des émigrés. Le commissaire du canton de
Thury signale le curé comme colportant une circulaire imprimée tendant à solli-
citer les signatures des fidèles dans cette intention. — Archives, floréal an vin.
588 M. DE CICÉ ,
I7G0 2I 1801. possession des diverses parties de son diocèse» les pouvoirs nécessaires
pour les administrer.
Le département de l'Yonne fut, par le concordai, compris dans le
diocèse de Troyes, dont M. de Noé devint titulaire. Le reste de rancien
diocèse d'Auxerre demeura presqu'en entier au diocèse de Nevers, comme
nous Tavons dit plus haut.
Le dernier souvenir du pauvre évoque exilé à son troupeau mérite
d'être conservé à la fin de sa biogra|)hie. Le village de Gy-rEvêquc
avait été dévasté par une inondation; M. de Cicé l'apprit dans sa re-
traite, et envoya aux habitants, dans le mois d'août 1800, vingt
louis d'or pris sur ses modiques ressources, en leur exprimant le regret
de ne pouvoir faire davantage (1). Il mourut dans l'émigration, le
ta novembre i80S, h Ilalbertadl, en Prusse, dans le couvent des
Franciscains où il fut enterré. Il était dans sa quatre-vingt-unième
année.
Ainsi fmitle dernier évoque d'Auxerre. Remarquable parla |>rudence
(1) Voici sa lettre , (elle qu'elle egt publiée dans le plaidoyer de M. Bellart pour
Mlle A. de Cicé. 3 août 1800.
« Chers habitants,
))J*ai appris avec douleur, par les gazettes, l'affreux ravage que Touragan et Tinon-
dation du 9 juillet ont causé dans les villages de Gy-rEvéquc et de Vallan. Pen-
dant longtemps j*ai joui d'une portion des revenus de Tcvéché dans votre paroisse
que je n'ai jamais cessé d*aimer. On n'y doute pas sûrement que si je m'en étais
trouvé à portée je n'y fusse promptement accouru pour régler avec vous les divers
soulagements qu'il m'eût été possible de vous offrir et pour tâcher de retenir dans
votre sein les familles qui ont le plus souffert.
» Dans mon éloignement, après toutes les pertes et les différents malheurs que j\il
éprouvés , les faibles ressources qui me font subsister ne me permettent pas de
rassembler actuellement plus de 20 louis d'or de France pour les joindre à la masse
des secours à distribuer parmi vous dans la proportion des pertes et des besoins.
Sûrement nos bons habitants d'Auxerre et des environs se sont empressés de venir
à votre secours avec le zèle qu'ils ont toujours eu pour soulager rinforiune et qu'ils
ont montré depuis longtemps contre le Qéau de la mendicité. C'est une consolation
pour moi de m'associer encore aujourd'hui pour vous à l'œuvre de leur charité.
Bientôt je ne pourrai plus en exercer aucune ; et quoique ma santé , grâces h Dieu ,
soit meilleure que je n'eusse dû l'espérer, mon âge de soixante-quinze ans m'avertit
que dans peu je n'aurai plus pour moi-môme d'autres besoins que ceux des prières
qu'on voudra bien faire pour mon éternel repos. Je me recommande aux vôtres
avec confiance , etc. »
CENT CINQUIÈME ÉVÊQUE DAUXERRÉ. 389
Cl l'élévation de son esprit, M. de Cicé avait entrepris dans son diocèse ^eo \k \m.
lu rétablissement de l'autorité du saint-^iége compromise par le jansé-
nisme. Les événements ne lui permirent pas d'atteindre son but, mais
ils donnèrent raison à ses prévisions (1 )• 11 put voir de sa retraite le
courage d'une partie de son clergé et la faiblesse de l'autre. La persé-
cution épura son troupeau; quoique la leçon fût cruelle, elle dut lui pa-
raître comme à beaucoup de bons esprits une épreuve de la Providence.
Voici le texte de l'inscription que les Franciscains d'Halberstadt
placèrent sur sa tombe :
a Ânno ab incarnatione Domini 1805, die 16 novembris, hora
> 12™^ meridiana et dimidia, sanctis ccclesiœ sacramentis munitus,
» piè in Domino obiit, anno a^talis suae 8i™<'.
» III. ac Rev. in Christo Pater D. D. Joannes-Baptista-Maria
» CHAMPION DE GIGË, âutissiodorensis episcopus.
» Hic in sedem suam pontificalem inthronisatus die 2^* martii anno
1761 , Gregem sibi commissum verbo pavit et exemplo, magna
morum integrilate, sincero religiouis amore, fide purâ. paterno in
clerum sibi subditum aiïectu, providcntiâ ergà pauperes, singulari
in omnes affabilitate conspicuus. E Gallià profugus posteà quam
0 fugerat ex unàcivitate in aliam, Halbcrstadium advenit; ubi, edifi-
> catis per totum decennium exemplo virtutum suarum fidclibus,
» complevit peregrinationis suse dies, in ecclesia Franciscanorum
(1) La manière de voir de M. de Gicc, en politique, était inspirée par les besoins
du temps. Il disait, en 1789, à l'assemblée des trois Ordres réunis à Auxerre :
a Remercions Dieu d^avoir inspiré au cœur de notre monarque le projet salutaire
des états généraux. Un monarque ne rend jamais son autorité plus sacrée qu'en
conservant les libertés nationales. Jamais aussi les peuples n'assurent mieux leurs
droits qu'en respectant ceux du souverain.
« C'est rendre à la couronne son véritable lustre; c'est servir les bonnes et justes
intentions de S. M. que de nous réunir , j'ose le dire, avec elle contre le torrent
des abus qui font gémir depuis si longtemps tant de citoyens de tous les ordres ,
surtout dans les classes les moins aisées, accablées sous le poids de leurs charges. »
— Arch. de l'Yonne , documents historiques.
•♦
390
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MÉMOIRES
HISTOIUOIJES
SUR
LES ÉVÊQUES D AUXERRE.
SEPTIÈME PARTIE ,
Contenant la coniinnation de l'Histoire Ecclésiastique,
depuis 1802 à 1830.
CHAPITRE I«.
M. DE NOË, ËVÊQUE DE TROYES.
I
M. de Noé (Marc-Ântoine) , né en 1724 dans le diocèse de La i^os.
Rochelle, évéque de Lescar en 1763, et premier baron des états de
Béarn, premier conseiller d'honneur au parlement de Navarre, avait été
choisi par le premier consul pour occuper le nouveau siège épiscopal
de Troyes qui comprenait, comme nous Tavons vu, le département de
TYonne. Sa nomination date du mois de floréal an x (9 avril 1802).
Sa réputation d'homme éclairé, de prédicateur éloquent et de prêtre
éminent par ses vertus l'avait désigné au choix du gouvernement. Il
392 M. DE f40É,
,«,9. avait fort à faire pour restaurer le culte dans son diocèse cl notamment
dans l'arrondissement d'Âuxerre. Les églises étaient tombées en ruines
par défaut de soin et par les atteintes ùrutales dont elles avaient été
Tobjet pendant les dix années qui venaient de s'écouler. Le personnel
du clergé avait éprouvé de grandes vicissitudes.
M. de Noé publia tout d'abord, aux mois de prairial et de messidor
an X (mai et juin 1802), des ordonnances sur la réduction des fêtes,
sur la sonnerie des cloches et les cérémonies extérieures du culte, dé-
coulant des Douveaux principes posés dans le concordat. Le préfet de
l'Yonne autorisa la publication de ces actes dans son département (1).
La première ordonnance est basée sur un induit du légat. L'évéque
la fait précéder de cette pieuse déclaration : a Que si certaines fêtes
» sont célébrées d'une manière moins obligatoire pour tous les fidèles,
> il ne sera cependant rien changé aux offices et aux rites observés
j» jusqu'à ce jour pour leur célébration - les églises seront témoins
> des mêmes solennités, les voûtes sacrées retentiront des mêmes
» chants , vos prêtres offriront les mêmes sacrifices, la piété qui ne
» sera point retenue par des obligations et des devoirs domestiques
> retrouvera dans nos églises tout ce qui lui est cher, etc. >
Il fixe ensuite le mode de célébration des fêtes.
Le règlement pour la sonnerie des cloches n'était pas alors une
chose indifférente. Il n'y avait pas longtemps encore que cet usage était
proscrit par la loi de l'an m. Il fallait donc fixer les circonstances reli-
gieuses dans lesquelles la sonnerie serait pratiquée.
M. de Noé établit par un autre décret du 27 thermidor an x (15 août
1802), un certain nombre de cures dont le ressort était aussi étendu
que celui des justices de paix. On trouvait dans l'ancien diocèse
d'Auxerre, les cures de Saint-Etienne de la même ville, de Coulanges-
la-Vineuse, Coulanges-sur- Yonne, Courson, Saint-Sauveur, Toucy,
Vermanton, Bléneau et Saint-Fargeau. Le premier consul ratifia cet
acte le 16 fructidor suivant. Ce fut la base du nouvel ordre de choses.
Les succursales furent établies ultérieurement.
(1) Le fait peut paraître siogulicr aujourd'hui, mais il non est pas moins exact.
ÉVÉQUB DE TROYES. " 393
Le 18 vendémiaire an xi, lous les curés du département se réuni- i^.
rent k Auxerre et prêtèrent serment entre les mains du préfet pen-
dant la messe paroissiale de Saint-Etienne , conformément au nouveau
concordat (1).
Les théophilanthropes furent définitivement privés des églises et des
autres édifices nationaux par ordre du ministre de la police générale
du 17 vendémiaire an x (9 septembre 1801). Le préfet prit des mesures
en conséquence : ceux d*Auxerre virent disparaître les emblèmes qui
remplissaient une partie de Téglise Saint-Eusèbe et Ton n'entendit
plus parler de ces mystiques.
Certaines paroisses furent encore, dans les premiers temps du réta-
blissement de l'ordre, agitées par des débats entre le curé constitutionnel
qui avait conservé ses partisans et Tancien curé qui rentrait de Texil ou
sortait de sa retraite.
La paroisse de Treigny fut particulièrement divisée pendant long-
temps sur ce point. Un sieur Chabrol, prêtre du diocèse de Yaison,
marié pendant la Terreur, qui s'était installé h Treigny en Tan iv, y avait
de nombreux partisans, lorsque revint le curé Pautrat, qui était envoyé
légalement par M. Yiart. Le débat aigrissant les esprits , M. de la
Bergerie, alors préfet prit, le 18 thermidor an ix, un arrêté qui ordon-
nait l'expulsion de M. Pautrat. Cependant, le ministre des cultes
Portalis, informé, fit au préfet des observations sur la moralité de
son protégé. M. de la Bergerie avoua qu'il en était peu édifié ,
mais il se retrancha derrière des apparences de légalité. L'oi^ani-
sation régulière du diocèse par M. de Noé mit fin à ces désordres
et M. Pautrat fut rétabli dans sa cure» qu'il desservit jusqu'à ces
dernières années.
•
À peine le diocèse commençait-il à se réorganiser que la mort
vint frapper son illustre chef, pour qui le premier consul avait
demandé au pape le chapeau de cardinal. M. de Noé mourut le 22
septembre 1802.
(1) La formule du serment avait été arrêtée de concert entre les deux autorités
civile et religieuse.
394 * H. DE LA TOUR-DU-PIN ,
CHAPITRE II.
M. DE LA TOUR-DU-PIN , ARCHEVÊQUE-ÈVÊQUE
DE TROYES ET D'AUXERRE.
1902 à 1807. M, (Je la Tour-du-Pin (Louis-Apollinaire), ancien évêque de Nancjf»
pais archevêque d'Auch , né en i 744 , avait donné sa démission en
1801 1 sur rinvitation du souverain-pontife. Il succéda à M. de Noé
dans le siège de Troyes, fut nommé le !•' octobre 1802 et prit pos-
session le 6 février suivant. Il prenait le titre d'archevéque-évéque de
Troyes et d'Auxerre.
M. Leduc, nommé vicaire général du diocèse de Troyes par Tarche-
véque de Paris , métropolitain , continua quelque temps encore après
la promotion de M. de la Tour-du-Pin , et à cause de son absence, k
exercer les pouvoirs épiscopaux.
Cependant le nouveau prélat parvint enfin, après quelques difficultés
administratives, à organiser le personnel de son clergé dans le départe-
ment et il annonça sa visite pour le 12 floréal an xi (2 mai 1805). Le
préfet en en prévenant les sous-préfets de Sens et de Joigny leur écri-
vait : c Je vous recommande de lui rendre et de lui faire rendre, par
> les maires des principales villes où passera Tévêque , tous les hon-
» neurs qui lui sont dus. A Auxerre , tout est disposé pour faire, à ce
> prélat respectable, la réception la plus honorable. >
Il y avait longtemps qu'on n'avait entendu rien de semblable. M. de
la Bergerie, empressé de se conformer aux dispositions du gouverne-
ment, s'était mis k Tunisson du nouveau langage officiel.
Lorsque M. de la Tour-du-Pin arriva à Auxerre , il y iui , en effet ,
accueilli avec beaucoup d'empressement. Sa présence était un gage du
rétablissement complet du culte. Le 5 prairial (25 mai), les curés-
desservants réunis dans la grande salle de la préfecture prêtèrent devant
le préfet le serment prescrit. Ce magistrat leur adressa ensuite une allô-
ARCHEVÊQUE DE TROYES. 595
cutioD j OÙ après avoir tracé le tableau des malheurs qu'ils venaient de i^qs ^ isor.
traverser, des persécutions qu'ils avaient éprouvées, il les invita k Toubli,
à la charité et à la paix. Il règne dans toute cette pièce un air de res-
pect pour la religion et pour ses ministres, un ton de vérité et d'éléva-
tion remarquable. On y trouve ces passages :
<r Le département de l'Yonne est signalé par le gouvernement
» comme un de ceux où le schisme a disparu, où toutes les dissidences
» d'opinions sont fondues et se rattachent au concordat, où règne entre
> les ministres du culte, les magistrats et les administrés, une harmonie
» parfaite.
0 Faites donc tous vos efforts, MM. les curés, dans vos communes
» respectives, pour concourir k l'exécution des lois et des mesures du
> gouvernement, pour reconnaître les bienfaits que vous devez, avec la
»- France, au héros qui a donné la paix au continent ; etc. »
Quelques jours auparavant le prélat recommanda k son clergé et aux
fidèles une nouvelle institution due k M. de la Bergerie, celle d'une
caisse de secours pour les incendiés. Déjk en 1790, M. de Loménie
avait proposé aux administrateurs du département d'étendre cet établis-
sement à tout le ressort, tel qu'il existait dans son ancien diocèse.
M. de la Tour-du-Pin, entreprit de réaliser l'œuvre réparatrice à
peine ébauchée par M. de Noé. Le prélat rendit, le 1®' août 1805, une
ordonnance pour le rétablissement de la discipline ecclésiastique. Il
y révoqua les pouvoirs extraordinaires qui avaient été accordés k cause
de la difficulté des temps et prescrivit instamment aux desservants
de se rendre dans leurs paroisses et d'y résider. Il recommanda k son
clergé la prudence et la modération, le soin de l'instruction des pauvres
et des domestiques et donna des règlements sur les cérémonies du
mariage, l'administration des fabriques, etc.
Il y interdit expressément aux laïques de remplir les fonctions sacerdo-
tales dans les paroisses où il n'y avait pas encore de curés a k cause du
> petit nombre de prêtres dont on peut disposer ; » il déclare que
c'est Ta, non un culte, mais un simulacre de culte religieux et un grave
abus.
L'arrondissement d'Auxerre forma alors un vaste doyenné lequel
fut dévolu k M. Yiart, qui avait été nommé curé d'Auxerre. On voulut
lâ(» k 1807.
596 M. DE LA TOUR-DU-PIN , ARCHEVÊQUE DE TROYES.
ainsi honorer les travaux apostoliques du digne vicaire de M. de Cice, son
zèle et son dévouement pour la foi pendant la terrible époque qu'on
venait de traverser. Il continua, comme nous le verrons, d'exercer les
pouvoirs d'administrateur de cette partie de l'ancien diocèse d'Âuxerre
sous les successeurs de M. de la Tour-du-Pin.
Les mandements épiscopaux de ce temps révèlent l'état déplorable
dans lequel était TËglise de France. M* de la Tour-du-Pin , pour en
préparer le remède, autant qu'il était en son pouvoir, établit un séminaire
dans sa ville épiscopale de Troyes, pour l'entreiien duquel il convia
les fidèles par son mandement du 5 mai 1804. Les départements
chargés par la loi de contribuer à l'entretien de la cathédrale et de
Févéché (1) ne faisaient rien alors pour cette institution. Cependant,
à partir de 1806 et pendant tout le temps de l'empire, le conseil-
général de l'Yonne <k convaincu des heureux effets que produira la
» renaissance de la religion > lui accorda annuellement 2,400 fr. (2).
Chaque année les mandements se renouvelèrent pour recommander le
séminaire qui reçut quarante jeunes gens la première année. Mais
qu'était ce chiffre en face des trois cents paroisses dépourvues de pas-
teurs !
La mort vint surprendre M. de la Tour-du-Pin au milieu de ses
travaux et arrêta ses projets. Un mandement des chanoines et Chapitre
de Troyes pour l'administration du diocèse, le siège épiscopal vacant,
l'annonça aux fidèles. Le prélat avait succombé le 28 novembre 1807.
Les chanoines faisaient dans cette pièce le panégyrique de M. de la
Tour-du-Pin, qu'on appelait le saint archevêque.
Les édifices les plus importants du diocèse, comme l'ancienne cathé-
drale d'Auxerre, commencent en 1806 à attirer l'intérêt du conseil-
général du département. On n'avait fait aucune réparation dans ce
vaisseau pendant la révolution de sorte qu'il était dans un élat déplora-
ble. Le conseil accorda 6,000 fr. en 1806, «regrettant, par des
motifs d'économie, de ne pouvoir faire davantage pour ce précieux
(1) Depuis Tan x jusqu'à 1820, le département de TYonne contribua pour des
sommes notables à Tentretien de la cathédrale de Troyes et du palais épiscopal.
(2) Procès-verbaux du conseil général.
M. DE DOl}LLO(»(E, ÉVÊQUE DE TROYES. 597
mooumeotJiditM. Olivier Chardon, secrétaire de l'assemblée. Chaqae 1809 ^ iwt.
année on fit des instances auprès du gouvernement en faveur de cette
basilique, mais sans succès.
L^église Saint-Germain de la même ville, ce vénérable monument
qui renferme les tombeaux des saints du diocèse, après avoir été condam-
née ^ la démolition, y échappa, et, sur une réclamation de Tévéque et des
habitants catholiques de la ville, fut conservée pour servir d'oratoire (i).
Pendant que le pape rétablissait pleinement son autorité sur l'Ëglise
de France, les débris des jansénistes essayèrent de se reconstituer. Mais
comme leur nombre avait sensiblement diminué ils ne formèrent plus
qu'une petite église. La ville d'Auxerre en posséda une chapelle dont
les rares sectateurs passèrent presque inaperçus jusqu'à nous.
M. J.-B. Yilletard, ancien chanoine de la cathédrale, qui avait sur-
vécu aux orages révolutionnaires, en était le représentant. Au moment
de sa mort , en 1805, il était en train de rétablir les écoles de
Saint-Charles, fondées par M. de Caylus et que la révolution avait
fermées. Il transmit ce devoir, par son testament, k M. Bourgoin Tainé
et k trois autres personnes honorables d'Auxerre, en même temps que
la dotation importante attachée à ces écoles qui existent encore aujour-
d'hui (2).
— ~ ~ ~ ^ ~ ^^^^^— ^^-^^^^ — |— ,— ,-^ — ,y— ^^-^p— p-^ — ,— — ^ -^-^ — -^^.^^^^^ — - — — — — — _^— >^^^— »» — — — — »»— — -^— — ^ — i-irirTrir-in « i_i^ j~lj-i_i i
CHAPITRE III.
M. DE BOULLOGNE, ÉVÊQUE DE TROYES, DE CIIALONS
ET D'AUXERRE.
Le diocèse de Troycs demeura vacant pendant quelque temps après 1807 !i im.
la mort de M. de la Tour-du-Pin, et le Chapitre cathédral fut chargé
(1) La décision du gouvernement sur cet objet, est du 18 floréal an xn.
(2) M. Villetard pria son neveu, M. Ilay, conseiller de préfecture, de le faire en-
terrer au pied d'un reste de bâtiment élevé par saint Germain et où avait été fondée
depuis Tabbaye St-Maricn(V. son testam. des 12 et28gcrm. an xiii, reçuDupIessis.)
508 H. DE BOULLOGME,
1807 1 1891. àe TadministratioD. Il pablia, cd cette qualité, plusieurs mandements
et ordonnances, particulièrement le 7 août 1808, pour rappeler Texé-
cution de Tindult du 0 avril 1802 sur la translation des fêtes de TËpi-
plianie, de la Fête-Dieu, des apôtres saints Pierre et Paul, et des
saints Patrons des paroisses, au dimanche le plus proche du jour où
elles tombent. L'inobservance de ces prescriptions jetait du désordre
dans l'administration du diocèse.
M. de Boullogne (Ëtienne-Ântoine), né à Avignon en 1747, fut
nommé évoque de Troyes ^ la fin de 1807. Il fut préconisé à Rome
dans le consistoire du 11 juillet 1808, et sacré le 2 février 1809 ; mais
il ne vint prendre possession de son siège qu'un peu plus tard, par des
causes indépendantes de sa volonté. Sa première lettre pastorale est du
20 mars 1809. Il y prend les titres d'évéque de Troyes, de Châlons-
sur-Marne et d'Auxerre , baron de Tempire , aumônier ordinaire de
S. M. l'empereur et roi. Sa réputation bien méritée d'orateur éloquent
lui avait valu depuis longtemps des succès dans le monde. Il avait prêché
à la cour de Louis XVI dès 1785. En 1784, Tévêque de Châlons le
nomma archidiacre et chanoine de sa cathédrale. Ëlu en 1789 député
de Paris h l'Assemblée constituante, il avait refusé le serment h la
constitution du clergé. Détenu, puis mis en liberté jusqu'à trois fois
pendant la Terreur, il échappa heureusement à une mort certaine. M.
de Boullogne se livra ensuite k la rédaction des Annales religietises qui
devinrent les ilnnales catholiques, où il prit souvent à partie les consti-
tutionnels. Le rétablissement du culte lui rouvrit la chaire, dans laquelle
il brilla d'un nouvel éclat. L'empereur, frappé de son talent, le nomma
au nombre de ses chapelains. Après avoir été promu k un siège d'Italie,
qu'il refusa parce qu'il ne connaissait pas la langue de ce pays, il fui
choisi pour celui de Troyes.
L'élévation des pensées et la profondeur qui distinguent le premier
mandement de M. de Boullogne promettaient un prélat destiné à raviver
l'esprit chrétien dans le diocèse de Troyes. Il y signale l'éiat des popu-
lations des campagnes que menace la corruption, parce qu'elles sont
privées de pasteurs. En effet, sur plus de 800 paroisses dont se com-
posait alors son vaste diocèse, le tiers était sans curés. Aussi s'écric-til .
a La morale se perd faute de culture et d'éducation chrétienne. Excm-
ÉVÊQUE DE TROTES. 599
» pie trop sensible, qui démontre aux moins clairvoyants qu'il n'y is^j ^^ i^si.
» a point de religion sans pasteurs, et point de mœurs sans religion.
» En vain les sages du siècle voudraient, ^ force d'art, obscurcir cette
> vérité ; toujours il sera vrai de dire que rien ne pourra jamais suppléer
» atix douces insinuations de l'autorité pastorale , qu'elle peut seule
> simplifier les opérations si pénibles et si compliquées du gouverne-
> ment, et que partout où les ministres de la charité disparaîtront, il
> faudra nécessairement multiplier les ministres de la justice. >
L'indifférence qui animait déjà les peuples est aussi l'objet des regrets
du prélat ; cependant il compte beaucoup sur le rétablissement des
écoles chrétiennes et sur l'Université nouvellement organisée, pour
obtenir, après un certain temps, de meilleurs résultats.
La confiance de M. de Boullogne dans le gouvernement impérial,
inspirée sans doute un peu par la reconnaissance et aussi par le désir
de fortifier l'autorité renaissante, lui dicte souvent dans ses mande-
ments de pompeux éloges. La grande victoire de Wagram, la paix avec
l'Autriche, inspirent sa plume féconde. Le mandement sur la naissance
du roi de Rome est un modèle du genre. Ses souhaits de perpétuité pour
la nouvelle dynastie se mêlent agréablement aux chants de triomphe et
de gloire. La ville d'Âuxerre vit une seule fois dans ses murs M. de
Boullogne au mois de juillet 1809; encore ne fit-il qu'y passer rapide-
ment et presque incognito, de sorte que la réception qu'on se proposait
de lui faire n'eut pas lieu.
Quelques jours après la naissance du roi de Rome, il vint k Paris
assister au concile national convoqué par l'empereur pour remédier aux
difficultés qui subsistaient entre le pape et lui. Napoléon avait violem-
ment annihilé la résistance de Pie YII au système continental. La
politique l'emporta sur le respect dû au vicaire de Jésus-Christ, et
le pape se vit successivement déposséder de ses états, et emmener pri-
sonnier à Savonne. Mais ces actes de force matérielle ne pouvaient rien
sur le spirituel ; le pape refusait de confirmer les évéques nommés par
l'empereur, et nombre de diocèses demeuraient sans pasteurs.
C'était pour remédier à cet état de choses, qui devenait inquiétant,
qu'un concile était convoqué k Paris, le 17 juin 1811. M. de Boul-
logne y prononça le discours d'ouverture, où il examina Vinfluence de
400 M. DE BOULLOGNE ,
1897 è 1891. ^ religion catholique sur Vordre social et le bonheur des empires. L'em-
pereur, dit-ODy vit ce discours d^uo mauvais œil. M. de Boullogne, qui
fit ensuite partie delà commission chargée de la réponse au message
de Napoléon au concile, avait composé la rédaction de cette pièce,
dans laquelle on déclarait que Ton demanderait la permission d'en-
voyer au pape une députation qui lui exposât Fétal déplorable des
églises. L'empereur propose un décret pour couper court à tout, et de-
mande que dans le cas où le pape n'aurait pas , dans les six mois ,
confirmé les nouveaux évêques, ce droit serait dévolu au métropolitain.
La commission décide qu'on soumettra le projet de décret au pape :
alors l'empereur irrité casse le concile le soir même, iO juillet, et fait
arrêter et conduire à Vincennes l'évéque de Troyes, ainsi que les évo-
ques de Gand et de Tournay.
Au mois de novembre, M. de BouUogne est obligé de remettre sa
démission et une promesse par écrit de ne plus se mêler des affaires de
son diocèse et de n'y entretenir aucune correspondance. Celait la condi-
tion de sa mise en liberté. Il fut ensuite envoyé en surveillance à Falaise.
Alors il s'éleva dans le diocèse de Troyes une division qui prenait sa source
. dans l'illégalité de la mesure dont était frappé M. de Boullogne. Une
partie du clergé regardant sa démission comme forcée, envoya consulter
* le pape qui répondit, en effet, que les droits de Tévêque étaient entiers
et que le Chapitre n'avait aucune autorité. M. de Boullogne, lui-même,
pressé de se prononcer, avait dit n que dans la situation rigoureuse où
n il se trouvait, il ne pouvait rien répondre. »
Alors l'abbé Arvisenet qui, jusqu'au mois de juin 1815, avait signe
les mandements comme vicaire général du Chapitre, collectivement avec
M. Treffort, se refusa à continuer et publia sa rétractation. L'éclat de
cette démarche, qui acquérait beaucoup de poids par la considération
dont jouissait sou auteur, décida le gouvernement à demander à M. de
Boullogne une nouvelle démission. Celui-ci ayant refusé de la don-
ner, fut encore jeté dans les prisons de Vincennes, le 27 novembre
1815.
M. Alexandre de Cussy fut nommé alors au siège de Troyes, et le Cha-
pitre, du moins en partie, le reconnut; et, dans un mandement aux curés
du diocèse, en date du 10 novembre 1815, ce corps entreprit de se
ÉVÊQUE DE TROYES. 401
justifier des accusations de schisme dont on le frappait pour avoir usurpé ^^ ^ ig^i,
l'autorité deM.de Boullogne captif. M. Yiart fut soupçonné de fomen-
ter la résistance dans son dojenné, et la police veillait activement sur
ses démarches ; mais tout se passa sans éclat.
La chute de l'Empire rendit M. de Boullogne à son troupeau. La per-
sécution qu*il avait éprouvée le grandit encore aux yeux du nouveau
gouvernement, dont il épousa chaudement les intérêts.
Son mandement du 10 mai 1814, qui prescrit un Te Deum solennel
en action de grâces du rétablissement de la maison des Bourbons, com-
mence en ces termes :
« Enfin, nos très-chers frères, après trois années environ d'exil ou
> de captivité, où nous retenoit la plus injuste tyrannie, pour avoir dé-
» fendu de tout notre pouvoir les droits du saint-siége inséparables de
» ceux des évéqnes, et ensuite pour n'avoir pas voulu souscrire à des
> propositions non moins contraires k notre honneur qu*à notre cous-*-
» cience, il nous est permis de faire entendre notre voix à ce troupeau
» chéri dont on a pu nous séparer par la violence, mais que rien n'a
» pu nous faire oublier. >
Son retour dans son diocèse y fut accueilli avec joie; cependant, le
parti qui s'était prononcé pour le Chapitre ne se résigna que quelque
temps après a la soumission. L'évéque prit alors des mesures pour an-
nuler les actes d'usurpation commis pendant son exil, mais sans bruit et
sans initier le public à ces détails d'intérieur.
L'ancien Âuxerrois , faible portion du vaste diocèse de Troyes ,
ne recevait que le contre-coup de ces mouvements. M. Yiart con-
tinuait de le régir suivant les anciennes traditions. La vaste étendue
du pays soumis à l'autorité de M. de Boullogne ne lui permeitait
pas de tout voir par lui-même, et il s'en rapportait à M. Viart pour tout
ce qui concernait son doyenné (1).
(1) Sous TËmpire, M. Viarl n'était pas toujours d'accord avec le préfet. M. de la
Bergerie, qui lui reconnaissait toutes les qualités d'un bon prêtre, Taccosail cepen-
dant de pécher par excès de zèle. II se plaignit même à M de Boullogne de la viva-.
cité extrême que montrait, dans ses sermons, ce vénérable abbé, contre les jansé*
nistes et Findiflerence des fonctionnaires publics h Tégard de la religion.
Il 26
402 M. DE BOULLOGIŒ, ÉV&QUE DE TROTBS.
2]. D'ailleurs, la politique absorbait presque tout son temps, et il datait
la plupart de ses mandements de Paris. Son zèle nouveau pour la
royauté l^ltime respire dans tous ses écrits et proclame cette union de
l'autel et du trône qui était le rêve des hommes de ce temps.
Les frais du culte entrent sous la Restauration pour une plus grande
part dans le budget du département. Le conseil général, dans sa session
de 1816, prit une délibération qui augmenta le chiffre de ce chapitre de
, son budget. Il demanda en même temps l'établissement d'un séminaire
dans le département, afin de faciliter, par son rapprochement des admi-
nistrés, l'augmentation du nombre des ecclésiastiques. II offrit, k cet
effet, une somme de 15,000 f. pour aider aux frais de première ins-
tallation.
Ce corps était animé de vues très-religieuses. Il voyait avec inquié-
tude diminuer le nombre des prêtres, sans qu'on fit rien pour y re-
médier. En 1819, M. le comte de Chastellux , rapporteur d'une com-
mission du conseil, fit décider l'adoption d'un projet du préfet tendant
à contribuer de 30,000 f. pour les établissements ecclésiastiques qu'on
s'attendait à voir fonder.
H. de Boullogne avait été appelé à l'archevêché de Vienne lors du
concordat de 1817. Hais les circonstances empêchèrent l'exécution de
cette mesure ; toutefois l'archevêque élu publia alors un mandement aux
fidèles de son diocèse de Troyes, où il fit l'historique des actes illégaux
commis par son Chapitre et des réparations qu'il en avait faites, afin de
laisser, dans les archives de l'église de Troyes, une protestation so-
lennelle pour la conservation des vrais principes (1).
Nommé pair de France, en 1822, M. de Boullogne nous devint
étranger. II passait la plus grande partie de son temps k Paris où il sou-
tenait ardemment les privilèges de l'Eglise et les lois tendant k leur main-
(1) U dit dans son m»dement du 17 janvier 1818 : « Noos avons ordonné que tons
9 les actes illégaux qui pouvoient se trouver dans les registres de notre Chapitre en
» disparussent et qu'il n'y restât plus de trace de ces délibérations plus qu'irrégu-
» lières. Nous avons déclaré nuls et de nul effet tous les pouvoirs quelconques qui
» auroient pu être donnés par les envahisseurs de notre juridiction, et les avons fait
M également disparaître des registres de notre secrétariat, et néanmoins nous avons
M. DE LA PARE y ARCHEVÊQUE DE SENS. 405
lien. Il consacrait les loisirs que lui laissait la session k composer des i^ ^ issi.
discours très-goûtës. Il mourut d'une attaque d'apoplexie cérébrale dans
la nuit du 15 mai 1825. Ses restes furent déposés au Mont-Valé-
rien (1).
L'établissement du siège archiépiscopal de Sens va commencer une
nouvelle série de prélats.
0^0^0^0^0^0^^^0^0^^^0^0^0^0^0^^^0^^^^^^^0^0^0^^^0^0^0^^^^^0^^^^^^m0^^^^^^^^^0^^*^^0^^^^*^^^^^*^*^^0^0^^^^^^^^^^^^^^^^^l^*^^^^^^^^^'*^^^^^^^^^*
CHAPITRE IV.
M. DE LA FARE, ARCHEVÊQUE DE SENS ET ËVÊQUE D'AUXERRE.
*
Le concordat de 1817, qui augmenta le nombre des évéchés et le ^^^ * ^^•'®-
mit plus en proportion avec les besoins des populations , rendit à
l'antique siège de Sens son titre primitif d'archevêché ; mais il ne
fut pas immédiatement exécuté. Cependant le pape Pie YII « par
sa bulle du 5 octobre 1817, conféra la dignité archiépiscopale de
Sens à BI. de La Fare (Anne-Louis-Henri) , ancien évéque de Nancy ,
aumônier de madame la duchesse d'Angouléme , nommé k ce siège
par le roi Louis XYIII. Les limites du nouveau diocèse ne furent
déterminées que le 4 septembre 1821 , par un bref spécial du pape, qui
lui assigna l'étendue du département de l'Yonne; c'est alors seule-
ment, le 51 octobre suivant, que M. de La Fare prit possession solennelle
parle ministeredeM.de Launay deYaudricourt, son vicaire général (2).
» validé ces pouvoirs pour la tranquillité des fidèles dont la bonne Toi formoil pour
» eux ce que TÊglise appelle un tUre coloré. Enfin, nous avons ordonné que toutes
» les provisions aux curés et desservants, ainsi que toutes les lettres d'ordination et
» permission quelconques portant le sceau d'une vacance imaginaire et non revé-
» tues de notre signature, nous fussent renvoyées pour en donner de nouvelles, ce
M qui a été exécuté. »
(1) Feller, Picot, mandements de M. de Boullogne, etc. — On a rccueiUi les ou-
vrages de ce prélat, en 8 vol. in-8<>. 1826 et années suivantes.
(2) M. de La Fare portait pour armoiries d^asur à trois flambcauœ allumés, et sa
devise était : lux nostris uostibus ignis.
404 M. DE LÀ FARE,
1S91 ^ 18-29. ^ ^^ moment toute autre juridiction ecclésiastique cessa sur le dé-
partement de TYonne. Un acte du 10 novembre 1821 établit M. Viart,
doyen de l'église paroissiale d'Auxerre, comme vicaire-général de Par-
cbcvéque. M. Viart continua d'administrer son doyenné comme aupa-
ravant, conservant ses babitudes, dirigeant les cboses h sa manière
pour le plus grand bien ; de sorte que les cbangements successifs d'au-
torité ecclésiastique ne se faisaient que faiblement sentir dans l'ancien
Auxerrois. Cet état de cboses dura jusqu'à M. de Cosnac.
M. de La Fare, attacbé à la ducbesse d*Angouléme par son service de
premier aumônier, devait nécessairement négliger son diocèse. Cepen-
dant il s'empressa d'en visiter tout d'abord les principales villes. Il
arriva il Àuxerre, le 10 décembre 1821, descendit à rHôlel-de-VilIe,
puis se rendit en grande cérémonie à la catbédrale. M. Viart lui adressa
dans son église un discours où l'éloge du passé du prélat se mêlait à
l'espoir que l'avenir réservait à Téglise d'Auxerre.
D'autres allocutions furent également prononcées par différents fonc-
tionnaires de la ville. On y remarque surtout un ton de critique pour le;
régime précédent qui semble malbeureusement être de tous les temps.
LfC 1®' novembre 1821, M. Dupont qui avait toute la confiance de
Tarcbevêqne fut nommé son secrétaire-général. Le même jour, le Cha-
pitre métropolitain fut installé. M. de La Fare nomma cinq arcbidiacres
portant le titre de chacun des arrondissements du département.
Ce n'était rien que de créer les titres et les nouvelles fondions des-
tinées aux services généraux, il fallait pourvoir aux besoins de plus
en plus urgents des paroisses qui allaient bientôt manquer de pasteurs.
Les prêtres qui avaient échappé à la persécution se faisaient vieux ;
beaucoup d'entre eux étaient plus que sexagénaires. La création de sé-
minaires pouvait seule après quelques années remédier à cet état fâcheux.
Aussi dès le 5 décembre 1821 l'archevêque publia un mandement pour
intéresser les fidèles à cet établissement. Le conseil général du départe-
ment, dans sa sessionde 1822, déclarait qu'il manquait plus de la moitié
des desservants nécessaires aux besoins du culte. Un tiers des autres,
disait-il, est dans un &ge très-avancé, qui menace dans peu de voir vaquer
un grand nombre de paroisses. Il approuva alors l'offre faite par la ville
d'Auxerre des bâtiments dits de Sainte-Marie pour un petit séminaire
ARCHEVÊQUE DE SENS. 405
diocésain. La foodaiion eut lieu en conséquence el fut autorisée |)ar is^i ^ ig^
ordonnance royale du 26 mars 1825 (1).
Dix bourses de 5,000 fr. furent fondées par le conseil général, h parta-
ger par moitié entre le grand et le petit séminaire. Les candidats étaient h
la présentation du préfet. Mais les résultats de cette nouvelle institution
ne devaient être efficaces qu'après un certain nombre d'années. Aussi le
cbiffire des églises où la desserte se faisait par binage, qui était de 98 en
1818, était de 111 en 1822, et de 128 en 1828.
En 1825, M. de La Fare, obligé de partir pour Rome afin d'assister
au conclave, en sa qualité de cardinal, emmena avec lui M. Dupont,
pour son conclaviste.
L'année 1825 est remarquable pour notre ancien diocèse d'Auxerre,
par la publication de la bulle du pape (2) qui réunit le titre d'évé-
clié d'Auxerre à Tarcbevécké de Sens. Cet acte eut lieu le 25 juillet.
Le conseil municipal d'Auxerre, justement préoccupé de la perte de
l'antique siège épiscopal, avait sollicité la conservation du titre de
l'évécbé et son union à l'église archiépiscopale de Sçns, et le roi avait
accueilli favorablement sa requête.
M. Dupont, nommé évêque de Samosate inparlibus tn/idehum, devint,
à partir de 1824, comme le coadjuteur de M. de La Fare et le remplaça
dans la visite de son diocèse qu'il ne pouvait pas faire lui-même.
Vers la fin de cette année, des missionnaires furent envoyés & Auxerre
par M. de La Fare, pour ramener les esprits aux croyances religieuses.
Mais la prévention d'une partie de la population fut si grande contre
eux qu'ils quittèrent la ville sans avoir obtenu tout le succès qu'ils
avaient espéré.
Parmi les mesures générales d'administration que prit M. de La
Fare, nous citerons notamment l'ordonnance sur les fêtes , du 28 mars
1822, par laquelle sont maintenus les règlements antérieurs et spéciale-
ment celui du 1®^ août 1805. Par cette ordonnance les fêtes de r£pi-
(1) La ville Gt abandon des bâtiments à condition qu'ils seraient à perpétuité af-
fectés à un séminaire.
(2) Du 3 juin 1823.— Voy. Preuves, t. iv n. 477.
406 M. DE LA FARR,
mi à 18329. phanie, de saint Pierre et saint Paul et celles des saints Patrons de cha-
que paroisse furent transférées, et durent être célébrées le dimanche le
plus proche des jours où elles étaient chômées jadis.
L'archevêque étant à Paris, le 9 septembre 1824, publia une ordon-
nance considérable sur la discipline générale du clergé , sur le service
divin et sur les devoirs des ecclésiastiques. Le 18 août 1826 parut une
autre ordonnance pour renseignement du cathéchismc de Sens, grand
et petit, dans tout le diocèse, à Pexclusion de tous autres. C'était
l'ancien catéchisme de l'archevêque de Luynes. Bientôt après (20 mars
1827), une circulaire d'un vicaire-général annonça le projet d'établir
partout la liturgie sénonaise. On y donnait pour motifs le besoin d'uni-
formité dans la liturgie, la dégradation des anciens livres et l'impossibi-
lité de les faire réimprimer sans de grands frais, etc. Mais ce projet n'eut
pas de suite. Les prêtres de l'Auxerrois Munirent pour conserver leur
belle liturgie qui avait eu l'illustre Lebeuf pour parrain et il ne fut plus
question de rien. Cette tentative montrait bien qu'il y avait sur ce point
une grande réforme h opérer, mais le temps n'était pas venu et elle devait
arriver de plus haut.
Parmi les paroisses de l'ancien diocèse d'Âuxerre qui éprouvèrent
des modifications dans leur titre, sous Tépiscopat de M. de La Fare,
on trouve en 1822, l'église Saint-Eusèbe d'Âuxerre, qui obtint le rang
de cure. L'église Saint-Pierre de la même ville, fut alors érigée en
cure de 5® classe. Jusqu'alors il n'y avait eu à Âuxerre qu'une cure,
celle de Saint-Etienne dont le bénéficiaire, M. Viart, se qualifiait curé
d'Âuxerre (1 ) .
Le 1®' janvier 1825 eut lieu Tércclion de l'église de Cravan en
cure; la succursale de Beaumont date du mois de novembre 1826.
(1) M. Viart avait pris, comme on l'a déjà vu, des allures d^indépcndancc qif au-
torisaient jusqu'à un certain point son âge, ses longs services et sa grande influence
dans tout Tancien diocèse d*Auxerre. M. de La Fare , qui n'aimait pas le titre
d'évêque d'Auxerre que le pape avait ajouté à celui de son siège, ne signait jamais
qu'archevêque de Sens et d'Auxerre. Mais M. Viart avait grand soin, lorsque des
pièces de ce genre lui arrivaient de rarchevéchc, d'ajouter après le mot Sens « et
évéque â^ Auxerre, » et de ne les publier qu'avec cette rçclification.
ARGIIKVÊQUE DE SENS. 407
Les Ursulines de Vermanton qui étaient venues de Trojes furent ig^i 1 1^,
autorisées le 1<^^ juillet 1825.
La mort de M. de La Fare arriva le 10 décembre 1829. Cet événe-
ment fut annoncé au diocèse par les vicaires-généraux élus par le
Chapitre.
Nous terminerons ici la suite des Mémoires ecclésiastiques sur le dio-
cèse d'Âuxerre. L'épiscopat de M. de Cosnac et celui de son vénérable
successeur ne sont pas encore entrés dans le domaine de l'histoire.
FIN DE LA SEPTIÈME PARTIE.
MÉMOIRES
HISTORiaiJBS
SUR
LES ÉVÊQUES DAUXERRE.
' ^ * ^.^i„— .„,^.^.^^^.^^,^^.^^.^^^.^^ — ^^ — M— in ri r~i n_rxi~i i~u~ii-~if~ii~i~-ii — i — i ^i~ii~r~i i~-m— i~i i^i ~ i~ ~i ' i i~ i~i i— r~i i~li~ij _i'i_i~ j~i-njn_n-n-ri n n_n i~i i— i r~i.r~ii~i i — i^ — — -~ — ^.^^^^^^-^ — ^—^
HUITIÈME PARTIE,
Contenant les listes des Dipitaires de la[ cathédrale et des Abbés
on Prieurs de plasiears commonantés
de la Tille d'Auxerre.
Nota. Nous avdns dû saouler dans cette partie les derniers Dignitaires du xtii* et du xviir siècle, qui n'étaient
point donnés par l'abbé Lebeuf. Un astérisque placé au commencement de la ligne indiquera ces adjonctions-
GORÊVÊQUES ET PREVOTS DE L'ÉGLISE D*AUXERRE.
Quoique le diocèse d'Auxerre ait été peu nombreux en paroisses dans
sou origine, puisqu'au vi® siècle il n'y en avoit que trente-sept dans la
campagne, ainsi qu'on a vu par la vie de saint Aunaire, dix-huitième
évéque, rapportée ci-dessus (1), il était cependant, dès-lors, de la
même étendue qu'il est aujourd'hui, c'est-à-dire qu'il s'étendoit jusqu'à
19 lieues d'Auxerre du côté d'Orléans, et jusqu'à 19 ou 20 du côté de
Nevers. C'est ce qui me fait croire que dans les moyens siècles, je veux
(I) T.i, p. 124.
410 PBÉVÔT8
dire ceux auxquels le zèle pastoral commençoit a diminuer, quelques
évêques d'Auxerre, soit par infirmité ou parce qu'ils avoient d'autres
occupations qui partageoient leur soins, auront permis à des évéques ré-
gionaires de s'établir vers Tune ou Tautre de ces extrémités, comme on
en a des exemples dans d'autres diocèses. Ces évêques, espèce de grands-
vicaires, avoient des pouvoirs limités et ne se qualifioient jamais évo-
ques du diocèse où ils rendoient service.
Le Nécrologe de Téglise d'Âuxerre écrit dans le xi^ siècle, où sont
nommés tous les morts remarquables depuis le temps de Cbarles-
Martel ou environ, n'en marque qu'un seul qui mourut le 10 décembre.
On y lit cette annonce à la tète de ce jour : Obiit WadimirtAS corepis'-
copw.
Les prévôts furent plus connus dans l'église d'Auxerre que les
corévêques.
Par leur charge, ils dévoient prendre soin du temporel des chanoines,
et cette sollicitude leur produisoit un grand revenu. C'étoit donc au
prévôt à fournir la nourriture aux chanoines dans le temps qu'ils obser-
vèrent la règle du concile d'Aix-la-Chapelle (i), et même depuis qu'ils
cessèrent de la pratiquer toute Tannée. Ce soin général du temporel, qui
l'obligeoit à connoitre les terres de l'église, fit que les évêques lui lais-
soient le soin de pourvoir aux cures de ces lieux du consentement du
Chapitre ; c'est dont il y a un vestige dans la vie de Guy , évêque
d'Auxerre (2).
Cette dignité éloit conférée par l'évêque de l'avis et du consentement
des chanoines, comme il paroit par une lettre où Pascal II remercie
l'évêque Humbaud d'en avoir gratifié le chanoine llger.
Dans les actes, il étoit nommé le premier avant le doyen, même
dans ceux qui émanoient du Chapitre.
L'autorité de ce dignitaire ne fut pas toujours goûtée a Auxerre.
L'évêque Robert de Nevers promit de l'éteindre. Un autre évêque eut
la même intention ; et, enfin, Alain la réunit au Chapitre, lorsqu'elle
eut vaqué, en 1177, par la promotion de Gui de Noyers a rarcbevêché
de Sens.
1) Vie d'Augelelmc, Héribald, Wala, elc. | •>) Voy. t. i |»ayc 257
DE l'église d'auxerre. 411
Les prévois les plus anciens de Téglise d'Âuxerre, h en juger par le
Nécrologe du xi® siècle, sont : Ermemberl, prêtre, qui y est au 16
février; David, au 27 avril ; Ermenfroy, au 7 août. Il donna des terres
siiuées sur le ruisseau de Beauche, et d'autres à Vaux ou dans la vallée,
et à Basson en Sénonois. Adémard, prêtre au 9 novembre, Etienne,
prêtre au 4 décembre, et Ermembert, diacre au 5 du même mois.
Vaidric, qui les suivit, est au 1®^ mars; Robert est au 31 octobre ;
ces deux précédèrent ceux que je vais nommer, dont on sait le temps
positivement.
Hugues, prévôt de Téglise d'Auxerre, neveu de l'évêque Geoffroy de
Champaleman, fut élu évêque de Nevers vers Tan 1060.
Hugues II est nommé dans un titre de 1076, concernant la fondation
du Chapitre de Clamecy en 1076 (1). Il pourroit être le même que le
nécrologe dit au 5 août être mort dans le voyage de la Terre-Sainte.
Dans le catalogue des chanoines, écrit vers Tan 1000, il n'est que parmi
les sous-diacres.
Ingelbold, qui rebâtit Crevan, Accolay et Villeneuve, est dans le
nécrologe, au 12 novembre, du caractère du xu^ siècle* Ainsi, il doit
être ici ou après Ilger.
Emelbert, prévôt de Féglise d'Auxerre, signa, en 1109, un accord
entre Etienne, abbé de Bèze, et Hugues, abbé de Saint-Germain
d'Auxerre.
Ilger ou Ulger fut fait prévôt par Tévêque Humbaud, son oncle, sur
la fin de son épiscopat, vers l'an 1 1 12 ou 1 1 15. Il eut quelques suffrages
pour lui succéder. Il fut de son temps le modèle des chanoines, et sur
la fin de sa vie il se fit religieux. Il donna un moulin du côté d'Aigleny,
pour l'anniversaire de son oncle, bien de l'argenterie et des livres.
Etienne, prévôt, vivoit en 1151.
Hervé, en 1157.
Gui de Noyers est qualifié prévôt en plusieurs tilres, depuis l'an
(1) Voy. Preuves, t. iv,
412 DOYENS
1168 jusqu*cn 1177, qu'il fut élu archevêque de Sens. 11 ccrivil à la
têle du Chapitre au roi Louis-le-Jeunc, pour le prier de prendre la dé-
fense des terres du Chapitre contre le comte de Nevers (1).
DOYENS DE L'ËGLISE D'AUXERRE.
Le nom de doyen ne se trouve employé, pour désigner un titre
honorifique parmi les clercs ou chanoines, que depuis le concile d'Aix-
la-Chapelle tenu sous Louis-le-Débonnaire. Plus anciennement, il éloit
d'usage parmi les moines, comme il paroft par les règles. Il est même
employé dans saint Jérôme et dans saint Augustin. Les fonctions des
doyens étoient purement spirituelles. C'étoit à eux à veiller à l'observa-
tion de la règle ; cependant, le doyen & Âuxerre n'étoit pas le premier
du Chapitre, et il ne le devint que lorsque la prévôté fut supprimée.
Ce doyen jouissoit autrefois de plusieurs beaux droits : il avoit juri-
diction dans la ville et faubourgs d'Âuxerre, excepté la paroisse de
Saint-Loup (2). Il avoit un officiai et une cour où se passoient des actes
solennels. Ces droits commencèrent & être combattus par Guillaume de
Seignelay, fait évéque en 1207 (a).
La dignité de doyen est celle qui a fourni un plus grand nombre
d'évéques à l'église d'Âuxerre. Elle est élective par le Chapitre, et on
doit appeler h Télection du doyen même les chanoines absents. Sa place
est la première en entrant au chœur à main droite. Ce dignitaire porte le
rochet sous son surplis ou sous son camail.
Le premier monument qui fournisse le nom des doyens de réglise
d'Auxerre, est le Nécrologe qui se trouve écrit d'un caractère d'environ
le commencement du xi® siècle.
(I) Duchène, t. iv. | (2) Voy. la vie de Guill. de Seignelay.
(a) Au xu« siècle, Hervé de Chilry prenait le titre de Dci gralia decanus.
(iV. d. E,)
DE l'église D^AUXERRE. 415
Voici les noms des plus anciens, rangés selon les jours des mois qu'ils
sonl décédés :
Adoyn, mort le 27 janvier. Rolfrid» le 1" mars. Valchaire, prêtre et
dojen au iS mars. Âiguiphe, prêtre et doyen, le 29 avril. Salomon,
chanoine et doyen, le 9 août. Ingebaud, prêtre et doyen, le 8 septembre.
Gauzon, prêtre et doyen, le 19 octobre. 11 légua aux chanoines son do-
maine de Crevan. Vital, doyen, mourut le 1®^ décembre. Âcclevert,
prêtre et doyen, mourut le 13 du même mois. Benoit, Geoffroy,
Âganon et Hugues n'ont vécu qu'après tous ceux-là, et sont morts
durant le cours du xi® siècle, le 4 et 16 janvier, le 11 mars et le 30
avril.
Voici les noms de ceux qu'on connoit depuis la fin du même
siècle.
HuHBAUD, issu d'une famille d'Âuxerre. Il souscrivit aux lettres de
fondation du Chapitre de Clamecy, en 1076, et fut depuis évêque
d'Âuxerre en 1087.
Frodon, doyen, signa en 1110 l'accord fait par l'évêque Humbaud,
entre Létheric, abbé de Saint-Benoit-sur-Loire, et les seigneurs de
Toucy, touchant les coutumes de Villiers-Saint-Benott.
Etienne, doyen, est nommé en plusieurs actes. Dans un titre du
monastère de Molême, de 1123; dans un autre de la même année, qui
regarde la donation de l'église de Saiot-Fargeau, faite par Hugues, évê-
que d'Âuxerre, & Gervais, abbé de Saint-Germain. On le trouve pareille-
ment & l'an 1126, dans le carlulaire de Crisenon ; et il souscrivit, en
1128, à la donation faite de l'église d'Âugy aux chanoines de Saint-
Père, par Tévêque ci-dessus nommé.
GossELiN, doyen, souscrivit en 1136 à la donation de quatre églises
faite au Chapitre d'Âuxerre (1), par l'évêque Hugues, et, en 1143, h
celle de l'église Saint-Pèlerin faite aux religieux de Saint-Père. On lit
dans les additions au premier Nécrologe, au 25 novembre, jour de sa
mort, qu'il donna au Chapitre sa maison avec des vignes, qu'il fonda
un chapelain à l'autel de Saint-Clément, qu'il donna des ornements h
(i; SpkîL, I. XIII.
41 4 DOYENS
l'église et on calice accompagné de loyaux d'ai^ent, poor la commoDion
do sang. Il est aossi dans TObiluaire de Fan 1250, sous le nom de
Jocelin.
Miles V* do nom signa, comme témoin, le titre des donations qoe
le comte Goillaome fit au monastère de Saint-Marien en 1140. Il
moorot le 21 avril, selon un nécrologe de cette maison to pr Dom
Viole. Je trooTe dans un obituaire do prieuré de Notre-Dame-la-d'Hors,
dépendant de Saint-Marien, au 15 mai, d'une main d'environ Tan
1400 : Commemoratio Milonis decani Autiss. pro quo habemms ty soi.
super ierram de Camipo^RegU.
Guillaume I®' du nom est nommé dans le cartulaire de Crisenoo, à
Fan 1159. Il est présent à la vente de deux hommes de Venoy, faite à
Tabbé de Saint-Germain, en 1160 (1). En 1166, il assista à Tacie de
la suppression de la prévôté du Chapitre ; en 1176, 2i une confirmation
do droit du prieuré de Saint-Eusèbe, sur les prébendes vacantes. La
chronique de la cathédrale écrite en marge du cycle pascal, met 2i Tan
1163 : De vinea Wxttelm de Prune^ anmu i$ie primus. Il poorroil être
ce Goilbome doyen, dont l'annonce de l'obil marqué an 16 octobre,
est conçue en ces termes : c Obitos Goillelmi de Proneto presbyteri et
» decani xl. s. super vineam de Poriaco qoe foit Milonis de Tremont
» militis fratris ejos (a). »
Hugues de Noyers. Il fat doyen peu de temps, mais on est assuré
qo'il le fot avant que d'être élu évéqoe d'Aoxerre, l'an 1 1 82.
Herté de ÇHrrRT, soccéda k Hogœs de Noyers. D est nommé dans
des actes de 1186 (2) ; dans le testament do chanoine Âbbon de Tan
1191 ; dans la confirmation do don de Pierre de Ckisiriaco son frère, de
la même année ; dans un acte de 1193, toochant une maison de la pa-
roisse de Saint-Pèlerin, et dans le cartnlaire de Reigny, à Tan 1194.
(IJ Cari. S Gtrm, \ (i) Fof . ?remieSy ii« 82.
(a) It approuva en 1178 le don da cours d^eaa, fait par Henré Cellerier, de Saint -
£lklineà Tabbaye de Sainl-Marien. — Arch. derYonne, Tonds Saiat-Marieo
{N.é.E.)
DE l'église d'auxerre. 415
L'obituaire de la cathédrale, écrit vers 1250, met au 50 mars : « Ob.
» Ilerveî decani lx s. quos débet capitulum pro operatoriis juxta poriam
» comitis, emptis dedenariis sais ab heredibus Guiberti Roter, super
» que etiam idem decanus assignavit alios lx. sol. in anniv. Manasse
» quondam Treçensis episcopi dividendos. »
Guillaume II du nom, issu des barons de Seignelay, fut élu doyen
vers Tan 1198, auquel temps il est nommé dans quelques titres. Il sou-
tint ses droits contre Tévêque et contre le comte, et fut enfin élu
évéque en 1207.
Renaud, doyen, est nommé dans le cartulaire du Chapitre, à Toccasion
d'un bail de vigne en 1209. Mais ce qui le rend plus célèbre la même
année, est qu'il se croisa alors avec Guillaume de Seignelay, son évéque,
qu'il se trouva depuis h la prise de Carcassonne, et qu*il fut nommé avec
le même évoque par Innocent III, pour faire rendre à Simon de Mont-
fort, chef de la croisade, ce qui lui avoit été adjugé sur le butin de la
même ville. Le même pape lui adressa, conjointement avec les abbés de
Saint-Germain et de Sainte-Colombe, une lettre sur FabbayedeMoutier-
Saint-Jean, l'an 1211 (1). Étant retourné \k la guerre contre les Albi-
geois, il y mourut (2). Voici ce qu'on en lisoit dans 4'ancienne chroni-
que d'Âuxerre, qui ne se retrouve plus : c Laval est pris et Penez en
» Âgenois. Li château trop fort est assis et après ou assiégé. Les gardes
» de chastel rendent le chastel sur leur cors et leurs choses. Renaud
» doyen d'Aucerre est enfoui en ce chastel en l'église de S. Pierre. »
Les Bollandistes parlent de ce doyen au commencement du mois de
juillet.
Le nom du doyen Renaud parolt aussi dans l'acte par lequel
Bethléem est déclaré, au mois d'octobre 121 1, être du diocèse d'Âuxerre.
En 1212, il avoit été choisi pour arbitre avec Arnaud, abbé de Saint-
Père, entre les abbés de Saint-Germain et de Saint-Marien, touchant les
dimes de La Chapelle, paroisse de Venoy. J'ai aussi aperçu au cartulaire
du Chapitre d'Âuxerre le nom de R. Decanus^ dans un acte du mois de
mars 1212. Enfin, le même R. doyen donne, en 1212, quarante sols
(1) Innoc. Regist.xw. Ep. 50. | (8) Parus de Vall. Cernait.
416 DOTins
snr sa maison de Ptiris, sitoée devant Saîoi-Pîerre^aax-Bceiifst pour
son anniTersaire (1).
QaelqaesHins oat cm qne toat ce qne j^ai rapporté da doyen Renaud,
depuis la chroniqne qne je Tiens de citer, regarde on second Renaod^.
différent dn premier. Je n'ose décider sor ce point.
GuiLLACME m dn nom. On lit de celui-ci qu'il fut délégué par
Innocent III, avec Êlie, abbé de Sainle-G)lombe de Sens^ pour ré^er
un différend entre Févéque de Troyes et Tabbé de Pontigny, en 1212.
n paroit la même année à des ventes (2). En 1215, il soutint un grand
procès sur l'Hôtel-Dieu, dont il est fiiit mention dans les lettres
dlnnocent IIL La même année, il ratifia la fondation et dotation des
chanoines de la Trinité et souscrivit aux lettres de Téréque Guillaume,
qui confirmoient an Chapitre les ^lises de Bazeme , Pourein , Lindry ,
Parly et Beauvoir. L'obit d'un Guillaume, doyen, est marqué aa 15
juillet dans Tobituaire écrit vers 1250. Le nécrologe de Notre-Dame
de la Gté le marque au même jour, en ces termes, qui nous apprennait
qu'il avoit été abbé de ce Chapitre : « Obiit Guillelmns venerabilis
n abbas, hujus ecclesie primus abbas, et venerabilis majons ecclesie
9 decanus. x sol. capitulum solvit. n
Heubi db la Fbrté. Un titre du prieuré de Saint-Âmatre, d'environ
Tan 1216, paroit en fiiire mention. Quelques comptes d'anniversaires
du XIV* siècle font aussi mention d'un Geoffroy de la Ferté, doyen. Cette
différence de nom peut venir de ce qu'on se contentoit souvent alors de
mettre dans les actes la lettre initiale, ce qui rendoit la méprise plus
Ëicile. Ce doyen a été peu connu par les auteurs des collections concer-
nant rhistoire ecclésiastique d'Auxerre. Cependant^ dom Viole en parie
dans son catalogue manuscrit des évéqaes de Chartres. L ne bulle d'In-
nocent HL» à l'occasion du prêtre de l'Hôtei-Dieu d'Âuxerre (3) , parie
aussi du doyen d'Auxerre, vers Tan 1217 ou 1218, mais sans le
nommer (4).
cl) CarmL CapiL, t 510. ù propos un Robert, qu'ils «lisent avoir ete
(â) CamtL CcKpiL, t lia, 124. nommé pour administrer le comté d'Auxerre
(3) De ÀptUaL, c 55. par Pierre <ie Courtenay. lorsqu'il alla pren-
(4) Ici quelques nouveaux conpilateurs dre{H)s«essionde rempireder.onstantiuopU*
de Itott» des do^mMcFAmerre oat placé mal i Mais ayant vu la rharte ipii leur .^iervoit de
DE L^ÉGLISE d'aUXERRE. 417
Guillaume IV dn nom. Celui-ci a été oublié dans le Gallia Chrùtiana,
aussi bien que Henri de la Ferté. Il éloit simple chanoine de Sens en
1205, comme il parolt par un acte de cette année, où le Chapitre de
Sens transige avec celui d'Âuxerre. Il est mentionné dans le traité sur
les oblations de la cathédrale, fart en 1221 (1). Il fit un legs au Chapitre
pour son anniversaire, au mois d'août de la même année.
Brice. Il est connu par plusieurs actes de Tannée 1223, dont l'un
regarde l'abbaye des Isles, d'autres les dons faits à l'église d'Âuxerre,en
1220, par Guillaume de Seignelay (2), et d'autres le don de la dtme de
Molinons et Lailly (3). Il paroft être le même doyen qui, peu après la
translation de l'évéque Guillaume k Paris, fut emmené en Bresse par
Gui de Brouillât, chevalier, en qualité de prisonnier. Il mourut le 5
octobre, selon le nécrologe de Notre-Dame de la Cité.
Miles II. Une sentence d'arbitrage de 1223 prouve qu'il étoit dès-
lors doyen (4). II transigea avec l'évéque Henri, touchant la juridiction
du doyen, en 1224, et passa un accord entre Renaud , abbé de Saint-
Germain, et Colin de Chàtillon, chevalier, en 1223. Il est aussi nommé
dans les titres des Cordeliers d'Âuxerre, à l'an 1228. Il est cité comme
mort dans le cartulaire du Chapitre d'Âuxerre, à l'an 1233 (5). L'Obi-*
tuaire d'Âuxerre, écrit vers 1241, annonce ainsi sa mort au 21 mai :
Obtins Mibnù de Cicon hujus ecele$ie deeani et Iwiie. ïx $oL iuper
pratum silum super Beleam quod dédit nobis ; et celui de Sens : xiij cal.
junii obiit Milo de Cicuns deeanus Autiss. et noster canomeus. Cicon est
une famille noble de la Franche-Comté.
Guillaume Torti est qualifié doyen de bonne mémoire, dans un
contrat du mois de juillet 1239, par lequel le Chapitre accepte du bien
pour son obit (6). Mais il devoit être mort avant le mois de février
1237. Quelques apostilles aux titres de son temps l'appellent aussi
Guillaume de Prunet.
fondement, j'ai reconnu qu'ils ont lu Rober-
1221, fol, 149.
tus Deeanus, où il y avoit Robertus de CHnaco
(3) CartuL fol. 517.
abrégé de Curtinaco.
(4) CatU Cap., f. 377.
(1) Preuves, t. iv, n. 341 .
(5) Fol. 374.
(2) CarhU, Capiu, fol. 49 et 52. Idem en
(G) Carml. f. 511.
II
27
418 DOYENS
Regnaud de Salignt étoit doyen dès Tan 1255, sMl est vrai qu'il soit
nommé dans la transaction de celte année sur les roarguilliers. Il est
nommé, en 1240, dans la transaction passée entre le Chapitre et Tab-
baye de Saint-Germain sur les processions des Rogations, dans le r^le-
nient intervenu entre ces églises et Guillaume de Mello, sur le pacage
du bois de Bruëre, en 1245 (1), et dans le titre des fondations de Té-
véque Bernard de Sully, en 1244. Il succéda peu de temps après à cet
évéque.
Guy de Mello se trouva au concile de Reims, sous Innocent IV, en
qualité de doyen d'Âuxerre, et fut élu en même temps évêque de
Verdun. Il en accepta la dignité, retenant par dispense le doyenné
d^Auxerre, jusqu'à ce qu'il devint évéque de la même église. J'ai lu sur
le sceau d'un acte du mois de février 1245 : Sigillum curie GtUdùnis
decani Autissiod.
Herbert. Vraisemblablement , il avoit été archidiacre avant que de
devenir doyen. Il autorisa, en 1247, les anniversaires d'Urse, voyer
d'Âuxerre, etc. Il consentit, en 1249, à l'augmentation du revenu du
scolastique faite par Tévéque Guy de Mello. Il fit des legs à Saint-
Germain, en 1252. Les Chartreux de Bellary le marquèrent avec dis-
tinction dans leur nécrologe. On le trouve au 22 juillet dans celui de
Saint-Laurent proche Cosne. J'ai vu parmi les manuscrits de Clairvaux
une Somme de théologie sur les sacrements, attribuée à Herbert, doyen
d'Aoxerre ; elle est aussi en Sorbonne, cod. 494. Il y a aussi au car-
tulaire du Chapitre (2) une lettre de lui, adressée à Renaud de Vichier,
commandeur des chevaliers du Temple.
Godefroy de Joigny. Il doit être le G. doyen nommé comme arbitre
en des lettres de 1258 (5). Il est à la tète de l'acte par lequel le Cha-
pitre vendit, en 1265, des maisods situées en la rue de Villeneuve &
l'abbaye de Saint-Germain. On croit qu'il mourut sur la fin de l'an
1267, ou au commencement de 1268. Son obit se lit dans le nécrologe
de la collégiale de Clamecy : XVII cal. febr. Gaufridus Autiss. decanus
(1) CartuL Cap., f. :^14
(2) Fol 129.
(3) Cart. Cap,f f. 430.
DE l'église d'auxbrre. 419
ei canonicus qui dédit vineam^ etc. C'est mal \k propos que quelques mo-
* derues ont placé ici, parmi les doyens, un Bernard de la Braile, qui
étoit vicomte d'Âuxerre et qui mourut en 1261.
Érard de Lésignes maintint les droits de sa dignité contre Guy de
Mello, son oncle, évéque d'Auxerre, auquel il succéda en 1270.
Hugues DE SuLLT est nommé dans le cartulaire de €risenon,en
1275. Il est à la tête de la charte sur Tordre de conférer les bénéfices k
la nomination du Chapitre, donnée en 1^16, et dans celle de la même
année qui regarde le droit de justice dans les maisons canoniales. Il
présida, en 1278, à Télection de Guillaume des Grez. En 1281, il fit
un échange d'hommes avec Humbert de Beaujeu, sire de Saint-Maurice-
Tirouaille (1). En 1285, il Tut uni ë Jean, seigneur de Seignelay, dans
un même compromis (2). On croit que ce seigneur étoit de ses parents.
En 1285, il transigea avec les moines de Flaviguy, pour des biens qu'il
tenoit d'eux à Massingy, et parut dans le traité fait avec l'abbaye de
Saint-Laurent, pour le droit des prébendes d'Auxerre. En 1286, il
répondit avec le Chapitre aux chanoines de Nevers sur les Tortriers (5) ;
et en 1289, il consentit à la donation que fil Guillaume des Grez de la
chapelle de Pontchevron k l'abbaye de Saint-Laurent. L'année de sa
mort est aussi 1289, suivant l'inscription de sa tombe qui est dans la
nef de l'abbaye de Saint-Germain, devant la porte du chœur.
Geoffroy IL II fut présent, en 1291 , dans l'abbaye de Saint-Julien,
lorsque Jean, comte de Joigny, y confirma les dons faits par ses pré-
décesseurs; et, en 1296, à l'hommage que Louis, comte de Nevers, fit
à l'évéque d'Auxerre. En 1297, il ratifia une sentence portée au sujet
de la justice d'Appoigny (4). Il se trouve depuis nommé dans un con-
cordat de l'évéque Pierre, de l'an 1504, avec l'abbaye de Saint-
Germain, louchant la correction de moines. De plus, dans un autre
titre de 1505, sur les droits du Chapitre dans l'église Saint-Aubin
d'Oisy, et dans un titre delà pénitencerie du mois d'octobre 1307 (5).
(1) Cart. Cap., fol. 408.
(2) Ibid., fol. 4*28.
(3) Preuves» t. iv, n. 300.
(4) Cart. Capit., f. 43.
(5) Le sieur Bargedé, assesseur, dans sa
liste des doyens d*Àuxerre, a attribué une
partie des foits qui regardent ce Geoflh)y» à
un Guillaume qu*il surnomme Cbauderon ;
420 DOTBMS
Guillaume surDommé en lalio Caiini. Il est apparemment le même
Guillaame Galini qui éloit lecteur et pénitencier en 1504. Quoi qu'il en
soit, il ne paroit en qualité de doyen que depuis 1312. Gette année Ik^
il fut lê premier député pour les partitions des prébendes. L'année sui-
vante, au mois de mai, il se trouve nommé dans une enquête et juge-
ment au profit de Durand, prieur de Saint-Eusèbe, et il avoit alors 70
ans et 50 ans au moins de canonicat. Il est aussi à la tête du consente-
ment que le Ghapitre donna en décembre k l'érection des archiprétrés
en titres perpétuels. En 1515, il signa Pacte de confraternité du Cha-
pitre d'ÂQxerre avec celui de Saint-Martin de Tours. Enfin, il reste de
lui une sentence qu'il porta en 1516, au mois de juillet, contre Jean,
baron de Seignelaj.
Jean de Melun, issu des vicomtes de ce nom. Il est connu par la dis-
pense de résider qu'il obtint en 1518 du pape Jean XXII ; ce qui dura
plusieurs années, puisqu'en 1550 le Chapitre se crut obligé d'en venir
aux sommations.
Jeam de Saint-Geriiain. Il n'est connu que par l'acte de la réception
du suivant, qui est dit lui avoir succédé (a).
Dreux Jourdain fut reçu en vertu de sa nomination en cour de Rome
Tan 1 545, au mois de novembre, en place de Jean de Saint-Germain (1),
dont la dignité vaquoit par mort. Il obtint, le 7 janvier suivant, de l'évé-
que Pierre de Villaines, la permission de fonder la chapelle de Sainte-
mais ce doyen ne Ait pas sitôt en place qu'il
Fa cm. Cest yniiemblablement le même
que le suivant : le nom de CaHni le laisse à
penser (6).
(1) Staiuta antiqtM cirta finem.
(a) Cest probablement le môme dont fait mention on acte de 1391, par lequel
les moines de Saint-Germain donnent à rente une vigne en Boivin, laquelle avait
tenue Jehan Feny Jadb doyen d'Auxerre. ^ Fonds de Saint-Germain, vignes.
[N, d. E.)
(b) Bargedé n'avait pas tort de placer parmi les doyens un Ghauderons, seule-
ment, au lieu de rappeler Guillaume , il faut le nommer Geoffroy, {Gaufridus
êklMê CkaMdenms) et il devient le même que Geoffroy 1 1. Cest ce qui résulte d'un bail
de 1293 de Tabbaye Saint-Julien, — qui relate une donation faite par ce Geoffroy
mme deeatm$ ÀutiMiiodaremii.
IN. d. E.)
DE l'église d'auxerre. 421
Marguerite en l'église paroissiale de Saini-Mamert. Il Tonda aussi deux
chapellenies dans la cathédrale à l'autel de Saint-André, à condition
que la collation en appartiendrait au doyen. Hugues d'Arsi, évëque de
Laon, le nomma dans son testament pour un de ses exécuteurs. Jean
de Cballon, comte d'Auxerre, fait mention de lui dans ses lettres de
quittance du 6 février 1547 (a).
Jeai« Germain, natif de Dimon au diocèse de Sens, étoit doyen d'Au*
xerre, lorsqu'à la recommandation de la reine, il fut fait évéque de
Chalon-sur-Saône Tan 1557.
Jean Le Mercier, auxerrois, de la paroisse Notre-Dame-Ia-d'Hors
étoit doyen en 1558, lorque la ville d'Auxerre fut prise par les Anglois,
et il s'obligea avec le clergé et les habitants envers les religieux do
Saint-Germain pour les joyaux de leur église engagés h ces mêmes An-
glois en 1559 ; son nom paroit en d'autres actes qui se rapportent à cet
événement. Il avoit été officiai et vicaire-général de l'évéque. Il homolo-
gua en sa première qualité, l'an 1555, un traité fait avec les habitants
de Montigny-le-Roi. Il établit vers l'an 1560 sous le titre de fondation,
que le verset Te ergo qtÂœsumus se diroit deux fois dans le Te Deum. Il
fonda l'autel de Sainte-Catherine dans la nef, le dotant d'une maison
qu'il avoit achetée le 27 novembre 1 575. Ce qui fut approuvé par révé-
queen 1578.
Pierre de Chisst. Après avoir résidé en qualité de simple ecclésias-^
tique à la cour des papes k Avignon, où il rendit service aux moines de
Saint-Germain d'Auxerre en 1560, il fut fait curé d'Ecan au diocèse
d'Auxerre. Urbain Y l'avoit député dès l'an 1564, pour aller h Fleury-
sur-Loire recevoir des reliques de Saint-Benoit (1), pour la nouvelle
église de Montpellier. On le voit comme notaire à la fin de l'acte du don
des reliques de Saint-Thibaud fait en 1581 aux habitants de Provins.
Il fut aussi archidiacre de Puisaye avant que d'être doyen (2). Mais il
(1) BibL Fhriac, p. 248. | ('2) Preuves, t iv, n. 328.
(a) Ce Dreux Jourdain fut en 1308 Tun des deux députes envoyés par la viilc
d'Auxerre aux états de Tours.— Foy. 1. 1, p. 496, Note sur les Templiers. {N. d. E.)
422 DOYESB
étoit éle^ 3Q dëcanat au moin» en 1389 qH*ll paroil «laoi m acte àt
l'éréqne Ferrie . ijà concerne la terre de Sony. En tôBT, le 13 jn» fai
Chapitre le pri?a de voix capitolaire, ponr avoir dit des injores a im da^
ooine. En 1402, il aaotint procès contre révéqne an sojel de aa jnridie-
tion. Eiant derenn sonrd on dioiut ponr présider an Gloire en an
place maitre Renand de Fontaines, chanoine, le f ^ décembre 1410. U
monrnt en 1412, le 26 octobre, a'étaot démis dn doyenné.
Pnoum MicnsL (on 3lichean^ anxerrois, licencié èa-lois. fut ponria
dn doyenné dn vivant de Pierre de Chissy. On le dispensa en 1413 d'nne
partie de son stage, a cause qne la ville le dépnia à Paris avec Jean
rCsnrier, citoyen, ponr réprimer les pilla^ des gns de gnerre. Phi-
lippe des Cflsartit évéqne d'Amerre, le dédara euonmnmié en 1414
contre le bon droit. D fat ein ehambrier de Grevan en 1417, qnoiqnH
le flkt dép d'Anxerre et d'Oisy. D monrnt en 1 iSû avant le 12 aoAt.
HiiGiJBs DIS 5oKS, chanoine d* Anxerre et trésorier de Toncv. fnt âm
doyen le 2 septembre 1420. Uévéfpie Philippe îles Ecarts Ini fit dé*
fendre par an arrêt da parlement dn 14 jnillet 1425, de port& le rocfaet
qn'en certains jonrs. D fit les fanérailles dn même évéqne en t^B» D
étoit Ton des goavemenrs de rHôtel-de-Vllle en 1431 . D assista an con-
cile de Bile en 1432. Il fut an Tannée d'après évéqne d'Anxerre par le
Chapitre, et essaya <le fiiire valoir son droit contre Laorent Pinon» jaco»
t»n. 0 vivoit encore an mois de jnin IG&y étant nommé présent a l'ac-
cord dn cnré de Seigneby avec rarcbiprétre (a).
PlBinE on LoiiGinuL, chanoine d'Anxérre, éln doyen en 14^, prêta
serment de fidélité entre les mains de Tabbé de Saint-Xtfien^ commis
par Tévéqne Laurent Ptnon, le 9 septembre. Dans les registres de la ville
ffar 11 janvier 1448, il se qualifie doyen d^Aoxerre et conseiller an par*
lementde Paris» D fut bit évéqne d^Vnxerre en 1449.
Loms ILfiiinn, conseiller clerc an parlement de P^iris^ fit le sermmit
•nlnaire des doyens d' Aoxerre entre les mains de Jean Hanvoisin, tré-*
par Tévéïpie. U ne tint cette dignité qne durant denx
i^mmkmMtUmmàtum. N. d. K \
DE l'église d'auxerre. 425
ans 00 environ, ayant été fait président en la cour des aides puis
évéque de Troyes.
Thomas DE la Plotb étoit doyen d'Âuxerredès Tan 1454, auquel il
a cette qualité aussi bien que celle de gouverneur de I'Hôtel-de-Ville
dans un registre de cet hôtel. Il eut vers ce temps-Ië de fréquentes délé-
gations pour les affaires de la communauté des habitants, tant en Flandre
qu^k Paris (a). Le Chapitre d'Âuierre le députa aussi au concile provincial
de Sens, le 15 février 1460, et ceux de la ville renvoyèrent ensuite à
Dijon, pour leurs intérêts. Il étoit en 1469, archidiacre d'Etampes dans
Téglise de Sens. Il paroit avoir été parent d'un Pierre de la Plote, gou-
verneur de rHôtel-de-Yille d'Auxerre en 1 151 , et de Denis de la Plolte,
avocat du roi k Sens. Il étoit encore doyen en 1475, lorsqu'on apprit
\k Auxerre la mort de Pierre de Longueil, évéque. J'ai rapporté sous cet
évéque les démêlés de ce doyen.
Guillaume Arbaleste, qualifié clerc du diocèse d'Auiun, dans sa ré-
ception li un canonicat,le28 octobre 1470; on ne le trouve sous le titre de
doyen, que dans des actes depuis Tan 1489 (6). Dans les litres de PHô-
tel-de-Ville il est qualifié premier gouverneur pendant les années 1495,
1496 et 1497. Il eut une commission du pape, le 9 juillet 1502, en fa-
veur d'un religieux de Tonnerre. Le livre du sous-chanlre marquait son
obit le 28 avril. Il mourut en 15il ou 1512, puisque c'est dans les
comptes de fabrique de 1512 qu'on trouve la réception de Nicolas Ar-
baleste là son canonicat.
Laurent LE Routier. On ne sait rien de lui sinon qu'il prêta serment
de fidélité h Jean Baillet, évéque, le 21 décembre i 510(1) (c). Il pouvait
être parent d'Edme le Routier alors gouverneur d'Auxerre (2).
(1) Cartul. novumEp. Àutiss.
{ï) Quelques-uns ont placé ici un Simon
le Charpentier. Son nom n'est point inconnu
dans ce siècle là parmi les bienfoitcurs de
réglise d'Auxerre ; mais rien ne prouve qu'il
ait été doyen. Pour ce qui est de Guillaume
de Prunai, marqué ici dans le Gallia ChrU-
tianat il est ci-dessus à sa véritable place.
(a) 11 fut député^ en 1452, auprès du duc Jean, pour la question dei limites du
comté d'Auxerre. (Pf. d, E,)
{b) Il fut député aux Êlats de Beaune, en 1494. (S. d, E,)
(c) La GcdUa ChrisUana, t. xii, n*cstpjs d'accord avec Lcbouf. Elle le fait pré-
ler serment en qualité de doyen dès le ^7 auût 14S0. {y, d, E.)
424 DOYENS
Jean Sauuot, né h Cosne au diocèse d'Auxerrc, licencié ès-lois,
chanoine et pénitencier dès l'an 1495, quitta la pénitencerie au bout de
18 ans. Il parott comme doyen à la tête de ia cooTocation des cha-
noines faite en 1515, le 5 décembre pour choisir un successeur \k Té-
véqne Jean Baillet. Il mourut le 28 septembre 1528 selon Tobituaire de
Saint-Laurent de Cosne, et les registres du chapitre d'Auxerre.
Fbauçois de Dinteville, nommé évéqoe de Riez, accepta le doyenné
d*Auxerre en 1528, pour être plus près de son oncle, Téfêque, auquel
îlsoceéda en 1550.
François DU Bourg, clerc du diocèse de Clermont, résignataire du
précédent, fut reçu le 7 décembre 1550 (1). Il étudioit encore h Or-
léans en 1555, le 2 octobre (2), et avoit pour vicaire Guillaume Dura
chargé de conférer les chapelles de sa dépendance. Il mourut en 1554.
FLOREirr DE LA Barre, reçu chanoine le 2 juin 1 554, fut aussi reconnu
doyen le même jour par résignation de François du Bourg. Il étoit issu
des sieurs de la Barre proche La Charité-sur-Loire. Dès Fan 1555,
il obtint monitoire contre ceux qui retenoient les papiers concernant sa
dignité. Il étoit gouverneur de THôtel-de- Ville en 1557. Il résigna son
canonicat en 1551; mais il ne mourut qu^en 1555,1e 29 octobre, selon
le registre capitulaire.
Nicolas Blanchard et Pierre du Broc furent pourvus du doyenné ;
mais sans effet et sans prise de posse sion. Le dernier dont le droit étoit
mieux fondé le céda h François de la Barre, qui d'ailleurs étoit pourvu
en cour de Rome.
François de la Barre, neveu de Florent, fut installé le 17 avril 1556
par Pierre Pean, sous-chantre. Il garda avec celte dignité les cures de
Saint-Siméon de Nanvigne, et de Saint-Germain de Chasnay. Il est
nommé dans le procès-verbal de la coutume en 1561. Ses armoiries
jointes h Fimage de saint François , se voient au bas du vitrage dans le
fond du sanctuaire, pour avoir contribué à la réparation des vitres du
chœur après le ravage des calvinistes. Il mourut le 20 janvier 1588.
Sébastien le Royer, docteur en droit, fut reçu doyen le 5 juin 1588.
(I) El CompHt Fabr | i^) Ex Rcfj. K. maii
DE L*ÉGLISE d'aUXERRE. 425
Il âvoit élé reçu chanoine dès Tan i 571 , par permulation pour le prieuré
d'Ândrie, et dans cette première réception il est dit clerc sénonois. En
quelques actes il est surnommé De-Ia-Motte (1). De son temps arrivèrent
les épineuses affaires qui furent suscitées à Jacques Âmyot, évéque. Il
résigna son doyenné au suivant en 1595, par permutation pour la cure
de Ghichery.
Guillaume de RiGifr fut reçu doyen le 20 mars 1595. Il étoit de
Bar-sur-Seine, selon son épitaphe rapportée dans le Gallia Christiana.
Il fut k différents temps gouverneur de THôtel-de-Ville. Il s'acquitta
aussi de la charge de vicaire-général pour Tabbé de Saint-Germain ;
il eut en commende Tabbaye d'Oigny en Bourgogne, et il venoit d'être
pourvu du prieuré de Saint-Florentin, lorsqu'il fut frappé d*apopIexie.
Il mourut le A novembre 1610 et fut inhumé dans la chapelle de Saint-
Georges, sous laquelle on a construit depuis une crypte.
Erard de Rochefort, abbé de Yézelay, fut élu doyen d'Âuxerre en
1610 ; l'élection de Pierre le Clerc n'ayant pas eu lieu. Il ne fut reçu
chanoine qu'en 1615, le \^^ février. Il permuta son canonicat et son
doyenné avec le suivant l'an 1622.
François de Lauzon, prêtre du diocèse de Paris, aumônier du roi,
prieur commendataire de Sainte-Marie-de-Dieu-Lidon, au diocèse de
Saintes, installé le 29 avril 1622. Il fut fort inquiété sur ce qu'un autre
chanoine demeuroit avec lui dans la même maison contre la défense des
statuts. Il mourut h Crevan, le 21 novembre 1627.
Claude Lemuet fut pourvu du doyenné le 15 décembre 1627. Il étoit
auparavant grand-archidiacre. Il prêta serment de fidélité à l'évêque
Gilles de Souvré fort solennellement. Il fut depuis doyen de Yézelay.
M. Gaud, archidiacre d'Amiens, n'ayant point fini sa permutation avec
lui, il se trouva un successeur dans Claude Seguenot, fameux Père de
l'Oratoire qui, avant que d'avoir pris possession, céda son droit à Edme
Amiot, n'ayant pas réussi dans les vues qu'il avoit eues pour le célèbre
Moriu son confrère.
Edme Amiot ayant eu le doyenné par la cession de Claude Seguenot,
(1) £n févr. 1587.
• #
426 DOYENS DE l'ÉGLISE d'aUIBRRE.
en prit possession le 19 octobre 1652 (a). Il étoit né h Villemer au dio-
cèse de Sens, ou k Saint-Âubin-Cliâteau-neuf du même diocèse. 11
avoit étudié k Auxerre, de Ik à Nevers où il prit Thabit de récollet. Mats
Tamour de Tétude Tavoit engagé k s'y remettre k Paris, en quittant cet
Ordre. Pendant qu'il continuoit la théologie demeurant au collège des
Grassins, il fut fait curé de Villemer. Il devint par la suite docteur de
Paris, après avoir professé la philosophie au collège du cardinal
Le Moine, puis curé de Champignelles au diocèse de Sens, après cela
de Château-neuf au même diocèse. Etant procureur de Sorbonne, il
fut fait doyen d'Auxerre, et son résignataire fut pourvu du doyenné de
Saint-Fergeau. Les différents postes de ce personnage avoient été soi-
gneusement remarqués depuis qu'il mit la division dans le Chapitre
d*Àuxerre, en voulant changer l'usage du capuchon d'hiver, par un pro-
cès qui coûta des sommes immenses. Au bout de 18 ans il résigna son
doyenné, et eut encore différents postes k Paris. Il n'étoit ni allié, ni
parent k l'évoque Jacques Amyot. Il en avoit adopté les armoiries, et
les fit mettre k des ornements de velours rouge qu'il donna a la cathé-
drale (6). «
Jean Foudriat fut doyen par permutation du prieuré de Saint-Si-
droine, proche Joigny, le 15 juillet 1650. Il étoit fils d'un président au
présidial d'Auxerre, et frère de Palamèdes Foudriat, lieutenant-général
de Sens. Il avoit été capucin k Paris au faubourg Saint-Jacques, et en-
suite de l'Oratoire dont les supérieurs l'avoient fait professeur de philo-
sophie k Nantes. Pierre de Broc l'établit son officiai et son vicaire géné-
ral. Il fut aussi gouverneur ecclésiastique de l'Hôtel-de-Ville. Il mourut
le 19 septembre 1661 , âgé de 46 ans, et fut inhumé dans la nef sous une
(a) Il ne fut pas reçu sans opposition. Lemuct, qui voulait permuter avec M.
Malo, archidiacre de Puisaye, protesta par Tintcrmédiaire de ce dernier. Mais le
Chapitre passa outre, à Texception de quatre chanoines. — Reg. capitul. de 1632.
(iV. d. E.)
{b) Suivant le chanoine Bardolat, c'était un esprit léger et novateur, qui traitait les
affaires du Chapitre sans consulter ses confrères et qui éprouva bien des échecs dans
ses propositions. II ajoute qu'il ne s^oubtiait pas lorsqu'il trouvait roccasion de
faire ses affaires. —Mémorial du chanoine Bardolat, archives de TYonnc.
' (.V. d. E)
^Sfv^V.' ■**»«'■ '■."•: ■■■'■*■■ ■ -i.
GRANDS ARCHIDIACRES DE l'ÉGLISE D AUXERRE. 427
tombe qui est aujourd'hui changée de place. En 1657, Robert Luyt,
chanoine de Tonnerre, fit imprimer à Sens une Vie de Saint-Micomer,
prétendu chanoine d'Âuierre et prévôt, dans laquelle il paroU y avoir une
peinture du premier du Chapitre d'Auxerre, alors en place.
Charles Testu de Pierre-Basse fut élu doyen en 1G61, n'étant en-
core que sous-diacre, et il fut installé le 27 octobre. Il étoit neveu de
Pierre de Broc alors évéque. Il fut fait chanoine quelques jours après.
Il eut aussi en comroende l'abbaye de Toussaints d'Angers et de Roches
au diocèse d'Auxerre. Il résigna au suivant le doyenné Tan 1704.
Gaspard Moreau, docteur en théologie de la maison de Navarre, pos-
séda le doyenné depuis le 10 mars 1704.
* Il fut élu général des Etats de Bourgogne en 1750. Il est mort en
1746. Après sa mort le roi fit défendre au Chapitre de procéder k
Télection de son succcssejnr. Le Chapitre ne fit point de représentations
et resta privé de chef pendant 55 ans.
* Adrien de Robien, prêtre du diocèse de Vannes, natif d'Hennebond,
fut élu le 8-10 janvier 1781. Il ferma la liste des doyens.
GRANDS ARCHIDIACRES DE L ÉGLISE D'AUXERRE.
La dignité d'archidiacre est si ancienne et si connue dans toutes les
églises, qu'il est inutile d'en rien dire ici (a). On voit plusieurs de ses
fonctions marquées dans les canons du concile tenu h Auxerre vers Tan
580. Comme il n*y avoit alors que 57 cures dans le diocèse, un seul
archidiacre pouvoit y surveiller ; mais au xiii® siècle les paroisses étant
multipliées et devenues en nombre égal h peu près h ce qu^elles sont
aujourd'hui, on créa un second archidiacre. Ce qui fut fait ^ Nevers h
(a) Selon M. Guérard (Polyptique d'Irminon), Tinstitution des archidiaconés pa-
rait remonter aa temps de Charlemagne. Il ont été composes en grande partie avec
les pagi minores, caox des subdivisions d'une cité, dont ils représentent assez bien
la circonscription ancienne. (AT. d, E.)
428 GRANDS ARCHIDIACRES
Texemple d'Auxcrre. Les archidiacres avoieni droit d'oiTicialiic durant
la vacance du siège épiscopal, ainsi que jeTai va par des actes de 1508,
1556 et 1426. C'étoit aussi à Tarchidiacre h conférer la scolastique et
la lectorie ; mais Tévéque Guillaume de Seignelay ayant doté de nouveau
ces deux offices, Tarchidiacre lui en céda Tinstitution. L'cvêque d'Au-
xerre nomme et confère Tarchidiaconné. Sa place est la première en
entrant au chœur du côté gauche.
Voici les noms de ceux qui ont possédé cette dignité.
Saint Corcodome, diacre, ordonné ë Rome, étant venu à Auxerre
prêcher la foi avec saint Pèlerin, en fut le premier archidiacre.
Saint Ahatre, ordonné diacre par saint Elade.
LiciNius, archidiacre du temps de saint Amatre.
Segbtius, archidiacre de saint Germain, qui apporta de sa part des
eulogies h sainte Geneviève vers Tan 448.
Saint Marin , archidiacre de saint Didier, évoque, et qui l'aida h
construire l'église de Saint-Gervais, vers Fan 610.
Andegise, diacre, que saint Pallade, son évêque, choisit pour défenseur
de son nouveau monastère de Saint-Julien.
Ragemfredus ou Rainfrot , qui assassina saint Tetrice son évcquc
vers Pan 707. Il y a un canton proche Auxerre, h Torient, que les titres
appellent Mons Ratnfredif et que le peuple nomme Morinfroy pour Mont-
Rainfroy.
Plusieurs archidiacres du viii®, ix^ et x® siècle sont nommes au jour
de leur obit dans l'ancien Nécrologe écrit vers l'an 1007; mais on ne
peut pas décider quels sont les plus anciens.
Il y a Ablenus, mort le 5 janvier. Hkiarim sacerdos et archidiaconus
au 10 du même mois.
GisLARus au 25 mars.
Valterius au 14 octobre.
SiGLivBRTus au 25.
Eliseus au 20 décembre.
Guy le Sénonois, fut archidiacre sous Fépiscopat d'IIérirride.
Jean d' Auxerre, docteur célèbre, puis évcquc d' Auxerre en 99G.
DE l'église d'auxbrre. 429
Arddin^ archidiacre qui est nommé dans la vie de Hugues de Chalon,
cvcque d'Âuxerre.
GoDEFROY, signa en qualité d'archidiacre d'Âuxerre, Tacte de la fon-
dation du prieuré de La Gharité-sur-Loire faite en 1056. Il fut aussi
abbé de Saint-Eusèbe (1).
Hervé, nommé dans un acte qui concerne la fondation des chanoines
de Glamecy en 1076.
RoTFRiDus, vers Tan 1100, selon la seconde colonne de la matricule
sous l'évéque Humbaud (2).
IiiGELBAUDUs présent k la transaction entre Letheric, abbé deFleury,
et les seigneurs de Toucy, en 1110.
Roger, fut présent aux lettres d'amortissement données en 1120 par
le trésorier à Fabbé de Pontigny, pour des terres qui relevoient de son
domaine, et quand Hugues deMontaigu donna Téglise de Saint- Fei^ean
à Tabbé de Saint-Germain^ et celle d'Âugy à l'église de Saint-Père, en
H 23 (3).
Renaud, dans les titres de Saint-Marien, depuis l'an 1142, et dans
d'autres en 1143, 1145, 1147, 1148, et même jusqu'à l'an 1163, car
rien n'autorise à mettre un second Renaud depuis Tan 1159, ni k le dis-
tinguer d'un Richard qu'on trouve dans un acte de 1157. Les écrivains
des chartes s'étant souvent contentés de la lettre initiale, qui a été de-
puisdifféremment interprétée. L'Obituairede la cathédrale écrit vers 1250,
ne nomme qu'un seul Renaud, archidiacre. Son obit y est au 25 février.
Dans celui de l'abbaye de Saint-Laurent un peu plus récent, on lit au
24 février : < Obiit Regnaudus Âutiss. Ârchid. et Nivernensis thesau-
x> rarius. »
Pierre (a\ présent à la suppression de la prévôté de la cathédrale, en
1166(4).
(1) Fof. Necrol. 6 avril,
(2) Voy, les Preuves, t. iv, n. 5.
(3) Preuves, n? 22.
(4) Preuves, n. 59.
(a) Le nom de cet archidiacre est Preshyier et non Pierre, suivant une charte de
donations faite h Pontigny en llGG. (iV. d. E.)
450 GRANDS ARCHIDIACRES
6. (que Ton a rendu par Barthelemi) eu 4i6G(l), est dans les litres
de SaiDt-Marien en 1 168, dans ceux de Regny en HG9. Quelques-uns
l'ont appelé Bernard.
Girard est nommé dans les titres de Saiot-Marien en 1170, et dans
ceux de Saint-Eusèbe en 1180. Il paroit qu'il fui ami ou parent de
Hugues de Noyers, évéque. L'Obituaire de 1250 au 4 février : < Obitus
» Girardi Ârchid. et Lévite xl sol quosD. Hugo quondam Ep. Autiss.
> dédit et assignavit Capitulo annualim reddendos in hoc anniv. super
> Ecclesiam de Yermentone (2). > Il est au même jour dans celui de
Saiot-Laurent-r Abbaye.
Dbimbbrt de Pibrre-Pertdise, fils d'Etienne seigneur de Pierre-Per-
tuise, proche Yezelay, et frère utérin de Guy de Noyers, archevêque de
Sens. H fut aussi, selon quelques-uns, trésorier de l'église de Sens. Il est
sûr qu'il fut sacriste de Nevers. Il est nommé archidiacre d'Auxerre
dans un titre de Saint-Marien (1185). L'Obituaire de 12i50au lOmai :
a Ob. Dainberti Archid. xl. sol. Pro eo dedil nobis venerabilis Hugo
» ejusdem cognatus xxx s. censuales in Ecctesia de Semenlerou, ei in
j» Ecclesia de Lano. » Le Nécrologe de l'abbaye de Saint-Laurent au
18 mai : «t Obit Dainbertus sacrista Nivern. et Archid. Autiss. »
Manassès de Seignelat fut archidiacre d'Auxerre depuis Tan 1202,
jusqu'en 1208 qu'il fut fait évéque d'Orléans.
HoGUEs (de Aula) prit possession du château de Mailly pour l'évéque
en 1210, et lui céda en 1215 le droit d'instituer le lecteur. Il lui avoit
aussi permis en 1212 d'unir la cure de Nusy au Chapitre de Gosne.
L'Obituaire de 1250 au 4 janvier : < Ob. Hugonis de Aula Presbyieri et
x> Archid. pro quo habemus xv sol. quos debent Guillelmus de Fonte-
> neto Miles et heredes ejus, reddendos annualim in Octava omnium
» SS. camerario Capituli pro duabus partibus décime de Fonteneio quas
9 dedil nobis. > Il est aussi au nécrologe de la Chartreuse de Bellary.
Philippe, nommé dans une sentence de l'an 121 7 en faveur de Tabbaye
de Saint-Marien.
(I) Voy. Preuves, n. 58 | (2) Item Cartul. Capit., fol 51.
DE l'église d'auxerre. 451
ANDRÉ, parent de Tévôque Guillaume Je Seignelay, éloit archidiacre en
1220 (1).II fut arbiire en 1222 touchant des biens du prieuré de Nitry.
Il est nommé dans le cartulaire du Chapitre h l'an 1225, sur des biens
qu'Etienne de Basso avoit à Chichery (2). Il accorda vers ce temps-là
le chapelain de Saint-Pierre de Gien-le-Viel avec la collégiale. Il se défit
de son archidiaconé quelques années avant sa mort, comme on rap-
prend par son testament, auquel il apposa son sceau quoiqu'il ne fût
plus archidiacre (a). Il mourut apparemment du côté deNevers, puisque
l'obituaire de la cathédrale marque ainsi son décès au 8 août : < Obiit
» Andréas Ârchidiaconus Âutiss. juvenis bone memoric et bone in-
» dolis, anno MCCXXYI.
* "
Etienne de Cudot. Ce fut lui apparemment qui succéda k André dès
l'an 1225. Les titres des châsses de Château-Rainard, au diocèse de
Sens, marquent que ce fut lui qui y fit en 1224 la translation des reli-
ques des saints Pavace etLiboire, évéques du Mans et Armel (5). L'O-
bitoaire d'Auxerre de l'an 1250 fait de lui cet éloge au 22 novembre :
« Ob. Stephani de Cudoto , hujus Ecclesie venerabilis Archidiaconi
> qui spretis hujus mundi honoribus et divitiis, in domo Yallis-Scolarium
)» sub réligione in pace vitam finivit ; qui dédit nobis xxi libras quas
» posuimus in emptione salvamenti de Merriaco, pro quibus, etc. >
Bernard de Sullt est nommé dans un .titre de Saint-Marien, en
1226. Dans un autre de 1229 au cartulaire du Chapitre. En 1251,
Miles de Noyers le choisit pour l'un des exécuteurs de son testament.
Il fut élu évêque d'Auxerre en 1254.
Herbert nommé dans un arbitrage, concernant l'abbaye de Régny en
1257. Il assista en 1241 aux funérailles de saint Edme, faites k Ponti-
gny sur la fin du mois de' novembre, et il est cité comme témoin d'un
(1) CartuU Cap, fol 49, verso et in eorUi
de Brenehiis.
(2) Fol. 374, V,
(3) Foy. Bolland, adUjuUi.
(a) André était encore archidiacre en janvier 1225 (1226), selon une charte de la
commanderie de Saint-Marc pour les dîmes d^Ancy*le-Franc. — Archiv. de VYonne.
{N. d. E.)
432 GRANDS ARCHIDIACRES
miracle qui s'y opéra (1 J. Il est nommé comme présent dans des chartes
de Saint-Germain des années 1242 et 1244. C'est lui qui vraisembla-
blement devint doyen vers l'an 124G.
Miles de Varzy, archidiacre, fut choisi par Jean, baron de Toucy, qui
alloit \k la Terre-Sainte en 1248, pour Tun des exécuteurs de son tes-
tament. En 1250, Adeline la Maréchale lui quitta en sa qualité de curé
de Nannai les dîmes des vignes nouvelles situées en la paroisse de Nan-
nai. Dans le détail des comptes d'anniversaires (2), écrit vers 1250, h la
tête de Tobituaire, il y a < Milo Archid. lx. sol. pro vinea de Monte
< defenso... que continet circiter ij arp. et dimidium. » Ce même archi-
diacre se fit jacobin vers ce temps-là. Les additions à TObituaire de
1250, marquent au 21 septembre : « Obiit Milo de Yarziaco hujus Ëc-
» clesie Archidiaconus , postea factus de Ordine Predicatorum ; pro
» cojus anniv. dividinis vi libras in bursa Capituli assignatas pro lxx
> libris tnr. de venta domus sue , quas posuimus in emptione nemoris
> GuidonisdeMerriaco quondammajorisapudMerriacum. > L'obituairc
de la collégiale de Yarzy marque simplement : c Obiit Frater Milo
» Archid. Autissiod. »
Ce fut de son temps que Tarchidiaconé fut divisé en deux.
H. ou R., archidiacre, légua en 1255 une petite rente à Tabbaye Saint-
Germain sur un clos assis proche la fontaine Sainl-Amaire. Ce qui me
détermine à prendre la lettre initiale pour un R, c'est qu'il y a dans une
seconde copie du Nécrologe de la cathédrale écrit au plus tard vers 1260:
< Obiit Regnaudus de Barris Archidiaconus Autissiod. et Diaconus. »
C'est au 4 d'août.
Jean, archidiacre d'Auxerre, est mentionné dans un titre de La Charité-
sur-Loire en 1264. Les additions au Nécrologe de 1250 mettent au
6 octobre: oc Item obiit Johannes Archidiaconus; » et le Nécrologc de
Notre-Dame de la Cité qui le place au 7, l'appelle «Johannes de
€ Sancto Lupo... »
Guillaume de Guigneville qui avoit été sacriste dans les années
1260 ei 1262, parut en différents actes comme archidiacre (rAuxeiro
(1) Thes.anecdot.A. m. Col. 1890. | {r, Ex Vidimus. n5G.
*
* -
DE L^ÉGLISE d'aUXERRE. 455
depuis Tan 1270 jusqu'en 1290 ou environ, qu'il fit un legs de 78 livres
au Chapitre, pour l'augmentation des distributions à matines, par son
testament, dont Hugues de Hermant son successeur fut exécuteur (1).
Hugues d'Hermamt, cbanoine dès Tan 1286, est qualifié archidiacre
dans un titre de Saint-Marien de l'an 1290. Girard de Ville-sur-Arce,
chanoine d'Auxerre, le nomma en 1296 exécuteur de son testament (2).
Les titres sur Nannai en font mention h la même année (5). En 1504,
il prononça jugement louchant les oblations de la chapelle de Saint-Au-
bin d'Oisy, et les adjugea au Chapitre.
R... DE Vaux (de Vallibas)^ est connu par un acte par lequel il subro-
gea en 1508 Jean Chopiles, clerc, pour les 125 livres que le Chapitre
lui devoit. Le 15 décembre 1509 il étoit nouvellement mort, suivant un
acte que j'ai vu en original, du temps de l'évéque Pierr^ des Grez.
Jean de la Mots étoit archidiacre dès l'an 1515 qu'il plaidoit devant
Tofficial de Cosne, pour les droits de la cure de Nannai. Il fut Tun des
témoins à la visite que le même évêque Pierre des Grez fit, en 1520, de
la ch&sse de Saint-Amatre en sa cathédrale. Il est aussi nommé en 1525
dans un grand acte françois du Chapitre d'Auxerre, qui regarde des
geas de Beauvoir.
Thibaud de Sebiur, archidiacre d'Auxerre, est nommé parmi les gens
du duc de Bourgogne (4) qui rendirent compte à Paris en la chambre
des comptes, le l®'^ juillet 1554.
Guillaume d'Anlesy, issu des seigneurs de ce nom en Nivernois,
étoit au Chapitre le 9 août 1 540, lorsque Guillaume, abbé de Pontigny, y
prêta serment à l'église d'Auxerre (5). Il reçut au Chapitre le doyen Dreux
Jourdain ë sa nouvelle arrivée en novembre 1545. Etant k Nannai en
1549, il admit la fondation d'une messe par an, pour une vigne que
Guillaume Moquars habitant du lieu, lui donna. Ayant logé en ce voyage
chez les Chartreux de Basseville, il leur laissa en partant un billet
comme il n'avoit chez eux aucun droit de visite. Il signa en 1259 la
(i) Foy. Preuves, t. iv, n. 224, 228.
(1) Fof. Preuves, n» 246.
(3) CarmL, fol. 225.
Il
(4) Ex eolleetaneis de Cornera comp,
(5) Es antiq. statut,
28
454 GRAKDS ARCHIDUCRES
transaction du clergé et habitants d'Âuxerre, touchant rengagement des
reliquaires de Saint-Germain pour la rançon de la ville, et une procura-
tion pour le même sujet en 1360.
Guillaume Insard, natif de Gorbigny. Il accorda en 15G8 le procès
qu'il avoitavec les Ghartreux de Bellary, sur le tonneau de vin qu'ils
lui devaient, à cause de la cure de Nannai annexée à sa dignité : au lieu
de quoi ils lui donnèrent quinze arpents de vignes et deux pièces de prés.
On le trouve nommé en 1585 dans une quittance de décimes. Il est pré-
sent en 1589 à la donation d'un bien de Sassy, faite à la cathédrale par
révoque Ferrie Gassinel (1). Il mourut au mois de janvier 1508. Il avoit
obtenu du Ghapitre dès le 18 mars 1597, que sa sépulture fût devant le
crucifix hors le chœur.
Jean du Pomt eut des provisions de Tarchidiacoué, dès le 22 janvier
1598. Il étoit dès-lors vicaire-général de Michel de Creney, évêque
d'Auxerre; on lui donne ces deux qualités k la clôture d'un compte de
Vhôtel-de-ville rendu en 1400. Il fut présent, en 1410, à Tintronisation
de Févêque Philippe des Essarts. Il mourut le 2 octobre 1415. Nicolas
du Pont et ses autres héritiers ayant donné k l'église, le 5 novembre
suivant, un reliquaire magnifique qui renfermoit une mâchoire de saint
Laurent, le Ghapitre alla le même jour la prendre processionnellement.
Cette relique est la dernière du catalogue de celles de la cathédrale
d^Auxerre, qui fut écrit vers l'an 1420 (2). Get archidiacre avoit son obit
dans l'abbaye de Preuilly, au diocèse de Sens (5).
Pierre Paterne, chanoine, qui étoit muni d'une grâce expectative de
la cour de Rome, se fit recevoir archidiacre dès le jour de la mort de
Jean du Pont.
Pierre le Glerc reçu à la prébende du précédent, le 15 octobre
1415, prit possession de son archidiaconé le 16. Il eut un procès à
soutenir contre Jean de Ghaumont, qui se fit recevoir aux mêmes béné-
fices le 21 juillet 1424; il fut reçu de nouveau à l'archidiaconé le 4
décembre 1417, après avoir gagné son procès, et on lui donna les
(1) Preuves, noâSS.
(2) Voy, Preuves, n. 228.
(5) Ex Necrol. loci.
DE l'église D*âUXERRE. 455
sceaux des cours de rofiicialiié d'Auxerre, de Cosne ei de Varzy, pour
s'en servir si le siège épiscopal venoit a vaquer. Mais il mourut avant le
commencement de Tannée 1420, c'est-h-dire au Carême de Fan
1419.
Guillaume Ovo, conseiller de la comtesse de Nevors, déjà chanoine,
fut pourvu du grand-archidiaconé par Tévêquequi étoilk Varzy, le 12
mars 1419, et s'y fit recevoir le 24 avril 1420.
Etienne Vivien, qui avoit des provisions du pape pour l'archidiaconé,
s'y fit recevoir le 1®' avril 1421, avant Piques. Il éloil Âuxerrois. Il fui
déclaré excommunié par le Chapitre, le 31 mai 1425, pour avoir mal-
traité, dans Féglise , le pénitencier qui encensoit le jour de la Pente-
côte f 1). Le 5 du même mois, il avoit fait un accord avec le Chapitre.
Paradin dit, dans ses Annales de Bourgogne^ que maître Etienne Vivien,
étant allé en 1455 prendre possession de Tévéché de Tournay pour
Jean Chevrot, fut injurié et mis en prison par le parti de France (2).
Jejin Paillard fut reçu archidiacre en 1459 (5). Il est nommé témoin
dans des titres du prieur de Joux, des années 1445, 1449. Il avoit un
successeur dès Tan 1454. L*épitaphe d'Etiennette de Paillard, dame
de Neumoutier-en-Brie, an diocèse de Paris, que j'ai vue dans Téglise
du lieu, m'a appris que cet archidiacre avoit été seigneur de cette pa-
roisse. Un de ses héritiers pour un tiers fut Christophe Paillard ,
comme on voit aux registres du Chapitre d^Âuxerre, 11 octobre. Cette
famille auxerroise a été illustre.
Guillaume de Loncueil fut reçu en 1454 (4). Il résida assez exacte-
ment. Il signa, en 1458, une transaction passée entre Pierre de Lon-
gueil , son frère, évêque d'Ânxerre, et le Chapitre ; il est nommé ici,
dans les Preuves, n. 586, à l'an 1469. En 1475, il encourut les
censures pour avoir maltraité Etienne Gerbaud, chanoine prêtre, dont il
fut absous le 15 mai. Il étoit aussi curé dlrancy et traita en cette qua-
lité, l'an 1474, avec les religieux de Saint-Germain. Il céda, le 27 avril
(1) Ex Regist, 1 (5) Comp. Fab
(2) Pag. 737. I (1) Comp. Calend. Maii 1444.
436 GRANDS ARCHIDIACRES
4482, son archidiaconé k Pierre de Longueil, son neveu, qui cloii
chanoine et archidiacre de Puisaye. Michel de la Grange, aussi chanoine
d'Auxerre en 1482, étoit pareillement son neveu. Il légua en mourant
au Chapitre sa vigne de la Chièvre. Son décès arriva le 51 janvier
1483
Pierre de Longueil, reçu en 1482, mourut l'année suivante.
Jean Odry, de l'ancienne famille auxerroise, dont une branche a
fondé k Paris Thôpital des Odrieltes, fut chanoine et oflicial de Jean
Baillet, évéque d'Âuxerre. Il fut pourvu de Tarchidiaconé par cet évé-
que, puis par Enguerrand Signard, ancien évéque d'Âuxerre, et par son
vicaire-général. Il prit possession le 1®' août 4483. J*ai vu son nom
signé Odry dans les papiers de la ville, et non pas Âudry. C'est la quit-
tance qu'il donna le 15 mars 1495 du reste des gages de Jean Chevalier,
chantre d'Acxerre, gouverneur de l'hôlel-de-ville, dont il éloil oncle.
Il fut aussi chantre et curé de Glamecy, selon l'obituaire de celle collé-
giale, qui marque son décès au 9 juillet 1497. Il fut inhumé au chœur
de la cathédrale, vis-à-vis sa place. (Ex lib. succentons) .
Jean Hennequin, neveu de l'évêque Jean Baillet, fut reçu en 1497.
Il est présent, en décembre 1513, à la convocation des chanoines pour
Télection d'un évéque (1). Il éloit à Troyes en sa maison ciauslrale
durant l'été 1515, pendant que la peste régnoit à Auxerre. Le procès-
verbal de Robert Thiboust, de l'an 1523, sur le ressort du bailliage
d'Auxerre, le qualifie aussi prieur et seigneur d'Andrie. Il apporta au
Chapitre, la même année, le 9 mai, le missel de M. Baillet. Un titre du
prieuré de Saint-Amatre donne le nom de Jean du Pont à celui qui étoit
archidiacre d'Auxerre en 1506. Il peut se faire que ce fût un des noms
de celui-ci.
Maurice de Gié, prêtre licencié-ès-lois, fut reçu le 6 septembre
1530 (2), en vertu de provisions de l'archevêque de Sens, légat, par
permutation avec le précédent. Il ne résida point à son bénéfice ; il le
permuta, en 1550, pour le prieuré-cure de Venousse et Rouvre t son
secours. Il avoit été fait chanoine le 8 février 1536, par permutation
(i) Ex Comp. Cal. Maii. \ (<) Comp. Fabr.
•^ * %^
DE l'église d'auxerre. 437
avec Aubin des Avcnellcs (1). Il eul pour compétiteur Jean de la
Planche, prêtre, qui fut pourvu de l'archidiaconé, le 23 juillet 1531,
par Louis Bride, vicaire-général de Tévêque (2),
Laurent Petitfou eut ses provisions le 22 mars 4550, en vertu de
la permutation qu'il fit du prieuré de Venousse, et il fut installé le 26.
11 fut aussi abbé commendalaire de Saint-Père. Il obtint , le 22 mars
1554, de François de Dinteville, évéque, que Jean Barat, chanoine,
fit les visites des cures pour lui (3).
Achille de Harlay, conseiller clerc au parlement de Paris, fut reçu
à Tarchidiaconé le 26 juin 1559 (4). Il éloit pourvu par le cardinal
Trivulce, légat, en vertu de permutation pour le prieuré-curé de Saint-
Loup de Cézy, au diocèse de Sens. M. Petitfou, se repentant de sa
permutation, demanda à rentrer dans son archidiaconé, quoiqu'il fût
déjà résigné à Charles de Harlay. Les parties étant tombées d'accord ,
intervint sentence de Gaspard Damy, officiai, du 20 février 1565, qui
remit les choses comme elles étoient auparavant.
Laurent Petitfou pour la seconde fois. Il garde sa dignité jusqu'h
sa mort arrivée le 3 février 1 595.
Laurent Faucuot, chanoine, du 25 septembre 1579, fut reçu grand-
archidiacre le 7 janvier 1595, comme résignataire de Laurent Petitfou,
son oncle, et pourvu par l'archevêque de Bourges, en conséquence d'un
arrêt du parlement, le siège épiscopal étant vacant. Il mourut le 30
mai 1608. L'oncle et le neveu sont enterrés k Saint-Père, sous la même
tombe.
Jean Dassier, natif du diocèse de Couserans, étant chanoine, avoit
été gouverneur de l'hôtel-de- ville, en 1596. Il fut pourvu de Farchi-^
diaconé par François de Donadieu, évéque, et reçu en 1608. Il fut
aussi conseiller clerc au présidial, en place de... Leprince. Il fit, en
1613, la visite solennelle de l'abbaye de Saint-Laurent, dont j'ai vu le
procès-verbal. Il obtint, le 12 janvier 1615, un arrêt du conseil-privé,
qui porte que les procureurs fabriciers de Clamecy rendront compte
|1) ExRegist.
(?) ErRegist. Grillct, secrelarii.
(3) Regisl, Duchié.
(4) Ex Comp. Fahr.
458 GRANDS ARCHIDIACRES DE l'ÉGLISE d'aUXERRE.
devant l'archidiacre faisant sa visite, et non devant les élus. Cet arrêt a
été imprimé à Auxerre, en 1622, chez Denis Vatard. J. Dassier mou-
rut dans l'automne 1616, k La Ferté-Bernard. Il étoit aussi prieur
d'Ouges.
Simon DB MoifTEREUL, reçu le 14 décembre 1616 h l'archidiacoDé
etcanonicat dn sieur Dassier, est qualifié dans Pacte de sons-diacre pa-
risien et bachelier en théologie. Les provisions de Tévéque sont du 28
octobre. Il étoit frère de l'avocat de cet évéque ; mais ayant été fait peu
de temps après curé de Saint-Sulpice h Paris, ou selon d'autres de
Poincy proche Meaux, il résigna son archidiaconé h son frère qui le
permuta avec le suivant.
Claude Lemdet, chanoine, permuta sa chapelle de Sainte-Apolline de
Montputois, paroisse d'Ouanne, pour l'archidiaconé auquel il fut ins-
tallé par Denis Chappu, sous-chantre, le 50 septembre 1619. Il fut
fait doyen en 1627.
André Percheron, prêtre du diocèse du Mans, docteur en théologie,
pourvu le 11 novembre 1650 de l'archidiaconé, sur la démission de
C. Lemuet, fut reçu le 17 avril 1651. 11 quitta depuis cette dignité
pour l'archidiaconé de Puisaye, dont Pierre de Broc le pourvut à la
mort de Claude Leclerc arrivée le 28 août 1646.
Guillaume Fernier posséda le grand archidiaconé depuis l'an 1647
ou environ, étant chanoine dès l'an 1640. Il fut gouverneur ecclésias-
tique de l'hôtel-de-ville. Il étoit docteur de Sorbonne et grand prédi-
cateur (1). Il est décédé le 12 septembre 1682, comme on lit sur sa
tombe au bas d'une épitaphe magnifique.
Jean-Baptiste Delagoute , natif d'Auxerre, a été archidiacre depuis
le 17 novembre 1682, jusqu'à sa mort arrivée en 1759.
Charles Huet, natif de Paris a été reçu archidiacre le 25 mai 1740.
' Ilesl mort dans ses fonctions le 12 février 1779.
• Louis-François Regnard, principal du collège de Montaigu à Paris,
fut le dernier grand archidiacre. Il prit possession de sa dignité et d'un
canonicatle24 février 1779.
(1) Menagiana.
ff
CHANTRES DE l'ÉGLISE d'aUXERRE. 459
CHANTRES DE L'EGLISE D'AUXERRE
On peut (lire que la fonction de chantre est aussi ancienne que réta-
blissement de l'office divin ; mais ce n'est que peu à peu qu'il s'est for-
mé dans des églises une dignité de celui qui étoil le premier des chan-
tres. De h vint qu'en quelques pays on l'appela Prœcentor on Archichorust
pendant que dans la plupart on lui donna le simple nom de Cantor, Il
y a des ordinaires romains très-anciens qui le qualifient Archiparapho^
nista.
A Âuxerre, le chantre est la troisième dignité, et est élective par le
Chapitre. Sa place au chœur est proche celle de l'évêque vers l'extré-
mité des stalles du côté droit en approchant du sanctuaire. C'est la pre-
mière qui ait fourni un évêque au diocèse dans la personne d'Âidulfe
an VIII® siècle. Il y a eu quelques variations dans les charges et privilèges
du chantre de l'église d'Âuxcrre qu'il est inutile d'expliquer ici (1).
Son bâton cantoral surmonté d'un oiseau qu'il porte avec les gants et
l'anneau an doigt, ne parolt singulier, que depuis que dans la plupart
des églises, on a donné nne espèce de lanterne pour couronnement h ce
bâton. Voici les noms des chantres d' Auxerre.
Aidulfe, qui fut fait évêque après avoir été chantre : Ex Canlorê
EptscopuSf vers le temps de Charles-Mariel.
On ne peut faire une suite de ses successeurs, d'autant qu'il n'y en a
que quatre mentionnés dans le Nécrologe de 1007. Savoir :
Beraldds au 15 novembre, Sacerdos et perfecttAS Cantor.
Ingo au 2 décembre, Canonictis et Cantor eximitts.
Lesgingus au 12 décembre, Levita et perfectus Cantor.
Il y avait aussi au 7 janvier un chantre, mais le nom a été effacé.
GiRALD ou Girard, est le premier qui puisse commencer un cata-
logue suivi. Il est nommé dans un titre de l'an 1076, qui regarde la
(1) Voy. Preuves, t. iv, n. 112, 413.
440 CHATiTRES
fondalioD do Chapitre de Clamecjr, et dans la matricule des chanoines
sous Tévéque Hombaud. Sa mort arriva le 20 décembre.
fluGUBS, quej*ai trooTé nommé dans an titre de Saint-Père d'Aaxerre
▼ers Tan 1112, a son obit marqué par addition, dans Tobitier de 1007
au 8 novembre en ces termes : € Obiit Hugo levita et canonicos, S.
B Marie Prepositus, hujus etiam Ecclesie Cantor eximius. m
jBAiifprétre et chanoine, présent à Taccord fait vers Tan li 10 entre
le baron de Toucy et Tabbé de Saint-Benoit-sur-Loire. Il donna au
Chapitre ses maisons situées à Accolay. (V, Nearol. ad 27 nov.J
GoDEFBOi Capel (ou Cbapcau), de Fancienne famille auxerroise de ce
nom, parolt dans plusieurs titres de Pontigny, Regny, Crisenon depuis
Tan 1120 jusqu'en 1147; entr'autres dans Taccord passé par saint
Bernard entre Tévéque et le comte d'Auxerre en 1145. L'obiiaaire de
l'an 1250 met au 7 janvier : 06. Gaufredi Cantons, ij den.
Guillaume. Il souscrivit au traité fait entre Alain, évéque d'Auxerre,
et le comte Guillaume en 1 157.
EnsmE étoit chantre d'Auxerre en 1165 et 1166, selon les titres
de ces années-là (1)*II fut aussi en même temps curé de Saint-Loup
dans la ville. En 1171 il fut élu évéque d'Autun. Sa mort arriva en
1189 le 29 mai, auquel jour elle est ainsi annoncée dans l'Obiiuaire de
la cathédrale d*Auxerre écrit en 1250. « Obitus Stepbani Elduensis
> episcopi. ij d. et unam quarlam vini. Dédit nobis unam vineam in
> Poriaco et allam in Monte-defenso. >
Hugues paroit comme chantre dans différents cartulaires, aux années
1 172, 1175, 1176 et 1180. Il étoit de la raraille de Toucy, neveu de
l'évoque Guillaume de ce nom. Il fut aussi archidiacre de Sens. Il ne
prit point la prêtrise. L'Obilier de 1250 marque au 20 mai : a Ob. Hu-
0 gonis Canloris et lévite, lx sol. super reddiius de Montigniaco. •
Jacques de Tonnerre. Ce chantre est marqué au 1 1 mai dans l'Obi-
tuaire de l'an 1250 en ces termes : < Ob. Jacobi de Tornodoro Cantoris
» et lévite xl sol. pro xlv lib. Tur. quas habuit Capitulum de denarii^
(l) Vo^. PrcuTes, n*^ 58, 5U.
DE l'église d'acxbrre. 441
» suis que assignate fuerunt super terrain de Draciaco versus Au-
D giacum in qua de novo plàntata est vinea et salicetum. » Il ne peut
avoir vécu plus tard que vers la fin du xii® siècle, parce que la place est
remplie par ceux qui suivent. Un litre de 1256 le suppose mort depuis
longtemps.
Gautier, chantre d'Âuxerre au moins dès Tan 1198 quMl fut présent
à un titre d'Héloïse, abbesse de Saint-Julien, contre Tévéque Hiiguesde
Troyes. En 1202, il fut arbitre avec Ârnoul, abbé de Saint-Père (1) et
Robert, lecteur, sur une difficulté élevée entre le curé de Palay, diocèse
de Sens, et les chanoines de Saint-Pierre dans la métropolitaine. En
1203,il fut encore arbitre entre le Chapitre de Sens et celui d*Âuxerre,
touchant des droits de main-morte. Il légua en 1209 une maison au
monastère de Saint-Marien. Le cartulaire du Chapitre rapporte à l'an
1221 , la charte de Jean, abbé de Sainte-Goneviève de Paris où ce chantre
est nommé comme déjh mort. L'Obituaire de 1250 marque au 28 juil-
let : <c Ob. Galteri Cantoris et lévite c. sol. Dédit nobis duo operato-
> ria in Draperia et domum ibidem silam et pratum super Belcam. »
Brice, chantre en 1212, fut depuis élu doyen vers Tan 1219.
Henri de Villeneuve proche Saint-Cloud au diocèse de Paris, fut
chanoine et chantre quelque temps, puis élu évéque en 1220.
Robert, est qualifié chantre dans un traité du Chapitre d'Auxerre avec
Dreux de Mello de l'an 1225, et dans un titre de Saint-Marien de 1226.
L'Obitier de 12!i0 marque son décès au 15 juillet , et le qualifie lévite.
Celui de Notre-Dame de la Cité dit qu'il s*appeloit Robert de Corbeil,
qu'il donna à ce Chapitre un arpent et demi de vigne in Brunelto. Â un
autre jour on y lit qu'il avoit eu un frère nommé Jean de Corbeil.
Félix, chantre d'Auxerre est nommé l'un des exécuteurs du testament
de Miles, seigneur de Noyers, en 1251 .
Robert II, est nommé dans la fondation de Simon, archidiacre de
Langres, chanoine d'Auxerre de l'an 1255. Il est pareillement fait men-
tion de lui dans une transaction de 1255 sur les marguilliers. Il fut ar-
(1) Ex Cartul. can, S. Pétri Senon.
442 CHANTRES
liitre en 1237 enire Bernard de Sully, évéque, et Hugues, seigneur de
Nenvoy touchant le droit de présentation à une chapelle fondée dans
la collégiale de Gien.
Philippe, chantre de réglise d'Âuxerre, jugea en 1258 comme arbitre
une difficulté faite aux moines de Saint-Germain touchant un bois. On
lit dans TObitier de 1250 au 15 août, maisd^une main un peu plus nou-
velle : c Obiit Phiiippus hujus Ecclesic Cantor eximius, etc. >
Jean de Dauas, de Tillustre maison de ce nom, chantre et officiai,
avoit rendu avant l'an 1255 un jugement contre Guillaome de Noes et
autres bourgeois de Saint-Sauveur, au sujet du droit de minage qu'ils
refusoient de payer à la dame sénéchale du lieu. Il fut fait évéque de
Mâcon en 1265, et mourut Tannée d'après (1). L'obituaire de Notre-
Dame de la Cité fait mention de lui au 19 décembre.
Guillaume de Jaligni , fils de Hugues , seigneur de Châtillon-en-Ba-
zois. Il paroit qu'il étoit chautre dès Tan 1260, selon des lettres de cette
année (et non de 1209) rapportées dans l'Histoire des Cardinaux fran-
çois (2), où il est fait mention du différend qui étoil entre lui et Renaud,
comte de Forés au sujet de la terre de Poimier. 11 faut aussi voir Duchéne
Histoire de Bourgogne (5) environ Tan 1260(4), où est rapporté un
arrêt du parlement au sujet du château de Bussy-en-Paële. Dans les
lettres d'Erard, évéque d'Âuxerre de l'an 1276, on voit ce chantre
d'Âuxerre s'engager pour le mariage de sa nièce. Il fut fait depuis
évéque de Laon. Son testament de l'an 1284 rapporté par Baluze,
apprend qu'il étoit neveu de Gui de Mello, évéque d'Âuxerre. Il s'y res-
souvient de l'église d'Auxerrre en ces termes ; a Item Ëcclesie beat!
» Stephani Âltisiodor.in qua fui (Cantor xxv libras annui redditus assi-
> dendas in terra mea de « Chasels > et de Donnapetra. >
N..., prolo-notaire et domestique du pape, obtint vers Tan 1500 le
canloral vacant en cour de Rome, comme il est porté dans un jugement
rendu en faveur du prieur de Saint-Eusèbe. Ce même chantre dont on
ignore le nom, mourut en cour de Rome.
(1) Gallia christ, nova. ! (5) Preuves de l'IIist. d'Auvergne
2) Lib. 3. C. 75. , ,1) Ibid.. pag. 202.
DE l'église d'auxerre. 445
Guillaume Mbschin, étoit vice-camericr, chapelain et domestique de
Clément V, qui lui donna le cantorat d*Âuxerre après la mort du
précédent arrivée en cour de Rome. Il fut condamné à payer le droit
annuel de sa prébende au prieur de Sainl-Eusèbe, par sentence arbitrale
de Guillaume de la Ripe et Guillaume Periti, chanoines d'Âuxerre,
prononcée dans le chœur de la même église le 25 mai 1515. Peu
de temps après il fut élu évéque de Pampelune, et ensuite de Troyes
en 1516.
Ponce ëtieniœ. Il fut présent en 1540 k l'évêché, lorsque Guillaume,
abbé de Pontigny y prêta serment de fidélité à l'évéque Jean de Blangy
et à l'église d'Auxerre.
Regnaud de Prégilbert. Le nom de ce chantre d'Auxerre se trouve
au 25 ou 26 septembre dans les Nécrologes de Notre-Dame de la Cité,
de Regny, de Bellary. Il mourut à Paris en 1555 le 25 septembre , et
fut inhumé dans la grande chapelle de Notre-Dame au cloitre de Sainte»
Geneviève, où son épithaphe se lit sur le cuivre en ces termes : a Hic
0 jacet vir magne discretionis et prudentie , Magister Reginaldus de
» Prato Gilberti, quondam Presidens in Caméra inquestarum Domini
» Régis, cantor et canonicns Autissiodor. canonicus Senonensis et
> capelle Regalis Parisiensis, qui obiit anno Domini m ccg lui , 25
to die septembris. » Il est représenté tenant un bâton qui finit en tau et
l'aumuce en télé (a); ce que Dom de Vert a observé dans son ouvrage sur
les anciens habits d'église. (T. 2. ubi de almutm).
Pierre d'Auxy ou d'Auxois, de Auxeio^ chapelain d'Urbain V et audi-
teur du sacré palais selon un rescril de ce pape du 24 septembre 1565
en faveur de Tabbaye de Saint-Germain d'Auxerre, est qualifié chantre
de la cathédrale en 1569, et comme tel envoyé par le Chapitre pour
consulter à Paris sur quelques affaires , d'où il rapporta des lettres
royaux. En 1575, il tenoil à bail du Chapitre la grange de Monétao,
(a) Cette forme de bâton rappelait Tancien usage de célébrer Icji offices debout,
appuyé seulement par tolérance sur des bftlons, dont la crosse en forme de potence^
se plaçait sous les aisselles.— Voy. Stalles delà Cathédrale d'Amiens, par M. Jour-
dain. (iV. d. E.)
444 CHANTRES
moyennanl la redevance annuelle de 12 livres (1). Il fui élu évéque
de Tournai en 1378(2).
Nicolas d'Epone. Ce chantre d'Ânxerre dont le surnom lalin est de
Spedona est mentionné dans un titre de 1581. Je le crois le même que
Nicolas de Bondeville, qualifié chantre dans une quittance de paiement
des décimes apostoliques de Tan 1585.
Denis Lopin qui avoit éié chanoine tortrier selon un titre de 1560,
fut chantre après le précédent, mais fort peu de temps, puisqu'il mourut
en 1584 le 9 janvier, comme il se lit sur sa tombe qui a été transportée
proche Tenlrée du Chapitre où il est représenté en chasuble tenant son
b&ton cantoraU II avoit fondé une messe de Saint-Eustache (5).
Bertrand Cassinel, frère de Ferrie Cassinel, évéque d*Anierre et
chanoine, fut fait chantre en 1585. Il est nommé en différents actes
jusqu'à l'an 1597. Il fut aussi chapelain de la léproserie de Toucy.
Voyez le reste de ce qui peut le regarder à l'article de l'évéque son frère.
Voyez aussi son testament (4). Duchéne parle de lui en sa maison de
Châtillon. Selon le Nécrologe de Notre-Dame de la Cité, il ne fut jamais
que sous-diacre.
Jean Chanteprihe. Qiioiqu'il paroisse que dès le 15 octobre Jean de
Molins se fût fait recevoir chantre en vertu d'une grâce expectative,
néanmoins il est certain par des actes postérieurs que ce fut Jean Chante-
prime qui jouit de cette dignité jusqu'à Tan 1402 qu'il fut fait doyen
de Paris. Il avoit été élu le 16 juillet 1599 d'une voix unanime (5).
Jean de Molins succéda à Jean Chanteprime, nonobstant l'élection
solennelle faite de Jean Âlepté, en 1402(6). Il était docteur en méde-
cine (7) ; mais il n'avoit pas la facilité de lire dans les livres d'église ;
d'où il arriva des disputes. Il conserva cependant sa dignité jusqu'en
1422(8). Il donna en 1415 pour la construction du portail septentrional
de la croisée, six vingts écus d'or. Il mourut en 1422 le 21 janvier, et fut
inhumé dans la chapelle de Saint-Pierre et de tous les saints, dite au-
(l) Ex compot.
(i) Ibid.
(5) Ex compot. XV. Sœculi.
(4) Voy, Preuves, n*^ 338.
(5) Reg. Captt,
(6) Koy. Preuves, n" 343.
(7) Reg. Capit, 1408, 3 maii.
(B; Reg. "ii juin.
DE l'église d'auxerre. 445
jourd*hai de Saiot-Sébaslieo. Il l^ua à la bibliothèque du Chapitre
tous ses livres de médecine, entr'autres Avicenne (1). Il avoit eu en
i420 un procès contre l'abbaye de Saint-Père sur la censive^ etTavoit
perdu.
Jean Vivien, d'une famille anxerroise qui s'établit k Paris, et y pro-
duisit des hommes illustres, étoit absent de son canonicat d'Âuxerre,
lorsqu'il fut élu chantre le 5 février 1422. Il se fit recevoir le 28 sep-
tembre 1425 par procureur, parce qu'il résidoit à la cour romaine. Il
étoit aussi prévôt de Chablis. Il fut depuis élu évéque d'Âuxerre, mais
sans succès. On l'appelait Jean Vivien le Jeune, pour le distinguer d'un
autre de même nom. Il eut pour frère Etienne Vivien, grand archi-
diacre.
Hugues de Villemer fut reçu chantre par procuration, n'étant que
sous-diacre le 21 mai 1427, et placé en personne le 26 juillet 1409
dans les basses stalles. Il jouissoit encore de cette dignité en 1453,
puisqu'il paya le droit de son antienne 0.
Jean Henribt, possédoit la chantrerie au moins dès l'an 1457 qu'il
jouissoit d'un privilège accordé par le légat. Dans les partitions de 1458,
il étoit placé h Oisy. Ce chantre résida très-peu. Il est nommé comme
absent dans l'acte d'élection d'Enguerrand Signard en 1485; il fonda
en 1481 sonobit, et le service de l'Invention de Saint-Vincent. Il mou-
rut en 1492, comme il paroit par la vente de sa maison. Il fut inhumé au
bas des degrés du sanctuaire du côté gauche.
Jean Chevalier, licencié en décrets, chanoine d'Âuxerre et chantre
de Clamecy dès l'an 1484, fut reçu chantre en 1492, et mourut le 25
mars 1494. Il étoit frère d'Antoine, chevalier, grenetier (2) d'Âuxerre,
et oncle de Renaud, chevalier, lieutenant-général (5).
Olivier Michel fut reçu chantre en 1495 et mourut en 1512. Il est
nommé dans un titre de Regny en 1511. Il avait la prébende théologale
à laquelle Nicolas Belin fut reçu le 24 juillet 1512. Il fut inhumé proche
(1) fiegf. Febr.
(2) C'est-àiHlire receveur du grenier à sel.
(S) Compot. Cal, Maii.
446 CHANTRES
la grande porte de l'église. Sa tombe levée de ce lieu , sert aujourd'hui
d'autel à la chapelle de Notre-Dame des Vertus, et j'y ai lu ce resie à
l'épitaphe : < Michel, docteur en théologie, en son vivant chantre etcha-
> noinede l'église d'Auxerre, natif de Saint-Pierre..., »
Jean de Noyon prit possessiou de la chantreriele IG septembre 1512.
II est nommé dans la conclusion du 5 décembre 1515, pour l'élection
d'un évéque. Il mourut de peste au mois de juillet 1515. Après sa
mort, Hugues de la Vault, chanoine, fut député pour aller convoquer les
absents à la future élection indiquée au 5 novembre à Auxerre, et si la
peste y étoit encore, au lieu de Crevan. Il y avoit plus de vingt chanoines
retirés ailleurs, savoir à Joigny, à Sens, à Paris, à Orléans, a Troyes, à
Saulieu.
Jean le Rot. Sa réception est marquée au 14 mai 1 51 G dans un compte
du temps. Il est nommé dans un titre de 1515 21 janvier, concernant
Parly. On lit dans les registres de 1524, 20 décembre, que M. le chantre
pour sa prébende de chanoine, fera l'office d'évéque le jour de Saint-
Etienne, excepté la mitre qu'il n'aura pas. Il décéda le 1 1 janvier 1554,
et fat inhumé suivant son désir < ante magnum portale juxta sepulturam
» D. Oliverii Michaëlis jam dudum Cantoris. n
Arnoul Gontier. On peut lire ci-dessus (1) les difficultés qui s'éle-
vèrent sur Félection d'un chantre, après la mort de Jean le Roy. Arnoul
Gontier fut celui qui resta en place. Il avoit été reçu le 10 janvier 1555
étant au droit de ceux qui avoientea des provisions. Il étoit fils de Louis
Gontier, et de Radegonde Donet. Il fut aussi abbé de Saint-Marien et
l'étoit dès 1540 (a). Il mourut le 10 juin 1555 selon Tobitier de la pa-
roisse de Saint-Renobert.
Laurent Robert, chanoine, fut élu par la voix du Saint-Esprit après
la mort du précédent. L'acte de confirmation par l'cvéque est du 7 août
1555.11 avoit eu communication des papiers du sieur Laurent Bretel,
(1) p. 12t.
(a) C'est ce qui résulte d'une pièce qui est aux archives de rYonnc, fonds Saint
Marien, collation d'ordres. [N. d. E.)
DE l'église d'auxerre. 447
secrétaire de Jean Baillet, évêque, et c'est de lui que j'ai tiré le pouillé
du diocèse imprimé parmi les Preuves de ces mémoires. Il mourut le
22 octobre 1557, et fut inhumé proche l'autel de Saint-Laurent, qui
étoit alors où est celui de Saint-^Michel.
Edme Thevenon. Son élection se fit le 4 décembre 1557 (\). Il est
nommé au procès-verbal delà coutume de l'an 1451. Après la dispersion
des chanoines du temps delà prise d'Âuxerre par les calvinistes en 1567,
il fut l'un des premiers qui retournèrent à l'église (2). Il donna en 1580
un bâton cantoral d'argent. Il résigna au suivant en 1585, et eut une
place de chanoine honoraire suivant les registres an 26 septembre
1587 (5). Il repose devant l'autel Saint-Michel.
Jacques Màgnbn qui avoit été chapelain-clerc d'un chanoine en 1552,
puis chanoine tortrier en 1567, greffier du Chapitre depuis l'an 1577,
et qui étoit curé de Saint-Renobert en 1581 , prit possession de la chan-
irerie d'Âuxerre durant le mois de juin 1586 au plus tard. Il ne la con-
serva que jusqu'en 1506 qu'il la permuta avec le suivant.
Pierre Berault, chanoine dès l'an 1558, fut reçu chantre le 1®' oc-
tobre 1596 par permutation pour la cure de Gurgy. Il mourut en 1610
le 8 janvier âge de 67 ans. Mais il avoit résigné la chantrerie dès l'an
1606. Il a eu une épitaphe en prose latine outre celle en vers qui corn-
mençoit ainsi :
Muncre Beraldus triplicî dum vi?eret aoctus.
■
Gaspard Bargedé, fils de Nicofas Bargedé, président au présidial
d'Âuxerre et de Marie Houbelin, fut installé chantre le 18 décembre
1606, comme résignataire de Pierre Berault. Il fut aussi curé deMoné-
teau, et trésorier de N.-D.-de-la-Cité. Il résigna au suivant en 1641.
Gervais Housset, neveu du précédent du côté de Marie Bargedé
sa mère, eut la chantrerie par résignation, et y fut admis le 22 dé-
cembre 1651 (a). Il fut aussi trésorier de N.-D.-de-la-dité. Sur ses
(1) Reg, Capit.
(2) Reg., 24 nw.
(3) Ex libro Succent,
(a) Il était fort vif, car, pendant uq office du soir, il voulut mettre lui-même hors
448 CMAytËMB K l'ÉUISK » AOXIBIE.
rMMMilnuices, oe établit^ eo 1653, Tnafe de se revêtir de dupes
po«r le répons des vêpres ei cIMim. Ses iBimhes FoUi^restà se dé-
■lettre de sa digDÎté, es 1674, en (aTenr de soo frère dép soas-ehantre»
n avoît pris possessioD de ia csre de Conrgj le 28 octobre 1662. D
■omt le 2 o« le i novembre 1673.
Nicolas Hocsot. chanoine et sons-cbantre, frère de Gervak et son
résîgnataire en conr de Rome, prit possessHHi dn cantorat le 4 novembre
1674. il conserva cette di^ié jnsqn'a sa mort, arrirée le 8 jnn 1679,
an bont de qnelqnes jonrs «Tiae mabdie qn^H avoit contractée à b
pfocesBÎon de h Féte-D^n. Les denx frères sont inbnmés devant b
ckapdle de S. Martin.
TocasàDT in ClebCt chanoine depnis le 9 aoèt 1639, n'émit qne
«MB"diacfe hffsqnll fnt éln chantre le 28 jnin 1679. D nmmrnn; à
r^îr le choenr en chapcet bâton ca ntoral à ITpiphaaîe 1 680, hrs-
fil em élé ordonné dbcre. D monmt le 4 aont de Fan 1 99t .
C1.ACIC Bncan, chanoine , étant absent , fnt éfn chantre snr b Sa
dn nmê raoèt 1794, et re^ le 9 septembre. B mwm a Bonne,
a pnirie^ le 28 dn même mok.
JnàSh-BàPren LAii^Bija, chanoine depnis fan 1637, ht ëm
chantre le 22 octobre 1694 et re^ le 9 noiven^re. D a fait beancenp
de dons à Té^sc^ et a procnré Fai^mentation dn de^ deb SHe de
& Pâcrin dam h caAédrale. D a dmmé entre aittres ehes» k p^md
n monmt le 13 imb 1704.
hm sMcédn CB vcftn de FâeciiM bile le 28 jniUet 1704. D a pomédé
ccnedipMiéjnB^'an mois de moi 1731 ^a décéda.
Fan 1710, int éin le 17 mni 1731.
*Dint bpvmcipd rédvle» dn Brévnire diocésain. D
SCS fanctiimi b 11 mni 1770.
et chflmÉg,c«ai lîi im. son ▼(hbol El nr
roftcr. Ijt CkofilK \t MAan ée cette eon-
TRÉSORIERS DE L*ÉGL1SE d'aUXERRE. 449
* Jean-Charles-Joseph Gaudet, du diocèse d'Yprcs, uommé chantre
par M. de Cicé, le 8 août i770. Le Chapitre refusa de le reconnaître
en cette qualité attendu qu*il avait élu canoniquement M. Letellier.
M. Gaudet se fit installer par deux notaires et obtint son maintien
par arrêt du parlement a attendu que malgré le droit du Chapitre,
l'évéque peut refuser Télu ob deffectum capacitalum. »
M. LetcUier étant mort en 1772, toute difficulté fut levé^. M. Gaudet
devint officiai de Tévêque en 1776. Mort le 9 avril 1787.
* Locis - Jean Vaultier , du diocèse de Bayeux , résignataire de
M. Gaudet, par acte du 9 mars 1787, fut élu en outre parle Chapitre,
le 9 mai suivant. Il continua d^élre commensal de l'évéque comme
lorsqu'il était lecteur, et devint son vicaire-général le 24 décembre
1768. Il présida jusqu'en 1792 les réunions du Chapitre. Il était
aussi chantre de la collégiale de la Cité.
TRÉSORIERS DE LÈGLISE D'AUXERRE.
Les dépositaires des vases sacrés, reliquaires, châsses, joyaux, ont
eu d'abord assez communément le nom (Tarchiclavus ou archiclavis
dans les églises cathédrales et dans les célèbres collégiales. Ils ont été
depuis appelés thesaurarius ou bien mcrisla. Il est visible qjue le nom
(ï^archiclavus venoit de ce qu'ils étoient chargés des clefs du trésor, de
l'argenterie et des orncmenls, de celles du chœur, du sanctuaire, etc.
Ils avoient en plusieurs églises d'amples domaines dont le soin les
dispensoit de la résidence , et ils ,s'en déchargeoient sur un officier
inférieur appelé custos ou sacrista. Leur dignité a été considérée, eu
certains siècles, comme h demi-séculière, puisqu'ils pouvoient assister
h l'office l'oiseau sur le poing, au moins aux fêtes solennelles (1). Ëtant
de puissants seigneurs dans ces siècles reculés, ils faisoient rendre
exactement h l'église les tributs de cire que lui dévoient les détenteurs
\^l) Voy. Prouves, iio 578.
II 29
450 TRÉ80RIEKB
des fiefs de Châteaa-ChiDon (1) , d'Odent el de Conches , proche
Varzy, et même ceriaines cures da diocèse. Aussi, dans ces temps-lîi,
se chai|;eoieDt-il8 de fournir du luminaire tout autour du chœur, au
moins les grandes fêtes, comme on le pratique en d'autres églises, el
comme on le faisoit encore, en 1695, le jour de rinvention de saint
Etienne. Cette dignité est k la collation de Tévéque. Sa place au chœur
est dans le bout fers le sanctuaire ^ gauche.
Je ne dirai rien ici des arcbiclaves de Téglise d'Àuxerre, dont il est
parlé dans Phistoire des évèques avant lex^ siècle (2), parce que leurs
noms n*y sont pas spécifiés. Voici d'abord ceux qui sont nommés dans
le Néerologe écrit vers Tan 1007.
EamALD, lévite et archiclave, tué par les ennemis, apparemment les
Normands, un huitième jour de septembre. Ce fut vers Tan 91 1 que les
Normands approchèrent plus près d'Auxerre.
RoTFREDUS, prêtre et archiclave, mort le 1®' novembre.
HBRMomus, acolyte et archiclave.
Gui, qui vécut vers Tan 1020 ou 1050, ou quelques années plus
laid, et dont on lit dans les additions au Nécrologe, le 6 mai : a Obi tus
> magistri Guidonis canonici S. Stephani et archiclavi, qui dédit eccle-
» sie nostre ex libris suis Passionales duos, Antiphonarium , Gradale,
» HjmnariumetPsalterium. »
ËTiENins, le premier qui ait été qualifié trésorier, est nommé dans un
acte de Tan 1076 ou environ, concernant la fondation du Chapitre de
Clamecy.
Robert nommé dans la matricule des chanoines d'Auxerre , parmi
les prêtres, sous le titre d^yEdiluus, vers Tan 1090 ou 1100, sous
révoque Humbaud.
Roger, qu'on dit nommé dans un titre par lequel Gosbert Capel fait
du bien à l'abbaye de Moléme du consentement du même évêquc.
Etienne II, qui en 1120, par un acte passé au trésor de la cathé-
(1) Le premier 30 liv. ; les deux autres
chacun 50 liv.. sans compter le cierge de
Gien qui étoit de 100 livres.
(2) Hist.HeribaldietHerifridi.
DE L*ÉGL1SE d'aUXERRE. ' 451
drale, ratifia une donation faite à Tabbaye de Ponligny du domaine de
Roncenay, mouvant de sa dignité. Il est aussi nommé dans les chartes
de la même abbaye, a l'an 1147. Son obit est marqué dans le Nécro-
loge de 1250, au 24 juillet : Ob.Slephani thesaurarii ij dm. Dédit nobis
XX libras ad emendos redditus.
Grégoire. Il paroit, par une lettre du pape Eugène III (1), daiée de
Langres m kal. rnatï, qu'un Grégoire, cardinal diacre, fut en même
temps trésorier d'Auxerre vers Tan 1150, et qu'il avoit aussi été
chanoine séculier de Sainte-Geneviève de Paris, avant que les réguliers
y fussent admis. C'est sans doute au sujet de ce trésorier, que Gui-
chard , second abbé de Pontigny, écrivit & l'abbé Suger une lettre qui
est chez Duchône (2).
Radulphb ou Raoul, issu des barons de Toucy, que Robert, dans
sa chronique d'Auxerre, représente comme un ecclésiastique très-riche
et très-pieux. Il dit qu'il laissa tout son bien aux églises, entre autres
à l'abbaye de Saint-Marien, où il se retira pour mourir. II y fut inhumé
dans le sanctuaire, selon le même écrivain qui vivoit alors. J'y fis la
découverte de son tombeau sous les ruines de l'église, le 17 février
1716, au côté droit ou méridional du banctuaire. Les ossements,
mêlés de restes d'étoffe d'or, furent portés au prieuré de Notre-Damc-
la-d'Hors, dont le prieur les plaça en quelque endroit de son église ;
et le tombeau fut laissé au même lieu. Le nom de ce trésorier est à la
fin de la donation de l'église de Saint-Amatre , faite au monastère
de Saint-Satur en 1165, et dans l'acte de la suppression de la
prévôté en 1166. Il mourut la même année. Il parait que c'est
des serfs de ce même trésorier dont il s'agit dans une lettre que
Alexandre III écrivit h Henri , archevêque de Sens (3). L'Obituaire,
écrit en 1250 pour la cathédrale d'Auxerre , marque son obit au 8
août, ajoutant qu'il avoit donné à celte église les moulins d'Accolay et
fait plusieurs autres biens.
Guillaume de Toucy fut successeur du précédent, et vraisemblable-
ment il étoit son parent. Robert de Saint-Marien dit qu'il fut trésorier
(1) Durbènc, t. iv.
(«) Ibtd.
(3) Martenne, t. ii, pag. 992.
452 TBÉSORIERS
il'Auxerrc, et archidiacre de Sens eo même lemps. Poar ce qui esl
de la trésorerie, il n'en fat revéta que daraiit Tan 1166, paisqo^il fol
élu évé«]ue d'Âoxerre eo 1 167.
HcGUES DE Noyers parait comme trésorier en des titres des années
1176, 1178 et 1182 dans différentes archives, soit de Saint-Marieo,
soit du Qiapitre d*Auxerre on de Pontigny. Il fat éla évéque d'Ânxerre
après la mort de Gaillanme de Toacy, arrivée en 1181.
Odon. Ce trésorier n'est connu que par la fondation de son obit,
qui est marquée au 26 février dans TObituaire de 1250, en ces termes :
« Ob. Odonis lévite et thcsaurarii xxx sol. > Il étoit apparemment
d'une famille des environs de Sens, puisque son obit se trouve pareil*
lement dans le Nécrologe de Saint-Pierre- le-Yif de Sens, et dans celoi
de l'abbaye de Prcuilly proche Hontereau. Il a dû vivre à la fin dn
xii^ siècle, parce que le commencement de ce siècle est rempli par
d'autres.
GtnLLAUHE. Il parait avoir dû succéder à Odon vers l'an 1210 oa
1215. Il est nommé au vingt-huitième feuillet de la collection des
anciens statuts du Chapitre (1), dans une charte de l'an 1221 sur les
oblations.
GuiLLAiN. Son obit se lit ainsi au 17 juillet dans TObituaire de 1250:
« Ob. Guillani presbyteri et thesaurarii. > Il y est dit qu'il avoit bâti
une maison au cloitre ; et au 22 mars, qu'il avoit fondé un service
pour ses parents. Il doit être le trésorier G. d'un acte de l'an 1223.
Durand. Ce trésorier doit être placé ii l'an 1252. On y trouve des
actes qui le désignent par un D. Il est aussi nommé en 1255 daus
une transaction sur les mai^illiers (2). Quelques manuscrits l'appelleai
Durand Belire. On lit dans l'Obituaire de l'an 1250 au 20 juillet :
ff Ob. Duranni thesaurarii et lévite. » On trouve dans un acte de
celui qui suit, que le trésorier Durand avoit donné des vignes a des
habitants de Chitry pour en jouir jusqu'à l'extinction de leur lignée,
après quoi elles dévoient revenir à la trésorerie.
(l) Voy. Preoves n. 341, à la fin. | {i) Koy. Preuves, n. IG5
DE l'église d'auxerre. 455
TiiiBAUD, trésorier, est connu par ractcilc i242, par lequel il donna
40 liv. aux gens de Chilry, avec lesquels son prédécesseur avoil traité
pour des vignes. Il fonda son anniversaire moyennant vingt sols de
rente sur les mêmes vignes ; ce qu'il fit agréer par Tévèque Bernard.
Cet anniversaire est apparemment celui qui , dans quelques livres
d'obits, est ainsi désigné au mois de décembre : « Obitus Theobaldi
(c Odet thesaurarii. » Il est probable que c'est de lui ou de quelqu'un
de ses parents de même nom, qu'une des rues de Paris a été dénommée
la rue Thibaud Odi. 11 est aussi marqué dans le Cartulaire du Chapitre
aux années 1250, 1255 et 1255, fol. 157 et 159.
Jean , trésorier , pouvoit être depuis longtemps pourvu de cette
dignité, lorsqu'il accompagna, en 1280, Guillaume des Grez, évêque
d'Auxerre, qui alloit prêter, à Sens, serment de fidélité (1). Lui et
Etienne, sacriste, transigèrent, en 1285, avec Pierre d'Appoigny,
chanoine d'Auxerre.
Pierre de la Motb. Il est nommé simplement Pierre dans l'acte où
il parut comme témoin, en 1520, quand le Chapitre donna }k l'évêquc
Pierre des Grez, la tête de saint Amatre pour être enchâssée ; mais il
est avec son surnom dans une charte de Philippe, comte de Valois,
de l'an 1527, et il y est dit héritier du même Pierre des Grez (2).
Jean de Damemarie, trésorier, est nommé dans un titre de l'an 1555,
et dans l'acte capitulaire dressé en 1540, lorsque Guillaume» abbé
de Pontigny, prêta le serment de fidélité à l'église d'Auxerre.
Beblius de s. Maria. On ne trouve ce trésorier que dans un compte
latin de l'an 1562 où on lit : « A Beblio de Sancta Maria thesaurario
> pro aotiphona sua 0, xl sol.»
Guillaume le Mercier, trésorier, paroit dans un titre de 15G9.
Guillaume Nazarie est fort célèbre parmi les trésoriers, à l'occasion
de la requête présentée là Michel de Creney, évêque d'AuxeiTC, en
1598, touchant les charges de la trésorerie (5). Il étoit trésorier au
moins dès l'an 1589, et il vivoit encore en 1401, étant nommé dans
vi) Exautograpko j '3) Voy. Preuxcs, ii 'SÔO.
(2) Voy, Preuves, n 27H.
454 TRÉSORIERS
b transaction du Chapitre avec l'évéque. Il cessa de gérer la trésorerie
Tan 1407.
Thibaijd Bocacbon qui étoit curé de Monlins-Engilbert et chapelaÎD
de Sainte-Catherine dans la cathédrale d'Âuxerre , permuta avec le
précédent et prit possession le 4 juin 1407. Il noourut dès Panoée
suivante. Ce fut apparemment lui ou Thibaud Odet qui donna au
trésor de la cathédrale un tableau de reliques mentionné plusieurs
fois dans Tinventaire dressé vers Tan 1420, et qui est parmi le Preuves
de ces Mémoires, n. 352. Peut-être celui-ci est-il le trésorier d'Auxerre
dont l'Obituaire de la métropolitaine de Bourges de 1514, marque
ainsi l'obit au 9 mai : c Anniv. Theobaldi de Chi^iaco thesaurarii
» Autiss. et canonici Bitur. >
Ëtienhb Balan fut pourvu de la trésorerie après la mort du précé-
dent, et fut reçu le 2 juin 1408. Dès la même année il fit un bail de
prés situés }k Villefergeau. En 1409 et 1410, il fut gouverneur ecclé-
siastique de rHôtel-de-Ville(l). Etant vicaire-général de Tévèque, en
1425, il donna absolution le 6 juin à Etienne Vivien, archidiacre (2).
Pierre de Longueil. Il est qualifié trésorier dans Tun des comptes
du Chapitre de Fan 1459. Comme Pierre de Longueil qui a été depuis
évoque, résidoit à Auxerre en qualité de vicaire-général dès Tan 1427,
il est probable que ce fut lui qui fut revêtu de la trésorerie vers 1450.
Au moins les longues absences du trésorier, marquées en 1450 et 1455
dans les comptes h l'article des dépenses communes, s'accordent
avec le temps des voyages de Pierre de Longueil vers le duc de
Bourgogne (5).
Jacques Villemer, trésorier, fut député le 2 décembre 1445 avec
Jean Comin, pénitencier, pour transiger avec les habitants d'Auxerre.
Il ne garda pas cette dignité. Il mourut chanoine au mois de septembre
1456.
Jean Mauvoisin , auparavant pénitencier, reçut en 1449 le nouvel
(1) Exregistr,
(2) Quelques-uns présument qu'il donna à
réglise de petites cloches pour les jours or-
dinaires, lesquelles prirent do lui leur nom.
Auparavant on les appeloit Manelli.
(3) Voy. sa vie ci-dessus, pag r>9.
DE l'église d'auxerre. 455
évêqae Pierre de Loogueil, h la léte du Chapitre ({). Peu après il fut
commis par ce prélat, pour recevoir le serment de fidélité de Louis Ra-
guier, fait nouvellemeot doyen. Il avoit été gouverneur ecclésiastique
derHdteUde-Villeenl445.
ANTOINE Thiart , étoit trésorier depuis peu, Tan 1454, selon un
compte d'environ ce temps-là. Il permuta sa dignité en 1459, selon
Facte de réception du suivant.
Jacques Juin, dit Junii en latin, fut reçu le 21 mars 1461 par per-
mutation, pour la chapelle de Saint-Pierre des Mathurins de Paris. Il
étoit prêtre, bachelier en théologie et ès-lois. Il paroit en quelques
actes comme conseiller au parlement. Ce fut lui qui, en 1464, rétablit
l'ancien usage des trésoriers d'Auxerre (2), de paroltre au chœur les
fêtes solennelles, Toiseau de proie sur le poing ; il vivoit encore en
1476 (5).
' Jean Garnier fut reçu trésorier en 1495. Il étoit gouverneur ecclé-
siastique de rHôtel-de-Yille en 1497 et 1498. Jean Grillot, chanoine
tortrier, fait mention de lui dans TOrdinaire des usages de la cathé-
drale qu'il rédigea depuis la reprise de la ville sur les Huguenots (4).
Dreux Picard, noble parisien, chanoine dès Tan 1504, fut aussi reçu
& la trésorerie dans le même temps. En 1506 et 1507 il étoit gouver-
neur de rHôtel-de-Yille, Etant encore trésorier en 1517, il entendit le
compte de Vincent Souef, chanoine, sur la continuation du bâtiment de
Téglise (a). Il fut fait chantre en 1524.
Jean Babute, reçu chanoine dès le 4 avril 1506, et qualifié protono-
taire, jouit longtemps de la trésorerie. Il y eut en 1532 une enquête sur
(1) Foy. Preuves, n. 364.
(2) Voy. Preuves, n® 378.
(3) II paroit que c'est ici la place d'Adam
de Poigny et de Guillaume Douet ou Donet,
que les listes d'anniversaires écrites vers
1530 qualifient de trésoriers.
(4) La notice de ce manuscrit est dans les
Preuves de l'Histoire de la prise d'Auxerre.
page XXXVI.
(a) Ce Vincent Sooef a le titre de k Maistre des œuvres des ouvrages de l'église
cathédrale d'Auxerre, pour la réparation de ladite église, » dans un compte de Té-
véché de l'an 1515, où il figure pour avoir reçu 120 iiv. de iévéquc h cette destina*
lion. {N, d. E.)
)eiiJriiiu >lu poêle de<> mtiru <]a'il prétendoiiavoir, eL '■□ loil il vent
contre loi one aenloice de LâareDt Pelilfon. abbé de Saiat-Père. aa
snjet d:^ la ^rde des nsps sacrés. W moanit le -i sottt lo5t. et fol
înhnmé proche le gni»! nuM de la cathédrale du i->>té du septentrion.
Son é|iil3phe en rnifrrï 3 dé depuis transporté'? hors >la >3Dctaairu
(In fr.ènie côté. Après ^3 mort. François do Dinteville donna le 10 août
des provisions de !a trésorerie et tle son canonicat. datées de CooSans.
au diocèse de Pans, â Go'lefroj de Cenames. clerc. Os provisions turent
appammoient sans effet, piiis'jne Lanrent Robert, prëlre. en aroît été
ponnu. et fit démission en farnur du soîvant.
SctPio^ DE PopRicoritT, issu J'uoe noble et ancienne fumiile de Picar-
die, coasin-gennaia du cûié de sa mère de François de Diateville H.
fiit reçu à la irésorerie le 17 novembre 1551. snr les proyisions (expé-
diées par Florent de la Barre. Tieaire-généra!. Il promit le 19 Je se
conformer an traité de N»z3rii>. On le trouve nommé en des actes de
1562 et 1564.
Jkih lk Soi-RT, oeveu du précédent et natif du diocèse de Meanx. fut
reçu trésorier le 7 avril 1567 avant Pâqoes. On le «oit conÛDaer en
157i ei 1580. Il monrut ea 1592. le 16 août, après avoir ressenti àes
affoiblissements d'esprit foi lut avoient fait nommer on curateur.
Clâcue Jacvabt, clerc sénooois, licencié ès4ois, fut reçu trésorier le
28 septembre 1592. Dmourat an mois de mai 1594.
Edhk GïmxAuaB dn diocèse de Langres. fut pourvu de la trésorerie
par le Chapitre < Setle episcopali vacante > le 2i mai [.j9 i et prit pos-
te 27. II remit sa dignité an Chapitre quelques jours après;
mais depuis il révoqua sa démission, et le Chapitre le nomma <ie doq-
veao te 28 juin 159ti. L'année d'après il permuta.
Jun LoKDBBK&cx qui étoit abbé de Sainl-Marien d'.\oserre. •toTea
et ebanoine de Saint-Mellon de Poaloise, permuta ce dernier bénéfice
peur la trésorerie dWnxerre qu'il avoil en vain essayé d'avoir en 1595
pw ImUes de Clément VŒ, et visa de Clande Amoal, doven et grand-
viciùrude Seos. Il fut recale 51 janvier 1597. et monnit an commcn-
cein*iil du moi» de juillet 1
DE l'église i)\uxerre. 457
Pierre le Clerc, uuxcrrois cl chanoine, fui nommé irésoricr par le
Chapilre le 5 juillel i598, cl insiallé le 6 par le sieur Chaucuard, sous-
chantre. Il passa transaction pour ses charges le 45 juillet 1606. Il y
eut deux arrêts du parlement sur le même sujet, en mars i608 et juin
1609. Il mourut h Paris en 1626, le 4 avril. Son corps, rapporté k Âu-
xerre, fut inhumé dans la chapelle de Notre-Dame de Liesse, qu'il avoit
construite au nord de l'église Notre-dame-la-d'Hors. Il avoit été élu
doyen en 1610.
Claude le Clerc, neveu du précédent, lui succéda ayant permuté avec
lui. Il fut installé dès le 9 avril, deux jours avant la mort deson oncle.
Il fat aussi gouverneur ecclésiastique de riIôtel-de-Ville. Il fut pourvu
en 1658 de Tarchidiaconé de Puisaye et quitta la trésorerie.
Pierre Fricour de Fenouillet, clerc du diocèse de Tours et prieur
de Juvigny, fut pourvu du canonicat et de la trésorerie, dont Claude le
Clerc s'étoit démis entre les mains de Tévéquc, et fut reçu k la trésore-
rie le 50 octobre 1640.
Robert Bastonnejiu, clerc parisien, reçu chanoine dès Tan 1642, suc-
céda au précédent dans la trésorerie quelques années après. Il passa en
1646 une transaction avec le Chapilre, et en 1652 il y eut une sentence
du présidial d'Âuxerre au sujet des charges de sa dignité.
Claude Lemuet fut fait trésorier après le précédent, et conserva celte
dignité jusqu'à l'an 1674. 11 mourut le 29 novembre 1676.
Claude Richer, bachelier de Sorbonne, éloit fils de Pierre Richer
avocat a Âuxcrre. Il fut pourvu en cour de Rome de la trésorerie par
résignation deson oncle, et en prit possession n'étant encore que sous-
diacre, le 29 janvier 1674.
Robert Poan est qualifié jeune chanoine et trésorier, dans un acte du
29 janvier 1688. Il avoit été reçu le 25 août 1687. Il étoit du diocèse
de Soissons.
Prix Deschahps né à Auxerre, a clé trésorier depuis le 24 avril 1692
jusqu'en 1722, auquel an il remit cette dignité entre les mains de
M. Charles de Caylus, cvéque.
Claude François Breuilot, né à Saint-Sébaslicn de Plainbois, dio-
458 ARCHIDUCRES DE PUISAYE
cëse de Besançon, fut poarvu de b trésorerie au mois de mai i 722.
Il en prit possession le 27 septembre, et s'en démit au commencement
de noTcmbre suivant. Cette dignité fut quelques années sans être
remplie.
Floremt-Louis de Neufville, prêtre du diocèse de Boulogne en Pi-
cardie, fut fait trésorier le 4 décembre 1729, et s*en démit le 12 juin
1732.
Claude Foucher, prêtre natif d*Orléans, a été reçu trésorier le 27
juin 1752. ^ Il est mort en fonctions à la fin de 1 751 .
* Auguste-Jean-Charles Clément, prêtre du diocèse de Paris, cha-
noine, fut nommé trésorier en 1752, le 10 décembre. Il fit un voyage
en Espagne. Pendant un long séjour à Paris il s^occupa beaucoup des
travaux de décoration du chœur de la cathédrale d*Âuxerre. Il résigna
son bénéfice au suivant.
* Jeam-Baptiste YiLLETARD, résignatairc de la trésorerie fit signifier
au Chapitre l'arrêt du parlement du 51 mars 1787, qui l'envoyait en
possession du temporel. Mais il ne reçut pas l'institution canonique
par son refus de signer le formulaire. Il fut le dernier trésorier.
ARCHIQIACRES DE PUISAYE EN L'EGLISE D AUXERRE.
Après que Ton eut partagé le diocèse d'Auxerre en dei^x parties à
peu près égales, on laissa la ville d'Âuxerre et le territoire qui s*étend
le long des rivières dTonne et de Cure au premier archidiacre , qui
fut appelé par la suite simplement Farchidiacre d^Âuxerre, autrement le
grand archidiacre. Le reste qui est borné par la Loire et qui ne renferme
aucune rivière considérable, s*appeloit Puisaye, ou Poisaie (1); c^est-à-
dire, pays de montagnes par opposition à l'autre. Ce dernier territoire
(1) Podium et Puleus signifioient anciennement des hauteurs ou dêvutions.
EN L*ÉGL1SE D'aUXBRHE. 459
fut assigné au second archidiacre, lorsqu'en vertu d'une bulle d'Inno-
cent lY de Tan 1249, l'archidiaconé fut divisé en deux. Comme on
étoit convenu de réunir à ces deux dignités une prébende dont ils par-
tageroientle revenu, on éteignit celle de Pierre d'Arcueil qui étoit mort
le 17 août 1249 : et par la suite Fusage détermina la manière dont ils
dévoient gagner leur revenus dans la cathédrale (1). Cette dignité est
conférée par Tévéque ; elle a sa place dans le chœur auprès du chantre.
Voici les noms de ceux qui furent appelés archidiacres de Puisaye.
Le premier fut :
GuitLAUME surnommé de Dezize, dans le Nécrologe de l'abbaye de
Saint-Laurent, au 26 août. 11 est déclaré présent dans le testament que
la comtesse Mahauld dressa, en 1257 an mois de juillet, & Coulanges-
sor-Yonne (2).
Geoffroy, nommé comme archidiacre vivant vers l'an 1260, h la fin
des additions faites à un Nécrologe de la cathédrale, touchant la desti-
nation des cinquièmes prébendes de la même église.
Miguel de Vermenton, est nommé archidiacre de Puisayc dans le car-
tulaire du Chapitre d'Auxerre, à l'an 1276, dans un titre de Saint-Ger-
main de 1279. <c Ârchidiaconus in ecclesia Âutiss. » dans Tacte
d'hommage du comte de Flandre en 1281 (5), et enfin dans l'acte par
lequel il donna en 1285 des prés a Parly, pour la distribution des
heures quotidiennes (4).
GiSLES DE Sarmoise, archidiacrc de Puisaye, nommé en qualité d'ar-
bitre dans des titres de Saint-Père et de Saint-Marien en 1507 (a). Il
fut exécuteur du testament de Guillaume de Chailly, chanoine d'Âu-
(1) Vo^. les Preuves, n.341 et 437.
(î; Foy. Preuves, t. iv.
(S) Foy. Preuves, n<» S28.
(4) CartuL CapU., fol. 111.
(a) Il assiste comme témoin, dès Pan 1304, à la sentence prononcée par arbitres
dans le couvent des Frères mineurs d'Auxerre, par laquelle les habitants de Préhy
furent obligés à payer un droit de maréchaussée sur certaines terres et maisons. —
F. Ponligny. Arch. de l'Yonne. - {N. d. E.)
460 ARCHIDIACRES DE PCISAYE
xerre. Le Nécrologc de Notre-Dame de la Cité moi au 1" juillet ;
a Obiil magister iEgidius de Sarmesia arcbid. Auliss. »
GoDEFROY DE Briançon, Doble dauphinois, mentionné dans les titres
de Pontigny comme archidiacre k Auxerre, les années 1515, 1514 et
1315.
Raoul Chbvenau, archidiacre de Puisaye présent, lorsque le Chapitre
donna à Tévéque Pierre des Grez la tête de saint Amatre pour Ten-
chasser, suivant le billet de ce temps-là qui est dans la chasse derrière
le grand -autel. Il est aussi nommé dans le cartulaire à Tan 1522 et
1525 (1). Il présidoit au Chapitre le 15 juillet 1527, lorsqu'on y per-
mit Il Pierre de Mortemar, évêque, de couper cent arpents de haute fu-
taie dans les bois de Varzy (2).
Gautier de Rouvre, fut archidiacre de Puisaye pendant sept ans et
davantage, qui finirent vers Tan 1540, selon les litres de Pontigny.
Ainsi il avoit été pourvu en 1555.
Hugues de Mont-Rieu ou Mopit-Rive, étoit archidiacre de Puisaye
quand le pape Clément VI Félevaau cardinalat sous le nom de Saint-Lau-
rent inDanuuo. Il ne quitta point son archidiaconé , mais il élablil
pour son vicaire-général Guillaume» curé de Suinlille au diocèse de
Bayeux, qui eut pour vice-gérant en 1545, Humbcrt de Salemari,
chanoine d*Auxerre. Il mourut le 20 septembre 1560.
Louis Balbet, archidiacre de Puisaye, fut présent h Paris en 1 504,
b Thommage de Chàteau-Censoir fait à Tévéque Pierre Ayinon |)ar le
sieur de Freloy. Ilfut aussi présentau chapitre de Saint-Germain, le 5 août
1566, quand on rendit aux religieux les reliquaires engagés depuis sept
ans aux Anglois pour la rançon de la ville. Du Tillcl le marque la
même année, lui ou son vicaire présent, le 25 décembre, au conseil du
roi, lorsqu'on traita de modérer l'apanage de Philippe de France, duc
d'Orléans.
Pierre de CuissY, qualifié archidiacre de Puisaye en V église d*Auxerrc,
dans un compte de la ville pour Tan 1575, à l'occasion du don qu'on lui
(I) Fo/. 306 et 598. j 2, Toy Preuves, ir i77
EN l'église d'auxerre. 461
fit, h cause des peines^qu'il s'éloit données en cour de Rome, pour faire
red/enir k Tabbaye de Saint-Germain des joyaux emportés dans le temps
des guerres. Il est aussi connu par la donation qu'on lui (it , en 1585,
d'une vignée située au Bouckeau, laquelle il céda depuis h la chapelle
de Toussaint dans la cathédrale. Il fut fait doyen en 1590.
Jean de Vitry paroit lui avoir succédé, selon ce qui se lit du suivant.
Les registres du Chapitre sont environ vingt ans sans rien fournir
sur l'archidiacre de Puisaye, ni même sans en faire mention aux Cha-
pitres généraux, apparemment parce qu'il n'étoit pas chanoine. On y
trouve seulement que ce Jean de Vitry prit possession personnelle do
son archidiaconé le 5 avril 1599 après Pâques, et même d'un canoni-
cat qu'il abandonna depuis, puisqu'il ne fut reçu que le 26 avril 1415
à celui de Jean de Chanieprime, doyen de Paris. Au 1®' octobre 1414,
il fut tenu présent per priviL régis.
Guillaume Bude qui avoit une expectative de Jean XXIII, fut reçu
le 5 juillet 141 8 h cette dignité, vacante par la mort de Jean de Vitry, et
ne la garda pas deux mois.
Pierre Rebrachien, pourvu par l'évêque, fut admis il la même dignité
le 51 août 1418. On le trouve nommé dans un titre de l'an 1427:
Jean de Molins. La perte des registres de plusieurs années, empêche
qu'on ne puisse désigner le temps de sa réception. Mais selon un titre,
ilétoit archidiacre dès l'an 1455. Il est aussi nommé en 1458 dans une
transaction du Chapitre avec Pierre deLongueil, évêque. Son testament
de l'an 1464 nous apprend qu'il étoit natif de Neuf-Fontaines, proche
Monceaux, au diocèse d'Âutun. Il mourut le jour de Noël de la même
année.
Etienne Gerbaud, déjà chanoine depuis le 9 juin 1464, fut pourvu
de Tarchidiaconé de Puisaye. Il étoit d'une des plus anciennes familles
d'Âuxerre. Il résigna au suivant.
Pierre de Longueil, neveu de Tévêque du même nom, fut reçu le
9 novembre 1465 à la dignité d'archidiacre qu'Etienne Gerbaud lui
avoit résignée. 11 étoit au Chapitre général du 1®' octobre 1466 parmi
les sous-diacres. Du reste il résida peu : je le trouve au 12 mai 1469
462 ARCHIDIACRES DB PUI8ATB
occupé il Paris aux affaires du Chapitre. Il revint à Auxerre ^ la mort de
son oncle en 1473. MM. de Sainte-Marthe se sont fort trompés dans le
Gallia Christiana^ page 525, t. ii , en assurant que Tévéque Pierre de
Longueil avoit créé Tarchidiaconé de Puisaye pour son neveu ci-dessus
nommé, puisqu'il y avoit déjà eu avant lui quatorze ou quinze archi-
diacres de ce nom.
Guillaume Ragonneau ou Ragonnel étant chantre de Gien fut reçu
chanoine d'Auxerre l'an 1479 (i), et comme il possédoit la cure de
Neuvoy, il la permuta en 1482 avec Pierre de Longueil qui tendoit à
devenir grand archidiacre. Il fut arbitre, le 4 novembre 1490, dans une
affaire qui regardoit les chanoines de Cosne (2). De son temps, c'est-à-
dire en 1495, fut donné un arrêt en parlement qui ordonnoit que l'ar-
chidiacre de Puisaye entendroit les comptes de fabrique de Gien, et non
les officiers du comte (a).
Odard Hennequin, né h Troyes vers Fan 1 484, et frère de Jean Hen-
nequin, grand archidiacre, paroi t avoir été reçu archidiacre de Puisaye
vers Tan 1505, car dès Tan 1506 il reconnut par devant Masle et Ar-
mant, notaires, devoir au Chapitre d'Auxerre 40 sols de rente annuelle,
pour le patronage de la cure de Mézilles annexée à sa dignité. Il est
nommé, en 1509, dans la publication de la coutume de Troyes, par Thi-
baudBaillet. Il reçut, le 28 avril 1520, arrivante Auxerre, les présents
de la ville. Le procès-verbal du ressort du bailliage d'Auxerre dressé en
1525 fait mention de lui. Je lis dans un recueil d'actes sous l'évêque
Baillet, vers la fin du volume, une saisie du temporel d'Odard Henne-
qnin, archidiacre de Puisaye, parce qu'il ne vouloit pas prêter h cet
évéque le serment de fidélité. Il permuta son archidiaconé avec le sui-
vant l'an 1527« La même année il fut nommé à l'évéché de Senlis.
Louis de la Loue, ci-devant chapelain de Sainte-Magdeleine dans
l'église de Saint-Hippolyte de Bourges, fut reçu archidiacre et chanoine
(1) Excomp, I (-2) ExCartuL Ep. Àutiss.
(a) Il claît encore nrchkliacrc en 1496. {N. d. E.)
EN l'église d'auxbrre. 465
le 4 mai i527 (i). Il passa, le 7 mai 1555, par devant Fauchoi , re-
coDDoissance des 40 sols dus au Chapitre pour sa cure de Mézilles.
Louis Bride prit possession le 1 7 avril i 558, en vertu de permuta-
tion avec le précédent, et mourut en 1559 au mois de décembre (2). Il
fut inhumé sous le portail de la Visitation qu*il avoit fait faire ; c'est
celui où est aujourd'hui représentée la Résurrection, proche les orgues.
Charles Grillet fut pourvu par Jean Ferrand, archidiacre de Sens
vicaire-général de l'archevêque, le 20 décembre 1540, attendu la trop
longue vacance depuis la mort de Louis Bride, et il fut installé le 51 .
Il est qualifié archidiacre de Puisaye dans la transaction du Chapitre
avec les religieux de Saint-Germain, pour les limites de Crevan et
dlrancy, le 5 décembre 1545, et dans le procès-verbal de la coutume
d'Âuxerre dressé en 1561. Il avoit con^paru longtemps auparavant &
celui de la coutume de Troyes, comme simple député du Chapitre.
Martin Rousseau du diocèse de Bourges, reçu chanoine dès le 20
septembre 1558, avoit eu comme gradué des provisions de Tarchidia-
coné de Puisaye , expédiées par le même Jean Ferrand ci-dessus nommé,
en date du 5 février 1559, mais il ne s*en étoit point aidé, surtout étant
devenu chanoine et chantre de la Sainte-Chapelle du palais. Cependant
dans Tété de 1564 il fit valoir son droit, et ayant apporté un arrêt du
parlement du 26 mai 1564 qui l'assuroit, et qui invalidoit toutes les
conventions que Charles Grillet avoit faites avec lui, il fut reçu et installé.
Mathubin Benard, chanoine, prit possession, le 26 novembre 1569,
de l'archidiaconé qui vaquoit par la mort du précédent.
André d'âssignt, derc auxerrois, fut reçu le 22 mars 1572 au cano-
nicatet à Tarchidiaconé de Mathurin Benard, et paya 40 sols pour le
patronage de la cure de Mézilles. Il mourut le 14 octobre 1575, et fut
inhumé au milieu de la nef de la cathédrale.
Jean de Bourneaux, sénonois, succéda au précédent, et prit posses-
sion des deux bénéfices le 8 mars 1574. II fut fait diacre à Paris le 10
avril suivant, par Pierre de Gondi. Il y étudioit encore en 1577. Il éloit
neveu de Jacques Àmyot, évêque.
(1) Ex Regiatr. capituli. | (î) Ex Comp. Fabr.
4
464 ARCHIOUCBES DE PUISAYE
François Pestele, prêlrc du diocèse deNoyoo.fui reçu, le 15 sep-
tembre 1579, à l'archidiacooé qu'il avoit permuté avec le sieur de
Bouroeaui, pour le prieuré du château de Herle, diocèse de Laoo (I).
Pierre Thio!< fut reçu archidiacre de Puisave le 16 décembre 1585
et iostallé par Droio Chaucuard, sous-chantre. Il est qualîGé prêtre
seooDois, et est dit avoir eu ce béoéfice « perobitum Johanois le Sage. »
Il mourut le 3 février 1592, et fut inhumé dans la nef vis-à-vis le cru*
ci6x. Il étoit aussi chanoine. Il avoit résigné sa dignité à Pierre Beraait,
mais cela fut sans effet.
Regnauld Marti!!, pourvu par Tévéque Amyot dont il étoit secrétaire,
et déjà chanoine depuis le 27 novembre 1580, fut reçu le 7 février
1592 à Tarchidiaconé de Puisaye. Il étoit du diocèse de Laogres et y
posséda la cure de Larey. Dans un placet qu'il présenta à Henri III en
1588, pour avoir le canonicatde la cathédrale de Lisieux dû au roi par
Jean de Vassey, nouvel évéque, il se qualifie sommelier et clerc de cha-
pelle ordinaire en l'oratoire du roi. Il étoit aussi licencié en médecine. Il
quitta sa dignité en i 601 • Etant mort fort âgé, à Auxcrre, le 29 septembre
1621, il fut inhumé dans la nef de la cathédrale. Il fit faire un des
vitrages du fond de la chapelle de Saint-Alexandre où est représentée
rhistoire de Job; son nom s'y lit encore.
Gui CoTiGNON, clerc et chanoine de Nevers, prit possession de Tar-
chidiaconé de Puisaye , et fut installé par le sous-chaclre le 22 dé-
cembre 1601 (2). Il fit ensuite passer cette dignité à Guillaume Fouquet
dont le suivant la tint (a).
Jea!« Prévost, prêtre parisien, se présenta au Chapitre le 22 février
1615, comme pourvu sur la démission de Guillaume Fouquet.
Barthelemi Malo eut Tarchidiaconé par permutation pour un prieuré
^1) On troQve dans les registres du Chapi-
tre, au 10 février 1584, qu'un nommé Jean
Becdoisy avoit dès lors résigné cette dignité
il Jean le Sage. Ces deux derniers posses-
seurs furent tnî's-peu de lemps titulaires,
et ne mérilcnl pas d'articles pari icu Hors.
'X Ex Registro.
(a) 11 prêcha le carême de Vannée 1607, à Tonnerre . cl reçut pour cet oflice
150 liv. d'indeinnilé. -V. d. E.
CN L*ÉGLI$B d'aUXERRE. 4G5
de Saîntc-Callicrinc dépendant de Saint-Faron de Meaux. Sa réception
se fit le 29 octobre 1618 et son installation par le sous-chantre. Il étoit
parisien, docteur de la maison de Navarre (a). Il mourut le 2 octobre
1658, et fut inhumé dans le chœur devant la place des archidiacres de
Puisaye, ainsi qu'il Tavoit demandé. Il possédoit aussi la chapelle de
Sainte-Agnès.
Claude le Clerc étant trésorier de Téglise cathédrale, fut pourvu
de Tarchidiacoué de Puisaye et en prit possession dès le 5 octobre
i638. Il eut un compétiteur nommé Georges Jubert, après la mort
duquel, arrivée en 1 641 , il se fit recevoir encore une fois par abondance
de droit le 4 de mai ; et il posséda cette dignité jusqu'en 1647 ou
environ.
ANDRÉ Percheron se trouve qualifié archidiacre de Puisaye dès
Tan 1647. Il conserva cette dignité jusqu'à Tan 1680 qu'il mourut
âgé de 90 ans. Il étoit manceau, et avoit été auparavant grand archi-
diacre.
Claude Chrestien, natif d'Âuxerre, docteur de Sorbonne et chanoine
depuis le 2 août 1660, fut reçu archidiacre le 25 mai 1680. Il est
mort le 5 janvier 1712.
Augustin Ferreol àrchambault, natif de Saint-Fei^eau, au diocèse
d'Âuxerre, nommé archiprétre de Puisaye en 1708, a pris possession
de l'archidiaconé le 25 janvier 1712.
* Il fut grand vicaire et oiBcial de M. de Caylus. Etant à Paris en
1749, il mourut privé des sacrements, ayant opiniâtrement refusé de
se soumettre à la bulle.
* Pierre Jacques Dettey du diocèse d'Âutun, prieur de Beauche en
1754, fut nommé archidiacre le 18 juillet 1749.
Il est l'auteur d'une Vie de M, de Caylus en 2 volumes in-12. Il est
mort dans sa dignité le 9 février 1775.
* Delart de Campagnol, licencié en théologie, succéda à M. Deltey
le 26 février 1775. Il était encore archidiacre en 1789.
(a) En 1632, il avait voulu permuter avec M. Lemuet, doyen; mais M. Amyot
remporta pour le doyenné. — Rég. de délibér. capitul. {N. d. E 1
Il 30
viOO SCOLASTIQUBS ET PÉNITENCIERS
SCOLASIIQUES DE LËGLISE D AUXEKKE, DITS DEPUIS
PÉNITENCIERS
Le scolastiquc ou écolâtrc dans les églises calhédralcs, éloit le maître
des écoles du clergé, autrement dit précepteur. Quoiqu'il y en eût dès
le temps de la première race de nos rois, ces maîtres ne devinrent dignes
d'une plus grande considération, qu'après que Cbarlemagne eut établi
les écoles dans les monastères mêmes. Pour lors celles d'Auxerre de-
vinrent des plus célèbres, h cause de l'émulation qui se forma entre les
maîtres do Tabbaye de Saint-Germain et ceux de la cathédrale. Saint
Héribald, évéque sous Louis-le-Débonnaire, fit venir h Auxerre des
savants qu'il appela de tous côtés. Charles-le-Cbauve envoya au mo-
nastère de Saint-Germain son fils Lothaire pour y être élevé sous la
discipline du savant Héric. Hugues de Vermandois, filsd'IIéribert, comte
d'Aquitaine 9 fut pareillement envoyé dans le siècle suivant aux écoles
de l'église d'Auxerre, et il y demeura plusieurs années (f ). Le seolas-
tique d'Auxerre fut choisi sur la fin du x^ siècle parmi les plus savants
hommes pour défendre la cause d'Arnoul, archevêque de Rheims, et
même toujours nommé le premier avant les abbés qu'on lui associa.
Dans le temps que les évêques cessèrent d'enseigner par eux-mômes ou
de veiller en personne sur leurs écoles, l'archidiacre fut celui sur lequel
ils se reposèrent : d'où lui vint la nomination de l'office d'écolâtre ou
de précepteur, et celle du lecteur dont les fonctions avoient aussi du rap-
port avec l'instruction de la jeunesse. Lorsque lo revenu en fut diminué,
personne ne l'acceptant plus, l'évéque de Seignelay la dota de nouvean
vers l'an f âlO, s'en retenant la nomination. Gui de Mello lui attacha en
1249 la fonction de chapelain de l'évéque, et lui donna dix livres de re-
venu sur l'église de Betry, proche Vermenton. Comme parmi ces fonc-
tions étoient celles qui regardent la pénitence et les pénitents , ce fut
de Ih que se forma peu b |>eu le nom de pénitencier, qui éclipsa celui de
1 FlodoaixJ, lib. t<. c. ^0.
DE l'église d'alxerre. 407
scolasliquc, d'autant plus facilement que les fonctions du tribunal
ëtoientplus fréquentes que celles de la présidence aux écoles. L'évéque
Erard de Lesignes ajouta encore dix livres de revenu \k Técolàtrerie
vers Tan 1275. Pierre de Bellepercbe y réunit en 1507 la chapelle de
Saint-Germain. Jusqu'alors le nom de pénitencier n'étoit pas d'usage
dans les titres. Il ne fut introduit que dans ceux par lesquels une des
cures du diocèse fut unie h ce bénéfice. Les évéques se sont réservé
la collation de cette dignité, dont la place dans le chœur est auprès de
Tarchidiacre de Puisaye.
Alagus est le premier maître de Téglise d'Auxerre qui soit connu de-
puis le rétablissement des écoles fait au ix^ siècle. Il vivoit en 875 et
880 : ce fut lui qui, avec le chanoine Rainogala et le moine Héric, rédigea
en un corps les gestes des évéques d'Auxerre jusqu'à son temps. Il mou-
rut le onzième jour de janvier où le plus ancien Nécrologe annonce ainsi
sa mort : c Obiit Alagus Magister. d
Voici ceux qu'on peut placer après lut, tirés du même Nécrologe :
Arnaud. Il est annoncé dans le Nécrologe au 1 6 janvier en ces ter-
mes : c< Obiit Arnaldus Diaconus et Magister. »
Adelbaud est dans le même livre au 5 octobre avec cette annonce :
« Obiit Adelbaldus sacerdos et Magister hujus ecclesiac. »
Jean, scolastique et maître de Téglise d'Auxerre, fut le premier des
trois défenseurs d'Arnoul de Rbeims, dont il est fait mention aux con-
ciles de Saint-Basie et d'Orléans, et dans Flodoard en son Histoire de
Rlieims ; il vivoit en 990. IL ne se trouve pas marque en qualité de maître
ou de scolastique dans le Nécrologc du onzième siècle d'où je puise les
autres, parce qu'il fut fait évoque d'Auxerre Tan 995 et qu'il s'y trouve
en cette qualité.
Odon ou Eudes est qualifié précepteur dans le Nécrologe, ce qui est
équivalent au titre de maitre. On y lit au 16 août: u Ipsa die OdoPraB-
> ceptor S.-Stepbani prxsentem finivit vitam. »
GiRBERT paroit être le plus nouveau des maîtres auxerrois marqués
dans le Nécrologe primitif. Son article au 4 mai est conçu en ces
termes : a Eodem die Girbertus levita etpreceptor et abbasS.-Eusebii
» corpus lumulo , animamque reddidit Christo. » En ces temps-lli
■
4C8 SCOLASTIQUES ET PÉNITBIICIERS
c etoil un chanoine de la cathédrale qui étoit abbé de Saim-Eosèbe.
Hugues éloii précepteur dans le Chapitre d'Auxerre PaQ 1 100 ,
sousTévéque Hnmhand, suivant la matricule des chanoines dressée ea
ce temps-la (I).
Gisi^BERT étoit dans le clergé d*Auxerredès Tan iilO, suivant on
acte de Pabbaye de Fleury. On infère qu'il fut maître des écoles, de
la qualité de magister qui lui est toujours attribuée, et de ce qu*ootre
sa science parfaite dans l'Ecriture sainte, ses autres connoissances loi
firent donner le surnom d'Univenalis. Il avpit aussi été trésorier de
Nevers, selon un Nécrologe de cette église. Il fut élu évéque de Liondres
en 1127. Il y a apparence que ce fut pendant qu'il brilloit lu Aaxerre,
que saint Thomas de Cantorbéry y fit quelques études de droit, comme
Jean de Sarisbéry Ta écrit dans la vie de cet archevêque. Il est au Nécrologe
par addition an 12 août.
Comme il est très-certain qu'il y avoit longtemps que l'écolâlrerie
étoit vacante lorsque Guillaume de Seignelay fut fait évéque au com-
mencement du xut® siècle , de là vient qu'on ne trouve point de titu-
laire dans les chartes du xii® siècle.
HuMBAUO Bastonnier pareil être le premier qui fit revivre le titre
de scolastique lorsque le revenu en eut été augmenté vers Tan 1210.
Son obit est marqué le 8 février dans TObiluaire de 1250. II y est
qualifié diacre et dit avoir donné une maison : « Ob. Humbaudi
» Bastonarii, hujus ecclesie scolastici et lévite. »
Mathieu de Migny vivoit en 1256, auquel an le Chapitre lui vendit
à vie une maison qui venoit de feu Jacques, chantre d'Auxerre (2). Il
n'étoit aussi que diacre. Il mourut le 28 décembre. Son obit est ainsi
annoncé dans l'Obituaire de 1250 : a Ob. Matthci scolastice et lévite,
D qui dédit nobis vineam suam de Moreto (5) , et prata sua de
)> Culliaco. »
Etienne de Mëz, chanoine et scolastique d'Auxerre, est connu par
le testament de Garnier de Saint-Renobert (4), aussi chanoine de la
(1) Voy. Pi-euvcs, n. 17.
i) Cartul.Capit,,îo\.9G.
(3; Jforemm, Morot, près Auxerre et Cuply.
^4) Car t. Cap.J. 96.
'\jjf ï. --. .» i!*i.' ..iW J
DE L ÉGLISE D AUXERRE. 409
même église donl il fui excculeur avec frère Pierre de Mailly, sous-
prieur des Jacobins, selon un acte de 1265.
Vincent, scolaslique d'Auxerre, fonda la chapelle de Sainl-Vincenl,
au cloître. Il n'esl connu que par là. On ne sait point précisément
Tannée de cette fondation. Il entra ensuite dans l'Ordre de Saint-
Dominique, comme quelques autres dignitaires d'Âuxerre (1).
Guillaume le Cerf, chanoine d*Âuxerre, se trouve présent en 1296,
à l'hommage rendu à Tévéque d'Âuxerre par Louis, comte de Nevers (2).
Il est pareillement témoin, en 1504, àTabbaye de Saint-Julien-lez-
Auxerre, dans Taccord du Chapitre avec les gens de Chichery, dont
le même prélat donna acte en ce lieu. Il y est désigné ainsi : GuilUlmus
Cervi scolasticus (5). Sa mort est marquée au 6 novembre dans le
Nécrologe de Notre-Dame-de-la-Cité.
Guillaume de la Ripe, sorti de Tancienne et noble famille de ce nom,
au diocèse d'Auxerre, fut l'un des exécuteurs du testament de Pierre de
Mornay, évéque, mort en 1506.11 est qualifié scolastique dans l'acte de
réunion de la chapelle de Saint-Germain h Técolâtrerie de l'an 1507,
et l'évéque Pierre de Belleperche l'en investit en lui donnant son anueau.
Depuis ce temps-là, il se trouve nommé dans les partitions du Chapitre
du 1^' mai 1512, aussi bien que dans la procédure du prieuré de Saint-
Eusèbe contre Guillaume Meschin, dont il fut arbitre en 1515. De plus,
il est nommé dans le registre du dénombrement des fiefs du comté
d'Auxerre^ aux années 1515 et 1516, pour ce qu'il possédoit ii
Courson.
Michel de Villebrehe est qualifié scolastique et chanoine dans un
titre du cartulaire du Chapitre de Tan 1524.
Jean de Yernot est mentionné comme scolastique d'Auxerre dans le
Nécrologe de Nolre-Dame-de-la-Cilé. Il vivoii en 1542, selon un acte
qui regarde une image du roi Jean (4).
Jacques Clément se trouve nommé avec le litre de pénitencier, dans
un traite de 1557. C'est l'acte d'accord entre l'évéque Jean d'Auxois et
•1) Ci-dessus, pag 132.
•2) Voy. Preuves, n" -217.
l.T Cartui Capit , fol. Wî
(4) Voy Preuves, i. iv.
11
470 SCOLASTiQUES ET PÉ2IITBNCIBRS
\e Chapitre, touchaot les droiis de justice. Ce fut lui que ce prébleo
investit au nom du Chapitre. Son anniversaire se célébroit au mois de
mai, dès Tan i569.
Jean I/Asne porte le titre de pénitencier dans un compte de Fae
4569. Un autre monument de Tan i587 parle de lui comme étant alors
décédé. Comme ces titres sont en latin, son nom y est exprimé par
Johannes Asinif le surnom étant au génitif, selon Tusage de ce temps-là.
Pierre Boileau étoit revêtu du titre de pénitencier au moins dès Tao
4589. Mais il ne vécut pas longtemps après, et il mourut Tannée sui-
vante qui est celle de la date de son testament, dont une expédition de
1391 le déclare mort. Il avoit désigné sa sépulture dans la cathédrale,
nu bas des degrés du chœur qui conduisent h la sacristie ; et il vonloit
que le célébrant et ses ministres s'arrêtassent tous les jours sur sa tombe,
pour y prier en retournant de Tautel. Il descendoit des Boileau de Paris,
déjh connus du temps de saint Louis.
Etienne Maguin ou MauguincsI reconnu pénitencier dans les registres
du Chapitre de Tan 1597 (a) et i598, au 18 mars. On lui donne aussi
la même qualité à la clôture du compte des deniers publics de la ville,
k laquelle il assista en 1400. Il s'adressa au pape Benoit XIII, lui mar-
quant la modicité de son revenu, qui n'alloit pas k 10 livres, outre sa
prébende. Ce pape accordai Tévêque Michel deCreney, en 1409, de
lui réserver 100 livres sur quelque bénéfice vacant ou prêt à vaquer.
Son mérite le fit choisir la même année pour présider au Chapitre, à
cause que le doyen étoit devenu sourd, et il fut installé pour cet effet,
entre le doyen et l'archidiacre, le 2 mai. Il mourut le 10 novembre
1412.
Jean Piqubron, se faisant recevoir pénitencier, prclendoit ne point
devoir de droit ; ce qui fut réglé par la suite. On le trouve présidant aux
Chapitres généraux de l'an 1414, pour Tabsence des autres dignités. Il
mourut au mois de janvier 1418.
Jean Prevostat fut pourvu, le 19 janvier 1418, de la pénitencerie.
(a) JI figure dans un aclc testamentaire de 1396, de Jean d'Ormoy, ancien cha-
noine d'Auxorre. (iV d. E,)
■4,r
t y.-^.i k(if.«.4
DE l'église dauxekre. 47 i
D'élaul quechauoiDC de Nolre-Damc-dc-la-Ciié, secrétaire et coiunieiisal
de Tévéque Philippe des Essarts. Il s'éloit mis en règle, avant sa ré-
ception, sur le droit qu'il avoit voulu disputer à l'exemple de son pré-
décesseur; et il se fit recevoir deux jours après, savoir le 24 juillet
14i9. Ce fut lui que l'archidiacre attaqua, en 1425, sur des droits
honorifiques. Il mourut pendant l'hiver de Tannée i428, puisqu'au 10
janvier il est fait mention de la vente de sa maison, comme vacante par
son décès.
Jean Guesdat fut reçu à la pénitencerie après la mort du précédent ,
selon un compte de fabrique.
Jean Macvoisin étoit pénitencier en 1458, selon un hail à vie du 9
novembre, d*un bien dépendant de la chapelle Saint-Germain annexée à
sa dignité.
Jean Comin, en qualité de pénitencier et chanoine, signa la reddition
d'un compte de la maladrerie de Sainte-Marguerite, proche Auxerre,
Tan 1445. Il fut député la même année avec son prédécesseur, qui étoit
devenu trésorier, pour faire un traité avec les habitants d'Âuxerre. Il fut
gouverneur ecclésiastique de l'hôtel-de-ville, en 1446 (1), et parolt
cette année a la tête d'un accord des bourgeois avec les vignerons sur les
travaux des vignes. Il avoit été autrefois trésorier du Chapitre de Notre-
Dame-de-la-Ciié.
Jean de Pernant étoit pénitencier dès Tan 1450. Il a cette qualité
dans la note du fabricien, au sujet du droit de chape qu'il paya cette
aDnée pour sa réception à une prébende canoniale. On lit de lui ce qui
suit, dans un compte de la ville (2) : « A Jean Riote sergent xx sols
» pour avoir mis à exécution certain cas de nouvelleté prins et obtenu
» au nom des habitans contre le pénancier d'Aucerre, maître Jehan
> Prenant, h cause de certain droit qu'il vouloit lever et exiger sur les
» enfans étant à l'école dudit Auccrre, conlre lequel exploit les doyen
» et Chapitre d'Âucorre se sont opposés, et est le procès pendant par-
» devant le bailli d'Aucerre. » Mandement et quittance, mars 1455. Il
quitta la pénitencerie quelques années après, réservant sa prébende sans
:V. Cartul. i'rbis, fol. 51 I \^' Comp. Job. Quoquarl, UôJ.
47:2 SCOLASTIQUBS BT PÉNITBNaERS
résider, ainsi qu*il paroll au I*' octobre 1459, où il est qaaliSé aumdflîer
da roi. Le Nécrologe de Notre-Dame-de-la-Glé fait de lai un grand
éloge au... avril : c Obiit magister Johannes Peroand canonicus ecde-
» sic Auiiss. confesser el eleemosynarius Domini t:oslri régis Karoli
» YII. » On ajoute qu'il avoit donné 52 écus d^or pour y fonder son
anniversaire. Pernand, dont il tiroil son nom, est un village proche
Soissons. Il étoit, en i468, chanoine de Saint-Martin de Toors, et
prévôt de Vacerna dans cette église, lorsqu'il permuta sa prébende
d'Auxerre pour une chapelle dans la collégiale de Sainl-Venani de
Tours.
GuiLuiuHE Pioif , natif de Crevan, selon Pacte de sa récepiion ^ oo
canonicat du 9 août 14i9, fut fait pénitencier vers l'an 1455 ou 1456.
Il parolt sous ce tilre dans le traité que le Chapitre fit en 1458, le 8
novembre, avec Tévéque Pierre de Longueil. Il mourut au commence-
ment du n^oisd^avril 1464.
PiBRRB DBS Portes, prêtre, maître ès*arts, bachelier ès-lors et eba-
Boine d^Auxerre, cousin de l'évéque Pierre de Longueil, eut des provi-
sions de la [>énitencerie le 22 août 1464, et ne se fit recevoir que
durant Tété 1466. Ce qui fit que Pierre de Longueil, évéque, conféra
la même année la rectorie des grandes écoles, la pénitencerie étant va-
cante. Il est qualifié archiprêire d'Auxerre dans un acte du 2G juin
1454 (1). Il étoit secrétaire de Tévêque ou scelleur, en 1455 et
1459 (2) ; il continua de demeurer avec lui comme il paroit par son
privilège au \^^ octobre de toutes les années suivantes, et fut son exécu-
teur testamentaire. Il avoit en 1488 un procès louchant un pré dépen-
dant de la cure Saint-Amand attachée \k sa dignité, lequel fut réglé par
arbitres le M juillet. Il vécut apparemment jusqu'en 1495, qui est Tan-
née où on lui trouve un successeur.
Jean Sauuot, natif de Cosne, au diocèse d^Auxerre, fut reçu a une
prébende et h la pénitencerie en 1495 (5). 11 résigna sa dignité en 1512
au suivant, et fut reçu doyen.
(I) Voy. Preuves, n. 3G8. l [II] Ex Camput.
(i) Ibid., n. 369 cl 374. !
DE l'église d'auxerre. 475
Pierre Sauuot, parent du précédent, fut reçu le 25 mai 1512 h la
dignité de pénitencier. Par un titre de 1526, il paroU qu'il attaqua
Jean le Roy de Prêtre, maitre de la petite école de Saint-Père, a cause
qu'il ne tenoit pas de lui son institution. Il agissoit le 8 juillet 1528,
comme curé de la paroisse de Saint-Âmand, annexée à sa dignité contre
Pierre de Piles, chanoine et curé de Treigny. Dans l'acte capitulairc qui
fait mention de sa mort arrivée le 24 août 1557, il est qualifié curé de
Fulvy et annexes, savoir : Yilliers-les-Hauts et a Meruriacum. > Il avoit
aussi été trésorier de Notre-Dame-de-la-Cité.
Etienne le Muet, prêtre, licencié ès-lois, prit possession du canonicat
et delà pénitencerie, avec la cure de Saint-Âmand, son annexe, le 4 sep-
tembre 1557, par provisions du 24 août, datées de Régennes. Il résida
peu sur la fin de sa vie. Il étoit encore pénitencier en 1561, selon le
procès-verbal de la coutume. Il lut quelque temps prieur d'Andrie. Il
étoit seigneur de Corbelin et autres lieux, et fut Tun des plus riches
ecclésiastiques de son temps. J'ai vu des copies de baux qu'il fit eu
1559 et 1556, de quelques pièces de vignes situées au finage d'Âu-
xerre, lieu dit Cry, dépendantes de la pénitencerie (1). Il mourut le
6 novembre 1566, et fut inhumé devant la chapelle du pénitencier.
Gaspard Damy Fainé, du diocèse do Châlons, déjà chanoine, ofltctal
et vicaire-général de Tévêque, quitta la leclorie pour la pénitencerie
dont il fut pourvu par M. de Macheco, vicaire général , le 2 décembre,
1566. Il mourut le 6 janvier 1575.
Jacques de la Halle, prêtre du diocèse de Langrcs, docteur de
Paris, déjà chanoine théologal depuis l'an 1550, ou environ, fort
connu par ses missions contre les novateurs, fut reçu le 14 février
1775 h la pénitencerie. Il fut aussi curé d'Oisy. J'ai vu la copie d'un
titre du 19 novembre 1575, ou il est nommé à cause d*une vigne de la
pénitencerie située en Morot. Il décéda le 14 décembre 1575. On l'ap-
pelait vulgairement de Aulay ou notre maître de la Halle (2).
^1) Exlibro Chaucuard succent,
(2) Du Boullay, l. vi, Hist. Univ. Paris,
p. 012. a remarqué que ce furent ses éco-
liers, au collège de Navarre, qui lui chaiv-
474 SCOLASTlUUEb ET P£3llT£3iClECS
EiiEH^E B£s?(iER, [irêlre <lu diocèse du Mans, docteur de Pisiris,
succéda au |)récédent dans la ibéologale el péniieDcerie, ayant ea des
provisions de M. Amyot datées des Quinze-Vingts le 28 décembre
1575, et fut reçu le i8 juin 1576 ; mats il en fit démission dès Tannée
suivante.
Denis Perro^tnet, natif de Melun, fut le successeur d*Edme Besnier.
Etant entré dans TOrdre des Carmes, il s'étoil fait passer docteur en
théologie. Il devint habile prédicateur, et fut théologal à Périgneux,
d'où il se retira dans le temps du massacre de levêque Pierre Four-
nier, etvint trou ver Jacques Amyot, évéqne d'Auxerre, son compatriote,
qui le pourvut du canooicat et pénitencerie vacante par la démission do
précédent; il fut reçu le G septembre 1577, en exhibant un certificat
de M. Âmauld de Pontac, évéque deBazas, comme c'étoit avec la per-
mission du pape Pie V qu'il étoit sorti de l'Ordre des Carmes. On peut
voir ce qui est dit de lui dans THistoire deM. Amyot(l) dont il fut vicaire-
général. Il demanda en Chapitre, le 22 novembre 1602, que l'on con-
sentit à la désunion de la cure de Saint-Amand de la pénitencerie, |ionr
unir en place celle de Treigny, et il vint a bout de ce changemimt. Il
mourut à Auxerre en 1610. Outre ses sermons qui ont été imprimes à
Paris et ailleurs, en plusieurs temps, il fit imprimer à Auxerre en 1609
l'écrit d'Arnold, abbé de Bonneval, surPouvrage des six jours.
Edme Thierriat, fils de Gilles Thierriat, prévôt d'Anxerre, eut la pé-
nitencerie par résignation du précédent Tan 1009. Il fut gouverneur
ecclésiastique de riIôlcI-de-Villc en 1615 et 1014. Il posséda aussi
quelque temps la chantreiie de Noîrc-Dame-dc- la-Cité. Il quitta la péni-
tencerie en 1034, et accepta un canonicat de Varzy avec la chantrerie de
la même église. Il mourut en avril 16i2.
Pierre Roulé, prêtre du diocèse d'Amiens, docteur de Sorbonne
gùrenl son iiuoi de Bulaluigon en celui de . temhn* 1561. pour corriger et ahrâjcr U»
itw/a-.el qu'il obtint permission que c<? nom | ^larivrolojîe p.irticuiirr de la cathédrale,
lai restât. Baronius le cite cii ses Annales | avant qu'on lenrrixit.
sous ce in<^nie nom. Sa réputation le fit j i^ <.i-des>u< p l^'t.
choisir par le Chapitre d'Auxerre. le s >v\>-
DE l'église d auxbrrë. 475
parvint 11 la péoitenccric d'Âuxcrre par permutation avec le précédcnl,
et fut installé le 1^' juillet i654 (1). Il permuta au bout de deux ans
avec celui qui suil.
Pierre le Yenier, prêtre natif de Trou, au diocèse du Mans, licencié
en droit canon, qui avoit élé professeur de rhétorique à Paris au collège
de Navarre, étoit titulaire de la cure de Saint-Georges du Rosey dans
le Maine, qu*il permuta pour la pénitencerie d*Âuxerre, h laquelle il fut
admis le i5 septembre iG56. Etant fort dans le goût des embellisse-
ments, il fit peindre ainsi qu'on voit aujourd'hui la chapelle où le péni-
tencier exerce ses fonctions (2). Les nouvelles hymnes du bréviaire
d'Âuxerre de Tan 1670 étoient de lui. On n'a conservé dans celui de
1726, que celle qui commence par ces mots : a 0 novam pugnâ stupendâ
» martyris victoriam. » Il y a plusieurs de ses poésies dans les Recueils
de Mercier, professeur de Navarre. Il mourut à Auxerre le 11 octobre
1669, âgé de 85 ans, léguant à l'église tous ses ornements et vases
sacrés dont on so sert encore pour la messe de son anniversaire. ^1 est
inhumé dans la nef devant le crucifix.
Jacques Pavin, prêtre, neveu d'André Percheron, archidiacre de Pui-
snye et natif du diocèse de Tours, eut la pénitencerie aussi bien que le
canonicat du précédent par résignation en cour de Rome. Il fut installé
le 14 mai 1669. Il décéda en 1 694 le 51 juillet.
François du Pré, prêtre, fut reçu pénitencier le 14 septembre 1694.
Il en fit démission l'année suivante.
Jean Marie qui étoit lecteur, fut installé pénitencier le 11 août
1695. Il fut aussi vicaire-général d'André Colbcrt et de son successeur.
Il est mort en 1751 au mois de mai.
François Monnot de Mannay, né à Bagnaux près Donzy, chanoine
depuis Tan 1716, prit possession delà pénitencerie le 25 mai 1751, et
mourut dans leBerry le.... décembre 1752.
Pierre de Bourzes, prêtre du diocèse de Viviers, fut reçu péniten-
l) Le Mcnagiana fait meiilion de lui. 1 d'Auxerrr, paj;. 51 ci 5n.
{2) Voy. les Preuves de VHist de In pris<' !
476 SOUS-CHANTRES
cier le 20 décembre 1752, et csl mort le 5 décembre 1759. Il na
poiot élé chaDOtne.
Jkàn Edmb Baudouin, prêtre parisien, chanoioe de Tan 1735, a élé
installé pénitencier le 9 décembre 1759. Mort en 1749.
* Jban-Baptistb-Albéric Chevalier, prêtre du diocèse de Paris,
licencié en théologie, chanoine, fut pourvu de la |>énitencerie fiar
M. de Gaylusle 5 juin 1749, sur le refus de M. Contrastin. fl fui péai-
tencierjusqu*en 1755, année de sa mort.
* Louis-Marcel d'âtmard, prêtre du diocèse d'Orange, nommé
pénitencier le 24 juillet 1755 et installé le lendemain. Il fui vicaire-
général de l'évêque. Nommé grand-chantre de la cathédrale de Paris en
1775, il fui reçu chanoine honoraire de Sainl-Elienue quoiqu^îl n'eûl
pas 20 ans de canonicat.
* De ViLLiARD, prêtre du diocèse de Troyes, bachelier ès-loîs, suc-
cède h M. d'Âymard le G août 1772. Il était encore pénitencier en
1790.
*^^0^0^0*0^0^0^0^0é0^^^0^^*^^0^0^^t0^m
SOUS-GUANTRES DE LÊGLISE D'AUXERRE.
Quoique le sous-chantrc ne soit pas dignité dans réglisc d'Auxcrre,
mais seulement un personnat titré et non amovible , j'ai cru que je de-
vois placer ici le catalogue de ceux qui l'ont occupé depuis que l'on en
a connoissance, parce que cette fonction est celle du chantre même
sous une autre dénomination, en sorte même que le sous-chanlre d'Âu*
xerre est chargé de presque toutes les fonctions qui sont acquiltées dans
d'autres églises par le chantre ou pré-chantre : c'est ce qu'il scroii
facile de rendre sensible par la comparaison de ce qui se lit dans les
«anciens missels et graduels, soit manuscrits, soii imprimés, oi par
plusieurs autres monuments. xVussi à Âuxcrre son ancien nom cloii
concenlor dont on a fail succenlor dans le douzième siècle, que quelques
> •..■—*-.
lai&if*!^.- :\^'
DE l'église d'auxerre. 4-77
écrivains, par inadvertance^ ont écrit subcanior^ ne faisant pas réflexion
qu'il n'a jamais été institué ni commandé par le chantre, parce que ori-
ginairement, il chantoit avec le chantre ce que ce dignitaire lui a laissé
chanter seul en certains jours. Ce personnal est à la collation de Tévéque;
sa place au chœur est à droite, vers le bout qui approche du sanctuaire
auprès des dignités. La liste de ceux qui sont qualifiés de l'ancien nom
concentar est assez courte, mais il n'y a presque point de lacunes dans le
catalogue de ceux qu'on a appelés en latin du nom de 5uccen(or , ainsi
qu'on va le voir.
Eudes est le premier de tous. Il est de la première main au Nécro-
loge écrit vers Tan 1007 au <«' février : « Obiit Eudo sacerdos et con-
» centor. »
ÂDHELELME. Il vîvoit au X® sièclc, étant de la première main dans le
même Nécrologe au 15 mars, en ces termes : a Obiit Âdhelelmus sacer-
» dos et Concentor. d
Beraldus. Sa mort est au même Nécrologe au 8 avril, en ces termes :
« Obiit Beraldus sacerdos et concentor. »
GiRBERT est le premier qui porte le nom de Succentor. Il doit avoir
vécu h la fin du xi® siècle ou au commencement du xll^ Son obit est
ainsi annoncé dans une addition au Nécrologe ci-dessus , au second
janvier : c Item obiit Girberlus succentor, levita et canonicus. d
ÂTTONs prêtre et chanoine « est marqué au même Nécrologe parmi les
secondes additions du 27 janvier en ces termes : c Obiit Atto sacerdos
» et canonicus , bujus ecclesie succentor egregius , qui omnibus que
> habebat in eleemosynam datis cum servis, vineis et rébus aliis , ec-
1 clesiam honestavit libris suis. »
Germain , sous-chantre, est dit présent dans un acte de l'abbaye de
Régny de Tan il48, et dans l'acte de l'extinction de la prévôté faite
l'an 1166(1).
Herbert vivoit en 1180. Il est nommé présent à la confirmation que
Guillaume de Toucy, évêque d'Âuxerre, fit cette année-là au prieur de
(l) Koy. Preuves, ii. 59.
478 SOUS-CIIANTRES
Saint-Eiisèbt\ du droit accordé par Alain, son prédécesseur. Uerberlus
sMccenlor. Il est aussi meniionné dans un autre acte de 1194. L^Obt-
tnaire de Tan 1250 marque ainsi son obil au G novembre : c Ob. Her-
» herti succentoris, canonici cl presbyteri, iv lib. videlicet, xl sol. super
» vineam de Juglario quam dedil, etc. > Ce climat de vignes étoit proche
Monétau.
Nicolas, prêtre et sous-cbantre, est qualifie arbitre avec Eustache»
sacriste, et maitre Bertrand, cbanoine d'Âuxcrre, sur une dime de
Saint-Marien, au mois de juillet i214, selon lesarcbives de celte ab-
baye. Il est aussi dit contemporain du doyen Renaud. En 1225, le sous-
chantre d'Auxerre, rofficial, et maitre Brice, furent délégués par le
pape au sujet du procès entre leCbapitre de Saint-Germain-l'Auxcrrois,
et les chanoines de Sainte-Opportune. Nicolas fit du bien à la cathédrale,
el son obit fut marqué en ces termes dans le manuscrit de 1250 au
5 août : d Ob. Nicbolai presbyteri et succentoris, xl sol. Dédit nobis
» domum suam lapideam juxta furnum B. Marie de civitate, etc. »
Les chanoines de Clamecy ont aussi son nom dans leur Nécrologe au
2 août. Il étoit mort sûrement avant l'an 1228.
Obert de Yézelày , prêtre, chanoine et sous*^chantre. Il légua h la
cathédrale des prés situés à Pourein et h Beauvoir, dont il est fait men-
tion dans un bail de 1506 (1). I/Obiluaire de Nolre-Dame-de-la-Cité
marque ainsi son décès au 19 décembre : c Obiit Obcrlus de Virziliaco
» presbyter canonicus, succenlor Autiss. pro quo habemus xx sol. >
Pierre de Mailly. Il vivoit encore en 1249 selon des fragments de
comptes d'anniversaires; mais il mourut en 1250 le 7 septembre,
comme il se litdans Ténumération des cinquièmes prébendes. La sienne
fut donnée a Vital, officiai. Les obituaires écrits vers ce lemps-Ih, ont le
sien par addition au 7 ou 8 septembre : c Ob. Pétri de Malliaco cano-
» nici sacerdotis et succentoris, l sol. super domum suam de claustre
» sitam juxta portam pendentem. i> Son obit est au 9 février dans l'Obi-
tuaire de Nolre-Dame-de-la-d'Hors. Il y eut vers le même lempsà Auxerre
un autre Pierre de Mailly, mais iléloit sous-prieur des Dominicains, et
1} Cartid. Capit . loi. r,^'
DE l'église d'auxerue. 470
il vivoit encore en 1264, où il pareil comme exécuteur du testament de
Garnier t de Sanclo-Ragnoberlo, » chanoine d'Auxerre (1).
Jean le Roux ou Ruffi est nommé comme sous-chantre dans le car-
tulaire du Chapitre (2) h l'an 1250, à l'occasion de son clerc appelé
Martin Chataud. Ce sous-chantre fut député en second Tan 1251 avec
Guy de Mello, €vêque d'Auxerre, pour être conseiller assesseur au juge-
ment que Pierre, évêque d'Herford, porta à Sens dans l'église deSaint-
Etienne« sur le mariage d'Henri, roi d'Angleterre, avec Jeanne, fille du
comte dePonthieu (5). Il devint lecteur par la suite et mourut possédant
ce personnat (4).
Robert de Compens, sous-chantre d'Auxerre, vivoit en 1 255 et 1264,
selon le cartulaire du Chapitre (5). Il tiroit son nom de la seigneurie
de Compens, paroisse du diocèse de Meaux , dans l'archidiaconé de
France. Son parent, Thibaud de Compens, établit vers ce temps-là dans
l'église d'Auxerre dont il étoit chanoine (6), le Salve Regina des same-
dis soir. Le Mercure de France a parlé de ce fait, sept. 1759, 1^^ vol.,
page 1928.
Etienne de Doet ou de Chateaudun, est connu comme sous-chantre
d'Auxerre au moins dès Tan 1275, que le Chapitre le députa pour ac-
quérir en son nom certaines vignes en Pied-d'Aloue. Dans un titre de
1275 l'official d'Auxerre le qualifie ainsi : a Yir venerabilis Stephanus
)> succentor Autiss. magister et provisor generalis domus dei de
» claustro Autiss. » Il est présent en différents actes jusqu'environ l'an
1287, entre autres aux hommages faits h l'évêque en 1280 et 1281 (7).
II dota deux chapellenies h l'autel de Saint-Alexandre, qui ont été depuis
conférées par ses successeurs, sous le nom de Sainte-Apolline et de
Sainte-Eugénie. Il donna, en 1284, des fonds pour fonder dans la cathé-
drale, la fête de la Transfiguration double, à neuf chandeliers (8). Mais
sa principale dévotion fut envers sainte Anne dont il établit la fête au
chœur, et parmi les chanoines de Nolre-Dame-de-la-Cité, selon leur
(1) Cartul. Capit., fol. 96.
(2) /6t(/. fol. 105.
(3) Rymer, t. i, p. 464. (7) Gall. Christ,, pag. 314.
(4) CartuL Capit.. foi 204, ad an. 1270. I (8) Voy. Preuves, n. 242 et 250.
(5;tFo(. tlSel 125.
(G^ Ex addit. ad obituar.^ xni «fcu/i.
480 SOUS-CHANTRES
Nécrologc. Il eut aussi quelque dévolion pour sainte Agnès, h la fétc de
laquelle il établit en 1288 un luminaire dislingué (i). Ce fut encore lu
qui fit augmenter au calendrier d'Auxerrc la fêle de la TraoslalioD de
saint Nicolas, et celle de saint Michel du mois d'octobre. On voit par
un titre du xiii^ siècle que le lieu de Doet dont il- portait le nom , étoit
proche Châteaudun. Sa mémoire est marquée dans les Nécrologes de
Tabbaye de Saint-I^aurent, et dans celui de la Chartreuse de Bellari au
mois de juillet (2).
MiLON DE Ravpillon étoit sous-chantre au moins dès Fan 1289 o&
il est qualifié exécuteur du testament de Pierre de Tournan , chanoine
d'Auxerre (5). Il acheta une maison en cette même qualité Tan 1292, et
une vigne en 1294 (4). Rampillon est un village de Brie dans le diocèse
de Sens. Il avoit pourvu d'une des vicairies de sa dépendance Guillaume
de Rampillon, clerc, comme il se voit dans Tacte de 1503, rapporté
parmi les Preuves, n. 250.
Adam de Solerre, sous-chantre d*Auxerre, étoit issu des seigneurs
de la paroisse de ce nom, dans la Brie, au diocèse de Paris. Il étoit en
place dès Tan 1503, puisqu'cilors Milon de Rampillon étoit mort. Il
est nommé comme diacre dans les partitions de 1512. Il fut aussi i^ré-
sent avec Guillaume Catin, doyen. Tan 1515 aux procédures sur le droit
de Saint-Eusèbe. Son nom est au 28 mars dans le Nécrologe de Tabbaye
d*Hières, au diocèse de Paris (5), comme ayant donné k cette maison des
cens k Solerre .*€ Obiit Adam canonicus Autissiodor. qui dédit nobis
» viij sol. super censu de Solarrio. » Pierre de Belleperchc , dvéque
d'Auxerre, l'avoit nommé h la manière accoutumée, pour mettre le
scolastique en possession de la chapelle de Saint-Germain.
Jean Coquard qui étoit professeur ès-lois,en 1509, succédai Adam
de Solerre. Il est nommé dans la lettre de confraternité des chanoines
d'Auxerrc, avec ceux de î-aint-Martin de Tours, en 1515(0). Il Tut
arbitre en 1510 avec Guillaume (^tin, doyen (7), sur un dilFérend qui
.1 ) Vt)y, les Preuves, 12H2, 1284.
(i) Titres des Ccinleliers d'Auxerre.
.3) Cartul.Cnpit.M.HO.
k) Cnrt. Cap. fol. KM) el 101.
^5) Cod.Heg .3883,5.
v6) Voy. Preuves, t. iv, n. 2(Î3.
7) CartuL Cnpit., fol. i'i9.
DE l'églisb d'auxerre. 481
regardoit les seigneui^ de Seignelay. Son nom paroit aussi dans des
actes de 1318 et 1319, comme chambrier de Pourein (1). Enfin il étoit
présent eu 1320, Iorsqu*on donna à Févêque Pierre des Grès la tête de
saint Pèlerin, pour Tencbâsser.
Michel d'âppoignt est désigné comme sous-chantre d'Auxerre et
chanoine dans Tacte d*une fondation de Tannée 1324, 22 mars (2).
De plus dans les lettres de Pierre de Mortemar, évéque d^Âuxerre, de
Tan 1321 (3), outre cela il se trouve un acte du 12 août 1329, dans
lequel avec sa qualité de sous-chantre, il prend celle de t magister
> domus dei B. Stephani Âutiss. » Il avoit été reçu en 1321 chanoine
de Notre-Dame-du-Yal k Provins sur la nomination du roi (4).
Adam de Crevan, sous-chanlre, est nommé dans Tacte de réception
de Dreux Jourdain au doyenné, en 1345 (5). On ne trouve point de
sous-chantre depuis lui jusqu'au suivant.
Jean Geoffroy ou Gaufridi étoit sous-chantre en 1383, comme il
paroit par une quittance du paiement des décimes où il est nommé.
Marc Gibert paroit avec le titre de sous-chanlre comme présent à
un don de l'évéque Ferrie Cassinel, fait Tan 1389 à son église (6). Ber-
trand Cassinel, chantre, le fit en 1397 Tun des exécuteurs de son testa-
ment. Il avoit la même année un procès criminel dont on ignore la cause.
Dans le même temps il sontenoit son droit surîtes écoles de chant de la
ville d'Auxerre, et sur la nomination des maîtres de ces écoles. Son
droit étoit bien établi ; mais il vouloit de plus lever un tribut sur les
enfants; et ce fut ce que la ville y trouva de répréhensible (7). Les re-
gistres du Chapitre font foi au reste qu'il n'y comprenoit pas les enfants
de chœur, ni les jeunes clercs qui dcmeuroienl chez chaque chanoine (8).
Il fui, en 1403, Tun des exécuteurs de la bulle de Benoit XIII sur le
traité de Nazarie. Il étoit en 1408 chargé de sollicilcr les affaires du
Chapilre. Il jouissoil d'un privilège de TUniversiié de Paris. Il mourut
sur la fin de la même année vers le milieu du mois de mars.
(1) Ibid.yfoL 322 etseq.
(2) CarhtL Capit., fol. 512.
(r>) Voy. Preuves, n» 181.
(4) Ex Archiv Pruvin.
(n) Àntiq. Statut.
(6) Voy. Prouves, n*^ 3ri?> et 338.
(7) Comptes de la ville, 1397.
(8) Regist 1407.
II 31
482 SOUS-CHANTRBS
Jean de Cande, chanoine de Sens ei d'Aoxerre, saecéda k Mac
Gibort et mourut au bout de quelques mois.
PiBRRB Gharlet, Secrétaire de Tévéque Michel de Greney, fot poom
du canonicai et de la sous-chantrerie, et reçu le 8 juÎD 1409.
Guillaume du Val-db-Merci fut reçu la même année, le f 6 aoAt, «
deux bénéfices du précédent, et mourut peu de temps après (1).
Michel de l'Arc fut pourvu de la sous-chantrerie, et fut répotë pré-
sent au l*' octobre 1409, par privilège, parce qu'il étoit chapelain dn
roi. Il étoit chanoine dès le 21 mars 1408.
Guillaume BUsi ou le Bègue prit possession de la sous-chanirerie k
8 mai 1410, et fut installé c a parte dextra in loco succentoris a (2). Il
quitta ce personnat au mois d*avril 1415, pour prendre celai da lec-
torat.
Etienne Moron, chanoine, fut reçu sous-chantre par procurear le
24 avril i4l5, et personnellement le 27 mai. Un induit de réTêqoe de
Bresse le fit tenir présent durant les premières années. Ce fm lui qui,
après avoir été guéri par Tintercession des saintes Mariée JoeèH et
Saloméy dont on établit la fête de son temps k la chapelle de Notre-Dame»
des-Yertus, au pied de la petite tour, en écrivit la vie ei les miraelès.
Son manuscrit a été inséré dans le lectionnaire de la cathédrale, aujoar-
d'hui conservé k Saint-iSermain d'Auxerre. Il décéda chanoine et sons-
chantre le 1 0 octobre i 429.
Simon Bechu fait chanoine dès le 17 septembre 1417 et lecteur en
1425, quitta lalectorie pourlasous-chantrerie (a). Il est qualifié de cha-
noine et de sous-chantre dans un compte de 1453. 11 fut, en 1457, Ton
des députés du clergé d'Auxerre à l'assemblée de ville, qui se tint pour
régler les travaux des vignerons (3). Il permuta en 1460 avec Philippe
Colel, pour la cure de Saint-Léger-des-Vignes, diocèse de Ne vers, et
mourut chanoine le 25 mai 1466.
(1) Regisl. Capit.
(2) Regist. Capit.
(3) Voy. Preuves, n. 370.
(a) En 1423, il était gouverneur des Grandes Charités.
(iV. d. B.)
DE l'église d'auxerre. 483
Philippe Cotet déjà chanoine, devint sous-chanlre en verta de la
permutation marquée ci-dessus, et prit possession durant Tautomne de
l'an 1460. Il éloit licencié en décret. Le Chapitre le fit son ofiScial le
2 mai 1464. La même année, le 18 août, fut faite la conclusion en forme
d'enquête» qui régla pour la suite une des prérogatives du sous-chantre.
Yoyez-en la teneur ci-dessous (1). Il fut un de ceux qui s'absentèrent
au sujet de la peste des années 1467 et 1468. Il ne mourut, selon les
apparences, qu'en 1475.
PiBRRE Pelàud fut reçu à une prébende et à la sous-chantrerie en
1475, selon un compte de cette année. C*est là tout ce qu'on en sait.
David du Gué prit possession de la sous-chantrerie en 1476. Il fut élu
gouverneur ecclésiastique de THôtel^de-YiHe pour les années 1481 et
1485. Etienne Naudet, lecteur, le choisit en 1491, pour l'un des exé-
cuteurs de son testament. On ne sait point le temps de sa mort. Il fut
inhumé devant l'horloge de Téglise.
Jean Sanceaulme, prêtre, fut admis à la sous-chantrerie en 1498, et
la posséda très-peu de temps. On voit par le compte de fabrique de
1501 qu'il étoit mort alors.
Guillaume Boisart, prêtre, chanoine et sous-chantre, éloit en même
temps fabricien l'an 1 505. ^
Chrestien Maillard, qui avoit été maître des enfants de chœur, en
1497, puis organiste, en 1499, étoit chanoine et sous-chantre au mois
de décembre 1515, lorsqu'on indiqua le jour pour choisir un évéque
(1) Exunctum e registris Capituli Âutiss.,
anni 1464, sal)I).« 18 augtisti « Quia verte-
» batur in dubium ab aliquibus Dominis
» de Capitule, utruni succentor ecclesie
» autiss. quod est simplex ofliciuni et non
» dignitas, in tenendo cliorum et ofliciando
» in ecclesia Autiss. et extra in his que con-
» cernunt et ad que tenctur rationc dicte
» succentorie débet precedere canon icos
:* ecclesie Autiss. ante ipsum receptos, po-
» situm fuit in deIil)eratione per dictum D-
» decanum, utrum deberet precedere, vel
» non : Et compertum fuit tam per dictos
» Dominos capitulantes quam antiquos tor-
» tarios ecclesie, quod semper vaderunt
» temporibus retroactis, quod in iis ad que
V tenetur dictus surcentor in tenendo cho-
» rum et ofliciando in ecclesia Autiss. etex-
> Ira, ratione dicte succentorie, quod sem-
» per precessit quemcumque canonicum
» etiam antiquiorem. Quapropter fuit de-
» claratum in dicto Capitulo per dictum D.
> decanum presidenteni quod dictus suc-
» centor in iis ad que tenetur ratione sue
» succentorie tam in tenendo chorum quam
» alias ofliciando in ecclesia Autiss. et extra
» de cetero prec^det quemcumque canoni-
> cum etiam antiquiorem. »
484 SOUS-CHATTKBS
après la mort de Jean Baillet. On le retrouve dans les r^^tres de
1523 et 1524. On croit que Jean Billard, maître des enfants en 1499,
reçu chanoine en 4519, lui succéda en 1525 on 1526« et ne garda
pas ce bénéfice.
PiBRRB HAGïnsN, bachelier en droit, qui avoit été, en 1520» seeré-
laire de H. de Dinteville, évéque, et fait par lui chanoine , en i5Z5,
eut de lui la sous-chantreric, et y fut admis le 17 avril 1526 avant
Pâques. 11 eut, en 1527, un concurrent qui s*appeloit Pierre Richard,
pourvu par Antoine Duprat, archevêque de Sens, à Paris, le 22 joiHet,
et qui se fit recevoir par procureur le 28 septembre. Il fut député,
en 1558 , pour rédiger un processionnal à l'usage de l'église. Ce fut
lui qui , ayant entrepris un procès au sujet de ses droits et de ses
charges, consentit ^ un concordat, qui fut passé en Chapitre , le 14
février 1 544 , par-devant François Maçon, vice-gérant en officialîté
de Sens, qui prend la qualité de juge ordinaire en cette partie. Son
testament, daté du 10 août 1541 , apprend qu'il étoit curé de
Conroultre et dePréy. Son codicile est du 9 mai 1547. Il est vrai-
semblable qu'il mourut la même année.
Laubent Robert. Il n'y a de preuves qu'il fut sous-chantre que
par les provisions du suivant, où on lit qu'il avoit eu ce bénéfice de
lui par résignation. Iléloit du diocèse d'Âuxerre.
Pierre Péan, prêtre du diocèse de Chartres. Les provisions du sous-
cantoral que François de Dinteviile lui donna, sont du 28 septembre
1549. Il étoit chanoine dès l'année précédente. Il fut reçu a la sous-
chantrerie le !•' octobre 1555. On lit dans les registres du Chapitre,
au 5 décembre 1557 : t Item fuit prohibitum crucem pulsare, >
le martinet (galhce) , sine permissione succentoris aut sui commissi.»
Dans le procès-verbal de la coutume d'Auxerre , rédigé le 16 juin
1561, il est qualifié curé de Gy-rËvêque. Il quitta la sous-chantrerie
en 1564, et mourut chanoine le 27 mars 1566.
Michel Kerver, prêtre du diocèse de Paris , étoit chanoine d'Auserre
au moins dès l'an 1551, et en même temps curé au diocèse de Char-
tres. Etant devenu par la suite chanoine de Brienon, au diocèse de Sens,
il permuta, en 1564, ce dernier canonic;)t avec la sous-chantrerie
' .j
DE L'ÉGLibE d'auxeuke. 485
d'Auxorre. Il oui son visa le AdéccDihrc cl fui inslallé le 7 (I). Depuis
ce lemps-là il cessa d'ùire à gaucho dans le Chapitre, el commença a
y êlre assis k droile, comme Pierre Péan et ses prédécesseurs.
Mathieu Morillot, prêtre du diocèse de Langrcs , chanlre de la
chapelle du roi, chanoine d'Auxerre dès l'an 1558, permuta la cure
de Perroy, au diocèse d'Auxerre, avec Michel Kerver, le 28 seplemhrc
1566, et fut installé sous-chantre le 50. Il mourut le 15 juillet 1568.
Pierre de Beaulieu avoit commencé par être maître des enfants de
chœur en 1550. Il fut fait chanoine en 1555, reprit pour la seconde
fois le gouvernement des enfants, Tannée suivante restant chanoine.
Après la mort du précédent. Il fut pourvu de la sous-chantrerie par le
vicaire-général du camlinal de la Bourdaisière. C'étoitlui qui, deux ans
auparavant, avoit obienu du Chapitre d*Auxerre (2) un morceau de la
relique qu'on appeloit le manteau de saint Martin^ pour Téglise de
Saint-Martin-d*01ivet, proche Orléans, où il avoit été baptisé. Il
mourut sous-chantre, le 16 juillet 1575, et fut inhumé devant la
chapelle de Saint-Martin.
Léonard Henrion, du diocèse de Sens, premièrement enfant de
chœur h Auxerre, puis prêtre, musicien, chanoine tortrier et maître
des enfants, fut admis en 1571 , le 26 janvier, a un canonicat, puis
reçu sous-chantre le 51 août 1575. Il mourut le 6 novembre 1580.
Droin Chaucuard, nalif de Colanges-les-Vineuses , au diocèse
d'Auxerre, fut reçu chanoine-clerc dès le 27 septembre 1565. Il fut
pourvu de la sous-chanlrcrie par Jacques Amyol, évoque, et installé
le 12 novembre 1580. Etant chanoine, il avoit dressé un inventaire
des titres, en reconnoissance de quoi le Chapitre lui fit une gratifica-
tion considérable pour ce temps-là. Il rédigea aussi le livre du sous-
chantre, des remarques duquel et de celles de ses successeurs j'ai puisé
quelques circonstances qui regardent Thistoire liturgique de Téglise
d'Auxerre. Ce sous-chantre fut recommandable pour sa piété ; il vécut
jusqu'environ Tan 1612. Il avoit été chantre de la collégiale deNotre-
l) Ex Regisths. \ ^2) Regist, capil , 'i6 Marhi 1566 et 14 npnl.
; 1567.
4S6 sous-chàiitebs de l'Aglisb d'auxkrrb.
Dame-dc-la-Cité. Il posséda aussi la cure de CouroulUre ^1 celle de
Falvy. Il fut fort considéré par Tévéque Amjot.
Màgdblbin Juubn , du diocèse de Sens , succéda à Droin Gbatt-
cuard; le r^istrc de 1571, 5 janvier, apprend qu^il avoit élé eobnt
de chceur. Il devint chanoine en 1597. Il avoit comoiencé à intenter
procès sur le choix des vins; mais en 1612, le 15 décembre, le
Chapitre général jugea la difficulté en sa faveur , déclarant qu'il dioi*
siroit ^ son rang d'antiquité, tant comme sous-chanlre qae comme
chanoine. Il résigna six ans après à Denis Chappu.
Denis Chappu, chanoine depuis 1614, fut installé sous-chantre le
29 décembre 1618. 1! avoit d*abord été vicaire de Saint-Mamert ; il en
devint ensuite curé et conserva ce titre étant sousH^antre jasqu*â Tan
1624. Il résigna son canonicat en 1641 et obtint un canonicalod
iffectum^ pour continuer de jouir des prérogatives du sous-chantre.
JouBN Davion, prêtre du diocèse d'Âuxerre, chanoine dès l'an 1640,
obtint,en 1644, la sous-chantrerie en cour de Rome. Il la garda peo de
tem|>s, et la permuta avec le suivant. On a quelques ouvrages imprimés
de ce chanoine. Il passoit pour avoir le talent de la prédication.
Nicolas Housset, chanoine natif d'Auxerre, posséda la sous-chan-
trerie au moins dès Tan 1647. Il fit, en 1650, le voyage de Rome
d'où il rapporta des reliques dont il est parlé ici dans les Preuves (1).
Il remit le personnat entre les mains de Tévéque Nicolas Colbert,
en 1 674 , lorsqu'il eût été élu chantre.
Claude Barrault, chanoine, né k Âuxerre, fut pourvu de la sous-
chanirerie, en 1674, après la démission du précédent et fut installé le
6 décembre. Il résigna au suivant.
Germain Drinot, chanoine et sous-chantre, depuis le mois d'août de
Tan 1094 jusqu'en 1712, 29 septembre, jour de son décès.
Jean Lebeuf, chanoine, né à Auxerre en 1687, pourvu de la sous-
chanirerie par M. de Caylus, évoque, en prit possession le 50 sep-
tembre 1712. Il donna sa démission en 1743.
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LECTEURS DE l'ÉGLISE d'aUXEURE. 487
* Edmb Simon Carouge, nommé sous-cbantre le 27 novembre 1745,
résigne son office, le 14 février 1764, à M. Davignon.
* H. Datignon succède à M. Carouge, et est maintenu en possession
par arrêt du parlement du 17 mars 1768.
* Simon Lorieux, prêtre du diocèse de Blois, chanoine, succède à
M. Carouge, après la mort de ce dernier, le 5 mai 1771, le Chapitre
Tinstalle sauf les droits de M. Davignon. Il résigna la sous-cbantrerie
a M. Parisot.
* André Parisot, né à Varzy, chanoine, fut nommé par M. de Cicé h
la sous-chantrerie , le 5 décembre 1781 • Il fut souvent réprimandé par
le Chapitre pour sa tenue et sa légèreté. Il était encore sous-chantre en
1789.
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LECTEURS DE L ÉGLISE D'AUXERRE.
 considérer le nom de lecteur ou litre dans la simplicité de son
origine, cette fonction seroit aussi ancienne, dans l'église d*Auxerre,
qu^ Test celle d'archidiacre, puisque si saint Corcodome, diacre, com-
pagnon de saint Pèlerin, put être regardé comme archidiacre; saint
Jovinien, à plus forte raison, qui étoit de la même compagnie, dut être
considéré comme lecteur dont il portoit le titre. Depuis rétablissement
régulier de Toffice divin, en même temps qu'il y eut un ou plusieurs
chantres préposés pour conduire le chant, il y eut aussi un ecclésiasti-
que constitué pour marquer ce qui devoit être lu aui assemblées des
fidèles, soit à la messe, soit à l'office de la nuit. Cet ecclésiastique,
chargé de la garde des actes des martyrs, des bibles et des livres d'ho-
mélies, devoit montrer à chacun ce qu'il avoit à lire, et souvent lire lui-
même le premier, comme les deux chantres principaux dévoient incul-
quer le chant aux psalmistes et aux enfants. Ses fonctions lui assurèrent
encore davantage le nom de lecteur, lorsque les biens de l'église furent
augmentés. Car ce fut pareillement sous sa garde qu'elle en remit les
488 LECTRUR8
lilres ; <le sorle que c'éloit lui qui en donnoil communication dans le
besoin, qui rédigeoit les nouveaux et qui les écrivoit. De là Tint sa dé-
pendance de rarchidiacre qui éloit comme Fintendant do temporel de h
mense épiscopale (1). Cet office étoit a sa Domination encore an con-
mencement du xiii® siècle; mais comme personne ne vouloit l'accepter,
Tévêque Guillaume de Seignelay lui annexa une demi-prébende et s'ea
retint la collation. A mesure que les biens augmentèrent dans les der-
niers siècles, il se trouva soulagé par ceux qui en gardèrent les nouveau
titres, et Tinvcntion de l'impression ayant rendu les livres commaos,
les fonctions du lecteur devinrent inutiles. De manière qu^il ne conserve
qu*un reste de celles qui sont allribuées ailleurs aux chanceliers, comme
de dresser la table des officiants et autres. Les anciens lecteurs da xi*
et xii^ siècle prenoient quelquefois le titre de chancelier. La place da
lecteur est dans le côté septentrional du chœur, proche la tribune où
se chantoient les épilres et leçons, en mémoire de quoi il a encore en
ce lieu un pupitre, de même que le chantre et le sous-chantre en ont
chacun un ^ Tangle opposé et du côté du sanctuaire, où primitivement
le chant de la messe s'exécutoit.
Saint Jovinien, lecteur de Téglise de Rome, le devint de celle
d^Auxerre, en accompagnant saint Pèlerin qui vint la fonder au lu^
siècle.
Les lecteurs sont inconnus depuis lui jusqu'environ le xi« siècle,
auquel il faut placer ceux que Ton trouve dans le Nécrologe écrit
alors.
Jean vécut avant le xn® siècle, paroissani être des premiers ajoutes
au Nécrologe dont on vient de parler, en ces termes, au 21 juillet :
Obiit Johannei levita et canonicuSt lectorumque magisier.
Rodolphe écrivit vers Tan 1076 un titre qui regarde la foudatioo du
Chapitre de Clamecy, rapporté dans les Preuves, n. H, et prend le
titre de chancelier.
Bladin parolt éire plus nouveau que Jean et avoir vécu avant ceux
(2) Ghss. Canffii. rncc yotarii nbbadim.
DE l'église d'auxerre. 489
qui suivent. Il se irouve dans le Nécrologe susdit. On y lit en second
iieu, au 25 août : /psa dte ohiii Bladinus lector et canonicus.
JoNAS, lecteur, est nommé comme témoin dans la donation que i'é-
véque Hugues de Montaigu fit, en 1 1 23, de l'église d'Âugy aux chanoines
de Saint-Père d'Auxerre (i); au lieu que dans la charte par laquelle
Tévéque et le Chapitre confirment, en 1120, une donation faite a
Pabbaye de Pontigny par Etienne, trésorier, il est qualifié chancelier.
Ce qui prouve que les deux titres éloient arbitraires. Voyez encore
Preuves, n. 14.
Ildebert fut présent , en qualité de chancelier, quand Tévêque
Humbaud accorda, l'an 1110, les seigneurs de Toucy avec Tabbé de
Fleury.
Hugues souscrivit, vers Pan 1158, avec Tévéque d'Auxerre, Hugues
de Màcon , à la ratification que fit Gervais, abbé de Saint-Germain ,
d'un échange entre les clercs de Saint-Florentin et les religieux de
Pontigny. Les additions k Tancien Nécrologe se contentent de marquer
au 8 juillet : c Obiit Hugo lector; » mais TObituaire de 125U marque,
au même jour, qu'il avoit donné aux chanoines trois arpents de vignes
en Montdefois, m Monte defenso, et un bâtiment de pierre situé devant
l'église, cameram lapideam ante eccle$iam nostram^ laquelle étoit alors
occupée par maître Anselme. Un titre de Moléme de l'an 1157, un autre
de Claraecy de 1145 , Preuves, n. 55 , et d'autres, n°* 45 et 49 ,
le quahfient de chancelier. Saint Bernard, écrivant, en 1155, au pape
Eugène HI sur l'élection de l'évéque Alain, lui donne le même litre et le
met dans le rang des prêtres. Il vivoit encore en 1159.
Pierre Sevenet. Ce lecteur est connu par le Nécrologe de Tan 1250,
où il est de la première main, au 29 août, en ces termes : « Ob. Pétri
» Seneveti lévite et lectoris hujus ecclesie, lx s. super domum suam
> sitam ante ecclesiam B. Marie in civitate, quam propriis sumptibus
» edificavlt et nobis dédit. » Je ne puis guère le placer qu'ici, le reste
du siècle et la moitié de l'autre étant remplis par les suivants.
Robert Abolant fut un lecteur très-célèbre qui mit à profit le dépôt
vl) î'oy Preuves, n^'ii.
— — ^
492 LECTEURS
Guillaume le Bret, iecleur, n*csl connu 4|ue par Irs additions laites
aux Obituaires sur la fin du sut*' siècle. Dans Tune de ces additions, oo
lit ao 20 octobre : c Obitus magislri Gnillelmi le Bret qaondam lec-
» loris et presbyteri ; > et dans Tautre, au même jour : « Item ob.
» magistri Guillelmi de Diseia lectoris ecclesie Auiiss. et sacerdotîs. »
Guillaume, surnommé en latin Caiini^ est connu comme lecteur de
relise d'Âuxerre par deux actes du Cartulaire du Chapitre, Tan de
Fan 1300, où il paroit avec Hugues de Herment, en qualité d^exécu-
teur du testament de Vincent de Mêve ; Tautre, de 4504, est un accord
du Chapitre avec les habitants de Chichery, fait |>ar Tcvêque Pierre de
Mornai, dont il est dit témoin : c G. Caiini lector. Vers le même temps,
il fut l'on des arbitres sur le différend entre Gilles, abbé de Saint-
Père et les paroissiens, touchant les réparations de leur église. Il est
encore désigné en sa qualité de lecteur, en 1309, dans des lettres de
Tévéque Pierre des Grez (1).
FtUL DE CouDUN, qui n*est qualifié que de chanoine-prctre dans les
partitions de 131 1 (2), paroit en qualité de lecteur dans Pacte du 23 juin
1315, qui regarioil la confraternité du Chapitre d'Auxcrre avec celui
de Saint-Martin de Tours (3). Il fulaussi Tun des chanoines qui visitèrent.
Tan 1320,1a châsse dcsaint Àmatre dans la cathédrale (4). En i 524, ce
chanoine-lecteur légua, par testament, b THôtel-Dieu de la cathédrale,
tousses livres, au nombre de seize ou dix-sept volumes, b condition
que Gilles de Paisy, son neveu, ecclésiastique, en auroil l'usage sa vie
durant (5). Coudun, dont ce lecteur tiroil son surnom, est un village du
diocèse de Beauvais, peu éloigné de Compiègne.
Pierre LE Blanc, appelé Petrus Albi dzns les titres latins. Il est
qualifié professeur ès-lois, clerc du roi et lecteur d'Âuxerrc, dans Facie
qui le députa pour aller demander, en 1325, à Charles-lc-Bel, la per-
mission d'élire un évcque, après la mort de Pierre des Grez. Il prend
les mêmes qualités, er. 1328, dans la quittance qu'il donne au Cha--
il) Voy. Preuves, no :J5'). 4 loi/. Preuves, ii 2G7.
.tj Voy. Preuves, n^ 2G0. 5 Vnij. Preuves., n» 27i.
3: Voy. Preuves, n" 263.
DE l'église D^AUXERRE. 495
pitre d'Âuxerre ^ de douze livres qu'il lui avoil payées sur les meubles
de Guillaume de Lésignes, chanoine, son ancien débiteur.
Pierre de Digy, chanoine ei lecteur, fonda, en 1340, son anniver-
saire (1). Il obtint en même temps, à cause de ses fréquentes infirmités,
d'être tenu présent h matines , le reste de sa vie , les jours qu'il seroit
a Auxerre. De son temps, en 1536, il fut conclu qu'on feroit un re-
cueil de toutes les chartes et titres. V. Preuves , n. 286. Il y a appa-
rence que ce lecteur donna tous ses soins à la confection de ce Cartu-
laire, parce que comme on lisoit autrefois dans la préface , cela
épargnoit an lecteur la peine de recourir aux originaux en y trouvant la
copie des actes. Il fonda la chapellenie de Saint-Jacques-le-Majeur,
Saint-Michel et Saint-Eloi , auprès de laquelle il est inhumé et où on
lisoit autrefois sur sa tombe ce qui suit : « Hic jacet discretus vir
» Petrus de Diciaco quondam Àutiss. canonicus et leclor, qui fundavit
» hoc altare in honore Dei et V. M. et Jacobi apostoli, Michaëlis
» archangeli, et sancti Eligii conf. ; obiitautem anno domini MCGG-
» LVIII die XII mensis maii. > Cette chapelle est celle qu'on appelle
aujourd'hui le nouvel autel de saint Michel, proche la porte méridionale
de la croisée, au-dessus duquel sont représentés, dans le vitrage, les
trois saints nommés dans l'épitaphe, et Pierre de Dici à genoux en
soutane violette. Saint Eloi est aussi peint à fresque sur le mur voisin
avec une mitre à TantiqQe.
Bernard de Pierre-Late, en Dauphiné, ou de Pierre Laye, près
Pontoise (2) , étoit chanoine et lecteur d'Âuxerre , au moins dès l'an
1569, mais il ne résidoit pas, sa prébende et sa lectorie étant dans le
rang des bénéfices forains (5). On trouve, dans le testament d'Audoin
Albert, cardinal, fait à Avignon, en 1565, ce même Bernard avec le
titre de chanoine de Limoges. Il possédoit encore, en 1585, la lectorie,
selon une quittance des décimes apostoliques de cette année. Il fonda
son anniversaire qui se trouve marqué en février dans les anciens
comptes.
(11 Cartul.Capit , fol. 363.
(2) {De Lata petra\
(A) Comput, hor, annor.
494
LECTEURS
Jean Camuset éioii lecteur en 4395, mais il résidoit à la cour de
Rome. Il donna, en 1598, des ornemenls à Notre-Daine-des*Venii&
On lui fil grâce, en 1599, d'une partie du stage. Il rédigea son lestâ-
ment le i6 septembre 1400. On y lit quMI fut curé de Colanges-les-
Yineuses et que sa famille étoit d'Auxerre, de la paroisse Notre-Dame-
la-d'Iiors. Il mourut au mois d'octobre ou de novembre suivant.
Jean de Maray, chanoine dès le 47 mai 4400, fat installé k lalec-
torie, en personne, le 1^' juin 4401. Il est aussi qualifié trésorier de
Notre-Dame-de-la-Cité, en février 4404. On conclut de son temps de
faire deux sceaux (4), l'un qui seroit de forme ronde pour les actes
judiciaires et lettres clauses, qu'il dcToit garder par devers soi^ /iisfs
fundationem et consuetudinemsuibeneficii^ et l'autre pour les contrais
qui devoii rester au trésor.
Guillaume le Bègue ou Blesi, chanoine depuis Fan 4401 , quitta la
sous-chantrerie qu'il avoit tenue pendant cinq ans, et fut reçn à la
lectorie le 2 mai 4415, en vertu de lettres du cardinal de Bar, évêque
de Porto (2). Le Chapitre fit de son temps une déclaration des cbanres
du lecteur. On croit qu'il mourut en janvier 4425; au moins il est
qualifié défunt^ le 20 de ce mois, lorsqu'il s'agit de la vente de sa
maison.
Simon Beghu, du. diocèse de Troyes, qui avoit été reçu chanoine le
47 septembre 4417, non sans peine, parce qu'on le croyoît serf, eut
la lectorie [)ar grâce apostolique et y fut admis le 25 janvier 4423. Il
céda, le 8 novembre 4424, sa maison canoniale à M. de Chastellux
qui en cherchoit une h acheter. Il étoit économe du temporel de
l'évéché, sede vacante, le 44 mars 4428. Il quitta la lectorie pour de-
venir sous-chantre à la mort d'Etienne Moron, arrivée le 40 octobre
4429.
Jean Vimont fui reçu lecteur entre la Sainle-Luce 4429 cl le 4«r n^^j
4450 (5). Il jouissoii de ce pcrsonnal en 1 459 et même en 1448 (4).
•(I) ncgist. Capil . 4 mai 1409.
(2) 9 octobre 14 IG.
iT»; Compot.
(4: Ibid.
DE L*ÉGL1SE d'aUXERRE. 495
Il vivoit encore en 1458. On eroil que ce ne fil qu'après sa mort qu'il
eut un successeur.
Jean Choin n*est connu comme lecteur que par les provisions de son
successeur. Il y a quelque preuve qu'il étoit lecteur en 1458. Les
regisires marquent, au 13 avril 1460, que ce Jean Choin donna cent
livres pour faire des orgues.
Etienne Naudet, chanoine dès Tan 1457, permuta avec Jean Choin,
en 1461, son canonicat de Notre-Dame-de-Ia-Gité, pour le personnat
de lecteur dont l'évêque lui fit expédier les provisions h Varzy, et fut
installé le 16 octobre. Il exerça l'office de secrétaire des conclusions
capitolaires, depuis l'an 1456, au moins, jusqu'à Tan 1475. Il fut élu
gouverneur ecclésiastique de l'Hdtel-de-Ville, en 1480. Son testament
du 25 janvier 1 491 , nous apprend qu'il étoit curé de Chasnay. Voyez-
en ci-dessous quelques particularités (1). Il vécut vraisemblablement
encore quelques années depuis la date de cet acte, puisqu'on ne
trouve de réception de lecteur que six ans après. Il fut inhumé au mois
d'octobre, au bas des degrés du grand portail.
Guillaume Rousseau fut reçu à une prébende canoniale et au lec-
torat, en 1497, et mourut en 1500.
Pierre Obbe ne fut lecteur guère plus de temps. Un compte de
1503 le suppose mort.
Michel le Caron, chanoine dès l'an 1495, n'est connu en qualité
de lecteur que depuis l'an 1505. Il est présent, en 1515, à la conclu-
sion sur l'élection de l'évéque. Pendant la peste de l'été 1515, le
député pour l'élection du chantre le trouva retiré dans sa maison des
Chasnées qu'il avoit fait bâtir. Il étoit natif d'une paroisse voisine de
(1) Etienne Naudet veul qu'autour de son
corps « per quatuor pueros thuribula tene-
» anturin quibus fumus thuris semper ema-
» neat et appareat durante suo scrvitio.»
Il lègue 15 sols aux Jacobins, autant aux
Cordeliers « proviso quod quilibet conven-
> tus tenebitur decantarc ante ostium suc
>> habitationis vigilias defunrtorum ad no-
» vem lectiones, proutconsuetum est.
» Ordinat quod dicta die sui obitus pre-
» sentetur omnibus personis .. ad offerto-
)» riura ire volentibus unum parvum dena -
» riura sccundum consuetudinem in dicta
» dicta Eccl. et civitaie Autiss. obscrvari so-
» litara. »
m\
LECTEURS
Clcrroonl en [)oauvoi>is, nppeléc NoinicK Etant expert dans la méde-
cine, il fut appelé a xXuxerre dans un temps de peste et établi médecin
de la ville. Il fut depuis Tun des médecins du roi Charles VIIL Etant
chanoine, il fit construire, dans la cathédrale , Pimage d^Eecehomo
derrière Taulel de la comtesse, et Tarcade qui est au-dessus, où Ton
voit ses armes et son emblème : largesse en vertu. Par son leslament,
il voulut être inhumé proche celte image; il demanda qu*on augmentât
la fcte de saint Cvr et de sainte Juliie , et que leur châsse fût descen-
due la veille. Il donna à Téglise de Saint-Bris pour enchâsser en argent
le chef de saint Col ; ordonna de garnir une salle séparée ii Tbôtel-
dieu, pour le temps de pcsle, et rebâtit plusieurs chambres de la lépro-
serie de Sainl-Siméon. On lisoit autrefois sur sa tombe les vers suivants :
Sislc gradus qni curris et hoc mirarc cadavcr ,
Tcrtia cui cursu parla corona fuit.
Consilii mcdicesquc mihi decrcvit honorem,
Tum spcs Galli», timor Karulus llalis;
Al tibi si mcdici stipcrcst cura ulla sepulti,
Ut mentis curcl vulnera, poscc Dcum (1).
Il étoit mort le 15 mai de Tan i528.
Guillaume Chausson, né a Chablis , fut pourvu de la lectorerie par
Tévéque le 44 mai 1528 et mis en place le 15. Il fut vicaire-général
de celui qui adminislroil révéclié d'Âuserre pendant la résidence de
François de Dinlevillc en Italie. Il mourut en 1548.
Nicolas Davy succéda au précédent. On le trouve qualifié lecteur
dans le registre de 1550. Il est aussi mommé parmi les chanoines
présents, en 15Gl,a la rédaction de la coutume d^Âuierre. Il mourut
durant l'été 15G5.
Gaspard Damy l'aîné, nalifdeChàlons-sur-Marne,oflricialde Tévêque,
fut pourvu le 14 septembre 1505 el reçu le 22 octobre. Il s'en damii
en 15G6, et Gaspard Damy le jeune, clerc de la même ville de Châlons,
fut pourvu par M. de Macheco, vicaire-général.
(1) D'un iii.'inusrrit (lo UunMoMii, (viisiin «lo Son>. cii la hil)l du Cbap di' Se:is
DE L^ÉGLISE d'aUXERRE. 497
Gaspard Damy le jeune prit possession par procureur le 2 décembre
1566, et jouit de ce personnat jusqu'à sa mort arrivée le 20 dé-
cembre 1614. Il fut aussi curé de Lindry.
François Pelle, prêtre du diocèse d'Angers et déjh chanoine, fut
reçu le 12 janvier 1615, mais il ne posséda ce titre que durant quel-
ques mois, étant mort le 6 avril suivant. Il avoit été secrétaire de
M. de Donadieu, évéquc.
Charles Thiot, prêtre romain, venu d'Italie avec le cardinal de
Lenoncourt, prit possession du lectorat le 15 avril 1615, et mourut
le 10 mars 1621.
Germain Bardolat, prêtre du diocèse d'Âuxerre, fut reçu le 20
mars 1621 . Il quitta, en 1649, et se fit chanoine régulier en Tabbaye
de Saint-Père (a).
Laurent Odinet, prêlre auxerrois, fut fait lecteur le 18 mai 1650.
Il fut vice-gérant en roflicialité sous Tépiscopat de M. de Broc, et
promoteur sous Nicolas Colbert, son successeur.
Edme Odinet commença à posséder la lectorie, le 14 juillet 1682.
Jean Marie, natif d'Àuxerre, docteur de la maison et société de
Sorbonue, a exercé le lectorat depuis le 1®' mars 1686 jusqu'au mois
d'août 1696.
Guillaume de la Chasse, reçu chanoine en 1681, fut installé au
lectorat le 7 septembre 1696. Il a conservé ce personnat jusqu'à son
décès arrivé le 16 avril 1725.
Dominique le Clerc, chanoine depuis Tan 1715, a été installé
lecteur le 9 mai 1725. * Il est mort en fonctions en 1755.
* Nicolas Créthé prêtre du diocèse d'Âuxerre, fut pourvu du lectorat
par lettres de Févêque du 51 décembre 4755, et installé le 14 mai
(a) Il est auteur d'un recueil manuscrit contenant les faits intéressants qui se
sont passés dans Téglise d^Auxerre^ depuis 1626 à 1648. — Voy. ci-dessus, note A ,
p. 216.— Archives de TYonne. [K. d. E.)
H 52
498 CANONICAT DE LA MAISON DE CHASTELLUX
suivant. A sa mort au mois de novembre i759, M. Vieil fut chargé du
lectorat jusqu'à une nouvelle nomination.
*M. Vaultier, pourvu du lectorat, fut installé le 22 décembre 1 769.
Il donna sa démission en 4787 pour devenir chantre.
* Joseph-Marie Closbt, prêtre du diocèse de Rouen, chanoine d'Yve-
tot, pourvu du lectorat le 14 juin 1787. Il étoit aussi officiai et vicaire-
général de l'évéque M. de Cicé, et fit en cette qualité une translation de
reliques dans Tabbaye des Isles» le 27 octobre 1789. (Procès -verbal de
la petite châsse de saint Just h la cathérale).
CANONICAT DE LA MAISON DE CHASTELLUX DANS L'ÉGLISE
D'AUXERRE.
La singularité du canonicat de Téglise d'Auxerre, attaché depuis trois
cents ans à la maison de Chastellux, m'engage à en dire quelque chose
à la fin de ce volume, quoique ce ne soit pas un bénéfice ecclésiastique.
Les chanoines d'Âuxerre, par reconnoissance de ce que Claude de
Chastellux, maréchal de France , leur avoit restitué gratuitement la
ville de Crevan dans le temps des guerres des Ânglois (i), crurent lui
devoir accorder le droit de se placer au chœur parmi eux, en habit partie
militaire, partie ecclésiastique, et d'y avoir les distributions qui s'y fe-
roient : de sorte que, depuis ce temps-là, celui de ses descendants qui
possède la terre de Chastellux (2) s'étanl présenté en Chapitre et y ayant
prêté serment de défendre les droits, terres et possessions des chanoines,
se revêt ensuite des habits dont je viens de parler ; et étant botté» épe-
ronné, couvert d'un surplis, le baudrier avec l'épée par dessus, ganté
(1) Koy. les Preuves, t. iv, an 1423.
(2) Cette terre est au diocèse d'Autuu, à
trois lieues d'Avallon, du côté du midi. La
paroisse est du titre de saint Germain, éve-
que d'Auxerre.
DANS l'église d'auxerre. 499
des deux mains, ayant sur le bras gauche une aumusse, et sur le poing
un oiseau de proie, tenant de la main droite un chapeau bordé, couvert
de plume blanche, est conduit depuis la grande porte du chœur et ins-
tallé dans les hautes chaires du côté droit, où il reste pendant l'office.
L'incommodité de cet habit fait que le possesseur du canonicat n'assiste
pas souvent au chœur ; et comme sa prébende n'est point h la collation
de l'Ordinaire, mais héréditaire dans la maison de Chastellux, il s'écoule
souvent plusieurs années, sans qu'elle soit remplie. Ainsi, lorsque dans
la famille du possesseur de la seigneurie de Chastellux, les aînés étoient
occupés h l'armée ou ailleurs, la prébende restoit vacante jusqu*h ce
que la suite des temps pût déterminer quelqu'un à venir en prendre
possession. Voilà pourquoi depuis trois siècles qu'elle est créée, celui
qui en jouit aujourd'hui n'estque le huitième du nom. Il semble au reste
que ce qui fut prescrit pour le cérémoniel des sieurs de Chastellux
n'étoit qu'une imitation de ce que pratiquoit déjà le trésorier de Téglise
d'Âuxerre (i), comme un vestige du privilège dont jouissoient les an-
ciens protecteurs des biens du Chapitre. Il falloit même que cela (ût
alors assez commun dans les cathédrales, puisque dans plusieurs statuts
on trouToit quelque chose de semblable a ce qui se lit dans ceux Ju
Chapitre de TonI, de i491 , en ces termes : a Nobiles scutiferi et mi-
> lites, specialiter hujus ecclesie vassalli cum inirant chorum, admitti
» debent portare calcaria et arma, et collocantur inter archidiaconos et
» canbnicos, quia defensores sunt ecclesie pro débite sue nobilitatis.
> Et si eo tempore intraverint quo Gt distribulio... offerri débet eis gra-
» taita portio juxta discretionem officiarii. i» La place de M. de
Chastellux, dans le chœur de Saint-Elienne d'Auxerre, est entre la
stalle du pénitencier et celle du sous-chantre. Outre le Glossaire de
Ducange, uu mot Canonicus^ on peut voir, sur le droit de MM. de
Chastellux, les Mercures des années 1685, i701 septembre, i752
juin, 1758 mars et avril.
(1) Vay. Preuves, n© 354.
>«•
••-•.ta"!» j» :a.w
*»î • > ! . 1* I •£ ..- ' *Ti . . . \ -S.
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500
SEIGNEURS DE CHASTELLUX,
SEIGNEURS DE GHASTELLUX, CHANOINES D AUXERRE (a).
Claude de Beauvoir, seigneur de Chaslellux, Moni-Saint-Jean.
Beauvoir, Basoche, etc.« vicomte d'Avallon, maréchal de France, fat
pourvu de la préhende honoraire dans Téglise d*Àuxerre, en 1 423, pour
la raison que j'ai apportée (i). II étoit fils de Guillaume de Beauvoir,
capitaine de cinquante hommes d'armes et chambellan du roi, qui
mourut en 4401 et qui fut inhumé chez les Cordeliers de Vézelaj. Sa
mère s*appeloit Jeanne de Saint- Verain. Ce chanoine laïque fut si sen-
sible au don que le Chapitre d'Âuxerre lui fit, que, pour être plus k
portée d^assister à roflice de la cathédrale, il demanda à acheter une
maison du cloître pour sa vie seulement ; ce qui lui fut accordé en 1424
en payant le droit d'entrée comme les autres. En 4429, il parcourut
le diocèse d*Àuxerre pour les intérêts du duc de Boui^ogne (2) ; mais
une preuve que la ville d*Âuxerre ne devint point pour cela le Heu de
sa résidence ordinaire, est qu'y étant passé durant l'été de l'an 1457,
le Chapitre lui fil les présents qu'il avoit coutume d'offrir aux seigneurs
qui ne résident point. Et quoiqu'on voie, par un acte de 1444, que lui et
Marie de Savoisy, son épouse, payoient chacun an au Chapitre cent sols,
pour la maison qu'ils avoieni louée proche la porte Pendante, c'est-à-
dire la dernière du cloître, sur la rue qui conduit h Saint-Loup (b) , les
(1) Foy. les Mémoires pour THistoire ci-
vile d'Auxerre, à l'an 1423.
(3) Mémoire pour l'Histoire de Bourges»
pag. 215.
(a) La maison de Chastellux est l'une des plus anciennes de France. Elle établit
par des chartes de 1147 son existence et son illustration. Artaud de Ghastellaz, au
moment de partir pour la Terre-Sainte, avec Louis-le- Jeune, fit son testament en
faveur de Tabbaye de Régny.
11 est superflu de s'étendre longuement sur Thistoire de cette Maison, qui se trouve
dans les Grands officiers de la couronne du Père Anselme et dans les autres re-
cueils généraux. (N. d. E.)
{b) Cet acte indique qu'il n'avait pas encore payé U rente, car le Chapitre lui fait
remise de vingt années.
La maison est possédée à présent par M°^^ BaillC; et fait l'angle de la rue du
D éparteircnt et de celle des Grands-Jardins. (iV. d. E.)
CHANOINES d'aUXERRE. 501
comptes de riiôlel-de-ville d'Âuxerrc de la même année, marqueni
qu'il résidoit quelquefois à Colanges-les- Vineuses, et notamment Tété
i444. Après sa mort, son corps fut inhumé dans un lieu dont on a
perdu le souvenir. On verra ci-après en quel temps il fut transféré dans
la chapelle de saint Alexandre.
Jban de Chastellux, vicomte d*Àvallon, seigneur de Bazerne et de
Goulanges-les-Vineuses, est qualifié fils de Claude dans Tacte de sa ré-
ception marqué au 2 février 1469, dans les registres du Chapitre
d'Âuxerre. 11 étoit né de son troisième mariage avec Marie de Savoisy.
Il fut aussi chambellan du roi. Son épouse s'appeloit Jeanne d*Âulnay.
Dans un acte de la ville d'Âuxerre, du 12 avril 1467, il est dit sire de
Chastellux et de Courson ; et dans un compte de 1472, il est dit avoir
été en garnison au mois d'août dans Auxerre, pour le duc de Bourgo-
gne. Un fragment du registre capitulaire de 1485, au 50 mai, apprend
qu'il demanda aux chanoines d'Âuxerre une maison claustrale aux
mêmes conditions que Claude, son père, et on lui accorda celle de
défunt Gérard Rotier, maître en théologie. Le même jour, il demanda
à la compagnie que le corps de son père fût mis dans la chapelle de
saint Alexandre et que le sien y fût pareillement inhumé après sa mort ;
ce qui lui fut accordé. C'est ce qui me fait croire que c'est lui et non pas
Georges de Chastellux qui est représenté avec Claude, dans le mausolée
refait il y a environ cinquante ans, quoique l'inscription récente marque
que c'est la figure de Georges, amiral de France. Jean mourut avant
l'an 1490, suivant les Mémoires de la maison de Chastellux.
Philippe de Chastellux étoit né de Jean de Chastellux et de Jeanne
d'ÂnInay, vers Tan 1480 ou environ, et fut nourri enfant d'honneur du
roi Charles YIII. Il étoit marié dès l'an 1502, en secondes noces, à
Barbe de Hochberg. Ce fut sans doute après ce second mariage et lors-
qu'il se vit quelques enfants mâles, qu'il {)rit possession dn canonicat
d'Auxerre; mais la perte des registres du Chapitre empêche qu'on n'en
puisse fixer le jour ni l'année. Au reste, ce ne peut point être lui qui se
fit recevoir en 1554. On ne voit pas quelle raison il auroit eu d'attendre
pour cela l'âge de 54 ou 55 ans. Il fut aussi seigneur de Coulanges,
vicomte d'Â vallon, etc.
5(t2 SEIGNEUBS DE CHA8TBLLCX ,
Philippe de Chastbllux , fils de Philippe et de Barbe de Ho^berg,
fille do marquis de Rothelio, se fit recevoir chanoine d'Âiizerre le 18
juillet 1554, avant que les partages de la maison de Chastellax fosseot
faits. Il fut depuis seigneur de Bazerne, Prëgilbert et Sainte-Pallaie.
Quoique dans la généalogie imprimée chezHoreri, on ne le dise marié
pour la première fois qu'en i 560, je trouve que son épouse monrat à
Bazerne dès le mois de janvier 1 557, puisqu'il demanda alors ao Cha-
pitre d'Âuxerre des ornements à emprunter jpro faciendo servùto de^
funetœ tuœ uxoris (1). H eut de son troisième mariage, avec Marthe de
Gulan, Antoine de Chastellux. qui essaya, l'an i582, de se faire receToir
en sa qualité de fils du précédent possesseur de la prébende ; mais qui
ne le put, ii cause qu'il ne pôssédoit pas la terre de Cfaastelliix. Oo
ignore le temps de la mort de Philippe. Louis , son cadet « auquel la
seigneurie de Chastellux étoit échue ne se fit pas recevoir chanoine. II
mourut vicomte d'Â vallon, seigneur de Chastellux, Carrée, etc.
Olivier de Chastellux, après la mort de son oncle Philippe, seigoeor
de Bazerne, et celle de Louis, seigneur de Chastellux, son père, se pré-
senta au Chapitre, le samedi 20 octobre 1582, et fut admis ï la prébende
par préférence à Antoine de Chastellux, seigneur de Bazerne, dont le
droit étoit moins établi : il fut installé le lendemain dimancbe c au
> chœur de ladite église, aux chaises hautes du côté dextre, par discrète
> personne maître Droin Chaucuard chanoine et souchantre de ladite
» église, pendant les heures canoniales de Tierces : » ce sont les lermes-
de l'acte de sa réception (5). 11 épousa, en 1585, Marguerite d'Âmboise
dont il eut Hercule, César, Alexandre, etc., et mourut en 1617. Il fut
inhumé à Carrée. J'ai vu un acte de préseniation qu'il signa en 1569,
pour l'hôpital de Coulanges. Son attachement à Henri IV fil que, lors-
que la ville de Crevan fut réduite sous son obéissance en 1594, il en fut
établi gouverneur (a). .
(Ij RegisL Capit , 8 Jan,
Ii) Voy. les Preuves.
(3) Ex Àrchiv. D., De ChasteUux.
(a) Il en lit la remise au Chapitre d'Auxerre le 18 février 1598.— Archives de
1 Yonne. {N. d. B.)
CHANOINES d'aUXERRE. 505
Hercules de Chastellux, fils aioc d'Olivier, se présenta au Chapitre
d'Auxerre le 51 octobre i622, fut reçu et installé le même jour par
Denis Chappu, sons-chahtre« Ce fut lui qui fit ériger en comté la sei-
gneurie de Chastellux. Il avoit épousé, en i612, Charlotte le Genevois
dont il eut plusieurs fils. Ayant un procès contre Paul de Remigny,
seigneur de Jou, en 1642, il pria le Chapitre d*Auxerre d'intervenir;
ce qui lui fut accordé le 6 juin.
César-Philippe de Chastellux , troisième fils d'Hercule, devint
comte de Chastellux par la mort de ses deux frères tués au service du
roi avant Tan 1648. Il prit, la mémo année 1648, possession de sa pré-
bende héréditaire k l'âge de 25 ans. En 1649, on lui donna une attes*
tation de sa qualité de chanoine d'Auxerre, afin qu'il se fit reconnaître
a Tours comme confrère, par MM. du Chapitre de Saint-Martin. Il se
trouva présent avec ses habits singuliers, lorsque André Colbert fit son
entrée au siège épiscopal, le 5 septembre 1678 ; il réitéra le dimanche
50 mai 1685 et le lendemain, lorsque Louis XIV arriva à Auxerre, al-
lant \isiter son camp de la Saône ; ce qui attira Tattention de ce grand
prince. Il mourut le 8 juillet 1695.
Guillaume- Antoine de Chastellux, né du second mariage de César-
Philippe avec Judith Barillon, ayant survécu à ses frères, est devenu
comte de Chastellux. Il a épousé, le 16 février 1722, Claire-Thérèse
Daguesseau, fille d'Henri-François Daguesseau, chancelier de France.
Le canonicat héréditaire n'ayant point été rempli depuis Tan 1695, il
en a pris possession aux fêtes de la Pentecôte 1 752 , de la manière
qui est rapportée dans le Mercure de France du mois de juin de la même
année.
Sa longue carrière militaire depuis 1705, époque où il entra aux
mousquetaires, jusqu'à sa mort le 15 avril 1742, fut marquée par une
suite de travaux glorieux. Il combattit à Hochstedt, à Oudenarde en
1708, à Malplaquet en 1709, où il fut blessé. Il fut plusieurs fois em-
ployé à l'armée du Rhin. Il assista au siège de Philisbourg en 1754, et
obtint le grade de maréchal le 1^' août de la même année. Le roi le
nomma lieutenant-général le 1®' mars 1758, et il obtint la lieutenance
504 SEIGNEURS DE CHASTELLUX, CHANOINES d'aUXERNE.
générale da gûavernemeoi de Roussillon 'et le commandement dans la
province, pr provisions et commission da 9 décembre i 739.
* César-François, comte de Chastellux, fils du précédent, naquit en
1725. Immédiatement après la mort de son père, on obtint pour lui le
gouvernement de Seyne, et pen de temps après, le commandement du
régiment d'Auvergne et le grade de brigadier. Il ne prit pas possession
de son canonicat à la cathédrale. Il mourut a Fresnes, chez son aïeul le
chancelier d'Âguesseau, en 1749. Il avait épousé, en 4745, Olympe-
Elisabeth du Thil.
* Henri-Georges-César de Chastellux, fils du précédent, naquit à
Paris le 18 octobre i746. Il entra dans les mousquetaires de la garde
en i765, et devint successivement capitaine-commandant au régiment
de Royal-Piémont cavalerie , en 1765, colonel du régiment de Lyon-
nais le 18 mai 1772, puis passa au même titre au régiment de Beaujo-
lais en 177i. Il fut créé chevalier de Saint-Louis en 1781, brigadier
d'infanterie le 5 décembre de la même année, et maréchal de camp le
9 mars 1788.
Il avait épousé , en 1775, Victoire de Durfort-Civrac , fille de M. le
duc de Civrac, chevalier d'honneur de Madame Victoire, tante du roi.
Il devint lui-même titulaire de cet eqiploi en 1787. Le comte de Chas-
tellux a été en qualité d'élu général de la noblesse, administrateur des
Etats de Bourgogne depuis 1784 jusqu'en 1787.
Il assista à l'assemblée des notables à Versailles en 1786 et 1787.
Sous son administration et celle de ses deux collègues, MM. l'abbé
de La Fare et Noirot, maire de Châlons, la Bourgogne reçut de grandes
améliorations dans ses finances et dans ses travaux publics. Aussi en
1787, les Etats voulurent-ils témoigner bsuitcment leur reconnaissance
aux trois élus sortants, en leur votant h l'nnanimité un décret de remer-
ciement pour tous les résultats et les succès de leur administration.
M. de Chastellux manifesta, en i 787, l'intention de prendre possession
de son canonicat; mais, comme nous Tavons vu précédemment (1), ce
projet ne fut pas réalisé.
(i) Voy. ci-dessus, p. 368.
CORFRATERNITÉS DU CHAPITRE d'aUXERRE. 505
M. de CLasiellux accompagna pendant la révolution Mesdames
tantes du roi, dans les différents lieux qui leur servirent de retraite. Il
rentra en France en 1810, et mourut à Paris en 1814, au moment de
rentrée des alliés dans cette ville.
GONFRATERNIT&S DU CHAPITKE D'AUXËKKE,
AVEC DIVERSES ÉGLISES DU ROYAUME.
Les confraternités ou associations entre les Chapitres des églises
cathédrales, qui sont éloignés les uns des autres, et qui ne sont pas de
la même province ecclésiastique, sont ordinairement établies ii l'occasion
de quelque saint qui aura vécu ou qui sera mort dans un pays, et dont
les reliques auront été transportées dans un autre. Le clergé de ces deux
provinces éloignées honorant le même saint, a cru se devoir de mu-
tuelles marques d'amitié. Ces marques consistent ou dans une associa-
tion de prières, ou dans la participation des honneurs, et séance au
chœur de Tune et l'autre église, et souvent dans ces deux choses en-
semble.
Le Chapitre de l'église d'Âuxerre se trouve lié de confraternité de
temps immémorial avec ceux des cathédrales de Beauvais et de Bayeux
et celui de Saint-Martin de Tours (a). Il paroit par son Nécrologe du xi^
siècle qu'il étoit alors en relation de prières pour les morts avec les
chanoines de Langres ; car c'est d'eux qu'il faut entendre ce qui est dit
des chanoines de Saint-Mammès au 29 et 50 avril, et 8 novembre. Mais
(a) Le Chapitre avait également des rapports de confraternité avec les Chapitres
des autres églises de la province. Ce fut en 1648 que Ton proposa pour la première
fois cette institution. La confraternité avecTéglise de Troyes fut conclue le 4 juillet
1704. En 1728, MM. Leclcrc et Grasset, chanoines, étante Sens, pour Timpression
du Bréviaire d'Auxerre, furent reçus dans le chœur de la cathédrale par le Chapi-
tre. En 1783, même honneur fut fait à un chanoine de Nevcrs. — Voy^ Reg. des
droits honorifiques du Chapitre. Arch. de T Yonne. (iV. d. E.)
506 COlfFRATEBNlTÉS
cette sociéUs si jamais c'eo fut une , ne couiioua |K>int dans les siècles
soivants. Il n'y a que les trois autres églises, de la confraternité des-
quelles on trouve plus de vestiges. Je ne m'arrêterai point à décider
quelle est la plus ancienne de ces trois associations. Elles sont fondées
•
chacune sur le motif dont j'ai parlé. Celle de Saint-Martin de Tours
vient de ce que le corps du grand saint Martin fut réfugié k Anxerre
durant les guerres des Normands, à la fin du ix® siècle ; et de ce que le
clergé de Saint-Martin vint le reprendre solennellement au monastère
de Saint-Germain où il étoit en dépôt. Celle du Chapitre de Bayeox doit
son origine au transport des corps de saint Renobert, célèbre évéque de
Bayeux, et de saint Zenon, son diacre, dans la ville d'Âuxerre,^ Toccaéion
des mêmes guerres des Normands. Les ossements de ces saints, commis
à la garde de l'évéque d'Âuxerre , furent réfugiés dans son château de
Varzy, excepté une partie qu'on transporta en Franche-Comté. La por-
tion de reliques restée à Yarzy dans un cercueil de pierre, fournit ce
qui servit à la dédicace de la nouvelle paroisse, érigée dans la cité d'Au-
xerre au commencement du xiii^ siècle, sous l'invocation de saint Reno-
berl, sur le territoire de laquelle est une bonne partie du cloître du Cha-
pitre. La confraternité des chanoines d'Âuxerre avec ceux de Beauvais,
a pour fondement les reliques de saint Just, enfant d'Auxerre, qui à son
retour d'Amiens où son père Tavoit mené, lorsqu'il alla racheter un de
ses parents captif, fut martyrisé dans le diocèse de Beauvais, en un lieu
dit depuis Saint- Just. Son corps fut dans la suite transféré en la cathé-
drale de Beauvais, excepté la tète qui avoit été rapportée à Âuxerre, et
mise dans la basilique de Saint-Âmatre, et dont le reste des fragments
est conservé aujourd'hui dans la cathédrale (a).
Le plus ancien monument que j'ai découvert sur ces trois confrater-
nités regarde celle de Saint-Martin de Tours. Il paroit par une lettre du
Chapitre d'Auxgrre au Chapitre de Saint-Martin, de Pan 1515, que les
deux Chapitres renouvelèrent alors cette association, qui avoit été appa-
remment un peu négligée. L'évéque d'Auxerre a aussi une place dans
l'église de Saint-Martin, comme plusieurs autres prélats ; ce qui est
(a) Voy, Preuves. Nccrologc de la cathédrale au 18 octobre.-— S<iint-Ju5t est
encore aujourd'hui un des principaux saints du Bcauvaisis. [N. à. E.)
DU CHAPITRE d'aUXERRE. 507
fondé sur Hiisioire de la Translation du corps de saini Martin dont j*ai
parlé. Dans Téglise d'Âuxerre on fait chaque année un service pour les
chanoines de Saint-Martin de Tours décédés. On peut voir dans les
Preuves de ces Mémoires la lettre de 1515.
Je n'ai point trouvé de semblable lettre d*union du Chapitre deBayeux
avec celui d*Âuxerre ; mais les comptes de dépense du Chapitre d'An-
xerre au xiv*, xv* et xvi* siècles supposent cette confraternité. Pour
rendre ces Mémoires plus complets, je crois devoir en rapporter ici l^s
articles. On j verra que les chanoines de Bayeux ont eu non-seulement
les présents d'honneur en passant par Âuxerre, mais encore qu'ils ont
perçu les distributions des chanoines tant dans le chœur de Saint-Etienne
que dehors, en leur qualité de chanoines de Bayeux.
Ex Compoto kalendarum maii 1 562 : c Computat (camerârius) tra-
)» didisse de précepte Capituli duobus caoonicis Bajocensibus cuilibet
» V solides pro distributionibus suis. »
» Item eisdem pro sex panibns ('apituli, scilicet cuilibet très panes.
1 Valent iv sol. b
Ex Compoto anni 1598. « Pro enceniis faciis... Magistro Johanni de
» Monte deserti canonico Bajocensi xxi die februarii de septem pintis
1 vini rubei, pro qualibet pinta xv denarii , et septem pintis vini ]albi,
» pro qualibet pinta vni denarii , capti in taberna Guillelmi Mariette.
» Valent xiii s. v den.
Ex Compoto anni 1412. « Die jovis post Pentecosten pro xiii pintis
> vini confessori régis presentatis, pro qualibet x den. Valent x s. x
» den.
»
» Item eidem tanquam canonico Bajocensi pro suis distributionibus,
» vsol.
» Item dicta die pro sex pintis vini magistro Jo. ( Daguy ) , pre&en-
> tatis ad x den.
«> Item eidem tanquam canonico Bajocensi pro distributionibus per
1 dictosduosdies, x sol. » ^
Ex Compoto anni 1495. a Domino canonico Bajocensi in vino eidem .
j» preseniato ex parle Capituli soivi v. s. >
Ex Compoto anni 1520. c Pro vino presentato dominis canonicis.
» Bajocensibus transeuntibus m sol. iv den. »
508 CONFRATERNITÉS DU CHAPITRE d'aUXERRE.
Ex Compolo anni 1521. c Pro vioo presentalo Domino (Chanvraux) ,
» canonico BajoceDsî viii sol. >
En 1557 Guillaume Ândraull, chanoine d'Auxerre, voulant se faire
reconnollre k L'ayeux, demanda qu'on cherchât au trésor Tacte de la
confraternité qu'on disoit y être ; et on conclut sur cela le lundi d'après
le dimanche Judiea^ en ces termes : c Duplum collationis canoni-
» calus et praebendaB Bajocensis quod est in thesauro ut fertur, de
> confraternitate inier canonicos praebendatos ejusdem ecclesiae Bajo-
1 censis et canonicos praebendatos hujus ecclesiae Autissiodorensis
» fiet, et deliberabitur domino (Audrault) pro sibi serviendo prout
> jaris faerit et rationis (1). » Aussi Jean Grillot, chanoine tortrier,
rédigeant l'ordinaire de la cathédrale d'Auxerre vers Tan 1575, a-t-il
intitulé ainsi l'un des articles : a De confratriis quas habemus cum cano-
» nicis ecclesiae S. Martini Turonensis et Bajocensis. o
Le sieur Hermant, auteur de la nouvelle Histoire du diocèse de
Bayeux (2), fait mention de la même confraternité en parlant de saint
Exupère, premier évéque de Bayeux. c La mémoire de saint Exupère,
» dit-il, est aussi en grande vénération à Auxerre, parce qu'on y tient
» par tradition, qu'en venant d'Italie il passa par cette ville, et que ses
» habitants en reçurent de grands biens. C'est de Ih qu'est venu Tunion
» qui est entre l'église d'Auxerre et celle de Bayeux, qui fut renouvelée
» le 22 octobre de Tan 1520, par un chanoine d'Auxerr3, député de
1 son Chapitre, et qui reçut dans l'église de Bayeux les mêmes hou-
> neurs et les mêmes prérogatives dont jouissent ces chanoines. »
Mais cet écrivain se trompe sur l'origine de la confraternité des deux
Chapitres. Il n'y a aucune tradition ii Auxerre sur saint Exupère, et on
n'y a même jamais célébré sa mémoire, quoiqu'on croie qu'il y a passé ;
au lieu que le culte de saint Renobert y a toujours été fort célèbre au
moins depuis le commencement du treizième siècle.
Pour ce qui est de la confraternité avec l'église de Beauvais, elle pa-
raissoit avoir souffert quelque interruption, lorsque vers l'an 1650,
M. Duchaigne, chanoine de Beauvais, passant par Auxerre, y fut reçu
(1) Regisl. Capil. \ (2) In sacrist, S. Capcllœ Paris.
ÉGLISE COLLÉGIALE DE NOTRE-DAME-DE -Là-CITÉ. 509
comme un confrère par le Chapitre, avec place au chœur en habit cano-
nial. En 1659 les mémoires sur saint Justque M. Louvet, historio-
graphe de Beauvais, fit demander aux chanoines d'Auxerre/jprocurèrent
au Chapitre de Beauvais une lettre de celui d'Âuxerre, où les souhaits de
renouvellement de Tancienne confraternité ne furent point oubliés. Les
chanoines de Beauvais acceptèrent la proposition et déférèrent à ceux
d'Âuxerre l'honneur de dresser les articles de cette alliance (1). Pour
la réaliser, le Chapitre de Beauvais, \k Toccasion d'une lettre du sieur
Noël, chanoine d'Âuxerre, conclut, le 16 juin 1646, que*si le sous-
chantre ou autre chanoine d*Âuxerre venoit k Beauvais pour la fête de
saint Pierre, on lui rcndroit les mêmes honneurs qui avoient été faits
au sieur Duchaigne (2). Un autre article de Tassociation fut les suf-
frages pour les morts, et il se pratique encore exactement, c'est-à-dire,
qu'après le décès connu d'un chanoine de Beauvais, on chante dans
Téglise d'Âuxerre une grand 'messe pour le repos de son àme ; ce que
dans celle de Beauvais on fait réciproquement k la mort des chanoines
d'Àuxerre.
Je n'ai point parlé de celle qui est avec le Chapitre de Troyes ,
attendu qu'elle est très-nouvelle et formée presque de nos jours.
L'ÉGLISE COLLÉGIALE DE NOTRE-DAME-DE-LA-aTÉ.
Autrefois il n'y avoit guère d'église cathédrale qui n'eût un autel
sous l'invocation de la sainte Vierge. Par la suite le terrain de ces
églises s'étant étendu, on bâtit plusieurs édifices contigus, qui for-
moient tous ensemble la cathédrale, quoiqu'il n'y en eût qu'une seule,
savoir la plus grande, où fui la chaire de l'évéque. Pour l'ordinaire ces
édifices sacrés étoient du titre de Notre-Dame, de Saint-Jean-Baptiste,
et de quelque apôtre ou martyr. A l'égard de l'arrangement, il ne fut
pas toujours le même, car quelquefois l'église de Notre-Dame étoit au
(1) Voy. aux Preuves la lettre de M. Man-
guelen, chanoine de Beauvais.
(2) Voy. au même lieu la conclusion du
Chap. de Beauvais.
510 ÉGLISE COLLÉGULE
milieu des troi&^el quelquefois elle étoit la première du côté du sep-
tentrioo, en sorte que celle de Saint-Jeao tenoit le milieu, et celle da
martyr étoit du côté du midi. Cest de cette manière que les trois bâ-
timents étoient disposés à Auxerre. L'édifice de Saint-Etienne fut celoi
qui put plus facilement souffrir des accroissements, à cause qu*il éloit
moins i^oisin des rues publiques, et ayant été toujours en augmentant il
éclipsa presque entièrement au xv^ siècle Téglise ronde de Saint-Jean :
mais celle de Notre-Dame qui éloit plus éloignée subsista, et elle rebla
dans son ancienne petitesse, parce qu'elle bordoit le chemin qui con-
duisoii du haut de la cité k la porte pendante d'où Ton alloit à la rivière.
Ângelelme, ixxiv« évoque d'Âuxerre, en avoit fait revêtir Tantei
de tables d'argent vers Tan 820, et Héribald, son successeur, répara
les lambris, les peintures et les vitres : ayant été brûlée sur la fin do
même siècle, l'évéque Hérifrid la rebâtit et voulut y être inhumé. Cent
ans après lui, Héribert, aussi évéque, y eut pareillement sa sépulture.
Ayant été brûlée sous le règne du roi Robert et sous celui de Henri
son fils, Tévéque Hugues de Châlon commença k la construire de nou-
veau : l'ouvrage étant resté imparfait à cause de sa mort arrivée en
i059, ne fut consommé que par l'évéque Humbaud sur la fin du même
siècle, et en attribuant k Notre-Dame-la-Ronde , la dédicace marquée
au 18 janvier, dans l'ancien martyrologe d' Auxerre, il faut dire que la
dédicace de celle-ci fût faite le 29 avril. Quelquefois, en parlant de
l'église cathédrale d'Auxerre, les écrivains se sont servi de ces expres-
sions Sancta Maria et Sanctus Stephanus, parce qu'il ne convcnoit pas
qu'en exprimant les deux titulaires, le saint martyr fût nommé avant
la sainte Vierge. Cela est ainsi dans un titre de Tévcque Alain de Tan
1157]; et j'en ai vu un de l'an 1 127, qui regardoil l'église de Sens, où
le même ordre est observé. L'église de Notre-Dame d'Auxerre étoit
tellement regardée comme faisant partie de la cathédrale, qu'elle étoit
gouvernée avant le xii^ siècle par un prévôt qualifié chanoine-diacre de
Saint-Etienne. Le Nécrologe en fournit deux, Yalterius au 4 mai, et
Hugues au 8 novembre.
On ne sait pas si alors il y avoit dans cette église des chanoines dif-
férents de ceux de Saint-Etienne, et qui fissent une mense séparée. On
voit seulement qu'il cxistoit un Chapitre sous Tépiscopat de Guillaume
DE N0TRE-DAM6-DE-L4-CITÉ. 511
de ToDci qui commença Taiï 11G7, puisque ce prélat donna ^ ces cha-
noines Téglise deMerry-Sec et des droits sur celle de Blaineau (1). Hugues
de Noyers, qui lui succéda en 1185, fit agrandir le bâtiment de cette
collégiale, et en augmenta les chanoines et le revenu. En 1212,
l'évéque Guillaume de Seignelay régla leurs usages par rapport k l'église
cathédrale, touchant la croix et touchant leurs semaines, les fonctions
de diacres et sous-diacres aux grandes fêtes, l'article de leur inhuma-
tion et du serment qu'ils doivent au Chapitre. L'auteur de la vie du
même évéque, parlant k l'an 1218 du danger qu'il y eut de rester dans
Téglise de Saint-Etienne, dont on abattoit alors les vieilles tours situées
environ à l'endroit où est aujourd'hui la croisée, dit qu'on alla faire
l'office à Notre-Dame, « que de appenditiis ecclesie majoris existiit.i
Le bâtiment actuel de cette église est en plus grande partie un reste
de ce qui avoit été construit sous Hugues de Noyers, excepté le portail
qui est plus nouveau, et le fond ou rond-point qui n'est que du com-
mencement du dernier siècle. Les Calvinistes ayant abattu les voûtes
de cette église, et ruiné absolument le sanctuaire et le chœur, on prit
ce qui étoit resté de la nef pour servir d'église, et on abandonna la place
de l'ancien chœur qui sert aujourd'hui de passage. Samson-Ie-Fori,
chantre et chanoine, avec Droin Ghaucuard, chanoine, firent ce retran-
chement. De sorte qu'il y a grande apparence que les tombeaux des
évêques d'Auxerre, Hérifrid et Héribert I, sont encore sous les décom-
bres (2). Entre les chapelles de cette église qui ne subsistent plus , du
côté du septentrion, il faut compter celle qui fut construite sur la sépul-
ture de l'ecclésiastique que le prévôt de la ville avoit fait pendre contre
les règles (5), et que Guy deMello, évéque, ordonna de bâtir.
Il y avoit aussi anciennement à Notre-Dame-de-la-Cité une chapelle
de SaintrJean l'évangéliste, dont les revenus sont unis à la mense.
Pour ce qui est de celle de Sainte-Anne, la dévotion d'Etienne de
Doet, sous-chantre d'Auxerre à la fin du xni® siècle, y donna occa-
sion (4). 11 s'y établit depuis une confrérie qui subsistoit dès la fin du
XIV* siècle.
{V, Chron. Roberti S. Mariani.
{%) Voy. t. I deces Mom.,p. 418 et 247.
r>) ExCodicillo
(4) Voy, son arlicio au cttalogue dos sous-
cbanln\s.
512 ÉGLISE C0LLÉGI4LE DE NOT|lE-DAIIE-DE- LA-CITÉ.
Les Trinitaires ou Malliurins de Paris avoient aussi formé au der-
nier siècle eu cette église, une confrérie en l'honneur de la Trinité. Elle
fut admise par Jean Foudriat, vicaire-général de Tévéquc Pierre de Broc ;
mais quelques différends qui s'élevèrent entre ce prélat et les chanoines
de la cathédrale qui en étoient directeurs, la firent supprimer. Il n*en
est resté que le tableau qui se voit dans la nef proche la porte du
chœur.
Il n'y a point d'église dans Âuxerre où le clergé de la cathédrale aille
plus fréquemment en procession que dans celle-ci , et même autrefois
il y alloit encore plus souvent. Premièrement on devoit y aller tons les
dimanches de l'année, excepté pendant les octaves de certaines fêtes.
^^ Le matin du jour de Noél pour y chanter la messe de Taorore.
3<^ Aux fêtes de la sainte Vierge, et plus particulièrement à celle de
l'Annonciation qui étoit la plus grande fête, et ii laquelle la cathédrale
y chantoit la grand'messe. 4^ Le jour de Pâques et toute la semaine,
à vôpres (1).
Quoique les chanoines de cette église ne fussent chargés dès leur
origine que du petit office de la Vierge, ils observoient en tout ce qu'ils
pouvoient les rits et cérémonies de la cathédrale, jusqu'à placer même
de grands chandeliers de cuivre sur le bord du sanctuaire, ainsi que je
l'ai appris par la copie d'un fragment de leur Nécrologe où j'ai lu ce qui
suit : c Hac die S. Gregorii anno 1587 Ego Stephanus Bizoncii pres-
n byter oriundus de Oysiaco capellanus capellanie s. démentis» cano-
> nicus tortrarius et canonicus hujus ecclesie dedi liuic ecclesie B.
> Marie quinque magna candelabra cuprea galliçe de coivre unius simi-
> litudinis... empta Parisius... xxv francis. » Et pour ornement devant le
portail, il y avoit à l'exemple de la cathédrale un grand orme , à Tombre
duquel on tenoit certaines assemblées, comme faisoient les chanoines
de la cathédrale sous le leur (a).
(1) Regist, Capit,., 22 Aprillilï, ctvetera Procesa.
(a) Au xvrsiècle, les clercs du chœur de la cathédrale tenaient leurs assemblées
dans réglise Notre-Dame sous la présidence d'un grand chanoine. En 1548, il y
avait dix-neuf prêtres clercs et choriaux du chœur. {N. d. E,)
*.. 1 . *^ ^ _ . . . . ■*-%.•
DE NOTRE-DAMR-DE-LA-CITÉ.
515
Cette collégiale est composée de vingt chanoines h la tête desquels
sonl^e chantre et le trésorier, qui sont dignités, et dont j*ai cru pou-
voir insérer ici la liste autant que j'ai pu les découvrir.
TRÉSORIERS
Dl NOTBB-DAME-DB-LA-CITÉ.
Bonirace(a),mort vers Tan 1250,
selon rObituaire de la cathédrale,
où son anniversaire est au 27 no-
vembre, pour avoir légué un étau k
draperie.
Hubert vivoit en 1287, selon le
Cartulaire de la cathédrale.
Lambert de Balène, Tun des
exécuteurs du testament de Tévé-
3ue Pierre de Mornay, mort en
306.
Charles Givart est nommé dans
un titre de 1559.
Jean de Farselles, chantre, nom^
mé dans une commission sur le
traité de Nazarie, trésorier de la
cathédrale en 1 597 , 25 juillet ,
et 1598.
Jean Comniin,en 1451, suivant
un titre de Saint-Marien, où il est
dit commis par le Saint-Siège
avec Hugues de Noes, doyen. Ses
provisions de Rome étoient de la
dixième année de Martin Y.
Adam Bohier mort en 1471 . Un
article de son testament excita de
grands troubles entre les deux
Chapitres, au sujet du luminaire.
CriANTRES
t
DR notub-dame-de-la-cité.
Isembard, mort avant Tan
1250, puisque son anniversaire
est dans Tobituaire écrit alors, au
24 décembre.
Âmaury vivoit en 1250. Nicrol.
cath. 4 déc.
Robert de Monélau. Il étoit
mort avant Tan 1257, selon un
acte du carlulairc de la cathédrale
fol. 17G. Son anniversaire est dans
Tobituaire de 1250, par addition
au 10 septembre.
Jacques , trésorier de Noire-
Dame et vicaire de Tautel Saint-
Eloi en Téglisc d'Âuxerre, vendit
en 1255 au Chapitre de la cathé-
drale, du conseutemenl de Tévéque,
une place située sur la paroisse de
Saint-Renobert, qui appartenoit h
sa chapelle. Cartul. cathed. f. 124.
Thomas Charsalée donna en
1276 k Tabbaye Saint-Germain,
six arpents de vigne situés k Orgy.
Il étoit décédé eu 1285. Car t. ca-
thed. fol. 55.
Mathieu de Monceaux étoit tré-
sorier en 1500.
Hugues Pilleavoine vivoit en
1 558. Sent, arbitr. sur les tortriers.
(a) Philippe est nommé chantre dans une charte de Tan 1222 en faveur de Pon-
tigny. — Venouse. {N. d. E,)
II
o5
:.-i
oU
ÉGLISE COLLÉGIALE DE :«OTRE-DAXE-DB-LA-€ITÉ.
(|iril aaroit voula qu*on partageât ,
ot qui fut cDlièrenient pour la ca-
ihédrale.
Raoal , Cher-ile-ville . rëioit en
IbOl et iolo.
Denis Cassin, en ioUn el mou-
rut en 1550.
Claude Liron, en 1545.
Etienne Desoliam|)s, en 1558.
Il é 10 il secrétaire de M. de Lenon-
court, évèque.
Jean Paydei, mort le il lévrier
1504. Il étoit Chàlooois. Après sa
mort, le Chapitre, sede vacante,
nomme le sous-chantre de la ca-
ihétlrale i}ui refusa.
Samson Lefori , natif île J»ign\\
mon en IH07. Il est inhumé an
sanctnnire.
Droin Chaucuard fut re^u le iî5
novembre 1600.
Eilnie Thierriat. Il permuta avec
le suivant.
Godefrov do Lucenav, oncle («'.
Jean de Blois« ea 4356,
un titre que j'ai vu.
Guillaume Moatoo. Il éioît
avant Pan 1400.
Jean de Maray vivoit ea liOl.
Renaud le FoDiaine, profi
en théologie. Ex yecroL B. Jh-
riœ 1 4 oc t.
Jean Sauljot, en lotietloST.
Pierre TournemoUe, chanoitt
delà cathédrale, éloil trésorier le
5 septembre 15-i8. Reg. cadmL
Jean Sevin . aussi chanoiiie <k
la cathétirale en 15o2 el loofi.
Linrent Normand , en 1366 ei
I%> ■* «•
Pierre Thion, en 1 588.
Edme Guillaume. Il fit Gùr b
nouvelle abside de réj2;lise avec le
autres ci-ilessus nommés. Il ohm-
rut en 1<K>7. Il est inhumé prod«
la sacristie.
Guillaume de Marende, 1611
Edme de Rigny, iG26.
Gaspard Bargedé, en 1652, e
résigne au suivant.
a, C'est .111 premier des deux Luc en. i y qu'il faut attribuer la tombe qui se tiov
dans le bas eî^tc méridional du chœur de la cathédrale d^Auxerre. Oa v Ut oril
épitaphe en jeu:^ de mots :
(iODEFlIDVS DE LVCE3IAV
DE LVr.K ?liTVS
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ET B. MARLE CIVITATE 4:A?(T0R
oBirr iD. XAar. i.i:iio.
M. DC. LVll.
.V. j: e.]
ÉGUSES d'auxerre. 515
Godefroi de Locenay, neveu el Gervais Housset résigne au sui-
résigoataire du précédent, meurt vaut,
en 1705. Laurent Frappé reçu en 1676,
-, . ^, 1 ^. mort curé de Saint-Renobert le 2
François Chazeray de Gien, octobre 1699
(1714, 1729), résigne au sui- -JeanMaricvicaire-général^reçu
^°^- en 1684, démissionnaire, 1685.
Claude de Maulnorrj, écuyer de * Joachim Cleriault, nommé le
Paris, reçu en 173z. Mort en 19 janvier 1686.
1762. Laurent le Seurre, en 1703,
• r»i j ï\ ' irrsà aa décédé Ic 26 juillet 171 1.
aandeDore en ii62,dé- j^a^ _ Baptiste Taveauk de
missionnaire en 1 766. ^^^^^ ^^^^^ ^„ ^ 743
* Louis-Jean Va ultier, de 1766 " Etienne Leroy, chanoine de
3il787. Sl-Ëlienne, succède au précédent.
Ducrot,del768lil789.
—i^^^^rf^
SUR LES QUATRE ÉGLISES ET COMMUN ALTËS DAUXERRE,
APPELÉES COmfC.XÊXEKT LES QCATBB FILLES DE LA CATHÊDBALE.
Il est assez commun dans les villes épiscopales de voir certaines
^lises plus particulièrement liées avec la cathédrale ; et même il y en a
plusieurs où Ton donne le nom de fliles à ces églises, parce qu'elles
sont censées élre émanées de Téglise-mère, qui est la cathédrale et prin-
cipale de la ville. L'église d'Auxerre en a quatre, desquelles je me suis
proposé de parler en particulier. Ces quatre églises n'ont pas toujours
été desservies par des chanoines réguliers, ainsi qu'on a pu voir dans
l'histoire des évéques : aussi un chanoine de la cathédrale en étoit-il
abbé ou prévôt, k peu près comme on voit encore de ces sortes d'abbés
subsister en certaines villes épiscopales , et de la nature des abbés de
quelques collégiales (1), qui sont encore existants. Mais il faut observer
que les évéques d'Auxerre y plaçant des chanoines réguliers, les tirèrent
de quatre maisons d'observances ou constitutions difTérentes, quoique
toutes de l'ordre de Saint-Augustin, savoir de l'abbaye de Prémontré,
.1) Château>Censoir. Cervuo.
51 G ABBAYE
de celles de Saiot-Viclor de Paris, de Saiot-Satur da Berry, et de Saint-
Laurenl proche Cosne , voulant apparemment connoitre quels seroieot
les plus réguliers, et exciter parmi eux quelque sorte d'émulation.
Gomme toute supériorité exige certains devoirs, les chaDoioes des
quatre communautés soumises k la cathédrale, sont tenus d'assister aux
processions que Téglise-mëre fait, et ils marchent à la tète du clergé,
excepté dans une partie des processions des Rogations, où dans le temps
qu'ils chantent seuls ils sont placés k Textrémité de la procession, afin
d'être k portée du peuple i|ui répond à leurs litanies, le clergé de la ca-
thédrale gardant alors le silence. Ce livre n'éiant point un cérémonial,
je me borne k ce trait du processionnel qui peut paroltre singulier.
Avant que de rapporter ce que j'ai h dire sur chacune des quatre
communautés, je dois m'excuser de ce que je ne donne point dans ce
présent ouvrage d'article particulier de Tabbaye de Saint-Germain. J*ai
cru pouvoir m'en dispenser, parce que ce monastère sur lequel la ma-
tière est abondante, est plus connu que les églises dont je vais parler:
ayant produit des religieux qui ont fourni au public des mémoires sur
son antiquité , comme don Georges Viole en sa Vie de saint Germain
imprimée en 165G, et don Dominique Fournier en sa Description des
Grottes de la même église qui a été publiée en 1714, sans compter ce
qui en est répandu en différents endroits des œuvres du père Mabillon ;
au lieu qu'il n'a jamais rien paru, au moins en notre langue, sur les
églises de Saint-Marien , de Saint-Père, de Saint-Amatre et de Saint-
Easèbe, qui sont les quatre filles de la cathédrale d'Auxerre.
DE L'ABBAYE DE SAINT-MARIEN.
Cette abbaye est regardée comme la première fille de la cathédrale
d^Auxerre (a) , avec d'autant plus de raison qu'elle représente le plus
ancien monastère du diocèse. Il ne faut, pour s^en convaincre, que la
(a) Malgré cela les abbés du xv« sièdes'intitulent Gèrement «subgetz sans moyen
au Saint-Siège de Rome.» — Arch. de Saint-Marien, préfecture de l'Yonne.
(N. d. E.)
DE SAINT-MARIEN. 517
considérer dès son origine. Saint Germain est le premier de nos évéques
qui bâtit un monastère. Cette maison éloit située presque sous ses yeux,
vis-h-vis Tangle de la cité romaine, de l'autre côté de la rivière. Saint
Aloge qu'il y établit abbé, eut pour successeur saint Mamertin, dit
Mamert par abréviation ; et sous ces deux abbés s'y sanctifia saint Ma*
rien, qui vei'loit sur le temporel du monastère, lequel porta depuis son
nom en place de celui de saint Côme. Cette abbaye éloit tombée sous
Charles-Martel entre les mains des laïques; mais Charlemagne la restitua
\k Tévêque Âaron. Comme les guerres des Normands firent craindre pour
tout ce qui étoit situé hors les murs de la citéd'Âuxerre, ou hors du château
de Saint-Germain, il y a apparence que ce fut alors que les religieux se
retirèrent au monastère de Saint-Germain avec le corps de saint Marien,
et que l'évéque fit transporter en sa cathédrale celui de saint Mamert.
Ce lieu, sanctifié par les retraites de saint Germain , et par la demeure
de tant de saints (1), comme saint Patrice, saint Savin, saint Valéry,
etc., n'étoit plus connu au xii® siècle que par une petite chapelle ou
autel du titre de Saiut-Germain qui rcstoit parmi les débris, lorsque
Ithier, clerc de la cathédrale, entreprit de relever ce monastère. Il en
vint h bout, et le pape Innocent II s'éiant trouvé à Âuxerre en consacra
Tautel, et prit pour texte du discours qu'il y fit, ces paroles : « Vere
> locus iste sanctus est, et ego nesciebam. » Mais les bâtiments néces-
saires pour y remettre des religieux, ne furent achevés qu'en 1138.
Alors Guillaume, comte d'Âuxerre, pressé par l'évéque Hugues et par
Ithier, obtint de Hugues , successeur immédiat de saint Norbert dans
l'abbaye de Prémontré, une colonie de religieux de ce nouvel Ordre, qui
fut conduite par Raiuier, prieur de la maison.
L'évéque d'Âuxerre leur avoit donné entr'autres choses l'église de
Saint-Martin, reste d'un ancien monastère de filles; mais quoiqu'ils en
fussent fort voisins , ils ne purent d'abord s'étendre jusque-lb , parce
qu'on ne vouloit pas les accommoder du terrain d'entre deux. Le même
évêque, du consentement de son Chapitre» leur donna l'église de Notre-
Dame hors les murs, dite alors Notre-Dame-la-Ronde, où il y avoit des
chanoines séculiers, et ils s'y retirèrent croyant être plus au large :
(1) Vita Patritii Hibern. F. Sar«i. Pictav. Valar» Leucon Àbb.
518 ABBATE
duraul le séjour qu'ils y flrenl, ils transporlèreol les lieux r^oliers do
cdté méridional au côté du se|iteDlrioQ (1). Pendant qu*ils étoient en ce
lieu, ils vinrent ^ bout de se bâtir tout à neuf et fort au large, à l'eodroit
où étoit Téglise de Saint-Martin, en quoi ils furent aidés du comte qaî
leur procura le terrain nécessaire.
Ce troisième monastère étant presque achevé en il 69 (2^, ils s'y
rendirent en procession, laissant seulement quelques-uns d'entr^eax
dans celui de Notre-Dame-la-Ronde, pour gouverner le peuple, qaî dès
lors y formoit une paroisse^ et pour ce qui est du petit nombre d'habit
tants voisins du monastère de Saint-Maricn, ils eurent leur autel dans
la nef de la nouvelle église. Ce fut en ce dernier monastère que se re-
tira Rodulfe, riche trésorier de la cathédrale. Il fut le premier inhumé
dans Téglise au côté droit du sanctuaire. L'évéque Guillaume de Tonci
ayant voulu mourir parmi ces religieux, qui étoient dans leur première
ferveur, fut inhumé en 1181 de l'autre côté. Robert Abolant, savant
lecteurde la cathédrale, yprit Thabit en 1205(5), et y finit la chronique
qu^il avoit commencée pendant qu'il avoit les archives du Chapitre en
sa garde. On peut voir dans les Preuves, (4) ii combien d'inondations ce
monastère fut sujet.
Ces accidents n'obligèrent point ces religieux d'en sortir. Mais les
guerres des Anglois étant survenues en 1558, ils se retirèrent dans
leur prieuré de Notre-Dame-Ia-Ronde, que Ton continuoit d'appeler
Notre-^Dame hors les murs , quoiqu'il fût enfermé dans les murs bâtis
depuis deux cents ans. Ils y demeurèrent jusqu'en 1575, puis retour-
nèrent dans leur grande maison, qui restoit seule au-deik d^ l'eau,
parce que la petite rebâtie par Ithier avoit été abattue, de crainte que les
Anglois ne s'en servissent de retraite pour assiéger la ville (5).
Ce pelil monastère des Prémontrés, silué vis-à-vis la fontaine de
Saint-Germain , ne fut plus reconnoissable que par une petite chapelle
du titre de Saint-Côme et de Saint-Marien , proche laquelle étoit un
verger dont l'abbaye fit un bail le 2 juin 1479. Un autre bail du 5 avril
(1) Voy. ceci plus au long à l'article de
saint Vigile, p. 159 et 160, t. i.
(2) Chron. Roberti,
(3) Voy. Preuves, n© 100.
(4) N« 98.
(5) Epitome Episc. Autiss. in S. Desiderio.
DE SAINT-MARIEN. 519
1550 fait mention « d'un jardin situé au champ Saint-Côme et ancienne
» situation du monastère, tenant d'un long h la chapelle Saint-Adrien,
> cl par devant h la rivière. » En 1547, le derrière de ce jardin con-
finoit k une maison qu'Etienne Gerbault tenoit de Tabbaye de Saint-
Marien. Ce particulier, receveur pour le roi h Auxerre ayant fait une
plus ample acquisition le long de la ruelle Sainl-Côme, y fit bâtir un
château qui fut appelé la Basse-Maison, duquel Belleforét a donné la
représentation en la Cosmographie. Il en est aussi parlé dans les regis-
tres du Chapitre (1). Mais elle fut détruite du temps des guerres de la
Ligue, en sorte que le nom de Gerbault n'est resté qu'à la place appe-
lée le Port'GerbauUj proche laquelle les anciens ont vu les restes de la
chapelle de Saint-Adrien , et devant laquelle la rivière fit découvrir
beaucoup de tombeaux l'an 1697. De temps immémorial la cathédrale
ayant passé le pont le mardi des Rogations, se rendoit au monastère de
Saint-Marien, primitivement h Tancien où saint Germain a demeuré,
et depuis au nouveau Saint-Marien; et de là on alloit à Saint-Gervais par
'a ruelle Saint-Côme.
Les Prémontrés ayant quitté leur grand monastère du temps de Tir-
ruption des Calvinistes, se retirèrent à Nolre-Dame-la-d'Hors, et comme
ce qui en étoit resté pouvoit encore préjudicier h la sûreté de la ville,
on les obligea de l'abandonner entièrement vers l'an 1590 {a), et on
le fit sauter avec la poudre, ne laissant pour mémorial que l'arcade
du sanctuaire (2). La demeure fixe des religieux de Saint-Marien au
prieuré de Notre-Dame-la-d'Hors, lui donna quelquefois depuis le nom
de 5atn(-Jfanen. Ils employèrent une partie des démolitions du grand
monastère pour se bâtir ; en jetant les fondements du dortoir, Tan
1608, on trouva le cercueil d'un payen dont la tête étoit toute entou-
rée de lampes sépulcrales (5).
(1) 22 mai 1767, 15 mai 1589. j (3) Ex P. Steph, Chancy.
(2) Ex relatu P. Thevcnon testis oculati. |
(a) C'est en 1570 et non en 1890 que cette destruction eut lieu. Ccst ce qui ré-
sulte d'une délibération des habitants d'Auxerrc du 13 février 1870, ordonnant que
les bâtiments et murailles de Tabbaye de Saint-Marien seront rasés et abattus dans
quatre jours de délai. — Arch. de TYonne, fonds Saint-Marien. (iV. d. E.)
520 ABBÉS
L*abbé el la commuoaaté de Sainl-Mariea, jouissenl d'uoe prébende
dans Téglise caliiédraie, qui lear fut donnée par Tévéqae Hugoes de
Micon, eu sorle qu'ils sonl tenus, élanl inlabniés pour leur semaine et
avenis par les enfants de cbœur, d'envoyer un d'entr'euz pour la graod'-
messe du chœur. Ils ont outre cela des messes i acquitter k Taolel de la
comtesse pendant une bonne partie de Tannée. La place des religieux
aux jours des processions et autres assemblées , est dans les stalles
basses du côté droit. Leur tour, pour soulager le clergé de la caihé-
f drale dans le chant des litanies aux Rogations, est le mercredi, jour
auquel la procession est plus longue el plus solennelle.
ABBÊS DE SALNT-MARIEN (a).
Le B. Rainier, disciple de saint Norbert, envoyé en ii59 à Aaxerre,
gouverna la nouvelle maison de son Ordre, tant au bord de TYonne
qu'il Notre-Dame-la-Ronde pendant six ans et quelques mois. Il mou-
rut en ii46, ii Provins, le 28 février, retournant de Prémontré.
Bertolde, originaire de Cologne, mourut au commenceinent de
février H47.
Osbert ayant été buit ans abbé, abdiqua celle dignité eu 1 155.
MiLON de Trainel. Voyez sa vie écrite par Fauteur de la Chronique,
son contemporain (1). Ce fut lui qui fit bâtir le grand monastère de Saint-
(1) Voy. Preuves.
(a) L'abbaye de Saint-Marien, protégée par les comtes d'Auxerre, obtint dès le
xii* siècle de nombreux privilèges. Le roi Louis-le-Jeune lui accorda en 1163 une
exemption générale d'impositions et de taxes sur les marchandises, excepté le sel
et les cuirs. Charles VIII conGrme cette charte en 14S4. Les religieux profitant de
cette facilité faisaient conduire et menaient eux-mêmes, au xiv» etau xy« siècle,
leurs produits à Paris, tels que les vins, les bestiaux, les huiles, le lard salé, etc.>
et les vendaient en gros et même en détail sans payer de droits.
L'abbaye avait droit de basse justice dans l'enceinte du monastère et aax alen-
tours. Elle avait au xvii* siècle un bailli général pour 1» justice de toutes les terres.
(^V. d. E.)
.;;-__ wq_,
DB SAINT-MARIEN. 521
Marieu sur les ruines Je rancieone église de Saiot-Marliu, et qui com-
mença a y former une bibliothèque. Il écrivit k Louis VII au sujet de
la ville neuve, que ce prince faisoit bâtir en partie sur leur domaine,
entre Sens et Joigny (i), c'est-k-dire, sur celui qui dépendoit des sœurs
de leur Ordre qu*il avoit établies k Val-Profonde dans la foret d'Othe. II
mourut le i7 mars i203.
Bernoal, prieur de la maison, fut fait abbé et ne siégea que trois ans
neuf mois.
Norbert fut élu au mois de décembre J 209, et siégea jusqu'en 1222.
Parmi les lettres de Gervais, abbé de Prémontré, la 67* fait mention
de lui (2). On y lit que la maison de Sainl-Marien passoit pour être
endettée, et que mal k propos quelques-uns vouloient qu'avant* d'ac-
quitter les dettes, on bâtit le réfectoire des convers. La 126® lettre
marque que J., sous-prieur de Saint-Marien, refusoit d'accepter Pélec-
tion faite de sa personne, pour abbé du Lieu-Dieu-en-Jard au dio-
cèse de Poitiers, maintenant de Luçon. Voyez aussi la 68®. Norbert
régla en 1220 avec l'abbé de Saint-Laurent, que les maisons de la rue
de la porte d'Eglény ne seroient plus alternativement de Notre-Dame et
de Saint-Eusèbe, mais que tout un côté seroit de Saint-Eusèbe et
l'autre de Notre-Dame.
Rainier II fut présent en 1223 k une sentence rendue k Sainl-Fer-
geau contre Dreux de Mello, en faveur de la cathédrale.
HuLDERus est nommé en 1259 dans une charte de Gauthier, arche-
vêque de Sens, touchant Taccord des habitants de Bassou avec le curé
de Bonart (5). Quelques-uns l'appellent Hugues.
Guillaume vendit au Chapitre d'Auxerre, en 1246, une maison au-
dessous des murs de la cité (4).
Etienne, abbo de Saint-Paul de Sens, fut élu abbé de Saint-Marien,
(1) Voy. Preuves, p. 32, col 1, p. 34, col.
1. Duchéne, t. iv. Il s'agit de Villeneuve-le-
(2) Script. Ord, Pram. apud Hugo,
(3) Archiv. S. Mar.
' ^ ' '^'^rtit, et ad an. 1247.
522 ABBÉS
et préseolé ii Tévéque Gui de Meiio, en 1250 (1). Il fil en 1257 remise
(l^uoe petite rente que ie trésorier de la cathédrale devoit sur deux
places (2).
Gderric, bourguignon de naissance, étoit abbé en 1264. Il
assista cette année avec Gui de Mello, évéque d^Auxerre, a la vérifica-
tion des reliques de sainte Marie de Béthanie qu*on rcgardoil comme la
Magdeleine, faite alors à Vézelay en présence de saint Louis (5). On le
trouve en des titres différents jusqu'à Tan 12G9 qu'il fui élu abbé de
Prémontré (4).
Jean est nommé dans des actes de 1288, sur les babiianis de Beau-
mont. Il fut présent en 1281 a Thommage du comte de Flandre (5).
Il est aussi au cartulaire du Chapitre eu 1287.
Henri fut élu en 1291.
Martin est nommé dans un arbitrage pour le Chapitre d'Âuxerre en
1302 (6).
Henri II assista, en 1305, au Chapitre général de Prémontré, où il
obtint de l'abbé Adam un logis pour lui et ses successeurs.
Hervé fit en 1311 un échange avec le Chapitre d'Âuxerre (7).
Martin fut témoin, en 1320, de la visite que Tévéque Pierre des
Grès fil de la châsse de Saint-Amatre. (8).
François fut choisi, en 1322, pour arbitre dans une affaire du sei-
gneur de Mello.
Etienne II fut l'un des principaux du clergé qui s^obligea avec les
habitants d'Auxerre, en 1358, envers les religieux de Saint-Germain,
pour la rançon de la ville. Item en 1360 sur la même affaire, le couvent
étant alors retiré h Notre-Dame-la-d'Hors.
Jean II transigea, en 1364, avec Etienne de Chitry, abbé de Saint-
Germain, On le trouve dans des actes de 1369 et 1372. En 1380, Tab-
baye de Saint-Marien transigea avec le Chapitre d'Âuxerre, sur la rede-
(1) Àrchiv. Epis.
(2) CartuL Capit.
(5) De Launoy. Disq. de Magd.
(4) Hist. de Meaux, pag. 463.
(5) Voy. Preuves, n» 228.
(6) CartuL Capit,
(7) Car lui. Capit., f. 37.
(8) Voy. Preuves, l. iv, ii. 91
DE SAINT-MARIEN. 5^5
vaoce du paiu à chanter. Je pense qu'il est le même dont on découvrit
la tombe soub les ruines de l'église en 1704, dans le côté méridional de
la croisée qui séparoit le chœur d'avec le sanctuaire. J'y lus alors cette
inscription : « Hic jacet Dominus Jobannes (Col d'argent), abbas bujus
» monasterii qui recte et laudabiiiter rexit istam ecclesiam , et obiit
» anno m cccc secundo, duodecimo die februarii. » Au milieu de la
tombe éloit figurée une main droite tenant une crosse. Cette tombe est
aujourd'hui dans le chœur de la petite paroisse de Saint-!\Iarien.
Richard Colas, curé de Notre-Dame-la-d'Hors, fut béni abbé de
Saint-Marien en 1402, par Tévéque Michel de Creney, dont il y eut
acte du 2 avril [à). Il garda encore un an sa cure que son successeur
voulut démembrer de Saint-Marien. En 14i0, le 25 janvier, il étoit au
Chapitre d'Auxerre pour l'élection d'un gouverneur ecclésiastique de
l'Hôtel-de-Ville. Il fut élu pour l'être, et le fut réellement en 1411 et
1412 (1). Il fut présent, le 5 mai 1406, lorsqu'on mit des reliques au
haut du superbe clocher, qui étoit alors h Notre-Dame -la-d'Hors. Il
mourut le 13 novembre 1419, selon le Nécrologe de la même église.
Sa tombe fut retrouvée sous les ruines, en 1713, devant la chapelle la
plus méridionale de la croisée, et portée h Saint-Martin, où on lit encore
ce qui suit : c Continet hsec tumba venerabilis ossa Richardi Golassi
> pastor istius Ecclesiae. Qui fuit et vixit per denos.... Qua die eccle-
> SIX sacra dicatio fit. » La tombe de Jeanne, sa mère, est aussi dans
la même églibC.
Pierre Aurard fut excommunié par Tévéque Philippe des Essarts,
pour n'avoir pas comparu au synode de l'an 1423, et fut absous ad cati-
telam quelques années après par l'abbé de Sainte-Geneviève, conser-
vateur des privilèges de l'Ordre de Prémontré. En 1433, il fournit des
hommes et des chevaux pour le siège de Brienon formé par Philibert
(1) Voy. Preuves, t. iv, n. 38.
(a) Il eut de grands débats avec ses moines, et fut môme excommunie par le
commissaire du pape en 1405. — Arcb. de l'Yonne, fonds Saint-Marien.
(iV. d. E.)
52 i ABBÉS
de Vaudré, gouverneur d'Auxerre (1). Il assista en 1449 à l'cnirée de
Tévéque Pierre deLongueii. J'ai découverl le H mars 1716 sa tombe
sur les ruines de la croisée méridionale devant la chapelle la plus
proche du sanctuaire, et j'y ai lu ces dix vers autour de la figure qui
le représente en chasuble avec le calice et la croise.
£gregie famé duru sub silice dormit
Vir Petrus Aurardi moribus ingenuus.
Annis trigentà septem quondam fuit istc
Archimandrites istius Ecclesie.
Mille quadringenti quinquaginta quoque seni
Martis et ipse dies ordine vicesimus.
Ilac sub bumo Petnim gelida clausere nepultum
Dum mors in tbalamo poscit amara suo.
Claustrali sancte quem dat sua cura Marie
Spiritus in celis gaudeat empireis. Amen.
Ainsi il mourut le 20 mars 1456.
Jean Veraudat, natif d'Âppoigny, parvint au siège abbatial en 1457.
En 1461, il demanda au Chapitre d'Âuxerre d'être exempt de venir,
cette année, à la procession de la Fête-Dieu (2) ; il lui fut répondu qu'il
n'y avoit que dans le cas des inondations et du mauvais temps qu'il en
éioit dispensé. Il fonda en 1468 l'office de sacristain. En 1470, Simon,
abbé de Prémontré, accorda les prières de TOrdre à ceux qui contri-
bueroient k la réparation de Saint-Marien (5). L*abbé Jean afferma les
dîmes de Notre-Dame-la-d'Hors, par un acte fort détaillé, où il est dit
que du côté de Saint-Georges, vers Yillefergeau, elles approchoienl
d'un vieux chemin ou fossé, au lieu dit la Fontaine salie. Il fit eu 1472
un traité avec les habitants de Notre-Dame-la-d'Hors, touchant les
usages de la paroisse, les charges et dépenses, etc. (4) Il fut commis,
en 1476, pour indiquer aux religieux de Dilo le jour de l'élection d'un
abbé, après la mort de Jean Adenet. H fut gouverneur ecclésiastique de
rHôtel-de-Yille, en 1477 et 1478. Il mourut le 15 août 1479. Sa
tombe qui étoit au milieu de la croisée de l'église, vis^-vis le grand
autel, est aujourd'hui \x Notre-Dame-la-d'Hors, proche la porte qui
(l) Comp. Urbis Àutiss,
(i) Regist. Capit.
(â) Cod Rcg.Suec,'22S, in Valic.
,4} Ex aulographo.
DE SAINT-MARIEN. 525
cooduil au cloitre, où son épitaphe en prose est très-lisible et sa repré-
sentation bien conservée.
Jean Bourgeois, sous-prieur, fut élu abbé le 51 août 1479, et béni à
Paris, par l'évéque d'Auxerre Jean Baillet, le 24 octobre. Il assista en
1485 au concile provincial de Sens (1). Se sentant infirme en 1496, il
se fit choisir un coadjuteur le 2 mars, et il mourut six jours après. Il fut
inhumé proche la grande porte du chœur de Saint-Marien, en entrant à
main droite, où sa tombe a été trouvée brisée en deux sous les ruines.
Tan 1755 Voici ce que j'y pus lire autour de la figure, qui le représente
en habits pontificaux, la tête nue : c< Hic jacet Rev. in Christo pater
> Johanncs is trauquillus moribus, amansque quietis ; corripiens»
» oleum vino roiscebat, eratque sub pietate gravis, sub gravitate pius,
» qui hoc cenobium spatio septemdecim annorum cum dimidio lauda-
> biliter pieque rexit;Obiit anno MCCGG nonagesimo sexto, die vero
> viiij martii. >
Nicolas Joannis, d'une ancienne famille d'Auxerre, étoit sous-prieur
lorsqu'il fut choisi pour coadjuteur et successeur du précédent. Comme
il fut fort zélé pour la règle, le Chapitre général de 1498 et l'abbé de
Prémontré, en Tan 1511, rétablirent réformateur d'un très»-grand
nombre de maisons. Il fut gouverneur ecclésiastique de THôtel-de- Ville,
en 1518. Il mourut le 51 octobre 1542, ainsi que l'écrivent ceux qui
Tout lu sur sa tombe qui ne se voit plus maintenant (2).
Arnoul Gonthier étoit sûrement qualifié abbé de Saint-Marien, dès
l'an 1540 ; et il y a apparence que Nicolas Joannis s'en étoit démis en
sa faveur avec l'agrément du roi. Il fut le premier abbé commendataire ;
mais les Prémontré l'aifilièrent k leur Ordre le 26 avril 1551. Il fut aussi
chantre et chanoine de la cathédrale. Son frère Palamèdes fut trésorier
de Bretagne. Il résigna au suivant et fit son testament en 1555.
Pierre Fourmibr , noble auvergnat, chanoine de Notre-Dame de
Paris, étoit abbé de Saint-Marien dès Tan 1552. Il fut fait évêque de
Périgueux en 1561. Dans le traité qu'il fit avec le sieur Antoine
(l) En 1486, il fit une association de priè-
res avec l'abbaye Saint-Laurent. Ear martyroL
m* S. Laur, ad cakem.
(2) G. Viole.
526 ABBÉS
DapechoD, pour ce bénéfice et autres, le temporel de Tabbaje de Saint-
Marien n'étoit estimé que i,700 livres.
Michel de CLucNveut apparemment l'abbaye par accommodement avec
le sieur Dapechon qui ne prit point possession. Il en jouissoit en 1564-
4567, *et attesta, le 7 janvier de la première année, la remise de reli-
quaires faite aux moines par le receveur de l'abbaye.
François Guerry, du pays d'Âlby, aumônier du roi en i571 (a), et
résigna au suivant en 1 579.
Jean Lourderbaux, du diocèse d'Âuxerre, aumônier du roi Henri III,
garda Tabbaye jusqu'en 1585 qu'il la résigna au suivant.
Jean Lourderbaux, frère du précédent, précepteur de Nicolas de
Meufville d*Alincourt, chanoine d'Âuxerre en 1573, puis abbé de la
Madeleine de Ctiâleaudun, devint abbé de Saint-Marien en 1583, tré-
sorier de la cathédrale en 1597. 11 eut toute la confiance du Chapitre
durant la vacance du siège, et les dëputations les plus honorables. I|
étoit en voie d'avoir Tévêché d'Auxerre, lorsqu'il mourut, revenant Je
Paris, en 1598. Il éloit aussi prieur de Sezane et abbé de Saint-Just eu
Beauvoisis. Ce dernier bénéfice échut h Germain Lourdereaux qui fut
son héritier, le prieuré de Sezane h Edme Lourdereaux, son neveu, et
l'abbaye de Saint-Marien à Edme Martin, son autre neveu. Il avoit com-
mencé à écrire on latin l'histoire de ses prédécesseurs On voit par le
catalogue de ses livres, écrit de la main de son successeur, qa^il avoit
une bibliothèque assez curieuse pour ces temps-là.
Edme Martin, natif d'Auxerre, religieux profès de l'abbaye de Saint-
Just, Ordre de Prémonlré, aumônier du roi en qualité d'abbé régulier.
Il fit avec succès, en 1610, l'oraison funèbre de Henri IV en la cathé-
drale. En 1616, il obtint arrêt au sujet de la prébende de la même
église, attachée h l'abbaye. Il reste h Sainl-Marien un portefeuille
d'écritures à ce sujet, la plupart de sa main. Le malheur qui arriva h
l'église de Notre-Dame, par la chute subite du magnifique clocher le 22
septembre 1627, lui avança les jours. La piété et la régularité de cet
abbé le rendirent très-recommandable et lui méritèrent la confiance des
(o) Il était clianirc de Sainte-Eugénie de Varzy en 1574. (iV. d. E.)
DE SAINT-MARIEN. 527
âmes pieuses. Après sa mort, arrivée le 6 décembre 1627, il se fit une
espèce de miracle au sujet de la fosse qu'on lui avoit préparée dans le
cimetière, selon sa demande; ce qui fut cause qu'on l'inhuma dans le
chœur, proche le tombeau de saint Vigile.
Nicolas de Castille, fils de Pierre de Castille, contrôleur-général,
jouit onze ans de l'abbaye, c'est-à-dire depuis 1628 jusqu'en 1639 (a).
Henri de Castille, frère du précédent, lui succéda et vécut jusqu'en
1670 ou 1671.
Henri de Baraille prit possession le 24 août 1671, âgé de 15 ans.
Il a été théologal de Mortain, au diocèse d'Âvranches, et est décédé vers le
commencement de l'année 1719. * Il ne jouit pas tranquillement de son
abbaye ni de sa prébende de Mortain, tous ses revenus ayant été saisis
par ses créanciers, et notamment par l'architecte qui avait bâti son logis
abbatial.
Nicolas-Joseph Racine, conseiller au parlement de Paris, fils de
Michel Racine, secrétaire du roi, fut nommé à l'abbaye le 15 février
1719. Il est mort h Paris, le 6 août 175j, âgé d'environ 59 ans. Il légua
à THôtel-Dieu d'Auxerre 400 liv. de rente, pendant vingt ans, par son
testament du 22 juin 1755.
Jérôme Le Febvrb de Laubrière, vicaire-général de François de
Laubrière, évéque de Soissons, son frère, fut nommé à l'abbaye le 8
octobre 1755 et en prit possession au mois d'avril 1756. Il est aujour-
d'hui doyen de la cathédrale de Nantes. * Mort en 1746.
* DuBRBiL DE Pontbriand, ecclésiastiquc vertueux et bienfaisant, insti-
tuteur des Savoyards et étrangers à Paris, nommé le 29 octobre 1 746, mort
en 1771.
* René Clemenceau, dernier abbé de Saint-Marien, nommé en 1771.
Il était de l'Ordre des Jésuites. Il fut impliqué dans le procès de La
Chalotais. Le célèbre Linguet le justifia de l'accusation de tentative
d'empoisonnement, et il obtint ensuite pour compensation de sa prison
l'abbaye de Saint-Marien. (Mémoires de Linguet.)
(a) Par acte du i9 juin 1629, il nomma M« Henri Bonissant, prôlrc, comme son
vicaire- général pour administrer l'abbaye, ainsi que ses prieures de Sainl-Vivant-
sous-Vcrgy et de Vigiiory. — Arch. de l'Yonne, fonds Saint-Marien. (iV. d. E.)
f
1
528 ABBiTR
DE L'ABBAYE DE SAINT-PÈRE.
î
Od n^est pas si bien iofomié de TorigiDe de Tabbaye de Saiol-fti|
d'Anxerre que de celle de Saiot-llarien donl je viens de parler, n\i
n*j a pas appareoce d*eD pouvoir faire rernooler la fondalioo ao-debèr
\ vi^ siècle. La vie de saiot Auoaire est le premier moDomeol qui eafai|
I meoiion. Cet évéqae assigce à la basilique de sainl Pierre, apôtt.;
I comme aax autres églises de son diocèse, un jour el des calendes |NI|
[ les prières qu'il avoit indiquées, ainsi qu*on peut voir ci-dessos (Il
I II ponrroit lui-même en être cru le fondateur, s'il saffisoit, povkl
j prouver, de dire qu'il ex|)Osa au pape qu'il j avoit dans son diocèKl
plusieurs nouvelles églises, et qu*k cause de cela il le sapplioit delà
envoyer des reliques de saint Pierre. Mais il pouvoit aussi avoir en ne
les églises d'Eppoigny, deCre^ic ou Cravan, et tant d*aulres qui soi
sous l'invocation du même apôtre. Saint Didier, son successeur, It
mention dans son testament de la basilique de Saint-Pierre et Saint-
Paul, située au-dessous de la ville d'Auxerre, et lui légua le village de
Breieau vers Tan 620. Saint Tétrique, ¥crs l'an 700, lui donna simpk-
ment le nom de basilique de Saint-Pierre, dans la description de sot
diocèse. On est ensuite un temps considérable sans trouver rien on
parle de cette église; car il ne faut aucunement ajouter foi îk la traditiot
moderne que Gérard de Roussillon, le même seigneur qui sous Cbarles-
le-Ghauve a fondé Pothières au diocèse de Langres, et Vézelay au dio-
cèse d'Autun, est aussi fondateur de l'abbaye de Saint-Père d'Auxerre,
puisque cela n'est appuyé que sur un roman qu*on a composé depcb
quelques siècles, et où Ton a inséré quantité de faits insoutenables. Ed
sorte que l'autorité du Nécrologe de cette maison, ou Ton trouvoit celte
tradition au 5 octobre, n'est d'aucun poids, parce qu'elle étoit prise da
roman, et que d'ailleurs cet Obituaire faisoit mourir ce Gérard plus de
cent cinquante ans avant Charles-le- Chauve.
j (i; T.i, p. 127.
..<& rv _-
DE SAINT-PÈRE. 539
Il faul doDC plutôt consulter l'ancien Nécrologe de la cathédrale, pour
retrouver quelque chose sur Téglise de Saint-Père. On y apprend que
celte église, dans le xi* siècle, étoit un Chapitre séculier dont un cha-
noine de la cathédrale étoil doyen. On y lit, au i8 février : « Obiit
x> Robertus sacerdos et canonicus alque decanus S. Pétri ; » au 21 du
même mois : «t Obiit Goffridus canonicus S. Stephani et decanus S.
» Pétri (1) ; » et au 25 mai : aObiil Walo sacerdos atque decanus S.
> Pétri. »
Humbaud, qui fut fait évèque d^Auxerre en 1084, établit en 1 107,
dans cette église, des chanoines réguliers (2) qui, comme les précédents,
avoient à leur tète un doyen; et, après qu'on y eut vu quatre ou cinq
doyens, Guillaume de Toucy, fait évéque en 1167, changea le doyenné
en abbaye.
Les doyens réguliers furent :
Ulric, sous lequel fut donnée à sa communauté, l'an 1125, Téglise
d'Augy. On les appeloit alors les chanoines de Saint-Pierre-du-Ponl,
pour distinguer leur église de celle de Saint-Pierre-en-Château (a).
Hugues est nommé en des actes de 1150 et 1156. Il obtint de Henri-
ie-Sanglier, archevêque de Sens « l'église de Cézy au-dessous de
Joigny.
Durand ; il obtint, en 1145, de Tévéque Hugues de Mâcon, relise
de Saint-Pélerin, auparavant annexée h Tévéché, promettant de payer
chaque année 10 livres de cire, et de continuer aux chanoines de la
cathédrale leur droit pour la station de la fête de saint Pèlerin.
Amig obtint de Godefroy, évéque de Langres, des églises de son
diocèse ; ce qui fut confirmé en 1149 (5).
GuÉRiN obtint d'Alexandre III, étant à Sens en 1 165, confirmation de
quelques droits, entre autres de celui de l'hôpital de Saiut-Père.
Je donnerai ci-après le catalogue des abbés.
(1) Il fout iir« Decanus et dod Canonicus,
comme od a mis par erreur dans l'imprimé.
(2) Labb. Bibl., 1. 1.
(3) Voy. Preuves,',!!. 26 et 27.
(«] Il Pétait encore en 1137, suÎTant les chartes de Pontigny. (iV. d. E.)
Il 54
5!S0 ABBÉS
La relation Je celte abbaye avec la cathédrale consiste dans les sta-
tions que la cathédrale y va faire : 1^ Le dimanche des Rao^eaux où
les chanoines réguliers reçoivent le Chapitre au chant d'une antienne,
qui étoit autrefois Occurrunt; 2^ le lundi de Pâques; 5^ le mardi des
Rogations où les mêmes chantent Agne Dei; et autres stations mar-
quées dans les Processionaux et titres, telles que celles de la Saint-
Pierre, etc. Le jour qu'ils sont tenus dé chanter les litanies à la pro-
cession de la cathédrale, est le lundi des Rogations ; leur place au chœur
de la même église est aux stalles basses du côté gauche. On peut con-
sulter, pour le surplus de Thistoire de cette maison, Farticle des
Vicomtes (i). On ne sait pour quelle raison aucun des évéques ne s y
est fait inhumer. Il n'y a de reliques remarquables que quelque chose
de saint Edme, archevêque de Cantorbéry.
ABBËS DE SAINT-PËRE.
Odom fut le premier abbé de Saint-Père d'Auxerre. Il obtint
d'Alexandre III une bulle de l'an li74. Comme la tradition étoit an-
ciennement que c'étoit de Saint-Victor de Paris qu'avoient été tirés
les Réguliers mis k Saint-Père (2) , il y a lieu de croire que cet Odon
est le même chanoine de Saint-Victor, dont il y a des lettres au 3fi
tome du Spicilége.
GoDEFROY. Il est connu par la bulle de i 178 qu'il obtint d'Alexandre
III, touchant les biens du monastère, où est comprise la dime des
raisins du clos du Vicomte. C'est ce que les actes des derniers temps
ont appelé la Cour des Vents au lieu des Veans. On croit qu'il vivoit
encore en 1195 (a).
Arnoul est nommé en une infinité d'actes, depuis l'an 1195 jus-
Ci) T. m de cette Histoire. | (2) BeUeforét le dit en sa Cosmographie.
(a) On trouve Gauthier en 1180, et Hugues en 1189. (iV. d. E.)
DE SAINT-PÈRE. 551
qo'en 1222. Sa science le fit choisir pour arbitre en beaucoup d'af-
fiiires. V. The$. anecdote 1. 1, col. 775, HisL Univ. Parit sœc. XIH^
12. Il mit sa maison en société avec Tabbaye de Molême.
Barthélémy. Son nom paroit dans des actes, depuis 1255 jusqu'en
1267. Il déclara, en 1255, quels étoient les droits que l'abbaye de
Saint-Germain a le jour de certaines fêtes dans Téglise de.Rouvret (1 )• En
1258 , son monastère se trouva si appauvri, à cause de la poursuite du
procès sur Téglise de Cézy, qu'il fut obligé de vendre de ses rentes Ji
l'abbaye de Saint-Jean de Sens.
Jean se trouva présent, en 1281 , à l'hommage de Robert de Flan-
dre rendu à l'évêque d'Âuxerre (2). En 1295, on fit don kluiet k
son église d'une place proche les Filles-Dieu, paroisse de Saint-
Pèlerin.
Gilles est nommé dans des titres depuis 1500 jusqu'en 1508. Il fut
en difiiculté avec les paroissiens pour la réparation de l'église.
Jean II étoit abbé en 1512.
Robert fat présent, en 1520 , k la visite de la châsse de saint Amatre
dans la cathédrale. En 1521 il fit un échange de biens.
GiBAUD D'Esntisi étoit abbé depuis longtemps en 1558. En 1550,
il y eut mandement du roi Jean adressé k lui comme commissaire, snr
le fait des lombards et usuriers , qui déclaroit que leurs débiteurs se-
roient quittes en portant le sort principal au trésor royal (5). Il est le
premier du clergé nommé parmi ceux qui s'obligèrent, en 1559, pour
la rançon de la ville envers l'abbaye de Saint-Germain. Il mourut' en
1568 (a).
Jean de Noyées. Il obtint du pape Grégoire XI, en 1575, l'union
pour un temps du prieuré de Cézy b son abbaye qui étoit devenue fo<t
(1) Fof . Prieuves, t. iv.
(«) V(ï^. Preuves, n* 2tS.
(3) Ord. des Rois, xt« vol.
(a) On trouve Jean d*Asserty, comme abbé, en 1360. (iV. d. E.)
552 ABBÉS
pauvre (1). Il associa sod roonastère avec celui de Saint-Laarent, en
1578 (2). On croil qu'il vivoit encore eu 1397; mais en 1398 le
si^e étoit vacant, lorsque Marie, reine de Sicile demanda pour cette
maison Tunion perpétuelle du prieuré de Cézy.
Nicolas, prieur de Château-Renard, étoit devenu abbé en 1598.
Guillaume Yivieh , auxerrois , étoit abbé dès Tan 1401 , qa*il assista
ï rentrée de l'évéque Michel de Creney. On le trouve en des litres
de 1404. Il fit soumission au Chapitre d^Auxerre, le 1*' octobre 1407,
au sujet du ban rompu par ses gens k Monétau (5).
Jean Dahade est dans des actes de 142G et 1427.
Jean Assert. Cet abbé fut déclaré excommunié an mois d^ octobre
1450, pour avoir persisté à refuser les droits dus k Hugues de Villemer,
archiprétre de Saint-Bris, après la mort des curés de Yenousse et de
Quéne. Il fut présent, en 1449, à Tenirée de Tévéque Pierre de
Longueil (4).
Pierre le Masle, auxerrois, fut député en 1455 avec le sons-
chantre de la cathédrale, pour aller solliciter k Paris le procès qne|^
ville avoit contre les vignerons. Il assista, en 1480, k rélévation da
corps de saint Cot faite à Saint-Bris.
Jean de Baugis fut apparemment peu de temps abbé, puisqu'il avoit
un successeur dès i486. Sa mort est marquée au 28 mai dans l'Obi-
tuaire de Saint-Laurent.
Hugues de Boulangiers éloit abbé dès le 20 novembre 1485. Il
obtint, en 1501, de Févéque Jean Baillet, la confirmation des statuts
de la nouvelle confrairie de la Trinité pour les paroisses d'Âuxerre. Il
est nommé au procès-verbal de la coutume de 1507. Il résigna en
1513 au suivant. Son sceau, que j'ai retrouvé avec cette inscription :
5. Hugonis abbatis monasterii S.-Petri Autiss. , contient en bas les
armoiries qui sont trois crénaux surmontés d'une étoile.
Laurent Petitfou fut le dernier abbé régulier jusqu'en 1542, qu'il
(r Voy. Preuves, t. iv.
(i) Ex Necrol. S. Laur.
(3) Regist. Capit,
(4) F'oy, Preuves, t. ir, n. ."564.
DE SAINT-PÈRE. 553
■
fit passer son abbaye en commende pour en gratifier son neveu. Comme
il vivoit encore en 1571 , selon des titres que Ton a, c'est lui que Joseph
Panier a eu en vue dans son mémoire sur la prise d'Âuxerre, en 1567,
par les Calvinistes, et non son prédécesseur. Outre que Hugues de
Boulangiers auroit eu plus de cent ans en 1567, il se seroit trouvé
alors k Saint-Père trois abbés, deux anciens outre le nouveau. J. Panier
ne parle que du vieux abbé régulier qui devoit être celui-ci. Ceci est
pour réformer ce que j'ai écrit pages 126 et -127 de THistoire de la
prise de la ville, trompé par les écrits du P. Viole.
Laurent Petitfou , neveu du précédent , fut le premier abbé com-
mendataire de Saint-Père, etTétoil en 1542. Il fut aussi chanoine de
la cathédrale et grand-archidiacre. V. l'article des archidiacres. Il
mourut en 1595.
Laurent Fauchot, second abbé commendataire, étoit neveu du pré-
cédent. Il mourut de la peste en 1608.
Henri de Lambert , filleul de Henri IV, fut le troisième abbé com-
mendataire jusqu'à l'an 1646, qu'il décéda le 4 mars. La réforme de
la congrégation de Sainte-Geneviève fui introduite de son temps. On
rebfttissoit aussi alors l'église.
■
Roger de Harlai fut nommé à l'abbaye de Saint-Père par Louis XIV,
et en prit possession au mois de novembre 1646. Il fut fait depuis
évéque de Lodève.
Roger, prince de Courtenay, neveu du précédent abbé, eut l'abbaye
par sa résignation et en prit possession au mois de février 1659. Il
étoit aussi abbé des Ëscharlis. Après sa mort a été nommé pour lui
succéder M. de la Chabrerie , prêtre, qui en a fait peu de temps après
démission pure et simple (1).
Jean Hardoin, prêtre-chanoine de l'église métropolitaine de Sens, a^
été nommé à cette abbaye au mois de juillet 1757.
* Joseph de Calvière deBeaucoiran fut nommé par le roi au. mois de
juin 1745. Il mourut le 8 juin 1768^
(1; Mercure, juin 1737, p. 1453.
* M. M SAorr-HiLAnc , i icaire-géoéffaS de diocèse de Mean^ ne fbt
^*Hi iosuat tiialaire de Tabbaf e Sant-Père a se démk à la io de
1768.
* M. M Macbot, ebaûire de FégUse eollégîale de Meioa , soccédb
3i M. de Saiot-Hibire le 3 décembre f 768. Il était encore titdaîre
en 1790.
DE L'AnATE DE SAdT-AMATlE , DEPOS B£DHTE ES FBfEUltL
Celle église a pris le nom de son foodatenr, qni FaToil dédiée ao«s
rinrocatiott de saint Sjphorien, célèbre martyr d^Antnn, doni il aToit
en quelques reliqnes. Sa situation a bit conserrer dans le pays Fancien
nom dont a été formé celui d*Auxerre. On a toujours dit, du» Ta»-
tiquité, que b basilique de saint Amatre étoit située in moule JmCfm»,
parce qo'efle est située i b naissance de b montagne au bas de bqueBe
étoit b prairie de Y^an, qui, quoique petite, éioii opulente. Dans
fancien bogage, Aulric signifioil prairie. Cétoit donc sur le coteau
occidental de celle prairie que fut placée b basilique de saint Stpho-
rien, au milieu des sépultures du peu de chrétiens qull j aToil eus jus*
qu'alors ii Aurerre. Saint Amatre , qui j fut inhumé, j opéra tant de
miracles que son nom il disproitre dès le même siècle celui de saint
Sjpborien , et que toute b Tille touIuI être inhumée autour de b basi-
Kque qui le renfermoit. De b se forma ce nombre infini de sépultures
entre cette église et b cité d'Auxerre. Il est parlé de cette é^îse dans
lliistoire de b coof ersion de saint MamerU Saint Crse ai oit mené uie
?ie solitaire , proche b même basilique , fers Fan 300, a? ant que d^étre
életé à Fépiscopat. Elle étoit dcfcnue si célèbre, qu'après b cathé*
dr^ elle ne le cédoit qu'a Téglise de Saint-Germain pour le rang^ En
effet, saint Aunaire b nomme b seconde, et saint Tétrique pareille-
mat, dans le catalogue que Tun et Tautre ont donné des églises de
leur diocèse au n* et mi* siècle. Saint Didier, succcHeur immédbt
DE SAINT-AMATRE. 555
de saint Aunaire .dooDa à la basilique de saint Amatre une terre ap-
pelée Talon , qu'on croit avoir été aux environs de Saint- Fergeau ou
\k Pourain. C'est la première fois qu'il est parlé de biens légués à cette
église. Apparemment qu'elle ne commença qu'alors, c'est-à-dire vers
Tan 620, à être desservie par quelques ecclésiastiques.
Il faut croire qu'elle possédoit des biens assez considérabliis au
VIII® siècle , puisqu'alors elle passa comme les autres églises qui avoient
des fonds, dans les mains des laïques, dont elle ne sortit que sous
Tépiscopat de Gui, vers le milieu du x®; après quoi un évéque l'ayant
donnée à un seigneur par forme de bénéfice, elle étoit passée entre les
mains de l'évéque d'Âutun, d'où Geoffroy de Champaleman la retira
vers l'an 1060, au bout de six-vingts ans ou environ; et ce fut proba-
blement en ce temps-là qu'il commença à y avoir un clergé réglé, dont
un cbanoine de la cathédrale étoit abbé. Cependant , entre tous ces
abbés , nous ne connoissons que celui qui est nommé dans le catalogue
des chanoines d'Âuxerre, rédigé sous Tévéque Humbaud, vers l'an
i090 ou 1100 (1), dans lequel Jeaa, abbé de Saint-Amalre, est le
dernier des prêtres du côté gauche. Mais, pour preuve qu'il y avoit en
effet une petite communauté en ce lieu , c'est ce qu'on lit au Nécrologe
de la cathédrale, dans le rang des additions de la fin du xi® siècle ou
du commencement du xii® , au 16 mai : a Obiit Fulco S. Âmatoris
» canonicus et sacerdos, qui pro salute anime sue domum suam petri-
j nam fratribus dédit, j»
L'évéque Hugues deMontaigu, à l'exemple de ce qui se pratiquoit
parmi les Cluniciens où il avoit été élevé, changea le titre d'abbaye en
prieuré, en y mettant des chanoines réguliers, l'an 1151, et Alain,
autre évéque tiré du cloître , y fit venir en 1 164 des religieux de l'ab-
baye de Saint-Satur en Berry, avec lesquels il y eut des règlements
pour les droits temporels dont il est fait mention ci-dessus, pages 520
et 587. Guillaume de Seignelay leur donna depuis les églises marquées
aussi ci-dessus, page 587. Quoique , du temps des guerres du roi
Robert ou autres, le corps de saint Amatre eût été tiré de cette église
pour être réfugié dans la cathédrale ou avec d'autres reliques, les cha-
(l) Koy. Preuves, t. iv, n. 17.
556 ABBAYE
Doines réguliers prétend irtnt, vers Tan 1319, le posséder encore, sons
prétexle qu'ils avoient son (omhoau et des châsses ; mais TouTertore
solennille qui fui laite, on i5i0 (I), de la châsse de la cathédrale , eo
présence de tout le clergé, les détrompa.
De temps immémorial il y avoit eu concours au tombeau de ce saint,
et quoique le corps ne fût plus dans son église-, la foire des calendes
de mai ne laissa pas de durer huit jours, tant dans le champ de Fin-
dict, qui étoit au-dessous du cimetière public, que dans la place dite
de Ghalcndemai. Il ne reste plus de vestiges de cet ancien concours à
Saint-Âmatre, que les petites vigiles que la cathédrale y vient chanter
la veille des calendes de mai, avec la grand'messe le lendemain. Celte
basilique étoit après saint Germain , celle où le même clergé se reodoit
autrefois plus fréquemment, surtout le Carême. Ces stations se firent
par la suite dans le cimetière de Montartre, canton de la paroisse de
Saint-Âmatre renfermé dans la ville, parce que le reste se trouvanl
dehors, étoit exposé aux incursions des ennemis dans le temps des
guerres. La cathédrale va encore faire k Saint-Amatre la station du
dimanche des Rameaux, oi^ le prieur fournit le buis et le distribue ^
tout le clergé, et celle des litanies du 25 avril. Le prieur de cette même
maison reçoit encore le Chapitre de la cathédrale , le mercredi des
Rogations, en chantant ilyne Dei, et il chante le même joor les lita-
nies du peuple avec un chanoine de Saint-Marien, depuis la porte
d^Eglény jusqu'à Téglise de Saint-Georges. Sa place, au chœur de
Saint-Etienne , est dans les basses stalles du côté droit.
Nous connoissoos trop peu de prieurs de Saint-Âmatre pour en
former une liste.
Olric paroit avoir été le premier. Innocent II l'appelle Hurric , dans
sa bulle du 24 septembre 1131 (a). Il fut présent en 1136, quand
Tévéque Hugues de Montaigu donna à son Chapitre les dtmes d'Oisi
etc., t, XII SpiciL
(Ij Voy, Preuves, n» 267.
(a) 11 porte le même nom dans une charte de 1144 sur les moulins de Gharen-
tenay. (iV. d, E.)
I
V
, DE SAINT-AMATRE. 557
Engisbaud doit avoir aussi été prieur de Saiot-A maire, avant que
celle maison fût soumise à Tabbaye de Saint-Satur. Le Nécrologe de
sainl Laurent marque qu'il en avoit élé tiré. On y lit, au il juin :
c< Obiit Engisbaudus prior S.-Âmatoris, noster canonicus.»
Voici une liste de quelques prieurs [a) :
WiLLELMus, en I23G.
Frère Jean, 1286, 1297.
JeanBoguikr , 1355.
Guillaume Burcadellus , 1 582.
Jacques Gujat Téioit en 1451 et dès 1404. « Ex computis Urbis. »
Pierre Eviat, 1405.
HUMBERT CaTIN , dit LE MiOT, 1466.
Bertrand Fuat, licencié en décret ,1498.
Pierre de Lux, en 1521. « Exquodam arresto Parlamenti. »
Robert de Lux Tétoit en 1428.
Martial Richard lui succéda en 1529. Encore titulaire en 1552.
HuET, 1568,1576.
Hector Vigneron, prieur, de 1587 à 1598.
Jean Garnot, en 1597.
Jean Garnot le Jeune succéda à son parent en 1619. Il résigna son
bénéGce en 1649. Il avoit eu une mauvaise affaire eu 1625 et étoit
accusé d'assassinat.
ANTOINE DE Certaines, clerc du diocèse d'Âutun, nommé en 1649,
mourut en 1668.
Pierre Marpon, de Saint-Satur, en Berry, lui succéda, mais résigna
son bénéfice l'année suivante h son frère Nicolas. Celui-ci étoit encore
prieur en 1 686.
Pierre Marpon, de Saint-Satur, en Berry, mort le 51 décembre
1720.
.... GoBiN, de Saint-Satur» réforme de Bosc-Âchard.
(a) Les noms des prieurs qui ne se trouvent pas dans la première édition de
cet ouvrage ont élé puisés dans les archives du prieure Saint-Amatrc. (^. d. E,)
538 ABBAYE
Germain Carouge, de ia congrégalion des chanoines de Sainte-
Geneviève, prieur en 1757, mourulen 1742.
Raoul Briquet lui succéda.
Etienne Chauchet, prêlre député à la chambre ecclésiasliquc, prieur
en 1759, mourut le 28 août 1784.
François Pasquier , célèbre par ses prétentions à la dime de vin
d'Auxerre, exerce en 1781. Il fut le dernier prieur de Saint-Amatre.
DE L'ABBAYE DE SAINT-EUSËBE, DEPUIS RÉDUITE ExN PRIEURE.
Je donne le nom d'abbaye au monastère que saint Pallade, évêque
d'Auxerre, bâtit hors les murs de la ville épiscopale, sous le roi
Dagobert I®'', parce qu'il est certain que ce saint y établit une commu-
nauté; et il y a lieu de croire qu'ayant proposé le saint évêque de
Verceil'pour modèle de ceux qui Thabitoient, il voulut qu'à l'exemple
de ce Haint on y observât autant la vie cléricale que la monastique (1).
Ce lieu étoit alors une pleine campagne avec quelques vignes. Il fit
fermer de murs son pnonastère, et lui donna des fonds dont je croirois
qu'est la terre deTerves, paroisse d'Escamps. Saint Pallade y fut in-
humé , et depuis lui quatre autres évêques dans l'espace d'un siècle.
Cette même église étant plus à portée de la cathédrale que celle de
saint Amatre, et nullement exposée aux inconvénients des inondations,
son cimetière fut choisi par les chanoines de la cathédrale, pour leur
servir de sépulture. Ce choix se fit au moins dès le temps de Charle-
magne , lorsque l'église de Saint-Eusèbe fut revenue au pouvoir de
l'évéque Maurin, après l'invasion faite sous Charles-Martel. Les évêques
y préposèrent alors un chanoine-diacre de la cathédrale , sous la qualité
d'abbé, et c'étoit une de ces petites communautés où l'on observoit ce
(1) Sancti Eusebii Àhbaliam in ordiriê
canonica ab initio constitutam. Frodo io vita
Godefr. de Carapo-Alemano episcopo ïi'
sxcuio.
DE 8AINT-EU8ÈBE. 559
que Ton poQvoit de la r^le d'Âix-la-Chapelie, qui se pratiquoit à la
leltre dans la cathédrale. L'évêque Wibaud douna à l'église de SaÎDl-
Eusèbe , vers l'an 890 , huit labourages dans la seigneurie de Moulins;
et Herifrid^son successeur, la voyant presque détruite, ajouta, vers Tan
900, d'autres biens situés à Leugny, à Serein et à Avignau. De sorte
qu'il paroit que tous les biens de celle église étoient presque contigus ;
mais les guerres des Normands et autres écartèrent les chanoines et
firent négliger la culture des biens. ^Cent-soixante ans après, l'évêque
Geoffroy de Champaleman y établit un abbé et des chanoines. Humbaud,
qui siégeoit en 1090, en augmenta le nombre en les rendant réguliers
par le moyen des chanoines de Saint-Laurent qu'il y introduisit; de
sorte que le prieur régulier veilla sur ces religieux, et le titre d'abbé,
possédé par un chanoine de la cathédrale , ne fut plus qu'un titre
d'honneur, et pour marquer l'ancienne dépendance. Comme ce mo-
nastère étoit le cimetière des chanoines de la cathédrale, le même
évéque trouva convenable d'y annexer la charge de prier pendant un
an pour chaque chanoine nouvellement inhumé, et d'y altacher l'émo-
lument de la prébende, cum consensu tottui cleri etpopuli^ disent ses
actes. C'est ce qui fut depuis expliqué par l'évêque Alain, vers l'an
1160, et qui a rendu le prieuré de Saint-Eusèbe très-mémorable dans
l'histoire du pays.
Du grand nombre d'épitaphes dont les murs du cloitre et du Chapitre
refaits vers l'an 1 1 00, étoient autrefois garnis (a), on ne lit plus que celles-
ci qui sont gravées dans la pierre même du bâtimentdu Chapitre, en lettres
capitales du xn<^ siècle : « Nonas martii obiit Renaudus Hichardus
D sancti Slephani canonicus. » Autre : a VII idus augusti obiit Segui-
D nus levila, S. Slephani canonicus. Anima cjus req. in pace. c Autre :
c( V idus decembris obiit Lupus Miles Treceusis. An. ej. req. in pace. »
 l'extérieur de la porte du Chapitre : « . . . tobris obiit Isanbardus
» sacerdos nosterque canonicus. An. e. r. in p. » La sépulture de ce
dernier fut découverte le 51 mars 1728, et on trouva son cercueil de
pierre sans fond, en sorte que son corps étoit posé sur la terre même,
(a) Ce clottre dont les restés se voyaient encore il y a quelques années était de
style roman. (AT. d. E.)
540 ABBATB DE SAlNT-EOSfcBB.
ayaDi auprès de lui deux petits pots de grès : Ton où avoil été TeaQ
bénite qui se trouva eotièremeot vide, et l'autre plein de ebarboo où
avoit été l'encens.
Il y a encore sous terre, en cette église, les tombeaux des évéqoes
saint Pallade et saint Tétrice. Les ossements en avoient été tirés eo 945,
par Gui, alors évêque d'Ânxerre, et exposés à la vénération des fidèles ;
mais ils ont été perdus dans le temps des guerres des CalviDisles. La
nef et le chœur de cette église ont été dédiés par Ferrie Cassinel, évê-
que Tan 1384, le 12 juin (a). Le sanctuaire et le rond-point ODt été
refaits bien plus nouvellement.
Le prieur titulaire avoit autrefois de beaux droits par coucessioo des
évéques et des comtes, surtout dans le marché du blé situé sur la
paroisse de Sainl-Eusèbe (1). Dans le temps des guerres, avant qu'il j
eût une horloge publique et un h4tel-de-villc, les habitants emprnn*
toient de lui le clocher de son église pour y placer le guetteur, comme
étant alors le lieu le plus élevé de la ville. Le prieuré de Sainl-Eusèbe
est tenu de fournir au Chapitre d'Âuxerre, chaque année, le Jeudi-Saint,
tons les pains nécessaires pour la cène ; et deux des chanoines réguliers
de cette maison les présentent aux chanoines et autres, chacun de leur
côté. Leur tour, pour les litanies des Rogations, est le second jour en
allant à Saint-Gervais et en revenant. Le clergé de la cathédrale fait en
leur église une de ses stations, le dimanche des Rameaux, le mercredi
des Rogations et Tune des fériés de la Pentecôte, auquel jour les cha-
noines réguliers chantent le verset du répons. Le même clergé y va aussi
chanter un nocturne, etc., la veille de saint Eusèbe, au mois d'août, et la
grand'messe le jour de la fêle.
De tous les anciens abbés de Saint-Eusèbe d'Âuxerre, Tancien
Nécrologe en nomme trois qui doivent être morts avant le xi® siècle. Au
7 avril : c Obiit Joannes levila et abbas S. Ëusebii adhuc juvenis, pru-
(1) Voy. Preuves, t. iv, n. 239.
(a) Malgré la date de la dédicace, on voit à Pinspection des lieux que le monu
ment est bien antérieur et de la fin du xii« siècle et du commencement du xuf.
(iV. d. E.)
PRIEURS DE SAINT-EUSÈBB. S4fl
» deotia lillerarum imbulus et bonitate decorus. » Aa 4 mai : a Gibertus
D levita et preceptor, et abbas S. Eusebii, corpus tumulo, animamqae
D reddidit Ghristo. > Au 14 juillet : c Obiit Guaidricus levita et cano-
» nicus S. Stephaoi, atque abbas S. Eusebii ; d celui qui suit a précédé
immédiatemeot Tintroduction de la régularité, puisqu'il vivoiten 1059.
Il y est parmi les additions, au 6 avril : « Obiit Gaufrid us arcbidiacoDUS
> et abbas S. Eusebii. »
PRIEURS DE SAINT-EUSËBE,
DEPUIS L'fiTABLISSBlfENT DES CHANOINES DE SAINT-LAURENT, JUSQU'a CELUI
DES CHANOINES DE LA CONGRÉGATION DE FRANCE.
Jagdilin, tiré de l'abbaye de Saiot-Laurent, paroll être le plus ancien
prieur. Son décès est de la première main dans le Nécrologe de la même
abbaye, au 15 avril : « Obit Jaguilinus prior S. Eusebit et noster
» canonicus. »
Etienne est au 12 juin, dans le même Nécrologe, el de la main pri-
mitive : d Obiit Stephanus prior S. Eusebii, noster canonicus. d
DoDON, Saint Bernard, en sa lettre 276®, fait mention du prieur de
Saint-Eusèbe, comme ayant assisté ii l'élection de Tévéque d'Âuxerre,
en 1152, et se contente de dire qu'il étoit frère de Tabbé de Saint-
Laurent ; mais le Nécrologe de Saint-Laurent nous apprend que cet abbé
éloit Hugues, qui avoit un frère nommé Dodon qui lui succéda dans la
dignité abbatiale. Il fut prieur de Saint-Eusèbe jusqu'en 1160 on
environ.
Geoffroy est témoin, en 1164, dans un titre de Bourads sur Ghe-
vigny et dans l'acte de suppression de la prévdté de la catbédrale, en
1166 (1). Il fut prieur jusqu'environ l'an 1175 qu'il fut élu abbé de
Saint-Laurent.
(1) Voy> Preuves, t. iv, ii. 59.
54t PRIEURS
Albéric est nommé dans on titre do mois de janvier 1205.
Pierre étoit prieur en 'fSSG. Il mourut le 4 juin. Ex NecroL S.
Lamenta.
Gui de Tract est nommé dans un titre de 1281, comme ayant été
ci-devant prieur de Saiut-Eusèbe. Ainsi il le fut apparemment vers 1260
et 1270 (1). Il avoit un frère chevalier appelé Guillaume.
Hugues fit quelques acquisitions ^ Lindry, en 1280. Il fut présent,
en 1281, à l'hommage rendu à Tévéque d'Âuxerre, par Robert de
Flandre (2). Il est apparemment celui dont le Nécrologe de Saint-
Laurent marque le décès au 28 juillet : a Ob. Hugo de Cercyo prier
D S. Eusebii Âutiss. et nosier canonicus. »
Etienne, surnommé en latii» de Pedagio^ vivoit vers 1300. Il est au
Nécrologe de Saint-Laurent, le 26 juin.
Pierre de Ghappes nommé dans un règlement sur le droit des pré-
bendes de la cathédrale, en 1507.
Durand étoit prieur du temps de Tenquéte de 1315.
Jean, témoin à l'ouverture de la châsse de Saint-Âmatre, en i320.
Philippe de Longueron nommé dans un titre passé sous son suc-
cesseur. Il vivoit vers Tan 1325.
Etienne de Saint-Maurice, issu des seigneurs de ce nom, an diocèse
de Sens, est nommé dans une procuration du clergé d'Auierre pour em-
proDter de Taisent, afin de faire sortir du pays les Anglois, qui en
étoient maîtres en 1 358. Il y est qualifié monseigneur Etienne de Saint--
Maurice prieur de Saint^Eueihe. Il fut fait abbé de Saint-Lanrent, en
1375.
Jean âliet est nommé dans un titre de Tabbaye de Saint-Père, en
1381.
HBimr DE LA Forêt est aossi nommé dans un titre de Saint-Père de
Tan 1393. Il étoit présent au Chapitre d*Âuxerre, le 6 mai 1596. Il
fonda son anniversaire en la cathédrale en 1401. Son obit est, le 4 de
(1) CartuL CapU., fol. 543. | (2) Ihid.j ibl. 542.
DE SAINT-BUSÈBE. 545
jnillet, au Nécrologe de Saint-Laurent : a Ob.... Et Henricos de
» Foresta prior S. Eusebii sacerdos et noster canonicus. x> On le faisoit
h la cathédrale les années suivantes.
^##«^ prieur de Saint-Eusèbe, étoit apparemment chanoine de cathé-
drale en 1402, puisqu'au premier jour d'octobre, après le trésorier du
côté gauche, on lit : Prior S. Euiebiù
Louis DE Bar, évéque de Langres depuis l'an 4397, connu sous le
nom du cardinal de Bar, posséda le prieuré de Saint-Ensèbe, comme il
paroil par un titre de 1407 et par les registres du Chapitre d'Auzerre,
au 14 octobre de la même année.
Jacques de Margillt, témoin à la reddition des comptes de la ville, en
1411-1417.
Pierre Moetrat est nommédanslesregistresdu Chapitre, au 27 juin
1425, comme chargé de la procuration d'un chanoine. Dès Tan 1422,
Hugues des Noës, doyen, avoit traité avec lui. Il est au 22 août dans le
Nécrologe de Saint-Laurent, comme chanoine de la maison.
Geoffroy Ghantereau, nommé dans les comptes de la ville, (1 433) ,
fut présent à l'entrée de Pierre de Longueil au siège épiscopal,
(1449) (1).
Louis Daduf nommé dans le compte de la ville, 1453.
Jean Pinard, dans ceux de 1458-1471, etc.. jusqu'en 1484, comme
ayant loué son trésor pour mettre les titres de la ville.
Guillaume Raffelin, en 1487, pour la même raison jusqu'en 1490.
Edmb Erard ou Regnard, en 1491 , pour la même raison.
JossERAN, prévôt, est qualifié dans le compte de ville de 1493:
(c Religieuse et discrète personne, prieur commandatairedeS.-Elusèbe.»
Il continue d'y être jusqu'en 1498.
Pierre Roulant, dans des registres de la viHe, 1505 et suivants
jusqu'en 1513, pour raison du louage de ses archives.
Antoine des Rutaux, prieur commendataire de Saint-Eusèbe en
(1) Yoy. Preuves, t. iv, n. 361.
1
544 PBIBUBS
i525. n éloii en même temps abbé de SaiDl-LaoreDl, selon on tilre de
cette anoée, da 27 janvier. Il n'y a voit alors que trois religieux an
prieuré.
Jean Olivieb cessa d'êire prieur en 1544, selon le registre de Laurent
Robert.
Vigile Marie fut fait prieur en 1544 (1), par permutation de la cha-
pelle de saint Ferréol, dans Saint-Julien, agréée par Bernardin Bochetel,
abbé de Saint-Laurent, et sur les provisions de Florent de la Baire, -
vicaire-général.
Deiiis de Li Porte est qualifié prieur de Saint-Eusèbe, dans les |
registres baptistaires de la paroisse, au 20 juillet i559 qu'il fut
parrain.
Ëtieki«b Armand, chanoine de la cathédrale, étoit prieur en 1567, -
lorsque la ville fut prise par les Calvinistes.
Simon Tribolé, natif d'Âuxerre, prieur de Saint-Eusèbe dès 1568,
mourut en 1583. Il fut zélé pour rétablissement de l'office de saint
Just en son église, sur ce que la tradition est que le lieu où étoit la
maison du père de ce saint enfant se trouve aujourd'hui dans Tenceinte
de la paroisse.
Jacques Michau est mentionné comme prieur de Saint-Ensèbe, dans
les registres de la cathédrale, au 14 avril 1599, où il requiert le visa du
canonicat de Victor Camus, qu'il a permuté pour la chapelle de Sainte-
Marguerite dans l'église de Saint-Mamert.
Nicolas de Ghamboursy, religieux et maître de l'hôpital de Beauvaîs.
Jacques Morisson, religieux de Saint-Laurent. Il a réparé la maison
et y est mort en 1 653, le I*' février, âgé de 88 ans. * Il était déjà titulaire
en 1604.
Sébastien Morisson, aussi religieux de Saint-Laurent, neveu et suc-
cesseur du précédent, lui posa une épitaphe de la composition d'Edme
Jodon, avocat, et mourut en 1655.
(1) Registre de L. Robert.
DE SAINT-EUSÈBE. 545
* Denis Deschamps, prieur en 1G59. La cure élail encore dislincle du
prieuré.
* JeanMotin, prieur-curé en 1G66.
* Louis de Paris de Belesbat, prieur en 1675.
* Louis Courcier, prieur conventuel et curé de la paroisse en 1G80.
Quatre religieux composaient alors le Chapitre. Il était encore titulaire
en 1714.
* René-Hyacinthe de Reminiac, pourvu du titre de prieur titulaire
en 1684, en jouit au moins jusqu'en 1725. C'est sous lui que la cure
fut unie au prieuré, en 1714 (a).
* Joseph Goby, prieur-curé en 1718.
* Antoine Catherine Lévesque, prieur en 1727.
* Toussaint Collin, prieur-curé en 1728, fait bail à cette date de la
terre de Terves pour le prieur de Saint-Eusèbe, Il est mort en 1738.
* Jacques-Bénigne Gagne, succéda au précédent. Il donna sa démission
le 12 septembre 1768.
* Michel Duchamp prend dès 1766 le titre de prieur de Saint-Eusèbe
et curé de Lainsecq. Il était aux droits de M. Gagne.
* François Pasquier fut nommé prieur-curé le 28 septembre 1768*
Il l'était encore en 1780.
* L'Heureux de Chambon, prieur-curé en 1781 , a obéré la maison.
* Pierre Garnier, prieur titulaire de Saint-Eusèbe, demeurant a Lyon
au prieuré Saint-Irénée, en mai 1784.
* ântoine-Marie Ducrest de Montigny succéda à M. L'Heureux. Il
devint curé de Saint-Eusèbe, en 1790.
(a) On distingue depuis ce temps deux espèces de prieurs, les prieurs titulaires
et les prieurs-curés. (>'.(/.£)
FIN DE LA HUITIÈME PARTIE ET DU SECOND VOLUME.
Il 53
TABLE DES MATIERES.
QUATRIEME PARTIE,
Suite des Vies des èvêques d^Auxerre^ comprenant rhistoire des antiquités
ecclésiastiques du diocèse.
Pages.
CuAPiTRB I. Nicolas d'Arcies (1373 à 1376) i
Chap. 11. Guillaume d'Etou(e\ille (1376 à 1582) K
Chap. III. Ferrie Cassinel (1382 à 1390) 9
Chap. IV. Michel de Crene; (1390 à 1409) 18
Chap. V. Jean deThoisj (1409 à 1410) 35
Chap. VI. Philippe des ËssarU (1410 à 1426). . ...... 38
Chap. VII. Jean de Corbie (1426 à 1432] 48
Laurenl Pinon (1433 à 1449) SI
Chap. VIII. Pierre de Longueil (1449 à 1473) 58
Chap. IX. Enguerrand Sigoart (1473 à 1477) 86
Chap. X. Jean Baillet (1477 à 1513) 90
CINQUIEME PARTIE,
Contenant l'histoire de onze évéques qui ont siégé depuis Van i 51 4,
jusqu'à Van i 676.
Chapitrb I. François de Dinteville 1 (1513 à 1530) 105
Chap. II. François de Dinteville ii (1530 à 1354) 116
Chap. III. Robert de Lenoncourt (1554 â 1560) 141
Philippe de Lenoncourt (1560 â 1563) 148
Chap. IV. Philibert Baboii de la Bourdaisière ^1563 à 1570). . . 155
Chap. Y. Jacques Amyot (1570 à 1593} 161
Chap. VI. François de Donadieu (1599 à 1625) 196
Chap. VII. Gilles de Souvré (1626 à 1631) 217
Chap. VIII. Dominique Séguier (1631 à 1637) 2^1
Chap. IX. Pierre de Broc (1640 à 1671) 242
Chap. X. Nicolas Colbert (1672 à 1676) 26L
548
SIXIEME PARTIE,
Qui contient les actions des quatre derniers évéques d'Atucerre, qui
siégèrent depuis Tan i 676 jusqu^en 1 80 1 .
Pages.
Cdapitrb. I. André Golbcrt 1676 à 1704] 393
Chap. II. M. deCajIus (I704à 1754) 310
Chap.uk. m. de Condorcet(1754à 1760) 338
Chap. IV. M. de Cicé (1760 à 1801) 349
SEPTIÈME PARTIE,
Contenant la continuation de l'Histoire Ecclésiastique depuis 1802,
jusqu'à 1830.
Chapitre I. M. de Noé, ëvêque de Troyes. (1802) 391
Chap. II. M. de La Toiir-duPin, archevéque-évôque de Troyes et
d'Auxerre(1802à 1807) 394
CuAP. III. M. de Boullogne, ëvéque de Troyes, de Châlons et d'Au-
xerre (1807à 1821) 397
Chap. IV. M. de La Fare, archevêque di* Sens et évéque d^Aiixerre
(18Î1 à 1829) 403
HUITIÈME PARTIE,
Contenant les listes des dignitaires de la cathédrale et des abbés ou prieurs
de plusieurs communautés de la ville d^Auxerre.
Corévéques el prévôts de l'église d'Auxerre 409
Doyens 412
Grands archidiacres 427
Chantres 439
Trésoriers 449
Archidiacres de Puysaie « 458
Scolastiques et pénitenciers 466
Sous-chantres 476
Lecteurs 487
Canonicat de la maison de Chastellux 498
Confraternilcs du Chapitre d'Auxerre avec diverses églises du royaume 505
Église collégiale de Notre-Damc-de-la-Cilé 509
^49
Si S
oie
558
Liste des chantres et des trésoriers de la Cité
Sur les quatre églises appelées les quatre filles de *.: l'.iihodnil^^
Abbaye Saint-Marien
Abbaye Saint-Pôre
Abbaye puis prieuré Saint-Amatre .... ...
Abbaye puis prieuré Saint-Eusèbe
TABLE DES DESSINS.
Armoiries des évoques depuis le xii* siècle ... . . i
— — depuis le xv*' siècle. ....... i
Armoiries du grand Cbapitre f
Sceau de l'abbaye Saint-Germain d'^uxerre (1 325) .... 17
Sceau secret de la môme abbaye ....... .... kh
Sceau d'un abbé de Pontigny (1525) tor>
Autographe de l'évéque J. Amyot . .101
Portrait de l'évéque J. Amyot. ...... . . Vft
Autographe de Tabbé r^ebeuf {84»
FIN DE LA TAJBLG.